Full text of "Romania"
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RECUEIL TRIMESTRIEL
CONSACRÉ A l'Étude
DES LANGUES ET DES LITTÉRATURES ROMANES
PUBUÉ PAR
Paul MEYER et Gaston PARIS
Pur remenbrer des anccssurs
Les diz e les faiz e les murs.
Waœ.
22« ANNÉE — 1893
PARIS
EMILE BOUILLON, LIBRAIRE - ÉDITEUR
67, RUE DE RICHEUEU, 67
.-A 31 ""-^
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÉRIEN
AUX Xnie ET XIV* SIÈCLES
Si, adoptant pour un instant la classification linguistique
imaginée par M. Ascoli, nous suivons dans leur marche vers
Toccident les phénomènes qu'on nous présente comme caracté-
ristiques du franco-provençal, nous les voyons dfsparaître, les
uns après les autres, dans les campagnes de Tancienne province
de Forez, sans pouvoir, à aucun moment, tracer une ligne de
démarcation dans cette masse linguistique flottante et indécise
qui n'est plus le franco-provei^L^etjqui n'est pas encore la
langue d'oc-
On sait, en effet, qu'aux yeux do savant professeur de Milan,
le phénomène qui caractérise !e mieux les « parlers franco-pro-
vençaux », c*est la diversité des traitements subis par Va latin
suivant qu'il se trouve ou ne se trouve pas dans le voisinage
d*une palatale. Or, quand bien même on se contenterait de cet
unique critère, on n'en serait pas moins fort empêché d'assi-
gner une limite précise au domaine du franco-provençal, par
cette raison que l'action de la palatale se poursuit d'autant plus
loin vers Toccident que Ta, étant ou n'étant pas accentué, lui
oppose une résistance plus ou moins forte.
Autant que j*en puis juger par les textes manuscrits ou
imprimés assez nombreux que j'ai analysés, l'influence du son
mouillé sur Va accentué n*a pas dépassé la Loire. Sur la rive
gauche du fleuve. Va persiste, même après un son palatal :
Arçon, arrondissement de Roanne, canton de Saint-Haon-
le-Chàcel ^ : infinitif maria ; placa^ lougea,
I, Ballade d'Arçon, publiée par M, de Chantelauze, à la suite de son édi-
tion de ÏHistoin da ducs de Bourbon et da comtes de Forei^ de La Muro, t, lîl,
Pièces suppUtneniaire-i^ p, 178. Cette chanson» nous dit l'éditeur» se chame i
Saini'Pricsi-la-Prugne, à Cbercz ci à Arçon, au sud-ouest du Roannais.
XXU, i
2 E, PHIUPON
Saint-Bonnet-le-Chateau, arr. de Montbrîson ' : infin.
donar, tstar ; gaiîjar\ forsar, aîonjar,
UssoN, arr, de Montbrîson, cant. de Sjint*Bonnet-le-CUà-
teau * : infin. arribâ ; ntand^à, coutchày envouyâ; — partie, passé
troubd; mand:^d^ mouilla*
Saint-Jean-Soleymieux, arr. de Montbrison ^ : infin. dind;
tnindid, partad:(d,
LuRiEca, canton de Saint- Jean-Solcymieux ^ : infin. leva;
miftd:{d^ nitsd; partie, hlessd; hrisd,
Montbrîson ^ ; infin, demanda; bailld^ empecM^ aida.
Notons en passant que dans le patois de Montbrîson -arum
est rendu par ot (ti) : proujïioi , curoî; babil lot ^ mais au féminin
reveilla. Il en est de môme à Saint-Jean-Soleymieux : blot^ irai-
noi; mind:{ot, ennuyot. On sait qu'i rextrémité opposée du
« domaine franco-provençal », dans certains patois de la Suisse
romande, atum est représenté par un o fermé (J)^.
Champdîeu, arr. et cant. de Montbrîson 7 : infin. mena;
cmp&ha^ nuîrcha.
Plaine du Forez® : blâ; infin. demourd; empàhâ^ bailla ^ min-
^ed.
L'influence de la palatale sur Va accentué ne parait donc pas
avoir franchi la Loire, qui formerait ainsi la limite occidentale
de ce trait linguistique, mais non pas celle des parlers franco-
provençaux, car on voit se prolonger, bien au delà du fleuve, un
ï. Coutume de Saint- Bonnct-le-ChAteau, publiée par M. de Chantelauze,
îûc. ciL^ P» 71* d'aprirs l'original de la confirmation de 1272* M, P» Meyer en
a donné une excellente édition critique, dans son Recueit (Tmcum textes ^
p. I7Î,
2. Contes en pSLio\s d^Usson publiés par P. Gras, à la suite de son Diciion-
natre du patûis for^ien^ p. 201-209.
3. P. Gras, loc. cit.^ p, 2IO, 21$, 220.
4. P, Gras» p. 212.
5. P. Gras, p* 23 j, et mes observations personnelles.
6. Voyez, notamment, Gilliéron, Patois de la cûmmane de Vionnai (Bas-
Val ais), p. 17 et 34; Odin, Phombgù des patois dit canton de Vaud, p. 20;
L, Fa V rat, Obssaire du patois de la Suisse romande ^ par le doyen BrideK Appen-
dia, pp, 4>Si 4î6, 4)8» 464» 480.
7. Chanson sur la Brenachc» par un habitant de Chandieu, publiée par
Aug- Bernard, k la suite de son Histùirf du Forex^ 183s.
^ P '^ras, p* 2î7 et 24a.
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÉRIEN ?
autre caractère de ces sortes de parlers» je veux dire Taffaiblis-
sèment de Va atone, sous Taction de la semi-voyelle.
MoNTBRisoN' : fenna; vieilli ^ longi; Pierres de Rochifort^ dans
un acte en français de 13 14*
Plaime du Forez ^ : aî^ena; bciti; en la Plaignis dans un acte
de 1245.
BoEN-sUR-LiGNON, anfond. de Montbrison^ : courla; bossi,
Saïnt-Jean-Soleymieux* ipeira; blaiitcht. De même, à la pro-
ionique : tchetni caminum.
Crèmeaux, canton de Saini-Just-en-Chevalet' : noutra ;
vûcbi^ parrochi, clochi,
Saint-Germals-Laval, arrond. de Roanne : BoUarda et de la
Rochi^ dans la charte de privilèges de Saint-Germain-Laval (juin
1248)6.
Ce dernier vestige du franco-provençal disparaît à son tour
au sud-ouest de Tarrondissement de Montbrison. Saînt-Bonnet
maintient Va atone même après une palatale : tailla^ eharerUy
balailh et ï la protonique chavaler7. Il en est de môme du par-
ler d*Usson où je relève les formes conchnsa^ vegliessa et tchami^.
Nous venons de voir l'un des traits do franco-provençal
empiéter sur le domaine des parlers d*oc et aller finalement se
perdre dans les montagnes du Forez; Texamen des textes que je
publie ici va nous montrer que, par une réciprocité à laquelle on
de\*ait s'anendre, quelques-uns des traits caractéristiques du
provençal ont franchi la Loire, pour aller se fondre insensible-
ment dans la masse des parlers « franco-provençaux ».
Au milieu de ce fouillis de phénomènes contradictoires, se
croisant dans tous les sens et formant entre eux les combinai-
I. P* Gras, hc* dL^ p, 235, et Chantclauze» îoc, cit., t. III« p. 88.
a, P. Gras, loc^ çit,, pp. 2J7, 242, 247 et Chantelauze, loc. cit,, t. III,
p. 42.
3, P. Gtas, îoc,cit,f p. 240.
4. P. Gras, ioc* dt,^ pp, 210, 215,
S- P. Gras, hc, cit., p. 249.
6. Ch2veTOT\â\er^ Ifn>eniaire des titres du comté de Fûrfi^ impartie, p. 510, et
Qiântdiuze, hc, cit. pièces supplémcmaires, p. 64.
7. P* Mcyer, Rfirueil ^attoins tejctés, p. 173.
8. P. Gms, loc. cit.t pp. 201-212; cf, La Mure, Histmrt des dites âe Bifur-
hm et des comtes de Forei^ IH, 162,
4 E. PHILIPON
sons les plus diverses, toute délimitation dialectale serait forcé-
ment arbitraire.
Ainsi se trouve vérifiée, une fois de plus^ la loi formulée par
MM. P. Meyer et G. Paris sur la fusion graduelle des dialectes
les uns dans les autres.
Cette constatation faite, j'aborde, sans plus tarder^ l'analyse des
textes de langue que je publie ici et dont voici Fénumération :
L Testament de Jean de Bourbon, 1289.
n. Censierde la Commanderie de Chazelles-sur-Lyon, 1290,
(Retraits).
ni. Livre de raison des seigneurs de Forez, 1322-1323,
(Extraits).
rV. Censier de Ponce de Rochefort, vers 1225, (Extraits).
Les trois premiers de ces textes sont écrits dans le dialecte
qui se parlait à Test du Forez, sur la rive droite de la Loire.
Quant au Censierde Rochefort, il appanient au sud-ouest du
Lyonnais. La comparaison de cts différents documents linguis-
tiques, les uns avec les autres, nous montrera comment, sans le
moindre soud des divisions politiques, les idiomes foréziens et
lyonnais s*enchevôtraient les uns dans les autres.
ToNiauES. — I, a pur persiste : Jjostal I i % Chasaki H 24,
pra n et IV^fava, mar et solars, qui milite en faveur de l'éty-
mologie *subtàlaris, IIL De même, devant n ou m : chapclan
\, Sani Rcmmn II 18, man III i^pan IV 49, fatUy fa oie m II 7
r*; — clmskUana, fanfatus II 37, 13 v^, semana^ grana III 14.
2. Précédé d'une palatale, a s'affaiblit en ev chère caram I
10^ chesa casam II j^ parrochiel, rAwtîcasa, chiera caro III 33,
3,4, — D'où la division en deux classes des verbes appartenant
à la première conjugaison : reiornar, hvar III; payer I 12, payier
II 13 v"*, abcrgkr, mingier^ aparelier DI.
3, Devant n devenue finale en roraan, Va infecté d; se nasa-
lise en îVn, bientôt réduit à m, m : âeyens III 28, Christins
Christianus II 45, Çafurin Symphorianum; et après rejet
d'accent sur la posttonique : Clenuticyn Clementiàmll 12, 7,
I . Les chitïrcs romains renvoient aux textes rais à profit ; les chiffres arabes »
aux paragraphes des extraits que j'en donne ici. Si l'exemple cité est tiré d*un
passage non compris dans ces extraits, je donne Findicatlon du folio, ea la
£aisaat suivre de la mention recio ou verso.
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LTGERÎEK J
Il en est de même à la protonique : Briandas^ Briemhs IV 2 v°,
aujourd'hui Brindas, Pareillement en vieux lyonnais : C:^abatin
Sebastianum*
4, A la finale en roman, Va étymologique demeure : paya I
12^ dcfnenchia II, poyia •podiata, nuylia II 19 r**, 22 v*. Cet a
devait se prononcer très ouvert et se rapprocher sensiblement
de t\ c'est du moins ce que semblent indiquer les graphies
arwnsie à côté de paya^ dans I et pidie à côté de ttuytia^ dans II.
5, A suivi d'un son mouillé se combine avec celui-ci, pour
former un son mixte noté tantôt ay, tantôt ey et parfois c : lay
îllac, cay eccehac» Il 19 r**, 16 r°, eyga aqua II 43, îayîy
aygui, frayti fractam, rays radices et egrelQ^fay fagum
IV 22.
6, a persiste pur devant l oun suivie d'un i en hiatus : talti
n passiffiy palli H 9, port al y portaui{li 12 et au:^ alios III; com-
pany XW 14, iagni II 6, mais saini^ saytm dans IV, 12, 65.
Les textes lyonnais du xtv siècle écrivent de même : palîiy
ialli^polaii^futaU, chasîannyes (^Rammiia, XIII, 543, 556, 558)
et de nos jours les patois prononcent paii, chôtahi {Revm Ja
patûu, î,2joy
Dans ntflks metalleas II 17, 26, raffaiblisscment de Va en
e est dû à Taciion de la semi-voyelIe qui le précède. Quant à
Urayls II 31, c'est une véritable exception qui indique une cer-
taine tendance de la palatale à affecter la syllabe accentuée.
Dans la charte de Saint-Bonnet, au contraire, la régression
de 1; est de règle : tailla 10, baillés 48, meailla 44, gaitje 24,
istrain:^ 19.
7* La finale aticum donne a/c?, comme en lyonnais : niariaja
I i^Jromajo, poriajo VU. A Saint-Bonnet, le r a développé un y qui
est allé troubler Va accentué : usaitge 27, putaitje^ mais aussi
segnûrajô (?), messajes 18, 20.
8. De même qu'en vieux lyonnais, le suffixe arium a donné
rr quand il n*était pas précédé d'un son palatal et ter dans le cas
contraire: Rosers I 3, muiur, pormr II, ccmrs III, Esco/ers, mou-
fiers TV 30, 2; — peschkr.grangieTy ciriskr II 12 r"*, 27 v**, 8 r°,
Fukhiers^ bergiersW 16, il. Dans III, cette distinction tend k
disparaître, sans doute sous Tiofluence du parler parisien :
patissrr et pâtissier^ oler et olier.
Ariam donne toujours ryn, cri : rmyri^ dmrhotuyri et
vcrchtyrif grange ri H, riveri^ lunieri^ chamhareri III 2, j, 10,
6 E. PHILIPON
Poisateri^ vercheri^ pereiri IV 4 r**, 29. Bruuri IV 22, s'explique
par la vocalisation du c médial de * brucariam.
Dès les premières années du xvii* siècle, les masculins en er
ont disparu du parler de Saint-Etienne : barbie^ darrye^ dans le
Ballet foréiien de Marcellin Allard, mais h finale féminine n'a
pas varié : parnicry^ bargiry (p* 2j de la réédition de G. Bru-
net). Les choses ne se sont pas modifiées depuis lors : chevalk;
hussiës^ dangk et charréri, varchéri, dans les Œuvres du poète
stéphanoisP: Philippon, (éd^'^de 1876, pp* S3, 74, 148, 55, 122),
En lyonnais, au contraire, la mouillure a agi sur les formes
féminines, comme sur les masculines : prinur et dmgiers^ lunuri
et cusinyeriy dans Marguerite d*Oingt. De nos jours, la forme
diphtonguée après avoir tout envahi s'est réduite à I, iri :
parmty bargî; revîri^ bargîri^ à Saint-Genis-les-OHières (Rhône),
A Saint-Bonnetj abstraction faite de l'action de la palatale,^
Va de la finale arium a été traité de même que dans le Forei
cis4igèrien ; il faut aller jusque dans k Basse-Auvergne pou
rencontrer la terminaison provençale cir^ cira : drapeirs, pili-^
ceirSj cbarreira^ dans la charte concédée, en 1270, par les frères de
la Tour aux habitants de la petite ville de Besse-en-Chandesse,
(Chabrol, Commentaires sur les coutumes d'Auvergm IV, 93);
Soliirs, Bareira, brugeira dans le censier du prieuré de Vieille-
Brioude, 1271, (A, Chassaing, Spicilegium Brivatense, p. 126) \
9. Dans les mots rai-savants qui suivent, raccenta été pro-
jeté sur Va posttonique et Va primitivement accentué s'est main-
tenu sans changement : frari, boari, chavannari II 24, 20, 9 r'^,
patuiari III, pcrari, avenarks IV, 22, 4,
10. L'entrave a protégé Va originaire dans clnr carne m III
^^chaci n 36, cassi *cassia III.
ir. Notons dans l frauro à côté defraro, et à la protonique
frauria. Les textes lyonnais et bressans du xiV^ siècle nous four-
nissent plusieurs exemples de ce phénomène linguistique; en
voici quelques-uns : fauurOy plaustro, plautro, tauxa (Revue des
patois^ l, 263, note 3).
Le redoublement de Va se relève dans salaa, jortiaa^ III
(voyez le § 23). C'est là un procédé graphique, très en hon-
1 . Sur le suffixe -ariuSy -aria voyez une note de M. G. Paris, dans Ronia-
ww, IX. 3J0.
2. Cf. Rofuoftia, XJIÎj 543,
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÉRIEN 7
neur parmi les scribes lyonnais du moyen âge^ et qui paraît
avoir eu pour but d'indiquer la prononciation fermée de Va.
Pareillement, à la protonique : Aaquaria à côté à'Aquarian IV 33
28 et maalars HL 17.
12. ^ et I sont représentés indifféremment par e^ ey ou «,
graphies diverses d'un même son , sans doute celui de è : se,
deyty vianeySy seyt I, assaver^ avenu, Verney, Ponuy, Franceis, Fey,
neyriy treyvOy nteyns II, très, seyr, saveir, peisçisuniy fen III, her,
avenUy deivonty treivOy fen IV. Vi via m, plur. vies II et IV, fait
exception.
Pareillement, devant une palatale primaire ou secondaire :
deys decemyfreyt frigidum, Leyriy irelli, soleyl; sant Gineyll,
fret (vha. frise), leny ligna, parels , dunieni III, Sant Ginieisy
treyvo TV i v*», dimey II et IV, difnei III et IV. Dans lentilli III et
servis IV, ï a été traité comme long , de même que dans l'en-
semble des dialectes romans; par contre, on trouve cwieyls
cunîculos, à côté d'ailleurs de cunyls dans III. Chazellcs et
Rochefort ne connaissent que la forme avec i : cunil-^, cunyou:(
dans II 36 ttconil:^ dans IV, 4 r°.
Dans le Forez trans-ligérien ^ et ï sont le plus souvent rendus
par ei : aveir, sabeir, sei sit, tneins, dreit, franchisa, cosseil mais
ers dans la charte de Saint-Bonnet. Quant aux textes lyonnais
des xiii^ et xiv* siècles, ils emploient concurremment les trois
graphies e, ey ou ei : ser, peis, peyvro {Remania, XIII, 544 et
546).
13. Après un son mouillé, ^ passe d'ordinaire à /, de même
qu'en français et contrairement à l'usage dii provençal : /?//:(/« II
13 r^, IV, siri ceram, III.
14. ê reste, vraisemblablement avec le son d'e ouvert, parfois
noté« ou ey : Peros I, II 11, pera II 15, peciU, IV, leot4re, ter:;^
II, veli m 26 ; Peyre II 20, veyl *veclum II, veili IV '.
De même igleysi I, egleysi II, glesi III, si, comme porterait à le
croire la forme provençale glieisa, \è tonique d*ecclcsia s'était
transformé en è, en bas latin.
La diphtongaison en ie n'apparaît que dans lievra, espicces El,
I. Dans ces trois derniers exemples, Vy pourrait à la rigueur s'expliquer par
la résolution de la gutturale secondaire. On pourrait aussi voir dans ii^îeysi
le résultat de la répression de 1; posttonique.
8 E. PHILIH3N
et dans tier:^ qui alterne d'ailleurs avec ter:^ dans IV, Tint et tînont,
dans Hj supposent les formes intermédiaires tient et tieftant.
Dans les textes écrits à Lyon ou aux environs de cette ville,
les formes diphtonguées remportent^ et de beaucoup, sur les
formes avec e simple {Romania^ XIII, 545 et les textes cités).
A Saint-Bonnet, par contre, k diphtongaison en k est incon*
nue : peiray segre, (Charte de Sainî'Bonnety §§ 12 et 30),
15, Lorsque Yè se trouve en contact avec un u posttonique,
il persiste d'ordinaire sous sa forme latine, au lieu de s*amincir
en I, comme cela s'est produit en lyonnais : Fila Deou^
Bertlxflomeou^ Andreoux et Atidreua^ Maîhoux et Mat hua ^ fcou
(provençal /f«) dans II, Math'u dans IV, Dans le livre de raison
des seigneurs de Forez, postérieur de plus d*un quart de siècle
au Terrier de Chazelles, e s'est réduit à; : Atidrim^ syu sébum.
Déjà dans II : tyoida,
ï6* Les noms de lieu en eu^ eau s'expliquent sans doute de
même : Va des finales en ia(c)utn s'étant affaibli en e, sous l'ac-
tion de la semi-voyelle, cet *' se sera comporté comme celui des
finales en etan et Ton a eu des vocables toponymiques tels que :
Esperceul i, Eculeu (aujourd'hui Ecutly) W i v*>, CuseoUySoloy-
memi II 22, Cyi^reu III 2. L'amincissement de e en i se relève
dans An^iiyu II, 25.
17. riouy ryou rîvum U, 29, 14 r**, fwnyow^ cuniculos et
ceou:^ ecce illos II 36, 44, nous offrent d'autres exemples de
la transformation en semi-voyelle de la voyelle accentuée,
lorsqu'elle est suivie d\in m, d'origine latine ou romane. De
même, en vieux lyonnais : riuy siou^ Diu, tioks^ miuiÇRoma'
nia, XIII, 545).
ï8. ô^ Met au donnent (ï; cet a était ferme ainsi que l'indiquent
les graphies au et « qui se rencontrent parfois dans nos textes :
lor^ XHilor ; hotra^ soa\\ — passaor, nevos, roro roburem; tyoîa
et tycrnla^ dos, fo fuit, josta et justa; oaut, esclosa (français.
écluse^, ot et oui habuit, cm caudam II; — (minsaors\ dos,
pola, chd caulem, ost augustum III; — nevow^ does et dui^
JQsta rV . — Pibto p ô p u 1 u m est anormal *
19. Dans les finales en orium, la palatale a disparu sans
laisser de trace, de même qu'en provençal : aberaors^ essagaors^
terraor II, OraiW III 9, Dans moni *moni a H, elle s'est bornée à
agir sur Va posttonique ; la régression de Vyod se constate dans
imyms H 8 r**.
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÈRrEN 9
20, est diphtongue d'ordinaire en ue^ de môme qa'en lyon*
nais : Ftur I ; — suel, lue II 49, 14 ; — uej *ô vos» hu^le III et
dans IV : suer^ uert et bmc*hosc\xm qui proteste contre Tétymo-
logie buxus proposée par M. Storm {Rontania^ V, 169), Le
passage à 0^ sans doute fermé, n'est pas rare : ncnfay rolo^ boc
U, mollo môdulum, 0/1, olio^l ule, posquCy knsoh III, ort II et
IV, base W,
21. Devant une palatale, 0 est représenté par uey ou par oi :
puey pod i u m n ; huây III ; poys p u t eu m II, oytres III , pois^ crois
crucem fV,
Dans la charte de Saint-Bonnet, ô ne se diphtongue guère que
devant un son mouillé ou une gutturale : art 15, w/ 18, moifa
29; puéis u, nueit n oc te m 30, pneschnt jé, ft4€c 45. Dans la
coutume de Besse, toute trace de diphtongaison a disparu i/oc^
poschont,
PosTTONiauES. — 22. -^ puT persiste, de même qu*en pro-
vençal : artna I> aveyia H, fava III, irossa IV. Une palatale
radoucît en <r, d'où la diphtongue ;>, réduite à / dès l'époque
préhistorique des dialectes bressans, lyonnais et foréziens :
ygkisi I, vigniy rochi II, Porvemi III, verckri, pcd IV. De même
ciri^ où l'affaiblissement de la est dû au groupe ir,
25. Précédé immédiatement d*ua a roman accentué, Va
posttonique a été comme absorbe par la syllabe précédente :
estra^aservisa^tmina^ quariala^ etc., dans le Censier de Chamelles.
Les graphies jornaa, salua quVmploie le Livre de raison n ont
d'autre but que d*indiquer la prononciation fermée de Va finaK
Il en est de même, dans la charte de Saînc-Bonnct, où on Ut
mailkraa ^2,fcrnuia 13, à côté de mcsda (mêlée) 15,
Va posttonique se maintient pur après les voyelles autres
qucû : frauria 18, partia II 15, vetma^ menua III 21, la soal ^^
çreysm H, mais/ran, Boari II 15, 17»
24. Devant s de flexion a passe à c ifontams^ gotes II 7 r** 11,
raviolis Uli does IV 15 , Dans les féminins en 1, Ys a maintenu Ve
et c'est ly qui a disparu : igkyses I 7, roclm II 12 v°, vimus IV
f v<*. De tous les caractères, sinon distinctifs, du moins habituels
des parlers franco-provençaux, cet affaiblissement de a postto-
nique en f devant x, est celui qui se poursuit le plus loin vers
Touest : la coutume de Saint-Bonnet ccm femnes ^ chauses et le
patoisd'Apinacprononce/c«^kîj- mais tout prés de cette dernière
PHIUPOK
commune, à Usson, on se sert de pluriels en as : ttrras,
hfîdxas, etc.
De mirme, et à plus forte raison, dans la charte de Besse-en-
Chandesse, i quelques lieues à Touest de Saint-Boonei : toîas
las femnas, chabras, etc. * .
25. L'^ posttonique des finales en aias s'étant adouci en e
suivant la règle, on a eu des finales en aes^ bientôt réduites à
aySi ais^ puiseyj: : quartalaySj eminays^ anays^ quartalaisll 50, 40,
charbofiaySy achatais, obleys oblatas III 14. Après une mouillure,
a tas est représenté par tes : detnenchies^ taUicSy pidies II 5, 21
PosTTONiauES AUTRES QJJE A. — ^ 26, Là OU la pronoociation
exige le maintien d*une voyelle de soutien, nos textes dis-
tinguent soigneusement entre les diverses voyelles latines : mare
I 10, U passim^ fran\ faurc faber II 27 6, autre alter H, 2 r**,
(rares fratcr, nuiytre magister III, pare IV; autri altcrî
n 13 v^;Hugos, Peros II 2, 1 1 ; autros alteros III, IV; rmrtajoî
l^auiro alterum./jwfi? fa bru m II 2 r*', meismo IV. J'ai relevé
le même phénomène dans les textes lyonnais et bressans des
xm* et XIV* siècles^. Par contre, la charte de Saint-Bonnet ne
fait point cette distinction délicate entre les diverses postto-
niques autres que a.
Signalons le maintien de Vu posttonique dans Gorgorios II 33,
Cf le lyonnais espadi\ sen^icio ÇRomania^ Xin, j 54). Cet u s^est
combiné avec Va dans fo (^fau) fagum IL
ANTiTONiQUES, — ij. a demeure même dans le voisinage des
palatales : chamin^ Cha^ale::;^^ achaîeî II 42, chavam^ agusar IH,
chavalar IV 39. Pareillement, à Tiniertonique : tmyluramentl r,
fayvakr, Margarita II 1 5 r**, 29 r°, Oraor II et III, prejaor, avan-
saors m, lavaures II 23 v°, Gaîdjaûr^ cimnaver FV 32, 17*
Va antétonique n'a pas toujours résisté à inaction de la semi-
voyelle, mais son affaiblissement en e ou en f", dans cette situa-
tion, est beaucoup plus rare qu'en lyonnais : Tyseor II et W,
chimin^ chivroî, HI,
1. Sur Tinfluenoe exercée par s sur la voyelle qui la précède, voyez
W. Meyer-Lùbke, Grammaire des langues romanes^ n° 309 de U traduction
française» et Romania^ XX, 78.
2. R^ntaniat XIII, 554, et Ram des Pa^is, I, 20,
LES PARLERS OU FOREZ CIS-LIoèRtEN II
Notons le redoublement de Ta dans maalars (vieux français
malart) IH, 17, Aaquaria IV, 53.
28. ï devient e : perer II 9. Pâysson III s'explique par la résolu-
tion de [a gutturale en/* — ê demeure : pereiri , nami IV 3 v**.
Dans mtismo ^metipsimum IV, meyma II 27, il se peut que
la contraction ne se soit pas encore accomplie.
Sous Taction d*une palatale, è passe i / : ciriskr II 8 r",
Gitieys II %Q v°, Ginics IV 3 ; igîeysi I 1 1, mais pourquoi sirventa
m?
Mis en contact avec la voyelle qui le suit par la chute d^une
consonne intermédiaire, è se réduit à / : tyokr^ tyoIeri\ Miart
Médardum II 16 v^^ 6 r^, 21.
Devant I ou n^ e atone peut s'élargir en a : Michakî, Guillal-
min n 5 V*» i6, vianeys I et H.
29. r persiste, même lorsqu'il précède un 1 accentué : dimi,
Malvisin II 5, 5 r**» mais aussi Espcrit 1 8, Fe:{edans\H 25, et
pare:^is III, (cf. G. Paris, Romania, \TII, 629). f a passé à u
sous l'action des labiales environnantes : prumerwtenl , dumenel\l
9 cipassim.
$0, ôet wse maintiennent avec le son d*o fermé, que nos textes
représentent indifféremment par 0, ou ut même u : anmî I 3,
mollet^ codurer, rnotons^ jontala^ boari II, tmterla^ coicus III^ BocrSy
potins ^ conil IV 3 v^, 4 r°, 25 ; — coudurers II 41 , Mouners IV
I yo. — nurirl 9, rwr///, frw)'fO« (= buyçon) à côté de boysson^
puiin, ctisin II, /)wrn, ufferendes et offcrmdcSy qusirm III, ci^raV IV.
De même devant w médiale : Laofujsa et Laouneysa II, unyons
m.
Notons le maintien de Té? intertonique dans Berthlorncou II,
peireal petrôselinum III 5.
0 s'est affaibli en e dans .ftvor II 7, pcirestl III Esphiîal II 30 et
Bertfmlmeoi4(= BtrtMnuoii) II ; il en est de même de û àin^Jevesi
(Juvisy),
Il y a eu dissimilation dans Laofieysa, Laouneysa^ raonî II 43,
26 V*, 26, laoneisa^ Mmtramiî^ raonda IV i v^'. Suivant toute
vraisemblance, Va n'est arrivé i a qu'après avoir passé par^ ;
en lyonnais, cet e au lieu de s'élargir en a, s'est aminci en l :
rianda et Lion dans Marguerite d'Oingt, prion profundum
dans le patois de Saint-Genis-les-OUières.
I* Cr* Laon {Lugdunum Ckmium),
r2
E. PHILIPON
Consonnes* — 3 i. f initial ou seconde consonne d^un groupe
latin prend le son chuintant devant a : chapclan I, cJmmin^ CIm-
sahXt Cbasîelltui^ mais aussi CaskiUd II, chiera, chavaus^ char UI,
chavalar IV; — Pervendjeres I, vercheyri *veTcaria, fiachi^
dtmenchks H, Mambi III , Rocbifort IV, Ce caractère se poursuit
dans les parlers du Forez trans-ligérien : charîra^ chavalers, mûr-
cha^ dans la charte de Saint-Bonnet (§§ i , 9 et 1 9) , et dans
ceux de la Basse-Auvergne : cfmrmiis, chaptal^ vacha^ dans la
charte de Besse (Puy-de-Dôme) ; C bal m y chapitok, dans le Cen-
sier du prieuré de Vieille-Brioude (Haute-Loire) ^. Les patois du
sud-ouest semblent avoir une tendance à remplacer le son chuin-
tant pur par un son mixte, représenté d'ordinaire par îcb et
quelquefois par is : tchami^ tchar^ coûte hâ, dans un conte en
patois d'Usson publié par P, Gras, à la suite de son Dictionnaire
du patois foré:^en, p. 205 ; tckmt et tsar, tchi canem et tsat, dans
des pièces en patois de Saint-Jean-Soleymieux, (P. Gras, loc.
riV., p, 210, 215); îsanîâ^ brantso et sauva kk% dans une chanson
populaire en patois de Luriecq, (P. Gras, loc, n/., p. 212).
Nos textes accusent une certaine confusion entre la chuin-
tante sourde et la sifflante dure ; broci (vieux français broche)^
fiaci, démmuies^ à côté de fiachi^ âcmenchks^ dans le Censier de
Chazelles.
32. Si le groupe consonne + c est un produit roman, la gut-
turale fait place à la chuintante sonore : fargi fabrica II 6,
mangi "^manicam H 23 r**, colongi colonie a 11% favergi
fabrica II 16 v*', sahago, Donmigo (= Dormnjo) II 9, mingier,
prejaors III. De même, en vieux lyonnais : prcgier^ pregeours,
erragicveîy empegia, empeginumî, niangos (manches d'outil), dye-
mengiy etc. {Roman ia^ XIII, 561).
Notons, dans le Livre de raison, la forme dmmni doraioi(c)a
qui a son analogue dans les patois lyonnais : dittnUni^ à Saint-
Genis-les-Ollièrcs, et dans les patois bugistes : dyorn^ne, à Juju-
rieux (Ain).
1. Aog, Chassaiag, SpklUgium BHvatensty Paris, 18S6, p, 126.
2. Sur lY'tymologie de cohngi^ vieux français cctuttgi\ voyei Aug. Beroard,
Cariukire dt Savigny^ chartes 29, 33, 203 et 702, et Cartuîaiu d\4\fmy, charte
56, dans la Cûlïedion dfs Documents in/dits. Montauges de l'Ain et Montangf de
la Savoie, ont été de même formés sur le cognomen romain bien connu
Mo^itanm^ à Taide du suffixe Um.
LES PARLERS DU FOREZ ClS-LtGÉRlEN IJ
33. Devant e et 1, c initial ou seconde consonne d'un groupe
latin est traité de môme qu'en français : ceou^^ cirisier II 44, I2j
peysmi III ; si le groupe est d'origine romane, c fait place 1 la
sifflante douce : ^«^m puUicenom, sau:^o salicem, sau:^ia^
DO^o rumicem II 15 r°, 16, 4 r**, /w;(ï«jrV 23 r^.
34. c inter\^ocal s'est adouci en g dans nt^gun I 11; il en est de
même de qu dans enseguent^ aygui III, cyga^ essagaars II 42.
ïqui ecce hic II 8, suppose un type bas latin ^eccu^m) hic.
ch intervocal a pris le son chuintant dans parrochiel lÛ 33.
35. r final en roman s'est résolu en 2, y dans ami, r^y *eccum
hac, lay IL Je n'ai pas d'exemple àciter de son maintien. Dans
la Charte de Saint-Bonnet, au contraire, je relève îes formes pro-
vençales mctnic^ amie, fuec 48, 45 ; pareillement dans la Charte
de Besse :foc, amie.
36. Le grouper/ donne ^'/ : layt,fayfi,frayti fracta, /rtj/wrrj
ni ; dans /ri*/ III, au contraire, la gutturale a été purement et sîm*
plement éUminée.
37. La dentale intervocale tombe : Sorlin Saturninum I 5,
abcraors^ passaor^ raonî II, Ormr III 9, feou *feoduni (?) Il 50,
^«f>/III 10. Dans laomysa II 43, IV 66, la chute do^ implique la
persistance de la forme pleine Lugudunum, attestée d'ailleurs
par les inscriptions et par Dion.
38. L*éiimination de la dentale forte s'observe, également,
dans la plus grande partie du Forez trans-ligéricn ; chamjaor^
fertnaa^ cùigfwgua, nwnda dans la charte de Saint-Bonnet
Les patois « de la Montagne », à l'extrémité sud-ouest du
Forez, se bornent à l'adoucir en d : niaridd^ jornada, nmtiada
(P. Gras, p. 224). Les pariers de la Basse-Auvergne agissent
de même : clmrrada^ moneJa^ dans la Coutume de Besse, Orador^
plantada, est roda, dans le Censier de Vieille-Brioude. Pareille-
ment, dans le parler de Clermont : doriada (A. Chassaing, loc. cit,^
p. 340). Notons dans le Censier de Chazelles : pidie pietatem.
Le / intervocal devenu final en roman s'élimine également :
pra^ meytia et tous les participes passés masculins. De même,
dans la chane de Saint-Bonnet : volunta, jura 13, niarclMt^
fiania 24*
Dans la Basse- Auvergne, au contraire, le / s* est maintenu :
merdMt^ donaî^ dans la charte de Besse ; prat^ p^gi^ty dans le cen-
sier de Vieille-Brioude.
14 E* PHILrPON
Le / final appuyé, soit en latin, soit en roman, persiste,
alors même que la consonne d'appui a disparu : dont donet
voudranîy re^mrt I, devant, aperthîont^ mais aussi aperihwn II
3 r*', 2 v*", ÎMrcnt, vmd^st, Bcrîrant W.funmî^ bcviront, ensegueni^
unt unde III, ant^ temnient^ ort^ pont IV; deyty donet Use dinet,
recet receptum, frut lU.
Signalons encore son maintien i la 3* personne du singulier
do subjonctifprésent : kysayi, plamt à côté dtprem I, 10 i u
De même qu'en vieux français, / s'efface devant s de flexion :
ort et or;^, part et /?^ïr^, Betirant et Bertrani II*
Il apparaît parfois Ik où Tétymologie ne l'appelait p^s ijohant,
fort n 14 v'', I 2 ^
40* Dans Tintérieur des mots et dernière consonne d'un
groupe, / s'adoucit end : codurer, consuturarium, sender
semitarium^n 3 v*'ji3 r^y Sandos *sabbatusIIL Les textes
lyonnais écrivent pareillement : sanda sanitatem, acoindts
adcognitos, cindres cincturas, etc. 5.
41. Le groupe tr se comporte comme en français; le /
disparaît sans laisser de trace, après, sans doute, s*être arrêté
quelque temps à d : mare , /rare ^ Peros I, Jî^f rares III, pare
IV. Dans Peyre à côté de Peros, Il 20, 11 et peiruel à côté de
pcreccî m ) , 1 1, try et ei sont vraisemblablement de fausses diph-
tongues qui indiquent la prooonciation ouverte de IV, A Saint-
Bonnet, au contraire, le / se continue en t : fahaire, dans la
charte de cette ville. Pareiitement, dans le patois d'Usson : pei~
rettas, et dans celui de Saint-Jean-Soleymîeux : vioulounaire^
peircs^ mais hune*. Le Censier de Vieille-Brioude emploie,
comme de raison, la forme /ram?j. Dans la charte de Besse, le
/ subsiste adouci en d : faîsadre.
42, / résiste d'ordinaire à la vocalisation : Sahago, Cbalvel^
delsy portai II, fmtal^ Pet al s 1, saha, navels ^ cunyls, porceL navel
ni, Galchaor, mais aussi Gatichaor, communals, als^ curiilx IV.
Devant s de flexion la vocalisation est fréquente : Moreu:^^
Clmlveu:(^ Espitauiy portau::^, cuniouit f^^«\ U*
1. Rommia, VU 107, Vllî no, XIH 565.
2. On pourrait» à la vérité» supposer un bas latin semcdarium.
3. Rofnattia, XÎII $64.
4. P. Gras, lûc. cit., pp. 204, 216, 220.
LES PARLERS DU FOREZ aS-LIGÉRIEN IJ
Dans la Chartede Saint-Booiiet, / se maintient mieux, surtout
devant s finale : falsa^ daîfina^ cassais^ cuminalsy mais aussi autres ^
Uiauta, autia.
Dans la Coutume de Besse, la vocalisation est inconnue : altras^
dels^falsadra, tfwltos, calicls. Dans leCensier de Vieille-BriouJe,
îe ne Tai relevée que dans les articles deus et atis; partout ail-
leurs / se maintient ; cabrais^ parlais.
Les textes du Forez cis^-Iigérien ne nous fournissent pas
d'exemple de Tapocope de / devant une autre consonne, apo-
cope si fréquente dans les textes lyonnais {Roniania, XIII, 588)
Cl qui se manifeste déjà dans le Censier de Rochefort ; Rose^.
4}. Le passage de / à r est beaucoup plus rare qu'en lyon-
nais; OQ ne le constate que dans Guilkrmo I i, amandra et
ffwUrla mustellam III 16; mais ohno II 6.
44. r s'est insérée dans trabla Ul et s'est déplacée dans Par-
vmsi III.
45. n ou m finale en roman persiste toujours après une
voyelle ; chapelan I, Sornyti^ Peron^ Hugon II, fen III, pan IV ;
Chrisiim^ Hucom^ fam, hom II 15 r**, 7 v**. Il en est de même
dans la Charte de Saint-Bonnet : maison^ om, mais t^f vinum,
dans la Charte de Bcsse et tchl cane m, tckmî à Saint-Jean-
Soleymieux.
n se maintient quelquefois après r : torn^ forn II 6 r**, 7 v**,
fom^ cfxtrn^ mais aussi char dans IIL
Devant s sa destinée habituelle est de tomber : cesa , tsi
in sic n, 22 f, 44, tramislll^ 10, nwtos, nuys minus, ces
census II, 22 r"*, 19, Lus et Luns^ unios et hunyons dans IIL
La Charte de Saint- Bonnet écrit de même maisos,
n s*cst laissé remplacer par / dans Sorlin I > et par r dans
arma I 2, vraisemblablement après avoir passé par /, Sempl
seprem H nous offre un exemple de Tépenthèse de la nasale,
phénomène qui a pris un grand développement dans les parois
du Lyonnais-
n suivie d'un; est notée parfois n ou nn, mais le plus souvent
gn : kni ligna III, saini, sayna:^, vini, vinrus IV ; sagni II, vigni
n,iv.
46. /i\ n' suivis d'une voyelle passent à la sifflante dure notée
tantôt f tantôt s on ss \ peci, places, Breysi II ; fayson et faysson
m, A la finale en roman, ils sont rendus par s ou ^ : servis^
pays U, ier:: U, IV.
^r r. c e: iiicui jcvicr^cn- . ai msmt qu'er. ivomiais :
j: u:::; . ! ir.:'^"...^:. ts: :.-.r-. iiiiiîLTemmen: .■ ol s: :
uu.\Ui,i i: m., .ui^ s./;-j-.." C" «"/i-v^.r ir-.j IL. /rjû: e: 77iairi£
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nu'ui; a. . rrcvAicr. j.r.-.^r:::^: J ::: irroinit . don: it zorps de.^
iiiiîî- i'tiii:,i' t .■;:;.;.;.-• I. -" -.•.- IL
nii.ii: :.. :.::.v., \.::.^r.::cr :.":r^jj- :u* " w:air, Ohaso-
\^.:w civ.vuiiiir. ^. :i-ij»zr. . •/;;■ -z: f.\iv,.'- L. ji.j. e: /vxza. I.
1. ;;.i.-.. ■■.■.'." Z. .'». su.-rîjLï Ji: : .:rci r . es: jrrett i: f
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LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÉRIEN I?
Flexion. — 52. La déclinaison esc assez bien observée; c*est
ainsi que les substantifs en er^ suivant la 2* déclinaison, sont très
régulièrement dépourvus dV» au nominatif singulier : faure H,
maytre VU. L'assimilation de la 3* déclinaison à la seconde
n'apparaît guère que dans le Livre de Raison {[rares f rater,
prejaor prédicat ores), et encore n'y est-elle point la règle.
Les noms propres de la i^ et de la 2' déclinaison offrent fré-
quemment Taccusatif en an^ on : PcroncUa^ Peroncllany Jaqm-
tan, Filippan I et II ; Mathia, Mathian II 12 V, n r% Guillal-
man II, Aaquaria^ Aquarlan IV 28, 25 , de même tantanU;
Peros^ Ptron II 11,7.
53, L'article masculin est /f, au cas sujet, comme dans les
Chartes de Saint-Bonnet et de Saiot-Vallier, (P* Meyer, Recueil
Tamiens Uxtcs, p. 173); les textes bressans et lyonnais de la
lème époque ne connaissent que la forme //.
Masc. sing. le ; él I, H, dal IH; al; h. — Plur. li ; dels II,
IV, dtl IL m, dtui IV 2 v-; dal III ; ah H, al II, III ; los, h U.
Fem. sing. li;di la\ a la, alla II \ la. — Plur. ks\ de Ics^ de
kU; a lesl, ailes et alh U ; les.
Neutre : lolî6 et III. el^=en la; en la, en les.
$4- L'adjectif démonstratif est représenté par ftf/ II, FV, cclta
et ces ecce illos U; le pronom démonstratif, par ceou:(^ ecce
illos et le neutre co U 16 r*», sa El; icol 15.
SS- L adjectif possessif fléchit ainsi : Masculin, singulier,
sujet : sos; r^ime : mon, son. — Pluriel, sujet : mi, si ; set IV ;
— régime : mos^ sos. — Féminin, singulier, sujet : sa I, Il ;
régime : sa II passim et III, si I i, II 7, 14. Au pluriel, je ne
relève que le régime nostrum III et l'indéclinable lor.
L'adjectif possessif absolu (ou tonique) est représenté par sia
sua, français : sienne et par lor H, 42.
Comme exemples du pronom possessif, je n*ai i citer que la
jol I 9 et la lor Û,
56. Au singulier et au pluriel, le pronom relatif des deux
genres est, au cas sujet, qui, dans le Terrier de Chazelles et que^
dans le Livre de raison* On trouve aussi qi4e, pour le féminin,
dans n, 13 r*». Le cas régime est que pour les deux genres et les
deux nombres.
Le Livre de raison emploie le relatif li quai au sujet mascu-
lin pluriel ; le Terrier de Chazelles, au contraire, ne paraît pas
connaître le relatif tiré de qualis : AI clxmin per que Imn vait...
n, 39 ; — pcr la vercfhjri en qm est sa tmysons II 1 1 .
57* Le pronom personnel fléchit de la façon suivante : i"
personne /<?; ms; — 3* personne, masc. sîng, el; li (franc.
lui) ; fo; — pluriel i7; lor; los\ — féminin singulier, ilïi I i ;
Icy I, /i; la\ — neutre /;a, 0 I 11, 2, au sujet et au régime
(fraoç. ï7, le). Le pronom personnel est assez fréquemment
omis dans I et II : tant quant Uy plaira I r ; — perj art que acha-
teront II ïé r^.
Le pronom personnel absolu (tonique) fléchit comme suit:
Masculin singulier, sujet : eî II passim : « et tint a quart, el et
SOS frare, v meitarays, « Il 21 r^ ; régime : de luy, a luy. — Fémi-
nin singulier régime : a ley (franc, à elle} I i , HI. — Pluriel
masculin, sujet : il dut IV 2 r°; régime : lor (franc, eux}.
Notons, à la 3*^ personne du masculin, Temploi régulier du
pronom j^ : « Et tint ij sestarays de terra a quarts per se et per si
mullier, » II 14; « per se » IV 4 r^.
Le pronom indéfini est lx>m I, H.
58* Nos textes, comme on devait s'y attendre, sont assez
pauvres en formes verbales; ce qu'ils en contiennent suffit
cependant pour nous autoriser â rattacher la conjugaison du
Forez cis-ligérien au rameau provençal. — C'est ainsi que la
finale latine *ant se conserve régulièrement, non seulement à
Timparfait de Findicatif et au conditionnel : aviant II, 30, paya-
riant U 43, descendrianî III, mais encore au (mur y partrant I lo.
Il convient d'ajouter que le Livre de Raison témoigne d'une
tendance marquée à substituer la finale un k la finale an : aviunt
et poiunî à côté de descendrianî.
Nos textes ne nous fournissent qu'un seul exemple de la j*
pers, plur. du présent de Tindicatif : fermant IL On sait que les
textes lyonnais, qui maintiennent d'ordinaire la finale latine -ani
(receviant^ faysiant faciebant, dans Marguerite d'Oingt), flé-
chissent, eux aussi, en oni^ les 3" personnes plurielles du pré-
sent et de l'imparfait de Findicatif : antant , entravant, dans
Marguerite d'Oingt, pp, 46, 63.
Le parfait des verbes de la i" conjugaison est formé sur le
type dédi, conformément à l'usage du provençal : comensey III
I, dond n 43, itemos III 14, acJxUeront II 16 r.
^
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÉRÏEK
Signalons, au présent du subjonctif de la i'* conjugnison, les
3" personnes du singulier en ayt^ eyt : laysait, ayiayî; nialmcntyt
I lo 9.
A l*imparfaît du subjonctif de la première conjugaison, la
finale latine — ent est rendue par ant : anmtdeysanî I 11,
aclmksant II 30.
La conjugaison de nos textes se rapproche du français en ce
que Va posttonique de la 3* personne du singulier du présent
de l'indicatif des verbes en ar^ s*est adouci en <?, de miïme
d'ailleurs qu'en lyonnais : isîc II, pose I, Pareillement au présent
du subjonctif : planet I it.
Notons aussi que le Livre de raison forme l'imparfait de
Tindicatif de la r* conjugaison sur le type de Timparfait en
ébam : mmiant^ detncfiani, contrairement aux textes lyonnais
qui ne nous fournissent que des formes en avant,
59. Voîd, au reste, le tableau sommaire des paradigmes
relevés dans les textes que je publie :
i*^* Conjugaison. — Indicatif présent i. donc I; 3, isteTl 22,
pose I I ; 6. fermant U 5 r". — Imparfait 6, demoriant^ meniani UI
t, 14. — Parfait i. œmensey III i ; 3, donei U 44, se dinet III 22;
4. itemosYH 14 ; 6* acbateront II 16 r°, se dinerunt III 28. — Condi-
tionnel 6. payariant H 44. — Subjonctif présent 3, laysayi I lo,
aydayt^ ntalmeneyt I 9; gart^ dont L — Imparfait du subjonctif 6*
anmideysant In, achaksantW 30. — Infinitif présent reiormr;
mingier III 10, 14. — Participe présent denwrant lit i. — Parti-
cipe passé, masc* sing., pela II 30 r** ; paya^ anonsic I 12, 1 1 ; —
Féminin sing. ascrvisa II ; *mingia, — Féminin pluriel asem-
says n, iuhatais III 14; ^mingies.
2* Conjugaison. — Indicatif présent -^^ deit Tl, deyt \\ 6.
devmit II 30 v°. — Imparfait 6. poiunt III 10. — Futur 6. vou-
drant I 2. — Parfait 3. z/// I 15. — Infinitif i^tv/r UI 10. —
Partie, passé masc, recet.
3* CoNjUGAïsow —Imparfait de findicatif 3. candiisetJÏX 14.
— Parfait i, dépendit III 14 ; — 6. feyront III i , mit t iront HI 14,
bevirmtt HI 32. — Futur 3. playrali. — Conditionnel 6. descen-
driantUl 10. — Subjonctif 3. se ptanet I i i.prette l 10. —Impar-
fait l.vtndest II 43, — Infinitif /ï/rd III i ; rendre I 8. — Parti-
cipe présent veyent II 32 r*»* — Partie, passé perdu III 14; vendua
Uifayîi.
20 E. PHILIPON
4^ Conjugaison. — Indicatif présent 3. tint II; 6. tinont U
30, — Parfait 6. partinmî lll 2. — Futur 6. parîranî I 10. —
Infïmûi venir III i* — Partie* présent cmUimnî II 30. — Partie,
passé féminin vmua IIL
AvEiR. — Imparfait 3* aveit II 43, aveî III 14; 6. aviant II
30, III 143 aviunt III 10. — Parfait 3. oî II passim^ oui U 15
r" ; 6. oront H*
EsTRE* — Indicatif présent 3, est U; 6. sunt H 15, III r,
sont n 15. — Imparfait 3. ère II 22; 6. eruîH III, — Parfait 3.
fû II 6,/w III; 6. /(?nw/ II i, /«nw/ ti juruni IIL — Subjonctif
présent 3 , j<y/ In.
L TESTAMENT DE JOHAK DE BOURBON.
Le 22 avril 1289, i la demande des intéressés, le juge du comté de Forez
faisait transcrire, sur k registre des insinuations de Feurs, les dispositions de
dernière volonté contenues dans le testament olographe d'un certain Johaa
de Bourbon '. Suivant Tusagc, le greffier paraît s'être contenté d'apporter à
la rédaction originale des modifications de pure forme; parfois mêmeUs'ou*
blie jusqu^à copier textuellement, de telle sorte que, dans un même paragraphe,
on le voit se servir tour â tour de la première et de la troisième personne.
Aussi bien, au point de vue de la localisation linguistique de notre document,
cela importe peu, puisqu'il résulte du contexte que le testateur habitait soit
l'anden fotum Se^^usiavonim^ soit Tune des communes qui Tentourent,
La feuille sur laqueUe le magistral avait fait transcrire le testament de
Jehan de Bourbon a été détachée du registre des insinuations ; conservée par
hasard, elle se trouvait, il y a quelques années, aux Archives du Rhône où
j*en ai pris copie :
Nos Henricus Dessartines, legum professor^ judex in coraitatu Forensï,
notum facimwj univ^rsis présentes litteras înspecturis, quod anno Domini
M ce octogesimo nono, die V^enms, post ociabas Pasche, pirsentata nobis in
scriptis, apud Forum, testamento seu ultinu voluntate Johannis de Borbono
dtfTunai, presentibus pareniibus et amicis ipsius deffuncti qui dicebant sua
t. Sur le juge ordinaire du comté de Forez, qui dut résider à Feurs jus-
qu'en 1441, époque à laquelle la capitale du Forez fut transportée à Montbri-
son; voyez Chantclauze, îoc. c^//.,lll, 254.
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÈRIEN
21
intereue-.. diaum testamentum seu uhimam volumatem apperuîmus, publî-
cavimas et de verbo ad verbum legimus et in forniam publicam, ad per-
pctuam rci memoriam» redigi facîmus in hune modum :
1. Prirno Johannes de Borbono pose essecutor de son hostal Guillermo
Chapelan et Johan Chapelan son fraro et Vialet Foron d'Esperceu * [et]
Johan de Bonayr, Et kysse Filîppaa si muillicr dona et senoreyssa de soq
hostal» tant quant ley playn, et quant ley non playra, jo H dono deys livres
de parûû de meyluramem hotre son niariajo et una gonella et un surecot de
bruoeta» tant que a la valor de c sols vien., et .xxx. livras de parisù de
mariajo que illî î a.
2* Item .ÎJL. châpellans pr*r s^arma et a chascun dont hom ,îj. sois vicneys, ej
jort que U essequtor o voudrant.
I. Itéra al chapelan de Rosers* .v. soîs de pamu p^r un anoal.
4* Item al chapelan de Ci vent » .j* anoal de V soli de parijû.
5. Itccn .xij... punsis ai pont de Saint Sorlin*.
6. Item cl pont del Palays de Fuer * .ij. sois vianeys.
7. Item a les igleyses d*Espcrceu, de Civent, de Roserz, de Costanccs*, a
cbasmoa ygleîsi ,ij sols vianm.
8. Item a Sen Esteven de Lion 7 .vj* [sols] vianeys; a la frauna de Saint
£$P<nt de Roscrs xx sols de parmi a rendre dcdîns à], anz.
9. Item laysse Stevenin son frauro deu fey et la soa, sos efans ; et que los
guait come prr se, et que los aydayt a nurîr et que no los bâte, nos los mal-
rocncyt.
to. Ixfm comandc que Peros sos fils, le annas de sos enfans, prme .x. Iivr«
de paiifij de melurament» lay que il partr ant, et salve si mare come sa cherc
marc ; et que guan los enfans come ^ se et que no« laysayt Tostal mcspar-
tir, tant quant îlli viora.
I I , Item comande que ho seyt anonsîe a Rossc[rs] et a Costances. que si
avcyt negun que se planet de luy, que U esscqutor lor ho amendeysant el
reguart de saint igleyst.
12. Item a paye Johan Chapelan.,.., .c. ^h de vianeys, a payer en marz de
k , paya.
t. Espcrdeux-Saint-Paul, con de Fcuis.
2. Roner-eo-Oonzy, con de Feurs.
3 . Gvcos, con de Fcurs.
4. Il s'agit vraisemblablemem ici du poct qui traversait la Loire, en face
de Fcurs.
5. Le Palais, faubourg de Fcurs, sur la rive droite de la petite rivière de
Loiâc,
$, Cottance, co» de Feurs.
7* Aodeime église métropolitaine de Lyon, construite au v« siède par
saîot Patient. Cette église» aujourd'hui détruite, était attenante à Saint-Jean
qui Tavait dépossédée du siège métropolitain.
22
E. PHILIPON
15. Item a recet de Johan de Bona^T .xxx. livrai vianeys del manajo soq
fraro.
14. Item .XXXV. hvres vianeys en dejrt.
15. ko vit Vialet Faure d'Esperceu et Andreueiz de P<?rvencheres et Cle-
mcns de Gutis et Peros Petals et Nicholas BoUers de Seo Marcelin. Tesict
suniîsti.
16. Datum lo vcndros après Testa saynt Mîcliel, anno Dommi
MCCLXXXVUI. In eu jus rei testimoniumj nos prefatus judex huic prescnti
carte et publication!, a nobis rite et sollempniter piiblicate, in formatn publi-
cam, ad pcrpctuam reî niemoriam , prout tnores et juriscst redacte, sigillura
Forensis curiac duxîmus apponendum.
Datum anno, die et loco predictis.
n. CEKSIER DE LA COMUANDERIS DE CHAZ ELLES -SUH-LYOK.
Vers îa fin du xvip siècle, les archives de la Vénérable Langue d* Auvergne
furent transportiics â Lyon, dans ThÔtel de la Commanderie de Saint-
GeorgeSt où le Grand Prieur venait de fixer sa résidence» Transférées à THo-
tel de Viîle, en vertu de la loi du 5 frimaire an V, portant création des
archives départementales, elles y furent conser^^ées à peu près intactes jus-
qu'au mois de janvier 1848, époque â laquelle le Ministère de Tlntérieureut
la malencontreuse idée de répartir cette précieuse collection entre les dix-huit
départements compris dans rancienne circonscription du Grand Prieuré d'Au-
vergne. Ce qui! en reste aux Archives du Rhône y est classé sous la déno-
mi nation de Fonds dé MalU*.
Ctsi dans ce Fonds que se trouve le Registre terrier de la Commanderie
de Chazelles sur Lyon *, petit volume en parchemin de 50S «™ de haut sur
20o™n» de large, comprenant 32 feuillets, écrits sur deux colonnes. Au dos
et en tète, une étiquette avec cette mention en écriture du x%ijf siècle : Cha-
^Uts^ no j, i2^\ au dessous, la cote nouvelle H 3316» Le terrier de Cha-
zelles a été dressé en 1 290 : c'est un des plus anciens documents en langue
vulgaire que possèdent les Archives du Rhône. A répo<îue où il fut établi,
rH<ipital avait des possessions dans trente-quatre paroisses; indépendamment
des redevances ou prestations en nature , il percevait 84 livres 2 deniers et
5 poiseSj réparties entre 395 tenures ou censives. En outre des redevances
1. L. Niepce, Li Grand Prieuré d'Auvergm^ f. 6.
2. La Commanderie de Chazelles sur Lyon (Loire) fut fondée, vers 1148,
par Guy II comte de Forez (La Mure, Hist. des ducs de Bourbon et des comtes
duForei, t.I^p. 157).
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIcfeRIEN 23
boclèreSrla Cotnmanderie levait sur ses tenanciers h taille personnelle; enfin
ïcs teourcs à quart, c'esi-à-dire moyennant l'abandonncment du ^uart de la
rkolte AU seigneur, étaient fréquentes.
Les censîves consistaient en terres, prils, bois, saulées, vercheyres ou
pacages, jardins (or^), courtils et vignes. Les ensemencements en froment
étaient rares : le seigle et l'avoine içyi'a) occupaieni la presque totalité des
surfaces emblavées,
(f» i)« Anno Domim MCC nonagesîmo fuit scriptum serviiium domus hos-
piftaiis de ChasaJez.
Et primo : In parrochia ât Chasaïei,
I. Estevena Neyrona ddt de servis alla maison de Chassai ez .xij. den.
Vian, et una galUna et ,]'. quart al de orgo p^- sa mayson et la vercheyri qui se
tint a sa mayson. Item tint .vij. meitûrûtyi' de t^rra a quart en la colongi,
juxta la terra Joanct Audevert dedoes parz,
3, Hugos Neyrons .iij. mcit^rj de segla et lo tera de ,j. gallina p^ sa
niayson et p<T la tirra qui s*y tynt. Item âiij. den, per lo pra qui se tint alla
l^rra davant ditî.
y. Joanyns Neyrons Jij. mcit<îrxde scgla et lo terz de J, autro meittr p^^
Il terra de Conba Esclaveui qui est juxta la tora Hugon Neyron. Item .iiij,
d. V. per los pras qui se tinont alla dîti terra.
4» Joanez Audeverz .vlij. d. vian. p^r una mayson et p«T .j. ort qui suMt
juxti la nuyson P. Escofer, Et tint una emina de tirra a quart juxta la terra
P, Vsoart.
5, J. Grangons .viij. d, \\ et dim/y galltVw e lo terz de .j. rasoti conblo de
cyva pfT sa ma)'Son et pfr son ort et ^tr très demenchies de ti'rra qui suwt alla
filerameyri qui forom rendues prr los pras que el aveit en Testanc.
d. Le dure Ysoarz .vj. d. e lo terz de una galh>«ï et dimey ras de cyva alla
gram mesura prr sa mayson et per son ort qui est juxta sa mayson. Item
J{. ras d*avena alla grant mesura p^r la v/rcheyri de la font al fauro qui est
juxta la t^rra Guillalmin Jaquei. Item ,j- r^ d*avena alla grant mesura p^r la
vircheyriquî est suspra grant, — (/<> /, i'o).Itcmprt-îa Virrcheyri de la Bapau-
déyrî hem pw-la fargi del poys jij\ d. Item p^r la mayson et p<T la v^r-
chcyrî qui fo Joanln de Tolmo .xij, d. et una gallm^ et ]. demenc d*avena
alla grant mesura. Item deit de mayens .ij. sols et .vij. d, pfr son pra del
vem[c])' et p*T lo pra clos qui est desus sa mayson et p^r la sagni,
7, Joaoca Arodons *ij. sols et .iiij. den. vîan. et ;ij. gall/>wj et quatro ras
d*tvenaalla grant mesura et .j. conblo d*avéna alla mesura de la segla p^r sa
mayson et per son ort et p<f .xij. méiiarays de t^rra qui sunt alla Chcsa»,
r. Œ mtyiara^ f*» 19 v©, et meytarah^ fo 24 v^.
1. La Chaize, Heu dit dans la paroisse de Chaz elles (Cassini, 87).
34 E. PHIUPON
juxia b terra alla Jacoarda et |vr una emina de t/rra qui est i Pera chalva,
juxta la Xern Joan Jauniar et per lo boc de k Lonnairy qui est juxta lo boc
alla IvernaJt, Item pfr lo boc que achatet de sj seror Gemencyn, la quînta
part de .ij. conblos d'avena alla mesura de la segla qui est en la Lonayry,
juxta lo boc Peron Blanc. Et deit .xvj. d, vian. de mayens per lo pra del
trcyvo de la Chcsa e per lo pra del Revochayli.
8. Joanez Boers de la Chesa ,vij. sob et *vj, d. vîan. et uiu galiswi et
Jj. ras de cyva alla mesura de Sant Galmer per sa tnayson et per son ort, et
per la v^rchcyri qui se tint alla mayson. Et deit .xviij. den. de mayens p^
son pra de la Gymon ' qui est juxu lo pra Joanin Arout, la Gymon entre-
mey. Item per M], peces de pra qui sunt en pra Sant Galmer, qui se tinont
al pra a la Jacoarda e al pra Joanet Jaumar. Et tint de t^ra a quan en pra
San Galmer ,x. mcnarays en dos lues. Item .vij. meitarays autres iqui meymo
entre los pras davant diz.
9. P» Asters jj, soLr vian. per sa mayson qui est dedcnz les portes. Item
p<*r la mayson alla palli .xviij, d, v. et una galliwj ; et p^ Fort et p<T la v^-
cheyri qui se tint alla mayson jj. ras d'avena alla grant mesura. Item per la
mayson qui fo Grifon .xviij, d. v. et una gallina et per Tort qui s'i tint.
Item per una quartala de t^rra qui est al perer P. Fauro .j. quartal d*avcna
alla mesura de Sant Galmer. Item per la v^rrcheyri del Faugatz ♦xviîj, d. v.
Et deit de mayens .iij. ob. per lo pra del Faugatz» Et Jj. sob per pra
Domengo qui est juxta lo pra Peronellan Priva. Item per lo pra de Gota-
riiayna .iiij. d. v. qui est juxta les twres del Hospital.
10. Grcgorios SOS (rare Jj. conblos d'avena alla mesura de la segla per una
demetichia de trrra qui est al pcrer P, Fauro. Item de mayens .îiij. d. vîan,
per îû pra de Gotamcyna qui est juxta la terra de TEspliîtal et justa los pras
del mont.
1 1. (/" 3 fo). Peros Tortorons , j. gallina et .j, quartal de segla ras et peylo
per sa mayson et per la vercheyri en que est sa maysons. Item per h vrr-
che>Ti qui fo Bernardin j, quartaJ de cyva alla mesura de Sant Galmer. Item
.j. meit^r conblo de cyva alla mesura de la segla per una demenchia de um
qui est ailes Cotes". Et deit .v. d, vian, de mayens per son pra de les Gotes
qui est juxia lo pra de Charentena K
12. Joanez Tortorons .ix. d. vîan. per sa mayson qui est dedenz los por-
tauz. Item .j. quartal de cyva alla grant mesura per la vrt-chevTi del treyvo
quant Lom vait a Sant Cafuria*. Et deit de mayens .iiij. d. et oboh vian.
per pra I>ocet qui est juxta lo pra alla Borgona.
1. Rtusseau qui se déverse dans ta Coise» afBuent de droite de la Loire;
Lagîmont lieu dit sur la paroisse de CbazeDcs (Cassini, 87), la Gimond(Eut
Major t68).
2. Trois-Gouttes, lieu -dit au sud de Cbazclles.
5. Charrantaine, annexe de Chazelles (Etat Major 168),
4. Saini-S>Tnphorien-sur-Coise, ch. I. c. arrond* de Lyon.
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÈRIEN 2$
13, Andreoux Bcrthalmeoux .v, d. vîân. et dimey gsXlina et ,j, conblode
cyn alla mesura de la segla et les très parz de autro conblo ^er sa mayson et
per la v^rcheyri qui s'i tint. Item dïmey ras d*avena alla mesura delà segla
ftr la Costa de la Vulpilicyri* Item deit de mayens ji. d» el o, v» p^ lo pra
de la Sagni qui est juxta lo pra Joan Berthalmeou. Item deit de taîli ,ij, sol.
et .tij. d. vian. Item dett per si rauîlier Chalandan .viij. d. vian, fer una peci
de tnra qui est eti la Salvageyri, juxta la terra B^nholomeou Grangon, Et tînt
Jj. 5tstarays de t^rra a quart p^r se et per si mullier en dos lues ; de que U
tina scstum juxta la diiî Xtnz assfrvisa et U autra scstara juxu la ti*rra Ber*
trant et Guilhdmo de Paparel.
14. Estevenenz del Mont ai. sob .v. et dimfy galli>w et .x. ras d*avena
âHa mesura de Sant Galmer pfr son curtil del mont et prr les p^rtenences.
Item ,j. conblo d*avena(/o 2 t*») alla mesura de la segla per una quartala de
trrra qoe ot del Raspauz, Item .viij. d. v. de mayens per los pras qui apifrti-
nont al dît curtil. Et tint de terra a quart en dos lues per lo curtil del mont,
en .j. lue una demenchia alla pereyri, item en autro lue una emina» en très
lues environ lo curtil. Item à%. sols et Jx. d. pfr lo curtil de Gotagon et per
les prrtenences et dimcy gallina et .j. demen de cyva. Et tint de t^rra a quart
per lo curtil de Gotagon una stsiara juxta Gotameyna et très demenchies sus
la mun de Gotagon.
ïS* (f* h ^)* Joanins Ysoan .vj. d, v. et una gall/fw p^ son curtil et per
sa partia de la mayson a la tyoula de Chasalez. Item Jj. sol. et .iij. d. pfr lo
tenetncnt qui fo als Trcns. Item de mayens jij. â. pet lo pra que ot del
Trens. Item deit jj. ras et dimey d'aven a alla grant mesura per les v^rchey-
res que ot del Trens ; e su»t en quatro lues. Item Jj. ras et dîm^ alla mesura
de Sant Galmer * per son ort qui est juxta sa mayson et la vcrcheyri qui est
juxta U sagni de p^r^ corba et per de pra qui se tint alla peci davant dili.
Item .]. quartal de segla per quatro peces de tfrra que ot de St. Chasalet :
una a la 4- àcl mont et en gota Chasalez les très. Item de mayens .ix. d.
per J, pra qui est alla -\- del mont que ot de Chasaleton et Jij, d, per lo
scgnaz et per de pra qui sont a Fera corba juxta la terra delà frari. Item .xîi.
d. pir son pra del v^mey e per lo pra de très sa mayson et per lo pra de
Botan. Item .viit. d. p^ lo pra de la broci que ot de St. de Bre}'si.
16. Joanz Pupers' .nx. et .viij. d. et una gallina et Jij. ras de cyva alla
grant mesura per sa tnayson et p^ son ort et per les v^rcheyres qui aperti-
non al curtil et per la v^rcheyri de la charcyri que ot de Chasaleton .j. quar-
tal de segla. Item j, meter de segla per la vfrcheyri que ot del Vauraz, vers
Tolmo de Mont Soron J, juxta la terra P. Vilan et Guillalmio Jaquet. Item
t. Samt-Galmier, ch. 1. c, Loire.
2. Je relève dans Cassint (87), paroisse de Chazelles, un lieu dit du nom
de Pupicr,
). Montsuron, lieu dit au S.*E. de Chazelles (Etat Major 167).
26 E. PHILIPON
de mayens .x\d« d. p^r los pras de Fera chai va et p<*r los pra de la sauzia de
laChesa. Et tint de t^rraa ^juart .v. scstariiyj juxta la terra ass^rvisa.
17. Jaqucz Vivians .iij. melles vian. et una gûlUna et ,j. ras d'avena alla
mesura de la segla et dimey prr sa mayson et ^' son ort et per sa vfrcheyri
dels Esbufaors. Item de mayens .v. d. per lo pra de la Gota et per son pra
dels Ebufaors, Item deit lo terz de ,], ras d'aven a alla grant mesura per son
boc dcis £sbufaors« Item âim^ meit^r de segla per una meitijrû de t/rra qui
est alla Gota. £t tint de xerta a quan una quartala a la Boari et una quartala
& Sant Somyn. — (fi 3^ t^). Itetn Jij. mtkarap de soz sa mayson. Item aij,
meîxarayj alla Chôma *.
18. (fi S, ï/o.) Hugo Boers ♦xxx* et ij. d. et una galltwï p^ sa maison et
per son ort et per la vercheyri qui s*ï tint e per lo pra qui est davant sa may-
son. Item ,ix« d« per la vrrcheyrî que ot del fauro juxta la vi de Mont
suroD. Item .vîi. d. et ♦]. ras de cyva alla grant mesura perli vmrheyri et per
lo pra que ot de Bernart RavaneL Item \\. ras de cyva alla grant mesura per
la vercheyri del roro juxta la vi de Sant Roman '. Et tint de terra a quartal
Vemey ,v» mcïtarays et en Fayvaler .xiii. meitaray^.
19. Joanz Boers .xiiii. sol. et Jiî. d, et jî. gaWities et ,v]\ conblos de cyva
alla mesura de la segla et .i. quartal et dim<y raeiter de froment et .j. quar-
tal et dimey meit«^ de segla et una quarta et dimey de vîn p^r sa mayson et
ptr son ort e per la vercheyri qui s*i tint et per la vfj cheyri de Roset et una
meitara de t^rra qui est ailes Targes et per lo pra de la Gymon qui est juxta
la l^ra Joati Chalvcî et per lo pra de les characon et p^ lo chanbon qui s'i
tint et per la costade les characon. Item Jiii, sol, et dim^y gallimi et ,iii. mei-
ter s de cyva alla mesura de la segla conblos per lo curtîl que ot de St. Aster
et per Tort et per la verrcheyri que ot de St. Aster qui est ailes Targes et p^r
de pra et de t^rra qui est en la riveri de Coysi. Item de mayens très melles
per lo pra de la Salvageyri et jj. d. per pra motos et per autro pra qui est en
pra motos Ji. d. et o. Et tint de terra a quart una emina en la Salvageyri et
el Tauli2 una scstara et .iii. quartalays en les Targes» et en Coisy una sesi^ira
juxta la terra al ces, et au. meitiiray^ ailes places, juxta la t^rra St. Boer*
20. (fi 9, ro.) Bernarz et Pcjtù sos Irare .ix. d. et una galUW per lor
m[a]ison et per lor ort. Item .iiij. d. et 0. p^r b pra qui se tint à la mayson.
Item per la t^ra de la Galiandeyri àij. sols et .j» demenc de cyva alla mes-
sura de Sant Galmer et .j. demenc de segla, Item .iij. meiters de segla p<?r
la trrra de la Chavannari. Item .vj, d. p^r la pecî del crueys de pera corba et
per ,]. coyn de t^rra q^ii est alb -f- del mont. Item p<fr la terra de gota Gray-
seou » qui est juxta Tolmo de Montsuron dimeî ras de cyva alla grant mesura
et dimei ras alla mesura de la segla. Item .j. d. et dimey poyesa e la mcytîa
1 . Les Chaumes, lieu dit à TE. de Chazelles (Etat Major 167).
2. Saint' Romain en Jarest (Cassini 87).
5. Grézîeu-le-Marché» c^o de St-Symphorien*sur-Coise (Rhône).
LES PARLEES DU FOREZ CIS^LIGÉRIEN 27
de la quarta part de una gallina per la maison de la tyoula qui est juxta lo
porul. Item p^ lo segnaz qui est en lor quartey de gou Chasalez .iij, meUcs,
21- (/^ i/, ï^). Lorent Tyvenr *j. demenc de orgo per una peci déterra
qui est el teraor de la Tyvelleyri » juxta la t^rra de Sant Miart ' et la tfrra de
Jorceou '.
2a. (/» iSt t^)* Mathia Chalmeysa ,j, ras de cyva alla mesura de Sam
Galiner per âîf , mcharays de terra qui sunt al Tolmo de Cuseou * juxta la vi
qui vait de Chasalej! alla Tyvelîeyri.
2}. Guillalmos Grangons ,xij. d, et una galhna ptr sa mayson en que el
isteet per son ort et per una dcmcnchîa de vr/cheyri qui s*i tint. Item »xx,
et Jj\ d. pCT- lo pra qui est juxta la vi per que hom vait vers Grayseou. Item
41 j. sol, et jîij, d. p^ la v^icheyri en que ère ti maladeyri et per de pra qui
s'i tint, hem per sa vercheyri de Bot an .j. d. Item ,xvi. d, per son boc del
Bocha2 et p<r .j. pra qui s'i tint et p^ ires mcitûrov; de terra qui s'i tinont*
Item .V. d, per unameîtara de Uni qui est en Borbona* Item ,iiij. d. et ïes
dues par^ de la tercy part de una galliViâ per la mayson allz tyoub de Cha-
&lez. Item .vi. d. et o. de mayens per la t^rra que ot de Peron del Poys et
pir .j. âacliai qui est en la FulH.
24. (fi ij, vo.) Li hers St Pdet .xviij. d, et una gslUna per sa mayson et
|«r son ort. Li mayson de )a frari de Cbasalez .x\'iij, d.
35. (^ /^i ro,). 1h pArrochia de FitkfUa^, — St. Faure ,vj. soLr vîan^
per lo boc de ïes bides qui fo GuilWwin del Prael. Item .iiij. d. de mayens
per dos pras de que Tims est al pont d'Anxiou^ et l'autre josta la byci, Et
tittt de terra quarteyna en boc Feschaleys una emîna et al pont d'Anziou desus
una quartala.
26, (f> ao, r^.y Le chapellans de Viricella o, per ,j. pra qui est en Botan
et très mclles et dimry rason de cyva et la meytia del terz de .j. rason per pra
raont.
27. (fi 2Jt ro,). In parrocbia de Ojaucansf. J, Palynnans .iiij, soU per la
vercheyri del noyier vermeyl josta la trtrra alla Brunîquarda et per lo pra de
U rivcyri de Glas * et per autro pra qui est iqui meymo , josta lo pra Per-
rin d'ArfoUi » et p<fr lo champ de les sagnes et p<*r autro champ qui est josta
la mayson P, Pupon alla Daragoneyri et per una peci qui est al forn Fara-
1. Tîvillière. hameau au S.-O. de Chazelles (Etat Major 167),
3. Saint-Miart» auj. Saint-Médard, c«^n de Saint-Galmier.
f . Jourd, hameau de Saint-Gai mie r, auj. Jourzey,
4. Curieu, c*"» de Saint-Galmier.
5. Viricdles, con de Saint-Gai mîer.
6. Anxieux, c»* de Chazelles-sur-Lyon.
7. Chausson, cp^ de Mornant, Rhône.
8. le Glas, hameau de Chausson.
9. Atfeuille, tort de Chausson,
28 E. PHILIPOH
baiït. Et tînt a quart, el et sos frare .v. métarays alla mayson Farabaat et uni
quartala ad les Varenes et îqui meymo ailes grosses roches uiw quartala,
ailes sagnes una demenchia et alla Girarde^TÎ, eo très lues.
28. St* Bruniquarda Jj. d. ptr de terra qui est josu la chanal.
29. Jl Aïbtsfnn \ -^ Guïlhlmos CharboiU *vj. d. p^ una peci de t^nra qui
est al riou Jafer a bona font,
30. C/o 22, fo.) Casidîud*. — J, de la Revoyri et Guilk?wios fraro .xiîij»
sol. p^ lo tellement de Montmeyti î continent entre bos et ti?rra, pras, pas-
turauz et broces ,vj. sestflra^f déterra. Item X\\, sol, p^- lo pra que oront de
Johan Ganaor qui est en pra Clunbon*» josta lo pra P, Helysent e lo lor
que il titiont a feou de rEsphitaL Item Jij. mtiXûrays de cjrva alla mesura de
Sant Cafurin et una gallïwa prr b f>ed de Grayseou quî ère Pf^rin Revol et a
sos ncvos. îteni .iij. d. p^ los pasturauz de Garenboc rowtinenz una demen-
chia de um en que il aviant .v. d. de cesa davaiu que il o achaiesant de
Perrin RevoL Et tinont de trrra a quart très crainays de que est li meitia lor
et li autra de FEsphital,
\i. Moreuz del Cluscls .lij.d. per ,j* ort qui est josta lo teraylz de Chas-
tellud. Et tint en Truchct una peci de terra en que TEspitauz a b meytia del
quart et el rautra, josta la terra J. Vial de Frayney* et dure près del roro,
32. Lorenci Morella *iiij. d. pfr una peci de t«Ta qui est en l'ayvelli de
soz Tegleysi.
33. Gorgorios Paria et J. sos frare âij, d. p^r una demenchia de terra qui
est a Vila Deou, josta lopra Thomas Revol ; e tint una sestara de tfrra iqui
meymo a quart,
34. (/<» 2j, ro.) în parrocMa de Maringu'i. — Thomas de la Rochi .j, d*
p€r .j. pra qui est assis a la font de la rochi ^, justa lo pra Lorent Tyseor.
3 S* (/* 2^. i«.) Ageta Salvagi tint .iij. mtixare^s de tfrra a quart josta lo
pra de la caboma.
36. (/> aé, ro,) In parrochia de Eellagarda'f. — Poncez del Prael S\, soli
p<r la chaci dels cunyouz et de les lecmres del bos et de les terres del fayi qui
se tint alla t^ra desus Tison et alla tirra del piney ".
î. L* Aube pin, ce Larajasse, EhÔne.
2, Chatelltis» cp^ Saint-Galmier, Loire.
3, Montmain, lieu dit au S.-E. de Chateilus, fait aujourd'hui partie de
Larajasse.
4. Le Chambon, au sud de Chateilus (Etat Major).
5. Clusel, lieu dit au S. -O, de Chateilus,
6, Freyney, lieu dit au S.-O. de ChateDus*
7. Maringes, c®» de Saitit-Galmier, Loire,
8, A la Roche, c»* de Maringes ♦
9. BcUegarde, co^ Saint-Galmicr.
10. Pioay et au Pitiay, lieux dits au N.-E. de Bellegarde.
LES PARLERS DU FOREZ aS-LIGÉRlEN 29
17, (fi 26, v^.^ lu parrochia Sancti Andrée ïo Poys ', — Peros A mois deit
.xi)* d* et .j. quaruî de froment et ana gallina fer sa raayson et p<T son on
et prr una dtnienchia de t^ra qui se tint alla mayson et per una demenchia
qui est alla vî chasteîlana, entre les does vies*
î8. (/« 27, r>.)Mathcoux Boncrs .vjj, d. jvr una quartyrona de t^rra qui
est al forn vei!, josta la terra Hysabel et la vi de! colon ber, et prr la riveiriqMi
est encontra, la vi entremeî, tant que a Leyri.
59. (/o ^7, to,) In parrochia sancti Baîdomeri. — Peros Marchanz jij. sol*
p<y son pra d*Aneyrcs qui se tint ai chamin pff que hom vait de Sant Cal-
mer* a Montbruson et josta lo pra jaquarian Faceion*
40* Li h ers Pcron Jaumar does anays de vin ^er la vigni Espîiale>Ti qui
est vers la broci qui fo Joceram de Sant Rambert et Esteven Costa nt*
41. Jaquet^ le coudurers débet *iij* anays de vin ^r una peci de i^^rra qui
est al trcyvo d*Aneyres, quant hom vait de Sant Calmer a Jorceou, josta les
peccs Charpin» et p^ una lista de t^rra qui est sus les vignes d'Aneyres, josta
U peci Johan Cosaor et mon sen Robert de Sartines.
42, (/» a5, v^,) Peros Helissens ,vîi. sols et .vi. àentrs per ta peci del
poys de Coson qui est josta lo chamin de Sant Cafurin a Raveyres* Item
,viii, àtmrs per son pra de Coson qui est josta IVyga et entre sos pras. Et
tînt de terra a quart el Tioley, de que est îi meytia del quart sia et U autra
de TEsphital. Peros de Losengeou et Johanz sos frare .v. sol. p^ lor mayson
et per la vircheyri qui se tint alla mayson et per una seytina de pra qui est en
Coson, josta lo pra Johan Ogier. Et ùnont de terra a quart al Tyouley, de
que est U meytia del quart lor et lî autra de TEsphital.
45. /« parrochia Sancti SymphorianiK — Johanz de les Cotes ,xviîi. d. et
una gallma et .iiij. ras de cyva alla mesura de Sant Cafurin p^ sa t<frra qui
est josta re)*ga du rongo et per lo pra qui est iquî meymo» josta la t^rra
Zaquarian Poncet et Testra laoneysa. Item .vi. d. pcr lo pra que ot de la
Mathcua.
44. {fi Ji, fo.) In parrochia de Sanl Martin -^rtoai/^+.^Estevenctz Mallarz
*9* sol. et .vj. d. que donet Peros Arouz allespiial sus lo curtil de la Mallar-
dcj'H et sus los tencmenz que el i ave il et si isi ère que le curtils se vendest,
U opayariant toz jorz. Item .iij. d. per lo pra et p^ lo v^rney de les conbes
qui est josta la trrra a ceouz de Moncel $.
4^. Johanîns Christins .iij. soL et .vj. d. et dimei gûUna p«r la mayson qui
sont cstre al grangicr et p^ la verclieyri qui s*i tint en très parties et per una
Stytaa. de pra qui se tint alla diti tirra.
I, Saint- André-le-Puy, o>n de Saint- Galmier, sur la grande route de
Montbrison.
2* Saim-Galmicr, c^o de Montbrison, renommé pour ses eaux minérales.
j, Saint-S)Tïiphorien-sur-Coise, ch. 1. c. dépan. du Rhône.
4, Saint'iMarîin-en-Haut, c»*» de Saint^Syraphorien-sur-Coise.
5, Le Moasel, au sud de Saint-Martin,
30 E, PHILIPPÔN
46. înparrochia Sancti Dionhii\ BarthoiomeotiK deBalleou Si], sol. et Jj,
ras de cj^va alla mesura de Sani Cafurin ^r una quartala de tirra a cclla
racyma mesura q/â est en les Chavannaries al les maisons de les prays
et fer .j. pra qui est de soz les maysons josta Tort et p<r j, boc qui est en
clo Vacins, josta la terra dcl dusel,
47. In parrochia (k Duerna K — Johaiiz Ponconeuz deMontromaa .Jtij. d.
iper una quartala de terra qui al Esphital de la conchi, josta Testra per ont
hora vait de Duerna a Yseron K
48. In parrochia dt Saynti Fei*. — Li Graner ,xviij\ d. per una ^td de
terra que tint de Chasalez
49. Perronez de ks Clavanyes tint de urri a quart alla mura d*Almays Jij,
raeit^ra^j soz lo fo d'Ardayson et una demenchia soz la \n d'Ardavson et
una quartala al Balay, alla peci de la -{- et una mtitara sur Ja praal et una
quartala josta la v^rcheyri del suel de la broci.
50. A RiviriaK — Johanz Manvglcrs .xxx. et .ij. d. p^ la meytia de
una vercheyri qui est de soz la vi de Chastel veyl *, josta la mayson J. son cusin.
Johanz Maniglers dïlz Vaneouz .xxx, et .ii. d» p^- sa mayson cl per hi
meytia de una vercheyri qui est de soz la vî de Castel Vcyl, josia la ver^
cheyri son cusin.
m» UVRE DE RAISON DES SEIGNEURS DE FOREZ
Les Archives de la Loire possèdent des fragments d'un livre de raison
rédigé en dialecte forézien et contenant le relevé des dépenses faîtes par les
fils puînés de Jean I^^, comte de Forez, pendant l'un des voyages qu'ils firent
à Paris', Ce sont deux cahiers en papier de 29s »"* de haut sur 220 de
large : le premier relate les sommes payées du 23 octobre au 25 décembre
1322^ le second va du 24 janvier au 12 mars de Tannée suivante. Si Ton rap-
proche ces fragments de comptabilité de ceux qui ont été publics par M. de
Chancelauze, â la suite de son édition de La Mure ", on D*a pas de peine à
j . Saint-Denis-sur-Coisc, c«»« de Saînt-Galmier» Loire.
2. Duemc, c»" Saint-Symphorien-sur-Coise, Rhône.
3. Yzcron, c*"* Vaugneray, Rhône.
4. Sainte-Foy-l'Argentière, c<*t> Saint-Laurcnt-de-Chamousset, Rhône.
5. Riverie, coo de Momant, Rhône.
6. Annexe d'Yzeron.
7. Ces fragments se trouvaient, il y a une dizaine d'années, aux Archives
du Rhône» où jVn ai pris copie : ib ont été depuis lors transmis aux Archives
de la Loire, où ils n'étaient pas encore inventoriés en 1885,
8. La Mure, Histoire des ducs de Bourbon et des comtes de Fore^, éditée par
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIcèRIEN 3I
se convaincre que les uns et les autres ont appartenu au même registre. Le
premier des extniits donnés par M. de Chanteïauze est un état de recettes qui
commence au 18 oaobrc 1322 et se termine par cette mention non datée»
mais qui fait suite à un article portant Ii date du 6 mai 1324 : a îtem eodem
anno XXIIII» recepi pcr manum dlcti Petit Pas, pro expensis doniinorum
meomm fadendis in îtinere quum recesserunt de Parîsius pro eundo in Fori-
sio XXXUlib. par. 9
Le second extrait est rédigé en forézten : il contient ï*état des dépenses
fiiîtes i Paris du Vendredi Saint de Tonnée 1325 N.-S, (2 s mars) au jeudi
suivant « la dimîeni (lisez : dumeni) qui fut davant la Saint Arobroysi «, (7 avril
1320 •*
Eniîn, par un heureux hasard, l'éditeur de La Mure a retrouvé, aux
Archives du Rhùne, la première feuîUe du journal sur bquclle Paches de la
Varenne, maître d'hôtel des seigneurs de Forez, notait au fur et â mesure
les sommes dépensées, pour les reporter ensuite sur le livre de compte. Ce
journal était tenu sur de petits feuillets de papier très épais, rappelant par
leur dimension les feuilles d'un noU-book,
La langue du Livre de raison appartient incontestablement au Forez cis-
ligérien» le passage de <} àf, après une palatale» suffirait seul à rétablir. D^autre
part, on sait que Feurs futlt capiule du Fore^ jusqu'en 1441, époque i laquelle
Charles de Bourbon transféra ù Montbrison le siège de son gouvernement ; il
est donc naturel de penser que Tancicn Forum Segusiavorum loumissait au
comte Jean la plupart des officiers de sa maison, et de fait^ le nom du maître
d*hôtel des jeunes seigneurs de Fore^: rappelle celui d'un lieu dit situé tout
près de Peurs, sur le territoire de la commune de Salt-en-Donzy.
Je roc bornerai à publier ici la partie du livre de compte qui contient les
dépenses de route et celles de la première semaine passée à Paris. J'imprime
en italique le fragment initial retrouvé par M. de Chanteïauze'.
I. Van de notre senyor Mil d ccc
fi XXI f, h mercres après la Tossayns^
jo Boches di la Varena comensey a faire
lo dépens de tnes stnyors Hayftau &
Joban de Foreys qui demoriant a
Pzxis; liguai sunt kriten i cet papier.
Et premieraïunt h dépens qu^iljeyront
al chimitt al venir de Forcis a Paris et
M. de Chantelauic, i. lil, Pikes suppléntentaires^ p, 46, Des fautes de lecture
«sscs nombreuses enlèvent à cette édition toute valeur linguistique.
I . L'éditeur, qui a fait précéder ce fragment de la mention » manque le
commencement », nous dit, en note, quUl Ta extrait d'un manuscrit du
Xt%* siècle, ï lui donné par M. de la Tour- Varan, ancien bibliothécaire de
Sjdnî'Eûcnne.
1, La Muie^ Histoire des dua de Bourhon, etc, II, 180.
^^^^^^H ^^1
^^^^^^^^^P deniorant à Pitis tant qu*aî mercrt
Item en fargi .xx, d, t, ^^^|
^^^^^^^^^^1 dessus dit ; ïo qtmU dépens daî chamin
Item en bêla chiera ,xmf. d, t, ^^^H
^^^^^^^^^^1 et de Paris tant qu'aï niercre demsàit
5. de la marecïmuci *xv, 1. v. d, t, ^^^H
^^^^^^^^^^B fufont fays p^ la man a Mouuu
S, de tôt ïo jor Jj. Tivres .xHij, 1. .xi. ^M
^^^^^^^^^M 2. Sosunt U dépens daî cbimtn
^^^^^^^^^^H Prumairement la dumene davant \ la
■
4, Item en peyson .xij. d. t. ^M
^^^^^^^^^^H SûitJt Luc evangéita i partiront
Item en fromage .xij. d* t. ^H
^^^^^^^^^M dit mittsenyor R. J, tk MonbrisoH^
Item en ucs *vj. d. t, ^M
^^^^^^^^^M e furont a Ckpett m^y tm
Item en vin cgre et ver ^M
^^^^^^^^^^1 de
jut. .iiij* d. L ^M
^^^^^^^^^^1 E prtimewetttent a un garson quaUt
Item a la sîrvcnta .îj. d. t. ^M
^^^^^^^^^H dt Mmbrison a Cyir(i4per aportar
Item en ufl^e rendes .îi). d. t. ^M
^^^^^^^^^M ceîa V /orneys.
Somtm de la qusina. îîj. s. Jîj. d. U ^M
^^^^^^^^^^B 3 . hem h seir furont mi smyor chîes
^^^^^^^^^^H Pnitnerrement en payn .(Vi)'* s, ,vf.
Item en ravcnna. xj. chavaus ^M
«V. s. .V. d. t. ^M
Item en bêla chiera .xv. d. t. H
Somtna *vj* s. .îx. d. e. H
^^^^^^^^^^m Sommsi de la patietari .jv, ,x, d. t.
5, Item h serr furont a Neveruge «. ^M
^^^^^^^^^^m Item vin noveî a'//, x* ,ij* d. t.
Item en payn .iv* s. .viij. d, t. ^Ê
^^^^^^^^H de h htteUcri
Item enirut A\* d, t. ^M
^^^^^^^^^^H Utm enpeyson
Sof^ffy^dclapanetari Jiîj.s. .x.d« t. ^B
^^^^^^^^^M Item en tus ,xj.
^H
^^^^^^^^^^H ïtem en uîio^^ vin egre^ moterïa ,xij.
Item en vin Jiij. s. .x. d. t. ^B
^^^^^^H
Sommadelabotell^/.iiij.s, .x.d, t, ^U
^^^^^^^^^^M Item aï valet de la qusina Jj, d, t.
^M
^^^^^^^^^^B S, de la qusina ,ix.
hem en peyson . vi). 5« Jj. d. t. ^M
^^^^^^^^^^M Item en ,xf, çhavaus ,xj.
Item en ues .xij. d. t, ^M
^^^^^^^^^M Itetn m una livra et dimey de clian-
Item en unyons» vin egre» moterbi ^M
^^^^^^^^^^H
peîrecel .xv. d, l. ^M
^^^^^^^^^^1 I. Éd. Chantdatize
^H
^^^^^^^^^^1 2« Ëd. ChanteUuic : dimene.
^^H
^^^^^^^^^M 3* Éd. Chantelauze : evangelica.
^^H
^^^^^^^^^^H 4. Ëd. Chantelauze : aporter^
^^^1
^^^^^^^^^M $, Éd. Chintdauze ifcut.
^^^M
^^^^^^^^H 5. Éd. Chantelauze
^^^M
^^^^^^^^^^H 6, Éd, Chantcbuze : Cïio.
^^^M
^^^^^^^^^^H 7* Éd. Chantelauze : clniftdelas de syn, ^^^H
^^^^^^^^^^H S» On pourrait lire, Â la rigueur, iuvernge^ qui ne serait guère plussatis- ^f
^^^^^^^^^1 iaisant, Ce qu'il y a de certain, c*est
qu*i] ne peut s*agir ici que de Nevers,^^^H
^^^^^^^^^1 Cf. Ë. Dcsjardtmt ht Géograpïne de ïa Gaule d^aprh la tabk de PeutitigerJ^^^^
^^^^^^^^m pp. 220 et 211» et Valois» Not. Galï,^
P' i^h ^^M
LES PARLERS DU FOREZ QS-LIGÈRIEN 55
Item en chandeles de syu Item en ver j ut et unyons et moterla
.xiij. d. t • et aus .viij. d. t.
Item en lumeri per chavaus Item en sal .vj. d. t.
.ij . d . t . Item a la chambariera (sic) . iiij . d . t.
S* delà qusina .x. s. .vij. d. t. S* de la qusina .xiv. s. .viij. d. t.
Item per 1 1 chavaus .xiij. s. .ix. d. t. Item p^ Tavenna .xj. chavaus
Item en mdurament .v. s. .x. d. t.
.iij. s. .viij. d. t. Item en fargi .xvj. d. t.
Item en bêla chiera .ij. s. .viij. d. t. Item en aborrelari .xij. d. t.
Item en Êu-gi .vij. s. .iiij. d. t. item en bêla chiera .ii. s. .vj. d. t.
Item en aborrelari .ij. s. .ix. d. t. S<^delamareschauci .x. s. .viij.d. t.
Item en una sengla .xij. d. t. —
Item p^ passar Leyre al port de y. Jtem lo seir furont mi senyar a
Ceyn» .ij. s. .vj. d. t. PoîeuK
Item en dos parels de solars pcr Pnmeriment en payn .vj. s. t.
valets .vj. s. t. 5» de la panetari .vj. s. t.
S* de la qusina .xxxix. s. .iij. d. t. —
^ , , . ; . ... Item en vin .iij. s. .vj. d. ob. t.
S-detotlojomJxxix. s. .vij.d.t. g-delaboteUeri .iij. s. .vj.d.ob. t.
S«detotalasemma3ma.xî. lib. .xxiij.d.
Item en char grossa .xix. d. t.
6. lUm h dûment] msegneni, qui fut Item en v polyes .ij. s. .vj. d. t.
iavant la fêta Saynt Symeon et Juda % Item en unyons et en sal .xvj. d. t.
furont m senyor a dinar a la Charité J Item en ues .v. d. t.
Pnimeriment en payn .v. s. .ij. d. t. Item a la chambareri(itt:) .iij. d. t.
Item en firut .iij. d. t. S* p^r la qusina .vj. s. .i. d. t.
Item en offerendes .iij. d. t.
S» de panetari .v. s. .ix. d. t. Item p»* .xj. chavaus .xij. s. .x. d. t.
— Item en melurament .iiij. s. .vij. d.t.
Item en vin .viij. s. .viij. d. t. Item en chandeles de syu .xviij. d.t.
S* de la botelleri .viij. s. .viij. d.t. Item en bêla chiera. iij. s. .ij.d.ob.t.
— S* p«' la mareschauci
Item en raves .iij. d. t. .xxij. s. .j. d. ob. t.
Item en char grossa et ^ portajo —
.xj. s. .j. d. t. S* de tôt lo jom .Ixxvij. s. .vj. d. t.
Item en très galines .xxij. d. t. —
I. Dedze, arr. de Nevers(?).
a. La fête de S. Simon et S. Jude tombant un jeudi en 1322, le dimanche
piéoédcm était le 24 octobre.
|. La Charité, arr. Cosne, Nièvre.
4. PoniliT-siiiwLoixe ou le Riche, ch. 1. c. de l'arr. de Cosne (Nièvre).
34
8. lUm h lus ensegueni^
senyor a dinar a Bonay *.
Prumeriment en payn
Item en offerendes
S» de la panetari .iiij.
Item en vin .v. s.
Somma de boieUeri .v. s.
E. PHIUPON
furotU mi Item per lo melurament
.iij. s. .viij. d. p.
.iiij. s. t. Item en fargi .xij.d. p.
.V. d. t. Item per lo tacons d*un garson
s. .V. d. t. .X. d. p.
Item en bêla chiera .v. s. p.
d. t. Sa de la mareschaud .xxj. s. vj d. p.
d t. S« de tôt lo jor .Ixxvi. s. .iiij. d. p.
.vij
vij.
Item en char grossa, en portajo
.iiij. s. .V. d. t.
Item en does galine .xvj. d. t.
Item a la chambariera .iij. d. t.
S* de la qusina .vj. s.
Item p^rl'avenna .xj. chavaus
.V. s. .vj. d. t.
Item en fargi .xvj. d.
Item en bêla chiera .ij. s. .viij. d.
S« de la mareschauci .ix. s. .vj. d.
D'isi en avant sunt parezis.
9. Item h seir ens^uent furmi Oraor »
Prumeriment en payn .iiij. s. .x. d. p.
S* de la panetan .iiij. s. .x. d. p.
Item en vin .viij. s. .iij. d. p.
Item en .ij. livres de chandeles de
siri ,vj. s. .viij. d. p.
S* de la botellm .xiiij. s .xj. d. p.
Item en char grossa .xj.s. .viij.d. p.
Item .ij. perdris .xvj. d. p.
Item en salsa et unyons .x. d. p.
Item en chandeles de syu . x vii j . d . p .
Item a la chambariera .iiij. d. p.
S* de la qusina .xv. s. .viij. d. p.
10. Item h tnars enseguent^ furont mi
senyor tôt lo jor a Montargis, quar li
gens al compte de Bolain et de Vévéque
de Jornay aviunt tôt retenu ad ordines,
si qu'il no poiunt pas ahergier.
Et prumeriment en payn
.viij. s. .iiij. d. p.
Item en frut .iij. d.
S* de panetflrt .viij . s. .vij. d. p.
Item en vin
S« de la botell^n
.XVJ. s. p.
.xvj. s. p.
Item per .xj. chavaus
.XJ. s.
Item en raves .iiij. d. p.
Item en char grossa .vj. s. .x. d. p.
Item en .viij. perdris .iij. s. .x.d. ob.
Item en moterla .vj. d.
Item en unios .iiij. d.
Item en charbon .iiij. d. p.
Item a lachambareri (sic) .vj. d. p.
S'^ de la qusina .xij. s. .viij. d. ob. p.
Item per .xj. chavaus .xij. s. .x. d.
Item per l'avenna dal chavaus
.vj- s. .V. d.
Item en fargi .xij. d.
Item en chandelles de syu .xij. d.
Item en .ij. parels de solars per
garsons .v. s.
1. 25 octobre 1322.
2. Bonny, Loiret, arr. Gien, c. Briare.
3. Ouzouër-sur-Trézée, Loiret, arr. Gien, c. Briare.
4. 26 octobre 1322.
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÉRIEN 35
Item per aparelier los solars d'un 12. Item h seir furont a Pertes en
garson .xiii). d Pareils*,
Item en aborrelari .xx. d. Prumeriment enpayn .iiij. s. .ij. d.p.
Item a un valet qui guiet dever Item en frut .ij. d. p.
matin los avansaors et los somiers S* de la panetarf .iv. s. .iiij. d. p.
pw champ purri .v. d. —
Item a Gratacul qui fu tramis a Item en vin .iiij. s. .vj. d. p.
Paris ptr saveir unt mi senyor S* delà botelkn .iiij. s. .vj. d. p.
descendriant .ij. s. —
Item en bêla chiera .iiij. s. .ix. d. ^^^^ ^^ "^^ .iiij. d. p.
S- de la mareschaud ^^^^ «° ^^^^^ -^^j- ^- P-
.xxxvi. s. .iii. d. ^^^°^ ^ ^^ chambareri .iij. d. p.
S-detotlojor S* de la qusina .ij. s. .iiij. d. p.
.Lxxiij. s. .vj. d. p. ob. , . '
_ ' ^ Item p»* .xj. chavaus
II. Item h mercres enseguent furont mi •*")• ^* •*^* "• P*
senyor a dinar a Nyntors ^ ^^^"^ P^ ^^ melurament
Prumeriment en payn .vj. s. .iiij. d. '^' ^' -^J* ^- P-
S* de la panctûri .vj. s. .îv. d. ^^«"^ «" chandeles de syu .x. d. p.
Item en bêla chiera .ij. s. p.
Item en vin .vij. s. .xj. d. S* de la mareschaud .xxij.s. .j.d.p.
S* de la botellm .vij. s. .xj. d. —
S* de tôt lo jom .Ixx. s. .v. d. p.
Item en peys .xij. d. p. —
Item en peyson .x. s. .vj. d. p. 13» ^^^^ ^0 jos après » furont mi senyor
Item en arènes .ii. s. « /«'«« ♦ « dinar.
Item en salsa . vij. d. p. Prumeriment enpayn .iiij. s. .x.d. p.
Item en perecel, oli, unyus Item en frut .vj. d. p.
.viij. d. p. S* de la panetari .v. s. .iiij. d.p.
Item en verjut, vin egre .vj. d. p. —
Item a la chambareri .iiij. d. p. Item en vin .vj. s. .viij. d. p.
S* de la qusina .xv. s. .vij. d. p. S» de la botel&n .vj. s. .viij. d. p.
Item en Tavenna .xj. chavaus Item en char grossa .iij. s. .vj. d. p.
.V. s. p. Item en .iii. galines
Item en fargi .vij. d. p. Item en arènes
Item en bêla chiera .xxj. d. p. Item en unyons
S* de la mareschaud .vij .s. .iiij. d. p. S« de la qusina .v. s. .x. d. p.
1. Nemours, Seine-et-Marne, arr. Fontainebleau, ch. 1. c.
2. Perthes, Sdne-et-Marne, arr. et c. Melun.
3. 28oct. 1322.
4. Juvisy-sur-Orge, Seine-et-Oise, arr. Corbeil, c. Longjumeau.
36 E. PHILÏPON
Iccm en Tavenna del chavaus
.viij. s. p.
Item en fen .ij. s. p.
Itemcnfargî âj. s. .xj. d, p.
Item en bêla chiera .ij. s. p.
S* de la mareschaud
.xîiij, s. ,xj. d, p.
14, lUm h mr furonl mi senyor a
Paris al âepms de mon smyor de
Fards,
Item per les beurcs de nôtres valets
qui erunt .jx, per .jx, jors que
nos itemos sus chîiiiin ,xj. s, p*
Item per les heures de très soma-
lïers dal dit temps .vij. s. .x, d. p.
Item per âiij. flesseys achatais pcr
.ïiîj. chavaus qui non aviant
poyni de ccles a retornar en
Foreis .vj. s. .x. d, p.
Item per ,iij. parels de chauses per
M], valets .v, s. p.
Item per A], pards de sollars
.iiij, s» .X. d. p.
Item per taconar los solars de ,j*
garson .jx. d, p.
Item a .j, garson que avet perdu
son chapiron .xij. d, p.
Item en aborreUr .xviij, d. p.
Item dépendit li chaire ta et maytre
Huguos que la conduset, et
me niant .îiij. chavaus, per .xj,
jors que il mittîront tant qu'a
Paris ,vij. libr. ,v. s. .jx. d. p.
Item per ,jx. valets et .jx, chavaus
tornar en Foreys
,v\^ lïbr. .viij. s, p,
S* de tôt lo jor .xvij. lib, .v. s, jîj d.
S* de la scmana tant qu*al jor dal
dit Jos .xxxj. iîb. ,jx, s. p.
S* de tos los dépens faitz de Foreis
a Paris unt per mos senyors e lor
Company quant per h charreta et
per retornar los cliavaus en
Foreis .xl. lib. »vj, s. p. .j^^, d.ob*
15. 5o suftt li dépens fayt a Paris ordi*
nuero; et lo vetuiros dùvant la
Tosaytis * furont mi senyor a Paris,
J, Demana paya .xix. s. p,
Tassetta frut Jij, d. p,
S» de la panetdW .xix, s. Jîij. d, p.
Item en vin de Porvensi Néant.
Jaquct olîer per peys .xiiij. d. p.
Piero de Cripenges per peison
^xv]. s» .vj. d. p.
Tasscta pr arènes .ij, s. p.
A ley per Jij. quartarons d'ues
.tj,s.p.
A ïcy .îj. fromages ,xvj. d, p.
A ley per peîreccl ,îj. d, p.
Jaquet olicr por ule .xij. d. p.
A luy pw- unyons, per aus, moterla,
vin egre, verjut, salsa .xxij, d, ob.
Johana chandelîeri per una livra de
chande!es de syu .x. d. p.
S* de Li qusina .xxvj. s. ,x. d. ob.
S* de tôt lo jor .kIvj. s» .ij. d. ob.
16- Item lo Sando[s] ensegucnt furent
mi senyor a Paris.
Joyan Demana payn .jx. s. p.
Tassetafrut .v, d. p.
S* de la panetari ,jx, s .v, d. p.
Vin de Porvensi Néant,
P, de Cripenges» peisson
.XV. s. .vj. d. p.
Tasseta, ucs ,viij, d. p.
A ley fromages .xvïîj. d. p.
A ley per sal grossa .xiiij. d, p.
i« 29 octobre 1322.
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÉRIEN
A ley vin egre .ij. d. p.
Jaquet olier, p^ oli .xij. d. p.
A luy unyons, aus .iiij. d. p.
Aluy araandres^ epieces .xviij. d. p.
Johanna chandeliera per .]. livra et
dimei de chandW^ de syu
.XV. d. p.
S* de la qusina .xviij s. .j. d. p.
S* de tôt la jor .xxxij. s. vj. d. p.
S« de ses dos deriers jors
•Ixxviij. s. .viij. d. ob.
17. Item la dumene ensegueni que fut
davant la Tosayns^ furont my unyor
a Paris,
J. Demana pain .xiiij. s. p.
Tasseta, fhit .vij. d. p.
S* de la panetof^ .xiiij. s. vij. d. p.
Vin de Porvensi
S* de la botelkrt
Tasseta, chois
Néant
.xiiij. d. p.
P. de Cripenges, charn grossa
A luy p^ .iij. galincs
.ij. s. .vij.
A luy p^ .iij. maalars
.ij. s. .viij.
A luy pfT portajo de char .v.
Tasseta, verjut, vin egre .viij
.jx. s.
d.
A ley p^ salsa .v)
A ley p»- .j. iromajo .viij
Aleyprraus .ij
Johanna chznâeleri per .j.
dianâeles de syu .x
S* de la qusina .xviij. s. .vij
S* de tôt lo jor .xxxiij. s. ij.
d. p.
d.p.
d.p.
d. p.
d.p.
d.p.
livra de
X. d. p.
d.p.
d.p.
Li Tosayns,
18. Item h lus enseguent,
J. Demane p^ payn .xiij. s. p.
Tasseu frut .vj. d. p.
A ley p^ sal blanchi .iiij. d. p.
S* de la panetart .xiij. s.
Vin de Porvensi
S* de la botelUri
37
.X. d. p.
Néant
Tasseta p»* porrelz .x. d. p.
P. de Criprenges, p^ charn grossa
.xij. s. p.
A luy per .j. oya .iij. s. .vj. d. p.
A luy p»* .j. porcelet .xxij. d. p.
A luy p^r .j. cunyls .iij. s. p.
Jaquet olier, p^r moterla .vj. d. p.
A luy p^r sal grossa .xiiij. d. p.
A luy p^r salsa .xij. d. p.
A luy p^r unyons, p^ layt, vin egre
.X. d. p.
P. de Cripenges p^ .j. fays de leny
.ij. s. .vij. d. p.
Johflwna chandWm pw' .j. livra de
chand«/« de syu .x. d. p.
S* de la qusina. xxviij. s. .j. d. p.
S* de tôt lo jor .xij. s. .xj. d. p.
19. Item h Mars ens^ent (2 nov
1322).
J. Demane payn
Tasseta frut
S* de la panetan
.XIJ,
.XIJ.
.iiij.
s. .iiij.
Vin de Porvensi
Perot per .ij. veros .vj. d. p.
S* de la botellm .vj. d. p.
Tasseta per raves .v. d. p.
P. de Cripenges per charn grossa
.X. s. .vj. d. p.
A luy per .vj. galli>f^5 .iv. s. p.
Tasseta per unyons .ij. d. p.
A ley pw' .j. fromajo .vii,. d. p.
Jaquet Tôlier, per vin egre, ayls
.V. d. p.
P. de Cripenges per leny
.iij. s. .X. d. p.
E. PHILIPON
38
Johana chand^&ri p«' j. livra de
chand^/^5 de siu .x. d. p.
S^ de la qusina .xx. s. .x. d. p.
S* de tôt lo jorn .xxxiij. s. viij. d. p.
Lo rémanent de Porvensi
20. Item h tnercros après h Tosayns (3
nov.).
J. Demana payn
.xj. s. p.
Tasseu, en frut
.vij, d. p.
S* de la panetflTj .xj. s
. .vij. d. p.
Vin de Porvensi
S* de la botellm
Néant
Tasseu peys
.viij. d. p.
P. de Cripenges cham grossa
.ix. s. p.
Pachot peysson fret
.xviij. d. p.
Aluy per .iij. pôles .ij.
s. .vj. d. p.
A luy pw' faytures de patiers et per
• farina per ravioles
.xvj. d. p.
Tasseta per .ij. fromajos
.xviij. d. p.
A ley moterla
.iiij. d. p.
A ley verjut
.iiij. d. p.
A ley per ues
.xvj. d. p.
A ley per arènes
.iiij. d. p.
A ley per salsa
.ij. d. p.
P. de Cripenges per leny
.nj. s.
Johanna chandekri per
chsindeles
S* de la qusina .xxiij.
S* de tôt lo jor .xxxiiij .
.V. d. p.
livra de
.X. d. p.
.iij. d. p.
.X. d. p.
21 . Item h Jos ensegueftt (4 novembre).
Jo. Demane payn
Tasseta en frut
S* de la panetjri .xij. s.
.xij.
.vij.
.vij.
s. p.
d.p.
Vin de Porvensi
S» de la holéileri
Néant
Tasseta, chois .xij. d. p.
P. de Cripenges, char grossa
.X. s. p.
Pachot per .iij. oseus de riveri
.ij. s. .ix. d.
A luy p^ j. porcel .xxj. d. ob.
A luy per salsa .iij. s. vj. d.
Tasseta, m[o]terla .iiij. d.
A ley fromajo .viiij. d. p.
Pachot per X], fays de leny menua
et per .j. mollo de grossa leny;
so et asaveir per chacuyn fays,
avoy lo portajo, .xvij. d. ob. p.
et per lo dit mollo.iiij. s. .iij. d. p.
S* de la qusina .xxvij. s. .ij. d. ob.
S* de tôt lo jor
.xxxix. s. .jx. d. ob. p.
(extraits)
22. (fo 8.) Item la dumene ense-
guent que fut davant la Saynt Ni-
cola furont mi senyor a Paris et se
dinet avoy lor mosen Simons de
Tiwctavila avoy .ij. conpanyons et
avoy .iij. ecuers.
23. Item lo mercros enseg//ér«/ se di-
nerunt avoy mon senyor de Foreis.
24. (fo 9) La dumeni enseguent que
fut après la fêta Notra Dama d'At-
vent furont mi senyor à Paris (12
déc. 1322).
25. (fo 10) Item la dumene enseguent
que fut davant la Narivita de Notre
Senyor furont mi senyor a Paris et
se dinet avoy lor maytre Maris lo
Fezecians.
26. Item lo Vendros cns^uent que fut
li veli de la Nativita (24 déc. 1322)
de notrun senyor furont mi senyor
a Paris.
27. Item lo Sandos enseguent, que fut 11
Nativitas de notrun senyor, furont
mi senyor a Paris,
LES PARLERS DU FOREZ aS-LIGÈRIEN
59
18. (2* cahier) Iiem lo Sandos ense-
guent, que fut d avant la Purtficas-
sio de Notra Dama, furont mîsenyor
a Paris et se dinemnt avoy lor
moss^ Guiîlauraes de Vieul Juye
et lo de3'eiis de Vouci avoy lor
ecuers.
29* Item lo mercros ensegueni, que fu
la Purificadon de Notra Dame (sic),
Ibnont mi scnyor a Paris et se dine-
ruci avoy lor undc I archivesque
de Tholosa.
30. Item ia dumene cnse^umtque fut
après la Purificadon de Notra
Dame furoot mi seoyor à Paris et
se dînerunt avoy lor mosscn Emeus
de Corsenay et moss^Q Reynaut de
Gransi, avoy lor ecuers.
31. Item lo luns etiseguent furont mi
$cnyor a Paris, et se dinei avoy lor
Guiocz de Foreys lor frares, avoy
sa conpany.
|3. Item lo mars enseguent, que fut
Karementrans, furont tni senyor a
Paris et beviront avoy lor lo archi-
diaqnes de Carcassona^ mosîifTï Ray
monat d'Aspel et ,vj. ecuers de
mosunyor rardiivequc de Tholosa.
3^. Item la dumene en s/;^z/rn/, que fut
après la octava delà Purification de
notra Dami^ furont mi senyor a
Paris, et se dinet avoy lor le curas
de lor glesi parrochiel.
34. liera lo mars eoseguent furont mî
senyor a Paris et se dinerunt avoy
lor /ij. fraro prejaor^ lor confessor
et le curas de la gleza (su) parro-
chci.
35. Item lo Mars enseguent se dine-
runt avoy [lor] mossrw Girardins de
Saynt Mur^ Guillarmï^ de Vevre et
.ij. badcl de les escoles.
36. (i« cahier, fo 5.) Denizeta la
lavandieri, p<'r lavar mantils et
(oales et lensols et totz los autros
draps, pos que mi senyor furont a
Paris cntro a la jornaa de huey
vs* X d. p.
IV. CEKSIER DE FONCE DE ROCHEFORT.
Située au sud-ouest du Lyonnais, la seigneurie de Rochefort comprenait
tout ou partie des paroisses de Saint-Martin-en-Haut (5"^ Matiinus dt' Annua-
Uhu% Rochefort, Thurins, Mcssimy et Dueme. Ponce de Rochefort paraît
eo avoir été le dernier possesseur laïque : d'une part, en effet, nous le voyons
êgtmx A titre d*cxc^cutcur testamentaire dans un acte de dernière volonté qui
porte la date du 15 mars 1254 s et d'autre pan rObituaire de FÉglise de
Lyon mentionne la seigneurie de Rochefort {domintum cas tri de Rochifort) au
nombre des domaines acquis par rarchcvèquc Renaud de Forez, lequel mou-
rut en 1226*. Ced date notre terrier du premier quart du xim siècle, ce à
quoi récriture ne contredit point. Le censier de Rochefort est consen'<J aux
Archit*es du Rhdne, partie non inventoriée ; c'est un registre de huit folios
1. M.-C. Guigne, Obituanum Lugdunensis eaUsiat^ p. 225.
2. M,'C, Guigue, ibidem^ p. 133,
40 E. PHILIPON
en parchemin, mesurant 264^^ de haut sur 1520»*» de large» d'une exécution
assez soignéCi mais quelque peu maltraité par le temps. Il contient Ténumé-
ration des redevances en argent ou en nature dues à « Ponce de Rochefort »,
par des maiiimortaWes possessionnés dans les paroisses de Thurins, Saint-
Martio-cn-Haut, Duerne, Rochefort et dans une paroisse dont le nom est
déchiré» mais qui doit être Messimy. Parmi les textes en langue vulgaire que
conservent les Archives du Rhône, le terrier de Ponce de Rochefort est cer-
tainement Tun des plus anciens; j'en donne ici d Importants extraits» en
ayant soin d'indiquer les folios d*où îls sont tirés. Il est, cela va de soi .
absolument inédit".
Ceftsiis dominî FoncU tk Ruppeforti.
[Aptid Maysnmfu] i . In pecia quam tenet Martina Fadella haZvt âominus
Poncias laudes et vendas.
2» Johanna Oleri et Johan«es li mouners de suo curtili cum i^nineftciis .ij.
d, et oboJd, e de tem de les Tremblai es dimei row^blo avene.
j. Johaimes Fab«r de terra de Sant Gînies et de terra de les Trenblaies .).
Cdmblô avene,
4. Perinus Vials de la peci de les vinnes ,xii, d., e de la vinni de peda
raonda .j. ras avene.
j. Johai»«es de la Fay de bosco et de v^rcbma de Corde vet ,viij. d. per la
vrmeiada.
6. Hugo de Broches per lo vinîel W per lo pra del viniel .iiij. soU e ,j. gal-
lifw, per lo pra de la Gotella .viij> d.» per la verchen de la Qjiineri j{. meit^rs
ras siligmw, per la vigni de la Tclanderi .xviij. d.
7. Vinceocius del Forti per sa maison et per la v^rchm et per lo pra de josta
.îj. meitfrs ras sîligtfiù et ,\, gallina et per lo buec del Tremolei .v. ras avene
H :\, galina.
5. (f* 2). — Hysebcx H Bertona de peda de Fantachonciri .xii. à. et per lo
curtil de Craponna ,ij. sob ^ pifr la peci Tardi dimei bichct d*orge et per lo
buec de Sent Ginieis dimey fcwblo avenc et dimey gall/wa.
9. Jobanna del brochil del pra de la font .iiij. d.
10. JohoTtfres Chanz de prato Hugoneens .viij. d. et de prato a la Êlîeta
,TÎij, d.
11. Joluiivnes Bues d*una peci de terra justa terr^m al B«TgîcTS 0, vicn.
II. Jacobus Vasauz p^ la terra del pra Marchaarat o.
I}. Peninus d*Eculeu per la vîgni Joriasab et per la v«rchm Johannem
Va^ ,jx. d,
14. St/pbaftnus Girardi de suo curtili dd treivo cmn pfrûtmtdis .xîij. d*
I. Sur la seigneurie de Rochefort en Lyonnais, voyez le même obituaire,
pf, 10 1, 121, 122, 170, et VAlmamihhistonqvede Uvilkdi L)ofi, pour 1789.
LES PARLEKS DU FOltEZ CIS-UGÉRIEN 4I
€t poteysa; ci deivont il dui .j. giûïitta tt rofff blo avtnc al quart an; «^deitSte-
phanwtix Girarz prr se de curtil del clos citm pcrtinenciis .jx. d.
J ). (r« 2 v«>). Johûwwes Romirns de Urra del clos et deuz aysarx del buec d
del pra del buec ,xv. d. et o.
ï6. GuiïU/mtts Fukhrrîi et St^hanuj Fulchiers proptrr terram de fonte
Esteven GîrArt .v. d. et .j, gallina al quart an.
17. Galvaînz de Bnenda^ p^ lo chanaver del coniers o. Strphanui Reîolcs
pr la vffch/ri del espeisi .j. d.
18, Johfl««es de Mayseu d'una ped de terra a Briandas o.
*9 if^ ?)• Martinus Fomeuz del pra Sant Juelio .ii. d.
20. Joharmers Boers et Bartholomew; Boers de urra de la p^^ari de Faruay
.Kxiij. d. et j. meit^ siligùiiV d .j, corwblo avene et .j. gaïina quarto anno.
21. PÈtrus Bruieri del curtil de la Bruîeri .vj. d. et lo terz d'un meitrr
22. Hugo Bruîeri del curtil de la Bmicri .vj. d. et lo tierz d*un radter silî-
gtiiù et lo tere d'un combio avene> Et entre toz, lo quart d'unagalma et d'uii
méHtr siiigtrm al prj>i^r ost.
Apuâ Turrim. — 23, Johafïifcs de Marnas per la t^rra de la noiarela las
Goronx* d.
24 (P» 3 vo). St^phawnus Pcstrc per la peci et psr lo saynax .vj. d*
25, Pucri Johani Burihel p^ la grangi del balaiec ,viij. sob et unufMconil.
26. Johannos de la Crois per la uni de les cosics .jx. d. et .j. galli/ia al quart
mn il ,j. quartairoM avene.
27* Martins et Jûïuï«fies Robmi per la leva de Mont Garm ,ij. d.
28. Johannes del treivol de Laval , de buec de Laval et de la peci de la
Mïcbalm ti de t^rra justa lo buec .xxij. d.
29. Stephanits de la rochi del sanaz de la pereiri .j . d.
Apud Monte Gnrin. — 50. Johdrtwcs Gubians per la gï'angi del mofit Gann et
per los pras et per los autros lencmenz Jj. sob ei les does pars d'una galina.
5r, St^hanui Marttws et Johafiwes Martins p<T la terra del aveneri .iij.
comblos avene, jj. a>mblos siliginis ^/ .j. ra^ siligmt5 a la, mesura vdli et àj,
cofiiblos avene d .}, galina; et deit Johfl««es Martins per se .xvL d.
p (f» 4). Aqjfaria Fusers per la v^rchm et pfi lo pra dd Galcliaor .xv. d,
et J. tneiter avene et dimd galioa, per lo buec et p^r la v^chm de la Ch'al-
meta xij. d.
JJ, Johanoadd Trabîo et Joh/i«wes de Costa prr lo curtil de la Poisatcri ,ii.
quartes vini d .îtij, pozins a festa Sant Lorent et «j. meiter de froment a la
tnesura vdlli d .j, gall/fw, et prr la t^rra de la costa 4ïj. soir d .îiij, à. et ,\.
mcur de froiww/ a la vdli mesura.
54 (^ 4 vo). Johaimes Revoux per lo curtUx dels Aysars cum pfrtinewdis
.ir. sob et .vj. cowblos avene, d per lo pra de la mesda.vj. d., flp^rlo moleti
.ti|. méxfrs stligiit».
JJ. Johatmesdel Trdvo per lo curtil del Treivo .iij. sols et ,], galina.
Dr Rupptf&rti, — 56. Pctnis Tisire per sa grangi et per U vercheri et per los
42 E. PHILIPON
pras.vj. soIj et Au], comhlos avenerf .j. gallinap^r U vignii (jiV)de C^ffibretu
,xv» d.
57. Petrus filins Pétri Tiseor jvr la vim de Q>mbreu ,xv» d*
58, Micahcl de Glas prr h vercherï et j«r lo pra del Gauchaor ,xv. d, et
comhlo avene r/ dimeî galîoa.
39. JohatinQs Faubri pt^rla vignî de Combreuz,
40. Jpud Buieu cmstis. — Michels de Buicuz de son curtil ,vj. soLr et .x.
d. d rneitifr de froment d ,\. c<?wblo avcne H .j. galina p<T Taiaz H pcr lo
buec, et ,ij. comblos avene pcr lo chanbon de gore Chavalar, jj. soIj per la
peci del forn d per la peci outra Brevonan,
Cmsus domini Poncti de Ruppc/orti, aptid la Bastia^.
41. (7°/, î/o.) Gutoaez p^r la vigni de Combrex .vj. ûeners et per îo tetie-
ment de la Bostia .ix, d, et .j, galîna.
42* Aquaria de Montraont et Johanwes frat^ et Johawnes filius Hugoni de
Montraont del curtil de Montraont dimei trossa de ten et .j. a?wbîo avene et
.j, gilina.
4î, Symeonz del Bosc de son curtil del bosc ettm prttinenciis .v. sols vicn,
et ,vj, raeitfrj cowblos avene et .\. gallina et pn îo curtil son pare ,j. galina
et dimei comhlo d*avena, et x, d. et dimei trosa de fen del buec del coin, et
dimei cowiblo avene et dîmei meit^ siligînis al ^ etpcrlo curtil son paro (sic)
J. fab de fen.
44. Stephanus de Bosco per son curtil cum pmînenciis »v. sois et .vj. mei-
tirs avene et .j. galina et dimci mcit/T siligi»is, et dimei trossa de fen per los
paquers de les avenaries, et .ij. cûwblos avene per lo bosco de Peire grossa et
.iiî). cowblos avene per lo buec de )osta lo coin, et àj. owiblos avene de la
ped del pra raont /]x. d,
45. Johannes Ayrao p^r îo curtil deî mort^r .vj, d. et dîmeî meit^ avene.
46. Martinus et nepotes et Petrus Pestre per lo curtil del mort^r' et per lo
tenemcnt .jx. soU et .xij. d, maiew^es et .xiij. meit(*rs et dimei avene et ,ij.
gallinis.
47. It^w Petrus BertrawdMs et GuïlleJmus et JohûWMes et Zaq/oria del ChucJ
de curtili suo cum p^rtinenciis ,vij. soh et aij. d. et .j. gaWsm et .j. puzin, per
^o bosc sus le coin aiij. (J° <5, r») mcyt«-s avene, et per la sala .îj. cawblos
avene.
1. La Bastîe» à Test de Saitit-Martin-en-Haut (Cassîni no 87) et La Baty,
chlteau, commune de Saint-Martin-en-Haut (Etat-Major, n" 168).
2. Le Mortier, au S,-0, de Saint-Martin (Cassini» 87).
3. Le Suc, au S.-E. de Saint- Martin (Cassini); le Grand Suc et le Petit
Suc, comm. de Saint- Martin (Etat-Ma|or). Suc, Si} s. m. a en forézien
moderne le sens de hauteur, sommet arrondi, montagne.
LES PARLERS DU FOREZ CIS-LIGÈRIEN 43
48. Ruphus de Chue pcr la ierra de Mo«trosel .v. ras avene et ,j. cotnhlo
d*avena de cella terra, et per la Vrra del pois .}, combla avene.
49, Martinus Keveilies pfrson curtil atm pertincnciis .vj. d, maienses et
Mi\, camblos avene et dîmci galina et dimei meitrr de ïrommi et dimei trosa
de fen et /], d, de pan et .j. puzin et d/mei quarta de vin et .uij. d. maiens
ftfr la Poiarderi, et perlo sotolaz M\\, d. maiewies et .j, mçï^tr aveiic et dimei
rodt/r de frometr/ a la vçili mesura.
$0. inter Manino et Petro Rufî ,viij. comhhs avene et »j\ galma <»wtïîu-
nais ptr \o curtil aïs Roses et ptr lo curtil del Sotolaz dimei galina et Au], d.
mxycnses et dJmcî trossa de fen et dîmci meitiT de iroraewt communal pcr la
terra del Sotolaz et .vj , cow^bîos avene o^ntïiunis.
51. Sus lo cens del pois aal lî lier al Sarrazins .ii. sob et .ij. d. £t .vîj.
rocitiT/ avene«
52. (fi 6f t*».) Jolmniies de Clsureu p^r la saini del boichet .Hîj. d. et .j»
tùmhlo avene.
$î. Stephanus del Boison pcr lo tcnemetit d'Orgoîa*.
54. Johanncs Rcis et Guillr/wa sa suer p^r lo curtil d'Axelgo .ij, sob et en
may .xij. â,it .j. gali'wa et .j. meitfr avene.
5$. Bcmardus del Fechet* prr lo pra de la vila et ^ ,j. ped de twra iqui
meismo .iiîj. solx d les does pars d'una galtina.
56. Mainarz ptr la trrra de la lentilleri .iij. soU et Jj» cowiblos de dva et
.), galina.
57. Jobinz Rtisticans et Petrus fratres p«' la tfrra de (fi 7, rt>) les revoires
.viij. comblos avene, prf la peci de Sala b^rtan .Hij. d., ptr la saynaz de font
«la.iiîj. d., parles v^rcherçs de les Jonîes .xij. a. et .iiii» conilz et ,j. galina»
fwr lo curtil Matlveu .îiij. soif, prr los pras del curtil .iij, soh mayenjes et
,iitj, Oïwibîos avene et .j. galina, per lo buec Joynie .ij. comUos avene,
58. Johanz Revulz ptr lo curtil d'Ardeison ^ .iiij. o^mb los avene ft .j. galma
cl ptr los pras .xv], d. maicwses.
59. Johannes del Apraal per la maison qui fuit Ossa ,îiij. sob e .i. galma
#1 p^ los pras .xxij. d. maiens<5.
60. Poeri Brunet Jayout deî pras de la font de Vikrs^ .x, d. maiewses, per
la vfTchm las los pras jj . comblos avene.
61. Stephanus del Buec per lo pra de la Fay .iiij. d. raaiens« et per la v«r-
chm del rucht .j. cowblos avene et .j. galina.
62. (fi 7, i«,) Bertholoraei*^ Pocacharz per lo bosc de la Paya j. corwblo
ivene.
1. La Goute-d*Orgeol, et TOrgeol, lieux dits près de Duerne (Cassini).
2. Le Flcchet, c»^ de Duerne (Cassini et Etat-Major).
5. Ardaison, au N.-O- de Saint-Martin (Cassini 87); Ardaison» écart de
Saint-Martin (Etat-Mapr).
4, \illard (Cassini), le Villart (Et, Ma}.), commune de Saint-Martin.
44 E. PHILIPON
63. Pueri St^phani del Fay» p«r lo pra del pont Patiel .xii. d. JohannQS
del Pynei * per los pras de les saynes .iiij. d. maewes,rf p^' la p^ari AqMarian
de Talaru .ij. d.
64. El curtil al Jayouz .viij. comblos d'avena ei .]. trossa de fen ei .], galfwa.
Item census de Castro de Rochifort J.
6$. Hugo Martins p^ sa maison de Rochifort .iiij. sob et .j. galiwa et per
la vigni de Combreu .iiij. d.
66. St^hanus Martins et nepos suus per la tm*a de la crois .îij, comblos
avene ; perle buec sus la vi laoneisa .ij. sols.
67. LorenciM5 Fusers et sui nepotes per lo forn d'aval .iiij. sob, per la vigni
de la Costa .iij. d. (f> 8, ro). Lorenciwj Fusers per Tort de la font de pissi
entor .xv. d.
68. Petru5 Tisire qui ot filiam Johanni Blain per lo sainaz davant lo molen
Aquarian Escofer .xii. d.
69. St^hanus Blains p^la vigni de Combreuz .iiii. d.
70. Pueri Johan Escofer per lo pras et per la terrai soz lo molen .ij. sob et
.vj. d.
71. Johaffiies del Pois per sa maison las Virichat et per los pras soz Rochi-
fort .ij. sob.
72. St^hannus Raphaex per la peci del molen de Lora .iiij. d. et o,
73. Aaq«aria Escofers et sei nevou p^r los pras soz Rochifort
74. (/» 8f vo,) Blanchia et Jaqwemeta per la peci las lo molen a Lora .xvj. d.
75. Guilb/mtts de Porta per Tuert davant la maison Roceu.
76. Margarita qui fuit uxor Mofitelon per cel meismo u(u)ert .]. comble
avene.
77. Johflfines de la Porta per Tuert sus font Chanonan .ij. d. '
E. Philipon.
1. Le Fay, lieu dit, commune de Saint-Martin (Et.-Maj.).
2. Le Pinay (Cassini) au N. de Saint-Martin, aujourd'hui le Penet, c»* de
Saint-Martin (Et.-Maj.).
3. Rochefort, village, paroisse et baronnie en Lyonnais, archiprêtré de
Mornant, aujourd'hui annexe de Saint-Martin-en-Haut (Rhône). La baronnie
de Rochefort dépendait, en 1789, du comté de Lyon; elle comprenait la
totalité de la paroisse de Rochefort et une partie de celles de Saint-Martin et
Dueme.
TROIS DITS D'AMOUR
DU XIII- SIÈCLE'
Les trois pièces publiées ci-après ont été composées à Timi-
tation Tune de l'autre, entre 1260 et 1280 environ, les deux
premières probablement à Arras. La première est d'Adam de la
Halle; les deux autres, de Névelon Amion et de Guillaume
d'Amiens. Elles étaient restées jusqu'à présent inédites,
mais non tout à fait inconnues. La plus intéressante, celle
d'Adam de la Halle, avait été signalée, dès 1842, par P. Paris
ÇHist. litt., XX, 797)', et, en 1844, par Ad. Kcller {Romvarty
?• 313)» qui en avaient cité quelques vers. De Coussemaker,
éditeur d'Adam (1872), en a eu connaissance, probablement
par le ms. même qui contient toutes les œuvres du poète,
mais il a jugé bon de ne pas la publier : « Sous les n°* ix et
XI, » dit-il dans sa description de ce ms. (Jntrod,y p. xxix),
« s'y trouvent deux autres pièces^; mais ces deux morceaux
« sont regardés par les meilleurs critiques comme n'étant pas
« d'Adam de la Halle î. » Rien, à vrai dire, ne justifie cette
1. P. Paris avait imprimé les six derniers vers de la strophe xii et
Ad. Keller les quatre premiers de la strophe i. Arthur Dinaux ne mentionne
pas la pièce dans sa notice sur Adam (Trouvères artésiens, 1843), ^^^^ 9^'^^
y ait largement mis à contribution l'article de P. Paris ; c*est que le passage
qui y est relatif se trouve, non dans le corps de cet article, mais en appendice,
et lui avait évidemment échappé. M. G. Raynaud, dans sa BibliograpJne des
Chansonniers français y l'a enregistrée, ainsi que nos deux autres dits (no^ 251,
166, 2073), bien que ce ne soient pas proprement des morceaux lyriques,
en la donnant à tort comme une pièce à la Vierge.
2. Le no IX est notre pièce ; sous le n» xi sont rangées trois strophes sur
la mort dont il est question dans la note suivante.
3. Par « les meilleurs critiques », De Coussemaker entend évidemment
parler de P. Paris, le seul du reste qui eût exprimé une opinion sur la
4^ A. JEAKROY
défiance : la pièce se trouve dans deux mss, (B. N. f. p* 25566
foL 65 r^* et Vax. 1490, fol. 128 r^^ indépendants Tun de
Tautre et qui tous deux l'attribuent i Adam; dans le premier
de ces deux mss., qui a, comme on le sait, une autorité excep-
tionnelle, elle se trouve entre deux œuvres du poète sur
Fauthenticité desquelles il n*y a pas le moindre doute, le poème
« Du roi de Sezile » et les u Congics Adam », Enfin, ce qui
nous paraît trancher absolument la question, on y rencontre un
grand nombre de pensées ou de locutions qui, comme le
montrent les rapprochements faits en note, étaient familières à
notre auteur, et parmi lesquelles plusieurs au moins sont assez
originales pour que ces rapprocliements soient significatifs.
Il n'est pas impossible de déterminer, au moins approxi-
mativement, la date de cette pièce. Cest sans doute à Arras
qu'elle a été composée, comme le montrent les allusions con-
tenues dans la strophe xn : elle est donc antérieure au moment
(1262 environ) où le poète quitta sa ville natale, qu'il ne
devait probablement jamais revoir. D'autre part, elle a dû
Têtre peu de temps avant cette date : certaines indications sur
question ; or, P. Paris, sans revendiquer positivement h pièce pour le poète
artésien, n'avait du moins formulé aucune objection contre cette attribution i
il avait dit» en partant de ces strophes, « qu'il était encore permis de les
attribuer au Bossu d' Arras. a Mais il s'était produit, dans Tesprit médiocrement
précis de De Coussemaker, toute uue série de confusions : P- Paris, après
avoir cherché A démontrer, dans ses Maniucriti françms (III, 235), qu*Adam
était l'auteur des Fers ik la Mort^ de Roben Le Clerc (récemment publiés
par M. Windahl» Lund iSBy» voy, Rom., XX, [57). avait paru (Hisi, lUt,^
toc* cit) renoncer à cette hypothèse. Or, comme îï y a aussi, dans le ras.
25566, et à très peu de distance de notre !>//» trois strophes intitulées Vfn de
la Mort^ De Coussemaker aura cru que la rétractation de P. Paris portait sur
cette pièce et s'étendait aussi au dit sur Taraour. Qpam à ces trois stroplies,
qui ont été publiées par Jubinal (Nouv, râcueiî^ II, 275), il n'y a aucun motif
sérieux d'en contester l'attribution à Adam, dont elles sont pariaiteaient
dignes par l'élégance et Ténergie du style ; il n'y aurait rien d'étonnant à ce
qu*il se fût exercé sur un sujet qui alors était dans son pays presque un lieu
commun, et qu'on n*eût conservé de son oeuvre que ce court fragment.
1. Elle y est précédée d*une curieuse miniature que P. Paris a décrite
{lûc. cit.).
2. Je me suis servi de la copie de Sainte-Palaye qui se trouve à la Bibl. de
TArscoal (no 5101),
TROIS DrTS d'amour DU xiu* si:fecLE 47
Tètat moral et social de la ville coïncident absolument avec
celles que nous fournissent quelques pièces artésiennes^ dont
Tune au moins a été écrite entre 1250 et 1270 environ. (Voy.
Il noie sur le vers 144**)
Je ne voudrais pas surfaire la valeur poétique de ces quelques
strophes : cependant il est permis de trouver que P, Paris ne
leur a pas rendu pleine justice en disant Çoc. cit.^ qu'elles
étaient 0 assez agréablement et facilement versifiées »; on y
remarquera certainement une énergie et parfois un éclat de
style qui les mettent au dessus de la plupart des pièces lyriques
du même auteur; on y est assez souvent choqué, il est vrai,
par Tobscurité d'expression et la brusquerie d'allures qui
semblent inséparables de la forme strophique adoptée par le
poète î.
Des deux autres pièces, nous avons peu de chose à dire :
celle de Névelon Amion se trouve aussi dans les mss* 25566
(f» 278 r*) et Vat. 1490 (f° 129 v", à la suite de celle d'Adam 4);
celle de Guillaume d'Amiens ne nous a été conservée que par
ce dernier ms. (^ 130 v**, à la suite des deux autres î).
De la première^ A- Dinaux avait cité (Trouvères artésiens^ P- 3 SO
les deux premières et les deux dernières strophes, Ad. Keller
{loc. cit,} la moitié de la première strophe, et P< Paris (Hisi. litt.,
XXin, 612) les dixième, onzième, dix-septième strophes. De la
seconde 5 mentionnée également par Keller, rien, à notre
connaissance, n'avait été publié^.
] * Voy. la liste de ces pièces dans les Études romams dédiées à M» G, Paris,
p.8}, n.
2. Il serait imprudent» à mon avis, de chercher des arguments dans la
situation d*esprit qui s'y exprime (et qui est à peu près celle que Ton retrouve
au début du Jeu de Ut FmïUt). Le lieu commun, au moyen âge, tient une si
grande place, même dans les oeuvres qui affectent le caractère de confidences
personnelles, qu'il vaut mieux ne s'appuyer que sur des allusions précises à
des ùîts historiques.
5. Ce qu'on remarque aussi par exemple dans le Miserere du Rendus de
MoUiens et dans les Vers de la Mort publiés par M* Windahl
4. Dans le ms. du Vatican, elle n'a que douze strophes disposées dans
Tordre suivant : i, 2, j, 4, 11, la, 19, 5, 16, 9, 17, lo. Ce texte est donc
bcomplei des strophes 6, 7, 8, t^, 14, 15, 18, 20» 21, 12.
5. Voy. G, Raynaud, Bibh, I, 229-50.
6. Sauf quelques fragments épars dans le Dict. de M. Godefroy.
48 A. JEANROY
Elles sont certainement postérieures Tune et l'autre à
l'œuvre d'Adam, dont plusieurs passages y sont imités '. Mais il
'est bien difficile de dire quel a été le premier imitateur. Névelon
Amion, en rappelant, au début Je sa pièce, que « maints
bons vers » ont été faits sur le sujet qu'il traite lui-même,
peut aussi bien faire allusion aux diverses strophes de la même
oeuvre qu'à des œuvres distinctes. Lepoque où vécurent
Névelon Amion et Guillaume d'Amiens « le Peintre » doit
être sensiblement la même. Le premier nous serait inconnu
sans la pièce qui nous occupCj bien que sa famille ait joué
alors un rôle considérable dans sa ville*; quant au second, il
nous a laissé deux chansons fort banales (Raynaud, n*"' 2, 1004)
qui ne fournissent aucune indication chronologique, et des
rondets^ de structure identique ;\ ceux d'Adam* On sait que
cette forme du rondet à un seul couplet ne fut guère cultivée
avant la seconde moitié du xin^ siècle ^.
• I, Voy. surtout les notes sur u, 45, 192, 245-, m» 4,
2. Baude Fastoul nomme dans ses Congés (y, 98, 2 10) Henri Amion, qui
est dté aussi dans le /ru d€ la FeuiUà (v, ï6) comme boins clers et soutkx et
auteur dVn « livre n qu*Adam semble admirer fort ; il devait être assez âgé
au moment où celui-ci lui adressait ces éloges, car son nom se trouve dans
le HegiUrt tks Jonglatrs (f. fr. ii54l), dès Tannée 1249, et celui de sa Tilk en
1273. Les Congés de Fastoul, dont il est difficile de fixer exactement la date,
sont en tout cas postérieurs à ceux d^Adam, qu^ils mentionnent comme
exilé à Douai (v. 472-3); d*autre part, B. Fastoul est inscrit sur le Registre à
la Saint-Remi de 1273 seulement. Le nom d*une « Sturio [iise^ Esturion]
fe Baude Fastoul », qui, du reste, peut être sa mère aussi bien que sa femme,
s*y trouve â la Purification de 1258,
3. Conservés dans le même ms. que notre Dit et publiés par P. Heyse
(Roman ische îmâiia, 1 8 5 6 , p . 5 4- $ 8) .
4» Quelques détails de langue pourraient prier en faveur de l'antério-
rité de Guillaume d'Amiens. Il y a dans Névelon Amion quelques synérèses
ou élisions très peu usitées avant Textrérae fin du xin« siècle : v. 30 t'aimes\
V, 11} r'oj; 145 t'ies^ 165 vir (= vàr^ imir) (les formes prieus,
ptilUus, compter^ dans G. d'Amiens (vv. 62, 102, 147) présentent un phé-
nomène différent) ; mais il est fort possible que Tabsence de formes pareilles
dans la pièce de G. d* Amiens soit purement fortuite. D^autre part, si Ton
compare les passages des deux pièces où sont exprimées les mOmes pensées,
il semble que Timitateur (car il y a dans le style trop d*analogie pour qu^elles
aient été écrites indépendamment) soit plutôt Guillaume d'Amiens. Voy.
par ex. 11, 90, et m, 36; 11, 226, et m, 114.
TROIS DITS d'amour DU XIII* SlfeCLE 4J
Quant à la forme strophique dans laquelle sont composées
ces trois pièces, on sait qu'elle a joui, spcciaîement dans la
région picarde et wallonne^ d'une grande vogue qui remonte
probablement aux fameux Fers sur la Mtyrt d'Hélinaud, qui
Tavaient si brillamment inaugurée; elle a été surtout employée
dans des œuvres d'un caractère religieux, moral ou satirique
de la fin du xiP au milieu du xiv* siècle*. Elle a été étudiée
par MM. P. Meyer (BibL de fEcok dis Chartes, XXVm,
p. I3î)> G. Raynaud {Romania^ IX, 231), van Hamel {Mise-
rere,,,^ Introd,, p. xcnt), et enfin par M. Naetebus {Dit nichi-
îyrischen Strophcnformcn des Altfrani^sisclmiy n^ xxxvr, pp. 106
et suiv.).
Il me reste h dire un mot de la façon dont j'ai entendu cette
publication : je donne pour les deux premières pièces le texte
de 25 566 {Â) sans essayer d*en uniformiser la graphie *. Quant
aux leçons de Tautre ms. (J5), je ne les donne ordinaircmeot
que quand elles importent au sens. Les notes qui suivent le
texte offrent, entre autres choses, un certain nombre de réfé-
rences aux poètes lyriques du Midi et du Nord, les trois auteurs
leur ayant emprunté une foule de pensées et d'expressions; il
va sans dire que je n'aj pas essayé d'épuiser la matière. J^ai
réuni dans un glossaire les mots dont la forme ou le sens
peuvent avoir quelque intérêt, en marquant d*un astérisque
ceux qui manquent au dictionnaire de M. Godefroy5,
î. Daas la poésie purement IjTÎque, nous n'en trouvons qu'un seul
exemple (et encore les vers y sont-ils de 6 et non de 8 sylkbes) qui nous est
ofUn par une pastourelle de Jean Bodel (Raynaud, n» 367; Bartsch,
Riom. K. Poj/., p. 288), 11 est cuHcuk qu'elle n'y ait pas été plus souvent
employée, car la forme dont elle n'est ^ju'une dérivation par redoublement
{aah aah) y est, comme on sait, Irêquente. — On remarquera que dans plu-
sieurs des piîîcjs écrites sur ce type, outre les nôtres, toutes les strophes au
le plus grand nombre commencent par une apostrophe, comme dans leur
modèle commun : %*oy. par ex. les Fers sur la Mort d'Adam, ceux de
Robert Le Qcrc, le MUfrtre (str. 58-119, 12 j ss., 143 ss., 253 ss.), les Vtrs
du MofuU (JubinaK II » 124), etc.
2. Je me suis borné â rétablir les formes picardes de Tarticlo et du pos-
teisif qui* du reste, sont de beaucoup les plus fréquentes dans le ms-
j. Je tiens enfin à remercier les personnes qui ont bien voulu me prêter
kttf concours pour cette publication : M. G, Huet a revu sur le ms. de Paris
quelques mots douteux des deux premières pièces; M, E, Langlois, de
XXIL 4
50
A. JEANROY
I
ADAM DE LA HALLE
I
Amours, qui mX^j niis tn sou-
[franche
De die» par te bele enortanche.
Dont joie deûsse or avoir,
4 Faus est i|ui en toi a fi anche,
Quant par te longue pourveanche
Me fais en tel grieté manoir,
Jou ne puîs ten engien savoir :
5 Le sobre fais par tora pooir
Estre en désir sans astenanche^
Et mes, COQ U pions ou miroir,
En feme, pour moi décevoir,
12 Plus biauté par faînte sanlanche,
II
Amours, tu m*as chiere vendue
Te connissanche et le venue ;
Pour voir ie:^ li Va us Pcrilleus
i6 Plains d*amertunie et sans issue;
Pals a pour guerre bien perdue
Chiex qui a but a tes baricus ;
D'un simple fais un reveleus.
20 Chiex qui sieveni pechies morteus
D'à traire a toi n'ies recreûe.
Bien fais de moi che que tu vcus ;
N*est men'eillc se je sui teus,
24 Car chars humaine lost se mue,
m
Amours,tantcuidierfaîsremaindre|
Tant begînage et tant veu fraindre ;
N'est pas a soi qui bien te sent.
28 Cornent se puet tenir de plaindre
Chieus que tu fais pâlir et taindrc
Sans envoler alegement ?
Repris sui de mon errement
}2 De tcus, par le mien ensicnt,
Qui ne porroient le leur faindre
S'un poi ^ntoicnt men tourment,
Car qui pert et riens ne mesprent
36 Cornent porroit s'irc refraindre ?
son côté, a corrigé sur le texte du Vatican plusieurs passages de la copie de
Sainte- Palaye qui, dès le premier instant^ m'avaient inspiré des doutes ; puis>
ma défiance s' étant accrue  l'égard de la fidélité de cette copie, j'ai prié
M* M. Pelaez de la collationner tout entière avec le texte original ; M. Pelaer
s'est acquitté de cette tâche avec un soin digne de tout éloge* Enfin,
M. G. Paris et M. P. Meyer m'ont prêté, pour F éclaircissement de plusieurs
passages, le secours de leur érudition et de leur sagacité bien connues : que
tous veuillent bien recevoir le témoignage de ma vive reconnaissance.
I. ] A soufïanche, B soufrance Qmn Us mùti de îû nUme strophe fortms avec k
suffixe -antia sont m -ance dam u ms,). — 4 £Ki a en toi f. — 7 -< Je n. p.
ton. — 10 ^ le plonc.
IL 1 3 ss. Ctili strophi manqm dans la copie de Sainte-Pahyt ^ mais tton dans
TùriginaL
m. 16 B p. de tourment, — ao 5 cîaus kî fuient. — 21 5 atraire, — 2^ A
char, B car car humaine tost senîue. — 2\ A fait. — 28 A Qjnem. — ^o A
cvoîer. — 32 .-f cnsiant. — j6 A remandre. Çf, pour la leçon adopta, la rime
de 1/,
TROIS DITS D* AMOUR DU XIII* SitcLE $1
jY 64 Et moi n'en doit on clamer quite,
Car H chars qui tant est despite
Amours, par toi ont amant joie ^'avoir son ses ne croit autrui.
Au conmenchier. puis leur anoie p^^^ f^. ^.^^ j,,^„ ^^ ^^^.^^
Par te defaute et par ten Eut. ^g q^^^^ ^j,^,^ ^ ^^j ^^^^j^^ ^^.
40 Pnnches en ost se gent raloie ^^ „,^ grevanche se délite.
Et de bien faire adès leur proie j^ ^^ ^^. ^^^ . ^^j ._
Mais tu cause ies de leur mesfa.t. ^ r^ngrener ne me conui,
Je ne voi qui ten secours ait g; .^; ^^ ^^^^ ^^y,^
44 S'il ne sert cheli de fol plait
Ou il tent, donfli coupe est toie; VII
Car fins amis qui grief mal trait ^^^„„ ^ ^. ^^.^^ n'enmance mie
Quant pour garison a toi trait, ^o^ j„ ,.j^,„j ^^ ç„ y^^.^
48 Tu li respons : « Fui ! va te voie ! » Li fevres le mancGOe ou coutel,
V 76 J*entenc quant cuers a cuer s*alie,
Amours, chelui. cose est seùre, ^^^^^^ ^'^^^ ^'^^^^ «^""^
Qui le sien a gaster n'endure ^^^^^ ^^^ P<^"^^^^« ^^ ^"^ ^°^ ^^^
Vas au cuer le denque saquant; ^u qui destourbe leur chembel.
S2 Sans proier i quiers te pasture; ^ amours, tu m'as fait de nouvel
Ou vaissel lais une morsure ^'"'^ ^^^ '^^^^ ""^ ^"''^^^
Plus que d'escorpion poingnant. »^ 0-"^ ^^ ^"^^ "^« ^^^^^^ «" ^^ P^^ >
Ce pert a mon pale sanlant ^"^^^ ^^ ^"^^^^ mangounel
S6 Con asprament vaf s] devouram ^^^^ b°" ^^^^'^ ^^ Tescremic !
Chf: c'aler doit en noùrreture. y m
Sot en devienent li sachant;
Qjii pais et repos vait querant Amours, te vie me deshaite,
60 Ne doit de tel oste avoir cure. «6 Car nus n'i a joie parfaite :
Qiii est amés, s'a il paor
Con ne l'oche ou c'on ne le gaite
Amours, donné m'as sans mérite Ou c'aucuns sourvignans n'ait faite
Le tourment que souvent rechite ; 90 Cose dont il quieche en errour ;
Encor me doue de graindre anuî, Chiex ensement qui n'a l'amour
IV. 57 B amant ont. — 39 AB ton. — 41 5 Et omis. — 42 A meffait. —
45 i^ u. — 46 B amans.
V. 49 B A. con cil. — 51 5 as cuers les denkes, A leclenque. — 52 ^
cucrs t. p. — 555 pointure.
VI. 61 La strophe manque dans la copie de Sainte-Palaye^ mais non dans Tori^
ginaî, — 64 5 et moi. — 65 i< fui(?). — 'ji A pieurt.
Vn. 73 ^ en manche. -— ^4 A ens en la main. — 75 5 la mance. —
77 A csrache. — 78 A pourcache el q. son b. — 79 ^ son ch. — ^2 A tx. le
pid. — 83 ^ mangôniel.
VIII. 85 B pooir. — 89 -/< s'aucuns. — 90 5 quiet.
^^^^^^ ^ll^^p^^^^^^l
^^^^^r De cheli qu*il sert nuit et jour
xr ^
^^^^^1 Ne vit point sans dolour entaîte.
AmourSi par men cruel martire ^H
^^^^1 94 A toi a dont mauvais retour.
122 Ai bien prouvé ten maïstire : ^M
^^^^1 Car on n*en vient pas au trestour
Nus ne fu mais si rais a point ^M
^^^^H Fors par dolour ou par souiïraite.
Con je sui, car mes cuers désire ^M
^^^^H
Che dont li cors font et empire. ^M
126 Chil qui plus sont sage et repoint ^M
^^^^H Amours, tes mesfais pas ne note
Et qui eu i dent amer de point, ^M
^^^^H 98 Qui pour se dame cante et noce,
Clie sont chil, quant il leur es- ^|
^^^^^1 Car tu l'as tout empuîsouné.
[point, ■
^^^^^1 Tu îesplus fausse que buhote,
Ou il a mains a desconfire. ^|
^^^^B Car chascuns qui a toi se frote
150 Pour che ne me desfendi point, ^H
^^^^T 102 Se plaint et tient pour engaoé;
Car on dist que deus fois se point ^U
^^^^K Qpant tu as un amant moustré
Qui contre aiguillon escauchire. ^H
^^^^H Sanlant de confort aprestL^
H
^^^^F Au paiîer est une riote.
^^^^^ to6 Ja nu$| je croi, n*cust amé.
Amours, nus ne fait jeu ne feste : ^^^B
^^m S*on percheûst te lasqueté
î 14 Chascuns a Tamasser s*areste ^^^|
^H Ne cornent chascuns i escote>
Pour che que tu ne les semons. ^^^B
^H
Plus roit qu 'esfoudres ne tempeste ^H
Deschens en nous et fais moleste ^U
^H Amours, s'aussi de me leecbe
i j8 Qpant tu veus c'amoureus soions. ^|
^^M tto Pensoies con de me tristreche»
Pour coi n'enflâmes ches garchons ^U
^^m Me paine î porroîe cmploier;
duî vo Qt disant : n Or gaaigaons, ^U
^^M Mais ne voi qui conseil i mcchc,
Puis amerons de saine teste «? ^H
^^H Ne che n*est pas par me perechc,
142 Mais a cheus a flou ris grenons ^H
^^M 114 Car j'aim de loîal cuer entier.
Est viex li vie et li renons ^H
^^m Tu me deûsses conseillier.
D'amer, et s*est au jone honneste. ^^Ê
^^H Qpi m'as fait l'oevrc conmenchîer,
XIU ^^M
^^m Ht tu m'as fait estre en destreche ;
^^m iiS Bien ses fin ami enging^nier»
Amours, te seigneurie est frainte, ^^^B
^^M Car premier le fais allechier
146 Car chascuns de volenté faînte ^^^H
^^H Seur un regart qui puis le bleche.
Aime le feme ou il s'aert ; ^^^^|
^^H VIIL 94 B rccoun — 9$ B au trctour^ A par autre tour. ^^^^|
^^M IX* 99 B que par. — 97 A melTais.
, — loS A qmeut. ^^^^|
^H X. 109 A leesche. — 117 B me fais, — n8 B amam. — 119 ^ allekier, "^1
^^H XI. I2t A mon. — 121 A ton» B 1
naiestire. — 124 B lui, A desirre. — ^H
^^H 136 A Cbis. — 126-7 ^ i^^ i^ "^ ^
amer de point cil ki plus sont s^ge et ^^t
^^H repoint, — 1^0 A deffendi. — 132 J 1
esguîllon. ^H
^^1 XIL 156 ^ plus tost qu'etfoudres. -
- 141 A tieste, B de sainte t. — 142 B ^f
^^H a kenus g.
a
TROIS DITS d'amour DU XIII* SIECLE 33
Tel jurent fe[e]uté a mainte Bien deûsses prendre conroi
Qpi moût tost ont le trieve en- De chelui qui bien ne s'aquite
[frainte 172 Vers se dame, ains fait son gaboi
150 S'ele est tenue a descouvert.
Qpi n'a c*un oeil souvent le tert :
Pour coi ne garde bien et sert
Bonne dame qui l'a atainte?
154 Bons est li jeus ou nus ne pert;
On soloit amer en apert,
Or aime on a candaille estainte.
XIV
Amours, n'en puet aler sans perte
158 Qpi en ten serviche s'aerte :
Fierté i troeve on et orgueil.
Te porte est contre tous ouverte,
Desus est de cloies couverte :
162 Q.uant je cuidai passer le sueil,
Je caî ens, dont je me dueil,
Et la pris si mauvais escueil
Qji'encore est me folie aperte;
166 Car quant de toi partir me vueil.
Je retourne, quant doi vair oeil
Sont respondant de me déserte.
XV
Amours, tu ne fais droit ne loi :
Q.uant il a goï du tournoi
Par menchoignes et par refuite,
Puis le laist tourner a le fuite
176 Quant il l'a hounie et destruite.
Ch*est trop povres gages de foi
Qu'il mist, ains qu'il venist a luite;
Puis que désirs d'amant afruite,
180 Comenche il estaindre se soi.
XVI
Amours, pour che pas ne le di
Qpe femes ne facent aussi,
Par aventure, et pis encore ;
184 Car quant feme a sen cuer verti
A un amant et consenti
Tant qu'il ait de s'amour vitore
Et plus net le voit c'un yvore,
188 Tant sont de muaule memore
Q.'ele a chelui lues enlaidi
Pour un nouvel qui li plaist ore,
Par un behourt de vaine glore :
192 Ensi sont li povre houni!
Chi defincnt li ver d*amour.
XrV. 158 A ton... saiene. — i$g A fiert. — 160 Corr. fosse (?). — 161 B
dcsous. — 162 A suel, B soel. — 163 A doel, B de koi me d. Ce vers est
dans A fiocé après 166, — 164 AB escuel. — 165 A encor. — 166 AB voeil.
— 167 A loeil, B oeul.
XV. 169 B tu nen. — 170 S deussies. — 172 B et fait. — 173 5 del otroi.
— 177 A Chest p. g. de se f. — 180 ^ estraindre (r expotictué) se foy, B
estraindre son soi. Dans A u vers est ajouté en marge.
XVI. 181 B li di. — 182 A sachent. — 183 et manque A. — 184 A son.
— iS6 Bt. qu'il a, A victoire. — 187 A yvoire. — 188 A mémoire. — 191
Bpour.
54 A. JEAKROY
n
NÈVELON AMION
I III
Amours, j'ai oï de vous faire Amours, se je dire l'osoie,
Mains boin[s] ver[s] qui bien doi- ^es jus est de boute en coroie
[vent plaire : Dqjj^ ^^'^j j^^^ „ ^^^^ j^j ^^js .
Or voel les miens faire savoir ; ^8 Defors te tins, qui seus le voie.
4 Ne puis plus celer men afaire : g^ j^ ^^^^^5^ ^^^ ^^ javoie
Vous me faites plus droit contraire l^^ f^^^ pj^i^ ^^^ ^^^^^^^^ q^i^ .
Qpe li fins blans ne face au noir; q^^ • ^^^^ ^^^^ j^j es^ahis.
Servi vous ai a men pooir ^^. ^^^ ^^^^ Qr serai malbailUs
8 En loialté et sens mouvoir, ^ ^^ ^^^^^ ^^^ j^ ^^^^^^^
Or me volés faire mal traire ; q ne vaut reconfors d'amis :
Mais je ne me sai percevoir ^ntre vous deus soit li estris,
due malvaistés puist remanoir ^5 ^ar je vous voiderai le voie.
12 U tous li biens maint et repaire,
II
IV
Amours, biautés et seignourie, Amours, u tous li maus se maire
Sens et honnours et courtoisie Et u tous li anuis s*esclaire
Maint en ten cuer et croist et tient, Et u tous li confors s'estent,
16 Et avoec tele compaignie 40 K'ai je meffait, ki ne puis plaire
Mais ni orguix ne vilounie A vous, ki estes deboinaire.
Ne se devroient tenir nient ; Ke me donnés alegement ?
Mais je pense c'on les retient Qpant merci crie doucement,
20 Pour ce que, s'aucuns faus i vient 44 Vous respondés crueusement :
Ki voelle avoir a force amie, « Fui de ci I De toi n'ai que faire :
A ciaus le baille on et détient : J'ai chou qui me vient a talent. »
On le pourtire, on le raient Ensi en moi coisist et prent
24 De cuer, de cors, d'ame et de vie. 48 Sans parler a prevost n'a maire.
A Chi commenche d'un dit d'amours que Névelos Amions fist. — B Ces
vers fist Nievelos Amions.
L 2 A Maint boin v. — 9 B mal f. t.
II. 15 AB ton. — 16 B Ja ueuc t. c. — 18 AB devroit. — 19 Bc'on le r.
— 20 B pour c. q. s'a maus i v. — 22 5 le baille on le détient. — 23 i< ptire,
B pourtire. — 24 B cuers.
III. 28 B tiens. — 29 B Et jou de .11. — 30 5 Le faus ploi q t'avoie q.
— 31 B fui. — 32 AB Mon. — 33 -^ le garderoie, B qi legardoie. — 35 soit
dans B remplace un mot gratté. — 36 AB le.
IV. 41 B Vers vous. — 42 A K\y B Q, me dougnies. — 43 i< prie. —
47 B ami kieusist et ; les deiix derniers mots sont écrits sur un grattage.
TROIS DITS d'amour DU Xill* SIECLE
SS
Amours, aussi cod H caiaus
Ki jue volenders a daus
U il troeve un peu d'amisié ,
S 2 Juai a toi cou jouvenciaus :
Mes or est falîs mes revîaus,
Kant n^i truis deboinaircté.
On ni*a aucunes fois conté
56 Ke tu faisoies en esté
En pur le cors porter capiaus ;
J'en ai par maintes fois poné
U je n'ai senti fors grieté :
60 Ades fail a tes biens roiaus.
VI
Amors, kî en maint boin cucr mains
Et qui maint bel viaîre as taîns ,
Je te pri merci et requîer
64 Que tu m*ocies a tes mains :
Je ne te quier plus de demaîns,
Trop me fais languir et sekierï
Souviegne toi du maronnicr
68 Ki al a en le mer pcskîer :
Si prist tant que se rois fu plains,
U ne le peut a soi sakier ;
Perdre li cou vint et laissier*
72 Fai en autant de moi au maîns I
VII
Amours, oîsiaus pris a le glui
N'a tel honte ne tel anui
Con dl qui est pris a te roi ;
76 Je ne trouverai ja celui
Devant cui n'ose bien cestui
Prouver, si vous dirai por coi :
Sans faille il est en grant effroi
Bo De ce k'il pert sen esbanoi
Ne k'il ne puet faire refui ;
Maïs cis ki pert sen cuer et soi
A cent mile tans plus d'anoi,
84 Car qui lui pert ne got d'autrui.
Vlll
Amours, amours, plus de cent fois
Ai sentu de tes esbanois«
Mais ne me sont ne boin ne bel.
88 D*une cose est vo maus courtois.
Car il n'est ne princes ne rois
Cui il ne saille au haterel»
De la 1) entre ens u cervel;
93 Perdre li couvient sen revel :
Pensis devient, simples et cois;
Plus grant mestier a d'un caude 1
Que li poissons n'ait du ruisscl
96 Ki pasmés a esté trois fois.
IX
Amours, j'oi tout le mont bla[s]-
[mer
De vostrc afaîre, car ouvrer
Vous voi trop souvent a rebours.
100 On en puet moût de biens conter,
Mais on en i en puet peu trouver,
S*encore ouvrés de vos faus tours.
Uns menestreus ki maine un ours
104 Pour gaaignier d u aillours
Le bat toute jour pour tumer ;
KuDt vient au soir, k'a fait ses
[tours,
Ne li faut il pas de secours»
108 Ains li fait de sen paîn doner.
V, 51 Dam B Us trois derniers mois écrits sur un grattage. — 55 -^ par
maimes fois, B aucune fois. — $7 /f Aîer en cors. — 58 B mainte» — 59 fl
Ia u je ne. — 60 B toudis.
VL Manque dans B.
VU. Manque dans B, —yZ À par. — So ^ son. — 82 A son-
Vm. Manque dam B, — 86 A a s, — 88 A vos.
IX. 97 B joc tout le monde blasmer. ^ ïoo B bien* — 101 B o. e. i. p.
poim^ — 102 manque dans B. — 194 B iaillours* — 106 A K. v, au nuit k*^t
&is i. t, — Î07 B point, — 108 AB son.
S6
Amours, tu fais le sot séné.
Le couart hardi redouté,
Et l'avarissieus courtois ;
112 Et tu m'as du tout oublié.
Je ne saî que t^as en pensé,
Mais tes bienfais m*cst moût es-
[trois :
Par tout est connus tes hamois,
116 E las ! et je ne le connois»
Fors tant c'on m*a dit et conté
K'en ten escu siet demanois
Une dame blance con nois,
120 Vermclle con rose en esté.
XI
Amours^ ains ne fu cevatide,
Tournoiemens ne ost banie,
U on ne sentist de tes caus,
124 Tu fitis faire cevale rie,
Tu fais perdre Tame et le vie,
Tu fais crever cors et cevaus.
Par tout est crueus tes assaus,
128 F^t a moi plus qu'a trestous ciaus
Ki au jour d'ui soient en vie;
A nului n'est li cemins saus,
Ni envers moi n'ies pas ioiaus :
IJ2 J'aim t*ounour et tu liés me vie.
XU
An:iouts, tu lances tempre et tart
Par ml et par tout de ten dart,
Et quant plus t'aime on, plus fiers
[fort.
A* JEANROY
1 56 Je ne voi szgc ne musart,
Puis qu'il a pensé celé part,
Ki ne s'en plaigne et desconfort.
A ten fait resemblc le mort :
140 Tu fiers a droit, tu fîcrs a tort,
N'îl ne t*en kaille de quel part.
Mais a ce mîe ne m*acort
Que chius ki arrive a ten port
144 Alume le fu dont il 5*art.
xin
Amours, t'ics de tel bien garnie
Et de si haute segnourie
Que li maus en doit pourfitcr;
148 De ce que j'en senc t*en mercîe;
Mais, pour Diu, se j*ai dit folie,
Que le me voelles pardonner.
Et je suis près de l'amender
152 Ensi con vaurés con mander,
Con chiens de cui estes saisie,
Du plus cier gage que donner
Puisi nus hom por soi racater,
156 S*or avoie mort desservie.
XIV
Amours, il n*a cuer en cest mont,
Tant i seûst penser parfont,
Dont bûuce peùst raconter
160 Les grans bontés ki en vous sont
Ne le grant bien que cQ aront
Ki vous senfironi sans fausser,
e mal lor faites endurer,
164 Ce n*est fors pour eus esprouver
Et pour vir lî quel rekerront.
Or doinst Dix si amans ouvrer
X, 1 14 iî biens fais, — îiy B dit par vreté. — 1 18 B q lun e. -^ ton.
119 A blance dame, B conuois. — 120 B vermeille q.
XI, 122 B nu — I2î B la ou ne. — 128 B iamoî. — 129 A qui. — i ji B
point. — 132 Biâlmc.
XII, 138 B kil. — 139 ^ A tous fais resembler le ra. — 141 A il ne te. —
A 143 cius.
XIIL Manque dans B. — 1$} A cieus.
XIV, Manqtie dans B,
A. JEANROY
Sans faille, quant sui en recoi,
224 II me souvient de men anoi.
Mais quant le voi, tous m'entrou-
[blie,
Car d'un tout seul regart pais moi ;
Puis k'il s'est pris au bien amer,
244 U tu ne faces de t*cnfanche :
Au premier li taus Fastenanche,
Puis ti fais de son douç amer;
Vellier li est u et et penser,
De ses doux iex miex me conroi 248 De chou ne se puet consiurer ;
221 Ke de toute autre conpaignie*
XX
Amours, se li preu et H sage
Avoient aucun avantage.
Si com il devroient avoir,
232 On feroit plus de vasselage
C on ne face ore de bamage :
Ce puet cascuns trop bien savoir.
Mais quant amis fait scn pooir
236 De lui avancier pour valoir,
S'ics lu de si m al vais usage
Ke lau U est dignes d'avoir
Le gucrredoQ a sen voloir,
240 Portes tu contre lui ten gage.
XXI
Amours, en Flandres ni en
[Franche
N*a home, tant ait grant pois-
[sanche^
Ccst sis confors et s'esperanche.
Rien ne li plaist a recorder
Fors le regart et le vis cler
2$2 I>OQt II mais naist ki point n*es-
[tanche.
xxu
Amours, puis que li soufHsant,
Lî preu, li sage, U vaillant
Sont pris, ce n'est pas grans mer-
[velle
256 Se jou^ qui ai peu d'essiant,
M'otroi a faire le comant
D'uns vairs iex s ou r face vermelle.
El bêle douce sans parelle,
260 Con j*aim le cuer qui me consdle
A vous remaindre a men vivant ;
Pour ce, se je souspir et velle.
Ne lais je pas que n*aparelle
Le cors a faire vo conmant.
m
GUILLAUME d'aMIENS*
Amours, moût as bêle ventie,
Mais ausî tost es pourveûe
De grever daus que tu as pris,
4 Car tu mes grant biauté a vue
Qj cuer d'oume esprent ci remue,
Par coi cascuns est esbaubis ;
Et pour çou m*i estoîe mis
XÎX. 22f 5 a r. — 224 B voit. — 226 5 regart par soi. — 227 B de ses
vairs îeus. — 228 B q d'autre toute c.
XX, Manqui dam B, — 25s, 259 vi son. — 240 A ton.
XXI* Manqiu dans B. — 241 A France, ft de mime -ance dans t<ms les mott
dt mime natmt, — 24J -^ a pmicrs. — 249 A c'est li c, de scsp.
XXn. Manqm dans B. — 261 A mon.
•Willaumcsd* Amiens li Paigncrres,
^^^V TROIS DITS D*AMOUR DU Xlll* SrfvCLB 59
^^Ê S Qpe je aiidoîe que tes pris
40 Pour celi qi a mort ra*atrait.
^H| Me deust gecer hors de mue,
Car toudis me truis volentieu
^H Màb oprimes me trui je espris,
De H servir, se mètre en îieu
^H Car j'ai de te douceur apns
Me voloit en fin mcn bien fait.
^^1 la Et tu le m*as Liere vendue.
Mais nennil : orgeus Ken retrait.
^^H
44 Aîns pcrderont cl cors et plait
Qi de mau faire sont doutieu.
^^^^^ Amours, tu m'as si fort cape
Je voi ja c*on trop lor fourtrait.
^^H Qpe ue puis avoir cskapiî
Il convenra savoir du wait :
^^M Le Guer qc m'a pris et loiiet,
^^m ]6 Âitis m*a si avant atrapé
48 Trop sont ti mesajc soutieu. . '
^^1 £t mes bien fais si recaupé
V 1
^^M Qmc je me tieing a forjugîet.
Amours, nus ne se doit pre[s]ter
^^M L'escarcete m'a resoiet,
A ti, s*il ne se veut douner
^H ^o Qi de l'amour q\ orc kiet
Du tout et roeirc en ten couraant.
^^^^ M'ar«te et tient pour encoupé;
$ 2 Car qant on cuide outre passer,
^^^H Bien en sont mi souks cangiet ,
Tu fais d'un[s] vairs iex retourner
^^^^^ Quant cle a mcn coiist Va vuîdiet
Si doucement en atraiant.
^^M 24 D'un fameillous sool estoupé.
Bien cuide tieus estre a warant
^^^H
^6 Dont li getes un ris devant
Qi no se puet desvolepcr;
^^^H Af&ours, comment osc[s] tu pren-
QAUt sur ti le sens apendant,
^^^1
Tu le fais vivre en lanwissant,
^^V Uoume, quant tu ne H vcus rendre
60 Tu li doune[s] mort sans tuer.
^^^^^ Le roa(u)l q'U a pour ti servir?
VI ^^m
^^^^P 3$ Tu li fais ea deus le cuer fendre ,
^^^^^ Se ne veus au saner entendre ;
Amours, con tes bien fais est vieus 1 ^^^H
^^P S^as bien pooir de li garir :
Conm[e] a en ti servir de prieusl ^^^^|
Four coi le fjis tu donc modr.
Nus n'est si sages qi s'i wait. ^^^H
|a Et se ne li feras ja vir
64 Ja n'est il matres ne baîliieus, ^^^H
Qantiaus tes pooirs puct estendrc?
Tant soit dcsloiaus ne desrieus , ^^^H
[H)ius boTO, se tu le veus saisir,
N*ait pec d'aucun home mesfait. ^^^^|
Il n*a pooir des dens ouvrir.
Las ! Je t'ai servi a souhait, ^^^^|
|6 N*tl ne se puec vers ti desfendre.
68 Et tu m'en rens mal si entait ^^^^H
rv
Q*il n'est de mi grever tardieus, ^^^^|
C*cst niens : je suî mors entresait. ^^^H
Amours, tu me fais estre eskîeu
Comment vainteroie tel plait ? ^^^H
D*aourer et le siede et Dieu
72 Tes jugemens est a ten kieus. ^^^H
II4 ij Z/ fni. semhU avoir tape. —
[$ qi m'a. — 17 fait. — 19 Liscircele ^^^H
reDoiet. — 25 gousi.
^^^H
IV- 46 fourgrait.
^^H
V. %i ion. — s s cieus (?). — J9 lanwisant. ^^^H
VI* 61 bieos f. — 6s desloial. — 66 pec (avec i siMscriiy — 72 tens. ^^^|
^ 60 A. JEANROY ^^1
^^^^H
Qi sont prîLleus et redoutaulc? ^B
Et ciaus qi ont bon cuer ^taule ^B
^^^^^^H Amours n'est fors menestrandle
104 ^t servent du gieu de le taule ^^^|
^^^^^^H Qi fait en grant baarie
Et qi d'amer sont deliteus, ^^H
^^^^^H Chascuns qi se[s] estrumetis ot,
Vers ci eu s ne veus cstrc bontaulc ; ^|
^^^^^H 76 Mais tous li mondes ne set mie
Bien t'en doi tenir a muaule» ^M
^^^^^^H Con bêlement ele ennuelie,
108 Quant vers tes voisins clos tes eus, ^^H
^^^^^^1 Car ele fait d'un saje un sot ;
^H
^^^^^^B Kus entre qî ne radot^
^^^^^^F So Ne jou ne voî que nus s'en lot,
Amours m'a fatt si haut penser ^^H
^^^^^^^b Tant le serce par signerie.
Que jou n'os me dame moustrêr ^M
^^^^^^H Tels cuîde avoir passé le bot
Le mal que tant me grée et plaist, ^M
^^^^^^^K Qi puis î paie graut escot :
112 Ains voel men cuer moût aourer * ^Ê
^^^^^^^H 84 Toute raisons i est folie.
Qant de çou se puet saouler ^Ê
^^^^H^
Que de rowart sans plus se paist, ^M
Ni onques, qant amours le trait, ^M
^^^^^^H Amours, que ne fois tu
1 16 De tel caup ne se plaint ne brait. ^M
^^^^^^H Ma dame aussi bien le désir
Pour çou si n'ose a li parler, ^M
^^^^^^H Et le mescief que jou le sent ?
Ains suefre et atent et se taist ^M
^^^^^^H 88 H me convient ses bons soufrir i
Et vraiement sai k'i[ll me lai(s)t ^M
^^^^^^H He m*a fait le gieu coîsir,
1 20 Pour plus loing salir reculer. ^M
^^^^^^H Bt m'en a douné le coument
XI H
^^^^^^B Et quant fou plus vers II me rent
^^^^^^V^ 92 Et merci demande et atent.
Amours. Jou m'esmervel pour qoi ^M
^^^^^^B Ne veut ele a mes maus partir»
Tu ne maines les gens par loi ; ^M
^^^^^K Ains me respont que se jou vent
^^^^^H Que fou warge a cui jou reprent,
^^^^^^K 76 Se jou veuc du catcl joîr.
Tu dois estre si droituriere, ^M
124 Et tu fais l'oumc estre en esfroi, ^^H
Et le feme mener dosnoi ^^^|
Et par mi sen tort estre fîere. ^^^|
^^^^^B
S*on ose blasmer te manière, ^^^H
^^^^V Amours; comment es çou c'or-
128 Tu me sambles trop coustumierc ^^^B
^^^K
D'ouvrer mal, a çou que jou voi. ^^^B
^^^^^b Ne sueflFt-e c'on aime autant deus
Tu fais servir sans te prière, ^^^H
^^^^^^^ Opi sont entour les gens antaule,
Ne on n'en ose aler ariere ^^^H
^^^^H^ 100 Qmc les estraigne[s] dangereus
I J2 C'on n'ait d'oscur semblant con- ^M
^^^^H Qi vont partout qerant lor preus^
[vd, ■
^^^H VIL 75 menestraudieC?). — 76 tout. — 81 serce. Corr. mene(?). -> 84 ^^|
^^H
^m
^^^^1 vin. 87 senc* — 89 coisier. — 91
reac. — 92 atenc. — 94 venc. — 95 ^M
^^^^H
■
^^^H IX. 99 anîtable (?}• — lo; estable.
^ 104 de greu dditiule. — 10$ déU- ^M
^^^^H Uule qui fausse la rimf. — — 107 muable. ^^^|
^^^^^^^ X. lîo ma. — 114 rouait.
^^H
^^^^^^k XI. 121 meifiveu, — 125 dannoi.
1
TROIS DITS d'amour DU Xlir SifecXE 6l
^j Celi cui n'ose demander
Merd : pour tant Tarai perdu.
Amours tent a rois et a traus Comment? de campion vaincu
Pour prendre et pour a(s)rester ^^^ qj ^.^.^^^^^ j^^j^j^ ^^ ^^^
[ciaus ^,Q- Qj^ onques mais parler ;
Qi aiment; toudis surque et Mais jou le sui, car quant foi vu
[naque, L'aspre samblant qi me fi(s)t mu,
136 Et cieus i vient qi sent les maus, , ^g Je fui vencus sans adeser.
XIV
Car il cuide bien estre sans :
Pour estre waris s'i esplaque,
Il s'i enfeut et s'i enrai;s]que ; Amours, bien te doi saourer
140 Cascuns i fait plus que se tasque, Q^nt tu me fais celi amer
Et qi plus aime plus est caus, Qi m'envoie tel essamplaire
Ne n'a qi ses maus li ala[s]que; 162 Qi me fait a honneur béer
Et dont di je q'amours fait raque Et en goie le cuer floter
144 Ausi bien les boins que les faus. Et en sus de tous mauvais traire.
Ai mi I a si douç saintuaire
^^^ 166 Doi je bien de men cors don faire
Amours, con tu me fais comprer Et men pooir resvertuer.
Les biens u me fesis béer ! Bien me doi de li priier taire,
Ams que jou connusse ten j(e)u. Car jou truis en sen douç viaire
150 Men cuer me tolis pour douner 170 Con doit bon paieur déporter.
NOTES
I
5 Pourueanche, délai. La série des sens doit être la suivante : provisions,
temps nécessaire pour se les procurer (voy. l'exemple de Froissart dans
Godefroy), délai.
9 Cf. Chansons, III (éd. De Coussemaker, p. 14) : « Chil qui plus sont
d'astenanche... | Aroient droite escusanche | S'il deVenoient amant | En
désirant | Ma dame.. »
15 Allusion à un épisode du roman d'Alexandre (éd. Michelant, pp. 320
et suiv.) dont la source n'est pas connue. Voir P. Meyer, Alexandre le Grand
dans la littérature du moyen dge, II, 173-4.
26 Cf. Chansons, VI (éd. p. 26)*: « Par leur boisdie (des femmes) |
Escolc, amis et signerie | Ai perdu, par eles anter »; Jeux partis, XIII (éd.
^11. 151 qi. — 156 jeu w. — 157 samblamt nu dans la copie de Sainte^
balaye,
XJV. 16^ son.
62 A, JEANROY
p. 171) : « Car pour amours je saî certainement | Ne guerpiriés a pîcche vo
argeai : | Che fai jou clergie. » tljfu de la Ftuillét, au d«ibut.
29 Cf, DiNardsm (Méon IV, 149) : « Atnors noircist vÎAÎrc et taint... »
Sur le redoublement de ot& deux expressions, famîlîef au moyen âge; voy.
Maetsner, Altfr. LiaJer, p. 164,
44 Cf. Chansons, VI (éd. p. 26) : « Ne nus por bel servir n*i vaînt | Ni
por sa dame foi porter, | Mais li trechiere qui se faint, | Tel ont amie. »
48 Cf Chansons t XIX (éd. p. 75) : « Et si me douch moût ausî | Se je
Taparloie (éd. : se jfkp. ) [ Nedesist: Va te voie! », ibtd.t XXVII (éd. p, 105)
c Et lues que g'i sui venus, | Ele me dît : Levés sus! » — Œ encore Motets,
n(éd. p. iî7).
49 ss, I^ sens de ces vers n*est pas très clair. Je comprends : « Au coeur
qui voudrait se dérober à tes ravages, tu vas secouant le loquet^ n c*est-à'dire
tu y pénétres de vive force,
5$ Cf. Chansons, IV (éd. p. 19) : <x N'est pas pctis li maus qui me des-
Iraînt : | Mon taint viaire en irai a tesmoignage, *> et XVI (éd. p. 64) : k A
mon vis pcrl cl a mon maintien coi. »
57 Je comprends : « Tu dévores (dans nos cœurs) ce qui devrait servir
â notre nourriture; » au v, 5^, le cœur a été comparé, fort bizarrement, au
vase dans lequel l'amour prend sa nourriture, et qu*il détériore, non content
de ïc vider.
58 Cf. Chansons, VI (éd. p. 16) : « Amours le sens loic cl estaim... |
Q)ti plus i set, mains i voit der. »
7 1 Cf. Jeu de la Feuillet (éd. p. 299) : « Garde cstuet prendre a Tengrener, w
88 Les formes analogiques du subjonctif de la i^conjug. en -ce, loin d*étre
•ttssi rares que le dit Schelcr (Trouvhes belges, H, H^) ^ propos de douce
(r= dubîtet), sont très fréquentes dans h langue d'Arras. Ocl)e en particu-
lier (ou 0») est plusieurs fois attesté par la rime : « Li Auduins en se maison
I Hc doit parler si haut c on Toce | C*on ne le jeté a le caboce, » etc. (B.N.
Êr. 1261$, foL 307 &.) Cf. dans les Vers de h Mort (éd. Windahl, str
IVin) : oa : toc* : reprùu.
9) Entait t non relevé par M. Kôrtingi remonte, comme Ti bien vu
Schcler (//. dt Cmdé^ p. 500) â in tact uni. Cette étymologie explique Tac-
ceptioQ de V frais, dispos » par opposition à « fatigué f* (voy. Godefroy,
seconde série d 'exemples). Du sens de n intact a dérive immédiatement celui
de » complet* achevé «, qui se trouve dans une locution {jomex entaite) où
M. Godefroy n'a voulu voir qu'un sacrifice à la rime, et dans un passage des
Congii de Bodel ikom. IX, 257), où M. Raynaud tr.iduit le mot par « mis en
UMti #, Cr encore» pour ce sens , les vers de Guillaume d'Amiens imprimés
^in bla (Mh ^).
joo Buhott^ que M. Wmdahl traduit par «r fa^^uin 1» (?), semble bien stgni-
im « cruelle », comme le dit M. Godefroy, mais se prend souvent comme
IjfflonyiiBlc de « cliose trompeuse ^ : voy. les deux exemples du Dictionnaire,
^fii ipptitknncnt tous deux à la région picarde (le second est tiré des pièces
TROIS DITS D*AMOUR DU XllV SIÈCLE 63
udriques sur Anas , qui se lisent à la fia de 12615^ et Tadjectif ^u^tos,
■ trompeur »,dans le Jeu de la Feuillu, Mais qu'y a-t-il de common entre une
cruche et une chose « fausse • ou « trompeuse » ? Peut-être le mot n'est-il que
U forttie fifimininc de htljot^ conduit , gaîne « , goulot. Du sens primitif de
« objet creux, tube », on a pu passer facilement i celui d'objet peu résistant
tnalgré les apparences, et qui tromperait quiconque se fierait à sa solidité.
loS Le mot ticokr^ signifie proprement «t payer son écot ». L*étymologie
dmcètrc eic-quûtt-are (dequottus pour quotus) et non un mot ger-
mamque (Kôrtmg, 7291),
122 Cf. Cofi^is de 0odd, V. 305 : « Bien ai prové sen malstire » (cf. Rom,
IX» 246). Il semble qu'il vaille mieux traduire ici par « pouvoir n que par
« sdcncc »,
!2J Misapaint^ non « accommodé, apaisé a (Godefroy), mais «dompté».
125 On sait que cette opposition entre le corps et le cœur est un des lieux
communs les plus rebattus de la poésie amoureuse,
126 Rcpcnnt (re-punctum) ^ sage, avisé. Ce sens doit reposer sur une
métaphore qui n'est pas très claire. Cf, une image analogue dans la locution
« être battu d'une chose » pour « la savoir » : « D*amour sa voit bien Tusagc
I Car batue en avoit esté | Plus d'un hyver et d'un esté « (Froissart, Eipin.
amour. 1284). Comparez rallcmand htschlagm =^ habile, a ferré» sur quelque
chose.
127 Df points modérément-
1)2 Eicaiicinr^ regimber, proprement « ruer », de ex-calcjtrare,, non
enregistré par M Kôrting dans son Lat.-rotmn, ÎVmt, Ce proverbe semble
emprunté aux Actei dts Apâ(res{lX^ s ; XXVI, 14) : « Durum est contra stimu-
Jum calcitrare, » Aux nombreux exemples qui en sont cités par M. Godefroy»
'on f>eut ajouter les deux suivants, ïc premier d'Adam lui-mcme, le second
d'un poète contemporain : « Amours me prist en itcï point | Ou !i amans
deus fois se point | S'il se veut contre li deffendre. » (Jfu de la FemlUe^ éd.
p. 399.) • Car on voit souvent avenir | Ki contre oguillon escaucire | II s*en
puct dcstruire et ocirc « (1261 >» fol. 207 ^ ). Cf. à ce sujet une savante note
\ût M. Chabaneau, Htvut des îanptci rom, XVIII, p. 264, n. 2,
IJÎ-4 Dans les Cotisa ^ composés, comme on le sait, vers 1262, Adam
exprime des idées analogues sur les habitudes de parcimonie qu*avaient prises
depuis peu les riches bourgeois d'Arras, et qui contrastaient avec leur prodi-
galité antérieure; voy. notamment les strophes iiî et xi.
144 On trouve des idées à peu près semblables dans deux des pièces sur
Arras du ms. 1261 s : Tune (CtrU^^ c'est laide cose^ foL 198 v*>) tourne en ridi-
cule les barbons qui veulent être iwviam drus (cette pièce est certainement
tpostérieure à 1258, car elle cite comme mort Adam Esturion, mentionné â
loettedate dans le Rrçistrf dfs Jongleurs et Bourgeois d' Arras); Tautre (Biett est
ariagei ounis^ fol. 200 r») s'attaque aux mariages disproportionnés qui , en
«i Voici UB »emfi^ de Frobun non recaeiJtî pAr M. Qodeftoy : • K« on^i3«4 U Umert ne li vok
hanétA IniiIdi oa U lunste eftûit boutée. ■ (Ed, Luee, UI, 4^^')
^4 A. JEAKROY
unissaint de toutes jeunes 6Ues à des vleiHards , introduisent dans tes familles
toutes sortes de desordres.
151 Proverbe dont le sens, qui se rattache assez bien^ en somme, à celui
des vers suivants, est qu'il faut conserver avec le plus grand soin un objet pré-
cieux et qu^on ne saurait remplacer, Voy, Le Roux de Lincy {Le livre des Pro-
verbes, II, 394) et le début d*un conte de la P'^le deîPhes, cité par M. Tobler,
d'après le ms. Steger-Mai : « Qui n'a c'un yeul souvent le tert, | Car y scet
bien, se il le pert, | Ja mais yeuî ne recouvera | Ne ja mais goutte ne verra »
(Jahrb, VII, 406). M«»« Ida de Dùringsfeld en cite plusieurs formes hollan-
daises et italiennes, et une française^ où le sens paraît atoir été médiocrement
compris : « Qui n*a qu'un oeil souvent le torche ; qui n'a qu*un fils le fait fol;
qui n*a qu'un pourceau le fait gras » (S^ricfni*ôrter, ï, n» 397),
159 Aerkr (j*), s'attacher ii, ^ M. Godefroy n'a que s'aerder,
168 Daerte ^ défaite, perte, C*est le substantif verbal de déserter (=: rava-
ger, gâter), qu'il ne faut pas confondre avec déserte, part, passé fém, de deser-
M>, seul enregistré par Godefroy.
170 Prendre conroi =^ prendre des dispositions au sujet de».., ici, faire jus-
tice de.*.
192 Cf. Chansons» VI (éd. p. 26) : «1 Qpi sait mentir et guiler | Ou qui
a assés a doner { Tel ont amie.»
U
18 Les poètes lyriques se plaignent souvent que, chc? leurs dames, les plus
belles qualités s'associent à un orgueil qui les dépare : « Amours, ja en fine
bîauté I Ne deùst avoir orgueil tant » (G. d'Espinau, Raynaud, no 954). Cf.
Amaut de Marueil ( Sim dtsirenhei^^ coup. 2; G. Faidit, Tant ai^ 64; G.
d'Usselp Gtide cîmnîar, c. 5).
25 Pôurtirer (manque dans Godefroy), tirailler, tourmenter, vexer.
26 Sur la locution boute-tn-couroU ^ voy. Rom. XXI, 407. Aux exemples
cités en cet endroit , on pourrait en ajouter deux , Motets (éd. Raynaud II ,
36); Adam de la Halle, éd. p. 172
32 Être maîbaiîU n ou envers quelqu'un r— ne pouvoir remplir ses enga-
gements envers lui,
37 Le verbe tttairier (que M. Godefroy enregistre sous les formes fautives
mairerj tnerer, merrer) dérive régulièrement de *majorare plutôt que de
m ace rare ÇZeitschrift^ IV, 41Q) et signifie propreraem maîtriser, dominer.
D*abord signalé par M^etzner (Attfr. Lieder, p. 248 , cl Scheler, Baudouin de
Condé, 419) , il a été l'objet d*une longue note de M. Tobler (voy. Jahrhuch
fur rortL Littr,^ VUI, 34 1).
45 Cf. plus haut Adam, v. 48,
48 Métaphore peu naturelle qui assimile l'aroour à un chef de brigands ou
de routiers levant illégalement des taxes.
57 Entendez : des guirlandes ou cltapelets de fleurs^ considérés ici comme
TROIS DITS d'amour DU XIII* SlfecLE
6$
Symbole de l'allégresse (voy« du Gange, Capellus de rosa), telles qu'on
eapon^U par exemple, aux fêtes de mai (Voy. G. Paris, dans Journal des
Séants, 1891, p. 686, et 1892, p. 421, n. 2). Cf. Guilhem de Montanhagout
Btl m'es quan (Tarmas^ envoi (R. IV, 214) : « Eiiglés, de flor Fuitz capelh o
de fuelha. » Je comprends : a L*amour m'a fait souvent, en été, porter des cha-
Jets de fleurs, mais ]e n*ai jamais ressenti la joie dont ils sont la marque. »
)n peut , il est vrai , se demander pourquoi le pocte ajoute : m pur U cori}
Peut-être : « Sans quç le reste du costume soit à raveaanl? » A moins encore
que ces mots ne soient une simple cheville.
62 Cf. plus hautf note sur le vers 29 de la pièce 1.
67^ Dans ce passage bizarre et quintessencié, le poète chargé de maux
semble se comparer au filet chargé de poissons, et il supplie l'amour (assimilé
au pêcheur qui traîne ses filets ) de ne pas h torturer davantage. 11 doit y
avoir li une allusion à une légende qui m'est inconnue , ou peut-être simple-
ment à an passage de TÉvangile (Luc, V, 6), qui aurait été légèrement
altéré : il n*y est pas dit , en eflet , que les pêcheurs du lac de Génésareth
aient dû abandonner leurs filets, mais seulement qu'ils ont eu beaucoup de
peine â tes retirer de Teau.
77 Ostui, au sens neutre, cela, cette proposition.
79 //, roîscau pris à la glu ; foin refui -= s'échapper.
S4 Ijti ^=. Soi-même.
^ fat smiu de tes esbanms^ c'cst-â-dire « tu m'as pris pour objet de tes
amusements ».
90 Cf. un passage d'une chanson anonyme (et inédite : Raynaud, n*» 1 108)
nposée sur un rythme curieux : « Amers n'ont point de seigneur, dire le
porriDÎc, I Car II n'est ne rois ne cuens qu ele ne mestroie. | Puis qu'ele a un
home ^Dt desoz sa corroie, | 11 ne s*en puet pas défendre n*aler autre voie j*
(B. K. Nouv. acq. fr. 1050, fol 238).
94 s n a grand besoin de reconfort. »
109 Ce lieu commun souvent développé (cf. plus haut, I, v. 19) se pré-
rite le plus souvent sous forme antithétique. Voy. surtout Robert de Blois
iféon, F&bL II, 213, et Ulrich, Roh. de Blois, II, 119). Ce même lieu com-
mun avait été traité avec plus de discrétion par un grand nombre de trouba-
dours : « Qpcl vU fai pros elnesci gen parlar, | E Tescars krc e leiaî lotruan,
El fol savi el pec comissedor^ \ E Torgulhos domesge e huraiiîan m (A, de
Peguilhan, Selh que s*irau^ Ux, tom. I, 4J1). Cf. encore P. Rogier, Tant ai
mot tor^ c. 5 ; G. de Calanson, A kis, c. 6.
ISt ss. Cf. Adam de la Halle, Chansons. IV (éd. p. 19) : « Et par U sont
form tant vasselage, » et Robert de Blois Çoc. a/,) : « Amors fait les lances
brisîer, j Amors fait chevaus irebuchier, | Amors fait les tornoiemens» * etc.
ît^ Cette comparaison, fort rare au moyen âge, se retrouve pourtant dans
une chanson fînédite; Raynaud, 524) ^ « Mors et amors sont de grant sîgno-
rie; I Bien les doit ou cnsambîe comparer ; | Car tôt le mont ont pris en
XZIL 3
66 A. JEANROY
vouerie» | Ne nuns ne puet de lor laz eschaper. ) Bien ait de Dieu qui Jor
îeulz fist crever ; | S'araours veîst, ne croî» que que on die, | Que vrai amant
eussent ïonge vie. » (B. N. fr. 846, fol. 152).
144 Cf. Peire Guilhem {I^x. rom., I, 413) : « Car îeu meteis culhi ïo
ram | Ab quem feri » et B. de Ventadour, Quan i^ei laflor^ c. j.
1 57 Cette strophe et la suivante abondent en lieux communs si souvent
traités par les poètes lyriques qu'il est presque superflu d'indiquer des rap-
prochements : nous nous bomnerons aux plus caractéristiques.
165 Rektrrmi est la forme picarde de recroiront ^ futur de recroire, renon-
cer au combat, s'avouer vaincu. (G. P»)
168 Cf. B» de Ventadour : Non es tnermttïba^ c* 7; Robert du Chasiel,
For çou se faim (Raynaud» 91}), c. 4.
176 Pour ce passage et les vers 199 ss*, voy. Cercamon(?), Quan l'aura^
c. 3 ; P. Raimon, Nom pose, c. î ; Elias de Barjob, Atnors be,c. 3 ; Châtelain
de Couci, La douce vois (Raynaud^ 40), c. 2; Adam de la Halle, ChansonSt V«
c. 5 ; XI, c, s ; XU, c. 4 ; XIX, c. 2, etc.
180 La théorie de la timidité en amour a été mamte fois exposée, notam-
ment par Adam de la Halle ; voy. Chansons, XI, c. 2 ; XVIII, c. 4 ; XXV.
c. 2 : Jeux partis, IV, c. 6. (Il est vrai que dans le Jeu parti XIV, il défend
des idées tout opposées.)
192 Cf. plus haut, I, V. 55.
207 Le sorage est proprement le temps qui précède la mue Ju faucon
ou le plumage roux qu'il porte â ce momctit. Le sens wt : « J'aî des pcnsers
(deux mille au moins simultanément) plus entremêlés que les plomcs d'un
faucon qui vient de muer, mais qui garde encore beaucoup de ses plumes
sores, » (G. P.)
212 Sous-entendu : « à condition que» en le perdant, je triomphasse. »
215 Allusion au jeu <* au plus près du couteau » (voy. Du Cangc,
CuLTELLUM (ludus ad), dans lequel chaque joueur essayait de planter son
couteau le plus près possible d'un autre qui avait été fixé dans une cible
pour en marquer le centre (ou de faire tomber avec son couteau celui du
précédent joueur). Entendez : « J'ai si malheureusement joué, fai été si
maltraité par le sort... »
2J4 C'est une des idées ie plus fràjuemment exprimées par les poètes
lyriques que leur loyauté les empêche de réussir, et que, perfides, ils eussent
obtenu davantage. Voy. ooiamment B. de Ventadour, Atnors e que, c. 2 ;
Bel m'es quHeu clianty c. 3 ; Gui d*Ussel, Ane no cugei^ c. 2 ; Anon., Trop be
m* estera, c, J (Pam. occ, 390); Ch. de Troyes, D'antors qui m^ti (Rayn.,
1664), c, I ; Blondel, Puisqu'Antours (Rayn., 779), c. 2; Bien doit cînnter
(Rayn., 482), c, 6 ; Cuers desirrous (Rayn., 1 10), c. 4 ; G* Brûlé, Quant nais
etgiaus (Rayn., 2099), c, 2; En cet tcms (Rayn., 857), c. i, etc.
244 C'est-à-dire : Contre qui tu ne te permettes des espiègleries dignes
d'un enfant.
245 Cf. plus haut, [, V. 9.
TROIS DITS d'amour DU XIIl*" SltcLE éy
246 Œ ibid,, V» 16. Ccuc opposition est fréquente. Voy. P. Vîdal, Pac
2S2 Li forme rj/<im:« ne pouvant exister dans aucun dialecte, il faut écrire
€stanche et Franche^ etc., ce qui prouve que N, Amion n*hésitait pas à associer
les formes françaises aux fermes picardes. Cf. Rom.^ ¥1, p. 617. Ces rimes
bâtardes ne se trouvent pas seulement dans les textes picards ; il y en a dans
\e Roman de Troie par exemple; cf. Rgv. des long. rom. XIX, 100.
m
4 ss. Cf. plus haut, I, w. 10 et 57. Les poètes l)Tiques se sont plaints
sonvetlt que leur dame leur ait d*abord fait w beau semblant » pour affecter
ensuite à leur égard la plus profonde indifférence. Voy. Cadenet, Ab leiaî
€Of^ c. î ; Peyrol, Manta gen^ c. 2 ; Elias de Barjols, Amon £t, c. 4 ; Chat.
de Coud, Li noviam tems (Rayn., 986), c. 2 ; Blondel, S'atfwrs vttet (Rayn.,
lao), C.2; Ah âouçor (Rayn., 1754), c 2, etc.
9 Cf. plus haut. Il, V. 12.
14 Bscaper tsi pris id au sens transitif.
19 « M'a ooupé l'escarceile^ b c^est-à-dire m'a joué un méchant tour, ou
m^a enlevé toute ma force.
24- Ce passage est extrêmement obscur : k dernier vers paraît d'ailleurs
altéré, car sool =: salullum est bien probablement disylkbique. — Il est à
fenurquer que, dans notre texte, les participes où la terminaison -atum est
précédée d^un yod, ont conservé te / final. H en est de même dans plusieurs
autres textes, comme le ms. A du Roman de TJ)ibcs^ F Empereur Constant et
Brun dé la Montaigne. M. Boucherie {Rtvite des langues rofn,^ XVIII, J04)
suppose qu'on essayait, par cette graphie» « d*accentuer la diftérence entre les
féminins en -tV et les masculins en -iè « ; les rimes montrent qu^il s'agît d'une
prononciation.
j6 Cf. plus haut, II, 90 et la note.
41 Mètre tft lieu ■=. faire cas de.
46 « Je vois qu'on leur enlève déjà trop (à ceux qui refusent d'être
déloyaux), qu*on leur fait subir trop d^avanîes. «>
47-S Ces deux vers sont clairs, mais se rattachent bien médiocrement ice
qui précède.
65-6 D.'srieus (prov. de desriver}) est un synonyme de deshiaui; pec signi-
fie « pitié •. (G.?,)
77 M. Godcfroy fait deux artides de moliir (III, 212) (mieux inueiîler) et
de tmdUer (\\\, }îo) qu'il traduit, le premier par « charmer, ensorceler »
(lu sens figuré), le second» par « vexer n (d'après un exemple tiré d*un
fableau : « Amis^ forment m'enuUiés. »). Nous avons affaire au même thème
{oleu) suivi de suffixes divers {-eare, -i^are)^ et le sens n'est pas scnsi-
btcment différent (enduire d'huile, et, de là, tantôt tromper, tantôt vexer).
A. JEANROY
de servir, formi comme oce. Par signifie ^^ par-
éS
81* Sera est le subj. pr,
fiitenicnt.
82 Hot, <|ue M, Godefroy confond avec hot =: troupeau ^ en est évidemment
différent. L'étymologie de ce mot nous est inconnue, mais son sens est clair :
il signifie certainement « obstacle »; c*est lui qui a formé V aâj^ct^î ahoté qui,
d:ins les patois de la Meuse, et aussi ceux du Bkisois (voy. Â* Thibault,
Glossaire du pays Maisois, p* 10), signifie « arrêté par un obstacle ».
90 « Elle m'a imposé le jeu et la règle qui devait y présider {U comment). »
91 « Elle me dit que, si je vQads et veux être payé, je dois faire attention
â qui je m'adresse {reprentï), c'est-à-dire que je devais d'abord m'assurer
qu'elle me paierait de retour. » (G, P.)
104 Je ne comprends pas ce vers.
112 Cf. plus haut, n, t8o ss.
I r4 Cf. ibid., 226.
121 La locution contraire a estrehi est plus fréquente.
132 Oîcur senéîant — mine irritée; cf. semblant eniori dans Adam, Chan-
sons, XXI (éd. p. 85).
133 « Tend aux filets et aux trous, » c'est-à-dire chasse à Taide de fosses
auxquelles mène un chemin tracé par des filets.
1 3 5 Le verbe surquitr^ « chasser aux souris » n'est pas dans Godefroy, bie
qu'il cite notre passage (à Espîaquer), mais on y trouve le dérivé surcecr*
(AwS, 8844); la forme parallèle surgier^ dont Godeiroy ne donne également
que ic dérivé surgeûre (Rose)^ est assez fréquente. — Na^uier =z flairer (de
na si ca re (voy. Godeft-oy. (G. P.)
138 esplûque doit être la 3* p. pr. ind* de <fî/)/(jfw*Vr (en registre par M. Gode-
froy sous la forme upîaquer avec le signe de T interrogation), dérivé de pla-
quer qui , dans un autre exemple du xiii* siècle ( cité par Littré), a le sens de
attacher, coller. Peut-être vaudrait-il mieux supposer un dérivé de in et lire
empîaqtte ?
143 Faire raque : expression inconnue. C'est sans doute un terme de jeu
signifiant quelque chose comme tromper.
170 « On doit accorder du temps aux bons payeurs », en d'autres termes :
ff Je serai largement payé de mes peines, » C'est encore un lieu commun
souvent exprimé, que les peines que cause l'amour sont toujours inférieures
aux {oies qu'il tient en réserve.
TROIS DITS D*AMOUR DU XIII* SIECLE
69
GLOSSAIRE
Atrdre, aert I, 148.
*atrtery aorte (f) I, 159.
afruitiery afruite I, 179.
alasquieTy aJasque III, 142.
àUecbier I, 119.
ûmparlerie U, 191.
anUmU III, 99.
astenancbe \, 9 ; II, 24$.
Baarie III, 74.
harUl, 18.
hehourtl^ 191.
hontauU III, 106.
h<£io(f I, icx> (note).
Gaie/ I, 49.
campionlil, 153.
caperUly 13.
oiid^ n, 94.
chembd I, 79.
cUnquely 51 (note).
fZotf I, 161.
conroi (prendre) I, 170 (note).
conroieTyConroi H, 227.
coroif (boute-en) II, 26 (note).
rw/f/ (;>/«r &) II, 3 1 3 (note).
ZXir/ II, 134.
demofwis II, 118.
ies^/^ I, 108 (note).
iespire, despit I, 65.
desriais III, 65 (note).
desvckptr III, 57 (note).
détenir y détient II, 27.
Enf anche II, 244 (note).
«i5fr«i«'I, 71.
eumancieTy enmancel, 73.
ennueUlier^ ennueUlieUlt 77 (note).
enortanche I, 2.
enpenser^ enpense II, 204.
tnrasquier, enrasque III, 138.
wtoiV, ««/ai/tf I, 93 ; m, 68 (note).
^te I, 78.
entrepeler, entrepelé II, 205.
entresait III, 70.
/m/uttf I, 81.
^^ifm II, 80, 86 (note).
escaucbirer, escauchire I, 132 (note).
escorpion I, 54.
«oïter, escote I, 108 (note).
escremie I, 84.
esfoudre I, 136.
espîaquier, esplaque III, 138 (note).
esracier, esrace I, 77.
essamplaire UI, 161.
estancier, es tance U, 252.
«5/af^ III, 103.
estrument III, 75.
Fameilîous III, 24.
floterlll, 163.
f(mrgraire,fourgraitQ)l\l, 46.
forjugier,farjugiéUÎ, 18.
/rofer I, loi.
Gâ^'I, 172.
f/w II, 73.
i/a/«rd/ II, 90.
Ad/ (?) m, 82 (note).
/ofir (tofe) n, 10s.
Kieu m, 72.
Ltffi (m«//rtf en) III, 41 (note).
Mairier, maire II, 37 (note).
maistire I, 122 (note).
man(^ 1,75.
mangounel I, 83.
maronier II, 67.
menés trandie III, 73.
ménestrel, II, 103.
mtt^ III, 9.
mttjar/ II, 136.
70
Naquier, naque III, 135.
noter y note I, 97, 98.
Oprimes III, 10.
Pet ra, 66 ( note),
/w»/ (md//r« a) 1, 123 (note).
*pourtirer pourtire U, 2^ (note).
pourveanche I, 5 (note).
pourveoir, pourveù III, 2.
Quantdm, 38.
Raembre II, 23.
radoter y raàot III, 79.
ra^ii«(?)m, 143.
r<»» II, 22.
r^ftf n, 81 (note).
repoindre, repoint l, 126 (note).
resoiierQ) III, 19.
resvertuer III, 167.
rwtel, 10$.
JEANROY
roi n, 69,7s; m, 133.
rtUste I, 83.
Scùntuaire III, 165.
séné Ut 108.
signerie III, 81 (note).
5a)/(?) m, 24.
5orfl|^« II, 207 (note).
^surquier, III, 135 (note).
Tardieu III, 69.
/a5^u« m, 140.
temprelî, 133.
/rau III, 133.
/t<m^ II, 10$.
Vaus (Perilleus) I, 15.
vertu I, 184.
vitore I, 186.
Yivr« I, 186.
A. Jeanroy.
LAS SEGUNDAS PERSONAS DE PLURAL
EN LA CONJUGAQON CASTELLANA '
En el siglo Xm todas las segundas personas de plural del
verbo castellano terminaban en dw, con excepciôn del impera-
tivo (de que no trataré aqui) y del pretérito (escuchasteSy dixistes) :
guardadts, faredeSy partideSy salgades, passedesy érades, ibades,
deciadeSy terniadeSy pagâssedes, viniéradeSy quisiéredes, Voy i expo-
ner las transformaciones por que han pasado todas estas
inflexiones para llegar à su estado actual.
I
INFLEXIONES ORIGINARIAMENTE GRAVES
En el siglo XIV se encuentran ejemplos de la desapariciôn
de la d en las inflexiones paroxitonas : vayaes por vayadesy socs
por sodés {Dania de la muertCy R. 57. 380* , 383 **) ; y contraidas
las dos vocales en la segunda conjugaciôn : irés (Arc. de Hita,
1425), abré^y avis, daréSy podrés (Dan:(a de la muerlCy R. 57.
384'', 383 ').
En el siglo XV fue ganando tèrreno esta desapariciôn de la
dental : Villasandino dice soeSy bivaes {Cane, de Boena, pp. iio,
174 éd. de Madrid) ; en el Caneionero de Stûhiga se lee daes, passaes
(pp. 215, 272), y en el Arte cisoria de Enrique de Villena
tmgaesy seaeSy vengaes (pp. 6, 112 : Madrid, 1879); ^hi mismo
I. En el tomo III, p. 417, de la présente Revista, apuntando cabalmente
la variedad que se nota en el Caneionero de Stûhiga con respecte i las
inflexiones aquf estudiadas , manifiesta el Senor Morel-Fatio la necesidad de
que se historien sus transformaciones.
72 R. J. CUERVO
se encuentran puhliquees, divulguées (p. 115). La contraccîôn de
dos ees en una es tan génial del castellano, como lo prueban
voces a la traza d^fee convertido en fe^ vee en ve^ y la pronun-
ciaciôn familiar de aquellas que en el Icnguaje litcrario llcvan
esta combinaciôn; asi debees^ habces se convirtteron de suyo en
debés^ habés (Arte cisoria^ p. 7), formas que sin duda dieron ori-
gen a sepàs por sepaeSy sos por soes y partis por parties. Por orra
parte la concurrencia de las dos vocales en^ir, oe se prestabaa la
diptongacion ; y a la mancra que cae , trae se convirtieron a
menudo en ca)\ tray\ también dtxaes^ soes, se volvieron oatural-
mente à'.V£2iV, sois, que i su vez favorccieron la pronunciacion
habéîSy dtbéis. Todas estas formas se hallan usadas promise ua-
mente i mediados del mismo siglo XV, v. gr, :
Senor Juan Alfonso, desque corronpés
Toda cortesya, (k^is que qmrù
Fahlar mesurado e ya non podis.
Pues cl comienço, scnor, non guardadts,
{Cane. d£ Baetia, p. 475 ^)
Qpe d£x^s por vuestia fe
Franquesa que arnhyi buscar,
(Cane, d£ Stûiiiga, p. 157.)
Tal constjo vos dsuré ,
Sy lo qiiertdes tomar.
TornandOj moscn Françes,
A mi porfia primera,
Pues ya veJes h minera»
Respondedmu si querés.
ifh. p. 171.)
Yû no dubdo luego que presto sera
Meritamcme egual de los très.
(Marqués de SantiUaiia, p. ^3 : Madrid, 1852 \)
Nada pues tiene de extrano que copias y ediciones de una
mîsma obra se hallcn en complète desacuerdo. Comparese este
pasaje de la Querella de amor del mismo Santillana segùn se
halla en la ediciôn de sus Obras (p* 402) y en el Cancîonero
de Stûniga :
1. Los consonanies son aqtif fomados, y les corresponden en las composi-
ciones précédente y siguiente : certes^ es, pavés ^ respùndaàn; schraoltàt «,
t raves, hondades.
2. En el Bmayo de ntm biblioteca espanola de lihros raros y curiosos^ lorao I ,
col. 497, en una poesù de este tiempo se balla tambîén rimado penarà coq
cartes.
^^^^^V LAS SEGUNDAS PERSONAS DE PLURAL 73 ^^^^|
^^1 DbEde : Non vos qmxedis
Dixele : non vos quexeyi ^ ^^^^|
^H O non soys vos cl primero,
Que non soys vos el primero ^^^H
^H Km itféi el postrimero
Nin itreys el postrimero ^^^H
^H Qmc Sâbe del mal que avtdts.
Que possea d mal que habeys. ^^^^^
^H Al déclin a r el siglo, van
haciéndose mas y mds raras las for- ^^^^H
^H mas COQ d {sabedcs^ fagades)^
, y quedando reemplazadas por las en ^^^^H
^H ais^ eis, ois; de las en as, es, ^^
iSy ôs^ solo se conserva défini tiva y ^H
^H unîversalniente la penùUima (^dtds^ seguls)\ las demis fueron ^|
^H relegadas al lenguaje vulgar
{sepâs^ cornés, sos). ^M
^H Don majote, no peni4$
Aunque prfsuntâs de necio : ^^^^B
^H De habrar tanto por desprccio,
Sepamos que cosa es. ^^^^^M
ÇEglvgas y farsas de Lucas Fer- ^^^^^|
nindez, p. 20 : edic. Acad.) ^^^H
^^^H Crtro esti, Dios me estcsûgo,
Que SOS * tonto con efcto. ^^^H
(Comedia La fufr;^ii del miurd^ ^^^H
jorn. II :R. 59.218 b.) ^^B
^H Dcstc habis de scr madrina ,
Y iKihù venido al lugar. ^H
^H Laura, pues sos nuesa reina.
(Lope, El bijo de hs Icotm , aclo IL ) ^H
^H La forma en^i conservô por mas tiempo acepuciôû en la len- ^^^^|
^H gua literaria. En les paradi
igmas del Ark para Ugeramenk sakr ^^^^|
^H la Imgua aràbiga de Pedro
de Alcala (impreso poco an tes de ^^^^|
^H I S05) se hallan leés^ sera al lado de amais^ sois^ ternis. ^^^H
^^1 Qpe ir i solas mejor es
Y si no, cuando es mirado» ^^^^^
^^1 Q$ie no mal acompanado ;
Gananda y caudal perdis. ^^^H
(Timoneda, Los ciegos y tî moio, en ^^^H
UordtlUyOrigmisi R. 2. 290* .) ^^^^^M
^^^V Cogida la dntura de tropcl,
Una beca de pano por travcs, ^^^^^^|
^^V La ropa cuanto luenga la querèî «
Un bonete a manera de sartén, ^H
^^1 Atestadas las mangas de pape! ;
Con médias chineletas en los pies. ^H
(Hurt.deMcQdozai«/>iiL P'I^ edic. ^H
de Knapp, p. 146; en R. 53, ^H
624, se lee, contra la rima, ^^^H
querais,} ^^^H
^^H Pues para no scr mgralo
Y veréis que no dilato ^^^H
^^1 A là merccd que me })acù,
£1 casarme. ^^^^|
^^H Vcàxà Ucencia al marqués
(Lope» Pût la ptunU, Juafta, ^^^H
aao IIL) ■
^^P t« n io^. segunda persona de
! singular, que se halla en Lucas Ferndndez ^H
^^1 (1^* 42) y en Juan de la Endna
(^Ensayo de una bihlioteca espahola^ II, 817^ ^H
^^H SiS)^ le apoya en w^ soyy como sm en 5omcv. ^H
74 R* J' C^UERVO
Pot manera que, al comcn?:ar el siglo XVI, en el uso
comiin las segundas pcrsonas de plural eran conio sigue ;
buK*îis,
pcrdéis*,
decis,
buscaréis,
perderéb,
diréis,
busquéis»
perdais,
digiis,
buscibades,
perdiades.
dedades,
buscarfadcs,
perderfadeu,
dinades,
buscissedes,
pcrdiéssedes,
dixésscdes,
busciradcs,
perdiéradcs,
dixéradcs;
busciredes,
pcrdiércdes,
dixéredes.
buscastes,
perdistes,
dixisies.
Estas son las formas que ofrecen los paradigmas de !a grami-
tica de Nebrija (1492)^; pero las intégras del primer grupo no
habian desaparecido del todo , segùn se colige de lo que el
mismo advierte : « Esso mesmo avemos de notar qoe en la
segunda persona del plural las mas vezes hazemos syncopa : e
por lo que aviamos de dezir amades leedes oides : dezimos
amaisleeisois* n Yhablandodelfutoro de indicativo : <* Reciben
esso raesmo cortamiento en la segunda persona del plural :
como deziamos que lo recibia el présente : e assi dezimos ama-
reis vos por amaredes vos. w
Como los redactores de las leyes, provisiones y despachos
reaies se guian siempre por formularios tradiciooales, el
lenguaje cancilleresco es por fuerza conservador, y siendo el
ultimo a admitir novedades, es también el ûltimo à aban-
donar los arcatsmos. En los cuaderaos de Cortes (edic. de
la Academia de la Historia) empiezan a aparecer aisladamente
en medio de las intégras las inflexiones agudas en ais^ eis, fj, ois
desde la primera mitad del siglo XV : fagays en 1436; veays^
en 1442; soys, 1451; peJis, 1462; rcynays^ soySy nombrareys, dis-
putareys, dex}s ^ 1469; pcdis (dos veces), suplicays (siete),
fagays^ ^473; ^^^y^ (très veces)^ entregueys^ deheys^ regrtays^
suplicays (très veces), 1476. Los cuadernos de 1506 y 1518, que
se apartan del formulario anterior, no ofrecen sino inflexiones
abreviadas* En 1520 por ocho formas antiguas hay veîntiséis
r. A veces umhlén perdes^
1. Me valgo de la edidén contrahecha el siglo pasado, pues la orignal no
se h alla en ninguna de Lis bibliotecas public as de Paris.
LAS SEGUNDAS PERSOKAS DE PLURAL 75
modernas; en IJ2J y 1525 no quedan sino el sepades inicial y
elfagaJeSy para^cacks At\ fin, consagrados por antiquisima tradi-
ci6n. En tiempo de Felipe II las pragmiticas y provisiones reaies
vacilaban entre sepades y sabed'^ pero muchas de las que comen-
zaban con el lildmo, lenian todavia al fin la formula nofagadcs
mde al \ ta cual alcanza à verse en documente de 14 de Agosto
de 1699% cuando el sepades Uevaba mucho dempo de estar
olvidado.
G}sa parecida puede dedrse de otras formulas : en cartas
credenciales de los Reyes Catôlicos datadas de 1498 a 1505, que
se hallan originales en la Biblioteca Nacional de Paris (MS.
Esp. 318), aparecen siempre las inflexiones sincopadas, excepto
en el consabido « le dedes entera fe y creencia ».
Reliquia de la conjugaciôn aneja tenemos hoy dîa en la frase
proverbial : Âhora à alla b veredes, dijo Agrafes. Quevedo en la
Visita de los chistes saca a este personaje protestando que nunca
dijo lal^ y que le levantan un tesumonio; Clemencin {Don
QuijûU, I, 187) no aduce pasaje alguno en que Agrajes pro-
fiera semejante expresion; y, revisado el Amadîs^ résulta que la
frase, en boca de otroSj no esta con la forma arcaica del verbo,
sino con la modcrna vercis (lib. I, caps, xxvii, xli; fols, lu y
LKXxm, V : Sevilla, 1539). <Podri colegirse de lo que précède
que esta expresion proviene de una redaccion diferente del
AmadiSy anterior d la refundiciôn de Garci Ordônez de Mon-
talvo? Sea dicho de paso que en la ûltima son comparaiiva-
mente raras las formas intégras, y que precisamente nunca apa-
recen en los pasajes en que habla Agrajes.
No debe pasarse en silencio una contaminacion singular fre-
cuente entre el vulgo chileno : por remedar a de^lSj pedis^ true-
can ienéis en tenis, y, dando un paso mas, confunden los modos
didendo jugufs por }ugt4éis.
J. Véaose» por cjemplo, las Cortes de Toïcdo, 1560, y Madrid, 1563, con
las pragmiticts que las aconipinait en hs €didones de Toledo» 1 >6o, y
Alcali de Hcoares, t S64.
2. Pragmaiicâ que su MagcUad manda publicar en onien al preâù y ias^ que
hanâeUmf lùs Granos que se comprartn y vtndunn en estos Reynos. Aûo 1699.
En Madrid : Por Juliao de Paredes»
7^ ^^^V R. J. CUEEIVO
n
IKFLEXIONES ORIGINARÎAMEKTE ESDKUJULAS
Si hubiémmos de créer a las gratniticas, no se liabrii verifi-
cado cambio alguno desde los tiempos de Nehrija hasta média-
dos del siglo XVII ; pero ya sea que los autores de taies obras se
copien unos i otros, ya que por el mero hecho de formulât un
codigo de conservacion , condenen naturalmente toda innova-
ciôn, elle es que nunca dan por bueno un use ouevo sino
cuando el anterior esta enterrado y olvidado, sieiido mucho que
le mencionen mientras se halla empenada !a lucha, A los para-
digmas del antiguo maestro se ajustan punto por punto la Cra-
mât ica ti' ht lengua vulgar de Espam, impresa en Lovaina por
Bartolomé Gravio en 1559» la Grammuire espagnole de Oudin
(Paris, 16 10), el Espcjo gênerai de la grantaîka de Ambrosio de
Salazar (Rudn, 1622), A Spanish Grammar de John Minsheo
(Londres, 1623) y el Trilingm de Gonzalo Corrcas (Salamanca,
léZ'j), Aldrcte, por el contrario, que, como no escribia una
gramatîca, no oecesitaba tcncr a la vista los tratados antcriorcs,
nos da en su Origcn y principio de la kngîui caskllana (pp. 256,
aî7 ; Roma, 1606) las inflexiones que cl debia de usar en el
habla ordinarîa : de todas las segundas personas de plural que
antes tenian rf, s61o la conserva en vuiessedej atnado ; las demis
aparecen en su forma actual. Por manera que este movimiento
de uniformaciôn, que vemos ahi casi consumado, hubo de
comcnzar mucho antes, y extendersc con lentitod en el len-
guaje familiar mientras en lo escrito se seguia el uso antiguo.
Entre los gramaticos he callado el nombre de Juan de Luna,
tt espanol castellano », que habiendo « dejado su patria,
parîenies y hacienda por una justa y légitima causa d, se dedic6
i ensenar fuera « el nucvo castellano ». Para cl efecto publicô
varios libros, entre ellos el Arie hrene y compendiossa para apren-
dcr a lecr, escreu'u\ profiunciar y hablar la kngî4a espamla (Londres,
1623), en la cual, como si se hubiera dejado también en Espana
todas las gramaticas anteriores, puso ùnicay exclusivamente el
uso moderno, no dando en los paradigmas de la conjugacion
sino las formas graves en m. Que él procediô en esto mas siste-
miticamente que por céder a un uso gênerai, se coiige de
LAS SEGUKDAS PERSONAS DE PLURAL
77
SUS Dialogos familiares {¥àns, 1619), dcstinados para los que
quisiesen aprender \i lenguacastellana; supuesto que alcorregir
completamente los sîete liltitnos, escriros por Minsheo, con-
sen'6 la conjugaciôn antigua. Mis claro todavia se ve csto en la
ediciân 6 refundiciôn que él mismo hizo dcl hîiarilh (Paris,
1620), pues q ut; dejaiido las inflexiones verbales antiguas como
se estaban en el texto primitivo, para la segunda parte que le
anadiô no se valio de otras que de las recién introducidas. Por
tnanera que aunque él usase una cosa, la orra pricrica era toda-
via tan comùn que no le disonaba ' .
No puedo determinar la época en que las formas nuevas
empezaron i tener cabida en las obras imprcsas. Es sin duda
que los mismos escritores que se servian de ellas en el habla
doméstica y comûn, las evitaban en el lenguaje literario, el cual
se apoya mis 6 menos en la tradiciôn, como que siempre tieiie
algo de aprendido y artificial. El ejemplo mis antiguo que
necuerdo de las inSexiones esdriijulas abreviadas es un quedareis
de la Galatca de Cen^antes, libro I (foL 50 de la ediciôn de
Lisboa» iS90j y pig- 54 de la de Paris, léri) ^; mas à lo que
creo, no volviô el autor d emplearlas en prosa, à por lo menos
prefirîô decididaraente las intégras ; hasta tal punto que no he
anotado una sola de las primeras, y si ochenta y cinco de las
ùltimas en las Novelas^ setenta en el Quijote^ treinta y cuatro en
el Persiles; y por veintidôs en las obras dramdtkas^ solo veo un
podriais en El galîardo espahoî , jorn, I (fol. 3 v**, Madrid, 1615).
Igual preferencia se observa en otros escritores : Cascales, por
ejemplo, en sus Tablas poiûcas QAuxcu ^ 1617), compuestas en
didlogo, no emplea otras que las en des'^ Lope en la Dorotea,
obra de sus primeros anos, aunque retocada después, y no
t. La gramitica de Luna y la ïmpresa por Gravio eo 1559, raras cuanto
predosas, han sido esmerada y cleganiemente reproduddas por cl S^nor
Conde de b Vmaza en Zaragosa, 1892» y i su exqûisiu benevolenda debo
eJ podeiias disfrutar.
2, Las edidones modernas (v. gr. Sancha^ 2.206; Baudry, 202; Rivade-
ncyra, i, 78* ) ticnea sin duda raiôn en poner rtcibiereh eu este otro pasajo
dcl libro V, doade las edicîones antiguas mendonadas iraen rtcibireys : « No
vvngû yo setiores para nienos (|ue para fiestas y content os ^ por esso si le rtci-^
hirep de escuchanne suene Marsilio su çampofu >* (Lisboa, foL 328» v«;
Par(f, p. \6o).
78 R. J, CUERVO
impresa hasta 1632, las usa cincuenta veces, y ni una las abre-
viadas. En otras obras de Lope aparecen tal cual ocasi6n las
formas nue vas, v. gr, mfrojmen Los emhusies de CelaurOy jorn, I
(parte IV de las comedias, Pamplona, 1614, fol, 220, V"), y
pudkrais en La Vcga dit Parnaso, foL 255, Madrid, 1637) *; de
donde podria colegirse que solo empleaba e! poeta las formas
abreviadas en fuerza de la necesidad métrica. Tirso prefiere
también d ojos vistas las intégras, pero se le escapaa de cuando
en cuando las otras, asi en verso como en prosa^, Villegas,
por el contrario, usa las modernas en las Erôticas (i6ï8), y
también en la prosa de la Consolaciôn de Boedo (1665). Calderôn
se aprovecha de las unas y de las otras segiin le viene i cuento,
variindolas aundentro de un mismo periodo; en El màlico desu
honra, que se imprimiô por primera vez en 1633, dice :
Yo (j VAlgame el delo 1) soy quîen
Vuestra Majcsud ^uisiere,
Sin quitar y sin poncr,
Porque un hombrc muy discrète
Me dio por conscjo aj^r
No fuese quîen en mîvida
Pues cadA vex
Que me hiciéredu reir«
CicQ escudos os daré ;
Mucho perdisteis c on mi go ;
Pues %\f\urah noble vos,
Vos no quisiemi ; y fué
De manera ta Itdôn «
Que antes , ahora y después,
Quien vos quisiàtdei solo
Fu(j quîen gustareis seré»
Q^ien os place soy.
u<^ /.)
Y si no me htàkreis hecho
Kdt en ter mi no de un mes ,
Os han de sa car los dientes.
No hahlàrades, vîvc Dios,
Asf de vuestro enemigo.
(Jorn. IL)
Tomados en conjunto los prosistas, se percibe de igual
manera la transformaciôn d medida que va entrando el sîglo.
t. Se me hacia recio de créer que en la comedia del Mdino (al fin del
ûltimo acto) hubiera dicho Lope ^raJes y frais con dos versos de intervalo,
segùn se halia en Rîv. 24. 41 ^ » y acudl i la ediciôn original de 1604» donde
luUé éradts en ambos lugares. £1 edltor moderno se propuso sin duda meiorar
d pasajc introducîendo el segundo vos : m i Erades vos el galin | Que tan ta
pena y afin | Suele dar i quien le adora ? | Eraîs vos aquel perjuro | Contra
la fe de los dos ? i^
2, Por ejemplo, habîabaU^ en El PrdindiriUg al revis, I (impreso en 1627) ;
aiiûùs^ en Ddiytar aftravfchandû^ loi, 91 (Madrid, 16) s)
LAS SEGUNDAS PERSONAS DE PLURAL 79
aunque no con uniformidad, poes unos se adelantan, otros se
retardan, ya por razôn de su edad ô de su educaciôn, ya por
Diras causas dificiles de determinar. Pedro Feroindez de Nava-
rrere en su traducciôn de los libros De be7ieftciis de Séneca usa la
ioxmàzii\\g\iz{dtseaua(ks,{o\. 152 : Madrid, 1629); Quevedo,
que en verso sabia iotroducir la abreviada {fuereis, Musa F/,
cane, /), preleria también las tradicionales , asi en el Buscôn^
imprcso en 1627, como en la Vida de S. Pablo y en la de
Marco Bmta, publicadas ea 1644. En los avisos que dio
Felipe IH i su hija cuando se casô con Luis XIII (1615), segùn
los pone Gil Gonzdlez Ddvila en el Teatro de tas gratuk:;as à la
Villa de Madrid {162}}, ocurren nueve veces las sincopadas, y
cuatro las enteras. La Corona gâika de Saavedra (ié^6), nos
ofrece eligiéredés, quisiésedeSj ju:^àr€dts^ y podrîaisy hariais^ haUais
(edic. de Madrid, 1670), doode se descubre alguna regularidad * ;
la cual se echa menos en el Criticén de Graciin, pues no
s61o escribe Inbiais {pic, //, p. 118 ; Huesca, 1653), sino
pudiereiSy dixerais (j>tt\ III^ pp. 210, 337 : Madrid, 1657). En
las arengas de la Historia de los rnavimientoSy sepuraaân y guerra de
Calaluha por Melo (1643), no se encuentran ocras que las
formas inodemas; lo mismo acontece en la caria del Conde de
Rebolledo i D, Ramiro de Quifiones fechada en 22 de Abril de
165 !• Es de créer que Solis no us6 en verso la forma Integra
sîno por necesidad mètrica {El anior al uso^ jorn. II*); pues
cuando Uegô el caso, empleô en la Cmquista de M^jico^ salida
i lux en 1685, la abreviada (ife/wî/ïVrw, lib. II, cap. XXI). Al
lenminar el siglo, ténia ya el uso cortesano canonizada la con-
jugaciôn nueva, conforme se ve, por ejemplo, en la carra de
gracias dirigtda por Carlos II a la ciudad de Sevilla en 20 de
Scpiiembrede 1696, que tengo d la vista ea papcl suelto origi-
ginal, y en los despachos originales tambicn del mismo soberano
I , Con corLi difcrenda esta es h prictica que représenta los pdradlgmds de
Il NùtWiïU gtammaitt espagnole de Vayrac (Paris» 1714); pues dan las formas
âbreviadas haviais, serhis^ tdah^ subiais ; sîn embargo» se hallan amariadei^
kmades. Sobriaoen la }« edîciôn de su Gramdlica (Bruselas* 1717), persiste
tockvk en dar las formas antîguas.
a. Es dedtarsc, por cuanto lleva la lécha de 1641, el romance que empieza
« Senor Marqués retirado » (publicado en las Varias poenas sagradas y pro-
fanas), en d cual se encuentran las formas cortas.
80 R. J* CUERVO
al Gobernador de Milin de 1697 en adelante, Circunstancie
curiosa : en Agosto y Septiembre de 1698 cambia la letra da
estes documentes y aparecen las formas antiguas, como si por
pocos dias se hubiera encargado de k redacciôn algûn viejo de
gruesas gafas y calva reluciente. (BibL Nac.de Paris, Collection
de Lorraine vol. 730 y sgs.)
Volvamos los ojos al lenguaje légal y cancilleresco. En el
reinado de Carlos II se mezdaban inflcxiones antiguas y
raodernas ' ; sirva de ejemplo entre los autos acordados de la
Nuei'a Recopilaciàn (edic. de 1772), uno en que se refunden
disposiciones de 167 1 y 1695, en el cual figuran rccibîértdes^
îuviéreâis junto con entend if rets (tomorV, pp. 294-297); peroen
las formulas persistîa naturalmente lo arcaico : « Como hallâ-
redes por derecho y justicia, » en dos leycs de 1699 (2 y é, tit.
16, lib, IX de la Nmf. Recop,'). En liempo de Felipe V perdîô
terreno, hasta desaparecer, la conjugaciôn antigua; en docu-
mentos de 1701 y 1703 copiados por Berganza {Anttguedades y
II, p. 513, 356), se lee Ithràredcs , dcspacbàredts ^ hiciéredes; pero
en las leyes, de ese tiempo en adelante, prevalece la moderna :
en 1708, aprendiereis (bis), Mciereis {Nun^a Recop, de 1772»
tonio IV, p. 37e); en 171 6, fucreis {Noi\ Rewp. Ub. VIL 24,
II); en 1726, iuviereis ^ pidiereis {Nuei^a Recop. tomo IV,
PP- 377p 378); en 1727, actmreis {Nov, Recop. lih, VI, 11. 5).
Asi que causa extraneza un cobràrcda de 1723, que se halla en
k Nueva Rtcopilaciôn ^ tomo lit, p* 385.
La Gramatica de D, Benito Martînez Gômez Gayoso, publi-
cada en 1743, no menciona siquiera la conjugaciôn antigua,
Natural como era la tendencia i uniformar y aligerar las
seguodas personas de plural, hubo circunstancias que la favo-
recieron, entre las cuales apontaré dos, una prosôdica y otra
sintictica, que, obrando en distintos casos, concurrieron i
apresurar el efecto gênera! .
Desdc la época de Berceo ha sido may comùn reputar en
verso como diptongo la combinaciôn k^ ta de las inflexiones en
que tigura como tcrminaciùn, acercindose de tal manera el
1. Nopuedo persuadirme i que sein auténttcas las inflexiones compusieseis,
eoHCordasds, pusksm de la traducdôn de un brève de Grcgono XJIl, încîufda
en cédula de 3 de junio de 1585 , que forma la ley 1*, dt. 10, Hb. II, de la
N(n4iima Reçopihnôn de 1805.
LAS SEGUNDAS PERSONAS DE PLURAL St
"«cnto i lii vocal llena, que Ikuim^ ponien, savim llegabun a
consonarcon Bthn^ bim^ segiin veraos en los versos Je Fran-
cisco de Ocana, y a citados par Diez, que se hallan en la Floresta
de Bohl de Faber (1.18) '. Siendo esto asi, habiâd^s, scriada se
asimilaban a ImyaJes^ digades^ y por tanto confacilidad corrieron
igual suertc* Poetas como Garcilaso y Hurtado de Mendoza,
que icada paso cometian la primera sinéresis, osaron también
la segunda :
^Opién me dixera quanJo Us passadgs
HofiS que en tanto bien por vo^ me via
Que me bahiadti de ser en ulgun dia
Con tan grave dolor represent^das?
(Soncto : Oh dulces pratdat.** *)
os CTibenaba
A quién Jirîaiks « él >\ y A pocas gente?»
Parj Ibniar « tnerced » licion os daba.
(Krmpp. p. tSj.)
Es cosa de consîderar que en la traducciôn de la sa tira de
Horacio Ihm forU que corre entre las obras de Bartolomé de
Argensola, se hallan d un tiempo ténia, disilabo agudo, dëspriva-
riada, pentasilabo grave, y estimariàis, tetrasilabo agudo K Asi
todo contribuye d demostrar que, entre las inflexiones esdrù-
julas, las en -iodes fueron las que primero se sincoparoîH.
Nuestra sîntaxis permitia enionces emplear indifereniemente
i » Véasc Muntbe Antecknhtgar om fcîhmUî i en trahi aj vestra Aititritn ,
p. so(Upsala, 1887).
2, Asi se halla este pasajc en la ediciàn principe y en âlçz mis^ anteriôres
al sigio pasado, que lie podido consultât. Si no me engano, à Azara (176$) se
debe el anacrônîco hahiah de las ediciones modernas.
3, Por supuesto que no ha faltado^algûn moderno caritativo que» pen-
sandohacer favor y buena obra i Argensola, haya tocado cl âesprivatiudeî :
D. J. deBurgos, copîando en su traducciôn de Horacio^ la del famoso arago-
nés, impriniiô dcsprivârades. De paso dire que esta composiciôn de Argensola
es la âiiiîca de laediciôn de 1654 que ofrece inflexiones modernas como «//*
ffMTMfV y quisistdf.,
4, Au tique i todas luces esti viciado, comprueba esta deducciôn un pasaje
det TrtUado ïîamaâù Manual de EieribùnUs por Antonio de Torquemada.
cscrîto, i lo que parccc, i mediados del siglo xvi, el cuaI pasaje puede verse
en d Ensayo dt tina bihîiottca de Ithros rarosy curiosos^ tomo IV, col. 7S S-
Sa R. J* CUERVO
en varios casos las formas ya abreviadas de antiguo y las inté-
gras, como se hace hoy cou sus correspondientes ; deciase si
qturéîs y si quisiéredes , cuando podâis y amudo pudiêredes; lo que
hubo de hacer sentir mis el desequilibrio de la conjugaciôn y
avivar la tendencia a igualar las inflexiones divergentes.
Nebriji mendona como usuales en su tienipo otras dos con-
tracciones : « Dezimos amarides por amariades, leeridcs por
leeriades, oirides por oiriades. » « Por amdredes, leieredes,
oieredes dezimos amardes, leierdes, oierdes. >ï La primera, de
que no recuerdo ejemplos, puede compararse al asturiano serls^
sériais; la ultima, comuoisima en épocas aiiteriores, alcnnza i
hallarse en autores de la primera mitad del siglo XVI como
Castillejo y Torres Naharro* Semejantes comracciones intro-
ducian nuevas divergencias en îos paradigmas de !a conjuga-
cioo , y por fuerza desaparecieron en circunstancias en que la
lengua tendia i uoiformar todas estas inflexiones.
m
INFLEXION EN TES
Al comeozar el siglo XVI, en el pretérito terminaba esta
persona en îes^ segun vimos, y asi se halla constantemente en
las ediciones hasta fines del mismo siglo; mas al entrar el
siguiente otra vez hallamos i Aldrete desconforme con Ios gra-
miticos citados. Los ûkimos dan la forma aotigua, al paso que
aquél trae amastis, qoe no veo mencionado en otra parte, pero
cuya autcndcidad es indudable. Por el mismo tienipo dcbia de
estarya bien extendida la inflexion actual en teis^ supuesto que
se halla en on despacho original de i°. de Septiembre de 1605
(Bibl. Nac. de Paris, MS. Esp. 60, foL 190). De donde podemos
inferir que al hacer entrar la forma antigua en el movimiento de
uniformaciàn que se venia verificando, hubo un a vacilacîôc
semejante i la apuntada arriba con respecto a las que finaliza*
ban en âs^ es : unos se contentaban con igualar la vocal final,
otros întroducian el diptongo; prictica esta ultima que tcnia
que prevalecer, por cuanto con* clla se lograba de todo en todo
el objeto i que tendia la lengua. En el Quijote, en la Dorotca y
en las Tablas de Cascales no se halla sino ks ; en la ediciàn
LAS SECONDAS PERSONAS DE PLURAL 83
priDctpe de las Novelas (1613) se halla aislado un hi^isteis (foL
^S ^ )f qu^ acasû ha de atribuirse al impresor, ni Dids ni
roenos que un habïasîeis de La grau Sultana^ jorn. I, que esti
como consonante de pintastes {Conudias ^ foL rî8 v°, Madrid,
téij); en la cdiciôn de! Persiks ht'cha en Bruselas en i6r8,
aparecen topastas, socarristeis (pp. 470-1)'; en cl Teatro de
Gonzilez Ddvila, citado arriba, hay dexasteis, Revuehos casi en
îgual proporciôn estdn tes y teis en las Ohras de Anastasio Pan-
tile<^n de Ribera (Madrid, 1634) y en la l^ega de! Parnasoùc
Lope, Lo misnio puede decirse con respccto al Criticôn y la
Ci^rana gôtica. Se cae de su peso que la forma en tes desapa-
rcciô del uso comùn como segunda persona de plural por el
mismo riempo que la en des^ supuesto que ambas se habian ido
alterando en virtud de un mismo impulso hacia la uniformidad
de la conjugaciôn.
Calderôn vacilaba entre tes y tis. En El Mâgko prodigioso^
comedia « compuesta para la villa de Yepes en las fiestas del
Santisimo sacramento ano de 1637 » (valiéndome de la rcpro-
duccitm del autografo hecha por el Senor Morei-Fatio), hallo
ocaiionastcs (p. 113); mis adelante (p, 221) esciiclmstes ^ pero
vtatasks^ que va primero y con el cual consuena esotro, esti
corregïdo matastis por el mismo Calderôn; y loego (p. 223)
rim^n fuistisy distis *. En la jornada IIl de El Màiico de su hnra
iifxx^ct tristes como consonante d^ perdistes (R. 7, 3580» Y
después en la jornada III (R. 7. 360- ) asuena el mismo adjetivo
con Jistiis j segiin los impresos; pero no séria temerario créer
que el original diria distis. En traslado auténiico hecho 4 fines
del sigio XVn de una declaratoria real sobre las preemincncias
de D. Luis de Torres y Monsalve, se lee supUcasiis^ presentastis
en parte de un documente de 16 17 copiado en 1639, y en el
icîtto mismo, que es de 1683, hay dos veces probastis, averi-
guasth.
1* No hay para que decir que los edîtores moderoos son poco esmerados
en este pUDtû. La Academia misma en su magnffica cdiciôn del Quijott (cap.
Il de U II parte , poco dcpuiis de les versos v En tanio que en si vuelvc
Akiiiâoni » dejô posar un naasids que no esti en lâs ediciones anteriores).
3. Fuistis se balU en tas Obras de Gôngora, foL i^ v^ Madrid, i6$4; pero
tn U edkîôn de 1634 se lee fuistes,
84
R, J. CUEKVO
IV
OTRAS FORAfAS ANALOGICAS
Como coexisticsen por algûn tiempo las formas intégras
esdrùjulas y sus abreviadas y ademds la en teis^ resuUù una
nueva confusion, y fue que el dfs se convirtiô en deis\ En la
instrucciàn dada por Felipe III a D* Juan Bautisra Acevedo
cuando le nonibrô Présidente de Castilla (Abri! de 1608) y que
copia Gonzdtez Davila {ubi supra , p, 385), se leen enîcmUen'is y
pudieredeis, La tercera parte del Criiicàn (Madrid, 1657) d^
repctidas veces la oiisnia forma. En El panxido en la carte de
Moreto teo atuviéredeis, segun trae la comedia cl tomo XXXIX
de la Biblioteca de Rivadeucyra (p. J 18' ); como el editor dice
haber tenido à la vista el autografo, séria curloso saber si asi
consta en éL En un auto de la Nueva Recopilacion (1772), que
arriba cité, el que refundc disposiciones de 1671 y 1695, se
muestran lado i lado rmbiéredes ^ îuviéredeSy aUendiereis^ y tuvU-
redeis. En sonia^ este modo de conjugar debiô de scr comûn en
la segunda mitad del siglo XVII, pues en los numerosos para^
digmas de la gramdtîca que acompana al Diccionario espaiiol é
inglès de J. Stevens % son estos finales, salvopoquisimas excep-
ciones, los ùnicosque figuran.
Oiro caso de la action analogîca présenta la forma disîedes por
disteSy de que hay ejemplos en el Ronmneero général K
Tampoco dcbo olvidar cl bogotano anmisteiSf nacido de
amàis.
Unas conjeturas para coricluir. Se han explicado las locucio*
nés tu corrisîes^ tû lecasasieSy en vez de îû farrisk^ tù UçasasUy
1. En el romance VIII dt Anastasio Famaleôn de Ribera se hallan junios
fuiskh^UegasUh, Unmsieis^y tniràradfs^ UevàhadesiM^ànàf ^634)*
2. A new Spanhh and EngUsh Oiciiomiry . . . byjohn Stevens, London, 1706.
5, Véase ïa nota 79 de mi ediciôn de b Gramiiica de Bello. Es de nour
que uno de estos ejemplos, que en el Romancero dice « Cantando vivos dolorcs
I Que me dhtfdes un dfa j> (R. 10. 1 se*» ), en Gil Vkente se lee : w Cueman
k)S vivos dolores | Que me dlsies aqucîdia « (tomo II, p. 250, edic. de 1843).
LAS SECONDAS PERSONAS DE PLURAL 8j
como resultado de la influencia de todas las otras personas de
sîngular, que acaban en s : corres, casabas^ etc. Sin duda que
esto tiene muclio de cierto; pero acaso séria mas exacte decir
que , habiendo coexistido las dos formas en ks y en teis, la
ùltinia, que debia su origen i la analogia de las demis personas
del plural, se fij6 en esta funciôn, al paso que la otra, al irsc
olvidando su primitivo oficio, en fuerza de su semejanza coti
las de singular, vino d j un tarse con el pronombre //î. En apoyo
de esta explicaciôn se ofrece el hecho de hallarse varias vecestal
combinaciôn en Canizares *, lo que acerca suficientemente el
use moderno aPantiguo para que pueda darse por no interrum-
pida la tradicion. Como quicra que sea, esta practica es comùn
en Aodalucta/^y escritores bien conocidos, y aun miembros de
la Academia de Madrid» oriundos de esa région, la han em-
pteado en verso; con cuyo ejemplo Oegô a generalizarse tanto
en Espana y en America que dentro de un mismo periodo se
mezclaban las dos inflexioncs, antigua y moderna, como con
las de plural sucediô en tierapos aiiteriores. Para citar cjemplos,
vayan dos de épocas difercnies, el primero del Conde de
Torrepalnia (1706- 17 67) y el scgundo de Zorrilla.
Mis flacos miembros, que rendidos
En medio del camioo concukastes;
Sin daftneni consuelo, estuvc triste;
Enfamo, en mis doîcnctas me oivi-
[dûstei;
Anoche en yez de oraciôn,
Dtscsperoda en el lecho,
£xba!asie de tu pecbo
Sacrdcga mdldicîôn.
Fcregrîno, tû, en fia, no tnca^ogisU;
Antes el dulce suçno procurastes^
Halliadolo, de mi bîeti descuidado,
En bbndo lecho, en pabel!(in dorado.
(BI jttidû Jinaî. — R,6f. 155^.)
Que en el cristal trasparentc
ContetttplasUs aterrada
Del negro crimen grabada
La marca infâme en la frentc,
(Obras, tomo I, p. 8 ; Paris, 1852.)
Sin embargo, este movimiento parece habersc atajado en el
lenguaje Hterario por efecto de la difusiôn de !os estudios gra-
nuticales, y mds por la censura que en libres didacticos se esta
I , A la tnenos en edidones de comedias sueltas suyas impresas en eî siglo
pisado se lee : tû apelmUs (El Dcnnine Uicas, jora, I), /li saîistes {El honor da
tntntdémiaUo f jorn. III), tù tchastes (La rtiâs ilmtn fregotta , jorn. II).
È6 R, J. COERVO
haciendo tiempo ha de esta que (si no se généralisa) Ibmaran
los gramadcos corrupteli intolérable '.
A lo que parece, dcbe expitcarsc de otro modo el uso vulgar
americano de la forma en tes. El nominativo /?î, como atinada-
mentc apunta R. Lenz {Zciîsfhrîfî fnr romanisch' Philologie, XV,
522), ha caido en olvido entre el pucblo de Aniérica y cedido
cl poesto i vos^\ de suertc que con toda regulartdad se dice,
valîéndosc de las antiguas inflexiones vulgares castellanas : vos
tomàs^ eorràj dccis^ sos^ comas ^ saqids^ vengàs^ y por lo misrao
Hevastesj îrujistes, A semejanza de estas hubieron de forjarse vos
andabasy Unlas^vinierasy que correspondeo ilasacabadas de men-
cionar como andabats , ieniais, vinierais a andâis, leuéis^ ifcrigùis*
R. J. CUERVO.
f . Es sitigukr que, habiendo publicado Qiiintana con toda correcciôn en
la coiccciàn de Femândcz el romance que comienza « Mira* Zaîdc, que te
aviso n (tomoXVl, p, 190), en las varias edicioncs del Ttsoro iM Parnasù
ispanoî (iSoji 1830, 1861 ) liaya salido afeada esa composiciôn con el revol-
tillo de que nos à\6 mutstra Zorrilla i fà iupUU, saltste^ bichtt^ hichtcs, ffu^
nasUs^ dfsaftastt'u Ni es diOcil aducir otros casos de igual corruptela, Por
ejemplo, Scfo puso bien quisiste traducicndo el Evangeîio de San Maieo, XI ,
50; pero en h edicidn de Parfs, 1846, cl cajista lo convirtiii en quishta.
2. No es improbable que semejante predoniinîo de tw sobre hï provcnga
del empico que del primera se hacfa al liablar con infcrîorcs, b cual serfa
buen argiiracnto de la mancra como los peninsulares trataban i los indios y
criollos. A los coniprobantes » que de este us<> de vos cstin cîtados en las
ApimtacioHfs criiicas sohre cl Icttguaje k\uitafto ^ S 306, agrcgsr^ el siguienic :
« Como un caballero valcroso y generoso , aunquc mal criado, le oyese yo
siemprc deciri cada uno con quien bablaba, vûs^ tm, y él^ f7, y que nunca
dccia m^rced, dijele yo : Por mi vida, senor, que pienso mu chas vcces entre
mi que por eso Dîos ni cl Rey nunca os hacen merced, porque jamis lîamâis
à ninguno tm^cùî. Sintiô tanto esta palabra, que dcnde en adelante paré cl
dcdr VP5, y lïamaba i todos nterad, ^ (Guevara, EplsL fam. i. 25.)
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET
(Suite)
II. RECUEEL DE MORCEAUX VARIÉS
(MS. de m. PAUL ARBADD)
Les dernières lignes de la chronique de Bertran Boysset se
rapportent à un événement qui eut lieu le 19 février 1415
[nouveau style), l'entrée à Tarascon de la reine Yolant, femme
ïu roi Louis II, comte de Provence *. Boysset avait sans doute
dépassé la soixantaine. La naissance du premier de ses onze
enfants, sa fille Marie, est marquée dans la chronique au
10 février 1573 (nouveau st.), et celle du dernier, Hoguet, au
23 avril 1393*. Par conséquent, à supposer qu*il se soit marié
jeune, selon l'usage de son temps, il ne peut guère être né
plus tard que 1350. Le goût de la httératore paraît lui être
venu de bonne heure. C'est en 1389 ou 1390 qu'il commença
à tenir note de ses dépenses et des événements de son temps
dans le livre maintenant conservé à Gênes qui est comme le
premier jet de sa chronique î, revenant occasionnellement en
arrière jusqu'en 1365 ^ pour insérer des documents qui lui
paraissaient bons à conserv*er. Mais, bien avant 1389, il s'était
montré curieux des choses littéraires en transcrivant, dans un
livre qui nous est heureusement parvenu , un certain nombre
d'opuscules provençaux dont quelques-uns seraient irrémcdia-
t. Lp Mufèt^ tamt arîésiennt Ust&riqu€ et HUéraire^ année 1877, p. 160.
2. LsMu^t anoéc 1877, p. 204 ; cf. le mémoire de M. Novatî, Romam'û,
XXÎ, Sî6,
j. Voy. Tarticle précité, Romania, XXI, 531, 550, SSI-
4. Eomania^ XXI, 564.
88 P* MEYER
blement perdus s'il n'avait pas eu soin de nous les conscn^r. Ce
livre est un manuscrit en papier, de 71 feuillets, qui a appartenu
jadis à Monmerqué ' et qui maintenant fait partie de la riche
bibliothèque de M. Paul Arbaud, d*Aix. J'aurai peu de choses à
en dire, M. Chabaneau 1 ayant décrit en détail = et en ayant
publié plusieurs morceaux.
Je me bornerai donc à Vappeîer que ce ms. a été exécuté à
diverses reprises, de 1375 h 1375» et qu'il contient :
i^ Fol. I à 23, un texte provençal du Livre de Sidrac^ diffé-
rent de celui qui se lit dans le ms. de la BihL nat. fr. 1158.
Cest une traduction du français.
2*" FoK 25 r** et v*", quelques coblas de Bertran Carbonel de
Marseille. ^Ê
3° Fol. 24 à 29 V**, une rédaction de VEnfant sage, ou dia-
logue d'Adrien et d*Epictète, difTérente des deux rédactions
jusqu^ici connues en provençal. De ces deux rédactions, Tune,
assez courte, est imprimée dans les Denhuttlcr de M. Bartsch
(pp. 306 et suiv.) sous le titre de Episcopus, dcclaranuns de mot as
detnandas, d*apràs une copie unique que contient le chansonnier
La Vailière. L* autre a été rencontrée jusqu'ici en trois mss. dont
j*ai donné l'indication dans le Bulklhi de la Société des anciens
textes fra finals j 1875, p. 72. A cette rédaction se rattache la ver-
sion catalane récemment publiée par M. Pages dans les Etudes
romanes dédiées à Gaston Paris (189 1), pp. 183 et suiv. Le texte
copié par Boysset est certainement diffèrent des deux rédactions
connues jusqu'à présent. Toutefois il est notablement plus
près de la version la plus longue que de la plus courte.
Pour aider à des recherches ultérieures sur [origine et les rap-
ports de ces divers textes, je vais imprimer le commencement
et la fin de cette sorte de dialogue d'après la copie de BoyssetH
plaçant en regard les parties correspondantes de la version pro-
vençale la plus rapprochée, celle qui se trouve dans trois mss.
entre lesquels je choisis le ms. BibL nat, fr. 1745 K
I. N» 2789 du catalogue de ses livres {1852); voy. Romania, XVII, 14;
3, Rnnt£ des langues romanes, 4e série, II (1888), 473 et suiv.
3, J'ai publié dans le BuUttin de 1875 (p. 73) le commencement de la
même version d'après le ms, Bibl. nat, fr. 25415» ^^ le texte est iocompîct
I
de U fin par suite de la perte d*un fcuîllci.
LES MAKltSCRlTS DE BERTRVN BOYSSET
89
COFIB DE BOYSSET.
Uo enfant fôn apellat Apitus; fon
comandat a ,j. iirchîveSi^uc , et aqud
archivcsque comandet lo al patriarcha
dcjherusalcm, el patriarcha de Jheru-
salein trames lo a .\, savi duce humil
c plus eotcndut de savisa que fos en
rota la icra d'Orient \ Cant Tenfant
fon vcngut ad aquella sieutat on era
aquel savi duc, las gens auziron de
Tenfam parlar, Adonc dysseron -iij.
cavallies d'aquel savi duc que cls l'âne-
ron vcxcf. E tantost con el los vi e el
los conoc, c saludet îos, e els luy. E
adoncs els lo meneron davani lo duc ;
e quant Tenfan fon vengut davant lo
duc, el lo près a regarda r e dcmandet
\\i n Enfint, per quai razon ycst ven-
• gut aysy * ? n L'enfant respont :
« Ycu soy vcngut de mon payre e de
m ma mayre, e suy engenrat de man-
« damem de nosirc Senlior Dieu , e
9 suy vengut pour cndoctrinar e pcr
« casttar los homes nçgligcns c non
«I cntendens de savtxa. » Cascuns dis
a Teofant : « Yes » tu sa vis ? » Uen-
fani responi : cr Aqucl es sa vis que si
B. N. FR» 1745, FOL, isî*
Hieu era apeïlat2 pcr nom petiu
efans, fuy comandatz ad .j, arci-
vcsque, c Tarcivesque comandeu ' lo
ai patriarcha de Jherusalem, el pa*
trîarcha trames lo ad .j. duc que era
homs de grans saviesa cl mays enten-
du t^ home que fos en toi as las parti-
das d'Oricn. E quant aqucll efan fo
vcngutz en la ciutatz hon era aquell
duc , no vole denant luy venir. E
disccndcro* s'en Jij. cavaliers que
cran dcnan lo duc : « Aquell no nos
</ conoyss ; anem lo vezer e saludar. »
E quantz Ij foron dcnan vengutz,
de m an de ron li : <r Efan , don les tu
« vengutz? » L*efan dis : « leu soy
«f vengutz de mon payre e de ma
V mayre , c soy eugenratz e crcatz
V del mandamens de nostre scnhor
« Dieu s. B Los cavaliers demande*
ron li perque cl era aqui vengutz» E
Tcfan rcspondctz : « leu soy ayssi
(t vengut/ per endoctrinar e per cas-
u tiar los homes necgligens e no
n entendutz de saviesa. » Et cils dis-
sero H : « Doncs ies tu savis? w L'cfan
Ir Le ^ est souvent employé, dans ce ms, , comme un pur ornement.
2. Il est visible que la copie de Boyssct abrège. Toutefois elle a conserve
à peu pri*5 le nom de Tenfant^ Apihts (Epictète), déplora blemeni corrompu
dans les autres textes provençaux. Le ms, derArscnal (Bniktin, p. 73) porte ;
Hui era apeiat ./• P'f^f (/<"'' ; le ms. 2441 5 : //« era apeUmi^ per mm e per petit
efan. Le ms. 1745, ayant commencé par hieu (je), a dû mettre le verbe qui
suit  la première personne (/«y cùtnanâalx)* Il faut probablement corriger Us
gfmis era apdati per nom Epitus.,. Le texte catalan a conservé le nom de Ten-
^t ; « Una vegaâafon un infant que havia nom Epi tus.
j. G>rT. dissero.
4. Cette question o*est pas à sa place et ne concorde pas avec la réponse,
V^oir Tautrc texte.
5. Ecrit ;«f avec une barre sur ces deux lettres.
90 ~m^^F- p. MEYER
« meseys caslia. »> Et ayso fon â'\g a lurdi : « Aquellessavis que se meicys
Temper^idor x\drian. Vcmpcrador H castia. » Aysso fou comtatz 2. l'em-
dcmanda : « Enfant, corn es fach lo perador; eloemperador mandetz que
« ccl?... » rtfan fezcs liotn venir denantzse...
Voici maintenant les dernières lignes :
Copie de Boysset, fol. 29.
LVmperador demanda : « Crczcs m
<c que nostre senlior Dieu Jhesu Crist
•t venges en k verges sancta Maria,
♦< e qu*el nasquet de luy veray Dieu e
«t veray homs? » Uenfant respon :
« Hoc. » — E crezes tu qu'el sufri
ft fatn e set e autras tribulations per
if nos pecados rezemcr? n L'enfant
reapon : a Hoc. — E crezcs tu qu'el
V près mort e pado en la sancta veraîa
« cros per nos salvar? » Uenfant
respon : « Hoc. — E crezes tu qu'eJ
«i resussiiet lo jom de Pas cas , e que
K lo jorn de Tacencion s'en pu jet cl cel
it e lo jorn de Pandccosta trames lo
« Sant Speritz als sieus decipols? »*
L*enfant respon : « Hoc. — E qu'el
n venra donar son jujamcnt afs bons
n et als mais en ïa val de Jozaphat , c
« qu*el als bons dara vida de glona
« per tostemps mays el sieu sant
«t paradis, e los mais mandara anar en
« cnfern, don yamays non ysseran ? »
L entmt respon : # Hoc* 0
Ar prcguetti nostre senhor Dieu
Jhesu Crist e la verges Santa Maria
que nos meta el gaug de paradis , lay
on tug li angel son. A Dieu plassa!
Amen,
B. N. fr. 174s, FOL. is6B,
Lo emperador demanda : « Ço
crczcs tu que Nostre Senhor %*enc c
nostra dona sancta Maria en près carn
humana e nasquetz d'ela vers Dieus
e vers horas, que sufri fam e sctz et
autres trebalhs, e près mortz c passio
per nos autres peccadors a salvar?
L'efan dis ; <» Hoc, et encaras crezi bc
(f ferma m en que resuscitctz lo jorn de
« Pascasc que s'en pojetz el cel lo jom
fi de la ascentio vcsiblamen dcn3[n]tz
«i los apostols, cl dia de pentacosta tra-
ie mes lo santz Espcriu sobre so discî-
« polse que d*a qui venra darlo juzizi
« als bos étais mais en la va II de Joza-
<t phau, ails bos vida per tostemps
« iiia)'S, en paradis, et als mais pena
« e turmcn per tostemps mays. » Aras
preguem Dicus nostre senhor e nostro
dona sancta Maria que, per la sua gra-
cia» nos gar de las pcnas de ifem, c que
nos meta en paradis hors son los amicz
cieus fizels. Amen.
4° FoL }o à 50, une sorte de roman en vers très ir réguliers
que M. Chabaneao a poblié dans la Ra^ue des langues roinanes,
4' série, II, 480 et soiv., sous le titre de Roman d'Arles, Comme
Ta montré réditeiir, il y faut reconnaître trois parties distinctes,
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET 9I
h légende du bois de k croix', une version de la Vindicta
Sahaioris^^ enfin une sorte de chanson de geste peu ancienne
sur la prise d'Arles î.
5** Fol. 50 v° à 69 , la vie en vers provençaux de sainte Marie
Madeleine, publiée d'après ce ms. par M, Chabaneau, dans la
Reim précitée, 3' série, XI (1884), 157 et suiv. On sait que
j'ai trouvé, dans un ms* d^Ashburnham place, volé à Tours par
Libri, une copie plus ancienne de cette même vie*.
Les fol. 69 v** et 70 contiennent divers dessins. Suit un
feuillet isolé qui devait à Toriginc être indépendant de notre
ms. et dont je parlerai tout A Theure,
Ce ms. a été, comme je l'ai dit plus haut, écrit à diverses
reprises. Boysset a daté trois des parties dont il se compose.
La première des trois dates se trouve au fol. 23 V*, à la suite
des coblas de Bertran CarboneL M, P. Arbaud ayant eu l'obli-
geance de me communiquer son manuscrit, j*ai fait repro-
duire en héliogravure, par M. Dujardin, ce verso et le recto do
feuillet 24. Ce fac-simîle forme le n" 356 de la collection des
héliogravures de l'Ecole des Chartes* Je juge inutile de joindre
ici un tirage de cette planche ; je me borne à faire faire un
report des lignes qui contiennent la date en question :
Fînito rairumdo sit laus et glorîa Christo,
Qjii escripstt scribat, scmper cum Domino vivat < f
Anno Donûni niillcsimo .ccc. .kx. secundo, die .xiij, mensis junit, fuit
feoitum istud romancion ad honorem Dei es mater ejus, qua Bertrandus
B. escripsit totum, etc*
Sur celte légende, voy, Rotmnia^ XV^ pé.
CT, ButUtirt d« la Soc. (Ui auc. textes, 1875, p. 5}.
j. Le romm de Tersin, que j*ai publié en 1872 dans le premier numéro de
ia Remania , nVst autre qu'un remaniement rcccnt d'une partie de ce potmc
de la prise d'Arles, avec des additions prises d'ailleurs.
Romania^ XIV, 52 >.
Cf. la souscription fort analogue insérée par Boyssct dans la première
rédactioQ de sa chronique, Ramania^ XXI, 5 $5.
9^
p. MEYER
10 *
rumine VtuAr* cf --
W»^*' T/s^ ^/^V=^ "^^
Il restait un peu de blanc au dessous de la date : Boysset
l'a utilisé trois ans après en y écrivant la mention de la nais-
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET 93
sance de son quatrième enfant, Jaumet, né le s décetnbre 1377
et baptisé le même jour'* Il est bien certain que cette note a
été inscrite aussitôt après le baptême, à un moment où Boysset
ne tenait pas encore son jouroaL Plus tard, il reporta dans ce
journal les mentions de ce genre soit de mémoire, soit d'après
des notes éparses, mais dans le cas présent, il commit une
erreur qui se trouve répétée dans tous les mss, de sa chronique.
Il assigna la naissance de ce Jaumet au 10 mars 1377, c'est- A-
dire 1378 du nouveau style '. Or cette date n'est guère vrai-
semblable si on considère que le 25 novembre suivant Boysset
eut un cinquième enfant K
La deuxième date se trouve i la suite de V Enfant sage, au
fol. 29 V. Elle est conçue en ces termes :
Knno Domîni mUlesimo .ccc. Ixx, tercio» die .xiij. mensis mardi, luit
fcnitum ïstud romand u m ad honorem Del es (sic) miter ejus, qua {sk)
Bcrtrando Boysseti escripsit totum, etc.
Enfin, à la suite de la vie de sainte Marie Madeleine , au
fol, 69, il y a une troisième date rédigée dans le même style :
Anno Domini tnilksîmo .cccUxv,, die Jîij. mensis augusti, fuit tinitum
istud romandum ad honorem Dei et mater cjus et ad honorcm beaie
Magdalene. Quam Bertrando Boysscti esciipsit totum, etc.
Le ms. a donc été exécuté de 1372 à 1375.
J'ai dit plus haut (p. 91) qu'à la fin du ms, de M. Arbaud
était relié un feuillet isolé, non paginé (ce serait le fol. 71), qui
devait être originairement indépendant du ms. auquel on l'a
annexé. Ce feuillet, qui est de la main de Boysset, contient
57 vers de la vie de saint Trophime, évoque d'Arles. J'ignore à
quel moment il a été rattaché au ms. de M. Arbaud, mats ce
qui porte à croire qu*il est tiré d'un ms. dont il est le seul débris.
1 . Boysset eut trois fils nommC^s Jaumet , ce qui suppose que les deux
premiers moururent jeunes. Il s*agit ici du second,
2. Pour le ms, des Trinitaires (Giînes), voy. Le Musée, 1877, p. 204; pour
celuî que nous a conservé la copie de Bonemant, ihid., p. 13 ; ms. de Paris,
f. niiij.
3. Lt Musft\ Î877» pp. 14 et 204.
94 P- MEYER
c'est qu'il était d'un format un peu plus grand. Par suite les
commencements des vers, au verso» ont été entamés par le cou-
teau du relieur *.
Si le reste de cet exemplaire de la vie de saint Trophiaie,
transcrite par Boysset, nous manque, nous avons du moins
conservé de ce même exemplaire une copie exécutée en 1619
par un certain Louis Ferricr,
Cette copie forme une mince plaquette in-S"* conserv^ée à la
Bibliothèque nationale sous le n* IJSM ^^ fonds français
(ancien soppl. fr. 3213). Celui qui Ta faite nous a fourni sur
le ms. dont il s'est ser\à quelques renseignements ^ La copie
est passablement exacte , autant que nous en pouvons juger par
la comparaison avec le fragment original joint au ms, de
M. Arbaud. Elle nous a conser\^é la souscription que Bo)^set4
selon son invariable et louable habitude, avait placée i la fin de
son travail. Voici cette souscription, qui est particulièrement
curieuse :
Annû Dominl millesîmo ccclxxiit^ die .xxvij. mensis febroani, fuit feciituni
seu escriptum totum hium romancium . seu vita beatissimi Trophimi , qua
escripsi ego Bertrandus Boysseti totum» qua illa die vinhcbat ^ nimis fortilcr,
quia habebat bene de espiso Si\. palmos et magis. Antequam fuisset ïcgata
tota fueruQt crasacci^ bene .xv. dies. Ffioito libro sit laus et gloria Christo.
iVmen. Qui cscripsil escribat , semper cutn Domino vivat ! Vivat in selis
Bertrand us Boysseti que nomioe felix. Amen.
La chronique de Boysset mentionne cette neige abondante à
t. Cf. Chabaneau. Rtvtu dis langues ronmtus^ 4* série, II, 477.
2. On lit en effet à la fin de la note qui suit :
Le ircntiesmt jour du mois de mars mil six cents dix s«pt, Anthoine Agztà, mststre
orfcbvrc de cesic ville d^Arles, a preste * moy Lonys Février un aniien livre ôrigîii»!»
couvert de pargerain , contenant Thistoirc de sainct Trophime , prcmiçr evcsque de U
dite ville, aui premier et dernier feuillets duquel messire Dacorti, pdii abbé du
monasuirt Sainct Pierre de Montmajour et d*aatres abb^s ses devantiers sont si^és, et
mr îceluy ay £aia cest extraici, y observant par tout t'orthogmphe et abrcvUtioii des
mots trouvées au susdit original escript et signé de la main de Bertrand Boysset.
L*abbé de Montmajour, meniionn<ï dans cette note, est Guillaume de
Ccni, i6ochi6ii ; voy, GaUia QmUùma, ï, 1617-8.
|. 5*t*, lire nitigiubat ou mwhat?
4^ Sk^ liie passait.
LES MANUSCRrrS DE BEKTRAN BOYSSET 95
peu près dans les mêmes termes*. Or, si on admet (cf. plus
haut, p. 87) que notre Arlésien n'a commencé à écrire le livre
conservé actuellement à Gènes que vers 1389, il faut cependant
supposer qu'avant cette époque il tenait note, en quelque autre
livre ou sur des feuilles volantes, des événements de son temps.
Le ms. 13514 a été copié pour Sainte^Palaye. Cette copie est
conservée à la Bibliothèque de T Arsenal sous le n^ 3309 (ancien
B. L. Fr. 140), jointe à une copie partielle du Brnnari d'aniûrs
d'après les mss. Bibl. nat. fr, 858 et i6or ^ Raynouard s'en est
servi pour son Ltxiquc roman, M. Bartsch a connu le ms. 15514
et en a tiré le morceau de la vie de saint Trophime qu'il a
inséré dans sa Chrestomathie provençale L II y a jointe dans sa
quatrième édition, les variantes d'un ms. de Naples dont il ne
donne p2S la cote- Ce ms. de Naples est un volume in*4*', de
49 feuillets, écrit au xvni* siècle (coté I. G. 40). La vie de
sakit Trophime en occupe les neuf derniers feuillets; les qua*
Tinte premiers renferment une version de Tévangile de l'enfance.
J'ai déjà eu occasion de dire 4 que cette copie de Tévangile de
l'enfance avait été faite d'après un ms. de la bibliothèque du
comte d'Ashburnham *,
J'ajoute que le même ms. contient à la suite de Tèvangile de
Tenfance, du fol. 33 v*" au fol. 38 et dernier, la vie de saint
Trophime.
1. Ms. de Gènes, fol. 34 v^ {Kômania, XXI, 535); ms. de Paris, foL xiiîj v«»;
{U Muséf» p. i4)< Voici le texte du ms. de Paris :
ittm, Vàn MXCcAxnix,, lo jorn .Mvi). de febricr, ocvct en Arle o en soa tcrnâoï
ttat fort qu« fon espesa tics pds e plus; et davant que fos Icguada foron pasatz .xv.
|qnu e plus,
2. M, Martin a omis, dans son catalogue des mss. de TArsenat, de men-
tîoitner la copie de la vie de saint Trophime, mais cette indication se irouve
diQf le catalogue manuscrit de D. Poirier, et par suite dans Vlmentairt imn-
main tUs Biblwtftèques de Francr de M. UL Robert, p. 116.
J. 4« édition, coL 391-4.
4. Romania, XJV, 307.
5, N'» 105 des rass. vendus i lord Ashbumliam par Libri. Ce ms.» dont
Torigine n'a pu être constatée d'une façon certaine, n'a pas tHé réclamé par la
France. Il fait partie des mss. Libri acquis par Tltalic. On en trouvera la
description dans les bdici e Cataîoghi publiés par le ministère italien de
rmsiruction publique, série VIII, / codici AMmnihamiûni dcUa R. hihîhiaa
M^dic^xyLaurm^iam, sous le n*» 38, Les rédacteurs de ce catalogue ont laissé
jé P. MEYER
Nous connaissons Boysset , chroniqueur. Nous avons vu en
lui un homme d*ûne iostmction limitée, mais d'un esprit
ouvert, un bon Provençal attentif à rhistoire de son temps et
de son pays, tenant note des événements qui se passaient sous
ses yeux et copiant, poor son usage personnel, des écrits en
langue vulgaire offrant soit un intérêt général, soit, comme le
Roman d* Arles ou la vie de saint Trophime, un intérêt spécia-
lement arlésien, Noos allons, dans le chapitre suivant, le voir
apparaître sous un aspect nouveau et qui n'est pas le moins
curieux.
IIL TRAITÉS d'arpentage
(ms. de carpentras no 325)
Livre en papier, composé de 31e feuillets écrits' et de
quelques feuillets blancs non compris dans la pagination. Hau-
teur de chaque feuillet : 215 """"; largeur, 148. Ce ms. est tout
entier de la main de Bertran Boysset. Il est difficile à décrire
parce qu'il n'a pas été écrit tout d'un jet', et de plus, Boysset
a fait à son œuvre des additions qui ne s'intercalent pas tou-
jours i leur vraie place. En outre, la reliure, qui est moderne,
n'a pas été surveillée avec soin, et diverses transpositions se
sont produites. Les feuillets doivent se lire dans Tordre qui suit :
échapper dans leur description une erreur bien singulière. Il y a à la fin
de révangile de Tenfance, A M E N^ les cinq lettres séparées. Ils ont lu ///au
lien d'Mt C au lien d'£, et // an lieu dW, et ont transcrit A : iij : C : ij,
ajouiam entre parenthèses, 1502 111 Comparant les extraits rites avec la
description que j*ai prise de ce ms. chez le comte d'Ashbumham en 1865,
j'y trouve bien d*autres fautes de lecture,
I, Je suis la pagination moderne, qui, du reste, n'est pas faite avec
méthode. Elle comprend un des feuillets de garde où se trouve une sorte de
titre en provençal moderne, et ne tient pas compte du feuillet blanc qui suit,
II aurait fallu remettre les feuillets en ordre avant de les paginer. Il existe une
ancienne pagination en chiffres romains qui s*étend jusqu'au n« cxxstxv
(î6t de la nouvelle pagination), et que je croîs de la main de Boysset. J'aurai,
plus loin, occasion de m'y référer.
a. La série de comptes faits qui commence au fol. 66, voir ci-après, p. ni,
est datée du 15 décembre 1401 ; le traité é'atnmemr qui occupe les ff. îo6 k
141 est daté du 8 janvier 1405 (1406 nouv. st.^ ci-après pp. uj et 116); il y
% au foL 8 V" (ci-après, p. loo) une addition du 16 mars 1405 (1406 nouv. st.).
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET 97
2 i î, 7 à 21, 6, 22, 23, 25, 24, 26 à 152, 1)4 i i6i, 316,
153, 162 1315.
Ce ms, contient, comme partie essentielle, deux traités de
Boysset : un traité sur Tart de mesurer (desirar) les terrains, et
un traité sur Tan de les délimiter {atermefiar). Ces deux traités
sont accompagnés chacun d*one table (ff. 30-1 et 99-104) qui
parait avoir été faite les traités une fois copiés, car Fécriture,
bien qu'évidemment de Boysset, n'est pas tout h. fait semblable
à celle du reste. De plus, les deux tables interrompent Fancienne
pagination. On possède, dans un manuscrit de la bibliothèque
Méjanes, à Aix, une copie contemporaine ou à peu près (mais
non autographe) des mêmes traités *, mais outre qu'en son état
actuel le ms. d'Aix est incomplet % il faut noter que dans le ms.
de Carpentras Boysset a ajouté diverses matières plus ou moins
en rapport avec le sujet de ses deux traités % et notamment une
sorte de poème dont les vers, mal mesurés, et rimant de temps
en temps, rappellent la composition relative au siège d'Arles
que M. Chabaneau a publiée naguères diaprés le ms. de Boysset
auquel est consacré le précédent chapitre. La versification des
mystères rouergats étudiés par M. ThotBas dans les Annales du
Midi (cf, Romaniay XX, 340) n*est pas beaucoup plus régulière,
1. K*» 84 du catalogue imprimé en partie (huit feuilles) par Rouard,
rancien bibliothécaire d'Aix (f 1873)*. Cest uo li\Te en papier, ayant le
format d'un petit în-4«», contenant en son étal actuel 71 feuillets. Uécriture,
qui dilTère assez de celle de Boysset, est de la première moitié du xiv* siècle.
Lji mcmc bibliothèque renferme (Catal. Rouard, no gçj yjiç copie de ce ms.,
faite au xvu« siècle, à une époque où il était plus complet. Au témoignage
^dc Rouard (p. 66 de son catalogue), ces deux mss, ont été conservés
squ*cn 1855 aux archives municipales d'Aix,
2. Les dcmiéres lignes du ms. d'Aix correspondent au fol. 194 du ms. de
Carpentras.
3. Outre cette première différence entre les deux mss., on peut constater
de Tun à Fautrc des variantes de rédaction assej: nombreuses. II m'a semblé
le ms. d*Aix abrégeait de temps en temps le texte de Boysset. Mon
^«xamcn n'a pas été assez prolongé pour me permettre de décider si le copiste
du ras. d'Aix avait eu sous les yeux le ms. actuellement conservé à
□tras ou un autre ms. Cette dernière hv^othèse est la plus probable :
t qui a fait plusieurs copies de sa chronique peut en avoir fait plusieurs
aussi de son traité d'arpentage*
* Ce uuàogae iuai îcufhcvè est resiè înétlil. ToatefoU qadiqaes exemplAÎrc» det f?Qill«s tirée
I été ûMÉOihaèi. J'ea (K»ui6dc deux pour nu put.
».xxa ,
98
P, MEYER
Passons maintenaot à la description détaillée du manuscrît,^
Les quatre premiers feuillets', numérotés actuellement 2 à 5,
ne sont pas compris dans raocienne pagination, et ont dû
bien certainement être ajoutés après coup par Boysset. Ces
quatre feuillets renferment des notes sur la valeur des mesures
usitées à Arles et sur la façon de les employer. Je cite le ^
premier et le deroier alinéa : ■
Senher e senhos, sus la[s] mesuras de la cana e dei[s] destres e dels pats',
d'aquebs vos vole declarar, per tal que si quas esdevenie que las mesuras
canna e destres se perdesan ^ que pocses e sau pesés lo lonc de las mesuras c
dels pals, d^aquelas desus dîchas que son de la sieutat d'Arle.
Senhos, h canna d*ArIe a deîonc *vîij* pals, lo destre de las vinhas .xiij,
palms I
(Fol, / vo) Item, car say lot sertamens que lo son pluros gens que cuidan
csser sotils, e non o son tant com cudan eser, c per so ieu laysaray per tanios
poncs e mesuras lo pal m de canna d'Arle senhat, que per forsa atrobaran la
justa longuesa del palm de canna e dels destres de la sieutat d' Ark, c senha-
ray to e .v, manieras o .v. mesuras, c .v. poncs, que las .v. mesuras e los
.V. poncs non seran sinon tant solaraens la longuesa d*iin palm liai d'ArIc,
lo[s] cal[s] .V, mesuras e *v. poncs s'ensegon per fegura desotz aquesto capitol
senhati, per que entendes lo ben e lo notas, e gardas vos dels pons e de îa$ ,
mesuras consi las penres, e notas 0 ben si voles. 1
Suit la figure d'un pentagone dont chaque côté a cinq cen-
timètres, et au dedans duquel on lit : Nota, — ./, pal de canna
I
0 de destra liai d'Arle; so es sa lûngu[e]sa justa agitestas ,v. mesuras
e ,v* poncs. Et, en effet, encore actuellement, dans le Midi, U
pan ou empan est considéré comme l'équivalent de 25 centi
mètres.
Le feuillet actuellement coté 6 est, comme je l'ai dit plus
haut, hors de sa place. Nous devons passer au feuillet 7, ancien-
nement coté .1)". Le feuillet qui devait être coté ./. fait défaut ♦.
Tout le recto du feuillet 7 est occupé par une sorte de char-
4
1. Je ne tiens pas compte du feuillet coté i, qui est du siècle dernier.
2. Pals pour palms, comme plus bas.
), Il sera question plus loin de cette différence entre le destre ordinaire et
celui qui sert à mesurer les vignes.
4. Ce premier feuillet devait être une sorte de frontispice qui aura été
arrach<^.
I
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET
99
pente dont je ne vois pas bien l'usage et dont la forme est à
peu près celle-ci :
1
_l
1
La base de la pièce centrale est engagée dans un piédestal
conique en maçonnerie. Dans les espaces vides sont placés, aux
I et 4 (j'emploie ici le langage du blason), un terme avec ses
dcHX agachans ou témoins ' ; aux 2 et 3, une canne d'arpenteur.
An verso de ce feuillet et au recto du suivant, on lit une
note assez longue, rédigée avec une certaine solennité, qu'il
sera intéressant de reproduire ici, parce que Boysset y fait con-
naître la destination qu'il assignait à son ouvrage. Autant que
cette note peut être déchiffrée, car elle a été en grande partie
biffée, on distingue que Boysset voulait que son livre fût con-
servé après sa mort par ses héritiers ou par la communauté
I. « Agachon, témoin, pierre, brique, etc., cassée en deux ou plusieurs
morceaux enterrés autour d'une borne, et servant à attester par leur rappro-
chement que cette borne n'a pas été déplacée. » Ra3mouard, Ltx. rom. III,
4x7. Les exemples de ce mot, aussi bien que du verbe agacbonar, cités par
Ra3mouard, sont tous empruntés à Boysset.
100 p. MEYER
d*Arles (on ne voit pas bien sous quelles conditions) ; qu'enfin,
au cas où ses héritiers et la commune ne pourraient ou ne vou-
draient l'avoir, il le lègue au roi Louis de Provence ou à ses
héritiers. Oo voit qu'il ne se faisait pas une médiocre idée de
la valeur de son ouvrage* Cette note a dû être écrite alors que
les deux traités étaient rédigés, puisqu'elle se réfère à Texplicit
du second traité. On pourrait croire qu'elle a été faite en vue
d*un autre exemplaire parce que le renvoi au feuillet n'est pas
cxactj mais !a pagination a été retouchée en divers endroits.
L*an .M, e Sm^, e .v,, lo jor .viij. de jetioier^ yeu Bertran Boyssct' presi
d'cscricure aquest présent libre, corn fa mension quasy a la fm d aquest libre
escrig en letra vermelha en lo fuhel cxvij cl en lo fuhel cxviij % lo quai libre
yeu î Bertran Boyssct ♦ al pi de. . , , . . .
vo série quas que mestier Eur agues per la vila o per 1 pcr fag de
destrar o d'atermenar. Et en lo quas que nengun aquest présent libre a sy
apropiarie e de la fenaiisa (?) del comuu îo voirie ostar, vole et avordene que
a nostrcs (?) hères o a mos beres ho a lurs susesors o deia reiornar. Et en
lo quas que aquest présent libre a ver non poirien ni lo coraun demandar noo
lo volricn, vole que sic del rey Loys (foL A\ amUn Jif) nostre senhor o de sos
sucesos, E pcT mais de Icrmcsa aquest présent seng(?) ay de tna raan propria
scrich Tan el jorn que desus, et de ma merqua la quai use en mas rclacions
tant de destrar quant d'atcrmenar scnhat con s'en sec, fâcha de tencha verme-
lha, ben que e mas jelasions las fare de oegra e las fauc.
Au dessous est tracée en rouge la marque annoncée dans les
lignes qui précédent. Cette marque reparaît au fol. 141, dans
une page dont on trouvera plus loin le fac-similé. Le bas de
la page est occupé par une sorte de monstre au corps d'oiseau
ayant deux tuteSj Tune humaine qui vomit du feu, l'autre
fantastique, en guise de queue, et deux pieds de bouc. Une
1. Ces deux mots sont biffés, mais cependant encore lisibles.
2. Aux feuillets cxvij et cxviij, il n'y a rien en lettres vermeilles. L'explidt
auquel se réfère Boysset est écrit aux feuillets cxxv vo et cxxvi r», actuelle-
ment 140 vo et 141 r>, comme on le verra plus loin, p. 116,
5. Les mots lo qual^ libre yeu, sont biffés.
4. Tout ce qui suit, jusqu*A la fin du paragraphe, au foL iij (actuellement 8),
est biffé. J*en lis ce que je puis* Les premières lignes ont été si fortement
raturées que je n'en puis rien tirer.
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET
lOî
figure très analogue est tracée au fol. i du ms. fr. 5728 qui
contient la chronique de B. Boysset, Ce n'est pas, comme on
pourrait le supposer à première vue, une tarasque. La tarasque,
qui figure dès cette époque sur le sceau de Tarascon, était
représentée tout autrement,
(Foi. 8 t*) L'an de Tencarnacion de nostre Senhor que oni conta mil Jîijc
.V., \o jorn *xvj. de mars, foron fachs îos pairons del ferrée plantau en una
paret de denfra la cort del rey,Jo quai pairon fon la quanna de .viij. palmsde
lonc, la quai canna es major lo .xl. que la canna d'Avinhon, contant e mesu-
rant la canna d*Arle en .xl. parts del lonc que es ferrât en lo marge
d*aqucsia carta ', e la canna d'Avinhon en .xxxix., ses mais ni mens, Lo
segon payron fon et es per lo dcstre de ,xvj> p. de lonc que n'a en la si, ^
clvj, jiij. palms* Lo tei[r]s pairon fon et es per lo destre de ,xiij* palms de lonc
que n'a en la caruirada* Item, era veguier moss. nions. Jo, de Sazo
docior en Icîs. Item, fcron far aqucstos sobrcdigs pairons 0 mesuras de ferres
lo sobrcdigs monss. lo veguier e lo conselh d'Arle, e sen Hugo Ri eau e sen
Antlioni de Monfrin* e sen Franses Mort e sen Vinsens Gautier, sindegucs
d*Ark. Item^ Ios davant dich senhos deron h comesion de faire far aqucstas
dichas mesuras e paurar denfra la cort a sen Anthoni Lucian et a Bcrtran
Boysset, dcstrados et atermenados d'Arle per lo conselh helegitz.
H faut rapprocher ce passage du paragraphe que Boysset a
consacré dans sa chronique à la vérification des mesures à Arles,
Le voici d'après le ms. de Paris, fol Ij v" et lij K
Item, Tin .M. ccccv., lo jorn ,vij. de mars, foron prcsas lotas las quannas
dcl[s] mcncstairaJs d'Arlc, c porladas a la cort; et après per lo scnhor veguier
raons. Jo. de Sazo, doctor en Icis e conseîhier del rey, fon cornes ad Anthoni
Ludan et a Bertran Boysset, sicutadans de la sieutat d'Arle que las quanas
aquelas reconoyser deguesan e mesurar, e veser si eran liais o non. Et aysins
fon fag que reconogudas e mesuradas e regardadas per aquels desus députais
foron ; et après relation per elos fâcha {ms. fâchas) a Mous» lo veguier desus
dich que toias las quaoas generalmens parlant eran cortas e foras de mesura
Ual.
Item, apr^ U reladon fâcha per Anthoni Lucian e Bertran Boysset desus
I . U y a en eâfec en marge la ftgure d^une mesure ayant $70^1° de longueur,
avec cette inscription : h carantm d'una camm.
a, Cette abréviation doit se lire mtairada.
3. Id ceschiiïres raturés ; ,iy»». xix t ix p., remplacés en marge par ceux-
d : wçf« xinj à, e .xj. p.
4. Mootfrin, arr. Nîmcs^ cant* Aramon.
5. Même leçon dans la troisième rédaction (L$ Musk, pp. 93-4).
102
P. MEYER
dich, ,x. jorns sigent, mons. lo viguier desus dich mandet quérir una quana
liai ad Avinhon , et a la semblansa d*aquela en fes far un^ autra tota nova
major d'aqtiela d'Avinhon lo caramen, e fâcha que fon, la baylet ad Anthoni
Lucian et a Bcrtran Boysset desus dichi que aqueb quatina nova reconoyser
deguesan an la quana liai d^Avinhon, e mesuresan si la quana nova era major
d^aquela d'Avinhon lo caratitcn. Els davant dich Ant. et B. la canna nova
rcconogron an la canna liai d*Avinhon, et airoberon la dicha canna, ses mais
ni mens^ îo caramen major d*aquela canna d'Avinhon ; et aytal relacton feron
a mons. lo veguier ; et après tost la relacion ausida, raons. lo veguîer fes far
âij. payronso très mesuras de ferre, La ,j. ton .j** canna de ,viij. palms de
lonc, major ïo carantea que la canna d'Avinhon; lo segon fon .j. désire de
.xvj. palms de lonc, escayronat segon los palms de b canna; et aquel désire
es pcr deslrar tous posesions, qualque sien, esepiat vînhas; lo te[r]s payron
fon .j. destre de .xiij. palms escayronat per forma de las mesuras desus, so es
asaber del destre de .xvj. palms e de la canna de .vîij, palms, per destrar
vinhas vo amras posesions que las gens velhan mcire a nombre de cartayra-
das de vinhas. E fâchas que foron las très mesuras davant dichas, mons.
lo veguier la ^ fes pîantar denfra lo palais de la cort rial d'Arle, so es assaber
lo jom .xvj. de mars, Tan .M. iiijc. e .v.
A l'époque où Bonemant fit sa copie de la chronique de
Boysset (1773), deux de ces mesures, la première et la troi-
sième, existaient encore. Elles étaient encastrées dans la
muraille du palais, au dessous de la salle d'audience. Sur cha-
cune d'elles était gravée une inscription provençale relatant les
circonstances dans lesquelles elles avaient été faites. Bonemant
nous a conservé ces curieuses inscriptions où il est fait mention
des deux experts, Anihoni Lucian et Bertran Boysset.
Le foL suivant (9, anc. iiij) est entièrement occupé par un
dessin d'ornement contenant un écu de sable (ou peut-être de
sinople) à la fasce d'or et à six besamsde même rangés 3,2, !•
Je n'ai pas réussi à découvrir la famille à laquelle apparte-
naient ces armoiries. Au dessus, dans une sorte de bordure,
les chiffres i, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, en capitales. Au verso
est représenté un personnage nimbé et assis, tenant de k main
droite le globe surmonté d'une croix et de la gauche une canne
d'arpenteur. Au dessus est écrit Jésus. A ses pieds, un homme
agenouillé, les mains jointes. Le même tableau reparaît aux
feuillets 10 à 20 avec des variantes, Jésus occupant le verso de
I. Il Éiudratt îas,
(Le Musàt p. 94).
mais le texte de k troisième rédaction porte aussi la
^^^^ LES MANUSCRITS DE BERTRAK BOYSSET 10) ^^^^|
^P chacun de ces feuillets et Thomi ^^^
tue le recto en face. Au haut de ^^H
^m h page commence un dialogue plus ou moins rimé entre Jésus ^^^H
^1 et notre arpenteur, qui est représenté recevant de Dieu même ^^^|
^M rinvestiture de son métier* Cette singulière composition ne se ^^^|
^M trouve pas dans le ms. d*Aix,
soit qu'elle ait fait défaut dans ^^^^|
^M l'original de cette copie, soit que le copiste Fait omise de pro- ^^^H
^^^^ pos délibéré. Quoi qu'il en soit, en voici le commencement : ^^^^|
^^^^1 Fhîl * e nostra creatura,
Plusï que destrador m'avez f^ ^^^^H
^^^^1 Lo destre nos vos baylarem.
£ plas a la sancta Trenitat ^^^^H
^^^H Li icrrsL c T^ygua en destrares,
Que yeu sie destrador apelat ^^^^|
^^^V A quascun soq dreg donares,
30 E per las gens aysins nonnac. ^^^H
^K^ $ l^ destra non tilhas'... embrar
^^^M
^^^^^H Per la senestra h,., sanhar ;
— Fhîl e creatura nostra, (t/°) ^^^H
^^^H La sîensa atrobares
Lo destre nos t'avem baylat» ^^^H
^^^H Dal destrar veraîamens
Que destrador sies apelat ^^^B
^^^^1 FoL 10 (aft£. V*)
Per las gens que al mont seran. ^^^^Ê
35 Fay so que en escrig t'avem iaysat ^^^^H
^^^f £ d'atermeaar eysamen.
E per quapicols ordenat ; ^^^^H
^ 10 En aqucst libre son escnclias
£ guarda ti de trabuquar : ^^^|
^^^^^^ £ per quapîtols son pausadas,
Nos em en luoc per regyardar ^^^H
^^^H On es tota la ventât
39 E veser qui f^i ben ni mal. ^^^^|
^^^V De destrar c d^atermenar,
^^^V Uzas issi com trobares
{Dessin cohriê ; Jésus sur son trdne,} ^^^H
^F i î Ny per nos es avordenat,
FûL II (anc. v}\) ^^^H
^^^^ Sy vos la tieu' arma salvar.
Senher, plus que play a la Tre- ^^^^B
^^^^H
^^^H ^ Senher Dieus, pa>Te glorios,
Que destrador ml aias fag ^^^^^|
^^^H Le désire ycu penray de vos *,
El destre m'aia[s] bailac ^^^^H
^ A quascun son dreg daray
Ni ordenat que deve far, ^^^^H
^^^^^ 20 SegOQ que aves avordenat.
Aysins con es quapitolat ^^^H
^^^^H £n b sîensa del destrar,
45 Ni per vos es avordenat, ^^^H
^^^^1 Enquaras mais d'atermenar ;
Yeu, senher» faray si Dieu play, ^^^|
^^^H E los quapîtols legîray
E guardaray mî de trabuquar ^^^|
^^^^ B so que dison yeu faray,
Ny far contra ta volontat. ^^^|
^^^^ 2^ E la destra guasanharay
(Dessin calorie : Boyssei agenouilU ^^^^^
^^^^H £ la seocstra laysara^s
tient le destre çu'iV inent de recevoir.} ^^^^H
^H I. 5ûr, pour FîUk Cette manière d'écrire est habituelle en ce texte. ^|
^H 2. Il y 1 un trou dans le papier. Lire
; [âesn^mbrar ? ^H
^H }. La déchirure a enlevé le cora me n cernent du mot [£Ud]sanhar. Voir v. 25, ^^^H
^H 4. Cest le sujet du dessin ci-dessus mentionné. ^^^H
^H^ 5. Corr. Pus^ ici et en tnamt autre endroit. ^^^H
104 **• MEYER
— Fil nostre, plus que tu as (t^) 65 Mas lot pcrraicraniens diray
50 Lo liestre en la tieua mon
Que per nos t'es agut baylat,
Coroensa taniost de destrar
E %»cngam con si o faras^
£ si auras ben entendut
55 Los quapitols aysins con son
De h si en sa de destrar.
{Dessin cciorié t Jésus sur san trône.)
Fol. 12 (anc. vij.)
— Senher Dieus, paire glorios»
Plus que io destre ay de vos,
E plas a la sancta Trenitat
Que yeu comense a destrar,
60 E\^cu o faray plus que a vos play*
Aqucsta terra destraray
E veires consi o faray,
E si auray ben entendut
Los quapitols ^yû con son ;
Que Dicus i aia bona part.
{Dessin : Boysset si baisse^ faisant le
geste de mesurer,}
— Fhîl, de destrar as aconiensat
Per la forma que o deves far,
E siec tôt jorn aqueî quamin,
70 E ben ti ve[n]ra a la fin ;
E guarda ti de desviar
Ni de penre autre quamin.
(Dessin : Jésus sur son trône.)
Fol. 15 {anc. inij.)
— Senher, si faray si a Dieus play
Nî plas a la sancta Trenitat,
75 Que mon sens mi vdba salvar,
Tojom, senher, miels destraray
H a quascun son drcg daray.
{Dessin : Boysset agenouillé.)
Ce dialogue se termine ainsi (foL 19 v**, anc, xiv):
Fil, sol pensa de ben a far
Quar de tu mi recordara,
E de tots los fags que auras a far
E de tots sels que ben faran ;
Lo senhal de la cros ti faray.
{Dessin : Jésus debauiS)
Foi, 20 (anc, xv.) *
— Senher Dîeus, laisa nui far
Obras que ti vcnguan a grat,
E la mîeua arma sie salvada
Eî règne tieu de paradis
On a gaug tos temps scnsa tin.
Amen.
{Dessin : Boysset agittouillé^ la
fnain droite levée.)
{Fol, 20 v^) Aysi acomcnsa lo quapiiol permier» la quaî es avisament de
consiensa de lot destridor et atermenador, quai que sie ni don que sie, El ay
lo mes perraier per tal que quant volran la siensa de destrar e d*atermenar
legir, que aquest liegan permier, per ta! que .j. quascun atermenador e des-
trador aia son cor en ben a far c donar son drcg a .j. quascun, segun que
dcclaran los quapitols de la siensa d'aterraenar e de destrar, la quai son en
aquest libre escrig, la quai quapitol aquest acoraensa per aqucsta maniera,
Dcstrador et atermenador, sapias de sertan que Dicus es destrador, Dieus
es atermenador, Dieus es escaîrador ; per que garda e regarda ben que taras
ni consi o faras, quar Dieus sap tos poncs e tas mesuras, e ves que fas,
sic ben 0 mal ; per que dona sa razoa ad aqucl que Taura, c non vergonhes
^^^^^^ LES MANUSCRITS DE
; BERTRA>J BOYSSET lOS ^^^^|
^H home, ni per pavor ni per mcnasis ni
per dénies non fasas que dever, quar ^^^|
^H Dtctis o ves tût e paguara tu e quascun scgon que aura senit , per que fay ^^^H
^H ben e jusumcns ton ufice» e ben d venra sen^a dengun defalhiment. ^^^^^Ê
^^^^ Le recto du feuillet 21 (anc. ^^^^^
xvj) est occupé par un dessin ^^^^1
^^^Bcoloriè où est représenté un homme dans Tattitude d'un ora- ^^^^1
^^^^ teur, la main droite en avant ei ^^^^^
t tenant de la gauche un livre. ^^^^H
^M A côté, cette inscription : Matstre Arnaul de Vilancrva, Au ^^^^H
^B verso commence le poème qui se poursuit au foL 6 (ce feuillet ^^^^|
^H n'a pas d'ancienne cote), et reprend ensuite au fol. 22. ^^^^^
^^^^H Et oy, S€nho5 mieus e maistres^
30 Gcneralmens per pluros» (/. 6) ^^^^^B
^^^^1 Sapias tots per veritat
En totas la siensas que son ; ^H
^^^^H Qpe ycu Amaut de Vilanova,
E cresie saber en gran partida» ^H
^^^^T Dûctor en leis et en décrets
Mas al rey Robert mon scnhor ^^^B
^^F S Et en siensa d'estrolomia
Non era ges de comparar ^^^H
^^^^H Et en Tart de medcsina
î 5 Per noblesa non ' bel parlar, ^^^B
^^^^H E en la santa teulogîa^
Mas per siensa tant solamcns, ^H
^^^^1 Enquaras mais en las .vij. arts
Quar se ycu volie reconiar ^H
^^^^1 Maistre per tots suy apelats.
La gran siensa qu*en luy era ^H
^^F 10 De Qpataluenha nadieu fuy,
De .c, ans non ho auric contât, ^H
^^^^ Et a Napol ycu mî mudiey ;
40 Per que de tôt m'en laisaray ; ^^^^
^^^H Al scrvise de! rey Roben estiey
Mas lo libre ulhas gardar ^^^^|
^^^H Mot longuamens sensa partir.
Que mot es noble per senaa, ^^^^^
^^^B Et estant a son servise,
El rey Robert lo bateget, ^^^^^
^^V 15 En sa quambra am lo rey estant,
Lo nonnet e Tapelet, ^H
^^^^_ En son estudi e veillant,
4) E vole que aysins agues non^ ^H
^^^^H An .ij. ensems, e nos fesem
Lybrc noble e sotil ; ^H
^^^^H Aquest libre vcratamcns
H, si ben 0 voles notar» ^^^H
^^^H On es tota la sie[n]sa scricha
Lo rey l'anet ben nomnar ^^^H
^^H 20 De destrar et d'atermcnar,
E per son dreg nom apelar, ^^^^^
^^^^_ Bt es tota quapitolada
%o Fer que ulhas lo ben gardar, ^^^H
^^^B E Qoblamens avordenada.
Q)iar las siensas son sotils ^^^^^
^^^H Monsenhor lo rey la dechava
De destrar e d*atermenar, ^^^H
^^^^f E ycu rcscrîvie e Tavordenava
Qiiar davant que acses trobat ^H
^ 3) Per la forma quel rey agradava
Un autre libre a\trestal, ^H
^^^^ Nil rey Robert mi comandava,
5 $ Mot gran pcnna aurias trag. ^H
^^^H Qtiar font era de tota siensa.
Per que ulhas lo ben gardar (y*) ^|
^^^H E so sapias tots de sertan
Et en bon luoc tenir sarat, ^H
^^^^K Qye nos sîam maistre apelats
E non vangtia' per totas mans : ^H
^^^^^^X Kûn n'a pas de sens ici. Boysset a-t-il voulu écrire w^^mou m ? ^H
^^M 2. Sky on serait tenté de corriger v^nga^ mais il y a xmngan ailleurs, par ex, ^^^B
^^1 fbl. 136 (ci-apiès, p, 115). Cest pour tfogm^ sub}. êianar, ^^^H
^^^^^^^^ ^^^^1
^^^^^^H Se si perdîe série gran dan.
Petit série s*avansament ^^^H
^^^^^^H 60 Quâr an gran pentia es stat fag
lOC
» Si non era Tensenhament ^^^H
^^^^^^H E trag de pons e de mesuras
De b sien s a de jaumetria ^^^H
^^^^^^^H E de sens natural eysament.
E de la siensa arismetica, ^^^|
^^^^^^H Per que, bon as gens, cscoutas,
Quar d*aquestas .ij. pren aponcha- ^^H
^^^^^^^B Et entendes so que ieu dirny ;
[ment ^^H
^^^^^^F 65 E Dieus d€l sel ulhas preguar
La siensa d'astrolomîa. ^^H
^^^^V^ duel rey Robert vclha salvar
los
E! rey Robert e nos eysament ^^H
^^^^H En aquest mont per ben a far,
Sus aquestas Jj. siensas prcsem ^|
^^^^H E puesqua vicure longuamens;
Nost res poncs e n ostra[s] m es uras » ^|
^^^^H E tais hobras li Jais Dîeus far
Encara nuis» sus la siensa (fo) ^|
^^^^B 70 Que, cant vcnra a SOS jams redics,
Que esquartabont ' es apcîada ^H
^^^^^1 La sîeu* arma sic pre^ntada
no
Akunna panida presem ^^^H
^^^^H Davant b santa Trenitat,
De SOS poncs veraiamens ^^^H
^^^^H On ara tostenips veray repaus.
Tant de destrar quant d'atcrmenar, ^^H
^^^^^ft E per mi Arnaut ulhas preguar^
Et après nos quapitolem ^^H
^^^^^ 7 S Qpe de Vilanova soy apcllat.
Aquest libre coma veses, ^^^H
^^^^^F Et en QuaLiluenha soy^nat.
"S
On es 10 ta la siensa scncha ^^^|
^^^^H A la santa Trenîiat
De destrar e d'atermenar» ^^^|
^^^^^1 Que mi perdone m os pcccatz»
Et an razon n crural ^^^|
^^^^^1 E que mi m eu cl règne sîeu.
Nos atrobem nostre fag, ^^H
^^^^H So Quant vcnra a mos jorns redîes,
Ni mais ni mens, con si deu ùr, ^H
^^^H Car mot gran penna a agut
120
Don SOD las leis totas prtidas. ^|
^^^^1 Lo rey Robert e ycu an 1 uy (/. 22)
Et atrobem la veritat ^|
^^^^H Per trobar aqucstas siensas
Per ta forma qu'es quapitolat ^^^Ê
^^^^H De dcstrar e d*atemtenar.
En aquest libre et escrîg. ^^^H
^^^^B 8^ Davant que fos capitolada
La quai libre fon aquabat, ^^^H
^^^^^1 Ny de toc fos avordenada
Ï2S
Escrig et avordenat ^^^^H
^^^^H Mot gran temps an Jj. i ponliem,
En Napol la granda sieutat ^^^H
^^^^^H E per miels atrobar la vcrtat
L'an quart que fon coronat ^^^H
^^^^^B Nos ho volguem tantost proar
Lo rey Robert en son régnât ^^^^H
^^^^H 90 La maniera con si deu far
Qjje Sesilia es apelat, ^^^H
^^^^H Destrar et atermenar.
130
Et autre titoi li es donat ^^^|
^^^^^B £ présent tantost poncs e mesuras
De Jérusalem eysament. ^H
^^^^H E siguentmens nos retomcm
A presen t plus non en diray (/. 2 3 ) ^|
^^^^^H A la slensa de jaumetrîa
Mas que Die us en sie lauzat ^^H
^^^^^B 95 Et a la sîensa arismetica,
E sa maire aytrestal, ^^^H
^^^^B Enquaras mais d'csirolomia,
135
E la santa Trenitat ^^^|
^^^^^ Quar totas .îij. usan cnsems;
E tota la cort selestlah ^^^H
^^^^H Mas la sîensa d'cstrolomia
AMEN. ^^H
^^^^H n Esquariabotti, mot qui n'a pas été relevé par Raynouard. doit signifier ^|
^^^^H un dcmi*cercle gradué» un rapporteur.
Le ch, Ix du traité d'aUrmtmr donne ^H
^^^^1 un moyen empirique pour taire une
équerre sans compas ni isquartaboni ^|
^^^^H (fol 217, anc. 20j).
■
J
^
^
^
>
^
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET ÏO7
Le reste de la page est occupé par un grand dessin colorié
représentant le roi Robert assis sur son trône, la couronne en
tète, le sceptre surmonté de la fleur de lys daos la main
gauche, et maître Arnaut de Villeneuve assis sur on siège plus
bas et écrivant sur un rouleau où on lit ces mots : Syensa de des-
trar t à* aitrmenar ,
Au verso, autre dessin. Le roi Robert tient en maio un rouleau
sur lequel est écrit ; Hos volem ci avordetmm que atjuest libre valha
€ tengua tas temps tmys. Robertus rex. Au dessous, deux groupes
d*hommes. Ceux de gauche, revêtus de longues robes, tiennent
un rouleau portant ces mots : Nos autres^ duXj contes e barmis e
lûs autres que son aysi an nos, consentent e confermam tôt quant per
vos es avordenaî. En face, un groupe d'hommes, vêtus de robes
plus courtes, lient un rouleau où on lit : E nos autres que em
aysi nuindats ad aquest consel gênerai avoam e confertnam tôt quant
es per la rey Robert avordenat.
En regard du feuillet 25 v** doit être placé le feuillet 25 (sans
cote ancienne) dont le recto est occupé par un dessin où est
figuré un groupe nombreux de gens du peuple. Au premier
rang, un personnage plus grand que les autres se détache, tenant
un rouleau où on lit : Et oy, rey Robert mm senhor, h pohol que
es aysy an vos consent en so que as avordenai ^aqiust libre e quapi-
tolat per destrar et atermenar. De la foule sortent deux autres rou-
leaux dont voici les légendes : Et 0 tenem trastoi perfag tôt quant
as avordenat — E nos y senher, tots 0 volem. Au verso du même
feuillet, sont écrites ces lignes (c'est Dieu qui parle) :
Et oy^ beb Bs destrados,
Et atemienados eysatnent,
Sapias que nos cm destradcfi
Hoc et atcrmenador,
Eoquaras mais esquaîndor,
E que plcnieramens sabem
Vostres poocs e vostras mesuras,
£ vexem qui h. ben ni mal ;
E a quascum rendem guisardon
Segon que aura servit,
Sie ben o mal, en Fautre mont,
Per que alhas vos ben gardar
De hr contra ma volontat
E de la sanu Trcniut,
A quasctin donas sa razon
Del gian al petit al mcjan.
Nengun non ulhas vergonhar
Per quant que saptan dîr ni far^
E ben vos en venra a la fin
En la gloria de Paradis
An lo Paire e an îo Fhîl (sic)
Et an lo Sant Esperit
Ont aurcs gaug lostemps scnsa fin.
AMEN.
Nous revenons au fol. 24 (ancien xviij) qui est déchiré.
I08 p. M£YER
Ce qui en reste représente Jésus et deux personnages agenouil-
lés tenant dans leurs mains les attributs du métier d'arpenteur,
le destre et les agaclmis. Celui de gauche est Boysset, celui de
droite, dont on ne voit plus que la main, le reste ayant été enlevé
par une déchirure, devait être A, de Villeneuve, Au verso on lit ;
Senher, nos saben andos Nos saîv e garde lots de mal
Qpe vos es ^tcrmenador^ E cth que upres nos venran
Enquaras mais c destrador, et atermenar
Hoc, senher^ et esquairador, 5enher per desirar
E que plenieramens sabes los velhas endreisar
Nostres poncs e nostras mesuras araens puesquan usar
E veses qui fa ben o mal De la sUma de destrar
Et a quascuQ rendrcs guisardon E d'atertnenar eysament
5cgoD ^ que nos aurem servit lo semblant
0 mû o ben, en Tautre mont; Talsobras pusquam far(/.26ia*ïi'. îtix)
iTrt^enheSj nos autres farem Que tots vcngam a salvament
Tds Tts que tç sien en plascr, El tien règne de paradis.
Pif que lu santa Treniut Amen.
Le reste de la page est occupé par un dessin colorié où Ton
voit cinq individus occupés à planter ou à voir planter un terme
et ses deux agachons. Celui du milieuj qui plante le terme,
représente peut-être Arnaud de Villeneuve,
Au verso, a magister Arnaudus de Vilanova, legum doctor, »
est assis sur un banc. Tenant d*une maîa un terme et de
Tautre un destre^ il instruit des élèves assis au dessous de lui.
Au fol. suivant (27 de la nouvelle pagination, xx de Tan-
cienne), Arnaud de Villeneuve s'adresse en ces termes à son
auditoire :
Escolas, e fils micus, entendes ; E de sotil entendement,
La sîensa del destre aprenes Per que avertesy vos tots ensemeos,
E d'atermenar eysament. Non ulhas a ver ïo cor van.
Que mot son nobîas veramens Si la siensa de destrar
Aquestas Jj. veraiamens Voles apenrc c d'atemienar.
De destrar e d'atermenar. Entendes bcn so que decharay
Home cntendut vol atrobar A vos autres tots ensemens,
I* Les lettres soulîgniîcs sont enlevées paruoe déchirure du ms. De même
celles qui sont remplacées par des points.
BERTRAN BOYSSET
Es maistre mot exselent
E mot apics el entendut,
Per que nos em a vos venguts
Qjie vos pksa a nos dccUar
La siensa, si a vos play.
De destrar e tl*atermenar
Quar nos desiram trop saber
La siensa veraiamens
De destrar e d'aiermenar,
Plu5 que la nos ave s bailada
En cscrjg et avordeiuda,
E ben tota quapitohda,
Plasa vos que la nos déclares
Qpe nos la entendam claramens
Sensa dengun défailli men^
Qjjar nos vos contenta rem
De tôt a vostre voler,
Sol demandas que voires,
Qiï*en ren non dtffalhircs.
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET IO9
Et estudias ben soven
En vostrcs libres que tencs
Von es escricha la siensa
De destrar et d'atermenar,
E tou i es quapîtolada
La sieusa et avordenada
De destrar e d^aiermenar,
Per que ulhas la ben no car
Et aquela ben decorar,
El aures en honor e kus
Si ben en voies usar
Ni faire si con vos dccha
La siensa d'atermcnar (i***)
Hûc, fhils mietis , e de destrar.
— Et * hoy» tnaîstrc Amaut de
[Vilanova,
Nos saben tots sertanamens,
Sensa dengun defalhîmen,
<ii'cn la siensa de destrar.
£ d*atertncnar eisament
Les deux feuillets suivants sont occupés par des dessins
coloriés, accompagnés de légendes» FoL 28 (anc. xxj) : Aqaesîos
son escolas de nuiistre Arnaui de Pllarunu qi4e si asajan d^ dejîrar
hoc e d'aUrtrunar segon la forma qt4£ !ur dcclaran los qunpiioh, —
Au v'ersD, quatre vénérables personnages enchaperonnés et
portant des bonnets plus ou moins élevés. Au dessus on lit :
Malt es sotils siema leis, décrets e la sancîa teulagia (sic), mas ben
es mat sotil la siensa de destrar e d*atermenar. Mot i coven botta
testa e sotilesa gran^ e quai que sien remplit de bon sens naturaL En
marge, une légende : Maistre Amaut de Filanova an sa corn-
panlxia que regarda la maniera cotisi sos escolas sabran destrar. —
FoL 29 (anc. xxij) : Aquestos son los escolas 0 dels e\s\colas de
maistre Arnaut de Vilanava que aprenon de destrar en sa presensia.
— Au verso» nouveau portrait de a Maistre Amaut de Vilanova »,
son tt destre » A la main.
Suit (ff- 30 et 3 1) la table du traité de a destrar », en quarante-
six chapitres. Puis un feuillet blanc non numéroté. Le feuillet
32 est blanc au recto et porte au verso le dessin d'un arbre
dont les branches et les feuilles sont disposées avec une symé-
I. Ce sont les élèves d'Arnaud qui parlent.
no
p. MEYER
trie bizarre. Ces quatre feuillets ne sont pas compris dans
Tancienne paginatioo. Vient enfin le texte du traité. En voici
le début :
{FoL jj^ anc, xxiif) Âysi acomensa la siensa del de$tre,e la déclara quapitol
per quapitol, k f\\i2\ fan dcchada a mi Bertran Boysset per lo vénérable savi
e discret senhor raaistrc Amaut del Puey, nof % en siensa de destrar et d'ater
menar Crasque sufesient et entendut» e d'alcun libre del davant dig maistre
Amaut, laquai libre e quapîtols foron scrigz e dechatz per lo crasque
exselent prmse lo rcy Robert [de] bona mcmoria', rey de Jherusaîem e de
Sesilia, e per maistre Arnaut de Vilanova doctor e maîstre en medesina *, en
la c|ual es tota ta sîensa del destrar e d'atermenar (quapitol per quapitol
escrigi). En aquest libre o xy tiailatat et e$cng quapitol per quapitol, per la
forma e per la maniera que eo lo libre dcsus dig atrobet* escrig, l'an .M.iiij«^.
e .j\, lo jom .XV. de desembre, la quai acotncusa lo perraier quapitol aysins
con s'cnsicc de la siensa de destrar tan solamens, f:^^ après aquesta escricha,
si siec ïa siensa, quapitol per quapitol, d*atermenâr, cou ?«ser e legir la podes
en lo fuelh .tiij»»* e ,xj J^
I. Quapiîd qui dii « o tntar^ »,
Destrador et atermenador^ entent et estay avisât que en tots los luocs qmt
atrobaras ni amras entre partidas débats que estie per esturment , que digua
una sestairadas^ o ,j. ^uartaîrada, o .x. st., o quartairadas o entorn, aquel
entc{r]n déclara a las partidas que son la -xvja. part d'una st. o d*una quartat-
rada. Esî eran .x., ,xx,, .xxx., .xl. st. o quartairadas, o mais o mens en Tcstur-
meni, perso non défalques que la ,xvj*. partida d*una sestairada o d*una (i^)
quariairada anb una que entendas savamens' que en l'esturment digua lantas
sest. o tantas cartairadas o entorn. — Item, h .xvj». part d*unc sestairada son
per far ton conte scrtan .ix. destres e .xij. palms e cart^ a la mesura d*Arle ■,
1, mtari?
2. Les mo\s la quùL,.. y medùsina, sont ajoutés au bas de la page en rcovoi»
de la main de Boysset.
j. Les mots que j'ai enfermés entre parenthèses ont sans doute été écrits
par inadvertance, puisqu'on les retrouve plus loin.
4. Il faut ou airobevj à la première personne, ou plutôt [5*}itrohet.
5. Le feutUet ,iiij»^xj. correspond au feuiDet actuel 106, où commence en
effet le traité « d*aterraenar », Mais il faut dire que les lettres xj ont été sur-
chargées ici et au fol. 106. L'ancienne pagination a été retouchée en divers
endroits.
6. Dans la iab!e (fol, 50), les mois per deilrar ODt été intercalés, par renvoi,
entre çapitoï et que,
7. Sai{{\aîmns ou Sattamens ?
8. Bo}fsset a ajouté en marge quelques mots en partie coupés par le cou-
teau du relieur.
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET III
— Iica» la .xvj*. part d*una cartaîrada de la mesura d'Arle son My, désires,
.j. fialm e micg. — Item, entent, destrador, daramcns : si destravas una. terra
0 4* vinlia que fosa question que contengues en Testurment un tas sest, o
quartairadas o entorn, e non atrobavas mens que .j. o .ij. o .iij. o Jiij. o ,v.
destres de la soroa que La partîda dlrîe o dcmandarîe, per so non duptes en
rcii, car per ,}. desrre o per Jj. si pot dire « o entorn », con fa per la .xvj*.
partida d*una st* o d*una quartairada
Ce traité se termine au foL 64 v° (anc. liiij). Je transcris le
dernier chapitre :
Quûpitol de poses ion que sk îûngua, estrecha, largua, bùytosa, comba^ torta,
drecba e de totas avcAs faysons^ per quai manieras (ijc) îa destraras.
Item» destrador, entent : si te venie a destrar *j*- poscsion tjue fosa bngua,
estrecha, largua, boitosa, comba, torta, drecha, e de totas a vols faysons»
bca penracha e jasent ; per so, destrador non esties esbaït, ben que pron
auras a far, c non seras ses obra veraiaraens. Mas fay so que s'en sec, e non
falhiras en rcn, Pcrmieramens , destrador, tu farasso que ti comanda lo
quapitol que acomensa en sa rubriqua Quapitd de segmr k poseshn , que es
lo quapitol ters daquest libre de la siensa de destrar. Item, totas las gibas
dcstra per sy, con\bas e voûtas destra per sy ; so que sera lonc et cstreg per
sy ; so que sera lare destra per sy; e generalmetis te die que dcstra tota la
terra, que non î reste lo traves d*un det; e non t'esbaîsquas per ren, quar
si lo i a mestier .x. destraduras, «xx. destraduras o niays o mens^ so te sic
ment* Mas com (fol 6j anc. h) que sie, escriu tantost quant auras destrat,
sic pauc e pron, d*aquela posesion, davant que plus en destres. E per aquesta
maniera o fay tro que sîe tota dcstrada , e destra la asoladamens, e non aias
cocha; e destrada que sie tota sonis ta[s] somas grasiosamens e bcla, et
aias y ben ton cor. E per taî que miels o entendis, l'enprenta o la semblansa
de la poscsion s*ensec, c regarda la ben, avisa la ben, e nota la ben, e lieg
beo îo quapitol aquesi e tots los autres, c sera ta honor e ton profîeg ses
ùdha.
Suit la figure d'un terrain qui présente une quantité d*angles
rentrants et saillants.
Au verso du fol. 65, Boysset a dessiné un nouveau portrait
de « maistre Arnaut de Vilanova », avec son chaperon, son
haut bonnet rouge, et son destre. Au fol. suivant (anc, Ivj)
commence une espèce de barème pour trouver la contenance en
dextres des divisions de la seterée,
E nom de Dieu Aracn. En Arle, Tan M. Àu\<. e .j., lo jom .xv, de
desembre.
Ayii s*cn sîec quantos destres a en k sestairada, a la mesura de la sieutat
pr d'Arle, ni quantos palms a lo destre de lonc«
A lû dcscre d*Arle de lonc .xv|. palms; de tas terras e dd lavor tant sola*
IÎ2 P* MEYER
mens^ quar lu destrc de U$ vinhas es en autre luoc d^aquest libre escrig»]
la quai es escrig en lo fuelh Ixxiij '.
Item, a en la sesiayrada del tcrador de la sîeutat d*Arle, sien terraSi prats,
pasturas boscs, .clvj. destres e .uij. palms quairats.
L'auteur poursuit en indiquant le contenu de réminée, qui
est la moitié de la seterée, puis des divisions de Féminée jus-
qu'au 64'.
Au foL 68 (anc. Iviij) commence la série des multiples de
la seterée, jusqu'à 100 :
Slec si quantos destres a en una sestairada o en pluros autras sestayradas,
con escrig atrobares en aquest libre^ ni quantos destres en quayrat fan las
sestairad^s que escridias son en aquest libre.
,/. sestayrada, — Item^ a en una sestairada de la mesura d'Arle .dvj.
destres e .iiij, palms. — Item, son en quai rat .xlj. destres e .viij. palms una
sestayrada.
JL sfstiip'iidas, — Item, a en .ij. sestayradas .nf. xij* destres e ,viîj. palms.
— Item .xvij. destres .xj. palms mens la .vj»» part d*UQ palm» fasent d'un
palm .vj. parts, son en quairal Jj. sest....,
(FoL 87 vo, anc. Ixxvîj) .C. iutairadas. — Item, a en .c. sest. destres
.XV"». .vjc, e XXV. — Item .cxxv. destres sont en quairat sent sestayradas.
Au fol. suivant (8S, anc. Ixxviij) commence une série de
comptes faits sur la valeur de la seterée en partant du prix du
destre :
Siec si quant ven lo destre segon que si vendra la sestairada, sie petit près
o gran.
.i, fiorin îa sest. —- Item, a .j, fl. la sest. ven lo destre .], denier o ,v.
grans e mieg.
(FoL 90 \'<», anc. Ixxx) .xxxij. fl. — Item, a .xxxij. fl. la sest. ven lo destre
,iîj, s, .iij. dénies e .viij. grans.
Suivent d'autres comptes faits :
(FoL 91, anc. Ixxxj) Aysi si sec quantos destres a en b quartaîrada de las
vinhas d'Arle, ni quantos palms, fasent lo destre de .xvj. palms..,..
(FoL 93, aoc. kxxiij) Siec si après quant ven lo destre de la vînha segon
lo près que si vendra, contant de ,xvj. palms lo destre...
t . Ce renvoi n'est pas exact : c'est au fol Ixxxviij (ou 96 de b nouvelle
pagination) qu*est défini le datrc dont on se servait pour mesurer les vignes.
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET ïl^
(F&l. ^ anc, iiij^ viij*) Aysi se siec quantos palms a lo desire an que
podes destrar vinhas ; si plus vos agrada que l'autre davant dig , ben que
ab aquest deves destrar et anb autre desire non , quar aquest destre es per las
vinbas c Tautre destre non. — Item, a de lonc aquest destre .xiij. palms. —
Item en la quartayrada plantada per son just plant, que son .lii}. palms de
quana, c mtrao y .xviij^. et .xvj. roalhols,.*..
Ces comptes faits se terminent, au foL 98 (anc. iiij" x),
par un dessin colorié représentant un arpenteur (Boysset lui-
même?) occupé X mesurer des vignes. Le verso entier est
occupé par un autre dessin où 1*00 voit « maistre Arnaot de
Vilanova » debout devant un terme et portant dans une main
deux agachons^ tandis que de l'autre main il fait un geste ora-
toire.
Les feuillets 99 à 104 contiennent la table do traité de Fart
de délimiter (^aurnunar). Le feuillet 105 est blanc au r', tandis
qu'au V** est peint un arbre fruitier assez semblable à celui du
fol. 32 v^. Ces sept feuillets, quoique de la main de Boysset,
ne sont pas compris dans Tancienne pagination.
Le traité de Tart à^aiermefiar commence ainsi :
(Kj/, ro6, am, iiij^ xj) Sîcc si aysi con ni per quai maniera tôt bon ater-
raenador dcu aicrmenar ni si dcu govcmar, ni conoiser d'un terme ni d*aquel
dcclarar, ni de sos aguachons con^i losdeu pauzar ni a quai part, laquai decla-
rasion e bs sicma c los quapitols d'atermcnar s'en siegon c son a\tal5.
\, Quapitoî d'attrtnenm .
Item, si las partidas quant aunes destrat e partît .J*. posesion, destrador
et atertnenador, volien que atermenesas e plantesas termes, estay avisât que
plantes ton terme drcg, e si i a mestier dos o .iij. o Àn\, 0 .v. aguachons o
nuis o métis, lay que sien tots d'una peira e que sien fraires, e que si acordon
tots sus la joncha de la rompedura, quar d^autramcns non serien aguachons
veriâdîcs apeUts.
Je citerai encore le chapitre quatrième où Boysset recom-
mande, aux personnes chargées de poser des termes, Temploi
d\m moyen ingénieux pour assurer dans l'avenir des témoins â
leurs opérations. Ce mo3'en, qui consiste i donner à des
enfants un soufflet pour leur fixer dans la mémoire ce qu*ils
ont vu faire, a été, du reste, souvent employé dès les premiers
temps du moyen âge; voir Du Cange, sous alapa.
U On passe, d'après Tancicnne pagination, du foK bxxv au fol, Ixxxviij.
ÎI4
p. MEYER
IIII. QiiapiiQÏ per recor dansa (foî. 109, anc. iîij»* xîiîj).
Item, tu, atermenador, entent quant plantaras terme ni agachons, von que
SïC, fay, sî podes, que y aia d'enfans, e tay lur vezer la maniera con si plantan
termes nî a quai part si pausan los aguachons, ni von es lo luoc ni de qui ; et
après dona a quascun dels enfans una bofa, per tal que quant seran antics lur
rccorde d'aquelos termes que auran visi plantar et aguachonar a tu en pre-
senda dels autres que i seran estât.
L* ouvrage se poursuit régolîèrement jusqu'au chapitre xxxj.
A la fin de ce chapitre (fol, 127, anc. cxîj), une note, de lu
main de Boysset, nous avertit de chercher la suite au fol.
cxxxvii) (154 de la nouvelle pagination), où se trouve en effet
le chap. xxxij, et rouvrage se poursuit jusqu'au feuillet 315 où
s'achève le 91'' et dernier chapitre. Mais i! y a une interversion
qui doit être signalée. L'ancienne pagination, en chiffres romains,
s'arrête au fol. actuel 161, anciennement numéroté cxxxxv. Là
se termine le 37* chapitre. II faut aller chercher le commence-
ment du 38^ au dernier feuillet, coté 316, du ms. Cest une
erreur de reliure, et Terreur est double parce que ce feuillet est
relié de façon que le verso est à la place du recto. Du fol. 316
f", on doit passer au fol, 153 qui, de même, a été fixé dans le
mauvais sens, le verso actuel étant en réalité le recto. Puis doit
venir le fol. 162. Il faut donc rétablir comme suit l'ordre des
feuillets : 16 r, 316 v^, 316 r^, 153 v^, 153 r'', 162. Ce chapitre
xxxviij contient quelques figures et divers développements qui
ne se trouvent pas dans la copie de la Méjanes. Il est intitulé
(fol. 3 té v^) Capitol per àxlarar la dreisiera 0 la longtiesa cCima
légua en ipmlqîic pais que sic. On y voit, f. 164, un dessin repré-
sentant Hercules, les jambes écartées et vêtu à la mode d'un
chevalier du temps de Charles VL D*une main il tient Tépée, et
de l'autre un tertne* A côté de lui est posé à terre un heaume
à visière avec son camail. Au dessous, une légende nous dit
que le pas d'Hercule est de 125 au stade. Les fol. réS v**
et 169 r'' sont occupés par une figure du monde {îoî h mon per
semblama) dans la forme traditionnelle , avec la terre au milieu,
puis les deux concentriques de la lune, des planètes, etc.
Revenons maintenant au fol. 127 où le traité « d'atermenar »
s'interrompt après le chap. xxxj. Le verso est tout entier occupé
par un nouveau portrait de « maistre Arnaut de Vilanova » tenant
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET
cette fois un livre à la main. Puis, du foK 128 (.tnc. cxiij) au
fol. 141 (anc, cxxvj) est intercalé un traité sur le nom môme
du ierrfu L*auteur trouve au choix de ce mot vingt-quatre rai-
sons diftèrentes* Voici la première :
(Fo/. t2S) Sîegon si h$ ruons per que terme es apelat ternie per las gens
cumunamens c la preniîcra razon s'ensiec et es ayial :
L Item, la razon penniera per que terme es apelat terme si es quar son. iij.
bras cnscms plantadas, e sensa .iij. peiras non si pot dire ni eser apelat
terme verudicr. Hoc, anb aquesta condcsion si pot dire terme verladîer que
^^ de las .iij. peiris las Jj. si acardon sus la rompedura» e que las .ij. sien parti-
^H das d*urïa petra, e d'aqudas .îj. sien fag aguacbons e plantats al pe de k
^^^Éersa petra per la maniera e per la forma laquai es déclarât en lo quapitol que
^^HBtomensa « quapitol de pausar agu.ichons ' u^ e per aquesta rason si pot dire et
^^T apelir terme.
■
■ mole
I théo;
Toutes les raisons données par Boysset se fondent sur Téty-
niologie erronée que « terme » viendrait de kr ou de trej, La
théologie et Thisioire sainte lui ont fourni de nombreux argu-
ments, Gtons, comme particulièrement ingénieuse, la dix-
ocuvième raison, qui est empruntée à un autre ordre d'idées.
(Fol, t}6y anc. cxxt) Item, la .xixa, rason per que es apelat terme si es quar
lô es m^mifest que a Dieusa plagut far lor jorn natural de .xxiiij. Iioras. En
.xxiii). ho ras a -viij. ténias» et a permes Die us mais que tôt los n a viles, sien
grans c petits» que vangan per la raar salada, a mesura de .iij. palms son
fags e ji lan toi seb que si fan anquaras; per que apar rasonablamens que a
Dieus a pbgut, et a pcrmcs que las posesîons, sien terras o vinhas, pasturas
o prats, per terme o termes si aian a declarar, c très peiras sus partida si
abfn] j pUnur : .j. longua peira e .ij. agu actions, c gênerai mens per tôt s
tçrmc si «Jcta a pela r et nonnar.
L*auteur avait évidemment Tintention de terminer son
ouvrage avec ce petit traité, car, après avoir exposé les vingt-
quatre raisons pour lesquelles» selon son expression, « terme es
apelat terme », il a écrit, i Tencre rouge, une longue formule
d'explicit dont voici le te.xte :
(FoL 140 v<*, anc. cxxv), FinitoUbro sit Imts et ghria Chrisio. Qui txmpùi
t. C'est le deuxième chapitre du traité vl d'atermenar », (ol. 106 ; il man-
querait donc dcuît feuillets,
u6
p. MEYER
2tUS
esctibat, seniper aim Domino vvvai\ Vivat in seîis Bertrattdus Boisseli^
Domwù/éUxK Aaten.
Anno Dominî .M.iîîj<*. quinto (1405), die .viiî], mensis januariî fuît
tus isie liber per me Bertrandum Boysscti de Arelate» destratorem et atermîi
torem Arelat'., in quo est omnîs sciencia destrandî et atermenandi pro quapf
tulis scrîptis, quas siendas extracsi et translaiavi de quodam (foî. 141 ^
anc, îxxvj) libro magîstri Amaudi de Podio, not* <» magistri in dicta siensia
destrandî et atermenandi exselentisimi, et hoc de verbo ad verbum, acut et
proui in eodem libro reperii, qui quîdem lîber fuerat, ut in eo legitur in fine
ejusdem libri, nobilis et eminentîs viri domîni Arnaudi de Vilanova in utro-
que jure doctoris et raagistri exselentissimi in pluribus sicnciis, et spedaiîtcr
ïiî dicta sciencia atermcnandi et destrandi. Et hec^scripsi ego supranominatus
Bertrandus Boysseti anno et die supradictis, et merqua mea qua utor in v\
tionibus meis destrindi et atermenandi aposui^ ut sequitur.
Suit la marque annoncée; voir le fac-similé ci-contre
La comparaison de ce fac-similé avec celui qui a été don
plus haut (p. 92), d'après le ms. Arbaud, montre combien
récriture de Boysset avait changé en 50 ans. C'est du reste à
peu près récriture qu'offrent les deux pages du ms* de Paris,
reproduites en héliogravure dans notre précédent numéro.
Les pages suivantes (fol. 141 v*" à 152 v% anc. cxxvi à
cxxxvij) sont occupées par une série de vingt-trois dessins fort
grossiers qui représentent des termes en diverses conditions,
inclinés, fendus, endommagés d'une façon ou d'une autre.
Plusieurs semblent être des colonnes antiques. Une légende
accompagne chaque dessin et indique de quelle manière la
position exacte du terme doit être constatée, à l'aide de l'équerre
et du fil à plomb.
Il est bien certain que ces dessins ont été ajoutés par Bo
set après la rédaction de Texplicit latin qu'on vient de lire
commencent en effet au verso du feuillet où s'achève cet exp]
cit. Quant aux chapitres xxxij à Ixxxxj du traité A^atermati
qui occupent la fin du ms. ^ partir du fol. 154, je pense qu'ils
1
ni^n
1. Formule dont on a beaucotip d'exemples. M. Watieobach en a
quelques-uns dans son livre intitulé Dos Schriftwcsefi im Mittelaîter (Lap£%7
1870, p, 388.
2. La vraie forme de ce vers, souvent employé comme explidtt serait
Vivai in uîis Bertrandus nùtnine fdix.
5. Ce nom, ici et plus loin, a été rayé i Tencrc noire.
4, mtariif
ii8
p. ME^TR
ont été ajoutés à différentes reprises par Boysset, Ce qui
fait croire, c*est d*abord la variation de Técriture. Tout le
manuscrit est de la tnaîn de Boysset, mais il est visible que la
fin a été écrite i des époques diverses. Je me fonde aussi sur le
manque de suite dans Fordonnance de Touvrage» Il n*y a plus
aucun plan : les chapitres forment autant de petites disserta-
tions isolées dont plusieurs traitent des questions de droit dans
lesquelles un arpenteur peut avoir X intervenir comme expert,
mais qui, véritablement, ne sont guère à leur place dans un
traité sur Tart de délimiter et de mesurer les terrains. Enfin,
l'examen Je la table des chapitres qui occupe les feuillets 99 à
104, confirme encore cette manière de voir. Cette table a été
intercalée après coup, puisqu'elle n'est pas comprise dans Tan-
cienne pagination. En outre, elle n'est pas complète : elle s'ar-
rête au chap. 86, et par conséquent doit avoir été rédigée alors
que les chap. 87 à 91 n'existaient pas encore. Il serait même
plus exact de dire qu'elle a été faite quand le texte s'arrêtait au
chapitre 85, car, dans cette table, Fintitulé du chapitre 86 e;
d'une écriture visiblement postérieure à ce qui précède.
Je vais, pour donner encore un échantillon de la manière
Boysset, transcrire les chapitres 89 et 91 (le chap. 90 est sans
intérêt) qui ne sont point accompagnés des dessins mïfs aux-
quels notre auteur a ordinairement recours pour compléter ses
explications verbeuses mais souvent peu claires. Il s'agit dans cç^
deux chapitres d'un point litigieux qui devait être fréquem-
ment débattu sur les bords du Rhône, à savoir des droits que
les riverains pouvaient prétendre sur les atterrissements formés
par les alluvions du Rhône. Ces atterrissements sont ce que
Boysset appelle creis, au plur. creisses. Le terme français, usité
en maints procès des derniers siècles, est créaient. Le cours du
Rhône s'est lentement modifié par suite de ces creraents jus-
qu'aux travaux d endîguements qui ont été faits ù la suite de k
grande inondation de 1856. Beaucoup de petites îles, principa-
lement celles qui étaient rapprochées de la rive provençale (côté
Empire) se sont soudées à cette rive, le bras qui les séparait de
la terre ferme s'étant peu à peu comblé '• La question qui s'èle-
I
1. C'est ainsi quç Valabrêgue (que le Dict. des Postes écrit à tort Va
brègues) à quelques kilomètres au nord de Tarascon, était jadis djtns un
du Rhône, et pjir suite appartenait au Languedoc, comme la plupart des I
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET Iig
vait, et qui a donné lieu à de nombreux procès, était de
savoir quels étaient les droits des deux propriétaires riverains,
celui de Tîle et celui de h rive voisine, sur le crcmeni. C*est la
question qu'examine Boysset dans ces deux chapitres.
(Fol. 511 vo). iuj«*îx. Capitol per tieckrar h crds d*una illa que sia mlrt Jj\
afgjtas^ ii quas era que si ajusUs an terra ferma 0 an las posfisims qm mien en
Urra ftrnm.
Item, destrador et atermcDador o autre quai que sîe, entent : si quas era
^ue questîo endevengties entre .ij. partidas» so es asaber que Tuna part agucs
.]*. UU entre .ij. aiguas, et l'autra part agues sa posesion en terra ferma» et
a quas vengues que Tila aquela si ajustes an terra ferma d'un costat, et aquej
de qui série l'ila demandava lo creis jusque a ribas vielhas de terra ferma ;
item, et aquel de terra ferma demandava lo creis aquel, disent que Tiia non
deu avcr A\* crei&es, an * li sufis ben que n*aia .j,, aqueï deforas', et aquel
que s'es ajustât an terra ferma d'un costat deu eser de la posesion que son »
en terra ferma e non dobla. Sus aquestas duptes non sues ♦ csbaït, quar nos
lo ti dcdararem pcr tal maniera que tu» atermenador o desirador, o autre
quai que sie a qui s'apcrtengua a dcclarj;r aquesta question, o sabras decîarar
scnsa fallir. Primo, sapias scrtanamens que si tllon aquel» o autre quai que
sic que sic entre jj. aiguas, e ven a quas de foriuna que los rieus o aquela
fcbicra scqua e rOon sy ajusta an los terrens et an las ribas vielhas, adoncs
t^ déclara que 1q creis que si sera fag a quascun costat sic megier : l'ilon
n'aJa U mîut e lo tcrren de ribas vielhas Fautra mitât. Aqucîa mitât entent
que vemu al terrador de las ribas vielhas, si c'on parta segon que venra a quas-
cuna de las posesions, segon lo lare de sa frondera, hem, sie pcr lo contrari
que filon aquel o aquels aia creis deves .ij. (foL J12) partz» e la .\. costat si
ajuste an terra ferma e Tautre costat an Taigua o an la rebicra corcrit deves
l'autn: costat ; si aysins es» adoncs déclara que lo crds que es entre la rebiera
corcnt c Pilon sie et eser deia tôt de Tiion e de l'ila aquela. Itcni, lo creis
^ilc Tauirc costat de Tilon que si ajusta o s*es ajustât an terra ferma, sie de la
iion o poscsions que son en terra ferma o en froniiera d'aquel illon,
Ûon aqud o aquels en aquel creis ren non aian. Item» sie pcr lo contrari
du Rhône, Lors de la division de la France en départements, en 1790, le
bras qui séparait l'île de la rive provençale était déjà comblé (sauf dans les
grandes eiux). Cependant, cette commune fut comprise dans le Gard dont
die est séparée par toute la largeur du fleuve.
U Pour a^ïi.
a, L*attcrris5cnient ou crcmcni qui s'est produit du côté du fleuve.
J, Il faudrait «j, ou las poscsions,
4« Ailleurs esties. Nous avons ici une formule qui revient en chaque
►tttç.
120
P. MEYER
que rilon aquel o aqueb aia creî$ d'un costal e se sie a}U!>tat an terra femu,
e de l'autre costat la rebiera fonda e dest rua filon a^ueï o aquels, e non aia
crets nengun sinon que font tôt jorn, adoncs tu déclara que lo creis que 5*cs
fag e si sera fag de ves .j. costat de Filon an terra ferma si parta per micy :
rilon n'aia la miiat e las poscsions que îi seran davant l'autre, c d'aquela
niitit quascuna poscsions del terrenh n'aia, segon sa frontiera, sa partida.
lieni, avertis t\% si per temps venent a ,x», .xx., .xxx. ans, o mais o mens,
lo creis que es o série entre la rebicra c filon que es déclarât desus que sie
de filon si ajustava a terra ferma (t^) con o faras ? Sus aquest pong non
duptes en ren, mas déclara ardîdamens que lo creîs aqud si parta per mlty ;
filon n*jia la mitai cl terren l'autra mhat, e quascun per sa rata, con dig es
desus. Item, si duptas que sic fag tort ad aquel de qui es o sera filon» quar
era stat déclarai que sieu cra, non es ges rason per que, quar faîgua tenic
de lare dos tantz trcstanu que era en aquel temps entre lo creis de filon e
terra ferma quant fon conegut que fos de filon, or es toi sec c lo creis es
fag major .x. tantz plus que non era davant; e per tal l'iïon guasanha e non
pcrl, quar si a fora fos atermenat» tôt îo creis fora de las posesions de terra
Icrma, c car non o fon, cascun n'a la mitât, e filon en aquesta part es avant
agul e non ti es fag tort nengu ni al terrenh aysi pauc , car non fon at»-
menat con dig es desus; per que tu, aiermenador vo autre quai que sic a quî
si apcrtengua a declarar aquesta question, déclara per la raanicra (JoL jij)
que desus es déclarât et scrig er avordenat, e non falhiras ; e nota o ben, et
auras en honor e près.
Jiij«ît. Capitol per âtclarar la via el camin que dm avtr .;\ tlon qm su tntn
Jj\ aiguas, e vmgua a quas que si prena e sy ajusta an krra ferma.
(Fol, J14) Jiij"xj. Capitol per declarar la dnisiera que deu aver ./• . 0.1).
possessions qtte sien en terra ferma que traversar e pasar vuelhan trai^ âUm illum,
e del creis wma sien que Inr sera davant, e ttrar dreg al fluvi coreni que série a
Vautre costal d^ aquel iîlum^ si quas era que PU un aqutl an terra ferma si ajusUs,
Item^ atermenador o destrador o autre, quai que sîe, a qui si apertengua a
declarar aquesta question o semblant d*aquesta, entent : sy Jj. partidas a\nen
débat, que la .j. agues una posesion en terra ferma que si confrontes an
ribiera corcnt, e davant aqucla posesion avie .j. ilon, et aquel ilon si fos
ajustât e près an terra ferma, et aquel de qui série aquela posesion de terra
ferma dcmandava sa frontiera jusque a f aigua corent, prenent o demandant
tant del creis quant de filon ab el traves sa dreisiera (t^), jusque a faigua
corent que série a fautre costat de filon aquel *. Item, aquel de qui série
filon diiic que filon era ilum * a tant de temps pasat que memoria non en
en contraria c que el e lois] sieus an posezit aquel ilum .xxx., xl ^ .1., Jx.,
I . Boysset a ajouté en marge, avec renvoi, quelques mots en partie enleva
par le couteau du relieur^
a. Sic\ Boysset aurait dû écrire sieu.
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOY5SET 12 1
.Izs., aîij", ans et otra, sensa contra4icsion neng[u]nad*ometîengun, e pcr-
len » que aqucl de qui es la posesion de terra ferma non i a ren, an perten e
dis que tôt lo creîs que es entre la terra ferma c Tilon es de rilon, et an-
quas * plus toi lo crcis que es deves l'autre costat del djg ilon que si teti an
la rcbiera .corent, e que la poscsion que es en terra ferma non a ren en
lo(s] creisses ni en Ttlon, ni aver nt demandar non i deu ren, quar maïs non
o poscsy. Sus aquestos duptes non sties esbaît, ne dubtes en ren, quar nos
l<K ty declararem si claramens que lo li abastara, Pt;rmi crâniens ty (fol. ///)
dtclaram sus los creiscs quai son, a quascun costat de Tilon vo a .j. tant
solameos, que sieguas Tavordenansa e la declarasion declarada et scricha en lo
Capitol Jiij"ix., queacomensa en sa rubiqua ; Capitol pet dt4:hrar hcms d*unn
iîa^ etc., e fay ses mais e ses mens, e non falhîras. Item, sus lo dreg que
demanda aquci de qui es la posesioo de terra ferma sus Tilon, con davant
scrîg », aquesta ty declaram tôt sertamens que aquel de qui es ta posesîon de
•ara ferma non a ren en Tilon ni aver non en dcu. Ra2on per que : car l'ilon
a .L, .Ix-, ,iiij»*., .C. ans que es ilon, et aqucl que lo posesis Ta posesit e
SOS prcdescsos pasifiquamens e quîetaf sensa contradicsion nenguna a tant
de temps que home non es al contra ri. E si la posesion de terra ferma o sel
de qui es o es stada per tems pasat î aguesan dreg, cls o agran demandât per
tcms pasat, si ben con U aquest aras de (v») présentée per aquesta razon li decla-
rjin que sel de terra ferma, o set que a la possessio»^ en terra ferma, non i a
dreg ncngun en l'ilon aquel ; réservât enpero ad aquel que aune posesion en
terra ferma que, s}- raostrava per stiirmens o per sabedos amies qu'ci agucs
dreg en aquel ilum, o en tôt o en partida, que son dreg li fos observât ; rasio
quart : quia malt posesor lH]tmquam perscribittir.
Ainsi se termine le ms., sans qu'aucune des formules d\'xplkil
dont Boysseï faisait habituellement usage indique la fin du
traité.
Ce traité, et le précédent, qui a pour objet « la siensa del
destrar w, ne sont pas d*un très vif intérêt. Ce qu'on en peut
dire de plus favorable, c'est quils sont Tœuvre d'un homme
très enthousiaste de son art. lis ont été composés avec amour.
Mais ils sont mal ordonnés et Texposition des procédés i
employer est longue et pénible. Puis on y chercherait vaine-
ment des allusions aux opérations cadastrales auxquelles
Boysset a dû prendre part, soit comme arpenteur désigné
par un vendeur ou par un acquéreur, soit comme expert, à
I. C«t et que donne rabréviation. Urt preUrt ? Cf. à la fin du chap. pers-
crtbHur , pour prrsc r ihit ur,
2* Pour (it$quar.
122 P. MEYER
roccasioii de quelque procès. La géographie historique n*a rien
à tirer d'ouvrages où aucua nom de lieu ni de personne n'est
cité. Cependant la publication complète du ms. de Carpentras
serait à souhaiter, car un lexicographe y recueillerait de nom-
breux termes techniques que Ton chercherait vainement ail-
leurs. Le travail de dépouillement est du reste fait en partie.
RaynouLird a pris beaucoup d'exemples dans nos deux traités.
Seulement il les a pris dans le ms. de la bibliothèque Mèjanes,
mentionné ci-dessus (p, 97)' qui n'est pas^ comme celui de
Carpentras, de la main de Boysset, d'où résultent peut-être cer-
taines incorrections*, et de plus il n'a pas relevé tous les mots
intéressants. Une suffirait pas, pour mener i bien cette édition,
de posséder les connaissances philologiques et paléographiques
qu'exige toute publication J*un texte du moyen âge : il y fau-
drait joindre des notions, qui me font complètement défaut, sur
l^art même que pratiquait Tauteur et sur l'histoire de cet art.
Boysset est assurément un simple praticien : il ignorait bien
certainement les travaux des agrimensorcs de l'antiquité, mais il
suit une tradition, et cqsî cette tradition qu'il serait nécessaire
de connaître afin d'apprécier équitablemenc son oeuvre. Ici se
pose une question que, pour nu part, je ne suis point en état
de résoudre. On a vu plus haut (p, 105) que Boysset place son
traité de la science du ikxire sous le patronage d'Arnaud de Vil-
leneuve, « docteur en droit civil et canon, versé dans Tastrono-
mie, la médecine, la théologie, les sept arts, » It ajoute qu'Ar-
naud de Villeneuve était catalan, qu'il fut longtemps au service
de Robert, roi de Naptes, comte de Provence, et que c'est sous
la dictée de ce prince qu'Arnaud écrivit le livre qui contient
toute la science « de destrar et d'atermenar >k Est-il vrai qu'Ar-
naud de Villeneuve, le célèbre médecin qui a tant écrit sur la
médecine, sur la chimie et même sur la théologie, ait aussi com-
posé un traité d'arpentage? Il est permis d'en douter. M. Hau-
t , Il Tenregistra dans la « table des principaux ouvrages dtés » (£/Jf. rom.
V. 610 b) comme suit : « Traduction du Traité de Farp^Dtage. Biblioth^uc
d'Aix, ms, »
2. Ainsi Raynouard cite» V, 252, un exemple d'asoîotitwt^ti, qu'il traduit
par « isolément », Mais dans le ms. de Carpentras (fol, 65 ro)on lit dans cet
exemple asoladanum^ et le sens est plutôt « tranquillement, avec caîme » (vo>\
Mistral. , assouïà). Cf. utt «autre exemple du m^me mot çi-dessus. p, m,
LES MANUSCRITS DE BERTRAN BOYSSET 12}
réau^ dans son article si complet et si fouillé sur ce personnage,
élève contre cette attribution de très graves objections. « Il est
f impossible de croire qu*Arnaud se soit donné les titres de
maitre es ans, de docteur en droit romain, en droit cnno-
ff nique et en théologie qu'il n a jamais possédés. » De plus,
lorsque Boysset lui fait dire que son livre a été composé à Naples
' la quatrième année de Robert (ci-dessus, p. loé), il produit une
assertion inadmissible, car « Robert ayant été couronné roi de
« Sicile le i^^ août 1309, Tan quatrième de son règne a com-
« mencé le i*' août 1312, Or Arnaud était mort avant le
« 1 î mars 1312*. »> Cependant, je n'irais pas jusqu'à dire, avec
M. Hauréau, que ce prologue est « purement fictif ». I! est pos-
sible en effet que Boysset se soit inspiré d'un traité d'arpentage
fait à la requête du roi Robert par un autre qu'Arnaud de Vil-
leneuve, et que ce traité ait été placé, par une fraude dont on a
bien des exemples, sous le nom illustre du grand médecin
catalan. Ce qui me porte à croire que tout nVst pas fictif dans
l'assertion de Boysset, c*est la mention précise qui se lit au com-
mencement du traité «del destre » (ci-dessus p. iio) d'un cer-
tain Arnaud du Puy, notaire (?), homme fort entendu en la
science de 0 destrar e d'atermenar », qui lui aurait communiqué
l'ouvrage composé en collaboration par le roi Robert et par
Arnaud de Villeneuve; cC Texplicit du foL 140 v"' (ci-dessus
p. lié). On ne voit pas dans que! intérêt Boysset aurait
inventé une fable aussi compliquée, et on conçoit très bien qu*il
ail pu tenir d'un certain Arnaud du Puy, d*ai!leurs inconnu, un
ouvrage perdu qui portait induement le nom d*Aniaud de Vil-
leneuve.
Je termine par quelques observations sur la langue de
Boysset dont j^empruntc les éléments au ms, de Carpentras.
Elles sont à rapprocher de celles que M. Chabaneau a présentées
dans la Rei*t4€ d<'s langim romanes , 2* série, XII, 109 et suiv., à
Toccasion de la vie de sainte Marie-Madeleine que renferme le
ms, Arbaud,
Toniques, ô latin devient uo : hwc.
au latin devient 0 dans te (aut). Parfois un v se produit
1. HkloiTt /iWirûir/, XXVIII, 116-7.
124 P* MEYER
au devant de Yo quelle qu'en soit Torigine : w (aui), von
(unde); le même fait se produit avant la tonique: avordenar.
— J'ai signalé jadis von^ vueilhs (o cul os) dans te chansonnier
Giraud> qui a été écrit en Provence (Derniers troubadours de la
Provence, p. 20).
PosTTOhîïQtiES. Les troisièmes personnes du plur. en -ant
conservent leur forme étymologique ; ind* pr. cuidun^ dularan^
intran; imparf, eran; subj. prés, liegan (legant); subj. pi*
que parf. perdesan. La finale analogique -on n'apparpît pa:*
encore. Cf. Romania, IX, 201-2. — a suivant i devient e : avie^
aurie^ auries (2' pers, sing.), cresie, ue, valie, poirten^ volrien.
De même dans le ms. de P. de Serras (Rontamay XIV» 544) et
ailleurs, surtout en Provence (Romania, IX, 202).
ANTèxoKiQUES. î latin avant la tonique devient e dans rebura
(riparia), foL 311 v**. De mcmc fegura^ fol. 5 V", fegurat^
fol. 8 v*». &ins doute Vi latin est bref dans /f^wra, mais ce mot,
étant passé en roman par voie savante, conserve ordinairement
son L Veguier (vïcarius) est parfaitement régulier (cf. le fr.
veier^ imer) ; cependant ailleurs la forme constante est viguier
{Ltx, rom,^ V, 542)1 bien que ce mot ne semble pas être de for-
mation savante.
Consonnes. Boysset emploie volontiers qu pour c : quamîn,
quanna^ quapilol, qmscun^ quas (cas us), pasifiquanum, aquahat ^
qtuil (calet).
V initial disparaît devant u : ullms (subj. prés, de iH>kr), p. 105 ,
w. 41, 50, 56, etc.; on a aussi î^Ums^ velha, fol. 15 r°, p. 106,
v. 65, etc.
Vj en contact avec une voyelle précédente, se vocalise et
engendre un c avant lui ; rieus (ri vos), de même le b devenu
V : escrieure, foL 7 v". Cf. mes Derniers troubadours de la Provence,
p. 21.
m suivie (après la chute d'une voyelle intermédiaire) d'n
s'assimile à cette consonne : nonnat ^ p. 103, v. 30; notimi^
p. 105, v. 44, Il ne paraît pas que cette forme ait persisté en
provençal (voy. le dict. de Mistral sous nouma), mais il y en a
des exemples à la fin do moyen âge» notamment dans le Ludus
S. }a£obi de Manosque. — La forme ordinaire nomnar se trouve
aussi (p. 105, V. 48)»
n s'intercale dans mngun, dans vengam (videamus), p. 104,
V. 53, dans vanga, p. 105» note 2,
LES MANUSCRITS DE BERTRAK BOYSSET
r suivi dV disparaît : smhs, (kstradvs^ atermaïadoSy rcdks;
c'est un fait très général à cette époque et plus tôt. Voir mes
Dernier i troubadours de la Provence^ p» 23.
, ç est habituellement remplacé par 5 : sieutat, sertamms^ Franses^
Vinsens.
s devient r dans/)/«r(U, fol. 5 v**, paurar^ foL 8 v*^. Ce chan-
gement est plus fréquent dans les mss. de la chronique, — j dis-
paraît devant /, ou s'assimile en / ; illa insula, iïa^ iUon^ iîmi.
sCy J/, au commencement des mots, n'appellent pas toujours
un e d'appui : Tauteur écrit volontiers scrig^ scrich^ scricha, siai^
slies^ fol. 314 V**, slurmens. Il en est ainsi non seulement quand
le mot précédent finit par une voyelle, mais même quand ce
mot se termine par une consonne* Cet usage est fréquent en
Provence et ailleurs à cette époque * .
ss se réduit ordinairement Is : fosa (plus*que-parf. du subj.
dVijcr), pasat^ perJesan, saupeses^ posesion, sucesors.
et devient ordinairement g à la fin des mots : fag, dreg, dig^
scrig\ parfois ch : scrkh. De même quand s suit : fags et fachs.
Naturellement, ce groupe est toujours rendii par ch quand il est
suivi d*une voyelle : dicha^ fâcha.
Il y a peu d'observations à faire sur la flexion. Les deux cas
se sont réduits i un seul qui est en généra! celui du régime,
quascuna posesmts^ foL 312 r°, offre à la vérité la forme du cas
sujet, mais ce peut être une simple erreur d*écnture»
Il y a de nombreux exemples des pluriel en -os, dans certains
pronoms et adjectifs : aquelos, aguestos, îanîos, quanîos. On les a
déjà signalés en d'autres textes de la Provence; voy. Romania,
xvni, 428.
L'an, masc, lo devient la dans la quai II n'y a pas de doute
sur le genre : la qualcapitol^ fol. 20 v"; /^ quai libre fon aquabai^
foL 22 v*. On peut comparer sa pour so^ et même la pour lo
dans l'expression la us (fun).
L'article ou pronom neutre lo est employé comme sujet
du verbe esser^ au pbr. : « lo son pluros gens que.,, m,
foL 5 v**, « il y a des gens qui.,, w Cet emploi de lo est bien
connu et on a beaucoup d'exemples dès le xin'^ siècle, mais ordi-
nairement h est construit avec le singulier. Cf. Romaniay IV,
t. Voir Bulletin tU la Soc. des anc, textes, 1890, p. 107,
1, Voy. Qiahaneau, Romania^ W\ 539.
126 p. MEYER
342, Vn, 329, ec Bulletin de la Société des anciens testes français y
1883, p. 62.
Dans la conjugaison on remarquera la forme relativement
moderne Wt- (je veux), fol. 2 r^, 7 v", au lieu de Tancien voil^
vuelh. La première pers. plur, du présent de Tind. à'esser est
siam (p, 105, V. 29), forme habituelle depuis le temps de Boysset.
et même avant, en Provence.
Le part, passé agut se substitue à cstat^ comme en bien d'autres
textes; cf. BulL dt la Soc, dàs anc. textes ^ 1S85, p. 62.
Je signalerai un emploi de de partitif qui est actuellement
tout à fiiit habituel en provençal, mais qui, à ma connais-
sance, n'est pas usité au mojren âge, du moins dans les textes
littéraires : « fay, si podes que y aia rfenfans », fol, 109. Cf.
Revue des langues ronmnes^ 2^ série, XII, 115»
Paul Meyer*
P.-S, — La chronique de Bertran Boysset vient d'être publiée d'après le
ms. de Paris, dans le tome Vil de VArchiv fur Litteralur imd KirchcftgeschïdHe
des Mittelalkrs (1895)^ L*autcur de cette édition, le R. P, Franx Elirle* S. J.,
avait été informé de Fexistence du ms. de îa Bibliothèque nationale par le fac-
sîmile que j'ai fait laire jadis de deux pages de la chronique. Il a connu lems.
des Trinitaircs d'Arles par la copie de Bonemant, et a rais à profit, dans ses
notes, rédiiion publiée par M. Fassin, d'après une autre copie de Bonemant,
dans le Musée d'Arles. La publication du P* Ehrlc n'est certainement pas
irréprochable. Elle 5*achevait au moment où paraissait notre précédent
numéro, et par suite, Téditeur n'a pu profiter des recherches sur les mss. de
Boysset que contiennent le mémoire de M. Novati et le mien. Le titre même
de la pubhcation : DieChromizda Garoscus de Ulmoisca. veteri und Bertrand
B<ysstt montre assez que le savant jésuite a accepté de confiance Tabsurde
lecture de Baluze, Garôsctis de Utmoism veteti au lieu de Jacobus de vetino ista
v'uii {Kotmma, XXI. 564); et en d'autres endroits encore, malgré le secours
que lui apportait le texte de Bonemant publié dans le Musày sa transcription
du ms. de Paris pourrait être critiquée. Toutclois, il ne serait pas équitable
d'insister sur quelques erreurs éch.ippées à un érudît qui a fait ses preuves
en d'autres domaines, et qui, cette fois, se trouvait sur un terrain nouveau
pour lui. J'aime mieux constater que le P. Ehrlc a trouvé, de son c6té, plu-
sieurs des faits qui ont été étabhs soit dans le mémoire de M. Novati, soit
dans le mien, et qu'il a joint a la chronique de Boysset des notes dont un
futur éditeur pourra tirer bon parti. P. M»
MÉLANGES
UNE CHARTE DE GAGE BRÛLÉ
La vie de Gace Brûlé, comme celle de la plupart des trou-
vères, est fort obscure : il vivait à la fin du xii* siècle ; il était
Champenois; il passa quelque temps en Bretagne, où il avait
été appelé par le comte Geoffroi II ; il était chevalier. Voilà à
peu près tout ce qu'on sait de lui ', et ce n'est pas beaucoup.
Aussi nous a-t-il paru intéressant de signaler une charte, datée
de 12 12, qui émane d'un seigneur nommé « Gatho Bruslé ».
L'association de ce nom et de ce surnom permet d'attribuer cet
acte, avec une grande vraisemblance, soit au poète, soit à un
de ses enfants , et la date peut fort bien convenir au poète lui-
môme; la région seule étonne un peu, car on ne s'attendrait
guère à trouver un Champenois établi sur les confins du comté
de Dreux et de la barbnnie de Châteauneuf en Thimerais.
La charte en question provient de la commanderie de la
Villedieu en Drugesin ^; elle relate un contrat passé entre Gace
Brûlé et les Templiers : ceux-ci reçoivent de Gace deux arpents
de terre pour lesquels ils lui payeront un cens annuel de trois
deniers parisis, et ils lui abandonnent une rente de trois
setiers de blé qu'un de ses serfs leur avait donnée sur un moulin.
P. GUILHIERMOZ.
Sciant omncs , tam futuri quam présentes , quod ego Gatho Bruslé dedi et
concessi Dec et béate Marie et fratribus miliiie Templi duo agripenna terre,
1. P. Paris, dans VHist. littéraire, XXIIl, 564-9. — G. Huet, dans les
Positions des thèses soutenues (à V Ecole des Qmrtes) par les élèves de la promotion
de i88s, p. 87.
2. La Villedieu, commune de Laons, Eure-et-Loir, arrondissement de
Dreux, canton de BrezoUes.
128 MÉLAKGES
sîta in feodo Graleriarum » juxu Foveatxi Fundatam, in [K'rpeltiam elemosi-
nam possidcnda, que ego emi de Lciart de Ponte, et predicii fr:itres dîmiserunt
niiclii et heredibus meis tria sextercia annone que Arnulphus Botefol, scnus
meus, dederat eisdeni frairibus in molendino de Taveion; unde michi et
heredibus meis predicti fratres reddent antiuatîm» in invcntione sancti
Stephani prothottiartirîs , très denarios censuales parisicnsis monete, quos
nisi nikbi et beredibus meis reddiderint , super terram prediciam jtistitiam
meam exercebo, Ei^ ut hoc ratum permancat et stabile, presentem cartam
sigilli meî impressione roboravi. Aaum aano graiie, M. C'C. XII,
(Archives nationales» S 4982» n^ 9. — Original scellé. Le sceau
pendant sur double queue n'existe pîus.)
LES PREMIERS VERS DE CHARLES D'ORLÉANS
Dans son édition des poésies de Charles d'Orléans, Champol*
lion-Figeac a publié, en appendice*, un court poème moral,
sous ce titre : Le livre contre tout pàlk\ par Louis XIL Le titre
est bien cetoi que Tauteur du poème a voulu donner à son
œuvre, mais l'attribution à Louis XII n*a d'antre autorité que
la perspicacité de Féditeur. Voici en quels termes ChampoUîon-
Figeac s'explique i ce sujet dans la notice qui est en tête de son
édition*.
Ow trouvera, sous le n« II de rappetidice, un petit poème composé par un
duc d'Orléans, Le prénom a été gratté dans le manuscrit. Nous Tavions
attribué d'abord au duc Charles , à cause de son élégance ; maïs comme le
prince qui en est Fauteur diiclare l'avoir composé i Tige de dix ans, et qu*U
y parie de maître Alain Chactier, nous avons été portés â reconnaître pour
l'auteur de ce petit livre, Louis, duc d'Orléans, qui fut plus tard le roi
Louis XIL Cette curieuse circonstance de la vie de ce monarque était entière-
ment ignorée. Nous avons trouvé ce petit poème à la fin d*un manuscrit laiin
qui a fait autrefois partie de b bibliothèque des ducs d'Orléans i Bîois. On y
lit aussi une pièce de vers larins en l'honneur des enfants de Charles d'Orléans.
Ce manuscrit est de la fin du xv«? siècle et porte les armes de ce prince.
La i< curieuse circonstance » dont Champollion-Figeac a
illustré la vie de Louis XII n*a pas échappé au dernier historien
de ce prince, M, de Maulde-La-CInvière, mais c^Ue ne lui en a
I. Groslière, commune de Chàtaincourt, Eure-et-Loir, arrondissement de
Dreux , canton de Brezolles.
a. Les poésies du duc ClniHes (t Orléans ^ Paris, 1842, p, 410-414,
3. IhfiL p, XXXV j.
LES PREMIERS VERS DE CHARLES D ORLEANS 129
pas imposé. Sachant de bonne source que le futur Loui-s XII fut
un très mauvais écolier, il ne Ta pu croire capable de composer
le poème qu*on lui a attribué : <« M. Champollion, dit-il, attri-
• bue à Louis, à Tâge de dix ans^ une petite pièce de poésie sur
Il les péchés capitaux. Mais cela nous paraît peu probable* La
tt seule preuve réside en ces vers :
Ce livre, lequel. Dieu donnant,
Je nommt^ d'Orl<?ans
Vh quant je eus acompli X ans.
T-e prénom est en blanc; il est probable qu*il s*at;it ici d'un
« Orléanais, ce que semblent indiquer les mots : Je nomme y qui
« ne s'appliquent guère à un prince '. ^
L'étude directe du manuscrit dont ChampolUon-Figeac a
tiré le Livre contre tout pèch* permet d'arriver tacilement a la
solution de ce petit problème de critique littéraire et d'affirmer
que Tœuvre est de Cbarlcs d'Orléans. Ce manuscrii^ porte
actuellement le n** 9684 du fonds latin de la Bibliothèque natio-
nale, après y avoir été désigné antérieurement par cinq numéros
différents au moins : suppl. lai. S45 — 5276 — 5247 A —
1822 — CIOLXXIIL Le numéro en chiffres romains est celui
du catalogue de Rigault, terminé en 1621 ^ D'autres mentions
nous font remonter plus haut encore. Au verso du 4*^ feuillet de
garde antérieur, on lit, d'une écriture du xvi'' siècle : Ex libris
hisîorialibm pu}[pi]îo )"" a<l parietcm a parle curie cast ri, IJtteraC ).
Cette indication suffirait à prouver que le manuscrit a fait
autrefois partie de la bibliothèque de Blois; mais on Ut par
surcroît ;\ la fm du Livre contre tout péché, fol. 41 r" : De caméra
anupotorum BUs\ensi\. Enfin, deu.x autres mentions, du xV' siècle
celles-tij qui avaient été grattées en tête du premier feuillet de
garde antérieur et en tête du folio 42 r'V ont pu être lues, grâce
1, Hist.deL^uis XIL Paris, 1889, i« partie, I, 27$, note 4, J'avoue que je
vols pas pourquoi les mots : ;> twmnU (jm Ul) ^ ne s'appliquentient pas d
i prince; je ne m'arrêterai donc pas ici ni plus loin à discuter ce scrupule
de M. de Nfauldc-Lj-Clavicre,
2. On remarquera que Chatnpolîion-Figeac ne donne pas d'indication pcr-
fDcttaût de rcUDUvcr ce manuscrit. Quand je l'ai ^n entre k^ mains, j'étais à
b recherche non des poésies françaises de Charles d'Orléans, mais des poésies
Utines composccs dans son entourage,
|, Cf. Rûmaniu, XV'll. 406.
130 MELANGES
i un réactif, par mon ami, M* Henry Omont : la première,
Constat domino mco comiîi de Angoksmc; la seconde, Karolo duci
AureUanensi spécial codex isic.
Abstraction faite de quelques hors-d'œuvre sur les feuillets de
garde ^ le manuscrit 9684 contient quatre compositions diffé-
rentes : i^ le Catilina de Salluste, du f" i au f'' 35, avec, en tête,
une petite miniature et, dans TO initial de omnis Imnincs^ Vécu
aux armes d'Orléans; Técriture est du commencement du
xv*' siècle,
2"* Une pièce de vers latins faisant suite immédiatement au
Catilina, et dont voici le titre et les premiers vers :
Hk infra Sibilla vaUs aUoquitur ilhtstres dontini ducis Aunlianensis geniios
monetqm pro eorum per egregios tmr€s exaUaiiom :
ïnâok Cesarei fratres solique nepotes
Lilileri solii, Ludovici parte pircmis
RegiBcam stirpcm Frigio qui dudtis Anglo»
Sanguine materno Lignrum serpeniis avite ,
Formosi nitiiium pueri, cca sidcra trina,,.
En tout 32 vers. L'écriture est différente de celle du Catilina.
L'auteur n'est pas désigné ; mais il est évidemment le même
que celui du numéro suivant.
3° Une pièce de vers latins transcrite aux folios 36 et 37 r%
et dont voici le titre et le début :
Histaria ad âilecthnem rtipubUcc exdtaiiva, a Valerio Maximo scripta^ îibrû
quiniQ, iitf4h « de gratis trga patriam », taliter $icut sequitnr i^erstjkata :
Urbs Romani potens» claris cclebrata triumphis,..
1. L«s feuillets antérieurs contiennent des listes chronologiques en latin
des empereurs, des rois de France jusqu'i Louis VIII , des premiers consuls
de Rome, Au ff 42 r» se lisent ces vers plus intéressants par la date qu'ils
rappellent que par les connaissances prosodiques de Tauieur :
AngloTLim rcgrao pro morte pnvau martti
Formoso moribus Liidovkî ^Ho ducis
Aurtlianeosis Karob Compendii pukra
Francorum nupsit fsabcllis fdia régis
Aîino mill"* cccc*' julîi sexto
Viccsîtîia noua. Faveant Superî precor ipsis.
Le mariage de Charles d'Orléans et dlsabcUe de France, veuve de Richard IJ,
eut lieu le 2g juin 1406, d'après la plupart des auteurs, le 6 juin, d'après
M. Jiirry (^Louis de France, due d'Orléans, p. 335). Quelle date est la bonne?
LES PREMIERS VERS DE CHARLES D ORLEANS I3I
En tout S 5 ve s. L'écriture paraît être la même que celle du
Qtilin^. A la suite du titre, une main différente a écrit en
caractères trtïs fins : abo. d. /. La même main a ajouté plus
clairement le nom de Tautcur ;i la fin de la pièce : H' Odo de
FouiUaco,
4"* Une pièce de vers français — celle qu*a imprimée Chani-
poUîon-Fïgeac — transcrite sans titre, du f'' 37 v** au folio 41 r*'.
Les initiales de chaque partie sont alternativement bleues et
rouges, sans or; les titres, rubriques. Dans le passage rapporté
plus haut, le prénom de Tauteur a en effet été gratté, mais
malgré le grattage et sans le secours d'aucun réactif^ j*at lu très
nettement :
Je nommé Otaries d*Orleans»
L*écriiure parait différente de celle du Catilina et de celle de
la première pièce de vers latins; mais on ne peut hésiter à
Tattribuer au commencement et non à la fin du xv- siècle,
comme le fait Champollion-Figeac.
Dans un .irticle paru en 1854 dans la Bibliothèque de r école des
chartes \ Vallct de Viriville a mentionné brièvement notre
manuscrit, d'après une communication de M. Lcopold Delisle :
il le considère comme écrie <f vers le commencement du
XV* siècle 3». Il suppose qu'il a été exécuté sous la direction du
précepteur de Jean, comte d'Angoulémc, Oudard deFouilloy %
Tauteur des vers latins signalés plus haut sous les n*"* 2 et 3.
Gritc supposition est plus que vraisemblable. On a vu dans le
début de la première pièce de vers latins Fauteur interpeller
par la bouche de la Sibylle les trois neveux de Charles VI, ceu
sidtra trim. Or, en marge de cette pensée du Catilina de Sal-
jsic : gîte apîid altos iracumlia dicitur^ ta in imperio superlnaalque
Wtfudelitas appellaiur^ quelqu'un a écrit : mtate, domini met K Ce
quelqu'un doit bien être Oudard de Fouilloy lui-même, et ce
sont sûrement les enfants de Louis d'Orléans à qui il veut faire
1. 4« ^érie» t* 1, p- 551 et suiv. L'article est intitulé : NoUs biMbgr. sur U
' • Mirmer Jrs femmes irrtuntm ».
2. Sur ce persotmagc, voy. L, Delisïe, Cab, des ManuscriiSt I, 105 et s.
M. Léopold Dcîïsle indique O. de Fouilloy comme auteur dcpîmifun pièces
de poésie contenues dans k ms, 9684. Plusteurs est excessif, à moins qu'il y
Ciille comprendre les vers de Charles d'Orléans.
132 MÉLANGES
la leçon. Quand Champollion-Figeac a écrit que notre manus-
crit contenait « une pièce de vers latins en l'honneur des
enfants de Charles d'Orléans », il ne songeait pas que Charles
n'a eu qu'un fils mâle, et il oubliait — ce qui est plus singulier
— que le père des trois enfants est nommé en toutes lettres, dès
le second vers de la pièce , Ludovicus , sans parler de l'allusion
très claire à la mère, Valentine Visconti, qui se trouve presque
à côté.
La seule raison, en somme, qui ait pu décider Champollion-
Figeac à fermer ainsi obstinément les yeux à la vérité, est celle
qu'il indique lui-même: l'auteur du Livre contre tout péchéy
déclarant avoir composé ce poème à l'âge de dix ans, et citant
cependant maître Alain Chartier, ne peut ûtre Charles d'Orléans.
A cela il est bien facile de répondre : l'auteur cite en effet Alain ,
comme il cite saint Bernard et Caton, mais il s'agit non d'Alain
Chartier mais d'Alain de Lille. C'est ce que nous allons mettre
hors de doute en examinant les trois passages du Livre contre
tout péché où il est question d'Alain.
I. De Envie.
Cil qui vueult bonté ensuir
11 doit envie moult fuir,
Car Alain si nous enseigne
duc tout ainsi que la montaigne
Qui est Ethna ' appellee
Est tousjours de feu embrasée
Ainsi Tenvieux tousjours art
Du feu d'envie de toute part.
On lit dans le Doctrinale minus ou Liber parabolarum d'Alain
de Lille, dès les premiers vers :
Nil aliud nisi se valet ardens Ethna cremare :
Sic se, non alios, invidus igné coquit ^
II. Du pechié (rire.
Et Alain en son livre dit
Que ainsi comme jour et nuyt
Les rivières, aussi les flues
Par les rives sont tenues,
1. A/5, ctluia.
2. Migne, Patrol.^ CCX, C(^l )!'. i.
LES PREMIERS VERS DE CHARLES D ORLEANS I33
Ainsi attrempance si lient
L'ire des gens quant elle vient.
On lit dans le même ouvrage d'Alain de Lille :
Ripa retentat aquas pelagi ne migret in arva :
Sic tcnet irati frena modesta manus ^
IIL De Peresse.
Et par Alain est demonstré,
Car tout ainsi que en esté
Le formy fait sa garnison
Pour vivre toute la saison,
Ainsi chascun doit entendre
Retenir et aussi aprcndre
Aucun bien des sa jeunesse,
CsLT on ne peut en viellcsse
Aprendre...
On lit dans le même ouvrage d'Alain de Lille :
Du m calor est et pulchra dies , formica laborat ,
Ne pereat dum nix venerit alta famé :
Sic juvenis, dum tempus habet sudoribus aptum,
Querat quo possit lassa senecta frui.
Je crois qu'il est inutile d'insister. Si Vallet de Viriville et
M. Léopold Delisle, qui ont vu notre manuscrit il y a quelque
quarante ans, n'ont pas signalé la singulière méprise de Cham-
pollion-Figeac , c'est qu'ils n'ont prêté attention qu'aux vers
latins d'Oudard de Fouilloy. Ils valent mieux assurément que
les vers français de Charles d'Orléans, dont ChampoUion vante
pourtant « l'élégance » : mais il ne faut pas oublier que c'est un
enfant de dix ans qui s'essaie à rimer la morale de son précep-
teur et qui s'excuse bien gentiment auprès de chacun et de cha-
cune de n'en savoir pas davantage :
Et me pardonnent, je leur pry,
En cecy se j'ay point failly ;
Car je n'estoie pas si saige,
Pour ce qu'estoie jeune d'âge,
Que je peusse faire traitté
Qui fust de grant moralité.
A. Thomas.
Migne, Pafro/., CCX, col. 582.
COMPTES RENDUS
Études romanes dédiées à Gaston Paris le 29 décembre
(25*^ anniversaire de son doctorat es lettres), par ses cltrves de France el
ses élèves étrangers des pays de langue romane. Paris, E. Bouilîoti, 1S91,
in-80, quatre-552 pages.
Le 9 août 1889, pour la date de mes cinquante ans révolus, les Suédois qui
étaient venus, dans ces quinze ou vingt dernières années, compléter à Parîl
leurs études de philologie romane avaient eu la charmante pensée de ra'ofTrii
un volume dont jVi rendu compte ici (XIX, 118). L'exemple de ces excel-
lents amis Scandinaves a piqué au jeu mes amis français, qui n*ont pas vouU
être en reste , et se sont ingéniés X trouver une occasion de me témoigner 1(
bon souvenir qu'ils ont gardé de nos rapports plus ou moins anciens. Et ce qu
m*a beaucoup touché , c'est que , ce dessein ayant été connu , plusieurs d<
mes élèves ou auditeurs w étrangers des pays de langue française » ont lent
à sV associer. On m'a donc offert, le 29 décembre 1890 (pour le 2 5«anni
versaire de mon doctorat es lettres), un magnifique volume, qui avaîl
été exécuté aux frais et par les soins de quarante-cinq amis plus jeunes qui
moi, dont trente-huit Français, six Suisses et un Belge; Texécution en avaii
été tout particulièrement soignée par nos excellents imprimeurs de la Romania^
MM. Protat frères, de Miicon, que je tiens à remercier encore, ainsi que notn
éditeur, M. E. Bouillon, qui n'a rien négligé pour que ce somptueux cadeat
répondît aux intentions des donateurs. Parmi eux, dix-sept n'ont pu contrit
buer â Toeuvre commune que par leur souscription (MM. Barbeau, Bémoni,
Bonnard, Brunot, Demaison, Duvau, Fagniez, Fécamp, Funck-Brentaoo,
Gerbaux, Giry, Goelzer, Lelong, Rabiet, S. Reinach, Rolland, Sudre), Jeiï<
leur en suis pas moins profondément reconnaissant, d*auunt plus que parm
eux, plus encore que parmi les vingt-huit qui ont apporté au ïi\Te des con^
tributions personnelles, plusieurs se trouvent qui mhonorent grandeme
se rappelant qu*ils ont jadis suivi tel ou tel de mes cours, mais qui se
aujourd'hui la science dans des voies bien différentes du chemin où ils"
marché un instant avec moi '. Quant aux autres, je ne puis mieux les remer
iun
I. Je dois donner un souvenir particulièrement ému à ce jeune homme s» tdborktti
«t ïi doue pour nos études, libbé Rabiei. le traducteur de U GtanxjtmiTÊ de M, Meyer
Ltibke, qui, bien peu de mois après h date où ce iivre fut achevé, devait termig
courte carrière, emporté par une cruelle maladie.
Ettides romanes dédiées à Gaston Fans 155
dcr qu'en rendant de leurs contributions un compte aussi exact et aussi
impartial que possible. Plus d*une, pamii ces contributions mcraes, dépasse les
limites où j*âi le droit et le moyen d'exercer une critique utile; la plupart
sont en rapport plus étroit avec mes études habituelles. Quelques-unes sont
d'une haute importance; toutes, je puis le dire bien sincèrement, ont de Tin-
téat et de la valeur, et je ne puis qu'être fier et heureux de voir mon nom
associé à des travaux aussi divers et aussi n:marquables. Rien ne peut être
plus doux et plus encourageant pour un travailleur que de constater ainsi que
le grain semé par lui n'est pas tombé sur un terrain stérile, ou n'a pas été
miporté par le vent» et que souvent il a fructifié au centuple. Je me rappelle
qu^l y a maintenant vingt-cinq ans, dans la première leçon publique que je
|6s, aux cours libres de la rue Gerson fondés par M. Duruy, je disais que le
VŒU de tout professeur digne de ce nom pour chacun de ses élèves était le
vœu d'Hector pour son tîîs :
Kûtt itoti TIC cfîzrjm* Ilorrpd^ V oyi tïoaXov àjjuîvtav.
Ce vœu s*est réalisé pour plus d*un de ceux qui ^ venus de France ou de
Tétrangcr, ont depuis lors trouvé dans mes cours et mes conférences leur
première initiation à la science. En voyant la façon dont ils ont su développer
et accroître le germe qui leur avait été confié , je me dis que ma carrière
didactique n'a pas été inutile, et cela ne me fait pas seulement plaisir» cela me
ouvcquc j'ai eu raison, contre l'avis de quelques conseillers bien intentionnés»
"de donner inflexiblement i mon enseignement la direction toute scientifique
que je lui ai donnée, le tenant également à l'écart de toute préparation à un
p examen quelconque et de tout appel à rintérêt d'un public étranger au travail :
\ m'a valu quelques heures difficiles, où j'ai pu craindre de me trouver isolé,
r suite, d'avoir choisi une mauvaise voie; mais je suis aujourd'hui délivré
fmti doutes et largement payé de mes peines. J'ai eu d'ailleurs le bonheur
d'appartenir depuis le début (après Téphémère essai des cours Gerson) à deux
abtîssenients dont Tesprît était celui même que je viens d'indiquer, l'Êcolc
Hautes Études et le Collée de France, Qu'i^ me soit permis de dire que
^exemple, fourni par ce livre, du bon résultat d'une pareille méthode doit
ncouragcr i la suivre tous ceux qui pourraient se sentir hésitants dans un
pj)*s 06 elle n'est pas encore aussi comprise et aussi répandue qu'ailleurs.
Je ne pub écrire ces remerciements , qu'une pudeur que Ton comprendra
m'cmpéche d'exprimer comme je les sens, â l'adresse de ceux qui m'ont suivi
et veulent bien me regarder comme leur premier guide, sans que ma pensée
se reporte avec émotion vers ceux qui m*ont précédé , qui ont bien réelle-
ment guidé mes premiers pas, et dont les mains aiïectueuses et exercées m'ont
iJfansnus le Hambcau auquel sont venues s'allumer d'autres lumières. J'ai
I dins l'étude de la philologie romane deux maîtres que j'ai perdus depuis
"Tongicmps, et auxquels revient légitimement l'hommage du témoignage oflen
ï leur élève. Je le dédie i la mémoire toujours chère et toujours vénérée de
Paulin Paris et de Frédéric Diez,
136 COMPTES RENDUS
P. I, H. Omoni, Les manmcnU f raturais des rois if Angleterre au château dt
Ruhmomi, — M. Omont publie, diaprés un manuscrit de notre Bibliothèque
nationale, une liste, dressée en i)5S* des manuscrits fra.n^ïais, splcndidcmctu
exécutés pour lui, qu'Edouard IV avait réunis au château de Richmond, et
des imprimés, pour la plupart magnifiques incunables, qu'y avait ajoutés
Henri VI. Il identifie eu note â peu près tous les m.tnuscrits, qui sont aujour-
d'hui conservés au Briiish Muséum, et joint A cette intéressante petite publi-
cation un compte détaillé du relieur Pierre Baudouin, qui avait été chargé,
en 1480-81, de recouvrir plusieurs de ces volumes de vêtements de velours et
de soie.
P* 15, G. Huet, Ri-marqun sut k$ rcitaclîms diverses d'une chanson dit
XJïi« siêck. — Cest le 11° 45> de H^ynaud , attribué à tort i Gace Brûlé, qui
y est AU contraire cité; M. lîuet, qui s*occupe depuis longtemps de l'édition
critique, très difficile, des chansons de Gace» donne ici un é'cluntillon de ses
recherches préparatoires. Il débrouille le chaos qu'offrent pour cette pièce les
trois familles de mss- qui nous l'ont conservée, et rend très vraisemblable la
conclusion que la troisième comprend, avec trois strophes de l'original, quatre
strophes ajoutées par un auteur quia voulu compléter un texte dont il n^avait
que le début, mais qui n*eti a pas bien compris la forme, Réd. I, sIt. II,
peut-être vaut-iï mieux sacrifier la grammaire â la rinje, et lire n/, grevé^ doué
pour tte^^ etc. — V. 6 tna mU\ imprimer m' amie. — VI, 2. p.-é. tte lairroie
au lieu de ne porroie, — Réd. II, VI, 4 ait^ corr. a\ 7 i7, corr. eh
P. 23* J. Bédier, Le fabliau de Riclieui, Après une fine appréciation littéraire
de ce petit poème si précieux et par sa date (t 1 59, comme le rectifie avec rai-
son M, Hédier, et non 1 1 56) et par sa valeur intrinsèque, Tauteur fait valoir la
forte objection qu'on peut en tirer contre une opinion que j'ai exprimée, cl
d'après laquelle le goût et le talent de la p<;inture des moeurs familières avaient
été introduits dans notre littérature, qui ne connais&iit que l'épopée austère ou
la poésie religieuse, par radoption et l'imitation des contes orientaux. Contre
cette opinion, il est vrai, il ne faudrait pas alléguer, comme le fait M. B.
(p. ^o), 1 importance excessive donnée « au hasard de traductions occidentales
(d'ailleurs postérieures â la plupart des fabUaux) du Livre de Kalilii ei Dimfui
ou du Ronmti des Sept Sii^es n, car j'ai toujours admis que ces traductions (sur*
tout la première) avaient peu d Importance en la matière, et que la transmis-
sion des contes orientaux avait été surtout orale, et, venant en grande partie
par Byzance, remontait â une époque très ancienne. Mais le raisonnement de
M. Bédier, en ce qui touche U nature même du poème qu'il étudie, est autre-
ment fin et serré. Ce poème, comme l'auteur nous le dit lui-même , n*esi
nullement le débtit d'un genre : c'est au contraire une branche* et probable-
ment la plus jeune, de toute une « geste », la geste de Richeui , qui était
célèbre dès le milieu du xii<^ siècle , comme le type de la fille et surtout de
l'entremetteuse (son nom était devenu en ce sens un nom commun), et les
aventures de son fils Samson» le type defhomme qui exploite les femmes
Etudes romanes dédiées à Gaston Paris 137
comme elle csi celui de la fcramc qui exploite les hommes» ont été inventées
pour (aire pendant aux siennes et pour nous pri^sentcr la lutte entre la mère
et le filSj dont IV'tat fragmentaire du poème nous a malhcLireusement dérobe
Tissue. (U est bien caractéristique, disons-le en passant , de voir les types de
Naha et de Bel-Ami inaugurer pour ainsi dire la littérature narrative
/ran<;*iÎ5C.) Or, dans la Richcut de 1159, et sans doute dans les poèmes anté-
rieurs qui étaient consacrés à ce personnage^ îl n'y a pas, comme le remarque
M» Bcdier, de thème de conte proprement dit : les aventures dt^coulent des
caractères et n*oftrent pas un tout harmonique et logique propre A se trans-
mettre de bouche en bouche. Donc , nos trouveurs n'ont pas eu besoin des
contes traditionnels (quelle qu*en soit Toriginc) pour peindre avec une obser-
vation exacte et malicieuse les mœurs de leurs contemporains. A cela on peut
répondre que rien ne prouve que le genre des vrais fableaux n'est pas beau-
coup plus ancien que les monuments qui nous en sont parvenus, et que les
jiutcurs de la geste de Richeut n'ont pas eu pour modèles des contes circulant
bien avant eux; l'argument tiré de la forme par M, B, n*est pas bien con-
%'aincani. Quoi qu'il en soit, il me sera permis dédire que ce morceau, dans le
/ccueil que j'analyse^ est un de ceux qui m'^ont fait le plus de plaisir, puisque
rien ne saurait être plus agréable a quelqu'un qui essaye de former des débu-
tants à b fois à la méthode et i Tindépcndance que de les voir devenus vite
I assez maîtres de Tune et assez épris de Tautrc pour discuter ce qu'on leur
enseigne au lieu de l'accepter docilement. M, Bédier prépare un grand
ouvrage sur les fableaux (qu*il persiste, par des motifs que je ne comprends
pas bien, A appeler /aHwwx), et il y combattra p^r à^s arguments nombreux
tout le sj-sièmc tf orientaliste «; j'aurai plaisir alors à raisonner avec lui et à
me rendre, s'il y a lieu. — Il a joint \ son étude une liste de corrections
excellentes au texte de RUheta , les unes rectifiant les mauvaises lectures de
Méoo (MM. de Montaiglon et Raynaud n'ont pas admis RiLi}cut dans leur
recueil), les autres reposant sur des conjectures. J*a jouterai ici quelques cor-
rections apparieruni â la seconde catégorie. V. 6 mainks. — 45-6 Car il pi
pris O /i, d, et o. — 49 rub(i maniis (un point après ce vers et pas de ponc-
tuation après jo), — Suppr. les ( ) aux vv, 5 4- S S et I. dans Guiîlaume de
SimUr (ou quelque nom pareil) poux dtfitttt. — 65 Sfit. — 76 ks mors. — T04
ijHatrmr. — 145 il faut s, d. Mu*uiit^*loin\ et au \\ suivant 0 te clan', — 150
Et a rttraii so/ert r( !xi{, — 216 de pute, — 328 saiaissilir (garnie sous l'ais-
icllc). — 250 0 eUravasfigmr Viel {Vkl est un nom propre. Vit aie m, et
non Tadj, wWf; il faut corriger ainsi aux v. 434 (a VJ), \^o, 595, 652. — 23 î
mettre un point après donokr^ et 254 impr. : Al Herseîott C'est Richeut qui
r Appelle il meichine. — 245 ntanti, — 2>o-$î Des que je fis Vautrier ton buen
fjjt^ moi!) ctine? — 2^2 wj'i, — 262 suppr. Et, — 273 misûe\. — 282 Di
ifor fuoi, — 284 Oi/, amis. Et je l*otrût\ — 287 point après chitre, — 294
— 297 point. — 505 / laissèrent. — 314 seoir. — 524 Asisse l'a, —
514 ftft^, — ^$5 dou imtre. — Après 360 point et après 561 point d'excla-
mation, — 374 qtt'et, — 59^ Qu'été ne w. — 400/» iceste v, — 444 Porte H\
138 COMPTES RENDUS
au m, — 452 Vaubé, — 469 messe, — 473 Vum, — 475 point, 476 virg., 478?
— 492 £/. — 507 joilicc, — 512 Tant diît ek. ^ 524 £/ do quel que soU, —
527 Dont d. — 529 Ei f. ont rt. — 5Î4-Î Ricljfut iiu preste servant jure
Qu*iUo resanhle, — 551 tfar^. — 567 M. B. propose de lire Wùt a Vucde si
sacfmtity mais la rime doit être en ers; je ne vois pas îe mot à suppléer, per-
vers n'irait pas bien, — 571 Ta. — 589 Car mont est fien (suppr, et ioges), —
S90 iers. — Lacune après 610* — 669 point. — 673 nen. — 694 trestors, —
698 Tescriture ou mieux d*e$critnre, — 700 pas de ponctuation, —yoiagret. —
727 dattte. — Après 757 lacune, — 748 Qite.^ 754 m^. — 77$ A pris.-^'j'j'j
difî kchis (non des lecbors), — 779 khoit, — 784 suppr. ne. — 787 0 qu^U 1
vdgtic. — 790 suppr. tie, — 802 tfijanei. — 807 Etightie a mainte cooille, —
814 d. *- 850 adameQ), — 854 de ci c*ûu Toivre. — 894 Cleresvax, — 89B Fuit.
— 906 De Deu servir (?). — 917 oprobre. — 9Î3 /^- — 960 Sansonis. — 962
maistrie. — 967 Que ne U face dire tropt, — 974 soi nue» — lOOJ cercfxint a
ortie (très clair» voy. Godefroy). — 1009 cittains, — 102J-24 O je vers omes^
O il l'ers famés , car mont somes, — 1027 c4irroge. — 1030 jaeL — 1060 deux
points. — 1067 point- — 1071 de Puis, — wj^EticontréVa^ mist Ta raison^ —
1085 nient, — 1090 vîrg; après Sansons. — i loo chaicuns d'els, — 1 1 12 avrils
lox, — îiîi A rnont sordestre. — ii\(iCeUt, — Lacune après ni8. — 1125
toi frétille. — î 126-7-8 kue^ Une ^ sent (le second îcue est loca, mais je ne
comprends pas le premier ; p,-^ corr. 57/ ne s'i jcue}). — 1 1 3 > Bordeh, — 1 1 56
Vapele. — 1135 A po dt pose, — 1156 virg, ^près corpe. — 1159 Sanpres, —
1163 point, — Î170 Qui. — 1171 pas de virg. après aime. — 11 78 eL —
I179 point. — iiZoPar contenant, — 1204 Cil. — 1207 empotent, — Lacune
après 1209, — 1216 et Dex, — 1217 n'est or. — 1218 point, — 1219 Qut
dii^ Sanson} — 1226 : après dist, — 1232 n'airai. — 1235 sangbt. — 1256-9
faintié, esphtiéy acointié^ amistié. — 1253 : après Richaut, — 1250 tressauta —
1261 Pert, — 1278 **ir (est-ce Tangl, hive^ « ruche, n ou faut-il Wtt Plus
quil nefeist en une ivtï). — 1288 Vuis, — 1292 //. — 1293 : après Riclxiut et à
la fin, — 1296 Li itns respont ; laisie^^ Fhrie. — 1J05 Pur coi rne fxynissiei^
seignor} — 1306 : après uns, — i^yi Le dit Richaut^ desor ma foi, — 1513 Dit,
P. 33» G. Monod, Les Annales Laurissenses minores et le monastén di
hoTscih — C'est aux bbtoriens à apprécier cette élégante étude, où le carac-
tère du document en question , <|ui est en réalité la plus ancienne des chro-
niques sorties du mouvement de la renaissance caroUngienne, et l'importance
qu'il a eue pour F historiographie subséquente sont mis en lumière d'une
façon aussi juste que neuve, à ce qu*il me semble.
P. 45, J. Couraye du Parc, C^nts populaires de la Basse-Nonmndie* —
Cinq chansons, assez altérées dans leur forme, mais précieuses, notamment
une curieuse variante de la Chanson des oreillers {Romania^ X, 387). M. C. du
Parc accompagne les textes qu'il a recueillis de savantes notes comparatives.
P. SI, G. Raynaud, L La niesnie Hellequin; U, Le poème perdu du comU
Herfuquin \ IIL Quelques mots sur Arlequin. — Les trois parties dont se com-
Etudes rainants dédias à Gaston Paris
n?
I
I
: cette importante étude ont chacune leur intérêt; h seconde est celle qui
île plus de nouveauté. M. Raynaud a relevé un vers de la curieuse pîccc
du Siige de Neuville {Manuil^ I, § ïOi ^u le poète cite, dans son jargon arté-
sien-flamand, une chanson
Vin conte de Bouloigne, vjtn conte Hotllcquîn \
et H y a reconnu un Hernequîn, comte de Boulogne, qui serait mort en 88 î
en combattant Tinvasion normande que Louis îll allait écraser \x Saucourt» et
qui serait devenu le héros d'une chanson de geste ; ensuite il a supposé qu'une
version quelconque, anglaise peut-être, de cette chanson, avait été connue
par Walter Scott, qui a donné le résumé d'un récit romanesque relatif à un
conte Heilequin : d'après ce récit, Hellequin, rebelle i Tempercur, et l'ayaiit
longtemps bravé avec sa terrible mesnie, aurait été vaincu et tué dans un
grand combat , et « en punition de leurs fautes , le chef et les compagnons
fureot condamnés à errer jusqu'au jugement dernier, sans renoncer cependant
à leurs mœurs guerrières et à leurs luttes anciennes d. C'est de ce poème que
serait sorti le nom de mtsnie Hdlequin donné dès le xi^ siècle À la noire
chevauchée que, d*après un mythe bien plus ancien et commun i un grand
nombre de peuples, on croyait voir mener les vents furieux et les ouragans et
traverser les airs pendant la nuit; ainsi, peu à peu, cette chevauchée, d'abord
divine, étant conçue comme infernale, Heîlequin serait devenu synonyme de
dMê. U y a plus d*une difficulté à ce système qui, en tout cas, fait honneur
i la science et à l'ingéniosiid de son auteur. Même en regardant comme
assurée Texistence du récit dont Walter Scott donne la substance, mais dont il
'indique pas la source , on peut croire qu'au lieu d'être l'origine du nom de
nie Hellt^iin, il n'en est qu'une explication faite après coup. Que le héros
de ce récit, brigand et rebelle, objet de Texécration publique, soit identique
au comte de Boulogne Hemequin , tué en combattant les Normands et en
défendant son roi et sa foi, c'est ce qui parait assez douteux. Le vers qui a
servi de point de départ A ce rapprochement semble distinguer le conte
Hoiltequin du conU de Bùuloigne ^ et ce second nom peut fort bien se rap-
porter au roman des Bnfattces Godefroi^ où, dans une rédaction remaniée, le
comte Eustacc de Boulogne joue un rôle capital. Enfin Texistcnce même de
ce Hemequin. au ix^ siècle, est assez contestable : aucun document contem-
porain, si {e ne me trompe, ne le mentionne, et il ne figure que dans une
généalogie des comtes de Boulogne fabriquée au xiii« siècle (aucun texte ne
parle non plus de la prise de Boulogne par les Normands). Malgré tout, il
reste comme assuré, des recherches de M, Raynaud, Tcxistcncc d'une chan-
son de geste sur le conte Hùilkquirt, et comme vraisemblable le fait que celte
chanson expliquait comme le rapporte Walter Scott le nom de nusnit
Hetle^itin.^Lx première partie du mémoire réunit de très nombreuses men-
tions de la fftesni/ Herkquin {HdUquin, Arlequin^ Henmquln)^ depuis le xi«
jusqu'au xvï« s., et montre sommairement les transformations qu'en a subies
la c«>ncepdoo, — La troisième fait voir comment Hdlequin^ transporté en Italie
140
COMPTES RHÏJDLÎS
comme un nom de diable, y est devenu d'abord VAlkkino de Dante, puis,
bien probablement, VJrîeahtno bergamisque de la Commcâia ddV Aïk, et
VAikquin des wii* et xvnie siècles, dont le masque noir, originairement
surmonté d'un semblant de corne, accuse encore l'origine diabolique. Tout
cela e5i fort curieux ^ et raL'riterait d^ètre exposé par Fauteur avec plus de
développement^ car il reste encore plus d*un point obscur dans cette évolu-
lion qui a fjit da terrible meneur du uûthmJcs Hetr le souple cl gracieux
héros de Watteui et de Fîorian.
P. 69, M. Sepet, Ohervaîions sur k Jeu de la Feuillée tfAdam tU h Halle,
— M* Sepct iliit fmement ressortir le rôle que joue la folie dans Tœuvre
étrange et charmante d'Adam de la Halle, et il montre que le jeu dt k fmUic
n'est pas seulement, comme on Favait dit, un divertissement de tnaî, que
c*cst essentiellement une sotte, et que, comme les sotîes postérieures, elle a
son origine dans les fêtes des fous, d'aboru toutes cléricales, puis adoptées
par la jeunesse des grandes bourgeoisies, et qui avaient donné Tidée de
représenter tous les hommes comme io/i (on sait que soî^ en ancien français,
est 5ynon>*me â^ fol) et toutes leurs actions comme des folies. Cela explique
le décousu de la pièce et en explique aussi ou en excuse plusieurs détails^
qu'on a pris souvent trop à la lettre {par exemple ce qui concerne le père
et la femme du poète). On notera encore, dans cette remarquable élude, la
curieuse constatation de Temploi du mot poh piles, si commun au xvi» siécîe
et si énigmaiique, et la conjecture vraisemblable d'après laquelle les pob piles
étaient mis par une croyance populaire dans un rapport quelconque avec la
foîie.
P. 8j, A. Jeanroy, Une pièce artéùenm du A7//e sikte, — On connaît le
petit recueil de pièces tout artésiennes (14, dont 9 sont maintenant impri-
mées) que contient le ms. B. N. fr. 12615. M, Jeanroy songe à le publier en
entier, et on ne peut que souhaiter vivement qu*il le fasse, vu la valeur histo-
rique et lïtiéraire de ces pièces, qui forment une contribution capitale à ce
tableau de la vîc communale et littéraire d'Arras au 3ciii« siècle, qui attend
encore son peintre et qui présentera tant dlniéressantes et originales figures.
11 est d autant plus A désirer que M. Jeanroy exécute son projet qu'on voh ici
comment il s'y est préparé. La pièce qu'il publie (n^ 1557 de Raynaud) se
rapporte â ces querelles et ù ces troubles encore mal connus qui, vers 1270
(c'est la date que M, J. rend probable), amenèrent l'exil d'un grand nombre
des principaux bourgeois et mirent fin à la prospérité de la Wlle. Elle présente
beaucoup de difficultés, non seulement par les allusions dont elle fourmille,
mais par le style heurté et obscur, rempli de locutions embarrassantes,
qu^elle a en commun avec la plupart des pièces du même groupe. M, J, a
résolu un grand nombre de ces difficultés dans le commentaire détaillé dont
il a fait sui%Te le texte. Dans le passage cité p. 91, iHtttaim me semble dési-
gner la taille mise sur les habitants d'Arras plutôt que le nombre de ceux
qu'on accusait de l'avoir frauduleusement répartie, — Fent^ dans son emploi
^
Etudes romanes dédiées à Gaston Paris 141
figuré, me paraît signincr « vanité, mensonge » plutôt que « tromperie »
fourberie »; c'est originairement un jeu de mots sur venter et vanter, de
même que toutes les plaisanteries sur blanc ^ Blangi, etc., remontent à une
équivoque avec blamiir, « lîatter, » Mange, « flatterie, mensonge, » — Au
dernier vers de la str. HT, où il manque une syllabe, je corrigerais plutôt : En
est sire Audefroh et trop camm , car dans tous les décasyllabes qui terminent
les autres strophes la cilsure porte sur la 6* syllabe. ^ Au v. 55, il faut
imprimer pouçon et peut-être ponçon ; le sens est : « 11 doit (rofficier infidèle)
avoir îc visage marqué (la façon ensignie) d'un poinçon » (ou peut-être, en
lanl pûuçm comme — poçon , d'un petit pot , ce qui pouvait Ctre une
de flétrissure imposée aux fraudeurs). — La liaison des vers 8t-8j
m'échagm^tee h M. Jeanroy, mais je n'y verrais pas un proverbe à cause
du V* â^Hresi auso et non audio; d'ailleurs ce vers doit plutôt se rap-
porter k ce qui précède qu*i ce qui suit ; ^mgnier doit être b forme dialectale
bien connue de manducarc.
P. 97^ E, Langlois, Quelques dis^niaticms inédites dr Claude Faueliet. — Ce
sont cinq petits chapitres que Fauchet avait l'intention d'ajouter au livre Vil
de son Recueil de Vofi/^ine de la langue et poésie panfoise, qii*il avait publié en
1581, M. Langloîs a bien fait de les tirer du manuscrit du Vatican où il les a
IrouvC^s. « Ce ne sont pas lanl « dît-il , des dissertations d'un savant que des
causeries d^un vieillard aimable, instruit, pas du tout pédant, qui a beaucoup
lu Cl beaucoup voyagé. » Il les a écrites en bonne partie de mémoire, remet-
tajtt i plus tard le soin de vérifier les détails et de boucher les blancs qu'il
laissait* Il y traite quelques-uns des sujets habituds de ses recherches, mais
légèrement et sans méthode, semant çà t*i l\ des souvenirs personnels. On lit
ces quelques pages avec plaisir et sympathie. — Dans le v, cité p- 100, il
faut certainement lire Jmoun pour A moins^ — Je ne comprends pas pourquoi
l'éditeur met un (?) après Bslonné en imprimant la locution bien cotmue
Eitonné cmnme un fondetir de cloches* — P. m, l. 21, n'y aurait-il pas d.ms le
ms- bapam au lieu Sahataml — Ib. L 25, ou =^ en le n'est guère admissible
chez Fauchet; il faut sans doute on. — P. 42, 1. 21, il y a une parenthèse
ouverte qui ne se clAt pas; il est vrai que le bon Fauchet, s^abandonnant i
K>n bavardage, a laissé en l*air la phrase commencée. — Ib. L 28, Vont ^
L Trusi.
P. 113, A. Piaget, Cîifomhgie des Épi très sur le Roman de la Rose, — La
question dans laquelle M. Pîaget apporte une parfaite clarté avait été
obscurcie par Terreur d*un scribe qui avait lu et copié vii au lieu de vu , et
avait ainsi fait attribuer d 1407 une lettre écrite en 1401. Uauteur d'une
récente dissertation sur le célèbre « débat du Roman de la Rose »», M. Beck,
avait bien rétabli cette date, mais était tombé dans les plus singulières
erreurs. M. Piagct connaît à fond tous les détails de Fhistoire littéraire du
xv« siècle, et il n'a pas eu de peine â rétablir partout la vérité. L'ensemble
des pièces de la comroverSL* soutenue eu 1 |oi et î [02 entre Jean Je Af nîrcuil,
142 COMPTES RENDUS
Christme de Pisan , Gonticr Col . Pierre Col et Gerson mériterait d'être
réuni ; c'est le premier essai de critique littéraire et morale qui se soit pro-
duit en France. M. Piaget nous le donnera peut-être quelque jour, avec le
commenuire qu'il est plus que personne en état d'en faire,
P, Uï, A. Thomas, Vwkn XAîïscam et la h'gfude de saint P^'idian, — A
Martres-Tolosanes, petite ville de la Haute-Garonne, on célèbre tous les ans
une curieuse fête en l'honneur de saint Vidian, patron du lieu : on y voit les
Mores et les chrétiens se livrer un combat acharné, après que le curé a lavé
l'iraage du saint dans la « fontaine Saint Vidian », en commémoration de ce
que Vidian y liiva lui-même ses blessures avant d*y être surpris et égorgé par
les Sarrasins. M. Thomas , ayant naturellement reconnu dans ce Vidian le
Vivien de notre épopée, qui meurt de ses blessures auprès d*une fontaine
(mais dans les Alsicans, fort loin de Martres), 5*est inquiété de savoir sur
quelle base reposait cette tradition. Il a trouvé d'abord une Fie de saint
Vidian composée en 1840 par l'abbé Jammes, curé de Martres, puis une pla-
quette publiée en 1769 (L/j induîgence^y îa vie et les mincies de saint Vidian) et
enEn uo pfffuium sancti Vidiani dans le Proprium sanctorum du diocèse de
Rîeux imprimé en 1764. Ces trois textes sont foncièrement identiques (sauf
que le latin abrège beaucoup); celui de 1840 ressemble de près à celui de
1769, et tous trois ont une source commune. Quelle était cette source?
M. Th. la juge antérieure de peu à 1764, parce qu'avant cette date on ne
trouve nulle part aucune mention du récit en question. Cela me paraît tou-
tefois peu probable. L'abbé Jammcs dit : w L'histoire du martyre de saint
Vidian, telle, quant aux faits, que nous venons de la rapporter, fut trouvée, par
monseigneur Jcm-Louis de Bcrthîer, écrite sur trois coffres dorés qui renfer-
maient les reliques, et qui étaient dans le tombeau de Toratoire du saint
martyr* Elle fut imprimée, avec approbation de monseigneur l'évèque, qui
voulut, pour lui donner plus d'autorité, la munir de son seing et du sceau de
SCS armes. L'histoire de la vie et du martyre de saint Vidian, imprimée par
ordre de monseigneur Tévéque de Ricux, Jean-Louis de Berthier, le 2j sep-
tembre 1634, doit faire foi aux yeux de ceux qui croient encore aux tradi-
tions historiques, a Diaprés M. Thomas, « l'histoire imprimée par ordre de
J.-L, de Berthier n'a jamais existé que dans Timagination du curé de
Martres, *> En ce cas, le mot « imagination » serait peu exact: il s'agirait,
étant donnés les détails si précis que rapporte Tabbé Jammcs, d'un bel et boD
mensonge, et fai peine à ratiribucr â cet ecclésiastique dont la bonne foi
paraît aussi évidente que la crédulité. M, Th, s'appuie sur le procès-verbal de
la viiiie que fit en effet Tévcque de Rieux 1^ T église de Martres le 24 avrii
i6j4, et qu'il a retrouvé aux archives de Toulouse. Il y est parlé de trois
coffres à reliques, qui étaient en fort mauvais état, et « paroisseot avoir esté
faitz de menuizeric , paints et dorei , avec remarque qu'il y avoit des escrits
que le temps avoit consumé ». L*évêque ordonna qu'on ferait trois nouveaux
coffres^ « et lorsque lesdits coâres seront faits, nous en sera donné advis.
I
I
Etudes rùffianes dédiées à Gaston Paris 143
mesmes des caractères qui estoient autour desdlts coiTres qui se pourront
lire. » Je ne vois pas comment cela empêche que cinq mois plus tard il ait
paru sous les auspices de Tévèquc une vie de saint Vidian se donnant comme
extraite des inscriptions déchififrces sur les coffres. Le fait que pendant
longtemps cette vie n*est mentionnée nulle part, ci qu'elle ne se retrouve pas
aujourd'hui, ne prouve pas qu*elle n\iit pas existé. En revanche, le style
gauche et barbare du document de 1769 sent bien plus la première moitié
du XVll* siècle que la seconde du xviii*, et je nliésite pas à mettre en 1634,
surU foi de Tabbc Jammcs, la composition de la légende qui a servi de source
à ce document et au Proprium sanctorum de 1 764.
Cette légende est visiblement empruntée aux Enfanc^i Vivien , dont elle
reproduit essentiellement le contenu (pour AUschans^ voir plus loin),
M. Thonus, qui croit la légende composée en 1764 ou environ, se demande
qui pouvait alors, dans le diocèse de Rieux, connaître et exploiter ainsi une
clunson de geste, et s'en remet à Tavenir du soin de découvrir « ce savant
omme ». Si nous faisons remonter la légende à 1634, une explication se
Iptéscotc naturellement» On sait (voy. Rom., II, 535) que Catel avait vu à
Salfit'Guilhcm du Désert un manuscrit cyclique de la geste de Guillaume,
manuscrit qui est aujourd'hui le n» 774 du fonds français de ïa Bibl. Natio-
nale. Dans son Histoire des comtes de Tobse , publiée en 1623, il dit qu'il a
% rencontré a ce livre « dans les Archifs du monastère Sain et Guillaume le
désert * ; mais dans les Mémoires de V histoire du Languedoc^ publiés en t6^j
par ses héritiers (il était mort au mois d'octobre 1626), il dit de ce même
manuscrit î « /*ay un anden Roman , escrit à la main, etc, n II semble donc
bien que le savant conseiller au parlement de Toulouse avaît^ d*une manière
quelconque, acquis ce précieux volume *. îl dut rester entre les mains de sa
É;imille jusqu'au moment où il fut acheté par quclqu^un des émissaires de
G>lbcrt, de ta bibliothèque duquel il a , comme on sait , passé d^ns celle du
rot. Cest sans doute â Toulouse que le consulta l'auteur de la légende de 16^4,
Le ros. contient en effet, quoique Catcl n'en dise rien (voy. Rom.^ L c), les
Enfance Vitnen,Tïms incomplètes du commencement, ce qui expliquerait fort
bien, si c'est d'après ce ms- quePauteurde la légende a travaillé, qu'il s'exprime
d'une manière si vague sur la façon dont le père de Vivien avait été fait pri-
sonnier par les Sarrasins. La rédaction des Enfances à laquelle appartient le
ms. de Sainl-Guiihem raconte que ce fut à Roncevaux ; il est probable que
le rédacteur de 1654 n'aurait pas omis cette circonstance s'il l'avait trouvée
en tète du récit ; mais il se contente de dire : « Le Père étoit duc de la mai-
son de France. Comme il étoit un grand guerrier , iï batailla constamment à
i, « Ptr tout k ms. on lit des remarques écrites par une maiD du xvi' ou du
XTtr* ifècle qui pourrait bien être cdle de Catet ; en outre un certain nombre des
• cités par Citd • sont dans le ms, m;ïrqués d'un trait de mcmc encre que les
(H. Sochicr, IB^fi.^ U, jjé). Voy. fol. ta, i f , 3} a, 2$ a, 27 r, 27 a
144 COMPTES REKDUS
l'cnconire des Sarrasins pour h défense de la Foi; si qu'après avoir triomphé
maiûiesfoisde leurs armes, il tut un jour arrêté et prisonnier de guerre, a Cesi
que le ms. de Catel ne commence qu*au v 44, où nous voyons le père de
Vivien déjà prisonnier à Lniserne, et les Sarrasins lui demandant de leur
livrer son flls \ Le ms. ayant quitté Toulouse encore au xvii< siècle pour
être envoyé A Paris, cette hypothèse, si elfe est fondée, fortifie évidemment
beaucoup Passertion de l'abbé Jammes sur la composition, en 1654, de la vie
de saint Vidian.
Qpoi qu'il en soît, les inscriptions des coffres étaient sans doute illisibles »
et un ingénieux écrivain a composé alors, en bonne partie â Taide des Enfanca
VivUn^ la biographie qu'il prétendit en avoir extraite. Mais est-ce lui qui a eu
le premier Tidéc de reconnaître Vivien Éîls de Garin d'Aaseùne (dont il a
fait Alençon ') dans le Vidian qui passait jusque-là pour avoir été martjTisé
par les Ariens au v* siècle ? J'en doute fort, et jecrois qu'il s'appuyaît sur une
tradition plus ancienne, mais restée locale et populaire. Le nom de VûUanus
et celui de Vivianus se montrent souvent confondus; la vie latine de saint
Honorât appelle Vi*iatu(s (ce qui est la forme vulgaire de Vhlianus) le héros
des guerres sarrasines?, et d'autre part M. Thomas cite une charte de \i%\
où l'église de Martres est appelée ecdma sancti Vimani. Ce nom même de
Martfrs, qui représente sans doute Mai ivres et dut être donné i l'ancienne
Calagarris à cause des tombeaux de Vidian et de ses compagnons martyrisés
avec lui, favorisait le travail de Timagination. D'ailleurs, de tous les héros de
répopée narbonnaise, Vezian ou Vivien est le plus incontestablement méridio-
nal i les jongleurs fran<;ais en ont (tût un neveu de Guillaume ;i une époque
récente, et nos poèmes ne sont pas d'accord sur la façon dont il Tétait. Ce
que Raimon Féraut raconte de lui ne se trouve pas dans les chansons fran-
I» Il est vmi qu'un peu plus loin le messager qui vient trouver k mère de Vivien.
Huisuce (appelée Stacc dans U VU de 1769), rappelle brièvement le désastre de Ron-
cevaux (ms. 774, (^53 f); inais le rédacteur de la légende de 16^4 avait lu très super*
6dclletncot sa source et accompli sa tache fort négligemment.
a. La Vie de 1769 pone la leçon absurde r «r Saint Vidian tut natif de la très noble
Maison de France, iiomméc maintenani Alaiivon, n La Vit de 1654 portait *ans Joute
d'Ameune pour de France-, on s'explique, à h rigueur, fidentification avec Alam^n,
3. D'après cette légende (et son traducteur Raimon Féraut), Veiian est un noble
guerrier de Charlemagne, qui est tué en trahison par le prince sarrasin de la Trapc ïors
du sjcgc d*Arks par Charlemagnc (voy. Rom., VIII, 501V). Saint Honorât, qui est son
ami, lui élève un tombeau dans les AUscans; c'est près de ce tombeau {h im r«xi4iH) (|tie
se serait livrée, bien plus tard, après la mort de Clurîcniagne» une bataille où les cliri-
ticus aurAÎent été vaincus (voy. la Vida de um Pot cari, de R. Féraut, éd. Sardoa,
p. 193). Celte indication se trouvait déji dans la source latine de Féraut, comme t'atteste
la version catiiknc de cette source (B. N. esp, 154, f, 59 a : forrn desbinatah e m&rtt
en aqueil toc on Vesta era tsîaî fmrh). Cette source et Fcratit mentionneni d'ailleurs
également un duc Vcziau parmi les combatunts de cette jouriiéc désastreuse. Il y a dans
tout cela beaucoup de confusion , mai'i il est clair que le Vezian du Midi et le Vivien
du Nord ne sont qu'un yeul et nu- me personnage.
I
I
Etudes rontatm dédiées à Gaston Paris 145
çaises» ci paraît reposer sur de vagues rcminîscences de récits traditionnels
(groupés sans doute autour d'un tombeau des Aliscans),
La fontaine saint Fic^w de Martres pourrait bien conserver une tradition
liort ancienne», et avoir fourni à des poèmes méridionaux, puis à notre épo-
pée le trait de la fontaine auprès de laquelle meurt Vivien ; le fait que la FU
di saint Vidian n'a que ce trait en commun avec Aîesdmm * et raconte d'ail-
leurs la mort du héros tout autrement semble indiquer que l'auteur suit ici un
rédt tout à fait indépendant. Ce sont là des questions très intéressantes que
soulève le mémoire de M, Thomas; il voudra sans doute pousser plus
loin ses recherches sur un point qui peut se trouver avoir plus d*importance
qu'il ne semble pour Thisioire encore si obscure de la formation de l'épopée
narbonnaise.
P. 157, D* Grand, Proclatmtiott d'un Uraut en dialecte montpeîUirain (1336),
— Ce petit texte^ outre son intérêt philologique, n'est pas sans jeter «quelque
jour, comme le remarque Téditeur, sur Fétat interne de Tuniversité de Mont-
pellier au xivc siècle.
P, 141, J. Flach, Lt compagnonnage dans les cïmnsons de gtste. — Cette étude
très neuve et très intéressante montre quelle mine féconde et encore à peine
exploitée nos chansons de geste offrent â l'historien des institutions et des
mœurs* Interprétées par un juriste qui a^ comme M. Flach, le sens pénétrant
de rhisioire, une foule d'expressions qui pissaient inaperçues ou semblaient
banales prennent un sens précis et vivant , tel est le mot de maisnie dans les
nombreux passages cités par l'auteur, qui y montre avec évidence la conti-
nuation de l'ancienne bande germanique groupée autour de son chef L'étude
sur le compagnonnage proprement dit ou, comme on a dit plus tard, la fra-
ternité d'armes, est aussi très précieuse. Le danger dans ces sortes de
recherches est d'en exagérer le bon côté, de prêter à des manières de dire qui
sont en cfïet banales et générales une précision et une portée qu'elles n'ont
pas; il faut pour l'éviter joindre beaucoup de tact ii beaucoup de savoir,
oocnme le fait l'auteur des Origines de rancitttne France, Nul mieux que lui ne
serait en mesure de nous donner un livre qui serait une belle contribution à
tiocrc histoire nationale, un Cm pus juris cpicum ï.
I. On peot en supposer auunt de l'îadiçation topograph^ue que doatieiit les docu*
meots de 1764 et de 1769 (mais non celui de 1840) : le combat se livre, d'après le pre-
mier, in Agrii fui dicuntur Campestra^ d'iprès le secoad « jusque au lieu nommé vul-
gairement le Champêtre ». M. Th. se demande si ce nom n'aurait pas 1 une ccrtamc
parenté avec Aïiscans •> Mais on peut aussi Ronger à cette singulière dénomination de
l'Jrflvtnt OU t'àUf de CArchant (ou Larcbant}), qui n'a jamais été bien expliquée et qui
hgviTc uziiquemeot dans le Caitmmt Vivien et Altuham, scmblaoi d'ailleurs en désaccord
atec le reste de la topographie.
a. Elle n'emprunte rien non plus au Cotenant ; ce n'est que pour les Enfances du
hénn q a Vile a rccoars j un poème français.
f. L'étude de M, Flach sur le compagnonmige vient de rcparaitrCt agrandie et révisée,
dans te tome U de son grand ouvrage^ que je ne saurais trop recommander à ceux qui
ttoknt comprendre la société du moyen âge î Lfi Origines de Vamienne France*
148 COMPTES RENDUS
M, Joreta public tout récemment : la Rose, il est diflîcile de Tanalyser; tous^
nos lecteurs te connaissent sans doute sous l'une ou Tautre de ses formes.
P. 303. L. Havei, L'i îalin caduc. — Ce morceau, assurément le plus
remarquable du recueil , comprend esseniielleraent l'étude de trois points :
comment et quand Tj finale est-elle ' arrivée à s^amuïr dans la prononciation
des Romains? Comment se constate cet amuïssement et jusqu'où allait-il?
Comment cl quand ïs a-t-elle été restaurée de façon à se maîntenir jusqu'à
nos jours en Espagne et en France? — Sur Li première question, M. Havet
montre que la chute de Vs finale a probablement commencé dans les cas où
elle finissait un mot terminant une phrase , car elle n'a dû , d'après la phoné-
tique générale du latin, tomber d'eîle-mOmeni devant une consonne ni de^ant
une voyelle (mais B elle aurait dû régulièrement devenir r) ; la négligence
de la prononciation d*x finsile k la fin des phrases peut remonter liant, mais
appartient, en tout cas , à la période proprement latine, — L'étude de b
représentation graphique (très peu riche et très peu sûre) et de la valeur pro-
sodique de Ts finale dans la période qui va des débuts de la littérature i
Cicéron occupe la plus grande partie du mémoire : on y admirera la science
métrique, la perspicacité et l'invention critique que peu des travaux de l'au-
teur présentent an même degré; il en résulte que pendant cette période on
prononçait toujours Vs finale devant une voyelle, on la prononçait faculta*
tivement devant une consonne, et la chute de Vi finale n'allongeait pas la.|
voyelle précédente; on ne peut savoir si on la prononçait à la fin des!
phrases (ni, à vrai dire, si on la prononçait devant une consonne aprèsl
une longue). — A partir de la traduction des Phaenomena par Cicéron
(vers 85) 1*5, prononcée commence à prédominer; cette prédominance s'ac-
centue dans Lucrèce, et dans Catulle il n'y a probablement plus un seul
exemple de la non prononciation de Tj, dont Cicéron dit en 46 ou 45
{Orator 161) : Quoti jam subrusiicum vitieUtr^ oîim autttn poîitius. Ainsi, entre 1
100 et 50 environ, 1'^ finale est restaurée et dans la prononciation des gens *
cultivés et dans la versification. C'est ici que M. Havet émetU conjecture A la
fois la plus ingénieuse et la plus hardie : les finales en îs^ ùs auraient été d'abord
bannies du qualricme pied de riiexamètre, à cause d'une particularité a micro-
scopique fl de la technique de Thexaraètre grec, imitée par les poètes latins,
puis de tous les vers; et, « du moment que les poètes entendent qu'on pro-
nonce Vs partout, les orateurs la prononceront, les gens du bel air aflcctcroot:'^
de la prononcer» et le vulgaire finira par suivre. » Au risque de me faire ranger
parmi les adeptes de ces « écoles de phonétistes qui aiment à envisager le
langage sous un aspect scolasfique et abstrait » , j'avoue que j'ai bien de la
peine à accepter une pareille hypothèse. Je sais bien que des effets très
I. J<: ùis, ii'aprcs uoc tradition dont les origines remontent ati Utin même, les sp*
tantes ou continues (/, l>, /, m, #1, r, s) du féminin^ leur nom {effe^ etc.) ayant une
forme féminine, et cette distinction exprimant leur nature en regard des explostv»
(^t ^* à^ i* pt 0' ^^^ ^^ lettres nouvelles (/, v) ont détruit cet arrangetncni»
Etudes romanes dédias à Gaston Paris 145
étendus procèdent souvent d^uue bien petite cause, maïs quoi? ces raffioe-
mcnts des doctes imitateurs des Grecs auraient transformé la prononciation
de tout un peuple» si vite que le latin porté en Gaule par César aurait déjùété
l complètement dépouillé de ces ibnnes si répandues peu d'années avant» et qui
[étaiem si bien dans la logique Ju développement de la langue? Et la réaction
cnée par Técolc des gens qui ne voulaient pas de coupe trochaïque au 4*
' pied de rhexaniètre (car tout est là) aurait été si puissante qu'elle aurait
rétabli IV égajpment en Espagne et en Sardaigne ? Je ne le crois pas, et en
énéral je ne crois guère k Tinfluence de causes aussi étroitement littéraires
ur des faits généraux de prononciation ( il y aurait bien à dire sur le rappro-
eni que fait M. Havet avec nos « liaisons «) , je ne dis pas sur le sort de
; isolés. Joignez i cela que Vs finale paraît ne pas être réintégrée précisé-
ment en Italie, où l'influence des urhani aurait dû se faire surtout sentir.
Pour moi, j*expliquerais tout autrement cet ensemble de phénomènes. Vs finale
se prononçait toujours devant une voyelle ; devant une consonne elle tendait
ae pas se prononcer (rhésitatiou avait sans doute commencé à la pause),
"^«t il fut de mode à Rome {ohm poUtius) du me au i*^ siècle de préférer
dans ce cas la prononciation sans i. Entre les deux prononciations d'un
même mot il devait se faire une assimilation : elle s'est faîte diversement»
d^une part en Italie (et de là dans la Romania orientale), où on a laissé
tomber W partout ' ; d'autre part, dans la Romania occidentale (Sardaîgne,
Espagne, Provence, Gaule du nord), où on Ta rétablie partout, et où
elle est encore aussi vivante (au moins partiellement) qu'avant l'époque où
la prononciation incertaine des syllabes atones finales terminées en s avant
tuuf pause avait menacé Vs de subir le sort de Vm. Toutefois, il y a encore bien
des obscurités dans cette question , et elle demande de nouvelles recherches,
pour lesquelles le mémoire de M. Havet offre une base des plus solides» et,
surtout dans sa seconde partie, un modèle qu'il ne sera pas facile d'atteindre.
P. 55 r, P. Bonnardot, trois textes en patois de Metz : Charte des Chaiviers;
ta Grossi Enwûrayt\ Vnt fiauve recrtative (xv*-xvîie siècles). — Ce travail,
de beaucoup le plus long du recueil, esc d'un grand intérêt et d*un grand
inén'te, La charte des cimxners (ou chamoiseurs) , probablement de 141 2
(p. 555), appartient encore, malgré son caractère très vulgaire, à îa langue
du tno)^n âge (/l'sg. sj., /cw sg, r.; irapf. œnreie, avmive ; tusi , deux fois
répété, me paraît être tmt al, et non une mauvaise manière d'écrire iuts =
tmf), Ijifiam^e recreatnr, imprimée en 1615 à la suite de la Grosse Enwaraye^
une curieuse facétie dans le st)*Ie et dans la forme des chansons de geste :
forme une laisse monorime de 54 vers en a féminin , où des assonances
(«pr, adiy ape) se mêlent à la rime dominante en aie\ c'est probablement la
I. Excepté, comme on SAk, dans les monosyllabes (tvi, nm, crai, dai ^ etc.), où Vî
me&tc une ptti» longue perstsunce de IV. C'est ex«ctemeot ce qui est xrrivé pour l'm,
oofiMrvée dans tuai, rem, que m, eu m bogtcmps après qu'elle était tombée i
r^ii^nf iînale.
IJO COMPTES RENDUS
demîère composition dans cette forme qui ait été faite. La pièce est obscure
par ses allusions , maïs assez piquante par son mélange des tons épique et
burksque; elle rappelle assez le Si^ge de Ntuviîk du kiv« siècle {Manuel^ 1,
S 5t). Le V. 2 est Diki Jesiraltm dayet MonUîimak\ M. B. reconnaît là Mon-
télimart, il y soupçonne une réminiscence de Tévéque Adéraar de Monieil ou
de Montélimart (i 327-1 361); mais je crois qu'il n'y a dans Montdwiatt
qu'one altération plaisante de MontoUvate ou Mont Olwet.^V. 30 0ns ati pour
u On en ». M, B. dît avec raison, je crois, dans sa note, qu*o{> a là l*s carac-
téristique du sujet (ons analogique pour Tancien om ; cf* Rom, XII, 544) ;
mais dans VÉludtdu texte (p, 552), il y voit, moins justement, une j eupho-
nique. — V. 33 : Jaytt chantt k jau^ « Coquelet chante le coq, >» formule Hnalei
ét\^fiave\ « manière plaisante, dit M. B., d*indiquer que l'auteur sait, à Foc-
casion eoHer ses pipeaux et s'élever au genre noble de Tépopéc. 1» N'y â*t-tl
pas là plutôt la formule qui termine tant de contes men^eilleux : a Et alors
le coq chanu, « c'est-à-dire u Je m'éveillai », c'est-à-dire « Tout ce que je
viens de conter n'était qu*un rêve » ?
Le morceau de résistance du mémoire est la Gro%Sf Enwaraye^ avec VÊtudi
du textt qui la précède^ et le copieux commenuire qui la suit* On connaissait
Foeuvrc par la médiocre réimpression qu'en avait donnée M* G, Brunct,
et jusqu'ici on n*y comprenait à peu près rien. M. Bonnardot s'est mis à
l'œuvre, et grlce à sa profonde connaissance des parlers lorrains anciens et
modernes, et A l'aide de « patoisants *> très versés dans les idiomes locaux
(notamment de M. Aoricoste de Lazarche), il est arrivé â dissiper en bonne
partie (mais non en totalité) les obscurités innombrables de ce petit texte, qu*il^
a reproduit avec le plus grand soin diaprés rédition, d'ailleurs pleine de
fautes et de non-sens, de 1615, C'est un monologue en 185 vers octo^Ua
biques à rimes plates (sauf en tête un triolet), contenant la déclaration d*araour,1
fort réaliste, d'un vtrtagoy de \411age à une hacdh quMl qualifie de grosse
muHirayf. La pièce a-t-eîle été destinée à être débitée sur un théâtre? Cela ne
me surprendrait pas, et je supposerais que ta 611e, personnage muet, était eti
scène devant le galant, lui tournant le dos, ce qui explique les vers 172 ss. :
« Je dis : Retourne-toi ; je te promets sûrement fie mariage]. Il ne t'en chaut >
je croîs : tu te tairais bien quinze jours sans dire même un seul mot, » Donnée
par l'imprimeur de 1615 comme» un ancien fragment du vray, pur, na^^ et
naturel langage messin », la Grosie Envmraye ne mérite pas réellement cette
qualification. M. Bonnardot a reconnu que « si la scène se passe dans le
5(ittfrtmi(CourccIles-sur-Nied^ Pontois, Mcchy ou Mercy), régions situées au
sud-est de Metz, la langue est celle du Haut- Pays (Amanvillers, Avril) et des
villages au nord-ouest de Metz en tirant sur Briey »♦ Je comprends moins la
conclusion qu'il tire de cette constatation : r J'en conclus que Timpression a
dû suivre de fort près la composition de la pièce , et que Tassertion de Tim-
primeur attestant l'antiquité de ce fragment de langage messin n'est qu'une
rubrique de métier. » On n'en verrait pas bien ruiiliié, et je crois que l'im-
primeur a été de bonne foi ; la pièce , probablement en réalité daum déjà
Etudes romams dédias à Gaston Paris 1 5 1
d'un certain nom^rc (î*années, Ta frapp<i comme ne présentant pas le langage
usité à Metz de son temps; il a juge chronologique une difftîrence qui était
surtout dialectale. Le ton et le genre de ce monologue me paraissent Fassi-
gner au dernier quart du xvi* siècle. La copie qu'a eue Fimprimeur Abraham
Fabert (qui a mis son édition, par des raisons fort bien esphqute par M. B.,
iciis le nom de son jeune fils Abraham , le futur maréchal de France) était
fort défectueuse; il paraît Favoir imprimée telle quelle» en y ajoutant, sans
dauie, des fautes nouveHes (une réimpression faite en t6j4 les accroît
LCncorc): aussi ïe texte» obscur par lui-même, est-il devenu inintelligible en
'^mâint endroit, M. Bonnardot a déployé» pour la solution de toutes ces
énigmes, sou\^nt fort scabreuses, autant d'ingéniosité que d'érudition, et il
â osé en donner une traduction , non sans lacunes ; pour espérer trouver le
[mot de celles qui lui ont échappé, ainsi qu'à ses savants collaborateurs, il fau*
Yétûl avoir cette connaissance des usages locaux et ce maniement familier du
' patois grâce auxquels ils ont réussi ï en résoudre un si grand nombre. Aussi
me bomcrai-jc à deux ou trois notes qui n'apportent aucun éclaircissement
nouveau, mais portent sur les explications données aux faitr. Et d'abord que
%\^n\fkCgroiSi tnxtMtayt'^ M. B. rapporte les nombreuses interprétations pro-
posées (dont la plus singulière est assurément celle de M. Godefroy), et se
kdéadc pour celle que lui a communiquée M, E. Rolland ; « Du premier coupj
I les paysans [de Rcmilly] auxquels il a posé la question » Font résolue en ces
fermes : etm'araye est une forme altérée pour embrawayr, ambroûttyej qui se dit
d'une personne forte en chair, d'une fille joufflue. » Emhrmmye serait le dérivé
de hfûUK^n^ Fancicn français hraon (mais il faudrait amhrawomye). On est asse^
surpris de voir des paysans dire en propres termes qu'un mot est la « forme
altérée » d'un autre» et on aimerait mieux qu'ils eussent déclaré qu'ils
employaient réellement enu-arayc dans ce sens ; en outre F « altération »
paraît fort peu vraisemblable. Je suis bien plus porté à admettre Fautre cxpli-
( cation donnée p. 585, et qui rattache enwarayf à warèi u taureau »>, Une
ffraj^esi une vache en chaleur, qui demande le taureau, « d'où, par cxtcn-
, Elle nubile, qui recherche le màle. » Ce doit être U le vrai sens. — La
Mbrme Ma^tlaim pour MaïUUitu (y. 76) surprend M. B. : elle se retrouve sou-
vent en anc. fi', (d'où le jeu de mots Marie maise ahine pour Marie Maieîaine
. dans la Pûû ans Engîois; Rom, XIV, 280); je l'explique par le provençal ; le
i culte de Marie Madeleine florissait, comme on sait, en Provence, et les pèle-
ritis CD rapportaient cette prononciation* — Les vers 17 ss. sont ainsi conçus
0c donne les mots séparés comme ils doivent Fctre, et je ponctue) : <* Se je
fm^€»àcbe asy ma a on pi/^ Jy aiclx, si mon aim, aie; Ma fatclicn etty affalé Pé le
rcuani tTtntiur U haye. v M. B, traduit : « Si je n'eusse eu mal au pied, j'y
eusse, sur mon âme» allé, Mais j'eus été aflbulé [je me suis foulé le piedj Par
les ornières entre les haies* 1» Je ne puis comprendre fetic})e{n) au v, 19 autre-
tnent que je neuche au v. 17, et je traduis : « Mais j'aurais été affolé (plutôt
^rx'afdi^ proposé en note, ou le très douteux affonlf) par les ornières entre
les hâics (à cause de sa blessure au pied) ». — Au v, 62, grâce est traduit par
IS2 COMPTES RENDUS
« grosses », mais comme ailleurs, on lit grôs^ ^rausse^ c*est plutôt grasses (au
V, 7 de la Flair, le mot se retrouve et est traduit par « grâce », s. d. faute
d*împressioii pour « grasse i»)* — Au \\ 6s, le verbe pouarâéy « regarder ncst
considéré comme une « forme difltirenciée de rotutiicr rwati^ déjà contracté
de l'anc. rouumrder....^ dans laquelle p s'est développé de w. » Ce serait déjà
fort singulier, mais comment, dans ponardéâc rouardèyp se seraît-il « déve-
loppé x» deti'? A la suite d'une chute de r? En fait, pouatdeestlâ contraction
de l'ancien /wwru'ûritT, a» fr. porgmràet\ rouatitr est d'ailleurs un autre mot,
répondant au fr. retvaiiier. Ajoutons que le mémoire de M. Bonnardot csi
riche en renseignements de tout genre pour l'histoire des mœurs et des
usages» et qu'il s'ouvre par une précieuse bibhographie d{^ ouvrages imprimés
en patois messin jusqu^â notre siècle. L'auteur constate que Tanncxion de
}Aetz à fAllcmagne a rendu une vigueur nouvelle au patois, « désormais unique
truchement des indigènes au foyer domestique..»*, et dans leurs rapports
mutuels, à rencontre des occupants, qui savent bien le français classique, tnais
non pas le patois, »
P. 407, A- Morel-Fatîo, Dutîos y qtuhrantos. — Don Q^iichoite, le samedi,
mangeait, dit son biographe, duelos y tjuebranhs^ «c des deuils et des brisures* n
Que désigne cette singulière dénomination, et d'où vient-elle? M. Morel-
Fatio, dans sa très piquante note, répond d'une façon certaine à la première
question. En Castille, depuis une époque impossible à préciser (une légende
voulait que ce fût depuis la victoire de Las Navas en 1212), on avait le droit,
au Heu de f^ire comme ailleurs abstinence complète , de faire abstinence de
grosura^ c'est-à-dire de manger les « issues » (tête, pieds et tripes) des animaux
de boucherie ; c'est évidemment ce que faisait le bon chevalier de la Manche,
Mais pourquoi cette nourriture du samedi s 'appelait-elle dueîos y qiuhrantûs'i
On en a donné deux explications, que M, M. -F, rejette Tune et Fauire. 11
établit que dmîos y qttcbrantos était une locution fréquente — quoi qu'on en
ait peu d*exemples — puisque Que\'edo la range au nombre d^ bordoncilhs
inuiiîesy dont un écrivain soigneux doit s^abstenir. « Quant au sens, les deux
mots n*ont été pris d'abord que dans Tacception purement morale de «» cha-
grins et tourments, et, i la rigueur, on a bien pu qualifier ainsi Je maigre
repas castilbn du samedi; les Allemands n*ont-ils pas notnxwé arme RttUr un
mets de pénitence qu'ils mangeaient précisément ce jour-ïà? Mais j'admettrais
volontiers que Cervantes ou tout autre a cherché à faire un jeu de mots :
le mot qtifhranh pouvait donner l'idée d' « abatis >» : an ferait une plaisanicric
du même goût en français si Ton accouplait les deux mots plaisir et réjouis-
sance. » Et iJ ajoute : « Quel que soit Tinventeur de la pointe, elle a eu du suc-
cès : dtieîos y qudfrantos deviennent peu à peu synonymes d*bsues ou de
tripes : » dans une comédie de Lopc de Vega, on voit « une Lucinda, almar-
lando unos tonrinôs^ con sus dueîos y quchrantos. Pas question ici du samedi ni
d'abstinence ; la Lucida entend faire , je suppose , avec son amant , un très
succulent déjeuner, )> Mais alors d. y qu. ne peut avoir qualifié « le maigre
Etudes romanes dédiées à Gaston Parts
ISÎ
Ttepas castillan du samedi » par allusion à sa triste condition (d'autant moins
que le %'endredi était bien plus maigre, et qu'au contraire les Castillans
étaient mieux partagés te samedi que tous les autres catholiques). C'est uni*
quement en tant que composée d'issues que cette nourriture a reçu son nom,
sans mélange d'idée compatissante, et l'on serait bien porté à admettre la
l • très ingénieuse » explication du D^ Antonio Puigblanch {duelos y quchrantos
signifiait « chagrins et tourments i», mais à côté dqos y qucbrantas signifiait
* tripes (cf. issuii) et extrémités (brisures, abaiîs) » , et le peuple (ou un
amateur d'agude^as) a substitué Tun à l'autre). Seulement, dît M* M.-F, (sans
{larler du sens forcé donné â qutbrantos) , on ne trouve nulle part ce d/jos y
ftttbrafitos. Il faudrait, pour résoudre mieux ce petit problème» rassembler des
rtples plus nombreux de dudos y quebrantos^ au sens métaphorique ; peut»
! en les cherchant trouverait-on la locution indiquée par A, Puigblanch,
P, 419, J* Cornu, Etudes sur Je poètne du Cid. — Le savant professeur de
Prague, apr^ avoir eu sur ce sujet d'autres opinions, est maintenant convaincu
que le Poema dtî Cid a été composé par son auteur en vers de romances (sept-
huit S)'llabes à chaque hémistiche), et que les innombrables hémistiches qui ne
I rentrent pas dans cette formule ont été altérés par la mauvaise mémoire des
3tateursou la négligence des copistes. Pour le prouver, il emploie un moyen
ingénieux, qui consiste i examiner un très grand nombre d'hémistiches
rooDtenant des noms propres , et, par conséquent, forcément mieux conservés
que les autres, et qui présentent effectivement sept syllabes dans le manuscrit
unique, ou se laissent très facilement ramener à cette mesure. Je ne me pro-
nonce ps sur le système de M, Cornu, qui est, en tout cas, bien attrayant ;
U réunion, dans ce mémoire, de 871 hémistiches d'un caractère particuUère-
ntcnt probant (auxquels il faut joindre aussi les 400 vers qui sont dans leurs
deux moidés conformes au type en question), fournit à coup sûr une base
||M)lide et toute nouvelle à la discussion, — M. Cornu a bien voulu m*envoyer,
\ me priant de le joindre â ce compte rendu, un choix d'autres hémistiches
de scpt'huit syllabes, fait pour lui par son ancien élève M, le Dr RoUn :
• ungmnd nombre^ rcmarque-t-il , sont des formules qull n'est pas possible
Je modiâer Plusieurs de ces hémistiches pèsent plus dans la balance que
cent autres qu'on apporterait pour prouver Talexandrin ou d'autres vers qui
me sont inconnus. * J'insère bien volontiers ici ce petit recueil.
ler hémistiche,
I
40 Una nina de nuef anos.
209 En San Pero de Cardena.
417 £j3 raedio duna montana,
S 17 Nin cativos nin cativas.
547 Entre Farua e Çctina.
514 En un otero rredondo,
665 A cabo de très semûnas =: 3481
902 El payo de myo Çîd.
1085 Aquis compieça la gesta.
1247 El amorde myo Çid.
1576 A la puerta de Valençia.
1711 Por las torres de Valençîa.
210? Trezienios marcos de plata.
2342 A la glera de Valençia*
^^^^^^ 154
^^H
^^^B
2222 metolas en vuestra mano. ^^H
^^^^^H 3556 E lâs noches e los dias.
2254 e corredorcs cavales. ^^^|
^^^^^H 1613 Por h huerta de Valençia,
^^1
^^^^^^B 26$2 Condozîemoscavalleros=28jS
^^^^^^P 2847 Varones de Santestevan.
2332 y Tantes de Carrion = 2496, ^^|
2587» 2646, 2675. 3701, 2941. H
^^^^^F Saond h/mistkîje^
2965, 3080, 5126, 3 1 44/ î tél. ■
5207, 3209, 3217, 5219. 5467, ^B
^^^^L*
3485, 3562, 3568, 3S96. ^^1
^^^^^^^L 149 de voluntade de grado -= 1005,
2474 la ûort del Campeador. ^^^|
^^^^^^1
2J12 el obispo don Jlieronimo. ^^^|
^^^^^H 226 de cuer e de velurttad.
2513 cavallero lidiador. ^^^B
^^^^^H Î38 abuelta de los alborcs.
2526 a lierras de Carrion = 2544, V
^^^^^^F 720 poramor de carîdad = 33^3.
2590. 2S97, 2627, 2638. 3470, ■
^^^^^P 829 a Castiella la gentil
5599- m
^^^^H 883 a Tii^o d/ /r£f setmtms » 9! $.
2>70 en tierras de Canion ^ 2600, ^M
^^^^^^ II 16 de la lînpia christiandad.
2717, 5223. B
^^^^^H 1133 el cimpo nuestro sera.
2578 las telas del coraçon = 3260 ^^H
^^^^^H 1 186 en ticrras de Mon Rreal.
2588 por Valençîa la mayor. ^^^|
^^^^^^ U99 deb buena chrisûandad.
2679 al Campeador leaî =3317. ^^^|
^^^^M 1 2^^ ^^ ^^ <^^^ de Bivar.
2748 en cl rrobrcdo de Corpcs = ^U
^^^^B 1272 myo senor naturaL
2754, 2945* 3156, 3266. ^^Ê
^^^^1 1321 por amor del Crîador = 27S7,
2809 por los rrobrcdos de Corpes. ^^H
^^^1 2792, 349ûi35^l. ?5So.
2851 que sodés cofioscedores. ^^^B
^^^^1 1432 cavallerode prestar.
2901 nnyo ViissaJlo de pro =: 3 193. ^M
^^^^H 1446 el Çîd siempre valdra mas.
2915 de yfantes de Carrion := 2952, ^M
^^^^H 1460 coronado de prestar.
311 3. 3202, 3457» Î704»Î707. V
^^^^^ 146 1 pora hucbos de lidîar ^ 1695.
3023 el Çid con todos los sos, H
^^^^^^L 150C el Burgales natural.
3137 ca sodés conoscedores« ^^^M
^^^^^f 1611 en el mas alto logar.
3151 de Valençia la mayor* ^^^|
^^^^H 1663 el buen Çid Campeadûr.
3372 allas certes pregonadas. ^^^H
^^^^H 1667 de] obîspo dan Jheronimo.
3310 Pero Mudo me lamade^. ^^^H
^^^^^ 1780 el Campcador cotitado = 2433
33^0 a guisa de traydor. ^^^|
^^^^^^H 1887 fîjas del Cimpeador = 3323 ,
3399 de Navarra e de Aragon — ^^H
^^^^1
540s» 3420, 3448» Î722. ^^Ê
^^^^^^^B 1995 el cavallero de pro.
3410 caboso Campeador. ^^^|
^^^^^^^P 2031 myo natural senor.
34S1 en begas de Carrion. ^^^|
^^^^^^F 3036 Alionsso myo senor.
3^53 el conde Garçîordone; ^^^|
^^^^V^ 3105 en Valençta la mayor 3710.
35^} las cspadas taiadores. ^^^|
^^^^H 2 161 a Valençia la mayor = 2623,
3 $8 s de los fier ros taiadores. ^^^|
^^^H
3616 abnckâs con los pendoncs. ^M
^^^^^ Zièé con los o^os de las car;is«
^696 por tierras de Carrion. ^|
Etudes rmnmus dédias à Gaston Paris 155
P. 4 $9, A. GilUéron, Remarques sur U vitalité phonétique des patois, — Dans
CCS pages pénétrantes, M. Gilliiiron montre que les patois ont été et sont
encore entravés et comme paralysés dans le développement logique de leurs
tendances purement phonétiques , non seulement par Tinfluence croissante
du français littéraire , mais encore par le voisinage de patois voisins cl ta
(nécessité de communiquer (aussi les villes sont-elles toujours en retard sur
[•les campagnes dans révolution physiologique). Les petits centres isolés,
F comme il s'en trouve surtout dans les montagnes, sont bien moins « réfré-
nés I» dans leur évolution, aussi s'accomplit-elle sans aucun égard à des
nécessités qui ailleurs s'imposeraient : la réduction des mots par Teffacement
I mécanique des voyelles et des consonnes y arrive k des résultats effrayants,
M, G. cite des parlers savoyards où Mont-Cenis est devenu Mwéni, aranea
ana^ illum levamen M, tic, « Si, par un malheureux hasard, tous ces
1 phénomènes de destruction venaient à se produire dans un seul et même
I parler, ce serait un engrenage d'où combien de mots hûns ne sortiraient que
I iédtiits i leur simple voyelle accentuée 1 » A vrai dire^ le danger existe aussi^
et très sérieux, pour le français, si Ton songe que déjà, p. ex,, augusiura
s*cst réduit à «, que alUos, aquas, altos^ ad illos sont réduits à a
(01 devant une voyelle) » que le même groupe vèr représente variura,
viridcm, vitrum, versum, verraem, que ^ 'autre part dans les deux
siècles derniers \*e féminin est réellement devenu un ^ « mtiet i»> que Vr a
Ciilli sombrer à la fin du xvni* siècle (quand ondhmpaoîe ifotiô), que de nos
jours môme 17 mouillée s'est réduite à /, et Vs douce, dite de liaison, va tous
les joursenseperdantdavanugeQ'ai entendu dire twu tifoneti), onscderoande
ce que deviendra la langue s'il s'y produit de nouveaux changements de pro-
nonciattoo qui suppriment ce qui lui reste de consonnes : rien n'empêche
que IV ne tombe cette fois pour de bon, et qu'on n'ait vè au Heu det'^r (répon-
dant déjà à vado et vestit); la chute du v réduirait ensuite tous ces mots
1 /, On s'en tirerait sans doute toujours en remplaçant les mots trop réduits
par des dérivés, mais ce n'en est pas moins un avenir assez inquiétant pour une
langue qui se pique avant tout de clarté, et dont une des ambitions légitimes
I &x de servir de moyen de communication internationale. Di omen aveitantî
l'Qpant à la science, elle peut décrire le mal et en prévoir les progrès, mais il
est douteux qu'elle ait la moindre efficacité pour l'enrayer*
P* 465, E. Muret, Sut quelques formes amîogiques du vethe français, — Le
premier paragraphe de ce mémoire concerne les i^» pers. plur. en-oiru; j'en ai
rendu compte Tan dernier (Rom. XXI, p. 352, n* i), ^ Le second est intitulé :
Stéis, vois; pfuis, ruis, truis ; corvée^ enterver. C'est une tentative fort ingé-
nieuse pour expliquer des formes qui jusqu'ici n'ont pas trouvé leur explica-
tion. L'auteur sépare les deux groupes estois^ twj, {dois]^ et rww, pruis^ truis,
Stais serait modelé sur un hypothétique jais^ de jaceo, â cause de Tidcntité
des part et part, fut stui^ jeu ste{d)u ; stais aurait à son tour amené vais et
dais; d'autre part, les formes traditionnelles étaient j/oi, voi, doi^ et il y a eu
entre les deux séries une fusion qui a amené stois, vois, dm (sur ce dernier,
I5é COMPTES RENDUS
cf. Rom. XXI, J48). 11 y a à ce système une asseï forte objection, c'est
que c| devient ts ii) et non ;j (tV)^ en sorte que jaceo aurait donné
jais (jai) (cf. facio fai) ei non jais\ en outre, jicio était devenu très
anciennement, au moins en gallo-roman, jécîo (ce qui eîcplique/ui jécuî,
en regard de piot plac u î), en sorte qu'on a dû avoir à rorigine^if^ (devenu
plus tard gis par analogie avec les autres personnes). En outre, il n'y a
aucune trace des formes postulées en a, et si ron considère les autres personnes
(estait ^i f t'^'^* l'dïV ou vaf), il paraît in \Tai semblable que stah^ vah eussent
si complètement et si anciennement céà^ à l'influence de stoi^ voi. Il reste de
rhypothèse de M. Muret un fait très probable, c'est que les formes en s (s
sonore) pour les verbes remontent i des formations en 1 1 , quelque chose
comme st au 1 10, -a^ vautîo, -a, dautio, -a. Reste i les expliquer. —
Pour rendre compte de ruis^pruis, tmis^ Tauteur entre dans des recherches
très fines et assez difficiles à suivre sur le sort respectif de ^, fr, /> et de d ou m
final. Il en conclut, si je le cotTiprends bien, que prôbo a donné normale-
meni pruett^ et s*est assimilé irôpo et rôgo : pruettf rueUy trutu sont ensuite
devenus /trwfj, etc., sous Tinflucnce de vois^ estais. La différence de V$ dans
les deux groupes, attestée par les subj. voise esiohe d*une part» et ruisst
pi'uissc triasse de l'autre \ rend cette hypothèse assez peu probable, outre que
la différence de voyelle qui a toujours existé entre les deux groupes s^opposait
aussi i une influence exercée par l'un sur Tautre. Je crois bien, avec M. Murer,
que les formes en -non, -mu^ représenteraient le développemeni régulier de
-ôgo, -ôbo, -ôpo, mais la cause de leurs changements doit être cherchée
ailleurs. Je pense toujours (voy. Rom. VII, 622) qu'elle a son origine dans la
double forme qu'a dû avoir la i« pcrs. pr. ind. de podeir : puou pueu :=
•poto (d. roum. pot, tsp^puedù), tx puois pueis puis (de provenance contes-
tée, mais assurés). Puou^ il est vrai, a disparu de très bonne heure devant
puois ^ mais Tinfluence a dû se produire plus anciennement encore. Quant à
la chute du ; de pôto, nécessaire pour la formation é^ptiou, je Texpliqucrais
par le fait que le t dans cette position avait très anciennement passe à tl : cf,
noUf de nôto = nato, qui remonte nécessairement  rmùu; podibat
apparaît de très bonne heure. Une fois créés, mis, pruis, truis ont fadlemcot
amené ruisse^ prutsse^ truisit^: puisse. Mais cela reste encore bien- hypothétique.
— On trouvera dans i*étude de M, Muret beaucoup de remarques intéres-
santes pour la préhistoire phonétique du français. II dit, avec raison, que
vivura I ô vum, nôvum ont dû donner viu^ uôu, nuou^ et il explique les
formes x'i/, niitf, comme M. Vàrster (Zeitschr. XIII, 544)» par TinBuence des
féminins vive et nuevt; mais judaeum > juif prouve que l'w a pu spontané-
ment se changer en/; c'est probablement un cas de phonétique syntactiquc :
on a dû avoir les trois formes : nom matUel^ tîucif e hon^ nuinUl nmf^ et la troi-
sième a prévalu. Pour i*r/, d'ailleurs, il ne donne pas d'explication; celle qui
I. Les fona«s ntiif, irtdmt prutse, qui ipparâissent rarement et tardivement, tout
dues k rajialogic avec duise, luise , nuise ^ fonncs eUcs-tnémes aoalogiqaes..
Etudes romanes dédiées à Gaston Paris ijy
a été proposée , je ne puis retrouver par quel philologue, Tinfluetice d'un
Ancien iinr < ôva (cf. it. iwva)^ manque de base, le mot tinv étant inconnu :
w«, u^u a existé et se trouve dans Est. de Fougères (eu : gieu^ feu, sarqutu) ;
il avait sans doute pour formes concurrentes utv et uef, qui a prévalu. La
triple forme queu^ clftve et chkfpexxi peut -être s*expJiquer de même.
P. 475, A. Rousselot» Us danint t, p, c dans Us Alpes. — Dans les vallées
du versant italien des Alpes, soit par luî-mèrae, soit i l'aide de renseignements
très sûrs, M. rabl>é Rousselot a constaté, l'une à c6té de l'autre, en train
souvent de passer de Tune à Tautre , les phases successives de rarouîssement
de V$ devant les explosives sourdes. Partout la première phase a été le pho-
nèmc qu'il notc^ et qui répond à peu près à l'allemand cb dans ach, Tochter,
Une fois constitué, le groupe c + expl, sourde suit partout deux voies diffé-
rentes : Tune, passant par^ (/), aboutit à la chute complète de Vs\ l'autre est
plus compliquée : pour sf elle aboutit à / (par cp, tf^ çf [ç = ch alL de mich^
ft^hty^ jfy, pour se à h (par ce, dc^ çc, yCy c); pour les transformations très
variées de sî je renvoie à Tétude eîle-mèrae. Ces observ^ations profondes et
délicates jettent, comme le remarque le savant phonétiste, un grand jour sur
l*histoirç antique des transformations de 1*5 en gallo-roman : toute cette his»
toirc, telle qu'elle s'est déroulée dans le passée s'étale aujourd'hui encore en
stratifications non plus superposées, mais parallèles, qui vont depuis l'état le
plus archaïque (car j/>, st^ se subsistent intacts dans certains endroits) jusqu^à
un état plus avancé que tous ceux que nous connaissons (chute complète de
%P^ par exemple). Ces études ouvrent à la linguistique des perspectives si
vastes, et, eti certains points, si inquiétantes, qu'elles donnent une sorte de
vcnigc, et que le philologue peu familiarisé avec elles s'en écarte avec pru-
dence, et ne se retrouve i Taise que devant des textes limités et des dates
précises» Mais il ne peut que mieux comprendre Tobjet de son travail en ne
perdant jamais de vue ce que des recherches comme celles-ci apportent d*éclair-
dssemcnts sur les lois, toujours cl partout semblables i elles-mêmes, de
révoJution mécanique et psychologique du langage humain.
P. 487, A. Bcljame, La prononcutthn du nom de Jean Lau/ k financier, —
Dans cette étude aussi piquante quYrudite, le savant professeur de langue et
littérature anglaise à la Faculté des lettres résout définitivement une énigme
pour bquelle on a proposé les explications les plus aventurées. Beaucoup de
ttoms, en Angleterre et en Ecosse, flottaient, à l'époque de Law, entre une
forme dépoun'ue et une forme munie de Vs indiquant fihation : on disait
Pitt et Pitts^ WUher cl fViif}ers; le célèbre financier, dont le nom officiel
} (d'après son acte de baptême et ses signatures) était Law, était appelé d'or-
dbairc et s' appelant lui-même Laws (Laos se lit dans une lettre anglaise de
1694, lûWT souvent dans d'autres écrits contemporains). Le nom fut, comme
le remarque M, B., entendu en France avant d'y être lu, et entra dans l'usage
sous la forme qu'il avait dans la prononciation ordinaire , tandis que les
documents ofBciels écrits et imprimés lui conservaient la forme Law. Lojê
158 COMPTES RENDUS
reproduit la prononciation écossaise de Laws ^ mais on trouve aussi des
exemples de la prononciation avec 5 douce (d'où de nombreux jeux de mots
entre LasQtI*a^ =: rdm). En terminant son élégante démonstration» M. B.
conseille aux Françab de garder, en écrivant Law » la prononciation Lass, qui
était celle des contemponkins de l'auteur du «t système w^ et sans doute, de cet
auteur lui-même.
P. joy^ J. Psichari» Le roman dt Flùrimont; contribution à Vhistmn Uttêraire;
élude dn mots grtcs dans ce rotnan, — Four apprécier cet intéressant travail, Û
(aut y joindre te récent article de M. Fr. Novatî dans ta Revue dts langtm
rotnaïus (XXXV, 4S1-502 ; cf. Rom., XXI, 61^) et la réponse de M. Psichari
dans le beau livre qu'il vient de publier sous le titre d'Étuda de philologie néo*
grecque (fascic. XCU de la BihîiotUque de Tkole des Hautes Études). Le point
essentiel du présent mémoire est la démonstration» qu'on peut regarder
comme acquise, que les mots ou phrases grecques cités dans le Florimoni ne
prouvent pas chez son auteur, Aimon de Varennes, la connaissance réelle du
grec. M. Ps. les étudie, d'après tous ïes manuscrits qu'il a pu consulter et
qu'il reproduit diplomatiquement , et s*effbrce de les restituer tels quHls ont
dû être dans Tautographe de Tauteur (l^ "^^t est ici bien à sa plac«; cf.
Milieu, V. 60 : Mais dou ditier et de Vescrire Ai moût de paine et moût d£fak\
et il constate que, soit pour les formes, soîl pour la construction» on n*»
là « du grec d'aucune époque ». H en conclut qu'Aimon a dû les trouver dans
un tcxle écrit, où U les a copiés tantôt mécatiiquement, tantôt avec des alté-
rations arbitraires, qui se dénoncent comme telles quand on voit qu*ell«
sont amenées par les nécessités de la rime : sirtes cah^ par exemple » semble
bien ne pouvoir provenir que de la formule de bienvenue caJos irtes (xaXbjf
tJgte;), dont les éléments ont été mal coupés, puis intervertis. Il faut lire toute
cette dissertation très serrée et où se montre à chaque ligne une profonde
coDtiaissance du grec. Toutclois on peut se demander, avec M. Novati, si la
conclusion de fauteur est bien assurée. 11 tire un argument qui paraît invin-
cible du fait que le 0 est rendu dans les mss. par th {t, c, ^, s semblent n'être
que des fautes de copistes) , tandis qull se prononçait déjà bien avant le
XII" s. comme il se prononce encore aujourd'hui {th anglais); ce ih repré-
sente donc une transcription purement graphique, tandis qu^une notation
faite d*après le son perçu serait ^, j, ou c. Mais il ne parait pas impossible
qu*Aïmon ait connu et employé le digramme th^ qui avait été longtemps, cl
en Angleterre et en France même, employé à représenter ce môme phonème
(cf. Ronh^ XVI, i>>). En revanche, M» Ps. reconnaît lui-même que le ^ est
rendu par v et non par h (les notations par h dans les mss- au Pass. 1 sont en
minorité, elles n'existent pas pour le Pass. U), ce qui ludique plutôt une
transmission orale. La plaisante déformation de cûîûs irtu en sirtes cah a pu
se faire aussi bien par un auditeur que par un lecteur (remarquer b prédi*
lection d'Aimon pour cette forme caïo^ qu'il emploie fautivement de diverses
façons). Il paraît évident que la méprise non moins amusante sur potamm^
Etudes rôtmnes dédiées à Gaston Paris 159
qui est. d'iprès le poète, le nom du fleuve qui arrose Fhilippople, ne peut
venir que d'une confusion comme en commettent souvent les voyageurs qui
ignorent h langue du piys* Aimon, se trouvant à Philippople, a indiqué
J'Hcbre (Maritia) en demandant ce que c'était : on lui a répondu noTaao; ou
7:<ïta|ji.t0V) qu*U a d'ailleurs mal entendu, et il en a fait le nom du l^cuvc :
c'est ainsi qu'A. Dumas, dans son Foyage au Caucasf^ parle d'une espèce
admirable de chiens qui s'appelle en russe sahak (sahak ^ chien) \ Le nom
de CacopéJUt que se donne pour se ravaler un des personnages du roman ,
doit avoir aussi une origine orale : le voyageur français en pays grec a du
entendre plus d*une fois qualifier de x»k6(v) r.a'M le garçon de son hôte;
il a rcicna ce nom ci en a fait l'humble nom de guerre dont s'affuble
Flocan, M. Ps. soupçonne que Cacopédie est originairement j-axx rstioia : « Il
est question, à cet endroit, de deux persoiinages qui vont incognito et que
réunit un même souci. Cacopédie, à l'origine, a donc pu s'appliquer aux deux
compagnons d'infortune, aux deux r.AY.k nai5i» ; Ta de Koniix justifierait seul
!V final de tous les mss. » Cette supposition s*appuie sur une conception
générale du rôle des passages grecs dans le Flotimont qui ne me paraît pas
assurée : « Les passages grecs de Florimont^ dit M, Ps.» ont un caracïtTC
bien marqué ; ce ne sont pas des morceaux détachés, qui peuvent s'intercaler
qu'importe où ; ils font partie d'un ensemble où ils ont bien l'air d'être en
situation. Ils font corps avec le récit. » Ces passages sont au nombre de
ncul ; quatre échappent d'abord à cette hypothèse : le nom de lieu (altéré)
Aiohalo ' (X propos duquel sont cités uihato et protosabato) , le nom de ville
tPJîihpfiopk (quant à Philiftpensts y nom donné aux habitants, il est pris de
i'épîtrc connue de saint Pau) par confusion de PhiUpfies avec Phiîippopî/) ,
fpoUimeu^ le nom de lieu Calocastro. Cacopédie peut s'expliquer comme je l'ai
fait; je reparlerai d'Eltneos, Restent deux formules de politesse (calisimra ^
caki irta\ une formule d'acclamation et une formule de prière (je les cite
dans la traduction qu'en donne Aimon : Si m* ait Dcus, hom est U rms ; Detu^
hn st^Hor, Gardti ni ccst tmpfreor !). Ce sont là des phrases qu'Ai m oa
2vait en Toccasion d'entendre à Byzance et qui n'ont certainement aucun
«pport intime avec l'histoire de Florimont, On ne comprend pas du tout
irquoi le traducteur latin de cette histoire que suppose M. Ps, aurait
éprouvé Je besoin de les intercaler dans son ouvrage et pourquoi Aimon les
1, NL Riïop {Anbiv de Hemg, LXXIH, 60) remarque fort i propos que Vîllchar-
ëouia et Henri de Vilencicanes n'appellent THèbrc que le fium. Il est très probablt
k^uc Tuiàgc habituel des Grecs était égaletncin d'appeler TTîïTatjxo; tout court le flcavc de
up le plus important de U Roumélie,
"ai Asii^to serait le nom du lieu où Philippe vainquît le roi de Bulgarie Candiobraii
^*t ^ndraii de ufiMio, qui signitic oit, ce qui fait que le chef des troupes de rcmpeneur
grec 5 -ippeUc protoiahdtô. Tout ce passige est encore incxpUquè (voy. les savantu
remarque» de M, Rbop, Anhn\ LXXIHi 60) ; il faudrait d'abord essayer d'identifier le
riieu indique par Ainiou. Notons sculcrncnt que le vrai nom du chef des troupes impé*
I rklci était np<uTOTcpai(iJp i il semble qu'Aimon ait mal entendu, car il fait bita son
fniot&htto de dnq syllabes. L'idée d'one Cxiite de lecture est moins Yraiscmblablc»
l60 COMPTES RENDUS
aurait conservées. On s'explique au contraire, comme !'a dit M. Novati,
qu'Aimon , voulant faire admirer sa science et donner à son roman un
apparence bien grecque, ait inséré çà et là les quelques bribes de grec qui lu
étaient restées dans la mémoire. Q^'en réalité il ne sût pas le grec , c'est
d'ailleurs ce qui résulte de la savante étude de M. Psichari , mais la nécessité
d'un original latin où il aurait trouvé ces phrases ne me semble pas démon-
trée*. J'admettrais seulenient volotuîers qu*il s'était fait transcrire en carac-
tères latins par quelque Grec latiniste (il y en avait certainement) les phrases^
un peu longues, ce qui expliquerait peut-être le mieux quelques particularités
de Ja notation,
Qpant à Thistoire en elle-même, M. Ps. est d*accord avec M. Novati pour
ne la considérer comme grecque qu'en partie. Assurément Aîraon y a beau-
coup ajouté du sien, et on y retrouve certains éléments qui ne peuvent être J
grecs, comme Brutus et Corineus ; toutefois M. Novati me semble aller trop
loin dans ce sens. Il paraît d'ailleurs s'en être aperçu lui-même, car après
avoir eu Tair de dire qu'il n'y avait de grec dans tout le Florimmt que la
légende locale de la défaite d'un lion par un roi Philippe, fondateur de Philip-
pople *, il reconnaît dans une note finale que la guerre de ce Philippe contre
un roi de Bulgarie et même le secours qui lui fut donné par un guerrier
inconnu se cacliant sous le nom d'Ehieos *, peuvent bien avoir fait partie du
récit originaire. Mais ce personnage dont Tintervention décisive assure la
victoire ne pouvait guère fournir à ce récit un simple « épisode » ; il devait»
suivant l'usage constant des romans de ce genre, épouser la fille de Philippe,
comme il le fait dans Fhrimoni , et on devait nous raconter à la suite de
quelles aventures il avait cru devoir cacher son nom : par \k même une
partie considérable du roman d'Aimon de Va rennes nous apparaît comme
ayant vraisemblablement figuré dans roriginal grec. Je ne suis pas non plus
convaincu que l'épisode de la fée de Vlk Cdà, qui est d'ailleurs en relation
intime avec ces aventures, ne sont pas d'origine grecque. Cette Ik CtU^^ par
son nom même, rappelle lUe de Calypso (dont le nom est en rapport certain
avec ataXi^Ttiii), cette « doublure i> de Circé, qui joue dans l'iiistoire d'Ulysse ^
un rôle fort analogue â celui de la fée dans Thistoire de Florimoni. Cest à
tort que M. Novati oppose if /or m«?«l « les véritables romans byzantins» tels que
ïîppomtdon^ VErack^ pour ne citer que ceux-là »* Assurément dans Vlpomidon
1. J'admets d'âiUcQrs^ comme on le verra pltts loin, un înttrmèdiaîrt Imtia pour le
Fhrifiwnt, mais dans d'autres conditions.
a. Ce Philippe» dont Aimon fait k bisaïeul d'Alexandre, et qui djins U conte Itrec
était sans doute son père (le vrai fondateur Je Philippple) , est appelé dan» le poème
Philippe MacfmHi, Je suppose que ce surnom n'cit autre que le grec jjta'^iji.o;. et je
vois là une trace nouvcHe de l'origine grecque du roman.
\. M. Psichari est porté k admettre une con|e>rturc de M. Hesselingt d'après laquelle
EUtteoi répondrait à. iKiuvoît et serait en réalité t'équivalent non de Florimoni^ mais
du pseudonyme qu*il prend de Powe l'eu. C'est en effet une conjecture vraiscmbkblc,
que M. Novati admet aussi, tout en discutant l'explication de M, Psichari.
Etudes romanes dédiées à Gaston Paris i6i
il y a beaucoup moins d'démenls grecs que dans le Florinwnt ' ; quant à
fBracU^ il soulève des questions très complexes dont je ne veux pas m'occu-
ici. De tous les romans français qu'on a cru pouvoir regarder comme
d origine byzantine*, le Florimont est celui pour le^juel cette origine, au moins
dans son ensemble, est le plus incontestable.
J'arrive à la seconde partie de la thèse (car c*en est bien une) de
M. Psichari* Aîmon de Varennes n'apu^ d'après lui, connaître le roman grec
qu'il a imité que par une traduction latîne : cela résulte d'abord de Texamen
des passages grecs qu'il a conservés, en les dénaturant, d*après le traducteur
latin, mais cela résulte surtout de ce qu'il dit lui-même, A plusieurs reprises,
il metîtionne expressément une source latine ; il est vrai qu'à un endroit il
cmble dire qu'il a mis le roman grec d'abord en latin puis en français (Tmj/
tgteu t'ûtoirr latine Et dtl latin fiit Urontans), mais comme il est prouvé que la
première assertion est fausse, il en résulte qu*Aimon est un menteur; un ne
lui fait donc pas tort en supposant qu'il a essayé ^ gauchement d'ailleurs, de
s^attribuer le mérite d'un autre, qui avait réellement traduit en latin un conte
Cet autre pourrait bien avoir été un certain Amo , sur le nom duquel
E>uc tout un passage cité par M. Psichari, faut-Il croire qu'un hasard a voulu
|ue le traducteur latin s'appelit Amo et le traducteur français Aitnofi, ou
ilutôt ce dernier nom n'est- il pas suspect, et ne faut-il pas, là où il apparaît,
rmattrc Je même Amo? C^est ce qui semblerait résulter de la comparaî-
dcs passages où l'auteur du poème dit ;V et de ceux où il dit Aitnon en
ani de lui : on sent en général entre eux une différence de ton qui
f explique s^i Ton suppose que les seconds proviennent de la source latine; il
vrai qu'à certains autres endroits celui qui dit ;V paraît bien s'identifier à
Aimon^ mais c*csi peut-être une tentative d'usurpation, et le nom d'Aimon
de Varennes ne doit « être prononcé qu'avec prudence dans l'histoire litté-
raire de la France r. Tout cela, on en conviendra, est bien compliqué, et je
ne puis que me ranger sur ce point à l'avis de M Novaii \ qui se refuse À
voir dans VAmo mentionné par le poète un autre per>onnagc que ce poète
lui-même. En fait , le nom à'Anw n'apparaît nulle part : au v. jo du Milieu
D seul a Amû, les autres mss. ont Aimes *\ je crois qu'il faut en réalité lire
Aimo^ et que le poète a donné ici son nom sous sa forme latine : Aittio^
dit^il^ serait amo si Ton en retranchait Vi : Qui Ti après Ta ostera Amo tout
U Kottt que répbode central d'Ifxrméiion n'est pas sans rapport avec celui de FiûH-
mmti U 4USM k héro» combat inconnu pour défendre les états de celle qu'il aime;
Mil c'est tm lieu commua ani se retrouve dans bien d'autres récits.
a* M* Piichan, d«ns ses Etudes dr pbilohgU nio-grtcque (p. Lvnr et suiv.), a soumis
cette opinion à une critique qui demande â être prise en sérieuse considdr*tion.
) , On ne peut toutefois admettre que le vers cité plus haut puisse se tire Truist di
'Gmr tUtoitr tatim i M. Ps. fait remarquer avec toute raison {Ètudtx^ p. lxiv) que cette
I £aus«e k vers et présente en outre une favon de parier inusitée.
4. Pir an regrettable accident typographique, les variantes des vers 27'$6 du Milieu
*0«l perdues djus ta reproduction, d'ailleurs si exacte et si consciencieuse, de
' H* Psidiiri (p* 548); mats voy. p. $49.
i64
COMPTES RENDUS
Geschichte der deutschen Litteratur. Eutcr Theil. Von deo
eriteii Anfàngeu bis zum Ausgiing des Miiielalters. Von Dr, Wolfgang
GoLTHER, Stuttgart, Union Deutsche Verbgsgcsellschaft. 1892.
Celte courte histoire de h littérature allemande au moyen âge n'est pas,
comme beaucoup d'oîuvres analogues, une compilation plus ou moins adroite
mais de seconde main. L'auteur, M. Golther, s*est fait connaître par des
litudes approfondies, trtts personnelles et très méritoires, quoique parfois un
peu aventureuses, sur plusieurs des questions les plus intéressantes du sujet
qu'il présente ici en résumé. Son livre est bien composé, écrit avec clarté,
sans vaine rhétorique, mais avec un juste et vif sentiment des choses litté-
raires, On le ht avec plaisir et profit, et on peut le recommander i tous ceux
qui veulent se faire une idée claire et presque toujours exacte de révolution
littéraire en Anemagne» depuis les plus anciens temps jusqu'à la Renaissance.
Toutefois, nous n'en parlerions pas ici si l'auteur n*avait donné à son
exposé un caractère particulier, en y introduisant beaucoup plus intimement
qu'on ne Tavait fait jusqu'ici Fétude de la poésie française du moyen âge. 1
Partant de ce fait incontestable que la httérature des wic et xiiic siècles en
Allemagne est essentiellement, — sauf ce qui appartient â Tépopée nationale,
— une « littérature de traductions », il sVst senti obUgé à présenter comme ^
introduction ;\ l'étude de cette période un tableau de l'histoire et une étude '
des oeuvres principales de la littérature qui lui a servi de modèle, et c'est
par U que son livre mérite de nous arrêter quelque peu.
Je n'ai ncn A dire de ce qui concerne les chansons de geste; Tautcur est dans
cette partie de son livre peu original et généralement bien informé. Sur Icsj
romans d'aventure, peu de chose également à remarquer. C^estsur la maiièrei
de Bretagne que M. Golther, comme on sait, a fait des études spéciales, et
c*cst cette partie de son livre qui me suggérera quelques observations. Je
n'entreprendrai pas, toutefois, de discuter ses thèses générales; on sait assez
que je ne les accepte pas. L'élément celtique dam les romans bretons cstj
assurément beaucoup plus important que ne le dit M, Goltlier^ suivant enc
M. Fôrstcr; il semble d'ailleurs lui-même revenir en maint endroit sur ;
assertions du début, et il est difficile, en effet, après les recherches de
derniers temps, et en prévision certaine de celles qui vont les continuer, de
fermer les yeux à l'évidence et de ne pas voir qu'avec la matière de Bretagne^
un monde poétique s'est f^iit jour, qui était nouveau, inconnu aux Français
jusqu'à l'adoption des thèmes cekiques par nos conteurs, et qui n'a pu sortir |
spontanément de l'évolution sociale et littéraire française. La question de la
provenance insulaire ou continentale de cet élément est, en regard de la pre-
mière, d*une importance secondaire ; M. Golther la tranche avec une décision
qu'il regrettera peut-être quelque jour. Pour lui, le Tristan même, que
d'autres défenseurs plus circonspects de la thèse armoricaine consentent à,
laisser aux Bretons insulaires» appartient aux Bretons de France, et U ne
s'embarrasse pas d'expliquer le nom de lovettàris dans Béroul , oi pourquoi
GOLTHER, Geschichîc ckr dcutsckn Liiieraiur 165
Marie donne à son lai connu le nom de goUkf à côté de chievrefoil (tandis
qu'il n*a pâs de nom celtique), ni Tassenion de Fauteur de IVaJdcf^ d*après
bquelle le Tristan avait c4é traduit de Tangbis (voy. Rom. XV, 598)* De
même pour les îais en général, tous armoricains, diaprés luî>, il ne nous
Cîtplique pas pourquoi plusieurs d'entre eux, outre le laî du Chèvrtjfuilh^
poncnt des noms anglais à côté de leurs noms celtiques et français, ni pour-
quoi c'est en Angleterre que Marie les a composés. La vérité sur cette
question* que M. Zimmer a posée avec tant d'éclat» mais qu'il sent bien lui-
mèrat n'avoir pas résolue, se diJgagcra peu i peu des recherches faites sans
parti pris , et on verra certainement qu'il ne faut exclure de la contribution
à la matière de Bretagne aucune des trois régions bretonnes, ni la Cambrie,
ni la Gîmouaille, ni TArmorique» et qu*il ne faut jamais oublier, derrière
cette couche, relativement récente, où a gernié la poésie franco-bretonne,
les assises plus profondes qui la rattachent à la branche gaélique de la race
celtique. Ceci dit pour maintenir mon point de vue général en regard de
celui de M, Gollher, je relèverai quelques détails. P. 149, j'ai lu avec
une profonde surprise la phrase suivante, croyant d'abord à une faute
d'impression : « L'époque florissante de ces romans français arthuricns en
prose tombe dans la première moitié du xn< siècle , avant rapparition des
romùm m vers, avant les œuvres de Crestien, » Il aurait été bien souhaitable
que Fauteur nous dît sur quels faits il appuie Tasscrtion vraiment énorme
■ l|u'il produit avec cette tranquillité. Nous n'avons aucun indice qui nous
atteste Pcxisiencc d'un roman arthurien (ou autre ^ d'ailleurs) en prose,
avant le Lancrbt^ qui est du commencement du 3îiii« siècle, et Fhypothèse est
d* autant plus étrangti que M, G. lui-même n'en tient par la suite aucun
compte; Chrétien, ni aucun de ses imitateurs ne se sert de ces romans en
I prose qui w florissaient » au moment de leur activité. M. Forster pense que les
romans en prose reposent en partie sur un fonds traditionnel plus ancien et
plus authentique que les romans en vers; c*est une idée contestable, mais enfin
clic peut se soutenir; mais jamais il n*a eu l'idée d'admettre une vaste littéra-
ture romanesque en prose dans la première moitié du xii« siècle, littératuTc
qui» d'après M, G., aurait peut-être influencé même Gaufrei de Monmouth!
— P. Î54, flt La pensée fondamentale d'Eres est purement chevaleresque et
française, et sûrement inventée par Crestien, n Je crois avoir mis le contraire
ib&olumem hors de doute. L'idée du mérite de l'aventure en soi, de la honte
qu'il y a pour le guerrier à ne pas toujours combattre, est inconnue â toute la
ï, fl Comme leur uom Tindique déjà, l'infloencc encore ici ot venue de b Brcugnc
(friiQçjtsel • (p« 177). n «t probable qtic M. Zimmer, dans quelque p&sagequc je n'ai
. |lâs préseoument tous h main^ aura donné la démonstration de ce qui est âvant^é ici,
i |e Ciois que l'origine de l'anglo-iax. lug est Li ptus vraisemblable. Les Liis sont
néon armoncaint parce que • Tiiction, duns qucIques-un^ d'entre cvn, a pour théâtre
I0 menur. • Un partisan de Torigtoe insulaire n'aurait qu'à dire : « T-cs bis
lêoot galkrii» parce que, dans U plupart d'entre eux, TactloQ a pour théâtre la Grande-
Bret^pc •
CHRONiaUE
M. Edouard Màuner, Tun des savants qui, dès le inîlieD de ce siède
étudiaient avec le plus de goÛt et de science notre langue et notre littérature,
est décédé le 15 juilkt 1892, à Tâge de 87 ans. La nouvelle de sa mort nous
est parvenue trop tard pour qu'il nous ait été possible de rannoncer dans
notre précédente chronique. Malgré le caractère scientifique de ses travaux, il
ne professait pas dans une université. Il appartint toute sa vie à ce que nous
appelons IVnseignement secondaire. De 1858 1 1888, époque où il prît sa
retraite, il dirigea h Berlin un important collège de filles. Ses travaux les plus
connus, dans le domaine de nos études, sont ses Altfraniôsische Lieder (Berlin,
1855), recueil dédié à Fortoul, alors ministre de Tlnstruction publique, et sa
Fran^ctshche Gratwnatik mit hesonderer Betûckskhtigmtg dfs Latnmsclxn (hcrVin^
iSjé). Les AUfranxpsische Lieder laissent à désirer pour rétablissement du
texte, Màtxner s'étant contenté des éditions antérieures (par exemple, des
textes publiés par Keller dans sa Rontvart), mais le commentaire, rempli de
rapprochements avec î^anctenne poésie provençale^ italienne, allemande, est
d'un grand intérêt et peut encore être consulté avec fruit. Cet ouvrage a été
de bonne heure connu en France, grâce au compte rendu critique que Unré
en fit dans le Jountaî des Savants (réimprimé dans son Histoire de îa langue
fmn^aisf). Une publication pîus ancienne de Màtzner» qui, malgré son peu
d*étendue, mérite d*étre rappelée ici, est sa réimpression (d*après Raynouard)
avec traduction allemande, de la Nohla Leycion^ dans un programme du
collège de filles, où il professait dès lors, et dont il devait plus tard prendre la
direaion : Jahrtshtrichl dei- ersten stàdtisd^n hohren Tôchterschtidt U dos
Schuljahr vom Oktoher 1S44 bis ^um Oktoher 184$ (Berlin, 1845). Depu
1860, époque où parut le premier volutfïe de sa grande Graramairçl
anglaise, terminée en 1865, Màtzner paraît s*être attaché de préférence i
Têtu de scientifique de Tanglais. Il laisse inachevée une chrestomaihîc de
l'ancien anglais conçue selon un plan très vaste, et publiée en collabo-
ration avec M. K. Goldbcck ; Aîtettglisd>e Sprachprobm^ mhst tiftern Wàrtirhmhs
(Berlin, 1867-1885).
— M. Siméon Luce, membre de 1* Académie des Inscriptions et Belles-Lettres,
chef de la section historique aux Archives nationales» professeur i l'École des
Chartes , est décédé subitement le 14 décembre dernier, à Tàge de 59 ans.
L*objct principal de ses études, depuis sa sortie de TEcole des chartes, en 1858»
CHROKiaUE 169
avtii été rhistoire de France au lemps de la guerre de cent ans. Nous ne
J pouvons que mentionner ses livres sur la Jacquerie (1859), sur Du Guesdin
[.(1876), sur Jeanne d'Arc à lïomremy (1885), qui sortent du cadre de la
ania » mais il est aussi Tauteur de plusieurs publications qui intéressent
[4e ptH notre histoire littéraire. Il a publié pour la Société de rhistoire de
[France la Chronique (jusqu'alors inédite) an quatre premiers Vahis {1862)
fédigéc ila fin du xtv« siècle par un Rouennais, et les huît premiers %'o1umes
(1869-1888) d'une édition critique des chroniques de Froissan, très supé-
rieure pour te texte, non seulement à celle de Buchon, où la langue est sou-
vent rajeunie, mais même à celle de Kervyn de Lettcnhove. Le commentaire
historique qu'il y a joint est une oeuvre tout A fait personnelle et d'une haute
valeur. Malheureusement cette édition ne renferme pas même la moitié de
rœuvre. Elle sera continuée par M. G. Raynaud^ qui avait déjii collaboré au
huitième volume. Pour la Société des anciens textes» M. Luce a édité la
Chronique du Moni-Saini-Michel {1879-1883) en deux volumes où la chro-
nique elle-même tient peu de place, mais qui renferment un choix abondant
de documents historiques sur Thistoire de la Basse-Normandie au xv« siècle,
durant Toccupation anglaise. En 1862, il avait publié, en collaboration avec
Guessard, dans la collection des anciens poètes de la France, ta chanson de
geste de Gaydott. Rappelons enfin qu'il avait donné A la Rotttania, peu de mois
avant sa mort, un intéressant compte rendu de Tédîtion de Tailleventr publiée
par MM. Pichon et Vicaire (XXI, 306).
— L'Iulie vient de s'enrichir d'un nouveau recueil périodique qui» par cer-
tains côtés^ touche à nos études. C'est la Rassegna hihUograjica 4elîa ïetUratura itû-
; Ham publiée sous la direction de notre éminent collaborateur, M. d'Ancona*,
nom du directeur est une sûre garantie de ta valeur de ce journal, qui
a, sur certains points, le Giormk storico^ et qui, paraissant à des
- H plus rapprochés, tiendra le lecteur plus rapidement au courant des
uveuités littéraires. Le premier numéro, qui vient de nous parvenir,
^i'ouvrc par un excellent article de M. d'Ancona sur le livre de M. Pizzî,
intitulé : SomigUan^e e rela^ioni ira la poesia peniana t la mstra ml Medio Ei>0,
Ldom nous avons récemment rendu compte sommaire (XXI» 6j4), Viennent
uiie des appréciations très autorisées de la publication en fac-similé du de
rtûgarî thquio et du livre de M, Auvray sur I^j mss. de Dante des hibîioUtèqttes de
'France^ dont nous parlons un -feu plus loin, de Fabretti, Cronache di Penigia^
de Mcnghtnl, FrottoU di Bisan^io de Lupis^ etc. Nous souhaitons une heu-
r fortune au nouveau recueil qui vient prendre place sur un terrain déjà
\ encombré*
— Nous avons annoncé. Tan dernier (XXI, 129), la publication d'un
fAlnmnoc patoues de VAriejo (Foix, Gadrat iîné), renfermant des chants popu-
laires, des proverbes, des contes, VAÎmamc de 1893 n*est pas moins intéres^
î. Pii€, F. Mariorti, gr. in-8% 14 pages par mois. Prix ; 6 fr. par an pour ritolie,
7 fr, pour l'étranger.
172 CHROXmUE
au cours de son pèlerinage^ et qui, dans les anciennes éditions, précède!
récit du « sainct voyage ».
Munmle deïîa Idteralura itaîlam , compilato dai Professori Al. d'Akcona c
O. Baccl Vol. I, parte i, xj-îis p.; toL II, 621 p. In 8°, Firenze, Barbera»
1892. — Cet ouvrage» composé en vue de l'enseignement secondaire,
5*élève de beaucoup au dessus de la moyenne des livres de classe. Les mor*
ceaux, choisis avec goût et d'une langueur suffisante « sont découpés de]
manière d présenter autant que possible un récit ou un exposé complet. Les ^
notices qui les précèdent sont , malgré leur brièveté , pleines de faits et
d'idées. Les travaux vraiaient importants sur chaque sujet, qui ne sont pas
toujours les derniers parus, y sont soigneusement indiqués. La première
partie du tome I" s'étend jusqu'à Dino Compagni et Cino de Pistoie. Le
second volume est consacré aux xv et xyi^ siècles. Il y a en tète de
chaque siècle, sous le titre de Koti^k storklie et de Noti^U kiterarù^ desi
résumés généraux très bien faits. Mentionnons aussi la dissertation de
M. Rajna, Origbti âdla Hngiux tialiana, dans le premier volume.
Les nmnuscriU de Dante drs Eibïwihèques de France, Essai d*un catalogue rai-
sonné par Lucien Auvray, avec deux planches en héliogravure. Paris »
Thorin, 1892. In-S», v-196 pages. — L'objet de ce travail, publié, on ne
voit pas bien pourquoi , dans la BlbîiotUqiu des Écoles françaises d'Athènes
et de Rome (fasc. LVl), est de décrire » selon une méthode uniforme, tous
les mss. de la Commeàia^ de ses anciens commentaires, des opère muiori^
et même (n»* XLÎILI) ceux des traductions françaises, du xvi* au
XIX* siècle, que renferment nos bibliothèques. L'auteur a apporté un
soin particulier à la description matérielle et à l'histoire des mss. » de ceux
du moins qui se trouvent à Paris et qu'il a pu examiner par lui-mcmc* Pour
les mss. de la Commedia, M. A. a suivi le plan indiqué par M, Monaci dans
sa note sur la classification des mss. de cet ouvrage (voy. Rùmania^ XVIII,
34j)i donnant en tableau, à la fin de son travail, les variantes des passages
iodiqués comme types par le savant professeur de Rome. L'appendice con-
tient quelques extraits de commentaires inédits ou présentant des varianief J
imporuntes par rapport aux éditions. Ce travail est fait avec soin et intel-
ligence, Il y manque une table des mss. décrits, avec renvois aux pages où
il est question de chacun d'eux.
Dante Allighiekï. Traité de Félo^uinceimlgaire, manuscrit de Grenoble, publié
parMAGNtEN et le D"- Prompt. Venise, Oïschki, 1892. în-80, 57 pages et
35 feuillets reproduits en phototypîe. — La partie importante et durable
de cette publication est la reproduction phototypique du ms., qui a été
exécutée A Grenoble même. Cette reproduaion, il faut le dire, est médiocre-
ment réussie. Assurément elle est supérieure aux fac-similés exécutés par
l'ancien procédé du calque, mais elle pourrait être meilleure. Le tirage survJ
tout est inégal. Le fac-similé du chansonnier Saint-Germain , récemment!
publié par la Société des /\nciens textes , et exécuté par le môme prtscédé, [
est bien supérieur. En outre^ le tirage étant en noir et en roug^, il s'est
CHRONiaUE 173
^issé quelques erreurs dans remploi de ces deux couleurs , conime
M. Rajtu(qui prépare depuis bngtenips une nouvelle édition de Detmîgari
dûquiû) Ta remarqué dans un compte rendu tout récent {Rassegtm Bibliogra-
Jka dslla Uiteratura ttaliana^ n<> i, p. 9). Qpant à l'introduaion, il y faut
distinguer deux parties très différentes. Dans la première, intitulée blhJiogra-
phkf et qui est» croyons-nous, l'œuvre de M. Maignien, conservateur de h
bibliothèque de Grenoble, on s'attache â montrer que le ms, reproduit en
(ac*similé est celui dont s*est servi Corbinclli pour son édition ea 1377.
Ccst, du reste, ce qu*mdiquait déjà Fraticelli (éd. Barbera, i8éi, p. 13 s).
Je relèverai une petite inexactitude. 11 est dit , p. 4, qu'au commencement
de ce siède les mss* du De vuigari eloquio « étaient bien connus à Paris et
minutieusement indiqués dans les cours de notre École des chartes ». Mais,
au commencement du siècle, l'École des chartes n'existait pas. Il est pos*
sible que ChampoLlion, qui a professé à cette École de i8}o à 1848, et qui
était de Grenoble, ait connu le ms, de cette ville, mais je doute qu'il ait
eu â en parler dans son enseignement. En septembre 18^9, me trouvant à
Grenoble, je collationnai le même ms. sur la première édition de Fraticelli;
M. Guessard, qui m'a%*ait prié de faire cette collation, n'en tira aucun parti.
Le reste de riotroduction est dû, croyons-nous, â M. le D*' Prompt. Ou y
trouve, sous le titre à*Obu'rvaiions parikuluns^ une suite de remarques déta-
chées auxquelles le traité de Dante sert de texte et plus souvent de prétexte.
Beaucoup de ces remarques, dont Tordonnance laisse bien à désirer, sont
extrêmement contestables* Je citerai, par exemple, le fameux vers Rafd mai
ûmtch ^ahi atmi (Jnf. XXX, 57) qui est interprété à l'aide du français (et quel
irançais^)et de l'espagnol de la façon suivante : Re feîh mai amûyt sahias
ûlmas, Çà et 11 quelques aperçus ingénieux, mais, dans Tensemble, manque
de critique et d*infomiation. — P. M.
StrtU ii Substrat, Gemalcgia poporeïor baUanm^ introducere la tomul III din
Biymotûgkum tnagnum Romania^ de B, P. Hasdeu. Bucarest, 1892. In-40,
XXX vit p. (avec 4 cartes et 2 tableaux). — On accueillerait avec grand
plaisir cette annonce de la reprise de la grande œuvre nationale de
M, Hasdeu, qu'on craignait de voir interrompue après le deuxième
volume, quand même le morceau qui sert d'introduction au tome ÎIl
o*aurait pas par lui-même une haute valeur. Des faits complètement nou-
veaux y sont produits en faveur du système que Tautcur expose avec
conviction, et qui est essentiellement celui-ci : les Thraces, dont les Daces
ne sont qu'un rameau , ont été complètement romanisés, à rexccpiion des
Albanais; i cette population romane, qui occupait toute la péninsule des
Balkans, se sont superposés, aux vie-viF siècles, les Slaves, en sorte que les
Bulgares et les Serbes actuels sont réellement àt^ Thraco-Romano-Slaves;
le btin ne s'est conservé qu'en Roumanie {Valachic et Dobroutcha), et
les Roumains de Macédoine et dlllyne sont venus d'au delà du Danube
au X* siècle, chassés par l'invasion des Magyars : ainsi s^expiique l'étroite
«ffiaitc des trois grands dialcaes roumains (à la même époque aussi des
Î74 CHRONiaUE
Roumains ont passé en Moravie, ei, slavisés plus tard, forment lâ encore
une population romano-slavc). Ce sj^stème prête assurément à la critique
par plus d'un côté et appellera de nombreuses discussions ; mais on ne peutj
méconnaître et l'importance des textes allégués par Tauteur et la force de '
ses raisonnements. Nous nous bornons présentement ^ annoncer ce nouvel
et puissant effort du savant à qui rhistoire et la philologie roumaines
doivent tant^ en exprimant le vœu que XEtymoîogkum trmgnum marche
dorénavant d*un pas rapide et ininterrompu vers son achèvement,
Pio Rajna» Gdid da Camino. In-iJ*», 1 3 p, (extrait de VArchiviû storico italiam^
S. V, t. IX, 1892). — La Gaîa» fille du huon Geranio da Camino, men-
tionnée par Dante au ch. XVI du Purgatoire, seraît*ellc identique à une
personne fort peu recommandablc citée (mais non nommée) par le
Padouan Giovanni di Non (voy. Rom. IV, 161) comm^ iorortm (L fifiam?)
nobîHs miUtii Gtrardi tk Camino} M. Rajna, dans cet article plein d'une
érudition très spéciale, discute celte hypothèse et plusieurs autres (notam-
ment Téquivalence du nom de Gaia avec celui à\4ica^ qui reparaît plusieurs
fois dans b lamillc de Camino) , et n'arrive qu*à conclure qu*ou ne peut
rien en savoir au juste*
Ùk Be^khungen iiviîchen Spankn and Ekutscbtaftd in dtr Litteratur dtr hiUrn
Làmkr. L Tell. Bis zum ï%. Jahrhundert. Von Arturo Farinilli. Berlin,
1892. în-80, 72 p. (diss. de Zurich). — Le litre de cet opuscule n'en donne
pas une idée absolument exacte : il y est seulement question de ce que
les Allemands ont su, pensé et dit de TEspagne. La vraie connaissance 4c
TEspagne et des Espagnols par les Allemands ne commence qu'au
xv« siècle, grâce aux relations de quelques hardis voyageurs ; auxvi« siècle,
elle devient bien plus intime p.ir réleciion de Charles-Qpint i b dignité
impériale et b lutte de la Réforme contre le catholicisme. Les renseigne- '
ments recueillis par iM. F. sur les témoignages, très divers, des sentiments
des Allemands envers les Espagnols aux xv!* et XYii* siècles sont fort
abondants, paraissent très exacts et sont interprétés avec intelligence. Pour
le moyen âge, il semble qu'on aurait pu trouver un peu plus : Wolfram
ne mentionne pas seulement quelques noms espagnols; il prétend, comme
on sait, que b partie de son poème qui n'est pas traduite de Chrétien vient
de Tolède; M. F aurait aussi pu menlionner le drame de Hrotsuitsur le
martyre de Tenfani Pelage à Tolède (en 92 s) * ïBart}Te dont elle tenait le
récit d'un témoin oculaire.
Attdrfo^ CapcUùiîi reçH Framorum Ek afnore Uhri tns. Recensuil E. Trojei^
Havniae, Cad, 1892, In-u, Lvi-^yo p. — Ce volume, très élégamment
exécuté, ne peut manquer d'être bien accueilli; il donne , d'après tous les
manuscrits, un texte du fameux ouvrage d'André le Chapelain qui n'a pas
seulement ravantagc de permettre i tous de le lire commodément , mais
qui est établi avec beaucoup de soin et généralement d'une façon qu'on ne
peut qu'approuver. La lecture du texte et de Tintroduction, fort judicieuse
et discrète» qu*y a mise M, Trojel, n'en sera pas moins une déception pour
CHRONiaUE 17$
ceux qui pouvaient s'attendre â y trouver une solution des problèmes
soulevés par le singulier écrit d'André, Ce n*esi nullement la faute du
sdv^int éditeur d.inois; mais les manuscrits ne lui ont livré aucune donnée
nouvelle, et il ne lui a pas été possible d'illcr au delà des derniers résultats
ou des dernières conjectures de M. Rajna dans l'écrit dont on a rendu
compte ici (XIX, 625) : il faut en rester lu jusqu*à la découvene peu
probable de tïouveaux documents. Un seul petit fait ressort de la compa-
raison des manuscrits, c'est qu'ils ne présentent pas tous, comme je
i*avais cru, la forme fautive Almoria; U forme Alinoria se rencontre dans
quel^jues-uns. Dans Tédition, on peut parfois contester la façon dont
M. Tr. a combiné les manuscrits, mais comme il donne toutes les
variantes utiles, on peut toujours refaire le travail. Il aurait sans doute
trouvé, en cherchant bien, d'autres emprunts faits par André aux auteurs
das&tques. Le nom iïJmpMia (p, 181) n'est pas celui de la Fenîce de
Cligh {Plifmu n'est que dans les manuscrits les moins autorisés) : c*est
VAtn/flise de fùucon dt Camite^ et c'est un témoignage de plus en faveur de
la vogue sans pareille de ce poème. — G. P.
Dk Pfoverbfs au Ccnk dr Brttagm^ nebst Belegcn aus germanischen und
romanischcn Sprachen» von Dr. Johannes Martin, Erlangen» 1892 (progr.
de la K^l, buyer. StudùmuslaU ^u Erkngen), ln-8", 57, — Nouvelle édition
de ce petit poème jadis imprimé par Crapelet. Le commentaire de
M. Martin atteste une connaissance étendue de la littérature parémiogra-
phtque ; mais les Proverbes au conte dt Bretagtie, malgré l'addition de Ce dit
U viJairti après chacun d'eux, ne sont de vrais proverbes qu*en faible
minorité et ne trouvent guère ailleurs de pendants exacts. Les différents
recueils de prcrverbes au vilain mériteraient bien plus une étude. Le texte est
établi avec soin, V, 47, 1. nesscroii', i\i En croire \ i$o Aus /es; 237 mati
J76 i'itt; 318 S*aus; les vv. 335 et }j6 doivent être intervertis; 382
Miamm bom est a tuer; 396 Et; 402 Se; 434 ni' est net (donné en note
L comme la leçon du ms.» corrigée en m\'iiue\ est-ce une erreur d'impres*
sioo ï) ; 4^7 Vers home. Dans les notes, on constate assez souvent que Tédi-
tetir n'a pas bien compris son texte , et les rapprochements qu*il lait entre
ce texte et des proverbes connus sont à cause de cela tout à fait erronés.
Lampyris italien. Stuggio iniorno ai nomt de! la « luwiola » in ïtaïia^ per Carlo
Salvioxj, 15 sept. 1892 (noKze Salvioni-Rossi), — M, Salvioni s'occupe
de préparer une Faune poptdaire italienne, qui ne peut manquer d'être fort
bien accueillie. Le spécimen qu'il nous en donne ici a un grand intérêt et
notts présente une richesse vraiment surprenante. Le savant auteur est loin,
dit 41, d'avoir fait des investigations complètes, et il nous présente près de
cent cinquante noms populaires donnés à la ludole , quelques-uns tout à
dit singuliers; une trentaine ont été recueillis dans le seul canton du
Tcisin. Il les groupe d'après Tidéc qui s'est exprimée dans chacun d'eux ;
mais pour plusieurs l'origine et le sens propre sont restés introuvables : tels
lont asdocatascio (nap,), mocarèïa (Brianza), parmirora (lorab.), etc, M. S.
lyfi CHRONIQUE
compte publier prochainement des essais analogues sur les noms du lézard
et de la salamandre. Les recueils de ce genre ne sont pas moins instructifs
pour la linguistique (rien ne fait mieux voir rextraordinairc et complexe
jeu de la phonétique et de Fanalogie) que pour l'étude de la ps\'chologie
populaire* On aurait et*.' reconnaissant à Fauteur de joindre à son recueil
le texte des formulettes, abondantes en Italie, qui s'adressent à ta lucioîe.
Gli amori di Belinda t Milate^ bruscello pubblicato per cura di Giovanni
GiANNiNi. Lucca, Gîusti, 1892. In- 8^, 2$ p. — ^ Le hrusaUo est un
spectacle propre au pays lucquois ; îl se distingue du maggîo toscan noum-
ment en ce qu'il est écrit en octaves. Le spécimeo qu'en publie M. Gianninî
n'est pas sans intérêt pour la connaissance du théâtre se mi -populaire encore
florissant en Italie; il forme comme une illustration au beau livre où
M. A. d*Ancona a étudié le maggio,
Traclatus de divenis ht s tort i s Romanorum et guibmdam alin^ verfasst in Bofogna j
î. ]\ 1526. Nach eïner Handschrift in Wolfenbûttel herausgegeben voii|
Salomon Herzsteen. Erlangen, Junge, 189^, In-80, 64 p. (i4<^ fasdc. des
Erlanger Bdtrâge ^ur eiîgî. PhiïoL and vergî. LiUeraturgtsçhkble), — Ce
petit recueil de 69 contes, quelquefois tnoralisés» compilé à Bologne en
1326, méritait d'être connu, et M. Herzstein Ta publié et commenté avec^
soin. Il montre qu'il n'est dans aucun rappon direct avec les Gesta Ramat
norum f comme l'avait cru M. Œsterley. Il donne les sources des bistoiresl
quand îl les a trouvées (les indications du compilateur sont souvent!
inexaaes), et renvoie aux ouvrages de MM. d'Ancona, Crâne, Œsierley, etc. ,
pour les autres versions des contes, La plupart de ces histoires sont prises
aux auteurs btîns profanes ou ecclésiastiques et n'ont pas par conséquent
grand intérêt ; quelques-unes méritent plus Fattention : citons (n<> 65) le
conte de Salomon qui devine le sexe de deux enfants vêtus de même que lui
présente la reine de Saba, et deux anecdotes sur saint Louis (n» 55 et 59;
cette dernière est une curieuse altération du trait connu de la punition
infligée par saint Louis au sire de Coud ; voy. Journal des Savants , 18S9,
p» 614). Le conte de la pie qui se pose sur le casque d'un Romain allant au
combat (n^ 66), qui rappelle évidemment Fhistoire de Valerius Corvious»
n'est peut-être pas sans rapport avec la légende de la statue de ConstantiiiJ
(voy. Graf, Rmmi, II, 1 14). Le conte des aveugles et du veau qu'ils doiveni 1
essayer de frapper (n« 68) se retrouve ailleurs. Le conte 55 est pris à
Etienne de Bourbon (J 95), qui le donne comme ayant été employé par un
célèbre prédicateur de croisade; celui-ci Favait emprunté au début de ta
Vengeance Ragitidel (voy. Hisi. Utt. de h Fr,, XXX, 65), N^ 57, l t, I. cocus
pour cccus^ et F 12 cociis vesttr pour cecm vù\
Lé propriétaire-gérant, E. BOUILLON.
ÈtAOùM, ¥Mûrtkr rHiM», ixi^iuiicun*
LE MYSTÈRE DE L'ÉPOUX
LE DIALECTE DU MYSTÈRE DE l'ÉPOUX ET LA LANGUE DU COPISTE»
A. — Ix dialecte de Vauleur.
Le Mystère de TÉpoux, on le sait, fait partie du cycle de
Noël. Composé, en grande partie du moins, en langue française,
il semble être le plus ancien drame non seulement français,
mais même roman, qui nous soit parvenu. A cet intérêt il en
joint un autre, celui du dialecte, qu'il est cependant assez difE-
cile de fixer. En efiet, quatre particularités seulement ressortent
des rimes comme ayant dû appartenir à la langue de l'auteur.
i« C'est d'abord la rime : dirum : comandarum : no7îi (y, 1 1-13),
qui nous montre que la première personne du pluriel du futur
n'avait point d'j et que la voyelle était ç et non pas e, comme
en provençal. 2** Ensuite les timcspechet : net : luieet (1. bateiet)
(y. 16-18), laideniet : claufiget : pauset (v. 21-23), ester : démo-
rer : doner : coseler (v. 70-73) prouvent que l'auteur ne distin-
guait pas entre e correspondant à un a latin libre accentué
devant une consonne orale (excepté c), et le son qui, venant du
même a mais soumis à la loi de Bartsch, aboutit en français
central, sous l'influence d'une palatale, au son fVr, c'est-à-dire
que notre poète, dans les deux cas, prononçait un e simple.
y La rime dit : aici :aici (v. 26-28) nous montre la chute du /
final latin dans le mot dicit. 4° La rime seros (pour serors) :
glarios: vos : espos (v. 74-77) rend probable que Vr devant s dans
le mot serors ne se prononçait plus distinctement par le poète.
I . Dans toute cette première partie, les vers du Mystère sont cités avec le
numérotage de Boehmer, Koschwitz et Stengel.
lyS \V. CLOETTA
En tenant compte de l'antiquité de notre poème, ces quatre
particularités combinées n'excluent pas seulement le provençal
et le franco-provençal, mais aussi Test du domaine de la langue
d'oïl, le français central et le normand, et nous renvoient i la
partie de TOuesc située au sud de la Normandie. Comme il
s'agit du xiï*' siècle, on peut même encore exclure la Bretigne,
à cause de la rime t : ie (voy. Goerlich, Dk Hordwestlkhen Dia-
kkte der langue d'oïl, Franiosische Sttidien, V, p, 13),
Par contre, PEpître farcie de saint Etienne présente les phé-
nomènes énumérés : i** jotû 14, arrù 15, trovû 40 et 43,
praû 5 8 ; 2° coniresier: niestev : deraisner : soner : damier 21-25, ^^c- *
voy. Foerster, Revue des langues romams^ y série, t. H, p. 8 et
10; Koschwitz, Comnientar :^u dm àltesten fran:{osischen Sprach-
denkmàîern, p, 208; 5^ pre <i *precet 59, etc., voy. Foerster,
îi., p. 10; Koschwitz, /, r., p. 212 s.; 4** saignas i, pour
saignors, qu'il faut probablement corriger en saignor. Mais
aussi les textes du Nord-Ouest (avec les restrictions faîtes
ci-dessus) et du Sud^Ouest analysés par M. Goerlich, et la
Passion Sainte Catherim analysée par M. Tendering et publiée
par M. Talhert, nous montrent les mêmes particularités, voy.
Goerlich,, Die nordwestL DiaLy p. 79, 13 s., 87 n° 3, 63; Die
stidwcsi lichen Diakkte der langue d'oïl {Franxpsisc}>e Sîudien HI),
p* 30, 24 ss,, 83 s., 79; F, Tendering, Laut- und Format'
khrc des poiîevinischen Kaîharimnlebem (Dissertation de Bonn,
1882, et Arcbiv fiir dus Situlium der neueren Sprachen und Litera-
turen, p. p. Herrig, t. LXVII), §§ 161, 10, 96 (rf/ < "ciîcît
Sainte Cath. 2222,/fii<facii m, 2038, 2097, etc.), 83; Dos
poiteviniscbe Caiharimnleben und die iihrigen sûdwestlkfien Denk-
màler, Barmen (Programme), 1885, p. ir et 14; Talbert,
Sainte Cathrine^ note au v. 272. Pour arriver à un résultat plus
précis, nous sommes donc obligés de recourir aux formes qui se
trouvent en dehors de la rime, ce que nous ne pouvons faire
sans avoir préalablement étudié les rapports entre la langue de
Tauteur et celle du copiste (ou des copistes qui ont successive-
ment transcrit notre poème). En même temps, une comparaison
constante avec les textes de FOuest sera indispensable. Je pré-
viens que, si je n'ajoute pas autre chose, ce sera toujours le
domaine de la langue d*oïl que j'entendrai; le normand sera
toujours exclu; laTouraine sera comprise dans le Nord-Ouest.
Donc, Ouest = a) Nord-Ouest : Bretagne, Maine, Anjou,
LE MYSTÈRE DE l'ÈPOUX
179
I
■
I
I
Touraine; b) Sud-Ouest : Poitou, Aunis^ Saintonge, Angou-
mois.
Le travail de M. Goerlich est insuffisant pour l'Angoumoîs,
qui n'y est représenté que par quatre chartes d'une valeur fort
douteuse, et desquelles M, G. n'a pas même tiré tout le parti
qu*il aurait pu. Des deux chartes de Cognac, la plus ancienne,
celle de Î262 (Saintonge et Angoumois, n" xni, chez Goerlich),
n'est qu*une copie, et l'autre, celle de 128 1 (le n^ vin de
Goerlich ; je la cite d'après Boucherie, Dialecte poiiann, p. 379 s),
s'en distingue par différents traits caractéristiques, quoique les
deux chartes nous viennent originairement du même person-
nage. Môme en ne tenant pas compte, dans la charte de 1262,
du mélange de différentes formes, dû évidemment au copiste
(par exemple, les imparfaits en -eent et en -oiait^ les premières
personnes du pluriel en -oms et en -ans, etc, voy. Boucherie,
î. r., p. 380 s.), il restera toujours entre les deux chartes
d'assez grandes dissemblances, qui demandent une explication.
Ainsi, entre autres, on lit dans la charte de 1262 dich 109,
dichr 108 et no, dichs 126 et 131, à côté de dict, n s., et de
di^, r* pL (voy. Boucherie, /* r,, p, 381, Goerlich, 5«^îi'. Dm/.,
p* 90), tandis que dans celle de 1281 nous ne trouvons que
ffuys 6, feytes 8. Pour Jarnac (le n" vn de Goerlich), M. Goer-
lich n'a eu à sa disposition que les extraits que Boucherie
communique d'une copie qui inspire bien peu de confiance.
Enfin, pour Angouléme, M, Goerlich ne se sert de nouveau que
d'une seule charte (le n'' ix; je la désigne par 5 dans Tétude
qui suit), bien que Boucherie en eut réuni quatre.
L:i plus ancienne, que j'appellerai A (p. p. Boucherie, L c,
p. 372), et qui, d*aprés Boucherie, quoique écrite dans la
première moitié du xii* siècle, remonterait au moins au xi*^ ne
contient que quelques mots de langue vulgaire, qui tout de
même méritent notre attention. Une autre charte (/. f. p. 375),
que je désignerai par B, est de 1270; c'est la seule dont
M- Goerlich ait tenu compte. Une troisième, C, de quelques
années plus ancienne que la précédente (elle est de 1264;
I. Boucherie avait été moins afïîrmatif là^dessus dans la Revut de VAunU^
di îa Saintonge ci du PoUou, t. ¥(1867, 1), p. J23. II vaudra mieux, en tous
CBS, s*en tenir au commencement du xii« siècle.
l80 W. CLOETTA
Boucherie n'en donne que des extraits, ib, p, 376 s.), a été
défigurée à plaisir par deux scribes peu consciencieux qui Tont
successivement copiée, et ne mérite pas qu'on s'y arrête; elle ne
contient que très peu de mots qui pourraient avoir conservé
leur forme originale. Enfin , Boucherie {ib, p, 374) avait
encore publié une charte scellée à Angouléme en 1260 et que
je désignerai par N, Quoiqu'elle soit de dix ans plus ancienne
que B, Boucherie, suivi en cela par M. Goerlich, a cru
devoir la rejeter, à cause de sa teinte provençale plus prononcée,
comme n'étant pas un spécimen réel du dialecte angoumoisin»
mais « un bâtard de la langue d oc, égaré en Angoumois n,
une charte écrite à Angouléme par un Marchois ou un
Limousin.
Je ferai d'abord remarquer qu'une charte n'est pas nécessaire-
ment rédigée au lieu même où elle a reçu le sceau; elle pouvait
y être simplement apportée, à cet effet, déjà tout écrite. En
outre, les chartes, tant vantées par les philologues modernes
pourleur fidélité dialectale, n'en subissaient pas moins Tinfluence
d'une langue littéraire ou, si Ton aime mieux, gouvernemen-
tale, et cette influence devient plus grande, plus on se rapproche
du quatorzième siècle (voyez là-dessus les remarques judicieuses
de M. Goerlich, Sudtv. DiaL, p. 2 et 6). Ceci dit, constatons
d'abord, pour la charte B, que la personne qui y parle et qui
ensuite y a apposé son sceau et l'a délivrée au comte d'Angou-
lème habitait Angouléme même. Quant à la charte N, elle a
aussi été scellée à Angouléme, mais par une autre personne que
celle dont elle émane- En eflet, les auteurs de cette charte
sont deux frères de Nersac, lieu situé i 9 kilomètres ouest-sud-
ouest d'Angouléme sur un coteau dominant le confluent de la
Charente et de la Boeme, et la personne à laquelle ils ont
affaire habitait Saint-Médard-de-Barbezieux, où les deux frères
avaient une propriété. Saint-Mèdard est à 5 kilomètres nord-
nord-est de Barbezieux, sur le Beau, affluent gauche du Né. Eh
bien, le caractère presque exclusivement provençal de N nous
oblige d'admettre qu'il a été rédigé à Nersac ou à Saint* Médard,
car, comme le remarque M. Paul Meyer, Romania^ \1, 633 (cf.
aussi IX, 199), « au moyen âge la langue d'oc s'étendait assez
loin au nord de la Gironde et se confondait avec la langue dVil
à peu près entre Barbezieux et la Charente. » Nous avons donc
un spécimen de la langue d'oc parlée dans le voisinage sud-ouest
LE MYSXèRE DE l'ÉPOUX i8i
d'Angoulême devant nous; il me sera permis de comparer cette
chane avec les chartes d*Angoulème ^ et 5 en essayant de
compléter le travail de M. Goerlich pour ce qui concerne cette
\illeS
Voyelles. Dans A et 5, aussi bien que dans N, a latin final
atone est toujours resté a : sua A 3 , una A6 ; dans B nous trouvons
fema 3 ; Fila //c^fîcr (Vilhonneur, canton Je La Rochefoucauld),
j, vila s; EngoUsma 4, 5, 9, 11, 13 ; j/a 12; qmresnm 15 ; une
seule exception, et encore dans un cas où Va final doit s'élider :
septante an^ 16; même dans C on trouve : contra 15; inutile
de donner des exemples de N, Si cependant cet a est suivi
d*une X, nous avons e dans A : does reges (rigas) 5 (de même
devant -ment : oîdréemmt < *iiuctorica -+- m en tu 3), et
dans B : liycetts ktres i, 14» nosîns 5, sckfiàs (^= seelés) 14; mais
remarquez Tarticle Je las dans le nom de lieu : Saint Geneys dt
las Moliera (= S'-Genis-des-Moulières, à 9 kih nord-nord-est
d*Hiers3c) B 9; malheureusement le cas ne se présente pas
dans N. Remarquons, du reste, que dans B Ve atone dit voyelle
d'appui est plusieurs fois rendu par «, et que le même fait se
présente encore plus souvent dans N, Exemples de B : honuinage
II, samadi 15, les noms propres d'habitants d*Angoulôme Peyra
< Petru iSi 1/ Faura (= Le Fèvre) 7; dans N : faira
< fratrc i^durablarncnî 5, 11, 16 {mais durablement S) ^ redra
(= rendre) 8, chaqua 9, Peira <; Petru ir, nostra^ masc, 12,
mdrabla^ masc, 19 *. L*^ Ubre tonique est toujours resté a^ dans
Nj même quand il est soumis à la loi de Bartsch : confcnnat 10,
doftat 18, vertat 17, etc.; outreiat 10 * ce dernier cas ne se pré-
sente pas dans 5, mais nous y trouvons doné 13, 14; seîeljées 14;
cependant Ta Ubre tonique y est maintenu dans le nom propre
1, Qpand je oe dte pas A, c'est qu'il n'a pas d'exemples; quant à C, <Jtii
\ mérite aucune confiance, je ne le cite qu'cxceptionneîlement. Pour ïa charte
M comparez ce qu'en dit M. Tabbé Rousselot {Lts modifications pl>otiètiques du
Imtgagt^ Hudiéts ditm le patois d'une famille de Celk/rQuin^ Paris ^ 1891, p. 175»
n« 11), qui la désigne directement comme charte de Nersac.
t. On voit que b voyelle d'appui est dans ce cas toujours immédiatement
finale ou immédiatement contrefînale (c*est-i-dire protonique immédiate;
finale de la première moitié du mot divisé en deux par Taccent), cp. ci-
dessoiD» p. 19J, n. I,
iSa W. CLOETTA
i> Faum 7 % et il y est encore conservé devant n : plan 1 1 , Pour
-ariu N et 5 ont également -ier : deniers doblie:^ N 7, chevaliers
B 2. — é libre accentué n'est pas diphtongue dans A : esters s
<: exter(i)us (cp. G. Cohn, Su fjixwatidlungen^ i89r,p.28}),
ni dans N : te ^ <i tenet. Pour é -\- i remarquez : le mey qiéd-
rcsma 5 15 et diema {= dîme) iV6, 13, 15^ 17, 21 ; à la syl-
labe atone : cissy N 16, eycco N 23. — f libre accentué est resté
e aussi bien dans les chartes d*Angoulème que dans N; pour ce
dernier, il serait superflu de donner des exemples; pour A
voyez : outràrmnt < ^i u c tor 1 c a + me n i u j , reges < rig as 5 ;
pour B : m que 6, ce qui prouve que dans por quoy il nous
avons à reconnaître une influence littéraire, et que sa%foer 3, 6,
doit être prononcé saver\ même dans C nous trouvons trts
(=1 trois) 9. Il est encore intéressant de constater que fl, en
dépit de l'influence du français littéraire qu*il a visiblement
subie, nous a même conservé la forme sia 12, 3' pers, sg, subj.
prés, de estre^ tandis que les autres textes du Sud-Ouest ont
seiî; mais la formation -ia se rencontre pour toutes les autres
personnes, soit dans Turpin I (sia^^ sianî)^ soiiàzns Sainte Cathe-
rine (si* devant ab, V" pers* sg,, 1220; sias; siàm; siàs 1020;
siant, sian), — Notons ensuite pour ill, éll : ctals B 1 (C :
ceaus 2, eaus 7, cbasteaus 10; mais ittm 6) et sehalB 14; par
contre dans N : cens r, seu (sigillu) 18, 21. ^ — ç reste o; dtus
B ï6 doit certainement être remplacé par dûus ou d^s; cp. dans
la même charte : amor 3, segnhr 16 et même dans C : mon--
segnor i, serors ré (mais seruers 15), de nos 12; does A y, dos
N 24, etc. — Dans JV, la diphthongue au et rt + / + cons,
sont devenus ou, quand ils se trouvaient dans une syllabe
atone : pmiset 21, autrui (^= autrui) 22, ou dich (ad + l'art.)
II, 12, 15, outrciat 10, outrei (subst. verbal de *auctorico)
14; de même dans A : outrànunt 3. — Dans N, les finales
-ïum et -ia de quelques mots qui, pour la plupart, sont de
formation savante, perdent la seconde voyelle et conservent Vi
comme syllabe finale : testimoni 17; parrosi < parochia 6,
preieri 22,
Consonnes* Je constaterai d'abord la vocalisation de 1'/
1. Sans doute à cause de la vacalisatîon du h^ cp. Gocrlich, SûJa'. Diai.^
p. 96, et Rou&selot, î, c.^ p, 204, 238 et 2^9.
I
I
LE MYSTERE DE l'ÉPOUX 1R3
devant consonne, même quand la consonne ne fait pas partie
du même mot ; dcu Javant dkb B 8 ; aussi dans C : generau cos-
tume 5, especiau costume 6, coporaumcnt % ^ teu manière 10, etc.; une
seule exception dans B : ceals i, qui certainement doit être lu
ceaus ou cens (cp* à la page précédente)* Dans N : deu mas 6>
OH dkh ri, 12, 15; diu seu mossenlmr i8; sau (imprimé X tort
san) son drechurage 22, N est même allé encore plus loin; il
montre, contrairement à 5, la vocalisation de 17 finale aussi
quand le mot suivant commence par une voyelle : eu^ pron. de
la 3* pers., devant r/, 4,8; seu (sigillum), devant a, 21;
Miclku 10, à la fin d^une phrase et devant et ; mais mil et dos
cms 23. 5 a dans le même cas aussi mil, mais après 1 la vocali-
sation de 17 est, dans tous les cas, rare dans le Sud-Ouest de la
langue d'oîl (voy. ci -dessous § 19; dans C je rencontre /rwx
<I fi il us, mais cela n'est d*aucune importance dans un texte
aussi corrompu) ; cependant on trouve, en outre, dans B sehal
14» à la fin d'une phrase et devant f, de sorte que B ne semble
réeUement pas vocaliser 17 finale devant un mot commençant
par une voyelle ou à la fin d'une phrase. — LV est tombée
devant 5 dans deniers doblie^ N S, — Quant à Vu finale isolée,
il est curieux de constater que i4s*accorde avec JV pour la laisser
tomber, tandis que B la maintient ; il est vrai que A n'a qu'un
seul exemple :do <, do no 4 ; N : /^ < te net 4, emarnacio 23 ;
par contre B : environ 5 ; nieyson 6, 7, et même meysons 6; plan
II ; en la vila 5, en rencarnacion ly, en que 6. — Les groupes
Ir, dr deviennent i>, non seulement dans AT, maïs aussi dans B,
cependant dans les deux chartes on trouve à côté aussi Tassi-
milation à rr : veyront ne orront B i ; verran N i ; Peyra
< Pctru B 17, Peira N ii\ faira <fratre N 2. Le rfintervo-
cal est tombé : Sanht Mehart ' (= Saiot-Médard-de-Barbezieux)
N 7; si cette chute avait lieu après une voyelle labiale, il s'en
dégagea un w par suite de Thiatus : uviren yf 9, qui rappelle les
formes limousines aussi par la désinence. Pour le /final, N suit
généralement le traitement provençal, tandis que les chartes
d'Angoulême montrent le développement français , mais des
deux côtés on trouve des contradictions* Ainsi le t final déjà en
latin, qui devrait toujours tomber dans N : /;« 4, q < est r6,
t. C'est ainsi qu'écrit la charte d'après Tibbé Roussdot, /. c, p< 206»
184 W. CLOETTA
y est cependant maintenu dans les formes verbales fut 4, 13,
23, fit 12; après « il y est toujours tombé : vcrran i, /^ 4^
dtven < *debunt 4, 8. Dans ^ nous trouvons : virent e uviren
9 ; quant à 5, il n'a laissé tomber le / final déjà en latin que
dans fu •< fuit 14, et, après la voyelle atone j, dans sia t2>
pour seit^ y pers. sg. subj. prés.; il Ta gardé dans les autres cas :
veyront ne orront i. Le / devenu final seulement en roman est
toujours conservé dans N, même après n : part 5, 13, 17 ; agut
13, receubut 14, vertat 17, abat (abbé) 19, outreiat 10, cmfer-
mat 10; durabîammt 5, 11, 16, durablement 8j avant 24; dans
yj et 5 il est toujours conservé après une consonne, Vn non
exceptée, mais il est tombé quand il n'était pas appuyé par une
consonne : doîiéB 13, 14. — Le son ts final est, dans AT, géné-
ralement rendu par ^ {Arnaui 1,3; salid^ i^aba^ 2i^pa:^2^ etc.,
mais tos 1^2 4, ^tc.^y cependant on le trouve souvent aussi écrit à
tort pour une simple j, ce qui nous prouve qu'il était déjà réduit
à s; quanta 5, le^ final n'y est maintenu que dans an^ 16, dans
tous les autres cas il est écrit s. — Le f devant a> ch : charta,
charira Ni, 18; cha^aliers B 2; de môme c devant r, i > c. Le
c n'a pas dégagé d'i dans Ja^^om B 3, faiem A/" 3, 10; pa:^ N 2.
Pans B (qui n*en a du reste qu'un seul exemple), ainsi que
dans N, et devient ch' : dich N 11, 12, 15; 5 8; dichi N 2î;
dicha N 13, 15; drech N 23 ; druhs N 16; dreehurage N 20,
23 ; drechurages N 14; fach N 23 ; mais le groupe net n'est pas
traité de la môme façon dans les deux chartes; dans N il aboutit
à : nk : Sanbt Mehart 7, sanht Micf)eu 10, Sanht Chibart 19,
sanhi 24 ; dans B il devient bit : Saint André (Charente, soit le
village à 8 kilom, de Cognac, soit le village près de Blanzac) 2,
Saint-Gemys 9 *. Le ^ latin entre deux voyelles dont la seconde
est a, passe à la chuintante sonore g dans reges < rigas.
1. Je laisse décote le mot savant of>tava < octava N9,
3, Cp. aussi ci-dessus, p. 179, — Uhistoire du groupe^/ n'est pas encore
éclaircie. Les textes limousins, y compris les chartes» le rendent tantôt par it,
tantôt par ch^ et par diâférenies autres graphies encore, qui toutes ont besoin
d'être soigneusement expliquées. Pour net, la question est encore plus
compliquée. Aussi dans les patois il y a mélange pour les deux groupes (voy»
Chabaneau, Grammaire limûusim, p. 65 s,, Rousselot, l. c,^ p. 189, 19^,
241 s.). Je ne puis, en ce moment, entrer dans les détails» mais j'espère bien
pouvoir le faire prochainement^
LE MYSTERE DE l'ÉPOUX iSj
fLLf A $, mot fréquent dans ces contrées, en limousin : rejas.
On sait que, surtout dans les Sctnmjs poiteinns, le c latin prend
le mètne son quand il se trouve dans ces mômes conditions :
mica > migi\ etc., voy. Goerlich, Sûdtu. DiaL^ p. 90'. — p
entre deux voyelles devient b dans N : saber 3, 10; mais dans 5
il va jusqu'à v : saiH^er 3, 6,
Quant àla morphologie, je citerai, pour raniclej le sujet
singulier lo, dansN : lo quaus 21, et le rég, sg. ïe 20 et îo 24,
dans la même charte; combiné avec la préposition ad : ou N
Iî> 12, ij; enfin le rég. plur. masc. los 14; dansB, nous trouvons
au fém. pi. de las^ mais dans un nom de lieu : Siiint Gcneys de las
Matières (voy. ci-dessus, p. 181); dans tous les autres cas nous y
trouvons les formes françaises. — Le pronom pers. masc. de la
3*pers. est, au cas sujet, m dans N 4, 8 (les deux fois le mot
qui suit est et); au cas régime, Io dans A4, — Le pronom pos-
sessif conjoint de la première personne du pluriel est, au cas
rég. plur. masc, nosires dans AT 5, 9, et la même forme con-
jointe se trouve, dans B 5, pour lefém. pi. Le pronom possessif
conjoint de la 3* pers. du singulier est, au cas sujet pluriel
msLSC^siues dans iV 5, 8. — Quant au pronom démonstratif, N
donne pour le cas rég. pi. masc. : ceus i; B: ceûls i (C : ceaus 2,
etc., icôtéde/^wjé, cp. ci-dessus, p. 182); dans B, nous avons,
en outre, fjycetes i , f. pi. (ces dans C 2), mais dans N : equesia i,
C sg. Le pronom démonstratif neutre esto dans ^ 9. — Remar-
quez encore, dans A, le nom de nombre pi- fém. dots 5. — Dans
N nous trouvons les troisièmes personnes sg. do prés. ind. q 16
< est, te 4, la 3* pers. pL deven 4, 8. La désinence de la pre-
mière personne du pluriel du prés. lod. est toujours om dans B :
Ja^oni 3; avùm 3, S, 8 (deux fois), ir, 13 ; ienom^^ 5, 8, 9, 10;
esîom 6; par contre, dans N^ elle est -em au présent et -iam à
l'imparfait ind. de la 2* et de la 3* conjugaison \ faiem 3, 10;
aitm 10, 13, 15, 18; tenem 20; danam 14. — Notons dans B la
y pers* sg. du subj. prés, sia 12 (cp. ci-dessus, p. 182). —
Parfait. Dans A, nous trouvons la i" pers. sg. de la i" con-
jugaison ; comprei 2, où la désinence -et n'est pas la forme pro-
vençale -ded i, mais un affaiblissement de -ai, comme le montre
la comparaison avec la même personne du futur, si fréquente
!• Cp. aussi Rousselot, /. c, p. 216, no 5.
i86
W. CLOETTA
dans Sainte Cathrine^ où -ai est également devenu -« ; mais la
y pers. sg. qui se trouve dans N : pouset 21, est bien la forme
provençale; elle ne se rencontre, pour la i" conjugaison,
presque dans aucun texte du Sud-Ouest de la langue d'oïl (seules
exceptions : dehîcsî dans Turpin // 319, 11 ^=2* pers. sg. du
parf. de dignare, et donet^ 3* p. sg. du parf., Coutumej de
Clmrrofjx 459, 29 ^ Il est curieux de constater qu'à côté de cette
forme provençale du parf. de la t'* conj-, N donne les troi-
sièmes personnes fut 4, 13, 23 (/« dans B 14) et fit 12. Notons
dans A : tarent e uvircn 9 . — Voyez les troisièmes pers. pL du
futur verran N i, mais vcyront m orront B 1, — Remarquez
aussi dans N rinfinitif redra (= rendre) 8, les participes passés
pronu^ 15; aguî 13, recculmt 14 (mais dans C ; requis 3; volu
14). — Notons encore, dans la charte A^ les adverbes esters 5,
jos 5, la préposition ab 3 ; dans la charte N : la particule hono-
rable ^« < dominum précédant les noms d'homme (tn Ramp-
nou 4, en Pcira 11, en Robbert 19; cette particule est inconnue
aux chartes d'AngooIème). Finalement je noterai la différence
entre N et 5, par rapport aux noms des jours de la semaine;
N : didu{/) 24, 5 : samadi ij.
Nous voyons donc, à côté d'un assez grand nombre de traits
identiques, des différences essentielles entre les chartes d*Au-
goulême d*un côté, et N de l'autre, différences qui nous per-
mettent d'attribuer Angoulème i la langue d*oïl avec la même
certitude qu'elles indiquent un lieu d'origine provençal pourN;
et ce lieu n'est qu'à quelques kilomètres sud-ouest d' Angou-
lème, sur un terrain qui depuis a été conquis par la langue
d'oïl, Angoulêrae marquera donc le point sud-est le plus extrême
du territoire dans lequel notre mystère pourrait avoir été com-
posé.
B. — i> manuscrit et la langue du copiste.
Le manuscrit de notre mystère est bien connu; c'est le
fameux numéro 1139 du fonds latin de la Bibliothèque natio-
nale de Paris. Il appartenait autrefois à Tabbaye Saint-Martial
I. Miiiwires de la Soc, dés antiq. de rOmst, 1842; dctut 451, 4 et 7C3lk
présent donat.
LE MYSTÈRE DE l'ÊPOUX 187
de Limoges, où il portait le numéro loo. D'après E. De
Coussemaker {Histoire de F harmonie au moyen âge ^ Paris, 1S52,
p. 126, n. 4), auquel j'emprunte ces détails, le manuscrit ren-
ferme 235 feuillets in-4** composés de plusieurs fascicules qui
sont écrits par des mains et à des époques différentes* Depuis le
feuillet 32 jusqu'au feuillet 83 Técriture et la notation musi-
cale sont de la même main, qui ne date que du xn* siècle,
comme Ta plusieurs fois répété M. Paul Meyer. Le mystère de
TEpoux occupe les feuillets 55 r" — 55 v**. Il est précédé, entre
autres, par trois pièces provençales que je désignerai par les
chiffres romains /, // et ///. La première, au foL 44 r*», inti-
tulée Tu autim^ ne se compose que de six vers en langue pro-
vençale; la seconde, In fjoc anni circulo^ au fol. 48 r^, comprend
dix-neuf quatrains en partie latins et en partie provençaux; la
troisième, au fol. 49 r*. Versus sancte Marie ^ se compose de
douze quatrains, tous provençaux. Les autres feuillets écrits par
le même scribe contiennent des pièces latines, et ne peuvent
donc pas nous renseigner sur la langue qu'il parlait. Les pièces
provençales ont été publiées plusieurs fois, entre autres par
M. Paul Meyer, Anciennes poésies religieuses en langm d'oc y Paris,
i8éo (extrait de la Bibliot))èque de F École des Chartes ^ 5* série,
t. I), p. 14 ss, Gjmme elles ne contiennent pas un seul mot
français*, nous n'avons pas de raison pour douter que le
copiste ait été provençal. Si, par contre, nous trouvons des
formes ou des mots provençaux dans le Mystère de VÉpoux^
qui e^t français, ce mélange pourrait donc bien être occasionné
Lj>ar le copiste. Mais la question est très difficile à résoudre, car
'nous verrons qu'il s'agit d'une région limitrophe, où se ren*
contrent des traits caractérisant le Nord avec d'autres qui carac-
^lérisent le Midi. Une distinction rigoureuse entre provençal et
rançais n'est donc pas toujours possible, et c'est seulement au cas
nous rencontrerions des formes en contradiction évidente
I. Le pronom dxtqtui (cas r<5gO II 19 « se trouve aussi à Limoges» par
Itjccroplc djMis une charte de 1258, Docttmenîs bistonques has-îatins, provençaux
' français concernant,,, la Marâx et k Limousin, pp. Leroux, Molînier et
as, t, I (1883), p. 181, no Lxv, L 9 ; de môme lxvi (1259), 4f et dans
une charte de 1167, Char ta, chronique et mémoriaux pour sentir â l histoire de
k Marche et du Ui^misin, pp. A, Leroux, Tulle, 1886, n^LXxxvii, p. 92, L a.
Seulement dans les trois chartes, la forme est plus correcte : chasqm,ai% rég.
t88 W. CLOETTA
avec les rimes ou la mesure des vers qu'il nous serait permis de
les attribuer au copiste.
D'abord 0 est à remarquer que nous rencontrons deux formes
qui semblent bien être en contradiction avec la première rime
de notre poème : ce sont les mots avem 35, et pocni 72. Seule-
ment, X la rime, nous avions le futur composé avec avoir^ ici
c*est le présent de verbes qui devraient avoir la même dési-
nence. En outre, les formes en -é'w, quoique généralement
inconnues aux textes du sud-ouest de la langue d'oïl (voy,
Goerlich, DieSudwesîL DiaL, p* 30; ci-dessus, p. 185) sont la
règle dans la Passion sainte Catberim pour la première personne
du pluriel ind. prés, de la deuxième conjugaison, tandis que la
même personne du futur de la première conjugaison est en -um
(voy. Tendering, LaiU- und Formmîehre des poitmnisctjen Katha--
rinenlebens^ §§ iji, 160, léi^ 164, et comparez Das poitevi-
nisck Katfmmmikbenj p. 10 s,). Aifcm et poetn pourraient donc
bien appartenir à notre auteur.
Au vers 25, nous trou%'Ons dH < dicit rimant avec ûia.
dît est donc monosj^Ilabe et semble bien une forme provençale.
Nous la rétro uvûns dans les poèmes provençaux copiés par le
même scribe /// 10*^, dans les Préceptes religieux W 13 (pp.
Armîtage, Sermons du xu' siècle en vieux provetiçal), et trois fois
dans la plus ancienne version provençale de VÉvangih selon
saint Jean, XIII, 24, XVI, 17, iH (cp, Diez, Jahrb, / rom. «•
mgl, L. I, 365). Cependant dans Sainte Catkrine^ nous trou-
vons facit>yfli III, 2038, 2097; fecit > /« 667, 1691,
1870; mei i-ji, y pers. sg. du parf. de nteîre\ dicit *illaec
> di li 2222 pourrait aussi avoir été originairement dii li. Je
n'ose donc pas attribuer dit au copiste.
Mais il y a d'autres formes dont Tattribution à la langue de
Tauteur semble plus difficile. Ainsi pour Ta latin libre accentué
devant une consonne orale, nous trouvons toujours un e (voy,
les nombreux exemples ci^dessous, § i; — - je ne tiens pas
compte ici du groupe -atr*, voy. § 2}) excepté seulement le
mot preiat 75. Si le maintien de Va latin libre accentué devant
une consonne orale (excepté / et quelques cas particuliers) est,
en général, extrêmement rare dans le Sud-Ouest, il Test surtout
dans les cas indiqués par la loi de Bartsch (devant consonne
orale, bien entendu). Je n'en trouve même qu'un seul exemple:
arbergiar, Turpin I 274, 4; quant à predicar, Sainte Catherine
LE MYSTÈRE DE l' ÉPOUX ïSj
4ïO> il ne peut compter, étant un mot de l*Église. Tout nous
autorise donc à considérer la forme prtiat comme introduite par
un copiste provençal.
Le vers 74 est généralement lu : Akt areir a vostras saie seras
ou saie s., mais M. P. Meyer (^Rotn, VIE, 465) a contesté la
possibilité de lire sait\ et a cru pouvoir reconnaître plutôt le
mot j/nr dans la leçon très indistincte du ms. Cependant les édi-
teurs qui ont revu le manuscrit depuis ne se sont pas rangés à
cet avis et continuent de lire saie ou saie. Si le nombre des
autorités fait donc décidément pencher la balance du côté
de saie ou saie^ saie[s]y ou plutôt sajas (voy. ci-dessous § 7),
est aussi beaucoup préférable pour le sens. Seulement le
vers est alors trop long, et nous sommes obligés de changer
vostras en it^, ou plutôt twr (d'après Jouas, vdy, ci-dessous
5 27). Les formes proprement françaises du pronom possessif
conjoint sont, pour le cas régime du pluriel masculin et
pour le pluriel féminin, «t?^, vo:^. Cependant, dans la charte B
nous trouvons nostres nuysons 5 (voy* ci-dessus^ p. 185). En
outre, on rencontre comme formes conjomtcs du pluriel fémi-
nin ftostrcs i côté de no:^ dans Turpin I et // (voy. Goerlich,
Sfidw, DiaLj p. ro8), et vostres à côté de vos dans Sainte
Catfjerine (vostres paroi les 194S, et vosparolks 790, etc., voy. Ten-
dering, Laul- und FormenL, § 142), mais même dans ces textes
les formes proprement françaises prévalent, quoique, d'autre
pan, on y rencontre quelquefois, mais assez rarement, nostres^
vostres^ aussi pour les formes conjointes du cas régime du plu-
riel masculin. Il nous sera donc bien permis, puisque la
mesure du vers nous Tindique, de mettre vost b. la place de îw-
/ro^, qui serait dû au copiste provençal, quoique cette dernière
forme ne soit pas inadmissible non plus dans le dialecte de
Tauteur.
Dans les vingt-neuf vers romans que contient notre mystère,
les rimes et la mesure des vers ne nous ont donc fait connaître
que deux formes étrangères à ToriginaL Ce résultat est impor-
tant en ce sensqu*il nous montre que le copiste n'a pas remplacé
â dessein les formes originales par celles de son dialecte, ce qui
pourtant lui aurait été souvent facile, notamment pour les rimes
tne^ie) de a latin.
190
W. CLOETTA
C, — Restitution de la langue de notre Mystère et
détcrmimtion plus précise de son dialecte,
a, LES VOYELLES
i) Va latin libre acceomé donne e i*) non seulement dans
les cas où le français central a le même son, mais i^) aussi
dans les cas où, d'après la loi de Bartsch, nous devrions avoir ie.
Nous avons d*abord à la rime les formes : pcchet : ttet : luteet
(1. bateieî) v. 16-1S; les participes passés : hidenjet : claufi-
geî : pauseî v. 21*23 i doner : achapter : ester 66-68 ; ester : dcmo-
rer : doner : coseîer 70-73. Ensuite : malaureas : Uvrcas : meneias
88-90* En dehors de la rime, nous trouvons pour i') la
deuxième personne du pluriel de l'impératif akt 67; 74; 88
(deux fois), qui est bien une forme française; les participes
passés lai^et i8; gah{r)el 21; pour i^) oiet 11; aiseet (1. aiet)
12; prdat 75. Je change cette dernière forme en preiii (voy-
plus haut p. 189). duant aux mots oiet, *bakiety "^atct, *preiet^ il
est à remarquer que le poète ne les prononçait pas avec un ie
diphthongué, mais voyelle -\- i -\- e.
y ai laissé de côté les deuxièmes personnes du pluriel du futur
ainsi que de l'indicatif présent et de l'impératif des deuxième et
troisième conjugaisons, comme dortnet : atmdet, qui riment
ensemble aux vers 14-15, vers qui forment un refrain se répé-
tant après chacun des versets suivants* Atendet se rencontre en
dehors de la rime vv. 13, 28; on trouve en outre querct 66, 72,
73, aircî 67, veet 68, seret 90. Ces désinences pourraient aussi
être provençales, et même on pourrait se demander si cet -et^
dans la langue de l'auteur, n'avait pas un e <i è (-êtîs),
puisque dans le sud-ouest de la langue d*oïl on trouve souvent
Yi latin libre accentué rendu par e au lieu de ei (voy. Goerlich,
Sudwestl. DiaLy p. 38 ss.; Tendering, Laut- und Fortfienlehre^
§ 30, Das poitev, KatharinenL, p. 30; dans le Nord-Ouest ¥e
simple se trouve aussi dans ce cas à côté de la diphthongue «\
voy. Goerlich, Nordwestî, DiaL, p* 37 ss. et p. 87, n** 7).
Pour Angoulêmc nous avons même constaté uniquement le son
^ <; f lat, libre. Mais comme nous ne trou%'ons jamais, ni dans
notre poème, ni dans les textes étudiés par Goerlich et Tende-
ring, des deuxièmes personnes du pluriel avec la diphthongue et
LE MYSTÈRE DE l'ÈPOUX IJl
îj nous n'avons pas lieu de douter que ce ne soit k
désinence -a lis introduite dans toutes les conjugaisons.
2) -ata. Nous trouvons à la rime aux vers 88-90 : malaurcas :
liurtas : fneneias, et pour a latin libre accentué n'est pas inconnu
au Nord-Ouest, mais, à ce qu'il paraît, seulement à partir du
xrrr* siècle (voy, Goerlich, NordivestL DsaL, p. 10 s.); dans le
Sud-Ouest on trouve cet ci presque uniquement dans la dési-
nence -ata, où Yi semble amené par riiîatus (voy. Goerlich,
/. c. et SûdwestL DiaL, p, 18 s., 21 s,)* Mais aussi dans ce cas
les formes sans i prévalent. Peu importe, du reste, que nous
exprimions ce son par l'écriture ou non, pourvu que nous nous
rendions bien compte qu*i un certain moment le son / s* est
développé dans la désinence -ata pour obvier à riiiatus. Pour
plus de clarté et pour unifier rorihographe , je Tintroduirai
d'après tneneias dans les deux formes qui ne la présentent pas*
3) -atr*, voy. tr, § 25,
4) a + fi, voy* n finale, § 22.
j) a entravé devant nasale n'est jamais confondu par récri-
ture avec e entravé devant nasale, que la syllabe soit accentuée :
metchaans 68; presm 12, monumen 13; ou qu'elle soit atone:
cotmndarum 12; aictuict lî, 15, 28, latdenkt 21, desœnîre 24,
dokntas 35, S^^; tojamen 71. Ces deux sons semblent avoir été
distincts dans la plus grande partie de TOuest jusque vers le
xni^ siècle (voy. Goerlich, SildiucsiL Dial.y p. 42 ss., et surtout
Ni^ràw. DiaL, p. 29 ss. et 87, n" 8; Werner Soderhjelm, Das
Marîinshben des Pàm Gaîimau \ p» 16), mais ils sont confondus
dans VÊpîîre de saint Etienne (voy. Kosclnvitz, Commentât ^u den
àhisien frani^dsiscljtn SpracMenkmàUrny p. 210 et 216 s.) *.
6) a atone libre protonique est conservé dans conmndûrum
II, hjaftien 71, Dans Sainte Cathrine on trouve au futur et au
conditionnel plus souvent un a qu'un e^ quoique ;\ rinSnitif la
forme régulière soit en -tr (voy. Tendering, haut- und Formenl.^
t. Dans les Comntentùtioms variae in merfioriam actorum ccL annarum tdiâH
Vmvtriitm Hthin^formmis^ Helsîngfors, 1891.
a. A Ccllcfrouîn an H- cons. et en -f- cons, auraient été confondues déji
tu Xl« s., d'après Tabbé Roussclot (/. r,, p. 310-514). Mais alors le fait que
ces deux voj^cllcs nasales sont encore distinctes dans le parler de sa mère
demeure inexpliqué. L'abbé Rousseloi s'était bien fait cette objection à pro-
pos d'une auiTc hypothèse (p. jij, h 22-24).
192 W. CLOETTA
§ 5). Le maintien de Va atone devant la désinence -fmnt est
fréquent dans les dialectes du Sud-Ouest» surtout dans les
textes saintongeais et angoumoisins , dans les Coutunm de
Charroux et dans Turpin I; il se trouve même presque régu-
licrement dans Turpin II et dans Sainte Cathrim (cp. aussi
lonjammt y Sainte CatJmine^ v, 1897), "^^'^ rarement dans les
Sermons et dans les textes poitevins en général (excepté
Charroux) et jamais dans TAunis (voy. Goerlich, Sûdtv, DiaL,
p. 72 s., et Tendering, Das poiîev. Katharinenl., p. 9). Dans le
Nord-Ouest Va dans ce cas n*est que fort rare et un dévelop-
pement postérieur (voy, Goerlich, Noi'dw. DiaL^ p, 24;
M* Goerlich n'en cite que quatre exemples, tous de la Bretagne).
— L'^ atone protonique faisant hiatus avec la voyelle accen-
tuée est conservé dans nurchaans 68 ; la même voyelle formant
hiatus avec une seconde voyelle protonique est conservée dans
mahureas 88. Quant au premier cas, le maintien de Va est la
règle dans les chartes du Sud-Ouest (mais les Sermons poitivins
et les deux Turpin ont toujours e, excepté dans paor) et dans
Sainte CatJxrine, de quelque nature que soit la voyelle accentuée
(voy. Goerlich, SùduK DiaL, p. 73 s., et Tendering, Dos
poita*. KatbarinenL^ p. 9 et 26). Même dans le Nord-Ouest et
ailleurs cet a en hiatus se maintient quelquefois sous la forme a
quand la seconde voyelle est elle-même un a. Pour le second
nialatireaSj le maintien de Va devant u, quoique cet u ne
cas
soit pas la voyelle accentuée, ne fait point de difficulté dans un
texte qui semble bien être du Sud-Ouest, puisque la forme du
mot pourrait être influencée par {nial-^ aûr. En outre nous
trouvons par exemple dans Sainte-Cat farine : benafirc ^ benaûrea^
malauré, niaîaHre::^ (voy. Tendering, Laut- und ForinenL^ § 69).
7) a libre posttonique et final est maintenu dans terra 16,
scriptura 25 ^ ora 90. Nous ne trouvons rien de pareil dans le
Nord-Ouest, mais cette graphie est réguhère à Angouléme
(voy. ci-dessus, p. 181), fréquente dans les chartes de TAngou-
mois en général, dans les Coutumes de Charroux et dans Turpin I
(tandis qu'elle est bien plus rare dans Turpin II; voy. Goerlich,
SiidwestL DiaLy p. 72), et elle prévaut de beaucoup dans
Sainte Cathrim (voy. Tendering, Laut- und FortnenL, § 15,
et Das poitev, KatlhirincnL^ p. 9). Nous la laisserons donc
subsister. — Si, par contre. Va posttonique à la syllabe finale
est suivi d'une s , il est toujours rendu par un ^ à Angoulême,
LE MYSTÈRE DE l'ÉPOUX I93
comme nous l'avons vu, et dans les textes étudiés par
M. Goerlich. Cependant dans notre texte nous trouvons :
dolentas 35, 58, chaitivas ^^y^ 88, damnas 68, (vostras 74), malau-
reas 88, pmas 89, livreas 89, meneias 90, et jamais e. Vu le
grand nombre d'exemples, je n'ose pas corriger, d'autant moins
que les formes en -as, quoique rares, se rencontrent aussi dans
Sainte Catherine, Cette graphie pourrait bien répondre à une
prononciation plus ancienne où a final + s n'aurait pas encore
passé à «'. Quant à la forme las 75 du pronom personnel
féminin de la 3* personne, nous la trouvons dans Sainte
Catherine à côté de les (voy. Tendering, Laut- und FormenL,
§ 139), tandis que les textes du Sud-Ouest analysés par Goerlich
ne connaissent que les (voy. Goerlich, Siiaw. DiaL, p. 107),
comme les textes du Nord-Ouest. Nous laisserons subsister
laSy puisque nous maintenons -as dans les cas précités. Du reste,
nous avons rencontré l'art, féni. pi. las dans un nom de lieu
à 15 kil. nord-nord-ouest d'Angoulême (charte B, ci-dessus,
p. Il) et la même forme se trouve aussi, quoique rarement,
dans Sainte Catherine (Tendering, /. r., § 128).
I. Au xnie siècle, le changement de -as en -es a même atteint Cellefrouin,
voy. Rousselot, /. c, p. 293 s. Dans le courant du xiii* siècle, Va atone
immédiatement final doit également avoir pris un son sourd dans le Sud-
Ouest français, voy. Tendering, //. ce. y et Talbert, Sainte-Catherine^ notes aux
vers 64, 2315, 2342. Qpant â la graphie a pour la voyelle d'appui c, voy.
aussi ci-dessus p. 181, Goerlich, /. c, p. 12, Rousselot, /. c, p. 297 s. L*abbé
Rousselot, qui ne croit pas pouvoir attribuer une autre valeur que e à la
voyelle dite d*appui, conclut de cette graphie que Va latin immédiatement
final était déjà e antérieurement au xi^ siècle, à Cellefrouin et dans ses
environs, ainsi que dans la plaine de rAngoumois. Mais cette opinion est
complètement erronée. Remarquons d'abord qu'on ne trouve jamais a pour c
à U dernière syllabe, quand cette syllabe se termine par une consonne ; jamais
on ne trouvera altères > ultras, et le Cartuîaire de Cellefrouin distingue
absolument, comme le remarque l'abbé Rousselot lui-même (p. 293), la
finale latine -as, qui conservait son fl, de la voyelle d'appui -|- j, qui est
toujours rendue par -es. En outre, l'abbé Rousselot n'a certainement pas
trouvé, ni dans le Cartuîaire^ ni dans le Censier de Cellefrouin^ un seul
exemple dV pour a latin immédiatement final, et nous avons vu que les
chartes d'Angoulême aussi écrfvent régulièrement, et l'on peut dire sans
exception, a dans le cas indiqué. Mais ces mêmes chartes d'Angoulême nous
montrent avec la même régularité -as final latin rendu par -es. Il s'en sui-
JiMRa»Ùl, XXII. I 3
196 W. CLOETTA
Dictionnaire du patois sainiongeais^ Royan, 1869 (/>>=pour, par,
p, joj, etc»); Tabbé Rousseau, Glossaire poittuin^ 2* éd., Niort,
1869 ; Éveillé, Glossaire saintongeais^ Paris, 1887, etc, Cq pre est
donc la seule forme dans certains dialectes du Sud-Ouest, au
moins à partirjdu xvi* siècle, et cette même forme le mot per
la revêt la seule fois qu'il est écrit en toutes lettres dans notre
manuscrit. Vu, en outre, que tuus les textes du moyen âge (y
compris les chartes) originaires de ces contrées ont subi une
forte influence de la langue littéraire, et que le mot per y est
le plus souvent rendu par le sigle latin, ce qui contribue à nous
empêcher de connaître la forme vraiment propre aux endroits
où ces textes ont été composés, h seule chose logique me
semble de rendre les deux sigles qui se rencontrent dans notre
manuscrit par prc. Si dans les textes provençaux écrits par le
même scribe nous retrouvons pre ///4^, ce sera une vraisem-
blance de plus, car, comme nous allons le voir, ils appartiennent
à une région toute voisine de celle où a été composé notre
mystère.
Il) écce^ nous montre le développement provençal : aiso
10, (aisdl 15), aici 27, 28, 71. Les textes du Sud-Ouest analy-
se par M* Goerlich, ont les formes françaises, tt Sainte Cathe-
rine donne généralement : {i)cest, i^fuest^ (f)<^h içf^K 0)^0$ i\p,
(î')ri, isi. Mais dans ce dernier texte on trouve aussi : aquella
394, aiso 8j3, 1628, eiso 925, de même une fois aitanî 1855, à
côté de iiant^ qui est assez fréquent (cp. Tendering, haut- unJ
FormenUhre, §§ 19, 108, 143 ss., qui du reste confond isi ^=^ ici
avec isi = ainsi^ Sainte Caîkrine^ 78 et 969). Peut-être faut-il
aussi voir la forme provençale dans le « cri du bouvier pour
ramener ses bœufs de son côté » : aîcé^ aJci^ que cite M* P.
Jônain , Dictionnaire du patois saintongeais,
II) Cf œ latin libre accentué devant une nasale n'est pa
diphtongue dans pcnas 89, ce qui ne s*accorde pas bien avec le^
Nord-Ouest, qui originairement doit avoir eu dans ce cas la
diphthongue ei, mats ce qui est fréquent dans le Sud-Ouest,
voy. Goeriich, Stidw. DiaL, p. 41 s,, et Tendering, Laut- und
FornienL^ § 31, où Ton sera cependant étonné de ne pas ren-
contrer un seul exemple de poena. En effet, M. Tendering
considère la diphthongue ot? comme correspondant a un c ouvert
du latin populaire (voy. § 63 ; voy. aussi ib., § 6, et Das poitev*
^
I
ft
LE MYSTERE DE l'ÉPOUX 197
KatlxtrinenL^ p. 7), ce qui est bien surprenant ^ Tout de
même nous pouvons relever, nu § 63, les iotui^s pcnUy pcnes^ à
côté de peina et môme de pana. Nous avons vu qu'aussi à
Angoulème IV libre accentué n'est pas diphthongué.
13) Vl latin accentué devant/ + / n'est pas diphthongué et
le inouillement de 17 n'est pas exprimé par récriture dans cosd
72. Dans le Nord-Ouest on a généralement -cil (voy. Goerlich,
Nardw. Dial.^ p. 41 ; cp. cependant ib.y p. éo) ; dans le Sud-
Ouest, il n'y semble en tout cas pas avoir eu de diphthongue,
mais le mouillemeatde 17 s'y trouve généralement exprimé par
la graphie ?7» du moins à la fin du mot (voy. Goerlich, Sûdw,
DiaLf p. 45 s. et 78)» Cependant, dans Sainte Cathrim^ nous
trouvons costl à côté de coml et comcilQ) (voyez Tendering,
haut- und FormenL^ §§75, 90); nous pouvons donc conserver
la forme qui se trouve dans notre manuscrit*
14) à latin libre accentué n'est pas diphthongue dans pot 73
et dans oli 66. Vo non diphthongue se rencontre aussi dans le
Nord-Ouest (voy. Goerlich, Nordw. DiaL^ p» 43 ss. et 88,
n® 15), mais il est encore plus fréquent dans le Sud-Ouest
(voy. Goerlich, Siidw, DiaL, p, 64 ss. et Tendering, Laut-
und FormtftLf § 42; Das poittv. KaiharinenL^ p* 8). duant à
clif nous pouvons laisser de côté l'histoire assez compliquée du
groupe d + j à l'Ouest, à propos duquel M. Goerlich lui-même
se contredit (voy. SûdiiK DiaL^ p. 68 s., et Nordw, Dia!,,
49 ss,). Rappelons seulement qu'à Angoulème nous avons
trouvé f + I > et (ci-dessus, p, 182), et remarquons ensuite pour
d + * que Sainte Cathrim a régulièrement 0/ [une seule fois
(p}H : Uei : enei^ écrit enoi 1453, voy. Tendering, Laut- und
FormenL, § 47], Quant à oleum (ou olea), il ne se rencontre
dans Sainte Catfxrim que sous la forme oilc 2631, qui se
retrouve aussi dans les Sermons poitevins^ 127, i. Si, par
contre, notre mystère nous donne 0//, il faut d'abord observer
t, D*2près M. Tendering (voy. haut- unâ Forment.^ % 63), ce serait même
ont loi bicQ connue, que ae t\ oe correspondent également à un f ouvert.
Aussi M Gocrlichi Siktw. DinL, p. 72, déclare que les diphtongues ae et oe
fttfUgeot en généra] le sort de Ve ouvert du latin populaire, ce qui ne Tem-
pécbc pis d'enregistrer poena sous e fermé devant une nasale simple. Mais
^udf sont donc les cas où x est traité comme e ouvert? Pourtant pas
foc DU m?
I^S W. CXOETTA
que ce mot, évidemment influencé par le parler de rÉglise, ne
présente nulle part un développement vraiment populaire (voy.
W, Meyer-Lùbke, Grammaire des langues romanes y § St8), et
que des formations analogues se trouvent parfaitement dans les
deux Ttirpin (coenieterium > cimistcri^ voy. Goerlich,
Sndw, Dial., p, 12 et 52) et dans Sainte CaîJjerine (avangeli 249,
espa^i 2529; glori 605, ï5>8, 1858, 2575, gloiri 11 84, vicîori
498, éo6, justicî 18, 2201, mili 2057, terci < tertia 2650;
sacrifici rime avec jusud 17, 2200, avec vici 1870; vi^i avec
jusiice 579; mais, d'autre pan, il est vrai, on trouve aussi ;
sacrifice : prise 209, vi^e : sacrifice 1073, etc.; cp. Tenderîng,
Laut' und FornmiL^ §§ 16, 3) et 127)'.
15) ô latin libre accentué n^est pas diphthongué dans notre
texte : seras : glorios : ws : tspos 74-77, tspas 2j, i J (je laisse de
côté les formes nos, vos, quand elles sont pour ainsi dire
atones)* Ce fait est, jusque vers la fin du xrr siècle, propre à
tout rOuest, et vu l*antiquîté de notre poème, il est impossible
d'en tirer une indication plus précise quant au lieu d'origine.
ré) ôy H lariû libre accentué devant nasale est tantôt rendu
par Uy tantôt par (? : dirum : comandarum : nom 11-14. En
syllabe atone nous trouvons on, dans doner^ 66, 72.
Les indicitions de MM, Goerlich et Tendering sont, à ce
sujet, en grande partie erronées. Le fait indiscutable est qu€
Ton trouve dans tout TOoest un^ um à côté de (?«, om. Tout^
au plus pourrait-on constater que plusieurs textes se servent de
la graphie u surtout pour la première personne du pluriel, mais
cela n'indiquait nullement une différence dans la prononciation,
puisque les deux graphies se trouvent partout côte à côte. En
outre, nous avons les rimes comme preuves, non seulement
celles de notre mystère, mais bien d autres, par exemple, dansi
Sainte Catherine : hom : amopi 601, : otreium 691, ; savom 703,
891, ; creum 725, 759, ; doptcrum 1003, etc. Je supprimerai
donc dans le texte critique cette différence purement grapliique
et j*écrirai partout 0,
17) i\ H latin entravé devant consonne orale est, i la syllabe
I. Uabbé Rousselot, /. f., p. 272 s., die comme formes de noms de
saints usitées à ADgoulême : Ausonium > Ausony, Aptooiura >
Aptony,
LE MYSTÈRE DE l'ÉPOUX
199
i
I
ccentuée, rendu par un 0 : tôt 89, jors 89. C'était la règle dans
tout ]*Ouest, du moins jusque vers le milieu du xin" siècle*
18) La diphthongue latine au dans une syllabe protonique
devient ot lorsqu'elle se combine avec un / : oui 1 1 ; sinon elle
reste au : claufigtt 22, cntnpausei 23. A Angoulème, et même
dans la charte N nous avons rencontré m dans ce dernier cas (ci-
dessus, p. 182), et des formes commti pousé, pouser, ousocnî^ etc.,
se trouvent aussi dans les chartes saintongeaises et dans les
deux Turpin; Sainte CatJk'rine : outreié 1494, 1530 (Goerlich,
Siidw. DiaLy p. 70 s.; Tendering, Imuî- und FonmnU^ § 69),
Cependant dans Sainte Cathrim nous trouvons aussi quelques
exemples, quoique rares, de au\ M. Tendering, /. c, cite
auirdera 8 et auloriiei 24, qui est un mot savant, mais il omet
un exemple important : amm 32, i"* p. pi. ind. prés, de otr^
jjf accentué se trouve dans awia, 3' p. sg* prés, ind., Hk, 1333,
mais, à part cet exemple, au accentué donne dans TOuest seu^
Icment ou à côté de ^ '. Dans le Nord-Ouest, cet ou semble être
UD développement postérieur (voy. Goerlich, Nordw, DiaL,
p, 58), mais non pas dans le Sud-Ouest, où c'était une
diphihongue faible accentuée sur Vo, qui était ouvert (voy.
Goerlich, SîUw. Dial., p. 71). ou y était donc le son intermé-
diaire entre au et 0, et il se pourrait très bien que ce son fût
exprimé, ;\ la syllabe atone, par au dans notre manuscrit, si i*on
ne veut pas admettre que l'original eut encore réellement
conscr\^é le son au*. Il ne faut pas oublier que le Drame dé
r Époux est plus ancien d*cnviron un siècle que tous les autres
textes du Sud-Ouest (excepté la charte A).
P, LES CONSONNES
19) VI devant une consonne est vocalisèe dans deus (= de
avec larticle) 68. Elle est encore vocalisèe quand la consonne
1. Je ne tiens pas compte ici de graphies étymologif^ues et toutes
modernes où le son ç est rendu pnr au,
2. A CeUefrotUD, au atone venant de av ou al -h cons, n*est devenu ou
<|ii'au xtn« s.; à k tonique, ce même au s^y est conservé encore plus long-
temps. Quant i la diphtongue latine au^ T^bbé Rousselot n*a pas
(f exemples anciens 0, c,^ p. 25S s.; le nom de lieu Onac ne proLivc rien pour
CeUefirouin, *Agûstu et tabône n'ont rien à voir là dedans).
20O
W. CLOETTA
qui la suit ne fait pas partie du même mot : eu (== iJ) fo 21 >
eu [fna] trames 27, (d)eu nwnumen 23, non (^^ ml) is>s 72. Ce
fait se rencontre dans tout TOuest, même, à partir du xin' siècle,
quand le mot suivant commence par une voyelle (cp. aussi
ci-dessous, § 33)* Remarquons cependant que k vocalisation de
17 dans les cas indiqués pour notre Mystère se retrouve aussi
dans les pièces provençales copiées par le même scribe * : aut 1 2>
moîtî II 4% aut III 1 1 *, à côté de tnals 1 6, il est vrai ; ensuite :
deu cd II 10% i8% au so talent II 12 % au sa chau;^it II 14 % siu
jauuîî II 14^, queufrut III 6^, deu fruit III 7**, eu pot III 11^, l
est maintenue dans notre texte dans le nom propre Gabrieh 27,
où on peut la laisser subsister, dans salvaire, que j'écrirai sau^
vaire, et dans gentils 70, que je ne crois pas devoir changer,
car, aprèt j, 17 ne semble pas avoir été vocalisée dans le Sud-
Ouest, mais bien dans le Nord-Ouest (voy. Goerlich» Nordw.
DiaL, p. 68). Elle est complètement tombée dans ^/wm 18. A
côté de la vocalisation, aussi la chute de 17 devant consonne se
rencontre, quoique beaucoup plus rarement, dans tout le
domaine delà langue d*oïl qui nous occupe. Elle est cependant
particulièrement rare i la fin des mots; M. Goerlich, Nordu;.
DlaL, p. 60, ne cite que quelques exemples pour le Nord-Ouest
Çjue chose pour quel clyose, en Berr)', et quelques formes de
patois), et, Sûdw, DiaL, p. 77, un seul pour le Sud-Ouest
(Saintonge) : saea (sigillum), forme fréquente, mais qui,
pour le développement des sons, diffère absolument du cas qui
nous intéresse. Comme nous rencontrons Tw dans tous les autres
cas, notamment dans {d)ai, je lirai eu flum,
20) Nous avons déjà parlé de 17 mouillée à l'occasion du mot |
cosel (voy. § 13). Nous trouvons de même cosekr 73; à Tinté-
rieur des mots, 17 mouillée est assez souvent rendue par une /
simple dans Turpin I (voy. Goerlich, Sûdw, DiaL^ p. 78).
21) r devant s à la fin du mot. La rime (voy. plus haut,
p. 177) ne prouve pas absolument que IV devant s ne se pro-
nonçait plus du tout dans serors (voy. Tobler, Vcrsbau^ 2* éd.,
p, 1 1 1 s,; Ronmnia VU, p. 12e), mais une pareille rime se trou-
I. La même chose avait certaineniem aussi lieu à Cellefrouin, à ptrdr de
la fin dix xi« siècle ; voy. Roussclot, /. c.^ p. ajy et passim, où cependant les
faits n'ont fas été sufEsamment précisés.
LE WYSTÈRE DE l/ÈPOUX 20 T
veri certaînement d'autant plus souvent que h prononciation
de IV devant s aura été moins distincte (voy. Settegast, Benoit
de Sainte-More, pp. 9 s. et 34 ; Cloetta, Poème moral j p. 88 et 95) *.
Je Gonservxrai donc la graphie seros 74 comme elle se trouve
lans le manuscrit et, d'autre part, je ne supprimerai pas IV de
^socors 76, d'autant moins que l'influence de secourir pouvait faire
maintenir Yr,
22) Un finale isolée est tombée dans e la 22, m vos 70 (tw'n
avret ou m navret 67, noi 14, nouji} ex dans Jordu 18. D*autre.
part» nous trouvons en terra lé, ett Betkem ly^ en cfcrn 90. La
chute de Vn finale isolée, suivie ou non d*une s de flexion, est
inconnue à la charte B d'Angoulême^ tandis que A nous donne
do < dono 4 (voy. ci-dessus, p. 9); elle se rencontre assez
^souvent, après les voyelles 1, 0 et «, dans Turpin Ily dans les
^Coutumes de Charroux% et surtout dans Turpin I (voy.
Gocrlich, Sûdw. DiaL, p. 81). Elle est plus rare dans Sainte
iCaîlx'rine^ où elle ne se présente que quelquefois devant l'j de
rflexion [voy, Tendering, Laut- unJ Forment,, § 90; ajoutez la
rime tte^ : fens (= foenum) 1946, supprimée à tort par
M- Talbert], et plus souvent dans quelques monosyllabes suivis
de mots commençant par une liquide. Ainsi l'un peut v constater
la tendance marquée de supprimer Vn de en dev.mt m, fi et / :
€ tnantesseni 365, a côté de en mainte sen 2035 et en mainta guisa
40; e nulla guisa 610, e ma compania 1531, e lui créés 1693, e
fncntûire 2542; mais en cel temps 16, m crois 58, en terre 43, en
tant 6), mci^ 129^ en un sen 2074, etc., en général en. Nous y
:. Cf. aussi Remania XV, p, 620.
a, Selcm M. Sttchier, Grundris, L I, carte Vîï, Vn finale aurait éttS au
mo\Tii âge, toujours maintenue à Charroux, même devant l'j de flexion.
Cette assertion ne saurait se fonder que sur les Coutumes, où cependant les
xceptioas sont assez nombreuses. D'abord pour nc/ï, h forme sans n finale
^Iffévaui décidément: 447, 18; 448, 22 ; 431, 15 ï 452*4; 453, io\ 460, 17 et
21; 461, 4, et parmi ces 8 cas de m^ quatre, le premier et les trois derniers,
sont devant un mot commençant par une voyelîe ; le premier, en outre, d la
6û d'une proposition subordonnée. fM?«, par contre, ne se trouve que trois
fois, les deux dernières fois devant voyelle : 448» 21 ; 450, 12 et 16. A part
•w«». On ne trouve la chute de Vn finale que devant Vs de flexion : une fois
r459, ^^ 0^ autres fois aucuns), et quatre fois fif^tis 448, 28; 4$6, 18;
r|62« 2t; 464, 23 (jamais mguns^ mais toujours negun).
202
W. CLOETTA
trouvons aussi les pronoms possessifs to 218, 2551, et so
1 580, mais seulement devant nom; h négation m devant los joj
(mais ttûti ih)S pre^ gain 608, non volt pas 609, non sai 28, non
fust 31, et même non nuzvlés 2523, etc., etc.), et co pour corn
devant l'article le 459, 604, I2j i, 1947. Je laisse donc subsister
e la, et je ne supprimerai pas davantage la forme m>, que Ton
trouvée aussi indépendamment de Tinitiale du mot suivant, par
exemple dans les Coutumes de Charroux. Dès lors je ne vois
aucune difficulté non plus d'admettre non avret ou no $t^avrei^
pour nen (cp. Sainte Cat})crine 794 : el no^n a soin; 1066 i
nulla paor non n*aveit; 1412: Non ni avtit un ; n <i\nàc aussi
V. 1340 r Que ses dmvallers na somos^ etc.); noi (monosyllabe,
d*après la notation musicale et d'après Sainte Catherine 678 : M
noi entent point de raison) pour ni; nou pour ncl (voy* Nou clmn-
geront por [texte : point^ nul avoir ^ Païen Gastinel, Vie de saint
Martin de Tours, pp. Bourassé, p. 23^ S> ^ ^til fmne nou âetssont^
v. 46 du passage de la 2* partie de ce même pocme p. p. Werner
Soderlijelm dans les Comtmntatianes variae in memoriam aetorum
CCL annorum de TUniversité de Helsingfors» 1891; Sainte
Cathrine a noi \nol comandot 87, noi pos 132, etc.]» nolsy à côté de
nel^ nels^ nes^ voy. Tendering, Laut- und FortnenLy § 138),
La question est bien plus difficile pour Jordn. Va latin libre
tonique, non influencé par une palatale et devant n, était dans
le Nord-Ouest une diphthongue nasale encore au xii'' siècle
(voy. Goerlich, Nordiu. DiaL, p. 17 s.); dans les chartes du
Poitou (excepté Charroux), nous trouvons ain et fiw, les chartes
de TAonis et de la Saintonge ne connaissent que ain; dans une
charte de Cognac et dans les Coutumes de Charroux nous trou-
vons ain à côté de an, tandis que les chartes de Jarnac et d'An-
goulême ne nous donnent que an. Quant aux textes littéraires,
ain prévaut même dans les deux Turpin^ où cependant an est
déjà beaucoup moins rare que dans les Sermons poitevins; par
contre, dans Sainte Catherine, nous ne trouvons que deux fois k
diphthongue [^peina : setmaina 2649, Jmntana : pana (^= peitm)
903; le mol plantain 2559, que M. Tendering cite encore,
n'existe pas; c'est planta (^plenté) t^;i], tandis que dans tous les
autres cas nous y trouvons an (cp. ci-dessus, p. 182; Goerlich,
Sildw, DiaL^ p, 22 s.; Tendering, Laut- und FormenL, § 6, et
Das poilan KatharimnL^ p. 11 s,, 22, 23). Mais la chute de Vn
finale après a ne se rencontre dans aucun texte de l'Ouest, de
LE MYSTfeRE DE l'ÉPOUX 20 J
sone qu'il nous faudrait tout au moins Vire Jordan^ en admettant
que le copiste ait oublié la barre sur Va. Je n'ose tout de mi^me
rien changer^ d*abord parce qu'il s'agit ici d'un nom propre
étranger et emprunté à TÉgUse, ensuite parce que notre mys-
tère diffère encore dans plusieurs cas de tous les autres textes de
l'Ouest, en se rapprochant davantage du provençal.
Remarquons encore qu'aussi les poèmes provençaux transcrits
par la même main ne conservent généralement pas Vn isolée
(ou séparable) ' : /'e' / i ; lai <C s o n u s / 2, 5(J <; so n u // 2 %
h II ^^^i sa <i suum // 12% 14% mais tmn II 19*; do
<dono // i6S <donet /// i2^ ;io III r^; mais non II 4^,
&• (de\^ant x, p), à côté de tw III 2% 7*/,% 8**, 9^ (devant
«, /, m,/, c); un devant voyelle /// 3**; en II 19'', III 3%
4^> S % 9** (devant voyelle, v, /, /), à côté de e la III 10^.
23) n finale après r : efern 90. Dans le Sud-Ouest, comme en
Normandie, Vn finale après r s*est maintenue assez longtemps
(voy* Goerlich, Stidiv, DiaL, p. 81, et Nardw. DiaL, p. 88,
n" 4), et elle est aussi le plus souvent écrite dans Sainte Cathe-
fine. Mais si les rimes de ce dernier poème nous montrent que
r« de jorn ne se prononçait plus (voy. Tendering, Lauh und
Formrtîl.^^^'^, Das poitev, KatharinenL, p. 13), il n'est pas néces-
saire que ce fait remonte à notre mystère, plus ancien d*environ
un siècle. 11 n*est donc nullement besoin d'y voir une influence
provençale. D'autre part, jor^ déjà dans Saint Etienne 5*
24) Vn à Tîntérieur du mot est tombée dans cosel jl^ coseler
75; efrrn 90, awent 70; loiarnm yr. Q.uant à la chute de Vn
devant!, elle est fréquente d;M\s Sainte Catl)erim, voy. Tendering,
Laut' und Fonnenkhre^ § 90 ; dans à^s mots comme efern, efant^
elle n'est pas inconnue à TOuest (cp. Goerlich, Nordw. DiaL
62); mais on la rencontre surtout dans des combinaisons avec
des sons gutturaux ou palataux : seigour, juige (= juin), juig,
poig, loig, tcsmoig^ oig, tuaicre^ renoicicrenî^ renoice dans des textes
du Nord-Ouest (voy. Goerlich, Nordw. DiaLy p. 61 s.); ^^5-
moig^ loigy poig engieg^ jug (= juin), coig dans des textes du
Sud-Ouest (voy. Goerlich, Siidw, DiaL, p. 82); cp, aussi
I, A. Cdlefrouia, cette n était tombée après toutes les voyelles déjà au
Xi« siècle; voy. Rousselot, !. c, p. 220 et 222 s., où Ton trouvera aussi des
remarques concernant l'^^volution du son en question dans les environs de
Ccllcfrouin et dans le Sud-Ouest français.
204 ^^'' CXOETTA
doigic 464, à côté de dmngic^ 471, dans V Alexis octosyllabique,
Rom, VIIl; comecet, Sainte Catkrim 376, D'autre part, on
trouve aussi dans les dialectes de TOuest Tintercalation d'un n
devant des sons gutturaux ou palataux : cngau^ netigun^ lairmcin
(voy, Goerlich, Sûdw. DiaL, p* 80) , arangcssânt (= arra-
chassent), 5am/^ Catherine 22\'j,arancherenî 2263. Nous laisse-
rons donc aussi subsister loianun, ou plutôt Jojamai, cp. hnja-
ffient y Sainte Catherine 1897, et remarquez ^unovii agelQ= angeï)
dans les poèmes provençaux/// 3^.
25) Le groupe tr devient ir : salvatre 13, areir 74* De pareilles
formes se rencontrent plusieurs fois dans Sainte Cailyerine (cp,
Tendering, iMut- und FormcnL^ §§ 20 et 97, Das poiiev. Kathari-
itenL, p. 13 s., où i! n'est pas tenu compte de dr :veirei 1151,
vàrént : creirint 2036, oiranî 264, etc.), et elles sont plus fré-
quentes dans les chartes du Sud-Ouest (où Ton trouve très sou-
vent veironî et oirotit} que ne le ferait supposer M* Goerlich,
Sûdiu, DiaL, p. 10 s., 19 s.^ 49 s. et 84 ss. ; nous en avons
aussi rencontré à Angoulème (ci-dessus, p. 183) *. Enfin ce déve-
loppement provençal est assez fréquent dans les Sermons poitevins^
et il prévaut dans les deux Turpin; mais Turpin //ne le connaît
pour -atr- que sous la forme évidemment postérieure eir^ qui
prévaut aussi dans Turpin L
26) Ccst pour le traitement du / final que notre mystère se
distingue le plus complètement des autres textes de TOuest* En
effet, il s*accorde sur ce point absolument avec le provençal, et
c'est bit:n de la langue de Tauteur même qu'il s'agit, puisque
nous avons la rime comme preuve : L Le / final latin tombe :
venra 28, 7é;/(? 17, 21; dii < dicit {: aici) 25; es 2^;fasen y
p. pi. 76; pour vcnit 16, cp. les parfaits en -it en provençal et
voy. ci-dessous, § 3 5 ; dans so 89 même le groupe nt est supprimé.
Par contre, nous avons une exception : auTtît < convenir 70,
qu'il fiot évidemment corriger en awen. — IL Le / devenu final
en français : a) tombe après n : presett 12, monutncn 23, leja-
men 71; on peut joindre à ces exemples vurchamts 68, régime
pluriel qui indique un rég. sg, merchaan (voy. au § suivant); b)
reste dans dans tous les autres cas : dormit j^^ pot 73, tost 76;
î. Voyez aussi une cbarte de Bourg-Charente de Tannée 1250, Rousselot.
Le, p. 2J7, no 2.
LE MYSTÈRE DE l'ÈPOUX 205
le groupe net devient nt : pont 6j (sur ce mot cp. ci-dessus,
s 30).
Les autres textes de la partie de l'Ouest qui nous intéresse
montrent un traitement tout différent du / final. Il est vrai que
le copiste de Saint Etienne y qui semble avoir parlé le même
dialecte que Tauteur et qui est bien encore du xii* siècle,
néglige le / final latin, mais il néglige aussi le / devenu final en
français, et Tautcur le négligeait de même, du moins quand le /
se trouvait entre deux voyelles en latin.
Dans les textes occidentaux * du xiii' siècle nous voyons l'an-
cienne tradition des écrivains normands se maintenir dans la
graphie et à la rime, quoique aussi le / final appuyé par une
consonne ait été en train de s'effacer complètement. Aussi
dans Turpin I les graphies sans / sont très rares et, même dans
Sainte Catixrine, elles disparaissent devant le grand nombre
d'exemples qui nous montrent la fidélité à l'ancienne tradition
normande (c'est encore es que l'on rencontre relativement le
plus souvent à côté de esty qui prévaut de beaucoup partout :
esy Sainte Catherine 187, 188, 624, 666, 882, 2157, 2158; une
seule fois dans Turpin I et deux fois dans les Sermons). Les
textes du Sud-Ouest vont même jusqu'à maintenir assez sou-
vent le / de eret (imparf. de estre), de la 3* pers. sg. de l'indi-
catif présent de la première conjugaison et du subjonctif présent
des autres conjugaisons, quoiqu'il ait cessé depuis longtemps
d'être prononcé : apelety donet, etc.; facet, diel, oiet , etc., et
jamais, ou presque jamais, Vé (a) de ces formes ne s'élide dans
les vers de Sainte Catherine (voy. Tendering, Das poitev.
KatharinenLy p. 13 et 26 s., qi Sainte Cathrinc, v. 565 : Soque
de Deu ère apris; v. 601, etc.); mais, d'autre part, la rime n'en
admet pas le / (ère : 1ère 38, ; père 159, 237, etc.). Les rimes
de Sainte Catherine conservent pour le t final les mêmes condi-
tions que les poètes normands du xii' siècle. Le / appuyé n'est
négligé que deux fois : crei < crédit : dei < debeo 49 et tei
< te ; iw* < vïdit 667; les rimes repentis (= repentist) : di:(
< dictos 183, destrei:^^ : pest (subj. prés.) 797, sont suscep-
tibles d'une autre explication, ou pourraient aussi être des rimes
imparfaites, comme mûrit (parf.) ; seveli:;^ (p. p.) <)S$yIaidament :
I. Pour Angouléme et la charte AT, voy. ci-dessus, p. 183 s.
2o6 \\\ cloetta
poineni 2054, parut (parf) ; saupt4i (p. p.) 2278, si Ys (^
finale ne tendait pas déjà h, disparaître aussi bien que le /,
appuyé ou non, qu'il eût été fiaal déji\ en latin ou qu'il ne le
fût devenu qu'en français (voy. ci-dessous, § 27). Quoi qu'il en
soit^ à part ces deux ou quatre rimes, l'ancien état normand
est rigoureusement observé par le poète, et les rimes qui en
font foi sont excessivement nombreuses et seraient, pour la
plupart, impossibles en provençal : Dé : celé6î , : mutuù'j^^y :
tnostré 841, : escouté 869, ; torbé 929, : gré 441, : poesté 743,
861, 977, : verte 815, 983, : humanité 909; îé (pron, pers.
fém,) : mandé 195, : clamé ^4^ ^ : lé <i la tu 1499; mes : secret
371; /w •* Jhesu 637, 819, 835, : vertu 967» ; rtspondu 1663,
1940, 2464, ; creu 1679, ; batu 1776; marci : di (i'* pers* sg,
près, ind.) 1097, ^* ^*^^'' (P» pO I02r, ; oï (p. p.) 2656; tu :
veû 159s ; emmi : mari (subst.) is6r, ; cri (subst.) 1633 ; ami :
converti (p* p*) 1710; ici (iqui) : conmrti (p. p.) looi, ; esba-
loi (p. p.) 1331, : safcli {p. p.) 2312, ; sufri (p* p*) 2622; dit
(p, p.) ; vit (parf.) 393, 1645, 2570, ; vctiguit (parf.) 1756, ; oït
(parf.) 2570; (/// (prés.): oït (parf.) 639, 1437, : vit (parf.)
1894; cslit (p. p.) ; vint 321; dcstruiî (prés.) : luit 351, 779;
fuit (prés.) : trestuit 1029, : destruit (p* p.) 2160; cort (subst,):
tort (subj. de torner) 1109; forfait (p. p.) : ait 11 29; cret
(creit) : dreit 999, : destrcit (p. p,) 1766; csieit : drcit 2342;
trait (p. p,) : fait (près*) 2428, : ait 2434, etc., etc. Il est
même curieux de constater que les parfaits en -// conservent tou-
jours leur / (Tendering, Dos poitev, KaiharintnL, p. 26) et qu'ils
ne riment jamais avec i (y compris les participes en / de îtu).
Nous avons donc des preuves nombreuses et indiscutables
d'un traitement absolument différent du / final dans le Mystère
de VÉpoux d'une part, et dans les autres textes de TOuest
d*autre part.
Remarquons encore que les poésies provençales écrites par le
même copiste s'accordent absolument avec notre mystère ; nous
y voyons deux fois le / écrit \ tort : talent II n' (mais à la rime
avec entcn : piamcn; cp. aussi // 19 la rime : talan : avan :
jan, etc.), rcceubt III 10' (mais sab, y pers. sg., rime avec gab:
chah II 4, etc.), et une fois il manque : apor^ i* pers. sg,,
// 10** (mais mort : tort III 10*''), en contradicrion avec Tusagc
suivi partout ailleurs dans ces poèmes.
J'ai longtemps hésité à propos de la forme 5<? < sunt de
LE MYSTÈRE DE L*ÉPOUX 2O7
notre mystère, maïs» en définitive, la comparaison avec les mots
en-fftQ) et -anQ) cités au commencement de ce paragraphe, et
surtout avec rinr»(/), m'a décidé à le considérer comme intro-
duit par le copiste ou comme dû à une simple faute d'écriture,
et à le remplacer par son. Par cette dernière forme encore, notre
texte se rapprocherait sensiblement plus du provençal que tous
les autres textes du Sud*Ouest, En effet, ceux-ci ne connaissent
presque que sonî ou sunt; même dans Sainte Caîberhh\ son ne
se trouve qu'une seule fois, et seulement trois fois dans le long
texte de Turpin I; nulle part dans Touest de la langue d'oïl on
ne rencontre so (voy. Teudering, Laut- und FormmLy § 159,
Goerlich, Siidw. DiaL, p. 84 et 135).
27) Le ^ final du français central est rendu par un simple / :
I** à la deuxième personne du pluriel présent de Tindicatif :
aundit 15» nutni 66, 72, vat 68; 2** à la même personne du
présent du subjonctif (= impératif) : oid 1 1 ; 5° de l'impératif:
akndti 13, 28, dûnmi 14, qncrct 73, aki 67, 74, 88 (deux fois);
4** à la même personne du futur : avret 67, sercî 90; j*' au cas
sujet singulier des participes passés : net 17, lavet 18, luteet
(1. bakUt) t8, battit 21, (22), ^alfÇ!)et 21, laidenjet 21, claufiget
22, pauset 23 ; é** au cas régime du pluriel : pfcheî 16, lot 89.
7** Ce même signe / représente aussi un c latin devenu final
après la chute d'un ^ dans crot 22.
n n'y a pas une seule exception dans notre texte, si ce n'est
ai(J)ix 12, que d'autres lisent cependant aisat ou môme aiset
et que nous remplacerons sans hésiter par aiet. merchaans 68
n*cst pas une exception; c'est, comme je l'ai dit au paragraphe
précédent, un cas régime du pluriel refait sur le régime sg.
mtrchaan (cp. h provençal). Nous parlerons de jars 89, en même
temps que de detis 68, au § suivant.
Aussi dans les poésies provençales écrites par le même
copiste nous trouvons / pour is à la fin des mots : 1° dans la
deuxième personne du singulier de l'indicatif présent dit II
16**, 17*"; 2"* dans les deuxièmes personnes du pluriel du subjonc-
tif présent (:= impératif) sahjai II 6% dijat II 19'' ; 3° dans les
leuxièmes personnes du pluriel de l'impératif latsat II 2**,
Upraukî il 2*; 4*' au cas sujet du singulier aut <; al tus / 2,
garit III 4^.
On y rencontre aussi les cas régimes tert < tertiu /// 10^
et, absolument comme dans notre mystère, crot ■< crucc
208 W. CLOETTA
m 10**, et même aut III iv pour au^ (= la préposition ad
avec Tarticle il les; ta même forme aut se retrouve dans
Fancienne version provençale ties chapitres XIII-XVII de
VÉviingik saint Jean écrite au commencement du douzième
siècle, chap. XIII» vers. 33, à côté de <m^ XIII 29, XVII 6,
rf^w- XIII 28 et dms XIIl 5, aqucui XVIl 20 et ^w^XIE 12, XV
22, XVI 17, 19, 3t, XVII 2, 8, 9, etc.).
A côté» nous trouvons une fois s pour /^ : tos temps U 8^.
Remarquons d*abord que cette graphie t < ts final se rea-^
contre aussi bien dans certains textes français que dans des
textes provençaux. Ainsi dans le manuscrit harléien de la
Chronique de Benoit : doltt I 122, aparilliet II 361, sachiet 9404 i
côté de avei dans le même vers et d'innombrables autres formes
en -Cl (cp. Settegast, Bfnoit de Sainte—Mort , p. 47); dans des
textes anglo-normands (voy. Suchier, Uehcr die Matthaeus Paris
:^njeshriekm Pic de scint Auban , p. 48 s.), dans VÈpltre farde
de saint Etienne (voy. Koschwitz, Commentar ^« den àltesien
franips. SpracMenhn,, p. 212 s.), une fois, due sans doute au
copiste, dans la Vie saint Akxi octosyllabique, ai^t 592 (voy*
G. Paris, ifn/w., VIII, p. 168), et dans nombre d'anciens textes
provençaux (voy. Settegast, L cr^ Chabaneau, Romania^ VÎII»
p. îiis., 113; Mahiî, Grummatik und IVôrterbuch der altpnwen-
lalisclKu Sprach, L Abtheilung, Kôtben, 1885, p. 314, et sur-
tout Diez, Jahrhucb f, rom. u. engh Lit.^ I, p. 364 s. '; Paul
Meyer, Daurel et Béton, p. lvi ss., lxv, lxxviii; Frederick
Armitage, Sennotis du XI I^ sikk en vieux praifençal, Heilbronn,
1S84, p, xxvi ss. et lui),
M. Paul Meyer a déji fait remarquer qu'au Midi le phéno-
mène en question n'est nullement borné à des textes limousins*
Ainsi nous trouvons / pour ts dans le descort : Eu aor Damridtu,
h pair omnipotent de la B. N. suppl. lat, 1743 (p. p. P. Meyer,
Ane, poàics reJig, en langue d'oc), dans la partie A, écrite dans
1* Dans iîo^, les exemples sont plus fréquenis que ne le dir Dicz. Voici
ceux que je trouve parmi mes notes prises autrefois dans un cours de
M. A. Tobler : 17 mort.,, /o/ pour w^r^.... /o; ; 95, 178 ei 244 vîU pour
Vîii, a« pers. pi.; 141 ht pour toi (ce qui, du reste, se trouverait dms le ms.,
d après P. Mcycr, Rtcuâî :^ on sait que le / et le i du second copiste se
ressemblent beaucoup); 183 tct diai pour /o^ dias^ 199 /i drap que la domn'a
vestit pour tvi//^. "^"^ ^ ^
LE MYSTÈRE DE l'ÉPOUX 209
la première moitié du xii* siècle, des Sermons provençaux contenus
dans le ms. lat. 3548 B de la B. N. exécuté à Saint-Martial de
Limoges, dans le Débat de la Vierge et de la Croix du ms. Didot
contenant Daurel et Béton (p. p. Paul Meyer, Daurel et Béton,
p. Lxxiii ss.) et, d'après M. Armitage, dans la traduction proven-
çale de la Régie de saint Benoit du ms. 2428 de la B. N. Si ces
textes, quoique une influence du scribe limousin soit au moins
vraisemblable pour les Sermons, ne sont certainement pas
limousins, il n'en est pas moins sûr que le phénomène en ques-
tion se rencontre surtout dans des textes limousins et périgour-
dins. J'ai déjà cité Boece, Saint Jean, où t pour ts se trouve très
souvent, les poésies religieuses /, II, III, et j'ajouterai ici les
Préceptes religieux étrits vers la fin du xni® siècle et contenus dans
le même ms. que les Sermons, la Prière à N. D. des Sept Dou-
leurs de la fin du xiv* siècle, contenue dans un ms. du xv*' et
p. p. Paul Meyer, Ramania, I, 409 ss. (crot pour crot:(, etc., y est
fréquent), les chartes des environs de Limoges des années
1200 ss. ' et le Cartulaire de Cellefrouin (fin du xi*' siècle) *.
Quant à des textes périgourdins, je citerai le ms. P (B. N. fr.
2180) de Girart deRossillon, où t pour /:( n'est pas rare : diret
57, entendat 97, remasut 11 17, requeret 1868, volet 2412, sot
(= sot:^ l^'i'iy etc. D'autre part, il écrit t^ pour / : arti 2554,
grat:^ 5185, serrât:;^ 5187, mesclati 5188, passat:(^ 5 191, pour
art, etc. Il en résulte que ce ms. n'avait nullement besoin, pour
changer les anciennes assonances en rimes, de séparer f de /;^;
il laisse rimer les deux désinences, tandis que les autres textes
s'efforcent, souvent en n'y réussissant que bien imparfaitement,
de changer les vers de façon à n'avoir à la rime qu'une seule de
1 . Documents historiques bas-latins , provençaux et français concernant princi-
palement la Marche et le Litnousiny p. p. MM. Alfred Leroux, Emile Molinier
et Antoine Thomas, t. I (1883), p. 149 ss. ; par exemple : niort pour tncrt^^
charte XXXI de la fin du xii^ s., p, i$o, 1. s ; fait pour fait^, ib.y ch.
XXXII, même date, 1. S;fossat pour fossat^ XXXlll (même date) 7; aquest
autreament fo fait, th., ig; faith pour fait^ XLI (12 18), 30; dans la
charte LUI (1246), 1. s, on trouve /w^ < fuit (graphie inverse), etc.
2. fai^ pour fait, f<> 8 r©, L 28 (p. p. Tabbé Rousselot, /. c, p. 354); tôt
pour to^, fô 8 ro, L 33 ; je ne compte pas le régime pluriel preho:;^t , fo 9 ro
1. 2, car le prétendu / final n'est, sans doute, en réalité pas autre chose que
le sigle de la conjonction et.
R-mmnU, X2UI I4
2tO
M\ CLOETTA
ces désinences dans une même tirade (corap. par exemple les
vers 2427 ss, et 2450 ss» de P avec les tirades 181 et 183 dans
O et L, les variantes du vers 121 dans le Recueil de P. Meyer
= tirade 197, etc.). Le même phénomène linguistique, je le ren-
contre dans un Cantique périgourdin en ffionfunr de saint Jean
Baptiste (^Reirue des langues romanes, XXVI, 160), dont l'original
remonterait au xrv* siècle, d'après M. Chabaneau, et où ce
dernier a eu tort de changer la rime des vers 3 s, : placet >
plat : annuntîatus > amionciat en plat^: anonctat;^; cp. les
rimes des vers 39 s*, 41 s., 53 s., etc.
Enfin Daurel et Beton^ où /i > / est très fréquent, a tout au
moins subi une forte influence de la langue du Sud*Ouesi
parlée sur les confins de !a langue d'oïl [cp. P. Meyer, Daurel
et Béton ^ p. XLVii, et Konrad MûUer, Die Âssomtnien im Girari
von Rossillon {Fransdsische Studien IIF), p. 65 ss.J.
Les textes les plus conséquents par rapport à /i final > / sont
VÉpUrc de saint Etienne , les poésies provençales /, //et ///
et notre mystère; en effet, la véritable patrie de cette évolution
phonétique semble avoir été, dans le Nord, la Touraine, d'où
elle pouvait entrer dans TaDglo-normand, et, dans le Midi, les
confins est de l'Angoumois et le Haut--Limousin.
Chiant aux autres textes de la partie de TOuest qui nous
intéresse, la graphie / ne se rencontre pas au sud de la Tou-
raine, car je ne crois pas que l'on puisse assigner au copiste de
Y Alexis octosyllabique une origine plus méridionale, ci les
textes du Sud-Ouest ne connaissent pas cette graphie. Il est
vrai que Ton y trouve quelquefois t pour /j, mais alors il s'agi^
de simples substitutions du cas régime au cas sujet , comme'
grant i suj. sg.. Sainte Cathrim 424, Ce qui est déjà plus
remarquable, c'est quand on trouve ^raw/ comme cas régime du
pluriel : agrantfnervilles, ib. 431, ou les cas régimes du pluriel ;
iqt4et, ib. IJ26, et iquest JS^ 425, 667, 1135, (i)cest jé, 1888,
2484. Nous trouvons même des rimes dans Sainte Catherin
qui s'expliqueraient aisément par t <i ts : mûrit (parf.) ; snrli:^
98 j, laidament : poinen^ 2054, partit (parf.) ; saupu^ 2278. De
même on pourrait expliquer repentis (= repeniist) : di^ < d ictos
183, destreix^ : pest 797, par repenti{s)t : dit [cp. des rimes
comme nuirit (3*^ p. sg. parL) : aguit (3* p. sg. imp- subj.)
1724, etc.; les parf. en -1/ conservent toujours le t, voy. ci-
dessus, p. 2oé], destreit : /v/(j)/, car s devant consonne, notam-
LE MYSTÈRE DE L*ÙPOUX 21 1
aent /, ne se prononçait plus, comme d*ailleurs déjà dans la
mguc du copiste de VÉpître de saint Éîicmu (voy. Tenderiiig,
fÏMut' und Formenl.^ § loj, Das poiteu. KalbarincnL^ p, 26;
Koschwîtz, Commtntar^ p. 213). Mais tout cela me semble plu-
tôt être du à une prononciation très faible ou i la disparition
rcomplète de Vs {^ et du / à la fin des mots dans Sainte Cathe-
rine (cp. aussi, entre autres, la rime tos temps : Afwn 2662), et,
ce qui me semble décisif, jamais on ne rencontre, dans* ce
poème et dans les textes du Sud-Ouest analysés par Goerlicli,
des deuxièmes personnes du pluriel en -/. Notre texte se
distingue donc aussi par là des autres textes du Sud-Ouest, et
comme il est impossible de l'attribuer à la Touraine, il faudra
ipposer qu*il est d'une région encore plus voisine du proven-
'îçal que ne le sont même Turpin I et Sainte Cathrine.
n nous reste encore à dire un mot sur la nature de ce son
représenté par t. L'explication proposée par M. Armitage, qui
n'y voit qu'une particularité graphique, ne me satisfait pas.
Pour ma part, je crois que dans les dialectes indiqués le son
Dmbiné ts a réellement passe à M, et comme, en vue du pro-
rès, une explication mauvaise vaut toujours mieux qu'aucune,
je me permettrai d'en proposer une de mon côté.
On s'imagine facilement que dans le groupe ts l'élément
dental ait prévalu sur Télément sifflant; la graphie ordinaire /^,
qui équivaut à //j, nous l'indique ^ Je suppose que l'élément
dental pouvait aussi prévaloir de façon à se faire entendre
encore après la prononciation de la sifflante : isi , et cette gra-
j^bîe se trouve en effet une fois dans Jo^ias (fragment de Valen-
1. C'est ce que serablcot bien aussi prouver les rîmes de / avec ti dans le
m$, P de Giraft ât' RossiUon, dans le D/hat de la lierre €t de la Croix [cotonat^
5J* ^g • ' p^tusaiÇOfS). pi,, V. 159 s.J, dans le Cantique périgoioditt [djanut, sj.
■ Sfg* roasc,, : eut < cogito, v. 39 s.; tttescrcsut, rég. sg, neutre, ; mut, sj,
misCy V» 41 $,], Cl dans k Prière â N, Z>. des Sept Doute un [bontatt rég.
5,, ; inpeutatt sj, sg. ma$c., v. 97 s.j. Il est vmi que ce dernier poC*roe est
Punc époque trop rccentc pour pouvoir servir de preuve dans le cas en
qucsîîoii.
2. Je noterai en passant les graphies assez étonnantes rencontrées dans une
charte de Limoges de 1255 (CfMtrteSy chroniques et m/moriatix pour servir â
^histoire de la Marche et du Uniomin, p. p. A. Leroux, Tulle, 1886» p. 85,
t3LXXnï) ; à côté de *7</i/r/^. on y trouve : tostbi < tôt os» pr<hti et parthi^
212
\\\ CLOETTA
ciennes) : sâictst v*» h 29, à coté de ts, qu'on y rencontre deux
fois, et de st, qui y est la graphie ordinaire et qui tnarqueriit le
son auquel ts, en passant par tsi (= ;;/), serait réellement
arrivé dans Joms, Mais cet st ne remplace pas seulement t + s
latin, il remplace aussi sî + 5, qui, en français, il est vrai, est
généralement contracté en ^ : ivst < vo stras v*» I. 30 (deux
fois). Je vois, dans Vsi de ce mot, sts devenu 5/; dans le cas où t
suivi d'une s est immédiatement précédé d'une autre i, nous
aurions donc la réduction de Is i / aussi dans fanas. En effet
i*osîs, prononcé avec une dentale très forte : vosits, peut avoir
passé directement A vost, et il serait superflu de supposer dans
ce cas une forme intermédiaire : i>ostst*
Le son originaire ts est donc représenté de quatre mameres
différentes dans Jonas : 1° /j, la graphie ancienne et étymolo-
gique : preireis v** 31, doliants 18; 2** tst, qui représenterait la
prononciation déjà un peu vieillie : sekîst 29, par laquelle le son
fs aurait passé pour arriver à 3'' j/, la reproduction ordinaire et
exacte du son comme il était actuellement prononcé dans le
dialecte de Jonas : avetst 27, faciest 28, contenciesl 28, aiest 2%
prétest 31, ireist 3, 21, sosi 14 j 4** t, le son auquel ts était
arrivé quand ce groupe était précédé d'un i : vost 30 (deux
fois).
Dans le descort : Eu aor Damrideu nous trouvons une plus
grande variété encore; ts originaire 3' est rendu : 1° par ts :
proferîs 69, torts 72, nwris (; cors) 98, babtiiats 120. plats 203
(: pecat), conorts 222 (: amor), iH>ts 23 i ; 2* par ^ : /?/a< 42, 220,
225, tmri 74y Ml 75, P^^^\ it6, fai\ 117, dii 117, ^m^ 119,
125, /ij^ 165, rft?w- 174 (; noms), for na:^ 202 ^ paren^ 2J5 ; 3** P^^
tl (et AT/^) : druxt:^ 23, wfiJ/#/^ 24, liati 32, ^a(ttl:ç 33, nio/mf-
^^K 33, /«/l^^/^: 34» dejpolati 3<5. «^/^ 37, />^ra/^ 38, levati 39,
/t*/^ 40, />%a/^ 64, a7j/>j/^ 1 17 ; 40 par st : />r<^/ 68, fîî<>rxr 71,
crost 230; 5<> par / (mais ceci seulement dans la seconde partie,
que Ton pourrait aussi considérer comme un poème à part) :
fait 154, 189 (: osât), pecat 164, 239, pietat 166, dehit 167» ptit
169, osât 190, dammment 241 (; -^w/), fciWm/ 254; 6*» par i :
ters T^.gens 79, 256, ja«a 86Jas 137, 172, /ix 144, dtspeis' 168,
/^u 183, /ox 237, (ad iUos > aïs 77, illos > Wx 78, eccû
illos> aijuels 189).
La prononciation de Tauteur du descort semble avoir été x,
cir on vou nmer ffiorts : cors 98 et dou::^ : notns 174, tandis que
LÉ MYSTÈRE DE t'àPOUX 213
Ton pourrait facilement corriger plats : del pccal 2oj en des
pccats et lire no*tn sfa damnammt 241 au lieu de : nom sia
damnamaU* Du reste> de même que le / final roman après «,
quoique presque toujours écrit, ne se prononçait plus (voy. la
rime de amen 247 avec : forment : ment : mtatdi'men^ etc.), de
même aussi is^ s ne semble plus avoir été prononcé, voy. la
rime amer : conorts 221 et les graphies/^/ pour fait:^ ï68, aquel
pour aqucl:;^ 190, sal pour sais 222, criminal : mal pour crimi'
nais : mais 239, Quoi qu*il en soit, rien que la confusion des
différentes manières de rendre Tancien son ts final suffit ample-
ment à expliquer les graphies inverses de ce texte et d'autres
mentionnées par M. Armitage^ comme tôt <C tuos 175, etc.
Outre le passage de /jf, devenu tst^ à j/, que j'ai supposé pour
Jûttos^ un autre développement est possible; Vs pouvait pour
ainsi dire être écrasée par les deux /, soit qu'elle en ait été pré-
cédée Qs, tts^ a, /) ou entourée Qs, îst, il, t); c'est probable-
ment à un de ces deux développements que nous devons le t
pour ts final dans Saint Etienne ^ dans notre mystère et dans
les textes limousins
28) 5 finale après une n appuyée par une consonne qui pré-
cède, est restée (ou redevenue?) s : fors 89. VÉpitre de
saint Etienne nous donne negtint j2, pour negum^ mais ce mot
ne présente pas les mêmes conditions. Pour de + l'article
illos nous trouvons deus 68 dans notre texte, tandis que dans
le texte provençal ///, ainsi que dans Saint Jean, nous avons ren-
contré autf qui, dans ce dernier texte, se trouve à côté de au^^
dbt^, dctiSj aqmui, eu^, Saint-h tienne, par contre, qui pourtant
écrit constamment t pour ^, n'a que as 9, 34, 40, «« 9, <ï 34
pour la préposition avec le rég. plur, de rariicle (cp. Koschwitz,
Cùmmentar^ P- 213 s.). En général, le traitement de // -f i finale
n'est pas le même en provençal qu*en français.
Si dans Sainte Catkrine et dans d'autres textes de TOoest on
trouve des graphies comme jor^, an;^^ deu^, au^, eui (illos),
cela ne prouve pas grand *chose, car ce :ç est assez souvent mis
i tort, I et ;^ sont confondus et les deux sons riment dans
Sainte Cathertm^ s'ils n'avaient pas déji complètement cessé
d*ètre prononcés (cp. ci-dessus, p. 184; Goerlich, Nordzif, Dial.^
f . /, r., p. xxvt s.; dicis > ait y figure à tort.
214 ^*- CLOETTA
p, 63, SûdiiK DiûL, p. 88 s., Tcnderin^,
§§ 93, 101 ss.. Dus poiîaK KutbarinenL^ p. 14 et 26).
29) c après consonne devant a est rendu par g au lieu de cb
dans le mot claufigct 22 ; cp, jan^ 11^ 19% si ce mot est le latin
cantu, voy. Bartsch, Cbrest, proi\, 4* éd., 18, 32, Cependant
riiésitation entre la palatale sourde et sonore se trouve dans les
textes du Sud-Ouest aussi bien que dans ceux du Nord-Ouest
(voy. Goerlich, Stldw. DmLy p. 90 s., Nordw. DiaL^ p. 6î,
Werner Soderhjelm, Das Marfwkhen des Péun Gaîineau^ p. 22,
et cp. arangessaut pour arraclxissent ^ Sainte Catb. 2217; josc
pour chose^ Vie saint Âkxi en vers octosylïabiques, Rom.^ VUI,
p. 163 ss., V. 442)*
30) Le f dans cruce > crot 22, punctu > pont 67 n*a
pas dégagé d'/. Les formes correspondantes des autres textes de
rOuest sont croi^, crois et point (voy. Goerlich, Sildxv, DiaL,
p. 62 et 90; Tendering, Laut- und FormenL, §§ 47, 57 et 108).
Cependant, dans Turpin /, nous trouvons une fois t^à côté
de iwç, croii:^\ dans Sainte Catherine : dreti;^ 282 (à côté de drei:0^
7wt:i 650 (mais M. Talbert lit : noii et le mot rime avec doi;^
< doctos); des formes comme fa:(otn ^ etc., que nous avons
rencontrées dans B (ci-dessus, p, 184), se trouvent aussi dans
d*autres textes du Sud-Ouest; tnas < magis est, comme
conjonction, la forme régulière dans les Coutumes dc]
Charroux et dans les Sermons poitanns^ et se rencontre deux fois
dans Sainte Cathrine*^ sant^ santa, plandre^ à côté des formes
avec ai^ se trouvent dans quelques chartes du Sud-Ouest et|
prévalent de beaucoup dans Sainte Catherine, etc. (voy, Goer-
lich, Sudw, DiaLy p. ji s., 62, 91 s.; Tendering, iMut- und
FormenL^ §§ 8, 14, 47, 112. Das poitev, Katharinenl., p. 6, 14).
Peut-être pont dans notre texte doit-il être prononcé pùnt
{= ponht^ voy. la charte N, ci-dessus, p. 184). Remarque»]
encore que crot se retrouve absolument sous cette même forme
dans les poèmes provenç;iux Uî 10'' et dans la Prière à N, D,
des Sept Douleurs j cp. ci-dessus, § 27.
D*autre part nous trouvons dans notre mystère cJmiîivas 35,
86, et mais 89 employé comme adverbe, et dans les deux
mots la diphthongue ai est la règle en français, y compris le
Poitou, aussi bien qu'en provençal (Jm mais I i).
31) Le r de aici 27, 28, 71 avait probablement déjà passé
par le son ts à celui d'une s sonrde; il est rendu par une $
LE MYSTÈRE DE l'ÈPOUX 21)
simple dtinsfasen 76, aiso 11, (aisd 15), graphie qui se retrouve
un peu partout dans des textes français, et notamment aussi dans
les textes du Nord-Ouest et do Sud-Ouest, et dans Sainte
Catherine. Le désir de distinguer aici de aissij aisi (= ainsi)
aura fait maintenir plus longtemps le c de aici^ du moins dans
H récriture.
H 32) Le /) du groupe pt est quelquefois maintenu par Técriture
^^^dans les textes du Sud-Ouest, Mais les rimes de Sainte Catherine
^^HpC un 2SSÇZ grand nombre de graphies, où un p se trouve écrit
^P^sans la moindre raison ét}^mologique, nous montrent qu'aussi
H dans cette région le p ne se prononçait plus (voy. Goerlîch,
H Nordw, DiaL^ p. 66, Sudiv, Dial,^ p. 95 ; Tendering, Laut- und
H FortnenU,^ 122, 124, et Das poitev. KatharimnL^ p. 15), Tou-
f tefois, l'écriture des textes en question, en gardant le p de ce
groupe, nous peut faire supposer que les temps où on le pro-
nonçait encore n'étaient pas trop reculés, c'est-à-dire qu'on le
prononçait peut-être encore vers le milieu du xn* siècle. Outre
le voisinage du provençal, nous avons donc encore cette raison
pour conserver dans notre m3^stère achapter 67. Qiiant à scrip-
tura 2$, le mot est évidemment latin* Nous avons déjà parlé de
chaiiivas au § 30,
Y- MORPHOLOGIE
53) Il s'agit d'abord du pronom personnel de la troisième
personne au cas sujet du singulier. Nous trouvons dans notre
texte deux fois ^m 21, 27, et les deux fois le mot qui suit com-
mence par une consonne. Même dans le Sud-Ouest, M. Goer-
lich n'a jamais rencontré d'autre forme que //, tandis que Sainte
Catherine nous montre souvent el à côté de il (voy. Tendering,
Ij2ui- und ForfmnLf § 138, et Das poitei\ Katharimnl., p. 17).
Cet el est certainement notre forme <?«, puisque précisément
dans Sainte Catkrine, comme ailleurs, du reste, on trouve fré-
quemment 17 maintenue par Técriiure, tandis qu'on prononçait
sûrement déjà u (voy. Tendering, Laut- und Formenî,^ § 7^)- U
est vrai que justement dans le cas où la consonne qui suit 17
ne fait pas partie du même mot, Sainte Catherine a presque
toujours maintenu 17 (voy. ih.^ § 73, Das poiîeiK KatlmrinenL,
p. 12)^ mais la comparaison avec les autres textes du Sud-
2l6
W. CLOCTTA
Ouest 'montre à Tcvidence qu'aussi dans ce ols, conime très
souvent pour 17 -f cens, i rintérieur du mot, il ne s*agit qac
d'une graphie étymologique. Précisément la circonstance que
seulement Sainte Catljcrim présente el à côté de i7, tandis que
tous les autres textes du Sud-Ouest qui, pourtant, sont en
grande partie sensiblement postérieurs, ne nous donnent que
//, me fait supposer qu'il s*agit là d'une particularité dialectale
qui pourrait remonter très haut. Le même fait phonétique,
c*est-à-dire la conservation de IV fermé du latin vulgaire,
nonobstant Vi final, se rencontre pour le pronom démonstratit
(i)f/7, qui, dans Sainte Catherine^ contrairement aux textes du
Sud-Ouest analysés parGoerlich, est souvent a! au cas suj, sg.
(voy, Tendering, Laui-und FonmnLy § HS)» ^^ ^*^^ P^^^ J
comparer aussi le parfait de verbes comme taiir, venir. Tandis
que les autres textes du Sud-Ouest n*ont que tint, tinc; vmty
vincy innct et quelquefois i^nguit^ Sainte Catl?erine n'a pour le
premier verbe que tmc 510, 1726, et pour le second elle donne
venCy 259, 686, 1741, 1744, ctvcngrunt 650, à côté devint iji
322 (: eslit), 399, vcnguii 1738 (: rfiV), avenguircnt 2608.
Remarquons encore que la forme en du pron. de la troisième
personne correspond bien aux formes modernes ou , au , a, qui
se rencontrent dans les patois français de la Charente,
Le pronom masculin conjoint de la troisième personne est Jl
l'accusatif singulier : lo 28, 73, forme qui prévaut généralement
sur k dans le Sud-Ouest et est même, à côté de la forme apos-
trophièe /* et de la forme enclitique /, la seule usitée dans Sainte
Catherine (voy. Goerlich, Sndu\ DiaL^ p. 106; Tendering,
Laui' uftd FormmL^ § 139)- On la trouve aussi, à côté de &,
une fois dans Saint Etimne 46. — Pour las^ voy. ci-dessus,
§ 7. — Le régime du neutre est 0 26, forme non seulement
fréquente dans Sainte Cathrim (voy. Tendering, haut- und Far-
mrnL^ 5 146), mais qui se trouve aussi dans les deux Turpin^
dans les Coutumes de Charroux, et dans d autres textes du Sud-
Ouest (cp. Goerlich, Sûdw, Dialehe^ p, 107, où M. Goerlich a
tort de considérer tous les régimes 0 comme venant de * i 11 um ;
ceux qui se trouvent dans les textes cités viennent certainement
de hoc; pour Angoulémc, voy. ci-dessus, p. 185.)
5.t) Pourtw/ni.f, voy, ci-dessus, p. 18?.
îî) Quant aux pronoms démonstratifs, la forme aisel 15 est
parfâitcmcni conforme à notre dialecte (voy. ci-dessus, g ir.
VE MYSTERE DE L*ÈPOUX 21 J
2$ et J3), seulement le sens nous oblige de corriger. — Pour
le neutre aiso, voy. ci-dessus, §§ ir, 25 et 33.
56) Le régime pluriel de Tarticle masculin est los 16, forme
rare dans le Sud-Ouest en général et assez rnre même dans
SainU Catherine (yoy. Goerlich, Sûdw. DiaL, p. 102; Tende-
I ring, Laut und Forment.^ § 128).
37) V'erbe. Pour les premières personnes du pluriel, voy.
ci-dessus, p, 177 et 188. — La forme soi l'j pour la première
personne du singulier du présent indicatif du verbe es^re^ est régu-
lière dans Sainte Catijerine et très fréquente dans le Sud-Ouest
en gcnéraK Pour le Nord-Ouest, M. Goerlich ne la mentionne
pas; cependant elle se rencontre une fois déj.\ dans le plus
ancien ms. de Fancien Saint Alexis normand, 44*. Soi est aussi
la forme des poésies provençales écrites par notre copiste / 2,
// 10*, 17 \ — Pour so[n] <Z sunt, voy, cî-dessus, § 26»
Quant au parfait/? < fuit, qui se rencontre deux fois, 17, 21,
et le participe passé trames 27, les formes correspondantes du
sud-ouest de la langue d'oïl sont généralement, comme pour le
Nord-Ouest, /ut et /«, et {traymis (voy. Goerlich, SfidwestL
DiaL^ p, 84, 135 et 118). Dans Sainte Catherine^ cependant, on
a^ncontre plusieurs fois /(;, mais pas aussi souvent que /w, et
jamais k la rime, tandis qncfu s*y rencontre fréquemment (voy,
les rimes ci-dessus, p. 206). Le participe passé mes 2450, trames
^380, est rare même dans Sainte Catixrine^ tandis qu*i la rime
on y trouve tramis (: paradis 458), promis (: vis 499)j et très
souvent wiV, mise, qui rime div^c pris^ prise^ aux vers 830, 914,
1308, 1540, 1704. Et cette rime n'est pas aussi insignifiante
qu'on pourrait le croire, car le participe passé de prendre a tou-
3urs la forme pris dans Sainte Catlkrine, et ce mot rime avec
ti>fi 565, vis 897, esjois 1265.
On sera d'autant plus surpris de voir que M. Goerlich,
NûfdweîtL DiaL, p. 79, die premes pour promis trouvé dans
une charte de la fm du xm* siècle, écrite en Bretagne, Mais
M. Goerlich se trompe absolument sur ce mot, qui n'a que faire
avec promettre^ car c'est tout simplement le latin proxîmus
avec le sens de : ayant les droits les plus directs sur quelque
kose, ayant plus de titres qu'un autre à quelque chose. Ce
aime mot se trouve dans une charte de Rennes datée de 1296,
où, par erreur, il est écrit /?r^jmti au Heu d^ preisme. M, Goerlich
dtc encore la forme reme^^ d'un document saumurois daté de
2l8 W. CLOETTA
1268, sans nous dire si c'est de remis su ou de remansu
qu'il s'agit. Ce docrniient n'étant point à ma portée, il m'est
impossible de trancher la question^ mais je penche bien pour U
seconde alternative, car le participe passé mes < m issu, que
M. Goerlich n'a pas rencontré dans les textes du Sud-Ouest» se
trouve certainement encore beaucoup moins dans le Nord-
Ouest.
Que penser enfin de ventt 16 ? On serait assez porté i voir un
latinisme dans cette forme, comme virgi nés ir, virgine 17,
scriptura 26, De oleo 76. Cependant une forme française du
Sud-Ouest venit ne me semble pas impossible, puisque dans
Sainte Caîberhu nous trouvons deux fois re^mt (762 et 2645),
la seconde fois même appuyé par la rime avec suffit. Inutile de
dire que venit se trouve aussi dans des patois poitevins, sainion-
geais et angoumoisins, p. ex. à Saintes (Charente-Inférieure), à
Chef'Boutonne (Deux-Sèvres), dans les patois français du
canton de La Valette (Charente), etc*, voy* au verset 14 des
versions patoises de la Parabole de r Enfant prodigue^ en outre,
Beauchet-Filleau, Essai sur le patois poitevin^ Niort, 1864,
p. xiv, etc.
L'étude qui précède montre clairement que notre texte, tout
en ne s'accordant avec aucun autre, se rapproche cependant le
plus des chartes d*Angoulême, de Turpin I et surtout de Sainte
Caîkrine, mais que les traits caractérisant le provençal y sont
plus prononcés et plus nombreux encore que dans cette der-
nière. Dans plusieurs cas où celle-ci , à côté du développement
français qui prévaut et est souvent le seul usité à la rirne^ nous
montre quelquefois aussi le développement provençal, c'est ce
dernier seulement qui se rencontre dans notre mystère (voy, la
syllabe atone finale as et le pron. pers. las, § 7 ; aici < ecce
hic, qui ne se trouve pas du tout dans Sainte Catherim^ aiso,
§ II; oli, § 14; la diphtongue au, § 18; crot, pont, $ 30; le
pron. pers. de la 3*^ pers. eti,$ 33; Tarticle pluriel te, § 36;
s€{n] < sunt,>, trames, §§26, 37). Par /r> ir il se rapproche
davantage des chartes d'Angoulême et des deux Turpin (§ 25),
par la chute de Vn finale de non des Coutumes de Charroux
(3 22); par ^ final > t il se distingue de tous les textes français
d origine plus méridionale que la Touraine et se rapproche de
1 tpttre de la saint Etienne et des textes limousins ($ 27). Enfin
LE MYSTÈRE DE t'ÉPOUX 219
il se distingue de tous les textes occidentaux en langue d'oïl par
la chute de Vn après a dans Jorda (§ 22), et surtout par le
traitement provençal du / final (§ 26).
Notre mystère ne saurait avoir été composé h Angoulôme — les
traits que je viens d'indiquer et la désinence -^m de la i"' pers*
pL de rind. prés, de la 2*^ conjugaison Ten séparent — ; mais
la grande ressemblance qu'il présente néanmoins avec les
barres d*Angoulème et avec Turptn I et Sainte Catf^erirte^
'textes qui, à bon droit, ont été considérés comme angoumoi-
Sïos, nous engage à chercher sa patrie dans FAngoumois et,
ïturellenient, aussi près que possible du domaine provençal*
'uisque Angoulème marque le point sud-est le plus extrême du
territoire dans lequel notre mystère pourrait avoir été composé
(ci-dessus, p. 186), sa patrie devra nécessairement être ou plus
occidentale, ou plus septentrionale. Je me décide pour la seconde
alternative, car c'est ce qu'indiquent les points de contact avec
les Coutuftws de Charroux et surtout avec les textes limousins et,
plus spécialement, les poèmes /, //, ///. En effet, tant de traits
caractéristiques de la langue de notre mystère se retrouvent dans
les trois poèmes religieux copiés par le même scribe que l'on ne
peut guère douter que leur lieu d'origine n'ait été voisin de celui
de notre texte. Ces traits communs au mystère et aux poèmes
mentionnés sont surtout r per > pre (§ 10); vocalisation de
17 6nale devant un mot commençant par une consonne (§ 19);
chute de Vn finale (§ 22) ; chute de Vn devant palatale {loja'
tnen-y agel, § 24) ; ts final > / (§ 27). De cette façon les poèmes
religieux et le mystère pourront alternativement nous aider à
retrouver leur lieu d'origine.
Nul doute que ces poésies religieuses ne soient limousines, et,
plus exactement, haut-limousines; nous devrons donc chercher
leur Heu dbrigine dans une partje du domaine du dialecte
appelé haul-hmousin qui soit plus septentrionale qu'Aogou-
lème, ce qui, du reste, est vraisemblable aussi pour d'autres
raisons. En outre, la patrie de ces poésies devra être aussi près
que possible du domaine de la langue d'oïl. Nous la cherche-
rons donc dans le nord-est du département de la Charente ou
dans Touest de la Haute-Vienne, c'est-à-dire à Confolens ou X
Rochechouart, ou, peut-être avec plus de vraisemblance encore,
à La Rochefoucauld. Notre mystère, par contre, sera composé
dans le centre nord du département de la Charente, entre
220 Vr. CLOETTA
Charroux (Vienne) et Angoulême, maïs probablement plus
près de cette derniire ville. Si possible, sa patrie devra aussi
être encore plus voisine du domaine de la langue d*oc que ne
Test Angoulême, et, en tout cas, on fera bien de rester sur U
rive gauche (orientale) de la Charente. Pour toutes ces raisons,
et pour d'autres, j'exclus Ruffec, et je pense à Saint-Amant-de-
Boixe (à i6 kilom. nord d' Angoulême), bien connu au moyen
âge pour son abbaye bénédictine fondée en 988.
Quant à Tépoque à laquelle notre mystère a été composé,
je pense, avec M. Gaston Paris {La Uttéraiurc fratKaist au tmym
âge, 2" éd., p. 237 et 246), à la première moitié ou au deuxième
tiers du xn' siècle, et en cela je suis guidé bien plus par des
raisons littéraires que par la langue de notre monument, qui, k
elle seule, ne nous permettrait pas de choisir, dans le xii*sîèclei
une époque de préférence à une autre.
LA VERSIFtCATIOK DU MYSTÈRE DE L*fePOUX *
M, Boehmer, Romnn, Sîud.^ IV, 103 ss., a déjà traité assez
longuement de la versification de notre poème et a montré que
la notation musicale, évidemment postérieurement adaptée au
texte fautif, ne peut nous être que de peu d'utilité dans cette
question (cp. aussi Schwan, Zeiîs, f, r. Ph., XI, 469 ss.).
Le texte du manuscrit, en dehors des difficultés linguistiques
que nous venons d'étudier, présente encore des fautes évi-
dentes dont la correction est exigée soit par la métrique, soit
par le sens, et nécessite aussi quelques transpositions et resti-
tutions de vers. Je prendrai donc pour base de Pexposé qui suit,
le texte comme je rétablis plus loin.
D'abord il faut remarquer que tous les vers latins de notre
mystère sont terminés par des proparoxytons; leur fin est donc
toujours iambique, leur rime mascuhne. Celle-ci est non seule-
ment toujours riche, c'est-à-dire qu'elle comprend aussi la
ï . Dans cette seconde partie, les vers du Mystère sont dtés avec le noroé-
rotagc de réditîoa qui suit.
I
LE MYSTÈRE DE l'ÉPOUX 221
consonne qui précède la voyelle de la syllabe finale; elle est
même presque toujours léonine, en ce sens qu'elle porte aussi
sur la voyelle de la pénultième; la seule exception en est
daemônes : -tnes 4. Accidentellement, la rime comprend en outre
la consonne qui précède la voyelle de la pénultième : lumine :
limine 91 s., et même la voyelle de rantépénultième : ocius :
socius 66 s.
Les vers français de notre mystère sont aussi toujours
masculins, excepté seulement les trois derniers (93-95).
Voici maintenant quels sont les différents mètres employés
dans notre mystère :
V. i-io. Le Chœur chante d'abord 10 vers latins qui sont
des septénaires (= tétramètres trochaïques catalectiques )
rythmiques se composant de 4 -f- 4 + 7 syllabes, c'est-à-dire
qu'ils ont un repos non seulement après la huitième, mais
aussi après la quatrième syllabe, que le premier membre se
subdivise en deux; et comme le repos après la quatrième
syllabe est tout aussi marqué que celui qui se trouve après la
huitième, on peut dire que chaque vers se divise en trois
membres, dont les deux premiers sont de quatre syllabes cha-
cun, le troisième de sept syllabes. — Les quatre premiers vers
riment ensemble, les autres riment deux par deux.
V. 11-30. Gabriel prononce ensuite quatre strophes fran-
çaises composées de trois décasyllabes avec césure après la qua-
trième, excepté le vers 13, où elle tomberait après la sixième,
si l'on ne préfère pas n'y point admettre de césure du tout. La
césure, qui généralement est masculine, est indubitablement
épique au vers 16 (ainsi qu'au vers 93); par conséquent, aux
vers 1 1 et 17, les mots virgines et virgine devront être considérés
comme latins et prononcés en trois syllabes , conformément à
la notation musicale, et peut-être même avec un certain accent
sur le second i. Les strophes sont monorimes et chacune est
suivie d'un refrain de deux vers qui riment ensemble et dont
le premier, d'après la notation musicale (cp. aussi ci-dessus,
p. 202), est de cinq syllabes, le second décasyllabiquc à césure
ordinaire.
V. 31-55. Scène entre les Vierges folles et les
Vierges sages. Les Vierges folles s'adressent aux Vierges
sages en trois quatrains latins monorimes composés de décasyl-
bbes avec un repos après la quatrième. Chaque quatrain est
222 W. CLOETTA
terminé par un refrain français d'un vers hendécasyllabe avec
une césure féminine après la cinquième syllabe accentuée*.
— Les Vierges sages répondent en deux quatrains également
latins et construits comme les trois précédents, avec cette diffé-
rence seulement que le second quatrain n*est pas monorimc,
mais rimé deux par deux. Après chaque quatrain » elles répètent
le refrain douloureux des Vierges folles en remplaçant avem par
Y. 56-60* Les Vierges sages résument la réponse qu*eUes
viennent de donner en latin, en un quatrain français monorime
suivi du même refrain. Les vers sont de nouveau décasylla-
biques avec coupe à la quatrième, mais la césure, qui, ainsi que
nous l'avons dit, est épique aux vers 16 et 93 (et 11 et 17?
voy. ci-dessus), ne saurait être que lyrique au v. 56, si toutefois
Ton ne préfère pas de n'admettre aucune césure dans ce vers
(voy. ci-dessus le v» ij). Le quatrième vers du quatrain manque
dans le manuscrit*
V. 61-80. Scène entre les Vierges folles et les
Marchands. Les Vierges folles chantent deux quatrains
latins suivis du même refrain français non modifié. Le premier
quatrain est monorime, le second est de nouveau rimé deux
par deux, c'est-à-dire que nous voyons ici se répéter exactement
la même distribution des rimes comme dans les deux quatrains
latins chantés par les Vierges sages. Aussi ici les vers sont
décasyliabiques avec un repos après la quatrième, — Les
Marchands répondent en deux quatrains français composés de
décasyllabes à césure ordinaire. Chacun des deux quatrains est
monorime et suivi du môme refrain, que les Marchands modi-
fient comme précédemment les Vierges sages.
y. 81-85. Plainte des Vierges folles en un quatrain
latin monorime de vers décasyliabiques avec un repos après la
quatrième. Le quatrain est toujours suivi du môme refrain fran-
çais non modifié.
1. La même forme de vers se retrouve dans k chanson : For mai nw-
pister ferai chm^n nai^dk {ArcMv fur das Studium der ntmrm Sprmhm unà
i-j^ra/«r^„, t. XLIII, p. 289 s ), si ce nVst qu'ici la coupe du vers est mas-
_ une et la termmaison féminine (cp. Toblcr, U vers framms, ic édit., p. 92,
mn.lH' ■; '^' ' ^' R^yfi^^d, Biblio^. des chans, fr.. H, no ijoi. a ton de
cûMsidcrerZc premier membre comme vers à pan).
LE MYSTÈRE DE l'ÈPOUX 223
A partir d'ici, l'espace laissé vide pour la notation musicale
n'a pas été rempli par le scribe, de sorte que pour les vers 86
jusqu'à la fin nous n'avons plus de notes dans notre manuscrit.
V. 86-95. Scène entre les Vierges folles et
l'Époux. Les Vierges folles s'adressent à l'Époux dans un
quatrain monorime latin de vers décasyllabiques avec un repos
après la quatrième, et font suivre aussi ce quatrain de leur
refrain français. L'Époux leur répond en deux septénaires
rythmiques latins et en une strophe française monorime de trois
vers décasyllabes à terminaison féminine et avec une césure
après la quatrième, qui a toujours l'accent ; la césure est épique
au vers 93. Quant aux deux septénaires latins qui précèdent, ils
sont construits comme ceux du début, seulement qu'outre la
rime au bout du vers qui les accouple, ils ont encore une rime
intérieure qui relie les deux premiers membres de chaque vers.
Ces deux premiers membres sont naturellement terminés par
des paroxytons; leur fin devant être trochaïque, leur rime sera
nécessairement féminine. Seulement elle est très imparfaite
dans le premier vers, où elle ne porte que sur la désinence
atone -co. Dans le second vers , elle porte sur toute la syllabe
accentuée et sur la voyelle , plus les consonnes qui la suivent,
de la syllabe finale atone, mais elle néglige la consonne qui
précède la voyelle atone de la finale : perdunt : pergunt.
m
TEXTE DU MYSTÈRE DE l'ÈPOUX
[L'indication des personnes qui parlent est en latin, de même que le titre :
« Sponsus 1». Ce qui, en outre, est latin dans le texte, est imprimé en
italiques ; j*ai rétabli l'orthographe classique.
Qpand le numérotage de Boehmer, Koschwitz et Stengel ne s'accorde pas
avec le mien, je l'ajoute toujours entre deux parenthèses.]
SPONSUS
CHORUS
Adest Sponsus qui est Christus : vigilate, virgtnes !
Pro adventu cujus gaudent et gaudebunt homines.
Venit enim liberare gentium origines ^
224 ^'- CLOETTA
Quas per priniam sibi mairem subjugarufit daemones.
5 Hic est Adam qui secundus per prophetam dicitur^
Per quem sultis primi Adae a mbis diluitur.
Hic pependit ut caelesti patriae nos redderet
Ac de parte inimici libéras nos tralxret.
Venit Sponsus qui twstrorum scelerum piacula
10 Morte lavit atque crucis sustulit patibula,
GABRIEL
Oiet, virgineSy aiso que vos dirom,
Aiet presen que vos comandarom :
Atendet un espos, Sauvaire a nom.
Gaire noi dormet :
15 Aici 's Tespos que vos or atendet!
Chorus] manque, dans le ms. — 4 daemones] demones et ainsi toujours e
tMur ae. — 5 prophctam] prophcta.
Gabriel] Prudentes. — 11 dirom] dirum. — 12 Aiei] aisect | comanda-
rom] comandarum. — 1 5 Sauvaire] ihû salvaire (-+- 2). — 15 Aid 's Tespos]
Aiscl cspos I or] hor.
5 s. Du Mcril, Origines latines du tlhJdtre moderne y p. 2}j, fait remarquer
que dans aucun prophète on ne trouve le nom d'Adam secuttdus donné au
Christ ; mais Esdras se sert de Tcxpression Je piimus Adam dans le quatrième
livre, qui peut bien être considéré comme prophétique, ch. III, v. 21. Dans le
Nouveau Testament, c'est surtout saint Paul qui a développé l'idée du primus
homo Adam et du uovissimus Adam , du primus Ijomo de terra , terrenus et du
secundus homo de caelo, cacleslis (/. Cor., XV, 21 s. et 4$ ss.), du vieil
homme et du nouvel homme (Rom., VI, 6; Ephes., IV, 22 s.; Ccloss.^ III,
9 s.), d'Adam ligure de celui qui devait venir (Rom., V, 12 ss.), etc. Pour la
liturgie du moyen âge, voy. Du Méril, /. r., et Marius Sepci, Les Propljètes du
Christ y Paris, 1878, p. 83 ss.
14 s. Le refrain doit certainement rendre le vers latin au début de notre
mystère : Adi\^t <p?n.MiS qui est Christ us : vigilate virgines! Pour le second vers
on a donc le choix entre : Aiei 's Fespos ijue vos or atendet ou Ci es Fespos etc.
ci n'est pas rare dans Saiuti Cath.rine ; mais comme il ne se trouve pas dans
notre texte, tandis que nous y lisons trois fois aici, il m'a semblé plus pru-
dent d'admettre Ai.-i '5, qui, en outre, s'éloigne moins du manuscrit et qui
me semble bien pouvoir se défendre. Le manuscrit original aura porté :
Ai:i (V, prononcé en deux syllabes, avec synalèphe iV; peut-être serait-il
même plus prudent d'écrire ainsi dans notre texte, c'est-à-dire de ne pas
LE MYSTÈRE DE l'ÉPOUX 225
Venit en terra pre los vostres pechet,
De la virgine en Betleem fo net,
Eu flum Jorda lavet e bateiet.
Gaire noi dormet :
20 Aici 's Tespos que vos or atendet !
Eu fo batut, gabet e laidenjet,
Sus e la crot levet e claufiget,
Eu monumen desoentre pauset.
Gaire noi dormet :
25 Aici 's l'espos que vos or atendet!
E resors es, la scriptura o dii. —
Gabriels soi, eu m'a trames aici :
Atendet lo, que ja venra pr*aici.
Gaire noi dormet :
30 Aici 's Tespos que vos or atendet!
16 pre] p harré, — 18 Eu] e | bateiet] luteet. — 19 s. Z^ refrain n'est indi-
que que par le mot Gaire. — 21 gabet] gablet. — 22 levet] batut. — 23 Eu]
Deu. — 24 s. Le refrain n'est indiqué que par Gaire. — 27 m'a] manque (-1).
— 29 s. 1/ refrain n'est indiqué que par Gaire.
apostropher Ve de es^ qui, dans la contraction des deux syllabes en une, pou-
vait néanmois se faire entendre. — Le copiste a pris le deuxième vers du
refrain pour le premier de la strophe suivante, ce qui explique Terreur dans
la leçon et la notation musicale du ms. etc.; cf. Schwan, Zeitschr., XI, 470.
18 La forme bateiet^ encore dernièrement proposée par M. G. Paris (Rom,^
XVIII, 150), me semble préférable à hateet ^ quoique cette dernière forme
s*éloigne moins du texte du ms.; hateié est aussi la forme de Sainte Catherine
1052 (: preié), et cp. le prov. hatejar. Naturellement cet / n'est pas là pour
marquer une diphtongue ie, c'est bateiet qu'il faut lire, comme : o/W, aiet^ preiet
(voy. ci-dessus, $ i).
22 Je remplace batut^ évidemment glissé à tort du vers précédent dans ce
vers, par levet, mot qui se lit souvent dans ce contexte. Ainsi dans le descort :
Eu aor Damrideu on lit aux vers 32 ss. : Donc fo près e liat^, Batut:;^ e mabne-
nat^, E la cros fo levati, etc.; je trouve en outre levar en croti dans les
Sermons provençaux du Xlb siècle (éd. Armitage), XVI, 6 et XXI, 19 ; dans le
Fragment du Puget, voy. Romania, XVIII, p. 436, 1. 33, etc.
23 Sur Eu voy. Schwan, 1. c, 473. — desoentre, composé de sœntre.
Emmitm. XA7/. IJ
226 W. CLOETTA
[Les vierges folles s*assoupissent et laissent pencher les vases qui con-
tiennent rhuile qui doit entretenir leurs lampes, de sorte que le liquide se
répand sur le sol. Brusquement elles se réveillent et, s'éunt aperçues de ce
qui vient de leur arriver, s'avancent vers leurs compagnes sages '.]
FATUAE
Nos virginesy quae ad vos venimus
(34) 32 Ut ad nias quibus nos credimus^
(32) 33 Negligenter oleum fudimus;
(33) 34 ^^^ orarCy sororeSy cupimus.
35 Dolentas, chaitivas, trop i avem dormit I
Nos comités hujus itineris
Et sorores ejusdem generiSy
Quamvis niale contigit miseris^
Potestis nos reddere superis.
40 Dolentas, chaitivas, trop i avem dormît !
Partimini lumen lampadibuSy
Piae sitis insipientibtis,
Pulsae ne nos simus a foribuSy
Cum vos Sponsus vocet in sedibus.
4S Dolentas, chaitivas, trop i avem dormit!
PRUDENTES
Nos precariy precamuTy amplius
DesinitCy sorores, ocius,
Vobis enim nil erit melius
Dure preces pro Ixk ulterius.
50 Dolentas, chaitivas, trop i avet dormit î
31 XosJ Hos. — 32 Dans k ms., ce vers ne vient qu'après 34 | ad] et. —
33 fudimus] fundimus. — 34 Vos] ad vos (-+- i). — 40 1/ refrain n^estindi"
que que fKir Do. — 45 ^ refrain nest indiqué que par Dole. — 46 Nos] Hos.
— 47 ocius] otius. — 50 Lt' refrain n'est indiqué que par Dolentas.
1 . On voit par ce qui suit que le poète s'est permis de modifier quelque
peu le récit de la parabole tel qu'il se trouve dans VÈvangiU selon saint
Mathieu, XXV, 1-15.
LE MYSTÈRE DE l'ÈPOUX 227
Ai ite nunCj ite celeritery
Ac vendentes rogate dulciter
Ut oleum vestris lampadibus
Dent equidem vobis inertibus.
5 5 Dolentas, chaitivas, trop i avet dormit !
(66) s 6 De nostr*oli queret nos a doner.
(67) S 7 No'n avret pont, alet en achapter
(68) 58 Deus merchaans que lai veet ester.
59 :
(69) 60 Dolentas, chaitivas, trop i avet dormit!
FATUAE
(56) 61 A! miseroCy nos hic quid facimus?
(57) 62 Vigilare nonne potuimus ?
(58) 63 Hufic laboreiny quem nunc perferiwus,
(59) 64 Nobis fiostnet ipsae conlulimus,
(60) 65 Dolentas, chaitivas, trop i avem dormit!
(61) 66 At dtt nobis mercator ocius
(62) 67 Quas Imbeat nterces, quas socius;
(63) 68 Oleum nunc quaerere venimus,
(64) 69 Negligenter quod nostnet fudimus.
(65) 70 Dolentas, chaitivas, trop i avem dormit!
51 At] Ac. — 56 i> refrain rCest indiqué que par Do. — 56-60 se trouvent
dans le ms, après 70; 59 manque et le refrain n'est indiqué que par Dol. —
61 FATUAE] manque, — 62 nonne] numquid. — 63 quem] que. — 64
nosmet ipsae] nosmed (-2). — 6$ Le refrain n*est indique que par Dol. — 66
At dct] Et de I ocius] otius. — 66 socius] sotius. — 69 nosmet fudimus]
nosme fundimus. — jo Le refrain n*est indiqué que par Dol.
59 n me semble assez probable qne ce soit le quatrième vers de ce quatrain
qui manque, et c'est ce qu'indique aussi la notation musicale, qui correspond
aux trois premiers vers des deux strophes précédentes des Vierges sages.
L'identité de la musique rend, en outre, encore plus vraisemblable ce que
déjà le sens, la symétrie et le manque d'une rubrique Prudentes après le vers 70
font supposer, que les vers 56-60 devaient suivre immédiatement les deux
quatrains latins des Vierges sages.
228 W. CLOETTA
UERCATOUS
(70) 71 Doxnnas gentils, no tos coven ester,
(7 1) 72 Ni lojamen aici a demorer.
(72) 7^ Cosel queret, non vos poemdoner;
(73) 74 Queret lo Deu, qai vos pot cosder.
75 Oolentas, chaitivas, trop i avet dormit !
(74) 76 Alet areir a vost sajas seros,
(75)77 E preiet las pre Deu lo glorios
(76) 78 De oleo fasen socors a vos ;
(77) 7^ Faites o tosi, que ja venra Tespos.
80 DolentaSy chaitivas, trop i avet dormit !
FATUAE
(78) Si A! mistrtUy nos ad quidvtnimusl
(79) 82 A'iV est enim illud qucd quammus.
(80) 85 Fdîdtum est, et nos viddnmus :
(81) 84 Ad nuptias numquam intrabimus.
(82) 85 Dolentas, chaîtîvas, trop i avem dormit!
{\fckJc irnU: SpomusS)
(S^) S 6 AiiJJy Sponse, voces plangentium :
(S4) S7 Aperire fci< nohis csîium
( 8 5 ) S S Cu 'K sxiis ad dulce prandium ;
(v'nS) S«^ }\:stra^ culpdi proche rernedium!
<)o Dolentas, chairivas, trop i avem dormit !
71 Cs^vcTij CvM-er.:. — 74. qui] chî. — 7> ^ rtfrain manque complèttnunt dans
iV ":>. — 70 vo>: sa*ji>] vostras saîj. — 77 preiet] preiat | pre] p barré. —
8v> U •;■•■'.:.: ••;.:•..:.•.:• â: t^vv:/.:;;. — S: FATUAE] ÎAà la marge gauche. —
S: iu;:ô' :!!;::. — S 4 nun:qujim] nunquam. — S> 1/ refrain n^est indiqué que
p:* \\\. — Se* L: ':.>».'.;:..• .;:.;" r^;.-.jV .x ^cuie à f extrémité de la marge droite.
8S <oci:s* s^^ti'.s .îà Ju!i.t: rrir.iium •nj»tj-u^. Je même que Nostrae culpae
./.. ..'v V, ..:•.■;. .:V >,•;,• .; ./ .V /- .-s:. • •n^^irv Je SS et le second membre de 89
s» :; ,/•:. .: ., > , : ■; y. .' ; ,- \ — v>.^ L: -r-^j;»: nnu^ue complètement.
^$^ > \ \ \>:<'\.\\\^'\ ôv* vVn ôc;:\ vers es: due i M. Gaston Paris.
LE MYSTÈRE DE L*ÉPOUX 229
CHRISTUS
(86) 91 Amen dico, vos ignoscOy nam caretis lumine,
(87) 92 Quod qui perdunt procul perguni huius aulae limine,
(88) 93 Alet, chaîtivas, alet, malaûreias!
(89) 94 A tôt jors mais vos son penas livreias,
(90) 95 E en efem ora seret meneias !
(Modo accipiant eas daemones et praecipitentur in injernum,)
Je suis heureux de pouvoir remercier ici M. G. Paris des
nombreuses et précieuses remarques qu'il a eu la bonté de me
communiquer à propos d'une première rédaction de ce travail ;
elles m'ont été de la plus grande utilité et ont sensiblement
modifié ma façon de voir en maint endroit.
W. Cloetta.
^i Au dessus de la rubrique Christus, îe rubricateur, en se servant de V espace
laissé vide pour la notation musicale, répète la rubrique qui se trouvait déjà trois
vers plus haut : Modo veniat Sponsus. — 93 perdunt] pergunt | limine]
lumioe. — 93 malaûreias] malaureas. — 94 son] so | livreias] livreas. — 95
E] manque ( — i).
91 Amen dico vobis, nescio vos (Èvang, selott saint Math., XXV, 12). Il est
évident que ignosco a id le sens de nescio, ce qu*on a cru pouvoir constater
aussi dans d'autres textes, voy. Du Méril, /. c,,p, 237, et le dictionnaire latin
de Forcellini. En introduisant ignora, on détruirait complètement la rime, déjà
imparfaite, des deux premiers membres de ce vers.
SIMON GREBAN ET JACQUES MILET
Un des volumes du recueil bien connu de Jacques Robcrtet,
conservé à la Bibliothèque nationale, le manuscrit du fonds
français 171 6, renferme, du fol. i> v<* au fol. 26 v*', un Lméres-
sant petit poème, fLiussement attribué i Alain Chanier : « La
Complaiftcte faicU par tnaisîre Alain Charretier de la mort di
maisïrc Jaques Millet qui composa la Destruction de Troye. »
Ce poème, — 69 huitains en ahabbck^ — a été signalé pour
k première fois, sauf erreur, par Vallet de Vîriville, qui en
a parlé très brièvement dans son article sur Milet de la Biogra-
phie Didot. Ce savant n'a pas eu de peine à montrer qu'Alain
Chartier, mort longtemps avant Milet, ne peut être Fauteur
de la complainte du manuscrit 1716, mais il n*a pas aperçu
Facrostlche de la dernière strophe : SIMON, — Simon Greban,
sans aucun doute, dont fune des spécialités semble avoir été
de composer des complaintes et des « déplorations * 1».
Pour donner plus de poids et de valeur à ses éloges, Greban
a fictivement placé quelques vers de sa Complainte — procédé
souvent mis en œuvre au xv siècle — dans la bouche autori-
sée d'Alain Chartier : voilà pourquoi, probablement, le poème
de Simon Greban est attribué à l'auteur de la Belle dame sans
merci par le compilateur ou le copiste du manuscrit qui nous
occupe. La Complainte de la mort de Jacques Millet figure, mais
sans la mention d*A!ain Chartier, dans un manuscrit de la
bibliothèque de La Haye'. On retrouve, par contre, cette
1. M Petit de Jullevillc, Mystères, I, p. 516, ayant mal compris une phrase,
d' ailleurs peu dairc, de Vallet de Viriviile, attribue la CompIainU k Robertet
lui-même,
2. Vo>% W. G. C. Bîjvanck . Spàimm (fun essai critiqm sur Us œuvres de
François Villon, p. IJ3.
SIMOK GREBAN ET JACQUKS MILET 23 I
étrange attribution dans un passage, jusqu'ici mal compris, de
■ la Plainte du Désiré, Jean Le Maire de Belges, écrivant Félogc
funèbre de Louis de Luxembourg, prince d'Altemore, comte de
Ligny, mort le 3 1 décembre 1503, fait dire à dame Rhétorique :
Mais je n'ay plus un Virgile qui plaigne
Son Mecenas, ne Catulle qui daigne
Gémir la mort des petits passerons ;
Maistre Alain dort, doni de due il mon cueur saigne,
Qiii pour Milet sa plume en tristcur baigne * ;
Grcban, qui pleure un^bon roy % l'accompaigne » ;
Si ne sçay plus désormais que ferons f
1^ ^»l
W Je relève dans le Catalogue Cîgongne, n** 534, !a description
■ d*u ne petite plaquette gothique, imprimée à Paris, sans date,
avec le titre suivant : La Forest de tristesse, composée par maisire
Jehan de Mun (sic) 4. « Ce petit poème », lit-on dans le Cata-
Ilogue Cigongne, « dont la mort de J* Milet, auteur de la
m Destruction de Troyc la Grant, [est le sujet, n'est pas de Jean
« de Meung, puisque d après Tépitaphe de J, Milet, qui se
« trouve dans Touvrage même, on voit qu'il mourut en 1456,
a c*cst-i-dire plus de cent ans après Jean de Meung. » Je n*ai
K pas eu ce petit imprimé sous les yeux, mats les lignes qu'on
W vient de lire suffisent pour identifier cette Forêt de tristesse avec
le petit poème de Simon Greban. Le cas de Jean de Meun est
identiquement le même que celui d'Alain Chartier. De même
I. M, de Montaiglon , ne voyant pas comment Alain Charrier aurait pu
écrire une complainte sur la mort de Milet, explique ainsi ces deux vers :
M* Atain don, dûnt de ducil mon cucur saigne^
Qui {Uqutî eueur) pour Mikt sa plume en tristcur baigne.
[Lts poftts français y I, 509.)
L a. Allusion à b Complainte de la rttort de Chartes VÎI^ de Simon Greban,
^1 j. M. Stcchcr, Œuitres de Jean Lemairede Betges (Louvain, 1885)» IJI, 172,
^Ê Ùà^m un vers faux et une phrase incorrecte, imprime ainsi la jîn de ta
^^^^L Grcbant, qui pleure d*un bon roy la compaigne,
^^^^P Si ne sçay plus dcsomiais que ferons,
4. En void le titre complet : La Forest de tristesse , composée par maistrt
Jehan de Mim (sic), avec PEpistre du salutaire au tnondain. On les vend à Paris,
ca la rue Neufve Nostre Dame, a l'enseigne Saint Nicolas. S. d,, pet. in-80
SDib., ao f^.
232 A. PIAGET
que ce dernier, Clopinel, dont la renommée était si grande
encore au x\^ siècle, est mis en scène dans la Complaink^ où il
est chargé de « dire Tobseque ' »,
Quant au titre Foret de frisîcsse, il convient parfaitement au
poème. Simon Greban se représente, en effet, assistant, dansi
une foret, à la désolation des n^^uf Muses qui pleurent la mort
de Miîet, — foret de tristesse, assurément, puisqu*il s^agit
d'une cérémonie funèbre* On pourrait au besoin donner de ce
titre une autre explication. Dans sa Complainte^ Greban ènumère
les différents ouvrages de Milet, donc Fun est précisément
intitulé la Foret de tristesse. Il est possible que rimprimeur-èdi-
teur ait tout bonnement, par confusion peut-être, adopté ce
titre pour !e petit poème qu'il publiait.
Je juge inutile de fliire l'analyse de la Complainte ik la tnvrt de
Millet; j'en citerai seulement la fin. Après avoir invectivé la
mort impitoyable et s'être longuement lamenté, dame Rhcto-
rique entre dans Féglise où se trouve le corps de Jacques Milet,
accompagnée « de son grant filz Marcus TulHus », d'Horace,!
d'Orose, de Servius, de Térence, de Valère, de Macrobe, de
Virgile, d*Homère, d'Ovide et de Boccace. Gilles Binchoîs avait
composé la musique de la cérémonie, Jean de Me un t< dit
lobseque ïi ; Guillaume de Lorris, Mercadé, Ivry, Guillaume
Le Munier, Du Fay, Okeghem et Fedé officient. Enfin, Alain
Chartier est chargé d'écrire Fépitaphe du défunt :
Lors Rethorîque en reglîse entre
Avecques toute sa séquelle.
Et ont mis le corps droit au centre
De b ch;ippellc, Dieu sçait quelle.
Et puis kl dime a pencé qu'elle
De lotjg temps en a amé ung,
due (ms. Qui) pour lobseque dire appelle :
Ce fut feu maistre Jehan de Mehung.
K Brunct, ManurJ du Libraire s. yo, Mun (J. AO» décrivant ce roèmc
exemplaire de la Partît de tristesse, le seul connu, se demande quel est ce Jean
de Mun Oie), poète du xv< siècle, dont ne parlent ni La Croix du Maine, ni
Du Verdïcr.-Ce n*est pas le seul exemple d^ouvrages faussement attribués à
Jean de Meun au xv* et même au xvie siècle. La Destructiofi de Troye, de Milci,
a ét6 imprimée à L>'onen 1543, comme « composée en riihme françoyse par
raaistrejelun de Mehun ». > J r
SIMON GREBAN ET JACaUES MILET 233
Pour ce corps bel office y a,
Et fut moult bien recommandé.
De Lorriz y officia,
Yvry, Munier et Mercadé,
Okeghem, Du Fay, Fedé,
Et Binchois y transmit musique,
Desquelz le chant a trescendé
Toute mélodie angelique ',
Non pas en nottes chansonnans,
Balans ne de revoisement.
Mais pyteusement resonnans
G)mme lamentans proprement.
Ainsi la messe entièrement
Ces seigneurs ont voulu parfaire,
Le très plus solennellement
Qji'il seroit possible de faire.
Le service fait bien et beau
Par gens très propres et deccns,
Le corps fut porté au tombeau
Bien gamy de myrre et d*encens.
Et y eut a mille et a cens
De synamome si tresfine
Qji'il n*est possible, com(me) je sens,
Qpe jamais si fine odeur fine.
Apres ont a cinq ou a six,
Pour couvrir le corps tout entier,
Sur la fosse ung grant marbre assis
Si qu*il n'y eut trou ne sentier.
Et lors vint maistre Alain Chartier,
Sans nul autre historiographe.
Qui sur sa tombe vint traitier
En lectre d'or ceste epitaphe.
I. Tous les personnages que cite Simon Greban sont bien connus, sauf
Munier et Fedé. Sur Guillaume Le Munier ou Le Monnier, auteur de
ballades et d'un chant royal, nous n'avons que les renseignements que nous
donne Fabri, édition Héron, II, 19, 94, 97 et 129. A la p. 94, on lit, par
faute dlropression, lo, Munier (corrigez : Le Munier), et M. Héron en
fait à tort un personnage distinct, du nom de Jehan Munier. — Quant au
musicien Fedé, il ne figure pas dans la Biog. univ. des musiciens de Fétis,
mais il est mentionné par Guillaume Crétin dans sa DeploreUion sur le trespas
tUfiu Ohtrgan,
254 ^* PUGET
EpiiapbUm.
Cy gist oudstre Jflquet IGUet»
Notable homme et sdentifique,
Leqod Êuné entre mil est,
Filz a oraee Rethorique»
Qpi par le rq;ard basitique
De la mort fut rendu transis,
A Paris, la ville autentique,
Mil quatre cens soixante et six '.
Qpant ceste tombe fut i
Et Tepitaphe reluysant,
Et par dessus la pierre mi&e
Ung ymage doulce et plaisant.
Le corps laisse[nt] ilec gisant
Ainsi richement compacé,
Et s'en vont trestous en disant :
SU hcus tjus cum pacê.
Qpant fut fiùcte la despartye
De rassemblée que Dieu sault,
A singulier dudl despartie,
Car tristesse fort les assauk,
Ung grant cerf de la forest sank,
Qpe force de chiens travailla.
Lors je sailly sus en sursault.
Car le son des corps m*esveilla.
Seigneurs et dames, com je sens,
J*e$criptz mon songe et le vous livre.
Mois excusez mon simple sens :
On n*e$t pas tousjours a deslivre ;
Ne )e n*en quiers ne nurc ne livre :
MiUet Ji ce foire m^enAime,
Atin que quint <xrez ce li\Te
Vueillez EHeu prier pour son ame.
X. Le ms, de La Ha>'e« cit< par M. Btjvaock. et llmprinié gocliiqoe
dvHîuctu rjLUQce 14 >ô. dite £iusse. comme fessaN-eni ie le moutio pbis loin.
— 5c bvfea:u sur ce pdbsso^ Je u CymptuifCe ie Sùnoa Gtcbon, M. B^ranck,
dxQS une lo«2^ue zKHe «ie »q Fxsi:' iriiùfoe .<v fluni» p. 155» ctott pouvoir
cecttitt U da^: de U mcrt dWUia Qurtier jusqu en 140 oa 1456L
SIMON GREBAN ET JACOPES MILET 2y$
n
ici le passage de la Complainte de Simon Greban dans
1 sont énumérés les différents ouvrages de Jacques Milet :
Faulse mort, qui tous maulx octroyé,
Tu as bien serrée la bouche
Qpi la Destruction de Troye
Mit jadis en si haulte couche,
Et si bien les hystoires touche,
Sans riens laisser qui soit de choix ,
Qpe riens a cest euvre n*attouche
Au moins pour langage françois.
Au temps de son adolescence
Fit, pour honneur de sa maistresse,
Ung livre de grant excellence
Nommé la Farest de tristesse.
Et maint autre que je délaisse.
Et or le voy je mort gésir I
Qpant il fault que tel bouche cesse,
Ce m'est ung mortel desplaisir.
C*est la bouche que je esleus ',
Qpi, au temps de prospérité.
Fit Fulgor Apdineus
Pour Agnès, dame de Beaulté.
Ce mettre est en solennité
Escript a Loches sur la lame.
Lequel a plusieurs incité
De prier a Dieu pour son ame.
î la Destruction de Troye^ qui eut un si grand succès, je ne
en *. On connaît bien également l'épitaphe latine d'Agnès
,, commençant par ce vers :
Fulgor ApoUinaeus rutilantis luxque Dianae).
C'est Calliope qui parle.
Voy. Petit de Julleville, Les Mystères, I, 3 1 5-3 17 ; II, 569-574 ; Catalogue
WW,n, 16-17.
Voy. J. Ddort, Essai critique sur Thistoire de Charles VU, d'Agnès Sùrét
eanne d'ArCf Paris, 1824, p. 289.
236 A. PIAGET
Quant à la Forit de tristesse^ Vallet de Viriville avoue que « ce
mélancolique produit » a échappé à toutes ses recherches. Je
crois avoir retrouvé ce poème dans \t Jardin de Plaisance^ édition
Vérard, flP" cciv-ccxxiv \° : Comment V amant yssant du Jardin de
Plaisance entra en la Forest cuydant avoir plus de joye et il entra
en Tristesse en plusieurs façons. Les premières strophes nous
donnent, avec la date du poème, quelques vagues renseigne-
ments sur l'auteur, jeune encore, amoureux a d'une gente
dame » :
Mil quatre cens cinquante neuf,
En avril, que Ton voit la fleur
Par les boys plus blanche qu'ung œuf
Et autre d'estrange couleur,
Je vois pensant a ma douleur,
Environ le cinquiesme jour
Dieu scct en quel piteux séjour.
Pensant a mes plus chiers secretz,
En la chambre paincte d*cnnuys,
Soubz le pavillon des regretz
Ou mon cueur couche jours et nuitz,
Ainsi languissant que je suis.
Et selon que je sens petit,
Ung livre feray, se je puis,
Bien ou mal a mon appétit.
Pour resveiller mes esperilz
Endormis au dur lict de dueil,
Rimer me fault a mes perilz
Ce qu*oncques homme ne vit d'œil.
Entrer en la matière vueil,
Et en escriray le registre
Qui sera fait selon mon vucil.
Dieu m*en doint en bonne fin istrc !
Tout seulet, sans nul confort d*ame.
Je vueil faire ce petit livre
En l'honneur de ma gente dame
A qui corps et pensée livre.
I . Le vers manque.
SIMON GREBAN ET JACQUES MILET 237
Pour elle puis mourir ou vivre :
C'est mon plus assouvy désir,
Et le bien que je doy poursuivre
Pour faire a mon cueur son plaisir.
Dieu luy doint ce qu'elle vouldroit,
Et a moy, qui jamais n'euz bien ,
Me face d'elle si bon droit
Qpe je peusse congnoistre bien
Qp'en la servant n'ay perdu rien I
Autrement grant tort me feroit,
Or sur ma foy, je suis plus sien
Que personne ne penseroit.
Ne plus ne moins que l'or s'espreuve
Qpi est en la fourftaise esprins,
Mon povre cueur en feu se treuve
Par sa beaulté qui Ta surprins.
Et si j'ay si hault entreprins
Que n'en puisse a bon chief venir,
Mon œil en doit estre reprins :
Luy seul m'en fîst assouvenir.
En termes obscurs et couvers,
En unt que me compecte et touche,
Je vudl escrire et mectre en vers
Cela que [ne] voult oncques bouche ;
Et s'il est aveugle ne lousche,
Sourt ou autre, qui point n'entende
Mon esprit ainsi que le couche.
Humblement pardon luy demande.
Car a mon cas a trop de quoy
Je me dois bien plaindre a couvert,
Et que mon dueil porte a rcquoy
Soubz ma robbe de gris ou vert,
Pensant qu'ung jour a l'œil ouvert
Advenir verray mon désir.
Dont me trouveray recouvert
Sans plus au lict de dueil gésir.
Qui ne m'entend a sourde oreille |
Je ne puis plus par escript mectre ;
238 A. PIAGET
La chose m*est si nompareUle
Qpe n*eti sçay parler cler par lectre.
Pitié m*a voulu entremecire
D'en faire une trouble complainte.
Et m'a fait jurer et promcctre
QjLi*eii feroye secrète plaînie.
Secrètement me faull douloir
Afiin que nesung ne congnoissc
La vérité de mon vouloir
Ne d'où procède mon angoisse.
Et est ce qui au cueur me presse
Ce que j*ay congneu et hanté.
Ou que ma douleur si fort croisse
Que jamais je n'aye santé.
Notre poète se représente, en songe, égaré dans la Forêt
d'enoLii ou Forêt de tristesse, dont une femme horrible à voir.
Mélancolie, est la gardienne. Dans cette forôt, véritable enfer
des amoureux, il n'aperçoit que cadavres, il ne rencontre que
gens fous de désespoir, il n'entend de tous côtés que cris et
plaintes. Après de long détours, il arrive devant un arbre auquel
se trouve attachée, avec la chaîne d*Amer souvenir, une jeune
femme nommée le Chief des dames, jadis « fresche et ver-
meille M, aujourd'hui toute « descoulouree ». Il écoute, caché
derrière un buisson, la complainte que cette malheureuse adresse
à la « royne des cieulx n :
Las ! moy» povrette jouvencelle,
Qiii me tiens servante et ancelle
Au saint trcisne de paradis,
Je me cora plains, doulce puceUe,
De la douleur que mon cueur celle,
Ne que jamais a nul ne diz,
Dk deux liv^res faulx et mauldis
Cbii sont escripu contre mon bien,
Pl^ns de meschans et vilains ditz :
Dieu le scet et vous aussi bien.
C^ deux livres, on le devine, ne sont autres que le Rùtnan ai
la Rose et les Lanieniaiiom de Mathmlus^ que notre auteur
appelle le Testa$nmt dtsfemma.
Nous ne suivrons pas notre poète dans toutes ses aventures.
SIMON GREBAN ET JACCIUES MILET 239
Après avoir risqué de se noyer dans la rivière de RefFus, en
compagnie de l'amant de la Belle dame sans merci» il rencontre
Subtilité qui lui donne de longs renseignements sur la « forest
mauldicte », que tous les mortels, une fois ou l'autre, doivent
traverser. Enfin, tant bien que mal, il arrive au château
d'Amours, où il retrouve le Chief des dames et où il assiste au
jugement de Jean de Meun et de Matheolus. Je rapporte ici un
fragment de ce jugement, qui montre une fois de plus combien,
à la fin du xv« siècle, étaient encore populaires les violents
poèmes de Clopînel et du Bigame :
Toy, desloyal Matheolus,
Indigne qu'on te nomme plus,
Ne que dedans la terre couches,
Cueur villain, la pire des bouches,
Des dames diz en ton escript
Q)ie pires sont que Tantechrist,
Et en ce mauldit propos entres
Que si les mers deviennent cendres *,
Terres et champs et tout chemin
Feussent papier et parchemin,
Et (que) tous arbres devinssent plumes
Pour faire rommans et volumes,
Et que se les cueurs de chascun
Fussent assemblez tous en ung,
Si ne pourroit on concevoir,
Escrire ne ramentevoir
Tous les maulx ne tous les diHames
Qpe l'on pourroit trouver en femmes.
Jamais de toy n'eust riens esté,
Se femme franche et naturelle
Ne t*eust tendrement allaicté
De sa nourrissante mamelle.
Pour toy perdit nom de pucdle,
Neuf moys en son corps te coucha.
Puis en soufirit paine mortelle
Qpant de toy, meschant, acoucha.
I . Il faut évidemment corriger : encres*
■w--^
240 A. PIAGET
Pour toy porta donlair anieie»
Avant qu'dle feust acoadiéy
Depub vers toy se moostra mei«,
Lasche paillart mal embouché;
Cent kîz t*a longuement ooodié
Et couvert de sa blanche main.
Ou ton père n'eust pcrnit touché.
Car homme n*est pas tant humain.
Toy, fauk paillart Mathedus,
Chascun sçait que tu es infime.
Car tu euz deux femmes ou plus
Espousees comme ung bigame;
Tout le monde t'en donna Uasme,
Et par justice en fîiz repris.
Depuis pour te vengier de fismme
Ce malheureux livre entrepris.
Ce livre, selon qu'on m*a dit,
A nom le TestametU des femmes»
Qpe pleust a Dieu qu'on te pendist
Et ceulx qui dient tdz diffunesl
La loy repute pour in£unes
Hommes et les excommunie
Qui mesdiront du Chief des dames '
Et de sa noble compaignie.
Je te desckire estre trouvé
Faulx aaeur, ennemy des dames,
Bigame, menteur approuvé.
Facteur du Testament des femmes.
Le villain boucquin tant infâme
Sera bruslé présentement
Pour monstrer que telz villains blasmes
Sont contre droit totalement.
Qpant au regard de Jehan de Meun,
Qpi fist le Rommant de la Rose,
I. Jardin de Plaisance : femmes.
SIMON GREBAN ET JACQUES MILET 24 1
Sage clerc selon bruit commun,
Dit des femmes trop ville chose :
En son livre dit et propose
Qji'ilz sont trop meschantes en somme » ;
Mais quant a moy je m*y oppose :
Il ment comme ung desloyal homme.
Prudes * femmes, par saint Denys,
Gracieuses et secourables,
Voit on trop plus que de fenix,
Qjii sont belles et honnorables :
Toutes les maintien(nen)t détestables,
Sans en excepter une seule ;
Mais cent mille en voy de notables
Qjii tiennent qu'il ment par sa gueule.
Si suis de ceste oppinion
Que celluy qui tresfort les blasme
Vault pis qu'un houlier d'Avignon
Ou qu'un meurtrier. Par Nostre Dame,
On devroit en feu et en flame
Brusler rommans, gros et menuz,
Qui desprisent la digne femme
Dont tous les hommes sont venuz.
Qpant a moy je croy tellement,
Q^e homme qui femme desprise
N'est point né naturellement,
Ne baptisé en saincte église,
Puis que son beau doulx per ne prise,
Et que pour meschant le repute,
Prest a faire pire entreprise
Que les sorciers de la Va u pute.
r du jugement, notre poète aperçoit une vaste prairie
ve être « la gente pree de mercy », et il s'y engage,
: Plaisance : en personne,
le Plaisance : Prudentes. C'est une allusion aux vers connus du
/?(w (édit. Michel, i, 288):
Prodcs fames^ par saint Denis,
Dont il est mains que de fcnis...
iXII. 16
242 A. PIAGET
guéri, lui semble-t-il, de son mal d'amours. Voici la dernière
strophe du poème :
Lors sur ma couche m*arresté
Comme homme de sens despourveu.
En pensant ou j'avoye esté.
Ou s'avoye songé ou veu.
Tantost a par moy je congneu
Que trestont n*estoit que mençonge ;
Non obstant, ainsi que j*ay scen.
J'en ay fait descrire le songe.
m
Le long poème, — cinq mille vers environ, — dont je viens
de faire une rapide analyse convient parfaitement à ce que
Simon Greban nous apprend de Touvrage perdu de Milet. Et
d'abord, on peut à coup sûr l'intituler la Forêt de tristesse : non
seulement le sujet du pocme nous y autorise, mais la rubrique
du Jardin de Plaisance nous y oblige. Pour relier entre eux tous
les poèmes de son anthologie, le compilateur anonyme du
Jardin de Plaisance a, plus ou moins, suivant les cas, modifié,
remanié, allongé leurs titres; mais, dans ce délayage, on
retrouve toujours et sans peine le titre original. Un exemple
montrera clairement la chose. Dans la rubrique suivante : La
relation faicte au Jardin de Plaisance du dehat de Vaniant et de la
dame , qui est sans conclusion, on reconnaît facilement le poème
connu sous le titre de Dehat sans conclusion ou de Relation du débat
sans conclusion. Le Débat du cœur et de F œil, de Michaut Taillevent,
est ainsi intitulé dans le Jardin de Plaisance : Comment, les amatts
estans au Jardin de Plaisance a leur plaisance, F un des amans se corn-
plaint de son cueur qui se débat a son œil. Le titre de FonH de tristesse
ressort naturellement de la rubrique Comment Famant yssant du
Jardin de Plaisance entra en la forest cuydant avoir plus de joye et il
entra en tristesse en plusieurs Jaçons,
Le titre acquis, passons à Tauteur. Simon Greban nous
apprend que Jacques Milet a composé sa Forêt de tristesse « au
temps de son adolescence » et « pour Thonneur de sa mais-
tresse 0. Or le poète du Jardin de Plaisance nous parle à deux
SIMON GREBAN ET JACQUES MILET 243
OU trois reprises de sa jeunesse. A Sapience qui Texhorte à se
défier des femmes et de l'amour, il répond par ce vers :
Il fault que jeunesse se passe,
et il ajoute :
Mais (a) moy qui en jeune aage suis
Il est besoing que fort traveille
Pour attrapper ce que je puis
D'amours, qui souvent me resveille.
Q)mme Milet, enfin, il a écrit son long poème « en Thon-
neur de sa gente dame » :
Tout seulet, sans nul confort d'ame,
Je vueil faire ce petit livre
En rhonneur de ma gente dame
A qui corps et pensée livre.
Quant à la date de 1439, donnée par le Jardin de Plaisance,
elle correspond tout juste « au temps de l'adolescence » de
Jacques Milet. Nous savons^ en effet, que lorsque Milet mou-
rut, en 1466', il était jeune encore : Simon Greban accuse la
mort d'avoir agi « contre l'ordre de Nature » en frappant ce
poète en pleine jeunesse; Octavien de Saint-Gelais également,
dans le S^'our d'honneur, gémit sur le trépas de Milet, mort « en
si jeune aage ».
Tous ces rapprochements permettent, me semblc-t-il, de
regarder la Forêt de tristesse du Jardin de Plaisance comme le
pocme, qu'on croyait perdu, de Jacques Milet.
Arthur Piaget.
I. Inutile de remarquer que, si nous regardons la ForiH de tristesse du Jardin
de Plaisance^ datée de 1459, comme étant de Milet, nous devrons rejeter
comme fausse la date de 1456 donnée par le manuscrit de La Haye et par
réditioodela ComplainU (voy. d-dessus, p. 234, n. i).
UNE SUPERCHERIE D'ANTOINE VÉRARD
LES REGNA RS TR A FERS ANS DE JEHAN BOUCHET
M. Piaget a montré récemment qu'un volume publié en 1509
sous le nom d'Octavien de Sainct-Gelays, La Chasse et le Départ
d'amours, contenait, avec quelques légères variantes, la plupart
des poésies de Charles d'Orléans'. On peut citer, à la fin du
xv-' siècle ou au commencement du xvi*, de nombreux exemples
de CCS plagiats éhontés, et nous devons admettre que nos anciens
auteurs n'avaient guère Tidée de la propriété littéraire. Nous
voulons aujourd'hui faire connaître une supercherie qui est
pcui-ctre encore plus singulière qu'aucune de celles dont il a été
parlé jusqu'ici.
Jehan Bouchet, le procureur poitevin, tient une place
honorable parmi les poètes de la première moitié du xvi* siècle.
Il était ne au mois de janvier 1476, et ce fut en 1500 qu'il
composa son premier ouvrage : Les Regiiars traversant les péril-
leuses ivycs des folks fiances du monde, tableau, en prose et en vers,
des abus et des fourberies dont tous les hommes se rendent
coupables. Le titre de cet ouvrage lui avait été inspiré par une
clcgie latine de Sébastien Brant, intitulée : Alop'kiomachia, seu de
s{\ytai'Nlo Ci'nflictuque vulpium^, Bouchet porta son livre au
grand libraire parisien Antoine Vérard, qui voulut bien se
charger de le publier, et fit même graver toute une série de
figures en bois appropriées au texte. Deux ou trois ans s'écou-
lèrent entre la composition et la publication de l'ouvrage. I^s
:. .■.;♦/,: Si\:>:i,;':i ^^'•.;•;r cV»»;;'»;.; (Risilejc, Joh. Bergman de Olpe, 1498,
in 0, vl. ■•;. — M. Ch.irlcs SchmiJî (H:s:*}:re littéraire Je V Alsace à li fin du
Ai' .. .:.'. .\ •':».v\\v".v':;.î:. \l'î< y/tV.V, I, 2M^ fait obser\*er que VAlopekicma"
^ ■■..; a\aii ac\ j\ir.i'!:rc J'aK^rJ en touille voLnte.
UNE SUPERCHERIE d' ANTOINE VÈRARD 245
Regnars ne virent le jour qu'en 1503 '. L'édition était luxueuse ;
mais quelle ne fut pas la stupéfaction de Bouchet quand il cons-
tata que son nom avait été supprimé du volume et que le titre
ponait « par Sebastien Brand, lequel composa La Nef des folz
derrenierement imprimée a Paris ». Le Narrenschiffy traduit en
latin par Jacques Locher, dit Philomusus, avait paru à Bâle en
1497 et 1498, et avait été réimprimé à Augsbourg et à Stras-
bourg en 1497, à Paris et à Lyon en 1498. La supercherie de
Vérard montre de quelle popularité jouissait alors la satire de
Tauteur alsacien; mais elle porta un rude coup à l'ambition
naissante du poète poitevin. Dans une épître écrite bien des
années plus tard, Jehan Bouchet se plaint amèrement du pro-
cédé malhonnête du libraire parisien, qu'il n'avait pas hésité ;\
poursuivre en justice. Énumérant tous ses ouvrages, il s'exprime
ainsi :
Le premier fut Lu Regnars traversatts,
L'an mil cinq cens, qu'avois vingt [et] cinq ans,
Ou feu Verard, pour ma simple jeunesse,
Changea le nom (ce fut a luy finesse).
L'intitulant au nom de monsieur Brand,
Un Alemant, en tout sçavoir tresgrand,
Qii\ ne sceut oncq parler langue françoyse,
Dont je me teu, sans pour ce prendre noise,
Fors que marri je fuz dont ce Verard
Y adjousta des choses d'un aultre art
Et qu'il laissa tresgrant part de ma prose,
Qpi m'est injure, et a ce je m'oppose
Au Chastelet, ou me paciffia '
Pour un présent lequel me desdia K
On le voit, Bouchet, qui était un homme de loi, avait porté
résolument l'affaire devant les juges compétents ; mais il ne se
I. Dans le passage des Episires cité plus loin, Bouchet dit qu'il a composé
Les Regnars^ en l'an 1500, à l'âge de vingt-cinq ans. Or, on lit au début de
l'ouvrage :
Jeune je suys et n'ay pas des ans trente.
Non vingt et huyt.
On trouve, d'autre part, au fol. nj b, la date de mars 1502 (v. s.).
3. Imp. ou il me.
5. Epistres morales et familières du Traversetir (Poitiers, 154$, in-fol.),
2« partie, fol. 47, ép. XI,
.r-^'V'"^-:
24e Ê. ncxxr
borna pas à une action judidaiie. Pour bien constater ses droits
d*auteur, il s*aflfubb d'un nom nouveau, et se fit appeler toute
sa vie « le Traverseur des voyes périlleuses » , ou sîmpicnicnt
« leTraverseur».
H nous suffît de renvoyer à l'analyse que Pabbé Goujel a
donnée des R^nars traversans\ Ear suite des suppressions pra-
tiquées par Vérard dans b prose de Fauteur, l'ouvrage est asw
court, n n'occupe en réalité que les ff. signés mj-fij^ c'est-à-*ic
31 ff. en tout, n se termine par une Exbariacim ou par la
premières lettres des lignes trouveresi le nom de Facteur de ce présent
livre ei le lieu de sa nativité. Cet acrostiche, que le libraire a
naïvement respeaé, contient en eflfet les mots : Jehan Bouaffir,
NATIF DE PoiCnERS.
Le reste du volume est occupé par les « choses d'un aultre
art » , auxquelles le poète fidt allusion dans son éjdtre. Nous
allons les £iire connaître en détail :
I . La Complaincte d'ung damné.
Cette pièce ne pone aucun titre dans l'imprimé ; elle est
accompagnée seulement d'un très beau bois représentant
les peines de l'enfer. Le titre que nous lui donnons tsf.
emprunté à un manuscrit de la Bibliothèque nationale (franc.
^305, fol. 27 '). Voici les premiers et les derniers vers des deux
textes :
Ms. 2 J06, fol. 27. Éd. de Vérard, fol. J5i>, a :
Gens endormyz en péchez tant infaicu. Gens endonniz en péchez tant in£ût2^
St>uille2, puans, villoins et contreÊiitz, SouiUez, puons, vilains et contrcÉritz,
Ne domiez plus, mais plorez vos maulx Nedormezplus, Mais pleurer vos nuulx
[faictz [iai«
A grant fo>*son. A gtant foison.
1 lorc/, plorez, car il en est saison. Pleurez, pleurez, car il est de saison,
cns despv^ur\ euz de sens et de raison. Gcnsdespourveuzde sens et de raison,
"clas . jpon^ez a vostre desraison Et pensez bien a vostre desraison.
Tant qme temps dure.
Cruelle et dure.
1- ^W'vV^V«OVj«a>iVc-, XL 2^
orne i^.rr"'*'"^.^ ^ ^^ ^'''^^""^''' P^""" Franv-ois 1er, puisque la miniature qui
rovalc niaù ,7,^"^^^"^^ '^'^ ^™« Je France accompagnées de la Salamandre
' ""'' ^'^ ^^-^^« ^" îï renferme som du x.- si^e.
UNE SUPERCHERIE d' ANTOINE VÈRARD 247
Considérez la peine que j'endure Considérez la peine que j'endure,
En ce feu cy ardant qui tousjours dure, Le grant travail et douleur si Iresdure
En lieu puant, infaict et plain d'ordure Et que je suis en ce lieu plain d'ordure
Bien attaché... Bien atachù.
Fol. 33 vo. Fol. fVy ab :
Quant vous vouldrez, dont vous vous Et nion conseil estre hou vous dire^y
[mauldirez,
Je vous prometz. Je vous promcctz.
Si de me plaindre devant vous m'en- Si de me plaindre devant vous m'en-
tremetz, [tremetz,
Las I raison est affin que tenez netz La raison est affin que tenez netz
Voz cueurs rempliz de péchez et d'or- Voz cueurs rempliz de péchez et d'or-
[dure. [dure.
Vostre pacquetau grant jourjeremetz, Tout ce dehat au grant jour je remectz
Et pour seurtéaux deables me commetz Et tout le cas a justice commetz,
Pour endurer peine qui tousjours dure. En laquelle équité tousjours dure.
La Complaincte d*ung damné paraît être l'œuvre d'un poète
qui signait « Le Douloureux » ; tel est du moins le nom qui
accompagne les deux premières pièces du recueil manuscrit qui
nous Ta conservée.
2. Balade de pertiftacité (éd, de Vérard, fol.yi' b).
Nous disons bien que Dieu nous a tous faitz...
Rejr. Mais gouverner ne nous voulons par luy.
Cette ballade se retrouve dans un manuscrit de la Biblio-
thèque nationale (fr. 2206, fol. 98) ; mais elle y a probablement
été transcrite d'après un des ouvrages de Bouchet. En effet,
celui-ci l'a reproduite dans ses Opuscules \ fol. Hij b, et dans
ses Généalogies ^y fol. 106 b.
3. Traité en prose et en vers sur la vanité des arts libéraux
et des arts mécaniques (éd. de Vérard, fol.yz; c).
1 . Opuscules du Traveruur des voyes périlleuses^ nouvellement par luy reveu\ ,
amande^ et corrigés (Poictiers, Jacques Bouchet, 1526, in-4 goth.). Voy. Cat.
Rothschild, I, n^ 508.
2. Les Geneak^ieSy Effigies et Epitapixs des roys de France, etc. (Poictiers,
Jacques Bouchet, et Jehan et Enguilbcrt de Marnef, 154$, in-fol.). Voy.
Catal. Rothschild, I, n» 510.
248 E. PICOT
PROLOGUE
« En ung lict de intirmité pensant a par mo>' la \'ariableté des choses
violentes, la ou riens n'y a permanent »
AUTRE PROLOGUE
Comme songeant et non en songe,
Esuni en mon lict me trouvé...
Il n'est pas sûr que cette pièce soit de Bouchet, bien qu'elle
soit assez dans sa manière : il n'en a rien reproduit dans ses
autres ouvrages, quoiqu'il ait traité dans ses Episires morales
des sujets tout i fait analogues.
4. Des vices et des vertus (éd. de Vérard, fol. 1 iij c).
Réunion de ballades reliées entre elles par des additions en
vers octosyllabiques :
j. Gens orgueilleux, qui estes tant penxTS...
Rtfr. Car a !a tin orgueil déçoit son maistre.
.'•. Esbahy suis Je vous, gens inhumains...
Rifr. Car de tous maulx avarice est la rix.
Peuple paré e: îarcy de panrsse...
Rft- . Du îenip> perdu il tauldra compte rendre.
i. De Terivicux vue:! parler, qui s'applicque...
Ri'' . Mais :c*.!c> i:cn> doi: o:: faire mourir.
IV!cr ::oi:> :iul: au>>: du pcchc d'yrc...
A*!*'-. Do::: Vv^u> :"àu'dr.i plusieurs hmuIx endurer.
■ . Gv> ^•\w«.>>i:-. ou: u::: ayiv.ci viuiîîc...
K.'- , IX u\ r.ir.id:> v^^u-i v.e f\^uc; avoir.
^. H: ouv di:^':> de '.vu>. luxurieux?
.V ''. 1\! .1 rvju'x Vvulx 0.:: >."u\\.r.: rie voit goûte.
Ces sep: '?aI!aJc> se rerrouvcn: dans le ins. fran*;. 2506 ,
10!. 20. H;!cs y so:^.: placées dariN Tordre suivant : a h g d e f c.
Le :r.a:iu>cri: r.e cor.tier.t point les vers qui relient les bal-
lades les unes aux autres.
5. l\\^ :,^:.::\ .;.. ••:.•:.:.• y^ed. de Vcr.ird, fol. iiij d).
Ce poènie es: preccde ie deux b.i'.'..iJes, savoir :
.:. O.: :v:>^: . . >. •*\>v-.::^!.'^ :" ^"d.::!^ ? ..
.V • . O.--'^" de '. ,> :"..i.:'\ \ou> :"uu!ùrà reiiJre compte.
UNE SUPERCHERIE D* ANTOINE VÈRARD 249
Dans le ms. fr. 2307, où nous rencontrons cette ballade
(fol. 5 5), elle commence ainsi :
Ou sont voz yeulx, misérables mondains?...
b. Cest grant pitié de ce monde fragille...
Rffr. Paine, travail et molestacions.
Bouchet a reproduit cette dernière pièce dans ses Opuscules,
fol. liij V*», et dans ses GenealogieSy fol. 112 v**.
Le poème commence ainsi :
Les vices generallement
Avons aucun petit touché
Et monstre comparablement
Qpe soy fier totalement
Mieulx vaut en vertu qu'en péché. . .
Ces vers sont probablement de Bouchet, bien que nous n'en
ayons pas la certitude ; ils sont suivis d'une ballade :
Je n'en dy plus; mais, pour conclusion...
Refr. Espoir en Dieu et fiance totalle.
Jehan Bouchet a reproduit cette dernière pièce dans ses
Opuscules y fol. Hij b, et dans ses Généalogies, fol. 106 v°.
6. [La Complainte douloureuse de Vaine damnée] (éd. de
Vérard, fol. mi a).
Helas, helas, et plus que helas !
Se mille fois disoye helas.
Ne me pourroye assez plaindre...
Cette complainte, qui semble appartenir au milieu du
XV* siècle, nous a été conservée par divers manuscrits (voy.
notamment Biblioth. nat. franc. 1181, fol. 121, et franc.
1467, fol. 301 ; Biblioth. roy. de Bruxelles, 9300) ;* il en existe
un assez grand nombre d'éditions séparées (voy. Brunet, II,
198; Cat. Bancel, 1882, n° 260, etCat. Rothschild, I, n° 533);
enôn elle a été réimprimée par M. de Montaiglon {Recueil de
poésies franc., VII, 91).
7. [Petit Dialogue entre Dieu et le Diable] (éd. de Vérard,
fol. fnv d).
Dieu parle et dit :
Je t'ay créé, (et) régénéré
Et de mon sang t'ay rachapté...
2)0 fc. PICOT
On trouve ce dialogue dans les éditions du xv* siècle à la
suite de La Complainte douloureuse dt Pâme dampnee (voy. Mon-
taiglon, VII, ii6). L'éditeur de la Complainte y a joint une
tirade qui se termine par l'acrostiche Rouge Belot. Cette tirade
manque naturellement ici.
8. Ballade des abu^du monde (éd. de Vérard, fol. mvj a).
Je m'esbahys comment seuffîre la terre...
Refr. Des grans abuz que Ton fait en ce monde.
Cette ballade est encore une de celles que Bouchet a repro-
duites dans ses Opuscules y fol. Hij v*», et dans ses Généalogies y
fol. 105 b.
9. (Fol. mvjd) [Ung Enseignement moult piteux.]
Cette pièce, qui compte plus de 5500 vers, est la reproduc-
tion pure et simple d'un ouvrage du xiv^ siècle. Le compilateur
de 1503 n'y a fait que deux changements importants : il a
changé au vers 19 la date de 1366 en 1502, et il a supprimé à la
fin deux vers qui contenaient le nom de l'auteur, Jehan de
Remin '. Il a d'ailleurs conser\'é avec soin, non seulement le
texte français, mais toutes les citations latines qui accompagnent
le poème. Ces citations forment, dans l'imprimé comme dans le
manuscrit, une seconde colonne placée en regard des vers.
Voici le début et la fin du poème :
Ms. fr. 1578. Édition de Vérard, fol. mvj d.
Pour eschiver impacience Pour cschever impacience
Qui monstre c'on n'a pas science, Qui monstre que homs n'a pas science.
Car ly homs n'est pas dis scicns Car l'homme n'est pas dit scient
Qui est trouvez impacicns. Qui est trouvé impacient,
Vueille cy sans dilacion, 5 Jcvueil cy sans dylation.
Pour ceulx qui tribulacion Pour ceulx qui tribulation
Ont souvent et au cucr meschicf, Ont souvent au cueur et meschief.
I. Du Vcrdior (éd. Rigoley de Juvigny, II, 511) mentionne, sous le nom
de Jehan de Remy, un ouvrage intitulé Le Miroir de l'Ijottime, qui aurait été
imprimé à Paris en 1497. On peut se demander si ce n'est pas notre poème;
mais il est possible aussi que Jehan de Remy se confonde avec Johannes
Remigii, pénitencier de Chartres, qui fit publier, en i486, le Hrniarium
CarnoUnsc {\V)h\\o\\\. nat., Rés. B. 27931) et qui donna, en 1500, le Manuale
Carnotaisc.
UNE SUPERCHERIE
Reciter tout de chief en chief
Ung enseignemant moult piteux
Et a oîr moult deliteux lo
Qu'il n'a pas long temps que j'oy
Dont moult en cuer je m'esjoy,
Car ne sçay qu'il m'est avenir.
Or m*en doint Diex en convenir
A no prouffit et a Tonneur 1 5
De Jhesucrist notre sauveur.
En l'an de l'incamacion
Jhesu nostre rcdempcion
M. et .III«. soixante et six,
Se emmy mars sont droit assis, 28
En une ville ou m'en entray
Un religieux encontray,
Si le suy et sa conpaigne,
Si comme drois faire l'enseingne ,
Car il aloit commenier 25
•I. malade et enolier,
Qui pcnoit moult en grief torment,
Dont se mesaisoit si forment
Qpe près estoit de desespoir
S'il n'y fust venus ; mais espoir 30
Qpe Diex ainsi le vouloit faire
Affin qu'amendast son affaire,
Si com David le volt laissier
Cheoir pour orgueil abaissier.
Cils malades dont je vous compte 3 s
IIU»» ans ot bien par compte.
Et tant que depuis la Toussains
Son corps n'estoit mie tous sains ,
Dont il ne demcnoit pas feste,
Car des pies jusques a la teste 40
Il n'avoit lieu ne place sainne
Qpi de grant doleur ne fust plainne,
Et de ce le voir vous diray
Que ja de mot n'en mentiray,
D* ANTOINE VÈRARD 25 I
Reciter tout de chief en chief
Ung enseignement moult piteux
Et a ouyr moult delicteux
Que n'a pas long que j'ouy.
Dont grandement me resjouy .
Ne sçay qui m'est a advenir ;
Or m'en doint Dieu bien convenir
A mon prouffit et a l'honneur
Dejesuchrist nostre seigneur.
En l'an de l'incarnation
Jésus notre rédemption
Que on dit mil cinq cens et deux.
En mars environ ving et deux.
En une ville m'en entray ;
Un religieux encontray,
Que saluay et sa compaigne,
Ainsi comme droit si l'enseigne ,
Car il alloit enullier
Ung malade et communier.
Qui penoit a moult grief torment,
Dont il se mesaisoit forment
Des maulx quil luy fauîl endurer^
Que estoit près ' au désespérer
Et estre îjors de bon espoir
S'il ne fust venu ; mais espoir
Que Dieu ainsi le vouloit faire
Affin qu'amendast son affaire,
Si com David il voult laisser
Cheoir pour orgueil abaisser.
Ce malade dont je vous compte,
Quatre vingtz ans ot bien par compte.
Et tant que depuis la Toussains
Son corps si n'estoit gueres sains,
Mais souffroit si grande moleste
Que, des piedz jusques a la teste.
Il n'avoit lieu ne place saine
Qjie de grant douleur ne feust plaine ,
Et de ce le vray vous diray
Que ja de mot n'en mentiray,
I. [mpr. Qjie près estoit.
252 È. PICOT
Car conscience en blesseroye, 45
Dont sages pas je ne seroye.
Cils malades premieremant
Par tout le corps entieremant
Tel mal de goûtez endurcit
Que ne sçay comment il duroit ; 50
Mais Dicx le faisoit, qui conforte
Ceulz qui ont conscience forte,
Car, de force de maladye,
Uoye avoit sy assourdie
Qu'il n'entendoit nez une goûte 55
Tant Tavoit fort destraint la goûte.
Des » yeulx par lesquelz droit alons
Ne veoit ne que des talons ;
Sa ' goûte ly avoit troublée
La clarté des yeulx et amblée ; 60
Par quoy nul esjoyssemant
N'avoit, ne soûlas aussement...
Car ma conscience blesseroye,
Dont pas saige je ne seroye.
Ce malade premièrement
Par tout le corps entièrement
Tel mal de goûtes endurcit
Q^e je ne sçay comme il duroit ;
Mais Dieu le faisoit, qui conforte
Ceulx que tristesse desconforUy
Car, de force de maladie,
L'ouye avoit si assourdye
Q^*il n'entendoit ne oyoit goûte
Tant Tavoit/or/ estraint la goûte.
Des yeulx par lesquelz nous voyons
Ne veoit ne que des talions ;
De goûte luy estoit troublée
La clarté des yeulx et emblée ;
Par quoy nul esjouj-ssement
N'avoit, ne soûlas ensement...
Le prestre lors, sans plus de plait,
Quant Tome ot fait confession,
A enoint le corps d'onctjon ;
Du bon homme congié a prins,
QuMl ot en ce duit et aprins : 5510
Ou bien il ot s'entente mise,
Et s'en revint droit a Tcglise.
Adonc je, Jehan de Remin,
A part eux laissay mon chemin ;
A mon chemin m'en retornay. 5515
Quant ving a l'ostel, j'atornay
Ma plume pour trestout escriprc
Ce que j'oy au prestre dire,
Au plus près c'onquez le poy faire,
Sans moy en nulle rien meffaire. 5 5 20
Si prie a tous ceux et requier.
Qui les orront, de moy moquier.
Pour Dieu, qu'il s'en veullent tenir
Le prestre lors, sans plus de plait.
Quant l'homme eut fait confession
Et fut enoingt de Tunction,
Doulcemmt congé \st] a prins ;
Tellement le duyt et apprins
Que s'entente ot toute a Dieu mise.
Lors s'en revint droit a Teglise.
Puis a Tostel m'en retournay,
[Et] quant vins yla, j'atournay
Ma plume pour trestout escrire
Ce que \o\iys au prestre dire.
Au plus près que je le peuz faire,
Sans moy en nulle riens meffaire.
Si prie a tous ceulx et requier
Qui les orront de cueur entier.
Pour Dieu, qu'ilz se veulent tenir
1 . U ruhriciitcur a mal à propos place ici un L ; leD est indiqué à la mar^e,
2. Ms, C (l'i moi tic efface) sa goûte.
UNE SUPERCHERIE D* ANTOINE VÈRARD 25 ^
Du mal et le bien retenir, Du mal cl le bien retenir,
A leur prouffit de corps et d'ame ; S 525 A leur prouflît de corps et d'amc;
Et Diex rottroie et Nostre Dame 1 Et Dieu Toctroye et Nostre Dame !
A mm, Anten.
On voit par ce qui précède combien les réclamations de
Jehan Bouchet étaient fondées, La transaction inter\^enue entre
I lui et Vérard n'empêclia cependant pas d'autres libraires pari-
I siens de reproduire l'ouvrage tel quel. MkM ht Noir le réim-
" prima sous la date du ir mai 1504 * ; Philippe Le Noir en donna
^^ne troisième édition achevée d'imprimer le 23 juillet 1522^;
l^hnfin Denis Janot acheva l'impression d'une quatrième édition
^Êft 25 janvier r$3i, n. s. i
^M Si Jehan Bouchet n'avait eu le soin de dénoncer le procédé
I peu scrupuleux du libraire parisien, il serait probablement
I aujourdMiui accusé de plagiat. Antoine Vérard, que nous devons
rendre responsable de cette fraude, traitait avec le mènie sans-
gène les auteurs dont il vendait les livres et les leaeurs qui les
lui achetaient. Quand; par exemple, il publiait quelque ouvrage
important, il ne manquait pas d'en faire séparément hommage à
des protecteurs différents. Cest ainsi que plusieurs de ses mer-
veilleux volumes conservés au Musée britannique ont été enlu-
I. Cat. Libri, 1859» ^^ 4'^' Cette édition donna lieu à un procès qu*îl est
bon de rappeler ici. Le 30 avril 1504, maître André de La Vigne, « cscoUer
estudiant en runivcrsité de Paris, » présenta requête au parlement pour
arrêter l'impression du Fergier iVbonnem' entreprise par Mkhtl Le Noir. Le
1 1 mai, la cour accorda au demandeur un délai de qiiin;:aine pour produire
ses pièces et permit provisoirement A Le Noir de continuer son travail. Le 3
iiin suivant, après plaidoyers, le parlement donna gain de cause à André de
t Vigne et fit défense â Le Noir et à tous autres imprimeurs « de ne faire
aprimer ne vendre Lt Fermer de honneur et Ws Regnars traversatts » jusqu'au
' avril suivant. Voy. La Borde, Le Parkmeftt de Paris^ préface de VInventaire
Actes du ParîenutH de Paris (1863, in-4), p. xliij. On comprend l'intérêt
fAsdré de La Vigne avait à surveiller les éditions du Vergier\ mais corn-
[ avait-il des droits sur les Regnars iraveimns} Ne serait-ce pas lui qui
Qrait arrangé le livre pour Vérard?
a. Car, BanccL 1882, n» 254. — Biblioth. roy. de Munich, P. O. gaîL 4»
t8it, — Biblioth, roy. de Dr^de.
3* Btblîoih. du château de Chantilly (Cat. Cîgongne, n^éi]). — D'après
Brunci (I^ 1 1 $4), il existe des exemplaires de cette édition au nom de Philippe
2S4 fe' prcoT
minés, retouchés, modifiés pour être présentés au roi d*An-
gleterre, tandis que les exemplaires des mêmes ouvrages
conservées à Paris étaient destinés au roi de France. Ce fut
très probablement Vérard qui imagina de réunir sur le titre
du Vergier d'hnneur les deux noms d'Octavien de Saina
Gelays et d'André de La Vigne \ L'évêque d'Angoulcme,
mort en 1502, avait joui de son vivant d*une grande réputation,
Vérard ne se fit pas scrupule de faire paraître sous son nom
diverses compilations qui devaient par cela seul obtenir la
faveur du public. Ce fut Vérard, croyons-nous, qui fit retoucher
par un de ses manœuwes les poésies de Charles d'Orléans et les
fit paraître, au mois d*avril 1509, sous le nomdeSainct Gelays.
Les pièces de Biaise d*Auriol furent ajoutées au volume dans
les mêmes conditions que les vers d'André de La Vigne avaient
été joints à ceux de l'illustre prélat. Les manuscrits des œuvres
d'Octavien de Sainct Gelays* ne contiennent point les morceaux
empruntés à Charles d'Orléans. M. Piaget nous paraît donc
avoir été fort injuste pour Tévêque d'Angoulêrae; c'est, à notre
avis, Antoine Vérard qu*il faut seul rendre responsable des
pirateries littéraires que nous venons de rappeler î.
Emile Picot.
Dans le très intéressant et très curieux article qu'on vient de
lire, M. Picot cherche à montrer, par l'exemple des Rignan
1. Voy. Bmnct, V, 45 ; Vin Praet, Catalcgue drj livres imprima sur tv/in
de k Bibliothèque du roi, IV. 185. Cf. CaL Rothschild, I, n<> 479. — La pan
d*Owtavicn de S*inct Gelays dans celte compilation se réduit à la ComplaimU
H Upitaphe du ffii ftyy Cljaries deftiier tresjmse. Tout le reste du recueil parait
Ctrç l œuvre d*Andrt} de La Vigne ; aussi venons-nous de voir comment il
fiiiiiait rcsjwctcr ses droits d'auteur.
i. HibUoUî, nai., nouv. acq, franc. 11 58» et Bîblioth. Rothschild, Cat.
lU, i\^ 2581.
j , Oii pourrait citer divers autres volumes constitués ainsi dans roffîcine
de Vérard ^w h réunion de divers ouvrages, par exemple le Phektu, où Ion
mT ^V'*''''"''' "^^ ^^"^ ^^ ^^ %"^' ^ ^^^*^ ^" P^^*^ à^ Gaston III,
K%u, ^c.H, Rothschild. 1, no 296); UJeu de. Escbe^ n^oraUsé (1504), où
T.T^'^ '^? '"^'^ ^^" •'•^^^^"^'^ ^^ ^^^^ ^' ^^^^^^^ ^v^c VOrdme di
^^^s^hU, Cl uvcc le roman de Utlibét H Pmdmu (ItmL, II, n- 1 soô), etc.
imk SUPERCHERIE d'antofse vérard 25 î
tfiWermns de Jean Bouchet, que le compilateur de la Citasse et
Départ d^amourSy plagiaire de Charles d'Ôrlcans, n'est aiure que
le libraire Antoine Vérard lui-mùmc, M. Picot me permettra
bien de faire A sa thèse une ou deux petites objections.
Voyons d*abord le cas de Bouchet, Je laisse de côtcS bien
entendu, la supercherie de Vérard substituant au nom du pro-
cureur poitevin celui de Sébastien Brant. Pour augmenter Tin-
térél ou simplement la grosseur du volume qu'ils publiaient, les
éditeurs du xv^ et du xvi* siècle ne se gênaient pas d'ajouter aux
œuvres de leur auteur des pièces qu'ils prenaient A droite et ;\
gauche, qu'ils démarquaient ou qu'ils rajeunissaient, s'il en
était besoin, Cest ainsi que plusieurs éditions des Lunettes des
princes renferment des vers qui ne sont pas de Meschinot; c'est
ainsi qu'à la suite de certains traités d'Olivier Maillard on
trouve d'autres traites et quelques poésies qu'on a, bien à tort,
anribués au prédicateur breton; c'est ainsi enfin que les Faicîs
ei les Dîti d* Alain Chartier renferment des vers de Guillaume
de Machaut, d^Oton de Graiidson, du sénéchal d'Eu, de
Michaut Taillevent, de Baudei Herenc, d'un anonyme de
Tournai, de Villon. Ce sont là des supercheries du fait des
imprimeurs-éditeurs.
Malgré ce qu'en dit M, Picot, les Regnars iraversans ne
rentrent pas dans cette catégorie. Vérard, en effet, ne donne pas
les neuf pièces * qu'il a fait imprimer à la suite des Ui'gmus
comme étant toutes du même auteur. Il entendait faire une
espèce d'anthologie : c*est ce qu*il indique très clairement dans
le titre du volume, — titre que M. Picot, toujours si précis et
si exact, a oublié de citer : Les regnars traversam les périlleuses
I. UMition des Regnars iraversans donnée par Michel Le Noir, en 1504,
contient une dixîcme pièce, /a Foie ik Paradis ^ à la suite de la Bakde des ahui
du monde. Cette petite pièce, d*une trentaine de vers, commence ainsi :
Qjiî en piradîs vcuU aller
Cy en peut la voyc trouver :
Doubtcr Dieu souverainement....
On h retrouve dans les manuscrits de la Bibl. Nat. fir. 952, 2249, 24439,
25547, sous les titres de Voye de Paradis^ ou Sentier de Paradis^ ou Omnin de
Paradis* Une autre version, très répandue, commence par ces vers :
Qpi veuit en paradis alcr
Pour avoir joye sans 6ncr
El la voyc n'y KCt trouver.,.
256 A. PIAGET
voyes des folles fiances du mande composées par Sebastmi Brandy
lequel composa la Nef des folz, derrenierement imprimer a Paris,
Et autres plusieurs choses composées par autres FACTEUilS.
Pour montrer que les différentes pièces de son recueil avaient
quelque nipport avec les Regnars travcrsans^ Vérard a fabriqué
pour trois 00 quatre d'entre elles des titres imaginaires. Il a
intitulé, par exemple, la Complainte (ftm damné :
CommenE un renart tresmauvais
Sur ^ui l'ire Dieu est tombée
Se coniplainl pour les siens mal fais
Pour tant que son ame est damnée,...
En tête du traité en prose et en vers sur la vanité des arts
libéraux et des arts mécaniques, on lit ce quatrain :
Comment Tacteur veu!t monstrer
Des regnars la folle fiance.
Disant que nuï glorifier
Ne se doit point en sa sdencc.
Ces petits trucs pourraient faire croire à une supercherie, si,
en tête du volume, Vérard n'avait nettement déclaré qu'à la suite
des Regfiars iraversam il ajoutait « plusieurs choses composées
par autres facteurs »,
Il y avait aussi des plagiats du fait des poètes; et il me semble
(\u^\q Roman de ramant parfait en est un. Charles d'Orléans
n'y est pas seulement copié servilement, ou remanié « avec
quelques légères variantes », mais paraphrasé, mais imité*
Le Roman de taniant parfait figure, sans titre, dans la Chasse
t't le Départ d amours^ après le Dialogue des deux gmtilshotnnus^ et
commence ainsi :
Au temps de ver, qu*esi saison tadtume,
Doulce et paisible, gracieuse, nocturDC.
Dans Texemplaire de la Bibliothèque nationale, coté Inv.
Rés. Y* 300, on lit d'une écriture du xvî*^ siècle, à côté du mot
Prologue^ le nom de Simon Bourgoing, — comme si l'auteur de
VEpinetle du jeune prince était le compilateur de notre roman*
Voici une courte analyse du Romande Vamxtnt parfait.
Le poète, caché « en un quignet », assiste dans le château de
Plaisance aux lamentations de la reine Amour, qui a laissé
prendre son cœur par ses ennemis et qui se désole. Tandis que
UNE SUPERCHERIE d' ANTOINE VÉRARD 257
Cupidon son fils et une foule d'autres personnages lui pré-
sentent des consolations, Jeunesse se met en quête d'un cheva-
lier désireux d'entreprendre la conquête du cœur prisonnier.
Elle trouve bientôt, endormi dans la Forêt de Gracieux Désir et
entouré de Bon Confort, d'Ardent Désir et de Cœur Libéral,
un jeune homme nommé l'Amant parfait. Jeunesse l'éveille ; —
et c'est ici que commence l'imitation du Poème de la Prison :
Esveille toy, mon beau et chier amy,
Et ne soys plus ainsi fort endormy'...
Après avoir longuement discouru, Jeunesse prend l'Amant
parfait par la main et le conduit au château d'Amour, où il est
reçu par Beauté, Plaisant Regart, Hardiesse et Bel Accueil, et
présenté au maître de la maison. On trouve dans les longs dis-
cours de chacun de ces personnages, par ci par là, quelques
vers de Charles d'Orléans plus ou moins remaniés. Voici un
passage du discours de l'Amant parfait à Cupidon :
Or puis je dire par tresgrant desconfort :
Je hay ma vie et si ma mort désire,
Je hay mes yeulx dont suis deceu trop fort,
Je hay mon cueur qui n'a plus nul effort,
Je hay ce dard qui le blesse et empire,
Je hay beauté par quoy fault que souspire,
Je hay ennuy que j*ay de tout costé,
Je hay penser qui n*a ce dard osté.
Las! mieulx me vault tout en ung cop mourir
Qpe plus languir sans joye ne soûlas,
Et me laisser en la terre pourrir
Sans en tel peine mon povre cueur nourrir.
Car par beaulté mon cueur est pris es laz
Du dieu d'Amours, tant est espris, helas 1
Plaisant regard de moy s'est enfouy.
Dont com malade suis presque esvanouy.
Charles d'Orléans (t. I, p. 8) :
Quand je le sceu, je dis par desconfort :
Je hé ma vie et désire ma mort I
Voyez Charles d'OrUanSy édition d*Héricauh, t. I, p. a :
Tu dors trop longuement,
Esveille toy et aprestes briefment
, XXU ij
258 A. PIAGET
Je hé mes yeuls, car par eux suy deoen 1
Je hé mon cnenr qu'sy nkcmmî poda!
Jehéœdanl qui ainsmoo coeur blesKi
Venez avant, partués moy, Destnsse,
Car mieuk me vaulc tout a un cop moiir
Q}ie longuement en desaise languir.
Jecognobbien, mon cucur est pris es las
Du dieu d*Amours, par vous, Beanié, bdas!
L'Amant parfût part bientôt à la conquête — à la chasse,
plutôt, — du cœur perdu de la reine. Et ce n*est qu'après de
longues aventures que Beauté lui explique les Cammandemetits
^AmourSy — longuement paraphrasés de Charles d'Orléans, —
et que Loyaulté écrit la Letlre dt nUnm^ — tirée presque tex-
tuellement du Fohne de la Prisom.
n est inutile, je suppose, de pousser plus loin cette analyse.
Aux quatre cents premiers vers du Paifʻe de la Prison corres-
pondent dnq mille vers du Romam de FAmani parfaiil Nous
avons bien là l'œuvre d'un poète.
Les rondeaux et ballades de Charles d'Orléans sont rangés
dans la Cbasu et le départ ^Amomrs sous b rubrique suivante :
Comment y apris que V Amant parfait et sa dame^ Twng a» vergier
if Amour et Vautre en la maison de Liesse, ont fait plusieurs randeaulx
et hallades de dizitrs amoureux et amoureuses, T Amant parfait, apris
son refvs et eshat pnnSy se remet plus fort que devant a faire plusieurs
rofUcaulx et ballades Je /«v fnesmes. Faut-il croire qu'un « ma-
nœuvre « de \*êrarJ, a\-ant le culte des rimes riches, a remanié
les dix premières ballades ? Ces ballades sont parfois si profon-
dément reinvaillêesqu il ne reste plus rien de Charles d'Orléans
que le relrain. Qu'on en juge par un exemple :
\ ucUIci xx^j yeulx enarrlsonacr VueiUîcz \XK vculx emprisonner,
S r^'io-T^ r""* ""* î^g«c:ei. Et sur moy pl'us ne les giettés,
1« ^ ** ^"""^' ''"^^"^ -** *-iîsosaer. Car quant vous plaist n>e regarder,
Lo^'^r :.^;:'!:î! \* ^^-r^-^*^" ^^ Keu, beUe, vous me tués.
O e k^ ,.! "^ r * ''''^''^- Et en tel point idoq cueur mettes
^*«vN Secours tî*e r»-\'»»»*^-»»» ¥ •
Mu sca-.:e ^v :_ f a-<v:w.'. Je su» mort se vous ne m'aidiés.
IXvu.;-^ ^V-1:'' '^^"^ "^^ • * *2j.c je ne sç.y que faire dojx.
V, - ^" «oie souvenmc jove.
lV:u a;: ^,,,,,^. T^- ^CC ^t "^ '"^ "^ demander
-'^^<c- Ciie \-a»T« vucur ne me donn<Ss
Sans nullement m'abandonner,
Mais très doulcement me traictez.
Vous sçavez que sans vous datez
Sans cueur vivre je ne pourroye,
Je vous prj' qu'il soit deshaîaez,
Ma seulle souveraine joye.
UNE SUPERCHERIE d' ANTOINE VÉRARD 259
Mais, se droit me voulés garder,
Puisque le cueur de moy avés.
Le vostre fault que me laissiés.
Car sans cueur vivre ne pourroye.
Faictes en, comme vous vouldrés.
Ma seule souveraine joye.
Vueillez mes faultes pardonner
Et mon cueur trop ne molestez,
Car comme vouldrez ordonner
Fcray, donc mon cueur supportez.
A honneur tost le transportez
Affîn qoe mieulx il se resjoye,
Et avecques vous le portez.
Ma seulle souveraine joye.
Amour qui mon cueur emportez
Donnez lui un joyeux mon joye ,
De l'aymer ne vous déportez.
Ma seule souveraine joye.
Trop hardy suy d'ainsi parler,
Mais pardonner le me devés
Et n'en devés autruy blasmer
Ope le gent corps que vous portés
Qui m'a mis, comme vous vées.
Si fort en l'amoureuse voye,
Qu'en vostre prison me ténés,
Ma seulle souveraine joye.
Ma dame plus que ne savés,
Amour si très fort me guerroyé,
Qu'a vous me rens ; or me prenés,
Ma seule souveraine joye '.
n me semble difficile d'admettre qu'Antoine Vérard soit,
comme le dit M. Picot, « le seul responsable » de ces pirateries
littéraires. Le Roman de H Amant parfait est bien l'œuvre d'un
poète et non d'un vulgaire « manœuvre ». Quel est ce poète?
Est-ce Octavien de Saint-Gelais % Biaise d'Auriol^ Simon
1. Charles d'Orléans^ 1. 1, p. 15.
2. Ocuvien de Saint-Gelais n'est vraisemblablement l'auteur que des pre-
mières pièces de la Chasse et départ d'Amours, qui commencent, après un pro-
logue en prose, par les deux vers suivants :
Octovien, que diz or, ou que faiz>
Pourquoy te taiz ? de quoy sert ta facunde >
3. Biaise d'Auriol n'est probablement l'auteur que du « traité de rhétorique »
qui figure dans la Chasse et départ d* Amours sous la rubrique suivante ; » La
départie d Amours par personnages parlans en toutes les façons de rytnes que Von
pourroit trouver la ou il y a de toutes les scieiKes du nwnde et de leurs acteurs.
Ftticte et composée par noble homme Biaise dAuriol, hacJxlicr en cJxiscun droit,
natif et chanoyne de Castelnaudarii et prieur de Denisan, Van de grâce mille citiq
censethuyt a Thoubuse, » Cette espèce de traité poétique commence par un pro-
logue en prose : « Enclos dans mon secret rcpagule sur celuy point que
oppacosité noctialle a terminez ses umbrages et Diane luciferante commence
ses rays illuminatifs.... » et finit par un Couplet rétrogradé a tous sens :
Vrays amoureux, oyez tous ma complainte
De cueur parfait, chassez toute douleur...
260
A. PIAGET
Bourgoing ou quelque autre ? Peu importe. Ce n*est pas le nom
du voleur qui est intéressant, mais bien le fait qu'on a copié
Charles d'Orléans, dont nous ne connaissions, imprimés au
xvr^ siècle^ que cinq ou six balbdes et rondeaux.
Arthur Piaget.
MÉLANGES
LE LATIN -ITOR ET LE PROVENÇAL -EIRE
A la fin de mon étude sur la loi de Darmesteter en provençal,
publiée ici même *, j*ai dit quelques mots des substantifs en
-eirey comme deveire, qui correspondent pour le sens aux
substantifs latins en -itor, comme debitor. Dans le dernier
numéro de la Zeitschrift j, rom. Phil.^, M. J. Cornu revient
sur cette question, qu'il envisage à un point de vue tout diffé-
rent. Je pense que la forme provençale est due à une création
analogique d'un suffixe -et or sous l'influence de -âtor, -itor,
et non au développement phonétique de -ïtor. M. J. Cornu ne
voit dans ma tentative d'explication qu'une sorte de tautologie,
et s'il lui reconnaît une vérité extérieure, il lui dénie toute
valeur intrinsèque. Voici quelle est, à son avis, 1' « innere
Wahrheit ». Le premier accident phonétique qui ait atteint
dçbïtor est le changement de -tor en -tro : soit *dçbïtro;
dedçbîtro un développement phonétique régulier a fait ensuite
*debitro, tout comme de cathedra, il a fait cathedra,
de ^^lécrum, alecrum, etc.
A cela, je vois une grave objection, qui m'a déjà empêché
d'enfiler cette route et que je soumets à mon savant collègue
de Prague. En dehors de la série de mots qu'il s'agit d'expli-
quer, je n'en connais qu'un qui offre le même type phonétique,
ou peut s'en Éiut, c'est prçsbïter. Or tant que l'on reconnaî-
tra i'ital. prête, le prov. prêtre ou prestre et le français prestre pour
des dérivés phonétiques réguliers de presbïter, on ne pourra
admettre concurremment d ç b i t o r > deveire 3 .
1. Romania^ 1892, p. 17.
2. Zeitschr,, 1892, p. $18-519.
3. D'ailleurs dfbitor a donné phonétiquement en français detre (lorrain
diUre\ dont on peut voir des exemples dans le Dictionnaire de M. Godefroy,
2 62 MèLAKGES
Que, dans certaines parties Jq domaine roman, le latin -tor
soit devenu de bonne heure -tro, je n'y contredis pas : le véni-
tien rti^tJ^oJri?, le trentin f/wwaJrt), par exemple (de advocaior,
decimator), n'ont pas d*autre explication *» Mais que cela se
soit produit dans le Midi de la Gaule, je ne pub le croire.
Une pierre de touche excellente nous est fournie par le franco-
provençal, qui ordinairement conserve sous forme d\> l'o et Tu
du latin après un groupe de consonnes, et qui dît niaistre, /^<Jrr,
de magister, frater, mais mmsîro^ fauro^ de magistrum,
fabruin, etc. Or comment le franco-provençal traite-t*il le
suffixe -tor? Il offre partout et toujours -re^ jamais ni nulle
part -ro, C*est ainsi que nous lisons dans les textes lyonnais
publiés par M. Philipon dans la Romania, en 1884 : acbt-
tares^ II, r, 5 ; afatiares^ III, 25 ; coreares^ III, 23 ; afjotuiares^ III,
23 ; guarnissares^^ ni, 2};pilliaciares^ III, 23; pccharcs III, 23 ;
pcsares^ II, 2; revendares^ I, 3 ; iroliares^ I> 21 ; vendarcs^ II, i, 5 ;
visiîaresy V, i ; dans Marguerite d'Oingt : créâtes ' ; dans les
textes publiés par M. Fabbé Devaux4 : ptrharc^ peschare^ HI, 9
et IV, 62, M. Cornu contestera-t-il l'identité phonétique de
vîtruui et de son hypothétique Vt*if/r(} ? Peut-être ; on ne sau-
rait être trop scrupuleux quand il s*agit de comparer similia
simiîibus. En tout cas, Tidentité n*est pas contestable pour
latro : or latro a donné en franco-provençal laro dans la
région où Ton dit vciro^ de vitrum^, mais pescimre ^ de
piscator.
Deux autres mots peuvent encore être considérés : quatuor
et rétro. Le premier se présente au xn^ siècle dans le fragment
ï. Meyer-Lûbke, liah Gramm.^ p. 178.
2. Guantissarts, coranie plus bas vànJares, revtndûrts sont des formes ana-
logiques où, comQie en français, -ator a supplanté de bonne heure le suiHxe
propre qui devrait itre -erc en franco-provcnç*il. Je note à ce propos que les
textes franco-provençaux n'offrent que très rarement des exemples corrc^
pondant phonétiquement au provençal eirf, tu. Le seul que je connaisse est
Tùsire, qui revient deux fois dans les extraits du censier de Ponce de Roche^
f::rt, 35 et 68. (Voy. Rontama, 1895, p. 41 et 44.)
3. Cité par M, Phîlipoo, Remania, 18S4, p. 565.
4. Essai sur h îan^m itdgaire du Dmiphinê septentrionai, p. 71 et 91 .
5. M. l'abbé Devaux, consuhc par moi sur Texistencc, dans les anciens
textes, de laro, m'écrit : « Je n*ai trouvé que le cas régime Jurons cbns Mjr^
LE LATIN '!TOR ET LE PROVENÇAL -EIRE 26}
d* Alexandre d'Albéric sous la forme qî4atro ' (v. 57), et aujour-
d'hui dans tout le Dauphînc septentrional, où l'o après tr ne
s'est pas affaibli en t\ sous les formes kçiro, kçiîroti. Ici nous
sommes en présence d'une métathèse extrêmement ancienne
de*quattor (= quatuor) en *quattro» : cette métathisc
s'est produite à peu près sur toute Tétendue du domaine roman,
mais le traitement du suffixe -tor n'est pas lié i celui de
quatuor, puisque Titalien, par exemple, dit sarîo, ï côté de
'quattro, comme le franco-pro%^cnçal Ahpcscbarc, X coté de quaîro,
— Le second mot, rétro, se présente constamment dans les
anciens textes franco -provençaux sous la forme rerc : rercbancJm
(Devaux, II, 25); ikrcrc la porta {Und, III, 30); Fort derere
(Philipon, VI, 17). Je ne crois pas qu'on puisse admettre
Tcquaiion phonétique rétro ^:= rcre en présence de latro =
laroy *quattro =^ quatro^ vitrum ^^veiro^ etc* Il faut donc
chercher une explication particulière pour rcrcK
La phonétique très délicate du franco-provençal ne nous
fournit pas seulement une preuve contre la thcoric phonétique
de M. J. Cornu : elle porte en elle-même un enseignement
intéressant sur la façon dont a évolué i l'origine le suffixe -a tor»
Le premier changement phonétique qui paraisse Tavoir atteint
doit être l'affaiblissement de Yo atone en c (comme dans scnher
de senior, majer de major, etc.); puis est venue la transfor-
^eritc d^Oingt, mais le mot existe encore dans le pays de V^iud sous les
formes hrOy hru, lifre (Odin, p. 84) ; en Dauphiné, dans les Terres-Froides,
TtipcmeT s'appelle /(Trai/, qui doit représenter latro. » L*étymologic du nom
de Tépervier dans les Terres-Froides qu*indiquc M, Devaux est certainement
îa bonne : en Auvergne» l'épervier est appcltï hire (Mistral, Trfioi\ v» latre),
ï. Je dois ]*indication de cet exemple et des formes actuelles des patois du
Diupliiné à M, Tabhé Devaux. On remarquera que dans VAkxandrc la con-
servation de Vo est cxceptiotmellc, car on lit dans le fragment toneyrts (v. 49)»
ei non totteyrùs^ aUrr à Taccusatif (v. 6^)» et non altro^ ampk (v, 69)» et non
amph^ magesîres (v. 82), et non ma^estros. Quant à etitro la mar (v. 105), le
cas est diflTérent, car on sait que le provençal proprement dit ne connaît aussi
^jue les formes en 0^ entro et tro.
2. Cf. Meyer-Lùbke, Italien. Granm,^ p. 156 : « Schon vulgârkieinîsch ist
die tJmstellung in sempre und qtmttto, »
|. M. Devaux m'dcrit à ce sujet \ «Le traitement de rétro est absolument
anormal, i moins de supposer qu'il ne soit emprunté au français ou au pro-
vençal, car on ne peut guère imaginer un type lat» *reter. a Jq ne serais pas
264 MÉLANGES
matîon de -ater (peut-être descendu au degré -ader) en atre^
adre, par un rapprochement de la liquide et de la dentale qui a
amené simultanément Li suppression de IV entre les deux con-
sonnes et la production d'un autre t* comme voyelle d'appui, ou,
si Ton veut, la métathèse de IV posttonîque^
Il est à croire — jusqu'à preuve du contraire — que ce qui
s'est passé dans le sud-est de la Gaule s'est passé aussi en pro-
vençal et en français.
A. Thomas,
BUISSÈ, BOISSIÈ, BOUYSSÉ, BOISSÈ
M. Godefroy, sous Buissie^ explique cet adjectif par « de bois
ou de buis », Cest une double erreur. Ce mot signifie seule-
ment « orné de buis », aussi bien dans Tunique exemple citi
par lui que dans ceux que j'ai recueillis :
Au plaissié, lés îa crois bnissU.
(Gauvain, 1248, Hippeau.}
Droit le jour de Pasques fleuries,
QuV'ti mains lîeus sont k's crois Jfoissùs.
{Bcaumanoir, La Mamktnt^ 6849, A, T.)
« La croix bouyssée », dans Léon Mellema, Dici. fratt^ois-
flûtneng^ édit, 1596, est définie par << la croix ornée de buis »,
Il en est de même dans le Thrésor des trois langues, édit. 1617 :
ce La croix hoissée ou houysséCy crux enramada de box. »
Bûisséy qui est dans Monet et Cotgrave, a été recueilli par La
aussi «éloigné que M. Devaux d'admettre •retcr, à côté, puis i la place de
rclro» sous Hutluence de inter (à côté de intro; on sait que le roumaîn
a coufoadu intro avec inter, et dit indifféremment mf/r, inint au sens de
i n t e r ), su p e r, '^ e q u e n t e r (prov. segumtré), * a l i u n d cr (prov. aU^ondré),
*aliuber (a ne, espagn. ajubre), etc.
I. M, Devaux a donc raison, en somme» quand il mentionne piscator,
à côté de melior et de senior, comme ayant « atténué To en €. » (Essaie
p. 2)î). Ailleurs, à propos de IV final (p. 229), il mentionne *t Fanalogue
peclmre » à côté de partjrare. S'il a voulu indiquer par là que les noms en
-ater, comme f rater, etc., ont exercé une influence analogique sur le suffixe
-ator, je ne suis pas de son avis. Il me semble que le changement de
•piscator en 'piscater est un fait d'ordre exclusivement phonétique.
BUlSSÉy BOISSIÉ, BOUYSSÈ, BOISSÉ 265
Cume, mais Texplication qu'il en donne, « paré de feuillage, de
rameaux de verdure », n'est pas tout à fait exacte, non plus que
celle de M. Suchier dans son vocabulaire de Beaumanoir, où il
accompagne le verbe boissier d'un point d'interrogation et le
traduit par « orner de branches vertes » *.
Je ne relève cette erreur que pour rappeler une pieuse cou-
tume qui existe encore aujourd'hui en Normandie et ailleurs.
C'est l'usage, le jour des Rameaux, d'orner de branches ou de
couronnes de buis bénit le grand calvaire du cimetière et les
croix des carrefours. Quand vient le temps de la moisson, on
les remplace par des glanes faites des plus beaux épis et genti-
ment tressés. A. Delboulle.
FRAGMENT D'UN MIRACLE DE SAINTE MADELEINE
TEXTE RESTrrUÉ
Un des rares manuscrits français de la bibliothèque de Trêves
consiste en un petit feuillet de parchemin, extrait de la reliure
d'un livre, et qui contient au recto et au verso , d'une écriture
de la fin du xm' siècle, un fragment de poème en dialecte
anglo-normand, comprenant 78 vers en 13 strophes. La strophe,
sur deux rimes, est du type aabaab (strophe couée) , les petits
vers b étant de 4 syllabes, les plus longs a de 8 syllabes, bien
que la mesure d'un grand nombre ait été altérée gravement par
rimpéritie du copiste. — Selon un procédé familier aux scribes
anglo-normands, chaque demi-strophe étant figurée en la forme
suivante :
De lame la mère eit pitez ) „
«... \ Par sa merci
Si la même a sauuetez \
le ciseau du relieur a rogné au recto plusieurs lettres finales
des petits vers, et, du même coup, au verso, les majuscules
initiales de tous les grands vers.
Le manuscrit en question fut publié pour la première fois en
1879, et très mal, par M. Max Keuffer dans la Festschrift ^ur
[i. Il Êiut ajouter â ces exemples celui de Meraugis de Portîesguexy tel que je
l'ai reaifié (Hist. Htt., t. XXX, p. 229, n. 2). J'ai rapproché accrois huissiée la
crux huxata de Du Cange et la croix hoisseîiere ou osaniere de Rabelais.
— G. P.]
266 MàLANGES
Bcgrussung der XXXIV. Fersammlung, dcutscbcr Philoïogm und
SchuUnànmr,,. ;w Trier); un fac-simUé était joint au texte, et
aussi un commentaire, qui est un tissu d erreurs *. Ciuelques
mois plus tard» les mauvaises lectures de M* Kcuffer étaient en
partie rectifiées par M. AJ. Schmidt à la fin de son étude sur
Guillaume le Clerc de Normandie {Rtvmmscljc Sludien, IV,
1880), et plus complètement par M. W. Fôrster dans le LiiL
Ceniralblati (0"* 21) de 1880, Enfin, dès la même année, le texte
fut imprimé à nouveau, de façon correcte, par M. Suchier dans
h Zeitschrift ftlr rontanische Philologie, TV, 362 s.
Du reste, la publication de M. Suchier est purement paléo-
graphique, c'est-à-dire qu'elle nous offre un texte, tant pour la
mesure que pour la syntaxe, fon corrompu. M*étani occupé, au
cours de recherches sur sainte Madeleine, du fragment de
Trêves, je fus frappé en même temps et des fautes grossières
qui y abondent, et de la facilité avec laquelle on le pouvait
améliorer. Quant à Tobjection que ces fautes pourraient bien
être le fait de l'auteur lui--même, attendu que la versification
des trouvères anglo-normands était notoirement incorrecte ,
j'admets, en effet, qu'il soit arrivé à l'auteur de confondre un
vers de huit et un vers de sept syllabes, ou bien de ne pas tenir
compte d*un s final à la rime; mais, pour inhabile qu'on le
suppose, il n'est pas vraisemblable qu'il ait pu tantôt réduire
roctosyllabe à six, tantôt l'étendre à neuf ou onze syllabes, m
qu'il ait fait subir au vers de quatre syllabes, d'un rythme si net,
des mutilations et des allongements. Tout ce désordre est donc
imputable aux copistes, et l'on y peut remédier critiquement;
c'est ce que j'ai fait ci*après, introduisant dans le texte plusieurs
corrections simples, et dont quelques-unes s'imposent avec
évidence, et rejetant en note les leçons vicieuses du manuscrit.
Au surplus, sauf Taccentuation et la ponctuation, ronhographe
très peu régulière du scribe n'a pas été modifiée.
« Oncore vostre Deu pricx
Ke Tenfes [ki est] ore nci
2 fns, Ke Icnfant ore n,
î, Conf. Romanta, IX, 191; XVI, 177.
FRAGMENT d'uN MIRACLE DE SAINTE MADELEINE 267
3 Seit [bien] gari ;
De Tame la mère eit pitez,
[E] si la meine a sauvetez
6 Par sa merci ! »
Apres ceo est il eschipé,
En haute mer tant ad siglé,
9 Ke a [la] terre
Venuz est [il] e arivé,
A Roume ad seint Père encuntré,
12 Ki sun zîere
Enquist, e pur quei fust venu,
Kar la croiz ad aparceû
15 K[e] il porta,
E par tant Ti ad coneû.
Il dist ke conseil ad eu,
18 [Ja] de peç'a,
[D'aler] seint Père a Roume querre
[E] de lui oïr e enquerrc
21 Dreite créance ;
Mes einz k'il le poù[s]t parfere.
En mer soffri meint[e] contrere
24 E mesch[e]aw^.
Ses enuis [tres]tous li conta,
E seint Père lui conforta
27 [Mult] bonemen/ :
« Cil, « dist il, » ki te flaela
Totes tes pertes restor[r]a :
30 Ne dute tient,
« Mes ke soit ta feme endormie,
Tost te purra il [bone ] aïe
33 [La] enveer.
Par la requeste de Marie,
Ki pe] toen i\z en sauve vie
36 Pout bien gzrder. »
Puis li ad [il] la foi pre[e]ché.
3 [Bien] ai une bonne conjecture de Keuffer; cf. d'ailleurs v. 36. — 9 Pour la
restitution, cf, v. 70. — 11 ms. Moun s. p. ad. — 12 ms. Ke. — 29 ms.
pertes te restora. — ^i ms, ke ta f. soit. — 35-36 ms. Kc porra toen f.
en sauue uie Bien girder.
268 MÉLANGES
A seinte terre Tad mené;
59 Si lui tmmsira
Les luis ou Jhesus out oté
E meint [bel] miracle oat moustié»
42 Ou il prêcha.
Ou [il] aveit esté pené.
Ou [il] de mort fu retevé,
45 Ou apparut,
Par ou il fuit au dd mounté»
Ou sdnt Espir ad enveié,
48 Par Id encrut
La foy e la drdte créance.
Kl les bons crestiens avance
51 A la douçour
De seinteté e de penanœ,
K* entre hom[e] e Deu fiet alîance
54 De fin[e] amour.
Tant ad [donc] sdnt Père ensdgné
Cel pèlerin e [l']a mené
57 A [cei] sdnz luis,
Ke deus anz sunt ja [tres]passé,
JT il ad of lui iloec esté
60 £ aukes pluis.
Des or s'en voudra retomer
A sue terre, e a la mer
63 Est ja venuz ;
Fent a [de! su ?] bon e plener :
La mer comence a trespasser;
66 S'ad apparu
La roche ou sa feme lessa ;
Cil iloekcs aler voudra
69 Querre tiovelc,
[E] quant a la terre aprocha,
Un enfant vit, kl se jua
72 Oflagravele;
38 ms. E a la s. t. m. : Vomission du pronom fait un solécisme, — 39 Keuffer
a déjà rétabli moustra ; dans le ms, il ne subsiste que le premier jambage d!r m. ~
47 ms. Ou le s. — 50 ms. Al seint luis. — 56 Ceo p. e amené. — 59 ms,
iloekes. — 61 ms. Des ore. — 62 ms. Asat. — 64 Pour rempHir la lacune de
deux syllabes, je propose del su qu'on lit au v. $41 du poème de Guillaume le Clerc^
lequel correspond précisément à celui-ci. — 66 ww. Se ad aperceuz. — 69 ms. Pur q.
FRAGMENT d'uN MIRACLE DE SAINTE MADELEINE 269
[E] ^ant il prendre le voleit ,
L'enfes fuî, si se musceit
75 De lez sa mère;
E quant i vint, dame troveit
Sien colouree, s'apparcit
78 K'endormi[e] ère.
Ainsi que M. Schmidt Ta justement observé, de rimes telles
que : é : ié, />n<^ ; ne^i : sauvete^, prêché : tnené^ viounté : enveiéy
enseigné : amené; lat. — ébat : — abat, voleit : musceit : troveit :
pareil; lat. ô : û, /m/V = 1ocos : pluis= plus, on doit conclure
que les strophes précédentes n'ont guère pu être composées avant
le milieu du xiii* siècle. Le poème dont elles faisaient partie avait
traita un miracle de sainte Madeleine, très populaire ai\ moyen
âge, et qui, raconté d'abord dans les actes grossièrement fabu-
leux de cette sainte (fin xii*^ s.), a passé de là, plus ou moins
textuellement, chez les hagiographes des xiii'' et xiv* siècles,
Vincent de Beauvais, Jacques de Voragine, Bernard Gui, Pierre
de Noiîl, etc. Vers le premier tiers du xiii* siècle, ce miracle
avait déjà été mis en vers (octosyllabes à rimes plates) parle
trouvère normand Guillaume le Clerc', et l'on possède aussi
un fragment (132 vers) d'un pocme en moyen allemand, de
la même époque à peu près, et sur le même sujet ^ Enfin un
petit mystère, apparemment du xvi^ siècle, imprima à Lyon
en 1605, ^ ^^ ^ Marie Magdalaine contenant plusieurs beaux
miracles Et est a XXII personnages, n'est autre chose que la
mise en scène de cette édifiante aventure.
L'auteur du fragment de Trêves paraît s'être servi des Gesta
Magdalenae^ qu'il suit assez fidèlement. La « Marie » men-
tionnée dans ses vers est donc sainte Marie Madeleine, seint
73 ms. Qaznt il. — 74 ms, Lcnfant. — 79 ms. il i vint une d. — 77 ms.
si apparceit; le c rajouté d^utu autre main. — 78 ms, iCendormi.
1. Excellemment publié et commenté par M. A. Schmidt : « Guillaume le
Clerc de N, und insheumdere seine Magdàkucnlegeiuie » , dans les RomaniscJx
Studien, IV (1880).
2. Publié par M. Steinmeyer dans la Zeitschrift fur deutsclies Aîterthum,
XIX, 1875.
270 MÈLAKCtS
Père est saint Pierre, le « pèlerin » est le roi (ou un seigneur)
de Marseille. Le fragment correspond exactement aux vers
401-586 du poème de Guillaume le Clerc; et le commence^
ment perdu devait compter un assez grand nombre de vers.
L'auteur avait à y narrer comme quoi Marie Madeleine et
les siens, chassés de Palestine, abordent aux bouches du
Rhône et prêchent Tévangile au peuple marseillais ; la conver-
sion du roi de Marseille, moyennant une grâce impétrée par
Madeleine, savoir la grossesse miraculeuse de sa femme jus-
qu'alors stérile; le dessein qu'il fait d*aller auprès de saint Pierre,
à Rome, afin de s'instruire dans la foi chrétienne, et les
instances de sa femme pour l'accompagner ; leur voyage , une
horrible tempête qui s'élève en mer, la femme prise des dou-
leurs de TenÉintement et qui meurt dans le travail ; comment
les mariniers, de peur que la présence d'un cadavre ne cause la
perte du navire*, exigent que la morte soit jetée par dessus
bord; et comment le roi supplie qu'on lui laisse déposer la mère
et l'enfant sur un écueil voisin, ce qui est fait. Avant de s'éloi-
gner, le roi invoque la protection de sainte Madeleine, et c'est à
cet endroit que commence notre première strophe. La trei-
zième touche au dènoùment : la femme, réveillée, déclare que
tout le temps que son corps reposait sur l'écucil, elle a visité
en esprit les mêmes lieux où son mari était en pèlerinage ; puis
les époux rendent grâces à la sainte, et font voile vers Nlar-
seille, où ils reçoivent le baptême. Pour cette fin trois ou
quatre strophes devaient suffire.
Il est regrettable que le poème de Trêves ne nous soit point
parvenu dans son entier; car nonobstant le prosaïsme et la
lourdeur habituelle de la phrase, le rythme, qui est heureux,
et le tour naïf du récit font que cette pièce ne manque pas, à
tout prendre, d'intérêt.
George Doncieux.
I. Superstition, comme on sait, familière aux gens de mef| et qui est dt
tous les tçmpsi
CHRÉTIEN DE TROYES ET L*AUTEUR DE l' OVIDE MORALISÉ 27 1
CHRÉTIEN DE TROYES ET L'AUTEUR DE L'OVIDE MORALISÉ
Un exemple cité dans le Diclionnaire de V ancienne, langue Jr an-
çaise de M. Godefroy* vient d'attirer mon attention sur un
curieux passage de Y Ovide moralisé attribué à Chrétien Legouais :
ce passage a échappé à M. Gaston Paris, au moment où
il rédigeait la notice de cet auteur dans V Histoire littéraire de la
France^ y et à M. Sudre, au moment où il préparait sa thèse
latine, dont un court chapitre est consacré à V Ovide moral iséK
Il est donc nécessaire de le mettre d'abord sous les yeux du
lecteur pour pouvoir montrer ensuite les conséquences impré-
vues que rhistoire littéraire peut en tirer. Comme Ta indiqué
M. Gaston Paris, l'auteur de Y Ovide moralisé a intercalé dans le
' livre XI des Métamorphoses le récit des noces de Thétis et Pelée,
du jugement de Paris et de l'enlèvement d'Hélène, récit qu'il a
puisé ailleurs que dans le poème d'Ovide. Le passage que j'ai
en vue se réfère précisément aux sources qu'il a utilisées pour
cette addition. Je le donne d'après le manuscrit de l'Arsenal
(f* 167 V**), corrigé, quand la chose en vaut la peine, à l'aide
du ms. 373 de la Bibliothèque nationale.
Ci dist de ceuls qui traitierent ceste ystoire premièrement de grec en
latin et de latin en françois^.
A quelque paine ont Grieu port pris. L'occision et le martire,
Achillës, li vaillans de pris, La grant estoire et la matire
Est la venus a la bataille. Que trait li clers de Sainte More
Des or commenceront sans faille De Daires ; mes ne m'en vueil ore
1 . « EscHAUFORE, S. f. mot altéré pour la rime, chaleur, emportement,
colère :
Mais il parla par eschaufore^
Pour ce li clers de Sainte More
Qui n'entendoit que voloit dire
Li redargua sa matire.
(FflW. ^Ot'., Ars. 5069, f* 167'.) »
Comme on le verra plus loin, eschaufore est une faute de scribe pour wc/Zw-
fore.
2. Hist, litt., XXIX, 455-577.
3. P. Oindii Nasonis Metamorphoscon lihros quomodo nost rates imdii aeii poc"
tae imitati interpretatique sint (Parisiis, Bouillon, 1893), cap. IV.
4. Le ms. 373 n*a pas de rubrique, mais on lit en marge, en face de ce
passage : Cy parle Vaucteiir (fo 260 v").
272
Sus lui de gueres entremettre
La^ ou biea translata la letre.
Mok fu li ders bons rimoierres.
Courtois parliers et biax forracrres,
El niolt fu bien ses romniaas fo ;
Mais ■ oon porquant, sauve sa pès.
Il ne dîst pas en toi^ licx voir,
Si ne âst mie grant savoir
Dont il Orner osa desdîre
Ne destneutir ne contredire
Ne blasmer oevre qu*il feist
Ne que oaques Orner deîst
Qiose que dire ne dcùst
Et que de verte ne seûst;
Ja neu deûst avoir repris ,
Car trop est Omer de grant pris»
Mes il parla par methafore ^ :
Pour ce H clers de Sainte Morc^
Qui n*entendoit que voloit dire,
MÉLAKGES
li redargi^a sa matire.
Tuît H Grefois et li Latin
Et ce us qui onques en latin
Tretiereni riens de cesie estoire
Tesmoignent la materc a voire
Ainsi ï comme Omer Li treta
El cil qui son grec translata ;
Neïs Daires» de quoi fu fiis
Li rommans Beneoîl* et trais»
N*est de riens contraires a lui
— Car Tun et Vautre livre lui —
Fors tant que plus proIiKemem
Dist Daires le dcmenementi
Les assemblées et les tours.
Les batailles et les estours
Qui furent fait par devant Troie.
Ne sai que plus vous en diroie;
Mais cil qui Tun et l'autre orra
Croie celui qui miex vaurra.
Je n insiste pas sur riniérct que présente ce morceau consi-
déré en lui-même, et comme preuve de la faveur persistante
dont jouissait à la &n du xm* siècle le Rontan de Troie de Benoit
de Sainte-More, et comme témoignage piquant des lectures et
de la critique de l'auteur de VO-ciJr jnoralisé^ qui se constitue le
champion d'Homère contre Fauteur du Roman de Troie K J'en
veux faire un autre usage : je crois qu'il peut servir à dissiper
un malentendu déjà ancien sur le nom prétendu de l'auteur
de YOi*idc ntoraltsé.
Des quinze manuscrits signalés par M. G. Paris ^, deux seule-
ment attribuent VOiiJe moralisé i Chrétien Legouais et ils le
1. Ars. Et.
2. An> cschaufore. Le ms. 57$ a non seulement la bonne leçon, mais cette
observation marginale d*un homme plus au fait que le scribe de rAisenal :
c'est mu figure en grammaire,
3. An. Si.
4. Ar$, bencûis; 575 benoiz.
5. Il est à peine besoin de dire que notre passage n'a pas été connu de
Joly, redite UT du Roman de Trm.
6. [Je puis maintenant ajouter quatre manuscrits à cette liste, sans compter ^
celui que signale M. Thomas : B» N, fr, 191^1* Berne 10, Rome Reg, i6S6,
CHRÉTJEK DE TROVES ET L*AU1EUR DE t'oriDE hfORJUSÈ 2J$
font en ces termes ; Crcsikn le Gouays de Saincte Mon vers Troycs
(ms. de Genève) ; nmistre Cresiien de Gmvays de Seynî More tfers
Troyes^ de Corder des frères menour s (ms. Cottonien, qui ne con-
tient que hi t*able des rubriques). On lit de même dans un
manuscrit du Vatican {Reg. ^^40) que n'a pas connu M. G.
Paris : Cy conwtence Ja table des rebricJm d'Ovide h Grani^ dit
Melanwrphcseos ^ translaté du latin en frmtçoys par Cr es tien le
Gcmays de Saincte More vers Troyes '. Je crois qu*il ne faut pas
accorder plus de valeur à cette attribution qu*à celle du ms.
24)06 de la Bibliothèque nationale en foveur de Philippe de
Vitry, qui est, comme on sait, le résultat d'une méprise, dont
on a retrouvé la source indubitable. C'est aussi une méprise —
un peu plus compliquée — qui a fait croire à un annotateur*,
dont nos trois manuscrits reproduisent l'opinion, que Fauteur
s'appelait Cbrestien le Gotiais et qu'il était de Sainte More vers
Troyes, M* G. Paris, à qui on doit la découverte si intéressante
du Philomena de Chrétien de Troyes noyé dans les 72000 vers
de VOvide moralisé^ a déjà remarqué que Fauteur de Philomena
se nomme lui-même Crestiens H gois^ que « ce surnom rappelle
singulièrement celui de l'auteur même de VOvide moralise^
Chrétien Legouais, » et que « cette mention est, il faut Tavouer,
fort embarrassante »• Nous sortirons d'embarras si nous
admettons que Tannotateur a pris l'auteur de l'épisode de
Philonima pour l'auteur de VOvide moralisé tout entier. Voili
son premier malheur. Or, comme dit « Crestiens li gois w lui-
même dans Philomena :
Toujours atrait
Lî uns maus Tautre.
et Rouen 104S-46 (JL* n'avais noté dans cette bibliothèque que le 1044, anc.
BfUes-ltttra }o). Voilà donc vingt manuscrits à consuher pour qui voudra
imblicr le Phlknnem. — G. P.]
î. Sur ce ms. du Vatican, que j*ai indiqué ici même {Romam'a, 1890, p.
60a), non pas, comme je Tai dit par erreur, d*aprês les notes de La Porte
«lu Thcil, mais d'après VHer romauum de Dudik, M. Ph» Dcloye, membre
de TEcolc française de Rome, a bien voulu me fournir récemment quelques
renscigneroents dont je tiens i le remercier ici.
a. Je dis anmtateur et non scrihty car M, G. Paris nous apprend que dans
le ïiïs, de Genève , \x table des rubriques est d*une écriture conlempOTainc,
mais différente de celle du texte. D'après les renseignements que m*a
fourtiH M. Dclovc, il en est de m^mc dans le ms, du Vatican.
. xxn iS
MÉLANGES
Ayant lu ensuite rapidement te passage que nous avons
publié plus haut, et où il est question du ckrc de Sainte More^
notre annotateur a cru qu'il se trouvait de nouveau en présence
du même auteur : si son manuscrit contenait soit la rubrique
du manuscrit de TArsenal, soit la note marginale du ms. jyj
de la Bibliotlièque nationale, l'une ou l'autre de ces indications
pouvait facilement lui faire prendre le change* C'est ainsi qu'il
a créé un imaginaire Crestiats li gots de Sainte Mare, à qui il a
donné arbitrairement pour patrie Sainte Maure près Troj^es, cir-
constance d'où nous pouvons induire qu'il était lui-même cham-
penois. Le manuscrit Cottonien, qui doit se rattacher directe-
ment ou indirectement à ceux de Genève et de Rome, a ajouté un
autre détail : de l'ordre des frères Menors^ et il se trouve en fin de
compte que ce détail est le seul qui ne soit pas apocryphe et que
tout ce que nous savons d'assuré sur l'auteur de V Ovidt tnaralisi
— parce que c'est lui qui nous l'apprend dans son épilogue —
c'est qu'il appartenait à Tordre de saint François. Berçuire nous
dit qu'on avait traduit et moralisé Ovide à la prière de la reine
Jeanne : rien n'empêche de croire Berçuire, qui était presque
contemporain. En tous cas, il faut récuser le témoign'«:-v
d'Eustache Descharaps, qui, à la fin du xiV' siècle, fait un ii:k
de gloire à « Saincte More » d'avoir voulu « Ovide esdai-
rier M) : Deschamps avait sans doute lu Y Ovide moralisé dans un
manuscrit analogue à ceux de Rome et de Genève.
Il resterait maintenant à examiner si, comme Ta dit M. G,
Paris et comme je le crois avec lui, Cresîiens li gois, auteur de
Philomma, est bien le même que le célèbre Chrétien de Troyes,
C'est une tâche qui incombe A l'éditeur du Philomena»
A. T
JIOMAS.
LE JEU DES CENT DRUTZ
DANS LE DlOCtSB DE PAMIERS
M, Léopold Delisle a bien voulu nous signaler un curieux
passage d'un statut synodal publié par révèquc de Pamiers,
Dominique Grima, vers 1327. Ce statut a été récemment
imprimé, d'après un manuscrit de la Bibliothèque de Toulouse,
I. BalhdeciiéeparM^G. Paris, loc, htud., p, 508.
I
SUR GUILLAUME DE MACHAUT îf]
dans un recueil publié par M, Tabbé C. Douais, professeur i
rinstitut caihoUque de la môme ville '.
Voici ce texte, qui intéressera certainement tous ceux qui
étudient T histoire de nos anciennes exhibitions dramatiques :
STATUTUM ANTIQ.UUM^
Dampnamus auiera et aiiatheraatlzarnus lucîura cenicum vocatum CcMum
Drudorum^ vulgaritcr Cent Drul^^ actenus obsenaium îti nostra dyocesi» et
spcdaluer in nostra civitaie Appamîensi et villa de Fuxo» per dericos et lay-
cos intcrdum magni status; în quo luJo effigiabantur prelati et religiosi gra-
duum et ordinum diversorum, facienies processionem cuni candclis de cepo,
et veitilis in quîbus dcpîcta erant membra pudibunda hominis et mulieris,
loduebant etiam confratres ilHus ludi masculos juvenes habitu muliebri et
deducebant eos processionaliter ad quendam quem vocabant priorem dicti
Iadi| cum carminibus iohoncsiissima verba coiitineniibus, Cum ergo predicta
nullo tnodo deceant nosiri tcmporis honcstatem, înterdicimus dictum ludum
in toto et îd parte, sub pena excommunicationis quam contra talia presu-
meotes ferimus in hils scriptis, canonica monittone premissa.
I
SUR GUILLAUME DE MACHAUT
MM, G. Paris et Piaget ont montré Ici ra^me {Romania^ XVI,
409 et XXI, 6 16) que le nom de Guillaume de Machaut a, dès
le XV* siècle, souvent été écrit par erreur Michaut, Ainsi, c'est
bien de Machaut qu'il s'agit, M. Piaget le prouve, dans la
lettre du marquis de Santillane, où se lisent ces mots :
a Mkkiute escrivio asymesmo un grand libro de baladas, can-
ciones, rondeles, lays, virolays, é asonù muclios dellos. »
Une autre altération a rendu presque méconnaissable le nom
Je l'auteur du V'oir Dit dans un livre où Ton ne s'attendait
pas qu'il pût être parlé de lui. Le livre en question sont les
Manorias para ayudar à formar un dkciotutrio criiico de ios cscri-
tora caîalatus deTorres Amat, où, sous la rubrique Méchant,
Mexaud ô Maixaut (^Guillem)^ sont consignés deux rensei-
gnements bibliographiques concernant Guillaume de Machaut,
1, TriîiHiux pratiqtui atiftt confératce de paléographie à TlnstHui aUk^ÏHpu de
Tûulûtist ÇtoMloùsi*, Éd, Privât; Paris, Alph. Picard, 1893, in-8«), p. 72.
2. Ces mots, placés .i la marge, indiquent que la défense du jeu des Cent
Dnitz avait déjà été prononcée par un statut antcrieurt
2jè MÉLANGES
Le premier est la simple mention d'un manuscrit de se5
œuvres : « Libre appellat Mtxlmnt à Mechaud anno 1367* » Le
second est un billet de la reine Yolande, femme de Jean P'
d'Aragon, à son cousin le comte de Foix, et dont voici la
teneur : « Car cosi^ Reebuda haveni vostra letra ensemps ab lo
libre molt bell é bo de Guiîkm Maixant quens havets trames ^^M
e lo quai vos entenem reraetre com lo haurem acabat de legîr^^H
D.ida en Montç6 a XVIII dies de juny de mil uescents vuy-
tan ta et nou. » Le texte de Torres Amat porte ici Maixanî^
mais il est bien vraisemblable que la reine Yolande a écrit
correctement Maixaui,
Ces renseignements, qui établissent la vogue du poèce
français dans les pays catalans à la fin du xiv* siècle, ont éti
extraits par Torres Amat de registres des archives d'Aragon.
A, M.-F.
JEAN DE HESDIN
LE GJLLUS CALUMNIATOR DE PÉTRARQUE
Qu'il nous soit permis d'ajouter quelques mots au très
intéressant article de M. de Nolhac {Romaniay XXI, 598) sur le
contradicteur de Pétrarque, Jean de Hesdin, qui fut dans sou
temps un personnage considérable, non moins versé que
Pétrarque dans la littérature profane et que celui-ci n'aurait pas
dû traiter avec tant de dédain.
Jean de Hesdin, religieux de Tordre des Hospitaliers de Saint-
Jean, docteur en théologie, auteur de très gros commentaires
sur différents livres de TÉcriture sainte, aurait certainement
mérité que la postérité s'inquiécàt de lui quand il n'aurait pas
écrit contre Pétrarque et quand Pétrarque n'aurait pas écrit
contre lui. Il n'est donc pas sans intérêt de faire un exact recen-
sement de ses œuvres.
Le premier de ses commentaires paraît être celui qu'il a fait
sur le livre de Job, qui est daté de Tannée 1357 dans les
n°* 200 de la Ma^îarine et 50 de TArsenal, de Tannée ijjS
dans le n° 42 de Toulouse. La dédicace est à Gui de Bologne»
cardinal-évèque de Porto. Un autre exemplaire est dans le
n"8S63 de Munich.
Job n*a jamais été plus prolixement commenté. Ce commen-
JEAN DE HESDIN 277
tmrc n*occupe pas, en effet, moins de 693 pages in-folio, d'une
écriture très serrée, dans le n° 50 de TArsenal* Les remarques
sur le texte sont pourtant rares et courtes. L*auteur ne semble
pas avoir eu le moindre souci de passer pour un grammairien
expérimenté. Ce n'est pas non plus un de ces théologiens
inquiets, méticuleux, qu'excîte et pousse immédiatement A la
controverse la rencontre d'un mot qui peut être diversement
interprété. Mais c'est un moraliste, et un moraliste lettré, dont
la mémoire est pleine de textes, et qui prodigue les citations
avec IVspoir, d ailleurs légitime, de se faire considérer comme
très savant. Il n'y a presque pas un écrivain, antique ou
moderne, profane ou sacré, prosateur ou poète, dont il ne cite
à tout propos des fragments plus ou moins étendus j puis, sur
ces fragments mis en regard les uns des autres, il disserte, en
montre l'accord ou le désaccord et donne enfin, en casuiste, sa
conclusion morale. Voilà ce qui explique ia longueur de tous
ses commentaires.
Le deuxième est sur l'épîtrc de saint Paul à Titus^ avec une
dédicace à Philippe d'Alençon, archevêque de Rouen. La date
est 1362 dans le n'=' 421 de Chartres, 1564 dans les n^* 272 de
LaMa^arine, S4 de Toulouse et 108 des manuscrits théologiques
de Saint-Marc, à Venise. D'autres copies de cet écrit très estimé
sont conservées dans les n^"* 271, 273 de la Mazarine, 33
d'Avranches, 8887 de Munich et 181 du collège BallioL Jean
de Trittenheim et Sixte de Sienne disent que Jean de Hesdin a
commenté toutes les épîtres de saint Paul. C'est ce que répète
Paquoti dans ses Mémoires de littérature^ t. Il, p. 345, reprodui-
sanl, dit-ii, le titre d*un manuscrit de TEscuriaL Mais c*est une
erreur; Jean de Hesdin n'a commenté que Tépître ;\ Titus. Ce
commentaire sur une des plus courtes épîtres de l'apôtre (elle
n'a, comme on le sait, que trois chapitres) n'occupe pas moins
de 322 pages in-fol. dans le n^ 273 de la Mazarine. Or, on a
quatorze épîtres de saint Paul. Quelle masse offriraient donc
quatorze commentaires nécessairement identiques i celui qui
Qous aurait seul été conservé! On ne se la figure pas sans fré-
mir.
Nous avons un troisième commentaire de Jean de Hesdin,
daté de Tannée 1367* Il a pour objet l'évangile de saint Marc et
nous en pouvons indiquer des copies dans les n""' 17287 de la
Bibliothèque nationale, 179 de l'Arsenal, 33 d'Avranches, 12280
2yB MÉLANGES
de Munich et i8i du collège Balliol, Cest encore un énorme
volume,
Jean de Hesdin a-t-il aussi, comme le prétend Jean de
Trittenheim, et, comme le répètent, d'après lui, Swert, le
P. Lelong ' et d'autres, paraphrasé l'évangile de saint Jean ? On
en doute. Si Jean de Trittenheim avait vu ce commentaire, il
en aurait cité, selon sa coutume, les premiers mots. Ce qu'il n'a
pas fait. Ajoutons que Sixte de Sienne et Casimir Oudin n'en
font pas plus mention l'un que l'autre et que nos catalogues
n'en signalent aucune copie. Le doute est certes permis.
Mais voici d'autres attributions plus sûrement fausses» Le
P. Lelong et Foppens^ disent que, d'après François Swert,
dont ils allèguent Tun après l'autre le témoignage, il existe
un commentaire sur l'Apocalypse sous le nom de Jean de
Hesdin. S'il existe, où est-il? Ne l'ayant pas rencontré, mais
croyant Swert sur parole, Oudin fliità l'appui de son assertion
une de ces conjectures qui lui sont habituelles et dont on a sou-
vent blâmé la témérité. On a, dit-il, deux commentaires sur
l'Apocalypse attribués à Nicolas de Gorran, Or, Nicolas de Cor-
ran et Jean de Hesdin furent contemporains, morts l'un et
rautre vers 1380 ; on les a donc facilement confondus, et comme
il est invraisemblable que Nicolas de Gorran ait deux fois com-
menté l'Apocalypse, que Fun des deux commentaires soit res-
titué sans hésitation à Jean de Hesdin. Les critiques décideront
lequel lui convient le mieux K Telle est la conjecture de Casimir
Oudin. Eh bien, Nicolas de Gorran étant mort, non pas vers
1380, mais en 1295, Oudin l'a rajeuni d'un siècle entier pour
le faire contemporain de Jean de Hesdin. Ainsi l'on n'avait pas,
pour les confondre, la raison qu'il a supposée. Mais s'ensuit-il
que Nicolas de Gorran nous ait laissé deux commentaires sur
l'Apocalypse? Nullement. La vérité sur ce point est que l'un
des deux commentaires attribués à Nicolas a deux fois été
publié sous le nom d'Albert le Grand, àBâle, en 1506, par les
soins de Bernard de Luxembourg, et dans le tome XI de ses
Œuvres. Or, s'il n'est pas plus d'Albert que de Nicolas, il est
1. Bibh Mcra, t. II, p. 796.
2, BihL %., p. 658.
3» Comrmtt, de Scrip. eccl, L III, col. 1323.
JEAN DE HESDIN
279
de leur liumblc confrère, Bernard de Trilta, ù qui le donne un
manuscrit qui paraît digne de confiance.
Maintenant, revenons \ Tassertion de Swert. Ceci est bien
étrange, mais nous lavons constaté : Swert n'a rien dit de ce
qu*on lui fait dire; cette assertion que Lelong et Foppens
mettent à son compte est purement fictive. N'ayant, comme il
parait, rien appris de particulier sur Jean de Hesdin, Swert s*est
contenté de reproduire la courte notice de Jean de Trittenheim
où ne figure pas le commentaire sur TApocalypse. D'où il
résulte que ce commentaire n'a jamais été vu par personne et,
pour conclure, n*a jamais existé.
Le P, Lelong et Foppens inscrivent, en outre, ce titre au
catalogue des œuvres de Jean de Hesdin : Comnuntarii tn
Noî'um Taiammîum, Comme ils n*ont pas certainement voulu
dire que Jean de Hesdin ait deux fois commenté saint Marc,
saint Paul et peut-être saint Jean, ce titre vague doit être raturé
comme superflu. Oui, sans doute, Jean de Hesdin a commenté
plusieurs livres du Nouveau Testament; mais il ne laut pas
donner à croire qu'il a fait sur tous le même travail.
Poursuivons. Jean de Trittenheim donne à Jean de Hesdin
des Sermotm varii et Casimir Oudin, se croyant mieux informé,
désigne un gros volume de Fabbaye de Foigoy qui, dit-il, con-
tient ces sermons. Ce volume ne se retrouve plus; mais, en
prenant soin d'en citer le début, Oudin nous fournit lui-mémc
la preuve de son erreur. C*est, en effet, le début du commen-
taire sur Tépître de saint Paul ;\ Titus; ce sont les premiers
mots de la dédicace. Voilà donc une bien étrange étourderie.
Mais Oudin en a commis beaucoup de semblables. Si Jean de
Hesdin a composé des sermons en plus ou moins grand nombre,
on n'en a, croyons-nous, conservé qu'un snr la conception delà
Vierge, que possédait autrefois Tabbaye de Saint-Bertin et dont
on nous atteste aujourd'hui la présence dans le n*" 316 de Saint-
Omer. Il est possible, d'autre part, que Jean de Hesdin ait peu
prêché. Parlant des théologiens de son temps, « ils ne veulent
plus, dit-il, prêcher dés quils sont reçus docteurs ^ » N'a-i-il
pas, devenu docteur, fait comme eux ? Ce qui, d\iilleurs, pouvait
les excuser, c'est que la prédication, toujours prescrite comme
1, ComtmtU, in Job; Arsen.» n*» 50, fol. jj, v<».
COMPLÉMENT DE l'oRAISON D*ARN0UL GREBAN A LA VIERGE 28 1
mente réplique. S'il ne Ta pas fait, c'est probablement, comme
le suppose M. de Nolhac, par dédain. Ou peut-être a-t-il voulu
se donner, en ne le nommant pas, de plus grandes facilités
pour Tinsulter.
B. Haurèau.
COMPLÉMENT DE L'ORAISON D'ARNOUL GREBAN
A LA VIERGE
Nous avons publié dans la Romania ' des fragments d'un lai
d'Amoul Greban qui était inscrit sur un tableau dans l'église
des Bernardins de Paris. M. Piaget veut bien compléter cette
publication. Il a trouvé le texte coniplet du poème dans un
manuscrit de la Bibliothèque nationale (fr. 19247). Nous ne
reproduisons ici que les vers manquant au manuscrit Didot.
L'acrostiche donne : Arnulphus Grabm me.
IV. Lune plus que soleil clerc,
Quant ma fragile matere
Considère, 45
C'est ung bien par moy défait :
Par ma coulpe tresamere
J*ay courroucé par misère
Dieu mon père,
Qp'a son y mage m'a fait. 50
Verger de grâce parfait,
Saint clos, par dit et par fait.
J'ai meffait :
Se par vous ne me modère,
Je sens tant grief moi»' meffait $ 5
Que tout mon bien est forfait,
Se relait
Ne suis par vous, tendre mère.
V. Doy je loer or de si haulte touche
Qui suis polu tant de cuer que de bouche, 60
Toutîesarmé d'innocente blancheur?
Je n'y voy mieulx qu'en sa mercy me couche :
Comme Seneque et Sapience touche,
X. Toir.cXIX, 1890, p. 59$.
iSz MÉLANGES
Lm n'css pas bd en boodie de ]
0 fin saphir, carbouclc espedak, 6$
Ryant roby de richesse royale,
Respleodissaiit par dessus tous les detih»
Riche Judo, douice Hélène aus beaulx yeulz,'
Pour vcoir Paris en regale esuture,
Excusez moy se dire ne say nûeulx : 70
C2pi de terre est, terrestre est par nature.
VI. Je viens et suis né de terre
Et la retourne grant erre;
Le requerre
N'y vault ; la Mort le me signe. 75
Mon ame plus hault se serre;
Les haultains deux voulsist querre,
Et conquerre
Son bien parfait qui ne fine.
La char est au monde encline, 80
Qjji n*c$t que pouldre et vermine;
Toujours mine
Pour bien transitoire acquerre;
L*amc quicrt gloire divine.
L'un reste, Tautre chemine. 85
O n\vnc,
AppaiscK moy ccsic guerre.
VU. \oMc 1\ginâ, HcNJ |çeiite et habile,
S.^irc Minerve Cl pniJentc Sébile,
HumMo Ho>tci , ÎHilivh nu Joui? maintien, 90
IVmIo Kavhv'K Kcbcque trcssubiilc,
K*iiî\ Jiîij^enu' ot IVra treryjremile,
Y^iiw y\Kw I'Kma. N;iii voi-s vou> ne sort rien;
\ .n . |VNn 1 jv»\s< M t«^< ; re ei ; \Te n n : lî ro\ le,
\vv. jVisliiiî niv i]c\}\ éternel lv.\ 95
\\m)\ I:i I ^l■^^Ml; *oer.v:*e î*>ut ce be;u: monde,
1 . j>:o!<M»,^Mi; j,m;v K»v ^M^fo^s ationJc,
» ; hinlron, v;iii^; l^v ;:-,isivv ^'Hîvorains.
r. .!. '.Ms'oii. on: A *vlU' re»*Oî\k-
\, ,v rn.v
* ^1 •♦». \i- ,1»,' r»':V%xo v^, 1\^«
COMPLÉMENT DE L^ORAISON D*ARNOUL GREBAN A LA VIERGE 283
Par vens et roches conduis.
Se je fuis
Ung péril, Tautre me chasse.
La Mort vient qui me menace.
Le juge somme et pourchasse 1 10
Qji*il m'efface
De ma povre charge, et puis,
Estoile immobile en place,
A vous eslieve ma face.
Vosirc grâce, 1 1 5
Vierge : sans elle ne puis.
IX. Pour tout mon cas, qui est grief et impieu,
Je n*ay que vous. Vierge au cuer humble et pieu ;
Et pour pécheurs pitié vous composa,
O noble espoir, sainae cité de Dieu, 120
Arche de paix, saint et précieux lieu,
Ou le trésor de la foy reposa.
Qpant Athleto, la nourrice d*envîe,
Obnubila la lumière de vie.
Guidant loger nostre foy hors des termes, 125
Fondemens ot, mais non pas assez fermes ;
Ferme piller fustes une saison,
Et, s*au fonder fundistes maintes lermes,
Mère piteuse, il y ot bien raison.
X. Or est ce grief dueil en voie 1 30
Et changé par doulce voye
A grant joye.
Flairant souef plus que basme.
Car, en la haulte monjoie,
Toute la court vous convoyé 1 3 5
Et festoyé.
Régente et chef du royaume.
Et moy, qui bruis en la flame»
Vous reclame :
Autrement je ne pourroye, 140
Si vous supply, haulte dame,
Qpant mon corps sera soubz lame
Q.u'après Tame
De vos beaux yeulx se rcsjoye.
XI. Tour de David, aux portes bien ferrées... 145
(Voy. Romania, XIX, p. 597.)
184 ' MÉLANGES
Xll. A vouf donc, Vkrge hononUe,
Royne trespiteable,
Non enable, 160
Viens m'onûson présenter.
Z«a vie m'est moult doubtable.
Forment soudaine et muable.
Variable»
Si fait bien a redoubler. 16$
Orant fardeau sens a porter ;
Raison me veult inciter
A compter.
Benoiste vierge amyable,
Xn vous me vueil rapporter; 170
Ne me laissea desmonter,
Mais monter
En la gloire pardurable,
Amen,
Emile Picot.
1S9 Mi. Bxfoynt.
COMPTES RENDUS
De Nicolao Museto (gallice Colin Muset) francogallico
Carmlnom SCrlptore, thesim Facultati litterarum parisiensi propo-
nebat Joseph Bédier. Paris, Bouillon, 1893, in-80, 135 p.
En même temps qu*il présentait à la Faculté des Lettres de Paris sa thèse
française sur les Fabliaux, qui sera un événement dans les études de littéra-
ture comparée et dont nous aurons certainement à nous occuper, M. J. Bédier
lui proposait cette thèse latine sur Colin Muset, écrite avec un agrément et
une élégance qu'on rencontre rarement dans les productions de ce genre. Le
sujet était un peu mince, et Tauteur s'est efforcé de Tagrandir. Il a surtout
fait servir l'aimable vielleur du xiii« siècle à appuyer la thèse (car c'en est bien
une) qu'il soutient contre M. Jeanroy et en général contre tous ceux, ou peu
s'en faut, qui ont parlé de la poésie lyrique française du xiii« siècle : tous en
ont relevé la banalité conventionnelle, le manque de sincérité dans le senti-
ment, et surtout l'extraordinaire uniformité ; à les en croire, on ne saurait
distinguer un de ces poètes des autres, et sans les indications fournies par les
manuscrits on pourrait attribuer au même auteur les 2000 chansons que nous
ont laissées les xii« et xin« siècles'. M. Bédier combat spirituellement ce
qu'il y a d'excessif dans cette appréciation; il soutient que la plupart des
groupes de poètes lyriques, dans n'importe quel pays et quelle époque,
présentent au premier coup d'œil une uniformité presque égale', et que si
cette impression est plus marquée et plus générale pour la poésie lyrique
française du xiii« siècle, cela tient surtout à la façon incomplète et défeaueuse
dont elle a jusqu'à présent été mise au jour. Il reconnaît toutefois qu'il y a
1. Il est à noter que Dier, bien qu'avec des réserves, avait dit à peu près la même
chose de la poésie des troubadours ? « Si l'on compare une série de pièces d'auteurs
di^reots, on constate qu'elles manifestent toutes le même caractère poétique. On
pourrait s'imaginer que cette littérature est l'oeuvre d'un seul poète. » {Die Poésie der
Troubadours, éd. Bartsch, p. 10.)
2. Il y a bien quelque exagération dans cette assertion, et je ne comprends pas
notamment comment un juge aussi délicat que M. R. a pu écrire (p. 7) : « Qpis adeo
•ubtilis et emunctae naris est ut CatuIIum a Tibullo, Tibullum a Propertio primo
adspectu discernât? » Quelle pièce de Catulle, dirai-je au contraire, peut-on prendre
on seul moment pour une pièce de Tibulle ou de Properce ?
2S6 COItfPTES RENDUS
dans toutes les productions de cette poésie un fonds commun d*idées ootivdl-
tionncîles et de formules toutes faites qui gèae b manifesutîoQ de Tindivi-
dualité poétique^ et îl carictcrise ce fonds commun en se plaint i un point
de vue un peu différent de celui de ses prédécesseurs, et en montrant, à côté
de ce qu*il a d*artifîdel et de f^ux, ce qu'il a eu de nouveau, de noble et
de fécond pour revenir* Mais il prétend qu*avec un peu d'attention et de
perspicacité ' on découvre bien vite dans la mise en œuvre de ce fonds
commun des différences toutes personnelles, et il le prouve en étudiant com-
parativement les chansons de Couon de Béthune et celles de Colin Muset, où
se révèlent non seulement deux existences, mais deux Ames et deux caractères
poétiques très différents. Tout cela se lit avec beaucoup de plaisir, contient
une grande part de vrai, quoique à mon sens avec un peu de parti prb opti-
miste, et contribuera certainement à faire mieux comprendre et apprécier
une poésie qui n'est pas ce que le moyen Ige nous a laissé de plus intéressant,
mais dont rînteîligencc est nécessaire à la compréhension générale de cette
époque. Le plaidoyer de M» B* sera surtout utile s'il contribue, comme on
peut l'espérer, A faire donner de nos vieux poètes lyriques des éditions séparées
et critiques telles que trop peu d*entre eux en ont déjà obtenues *. D s'est chargé
de celle d^un des plus aimables d'entre eux et en même temps d'un de ceux
qui nous sont arrivés avec le plus léger bagage, Colin Muset.
Ici se présentait tout de suite k question préalable qui se pose pour chacun
de ces poètes, et dont la difHcuhé est à la fois un des grands obstacles à
cette appréciation individuelle que réclame M. Bédier et un des arguments
en faveur de ceux qui ont révoqué en doute la possibilité de cette apprécia-
tion» Quelles sont les chansons authentiques de Colin Muset? 11 est clair que
nous risquons de nous tromper gravement dans notre opinion sur lui si
nous lui attribuons des pièces qu'il n'a p.is composées, et de n'en avoir pas
une idée aussi complète que nous le pourrions si nous ne îuî attribuons pas
des pièces qui sont de lui, mais que rien ne désigne dans les manuscrits. S'il
est possible de discerner quelques-unes de ces dernières, ce sera la meilleure
i*^ M, B. cite âvec l-propo< h pensée de Pascal : « A mesure qu'on t plus d'esfdt,
on s*«pcrvoit qu'il y a plus d'esprit» originaux. • A ce compte, on comprend qo*a en
distingue beaucoup. Miii Pascal aussi a dit : Cbt inppo laisottiglia si s£^nv^4.
j. On a, a vrai dire, déjà pas mal de cm éditions séparées; quelques-unes sont tsiut
k fait insuffisantes, comme celles de Tibaod de Champagne cl de Blondcl; d'uitres^
comme celles de Guilcbcrt de BcriieviUc, d'Addoi de la ÏUlîe, de Gautier d'Épîiul. de
Hugues de Bcné, ne sont qui moitié sitisfaitantes; mais celles de Moniot de Pari»
par M. Kaynaud, du Chitclaiu de Couci par M. Falh, de Conon de Bêthnflc p»
M. WaHcnskiOld, répondent k toutes les ciigt^occs de la critique. Nous en «nran
bientôt d*autrcs également bonnes t depuis plus de vingt ans. XL G. Kaymod fiéfUtt
celle du roi de Navarre; M. G. Huct a terminé en manuscrit celle d« G«ce Baillé»
qui. e«|>éront*lc, verra bientôt le {onr; eelïe de Gautier d^Êpinaï, par M. liisdekX, est
in$prtiti«c et n'attend que !c moment de paraître; M. Schwan en «anooce WK de
Hugues de Bcrté. Un corpm général des pile» ly-nques ne «trait pas Aujottn!*h«i iaa«
a»uvrc «u dcMui des forces d'un éditeur Uborteun,
I
J. fiàoiER, De Nicolao Museto (galUce Colin Musct) 3^7
Ttt que la pot^sic de Colîn Muset a dans la forme ou d.ins le fond des
traits vraiment caractéristiques; or c*esi très probablement le cas pour une
petite pièce conservée dans un seul manuscrit (R. 895) et publiée par
M, Jeanroy (Orig,^ p. 505)', quî a conjecturé qu*cUe devait ctre de notre
poète; on peut en être X peu près ceruin» et M, B. est trop réservé en disant
(p. S 2) : « fortassc sententiae a Jeanroy latac assenties. »> Mais c'est U une
chance bien rare, et, en général, les conjectures de ce genre qu'on pourra
faire ne sembleront évidentes qu*à leurs auteurs. Au reste, la solution de la
première question, à savoir de la légitimité des attributions fournies par les
manuscrits, est plus importante; [X)ur Colin Muset, cette question se présente
dans des conditions particulières, et tout ce que nous pouvons savoir ou
penser du poète en dépend étroitement. Voyons comment M, Bédicr Ta
résolue.
D'abord nous ne trouvons pour aucune des douze chansons quî sont attri-
buées i Colin d'attributions contradictoires, ce qui est rare : toutes lui sont
expressément données et ne sont pas données à d'autres. Sur les dou^e,
quatre (I, IV, X, XI) portent son nom dans le texte méme^ et forment la
base indiscutable de notre opération critique. Pour savoir si les autres sont
bien de lui, M. B, a employé une méthode qui en soi est bonne, mais qui ne
pouvait conduire qu'à un résultat peu assuré : il a constaté qu'aucune des
huit chansons ne contenait de rimes contraires phonétiquement i celles des
quatre pièces certaines*; cela prouve simplement qu'elles peuvent être de
Colin Muset, maïs non qu*elles soient de lui. Il n'a pus fait h même corapa-
raison pour le contenu des pièces, et cependant elle aurait pu lui fournir éts
éléments plus intéressants. J'y reviendrai tout X Theure. Mais, pour résoudre
une question d'authenticité la première recherche à faire devait porter sur
t, Cette chiinsoa *e trouve dans un mî, (Pb^) où toutes les pièces sont anonymes,
«l où il se rencontre une autre chanson de Colin (IV) sigoéc par lui; il y aunitt peut-
être lieu lie nechercfaer si d'aotres uniça de ce manuscrit ne pourraient être de notre
poète.
a. L'une d*el1ei, contenue dans le ms. Pb5 qui ne donoe pas de noms d'auteurs, ne
noQS est signalée que par là.
j. La petite recberchc sur la langue de Colin Muset (p. 6$ ss.), q«i sert de base i li
critique de rauthenticicê , n'est pas exemple d'erreurs : prctium a donné dans
tous les dialectes pris et non prix (voy, Rom,, XVîII, 549), et, par conséquent, il
ti'y avait pas de raison de supprimer dans Tiiditioii les ^ donnés par les mss, ; il est
inadmissible que F/ de — f Jj < - c 1 1 o s , -c 11 u s ne soit pas vocaliséc : dans la pièce IX,
qui a 41 vers en -*/, | seulement crfFrent ^eh ou ~eli dans le ms. unique; v, 10 I. 4^
loxitl^ V. -^o ifarbritifi; au v, 19, Cbaictini a cbitpel de for Et x'rrdute tt himui/ii^
XL B. lit Et vtrdurl et brouUls^ et remarque en note : « Brmttti ^= silvula (cL hrot'
tfOHX^ brotit), Hanc formam formae brouiiel^, quae in codicc kgitur, praetuU. » Comme
me Ta fait remarquer A. Tliomjis, nous avons très probablement ici le mot prov.
brondeî, que Raywouird a âé\a. rapproché du mot fr» brmdfs, dans Cotgrave * grecn
bûughes, or branches, of trces «(notre mot brindille me paraît être le pr. brondilb altéré
sous l'influence de brin) ; le ms. (B') porte sans doute brmdfly. Eu tout cas^ rien n'«m*
p6cht de mettre te mot au singulier,
288 COMPTES REKDU5
Tautorité de h tradition , et M* B. ne %*çn est pas assez préoccupé; die a
ccpcudant ici un intérêt particulier.
Les treize pièces publiées avant M. B. et par lui comme de Colin Muset
(en y comprenant la pièce R. 893, que j'appellerai Xill), nous sont arrivées
dans des conditions spéciales. Au point de vue de la tradition, elles forment
trois groupes bien distincts» et aucune ne se trouve à la fois dans deux
groupes :
10 I, X, XII dans Pa, Pb*, Pb*, Pb '?. Ces quatre mss, forment, comme
on sait, une 6imille très étroitement unie (v de Schwan, un des sous-groupes
de S^i ). Leur attribution ne représente donc que celle d'un seul manuscrit;
mais les pièces I et X sont signées par le poète, et la pièce XII e^t sûre-
ment de luif comme le prouve la plus superfidelle comparaison avec les
autres pièces authentiques.
30 IV et XIII ne se trouvent que dans Pb ^ ; ce ms laisse toutes les pièces
anon>ineS) mais IV est signé, et XUI se dénonce comme authentique par sa
fanure et son contenu,
î° II, V, IX, XJ ne sont que dans Bs III, \1, VU, VIII sont dans B- cl
Pb'% mais Pb'* ne donne pas de noms*; B* est donc seul responsable de
Tattribution, Or on sait depuis longtemps que Tau toril é de ce ms. sur ce
point est extrêmement faible^ et que les rubriques, ajoutées une cinquantaine
d*années après la confection du ms., Tout très souvent été au hasard. £n ce
qui concerne les pièces de Colin, nous n'en avons la confirmation externe que
pour XI, débat entre Colin Muset et Jacques d'Amiens qui contient les noms
des deux auteurs; IX est certainement de lui, comme le prouve Texamcn du
contenu. C'est sur les pièces II, V, — III, VI, VII, VIII, que porte surtout
la question. Elle emprunte im intérêt particulier au ^t que les quatre
dernières se trouvent dans Pb", et dans la première partie de Pb'». Or cette
première partie (f» 1-91) a été écrite, non pas, comme le dit M. Schwan,
dans b seconde moitié du xiii« siècle, mais certainement dam b première,
comme tout le monde peut en juger par la reproduction hcliotyptquc que
vient de donner de ce précieux manuscrit la Société des andeos textes
(M. Ra)iiaud dit même « du commencement »), et elle doit, quoi qu*en dise
aussi M. Schwan, être considérée à part des suivantes. Elle ne contient que
des pièces de poètes appartenant au xm siède ou au commencement du
xin« ' ; on sait en outre quelle est seule à contenir un certain nombre de
chansons adesfioia, et noumment de chansons de toile, qui appartiennent
ï, M. B. dit k ^usîcars rcpriics que Pb " inctrtû Am^tisri impntat les pièces de Colio;
rcxprestioQ n'est p« très cuctc, ce ms. n« désignant jamais d'amcur».
j* Toos ceux éo moins dont on peut établir b date avec quelque certitude ; 3 eu est
nous ne comirissoos pas bien Tépoque, mais i! o^en est pas dont fépoqac sott
conniK et pottérienre m eommeiicemcitt da xiu* »ècle. Il est vni ^tià en }iiger par b
liste qoe ionoc M. Sdtwaa (pw iSi ss.) il j aurait des pièces de poètes bîco plus
fteois; maïs il ii*â fut que rcpodutre les attributions du m$, de Berne, qui demandent
). BÉDiER, De Nicolao Museto (gallice Colin Muset) 289
•iÉremcnt au xn« siècle». Il Ciut que le choix ait été arrêté de bonne heure
pour que des poètes aussi remarquibies et aussi prompte ment célèbres que
Tibaud de Champagnei Guilebcrt de Berneville, Jehan Breiel, n'y aient
pas été admis. Si des chansons de Colin Muset figurent dans ce choix, nous
avons par U même la preuve qu'il appartient â la génération des irouveurs
qu'on peut appeler classiques, Gace Brûlé, Blondcl et le Châtelain de Couci,
C'est bien l'opinion de M. Bédier, mais il ne s'appuie (après P. Paris) que
sur les deux pièces VU et Vlll» qui sont précisément en question. Examinons
donc : 1° les pièces contenues à la fois dans Pb'^ et dans B^; 2^ les pièces
propres à B*. 10 On sait que Pb" remonte à une source plus ancienne qui
est aussi en partie h source de B', et qui contenait déjd des fautes qui se
retrouvent dans les deux mss» (S*" "j de M. Schwan). Or il faut remarquer
que les pièces M, VIII et III, attribuées à Colin Muset par B^ se trouvent
à la suite !*une de Tautrc dans Pb'* (f. 76, 77 et 78); Bs qui range les pièces
par ordre alphabétique des premiers mots, a disloqué naturellement ce petit
groupe (f"^ 247, 170, 226), mais le fait qu'il attribue les trois pièces à Colin
Muset semble attester que Tattribution remonte A la source originale et par
conséquent est digne de foi** La pièce VU au contraire (Pb^* f, 63, B*
f. 255) n'offre pas cette garantie, 2»^ La pièce II (B% f. 150) n'a pour son
authenticité que la faible autorité du ms. de Berne; la pièce V (B* f. 171)
est particulica*ment suspecte, parce qu*elle suit immédiatement la pièce VIll,
et que le rubricaieur de B* a fort bien pu répéter machinalement le nom
qu'il venait d'inscrire en tète de celle-ci K
U résulte de cet examen : i» que les dix chansons I, III, IV, VI, Vlll-XlU
sont sûrement ou très probablement de Colin Muset; 2" qu'il a flori A la
fin du xn^ ou au commencement du xili» siècle. Restent à examiner les
pièces II, V et VIL La pièce II à mon sens n'a aucune chance d'être de lui :
die est dans un rythme qui ne ressemble à aucun des siens, et elle repose en
bonne partie sur la banale plainte contre les mesdisani^ qui ne se retrouve
dans aucune de ses pièces authentiques. J'en dirai autant de V, qui roule sur
les lieux communs de Tamour courtois, et surtout de VII, consacrée a blâmer
le siècle et la compagnie de mauvahegcut, où l'on ne reconnaît rien de l'esprit
loatoyrs i Hrc contrôlées, ci qui, dans 1c cas dont il i'igh, peuvent souvent être
COn%*AÎncues d'erreur. Ainsi la pièce attiîbuèc pu B^ â Philippe de K^ntcuil (R, 116)
est anonyme dans cinq mss. et donnée par Pb* i Gace Brûlé; celle que B' attribue
au Roi de Navarru est du CbdteUin d'Arras d*après Pb^» etc.
I. £n revanche, elle uc contient que très peu de pastourelles et un seul jeu parti
(R, 878) d'un caractère tout h fait arch:i:que«
a, n y aurait Heu d'examiner si la très jolie pièce qui précède ces troîs-U dans Pb **,
et qui est un lai ou descort^ forme chère i notre poète (R. 284), n'est pas de lui ; B' ne
Ta pis,
|. Ce n*eft p» ta seule fois qu'il aurait agi ainsi : au f. i, b pièce aoco, qui ne saurait
étié de Conon de Bétbune, lui est iittribuée parce qu'eUe suit la pièce lU), qui est
de lui.
r. XXIL
19
290 COMPTES REHDUS
ni du style de notre poète '. C'est dans cette |nèce que se tronveoc les men-
tions des seigneurs de Waignonru et de Widemont qsà ont seides aerrî
jusqu'ici à situer G)lin Muset dans le temps et le lieo. Je crob qnll £uic y
renoncer» et se contenter de ce que nous fournit à. ce point de vue» aiec la
présence probable de trois pièces de lui dans le ms. Pb ", son débat avec
Jacques d'Amiens; ce dernier nous élcngne de la Oiampegiie pour nous
rapprocher des hona viles de la Picardie. Nous ne savons pas qoand vivait
Jacques d'Amiens ' ; son nom ne figure que dans B', et des six (Mèœs (outre
le débat avec G)]in) qui lui sont attribuées, une (189) est anonyme dans O»
une (1252) se retrouve dans de nombreux mss. et n'est sûrement pas de lui.
La pièce 1x94» si die est de lui, nous le montre en relation avec une
comtesse non nommée et un certain Ferri; M. Bédier voit dans Tun le mari
de l'autre, y reconnaît Ferri II duc de Lorraine, et identifie la comtesse avec
la hone ditcfjesse dont parle Colin (VIII 62); mab Ferri ne peut guère avoir
été un duc, puisque le poète l'appelle tout simplement par son nom>.
Tenons-nous en donc à ce résultat quant aux dates de la vie de Colin : il
florissait vers le commencement du xiu« siècle, il allait de cour en-ooor
dans les provinces du Nord et de l'Est de la France, il fut protégé par une
duchesse, et il nous a laissé dix chansons, dans lesquelles il montre un
talent original et personnel. Si dans les pièces VIII et X il a fait violence à
son naturel pour plaire à ses patrons et s'est évertué à trouver avec autant de
courtoisie que ses nobles émules, les autres pièces nous montrent des traits
caractéristiques faciles à discerner : pour la forme, il aimé les vers inégaux
et les strophes inégales, il ne craint pas çà et U l'assonance, il emploie avec
prédileaion les diminutifs mignards en -</, en -f/, en -e/eT; pour le fond, il ne
célèbre pas proprement l'amour courtois, ne s'amuse pas à invectiver les
losttigicts et à gémir sur la décadence du siècle; il nous peint des amoreUs
d'un moment avec des puceJ^s ù peine entrevues, dont on ne sait pas même
bien si elles sont réelles ou rCvées, qui lui apparaissent dans un bois ou une
prairie ; il se représente îiVZjw/, dansant, poussant des cris de joie en l'hon-
neur du printemps et de la botu vu qu'il mène, et il ne manque presque
!. Sc»tci en outre la t. 52 jeus == judaeus moDosvllabique, ce qni est 4
Tustf^ de notre aateur.
1. Rien ne proa>x qu'il soit le même que l'âuteur de VAri d'aman paWê par
M. KOrting ; s'il Vèuiu il fiiudnût sans doute le faire descendre autant qoe poosîbk
dan» le \iii« siècle. M, Kdning ne voit jus d'objection à ce que VJri d'aman soa àa.
commencement du xxn* siècle; mais plus d'un trait de la langue. le srde, la lovae
et malicieuse allusion aux bruines (v. 22-^ ss.\ montrent qu'il est de la r^-*^it^
moitié.
^ Je «rtis bien plus pané i y voir le Ferri qui est un des autcc» des desïx )esx
partis icvaa e: iiaa. —M. B. dit' que Jacques n'a pu rapprccher la coatesK e: Ferri
comme :: le ta:: que s"i:s étaient man e: fcnîTne : mais i\ ac s'est pas axrçs^ qu'ils sooï
mentionnât dans deux envois disrlncts. qui n'euieai ceraiacmest pas vèa» as ■yTr^T%>
exemplaire de 1* chansor.
j, BÈDiER, De Nicolao Museio (gai lice Colin Muset) 291
jamais (jamais dans ses pièces les plus sûrement authentiques) d'associer ou
mdrac de préférer b bonne chère à Tamour * .
A Taide des dix pièces que nous avons conservées de lui (et surtout des
pièces 1,111, IV, \% IX-XUI), nous pouvons nous tracer du poète un portrait
suffisamment complet et vivant. C'était un ménestrel de profession. Il passait
sans doute l'hiver bourgeoisement a\xc sa femme et sa ûWc, dans une maison
qui ne manquait pas de confort, et oîi il avait un valet et une servante;
puis, les beaux jours venus, monté sur son cheval, sa valise en croupe, sa
vUU et son archet liés par dessus, il s'en allait dans les châteaux pour divertir
les seigneurs et les dames. Il leur viellait sans doute toutes sortes de choses,
des chansons de geste et des chansons d'amour, des irihoutîainei et des
pastourelles. Dans son répertoire figuraient des pièces de lui, ce qui lui
donnait un rang à part parmi les ménestrels. Il semble qu'il avait donné à
Tune de ces pièces le nom de muse ou de muut ', qu'elle avait eu du succès,
et que le surnom lui en était resté. Dans ses compositions, il se met presque
toujours en scène avec sa vielle et son archet^ et se représente à la fois
comme un poète, un amoureux, un gourmand et un parasite. Il désire par
dessus tout mmtr hom vie en mangeant des chapons à Tail et en buvant du
vin frais, mais il veut être assis dans une prairie verdoyante et fleurie, au
mois de mai, un clmptl de roses sur la tète, et il aime être servi par une
hhftdde qui complète sa joie par quelques savoureux baisers* Cest le rêve
qu'il se plaît sans cesse à caresser et qu'il nous raconte avec une grâce
$in^lière. Ces vives esquisses charmaient sans doute aussi ses auditeurs par
|lcur mélange imprévu de poésie légère et de grasse matérialité. D'ordinaire,
fîl rentrait chez lui revêtu d'une belle robe fourrée, la valise gonflét:, parfois
avec un beau cheval frais en place du rottcin fatigué qu'il avait emmené; on
lui faisait alors bel accueil ; mais il n'en était pas toujours ainsi : il se trouvait
f ^cs seigneurs, voire des comtes, qui le laissaient vieller tant qu'il voulait, ne
lui donnaient rien et ne dégageaient même pas, suivant F usage, les véte-
mcnisou les objets qu'il avait dû donner en gage à son hôte pour la dépense;
rhôic les gardait impitoyablement, car on ne k voyait qu'en songe, cet hôte
idéal ff qui ne voudrait pas compter 3», et qui laisserait sa femme, aussi
« courtoise n que lui, embellir les nuits du ménestrel dont il se chargerait de
charmer les jours par une cuisine abondante et variée. Le pauvre Muset
n'était pas bien reçu quand il rentrait à la maison sur son cheval harassé avec
• î, 61 : Ma ht bon morset ti a demi Et départi, Et ât hn vin fort a sosi ^a , — iV 5 j î
L'fH m*ap^fU Colin Mtnet, S'a! tnangié maint K>« chapoturt^ Mainte knte^ rrr^iiVj/ gastelet\ —
X, 42 : Vûi itrés bien servie De crasse oe roitie^ Et beircm vin sor îie^ Si mtnroiu boue vie ;
— XI, jé : J*ujitié3 d* Amiens^ et j' errant m*en retor As chapons en jance ailîie Et as gaitenus
^i tant blanc corne fîor. Et 411 très bon vin scr lie; — voy. auiii U p. Xlïl (Bcdtcr,
p. p) et U pièce XIF.
3. C*cii ce qui me semble ressortir de h pièce I : • Fien c*r, • ntê âist tît^ • Si me
X'iele Ta musi en chantant » J'alai a li el praetet A tôt la viele et Varcbet^ Si ti ai
fbanté U muset Par gtant aimf* Ou pourrait mcmc croire que les deux, vers qui suivent
lont le début du muset.
291 COMPTES RENDUS
M malf fartif de ttnt et m bourse dégarnie : sa femme le sonpçnnnait (faïaîr
été fiire la débauche aval la vile ', au lieu de Êûre la tournée lucrative qaH
avait annoncée; encore ne parlait-il pas du dei qiïïL avait contracté, et
qu'il ^'efforçait d'oublier lui-même. Aussi Êdlait-il de temps en temps se
réM^ner k de% expéditions plus longues : il fallait trotter, tout ieso^gmms,
ffpf(:t quelque « mauvais prince » qui ne vous récompensait que bien médio-
crement de von peines; fhcheux moments pour qui n'aimait qu'ois^ et sepr!
Mrfit à'A\\Xrt% fois aussi on vivait grassement, quitte à engager son manteau,
d^n^ quelque how vile, où on médisait des borjoius, et où on donnait à un
amittrc en poésie comme Jacques d'Amiens des conseils empreints de b
<Mgf«^ la plus pratique : « l'aitcs comme moi, si mentis homvie\ ne donnei
votre ;iniour qu*aux bons morceaux, aux bons vins, et, par cette fnndore,
aux ^r^iuls feux dans la cliambrel » Ainsi se passa la vie de Colin Muset,
imc vraie vie d*oiseau, voyageuse et casanière, légère et sensuelle, recluse
en hiver, vagabonde en été, familière jusqu'à llnsolence avec ceux qui
rcntrcticnncnt, mais toujours gazouillante et mêlant à ses ef&onteries et â
ses libertinages ce que des ailes, un gosier vibrant et l'amour des bois et des
prés donnent toujours de poésie. — Dans ces conditions, on comprend
sans peine que l'œuvre de notre ménestrel ne ressemble pas à celle des
chevaliers qui, pour plaire aux dames et acquérir le renom d'une parÊdte
courtoisie, s'appliquaient à produire sur les thèmes donnés de l'art â la
mode quelques variations poétiques et musicales; il a cherché à prendre
leur ton dans la pièce VIII et dans la pièce X, où il parle de merci, de
bel servir y et menace de mourir si sa Me douce amie ne l'exauce pas; mais
il reprend vite courage et lui promet, si clic vient le rejoindre desox l'ente
florie^ tout ce qui constitue pour lui le bonheur idéal, une crasse oe rosiie et de
Inm vin sor lie. l:n somme, Toriginalité de Colin Muset tient à sa condition
sociale et à sa profession; sa poésie est en marge de la poésie courtoise
qu*on peut appeler officielle, comme sa vie est en marge de la sodétc
courtoise qui raccueilie et le paie, mais dont il ne f;iit pas partie.
M. lîédier a étudié avec un soin particulier la versification des pièces qu'il
a publiées. Aucune n'est dans la forme classique des grands c1}ants\ ce sont
toujours des rythmes légers et de courte haleine, qui remontent à lancienne
tradition française autant qu'i l'art imité des troubadours. Colin ne slnterdii
ni l'assonance, ni la rime d'un mot avec lui-même', et n'obscr\-e pas U
tripartition; il aime au contraire les suites de vers sur la même rime et
1. XII, 19 ss. : Ain;^ me dit : « Sire engdè, lin ijncl terre avei esté. Qui nji€^ •tI-îc
eon^uestèl \ Trop vos estes déporté] Aval la viU. » On peut suppléer ainsi le v. 22 jut
manque. M. B. place l.i lacun'j entre 20 et 21.
2. La non clision d'un e fcminiri «.vt moin^ .issurcc (p. yj). M. Bêdier do=3t =::
explication très ingénieuse, et qui pujit être vraie, de certaines irrégularités arcur:=-!
dans le nombre des syllabes de vîri qui v: correspondent. Sur la constructics'i
de onie sylbbcs (II), il présente de^ observation* intéressantes.
23t 12ft
j. BÈDiER, De Nicolao Musela (galUa Colin Muset) 293
coupe volontiers ses strophes en deux parties égales. On sent pourtant dans
ses vers qu'ils sont faits pour la musique, et il semble qu'on entend le gai
coup d*archet qui les rNthmaii sur la nW**, 11 est malheureux que nos études
sur la musique du xiii* siècle soient encore si peu avancées, et que nous ne
puissions nous rendre compte de ce quMl devait y avoir d'originalité dans les
notes comme dans les vers de Colin Muset.
Je terminerai ce compte rendu par l*examen de Tédîtion qu'a donnée
M. B. des douze pièces que, sur h foi des manuscrits, il attribue à notre
ménestrel. Cette édition est aussi critique que le permet l'état des choses,
chaque pièce ne reposant en réalité que sur un manuscrit (S»» v, B^ ou
S»fl j). Pour la graphie, Téditeur déclare avoir suivi Pa, en remplaçant
seulement i final par s (à tort comme on I*a vu cinlessus, p. 287 , n. 3) et iau
par cl (à tort au moins dans iaus ou catts), en écartant le redoublement
intermittent des consonnes, et en écrivant partout ai là où il est étymo-
logique et û pour 0 fermé au Heu que le ms. hésite entre o et ou'. Cette
restitution n'était pas toujours aisée, les huit pièces qui ne sont que dans
S»" j étant copiées sous une forme lorraine moins marquée dans Pb", plus
marquées dans B'; elle est en général réussie, mais on y peut relever quelques
inconséquences. Le principe de mettre eî pour iau ou eau n*est pas observé
dans heaus III 18 et beautés II 21 ; la vocalisation de 1'/ dans les autres cas, qui
en général, avec toute raison, est admise, ne Test pas toujours : pourquoi
tmlt II 10, m 12 en regard de dom, outrer^ escauter, etc.? pourquoi mais VI
44 en regard de ntauvais} pourquoi fols 0 19 et non fouû ceîs VI 4 et non
C€us} nuls VI 22 et non ttusl gentils XI 29 et non ^entis} — La double
consonne, partout écartée, est maintenue dans comntenf VII 5, comme III 6,
X 10, a/fi I 65. — On ne comprend pas mauvestià V 38 en regard de
maux*ais, htsier 1 43, X 54 en regard de haisier VI 44. — Pour 0 fermé, où on
devrait toujours avoir 0, on lit ou dans houch XI 7, houchete I 14, reJout VI
25, desom X 39, jalousie XI 23, ou fw dans pretts V 46, VIII 57, eure XI!, et
même amorcuset I 28, VI 3, antoreusen^ent XI 23. — ^ La représenralion de
0 bref tonique est très hésitante : on lit peu l IV 13 et puei VI 50, VIll 72,
veut II 12, IV 38 et vuehni VI }0, jeune lll 5 et cuer III 32. — Les graphies
^^ V 37 pour proece^ morcel I 62, IX 40 pour ntorset, einbrassier VI 41,
jser VU so ^our embr acier, iKtussc V 36 pour hatue ne s'expliquent pas.
— On lit oe X 42, mais oies ly*. "^2-, hevrom X 44, mais obeuvrer XII 39. —
On est surpris de voir XI 37, 38 aux et 40, 4 1 aus : le ms. (B*) a trois fois
as (qui était le meilleur) et une fois ai », Ce sont des minuties, mais quand
on veut donner un texte uniformisé, on ne saurait être trop minutieux;
I. La Toison que donne l'édilcur pour adopter u r- miiic ^i (p. j-i) n*cst pas bootic :
Colin ferait rîmer amor, Jîor^ avec or; il n'y a y avoir de iclle* rimes daai
*cs poésies; les deux de ce genre qu*a admises i : jivent être corrigées (voy. ci-
dessous),
a. Je nt regarde aimerott pour amtroit (XI 17) qae comme uae Êiute d'impressioti.
294 COMFTES UESDU
TMmitjMi mtatt ^'ec^ et trmf! esc ses praâabiè i aàm ^
ea Txaeaxaz i riftWrhfr szr seuuoop ie t>gt'nri >yiifVïkMn Je ;
et de ^rspcse ^ œ soc: TTirfrmrrr rskSârcsses iFfaîscaÊcc Je la)
Sar Se texse m2ase, cocsâsé ztcc bcaoanzp Je sm et ^ii
axas qcse »r les ater-jrftarœg Jot:a£es es oooe. )e s'aE ^pt Ken pca
étobserrxàooi i £ûre. I Zi ('tojcz scr ce «ers cMesas p. 391, a. 2) la
rtactaàoa en û km ^tt esi £exz zngésrase; nsss ^ jb SB|g;HEer aùst
ioc/yoaa, tt ne tadrxzS. pas /itf r Je De n» pas li camccâoB. — H 12
# simfU zù : ntst id h. îansut kxnfoe «Ta; La. — II ij Sr aretf jeu;
Lu, — n 21 ov voir imr, I. ;a2 ?is> wz?'. — III S fSKr ot, L irfi —
in îy mtor œ peut riarjer arec sor, or : I. oœr, ce <fà ca b legoo Je Fb".
— ly 16 Gratier^L Garmer (Itxns.^ Gnîer arec F jhcérlinoQ Je fa on Je ar),
— IV 24 }e finis avrer poctr euirtr. — Vu Mm lim fiâm ^imcit\ le ms.
a fad, et 3 £dUh le gvder; fim/ est îd trôtiê aximie on ont mwrnlïn —
VI 16 je Israss jr fti^ avec Pb" plotôt çpc se Soit avec B' : jr £ar, c bien ^ne. »
— VI 50 Qdaâéi vuekmi d'ami servir; M. B. leuLLque que dam B* Bks-
tefnMnn Et dEo»»; mais il oe £: pas qce Pb" porte ionî; fl Est ccnjîufr»
ment Ere fanui^ qui seul donne on sens. — VI 31 s'a, L as. — VII 4$
je Hirnrjis ime Tîrgale, ce qui change on peo le sens. — Vn 48 il £uit Gic
Se fair, c non plos qne. » — MI 49 f ai bien de la ptône i Ere avec
M. B. k nfemroU^ do v. emroûr^ qui sigmÊeraxt « mettre dans le dhemin,
dans le droit chemin ». D s'appoie sor Tartide enrner de Godeftor, mais
cet aftide n'est exempt m d'erreurs ni de confusions. LeTerbe emroier àgnàSt
000 pas « enfoncer », mais « mettre (la charrue) dans le sDon » : Ts «r m
ilvr^ lenrip «nW Um arere (G. ^Aupais^ et par esienâon « mettre en tnûn » :
Orfuel 'Jtut achr^er quan qu'il pense et enrcie (Test, de J. de Meun): Quant Ji
aprentiz e:t enroUz a aprendre (Livre des M/s::ers). Ces citations sont
bonnes et probantes ; les autres sont à supprimer. .Au sens de e commencer m
enrcier se trouveraît dans ce vers du ChjFtie^usari : W /; cbsut (i la femme)
qui el mate ou enprent ou enraie ; je ne sais comment M. Godefroy comprend
ce yen, mais il doit être lu : Ki lui chaut :ui el mcte eu m peint eu en rote
fvoy. ffom.f XV, 607;. Enroier signifierait c avec un régime de chose,
enseigner » dans un vers de Mahomet où il faut lire menrciier^ « amoindrir »,
au lieu de m'enroiier (voy. Rom., XVI, 589). Il voudrait dire encore : « s'ar-
1, J'ai qutlq'iti réserves de détail i £ure sur le mode d'impression adopté par
M. Bédier. Je ne sais pourquoi il n*a pas numéroté !es strophes des chansons ; on a
fouvent besoin de les citer. L*usage du trait d'union doit être proscrit pour Tancien
français, et M. B. a raison d'imprimer dist tie l 16, vueiï ;V IV 21, V 4, îwV on FV' ji,
mais alors pourquoi iruis-je XI 5 et surtout Saint-Marcel pour SMni Marcel IX 2}? Je
ne vois aucune nécessité de mettre un accent sur IV de la terminaison -et. Il faut
imprimer Mutés et non Muses (cf. adès V 15). La noution /"i 1 15 n'est pas conforme k
l'asage ; le ms. a gi (ce que l'éditeur ne note pas), c'est-i-dire g'i.
2. Je dois dire que malgré les explications de M. B. j*ai quelques doutes sur la cor-
rection rythmique de plusieurs des vers de ccne pièce.
I
I
j. BÉDïERj De Nicolao Museio (gallke Câlin Muset) 295
rêter dans le chemin, s*arréier en général, et, dans Tcx. suîv., s'arrêter pour
résister, s'opposer » dans un vers de Partawfiem où enraie, rimant avec
Arcaie =: Arcajrt doit être lu estraji\ Enfin le part, passé ^wroiV, signifiant
« qui sert de chemin », serait attesté par ce vers du Bestiaire de Philippe de
Thaon : Un cerne fait en terre^ Quant veît praic conquerre^ Si laisse une bote,
Que iceû seît enreiet As testes quiî désire^ où il est clair qu'il faut lire entrée.
Reste le passage de Saint Bîoî auquel renvoie M» Bcdier : Ches deus dames
bien Fenroiiermt En hone foi^ et ravoierent A chc trouver que il queroit : il est
vrai que Peigné- De lacourt, suivi par M. Godefroy^ traduit renroijermt (sk)
par « le mirent sur la voie «, mais ce n*est qu*approximatïf : il s*agit de
DcH'otion et de Foi, qui soutiennent le courage de saint Eloi cherchant le
corps de saint Quentin dans Téglise où il le sait enfoui : Venroiierent veut
dire « le mirent en train », et le poète ajoute : Car point ne se désespérait.
Je ne crois donc pas possible que m'emoie signifie v je me dirige », surtout
avec un complément (a IVidemont), et que voudrait dire le h qui procède?
En outre les deux verbes avec lesquels celui-là est coordonné sont au condi-
tionnel. Je lis donc la menroie ou Vainenroie^ sans d'ailleurs le pouvoir traduire
exactement. — IX 15 i!a tahor^ l. le (faute d'impression?). — IX 24 Plus mi
îiés^ par saint Marcel^ Que tels a chastel mi tor. M. B. remarque : « Desirares
«f que tels qui a », neque hune locum explan are potis su m. » Il ne s'est pas
souvenu des nombreux exemples de cette construction qu'a cités en divers
lieux (en dernier, si je ne me trompe, Zeitschr,^ IV, 162) M. A* Tobler, —
La strophe 25-36 me paraît interpolée : cet éloge enthousiaste de la valeur
guerrière est en complet désaccord avec tout le reste de la pièce, — IX 47
je lirais Queti non Qu'i (nis. Kf), — XI 3 resior ne peut rimer avec amor etc. ;
il faut donc suppléer un autre mot; peut-être retor, — XI 26-27 : il faut ou
a horjoise et n'arttera (ms. namerait^ forme lorraine du futur) ou ont borjoises
et namermt. — XI 57 chapons en jancelJie, XII 43 chapons A ta (1. En pour
la mesure) janse ailUe : il est clair que nous avons ici les mêmes mots et qu'il
fallait unilormiser les deux leçons. Mais quelle est la bonne, et que slgnifîe-
i-elle? Il faut certain cmcnt;û«f^ aiîlie; ailtie veut dire « à Tail », et la janc^ ou
gance est une sorte de sauce; voy. les exemples donnés par Godcfroy ^ On
pourrait, il est vrai, être tenté de lire jauce^ d'après ce vers du Roman de
la Rose : la sauce , Soit vert^ ou cameîine, ou jattce (M. Godefroy, s. v» ;aji«,
voit dans ce mot «t un abus de la rime pout jautte »); mais, d'autre part,
r« de /artf/ (jansse^ gf^^se), qu'ont lue jusqu*ù présent tous les éditeurs» est
attestée par une rime d'Eustache Deschamps (MCCCXVIII, 17), en sorte
qu'il &ut sans doute admettre les deux formes à côté Tune de l'autre» —
XI 39 a, 1. au (cf. ci-dessus).
J'ai dû naturellement faire porter mes observations sur les points du travail
I. Il faut m^iimcnaot y joindre celui du Viandier de TAÎllevcnt, qoi donoe (p. 189)
la recette de la jance aux aulx et de U jana de lait. Dans le ms. du Vatican (p. ir8) on
rotiTC encore : une hone sausse dejanc4poHr morue auxanlx.
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€o odier ocraticwti- Onipoiij' «naen atoot ilae ji«ar 1100, £&el mritti â
TnniMiafi md domrj bjr tbe Rtv. Roben Wnxz&MS. Loodoa, Ridiards,
VoL n» oocmiiiii^ Ciqfi'i Ciiiljw^i, I>é«^s PkAv, BécWI lf<»r w^.
yÊpHêÊtBi^ ImâiaHm, Tmêortkjr Emdt^ t$c.^ iU. Edittd, «îth a Tras^atioci,
bj the lise Rrr. Rûbcrt WauAHS, and the Translatkm continncd by tbe
ReT« G. RàitTiTELL Jossis. LoadoQ, C^iazildt, iS^ ia^, 760 p.
D est ât&xle d^îmag^Dcr <|oelqi»e chose de fias t&coiilfcxit que cette pofe£*
catiocL Oàm qm fâvait entreprise, le chiûoine R- WHEams, est movt après
avoir pobfié, il y a dix-sept -.
et avoir udocubc Ai
second les
il
et noe partie des tradocdoos. Koos ne savons qnds oonsplè-
9oa oeniie, et de qodb iiMiimeuCdgcs Q ifixilait
raccaropagner. Ccsl son oomiBiuiciir seul, M. Haitvtll Joncs, ^ est
tespoosahle de cette poitie de b ticbe» et n s^en est aoqintté aussî tzul qoe
poaable,. Noos n'apprenoBS ntiUe paît de quoi se composent les manuscrits
oHcn^^wrtli, aoîoiiid*baî à ^cniafth, à queue époque ili icmontent» m^^ ^ ^^
le motif do dwis £nt pacnin eux et qods sont ceux qœ restent nsëdits. Sur
son travail, le conànuatetir nous donne les extraotduutres tenseî^ietncists
que voici : « Tbe test beîng In monf pbœs inoomplete, espedally m the
earfier ptn% ît was found necessiTy to ooHate Canoo Wtffiams* trinscript
wiih the manoscripts» wbicii I vas enabled to do hmrntHj hf the coartesy of
W. R. M. Wyone, Esq., of Peniaitfa, or wîth other versions at the Bodldan
or «bniafTg some oC wfaidt I saw alkr tlie sbeets bad been pnnted off*. %
constiltîog the ongiails^ fom wfakJiihcse veie nanslattd in die tet insunce;
most of them in Lano, I bave snccceded in coBjecntritig tbe first reading or
tradng the grounds of tbe nùschief >. Tbese doaunents, wrnten in vanous
I. Li pccmièce pink dt quoi > M. lAlllijjns iTatt traduit toot le ffcmicr vohiiiK et
ciiiriroii b moitié dd «eoond.
s. QyMllei Iniîlks 7 ctlks da texte oq de b tndncssoo ?
|, Ccft ttboneo$«s i^cher^fcs ii*oot hàaai qoe bkn peu de tnces dus Ici notes cii-
tlqQcs de M. Joaes sur les dernière pièces do îtciieÛ.
\\1LLIAMS and JONES, The Hcngwrt Mss, 297
languages (\\ I hâve dîscovcrcd (î) in English libraries or abroad, whîlc
engaged in other kitids of rescarch..-.. A fcw notes hâve been added, but
they deal with a few points only, since I havc in my work chiefly folio wed
Canon Williams^ in constilting rathcr thc intcrest of the gênerai reader (1)
than those* versed iti Old-Welsh, who will easiïy sce why I havc adopted a
particular version, or how I hâve supplicd laaltta^r(\). »>
Mais voici qui est plus étrange encore. M. Hartwell Jones n'ayant coni-
raencé son travail < qu'à l'endroit où R. Williams avait laissé le sien, c'est-à-
dire â la p. 570 du t* 11, il n*a également donne de commentaire quelconque
que pour l'ouvrage où il Fa commencé (Purgatoire dt saint Patrice) et les
suivants» en sorte que tout ce qui précède est privé de toute espèce d'expli*
cation î Celte partie est cependant de beaucoup la plus intéressante, surtout
pour nous; c'est à cause d'elle que nous annonçons ce livre dans la Romania^
et nous suppléerons très brièvement A l'inexplicable silence de l'éditeur.
Le premier volume comprend les traductions de deux romans français, la
Qutite du saint graaî (ch. I-LXX) «rt le roman en prose que je désigne par
PerUsvaus. Ces traductions, que î'on peut utiliser, grâce à la version anglaise
deR. Williams, ne sont pas sans intérêt pour l'histoire littéraire. En effet, celle
de la Quôste est faite sur un manuscrit du roman français différent de tous
ceux qu'on a étudiés jusqu'ici, et représentant sans doute une rédaction plus
ancienne, comme Ta montré M. Nutt dans ses Studia m îhe hgtmi of tl}t
holy Graiï; elle devra être prise en considération pour la critique de ce curieux
ouvrage. Celle de PerUsiaiis est faite également sur un texte meilleur que
celui qui a été publié et devra fitre consultée si on en donne quelque jour
une nouvelle édition -*.
Le tome II commence par une longue histoire, intitulée Lu Faits de Omrîe-
magne, qui comprend plusieurs parties, lesquelles ont d'ailleurs été originaire-
raeni réunies ensemble (voy. la note finale qui attribue toute la traduction à
Madawc ab Selyfei les curieuses remarques de transition, ch. XX, LV, LXX) :
10 (I-XIX). Lt Pikfinc^e de Charktmigtu\ version identique sauf quelques,
variantes à celle dont M. J. Rhysa donné, d'après le Livre rcuge d'Oxford, le
texte et la traduction anglaise dans le livre de M, Koschwitz, Seths Bcarhti-
iungm dis alifraniôsischen Gedichîs von Karls dtr Grossen Reise (Heilbronn,
1879).
i. Comment M. H. J, suit-il rcxewple eu cbâjioîne Williams, qui n*4vait ajouté à
son premier volume ;tucune espèce de notes?
3. Il {aut sans doute lire tbtitt tbe intêrtstso/thoté; quant aux intérêts du gfturaî reader^
HOU* verrons comme ils sont satisfaits.
5. Sauf trois pages (si je comprends btt:n), dans la traduction de Btftvn di Hamîom,
4. Ce ne sera pas une tiche attrayante, vu Tennui que respire la plus grande partie
de ce roman ; mais ce ne sera pas non plus une tâche inutile pour Tétude du cycle breton,
le note ici que ce roman (outre le ms. de Bruxelles et le fr.igmenî de Berne) est non seule-
ment dans le ms. d^Oxford H.ttton 82, signalé par M. Stcngcî {Dttrmart, p. 466; Riv.
di fil. rom, I, 192), mais dans le célèbre ms, de ChantilH qui contient aussi Rigûmer, la
Vmgtattu Raguidil, etc. ; scnlement U il s'arrête au milieu de la p. 178 de l'édition.
298 COMPTES RENDUS
20 (XXI-U\0. Traduction fmcomplète) de b chronique de Turpin. Voyez
sur celle traduction les remarques de M, Koschwitz dans l'ouvrage qui vient
d'être cité.
30 (LVI-LXXIX). Otufl (la fin manque dans te ms.); version qu'il Êiudrait
comparera celle qu'on connaît dcjA de ce petit poème, qui a joui en Angleterre
d'une si grande popularité (voy. Rom.^ XI, 151).
4Û LXXX-CXXI). La première partie (LXXX-^CVIII) est 00e traduction
un peu abrégée, mais gcn<^Talement exacte, de la Chanson de Roland^ qui
\ient se joindre aux versions étrangères déjà connues et pouna ça et là être
consultée par la critique. Malheureusement, un peu avant la mort de Roland,
le traducteur, qui avait plus haut abandonné Turpin pour réserver au poème
français le récit de la guerre d'Espagne, reprend la chronique latine (CIX) et
la suit jusqu'à la fin, en sorte que nous ne savons pas comment le poème se
terminait dans le manuscrit qu'il avait sous les yeux.
Après les Faits de Charlettta^ne vient, dans le second volume, une traduction
de Bcvon d'Hanskme, qui sera classée parmi les autres versions dans le travail
d'ensemble que nous attendons depuis longtemps de M. Kôlbing.
Les autres morceaux publiés et traduits par MM. Williams et H. Jones sont
presque tous traduits du latin et offrent beaucoup moins d*intér^t. Cest
d'abord le Purgatoire de saint Patrice (d'après Henri de Saîtrey), puis une Vit
de la Vierge Marie (évangiles apocryphes), Les sept péchés mortels^ YÉimngiUde
Nicodhne, h Mase du vendredi saint (légende de Tinvention de la croix),
V Histoire de Ponce Pilate^ V Histoire de Judas ^ les Qtdn^e signes avant Je jugtmmt^
V Hostie (quelques lignes), la Prcpltéde de Sibylle^ la Visi&n de saint Pau/, h
Signification du Pater (d'après Hugues de Saint- Victor), et plusieurs autres
courts morceaux de piété, les Sept Sages de Rome (version qui se rattache au
groupe A, mais demanderait â être étudiée de près)*, V Huilé h/nie*^ la
Terre du Prêtre Jean , Jdrieft et Ipotis (l'Enfant sage), le Lucidaire (d'Honorîus
d^Autun), la Nourriture de Vdine (d'après M, H. J., w this is made up of several
documents sirung togcthcr *),
i. Voy, G. P;iris, Deux rédaetions du roman des Sept Sages de Reme (1876)» p, XVI.
Le inducteur a du avoir une source fort troublée ; il dérange Tordre des cootes, et en
omet deux {Avis et Roma) qu*il remplace par deux historiette qu*on peut appeler Ramtts
et Lupiis, dont Tune «t une très pauvre invention, et rautrc une foible imitaiiot) de la
fable L/j Brebis^ les Loups tt les C biens. — L* note de M. H, J. sur ce morceau mérite vrai-
ment d'être rapportée : • Tlie Htstoria Septem Sapientimn, from which ihe Wclsh vwïions
[il y en a donc plusieurs ?] are directly dcscended, though with much variation, were
(«V) translatcd (!) by Jean de Hauicselve, a Fr^nch pricst (1) in thc diocèse of Nancy (î),
and publishcd soon afrer the invention of printing. ■
2. C« morceau extravagant, qu'on ne retrouve nulle part ailleurs, est one siogolièit
combinaison de contes sur Nascicn, le saint graal» Glastonbur%\ Thotnas Beckct, Siladin»
pour aboutir à la prédiction que la Terre Sainte sera délivrée par le roi de* léopards.
qui paie ses bonimcs avec de la laine et les désaltère avec du pain (industrie lainière et
bière Ciitc d'orge).
LANUSSE, De V influence du dialecte gascon 299
On voit que cette publication présente de Tintérêt à plusieurs points de
vue ; il est regrettable qu'elle n'ait pas été faite avec une meilleure méthode et
un plus grand souci de l'utilité des lecteurs. G. P.
De rinfluence du dialecte gascon sur la langue ft^ançaise
de la fin du XV^ siècle À la seconde moitis du XVn«. Thèse
présentée à la Faculté des lettres de Paris par Maxime Lanusse. Paris,
Maisonneuve, 1893, in-80, xv-470 pages.
L'influence du gascon sur la langue française s'est surtout manifestée au
xvi« siècle. Elle s'est produite dans le langage courant par le contact avec les
cadets de Gascogne (le mot capdet, puis cadet^ est gascon) qui allaient chercher
fortune hors de leur pays, et dans le langage littéraire par l'action des nom-
breux écrivains gascons qui, au xvi* siècle, ont écrit en frapçais. M. Lanusse
a cherché à retrouver les traces de cette influence dans la prononciation,
dans le vocabulaire, dans la syntaxe du français, et dans cette recherche il a
fait preuve de beaucoup d'érudition, mais il ai sur tous les points, exagéré
sa thèse. L'influence du gascon sur la prononciation française, notamment,
a été nulle. Personne n'admettra, par exemple, comme M. L. le soutient à
diverses reprises, que la perte de l'aspiration en français soit due à une
influence gasconne. L'existence de hors en français, à côté de fors^ est une
anomalie que le gascon hore ne saurait expliquer, puisque hors se rencontre
en français au xii« siècle, en un temps où les mots gascons ne pénétraient
guère dans les pays de langue d'oui et où d'ailleurs il est probable que le
changement d'/en h n'avait pas encore eu lieu en Gascogne méme^ Je ne
crois pas non plus que les formes en arent des prétérits de la première conju-
gaison, si fréquentes au xvic siècle, soient d'origine gasconne (p. 235).
M. Suchier est également dans l'erreur lorsqu'il les considère comme pro-
vençales {Lt français et le provençal y p. 221) :en provençal on disait flffi^ow, et
non amaron. Ces formes en arent sont bien françaises : elles ont été engen-
drées par l'analogie des formes âmes y astes du pluriel. Un très grand nombre
des témoignages cités sont sans valeur. De ce que divers auteurs du xvi« siècle
ou du commencement du xviic, d'Aubigné par exemple, dans les Aventures
I. C'est ce que M. L. contestera sans doute, car il affirme (p. 91), sur Tautorité de
M. Lespy {Grammaire béarnaise, a* éd., p. 102), qu'on trouve, dans des documents du
xn* et du XIV* siècle, certains mots écrits tantôt par/ et tantôt par b. Pour le xiv* siècle
le fait est vrai, mais pour le xii* M. I^spy cite uniquement le nom de lieu basque
Hait^ea (com. d'Ustaritz) écrit Hat^e en 1193, et Fatbse au xii' siècle. Je ferai observer
I** qu'il s'agit d'un nom basque, ce qui ne saurait prouver pour le gascon ; 2* que les
formes de ce nom que cite M. Raymond dans son dict. topog. des Basses-Pyrénées sont
tirées, non d'actes originaux, mais du cartulaire de Bayonne, qui a été écrit an
XIV» siècle. Je remarque d'autre part que, dans le cartulaire de Saint-Jean de Sordes
(p. p. P. Raymond, 1873) tous les noms de lieux qui commencent actuellement par b
sont écrits par /.
300 COMPTES RENDUS
du barott de FtettêsU, emploient des mots gascons ou des tournures gasconnes,
il ne s'ensuit nullement que ces mots ou ces tournures aient étiî, à aucun
moment, naturalisai dans la langue franv^iise* D'autre part, Fauteur est trop
enclin à faire honneur au gascon d'expressions qui peuvent, aussi bien et m<irae
mieux, venir de Titalien, ou tout simplement de l'ancienne langue française
ou du latin classique. Qpi croira par exemple que mukter (p, 345) a été
emprunté par Montaigne au gascon, parce qu'on a trouvé muilat dans un
texte gascon du xvi^ siècle? Fût dfai^ (que le dictionnaire de l'Acadcmie
française, pour le dire en passant, traduit plaisamment par « visage d'âne »)
est un juron provençal et non gascon. Je pourrais multiplier les exemples :
j'en ai dit assez pour montrer que M. L. n*a pas toujours été assez réservé
dans le choix de ses preuves. M, L. a grossi son livre de quelques chapitres
accessoires^ entre lesquels nous citerons le ch. II du premier livre, qui con-
tient une phonétique assez bien ordonnée, mais sommaire et souvent peu
précise, du gascon, et le ch. I*"^ du livre II, « la langue française en Gascogne
jusqu'en 1^59 j», qui traite un sujet intéressant et assez nouveau, maïs qui,
rédigé à peu prés uniquement d'après les matériaux publiés, ne donne encore
que des résultats vagues et incomplets. Toutefois , il faut louer M. Lannose
du soin avec lequel il a étudié et mis â profit tout ce qui a été écrit avant lui
sur le gascon, de Tattention soutenue qu'il a apporté au dépouillement des
auteurs français du xn*^ siècle et du xvii* où il pouvait espérer trouver des
preuves â Tappui de sa thèse. En somme, son ouvrage est intéressant et sera
lu avec profit par ceux- mêmes qui n'en accepteraient pas toutes les conclu-
sions, P. M,
Stildl dialettall venetl. — Max Goldstaub u. Richard Wendrdîek,
Ein toscchventiianischer Bestiarius^ herausgegeben u. erlâuten. Halle,
Niemeyer, 1892 (in-8«, pp. vt-î26).
Francesco Novatï , La « Navigaiw Sanctt Brendani », in antko ventiianOt
édita ed illustrata. Bergarao, Cattaneo, 1892 (in-Bo, pp, LVin-iîo).
Leone Luzzatto, / dtaUtti moderni ddk città di Fatt^ia t Padm>a. Parte I ,
Analisi dei suoni. Padova, tipografia coopérât! va, 1892 (în-So, pp. 51 »),
Dei due primi lavori , che comprendono una parte letteraria ed una parte
linguistica, io non intendo esamînar qui se non quest' ultima* Il « Bestia-
rius « tosco-venedano (veneziano in senso moho largo, com' è da intendere
anche nel titolo délia « Navigatio )>) è studiato sotto questo aspetto dal
Dr Wendriner (pp. 442-494) , già noto per una gîudiziosa memoria sul dîa-
:
I. La prima parte di qauta mcrnoria, i»5ccracnte le vocali» fu pubblicât&, in orniai
poeo divers8j nell' c Ateaco Vcneto » dei Sett.-Ott. 1890,
Siudi diaktîali veneii 301
letto padovano in Ruzzanic'; îl testo învece (pp. 13-73). P^^c appartenga ai
due collaboraiori însicmc, i ijuali sctiza dubbio vî spesero attorno molta
fatïca e nioha diligctua, affine di rendcrlo un po' più intdligibile, chc non
fosse di pcr se. Senza voler nul la detrarre alla Iode che loro spetta^ osscrverô
che non mi pajono da approvare trascrîzîoni come in {n)aiere^ a taccre del
falso in (jt)d vanieîiû ; che mi scmbra scrupolo non giustilîcato quelle di scri*
vere unité le due parti dcgliavverbî in -mente, conscrvate disgiunte nel mano-
scritlo ; ehe înfine trovo un po* inconseguente , che si chiuda fra parcntesi
l'innocuo p dî scrtptura e simili, mentre si lasciano ïiberi vocaboli e sîllabe,
che mcriterebbero assai più codesto trattamcnio coercitivo *. Correzione non
buona è quella dî comita in vomiia^ p. 39, 14» giacchè si traita di gotnitHy che
appanîene anche al vencto ed al toscano moderni; cfr. gofnitass/OiLlmo 14.
Jl c per g ê frequentissîmo nel codice, secondo è detto a p, n : cljm'crnar
chalh diola cljanbe caia^ qcc. Più curioso è Terrore che ha daio vita al nuovo
vocabolo castruio struzzo» p, 57, 18. 25, intorno al quak il W. fu poî
costretto ad almanaccar nel a Glossario t». È da dividere Poca itru^\o, anzichè
h mitnc;p^ cfr, « avis stnitius ».
Lo spoglio è fatto assai bene, coni' era da attendere, e le osscrvazioni che
seguono, non vogHono certo provar nulla in contrario*
j. Per fl/iV^TtJ vedi ora5/, itaL di filoL class. 1 395 n.
4. Pel dittongo dell* ô, son cîtati buoi hiOt due esemp! di plurale, ma
andava ricordato anche il sîngolare hS, p. 70, 10. n. 12, per dedurne chc
T. Cbe îo cîtcr6 : Wmdrîntr Ruij^, E cosi d'ora iuiian^î indtcherù con Best, il
• Bcsttaduf • , coti Br. la « Navigatio • , cou Vg* T ■ Uguçon ■ dcl Tobler ; con
Mm. i • Monumcnti antichi <ii diàlctU îulUnî • dcl Mu554f)J ; ron Es, gU n Escmpî »
ddl* Uîricht Rffttutttia Xllî, 27 sg-, cou Calmû rcJizionc, chc dclle sue Itf itère ha. fatto
Villorio Rossi (c la dfr* romana si rifcrisce alla pagina, Tarablca al paragiafo dcllo spo-
glio); infinc coo ri m, pmt. le Rime di Magagnù Mtftûfi e BfgcttotH lingua rustica padiH
vûna^ Vcucfia 16^9, divise in quattro parti.
1, Non intcndo nemmciiu perche non sicno introdotte nel testo correzionî evidenti,
corne ma pcr no^ p. 14, l, 6, m pcr fa 15, 7» aistiUute pcr castitude 37, 18, le quali
invcce si mandano in nota; aè come aJtre non sîeno indicate neppur aelle noie, nieatrc
vi si pfoponc, sia pur dubitauvamente^ Pcmcrulazionc di auto^ chc è csatto, in avuto,
51, 2, Qisi ; pcr rason \de com\seiiiii 14, 15; aftrteguirse i$» 21 ; bm pcr bvn 17,
>; ttmor mente pcr vuior nient* 17, 1^ ; / pi» (tm^tti 26, 18, roeno sicuro; afrliando^T
fiiiamio 51. 31, il quale suggcriscc pure fratuti U entent per te a tuti li om, 31, 24;
atio per ri<i;;i\ m per non 33, 6, corrczioni cbe, a dir vcro» risuhano dai pssi paralleb.
Ma pcrcbè, in qucst* ultimo luogo, la virgola ddia Unca ç, dopo moUi} Forsc : moUt
pfrwne; o persorn sta per pensano} înoUrc î cbe [V] litpo Jj, 15 ; chi îi [nmt] am j6,
I ; chc [cbi] a Dio si vol simiarc et jé, 4 : qucsto et è plcouastico; a îloro per al lorù
}6, 14 î lo st[r] fritte te per lo se pentise 40, î8, chc risulu dal passo parallelo ; olimen-
tùsi pcr aîfmentosi 41, 11; forse * è bêla entra bîanca \e] machiata » (entra = fra) pcr
« fhe W âtntrQ b. m. •41, 1 Ç ; • i sono asomîati aV oro et Foro si se ajenise al foco • per
• i lUûm asoniiati a tara et toro ti sea fenise al foco » 42, 1-2 ; de Tomo ohiigare (de ^=
dcve) 41» 14, oppure te (= tient),., ohtigate} 11 se chc précède par si deva sopprimere,
aggiungendo un t liavanti a sempre, 1. 17. — de F pcr de lui 45, 9 ; (dtaâe par npcti-
sione crronca di galtdde 47, 7; mi [devemo] ^1, 20 ; in to aiulo $1, 21,
302 COMPTES RENDUS
Va lînale non si dittongô mai. Cfir. qui al nuîn/44, e hasalkà rim. pad. I
59, ecc; inoltre il dialetto moderno, h{K
5. Rilevo ligano, che ricorre anche in Br., p. 51, liga %<ï, e col quale
s^accompagnano il ligure %«, I*algher. îjk Arch, gh!(ol. i7., DC 535, ecc, —
Davanti a nasale complicata, si trova longo quaîonqut ace. a «««ai, dondt ace,
ad unde. Se quesf ultimo non è, e non credo che sîa, un Jatinismo, puô
trarsene lucc suUa patria del rifacitorc toscano : anzi lo stesso nunca puô servirc
a questo scopo. Cfr. qui al num. 24 a.
6, Che in ;\tar ïi deva spîegarsî coU' influsso « àts sidi auHôsenden c »,
come il W. vuole» scgnendo il Tobler, nii sembra perlomeno dubbîo,
quando i testi venedani , ad eccezione dei veronesî , ci dànno per et solo il
riflesso /. Anche neir odierno genovese abbiamo ii7J, ma al dritura del Best,
risponde invece ddrcUûa. La cosa è più verosimile per ni nec^ quantunque si
possa supporre che sb sorto primnmente davand a vocale. Ma forse Tuna ipo-
lesi non esclude i'altra e piuttosto si completano a vicenda. Ad ogni modo,
certo non accetteremo qui insir insire ^ num. 11, perché a vederci TinSusso
del c è necessarîa una troppo forte dose di buona volonti*
lî. Per Vi di vignir, ecc, è da considerar anche, corne fece il Novati, la
consonanie attigua; e cosi per Va â\ splandore, che è esempio comune, e di
tantar {su cui è poi rifatto tantà)y nonchè del notissimo niaritdt. Che in
mptta sia un e latino passato in «, non mi sembra sicuro. Per itrore, cfr. St.
iiai, di fîîoL class. 1 400 n. ; ma aperiien come mai c attribuito a dîssimila-
£ione ?
I ) . In apariado avremmo, seconde la spiegazione comune, tm -cU trattato
in modo affatto irregolare; ora, o convien riguardarlo come vocabolo impor-
taco, 0 piuttosto ricorrere ad una base un po' di versa, ^ad-pariliare, cfr. l'ital.
pariglia^ che è per6 dubbio.
16. Che nmn^ar ci presenti il riflesso regolare di -dic-^ non dovrebbe più
dîrsi.
17. Per digoklo, ant. genov. degdar^ credo che le due tpotesi ênora
espressc, sccondo cui verrebbe o da « collo » o da « gola *, sîeno da unire
insierae ; che cioè esso risponda veramente ail' ital. dicoUare^ come mostra la
vocale del genov. od. deg^ht, ma che il c\ il qua!e dovrebbe cooservarsi întatto,
si sia modiHcato sotto Tinfiuenia di <t gola i>^
iZ* maor^ ace. a maiot\ fu cornu ne nell' Alta Italia, e la caduta dello / va
attribuita al trovarsi esso in silbba protonîca : cfr. matstro saitta, Qiianto a
tmior si poircbbe crederlo rifatto su un antico * wâ^o, che va unito col tosc.
tftàggiû ; ed anche vuiggiore cstge la stessa spiegazîone.
24 à, Nclla nota di p. 458, si spicgano i numerosi tndel indda o indellu del
nostfo testo coir ipotesi dcï Meyer-Lûbke, che potie un anteriorc *uttdet^
confusosi poi, dopo îî passaggio di -nd* protonico in -nn-, col noio innd^
Qjiesta dichîaraaîonc perè non tien conto délie forme intd itttuî e simili, cosl
diffuse anche nella Toscana e che sono certo il punto di partenza ; come poî
da esse si venisse a itidel^ ecc, ha ben mostraio il Bianchi, cfr. Rom, XVIII,
Siudi dialeitali vtmii 303
321. A me questo mdd importa in specid modo^ perché, non potendosi
attribuire al copista vcneto, convicn riferirlo al rifacitore toscano* che per-
de dovevd appartenere alla regione pisano-lucchese-pistoiese. Alla stcssa
conclusîonc conânctunde^ pisano, gîà ricordaio al nuni. 5.
24 d, Che inirabi sia esatto , cioà clie il ti sia caduto per dissîmUazîone »
[non oscrei afFermare con sicurezza; ma bensi riguarderei sicuramenie corne
errori artdonca congiUiiione inpcnâirc. Manca îaHpidandoh\ p, 52, 22, chc
invece potrebbe attrîbuirsi ad etiraologia popolare, Accanto ad onjeso^ ecc, si
puô mtxi^t^ cnfrissi rim. pad. I 76, anfiare II 59 « affidare », chesarebbero
del diaJetto rustico padovano-vicentino.
24 t. Corne son citati gli esempî di metatesi di r, potevasi ricordare rcvt*
îan^ 61, 8» per « rikvare ».
j8. È da soppriraere verde ratrte, 64, 21, chc non è un singolare, ma il
plurale dî rama, lig. ràma râmf^ toscane ratna rame,
41. Suir origine di m w noi », îl W. par si tenga in tulto al d*Ovidio • ma
sarebbe da ricordare ciè chc è detto in contrario, Rmn. XVIII, p. 618 n.
Vedi qui sotto la recensione del Brandano, nura. 11.
44. I riBessi del possessive maschile si confondono qui, come în génère
nei testî veneti, con quelli del femmitiile; quelli del singolare estendono la
loro influenza anche su! plurale, Kel << Bestiarius » poi abbîamo pure la
confuslonc dclle forme toscane con le vcnete. Ma mi sembra da insistere su
ciô, ché, sccondo l'analogia dcgli aJtri dialetti deil* Alla Italia, i rîflcssi ori-
ginari dovettcro avère per base : /(' t[n, tm h^t; sç sçd, s^ s^; donde rcgo-
larmente iç(stnzÀ dittongo perché Vdt finale, cfr. num. 4) tuoi, iça tge^ ecc;
i*Itemaxione che è ancora avvertibile nei testi più antichi. Le forme femmi-
nili SHoa suoc sono rifatte sul plurale maschile, e non intendo perché dopo
5UQ€ il W. abbia posto un punto interrogaiivo , quando lo si trova nella
« Cronica deli imperadori ». De! resto potrebbe anch* esscrc toscano, come
sarà certo sui^ che è stato segnato esso pure con un interrogaiivo.
52. Tra gli imperfetii congiuntivi é çXxslXo posemo^ menire pel senso è un
Lcondizionale : « che si non fose la miscricordia de Dio, mai non si pûsetno
Prevelarc, » 61, 10, cioè : <t mai non potreramo rilevarci » ; come é condirio-
nale sasottOt che ricorre due volte : « se lo nostro signore Jesu Cristo non li
aluminase (cioè ; i nostri occhi) delà sanu grazia, si sasemo zîeghi de veraze
lume, jï 44, 25, c « mai non se dovcmo aconpagnar con alguno chc sta
mazore de noi o più forte ; chè per aventura pieravc la sua pane e la nostra,
Cl sascmo fadigadi insieme ^ j>, 71, 15. Anche il Novati dta forme simili,
num, 53, poserfiOi pose^ vosemo, ma giudicandone rettamenie, quaniunque le
trovi incspliabiïi rispetto alla loro forma, Eppurc non si potrebbe dire che si
traiti di forme ignote. Infatti il Rossi, Calmo num. 61, ne raccoglie un buon
numéro di affaito simili, e per la i* persona^ muUssèno podcssémo vosséfm
t. Qpcsto intiefm par dâ correggere ia quakhe «werbio, cbe significhi i invano ii
304 COMPTES RENDUS
tossémo sassémo danéinùy e per k 2*, stracassé pùsU fossé sassé skusé tm»;
aggiutigendo pot, a pag. clvl n., che tali forme vivono tuttora a Chioggia e a
Burano. Numerosisslmî escmpl dl tal uso ci oâfrono pot aache le rîm. pad. :
</ïj^^' direste I 96^ 98» 102, 105, II 81, ecc*, ÏMssi avrcsle I 107, Il %6,
possé potreîie II 50, sessi sarestc II 50, ^6^ f aisé farestc III 49, ecc. Si rioti
il costrutto : «i s'zposs/ verme in sen.,. A vessé » « se potesle.,* vcdresie * E
59. Pcr la I* pcrs,, aggiuogo ia tvicsse se vorrci II 65, e p€r la 2* sg., irssi
III 19, che parc v;ilga « sirei ». Con desinenza in *amo : sessdm saremmo II
8, Ixitussatm ib, dtstamo dovreramo III 51, ecc.
Congiunzionî. Sembra strano ilih poichè, sîcdiè, dl cul slianno un doque
esempif e che tuttavia lascia dci dubbî*
Âvverbî. Mancherebbe il note ge delP Atta lulia. Ma 10 credo si dcva rîco-
noscere nd cU di pag. 61, 20 : « no-tide sono se non inn una parte de
oriente, che non che piove mai da nisun tenpo », ove sî dovrà quindi leggere
gh, second© ciô che del f, adoprato per ^^^ ne! manoscritto, s*è detto piQ
sopra.
Lessico : aprii aspide è certo un errore; — arsair è anche in Br., e pel suo
ar- ricorda Tital. argine ; — hausia è, non so corne, cascato fra gli csempî di
huso\ -^duma^ insieme col duniar del Calmo, par induca a conreggere il
dmiava deïli Cronica deli Imperadori in duntaiia; — pied/ghe va realmenie,
per la forma, coll' ant. gen* peiga, ma non pel senso, e per questo gli
COrrispondeva pcam (1, pcaittu), E corne si sptega il c dclY od. venez. peia ? Cfr.
pecche Es, 705, pecJfc rim. pad, III 19. Forse si ebbero due forme : 'pêdica
întatto, e 'ped'ca; cfr. l'ant. ital. dotta dubita, l'ant. genov. eréUa per
* Cftd'tûy ecc. — L*etimolûgia di iapo^a è se nia dubbio * sub-puteare, cfr. lo
sp, saput^ar e l'od, gcnov. apusd\ Che il vocabolo nclla sua înierezza non
fosse estraneo al genovese stessOj poircbbe far credere il n. pr. Zaputins Zaptqp^
che trovo in carte del r 190. — Infine riguardo a ^igognaiti cicognini, potremo
os&crvare che il suff, -atto (pîtittosto esicso ncU* italiano, per diminulivi di
nomi d*aniraali, arbiatto kpratto uoiattù-h)^ ebbc nelF antico veneto uiu
larga diffusione, a scapîto di -itto, fiasterà ch* io citi quakhe esempio detle
rim. pad. : putiato l 70, pu i ta ta 85, hoscattû 92, 94, fautunato 99 e 100,
russigtmtîi II 5» veiatto niadia 8, loucnatto 63, borsatto 80, caJandratto IV
29, ecc. Anche negli Es, lovatino 22, povtraîo 75 j. — Eran forse da ricordar
pure pigoio 52, 9 picchîo, od, genov. pigunsu, e stôrnidi 36, 14, che è da
unire collo storno del Calmo, e ritorna in rim. pad. : insiornire stordirc III 6,
ittstornîa siordiia IV 105.
11 prof. Novati, pubblicando un tcsto veneto délia leggenda di S. Brendano,
air imroduzione Ictieraria {V1I'XX\^, sopratutto importante per le redaôon
italiane, ha accompagnato uno spoglio linguistico accuratissimo (XXVI-LVI ;
Lessico 103-108); co&l da lasciar in tutti il desiderio dî veder presto altre
prove délia sua attività su questo campo, La costituzîone del testo (1-92)
presemava diffîcoltA meno gravi, che pel k Bestiai ius » ; ma neppur qui
Studt diakitali veneti 305
l*impresa era agevole, e convien dire che il N. ha saputo sodisfare le più
severe esigenze. Tuttavia non riusciranno forse inutili alcune correzioni ed
aggiunie, che qui suggerisco, ciundo pel testo le pagine dell* edizionc, e per
lo spoglio i paragrafî.
Nel testo, rileverô solo ciô che ha importanza lessicale o fonetica. A
pag. 33 : « e abiando reie udé queste cose » va letto « e abiando revende
queste cose » , cosicchè sparisce Firregolare re^e , che era inteso come
« orecchie », e il non meno strano tidé\ cfr. qui al num. 5). — A p. 31
« uestili tuty de hlammere blanche » ci dà un blammere, afFatto ignoto, col
senso di « veste » ; ma forse è da correggere çamare o :^amarey e l'erroneo bl-
iniziale si spiegherà , supponendo che il copista avesse già in mente blanche.
— A p. 42, anbandona ricorda i casi più sopra veduti, onfeso onfrissi e simili ;
si puô aggiungere Tod. ferrar. imbin^ion ambizione, benchè di génère un po*
diverso. — A p. 44, tofania epifania, par un errore, avendo altrove come
corrispondenti i legittimi pifania pefania befania ; il /- sarebbe un* incosciente
ripetizione del / di otatuiy che précède : « fîna Votaua delà tofania. » — A
p. 49 and* e è giustamente corretto ond* e ; pure non sarà inutile ricordare che
la forma dande per dotide è di parecchi dialetti liguri ». — Un discorso un po*
più lungo mérita Tesclamazione anoia, che ricorre tre volte : « anoia mi, che
mai nasi in lo misero mondo 1 » p. 5 1 ; « o fiolo, anoia ti, dolente ; perche
nasiestu? » p. 52; « anoia mi, dolente I » p. 62. Nei due ultimi casi, il
manoscritto porta anoia, cosicchè la ragione paleografica, con due esempî
contro uno, consiglierebbe questa seconda lettura; ne d'altra parte si potrebbe
addurre in contrario Tintrinseca verosimiglianza délia forma anoia, giacchè, se
si voglia partire dal verbo annoiare, s*attenderebbe piuttosto anoiame anoiate^
anzichè anoia mi, ecc. ; e dividendo anoi a mi, anoi a H, ci metteremmo in
un gineprajo di non facile uscita. D'altra parte la forma auoia ha per se
Tappoggio d*un riscontro , che mi sembra levi ogni dubbio. L'amico Vittorio
Rossi ha riprodotto per nozze, da una stampa veneziana délia fine del
sec. XV o del principio del XVI, otto graziosi sonetti, scritti nel dialetto
délia città, e nel quarto di questi si leggono le seguenti parole, dette dalla
sdegnata padrona alla donna di servizio, che non ha fatto benc la spesa :
Ti non ha tolto ravancllo, sora I
Déserta 1 o vota ti l *
Appunto in questo voia ti , che ha il significato évidente di « guai a te » ,
credo sia da riconoscere Tesclamazione , di cui stiamo ragionando ; e certo ,
1. Si vedano, per ora, le tre novellette di Costa Pianella, pubblicate da P. E. Guar-
nerio, per nozze Salvioni-Taveggia (Genova, 1892) : es. « l'è andâ aa funtana, dande
u patrùn u Teiva mûsu a fante », p. 8 : « è andata alla fonuna, dove il padrone aveva
messo la fantesca. »
2. Per nozze Salvioni-Taveggia , Livorno 1892. Il Rossi vorrebbero leggere hoia, ma
non è necessario.
Rtmania, XXU, 20
}0é COMPTES RENDUS
fielU picna convenienza di senso e di forma^ non si potrebbe nemtneao
rilévare, corne uiu diSBcoitâ, la mancanza déiï a inizialc. Qsiaoto ail' origine
del vocabolo, ncm parrâ forse troppo ardito ch' io voglia unirto appuûto coq
guûi^ cioè, nd veocto, regolarmeate *rai, e <)uîadi, per rinBusso del v, vcso
possîbilc dalla posizionc prodiûca (•wît-a-/f), voi. Nel « Brendano » stesso
abbiamo due volte vosirU^ a p* 21, pcrvaskti. Va iniziaîc non dovrebb* csser
altro che resclamazioae a^/, coi risponde beœ Vo del dtato sonetto. — Un
ultima osserva^ione al testo : sftûrt^ada^ p. 61, staii probabilmeote per
sforegadar. E passo allô spoglio.
4. 11 soUto luova jûvat dei test! veoeti, potrebbe spiegarsi in due modl ;
o corne una posterior e estrazione da lovar ; o oome un esempto da unire con
•gvum, per Qvum. Un di mttuego t ben chiarito dal Sal^-îoni, Gicrn, stor, J,
ktUr. it,, XV 260, Dum. 4. Notevoli drrta diritta, drfié drujate, coi quali i
tcsd veneti sogUon rîspondcre ail* italiano e comune dirittô, occ. ; ma sarà un
crrore d^st per « dbse », p. 67.
5. OItre a gostOi chc conserva il lat. class. gûstus, m^Uo cbe TiUl.
gustû, il geoov. gùstUj tcc,, lilevo dalla nota Tesempio (di jïlurale?) cuftufi»
affatto isolato, clie ha accanto canoti. Cfr. qui, p. 310.
6^ Vi di intrOf ecc, sarà dovuto alla prodisîa» corne nella preposi^ione tu;
ma rinianc pur sempre curiosa questa tendenza , che riscoDtriamo nei testî
dialetuli dell^ Alta Italia^ ad escludere via via IV di sîUaba înîxiale
davanti a nasale , sostituendovî i. Si direbbe che Vi si sviluppossc dapprima
davanti a nasale compUcata, e poî s*estendesse alla prepos* m, e ai pochi casi
dove m- era o poreva preftsso. — Accennerô aoche a sinph, chc par formato
su! plurale, corne muntgo,
8. Non rai riesce chiara Taffermazione, che t di plurale rcsti dopo i, r, n,
Inoltre si donianda : la caduta di ï dopo le prime di queste consonanti, è un
fatto fonetico? E la donianda non vale solo pel veneto; ma per ora mi con-
tentera d'averla indicata» rimandando intanto alla spiegazione, cbe non mî
pare in tutto esatta, del Salvioiii, Krit, Jabresb. ûh. d, Fortschr. d. roman.
Phil, I, 122.
In questo numéro si puô anche rilévare, che -ai riesce ad -t, negli es» nu
magis, as& assai, nella seconda plurale delk prima coniugazione, ecc.;
raentrc i participa plurali maschili, in -ati^ si fermano ad -à[i\. Nel nostro
testo non ne abbiamo perô chc un solo eserapio : attend , p. 22 . U fatio si
potrebbe spiegare coU' influenza del singolare c del fcmmimle, che raanten-
nero più foriemente accemato e distinto Va ; dopo questa Vi doveva sparirc.
I. Aggiungo iincora qualchc Ucvc appunto al testo : p. 8j \tiUur$ t forsc da tegger
jjmturt\ p. 17, dananti ^ foit mo^ l./oifmo; p. J4, ionado là canpaneh, 1. sonando (cfr. a
p. l8 andamii, rclUmcnlc corrctto ia andadt) ; p. 50, dio si m* a, dado, 1. «* «, o tf* a;
p. 51, tfeto^ L itrttû^ c cfr. //rm^a nella îinca chc scguc ; p. 52, tjueh chatinclo, forse
ftti h, quantunque per il senso non appaja ncccisario; c c£r. qut perque quoique num.
34 ^; p. 60, moiitagna... alta zercha poiû ccc, ccc, L frra^o, corne a p. 48? O bra^A
t Ja aggiungerc dopa cc€ ? ccc*
Sttédi diakuali veruii 507
ovc non SI fosse unito con cssa in dinongo, perché è tendetiza générale del
veneto di lasciar cadere le vocali d'usdia, ove altra vocale précéda : âmitis.
cantata, Idda iodato» fu fui, die per dki, pao per puoi^ tutti esempî di Br.
I ï . Dai casi di f in a va tolto ak\e^ perché forma già latina ' ; l'a di btsporo
potrcbbe ascriversi alla labiale précédente, ricordando Vo conservato à\
àlboro : cfr. agnoîo 40, 83, ag^noly 12, an^cîy 40, Invece è scambio di prefisso m
sopelir c assimilaïionc progressiva in otulstade,
Fragli esempî di m per ru, mi scmbra dubbio il terzo, p. 47 : v eli no briga
tre di, » che ititenderei : v non si afïaticarono tre giorni. » L'ultimo, p, 81,
valc ci ; « clo fio besogneria dormir » ^ e potrebbe indurre alla pcrsuasione
che si tfatli d'un antico nt^s}^ utile a confermare clà che dissî altrove intorno
air origine del ne (^: noi, a noi) italiano*. Che Vo poi si estcndesse oltre il
suo irabito antico, dopo che ne nos e ne înde si furono confusi insieme, non
pu6 fare difficolià. Qpanto a so per se, dovette sorgere primamente nella
nota unione se no^ per assimilaxione ; e col m è accompagnato Tunico esem-
pio di Br. jo, e cosl pure uno dei due esempî, che trovansî in Mon., A lao.
Casi di assimilazione sono mana^e salva^e balance, ma cfr. Meyer-Lûbke,
Gr,f I, <386; si aggiunga daladorc *doIatoriae, p. 49, rini. pad. daldura I 78, c
con altra vocale , Umcnta^on , cfr. lemento Boerio , se pcrô non si tratta deir
ant. ai di hinuniar iaiimnto Ug., ecc. Invece, di ananii dananti è da giudicare
in modo diverso ; si ha cioè in essi il rîsultato délia commistione di inanti
dinantx con avanii davanti.
Infine, lasciando il solilo rt- di reluo^iQ ndondo^ acccnncrô a caniit
corrucciai, p^erchè è esempîo abbastanaa esteso : inscore^è Ruzzante e rim.
pad, m 58, inskursôtj gcnovese, dove la caduta délia vocale accenna ad e (1)
antcriore, pîuttosto che ad u,
14. Eran da distinguere i cas! come conseiCt da qucUi come fio, E ^ï non
è un esempio di -lli?
14 a. Il r di arqimnti proviene da uno scambio col prefisso or-, cosl
fréquente nel Veneto, come succedaneo di re- ? Cfr* arsirao Calmo. Anche
arianto altrcttanio rim. pad, IV 8, artantf tante 6; e îl primo di questi due
esempî potrebbe suggerirc una spiegazione divcrsa ; arlanlo cioè sarebbe una
vera contrazionc di « ahrettanto », c Var- si sarebbe poi esteso agli altri casi.
\%, Noto splttntada, p. 34 ; cfr, ipîuma^ Arch. ghtt, U., I, 222 n.,del basso
engadino, che ha ace. skîmm, ib,, e cfr pur ivi le p. 324, J71, 446. Il Meyer-
Lûbke It, Gr, 16 gîudica in un modo suo proprio Tital, schiutna, il gen.
uùrna, ecc, traendone notevoîi conseguenste. Ma poichè il cosl diffaso
spluma si spiega facilmentecon *spumk, anche *skîutna potrà risalire a *ikumïa.
u Cfr, adkctus CIL VI 3149, aUici{m\ 3308 e âltrove.
2, Il Mus$afia, Mon. i^o, rlmaada 1 due luoghi, ovc dovrcbbe trovorsl no\ mi. nel
socondo, G 134, si trova Kritlo n^. Se è un (;rror di sUmp per na, va ricordato, perché
bi Talore di « ci »,
3o8 COMPTES REXDUS
sorto pel paraHelismo del vocabolo précédente, il qaik abbiam visto csseigli
io qualche luogo sopravissuto accanto '.
i6. Rilevo proa , perché dimostra che anche pd yuovcsc si tntta d'un
dissîmilato^oia.
17, 19. Il f di gatMi risale al latino ; mgola è nna svisu ; in aUâr non è
esatto dire che cadesse il i; crqio cre^ando^ eoc., sono analogid.
24. n dileguo di V è attesuto solo per la protonîca, e col v si accordano p
c b, che nella postonica caddero assai più tardi. Casi corne il genov. cmifi
ven. cav^, ecc., sono analogid, cfr. Fit. capeUi,
24 2, U qui dî perque ë semplicemente grafico, cfr. rim. pad. qmH^i^
IV 7, perque II 6, IV 6 e spessissimo. Anche nelle andche « Rime genovesi »
vaguj XL VIII 36 su per vagii. Ma cbela pare uiu « scrizione a rovescio ».
24 c-24 e. Dissimilazione in nembre 25, dr. Tant. îtal. vembro; in covigmra
si ha caduta di n , già latina ; sague setella sono errori ; per r^iosOy rimandato
in nota corne dubbio, cfr. rim. pad. regilion IV 11, 44, 97.
È notevole che nel manoscritto si trova sempre n davanti zp, b^ a ccrto
esso rende la pronunda reale, cfr. qui p. 314. Si possono aggiungere con nb
da mm, conbiado p. 28, gatibely p. 45.
38. Tra gli -o finali, oltre/o2o mantice, menu ricordo rawerbio quasio
pp. 10, 30, 54, ecc. E pel génère muuto o poco comune» era forse bene
addurre banbasio pp. 14, 79, vivo tuttora, laldo 20 e loido 27, ddo rede délia
rcte 49, Ji paredy 10, cfr. parci assiti Caimo, tre pe^e tre pezzi 35, If «wi gli
acini 42. Finalmente ricordcrô in altra porta 54, che pero ë probabile sia un
errore.
43. Le funzioni di « ibi » sono assume da « inde », come altrove c unde »
prcnde quelle di « ubi n. Qui si potrebbe collocare quen:^e « non voria andar
quen^e ni aprosimarse » p. 49, che ha valore di « quivi » ; cfr. rim. pad.
quence v hinc » III 19, « hue » 28, « hic » 43.
51. Dclla i» persona singolare del perfetto Ji prima con., si dice,
seguendo il Salvioni, ApoU. 42, che esce in -ie. Il Salvioni citava aconfemia,
dal Calmo , andi irovi , che perô non fanno gran forza , corne forme analo-
giche, provenienii dalle altre coniugazioni, dove 1'-/ è regolare : lasi nasi hati
rendi, anche nel a Brendano », senza parlare di parti ttioriy ecc. E d*altra parte,
come si spiegherebbe IV, il quale, se antico, avrebbe dovuto cadere? lo
credo si tratti di -/V, cioè del dittongo dell* ë, estesosi dsi'dic diedi (che trovasi
pure in Br.) aile altre forme. La desinenza -iè xnve tuttora nel ferraresc, dove
ha invaso anche la terza persona. — E aude andô ? Si dice comunemeiîie
che è rifatto suUe forme parallèle di « dare » « stare » ; ma perché in tal caso
manca il dittongo? Invero die dédit si ha in Br., ma è forma meno usata ;
e de ste ande si dovranno attribuirc ail' attrazione dei perfetti di 2» (3») con..
1. .\nche nel dialctto odierno , spiuma o sbiutna, ail. a siuma, con qualche differcnza
di significato.
Studi dialeitali veneti 309
moue cognosé e simili. — La i» plur. andasento cercasettio andararao cercammo
coincide, osserva il N., con quella dell' imperfetto congiuntivo ; par quindi
che esso propenda a riconoscervi , corne già il Diez , il risultato dell* attra-
zione, esercitata da questo tempo sul perfetto. Ed a ragione, senza dubbio,
giacchè la supposizione del Mussafia, che si tratti d'un fcnomeno fonetico,
cioè dello -5/1 di 2» pers. passato in -si, manca afïatto di prove; quantunque
il Mussafia sia nel vero, movendo dalla 2* persona, che è, anche fuori del
Veneto , quella che ci si mostra più anticamente trasformata e che trae poi
seco la prima plurale. Mi par degno di nota , che anche in dialetti toscani
apparisca la 2» pers. del perfetto colla desinenza -si, ad es. nel montalese : tu
andessi andasti, vu andassi andaste '.
5$. Allato a fa si trowa fase, e s'avrebbe anche, secondo il N., un esempio
di stase, Tuttavia se si considéra il testo « e [si e] do figure chusi fate Tuna
chomo Taltra, e stase contra doxo », p. 73 , riesce più verosimile s'abbia da
intendere « sta-ssi » « stanno-si ». — La caduta di e in par, val vuoîy è fone-
ticamente regolare; e nel veneto e fuori sono invece analogiche le forme
complète. Ma nel Br. mancano i noti dis plas ca^, che sono i soli casi carat-
teristici ; cfr. gli odierni bus vis gris, adoperati in proclisi.
Nella 2» plur. indic. abbîamo : ande ste, doue pode, che son forse da leggere
andù'y dût'{; ma vanno soppressi gli es. di 4* con. in -e, udé inpléy il primo
perche ho già detto, p. 305, che è una cattiva lettura, il secondo perché deve
intendersi come un congiuntivo : « io ue conscio che uuy ittpîe tuti li uostri
uosiely de 1* aqua, » p. 21, cfr. vigne veniate. Per converse, il N. attribuisce
la desinenza in -i alla 2» plur. congiuntivo di 4* con., sulla fede di due
esempî , conpii servi ; ma questi sono veramente due indicativi , o meglio un
imperativo e un indicative, e ci dànno la desin. -i di 2» plur. di 4», che devesi
attendere : « la ue conply la uostra penetenzîa », p. 88, « conpitevi >> ; « delo
uostro tornar indriedo ala tera uostra, onde seruy a dio..., seralo gran conso-
lazion et alo corpo e al' anema » ib., « onde scrvite » « con che servite » (o
forse : « onde servire? »). Va quindi modificato anche ciô che si dice al
num. $6 a, per Timperativo di 4*, il quale è regolarissimo : archui, ecc.
IV. Tra le preposizioni aggiungerei cercha, ccrcha :{iOy p. i « intorno a ciô »,
anche se noto. E non metterei ad un tra gli avverbî di luogo : cfr. il genov.
se tehan tûti ad tin si tengono tutti ad uno, cioè « concordi ».
Sintassi : è forse da ricordare, per Tinterrogazione, il che del modo seg. :
« clje uuy ue meraueie delo fuogo? » p. 16, che ricorda il toscane.
Glessario. aguia aquila. Anche in Rom. XVIII, $95 n., è espressa un' ipo-
tesi simile a quella del Salvioni, ma non si puô dire che l'clisione dell' i di
•aquilea in aguglia sia ancora perfettamente giustifîcata. Che s'avesscro due
forme parallèle, *aquilea da una parte, donde Tant. tosc. aguiglia, *aquuka
dair ahra, da un *âquulay fondato sul parallèle *equula equiîa} Cfr. St. it. di
I. Si veda il Nerucci, Saggio di uno studio sopra i parlari vernacoU délia Toscana
(Milano, 1865), p. 33 sg.
310 COMFTES RENDUS
fikH» cUus, I, 412. — br^ar pare prenda il senso di « dorare » oeil* es. :
« hriga tre dt questo brusUr » p. $i. — /ntiqo Uveggio. Ricordo due
ïuoghi , che par ci conscrvino un modo popolare : n Taqua cometua a hoir ,
(ùmo une laufio plan de czmtafucgo^ » p. so; « Taqua sooaua hoir a muodù dâi
um gran îaue\o, » p, 50 sg. Anche nclle ani* Rime gcnov* : « e passar lo gnnil
peleaOf | H hoit coma un laue^Oj » Arch, glottoL it, X, 129, v, 5 c 6, — mon
pu6 andare col pîcm, genov* muru muso, afr. moum^ ma questî poi noo
avranno che fare con « morsus **, Pcr runione di moreh con f?iuru , dx. il
genov, wttr//w caniuccio (di pane) — pope^ tuttora vivo, è noievolc per U
dCGlinazione conserva ta. — striminti ho dalle rim, pad. III 9.
Forse si sarebbero poniti ricordarc : abUacMy 60 , « do spclonche 20e
àbitdcholy soto tera, » cui risponde Tod. genov» bitdktûa « caseiu ddla j
bussola », ecc, di laûno médiévale ; — agudaua 49 arrotava, ven. od. fwdr;
— hfsiia 44, nel senso restrimvo di : « animale terrestre, ne pesce nèH
uccello; » ^ chadin 41, più tardi kain^ ov* è notevole la caduta regolaredel
t, mentre questo permane ncî genov. hUûcu cantero e inoltre non si muta
In d neir ital. catino\ — cotiuânaiimi 5, forse nel scnso di « soggiomo; ■
— fato 50, con scnso indeterminato, « pcr lo fato de uno mîcr; » — fita 73,
che non credo valga « piantata », ma betisi piuttosto « massicda », cfr. Vital.
fitU>\ — li^ogo^ nel la frase â ïuago a fa mestieri », frcquentissîma 8, ïl, 30,
ecc,; — mati 81, stanchi? — morheda 2, t* la quai isola si è molto morheda e '
delixiosâ ; » — ialda 47, intera, non divisa, cfr. il dantesco saîdo Inf, XIV jj ;
— spa^ià « si se spa\i^ » }2, si spaccid, si af&ett6 ; — sptst p, collo stesso
significato di spcnsarie^ prowîgîom; — spiero $5, che sembra avère press* a
poco il vabre dello sp. esperar aspettare; ecc. »
Per alcune caratieristiche, il Br. s'accosta ail* « Apollonio » : per -d da
-atii, per l'alternazione -aït -oU e simili ; pei perfetti in -té, Notevoli anche :
ta frequenza dell' a protonico , per la quale si pu6 confronure il Wendriner
Ruzz. num. 26, e rim. pad. ; sopirhia IV j, 68, sùperhio 5, sopierhh 12,
stopirt 10, 55, stopir 36, giosHésia lî, 22, homam 69, pon^ente 4$, ecc; i
oondizionali, uguali ail' imperfetto congiuntivo, num. 53, cfr. qui Best, num,
52; la caduta di r in alcuni infiniti, troba chaie parti, fenomeno che si
riscontra ncgli odierni dialetti di Burano e Mazorbo» nonchè nei dialetci
istriani di Pirano, Rovigno e Dignano, Arch,ghtt, it* I, 436 sg. C nota^ 465,
Calmo CUV sg. c wo^a; inftne Tisolato canun^ con V-cne (od -^î?) In -i«i
cosi fréquente ncgli « Atti di Lido Maggiore »» Ârch. ghtt, it, I, 469.
Il lavoro del Dr Luzzatto fa sentir vivo il desideno , che sia presto Hem-
piuta una lacuna degU siudt diaJettali italiam, con uaa buona ed estesa
I . A p, 73 si trova un ignoto vocabolo, ra^^iy : a lauorado lî plu beli intai âd o*eîy
cd A albary e ra^iy et a bistJolc. » Che vadi unilo col mtku. rôxol rajù* * DUgliuolo »
iarmcnio di vite », c anche ■ bottonc di rosi » nel cremoaesc (BiondeUi), paim. raiàl
I bQttoue di rosa » ? Anche nd Calmo : rài^tlo magliaolo.
Studi dialettali veneti 311
memoria sulle parlate del Veneto; ma certo non riempie la lacuna esso
stesso, nemmeno in piccola parte, anzi direi che non aggiunge quasi nuUa
a quello che già si sapeva. L*A. s'è infatti limitato ad esporre i fenomeni più
cvidenti e più noti ; mentre io credo che sia stretto dovere di chi intraprenda
le studio del suo dialetto nativo , famé risahare le più minute e più riposte
particolarità e finezze, poichè queste difficilmente si manifestano air occhio
anche del più sagace e paziente dialettologo forestière. Neppure il metodo
del lavoro è in tutto sodisfacetite, e tradisce qua e là inesperienza o legge-
rezza. Il Dr Luzzatto dovrebbc affinare e completare la sua coltura lingui-
slica, e poi darci esso, nobile rivincita, quel lavoro sugli odierni linguaggi
veneti, che qui si pu 6 dire appena appena sbozzato.
Seguono alcune osservazioni ai varî numeri délia memoria.
I . Due esempi di a in c : Baîdiss(ra Baldassare , sqttfro piccolo cantiere ,
anticameme squadro. Il primo , come nome proprio , non ha importanza ; il
secondo si trova già nel Calmo, cfr. Arch, glott, it. I, 458, e proverrà da
*squario *5qiiairo, come foriifr da *fornairo (dove -fr = ital. -ajo, come -ter
= ital. -derè). A questo proposito, si desidererebbero notizie del vezzo popo-
lesco veneziano , per cui a, davanti r, si fa a : faro ferro, tara terra, Piaro
Piero. Mi si dà, per converso, come sicuro, anche kii^a chitarra.
4. É notevole Vê in iato, che dà ç : davanti a, cr(a creta; davanti 0, can(o
Carpen^oK È fenomeno difFuso, almeno per la sua prima parte, cioè per
Tunione -(a^ e citerô i genovesi craa tnunaa saa « seta » e « setola », ecc.
Anche i francesi monnaie taie raie claie saie credo vadan posti qui, e il loro ai
risalga direttamente ad ê, non già ad «f , come pone il Meyer-Lùbke, Gr. I,
92 sg. L'imperfetto e il condizionale in -ais conserverebbero quindi la
vocale délia prima singolare originaria ; mentre la scrizione arcaica -ois -oit
proverrebbe piuttosto dalle altre persone, ove non rappresenti una sfumatura
dialettale, rimasta viva soltanto nella grafia : cfr. lamproie^ ecc. Anche croire
S(ns, già pronunziati craire sais, possono aver luce dalla mia spiegazione ; non
cosl altri casi, ne* quali saranno invece da riconoscere capricci dell* uso lettera-
rio e incrociamenti di vario génère.
6. E brève : « ora dà -t^-, ora iç, » Ma si vorrebbe sapere quali sieno i casi
di if, quali quelli di i(. Il L. cita, con }>, solo ti^Uy che certo rappresenta un* intera
série, cfr. vif», e difse'y ove Vif trovasi davanti s : io aggiungerô sifsa caesa
« siepe ». Mi si forniscono anche lifvro (il L. scrive îièvoro z= li(voro)y siçvoîo
cefalo, davanti a t/, e inoltre siçloy tra i e /. D'altra parte, quello che il L.
afferma, non pare dovrebbe intendersi anche pel padovano, il quale ha
sempre iç :fifl, siçra cifra, Pifro, pifgora, ecc, oltre ai comuni viçn tifùy di^e
I, Credo perô che il padovano sia ornai sccso a crea^ cai^o, ecc.
a. Per Io più trascrivo a modo mio i vocaboli datimi dall* A., per non mettcrli in
apparente contraste con quelli che aggiuogo. 11 i, che vale s dolce, è nel veneto assai più
affilato che nel toscano ; c cosi il 5 duro.
312 COMPTES RENDUS
${(hi c via discorrendo, — È note il fenomeno delU ritrazionc ycu
m 6u di parob, c il L. dt^ sic seî; e perche non fie pîede*?
8* Dovc IV non dittonga, dk f : mcd^o, cf(po (cfr* gîi ital. br(V^ c ^i»«i),
Aggiuogï ; pr(vt^ m^jo m(go spi'co, ecc.^ che soûo anche padovanî.
îî. L'esciupio (rfna andrebbe aJ nuiu» 14, comc caso di -INA in y«w,
16. In campafti(l campanile, vi é certo immistione di campandlo ; cfr* ilgesov*
caripanif'tf chc ha Tuno e Tahro significato.
n-22. maiftio è csempiodi -nj ; asegw è da •asîlleu, con raddoppiamemo
dclla consonante c il conscguente abbreviamcnto délia vocale, secondo il
noio fenomeno iatino. Qpi poi convicn mettere in guardia l'A., conlro i
vocaboli dottî o semidotti, de* quali non ha tin' idea molto chiara.
2 j . Le forme vfrsor twssora son venczbne^ e quindi passarono al padov&no ;
di questo sono invecc proprî gli arc. venurofenura *» Aggiungerô un esempio
di w, bencht d*ahro génère : prua^ ove IV potrebb* essersî chiuso per l'bto.
O è d*origine forcstiera, come TitaL prua ? Certo prça non è meno usaio,
26 sgg. Anche qui, rîguardo ai succedanci dell* ô, non si potcva far
opéra utile, se non dando una stalistica pîii che fosse possibîle compléta, sia
degli uè supcrstitîf sîa dcgli p ed c^, sia degU u) (. Il padovano intanto par che
abbia quasi sempre ç t s^îa suola vçîa vol pçî hanarçl fiùçlo ^ cçr cuotq fçra
fuori stçra siuoja mçrû muojo , nçt'û pi(>t*i ^ poco (da au)^ i(fo /(fo^ ecc*; ma
converrebbe studiarc i casî, raolto rari, di i>, ^^w*?, davami w, dove lo scem-
piamento del ditiongo dovrcbb' cssere molto antico, se s'ha da fondarsi stiï
ranalogia di altri dialctti^ l>[yra^ rçisn, forse împortato, fi{Wé, D'altro génère sooo
krti^o, fett^'o, ecc, , cfr, sp(co. Invece dî tiime il veneziano, a quanio mi s'af-
ferma, dicc »ptfe , e cosi sempre davanti a v^ nçve piçv€ çvo. — Osserverô
infine che, invcce di ninsçh^ che è dato dal L., il padovano dicc di preferenza
niip/ (che è dato pur dal Boerio) e più ancora nisiol, notcvole cscmpio di
dissiniibzionc. Pcr rua^ con u sorto nell* iaio» vedî Meycr-Lùbke It. Gr. 56;
per muftfgiit che è rifatto su mutiégo^ qui p. 306; higo giuoco, puô esscr riiatto
i, Quuta ritrazionc di acceato si estende atichc verso Riezzogiomo, c ad cssa devon&i
foTie in buoiia parte gli ta lia, rkordati dal Mcycr-Lùbkc, h. Gr. 26 sg. Il ferrarese
ha oggi ï^ tt^, ma qucst' apparcnza di buoaa coiiscrvajgîcme scmbra da coustdcrarsi illu-
soria, itei ca&i o%'e il dittongo riusciva linak, come îa /^if hu^ buoi. to credo sî tratti di
antichi pie Inui, passati poi in fm bûiU c aîfîne ritornati aile primitive scrabîanze, pcr la
ftessa letidcnza che muta ora a Fcrrara famia via spe^iaria In/amîé tiV spijiariç., cd ùa
uva in iêé \iù, Certo nella t Traducionc dcl Caos ■ in ottava rima, di Pictro Draghani,
pnbblicata ncl 1587, sileggotio ! cortia coltcUi (da cùrti€[i} coriU) fama fagiuoli, bùa buoi,
Gli anellî iniormcdii, secondo apprendo d.i un niio ottimo disccpolo^ sono conservati nci
diaklti liinilrofi ; a Comacchio sie (c dits dieci),/<^jM/ /îiif figliuoli, ad Argenta c a Ccnto
ih piû picde, smia • soonai u c « suonô, » cfr, qui p. jo8, n. $1 (raa di\)^fatùiiftm.
2, Cfr. tvrxrtr^rim. pad, t 85, dalâurû 'dolatoria 78, hura borca 70, ecc.
5 Pcr io ai uo vudi ora un articolo del Gartner, Zeilschr. /. nmian PltiL^ XVI, 174
igg, A p, 80 si tratta dcl suff. -côlu, e mi parc si dovcsse tcncr conto dcU* t (0 «he pré-
cède air (); cU, gU itat. armajuoiç hurmjwh^ ccc.
Studi dialettali veneti 313
sulle forme arizotoniche, e cosi iorst scuria sferza, se non vi si vuol riconoscere
un caso sopravissuto dî m... i.
38 sg. hrçnsa brace, non sarà da *prunicia, dove Taccento starebbe sulP i,
ma dsi prûnicCf lucch. brûnice^ e Vi sarebbe caduto prima che il c passasse in
s ; più tardi sarebbe avvenuto uno scambio di declinazione. Se si dice anche
bronsa, come il L. afferma, questo ci darebbe una forma collatérale, con 1
caduto assai tardi, cfr. ptilese puise. È da toglier ^wWa, che non è esempio di «,
e coa^ il cui 0 non risale ad an.
4S. Notevole V{rser aprire, cfr. covfner coprire. Sembra si sia conservata,
coir aiuto del participio, la vocale originariamente accentata, apério coopério \
c il 5, piuttosto che allô /, si dovrà ad analogia d'altri verbi ; cfr. Tital.
tolgOy ecc. In arpinate : arr(p^.
54 sg. In hecaria îihraria nonè e origînario; crorvar croar non va unito con
crepare ma con *co-rotare *crotare; il diffuso 0 atono di rognon è
per assimilazione ail* 0 tonico ; pevere sesere pajono casi di e.,, e; forfe^ allato
a forfese, è un esempio di nominativo; per faragine non è da dimenticar
farrâgo; colgarse risale a collicare, St. ital. di filol. class. I, 428, ecc.
82 sg. rçcio e agurar stanno molto a disagio insieme ; cesura è un derivato di
caesa, ven. siesa^ anche se nel suo signifîcato v* è come un ricordo di
clausura.
85 sg. gâtolo « condotto » andrà col -gdttoîo di bugigattob. Pel g di gucia
non Y* è motivo di pensare ail' u seguente.
91. seséndela è errore per sesendéla cicindêla.
92. Secondo il L., -rc- darebbe -rs- in protonica, -rs- in postonica; ma
sarà da dire invece che dà sempre -rs-. Infatti marsir prova per la protonica
cosl poco, come siorser per la postonica; e questo sarà rifatto su voUer
acorser^ ecc. In sorso sorcio , che si puô aggiungere , è da vedere un conti-
nuatore di sorice; cfr. Tant. ital. sorico.
93. -ce- -Cl -darebbero, secondo il L., -se -si, quando précéda vocal palatina :
feîise feîisiy amisi nemisi. Sono i soli eseropî che rechi per prova, e, come si
vede, non hanno valore, perché d'origine letteraria ; dello stesso génère sono
difisile, atrise traditrisey Beatrise Doralise y ecc, cui stanno di fronte i
legittimi cornise pernise radise vernise , le narise , la Pendise , tu disi dise , ecc.
Letterario è anche lus^rna, che ha accanto luse.
96 sg. bombaxp (1. boAbdso) puô esser *bombacio, con mutamento di decli-
nazione. In girlanda, arc. sirlandUy è influsso di siro giro.
99. Che sanca provenga da stanca non sarà facile a dimostrare, cfr. Kôrting
8925 ; e non parlo di sasçfiy pel quale si dà la vieta etimologia station e.
Noterô di passaggio, che vanno accolti con beneficio d'inventario tutti gli :([-
toscani , che si voglion da 5/-, de' quali ha un certo numéro il Caix, ne' suoi
« Studi etimologici ».
100-102. Qui è di nuovo da insistere nell' osservazione, sull* uso che l'A.
fa dei vocaboli non indigeni. Inoltre regata non è certo da *rigata, ma dal
314 COMITE REHDUS
verbo recaptare, coaac mostrô il !U)Qâ, Zdtsibr.f rûmoMphûd, XI, i6ç.
Il num. lO) è inutile.
105*106, Gli cscmpi di -ni- in -ni- banoo bcn scarso viïore. D L. vnok
inttIdA indd l Cfr. qui p, 502. Tanto meoo persuade cartû cardo.
Î09, Ê da ricordare TosservaiioDC, chc ho fatto a p. joS, sulla cadnta di^,
^c V» più o meoo mpida, secondo chc sieno prototûci o postooid»
114, ufwqfifiV é dal présente an^no.
UJ. Cbe significa « i tra vocali c tntaito •? Andava dctto : dîventa
sofioro^ trarme se preceduio da au, cosa reposât^ c traonc che nell* awcrbio
i^mi, cfr, l'itaJ. cosi, û genov, aài, ccc. Sembra chc le due parti* di cm
l 'awcrbio è compoito, rimanessero a lungo divise,
118 sg. Si iratta di v, e tra !c moite cose non dette bcne, notera solo chc
a!beu con h risale al latino, trovandosi già nelP « Appendîx Probt s.
IJI-IJ2. A proposito di «, si doveva rîlevate che davanti a consonante,
ha scmprc il suono cosidetto gutturale o velare, come in fin di parola : vifn
ti{n, twito grtnHât smso. È comunc caratteristica dei dialetti dcll' Alta Italia.
Inânc credo cbe il L. avrebbe fauo cosa utile, dicendoci qualcosa dcUa
quantîtà dcUe vocali vencte , davanti aile varie consonanti e In spécial modo
davanii aile doppie originarie. Si sud dire che il veneto si distingue dagU altri
dialetti îtaliani, pcr il suo abborrîmento délie doppie; ma a guardar bene, io
credo si troverebbe che esso rimane, tranne per leggiere particolarità , nelle
stessissime condizioni dî tutti i dialetti deli' Alta Italia. Questi infatti ^ in un
antico période deïla loro esistcnxa, scempiarono la doppia originaria. pur
conservando brève la vocale accentata ; e il risultato più notevole fu quindi »
che la sillaba précédente, di chiusa che era, divenne aperu. I vocaboli geno-
vesi vacca gattu Uttu btigge boUe russu friïse, ecc, vanno adunquc pronuti-
xiali vâ'Cagd'tu U-iu bù-^ern-sxi fri-se; ecost dicasi per i dialetti del Piemonte,
dclla Lombardia, deir Emilia, délia Lunigiana, délie Romagne. Ora, anche
pcr il Veneto è scnza dubbïo da porre : vd-ca itri-to spâ-co tni-go hrâ-so^ ccc.;
e solo è forse da concedcre, che la vocale brève à^ vencti è împcroettibîl-
mcnte più lunga. Alquanto più lunga, che negîi altri casi, mi sembra poi in
fato fatto, che sta quasi di mezzo tra il fâto italiano, « destino », e il genov.
fdiu fatuuj tf dolce di sale » ; di che il motîvo avrebbe a rie ercarsi nclPa, A
conferma di ciè , si osservn che nel veneto, corne nel genovcsc ed in altri
dialetti, le vocali son brevi davanti al m sempHce orig^nario , fù-tno Rô-fna
tri^ntô U'tm; ma di fronte al genov. fd-m hl-ma, il veneto hn/a-me la^nia,
con un a un po' raeno lungo che in italiano, e un po' più lungo forse che in
fa-io, Lasdo agb studios! veneti la cura di verificare le mie asscriioni, dî
compîctarlc c di estcnderie.
E.-G. Farodi.
PÉRIODIQUES
I. — Zeitschrift fur romanischb Philologie, XVI, 3-4. — P. 289, Thur-
neysen. Die Sullung des Verbutns im AUfran^ôsischen. Ce travail très intéressant
soulève des questions fort compliquées et ne pourrait être examiné que
dans une étude spéciale. Pour en contrôler les résultats, il faudrait appliquer
la méthode de l'auteur à d'autres textes que celui dans l'étude duquel il s'est
renfermé (les parties en prose d^Aucassin et Nicolete), — P. 308, Gartner,
Die Mundart von Erto (fin). — P. 372, Gorra, // diaUito di Parma; courte
esquisse de l'eut du dialecte moderne, comparé à celui de Plaisance. —
P. 380, Marchot, Ètymologies dialectales et vieux-françaises, i. Fr. aveindre,
n'est qu'une autre forme d*avenir, comme l'avait très bien vu Littré, et n'a
rien à faire avec abemere. — 2. Liégeois cuat* p(s\ lézard; viendrait
de ^quattuorpedia, mais pedia ne peut donner ^5'; il faut supposer
que, par une confusion semblable à celle qui a fait dire ailleurs quatre-pierres
ou catrf fis\ on a substitué p^ <pecias au représentant de pedes. — 3.
Liég., d^ày « allons! voyons! » « C'est tout simplement le latin eamus,
allons. » Rien n'est moins probable, eamus éunt inconnu à toutes les
langues romanes; il y a là quelque forme abrégée d'un mot plus ancien;
d'ailleurs il n'est pas exact que a amus donne régulièrement à » ; (voy . dans la
Zeitschrift même plus loin, p. $ 11) et eamu s ne pourrait donner que itus ou
giens, — 4. Liég. hêCrà^ m., cou; M. M. combat par de bonnes raisons
l'étym. de M. Bugge (Rom.y IV, 359), mais il n'en propose pas d'autre. —
5. liég. in^saciy in*sacu{y ih'satvus ou in*sawiSf sacuâ; ce n'est pas un je ne sais
qui y etc., mais un ne saue^ qui, etc. — 6. Liég. mita, milieu et moitié; reje-
tant medietaneum, médium tempus et médium tantum,
M. M. reconnaît dans mitan(t) un participe medietantem; ses déduc»
tions sont assez séduisantes; cependant il serait singulier qu'on eût fait un
tel usage du participe d'un verbe qui, d'ailleurs, n'existe pas (il serait moitier
en anc. fr.), et cela d'autant plus que mitan ou mitant n'apparaît en français
qu'à l'extrême fin du xrvc siècle ; en outre, le dérivé mitanier se présente en
même temps, au lieu que mitantier, cité par M. M., est bien plus récent. —
7. Liég. /vmf, m., sorte de petite enclume, voy. 11. — 8. Liég. pçt\ épi
probablement palmltem, comme palmella a donné paumele dans un
sens analogue. — 9. Lièg. tèP, f., terrine pour le lait, en terre cuite; ce
serait testula, mais testula en lat. vuïg. avait passé à tescla (it.
51^ PÉRIODIQUES
ieichmj: n cNt-ce pas plutôt TaU, TifgeJy m. h. aU, i^d? — lo. Lieg. %;
joue :=zfr.gijk; M. M, appuie, avec quelques mckJificatioQS, fétyraologic de
M, Bugge (i?<JOT., m, 150), ail. AV/rr, qui n"es£, toutefois, pas sans diffi-
cultes (voy. d-dessous). — 11. Wall. :Wf/\ petite claie, clayon; viendrait de
vola^ creux de la main (et l'auteur rapproche le Uèg* pçm{, petite enclume
plate, de palttia); mais foUtu, qui existe aussi en français, ne peut guère
se séparer de voift, qui a i peu près le même sens (dans trier sur U volet) ^ ni
ce iHiiit de voUî^ « contrevent »; en outre vola, au moins comme subsi.,
n'a point pass<^ en roman. — P. $88, Settegast, Altfr. jtslùn etc., neufr.
(reton^ frduche, frAuquci. Reprenant sur un sujet qu'il avait traité autrefois
(voy. Kom,^ VIII, 630)» M. S, donne des raisons qui paraissent convain-
cantes pour rattacher Pane. fr. fesJm^ « boulet du cheval, » à l*aoc. h. ail.
in^thch^ « touffe de poils au boulet, » plutôt qu*à rr^/, « entrave. • U est
plus douteux que frelon, « poils au bec du faucon, » frtloche^ frflucJje^ frdu^
qitfi^ se rattachent à feshn (qui se présente une fois sous la îotmt frthn\ mais
ce n^est pas invraisemblable, 11 signale en terminant un vrai curioium : citant
dans son premier article les mots français honld tt fanon, îl avait laissé impri-
mer par ttxtnt fcuht et hanon; sans y faire attention^ j*ai reproduit dans mon
compte rendu /o«/f/ au Heu de bouUi^ et M. Korting a conjecturé (n<* ptj)
que ce mot devait sa forme a une influence de /aw//r, « explication si vraisem-
blable, dit M. S., qu'on ne peut que regretter que le mot si bien expliqué
n'existe pas. » — P, 597, C. Michaelîs de Vasconcellos, Romanimsfudim^ II,
[Le n*? I était une étude très ingénieuse, un peu subtile parfois, sur une romance
du Cid, Heh, hdopordoviettt El moropor h cal^^ada^ et quelques autres romances
« de frontière * qui, selon M™* de V., constituent une sorte de drame en trois
actes. Beaucoup d'observations, de détails philologiques et historiques qui pré-
sentent encore plus d'intérêt, s'il se peut, que le fond même du sujet. Dans
cette seconde étude, sur diverses romances espagnoles et portugaises où il
est question des « morts par amour i>, Fauteur disserte, avec beaucoup d'éru-
dition, sur le genre de sépulture qu'on donnait aux victimes de Tamour, et
rattache Tu sage de ne pas les enterrer en terre sainte i des traditions germa-
niques. — A. M. -F.]. ^ P. 422, Lang, Tradiçôes populares iiçortanas^ chan*
sons, prières, formulettcs, recueillies dans Tile de Fagal. — P. 437, Zenkcr,
Zu Peire d'Ahrrnfie'ï Satire und nochtnah a Car vei fenir a toi dia », M. Z,
défend contre M, Appel (cf. Rom.y XIX, 6î8) son interprétation du sir-
venks de P. d'Auvergne (sans réussir k entraîner la conviction) et répond
a M. Jeanroy (Kom.^ XÏX, 594) au sujet de la tenson Car veif^mr a toi dm,
[La seconde partie de cet article est une réponse aux objections que j'avais
fait valoir ici (XIX, 394) contre une hypothèse récemment édifiée par
M. Zenker. La réponse m'a paru longue, et le paraîtra sans doute davantage
encore à ceux qu'elle intéresse moins directement : M. Z. eût pu épargner
au moins à ses lecteurs Texposé des raisons sur lesquelles il fondait une opi-
nion à laquelle il renonce aujourd'hui; en effet, il conclut en disant w qu'il
n'hésite pas à laisser tomber, comme manquant de base solide i», l'hypothèse
PÈRlODiaUES 317
qui fatsaît le fond de son articlt:^ à savoir que le « Maistre » de la tençon Car
tvi/f«ïrnc serait autre que Raimon de Miraval. 11 ne pouvait gu(ire en effet la
maintenir, apr6s m'avoir accordé que la pièce de laquelle il lirait son princi-
pal argument est composée de deux cohhs^ dont la première seule est Tceuvre
de Miraval. Le leaeur n*éprouve pas une médiocre surprise quand il voit
M* Zcnker, ces concessions faites, contester que j'aie réussi à v réfuter direc-
tement fi rhypothcse en question. Cest donc pour d*auires motifs quMl y
renonce. Soit : l'important est que le terrain soit débarrassé d'une hypothèse
inutile autant que compliquée, et non que fate riionneur de ce déblayement.
M. Z. se borne A maintenir contre moi trois points d'un intérêt secondaire :
10 que le Guilhalmî de la lençon est, non un jongleur, comme je le suppose»
mais un châtelain, û qui Maistre demande Thospitalité ou on secours en
argent ; 2^ que ce nom de Maistre ne fait pas allusion à la condition du per-
sonnage qu*il désigne (je le supposais clerc), mais à sa « maîtrise » dans l'art
de trouver ; 3^ que le mot poîfje au v. 23 de cette même pièce signifie ponki
et non poulain. Sur les* deux premiers points, on pourrait discuter indéfini-
ment sans profit, aucun passage de la pièce ne permettant de déterminer la
condition des interlocuteurs; je ferai seulement remarquer que Tinterpréta-
tion de M. Z, se fonde sur un seul vers (49) très obscur», et je persiste â
considérer la mienne comme plus vraisemblable, étant donné le ton d'égalité
qui règne entre les deux personnages. — Enfin» je suis prêt à reconnaître les
concessions de M. Z. en lui accordant qu'il peut avoir raison contre moi en
traduisant, au v. 23, poJI)^ par <* poulet «. Voici, puisqu'il me le demande,
pourquoi j^avais préféré le sens de « poulain » : i» ce sens me paraissait
rendre le proverbe plus expressif en accentuant Top position entre les deux
objets comparés; 2^ je ne sache pas que dans aucun dialecte, soit du nord,
soit du midi, « poulet » ait été jamais rendu par pull-enum; c'est le
suflflxe -ittura ajouté au même thème qui est affecté à cet usage; polin
ayant, au nord, fait place dès le xn« siècle a pokifi (voy. un ex. du Psautier
tfOx/ofd dans Littré), aussi bien qu'à poîain (cf, Fôrster, Zdtschr, XV, 523),
je supposais que le poète, poussé par le besoin de la rime, avait emprunté la
forme d'un dialecte voisin. Mais il est vrai qu'aucun texte ne me donne rai-
son— non plus, du reste, qu'à M. Z, % — et je consens volontiers à avouer que
j'eusse mieux fait d'être moins affirmatif. — A, J.] — P. 452, Baist, Jo/rd^
d'Anjou. M, Baist n'a connu Farticle de F. Lot sur le mèmesujei(/?ar«.,XIX,
Î77) qu'après avoir composé le sien ; il apporte de nouveaux textes et surtout
des vues nouvelles, parmi lesquelles il en est qui appellent la discussion. —
P. 458,Horning, DU Mundart von Tannois ; Tannois est à 4 kiK de Bar-le-Duc,
cl son parler, ici soigneusement mais sommairement étudié, « peut provi-
t. Des vers 39 et f 4, il ne me pantit aallement résulter que Mdstre demsiatle de ViT-
l^nt h Guilhalmî,
a. M, E. Levy, consulté par moi, veut bien me faire savoir que le mot poihf ne se
lr(MiVc ikns aucun de ceux qa'il a dépouillés pour son Pr^v, Suppt€ment^H''<xrtfrbucb^
Îl8 PfeRîODîaUES
soîremem être accepté comme t)*pe du lorrain occidcntjil, » — P 477,
M. Mcnghîni, FiUancUe alla napolitana : publication, avec quelques
remarques préliminaîres» de 15 j de ces petites chansons seml-popuUires du
XV te siècle» d'après un ms. Chigi (première partie).
MÉL.VNGES* I. Histoire UUiraire. P. 505, O. Schultï, Docnnuitts sur Hugues
de Ikrjé. Des actes publiés dans Bréquigiiy et dans le CartuJaire de Saint'
Vincmt de Mdcon nous montrent entre 1182 et 1196 un Hugues de Bcrxé,
fils et ^T^ d'un Hugues; c'est ce dernier qui est le poète (il est surprenant, et
je suppose là quelque erreur, que Hugues II, qui se croise en 1202, soit, en
1196, doyen de MAcon après son frère Gautier; il n'était sûrement pas clerc).
Je ne suis pas tout ifait de Tavis de M. Sch. sur un passage de la Bihk^ où il
s^agit des quatre empereurs que Hugues dit avoir vus en dix-huit mois, i
Constantinople, vivants et morts de vil mort. Celui qu*il vit saillir en la mer
est certainement Murruphle,que Ton fit iaiV/ït a W(Villehardouin) du haut de
la colonne de Théodose; celui qui/w désert te^ (Qui valu pis de mort asseï) BS
Tfiene:^ en chetivoison est Alexis UI (le poète ^ par sa remarque, restreint lui-
même la portée de Tcxprcssion gx;nérale : morir de vil m&rt), M. Sch, dit avec
raison que rien ne prouve que Hugues soit resté en Romanie plus tard que
1205 (date de la bataille où fut pris Tempereur Baudoin, 15 avril; v. 421 I.
Conmin au Heu de Romain) ; toutefois j'ai supposé que les vers 4}2-440Ûdsaient
allusion à la mort de Boniface de Montferrat (1207), mais on peut les expliquer
autrement. — II. txf^èse. P. 508, Baist^ i. Der Ztueikttmp/ im Roland stitiU,
M. B. corrige une erreur de mon résumé du phii de Gumehn^ dans l'Intro-
duction de mes Extraits de la chanson de Roland (erreur qui m'avait été signalée
d^autrc part et que i*ai corrigée dans la nouvelle édition qui vient de praîtrc);
i] tire de là, pour l'origine bourguignonne du poème, des conclusions aux-
quelles j'aurai lieu de revenir à une autre occasion» — 1. Ad oes seint Pert en
cunquist le cljevage. M. B. a raison de contester que T Angleterre se fût engagée
à payer un tribut i la papauté, mais je ne vois pas comment il suit de li que
le vers dté de Roland^ qui représente une opinion courante au xi« s., n'a pas
trait à la conquête de l'Angleterre par Guillaume. — UL Grammaire, P. 511,
Stùrzinger, Die walhn -loth. Pràsens-Endung à. L'auteur rend probable qu'elle
représente la i« pers, plur. du parf., -ames^ transportée au présent* —
P. 513, Schuîtz, UnvermitieUes Zusammentrtten von ^wei Adjekiiven oder Parti-
dpien im Proven^alisclxn ; l'auteur étudie avec soin cette construction où deux
participes présents (il ne s'agit presque que de ces formes) sont juxtapo-
sés de manière à ne former pour ainsi dire qu'un mot, soit qu'ils soient à peu
près s>*nonymcs (r^tn jogan , somjmlmn durmen) , soit qu'ils soient opposés
(cd;ç«i levan^ œmfrran vetuien), — IV. Histoire des mots. P. 517, Cornu,
ir. prosne^ protte, prôthyrum ou prôlhyra; on ne voit pas bien com-
ment prôthyrum ou la forme vulgaire prôtùlum (Lœwe, Prodr&mus,
p. 376) aurait donné prone, car un protinum issu d*une « dissimilation
plus décidée « n'est guère probable (on peut citer posierm^ marne, pesm^
mais le changement d7 en n y est bien plus récent, et l'on trouve posterkf
I
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pèRtooiauEs }i9
mark^pesUy M» Meyer-Lûbke, qui a proposé «pdvao;, a annoncé (LiV^a-
turhL 1892, p, 70)<5u'il donneroii des preuves de cette étymologie. — Prov.
-eire^ -Itor; voy» ci-dessus, p, 261, — ÏVamin frani^, pourceau uttd nichl
porceauf M, C. soulève là une question des pîus intéressantes, â laquelle j'ai
rimention de revenir ailleurs; je me borne i dire ici que sa solution fort
ingénieuse est que (utrcdli (GU Cass.) remonterait au nom. plur. purdy où Vt
final aurait changé Va en ç (comme dans les pronoms il a changé e en *, ç en
w). — Noir comt àioe i la chot n'est nullement b chouette (Godefroy), mais
le choucas (Saînte-Palaye); en effet, dans b fable de Marie où figure une
choe, le latin a monedula^ et un glossaire cité par Godefroy dit : momdula^
choue. — Esp, et Port. aîarido\ ne serait pas arabe» mais viendrait d' ulu-
lât us; M- C a oublié qu'arUe existe en ancien français comme cri de
guerre des Musulmans; P. Paris (voy. Diez) a déjà rapproché ce mot
d'àkridoy certainement avec raison (voy. encore Rom,^ XIII» 496), — Prov.
vegaire^ veiaire, Qpe veaire dans vtatrf m*es, veaire^ « apparition, vue, » al
meu vtiaire, a tneu veiaire, remonte à vîdeatur^ et que Ta. f. ço tn*est x^iain^
viaire^ « visage », gruér, vitro y « visage n» v. esp. refaire , port, veairo^ soient
empruntés au provençal, il n'est sans doute besoin que de le dire, il est inutile
de le prouver, » Ce ne sera pas Tavis de tout le monde; quelques scep-
tiques voudront savoir comment on a jamais pu construire une phrase telle
que mihi est videaiur ou une locution comme meum videatur, ou
demanderont des exemples d*une autre forme passive ou déponente qui ait
passé en latin vulgaire. C'est ce qui avait empêché des philologues à qui Fidée
de M. C, avait déjà passé par b léte de la communiquer au public, — 2. P» 521,
Ulrich^ adesso : pourrait être ad y(um) epsum, ipsc étant pour is*psc;
proposition qui a peu de chance d'être accueillie. — P, 521, Schuchardt,
archiater (alL Arit) : a dû exister en roman, à en juger par le basque
acyter^ « médecin, » qui paraît en venir. — Fr» orijlamnu = (l)abari
flamma; otu flambe dans Ro}. me paraît très suffisant. — Prov, ms
« gris * : pourrait être rapproché de sasia, « seigle », plutôt que de
caesium. — Fr, ribon-rtbaine^ vient du prov» nboun-rihaino (ou -nhUrç),
c.-à-d. arribeço que arriboQ), — ^ P. 523, G. Meyer, andar al Foiamô, « mou-
rir, » en vénitien ; n*a rien à faire avec le Styx, ni avec le petit iîeuve de
Corfou appelé Potamd-, c*est le grec mod. (a)j5oû«{Ao;» « mort, » — SiciL,
nsfaru, « cariharae, » =: ar. asfar, — Zanca : ce mot, répandu sous diverses
formes, avec le sens de « jambe » ou de « sorte de chaussure », dans pïu*
sieurs Ungues romanes (Kôrting, «0892 5), vient très probablement, comme
l'auteur, après P* de Lagarde, le montre avec un grand savoir, du mot
perse zanga, « jambe; » déjà dans une lettre de Tempcrcur Gallicn il
s^agît dciam^ partfncas, — P. 527^ Horning, fr, fyarruçotit esp, aniti^Io; dans
cet article, plein d'érudition et de sagacité, l'auteur montre, à vrai dire, plus
de difficultés qu'il n*en résout ; il serait trop long de le suivre dans toutes ses
explications, qui touchent des mots romans très nombreux; elles méritent
d'être lues; pour imimçon en particulier, je crois bien que le plus vrai-
Î2Ô PÉRtODlQUES
semblible est d'admettre comme base un dérivé amfi < ha m ici u m
(quant À afmt^ qu'on ne trouve que dans Amouî Greban, il pourrait bien
être le subst* verbal d'ameire) : cf. caveçon de fit. cavr^iofu^ ditu. de
•capîciura. — P. 5îo, fr* gaî*i, fera.; est rattaché avec vraisemblance à
gabai j, auquel rauicurcst tenté de ramener aussi fx/if, gifle (cf. ci-dessus),
— P. 5p, Baîst, csp. soy, L*esp. mod. soy ^rsum n'est pas l'anc. csp.
(très rare) soy et s*est sans doute formé sous rinfluence de soys ^zzsodis; Tanc.
esp. soy (qui a suscité atoy^ voy, doy) doit, comme le fr. sut, son y a Tîn-
fluence à'ay < habeo, qui a dû précéder en hispano-roman la forme
seule attestée {h)e.
Comités rendus, P. 533. Goudeau, Les prêcheurs burlesques en Espagne
au X^Ilh siède (Lidforss). — P, 558» Tiktiu* Grammatka romina (Jamik :
excellent livTc scobire). — P. 541, Weigand, IVlacho^Mtglen Q^xmk ; beau-
coup d*observations de détail sur ce travail utile et méritoire). — P. 547^
MéUfiges waîîùm (voy. Rmn.^ XXI, 534; Marchoi : critique acerbe et d'un
ton trop personnel» mais qui contient de bonnes remarques; M. Grôber y a
joint deux notes qui sont bien obscures. Ce que Tauteur dit de ue, ie^ qu'il
regarde avec M. Horning comme des diphtongues originairement descen-
dantes, est fort aventuré et même contradictoire)» — P, 554, Huberti, 5/i*-
dieu ^ur KechtsgcschkhU der Gottesjrieden uttd Latid/rieden, L Die friedensord-
nungm in Frankreich (Schwab : ce livre, d'après îc Recensent , est intéressant
aussi au point de vue de Thistoire des mots). — P. v^4, GhttmU Stùrkù
délia Ltiîeratura iîaîiam^ XVIII, 1-2 (Wendrincr)* *— P. J57, Arcbtnoglot'
tologko iiaîiatw, XII, 1-2 (Meyer-Lûbke). — P. >6i. Ronuinia, juillct-oct.
i'^9i, janvier 1892 (Meyer-Lijbke, Tobler. M* Grôber admet, non sans mau-
vaise humeur, Tétymologie couiiin <Ccoxinum et déclare par manière de
représailles que P. Meyer est seul aujourd'hui â croire que font, ont^ vont,
remontent à des formes « préromanes » faunt aunt vaunt; je croyais
que tout le monde était de cet avis), — P. 256-577. Tables. G. P.
II. — ROMAKISCHE FORSCHUNGEK, IV, 1888-189I ». — P. l, DcCUTtinS,
RâtoromanhcbeChrestonmthk, I. Batid^ i. Lkferuttg (la suite n*a pas encore paru).
— P. 219, Herlet, Stttdien ûber dk sog, \\opets (Lyoner Y^opet, y\opei l und
Yiopft If}, Travail soigneux et intéressant. Sur VY^opti de Lyon, M. H.
rend vraisemblable que Tauteur, tout en traduisant Tanonyme de Nevelet
(d*aprés le texte même qui est copié dans le ms* de Lyon), a connu le
recueil de Marie de France et lui a fait quelques emprunts. L' Y^ppet-Aviûfnt^iy
dans sa première partie, suit très fidèlement Tanonymc de Nevelet, et les
T» Nous sommes fort en retard avec les Romaniscbe Foncbung^n, mais noos tliruns
pour nous excuser que M. Vollmôllcf commence ptusicurs vobmc* en même temps cl
a*en termine souvent un qu'en plusieurs années, comme on le voit ici ; nous devons
donc attendre U dôture d'un volume pour en rendre compte. Nous donnerons dans
notre prochaine livraison b suite de ce compte rendu.
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quelques cas où l'on peut adraettre une inHuence de Marie sont plus douteux ,
la seconde partie (qui contient 18 fables d'Avîanus) est inséparable de la
première et du même auteur. A propos de l' Y^opci //, qui est une traduction
du Noims Esopus d'Alexandre Ncckam (peut-être avec quelques influences
étrangères), M, H. étudie surtout le Novtis Esopus en lui-même, et cherche
d établir quMl n'a pour base aucune des coûections connues, mais s*appuîe
probablement sur un recueil apparenté à la source de Marie de France. —
P, 5 10. Dannheisser, ZumSchlusskapiUîvon Ehert's «t Entwkkéhmgs^escljùhU dir
fran^ôsisàjett Tragédie a. — P. 317, Sarrazio, Zttr Get^rapbU und GesclncbU
^ Tristan-Sage. L*autcur cherche i démontrer, dans la première partie de
*^tte étude, que les poèmes français sur Tristan ont pour base une légende
armoricaine et non insulaire, et, dans la seconde, que cette légende eUe-
méme a une origine Scandinave. La première partie n'arrive à aucun résultat
probant, car il est bien certain qu'une partie des aventures de Tristan a pour
scène la Bretagne française, mais les plus importantes se passent dans la
Grande-Bretagne occidentale (ridentification de Tintajol à Tiniéniac est tout
â fait déraisonna ble)j d'autres en Irlande ; la légende en général a pris sa forme
dans un temps où le commerce par mer entre les deux Breiagnes et ITrlande
était perpétuel. Dans la seconde partie, Tauteur essaie de rattacher les noms
Tristan et Iseut à des noms Scandinaves, et II signale entre les aventures de
Tristan et celles de Thorstein Drômund, dans la Grdissaga, des ressemblances
(déjà relevées par M, Goltlier) qu'il est porté à expliquer en admettant,
comme source commune, un ancien poème Scandinave -, il y a là des questions
qui méritent d'être étudiées de près* — P, 333, VollmôUer, Jorge de Monte-
mayor^ Segutido Cancionero spiritual, — P. 341, Albrecht, Zu T. K Stro^a's
und B, Basini*s îateiniscf)en Lohgedkhten auf Vittorio Pisano. — P. 345, Baist,
£^ arabischtn Lautt im Spanischen, Nous n*avons malheureusement id que la
^mière partie de cette étude d'une haute importance ; et nous voudrions
d'autant plus en avoir la fin que Tautcur annonce qu'il ajoutera de nom-
breuses rectifications à son travail, qu'il publie, dit-îl, un peu prématuré-
t. — P, 433, Manitius, Zu latcinisclKn Gedichten des Mitttlaîters ; nom-
ises corrections À Tédition si défectueuse (par Merzdort") du Troiîus d'Albert
de Stade; quelques notes sur la ftcunda Ratis si excellemment pubhée par
M, Voigt, — P, 427, Oreans, Die o-Laute im Proi^nialisclmi ; travail qui ne
modifie pas les résultats du mémoire connu de P. Meyer sur le même sujet,
mais qui 3 l'avantage de donner un très grand nombre de rimes à l'appui
(un trop grand nombre même, car à quoi bon relever par centaines, par
exemple, des rimes de -osum avec lui-même?). Uauteurne s'occupe que de
1*0 tonique, et aurait dû k dire. — P, 483, Werner, Hytnnologisch Bâtràge ;
quelques hymnes tirées de mss, de Zurich. — P. 536, Fischer, Zum provtn-
laliscben Fierabras; quelques nouvelles corrections d'après une collation du
manuscrit (cf. Rom, Forsch,^ I, 117). — P. 539, Frànkel, Zu Rabelais Syntax,
— P, 549. Patjtig, Zu Guiraut de Cahrdra; propose de lire Del Nortnams
pour Del Fornuines^ sans aucune vraisemblance ; rapproche le Fripon qui suit
XXU 21
322 PèRlODiaUES
(Ni tTAntdme ni 4t Fri^) d*UQ très oirîeux poème des Cannitia Burana oft
des aventures, évidemment très romanesques, sont attributo A un Pbristm
d'ailleurs inconnu,
V, 1889-1890. Ce volume, dédié à Konrad Hofmann pour le 70* anni-
versaire de sa naissance (voy. Hofu.f XIX, 151), n*a été ache\'é qu*après
sa mort (Kw., XX, 178)*. — P. i, Heyse, An K. Hofmann (sonnet
mélangé de provençal et d'allemand), — P* 3, Lauchert» Zum Pbysiciqpts,
— P. ij, Hamrael, Der àthiopisctie Pljsioîogm. — P. 37, Dannheisscr, Zur
Cbronokgis âtr Drant/ti Maintes. — P. 65, Koeppel, Sludim ^r Gescbkhii .
dis ettgUscJifn Pttrarànsmus , — P. 98, Schnorr von Carolsfcld, Die IVortstelîmig ]
in dm Tlm-Sprachen. — P. loj, Golther, Lûbettgrin. Après quelques
femarques sur la base mythologique de la légende du OjaniUtr au cygne et
sur son rapport avec le conte des Enfants-cygms (voy. ce que j'ai dit de cette
partie, Rom.^ XIX, 323), M. G. étudie les %*ersions allemandes* Il montre
d'abord que le Scinvanritter de Conrad de Wurrbourg représente une version
française intermédiaire entre celle d'Hippeau et celle de Reiifenberg. Quant à
répisode de « Lohcrangrin » dans Par^it^aJ, M. G,, qui croit à Tcxistcnce dû
« Kyot >», pense que Wolfram a trouvé dans Kyot un court résumé du
ChevaHer au cygne conforme aux poèmes français, qu^il Ta en partie mal
compris et en partie développé i sa façon, en y introduisant le nom du
*t loherenc Garin » qui n'avait rien à faire avec cette histoire. Le Li^xttgrin
est iV son tour un développement des données de Wolfram, mais complétées
à l'aide des poèmes français. Je compte revenir sur toutes ces questions dans
une élude d*ensemble sur le Ommîiat au Cygm^ — P, 137, Aurachcr, Dtr
alîfranjpstsch Pstudoturpin der ArsniaVmfidsdirift B L F 283. Collation de ce
ms. avec le ms. de Munich» jadis imprimé par le même sa va m. — P, 172,
Bechstein» Zu licinricHs van Frtiherg ScljUMnk vom Scffrdteî und i^m fFoiser-
hdreri, — P. 183» Brermer, Ein KapiUl aus der Grammatik dtr deuiscbm
Urkuiiden* — P. 193» Sliefel, Di£ Nachahmung spanisàier Komôdim in England.
— P. 221, Bàchtold, Ueber die Atiwettdung der Bétrprohe in dtr Sclnuei^. —
P. 234, von Reînhordstôttner, Eirn dnn Leonardo Bruni lugejchriehene Sallus--
iàberstt\ung , — P. 241, von Antonicwicz, îkonograpinsches lu Cfjrestieu de
rroytf. Description, avec reproductions, d*un beau cofilrct d'ivoire représentam,
entre autres épisodes» Lancelot traversant le pont de l'épée (Clmreie) et
Gauvain sur le Ut périlleux {Perceval). M, d*A. accompagne ce mémoire
d'excellentes observations sur Fétu de de l'iconographie médiévale dans ses
rapports avec !a littérature, et présente plusieurs intéressantes remarques de
détail II dit avec raison qu'il y a sur ces questions trop négligées toute une
série d'études fructueuses à entreprendre. Son mémoire, qui mérite rattcn-
ï, A cause de sa dcstinatioa exceptionnelle, ce volume contient plusieurs articles qui
ne concernent nullemeot les études roniiineâ. Nous en donnons néanmoins les titres,
mais tes titret seula (comme nous fiions aussi pour les articles qui se mppottent à une
époque rdiitivcmeat moderne)*
PÉRIODiaUES 323
tion des archéologues et des philologues, a paru à part à la librairie Junge,
à Erlangen. — P. 269, Zïramermano, Zu Wolfram* s Par^vaL L'auteur
d^jcrit une tapisserie représentant des sciïncs du Par^val. — P. 280,
Muncker, Ltssitigisch Oihmtituiirfe. — P. 285, Elias, Briejujechse} ^'isc})ef$
Elisabeth Charlotte ttw OrUam u. Christ. îVernich* — P. 299, Hillebrandt,
Die Sonmverulfeste in AU-ïndien, Intéressants rapprochements avec des usages
i occidentaux. — P. 341, Vollmôllcr, Spanische Fundc; concernent la lirtéra-
Iture du xvi« siècle. — P. 392, Mayer, Dtr waltUnsiscîfe Physîoh^us. Publié
d'après le ms. unique de Dublin. L'idc-c que le laco mentionné dans le pro-
logue serait Jacques de Vitri paraît fort peu probable. — P. 41S, W. Meyer,
Pétri AlHtelûrdi Phnctus L IL IV. V, VL M. M,, qui a déjà publié à pan le
Planctus III, donne des cinq autres une édition bien meilleure que celle de
Grcilh reproduite par Cousin» et en étudie savamment la forme très recher-
chée. — P. 436. Baist, Dtr gcrichtUche ZiueikampJ nach seinem Urspnmg und
im RolamisHede. Après de fort intéressantes remarques et conjectures sur l'ori-
gine du combat judiciaire (rapproché des autres ordalies)^ M. B. montre
que le combat de Tierri et de Pinabel dans le Roland nous présente une forme
sensiblement plus archaïque que celle qu'on rencontre dans d autres chansons
Ldc geste, et cherche â établir qu'elle se rattache intimement au droit bour-
fguignon tel que le statue la loi Gambette ; il n*en conclut pas d'ailleurs que
le poème ait, dans cette partie, une origine bourguignonne, car les disposi-
tions en question ont fort bien pu passer de la Bourgogne dans d'autres
parties de la Gaule. — P. 449, Hartmann, Hans Hesdhhers Litder, —
P. 519, Schmitty Zitr Veherliefening der Cl^ronih von Morea, M, Schm. relève
les leçons du ms. de Copenhague qui diffèrent de celles de rédition, et rend
toute justice â N» Landois, dont le travail sur les mss. de la Chronùjm de
Morée, resté inédit par suite de circonstances qui ne font pas honneur à
BuchoD, est conservé à la Bibliothèque nationale. Landois était arrivé, sur
les rappons des deux mss. du poème grec, aux résultats que M. Schra. devait
atteindre plus tard par un travail personnel (voy. Rom.^ XVIII, 352). ^-
P. 539, Schemian , Eine Art visiomurr HôUmschfîderung aus dem ituHscheu
Miitdaltfr. — P. 583, Otto, Altlothringische geistlicJx Lieâer; jolies pièces,
toutes semblables à ceUcs que P. Mcyer a publiées dans le Buiktitt de la
Société des anciens textes (i886, p» 41-76), tirées d'un ms. de Munich provc»
venant de Metz. G. P.
m — Rbvue de philologie française et provençale (ancienne Re\tje
DES PATOIS), p. p. L. Clédat. —T. VI, n<» i (1892, i^^ trimestre). — P. 1.
P. Passy, Notes sur quelques patois vosgiens. Suite; glossaire. — P. 17. Clédat,
Fragment d*Aimeri de Narbonne^ traduction arclmujtte et rythmée. C'est le morceau
que V. Hugo a imité dans Aymerilloty d'après la mauvaise traduction publiée
par Jubinil, ce que M, Demaison a le premier signalé dans son édition
é^ApTteri de Narbonm. — P. 33. Clfansons satiriques en patois h>onnaiSf p. p.
Philipon, Chanson des taffetaticrs , du commencement du xvnt* siècle. Com-
|24 vhttoaosns
Uétnamà. Vttwm p^Mentit^ p. p. M. Doodens. Le «aor es «b aa^
c^ftffmt^j. Mjùi fih yak qu'on poMde on gnad iiunitjiir Je aBfccfiM»*fefc
ctMfiï^/n de y««(fy Htmatêd^ uAr/n le titre le pto gfnrnWrnfTB afcgafc. — K-â^^
/^x/ftfj/ </ii f;hAte4U de Dannenurie, nomklk ^A. Jtàmd, Tné Ai Jfnr Ab
JamUletf t. X. Cc%t la Krtirce, signalée par M« Demaisoa, ^ rjhMvâBtf «fe
V, MuK'/. — P, 70. Chronique. Livre» et anklei wgnalH, A fH^as «iBuK
cmimunicalion (p. 70) de M, VtUepdet rdativemeot aa bs. 4e flUfaoK
du !> C#aly« rappclon» que ce m», fait maintenant partie da UmsètCamBis^A
Clianlilly; voir Homania, XXI, 461. ^ P. 73. BoUetin de b SaôU ife
réforme orthfif^raphiquc.
N" a (1892, a« trimcitrc;. P. Hi. Clédat, Les tnmhaioÊtn a Tm
en irancf aux Xi h ft XI! h sMfs. Bxposé général, sans appareil 1
ni rechercher nouvcllct, contenant la traduction de plusieurs vies de 1
doum. - - P. 129. P. PaMy, Notes sur quelques patois vosgwu. Fin do j
et obitcrvaticm^ grammaticales. — P. 151. Qédat, FaM^ dm inmtada
(^rdituil, trmtuitum archaïque et rythmée, — P. 155. Irt^n» et arUdes j
— P. I )7. Bulletin de la S(Ki<ii(^ de réforme orthographiqne.
N«) ) (tH92» )« trimcMrc). — P. 171. Clédat, Iji versifiaitkm Jrmmçmm H
particulihemoît la imiJicatUm lyrique au fuûyen 4^. Généralités sur Tangat
du vcr« franvaiit, itur TrisMinancc, »ur la rime, sur le groupement des veis cd
couplets. — P. iH). (*l)iWsiWs satiriques en patois lyonnais p. p. PhiUpoii.
Piéccn de la (in du xviii* siMc et du commencement du xix«. — P. 204.
Macé, Mots Kmfxuif*m^s. — P. ^)7. Marchot, Autres textes wdkms, Cooils
r^\\% écrite phonétiquement. -^ P. a 18. lUstin, Lr passé antérieur en fhmfais.
(1KM.H, Chifiuyfis *if «r.vwï'/i* cl pii\touuH'\^ trathtction archaïque et rythmée,
~ V. J^N. l.iviTN cl ;uii*.U'N Mj^iuK^. V. 2\.\, CÀ)mptc rendu de Monseur,
h- /v/<7i»>r ^iw/Zo»/ 1\ J?7. UulKiin *io l,i ScKiété de réforme orthogxa-
phiqu*\
N'" i (iSx>?. .\* tnnuAtiv^ P. )^\. C.WUx, Ph^*h'titjur raisonnèf du français
nii^U'r*h. Si' i;\ti.ulu' .> \.\ iVIoniîo onlu\i;r.iphiquc proposcc par Tauteur. —
r. î05 \ ini^tiiiiin. ('•/ hauU J, n w.Mr/.^-r;, , ,iu Lw-^mais, rcimprimé d'après
uiK i\Vcmo puMK-,uu">n *!c M. VinKinnu-t -1''. v'^v l^i<Uyns en patois de
<»>f>h»//A (SihW-tUi *'*!*■ A rc\»irilliv pji l'omhici. P. ^o>. livres et articles
5ignal<*s. - r. ^x"i. Uullcîjn Ac U S.\u^u' *io n'-tormc orthographique.
IV. Bn 1 rn\ ni \ \ S.\ ii'ri* ni.>^ \\\.ii.\v nAns tkançais, 1892, n© 2.
- r. 6S. P. Movvi, .V>;»,. <h i, fti. y ,i, L nihî,o!h\uv ,rAJrfi^ofi {Somme Je
f?iV,î'»V' ih- <»ji*ih i*t; fi*'o<A. Mv Ju »',Mnniojv*Mivn; Jr. \:\** siècle provenant de
TaMvnv »io S;ïinî rvroul», o»*: il jvu.jî; .''tr» otiî!-, *•;■, . - ; ; ot avant appartenu
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j^iVMiionrN i »*v xu'v ^U vnn;v *'«; n.o*. . .,». noiiiî^ * «<* : : . xi roncontrent toutes
vr. ,i''uî'v^ mvN Jon; pîi-.su'ni-v «m; *■!. *^\.i:v v>i. ,Uiîv U morne Bulletin
^;SSn. ;^s^^. Noi: *l.u*.- !.. K.^fu.ju.. ^\\.\. , \^ W .i. îN \. Lc tcxie de b
PÈRIODiaUES 325
Somme le Roi ne se recommande par aucun mérite particulier, mais il a fourni
l'occasion de quelques recherches sur cet ouvrage bien connu, mais dont
la composition n'avait pas encore été étudiée. M. P. Meyer montre : 1° que
pour une partie, la Somme est la reproduction souvent textuelle d'un ouvrage
antérieur intitulé le Miroir du monde\ 2° que ce Miroir du vwtuîe a été
développé vers le temps de Qiarles V et augmenté de parties empruntées
à la Somme le Roi. On a de ce second Miroir plusieurs mss., dont le plus ancien
est daté de 1373, et une édition incomplète publiée en 184$ par F. Chavannes,
pour la Société d'histoire de la Suisse romande. — P. 94-5. P. Meyer, Notiu
sur le ms. du Musée britannique Add. loô^j. Cette description a été publiée en
appendice à celle du ms. d'Alençon parce que, comme ce dernier, le ms. Add.
20697 a appartenu successsivement à la Bihliotheca Castdlatui et à l'abbaye
de Saint-Evroult. Il avait du reste été décrit d'une façon très incomplète, et
souvent erronée, dans le Catalogue imprimé du Musée britannique. Une
note finale indique qu'il a été fait pour Pierre Basin, confesseur de la reine
Blanche de Navarre, veuve de Philippe de Valois, qui mourut en 1398 et
dont le testament a été publié par M. Dclisle dans le t. YAlàts Mémoires de la
Société de Thistoire de Paris. Ce ms., vers le milieu duquel il y a une lacune
de près de 1 50 feuillets, contient, entre autres ouvrages de littérature reli-
gieuse, une traduction en vers du Lignum vita de saint Bonaventure.
V.— Il Propugnatore (nuova série).— T. IV, impartie, janvier-avril 1891
nos 19-20). — P. $, G. Bruschi, Ser Piero Bonaccorsi e il suo « Cammino di
Dante » (premier article). Recherches approfondies sur la famille et sur la per-
sonne de Piero Bonaccorsi, notaire florentin du xv* siècle. M. B. a reconnu
deux mss. de la Divine Comédie écrits de sa main (l'un à la Riccardienne, l'autre
à la Laurenticnne) ; mais il s'applique surtout à faire connaître et à apprécier
ses deux lettres, en italien, à fra Romolo, l'une sur la topographie, l'autre sur
la chronologie du poème de Dante. Ces deux lettres sont intéressantes pour
l'histoire des études dantesques, mais elles jettent peu de jour sur des ques-
tions qui paraissent devoir être éternellement débattues. — P. 40. M. Pelaez,
La Vita e le Opère di Giovanni Andréa delP Afiguilloraf avec un appendice de
documents inédits. — P. 125. A. Belloni, Cur^io Gon^aga^ rimatore del secolo
XVI. Cenni sulla sua vita e sulle sue opère. — P. 163. C. e L. Frati, Indiu délie
carte diPietro Bilancioni. Suite, lettre F. — P. 232. Miscellanea. V. Lazzarini,
La seconda ambasceria di Fr. Petrarca in Vette^ia. — P. 242. I. Sanesi, Lanno
délia nascita di Léon Battis ta Alberti.
Mai-juin (no 21). — P. 261. C. Mazzi, Leone Allacci e la Palatina di Heidel-
berg (premier art.). — P. 308. G. Bruschi, Ser Piero Bonaccorsi e il suo
« Cammino di Dante ». (Fin) ; texte de la lettre de Frà Romolo. — P. 349.
A. Belloni, Cur^io Gon:;aga^ rimatore del secolo XVI (fin). — P. 387.
O. Zenatti, Nuove rime d'alchimisti. Poésies du xv« siècle, composées dans la
Vénétie. — P. 415. A. Zenatti, // bisnonno del Petrarca. Ce bisaïeul de
Pétrarque est le notaire Gar^o de qui le Propugnatore a récemment publié des
326 PÈRTODîaUES
poésies. Cette hypothèse, déjà émise par M, Mazzoni, trouve ici sa conHnnâ-
tîon.
Juillet-octobre (n«» 22-23). ^ P* 5- ^- ^- Bresdanî, Intorm a tma mn^mm
difra Guiîtom (TÀrt^io aï conk JJgoUno dei Gherardtschi, Cest Ij pièce Mt^
haroni certo t rcgi quan^ que Tauteur de cette dissertation attribue à la 6n de
Tannée 1284. — P. 25. C. e L* Frati, htdice delk carte di Fktro Bikttcùmi,
suite^ lettre G. — P. 65. G. Vanzolinî, « La DragJm dt OrlanJo », di Fran-
cesco Troniha, — P. lOj. A. Belloni, Di unapoesia anonima dtl sec* XVII. —
P. 134. A. Gtovanelli, LtîUra al prof . D. Mantcmni suî diidegno di Guîdo
Cavakmli. Il s*agit toujours de savoir pour qui Cavalcanti avait du mépris
dans les vers que les commentateurs ont torturés de tant de façons : Colui chi
atimde la per qui mi tfieita, Forse cui Guido vostro ibbe a diidegno. On admet
généraîement que ctd se réfère à cdui^ c'est-à-dire â Virgile, et c'est Topinion
La plus probable» bien qu'on ne voie pas clairement la cause de ce disdegno
de Cavalcanti pour le poète latin ; d*autres ont voulu rapporter cui à Tcnfer,
à Dieu même. L'interprétation ici proposée consiste i traduire w me conduit
« pcut-ûire à la connaissance du bien que Cavalcanti , en raison de ses idées
« philosophiques, a méprisé ». Telle est la dièse, à tous égards inadmissible,
que l'auteur soutient en vingt-cinq pages. — P. 1J9. A. Tambellini, Il
codiu dantcsto Gradenighiano. Nouvelle étude de ce ms, bien connu de la />. C.
et du commentaire qui Taccompagnc — P. 199. A. Soîerti, La Gàlaiea di
Albfrtû Loîlh, — P. 215. A. Medin, îdistki suUa natiira ddk fruiia. Nouvelle
rédaction d'un opuscule déjà publié dans le Giarnali storicù, (Voir Moniania^
XXJ. îis.)
Novembre-décembre (no 24)* — P. 221, Ct-A. Zacchetti, L'imita^iom
cîoiSîca ndV Orlando furioso. — P. 276. A. Miok, Lu scrtHure in vdgare
dei primi tre secoU ddla liugua ricercaU mi codki ddla BihlioUca fiajiônak di
Napali, Suite; mss. dantesques. — P. 507, S. Morpurgo, SupplttUi-nto alk
a Opère volgari a stampa dei sec. XI U c XI F » imUcate e descritU da Fr. Zam-
hrini, Publications de 1889 et de 1890.
1892, Janvier-avril (n^» 25-6). — P. 5. A. Lubin, U cerclm che^ seconde
Dante j fa parère venere scrotina ù ttiattutina secundo i diversi tempt, t dedu^ioni
che se ne traggono. Savant mémoire d*un vétéran des études dantesques,
accompagné de démonstrations mathématiques, — P. 87. GurooNis Fabe
Dictamina rhetorica, p. p, A. Gaudenzi. Suite de cette édition, qui est ici peu i
sa place, et qui offre un teîtte souvent peu correct. — P. 13 1. C, Mazzi, Leom
ÂUac^i e la Palatina di Heidelbcrg. Suite. — P. 207. (C. e L. Frati, Ittâice ddU
carie di Pietro Bilancioni. Suite; lettres /. à iV. — P. 279, F. Flamini, Un
codii'c dei CoUegio di S. Carlo e le raccoîte apenna di ritru adcspote.
Mai-juin (n» 27). — P, 315. C. Mazzi, L. Allacci e la Palatim di Heidd-
berg^ suite, — P. 389. F. Gabotto, Vn pcela pietnontese de! sec. XVL Un cer-
tain UaffacUo Toscano» tié à Mondovi vers le milieu du xvt« siècle et mort
après 160 1 . — P. 44^- G. Cogo, Fram^co Bu^acarini, poeia laîino dd sec, XV,
Poète padouan, mort vers i joo, cl de valeur médiocre.
PÈRIODiaUES 327
Juillet-octobre (n©» 28-29). — P» 5» E. Cais de Pierlas, Giacobina di Venti-
miglia eU sue attinetiie famïliari in un nuovo frammmto di can:(one di Rambaldo
di Faqueiras. Le fragment de Rambaut de Vaqueiras qui sert de base aux
recherches de M. de Pierlas appartient non pas à une chanson, mais à une
des épîtres en vers monorimes de ce troubadour. Cette épître nous a été
conservée par le chansonnier La Vallière (B. N. fr. 2543), mais l'écriture
étant par places très usée, la lecture en est devenue difficile. M. de P. lit le
premier des vers qu'il cite : El ser [venguymab Veys[sial] Pueg cJar, Les lettres
entre crochets sont 'celles qui lui ont paru (à lui ou au copiste qu'il a employé)
d'une lecture incertaine. Feyssi est pour lui Vezzi, village situé dans le Sud du
Piémont, entre Albcnga et Finale; et interprétant bien à tort ab au sens du
latin abf ou de l'italien da, il comprend : « nous vînmes le soir de Vezzi a
Montechiaro ». Toutes ses recherches historiques sur la pièce en question
dépendent de cette interprétation, qui est doublement inadmissible, car, d'une
part, flZ> signifie « avec », ce qui suppose que le nom lu Veyssi doit être un
nom de personne plutôt qu'un nom de lieu, et d'autre part, le ms., que j'ai
examiné avec soin, porte réellement El ser estem (et non venguem) ab Nai^i a
Ptug clar. Il s'agit donc d'un individu appeié En Ai^i. Cette pièce, d'ailleurs,
ne se trouve pas que dans le ms. La Vallière. On peut la lire plus facilement
dans le ms. B. N. 856, fol. 131 ; elle est indiquée dans le t. I, p. 133, du
Catalogue des mss. français. Là on lit àb Neyssi, Les recherches historiques de
M. de P. conservent leur valeur, mais elles ne s'appliquent pas à la pièce de
Rambaut. — P. 58, Guidonis Fabe Dictamina rhetorica, suite. — P. iio,
A. Brognoligo, Luigi da Porto uorno d'arme e di îettere delsec, XVI (1486-1529).
— P. i$8, F. Foffano, Un letterato italiano del sec. XVI (Rinaîdo Corso). —
P. 196. S. Morpurgo, Suppîemento aile « Opère volgari a stampa » di Fr. Zam-
hriniy année 1189. — P. 234. Indice délie carte di P. Bilancioni. Suite ; lettres
OetP.
Novembre-décembre (no 30). — P. 303. A. Savîotti, Rime inédite del sec
XV (dalCodice Oliver iano j 4). Table du ms. avec références bibliographiques
et extraits. — P. 346, B. Feliciangeli, Alcune Iettere inédite di B. Castiglione.
— P. 370, C. Mazzi, L. Allacci e la palatina di Heidelbcrg. Fin. — P. 401,
G. Brognoligo, Luigi da Porto^ uorno d'arme e di Iettere del sec. XVI. Fin. —
P. 458, V. Crescini, A proposito delY articolo del sig. Cais de Pierlas sopra
Giacobina di Ventimiglia. M. Crescini, dont les travaux sur R. de Vaqueiras
ont été signalés dans la l{omania en leur temps, rectifie en partie les lectures
et les interprétations de l'article ci-dessus mentionné , en faisant usage de la
leçon du ms. fr. 856.
P. M.
CHRONIQUE
M, Louis Gauchai s*esi « habilité » comme Privat'Docmt pour k philo-
logie roiii^iae à T université de Berne.
— M. Henry A. Todd a été nommé proffâseur de philologie romane à
Columbia Collège^ New- York,
— M. John E. Matzke a été nommé professeur de philologie romane à
runiversité « Lebnd Stanford Jr. a, Palo Alto, Californie.
— L*Institui de France a décerné le prix Volney à M. Tabbé Rousselot
pour son livre : Les modificatiom pljonétiquei du langage Hudiées dans k patois
d'une famille de Cdkfrouin.
— L'Académie des Inscriptions a accordé la seconde médaille du concours
des Antiquités de la France à M, J. Loth pour son li\Te sur les Mots ïatins
dam Us langues hriUoniqws ^ et k première mention honorable à M, l'abbé
Devaux pour son livre sur le DiakcU du Haut-Dauphitié au moym dge,
— La SocW des parkrs de France ^ qui n'avait eu, en 1889, qu*un commen-
cement d'existence, essaie en ce moment de se reconstituer. Nous tiendrons
nos lecteurs au courant de ses progr^.
— M. Alessandro d'Ancona ayant, le 21 janvier de cette année, marié sa
Elle Mathilde , une véritable bibliothèque de per nû^^e est venue témoigner
de U reconnaissance, du respect et de raffcction qu'inspire à tous ceux
qui Font approché et surtout qui ont joui de ses leçons fémincnt professeur
de Pise, Il ne nous a pas encore été possible de prendre connaissance de
toutes ces plaquettes, dont son amitié a bien voulu nous faire part ; nous
signalerons dans notre prochain numéro celles qui touchent les études
romanes et dont plusieurs sont fort intéressantes,
— Dans un grand ouvrage intitulé DU dcuîscfjen Universitàtm (Berlin,
Ashé, in-40)^ M. Tobler a inséré (p. 496-506) un tableau de Tétude de la
philologie ronune dans les universités allemandes. Il ne l'a représenté que
dans des traits généraux et impersonnck, et on ne peut pas l'accuser de
ravoir tracé avec trop d'optimisme : tout en reconnaissant ïes grands progrès
qui ont été réalisés, il signale très nettement ceux qui restent à faire, et
marque avec beaucoup de fermeté les périls qui menacent, suivant lui, le
développement vraiment scientifique de renseignement de U philologie
romane en Allemagne*
— Dans les comptes rendus des séances de TAcadémie royale de Bavière,
^
^
CHRONiaUE 329
classe d*hîstoire et àt philologie (séance du ^ décembre 1892), t. IV, pp. jiy
788, se lit un mémoire de M. Rider sur « Naime de Bavière et Oger le
Danois »* Dans la première partie, Tauteur essaye d*ideniifier Naime avec
Grifon, fils de Charles Martel et de la princesse bavaroise Svanahild ou
Sonîchild ; mais ce rapprochement ne repose que sur le renseignement, donné
par Girard d'Amiens, d'après lequel Naime était fils de Scneheut, reine de
Bavière; or ce renseignement n*a aucune valeur, étant dû à la manie cj-clique ;
on trouvait d*une pan (dans Auheri le Bourguignon^ une Seneheut de
Bavière (mariée à Gacelin), d'autre pan le célèbre duc Naime de Bavière^
dont aucune tradition ne relatait Torigine : on fît de l*un le fils de Tautre,
Tout ce qui résulte du rapprochement fait par M* R., c'est peut-être que le
nom de k Bavaroise Seneheut dans Auheri provient indirectement du nom
de la Bavaroise Svanahild, Au reste, l'histoire de Grifon, toujours rebelle et
violent, tué dans un combat i Tâge de 27 ^ns^ n'a aucun rapport avec celle
du sage et Mk\c Naime, dont la vieillesse est le trait le plus ordinairement
caractéristique. — Dans la seconde partie de son mémoire , M. R. cherche i
prouver que ridentification établie par Metellus de Tegernsee (vers 1130)
entre POtger fondateur de Tegernsee et FOger des chansons de geste fran-
çiises n*e5t pas dû à une pure fantaisie, et que les deux personnages pour-
raient fort bien n'en faire qu'un. Après les belles recherches de M* Voretzscli
sur la légende d'Oger (qu'il n'a connues qu'après la rédaction de son travail),
celles de M. R* n'ajoutent rien d'essentiel d notre connaissance du sujet traité
par les deux critiques; la thèse spéciale de Tauteur est très loin d'être prou-
vés par lui (l'historicité des exploits accomplis devant Rome contre les Sar-
rasins par rOtger bavarois est notamment bien douteuse) ; mais on remarque
dans ce mémoire plusieurs rapprochements assez intéressants , par exemple
Tobscrvation, curieuse en effet, que dans la CJmnson de Rolatid^ tandis que
Naime n'est appelé que duc^ sans désignation spéciale, c'est Oger de Dane-
marche qui est chargé de conduire les Bavarois au combat (épisode de
Balîgant).
— Au 42* congrès des philologues et pédagogues allemands, qui vient de se
tenir à Vienne (mai 1893)» la « section romane » a entendu les conmiunica-
tions suivantes : A. Tobler^ « L'adjectif employé substantivement, surtout
dans les langues romanes ; » — R. Zenker, « Les éléments historiques et le
développement de la légende de Gormond et Isembart; » — J. Hucmer»
« La collection des formes des mots du latin vulgaire ; » — M. Friedwagner,
9 Sur dit% cas difficiles dans la restitution de la forme originale des anciens
poèmes français. » Ces mémoires paraîtront dans le volume qui sera publié
Tannée prochaine en souvenir du Congrès. Ils ont tous été accueiUis avec
faveur par la section , qui comptait une trentaine de membres et que prési-
dait M. Ad. Mussafia. A la suite de la lecture de M. Hucmer, on a nommé
un comité (MM. Mussafia, Meyer-Liibket Hucmer) charge d'appeler l'atten-
tion de TAcadémie des Sciences de Vienne sur l'utilité qu'il y aurait à jeter
au moins les bases d'un grand recueil des formes vulgaires du btin. Cette
330
CHRONiaUH
Utilité n*est pas contestable, tnaîs les principes qui présideraient à la rédaction
d'un tel recueil seraient, croyons-nous, plus difficiles A établir qu'on ne
l'imagine. Dans le court résumé de la lecture de M. Huemer que nous avons
sous les yeux, nous trouvons déjà citées des formes dont la « vulgarité »
paraît douteuse. Le mieux serait de tout recueillir sans se prononcer sur le
caractère des faits relevés. — En se séparant, la section a exprimé le vœu
que le centième anniversaire de la naissance de Fr. Diez — lo mars 1S94
— soit Tobjet d'une fête dans toutes les universités allemandes. Nous
croyons savoir qu'il s'agit de le célébrer aussi par un congrès international
de romanistes qui se tiendrait en Italie. Nous ne saurions qu'applaudir à
cette idée, qui aurait profondément touché le \deux maître.
— La librairie Colin a accepté la proposition qui lui a été £aitc de publier,
sous la direction de M. Petit de JuUeville, une grande Histoire âe la langue d
de la Utthaiure fratiçaiïû depuis les origines jusqu'à nos jours. L'ouvrage doit
comprendre six volumes in-S'', de 800 pages environ chacun. Les différents
chapitres de l'ouvTage seront confiés à des collaborateurs différents ; l'ouvrage
sera illustré, mais seulement par des reproductions de manuscrits, de
lettres autographes, de miniatures, de frontispices tirés d'éditions originales,
de portraits authentiques, etc. Le tome I sera consacré au moyen igç, k
second à la Renaissance (jusqu'à la fondation de l'Académie française), le
troisième au xvri* siècle (1655-1700), le quatrième au xvni«^ siècle; le
xrx« siècle remplira les deux derniers volumes. — Le tome I est d'ores et
déjà confié à MM. Léon Gautier (matière de Fnince), G>nstajis (cycle
iintique), Clédat (romans bretons et romans d^aventure)» Jeanroy (chanson-
nicrs)» Sudre (Retard et fables), Bédîer (contes), E. Langlois (roman de la
Rose), Piagct (poésie didactique, sermonnaires, traducteurs), Brunot (histoire
de la langue) j M. Petit de Julleville se réserve le théâtre, et peut-ctie les
poètes des xrv« et xv* siècles ; on a demandé A M. Qî.-V. Langlois de se
charger de Thistoire (en prose et en vers). On voit que tous les collabora-
teurs sont désignés par une compétence particulière. Nous n'avons pas besoin
de dire que toute notre sympathie est acquise â une entreprise aussi vérita-
blement nationale et dont on peut vraiment dire qu^clle comblera dans notre
litténture une lacune qui ne nous faisait pas honneur.
— Disons en même temps que MM. Suchier et Morf publieront procfaai*
nement en allemand une l^stoire , également illustrée, de la littérature fran-
çaise, mais die ne formera qu'un volume de grand format. Le sujet est ici
divisé en deux panies égales. Tune pour le moyen igç, l'autre pour les temps
modernes; M. Sudiier tndtera la première, M. Morf la seconde.
— En tète de VÀmmûrt pour 1895 (première année) de YÊcok prûiiqm
des HàuUi Éimdes figure (p. 7*^7) tme dîssertatiûo intitulée : V^iératim ^
raummdu c kiim^ ptr G. Paris.
— Une nouveOe édition, revue et corrigée, des Bsirmts dâ la chtmmm M
Bûkmd^ ÏMir G. Paris, vient de paratue à h librairie Hachette. Une nonirelk
CHRONiaUE 331
édition des Extraits des Cyoniqiieun jrançais au moytn âge, par G. Paris cl
A. Jeaûroy, paraîtra incessamment à la m^rae librairie.
— L'impression du t. II de la Grammntik ihr romatmchiti Sprachn de
M. Meyer-Lûbke est très avancée,
— Dans la séance du 17 mars 1893 de l*Acjdémie des Inscriptions, M. G.
Paris a lu une note sur îts faits ^pi^raphtqttes ou paîéog^raphiqfi^s aWgués en
preuve d'une aUiratiofi atukmu du c îatm, qui vient de paraître dans les
Comptes rendus des séances de l'Académie.
— M» Éd. Schwan publiera dans le courant de cette année une édition
critique des oeuvres de Hugues de Berzé (les chansons et ïa Bihk)»
— U. F. W. Bourdiîlonj connu par sa jolie traduaion anglaise à\4ucasm
ei Nicokte, nous adresse la note suivante que nous insérons bien volontiers :
« At a sale ol books and mss. at Messrs. Sotheby's in nov. x888, 1 bought
a small M. S, on vellum of the xiir^ century which proved to be in fact a
second copy of the volume in the Bibliothèque nationale, Fonds Franc. 5714.
It is rather smalîer informât, and probably somewhat later in date. ît is also
unfortunately împcrfcct , a whole « gathering » of 8 leaves being lost at
the beginning, and one leaf at the end* Like the M. S, 5714 ît contains
VKo separate works, the History of France and the Choniqm de Turpin, in the
Saîntongese dialect. The later has becn printed by Herr Auracher; but the
former is hitherto unedited, and I hope to publish it in the course of this
ycarthrough the meansof Mr David Nutt, London. The body of the text will
bc that of my own M, S,, which has of course been ilie readiest for me
to transcribc. But the missing part I hâve transcribed from the Paris M.S.»
and bave also noted the chief variants. The new M. S, stands to the old
ver\* much as the Turpin ms. 124 stands to the Turpin ms. 5714. ïhat
15 to say the dialectic peculiarîties are somewhat reduced» and the phrases
throughout amplilied, The very peculiar form mosl = moU or moutt, which
Herr Aur.icher could not bring himself to believe in, is habituai in this M, S*,
and I hope in a short note to prove that it is indisputably tmst , and not a
peculiar writingof wo//. »
— M. E. Gorra, dont nous signalons plus loin les Stiidi di critica UUeraria,
annonce la prochaine publication de plusieurs ouvrages ou éditions qui ne
pourront manquer d'avoir de l'intérût : Studi gbttoh^ici : DdT tpcnten di jah
Hdk lingue ronmnie; Il diaktto di Panua; U ditûetto di Fer r ara; Le Court
d'Amours di Mahius te Portiers ^ cm intrûdui^ionc ed illustra^ioni.
— Livres annoncés sommairement :
Vnsert bàfisdh-n Epen uttd ihrf QueJkn. Von Dr Placid Genelin. Innspruck,
Schwîck, 189Î, în-8*>, 115 p. — Travail de seconde main, et dont Tauteur
n*a même pas toujours su puiser aux meilleures sources. Il peut être assci
commode pour les lecteurs allemands comme orientation générale, mais il
les égarera plus d*une fois, surtout en ce qui touche les parties françaises du
sujet» et il n'apprendra rien aux émdiis,
332 CHRONIU.UE
Olonurts grammaticales^ par J. Bastïn. Namar, 1891, in- 18, 88 p. — Ces
observations sur des difllcultés et parfois des subtilités de notre syntaxe et
de notre orthographe se recommandent par Tcsprit judicieux qui les a
inspirées et par rexcellentc méthode qui consiste k s*appuyer sur des
exemples et non sur des règles purement théoriques et souvent arbitraires.
On peut ne pas être toujours de Ta vis de Tauteur sur ce qui serait le meil-
leur usage, mais il renseigne fort bien sur ce qui est l'usage réeL Nous ne
pouvons que recommander son petit livre à ceux qui s^occupent de la
grammaire moderne du français.
DU aîîegoriiche Can^mit dâs Guiraui de Caîanso : A leis cui am de cor e de
saber, und ihre Deutung, von Otto Dammakn. Breslau, 1891. In-So»
87 pages. — Cette dissertation contient le texte critique d après les
manuscrits de la chanson de Guiraut de Calanso, des recherches sur les
représentations allégoriques de Tamour, et une critique minutieuse de
Texposition de cette pièce par Guiraut Riquier, Ce travail est fait avec soin
et dénote une connaissance suffisante de b matière, mais il est bien long
eu égard à ce qu*il contient de nouveau,
Ânt})oÎ0gie populaire de VAlhrtt^ par l'abbé Léopold DAJiDy. Agen, Michel et
Médan, 1891, 2 vol., in-12, xxx-366 et 424 p. — Recueil de chansons,
proverbes j devinettes, contes, etc., qui présente un réel intérêt et paraît
formé très sincèrement. L'auteur annonce un lexique du parler de TAlbrei
pour compléter son œuvre; il fera sagement de s*abstenir d'étyraologies;
les quelques pages grammaticales de son introduction prouvent assez qu'il
a raison de reconnaître qu'il n*est pas philologue.
Ln Épopées françaises. Études sur les origines et Thistoire de la Httératurc
nationale, par Léon Gautier, IL Seconde édition entièrement refondue,
Paris, Weltcr, 1892, 8^, vm-416 p, — Ou sait que M. Gautier a séparé
en deux le premier volume de son grand ouvrage; le premier des nouveaux
volumes a paru en 1878; nous n'avons encore id que la première partie
du second, mais nous avons lieu d'espérer que la seconde ne se fera pas
attendre. Nous reparlerons de ce volume quand i! sera complet. Bornons-
nous ici à dire que le titre d' w édition entièrement refondue » est A peine
suffisant pour marquer h différence entre la première et la seconde forme de
l'ouvrage : c'est un nouveau livre, où fauteur a fait entrer tout le fruit des
études des autres et des siennes propres depuis vingt-huit ans* Espérons
qu'une fois le tome II de la nouvelle édition terminé, l'auteur des Épopée
françaises se mettra vaillamment au tome V, qui doit nous donner la fin de
la (r Geste de Guillaume j^^et que nous attendons depuis dix ans.
Ânsds von Karthago^ herausgegeben von Johann Alton. Tûbingen, 1892,
8°, 606 p. — Malgré les critiques qu'on peut adresser à cette édition, ci
dont la plus grave est la non utilisation du ms. de Durham, elle rend ser-
vice 1 la science et mérite la reconnaissance, car ce n*ctait pas une besogne
attrayante que de publier d'après cinq manuscrits les 11600 vers d*Anseis,
Cette clianson, qui dans sa majeure partie est banale et de peu de valeur,
CHRONiauE 353
offire de l'intérêt par son début et par son thème général, emprunté,
comme on Va reconnu il y a longtemps, k h légende espagnole de
Rodrigue et de la Cava. Sur le rapport du poème français avec la Seconda
S/k^a, M. Alton émet une opinion qui ne me semble pas absolument
juste; j'ai examiné cette question dans un article qui a paru dans la
Rasîfgna blhliografica italiana dirigée par M, d*Ancona. — G, P*
Spanim und die spaniscfte Litteratur im Lichu dcr deutscfjen Kritik und PoesU, Von
Df Artur Farinelli. Berlin, Haack, 1892, in-80, p* 73-128. — Nous avons
ici la seconde partie de Touvrage dont la première partie, publiée comme
thèse, a été annoncée ci-dessus (p. 174). Elle concerne le xviif siècle et
s'arrête à Herder, On y trouve, comme dans la première, beaucoup d'éru-
dition et un grand nombre de faits intéressants très bien appréciés*
La fofwtica, por Rodolfo Lenz, profesor de lenguas modernas en el Instituto
Pedagojico deChile. Santiago de Chile, 1892, in-8*>, 27 p. — Ces quelques
pages (extraites des v^mi/i*^ de la universiJad de Chiie^ t. LXXXl) contiennent,
après un court aperçu de Tliistoire de la phonétique comme science, un
tableau très clair et très pratique des faits qui constituent aujourd'hui cette
science. On ne s'étonnera pas de i*escellente exécution de ce pritmr si on
se rappelle que M- Lenz est Fauteur de ce remarquable travail sur M Physio-
Jo^ieet Fhistoire des palatales qui a véritablement renouvelé un chapitre de la
phonétique (voy, Rom., XVI, 6}o). Espérons que ses indications suscite*
tout des travailleurs dans ce vaste monde espagnol où les études de phoné-
tique historique n'ont jusqu'à présent qu'un représentant, M. P. Araujo,
dont Tautcur parle avec une juste estime. En disaot que les Français n'ont
guère étudié la phonétique qu'au point de vue pratique, M. Lenz oublie
le livre de M. Paul Passy ; il ne pouvait encore connaître celui de M. l'abbé
Roussdoi.
Dii Vfrfasserfragt des Eneas und der Koman de Thebes... (von) Otto Rottig.
Halle, 1892, in-80, 44 p, — L'auteur conclut, après un examen qui parait
attentif, que « Benoit ne peut avoir écrit ni le roman é'Etum m le roman
de Tlièbesy et qu'£w^et Tbibes ne peuvent non plus avoir le même auteur».
Dans cet examen on pourrait relever quelques erreurs. Ainsi M. R. dît,
après bien d'autres, que « -ûil s'affaiblît en -eil u dans certains textes; on
n'en cite jamais qu'une preuve , c'est travail rimant en 'til , mais ce mol
a une double forme qui lui est tout à fait spéciale, travail et iraveil (de m»
travaillier et traveillier traviUier); ce n'est pas là un fait de phonétique
générale.
Les mots latins dans les langues brittoniqties {gallois^ arvwrkain^ comiqm\ pho-
nétique et commentaire, avec une introduction sur la romanisation de TIlc
de Bretagne^ par J. Loth. Paris, Bouillon, 1892, in-80, 246 p. — Livre
d'une grande valeur et qui, A divers égards intéresse beaucoup la philo-
logie romane ; nous espérons pouvoir l'examiner à ce point de vue.
BitgHuhe Phihl(^. Anleitung zura wissenschaftlichen Studium der Englis-
cben SprachCi von Johann Storm. Vom Verfasser fur das deutsche Publi-
3J4 CHRONiaUE
kum bearbeiict. Zweite, voltstindig umgearbchete und sehr veniiehrte
Aaflage, 1. Du lehauk Sprache, L AbkUung : Phûmtik und Aussprache,
Leipzig, Reisland, 1^2, in*»», xiv-484 p. — Il est inutile de recommander
radiïiirablc ouvrage de M, Storm, classique dès son apparition ; il suffit de
dire que cette seconde édition est bien réellement « complètement refondue
et très augmentée ». Sous prétexte d'introduction à la philologie anglaise,
on a li une vèritabk encyclopédie phonologique, comprenant la sdcncc
eUe-méme et rhistoire de cette science. La description de b pronondation
anglaise n'occupe que 1 30 pages, la « phonétique générale » en occupe 5 18 ;
c'est dire que cette magistrale étude peut servir d'introduction À la gram-
maire de n'importe quelle langue, et, en effet» tous ceux qui voudront écrire
une grammaire devront commencer par se pénétrer des idées si justes ei
des observations si exactes du savant professeur de Christiania, et tout pr*
ticulièrement les romanistes, parmi lesquels il occupe aussi un rang
éminent.
Lis Lamentations de Matheolus d k Livre de Liesse de Jehan le Fhrt de Ressm
(poèmes français du XlV^sikîe). Édition critique, accompagnée de Toriginal
latîn des Lamentations^ d'âpre l'unique manuscrit d'Utrecht, d'une Intro-
duction et de deux Glossaires, par A. -G. Vak Hamel. Tome premier.
Textes français et latin des Lanitntatiom . Paris, Bouillon, 1S92, 8^, XXV-
Jl) p, (95*^ fascicule de la Bibliothèque de t École des Hautes Études), —
Nous reparlerons de cette belle et intéressante publication quand elle sera
terminée; disons seulement qu'on y retrouve l'érudition et le soin bien
connus de Tédiieur du Reclus de Molliens.
/ Rmli di Francia di Andréa da Barberino. Testo critico per cura di Giuscppc
Vandelu. Volume IL Parte I*. Bologna, Romagnoli, 1892, in-B*», cxvni-
291 p, (Coite^iont di opère inédite 0 rare dei primi tre secoU deîla Httgua pttb-
hîiciita per cura délia R, Commissiotu de' testi di lingua neUe ptovincie deiP
Bmiîia). — Enfin, après avoir attendu vingt ans, nous possédons au moins
la première partie de l'édition critique des Re^li qui nous avait été promise,
et la seconde, qui comprendra k fin de Touvrage, ne tardera sans doute
pas à nous être donnée. Ce long retard n'a pas nui à roeuvrc» au contraire,
ne fût-ce qu'en laissant se produire la découverte d*un précieux manuscrit
qu'on croyait perdu. M. Cappelli, qui de^^ail donner l'édition, fut bientôt
distrait par d'autres soins d^ travaux préparatoires qu'il avait commencés;
après sa mort, M. Rajna, qui avait écrit le beau volume d'introduction
dont nous avons jadis rendu compte {Rouk H, jSi), chargea un de ses
anciens élèves, M. G. VandeOi, de reprendte et de mener à bonne fia b
tichc abandonnée. Ce choix parait avoir été extrêmement heureux : la
longue préface de M. V, sur les sources de son texte (qui se réduisent à
deux manuscrits, Tun à Florence, l'autre à Oxford, et à l'édition de Modène
de 149 0 est tout à fait judicieuse, et en la lisant comme en lisant le texte
on $G sent en présence d'un travail bien et intelligemment exécuté. Noi»
aurons donc bienttJt le plaisir de pouvoir Ere dans une forme bien voisine
CHRONiaUE 3 3 S
de rorîginal, sinon absolument dans la forme originale d 'Andréa da Barbe-
rino (M. V, rend probable Texistence d'un manuscrit intermédiaire entre
Tautographe et nos trois copies)^ cet ouvrage curieux, qui a perdu en lui-
même quelque peu de son intérêt depuis qu'on Fa étudié de près et qu'on
en a indiqué les sources, mais qui donnera encore lieu par plus d'un aspect
à de nouvelles recherches. Nous en sommes très icconnaîssants à M. G.
Vandelli,
Tbierri ixm Vauœtdettrs Jùbonnes-Legmâc, Van Franz Thormann. Darmstadt,
Otto, 1892, in-fio, 96 p. (diss, de Berne). — Le ms, }88 de Berne contient
une vie de saint Jean l'Évangéliste en vers, dont Fauteur se nomme Tierri
de Vaucouleurs ; M, Thormann en donne une analyse, en recherche les
sources, en étudie le dîaleae et la date, en publie de longs extraits, et
propose, avec vraisemblance, d^identifier Fauteur à un Tliiodoricus de
Vidîiscolore qui a composé, sans doute en 126$, une vie latine en vers
d'Urbain IV. Les raisons qu'il apporte pour attribuer la Vk de mini Jean à
1220 ou 1250 (ce qui cadrerait mal avec cette identification) sont peu
probantes ; notamment la non élision de IV atone intérieur devant voyelle
est Inen contestable : M. Th. veut corriger les passages où cet e est
tombé, et n'en laisse pas moins subsister des formes comme ponrist •=
pourdst (p. 5), bleçure (p, 96; à propos de cet e il écrit, p. 55, des choses
tout à fait extraordinaires sur Falternance de irai et de verai^ où, d'après
lut, « Vr sonantc a développé devant elle un e^ qui, suivant le besoin du
vers, allonge ou diminue le mot d'une syllabe »); on peut sans crainte
faire descendre le poème de Tierri de quatre ou cinq dizaines d'années; la
langue est le français influencé par le lorrain et le champenois (Fauteur a
vécu à Metz et sans doute à Troyes). Les morceaux publiés paraissent
Fètre avec soin ; p, 5, v, 9, il faut évidemment tu cuit pont je cuit; dans
le premier des extraits donnés en appendice, v. 147 L Tœit, v. 16 j vwit
Tanfant, v. 297 covient^ U, 104, c*on, M. Th, conserve à tort le w du
manuscrit (wisom, welles, aweCy etc.) ; on a plus d'une fois répété qu'il fal-
lait, du moment qu'on nimprime pas diplomatiquement, résoudre ce
groupe en w^ uUy tw ou m* (sauf naturellement quand il représente réelle-
ment tu =^ gu français). — Ajoutons, ce que n'a pas su M. Th., qu*il
existe à Carpentras un ras. de la môme vie plus complet que celui de
Berne. C*est un ms. du xiii« siècle, d'origine lorraine. Il est décrit dans le
catalogue de la Bibliothèque de Carpentras par Lambert.
Étud^ de phihlo^ie néo-grecque. Recherches sur le dévehppcmmt historique du grec
publiées par J. Psighari, Paris, Bouillon, 1892 , in-80, CCX1-J77 p, (94*
fiisc. de la Bibliothèque de V École des Hautes Études). — Plusieurs chapitres
ou passages de ce livre remarquable intéressent la philologie romane , et
nous comptons lui consacrer prochainement un article; bornons-nous
présentement à le signaler à toute l'attention de nos lecteurs.
Ch, Thuriet. Traditiom populaires de la Haute-Savoie et du Jura. Paris,
Lechevalier, 1892, in-12, x-6)2 p. — lî y a beaucoup de paille et un peu
336 CHRONIQUE
de bon grain dans cette grosse gerbe ; mais même ce qui a quelque valeur
est souvent gdté par la façon dont i*auteur le présente, donnant à des
traditions dont il n'indique pas assea exactement la provenance une anri-
bution historique inadmissible (on voit par exemple figurer dans ces rédts
des « druides »| des « leudes »» etc.), L érudition de Tauteur se montre
dès la première page de sa préface, où on lit : « N*avoQS-nous pas â
Autrey (i quel propos cette histoire est-elle localisée à Autrey ?) la célèbre
et émouvante histoire de GahneUe de Vergy^ qui, avant d'épouser le sire de
Fayel, avait aimé Raoul de Coucy, te noble ménestrel à la fière devise :
Je m suis roy ne dttc, prince ne conît atissi^ Je suis U sire de Coucy ? »
Gtsckichte dis Rumânischen Schrifitums bis ^ur Gegemvart, von Dr. W, Rûdow.
Ausgearbcitet mit Unterstùt/ung der angeschenstcn Schriftsteller. Durch-
gesehen und erganzt im Auftrage des Bukarester Kultusministeriums von
Prof. J. Negruzzi und G. Bogdan. Wemigerodc, 1892, in-ii, 240 p. —
Malgré toutes les garanties que semble offrir le titre qu'on vient de lire, le
livre de M, Rûdow n'a pas été favorablement accueilli par la critique; il
paraît, en effet, en maint endroit être le produit d'une compilation assc2
superficielle, et la personnalité de l'auteur s'y donne carrière d*une (açon
parfois bizarre* Néanmoins, il peut servir à orienter les lecteurs dans une
région encore bien peu explorée.
htoria filologiei romdne. Studii critice de Lazâr Sàinénu, c*o prefa^i B. P.
Hasdeù, Bucarest, Socecù, 1892, in-12, xvi-4^5 p. — Livre fort intéres-
sant, comme on pouvait l'attendre de la science et de la critique de Tau-
tctir. Les Qotcs bibliographiques, extrêmement riches et précises, rendront
grand service aux travailleurs. Sur tous les points qu'il traite, M. S, a une
opinion à lui ; quelquefois, comme pour la question capitale de la conti-
nuité de Texistence des Roumains en Dacie, on souhaiterait qu'il l'expri-
mât plus explicitement et qu'il la motivât mieux.
Studi di critica UtUtaria di Egidio Gorra. Bologna, Zanichelli, 1892, în-12,
IV-40S p. — Ce très intéressant volume contient : tme notice étendue sur
le poème jusqu'ici mal connu de Thomas III de Saluces, le CfftvaJîcr
Errant; 2« une étude sur quelques dérivations du Raman de k Rose (il
s'agit surtout des poèmes français du xv« s,); }<> un long et imporunt tra-
vail sur le Pecorotie, où M- Gorra, après avoir réuni et soumis à une judi-
cieuse critique tout ce qu'on sait (et c'est peu de chose) de Tauteur de ce
recueil, cr Ser Giovanni Fiorentino, » étudie chacune des nouvelles du
Pecorotte qui ne sont pas de simples copies ou traductions, et, suivant une
excellente méthode, s'attache, non à refaire Thistoire complète de chacun
de ces motifs mythographiques, mais à déterminer autant que possible la
source directe de Ser Giovanni et à fixer la place qu'occupe son rédt dans
révolution du motif; 40 // Reg^imento t Costume di donne dd Barherim net
suoi rapporii coUa letkraînra provençale e fratwese. Il y aurait çà et là plus
d'une observation de détail d faire sur ces études, où l*on remarque toujours
une grande érudition, parfois un peu surabondante. Nous nous bornerons
CHRÔMldUE 3J7
â £iîre observer â l'auteur que la version du conte de « TAigle d'or n
qu*il a impnm<!*e en appendice d'après le Cbtvalw' Errant de Thomas de
Sâluces provient du roman bien connu de Tkstus de Cologne (voy. Ward,
Cutalogtu^ I, 569).
Os Ciganos de Portttgal^ con um cstudo sobre o calao, . . . por F. Adoîpho CoELtto,
Lisboa, Iraprensa Nacional, 1892, quatre- jo) p* — Une grande partie de
ce beau livre, que Tauteur a Voulu dédier à Tun des dircaeurs de la
Rumanm, sort du cadre de nos études et dépasse notre compétence; mais
un chapitre considérable (p* 55*165) est consacré à une étude du calao ou
argot portugais, dans laquelle ses rapports avec le parier des tsiganes
n'occupent qu^une faible place, tandis que U plus grande est prise par des
recherches extrêmement intéressantes et pénétrantes sur le rapport de cet
argot soit avec la langue ordinaire, soit avec l'argot d*autres pays et
notamment de France. On retrouve là, comme dans tous les écrits d'A.
Coclho, la mise en œuvre de matériaux très sûrs et très riches par un esprit
remarquablement sagacc et nourri de la meilleure philosophie.
Expûiiçàû da pronuncia normal portu^ue^û^ para uso de nacionaes e estningeiros. . .
por A, R. GoNÇALVES Vianna, Lisboa, Imprensa Nacional, 1892, in-S*»,
Î04 p. — Le nom de P auteur dit assez la valeur de ce traité, à la fois très
précis et très concis; on se rappelle l^article publié par M. Gonçalves
Vianna dans la Romanîa (XII, 29) sur le même sujet. Le tra^^aiJ actuel est
d'ailleurs conçu sur un tout autre plan ; il s*ouvre par des considérations
générales sur la formation des phonèmes, et il compare constamment la pro-
nonciation ancienne à la moderne. Nous ne saurions trop recommander
à ceux qui veulent étudier de près le portugais l'ouvrage si court et si
riche de notre savant collaborateur.
Archives municipales de Bayotme, — Livre des itahUssentmts, Bayonne, impr.
A. Lamaignere, 1892, in-4», Ln-546 pages, — L'idée de cette publication
mérite tout éloge. On ne saurait trop encourager les municipalités à faire
imprimer les documents les plus précieux de leurs archives. Ccst le meil-
leur moyen de les soustraire aux chances destructives qui les mcniicent.
La ville de Bordeaux, qui avait perdu une partie de ses archives dans un
incendie» a, comme on sait, entrepris une publication très bien entendue
des plus anciens documents qui lui sont restés. Bayonne, â qui pareil acd*
dent est arrivé il y a trois ans, a suivi cet exemple, et imite Bordeaux jusque
dans le choix du papier et du format. Mais it faut convenir que dans
reoscmble la publication bordelaise est très supérieure à celle que nous
annonçons présentement. Le livre des établissements de Bayonne est un
cartulaire municipal fort précieux, et qui méritait assurément d'être publié
en son entier, bien que plusieurs des pièces les plus importantes qu'il ren-
ferme eussent déjà été mises au jour par MM, Balasque et Dulaurcns, dans
leurs Èiuda historiques sur la ville de Bayonne, mais il est regrettable que
celte publication n^ail pas été confiée à des mains plus compétentes. Les
textes latins et béarnais contiennent de nombreuses fautes, et alors même
XXU.
21
338 CHRONiaUE
que ces fautes se trouvent néellemeni dans le carlubire, îl eût fallu Jc$
rectifier en note. Ainsi, parmi les témoins d*un acte du roi Jean d'Angle-
terre : H''. Com. BarmUy.... IV. d^ Harecuii, Jolian dé Baissinge bcirn. H
fiillait lire IV, comis Varmfte, IV. (k Harfcurt, joJhin d< Bassingtmm. Il ti*€St
pas aisé de reconnaître le comte de Warren dans cet article de La table :
Barrttn (fV, Com.) témoin. Le glossaire ne contient pas Je renvois au texte,
ce qui en rend Tusage fort difficile. D'ailleurs il fourmille d'erreurs dont
bon nombre auraient pu être évitées si celui qui Ta composé avait pris la
peine de consulter le dictionnaire béarnais de MM. Lespy et Ra^'mond.
Ainsi on y trouve un mfmiû[ armairar «t rester ». Ce fantastique intînîtif a
sans doute été créé diaprés le futur armaira qu'on peut lire^ p. 17, ligne 2;
la vraie forme de Tinânitif est donnée par MM. Lespy et Raymond : c'est
annaner. Artreitar^ traduit par « maltraiter, injurier n, signifie « rappeler,
reprocher » (anc, prov. et fr. rdraire)^ etc. Ces imperfections sont d'autant
plus regrettables que le Livre des étabUssernents renferme de nombreux textes
béarnais qui, en raison de leur date (une grande partie du ms. a été
exécutée en 1336), offrent un réel intérêt linguistique, — P. M.
De Jolmnnt Ntcotio phiîoîogo thesim proponebat Facultatî litterarum Parisiensi
Maxime Lanusse. Graiianopoli, 1893, in-8*^, 202 p. — Travail estimable et
qui fait estimer Jean Nicol et son Tïnesor de la Luipie fran^vyse. Il avait un
certain discernement en fait d'étymologie et savait que le français ne vient
ni de l'hébreu, ni du grec, ni du gaulois. Son grand mérite est d^avotr
réuni plus de mots français que ses devanciers et d'avoir, à peu prés le
premier, cherché à les définir avec quelque exactitude. Son livre mérite
encore d'être consulté.
Proven^alisif)es Suppictneni-H^ôrUrhuch. Berichtigungen ond Erginzungen m
Raynouards Lexique Roman, Von Emil Levht . Erstes Hcft, Leipzig, Bresr-
laud, 1892, in-8'^j VIII- 128 p. — Nous rendrons compte de cette intéres-
sante publication.
ÙU BrUfe des Trobùdors Ratrnbaut de Vaqudras an Boni/s^ /, Markgraftm vom
Montjtrrat. Zum ersten maie kritisch herausgegeben, nebstxwei Karten iliid
eincr Beilage ûber die Markgrafen von Montferrat und die Markgrafen
Malaspina in ihren Bezîehungen 2U den Trobadors. Von Oscar Schultz.
Halle, Niemeyer^ in-8«, VIII, 140 p. — Étude très consciencieuse, mais qtd
n*édaire pas tous les points obscurs de ces textes difficiles.
Ph* Wagner. Frattiôsische Quantiiài , unter Vortuhrung des AIbrecht*sdicn
Apparats. Marburg» Elwcrt, 1S93, in-80, 17 p. (extrait dts P}»H€tiscbt Stu*
dîeti^ p. VI), — Conférence du plus grand intérêt sur la quantité en fran-
çais, mesurée à F aide d'un ingénieux appareil, fiien des idées courantes sur
ce qu on appeUe la quantité seront détruites par ces expériences concluantes.
Le résultat principal est que la durée de prononciation des voyelles dépend
plus de leur place dans la phrase et de leur valeur de setis que de leur
tiature, et que dans le discours les consonnes occupent sensiblement plus
de temps que les voyelles. Kotons encore te curieux essai fait par rauteor
CHRONIQUE 339
sur les vers : il a constaté que dans des alexandrins pris au hasard chez
Boileau, Racine et Victor Hugo les deux hémistiches étaient toujours
mathématiquement égaux. Toutefois l'expérience est à reprendre,
M. Wagner Payant faite sur un jeune Français de quinze ans qui récite
peut-être les vers avec une régularité exceptionnelle. Mais toute cette
étude est intéressante et fait grand honneur à l'intelligence et à la pru-
dence de l'observateur.
Egidio Bellorini. Note sulle traJu^iofii itàliane delV Arteamaioria e dei Remé-
dia Amoris d^Ovidio anteriori al Rinascimcnto. Bergamo, Cattaneo, 1892,
8®, 71p. — Celte étude, faite très consciencieusement et qui ne manque
pas d'intérêt, n'est qu'un chapitre d'un travail étendu sur les traductions
d'Ovide en Italie au moyen âge. Elle porte sur trois traductions de Y Art
d'aimer (deux en prose et une en vers) et trois des Remèdes d'amour (toutes
en prose) ; elles sont toutes accompagnées de gloses plus ou moins éten-
dues dont M. Bellorini fait connaître le caractère général et communique
quelques passages souvent curieux. On ne peut que souhaiter que l'auteur
mène à bonne fin l'entreprise qu'il a conçue et qu'il a déjà en partie exé-
cutée.
Les Sources du Roman de Renart, par Léopold Sudre. Paris, Bouillon, 1893,
in-80, VII1-316 pages. — Nous reviendrons sur ce livre important, qui
renouvelle complètement, au moins chez nous, l'étude d'une des pro-
ductions les plus intéressantes du moyen âge. Bornons-nous pour le
moment à dire que l'originalité de l'ouvrage consiste en ce qu'il essaie de
montrer que si le « Roman de Renart » n'est pas une « épopée animale »
d'origine germanique (théorie de Grimm), il n'est pas non plus, au moins
dans ses parties essentielles, le simple développement médiéval de fables
ésopiques transmises par l'école (théorie de P. Paris), mais qu'il se com-
pose surtout de contes d'animaux de provenances diverses, destinés simple
ment à l'amusement et mis en vers par des jongleurs à différentes époques;
ces contes se retrouvent encore aujourd'hui dans la tradition populaire des
nations européennes, et un groupe considérable paraît être d'origine
Scandinave ou au moins septentrionale. Il reste encore beaucoup â dire
sur la formation et l'évolution du cycle, mais le livre de M. Sudre, où
une science très sûre est dirigée par une critique pénétrante et exposée
avec beaucoup de clarté , fournit aux recherches une base qu'on ne faisait
guère jusqu'à présent que soupçonner et présente toutes les questions sous
un jour nouveau.
Arturo Graf. Miti, leggende e supers tiiioni deî Medio EvOy Vol. II. La ï^^enda
di un pontefice. — Dcvionologia di Dante. — Un monte di Pilato in Italia. —
Fù super sti\ioso il Boccaccio ? — San Giuliano nel « Decamerone » e altrove. —
Il rifiuto di Cekstino V. — La leggenda di un filosofo. — Artù nelPEttta. —
Un mito geografico. Torino, Lœschcr, 1893, 8°, 398 p. — Ce second
volume du recueil de M. Graf (cf. Rom., XX, 628) contient quelques
articles que nous ne connaissions pas encore, soit qu'ils paraissent ici pour
340 CHRONiaUE
la première fois, soît que nous en ayons ignotAÏ la prcmîCTc pubUdtîon.
La variété des sujets traités, qui atteste celle de réruditioa de Tautcur^
appellerait un compte rendu étendu que nous ne pou^'ons consacrer pour
le momenî à cet ouvrage aussi attrayant qu*imtruaîf. Bornons- nous â le
signaler à nos lecteurs, en remarquant que ia Ifggtnda di un ponirjUcr se
rapporte au pape Silvestre 11, que la leggcnda di un fiksofo concerne Micbel
Scot, et que !e mito geografico à trait à la fameuse montagne d*aimant con-
nue par tant de contes.
Etymologischts^ von A. Tobler. Berlin, pet. in-40, 12 p. (extrait des Comptes
rendus de l'Académie royale des sciences, 1893, m, p. 13-24). ^ ItaJ.
attraio, attre:^o (paraît emprunté à Ta.-fr. airait ou plutôt au plur. airai^,
— Fr. rtls (explications précieuses sur les diverses formes de ce mot ; m,
Pyram, 395, est plus que douteux). — V, fr. moiaisofif -oison ^-ison (viendrait
demanationem, mais le prov. ntàta^o^ Tîtal. mettagione sont peu favorables
à cette étymologie, que le sens n'appuie pas non plus beaucoup ; je regarde
mmaism comme répondant Àmînuationem,et mi^nuison Amînutionem;
on sait que min u are est attesté très anciennement à côté de minuerc),
— Fr. haUter (n'est autre que Ta. fr. aid^r, « agiter les ailes ; i> ridcntiié,
que j'admets pleinement, est établie par les rapprochements les plus intéres*
sants ; citons un autre exemple d'alelsr au sens propre FioL 4186 ; Taddition
de 17/ est sans doute une sorte d*oûoraatopée). — Fr. aîoyau (étymologie aussi
ingénieuse que vraisemblable : Ta. fr. appelait alotaus^ c'est-i-dire« alouettes »,
de petits morceaux d*une certaine partie du bœuf^ entourés de lard et
embrochés à la façon des alouettes ; plus tard on a nommé aloyau k partie
du bocut dont on les tirait; des dénominations semblables à abiaus existent
en prov* et en allemand). — Fr. ébouler (n*a rien à £iirc avec loùUt mais est
Tanc, fr. esboéler = *ex-boteHare; la forme esboouler a pour pendant
rooukr= *rotelïare; à Ta. fr. boëk se rattachent aussi bouleverser Q) et Ta.
fr. k)rtuhoi'h\ â*où. tourmbouUr^ qui a produit lountebonle; tout cela paraît pro-
bant ; quant à Texplication de bouillabaissù par 'botula abbaiissac, l'au-
teur ne la regarde sans doute lui-mÉme que comme un jeu d'esprit). — Fr.
battturei (est originairement banere^f tiré de baniere à Taide du suff. -Icium ,
et à ce propos Tauteur énumère plusieurs mots anc. fr. en -^re^ qui sont
formés de même, et dont plusieurs ont passé à -tret par une assimilation
très naturelle; sa liste, déjà fort précieuse, pourrait être sensiblement
augmentée t citons seulement damerci, bien probablement pour damerez ;
Tautcur remarque avec raison que la forme première de berserei est bcrsert^ \
cf. Honi.f XXI, 291).
Poésie in dialetto valmaggino (Çaverjgno) ora primamente pubblicate da Giacomo
BoNTEMPi, Bellinzona, 25 oct, 1892 (Noue Salvioni-Taveggia), in-S» 25 p.
— Petites pièces intéressantes pour Tétude du dialecte, publiées d'après un
recueil fait il y a déjà une trentaine d'années.
Edouard BouRaEZ. La hfigmgasconm à Bordeaux. Notice historique. Bordeaux,
CouuQuilhou, 1892» in-4o, 27 p, (extrait de la Monogra^hU publiée par h
cHRONiauE 54 r
Municipalité bordelaise), — Esquisse judideuscmcût tracée, qu'on aimerait
à voir développée par l'auteur.
Lés Fabliaux, études de littérature populaire et d'histoire littéraire au moyen
âge, par Joseph BéoiER. Paris, Bouillon, tS^î, S*», XXVl!-48s p* (98*
fascicule de la Bibliothèque de VÈccïe des Hautes Études). — II nous sufïîi
aujourd'hui d'annoncer ce beau livre, qui a servi à M. Bédier de thèse
française pour le doctorat es lettres (nous avons rendu compte plus haut de
la thèse latine). Nous aurons l'occasion d'y revenir bien des fois, car il
traite aux points de vue les plus divers une des questions les plus intéres-
santes de rhistoire littéraire générale et spécialement de Thistoire liuéraire
de la France* Dans la première partie , Tauteur expose , sur roriginc des
fableaux» une doctrine très neuve et qui soulèvera de nombreuses contesta-
tions. La seconde prête moins à la discussion , mais elle abonde en
remarques fines et pénétrantes. Le volume se termine par une longue liste
de corrections à l'édition des fableaux de MM. de Montaîglon et Ra)iiaud*
Tûrkische Studiett ^ von G. Meyer. L Dit griechischen und romani i^heff
Beitandtheik irn Wortichatic des osmanisch'tûrkisdKn. Wicn, Tempsky, 1895,
in-80, 96 (extrait des Compter rendus de V Académie de Vienne), — Ce recueil
très riche, d'où sont exclus les mots roumains, comprend surtout, comme
éléments romans, des mots italiens, dont la réunion est instructive pour
l*hïstoire des rapports des deux peuples; le savant auteur donne d*intéres-
santes remarques sur les règles qui ont présidé k rassimilation des mots
adoptés. •
Clair Tisseur. Modestes observations sur Vart de versifier, Lyon, Bumoux et
Cumin, 1893^ in-8», 355 p. — L'auteur de cet aimable volume, où des
observations presque toujours judicieuses sont présentées sous une forme
parfois un peu trop humoristique, mais toujours vive et piquante, est
Técrivain « patoisant « que les lecteurs de la Remania connaissent bien sous
le pseudonyme lyonnais de « Puitspelu ». Il ne s'est pas borné à observer
et à juger avec autant de bon sens que de sens r^'thmique (si Ton peut
ainsi dire) la crise que semble subir aujourd'hui la versification française,
il a fait appel en plus d'une occasion à l'histoire des formes poétiques et à
leur évolution depuis le moyen âge : c'est à cause de cela que nous men-
tionnons ici son livre. M. Tisseur n'a pas la prétention d'être proprement
un savant, mais il a tenu à s'instruire du passé afm de mieux comprendre
le présent et de pouvoir quelque peu pressentir l'avenir. C'est un exemple
que de\Taîent bien imiter tous ceux qui se mêlent aujourd'hui d'écrire sur
le sujet qu'il a traité.
A. Restori. Musica alkgra di Francia nei stcûli XJl et XI JL ln-40, 10 p. et
î p. de musique (per nox^e Dosi-Laîatta), — L'auteur étudie la musique de
quelques pièces du chansonnier Saint-Germain et cherche à montrer qu'elle
se rattache de près à l'art populaire; iï en donne une transcription en
notation moderne dont il reconnaît luî-méme le caractère approximatif.
V'gjp CHRONiaUE
Qjielques remarques sur les danses et les chansons de mai servent d*întro-
duction à cette intéressante étude,
A. Restori- Tre pngbicn fratice^i del stcdo XV. In-40, neuf p. (/W no^x^ Oel
Vasto-Celano). — Ces trois petites poésies dévotes (dont U seconde seule
est une prière) sont tirées de trois manuscrits de la Palatine â Florence;
elles sont publiées diplomatiquement, I, 36 vtustre^ 1. s, d. kmstr$\ II,
7 alîégranu^ 1, alkgmrtce,
Gramtnatik des AltJran\osîscheti {Laut- und Formmîe}}re\ von Dr Éduard
ScHWAN, Leipzig, Reisland, 1893, vni-247 p* — Nous rendrons compte
de cet ouvrage dans noire prochain numéro; boraons-nous \c\ à dire que
la nouvelle édition est bien réellement neuhearheiid et très supérieure i
Tanciennc.
Histoire poétique des Mérovingiens, par Godeftoy Kurth. Paris, Picard, 189^,
in-80» 552 p. — Nous re\iendrons en détail sur cet important ouvrage, que
nous nous bornons présentement à signaler à nos lecteurs; M, Kurth» bien
connu par ses beaux travaux sur l'histoire du moyen âge, a repris ici à un
point de vue particulier Tétude de la pari qu'il faut faire à la poésie épique
dans ce qui nous a été transmis de Thistoire des temps mérovingiens.
Les parler s parisiens, d'après les témoignages de MM. de Bomier, Coppée,
A. Daudet, Desjardins, Got» d'Hulst, le P. Hyacinthe, Leconte de Lisîe,
G- Paris, Renan, Rod, Sully-Prudhomrae, Zola et autres. Anthologie
phonétique, par Eduard Koschwitz. Paris, Welter, 189J, in* 16, xxx-
147 p. — Le titre de ce curieux petit volume dit assez ce <ju*il contient.
M. Koschwitx a fait lire par les personnes citées et quelques autres des
morceaux plus ou moins étendus, et il a noté leur prononciation aussi
soigneusement que possible à l'aide d'un système qui bisse à désirer
comme tous les systèmes de notation phonétique» mais qui est en somme
assez exact. Ce sera un document précieux pour l'histoire de la prononcia-
tion au xixe siècle, J*ai présenté à M. K., qui avait bien vouîu m' envoyer
d'avance le morceau qui me concerne (déjà tiré), quelques observations
qu'il discute dans son Appendice (il y en a une qu'il ne mentionne pas et
que je tiens à rétabhr : je prononce unn endroit, peut-être un endroit^ mais
sûrement pas ettn etidroit). Les remarques que lui a suggérées notre désac-
cord sont fort intéressantes ; il montre comment il arrive souvent que Ton
se trompe, même avec toute l'attention et la bonne foi possibles, sur ta
vraie nature des phonèmes qu*on émet. Les chances d'eneur sont au
moins aussi grandes du côté de celui qui recueille ces phonèmes, et qui
pourra les départager? Les prononciations que je récuse, M. K. déclare
les avoir it entendues distinctement ». On voit que, malgré le soin îe plus
consciencieux, les constatations acoustiques laissent encore place à bien des
doutes. Espérons que nous aurons bientôt des enregistreurs mécaniques à
la fois infaillibles et complets. — G. P.
PtéUt Ovidii Kasonis Metamoip^mton îibros quomodo nosirates medii aetn pœttu
imitati interpreiatiqtu sint, Thesim Facultati litterarum parisiens! proponc-
I
CHRONiaUE 34 J
bal Lcopold Sudre. Paris, Bouillon, 1895, S°, fi8 p. — Dans sa thèse
bline» M. Sudre examine plus complèieraeni qu'on ne Tavail fait les
diverses imita lions des Métamorpfmes au moyen âge. Dans ses recherches
sur « Chrétien Legouais «, il n'a pas eu la chance de mettre la main sur le
passage qui vient d'amener M. Thomas (ci-dessus, p. 271) à rayer ce nom
de notre histoire littéraire.
Lfs Fabulistes latins ^ depuis le siècle tT Auguste jusqu'à la fin du rnoyen dge, par
Léopold Her VIEUX. Avienus et ses anciens imitateurs, Paris, Firmin-Didot,
1894 (sic), in-8'', III, 530 p. — Nous avons ici la suite du grand ouvrage de
M, Hervieux, dont le Plièdre forme la première partie. Une nouvelle édition,
complètement remaniée, de ce Plïèdre doit paraître cette année, et c'est ce
qui explique sans doute la date anticipée donnée au présent volume, dans
la préface duquel la seconde édition de Phèdre est présentée comme publiée,
Grundriss der rotnanischen Philologie.,, herausgegeben von Gustav GrôBER. II.
Band, I Abtheilung. i. Lieferung, Strasbourg, Trûbner, 1893, gr. in-80,
256 p. — Deux travaux , on peut dire deux ouvrage» , très importants
forment cette première partie du second volume du Gruttdriss. L'un, dû â
rinfatigablc érudition de M. Grôber, et qui n*est pas achevé id, n*est rien
de moins qu^une liistoire de la littérature latine au moyen âge, sujet aussi
difficile A traiter que peu traité jusqu'ici; nous ne savons encore si M. Or.
aura réussi 4 domicr de ce sujet si vaste, si dispersé, si mal éclairé et en
tant de points si peu attrayant, un tableau clair, proportionné et sufhsam-
mcTJt complet ; nous nous tions A lui pour en avoir fait Tobjet d'un travail
consciencieux, et on lui devra en tout cas de la reconnaissance pour avoir
eu le courage et la patience de l'entreprendre et de Texécuter. On n*en
devra pas moins à M. Stengcl pour k bel exposé qu'il donne (p. 1-96)
de la Versificatim rotnant. C^étaii li encore un sujet que personne n'avait
abordé d'ensemble, mais, en revanche, il avait été, dans chacune de ses
panies, l'objet de recherches multiples et de théories contradictoires qui
compliquaient singulièrement, au ïieu de la faciliter, la tâche que s'est
imposée M, Stcngel. Il nous paraît Tavoir remplie d'une façon extrêmement
remarquable , bien qu'il soit permis de n'être pas de son avis sur plusieurs
points, dont quelques-uns sont de grande importance. Mais des diver-
gences d'opinion ne sauraient empêcher de rendre hommage au mérite
d'un ouvrage si neuf et si précieux : les recherches sur l'histoire de la
versification romane auront désormais une base et un cadre. L'exposé de
l'auteur est très sobre et en même temps très clair; les exemples sont bien
choisis et éclairent vraiment les explications; rien d'essentiel ne paraît omis
et chaque chose est bien â sa place. Il y a toutefois un manque de propor>
tion général qui comporte le seul reproche sérieux que l'on puisse adresser
d l'ouvrage : la versification française (et provençale) tient une place
par trop prépondérante, les autres ne figurent presque que comme acces-
soires; il est bien vrai que cette prépondérance s'explique et par la variété
plus grande de cette versification, et par les questions plus compliquées
344 CrtRONiouE
qu'elle soulève, et par les travaux bien plus nombreux dont elle a été
Tobjet; mais il n'en est pas moins certain que les versificatious des autres
pays auraient eu droit à une place plus grande, et que, surtout pour les
questions d*origine , il y aurait eu lieu de faire plus souvent appd à leur
témoignage, A propos des origines, M, St. dte bien le livre de M* M.
Kawczynski, Essai sur Vorigini tt Yhistoife dis rytimus^ mais il ne paraît
nulle part qu'il en ait fait usage; ce livre, assurément un des plus remar-
quables qu'on ait écrits depuis longtemps sur le sujet, n'a pas encore dans
la littérature scientifique la place À laquelle il a droit (qu'on en accepte ou
non les doctrines un peu absolues)-
Prof Vincen^o Crescikï. Qualcfx appuntosopra TAmeto del Boc^aaio, Padova,
1895, in-80, 5 p. (extrait du t. IX àes Atti t Mtmùrit de TAcadémie de
Padoue). — En annonçant ici {^om. XXI, 654) le livre de M. Pizzi sur les
rapports de la poésie persane avec la poésie européenne > nous signalions
comme assez frappant le rapprochement de VAmclo de fioccaoe avec un
roman de Nizami. M, Crescini, avec cette circonspection judicieuse qui
caractérise sa critique, montre que ce rapprochement est sans doute pure-
ment fortuit» et que les sources du roman de Boccace ne sont pas à cher-
cher en Orient.
VchtT dieSprache von Provins im ij, Jahrhimdtrt^ nebst einigen Urkunden...
(von) Adoîf GoTTSCHALK. Halle, 189Î, in*8o, 64 p. — La langue de
Pro\ins au xm« siéde ne différait pas essentiellement du français commun ;
tel est le résultat de cette étude, faite avec soin, d'un élève de M, Suchier.
L'auteur a recherché oonsciencieusemeni les éléments de sa thèse , et il
publie en appendice un certain nombre de documents qu'il a trouvés à
Pro\nns même et qui donnent de la valeur à sa petite publication. O sont
des actes de 1 268 et années suivantes. Ils sont bien édités, VI Hehnis, L
Helouis, VU Enseîhie^ 1. ett sesine ? IX quevûs^ U qui*ues, XVI tvj, I. cri (oies),
XIX La^ucte, l Jaqueie, XXIV qufle, l qu'th, XXV la cort, L racart ;
Rt'méftai^ L rernetuxnt.
Il Ubra dd Vi^ii t dillt Firtù, testo siciliano inedito del secolo XIV, pubbli-
cato ed illustrato da Giacomo de Gregorio. Palermo (Paris, Bouillon),
1895, in-80, 266 p. — Cette publication a de Tintérét parce qu'elle met à
la disposition de tous un des plus anciens textes siciliens connus, lequel
n*csi d'ailleurs (ce que Téditeur ne paraît pas avoir vu) qu'une traduction
(d'après h. traduction italienne) de la Somme le Rai de frère Laurent. Nous
en parlerions plus longuement si elle n*avait été soumise par M. Fôrstcr
(dans le LiteraturbL fur gcrm, itnd rom, PhiL) i une critique très détail-
lée et très instructive, à laquelle il suffit de renvoyer.
Errata, — P. 178, Lu, mesiev^ L mesier\ p. 19g, L 5, entrepauseh L
Lepropriàaire^é^mt, E. BOUILLON.
MAOlt, fKOTAT VMEau, IICFI|IH«OIW
LA CHANSON D'ANTIOCHE PROVENÇALE
ET LA
GRAN CONQUISTA DE ULTRAMAR '
I
vn
A partir de la victoire d'Antloche, il n'y a dans la Cmquista
de Ultramar que bien peu de passages dont on puisse, avec
quelque vraisemblance, faire remonter la source i notre poème
proven<;al. Je donne des chapitres qui suivent cet événement
un relevé très sommaire; il suffira à montrer que la compilation
espagnole se compose à peu près uniquement, pour cette partie
qui va jusqu'à la mort de Godefroi de Bouillon, de deux élé-
ments, formés Tun par la traduction de Guillaume de Tyr,
l'autre par les poèmes français; je ne m'arrêterai pas à marquer
les différences qu'on peut çà et là relever entre c^s sources et
la compilation espagnole; Je relèverai seulement un ou deux
traits où, par exception, il y a sans doute lieu d'admettre
encore l'influence de la chanson provençale.
Les ch, CLXXi-ccvii de la Conquisla^ qui nous racontent la
marche des croisés d'Antioche ;A Jérusalem, sont essentiellement
une traduction du livre VII de Guillaume de Tyr. Nous citerons
seulement dans les ch. ccni-iv fintercalation d*un épisode que
nous ne retrouvons pas ailleurs; les croisés, après avoir pris
Rames, hésitent sur ce qu'ils doivent faire : marcheront-ils
sur Jérusalem ou essaieront-ils de s emparer de TÉgypte, pour
revenir ensuite sur la ville sainte ? Tancré et Robert de Flandres
sont envoyés en éclaireurs : ils voient Jérusalem et le pays qui
I. Voyci Remania, XVII (1888), 513-541 i XIX (1890), 562-591.
3Î
34^ G. PARIS
l*environne, et en rapportent l*impression que la ville est pre-
nable et qu'il tiLit Tassiéger sans délai ^,
Ch. ccvm-ccLX, traduction des Chétifs; au ch. CCLXI com-
mence la traduction de la branche publiée par Hippcau sous
le titre de CImnson de Jérusalem,
L. lU, ch. i, Jémsdkm, II, h — Çh. ii-vn, Guillaume de
Tyr, Vm, i-s. — Ch. viii-xm, Jà\^ II» 18-35. — Ch, xrv-
XIX, Guillaume de Tyr, VIII, 6-10. — Ch. xx-xxxix, Jér.^
n, 37 — V, 3. — Ch. XL-XLV, Guillaume de Tyr, VIII, 12-20.
Notons que dans le ch. xliu est inséré un épisode fabuleux,
emprunté à la chanson française, où Ton voit le roi des Tafurs
entrer le premier dans la ville et une Bédouine (corriger dans
l'espagnol vedahia en Veduind) prédire à Thomas de Marie qu'il
sera tué non par les Turcs, mais par son propre seigneur*.
' — Le ch. XLVi vient également de la chanson, mais ne parait
pas se retrouver dans nos textes; le ch, xlvu répond à /^.,
V, 13-14 i i^ reparlerai tout à Theure du ch. XLvni. —
Ch, XLix-Lîit, Guillaume de Tyr, \T[II, 21-24.
Le ch. nv reproduit d'abord le cli. 1 du L IX de Guillaume
de Tyr, mais il passe ensuite à la chanson française, et les
ch* LV-LX continuent à la suivre (V, 17-33). Puis nous repre-
nons Guillaume de T)T (ch. lxi-lxv, Guillaume de Tyr,
IX, 3-1 0> ^^''^*^ bientôt nous rabandonnons de nouveau pour
un poème français.
Ce poème remplit les ch, lxvi-lxxvi de la Canquista, et
correspond à peu pr^s aux trois derniers chants de Tédition de
Jérusalem; mais il en est notablement différent, La chanson
française, telle que nous la connaissons, ne paraît nulle part
se douter que Jérusalem, au moment où les croisés l'assiégèrent,
venait d'être enlevée par le calife fatimite au calife de Bagdad
et qu'elle dépendait de TÉgypte : c*est le soudan de Perse
qui, suivant la promesse &ite au roi de Jérusalem, vient à son
I . Le ch. ccvi porte im titre visiblement déplacé : De lixs haîdmts que
dêcia CorvaJaH de h su ky\ il ne s'agit nullement ici de Corbaran, et cette
phrase doit compléter le titre du ch. ce vin : Del Ilanto qm hacia Corvahm 4
lui suyos por B^badin^ où Ton voit en effet Corbaïun dépnêcicr Amèrement
Mahomet,
a. En cfifet, comme on Ta remarqué à ce propos (Jiist. UU,^ XXII, 581)^
Thonus de Marte fut tué en 1 1 30, de la propre main de son seigneur Raoul
de Venuandois.
LA CHANSON DANTrOCHE PRO\'ENÇALE 347
secours et est vaincu par GoJefroi. Dans Tespagnol, au contraire,
Tennemi que les vainqueurs de Jérusalem ont i combattre après
la prise de la ville est, comme dans Thistoire, Afdala (Abdallah),
général du calife d*Egypl€ *; toutefois, comme dans la chanson
imprimée et contrairement i Thistoire, la bataille a lieu à
Rames et non devant Escalone, Une étude comparative des deux
récits ne serait pas ici à sa place; je me borne à signaler celui
de la Conquisia comme nous ayant conservé une version parti-
culière, et sans doute plus ancienne^, du poème français. —
A partir du ch. Lxxvn, la compilation espagnole rejoint
Guillaume de Tyr et ne le quitte plus.
Dans ce rapide exposé, je n'ai p.is signalé d'autres traits, assez
nombreux, qui nous montrent que le traducteur espagnol, lioû
il a puisé dans nos poèmes, en a eu sous les yeux des textes plus
anciens que ceux qui nous sont arrivés. Je n'indiquerai qu'un
genre de divergences qui se présente à plusieurs reprises et qui
appelle particulièrement notre attention. Dans les versions
françaises conservées, Boémoiid prend une part considérable au
siège de Jérusalem, tandis qu'en fliit il était resté ;V Antioche;
il en est de môme de Hugues h Maine qui, lui, était retourné
en France j dans Xjl Conquisia ^ ils n*apparaîssent ni Ton ni l'autre :
à leur place figure presque toujours Raimond de Saint-Gilles,
qui, évidemment, en sa qualité de méridional, n'intéressait pas le
remanieur français. On peut en dire autant de Hongier l'Alle-
mand, qui, tué à la bataille d'Antioche, d'après le poème ancien
(^Ant,^ t. II, p* 269), n*cn reparaît pas moins dans le français
(rV, 17), mais non dans Tespagnol, où il est remplacé par
Gontier d*Aire '.
1. Parmi ses auxiliaires figureiii lûs dt la hinia (ch. LXIV), c*cst-àsJîre les
Bédouins, les Arabes de la lande (voy. sur le sens de herrU le passage connu
de Joinville), Ce mot a donnai à M. de Gayangos l'occasion d'une de ses rares
notes : « Qiiiza haya de enicndcrse de /(J Ihcria nieridiotmU » Il est vrai que
Pigeonneau voit dans la hrtie Tancienne « Peréc, au dcl.i du Jourdain »
(p. 69) ».
2. Il est très digne de nenurque que c'est à cette partie du récit que ta
Conqmsîa rattache une des mentions qu'elle fait de Richard le Pèlerin :
it Cuenta Ricare el pclegrîno, que cscribiô esta historia por manda do de!
principe Remonte de Amioca... (ch. lxxu) »,
5. Il est vrai que quelques erreurs sont communes aux deux versions*
Ainsi dans la Cottqmsta comme dans la chanson on raconte que Baudouin da
34$ G. PARIS
Maïs la seule question qui nous intéresse pour le moment est
de savoir si dans cette partie de la Qmquista on retrouve encore
des traces de la chanson provençale. Je ne vois qu'un passage
qu'on puisse ramener à cette origine, c'est celui qui a été men-
tionné au début de cette étude (XVII, 527) et qui concerne
Aicart de Montmerle. On se rappL41e que ce chevalier lyonnais,
étant pèlerin i Jérusalem, avait reçu un soufflet violent du
gardien du saint sépulcre, le renégat Jean Perret, et lui avait
promis, à la suite d'une vision, de loi couper la tète à Ten-
droit même où il avait été outragé par lui- La Cortqutsta a
raconté, il est vrai (L III, ch. xvm, p. 3îi), d'après Guillaume
de Tyr (i. VIII» ch. ix), qu' Aicart de Montmerle avait été tué
pendant le siège, et il semble même qu'elle ait emprunté à la
chanson provençale le passage suivant, qui est relatif à cette
mort, et qui ne se trouve pas dans l'historien latin * :
É tomaron el cucrpo tic Aicarte de Montemerlo, del cual los moros habian
le%'ado la cabcza i Hierusalçm por mostrarla i su senor, é levaronJo p>ara la
lîueste en dos pakfrcnes é andas que ficieron de las astas de laslanzas; é
cuando llegaron é lo supicroti los de la hueste, hicieron todos gran Uanto 6
sentimento por el, é lloraban en muciias partes cada uno por sus tiendas,
é mesabanse los cabellos é bs barbaSj é cuando vieron que no cra ah< la
cabeza besabanle los pies, porque el fué uno de los très caballeros priraeros
que fizieron comen^ar esta hucsie» é don Remon Pelés é Gandcnia^ fueron
los otros dos, é estos liabian seido companeros cuando vinieron en romeria
al sepukro an tes que la cruzada se comenzasc, as( conao habeis oido en el
comlenzo deste îibro; c este Aicarte de Montenierle fud aquclo que dieron la
punada A la entrada del î^epulcro, porque non podia pagar como los otros
el maravedf que costaba dejarlos entrar al sépulcre è adorarle, é la pescozada
fué dada tan de rcc(o, que le salîé ïa sangre por las narlces é por las orcjas,
Rohais, qui ne vint à Jérusalem, comme Boémond, qu'après la prise de la ville,
arriva pendant le sîege, rencontra Cornumarant qui s'enfuyait, le combattit,
et eut une <îtrangc et périlleuse aventure, qui a donné lieu à un curieux
rapprochement hisiorique (voy. Pigeonneau, p. 70), Mais différentes raisons
me font croire que le compilateur a utilisé deux rédactions françaises de
dates différentes.
1, Ni dans Albert d'Aîx, qui est sa source; celui-ci mentionne seulement
l'enterre ment d' Aicart et d'autres victimes de cette journée in sepukhro cffris-
tiamrum confratrum qnod erai extra ctvitatem. La mort d' Aicart est aussi men-
ti orniée par les Gestit.
2, C*cst le personnage appelé au début Cmidomar de Unixi.
LA CHANSON D ANTIOCHE PROVENÇALE 349
é mostrô despues nuestro s^nor Jesucnsto grao mîlagro por eUo, asf como
vos lo contari h historLi addante. Estando en esto, dijo el conde de San Gil
que déjasen de bacer ai^ucl ruido ; que aquello non era sino un aparejo para
pelear con esfuerzo dobïado, porque cuanto mayor era la pérdida, tanto mas
la debian vengar; é esu razon diclia, levdronlo à enterrât à Monte Sion , i
ta îglesia que am6 Dios tanto que allî pasé la gloriosisîma Vîrgen nuestra
senora, su madré» deste mundo al otro cuando la subiô al cielo; é mcticron
aquel caballero Aicarte en un monumento de niarmol.
Mai5î il n'en faut pas moins que la prédiction se réalise» et
elle n'avait même sans doute été faite que pour amener l'écla-
tant miracle qui se produisît lors de la prise de Jérusalem et qui
remplit le ch. xlviii de notre 1. IIP :
Una cosa acaescîcî i la enirada dcl Scpuîcro que lue gran mîraglo de Dîos,
porque, segun que habeis oîdo en el comieni^o de esta hestorîaf fueron trcs
caballeros en romeria al Scpukro, é los dos pagaron su entrada é entmron
dentro; é el tercero, d quien decian Aicarte de Montemerle, qued6se de
luera porque non pudo pagarel maravedi en oro, é por aquetlo Aicarte hobo
de parar el cuello, c diùlc la pesco/ada el que guardaba la puerta, é dejôlc
entrar; ^ d la salida dijolc Aicarte de Montcmcrîc : « Juan Perret, espéra aqui;
que yo te prometo que torae por aquf, por me vengar desta deshonra que
agora me feciste, é eu este lugar mesmo te cortartî la cabcza, » È este cabal-
lero eni ya muerto, que le mataron yendo de Hierusalem al puerto de Jafï;»,
el dîa que fué preso ei rey Garc^a^ que se convertie, segun habeis oido; é
aparescià en aquel dia que los cristianos cntraron en Hierusalem, de matiera
qye le viéron rauchos hombres, é como cortd la cabeza à Juan Ferret en
aquel lugar que el le dié la pescozada» segun que lo habia prometîdo.
Il y a dans ce passage une particularité digne de remarque :
Aîcart aurait été tué a allant i Jérusalem au port de Jafte, le jour
où fut pris le roi Garcia qui se convertit. » Mais au ch. xvni
la mort d*Aicart est bien mise en relation, d'après Guillaume de
Tyr, avec une expédition sur Jaife (inconnue à la chanson fran-
çaise)» mais nullement avec l'épisode du combat contre Gracien
(inconnu k Guillaume de Tyr); on ne peut pas dire non plus
que les deux faits se seraient passés le même jour, car le combat
avec Gracien est séparé du premier récit par riiistoire d*un
î. J'avais supposai {Rom,^ XVU, 528, n, i)que ce miracle éuit peut-être
dû au compilateur, qui aurait ainsi conciîitî les deux données contradictoires
de la mon d'Aîcart et de raccom plissement de la prédiction ; mais il est
beaucoup plus probable que le miracle td quel était dans k texte original.
3S0 G. PARIS
assaut donné h h ville, et il commence par ces mots exprès
(ch. xxi) : « Otro dia de manana..., » Il y a évidemment là
une confusion de mémoire du compilateur, mais elle oe se
comprend gucre à moins d'une hypothèse qui, elle-même, est
nn peu compliquée. L*épisodede Gracien provient évidemment
de la chanson française : bien que l'espagnol soit fort abrégé, îl
y a des passages littéralement traduits % et on peut à certains
endroits corriger les deux textes Tun par Tautre'. Toutefois^
il y a d'assez notables différences; la plus importante est que le
héros de l'aventure est dans l'espagnol Tancré et non Boémond,
Nous avons vu plus haut que la présence de Boémond était
propre à la rédaction remaniée de notre chanson qui nous
est seule parvenue en français, et que la version espagnole
rignore : on peut donc voir ici simplement le reflet d'une
forme plus ancienne du poème français; mais ce qui est parti-
culier, c*est que « Tranquer salio de la celada llamando Gonn-
uersana»; Gonnmrsana n'est pas autre chose que le Conversana
qui apparaît comme surnom d'un Tancré (sans doute autre que
le fameux héros) précisément dans le fragment de la chanson
provençale qui nous est parvenu ' » et ce nom est inconnu i tous
les textes purement français^. Il semble donc permis de sup-
poser que, pour cet épisode, le compilateur, à côté d'une version
française^ a consulté la chanson provençale; dés lors on peut
croire que dans cette chanson la mort d'Aicart de Montmerle
était rattachée au combat contre Gracien, et que le compilateur,
tout en la plaçant avec Guillaume de Tyr à une autre occasion.
1. Jèr, 2195 Quinze mik somicn font avec eh tmner, Conq. XKI é în^aron
quince mtî actmiîas\ Jiw 2255 Les somiers encofitrerent qui Us font âtiritr ^
Conq, XXI r-cnfroniaronse con la rei'ua qm îos àetcvo nmrh; Jér, 2510-11
Devant venoii lot sires,.,.. Vestu oi mt samit ; Conq. XXII eî rey veniva vesiiih
de un xafnete, etc.
2. Ainsi, dans le passage oh il s*agit du traitement que font subir les ta/urs
aux corps des Sarrasins qu'ils ont tués : Jér. 2352 L« con ont escorchiés et avers
et salés, Conq, XXII a îos g or dos desolîaron è ah r ter on é pusihonhs al Sùl^'û faut
sans doute lire Les cras dans le Érançais et aï sal dans l'espagnol.
3. Vûy, Rom,, XIX, p. 590, n. i.
4. Le nom de Conversaim se retrouve dans le curieux passage de Geoffrcî
Gaimar (v. S 771) relatif à Robert de Normandie, qui avait en effet épousé la
fille du duc Guillaume de Conversana, père ou frère de ce Tancré.
LA CHANSON d'aKTIOCHE PROVENÇALE 351
a emprunté à cette môme chanson le passage reproduit plus
haut, qui n'est pas dans Guillaume, et où figure le chef des
Provençaux, Raimond de Saint-Gilles; enfin on expliquerait
ainsi la confusion de mémoire qui lui a fait dire, réunissant
deux données contradictoires, qu*Aicart avait été tué « allant de
Jérusalem au port de Jaffe, le jour où fut pris le roi Gracien ^ »,
En dehors de cet épisode, on ne trouve dans cette partie de la
Conquista rien qui puisse se rapporter à la Canso^ sauf la mention
de Gaston de Béarn, en deux passages où on ne la trouve pas
dans la source', c'est-à-dire dans Guillaume de Tyr,
Au ch. XIX du 1. IH on lit (je souligne ce qui est ajouté
au texte de Guillaume) : « En esto, aquellos que eran en la
hueste non se daban espacio al hacer sus eugenos cada uno
como mejor podia; que el duque Gudufre é el duque de Nor^
mandta é el conde de Flandres tcnian de su parte al noble é al
muy honrado Gaston de Béarn^ a quien hahian rogado ellos que
tomasc sobre si los laborcs de los engcmSy é él Jijoh, é il los facia
labrar muy bien e much ahlna. »
Le début du ch. lx correspond à la laisse 23 du ch. v de
Jérusalem : Tévéque de Matran se lamente de ce que tous les
hauts barons auxquels il a offert la couronne de Jérusalem Tont
refusée :
Vés le duc Godcfroî et Robert le Nonnant,
Huon et Buiemont : il n*en vucleni noient*
Dans les laisses qui précèdent, il fa en effet proposée aux
quatre personnages ici nommés, et en outre à Robert de
Flandres; dans la Conquista (ch. Liv), il n'est pas question de
Boémotid ni d'Hugues le Grand, dont la place est prise par
Raimond de Toulouse et Baudouin de Rohais, Mais le passage
cité ci-dessus est ainsi rendu : « E veis aqul e! duque Gudufre,
è el duque Ruberte de Normandia, é Ruberte el Frison conde
1. Gaston de Béam est d'ailleurs mentionné À diverses reprises par
Guillaume de Tyr comme ayant pris part au siège.
2. La fréquente mention de Raimond de Saint-Gilles au lieu d^autres
personnages nommés dans le poème français ne prouve rien pour Templol
du poème provençal, car, comme on l'a vu, les noms donnés par le poème
français sont ceus de personnages qui n'ont pas pris part à Texpédition ; Us
appartiennent à un rcraanieur, et Raimond de Saint-Gilîes figurait sans doute
à leur place dans la chanson primitive.
3S2 G. PARIS
de Flandres, é don Remon conde de Tolosa é (el conde) de San
Gil, é Tmuiuer, é Baldovin de Roax, / don Gaston de Béarn^ é
otros muchos honrados principes que non quieren recebîr el
senorio. » Tancré ni Gaston ne sont, dans les chapitres précé-
dents, Tobjetde Toffre faite aux autres, en sorte qu*ils semblent
ajoutés ici, assez maladroitement d*ailleurs, d'après une autre
source : on a vu que Tancré semblait être un des personnages
favoris de la Canso provençale.
Ce sont là de bien faibles vestiges de rutilisation d'une source
qui, dans les parties antérieures de la Conqtùsta, avait été mise
si largement à contribution. Il est même remarquable que k
compilation espagnole a négligé des occasions qui s*offraieni
d*eUes-mèmes de tirer partie du poème provençal. Il est certain,
par exemple, que Golfier de Las Tours devait jouer un grand
rôle dans le récit fait par ce poème de la prise de Marra, où les
historiens s'accordent à célébrer sa prouesse; le compilateur se
borne cependant ici (I. Il, ch< clxxxuA i reproduire le passage
de Guillaume de Tyr (VU, 9) : « É entre todos los otros
hobo hî un caballero mancebo ardid, natural de Lemosin,
é decianle Golfer de las Torres, que sabiù fasta cerca de las
almenas. »
On voit avec quelle inconséquence et quelle intermittence
le compilateur a puisé aux diverses sources qu'il a mises à profit
pour son curieux et disparate travail.
VIII
Maintenant que nous avons recherché dans toute la partie
de la Cofiquisîa relative à la première croisade ce qui doit pro-
venir de la chanson provençale, nous allons revenir sur nos pas
et essayer de reconstituer, à Faide du résultat de ces recherches
et du précieux fragment de Madrid, ce que nous pouvons
savoir de Tétendue et du contenu de cette chanson.
Elle commençait sans doute en exposante sa façon Torigine
de la croisade, par le pèlerinage de Raimond Pelet, d'Atcart de
Montmerle et de Gondemar Jlf Vnixi : outragé au Saint Sépulcre,
Aicart de Montmerle a une vision dans laquelle un ange lui
ordonne d'aller dire au pape que Dieu veut qu'il prêche la
croisade, et lui promet qu'il vengera son affront au lieu même
LA CHAKSON D AKTIOCHE PROVENÇALE 353
OÙ il l'a subi. Les pèlerins accomplissent Tordre reçu {Rom.^
XVIIj 527); Raimond Pelet s'entend en outre a%^ec Raimond
de Saint-Gilles. En même temps, un chevalier avait eu dans
Féglise du Pui la même vision angélicjue, et bientôt le pape
Urbain, ainsi sommé de deux côtés, venait en France prêcher
la guerre sainte et mettait à la tûte des croisés Tévéque Ademar
du Pui (XVII, 529). Du rôle prêté à Pierre l'Ermite dans la
légende proprement française, il n'était sans doute pas dit un
mot. — Dans rénumération des croisés, la chanson faisait une
place prépondéraiiie aux Méridionaux, notamment à Gaston
de Béarn et à Goîfier de Las Tours (XVII, 525).
Le récit du siège de Nique mettait en relief les exploits de
ces guerriers du Midi : on y voyait Gaston de Béarn, accompa-
gné du vicomte de Turenne, de Hugues des Baux, de tous les
Provençaux et Gascons, s'emparer de quinze barques sarrasines
sur le lac qui baigne la ville, et Golfier de Las Tours, Hugues
de Monteil, Amanieu de Lebret, etc., se distinguer par leurs
prouesses (XVII, 529). A la bataille de Gorgonîe, c'est le comte
de Saini-Gîlles qui jouait avec Boémond le rôle principal, et
qui envo3^ait 1 Godefroi de Bouillon, pour lui demander secours^
Golfier de Las Tours, dont les exploits dans la bataille étaient
complaisamment racontés (XVII, S 3 0* — Au passage du pont
du Fer devant Antioche, le vicomte Taleyran^ et Golfier de
Las Tours accompagnaient Robert de Normandie (X\1I, 523),
— Au siège d'Antioche, la Canso nommait beaucoup des Pro-
vençaux et des Gascons campés devant la porte du Chien, et y
ajoutait « les Limousins, les Saintongeais, ceux d'Auvergne,
du Périgord et du Querci, qui tous s'entendaient entre eux et
s'armaient de la même façon « (XVII, 534). — Lors de la
construction du pont de bateaux sur le Fer, — trait historique,
mais inconnu aux poèmes français, — celui qui se distinguait
le plus était Golfier de Las Tours (XVII, 536). — Nous retrou-
vons ce héros dans le récit d'une expédition menée par Boé-
mont et le comte de Flandres (XVII, 537), et d'une bataille
livrée à une armée torque qui essayait de déUvrer Antioche ; il
y figurait à côté d'Amanieu de Lebret, de Tancré, qui paraît
I, Je pense qu'il faut interpréter ainsi « le vioomteTaleg » qui figure dans
le texte espagnol : il s'agit sans doute de Guillaume Talevnui, ûh du comte
Hélie m Je Périgord.
3 54 G. PARIS
avoir été spécialement célébré par le poème provençal, et de
Jofroi de Roussillon, qui y était tué (X\TI, 538). — Une expé-
dition heureuse sur Arsac, dont Témir avait appelé les chrétiens
à son aide et devenait leur allié, était dirigée par Raîmond de
Saint-Gilles (XV^II, 539)- — On ne peut savoir parla Conquista
comment la Canso racontait le voyage de Sansadoine et les
préparatifs de Texpédition de Corbaran; mais il n'est pas
douteux qu'elle les racontât. En tout cas, il y était question
des <r sorts n de la mère de Corbaran et de la prédiction qu*elle
lui faisait (XIX, 585).^ — Cest au second siège d'Antîoche
qu'appartient le seul fragment de notre chanson conservé en
original. Nous pouvons tirer de ce qu'il contient quelques con-
clusions pour ce qui le précédait. La Camo donnait au château
resté au pouvoir des Turcs le nom, sans doute authentique, de
Mal Vc:;i (v. 218). Elle ne connaissait pas le personnage
d'Amedelis (XIX, 569), non plus que celui du roi sarr<isin w le
Rouge Lion », qu'elle remplaçait auprès de Corbaran par des
rois non moins fantastiques (XVII, 515). Le message qui
précédait le combat était rempli par Pierre TErmire (?) et le
cor tes drogoman Arloin, le Herluin des Gtsta (XJX, 564); on
proposait, mais en vain, de remettre le sort de la guerre au
combat de trente contre trente (XIX, 584); Corbaran deman-
dait à Arloin, qui y consentait, de revenir le trouver le lendc^
main pour lui dire les noms des chefs croisés au fur et â mesure
qu'ils sortiraient de la ville. Cest cet épisode qui remplit le
début de notre fragment ; Arloin renseigne le chef sarrasin sur
la composition de chaque corps d'armée qui apparaît, et Tengage
à renoncer à la guerre contre des adversaires aussi redoutables.
Dans cette énumération, la Canso se montre beaucoup mieux
informée et plus voisine de Thistoire que ne Test la chanson
française conservée dans Ténumération correspondante, qu'elle
attribue à Amedelis; mais il y règne, surtout dans la première
et la quatrième « échelle », un certain désordre, imputable sans
doute, au moins en panie, aux copistes, mais aussi au poète,
comme le montre Taccord sur divers points de la version espa-
gnole et du texte original* Le célèbre épisode des « chevaliers
blancs » envoyés par le ciel au secours des combattants chrétiens
a, dans la CansOy une forme toute particulière, plus belle, sinon
plus ancienne, que toutes les autres. Corbaran, qui a d'abord
dédaigné les avis d' Arloin et a même entrepris une partie
LA CHANSON D ANTIOCHE PROVENÇALE 355
d'échecs, se sent inquiet après le départ de celui-ci et se rap-
pelle les prédictions de sa mère; il essaie, mais sans succès, de
reprendre la proposition de la veille sur le combat de trente
contre trente. Après une description de la tente où Corbaran
réunit les quarante-quatre rois qu'il commande dans un der-
nier conseil de guerre % la bataille s'engage et le poème nous
en raconte plusieurs épisodes, en citant une extraordinaire abon-
dance de noms propres : mentionnons seulement ceux d'Eral de
Polignac, qui est tué, et de Golfier de Las Tours, qui est blessé,
l'un et l'autre après avoir tué un « amiral » ^. Le fragment
s'interrompt malheureusement avant la fin de la bataille. Nous
pouvons toutefois retrouver encore, grâce à la Conquista, une
partie assez notable du récit que le poème provençal faisait de
cette journée ^ Dans la Chanson d'Antioche, qui suit ici Robert
le Moine, c'est-à-dire essentiellement les Gesta^ Corbaran dit à
son « canberlenc » que quand on allumera dans Vost un grand
feu, ce sera le signal que tout est perdu, et qu'il devra alors
emporter tout le trésor de son maître et s'enfuir avec (VIII, 24),
ce qui est en effet exécuté plus tard, sans succès d'ailleurs
(VIII, 52). Cet incendie (des herbes sèches de la prairie) avait
dans la Canso une tout autre signification. Au moment où la
bataille va commencer, Corbaran dit aux rois qui l'entourent
dans sa tente :
Cant auziretz bruir los tabors autamen,
E veiretz la gran niula ♦ el foc el fum el vcn,
Vos poinetz tuih ensem ad u desrcngamen,
E negus por paor no lais resvaimen,
D'aisi a la siptat no fasa tenemen (V. 348-52).
Ce passage est omis dans la ConquistUy qui suit à cet endroit
la chanson française; mais il est rappelé au ch. clvi, qui nous
représente certainement un morceau du poème provençal :
Corvalan bien del comienzo mandara i sus rfcos hombrcs que cuando
vcisen el fumo 6 el fuego ante el estandal, que cstonce se ayuntasen todos
1 . Voyez ci-dessous les remarques faites à ce propos.
2. V. 655-672.
3. Je reprends ici ce qui a été dit précédemment (XIX, 590-591) d'une
façon qui a besoin d*ôtre développée et précisée.
4. Je corrige ainsi au lieu de r/7/a, qui ne donne aucun sens.
3S6 G. PARIS
dondc quier que estuvîesen, é que veniesen d él , é mandani otrost MtgsT
mudvA paja é cardos sccos, é que ficiesen con cllo aïmenara; é cstonces
que 'corricsen todos en uno, é que asi sacarbn los cristianos dcl campo por
fuerza, é que fuesen firiendo en ellos hasta las puertas de Antîoca, é que
entrasen de vueJta con ellos en la cîbdad. É ottosi habia puesto esta scttaJ
mesnia con los del alcdzar de Mal Vccino, 0 nundôles que dcscendicsen todos
por la cuesta apriesa, é que entrasen en la villa é abriesen luego las pucrtas,
é asf lo hicieron. E cuando Corv^alan tocd cl cuerno, é se alzà el fumo por
el aire arriba tan alto que daba hasta Us nubes, é ÏJama con él tan grande
que era mara villa» los nioros cometxzarau estonce d taner los atam bores e Jos
anaftles é los bocinas, é dicron otrosf los lurcos las voces tamanas é tan
grandes los alaridos que senjejaba que aquella tierra se queria sumir c des-
cender en los abîsmos, etc.
Li fin de ce chapitre est occupée, ainsi que le ch, CLvni,
par l'épisode de l'intervention des terribles « Acimitas » et de
leur défaite (grâce aux miraculeux chevaliers blancs), épisode
dont une partie, comme on Ta vu (XIX, 590), est littéralement
traduite d'un passage antérieur de la Camo. A ta Canso appar-
tient encore le ch. cl vu» qui, seul entre tous les textes histo-
riques et poétiques, nous raconte les combats livrés aux défen-
seurs du chfiteau de « Mal Voisin » par Raimond Je Saint-
Gilles, reste dans Antioche \
Pour ce que le poème provençal pouvait encore contenir, la
Conquhîa, comme on Ta vu, ne nous fournit que de très maigres
indications. Cest en dehors d'elle que nous supposons que les
prouesses de Golfier de Las Tours à la prise de Marra étaient
racontées en détail dans la Canso. Nous avons vu en revanche
qu'elle permet de conjecturer que le poime provençal connaissait
l'aventure du roi Gracien, où il donnait un rôle important i
Tancré de Conversana, et qu'il y rattachait la mort d*Aîcart
de Montmerle, La résurrection miraculeuse de celui-ci et la
vengeance qu'il tira de Jean Ferret remontent sûrement à la
même source. Enfin, sans parler de plus d'un épisode où figure
Raimond de Saint-Gilles et qui pouvait se trouver aussi dans la
I. Au cil. CLix, la Conquisia reprend le récit du poème français et inter-
prète de même, comme un signal de retraite et non d'atuque, le feu que
Corbaran fait mettre dans le camp. — L'effroi que causent aux défenseurs de
« Mal Voisin » la vue des chevaliers bïancs et le iremblcrnent de terre paraît
s'être trouvé dans les deux poèmes (Conq., II, clxvi).
LA CHANSON D ANTIOCHE PROVENÇALE 357
première forme du poème français, il semble résulter du pas-
sage ciit* en dernier lieu que Gaston de Béarn était compris au
nombre des barons auxquels on offrait la couronne de Jérusa-
lem et qui déclinaient cet honneur* Nous pouvons en tout cas
conclure d\m passage du fragment conservé, comme Ta déji
remarqué P» Meyer, que le poème allait bien jusqu'à la prise
de Jérusalem'.
Nous aurions encore quelques renseignements à joindre i
ceux que la Conquis ta nous donne sur le poème provençal si
nous pouvions lui attribuer ce que A. du Mège a fait conniutre
de ce qu'il appelait la CaNSo de San Gili, Maïs les doutes sur
Tauthenticité de ce poème sont trop graves pour que nous
puissions en tirer parti % et même, fût-il authentique, il ne
serait nullement prouvé qu'il fût identique avec notre poème '.
C*est avec plus de confiance que nous pouvons rapporter i
celui-ci rallusion, indiquée par P. Meyer^, que fait un trouba-
dour i un exploit d'ailleurs inconnu de Golfier de Las Tours.
Voici en effet ce que dît Uc de Pena à sa dame -
Et atîc aN Golfier de Las Tors
Non près dcl mcssatge tan gcti
Que portct per son ardimen
En Antioclu al s poîgnadors,
Don fetz marns paubres cnriquir
E mains niancns enpaubrezir,
Cum a mi ictz» dompna, de vos,
QjLn me dis^et/ crânes joios s.
Nous ne trouvons, il est vrai, aucune trace de cette histoire
dans la Conquista ; mais nous savons combien il s'en faut qu elle
1. V. 688-90 : A donc eran pro ottu en aqueîa sa^o, Qttcpres^ro TabariaQ l'hé-
mîstiche est trop long, et la prise de Tabaric ne paraît avoir donné lieu à
aucun combat) e! temple Sahvfto, Tro David (P. Meycr traduit avec toute
vraisemblance « la tour de David i», mais alors tl faut lire Tor) el Stputcre i
raltm oraso (? P. M, traduit c< et le reste »).
2. Vo\\ P. Mever, Arch. de POr. lot., II, 509.
3. Les discours attribués à l'évcquc du Pui et à Raîmoiid de Saint-Giîles,
à la bataille de Gorgonie, ne se retrouvent pas dans la Conquista (0» vj ss,),
qui pjirait ici remonter à notre poème.
4. Cimmon de la croisade contre tes Aîhigeois, 11, }8o.
5. Cora quem desplagua Atnors {Anhiv de Herrîg, XXXIV, 179).
358 G. PARIS
ail mis ;\ profit tout le poème provençal, et ce quî rend bien
vniisembhble que Tépisode en question appartenait à ce poème,
c'est le soin qu'il prend partout et que nous avons maintes fois
relevé de célébrer Goltier de Las Tours, et la circonstance qu'un
des exploits qu'il lui attribue (à h bataille de Gorgonie) est
précisément de s'être acquitté d*un message périlleux ^
DC
Il nous reste, pour terminer cette étude, à nous demander ce
qu*est au juste le poème provençal dont le manuscrit de Madrid
nous a conservé un fragment et dont la Cotiqtiista nous permet
de nous faire une idée générale, à quelle époque et à quelle
région il appartient, quelle est sa valeur historique et littéraire, et
dans quel rapport il est avec les mentions de poèmes anaIo;^ues
qu'on avait relevées jusqu'à la découverte du fragment publié
par Paul Meyer,
On sait que des témoignages divers nous attestent Texis-
tence de poèmes méridionaux sur la première croisade, Le plus
important, maintes fois cité, mais qu'il faut citer encore, est
celui deGaufrei de Vigeois, relatif à Grégoire Bechada :
GregoritiSj cognomeiito Bechada, de Castro de Turribus, profes^one miles,
subiilissinii iiigenii vir, aliquAntulum imbutus littcris, homm gesta prelio
rura matern.i, ut îta dixerim, lingua, ritmo " vuJgari, ut populus plcniter intel-
Ugcre, ingens volunien decenter composuit î ; et, ut vera et Caceta verba pno-
1. Une autre aventure, beaucoup plus célèbre, de Golfier de Los Tours,
l'histoire du lion qu'il délivra d'un serpent et qui le suivit depuis lors comme
un chien fidèle» ne doit pas s'ûtrc trouvée dans le poème, D*unc pan, la Coti-
quista la mentionnerait sans doute à quelque occasion; d'iautrc part, on ne
voit pas où elle s'intercalerait^ et enfin elle est d'un genre de merveilleux qui
ne répond pas au caractère de notre poème. Bien antérieure à Golfier, elle s'est
attachée à lui comme à Ivain et comme à un autre croisé, le Flamand Gilles
de Chin. Sur les auteurs qui rapportent cette anecdote, voy. les textes cités
par P. Meyer.
2. Sur la lecture et T interprétation de ce passage proposées par M. Arbel-
lot, qui aboutiraient à l'invraisemblable conclusion que Bechada avait écrit
imc histoh-e de la croisade tn prase provençale, voy. les remarques de P. Meyer,
Hom., X, 459.
3» La phrase cloche, et il faut évidemment suppléer quelque chose après
tntelligeredj par exemple ce dccantavit (ou « narravît »), et înde ».
LA CHANSON D ANTIOCHE PROVENÇALE 359
fcrr€t« duodccim annorum spacîo super hocopus optTâm dédit. Ne vero viles-
ceret propter verbum vulgare, non sine precepto cpiscopi Eustorgii ci consi-
llo Gaubeni Normanni hoc opus oggrcssus est. Supmdicti princeps fuit ille
Gulpherîus de Turribus, qui in suprascripta belle, et maxime apud Marram
urbem, magnum sibi nomen in preclaris facinoribus acquisivit *.
Deux circonstances remarquables portent à croire que le
fragment de Madrid appartient à Tœuvre de Grégoire^ Bechnda.
La première, déjà relevée par M, Chabaneau ^, est le passage
(v. 677) où Fauteur, parlant d'un des corps d'armée qui sort
d'Antioche, dit :
£ nostre Leftmsi et Alvergnas i so.
Le château de Las Tours, où habitait Grégoire (H** Vienne,
arr. de Saint-Yrieix, canton de Nexon), est en plein Limousin, et
il écrivait sous Tinspiratian de Tévéque de Limoges. D'autre part,
comme nous Tavons vu, le pocme célébrait tout particulière-
ment les exploits de Golfier de Las Tours, et Golfier, qui vécut
jusqu'en 1126 au moins ^ était le possesseur du château de Las
Tours, et le seigneur des chevaliers qui, comme Grégoire Bechada
et d'autres membres de sa famille ^, logeaient dans ce château et
formaient sa « maisnîe privée ». Userait à coup sûr très invrai-
semblable qu*îl eût existé sur la première croisade deux poèmes
aussi étroitement rattachés i une même région, voire ^ une
même localité et à un même personnage.
P. Meyer, qui ne pouvait connaître le rôle important attribué
à Golfier de Las Tours par le poème dont il puWiait le seul
fragment conservé en original, ne s'est pas montré favorable à
cette hypothèse : « Un passage de la chronique de Geoffroi de
Vigeois nous apprend, dit-il *, que Grégoire Bechada, Vnn
1. Ce passage, imprimé dans les différentes éditions, malheureusement
toutes imparfaites, de la chronique de Gaufrei, a été reproduit dans Chaba-
neau, Biographie des Troubadours^ p. 9.
2. Rei'ué des langues rotftanes, 1885, p. 148.
j. Sur ce nom, que M. Arbellot a voulu à ton remplacer par celui de
Géraud, en faisant de IVcrivain un frère de Golfter de Las Tours, voy. les
remarques d' A. Thomas, Rom.^ X, 59 T.
Voy Arbclloi, Les Cffrvaliers limcmsins d h croisadt^ p. 4I.
4. Voy. Thomas, L c,
%, Arcb. de TOr, lai,, II, 468.
360 G. PARIS
des témoins de la croisade, avait composé, à la prière de révèque
de Limoges, Eustorge, un récit en langue vulgaire (limousine)
et en vers de la première croisade. Cet ouvrage, qui appartient
au premier tiers du xii' siècle, est perdu, et notre fragment ne
semble pas assez ancien pour qu'on puisse l'en croire tiré. »
Mais si le poème de Grégoire remonte au premier tiers du
xîo'' siècle, c'est sans doute à la fin de ce premier tiers, et il
n'y a même aucune raison pour ne pas le croire un peu pos-
térieur. Gaufrei ne dit nullement que le poète ait été témoin
de la croisade; le contraire semble même résulter de ce qu'il
nous dit du temps que Bechada mit à préparer son ouvrage :
il n*y employa pas moins de douze ans, pendant lesquels il
recueillit sans doute des témoignages et des récits soit écrits,
soit oraux; parmi ces derniers, il faut faire une place impor-
tante à celui d*on certain Gaubert le Normand, qui, lui,
avait évidemment pris part à la croisade. On ne le connaît pas
autrement, mais c'était ou un des compagnons de Robert de
Normandie, réfugié peut-être en Limousin après ta défaite et la
capture de son maître i Tîncliebrat, ou un Normand dltalie,
qui était venu dans des circonstances inconnues s'établir en
Limousin ; dans Tune et l'autre hypothèse on explique facile-
ment par son intervention le rôle important donné dans le
poème à Boémond, à Tancré et paniculièrement à Tancré de
Convcrsanc, proche allié du duc Robert. L'évêque Eustorge
occupa le siège de Limoges de 1115 à 11 37 : Gaufrei dit sim-
plemeot que Grégoire commença {aggressus est} son grand
ouvrage à sa prière; il ne dit pas qu'Eustorge i'ait vu terminé;
comme Bechada mit douze ans i l'écrire, on peut très bien sup-
poser qu'il le commença vers 1130 et l'acheva vers rr42*. Il
paraît alors bien difficile d'affirmer que « notre fragment ne
semble pas assez ancien pour qu'on puisse l'en croire tiré ». Ce
fragment nous est arrivé fort maltraité parles copistes successife;
mais je ne vois dans la langue aucun fait attesté par la rime ou
la mesure qui nous empêche de le Élire remonter aux environs
de 1130-1140.
I . On peut conclure des vers 688 ss. que notre poûme a été écrit après la
mon de b plupart des héros de la croisade et notamment de Golfier de Las
Tours.
LA CHANSON d'aNTIOCHE PROVENÇALE 36 1
Notons encore qu'il convient très bien ù ce que nous dit le
prieur de Vigeois du long travail de ce chevalier « très subtil et
sachant quelque peu de latin » ; il montre en effet une certaine
érudition, et la masse énorme des noms propres qu'il énumére
atteste de longues recherches et de grands efforts d'information.
Un poème d'origine plus spontanée et plus populaire ne porte-
rait sans doute pas ce caractère.
D'autres mentions bien connues nous attestent Texistence en
provençal d'une Canso ifAnlmba et nous en indiquent même la
forme. La plus ancienne est celle de Guiraut de Cabreîra, qui
dit à son jongleur : UAniiocba Non sabes ja {Cabra juglar),
Guillaume de Tudèle, Fauteur de la première partie de la
Ctjanson de la croisade d'Albigeois^ dit dans des vers célèbres :
Scnliors, esta canso es faita d'aital guia
Com sda d*Antiocha et ayssis versifia,
E s'a tôt aital so, qui diîre lo sabia (v» lô-jo) ^
Cette indication, comme l'a démontré P. Meyer, peut très
bien s'appliquer à notre poème. Il ajoute : « Je ne suis pas
arrêté dans Tidentitication que je propose, sous toutes réservées
d^ailleurs, par la contradiction apparente qui résulte du nom de
Chatison d' Atit iœk :idopié par G. de Tudêlc, et de la supposi-
tion faite plus haut que le poème auquel appartient notre frag-
ment se serait étendu jusqu^A la prise de Jérusalem. Il n'est pas
impossible qu'une chanson, qui embrassait toute la croisade,
ait reçu dans l'usage son titre de Tévènement qui paraissait le
plus considérable. Et certes, bien que la prise de Jérusalem ait
été le but final, on ne saurait nier que la prise d*Antioche, la
découverte de la sainte Lance et la défaite infligée aux Sarrazins
dans des circonstances presque merveilleuses, aient dû impres-
sionner vivement les contemporains, j) La môme chose semble
s'être passée au nord de la France, où nous voyons te nom de
Ofanson d*Antiixh\ dans un passage connu de Lambert d'Ardres,
donné à Tensemble du poème sur la première croisade. Cela
s'explique sans doute, outre la raison donnée par P. Meyer,
par le fait que les premières chansons qui célébrèrent en France
les victoires des croisés se répandirent aussitôt après la prise et
la délivrance d'Aniioche, et furent dues à des pèlerins revenus
1 . Chamon di la croisade dis Albigeois ^ t. I, p. xliil
3é2 G. PARIS
en France i\ ce moment : le nom de Chanson d^Antiocfje resta
attaché à tous les poèmes qui célébraient la première croisade.
Mais peut-on croire que ce nom de Chanson d'Antioche ait été
donné à l'œuvre de Grégoire Bechada ? Si on accepte les raison-
nements qui précèdent, on admettra en même temps qu'il en
est ainsi, puisque notre poème doit être, d'une part, celui de
Grégoire, et d*autre part, celui que Guillaume de Tudele
désigne sous le nom de Catiso (TAntiocha. P* Meyer a toutefois
exprimé (avant de connaître le fragment qu'il a publié) un
doute sur Tidentité des deux œuvres, parce que Gaufrei de
Vigeois donne i entendre que le poème de Bechada embrassait
tous les événements de la première croisade» Mais il a détruit
lui-même plus tard cette objection par les remarques qu*on
vient de lire»
Je crois donc que nous avons dans le fragment de Madrid et
dans les parties du poème auquel il appartient que nous a con-
servées la Gran Conquista de Ultramar les restes de la Canso
ifAtitiocha, œuvre do chevalier limousin Grégoire Bechada,
attaché aux seigneurs de Las Tours, composée environ de 1150
à IT45. La valeur historique de ce poème ne me semble nulle-
ment ;\ dédaigner : il contient certainement beaucoup de rensei-
des témoins oculaires. Mais il est surtout
qu'on peut appeler T histoire poétique de la
il nous montre, en regard des légendes nées
parmi les Français du Nord, celles qui eurent cours chez les
Français du Midi (voy. notamment Forigine si différente attri-
buée à la croisade). L'aoteur a d'ailleurs fait une œuvre com-
posite, pour laquelle il a puisé ;\ beaucoup de sources, et il est
probable, comme je Tai indiqué, qu'il a utilisé aussi les chan-
sons françaises qui circulaient déjà de son temps.
P. Meyer a été sévère au point de vue esthétique pour le
fragment qu'il publiait : « Le style, dit-il, est de la plus grande
faiblesse; les mots de remplissage, les chevilles abondent, » Je
ne puis partager tout à fait cet avis. Le stj4e ne ressemble
assurément pas à celui de la poésie lyrique, et il ne doit pas lui
ressembler : il est beaucoup plus naturel, plus simple, plus
populaire ; mais il n'est ni plat ni prolixe, il a toujours de la force
et souvent de la couleur. Les vers ne sont pas exempts d'hémi-
stiches de remplissage et de formules toutes faîtes, et en cela ils
ressemblent à ceux de toutes les chansons de geste, mais ils
gnements dus à
précieux pour ce
première croisade
LA CHANSON D*ANTIOCflE PROVENÇALE 365
n'en sont pas encombrés, et souvent ils ont une excellente allure
épique. La forme de la strophe, avec son petit vers féminin
final, est heureuse, et paraît avoir été introduite par l'auteur de
notre chanson au moins dans la poésie épique : c*est de là
qu*elle a passé à coup sûr dans la chanson <Ic la croisade albi-
geoise, et peut-être dans un certain nombre de chansons de
geste françaises. Les discours mis dans la bouche des person*
nages ne manquent ni de vigueur ni de caractère; les scènes de
combat sont racontées avec animation. Les conceptions poétiques
dignes de louange ne font pas défaut; celle des pèlerins morts
qui prennent part au combat est véritablement belle, et si on
n'a pas le droit d'en iaire remonter tout l'honneur au poète, il
a do moins le mérite de l'avoir accueillie et bien rendue.
En somme, le poème de Grégoire Bechada, intéressant par sa
date, par son sujet, n'était pas à mépriser pour sa forme et paraît
avoir justifié l'estime qu'il avait inspirée aux contemporains. La
découverte d'un fragment original de ce poème et de la traduction
partielle qu'en a faite la Cmquista apporie à la littérature proven*
cale un véritable enrichissement, et il serait fort à désirer qu'on
retrouvât en Espagne les restes, qui y subsistent peut-être encore,
du précieux manuscrit auquel appartenait notre fragment.
Il y a d'ailleurs peut-être une autre chance encore de rentrer
en possession de l'œuvre de Bechada, Mon ami A. Thomas a
relevé le curieux passage suivant dans un des recueils de
Gaignières (B. Nat., lat. 171 18, foL 424) : « A la marge de
la copie envoyée à M. Justel*, où il tst parlé du hvre de
Boldricus, abbé de Bourgueil, y ql i ce livre est à Las Tours escrit
m rime du vieux gaulois m tr/m, fort lisible^ mais malaisé à
entendre. Peut cstre que c'est celuy de Grégoire Bechada dont
il est parlé en suite, car Baldncus est imprimé en latin et a
escrit en prose, » Cette conjecture est extrêmement vraisem-
blable, et le manuscrit conservé au château de Las Tours était
peut-être l'original même de Bechada, qui habitait ce château
et écrivait en l'honneur de son feu seigneur Golfier. Qu'est-îl
devenu depuis le xvii* siècle? C'est aux archéologues limousins
à le rechercher : il y aurait là une belle découverte à faire.
Gaston Paris.
t. n s'agit d'une copie de U chronique de Gaufrei de Vigeots,
LES POÉSIES PROVENÇALES
CONSERVÉES P^Ul DES CHANSONNIERS FRANÇAIS
§1, — INTRODUCTION.
Quoiqu'on ne soit pas encore complètement d'accord sur la part
d'originalité qu'il faut reconnaître aux poètes « courtois » de
la France septentrionale, ni sur la valeur esthétique de leurs
poésies*, tout le monde s'accorde aujourd'hui à penser que Tart
raffiné qu'ils ont cultivé est né dans le Midi, Le fait qu'il s'agit
ici d\me imitation est incontestable, grâce à la quantité de
rapports d'idée et de forme qui, jusque dans les plus petits
détails, existent entre les poésies des trouvères et celtes des
troubadours. On ignore encore la date précise h laquelle ce
genre a fait sa première apparition dans le Nord, et Ton trouve,
sur ce point, des contradictions dans les meilleurs travaux trai-
tant ce sujet. Ainsi M. P. Meyer, après avoir dit que la poésie
courtoise des Méridionaux exerça, dés la fin du XI P sièch\ une
influence appréciable sur la poésie des pays de langue d'oïl
(Rom., XIX, 2), fixe, en précisant la date, le commencement
de cette influence à lY'poque où Aliénor de Poitiers fut reine de
France (1137-52) {Rom,^ XIX, 3)^; les dates que nous donne
M, Jeanroy sont également incertaines : cf. De nostraîihiis niedii
aevi poeiis qui primum lyrica Aquitaniac carmina imitati sint, ro :
I* Voyez Topinion, assez différente des idées généralement reçues, que
vient d*émettre M. Bédier dans sa thèse latine sur Colin Muset,
2* [11 n'y a là aucune contradiction. On ne peut constater Tinlluence pro-
vençale sur ta poésie lyrique française qu'à la fin du xii« sitcïe, parce que
nous n'avons guère de spécimens plus anciens de cette poésie. Toute une
période de la poésie des trouvères s*est perdue. — P. M ]
LES POÉSIES PROVENÇALES 365
circa annum iiJOy et 63 : neque antefinem duodecimi saeculi. En
tout cas, la poésie courtoise apparaît au Nord sensiblement plus
tard qu'au Midi, et c'est au Nord qu'il faut chercher l'imitation.
M. Jeanroy cite plusieurs passages français qui traduisent textuel-
lement des passages provençaux (JDe nostr.y 88 ss.) ; M. P. Meyer
signale de nombreux cas d'imitation en ce qui concerne la forme
(/. c.y 13 ss.). Les relations personnelles entre les trouvères et les
troubadours nous sont en outre attestées par un échange de
couplets entre Folquet de Romans et Hugues de Berzé*, et un
jeu parti moitié français, moitié provençal (Suchier, DenkmàleTy
326). Mais nous possédons, de l'influence de la poésie méri-
dionale sur celle du Nord, une preuve encore plus évidente,
c'est que plusieurs chansonniers français nous ont conservé un
assez grand nombre de pièces provençales^. En outre des frag-
ments de chansons ont été cités dans les romans français de
Guillaume de Dole et de la Violette.
§ 2. — LES PIÈCES.
Voici la liste aussi complète que possible des poésies proven-
çales qui se trouvent dans différents manuscrits français, avec le
nom de leurs auteurs.
Pour abréger, je désigne les mss. par les sigles suivants :
A Berne 389 (B' de Raynaud) G Bibl. Nat. 12615 (Pb")
B Bibl. Nat. J 20050 (Pb") H — 24406 (Pb'O
C — 844 (PbO I Val. Reg. 1659
D — 795 K Montpellier 196
E — 846 (Pbs) L — 236
F — 12581 (Pb'») M Bodl. Douce 308 (O)
1. AiMERic DE Peguillan, Qui la ve en ditz C 185 t*.
2. Albert de Sisteron, En mon cor ai un* aital encubida C 203 a,
1. Qui n'est sans doute pas isolé, cf. Zeitschr.y VIII, m.
2. Elles sont relevées dans le Grunâriss de Bartsch, mais avec un assez
grand nombre d'erreurs et d'omissions.
3. Publié, en reproduction phototypique, par la Société des aticiens textes,
4. [Dans cette table les incipit sont donnés non pas conformément au texte
des mss. indiqués, mais selon la leçon admise dans le Grntidriss de Bartsch.
Les attributions sont aussi celles de Bartsch, ce qui explique qu'elles soient
^66
f p Beatrix de Dia,
4. Bernârt de Ventabolr
i* -
6. —
7. —
5. —
9. -
10. —
11. —
la» —
tj. CadeneTj cf. no 91
14. Daude de Prades,
15. Elias FoNSALA3>Aj
16. FoLdUET DE Marseille T
17. —
ïS. -
19. —
20. —
21. Gaucelm Faidit,
%2. -^
24.
25.
26.
27.
28.
29.
L. GAUCHÂT
A chantar ra'er
C 204 i',
, Ab joi mou lo vers d comens
C 202 a, FwkiU ■ 320-328,
Axa no vei luzir soîeil C i jo t.
La doussa vou ai auzîda iî 89 ro.
Lanquan foillon bosc e garric C 202 i^*
Non es mera villa s'en chan C [91a.
Qpan par la fi ors josial vert roîll C 1 88 h^
Qpan vei la flor Terba fresc' e la foilla B 8ë r«.
Qjîan vci lalauzeta mover B 148 v^^, C 1901/,
ViôlHk 4193-4200, Dok L 96 h
Tuït cil quem pregon quVu chan C 191 a,
Cf, n^' 39,84,96, 108, 109, m,
Be voîgra s'esser pogties C iBSb.
BeU m*es la vou autana C 196 a ^ /Mf C 93 i».
De bon loc movon mas chanson C T9S ^.
En chantaa m*aven a membrar C 1S9 À.
Sttot me sui a tart aperceubuiz C 18S fr*
Tan m'abeîis Tamoros pensameos C idS^-
Tan mon de cortex razo C î88 ^,
En la vostra mantencnsa C 200 d.
Chant e déport joi domnei e solatî B 8> r*.
Fom cau^a es que tôt lo major dan B 87 r«*.
C J9ii,/89ii.
Jamais nuill temps nom pot ne far aitiorsi
C200fl.
Lo gens cors honratz 5 90 ro.
Mon cor e mi e mas bonas chansos B 84 r© ».
No m'alegra chans ni critz C 202 b.
Si anc nuills homs per aver fin coratge
5 86 yo.
Sitôt m*ai tarzat mon chan B 86 r».
S'om pogues partir son voler B 89 v®.
parfois en désaccord avec celles que donne le Catalogue imprimé de la
Bibliothèque nationale pour le ms. 844. Lorsque j'ai rédigé la notice de
ce ms., en 1863, on n'avait pas pour la poésie des troubadours les moyens de
recherche dont on dispose maintenant, et j'ai le plus ordinairement adopté
les attributions du chansonnier 856. — P. M.]
1. Edition de Fr. Michel, p. 19.
2. Bartsch dit que cette chanson se trouve également dans I (r^); c'est une
méprise.
LES
30.
31-
32.
33.
34.
35.
36.
37.
38.
39-
40.
41.
42.
43.
44.
45.
46.
47.
48.
49-
50.
51.
52.
53-
54.
5S.
56.
57-
58.
59-
60.
6x.
62.
Gui d'Uisel,
guilhem augier,
GuiLHEM Magret,
Jaufre Rudel,
Marcabru,
Peire d'Auvergne,
Peire Cardinal,
Peire Vidal,
Peirol,
Perdigo,
Pistoleta,
Pons de Chapteuil,
Raimbaut d*Orange,
Raimon Bistortz,
Raimon Jordan,
RiGAUT DE BaRBEZIEUX,
POÉSIES PROVENÇALES 367
Ces de chantar nom faill cors ni razos C196 c.
Ses alegratge C iS6d,
Aiga poja contra mon C 201 c,
Enaissim pren com fai al pescador C 192 ^.
Lanquan li jorn son lonc en mai B 81 v»»
C iSgd,Doh f. 75 b,
Qpan lo rius de la fontana ^11$ ro, B 149 vo.
Bel m*es quan son li fruit madur C 203 d,
Pax in nomine domini C 194 ^.
Dejostals breus joms els loncs sers B 86 ro.
Amies Bernart de Ventadom C 190 ^.
Ane no vi Breto ni Baivier D 1 a,
D'Esteve de Belmon m'enoja D i c.
Falsetatz e desmezura D 1 b.
Tostemps azir falsetat et enjan D i a.
Tostemps volgram vengues bon'aventura
D i c.
Totz lo mons es vestitz et abrazatz D i a.
Ane no mori per amor ni per al £ 85 vo.
Bem pae d'ivern e d*estiu B 87 v©.
Quan hom es en autrui poder C 204 d\
Tart mi veiran mei amie en Tolzan Ci 97 a.
Cf. no 88 note.
Atressi col cignes fai C 197 r.
Del seu tort farai esmenda B 88 vo.
Trop ai estât qu'en bon esper non vi B 89 ro.
Ar agues eu mil mares de fin argen B 82 ro,
D 200, E 125, F 88 ro, I, M no 182 des
ballettes».
Leials amies eui amors te joios C 202 d.
Us gais conortz me fai gaiamen far ^ 90 vo.
Pos tais sabers mi sors em ereis 5 88 v©.
Eu no trop quem reprenda D i c.
Lo elar temps vei brunezir C 1^2 d.
Vas vos soplei donma premeiramen C 194 a.
Atressi com lo leos C 195 c.
Atressi eom l'olifans -^ 238 ro, B 84 ro,
C 195 d.
Atressi eom Persevaus 5 85 ro, C 197 ^.
1. D'après Bartseh, la chanson Quan hom Ijonrat^y de Peire Vidal, se trou-
verait également dans C; c'est une confusion.
2. Cf. Romania, XIX, 43 et suîv,
jéS L. GAUeilAT
63. RiGAUT DE Barbezîeux, Be vôîriâ saber d'amor C 194 d.
64. — Lo nous mes d'abril cotneîisa C 189 f,
65. — Tuit demândon qu*es devcngud'itnors A Iji
rp, B 1 jo ro, C 200 b,
66. Uc Brukemc, Corteiameû mou eti mon cormescbtisa.f f ?
67. Anonymes, Aissi com eu sab triar ' C tgû h.
5g. — A Tentrada del temps ciar B 82 v».
6^. ^* A Tentrada dd temps florit C 191 i.
70* — Amors doussors mi assaja C 199 a*
7 K — A tota gen don rai conseill leial D 1 c.
72, — Bêla domno cara C 117 a.
7^, — Bel m'fô que chant quan vd del fau C 1 9S ^,
74. — Be volgra quem venques merces^ C 78 d,
75, — Cel jogbr mi fan gran pior D i r.
76. — Domm pos vos ai chau/ida C i \^,
77, — D'un déduit C 193 f^.
7H, ^ Eissaraeii corn la pantera C 199 i/.
7^, — Eu en sav un fiae e mal D 1 a.
80* — Ha me non fai chantar foi lia ni flor C 204 ff.
8 k — Uautricr cuidaî avcrdmda G 199 ^.
83. — Lo dous chans que Tauzels crîda G 203 f-
Bj. — Lo premkr jorn que \'i C aoi a.
84. — Ma dompna fo al comensarî C i^yh.
85 . — Mant rie home en ay chest si mal stam D t h.
86. — Mos coratgcs m*es camjatz B 91 r».
87. — Pos qu'îeu vei lu fuoilla C i v».
88. — Pos vezem que riveras s'irais* C 190 a.
89. — Quan vei los pratz verdezir C 198 r.
90. — Tant es gai et avinentz C 78 c,
91. — Tôt enaissi com deus fo encolpatz ^ D 1 d.
92. — Vos domna ab un dous regart C 198 a.
1. M. Appel, dans ses Provetiiaîische Inedita, 316, fait la remarque que le
même type se retrouve dans la poésie de Bernart de Ventadour Gent estera
que chantes,
2. Doit être identique avec Blacasset, 2 (Gnmdrîss).
3. Une main moderne a ajouté en marge : B. de Ventadour.
4. M. Appel (1. "c. 329) observe que la chanson pourrait être de Peire
Vidal, parce qu'on y lit le nom Drugheman. En effet, le ms. attribue la pièce
suivante à P. Vidal, quoique à tort.
5. D'après M. Grôber, de Cadenet.
LES POÉSIES PROVENÇALES 369
Puis il y a quelques pièces que je n'ai pu retrouver dans le
Grundriss, savoir :
93. ? Amors m*art con fuoc ab flama C iSj d.
94. — Ar uous mesiau (sic) H 151 c.
95. — Bêla domna a Taida de vos B 149 v<>.
96. — En coravetz meins de valor C 192 a '.
97. — En aquel temps que vezem verdezir (?)
Vioktte 319 ss.
98. — Molt fosson douz mi consirrier C 189 ^.
99. — Si com l'aigua soffre la nau corren. B 149 r*»,
100. — Si com l'enclaus que a de mort dotanza
C 197 d.
loi. — ...pellaç, herege q ne jura (sic) D } c,
102-107. — 6 strophes différentes, très mal écrites, que
je n'ai plus eu le temps de déchiffrer, dans
D 2 roî.
Enfin, le ms. 844 de la Bibl. Nat. (C) a contenu, d'après les
indications de l'Index, les pièces suivantes qui étaient écrites
sur deux feuillets qu'on a coupés, après les feuillets actuels
190 et 193 :
108. [Bernard de Ventadour], Be m'an perdut lai enves Ventadorn*.
109. — Ben me cuidai de c' (sic =z Grundr. 70, 13?)
iio. — Amors et quaus hounors (sic = Grundr,
70» 4?)
1 1 1 . — Lou louseignol s*esbaudie K
112. — Molt m* es bel et clar
113. — Per dous chans que louseign *.
Comme on le voit, le nombre des chansons provençales
accueillies par les chansonniers français est assez considérable.
1. Note marginale d'une main moderne : B. de Ventadour.
2. [Strophe de Jordan de Bonel, S*ira d*amorSf voy. Parn. Occit.^ p. 203.
— P. M.]
3. [Probablement de P. Cardinal. On y a joint à la fin la tornada de la
pièce Un sirventes fauc en loc de jurar de Peire Cardinal (Grundriss y 335, 66),
mais ce qui précède est un sirventes différent et inconnu. — P. M.]
4. Grundriss, 70, 12.
5. Grundriss, 70, 29.
6. Pour la chanson Lauhier m'iere Iti'ai (sic), qui termine la section,
voyez ci-après.
370 L, GAUCHAT
On y rencontre en outre des mokîs provençaux, notamment
dans C et A' (cf. P. Meyer^ Rom.^ l, 404-5), et des lais^ dans
G et C (ce sont les lais lyriques de Marhiol et de Nompar *, les
numéros 46 1\ 122 et 461, 124 du Grundriss^ où il faut lire fVz
au lieu de IVh)* Comme ces motets et lais ne rentrent pas dans
le cadre de mon travail, je les laisse ici de côté.
§ 3* — LES MANUSCRITS.
Ce sont donc les mss. 844 et 20050 qui nous offrent les plus
riches recueils de chansons d*origine provençale. Elles y occupent
des sections à part, dont la première cependant est interrompue,
dans le ms* 20050, par quelques pièces françaises. Cette section
provençale du ms. va du fol. 81 r" au foK 91 v°, où s'arrête
récriture du premier copiste. Parmi ces chansons provençales ont
pris place les pièces françaises : Quant voi ces pre:;^ florir eî vtràner
(Raynaud, £//;/., n** 13 18), f. 82 v^ et Gatte de la tor, gardr^
enîor (Raynaud 2015), f- 83 r^* Une seconde série plus courte,
de la main d*un autre copiste, remplit les feuillets 148 v* à
150 v". Le ms. 844 contient, outre la section provençale,
fol* 188 £i"204 dy qui forme la fin des chansons courtoises et qui
est suivie d'une section renfermant des motets, quelques pièces
provençales èparses, écrites sur des feuillets qui avaient été laissés
en blanc. Ces morceaux y ont été insérés par divers scribes des
xin* et xiv*" siècles : ce sont les pièces numérotées i, 13, 31^ 72,
74, 76, 87, 90 et 93 dans ma liste et qui, pour le langage,
diffèrent notablement des autres chansons provençales de ce
manuscrit \ Elles sont écrites en un provençal presque pur. (On
remarque seulement via pour vida, mn pour nom [n** 76], etc.
Dans la pièce 87, la diphtongue m est régulièrement remplacée
par lut : ainsi Jualldj mmlla^ pnascha,} Dms le ms. 795, les chan-
sons sont placées au commencement du ms. sur quelques feuil-
lets de garde. Les trois premières pièces seules paraissent
remonter au xhT siècle, les autres sont au plus du xiv*= siècle.
I. Cf. Zeiîschr.^ I.
1. Q'ai donné Findication de ces pièces en 1867 dans mon mémoire sur le
SaJut d'amour {Bibî. de TÉcoïe des Chartei^ 6* série, t. III, p. 139 — tiré à
part, p. 16, — et dans le Catalogue du Fonds français. — P. M»]
LES POÉSIES PROVENÇALES 371
Les trois chansons provençales du ms. 589 de Berne, ainsi
qu*une pastourelle d'apparence provençale, dont je parlerai plus
loin, sont insérées parmi les chansons françaises, rangées par
ordre alphabétique. Le copiste du ms. Vat* Reg- 1659, ayant
terminé la copie du poème d*Ambroisc sur la troisième croisade,
consacré surtout à la gloire de Richard Cœur de Lion, n*a pas
pu s*cmpècher de citer deux strophes du célèbre planh de
Gaucelm Faidit : Fart^ causa es, etc. Dans le ms. 24^06 enfin,
nous ne rencontrons qu'un fragment provençal tout i fait isolé.
Dans tous les mss», ces pièces sont anonymes^ sauf quelques
attributions dans 844 et 389, d'ailleurs souvent erronées*.
Toutes ces chansons sont loin d'être complètes : tandis que
les mss. 389 de Berne et 20050 otîVent presque toujours de deux
à six strophes, le ms* 844 ne donne, la plupart du temps, que le
premier couplet des poésies, comme si on avait voulu unique-
ment noter les mélodies. Quelques poésies cependant y ont été
transcrites plus complètement, le scribe y attachant peut-être
plus de prix (17, 9, 18, 16, 64, 34, 88,5 [ce sont les premières
poésies que le copiste a écrites], 8, 69, 22, 59, 89, 15, 81).
Pour les autres, il a laissé en blanc la place des couplets
suivants. Les envois des poésies provençales n'intéressant que
peu les hommes du Nord, les copistes les ont généralement omis,
i rexception de quatre ou cinq (n^* 15, [89], 29, 47, 5 1), dont
deux consistent en une strophe entière. On a le droit de
s'étonner que nos chansonniers n'aient pas admis Tcnvoî de la
poésie de Rigaut de Barbezieux : Tug dtmandùn qucs dei'cngu-
d'amors^ qui s'adressait à la comtesse Marie de Champagne.
§ 4. — LES POÉSIES,
Ce n'est certainement pas le pur hasard qui a présidé au choix
de chansons et de troubadours qu'ont fait les chansonniers
français, Si les fameux souhaits de Pistoleta se sont conservés
dans six mss, français, c'est que le sujet en était devenu très
I . Contre six attributions justes, le ras. 844 en contient sept fausses. Les
noms des poètes sont très défigurés, d. lossiames Jaidius (^ Gaucelm Faidit).
Le ms. de Berne attribue à Forhs de mnsaUU un sorpaîtn*} (son poitevin)
qui est en réalité une poésie de Rigaud de Barbezieux» n<*63.
372 L. GAUCHAT
populaire ; c'est aussi la seule pièce qui ait été réellement traduite
(/Σ?m,, XIX, p, S4 ss.). Le célèbre planh de Gaucelm Faidit sur
la mort de Richard Cœur de Lion se retrouve dans trois mss,
français; c'est, en quelque sorte, le pendant de la chanson
du roi anglais : Ja nus fmn pris ne dira sa raistm, que nous
possédons dans plusieurs remaniements provençaux. Richard
d'Angleterre ii'était-il pas Tidok des nobles du moyen âge, et
cette belle complainte sur sa mort ne devait-elle pas toucher
toutes les âmes courtoises? J'ai déjà nommé la chanson de
Rigaut de Barbezieux : Tug demandon qu'es devengudamors\ elle
figure également dans trois mss,^ ce qui n'est pas étonnant,
si nous considérons qu'elle a été composée, très probablement,
en Champagne. Les pièces contenues dans deux mss. appar-
tiennent aux poètes Bernart de Ventadour, Gaucelm Faidit,
Jaufre Rudel et Rigaut de Barbezieux, et Ton comprend aisé-
ment qu'elles aient été très répandues.
Il faut ensuite remarquer que la presque totalité de cqs poésies
sont des chansons d^ amour : on sait que l'amour régnait en
maître dans cette société brillante. Nous ne trouvons dans les
chansonniers français que deux véritables serventois, genre très
peu cultivé dans le Nord (Guillem Magret : Vaigua pnja contra
mon^ et Marcabru : Fax in nomim domini). On a souvent consi-
déré comme un ser\^entois la pièce de Gaucelm Faidit : Chante
déport^ joi, dommi c solati^ mais c'est simplement un éloge du
bon vieux temps, ce qui a toujours été un thème favori- La
pièce : Si anc nuls hm per avcr fin corage^ du même auteur,
serventoîs adressé à Marie de Ventadour, n'apparaissait aux
Français que comme une de ces nombreuses chansons d'amour
où l'amant se plaint de la rigueur de sa dame. Le planh de
Gaucelm Faidit se trouvait dans des conditions extrêmement
favorables, à cause de son sujet. Je crois qu'on ne saurait rien
conclure de l'apparition isolée d'une /c«ja«(39) et d'une ballade
(68), bien que, pour ces genres aussi, les Provençaux aient servi
de modèles aux Français* Il y a enfin deux pièces d'un genre
particulier (populaire?), les n" 68 et 8i. Notons finalement
que les mss, ne présentent qu'une seule pièce ayant trait aux
croisades (Marcabru : Fax in nomine domini)^ ce qui ne confirme
pas l'opinion de ceux qui placent en Orient Torigine des rappro-
chements entre les poésies méridionale et septentrionale.
LES POÉSIES PROVENÇALES
373
§ 5. — LES POètES.
Les poctes dont les ms. nous ont conservé le plus grand
nombre de pièces sont Bcrnart de Ventadour, Folquec de
Marseille, Gaucelm Faidit, Peire Vidal et Rigaut de Bar-
bezieux* Bcrnari de Ventadour fit un séjour X la cour d^Alié-
nor^ duchesse de Normandie, entre 1152 et 1x54* La biogra-
phie provençale de ce troubadour dit : lonc temps esieî en sa cor t.
C*est à rinfluence de cette princesse qu'on rattache à bon droit
tout ce mouvement littéraire, et c'est très probablement en imitant
Bernart de Ventadour d'abord qu'on est arrivé à transplanter la
poésie courtoise dans les pays de langue d'oïl (cf. G. Paris,
Rom., Xn, 523)* Un second centre s*est formé à la cour de
Châmpagne^'ou' résidait la fille d'Aliénor» Marie de Champagne.
Rigaut de Barbezieux doit avoir fréquenté cette cour; aussi
les mss. français contiennent-ils six poésies de lui, sur dix qu'il
nous a laissées. Il y eut hï peut-être des rapports personnels
entre les troubadours et Chrétien de Troies, dont nous
connaissons trois poésies courtoises, qu'on peut considérer
comme les plus anciennes qui soientparvenues jusqu'à nous. En
cherchant bien, on pourrait assigner à chacune des idées de
Chrétien, voire à des vers ou à des strophes entières, une
origine provençale : Nus, s'il nest corîois et sages y Ne ptu't
d\imor riens nprcndrc Raison U ccvicnt Jespcndre Et nuire
mesure en gages. C'est le programme de la nouvelle école!
Un autre centre s'est constitué plus tard ;\ la cour de Richard
Cœur de Lion. Autour de celui-ci gravitaient Peire Vidal, Fol-
quet de Marseille ' et Gaucelm Faidit, dont les mss* nous ont
légué plusieurs poésies. Marcabru a dû parcourir aussi le Nord,
comme nous l'atteste un passage d'Audric du Vilar : Quan sai
de Blés [Blois] A nu vengttes {Hist, gén, du Languedix, X, 217).
Nous ne voulons pas rechercher pourquoi les chansonniers
français ont admis des chansons de Cadenet, Jaufre Rudel',
î. Cf. aussi Rom,^ XIX, 4.
2. Quant 1 CCS deux troubadours, M. O. Sc\m\u {Ztiiuhr . , VIII, Î09 ss.)
remarque qu^ils ont eu <3e5 rapports avec le Nord, puisque le premier adresse
des chansons à !a comtesse Maheut d*Angoulémc et que Li chanson : Quan lo
374 ^' GAUCHAT
Elias Fonsolada, etc., car nous sommes trop mal renseignés sur
la viû de ces poètes. Il paraît singulier que nos mss. ne con-
tiennent pas de traces de Bertran de Bom, qui s'était pourtant
aussi rendu auprès d* Aliéner ; mais son domaine était surtout
le serventois^ qui n*a pas su se naturaliser au Nord.
Chronologiquement, la liste des troubadours qui ont pris
place dans nos chansonniers commence par Jaufrc Rudel et
Bernart de Ventadour et se termine par Cadenet (i2o8-r239).
On ne peut donc être d'accord avec M. Jeanroy, quand il dit
ÇDe nostr^ 91) : « At, si paucissima Occitanorum poetarum car-
mîna propriis verbis expressa învenimus, eorum componendi
ac dicendi ratîo nullo modo immutata apud nos migravit; non
oranes autem eodem favore gavisi sunt : inter eos enim rectnîio-
rcs pracsertim..,nostrai€S ut exemplaria sîbi proposture. » Nos chan-
sonniers français prouvent que ce ne sont nullement les poé-
sies des derniers venus qui ont été les plus répandues dans le
Nord : ce sont au contraire les meilleurs troubadours, Bernart
de Ventadour, Jaufre Rudel, Peire Vidal, etc., qui sont le plus
fortement représentés* Ce n'est pas parce que Tart des Proven-
çaux a passé au Nord « jam senescens, obsoleia et ad cxitium
vergens )) (Jeanroy, 1, c, 91), que la poésie courtoise française
n'en paraît être qu'un pâle reflet : il faut en expliquer la médio-
crité et la monotonie par le manque d'originalité des trouvères,
par le fait qu'ils ont vu dans cette poésie plutôt un jeu de
Tesprit que l'expression de vrais sentiments et peut-être aussi,
comme le veut Diez (Pùesic dcr Traub,% par leur langue qui se
prêtait moins que la langue provençale X ce raffinement d'idées
et de sentiments. En tout cas, les termes techniques empruntés
directement au code d'amour provençal étaient moins expressifs
en français qu'ils ne l'avaient été dans le langage où ils étaient
nés. En adoptant une terminologie toute faite, les trouvères
avaient traduit les mots sans traduire les idées. Ils ont ainsi
peu profité des mêmes modèles dont Dante et Pétrarque ont tiré
une poésie pleine de charme.
riiis df la fontana de Jaufre Rudel est dédiée i Hugon le Brun de Lustgnin.
Mais, observe justement M. Jeanroy {Oripfîri de la poésu îyriqtu^ 2%), ces
provinces appartenaient bien pluttJt au Midi, de sorte que ces faits n*ont pas
une grande valeur démonstrative pour les rapports entre le Nord et le Midi.
LES POÉSIES PROV'EÏIÇALES
37S
s 6.
DU LANGAGE EN GÉNÉRAL.
Le langage de ces poésies ' a déjà été le sujet de beaucoup de
contro%Trses.Sainte-Pakye, chose curieuse, n'a pas reconnu que
celaogage est du provençal plus ou moins déguisé. Il dit, ;\ propos
de la pièce 306 du ms. de Berne : « Observez la singuhiritc du
patois de cette pièce ^, » Raynouard appelait ces chansons des
« traductions informes de poésies des troubadours ». Le Roux de
Lîncy^ qui a publié plusieurs de ces pièces A différentes reprises
(Cfmnts hhtoriqiiits frartçais^ Quatre livres des Rois), pensait qu" elles
étaient écrites en dialecte poitevin. Cette opinion a été l'objet
d'une critique très sérieuse de la part de Brakelmann (Les plus
ancian chansonniers français 204 ss.) : il conclut qu'il s'agit tout
simplement « de chansons provençales transcrites par un scribe
du Nord qui ne comprenait point la langue d'oc », jugement
qui, bien qu'à peu près juste, aurait eu besoin d*un peu plus de
développement.
Nous possédons aujourd'hui un travail excellent sur les dia-
lectes de la France occidentale par M, Gorltch {Fran^. Studiett^
ni), qui prouve clairement qu'il n'est pas question ici de dia-
lecte poitevin* Ainsi a Ubre tonique, en ce dialecte, devient e^
comme en français; or nos chansonniers présentent des formes
telles que : amar, îrohur^gcîzi (20050 f. 85 v*»), tnagraa^ bai-
sm, portsLi (844 f. 198 c), îornà{i)s (389 f. 138 v**), etc. Va
libre tonique, après une aiouillure, devient également f en poi-
tevin, tandis qu'il donne te en francien et reste intact en pro-
vençal et dans nos textes : c^r (20050 f. 85 r°), laissât
(844 f, 191 c), baissa(i)t (389 f, 234 r*), etc, Vç tonique
(français «, ot) reste comme en provençal, tandis qu'en poi-
tevin il donne et : parcr^ valer, aver, etc, (20050 f. 88 r**),
podçr (844 f. 204 d.), etc. Le Roux de Lincy a probable-
ment été amené à considérer ce langage comme poitevin par
1 Je bisse ici complètement décote les mss. ne contenant qu'une seule
pièce provençale, ainsi que les poésies provençales insérées plus lard dans le
ms. 844 et celles du ms. 795 qui datent de même d'une époque postérieure.
2. Cité par Brakelmann dans VArchw de Herrig, XUîI, 241, note.
37^ L. GAUaiAT
le fait qu'il est question, dans divers textes, de sons pùtievim^ et
que ce nom se trouve précisément, dans le Roman àt la VicUitt^
appliqué à une de nos pièces : au v. 3 19 on lit : Un ver d'un b&n
son poita'in, et la strophe citée est dans Tun des mss, un cou-
plet de Bcrnart de Veotadour (voyez notre n** 4), dans Tautre
notre n"* 97; plus loin (v, 4192) un des mss. qualifie de son pûi-
tevin le couplet du même Bernart (n** 1 1) que Tautre appelle son
f^rov€nçal\ le môme couplet (ce que ne pouvait savoir Le Roux
de Lincy) est encore appelé son poitmn dans GuiUauntc ik Date
(f. 96^). Une des pièces du manuscrit 389 de Berne porte
comme rubrique : sorpointevin (f. 254 r°), qu'il faut évidem-
ment lire : son poiîann^ et il s*agit de la célèbre pièce de Rigaut
de Barbczieux (notre n"" 65). Mais les désignations «f poitevin » et
« provençal » étaient, en ce cas, sans doute identiques pour un
scribe du Nord. Une chronique normande donne à croire
qu'Aliénor de Poitiers avait conservée Fhabitude de parler avec
ses barons le langage de son grand-père, le troubadour Guil-
laume IX, comte de Poitiers, c'est-à-dire le provençal^ : c'est
ainsi qu'on a pu arriver à appeler poitevine cette langue qui
caractérisait la cour d'Aliénor de Poitiers et qui n*était, en réa-
lité, que le provençal.
Mais, pourrait-on demander, si ces chansons ne sont pas
écrites en dialecte poitevin, ne faut-il pas y reconnaître quelque
autre dialecte? Non, car plusieurs indices nous démontrent que
nous avons à faire ici X une langue tout à fait factice, sunout le
fait qu'au point de vue linguistique ces textes sont remplis de
contradictions^ et de formes hybrides qui n'ont existé dans
aucune langue parlée, ainsi au:;jatis ^^ autels + oisiaus (20050 :
81 v°, 16), cgusse ^^ agî4es + eusse ^ etc.
Ce ne sont pas non plus des rédactions françaises de poésies
provençales. Si cela était, ce serait à la rime que nous constate-
rions les plus grands changements, et c'est précisément là que
î. \oy. Ronu, XIE, 21 ; XIX, 4.
2, Rom.^ XIX, 3. Voici le passage : Alienor vint a ses gens de Poitou et dist:
Scfnor, quau htste sut? Et per Iku, distnnt t/, et non ac tant heîe dosne en tout le
tftont (Notices et extraits des mss,, XXX 11, II, 68; le texte provençal est, du
reste, bien conompu).
3* Nous trouvons dam les mêmes pièces la lornic /wm à coïc de bonc^
doitii côté de avcr, cortw à côté de i^/er, 20500 : 81 n^, 22; 81 v», 14.
LES POESIES PROVENÇALES 377
les copistes oni le plus respecté leur texte. Les compilateurs
savaient, au contraire, parfaitement bien qu'ils transcrivaient
une langue étrangère* Le scribe de 20050, par exemple, se cor-
rige quelquefois : après avoir écrit mentist^ il corrige mentis
(8î v'% II); pechtt est changé en pe^fmt (85 v**, 13), auifnn
en auiHQTï (89 v**, 19); ce même copiste abandonne aussi, dans
cette section provençale du chansonnier, ses habitudes de gra-
phie lorraines : nous ne lisons qu'une fois /fî/aiz (Si v% 20),
(cop, nus 81 v'', 4; 8t v"*, 5). Les copistes avaient donc noté
quelques divergences phonétiques entre le provençal et leur
langue habituelle; ainsi ils avaient remarqué que le provençal
mettait souvent une / où ils avaient coutume d'écrire w, par
exemple dans le mot altrc^ vis à vis du français autre; en se
donnant la peine de rétablir ces / il leur arrivait parfois de pous-
ser le zèle trop loin et de mettre une / où Fétymologie ne le
permettait pas : ainsi dans ioioh (20050 : 90 v% 17), viïre pour
t'iur^(200SO : 149 r"*, 5), de même Jimhnent=Jïnamen (20050:
90 V, 7), ai/ans ^= a/ans (20050 : 89 v°, 3, le scribe est lor-
rain !). L^alternance de an français avec en provençal a produit
la forme cng^ùn (20050 : 86 v°, 8). La même tendance a fait
naître les formes confumhz (20050 : 81 \^^ 9), fussztz (ib.
84 r^, 7), sabissatz (ib. 84 r°, 8), podaz (ib. 85 r^i iS), vesqui"
jaz (ib. 87 V**, 13)^ méme/îraz^/^rè*/^ (ib, 86 r"», 18 ; 86 r", 19 ;
87 r**, 4), qtiOihs ^ quaîlcs (844 : 198 d, 28), pour cofifondetz
fosAT/s, etc., car les scribes s'étaient aperçus que le provençal
mettait souvent at^ où ils écrivaient i7^ (iinutti= amet^^ etc.).
Les chansons provençales offrant tantôt ie, tantôt îen, les
scribes du Nord ont cru que bm était la forme régulière (et be
une graphie négligée pour he) et ils ont rétabli partout les w,
même là où il ne le fallait pas, comme dans fficrcen (20050 :
88 v*", 4; 85 v**, II), La rime n* se trouvant ainsi changée en
rm, le copiste écrit aussi tranquillement wjen pour me (20050 :
89 V**, i) ; cf. tapin (20050 : 82 r*», 3), tapins (844 : 189 D, 21),
sindon = sidoniÇioo^o : 86 v"", 14), minJon (ib, 86 v", 17).
En somme, c'est un langage tout artificiel, dont le fond
est le provençal, mais bizarrement mélangé de formes fran*
çaises ou hybrides. Doués d'une connaissance assez médiocre
de ridiome méridional, nos scribes voulaient certainement
écrire du provençal, mais ils remplaçaient très fréquemment, soit
par mégarde, soit par défaut de connaissance, les formes de
BùmtkntA t 2UUI 2)
378 L. GAUC
rorîginal parles françaises, qui leur étaient plus familières. Très
souvent lis ont mal lu ou mal compris, et offrent, dans ce cas,
un texte qui serait inintelligible sans l'aide d'autres mss.; Us ont
enfin forgé à leur façon bon nombre de mots en mèbnt des
éléments français aux éléments provençaux, comme dznsfalsic
^=^ faiia -^faisait (844 : 191 c, 7), plaiser = placer + phiisir
(844 : 204 Al 8), etc. Ce langage offre donc, cxtérimrcnunt ,
quelque analogie avec le franco-italien, quoiqu'il y aît, pour le
fond, une grande différence : le franco-italien, qui était une
tangm parlày mêlait à dessein ritalicn au français pour faciliter la
compréhension d*un texte français dans un pays italien, tandis
que nos mss. présentent un mélange de provençal et de fran-
çais involontaire et sans portée littéraire.
La francisation de Poriginal provençal s*est opérée, dans les
divers mss., d'après les mêmes principes, mais on peut, naturel-
lement, distinguer plusieurs degrés de francisation* Dans la
seconde section provençile du ms, 20050 nous observons déjà
une plus grande altération du texte provençal que dans la pre-
mière section du même ras. Ce scribe réprime moins que
Tautre ses habitudes de graphie lorraines : il écrit par exemple
ait pour a^ sarchait = urcai (ijo r^, 8), îorbeir = tralntr
(150 v^, i), valeur, amour (150 v, 12 et 13) où le premier
compilateur aurait écrit valor^ amor. Le scribe du ms, 844 con-
naissait encore moins son provençal : il fait de grossières fautes
de lecture ; d*autre part, il francise moins son texte, parce qu'il
le copie plus machinalement que ses collègues. Le ms. de Berne
et les fragments des romans de Guillaumt de Dok et de U Vio-
kîk nous donnent le texte le plus corrompu; il y a même des
formes d'infinitif toutes françaises : ehinîc(J)r, îroue(^t)r (389 f,
tiî f). C'est le scribe de la première section de 20050 qui
traite ses originaux de la façon la plus indépendante, et c'est ii
que nous rencontrons parfois des essais de traduction. Tandis
que le nis, 844 contient des poésies qui ne nécessiteraient que
peu de changements pour être du provençal (ainsi k pièce :
Aman àousors mi assaia, n** 70), le ras. 20050 présente des
diansons où le lang^^c est plus près du français que du proven- _
çaL Dans 844 je n*ai guère trouvé que le passage Or sdt dd taÊ\
si corn li plais (190 ^, 5) qui soit une sorte de traduction. Par '
contre le copiste de 200 >o éprouve souvent le besoin de tra-
duire i cette tendance est très sensible dans la pièce de Benuitt
LES POÉSIES PROVENÇALES 379
de Ventadour : Ab joi mou lo vers el comeni (f. 8i r°), où la
deuxième strophe est entièrement traduite (8i v°, i) :
Original Texte de 200; o.
Ane sa bela boca rizens De sa bele boiche riant
Nom cugei baisan me trais, Non cuidai baisant me tradist,
Car ab un douz baisar m*auzis, Kant per un baisar m*a aucis.
Si ab autre no m*es guirens. Se par un autre nel raiaint (!);
Atressi m'es per semblanza, Se va de moi par sanblance
Com de Peleus la lanza : Con de Peleûs la lance :
Que del seu colp no podi' om garir, Cainz de son cop ne pout nus hom
[garir.
S'un'altra vez no s'en fezes ferir. S'un'autre foiz ne s'en fait referir.
Il y reste toutefois des traces de l'original. La même tendance
s'accuse dans le couplet suivant, mais le scribe a respecté la
forme devis (français : devins)^ pour ne pas fausser la rime avec
so mes vis (20050 : ce m'est vis), et il a si bien voulu conserver la
forme provençale du dernier vers : mi confondetT^ e vos non vei
iau:{iry où il ne comprenait probablement pas l'expression jauiir,
qu'il a écrit : mei confundaiet nos nen w/a«:(/r, croyant que c'eût
été une faute de provençal que d'écrire confunde:^ (voir page 377
ci-dessus). Dans la dernière strophe (20050 : 81 v®, 9 Dune rien
mabunde mes sens...) il essaye encore d'accommoder le texte, mais
il se voit forcé de corriger mentis après avoir écrit mentist et il
laisse de nouveau le dernier vers plus ou moins inaltéré : Se ne
pot ou ualer ou iau:(ir. Il faut noter que cette pièce est la pre-
mière poésie provençale que ce scribe a transcrite. Viennent
ensuite la chanson de Jaufre Rudel : Lanquan H jor son lotw en
mai y et la pièce de Pistoleta : Ar agues eu mil marcs de fin argen,
où nous remarquons encore quelques efforts de traduction (cf.
Rom. y XIX, 55). Plus loin le scribe paraît avoir abandonné cette
idée; il écrit son provençal tant bien que mal, tout en remplaçant
souvent une expression provençale par du français, tantôt par
inattention, tantôt parce que la leçon de son original lui sem-
blait douteuse. Au vers de Gaucelm Faidit (JFortz^ cau:(a es...) :
No cre que tan dones ni tan meses, notre scribe confond ffieses
avec mais, dones avec (d)onques et il modifie par conséquent le
vers de cette manière : Non dona tan onques autant ne mais
20050 : 87 r°, 16 (844 : 191 D, 15 est resté plus fidèle ;\ son
|80 L, GAUCHAT
Ofigbul : Nûn cm qm êûh amas m tan mem). H se pennet ainsi
quelques altâutions légères, niais il n*cst plus quesDon de tra*
duoicm.
Du reste, l'original que copiait le siaibe de 20050 avait déjà
poussé jusqu'à un certain point la francîsadoo du texte proven-
çal. Cela est prouvé par un Eût assez curieux. Les mss. 200 jo et
589 de Berne, qui ont une source commune, contiennent une
pastoaielle écrite dans le mènie langage artificiel que celui des
chansons de troubadours dont il a été question jusqu'ici. On a
déjà élevé des doutes au sujet de Torigine provençale de cette
pièce. Bartsch, qui Ta publiée dans ses Rcman^en und PusUmrdlm
(n, 15), en suivant de près le texte du ms. 20050, Tassigiie à une
région întennédiairc entre le français et le provenu (/. r.,
p- 363). D'un autre côté, M- Jeanroy (JUs origines Je la poésie
lyrique, p. 19 note) l'attribue au Kord. « Il faut conclure, dit il,
« que cette pièce a été écrite par un poète du Nord qui a voulu
« lui donner une couleur provençale, en n'a}^ant du provençal
« qu^une connaissance très superficielle ; ainsi il forme entendati
u sur entendes parce qu'il savait que amai:^ correspondait à afnés.
u Cette médiocre tentative prouve du moins que c*est dans des
« pièces provençales que ce geiu^ s'est d'abord répandu au
« Nord ; c'est donc un solide argument à 1 appui de la thèse que
« nous soutiendrons sur l'origine méridionale de la pastou-
« relie'. » M. Jeanroy a évidemment raison en ce qui con-
cerne la langue : cette poésie appartient à l'Est (cf. la rime
engignie : vié)^ malgré la mention de Limoges qui est peut-
être due au désir de provcnçaliser la pièce. Mais on ne
saurait rien en conclure pour l'origine méridionale de la pas-
tourelle ; car voici ce qui explique b couleur provençale de cette
pièce : elle se trouvait, très probablement, dans l'original du
ms- 20050, comme dans ce ms. même, à la suite d'un grand
nombre de poésies provençales contenant déjà de ces barbarismes
dont parle M. Jeanroy (cf. dans 20050 les formes confundaz
81 v<*, 9, pod^ 85 v% 18, /^z =1 pret:^ 86 r**, 19, etc.). Le
scribe (et non le poète), croyant encore avoir affaire à une
poésie méridionale, lui a donné, par mégarde, cet accoutre-
I. M. Jeanroy par!e de dcujL pièces; id, U ne s'agit que du m H» 1 j de
Bartsch.
LES POÉSIES PROVENÇALES 38 1
ment étrange. J'en cite, comme curiosité, les deux premières
strophes.
aoo^o f. 91 V*.
Lautrier miere leuaz
sor mon cheual montaz
sui por déduire alaz
hz une praierie
ne fui gaires esloignaz
can me sui arrestaz
et dessendi en praz
soz une ante florie
sai ermoinion choisie
conques rose espennie
ne fu tais ne cnstals
uers li uois liez et baus
que sea beltaz magrie.
Qpant la fui aprochaz
dis li suer car mamaz
bonorade en serai
en tote uostre uie
signer non gabaz
ben sai prou troberaz
fenne cui ameriaz
plus riche et meuz uestie
bêle ie ne (juier mie
en amor seignorie
senz mi plaist et beltaz
dont grant plantaz auaz
et dolce compaignie.
B. ^8^ f. 138 V.
Lautrier miere leuais
sor mon cheual montais
fui por déduire alais
lais une praierie
ne fui gaires aloignais
quant me seux arestais
si descendi el prais
sous une ente norie
sai ermenion choisie
onkes rose espanie
ne fut teil ne cristauls
uers li uoix lies et baus
car sa biaultez men prie.
Qpant la fui aprochaus
dix li suer cor mainauz
honorande en serais
en toute uostre uie
sire ne moi gaibais
ne saip ou trouverais
femne cui amerais
plus riche et muels uestue
Dele ie ne qier mie
en ameir signorie
senz me plaist et biaulteis
dont grant planteit aueis
et douce compaignie.
Reconstructum française.
L'autrier m*iere levez,
Sor mon cheval montez,
Sui pour déduire alez
Lez une praërie.
Ne fui guère esloigniez,
Qjiiant me sui arrestez
Et descendi en prez
Souz une ente fleurie ;
S*ai Ermenjon choisie :
Onques rose espanie
Ne m teus ne crisiaus » [?J ;
Vers li vois liez et baus [?],
Car sa biautez m'en prie.
Qpant la fui aprochiez,
Dis li : « Suer, car m'amez !
Honouree en serez
En toute vostre vie . »
« Sire, ne moi gabez;
Bien sai prou trouverez
Femme cui amerez.
Plus riche et mieuz vestie. »
« Bêle, je ne quier mie
En amour seignourie;
Sens m'i plaist et biautez,
Dont grant plenté avez.
Et douce compaignie. »
§ 7. — CARACTÈRES PRINQPAUX DU LANGAGE.
Je réunis enfin les caractères principaux du curieux langage
que les troubadours parlent dans nos manuscrits français.
a) tns, 844.
I. a libre tonique apparaît presque toujours comme a; triar
196 B, 8; amar i88c, 24; tal 196 b, i ; arrestas 196c, i; tornat
191 c, 3; beltas 194c, i. Seule exception: /«ea, coka 198c,
4, 5, cependant la dernière strophe et l'envoi de cette poésie
donnent iornaa, baisaa^ encortincuiy etc.
I . Les autres strophes indiquent ici une rime en e^ (es). Faut-il mettre :
Ne cristaus ne fu tés y Vers li vois baus et lie^? La rime de q; avec it^ est surpre-
nante. [Elle est tellement surprenante qu'elle fait douter de toute l'explica-
tion. — G. P.l
382 L. GAUCHAT
n. a final est remplacé presque partout par e^ sauf quelques
cas isolés : toutes les rimes ont a dans les deux poésies
Anwrs dousors mi assaiz, etc. (199 a, 6) et Laltrier cuidai abar
druda (199 B, 7); la même poésie donne souvent c dans Tinté-
rieur du vers : amtge 1990, i; espaulh 199 c, 4. A part ces
deux poésies, a est très rare : altam 196 a, 3, a(u)ranaL 19e b, 3
à la rime; entrada 191 b, 33 parh 189 a, 6 alirz 194B, 20, etc.
dans l'intérieur du vers. Cette absence presque complète de Va
final, qui est encore plus sensible dans le ms. 20050, est assez
surprenante. Je serais tenté d'en conclure que les premières
compilations de poésies provençales faites dans le Nord pré-
sentaient déjà un langage hybride. Si l'original avait été pro-
vençal, il aurait, ce me semble, bissé plus de traces; ainsi
nous aurions plus d'à atones. Il faudrait donc supposer que le
premier compilateur, transcrivant dans le Nord des poésies pro-
vençales, qu'il avait entendu chanter, le faisait de mémoire et
en y mêlant des sons et des formes de son langage. Va atone
provençal, qui tendait peut-être déjà vers <?, l'aurait moins
frappé que Va tonique, qui s'est maintenu intact dans nos chan-
sonniers.
m. Le groupe n/, que le provençal réduit ordinairement à
n seule, est rétabli : Ijardimtm 191c, 10; /ant 190 a, 20;
sefnbleni == semblan 190 b, 20; arment 200 a, 3; pensamcnt
188 c, 27, etc. Exceptions : inon (mundum) 196 b, 9; tan
191 c, 18, etc.; Jan 191 d, 2 ne pouvant pas avoir de /, le
scribe ne l'a pas non plus rétabli dans les formes ^/c>^an 191 d, 4
et sctnblin 191 d 12, qui riment avec Jj;/. Dans un autre cas
cependant nous lisons dant = dan 191 b, 25, ainsi que cn^mt
^= cn^an, 191 b, 21, qui ont subi Tinfluence des rcublisse-
ments r/;ant, tv/;/ant, 'ant, etc.
IV. Nous trouvons bien les combinaisons «t*/, Jel, etc. qui
étaient aussi propres au français, mais les combinaisons mnj^
quc'us, etc. sont rendues par wj»;, qu.\ etc.; ainsi ».v'; pour ru^m :
1910,23; 100 D, 10; 190 A, 19; 195 A, 7; /•:/;= •v•^' i<îSd, é;
1S9D, 23 ; i/.'/t- ^= ijiu'us 1S9 c. S; c: = c! (c-; — art.) 191 d, 2;
ft=is (c-; se) 19OD, 7; qiii=qu:! 1910,-1; h ijn^ue = Ai
/^»iy:u/>; 194 B, 5 ; scn =scrK 191 c, 7; quin =^.::u'ni 191 c, 19.
J'ai trouve une seule fois ^:m 191 b, 27 e: sir: ivK) a, 15.
V. Le scribe remplace très souvent une expression proven-
çale par !a forme équivalente française. C'est presque toujours
LES POÉSIES PROVENÇALES 383
la grande ressemblance entre les deux langues qui a amené ces
remplacements, Là, où il y avait une grande dilTérence entre
les formes des deux idiomes, le copiste reste ordinairement
fidèle à son original : il ne traduit alors les mots que quand le
contexte ne laisse subsister aucun doute sur le sens de la
phrase, donc involontairement, ou quelquefois peut-être parce
que l'expression qu'il devait copier lui paraissait douteuse. Il
écrit presque partout eu (je n*apparaît que trois fois : dei te
204 A, 7; k 190 c, 8. 190C, ij), mais lieis^ par exemple, est
toujours rendu par //; maintas veti est remplacé par maintes fois
1S9 B, II ; tï//;^ constamment par eus, ainsi 191 b, 15, peut-être,
parce qu*il se méfiait de ces formes. Autres exemples : hmsd^nol
= rossignol 196 a, 4; ou ^=^ o (où) 196 b, 10; tam = temps
191 B, 33 et passim; sons(\) = em 191 b, }^;font=^fan 191 c, i ;
rien:^ = re 191 c, 28; chère =^cara 201 a, 5. toujours vers =^
vas 190 A, 15; noi^=- rCau 190 a, 26; «f = « 190B, 4; malves
= malvati i$0B^2'j;peise=^pesa 190c, 6; pis^=pieiîi 190 c, 13;
vais = vauc 1 89 d, 15; (ust =^fos 189 d, 22 ; les pertes = las per-
das 200 A, ^\ fist ^=^fcii 200 B, 3 ; pou ^^pauc 188 c, 23 ; venu:^
^^venguix^ 188 c, 28; od^^ab 189 c, 13; toujours sani^=ses
191 B, 4; toujours /jrj pour tnas 191 b,5, 191 b, 25; cJiangaisse
=^camges 195 A, 9, etc., etc.
VI. L'ignorance des formes provençales a bien souvent
embarrassé le scribe ; dans ce cas, il copie machinalement son
original en ajoutant nombre de fautes à celles qui s*y trouvaient
déjà, ou il torture le texte pour créer des mots qui n'ont pas de
sens. Ne comprenant pas le mot afan qui ne lui était connu que
sous la forme française ahauy il écrit : ai me perdu mon en/ans
190B, II; et de même querre sa iostc en lieu saluai ^^ quera
s^aiostan H saluai 190 b, 28; a mais de san^^ab menhs d'à/an
197 c, 6; entredist mon ccrrage^^entret din:^ m, c* 200 b, 4; sa
bouche devis^^saubut et deuis ? 189 a, 25 ; belameier uilan dvs tan^
= be Vamei ter oi Vam d, t, 198 Dj 18, et ainsi de suite.
VIL Ces textes sont surtout très iniéressants par leur ^^rand
nombre de formes hybrides. Au moment où le scribe transcrit
une forme provençale, le mot correspondant français se pré-
sente si fortement à son esprit qu'il crée un compromis*
Exemples : faisie ^=fa:;ja + faisoit 191 c, 7 ; laissai = laisses -+-
laissasi 191 c, 8 ; plaider =^ pla:;er i- plaisir 204 A, 8 ; degreit =
degra + devreit 1880, 8; cnvide — ettveja + envie (il a pensé à
384 L. GAUCHAT
vida ^= vit'); âges =^ agues + ousse 191 d, 3, Jai déjà parlé des
barbarismes qu'une connaissance très imparfaite des correspon-
dances entre les sons provençaux et français a fait naître (pages
377 ^t 579)* En voici quelques autres exemples : aber = iwer (le
scribe savait que sakr = jaiWr); creddîor^^creator 191 c, r^
(cf- vida ^=vie) ; pi^anca 1 99 b, 6 ^=pidania (cf. vedtr =: vc:^cr ??) ;
iau^ôî^^joios 190 A, 27 (le scribe voulait sans doute rapprocher
le mot de/Vi«^/r) ; conissar ^cotioisser 195 a, 2 (Foriginal donnait
la bonne forme provençale, mais notre scribe, pensant aux verbes
de la i^^ conjugaison, mofiiar ^= monter, etc., a transformé eren
ar, pour éviter une faute). Les formes verbales ab^^ai 191 b, 17,
19 ic, 7, 190 A, 27, ab ===^ a 192 c, 6, sab = sai 194 B, 11,
194B, 2S, 194c, 19 sont aussi de son invention.
VIIL Observations diverses. Une certaine affectation du scribe
a mis quelque régularité dans cet idiome factice; ainsi il écrit par-
tout lot4 où le provençal avait lo, 196 b, 6,191 c» 5, etc. Une foule
de dialectes provençaux et franco-provençaux possèdent aujour-
dMiLti cette forme de Tarticle : le scribe aurait-il entendu pro-
noncer de cette manière déji à son époque ? Du reste, Vo atone
provençal est presque toujours représenté par ou dans ce ms* :
souiors 200 A, 3 ; moustrat 192B, 3 ;fons^^fos; souspir 197 a, 6;
tbohusan 197 a, 2; troiibar 1960,3; donbtan 1980, 18, etc.
Pour vûi^il écrit constamment veis (sous Tinfluence de dreit=^
droite eic, ?)» Nous rencontrons souvent gins pourri*/ 188 a, 5,
190 A, 19, 190 B, ij, mais à la rime ^^t'J s'est conservé 191 B, 3 r.
Pour donna, dompna notre scribe dit toujours dosnc ou dosna :
dosnc est une forme très répandue en ancien français qui
s'explique par le fait que Vs est tombée très tôt devant », m;
ane : asne : : dom : dosm. Le copiste attribue cette forme factice
au provençal, parce que celui-ci présente ordinairement des
formes plus amples que le français.
b) ms, 200J0.
L chant Az, amist^z 91 r^, ir et 12; sobrsiX 82 v**, i; rcmiraz.
82 r"*, 4; Ihwxt 85 T° 10; r/ar 82 v*', 2, etc.
n. a final s'est conservé seulement dans les formes isolées :
kma 81, r'* 19, 20 et 2 r ; bonsx donne 84 r" 2; M/a àmne 91 r"*, 20;
toî^iim 8s r*, 16, 88 v« 10.
IIL mun (mu n du m) 91 r°, 12; /an 86 v<», 4, mais ordinaire-
LES POÉSTES PROVENÇALES jgj
ment le groupe nt est rétabli : chant 86 r*», 22 ; talant 86 v", i ;
fem 8ï r» 20; baisant 81 v"*, 2; ûr^mt 82 r*", 9, etc. •
IV. nel 81 V", 3 est coaservé, mais qm^quem 86 v**, 4; se
=s€us 84 V**, 6; g€u=^ queus 87 v**, 11 ; si pla^^^^silh pJa^
88 v°, 3; h^queill 90 v**, 2; m; t^« qm val = nels km q'cus
volhS^T", 4.
V. Formes françaises remplaçant des expressions proven-
çales : oir ^^ aniir 87 r** 1 2 ; cant on veti ^^ pus ve:^em 87 v^ 3
(cest une traduction); sen dcii on hen^=hen deuriam 87 v**, 3
(de mime); plaist^=plai 91 r"*, 12, plus loin en rime /î/a:^
91 r", 15 ; coi que je die ^^^que que vos diga 91 r®, 17; irie^^^
irati 91 r'', 18- mains iotutes ^= mas jointas 86 v**, 5 ; osai^^auiei
86 v", 6 ; reçut = re^eap 86 v**, 7 ; conul = cûhûc 86 v", 8 ; deust =
degra 88 v**, 6 ; t^^iri =^ wri 88 v**, 7 ; ceu=^sû (scribe lorrain)
901:^, 18; avoir 90 r", 18; toujours fûrs=^mas 90 r% 19 >
85 V**, 6; ueoir twir =veier nau^ir 86 r**, 2, etc., etc. Par contre
le scribe a laissé subsister par exemple : ^w^^je 82 r** i,
85 v°, 7, etc.; negunc 82 r°, 6, 82 r'', 12; pogue^ 82 r^, 12; j««w
82 r^, 2 1 ; poderoux 84 r**, 12 ; preiadors 85 r**, 12 ; /)c^ 85 \^ 12 ;
iteu (neige) 86 r*" 5, etc*, etc.
VI. Si les remplacements de mots provençaux par des mots
français sont plus nombreux dans ce ms. que dans le ms. 844^
les erreurs de lecture et les passages corrompus y sont bien
moins fréquents. Nous lisons ici : trop mis = trom mes (jusqu'à
ce qu'elle me mît) 86 v**, J ; vains =^ vauc 81 V, 17 ; magres =
m'agrops 84 r'', 6 ; envol = auol 87 v*', 16, etc.
VII. Formes hybrides : amia:;; = arnavat^ -{- amie^ 91 r", 14 ;
faisic ^=^ fa^ia -\- faisoit 91 r'', 22; au^iaus ^= autels -+- aisiaus
8r v^ 16; ob = ab + t\i 91 r, io(?); uesquisa^, etc.
Vin. Observations diverses : Nous ne trouvons qu*une fois
lou pour lo 90 r*', 15 ; gins pour ges ^i r, ï>, 88 f, 17; giem
88 v*", 5* A côté de^^îr 85 V", 4 et por 91 r*", 23, on rencontre
très souvent la forme curieuse pïr 88 v*», 8, 82 v**, 3, 85 v^, 4,
85 v°, II, etc.; fous^^fos 91 r^, 13, 81 r^, 19 et passim.
Quant aux copistes de la 2^ section provençale du ms* 20050,
du ms. 389 de Berne et des romans de Guillaume de Dole et de
la Violette^ ils ne savaient certainement pas un mot de pro-
vençal et ils ont terriblement défiguré leurs modèles. Un « bon
son poitevin » cité dans le roman de la Viokiie (ms. 7498,
vers 321) commence par exemple ainsi : En iqual tans que
386 t. GAUCHÂT
nétw daunr. Cest absolument inintelligible (^^ En aquel temps
que i^:^em verdru^ir ?). Comme variante, le ms, 7595 donne un
couplet qyî est une bonne traduction française d'une strophe de
Bernart de Ventadour : Ab j&i mon h vers el wmeni. Le voici :
Bérmrt di Veniadùur
(d'après VArchiv xxxvi, 400).
Kon e$ cDUgs tii fa 1 liment
Ni vilanîa, so m'es vb,
Mas d*omc an se fa devis
D'autruî amor, ni conoliîens.
Etiiiî05, c quéus enan^a^
Sim fait? enug ni pesanxa?
dscus se vol de so mcsier formir:
Ml confondes, e vos noD vei iausir.
Gerberf de M&ntnuil
(d*5iprès Fr. Michel, 19).
11 n'est anuis ne faiUemens
Ne vilonnie, che m'est vis,
Fors d'ommc kî se fait devins
T^'-utrui amour, tie comssans,
tii^eus, que vous çn avanche
De moi faire atiui ne pesandie ?
Chasctins se veh de son mesùcr garîr ;
Moi confondes , et vous n'en voi joîr î
On voit qu'il s'agit d'un remaniement : le poète, si Ton peut
attribuer cette strophe à Gerbert lui-même, a par exemple aug-
menté d'une syllabe le cinquième et le sÎKième vers. Le
deuxième fragment provençal du roman se irouve tellement
rrompu dans les deux manuscrits que Michel Ta cité d'après
ynouard,
§ 8, CONCLUSION. - ^
I
Les deux mss. B. N. fr. 20030 et 389 de Berne, qui sont
étroitement apparentés pour leurs parties françaises, ont aussi
puisé leurs poésies provençales à une source commune. Toutes
les pièces provençales du ms. de Berne se retrouvent dans
les deux sections du ms. 20050, et Texamen des leçons prouve
à Tévidcnce leur affinité. J'ai déjà parlé de la pastourelle i'û«-
trier iniere levei, dont le langage hybride doit être, en grande
partie, attribué au copiste du texte qui a servi de modèle à ces
deux mss. (voir page 380). Voici quelques autres preuves de
Torigine commune. Dans la poésie de Rigaut de Barbezieux
Altressi corn Volifani (4* vers), les mss. 20050 et 389 donnent
la leçon : ressordent (20050), ne xourdent (389), où les autres
mss. ont : lo levon. Au 9^ vers le provençal non serai sors est
devenu : non serai sus (20050) ou fwn sera sus (389);
provençal (i/>wj baisset Vcrgoill e fo sobran^ = . . et lo boban
LES POÉSIES PROVENÇALES 387
(20050), it h bobant (389); provençal malanani^ ^^^maligfmui
(20050), malignans (389). Dans la pièce Tuiî danandon qu\s
drccngtidCaviors^ du même auteur, 20050 et 389 rendent le vers
provençal E noi faill ges amors can tal pren (c'est la leçon du
ms. 3207 du Vatican, en tout cas il doit y avoir une rime avec
n appuyée) par : .♦.«/ fault de rant (389), ni fat de ranî
20050) ^=n'i faill de re^ ce que Toriginal provençal ne pouvait
contenir. Il est plus difficile de réunir A ce groupe le ms, 844.
Le nombre des poésies se trouvant en mérae temps dans 20050
et 844 n'est pas considérable: il y en a seulement huit et parmi
celles-ci quelques-unes, ainsi la picce de Gaucclm Faidit Forî:^
cau:^a es,,, et la stroplie de Jordan de Bonel Si corn Vaigua soffre
la nau corren, présentent quant aux leçons et au groupement
des strophes des divergences trop grandes pour avoir une origine
commune. Pour d'autres pièces cependant la ressemblance des
leçons et quelques particularités semblent attester une même
source. Par exemple Bernart de Ventadour : Ab joi mou lo vers
cl comeni^=^ En ioi mof (dans 20050 et 844) ; B. de Ventadour :
Quan vei la law^eia mover, le vers Meravilhas ai quar desse se
trouve dans nos mss. ainsi altéré : miravill me qeu nies del stn
(844), miravile est que vis del sens (GuiUamnc de Dolc)^ merlauitmr
he mn dcscmt (20050), ce qui me semble reposer sur une leçon
d'un modèle commun, que S44 reproduit le plus fidèlement :
miravilh me que riieis del scn (ce qui fausse la rime enf +w
caduque^ ; les strophes citées dans les romans de Guillaume de Dole
et de la Fio/d/^ paraissent bien être puisées au même endroit com-
mun. Le roman de la Violette contient une poésie que je n'ai pu
identifier (comme variante l'autre ms. donne un remaniement
français d'une strophe de Bernart de Ventadour, qui se retrouve
dans 20050 sans diflférences de leçon notables; quelques diffé-
rences légères s'expliquent facilement par le travail du poète
traducteur, voir page 386), et une strophe de B. de Ventadour :
Quan iKila lau;{eta movcr^ qui se trouve aussi dans 20050 et 844,
mais dont je ne puis donner le texte, Fr, Michel, comme
on Ta vu ci-dessus, la citant d'après Raynouard, Le roman de
Guillaume de Dole cite : i" une strophe de Jaufre Rudel : Lanquan
li jorn son tonc en mai y qui se trouve aussi, sans divergences consi-
dérables, dans 20050 et 844; 2*' une strophe de Daude de
Prades : Bcla m'es la t^o/^ autana, pour laquelle le rapport avec
le ms* 844 est hors de doute, car le ms. 844 et le roman de
C (JSÊBodk Gr. t^ siàde} ks sod^ mss. qui
sse pièce; 3* ilen stropbes die Bemart
ife Vacdbar : j(^Mi 90, ^ ig^Kint araB éw les mss, 844
#1 JOOfO. Lr rooMi de Air ce &14 pféseamck fimne rcmar*
i|Mble WÊiesr poor JWBer, donc 20050 ne s'âoîgae pas trop par
«21 leçon mmfUtir, Les trob mak. liotment aa cmqoîème vers
(Jilai, qnab m&eja^ mm fr) mnfrûm (20050), men prm (844),
m'est pris (JDbir) = kçoQ origmaieiii m/r^, qui fausse Li rime.
Œ loasi le vers : totêi m'i» mam €or e AmiI m*a se^=ei tcut mi mdr
it mm mima (200 >o), td mdsmes (DoUy,
Tout cela me fait sopposer ane comptladon de poêles pro-
vençales, 4u)oyrd hui perdue, qui a servi de source aux mss.
20050 et B. 389, à 844 (en partie) et aux deux romans. Plusieurs
raisons (le Ungâge, des rapports pcrsonnek avec le Nord) nous
portent i croire que cette première compilation a été faite dans
le Nord. Or, comme le roman de la Violette a été composé
vers laij et celui de GuiUautm de Dole vers 1205, et que,
d'antre part, Daude de Prades, cité dans ce dernier ronian^
vivait i\ la fin du xn* siècle (voir Chabaneau, Hisî, du Langt4e-
doCt X)* il faudrait fixer Tépoque de cette compilation vers
l2iMh \a restitution de ce recueil nous donnerait donc le plus
(iHiien chanmmkr pnmtiçal dont nous ayons connaissance'.
Tels qu'ils sont, nos chansonniers représentent ce que
M. firObcr appelle des Lieder bûcher, qui, selon lui, seraient les
éléments dont *ie composent les grands chansonniers proven-
çaux rangés par ordre d'auteurs et qui reposent eux-mêmes
sur des Liedtrhlàlkr^ c*est-i'dire des transcriptions de poésies
I > Bfl «(HVip«r«nt U% Icçom de nos mss, i ceUcs des chansonniers provxQ-
^yn .« cx6nmH U plupart au xiv* siècle et ca Italie — qui éuient i ma
dlupcuMoHi 1^ ti*âi tfoa\^ de râppocts plus énoiis qo'mTec le tm^ Lt Valtîère
(f R dt AMtlcK ^ â M écrit ic^en i|Od). Comipim les leçom : Imssm
tàài^ (U VêllKf«« iftiillA foétkde Bv de Vcattdoar : Qmm wm h In^)
fl ki^ iifcièà' d» MO^o. Notons ms» ane caacs^omàÊom cmaÊnsKiqiic
rmt W HMk Là V«IKè«t tt k nu^ ^ ponr «ae fotm àc i^^Mi et Bv-
l«Mit^%« Ahwpimm hhmikSi detts «us. «m ^b^ ce ^ai est «o sob scas,
jf i^tMl» fftV« «ic4^ a iMte fift et iHfWtliMii. 1b éeos «wksciîcs.
M 1». >i<^#»dldy<l^teifi lift mil iw wiù^âeée h dta-
LES POESIES PROVENÇALES 389
isolées par les troubadours ou leurs scribes. « On peut se
demander, remarque M. Grober (Rarn. Studien II, 34j), si les
compilations sans ordre {Liederbitcher) ne se fondent que sur
une tradition écrite (Licderblàtter)^ ou si les jongleurs ne
transcrivaient pas aussi des chansons de métnoire. Mais alors il
serait incompréhensible que les chansonniers attribuassent les
chansons avec tant de concordance, et nous n'avons aucune
collection qui ne contienne que des pièces anonymes. Ensuite
les compilateurs se réfèrent toujours à des sources écrites. *>
Cela n'est pas tout à fait juste : d'abord le ms. 20050 nous
offre précisément un recueil qui ne contient que des pièces ano-
nymes ; puis il n est point du tout impossible que les petits
recueils des mss. 20050 et 844 reposent, à Torigine, sur une tra-
dition orale (voir p. 382). Dans les mss. 20050 et S44 les poètes
se suivent généralement sans aucun ordre apparent ; notons tou-
tefois que dans 20050 nous trouvons trois poésies de Gaucelm
Faidit se faisant suite (f. 86 v^-Sy v*')^ puis deux du même auteur
(f. 89 v'*-90 v**), et que le ms, 844 place en tête cinq poésies de
Folquet de Marseille (dont une cependant lui est faussement
attribuée) ; ensuite ce ms. attribue deux pièces à Gaucelm
Faidit, quoiqu'h tort, et plus loin de même à Peire Vidal trois
pièces qui ne lui appartiennent pas, après quoi les attributions
cessent tout à fait. Nous reconnaissons là déjà un essai, quoique
très grossier, de ranger tes chansons par auteurs, en commen-
çant par ce même Folquet de Marseille qui marche en tête dans
un grand nombre de chansonniers provençaux (Bartsch C E G
Q N, ctc).
Parmi les passages d auteurs français qui, selon M. Jeanroy
{De twslr. 89), sont traduits du provençal (et que je réduirais
d'ailleurs au nombre de huit), trois se retrouvent dans nos mss.:
Ben es tnorî:^ qui d'amor non sen 844, f. 191 b; La doussa vot^ ai
auiida 20050 f, 89 r**; Gran talan ai quUm baisar 20050 f, 88 v*».
M. P. Meyer, Rom.y XIX, 16 ss., parle des rapports de forme
entre les poètes septentrionaux et méridionaux : quatre des
pièces qu'il signale se trouvent dans nos recueils : Gaucelm
Faidit : Si tôt ai tardât mm chan 20050 f. 86 r^; Peirol : Dels siens
tartifarai esmenda 20050 f. 88 v*; Gaucelm Faidit : Fortx caui^a
€$ qut tût h major dan 20050 f. 87 r*» et 844 f. 191 d; Raimon
Jordan : Lo dar temps vet brune:^ir 844 f, 192 d. Ainsi nos mss*
nous ont transmis, sinon tout le fonds de poésie provençale
188 D.
189 A'
189 B,
i»9C.
392 L. GAUCHAT
Qiian me membre 9 amar sueiïL la Êil | se de raalc merce. amon cor tal
ira acuel | a pou de ioi non recre. quer se hom per bê | amar mor. eu me
morrai. quer a mou cor. | la port amor tant fine natural. que tuh | *« suot
Cils vers me li pluz Ical. fouques de Marselle, (Sur la marge.)
18 Molt mabelist lamoros pensa [ ment, qui sest venuz en | mon fin cor
ausîre. per que non pos nul | ahre pens aber. ne ta nus tant non mî ||
I que per tôt ingalmcnt, et sil vos pla2 q | daltre par mi vire, ostas de vos la
beltat. I et gent rire, et dok prbr qui mafollst ) mon sen. pos partîmi de
vos mon csden. | fouques de Marselle. 5.
19 Tan mot de corteîse raison | mos chantars que non pot | faillir, sx men
degreit bens aucnir. que | mais non faz et sabescon. car Iempereris|{ ma
se m on. et plas gien lors q | — chis. si men su fris, car ele est — | densei-
gnemcnt. non se chai q | — ment, sie mos trobas fak ni le | — deit doublar
mosengens. | ^.
Et son parla de ma chancon. — | qui dex deigne air. einsi les vue ^ |
maudir. que ia dex ne les lor pard — | dîent que veir non fon. et ceic
a — I mobeîs. mai rclenquis. cl dicn c — | "* assis, mon pensament. bcn
rouir — I gran faîUimeni. quant per ce que — * | nalmcnt. per que dient que
hi ne I
Ameraî donc alanon. oil car non — | pos panir. cm dedens mon cor la
désir. \ *i — sab se ben £12 vueille o non. quencor tic | mon cor en prison,
qude ta destraint et 9 | qub. st que men vis. quaie poder que më | partis^
en mon viuent. per hoc sui a son eau | àmcnt. qumilitas et sufrir %*cnt. b 011
nô I **^ val force ne gent»
Mab per ioc que mabandon. quere su pris [ en auzir. ne mos song^^ non
pot cubrir. I que non muire aquel que saison, per ico [ fiz bon al que noa.
quenque sa bouche de | ^^uis. eu en sui fis. si ^ sui souges et adb. [ de bon
talent, de li amar ont pris 9 cen, mos | fins corages et mon scn, chasam cuide
a I mar plus lomnent. ||
16 honrar tan quai ] cor vos mi fai porur. post taerces clam qui { gande del
ardor. qucu ai paor mol maior de | vos que de me. et pos dosne mos cors vos
ade I risse, se maus len ven. edînsîes et su&ir le { i 9ueii. et per oc ^ al oor
cou que sab bon. [ quel cor gardas 9 la vostre mcsoo. |
Ev vos am et ten tant car. qud cor mi | fat nke sambkr. qiiel seo esmuel
kugîcii- 1 ce la ^-alor, si quen error. sui de vos per cor | ** qfoeo icfeeiu et
pAïaulent, maintes fob se 1 deuen. que non sai qtK deucn ' loden, que | ooo au
ren. ni ia nus hom per ce ne ma 1 cheison. sa saloJcDt. et eu mot 000 lor sô,
M Moût fussent doU nu oonsirricr. bde «fesac | ^* ntaia qoa plaisur. vos
vengîst ta vue foia | nmicfiibraot. del mal suiram. qfuoocr cnll
64 veo^ bcns aaoros et plaisem. |
Ausi ^ tôt lao s^^oce. per faille et pcr^ Bon^ vml nais loQ rnoot per amor.
1. Coiii anadié.
2. Ce mot c$t bilK.
LES POÉSIES PROVENÇALES 393
et el I mont non ab vaillence ne valor. meudre dos | ne sanz vostre mainte-
nence. car de toz bès | J es et gran. et semence, et en vos es près et | valor et
sen. et per amor es plus valor valè. |
Tant abes de pnoissence. per que font | seignor. iouens beltaz et anor. vos
porten | obédience, chascun ior. meudre dosne en | '°questa credence. aten a
vos. et fas ma peni | tence. que se vos plas lou mieuz enance | mens, dun dis
iouious od douz esguars plai | sens.
Cvr 9uient et cheence. afin amador. ] *J qui vol amar per doucor. que g^eu
es qua II — que non plor. meudre dosne | — camor venche. vostre dur cor. | 189 D.
— nence. dalcuns bons fes. per q | — ens. et en amor fins et pmen | —
— p durence. pert en mar ma — | $ que longes non cor. altresi | — lence.
sa color. meudre dosne. | — inence. altre beltaz deuant vo | — ala vostre qui
tant es auinês. j — ^ la lune es creissens. | '° Jossiames faidius.
34 an que li ior sunt lonc en mai. | mest bel dolz chanz doisel de | — uan
me suis partis de lai. membre | — ne amor de loig. vais de talens brus | et
enclins, si que chanz ne flors daubespins. | '5 non val maiz que liuers gelaiz. |
Mol teg lou segnor per verai. per que le | dit amor de loig. et per vn ben
que men | cschai. ai deus maus. car trop sui de loig. | dex car fusse fains
pelegrins. Tan que mos | '° fust et mos tapins. fust deses biauz ex
re I mirais. |
Ben parra iois quant li querrai. per a | mors del hostal de loig. et se li plais
herber | gérai, près de li car trop sui de loig. adonc | 'J sera parlemens fins,
quant dru lontains se | ront veisins. en corteis iois gist gens soûlais. ||
I Jamais damors non jauzirai. se non jau | zis damors de loig. et bien sai 190 A
que grieu | ment laurai. quar trop sunt nostres terres | loig. dex tant i a pas
et chemins, que grie | ment en serai saisins. or seit del tôt si ^ li | J plais.
li sons derues del home sauuage.
88 Poe ve gent que liuer sirais. | et part se del tanz amoros. que | non
auges notes ni lais, des auselz per ver | »<> gers foilloz. per lou freit del brun
tempo I rau. non leisserai vn vers a far. et dirai al | ques mon talant.
Lonc desirrier et griu pantais. nai agut | al cor cubitos. vers celé qui soa.
mi trais. | »$ maiz aine vers li non fui greignos. ainz j la portaue el cor leial
mol fui legiers aen | ganar. mes peccas naie deus amans.
Nogins per autre orgueill non lais, de | samor dont tant sui corcous. el
^ncis ben 9 | " ben mi pais, et sui galias aestrous. las re | masus sui ce
chabau. quant per autre | non vol poignar. per me. ni per mon dru |
ghemant.
Tôt mes chauat car agran fais, me | tieg dosne quan pens de vos et
quant | 'J noi parlar mes esglais. et ia ior non serai | iauzos. queu sui irai*^ de
vostre lau. et ab | ioi de vostre blasmar. et plaisen me tuit | vostre dan. ||
I Non pos mudar que non biais, vers a | queu ioi tant orgueilloz. quainc 190 B«
non vi or | gueill non abais. quan pluz en poie menz | caous. et est folz qui
ve et qui au. et si | non sab son meuz triar. et na el siegle da | 5 ques tans. |
Huimais sen faignent drue et lais, cel qi | non estât enuios. qua toz les fenis
Roffunta, X2UI 26
J94 1" GAUCHAT
et le lais. | per oc que non si poderos. pos poder ni sab | tcti ni mâUp bcît
es dreîs 5? h di^sampar* et | ** ai me perdu mon enEins.
Pieres \îdaus,
B Ere non ve luislr soldlL tant [ mi sunt oscurd !ou rat* et | pas per xsco
noQ mcsmai. cune dartxis M^ ml soleille. damor qui al cor mî raie, et | qyan
laltre gens sesmaie. et meillor ab | ans que sordeî, per que mon cbanl goq |
sordee,
Pfst mi semblent blanc et vermeill. j ^^ ensenient 9 eî tans de tuai, xm tcn
fine a I mor ^inle et gai. meu mest fîors bbn [ chc et verraetlîc, qud ■
yuers kaknde | maie, quel gencors et la plus gaie, ma pra | mes que
mautreL sencor ne sen des | *s autree. I
Pâor me font malues ^ïll. per quel j segîe. et aroor decaî, querre ss î
190 C. en Heu || } saluai, et luns al autre 5? seilîe. 9 si fine a 1 mor dccai, Ju, raalaaisc
gens saVuaige. qi | vos nel vostre pseill crei. damedeu perde et | mescrdc. |
Dalqucs mi reuen en coreîl. qui re me fë | î dol et esglai. et peise meî dd
iol qiieu nai, 1 et pos chascuns sen coreille. del altrui îoi { et sesglale* la îe
meillor dreit non aie, qo ] picn déport non esguei.celi quipluz mi t guerree, f **
Noit et ior y sir et vueil. plaîg et souspîr. j maii puis mapai, qtian tmeuz
mlmz et I je pis trai. maiz vns bons respis mesueîîle. | donc mon ^drrer
sapaic. fol sui quan die [ que mal traîe* et pos ai tant ricbe amor, j '« eu tjol
bcn ia vn sol îoi naie.
Fine amor a vos mapareill. per ou nd | ^uen ni sachaî. mût per vosxte
merce >'os j plaie, dex que men appareille, car se ftne | amor mi caie. ha.
dosna per merce vos plai | *« e. quaias de vostre ami marce. pc« ai tant j ia^t
si marcee, |
Pieres vidaus.
39 Amis bernart de ventador. p | vos poias de chant sufrir | *J quant ensî
oias resbaudir. le louseignol et | nuit et ior. auiaz lou ioi que demene. | tote
nuit * chante sur la flor. maiz senten | de vos en amor.
190 D. Perrot lou dormir a seior. aim miauz || | quel louseignol auzir. ne iamaiz
tant I sauriez dir. que maiz ala folie tor. lo | dieu for sui de chadene. et vos
et li altre | amador. sunt remasu en la folor ».
Pieres uidaus.
11 Quan vei laloete moder. de | J ioi ses aies ^tre al rai. que | soublide et
laisse cader. per la doucor quel | cor li vai. he. tan granz enuide men prê. |
de co quest si en jausion. mirauill me qu | nies del sen. et cor de desirrier
non fon. | »»
Hc. las tan solie saber. damor et p pe | tit en sai. naine damar non me po
1 . Ce mot est biffé.
2. Mut ou nuit y sans point.
3. 14 lignes blanches.
IJSS POÉSIES PROVENÇALES 395
tener. | celé donc ia ioi non aurai, toi me lou cor. | et toi lou sen et sei
meeme et tôt lou' ||
12 sab ni champ ni vie. pos pe* | enance. per ma maie destina | — 191 A.
Damor vos di verement. | — tener. mais en deurie valer. — | fol amie, mais
non dure que o — | J es fol qui sans fermance. met — | sesperance.
He. las p muir de talen. queu — | matin non seir. et la nuit quan — | lou
louseignol chante et crie, ma — | »° chantar solie. muir de dol et de p — | queu
nai ioi ne alegrance. |
Amors ma mis al neent. et torn — | nonchaler. mais seu la poges tener— |
fere vilenie, maiz dex non vol quamor sie — | 'J ren donc len prende
veniance. ob espade | ne ob lance. |
Amor prei vos de mon dan. qualque prou | non pos veder. iames blandir
ne temer. n | quier. car tôt en perdie. ben es fol quen vos | *° se fie. par
vostre false semblance. sui trahiz | sanz desfiance.
8 Non es merauille seu chant. | mais de nul altre chantador. | quan plus
trai lou cor vers amor. et mau | 's sui fais a son ^mant. cor et cors saber | et
scn. et force et poder i ai mes. sen ti— 1| — | e vers amor lou fren. qua nule 191 B,
altre — | ren non enten
Ben es mors qui damors non sen. al cor | qualque don de sabor. et que virie
sanz do | . or. fors per anui far ala gen. ia damedex | $.on maint tant, que ie ia
vine ior ne | mes. pos que damor serai repres. que da | mar non aurai talen.
He. dex car se fussen trian. dentre fais | fin amador. que losengier. et
tricador. | »° — rtaissen corne el front deuant. lot laur | — 1 mont et tôt lar-
gant. ivolgre aber dat. | lauges. per oc mi dosne ^nosghes. ausi | culam
finament. |
Qyant eu la ve mos bcns peruent. asex's | al vis ala color. qualtresi tramble
de paor. | 9 fait la foille ^traluent. non ab de sen ^ | tre vn enfant, alsi ma
amors soubrepres. | et dôme qui si es ^ques. pot len auer al | mosne grant".
Per bona fei et sanz engant. an la plus | bêle, et la meiUor. dd cor souspir
et des I ex plor. tan lamade que faz mon dant. nô | pos mes. que samor ma
près, et en la char | tre ou el ma mes. non pot das oubrir fors l 's merces. et
de merce non trop niant. |
Bona dosna plus non demant. mais qm | prendas aseruidor. seruirai vos p
bon seig | nor. quai qui sia guerredonant. tôt al vo | stre pmandemant. bel cors
ientix fi^ns et | )<> corteis. ors ne lyons nestes vos ges. que mau | cias sa vos
me rant. |
1 . Fin de la colonne. Un feuillet doit être tombé après, qui, selon Tindex,
contenait les pièces suivantes :
Pieres Vidaus : Ben mont perdu et lais.
Bernars de Ventadour : Ben me quidai de c*.
Amors et quaus hounors.
Tous cens qui preent q.
2. Déchirure au milieu du feuillet.
39^ L. GAUCHAT
191 C. 69 A lentrada del tans florit. q | nos sons dd yner partit || me sont bel
chant et lai crit. que font — | auseillon petit, adonc mi membre dune am — |
qui ma tornat en lonc oublit. sencor a^n io — | non secor.
Pos entre lou viure et morir. estau | i non mi pos partir, assas nû degré
defen ~ | pos en altrc non ab ^ir. et sen faisie tan | danor. qui mi laissât
ses mans tenir. | dont aurai ioi et baudor.
Per oc sai dit gran hardiment, queu — | '• esgoar nol Ênlliineiit. et pos
far me pot | de neent. prei li quen aie causiment. en | âne ganaî de ma
dolor. qui me tengut vn | an vercent. que neguns hom noo ab pe 1 ior*s | .
Dosne de vos me blasm et lau. et guer | piraî sicde cbamau. et pos Ion
ben mi | tom al mau. tan me metraî per vostre esdan. | per oc si prei al oc^
dator. quin lais remirar | vostre osuu. mais men prds don empera | **dar. |
Fer ceste amor ferai orgueill. et totes ; altres noo acnnll. assas men prcb
mais q i non sueîll. queu crd que la verront mi ; œill. ia des non des pliu
de rîcbor. maiz ; 'f qua li fusse dis vn bnidll. qœ laïud dian [ ten sor la
Aor.
Ab un petit dimar non Lus. que rienz ; non ai al que kxi Êds. sin tome
mos i<»sen '. biais, de lamor quaien en pantaîs. se nô ^ rentabfcn ma Talor.
Lùssar mi cuit dd tôt eschaîs. et tir moines en rettctor. \]
191 D. M — chose auias et toi lor ma — or dan. es grcigcor del qne : — scges.
que ce 9 ddt toi ior | — pSoran. mcst bd »iir en dun , — csrÈie. qne cQ
qot es des rak3»$ ( — pjùne. kc nÈs rakos. rSchirs rôs des cibles, es mon.
he. ia^ qs^a! dû! et | 9 periess. ^ escrjcg 3>cc et salsue a as air. 9 a dm-
oor tâb hctts qci fo: sufrir.
Mv"«; c< V>ïï :«*, « «:::: tiâsu: mîl a=. '-' est tsls TCïoiccn iwo fb ne
no.r. :iT r.-^os^ iir.--i:r r. J5 h. ~ r.cr. ir ii fc - s^~ ^lLr 11^ Izn îiz prc»=LS taa
hirc:* :i^ i.~r*t: rc. i'.cxi:ii:xs 1j- rtv.* c.: ■■■cz'Z;^ ^^rt. rue cri: ç^ae taa
r< =" C-- ."CT-i j^^-s X r.5 rir^iri .ijr.L.; r>:c cri. c.;::^rri:* Ârensrr itas ri
oc. .T^ir. pntiis. T.-Ci .'ô:^:-: ::•: :.'■.: .ni:r. ::»: .:'^ r.^-i^. ît: ;ui.r cl ve; ;. -no::
^6 Lrco: i>c* n-;^:n> j^ v^io: ci r.^'i i.r-^ j.-^;ni.. zz.ziz iz^zis ud::
ou rx i;-i: n^ ^j;vj.-x it si*. ^cs-<L.r r.-.. ^«:^ :.r.-.û* tor. ir»: Trx.zi. T«r mtr-
cc? nrc. ,.'*ii " ror. S'i> juJ;*iu?c r.-.;.:- i>^vi;-.:.> ni -.:. nrir. :«l:i^ 7:1:1. - . |
Tûi K sis "£• "ns nroix: »' u. t. xs^ci .in: ç.. :o: ûiisi >rjr iiiii? mnziinT ni
vrrvJTî. r*.> cim i. i- : .1»."»;:^:-; : i sor sc;rr«.T i:^ Josr*i. m; ûl. amzy:
LES POÉSIES PROVENÇALES 397
entendre. | que quant ai fait seruenteis ma chancon. | J ne nule ren queu
pens qui sie bon. eu ii | tramet per oc quel en retaigne. ce que plai | ra. et
que de me suuaigne. et pos blous | de son rémanent, déport me od la cor-
teisejlgent. 192 C.
Altresi fait gorpill en chacador. qui cha | ce ades ce que non ause prendre '.
atendre. | ensi vueill prendre ala perdriz lostor. et ç I bat la ou non mi pos
desfendre. ^ bateil $ | liers quab perdut son baston. et ies na I uraz sous laltre
champion, et lou mal | mot encor dire non deigne. car par son | dreit a espeir
quil reueigne. ensi fui espro | bas per cent, per oc nai maior hardirïit || '®.
68 Lou dar tans vei brunasir. | les auzeillons esperduz. per freit quis | des- 192 D.
traig sunt mus. et sanz pnort des | iauzir, maiz eu qui en ioi ^ir. per la |
gensor ren cainc fous, tan ioious. sui | 5 quades mest vis. que foille et flor
respc I dis. I
(Le reste de la colonne est vide.)
En blanc. 193 A,B».
Sur la marge : Bernars de Ventadour, écriture moderne. 193 C.
77 D'un déduit qui me fuit. || 193 D- desoubre lou glai. ne cointe-
ment remirar. einsi p solia | far.
(En bas :) 59 Vers vos souple dosne pre || mierement. per que eu | fas et 194 A, B.
pmens ma chancon. et sil vos | pi as entendez ma raison, caltre non aus | des-
courir mon talent, quensinc mauê | quan vei vostre façon, la langue fal.
lou I 5 cor ai temerouz. quer qui non tem nô I ame coralment. per oc ten car
lou vostre | seignorage. |
Ev vos donai per fei et lealment. mon | cors el cor dont faites teneison. et
ai grât I »° ioi que sab que sui vostre hom. cuns bons | espeirs de vos mi ten
jauzent. quen bon | seignor non pert nus guerredon. qui bê | la sert, eu vei
mainte saison, poure enri | chir. per bon atendiment. per oc esfors | »J enuers
vos mon corage. |
Tant ai assis mon désir Hnament. en | vos dosna se dex iauzir men dons.
que I mieuz vos am seruir tôt en pardons, q | de nule altra afar mon mandi-
ment. car | *° si granz iois ratrait mon cor vers vos. | pos que vos vi non fui
aine poderos. si i desirrous sui de vostre cors gent. ^uis | mauez remaig en
vostre ostage. |
Et sab trop ben queu faz fol ardimen. | *> quan eu la prei damors ni mot
en son. | mais aine non pos tomar ma souspecô. | et sab trop ben que trauaill
per neent. ||tant a beltas son gent cors orgueillouz. | que son reu près fait 194 C.
puiar soubre toz. | queu desirrans souspir en esperuens. et te | meros que non
tegne a folage.
1. Biffé.
2. La moitié supérieure du feuillet est coupée. L'index indique ici :
Per dous chans q louseign
Lou louseignol sesbaudie.
Mol* mes bel et clar.
398 U GAUCHAT
Et seu folci eu hz acscient. sabcs pcr t ^ quci d m^t bel si mest bon.
et dirai vos | q ^ per qu.île enteniion. bons espcrars tict f lome asaluiment.
et seu hz ben moût ] en serai îauzouz. et seu hï mal suinrai | pcsancotu.
et jausiraî ben et mal cnsirïit. | cnst ferai le 9nort al saluage. |
Bona dosna merccs clam per garent. | car sens merccs non aten guerredoa.
aîz ! cri merccs ou nierces venghe ou non, et 1 ia de ce non verrois recredcnt.
ainz pree 1 ''rci mcrces tant ^ingoissois, que per mer | ces tendrai mes mains
ansdous. entre | vostres. et ferai causiment. quel mont I non sab tan œrtaa
hominage.
37 Pax in nomine domini. dîst | macabruns lou vers del sô | '*» oias ^ueu
dis. que nos a fait per sa doucor. | lou seignoris celcstiaus. quil post pcr nos |
vu lauador. que for doutremar non fu I taus. et lai deuers val iosaphat.
et daikel [ de cai nos j?nort.
194 D. Lauar al scîr et al matin, nos deuriô || *» segont raison, eo vos afic. cd qt»
del la I uar ont iaissor. de me tenez quil sunt sa | et sau. deuren annar al
lauador. quer il [ nos en \Tais mecinaus. et sabens îoignôs [ ala mort, dont
en crci quaurem larberc | î bas,
63 Si ç la tygrc al mirador qui I per remirar son cors geni. | obUde sire
et son torment. ausi 1 quan vei le qui iaor, vblide mire, et ma | '^ dolor,
195 A. ^* mendre. ne ia neguns ne se || face deuins queu vos dirai qui nia od | soi
conquis, se vos sauez pnissar et cnten | dre, |
Bien voudrie saber damor. sele vei ne | au ne enten, quar tôt aï requis
franca | s men. merccs ni de ren non secor, ni eu | non pos vers ses armes
dcsfcndre. fors per | merccs acuî eu sui acUns, quil non es | iois ni altres
paradis, per queu changaîsse I espérance et atendre. || '^
84 Ma dosne fu al 5?mcncar. frà | che et de bone ppaignie. per quel eu
me I det mais lauar. que sel fust fcl ne estraig ( ne. ben es drets que dosna
fraigne. vers ce | lui qui la cor damar. que sel fait son ami | î pregar. drds
es sa' quamis li soufraîgne. (
Dosne pensans mal enganar. losengicr | qui dex (j traigne. car tan 9 on en
pot em j blar. damar. itant en gadaigne. auan | que neguns sen plaigne, pot
Jamor Ion 1 *^ guement durar. car quan leus est deit | on parlar. et quant liens
non est remaig | ne. |
Ma dosne me fait grant anor. quan li I pi as qua li 5? taigne. et prei U de son
amador. | »^ quel ben quele fara non venge, non leis | se far longe atente.
car Ions termes mi | fait paor. cainc non vi maluaiz donador, q j Ions respts
non desfende. |] {Il Je jusqu'au bas.)
60 Avsement 9 li lyons qui tant es | fers et tan gais, que sous Ico | nîaus
quan nai*. mors sans alane ei sai^s | vide, maiz od sa veis quant lou crîde.
1, Biffé.
2. En marge, écriture moderne
h
Bcmars de Ventadour.
LES POÉSIES PROVENÇALES 399
les I fait reuiure et morir '. et amar. ensirîit | $ pot de me far. ma douce
dosne et amor. | et guérir ma gran dolor. 1 1
61 Avsement p lolifans. qui | chat et non pot leuar. mes | li altre od lor 195 D.
cridar. de lor veis lou leuen | sus. et eu vol sigre itel vs. car mos mes | fais
mes tan grieus et pesans. que se la | $ cors del pui et lou beubans. et lou
dreis | preis de leaus amadors. non me leuent ia | maiz non serai sors, el
deignaissen per me | clamar mercez. la ou jogar ni raison non | qui* val ren.
Et se per lou fins amans non pos de ioie | »° coubrar. per toz iors mais laj
mon chantar. | ne de mei non er ren pluz. ainz viurai 9 | me ranclus. sous
sainz soulaz. car ma vi | de mes enuide et pesanz. ioi est mes doelz | et plai-
sens ma dolors. dont sui ie mieuz | '$ de la manere al ors. car qui lou bat et || 196 A.
ten vill sanz merccs. al douz degraz. et | meilleir en valghes.
14 Bêle mes la veis altana des | louseignol en pascor. que | foille es vers
et blanche flor. et lerbe nais | en larfane. adonc tentissent 11 vergier. et || iois 196 B
maurie tal mestier. quel cor mi rauif | et sane. |
Esbaiz 9 caus arana. vains et plans de | duisor. arai campes asa valor. seu
sui de I plusor ppane. que tuit soulaz mi sunt ger | J rier. auiaz que lou faz
destorber. tal cortei | sie es vilane. |
67 Ensi 9 eu sab triar. lou melz | del mon et causir. me don | dex de me
iausir. et de la bêle nonpar. ou iois | ^° apris son estage. quere chacaz et
guerpiz. et | de tôt lou mon faidis. mais en son franc seig 1 1 norage. sest 196 C.
arrestas et aers. ou ert honras | et aders. |
30 Tens de chantar non fal cor ni | raison, non fas saber se chans | mère
grassis. mais ère mes cant vers a | J mors failliz. per quel eu mestau maris,
et II psirous. et post fai me défaillir mous par | dons, deserenans deit chascun 196 D.
ior chantar. | post ca mo 3 mi dosn dei chascun ioi troubar. j nouel sens,
nouele valor. et beltaz pluz fine | et meillor. || J
49 Tart mi vendront mi ami tho | lousan. et tart verai fau | giaus et mont loy a.
rcal. quer rcmasus es del tôt | en bar as. mos bels règnes, qui es dolz et cer j
tans. he. bêla dosna queu am et désir, des | 5 ex vos plor. et del cor vos
souspir. quan mi I membre vostre cors auinenz. el dolz regars. | et la bouche
riens.
Dosna ben oi larberc sant julian. quan pre | miers veng en vostre rie hostal.
cainc dex n | *° feis tant auinent iomal. 9 ikel ior quil j forma de sa man.
mirauill mei quan sot si | gent bastir. et vn tal glauc a fait per me | aucir. et
vn ^nort quist tant dolz et tan | gens, se mocias liez en sui et jauzcns || '5.
62 Altresi 9 perceuaus. al tans q | viuie. qui sesbahi desgardar. | et si non 197 B.
sab demandar. de coi scruie la lâcc | et lou graaus. et eu sui altretaus. bona
dos I na quan vei vostre cors gent, ensiment mu | J bli quan vos remir. non
aus pregar. ne n | sab ^sir. |
1. Et morir biffé.
2. Biffé.
3. Biffé.
400 L. GAUCHAT
A Fidie de sens et de laus. juene ou jois sa | lie. vkille de prçis et donrar*
•97 C. jucnc de bel | dosnear, loiDgde folie* vielle désire leaiis^°. 11 jueoc oq ioiieos
en saiîs. vielle ea iql bîaus | iouerts aainens. vidle sanz vîella^r- eî juc J oc
dans et de getit acueillir,
50 Alrresi ç cîsnes M quan deit | morir chant, et semm ge ( f sût morrai
4£t amais de san. mol ma tectgut | amors al laz. et maint trauati sufen tas oe |
pcr diii ^ue cere me teng. 5ïnais caînc mais ! non for£s ren. Il
^< 100 Sî 9 lenclati^ qui a de moi dou I canc^. bàukt dedetu. et trenche | et
fait archiere. en ^tre lost et prent de nui | re esmance. krcher dcfors. et es
pluz engeig I nos. et ftertdeuant per oc quW seît rescous. 1 ï et mi dosne mi
tcn en tal bilancc. [|
198 A. BZ Uos dosne ab vn dok regait que | firent vostre oetll lairon. qui | vin-
drent mon cor emblar. mais non firêt | mesproison. et post que mon cor
auez lai. | non creî que vos morir mi lai. per oc ben sai ] s que sen volei
audrre, non pos moir a tant | honràt martyre, [|
98 B. 73 Bhn mest que chant quan | vci del fau cader la foille ^ î tre %*au. que îi
auîkil restent br vds. per | lou tens qui ses brunasis. eu qui per loi I damor
mesjau. dirai 9 sui damar iausis. Il 1 {Raie de k cojùtim mdt,)
Z. 89 Quan vel les praa verdesir. et j parens la fîor granea, adqnqs 1 pens et
5?sir. d amors quainsi malegrea. per f vn pou non ma tuea, tan soen souspir
caîc I non vi tan for colea senes colp ferir. aei. M
Tôta nuit sou s pi r et vcill. et tressai tote 1 endormi a. per oc car ueraire mes
quel meus j amîs se resta, a, dex ^ seri garia. sensi deue | gués, vna nuit par
escaria qua me sen ve j gués* aei 1 ^®
Donna qui amor saten, ben de auer fin co I raie, tal ni a quades la pren
^-^^ puis la laissa | per foîaie. maiz eu len ten fin corage. ensi I leaîmeot. cainc
dosna del mieu parage. nô | ou fiz tant gent. aei. j 'J
Dosna qui amie non a. ben si gart que | mais non aia. quamors pon vie
demag. ni | tan ni quan non sapia. senes colp fai mort | et plaia. tal ia non
garria. per nul mege | que ie naia. se mors non loida. aei. | '°
Messagier leuaz matin et vai mon la | gran iornaa. la chancon amon amie,
li por I taz en sa 5?traa. digas li que mol magraa. | quan membres del song.
quel mi dist | quan mot baisaa. soz mon paueillon. aei. j '^.
Dins ma chambre encortinaa. fu il alar | ron. dins ma chambre ben doraa.
fu il en I prison. ||
198 D. 15 De bon loc mouen mes chancôs | per queu me deit raîr aenant. de ben
a I mar totes saisons, quamors men uensara | lou dan. queu nai sufert et
sufrirai. trus | quela sap quai mal quen trai. sim pan | J tais al cor en balans.
que ben pot venser j vns enfans. j
Per dieu donna car mi euos uan celés qi j an druz gaban. et disons que trop
en perdôs I nai chantât nen irai chantan. lou cor non | »« pot dir co quil plai.
la bouche non pausa peis | trai. maiz vol mûrir per vos amans, que des I amans
viure dous tanz. j
Da non gabare lous bretous qualtresi vau | 9 il musan. et vei quades faz
LES POèSIES PROVENÇALES 4OI
dun dan douz. | '$ car li soi tan fîngs sos enians. sin parc de lei | deus que
farai. sin roman arta poc osai be I lamei er uilan dos tanz. quaissi vais dou-
blan I mos talanz. |
Pos fait manez fait mi joious. per chausi'° | men vos o deman. et traiez
mes ielz ambes | dos. sanc posui usanei camnam. qucu nobs âmes et mielz
et maîz. queu non die ni | no os odiri. ben sai de ver or moi lenians. sîns |
auses diri mos talans. | 'J.
Ane non raisonai dcnan vos. anc tan non | vos estui denan. quar ane sens
vos sei enoios. | quadas die merces et clam, queu non lai trop | ni sai ni lai.
merses car ami dosn non piai. sap | chaz quan vei voctre semblanz. pluz soi
mus II î° que non soi parlanz. | ^99 A.
Bens ioenz nobs est nulis enans. quar | vau toz iors de vos damans, j
Del rei daragon pren talanz. veia que soz I preis es granz. | î
70 Amors dousors mi assaia. | valors richors mi menaia. | gensors que
fiors es pluz gaia. esel quaissi j mauci em plaia. per que non vol quautra j
meschaia. mais il me tormenta et mcsglaia. | »° don souinent sent, martire
9sire. car dire n | aus mas quil maia cors ^uinens iens. traire | délire quabrire.
quen fai mi menaia. et mi | te en tal uistenca. que dal non ai souinenca. |
mais de leis qui toz iors icnca. et pois sim fai | '$ aperuenca. qua ia de
samor tenenca. per qeu | momet afufrenca. car ondranca. e pesanca. || lenlanca 199 B.
ses doptanca. quab seinlanca. quen | fai mi retrai. que iamai non don dés-
espéra I ca. per quatendrai e ueirai si iamai troua | rai ab Ici nulla cordanca.
si que lesmai que ieu nai tom en iai dun murrai si non | J len pren pizanca. j
81 Laltrier cuidai aber druda to | ta la meillor. ^ques egusse ue | guda et
la belisor. velle antiue paupre et nu | da ben parlant damor. trames per oc
quel I »° saluda et fac plaz gensor. mais la trace ma | lastruda queu per liei
oidat. vels vin e tro | blat. peis et por salât, e loi calcada et vestuda II si men 199 C.
ab boisât, quen loc damige es ven | guda. en tens tenebror. tint son pan en
sor. I et en sus li cor. et trobai la piau caluda. cor | de el col. espaulle aguda.
mcmella pendant et | vuida. 9 borsa pastor. pis ossut et plat, el vê | J tre
ridât, maigre rains. es cuisse ruda. dur | genoill et flat. et quant lai apercude.
es I me vos irat. ab itant vir a la fuda. non sui | arrestat. |
Tan men es el cor creguda. rancune et gra | '° mor. que continence ai
perduda damar per amor. I q pensaua la canuda. que non ab calor. et vo I lie
essre batuda subra son tabor. non ab tan là | gue esmoluda. quegusse a^tat.
demei la me | tat. del mal quab pensât, dont deurie essre | 'J teguda per son
lait peccuda * peccat. tos et agut | dae' ta et mal qui suda. sanz aber retor. |
freit et seif et plor. od fresche dolor. ni ial ) tendre ni paruda. que non sie
amort feruda. | de tal mal qui non la tuda ainz la teigne | '° en langor.
ncl non ait denfat for pan mesalat. | et carne de vella truda. ou de porc
1. Biffé.
2. Biffé.
402 L. GAUCHAT
sorsemat. i pis de mar qui de loig poda* vio cras et booUL | jto S es tint
irasoida que quîdai essre veogat^ [|
199 ^- 78 Ensement ^ la panthère qui | porte tan booe odor. et ast | bde color,
que non es beste saluage. qui par | force et par ot;trage. sîe tan nuk ni fae. (
que si Img $? puet choisir, non auges près | Mou muir. et en altreial sem^
blance. mi im amor tn baktnct. Qfus ugre sigre dbr f it | pos ahcr ti iâcmà dàf ^
far hu stn plaser*, \
Ne îa poT ce non plantere. negun tor da j mor. aini prendrai en îoi dolor.
son gentilt [ cor del parage. mes sel abes en corage. merces | >^ que doq es
encore, enstnc non pogres garîr. t de mon mal trait et merir. asa simple
sem 1 blance. et asa douce acointance. ou atan l gran bdtat en soii poder, per
que non pos | laissar del veder'î. U
200 A* 23 Jamaii rié tal nô porroil far amor km * | sie ennui ne mal Itaîs ne «&ns.
car el ( ma ùâi tant auinent soucors. que re t staurai ma les pertes el à^as^
quauie fes | a dreit per mon folage. et si aine ior de | s ren ma fet mari, eu loa
pardon lou de | trie el damage, car tal dasna fai naon | preîs acueilOr. qin
mamende tuit que | nu fait sufrir. 1)
200 B. Mol rai sab gcnt lou cor daltres partir, et I aîostar enli toz mes talanz. amors
Jûu ior ql | fist del tans venir, ala belc. dont vn cortcis sem 1 blant. de ses
bîaus ex entredist mon corage, | si que aine puis non pos virar aîUors,
adonc | î sab eu que lueil! meront message, damors. | quai cor me ven freîs
et calors. iois et ^rs. | ardimens et paors. |
65 Tvit demandent quest dcuen | guda amors. mais oîani tox M* en dîraî
200 C. U vertaz. tout autrui ^ del solcill |f esiaz. qui per manl leu îete sa resplendor. |
e ai seir vait colcar tout cnsament. sine t Tai amor quan a per tôt cercat. et
quan | non pot vengher ason agrap. tome sen lai I doncven premcrarocnt. (| s
aoo D, 20 Hn la vostre maintencnce. mai | mis amors franchement | queu fusse
mors verament. se non fust ma | ^ noîssence. dont non eu en me peruencc, |
don muir quan plujî sui plaignens. dont | * mire me tan suuent, que ma can-
con en ! peruence. naurie maiz de valence. If
h A* 83 Lou premer tor que vi mabcli 1 lî vostres biaus cors gens. 1 doua et pld-
sens corteis et debonaîre. et | seu sap dir ni faire, nuleren. que vos ten 1 gtics
aben. ma douce chère amige al cors 1 J plaisen et gai. sachaz que mol mi
pîal. I seu fai ren qui vos sie », i)
201 B. 99 Si con laig^ue suffre htiafconrèt \ pu hm Um gran ke mil hou \ nus susten,
f, L dahel pcrt iô ffforcahhi, pot h \ suffrar muH ^ nuk aut^ retu si ua de U ci
i , D*une autre main.
2. Autre main, comme plus haut.
5. Appel, Prov, IfifJita dit â propos de la forme iiV, 326 n : « Wenn nicht
zu inden ist, haben wir es in j*^ mit einer franz. Form von seoir zu thun. 1»
Cest inadmissible : ce morceau est certainement d*origine provençale et îl
ûudra corriger d*une manière ou d'une autre : « $*eu faz ren queus plasia? n
LES POÉSIES PROVENÇALES 4O3
defaiU \ a merccs. et molt mi plas que daltre part I 5 mi vire, et sab per ver
que non aus ren | desdire, el vol mon dan. et eu li vol amor. | quer assas sui
defaillens amador. H
32 Laigue puge ptre mont | al fum et al nuile et al | vent, et quant est aut 201 C.
et descent. et sa | chent tuit cil del mont, quensement 1| puge valors. abenfas
et ab ennor. et | quantt est aut descendrie. son ben non | la soustenie. et 201 D.
degrem esser enuious. | del markeis et des altres prous. et des | onras rie fas
kitifen^.
4 En ioi mof lou vers et ^mcs |1 et en ioi reman et fenis. et \ sab ^ botte en est 202 A.
îa^ fins carbôs et \ li pmencemens. per la bone pmencance. | mi ven lois et
alegrance. et per oc dei la | J bone fin grasir. que toz bens faz vei lau | sar al
fenir. ||
26 Non malegre chans ni cris. | danz el. non fai cors en grei^. \ ni non sap 202 B.
j) q tenghe^ ni per des mous dis. car ben lous perdrie. seu cui | die que voighes.
ami dosn près ni mer | ces. car non tengues que per me si chausis. | perdons
tal mi sui faillis. Il
7 Lan que fueille et bosc jaur | rist. que flor sespan et ver j dure, per ver- 202 C.
giers et per praz. et lauzel j qui sestai tenic sunt gai. per me lou | fueillas.
altresi chant et mesbaude. et | vif de ioi et rauerde. et fueill segont | ma
nature. ||
54 Loiaus amis cui amors tièt | ioious. deit ben essre alegres | et jauzens. 202 D.
lars et ardis adreis et amoros. | ère quan veit lou gais termines gent. q | foille
et flors sespandis per la plaigne, el | rouseignol chante iouste el vert fueill.
mais I eu non am lor dous chans tant p sueill. | pos mi dosn plaz que toz
iors mi suffragne. ||
2 Tal amor ai en mon cor encubi | de. per que mi ten per rie et | per 203 A.
honras. et plaz me moût que sie en || amoraz. et en am (coin arraché) — | eau- 203 B.
sidc. et pos amor me — | me pot tôt lou tort amendar. que magra. — | se dital
mi dcstregne. et seu fai ben bone a | uenture auegne. Il
82 [Index: Li dous chans] que lauzel cride. | — esbaudir mon corage. ha. | 203 C.
— en per boschage. la veis ques de le par | tide. ère mes venguz de nouel lou
talens. | notonet ridel. et amerai 5?me pastor. | aurill et mai et tans pascor. Il
36 Bes mes quan sunt li fruit | madur. que rauerdissent I li gaim. et lauzel 203 D.
per lou tens obscur. | baissent de lor veis lou refren. tan redou | ten la tene-
bror. et mous corages senan | ce. et chant per ioi de fine amor. ou nais |
ma bone espérance. ||
80 Ha. me non fai chantar foil | le ni flor. ni chanz dau | zel. ni louseignol 204 A.
en mai. mais la meil | leur de toutes les meillors. et la gensors de | la gensor
queu sai. mi fai chantar Icu | preis que de li nai. car per son preis dei | ie ben
chancon faire, si ferai eu pos li vè | aplaiser. car ren non fai fors que lou | son
voler, tant es vaillanz et sage et | debonaire. Il
X. Autre main, comme plus haut.
304 C,
104 D
30S A,
404 L. GAUCHAT
3 A chatitar mes al cor que fi | deurie. tant mî raacun ce | le a qui suî
amigs. et sî lam mais que | uule ren que sie. non mi val ren beltat B ni cur-
itsîe. ne ma bontar ne mon près ne | mon sen. aîtresî sui enganade tl
liagide. I qu eusse fait vers lui desaumence. 0
48 Qvant hom est en akruî po [ der, non pos to« sons talani 9pEr. aint |
auen. souent aguerpîr, per altre graz. [ lou son voïer. et pos en poder me
sui mes. 1 dam ors sigrai et maus et bms. et tors et | drds et dans et prous.
quensi lou t^man | de raisons. Il
Ci ^mcnccQt li motet.
MÉMOIRE EN PROVENÇAL
PRÉSENTÉ, EN 1398, AU COMTE DE SAVOIE
PAR LES
GRIMALDI DE BEUIL
I
Les documents en provençal du comté de Nice sont fort
rares, aussi nous sommes heureux d'avoir pu trouver aux
archives d'État de Turin une longue pièce écrite en cet
idiome dans les dernières années du xiv* siècle. C'est une
époque où l'on peut présumer que le langage était encore très
pur. Depuis lors, de nouvelles relations politiques et commer-
ciales s'établirent entre cette région et le Piémont, le comté
étant passé sous la domination de la maison de Savoie, relations
qui introduisirent peu à peu des éléments étrangers dans le
langage niçois et finirent par le modifier considérablement.
Cette pièce historique, encore inédite, est écrite sur un par-
chemin mesurant i"* 30 sur o" 61 et se compose de 176 lignes;
l'écriture en est assez claire et généralement assez bien con-
servée, sauf à la partie moyenne et inférieure de l'acte, où de
larges traces d'humidité empêchent çà et là de lire quelques
mots. Elle a été analysée dans son histoire des Alpes Maritimes ',
par l'abbé Gioffiredo, qui en a rapporté textuellement les pre-
mières lignes.
Il s'agit d'un mémoire de protestation présenté, en 1398, par
Jean de Grimaldi, seigneur de la baronie de Beuil et sénéchal
du comte de Savoie pour les pays de Provence nouvellement
I. Edition des Monumenta Historié pairûe, série des Scriptores, II, 959;
éd. in-80, III, 377.
406 C* DE PIERLAS
annexés, et par Ludovic son frère. Ces deux seigneurs^ mécon-
tents du nouveau suzerain auquel ils avaient livré le pays et
jaloux de Tautorité des officiers savoyards qu'on envoyait
à Nice, étaient entrés en pourparlers, paraît-il, avec la maison
d'Anjou et avec la république de Gènes, dans l'intention de leur
faire passer le domaine du comté de Nice* Quoi qu'il en fut, ils
commencent, dans leur mémoire, par se justifier de cette inten-
tion, puis ils exposent longuement toutes les persécutions que leur
avaient fait subir les officiers du comte de Savoie, Ils avaient
donné procuration à un envoyé d'exposer leurs grieÉs i la cour de
Savoie; celui-ci, muni de lettres de créance du 24 novembre
1397, présenta, le 6 janvier de Tannée suivante, à Bourg en
Bresse, au comte de Savoie les réclamations des sires de Beuil
formulées dans deux pièces, la première quetidam roîulum papireum
scriptum lingm seu ydyoniatc Pnrûincie^ la seconde en latin. La
cour désirait gagner du temps, car elle répond d'abord que ce
jour est celui de la fête de TÉpiphaaie et qu'on ne peut s'occu-
per d'affaires. On remet donc au lendemain. Ce jour-là, les
conseillers du comte n'étaient pas tous arrivés : on renvoie la
réponse au mardi matin, A Theure fixée, le délégué niçois se
présente, on renvoie la séance au soir; le soir, on lui répond que
le comte est sorti et on lui remet une réponse cachetée adressée
aux Grimaldi, Tels sont les actes qui précédent le facium en
langue provençale. Ace /ar/wm fait suite l'autre document latin,
qui insiste particulièrement sur l'exposé des principaux griefs
contre les officiers du comte et sur diverses réclamations :
demande de restitution des châteaux occupés par le comte,
confirmation des droits et privilèges qu'il leur avait jadis
accordés, mise en liberté de leurs parents et serviteurs.
La réponse du comte de Savoie fut favorable, car Tannée
suivante une trêve fut conclue, puis en janvier 1400 la paix
fut rétablie par un nouveau traité*
Le mémoire même présenté par les Grimaldi, et qui était sur
papier, n'existe plus ; le parchemin est le procès-verbal authen-
tique des conférences rédigées par le notaire Guillaume Teys-
serandi de Grenoble sur demande du délégué des Grimaldi. Il
s'agit donc d'une copie faite sur l'original et le jour même de
sa présentation. Sur le dos se trouve le titre suivant : Son las
protestas fâchas per mofu. Joan de GriimuU r de Bueyl, en h tens
de la guerra.
MÉMOIRE EN PROVENÇAL PRÉSENTÉ AU COMTE DE SAVOIE 4O7
'*Ayszo son las rancuras deïs autragcs, ontas, vergonhas e despietz c
dapoages facz, tractatz,.. per nions. Oddo de Vilas govcrnador e regadour ' de
•^reluxtre e traque poysant princcz e excelleni mon senhor le conte de
Savoya c per los ufticials mandatz pcr lo dich mons, Oddo de Vilas as aquestas
partidas de Prohensza a governar lo dich pays de mon senhor de Savoya ,
coma leuctenent del dich mons, Oddo, los quais ^*moQs. Oddo de Vilas e
dcsotx dich ufficials, Icuctenent syeus, ant fach enjuriosaraens e vergonabla-
ment, conira drech e justicia, contra loz senhor de Buelh e son tVayres mons.
Loys e mons. Andaro, e contra la dama de Buelli e sos frayres et sos enfans,
parens , ami s es *''e servi dors , estant près loz senhor de Buelh e son frayre
mons. Loys entre las raans e en preyson de mesier Anthonioto Adorno duze
que era adonx de la ciptat de Jeona e del comun. E tant lost quant lo senhor
de Buelh e son frayre foront en preyson dedins >°lo caste! de Vcntimilha
preysoners, foront requistz per messîer Jorgo Adorno firairez del sobredich
mesier Anthonioto, que, si los dich senhor de Buelh, coma governadour del
pays, c mons. Loys son frayre, volguessant consentir e obrar de mètre lo
pays ï'de Prohensza, que lo dich senhor de Buelh governava, en raans e en
scnhoria del rey Loys, c si non y poguessan raetre toi lo pays, y messesant la
Turbia, Esa e ViUafranqua , e forant deslivrat tantost e foraz de preyson, e
lo dich mesier Amho-J^nioto liir feraz autreyar au rey Loys tout quant mon *
frayre, responderon al dich mesier Jorgîo, desus cscrîpch, que mays ameran
morir en preyson o que fossan menât a Jeona e perdre la testa , de la quai
causa erant menassatz pcr lo sobredich mes. Jïjorgo, qui si ellos bayllcsant
ne acoventessan de beyllar un plen pe de terra del pays de mons. de Savoya
a rey Loys, ne aucum' de Jenoa, ny a deguna autra persona, non obstant que
o agcssam pogut far, car tout los castels erant a las raans de lurs parens,
Mamises e servi dou rs ; e d'aquet fait pot testifficar Johan de Champroya, lo
quai fuu mandat a Jcnoa al duze e al comun de par mons. de Savoya per lur
dcslivransia • e vent cl castcl de la Pressa anbe mes. Jorgo Adorno, ont lo
senhor de Buelh e son frayre ï^eran en preysoD, al quaî Jobant de Sant Proen
fom dich per lo senhor de Buelh e son frayre que cl vengues a mons. de
Savoya e a son conseîlh rcquerre que messesant governeraani el pays, que
non sy perdes a mons* de Savoya, b que y vengessa en Prohcnsza, ^*quar lo
dich senhor de Buelh manderaz a la dama de Buelh que li fesessa bayllar las
fortaressas al dich Johan de Sant Prohen e nom de mons. de Savoya per en
cspecial , quar non volgron consentir la rcquesta del dich mesier Jorgo , an
>?estat en preyson, mays per aquel fait que per autre, .xvj. raenses cascuni, en
UQ grant pareilh de ferres; e en remuneracion del trabaylh c de la pena que
n'ant suffert e del bon servici que pensant aver fach a mons» de Savoya, que
Dieus [ayaj l'arma, quant **lo feront senhor de Nisza c de Tautre pays que a
en Prohcnsza, e per donar mclhour essempicz a ellos e a tout autres que vuel-
1. Sic, corr. regidûur, — 2. Il faudrait itm»
4^8 C. D€ mERlAS
luuit servir, cne^-ser e ommeotir lo hm e roociir ik Tostil de motis. de
Sâvoya. onoas. Odâo de MUs cb atîtpcs veogut «^m Profaoïsx^ Iciftamif per
lo dîcb nions. Odiîo de Vil» a govcnui lo pky&i ^Q na^t il icrtbor Je
findh e $0$ &^>ii£s e a la dimi de Buelh r ab beos, {nfcns, axabcs c servi-
4oiQxs qufC ilcsûs s*eii sd, c map tf^mtoft «mims, ^klpiCTI, d^wage» c ^«er*
gonlus qoc Qoa «m ^^oip e que scnDot tiop looc « eacriémc. E prcoâLpt^
tEKDt, que u^ tio^ quant Ibrûnt preirses k» seikbar de fiuelh e k» ^^tyrt^
motis^ OIdo de \lks niaoiief Frâacejs Coi&|Hm m Nkn aa km de ots-
«eostt de WÊomaikÊm **é€ Sxvtjri qtie sy «Hdgbz a k dma de BiBe&« toat-
ififit lie oM&Mitiit • b» de put aioas, de Sak^s ede nom^ Oddo de V3as e
dd coctselhp e d'uma |utt lo ^di Fiidgcs Ckwnfmn, ieÊm peàt de îon^
pPMOïKi ki^s al cooadh ie Nbsa de aqcnsa fie d n âi *'gppcm«r
doQis ; e iatret ea fis^ e puis s'ea to^ _« «pbi al oscd de î^za an ,C. o
,x\. Tins hcRiis anaOiiix, on n'avli mb di i^iom e J? crraees ^se de iô», e
lit a k d«n» de &Mllt foe db pcMS de siAk M cK^ e raw ^a «ien
VAb, isi^fie f<%iiti« &Êhi^wmwB^^m^tB pie : la^nld^Bapûi
^ CC3ifiK BcDa t^Qt Jiaf flœ vcf aflsc^ia bhc^^b la 1
pif ttr eft luji^ n sniha c sd i|Be s^a dodeni^ c :
••jiMliâEi jTimhattfeaiB^gpaa^aigcifa yi to» e gâta la a
L de la ^te^^Hôa J^ ^^^^^ Cj^^^^^ ^^^^^ __|^_jj «
^aes btfbat dcb «ilHsIoi pnsne Id MiÂr» |
IBI pedKa sofôBa, e 4>afe 40e ma en 4a a f cttd de sa ^ugjfc^ < 1
10|K^B&fBl3dEHL'' — IS^K^ JpR5 SJ^B Jpâ
er^Eiis fr.M ^- *^:::: r>£C:: ç:3«f d^t:: x^iiLi mis .^;iif _^- xss., t -mrm^jr ias en sa
::z\z rD^Tir r«sr 1" cirrir., ç:::£r Frirc2< CrrTg'«r::> j» vrini àr waK: * anesic
Tien? jc* cisîiî Oi li T^r^ù- r-ï îfi? xarx* frtrursfsis. r*' i inrr OTt x'iœssa
iscrjL jj js^TsSv. oi S^^cn-i i ^ ior ^-rcgr^^ tut i?irjsi. ^ icm -mirt: * ^gty»T;«^
«e car 1: oj^ FriTCis Cv^-nrcur:?- sr 'a ^'i.«irrt ^iii i rru. niinrT ^ inni& cfl
Srtc*r-i ^ C!*<Cî4c:&ni^ rcc Tiii n-a rcr iei , ttj:? -çm TDni& ik fartr^^ Tizîfiii
itiotiî: Frinciî- CTmrmr:^ i . f-xj-^s? ^ Ik r.:rmf in 3lLKiIi ^ air n:s3L iit Xîiaa
r'.nir riv.. — ^. vijiri.
MÉMOIRE EN PROVENÇAL PRÉSENTÉ AU COMTE DE SAVOIE 4O9
fora de la taula, dînant si decosta clla, losquals confortavam ta î» dicta
dama de Buelh lut seror, al mieulx que podiant ; lo quart guisardon. — Iicm,
après a>^zo fey comandanient lo dich Franceys Compaas que a la dîaa dama
de Buelh non venguessa parlar oi vcser deguni, ny deguna de la ciptat de
Nisza» ^*ny denguni ' autre que y vengues, e aquo sus grani pcna, mas ïi facia
estar e nuech e jort los compagnons dcl sosvïguier aszque denguni non U
vengues : lo sinquens guîsardon.— comandament Frances Compans a la
dama Mde Buelh que tant tost pensât » de vuydar e de eysir fora de la ciptat de
Nisza; c si non o fescs, que el li fera, so est una nuech en Tostal que ella
estava e venia una ...feyturira; *»la quai dama qualt que cUa si partis de
Misza, e a grant pena pot avcr /}. frayre sieu qui Tacompagnes» e boticari e
dous notaris corapaire sieus, sen degtini autre sieus que pogues aver» an
grans ïsneusc a grans pluyas e mal temps^ convent que partissa de Nisza c
ptada defora, coma si fossan una paura guaysanarîs : lo seysen guisardon. - —
'Item, après ayszo,.. lors» ontas e vergonhas e dapnages ''*que li erant estât
faiz, si mandai '^ .ij. ser\'idours sieus a mons. de Savoya e a nions, Odo de
Vilars e als senhours dcl conseilh, que lur plagues de remediar que las dichas
... e que rason U fos fâcha e non ^nort. E sus ays^o mous. Odo de Vilas a
escris a la dicta dama que mons. Deris de Valgrinosa fora tantost de par
de sza en Prohensza, e réparerai las causas que.,, en maneyra que la dica
dama fora s*contempta; e si fetx» coma desotz s'en set après » e tantost coma
mons. Dcris de Valgrinosa fon vengut en Prohensza, la reparacion fon
aquesta que el anet Icvar... senhor de Buelh lo castel del Puguet ^'e tota U
val de Masoins, lo quai mons« de Savoya, que Dieus aya Tarma , lur avia
donat, quant vent a Nîsza esser senhor per lur oubra e tractameni, e ja avia
près la possession e tenian, e de la val de Masoins près l'omage ^'*mons,
Loys : lo scptcn guisardon, — Item, après comandet lo dich mons. Dcris ab
hommes de Roura *» los quais eran e son de la senhoria de Buelh, denant
que mons. de Savoya vengissa en Prohensza, que non deguessan donar, ny
res^'pondre denguna renda a la dama de Buelh ni a deguni per ella d'aqucl
luec, mas volia aver la fortarcssa dcl castel de Roura, si âges p>ogut, antras
sas mans ; lo .viij. guisardon. — Item, après lo dich mons. Deris ^"passant
per lo castel del Sares*, lo quai cra e es de mons. Loys, frère del senhor de
Buelh, avant que mons. de Savoya venges&a en Prohensa esser senhor, lo
qu.il castel mons. Deris volia aver en sas mans, e comandet ^^a aqucllos que
lo gardevant que, sus la pena de la força, la li aguessan rendrez e beyllar
antre sas mans, voilent lo levar a nions. Loys : lo Jx. guisardon, — Item,
âpres ayszo un petit bénéfice de nostra dama de Dans, loqual es dopiat per
1, On lit plutôt dmguni^ ici et plus loin, — 2. Suppl. Item après aysp fcy*
-^ }. li faudrait en prov. penm^ en fr, pensmt. — 4. Corr, mumkt. —
j. Village de la vallée de la Tin<k, — 6. Sk^ voir la table.
EcAelitefc^ Mâsa e ca feu
per lo serrici qoe lo didi senhor ie BaeOi e son trayre moos. Loys fi zrîjn
ùdt, d dkh mons. Oido de Vihis, uni tost quant fîx a Nisza, rGniet a
Tevesque ic Nisu, lo quai era esut rot jort e es enemic de "^Hdoos. de
Savoya, i'ercsquat, e k» mes en possessoa de sa rendi dei «fit evesqoat pcr
nul e dos cens ûot. o pins que n'at lo dit mons Oddo e aknm de son
coQseilh, e lo desos dit mons. Derins vie Valgrinosa^ coma leoctenent de
mons. Oddo, 7»tout jort vessant e comaadant a grans penas a la dama de
Badh e als hommes de La terra de BueOi que degnessant obeszr e las rendas
baylar a l'esvesque de Glandeves, de que la didu dama e homes an agut grans
dans e viten "Jessers ' : e ayso es, etc., lo .xij. guisardon. — Item, après ayszo
lo susdit mons. Derins de val Grinosza estafnjt a Xisza leuctenent pour lo dicii
mons. Oddo fej- trateyment e fey pendrez lo castel de Gatieras e NapoHon de
Grimant Éra>Te de ^b dieu dima de Buelh , e b dieu presa fey tractar e
far a certz pre\Tes e capelbns eaemises de mons. de Savoya, lo quai erant
de b terra del senhor de Vensza, homes del rej- Lo>-s, lo quai Napolion fon
nafrat e pbgut entru a b mort , ^re Je uru man despoderat, e tôt son foire
I. Corr. priyftus. — 2. Corr. iwittm,^tssas ?
N
MâxMOIRE EN PROVENÇAL PRÉSENTÉ AU COMTE DE SAVOIE 4I I
Je l*osul près, detcngtit e raubat, e son castel près e establit pcr lo dich
nions, Derins, lo quai castel era agut donat al dîch Napolion e als sieus pcr
mons. de Savoya, que Dieus aya î^Parma, e quant îo dich Napolion plagas,
lo dich nions. Derins lo fetz mcire dedens îo casteï de Nisiia, coma bon
mcgc en preyson^ c a grant pena lo la3'sava mejar, c lo teni ben très mescs en
prcyson, e an reiengui e tenont b "castel que jamays deguna rason ni justi-
cîa non an pogui aver si non mensoneguas e bellas paroUas sen fhit. E
quant demandava lo srcu esser tornat tout jort en preyson, e ayszo es, etc.,
lo .xiij. guîsardon, — Item, après ayszo, ^^'quant lo senhor de Buelh e son frayre
foron fora de preyson e foron en Menton per venir a lur meysoo, van
escriure a la Corna de Rogimon, lo quai avia laysat son Icuctenent mons.
Oddo a Nisza, que ellos avjan ausic qu'el dîch Corna *'avia establit los passes
e per niar e per terra per penre los, e que ellos n'avian grant meravilha,
quar ellos veniant per anar s*en a lur osial ben e gradosament, e que, de lur
hostal en foran , ellos demanderan rason a mons. de Savoya e a son conseilh
de '''las oustrages que lur eran estadas faytas mal a poynt, e que as el ni al
pays non n ayan rcn a demandar, quar non lur podiant far rason, pcr que
volian saber de la Corna se podiant passa r seguremant per la terra de nions,
de Savoya *»a anar s'en a lur ostal ; e la Corna lur mandet per Io bastar de
Bussin que el lur deiïendta que non fossan si ardît de venir a Nisza e per
Tautrez pays de mons de Savoya... que y pogessan passar, ^«quar so que
non avia devedat non calia que asegurcs ny desasegures, per que sus ayszo
covent que lo senhor de Buelh e son frayre passessan per lo tcrren dct.,.; lo
.xiiij. guisardon. — ^'Itcm^ après apzo, estant lo dich senhor de Buelh c son
frayre a Menton, lo bayle de Levens, hommes del dich senhor de Buelh, los
vent vesir a Menton per plaser que ac de lur desliuransa, coma tout fisel home
deu aver del ben de son '^%enhor, e quant lo dich baylles'cn fon tornat a Levens,
la Corna de Rogimont lo mandet quurre e lo fey mètre en preyson, e la nuech,
a la corda estacat, lo fey finar ij'^. florins, que avant que jamais sia sallic
de preyson Ten fait '*7pagar cent e xxx. flor. : lo .xv. guisardon. — hem,
ancara ^ raays mons, Deris de Valgrinosa si fetz penre Anthoni Pcyre de
Niua, amie especial e servidor del senhor de Buelh, lo quai s*era tout jort
travaillât en lo ben e en la ^•'honor de mons. de Savoya, e mes y coris e bcos
tant avant coma deguni autres del pays, segon sa poyssansa, e Io mes en
preyson en dos (?) pais de Senes, e U fes ftnar e pagar .iij^. flor, avant que li
escapeSf scnconeysan^^cz du jugi : lo.xvj. guisardon : — Item, lo dich mons.
Deris e mays la Corna de Rogimont ant fach cridar, cascuni estant uffidal»
que deguni non fos si ardit, sus grant pena, que venguessant vesir lo dich
senhor de Buclb, ny »^ son frayre, ny parlar lur, coma si fossan cscorainiatz
o Jusieus o Sarftsins : Io ,xvij, guisardon. ^Itcm, lo dich mon. Ekrins fct
penre Maiieu de Grimaut, frayre a la dicta dama de Buelh c loz fet mètre en
r Ms, apcara.
412 C» DE PIEiaA:
preyson scn deguna rason, mas ^'per aver de sou *irgent, al quai fat pag
entre joyels c argent de cent a .v^^, florins : lo .xvHj. guisardon. — lie
;iprcs avszo aj. bons home^ de BarcîUona^ los quâls dels mdiors e dcis pla
leyals, c son de mons* de Savoy a, ^'e l'unî a non Falco Amaut c l'autre Sa|
vayre Manuel ', los quais crant vengut vesir lo senhor de Buclh, e quant i
Corna o a saput, los a mandat penre per tnetre en preyson, e lour pcnrc ^
raubar tôt so que eraz «^dédias meyson; et quant aquellos son anat
Savuya c an appelât a nions, de Savoya^ e an aduch letras d*eJ que deguessan
esser restituit de lur dapnage, quant présenteront las letras al capkan de
dllona, los fetz mètre **cn preyson : la .xix. guisardon. — Item, après aysxa la
dich senhor de Bnelb volant demandar rason als desus dicli mons. de SavoyJ
[mandet] Peyre Nègre, home e procuradour sieu e de son frayre, a supplicar 3
mons. de Savoya, présentant H 'ïla supplicacion e requesus que lî pbgues qu
los tors e injusticias que erant fâchas al sobredich senhor de Buclh e son trayn
que li plagues de far reparar, c de far rendre a mons» Loys sa terra que li ei)
aguda Icvada per raons. Dcris d'aver... franchi'^raent de las convcodon
fâchas c juradas entre monsenor de Savoya cl dich fra\rres, e de S20 demanda
carta e cartas; e quant Mcrmct Rogict secretari de mons. de Savoya legï(?
la dicta requesta, mons. Odo de Vilas.,. et non en ley^'set Êir cana degun
mas lo menacet fort, tan que s'en retomet sens deguna causa Ciyre : lo .icxj
guisardon, — Item, après ayso lo senhor de Buelh c son frayre non cessant i
de requerre lur senhor mons. de Savoya, si anet mons. Loys en non de si i
de son frayre ^^en Savoya al dich mons. e a son conseil, requiant' li que
plagucs de far rendre al senhor de Buelh la senescalcia, la quai ly avia dona
mons, de Savoya, que Dieus perdont» a .x, ans, cotna esta prcvelegons(?) i
letras *, c U plagues de far rendre sa terra, la quai li ^'era estada levada ]
mons. Derins, e mons. Odo de Vilars h respondet que de sro non fera ren, i
li dicï pron de paraulas ergoîosas e malgraciosas, c fon die al dit moos. LoysJ
per alcuns de pais de Savoya que, si non partis tantôt, que mons. Odo
Vilars lo fera "*"penre, non obstant lo salconduit que avia de mons. de Savoya^]
per que lo quah a partir an grant coyta : lo .xxj. guisardon. — Item, âpre
ayszo mons. Loys es agut retornat a Tosial de son frayre e sieu c anct 1
Monegue per alcunas besognas que "^' y avia a far, la Corna de Rogimont li î
fach pcnre, elo castellan de la Turbia an son nom, ceria quaniitat de bistiafl
c de rouba, la quai li anava a Monnegue per sa bessonha, laquai bcstiiin
rauba.., recoubrar; e après szo la dicta '***Corna vat amassar di versas gens d^
Nisza e de Tautrcz pais per penre e per etabUr las doas pars del castd âû
Levens,que sont del senhor de Buelh, en lo quai luec de Levens anetc nou.
lo .xxij. guisardon — •^^Itera, mons. Oddo de Villars» quant fon a NiSita^ la
I. Quoique le parchemin soit ici un peu endommagé, on Ut Mamàd i
non Maure! ^ comme a lu Gioflredo dans Tanalyse de celte pièce. — 2. 5/V,l
corr nqmrent, — j. Corr. conui canna pcT prn'elegh. — 4. Lacune?
MÉMOIRE EN PROVENÇAL PRÉSENTÉ AU COMTE DE SAVOIE 413
senhor de Buelh e son frayrc lur aviant mandat .j. de sos servidors an letras
cornant ellos erant deslivre de preyson, e que aviant grant désir... lo dich
>o4Valeniin servidors lour li ac bayllat las lettras, e s'en anet portar en d*autras a
la dama de Buelh, e puis, retornat a Nisza ont avia sa molier, e mons. Odo la
fat penrc e... la Corna '^sde Rogimont que li feses donar de (?) tract de
corda, e si fetz, e tantoz (?) que lo dich Valentin esta coma mort e despoderat,
e li volgron fardir per forsza de torment causas... de Buelh »*>*e son frayre a
mesier Sadoc Sapia, jugi que era d'apellacions, loqual facia tirar Valentin, per
comandament de la Corna ; dit Valentini : « Si tu voles enpoysonar lo senhor
de Buelh... » deslivrez (?) ; » »°7lo quai baylet non o vole autroyar a la Corna de
Rogimont l'a depuys tan tengut en preysons tro a tant que n*a agut, el els
autres, .Ixv. florins : lo .xxiij. guisardon. — Item... sieu home »°*e vicari de sa
terra en Puymont per sas besonhas proprias , non per causa de dapnage ny
de deysonor de Savoya, c la Coma sabent o mandet(?) al bayle de sant
Esteve... lo dich '«'home del senhor de Buelh, que lo preses e lo li menés
estacat a Nisza, lo die bayle avia fac mas si lo dich home... Coma de Rogi-
mont "°en vol aver cent... de la villa que si soperon la nuech en lo dich
home del senhor de Buelh... far tirar a la corda *''tro a tant que... lo juge
ny voler... que tota la "'terra que li era estada donada per mons. de
Savoya... aguda levada per lo susdit mons. Oddo... trobar ambe lo dich
"ïmons. Oddo lo dich mons. Loys escrius una letra a la Coma et al[s] scn-
degues de Nisza, que sa entencion non era poynctz d'aver mons. Oddo de
Vilars per ufficial ni autre en son non... lo dapnage c des"*trucion de si e
de son frayre e la dicta Corna de penre e de far penre e destmyre de cors e de
bens lors e lurs scrvidours ambe trataraens e engiens (?) malvayses, de que
procéder (?) alcuns... e la vila de Nisza, e per diversas "J.autras malicias, trou *
e eniquictatz que erant tôt jort fâchas al desus dich mons. Loys, per que los
censdegues de Nisza requere fcron lo senhor de Buelh per lurs letres que...
volges cessar "*de non far dapnage a ellos ni a leurs gens, e sus ayso lo
dich senhor de Buelh y mandat de sas gens per remediar a la dicta malenco-
nia, als quais est mal vengut (?)... Lo susdich senhor "7de Buelh vesent la
dicta malenconia que era entre lo dit mons. Loys son frayre e la vila de
Nisza, la quai despleysiaz fort, e vesent la requesta dels cendegues de Nisza,
si escrives una letra a son frayre, mons. Loys, lo noble (?)... Amerigon
d'Auriac "*e Peyrc Nègre clavari de sa terra e home sieu e Johannet de Sel-
hont servidors sieus, per pregar a son frayre que riota ny malenconia ne
fossa entre el e la villa de Nisza, e per... e poynt a sa "'poyszansa, e atresin lo
dich Amerigon d'Auriac anava au dich luech de Monegue per penre congié
del dich mons. Loys de Grimaut per anar s*en en son pays vers monsenhor...
c anar a son servici; "°e sus szo aneron al dich luec de Monegue, e quant
agron parlât al desus dich mons. Loys, retornant s'en vers lour senhor de
I. Suppl. tu seras? — 2. Pour tort:(.
414 C. DE PIERLAS
Buelh enseraps an lo noble Vîta de Bloys, loqual per "Ulcuns argcn que :mA
a recobrar a Turin de mons. de Savoya, que Dieus aya Tarma, per lo boo
servici que li feu quant vent esser scnhor de Nisîta e per aucunas autras
besonhas del senhor de Baelh, non pas causas que fossan contra lo *"ben ni
d ooor de mous, de Savoya , la quai causa plus tost volgra morîr, e vent lo
desus dîch per mar, quant foron devant Nisza , una galiota de Catakos lo«
asalhi,.. que s'apelki "îEsae del destrech de Nîsza, pensant esser saul* coma
e la terra de lur senhor de mons. de Savoya coma déviant, quar entre Sa-
rasins en a}ial cas feran segur, lo casiellan del dich castel d'Eza e las gens del
luec presarent **^lo dich Vita, Aymerigon, Peyre Nègre e Juhant de Selbont
e diverses autres homes e servi dors del dich senhor de Buelh, c los meneron a
Nisxa al dich Corna, las mans Hadas tros... coma se fossan traydours, e szo
fom per son coraanda"ïment; e quant foron a Nisza, la dicta Coma los fet
mètre en sccres e en preyson, e après .v, o -vj . jors la dicta Corna de Rogimont
fait venir devant si Aymerigon d'Auriac c Johanet de SeUion e dous autres,
sensa far procès"* degunî contra ellos, ni autra conneysansa de drech, non
obstan totas apellacions per aquellos fâchas, comandet que Amerigon, Joha-
net de Selhon edous autres fossan pend ut per la gorja e lo desus dich Doblc
Merigon a usent sko, ^^^rcquis a la Corna que li plaguessa, pos lo volia fax
morir, que li feses tranchât h testa per honor de mons. d'Arraa[n]hac, del quai
era home e subgiet, e per honor de son hordre, lo quai li am donat» c per
drec de gentillesza; "*e adont lo dich Corna respondct que non en fera ren,
mays lo fera pendre coma layron, e lo fet pendre e el e Johan de Sethon c
dous autres en lur compania, e ancara tcnom lo dich Vita, Pcyrc Nègre c tos
los autros en prey^^^sons, moût a mal ayse e en grant detrecha, e a fattirar
lo dîch Corna, Peyre Nègre a la corda per tant de veti que coma mon es
restât e es tout jors del grant torment que li fant endurar per fer li dire cau-
sas contra *i**lo ben e Tonor del senhor de Buelli e de son frayre e per dcs-
trucion lure de sos parens, servidors, amises; las quais causas sunt falsas c
malvaysas e contra ventât, e son totas fâchas per deyssonour, onta e dcspiei
del dich senhor de *î^Buelh e son frayre. Per que lur sembla que aysi a mal-
vays guisardon c croj^a paga deî bon servici que lo senhor de Buelh e sos
frayres parens, amisez e servidors an fach a mons. de Savoya, que Dieus aya
Farma, cant lo feron senhor de *HNisza e del pays e a mons. que es aura,
quant ii feron penrc los omages. E per totas aqu estas ont^is, autrages, des-
piecz e dapnages, e diversas autras que sarian trop longas a escriure, lo dich
senhor de Bueîhe son frayre mons. '^Coys mandan supplicar e requerre a
mons. de Savoya e a son conscilh que U plassa de mètre rcraedi en las desus
ditas causas mal fliytas e mal a point cootra los susdîch senhor de Buelh e
son frayre, parens, amises e scrvidours, e en lo cas *ï<que non li plasza lantost
de remediar y sensa denguna demora, lo dich senhor de Buelh e son frayrç
I, Pour sah^ sauf.
MÉMOIRE EN PROVENÇAL PRÉSENTÉ AU COMTE DE SAVOIE 413
mandan protestât e protestan per lur dever e honor al dich mons. de Savoya
eson conseilh que d*aqui avant metran remedi en lur nsfaich e si conselhi-
rant corne bon e bel lur semblara ; atendent que ont non lur atenden ren que
mons. de Savoya, que Dieus aya l'arma, lur agues promeys ni jurât... que
non sien *î*dcstruch per la malicia et eniquitat de mons. Oddo de Vilars,
encmic lur capital e mortal per son grant tort, et que jamays non li feron
onta ni... lo dich mons. Oddo, coma governadour Ȕ7e uflScial de Savoya,
tos jors los a volgu e vol destruyre, e non obstant toutas ontas, despiecz e
dapnages desus escris, lo dich senhor de Buelh... fach ni volgu farde no-
«î^vel contra ufficial sieu ni deguni del pays entre al jort d*uy, e espérant tout
jort que mons. de Savoya e son conselh meseran lo...
TABLE DES NOMS DE PERSONNES ET DE UEUX
Adorno, Anthonioto, 29, 31, doge de Gênes.
Adorno, Jorgo, Jorgio, 30, 32, etc., frère du doge.
Andaro, frère de Jean de Grimaldi, seigneur de Beuil, voir Grimaut.
Armanhac, mons. d* — , 127, le comte d*Armagnac.
Arnaut, Falco — , 92, de Barcelonnette (Basses- Alpes), partisan des sires
de Beuil.
AuRiAC, Ambrigon, Aymerigon, Merigon, d' — , 117, 119, 124, capi-
taine gascon, hostile au comte de Savoie; deux familles de ce nom existaient
dans le Gapençais.
Barcillona, 91, Barcelonnette (Basses-Alpes).
Blois, B-ys, Vita de — , 120, 124, capitaine de 2$ lances au service des
comtes de Savoie.
Buelh, îo setilxir de — , 27, 29, etc. , Jean de Grimaldi, fils aine de Bamabas et
de Béatrix de Glandevès; la dama de — , 28, 36, etc., Bigotte, femme de
Jean et fille de Pierre Grimaldi et d'Englesia Gentile.
BussiN, LO BASTAR de —, 83, Burcard, bâtard de Bussy, châtelain de Sainte-
Agnès, près Menton, en 1410; famille du Bugey; en 1337, Etienne de Bussy
reçoit Aspremont, en Bugey, en fief, d*Humbert de Thoire-Villars; Guigone
de Bussy ep. François de Rogemont (voy. ce nom).
Catalans, una galiota de — , 122.
Champroya, 34; Sant-proen, 35 ; Sant-prohen, 37, Johan de —, gen-
tilhomme de la cour de Savoie, p. e. étranger.
Clans, Nostra-Dama de —, 63; prieuré et collégiale au village de ce nom
dans la vallée de la Tinée, arrondissement de Puget-Théniers.
CoMPANS, C-^-NS, Franges, F-eys — , 40, 41, etc., François de Compeys
(ou de Compoys), gouverneur de Nice, chevalier savoyard, probablement
François de la branche du Valais, vidame de Conches et mayors de Viège;
François, de la branche Savoisienne, en 1434, est écuyer de Marguerite de
Savoie; la famille possédait des fiefs en Dauphiné, Genevois et Bugey.
4l6 C. DE PrERLAS
Corna de Rogimont (la); cf. Rogimon,
Dekis de Valgiinosa, voir Valgrinosa,
ESA, EszA, Ji, 123; Eze, arrondissement di^ Nice.
Gatieras, h caiid dé — j^; Gattièrc, coîn, sur U rive droite du Vir»
atrondisscment de Grasse.
Gèkes, voir JÈNOA.
Glaneves, G-nde-s^ l'evesqui de — , 65, 74 ; GlandevèSi ancienne baranic
et ville diStruite, près d'Entrevaux (Basses- Alpes) ; l'évêque cité devait Être
Ludovic^ des sires de Glandevès, mais le fait n'est pas prouve.
Grïmaut, Loys de —, 119, Andaro, A-e de — 2B, 64, 71 ; Gu[Llem de
—^71; frères de Jean dt Bueil; Mathieu de —, 90, Napûuon de —
75, 76» etc., frères de la dame de BcuiK
Jenoa, Jeona —, 29, 11, II, 34, Gênes.
Le%'^enSj h casttî de — ^ 85^ loa^ sur la rive gauche de la Vêsubic^ ch. i. de
c* de rarrocdissemem de Nice*
LoYSj LO RE¥^ 31, 53, etc.; Louis U, roi de Sicile, duc d'Anjou et comte
de Provence.
Manuel, Salvayre —, 93, de Barcelon nette, partisan de la famille de
Beuil.
Masoins, îa vaî i^i? — , 59, MassoîRs, sur la rive gauche du Var,arroiïtlbs«v
acm de Puget-Théniers,
Menton, So, Sj, la ville de Menton, fief des Grimai di de Gènes, âfron-
' d...ement de Nice.
Merigon, voy. AuRiAC.
MONEGUl, M-NN-E lu îuic dé — , loo, 101, U9, Monaco, alors occupé
par les sires de Beuiî , qui en avaicm eipuisé les GOnois,
Kecre, Peyre — , 94, uS, iz8> n clavarî » de la terre de Louis de BeuïL
NiszA, 38, 41, 42, 50, etc., îa ciptat de, îa badia de^ 70, Vcvesqw de, 72 ;
l'évêque de Nice devait être alors Jean de Tomafort.
Peyre, Anthoni —, 87, citoyen de Nice, partisan des Griraaldi.
Pressa, îo casteî de îa —, 34, Pietra-Ligurc, arr. d'Albenga, Italie, château
que les Génois avaient récemment acquis de la famille Del Caretto.
PuGUET, b casteî deî — , 58, Puget-Théniers, sur le Var, chef-Heu d'arrondis-
sement, dont une partie avait été donnée depuis peu aux sires de Beuil par
la maison de Savoie.
PuYMONT, 108, le Piémont.
RoGiET, Mermbt — , 96, secrétaire du comte de Savoie.
Prohensza, P-sa îo pays de — , 31, 35, 38, etc., la Provence.
RoGiMON, R-T la Corna de — , 80, 82, etc., François de Rougemoni (ou
Rogemont), dit la Corne ; d'une très ancienne famille dauphinoise; G. de R.,
chevalier à qui Humbert IV de Thoire-Vilars donna des fiefs en Bugey, por-
tait déjà ce nom en 1270.
Roura, b casteî de — , 60, 61, Roura, dans la vallée de la Tinée, arron-
dissement de Puget-Théniers.
H
MÉMOIRE EN PROVENÇAL PRÉSENTÉ AU COMTE DE SAVOIE 417
Sadoc Sapia, juge mage de Nice, 106.
Sant Estève, îo hayU de — , Saint Etienne de Tinée, arrondissement de
Puget-Théniers.
Sant Proen, P-hen, voy. Champroya.
S ARES, îo casteî del — , 62 ; le château d'Ascros, dit aussi de Scros (en lat. de
Crocis), com. dans la vallée du Var, arrondissement de Puget-Théniers.
Savoya, U) conte ic —, 27, 33, etc.; le comte Amédéc VIII, son père, Am.
VII est aussi mentionné.
Selhon, Selhont, S-nt Johan, J-net, Ju-nt de —, 118, 124, 125, 128,
probablement un aventurier gascon.
Senes, le comté de Senez (chef-lieu de canton. Basses- Alpes), 88.
TuRBiA, LA — , 31, 43, etc.; la Turbie, au dessus de Monaco, arrondisse-
ment de Nice.
Turin, 121 ; la ville de Turin, Italie.
Valentin, 104, 105, 106, serviteur du sire de Beuil.
Valgrinosa, Deris, D-Ns; Deris de — , 57, $8, 61, etc. (lat. Deriosus),
Déris de Valgrigneuse, fils de Jean, seigneur de Thol, de Rosy et de Marrigna
au Comtat, d'une très ancienne famille de Bresse: ép. Marg. de Luirieux.
Vbnsza, h senhor de — , Vence, arrondissement de Grasse, appartenant
alors à la famille de Villeneuve, soit à Guillaume et Pons de Villeneuve.
Ventimilha, 30, la ville de Vintimille (Italie),
ViLAS, V-Rs, Oddo de — 26, 27, 28, etc.; Odon de Vilars, chev. de Tordre
de TAnnonc, gouverneur de Nice, fils d'Humbert VI et de B. de Chalon;
il épousa Alix de Baux, comtesse d'Avellino; sa soeur épousa Phil. de Savoie-
Achaïe; il hérita du comté de Genève qu'il céda au comte de Savoie en 140 1.
ViLLAFRANQUA, 31, ViUefranche-sur-mer, arrondissement de Nice.
ViLLAz, le Villars, sur le Var, un des châteaux des sires de Beuil, arron-
dissement de Puget-Théniers.
ViTA DE BLOis, voir Blois.
E. Cais de Pierlas.
n
M. le comte de Pierlas, dont les savants travaux historiques
sur l'ancien comté de Nice et sur la région environnante sont
bien connus, a plus contribué que personne à faire connaître
les rares documents en langue vulgaire de ce pays qui nous
sont parvenus, puisque, sans parler du texte qu'il vient de
nous communiquer, il a mis au jour, dans son Cartulairc de
41 8 V. MEYER
rancienm cathédrale de Nice (TuriDj Paravia, 1888), les plus
anciens monuments du provençal de Nice, Ces pièces (n*** Sj
à 85 du Cartulaire) sont des serments de la fin du xr siècle ou
du commencement du xu* ^ Depuis lors, jusqu'à la fin du
xiv siècle, les textes vulgaires manquent complètement*, et
même à la fin du xiv^ et au xv% ils sont peu nombreux. Ils
consistent en quelques pièces conservées par Gtoffredo dans son
histoire des Alpes Maritimes S auxquelles on peut ajouter une
lettre écrite, en 1450, par Jean Grimaldi, seigneur de Bcuil,
aux syndics et conseillers de ta vtUe de Nice-». Cette dernière
pièce est le seul document en langue vulgaire offrant quelque
intérêt que faîe trouvé aux archives municipales de Nice. En
outre, j*ai vu un compte de journées d'ouvriers employés à la
construction d'un pont, en 1543 (CC 138).
Il est vrai que les archives de Nice ont subi beaucoup de
pertes. Ainsi, les registres de délibérations du Conseil ne com-
mL-ncent, actuellement, qu'au siècle dernier; toute la partie
antérieure est perdue ou dispersée K Mais je crois aussi que sur
la rive gauche du Var on a conservé l'usage du latin plus long-
temps que sur la rive droite, de sorte que si même la série des
délibérations municipales et celle des comptes s'étaient conser-
vées intactes, la langue vulgaire ne s'y serait guère montrée
qu'au xvi*^ siècle.
Un document important du niçard est le Compendion de h
ahaco de Frances Pellos, imprimé à Turin, en 1492, et dont
M. Sardou (Vidiomc niçcfis, p, S>"4) ^^^^ quelques lignes. Mal-
K On peut aussi recueillir quelques mots en langue vulgaire dans les
no* 89 et 94 qui sont des brefs de cens (xn*^ siècle).
2. M* A.-L, Sardou {^Uidiottte ni0is, 1878), pp, 20 et suîv., cite comme
«échantillons du niçois des poésies de troubadours qui n*ont aucune ^'alcur
en tant que textes de langue, et des morceaux de la vie de saint Honorât, par
Rai mon Fera ut, qui ne peut gnère passer pour un texte niçois.
3. Monumntta hiUorue piUriie^ II, 872» 955» 1161, ou <M, iQ-8«, III, J79,
540, IV, J19 ; cf. Sardou, Uidiotm niçois, pp. 47 et sutv.
4. Je Tai fait reproduire en h<^nogravnre pour TEcole des Chartes
5. Un registre contenant les délibérations de 1454 ^ 1457 ^ ^^é acquis
récemment par la Bibliothèque nationale. Il est en latin. J'en ai fait repro-
duire deux pages en héliogravure pour l'Ecole des chancs (n^ }67)»
WÉMOIRE EN PROVENÇAL PRESENTE AU COMTE DE SAVOIE 4!^
heureusement cet ouvrage, que j'ai étudié à Nice môme dans
Texemplaire conservé à la Bibliothèque municipale, est plein
d'itatianismes, de langue et de graphie. Je n*ai pu trouver nulle
part le Tnirtat ckl rosari mentionné par M, Sardou (p. 55)
comme imprimé à Nice, en 1493.
Je vais grouper les principaux fiits linguistiques qu*on peut
relever dans le document publié par M. de Pierlas. Et tout
d'abord, je noierai quelques formes plus ou moins françaises
dont plusieurs peuvent, avec vraisemblance, être attribuées au
notaire dauphinois de qui émane la transcription qui nous est
parvenue. Je dois ajouter qu'A la fin du xiv*^ siècle bien des
formes françaises avaient pénétré en provençal et surtout dans
le provençal administratif, et par ex* àinm 57, qu'on trouve
employé k Nîmes dès le milieu du xiv* siècle, et qui est d'usage
courant, au même temps, dans les procès-verbaux des états de
Provence, pour désigner la comtesse de Provence ; de même
pays 30 (au lieu de paes)^ fort usité en Provence dès la même
époque. Dans la lettre de 1430 signalée plus haut, je lis payis à
plusieurs reprises. On peut aussi considérer comme français :
cangié ii^ ^, joyels 91, 33, autroyar 107, governcmant 34, saque-
tuant 44, volant 94, comani 103, Uutemns 39» kiutcmnt 73, de
par 34, pour 75, du 89, escuycrs 46, frère 62. Outre /rrrr, qui est
bien français, on rencontre /r^r^ 69, qui a l'air particulièrement
dauphinois.
Voici un autre fait qui s'obsen^e sûrement en Daophiné, mais
je ne saurais dire exactement dans quelles limites : c'est l'usage
d'ajouter un :^, que rien ne justifie étymologiquement, à cer*
taines finales, par exemple aux troisièmes personnes du singu-
lier en a. On peut citer les conditionnels /^rrf^ 32, manderai 36,
réparera^ 57, les imparfaits era^^ 44, 92, avia^ 47, despkysia^ 1 17.
De même après e atone : rendre^ 63, pemire^ 75, prime^ (au
sing.) 26, essemplei 58, fraire^ 30, loi ^8, 90. Quelquefois Ys
est employé au lieu du ;( ; los 30, papas 69, etc. Il est probable
que cette addition d'une s non étymologique, ou d'un ;ç, qui
d'ailleurs n'est nullement constante, a pour objet de marquer
un certain allongement de la prononciation des finales atones.
I. Congiei se trouve dans wn autre acte niçois de 1488 (Sardou, L*i4wm$
niçois, p. Sï* <icrn. ligne),
420 p. MEYER
M. Tabbé Devaux, qui signale h même particularité dans son
Essai sur la langue vulgaire du Dauphiné srpîentriûnal (p, 3 14-s),
suppose que cette graphie est destinée à marquer IV et Va atones,
brefs et ouverts, explication assez contestable.
Je ne vois rien d'intéressant à noter en ce qui concerne les
voyelles. On peut cependant relever le passage d\i antétonîque
à u dans sugel^ sugelladas 70, forme dont on a d'autres exemples
plus récents- Le groupe latin cc^ ci (ou // après une consonne) est
ordinairement rendu par j:( : ays^o 26, 45-6, sxp 45, 70, s^a 57,
Prœnsia 3s, 37, desUuransia 34, Ni^sa 38, 40, 41, cresmsia
40, 41, Vens^a 76. C'est une notation bien ancienne, il y
a déjà fasian (faciant) à la fin du xn'' siècle, Roffiania^ XTV,
277.
C'est peut-être Técrivain dauphinois qui est responsable Je la
perte de Y s dans traque l'j^ établir 102, tantôt 99, detrecha 129»
Les formes aqmUos 63, 126, cUos 80, 81, sont fréquentes
dans la partie orientale de la langue d'oc, et j'ai eu plus d'une fois
à les signaler- Mais l'addition d'un e est plus extraordinaire
dans amiscs 2%, 34, 130, 131, enemises 76. Faut-il supposer qu'il
y avait au singulier une forme courante qui avait l'ancienne
s du cas sujet : amis^ enemis} Cela est peu probable. La
cause est plutôt i chercher dans une fausse analogie, Malvnysia
114, plur, de ffialvaySj est, au contraire, parfaitement régulier.
Dw:^^ 29, 34, qui désigne le doge de Gênes, est une forme
importée. Coris^ 88, plur. de cor, cœur, est une forme irrégu-
Hère à laquelle je ne trouve pas d'analogue dans ce lexte.
Actuellement, en niçard, les participes passés et adjectifs
prennent^ au pluriel, une terminaison en f, lorsqu'ils sont
employés comme attributs. Cet usage est certainement peu
ancien. Ici la terminaison en / s*observe dans les composés
d'un us non seulement au pluriel, mais aussi au singulier :
aucuni 35, alcuni 7^^ cascuni 37, deguni 51, J2, 54.
Entre les formes verbales on peut signaler l'infinitif vestr 85,
89, 92, au lieu de i^\cr. Les prétérits vent 34, 59, dè^covetit 55,
84, tent 78, au lieu de venc^ caucnCy ienc sont peut-être à imputer au
copiste qui pourrait être aussi responsable de set (suit) 39, 58, au
lieu de sec. Plus sûrs sont les prétérits /o? (fecit) 5 1,75-6, 86, et
/i*/^ 68, 70, 87, 93, formes bien connues d'ailleurs. Fet 90, 128,
est sans doute pour/d^, mais que dire à^ fat 91, 104, sinon
que c'est une faute de copiste? Fit 45 est français (/i/)- ^-^
MÉMOIRE EN PROVENÇAL PRÉSENTÉ AU COMTE DE SAVOIE 42 1
troisièmes personnes du pluriel qui en latin sont en ant, sont
ici en an ou en ant y 30, 31, 32, 33, etc. Dans les textes du
même pays que je connais, ces troisièmes personnes sont géné-
ralement en an.
Je ne juge pas à propos de pousser plus loin ces remarques
sur un texte qui méritait assurément d'être publié, mais qui, on
l'a vu, n'est pas toujours d'une parfaite correction '.
P. M.
I . A ce propos, je dois ajouter que les incorrections, dont plusieurs ont été
signalées en note, doivent être attribuées au notaire qui a fait la copie conser-
vée à Turin. M. de Pierlas, en effet, a bien voulu vérifier attentivement sur ce
ms. tous les passages que je lui ai signalés comme suspects, et il a même eu
l'attention de m'envoyer des calques de la plupart d'entre eux. — Les prin-
cipales difficultés de ce texte sont causées par les lacunes qui résultent de Tétat
du parchemin. Le commencement de chacune des lignes de Toriginal étant
indiqué par un chiffre, il est facile de se rendre compte de l'étendue des
lacunes marquées par des points. Mais, en outre, il est possible que le notaire
ait omis, çà et là, un ou deux mots.
f
JEAN DE GARENCIERES
I
Au nombre des premières poésies de Charles d'Orléans, dans
ce qu'on esr convenu d'appeler un peu improprement le Poéfm
de la Prison^ se trouvent deux ballades pleines de sous-enten-
dus et susceptibles peut-être de plus d'une explication, très
spirituelles d'ailleurs^ intitulées l'une Orléans contre Garcnàerts^
l'autre Rcspome de Garemiêtts, Charles d'Orléans, se mettant
Door un instant à la place du dieu d'Amour, se plaint, dans la
llade qui porte son noni^ des don Juan de son époque, et en
iticulier de Tun d'eux, Garencîères, « roy des heraulx pour
*n mw^ntir »
Je, qui %\xïs dieu des anjQuretiK,
Prince de joyeuse plaisance,
A toutes celles et a ceulx
Qjii sont de mon obéissance,
Requier qu'a toute leur puissance
Me viengnent aidier et servir
Pour Toutrecuidance punir
D'aucuns qui, par leur janglerie,
Veulent, par force, conquérir
Des grans biens de ma seigneurie.
Car Garancieres, Tun d'entre eulx.
Si dit en sa folle vantance,
Pour faire le chevalereux,
Q.U 'avant yer, par sa grant vaillance,
Luy et son cueur, d'une aliance,
Furent devant Beauté courir.
Je ne l'y vy pas, sans faillir,
Mais croy qu'il soit en resverie ;
Car si prés n'oseroit venir
Des grans biens de ma seigneurie.
JEAN DE GARENCIÈRES A2^
Il dit qu*il est tant douloreux
Et qu'il est mort sans recouvrance ;
Mais bien seroit il maleureux
Qui donneroit en ce créance !
On peut veoir que celle penance
Q.u*il lui a convenu souffrir
N*a fait son visage pallir
Ne amaigrir de maladie.
Ainsi se moque, pour chevir
Des grands biens de ma seigneurie.
Sur tous me plaist le retenir
Roy des heraulx pour bien mentir :
Cest office je luy ottrie,
C*est ce que lui vueil départir
Des grans biens de ma seigneurie'.
Garcncières renvoie la balle à Charles d'Orléans. Il signale à
Cupidon le cas de cet « homme de mauvaise vie » qui veut
faire le dieu d'Amour, et qui mérite, plus que tout autre,
d'être appelé « prince de Bien Mentir » :
Cupido, dieu des amoureux,
Prince de joyeuse plaisance,
Moi, Garencieres, tressoingneux
De vous servir de ma puissance,
Viens vers vous, en obéissance,
Pour vous humblement requérir
Qpe vous vueilliez faire punir
Un homme de mauvaise vie,
(lui, contre raison, veult tenir
Le droit de vostre seigneurie.
C'est un enfant malicieux.
Ou nul ne doit avoir fiance.
Car il en a ja plus de deux
Deceues ou païs de France,
Dont vous deussiez prendre vengeance
Pour faire les autres cremir ;
C*est le prince de Bien Mentir,
Ainsné frère de Janglerie,
Qui, contre raison, veult tenir
Le droit de vostre seigneurie.
I. CharUs cT Orléans, édit. d'Héricault, I, 146.
JEAN DE GARENCIÈRES 425
II
Les poésies de Jean de Garencières — personne jamais ne
les a signalées — se trouvent à la Bibliothèque Nationale dans
le manuscrit du fonds français 191 39, ancien Saint-Germain
1660. Ce manuscrit, bien connu, a été utilisé par les trois édi-
teurs des œuvres de Charles d'Orléans. ChampoUion en a, de
sa main, chiffré les 119 premières pages ^ et numéroté chacune
des différentes pièces, complaintes, lais, ballades et rondeaux,
qui forment le Livre de la Prison.
Les poésies de Charles d'Orléans commencent à la première
page, sous la rubrique suivante : « Cy comtnance le livre que
monseigneur Charles^ duc d'Orléans , a faict estant prisonnier en
Angleterre, » Elles finissent page 117 : « Cy fine le livre que
monseigneur le duc d^Orleans a faict estant prisonnier en Angle-
terre. » On trouve ensuite, après trois pages blanches, les
poésies d'Alain Chartier : i"^ Le Débat de Reveille matin; 2° Le
Livre des quatre dames; y La Belle dame sans mercy; 4** La
Response a la Belle dame sans mercy [autrement dit YExcusacion
maistre Alain]; y Le Breviere des nobles; 6° Le Lay de paix;
7° La Complainte maistre Alain [contre la mort]; 8° Le gras et le
maigre; [9° Lospital d^amours;] 10° Balade d'Alain dont voici le
refrain :
Qpe les loyaulx sont les plus douloureux.
1 1° Rondel de ce mesmes :
Joye me fuit et desespoir me chace.
12° Le Lay de plaisance.
Après le Lai de plaisance, dans la même page, commencent
les poésies de Garencières, précédées de ces quatre mots : Garen-
ciers (sic) Vous m'avez. Elles remplissent la fin du manuscrit.
Comme elles sont immédiatement à la suite des poésies d'Alain
Chartier, sans intervalle apparent, on s'explique, en une cer-
taine mesure, qu'elles aient passé inaperçues. Le manuscrit
19 139 est enregistré à la Bibliothèque Nationale comme ne
I. Le ms. 191 39, paginé en entier tout récemment, a 482 pages.
Romani», XXIL 28
42 é A, PIAGET
renfermant que des poésies de Charles d'Orléans et d'Alain
Charrier ' .
C'est un petit in-folio, papier, de 269 millîm. sur i8j*.
Champollton le date du xv!*^ siècle, — ce que fait après Im
M. d'Héricault ^ — et le juge d'une exécution médiocre et
d'une incorrection très grande. En face de cette appréciation si ,
catégorique et si défavorable, j'éprouve quelque gêne à dire que
le manuscrit date du milieu du xv" siècle, — plutôt iTant
1450 qu'après, — qu'il est sinon l'un des meilleurs du moins
l'un des plus anciens des oeuvres de Charles d'Orléans, et qu*il
est écrit, tout entier de la même main*, sur du fort papier,
d'une écriture pas très lisible peut-être au premier coup d'oeil,
mais régulière, avec majuscules initiales ornées de rouge.
L'ancienneté du manuscrit ressort de l'examen, même super-
ficiel, de l'écriture et de Taspect général du volume. Elle s'im-
pose également par le simple raisonnement. Ne serait-il pas, en
effet, étrange de voir un copiste du xvi^ siècle ne copier des
œuvres de Charles d'Orléans que la première partie, celle au
fond qui devait le moins l'intéresser, et cela sans en rajeunir la
langue; transcrire les poésies d'Alain Chanier, tandis qu'il
1. Itweniairf iommairt des nmnuscrih français, L XV lU, fo 778.
2, Au verso du dernier feuillet» on Ut d*une écriture plus moderne» avec
la signature plusieurs fois répdtC*e de C. Laki^fiant :
O livre est a. Coiia Lateigneat,
Qiii le trovcra sy le rendt
El il pjyerji boa vin;
enfin» de la main de Lateignant, 17 vers, qu*on retrouve, par exemple, dans
le manuscrit de la Bib. Nat. fr. 25434» ^^ I55» et qui commencent ainsi :
Se tu veulK ad (j*^) hoiicur venir.
Il le covicni (tir) de toy bannir
Orguiel {iic) et hunblc devenir,
Lever mattn pour messe oyr..».
3. Guicbard ne donne pas la date du ms. 19159, qui, dit-il vaguement,
renferme les poésies de Charles d'Ork^ans « avec d'autres opuscules ». — Par
trois fois» les Cat. de la Blh, Nai. datent notre ms. du xvi^ siècle: Inventaire
sommaire, t. XVIO, f^ 778 ; D^pouilUmént aîphabétiqm^ s. v. Chartier et
Orléam {Charles duc </').
4, On lit à la ftii des poésies de Garencières t « Ce présent livre est escripi
de la main de Bonnefoy. » On trouve également la signature de Bonnefoy
dans le corps du volume , à la fin Je la Complainte d* Alain Char tin sur la
mort de ia ddtne, à la fin de VHàpital d^aniours et à la fin du Lai dé plaisance.
JEAN DE GAR^afeRES 427
avait à sa disposîtioo cinq ou six éditions gothiques ; composer
un recueil enfin dont toutes les pièces sont antérieures à 1440?
Au xvr siècle, on ne copiait plus Charles d'Orléans, on le
plagiait; on copiait encore Alain Chartier, c'est vrai, mais
exceptionnellement et sur les mauvaises éditions de Pierre
Le Caron, tandis que le manuscrit 19 13 9 nous donne un texte
excellent. Le manuscrit 19 139 — soi-disant du x\i* siècle —
est antérieur aux chansons et rondeaux composés par Charles
d'Orléans après sa captivité d*Angleterre. Voilà pourquoi sans
doute il ne renferme que le seul Poémc dé la Prison que Charles
avait mis en circulation vers 1440 '. Intéressant par son âge, il
est en outre précieux parce qu'il nous donne comme étant de
Charles d'Orléans le Lay piteux, une chanson et trois rondeaux,
— qu'on ne retrouve pas ailleurs, — fort mal publiés par
M. d*HéricauIt>.
III
Nous savons par le recueil des poésies de Garencières, du
manuscrit 19 139, que ce poète s'appelait Jehan (voy. ballade
XLIX) et qu*il était très jeune encore, presque un enfant, en
1407 (I, XXV, XLVI).
Il ne peut être ici question de Jean de Garencières, seigneur
de Croîsy, diplomate et soldat, Hiomme de confiance de Louis
d'Orléans, intimement lié à toute la vie politique de ce prince.
I, Martin Le Franc» dans son Champion du dames, fait allusion au P^ème de
h Prison. Voy, Rotrmnia, t. XVÎ, p. 418. ^ Je relève dans un inventaire de
1498 des livres du château de Chambéry la mention suivante d'un manuscrit
du Poème de la Prison ; « Ung livre de papier moyen escrîpt a h niam en vers
tractant de monseigneur d'Orléans estant en prison en Angleterre, commen-
çant en la grosse lectre : S'ensuyi, couvert de papier coullé. » Im^entari dd
castelli ai Ciamberi^ di Torino et di Ponte d'Ain, pubblicatr sugli originali incdîti
da Pietro Vayra (Miscdlanea di sioria itaîiami, t. XXII, p. 58).
2» Cfjarks d*OrUans, t. !> p. 20} et suîv. M. d'Héricault a publié sous le
nom de Batlades, en les remaniant quelque peu, k rondeau suivant :
J'ay uni en moy de desplaisîr (T, I, p. 218),
et la chanson :
Faites pour moy com j'ay pour vous (T. 1, p» 320).
Dans le t. U, p. 278 et 280, il les a republiés plus correciement.
428 A. PIAGET
En 1407, il avait pour le moins une cinquantaine d'années. Je
le vois figurer, en 1377, dans une montre de Yon de Garen-
cières, à Bretcuil \ En 1384, le roi de France fait don à Jean
de Garcncières , chevalier, chambellan de Louis, comte de
Valois, de 200 fr. d'or « pour les bons et agréables services que
nous a fai2 en nos guerres et ailleurs... et par especîal en la
dernière chevauchée et armée que nous avons fait ou pa\*z Je
Flandres^ «. Charles VI le nomme « maistre des eaues et lorests
es terres que souloit tenir le roy de Navarre es parties de
France et de Normendie, en lieu de Jehan de Pessy, chevalier »,
par lettres du 15 mars 13845.
Peu après, Garencières échange ce titre contre celui de
« maistre et enquesteur des eaues et forests es pays de Picardie
et de Normandie^ ». D reçoit de ce chef 400 fr. par an. Sa
charge de chambellan de Louis, duc de Touraine, lui vaut
1200 fr. d'or>. En 1388, il prend part à Texpèdidon contre
Guillaume de Gueldre^. L* année suivante, Louis, duc de
Touraine, le charge avec Jean Le Mercier, sire de Novîant, de
régler le différend relatif aux revenus d* Asti 7. Du 30 septembre
1389 en novembre 1391, il est nommé, aux gages de 60 fr.
par mois, garde du château de Crèvecœur en Brie» où le duc
avait déposé les florins, joyaux, vaisselle d'or et d'argent, qui
lui venaient de son mariage^. Dès lors, et très souvent, le duc
l'envoie en ambassade soit auprès de Jean Galéas, soit à Asti
ou à Venise 9. Cest lui qui, en 1397, ^<^Çoit de Jean Galéas
4
4
1, Bib. Nat. Pièces originales, vol, 1280, n" 22,
2. P. orig,^ vol. 1280, n° \6.
}, P. orig.^ vol. 1280» Qo 37. Ordùntmttus des rois de Franc», t, VII, p. 171;
t. VIII, p. J71, N. Acq. fr. 26276, o^ 5^^
4. P. orig^t voL 1280, no 114, N. acq. fr. 26276, n« 67, 68, 69. Ordtm-
mtiasdes rois de France, t» VIII, p. 416; t. IX. p. 285,
5. P. ofig. voL ï2ao, n** 48.
6. JaîT>% La vie politique de Louis de France , duc d'Orléans ^ p. 414, Piku
jmtific4UiveSi XL
7. Janry, ouv. cit., p. 42.
8. P. orig,^ voL 1280, n<» 55,
9. Jarr>\ auv, cit., pp. 69, 84, 141*144» H^, iSU 186, A. de Circouit, lé
duc Louis (VOrUans, ses entreprises au dehors du royaume. (Extrait de U R^vm
des questions historiques), Paris, 1887 et 1888, l p. $2, 56 j n, 55, 56; lU, 9,
48. L. Eklisle. Les Collections de Bastard d^Estang, pp, 148, 182,
JEAN DE GARENCIÈRES 429
Visconti le payement de la dot de Valentine, en exécution du
contrat de mariage et de la convention d'Asti ^ A la mort de
Guy de Châtillon , c'est lui , avec Philippe de Florigny, Jean
Prunelé et Hugues de Guingant, qui est chargé, par le duc
d'Orléans de prendre possession des comtés de Blois et de
Dunois*.
En 1400, Jean de Garencières est nommé capitaine du châ-
teau de Châteauneuf-sur-Loire3. Quelques années après, lors
de la prise d'armes de 1405, il visite les forteresses ducales, les
fait remplir de vivres et de munitions, ordonne les réparations
nécessaires, puis prend le commandement des Orléanais qu'il
conduit au duc^.
Yon de Garencières, capitaine du château et de la ville de
Caen, étant mort vers 1409, Jean de Garencières, seigneur de
Croisy, lui succéda. Nous le voyons, en 141 1, cité dans la
requête adressée au roi par Charles d'Orléans, comme ayant été
dépouillé de la capitainerie de Caen par le duc de Bourgogne,
après l'assassinat de Louis d'Orléans : « Combien que par
traictié et appoinctement fist que tous ceulx qui avoient esté
déposez de leurs estas et offices soubz umbre d'avoir esté en la
compaignie de moy, Charles, et autres desdiz seigneurs feussent
remis et restituez en leurs offices, et que par l'ordonnance de
vous et de vostre grant conseil messire Jehan de Garencières
en l'office de capitainerie de vostre ville et chastel de Caen eust
esté remis et restitué, neantmoins, en venant directement contre
la dicte ordonnance, le dit de Bourgogne le fist depuis déposer
du dit office et le dit office impetra pour lui mesme, ou con-
tempt et en la haine du dit Garencières , et de fait le dit office
occupa, tient et occupe î ».
La dernière mention que nous ayons de « Jehan de Garen-
cières, chevalier, seigneur de Croisy, conseiller et chambellan
1 . Faucon, Le mariage de Louis d! Orléans et de Valentine Visconti. (Exiraii
des Archives des missions scientifiques et littéraires^ 3* série, t. VIII.) Paris,
1882, p. 15. Jarry, oiivcit.^ p. 407. Pièces justificatives^ IX.
2. Collection de Bastard, Titres originaux : 311. Jarry, ouv. cit. y p. 218.
3. Catalogue Joursanvault y t. II, p. 137, n^* 2912. Cf. Delisle, Collections de
Ihstard d'Estang, p. 182.
4. Jarr>', ouv. cité. Pièces justificatives : XXIX.
$. Monstrelet, t. II, p. 143.
430 A. PIAGET
du roy, maistre et enquesteur des eaues et foretz ou pays de
Normandie », est du lé mai 141 5 *.
Le 5 juin 1391, Louis, duc de Touraine, fait don ^ d*un
lianap d'argent a couvescle vermeil doré, poinssonné, et une
aiguière de mesme », du prix de 66 fr* 5 s, t., « a la femme de
nostre amé et féal chevalier et chambellan , messire Jehan de
Garencieres, dont nous avons fait lever Tenfant sur fons en
nostre nom^ ».
Dans une de ses plus curieuses ballades, Eustache Deschamps
décrit une w beuverie » du duc d*Orléans et de ses familiers au
château de Boissy. Jean de Garencieres, seigneur de Croisy,
figure au nombre de ces seigneurs bons vivants, parmi lesquels
se distinguait Guillaume de Bruneval, qui « crioit sur tous
comme enragiez ».
Jean de Garencieres, seigneur de Croisy, avait un fîls que les
titres et les chroniques de Tépoque appellent , pour le distin-
guer de son père, Jean de Garencieres le Jeune, ou Jeannet de
Garencieres, ou le fils du seigneur de Garencieres. C'est ce per-
sonnage qui est Tauteur de nos poésies.
Très jeune encore il a pris part, en 1396, à Texpédition de
Hongrie 4.
Le 18 novembre 1403, « Jehan de Garencieres le Jeune,
chevaUer et chambellan de monseigneur le duc d'Orléans n ,
donne quittance de quarante francs de gages d*un mois a pour
aler en la compagnie du duc et lui servir ou voiage qu'il entent
presenteraeot faire es parties de Lombardie et d'Ytalie * »,
Jean de Garencieres le Jeune, Raoul, sire de Boqueaux»
François de Grignols, et d'autres chevaliers, avaient organisé,
en 1406, « certaines joustes ou faiz d'armes » à Royaumont.
Le roi les interdit expressément, par lettres du 27 janvier,
a attendu, dit-il, les haynes, debas et controverses qui pour
occasion de ce seroicnt en voye de mouvoir entre eulx ou
aukres, dont très grans inconveniens s'en pourroient ensuir,
ausquelz nous desirons obvier de tout nostre pouoir^ ».
1. N. acq. fr. 26276 : Titres originaux : 69,
2. P. orig, voL 1280» no 87.
}. E, De^cfmmps, éd. Raynaud» t. VII, p. 120.
4, Voir plus loin.
5, P, orig,, voL i2So» no» 122 cl 123.
6, Ordonnancés des rois d* France, t, IX » p. 106.
JEAN DE GARENCIÈRES 43 I
En 1407, nous trouvons Jeannet de Garencières au siège de
Bourg (Gironde), où il est fait prisonnier des Anglais ^
Il figure au nombre des seigneurs du parti d'Orléans qui
signèrent, en 141 1, la déclaration de Saint-Ouen^
Nous le retrouvons, d'après Monstrelet, au siège de Saint-
Remy-du-Plain (Sarthe) en 1412. Waleran de Luxembourg,
comte de Saint Pol, chargé de réduire « en l'obeissarice du roy »
le comté d'Alençon, était venu mettre le siège devant Saint-
Remy-du-Plain. Les Armagnacs, accourus pour déloger le
connétable, furent mis en déroute et plusieurs d'entre eux
restèrent prisonniers. « Entre lesquelz prisonniers, dit Monstre-
let, estoit le seigneur d'Asnières' et messire Jannet de
Garpcheres (sic)^ filz du seigneur de Croisy, lequel estoit a
ceste besongne avec ledit connestable. Et quant il vit son filz
qui estoit tenu contre lui, il fut esmeu de si grant ire que se on
ne l'eust tenu il eust tué sondit filz 4 ». « Et après, dit Pierre
de Fenin, le conte Vallerain s'en râla en son païs et devers le
roy Charles et le duc Jehan de Bourgoingne qui grant joie luy
firent. Et avoit prisonnier messire Jehan de Gauchieres (sic),
lequel il envoia a Saint Pol pour tenir prison ; mais enfin il fiit
délivrés de prison par finance 5 ».
Jeannet de Garencières semble avoir remplacé son père
comme capitaine de la ville et du château de Caen. Des montres
« de messire Jehannet de Garencières, chevalier bacheler »,
furent reçues à Caen les 9 août et 9 septembre 1415^. Le
21 septembre de cette même année, il donne quittance de
1. Voir plus loin.
2. Douët d'Arcq, Choix, t. I, p. 346.
3. Drouet d'Asnière, chambellan du duc d'Orléans.
4. Monstrelet, t II, p. 253. — Il semble difficile d'admettre, avec
Monstrelet, que Jean de Garencières, seigneur de Croisy, dépossédé en 141 1
par le duc de Bourgogne de sa capitainerie de Caen, ait combattu en 141 2
aux côtés de Waleran de Luxembourg. Monstrelet a-t-il confondu Jean de
Garencières avec Guy de Garencières , dit le Baveux , conseiller et cham-
bellan du duc de Bourgogne? Voy. [Labarre] Mémoires pour servir à Phistoire
de France et de Bourgogne, 2« partie, pp. 13 et 38.
5. Edit. Dupont, p. 30. Cf. Chronique de Jean Le Fèvre, seigneur de Saint
Remy, éd. Morand, t. I, p. 57.
6. Qairambault, Titres scellés, r. 51, nos j^ç^ 160, 161. Parmi les huit
écuyers de sa compagnie figure un Pierre de Garencières.
4J2 A, PIAGET
63 Hv. t., gages de huit arbalétriers de sa compagnie, « pour la
garde, seurtè et défense du chaste! de Caen et du pays d'envi-
ron et pour résister aux Anglois ' ».
Le 22 octobre 1416, Charles d'Orléans lui continue les
« fruix, revenues, proufEz et levées » de la terre du Puiset^,
w a lui venue et escheue a cause de feu son pere^ ».
IV
Le recueil du manuscrit 19 139 est formé de trente-deux
ballades, de onze ronde's, de sept complaintes et d'une lettre en
vers. Toutes ces pièces ne sont pas de Jean de Garencières lui-
même : la ballade VIIl'' est de Jean de Fayel, la X* de Jacques
du Peschin, la XL!!!*-' de Bucy, la XLV*^ de Gaucourt, h
XLV^ de Courrarre (sic). La XLIX^ pièce est une « Balade^
faute par cetilx de Bonhiulx ».
Les poésies de Garencières commencent par un petit poème
intitulé V enseignement du dieu d'Amours. Nous y apprenons
comment Garencières , encore « jeune valleton » > prit la réso-
lution de se « bouter en ramoureux mestier «^ et d'acquérir
par Famour un grand renom de loyauté et de prouesse. Malheu-
reusement la blonde damoiselle qu'il a choisie est « si gente, sî
longue, si droicte, si gracieuse »>, qu'elle a toute une cour
d'admirateurs autour d'elle.
1. Clairambault TUns udU's, r. si, n" 165. Cf. n^ 164.
2. Ls Pttisety Eure-et-Loir, cant. de Janviïk, arr. de Chartres.
3. Collection de aisiard, 698 : « Charles, duc d'Orléans et de Valois,
au gouverneur de nostre dit duchié d'Orléans ou a son lieutenant a VenvUlc
et a nostre procureur illec , salut. Comme la terre du Puiset appartenant a
nostre amé et féal charabelLin messire Jehannet de Garencières, a lui venue
et escheue a cause de feu son père, niouvent et tenue de nous en fié a cause
de nostre chastdlerîe d'Ycnville , ait esté saisie et mise en nostre main par
deffauli d'ommc, nous pour ctrt.iines causes et consideracions qui a cé nous
ont nicu et meuvent , vous mandons et a chascun de vous si comme a lui
appartiendra que des frui^, revenues, prouffi/ et levées de la dicte terre et ses
appartenans , vous soufTrer et laissiez soubjî nostre main joir et user les pro-
cureurs, gens et officiers de nostre dit chambellan jusques au jour Je Pasques
proche vcnans, sans leur iaire ne souffrir estre ùh ce pendant aucun
destourbier ou empeschement au contraire. Donné a Paris k xxif iour
d octobre, l'an de grâce mil CCCC et seize n, '
JEAN DE GARENCIÈRES 433
De hauts personnages sont au nombre de ses « servants » :
Je sçay qu'elle est amee
De plus grans maistres que je ne sui acez,
Qui ont puissance et loz et renommée,
Et sont jolis et moult bien abilliez !
A côté de ces brillants seigneurs , qu'est-il , lui , Garencières ,
jeune et encore inconnu? Elle ne Ta seulement jamais remar-
qué. Il ne lui a seulement jamais adressé la paroUe. Quelle folie
que son entreprise !
Car je ne suis jolis, ne avenant,
Ne ne sçay bien ne chanter ne dancer,
Ne je ne sui saige ne bien vaillant,
Ne n'ay nul bien qui me deust faire amer.
Mon cuer se mesle bien des oes ferrer
Qui cuide faire tant qu'il en soit amés !
Cependant il est jeune, plein de force, d'énergie et d'audace. Il
fera parler de lui. Il fera tant et si bien que chacun le voyant
s'écriera :
Vêla cellui qui a
D'estre amoureux tresbonne voulenté !
Les ballades de Garencières rappellent, à s'y méprendre,
avec quelque chose peut-être de moins passionné, les poésies
d'un autre chevalier poète, d'Oton de Grandson. Mêmes idées
souvent exprimées dans les mêmes termes, mêmes circonstances,
mêmes lamentations. La dame qu'aimait Jeannet, comme celle
qu'avait aimée messire Ode, était « plaine de refus » : elle
était « si pou piteuse » qu'elle semblait prendre plaisir aux
douleurs de ses soupirants. Après l'avoir « servie » deux ans,
Garencières n'était pas plus avancé que le premier jour. On
devine ses plaintes contre le dieu d'Amour, contre sa dame,
contre lui-même, contre son cœur, contre ses yeux.
Toutes les ballades et complaintes, tous les rondeaux de
Garencières , — sauf deux ou trois , — sont précédés de ces
mots : Fous mave:^^^ devise amoureuse du poète qui s'était donné
tout entier à sa dame, cœur, corps et biens '.
I. Cette devise : Vous m^ave^y rappelle celle, plus répandue, de Mon cuer
ave^. Voy. L'Amant rettdu cordelUr a Vobservanu d^AtnourSj édit. A. de Mon-
taiglon, V. 1488.
JEAN DE GARENaÈRES 455
Advise toy doncques, si t'appareille
Pour ce grant bien en ta vie acquester.
4. Va t'en par tout et choisy une dame
Qpi a ton gré soit bien digne d'amer,
Ou damoiselle, mais qu'el soit gentil femme,
Jamais homme ne t'en pourra blasmer.
Car tu pourras par elle recouvrer
Trestous les biens que je [te vois] dizant
Qp'en ce monde l'on devroit souhaitier.
Ou regardes, que tu vas si musant?
5. Penses a toy, car tu as trop musé,
Et advise le bien que je te nomme.
Et puis regarde si je [bien] te conseille,
A ton ad vis l'onneur de ta persoime.
Prens tous ces poins et les gectes a somme,
Et, par ma foy, se tu les scez penser,
Tu n'avras pas parfait couraige d'omme,
S'il ne te prent grant voulenté d'amer 1
6. Lors je lui dis : Dictes moy vostre (re)nom,
Qpi me monstrez si bon enseignement.
Il me respont : Cellui qui a renon
De départir de joye largement.
— Helas ! sire, je ne sçay vraiement
Se vous n'estes le dieu des amoureux ?
— Oyl, fait il : sers moy bien loyaument,
Je te jure de te faire joyeuk.
7. Mais or vien ça, je te vueil enquérir :
Amas tu oncques, ainsi vraiement, t'aist Dieux?
— Oyl, une, point ne vous vueil mentir;
Mais en la fin nous nous trouvasmes deux.
— Toutesvoyes, auquel en feust il mîeulx ?
— Je ne sçay, sire, plaindre ne m'en vouldroye*,
Car de me plaindre je seroye tout honteux,
Et si me semble que trop grant mal feroye.
8. Veu qu'elle puet et donner et hoster
Trestous ses biens ou bon lui semblera.
Vous le savez, nul ne s'en doit courcier,
Qpant la coustume est tieule de pieça.
Ja pour ce point ma bouche ne dira
j. Ms. ne plaindre ne m* en voulofc.
4J<
Ou est le cœur qcî s'en ^miiiuii tenir?
Je ne croy pas qije Ten ie pecst trocx^r.
En œ moode, tant le soesst oc qoerir !
12- Qoant est a moy, s'amer me coQveuoit,
J^ n'armeroye autre qœ celle La,
Je le voas jure sur le EHca que Ton croit.
Eî si oxjy bien qu'amer me La finldra..
Car mangr^ mien mon cxaetir Fentreprenra,
El sll le veult je ne l'en pcis garder.
Mais je herray qui lia cocseilleia,
Cir je ùis dôubte qu el rse me voelle amer.
15. SdN-ei pvHir qooy? je sçay qu'eQe est amee
1>^ Fi^ grans raaistnis que je ne sui acez.
** Ms. u>N,«,^ ^ f^ j^. ^^
^ le \xi>i uunqiK\
JEAN DE GARENCIÈRES 437
Qui ont puissance et loz et renommée,
Et sont jolis et moult bien abilliez.
Helasl sire, comment seroye amés » ?
Car je diroye, que m'en feroit jurer,
Qu*cl ne scet pas que je doye estre nés,
Ne que de moy n'oïst oncques parler.
14. Et se encore (s)*oï(r) parler en a.
Ne feust il mieulx qu'on s'en fust déporté ?
Car vous savez que dit on ne li a
Nul bien de moy qui ne l'a controuvé.
Pour ce seroie bien a droit forcené
Si j'emprenoye une si grant folie
Que d'amer celle dont je vous ay parlé,
Qpant je sçay bien qu'el ne m'ameroit mie.
15. Car je ne suis jolis ne avenant,
Ne ne sçay bien ne chanter ne dancer,
Ne je ne sui saige ne bien vaillant.
Ne n'ay nul bien qui me deust faire amer.
Mon cuer se mesle bien des oes ferrer
Qui cuide faire tant qu'il en soit amésl
Il ne puet estre, laissons en le parler.
Car je sçay bien qu'il n'avendroit jamais.
16. Lors me respons : Prens bon confort en toy,
Et pense bien que celle t'aymera.
Mais fay ainsi, s'il advient devant soy,
Qpant d'aventure de toy on parlera,
Qpe chascun die : Vêla cellui qui a
D'estre amoureux tresbonne voulenté !
Et tu verras que le temps avendra
Qp'i[lJ lui prendra de ta douleur pitié.
17. Ne cuide mie que l'amour des seigneurs
Te destourbe ton bien aucunement.
Car tu scés bien qu'ilz sont si desdaigneux
Qp'ilz ne pourroient endurer longuement.
Scez tu pourquoy? Ilz ayment faintement.
Et ne leur chault qu'avenir il en doyt.
Car leur propos leur change trop souvent
Par faulceté qui ainsi les déçoit.
I . Ms. ofi stray je année.
4;8 A. PIAGBT
iS. Je ne dy pas qu'ilz soient crc^tous tieulx,
Mais toutesfoys en est il grant foison^
Q^i entre femmes font bien les amoureux
Âfîn qu'on cuide qu'ih aleot bonne saison.
11 leur soufHst d'en avoir le renon.
Et qu*il en queure par la %'ille nouvelles,
N'iî ne leur chauh s'ilz sont amez ou ooni
Mds que Ton die qu'Ut soient bien des belles l
19. Et pour cela se tu es amoureux.
Laquelle chose je te conseil et prie,
Garde toy bien que tu soies de ceulx,
Car en ver(i)té lu feroys g blie,
Scés tu pourquoy ? Tu faul. en ta vie
D'avoir la joye que Ton doh irer.
Car en b fin tu n'avrois point 'amye.
Ne nule femme ne te devroit amer.
10. Qjjant en ce pom^ m'eust tenu longuement
Le dieu d'Amours qui ainsi m'enseignoît,
Et que ce vint sur son département ^
Il me va dire : Garde» comment qu'il soit,
Q^e qudle chose qu 'avenir il te doît^
Qjie tu aymes et celles sam faillir.
Et je te jure ycy et te promect
De te venir a tes maulx secourir.
n. Balade Fous m^ave^. Cette ballade, dans laquelle Jeannet,
obligé de quitter sa dame, se lamente et désire la mort, rappelle
les pièces XVI et XXVÛI d'Oton de Grandson sur le même
sujet ^
Helas I a qui diray je ma tristesse,
Ne la douleur que mon corps portera,
Puisqu'ainsi est que ma belle maistresse
Plus qu'onques mais esloingner me fauldra?
Je ne sçay pas que mon las cueur fera
Qpant il verra que si loing de mes yeulx
Sera la belle au gent corps gracieux.
Je ne croy pas qu'aye nul réconfort,
Fors de dire, comme un homme annuyeux :
Je hez ma vie et désire ma mort ' !
1. Romattia, XIX, 420 et 431.
2. On trouve le même vers chez Charles d'Orléans, I, 8.
JEAN DE GARENCIÈRES 439
Car je voy bien que ma dure destresse
Jamais nul jour allegié ne sera
De cy a tant que ma belle princesse
De ses beaulx yeulx un regan me donra.
Ainçoys je sçay que il m'en convendra,
Veu que les maulz me sont ainsi crueulz,
Moy maudire quant je fu amoureux,
Et maintesfoys dire par desconfort :
Puisque me fault estre si douloureux,
Je hé ma vie et désire ma mort !
Car s*il estoit que j'eusse la richesse
Et les grans biens qu'Alixandre donna,
Et que j'eusse des IX preux la prouesse.
Et les contrées que Charles conquesta,
Tant que chascun dist de moy : Je voy la
De ce monde trestout le plus eureux !
Ja pour cela ne seroye joyeulx;
Assez diroye, fut a droit ou a tort :
Si je ne voy celle dont je me deulx,
Je hé ma vie et désire ma mort !
XIX. Balade Vous nCave:^,
Je ne voy homme de mes yeulx,
Tant comme moy desconforté,
Mais nul n'en doit estre piteux
Qpant je (ne) le me suy pourchacé.
Car par ma jeune voulenté
Je vous ay fait a moy courcier.
Belle, vueillez moy pardonner
Ce meffait, et vous m'orrez ja
Devant vous sur les sains jurer
Que jamais il ne m'avenra.
Car vraiement si douloureux
Ne fu oncques que je seray,
Dame, se vo cuer gracieux
N'est du tout vers moy apaisié.
Mieulx voulsisse qu'on m'eust noyé
Très l'eure que nasqui premier !
Combien que je me puis venter
Qpe chastié sui pour cela.
Et si vous puis acertener
Qpe jamais il ne m'avenra.
440 A* PÎAGET
Penser si j'ay esté joyeulx
Quant vous n'avez a moy parlé
De vDstrc parler amoureun
Comme j*avoye acousïumé.
yen ay esté si for séné
Qjje je m^en sui cuidé tuer.
Mais Espoir m'a fait espérer
Q^e vostre cuer s*apaisera,
Qjiant Pitié vous vouldra monstrer
Q^e jamais il ne m'avenra K
XX* Bnladc Fous m'mfei. On peut en rapproclier la baltadc
de Grandson qui a pour refrain : « Je n*en congnoîs Dolle si
belle*».
J'ay veu dames et damoiseiles
Maintcsfoiï clianter et dancer,
Et de gracieuses pucclles
Qp'îl faisoît moult bon regarder.
Mais il me semble, a brief jugier,
Qjïc ma dame si est bien teîle
Par quoy je la doy appeller
Entre les autres la plus belle.
Et n'en dcsplaise a toutes ceWes
Qpi orront cecy recorder,
Que ce n*est pas pour le bien d'elles
Vouloir nullement rabaissier,
Ainçoys le vouldroye honnorer,
Mais certes la grant beauté d'elles
La me fait a bon droit nommer
Entre les autres la plus belle.
Combien qu'en aye veu de telles
Qui moult affierent a louer,
Car ilz sont plaisantes et belles
Et sccvent bien gens festier,
Mais je puis pour celle jurer
Qu'elle est jeune, fresche et nouveMe,
[Et] quant plus avant vueil parler,
Entre les autres la plus belle
1. Ms il ne m' amer a.
2. Romania, XIX, 429.
1
JEAN DE GARENCIÈRES 44 1
Prince, qui pourroit assembler
Les belles qu'on pourroit nombrer,
Créez que ma pensée est telle
Qu'on la deust veoir et trouver
Entre les autres la plus belle.
XXI. Rondel Fous mave:^.
Entre les autres la plus belle
Est celle qui me fait amer,
Ne pour riens qu'on me sceust donner
Je ne vouldroye autre amer qu'elle.
Car ou monde n'a point de telle,
De cela me puis je vanter.
Qui sa couleur fresche et nouvelle
Savroit bien a droit regarder,
On ne la pourroit trop louer,
Veu les grans biens qui sont en elle '.
XXV. Balade.
Helas I pourquoi virent mes yeulx
.Vostre belle plaisant beaulté,
Ne pourquoy suy jeune amoureux,
Quant je ne sui de vous amé?
Par Dieu, ma dame, je ne sçay.
Ce fu mon cuer qui fu ravy
Qiii m'en fist avoir voulenté.
Le premier jour que je vous vy.
Mais oncques puis ne fux joyeulx,
Ma seule amour et ma chierté ;
Si ay je esté si douloureux
Et petitement conforté.
Par Dieu, je sui bien fortuné
Q^ant vous n'avez de moy mercy.
J'ay masse mieulx qu'on m'eus t tué
Le premier jour que je vous vy.
I. La chanson VI de Charles d'Orléans (édit. d'Héricault, II, 8) traite le
même sujet, presque dans les mêmes termes : '
Dieu, qu'il la fait bon regarder
La gracieuse, bonne et belle 1
Pour les grans biens qui sont en elle
Chacun est prest de la louer.
AwMUM. XXU. 29
^^^H ^^^^^^^
^^^^^^^^^^H
^^^^^H Aussi le vaulsist tt ^^^^^^^^^|
^^^^^^H S'il ne vous prent
^^^^^^^^^^^1
^^^^^^H Car oncques nul si
angoisseux ^^^^^^^^H
^^^^^^1 Q^e nioy de mère ^^^^^H
^^^^^^1 Car je maudy maudire, ^^^^^|
^^^^^H Pardouaez moy
le dy, ^H
^^^^^H Comme un homme desesperi, ^^H
^^^^^H Le premier jour que vous vy. ^^H
^^^^^^ Cette ballade, rajeunie et
remaniée par deux rimeurs diffè- 1
^^^^H rents^ est imprimée deux fois dans k Jardin de Plaisance^ édi- ■
^^^^H don Vérard, Â''' lxix et xcix v"* : ^^|
^^^^^H Las 1 pourquoy vis je de mes yeulx
Las 1 pourquoy virent mes yeulx, ^^H
^^^^^H Vostrc belle plaisant beauké,
Dame, vostre plaisant beaulté, ^^H
^^^^^H Ne pourquoy en fus je amoureux
Ne pourquoy fus je odc amoureux ^^B
^^^^^H Quant de vous je ne suis zymé ?
Quant de vous ne puis estre aymé? ^^M
^^^^^H Par Dieu, ma dame, je ne sçay;
Par Dieu, ma dame, je ne scé ^^fl
^^^^^H Se fut mon cueur qui fut ravy
Se vous eustes mon cueur ravy, ^^H
^^^^^H Qui m'en dst avoir voulenté
Mais en vous fut ma voulenté, ^^H
^^^^^H Le premier jour que je vous vy.
Le premier jour que je vous vy. ^^H
^^^^^H Oncques depuis ne fus joyeux,
J'amasse mieulx avoir esté ^^H
^^^^^H Ma seule amour, ma chanté,
Par delà Romme deux cens lieux, ^^H
^^^^^H Fors que tousjours suis douloureux
Ou en Avignon la cité, ^^H
^^^^^^H Et petitement conforte.
Quant de vous je fus amoureux* ^^^|
^^^^^^H Par Dieu, je suis bien fortuné
Hellas t je mourray angoisseux ^^^|
^^^^^^H Se de moy vous n'avez mercy ;
Se vous n^avez de moy mercy» ^^^|
^^^^^H J'amasse tnieulx estrc enterré
Et si mauldiray en tous lieux ^^^|
^^^^^H Le premier jour que je vous vy.
Le premier jour que je vous vy, ^^^M
^^^^^^H Aussi le me vaulsist il mîeulx,
Aussi le me vaulsist il mieulx, ^^H
^^^^^^H Je le vous dis en vérité,
Se vous n'avez de moy pitié, ^^H
^^^^^^H Car jamais povre douloureux
Car onc homme plus douloureux ^^H
^^^^^^H Qjic moy ne fut de mère né.
Ne fut de moy de mère né. ^^H
^^^^^^H Et si mauldis et mauldiray,
Car je mauldis et mauldiré, ^^^^
^^^^^^H Pardonnez moy se je le dy,
Pardonne;; moy se je ie Jy, ^^^|
^^^^^^H Com ung homme désespéré,
Com ung homme désespéré ^^H
^^^^^^H Le premier jour que je vous vy.
Le premier jour que je vous vy. ^^H
^^^^^H Ma dame, or suis je débouté,
Princesse, aiez de moy pitié ^^M
^^^^^^H Sans confort et de joye banny ;
Retenez moy pour vostrc amy. ^^H
^^^^^^H Mieulx amasse onc n*avoir esté
Ou sans cesser je mauldiray ^^H
^^^^^^H Le premier jour que je vous vy.
Le premier jour que ]e vous vy. ^^|
^^^^^H XXIX. Complainte Vous tnavei. Cette pièce se retrouve, V
^^^^^H sous le titre de Complainte d' amant y au (° 14 du manuscrit de A
JEAN OE GARENCIÈRES 443
Westminster Abbey, décrit par M. Paul Meyer dans le Bulletin
de la Société des anciens textes français (1875, p. 30).
1 . Belle, prenez temps et espace
De regarder mes piteux cas,
Car, par ma foy, je ne pourchace
Envers vous nulz mauvais pourchaz.
Je me suis pour vous mis es laz
D'Amours et de leur grant dangier.
Mais repentir ne m'en vueil pas
Pour mal que j'en doye endurer.
2. Je ne vouldroye pas avoir
Tous les biens qu'on pourroit nombrer
Par si que vous eussiez vouloir
De ne me devoir point amer.
Qpe me pourroit il proufHter ?
Car point en gré ne la prendroye,
Ainsi me vueille Dieux aidier,
Jeune, gente, plaisant et coye.
3 . Com il est vray que je [vous] ayme
Plus que toutes celles du monde,
Ma seule dame souveraine,
Celle de qui tout bien m'abonde,
Tousjours me semble blanche et blonde,
Quoy que je face, [ou] dorme ou veille,
En bonne foy que je voy l'onde
De vostre beaultô nompareille.
4. Ne je n'ay nul autre pensée
Qpe celle la, a dire voir,
Ma treschiere dame honnoree.
Le bien que j'actens a avoir.
Se j'avoye perdu cest espoir
Il me fauldroit désespérer ;
Car certes nulle n'a pouoir
De ma douleur reconforter
5 . Autre que vous, ma chiere dame,
A qui j'ay donné et donray
Mon cueur, ma pensée, par m'ame.
Tous les jours mais que je vivray;
N'a nulle autre ja ne seray
Pour rien qui me saiche avenir.
Et puis après, quant je mourray.
Mon ame vous vendra servir.
JEAN DE GARENCIÈRES 445
1 1 . Et pour ce au dieu des amoureux
Vueil je requérir et prier
Qji'a ce jour de may gracieux
Lui plaise de les vous monstrer.
Et si ne le veult accorder
Je ne lui requier jamais don,
Se non qu'il me vueille donner
La mort pour avoir gairison.
XXX. Balade Vous tnavei.
Je suis cellui qui ayme la plus belle
Que Ton puisse des deux yeulx regarder,
Et devant tous maintendray la querelle.
Et s*en cource qui s'en vouldra courcier !
Si n'est homme que je doye excepter,
Il ne m'en chault qui en ait desplaisir,
Car je me doy bien a droit resjoïr
Quant je pense que je sui si eureux
Que je puis bien devant tous maintenir :
J'ayme la belle, la meilleur des meilleurs.
Car oncques Dieu si n'en fist point de telle.
Quant de cela, je m'en puis bien vanter,
Ne qui finast des biens qui sont en elle
Dont vous m'oyez si a présent parler.
On n'y savroit ne mectre ne os ter,
Ne riens redire pour beaulté acomplir.
Mais ne suis seul a ce propos tenir.
Et quant a moy j'en seray amoureux,
Disant tousjours sans jamais repentir :
J'ayme la belle, la meilleur des meilleurs.
Qui ne m'en croit, si voise voir a elle,
Pour savoir mon se je sui menxongier;
Enquiere bien celle que l'on appelle
La nompareille que l'on puisse trouver;
Cerche partout s'il y scet assener :
Je n'ay pas paour qu'i[l] me doy[e] desmentir;
J'ose bien tant de son fait soustenir.
Et pour cela, maugré tous envieux,
Je maintendray, qui ne le vueille oir :
J'ayme la belle, la meilleur des meilleurs.
XXXIII. Balade Vous m'ave^.
J'ay tant de maulx qu'il doit souffire,
Je sui malade et mau gardé.
44<
Je T-jfiss ^CLS TCfs pcor aerc* re^oerâr.
^ traaas ^les tccs pcor anrv raa?ntcraer.
^s Tà=s ▼«» ^CBS jciir nnai cmair r«^cir.
Se ràsrs nar? ^rccsv xîTe. gcur ^cos senràr
P!izs v^'cm^nes as£b ^ xnsit sus, gufssmisu
j« Tàss Ter? »ctis snt /m liin** je Fr m»:-»
Cet *e t«Lixa Tcscç TÙitsnîC ^«iuiiiss^
f*e T3sns ^Rsrs ^pghs gcar reaprcnr jetss&.
Mil. ^KÎht ^-trrf^ nSTCU^ ^yrrfty s i^ilt?
vint -ij îttt TcsCTî sans -.anais ieiartrr.
J«e îuis "nsHt Tiiicsf tqus aie iamer
V Stt Tean itcus iinx >S>s:îSani3L.
JEAN DE GARENafeRES 447
Je sui venu pour finer ma tristesse,
Je sui venu , ma treshaulte princesse,
Vous requérir que vous n'oubliez mye
Que j'ay empris, sans ce que je me laisse,
De vous servir tous les jours de ma vie.
Je suis venu : or me vueillez amer
A ceste foiz, s*il vous vient a plaisir,
Ou, sans faulte, vous m'en ferez râler.
Mais ce sera sans jamais revenir.
Car mieux me vault loingtain de vous languir,
S'il ne vous plaist me donner allegence,
QjLie tous les jours veoir ma 'desplaisance
Devant mes yeulz et ma dure destresse;
Mais toutesfoys, quelque part que j'adresse
Pour paour de mort je ne me tendray mye.
Ce saichez vous, ma tresplaisant maistresse,
De vous servir tous les jours de ma vie.
XL. Balade. On peut en rapprocher la Balade de saint Falen-
tin de Grandson, dont tous les vers, sauf le refrain, commencent
par ces mots : Je vous choisy (^Romania, XIX, 422).
A ce' jour d'uy c'om doit dame choisir.
Je vous choisy, et si vous fays présent
De cuer, de corps, sans jamais départir,
Pour vous servir, ma dame, seulement.
En vous venant requérir humblement
Qp'il vous plaise de me vouloir amer;
Et, par ma foy, bien vous pouez vanter
D'estre la dame du monde mieulz amee.
Car j'ay tout mis, cuer et corps et pensée,
A ce faire, quelque part que je soye.
Ne sans [vous] voir nulle rien ne m'agrée.
Ma seule amour, ma souveraine joye.
Je vous choisy, mon treshaultain désir,
Je vous choisy, mon joyeulx pensement,
Je viens vers vous humblement requérir
Vostre grâce pour mon allégement.
Je sui vostre, sans nul département :
Vous me pouez de mes maulx conforter.
Nul n'a pouoir dessus moy commander
I. Ms. Au,
448 A. PÏAGET
Autre que vous, ma dame redoublée,
Vostre amour est tant de moj d^iree
Que, par ma foy, pour neti ne rnc tendroyc
De vous servir tant com j'avniy durée,
Ma seule amour, ma souveraine joye*
Je Yous cboisy, la plus belle a veoir,
Cii'onoques veîsse de mes yeuîx ïiuîtement.
Je suis venu : or me vueiïlef partir
De voz grans biens dont si tresLirgemcnt
En avez, dame, que je tien fermement
Que nulpej autre n'en pou[rr]oit tant fioer.
Car nul homme ne pourroh racompier
La grani beau hé dont vous estes parce.
Oncques sr belle ne fu de mère née
Que vous estes, cela dy et diroyc
En tous paîs et en toute contrée.
Ma seule amour, ma souveraine joye.
Ma princesse^ ma dame recdlee,
Le bien de vous, vostre grani renommée,
M'a mis es maulx ou guérir ne pourroye
Se par vous n'est la gucrtson trouvée,
Ma seule amour, ma souveraine joye.
Quelques-unes des pièces du manuscrit 19139 présentent un
intérêt plus spécial que les lamentations amoureuses de Jeannet
de Garencières et méritent de nous arrêter quelque peu.
La VHP est une ballade de Jean de Fayel. Ce personnage
était déjà connu comme poète. L'abbé de la Rue mentionne ,
mais sans citer de sources, les « chansons et ballades de Jean
Fayel, vicomte de Breteuil * ». Ces deux lignes ont été
reproduites, sans autre explication, par Frère*, par M. Tabbé
Chevalier 3, dans le Dictionnaire du département de PEure^y pat
1 . Essai ïnstoriqiu sur les bardeSy les jongleurs et les trouvèreSy III, 349.
2. Manuel du bibliographe normamî^ I, 148.
j. Répertoire, s. v. Jean de Fayel.
4. Evreux, 1882, p. 62, s. v. Breteuil.
JEAN DE GARENCifeRES 449
M"^* Oursel *, Que sont devenues les chansons et les ballades
dont parle Tabbè de la Rue? Je n*aî pas réussi à les retrouver.
Le 22 novembre 14 17, Jean de Fayel est qualifie de « cheva-
lier, viconte de Bretueil^ chambellan de monseigneur le duc
d'Orléans, et gouverneur de ses duchiè de Valoîs et conte de
Beauraont, et cappitaine de son chastel de Beaumont* ». Il
vivait encore le 25 mai 1420'.
Dans la ballade qui porte son nom, Jean de Faycl s'adresse
à Jeannet de Garenciéres et lui demande conseil. Il est sur le
point de se déclarer servant d'une jeune dame « qui moult fait
a louer s), mais il hésite, parce que, de tous côtés, il entend dire
du mal du « mesticr amoureux ». Est-ce qu'Amour est réelle-
ment un maître si cruel et si peu généreux ? Est-ce que ceux
qui se plaignent si fort ne sont pas plutôt des amants trompeurs,
punis pour leur fausseté ?
Je m'en rapporte a vosire jugement.
Or me dictes, se du tout me meaoye
A bien servir la belle seulemem^
Se c'est le mieuli pour moy tenir en joye?
A cette ballade, où se cachait peut-être quelque malice»
Jeannet de Garenciéres répond (ballade IX), un peu brusque-
ment et de mauvaise humeur, qu* Amour ne récompense pas,
tant s'en faut, tous ses sujets, mcrae loyaux et fidèles. Il con*
seiile à Jean de Fayel — qui fera bien, une autre fois, de ne
pas médire d'autrui — d'aimer la belle dame dont il parle. Et
puis, dit Garenciéres, vous viendrez m'en donner des nou-
velles :
Je m'en rapporte a Jaques du Peschin.
Jacques du Peschin, trahi par une dame qu'il aimait « loyau-
ment sans fausser », abonde dans le sens de Jeannet de Garcn*
cières (ballade X). Peut-être, dit-il au vicomte de Breteuil,
serez-vous plus heureux qu'un autre. Essayez. En tout cas, je
vous souhaite
Que tousjours mais vous vous tenez en joie.
1. Nouv, hiog, normande^ I, 494,
2. CoUcction Basiard, n» 709,
3« Id., n^ 747. Le Dictionnaire de Y Eure dit que Jean de Fayel mourut
en 1410,
4SO A. HAGET
Jacques du Peschia o'était pas connu en qualité de p€>ète. Il
figure, le premier mai 1400, parmi les écuyers de Charles M
qui reçurent des houppelandes '• En 1401, le duc d'Orlians fait
acheter pour la somme de 128 L t. ^ huit pièces de draps de
soye appeliez baudequins , ouvrez de plusieurs soyes », et les
donne ^ a Guilbume de la Campaingne et Guiot de Renty, ses
chambellans» Archembaut et Jaques du Peschin, ses escuiers,
pour faire a chascun une robe pour euU^ ». Peu après, il fait
don au même Jacques du Peschin, son écuyer et chambellan,
d'un « coursier brun bay a longue queue » , acheté à Charles
de Giresme, chevalier, alors prisonnier K En 1412 et 1413,
nous voyons « Jacques du Peschin, conseiller et chambellan du
duc d'Orléans et gouverneur des contez de Blois » , chargé de
lever une aide pour la délivrance du comte d'AngouIèrae^. Le
24 avril 141 5 (n, s,), Jacques du Peschin donne quînance de
ses gages pour service de guerre contre le duc de Bourgogne î.
Voici les trois ballades de Jean de Fayel, de Jean de Garen-
cières et de Jacques du Peschin :
Vin* Balade Jehan de Faiel,
J'ay trop oy* le mestier amoureux
Par balades ahontir et blasiner ;
Les uns y a qui inaudi(r)ent les ycuh.
Les autrtis dient que bricf ïes fault liner»
Et s*il leur vient de loyaument amer,
Et comme ilz diem, et en font grant scrcmciit.
Et pour ce, Jehan', je vous prie humblement
Que me vueïllez conseiller, se j'avoyc
Mon cuer donné a Amours lige ment,
Se c'« est le niîeuîx pour moy tenir en joye ?
I , Douêt-d'Arcq, Choix dt (nkes itt/âiUs rektives au règne de Cbarlts Vl^ J,
166.
j. Collection Bastard, n^ }8k
3. Id.f 110638.
4. W,» no 688.
5. Clairambault, Titra sceliés, r. 8j, p. 6691.
6. Ms. fay trop Iminy.
7. Le copiste avait d'abord écrit ]aq(m. Ce mot est barré et remplacé, eo
i n lerlig ne , par Jeintn .
8. M$. Ce est.
JEAN DE GARENafeRES 45 I
Car je vous jure qu'il n*a pas des ans deux
Qpe j*en vy une qui moult fait a louer;
Et si me semble qu'il seroit bien eureux
Qui la pourroit tout son saoul regarder.
Il n'est pas bouche qui vous peust raconter
Sa grant beaulté, tant en a largement ;
Mais tout mon cuer, ma vie entièrement.
En la servir voulentiers emploiroye ;
Si vous demande, selon vostre escient,
Se c'est le mieulx pour moy tenir en joye?
Et, d'autre part, il me semble que ceulx
Qui se veulent si fort désespérer,
Et qui endurent les tourmens si crueulx,
Q^'ilz ont voulu de faulseté user ;
Or je ne cuide qu'Amours voulsist donner
Sans desserte si fel guerdonnement.
Je m'en rapporte a vostre jugement :
Or me dictes, se du tout me mectroye
A bien servir la belle seulement,
Se c'est le mieulx pour moy tenir en joye ?
IX. Balade Fous m'avcTi.
Vous qui avez le mestier amoureux.
Ce dictes vous, si fort oy blasmer.
Je vous demande s'il vous semble que ceulx
Qui s'i mectent s'en puissent tous louer.
Il me semble que c'est fort a penser
Qp' Amours puisse tant de gens assouvir,
Veu que chascun si vouldroit bien jouir
De leurs grans biens, et en avoir souvent.
Il me semble, selon mon jugement.
Je ne sçay mie ce se vous a fait vin.
Car vous parlez un petit largement :
Je m'en rapporte a Jaques du Peschin.
Car vous dictes, dont je sui merveilleux s
Que ceulx qui ont tant de mal a porter
Et qui endurent les tourmens si crueulx,
Qp'ilz ont voulu de faulseté uzer.
Advisez vous ; on ne doit nul blasmer.
Car on [ne] scet qui lui puet avenir.
I. Ms. merveiîleurs.
JEAN DE GAREXCtÉRES 4SÎ
Les amoureux qui vont les maulx souffrant,
Je vous respons, a vous en brief parler,
Qpe j'iiy arné, loyaument» sans fausser,
Utit qui m'a, das I voulu trahir.
Plus ne vous puis de mon fait descouvrîr;
Mais toutesfoys je vous conseilleroyc,
Se vous pouez votre fait acomplirt
Qpe 10 us jours mais vous vous tenez en joye.
Chier compaignon, vuelllez vous avânder.
Car c'est un fait qui se veuk sans muser
Brief abregier, selon qu'en puis veïr.
Je sçay trop bien a quoy m'en puis tenir.
Autre conseil donner ne vous savroye,
Fors : faictes tant qu'a vostre revenir
Q.ue tousjours mais vous vous tenez en joye.
Dans la ballade XI, Jeannet de Garencières nous parle d'une
croisade à laquelle il a pris part :
Uau trier nous feusmes des compaignons pluîseurs
Qui empreismes le chemin d*oulire mer...
Nous savons, d'autre part, que <c le fils do seigneur de
Garancieres m se trouvait parmi les croisés de rexpèdition de
Hongrie, en 1396 ^ L*expression « d'oukre mer w qui semble
faire difficulté peut très bien se justifier. Si l'armée franco*
bourguignonne, en effet, s'est rendue à Nicopolis par TAlsace,
le Brisgau et la vallée du Danube, les prisonniers revinrent en
France par mer, de Brousse à Venise. Jeannet de Garencières
ne dut sans doute la vie qu'à son extrême jeunesse. Excepté les
grands seigneurs destinés à payer rançon» tons les autres cheva-
liers furent horriblement massacrés. On n'épargna que les pri-
sonniers âgés de moins de vingt ans.
Cette ballade, adressée à Guillaume de la Champagne, semble
bien dater de 1596. A cette date, Guillaume de la Champagne,
seigneur d'Apilly, capitaine delà ville et du château d'Avranclies,
était écuyer de Louis d*Orléans. Ce personnage est surtout
connu pour avoir pris part, le 19 mai 1402, au combat des sept
Français et des sept Anglais qu'a célébré Christine de Pisan *.
1. Deîaville Le Roulx, La France en Orienî au XÎV* stéck, II, 15
2. Voy. Bit, Èc, des Charlei, l, 579, Le Roulx de Lincj\ Recutil de chants
historiques, ï, 280. Christine de Pisan, édit* Roy., I, 240-245.
JEAN DE GARENCIÈRES 437
La pièce XXIII, intitulée Letres f^ous in'ave:^^ est assez
énigmatique. Autant qu'on peut le voir, en lisant entre les
lignes, Garencières était en train de passer gaiement son temps
auprès de sa dame, avec d'autres « compaignons joyeulx »,
quand un événement imprévu, la mort de son oncle, vint trou-
bler la fête. Obligé malgré lui de s'éloigner, Jeannet chevauche
furieux de Paris à Orléans, et ne pense qu'à revenir au plus tôt.
De par cellui qui a dormy
A celles qui Pont resveillô
Je présente ces letres cy.
Ma damoiselle, je vous pry,
Lisiez les, s'il vous vient en gré.
Belle, aiez[a] recommandé
Cellui qui de vous se party,
Ce mercredy derrain passé,
(iuant[ilj eust devant vous dormy.
Au moins souviengne vous de lui,
Car ainsi tost qu'il vous laissa
Il se trouva si tresmarry
Qvi'oncques depuis ne reposa.
Mau repos est pour lui sonné :
Il se puet bien aler couchier.
Créés qu'on Tavra bien logié
S'il ne se deult au resveiller.
Il le feroit bon encontrer
Pour voir mon la chiere qu*il fait :
Je tien, selon le mien cuidier,
Qii'il n'a rien de ce qu'il vouloit.
Car Dieu scet s'il est douloureux
Quant il pense qu'il a laissié
Les autres compaignons joyeulx.
Et il s'en va desconforté.
Il a esté depuis tempté
Plus de cent foiz de retourner.
Or chevauche mal reposé
Qjii ne scet ou il veult aler.
N'il ne scet quant il retourra,
Q^i lui est moult grant desplaisir.
Car on scet trop bien quant on va
Mais ne scet pas du revenir.
Ce compaignon a beau loisir
Rfimanm. XXJI «q
JEAN DE GAREKClèRES 459
Après avoir pris part au siège de Cherbourg ^^ il est nommé,
en 1380, « chasicllain et cappitaine du chaste! et ville de
Caen ' », charge qu'il occupa pendant de longues années,
rj ans au moins. En 1406, il était conseiller et chambellan du
roi» grand maître d*hôtei de la reine K II vivait encore en
octobre 1408 ■•,
Yon de Garencières avait épousé la veuve d^Eustache de
Mauny, Brunissende de Lautrec, fille d'Amalric IV, vicomte
de Lautrec, et de Jeanne de Narbonne?. Brunissende mourut
rn 1418 sans laisser d'enfants^.
Signalons encore Pierre de Garencières, qui, en 1390, était
écuyer panetier du duc deTouraine7, et Sevin de Garencières,
qui était contrôleur du grenier à sel d'Etampes en 1404 *,
La ballade XLI est adressée à Lourdin de Salligny. Elle doit
dater, de même que la ballade XLIV où il est également ques-
tion de ce chevalier, de Tépoque où Lourdio de Salligny était
attaché h Louis de Bourbon. De retour de sa captivité d* Angle-
terre, le duc de Bourbon avait retenu « messire Lordin de
Saligni, qui estoit ung appert et vaillant chevaher, pour son
compaignon d'armes 9 », Ces deux ballades sont donc anté-
1. P, orig,, vol, 1280, no 25.
2. P. orig,, vol. 1280, o" 28. Jules Tardif, Monuments hhtcriques : Carions
iks rois^ n<» 1614, 1627» 1640, 1658, 1671, îjO}, 171). Cest Jean de
Garencières qui lui succéda dans cette charge.
3. P, orig., vol. 1280, nf> 16.
4. P. Anselme, HisL génè4Û,, t. II, p* 566.
5. P. Anselme, Hist. généaL, t. 11, p« 365*366, Histoire génér, du Languedoc,
i. X, note 4, p. 20. Cf, iiL, \, IX, p. 963-
6. En 1425, Henri IV donne à Guy de Bar, seigneur de Presles et bailli de
Sens, une maison, sbe à Paris, rue Galande, avec issue par derrière sur la
rue du Plâtre, maison confisquée sur les héritiers de Brunissende de Lautrec,
veuve d'Yon de Garencières* Voy. A. Longnon, Paris petidant la domitmtion
anglaise^ p. 192. Brunissende de Lauirec avait laissé ses biens à Jean de
Voisins , seigneur de Confolens , et au vicomte de Narbonne, Hist, gétté^il.
H , p. 366. La rue actuelle G<trancière (près de Saini-Sulpice) tire son nom
d*un hôtel qui, au commencement du xv* siècle, appartenait  Guillaume de
Momenay, seigneur de Garencières. Longnon, Ouv, ciL, p. 193, note 1,
7. P, orig,^ vol. 1280, 0» 53 et 82,
8. Clairambault, Titres scellés, r. 51, n" 162*
9. Chronique du bon duc Loys de Bourbon ^ édil. Chazaud, p. 21. Cf, pp. 7,
9» î5, 19, 20. Clairambault, Titres scella ^ r. 100, p. 7757.
JEAN DE GARENCIÈRES 46 1
yeux, les dames et leurs servants! Q.uant à moi, s'écrie-t-il, « je
ne vueil plus amer » ; décision qu'il regrette presque aussitôt.
Et il demande à Bucy son avis sur ce point délicat.
La réponse de Bucy (ballade XLIII) a pour refrain :
Car quant a moy je vueil tousjours amer !
Quel est ce Bucy? Cest probablement le même personnage
que le Bucy du Livre des cent ballades. M. de Qpeux de Saint
Hilaire l'a identifié avec le fils de Simon de Bucy, premier pré-
sident du Parlement de Paris, « Renaud de Bucy, qui fut chanoine
de Soissons, qui figure parmi les conseillers au Parlement de
Paris, en 1372, et qui mourut le 10 mars 1407 ^ ». Cette iden-
tification doit être rejetée. Le Bucy du Livre des cent ballades est
certainement un chevalier, de même que les autres poètes de ce
recueil.
L'auteur de la ballade XLIII — et de la ballade du Livre des
cent ballades — est probablement Jean de Bucy, l'un des fami-
liers du duc d'Orléans, collègue d'Yves de Vieuxpont, de Jean
de Fayel, de Jacques du Peschin et de Jeannet de Garencières
lui-même. Nous le voyons en 1390 prendre part à l'expédition
de Barbarie, avec Yves de Vieuxpont*. Eustache Deschamps
met Jean de Bucy au nombre de
ceux qui a toute heure
Rifflent, ratafflent aussy :
Au vin queurent tousdis seure.
11 le range parmi les chevaliers à la mode :
Ne leur chaut qui chante ou pleure,
Mais qullz soient bien joly J !
XLII. Balade Vous niaveT^, Cette ballade figure, incomplète,
dans le Jardin de Plaisance, édition Vérard, f° ex v°.
Je hez ma vie et désire ma mort ♦,
Et maudy Teure que je feu amoureux,
1. Le Livre des cent ballades y p. 244. La ballade de Bucy a été publiée par
L. Pannier, Romania, I, 367, et par M. de Queux de Saint-Hilaire , Le Uvr
des cent ballades , Complément, p. i .
2. Jarry, Ouv. cit. y p. 55. En 1389, Jean de Bucy était écuyer échanson du
roi, P. orig.y vol. 546, n© 21.
3. Édit. Tarbé, I, 196.
4. Ce vers est le refrain de la Ballade II.
^6t A, PIAGET
Et hé mon cuetir quant il en fu d*âccord,
Ec aussi hy je ma pensée et mes yeukj
El puis après toutes celles et ceulx
Par qui premier le mestier commença ' ,
El de cocy me bksrae qui vouldra,
D ne m*en chaiilt qui en puisse parler.
Die chascun tout ce qui lui pbim.
Car quant a moy je ne vueîl plus araer. lO
Et je vous prie» dictes moy se j*ay tort,
Bucy, Bucy, mon frère gracieux ;
Car il est vray que sans nul réconfort,
Ne sans estre aucunement joyculx.
Que i*ay amé plus de deux ans et mieulu tf
Une qui dit qu'elle ne m amcm fA,
Ne que pour riens ne me confortera
De la douleur que me fault endurer,
Pour quoy je dy : Qperez qui aymera,
Car quant a moy je ne vudl plus amer. 20
Car je voy bien que celle [en] est <l'accord,
Par qui j'ay eu unt de mal douloureux.
Que je languisse par faulte de confort.
Sans que son cueur soit envers moy piteux;
Et si je doy estre si maleureux 25
Qp'elle de moy nulle mercy n'avra,
Des biens d'amours ne (ne) le verray je ja,
Pour nulle riens qu'autre me puist donner
Jamais mon cueur ou dangier ne sera,
Car quant a moy je ne vueil plus amer». 30
XLin. Balade. Resposte de Bucy.
J'ay me ma vie sans désirer ma mort,
Et l'eure aussi que je sui amoureux,
J'ay me mon cuer quant il en fut d'accord,
Aussi fay je ma pensée et mes yeulx.
Et puis ma dame au gent corps gracieux
Qui en ce monde point de pareille n'a,
1. yis. U premier commença.
2. Var. du Jardin de Plaisance : 2 qu'oncques fus. — S II ne me chaul
qu'on puist dire et parler. — 11 Et dictes moy, je vous pry^ se fay tort, — 12
Respondei moy, mon frère gracieux. — 13 Dois je tousjours estre sans reconfort.
— 14 Ne sans y estre. — i^ Je me complains de ce cas merveilleux. — 16 Ma
dame dit. — 19 Parquoy je dy que Dieu Vadvisera. ■— 10, 20 Quant est a moy.
JEAN DE GARENCIÈRES 463
Et quant eûr tant de bien me donna
Qpe de si belle servir et honnorer,
Die chascun tout ce qui lui plaira,
Car quant a moy je vueil tousjours amer.
Garencieres, vous vous plaignez trop fort
Des maulx d'amours qui vous sont douloureux.
Il me semble que vous avez grant tort.
Car nul ne puet a droit estre joyeulx
S'il n'ayme fort tousjours de mieulx en mieulx .
Je vous dy vray, créez moy de cela.
Aiez espoir que vostre dame avra
Pitié des maulx qu'i[l] vous fault endurer. •
Autre conseil Bucy ne vous donra,
Car quant a moy je vueil tousjours amer.
Je vous supply que prenez reconfort,
Et ne vueillez jamais estre de ceulx
Qpi se repent[ent] d'amer si n'ont confort
De leurs douleurs en un an ou en deux.
Car cuer de dame est loyal et piteux,
Qpant il est temps, de ce ne doubtez ja.
Prenez en gré tout ce qui vous venra.
Meilleur conseil je ne vous puis donner.
Et au surplus aviengne qui pourra,
Car quant a moy je vueil tousjours amer.
VI.
Les dernières pièces du recueil du manuscrit 19 139 sont aussi
les plus intéressantes. Jeannet de Garencieres les écrivit, en 1407,
à Bordeaux, prisonnier des Anglais.
L'expédition de Guyenne, entreprise en 1406 par Louis
d'Orléans, nommé « lieutenant du roi dans le duché de
Guyenne et ou fait de la mer », n'était ni téméraire ou irréflé-
chie, ni condamnée d'avance au plus piteux échec, comme l'ont
prétendu les chroniqueurs d'inspiration bourguignonne'. Peu
auparavant, le comte de Clermont, capitaine général en
I. M. Jarry n'a consacré à cette expédition de Guyenne que deux petites
pages de son gros ouvrage sur La vie politiqtu de Louis de FranUy duc d^Orléans,
Il n'a pas utilisé les Archives municipales de Bordeaux.
464 A. HAGET
Languedoc, et Bernard VU d*Armagnac avaient mis lottt le
pays à feu et à sang, et s'étaient empare d*un grand nombre de
places fortes. Ils étaient même allés jusqu'à bloquer Bordeaux^
et cette ville avait dû payer d'une forte rançon la retraite des
Français. Henri de Lancastre, d'ailleurs, avait trop i faire en
Angleterre pour pouvoir s'occuper d'une manière active de ses
vassaux de Guyenne. En juillet 1406, deux ou trois mots avant
rexpédition de Louis d'Orléans, de Tavîs de François Hogotion,
cardinal-archevêque de Bordeaux, la situation de la Guyenne
était désespérée. Le 11 avril 1406, ce prélat écrivait au rai
d*Angleierre : « Nous sûmes en perilh de pardition, comme
pluscurs foiz je vous ay escript »>^ et il réclame du secours « sans
aucun delay ' », Sa lettre du 30 juin est plus pressante encore :
w Très excellent prince, je vous ay escript tout» foys et enssi
largement de Testât d'icest vostre pays; ains ay encore tant crié
que ma voîz en est faicte rauque. Ainsi je ne say que dire plus
for que rcpetîr et resumir briefment cela que pluseurs fois je
vous ay escript : c'est assavoir que si les Françoys pourçuient
la guerre ainsi corne menassent et se appareillent, je repute tout
ycest voustre pays perdu, ou au menchs destruyt^ ». Le
lî juillet, nouvelle demande de secours : les Français, écrit le
cardinal au roi d'Angleterre, s'avancent peu à peu, font de
grands dommages et prennent « orez un lieu, orez un autre » ;
ils en conquerront bien davantage « pour ce que quasi touz voz
subgîz perdent le cuer »>, voyant qu'aucun secours n'arrive
d'Angleterre K François Hugotion ne se fatigue pas. Le
22 juillet, il revient à la charge auprès de Henri IV. Je ferais
mieux, lui dit-il, de ne plus vous écrire, « quar, selon que je
veoy par esperience, negune ma letre ne porte aucun fruit, ains
scmle que mes paroles soient meinsprisees : neantmoyns par
moy mesme j'ai délibéré de vouloir plustost faillir en escrivan
vous que en taysan ». D'après Hugotion, Saint-Emilion,
Libourne, Fronsac, Blayc et Bourg sont dans la position la plus
critique, et, chose grave, de nombreux seigneurs du pays,
faisant défection, passent du côté des Français 4,
i. Archives munkipaUs de Bonhaux, Rfgistrea de tajutade, l. JII, j>.
a. Id., t. m, p. 89.
}, id,, t ni, p. 91.
4. ld„ t. m, p. 9î,
JEAN DE GARENCIEKES 465
On trouve, publiée dans les Lettres de roiSy reities^ etc., de
Champollion^Pigenc, une intéressante lettre anonyme, du
18 octobre, écrite de Bordeaux à Henri IV touchant le progrès
des Français en Guyenne*, L'auteur de cette lettre — on ne
ra%'ait pas remarqué — n*esc autre que François Hugotion,
cardinal-archevéqoe de Bordeaux* Le duc d'Orléans, écrit-il au
roi d'Angleterre, s'approche avec une grande armée ; Bordeaux
même ne pourra résister si un prompt secours ne lui vient
d'Angleterre. Ne renvoyez pas sous prétexte de T hiver : « Vidi
eoim pluries in partibus istis tempora hyemalia ita grata sicut
alias soient esse tempora veris ». Hugotion croît le pays perdu.
Mais aussi pourquoi toutes les lettres adressées à Sa Majesté
n'ont-elles pas eu dVffet ? Et il ajoute, après avoir enregistré les
progrès des Français : « Ex istis concludat, si placet, alta Vestra
Prudenîia : ego enim, jam a principio hujus guerre, in mente
raea conclu si, et sic etiam Vcstre Serenitad per plures mcas
littcras nunciavi, quod si Gallici prosequebantur guerram ut
inceperant, quod nihilsub vestra obediencia remaneret in par-
tibus istis, ni si succursum seu au xi Hum congruum mitteretis de
Anglia : et sic apparet per expericnciam me vera pronunciasse ».
La lettre est du i8 octobre : quelques jours après*, l'armée
ducale était devant Blaye, tandis quVne flottille, commandée
par Clignet de Brcbant, tenait la mer'. Les Bordelais, malgré
le peu de zèle qu'Henri IV mettait à les secourir, n'avaient pas
perdu courage. Le lo août déjA, sur Tordre des jurats, Bernard de
Lesparre, seigneur de la Barde, s*était rendu à Blaye, pour orga-
niser La défense, « per so que lo seti segont que era fama y debe
I, Tome 11, p. 320. Champollion date celle lettre de 1407, c*est 1406 qu'il
fsLut lire.
2* Chronique ou Journal du siège de Blaye et de Bourg dans ArcUvej hisioriqms
de la Gironde t t, 111, p. 179.
5. Les Regiitrei de h Jnnuie^ t. 111, p, 162, donnent une liste des seigneurs
qui accompagnent le duc d'Orléans : Charles d'Albrel, connétable de France ;
Jean d*: Montagu, grand-maître de France; Edouard, marquis du Pont, fils
du duc de Bar; les comtes de Clermont, d'Armagnac, de Vendôme^ de
Dammanin, les vicomtes de Thouars, de Castelbon, les sénéchaux de
Saintonge, de Liniousin, du Poitou, d*Angoumois, les seigneurs de Parthe-
nay, de la Fené, de Beaumanoir, de Pons, de Montberon, de Mauléon, Jean
de la Tour, Arnauton de Bordes. A cette liste , on peut ajouter François de
46é A. PIAGET
bénir* ». Le 20 septembre, les Bordelais, qui avaient mppelé le
sire de la Barde, envoyaient à Blaye des hommes d'arnus» des
archers et des arbalétriers *. En octobre 140e» la viUe de Blayc '
avait à sa tête Jean de Grailly, bâtard du captai Jean IIl- Le siège
dura une quinzaine de jours, qui se passèrent en négociations
relatives au mariage — qui d'ailleurs n*aboutit pas — du troi-
sième fils du comte de Foix» partisan des Français, avec Marie
de Montaud» dame de Mussidan, héritière de Blaye *.
De Blaye, Louis d'Orléans vint mettre le siège devant Bauig,
et fut encore moins heureux. Le 20 octobre, les Bordelais
avaient envoyé à Bourg, avec quelques hommes d'armes,
Bertrand de Montferrand le Jeune : <£ Quar gtandament pot sa
pcrsona aproiîeitar a la deffensa deudeit loc d, lit-on dans les
Registres (U la Jurade^, Jeaonet de Garencières, comme nous
verrons, parle dans ses vers de Bertrand de Montferrand. Le
Religieux de Saint-Denis fait également Féloge de ce person-
nage : « Ipsam tamen [villam de Burgo] custodiendam suscepe-
rat quidam Gasco, miles strenuus et astutus, qui ante ducts
adventum ex finitimis vicinis vires corrogans, victus et alimen-
torum copias collegerat, arma congregaverat, materiam ad cun-
texendas varii generis machinas et cetera que in huiusmodi
Gfignols (Clairambault, Titns scella^ r. 86, p. 6745), Amaury de Limcrs
(Qairambault, r. éi, p. 5049), Raymon Arnaud de OoairsLZC (voir plus loin)
et Jeannet de Garencières. — Archarabaud de Grailly, comte de FoU, ne se
trouvait pas dans Farmée de Louis d'Orléans , connue le dit M, G, Lcfôvre-
Pontalis (Petite chronique d^ Guyenne fusqu^à Van 1442, dans Bib. Éc. db
Cfmrifs, L XL Vil, î886, p* 64), Ce seigneur était resté fidèle, du moins en
apparence, aux Anglais. Le premier novembre 1406, il Taisait dire au conseil
de Bordeaux « <|ue de ssons locs» a ssou poder, res de la part deu rey d'Angla-
terra », mais que son û\s s*en est allé auprès du duc d'Orléans avec
400 hommes (Registres de la Jurade, i. III, p. 127). Le comte de Foix raen*
tionné parla PetHe chronique n*est autre que Jean, vicomte de Castelbon»
devcmi comte de Foix en 141 2.
1. Registres de la Jurade, t* III, p. 19.
2. M, t, m, p. î4, 64.
3. Voy, sur ces négociations Léon Flourac, Jean /«, comte de Fwx, via
îouvirain de Bèarn, Paris, i884t P- îS-
4. Tome III, p. 129. Sur Bertrand de Montferrand» voy, les Registrts de la
Juradc, t. III, passim, et J. de Bourrousse de Lafibre, NotUimre de Guimne et
deGasaf^Hfy t. IV, p. 241,
JEAN DE GARENCIERES 4*7
soient usum prestare necessarium^ ardentibus studiis incolas
hortatus fuerat inducere * ».
Un combat naval eut lieu» le 23 décembre, surveille de
Noël', entre la flotte bordelaise-anglaise et les vaisseaux fran*
çais, à la hauteur de Saint-Julien de Médoc, en amont de
Pauillâc*. Les Français furent battus, et une vingtaine de
chevaliers, parmi lesquels Jeannet de Garencières, emmenés
prisonniers à Bordeaux. Ce fut le seul engagement sérieux de
la campagne 4. Un temps affreux de pluie, de neige et de tem-
pêtes vint paralyser toutes les opérations et développer dans
l'armée des assiégeants les fièvres et la dysenterie^. Il semblait
vraiment — et certains chroniqueurs n'ont pas manqué de le
remarquer, — que Dieu, du haut du ciel, prenait la défense
des Anglais : « E nulh contrast lodeit duc no ago, sino de Diu
qui lo combato ab pluyas, ab vent fortz et grandas fanhas** ».
Le court passage de Thomas Walsingham sur le siège de
Bourg mérite d*être cité :
tt Anno MCCCCVII soluta est obsidio villarum de Burgh et
de Bloy (Blaye) in Wasconia, facta per ducem Aurelianensem;
qui cum quioquagiota millibus? venerat ad subverteodum illas.
1. RiUgieux dt Saint-Denis^ t. III, p. 453.
2. Religieux de Saint-Defiis^ t. Ill» p. 454.
3. Archives de la Girondr^ t. III, p, 179.
4. S'il est vrai que les chroniqueurs d'inspiration bourguignonne, tels t^uc
le Religieux de Saint-Denis , Monstrclct , P. Cochon , Jouvcncl des Ursins,
insistent avec un secret plaisir sur Tinsuccès de Fexpédition de Guyenne , il
faut avouer que Cousinot, pour les besoins de sa cause, en prend â son aise
zvtc rhistoire : t< Et avint une journée que Monsieur Glignet de Braibant,
admirai de France, qui a grani gem gardoit la mer, combati Angloîs qui en
Gironde estoieni entrez; lequel obtint victoire; et fut la prins le maire de
Bordeaux. » Uîronique de Coininot^ éd. Vallct de Viri ville, p. 112.
5. « Instantis raaxima erat inclemcntia hyerais et pluviarura intempéries
inaudita, ita ut armatorum virorum papihones vix posscnt cohibere stillicidia ;
unde etiam vîctus et supellcx omnimodo de madore jugis aque corrumpe-
rentur et inciperent putrescere. Ubique in tentoriis et extra per lutum nsquc
ad genua opportebat incedere, » Religieux de Sainl-DefAs, t» III, p, 454,
6. Ardnves de la Gironde^ t. III, p. 180,
7. La Peiiie chronique de Guyenne donne le chiffre de quinze mille combat-
tants, ce qui correspond assez bien aux six mille hommes d'armes indiqués
par le Religieux de Saint-Denis. Voyez la note de L. Flourac» Jean /«* cantte
deFoix, p, 35.
468 A. PLAGET
Scd Deo dispensante, qui superbes humiliât, nulta dies per cxto
hebdomadas illuxit ei sine lempestate pluviamm, nivis et gran-
dinis, mixtae cuin ventis et fulmine; quae tam homines ad
mortem conipuUt quam jumenta. Quibus infonunîis fernir sex
millia hominum perdidisse; et qui, in adventu suo, super for-
tunani suam nimis ambitiosus, fecerat deportari supra caput
suum a quatuor militibus pannum aureum, jam reveriens»
inglorius, gaudcbat ab imbribus cessare coelum ' ».
Le 14 janvier 1407, le duc d'Orléans leva le siège, sans avoir
rien fait que perdre beaucoup d'hommes et beaucoup d'argent,
« Ce fu, remarque Nicolas de Baje, une besoigne de grant per
et de néant et entreprise de reveP ».
Prisonnier des Anglais i Bordeaux, Garencières se console
en faisant des vers. Il se demande, dans la ballade XLrV'\ lequel;
vaut !e mieux « pour vivre joyeusement » : être homme*
d'armes, ou être amoureux 3, Il n'avait à se louer, pour Tins*
tant, ni de Tun ni de l'autre de ces w mestiers » : amoureux, sa
dame le faisait languir; homme d'armes, il était prisonnier.
Jeannet s'adresse pour avoir solution de la question à Lourdîn
de Salligny et à Gaucourt.
XLIV. Babde Vous m'aiH^. Cette ballade figure dans le Jardin
de Plaisance^ édition Vérard, f* cxi v^ :
J'ay longuement Amours servi
Pour cuidiûr leur bien acquesier,
Mais ilz m'en ont si mal party
Que je ne m'en pourroye louera ;
Si ne m'en sçay a quel mestier
Mcctre pour mon allégement.
Conseil demantJe a toute gent»
Car je ne 5^;ay qui me vauh mieulx
Pour vivre bien joyeusemenl,
Estre homme d'armes ou amoureux .
I. HUioria anglmna, td. Rilcy. Londres, 1864, t. II, p, 275, ou V/
Neuitriae^ éd. Rilcy. Londres, 1876, p. 421,
a. Nicolas de Bayi\ L 182,
), Dans le Blason dfs artftcs et tks dames, Coquîllart pose la même question.
Il conclut qu'un prince doit aimer les unes et les autres.
4. Ms, kuer.
JEAN DE GARENCIÈRES 469
Pour ce, Lourdim de Salligny;
Et vous, Gaucourt, my aray chier.
Qui m'avez veu, la Dieu mercy,
Longuement Amours pourchacier.
Je sui a Bordeaulx prisonnier, 1 5
Et n'ay ne dame ne argent.
Vous, oyez « mon gouvernement
Et me dictes, si vous ait Dieux,
Lequel me vault mieulx a présent
Estre homme d'armes ou amoureux. 20
Gur ma dame du bien de li *
Ne m'a voulu oyr parler.
Il a plus d'un an et demy.
Ne [a] grant peine regarder.
Plus ne vous en fault desclaîrer, 25
Trop en savez vous largement.
Avisez [a] ce jugement,
Et me dictes, entre vous deux.
Qui est plus mon avencement,
Estre homme d'armes ou amoureux s . 30
Nous n'avons pas la réponse de Lourdin de Salligny. Mais
nous avons celle de Gaucourt (ballade XLV) et celle d'un autre
chevalier, nommé Courrarre {sic) dans le manuscrit 191 39
(ballade XLVI).
Gaucourt conseille sagement à Jeannet de rester, comme
devant, homme d'armes et amoureux.
XLV. Balade et resposte de Gaucourt.
Garencieres, je vous niercye
Quant il vous plaist me demander
Conseil de vostre maladie,
Des maulx que vous fault endurer.
Selon ce qui[l] me puet>embler.
Vous estes content de servir
Amours ou les armes suir.
Pour savoir lequel vous vault mieulx
1. Ms. orre:(^.
2. Ms. lui,
3. Var. du Jardin de Plaisance : 3 Mais il^ mont si tresnud party, —
4 scauroye. — ^ Si ne me, — 11 Saligry (sic). — 12 mon amy, — 13 Qui aue^.
— 2% A me trouuer en haultains lieux.
470 A^ PIAGET
Si vous fault tous les deux tcnk,
Estre homme d'armes et imoureux.
Mais je croy et vous ccrtiffie
due cil qui veult les detix Uanter,
S*il ea fait un jour chîere lie.
Deux Ten ùmh languir et penser;
Et ets verroit on bien muser
Cent saiges et eux esbaîr
La ou • vous livrez a plaisir
Tant estes bel et gracieux ;
Si vous faylt, q«oy qu'wiî peust venir,
Estte homme d'armes et amonrenx.
Je le vous conseil et vous prie,
S'Amours vous ont voulu monstrer
Leur pouoir et letir seigneurie.
Vueillez humblement endurer,
Et celle qu'on n*ose nommer
Plus qu*oncques amer et chérir.
Car die vous pourra guérir
Tout a tens par ces biens joyeulx.
Or vueilleij sans vous repentir,
Estre homme d'armes et amoureux.
Courrarre (w), qui lui aussi était prisonnier des Anglais, ne
prend pas au sérieux la « desesperacion » de Garencières. Vous
n'êtes qu'un enfant, lui dit-il, et vous aurez bien le temps
d'acquérir « le les de bon guerrier ».
XL VI. Balade et resposte de Courrarre.
Garenderfels, mon compaignon.
Il vous a pieu de toute gent
Enquérir par oppinion
Que vous devtz faire a présent,
Ou renoncier' entièrement
Aux grans biens qu'Amours puet donner,
Ou laissier d'armes le mestier.
Mon très doulx frère gracieux.
Je vous vueil premier conseiller
Que vous soiez bien amoureux.
D'armes laissier n'avez raison,
Veu que vous n'estes qu'un enfant ;
I. Ms. Ion — 2. Ms. Et receuoir.
JEAN DE GARENCIÈRES 47 1
Celle desesperacion
Ne soit en vous, ne tant ne quant.
Car, si Dieu plaist, d'or en avant
Avrez le los de bon guerrier,
Et tout plaisir par bien amer.
Tenez vous donc a tous ces deux.
Pensez tousjours d'avant aler.
Et d'estre tresbien amoureux.
Aiez tresbonne entencion
De saillir de prison briefment ;
Vous estes encore en saison
De ferir ung coup plus avant.
Laissiez trestout ce mal talent
A moy qui doy tousjours plourer,
Car je sui vieil et prisonnier.
Et ay perdu tant que les yeulx.
Laissiez moy ces maulx endurer,
Et soiez tresbien amoureux.
Cellui qui ne fault [ne] ne ment
Vous doint tresbon avancement
En ces deux mestiers gracieux,
Et vous doint tousjours pensement
D'avoir le cuer bien amoureux.
Le Gaucourt dont il est ici question est, très probablement,
Raoul VI* du nom, qui fut conseiller et chambellan du roi,
grand-maître de France, gouverneur de Dauphiné. En 1396, il
avait pris pan, avec Jeannet de Garencières, à l'expédition de
Hongrie, et avait été fait chevalier le jour de la bataille de
Nicopolis*.
Quant à Courrarre, il faut l'identifier à Raymon Amaut, sei-
gneur de Courraze ou de Coarraze, chevalier béarnais, cham-
bellan du duc d'Orléans. Ce personnage, qui a joué un rôle
important dans l'histoire du Béarn*, était, en 1403, chevalier
et chambellan de Louis d'Orléans. En juin de cette année, il est
choisi par le duc « pour porter lettres closes par devers le conte
1. Voy. sur ce personnage le P. Anselme, Hist, gànéal., VIII, pp. 368 et
suiv.; La Thaumassière, Histoire de Berry, pp. 586 et suiv.
2. Voy. Histoire générale du Languedoc, X, col. 2195. Flourac, Jean /«r
comte de Foix. Pièces justificatives» pp. 198, 211, 292.
472 A. PIAGET
de Foix pour certaines choses qui grandement touchent ic tut
de moïidit seigneur le duc ' ». Il se trouvait, en 1407, au siège
de Bourg, et, comme Jeannet de Garencières, fut fait pri-
sonnier. Le 23 avril 1407 (n. s.), le duc d'Orléans lui donne
2.000 L t. « pour lui aydier a payer la finance a laquelle il est
mis a rençon par les Anglais dont il est prisonnier ».
Collection de Bastard, n" 497 :
Loys, filx de roy de France,,,.. 2 nostrc amé et féal conseiller Jchia le
Flamcnc, wlut et dileccion. Nous voulons et vous mandons que par nostrc
bien amé Adam de Blois, commis de par nous a recevoir la somme
de 110^^ II» francs, a nous assignée par monseigneur le roy pour le £ut de
Tarmee de la mer, sur ce qu'il nous puei devoir, tant a cause de la dicte
assignacion du fait de ïa mer comme de ce que ordonné lui avons a recevoir 1
pour le fait des noces de Compiengnc, vous faictes bailler et délivrer a nostre
amé et féal chevalier et chambellan, messire Ray mon Amault de Courraze,
ou a son certain mandement, la somme de deux mil livres loumois, laquelle
nous lui avons donnée et donnons de grâce especial par ces présentes, tant
pour consideracion des bons et agréables services qu*il nous a faiz et espérons
que cncores face, comme pour lui aydier a payer la finance a laquelle il est
mis a rençon par les Anglois, dont il est prisonnier Donné a Paris, le
xxiii* jour d'avril. Tan de grâce mil occc et sept. Sign. : Héron.
Collection de Bastard, n^ 498 :
Sachent luit que je, Ray mon Amault de Courraze, che\*alier et chambellaa
de monseigneur le duc d'Orléans, confesse avoir eu et receu de Adam de
Elois, commis de par mondit seigneur le duc a recevoir la somme de
IIJI** II* frans, a lui assignée par le roy nostre sire pour le fait de l'armée de
la mer, la somme de deux mille livres tournois que mondit seigneur le duc,
par SCS lettres données le xxui* jour de ce présent mois d'avril , m'a donné
de grâce especial pour aidier a paier la finance a laquelle j'ay esté mis a
raençon par les Anglois don j'en suis prisonnier, et pour cert^nes autres
causes et consideracions plus a plain contenues et déclarées es dictes lettres,
de laquelle somme de 11** L t. dessus dicte, je me tieng pour content et bien
paiez et en quicte mondit seigneur le duc, le dit Adam et tous autres, Tes-
moing mon secl et saing manuel cy mis, le xxv* jour dudit mois d'avril. Tan
mil cocc et sept. Sig. : Ramon Arnaut,
En 1426, Raynion Arnautj chevalier, seigneur de Coarrazeet
d'Aspct, reçoit 580 L t, pour le payement de ses gages « ou
service du roy nostre sire en ses présentes guerres es parties de
I. CoUeaion de Bastard, no ^jj.
JEAN DE GARENCifeRES 473
France a rencontre des Anglois et autres ses rebelles et desobeis-
sans' ». Deux années après, il prend part au siège d'Orléans^,
et pour Ten récompenser, le roi de France le gratifie de
1500 1. t. : a pour consideracion des grans et notables services
que nostre amé et féal chevalier, conseiller et chambellan, le
seigneur de Courraze, nous a faiz par deçà en noz guerres et
mesmement en la ville d'Orléans, par longue espace de temps,
durant qu'elle a esté assegee par les Ânglois noz ennemis, et
depuis aussi en autres places, et pour le recompenser des grans
fraiz et despens qu'il a faiz en icelle ville durant ledit temps ' ».
II n'était pas, en 1407, aussi vieux qu'il se plait à le dire dans
sa ballade : nous savons qu'il vivait encore en 14604.
Du fond de sa prison, Garencières adresse à sa dame une
longue complainte amoureuse (XLVIII). Mais au milieu de ces
lamentations toujours les mêmes et que nous ne connaissons
que trop, on est heureux de rencontrer quelques allusions à ses
geôliers. La scène du chaperon, par exemple, est bien jolie :
Hz me font a force languir
Et endurer des maulx tout plain,
Et n'y a si meschant villain
Qp'ii ne me faille seigneurir.
Si tost que je les voy venir
Je mea au chapperon la main,
Mais c'est en priant saint Germain
Qu'il leur puisse mesavenir !
N'aimerait-on pas trouver quelques passages de ce genre dans
les poésies d'un autre prisonnier des Anglais, de Charles
d'Orléans ?
XLVIII. &)mplaînte Fous m'ave:^.
I. Loingtain de quanque je vouldroye,
Tout au rebours de mon vouloir,
Seray, ma dame, a dire voir.
Jusqu'à ce que devers vous soye.
Je ne voy riens qui ne m'ennoye.
1. P. orig,, vol. 792, no 22.
2. Chronique de la Pucelîe, éd. Vallet de Vin ville, p. 261.
3. P, orig.y vol. 792, no 29.
A. P. orig,, vol. 792, no 3^.
ftouMnM. xxn, 3 ^
-[ 474 ^* PUGET
I
\
Je suis près de mon dcscspoir
Pour ce que tie vous ptiis vcoir.
Belle» doulce, plaisant et coye,
Sans qui vivre je ne savroye,
Ne parfilîœ plaisance avoir-
dr nulle que vous n'a pouoir
De mectre ma douleur en joye.
Dame par qui tost je pourroye
Guérir ce qui me fâult douloîr,
Plaiae vous oir et savoir
Qjie voulentiers je vous venoye.
H. El ce n'est mie [grant] mervdUe,
Beïle^ bonne, blanche et vermeille^
Qjie mon cueur souvent me conseille
D'estre de vous bien amoureux,
Car de Londres jusques a Marcelle
N*a dame, tant bien s'apareille,
C2^i peust estre de vous pareille
Tant avez de bien gracieux.
Pay pour vous la puce en l'oreille
Qpi ne veult point que je soimneille,
Ains a toute heure me desveille
Et me fait penser aux beaulx yeulx
Qpe je vous vy soubz une trdlle,
Dame, de toutes nompareille,
Pour vous servir jeunes et vieulx » .
III. Vueillez ma pensée escouter
Et piteusement adviser
Le mal qu'il me fault endurer
Pour ce que je ne puis aler
Vous dire mes douloureux plains
Dont nul ne me puet conforter,
Doulce, plaisant a regarder,
Que vous, qui me pouez donner
De bien trop plus que souhaidier
Ne pourroye, j'en suis certains.
HellasI je sens les maulx d'amer.
Ma dame, pour force d'amer
Mon cuer ne fait que souspirer
Et ma pensée que pleurer.
I. Ms. jeunes et beaulx.
JEAN DE GARENCifeRES 475
Pour ce que de vous sui loingtains,
Je sens mes maulx renouveller,
Et voy ma joye deffiner.
Je suis près qu'au désespérer
Qpant je ne puis a vous parler,
Belle, que tant désir et crains.
IV. Mon cuer se plaint et je me dueil,
Et je vous diray Tachaison :
Je suis au rebours de mon vueil,
Et loingtain de ma guerison.
Je sens des maulx plus grant foison,
Ce me semble, que je ne seuil ;
Je regarde souvent de Tueil,
Je ne voy riens qui me soit bon ;
Je suy entre gent sans raison
Qpi me font trespetit acueil :
Je n'ose pas passer le sueil
Du premier huys de ma maison ;
Il y a un traistre garçon
Qiii me fait arragier de dueil,
Il me ferme l'uis au courreil,
Et me laisse en une prison.
Je ne puis avoir se mal non.
Tant que je soye en cet aqueil
V. Car je me vois de vous loingtain
Q^i me pouez (tous) mes maulx guérir
Entre [c]eulx dont je suis certain
Qpe nul bien ne me puet venir.
Hz me font a force languir
Et endurer des maulx tout plain,
Et n'y a si meschant villain
Qp'il ne me faille seigneurir.
Si tost que je les voy venir
Je mect au chapperon la main,
Mais c'est en priant saint Germain
Qp'il leur puisse mesavenir I
Car quant est de mon départir
Je ne me tien pas si prouchain
Qu'on ne peust au fleuve Jourdain
Aler a temps et revenir.
VI. Pour quoy, belle, je vous prye
Et supplie
Q^e vous ne me vueillez mie,
I 47^ ^" î'ïA^^'^
> SW vous plaist, mectre çn oublk ;
Mais penseï qu^ j'ay envie,
, Qlioy qu'on die,
De trouver b départie
De moy et des getis [i]cy.
Car certes leur corapaigaie
Si m'ennuye
Pour la tresgranl tîrannîe
DoQi chasctîti d'euk est garny.
Qijant a moy je les regnye
Et deffie
Pour tous les jours de ma vie ,
Mais que j*cn soyc pany.
Car ïh sont desraïsonnableg
Et muables
Plus que n'est un jeu de tables.
C2pe l'on tient a l'aventure.
Et si sont de tel nature
Qpe je jure
Qp'on feroit estre parjure
Le meilleur pour un cent d'ables,
Et quant est d'estre amiables
Ne piteables,
Les sarrazins mescreables
Le sont d'aussi grant mesure',
Car leur prison est trop dure
Et obscure,
Et semble bien qu'ilz n'ont cure
Qu'on les tiengne a honnorables.
Vil. Ce sont gent, a vous tout dire,
De si maie voulenté
Qpe je ne saroye ' eslire
Le niieulx condicionné.
Ne si n'ay pas advisé
Qu'on peust congnoistre le pire ;
Et pour ce trop je désire,
Ma souveraine chierté,
D'estre de vous approuchié
Pour m'oster de ce martire.
Car mon fait tousjours empire.
1 . Ms. mesaise.
2. Ms. savoyt.
JEAN DE GARENaÈRES 477
Je suis près qu*a mort mené.
Se confort ne m'est donné
Je tien que je mourray d'ire.
VIII. Mais se je muir par vostre amour
En ceste douloureuse tour,
Belle que j'ajmie si tresfort,
Au moins vueillez plaindre ma mort,
Et dictes unes foiz le jour,
S'il vous plaist, en quelque destour,
Qu'on a fait mourir a grant tort
Cellui qui tout estoit d'accort
D'estre vostre sans nul retour.
Se ' vous me faictes cest honnour
Vous me ferez grant reconfort
Encontre l'amoureux effort
Q.ui me tourmente sans séjour.
Et me mect en la grant doulour
Dont je ne puis avoir confort,
IX. Si ne me vient de vostre grâce,
Doulce, plaisant et gracieuse ;
Car je voy qu'Amours se soulace
Qpant ma pensée est douloureuse.
Il ne la puet souffrir joyeuse
N'il ne me veult laissier en place.
Il fault souvent que je desplace
Par sa puissance rigoreuse.
Car Fortune la maleureuse,
Qpi toutes * les douleurs amasse,
Me veult asommer de sa masse,
Se vous n'estes de moy piteuse :
Je la trouve si despitcuse
Qjiie je ne sçay pas que je face.
X. Vous avez oy ma complainte
De mon cuer qui tousjours se plaint,
Dame^ par qui j'ay douleur mainte,
Souffrez ) que mon mal soit estaint ,
Ou autrement je sui retaint
Et tien ma vie pour estainte.
1. Ms. Ce,
2. Ms. ious.
3. Ms. Souffrir.
478 A. nAGET
Car Désespoir qut rae destrrât
Me Ml reootiveller ma plaînit.
Je sois en ramoureuse ençamte.
De tOQS les cost^ si ençaïnt,
Qpe je oe puis estre desçâint
De ma douloureuse desçainte,
La pièce XLIX, faussement nommée « balade », a pour
auteur, comme le dit le titre, « ceulx de BordeauU », Ce pro-
duit de la collaboration de quelques seigneurs bordelais est très
incohérentj mais ne manque pas d'intérêt- On y trouve Féloge
du roi d'Angleterre et celui de Bertrand de Montferrand,
Garcncières répond (ballade L) de son mieux à 1* écrit des
seigneurs bordelais, qui est^ remarque-t-il ironiquement.
Si grandemeni rimé
Qpe par Dieu je ne renten mye !
Il accorde volontiers que Montferrand s'est très bien défendu
dans sa ville de Bourg, et fait, en passant, une discrète allusion
au duc d'Orléans.
XLIX* Balade faicie par ceulx de Borâmulx '.
A vous» ma dame jolie.
Par ma foy nous ea yron,
A vous, ma dame jolie.
A Paris sur Normendie
Dont maudit soit le renom.
A vous...
François ont fait grant folie
D*assaillir le gascon.
A vous...
Le jour de saincte Marie
Candelour nous combatron.
A vous...
Par ma foy non feron mye,
A Paris nous en yron.
A vous...
En la chambre jolie
De ma dame nous tendron.
A vous...
X. Je reproduis cette « balade » telle qu'elle est dans le manuscrit.
JEAN DE GARENCIÈRES 479
Monferrant et sa compaignie
A gaigné tresgrant renon
A vous...
De la tresgrant valentie
Qp'il a fait ou lieu de Bourc ;
A vous...
Qjiie pour mort ne maladie
Ne pour promesse ne don
A vous...
Q)ie le duc fait leur ait voulu
Le lieu de Bourc ne rendron.
A vous...
Ains le tendron en la baillie
De roy Henry leur baron,
A vous...
Q)ie les en fera trestous
Chevaliers, chambellans de grant renon.
A vous...
Messire Jehan de Garencieres,
Les seigneurs de la ville vous envoye[nt]
Cest escript, et vous prie[nt]
Q.ue vous faciez la responce
Selon vostre sentement. Preu vous face.
L. Balade et responce Fous m'àve^i.
Seigneurs, vous m'avez envoyé
Ung escript de vostre partie
Q.ui est si grandement rimé
Que, par Dieu, je ne Tenten mye.
Et pour cela je vous supplie
Que se je respons jeunement
Que [vous] vueillez premièrement
Avant toute euvre regarder
Que ce me fait force d'amer,
Qui me tient en merencolie,
Pour ce que je ne puis aler.
Par devers ma dame jolie.
Quant au duc qui s'en est aie,
Je ne sçay s'il a fait folie,
Car je ne l'ay pas conseillé.
Aussi ne m'en cre[r]oit il mye !
^|jgO A. PIAGET
Mais $e fesBTie at No
Dcmî je fsny âtt{Tt)mGvxocBÊ^
El que j'ei^se d^vretoeiu
Ek r^rgcnt qu'il tue ùaâL fsttkr.
Je oe fcfoye aune mestiert
Eïe cek oe votu daobtez mye,
Trtstout k long de c^t f*cr,
Qpe veoir ou d^me plie.
MonifcrTam, qui Bourc â gardé
Enîre lui et &a compôignk,
Doit bi^ cstre rccomimndé
A roMieur de daevakrie.
Dq surplus je ne sait)}^ mye '
Vous n^pondre quant a preseot.
Ne comnïem le departemeoï
Du siège s'est peu* ûrdonuer.
Car je sui vostre prisonmer
En une tour ou bien tn 'ennuyé.
Or m'en vudllejt tpst delivro-.
Si verray ma dame foUe!
Et preu vous ùict.
Dans la LP et dernière ballade, Jeannet de Garendèies, depuis
trois mois prisonnier, las d'invoquer « les sains de paradis »
pour sa délivrance, crie « aux dames mercy ».
LI. Balade Fous tnavei.
Il a bien trois moys acomplis
Que je ne finay de prier
Dieu et les sains de paradis
Qu*ilz me voulsissent délivrer;
Et cuidoye pour beau parler
Les convertir a ce vouloir.
Mais je puis bien aparcevoir
Qu*ilz m*ont a ce besoing failly.
Si m*en repens, a dire voir,
Et en crie aux dames mercy.
Car se j'eusse requis les dames
Ainsi bien que j*ay fait les sains,
Veu que pitié est [toute] en femmes
Et Tonneur de tous biens mondains,
I. Ms. je ne sauoy mye. — - 2. Ms. cest pour.
JEAN DE GARENaÈRES 48 1
Je CDidâsse estre plus proucbains
D*avoir trouvé ma délivrance.
Mais non obstant la penitance
Qpe j*ay faiae jusques a cy,
Je vien a leur obéissance
Et leur crie de bon cueur mercy.
Qji'il leur plaise me pardonner
De ce que j'ay autre requis.
Car ilz me peuent plus aidier
Qpe tous les sains, grans et petiz ;
Mais folie m'avoit sourpriz
Com un homme désespéré.
Et pour ce que j'ay advisé
Que j'ay trop grandement failly,
Je m'en mect a leur voulenté
Et leur crie de bon cuer mercy !
Fous ifi'otAq.
Arthur Piaget.
NOTES DE LEXICOLOGIE ESPAGNOLE
L'ètymologie Je aida^ st misîstT^lemeDt démontrée par
M. P. Me ver {Rmanm, D, 8o-{ , avait été indiquée déjà par
an grammairien fôpagtïol du xvuj- siècle, D. Gregorio Garces,
dans son cMivnige intitulé : FMmhmcnîo M vigcry degamia de la
lengua msîdlam^ ixfmisio m dprûpiûy vario uso de st4s parîktda^^
Madrid, 1791, t. H, p, 134, Pour rattacher à yi,x-i le roman
caday Garces ne s*appaie, il ^sx st£\^ que sur le sens des deux
particules et sur le traitement que le cistillan a fait subir au I
intervocalique dans les mots latins; il n'a pas connu Temploi
de cota en has-latin. Voici au reste ses paroles : « Entre los
pronombres que tiene nuestra lengua invariables en el numéro
y casos damos el primer lugar a las voces coda y dtmûs^ que
detemiinan mulotud por diversa manera; puesto que aconipa*
nase siemprc el primero con sustanrivos comunes en si ô géné-
rales, contrayéndolos a determinada cantidad ô numéro...
empero dmbos son bien singulares por su naturaleza y origen,
en la quai se parece bien el genio desembarazado y filosôfico de
la lengua Espanola, pues dériva a nuestro parecer el pro-
nombre ccda^ que dice tanta relacion con el adjetio singuli
de los latinos, de la preposicion kata de los Griegos man-
teniéndole su ser de indéclinable y toraàndole la particular
mira al distribuir multitud de su raiz. » Et en note : « Es muy
conforme el trueque de la letra d por la / al genio de nuestra
lengua ; pues asi como la muda respecto de la preposicion
griega, hdcelo tambien respecto de las voces latinas todOy pode-
rosoy puedcSy podias, etc., sonido^ oido, atnado^ etc. »
ESTANTIGUA
Dans la Zeitschrift fur rottianisclx Philologie (XV, 228),
M. Akc W:son Munthe a proposé pour le mot castillan estan-
NOTES DK LEXICOLOGIE ESPAGNOLE 48)
tigua, qui signifie « spectre, fantôme », la jolie étymologie
hueste anligtm dont le sens, d'après un texte du xvr siècle, paraît
bien être « procession de trépassés ». Un autre exemple, beau-
coup plus ancien, de la même locution, et qui jusqu'ici a passé
inaperçu, se trouve dans le Poemade Fenian Gon^ahx (str, 3î3).
Les compagnons du comte, abîmés de fatigues et de misères,
[se plaignent et protestent : « Cette vie est bonne pour les
démons (pecados) qui marchent jour et nuit et jamais ne sont
las; le comte ressemble au diable et nous à ses acolytes. »
fuis vient le passage intéressant :
Porquc lidiar qucrcmos e tanto lo amamos,
NuMca folgura tcncmos» sy non quand o aJraas saquamos ;
A los de b utstt aniygtm^ aqudlos semdamos,
Ca todas cosas cansan e nos nunca cansatnos.
Voila qui confirme pleinement, croyons-nous, Tctymologie
proposée, qu'appuyait d'ailleurs la signification de « procesion
nocturna de finados » que les dictionnaires de Fasturien moderne
attribuent k guesie^ gueslia,
fUDINO
A la page xxxvm du tome FV de son Anîoh^îa de portas liricos
caskUanos (Madrid 1893), M. Menéndez Pelayo fait à propos de
Juan Alfonso de Bacna la déclaration suivante : « La conjecture
de Torientalistc MûUer, qui doute de l'origine hébraïque de
Juan Alfonso, na pas trouvé if adhérents : il Iitym//>ï<)où les autres
lisent judino et considère comme une simple cheville les mots
bahado en cl agm del sanio haptismo, w Où la conjecture n*a-t-elle
pas trouvé d'adhérents? Si c'est en Espagne, je le regretterai
pour les Espagnols et en particulier pour mon excellent ami
Menéndez Pelayo, qui était digne de raccueillir et de fimposer
à ses compatriotes, car cette conjecture ou, pour mieux dire,
cette lecture est l'évidence même. Le manuscrit du Cancimtera
de Bama porte très distinctement : « el quai dicho libro... fizo
e ordeno e conpusso e acopilo el indino Johan Alibnso deBaena,
escriuano e seruidor del muy alto e muy alto e muy noble rey
de Castilla don Johan, » ce qui est tout à fait satisfaisant et
conforme au style que tous les compilateurs du monde emploie-
raient pour dédier leur ouvrage a leur souverain : « Tin-
digne, a etc. A la vérité, comme 1*/ initial du mot indino est
484 A. MOREL-FATIU
long, OD conçoit que les premiers éditeurs aient commis la huie
de lire judim^ — :1s en ont fait bien d*autres, qui ont été en
partie corrigées par Fr. Michel, quoi qu'en dise M. Menéiide^i
— mais, paléographie à pan, ce judino est une « conjectarc •
sans valeur, et cela pour deux raisons. La première d'ordre
moral et qui a été indiquée par M, J. Mûlkr', c'est qu*il est
contraire à toute vraîsembianœ qu'un juif oa un nouveau
converti se soit ainsi prodamé juif on d*orîgîne juive. La seconde
c'est que le dérivé judim n*a jamais existé que dans la langue
des éditeurs du C^Mncicnaro^i on connaît judh, jiêdùgo^ fude^no^
mais non pas fmàim. Lisons donc en toute sécurité indim et n*en
parlons plus.
Quant à savoir si Juan Alfonso de Baena était un amverso,
c*est une autre affaire. M. Mûlkr ne le nie pas ; il fait setilement
observer que dans b pièce de Ferrant Manuel adressée à Juan
Alfonso, le vers « Banado de agna de santo baustîsmo » n'a pas
grande ponée, vu qu'il peut avoir été suggéré par le besoin
de trouver une rime en ismû. Cela me pâuidt sag^ement pensé,
et TcHigine juive de Juao Alftiinso, possible, prohabk même,
doit être établie par d'autres arguments.
UNDO
Le sens étymologique (limpidus)» qm s'est conservé pour
ce mot en italien» parait n'avoir plus été compris des Casdllans
dès h fin da XW siëde* Et, chose cnrieuse, le foG vocable fut,
à cette époque, trouvé bas pir quelques puristes qui tentèrent
de Tesdure de la Lingue châtiée. Témoin cette protestation de
Femodo de Hcrrera dai» son conmientaire sur Gardlaso
(Sévîll^, 1580, p. 121) :
f|Qe ïmya el tratt» desa
(Jeocti|alft-
lueior^ôe
Si3per.
Ckam
es
ct4elVrei
KOTES DE LEXICOLOGIE ESPAGNOLE 485
Ou encore cette allusion de Lope de Vega dans la dédicace
de Im Pîuda vakticiana :
« Muchos se han de oponer d tan linda cdtcdri: perdonen los crfiicos esta
voz lifula; que Fernando de Herrera» hotior de h lengua castellana y su
Colon primcro, no la despreciô famas ni dejé de alabarla, como se ve en sus
ComiHios, »
Les Oistilhns de la Vieille Castille, à vrai dire, tenaient lindu
pour fort bon et taxaient d'Andalous (grave injure !) les gens
mal avisés qui se permettaient de le proscrire. Cest ce qu'on
peut voir dans la critique sanglante que fit du commeotaire de
Herrera le connétable de Castille, D. Juan Fernande^ de
1 Velasco :
« Con vucstra eioquencîa de hierro os queitais de que muchos condenan
estas vozes de ayuda y Iittiio^ y estos deveti de ser algunos éloquentes sevill-
llanos, porque de puertos acd no a llegado esa censura. A muchos discretos é
oydo dezir Jindo, y en los libros de frai Luis de Granada, que es el Cîceron
castellano, he topado hartas %'ezes ayuda\ y asi me parecc que quien condena
este vocablo ayuâUf meresce la palmatoria y vos una ayuda ô, si os parece
mejor vocablo» una melezina de agua fria*. )>
Des passages cités il ressort, semble-^t-il, que ni Herrera, ni
Lope de Vega, ni le Connétable de Castille ne se rendaient compte
de la signification primitive de lindo. Quant aux lexicographes,
ils ne montrent pas en savoir plus long. Covarruvîas traduit le
mot par « agréable à la vue, beau, bien proportionné », le tire
de lima et donne comme sens dérivé (en parlant d'un homme)
celui d* « efféminé » : « Dezir eî varon lindo absolu tamente, es
llaraarle afemhmdo, » A Tépoque de Covarruvîas, en effet,
lindo désignait particulièrement l'élégant, Thomme à la mode :
El lindo don Diego est le titre d'une comédie de Moreto, qui a
sans doute répandu et maintenu un certain temps cette accep-
tion spéciale. Autant qu'on le peut vérifier, les ouvrages lexico-
, graphiques postérieurs à Covarruvias, et notamment le Diction-
naire de rÂcadémie, depuis fédition dite dt autoridades jus-
qu'aux éditions publiées de nos jours, ne font que paraphraser
les définitions de Térudit du xvn'' siècle et n'enregistrent pas le
sens de « pur », dont dérivent tous les autres.
I. Fernando de Herrera, Contrùversia sobre îus Anotacioms^ etc, Séville
1870, p. 7-
4&6 A. MOREL-FATKÏ
C*esi pourquoi il a paru utile de signaler ici deux passages ou
lindo signifie incontestablement « pur » et ne peut pas signifier
autre chose. Le premier est dré du roman de Cifar (éd. Micbe-
lant, p. 117) :
« Cavallero de Dtos, rruegovos, por la Ce que dcvcdes ai^ocl que aci vos
cnbio, que dîgades delante de todos estes ssy sodés fijodalgo o non. — Vcnîad
vos digo, scDor, dixo d cavallero de Dios» que so fijo de doen^ et de caval-
lero Undos, »
Le second passage appartient aux fameuses Trecwttas de Juan
de Mena (str. 83) :
Aprcndan los grandes vivir castaiDcnte.
No ven2an en vido los brutes salvages.
En %'ilipendio de muchos îinagcs ;
Viles delcites no envicien ta gente,
Y los que presumcn del mundo présente
Huyan de donde los danos renacen :
Si lituhs codician ser hechos, abra^en
La vida mas casta con la continente.
PLEGAR
La forme rigoureusement phonétique du subjonctif de /^Aïrtr
est, en castillan, plega. Mais à côti5 de pUga, Ton trouve pU^m.
Le (t plût à Dieu 39 ! se dit aussi bien plegue à Dios! que ph^d
à Dios! Comment expliquer pîegue ?
Les grammairiens se contentent de dire : forme irrégulière,
corrompue, attribution erronée à la première conjugaison d*une
forme verbale qui appartient à la deuxième, « Lo mas notable
ha sido la conversion de pkga en pkgue^ como si el verbo pasase
de la segunda conjugaciôn i la primera, lo que ha dado motivo
i que figure en aigu nos diccionarios el verbo imaginario pkgar,
que dicen significa placer 6 agradar^ y de cuya existencia no se
podria dar otra prucba que este mismo solitario pîegue^ corrup-
a6n de pkga^ „ Bello, qui écrit ces lignes dans sa Gramàtica de
la kngua casiellana (éd. R. J. Cuervo, § 561), a raison de
protester contre Tintroduction pure et simple dans les diction-
naires d un verbe pkgar synonyme de placer^, mais un hypothè-
iquù piegar n'en est pas moins nécessaire pour expliquer pkgm.
mon avis, la fréquence de l'expression pkga à Dhs et la confu-
sion qui a pu s'établir parmi les Ulettrés entre ce plega et le
NOTES DE LEXICOLOGIE ESPAGNOLE 4S7
plega, doublet vulgaire àtprega^ dérivé de precat (d. pkpiria)^
ont fait perdre de vue le rapport entre pl^a et ptam', et motivé
la « croyance » à un infinitif plegar : d'où plegue.
Cette confusion de mots et cette sorte de création analogique
d'une formQ plegar sont rendaes évidentes par le passage suivant
d'une comédie d'Alarcon (JElsemejante à si mismOy acte I, se. 5) :
Dona Ana
\ Plega à Dios, dueno querido,
Si en tu ausencia tengo vida,
Q.ue viva yo aborrecida,
De un adorado maridol
i Plega à Dios!...
Sancho
Basta de plegas ;
Qpe viene, senor, el viejo.
Don Juan
Al tiempo la prueba dejo
Desas fînezas que alegas.
Sancho
i Plega à Diosl... Ahl Enamorados,
Cuando empiezan à plegar ^
Plegarias pueden prestar
Al dia de los fînados.
Alarcon, sans aucun doute, se rendait très bien compte de la
valeur de plega dans l'expression plega âDiost; mais le fait qu'il
a pu, par manière de plaisanterie, dire plegaSy « des plût à Dieu ! »
et plegar y « proférer des plût à Dieu! », puis rapprocher de ces
mots plegarias y permet de supposer que d'autres ont de leur
côté pu croire sérieusement à un infinitif ^/ég^ar et en tirer un
subjonctif ^/^«^.
Un emploi analogue de plegar dans le sens de dire des « plût
à Dieu ! » se trouve aussi dans une comédie de Lope de Vega
{Pobre:^a no es villeia, acte II, se. 12). « ; Plega al cielo! » dit
un Duran. A quoi un Mendoza répond : « Plegue y vaya ».
SIERO
Le latin sérum, « petit-lait », est représenté en castillan par
suerOy en portugais par sorOy en sarde par soru, qui répondent à
LES NOMS DE RIVIÈRES
ET LA DÉCLINAISON FÉMININE D'ORIGINE GERMANIQUE «
Il y a longtemps que Jules Quicherat a fait remarquer^ que
certains noms de rivières, dont la forme latine appartient à la
première déclinaison, présentent aujourd'hui en français une
terminaison masculine en -am, -m, -ing. M. Lindstrôm a
ajouté ^ quelques noms à ceux qu'avait signalés Quicherat, et il
cite en tout six exemples de ce curieux phénomène; voici ces
exemples par ordre alphabétique * ;
Le Loingy affluent de la Seine (Yonne, Loiret, Seine-et-
Marne), en latin Lupa;
Le Mesvrirty affluent de l'Arroux (Saône-et-Loire), en latin
Magavera;
1 . Je n*ai pas à justifier ici la qualification que je donne à la déclinaison
féminine en -am, bien que Torigine germanique n*en soit pas reconnue par
tous les philologues. M. Gaston Paris doit étudier la question dans un travail
spécial, qui paraîtra dans un des plus prochains numéros de la Romania,
M. Longnon a bien voulu lire la première épreuve de cet article qui traite
d*un sujet sur lequel, comme sur tout ce qui touche à la géographie historique,
il avait réuni un important dossier de notes. En le remerciant de Tintérêt
qu'il a témoigné à ce travail, je tiens à déclarer que je lui dois l'indication
d'une trentaine de noms de rivière en -ain ou en -a«, la connaissance des
formes anciennes de quatre de ces noms {Ingressin, Rhcin, Ternin, Vaïouian),
et différentes remarques de détail. M. Longnon a fait d'ailleurs sur ce sujet
d'intéressantes observations, que les lecteurs de la Romania lui seraient cer-
uinement très reconnaissants de leur communiquer.
2. Delà formation française des anciens noms de lieu (Paris, 1867), p. 82.
Quicherat cite le FormanSy le Loing, le Morin et le Thérain,
3. Anmàrkningar till de ohetonade vohûernas hortfàll i nagra nordfranska
ortnamn (Upsala, 1892), p. 13.
4. M. Lindstrôm a laissé de côté le Formans, cité par Qjiicherat, dont nous
parlerons plus loin.
Amimm. xni. 32
490 A. THOMAS
Le Marin ^ nom de deux ri\îèrcSj le Grand -Mbrm et le Petit-
Marin, affluents de la Marne (Marne, Seine-et-Marne), en brin
Muera, Mogra;
UOrnain, affluent de la San U (Meuse, Marne), en latin
Odorna;
Le Serain, affluent de l'Yonne (Côte-d'Or, Yonne), en latin
Sedena;
Le Thérain, affluent de TOise (Seine^Inférîeure. Oise), en latin
Thara.
Quicherat suppose que les noms français se sont formés par
Taddition du suffixe -in us au nom primitif et représentent
des types comme Lupinus^ Mticrinus, etc., qu'on ne trouve pis
dans les textes latins,
M. Lindstrora combat cette opinion en taisant remarquer que
dans les documents les plus anciens les formes en langue vul-
gaire oâFirent la graphie -ain ou -ein, mais non -tif- Pour le
Serain, par exemple, on trouve Seneim en 114^^ Samim vers
1150, Senairtcn 1 1 57, 5«ffi«rm en ir88, Scnaynen 1297; il &ut
attendre jusqu'en 1485 pour avoir une forme en -i«, CcninK
Pour le Petit- iVfan«, on trouve Martin en 1 168, Mareinsen 1209,
Morains en 1227, Morain en 1252, Mcurein en 1272 : ce n'est
qu'en 1278 qu'apparaît Morin^, Quanta rexplicJtion destinée à
remplacer celle de Quicherat, M* Lindstrôm ne la donne pas
péremptoirement : il en présente deux sur la même ligne en
avouant qu*il n'a pas de raison pour choisir : le sufBxc -anus
ou un cas régime en -ain,
A notre avis, les noms Laing^Mesvrin, etc, sont incontestable-
ment des restes Je l'ancienne déclinaison française et doivent être
mis sur la môme ligne que les deux débris conservés par la langue ^
actuelle et souvent cités : nannain ci putain. Comme le rappelle'
M. Lindstrôm, M. Longnon a indiqué que telle était sa manière
dami^n*'^'^ ^^^ exemples donnés par M. Lindstrôm en puisatit
torJ.1^ ^''^" '^'^ '^^''""'^ *^^ Qîiantin. pour le Serain. et dans le DicU
2 M ; T ' ^ ^^°«^^°^ ^^' ï^ Pedt-Morin. *
(Mamei elt p'"""" ^^''''''' ^'**' ^ *^^'^^ ^'^°*= ^^ "^^'^^ *^^ ***=" Purremorain,
textes ne^ fou7niL^aT'''p ^ '''' T "^ '" ^''''^* ''''''^- ?' ^^^> ^«
urmssem que Petrus Morain vers i.aa cl Pie?r^^Jn en
LA DÉCLINAISON FàMININE DES NOMS DE RIVIERES 49 î
de voir quand il a écrit dans son introduction au Dict. top. de
la Marnt\ p. XIII : « Les villages de ... Mœurs ^ Muera ou
Mocra, Moratns, Muera ou Mocra (au cas oblique), étaient
originairement désignés par les mêmes vocables que,., le Grand-
Morin, le Petit-Morin... Les vocables Picrrcuwrains^ Petra
Mu crâne, et Vimnt\ jadis Fiaisue, Vie us Axonae, offrent
des exemples de la combinaison d*un nom de rivière, le Petit-
Morin et T Aisne, avec on nom commun qu'il détermine, » On
peut mettre en fait qy'on déclinait autrefois Lot4e Louai n ,
Meure Mevrain^ Meure Morain^ Orne Or nain, StntieSenain, Tere
Terain^ au même titre que anît antain^ nontte nonnain^ pute
putain^ etc, parmi les noms communs, Berîe Bertain^ Aie
AiicHt etc., parmi les noms propres.
Ce qui a fourvoyé Quicherat et troublé le discernement de
M* Lindsirôm, c'est le genre masculin actuel des six noms de
rivières cités plus haut. Le genre masculin est-il le genre primitif
de ces noms sous la forme -aiw? C'est une question difficile à
résoudre directement par les textes, car au moyen âge les noms
de rivière s'emploient ordinairement sans article, comme ils le
font encore aujourd'hui dans les locutions géographiques pétri-
fiées, comme ClkUUlûn-sur-Lôing, CMiUlon-sur-Môrin, L'Isle-
sur-Scrain, etc. Mais si le masculin est formellement attesté
pour le xvu^ siècle, où l'on trouve le Grand Morain dés 1602
on peut croire que ces mots en -ain étaient féminins au moyen
âge : cela résulte manifestement de la forme latine Senana
par laquelle est traduit en 1263 le nom du Serain, écrit Senain
dans les textes français de la même époque ^ La substitution du
masculin au féminin % à une époque relativement récente, s'ex-
plique par la confusion qui s'est produite entre la terminaison
féminine -ain, relativement rare, et les terminaisons mascu-
1. Quantin, Dict. top. dé T Yonne,
2. Dans la bonne latinité les nomsde cours d*eaij de la première déclinai-
son sont du masculin, m;ûs on trouve déjà quelques exceptions : c'est ainsi
qu'Ovide fait Allia du féminin : w flebilis AJHa Vulneribus Laiii sanguinolenta
fiait »> {An Am,t I, 413}. A la basse époque» c'est le genre masculin qui est
exceptionnel : si Ausone tait indifféremment MouUa des deux genres, il
traite Matrona, Druentia, Sura et Garumna comme féminins (voy. Gossrau,
Lat* SprachUhrt, p. 65). On peut donc considérer jous ces noms comme
fénûnîns dans le ktiii qui a été le point de départ des Ungues romanes.
492 A. THOMAS
lines -diw, -ein^ -in, très nombreuses*. Je puis produire un
exemple de h même confusion qui ne laissera pas de doute à cet
égard. Il y a au diocèse actuel de Limoges (ancien diocèse de
Poiiiers) une église, siège de paroisse et de commune^ dite de
Saint-Barbant, canton civil de Mèzières (Haute- Vienne). Le
curé de Saint-Barbant, ayant fait récemment reconstruire son
église et voulant dédier le maître-autel au patron primitif de
la paroisse, se trouva fort empêché : il ne savait littéralement i
quel saint se vouer, saint Barbant ne figurant sur aucun calen-
drier, et il avait quelque scrupule à charger son prône de ce
saint nouveau et suspect. Un de ses voisins, mon excellent maître
et ami, M, Fabbè J. Paufique, curé de Bussière-Poitevine, lui a
montré sans réplique que saint Barbant n'est qu'un avatar de
sainte Barbe; Téglise en question est appelée Sancta Bar-
bara dans un texte authentique du xiv* siècle*.
1. On trouve cependini, dès le moyen âge, des traces de cette coolusian.
Ainsi PAmatice» affluent de la Saône, Antancia en 1270, est appelée Amacimi
(corr. Amanciens) en 1295 (J, Finot, Etudt de géogr, historique sur lu Soém^
p. î4). Le cas régime régulier de Anmnu serait Amandm : la présence de IV
trahit Tinfluence des noms masculins en -un, Cf. les expressions aqva dt
Moreitts (120^), ripparia de Momùjs (iijj), relevées par M. Longnon pour le
Petit-Morin, et le nom du village de Morains, sur le Petit-Morin, écrit Marrîns
dès Î171.
2. Sernaim religieuse de Limoges^ 2 février 189Î, pp. 112-115. On me satin
gré sans doute de reproduire Texplication donnée par M, Tabbé), Paufiquc.
« Quant à \a curieuse transformation ijui a fait de sainte Barbe saint Barbant,
la philologie romane peut l'expliquer a prwn\ Il faut admettre que : i*» le /
n'a aucune valeur étymologique (comme celui de Mortetnart^ Mûriua mari)
et que Ton écrit saint Barbant ou saint Barhand, en ajoutant une lettre finale
à la terminaison an, par analogie avec s^miAmandou ssànt Amant; 20 saint
Barban est une corruption de sainte Barban, où la tenninajson, d'aspect mas-
culin, a transformé peu à peu la sainte en saint ; }<> sainte Barban s'explique
régulièrement dans la langue du moyen âge, C*est un fait bien connu que
les noms propres de femme de la première déclinaison ont en ancien
français un cas régime distina du cas sujet et que ce cas régime, d'origine
germanique, est en ain.,. Dans la région intermédiaire entre le français et le
provençal on a la terminaisou an au lieu de la terminaison ain* Les textes
manquent pour la région du nord du Limousin, miiis dans les textes lyoniuîs
et dauphinois on trouve Katalman (Catherine), Blandinan (Bkndine), etc.
Pour dire VégUse de Saink Barbe, la syntaxe de rancienne langue exige le cas
régime^vec ellipse de la préposition de, et Ton disait régulîèrenjent F^lù»
LA DècLtNAlSON FÉMIXINE DES NOMS DE RIVlfeRES 493
On serait loin de compte si Ton croyait que les six rivières
mentionnées par M* Lindstrôm sont les seules dont le nom ait
ainsi été décliné en ancien français et se présente aujoiirdliui
sous la forme du cas régime prise pour un masculin. Il existe en
France environ quatre-vingts noms de rivières en 'ûin, -in ou
-«>w : il est probable que la majeure partie de ces noms com-
porte la même explication. Malheureusement, tant que nous
n'aurons pas de dictionnaires topographiques pour tous les
départements français, nous en serons réduits aux conjectures
dans beaucoup de cas*. Je puis du moins énumérer, par ordre
alphabétique, en les accompagnant de quelques remarques, un
certain nombre de ces noms dont Forigine ne laisse aucun
doute :
V Alain ou le Lalain^ affluent de la Vanne (Yonne) : lege^
V. 1150; Itgye^ 1163; yogty 1293; ^^S^^ 1548. (Quantin, Dict.
top. de tYotjru). La filiation de la forme actuelle n'est pas très
claire : il semble que l*Jlain ou Lalain soit pour La Ltien; en
tout cas, c'est bien un ancien régime féminin.
VAnglin, affluent de la Gartempe (Creuse, Indre, Vienne),
éponymedela ville d'Angle qu'il arrose : ftuvius EngU\ vers 1080;
riveria de Englis, vers 115 1; fluvius Englk^ iiio ; Jîtmus qui
vûcatur Anglia, 1247; riparia (fEngleen, 1260 ; aqua de T Anglain,
1309 ifieuve de Englm^ I35 3 ; Anglen^ 1450. (Rédet, Dici. top.
de la VierifieS)
VAubetin^ affluent du Grand-Morin (Marne, Seine-et-Marne) :
Huvius Alba, \7i* siècle; Albtîa^ 1213; Aubetain, 1231; Aubete,
alias Aubeîin, 1675. (Longnon, Dict, top. Je la Marne.)
Le Cousin', affluent de la Cure (Yonne): Cosa^ ii47>
Cosainy 1366; Cosin, 1587. (Quantin, Dicî, top, de T Yonne ^)
1. Même pour les départements qui possèdent des dictionnaires topogra*
phîques, la curiosité n'est pas toujours satisfaite : les articles relatifs aux cours
d*eau sont souvent insî^lfiants, quand ils ne sont pss oubliés. Cest ainsi
qu*on ne trouve pas dans le Dict. top. de ta Marne le Poussin, affluent de
droite de TAube en aval d'Anglure. Dans le Dict. top. de TYonne on trouve
bien le Branlain et le Lumin^ mais sans aucun exemple de formes anciennes.
De même pour VAcoïin et VAcotin dans la Nièvre,
2. Cf. la Cause ou Couie, nom de divers affluents de la Dordogne, de la
Véière, de la Gartempe et de TAllier. Il faut ajouter, comme exemples de
Torthographe -atn, Cosain-îa-Rûiclx (1472) et Cosain4t-Pont (1586), noms de
deux hameaux de la commune d'Avallon. sur le Cousin : on écrit aujourd'hui,
bien entendu, CousinAa-Roche et Cottsin-k-Pont.
A. THOMAS
VHoiaiu\ affluent de la Seine (Aube), éponyme du village
de la Chapelle d'Oze, appelé Ausa en 754 : Osa, 1236; riparia
de Ose, 1247; Osain, i}04; rivière d'Osain^ 1566; Losa^ i6ï8;
Lûsain^ 1679 ; sources du Lûiein, xvîiî* siècle. (Boutiot et Sccard,
Dict. top. de rAuhe.)
Ulngressin^ affluent de la Moselle (Meurthe-et-Moselle) : flu-
violmJJngruscia, S'i&ijhwwn Angruxia, ^Hi; Engrusia^ Iî68-
j 19^ ; Engresbin^ I779- (Lepage, Dicî. top. de Id Meurt fje,^
L'Ora«% affluent de la Seine (Aube, Seine-et-Marne) :
Alve^ 117?; Lûruirtus, iéi8; le Lorvain ou Sarme^ xvan* siècle;
Lûrrain (corr, Larvain)^ carte de Cassini* (Boutiot et Socard, Dict,
top, de l'Aube,)
VOlfjaift^ affluent de la Chiers (Meuse) : Ortusfluviolw^ 654;
super Jiuinum qui dicitur Otha^ 12S3; Ostain, 1656; Osthain,
1681 ; Osîin^ Aulin, 1700; Hotin^ 1749 (Liénard» Dict. top. d€
la Meuse.)
Le Wmh ou le cours de Rhoin^ sous-affluent du Meudti
(Côie-d'Or) : cursus de RMns^ i^jj ; cursus de Rinces ^ 1236. (Cart^
de Citeaux^ cité par Gamier, Nontenclat, hist. des commums de la
Câie-ifOr, n* 924.)
Le Somin^ affluent de la Loire (Rhône, Saone-ei-Loirc,
Loîre) : SomftuviuSi dans un diplôme du roi Boson de 879».
Le Surmelin^ affluent de la Marne (Marne, Aisne) : Seurtmmi^
V , 1252; Sommerain , Sourmerain, 1366; Saunnera in^ 1 5 9 } ; Sûur-
meJain^ ï395; Sourtnelans^ t4tï; SaunmJmi^ H^4l Somrmrlin^
1553 ; Atr/m, xvm^ siècle; U Surmdin m plus smvmt k Melin^
l86o« (Longnon, Dkt. top. de h Marne,) On retnirqoen que les
textes réunis par M* Longnon ne donnent pas le nom latin de
cette rivière* Dans le plus anden exemple» S€MrwÊinei est tnaaifes-
tement une faute de scribe pour Seunmmin : cet exemple est,
d*aiUcuTS« prédeux» car U nous montre que le n initial de la troi*
sii^mc syllabe est primitif et a été dissimilé soit en r (cf. Serain
pour Sifmn\ soit en l (cL Filaimpom Finaine)^ Le nom biia
ée U Dunkfoe (Cjmmt), le £j^^, iff
a. <ktim e» pour A^vêM (CL Arc
de crm tivi^fv est le mèsar que ex
Atvâ, pow AW*. en ma, (A. L
Or). IJm^f^
I .\2s0e, sppdèe
^tle (Istre).
H
lii
LA DECLINAISON FÉMININE DES NOMS DE RIVIÈRES 495
est vraisemblablement Surmena, peut-être même Sumtmna, car
il est fort possible que le r de Surmclin soit dû ^ une ètymologle
populaire et que ce nom soit le même que celui de la Stmène
(Haut€*Loire), de la Suniém (Ardèche et Cantal), de la Semine
(Ain et Camal) et de la Souvignc (Corrèze), appelée au moyen
âge Sumffunia (Cart. de Bcaulteu^ n° 172).
Le Ternin ou Tarnin, aïfincni de TArroux (Côte-d'Or, Nièvre,
Saône*et-Loire) : Ripa Tarant^ ripariam ik Taronam (corr. Taro-
ynain), {Hisi. de Saint-Martin d^Autun, citée dans M. Qnat,
Topogr. des cours d'eau du dép, de Saône-chLoire^ p. 14).
Dans quelques cas, la forme en -ain ou -ien est tombée en
désuétude, mais on constate directement ou indirectement son
existence au moyen-âge :
UAnmnce, affluent de la Saône, a porté le nom d'Amaftcien
au xiir siècle, comme il résulte d'un texte de 1295, où le scribe
a écrit fautivement Amaciens. (J.Finot, Êtuik de géogr, hist. sur
la Sûône, p. 34).
La Dive^ affluent de la Vienne, et la Dive, affluent du Touet,
s'appelaient au x* siècle Divain^ à en juger par les expressions
fluvius Divane, alveum Divane, qui se trouvent en 916 et
en 994. (Rédet, Dict, top. d^ la Vienne.^
Parmi les autres noms de rivières en -ain^ -in ou -ien^ plu-
sieurs se révèlent a priori comme d'anciens cas régimes en -ain
par le simple rapprochement avec des localités èponymes ou
avec des rivières homonymes : le Brcucbin passe i Breucks
(Haute-Saône), le Cusancin à Cusance (Doubs), le Jarnossin à
I, Voici une liste de ceux que je connais» liste qui n'a pas la prétention
d*ètre complète, tnais qui pourra servir provisoirement d'index pour des
recherches ultérieures. Je îais suivre le nom des rivières des noms des dépar-
tements où elles coulent. Tous ces nom*î sont masculins dans Tusage actuel :
Acûïin ou Cotin, affluent de la Loire (Allier, Nièvre).
Âcotin^ affluent de la Nièvre (Nièvre).
Acolin ou Cotin, affluent du Nohain (Kiè\Tx;).
Airain, affluent de TYèvre (Cher),
AfigoUn, affluent de Tlodre (Indre),
Annain^ affluent de TAuron (Cher).
Badin y affluent de la Vingcanne (^Hau te- Marne).
Bardin^ affluent de TOzcrain (Côte-d'Or).
BîandenaifJi afiluent de la Loire (Saône-ct-Loire),
Blartn, sous-affluent de la Moselle (Meurthc-et-Mo«el!e).
49^ A. THOMAS
Janwsse (Loire), le Sagonin i Sagûmw (Cher), comme le Mes-
vrin àMesvre, le Grand Morin à Mœurs; d'autre pan, V Airain
fait penser à VAire^ nom d*un affluent de T Aisne et d*uii
affluent de TArve; le Colin X la Colle (Dordogne) et à la Cwk
(Marne); le Cusandn h la Cousance (Meuse), à la Cu^atict
(Allier) et à la Cuisance (Jura); le Ij>iain à VÈa^ain, dont il a
été question ci-dessus, le MetiT^in à la Meuse^ etc.
L'usage de la déclinaison germanique féminine n*est pas
Beulain ou Bulletin, affluent du Breuchin (Haute-Saône).
Bouchitt (ru dé)^ affluent du Cousin (Yonne),
Branîatn ou BranUn, afBuent du Four (Yonne)*
Breuchin^ afiBuent de la Lanterne (Haute^Saône),
Buiiift^ affluent de l'Albarine (Ain).
Caîvtlm^ âfHuent de la Nied française (Meurthe-et-Moselle).
Cclin^ affluent de rYèvrc (Cher).
Cotencirt, affluent du Moulin*Keuf (Cher),
Coussin, affluent de la Sauldre (Loir-et-Cher).
Cusancin ou Cuisatuin^ affluent du Doubs (Doubs).
Dti'tï^ affluent de la Somme (Somme.
Édin, affluent de TOuche (C6te-d*Or).
Fêkrin, affluent de la Tessonne (Loire).
Fttsaift^ affluent du Loing (Loiret, Scine-ct-Mame).
Herclin, affluent de l'Escaut (Nord).
Hivemin, affluent du Cher (Cher).
Hoiim (ru tf ), affluent de l'Aisne (Aisne).
Jarmssin, affluent de la Loire (Loire),
Uitt, afHuent de la Charente (Charente).
Lûing ou Ouin, affluent de la Sèvre Niortaîse (Deux Sèvres),
Lûiain, affluent de TOgnon (Haute-SaÔne),
Lttmtin, affluent du Loing (Yonne» Seine-et-Marne),
Mardift, affluent de la Loire (Saône-et- Loire).
Martcnin, affluent de la Gande (Saône-^t Loire).
Mauvdain (ndismt de), affluent de la Brenne (C6tc-<i*Or).
Maiwoisin, affluent de la RC-rc (Cher).
M^-Ji^/iw, affluent du Fîuem (Meuse),
Meniin ou Muim, affluent de la Dheune (Côte-d*Or).
Moiiiin, affluent de la Sajie (Ain),
Mardain {ruisseau du), affluent de la Vouge (Côte-d'Or),
Mortntin, affluent de la Sauldre (Loir-et-Cher).
Morins, affluent de b Petite- Sauldre (Cher),
Mohaifu affluent de la Loire (NièNTe) : pas d>xemple avwt le xv* siècle où
Ton écm Noyn en 145,. (Soultrait, DicL top, de la Nièvre,}
LA DÉCLtNArsOK pfeMîMlNE DES NOMS DE RIVtfeRES 497
limité au français propre; s'il est rare en provençal, il est très
répandu, en revanche, diins les dialectes intermédiaires entre le
français et le provençal, et particulièrement dans ^est^ L;\ la
terminaison n'est plos -ain^ mais -an\ Dans cette région, les
noms de rivières n'ont pas échappé non plus à Finfluence germa-
nique. J*en puis citer un intéressant exemple que n*a pas relevé
M. l'abbé Devaux; il s'applique à i*Isêre. On lit dans le cartu-
laire de Thôpital de Saint-Paul de Romans, dans une chane de
Oignin^ affluent de TAÎn {Aîn)«
Oraitty affiuent de la Vingeanne (Côte-d'Or).
Orain ou Dorain^ affluent du Doubs (Jura).
Oltrain ou LcKierain, afBuent de la Brenne (Côte-d'Or).
Rabin^ afHuent de rOignon (Haute-Saône).
RetiHn {ruisseau de)^ afllueni de la Dheune (Côte-d*Or).
Rhin ou Rabin ^ affluent de la Loire (Loire),
Sagouin^ affluent de l'Auron (Cher).
Saridiits^ affluent du Mou Ion (Cher).
Serairtf affluent de la Seille (Jura).
Solirtt affluent du Loing (Loiret).
Spitt, affluent de la Scilîc (Lorraine allemande).
Suin^ affluent de la Creuse (Indre).
Ttrrouin^ affluent de la Moselle (Meurthe-et-Moselle) : TtrouHn, 1272;
Le Terrowain^ 1471. (Lepage, Dict. top. de la Meurthe).
Tramhotiîin^ affiuent de la Loire (Nièvre).
Tripotiftf sous-affluent de la Sarthe (Sarthe).
IV<f^/frt, affluent de la Bourbînce (Saône-et-Loîre).
Feront fî^ affluent de la Meuse (Belgique, Ardennes).
Je ne fais pas figurer dans cette liste le Duretin^ mieux Durtmn^ affluent de
la Voukie à Provins, car îe nom primitif de ce cours d'eau paraît être
Durtanus. Cf. Bourquelot, Hist. de Provins ^ II, 399 i fttmum de Durtani
p, 1176; ihid., I, ï86, n. } : inter Durtanum et Vosiam^ 1233.
1. Devaux, Essai sur la langue vulg. du Dituphirté seplcntr.y p. 361 ; Suchîer,
t£ franc, d k prcv,^ p. 204. M, Suchicr semble nier Texistence en pro-
vençal de cette déclinaison féminine ; mais pulan est fréquent chez Marcabru
(notamment dans la pièce Sdgner n*Aidric^ où il est assuré par la rime :
voy. Ânn, du Midi, V, 500), et je relève Cauban, Estevenan dans des textes
bordelais (Luchaire, Recxml d^ textes de Tarn, dialecte gascon, pp. 122 et 127).
2. Au lieu de -an on a -iiï sous rinfluencc d*un yod : ainsi Kataîinan^ mais
Berengeirin. Il se pourrait donc que quelques-uns des noms de rivière men-
tionnés plus haut en note, comme le Buiiin (Ain), VOiptin (Ain), présen-
tassent cette réduction phonétique de -«•« à -in et non une orthographe défec-
tueuse consistant à écrire -m pour -ain.
498 A. THOMAS
I20J : dtis Iscran en cei^> Je ne crois pas être trop téméraire en
supposant que ce cas régime Iscran^ qui a disparu de Tusage
en tant que nom de la rivière d'Isère, a survécu dans la locution
U col d'Iseran, terme bien connu des géographes, qui désigne le
passage réunissant les vallées de Maurienne et de Tarcntaise^
près des sources de l'Isère et de TArc (Savoie).
En soumettant tous les noms de rivières de la région franco^
provençale qui se présentent avec la terminaison -tin (variantes
-audy -anty -ans^ ens) à un examen historique, il est probable
que Ton arriverait à constater que beaucoup d'entre eux sont
d'anciens régimes féminins \ Malgré Tinsuffisance de mes moyens
1. Édition Ulysse Chevalier, no 58.
2. Voici une liste alphabétique^ dressée comme celle que j'ai donnée plus
haut, pour guider des recherches uhérieures ; aux noms de la région franco-
provençale, qui sont de beaucoup les plus nombreux, sont môles quelque
noms du domaine provençal :
Ainan, affluent du Gui ers (Isère).
Anconan, affluent de i'Oignin (Ain).
Ba^éran, affluent de la Garonne (Gironde).
Barhcnan, affluent de la Bèbre (Allier)*
Chéran, affluent du Fier (Hautc-Savoîe).
Conan^ affluent de la Brévenne (RhÔne).
Coran y affluent de la Charente (Charente-Infértcure).
Daiiian^ affluent de PAnde (Cantal),
Droiwenanty affluent de la Syrène (Jura)
Formam^ afïîueni de la Saône (Ain).
Furan, affluent du Rhône (Ain),
Furand, affluent de fîsère (Isère).
Fnrem, affluent de la Loire (Loire).
Gtrhan, affluent de la Bèbre ( \llier).
Herbe tan, affluent du Gui ers- Vif (Isère).
Hérétang^ affluent du Guicrs-Mort (Isère).
JiMn, affluent du Sichon (Allier).
]ournan, sous-affluent du Rhône (Ain),
Méran, affluent de ïa Loire (Loire).
Moignans, affluent de la Chalaronne (Ain).
Ki^eranâ, affluent du Rliônc (Rhône).
NoUan, affluent du Suran (Ain).
Ouêan, affluent de la Loire (Loire).
Séran, affluent du Rhône (Ain)»
Soamn, affluent de l'Azcrgue (Rhône).
LA DfeCLINAISON FfeMÎNTSE DES KOMS DE RIVîtRES 499
de recherche je puis en indiquer un certain nombre comme
écant sûrement dans ce cas.
LQConan, affluent de la Brévenne (Rhône), a donné son nom à
h val lis Col nrrtsi s ^mcnûonnéçQu 1204 dans la charte 678 du car-
tulaire de Savigny : il est donc certain que le nom primitif du
Comn était identique il celui d'une localité disparue, appelée
Col na, qui figure dans deux chartes du même cartulaire% et à
celui de la Cosne, autre affluent de la Brévenne.
Le Formans^ aflluent de la Saône (Ain), figure sous la forme
Folmoda, signalée par Qiiicherat sans indication de prove-
nance, dans une charte du cartulaire d'Ainay d'environ 980 :
unutn muhuiniim qitod est super (Ujua Fohnoda volventem^, Vs de
la forme actuelle du nom du Formans n'a rien d'ancien : la
carte de Gissini écrit Froman (sic}, et Guigue indique la forme
Formoan comme employée au moyen âge'.
Le Furand^ ruisseau affluent de Tlsére (Isère), n*est pas men-
tionné avant 1398 : à cette date il est appelé ripptria Furani^
forme qui montre que le d qui termine le mot dans Tortho-
Sdmn^ ailBueDt de laSeille (Ain et Saône-et-Loîre).
Scîvan^ Affluent de b Seille 0ura)»
Sonnayit^ afRuerit de llsère (Isère)*
Su^ati, afBucnc de la Midouze (Landes).
Sur an t Surand^ Surani, affluent de l'Ain (Ain).
Taîenchant^ affluent de la Mouge (Saône- et-Loire).
Trambotiiafif affluent de la Loire (Loire)»
Falouian, affluent de la Grosne (Saônc-ct-Loîre).
rmani, affluent de la Boublc (Allier),
Je ne fais pas figurer dans cette liste le Ferrand, affluent de la Romanche,
parce que ce torrent emprunte son nom au mont Ferrand, appelé tnms Fer-
rant en 1260. Ce renseignement m*est communiqué par mon confrère et ami,
M, Prudhomme, archiviste de l'Isère, d\iprès le Dkt. top. de Vhhe^ ouvrage
en préparation de M. Pilot de Thorey; c*est de la même source que me
viennent les textes que je cite plus loin sur le Fttrand^ VHerbetan et VHhHang.
Je liens à en exprimer ici tous mes remerciements à ces deux messieurs.
1. « Unam medictatem de cambone quae est juxta Colnam »» n» 468 (an
994): ft in loco qui diciturCiriacus sive Colna *, n^ 578 (vers l'an 1000). Ala
rigueur on pourrait croire que c'est le cours d'eau luî-mcme qui tîgure dans la
charte no 468.
2. Cari, d'Ainay, publié par Aug. Bernard à la suite du cartulaire de Savi-
gny, n*^ 181,
5. To/nyr. hist, du dip, de TAin, Trévoux, 1875.
500 A« THOMAS
graphe actuelle n'est pas ctymologique. Ldi
l'bèrc a nom la Furc et est éponyme du h:i: .
ton de Tullins. L'étude des anciennes formes du nom de la Fore
montre que le nom actuel du ruisseau de Furand est bien le cà&
régime de Fure, En effet, les textes qui mentionnetit b Fore
rappellent, à partir du xiv* siècle, tantôt Fure, tantôt Furam^
sous des graphies diverses : Fura aqua, en 976 ; aqua fm dki-
lut Fura, en 1257 ; aqua deFura^ en 13 17; oqMi de Furrmï^ en
1)54; mpid de Furans, en 1591; ripperia Fure, en 1593; rippù-
ria de. Furans, en 1394; aqua Furani, en 1444; rivière de Fitn^
en 1546; rivière de Furan^ en 1724. Ces formes pcrmenent de
supposer avec la plus grande \Tâisemblance que le Furtns^
rtffluent de la Loire qui passe à Saint-Etienne, et le Fitran^
affluent du Rhône (Ain), s'appelaient primitivement la Fure.
VHerhctan, affluent du Guiers-Vif (Isère), est formé par la
réunion de deux ruisseaux que Ton désigne respectivement
sous le nom de VHerbetan-ù-Fif et V Herbetan-lt-Mort, Que
Herhetan soit un féminin et que la notion de ce genre se soit
longtemps conservée, c'est ce qui résulte des anciennes formes
réunies par M, Pi lot de Thorey : rif iHerbeîtai-la-Morte, en
1641; rivière Arbeiki-la-Vive et rivière Arbetta-la-Marte, en
1725* L*Hcrhetan-le-Vif est appelé ruisseau de rHerbetie en
1695 ; aqua Alhia et aqua que iHxatur Arbeta^ en 1314. Il n'y
a pas d'hésitation possible sur la forme primitive entre Albeta
et Arkia^ car le changement de / en r devant une labiale n'est
pas rare dans le Dauphiné* : Albeta est le diminutif de Alh^ et
VHcrkian du Dauphiné est le pendant exact de VAubctin de la
Champagne.
VHèretang, ruisseau affluent du Guiers-Mort, qui traverse les
communes de St-Joseph-de-Rivière et de St-Laurent^du-Pont
(Isère), paraît avoir été souvent désigné par le même nom que
rHerbetan, M. Pilot de Thorey cite les formes suivantes comme
s'appUquant à THérétang : Albeta^ en 1139; rivus de Alkta, en
1308 ; aqua Aîbete^ in rivis dAlbetay, river ia dtAlbetan en 1333 ;
fwus de Albetam^ en 1512; le ry d^Erbetan, en 1540; rivUrt
dtArbetan^ en 1554. Il est manifeste que ce n'est pas de ces
formes que peut être sorti le nom actuel : ce nom se présente
pour la première fois en 12S9, où le ruisseau qui nous occupe
I, Voyti Devaux» Essêè^ «c», p. ||7.
LA DÉCLINAISON FÉMININE DES NOMS DE RIMERES 5OI
est appelé aqua à' Lcyretan^ puis il prend définitivement le
dessus au xvii^ siècle : rivUrede fHeretan^ dcVHcreta\y en 1610;
rivière de rHcreîan, en 1645. Il est clair, d'après ces derniers
exemples aussi bien que d'après celui de 1289, que la forme
correcte est Leretan, plus anciennement Leyretan; si le nom
actuel Hérétang a perdu son / initial, parce que le peuple a pris
ce / pour Tarticle, et s'il a reçu un g finale parce que les gens
savants^ou se croyant tels, ont pris ce nom pour un composé du
mot français étang, ce double déguisement ne nous empêchera
pas de le reconnaître pour un ancien cas régime AtLeyrete^ c'est-
à-dire « la petite Leyre » ou « la petite Loire ».
Le SéraHy affluent du Rhône (Ain), est mentionné dans une
charte des environs de 1 1 3 > yfluviusquidiciturSerafia ' . Il ne paraî-
tra pas téméraire sans doute de conclure de cette forme que 5tVïï;î
était féminin au xii*^ siècle et que le nom primitif latin de ce
cours d*eau était Sera^. On notera que Guigne mentionne
un ruisseau appelé la Serre comme affluent du Séran : il semble
donc que le môme nom ait été appliqué à Torigine aux deux
cours d*eau, habitude fréquente dans la nomenclature hydro-
graphique.
Le Soanany affluent de TAzergue (Rhône), figure en 858 sous la
forme Soanna dans le cartulaire de Savigny ; a cercio Soatifta
(var. Soana) fiuviô l'olveuk^ n° 25. La forme primitive est con-
servée dans le nom de P\ilsonm, localité arrosée par ce cours
d'eau et appelée au moyen âge Fahoamia^, Auguste Bernard
appelle ce cours d'eau la Souannc y peut-être par suite d'une
préoccupation étymologique. Au xvii"^ siècle, le sieur Coulon,
qui ne peut être soupçonné d*une préoccupation de ce genre,
dit de son côté que TAzergue « se joint à la Saene^ ». Quoi
qu'il en soit, l'usage actuel est pour Soûnan"^ ^ Cassini écrit
Soatmt,
Le nom de Valou^^cin est porté, non seulement par Tun des
1. Guigue, Top.hisi^àeTAin,
2. Cf. la Cèriy afEuent de la Dordogne (Cantal, Loi), en latin Sera,
d'après QiJicherat.
5. A. Bernard, Cart, de Savigny, p, 940,
4. Les rivières de France ^ par le sieur Coulon, Paris» 1644, p. 94.
5. Le Dict, giogr. de k France de M. Joanne appelle cette rivière» par suite
d*une fâcheuse coquille, ÏQSoaman,
s 02 A, THOMAS
bras supérieurs de ta Valouze» affluent de h Grosne (SaÔQC-et-
Loire), mais par la Valouze elle-même, appelée Avalosa'
au X* siècle.
La Vésonne^ affluent de la Gère (Isère), a dû posséder trhs
aocienuement laccusatif Vésonnan^ ï en juger par un acte d'en-
viron 975 i^App. 7, dans le Carîulaire de S^ Anàré-ït-Bas^ p.p,
U. Chevalier) où on lit : rio Vesonnane; dans les chartes 2,
4, 25, 36, on Ht Vesonna.
Parmi les noms pour lesquels les textes anciens font absolu-
ment défaut, on peut faire quelques constatations intéressantes*
D'après Jeanne, le Drouvtnanî porterait aussi le nom de Drcm-
ventu* Près des sources du Tramhuian naît un autre cours
d*eau, affluent du Rhin ou Rahin, qui porte le nom de Tram*
bouiè et qui tire manifestement ce nom du village de Trambou^
qu'il arrose. Le Coran^ affluent de la Charente, fait penser à k
Cure (en latin Cor a), affluent de T Yonne; le Suran^ affluent
de TAin, à la Sure^ affluent de la Moselle, etc.
A quelle époque les noms de rivière dont nous venons de
parler ont-ils été soumis à la déclinaison féminine d*ongtne
germanique ? Il faudrait beaucoup plus de textes que nous n'en
possédons pour répondre à cette question d'une manière satis-
faisante. La date a dû varier selon les régions, selon les noms
mêmes. 11 est évident qu'un nom comme Aubctain ne peut pas
préteodre à une bien haute antiquité : c'est sans doute un des
plus récents. Quant aux plus anciens, tout au plus remontent-
ils à l'époque carolingienne ; ils supposent en effet déjà forte-
ment enraciné parmi les populations romanes Tusage de décliner
ainsi les noms germaniques de fetnraes, avec une tendance i
appliquer la même déclinaison aux noms romans ^. Cette ten-
dance est moins énergique, d'ailleurs, pour les noms de rivières
que pour les noms de femmes : elle ne s'attaque guère qu'aux
petits. On ne voit pas qu'elle ait jamais atteint les noms de
1. Chavût, Le Mdc&nnais, p. 276.
2. En fait, le plus ancien exemple de la déclinaison germanique appliquée
i un nom de rivière que je connaisse esi de Tan 916 : à cette daie la Divc de
Mortcmer est appelée fluvius Diva ne. Un peu plus tard, et dans U
même région^ celle du Poitou, la Divc de Montcontour est désignée par rot-
pression alveum Divane (voy, Rédet» Dict. top. tU la Vienm). Le rio
Vesonnane, ea Dauphiné, de 975, vient ensuite.
LA DÉCLINAISON FÉMININE DES NOMS DE RIVIÈRES 303
l'Aisne, de TAube, de la Marne, de la Meuse, de la Saône, de
la Seine, de la Vienne, de TYonne, etc. Ces grands cours d'eau
jouissaient, semble-t-il, d'une trop grande notoriété pour qu'on
songeât à modifier l'usage traditionnel de leur nom : les petits
ruisseaux font les grandes rivières, mais ils n'appartiennent pas
au même monde.
Je terminerai en faisant remarquer que le fait que certains
noms de cours d'eau ont été soumis à la déclinaison germa-
nique suppose une sorte de personnification de ces cours d'eau.
Diez a déjà constaté ^ que la déclinaison Berte Bertain s'applique
non seulement aux noms de femmes proprement dits, mais aux
noms d'animaux ou d'objets féminins personnifiés : il cite Pinte
Pintairiy la poule, dans le Renarty et Guile Guilain^ la tromperie ;
il aurait pu citer Courtain, la légendaire épée d'Ogier le Danois^.
On accordera sans peine que la personnification d'un cours
d'eau est pour le moins aussi naturelle que celle d'une épée.
A. Thomas.
1. Gramm. des îang. rom,, II, 42.
2. On lit dans Girart de Roussiîlon, manuscrit d'Oxford :
E a ceinta Beîan qui fu Disder (v. 3937, éd. Fœrster).
M. P. Meyer traduit : « Et ceignit Tépée qui appartint à Didier. » En note
il indique que le ms. d'Oxford, au lieu de « Tépée », a Belan, et il ajoute,
avec un point d'interrogation : « le nom de Tépée ». Le traducteur n'avait
pas à craindre d'abonder en son sens : Belan est à bêla (== belle) comme en
français Courtain à courte. J'ajoute, pour prévenir une question et dissiper
jusqu'au dernier doute, que Girart de Roussiîlon décline Berla Bertan (v. 185,
23s, etc.) : on voudra bien se rappeler, d'ailleurs, que M. P. Meyer place
la patrie de Girart de Roussiîlon dans la région même à laquelle appartient
Saint- Barbant y qui a été expliqué plus haut.
LAILOKEN (OR MERLIN SILVESTER)
INTRODUCTORY NOTES
After the death of S* Kentigern (6 ï2, accordîng to the Jnnala
Catnbrue)^ there is almost a total blank in the Church history
of Cumbria for 500 years. The eadiest really historical records
are those edited by Costno Innés, for the Maitland Club, as
the Rcgisirum Episcopatus GlcLsgucmis (Edinburgh, 1845). The
first six bishops of Glasgow in thaï Regîster are as foUows :
(i) John, consccratcd about 1117, died 1147. (2) Herben,
1147-1164. (3) Ingelram, 1 164-1174. (4) JoceUne, 1174-1199.
(s) Hugh de Roxburgh, died two momlis afier appointmem,
1199* (6) William Malveisin, 1 199-1202,
There are practically only two Lives of Kentigern. No. i îs
a mère fragment (a prologue and 8 chapters), written at the
request of Bishop Herbert (and therefore before 1164) by a
cleric of S^ Kentigern's, who vvas apparently a foreigner. It
now only exists in one Ms, (Cotton Ms. Titus A, XIX,
ff. 76-80. b); but the satne chapters hâve been used, in an
abridged forni, tor the Legend of S* Thenew (Kentigern*s
mothcr), in 9 Lections, in the Breinary of Akrdeen (Pars Esti-
valis, f. xxxiv). It was printed, from Titus A, XIX, by Cosmo
Innés, as Appendix II to his Introduction to the Registrum
Episc, Glasg., followed by extracts from the Aberdeen Breviary*
It was reprinted by Alex P. Forbcs, bishop of Brechin, in his
Lives of SS. Ninian and Kenîigern (vol, V of the Historians of
Scolland^ Edinburgh, 1874). The other Life of Kentigern was
written (in a prologue and 45 chapters) by Joceline of Furness,
at the request of Bishop Joceline (and therefore before 1 199),
in order to correct the extravagances of the earlier Life. It was
first published (from the 13^^' cent. Cotton Ms., Vitellius
C. VIII) by Pinkerton, in his P'itts antique Saru'forum Scoti^e
ta
LAlLOKE?4 (or MERLIN SILVESTEr) 50$
(1789); and again (from a Dublin Ms. with collations from
thc Cotton Ms.) by A. P, Forbes, in his Ninian and Kenii-
The Life of Kentigern which used to be ascribed to S* Asaph
(pupil of Kentigern, and his successor at Lknelwy» now
S* Asaph's, in Mintsliire), is nathing more than an abridgmeni
(made by John of Tmmouth) of Joceline's work. It was
published in Cap^rave's Noi*a Legcnda Anglie ^ and again in
Acta SS. (Jan* 13).
The Breviary of Ahrdeen , vvhich contains extracts from the
earlier Life, was drawn up by William Elphinston, bishop of
Aberdeeo in 1483 (died 15 14). It was prioted for the bishop
by Walter Chepman (Edinburgh, 15 10), and reprinted by the
Bannatyne Club (London, 1854),
Thomas Dempster, in his Hist. u^cles. Getttis Scotorum (1627),
p. 490, under the head of "GuL Malvaisin'' (bishop of
Glasgow in 1199), says : '*De miraculis S. Niniani lib. L —
Acta S. Kentigerni lik L — laudat Mombritius.** I can find
nothîng on the subject in Ûm: Sam'îtiarium of Mombritîus; but
there are some of his published W'Orks which \ve bave not got in
the British Muséum.
Let us now glance at the two îndcpendent Livcs, No. I
(Titus A» XIX). It is headed " Vita Kentegerni '\ but not in
the hand of the scribe, The Prologue begios : ** Multas quidem
perlustrauî reglones. et earundeni mores et cleri plcbisque de^
uociones diligenter perscrutans. omnem patriam sancios suos
prouinciales propriis et arternis [**altiorîbus" éd. Innés; ** alter-
nis ** ed, Forbes] laudum preconijs vcnerantem, Cum auiem
ad regnum Scoitorum demum perueoerim, '* etc. He goes on :
** qnemadmodum Symeon monachus olim Dunelmensis de
sancto suo Cuthberto historiam contexit. ira et ego qualem-
cunque clericus saricti Kentegerni. de materia in virtutura eius
codicello * reperta. et viua voce fidelium mihi relata, intimante
venerando Glasguensi episcopo Herberto, prout potui deuote
composui, " Thèse words w^ouîd seem to imply that the author
1. Wriucn **coJicclt. " I see iliat M. de la Villemarqué {Myrdhinn, 1892,
p. 68, note 2) has extended the contraction thus : **ccKlicellis. " Pcrhaps
this suiis the passage better, by iiself ; but compare Joceline's mention of a
certain "codiculus " ; — see a Utile further on.
S06 M. WARD
could not read the '* codicellus"; and this view may be sup-
ported by the way in which he spells vxo of the names ; but it
îs hardly confirmed by what Joceline says of a certain '' codi-
oilus '\ which is probably the same. Cip, I of the Fragment
now tells us that King '* Leudonus *' [called '* Loth " in the
Aberdeen BreviaryJ, *' vir semipaganus ", had a daughter
" Thaney ** [" Thenew '* in the Ab. Brev., aiid elscwhere;
the modem VVelsh however pronoujice this -€W like the
German -d]. She had a suitor, favoured by her fkther : *'Erat
namque procus eius iuuenis quidam elcgantissiraus, Ewen vide-
licet fiiius Erwegende [Urbgen ?] nobilissima brittonum prosapia
ortus. Sed verbis neque donis aniori satis congruis animum
virginis ad suum connubiura nullatenus potuit promouere. **
— It is pcrhaps the scribe who has hère inserted the words :
'* in gestis histrionum vocatur Ewen fiiius régis Ulien '*(that is,
Yvain fils Urien). — -'Et quanto illa plus renitebatur. tanto
audacius iste in eius amorem accendebatur, '* Cap. H. Ewen
disguises himself as a girl, and violâtes '* Thaney *'; yet, whcn
he leaves her, she is stiU half persuaded that he is a girl.
Cap. IIL She is found with child, and condemned to death.
Capp. IV-V. She is cast down from Mount Kepduf (now
Kilduff), but is miraculously saved. Cap. VL She is tumcd
adrift in a boat^ at the mouth of the river Aberlessic (now
Aberlady). Cap. VU. King Loth is killed, and is buried under
a cairn near Dunpelder (now Dunpender Law, in East Lothian).
Cap, Vin, '* Thaney *' is case on shore at Culross, in Fife; and
she bears Kentigern, who is received by S* Servanus (or
S' Serf). Hère our copy ends. It may perhaps hâve been made
for Bishop Elphinston, when he was employed on the Aberdeen
Breviary, This Breviary says, on S* Kentigern's day (13 Jan.) :
** Lectio prima. Predarus Dei confessor Kentigemus nobilissima
incUtoruni Scotica prosapia pâtre Eugenio Eufuren" rege Cum-
brie matre vero Tenew filia Loth régis Laudonie ortus» ** etc.
On S* Thenew^s day (18 July) it says ; ** Namque eu m Ewen
Cumbrie régis fiiius, " etc.
N** 2. (Joceline's Life of Kentigern '.) Joceline alludes to the
1* I quûte from Bishop Forbes's édition; because our Cotton M$, (Vitel-
Uns C, VIII) has a very great aumber of pctty misukes, that are oot wortfa
noiîng,
LAILOKEN (or MERLIN SILVESTEr) 507
earlîer Life ùrns : " Qua^ivi igitur diligenter vitam, si forte
invenîrctur, qux* majori auctoritate et evidentiori ventate fulciri,
et stilo cuhiori videretur exarari, qoam illa, quam vestra fré-
quentât ecclesia. '* Joceline goes on : *' et quod prae hiis
omnibus quilibet sane sapiens magis abhorret, in ipso narra-
tionis frontispicio quoddam sanar doctrinal et catliolicie fidei
adversuin evidenter apparet, *' This refers to Thenew's prayer,
that she (like the Virgin) may conceive a child by a miracle.
Hc adds that the stupid peopte still believe that her prayer was
granted* Joceline calls her father " paganissimus '*; but he
does not name either her father or her suitor. Alluding (appa-
rently) to the ** codicellus" mentioned by the earlier writer,
Joceline says : ** Codiculum autem alium, stilo Scottico
dictatum, reperi, per totum soîœcismis scatentem, diffusius
tamen vitam etactus sancti Pontificis condnentem." The éditer
and other modem writers translate ** stHo " dialecî; and suppose
the *' codiculus " to hâve been in Welsh or Gaelic; but I cer-
tainly think it was a Latin Life, full of Scottîsh idîoms. Joceline's
last chapter (cap. 45) is headed : "De prophetia cujusdam, et
sepultura sanctorura in Glasghu, *' It begins : " Eodera anno
quo sanctus Keotegernus rébus exemptus humanis ad celos
migravit, rex Rederech, sepe nominatus [i. e. Rhydderclî Hael,
of Strathclyde], in villa regia que Pertncch nuncupatur, diuttus
soUto commoraïus est. Iti curia ejus quidam homo fatuus,
vocabulo Laloecen [in the Cotton Ms. ** laloicen *'J, degebat,
qui victualium et vesticus necessaria ex régis munificentia
perci[pi]ebat. Soient enim optimates terre, filii regni, vanitaii
dediti, homines hujusmodi secuni retinere, qui et ipsos domi-
nos, et famiham, verbis et gestibus fatuis possînt in jocos et
cachinnos commovere. Hic homo post depositionem sancti
Kentegerni gravissimis lamentis se afficiebat; nec aliquam
consolationem ab aliquo accipere volebat. Qui cum perquire-
retur cor tam inconsolabiliter lugeret, respondit regem Rede-
rech dominum suom, et quemdam de primoribus terre nomine
Morthec, non posse post mortem sancti episcopi diutius in hac
vita morari, sed illo anno presenti in fata concessuros. Quod
dictum fatui quum non fatue, sed pocius prophetice probatum
fuerit, mors prefatorum eodem anno subsecuta evidenter com-
probâvit, '*
It is to this passage^ compared with Bower's erdarged Scoti-
J08 H. WARD
cbrmicon (Lib. III. cap 31), ihat ail tbe modem ciitîcs ha^
referrcd» whcn trcaring of Lailoken.
But, before tuming to rhe texi of ibc S(vt$chrmiwn^ I wîll
say a few words aboui the Welsh traditions ofthe gneat battle of
Ardderyd. It appears in rite Annaks Câmhri^ (Rolls édition) as
foUows ; ** 573 . Bellum Armterid [inter filios Eltfer et Gueodoleu
filiam Keidiau; in quo belle Guendoleu cecîdit : Merlînus insa-
nas efieaus estj, ^* The words between brackets ztc onh* found
io the later Mss,; but their ptirpon is supponed by évidence ot
the 12^^ century. From anotherentry in the Annaks (under 580)
we leani that d\'o of ihe sons of Elifer were named ** Gnurci "
and ** Peretur '\ In the Black Book of Caermarthen , Poem I
îs a dialogue between Myrddin and Taliessin, upon the battle^
of Ardderyd, They speak as if Maelgwn Gwynedd commanded
the army against Guenddoleu ; but they also speak in praise of the
sons of *• Eliffer ". Poem XVII is the Avalîemu (Apple-trees).
Myrddin hère complains of his madness. In the translation în
Skene's Four Ancient Books of fFalts (vol. I, p, 370) his words
are :
(Stanza V :)
Gwendydi [tbe wifeof Rhydderch Hael] loves inc not, grects me oot.
1 am hated by the firmcst rainister of Ryddérch ;
I hâve ruined his son and his daughter.
Death takes away ail, wby does be not visit roc ?
For afier Gwenddoleu no princes honour me ;
I am oot sootlied with diversion, 1 am not visited by the (air;
Yel in the battïc of Ardderyd golden was ray torques \
ThoQgh I am now despised by her who b ofthe colour of ^wans.
(Stanza VI ends :)
O Jesas! would that tny end had coroc,
Before the deatb of the son of Gwndydd happeocd on my hand,
(Stanza VU, speaking ofthe applc-tree :)
^^hile ray reason was not aberrant, 1 used to bc around its stctn
;^ »th a Uir sponive maid, a paragon of sicndcr form.
len years and fony, as the toy of lawless ones.
word^Jl^^*'''*^''''^ ^^'^^^ '° "^ '^"^ ^^ ^^™' ^°^^*^*i °^^^ EngUsh
3KE\ (OK MERLIS' SILVh>Tl l<) 509
Hiive I bcen wandering in gloom and iimong sprites.
I wiU not sleep, but tremble on account of my leader,
My lord GwendJoIcu, Jiid those who are natives ofmy country**
In the Red Book of Hergest, Poem I is a dialogue between
Myrddin aod Gwcndydd, upon the kings destined to succeed
Maelgwn, Rhydderch, etc. The poem is conimonly known as
the ** Cyvocsi Myrddin" (see the translation in the FiJur Aticknt
'BookSy vol. I, p. 462). Gwendydd hcre addresses Myrddin as
**LlaIlogan" (usually intcrpreteJ twin-brother).
Most critics are now agreed ^,1 believe) that the langua^e of
thèse three poems îs of the 12^'* centory; and that the third of
them (*'Cyvoesi Myrddin**) has also been enlarged in the
lî**" century^ but still that they partially represent much carlier
compositions. Thereishere no allusion to Vortigern. Myrddin is
no deviFs child He Iras no snpernatural gifis frmn his hirth. He
is only the brother of the queen of Strathdyde; and he has
been inspired with prophecy by madness.
It is crue that, in ihe Fita Merltni of Geoffrey of Monmouth,
Merîio emphatically asserts that he (now the broiher-in-law of
Rhydderch) wasformerly the prophetof Vortigern. But Geoffrey
toys with the sobject of his poem. He drops the pretence of
scrupulous accuracy and the tone of profound soleninity that
helped to establish the fictions of his Histona. He says :
** musamquejocosam Merlini cantate paro '\He adopts incidents
of popular tradition; but he alters them, and arranges them
artificially, so as to suit lus poem. In his account of the battle,
Maelgwn disappears; Rhydderch comniands in chief against
'* Guennoleus '\ king of Scotia, Rhydderch's associâtes being
Peredur with the North-Welsh, and Merlin himself with the
South- Welsh. Merlin îs styled a king; a title perhaps suggested
by the '* golden torques*' meutioned in the Avaîknau. When
Merlin is mad, and is held captive by Rhydderch, he laughs at
seeing the king pick an apple -leaf out of the hair of Gwendydd.
He accuses his sister of having just committed an act of
adultery. She retorts, by leading him to foretell three différent
i. Thomas Stephens has engUshed the passage în better style, m his Litt^
rature of ty Kymry{i%^^), pp. 223-25 1* Bot he uscd a more modem text ,
lull of corruptions and interpolations.
5IO
H- WARD
deaths for the same man. Thèse two incidents are toId# în
coonecrion with Lailoken, but not with Gwendydd» în Titus
A. XIX; and Geoffre>' (I thînk) ha$ defamed Gwendydd,
merely in order to tnaintain a kind of uniry in his narrative.
Geoflfrey's Merlin is older, he says^ than the oaks of the Cale-
donian Forest; but he does not explain how his sister is young
enough to please both her husband and her lover. And lastly,
when Gwendydd herself is rapt with inspiration, she describes
events of ii}9-îi4i* with a downright minuteness, which
(GeoSrey must hâve been qui te aware) could never hâve beetl
mistaken^ even by the simple critics of his time, for the genuine
language of prophecy. In short, he meant the poem to be received
as an amusing fiction, ending in a political squîb.
Let us now turn to the Scotichroniam, John of Fordun, appa-
rently a Chantr>- Priest in the Cathedral of Aberdeen, began a
work, Chronica gentil Scotorum^ about 1384. He completed five
books, and a few chapters of the sixth ; and he left materials
for more when hedied, about 1387. Fifty years later, the work
was resumed by Walter Bower, Abbot of Inchcolm in the
Firth of Forth, and completed (in 16 books altogethcr) in 1447.
Bower dîed in 1449* Fordun's part of the %vork, to some txtent
altered by Bower, was published by Gale in 169 1 and again
by Heame in 1722» But the whole work (in 16 books) was
published by Walter Goodall in 1759; and it is this latter
édition that has usually been quoted as Forduns Scûlichnmkon»
Fordun himself only gave two meagre notices of Kentigem*
both taken from the earlier Life (now only a fragment). But
in the third book Bower inserted a narrative of the interview
between Kentigern and LaiJoken (now reckoned as Lib, III,
cap, 31), which is abridged from ihe same text as that in our
Ms. Titus A. XIX. Lailoken hère says that he has been driven
mad by the events of the great battle ** in campo inter Lidel et
Cirwanolow situato *', This induced Mr. Skene to visit that
pan of Cumberland, lying a few miles north of Carhsle,
between the river Liddel and the brook Cirwhinelow; and he
has fixed, with something like certainty, upon the parish of
I
I. Events in Oxford in 1139, and in Liocob and Winchester in 1 141 : sec
the expîanatbns given in my CataJqg^ue cf Romances, vol, I (1883), pp. 2S2-S.
LAILOKEN (or MERLIN SILVESTER) 5II
Arthuret, as containing the site of the battle of Arderydd^. It
is supposed that the resuit of this battle transferred much of the
importance of Carlisle, as capital of Cumbria, to the head-
quarters of Rhydderch Hael, at Aldyde (afterwards called
Dunbrettan, and now Dumbarton) : see Professor John Rhys,
Celtic Britain (1882), p. 143.
Bower's mode of abridging his text was this : he eut out half
of it from the middle; and then he tacked the beginning and end
together, without any regard to the sensé. He has also altered
a few phrases; and, after the words addressed by Lailoken to
Kentigern, — " Ego sum Christianus licet tanti nominis reus, "
— Bower has added : *' olim Vortigerni vates, Merlinus
vocltatus ".
The Rev. Thomas Price, of Crickhowel, made some remarks
upon the '* Cyvoesi Myrddin ", in his Hanes Cytnru (History
of Wales), which came out, in 14 Parts, in 1836-1842. Price
then turns to the Scotichronicon, and says (according to a trans-
lation given me by one of my colleagues) : '* Now, since the
word Laloicen or Lailoken bears no signification in itself, it
appears certain to me that the word was taken from the Welsh
llallogariy which signifies twin " (p. 209).
Thomas Stephens, in his Literature of the Kymry (1849),
p. 220, expresses a belief that the " C)rvoesi Myrddin " contains
" a few facts of authentic biography " ; and he commends
'* Mr. Price's ingenious proof that Laloiken is another form of
the Welsh word llallogan ".
Again, one of Price's English Essays contains a passage to
much the same effect : see his Liierary Remains ^ vol. I. (1854),
p. 143. And this passage is quoted in the Four Ancient Books,
vol. II, p. 424; and also by Bishop Forbes, and others.
Now the whole strength of Price's argument rests upon the
assumption that ** Llallogan " was never used by the Kymry
as a Personal name. But see the Redoti Cartulary (p. 125, and
p. 363). Hère we find " Lalocan, donator villae Trebinhoi in
Siz " (named several times) in Dec. 854; and ** Lalocant "
(another Donator) in May 850.
I . Skene read a paper on this subject to the Society of the Antiquaries of
Scotland, 15 Feb. 186$. It was published by the Society in their Procefdings^
vol. VI (Edinburgh, 1864-6), p. 91.
>I2
tK WARD
I understand that **Lalocant'' was probably the oldest form
of ihe name, and that this would naturally change into Lahh
gan (as Morcant changed into Morgan). If it was at aJl certaiu
that "llallogan" evtrr meant twin-hraibcr in Old Welsh, wc
might here thtnk that we had obtained a due to part of chc
tradition. The original form of the " Cyvocsi M>Tddin '* mighr
be supposed to hâve been a dialogiie betv^een Gwendydd acd
the family bard, Lalogan; and that oatne might easily bave
been misunderstood, when the poem was taking one of ils
Uter forras. But I hâve been assured, on very high authority,
that the interprétation of *' llallogan " as tKin-hrothtr îs proba-
bly not niQch older than the Dictimmry of Owen Pugbe (1793)*
I cannot then suggest any process by wbich ihe hxxàHy
bard of the queen of Strath-Clyde was convened (as he cenaioly
was) into her brother, zs early as the days of Geofircy of
Monmouth.
People had cenainly begua to îdentîty Lailoken with Merlin,
when the narrative in Titus A. XIX was written, It says of
hîm : '* qui Lailoken vocabarur quem quidam dicunt fuisse
Merlinuni. qui erat Britonibus quasi propbeta singularis» seJ
nescitur. ** Again, Lailoken utters that prophecy about a triple
death (in this case told of himselQ, whrch we regard ^ essen-
tially Merlinesque, because we know it well in the French
Romance. And lastly, at the end of Pan II, when it bas been
told how he was buried at Drumelzier in Tweeddale, **în cuîus
campo lailoken tumulatus quiescit, *' the foUowintr couplet îs
added :
Su de perfossus, lapiaem perpcssas, et ttndam,
Merlinus triplicem fcrtur inisse nceexn.
In ail other respects, Lailoken is very différent indeed from
the semi-d;eraon who attached himself to the early kings of
Britain. Kentigern describes him as a mère man, subject to cold
and hunger, and liable to death. He is much more a madntan
than a prophet. He can never make the same statement twicc
over. No one pays much heed to his words, until he has dicd
the triple death he had prophesied ; and then a few^ of his other
strange sayings are recalled to mind.
It may be objeaed that the secular legend has been craraped,
in order to exalt the dignit>^ of the Saint. And this objecrion
'
wÊm^
LAILOKEN (or MKRLÎN SÎLVESTE^J 51 J
ceruitily applies ia tht: case of Joceline's Life of Kentigern,
where *' Laloecen *' appears as an ordinary court fool. But the
author of the earlier Life was evidently more indulgent in his
treatment of popular traditions. And I think \ve may fairly
regard our Part I as a chapter taken out of the earlier Lîfe.
There is, indeed, no exteroal proof of this. Our copy is not in
the same hand as that of the open îng chapters of the earlier
Life, which are bound up with it, The writîng looks a Httle
older^ and the transcript may hâve been made for Bower, when
hewas enlarging thethird book of the Scolichronicon^Thc internai
proof is rather strong. The earlier Life was still the popular one
in the days of Fordim, and Bower, and Bishop Elphinsion.
Bower, therefore, was likely to use it for any further détails of
the Saint. And the quaint , picturesque style of our narrative
reminds one of the opcning chapters; only it is better, partly
because the subject is bctter, and panly because the scribe
understood his original. It has only been known in modem
times through Bower's abridgment. Our copy has not even
1 been noticed by any critic, so far as I can ascertaiti, except by
M. de la Villemarqué in his Myrdhimi (1862), pp. 71-76,
La Villemarqué has ignored the name '' Lailokcn '*. He has
referred to our Ms,, as well as to the Scotichronicon; but in his
abstract and hîs quotations he has simply follovved the latter.
Part II of our narrative is a sort of supplementary chapter
(perhaps by a later author); which is addcd to explain how
Lailoken incurred the deadly hatred of the queen of Meldred,
the kinglet of Dunmeller (now Drumelzier). He had been caught
and held captive by Meldred; but he had been releascd, on
condition of explaining a sudden laugh. He had laughed (he
said) at an appfe-leaf entaogled in the queen's hair, a witness
of her frailty. This is Merlinesque, no doubt; but an unexpected
laugh is a natural attribute of any Seer* 1 cannot assert that the
story reached Geoffrey in this particular form, and that he
chose to identify the king with Rhydderch and the queen with
Gwendydd (see his Fita Merlini\ Unes 2)4-293); but I think
that this w^as oot improbably the case.
Before concluding thèse introdoctory Notes, I wâll ofFer
another instance, in which a local tradition seems to hâve been
preserved more strîctly in the earlier than in the later Life.
Many of the old seals of Glasgow bear a figure of S* Kentigern,
514 H. WAÎU>
in connecrion wîth a fish and a ring. The siotj (perhaps siigges-
ted by this device) is told , how a certain king or kinglet of
Strath-Ctyde went out hunting with one of hts knights; hcyw
they rested on the bankof the Qyde, and the knight fell asleep;
how the king saw his queeo's ring upon ihe knight*s hand,
drew it off, and flung it into the Qyde ; and how the king rode
home, and summoned the queen (on penalty of death) to
produce the ring (a gift of his own) within a certain rime. The
queen then appeals to Kentigem, and makes full confession.
The Saint sends a ser\'ant to the Clyde, telling him to bring
back the first fish he can catch. It is a salmon, and the ring îs
tnside it. The Aberdeen Breviary, which apparently dérives ail
îts narratives of Kentigem from the earlier Life, telk this story
of a '* Regina de Caidzow"; ihat is to say, a qoeeo whose
husband was a kinglet undcr Rhydderch Hael» and who had
his seat at Cadyow, about two miles from the Clyde '. But
JoceUne (cap. 36) tells the story of the queen of Rhydderch
himself. It raay be added that Joceline does not call her
Gwendydd, but ** Languoreth *' or '' Lang^-eth ".
Part I. — Sx* Kextigerk akd Lailokek
BoWER*S SûOTXCimOKICOK
(Ub. m, cap. 51),
Df mirahili pjmimlm MerUm t«ifù.
Legiraus qu6d eo tempore quo bea-
tus Kcntigemus eremi dcscfta fre-
quenUre solebat, CDodgit die quidam,
Uk» in soliradînis arbusto soUidte
oraitte* ut quidam demem, nudus et
hîfSOtii&, «b omni solatio mundalî» ut
âppifttit, destî tutus, quasi quoddini
tOTVuiu furiiJe, transitus Éicerei sccus
eum, qui vulgo Latk>keti vocâbatut'.
Trrrs A. XIX (ft, 74-75^)
Sdrraiints aflûOcèm^ btaiei (In
tiitr handy ** Fita Mirlim sihtaim
In 2 Parts,
Part, l. (Keodgem and L^loken).
Eo quidem in tempore quo beatus
Kentcgemus heremi descru frequen-
tare sokbat. contigii die quadam iUo
in solitu^finis arbusto solicite orante.
vt quidam démens nndus et hirsotus
et ab omni bono destitntus. qnan ;
quidam toninm funale traositiim h"
1 . Aftemrards the seat of tbe Hamsltons : sec Waher Scott's ballid ot
•• Cad\t>w Castîe ", in his Minsirâsy of lia Border.
1» The assertion , that Lailoken is said to hav>e ilso bonie the name o| 1
MeHin > but that û\h ts doubtiul (made in tbe fiill nirratii^), is omitied bf
BowicT in ihis sentence ; bat only to bc pliced (qoiic posttjvdy), ftmher ou,
in the hkhmIi d LuMcen lueiiadf.
LAILOKEN (or MERLIN SILVESTER)
Qpcm cùm vidisset Sanctus Kenti-
gernuSj fertar eu m ita diccndo conve-
nisse : Adjuro te, qtiiliscunque es
creatara Dei, per Patrem, et Filium,
et Spiritum sanclum , si ex parte Dei
es, et in Deum credis, ui mecum
loquaris » exprimcns quis es et cur in
hac solitudîne solivagus silvestribus
bestiis comitaris. At concitù dt;mens
cursum coercens respondit : Ego sum
Chrîstîanus îicet tanti nominis reus,
olira Vortigerni vates, Merlinus vocî-
tatus. In hac solitudine dira paticns
ùia, qu3e pro peccatis meis niihi sunt
cum fcrîs pr;EdestinAta : quoniam non
sum dignus inter homines mea punire
peccamina. Eram enim Cîedis omnium
causa interemptorum , qui interfecti
sunt in bello^ cunais in hac patrîa
consiitutis satis noto, quod erat in
campo imer Lideï et Carwanolow
situato : in quo etîam prxlîO) super
me cœium dehiscere cœpit , et audîvi
quasi fragorem mnximum, vocem de
coelo mibi dicentem, Laiïoken, Lailo-
ken, quia tu soins omnium horum
inierfectorum reus es sanguinis, tu
solus cunctorum scelera punies : An-
gelo enim Satbanae traditus, usque
in diem mortis tuas conversationem
habebis imer bestias silvestres, Cùm
autem ad vocem quam audivi mcum
direxi intuitum, vidi splendorem nî-
mium, quem natura humana sustinere
non potuit. Ubî etiam innumcr.ibilis
phalanges exercitûs in aère, fulguri
si m îles corusco lanceas igneas et tela
scintillantia in manibus tenemes,
quae crudelissimè in me vibrabant.
Unde extra meîpsum conversum spi-
ritus malignus me arripuit, ferisque
silvestribus sicut ipse contemplaris ,
praedestinnvit. Et, hisdictis^ prosiluît
înde in loca nemorum infrequentia»
ceret secus eoiu qui Laiîoken vocaba-
tur. quem quidam dicunt fuisse Mer-
lynum. qui erat Britonibus quasi pro»
phcta singularis, sed nescitur,
Quem cum vidisset sanctus Kente*
gernus, fcrtur eum in dicendo taliter
conuenisse. Adiuro te qualiscunque
es creaiura deî per patrem et iilium et
spiritum sanctum. si ex parte dei es et
in deum credis, vt mecum loquaris.
exprimens quis es et cur in hac soli-
tudîne soliuagus silucstribus comitaris
bestijs. At concito démens cursum co-
hercens, respondit- Ego sum christia-
niis Iicet tanti nomînis reus. in hac soli-
tudîne dira paciens fata que pro pcccatis
meis mîhi sunt cum feris prédestinât a.
quoniam non sum dignus inter homi-
nes mea punire peccamina, Eram
enim cedis omnium causa interempto-
mm qui interfecti sunt in bello.
cunctis in hac patria constitutis satis
noto (Af5.-a). quod erat in campo qui
est inter Lidel et Carwannok, in quo
ctiam prelio, celum super me dehis-
cere ccpit. Et audiui quasi fragorem
maximum, vocem de celo mihî dicea-
tem, Lailochen. Laîlochen. quia tu
solus omnium istorum interfectorura
reus es sanguinis , tu solus cuncto*
rum scelera punies* Angelis enim
Sathane traditus vsque in diem mortis
tue. conuersacionem habebis inter bes-
tias siluestres. Cum autem ad vocem
quam audiui meum direxi intuitum,,
\idi splendorem nimium quem natun
humana sustinere non potuit. Vidi
etiam innumera biles phalanges exerci-
tûs in aéra [aère ?] fulguri similes cho-
rusco. lanceas igneas* et tela sdntillan-
da in manibus tenentes, que crudelis-
simè in me vibrabant. Vnde extra
meipsum conuersum » spiritus mah-
gnus me arripuit. ferisque siluestribus
5 lé H. WARD
feris ac avibus nota. De cujus sicut ipsc contcmpUris prcdestinauit.
miseria beaius Kentigernus valde Et hijs dîctis prosiluit in loco [loca?]
compaiiens proddit in faciem suam inde nemorum mfnuïuentia. feris dun-
super terram dicens; Domine Jesu, Uxat ac auibas nou. De cuius mïiemj
hic miserorum misemmus honiinum Kentegemus beitus valdc compassu
quomodo in hac squalenti degit soH- proddit in hàcm suam super tcrran
tudinc in ter bestias, ut bcstia, nndus dicens : Domine Jheso, Hic mis
et profugus; herbarum tantùm pabulo rum misetrimus bominum. quomodo
pastus. Sttae ac pili sunt feris ac in bac squalenti degit soliiodine imer
bestijs tegmina naturaiia; herbarum bestias vt bcstia. nudus et profugus «
vîreoa, radiccs et folia propria ciba* herbanim untura pabulo pastus. Scte
ria : et en hic frater noster, formam, et pili sunt feris ac bestiis tegmina
camem et sanguinem, sicut uaus nos- naturaiia herbarumque virecta. radi-
trûm habens, nudiutc et famé roorie- oa et folia, propria cibaria. Hic tra-
tur. ter nosier formam, nuditatcm. ca^-
Bowcr hère goes on : '* Iddrco nem sanguinem et fragilitatem. sicut
posi tuam nunc mihi iâctam confes- vnus habens ex nobis » omnibus caret
«onem", etc. (see further on) This quibus humana indiget natnra. prêter
is dumsy patching indeed ! LaiJoken duntaxat aerem communem, Quo-
had left Kenùgera ; and it was not modo igimr pre Êunc et algore et iitc-
till aficr scveral more interviews that diarum vniuersitate inter bcstias viuit
the Saint consented to reccive his siîuestres?
confession and give him the sacra- Fleuit igitur pietatis Ucrimis gênas
ment. Villemarqué b naturally not profusus ptus prcsul Kcnt^cmus,
awaïc of this; and he tries to supply soUto ardus, pro dci amore, solitudi-
ihc gap in Bower with the foUowing curi se tradens disdplîne. Opttulaba-
words ; s Et rappelant d^une voix tur etiam domino predbus obnixis.
fone le fugitif: Mon frère, ne me fuis pro illo siluestri homîne. mbero
pas, re\iens. » Tben hc proceeds mth immundo et energuminoso , vt cala-
toc narrative : m Puisque tu m*2S £ui ta miut» et enimpnc quas pacicbatur
conlessiaQ i», eic, (see hb MyriMm, hic in corporc, suc subsistèrent anime
^^ 7^)' re&igerium in ftituro. Hîc autem
dcmcns vt fertur. postmodum de soli-
^EtiiflilM]sseptusveniens.sedebat super
qitiaiidani rupcm proclîuam. que emi-
net trans torrentcm Mellodonor ' quaâ
in prospccxu Glascu, ad aquilon[al]em
partem eiusdem lod ccclcsie, multo-
dcns tnquîctaiiit danioribushorrisonis
sanctum Kente^mumet clericos eius.
diuiiieci08ifieai[ilacioQÎs opcri vacantes.
Ât enîm ibt multa futurs ac si
ll*ii bfook i, «ow câlted the IWmItiwr.
LAILOKEN (or MERLIN SILVESTEr) 517
propheta. Sed quia nunquam repetere
solebat que predixerat. quamquam
erant valde obscura. et quasi non intel-
ligibilia ; nullus ei credere présume-
bat. Sed quasi verba nugatoria quedam
retinebant et scripturc commendabant.
In die autem qua de huius mundi mise-
rijs migrare debuerat. démens iste vt
sueuit ad rupem peruenit prefatam.
beato Kentegerno missam mane célé-
brante, ciulans et damans, magnaque
voce rogitans, vt ab illo christi corpore
rauniri et sanguine mereretur ; ante-
quam de hoc seculo transitum faceret.
Cuius clamoris irreuerendam beatus
Kentegemus cum ferre non possct;
misit âliquem clericum qui silencium
illi indiceret. Cui miser felix pijs et
mitibus verbis respondens. ait. Vade
precor domine mi ad bcatum Kente-
gernum. et eius gracie caritatis opitu-
lare, quatenus viatico me dominico
munire dignetur. quoniam de hoc
seculo nequam , hodie per illum féli-
citer transibo. Cum autem episcopus
hec ab ore clerici audisset , pie subri-
dens dixit circumstantibus. pro ener-
gumino vociférante, illi obnixe suppli-
cantibus. Nonne vosomnes ceterosque
nonnuUos miser iste suis sepe verbis
seduxit. vitamque energuminosam in-
ter feras siluestres multis annis deduxit.
nec communionem christianam nouit?
Qpapropter mihi non credo esse salu-
bre tantum illi munus donare. Sed
perge inquit cuidam clerico suorum
et interroga eum de qua morte morie-
tur , et si hodie sit moriturus. Perrexit
igitur clericus dicens deme[n]ti. sicut
iniunctum ei fuerat ab episcopo. Cui
respondit démens. Q}iÏ3i hodie lapidi-
bus obrutus et fustibus defungar. Gerî-
eus vero regressus ad episcopum, dixit
ei quod audierat ab ore démentis. Epis-
LAILOKEN (or MERLIN SILVESTEr) 519
sim destinatus? Ecce non credunt ver-
bis meis. cum nichil aliud illis prefa-
tus sim , quam quod mihi tu inspirasti.
Conuersus igitur ad clericum dixit.
veniat quam maxime obsecro ad me
episcopus ipse , cuius patrocinio a
domino in hac die precipue sum dele-
gatus. et afferat secum sacrosanaum
quod postulo viaticum. et audiet man-
datum quod deus dignatus est illi per
me significare. Venit igitur episcopus.
multis clericorum precibus superatus ,
deferens secum panem et vinum sacra-
tissimum. Qpo appropinquante, des-
cendens miser felix de rupe cecidit in
faciem suam ante pedes episcopi. in
huiusmodi verba prorumpens. Salue
pater venerande. summi régis miles
electe. Ego sum miser iUe inermis.
qui olim tibi in heremo apparens, fata
mca soliuagus et erroneus. angelis
adhuc sathane traditus. Sed et a te per
deum viuum et verum in nomine tri-
nitatis coniuratus , causam mee cala-
mi tatis enarraui. Pro cuius etiam
erumpnis et miserijs pietate sauciatus
si rétines; domino cum lacrimis pre-
ces fudisti. quatenus omnes angustias
et infortunia. que in hoc seculo pacie-
bar in corpore, in gaudium mihi
conuerteret sempiteraum. recolens
nimirum apostoli verba dicentis, quod
non sunt condigne passiones huius tem-
poris ad futuram gloriam que reuelabi-
tur in electis dei. Et quia oraciones tuas
mei misertusexaudiuit dominus, hodie
in meipsum reuersum. et in deum
patrem omnipotentem. sicut decet
christianum [fidei?] chatholice creden-
tem vt verbis meis credas. hijs signis
munitum, tibi hodie pre ceteris electis
specialius me misit. vt per suscepdo-
nem sacrosancti corporis et sanguinis
eius ad illum hodie me remittas. Cum
$20
Idcirco post tuam nunc mihi fac-
um coofessionem, si verc pœniteas, et
si te digaum tami donî contempbris,
ecce Christi mensae împositam hos-
tiam saJûUrem. Accède taiitûm eam
cum timoré Dd, in omoi humilitate
accepturus, ut îpse Cliriîstiis te quoque
suscipere dîgnetur; quoniam nec tibi
dare neque audco prohibere. Miser
autem confesiim aqui lotus, et unum
Deum in Triniiate ftdcliter confessus,
accessit h u militer ad altare, et suscepit
purâ tide, et devotione maximâ incir-
cumscripti sacramenti niunimen.Quo
percepto, extendens manus ad cœlum
dixit, Gratias tibi ago, Domine Jesu
WAKD
auteni audisset beatus presul Kenic-
gemus iUum hune esse, qui dudum in
heremo illi apparuit. et alia muha tb
ipso que in hoc codicello scripu non
sunt. de incertis ad ceru aliqujutu-
lum promotus. pîctateque coouictus
lacrimis quoque l'aciem pcr£usus ; tni-
sero dcfieoii et dei graciam obiûxe
petenti, respondit benigniter dicens*
Eccc ade[st] corpus et sanguis dotnini
nostri Jhesa Chrisû qui est perpétua
Wuencium- salus vera iû se creden-
cium. gloria etema se digne sumcn-
cium. Qpicunque crgo hoc sa4:ram€ti-
tum digne suscipit , vita viuet et non
inorietur- Qui auiem iDdigr^e, morte
morietur et non viuct
Icdrco si te dignum lanti donî con-
templaris , ecce christî itiense imposi-
tum. Accède tamcn cum timoré dé.
cum omni humilitate ipsura acceptu-
rus. Vt ipsc Christus te quanquam
dignetur suscipere. quoniam nec tibi
dare oeque audeo prohibera Mistfr
auteni beatus coiifestim aqua lotus, et
vnuni deum in triniiate fideliier con-
fessas, accessit humilitcr ad altare, «a
suscepit pura fide ac sincera deuodonc
incircumscripti sacramenti munimoi.
CXuo percepto, extendens raanus ad
celum , dixit, Gratias tibi ago domine
Jliesu. nam quod optaui sanctisâ-
mum, iam consequuius sum sacra-
uixn, uratias tîbi ago, Domine Jesu mum, lam consequuius sum sacra
Christe, quia, quod optav-i, sanctissi- mentum, et conuersus , dixit ad bea
muni jam consecutus sum sacramen-
tum. Et conversus dixit ad beatum
Kemigernura : Pater, si hodie com-
pléta fuerit in me \nia temporanea,
skuta me accepîsti, regum Britannia?
pra^stantissimus episcoporum sanctis-
simus, coniitumque nobiUssimus in
hoc anno me sequentur. Rcspondil
^nctus episcopus : Frater, adhuc per-
niines in simphcitate tua, non pemtus
tum Kentegernum Domine si hodie
compléta fuerit in me vita terapora-
nea. si eut a me accepisiis. Regum
Brîtannie prestantissimus. Episcopo-
rum sanctissimus, Coraîtuni nobîUssi-
mus, in hoc anno me sequentur.
Respondit episcopus. Frater adhuc
permanes in simplicitate tua? Non
expers irreu[er]encie? Igitur vade m
pace, et dominus sit tecum, Lailokcn
I
I
LAILOKEN (or MERLIN SILVESTEr) 52!
expers irreverentiae : Vade in pace, et autem pontificali benediccione sus-
Dominus sit tecum. Lailoketi autem , cepu. prosiluit inde velut capreolusde
pontificali benedictione susceptâ, pro- laqueo venantis ereptus. solitudinis
siluit inde, velut capreolus de laqueo petens letus frutecta. Sed quoniam eâ
venatoris ereptus, promensque canoro que a domino sunt predestinata ne-
jubilo, misericordias Domini in ater- queunt pretermitti. quin ea oporteat
num cantdbo , solitudinis petiit laetus fieri , contigit vt eodem die a quibus-
frutecta, sed, quoniam ea quae a Do- dam régis Meldredi pastoribus vsque
mino sunt praedestinata , nequeunt ad mortem lapidatus ac fustigatus.
praetermitti, quin oporteat fieri, conti- casum faceret in mortis articule,
git ut eodem die a quibusdam reguli vitra oram Trauedis fluminis prerup-
Meldredi pastoribus, usque ad mortem tam. prope opidum Dunmeller. su-
lapidatus ac fustigatus, casum faceret per sudem acutissimam. que in ali-
in mortis articulo ultra oram Tuedae qua piscaria erat inserta. et transfixus
fiuminis praeruptam, prope oppidum per médium corpus, inclinato capite
Dunmeller*, super sudem acutissi- in stangno. spiritum sicut prophetaue-
mam quae in aliqua sepula piscaria rat. domino transmisit. Hec autem
erat inserta, et transfixus per médium cum cognouisset beatus Kentegemus
corpus , inclinato capite , in stagno et derici eius ; consummata videlicet
spiritum, sicut prophetaverat, totaliter ita esse, que de se presagierat energu-
Domino transmisit. Unde quidam; minus ille; credentes et timentes ea
Sudeque perfossus , lapide percussus , et proculdubio fore futura. que de resi-
undd : Hoc tria Merîinum fertur inire duis predixerat. ceperunt omnes
necem. Haec autem cûm cognovisset
Beatus Kentigernus et clerici ejus,
consummata esse quae de seipso praedi-
xerat energuminus ille praemissus,
credentes et timentes ea procul dubio
fore futura, quae de residuis praedixerat,
cœperunt omnes pavere et taedere,
genasque creberrimè lachrimis perfun-
dere, et nomen Domini in omnibus
collaudare ; cui sit honor, etc.
Post haec addit epitome libri Pasle-
tensis, ** Et sic eodem anno mortui
sunt Merlinus, sanctus Kentigernus,
et rex Rodericus".
Walter Goodall , the editor of Bo-
wer's Scotichronicon ( Edinburgh ,
1759), says in his Préface (p. iv) :
" Epitome libri Pasletensis a Joanne
Gibson canonico Glasguensi et rectore
pauere. et lacrimis gênas vberime
perfundere. nomenque domini in
omnibus collaudare , qui est in sanctis
suis semper mirabilis et benedictus in
secula seculorum. Amen.
End of Part I (Kentigem and
Lailoken).
Note. — The couplet inserted by
Bower (see preceding column), is sub-
stantially the same as the couplet at
the end of our Part II.
I . Now Drumelzier (see Conduding Note).
Komania. XXII
34
522 H. WARD
de Renfren scripta A. D, MDt *" The
Blaek Book of Paisley itself is now at
thc British Muséum (Royal Ms, 15.
E. X* Tîie narrative about Lailokcn
ts it r 5B).
Ai thc end of his narrative Bower
has added : **Non mireris qu6d Mer-
lÎDUs et Sanaus Kentigemus uno et
eodcm aono vitam Hnlerunt, dim
siquidem Sanctus Kentigemus fuît
cemum octoginta et unius annorura
quando obiit : nara babetur infrà libri
quinii capite XLIII. de quodam armi-
gero vocato Johannes de Tcmporibus,
qui vixit trecentis sexaginta et uno
annis. Alii dicunt quôd non fait Mer-
linus qui fuit tempore Vortigeroi , sed
alius mirabilis Scotorum vates, qui
dicebatur Lailoken; sed quk pro-
pheta fuît mirabilis j vocatus est alter
Merlinus. "
End of Bower*s Scotichronkoft, IJb.
m, cap* ji.
Part IL — King Meldred and Lailoren^^
Titus A. XIX (fl'. 75*75 b). Fertur quod lailoken a regulo
Meldredo dudum captus. et in opido suo Dunmeller loris
conuinctus lenebatur, vt aliquod nouum ab illo rex audire
mereremn Ille vero triduo ieiunus permanens nuUi penitus licet
a multis conueniretur dedit responsum. Tercio quoque die
regulo in aula. celsiori assidente sedîl[i]. intrauit vxor cîus.
arboris folium suo peplo iDuolunim nobilîter gerens in capite*
Quod regylus videns, manu attraxit, et attrahendo in minuta
frusticula disccrpsit, Quo viso, Lailoken démens cepit in altum
prorumpere risum. Cumque illam solito hilariorem rex Mel-
dredus conspiceret, conuenit eu m blandis verbis dulcissime
dicens, Amice mi La![ok[en]dic mihi obsecro quid risus porten-
dcrit, quem argute stringendo auribos nostris tinnire fecisti, et
liberum eundi quo vis te dimittam. Ad hec confestim Lailoken
I . There is nothing in the Scotkhronkon that corresponds to our Pan II.
LAILOKEN (or MERLIN SILVESTEr) 52)
MS{iondit. Tu me cepisti. et vinciri loris îussisti, gliscens nooum
aKquod audire oraculum. Quapropter problema nouum de noua
tibi proponam materia. De veneno stillauiidulcedo, et de melle
amaritudo. Sed neutrum ita licet verum manet vtrumque* En
proposai questionem, die si potes solucionem, et me liberum ire
dimitte. Regulus respondit* Hoc problema valde est perplexum.
cuius nescio soluere nexum ^ Die igitur aliud apercius sub
premissa condicione. At Lailoken priori siraite problema protulit
dicens, Bonum pro malo fecit iniquitas. e conuerso reddîdit
pieias. Sed neutrum ita licet verum manet vtrumque. Regulus
dixit. Noli vitra loqui per conieccuras. sed palam die nobis cur
risisti, et questiooum soluciones quas protuHsti, et liber a vin-
culis eris, Lailoken respondit. Si palam loquutus fuero, vobîs
inde mesticia. mihi autem mortifera orietur tristicia. Ad hec
regulus. Quaraquam inquit ita futurum fore contigerit, nîchillo*
minus audire hoc volomus. Lailoken siquidem intulit regulo.
Tu quoque cum sis iudex scieocia preditus, die mihi prius vntus
pragmatis iudicîura, et tois postmodum iussis parebo. Regulus
respondît. Die cito causam. vt audias iudicium* Lailoken dixit.
Qui summum honoremconfert inimico. et supplicium pessimum
amico. quid meretur vterque ? Respondit regulus. Talionîs vicem.
Recte inquit Lailoken iudicasti* Proîndc nîmirum. vxor tua
promeruit coronam, tu vcro pessimam mortem, sed non ita.
licet verum restât vtrura[que], Regulus dixit. Cunctorum que
facis fucus opacitate concludiior. Edissere ergo nobîs obsecro
bas questiones, et quicquid hooeste potest persolui* si postules
tibi dabo, Respondit Lailoken, vnum valde dabile postule, liber-
tate non pretermissa. videlicet vt tradas corpus meum sépulture,
ad partem huius oppidi orientalem* in loco funcri. fidelis defuncti
competenciorej haut longe a cespite, vbi torrens Passales* in
flumen descendit Tuedense, Futurum est enim post paucos
dics, trina nece me morit[urum], Cum autem confurcacio
ampnis vtriusque contigua fuerit tumulo meo, pactor Britani[ce]
gentis dominabitur adultérine K Hec dicendo, signauit excidium
I. Hère and ihere, ît will be obsen^ed , jingles occm in the dialogue.
Perhaps the writer was , half tinconsdously, imitating the forra in whkh hc
had heard the ston^ told in Celtic.
2 «The brook Paasayl : see our Concluding Note.
|. That is, Cadwaladyr shdl subdue the Saxons : see our Conduding
Note.
524 H* WAKD
Britinnorum, et itcrum eorum diuorcij refonnacioncra esse
futuram. Hec il!o et alia protrahente. et que audire optabam
ficcius différente, regulus ac régula eorumque curia. concessa
funeris postulacione. cum iuramento affimiauerunt vi liberum
et incolumem illum quo vellet ire dimittereat* At Lailokcn lorij
solutis stans fugere paratus, huiusmodi verbaexorsus est diccns,
Qiiid est ainarius felle muliebri, quod ab tnicio serpentino
infectum est veneno? Quid autem dalcîus iusticte censura per
quam mites et humiles a felle impiorum defenduntur? Hec
quippe mulier vxor tua suDimum honorem hodie suo contulit
ininiico, tu vero amicum rtdelem conscidisti in frustula, Sed
ncutrum ita quia hoc faciens. bene facere existimasti. Illa vero
honoris quem ininiico confercbat. prorsus erat ignara. Secun-
dum problema, huic est simile. Tune iniquitas fecit bonuni,
cum mulier nequam suum veneraretur proditorem. Tune pietas
fecit malum, quando vir iustus suum fidelem occidit amicum.
Sed neutrum ita, quia inscius facti fuit vterque. Régula enim
paulo ante in orto reguli adultérante, descendit folium arbaris
super caput eius vt illani traduceret. regique adulterium mani-
festaret. Quod in peplo suo inuolutum coram omnibus régula
super caput suum in auiam portando venerabatur. Qyod cum
vidisset rex, protinus digitis attraxit. et attrahendo dlgitis suis
minutatim decerpsit. Hoc est quod mulier honorem contulit
inimico. qui facinus suum prodere voluit. et quia rex iuiuriam
fecit amico, qui vt crimen euitarei illura premunire decreuit.
Lailoken hijs dictis. solitudinis squalena inuia petente. nulloquc
eum persequente, oranes pariter nutare ceperunt. Mecha vero
cum lacrimis machinans dolum, regulum quam dulcibus cepit
alliccre sermonibus dicens. Noli domine mi rex venerande
Jîuius démentis credere verbis, quoniam vt credi fas est» nichil
aliod coniecturando fecit. quam querere a nexibus solui et
dimitti, tiuapropter mi domine cum complicibus presto sum
ydoneis, me de obiccto crimine purgare. Ipse quoque audisti
nobiscum, quatenus seductor îlle pessimus dixit se ter moritu-
rum, quod proculdubio est impossibile. Quoniam m nuUo
semel defuncto, mors iterar[i| potest. vtrumque ergo pari palet
mendacio. Proptereasi propheta vel vates fidelis csset, nunquam
se capi permitieret seu ligari. a quibus vellet postea erui. Quam-
obrem si illum persequi désistas, nostrum obprobrium et regni
*"* -mnam fouere videberis. Tu ergo quia honor regîs iudi-
tui mu
LAILOKEN (ou MERLIN SILVESTEr) 525
dura dîlîgît, non debes tantum scelus înipunitum transire. ne
forte illi parcenJo honor regni insolescat. At hec regulus res^
pondit. O mu]ieruni stultissima. si verbis tuis obtemperarc
andauero, tu mecharum fedissima fuerîb probata* ille autem
veridicus propheta. Dixit eiiim. Si palam rtfferamque postularis,
vobis inde mcsticia. mihi autem letalîs orietur tristicia, Nostra
iam quippe patet tristicia. sua vero quamdiu superfuerit latet
mestjcia. Mu lier hijs dictis vberius in lacrimis prorumpens quia
quot! voluit non valuit, clam morti Lailoken parabat insidias.
Post aliquot quidem annos, contigit Lailoken illo die quo diuino
erat premunitus viatico. occidente iam sole transîtum facere
per campum secus castellum Dunmeller. Quo a quibusdam corn-
perto pastoribus. qui erant in illum a nequam femina încitati,
sicut predixerat. et super inscriptum est, ita de dlo diffioîtum
esse audiuimus. Cuius vt dicitur corpus exanime. rex tradidit
sépulture in loco videlicei quem ipse adhuc viuens sibi preele-
gerat. Porro opidum istud distat a ciuîtate Glascu quasi xxx**
miliaribus* In cuius campo Lailoken tumulatus quiescit.
Sude perfossus. bpidem |>erpessus. et vndara ;
Medinus triplicem fertur misse necem.
End of Part II. (King Mddrcd and lailoken.)
CONCLUDING NOTES
ïiinmeller, în Tweeddale (now Drumelzîer, in Peebleshire)
used to be in thc heart of the Caledonian Forest,
The '* pactor britanice gentis " is no doubt Cadwaladyr,
whose miraculous return, a^ ihe imiter of the Cymry froni
Cumbria to Armorica, was often prophesied in the Merlinesque
poems. When ît is said that he '* dominabitur adultérine
[genti]", that is, over the Saxon race, I do not suppose that more
is meant by that phrase than intrusive\ but it seems to hâve
suggesied to the author the idca of there having been a divorce
between the varions Celtic families.
Thc conckidiog prophecy has hiiherto (I believe) been only
known in a very modem form. It was first published by
Alexander Pennycuick (or, as he vvrote the name himself,
Pennecuik), M. D., in A ^eograpbical htstoricaî Description of
the Shire of Tweddale (Edinburgh, 1715)» The following passage
526 H. WAKD
is at pp. (26)— (27), '' A little furder down is the town of
Drumel^^er, with the Church» Mr. fVaUac^ Minister. There is
one thing remarkable hère» which îs, The Bum called Pausayl,
runs by the Eastside of thîs Church-yeard into Tweed, at the
sideof which Bum, a little belowthe Church-yeard^ the famous
Prophet Merlin is said to be Burîed. The particular place of his
Grave, at the root ofa Thorn-Tree, was shewn me many years
ago, by the Old and Révérend Minister of the place Mr. RkJmrd
Braum^ and hère was the old Prophecy fulfiUed delivered in Se4^s
Ryme to this purpose :
ff^hen Tweed and Pausiiyl meii at Merlins GratM^
Scotland and England, shalî one monarch hâve.
For the same Day that our King James the ^'* was Crowned
King of England, The River Twùsd by an extraordinary Flood,
so £ar Overflowed its Banks, that il met and joined with Pausayl^
at the said Grave, which was never before observed to fell eut,
nor since that time ". Walter Scott gives some account of Merlin
out of the Scotichronicoriy and then he quotes part of the above
passage from Pennycuick, in his Introduction to the Second
Ballad of Thomas the Rhymer, in his Minstrelsy of the Scottisb
Border. See also the remarks of J. S. Stuart Glennie, in an
Essay, which is prefixed to Part III of the Early English Text
Society's Merlin (London, 1869), the Essay being entitled
Arthurian Localitics (p. lxxii).
H. L. D. Ward.
MÉLANGES
D'UN COMPARATIF GALLO-ROMAN ET D'UNE PRÉTENDUE
PEUPLADE BARBARE.
Il y a dans le département de la Marne une commune du
nom officiel de Courtisais, Il est certain que, dans CaurtisolSy Vs
finale est paragogique et que 17 a pris la place d'une r anté-
rieure, sans doute par suite de dissimilation : on disait autre-
fois CourtisoTy et Ton prononce aujourd'hui Courtisou. Si j'ajoute
que d'anciennes chartes latines traduisent la forme vulgaire
par Curtis Ausoruniy Otiosorum CurtiSy on ne sera pas surpris
que Quicherat ait fait figurer Courtisols parmi les noms de
lieu qui ont conservé jusqu'à nos jours d'anciens génitifs
pluriels*. Dans l'introduction de son Dict, top, de la Marne
(189 1), page X, M. Longnon s'exprime avec quelque réserve à
ce sujet. « Courtisols y dit-il, Curtis Ausorum^ semble avoir
pour second élément le nom de quelque peuplade étrangère. »
La réserve de M. Longnon porte plutôt, à ce qu'il semble, sur
les mystérieux Ausi (pourquoi pas Otiosiï) que sur le génitif
pluriel dont Courtisols continue à ses yeux, comme aux yeux de
tous, à être le dépositaire.
Or, voici toutes les formes réunies par M. Longnon
jusqu'au commencement du xiii* siècle pour le nom de Cour-
tisols : Curtis Acutiory 847; Curtis Agutior, vers 850; Curtis
AusorutHy 987-996; Otiosorum Curtis y 1028; Ausorum Curtis y
1043; Curia Ausorum y 1132; Cortesory 1165; Cortesoriumy
1181; Cortesorty 1185; Curtis Auxorumy xii* s.; Cortoisory
I. Traité de îaform. des noms de lieu, p. 59. La liste de Quicherat a été
reproduite par A. Darmesteter, Traité de Iaform, des mots composés, p. 48, n. 3,
et en partie par M. Suchier, Le franc, et le prov.y p. 222. Sur une douzaine
de noms donnés par Quicherat, quatre au moins sont i rejeter.
J28 HfeÀKGES
Corîaisùur^ 1203, I2i2; Cariisar^ «215, etc. En présence de ces
textes et de leurs dates respectives, il est difficile d^accoîder 110
plus grand crédit à Curtis Auu^trum qu'à OtiûSârum Curiis.
Pour mon compte, j'aimerais mieux m'en tenir à Curiis JÊat-
tior de 847, et dire que dans Caurîisùls le second élément
représente, non pas « le nom de quelque peuplade étrangère •»
mais le comparatif acuttôrem» qui, d'après les lois phoné-
tiques du français, a dû devenir auisar. C'est sans doute cette
forme auisor, dont Y s devait être à Toriginc très peu sensible,
qu'il faut reconnaître dans la traduction latine Ausorum.
Que si 1 on a des doutes sur Temploi effectif de acutiorem
dans la topographie de h Gaule, j'en puis citer un autre
exempte, emprunté à la région méridionale. Il y a prés d*Agen
une localité appelée officiellement Montagusan^ nom que Ton
écrivait au xi* s. Montagu^or *, et dont l'étymologie est mani-
festement Montem acutiorem. J'ajouterai encore que acu-
tiorem n'est pas le seul comparatif inconnu de la langue
commune que nous ait conservé la topographie. Je relève 4
plusieurs reprises dans le censier de Solignac, Haute- Vienne
(xu* s.) : mansus sotrâry rnansus sutràr^^ et je ne crois pas
que J(?/n5r représente autre chose que subteriorera. Ce même
comparatif, ainsi que superiorem, se retrouve d'ailleurs dans
deux noms de lieux du Dauphiné. On lit dans le Cartuîairtdi
Saint'André-k-Bas de Vimne, p.p. U. Chevalier (Vienne et
Lyon, 1869, p. 263; Âpp, chart, Vimn, ^S}): « in loco et villa
que diciiur Monte Subteriore (1051) n, et (iWJ. ^84 et Caf-
tuL p. 88) « in Monte Superiore »; ces deux localités sont
aujourd'hui Monsteroux çi Momeveroux (c**" de Beaurepaire, art.
de Vienne).
A. Thomas,
.
1. Monuguson figure encore comme chef-lieu de commune dans le EHa,
miv. Jés gwgraphies de Masselin ( 1 827) ; depuis il a été réuni i U commune de
Cours* La prononciation locale doit être Mantagusou, que l'on a transcrit mal I
propos, dans cette langue incohérente qu*on peut appeler le français topogra-
phique, par Montaçusùtt.
2. Ecclesia de Monte Aguzor, CarL de Connues, n» 572 ; cccîesia in Monte
Aguzor, tbid.^ no 586.
î. BibI nat. Nouv, acq. ht, 461, fol. 2 yo et j vo; les aorents sont dans
le manuscrit.
^^^^,.->^
LAISSE 144' DU ROIJKD
529
LA LAISSE !44 ' DU ROLAND
Le passage du Roland compris dans les vers 2031-2059 du
ms. M, correspondant aux laisses 204 de C, 193 de V, 105 de
P, 92 de T et 62 de L, appardent-il à la rédaction primitive de
la chanson, bien qu'il ne se trouve pas dans le ms, d'Oxford?
On peut tout d'abord remarquer que ce passage, qui nous
raconte la fuite du roi Marsile avec 20000 des siens, netiit double
emploi ni avec ce qui précède ni avec ce qui suit, et que, — au
moins dans M et C, — le style a les qualités ordinaires de Tau-
teur : la rapidité et la simplicité. En outre, comme presque toutes
les laisses de la chanson, celle-ci, que nous appellerons 144*
pour plus de commodité, forme un petit tableau complet en lui-
même. Son existence dans la rédaction primitive A est donc
bien vraisemblable.
Si nous Texaminons dans les mss., nous arriverons à la
même conclusion.
En effet, M et O forment une famille ayant pour origine des
mss. a' et a", issus tous deux d'un type jtj C» V, T, P et L — je
ne parle pas de F, vu que le passage en question n*est pas arrivé
jusqu'à nous — appartiennent k un autre groupe (3), C et V for-
mant une famille copiée sur un ms. ^', dont un autre exem-
plaire, g", a donné naissance à deux autres familles, y (repré-
sentée par T) et y' (représentée par P et L), La multiplicité et
la concordance de témoignages provenant de sources si diffé-
rentes obligent à reconnaître que le copiste d*0 a tout simple-
ment omis 144 '• Pour quelle raison? Peu importe.
Ajoutons à ces témoignages ceux de la Katiamagni4s Saga et de
la rédaction de Conrad, lesquelles, faites sur d'autres mss, que
ceux que nous connaissons, renferment toutes deux le passage
en question, et nous conclurons que, de vraisemblable, l'exis-
tence de 144' devient certaine.
A ces raisons d'un ordre extrinsèque, il est possible d'en
joindre d'autres tirées du ms. d'Oxford même. Trois fois, dans la
suite du récit, il est fait allusion à la fuite de Marsile, Le vers
2570 dit :
U reb Marsilie sen fuît en Sarrjguce,
Sans b ktsse 144 ^ cette phrase serait înintelligible, et il en
seiait de même do vers 27S43
Final SI
Enfin le vers 1913,
t qmi m |ioGt 1
De CD ^« dit se fiûr sa e
rend évidente la nèœssîté de restitoer 144 '. Cette exclamatioii»
m Qo'impofte si Marsîle s^est enfiû ? «» ex^ pcmr la danè et la
liatsoo du rédt qu^S ait été question prècédônment de la (îitte
do roi dans des termes positifs.
En résnmé, la restitution de 144' s*impose^ parce qtie cette
laisse est — an moins dans M et C — conforme au s^le de
l'auteur, parce qu'elle se trouve dans tous les mss. autres que
O et dans deux rédactions étrangères, enfin parce qu'elle esc
nécessaire i l'exposition.
Mais comment £iudra-i-il la resdtoer? Aux 7 vers donnés
par M et Q qui sont presque identiques» faut-tl ajouter ceux
que donnent V, T, P, L, ou quelques-uns de ces vers ? Les
amplifications constantes auxquelles se livrent les copistes de ces
derniers mss, ikhis les rendent a priori suspects. Nous, n'hésite-
rons donc pas à éliminer les ^xrs surabondants de V, T, P et
L, et nous ne nous servirons de ces mss. que pour y chercher
au besoin une expression quand le terme exact aura été déna-
mré ou remplacé par M et C. A la vérité, k vers 3 de V, 2 de
T, P, L semblerait pouvoir s'intercaler entre les vers i et 2 de
144'. n a pour lui Taccord de 4 mss., et il est très vraisem-
blable. Nous l'écartons cependant, ayant remarqué que son
introduction a obligé V, T, P et L à modifier la construction
du premier vers, qui devient une proposition subordonnée, tan-
dis que dans M et C il forme une proposition principale. Or,
C et M sont incontestablement plus près du texte primitif que
V, T, P, L. Nous réublirons donc seulement les 7 vers qu'ils
nous donnent.
Les trois premiers n'oflErent pas de difficultés et peuvent se
restituer ainsi :
lÀ reis Marries lo poing destrç it perd ut;
Encontre terre puis getet son escut;
Lo cheval brochet des esporoos ngui ;
Au 4* vers» laisserons-nous lasrit que donne M, prendrons^
RÉVISION DES ÉTUDES SUR LE POÈME DU CID 53 1
nous la locution Droite la reincy formant une sorte d'ablatif
absolu, de C, guenchist de V, T et L, ou torne de P ?
Je crois qu'il faut écarter laseit. En effet, si, en éperonnant
son cheval, Marsile avait lâché la rêne, c'eût été parce qu'il se
serait élancé contre l'ennemi, ainsi que le prouve la comparai-
son avec les vers 1290, 1381, iS74, ^99^ ^^ 3877> où noas
trouvons ce lieu commun : lâcher la rêne. Ici, Marsile a épe-
ronné son cheval pour fuir ; il a donc dû tourner bride.
Droite la reine ne signifie pas grand chose.
Si les copistes de M et de C s'étaient trouvés en présence de
torne y mot qu'ils connaissaient puisqu'il se trouve dans tout
le domaine roman (it. tornare; esp., pg., pr. tornar; roum.
turnà)y ils n'auraient, très probablement, pas changé le texte.
J'admettrai donc assez volontiers que la rédaction primitive
zvdxt guenchisty mot d'origine allemande (anc. h. ail. wankjan^
auj. wanken et schwanken^y qui n'a de représentant qu'en anc.
fr. et en roumanche (Coire, guinchir) et que les Italiens, copistes
de M et C, pouvaient ne pas comprendre. Guenchist convient
très bien comme sens et M. Godefroy donne 4 ex. d'un emploi
identique {Ogiery AmadaSy Tristan [en prose] et Parise).
Nous rétablirons donc le 4* vers ainsi :
Guenchist la redne ; vers Espaigne s'en fuit.
Les vers 5 , 6 et 7 peuvent être restitués de la manière sui-
vante :
E tels vint mille s*en vont deriedre lui
ou : s'en alerent o lui
N'i at celui ne seit el cor feruz.
Dist Tuns a l'altre : Li niés Charle at vencut.
Aoi.
A. Salmon.
RÉVISION DES ÉTUDES SUR LE POÈME DU CID
I
P. 423, w. 2231 3438 /. Por mando del rrey Alfonso.
— i;. 2951 /. E que[ent] vos pesé, rréy.
P. 424, V. 2986 /. Porque dentro en ToUedo el rrey fazie cort.
5Î2 MÈLAKQES
P. 424, V. 629 L Ayrol el rrey Alfons&o ou bien A3
Alton sso.
— w. 213 s 304Î /, Rrespuso el rrey [al ÇtdJ,
P. 425, V, 2127 î. En d, en so o» Sobrel cavâllo Bzv
Diâ2 salto à\o,
— t^* 2420. /. Alcançûl ou Alcaoço el Çid a Bu
— t\ 2476 /. [Myo Çid] a!ço k mano.
— w, 632-633 /.Si non das conscîo, [rrey] oti
dieres conseio ou Si non pusicres conseio
Temel perdras [E] perdras CaJaiayuth, erc
dras était la far me Ânt si servait le poète,
P, 426» V. 2410 /. [Tu] v^eerte as con el Çid.
P. 427, w, 2278-2279 /. En Valençîa se folgava el
todos los SOS, Con eipi] amos sus ycrno
de Canton.
— ^. 2464. Cmplélfr le t^rs en lisant : Mas e
cuydavan m cuydamn, leçmi qui réiabli.
r autre msamineeet qui s^ appuie sur la Clwo9
cbap, CCtXXVn ; Bien to dezia el Çid,
al se tenian en el coraçon, passade qui
txtriantes inst^i^arttes , se reirmeve dans
£Espa^m^ fol. cccxiv, tr* A.
P* 428, V. 2677. Mieux ttîJifl lire je crois : Por m]
Bîrar ûu por myo Çîd natural ; cf> v. i^
tef&n de myo Çid natural que me prûp^^se
Ri^lin me semble tout à fait à sa place.
t\ 299S> Une autre leçon serait El enemigo d<
-^ et. 3612-3613. Af. le ly Roi in évite FâSSù
césure en lisant : Dcsi los de myo Çîd va
Canion E los de Carrion \ietieii a los del C
165 . Le premier bém. est œmrî^
1402. te premier jWaf. est awrecf.
^ 1714 L Diva salto myo Çid.
P ^^^ *" ^5^ ^; Fw el Camp^dor posar e œvad
^^ 4|0, r. 169. Urne i^cn m^i^ r^bercb^ serait : Ca
el Çid,
~ ' " .™ '' ^""^ ^ '^ ^^"^ ^^ Çi^> i^-^ ^
^ ^entasse, ^" >
V* PQT nosj so« yemœ cato e nolos
P- 459. E '
t%
RÉVISION DES ÉTUDES SUR LE POÈME DU QD 533
Les hémistiches que voici sont d'autres excellentes preuves du
vers de quatori^e syllabes et auraient dû prendre place après
l'article Rruy Diaz myo Çid :
De myo Çid Rruy Diaz 942.
Con myo Çid Rruy Diaz 1237.
Que myo Cid Rruy Diaz 784 958.
Que a myo Çid Rruy Diaz 25.
P. 431, w, 720-721 /.
Ferid[los], los cavalleros, por amor del Criador,
Yo so el Çid Rruy Diaz de Bivar Campeador.
— v. 1140 /. Yo so el Çid Rruy Diaz Campeador de Bivar.
P. 432, V, 2558 /. Fablo yfante Ferrando.
v. 3624 /. Con yfante don Ferrando.
P. 434, V. 187 /. Cinco escuderos tien, a todos [çinco] los
carga.
V. 1 5 00. Supprimer comme mauvaise la sec. des deux leçons,
P. 435, V. 1994 ^' E aquel Alvaro Alvarez.
V. 1999 /. el bueno de Aragon = 3071.
P. 437, V, 3379. La leçon du ms. est bonne,
P. 438, V. 282 /. Plega a Dios [Criador] e (a) [madré] Santa
Maria.
— V. 1867. Supprimer « lire tris probablement de mime
V. 1867 », où la leçon est pour le moment bien difficile à
rétablir. Le ters avait une assonance en i.
— V. 2980 /. Que en Tolledo cort fazie en el plazo
senalado.
P. 439, V. 3597 I. Je n approuve plus la leçon proposa.
— V. 2Sj2 l. Plutôt A la torre de Urraca.
— t/. 2613 /. PUERTA au lieu de HUERTA.
— V, ^Sj, La leçon du ms, Salieron de Aïcocev peut ou doit
rester,
— V, 1 174 /. Mal se quexan en Valençia.
P. 440, î;."i396 I. Omilom dona Ximena, est une excellente
leçon à laquelle je n aurais pas dû toucher,
V, 3017 /. Que amas manos besasse ou que besasse amas
manos et supprimer l'autre leçon,
P. 441, V, 1790. Alfonsso el Castelano doit rester. Le premier
hémistiche est fautif. La première des leçons proposées
pour le V. 2900 est par conséquent mauvaise.
— V. i()2<).Ala leçon du ms, Alfonso el de Léon je préférerais
^^JsTi
MÉLAKCeS ^H
rrey Alfonso de Léon. Pour des raucm que je ne pms ^
développer maintemni^ je lirais aufaunTlmi t. 3536 J
Ellos eran en poder au en h maso de Alfcmsso de ^M
Léon et, t\ 3543, A Alfonsso de Léon; cf. v. 3717, H
qui rne semble confirmer ces leçons. ^M
^^B
t/. 2013 L De un dia lego antes cl [boen] rrey don ■
Alfonsso. ^^M
^^^^H
V. 3 171 n /. vos sodés nuestro Senor; cf, 5403. ^^M
^H
V, 290. La le^ûft du ms. peut rester. ^^^Ê
V. 1714 L Dava salto myo Çid. ^^^^
V. 2127 n. Rruy Diaz salto dio. |P^H
^^^H
V, 3004. V hémistiche est correct, mais tassmmM ts^^M
fausse, ^M
^^V 443,
, î/. 3148 /. [Aqu]esto fyo] les demando a condcs de ^M
Carrion. I. 2952 au lieu J!f 295 1 . ^M
^^^H
i;, 3 38 1 /* Qui con los de Carrion le darie a casar. ^M
^^H ^-444>
V. 3129 /, Del dia que fui rrey au Hyo desdc que fui ^M
rrey. ^M
^^^H
V. 3 130 /- La primera fue ea Burgos. ^M
^H 445,
, V. 3132 /. Catando esran al Çid quantos [que] ha en la ^M
con. ^M
^H
V. II 90. Viniesse a myo Çid doit rester. ^|
^^^H
V, 1302 /. Plaz a Minaya Albarfanez de lo que diz don ^M
Rrodrigo; w. 539-3 120 /. [DeJ lo que dixo el Çid, ^Ê
^^1
V. 102S L Dixo el conde : comed ; cotnme il arrive sem- ^M
vent, le texte s'embarrasse quand Vassofuince change, ^M
^^^^L
V. 2514. Une leçon plus simple est : que el Campeador ^|
^1
^^^H
w, 2049 2227. /. dtpréfèrenc€ Çid el buen Campeador. ^
^^m
sV, 911. V assonance à la césure tne fait dernier de la jus- ^J
tesse de la leçon adoptée. ^Ê
^^^^^m
V, 2685 /. grade el Campeador ; que appartient à Fautre ^^
hémistiche. ]
^^^^H
î/. 2280. durmie el Campeador est un hémisticlye douteux. M
^^^^^^H
V. 2230 L H>^oios fitos sedie el [buen Çid] Campeador H
ou myo Çid Campeador. H
■L'. 3192. Supprimer u est un hétnistiche douteux ^. ^|
v^ 2527 /, fablo ifante Ferrando. ^^Ê
^^^^^^^H
v^ 92s L bien ynne a a mi, Minaya. ^^H
î'. 1815 /. qoe fse] bsse con Minaya, ^^H
RÉVISION DES ÉTUDES SUR LE POÈME DU CID 535
P. 452, V. 1256 /. elli se va consegando.
— î/i/. 347. V assonance est incorrecte, L. peut-être Do dizen
mont de Calvar ou En el monte de Calvar, comme on
lit, Poema de Alfonso XI iiS 1521 1914.
— V. 3629. La première leçon est impossible; l. Firme estido
don Pero.
P. 453, w, 3053-3054. Les deux assonances en ado sont invrai--
semblables dans cet entourage; L El[buen] rrey don
Alfonsso a Tolledo fo entrar [E] myo Çid Rruy
Diaz en San Servan va posar.
— v. 911 . Voir la rem. sur ce vers quelques lignes plus haut.
P. 454, w. 2962-2963. // serait aisé d'obtenir des assonances en 0
en lisant : Por todo el myo rreyno andaran myos
pregones, Pora dentro en Tolledo pregonaran mîa
cort.
— v. 2335 /. En Valençia [vos] folgad.
— i;. 1814 /. Del [Çid] que Valençia manda.
Les passages traités ci-dessus sont, dans leur ordre, les
suivants :
25
784
1714
2279
2951
3148
lés
9ir
1790
2280
2962
3170
169
92s
1814
2304
2963
3192
187
942
1816
2335
2980
3379
282
958
1867
2410
2986
3381
290
1028
1927
2420
2998
3438
347
1140
1994
2464
3004
3536
428
1174
1999
2476
3017
3543
43 î
1190
2013
2514
3043
3597
539
1237
2049
2527
3053
3612
587
1256
2127
2558
3054
3613
629
1302
2135
2613
3071
3624
632
1396
2227
2677
3120
3629
633
1402
2230
2685
3129
720
1470
2231
2812
3130
721
1500
2278
2900
3132
Prague, mars 1891.
J. Cornu.
Sî6
MËLANCeS
SUR L^ORIGINE DU POÈME DE PHYLLIDE ET FLORA
II est en général difficile de déterminer le pays d'origine des
pièces dues aux clertci vaganUs, II y a pourtant des exceptions,
et parmi celles-ci il faut ranger, selon nous, une des poésies
les plus charmantes de la classe des erotica du recueil connu
sous le nom de Carmina Buratia ', celle qui est intitulée De Pbyl-
lide et Flora. Le fait seul qu'il y a quatre poèmes français trai-
tant le môme sujet ^ fait soupi^onner une origine française,
mais deux passages du poème latin lui-même confirment cette
hypothèse.
Le premier se trouve str, 7. Les deux jeunes filles, dît le
poète, au moment où le débat commence, étaient assises sous
un pin :
Ut pucllis noceat calor solis minus,
Fuit juxta rivulum spaciosa pi nus,
Venustata foliis, late pandens smus,
Ncc intrarc poierat calor peregrinus.
Ce trait a fait penser à une origine italienne* « Les jeunes
filles, » dit M. Hauréau ', « sont assises, avant de commencer
leur débat, sous un pin d'Italie, puisque ce pin forme sur leurs
têtes un dôme de verdure. » Déjà BDrckhardt4, dans son ouvrage
sur la Renaissance, avait cité le même passage, pour revendiquer
pour notre poème, ainsi que pour les plus belles pièces du
recueil des Carmina Buratia^ une origine italienne. M. Ch.-V.
Langlois, dans son intéressante étude sur les poésies goliar-
diqoes, analysant notre pièce, parle, lui aussi, sans se pronon-
cer d'ailleurs sur la question d'origine, d'un « pin parasol» ».
Nous croyons qu'on fait trop d*honneur aux connaissances
I . Carmina Bttrana (dans BibUothék des liUfiarischtn Fera us in Stuttgart ,
t. XVI), p, IS5 ss.
a. Voir en dernier lieu E. Langlois, Origims tt sources du Ronmn dt ta
Rose^ p, 11-15.
3, Notices et txtraitsdes manuscrits^ XXIX, 2* partie» p. joS,
4. Die Cul tut dcr Retiaissanct^ 1, J2} (j* édition).
>. Hfinu poîi tique cl linéaire, 1893, t. I, 175, col. a.
SUR l'origine du poème de PHYLLIDE et FLORA 537
botaniques du poète inconnu en lui prêtant des conceptions
aussi précises. La mention du pin est tout simplement emprun-
tée aux chansons de geste ou aux poèmes qui les imitent de
près. On trouve le pin déjà dans le Roland (v. 114, 2356,
2375, du texte d'Oxford), et il figure évidemment comme un
arbre qui donne de l'ombre. De même dans le ms. IV de
Venise (v. 2354 édition Kôlbing, à insérer après le v. 2201
d'Oxford) :
Deso| un pin e foluç e ramer.
Dans les chansons de geste postérieures, le pin est mentionné
à tout propos et hors de propos pour remplir le vers ou amener
une assonance en i : voir notamment Fierabras^ p. 3 , v. 73 ,
p. 28, V. 896, p. 50, V. 1633 (Je ramé pin), p. 138, v. 4579.
Des chansons de geste la mention passe aux poèmes narratifs
qui imitent particulièrement le style épique.
Dans le Roman de ThèheSy v. 2375, il est dit d'un messager :
Tant a brochié par le chemin
Les dames trueve soz un pin,
Sor un pué ou eles 5*omhreient.
Ce passage est curieux parce qu'il insiste sur Vombre de
l'arbre*. Enfin, dans une des versions françaises du débat {De
Hueline et d' Aiglantine , v. 8, dans Méon, Nouveau Recueil , I,
353), le fameux pin reparaît : les jeunes filles, dit le poète.
Amont vindrent par le jardin
A la fontaine sor (lis. soz) le pin.
Évidemment l'imitateur français, qui prenait tant de libertés,
n'eût pas reproduit un trait qui lui aurait semblé étranger*.
1 . On peut cependant remarquer que dans les poésies goliardiques la men-
tion de Tombrage est fréquente , ainsi que Ta observé M. Marold (Zeitschr,
fur Deutsche PhiL, XXIII, 24), et que Tinsistance du poète, dans notre passage
comme dans d'autres, pourrait s'expliquer par une influence de la poésie
antique.
2. Le pin se retrouve dans la fameuse Altercatio Ganymedis et Heletue
(strophe 3) et dans une imitation de cette pièce publiée en partie par
M. Hauréau, Notices et Extr., XXIX, 2* partie, p. 276. M. Wattenbach
(^Zeitschr. f. deutsches Alterthum, XVIII, 12s) attribuerait volontiers V Alterca-
tio à un Français du Nord, mais la mention de Tolivier (str. i) le fait penser
à un Provençal. Ce n'est pas nécessaire : Tolivier est mentionné dans la
Romani4,Xni 3)
538
MèLANGES
Ud passage plus important est la descriprion du palefroi de
Flore qu'elle monte pour se rendre à la cour du dieu Aniour.
Le cheval» dit le poète (str. 50-52) était
Pictus artifîcio varii coloris,
Nam mixtus nîgredini color est olorîs.
Loro fuit habilis çtatis priraçvç,
Et respexil paululum timide, non s^ve.
Cervix fuit aniua, coma sparsa lève»
Auris parva^ firomituns ptiius^ caput brève*
Dorso pando jacuit virgini sessUrç
Spina, quç non senserat atiquid pressurç ;
Ptde cavo^ tibia recta ^ longo çrure
Totum fuit sonipes studium naiurç.
Ce passage a, même i première vue, une ressemblance retuar*
quable avec les descriptions de destriers dans les chansons de
geste** Nous devons cependant faire une réserve. Les exprès*
sions ûue nous avons soulignées se retrouvent dans le Carmm
de prmkiom Gtmionis {Rùmania^ XJ, 476, v. 339 et ss.). Voici
les vers (le poète latin traduit assez exactement la description
du cheval de Turpin, Chanson de Roland^ v. 165 1 et ss.) :
Horridus aspectus, auris brevîs^ aràua ctrvix^
Costaque prolixa, Ubia rt€ta sibi^
Crus perîargîtmt pes cavm et ptctm spaciùsum.
En rapprochant ces trois passages, on trouve ressemblance
peu prés complète pour tibia recta (= gambes plates) , pede cû
{Carmen : pes cavus =^ pie:^ rapf^^); auris pan>a correspond Jl
auris brans du Carmen (^ petite oreille); rexpression crm
perlargum du Carmen nous montre que longû crure du débat
doit être corrigé en largo crure {curte la quisse^ RalL^ 1653;
comp. la cuisse grosse et corte^ Fierahras^ 41 10). Il est inadmis*
poésie française A peu près aussi fréquemment que le pin : Tauteur du Filiri-
nagt d« Cfyarlrmagnf pîace môme un olivier à Saint-Denîs (v, 7, élit*
Koschwiii), L*oîivier remplace le pin dans une version française du débat des
deux jeunes filics, Ik Florance et de Bîûfuhefior (v. 57, Fabliaux it Ctmks^ édi-
tion Barbawn-Méon. IV. 555).
t. Ces descriptions ont été analysées et comparées par Bangen, dk Tïert
im «Ut/rân^ Epoi (Àu^. und Ahhandîuf^en de Stengel, XXXIV), p. 48-50.
a. Comp. G. Paris, Hom^a, XI, 509, note 1.
SUR L*ORIGINE DU POÈME DE PHYLLIDE ET FLORA 539
sible que deux auteurs aient traduit indépendamment Tun de
l'autre, de la même façon, des expressions aussi techniques. On
peut ajouter que deux formules qui ne sont pas dans le Roland
sont communes aux deux textes latins : prominens pectuSy qui
correspond au pectus spaciosum du Carmen (comp. Fier. y
41 13 : moût ot large le pis) et ardua cervix dont l'équivalent fran-
çais n'est pas très clair'. Comme le passage du Carmen
est plus court que notre débat et traduit assez exactement le
Rolandy il est évident que c'est notre poète qui est l'imitateur.
Mais notre débat ne contient pas seulement ces formules
empruntées à un poème latin, qui, quoique traduit du français,
n'a, dans l'espèce, aucune valeur probante; il donne d'autres
formules directement empruntées au français. Et d'abord
l'expression du Carmen : auris brevis, est plus éloignée de l'ex-
pression française habituelle que ne l'est celle du débat : auris
parva ; comp. petite oreille^ Roi. y 1656; petite oreillettey Gui de
Bourgogney 2329; petites oreilleteSy FierabraSy 41 13.
Le débat dit du cheval qu'il était
Pictus artificio varii coloris ;
Nam mixtus nigredini color est oloris.
La diversité ou même la bizarrerie des couleurs de la robe du
cheval est un des traits que les descriptions des chansons de
geste relèvent le plus souvent. Aux passages réunis par Ban-
gert^ on peut ajouter celui-ci, du Roman de ThèbeSy v. 2829 ss.
Le poète décrit le palefroi d'Ismène :
Et fu toz neirs, ne mais les hanches
Et les espaules, qu'il ot blanches,
Et les costes et les oreilles
Et les jambes qui sont vermeilles.
La formule color est oloris se retrouve littéralement dans Gui
de Bourgogney v. 2326 : // ot le costé blanc come cisne de mer.
Caput brève du débat correspond à la teste corte et megre du
même poème (v. 2328; cf. FierabraSy v. 41 13 : maigre chiej).
1. Comp. cependant Fierabras, 4108 : le hum haut levé. Il est probable que
l'auteur du Carmen de prod. Guen, aura emprunté ces détails à des descriptions
analogues qui se trouvaient dans d'autres chansons, ou bien qu'il a eu sous
les yeux un texte légèrement amplifié.
2. Ouvrage cité, p. 53
J40 A^LâMOBS
S:ins les textes français on ne se ferait pas une Idée nette du
sens des deux vers de la str. 5 2 :
Docso pando jaaiit virg^fii ses£urç
Sptoâj quf non setiserai aliqaid pressurç.
VescMm ad him halte, dit la Chamm dt Roland du cheval de
Turpin, \\ 16S4; ^ dmiti rmhme dît le Fiirabras^ v. 4112,
Uautcur du Rmmn ai TUks va un peu plus loio : suivant lui,
iJ ne suffit pas que répine dorsale d'un bon cheval soit
droite ; loin d'être déprimée, elle doit être bombée : il dit, en
décrivant le cheval Blincbenue (y. 'S^^) =
Et 01 ixQ poî tofobte le éos;
De um i Eut ondUof sedr '.
Li descripdon «lu cheval est soîvîe de oelle dti hamadietneot :
au début nous retrouvons encore un détail de h po^ie vulgaire
(itr, 53) i
la mention de h selle d*ivoire est cofitiotiene daiEs ks
sons de geste, voir Bin^ert^ p. jS; on pent a}oufjer le Rm
Dmsi choses sont à noter pour bicsi apprider œ
Aemeats : d*uae pin^ ces dêsoîptîoas de chcvatct, sm^eent,
agnementées Je détails birarres (tel que celui des couleurs de la
ro!x). son: une des marques disriactives de V épopée friinaiùs ;
J^aurre part. les dérails à Taide desquels notre poète a complété
les brèves indications du Curmen ne semblent pas empruntés i
un seul texte ; pour les eciaircir^ nous avons du comparer des
passades assez nombr^iux-. L*auceur du débat avait donc avec
1. Le >çrul truc ajoutai par le iêb-dt dent on ne retrouve pas bien, la tonne
îriuv-ii^^ î^^- «:x:;ui Jc la >rr. ; : : Cjtnu ^pursa kve. On trouve des expressions
diverses pour décrira la vT^nicn; : Jtv snrts lom dt J*:tgït!^, Bmcan j£ Caïuat,
p. ;;. V. 7, ciiiL Tirix* ; la :T.n< jasmtu Fûrabras^ 4,111 ; ^n Jutre l'exprès-
>îcii p^u ddirx: .UiCri- sinru-^ i^v&ir Godeiroy, i. v, cwnéy et &?m. Je 'Vxbei 05, 7^
^ui 11^ peut se rapporter ^u'a la cnniere : rien de tout cs!i3L ne correspond
^xactetneac a la pnrase latine.
>. Parmi les poèmes <^ue nous citons* il v ^n a, comme Gui de Bour^wvrtc
sjui >enc >X'rtaiiTemem: po^^teneurs au débat ; mais les descriptions vpie c»
^a»ui>oii> coutieimetit deiveut vitre composées de lieux commims remontant
beaucoup piu> haut.
LA CHANSON COMPOSÉE A ACRE 54I
cette littérature épique une familiarité que nous ne pouvons
supposer que chez un Français de naissance, peut-être chez un
Anglo-Normand (il est à remarquer que des quatre pièces
françaises qui traitent le même sujet, deux furent écrites en
Angleterre). En tout cas, l'auteur du De Phyllide et Flora n'était
ni un Italien ni un Allemand. Grâce à la popularité, déjà au
douzième siècle, de l'épopée française à l'étranger, on pourrait
supposer chez un clerc allemand ou surtout italien la connais-
sance de quelques détails isolés, pris dans une œuvre connue
par hasard; une pareille richesse de réminiscences ne se com-
prend que chez un national.
Gédéon HuET.
LA CHANSON COMPOSÉE A ACRE
EN JUIN 1250
Je voudrais donner quelque jour un recueil d'anciennes
chansons historiques, comme une nouvelle édition, augmentée
et améliorée, du recueil de Le Roux de Lincy, mais en me
restreignant aux xn* et xiii* siècles. Je compte imprimer d'abord
ici la plupart des pièces qui le composeraient, dans l'espoir que
cette publication pourra donner lieu à des observations utiles.
Je l'ai déjà fait pour la chanson de Huon de Saint-Quentin
{Romaniay XIX, 295).
Celle dont je m'occupe aujourd'hui (Raynaud, 1887) a été
imprimée deux fois, par P. Paris {Romancero françois ^ p. 100)
et par Le Roux de Lincy {Chants historiques français^ t. I,
p. 118)*. Ces deux éditeurs n'ont connu que le ms. Pb"
(B. N. fr. 20050), où elle se trouve au f* 117; elle est encore
dans Pb** (fr. 24406) au ^ iiéd, malheureusement avec
deux couplets en moins. Le texte que je donne repose sur la
comparaison des deux manuscrits , qui n'offrent pas d'ailleurs
de bien grandes variantes (j'appelle A le ms. 20050, B le
ms. 24406). L'authenticité des deux couplets omis par B ne fait
pas doute; la seule question difficile est celle de l'ordre des cou-
I . Par une inadvertance singulière , Le Roux de Lincy (p. 90) la donne
comme inédite.
s 41 MÉLANGES
plets. Pour la résoudre, il feut se rendre compte de 1
tion exirémement savante de la pièce- Il est probî
est ûite, comme tomes les chansons politiques, à
d'une chanson d'amour célèbre ^ mais je n'ai pas s<
pour le moment les moyens de le vérifier.
La pièce compte cinq strophes (il nous manque
un envoi). La strophe de neuf vers sur quatre riir
le schéma suivant (je marque par des chiffres les rin
rées comme distinctes les unes des autres dans chaq
réservant les lettres pour désigner leur identité rée
strophe à rautre).
Si nous désignons par â ^ r rf les rimes i 2 3 4 d
tîous remarquons que la str. Il ent ploie d et *i pour
et 2^ et r, comme I, pour sa rime 3^ en sorte qu'e
dnit qu'une rime nouvelle, sa rime 4, que nous ap
Un a donc entre les strophes I et H k rapport suivan
L
K l a
2. 2 h
4* ^ h
7 î c
^44
n.
rapport
î. t d
2. 2 a
1. 1 d
4- a a
6. j c
«- 4 c
94c
^7 *"*^'*.XT^^r:^***^«*^ «Topheet ks strophe
*«iot« l ordre v^érictbfe, eesi eo efi
LA CHANSON COMPOSÉE A ACRE
S43
produit si nous faisons passer au troisième rang la strophe V de
A, au quatrième rang la str. IV, et au cinquième rang la str. III.
Nous obtenons alors le rapport suivant pour les rimes des cinq
strophes :
I II m IV
I.
a
d
e
f
g
2.
b
a
d
e
f
3-
a
d
e
f
g
4'
b
a
d
e
f
5.
b
a
d
e
f
6.
c
c
c
c
c
7-
c
c
c
c
c
8.
d
e
f
g
h
9-
d
e
f
g
h
On comprend en même temps que les str. IV et V aient été
omises par B, qui s'est contenté des trois premières ; quant à la
raison du désordre de A, qui nous présente I II V IV III,
nous ne la saisissons pas.
On voit que par ce système ingénieux, qui lie intimement les
strophes les unes aux autres, chaque rime revient dans trois
strophes à trois places différentes, sauf 3 qui reste immuable,
et les 45 vers se contentent de huit rimes '.
I » Nus ne poroit de mauvaise raison
Bone chançon ne faire ne chanter;
Por ce n'i vueil mètre m*entencion,
Que j'ai assez autre chose a penser.
Et nonporquant la terre d'outre mer
Voi en si très grant balance
Cîp'en chantant vueil proier le roi de France
Que ne croie coart ne iosengier
9. De sa honte ne de la Dieu vengier.
I, I B On — 4 A Car, — 6 très manque B — 7 B Qua jointes mains prie on
— 8 B Quil — ^ A De la honte nostre signor v.
1 . La rime h^ finissant la dernière strophe, n'a que deux vers à elle ; a
commençant la première, n'en a que cinq; ^, qui ne figure que dans la pre-
mière strophe, n'en a que trois ; d efg en ont sept, et c en a dix.
2. Je ne relève pas La graphie lorraine de A; on la trouvera dans l'édition
diplomatique du ms. 20050 de la Société des anciens textes.
MÉUUfiQES
II. A ! geoîû Tok^ gKOit Dki» to» M t
Tott Bgifiie doioit Toitic i
Or iifiiiej ipt ^liost ^olez 1
4 f&WÊÊkm csxrc en di^ttî*
Ov ^Bânl Dkos est de TO i
Er MJgnor dr si ^
Bîcxi deânict i
De refoig^les mon £1 le^duîtîs
f Qpî ptii' O^ sont et por «es moit â prâ.
JH Rots, vos sa-rfi ^ne Dâeû$ 4 pOD d'ans.
Ne onqiMS nias d^cs ont si gram ncsttr r
Ctrpor vos est sesppefks mocra pris*
4 Ne imi, £dr Tm^ ne f «n pocoii aidi»' ;
^»e porre lom dl aatie dievalkr,
SI crkmeot b éaaiomsce;
Eî s'en tel poiitl lor ùasksi farUitMip^
9 5e|Pliîa&«)iatt4ei
l\^ Rois^ vœ JTCZ tiitsar d^or et iTsigem
Phis ^Dc DOS roê a'ot ooifiics^ c:c m'es
S tn devez doo^ plai bi^goiieni
4 Et dcmocer fMsr guider cest pais;
Car ¥OS 2VCE pins penlo que cofKfnis,
Sa serait trop giani viEtDcê
De ie«orDCT 2 toi k ineKheanoe;
Mai5 deroorer, si ferez gram ^^^^c, <
9 Tant qae Frjnce ait Ttcafvrôe s^onor.
Rois, s'iCT tel point tïï&
France dirm, CEunipasgoe, ei eotc gent^
Qi3« vostre !os âi«ï mk en tresxor
& gxitgnSè aTTéi ineiïis q/at tûem;
Et des pmoQs qin vivent « Tooueiit
Deûssàei itoït pcsance;
''*»**»' -- Q A lir# nw txïf sont a /tr jancvir ij^TÛ
tV-V. MraqucAi B ~ IV. > &
LA CHANSON COMPOSÉE A ACRE 545
Bien deûssiez querre lor délivrance :
Qjiant por vos sont et por Jesu niartir,
9 C'est granz péchiez ses i laissiez niodr.
En imprimant cène chanson pour h première fois, P. Paris
Tavait datée de 1190, y voyant une exhortation adressée au roi
Philippe de ne pas rentrer en France après la prise d*Acre, et
avait ajouté : « On pourrait Tattribuer^ sans invraisemblance,
à Qjienes de Béihune; c'est encore ici son éloquence, son
énergie et sa haute raison. » Le Roux de Lincy avait accepté
cette hypothèse. Mais, dans une note écrite sur son exemplaire
du Rûmanara^ peu après la publication do Uvre, mon père avait
remarqué ; k Cette chanson est plutôt d*un compagnon de
Join ville et dut être fliite en 1250. » Et en en citant un cou-
plet dans le t, XXIII de VHisioire Utîéraire (p. 814), il la dési-
gnait comme « cette belle chanson où Ton engage Louis IX à
ne pas quitter la Terre Sainte avant d'avoir visité Jérusalem et
délivré tous les chrétiens restés captifs »» Il n'y a pas en eflet de
doute à avoir sur ce point : la chanson a été composée à Acre
en 1250', quand on ne savait pas encore si le roi, qui venait
d*arriver d'Egypte, se déciderait \ rentrer en France ou à rester
en Syrie. On peut même en fixer la date avec une rigoureuse
exactitude. Arrivé à Acre le dimanche 13 mai, Louis IX tint le
12 juin un premier conseil où il exposa simplement la situation,
en demandant aux barons qu'il avait convoqués de lui donner
leur avis le dimanche suivant 19 juin ; ce jourdà, après les avoir
entendus j il remit encore à huitaine pour leur faire connaître
sa décision, et le dimanche 26 juin il leur annonça qu'il était
résolu à rester* : k chanson est donc antérieure à ce dernier
V, 8 Kf por voi sont et por satnour cccis. J'ai restitué par conjecture la fin
du vers; le coniroen cernent est peut-être également fautif dans le manuscrit :
le copiste a répété par distraction le v. II, 9, pour lequel il avait d'ailleurs
une mauvaise leçon (occis ne peut s'appliquer aux dmitis du v, 8).
I . Ce fait n*est pas sans importance pour l'étude des différentes parties du
ms. 2O0)o. Il est clair que la partie du manuscrit où se trouve notre chanson
a été copiée un certain temps après le milieu du xut« siècle,
a. Ces dates sont celles que M. de Wailly (Joinville, éd* Didot, p. 506)
a déduites des données du récit de Joinvilîe; les mêmes raisons les ont ialt
adopter par M. R. Rôhrîcht {KJeinc Sttidien ^ur GtichkhU der Kreù^iùge, Ber-
lin» 1890» p, 22). Tiilemoiu (ÏII, 389) et M. Wallon {^Hhtoire d^ saint Louis ^
^* ^95 1 ?9^t 4<^) avaient adopté pour les trois dimanches les dates des
19 juin, 16 juin et \ jui
llet.
J4é MÉLANGES
jour» et très probablement au 19 juin ; elle a dû être composée
et répandue entre le 12 et le 19, pour peser sur ta décision du
roi et combattre les efforts des <* couards et losengiers » qui le
sollicitaient de s'en retourner au plus tôt.
En lisant cette chanson, on est frappé de son étroite ressem-
blance avec la partie des Mémoires de Joinville relative à ces
mêmes incidents. Les arguments que le sénéchal se donnait 4
lui-môme ou donnait au roi en faveur d'un séjour de quelque
temps en Syrie se retrouvent dans la chanson. Le poète insiste,
comme le fit !e sénéchal, sur la honte et le péché qu'il y aurait
à abandonner à une mort certaine les prisonniers restés en
Égypï^' Les expressions mêmes sont parfois identiques : « Et
par sa demouree seront délivré li povre prisonier qui ont estei
pris ou servise de Dieu et ou sien, qui jamais n*en istront se li rois
s'en va (§ 427); i> d. I, 9; H, 9; V, 5-9. Le moyen suggéré
pour avoir des forces suffisantes est le même et est indiqué dans
les mêmes termes : « L'on dit que H rois n*a encore despendu
nus de ses deniers Si mete li rois ses deniers en despense..»..
et quant Ton orra que li rois dontu bien et largement ^ chevalier
li venront de toutes pars. î) Cf. FV, 1-3 : Rois^ ivs air^ ire^ord^or
et d'argent,.,.. Si en deve^ doner plus largement. Enfin on doit
relever la mention de la Champagne à càté de k France
(V, 2), qui permet de voir un Champenois dans rauteur de h
chanson*
Ces rapprochements suggèrent naturellement une hypothèse:
cet auteur ne serait-il pas Joinville lui-même? Assurément 3
n'y aurait rien dMnvraisemblable à ce que le jeune séaédial de
Champagne, familier de la cour de Tibaud le Cbansonnier^
habitué des « chambres des dames », ait pratiqué Part de
« trouver », qui faisait alors partie de la haute édocatioa cour-
toise qu*il se piquait de posséder X fond, comme nous le
montrent les précieux souvenirs de Francesco da Barberino. Si
nos recueils ne nous ont transmis aucune ch : ôus soo
nom, cela ne prou\'e naturellenient rien* On saiL ^rs qu'il
aimait à composer et à écrire, et dans cette même ville d'Acre,
peu de mois après, il occupait ses lobîfs par b rédaction et
rUlustration de son Credt?, Il est donc très tentant de lui attri-
buer cette chanson dont les sentiments répondent si bien aux
siens» dont les termes mêmes rappellent de si près ceux qu*il
emploie en notant ses propres paroles, Touteibis une affirma-
ENTRECOR — PUIN (HELT) 547
tion serait téméraire, et l'hypothèse rencontre quelques diffi-
cultés. Il semble que si Joinville avait composé cette chanson,
qui dut avoir un certain effet sur l'opinion, il n'aurait pas omis
de le dire dans ses mémoires, où il ne manque guère l'occasion
de rappeler le rôle qu'il a joué, et où, en cette circonstance
même, il semble avoir quelque peu exagéré l'importance de
celui qu'il eut. D'autre part, la chanson s'adresse au roi avec
une franchise qui va jusqu'à la rudesse , et l'on se demande si
Joinville, déjà l'ami de saint Louis, n'aurait pas craint de le
froisser en lui parlant ainsi, non en particulier (il va aussi loin
dans l'entretien où il lui déclare qu'à son avis il ferait « que
mauvais » s'il s'en allait, § 433), mais publiquement et dans
une pièce destinée à courir de bouche en bouche ^ Il est donc
plus sage de ne rien décider; mais en tout cas cette remar-
quable pièce est d'un compatriote de Joinville et d'un homme
qui partageait tous ses sentiments.
G. P.
ENTRECOR — PUIN (HELT)
M. Salverda de Grave a traduit le mot entrecor (entretor)
dans YEneaSy v. 4484, par « fusée de l'épée »; M. G. Paris,
dans son compte rendu de cette édition (Rom,, XXI, 291), dit
ne pas connaître ce mot. Cependant M. Maindron, dans son
livre Les Armes ^, l'un des plus récents et des meilleurs sur la
matière, ne se sert pas d'une autre expression. Littré a inséré
fusa avec cet emploi dans son supplément, mais la définition
qu'il donne : « partie de l'épée qui est engagée dans la poignée
et qui s'y fixe, » n'est pas juste. La fusée n'est pas une partie de
l'épée, qui, exactement, ne se compose que de la lame et de la
I . On pourrait encore objecter que la chanson propose comme objectif au
séjour du roi la délivrance de Jérusalem (II , 3-4) , ce dont ni Joinville ni
Louis IX ne disent mot dans les Mémoires. Mais c'était certainement là un
des motifs principaux qui dictèrent la décision du roi et qui le firent plus tard
prolonger son séjour bien au delà de ce qu*il avait d'abord projeté. Joinville
devait avoir, en 1250, les mêmes espérances; mais l'événement les ayant si
complètement déçues, il ne les rapporte pas dans son énumération des raisons
qu'avait le roi de rester en Syrie.
I. Bibliothèque de renseignement des Beaux- Arts ^ librairies-imprimeries
réunies.
#'il»pUl|Ut purkltcmem ^ h futée ^ rt U est è\îdeai q
l|ll II fflflt rccfiflcr la défini ijon donnée par M- Gc
àtlluh fiitff{or, L'exemple* que le même a tiré
tf\Hr\fimhi' (!*• Mcycr, Akxandre k Grande I^ 218^
l*i litHV (Jliilt faite à\ï%%\ parfois de pierre précieuse
iflUHI*^!! lo nuJinc mot que fmée^ masse de fil en
ItoMNlil } iW%\ hm pruKiKIe ; il ii dû y avoir une as
ftirm*» \\m\% IVvolution sémasîologique< Ce sens
\n\\% mmlenic, LVxi^mpJe le plus ancien que j'en
IhHHV \U\\% Mn *^ivni|î^ de M. Penguiily THaric
OJ^ Vhw %\w |Mi Utlrt — le CiJtf/i^ii^ <feî colk^ti^
I A fk\Mhyi\ m 5<cns de mfmyr aniènc à considéi
*X;r\ ^>|^nK >mi le ii\H»\x" ptcsi^iie coutoiirs énut
^^ »Xh4^ W fcvw^H 4^m fvsmue «si certaine.
BÉDANE 549
Si que li puins et Tentrecor
Ki estoit adoubés a or
Li remest en la main sans plus.
L Aire périlleux y v. 5 596-5600, Herrig.
On serrerait, je crois, la vérité de plus près en traduisant
par « quillon », la garde des épées anciennes étant bien diffé-
rente de celle des épées d'aujourd'hui.
A. Salmon.
BÉDANE
Le Dictionnaire général donne bédane y « outil de menuisier
pour faire les mortaises, » remarque que Cotgrave, en léii,
écrit bec (Tasne, et explique en conséquence : « Pour hec-d'âne^
composé de bec et à'dne, » Littré écrit bédane sans accent, mais
renvoie à bec d^âne^ graphie qu'il adopte, et qui le dispense de
donner l'étymologie d'un mot aussi transparent. Toutefois ce
composé est embarrassant : on n'a jamais, que je sache,
attribué de bec à l'âne comme au lièvre, et la forme de sa
bouche ou de sa tête n'y invite nullement. Puis le bédane est
une sorte de règle de fer de petite dimension, terminée en
biseau, qui n'a aucun rapport avec la tête ou la bouche d'un
âne. Il me paraît certain qu'il s'agit ici à'anCy « canard » en
anc. fr., et non iLasne. Déjà Marion, dans le Jeu de Robin et
Mariony confond ou feint de confondre les deux mots (v. 32 ss.),
et plus d'un philologue moderne est tombé dans cette erreur
(voyez entre autres la remarque faite ici, XVIII, 142). Cotgrave
y est tombé également, et, ne connaissant qu'un mot ane qu'on
l'écrivait asne, il a résolu le bédane qu'il entendait en bec d'asm,
sans être arrêté par l'incongruité de l'image. La prononciation
a dû pourtant être longtemps distincte. Les ouvriers aujourd'hui
prononcent généralement béddne (peut-être sous l'influence de
la fausse étymologie); mais on entend aussi bédane, et mon
ami J. M. de Heredia s'est autorisé de cette prononciation,
qu'il m'assure avoir constatée maintes fois, pour faire rimer
bédane avec ahane et platane dans son joli sonnet du Huchier de
Na:(areth {Les Trophées, p. 91). Quant à bec d'âne, qu'a préféré
Littré, ou mieux bec d'âne, c'est un archaïsme tout à fait disparu
de l'usage. G. P.
MAKMOT, 3tAllMEA.U
Marmai est doooè par Liaré comme étant d*oni
Diez est muet \
Marmoi, quî^ injourd'hai, âgnifie « petit ei
fiait autrefois « marmotte » et « petit sioge
doone : « Marmci, a marmoset, or littlc moi
mannotaiDeJ- » MarmÉU est le fëminiD d<
dernier, et non marmûSU, représentant m un
bien que soas une forme fort corrompue, La
r^ulière se trouve dans le bdio (pays de Coi
m marmotte * ; mitffmmi ^^mutim montu-
que le pays où habite b marmone ail fourni au
mal et son nom. Le ladin miârmMî est probable
de fane, haut allemaiid marimunm^ mmrmenii et |
des autres mois néo-latins : italiai muirmûitû et
et port, marmota^ fr. anc, manmût^ fif, mod, ma
mu rem montis Fîtalien aurait £ùt murman^
mûiîû, qu'il s'est permis d'attribuer à b deuxiè^
comme û k ladin mmnmmi Tenait d*un fictif *n
Du masculin marmoiiû^ manmiH, oo a créé le &m
*, qui seul est resté, et qiai^ luî aussi, 2
meut le saas de « guenon » comme marmûi cdai
*» Marmofu, a she marmoset or she mookej », é
I. [Flediia (.fn^. g^hti., n, 566, mÂ^ p*r M, Kôrti
tV. c petit enfant, singe, • de ••senw ; M, K^mi^ a|o
être oDtnitic iém. msrm^eSâ^ m cane v«at ftts mer ce mcx à
^tii teîpeu croy^bie- > L'îal, «âmaoe^èv, m petit easÊairt » (<
P- 40s) pirait empfitnté âa feuiçiis; quant m «ii^m^lts,
P«*d^ k comisqi^ fw^^wT^ le tire directcnMit de mis
1 -^fVfî«i *i,rf £i^|£s* Dktio,,^^. UmUm, éd. 1675.
î -M^nMMf^ f»Tw,ia4n&.f, formes ftnûmnes de mmn
* i. Pi^' ""' '^^^ ^' ^ -i.*^*^ ^«t de l-it^
MARMOT, MARMEAU 55 I
Quant au passage du sens de « marmotte » à celui de « singe »,
le peuple qui fait les langues n'a jamais été bien fort en zoologie,
surtout au moyen âge où les savants eux-mêmes n'en savaient
guère plus que lui, et il a bien pu donner le nom de marmot,
marmotte au singe et à la guenon, deux matnmifères, après tout,
puisque les savants d'alors prenaient encore la baleine pour un
poisson.
Le passage du sens de « singe » à celui de « petit enfant, mar-
mot », est encore plus naturel. Nous avons de la tendance à
dénigrer la gent enfantine : les mots gamin, mioche, moutard se
prennent tous en mauvaise part, et puisque nous appelons quel-
quefois les enfants des crapauds, nos pères ont bien pu les com-
parer à de petits singes.
Marmot avait donc les sens : i° de marmotte, 2° de singe et
3° de petit enfant, de même que marmotte signifie marmotte,
guenon et petite fille : « Marmote, s. f. petite fille (c'est une
franche petite marmote) », dans Richelet, Dict. de la langue
française, éd. 1759 : de l'Académie française, 6* éd., 1835,
dit également : « {Marmot) se dit figurément et familièrement
d'un petit garçon; on en forme aussi le subst. fém. marmotte,
qui se dit d'une petite fille. »
Il y a dans l'ancien français un autre mot de forme à peu près
semblable à marmot et signifiant, comme lui, « petit enfant,
petit, » c'est mermel, marmel, manneau, marmiau, diminutif de
merme, « petit, petit enfant, mineur, » minimum : voy. Gode-
troy, au mot Mermel. De mertne, mermaille, marmaille, — Mar-
meau, enfant, s'est-il confondu avec marmot, marmotte et singe ?
Scheler * incline vers l'opinion que marmot n'est autre que
marmeau ; mais marmot, avant d^avoir le sens d'enfant, a d'abord
signifié marmotte, puis singe; il n'y a donc pas identité, mais
il y eut probablement confusion entre marmeau, petit enfant,
et marmot, singe, après que ce dernier eut passé au sens de petit
enfant. Cette confusion était d'autant plus facile que l'un et
l'autre, à partir du xvii* siècle environ, se prononçaient de
même, marmô.
En résumé, marmot, ladin tnarmont, murem montis,
a signifié d'abord marmotte, puis singe et, enfin, petit enfant.
Quant à marmeau, petit enfant, il s'est probablement con-
I. Dict, d'itymoL française^ 1868.
S52 MÉJL ANGES
fonJu avec marmot ^ grâce à h pronondadon
pour les deux et au sens qui, dans ntarmût^
a abouti à celui de petit enfant, signification de manm
J. MOLINET AUTEUR DU MYSTÈRE DE S. QCE5^
Il y a quelque temps, j'ai montré que VAri iâ ï
faussement attribué i Henri de Croy, est en léafité A
net * ; aujourd'hui c'est une composition noa niotfïs
mais d'un tout autre genre et beaucoup plus importaxi
restitue au Qième auteur, c'est YHisî^yîre ai JéÊmsagman
Ce m^^tèfie esï un des plus curienx à diâer^nxs potii
notamment pour rhîstoîre de h bogue, dis sTfie er <
siâcatioû pendant répoi]ue qui a ^stcèàt iwwJiii
Renaissance, Malgié cet intérêt, il est eococe ioéfiÊ,.
dnit qu^il soit pnbiîè, l'aiLilTse de M. Ed. Hchj,
dmm^ks mnbépbgifwm de Didiïja, peut àatana OBe iil
împort^Me'.
Xoki les deux raîsoiï& qui me tottt jsiîfcvef ce i
Molinet; la secoade me poraii dô^âre, ce îe b
si^T3Akr la première sans tnj ssrèur z
t' Lfô procédés de srrie eî de TCrâftnnrm j
du mi^iiétrsûotAl»hnac!iicciEEde|, Mcfine:^
3k tc^ *% iMfirJI
Sd, Fk
COaUILLES LEXICOGRAPHiaUES SS3
2° Un manuscrit des œuvres de Molinet, appartenant à
M™* la baronne James-E. de Rothschild, contient (fol. ii v°)'
une ballade fatrisée commençant par
Maurice le beau chevalier
Dans son Art de Rhétorique ^ Molinet, après avoir défini la
« ballade fatrisée ou jumelle », ajoute : « Geste couleur de reiho-
rique est décente a faire Rçgrez^ comme il appert en TYstoire
de Sainct Quentin, ou Tescuier trouve Saint Maurice mutilé
sur les champs. » Et l'exemple qu'il donne est précisément la
pièce Maurice h beau chevalier.
Les deux seuls manuscrits connus du mystère de S. Quentin
se trouvent à la bibliothèque de Saint-Quentin; un de mes
frères, professeur au lycée de cette ville, a consulté pour moi
ces deux manuscrits et y a trouvé la ballade en question; elle
fait partie du second acte (vers 2504-2254 de cet acte, 5971-
6021 du drame).
De ce qui précède , je conclus que la ballade fatrisée Maurice
le beau chevalier est de J. Molinet; qu'elle fait partie du mystère
de S. Quentin ; en fin de compte, que ce mystère est lui-même
de Molinet. Ernest Langlois.
COQUILLES LEXICOGRAPHiaUES «
C-D
CANETTE
<r Canette. Pièce de bois supportant la ventrière d*un navire qu'on veut
lancer à Teau , et glissant dans un coulisseau parallèle au grand axe du
navire. » (Littré, Supplément.)
Nous n'avons pu retrouver la source de Littré, aucun des dictionnaires que
nous avons consultés ne donnant ce sens au mot canette. C'est une coquille
évidente pour coueUCy mieux coite^ que Littré définit lui-même : « forte pièce
de bois qui, placée sous un bâtiment en construction, glisse avec lui quand
on le lance à la mer. »
CHARNIE
M. Godefroy enregistre dans son Dictionnaire de V ancienne langue française
un substantif féminin charnie, synonyme de clxirnier, au sens de « échalas de
1. Catalogue Rothschild, n» 471-8.
2. Voy. Romania, XX, 464, 616.
Rmania, XXU 36
S54 MttJ^KGES
vigne ». Sa seule giutoriti' csi Nicot, qu'il cite aîn^* : *f Cli amies oti ccNlu. ■
Ed réalité, il y a dans NIcot dMîrm/Sf et non chimkSf au moins dans Téditii^fl
de 1606 (il est vrai que Taccent aigu stîr IV est à peine visible), tl t'est
assurément à Nicot que Coigrave a empninlé son ariide ^f^mùr^ dont il ùaî
un $ubstantîf masculin. Si ron remonte à 1564, date du Dkiiûfittmre 4e Jean
Thïcrn% embryon de Nicot, on y lit effectivcmetît dfàrtiùs ou ischaks, Um lE
suffit de remarquer que le Dicnonnaîrc de Robert Estîenne (édil de îî49)
donne à la m^me place charmer ou Hchaîûî pour se couvai ocre que f* Je
fiMtrnia^ en 1564, est, non pas le signe du pluriel, mai^ une simple iioti;
d'impression pour r : le charmé de Cotgrive et h charnic de M, Gadcffoy
*'évanouissetil donc en fumée , et ÎI ne reste qye k mot bien authemiquc de
(harnitr^
CHASSE-PARTIE
if CtiASSE- PARTIE. Accord par lequel les aventuriers règlent ee qui dort
revenir à chacun pour sa pan. Ètym* Partk est ici le participe passé du verbe
partir, partager : chasse partagée. » (Littrê.)
Le mot n'est ni dans Furetière (1690), ni dans Tliomas Corneille (1694),
Il a été introduit dans Tédition de Furetiêrc donnée par Bjsnage en 1701
avec cette définition : a Cest un accord par lequel les aventuriers règlent
entre eux ce qui doit revenir à chacun d'eujc pour sa part, lorsqu'ils ont bit
quelque entreprise, » De là, il a passé dans tous les dictionnaires, ou pe«t
s'en faut. Trévoux traduit élégamment : « Pactum c&nvmium initr pir&im de
pariia$da mt^^ sf pr^Ja. >* C*est dcji l'étymologie de Litiré. Mais écoutons
Savary, Tautcur du Dictionnaire du commerce, rédigé longtemps avant la date
où il a paru (1725). Après avoir dctini la cJkirte-partie maritime au sens ordi-
naire que donnent tous les dictionnaires, il ajoute : « Charte-partie est encore
un terme de marine qui signifie un certain acte par lequel plusieurs personnes
se joignent ou s'associent ensemble pour naviger {sic) de compagnie et
fliire quelque entreprise de piraterie ou d'autre chose semblable. Ce sont de
ces sortes de charte-parties {sic) qu'ont coutume de faire ensemble ces
fameux flibustiers {sic) qui par leurs entreprises, leur valeur et leur cruauté,
ont si souvent f.iit trembler l'Amérique esp.ignole. » Il est à peine besoin
d ajouter qu'on ne trouve pas dans Savary clkisse-partie, déformation évidente
de ifM/tt'-/\irtu\ Cette détormation est-elle une simple coquille, ou provient-
elle, de 1 etymologie populaire? Nous inclinons vers cette dernière opinion.
CHEVÈTRIER
^' CjiiA-i-i'RiKK. Pièce qui sert de support à un tourillon. Il Solive dVnche-
vctiuie. l::v..:, chovCtre. . ^inré.)
le second sens est le seul qui soit d'accord avec rét>Tnologie ; nous le
COQUILLES LEXICOGRAPHiaUES 555
mettons hors de cause*. Quant au premier, on complétera la définition qui
lui convient en s'adressant à Littré lui-même, au mot chèveteau :
« Chèveteau. Dans un moulin, grosse pièce de bois, sur laquelle tourne le
tourillon de Tarbre. Ètyin. chevet». *
Il est manifeste que le nom de la pièce de bois sur laquelle repose le tou-
rillon doit avoir pour étyraologie chevety et non chevéire. Dans cl}evcty le /
n'est pas étymologique (anc. franc, cheve^ : le diminutif correct en eau
serait chcveceau, qui existe effectivement et dont on peut voir plusieurs
exemples dans le Dictionnaire de M. Godefroy, parmi lesquels un a précisé-
ment le sens spécial qui nous occupe J. Nous n'osons décider si cJjn'eU-atiy qui
apparaît dans Trévoux (éd. 1771), doit être considéré comme un dérivé
très récent de djevet, ou comme une simple faute d'impression pour
cl)evec€au. En tout cas, nous sommes en mesure d'établir que cfjevctrier est
le résultat d'une coquille. Un vieux livre, fort bien fait, sur la matière
est le Manuel du Meunier rédigé sur des mémoires du sieur César Buquet
et publié en 1775 par Béguillet. Or Béguillet ne connaît que cbevressier
(voir notamment, p. 16 et 168). L'article Art du Meunier de l'Encyclopédie
mctl)odique, paru en 1788 {Arts et Métiers, t. V), se borne en général à copier
Béguillet, en l'augmentant surtout de fautes d'impression. Dans le vocabu-
laire qui termine cet article, on lit à plusieurs reprises la forme bizarre
chevetsier : c'est évidemment cet impossible chevetsier que des gens bien
intentionnés ont corrigé en chevetrier, puis affublé de l'accent circonflexe de
son père ^uXzxM chevêtre. Or il est manifeste que l'auteur de Y Art du Meunier
n'avait pas l'intention de changer la technologie de son modèle : en effet, on
lit à trois reprises chez lui chevressier (pages 69 et 70) et une fois — par suite
d'une faute d'impression d'un autre genre — chevresier (p. 44).
Reste à montrer le rapport de cJjei'ressier (mieux cheirecier) à chevet
1 . Cltevétrier ne figure avec ce sens dans aucun dictionnaire français anté-
rieur à notre siècle. Il existe en blaisois et désigne « chacune des deux grosses
pièces de bois enfermant à l'avant et à l'arrière le tablier du pressoir » ; on le
trouve dans un devis local de 1743. (Voy. A. Thibault, Glossaire du pays
blaisois, Blois et Orléans [1892].)
2. Littré et la plupart des dictionnaires contemporains donnent aussi à
cJjeveteau le sens de « solive d'enchevêtrure », comme à chevètrier. Si le sens
est bien attesté, cJjeveteau serait dérivé de chevêtre par l'intermédiaire de la pro-
nonciation négligée chei>èt\ Dans le blaisois, chevêtre, au sens dialectal de
« crocheta ressort qui est au bout d'une corde de puits pour saisir l'anse du
seau », s'est réduit à cJjevet dès le xvn« siècle. (A. Thibault, Gloss. du pays
blaisois.)
3. Au mot chevecel. M. Godefroy définit ainsi ce sens spécial : « Solive
d'enchevêtrure sur laquelle tourne le tourillon de l'arbre de la roue d'un
moulin; » et il est si content de cette définition qu'il la reproduit in extenso
au mot chevcccul. On voit le profit qu'il a tiré de Littré.
5S6 MÉLANGES
(mieux fhtve^). CbtvrecUr est pour chfvmtr et nous offre k même r épcnth^
tique que nous avons dans chanvre pour chanve. On remarquera dans le Dk'
tionnaift de M. Godefroy un exemple de charcchad , pour cheirctul^ qui a
préciséracnt le sens ledimque de notre mot chevrakr\ oû trouve ménie
cbevtrscul dans un autre texte, ce qui pourrait Êurc croire que le mystérieui
chevtlsier de VEtKychpedit mèlfxkii^m doit être corrigé en cfjnifrsirr^ 'i-ariaotc
phon^îtiquc de cheweckr.
CORMAN
Coignivep «1 mot mrmùrunt^ se contente de faire un renvoi à
c*est sous cette dernière forme qu*îl di^finit et Toiseau bien connu que nous
nommons aujourd*huî cormoran, et une sorte de poisson, « the cabot 6sb ».
Nous ne savons pas quelle est la source de Cotgrave quand il donne le nom
de cornian â un poisson et, par suite, nous ne pouvons pas nous prononcer
sur la valeur de son témoignage. Mais en tant que nom de Foiseau appek
ordinairement cormoran^ la forme corman n*est qu*une coquilJe. Cotgrave a
puisé dans le Nicot de 1606, oii on Ut : « Corman, corbeau p^scherei, phala-
crocorax, corvus aquaticus : Delphi nates vocanl corhat peschereî, j» La definirioo
vient en droite ligne de Robert Estienne (1 549), sauf que dans ce dernier 00
lit ccrTucnant et non corman. Cette dernière forme s*est introduite dans le
Dkthnnain françois'latin de 1564, publié sous le nom de Jean Thierry; il
est évident que c'est une simple coquille, car Tordre alphabétique reste le
même, et le soi-disant corman (lisez cormoran) est placé après corme^
4
ÇXJURT-BATOM
« CouRT-BATON. Ancienne arme du genre des demi-piques. || Terroc de
marine. Courbe de charpenterie qui soutient les bouts des bancs ' et des
barrois. « (Littré.)
Le premier sens est le seul qui ne jure pas avec Torthographe court^éton :
nous n'avons pas à nous en occuper ; nous ne retenons que le terme de marine»
Littré, qui ne donne aucune indication étymologique, a oublié qu'il avait
admis précédemment un article ainsi conçu :
« CouRBATON. Terme de marine. Fortes pièces de bois qui servent de
contre-forts dans une galère. »
Trévoux ne donne que courhaton dans les deux sens. La fausse ortho-
graphe courl-hasiûfi, ccurhastmt est d'ailleurs ancienne : on la trouve dans le
Trésor de Nicot de 1606, qui paraît être le premier dîaionnaire qui lit
enregistré ce terme de marine. Dans un passage d'Etienne Binct , un peu
I
4
î. Sic, C'est une coquille pour haux^ pluriel de ^7w. Cf\ Fuketière (1690);
« CoDRT Baston, terme de marine , qui se dit des courbes de charpenterie
qui soutiennent les bouts des baux et des barrots. »
COaUILLES LEXICOGRAPHIQCES
557
antérieur (1600), quQ nous a communicjué M* Godefroy, on Ut courhaiton.
Il est évident que le terme de marine n'a rien à voir ni avec cmirt ni avec
hiion et qu*il se rattache à raJjeclif courbe, qui s'emploie substantivement,
au féminin, dans un sens analogue. Comme on s'explique diflicilemcnt, en
français, un rapport de dérivation entre cowIk et courbahn, on peut supposer
que le terme de marine est emprunté de l'espagnol curvaton. En espagnol,
curvaion^ à côté de cun*ù, est analogue 4 nom(o, rm^aton^ Â côté de nimfo.
COURT-BOUTON
« Court-bouton. Pièce de Fatielage des bœufs. An pîm\ Des courts-
boutons. » (Littré,)
Le mot se retrouve dans presque tous les dictionnaires antérieurs, et Littré
aurait pu emprunter à BeschercUe une définition un peu plus précise :
« Cheville de bois qui attache les bœufs avec un anneau de bois tortillé au
bout du limon. » Il faut remonter jusqu'à 1752 pour avoir, dans Trévoux, à
la fois, la mention lexicographique la plus ancienne et la défmition la plus
complète : « Cheville de bois à dcmi-équerre qui sert i Uer les bœufs avec
un omblet ou anneau de bois tortillé au bout du timon. « Littré s*est abstenu
de donner l'éiymologie du mol : sa définition fait douter qu*il ait eu une
idiie exacte de la chose. On remarquera que les dictionnaires qui ont succédé
iV Trévoux (de Wailly, 1775, Gattel, 1797, etc.) ont déj:\ Ix définition de
Bescherelle , c'est-i-dire qu'ils ont supprimé avec une admirable entente la
seule indication qui puisse permettre de trouver l'étymologic : à dam-éqturre.
Il est à croire qu'ils n'ont pas compris, et, à vrai dire, Trévoux lui-même,
vo êqtterre^ n'enregistre pas l'expression à dcmi-èquerrt. Il faut entendre que la
tête de la cheville forme avec le corps non pas un angle droit {iqu^né)^ mais
un angle obtus de 90*^: telles sont, en effet, à peu prés, les chevilles qui servent
a cet usage dans le Limousin, et qu'on appelle tùlodoudrd (atleloires). C'est
donc à l'adjectif courbe qu'il faut rattacher notre mot. Or on lit d^ns le Voca-
buiaire du Haut 'Maint parC-R, de M. (Le Mans et Paris 1859) ;
« Cour BETON. Grande cheville de bois à laquelle on adapte une branche
courbée qui sert à attacher les bœufs, conjointement avec VambiH ', »
Il nous paraît évident que c'est ce mot cmirbeion qui a été entendu cour-
hoiitjn par quelque philologue amateur du siècle dernier, et orthographié le
plus singulièrement du monde cmirl-bouion. Ce qui est à remarquer dans la
définition de Trévoux, c*est la forme omhUJ au Heu de ambUt^ ou plutôt
ainblaû, nomdialcctal de la hart d'attelage ' ; cette ahération de an en on est
précisémentun caraaère âss patois de rOue^t*
i. Cette définition est défectueuse, car Vambid ou ambld n'est autre chose
que /ti bmnchf cmtrbèe dont it y est question, ou Imrt^ et, d'autre part, ïa cour«
bure du conrbelon n'est pas indiquée.
2, Le mot se trouve sous la forme ambUdui dans le Pûlyptiqm trirmitton;
^
MELANGES
COUBTIÈBE
a CouRTltHE. Espace dans lequel tourne 1
Le mot figure avec b m^c définition dans
qui ont dû le prendre dans rEtjcycliypêdk métffùi
ailleurs, à notre comiaissance. On lit; en cflfei, <
le long article sur VArt thi McmUr dans le
w Cour!iln\ c'est l'espace où La roue dti tno^
plan incliné, afin que TeatE ne s*y arrête pas, u
On remarquera qut^ dans le courant de
mcme sens reilUre ott caursiitt ma.ts jamais cour
« MmtUtts en ikssùus^ dont la rone X aubes to
ou cûuratit d'eau qui ïa prend par dessous* »
En outre, le vocabulaire lui-même, à lart
chevrccier du dehors :
tî Oxvetsier eu drJj&rSj celui qui reçoit le lou
moulin, et qui est posé comme un Iinteat
e0ursûr£ \ s
Conime tenue de marine, on emploie îndiffiS^
pour designer un passage dans le sens de la k
Guérard le déftnlt avec une grande précision
contonisque effbrnïatus cui paxIUus ju^ înseril
M. Godcfroy, qui reproduit cette définition en
d'emprunter à Carpentier, sans le nommer, u
que deux exemples français, de 1554 et i:|
M. Godeiroy, a Tartide amblais^ ce qui est rcL
doit cire cherché dans le même ouvrage à Tartic
mm existe non seulement dans les patois de 1
tonge), mais en Berr\% en Morvan et sans d
moment^ M. F. Dégaine nous signale un empl
auTcup du xvur.-- siècle, Duhamel du Monceau, t
j^^ Mu p- J45 : <'■ Afin d^empédier qu^iîs (U
Univerture, on y applique ce qu'on appelle
dv fil d^ fer ou une courroie et qui s^attach(
WoncLviu n:înJiqye pas dans quelle région umbl
"^luf. qiîcpîuîieurï pjtois expriment par le mot ^
î. ^ï^'"îe forme aux aniciesmM/riîjL'ar^ et fffmi
l ^UU'Ur du SLuusel du Meunùr (1775), q,,c VEm
"NuMuemcnt à copier, emploie aussi coursiht.ÎL.
P* 3f^ i « Touïes les .lubes A roues qui tournem
COaUILLES LEXICOGRAPHiaUES 559
donc pas surprenant qu'on puisse dire la coursière aussi bien que le coursier
d'un moulin à eau. A vrai dire, le sens propre de œursier est plutôt « conduit
qui amène Teau à la roue » que « espace où la roue tourne », encore que
l'un soit le prolongement naturel de l'autre, et qu'une extension de sens soit
fort explicable. En tout cas, il ne faut pas hésiter à considérer courtière comme
une faute d'impression pour coursihe ».
COUSTON
a CousTON. Filaments courts qui restent après que l'on a passé le chanvre
écru. Étym. Diminutif de coste ou côte. » (Littré.)
Cette définition singulière n'est qu'une mutilation de celle de Besche-
relle : « Filaments courts qui restent après que l'on a passé le chanvre écru
à Tccl)anvroir. » Comme on le voit, les trois derniers mots, qui importent fort,
sont restés dans l'encrier de Littré.
Les filaments courts font songer, à première vue, que coiision pourrait bien
être une coquille pour courton. On n'aura plus de doute si l'on considère
la définition que donne Littré au mot courton :
« Courton. Troisième qualité de filasse; les quatre qualités sont le
chanvre, la filasse, le courton, l'étoupe. »
GRAVE
« Crave, s. w. Terme d'ornithologie. Nom donné par quelques auteurs
au genre frégile. » (Littré.)
« Crave ou coracias, oiseau noir qui tient du corbeau. » (Bescherelle.)
La définition de Bescherelle se retrouve à peu près dans Napoléon Landais
et dans La veaux. Boiste (1800) paraît être le plus ancien de nos lexicographes
qui ait recueilli le mot ; il se contente de cette vague définition : « grave ou
GORAGIAS, oiseau. »
BufFon mentionne ce nom de crave avec un renvoi ainsi conçu : « crave est
le nom qu'on lui donne en Picardie, suivant Belon. » En réalité, Belon ne
donne pas la forme crave^ msiis g raye y qu'il fait féminin. Voici le passage où
il en parle le plus longuement :
« Celui qu'on nomme en quelques lieux un petit corbin est le cornix des
anciens, dont l'on voit une espèce qu'on nomme corneille emmantelée ; et pour
ce qu'elle est aussi nommée une graye^ il y en a qui ont pris argument de
dire que c'était gracculus^ mais nous montrerons cy après qu'il en est autre-
ment et que le nom françoys est prins de l'anglois qui nomme une corneille
craye*. » (^Histoire de la nature des oiseaux (155S), VI, 2.)
;-, JL>ans \c Supplément de Littré, on trouve coursière au sens de « rigole
desti^^^ ^ conduire le métal fondu dans le moule ».
^ ^ En réalité, l'anglais dit croiv et non craye.
5^0 MÉLANGES
Ailleurs, U dit : « Toutefois gracctihis est ce qu'avons çâ nommé utu rrnîl',
graye on freux. « (îbid. VI, 6.)
Nous conclurons que Ténigmatique cravi est une coquille pour cm^r que
l'on a pris d:ins Belon, sans s*apercevoir que celui-ci le donnait non pour du
français, mais pour de Tanglais. Quant à ^raye s en dépît de Belon, iJ est
bien difficile de ne pas le rattacher au latin giacuîa et de ne pas le considérer
comme une notation inexacte de graille, « nom vulgaire de la corbinc >i
dit Littré,
CROILER
« Croiler ouCroler, Termede fauconnerie. Se vider par le bas. » (Littnt.)
A Tarticle croler, Lîttré ne mentionne pas la forme croiler ^ mais il donûc
Tétymologie de croler avec un $am douU qui est de trop : c'est une variante
du mot de la langue commune crouler. Tous les dictionnaires de ce siècle
portent croiler^ sans explication ét>'mologique, sauf cependant Napoltfon
Landais qui fait cette sortie imprévue : « Nous demanderons â nos devan-
ciers pourquoi Us ont employé deux termes pour une même signltication»
car croiUr nous semble n*avoir aucune espèce d^analogie avec la chose que ce
mot exprime; il n'a aucune espèce d*étymologie admissible; nous préférons
le second dont s'est servi Marot dans le sens de crouler^ et ici croler a bien
quelque analogie. >i Les devanciers de Napoléon Landais ne lui ont pas
répondu, parce qu*il n'a pas su les interroger : il y faut de la patience.
Le Dictionnaire de toutes ks espèces de clmsseSy paru en 1794, dans la collec-
tion de VEncychpcdie mHliodique , ne donne que crckr. La dernière 63itîûn de
Trévoux (1771) se contente d*un simple renvoi sous crolbr; c'est sous
CROILER qu'elle place son article , où on lit comme exemple cette phrase :
« Quand un oiseau de proie croik^ c*est marque de santé, » Il semble résul-
ter de cette disposition que croiler est plus légitime que croler ; mais il n'en est
rien. Les premières éditions de Furetiére et de Thomas Corneille ne donnent
que croiler, forme primitive de crouler, laquelle se lit effectivement, au sens
spécial de la fauconnerie, dans ks œuvres de d'Arcussia» On sait que la pre-
mière édition de Trévoux n'est guère qu'un plagiat du Furetiére de 1701, avec
des traductions btines cl quelques artilices d'orthographe. L'un de ces arti-
fices consiste à imprimer en petits caractères, dans les mots en vedette» les
lettres, spécialement les consonnes, qui ne se prononcent pas : ainsi on
imprime coMpTE, aIler, et de ménïc croIler, Dans U seconde édition (1721),
on renon<;a â ce système qui, tout ingénieux qu'il fût, choquait les yeux, et on
imprima : compte, aller; mais comme croJkr n'était pas de la langue cou-
rante, on prit ï minuscule pour 1, et le mot en védetlc devint : croïler,
JusquVn 1752, le mot est resté à la place qu*il occupait primitivemcoi
entre croix et CROMATiaUE : ce trouble dans Tordre alphabétique, précieux
î. Le mol est dans Cotgravci qui Ta sans doute emprunté à Bclon.
COQUILLES LEXICOGRAPHiaUES 561
témoin d*un état antérieur, a été réparé dans l'édition définitive (1771), qui
a intronisé croiler triomphant entre croie et croire.
DÉCHAUSSIÈRE
« DÉCHAUSSIÈRE, S. f. Terme de vénerie. Lieu où le loup a gratté et où il
gîte. On dit aussi déchaussure, Etym. déchausser, » (Littrè.)
Nous retrouvons chez presque tous les lexicographes de notre siècle la
même dualité : déchaussière ou déchaussure. La première forme remonte, à tra-
vers V Encyclopédie méthodique de Tan III, à V Encyclopédie de Diderot (1754), où
on lit :
« DÉCHAUSSiERES, c'est le lieu où le loup a gratté, où il s'est déchaussé. »
La forme du pluriel trahit la source où a puisé V Encyclopédie ; déchaussière est
une coquille pour déclmussure^ qui est seul susceptible d'une explication satis-
faisante. On lit en effet, aussi bien dans les premières éditions de Trévoux
que dans Thomas Corneille (1694) et dans Furetière (1690), un article iden-
tiquement conçu :
« Deschaussures, s. f. Terme de vénerie, qui se dit du lieu où a gratté le
loup, où il s'est deschaussé et où il giste. »
DÉFENDURE
« Défendures, s. f. pi. Bâtons garnis de paille, dressés en un champ et
indiquant que les bestiaux n'y peuvent aller paître. Etym. défendu. » (Littré.)
Coquille manifeste de Littré, qui a été fidèlement reproduite par le dic-
tionnaire français-allemand de Sachs. A la place de défettdure, Larousse et
Poitevin donnent défendude, qui remonte à V Encyclopédie méthodique^ Agricul-
ture (1796), où on lit :
a Défendudes. C'est le nom que l'on donne en Provence à des morceaux
de bois au bout desquels on met de la paille, pour marquer un champ où on
ne veut pas que les troupeaux aillent paître, a
La forme du mot, à défaut du témoignage exprès de V Encyclopédie métho-
diquty suffisait à déceler une origine méridionale. On lit effectivement dans le
Trésor dou felihrige de Mistral :
a Defendudo, devendudo, S. f. Terrain en défense contre la vaine
pâture; perche surmontée d'un bouchon de paille pour indiquer qu'un champ
est interdit aux troupeaux. »
DEMI-CEINT
« Demi-ceint, s. m. i© Ceinture d'argent que les femmes de condition infé-
rieure avaient accoutumé de porter. 2° Terme d'architecture. Nom donné
quelquefois à une colonne qui ne paraît qu'à demi hors du mur. » (Littré.)
Nous ne nous occuperons que du sens 2 qui, manifestement, jure avec le
sens I. Dans la première édition de Furetière (1690), les composés avec le
562 BCfejlKi;£S
moi à^ni sont divisés en dtmx groupes : Ite ùhs, ceux qm n'âppellenî |ai
dVxpîicatJon spéciale, sont éniimèrés pëe-mtk à Tirtide mime : « urii^flw-
diamètre, ud demi-cerch^ etc. ; ■ les autres ont <îes anides panioiiicrs i b
suite» dont chacun forme un alinéa en tète duquel le mot éiudîé Êgute ea
petites apilAÎes, formant vedette. Les vedettes donnent La liste scivaaîe :
DEMMOTTE, DEMI-MIN^ OEMI-LUXE, DEMI-BASTION» DEMI-CEUTT, POI3-FÎ1E,
DEMI -GORGE, DEMI-FiaUE, DEMI-TOK Ct DEItVVOL, TontéfotS, dcûl tDÛtS
composés, ou le root défini n*^t pis en t^e de k défînilioo, îi oni pis été
fnis en vedette : c*cst dam-arrests {sic}» qui est apnb DEMi-eorrE. etémi-
mhnm, qui est après dimi-cetnt, La reproduction cxaae de la dispos^on
matérielle du dictionnaire de Furctié ■ fera mieux cotnpreodrc où nous m
voulons venir :
K Demi-bastjon, est un biitîon qui n a qil*un flâne et une face.
« Demi-ci[nt, est une ceinture d'argent avec des pendants que portient
autrefois les femmes des artisans et les paysannes,
ir On appelle en architecture une dmi-c^îonm, celle qui ne paraît qu'i doiti
hors du mur, qui n'est pas en plein reïiel.
« Demi-fïle csi une file divisée en deux, »
Cette disposition est maintenue dans h première édition de Tr^i-Hsai
(1704), E!k a induit en erreur BescîicrcJle qui pour avoir lu trop -^ite a attri-
bué à DEMi-CEiNT la définition qui s^applique exclusivement à dfmi<ohHm :
«t Colonne qui n*est pas en plein relief et <jui ne ressort du mur qu'à demi, »
Littré a suivi aveugléinent Bcscherellc, et Larousse, Sichs et îa Grattât Emy-
çhpédk en cours de publication ont emboîté le pas. Juàquld les dictionnaires
spéciaux d'architecture n'ont pas admis di-tni-c^ni. Espérons que îa Grartét
EfîcyclopêiUe ne les entraînera pas dans Terreur qu'elle reproduit après tant
d'autres.
Dl^SŒUVRER, DÉSŒUVREMENT
« Dj':scr.uvRF.R, v. a. Terme de papeterie. Séparer les feuilles de papier les
unes des autres.
« Ui^sa:uvREMENT, s. m. Terme de papeterie. Séparation des feuilles de
papier. Hiyni. A' préfixe et œuvre (de papeterie). » (Littré.)
Tous les grands dictionnnaires de notre siècle donnent dcsœuvrer et dcsœii-
viemcfit avec ce sens spécial; rétymologie seule est propre à Littré, et elle
" est pas satisfaisante. Les deux mots se trouvent pour la première fois dans
' ^^^cychpcdic méthodique (1788), où on lit :
dans c^"^"^'^^''^.^"^' "^'^'^^ séparer les feuilles de papier les unes des autres et
J^'s fcuniT'l '"'"'''■'''''■'"''"^ ^^Snifie la séparation de œs feuilles. On a soin que
craindre nu T ^r^""' "^ ''''''"^ P''' désœuvrées avant la colle, parce qu'il esta
Plon-c d ,nc i""' i?'^^"-"'' *"" ^"^^ ^^''^ '^"^ séparation, ne se cassent lorsqu'on les
•^ tians la colle. »
4
COQUILLES LEXICOGRAPHiaUES 563
Il nous paraît évident que nous avons affaire dans désœuvrer et désœiivreitient
à une altération par fausse étymologie de desseuvrer, desseuvretttenty qui
remontent aux premiers temps de la langue française sous les formes dese-
irer, dcsnrement, et dont on peut voir de nombreux exemples dans le Dic-
tionnaire de. Vanc, îang. franc, de M. Godefroy. Desevrer est, comme on sait,
composé de la particule de augmentative et de sevrer^ séparer : il n'a rien à
voir avec œuvre.
a DouviLLE, S. f. Variété de poire d'automne. » (Littré.)
Cet article doit être rapproché de l'article suivant du même auteur :
« DoNviLLE, s. m. Espèce de poire. »
L'étymologie manque aussi bien à donvilh qu'a dotiville. Littré a copié Bes-
chcrellc, chez qui on lit : « Donville, s. m. Espèce de poirier. — Douvilîe, s. f.
Variété de poires d'automne. » Ce n'est qu'en considérant la source de Littré
qu'on s'explique la bizarrerie qu'offre ce dernier en ce qui concerne le genre :
doninllcy s. m., à côté de donvilîe, s. f. Bescherelle fait donviïle masculin parce
qu'il applique ce nom à un poirier — ce qui est raisonnable — ; Littré lui
conserve ce genre tout en substituant dans la définition poire à poirier — ce
qui est absurde.
Napoléon Landais et Laveaux ne connaissent que douvilîe. On ne trouve
ni douvilîe ni donvilîe dans les dictionnaires antérieurs de Boiste, de Gattel,
de De Wailly. La source de Laveaux doit être V Encyclopédie méthodique^ où on
lit :
« DoNviLLE. Variété du poirier dont le fruit, de grosseur médiocre, est de
forme allongée et en pointe vers la queue. Sa peau est unie, jaune du côté
de l'ombre, colorée d'un rouge vif du côté du soleil. Ce fruit se conserve
jusqu'à la fin de germinal. » {Agriculture, publiée en 1797.)
Nous devons donc, en l'état de la cause, considérer donvilîe comme la
bonne forme et douvilîe comme une coquille. Quant à l'étymologie du mot,
il faut vraisemblablement la voir dans le nom de lieu Donvilîe, canton de
Granville (Manche). Plusieurs localités portent le nom de Douvilîe, mais il
n'y aurait à s'en préoccuper que si des recherches plus approfondies renver-
saient notre conclusion en faveur de la forme donvilîe.
DRVIN
« Dryin, s. m. Poisson appelé aussi appât ou équille (ammoilytcs). »
(Littré.)
Littré n'indique pas d'étymologie. Il est manifeste que dryin est la forme
francisée du latin des naturalistes dryinus, grec opu?v«s. On peut lire dans le
dictionnaire de Thomas Corneille un Jong article sur le dryinus :
L
564 MÉLANGES
9 DftYtNUS. Espèce de serpent i^uî est blanc et fuligineux pa.r le dos et qui
a la teste semblable à celle d'une hydre, *. .C'est ce qu'en dît Nkander. Ce
serpent est nommé dryîmts de Sp-j^, chesne, à cause qu'il se nourrit parmi les
racines de ce: arbre '. n
Ceb éti^nt, on oe s'êJîpîiquc p^s comment le nom d'un serpent a passe â cm
poisson, car on ne? conçoit pas un poisson vivant parmi les racines dVn
chêne. Littré, comme d'habitude, a copie Bfscherelle, Napoléon Landais dît
plus justement : ^ Dryin. Espèce de vipère* » Laveaujt (éd, 1S28), plus com-
plet, commet une erreur singulière, qui va tious montrer comment, sekm
toute vraisemblance, un serpent a été peu à peu pris pour un poisson :
*t Dryin. On a donné ce nom à la vipère coîinue aussi sous le nom à^amstiù-^
dyti ùppdL n Cest là ce qu'on peut appeler une définition amphibie : le dryin
est bien une vipère, mais Vammodyk appét est incontestablement un poisson,
celui qu*ûn appelle aussi rquiîU ou lan^ûn. Cest le savant naturaliste alle-
mand Conrad Gessnçr qui a le premier appliqué à ce poisson le nom très
flpproprî<î d*amnmdylg, puisqu'il s*enfonce dans le sable (cf. les noms allemands
smtdaaî , sa*iJfischj et les iioms anglais sand-t-d^ iatid-hma}. Or les andens
appliquaieîîE le nom d'amfnodyit à un serpem des déserts de Lybie ; gre;
à[Afio3uîii;, lat. mnnukiyîei. Il en est question dans Lucaîn i
Concolor exustis atque indiscretus areals
Amniod}'tes.
Quelque naturaliste aura eu Fidée de rapprocher le dfyin de Vamttwdyk-
vipère, — ce qui est raisonnable — , et comme à côté de Vammodyte-vipire
il y a Vammodyte-poisson, nos bons lexicographes en ont conclu que le dryin
pouvait lui aussi être concurremment serpent et poisson — ce qui est absurde.
Ad. Hatzfeld, Ant. Thomas.
I. Trévoux reproduit, en l'abrégeant, l'article de Th. Corneille; mais
Tcdition de 1771 donne par erreur en vedette drynus, au lieu de dryinus.
COMPTES RENDUS
Mémoires de la Société néo-philologique â Helsingfors,
1. Hcisingfors, Wascniuska Bokhaocidii ; Paris, Weher» 1893, 412 p.
Rîen n'est plus intéressant et plus digne de sympathie que les efforts que
font depuis quelques anntïcs en Finlande un certain nombre d'hommes jeunes
et convaincus pour y développer les études sérieuses de philologie moderne
et spécialement de philologie romane. Leur œuvre rencontre beaucoup d*obs-
ticles, dont quelques-uns sont tout à fait étrangers à la science ; mais ils la
continuent avec une ténacité qui finira par leur assurer le succès* Ils ont
fondé, à Hclsingfors, le 15 mars 1887, un Chth nèo-philolcgique^ devenu en
1891 une Société ttèo-phihlogiqm^ qui» de 17 membres, a passé» s'accroissant
chaque année, à 88, et qui forme une base très solide pour l'action qu*îls
poursuivent tant i l'université qu'à côté d^elIe. 1! est vrai, et cela se comprend
trop naturellement^ que la plupart des membres de cette Société, maîtres de
langue ou simples amateurs, s*intéressent aux questions d enseignement ou à
Tusage des langues modernes plus qu*à leur histoire et à leur ancienne litté-
rature i mais ils forment un milieu accessible à Tétude historique, et les direc-
teurs de la Société ont très bien su joindre dans ses travaux la philologie à la
pédagogie et à b pratique. Cette Société a pour président M. Sôdcrhjelm,
pour vice-président M- WallenskjÔld» pour secrétaire M, Lindelôf ; ce sont
trois noms déjà honorablement connus dans la philologie romane et qui
méritent d'être mentionnés avec reconnaissance par ceux qui s'intéressent à
sa diffusion'. Ils nous ont donné dans ce volume le premier fruit de leurs
efforts collectifs, et, comme on le verra, ce fruit n'est point à dédaigner. Le
recueil de la Soci/U néo-phiMûgiquc de Hclsingfors contient des travaux de
divers genres ; je ne m'occuperai pas de ceux qui sont purement pédagogiques
ou consacrés aux langues germaniques ou slaves; je parlerai seulement de
ceux qui concernent la philologie romane K
P. 21 -p. W. Sôderhjelm, Le pohm de saint Laurent dam le ms, Egcrlon
i. Une bibliographie des ccriis» déji nombreux, de ces trois savants se trouve dans
l'article de M. P. Gusiafsson qui ouvre le présent recueil, article où l'on pourra voir
en outre les diftîcultcs coutre lesquelles se heurte, à Funiversité fitibndaise^ la bonne
volonté de ceux qui essaient d'y introduire la philologie moderne. ïl convient de rap-
peler Tappui que leur a prêté M. EstUindcr^ le précurseur et le maître des romanistes
6nlandais,
2. Tous les articles du recueil *ont en françaU ou en allemand.
j66 COMPTES fŒKDiîS
J710, M. S. aviît donné son édition «!e h Vu d^ smni Imiftml (ray^ ftm„
XVII, 6îo) saDS conoiître le se*:ûnd miîwiscTit *âe ce poècoe qoc P, MtfffA
' trouvé 1 Londres. I! donne ici la colktion coraplete de ce ms., qoî osilbcv-
reuscnient dérive de la môme copie, déjà très fautive^ que ïc ms- «le PUil»
TOAis cjui cependant permet d\iméïiorer le texte en uo ceruln oomb^e 4*C»-
d rails.
F. Î2-64. W. Sôdcrhjebi, Saint Martimct k Tommdtia Biih Hm/tedeûm-
iQnltmpI^, M. S., qui va donner une édition complète 4ii pc^^e de ¥ûm
Gastinei sur ta vie et les oairacles de saint Martin, s'e^ enqui* ifes autitl
ttuvrcs poétiques où figure k célèbre évoque de Tours (il ^gnak ootifo-
mtm un mystère du x\'i« siècle, représenté à Saint-Jean àe Manrienoe en
156) et récemment imprimé, que n'in -. pas M. Petit de Juîleviîle), et tî 1
lu k rottia» de ïa MU HMne^ dont l'Mt*oîiie est donnét; comme îa mère de
saint Mirtin, romain bien connu dans sa version en prose et dans ses traduaioos
étrangères ^ mais dont la forme originale est encore inédite. Il eo impntue
ici, d'après îe seul ms. de Paris iisSi % les morceaux qui concemeiil » tu-
cbevéque 0 de Tours appelé Martin, qui donne son nom, ers le baptisant, k
Lïon. Vnn des fils d'Hélène, et en fait plus tard son successeur, A vrai dire,
cette publication repose sur un malentendu. M, S. imprime ces mordant
paxce qu*il les regarde comme concernant saint Martin; d'après lui, • Il
%ure Historique ou légendaire de saint Martin se trouve ainsi partagée ci
deux dans le roman, » Mais le parrain de Lîon, Martin, n'est nulle pan J«eb
k roman donné comme saint, et il ne se conduit nullement comme un saîist
(M, S, k remarque lui-même) : k seul saint Martin, aux yeux du romandct^
est le fils d'Hélène, et l'autve Martin ne figure que pour lui donner son nom
et lui kisscr son siège. Sur Timpression des vers tirés du ms. 125S2, il y
aurait à faire plus d'une observation de détail ; mais cela paraît assez superflu,
puisqu'une édition du poème, quand on la donnera, devra nécessairement
s'appuyer sur tous les manuscrits. Je noterai seulement qu'il faut lire Douay pour
dofiay et ihiiivê pour douhbè (p. 45), n'euissc pour lie visse (p. 45) et qu cuisse
pour que visse (p. 51), ileuisl pour dczûst (p. ^7)y poiiei etc. et non /x>îv^, /vw-
stst pour peiisisi (p. 58); pp. 55 et 64 les leçons du ms., œntree et Alons
ment ne devaient pas être corrigées. Les autres erreurs no risquent guère
de reparaître après la collation.
P. 6). \V. Sôderhjelni, Notice et extraits d'un manuscrit latin-français du
XF'' siècle se trouvant en Finlande. Il s'agit d'un petit ms. acheté à Stras-
bourg par un particulier; c'est un livre d'heures et d'oraisons avec quelques
morceaux en français. M. S. les imprime : l'un est k prologue d'un hynme à
la Vierge, où l'on raconte que cette prière fut révélée en vision à un chanoine
appelé Ernoul (je ne connais pas plus que M. S. la source de cette histoire).
i
4
. . oK/ auss, les rc.sc^McMicnts donnes sur le ms. B. N. fr. 1489, rédaction en
P ose nKlcc aalcxandrins rimant deux à deux. I^ réd.icteur semble avoir suivi b mise
prose de 1 ancien poème, en essay.mt ,à et i.i de la rimer.
Mémoires de la Société néo-philologique à Helsingfors 5 67
Il conclut avec raison des formes du langage que le ms. a été exécuté en
Picardie ou plutôt en Hainau ; peut-être les noms marqués, suivant l'usage,
dans le calendrier français qui est en tête comme objets d'une dévotion par-
ticulière, auraient-ils pu donner quelque renseignement plus précis.
P. 71-109. A. Wallenskjôld, Das VerhàUniss :^wischen den deutschen tind den
entsprechenden lateinischen Liedern in den Carmina Btirana. Si je mentionne ici
cette étude, c'est parce qu'elle présente un intérêt au moins indirect pour
l'histoire générale de la poésie lyrique au moyen âge. On a beaucoup disserté
dans ces derniers temps sur le rapport des strophes allemandes insérées dans
le ms. des Carmina Burana avec les pièces latines qu'elles accompagnent.
M. W. me paraît rendre très vraisemblable son opinion, qui, d'ailleurs, a été
celle de tout le monde jusqu'à ces derniers temps, mais qu'il appuie par
d'excellentes observations, que les pièces latines ont été composées sur le
modèle des strophes allemandes. Si l'inverse était vrai, ce qu'on a soutenu,
il faudrait faire à l'influence latine dans le développement de la poésie lyrique
allemande une part considérable, et naturellement on serait tenté d'admettre
pour d'autres pays ce qu'on aurait constaté en Allemagne. La question géné-
rale n'est pas tranchée par le résultat acquis pour les Cannina Burana ; mais
pour la résoudre il ne faudra pas s'appuyer sur les données fournies par cette
précieuse collection.
P. 131-1 66, Ivan UschakofF, Zttr Erklârting einiger fran^ôsisclien VerhaJfor-
men. Ce morceau, le plus remarquable du recueil, et qui montre en son
auteur un linguiste expérimenté et sagace, a pour objet la recherche des
causes qui ont amené en français l'addition d'un c 2, la v^ pers. du prés,
ind. et aux trois pers. du sing. du prés. subj. de la conjugaison en -cr. L'au-
teur cherche à démêler, des diverses influences analogiques qui ont produit
cette déviation des lois phonétiques, celles qui ont agi le plus puissamment,
et rectifie ou précise ce qui a été dit avant lui sur ce sujet. Il admet avec rai-
son que des influences analogiques diverses ont pu concourir au même résul-
tat et qu'il ne faut en exclure aucune. En somme, pour la transformation du
subjonctif, plus ancienne (jur, jttrs, jurt devenus jure, jures, jure), il regarde
surtout comme déterminante l'influence des subj. comme serve serves serve, sans
qu'ait fait défaut celle des verbes qui phonétiquement avaient un e (livre,
livres, livre)', il montre fort bien pourquoi la 3e pers. (Jurt) s'est maintenue
plus tard que les deux premières, appuyée qu'elle était par soit, ait, puist en
regard des i" pers. soie, aie, puisse, etc.,rimpf. ind. -0// en regard de-o/>,rimpf.
subj. -asttn regard de -asse. Pour le prés. ind. il y voit surtout une « analo-
gie proportionnelle » avec le prés. ind. des autres conjugaisons (cour, cours)
où la irc pers. no différait de la 2e que par l'absence de Vs (ainsi jure : jures ::
cour : cours)', il y joint d'ailleurs l'influence du groupe livre, et aussi celle des
temps, comme le futur et le parfiiit, dont les deux premières personnes du sin-
gulier avaient au moins le même nombre de syllabes. Tout cela est fort bien
déduit, et l'auteur fait un bon usage de la statistique, en montrant que les
formes des verbes non en -er l'emportent de beaucoup en fréquence dans la
î68 COMITES RENDi:
langue pariée sur cçlïm des verbes en -er (il
part au glossaire d'E. Siengel aux plus andeDS
du Bottr^fois gtfitilhùmmtf et il trouve dans !(
contre 1663 non en -^, dans le second 1S7 ^i
-tff donc la même proportion, qui comporte p
fréquence double de celle des verbes en -#f)
formes de subjonctif deux fois plus usitées que
assimîlées. Je crois seulement que M. Uschako
fluence du subj, du type îhrtr : on voit par sa
formes verbales de ce type constituent en^îron
formes verbales en -tr ; 11 ne suffit peut-être p
rassimilation aux Ibrmes des verbes non en -*
assimilation atirait pu ne pas se faire ; elles m
décisif et auraient peut-être amené rassimilatic
fluence du subj. des verbes non en -«"r. M, U
qu'un groupe moins nombreux n'assimile pai
mais ici rassimilation me paraît avoir été très fac
du plur,, semblable par Taccentuation aux J p<
dans le présent des deux modes (Jurtfti ' cornm*
rétaîent aussi devetiues de très bonne heure (jur
ïnâ, et pr. subj, Sjurefd-Hvrmt^ pr, subj, i pir
runiformisatioEï était indiquée, et comme dl
livre i elle s'est pratiquée sur iurt\ maïs je n^
courte cQureî, cottn^ cùumd* n*y ait aidé, Qua
rindic, je croîs de même à Finfluence prépoi
subj. prés, assimilé, la conjugaison en -fr j
personne une division qui ne pouvait subsister
suTjmi; on moâch jtir SUT hvre; mais encore
des autres influences invoquées par M, U. ; je
d'analogie j il faut tenir un compte particulier
corps d'une même conjugaison (celle que M. I
iraerft^çn regard de IVîWfj^ïV exiem^). En résur
est fort intéressant; l'auteur annonce sur d'ai
française des études qui ne peuvent manquer d\
et suggestives.
W^y^-^dcv.,tnt f.îrc -cb.nt à l'ind., -c.nî ,u subj. (d
^tc ), n^,,,! „^i,^^^^ ^ àû ^ fair. très ,nc\^nncnv
veniez i""' ^'"^ f*'"^ commode que ..mV, q
c^^dtJr^ =^pe«d;int qtiWnt le travail Kénér.1 c
^'i^m ïo,nîu4 ■!."' '"f '"' ^^ "^ cpnroniïer n. type l
P^^^^^^^^T '-^^ ^^"^^^"^-^ -^ typ-/-r. Ainsi .
^^ ni.n.e, .„nsi que r./.„V h càié de r^rr..
rVdberg, Lf (Icveloppcmeni de facere darts les lang. rom. 569
P. 360-372, Annie Edelfeit, LisU de moii français employés dans la langm
sitèdoisc avec utu signifier iim détour ni^. Quoique ne portant que sur des
emprunts modernes, cette liste mérite d*ètrc signalée ; il est curieux de voir
les déviations de sens parfois étranges qu^ont subies les mots français en pas-
sant dans un autre milieu (ainsi bonjour signifie en suédois « redingote »,
carotte « compotier ij, pirate u sac à ouvrage w, polissons v favoris «, salope
« espèce de manteau «, etc.). D'autres fois, un sens du mot français, perdu
cheiî nous, s*cst conservé là -bas (c'est le cas pour cadet, planchette, veste). Plu-
sieurs de ces mots viennent directement aux Suédois de Fallemand, et c*e$t
en allemand qu*îls ont subi la déviation du sens (ainsi bldtner, concours^ par*
tout, réel, revers^ etc.). Quelques-uns des mots cités ont peut-être été pris au
latin et non au français.
Nous souhaitons longue vie et prospérité à la Société ttéo^phihli^qm de Hel-
sîngfors, et nous espérons qu'elle nous donnera bientôt un nouveau volume
de Mémoires K G. P.
L.e développeinent de FACERE dans les langues romanes,
Thùsc pour le doctorat par Gust. Rydberg, licencié ts lettres de TUniver-
sité d'Upsal. Paris, Noblet^ 187J, 8°, 10-256 p.
Cet ouvrage n*est pas seulement» comme rauteur semble le dire trop
modestement dans sa préface» un recueil de faits et un résumé d'opinions
présentées antérieurement. Le jeune philologue suédois auquel nous le
devons apporte partout une critique très indépendante et généralement trCrs
perspicace, et sur plus d'un point les explications qu'il propose sont i la fois
nouvelles et justes. Le sujet qu*il a choisi paraît au premier abord bien étroit
pour un gros volume ; ce n*cst nullement par une exposition prolixe ou des
digressions inutiles que M, Rydberg est arrivé à remplir son livre : au con-
traire, il est plutôt concis^ et quand il expose les hypothèses émises avant
lui, il le fait avec une étendue justement proportionnée à leur importance.
Mais ce sujet était réellement fort totércssant et difikile, il soulevait un grand
nombre de questions obscures et délicates, dont plusieurs sont encore pen-
dantes, et M. Rydberg n'a eu qu*à Tétudicr métbodiquemem. Encore ne
s'est-il occupé que de révolution morphologique de facere dans les langues
romanes. S'il avait voulu en étudier l'évolution sémantique, il lui aurait failu
UQ autre volume.
Le premier chapitre concerne les rapports du verbe latin facere avec b
grammaire indo-européenne, le second traite de la nature du c qui termine
le thème ; nous ne nous y arrêterons pas*. Le troisième et le quatrième sont
t. Je n'ai pas mânuoniié un article de M. Soderhjclni sur des cas d'analogie en syn-
uxc, parce qu'il ne contient il peu près rien qui concerne les lingues romaties ; mais il
est plein d'idées justes et intéressintes pour h linguistique gétièralc,
3, Notons seulement que les exemples alléguèi eu preuve de raacîenne € ;ïsstm»t4<
tion > du r sont tous à riycr (voy. Compiet rendiu éU V Académie des ImcTiptÎQm^ l, XXt,
1893, p. 81) ; M. R. avait d'ailleurs fait de prudentes réserves sut Lear autbcaticité.
kmmu»», mil 57
570 COMPTES RENDLS
ooQSJdés à rînfîmuf et au futur, dont T^tude est îotîniemeiit Dée. Je passe lur
ce qai concerne les dilTérentes représentatioDs du type facere pour s^oiIcr
setilemcot ce que dit M. R. des formes nombreuses qui postulent un tvpe
Imre en Ut. ^nilg. ; je suis tout i fait de son avis sor Texistence réelk de cette
base, qui explique seule d'une mantcre satîsfaî&aote des formes qu'on tioutt
dans plusieurs langues romanes et qu'on a tentt^ sans succès d'cxptiqocr bo)^
ment. Le français ne présente aucun exemple de f arc*; mais M. R» ttcon-
naît dinsylTiij la continuation d'un L vutg. farajo, en quoi je suis encore
de son avis. Seulement je ne puis admettre que IV âc/mu sott cooforme à h
phonétique normale : dans lavarajo^ etc. , Va est amétomqtie non i h
s>llabe initiale, d*o£i tairrai, etc. ; mais À la syllabe initiale a persiste (hrint^
etc.*: farajo devrait donner /tirji. Je suppose que nous avor un
phénomène de phoûciique syntacdque : on disait /a/a/, mais/o r-zj^
etc., la première syllabe du mot se trouvant comme seconde par Tiaiion
intime avec le mot pn^ccSient ; puis cette forme est devenue unique. Cest la
répédtioo, à quelques siècles de disunce, du même phénomène qui a produit
la forme /riii, si usitée en aoglo-normand * et qui n'est pas rare non plus
dans des textes picards*. Sauf ce détail, toute Texposition de M, R. me
paraît excellente; il appuie d'ailleurs l'existence de fare au moins sur un
exemple cité par Schuchardt^. Comment s'explique cette forme fare, qui
n^est pas conforme à la phonétique ? Elle parait être due, comme celles que nous
aUons constater pour Tînd. prés., à une abréviation du langage courant pro-
venant de l'emplni extrêmement fréquent de ce mot'; elle s'employait sans
doute uniquement quand le mot était dépourvu d'accent oratoire et intime^
ment hé au mot suivant : or c'est ce qui arrive surtout dans la proposition
composée facere habco, qui est devenue le futur, aussi at-ce Ik que fare
est le plus généralement répandu dans les langues romanes; dans aucune
d*iulleurs, en dehors du futur, fare n'a supplanté facere : les deux formes
existent i c6té Tune de l'autre, bien que leur emploi ne soit plus soumis
aux règles primitives.
Le chip. IV, qui traite du présent de l'ind.» est le plus intéressant de
t. Fer $c lit à U rime dui& Meraagù (p. 102), tuùs M. Ziogerte (Ufber ILumï M
HùHàdfHc, p. |8) a montré que c'était une leçon fsuitTc.
a. On trouve bien Jtrine^ mais dialectalement cl postéricarement.
j. M. E, en aurait trouvé des exemples plu* Anciens que ceux qn*il dtc dans la dis-
sertation, qu'il mentionne pourtant, de J. Brôhan surit futur. H aurait dû rtanar^^ucr
quc/r*ti, frdi^ attestés par la mesure, se trouvent déjà dans le BretïdaH (v. 1441, 878).
4. M. R. ne cite qu*.4fûl, mais il eu aurait trouvé beaucoup d'autres exemples danj
Brôhan. En revanche, celuî<î cite par erreur G/V. de Roust. v- ôjo,
5. Il mentionne au»i la forme cal(e)farc, base du pr. calpr^ fr* chaîfkr^ «t Je pcns^
qu'il a raison. On a eapliqué aatrcmcnt ces verbes, par un cAlfacit det>cnu ctlfat et
produisant toute une conjugaison sur ce point de départ ; mats il paraît probable qu'oo
auraîteu cal fi cil comme pcrficiç.
6. Il est probable que Ton doit aussi faire une place à l'influence analo^quc à»
date, siare*
*
RYDBERG, Le dévdûppcmcut lie facere dans les hirfg, rom. 5*
l'ouvrage. Je suis encore ici — et depuis longtemps — de T^ivis de rauteuî^
qui admet en lat, vulg., à côté des formes classiques^ les formfâ fais, fait,
faim us» failis, faunt. Ce sont des formes abrégées d cause de rerapbi
h'équent du mot, et tout â fait comparables à celles de Tind. prés, de vaderc,
qui étaient en lat. vulg. vao, vais, vait, vamus, vaunt. II y a seulement
deux points sur lesquels je ne suis pas de l'avis de M. Rydbcrg. Je ne crois
pas à Texistenceen lat. vulg. delà i^^ pers. fao : les représentants de facio
se retrouvent en sarde, en italien, en gallo-roman et en réto-roman (le roumain
ne compte pas ici); riiispano-roman a eu aussi facio, conserve dans k port,
fa^Ot et M. R. a parfaitement raison de voir dans Tesp. }xLgo une forme rela-
tivement moderne subsiituée â un faxp plus ancien. Or il ne s*agit pas ici de
phonétique syntactique ni d*abréviation rapide comme celle de facis en/flii,
etc. ; facio n'a jamais pu devenir fao, et faco n'a jamais existé, comme le
montre M. R. lui-même. Les formes sur lesquelles on s*appuie pour recon-
struire fao sont inconnues â la Sardaigne^ à F Espagne (sauf le catalan) » i
la France du Nord et i la Rétie : elles se bornent à\xjau (faite) prov. cal. et à
rit. fût mais ces formes sont indépendantes les unes des autres, relativement
récentes, et construites précisément parce ([uc fai^ jaccio, difïti raient trop des
autres personnes du mtïme temps : celles-ci se rapprochant de celles de *vao,
•dao, •stao, on a refait, d'une part en Provence, d'autre part en Toscane,
une i^ pers. semblable à cellcs-lâ* En ce qui concerne la y pers, pL, M, R.
repousse avtc énergie riiypothèse d'une forme 'facunt d*oCi fa uni, admise
par plusieurs philologues comme par moi ; mais l'existence de celle forme
«t absolument certaine, car toutes les 3" p^rs, en -îunt ont perdu leur 1 en
roman, donc en lat. vulg. (aucune trace d^Vi dedormiunt, serviunt,
audiuni, sapiunC, capiunt); faciunt n\i pu faire exception et a néces-
sairement passé par facunt * ; d'ailleurs, ce n*est que facunt et non faciunt
qui peut dans une prononciation rapide s'abréger en faunt. Au reste j'admets
avec M. R. que facunt n'a laissé aucune trace en roman*; toutes les formes
qui ne sont pas analogiques viennent de faunt : faunt prononcé en deux
syllabes a fort bien pu donner le (dmcux ftrnt au Jonas; faunt prononcé en
diphtongue a donné pr. faun fr, fotU (toutefois pour ce dernier, comme
pour kfûtt provençal, on peut admettre aussi une imitation de sun t) i le fiitt
prov. et surs., le fann^ it., peuvent venir de faunt ou être mode-
lés sur dant, s tan t. — L'hypothèse de faim us, fa i lis explique également
les formes fainm^ faites ^^ sans f, au lieu de faisnus, faistfs*. — Nous pou-
j. Les formes romanes (c5p,> port,, etc.) qui semblent remonter à faciunt sont
refaites par analogie i M* R, Ta très bien pressenti, qnolqu'il pcïisc qu'elles pourraient
être étymologiques.
2. Sauf peut-être le sarde fihfjént (Jiichiu ftighent), qut M. R* regarde comme un«
forme aiulc^ique (p, 76), fins donner de raisons.
3, Sur ÏV final de ers formes, voy, Rom, XXI, 3 ça*
4- M. Meyer-LQbke(Gr., 1,5 Sîi)» ^^^^ p*r M. R., oppose «/liin^j kfimm^ie dcmaa*
dant lequel est réguHeri lequel andlogîque, Msis il y a là une erreur de fiiit i on si dima
4
i
I
4
571 COMPTES RENDUS
vons donc admettre avec certitude comme rcpréseoiaDt U fortae prise par te
présent de Hnd. de facere en lat. vulg. ^ fac|o, fajs, fâj t, fjijtniiK fjjlis»
faunt.
Dsms le diap. V, consacré â Timpératif^ Tauteur aJtnet que tes tangues J
romanes continuent tantôt fac, tantôt face. Il Ht ut toutefois remarquer que
fac n*est absolument attesté nulle part, et que les îozmcs fay fai fii (anc.
esp,, cat., prov., fr., surs., frioulan, ital.) pounaient s'expliquer par un ht.
vuJg. fac analogue aux formes du présent. Néanmoins, je crois plutôt à
fac, comme base de toutes ces formes : fac a été plus usité que face, et ce
monosyllabe rentrait bien dans le cadre général fourni par le présent de Tindi-
catif.
Le ch. VI, consacré au subj. prés*, ne contient rien de bien nouveau» it
temps, sauf quelques formations analogiques transparentes, étant dans les dif-
férentes langues le développement régulier du temps tatin. La question du
remplacement en français de facUms p^r facionts n*est pas traitée par î auteur,
et en effet elle est en dehors de son sujet. — Le très court diap. VII traite
de rimpf, du subj., face rem, conservé, comme on sait, uniquement en sarde.
Ch, VIII : imparfait de Tindicatif. Sur Torigine de l'imparfait roman en
-ia, -ea, M. R. émet une hypothèse un peu compliquée, mais très ingénieuse.
D'après lui, étant donné que -ieba m était abandonné pour -ibara, Texis-
tencedcsdoublesformesaudivi-audîi,audîveram-audieram,audiverO'
audicro aurait amené la création d^audiam en face d*audivam;
d'autre part, les impf. en -ebam étaient souvent devenus -Ibam, p, es.
delibam pour delebam, d'où naturellement delianii mais d'autres impf.
gardaient -ebam, et sous l'influence de -iam on créa une forme <am.
Ainsi les impf. desconj. II, lîl, IV flottèrent entre des formes -iï«, -la, -a%
*M, et ces formes se retrouvent dans les langues romanes, parfois encore eu
concurrence, le plus souvent avec victoire de la forme sans î% et avec une
répartition dïct à'e qui ne correspond pas à la distribution latine. Je voisi
cette hypothèse une objection sérieuse, c'est que l'i de audii, cic , est bref,
tandis que Vi du roman -ia est long, et que par conséquent il semble peu
vraisemblable que le couple audîvi-audîi ait suscité le couple audîva-
audïa, qui lui ressemble d'autant moins qu'aux personises les plus impor-
tantes du parfait^ la fc et la y du sg,, le changement de quantité amenait un
changement d'accent : audivit-aiidiit. M, R. ne semble pas avoir connu
l'hypothèse de M. Thurncysen (Das verhum être, p. 30), qui donne pour
point de départ â -ea des imparfaits comme vivea, ave a, dcvca, savea*
où le V serait tombé par dissimîlation, comme dans vi va ci us, vivenda,
comme faimts, et non Jtsnies (si dhmts se trouve, il est purement graphique ; c'ait
comme t^edisma^ etc., nnc grnphie inverse due au très ancien amuîsscmeat d*i dcnat
fft) ; d i c i m u s était en ht , vtilg, d i i m u s comme f a c i m u s était f a i m q s.
I. Sauf pour le sarde, qui reproduit ôdckment la forme du latin classique, itrçc
déplacement de Taccent kh i" et 4* plur. (pour U y, voy. ci-dcssusj p. s?*» »• a).
RYDBERG, Ix développement de facere dans les lang, rotn, 573
vîburnum; -«ï aurait ensuite produit -ia : cela paraît à la fois plus simple et
plus vraisemblable. Quoi qu'il en soit, les formes -iva, -ia, -eva, -ea sont
en effet répandues dans le domaine roman : en Gaule, le v ne s*est conservé
que dans -iva et très sporadiquement (gascon, franco-provençal, messin) ' ;
en général on a pour -ibam comme pour -ebam -w au sud, ea au nord. En
français, -eie, sorti régulièrement de -ea non précédé de palatale, s'est imposé
même après une palatale, où on aurait dû avoir it : c'est, comme le remarque
M. R., le cas de faiseU, qui serait régulièrement /aiVi^, s'il représente facê-
bam comme s'il représente fa ci b a m. Il rapporte avec vraisemblance à
l'influence dt ferai, f croie la prononciation si souvent attestée dcfesoie, etc.,
au lieu de faisoie (cf. pïaisoiâ taisoie). Il ne parle pas de la question de Vi des
ire et 2e pers. du pluriel ; y voit-il un représentant normal de Ve d'-êâmus
ou le regarde-t-il comme provenant de l'impf. en -ia? Les deux opinions
peuvent se soutenir et ont été soutenues ; je pencherais plutôt pour la pre-
mière.
Dans le chap. IX, qui traite du participe présent et du gérondif, l'auteur
me paraît manquer un peu de clarté : il ne dit pas expressément, ce qui est
bien sa pensée et ce qui est certain, que toutes les formes romanes remontent
à facentem, facendo.
Le chap. X est consacré au parfait de l'indicatif. Il est excellent ; tout au
plus pourrait-on demander plus de lumière sur certains points. Ainsi l'au-
teur établit fort bien que la seule forme traditionnelle du français (sauf le
changement de voyelle dû à l'influence de la re pers. du sing.) pour la 3e
plur. est yîrdw/ de fecrunt, mais il ne donne pas l'explication des formes
fisdren[t] (Ug.), fistrent (S. Brendan $94, Ben. Chron. 41804, S. Martin) y
non plus que du fisent picard-wallon-lorrain; il pense certainement, avec
raison, que ces formes sont empruntées à misdrent et à dislrent d'une part,
à misent de l'autre *. Pour la chute de Vs d3insfesis (lui-même pour /mis, cf.
feisii[t] Pass. 212), etc., il accepte, après avoir hésité, l'influence analogique
de vetSf etc. ; et en somme, il n'y en a guère d'autre possible; toutefois le
feissenl du ms. de S. Léger fait diflficulté, puisqu'à l'époque où il a été écrit le
d de vediSf etc., subsistait encore'. — Je ne suis pas de l'avis de M. R. sur la
1. On peut du reste se demander, là comme partout où on retrouve le v de -iva ou
de -eva, s'il est originaire ou si plutôt il n'est pas emprunté à -a va; je penche, quanta
moi, pour cette dernière opinion, d'après laquelle le roman n'aurait reçu que -ea, -ia.
Remarquez que même là où l'on trouve -ew, -iva, le conditionnel est toujours -ia.
2. Un mot en passant sur ces formes, qui ne sont pas elles-mêmes toutes tradition-
nelles. L's douce devant r postule un d d'appui (cosere]>cosdre), d'où misdrent^
tetc. ; mais ces formes se sont plus tard modelées smt distrent y etc., où une s appuyée pos-
ulait un /. Dans les régions où on dit misent, le groupe s douce -f- r ne postulait pas
de d intercalaires, et Vs de misrent est tombée ; mais s appuyée 4- r postulait un /, et
disent, etc., ne s'expliquent que par l'influence de misent, etc.
3. M. R. regarde cette forme comme « accidentelle ou même douteuse », le même
texte ayant ailleurs fesist (196, leçon d'ailleurs mal assurée). Aux exemples anciens
qu'il cite pour la chute de 1*^, il faut ajouter celui de YApp. à* Alexis et l'exemple éga-
lement probant pretst empreist dans Brend. 770.
574 COMPTES RENDUS
conservation en hispano-roman de la base fecérunt; le h âù Vc
ne peut représenter un ê : ces formes sont refaites, et rhbpoiid
comme toutes les langues romanes, n'a reçu du latin vulgaire que des formes
en -crunt.
Le plus-que-parfait de Tind, (ch. XI) présente en fr. les formes^^r^ (^t)^
fUdra^ fistdra^ qX fire (Akx. 12\ fireî). Comme le dit mais un peu obscure
ment' M. R., la forme primitive a dû être frire < feira (cf. le prov.);/rf/t
est devenu /ne comme /tirent est devenu firent, sous rinfluencc de fis;OQ 2
âlxjisdre sous riniluence de mtsJre.
Le ch. XIÏ, qui traite du plus-que-parfâit du subjonctif, n'offre rko de bîca
iniLTessant, le sort de ce temps étant identique à celui des formes faibles du
parfait. — Le cli. XIII s'occupe du futur exact (antCrieur) et du parfait du
subjonctif. Il y a peu de chose à dire du temps résultant de la fusion de ces
deux temps qui soit spécial à facere ; il n*existe, comme on sait, qu'en his-
pano-roman, sauf quelques traces en roumain et dans des dialectes italiens. —
Enfin lech- XIV donne les formes diverses du participe passé» qui n'ont rien
non plus de particulier et représentent révolution régulière du txpe latin.
Un vaste tableau synoptique, où chaque forme est accompagnée d'un ren-
voi à la page du livre où elle est traitée, et une bibliographie qui remplit pîus
de vingt pages, complètent cet intéressant volume, dont la Icaure sera très
utile particulicrement aux étudiants en philologie romane, en leur montrant»
sur un sujet bien limité, une niasse considérable de faits interprétés avec une
exccUeme méthode, et en leur faisant connaître la marche de ta science par
le résumé et la judicieuse critique d*un grand nombre d'hypothèses émises sur
ces faits par divers savants. La thèse de M. Rydberg, qu'il a eu raimable
attention d'écrire en français, fait grand honneur à runiversité d'Upsal et
permet d'attendre de son auteur des travaux remarquables dans le domaine où
il a si bien débuté» G. P, ,
La proBunzia popolare dei versi quantitatîvi latinl nei
bassl tempi ed origine délia verse ggiatura ritmica.
Memorîa di Felice Ramorin'O, professore ne 11 a R. Uni versi ta di Pavia,
Torino, Clausen, 40, 70 p. (Extrait des MetnorU dàla R. Accaàentia delU
JoV»^f di TorinOf ser. II, t. XMII).
Depuis quelques années on s'est occupé aux points de vue les plus diffé-
fcnts des origines de la versification romane, qui est, comme on sait, fondée
sur l'accent et le nombre de syllabes (l'assonance ou rime n'est qu'accessoire),
par opposition à h versification classique, fondée sur la quantité et le pied. J'ai
souvent eu occasion de parler ici de cette intéressante question, cl d'autres
collaborateurs de la Romattiu ont essayé de Tédaircir à leur manière. Les tra-
j. ht fi ait m du \\ 62 est aimbuc ici pAr M. R. au plus-que-parfait, et plus haot m
parfiitt : c'c$t bien prob^iblemcnt cette dernière opinion qui est U vraie,
a. Il aurait dû écrire fcccunt et non feceruut comme base du dérivé Irançais.
RAMORiNO, V origine délia verseggiatura riimita. 575
vaux de MM, W- Meycr (de Spire), Kawczynski, Vcrnier, Havet, Henry,
Thurneysen, Bccker, Ronca, Stcngel» d'autres encore» n'ont cependant pas^
malgré le très grand mérite de plusieurs d'entre eux, réassi encore à Télucider.
M* RAmorino nous apporte ici une solution nouvelle , qu'il regarde comme
déûnitivc, et qui mérite, tout au moins, d'i^tre prise en très sérieuse considé-
ration, car si elle ne résout pas, à mon avis, le problème tout entier, elle en
éclaire d'une façon qui me paraît décisive quelques-uns des côtés les plus
obscurs. Pour Tcxposer dans son ensemble et la discuter dans ses détails , il
faudrait une étude de Tctcndue de h sienne; je ne puis entreprendre, pour le
moment, un travail qui demanderait beaucoup de temps ; je veux seulement
signaler ù nos lecteurs ce remarquable mémoire, en faire connaître F idée
dominante et indiquer très brièvement les quelques objections ou réser\^e$
qui se présentent d'elles-mêmes à Tes prit.
L*idée fondametitale de Famcur, c'est que les vers rythmiques sont une
imitation des vers métriques, tels qu'ils apparaissaient quand on les prononçait
d'après Tacccnt , sans tenir compte de la quantité. C'est, en somme , comme
M. Ramorino le reconnaît d'ailleurs, Tidéc que M. Ph.*A. Becker avait
exprimée en 1890 dans son intéressant écrit Uebcr den Unprung der romanh"
chéft Vetsmasse^ mais il ne Tavait pas appuyée et développée comme le fait le
savant professeur de Pavie. Il montre d'abord, par des témoignages de gram-
mairiens et des exemples de poètes (tirés en grande partie des inscriptions),
que le sentiment de la quantité va, à partir du in< siècle (et même avant),
se perdimt de plus en plus, et que la plupart des erreurs comnïises sont dues
à l'influence de Taccent. Puis il fait voir comment de vers métriques fautifs
on passe insensiblement X des vers qui ne reproduisent des vers métriques
que la distribution de leurs accents : il explique ainsi, et il me semble avec
certitude, les vers de Commodien et beaucoup d'autres. Maintenant ce pro-
cédé de déformation a-t-il été le seul? Un autre s)'^tème, plus conscient,
consistant à remplacer aux temps forts des vers la longue des vers métriques
par une tonique n'a-t-il pas été employé? Les deux procédés coïncident sou-
vent, mais sont essentiellement différents (par exemple, dans rhcxamètre avec
césure penthémimère, /Irma vinmque cano Trojae qui primas ab oris, le pre-
mier système nous donnerait en traduction rythmique 'w- *« 'v Vw '^^ ^\
le second '- - '-- '« '^ '- - 'w). Puis n'y a-t-il pas eu des vers ryth-
miques indépendants de toute imitation de vers métriques et créés simplement
d'après Paccent (c'est ropinion de M. Stcngcl, et c'est celle que j'avais ex primée
jadis, en la formulant comme je ne le ferais plus aujourd'hui)? L'absence, dan
les hexamètres de Commodien et autres pareils, de tout principe de syllablsmc,
ne les met-elle pas à elle seule en dehors de l'évolution rythmique i laquelle
appartient la versification romane, tandis que les vers de soldats qui nous
ont été conservés de César k Aurélîen, les seuls d'un caractère vraiment
populaire que nous ayons (et dont on est surpris que M. R. ne dise rien),
montrent dès leur apparition ce principe absolument établi? Si on admet la
prononciation populaire en ce qui concerne l'abandon de la quantité au pro-
Sjfi COKtPTES RENDUS
fit de Tâccent, ne faut-il pas radmcitre aussi pour bien d'autres choses,
nolamracni pour la consonification de Vi (e) devant voyelle , qui réduisit de
bonne heure tant de dactyles rythmiques à des trochtVs? Elle joue bien
un rôle dans les fautes de vers métriques et les imitations rythïniqucs de
ceux-ci alléguées par M. R,» mais dans des vers vraiment modelés sur la pro-
nonciation populaire elle devait être admise »ns exception. HofiD 0 est
surprenant qu'une versification sorte d'une autre en s'édîfiant sur un élé-
ment complètement étranger à celle-ci; la substitution des toniques aux
longues aux temps forts aurait au moins un avantage» c*est qu'entre les deux
versifications il y aurait un élénient commun , prcciséroeni le temps fort. 11
est \Tai que M. Kawciynski a contesté l'existence chez les anciens du icrops
fort (ou temps marqué) comme distingué du temps faible par Tintetisilé;
mais, quelle que soit la force de ses arguments (qui n'ont pas con^iincu
M. R.), on peut très bien admettre que cet élément d'intensité était \-enu i
un moment quelconque s'attacher à la tk'sis (ou â Tarn'i, si on veut conserver
Tancienne terminologie, qui semble bien erronée) ; dès lors, Taccent ayant pris
également un caractère de plus en plus dominant d'intensité, il était naturel
de le faire coïncider avec le temps fort; il était même inévitable que cela
arrivât pour qu'une prononciation r>'thniée des vers fût possible (nous n'arri-
vons pas à nous représenter comment Claudien ou d'autres prononçaient leurs
vers avec des temps forts et des accents d'intensité qui ne coïncidaient pis).
Toutes ces questions restent pendantes, et il appartiendra à l'avenir de les
résoudre. Mails on ne peut nier que le beau travail de M* Ramorino ne les
ait écLiirces de plus près qu'on n*avait fait jusqu'ici, et n'ait obtenu sur plu-
sieurs points des résultats qu'on peut considérer conunc acquis A la sdencc.
G, P,
Etude sur la vie et la mort de Guillaume Longne-Epéet
duc de Normandie» par J, Lair, Paris, Picard, iii95, in-folio, S4 p.
Cette belle publication nous intéresse d'abord à cause de la nouvelle édition
critique qu'y donne M. Lair du précieux petit poème rythmique (les vers n'y
sont pas seulement syllabiques, comme il le pense, mais très régulièrement,
sauf des passages corrompus, cotnposés de trochées toniques) sur la mort de
Guillaume I de Normandie (94?), avec une magnifique reproduction béliogra*
phique des deux mss. qui nous en ont conservé un texte malheureusement
bien altéré, ensuite à cause des nouveaux documents que le savant éditeur
apporte à la curieuse question de la chanson de la VengeafKt Kiotil (voy. Rûm.^
XVII, 276). M. Lair n'étudie pas d'ailleurs cette question en elle-même (îl
propose toutefois, et avec toute vraisemblance, de lire de PtwU pour d^spaigiu au
V. 1 565 de la Gatedci Normands ;mà\% il y a certainement, en outre» une lacune
â cet endroit). Il s*attache surtout, comme l'indique le titie de son mémoire
et comme l'y engageait la direction habituelle de ses études, à la partie his-
torique du sujet. Il continue â corriger dans la str. II du poème Htc in orht
transîuarino valus paire in crrore paganorum permanente en Hoc in urbc^ trans-
j. LAiR, Étude sur Guillaume Longue-Épà 577
maritto naius paire, malgré Taccord des deux mss. , et à la str. III Moriente
infidèle (ms. de Florence infidelis) suo pâtre surrexerunl contra eum beJUcose en
Moriente infidèles suo pâtre surrexerunl. La première de ces corrections, qui,
comme la seconde, a pour but de mettre le poème d'accord avec Dudon de
Saint-Quentin et les autres sources (qui d'ailleurs dépendent presque toutes
de lui), est appuyée par une savante note de M. J. Steensirup, en réponse aux
objections de M. G. Storm ; elle n'en paraît pas moins bien difficile à admettre.
Sur la seconde, M. L. ne s'étend pas ici comme dans sa première édition ; elle
reçoit un certain appui de la leçon infidelis du manuscrit découvert depuis lors ;
toutefois, si on considère que le mot est devant une j, on sera bien porté à
croire qu'infidèle et infidelis sont également pour infideli; d'ailleurs la con-
struction adoptée par M. L. est au moins singulière; enfin on sait que le
retour de RoUon mourant au paganisme est raconté par Adémar de Chabanes.
On peut se demander si la division des strophes adoptée par l'éditeur (3 vers
de 12 syllabes divisés en deux hémistiches, plus i vers de 8 syllabes et un
refrain de 2 vers de 8 syllabes) est bien la bonne ; elle paraît assez appuyée
par le fait qu'elle dégage plus de rimes que les autres; d'autre part, elle
sépare souvent d'une façon peu naturelle des groupes de mots qui se tiennent.
Le savant éditeur dit (p. 69) que « cette forme était assez usitée, et probable-
ment populaire » ; j'avoue n'en pas connaître d'exemples. En tout cas, les
derniers vers des strophes V et IX indiquent que les strophes se terminaient
bien par un octosyllabe. Les incroyables corruptions et lacunes des deux mss.
font qu'il est impossible, surtout pour les strophes qui ne sont que dans B,
de restituer avec certitude le texte original. Str. IV, il faut Audacter
(A auditOy B audacer) ; str. IX, obsideque nullo dato, quoddam ftwnen (A obsi-
deque nulla dalum quosdam flumen, B obsideque nullo qitodda flwnen ; flumine,
introduit par M. L., ne peut entrer dans le rythme) ; str. XIII, 1. occukndo ou
occultando (B, ici seul, occulando) ; la str. XV (dans Bseul) est désespérée, mais
la substitution de mihi à tibi n'est guère admissible (cette strophe, où est
mentionné Guillaume de Poitiers, beau-frère du duc de Normandie, pourrait
bien être ajoutée).
M. Lair a bien voulu rappeler en tête de sa belle publication que la pre-
mière copie du poème lui avait été communiquée par moi (ms. de Clermont-
Ferrand) ; la seconde (ms. de Florence) a été publiée par M. Léopold Dclisle :
nous avons été heureux l'un et l'autre de fournir des matériaux à quelqu'un
qui sait si bien les mettre en œuvre'. G. P.
I. II est regrettable qu'un assez grand nombre de légers lapsus et de fautes d'impres-
sion aient échappé i la révision de l'auteur. Ainsi, p. 59, il remarque que p.irmi les
grands barons de France, dans le Couronnement de Louis^ figure « Garin d'Anséune-li-
Vieh » (ces traits d'union et cette majuscule sont de trop), et il ajoute : « C'est le
Garin de Mousket, mari d'Anseis, sœur de Gisia, femme de Rollon. » Mais dans le pas-
sage de Mousket cité plus haut (p. 9), Garin épouse non Anseis (qui n'est pas un nom
de femme), mais Herluis (ce Garin, trois lignes plus loin, est défiguré en Sorin)\
d'ailleurs on sait que Garin d'Anseûne doit son surnom à la ville qu'il possédait et
nullement à sa femme.
578
COMPTES RENDUS
Dîe handschriftlichen Gestaltungen der lateinische
Navigratio Breadanl. voa Cari Stetsweg (Rooianischc Fo
schungen, voL VIL pp 1-48).
I«& Navigatio Sancti Brendani ia antico venezlano, ^n
ed illustrata éâ Francesco Novah. Bergaoïo» 1S92.
L'étude <ie la Ugcadc, et plus partkulièreraent du im^gt. otéattuiui^ àc 5410
Brtridan, a pris dans ces dcroicrcs années un nouvel essor ; nombre de pbila
logues. aussi bien celtistes que roimnisies» ont voulu apporter leur contriba
tion à la solution d'un problème qui. sans être d'une importance capitale
pn-scnte néanmoins un certain intcrêt à différents points de vue '. Cepcndi
on est obligé d avouer que le progrcs accompli est loin de r*>pondre i 1
effort aussi multiple et aussi considérable; non que personne n'ak fc
trouvé la vérité ou, du moins, une partie de la %'érité, tnaîs il me semble
qu*on a continué i chercher après avoir trouvé déjà, et que tout ce qui a ét^i
dit sur la question, après les travaux de Schroder, Suchier* et Zimmcr, ^H
presque autant contribué a embrouiller les choses qu'à les écUircir. ^H
Le travail de M. Steinweg sur les manuscrits de la Xavigatio latine n a pis
la prétention d'être complet ni définitif; Tauteur déclare lui-mcmc que ' ^
but a été uniquement de jeter les bases d'un travail plus étendu sur le nxn
sujet, travail qu'il ne pouvait exécuter lui-même, n*étant pas en posscssuij
de tous les matériaux nécessaires ; reste à savoir s'il a atteint le but qui
s'était proposé, et dont il se plaît lui-même à foire remarquer la modeslîfl
M. St. a divisé son travail en trois parties: la première (p. 7-îî) est cou4
crée â la classification des manuscrits étudiés; la deuxième (p. 54-57) s'occup
de la traducUon en prose en ancien français, publiée en 1856 par Jubinal \
rééditée tout récemment par M. Wahlund; la troisième (p. J7-4S) est iiititil
lée « mutmassliche Gcstaltung ilc^ Originals w. Le tout est précédé d'ufl
courte introduction et d'une table des manuscrits.
La classification proposée est inacceptable pour plusieurs raisons* Ofi \
que les manuscrits de la Navigath sont très nombreux * et disséminés daiîS
t. Outre les deux ouvrages qai fonnent \c sujet de ce compte rendu, îl a p4nj •.
*^ftftfi ^?*^^" années les travaux suivants : Scbinncr, Zur BrgnJanus-Lfgrmtf, Lcip
VXViTr "^'^'^* 5ri7iJdfw Murfahrt, j888 {àxixs Zeih^br, f, deufulfj AlUrfum, t
71^/' "9-2ao et 2S7'5î8); De Gocje, la Ugtndf dt Saint- Brandnn, LciJc, 1%
ï j "^^ -^"^^^ ''" ^ Cofigrh inUrnatictuti dts Ot imUlhtes)', Graf, dan* M
Wahlund, Brendans Stefahrt, Upsala. 1892, * 7# »
R^ma^is^l^^'shtZn T''^ ^'^''^^**"' Erïangcn. 1871 ; Suchier. BramUm Sttfahft (d^
w'sMp^'rnTLtr' ^A^' "'''J (PescriptH. C.taîogu.^ I. i. p. rj^) « qui, dV
^''^iic. Ktat " Vr . "î!" ^ '^" '*'"* ^^ N^nigotio, est évidemment le ma«u.c
'«^niontcra^ ;,. JJr.' v" ^ ""J^'J^'^'""' Cbrhtinaf, 217) que \f, Whitîcv Stokcs f
ccic, vo>% De Gocje,p. 25, note 5 et p. 35.
Steinwhg, Dei Handschriften der Navigûtio BrendanL 579
un grand nombre de bibliothèques de l'Europe : on en connaît aujourdliui
75 î or, M, St. n*a tenu aucun compte de plus de la moitié de ces manuscrits,
il n'a même utilisé directement que ceux qui se trouvent en Allemagne et
qui sont au nombre de 12; pour d'autres, il s'est servi d'une collation par-
tielle de M, Suchicr. îl est évident que, dans ces conditions, il était de prime
abord impossible d'obtenir des résultats absolument certains, et de jeter,
comme Ta voulu Tauteur, les bases d'une classification déEnitîvc. Mais il y
a une autre question : Tauteur a-t-ll consacré à la mise en œuvre de ces
matériaux» quelque insuffisants qu'ils soient, tout le soin et toute l'exactitude
désirables? Il suffira, pour en juger, de rexamen détaillé de quelques passages
de cette première partie. Je choisis les paragraphes 2 et 5 (p. 8-9) parce que,
grâce à leur nature plus générale, ils se prêtent mieux que d'autres ù un con-
trôle exact, tandis que presque partout ailleurs tome critique est rendue plus
OU moins impossible à quiconque n'a pas en mains tous les manuscrits dont
s'est servi M. Steinweg,
P. 8, lignes 6 et 7 : « Brendan jedoch nimrat.,. >» etc. L'auteur, par une
Inconcevable inattention^ n'a pas saisi le sens si simple et si clair du texte
latin »(Schrôder, p. 10, 1. 5-4) : Sattctus Brandanus rekvato iUo de terra et data
osath dixii : Fili, dominns mskr^ etc...)- P^^r ^^^y Brandan s'adresse à ses
compagnons et non au ce procurator » ; c'est qu'il a pris le mot fili pour un
vocatif pluriel, ce qui est contraire, d'abord au contexte, et ensuite à la
grammaire, et spécialement d la grammaire de notre texte '.
P. 8, K 16-18. « Denn, wolltc man auch..., etc. » Les manuscrits qui ne
portent pas dum présentent une leçon excellente; la prédiction ne s*étcnd
qu'aux « vigiliae » et aux « missac » sur le jasconius, et elle s'accomplit
de point en point; il n'y a donc là aucune contradiction, et ainsi l'unique
argument qu*ait fait valoir M. St. pour prouver qu'aucun des manuscrits
étudiés ne représente l'archétype est dénué de toute valeur.
P. 8, I. 2}, « Nur an einer von beidcn Stellen,., i», etc. Cette répétition
est parfaitement dans la nature des choses ; à vouloir éliminer le passage en
question» on enlèverait mkm^ au texte beaucoup de sa clarté, qui est ici
irréprochable*
9, S j. L'auteur range la version en ancien français parmi les manu-
îts appartenant k la famille w, mais aucun des traits indiqués ici comme
caractérisriques pour cette f^imille ne se retrouve dans cette version.
P. 9, sub 8, 26. Frcttum pris comme masculin (Jrenum qurm) est indiqué
comme trait caractéristique de la famille m ; mais nous trouvons également
(rtntim iptem dans le manuscrit d'après lequel est faite Tédition de Schrôdcr et
que M. Si. range lui-même dans une autre famille. D*aiHcurs il n'est permis
de tirer aucune conclusion de fautes du genre de fnnum pris comme mascu-
ti, Caaimc M. St,, je citerai toujours d'après Tédition de Schrôder, ùp, dt^^ p. J-jé.
a. Ccliii-ci tie connaît du moi Jili us que le vocatif singulier //i (24, 16; 19, 25);
cour tous les autres cm il emploie des formes de filiolus.
COMPTES RENDUS
que la faute qui, d'ailleurs, sau
te aux veux, ^ lOit
580
lîn; il est fort possible
trouviie îi Torigine dans an plus grand nombre de manuscrits et que les
copistes raient compile dans quelques-uns.
Toutes ces m«iprbcs se trouvent dans moins de deux pages, et il n*y 1 pas
lieu de croire que le reste soit fait avec plus d'exactitude. On conclura donc
que cette partie du travail ne tnérite aucune conûance et qu*oii ne saurait eu
accepter les conclusions.
Dans le deuxième chapitre, M. jSt. examine la version en ancien français
dont nous avons parlé, â Teffet de rechercher si elle pourrait, ay besoin, tenir
lieu du texte latin sur lequel die a été faite. Le résultat de cet examen est
purement négatif, et Ton n'entrevoit pas les raisons qui ont engagé Tauteur k
consacrer un chapitre spécial à ce sujet et â nous dire en trois pa^cs ce qu'il
aurait pu nous dire en trois lignes. Comme M. St. ne peut (aire entrer la
version française dans aucune des familles de sa classification, — et pourtant
dans le tableau de la page s il la range dans la famille m — il pense que le
traduacur a eu sous les yeux plusieurs manuscrits de familles dîdérenies.
Mais il est fort possible qu'il n*en soit pas tout à fait ainsi et que la version
se comporte de la mcme manière que le manuscrit du Mont Cassin qu*i
signalé M Novati (p. XI, note i) et que M. St. n'a pas connu : il est égale-
ment impossible de faire entrer ce manuscrit dans k classitîcatlon proposée,
et cela probablement parce que cette classification est fausse.
Le troisième chapitre ne répond pas exactement au titre qu'il porte: on
s'attend ùl de véritables conjectures sur l'archétype de la Navigaih, et l'auteur
ne nous présente que des remarques sur un certain nombre de passages
qu'il estime interpolés. De ces interpolations, l'auteur tire des conclusions
qui, si eîles étaient acceptables, seraient d'une certaine poitée pour l'en-
semble de la question « brendanîque », puisqu'elles fixeraient définitivemcm
au ixe siècle la date de la rédaction de notre texte. Pour quclqucs-um des
passages en question le doute n'est pas possible : Tinterpolaiion est tout à fai^
imaginaire. C'est le cas pour le passage p. îj» 1. 24-aB (St. p. 47); le texte
est parfaitement clair et ne bisse rien â désirer» seulement M. St. n'a pis
compris le mot navigan ()), 24), qui, du moins dans la Navigaiio^ stgnîfte
quelquefois « ramer » » ; il a pris ce mot dans le sens de « fahren » , de
a vehi e, et, partant de cette erreur peu excusable, il se lance dans une
interprétation qui fait sourire. Mais, ce passage et quelques autres mis à pari,
il en reste .1 peu près une douzaine que l'auteur juge interpolés et qui méritent
qu'on s'y arrête. La raison qui fait conclure M. St. à une interpolation est tou-
jours une contradiction dans les faits ou une répétition ; or ces contradictions
existent réellement et il ne s'agit que de savoir à qui elles doivent être attri-
buées. D'après l'auteur, elles n'appartenaient pas à l'original et sont rocuvrc
des copistes, bien entendu des copistes qui ont transcrit les manuscrits anté-
rieurs à k lia du x« siècle, puisque le plus ancien manuscrit que nous com-
I. Voy,, par exemple, d, 17; 7. t, 18, ja; 19, 21; 18, jj aS, aa.
NovATi, La Navigatio Brendanî. 581
naissions, et qui date de cette époque, lc5 contient déj.l toutes. Or, si nous
examinons un manuscrit du xiis du xm^^ou du xiv< sitïcle (p. ex. ceux qui
sont représentés par l'édition de Schrôder), nous voyons qu*ib ne contiennent
pas ou presque pas de contradictions et répétitions en sus de celles qui sont
déjà dans le manuscrit de la fm du x« siècle. Les copistes du x«^ siècle auraient
donc été grands interpolateurs et surtout grands amateurs de contradictions
et de répétitions d'un genre particulier, tandis que leurs congénères du x« au
xive siècle auraient fait preuve d'une tendance inrtniment plus conservatrice.
Evidemment, M, St. est dans Terreur : ce grand nombre de contradictions,
toutes du même genre» pour un texte qui n'a qu*une trentaine de pages et
pour un laps de temps aussi restreint, est si extraordinaire qu'on ne saurait
admettre qu'elles datent d'époques différentes et de copistes indépendants ; il
faut plutôt croire ou bien qu'elles se trouvaient déj,\ dans l'original, — et
cette hypothèse est rendue très probable par ce que je dirai plus loin de la
manière dont a été composée la Navigatio — , ou bien qu'elles ont été intro-
duites dans le texte par un seul et même copiste, Il se pourrait donc que la
rédaaîon originale de notre texte, loin d'être antérieure d'au moins un siècle
au plus ancien manuscrit, lequel date de la lîn du x«^ siècle, ne remontât qu'à
peu d'années au delà de ce manuscrit.
M, Novati a fait précéder son édition de la Navtgaftù en ancien vénitien
d'une courte introduction sur l'ensemble de la question w brendanique ». Ce
n'est que de cette introduction que je m'occuperai ici ; je reprendrai une à
une les idées que Tau leur y a émises et je chercherai i réfuter celles qui nie
semblent inacceptables, tout en tenant compte des différents travaux publiés
dans ces dernières années sur le même sujet. M. Novati consacre d'abord
quelques mots à ses prédécesseurs et trouve que les résultats auxquels ont
abouti leurs recherches ne sont que peu de chose en comparaison de ce qu'il
reste à faire pour résoudre la question d*une manière définitive. Selon lui, il
régnerait encore beaucoup d'obscurité sur « les origines et les vicissitudes n
du récit de la Navigatio^ lequel renfermerait encore presque intactes sous le
voiie qui les recouvre « les formes grandioses, primitives, de conceptions tout
à fait païennes n. Tel n'est pas mon avis; pour les origines de la Navigatio,
il me semble que M. Zimmer les a suffisamment indiquées et qu'il n'y a plus
que quelques questic »_routf ^.^ résoudre; Thistoire du texte latin sera
complète quand on au*., s| ^^ . travail de M. Steinweg, et qu'on nous
aura donné une édition critique et définitive. Il est vrai que nous ne connais^
sons pas encore la date exacte de la rédaction première de ce texte, mais
cette question ne sera peut-être jamais résolue et n'est, d*.iilleurs, que d'une
importance secondaire. Quant aux conceptions grandioses et primitives que
renfermerait la Navigatio, on ne voit pas trop en quoi elles consistent, et
Tauteur aurait bien fait de nous le dire. On a d'ailleurs attribué souvent au
texte btin une valeur esthétique que, à mon avis, il n'a point. M. Renan *
BssaU démorak U dtfriUque^ Pjiris, i8f9, p. 446.
582 COMPTES RENDUS
est ailé jusqu'à appeler h NaifigaUo <t une des plus étonnantes créatidos 4e
l'esprit humain et Texprcssion la plus complète peut-être de Tid^l cdrique, s
Il est diJBcile de partager ce jugement quftnJ on considère ^ttenTivement la
genèse de notre texte : celui-ci, loin d*ètre Texpressioa d'une conception pcxpa-
laire et nationale de toute une race, n'est que la compilation faite par mi
esprit assez médiocre de matériaux pillés un pca panoui et coordonnéSi
quelquefois avec une certaine habileté, mais presque toujours sans beaucoup
d'art ni de goût. Si la Nuingatto a néanmoins joui, au niojren âge, d'une
assez grande popularité sur le continent, c'est grâce au caractère pamcuiicr et
tout exotique des aventures qu'elle contenait; peut-être aussi a-t-dlc bésÊC&'
Clé» du moins en France, de la faveur toute particulière qui s'était attachées
dès la deuxième moitié du xir« siècle, aux sujets d'origine « bretonne ». Oo
sait d*ailleurs qu'au moyen âge, tout comme aujourd'hui, la valeur esthétique
d*un texte ne va pas toujours de pair avec la popularité dont il jouit»
Tout en rejetant fopinion de M» Zînimer sur les sources, ou du moins b
source principale, do la Navigation M, Novati déclare reconnaître pleinement
les mérites du savant celtiste, et il lui décerne l'éloge d'avoir mieux que tout
autre indiqué les liens qui rattachent la Naiigath aux « rmrama » de la litté-
rature irlandaise. Cette appréciation est singulièrement contradictoire, puisque,
d'une part, la théorie de M, Novati (p. XI) ne fait aucune place à Vfmr^m
MatîduiH ni  quelque autre « imram 1» que ce soit dans les sources de la
Ntmgatio^ et que d'autre part M. Zimmer reconnaît dans c^ « itnrama » la
source principale et presque unique du texte latin. Si M. Novati a raison,
M. Zimmer aura tort absolumeot et en tout; il n*y a pas là de moyen terme.
Mais je croîs que Téminent celtiste a raison, et j*aî même beaucoup de pdne
à comprendre que non seulement M. Novati, mais encore M. De Goeje et
M. Graf aient pu un seul instant hésiter à accepter ses conclusions. M. Zim-
mer nous montre qu'il a existé à partir du \^n* siècle un genre littéraire
particulier à Tir lande, les t imrama », mot dont la traduction latine contem-
poraine est « navigatio a et qui signifie « voyage maritime 9, Qpetques-uns de
ces imrama nous ont été coDser\ es, entre autres V Imram Madduin > ; celui-â
contient une bonne partie des aventures de la Naii^aiio latine, soit sous une
forme X peu près identique, soit avec des modifications plus ou moins pro-
fenJcs. C'est 11 un fait qui ne peut être nié et Qu^Hequel la simple lecture
des deux te&tes suffit à éckirdr tous les doutes. Nous nous contentons donc
de rappeler quelques-uns des traits les plus caractéristiques communs â Vim-
f0m et à U NmfigfatÈO : k visite de M^lduin au druide Nuca et cdle de Bran-
la» à ttint fiEida; k Me des trois frères de lait de Madduin et celui des
à9
H ^omw X^ f tndiicSMft «g^jhbc qui ii«:coffipd^
M Stnkc», *^ , \ ««tfcs taâneHkin^, l'crie rn aller ;i£r,
flll PHwitv uac 9è»mm cntâfw 4e VhmMm (if. ^., p. lyo-iyé}^ l'xûtrc en tmayiis «k
il. Kl4t««»4 Loi, ént k C»mt et ëÊih^mff idH^ ik M. iWrbeis de Jiib«iitv&tk,
NovATi, La Navigaito brendani. 583
trois moines de la Navigatio; l'île gardée par le chat de Vimram et la première
île rencontrée par Brandan dans la Navigatio; Tîle des forgerons; la colonne
et le filet d'argent. Quant à savoir si c est Vimram qui a emprunté ces traits
à la Navigatio ou si c'est Tinverse qui a eu lieu, le doute n'est pas possible
non plus : Vimram et, en particulier, le genre d'aventures qui nous occupe
rentre, comme on vient de voir, dans une catégorie de récits du même genre,
les imrama, tandis que nous ne connaissons pas de texte latin ressemblant
tant soit peu à la Navigatio dans la littérature latine du moyen âge ; le mot
a navigatio » n'est que la traduction du terme irlandais « imram * » ; Vim-
ram Maeîduin a été composé au plus tard au viii* siècle, tandis qu'il n'y a
pas de raisons pour faire remonter aussi haut la date de la composition de la
Navigatio; en outre, et c'est là l'argument le plus décisif de M. Zimmer,
plusieurs traits qui sont naturels et parfaitement motivés dans Vimram (visite
de Maeîduin au druide, rôle des trois frères de lait de Maeîduin) sont plus
ou moins incompréhensibles et mal motivés dans la Navigatio.
M. Novati a tenu à rappeler qu'il n'est pas le seul à être d'autre avis que
M. Zimmer, et il cite à cette occasion le travail de M. De Goeje que nous
avons mentionné plus haut *. D'abord il faut faire remarquer que, si M. De
Goeje n'est pas de l'avis de M. Zimmer, il est tout aussi peu de l'avis de
M. Novati ; il ne faut pas oublier non plus qu'il n'a pu prendre connaissance
du travail de M. Zimmer que peu de temps avant la publication de son propre
mémoire et qu'il n'a pu en tenir compte que dans une mesure très restreinte.
M. De Goeje avoue lui-même (p. 32) que, si Vimram Maeîduin datait vrai-
ment du viiie siècle, ses scrupules à l'égard de la thèse du savant celtiste
devraient être « considérés comme non avenus » ; il croit pouvoir trancher
toute difficulté en supposant que Vimram, tel qu'il nous est parvenu, ne date
pas du viiie siècle, et qu'il est seulement la refonte faite au xi« siècle d'un
conte plus ancien. Mais les arguments que donne l'auteur à l'appui de cette
supposition (p. 33 et 34), quand môme ils seraient justes en eux-mêmes, ne
prouveraient rien pour l'âge de la rédaction qui nous est parvenue. Nous
sommes donc tenus, jusqu'à preuve du contraire, de considérer Vimram
Maeîduin comme datant du viii* siècle, conformément aux conclusions de
M. Zimmer, qui est seul compétent dans la matière et qui, sûrement, n'a pas
jugé à la légère, puisque tout son travail repose sur cette base'. Il faudra donc
considérer les traits qui sont communs à Vimram, à la Navigatio et aux contes
de Sindbad non pas comme ayant passé de ces derniers dans la Navigatio qX.
de là dans Vimram, mais comme ayant passé des contes de Sindbad dans
Vimram (ou vice versa), et de Vimram dans la Navigatio.
1. Voy. Zimmer, op. cit.j p. 145.
2. Voy. Romania^ XIX, p. 504, un compte rendu de ce mémoire par M. G. Paris.
3. Dans un travail plus récent paru dans les Sitiungsherichte der Akademie der fVis»
senscbaften ^u Berlin (vol. XVI, pp. 279-517), M. Zimmer a corroboré par de nouveaux
arguments ce qu'il avait dit déjà sur Vimram Maeîduin et spécialement sur la date de
la rédaction de ce texte .
584 COMPTAS KEXDUS
Qltam aux aiioâdcDoes éc ctsiâka^ xnâm «le k Wae^gmm mm ^^Êms^èê
rédt é& avttitBnam ponugia i^pfKMté par le |g4*JgiJyhc JBSiie Edkjn^ < (Ik
des QKMiions, îk de» oiicM]s)» il mt lemik qaÙes wam jonanes es d^oo
caradère beaticcmp trop gMral poar laire anife 1 des caymim &cc£s^
Il y a eocoie une foule d'aMnes objcdlotis de mamdt^ ht^nMMMKr à iâtt
SOI travail de M. De Coqc. Lescoodusicxis (^. 9) qall m^ âa péage deli
Kavigêih p. ^4^ L |0-|S, me lemfakiit fart dcmtesses; 3 et vm 1^ ce
passage pr^bente mie oaiûoÊt coimadktîûD (et c'c5t précHémem b nâ^
pour laquelle M. Sieîiiw^ k «ocsklére axBine interpolé), nuis d «"ai |
impossilile de rocooaaltn: dms ces quel^œ moB ks tnces d^oaie txa£tko 1
dîÂSreoie de cdk qoe suit d'ordiQaîtr f amevr et scmyable à c«fle fm aant I
été cGBscrvee par Raoful Gïaber, D'ailkb^^ k pesage de XHiàonm WÊi ^^*^^^J
de Raoul que dce M. De Goqe ne pitAive pas Fesiâetïce d'âne vériufaie m&çMl
tioo di^erente de odle qœ leprteâte b .V«£'^fis£»0 : ks ^âi^ences fui oesI^ '
entre les deux testes s'expfiquens parbiternsM si Too afiiEtet q«e Raoat Qi-
ber n avait pas k texte de la Nm^ati& 90m ks \^tix et quU dtxit de
mémoijis; il appelle Bicndait ■ egrqpus conléssor Besniaou^ {dey • et Im
donne cocnme patne k pa)*s < orietit^iiTi] Ai^ofiuii •» ce qoi est es cxB*
tradiction non seolemetit ai^ec b NavigâÈm^ tuais afcc lo«t ce que ni9lis csb<
naissoEîs de b kgeode du s^nt ifbûtbis. Cepen^uot k pasage ea quetioi
est d'un certain intérêt pooriioiis, parce qa'npnNiTe la dîÂisioQ delà l^enAe
de saint Brendan en France ao commenccineiit du xi« sièck.
Le raisonnement sur lequel s'appok rautenr (p. 6) pcfor coodnre que b
donnée de sept ans comme dorée du voyage àt Brendan se uouwait d^
dans 9 b légende originale qui forme b base de b NavigaHo m est fort sin-
gulier, car on s'attend à une conclusion tout à bit contraire. Mais qu'est-ce
que M. De Goeje entend par la légende originale qui aurait formé la base de
la Savigaiic? Il nous parle encore d'un « sujet antérieurement connu » (p. 6,
ligne 6), de l'ancienne légende du josconius (p. 20), de Tancienne \-ie de
saint Brendan (p. 24); on ne voit pas si toutes ces expressions désignent
une seule et même chose, ou s'il s'agit d'autant de traditions diâférentes et
distinctes les unes des autres.
Quoi qu'il en soit, il est é\-ident que la thèse De M. de Goeje, dans son
ensemble, ne peut pas être juste; si je m'y suis arrêté un instant, c'est que
personne n'avait encore pris la peine de la réfuter et que M. No\-ati, au con-
traire, l'oppose à la thèse de M. Zimmer.
Dans la même note de la page IX, M. Novati tait à M. Zimmer l'objection
que b XdiYJtio renfermerait des éléments empruntés à l'antiquité classique;
mais il oublie que M. Zimmer est le premier à reconnaître le fait, puisqu'il
nous dit lui-même que ces éléments entraient pour une bonne part dans la
composition des imrjma, par conséquent aussi dans ceUe de Vlmram Ma^U
duin.
I. De Goeje, p. iS-i^^
KOVATi, La Navigatio Brendani. 585
Je ne vois pas trop ce qu'à voulu dire M. Novati (p. ix, note i) quand il
déclare que M. Sdiirmer aurait exposé des t< idées tout à fait différentes (de
celles de M. Zimmer) sur le rapport entre les imrama païens et la Navi^atia
chrétienne », M. Schirmer * dit bien quel<|ues mots d*un imram qui ne con-
tiendrait pas d*él(lmenis chrétiens; mais d*abord M. Schirmer est dans Ter-
reur', et ensuite, quand même il aurait raison, ce qu'il dit n'aurait aucune
importance pour notre sujet. M. Novati ajoute même que ces idées ont été
reprises par M» d'Arbois de Jubainville dans le cinquième volume de son
Coûts iit UUératun cdtiquc ; mais tout ce qui, dans cet ouvrage, pourrait avoir
donné lieu à la remarque de M. Novati se réduit aux deux dernières lignes
de la note 1 de la page 449 et i deux autres passages tout aussi couns, Tun
(p. 449), de M. d'Arbois de Jubainville, qui nous dit que la Navigatio est
imitée de Vhmam MadJuifi^ et l'autre de M> Lot (p. 4>i), qui nous dit que
c'est Vïmram Maddtnn qui imite fa Navigatio.
Si M. Novati s'oppose aux conclusions de M. Zimmer sur les emprunts
£aîts par Fauteur de la Navigatio à V Imram Maeiduin^ c*est uniquement
parce qu*il trouve inadmissible que les aventures de Tr^riji?!, attribuées i saint
Brendan par le simple caprice d*un clerc > aient pu donner naissance à une
légende aussi populaire; selon lui, la Navigatio n'aurait jamais atteint la
grande popularité dont elle a joui si elle n*avait pas eu ses racines dans une
tradition populaire plus ancienne* Partant de U, il préfère révoquer en doute
des faits qui me semblent acquis et incontestables, pour se lancer dans des
hypothèses qui ne reposent sur rien de certain- D'ailleurs, les objections de
M. Novati disparaissent quand, sans tenir compte de l'Irlande, on considère
ce qui s'est passé sur le continent : la Navigatio y est devenue populaire et a
été traduite dans les langues vulgaires sans avoir eu besoin pour cela du
secours de traditions populaires plus anciennes.
Mais on peut aller plus loin et dire que la Navigatio, bien qu'elle ait été
composée en Irlande, n*y a pas été populaire, du moins dans les commence-
ments; elle a fini par le devenir, mais seulement par contre-coup, et après
s'être répandue sur le continent et en Angleterre. Des nombreux manuscrits
de la Navigatio qui nous ont été conservés, il n'y en a qu'un seul qui se
trouve en Irlande*, et celui-là date du xui» siècle. Dans la littérature de Tlr-
I. Zur Bretidanns-Ligendt^ p. 19 et 2; «16.
3, Voy, Zimmer» op, cH , p. 2S9 et 161-
j, M, NovMti est d'accord avec M. De Goeje pour révoquer en doute l'hypothèse de
M. Zimmer sur la manière dont les aventures de Vïmram Miteîduin auraieot passé dans
U Navigatio^ hypothèse d'après hqucllc on aurait confondu notre Brendan, Brendan de
Cloitfert, avec un autre Brendan, Brendan de Bîrr, dont 11 est question dans Vîmram
Miitlduin; mais il ne faut pas oublier que cette hypothèse, M, Zimmer la donne comme
telle et n'y attache pas lui-même beaucoup d'imporiajice; il a voulu donner rcxplication
d'un fait, et quand même cette cxpUcatîoîi serait reconnue fausse (ce qui d ailleurs ii*est
pas le cas), le fait n*en subsisterait pas moins.
4. CïpaDt à savoir si parmi les auties il s'en trouve qui aient été faits en Irlande,
personne ne s'est encore prononcé lÂ-dessus, mais la chose est fort peu probable.
SbmMis, XML 3S
58fi COMPTES RENDUS
bode, la piemièrc tÙmaoa à la Navigaîw cjâie nous trouvions date âe h un
do xf siècle, tandis que le nom de Brend^n et certains traiis appanexiiïîti
la Jégendc du saint, mnîs étrangers m récit de U Kat4iûtw, se rencontrent
assez souvent bien avant cène époque ' et dors que la xVuî'^^w elîe-ni^^tnc
était déjà répandue sur le continent. îl me semble que M. Novati, ainsi qoe
tous ses prédécesseurs, n'a pas distingué assez soigneusemeot entre saint
Brendan, héros de la Mtni^^aiio, et samt Brendan, héros de la légende pro-
prement dite qui porte son nom. Scbo moi, la Vita publiée par Moran^
représente h légende qui s'était formée peu â peu autour du saint irlandais ei
qui n'a presque rien de commun avec la Navi^aiio. Cest cette Fita^ ou plut<5t
le sujci qu'elle traite^ qui a été populâ^''^ en Irlande, tandis que la N^*i^étw
y a été presque inconnue ou du moin a peu répandue. Cela s'explique ton
bien et s*aceorde parfaitement avec les conclusions de M . ZimmcT sur les
sources de la Nai'îgijiio. En effet, il serait bien extraordinaire que les compa-
triotes de saint Brendin, qui connaissaient U légende telle que nous ladontîe
la F/ta, eussent, du jour au iendemain, accepté comme vrai et authentique
le récit de la Navigatio, qui attribuait à saint Brendan une foule d'aventures
dont ils n 'avaient jamais entendu parler, ou qu'ils connaissaient pour les
avoir entendu attribuer au héros Maelduin. Il faut plutôt croire que les Irlan-
dais, s'ils ont connu U Navfgalio, Vont prise pour ce qu'elle éuit réeUeni«!t,
et qu'ils en ont pensé ce qu'en a pensé plus tard Vincent de Beau vais (et
après lui ks Bollandistes)^ qui la qualifiait de « apocrypha délira menta ^* Ce
que M, Novati dit :\ h page tx de la popularité de b légende en Irlande
doit s'entendre de l'ancienne légende vraiment populaire et non pas de la
Natfi^aliû; si ce sont précisément un promontoire et une baie (Novati„
p- IX 'j qui ont reçu et portent encore aujourd'hui le nom de Brendan, c'e^t
que ce promontoire et cette baie sont situés dans le voisinage immédiat du
lieu où le saint irlandais était né et avait vécu, et que d'ailleurs l'ancienne
légende connaissait peut-être déjà Brendan comme navigateur. Par l'expres-
sion de warebraudanicum, qui se trouve dans Gérald de Barry (Novati, p. ix),
il n'est pas nécessaire d'entendre, comme le veut M. Novati, l'Atlantique
tout entier : il se peut parfaitement que Gérald n'ait voulu désigner que cette
partie de l'Océan dans laquelle se jette le Shannon, et qui baigne les côtes
de la province de Munster, la patrie de saint Brendan. Quant au passage du
même Gérald de Barry que M. Novati cite un peu plus loin (p. xi, note 3),
je ne crois pas qu'il soir permis d'en rien conclure. On sait que Gérald, quia
Ir'land'^^ '^''''^^'''' ////v„//û/ vers 1190, était Gallois, qu'il n'a séjourné en
Probabl^^^'r""^^"^ ^^^"-^ ^""^<-^îi et qu'il connaissait fort mal ce pays. 11 est
en An A ^" "'^ ''^"''^'^ "^^^ lui-même dans la province de Munster, et c'est
n'a-t-il^niT"''^ "^"'^ ''""^^ ^" °" entendu le récit de la Navigatio; peut-être
"eme pas voulu désigner par « ea quae de sancto Brendano tara
^- Voy.Zimmer.o^c//., p.,99.3^e>.
NOVATi, La Navigatio Brendant, 587
miraculose refeiuntur, et in scriptum etiam redacta sunt » des traditions
populaires proprement dites, encore moins des traditions particulièrement
irlandaises. Cependant il pourrait se faire aussi qu'il eût vraiment entendu
raconter en Irlande certaines aventures se rapportant à saint Brendan et qu'il
ait cru qu'il s'agissait de celles qu'il avait lues ou entendues en Angleterre.
Quant à savoir si, antérieurement à la rédaction de la Navigatio, la légende
attribuait déjà au saint irlandais un ou plusieurs voyages maritimes i la
recherche de la terra repromissionisy la question est assez embrouillée ; peut-
être même ne réussira-t-on jamais à la résoudre complètement. En tout cas,
c'est là un point d'une importance secondaire, car nous connaissons la source
principale de la Navigatio, qui est Vlmram Maelduin, et, s'il a existé antérieu-
rement d'autres Navigationes de saint Brendan, elles ne peuvent avoir fourni
à l'auteur de celle qui nous occupe que quelques épisodes, entre autres celui
de la baleine et l'idée générale de la terra repromissionis sanctorum.
Nous possédons pour la date de la rédaction de la Navigatio le terminus ad
quenty qui est la deuxième moitié du x« siècle; les deux seuls textes antérieurs
à cette date qui fassent allusion à une Navigatio de saint Brendan sont
quelques vers d'un poème irlandais de la fin du ix« siècle ^ d'après lesquels
Brendan aurait passé sept ans sur le dos d'une baleine, et une Vie de saint
Malo ' composée en Bretagne vers la fin du ix« siècle. Dans cette Vita,
Brendan accompagne son disciple saint Malo dans un voyage que ce dernier
a entrepris pour découvrir l'île d'Yma et au cours duquel les navigateurs
célèbrent la fête de Pâques sur le dos d'une baleine. Mais il est difficile de se
prononcer sur la question de l'antériorité de l'un ou de l'autre des deux textes.
Pour ma part je suis porté à croire que, s'il y a réellement un emprunt
direa, c'est la Navigatio qui a emprunté k h. Vie de saint Malo, En effet,
d'une part il est peu probable que la Navigatio ait été connue en Bretagne
dès le milieu du ix« siècle ; d'autre part il est vraisemblable que, si l'auteur
de la Vita avait connu la Navigatio, il n'aurait pas manqué de lui emprunter
l'idée d'un voyage à la lerra repromissionis. Mais il est possible aussi qu'il ait
existé antérieurement à la Navigatio aussi bien qu'à la Vita une tradition plus
ou moins ancienne qui aurait connu un voyage de saint Brendan et à laquelle
auraient puisé les auteurs de l'un et de l'autre texte. Cependant cette dernière
hypothèse est rendue assez peu probable par le fait de l'existence de la Vita
Brendanij dont nous avons parlé plus haut et qui ne contient aucune allusion
ni au récit de la Navigation ni à n'importe quel autre voyage océanique du
saint. De là, M. Zimmer a cru pouvoir* conclure (p. 292-295) que cette Vie
était antérieure à la Navigatio, puisqu'elle ne tient aucun compte de cette
1. Zimmer, op. cit., p. 303; Schirmer, op. cit., p. 15.
2. Vie inédite de saint Malo, écrite au IX* nècU par Bili, publiée p. dom Plaine,
Rennes, 1884.
3. II est vrai que dans le manuscrit unique de cette Vie la Navigatio se retrouve tout
entière, mais, comme Ta montré M. Zimmer (p. 130 et 293), elle y a été intercalée
par un copiste et éuit tout à fait étrangère à la rédaction originale.
588 COMPTES RENDUS
dernière; mais il me sembîe qu'ici le savant cddste a tort; cir, comme |e Vu
dit plus haut, la Navigaiio ne devait pas être fort répandue en Irlande, et,
d'ailleurs, l'auteur de la Vita peut Tavoir connue, mius n'en avoir pis tenu
compte^ parce qu^il la considérait comme apocr)^phe.
Qu'on me permette d^iniercalcr iâ quelques remarques sur des faits que
M Novati n*a pas touchés dans son travail, mais qui me semblent avoir une
cenaine importance pour l'ensemble de la question « brendanîque n^ Dans
Tintroduction de son Sanct BranJan (p. xi-Xïi)» M. Schrôdcr a cru pouvoir
affirmer que la conception de la terra rtpromUnùnis sam-forum telle qu'elle se
dégage du récit de la Xavigatio répond assez exactement à Pidée que se fai*
saient du «f séjour des morts • les anciens Celt«^ et les anciens Germainsf
M. Zimnier a repris cette opinion dans le chapitre qu*îl a intitulé Dit terrê^
rtpromissionis im Uchte dn irtschen Sagf, et où iJ a rassemblé et coordonn«J tous
les éléments permettant de reconstituer le stjottr dts MetUxur/ux de b m\^ho-
logie irUndaii^î. Je ne doute pas que cette partie du travail de M, Zimmer ne
soit fort précieuse pour tous ceux qui s'occupent des choses celtiques, mais
force m'est d*avouer qu'elle contribue fon peu i éclairdr b moindre des
choses de la question qui nous occupe. En effet, je ne vois aucun trait qui
soit commun â la terra repromissionU et au s^our des bienheureux des Celtes
sans Fétre en même temps k JHdée du paradis terrestre tel que Ta compris le
mo\xn âge chrétien. La description de la ierra est calquée sur la descripti^ic
du paradis terrestre de la Genèse^ avec un certain nombre de modifications
qui se retrouvent dans d'autres textes du moyen âge. Il sufiît, pour éc\à
tous les doutes à ce sujet, de comparer la Savifaiio, p. 4-$ et îS-î6. avec^
Zimmer, p. 280-281, et Graf, \fUi, légende, etc., vol, I, p. 6, 22, 38 ctpassini.
M. Zimmer ( p, 202-204) croit reconnaître dans Vhnram Va Corrûy qu'il
estime avoir été composé au xil* siècle, certains traits appartenant à U Natn-
gulio, ce qui ferait supposer que celle-d a été plus ou moins populaire en
Irlande dès le commencement du xii» siècle. Sans \'Ouloir nier la possibilité
de cette dernière hypothèse, je trouve que les arguments sur lesquels se fonde
M. Zimmer ne sont pas concluants. Daprès lui, le sruisk (=lc sage) de Tiii»-
ram ne serait qu'une réminiscence du tir dei de la Nav^aiio; Tautcur de Tim-
raw n'aurait pas vu ou aurait oublié momentanément que le tir dei et sanctui
Brendanus ne faisaient qu'une seule et même personne et aurait cru qu'U
sagis.Haitdedeux personnages dîfîércnts. Mais cela est fort peu probable; il
me semble que, même pour un lecteur peu attentif, il était impossible de s'y
tromper : Brcndan est pour ainsi dire Tunique persontiage de la Navigaiio ti
U .\mjuth nest guère qu'une longue en6ladc de phrases av^nt presque
^utc^ le même sujet, à savnir Brendanus ou mnclm Brendofius ou' sa^^ius i»ter
aue cW r "T C^""'"'' ** ^" ^^'^ ^"*^« °*^ P*^"^ o^^îi^ ^ ^"^"O •»<>««»
P« IZ . "^^^^ ^""" *^*«"' Les oiseaux de Vimr^ ne ressembleot
P« plus aux mseaux de la Nm^Ho qu'à ceux
qu'on rencontre dans une
t. C«t cx|iptttjaiis
•wîeaociK plus de 300 fois eo moins d«
ÎO pi^es.
NOVATI, Im. Nnvigatio Brendani, 589
foule d'autres textes du moyen âge ' . Enfin il me semble que la coïncidence
de Vimrdm et de la Navigatio dans la description des deux sources de IMle
d'Ailbe s'explique suffisamment, si Ton admet que les auteurs des deux textes
ont puisé indépendamment à une source commune perdue, d'autant plus que
nous retrouvons Tîle d* Ailbe dans d'autres textes irlandais (Zimmer, p. 1 54
et 301)»
M, Zimmer a essayé de déterminer la date de la rédaction de la Kavigatio
(p. 297- J07), et il a cru pouvoir la fixera la deuxième moitié du xi^ siècle;
mais le seul fait que nous connaissons un manuscrit de la (in du x^ siècle
détruit cette hypotbèse, M. Zimmer avait admis que la Nai'igath
ne datait que du xf siècle parce qu'il n'existe pas de textes irlandais antérieurs
à cette époque qui y fassent allusion, et cVst encore lâ la meilleure preuve de
ce que je disais plus haut, à savoir que la Ntwigatio n^était pas répandue
en Irlande alors qu*elle était déji connue sur le continent.
J*ai dît ce que je pensais du travail de M, Steînweg sur les manuscrits
de la Navigatio; M. Novati (p. x) n'est pas de mon avis, et, tout en recon-
naissant que les recherches de M. Steinweg ne sont rien moins que défini-
tives, il en accepte néanmoins les conclusions. Puis il résume sa propre opi-
nion sur l'ensemble de la question (p, xi). Ici M. No val i est en désaccord
complet avec tous ses prédécesseurs; la théorie, qu'il nous donne paraîtra
peut-être excellente à quiconque n'a de la question qu'une connaissance super-
ficielle, parce qu'elle semble tout expliquer à merveille; mais, au fond, elle
ne repose sur rien de certain ; Tauteur s*cst laissé guider plutôt par son ima-
gination que par les faits.
Le reste de l'introduction (p. xii et suiv.) est consacré aux traductions et
, imitations de la Navigatio dans les langues vulgaires et particulièrement en
I italien. Cette partie de la question a été suffisamment mise en lumière par
M. Novati et ses prédécesseurs, et il serait superflu de s y arrêter longtemps.
Je rae bornerai donc là-dessus â quelques remarques détachées.
P. xri» note i. Le texte latin de M. Wahlund n'est pas et n'a pas la pré-
tention d'être, comme le dit M. Novati, une édition définitive : c'est, au con-
traire, un « Compromisstext » qui n*est destiné qu'à faciliter l'intelligence de
la traduction française en regard de laquelle il est placé»
P. XVL M. Novati revendique pour les textes italiens qu'il étudie une
place à part et presque une place d'honneur parmi les traduaions de la
Navigatio dans les langues vulgaires. Je suis loin de partager son avis, car la
» description de la terra rfptomissionis que le traducteur italien a ajoutée à sa
version, ou plutôt qu'il lui a juxtaposée, n'a rien d'original; on pourrait par-
faitement la retrancher sans qu'il y parût, et il est même fort possible que le
traducteur ait tiré cette description d*tin texte latin tout à fait indépendant de
ht Navigatio,
P. XVII. L'auteur de la Navigatio n'entre pas dans une description bien
I. Voy. Schirmcr, 0/. «>,. p, Jî, note; Gr*f, op. dl,, p, aéo.
590 COMPTES RENDUS
détaillée de k Urra rtprortiissiùnii et ne consacre guère que deux oa trois
pages à ce sujet; M, Novati est surpris de cette concision qu'il juge excessive,
et qui, selon lui, ressemble fort i une mutilation ; il voit U un probJcroc
intéress.tnt digne d*£trc étudiiJ. U me semble pourtant que cette prétendue
mutibtion s^cxpliquc parfaitement : le sujet de la Navigatio est, comme l'in-
dique son titre» un voyage maritime ; il est donc tout à fait naturel que Tan-
teur ait consacré la plus grande partie de son récit à son véritable sujet, quî
est la description de ce voyage. De deux choses Tune, ou bien l'idée de la
iirru npromiistonis était répandue et populaire en Irlande, et alors h quoi bon
décrire tout au long cette île que tout le monde connaissait ? ou bien cette
idée n'était pas répandue, et Tauteur de la Navigatio ne Ta introduite que
pour motiver le voyage du saint irlandais; dans ce cas, il est fort naturel
aussi que l'auteur ne se soit pas arrêté très longtemps h la description de la
terra. 11 pourrait bien en avoir été du récit de la Ndvigatio comme il en est
de nos jours des nombreuses relations de voyages au pôle Nord écrites pour
le peuple et la jeunesse : la plus grande partie de la relation est consacrée
aux aventures du voyage; quant au but et aux résultats de Tentreprise, Tau-
teur ne fait que les esquisser rapidement, parce qulls n'oflrcnt, d*ordinaipe,
pas grand' chose de nouveau et sont à peu près les mêmes dans tous les c^.
César Boser.
Bertran de Bom, hgg. von Albert Stimmikg. {Rûmamscbe Bibiioihik.
n<* 8) Halle, Kicmeycr, 1892, in- 12 de 248 pages*
La nouvelle édition de Bertran de Bom que vient de donner M. Stinuning
diflèrc profondément de celle qu*il avait publiée en 1679, et se rapproche ^
tout i fait par la disposition matérielle, comme par le caractère intrinsèque,
de celle que j'ai donnée en 1S88. L'orthographe et la langue sont inufor-
misées ; les poésies ne sont plus rangées dans un ordre alphabétique unique, -
mais di viciées en trois classes : sirventés politiques, chansons d*amour, poésies \
diverses ; les ra^ ne sont plus imprimées en bloc, mais distribuées en tète I
de chaque poésie, etc. La biographie de Bertran de Bom a été en partie reââe
J»r M. St., et il est arrivé à quelques condusions oouvdles pour k date des 1
sirventés politiques, comme oq s'en rend compte clairement piir le tabiesu |
eompanttf qui occupe U page 49, Dans b pféC^e, M. St. vcm bien
Mitre que mon édition de 18S8 « ootistinitft m pcogrfo «xr sa devandète m '
^^f^ P" seulement pour luâ rendre sa politesse qoe fe tiem à &ire mie
^^d^raoïi analogue en œ qi» co«Kcn)e Tèdiiioii de iS^a p«r i^|x^ à cdki
ÎLÎTÏLS!!^ ^ ^"^'^^ tedicf^cs, rédianr a Lvgeiiiem mis â profit!
^^ *''^ oo<i>pies i^odvs qtii COI été faits de om» édition , fuo picia
;(rùUM^U^ de déuâl et de coojectuies ingénietacs de M. Etaile Lew;
™w«. moim iwportaat. ma^ié ses gnmdes f^Ofomm^!^ de M, Andraen.
^•^e»ci«ra de fie pts «ïwndi^
A. STiMMiNG, Beriran de Born 591
absolumem pour le ^re. Je voudrais simplement montrer, par quelques
observations détachées, que ma dévotion à Bertran de Born, bien qu'étouf-
fée par d'autres préoccupations, n'est pas encore tout à fait éteinte.
Biographie. P. 5. M. St. oublie qu'Henri Plantagenêt n'était pas roi d'An-
gleterre quand il épousa Eléonore de Guyenne et qu'il ne le devint que deux
ans après. — P. 14. Il n'y a pas de raison pour dire Guiscart, Guiscarda
quand il s'agit de personnages de la maison de Beaujeu, mais Guischarty
Guischarda, ou, à la moderne, Guichardy Guicharde. — P. 15. Berhesil est
aujourd'hui Barbepeux. — P. 44. Au lieu de Gameges, lire Gamaches. —
P. 4$. Au lieu de MeîhaUy lire Millau.
Jidiiion. Comme je l'ai indiqué, M. St. a uniformisé le texte de Bertran de
Born de façon à introduire partout les formes proprement limousines. C'est
un travail où il n'est pas possible d'éviter les incohérences : quelques-unes
m'ont frappé. Partout c -{- a est rendu par ch : chaniOy trenchaty etc. Pourquoi
n'a-t-on pas de même / pour c médial ou g -f- a ? L'éditeur imprime : digat^
d'une part (II, 52 ; VI, 2, etc.) Qt preiat^ de l'autre (IV, 49); il est vrai que
pour ce dernier passage, il a eu un remords et que dans ses Anmerkungen, il
corrige en pregat^. J'avoue que, dans ces deux cas et dans les analogues, je
ne m'explique pas pourquoi M. St. n'imprime pas dijat^y prejat^y puis-
qu'il n'hésite pas à écrire ;flw^/r (IV, 25), jardi (XXIV, 4). C'est une incon-
séquence aussi que d'écrire ajut d'une part (II, 51) et veia de l'autre (V, 37).
Mais je n'insiste pas sur ces minuties, et je passe à l'examen de quelques
leçons ou de quelques notes. I, 2, n'Aratuon Ltic d'Esparro, Pour justifier
Aramon M. St. invoque le haut-allem. Aramundy Arimunty et pour élucider
la mention d'EsparrOy il parle d'une famille féodale qui empruntait son nom
à la localité d'Esparrony dans les Hautes- Alpes : ces deux remarques viennent
de M. Andresen et me paraissent sans valeur ; puisqu'il s'agit d'un agent du
comte de Toulouse et qu'il y a un Esparron au sud de Toulouse, en pays
gascon, je maintiens ce que j'ai dit, que « Arratnon est la forme gasconne de
Raimon » et que « vraisemblablement » il s'agit d'Esparron, près d'Aurignac,
dans la Haute-Garonne. — I, 15. La rue et la place de Toulouse citées
s'appellent du Peyrou et non du Peyron. — II, 33, /o fers Saint Launart. M. St.
paraît s'en tenir à l'explication de Diez qui voit là une allusion aux ex-voto
offerts à l'autel de St Léonard de Limousin (et non de Limoges) par les pri-
sonniers délivrés de leurs fers ; il mentionne pourtant l'opinion de M. Cha-
baneau d'après laquelle il s'agirait plutôt du fer fabriqué à St-Léonard, ville du
Limousin. J'incline vers l'opinion de M. Chabaneau, ayant relevé récemment,
dans l'inventaire des archives de la Haute-Vienne, l'autorisation donnée à un
marchand de St-Léonard de bâtir un moulin sur la Vienne pro faciendo fer-
rum (D 991) : l'acte est assez récent (1491), mais il est vraisemblable que
depuis longtemps on travaillait le fer à St-Léonard. — V, 20. L'égalité
Acs z= ad Aquas, empruntée à M. Andersen, n'est pas tout à fait juste ; il
faudrait écrire Acs nr Aq u is. — V, 26. Je ne comprends pas pourquoi M. St.
a remplacé la leçon qu'il avait adoptée en 1879 (5ï... E Malleos e Tannais fos en
s 92 COMPTES RENDUS
pes) par E Malk^i t Taunats fo^sen près, La locution esstr en pts, * être sor
pieds, « doit ôtre gardée, car elle est en harmonie avec l'image du \^erssuivam :
£ a Sivrai fùs vescoms vim e sus. La comparaison des tnanuscrits indique aussi
qu'elle est primitive : les six textes se répartissent, d'après M. St. lui-même,
en deux familles dont Tune est représentée par C tout seul et rautrc, a des
degrés divers, par AFDJK ; or fos en pes s*appuie à la fois sur C et sur A. —
V, 35, Entre Peitau e la hia-Bochut, Ordinairement Peitaiâ signifie PoUm et
non Poitiers. La leçon est-elle justifiée par les manuscrits? Qu'on en juge,
Peitau AI, PeitOH K, Peiteu D, PeiUus F, Peittetis C. Etant données les dcui
familles telles que M. St. les a constituées, je n*hésite pas A lire Peiteus,
devenu Ptiiieus sous la plume relitivement récente de C. — Vil, 10-12, G:s
trois vers sont Tobjet de deux notes erronées au point de vue géographique :
là Saintonge et TAngoumois forment aujourd'hui deux départements, et nou
un seul ; d*autre part le Finist(:re (et non finisttrre) est la Bretagne breton-
nante et non « îa partie occidentale de la Normandie». — X, 24, En Ceniolbs
abGasto. La graphie par Ih appartient au ms. C, qui écrit, comme on sait, Mfc
pour M, etc. Il faut la lui laisser ici comme ailleurs et écrire Centds, en bt.
CentuUus et non Cent uU tu s, — XIV, 45, Qu€ iTAuiasvah entro a Monfermn.
M. St. m*a emprunté la conjecture Autasvats^ au lieu de Ostasvah des manu-
scrits; il a eu tort. J^ai déjà fait mon mea culpa de cette conjecture dans les
Annales du Midi, il y a trois ans (II, 14) : il s'agit d'Os total dans les Pyré-
nées et non à'Aîtavaux en Limousin. — XVI, 21. Dans la note, Odessa est
une fâcheuse coquille pour Édesse, — XVII, 1 5 , £ Catr^is rema soi en trepei.
M. St, fait du ^ un usage immodéré dans son orthographe unifiée : il écrit
Caerii (c a d u r c i n u m), farcit (fa r c i t u m), etc. Mais le c étant directement
appuyé, il faut récrire par un c, comme â Tinitialc ; aucun tns. n'écrit un ;
dans ce cas. — XXXII, 27, mi dons m Elis. M. St , suivant ïd encore la
f&cheuse influence de M. Andrescn, me reproche d'avoir imprimé nAelis^ Cl
il ajoute : « La dame s*appclait sans aucun doute Elis,. ; d'ailleurs Aelt^ {AJd
heid) n'a rien à voir étyraologiquement avec Elis (Elisabeth^ » Je conteste
absolument que la dame en question se soit appelée Elisabeih ou, en d'autres
termes, que Elis doive s'interpréter autrement au mcmn Age que comme une
forme abrégée de Aelis et se traduire autrement en français moderne que par
Alix. La dame célébrée par Benran de Boru était, au dire du biographe, fille
d*un vicomte de Tunenne et sœur de Matilde (MoeuT) de Montignac cl de
Marie de Ventadour ; je ne veux pas insister ici sur sa personnalité, que le
biographe pourrait bien avoir méconnue. Toujours est-il que le vicomte de
Turenne Riimon, contemporain de Bertran de Born, mort à la j* croisade^
a^it une femme que les documents authentiques appellent indifiéremmeot
/J'I^ ^^'''" -^ÛNon--, B. Nat. n. ao,. lai, 1560, f^ 165 v<»), fl«/f> en
1191 (•». P» 129 To^y et HeiU en 1209 Qnstéï, Hist. âtUmaù, iê Tmrmm,
T^T!^\^^ . ' Appendice m, M. St. reproduit à tort, après bien dantres,
1^ u "^""""^ *'*"* ^^"^ ^^ ^ «»<^ d Adémar. comte d'Angou-
itme k comte moumt, à Umoges. le i<5 juin 1202 exactement (Oro.. i.
Miây
A. STiMMiNG, Bertran de Born 593
Saint-Martial de Limoges, p. p. Duplès-Agier. p. 106). Un peu plus loin est
répétée une erreur d'un autre genre, très difficile à déraciner, paraît-il : M. St.
croit que quand Hugues X de Lusignan épousa, en 1220, Isabelle d'Angou-
lême, veuve de Jean sans Terre, il ne faisait que reprendre le bien que le roi
Jean lui avait enlevé en 1201 ; mais ce n'est pas Hugues X, c'est son père
Hugues IX qui avait été fiancé en 1201 avec Isabelle.
Je terminerai par l'examen d'un point particulier de la versification de Ber-
tran de Born que M. St. n'a pas élucidé. Dans son édition de 1879, il avait
signalé sept vers décasyllabes comme présentant une césure fétninine ; les
voici tels que les donne la première édition :
1. En dompn' escarsa nois deuria hom entendre, V (2« édit. xxv), 31.
2. Qu'ab thezaur jovepot bon pretz guazanhar, VII (xl), 44.
3. Que de nulh'autra aver lo desirier, XV (xxxi), 11.
4. E la paraula fon doussa et humana, XIX (xxxv), 29.
5 . Per eu fon Polha e Sansonha conquesa, XXIX (xix), 24.
6. Tro la demanda qu'a faita a conquesa, XXXI (xvii), 7.
7. Una ren sapchon e Breton e Norman, XXXIV (xiv), 41.
La question est de savoir si l'on a affaire à la césure épique ou à la césure
enjambante. On remarquera que deux de ces vers (3 et 5) ont Télision de la
cinquième syllabe, ce qui les met hors de cause ; deux autres (4 et 6) se
prêtent aux deux coupes, selon qu'on élide ou qu'on n'élide pas la huitième
syllabe. Dans le vers 2, M. St. n'obtient la césure épique qu'en intercalant le
mot bon qui n'est pas dans le seul manuscrit qui contienne cette poésie. En
gardant la leçon du manuscrit :
Qu'ab thezaur jove pot pretz guazanhar,
on a la césure enjambante. Dans la seconde édition, M. St. imprime /wVa au
lieu de pot et se prononce contre l'avis de M. Chabaneau qui propose sage-
ment de garder la leçon du manuscrit. Le vers 7 n'est que dans deux manu-
scrits ; l'un des deux donne la césure enjambante :
Una ren sapchon Breton e Norman.
Reste le n© i , pour lequel nous avons un manuscrit unique, où l'on a la
césure épique. Je suis disposé, je l'avoue, à admettre, comme M. Chabaneau,
que Bertran de Born a employé couramment la césure enjambante, tandis que
l'emploi de la césure épique, constaté une seule fois, est tout à fait exception-
nel. Le premier vers de la pièce XXXIV (xiv) :
QjLian la no vêla flors par el verjan,
où M. St. voit la coupe 6 4-4» peut être considéré comme ayant la césure
enjambante après la quatrième syllabe. En effet, la coupe 6 -f 4 ne se retrouve
pas une seule fois chez B. de Born ; M. St. en indique, il est vrai , un autre
exemple, mais l'indication de cet exemple est le résultat d'une mauvaise ponc-
tuation ; d'ailleurs la pièce où figure ce prétendu exemple n'est pas de Ber-
594 COMPTES RENDUS
tran de Born et M. Si. ne la reproduit pas dans la seconde édition. Outre ï»
sept vers indiqués par M. St. comme ayant la césure féminine , il y cti i
àcu% autres qu'il a oublîc% :
Pois na Guîscharda nos es en sai tramesa, I (scxfx), 14*
Sleu autra domiia mais deman ni enquier, XV (xxxi), 2}-
Dans le premier cas, sur deux manuscrits, un seulement contient b prépo-
sition en qui n'est pas utile au sens. Dans le second, sur huit manuscriu,
deux seulement ont la leçon adoptée par M. St. ; quatre suppriment méi,
et les deux autres ont un texte dîtféreot» J'ajouterai que pour le vers 27 de
la piccc XV (xxia), la comparaison des manuscrits ne me parait pas appuyer
la leçon adoptée par M. St, Au lieu de :
£ Tus r autre nons poscam ja aroar,
je lirais, avec une césure enjambante :
E ja Tus Tautre non s poscara amar.
A. Thomas*
Essai sur la taogue vulgaire du Dauphiné septentrio-
nal au moyen-âge...» par Fabbé A. Devalx. Paris, Wcltcr; Lyon»
Cote, 1892. In-80, xxti-S22 pages et une carte (Extrait du BidUHn 4# M<»-
déttit iielphinak, 4* série, t. V).
Cet ouvrage est une thèse de doctorat présentée i la Faculté des lettres de
Grenoble. C'est sans doute Tune des meilleures thèses que cette Faculté ait
reçues '. â Paris mCme on en a iidmis qui ne b valaient pas. Le sujet est
bien limité» bien comprisii traité avec compétence. Lorsque je dis que le sujet
choisi est bien limité, je n'entends pas dire que le roman du Daupbiné
septentrional offre des caractères spéciaux qui permettent de constituer une
circonscription dialectale. Là, comme ailleurs» les caractères linguistiques se
développent indépendamment les uns des autres et, pris dans leur ensemble,
résistent à toute délimitation géographique. M. l'abbé Devaux le sait bien, et,
s*il a choisi le nord de l'Isère comme sujet de son étude, c'est parce qu'il
avait des facilités particulières pour connaître tant les documents anciens que
Tétat moderne du langage de ce territoire. Ayant ainsi limité le sujet de ses
recherches» il a eu le mérite de s'y tenir, ne citant les formes Unguistiquçt de
la région voisine qu'à titre de comparaison ou pour indiquer la dircoion de
certains faits, s'abstenant de ces généralisations vagues et peu jusrifiôcs qu*oa
rencontre trop souvent dans les travaux de ce genre publiés jusqu'i ce jûux.
M, Dcvaux nous donne plus que ce que promet le ritre de son ouvrage. H
ne se l>orne pas â décrire le dauphinois septentrional du OTo>-en Age : il suit
les faits jusqu*i Pépoquc actuelle. C'est donc véritablement une gramtnjnre
historique qu'il nous donne. ï>rocédant historiquement, D se garde bico de
mettre sur le même plan, comme on Ta fait quelquefois (c'est une des £utta
DEVAUX» Essai sur la langue vulgaire du Daupfriné 595
capitales de la Grammaire des langues romanes de M. Meyer-Lûbke), les
formes anciennes et les modernes. Pour chaque fait il indique, autant que le lui
permettent les documents écrits, l'état de la bngue au moyen Age, et il donne
ensuite l'éiat actuel» ayant soin d'exclure les mots français qui se sont intro-
duits en si grand nombre, parfois depuis une époque assez ancienne, dans les
patois. Il faut l'en louer, car je sais des romanistes qui n*ont pas la m^ime
précaution. Pour la notation des sons patois, il se contente des ressources
ordinaires de rimpnmerie. H n'arrive pas au degré de précision qu'obtiennent
MM, Gilliéron et Rousseloi, dans la Revtu des patois gallo-ronians^ avec leur
alphabet si compliqué, mais son système» par cela même qu'il est plus
simple, est plus accessible au commun des leaeurs et» en somme, donne des
résultats suffisamment exacts.
M, D. n'est pas le premier qui ait étudié historiquement le roman d'une
région déterminée, mais la région à laquelle il s*est attaché offrait des condi-
tions particulièrement favorables, et il a su en profiter. Lorsque M. Ascoli a
décrit de la façon tnagistrale que Ton sait Tensemble du domaine ladin , il
s'attaquait A une suite de territoires disjoints pour lesquels on a bien peu de
documents en dehors des mots et des phrases que l'on peut recueillir de la
bouche du peuple Pour une partie seulement de ces territoires , les textes
écrits remontent jusqu'au xvi« siècle, de sorte que la période soumise A
l'étude est nécessairement assez courte. Ici M. Devaux a pu utiliser quelques
textes du xin* et du xrv« siècle. Un de ses mérites est d'avoir su ajouter par
ses recherches plusieurs documents écrits à ceux que l'on connaissait avant lui,
et surtout d'en avoir su tirer â peu près tout ce qu'ils pouvaient donner de
renseignements sur l'état ancien du langage. A cet égard, son « essai j>, pour
employer le titre modeste qu'il a adopté, n'a guère d'autres devanciers, dans
cet ordre d'études, que la Grammaire Umousine de M. Chabaneau, où le
limousin anden est constamment comparé au limousin moderne, Mais, soit
dit sans diminuer le mérite de M. Chabaneau dont l'œuvre est antérieure aux
récents progrès dé la philologie romane, le travail de M. D, l'emporte dans
l'ensemble par la sûreté de la méthode , dans le détail par l'exactitude avec
kquclle les faits sont vérifiés, classés et décrits. L'ancien limousin de
M* Chabaneau est un peu vague , son limousin moderne est le langage de
Nontron et des en\n'rons. Chez M. D. la correspondance entre l'état ancien
et l'état moderne du langage est beaucoup plus rigoureuse.
VEaai iur la langue vulgaire du Dauphiné septeutrianal se divise en deux
parties : i<* La Documents, z^ PlxméJique et Flexion. Suivent un chapitre de
conclusion {Lancim dauphinois et les patois actuel; Tancim dauphinois il ks dia-
lectes voisins) et divers appendices.
Le recueil de documents qui forme la première partie est du plus grand
intérêt. Voici ce qu'on y trouve : L Le testament, bien connu^ souvent
réimprimé et utilisé (j'en ai fait grand usage dans mon Uvre sur Alexandre le
Grand dans la littérature française du moyen d^e)^ de Guignes Alleman, seigneur
d'Uriage (127$). Malheureusement le texte original n'a pas été retrouvé, et
596 COMPTES RENDUS
M, D. a dû se contenter de réimprimer le texte donné par Chorier, avec un
petit nombre de corrections justifiées en note, y joignant un commentahe
hîsioriqne et géographique. — IL Comptes consulaires de Grenoble (1)38-40),
Comme pour le texte précédent ^ l'original de ces comptes est perdu , tuais
depuis une époque beaucoup plus récente, de sorte qu'il ne £aut peut-être pas
renoncer à tout espoir de le recouvrer. Quoi qu'il en soit , on n*en possède
que des citations assez nombreuses faites par Piloi» Tandcn archiviste de
risère, en diverses publications qui datent de 40 à 50 ans. M, D. a recueilli
partiemment toutes ces citations , les a rangées dans Tordre chronologique,
rectifiant par des conjectures généralement heureuses le texte mal transcrit
par Piloi *, — IIL Usages du mistral d(s œmtts de Vienne (1276). Le mistral
des comtes de Vienne était un fonctionnaire héréditaire. L'énumératicm des
droits quil percevait à Vienne en certaines occasions présente de Tintérêt
pour Thistoire comme pour la topographie de cette ville, sans parler de b
valeur linguistique du document, qui était tout i fait inconnu, et que M. D.
a publié d'après Forigina! conservé dans la collection d*un bibliophile dau-
phinois bien connu, feu E. Chaper, — IV. I^yde de Vienne, texte qui remonte
probablement à la fin du xin* siècle, mais dont on n*a qu*une copie asset
incorrecte de 1403. Tous ces documents, je le répète» sont fort bien publiés,
quoiqu'il y reste, surtout dans le n*» 11, des passages bien obscurs *. L'usage
en serait plus commode si M. D. avait eu l'idée de les distinguer les uns des
autres par des titres courants. Dans le reste de Touvrage aussi Tabsence de
titres courants est regrettable.
Il n'existe pas de textes littéraires anciens qu'on puisse avec probabilité
attribuer au Dauphiné septentrional, ou du moins on n*cn connaît pas.
Toutefois M, D. signale dans le recueil de MM, Bartsch et Horning {La
hngue tt la UfUr, fr,^ col. 461) une Vie de saint Théophile rédigée en vers
octosyQabiques, qui lui semble composée dans le langage àçs environs de
Bourgoin (p. 439, cf. p. ii). Cette hypothèse n'est pas tout à fait e:xactc- La
Vie de saint Théophile dont il s'agit est tirée d'un ms, (n« 818 du fonds
français à la Bibl. nat,) dont, bien avant MM, Bartsch et Horning, divers éru-
dits avaient publié des fragments qui ont échappé à Tattention de M. Devanx.
Tout récemment j'ai fait paraître (dans ies Notices et Bxtraiti) un mémoire sur
ce ms., Cl je n'ai pas eu de peine A en prouver Torigine lyonnaise. De Lyon
à Bourgoin la distance n'est pas grande.
La deuxième partie est consacrée â la grammaire de l'ancien dauphinois.
I. Aux J5 ^6« ^9* 20, 21, ptjjp, palps^ que M. D, interprète dans son glossaire^ maîs
non sans une juste réserve, par paîm^ pourrait être un nom de monoAtc : voir Du Cangc
PALPA, Si cette explication était adoptée, on pourrait proposer din, (deniers) au lieu de
dm qui se rencontre dins les mêmes articles et qu'on ne sait comment expliquer. ^^ — Au
56} rmoHair, qui étonne i bon droit M. D., ne doit pas être corrigé en rmom^r; il
faut lire ret'outar. C'est utîc forme savante comme vaquar c\ti p. iiç.
a- M. Ant. Thomas a communiqué à M, Tabbé D, quelques corrections qui ont élé
imprimées sur un feuillet volant pour être joint à Touvragc.
DEVAux, Essai sur la langue vulgaire du Daupbiné 597
Elle se divise en deux chapitres. Le premier, et le plus long (pp. 103-349)
traite de la phonétique, le second (pp. 349-409) deîa flexion. L'ordre suivi me
paraît bon (il se trouve, par une simple coïncidence, que c'est â peu près celui
que j'ai adopté pour mon enseignement de TEcole des Chartes) et Texposi-
tion, qui est toujours claire, ne dissimule pas les difîïcultés. Bien que les
documents linguistiques du Dauphtné septenirional n'aient pas été, jusqu'à
M. D., Tobjet d'une étude systématique, il ne faut pas croire qu'ils nous pré-
sentent un grand nombre de faits nouveaux. Au contraire» beaucoup des
cjtractëres de Tidiome étudié étaient connus par des documents de pays voi-
sins. M. D. est très au courant de ce qui a été écrit sur les alentours de son
sujet et discute avec compétence les opinions qu'il adopte ou qu'il rejette*
On comprend qu'à mon tour je trouverais beaucoup à discuter. J'ai eu à me
former une opinion sur beaucoup des points qu'étudie M. D., et il est natu-
rel que je ne me représente pas toujours de la même façon que lui les modi-
fications phoniques dans leurs conditions de temps et de lieux. Je me borne-
rai toutefois à un petit nombre de remarques choisies parmi celles qui
n'exigent pas un trop long développement. A tonique influencé par une
mouillure reste pur en certains cas, comme en provençal (ligatum Ua^
mcrcatum marchia)^ et en d'autres cas devient U, comnje en français la
même voyelle (ligare /tVr, regalem regiti). On sait que cette difl^érence de
traitement a suscité bien des tentatives d'explication depuis que M. Ascoli l'eut,
le premier, mise en son plein relief. M, D. étudie à son tour ce point délicat,
mais je ne trouve pas qu'il ait classé les faitb bien clairement. Il range en effet
(p. us) dans la même subdivision marchia ( m e r c a t u m) et preyh (p r c c a t o s),
chargiéi (carricatus). On s'étonne de voir groupés ensemble deux résultats
aussi différents. On s'en étonne d'autant plus qu'on voit plus loin M. D. adop-
ter, avec raison du reste, l'explication de M. Philipon {Rornania^ XVI, 263),
qui fait dépendre la conservation de Va de la nature de la consonne qui suit :
a se conserve quand il est suivi d'une explosive (mercatum :== marchia)^ il
s'aflaibliten 0 quand il est suivi d'une continue (m ercat os ^: mflr£"ftkfi, ligare
^z lùry Ce n'est qu'un défaut de classement. C'est sans doute par inadvertance
que masna de mansîonata, en passant par masruia, est cité, p. 117, comme
exceptionnel : il n'y a aucune raison pour que Va tonique de ce mot passe à iV. =—
Le traitement du suflixe -acum, dans les noms de lieux, est différent selon
que ce suffixe est ou n>st pas précédé d*/ : Burnacum aboutit k BouriMt, et
Romaniacum à Romagmfu, Voilà le fait incontestable. L'explication de ce
fait présente une difficulté justement relevée par l'auteur. Comment le suffixe
-acura donne-t-il ai tandis que lacum, 'faco (pour facio) donnent
lau^ fati ? Assurément, dans ces derniers mots il y a perte pure et simple de
la gutturale; cf. en prov. *i^cunx faun^ fagum fmt, etc. De même, quand
-iacum donne -Uu (ou eu) on conçoit que l'influence de l'i a fait passer l'a
suivi d'w à f^ la persistance de la posttonîque u ayant ici le même effet sur l'a
qu'une consonne continue» Il y a parallélisme complet entre Iacum lau et
Romaniacum Romagnku. Mais pourquoi ai dans Bourtmi^ Cfmrintùnnai^
598 COMPTtS REKDUS
Clmutlai, Chaioîtai, etc., tous licust de l'Isère qui oût en ladc le su^ke
- il c u m non précédé d^utie mouillure? Pourtjuoi pas Bûurtmu^ etc.? Jedob
il vouer que rexplication proposée par M, D. ne me satisfait pas, ei j'ai peine
â croire qu'elle le satbfasse, ScIod lui (p. 140), « dans RomaBiacum
« devenu Româtiiago, le g a dû tomber de bonne heure, tandis quTil
« persistait dans B u rn a g o pour se résoudre plus tard en palatale, B u rn a jo. •
Assurément, de Barnayo on arrive vite à Boitntai. Mais quelle raisoti avons-
nous de croire que dans ButDago lef a persisté plus loiîgtemps qu& dans
Romaniago? Et est-il bien sûr que Içg^ suivi d'une voyelle bbiale, devait
se changer en v ? Ce sont là des suppositions très aven t tirées. Et en outre il
reste à expliquer pourquoi lacunn csl devenu lau et non pas ht, M. D. a vu
robjcction, et il répond ainsi (p, 142; . [1 ne semble pas tmpossabk qu*en
«i disant !au on ait continué à dire BurnagO^ précisément paroe que Hfo
!i était un suffixe, et même un sufEie de lieu, par conséqueot un signe plus
a résistant, a Y a-t*il donc une phonétique spéciale aux noms de lieux? La
véritable explication est fournie par un lait qui paraît avoir échappé à M. D.,
c'est que dans ïa région dauphinoise et aux environs le suffîxe -a cas est
dcveîiu de bonne heure -ai eu s, je consute le Êait sans êtrç irn eut d'en
donner rexpïication : Anmmii cstAnnonaîcus dès le Oûxi^ème sâède dans le
Cartulâiîie de St-Andr^lé-Bas (pp, 265, 19S), Chartnkmm esi C a renie n-
tiaicus (iH4.^ p. 297)» Cbmsiki cil Cancellaicus (Cart. de S«im-Hugues,
p. 2), Ckiimoi estCatonaicus (St- Andné-Ie^Bjs, p. j6 |), Fimm \" i u a i c u s
(Can. de Si4iugues, p. l> Il ra. ^ns cËre que je n'étends pas oette c&piiatkra
â la t^^oct coitiak et sc|rtefitriopale de h Fracice, où il nV a point de i^Ttr-
^jOKit entre les piodaits de Ucum ^t da sufExc -a eu m. et où d^aiikti^
pour ce suffixe, on trouve, dès le onzième âède, -aie m, -eîum, mais non
-ai eu m. — La îînale -ii'u -^u correspondanî à -iacum éprouve dans une
partie du Dauphiné une modification singulière : Vu dexient consonne et est
représenté par f : C a n d i a c u m , acîuellemeni Chandieu (air. de Menne), se
trouve au Xï\*« siècle sous la forme CbjnJff. M. D. a étudié de très près ce
phénomène (^pp. i;^ et suiv.") et en a relevé à peu près tous les exemples que
tourriisscnt les textes de risere. Il rapproche avec raison de ces exemples g
d*Cj:o , 'co, ù* de *î'ico v?»>i^î" îacîoV II remarqDe non moi^s â propos
que ce passap.^ d> ou ^ iarin posrronique i r's'obf^rve en anden français dans
nr àc nidu, dans pi'' de riu; aiouîons Gif, près Pam, qui est en latin
Giîr. m. c: pour k DauphiDc môme Cun'rrf (ClerJeu, DrômeX et Vad^j
(^Vasnîc.-.x, l>"<Snic\ /'4XVÎ.' es: donné par 3e Can. de Léonce! qui a aussâ
Ta ;». , nii-.s po;:rqjvX n'a-t-on pas V^lv - Comme le DLz:. top, ac h Dràrm de
M. Krun>l^uranc ne donne pas de formt plus ancienne que Variz^ en liiS,
«>r, nVs: pxv a^îSUT-e %:sc.:'i présent c*3e le rvpe pnmrdf foh en -iaccm. —
M î>. trji:rc de k prv^:onlCJe non in:t:ijc d'après Darmesicîer. Il lapprik
♦^ proton )C;îc îmnx'dwitc >> ce q«: n'es: pa> clair, La seoie dênoimnaîion
evAvtc c^; , K « ii d:t pîus c\;:n£ lois, c mtenoaiqoe, «> car si en Mn^às ie
5»<\'0:\i £ de sac : Ji ni c r. : c m s'a£aj*);:: en t {ie^ctncn: ), si .dans bonîiaîcm Vi
DEVAUX^ Essai sur la langue vulgaire du Dauphiné. 599
disparaît (bmte) , ce n'est pas du tout parce que cet û ou cet i sont placés
avam la tonique principale, c'est parce quHls sont placés après la tonique
secondaire'. Ainsi rintertonique est généralement traitée comme une
posttonique, qu'elle est en effet. Le classement des faits (pp. 240 et suiv.)
n*est pas irréprochable. Certains faits ne sont pas à leur place^ d'autres sont
mal expliqués. Je ne vois pas ce que Va initial d*agurium (p. 242)
vient faire parmi les intertoniques. Vo d'adobar (p. 244) n'est pas du tout
conservé parce qu'il est appuyé sur un groupe de consonnes : c'est un mot
composé; le cas est donc tout autre que dans honora tu s donnant ondras.
Dans le même paragraphe sont rangés à tort peioresses , montonines , formes
dérivées où rinfiuencc du primitif est évidente, — P. 252, c*est sans doute
par inadvertance qWapcrUtam est cité parmi les mots oQ a s'affaiblit en e sous
Taction d'une r suivante, — En Dauphiné, et plus i l'est, la diphtongue
latine au^ antétonique^ s'est continuée en u : Mauricius ^z Mûris ^
Auriaticum Uriage. M. D. pense que cet u se prononçait ou\ mais il n'en
donne aucune raison valable : la graphie EuriagWy au xvii« siècle, ne prouve
rien, puisqu'on français, à cette époque, on écrivait souvent eu ce qui était
prononcé u (par cti, heur, bonheur , malheur). Ce qu'il faudrait trouver, c'est
Ouriagt'y Mouris. Je crois donc {^u'on prononçait, comme maintenant, Uriage^
Mûris; cL en Piémont Turin de Taurin u m. Le point délicat est de distin-
guer les cas où au antétonique se continue en u et ceux où, comme ailleurs,
il se continue en 0 probablement ouvert. — 11 y a un peu de désordre dans
Texposé qui concerne le^ intervocalique (p. 291) : pciesu, poesu (Podiensis)
n*a rien à y faire , et quant au passage i y de ^ suivi d'une voyelle labiale
(c si ego z^ esle)x>), j'y crois peu. — M. D. explique très bien que le / inter-
vocalique disparaît en dauphinois très anciennement, aussi t6t, peut-être même
plus tôt qu'en français» d'où les participes passés féminins en -aa^ lat.
-a ta, prov. -adû. Mais je ne comprends pas pourquoi Gratsivaudan est cité à
titre d'exception, comme un mot tout provençal (p. 297); car assurément le
second ^ de G ration o poli tanum n'est pas intervocalique : Yi étant tombé
très anciennement , le / se trouve appuyé sur 17. — Le passage dV en / dans
CaiaUna (p. 351) n'est point spécial au Dauphiné, puisque le même exemple
est cité dans les Leys d'amers^ II, 194,
Le deuxième chapitre, consacré à la flexion, est beaucoup moins étendn
que le premier : les documents, tous d'ordre diplomatique, qu'on peut utili-
ser ne fournissent pas une grande variété de formes flexîonnelles , surtout
pour la conjugaison, et, comme le remarque très justement M. D., U y a peu
à tirer des patois pour h connaissance de Tancienne flexion, tant la déclinai-
son et la conjugaison ont été modifiées, depuis le moyen âge, par des
influences analogiques. On peut du moins rendre à M. D. ce témoignage
qu'il a tiré le meilleur parti des textes anciens qu'il avait à sa disposition.
Tout en reconnaissant le mérite de cette partie du livre» je dois dire que je
1. Vof. MûMantû^ VII, 451.
600 COMPTES RENDUS
n'approuve guère la classification des déclinaisons qu'a imaginée M. Devatti :
il n'y aurait pas moins de six déclinaisons, trois pour les noms masculins et
autant pour les féminins, sans parler d'une dernière série compos<ie îc
substantifs indéclinables. Tout cela est ùctîce et correspond mal X Fétyino-
logie. Sans entrer dans une critique détaillée, qui prendrait trop de place et
que chacun peut faire » je me bornerai à contester que les sujets féminins!
CQri^, tnaysons.Gtc, dérivent de Taccusatif latin» et que Vs (ou ^ de âeiionl
ait été introduit par l'analogie de h seconde déclinaison latine (p. jM-l
Il n*y a aucun doute que ces formes correspondent à des nominatifs atteste* j
en latin vulgaire (curtis, mansionis)'. Les pages où il est traité de UJ
conjugaison contiennent des discussions bien intéressantes, par cit. sur lej
subj. prés, en <*/V (3e pers. du sîng.); je me borne à les signaler.
Dans la conclusion , qui forme le dernier chapitre, M. D, examine» non!
point en théorie, mais en f^iit, la question, tant de fois débattue et trop sou-
vent mal comprise» des limites dialectales. Les résultats auxquels ses!
recherches Tont conduit confirment absolument les idées que la Rornania ij
mainte Ibis soutenues, à savoir que les aires sur lesquelles s'étendent Ic$l
divers caractères linguistiques ne coïncident pas; partant, point de limitt
dialeaale : « le nom de dialecte appliqué au dauphinois, comme d'ailleurs il
a n'importe quel parler régional , est un terme de convention ; au point del
« vue iinguistique, il désignerait un être de raison et non une espècel
« réelle (p, 234). » Conclusion tout à fait semblable à celle qui a été justi-
fiée ici môme pour la Normandie et le Ponthieu par M. Gilliéron» XII,
394 et suiv., par M. Phihpon pour le Lyonnais, XX, |o6. Cesl en somnie|
ce que Ton constatera partout. La lecture de ce chapitre ne saurait trop i
recommandée aux philologues qui divisent et subdivisent le roman en lang
dialectes et sous-dialectes '.
M. D. a imprimé à la suite de bon livre divers appendices intéressants :J
I* un glossaire de Tancien dauphinois septentrional (comprenant les non
propres), dont les éléments principaux ont été Ibumis par les textes publié
dans la
première panie de 1 ouvrage; II, un index des mots empruntés  !
littérature dauphinoise (xvi< et xix^ siècle); 10, un index des mots
empruntés directement aux parlers vivants; IV, un index géographique,!
^ o n M. D. a dressé une carte linguistique du Dauphiné septentrional oùj
sont Circonscrites les aires de divers caractères linguistiques.
qu^il^r''^'^ a"" ^' ^^?,"^ ^^^ ^"^^* complet que le permettent les documcotj^
combler"* ^/Jjsposition. Les lacunes qui subsistent ne pourront guère arc
tenant TuT ^' ^" ''^"'''' ^ àécouvrir de nouveaux textes dauphinois appir-
•>omhrcde<.T^''" ^^^' ^^ Devaux, qui a déjà accru par ses recherches le
et personne ,,''*'""'^"*' ^*^ ^^^ ""'^'^^ ^^ra sans doute de nouvelles découvertes.
p. -A. BECKER, Jean Lemaire 6oi
Jean Lemaire. DerersU humanistUche Dichter FrankreichSj von Ph. Aug.
Becker. — Strasbourg, Trùbner, 1892, in-8'», p.
Jean Lemaire de Belges n'est ni un oublié ni un dédaigné. Depuis long-
temps, la critique lui a marqué sa place parmi les précurseurs immédiats de la
Pléiade; tous les Morceaux choisis du xvie siècle contiennent quelques extraits
des Epistres de ramant vert et des Illustrations de Gaule,
U y a quelques années, M. Fr. Thibaut a présenté à la Faculté des Lettres
de Paris une thèse de doctorat intitulée Marguerite d'Autriche et Jehan Lemaire
de Belges y ou De la littérature et des arts aux Pays-Bas sous Marguerite d'Autriche.
(Paris, 1888.) — Le défaut essentiel de ce livre, — trop sévèrement jugé,
toutefois par quelques critiques, — apparaît dans son titre môme. Ce sont en
réalité deux études successives, dont le lien est très artificiel. Marguerite
morte et enterrée, M. Thibaut s'attache au seul Lemaire, déjà entrevu, et il
n'est plus question de Marguerite. Cependant nous avons à partir du cha-
pitre V une étude, sinon complète et approfondie, au moins suffisante pour
qui voudrait prendre du sujet une connaissance générale et quelque peu
superficielle. Le meilleur chapitre est le sixième : Lemaire historien ; c'est une
assez bonne introduction à la lecture des Illustrations de Gaule. Quant à
Lemaire poète, M. Thibaut lui consacre des pages sympathiques et banales,
où l'on retrouve avec ennui ce qui traîne depuis de nombreuses années dans
les notices de Morceaux cltoisis. Conclure par le jugement de Pasquier, c'est se
dispenser de conclure ; on termine ainsi une Leçon, non une étude critique.
M. Becker, sans avoir à tenter une réhabilitation, pouvait donc écrire un
livre nouveau sur Jean Lemaire. Il a su profiter des travaux de ses devanciers
auxquels il rend justice, et dont il relève et corrige les erreurs.
Dans une courte préface, il s'attache à faire ressortir l'importance et l'in-
térêt de l'époque où Lemaire a vécu, et la signification toute particulière de
Lemaire lui-môme au milieu des poètes de son temps. « Par sa vie, ses
mœurs, ses essais, il est au centre du mouvement... Dans sa sphère restreinte,
il nous donne une image des aspirations et des tentatives de tout genre de
ses contemporains. » — « Mon désir, dit M. B. en concluant, n'est pas seu-
lement de prouver que Lemaire fut vraiment un poète d'où l'on pourrait
extraire une anthologie de passages remarquables, qu'il a devancé son siècle
et montré le chemin aux écrivains de la Renaissance ; — je voudrais aussi
faire voir en Lemaire une personnalité qui, en dépit de la fuite du temps, reste
à nos yeux vivante et significative, et mérite toute notre sympathie. »
Le plan suivi par M B. surprend un peu au premier abord. En effet, le
critique mène parallèlement la biographie de Lemaire et l'analyse raisonnée
de ses ouvrages. Il en résulte, çà et là, quelques inconvénients : c'est ainsi
que le i^^^ livre des Illustrations est analysé au chapitre IX, et qu'il faut
attendre aux chapitres XV et XVI l'analyse des deux livres suivants. On eût
préféré une étude d'ensemble sur un ouvrage de cette importance. — Mais,
Rfffnama. XXII 39
é02
COMPTES REXDUS
ca y regardant de près, cette méthode était vraiment la meilleure pour nous
faire apprécier exactement le mérite propre de Lemaire.
Qp'a-t-il écrit, ea effet, sinon des ceuvres de drconstance, inspirées par
SCS tonctions, par le désir de pkire â ses protecteurs successifs ? — Corameiit
les a-t-il écrites, sinon sous des influences direaes et sans cesse renouvelées?
— Et comment faire ressortir le progrès continuel d'un poète d^abord fidèle
disciple de Molinet, enfin rival et presque émule de Marot, sinon en reconsti-
tuant presque au jour le jour moins Thistoire de ses ouvrages que cdic de
son talent ? — C'est ce que M. B. a fait, très bien fait, d'tine manière vrai-
ment définitive. Et l'on ne saurait trop louer Te^aaitude et la sûreté des
analyses à la fois historiques» morales et littéraires qui remplissent ses dix-
huit premiers chapitres.
«Mais il semble que M. B. aurait dù^ par sa méthode même, et par les rai-
sons quMl avait eues de la choisir, se sentir averti de la v^riuble originalité
de son poète ; il se serait ainsi gardé des exagérations de ses derniers chapitres,
dans 1csl|uc1s il attribue à. Lemaire, un peu péle-méle, tomes les qualités d'un
écrivain de génie. Sans doute^ Lemaire n'est pas un auteur tk second ordre „
c*cst un poète de transi lion ^ â qui il n'a peut-être manqué que de naître cin-
quante ans plus tard pour égaler Ronsard sur qui il l'emporte du moins par
le goût. Dévoué à la tâche ingrate de précurseur, poite-ouvritr trop occupé de
préparer à ses successeurs un instrument plus parfait, il est aussi supérieur k
un écrivain stamdaite que Malherbe Test à Jean-Baptiste Rousseau. Si donc
M- B, veut lui assurer une place prépondérante parmi les prédécesseurs et les
inspirateurs de la Pléiade, s'il pense qu'on ne saurait trop le compajrer à son
temps ni démêler avec trop de scrupule et d'exactitude ce qui chez lui appar-
tient encore au moyen âge ou annonce déjà la pleine renaissance, il a raison ;
et qu'il ait rempli cette tache avec patience, avec érudition, avec amour,
nous ne nous en plaindrons pas. Mais si le critique s'est flatté d^ajouter
quelque chose i la renommée alnohu de son poète, de lui assurer une plus
large place dans les anthologies destinées aux amateurs ou aux écoUcrs, et de
lui attirer des lecteurs plus nombreux et plus épris, W s'est vraiment fait illu-
sion, Jean Lemaire doit tenir une place importante dans l'histoire littéraire :
la littérature peut le négliger. Cest dommage. M. B, nous fait déji caresser
des yeux et presque toucher de la main un joli petit volume qui serait ilhis-
tréy et qui comprendrait les Amours de Paris et d'Œtwnf, les Epistra de fumant
xtert, îa Concorde des deux kftgai^es, et les deux contes de Cupido et d*Atropos
Encore cette espérance d'une anthologie est-elle légitime cher un critique
qui préparc une nouvelle édition âtis oeuvres complètes, Mais iM. B. force
trop la note dans ses chapitres XIX, XX et XKl, où il examine le caractère,
le talent, Tinfluence et le style de Lemaire. Un écrivain dont les poèmes ne
peuvent être utitcment étudiés que rattachés aux circonstances mômes de leur
apparition, dont chaque vers perdrait une partie de sa valeur s'il n'était exac-
tement reporté i sa date dans l'histoire Uttéraire et dans la vie même de l'au-
teur, un poète, je le répète, auquel M. B, a appUqué cette méthode d'analyse,
P.-A. BECKER, Jean Lemaire 603
et avec raison, peut-il mériter d'aussi pompeux éloges ? Aucune quaKté, natu-
relle ou acquise, n*a manqué à Lemaire, si Ton s'en rapporte à son nouveau
biographe : « Lemaire a le souffle lyrique... l'élan de l'enthousiasme... il
nous emporte avec lui dans le pays de la fantaisie... Il a trouvé des traits
d'une beauté impérissable... L'inspiration vivifie sa langue : elle lui inspire
des traits d'une véritable poésie, qui nous ouvrent un nouvel horizon et qui
brillent comme un rayon de soleil parmi les nuages... A de pareilles hau-
teurs, il sait se soutenir comme un oiseau qui plane et se balance sans
craindre de chute... » M. B. veut bien reconnaître cependant que Lemaire n'est
pas l'égal de Ronsard, « ce jeune aigle qui vole sur les traces de Pindare dans
les hauteurs de l'espace... Il s'est tenu modestement dans des régions plus
basses, sur les prés fleuris où Catulle se promène quand il chante le moineau
de Lesbie. » La poésie ne manque pas au style de M. B. ; c'est une perpé-
tuelle création d'images et de métaphores. L'abus ne s'en fait vraiment sentir
que dans ces derniers chapitres, où l'auteur se laisse aller, avec trop de com-
plaisance, et à son enthousiasme exagéré pour Lemaire, et à la facilité exu-
bérante de son imagination. Mais ce style coloré, cette chaleur d'admira-
tion qui circule incessamment sous les pages les plus techniques, donnent aux
analyses et aux critiques de M. B. un intérêt tout particulier. Il est presque
à regretter que M. B., connaissant bien notre langue, ait écrit son livre en
allemand. Les lecteurs français eussent pris grand plaisir à le lire; c'eût été
pour eux un sérieux, avantage que l'étude d'un ouvrage où le fond est si riche
et si solide, et la forme si séduisante. Il eût seulement été à craindre qu'en
passant de la prose de M. Becker aux vers de Jean Lemaire ils n'eussent
éprouvé une déception dont ib auraient peut-être gardé rancune au poète
de Marguerite d'Autriche.
Du moins, les érudits et les critiques ne pourront se dispenser de le con-
sulter, et tout en faisant leurs réserves sur le mérite absolu de Jean Lemaire,
ils jugeront avec nous que M. B. vient d'écrire d'une manière aussi définitive
que possible un des plus intéressants chapitres de l'histoire de la littérature
française au xvic siècle.
Ch.-M. des Granges.
PÉRIODIQUES
L — Zeitschrift fur ROMANISCRE PHILOLOGIB, XVII, 1-2, — P, I, E,
Gessner, Das spanische Bfrsonalpronomm. [Travail consciencieux, très méri-
toire » mais lia peu dmeitig^ comme tous ceux de Tauteur^ sur les (ormes et
la syntaxe du pronom personnel castillan» M, Gcisner prétend tout tirer de
son fonds et ne s^occupe pas de ce qui a pu être fait par d'auires sur le sujet
qu*il traite. Est-ce ignorance ou dédain? Le dédain serait bien peu juslihé
quand on songe à des livres tels que le Dictwntmrc de Guervo, où tant de
questions abordées par M. Gessner^ notamment celledu Jasme-histm^ qui jadis
fit verser des flots d'encre, ont été traîté<^ d'une façon tout i fait supérieure
et définitive. Le choix des textes, en outre, mis à profit par Gessner prête A
la critique : il est loin de présenter toutes les faces du génie littéraire espa-
gnoL — A» M. -F.], — P. 55, Schiavo, Fedf t supersH^ione neW antica potsia
francest. Fin de ce long et médiocre travail ; dans ce dernier article» non moins
incomplet et insuffisant que les autres, le lecteur est, en outre, rebuté par le
nombre extraordmaire des fautes d'irapre^ion. L'idée de voir dans la Court di
paradis une satire des dogmes chrétiens est bien peu raisonnable, — P, U5» E
Dias, Einige Bemerkufigm ^ur Vcrbeaermtg da Cancioneiro ^iràl von Reunàt,
Nombreuses et utiles corrections. — P. 1J7, Miguel de Unamuno, Ddtit-
tmntù alienigaia en tl idiûtna vasco. [Observations intéressantes et qui dénotent
un esprit sain sur les mots empruntés par le basque au castillan, Chcimn
faisant, Fauteur nous révèle certains procédés de f^if«!Îa//a« de mots basques dus
aux champions de l'euskarisme; il ne paraît pas priser beaucoup la ci%*iltsa-
tion euskarienne et se méfie des bascophiles. Cependant il est basque. Il va se
faire lapider. — A. M -F,] — P. 148, Forsyth Major, Italiânisché Ftêlgarna-
mm der Fltdermaus. Recueil d^une richesse et d'une variété surprenaoto des
noms donnés à la chauve-souris dans toutes les parties de lltalic ; les expli-
cations de Fauteur montrent beaucoup de savoir et de jugement, et il réussit
à ramener à leur étymologie des formes extraordinairement défigurées. —
P. 160 es Horning, Utber Diahkt^reniett im Romnnnchen, Dans cette très
intéressante étude, M. H. résume avec beaucoup de dané le débat qui s'i»t
élevé entre les romanistes depuis le mémorable article de P. Meycr sur k
franco-provençal et la question des dialectes et de leur limite; il oppose h
r. Par saîtc d*uti icclAtm quclcoûquc. entre les piges 16a et ï6i sont fittercaléti
quatre pages numéngiécs 160 a, b, ç, d.
pèRIODIQUES 605
Popinion de Mcyer. que j'ai adoptOc ainsi que MM. Giltiéron, Schuchardt,
Gauchit et la plupart des philologues, des objections diverses, toutes réfléchies
et dignes d'attention. Il y en a deux principales, Tune de théorie, Tautrc de
fait. L'objection théorique est empruntée à M. Grôber r la question des
dialeaes se pose en roman , et notamment en gallo-roman , autrement que
dans d'autres domaines ; en effet ^ le htin ne s'est pas épandu sur fa Gaule
(ne parlons ici que de b Gaule) comme une onde qui submerge également
une plaine ; il a rayonné de di6férents centres dans un pays peu peuplé, où
des forêts énormes, des nurais, des espaces inhabités séparaient et séparèrent
longtemps les territoires successivement conquis par le langage étranger
d*abord introduit dans chacun de cgs centres, et gagnant peu à peu alentour;
il a donc pu et dû se former des variétés diverses^ qui, en s'étendant, se sont
rencontrées et sont devenues des dialectes limitrophes après avoir été des
dialectes isolés. Uobjection de fait est tirée en grande partie des observations
de M. H. lui-même, si profond connaisseur des parlers de l'est de la France;
en plus d*un endroit, il a trouvé des limites linguistiques assez nettes entre
des territoires voisins; des faits du même genre ont été constatés pour la
Lorraine par M. J. Passy, par MM. de Tourtoulon et J. Simon pour 1 extrême
Sud- Est et le Nord-Est; on a également pu tracer exactement la limite du pro-
vençal et du catalan ; au Sud-Ouest, P. Meyer lui-même a reconnu des limites
au domaine de la langue d'oc et à celui de la langue d*oui. Cette objection ne
inc parait pas peser d'un grand poids dans la balance; en effet, d'une part,
plusieurs de ces constatations semblent fort douteuses (et M. H. en convient
lui-même avec impartialité); d'autre part. P. Meyer et ses adhérents ont
toujours reconnu que, sans parler des limites naturelles produites par des
séparations matérielles, îl y avait eu des extensions de variétés dialectales ducs
i des causes historiques et amenant des parlers autrefois divers à une unité
plus ou moins complète et, par suite, des parlers autrefois éloignés l'un de
l'autre à être voisins, mais nettement séparés. Nous avons opposé ce fait que
nous qualifions à'hntoriqne au développement natureî 60% parlers» qui ne pro-
duit pas entre parlers variés de séparation tranchée atteignant un ensemble
de traits linguistiques. M, Hornîng n'admet pas cette idée du développement
tf naturel 1», et remontre à ceux qui la soutiennent que l'évolution du langage
n*cst pas un fait naturel, mais un fait social» Je suis tout à fait de cet avis, et
je t'ai dit plus d'une fois, et k une époque même où la théories naturaliste »
régnait dans la science, et où Schïeichcr voulait comparer rigoureusement
révolution des langages à celîe des espèces (voy, Rnmt Critique, 1868, t. II,
p. 2421 Jounut! des Savants, 1887, p. 66). Mais ici il s'agissait simplement de
distinguer les faits qui appaniennent au développement d'un langage Hvré i
lui-même de ceux qui tiennent â des causes historiques : le développement
du celtique en Gaule est un fait du premier ordre, l'implantation du ïatin en
Gaule un fait du second ; le développement d'un parler local est un fait du
premier ordre, la substitution d'un autre parier ou du francs d'école à ce
parler un fait du second; îl est évidemment nécessaire de disiingtier soigneu-
6o6 pèRioDiauEs
sèment les faits des deux ordres (quils soient mêlés dans Thistoire de presque
tous les parlers, ce n'est pas contestable, maïs cela n'cnipôchc pas leur profotidc
diversité originaire). Il nous est donc facile de répondre, et il nous parait évi-
dent que, partout où Ton trouve entre des parkrs gallo-romans une limite
réelle, cela tient à des causes historiques et relativement récetîtes. Reste la
théorie de M. Grôher, qui est assurément ingénieuse et profonde; mais rien
ne vient la confirmer en fait. Si elle était vraie» les différences dialectales
seraient d'autant plus tranchées qu'on se rapprocherait plus de Fonginc :
prenons un parler roman qui, s'étant formé A Reims, rayonne peu il peu tout
alentour, et un autre qui en fasse autant en partant de Paris ; Us finiront par
se rencontrer, mettons entre Meaux et Soissons : il est clair que dans Ls pho*
nétique et la morphologie chacun d*eux aura développé certains traits par*
ticuliers qui les mettaient en vive opposition A Toriginc^ mais que le com-
merce entre les régions limitrophes pourra peu A peu rapprocher. Or c'est
tout le contraire qu*on observe. Plus on remonte le cours des siècles, plus on
constate d'uniformité dans le développement du latin en Gaule sur uïï terri-
toire de plus en plus vaste : les ultiémes, par exemple, tombent dans la Gtulc
entière, et dans la Gaule entière les cas se réduisent à deux ; puis de grands
faits sont encore communs à des zones immenses, comme le changement à* a
tonique en é, de k en tSy h diphtongaison dV fermé e,n a, la chute de l*j sonore,
puis de Vs sourde devant consonne, etc. Cela indique un contact permanent
entre les différents parle rs et non l'élaboration séparée du gallo-roman dans
un certain nombre de foyers distincts. Mais l'examen de ces faits, qui forment
la trame même de l'histoire du gallo-roman, ne saurait être abordé id; îl
nous conduirait à traiter les questions les plus difficiles de la linguistique.
Bornons-nous à répéter que les faits linguistiques ne donnent point raison i
la conception de M. Grôber, que les faits historiques beaucoup trop mal ooo-
nus ne sauraient non plus justifier* : l'histoire linguistique nous montre bien
par toute la Gaule une masse d'abord i peu près identique et se différenciant
de plus en plus. La formation d'une langue d'oc au Sud, d'une langue d'oui
au Nord, pour prendre le cas le plus saillant, ne s'expliquerait par aucune
raison historique (c'est ce que j'aî voulu dire en parlant d^ points « absolu-
ment fortuits Ht par lesquels passerait la prétendue ligne de démarcation);
M, H. s'efforce d'imaginer celles qui ont pu exister, et remarque d'ailicun
justement, avec M, de Tounoulon, qu'il ne serait pas scientifique de nier un
fait parce qu'on ne peut l'expliquer; nmis si le fait existait réellement, il est
clair qu'on l'accepterait, quitte à en ignorer ou à en chercher les causes; seu-
lement il est loisible de faire remarquer qu'au manque de preuves de son exis-
I, Pl<eDotis «û eiemple que M. H. i die h Tapput de » thèse : • Le Perche, dit
A. Lf Prévost, n'éuit qu*«nc forêt avant l'invasion normande. Au Perche appartcnjùcnt
Im aép4ftemcnts actuels de KOruc, Eure-et-Lotr , Sarthc , Loir-cl^Chcr. • Or. non
•tulcment le Perche comptait d'importantes villes, comme Chartres , qui n'ont ]*tmi%
«••aé J'êtnî popitleu»c*, mais si ou examine les noms de l'ttax habités qu'il renferme,
on voit que le plu» gnmd nombre remonte 1 répoqtic romainç.
lÉ
PÈRIODiaUES 607
tence vient s'ajouter son improbabilité. La grande argumentation de M H.
porte sur ce qu'il faut entendre par a limite dialectale » ; il nous reproche de
nous représenter cette limite comme une ligne mathématique, et de prétendre
qu'elle n'existe pas parce que nous ne la rencontrons pas sous cette forme ; à
cette idée abstraite et fausse il faut, d'après lui, substituer l'idée d'une zone-
limite, d'un genre intermédiaire; il aperçoit bien l'objection qui se présente
immédiatement, et il annonce qu'il la détruira, mais je ne vois nulle part
qu'il le fasse. Cette objection est celle-ci : on constitue la langue d'oc et la
langue d'oui (pour conserver cet exemple particulièrement frappant), l'une au
Sud, l'antre au Nord, et entre les deux on admet une bande intermédiaire qui
n'est ni d'oc ni d'oui, ou qui est d'oc par certains traits, d'oui par d'autres ; je
dis que c'est un procédé arbitraire (résultant de l'idée préconçue qu'il y a une
langue d'oc et une langue d'oui), et que si on découpait la France du Sud au
Nord en autant de bandes égales à celles dont on a fait la zone intermédiaire,
on trouverait toujours (sauf aux extrémités) un égal mélange dans chaque
bande des éléments des deux bandes contiguës(je prie le leaeur d'excuser la
grossièreté d'un pareil schématisme ; je n'ai pas besoin de dire que je ne m'en
sers que comme d'un procédé abréviatif). En résumé, la position que prend
dans la discussion en question un savant de la valeur et de la circonspection
de M. Homingest assurément un fait important, et plusieurs de ses remarques
méritent d'être prises en sérieuse considération ; mais je ne puis trouver qu'il ait
réussi à ébranler une théorie qui me paraît toujours absolument simple,
conforme à la nature des choses telle que nous pouvons la concevoir, et con-
firmée par la plupart des observations qui ont été faites avec la rigueur et
l'absence de parti pris désirables. Lui-même, évidemment, il n'est pas bien
sûr de ce qu'il pense au fond ; il n'avance ses idées qu'avec beaucoup de pru-
dence et m^me d'hésitation ; après avoir essayé d'établir par divers exemples
qu'il existe bien réellement des limites dialectales, il avoue qu'il n'ose pas se
prononcer sur l'existence même des dialectes ; après avoir exposé la théorie
de l'expansion du latin par le rayonnement de foyers distincts, il n'essaie pas
de chercher dans les faits la confirmation de cette théorie ; après avoir répété
que les traits dont la réunion peut constituer un groupe dialectal doivent non
se compter, mais se peser (ce qui est juste), il ne nous dit nulle part et ne
nous fait comprendre par aucun exemple à quels traits on peut reconnaître
un de ces groupes, etc. Son travail est fort intéressant et donne beaucoup à
penser sur beaucoup de points ; il pourra être fécond en ce qu'il excitera des
travailleurs, par des études de plus en plus méthodiques et minutieuses, à
contrôler sur les faits la justesse des idées vers lesquelles il incline ou de celles
qu'il critique. La science ressemble au champ de la fable : pour fouiller avec
ardeur et persévérance, il faut être encouragé par l'espoir d'un trésor caché;
le trésor ne se trouvera peut-être pas, mais le champ sera labouré et portera de
riches moissons. C'est l'exemple que nous a déjà donné M. H. dans plusieurs
de ses excellents travaux, et que d'autres, espérons-le, suivront avec zèle :
« Travaillez, prenez de la peine; c'est le fonds qui manque le moins. » —
éo8 pèRioDiauEs
P, i88, R. Lenz, Biitràge xur Kennlnh des Americospanischm. [Très impor-
tantes recherches d'un excellent phonéticien sur le développement de l'espa-
gnol parlé dans rAméfique du Sud, et sur rinflucnce que b langue iraucanç
a exercée et exerce encore sur l'espagnol chilien. Au début de son article,
M, Lenz déclare que les renseignements qu'on peut rccueîïlir sur rorigine
des conqtmiadora et des colons espagnols ne permettent pas de rattacher les
variétés hispano-américaines à telle ou telle variété de castillan parlé en
Espagne au xvi* siècle. En terminant , au contraire, U se range i l'opiaion
d'un historien américain, Diego Barros Arana, suivant laquelle le plus grand
nombre des conquistadores auraient été originaires d^Estremadure, et auraient
implanté en Amérique leur castillan tslrentefio^ d'où serait sorti le chilien
actuel. Je ne connais pas les arguments de Barres Arana, mais qiioiqu*il
convienne sans doute d'admettre que Pizarrc , par exemple, ait amené avec
lui plutôt des gens de sa province et que ceux-là en aient appelé d'autres, il
ne s*en suit pas que la prépondérance de Télément estremtuo dons b colonisa-
tion de l'Amérique du Sud et du Chili en particulier soit un fait acquis. Beau-
coup d*auires Espagnols de toutes hs provinces de la monarchie partidpèreol
à Texode et vinrent grossir le premier noyau; nous savons» notamment»
qu'un nombre considérable de monlahaa, d*Astu riens et de Basques s*cxpa-
trièrent par Séville au xvi« et au xvnc siècle. Or* retrouver aujourd'hui dacs
tout ce mélange des traits propres à telle variété castillane du xvj< siècle
(quand d'ailleurs on ne sait que très imparikitement la prononciation da
castillan de cette époque) me semble épineux. La partie la plus importante
du travail de M. Lenz est son essai de phonétique araucane. Les documents
sur lesqueb il a opéré ne sont pas tous très sûrs , et il reste , naïunrllemcnt ,
bien é^ points douteux touchant l'action que cette langue indienne peut avoir
eue sur la langue blanche. Toutefois, le premier pas est Éait. M. Lenz ne
compte guère sur les H ispano- Américains pour lui venir en aide, et nous n*y
comptons pas non plus \ mais nous comptons sur lui * qui est parfaîtement
préparé i accomplir la belle tâche qu'il s'est tracée dans ce domaine à peu
près vierge. —A. M.-F.J — p. 215, Link,i> roman â'Ahîadam.On n'a de ce
roman en prose que le début (M. L. paraît ne s'en être pas aperçu , m^is cf,
notamment p, 229, L î6, ftmiwif U îivrt dttmst cy affres}, et encore imparfaite-
ment conscr\'é. Du Gange l'avait fait copier sur un manuscrit perdu» et sur
cette copie en ont été exécutées pour D. Grenier* trois autr», aQ}0iirdlittt
conservées X Amiens, Paris et Munich, dont chacune ajoute des fautes i
celles de la première. M. Link pubUe ce début d'après les trois cognes : il atiraii
pu souvent mieux corriger le texte qui résulte de leur comparaison (pour
ncn citer que quelques exemples 220,4 ^mcuriUir qu^il rcmpbcc par
acr^nirtf^X fort bon; 221,18 L Sîngrtfmmc4\ 224,16 frumii 229.2 mmui
^lUK^ffmi ajs.ia soul^iii 252,20 traiHurs: «j,i deux copies doanettl
t. M. L
*'obstiiie k écrire Grtm»er^ fciuiç <|uc
nous tvoos dé|a fdeniée.
PÈRIODiaUES 609
prime y la Xrovàkm^ prince \ M. L. lit priwe, qu'il comprend sans doute). La
perte du reste du roman et le mauvais état de ce que nous en avons sont peu
regrettables : c'est une très pauvre fiction, imitée (comme l'a reconnu M. L.)
du Bustalus tournaisien, qui prétend raconter les origines antiques de la ville
d'Amiens , laquelle se serait appelée d'abord Abladane, puis Somme-Noble,
puis Amiens (le fragment s'arrête après la destruction d' Abladane et avant
qu'on la reconstruise sous le nom de Somme-Noble comme l'annonce le pro-
logue). L'histoire la plus grossièrement défigurée, la magie la plus banale,
les inventions les plus froides font les frais du récit , d'ailleurs aussi sec et
plat que possible. Le prologue assure que le conte a été traduit du latin par
un disciple de Richard de Fournival (f 1260), d'après un manuscrit qui
aurait été brûlé dans l'incendie de l'Hôtel de Ville d'Amiens en 1258; il a
donc été en tout cas écrit après 1260, sans doute vers 1280; l'existence de
l'original latin est très douteuse. Il n'y a dans ce fatras qu'un trait intéressant;
malheureusement il se trouve après une lacune qui le rend peu clair : car en
reprouvier aient cil d'AbbeviUe (c'est la leçon de deux copies , et la bonne ;
M. L. adopte à tort la leçon de la 3c, MonstrceuJ, amenée par la mention de
cette ville dans le récit deux lignes plus bas) a cetts (T Amiens : aies caroler
(les copies ont dés caroles, M. L. als caroles), quant cil d'Amiens leur dient qu'il
voient le sang obeuerQ). Il y a là un échange de dictons injurieux entre les
deux villes : l'auteur explique à sa façon l'origine de celui qui concerne
Amiens; l'autre est obscur. Notons que l'auteur a emprunté son Aftican, qui
Jist maint droit et plusieurs lois qui encore sont tenues au jurisconsulte Africanus.
Ce n'est pas lui, comme le dit M. L., qui a prêté à Virgile la construction
d'une image (ou d'un palais) qui devait s'écrouler « quand une vierge enfan-
terait ». — P. 232, Zenker, Das Lai de l'épine. Edition de ce petit poème, que
Roquefort a imprimé d'après un ms. très altéré, d'après les deux mss. qui
l'ont conservé. V. i je lirais les laySy pour le sens et la mesure. — 24-25 la
leçon de B est meilleure. — jo je lirais Paage pour V entente, en rattachant ce
vers au précédent. — 36 le mot iemble , dont l'éditeur ne sait que faire, est
bien connu : jernble, gemhle signifie « jeune » ; le vers suivant reste très diffi-
cile à restituer. — 46 je lirais Si failli Vefifantil amor, H (avec i non élidé
devant voyelle) comme nom. sg. fém. de l'article étant picard et non
normand. — ^2 Et. — ^6 joinst (B). — 63 La leçon de A De si bien lor amor
garder est plus claire que celle de B, et M. Z. traduit en note cette leçon
même, qu'il déclare ne pas comprendre. — 68 ert. — 87-8 tels que l'éditeur
les imprime et les ponctue, n'ont pas de sens; 1. Cent Jei^ le baise par amor;
SHl i sont trop c'iert grant folor. — loi fl quelque painne. — 104 destrei^. —
119 qwl la ferai} — 126 Et la reine. — 175-6 Lisez /^ et Aeli^j d'après la
phonétique normande. — 194 Qui. — 251 parlot. M. Z. a raison de préférer
le freor de B au paor d'A, mais il explique bizarrement freor par « froid » ;
ce mot (lat. fragorem) veut dire « bruit ». — 276 Se es chose qui parler deies
(ce terme de clx)se appliqué à un être qu'on soupçonne d'être surnaturel est
très fréquent). — 295 Qui. — 326 maumetre. — 341 tros (A) et non trons.
6tO l'LKlODlnLfuS
— J64 ('aimcnns micax soi (B) qot hr (A). — 567 pasunt (B) ; tout œ pas-
sage a K*mblé obscur â M. Z, » mais cette leçon cd enlève une 4es diffiotliès;
Tautrc qui Ta frappé mV^chappe. — 418 1. Ja mm- et bod /amt fféikw»
verriit-il là une forme de Jamm ?). — 416 Et pu c*tst vdr, — 4S8 hJë^B
Lt\ 1. Z.d« Je ne relève pas un certain nombre de ponctuatiotis contestables m
de fautes d'impression ; Tédition est d'ailleurs Êiite avec som. Dans la préûoe^
M. Z, traite de la langue du poérae, qui est certainement nortuande. Le seul
point à discuter est la rime des v. 241-2, qui dans A est nhûiUi prié (prcco),
dans B dfshaitià (L rehaUiés) pitiés. La leçon de B est certainement refaite ; celle
d*A indiquerait une rime de jV = ^ -(- ; avec i^ ^= ti qui assignerait le poemc
à Toucst du domaine normand (quant i lire rehaUic prir, qui donnerait une
rime piciirdc, c'est impossible de toutes façons); sans examiner si une telle
rime est possible , je remarquerai que ce qui la rend bien peu probable peut
notre poème, c'est qu'on y trouve H rimant avec chasti (iio); je crois dotjc
préférable de corriger au v. 242 or vos pripé\ la forme fiV, tombée en désuè*
tude âè% \c milieu du xnic s., a souvent été supprimée par les copistes : îcî A
et B ont modifié le texte de deux façons différentes. Cet emploi de it pour
# + / constituait la seule différence grave relevée par M. Z. entre la Ungue
de notre lai et celle des lais de Marie; te taî de VBsptm est-il d'elle? M. Z,
d*accord avec M. Warnke, ne le pense pas, et ils donnent à l'appui de leur
opinion deux raisons qui leur paraissent décisives, l'extrême pauvreté du fond
et une divergence dans Findication des sources. H est vrai que ce petit rédt
est dénué de tout intérêt, mais !c lai du Chaitivd en a-t-il davantage ? Quant
k la source de ses lais, Marie indique la tradition orale ; l'auteur de VBspim
renvoie au contraire à un recueil conservé à Carlion. Mais dans le poème
même l'auteur parle d'une source orale (ji conf&i conter , v, 481), et dans le
prologue it ne prétend pas avoir puisé dans le recueil de Cartion ; il dit scti-
lement que le livre conservé à Saint-Aaron peut lui servir de garant pour la
vérité des aventures qui en sont le sujet (il ajoute, si on adopte La leçon de
B qui me parait la meilleure, que ces liistoires, conntûcs en plusieurs lieux,
iomi €ik$ en Bretagne, c'est-à-dire qu'on les y a aussi par écrit). Ce qui est
remarquable , c'est que l'auteur de notre lai rappelle en débutant qu'il en a
composé beaucoup d'autres : Les aventwreM qu'ai travées (c'est le root même
dont se sert Marie), Qui diwrsfmmi sont c&nieis^ N«s ai pas dit^ smn^ganimt.
Ajoutons que la mention de Cariion convient parCmeroent à Marie, étililk ai
Angleterre. Si l'on jdnt à ces circonsunces l'identité de langtie, de style cf Je
ton, on sera porté, je crob, ;li joindre le lai de VBspim mx lais de Mavie, dcoi
il sera assunfrmetit un des plus faibles. — P. 256, Wese, Zu dm Liedtrm Im-
tnh GmsHiàiÊitis, CoUation ou publication diaprés ks manuscrits die Flopenoc
Cl de Paris de tiombreiises im^ot^Hs^ de Ciustiiiitiil.
MÉLANQtts. L ms»oin tUthmre. P. 276, Arattjo, Vn^im dm ww^ê êm Oâ-
***"• •• Qmd, Cetw note, comme le momreas 1^ tomêtts %aes, qoe
IWur a n^ifii^ de oKMËfier, étitt destinée à k JNmwui; ochis a^m»
H|«tidy au tr^ dfatini^tté lomaniste espagnol <^'éh Doa$
PÈRIODiaUES éll
mériter Timpression. En effet, M. A. veut trouver le nom de l'auteur du
Châtelain de Couci dans les deux mots qui terminent le vers Et mon nom
rimerai ausy : il y lit Rémi Avresy, ce qui est une erreur de fait, Rémi Avresy
ayant dix lettres et rimerai ausy onze (M. Grôber dit qu'on pourrait aussi bien
lire Aimeri Saury, — ou Savary Miriéy ou Marie Varisy^ ou bien d'autres
choses). Mais il ne considère pas que non seulement (comme le dit
M. GrôbQT) Jakemes Sakesep « s'obtient sans effort », mais qu'il est impossible
que ces quatorze lettres se trouvent par hasard commencer dans cet ordre
les quatorze vers qui suivent le passage où le poète annonce qu'il va se nom-
mer, et qu'en outre ces quatorze vers ont le tour contraint qui indique la gêne
imposée par l'acrostiche. Quant à l'expression mon nom rimeray^ à laquelle
M. A. attache beaucoup d'importance, elle signifie seulement que le poète
fera, par un engen , entrer son nom dans ses vers. Le nom de Sakesep^ il est
vrai , paraît étrange , mais il a des congénères ; à la rigueur on pourrait ne
prendre que les douze premiers vers du passage et lire Sàkès (ou Makès si on
adopte la leçon du ms. Ashburnham) : Saquet et Maqmt sont des noms de
famille encore répandus. — II. Textes, i. P. 279, Stimming, Anglo-norman-
nische Version von Eduards I Statutum de viris religiosis ; fragment- publié en
regard du texte latin (1279), ^^^^ grand intérêt. — 2. P. 282, Suchier, Les
quinze joies Nostre Dame. Édition , d'après un ms. possédé par un particulier
(avec collation de deux imprimés), de cette oraison du xv* siècle, et des Sept
requestes a nostre seigneur qui la suivent. — III. Grammaire. P. 285, Kalepky,
Ztim sog. historischen Infinitiv im Franiôsischeti. Discussion un peu subtile, mais
qui paraît judicieuse, de l'opinion de M. A. Schulze sur la valeur actuelle de
de dans les phrases comme : « Et les enfants de rire, » etc. — IV. Histoire
des mots. P. 288, Marchot, Solution de la question du suffixe -arius. J'aurai
l'occasion de discuter prochainement à fond cette question, et d'examiner
la théorie de M. Marchot, qu'il publie sous un titre qui pourra sembler un
peu ambitieux.» Le mérite de sa note est surtout de rappeler l'attention sur les
très intéressantes formes sorcerus et paner dans les Gloses de Reichenau.
Comptes rendus. P. 293, De Gregorio, Capitoli délia prima compagnia di
disciplina di S. Nicole in Palermo (Schneegans : examen rapide de cette édi-
tion, de la critique de M. Fôrster et de la réponse de l'éditeur). — P. 295 ,
Bûttner, Studien ^u dem Roman de Renart und don Reinhart Fuchs (Fôrster :
travail rendu inutile par les études de M. Voretzsch. M. F., qui ne connaissait
pas encore le livre de L. Sudre, insiste en terminant sur l'origine germa-
nique (îirdeutsch) des poèmes de Renard ; j'aurai prochainement l'occasion de
revenir sur cette question). — P. 298, Doutrepont, Étude linguistique sur
Jacques de Hemricourt, Tableau et théorie de la conjugaison dans le wallon
(Homing : remarques importantes, notamment celle qui concerne la diphton-
gaison de e, 0 entravés, même à l'atone). — P. 300, de Mugica, DiaJectos
castellanos montants, viicaino, aragonés. Primera parte : Fonetica (Vigon :
[compte rendu assez insignifiant d'un livre qui est plus mauvais encore, s'il se
peut, que la Gram^ticd dçl castellano antiguo du mêmç auteur \ aussi ^von$-
^12 PÈRlODiaUES
nous jugé inutile d*en parler â nos lecteurs], — A* M.-F.] — P. JOJ*. Lc^»
PKK'en^aUsdxs Supplément- fVôrtfrbttch, I (Toblcr : précieuses remarques recti-
ficatives et complémentaires), — P, îo6» Novati , Nouvelîts rwchefchn Wf k
roman dt Florimcnt (Risop : M, R,, qui prépare depuis de longues années une
édition de Fîanmont , annonce une prochaine réfutation de l'étude de
F. Novati ; mais Tadhésion donnée par moi â une partie de cette étude l'a
décidé â répondre tout de suite sur quelques points. Il est regretuble qu'il
persiste à regarder k choix comme libre entre Sûr A$dgji£ a ClMstilhn et Lûrt
a sefour a Oxisiiîîon , étant trop évident que la seconde leçon est une altéra-
tion de Tautre et que Tinverse ne saurait être vrai (ce qui entraine nécessai-
rement la préférence à donner à Lwftois sur Laonois). Sur la nécessité de la
forme Romanadapîe au contraire (et non RomanJapl/)^ M» R. a pleinement rai-
son. La question du nom de Juliana ^ Afîa[i\lm reste indécise. M, R.
apporte à sa réponse une bonc d'irritation qu*on ne s*explique pas bien. —
P. 3îi, Jeanroy, Les origims de la poèsk lyrique Jrançam (Grôber : simple
annonce, rendant pleine justice aux grands mérites du livre, en attendant k
compte rendu détaillé auquel M. Grôber « se considère comme obligé »). —
P* J15. Bellorini, Note sulk traduiiotii italiane deïï Ars amatoria t dei Rtmêài^
amoris d'Ovidio. — P, jij, Rmnania^ avril -juillet-octobre 1S92 (M* Toblcr
fait quelques menues correaions à T édition à'Estfjcr^ doute de mon explica-
tion de sontcs^ estes par Tinfluence dVjm^i parce (\\x*esmes n*csi pas attesté en
français; mais il oublie csmes Ama Alexis ^ v. 616, sans compter que Vismis de
la Passion et de Boèce, Vesmos lyonnais ratlesieni en gallo-roman), cite de
nombreux exemples de hrief en a, fr, au sens d'écrit qu'on porte sur soi
comme talisman (à propos de la note de P. Meyer dans le BttJL de la 5tV* des
anc, textes, 1891, 2); — M. Mcyer-Lùbke approuve Tétymologie à*aiii don-
née par A, Thomas, remarque (ce qui m'avait échappé) qu'il avait déjà donné
Tétymologie de mastin (Kôrting, Anhatïg 5074), tire antenois d^annotinum
mais un peu autrement que moi (j'aurai occasion de revenir sur ce point) ; —
M, Horning présente des remarques dignes d'attention sur la terminaison -à
des i^w pçrs, pL en lorrain ; — M. Grôber, montrant que îongatgne a le sens
d* <t excrément )> plus souvent que je ne Tai dit (ce que confirme A, Tobler).
et, apportant d'autres raisons, ne se déclare pas convaincu par mon étNinolo-
gie). — P. 321, GiornaU stôrico deîla leiteratura italiatia, XVlll, 5 ; XIX, i
(Wiese : à noter principalement les remarques sur la première partie de Tim-
portante étude d'A, Cesareo sur la chronologie des poésies de Pétrarque).
G. P,
II. — RomanischeForschungen, M. (1891). — P. t, Manitius, Lateiniuhe
Gedichu ans Cod. Dresd. A 167-; pièces pieuses; la troisième ci dernière
racome un combat allégorique entre Fuscus de Jéncho et DL^ôphiUis de Jéru-
** '^l ?"* <^oinprend ce que cela veut dire. Cesi une pièce à joindre au dos-
sier déjà nche des «c combats des vices et des vertus n. — P. 9, Roth,
PÉRIODIQUES fil 3
Laieiniscbe Ctdkhtc des Xîl'XlV, Jahrhundirh aus Dannstadter Hatuischriften,
Six petites pièces, dont deux assez curieuses (mais sont-elles in édiles?) se
rapportent au débordement de la Seine à Paris en 1296. L'édition nVst pas
exempte de fautes. — P, 17, Rotli, Mittimimigm lur LUeratur des MittelaU
ter aus DarmsladUr Handschri/im, Il y a des choses intéressantes dans ces
descriptions de manuscrits et dans les morceaux publiés (notamment le
poème Pavû où, sous Tallégorie transparente d*oiseaux, sont représentées, dans
un esprit guibelin, les luttes de Frédéric II et de la papauté), mais les textes
sont bien imparfaitement publiés (voy. surtout le premier poème, bien connu
d'ailleurs, qui a pour commencement et fin de chaque distique Fat/a tmrf),
et tout commentaire est absent; des recherches que je ne puis faire ici mon-
treraient d'ailleurs que plusieurs des morceaux donnés ici comme inédits ne
le sont pas V — P* 57, Rohde, La Prise de Cordre^ aît/ran^ôsiîchej f^olht'poi
aus dtr Wende des 12, und 1 }. Jahrbundtrts (première partie d'une introduc-
tion, raisonnable, mais inutilement prolixe dans F élu de linguistique» à
une édition de cette chanson de geste). — P. 89 et 615, Vollmôller,
Laberinto amoroso^ reproduction d'après les deux exemplaires seub con-
nus d'une édition de 1618 (Barcelone) et d'une seconde de 1638 (Sara*
gosse)i d*un canciofterû galant, avec de précieuses notes» — P. 149, Mail,
Zur GtschkhU der Légende vont Pttr^aîorium des hil. Patricîus ; édition» avec
quelques remarques iniroductîvcs, d'un double texte de la relation connue
d'Henri de Sakerey; malhcureusenicni, la suite du travail, où le savant
auteur devait rechercher b date de Touvrage et le rapport exaa du poème de
Marie de France avec les diverses rédactions qu'on en possède du texte
latin, n'a point paru, — P. 198, Roth, Mitt}>eilungen aus altJraniosisch(ft^
itaiienischen uttJ sfHtnischen Handichrijten der DartmladUr Hofhiblwthek. Manu-
scrits français: un volume de Froissart; traduction faite pour Charles le Témé-
raire des chroniques de Pise de Bemardo Marangone; traduction de Boèce
attribuée à Jean de Meun (ms, exécuté pour w noble damoiscUe Jehanne de
Bcaucours» dame de Montmartin et du Brossay »>) ; quelques vers pieux sur
les feuilles de garde d'un ras, ; un tnédkinaire ou réccptaire du xv^ siècle ;
explication du Pakr (xiv«-x%^= s,); Vie de Jésus-Christ^ traduite du latin, vers
I Î90, pour le duc de Berri ; Ysaie le Triste ; le Saint GraaJ (xiv« %.) ; gloses aux
distiques de Caton (xtv« s.); notes françaises dans le traité de musique de
Jean de Grouchi (xxvc s.); Exemple dé Notre Z)a^w^ (semble être le quatrain
fameux sur la conception de Jésus comparée au passage d'un rayon de soleil
dans une verrière); Vie de saint Julien , Dit de Saches (? iwr), prières et
hymnes {xv^ s*); fragments de Oui de Bourgc^tu (imprimés depuis, voy.
Rom. XX, 527), Manuscrits italiens : traduction du De viris illustrihus de
Pétrarque ; nouvelles dello impcradore Frederigho de Bardi et delta Gbutgliâma
1. M. VollmûUer &11 remarquer (p. 4^8) que le morccâu IV ett tiré dl»idore de
Sévînc.
6 14 pfeRlODlQUiiS
fifUttok del rt ifArtgUae donna del rc itUngïieriû ; ïc r«te insignifiant. Minu-
scrits espagnols : Chronka dt hs re^s de Navarra asia A primif^ Coflt» 49
escritapoT este (xv< s,), etc. —P. 20}, Kùbler, Commonilorium Foikàià, Brkf-
wtchsd uiscfjen Alexander dem Grossm und AthtotfUs ukr die IVuttdir înSeni,
Publication de ces textes d'après le ras, de Baraberg (xi< s.), avec une îîHé-
ressante introduction, — P. 258, Baist, Aiborai-Camp^ador , LHntcrpréUtioo
de Dozy du mot alboroi^ dans la lettre connue du comte Berenger de Barce-
lone au Cid, comme une traduction ironique en arabe du litre de cmtpm-
dor^ n*esi pas soutenable ; M* B. en propose une autre {alhatai -=. fxtrtmm-
ium), qui n*est qu'admissible. — P. 259, Roih, MitOmlungm aus mititlhui-
micfien HandschifUn der HoJbibUoihrk lu Darmstadt. Catalogue très sommaire
de nombreux manuscrits, surtout des xiv« et xv«: siècles, à^cc quelques cita-
tions, souvent Éiutives (p. ex., p* 260, iornuna^ L crtimfmi). — P. 27:,
Roth, Oas Missak und das Antipiionarium der Ahtei Echtirnûcb O. 5, B. iOtc.
X in der HofbibUothk lu DarmstadL — P. ^^^ Mettlich, Zur QudUn und
AUetbestimmuntg da ^ogemmnUn aîtfraniôuichcn Hohnliédti. Par une série de
rapprochements ingénieux, mais qui sont loin d'être probants, l'auteur essaie
d'établir que le mots de juillet où l'auteur de Tancienne imitation du CûHliqm
des Caniiqim met la scène qu'il rapporte {^uani H solUi^ converset eft leoti, £h
icel Uns qu'est ortus pliadon) est le raois de juillet 1 140, et que le po^mc a été
composé peu après. Le manuscrit me paraît décidément plus ancien. En tout
cas, ridée d'attribuer le poème à saint Bernard ne sera certainement a^^cep*
tée par personne. — P. 292, Baist» Eine neue Handscf^ijt des spanhchen
Alexandre-^ cf. Rom, XVII, 476. — P. 293, Zingerle, Zum « Songe d'hu/em
des Raûuis de Houdette; collation du manuscrit B. N, fr. 2168, non utilisé
jusqu'ici. — P. 298, Otio, Der povtugiesiiche Infini tiv hei Camoes, Madame de
Vasconccllos a tenu compte de ce travail et Ta apprécié dans son étude plus
générale de rinfinitif portugais dont nous avons eu occasion de parler, —
P. J99, Mann, Zh PhiUpp's von Taûn tVerken. L Ccst sans raison que le
catalogue des mss. cottoniens du British Museurn attribue à Philippe un bes-
tiaire latin contenu dans le ms, Vesp. E. x» ; ce bestiaire n'est pas non plus
de Hugues de S. Victor, bien qu*il dgure dans ses ueuvres, ni sans doute de
Guillaume Perrault, à qui il est auribué. II, Les (trois) manuscrits du Ba-
tiaire, 111. Les morceaux en prose latine intercalés dans le i3<^^iia»'^ ne sont
pas de Philippe, non plus que les intercalations semblables, latines et («û-
çaises, du CompuL IW Rem.irquei. détachées sur les sources et le texte du ikh
tiaire. W Les trois passages (relatifs au lion) identiques dans le Comfii « k
lii'sliuire ne sont pas interpolés de celui-ci dans celui-là, mais ont été toits
par Phihppc pour le Comput (1119) et repris par lui dans le Bestiaire (1125)^
-- P. 414, Zingerle, Zur MargareiJitn-Ugeiuîe, Fragment (fio vers octosylla-
biques) d'un ms. anglo-normand contenant une vie de sainte Marguerite dif-
férente de toutes celles qu'on connaît déjà. — P, 417, Wcrncr, Eiite Zûri*
cha Hamischrijt i^u Arnuifs DeîUU Ckri ; collation avec Tédition donnée
par M. Huemer dans le 1. 11 des R, F, - P. 424» Patzig, Lant/ridund CMo,
pèRIODiaUES él5
essai de restitution du texte du poème rythmique de Lantfrid et Cobon
que j'ai publié dans le Moyen dge (août-sept. 1888); j*ai rapporté les proposi-
tions de M. P. dans un article subséquent du même recueil. — P. 427, Otto,
Rumànisch insurare; ce mot, qui a le sens d*uxorare, est en fait ce mot
lui-même; Vn s*est intercalée devant Vx. — P. 429, Roth, MUtheilungen aus
laUinischen Handschriften :(u Darmstadi, Main^^ Cobleni und Frankfurt a. M.
Le chancelier de Paris dont M. R. imprime (mal) divers morceaux en vers
rythmiques est naturellement Philippe de Grève, et ces vers sont imprimés
ailleurs encore que dans Flacius Illyricus. — P. 462, Roth, Der Buchdrucker
Johann Schaffer ^u Main^ (1503-1531). — P. 47s, Roth, Beitràge ^r Ges-
chichte und Uteratur des Mittelaîters, insbesondere der Rheinlande, — P. 509,
Manitius, Die Messias des sogenannten Eupolemius; poème du xii* au xiii© s.,
racontant encore un combat de « Messyas » contre « Cacus », le diable. —
P- 557» Voigt, Dos FloriUg von S. Orner \ recueil (340 hexamètres) de sen-
tences et de proverbes; l'édition, préparée par un savant français qui a voulu
garder Tanonyme, a été terminée par M. V., et les notes comparatives lui
doivent de nombreux enrichissements. — P. 574, Voigt, Karl Bartsch mit-
teîlateinischer Nachlass; description des notes qu'avait recueillies et classées
Bartsch sur la littérature du moyen âge. — P. 581, Manheimer, Eiwas ûber
die Aer^teim alten Frankreich; jolie étude (uniquement d'après les sources lit-
téraires), attestant une lecture intelligente et étendue, d'un jeune homme dont
c'était le début, et dont une mort tragique arrêta aussitôt après les grands
projets de travail. Elle a aussi paru à part (voy. Rom, XX, 375). — G. P.
m. — Publications of the modern language association of america,
edited by James Bright, vol. VIII, 1893 (New Séries, vol. I). — P. 1-76,
Schônfeld, Die Be\iehting der Satire Rabelais* ^u Erasmus* Eticomium Moriae
und Colloquia; ce travail, qui dépasse notre cadre, est prolixe, mais ne
manque pas d'intérêt : il confirme d'ailleurs ce qu'on a dit maintes fois de
l'influence considérable d'Erasme sur Rabelais plutôt qu'il ne démontre par
des faits nouveaux une imitation directe du premier par le second. — P. 77-
140, G. Mac Lean Harper, The legend of the Holy Graily essai tout à fait inu-
tile à lire ; l'auteur, qui prétend mettre ses lecteurs au courant des derniers
travaux sur la question, ne connaît rien de plus récent que le livre de
M. Nutt et n'a guère rien lu en dehors. Il commet en outre beaucoup
d'inexactitudes de détail qu'il est superflu de relever». — P. 141-209,
L. E. Menger, The historical development of the Possessive Pronuns in Italian.
Cet excellent travail, fait avec autant d'application que de méthode, éclaire
véritablement le sujet auquel il est consacré. L'auteur étudie dans un premier
I. Lorsque ce mémoire a été lu i la dixième assemblée annuelle de la Modem Lath
guage Association, il a provoqué des remarques fort judicieuses de la part de MM. War-
ren et J. E. Matzkc (voy. l'Appendice du présent volume, p. XVII-XVIII).
6x6 ^^^F PÈRIODICIUES
chapitre, i Taiile d*im grind nombre de textes soigneusemetit dépo utiles» tes
formes irréguUères de ces pronoms, d^abord celles du singulier (surtout
iuo mo jxjiir mia, etc.), qu'il explique d'uTie É»çon plausible, pub celles <
pluriel, c*est-à-dire les formes dorentines si connues mia tua ^tta pour mm^
titoi, suoî et mU, ttu^ sue, pour lesquelles il démontre à peu près mûrement
que ce sont originairement des formes neutres, employées d'abord devant les
noms neutres pluriels conservés (U sua hraccia, Dante), puis devant des
noms d'un sens de duel et, plus tard, surtout dans Tusagc populaire, <îtcn-
dues à tous les cas. Dans le second chapitre, il étudie les formes ordi^
naircs mio mtW, tuo iuoi^ suo suoi^ avec leurs variantes, et conclut qu'elle
représentent un dt^veloppement phonétique r^^lier, tout e ou tf, long aus«
bien que bref, se diphtongant en hiatus avec f, tout i ou o, long ou bref, pas-
sant à I, u devant o. Cette conclusion est appuyée sur une étude très péné-
trante de tous les cas d'hiatus latins-italiens, et elle paraît devoir être acceptéBj
de tous. Une seule amélioration pourrait être apportée au travail de M Men
ger : les textes dont il s*est servi sont loin d'être sûrs pour c
questions de graphie; il a en général consulté les meilleures édi si
pour baïucoup d*auteurs anciens on n'en a pas encore qui reproduise jtriae-
ment les manuscrits. Il est à croire toutefois que la comparaison de ccux-d
ajoutera des exemples â ses listes, raab n'infirmera en rien les résultats qu'il
a obtenus. — P. 305, J, Matzke, On ihi soura 0/ tbi Italian and EttgUsb
Idiofns fmanitig ** to iake Time by thejortlxk ". G, P.
IV, — Studies akd notes in philology akd uteraturê. Publîshed on-
der the direction q( the modem laoguage départ menis of Harvard Univer-
sity». — « On a rintention, dit dans une note préliminaire M. F. J. ChiUl Jtt
nom du comité de publication, d'imprimer annuellement une série d'anidcs
par les professeurs et les étudiants dans les différents départements des Langues
modernes à Puniversiié de Harvard. Ce premier numéro, publié sous le patro-
nage de l'université, montrera ce que doit être le caractère général de U
publication; mais les numéros suivants seront de dimensions plus étendues. »
-Nous accueillons avec grand plaisir cette annonce et ce spécimen qui est fnrt
mtércssant. Nous rendrons compte dans ce numéro et dans les suivants des
articles qui rentreront dans nos études. ^ P, 1*65, G. L. Kiilrcdgc, 7^*
iiuifiôrship of the tnglish Rofrtaunt of th Rose, Contrairement à Tcipinion de
M. Lounsbury, qui revendique pour Chauœr cette traduaioo dont on ne
possède que 7700 vers, M. K., après une étude fort attentive et fort métho-
dique, conclut que le Homaunt n'est pas de Chaucer, à rexccption pcui-
ét^rc des 1704 premiers vers (exception admise par MM. Kaîuza et Skeat).
oJ^Hibti, étude excellente, qui intéresse la philologie romane et spécialement
oolu!!!; ad\ ^''*'* """^ ^^' '^'^ *^"^^' '^» P^ - On . imprimé au 4o* : vol. i, ou^s
00âur.|, dû le ««rtre .usti sur le titre c. U «g„,,urc de fcaaies.
éÊm^â
PÈRlODiaUES 617
française tout autant que l'anglaise. Je regrette de ne pouvoir éclairer aucun
des points restés obscurs pour Tauteur dans ce double domaine (par exemple
les anciens noms des lettres en provençal) ; il montre un savoir si sûr et un
raisonnement si juste qu'on peut difficilement le compléter ou le redres-
ser. Il rassemble beaucoup de faits curieux et en donne des explications tou-
jours plausibles, souvent nouvelles. Son hypothèse sur la formation du nom
nouveau de la lettre h (ha en latin) est des plus ingénieuses : ha, par la
chute de Vh, ne se distinguant plus d'à, on prit l'habitude, en épelant, de
dire (h)a Aa, joignant à (h)a le nom de la consonne la plus proche, d'où
acd (port, hagd) ou aca, acca (it. acca, fr. ache). Les remarques sur les anciens
noms de Vy (notamment vén. it.^, pr. fint\ (?), anc. fr. fius=iîi\\us à cause
de l'habitude attestée d'écrire T pour le Fils, uîoç), du «/, du ^ sont égale-
ment fort érudites. Il serait à désirer que cette liistoire de l'alphabet, qui a
des côtés fort intéressants et pour la phonétique et pour la KuîiurgeschichU,
fût étudiée avec soin dans les différents pays. Sur la prononciation ioj, a?/, etc,
je signale à l'auteur les passages que j'ai cités Rom., XIX, 125. — P. 118-
124, Sheldon, Elymological notes. I. Fr. traître^ M. Sh. réfute très bien l'opi-
nion, émise par Willenberg et soutenue par Neumann, d'après laquelle
traître, anc. fr. traître, serait tradïctor;il y voit avec raison un mot savant.
Il faut noter déjà dans la Pass. tradetor, au lieu de -idor, qui ferait croire que
c'est, comme on peuts*y attendre pour un mot savant, tradïtorem qu'on
a emprunté en français; puis tradetour est devenu traditour sous l'influence
de tradir (la chute du ^ <; </ dans des mots savants n'est pas rare : voy. p.
ex. hinir, juise, empereur, etc., tandis que le / ne tombe pas). Je crois en
outre que traditre a été refait en français sur traditour : on avait besoin
d'employer ce mot au vocatif, (et on ne s'en fait pas faute dans les vieux
poèmes): c'est ce qui a maintenu le mot au nominatif dans le français actuel ;
servitour, également très anciennement emprunté, n'a pas développé de
nomin. servitre. — 2. Pr. suite, anc. siute < sécta influencé par les formes
de séquére qui avaient iu devenu ui; j'admettrais plus volontiers, vu l'an-
cienneté de siute, un part, séquitus, qui aurait existé à côté de sècùtus.
— 3. Engl. cruise, « croisière », au lieu de croise; essai d'explication. —
4. Engl. jeweî; le mot reporté à un anc. fr. giuel, juêî, attesté d'ailleurs, et
non ^ joieî qui n'existe pas ; ce giuel ne peut venir degaudiellum comme
on l'admet le plus souvent, ni de jocalem comme on l'a proposé : c'est
un diminutif de jeu comme joiut ; l'addition de Vy s'explique comme dans
aloyau, hoyau, boyau ; cela parait tout à fait plausible. G. P»
Remania. XXII. 40
CHRONIQUE
Ed. Schwan esi mort à Gies&en, sa pairie, le 27 juillet, â Vàge de
35 ans sculeraeiiL II avait été relève de MM. Bôhmcr, ten Brink, Martin et
Koschwîtz i Strasbourg, puis de M. Grôber A Breslau ; il avait suivi à Paris
les cours du Collège de France et de l'École des Hautes Etudes; c'est des con*
rérences de cette école qu'est sortie son ctudc sur tes manuscrits de la Fù des
Fera qu'a publiée la Remania. Après avoir été privat-docent à Berlin, puis
avoir suppléé M* Koschwitz à Breslau pendant un semestre, il venait d'être
nommé professeur h Jena quand il fut atteint de la maladie qui Ta emporté.
Outre d'intéressames études de phonétique et dliisioire littéraire, on lui don
surtout un iniportatnt travail sur les Chanson nifrs français du moyen i^e (Ber-
lin, î886)» qui rend et rendra beaucoup de services, et qui témoigne d'un
travail intelligent et acharné. La Grammairt de rancien Jraitçûis^ qu'il avait
publiée en 1888, a reparu cette année même dans une seconde édition com-
plètement remaniée. On peut adresser bien des critiques à ce livre» i la foi$
trop systématique et trop peu rigoureux, mais il y a un grand eiFort, une
composition habile, beaucoup de remarques ftnes et judicieuses» et c'est
assurément jusqu'il présent la meilleure de beaucoup des grammaires de nota*
ancienne langue. Ed. Schwan n'était pas seulement un esprit distingué et un
ardent travailleur ; sa personne était sympatliique et attachante, et sa mort
prématurée laisse de vifs regrets à tous ceux qui l'ont connu.
— Le 6 août est mort, à Castel Gandollo, G. Papanli, âgé de 62 ans,
M. Papami a rendu les plus grands services à la littérature italienne par son
Caidîo^a dd novAlùri Haïiani in prosa (Livourne, 1871, 2 vol. in-8«), par son
supplément i Touvrage de Passano sur le même sujet (Livourne, 1878), et à
la linguistique par sa belle publication : / parlari italiani in Certaido aUafesia
dei VI cmUnario di mejsi'r Giovanni Boccaccio (voy, Rom, V, 496). Citons
encore son joli recueil : Faceiie e motii dei sec. XV t XF/ (Bologne, 1874), et
Toetivre érudite et précieuse qu*il intitula: Dante secundo la tradiiionee i twvtl'
laiùri (Livourne, 1875), Papanti était comme profession un riche négociant
de Livourne; il employa sa fortune d'abord à coïlectionner des livres, puis i
imprimer élégamment quelques nouvelles inédites, et enfin il devint un
excellent et intelligent bibliographe.
— Un jeune romaniste danois, qui avait été élève de TÉcole des Hautes
Études, et qui donnait à ses anciens maîtres de Copenhague et de Paris les
espérances les mieux fondées, M. W. Sporon, est mort après une très courte
CHRONIQ.UE 6l9
maladie, le 14 octobre. M. Sporon avait fait sur les vies de saints en ancien
français, sujet proposé par TAcadémie de Copenhague, un mémoire qui lui
avait demandé beaucoup de travail et qui obtint le prix. Nous ne savons si ce
travail, que l'auteur voulait revoir encore avant de l'imprimer, pourra être
publié.
— M. Paul Marchot vient d'être appelé à l'université catholique de Fri-
bourg en Suisse, pour y enseigner la phlilologie romane.
— L'Académie des Inscriptions a décerné le prix La Grange à M. Emile
Picot pour la publication, en collaboration avec feu le baron James £. de
Rothschild, du mystère du Viel Testament par la Société des anciens textes
français,
— Le 1$ mars 1894 est le centième anniversaire de la naissance de Frédéric
Diez. Plusieurs universités, tant de l'Allemagne que d'autres pays, où sont
représentées les études romanes , ont l'intention de célébrer cet anniversaire
par une fête intime entre romanistes. En France, les villes dont les Facultés
ou les autres établissements d'enseignement supérieur offrent à ces études des
centres importants, comme Paris, Lyon, Montpellier, voudront sans doute en
faire autant. Nous reparlerons de celte question dans notre prochain numéro ;
nous ne savons encore si l'on s'entendra sur un moyen de centraliser les
hommages qui seront si légitimement rendus au vieux maître de Bonn.
— La Société des parUrs de France est reconstituée, comme nous l'avons
annoncé. Son premier Bulletin contient les statuts, la liste des membres
actuels, celle des membres du bureau», le compte rendu de la première
réunion, tenue à la Sorbonne, où, grâce à la bienveillance de Monsieur le
vice-recteur de l'Académie de Paris, auront lieu désormais les séances, le
discours de M. G. Paris sur les Parlers de France, et quelques communica-
tions intéressantes. La cotisation est fixée à six francs par an, et donne droit
au Bulletin, La Société patronne en outre des publications, pour lesquelles les
membres ont droit à un prix de faveur (eUe annonce dès à présent le Glos^
saire des parlers de Bourncis, dans le Doubs, par M. Ch. Roussey, et le Glos-
saire Sainl'PoloiSy l'œuvre si remarquable de M. Edmond, dont le commen-
cement a paru dans la Revue des patois gallo-romans). Elle institue des
enquêtes (dont le Bulletin donne plusieurs excellents spécimens) sur des
faits de phonétique, de morphologie, de lexicologie, de sémantique, etc. Elle
espère pouvoir constituer prochainement, au moins sous une première forme,
un Atlas phonétique de la France. Nous n'avons pas besoin de dire que nous
I. Président : M. G. Paris; vice-présidents : MM. Paul Meycr et Gilliéron; secrétaire
général : M. Rousselot ; secrétaires adjoints : MM. Pepoucy et Salmon ; administrateur :
M. Psichari; trésorier : M. Deseilligny ; bibliothécaires-archivistes : MM. Sudre et J.
Passy; comité de direction scientifique et de publication : MM. P. Meyer, A. Thomas, Gil-
liéron, Morel-Fatio; conseil général (outre les membres ci-dessus nommés) : MM. d'Ab-
badie, d'Arbois de Jubainville, Brunot, Clédat, Colin, Condamin, Delochc, Dottin,
L. Gautier, Raillant, L. Havct, Jorct, LiéUrt, Longnon, Loth, P. Passy, E. Picot,
Rosapelly.
620 CHRONIQUE
fccommanjons chaudement cette scientifique et nationale entreprise à
tous no5 lecteurs. Les souscriptions et cotnmumcaiions doivet^t être adrcs-
ste Ji M. l'abbé Rousselot, ii, rue Llltré»
— Il vient de se fonder à Paris une nouvelle Société, sur laquelle nous ne
saurions trop appeler Tattention de nos lecteurs. Nous détachons des Statuts
l«t art, I et 8, qui font suffisamment connaître Tobjet en vue duquel elle
a étc fondée et les moyens qu'elle se propose d*cmpIoyer*
Jtt. i, Jl e^l créé une Société d'histoire tiitéraîre di U Francf, destiné»: x fouroif aux
pcrwnnc» qui **intércsscnt â ThiMoirc de h France liitér,iîrc les luoyeni de se réunir*
d'écliàiigcr leurs idées, de profiter en commun des recherches individuelles, d*UQlr kun
cflbrti et de groufKr leurs travaux.
Âri. 8. Li Société se propose de publier une Rfiue périodique, des mémoires et des
ouvrdge» lutéfciitint rhbtoire de U liitéraiurc françaiset et d*âîdcr, dans la mesure et
CCS moyens, au développement de ces études,
La cotisaiion des membres de la Société est fixée à 20 francs* moyennant
quoi ils recevront la Kwue. Les adhésions doivent être adressées à M, Brunot,
secrétaire, 23, me Madame. Le bureau se compose de MM. G, Bois&îcr,
président; Petit de Jullevillc et Dezcimeris, vice-présidents ; Brunot, secré-
laire; t*. Bonnefon, secrétaire-adjoint; A. Colîn, trésorier. Parmi les membres
du Conseil d^admiiustration, nous relevons les noms de MM, Chuquct»
Claretk% Doumîc» Faguet, Larroutnet, Lavissc, J. Lemaîire, G. Monod, P. de
Kolhac» G, Paris, I:, IMcot, Tamizey de Larroquc; parmi les premiers adhé-
rents, ceux de MM. Bédicr, Beljâme, Bourcicx» Châtelain, Consuns, Dejob,
Dclboulle, L. Delislc, Gasié, Gaiicr, L, Hilévy, Hauréau» Jcanroy, Jorct,
E. Langiois, Ch,-V, Langlois, Lanusse, Marty-Laveaux» A, de Montiîglon»
Morel-Fatio, Novati, J. Pichon, G. Ravnaud, Rcinach, RigaL H. de
Rothschild, Sudre, Vapereau. Inutile de dire que nous soulmitons le mdlkur
succès i la nouvelle Société, qui vient combler une lacune bien souvent
déplorée. Le premier numéro de la Rnme tfbisioirt Hiiérmrt ir Itf Frimct
parattrti en janvier 1894*
— La Société des anciens textes français vient de mettre en dlstnbiutiofi
deux volumes attribués â l'exercice 189^ : le tome VTH d*£ttsilache 0»-
champs, par M. G. Ravnaud; et le vocabulaire des Mirjtcks éi Nmtrt Dmm,
par M. Bonnardot. Ce vocabulaire forme le tome VIH de U poUkatioa des
Miracles faite par MM, G. Paris et U. Robert, L eseioce 189 j sera pcockia-
nemcnt complété par le roman de GuiUAmm di Doie de|)iiî$ sa ioi^eiffS
annoncé. — La même société se propose de roeftie pioduinemcaf kmbs
presse une édition des poésies de Guillaume Alexis, par MM. É, Pkm et
A. Pîagct,
— Nous avons dit un mot ct^cssus (p. 529) des p^ m^ ^oi en éiè
imprimés eu Iulie à Toccasion du mariage de mademoisdlc Macbilde d*A»-
cona avec M. E. Casàn, Void ccUcs de ces charmin» p«ibE«iom fri m
paMMScni mériter spécialement d être désignées à oos lectcms : L SsM
fmeiH imdUi éi Masser Frmaxo Aatiii d'Arts (obk moels ém àM
l«niooii$ohe eu XV siècfc); — h del Lungo, Vm 1 n'i iijr if m M i
aiRONIQUE 621
XIII ( curieuse page extraite de la Cratiiai doftmtka deDonato Velluti, dont
M, del Luîîgo prépare la publication tî*après le ms. autographe); —
P, Rajna, PulxcUa Gaût^ cantate cavalUresco (poème inédit sur un thème ana-
logue à ceux de Grathni et de Lmtvaî\ M. Rajna, qui ne donne ici que le
texte, nous en promet une édition copieusement illustrée) ; — D» Buona-
mici et S. Morpurgo, E! govertto d^ famigVia ( U malitk ddk àonm (ce sont
deux poèmes originairement distincts» Tun imité de la célèbre épître ;\ Rav-
raond de Saint- Ambroise attribuée A saint fk'rnard, l'autre sur un thème
bien connu; ils ont été indûment réunis à une époque déjA ancienne i Tau»
teur des Mahiie ddU donm, qui vivait à la Un du xv* siècle et est peut*étre
aussi celui du Gt^vtrm de/amtgJûi, avait également composé les Malitie ddk
arii^ dont il y a plusieurs éditions; tout cela est exposé dans la sobre et
savante notice jointe par M Morpurgo à cette édition faite sur divers impri-
més anciens); — P. Nov.iti, Libro mcmoriak dei figïi di M. Lapo da Castigîion-
chio (1382, avec une charmante préface et de savantes notes) ; — F. Torraca,
Baiti e scrilti di Vgolino Bu:(^ola (nouveaux renseignements sur ce Faentin»
dont Dante a parlé dans le De vidg. cL^ et qui avait composé un traité sur les
diverses manières de saluer fort admiré de Franccsco- da Barberino) ; —
M, Menghini, Uttcapiiolosuila virtudtïU (rutta (petit poème inédit du xv* s.) ;
— O, Bacci, Ltttere inédite di Marco Farenti^ setaiuolo fiorcntino dtl secolo XV
(extrait d'une riche correspondance dont on iî*3 imprimé jus^ju'icî que
quelques échantillons et (^ui rnériterait certainement d'être publiée tout
entière); — G, Pitre» Dtibhi e indovindîi siciiiani; — G. Mazzatinti, Costitu-
\l<ini dei Disciplinât i di S. Andréa di Ptrugia (texte de 1374, intéressant pour
la langue) ; — M. Barbi, Antonio Mandti £ la ncvella dtl Grasso tcgnaiudo
(Manetri, s'il est probablement l'auteur de la Vie de BruneUeschi, n*est paS
celui de cette célèbre nouvelle dont on a une copie de sa main ; elle paraît
être sortie d'une collaboration dans laquelle Feo Belcari eut la principale
part, et a été plusieurs fois retouchée et amplifiée),
— Nous avons reçu le premier fascicule de V AUfran^osische Grammatih
que public M, Suchier (Halle, Niemeycr, in-8«, 88 p.). Il comprend l'étude
des voyelles accentuées de la « Schriftsprache « ; les variations dialectales
seront étudiées à pan. L'ouvrage est, on le voit, conçu sur un plan à la fois
très clair et très compréhensif; il formera sans doute plus d*un volume. Ce
que nous en avons lu justifie pleinement tout ce qu*on pouvait attendre d'un
philologue de la valeur de M, Suchier : nous en reparlerons à loisir.
— Au troisième congrès des philologues Scandinaves, tenu A Stockholm
en 1886, M. J, Storm avait fait une communication sur la dipîjtongaison dam
Us langues rotnatm s qui vient seulement d^ètre imprimée, après avoir été rema-
niée par Tauieur, dans l'appendice des Actes du quatrième congrès, tenu i
Copenhague en 1892, Le savant phonétiste de Christiania attribue la diphton-
gaison de € en iV, a en uOy quMl croit (et nous sommes de son avis)
originairement commune à toutes les langues romanes» comme une
conséquence de li réduction de è, ï à <•, de ô, û A j>, Jointe à l'égalisation de
622 CHRONIQUE
la quantité entre ^, o et é, à, les quatre voyelles étant devenues longues do
moment quelles portaient Taccent. Le btin ayant en lui, comme plusieurs
autres langues (M. Storm dte particulièrement un dialecte norvégien qui
offre des phénomènes tout à fait analogues), une tendance i prononcer
les voyelles longues comme des diphtongues, de telle façon qu'elles finissent
autrement qu'elles ne commencent, cette tendance s'est développée par îc
besoin de distinguer les anciens <•, o des nouveaux, et elle a abouti à b for-
mation, d'abord de voyelles doubles ft, ûo, puis des diphtongues ie^ uo^ dont
Taccentuation a peut-être été à Torigine descendante, mais qui a fini (non point
panout) par devenir ascendante, après avoir passé par une longue période
d'accentuation « flottante ». Bornée dans la plupart des langues à é, é
toniques libres, elle a atteint dans d'autres <?, 6 entravés, et en français (et
ailleurs) elle a encore agi sur IV, o nouveaux, les changeant en W» ow
(devenus plus lard m, eu). On retrouvera ces idées^ que nous nous bornons ici
à exposer, dans VEnglUclx Phiîologu de Tautcur. Elles ont le grand mérite
d*étrc fondées sur l'observation directe et attentive des phénomène vivants
du langage.
— Au quatrième congrès des philologues Scandinaves, tenu à Copenhague
en juin 1892» M. J. Visîng a fait une intéressante communication (imprimée
en suédois d Copenhague dans les actes du Congrès) sur le latin vulgaire, U
a eu surtout pour but de répondre à M» K. Sitll, qui, dans différents écrits,
en dernier lieu dans le Jahnsherichl de Bursian (1891), a nié que les textes
de l'époque classique, grammaires, ouvrages et inscriptions, nous aient rien
conservé du latin vulgaire (voy, là-dessus M, Miodonski, dans le t. vni,
p. 1461 de VArchiv fur hUeinhcfx Lixikographié). M. Vising montre que c'est
se faire une idée laussc du latin vulgaire que de s^imaginer qu'il dût présen-
ter des formes très différentes du latin littéraire, et que c'est cette idée
fausse qui, en amenant une déception chez les philologues qui ont examiné
en s'en inspirant les textes en question, leur a fait nier qu'ils continssent du
latin vulgaire. II fait voir que, des grandes altérations du latin qu'on trouve
dans les langues romanes, les unes par leur nature (accent, quantité, etc.) ne
se prêtaient pas à être notées dans les textes, les autres sont postérieures i
Tépoque à laquelle remontent ces textes, et que notamment les différences
dialectales (que le même K. SittI avait jadis infructueusement essav^é de
constater) étaient très faibles à cette époque. Malgré cela, ces textes sont loin
d'être aussi stériles qu*on le dit, et il en donne quelques preuves que tout
romaniste pourrait multiplier* Il ne faut surtout pas oublier que la forme
qu'on peut appeler vulgaire et qui était destinée à triompher n'a jamais rem-
placé brusquement la forme classique correspondante, qu'elle a longtemps
vécu à côté d'elle, que ceux qui l'employaient connaissaient aussi l'autre et
préféraient naturellement celle-ci quand ils écrivaient : tout homme qui
écrit est un lettré ( même les graffiti de Pompéi sont l'œuvre de demi -savants),
il a forcément appris Torthographc et la grammaire en même temps que
récriture, et il ne les viole outrageusement que quand elles se sont par trop
CHRONiaUE 623
éloignées de la langue vivante (comme en français moderne), ce qui n'était
pas le cas en latin* Au reste, la question du latin vulgaire est à reprendre
d*ensemble, après les travaux de ces dernières années ; les quelques pages de
M. Vising formeront une bonne contribution A cette attraj^^ante et difficile
étude.
— A ce même congrès, M. P. A» Geijer a fait une intéressante lecture
sur ks noms de phinks tn français, sur lesquels il prépare un travail étendu.
L'auteur parle d'abord des noms traditionnellement conservés, d*origine cel-
tique, latine, germanique, puis passe en revue les différents procédés employés
par b bngue frjtnçâise pour dénotnmer des plantes ou des variétés qui
n'avaient pas de nom traditionnel. Il mentionne en dernier lieu les emprunts
aux langues étrangères et nous donne Tétymologie du mot rutabaga (bras-
ska csciilmta), « chou de Suède, navet de Suède •>» qucLittré n'explique pas.
Le nom suédois de cette plante est rofvcr^ mais la langue poputaire la
désigne sous le nom de roiahaggar ; ce nom parait avoir été transporté avec
la plante elle-même en Angleterre d'jbord et de là en France,
— Dans les Anaieita Graecitnsia offerts par TUniversité de Graz au con-
grès des philologues allemands et autrichiens tenu à Vienne au mois de
juin, M. Schuchardt a inséré une jolie étude intitulée : Dtr mebr\ieJige Frage-
und Rdaîiviati (tirage à part, cher Fauteur, Graz, 2B p. in-80). II s*agit de
phrases dans lesquelles une double qucsïion, directe ou indirecte, est conte-
nue, comme dans l'allemand : IVaun niksi du nvhin? L*auteur recherche
cette construction dans les nombreuses langues qui lui sont familières. Elle
est rare en roman : pour le français, il nVn a pas trouvé d'exemples ; je crois
cependant qu^on pourrait en découvrir qui ne seraient peut-être pas des lati*
nismes, au moins sous la forme exclamative. Il ne serait pas impossible, il me
semble, de dire, en supprimant et dans la phrase connue de Racine ; Quel
père je quitterais pour quelle mire! Mais si cette forme a été employée, c'a
été, i coup sûr, très exceptionnellement. L'auteur a fait précéder cette étude
de quelques réflexions intéressantes sur ce qui constitue réellement le génie
des langues, ce qu'il appelle « la langue intérieure » par opposition A « la
langue extérieure ».
— La première partie du t. II de la Gramniatik der roman ischen SpracJjen de
M. Meyer-Lûbke vient d'être mise en vente ; la seconde partie paraîtra sans
doute au mois de janvier. La traduction française de ce volume est confiée à
deux jeunes romanistes belges que nos lecteurs connaissent, MM. Auguste et
Georges Doutrcpont.
— Dans les n<» de mai, juin» juillet et 3iOùt du Journal des savants, G. Paris
a publié, à propos du livre de M. A. Fioravanti, // SaJadino nelïe ieggende fran-
ct$i ed italiane, une étude étendue sur la légende de Saladin (elle a paru À
part, in-40, à la librairie Bouillon). Il faut y joindre l'édition d*un petit
poème latin sur Saladin donnée par le mcme dans le n** de mai de la Rome
di r Orient latin»
— Dans le n» de novembre-décembre de la Revoie historiqtte (p. 225-260) a
— Nous avons reçu de M. tLirtwell Joncs les observations suivantes ;
L'écrivain de ranjcle paru dans Romanta d*avnl 1895 est complète m ctil dans l'erreur
lorsqu'il croît cjuc je suis responsable pour la publication des Morceaux choisis
liréf des Manuscrits lL* Hengwrt pjr William*. — Voici ce qu'il en est, — A la mort
du chanoine Williams, la traduction, qui était incomplète, fut confiée à un célèbre
savant gallois; mais bientôt» se trouvant tnciipable de faire cet ouvrage, il me pria de
le faire pour lui. Ainsi donc, on voit après cela que les critiques de G. P, vaut tout À
fait au delà du point. PremicrcmcTït, il écrit 1* M, Harti^'cll Jones, qui est responsable
de cette partie delà tâche, c Eh bi<;n, il n'y a aucune raison d'être pour cette assertion.
Ce qui m'a été confié, c'est la traduction seulemeuti et elle devait être terminée dans
Tespacc de six mois.
2*. Il est évident qu'avec si peu de temps à ma disposition, je ne pouvais jamais
essayer d^entreprendre une étude philol(^quc des différentes parties de l'ouvrage.
D*ailleurs» toute responsabilité, excepte pour ce qui regarde la traduction, a été rcjetée
dans la préface.
5*. Ensuite, trouvant parfois impossible de déchiffrer le texte gallois, j'ai voulu con-
sulter les manuscrits de Peuurth ; tout ce que j'ai pu obtenir, c'a été la permission d*y
jeter un coup d'ceil pendant deux jours seulement.
4\ Le texte gallois tout entier, sauf les trois dernières pages de la fin (qui ont été
imprimées par M. Phillimore), avait été mis sous presse, et de fait imprimé avant U
mort du chanoine Williams.
;". Les notes sur le texte ont été insérées à h suggestion d*un ssvant célèbre gaU
lois qui a cru que, pour me justifier, je devais expliquer le sens qu'on avait adopté
pour les passages altérés. Les explications qui précèdent ont été insérées avec te
consentement des éditeurs, et cela pour s inaplc ment servir de guide aux recherches
futures.
Va Taltération du texte dans l'ouvrage entier, ît m'aurait été complètement impos-
sible d'en entreprendre la publication, et comme ]*ai écarté aussi clairement que pos-
sible toute idée de publication, les remarques de M. G. P. à mon égard sont ntanifes*
tement injustes.
On pounajt ainsi résumer sa critique :
t". Partant d'une idée fausse, il attaque un ouvrage que je n'ai jamais entrepris et
que je n'aurais jamais voulu entreprendre.
1°. Il n'a pas discerné le travail que j'ai réellement fait» c*est-Mirc la iraditclîon de
la VI* partie, la seule chose que l'on m'ait demandé de faire, et qui, je peux le dire, a
mérité l'approbation des suivants gallois, bieti capables de jtigcr de sa valeur.
G. HjIMTWELL JONES.
Cette réponse, comme on le voit, nest guère moins confuse que la publica-
tion même dont j'ai rendu compte. J'ai dit que M, H. J. était responsable de la
partie de cette publication qui n'était pas de M. Williams, et je le maintiens,
car, quoi qu*il en dise, il n'a nullement rejeté cette responsabilité dans sa pré-
face. Au reste, il ne désavoue pas dans sa réponse les notes que j'ai critiquées,
et îï importe peu qu'elles aient été faites « à la suggestion d'un savant célèbre
gallois » et « insérées avec îc consentement des éditeurs ». Elles sont bien
de M. H. J., ou du moitis je n*avais et n*ai aucune raison de les attribuer à
un autre. Au reste^ ta question personnelle est ici de peu d'importance; j'ai
voulu faire connaître i nos lecteurs U valeur d'une publication qui pouvait
les intéresser, et M. H. J. luî-méme ne dît pas que mon appréciation soii
mal fondée. C'est le point essentiel. G. P.
CHRONÎtlUB
— Uvfts âf2t)0£icès sommairement
^iin f^ioii uxûlm^ cotitributt
moifern^, fxr pjn! Ma^îiot^ Paris, BouiUati,
— Noos av^cms id la rdbnie Complète ex extrèmei
sm U piîcns de S^i-Huben que M. M^rdiot ^^
J/ ^bîlakfie franç^ix (IV , 190-201)1 c'est dcveo)
riche en observitions, et où Vûti rem^irqueiii ac
propositions ^ytiiologi<]Ues, ordinâîretïient )adk
unes i^stére^sent le français même ou le roman
c'est ni nùS conmioJe ni irés jùstïhé* et oo peu
négligences (impossible» par exemplef de comprei
tuté Exapiiom^ où les rubriques dîscnE le centra
dire)- fnais en g^éral il fait preuve d*att»itiao <
petit Mfre fornaerâ vraîmciïi une contribûtîo
waûïOQ moderpe*
Emcsto MoKAQ, Suir milichhsima mntitenû gmllart
Cfxxc^ XV, 6. Roma, 1391, m-S«, i s p» (extrait de
d^mui dei Lmi:ef\ mai 1892), — M. Monaci a rais
âtir cette petite pièce, fort obsctire et assuréms
mais qui est Tûcuvre d'un jongleur toscan du Kl
scrite avant h. ûa de cestècle (on en a donné deu)
phiques), H en améliore en beaucoup d*endroits le 1
gnabns nocammeatrï^^/iaf^r^ci fan bien appliqué coi
maisquiest à mon avis non p3is nuptiale H-isb(
de nu plia avec le double suffixe 'ar-isc rècem
bkr, voy, ci-dessus, p, 340). Il en fixe h date ai
que le ivscm'o voUfrrani> du v. 24, désigné seulemei
nom doit avoir trob syllabes et rimer en uno, ne
évtque de Volterra de njo à 1171. Mais il n'an
bkble que le pape dooi reloge enthousiaste re
trouvent ces vers fût Calliste II (1124) " qu'an
un pape mort depuis trente ou quamnie ans, c
ne croira pas, malgré tout ce qu*oni d'ingénieux
sur le (HtradiS dmiano (province de Vienne), lotnaf
en question dok être un contemporain de G a
imprime Se mi dd pour semida^ mais il me parai
St mi dà et de supposer que le jongleur sittend
vient de buer). Cluant au vtscova ^rimaUrsco, y
if m<ïme G;ilg.mo. La première strophe pourrai
iHr.mgère aux deux autres. ^ Au w ^ m /soh
l.iille interpréter Jisoliia^ par Phystolcfus (on sait
ciJiint.>rntia'nt au moyen âge pour un nom d'au te
difveni» iwctesiivemeïit filomfû, fisdafo, polac^, -
CHRONiaUE 627
Emesto Monaci, ShJP aiba hiUng^ie dd coà. Fat. Rtg. 1462. Rama, 1892,
Jn-8«, 15 P* (extrait des Rtndkonti deUa R. Academîa dti Lincei, juin 1892).
— M* Monaci essaie très savamment et trt;s iogé nie u sèment de prouver
que le refrain « vulgaire n de la chanson d*aube latine sur lequel on s'est
tant exercé n'est pas provençal, m.iis ladin, que î^/^/7 ou bigii n*y est pas
un adjectif, mais désigne le VigiUJoch près de Meran, et que Tencbras est
sans doute aussi le nom (jusqu^i présent non retrouvé) d*une montagne
voisine, La langue d'ailleurs confirmerait cette explication : y serait le
surselvan i =r illc et illî ; en ladin itutr est masculin, humidum et so]
survivent; mira veut dire « voilà » etiiar « lumière », part « du côté de »
s*emploie sans un de qu\ le relie au mot qui en dépend, post devient />o.
En sorte que les deux vers : Latba part umet mar atra sol^ Po y pitsa higiî
miraclar tcnehras signifient dans le plus pur ladin du monde : « Uaube du
côté de îa mer humide attire le soleil ; après qu'elle passe Vigîl, voilà lumière
[sur] Tenebras. » C'est une obsen-'atîon de météorologie locale d'une
remarquable précision (sauf la mention de la mer qui surprend un peu ;
mais M. M. nous prouve que c'est à tort). Je doute que mon savant ami
convertisse à son opinion beaucoup plus de lecteurs que ceux qui l'ont
précédé dans les divers essais d'interpréter ce texte, où il n'y a qu'une
chose claire, c'est que VaUnx part est le fr. Laube péri, le prov. Vaïba
par, début de tant de refrains d'aube. Mais ce qui est intéressant dans
le mémoire de M. M-, ce sont les preuves de l'activité littéraire de la
région lombardo-frioulane aux vm«, ix« et x« siècles. C'est â cette région
aussi que M. M. rapporte {il en donnera prochainement les raisons) les
gloses de Cassel, et la pièce 81 des Carmina Burana, où Ton avait vu du
provençal mêlé de français. — G. P.
Livres prm^efiçaiix rassemblés pendant quelques annéts d* étude et offerts à la biblio-
thèque de rUnivcrsité d'Upsala par Cari Wahlund. Upsala, impr. de l'Uni-
versité, mai 1892» très petit format. — On connaît lecatalogue, unique en
son genre, que M. Wahlund a dressé de ses ouvrages de philologie romane
afin qtion pût plus commodément les lui emprunter (voy. Rom , XIX, 369).
Cène fois il imprime avec la plus exquise élégance, à 75 exemplaires seule-
ment, le catalogue des livres provençaux qu'il a rassemblés et dont il a fait
don à la bibliothèque de runiver5ité d'Upsah Ce catalogue comprend 224
numéros; le titre de chacun d'eux, reproduit approximativement d'après
l'original, occupe un recto ; au verso se trouvent les indications du for-
mat, du nombre des pages et du prix. Il y a pîaisir à feuilleter ce charmant
volume, et ci et là les provençalisies feront connaissance avec des
ouvrages dont la plupart ignoraient sans doute l'existence, par exemple
des dissertations suédoises. Quant aux étudiants en provençal de Funiver-
sité d'Upsal, ils devront à leur généreux professeur un instrument de
travail que ne possèdent assurément pas bien des universités beaucoup plus
voisines de la Provence. Il faut cependant avertir les bibliographes que
M* W, a, en certains cas, créé des titres qui n'existent pas et converti en
tirages ft part de simples coupures de revues*
^
628 CHRONiaUB
Réceptaire français àti XÎV'^ siècle ^ diaprés un 1
J. Camus, in-80, 15 p. (extrait du Bulletin di j
la CâU-iTOr, u9 u). — Ce petit recueil i3e t&
ms. de Turin L, V, 17 > il ne manque pas d'im
pour rhistoire de la médecine* M. Camus l'a p
quelques bonnes remurques. « Le manuscrit, dit-
à déchiffrer; aussi aï-je cru devoir faire suivre
quelques vocables dont b lecture ne m'a pas do
Je n*ai pu restituer ces mots ; voici quelques ob
sages : 4 dont on (feut Immm ganr ti satdver si
mority 1. aterminèi (voy. Godefroy, s. v,); ^ ;
terre : la première aï m priera ^ la secomie m pan
pierres (c'est la ftirmule bien connue in herUs^ «
nei li acoinUf 1. liacûttra (?) ; ^ a j et ^00 y c^, L
— 76 li, 1. Pi; — 124 cafwrgf l. /û«tTf (mince)
1. <rajra«fe (d'érable) i — 273 dan^ une, 1. d'aucun
éd. uns du vdlous, tnais il faut lire uns dureUons
la ou nature domine qu^élle en ait (de la barbe
peut-être plutôt dénie ou dénote \ — 548 mptrîn.
Notice sur un ms. d'Orléans contenant d'anciens mi
français, par Paul Meyer (tiré des Nûtic4s
' t. XXXIV, 2« partie). Paris, imp. nat., librairie
30 pages et une héliogravure. — Ces précieui
trois miracles distincts, sont d'une t^criture du xi
normande; mais le texte parait être continental
est affectus, cela les assignerait au sud-ouest
remarquera une curieuse description du marché
Jérusalem, que l'éditeur rapproche d'autres anal<
céder sa publication de renseignements sur les dif
de la Vierge, de recherches sur les sources de ce
l'a accompagnée d'un glossaire riche en indication
Notice sur le recueil de tniracles de la Vierge renfertn*
Si8y par Paul Meyer (tiré des Notices et extraits
2e partie). Paris, Imp. nat., libr. Klincksieck,
P. Meyer prouve d'abord que les pièces de ce ms.
d'origine française ont été composées dans la r
ensuite les trois miracles, appartenant à ce grou
trois imprimés en fragments dans la notice précéc
Enfin il donne les rubriques et les débuts des 26
sont dans ce ms., et qui forment « le document
possédions du langage lyonnais au xiiie siècle ».
Tk'ophih Braga e la sua ohra, por Teixeira Bastc
m-i2, ix-508 p. — M. Braga a écrit une centa
posé des poèmes, des contes, des œuvres ph
CHROKiaUE 629
sociologiques, politiques; il est en Portugal le représentant du jXïsiti-
visme et le chef âcs républicains; le livre enthousiaste de M. T. Bisios
éclaire sous tous ses aspects l'activité multiple et vraiment prodigieuse du
«t plus grand remueur d'idées du Portugiil contemporain ». Mais nous ne
mentionnerions pas ce livre, malgré le vif intérêt avec lequel nousTavons
lu, si M. Braga nViait en même temps, comme on sait, l'historien de la
httérature portugaise. Son oeuvre inégale, disproportionnée, contradictoire
en bien des pages (suivant que l'auteur a passé de l'école de Hegel à celle
de Comte, ou qu'il s'est exalté pour les Germains, les Arabes ou les Tou-
raniens), est en tout cas une mine de faits prodigieusement riche et
aussi une mine d'idées qui, pour n'être pas toujours bien approfondies et
bien sévèrement contrôlées, n'en sont pas moins fort souvent originales et
quelquefois remarquablement justes et fécondes. Comme philologue,
Th. Braga ne mérite pas pour son Conchnaro vatkatw, travail fait précipi-
tamment, toute Tadmiration que lui accorde son biographe. Comme folk*
loriste, il s'est acquis les plus grands titres à la reconnaissance des savants
et de son peuple par ses belles publications de chants et de contes. Th.
Braga est né i Ponta Delgada {Ile de Saint-Miguel, Açores) le 24 février
1845; il a publié à quinze ans son premier volume (des poésies) et ne s* est
pas arrêté depuis. Une bibliographie de ses œuvres et des appréciations
dont elles ont été l'objet termine le volume. On y voit avec grand plaisir
que Th. Braga prépare une édition nouvelle, complètement refondue, de sa
grande Histoire de la Httérature portt^aise.
Die isirianiscljen Mutulartett, Von Dr. Anton Iv£, \Vî en, Verîag des Verfas*
sers» 1893, in-8^» 42 p* — M, Ivc poursuit ici le cours de ses précieux
travaux sur le roman de Tlstric. Ce fascicule contient le vocalisme du
parler de Rovigno, comparé constamment à ceux de Pirano, Valle,
Dignano, Gallesano, Fasana, Sissano et Pola, et rapproché quand il y a
lieu du vénitien et du ladin. C'est une étude faite véritablement avec
beaucoup de soin et qui sera très utile aux romanistes quand elle sera ter-
minée ; Tautcur nous annonce que la suite, consacrée au consonantisme et
à la morphologie, ne tardera pas à paraître.
Gbsiaires et lexicographs geneivis^ par Eugène Ritter. Genève, Georg,
1895, in-80, 19 p, (extrait du Bulletin de V Institut geneims^ t. xxil)* —
Dans cet intéressant discours et dans les appendices qui l'accompagnent,
M* R. donne une courte description du plus ancien dictionnaire latîn-fran-
çàis imprimé, qui le fut à Genève en 1487, et dont la bibliothèque Sainte-
Geneviève à Paris possède le seul exemplaire connu, — des détails sur l'im-
pression \ Genève, en 1680, du dictionnaire de Richelet, — et surtout sur le
dictionnaire français-italien de Pierre Canal, publié à Genève en 1598, ^-
et communique une liste d'additions au Glossaire genevois de J. Humbert,
dont il avait eu le projet, malheureusement abandonné, de donner une
nouvelle édition.
Manuale délia letteratnra italiana, compilato dai Professori AL d'ANCONA c
CHRONiatJE 631
p. 58, attribue-t-U au Pamphilus quatre vers du Condlium Romariciniontisï).
U faut ccpendjitxt noter la preuve, tirée de pièces d'archives, que le Guido
dclle Colonne qui a mis en latin Benoit de Sainte-More était bien juge à
Messine de 1257 à 1280 au moins, et qu*il doit être identifié, contraire*
ment à ropinion de M. Gorra, avec îe poète ïyrîque du même nom,
Premitr essai, Pdtk gramtmiire du àtahck valdotain avec traduction françûise
[par l'abbé J,-B. Cerlogne]. Front Canavese, impr. J.-B. Cerlogne,
1893, ln-î2, 105 pages. — M. l'abbé Cerlogne, curé de Champ-de-Prai,
dans le val d'Aoste, aime son patois et ne néglige aucun soin pour le faire
connaître. 1! ambitionne même de lui donner une littérature. Ses poésies,
publiées à divers inten'alles et réimprimées récemment en un volume
{PoésUs m dialecte valdotaits p.ir Tabbé J.-B. Cerlogne, Aoste, inapr.
L. Mensio, 1889, in-8, 158 pages), constituent, à part leur mérite littéraire
que nous n*avoiis pas à apprécier, un véritable testodi îingua d'autant plus
facile à utiliser qu'une traduction française est placée en regard du texte. Il
a publié aussi des almanachs populaires en patois {Jan-Pouro, armanaque dt
veUad^o pe Vîm bisesiil iSgiy Barbania, impr. J,-B. Cerlogne, 1892;
Armùfuiqtif di veUad^o aivc Us foires dt la vatlee^ ^893), et voici qu'il nous
donne sous un titre modeste une courte et -utile grammaire du dialecte
valdotain. M. Tabbé C. est son propre éditeur cl même son imprimeur :
cette circonstance doit nous rendre indulgents pour les fautes typogra-
phiques qui abondent dans la Petite grammaire et qui ne sont pas toutes
relevées à Vetrata. Cette grammaire n'est pas et ne prétend pas être un
travail d*érudition linguistique. Cependant elle indique avec assez de
clarté la prononciation, en tenant compte des variétés locales, et elle four-
nit des séries de paradigmes qui paraissent complètes. L auteur, qui n'est
plus jeune, signale çà et là des modifications qui se sont produites dans son
patois depuis un de mi -siècle. 11 ne faut pas perdre de vue, afin de rendre
justice à M, l'abbé Cerlogne, qu'avant lui les philologues n'.avaient guère,
pour se rendre compte du patois valdotain , qu*un petit nombre de spéci-
mens imprimés dans îa Raccolta di diaîetti italîam de Zuccagni-Orlandini
(Florence, 1864), p. 32 et suiv., et dans le recueil de Papanli I parlari
italiani in Certaîdo^ p. 490. — P. M.
Semin Santy, La Comtesse de Die. Sa vie, ses oeuvres complètes, les fêtes don-
nées en son honneur, avec tous les documents. Introduction par Paul
ALxRiÉTOK. Paris, A. Picard, 1893. In-S"», xvni-146 pages. — Cet ouvrage
a été composé, comme l'indique le titre, en souvenir des fêtes célébrées à
Die, en août 1888, à propos de Tinauguration d'un buste de la fabuleuse
comtesse. On y trouvera tous les discours, toutes les poésies qui virent le
jour à cette occasion. En ce qui concerne la comtesse de Die elle-même,
nous avons, dans ce volume, un résumé assez exact et passablement au
courant de ce qu'on a écrit pour concilier ou expliquer les deux biographies
de cette poétesse et les témoignages de Franccsco da Barberino. L'auteur,
qui, du reste, $e borne au rdie modeste de rapporteur, dit avec raison > en
632 CHRONIQUE
prC'Scncc des contraJîaîons qui surgissent Je toutes parts, que Tliistoire, le
nom, le litre de son héroïne sont encore une énigme» hes poésies sont
réimprimées d'après les cdîtîonSf et qui implique des v;inations considé-
rables de syïilème, et accompagnées de traductions où Ton trouverait bien
à reprendre. En somme, travail d'amateur, fait consciencieusement^ mais
où il ne faut rien chercher de neuf.
i/i livres dt comptes des frèrts Bonis, marchands monlaJbanais du XI V^ sikJi,
publiés et annotés pour la Société historique de Gascogne, par Ed. Fores*
TJÉ. Deuxième partie. Paris» Champion; Auch, L. Cocharaux, tS^j.
In-80, 285 pages. — Nous avons rendu compte du premier volume de
celte intéressante publication (Romank, XX» 170); nous nous bornons
actuellement a annoncer la seconde partie qui vient de paraître, ayant Tin-
lention de consacrer aux Livres des frères Bonis un second compte rendu,
lorsque la troisième partie, qui renfermera la lîn du texte, le glossaire et k
table, aura paru.
Us couplets similaires dans ta vieille êpop/e française, par Alfred NoitDFELT.
Stokholm, 1895, in-40, 18 p, — M. Nordielt» dont nous avons annoncé
l'an dernier rintércssanie étude sur l'antiquité des laisses nionorîmes ter-
minées par un petit vers, s'attaque ici â un autre point de La technique
des chansons de geste, celui des « couplets similaires ». On a déjà beau-
coup discuté cette question compliquée, et Tauieur n*a pas connu tout ce
qu'on a écrit avant lui (il s'est aperçu après coup que M. Grôber avait
donné une explication fort semblable ;!^ la sienne). Il établit d*abord
que les laisses entihetnenl similaires, comme Roi. XLV et XL Vil, sont
extrêmement rares; pour les laisses partiellement similaires, il y voit un
procédé des copistes» qui ont amplifié de simples « recommencements © au
début d*unc laisse, ou de simples « anticipations i> à h Hn d^une autre. D
donne de ce procédé des exemples qui paraissent frappants, notamment
dans les Enfances Vivien, où la rédaaion la plus récente remplace par plu-
sieurs vers répétés (avec changement de rime) un vers de résume de la
rédaction la plus ancienne. Toutefois, quand on voit les laisses similaires,
fréquentes dans les anciennes chansons (notamment dans le Roland}^ deve-
nir de plus en plus rares avec le temps, on ne peut les regarder que comme
très exceptionnellement dues à Tintervention des copistes. On peut, avec
plus de vraisemblance, les attribuer souvent aux chanteurs, mais, dès lors,
elles apparaissent comme un procédé qu'on employait pour plaire aux
auditeurs ; et qui empêche alors de croire que les premiers auteurs en ont
eux-mêmes fait usage? C'est une question complexe, mais à l'étude de
laquelle les observations précises de M. N. apportent une contribution qui
n*est cenainement pas à négliger.
Lepnfprytaire-g&anl, E. BOUILLON,
TABLE DES MATIÈRES
E..PHILIPON. Les parlers du Forez cis-ligérien aux xiii« et xive siècles. i
A. Jeanroy. Trois dits d'amour du xiii* siècle 45
R.-J. CuERVO. Las segundas personas de plural en la conjugacion cas-
tellana 71
P. Meyer. Les manuscrits de Bertrand Boysset {fin) 87
W. Cloetta. Le mystère de V Époux 177
A. PiAGET. Simon Greban et Jacques Milet 230
É. Picot et A. Piaget. Une supercherie d'Antoine Vérard 244
G. Paris. La Oxinson d'Antioclx provençale et la Gran Conquista de
Ultramar (Jin) 34S
L. Gauchat. Les poésies provençales conservées par des chansonniers
français 364
Oc E. Gais de Pierlas et P. Meyer. Mémoire provençal présenté, en
1 398, au comte de Savoie, par les Grimaldi de Beuil 40s
A. Piaget. Jean de Garencières 422
A. Morel-Fatio. Notes de lexicologie espagnole 482
A. Thomas. Les noms de rivières et la déclinaison féminine d'origine 489
germanique.
H.-L.-D. Ward. Lailoken (or Merlin Silvester) 504
MÉLANGES.
Une charte de Gace Brûlé (P. Guilhiermoz) 127
Les premiers vers de Charles d'Orléans (A. Thomas) 128
Le latin - itor et le prov. -être (A. Thomas) 261
Buissé, boissiéy houyssé, baissé (A. Delboulle) 264
Fragment d'un miracle de sainte Madeleine (G. Doncieux) 26s
Chrétien de Troyes et l'auteur de V Ovide moralisé (A. Thomas) 271
Le jeu des cent drutz (É. Picot) 273
Sur Guillaume de Machaut (A. M.-F.) 27$
Jean de Hesdin (B. Hauréau) 276
Complément de l'oraison d'Amoul Greban à la Vierge (É. Picot) 281
D'un comparatif gallo-roman et d'une prétendue peuplade barbare
(A. Thomas) 527
Rffmania, XXII 4^
634 TABLE DES MATIÈRES
La laisse 144» du Roland (A. Siîmon) .,......, S29
Revision des Études sur le Potf me du Cid 0. Coron).* S î î
Sur Torigine du poème De PhyïHtk tt Flora (G. Huet). .............. %\h
La chanson composée à Acre en juia 1 250 (G. P.) - ■ ^ - . - — • — S4!
Enirecor (Jmin, hdt) (A. Salmoii), , , Î47
Bédane (G. P.) . , ., 549
Marmot, marmeau (A. Bos). . , , , , ...,.,.. , S50
J. Molinet auteur du Mystère dt S. Qmniin (E, Langlois).*, SS2
Coquilles lexicographiques (Ad. HatEfcid, A. Thomas) > S3
COMPTES RENDUS.
Becker, Jean Lemaire (Ch.-M. Des Granges) 136
DÉDIER, Le fabliau de Richeut (G. P.) 156
Bédier, De Nicolao Museio (gallice Colin Masel) (G. P.). . . * . - aS^
Bbljame, La pronondation du nom de La w (G. ¥.),.... * . 1 57
Bertran de Born, hgg. von Stimming (A, Thomas). *,......• 590
BoNNARDOT, Trois textes en patois de Metz (G. P,). . . * . . . . . . ♦ 147
CoNSFANS, Notés pour servir au classement des niss. du roraafl de
Troie (G. P.). ..--■■.- . * - - . 14^
Cornu, Études sur le poème du Cid (G. PO .,,,.. i%%
CoURAYE DU Parc, Chants populaires de la Basse-Normandie {G. P.)- 138
Devaux, Essai sur la langue du Dauphin*^ septentrional au moyen âge
(P. M.) .' 594
Edelfelt (Annie), Mots français et suédois 5^
Études romanes dédiées à Gaston Paris (G. P.) 1 54
Flach, Le compagnonnage dans les chansons de geste (G. P.) r4S
GiLLiÉRON, Remarques sur la vitaHté phonétique des patois (G. P.). • . IS5
GoLDSTAUB und Wendriner, Ein tosco-venezianischer Bestiarius
(E.-G. Parodi) 300
GoLTHER, Geschichte der deutschen Litteratur, I (G. P.) 164
Grand, Proclamation d'un héraut en dialecte montpelHérais (G. P.). • I45
Havet, L'5 latin caduc (G. P.) 148
HuET, Remarques sur les rédactions diverses d'une chanson du
xiiic siècle (G. P.), Ij6
Jkanroy, Une pièce artésienne du xiiic siècle (G. P.) 140
Jones, voy. Williams.
Joret, La légende de la rose au moyen âge (G. P.) 147
Lair, Élude sur la vie et la mort de Guillaume Longue-Épée (G. P.). 576
Langlois, Quelques dissertations inédites de Claude Fauchet (G. P.). 141
Lanusse, De l'influence du dialecte gascon sur la langue française
^••M) 299
TABLE DES MATIERES 6j5
LuzzATTo, I dialetti moderni délie città di Venezia e Padova (E.-G.
Parodi) 310
Mémoires de la Société néo-philologique d*Helsingfors, I (G. P.) 565
MoNOD, Les Anttaîes Laurissenses minores et le monastère de Lorsch
(G.P.) 138
Morel-Fatio, Duelos y qnehrantos (G. P.) 152
Muret, Sur quelques formes analogiques du verbe français (G. P.). . . 155
NovATi, La Navigatio sancti Brendani in antico veneziano (E.-G.
Parodi) 304
NovATi, La Ndvigatio sancti Brendani in antico veneziano (C. Boser). . ^81
Omont, Les mss. français des rois d'Angleterre à Richmond (G. P.) . 136
Pages, La version catalane de V Enfant sage (G. P.) 146
PiAGET, Chronologie des épîtres sur le Roman de la Rose (G. P.) 141
PsiCHARi, Le roman de Floriinont (G. P.) 158
RoMARiNO, La pronunzia popolare dei versi latini ed origine délia ver-
seggiatura ritmica (G. P.) 574
Raynaud, La mesnie Hellequin (G. P.) 138
RoussELOT, Vs devant /, />, c dans les Alpes (G. P.) 157
Rydberg, Le développement àtfac^re dans les langues romanes (G. P.). $69
Salmon, Remèdes populaires du moyen âge (G. P.) 146
Sepet, Observations sur le/fw delà FeuiUée d'Adam de la Halle (G. P.) 140
SôDERHjELM, Le poème de saint Laurent (G. P.) 565
SôDERHjELM, Saint Martin et le roman de la Belle Hélène (G. P.). . . . 566
SôDERHjELM, Notice d'un ms. français-latin du xve siècle (G. P.). . . . 566
Steinweg, Die handschriftlichen Gestaltungen der Navigatio Brendani
(C. Boser) 578
Strimming, voy. Bertran de Born.
Studi dialettali veneti (E.-G. Parodi) 300
Taverney, Le traitement de /; et du suffixe ulum^ ulam en roumain
(G.P.) 147
Thomas, Vivien d'Aliscans et la légende de saint Vidian (G. P.) 142
UscHAKOFF, Zur Erklàrung einiger franz. Verbalformen 567
Wallenskjôld, Die deutschen Lieder der Carmina Buram 567
Wendriner, voy. Goldstaub.
Williams and Jones, Sélections from the Hengwrt Mss. (G. P.) 269; cf. 625
WiLMOTTE, Gloses wallonnes du ms. 2640 de Darmstadt (G. P.) 146
636 T4BLË DES JtâTIÊMS
UVRES ANKOKCES SOMMAIREMENT,
Altow, vqy. Jnstis.
Amcona (D*) e Bacci, MaouAJe âéh HtoMan ititîaiu. « . 171, 629
André le Chapelain, Dt amore lièrt tru^ rec Tkojel. ....,,, 174
Ansâs von Kartbago^ hgg. von Altox. .*...,...,....« ^ ;p
AuvRAY, Les manuscrits de E^nte des tiiUîocbèqtie& de Fisnce^ ...... 1 71
Baco, voy. D'Ancona.
Bastin, Glanores grammaïkalfô « . . ip
Bastos, Thcopbilo Braga. ... .,..,..... 62S
Bayonne (Livre des ÉtMissermvis di} ..,.., 5^7
BÂmer, Les Fabliaux .,..-......*..,*,.... .*.,...,... 541
Bellouni, Note sulk tradiiziciEii italiaiie d*Ovidio 1^9
Bonis (Les livres de comptes des frércsx p p- FoniSTiÉ, H, * . - 6p
Bomtempi, Poésie in dialeito vaîmiggîpo. . . . . , ....,*»,*,,«« 140
BouRaEZ, La langue gascofine à Bonjeaux. , , , 540
Camus, Récepuire ftançab du xi% « siède. * , ^aS
Cerlogme, Petite grammaire du dblecte vddoiaio. . , . . ^ , . , . 6|i
CoELHO, Os Ciganos de Portugal , . , , . ^ . J17
COURTEAULT, voy. Goston IV, ctmk de Foix {Hùioirt de%
Cresomi, Qpaldie appunto soprà VAm^îù del Boccat:cio. , « , ^ . . 144
CucHARMOYS, 1/ soinct voyait âe }êrumkm, p. p. De Majisy. * , , 171
Dammann, Die allegorische Qin/onê des Guîraut de Calanso. . . . . . tu, 7
Dante, Traité de r éloquence vulgaire, p. p. Maignien et Prompt 172
Dardy, Anthologie populaire de TAlbret 332
FoRESTiÉ, voy. Bonis.
Farinelli, Die Beziehungen zwischen Spanien und Deutschland. . 174, 333
Gaston IV , comte de Foix (Histoire de), p.p. Courteault, 1 630
Gautier, Les épopées françaises, II 332
Genelin, Unsere hôfischen Epen und ihre Quellen 331
GiANNiNi, Gli amori di Bclinda e Milene 1 76
Gonçalves Vianna, Exposiçào da pronuncia normal portuguesa 337
Gorra, Studi di critica letteraria 336
GoTTscHALK, Ueber die Sprache von Provins im 13. Jahrhundert 344
Graf, Miti, leggende e superstizioni del Medio Eve, II 339
Gregorio (De), voy. Libro dci Vi^ii e délie Virtù.
Gregorio (De), Per la storia comparata délie letterature neo-latine.. . 630
Grôber, Geschichte der lat. Litteratur im Mittelalter 343
Hamel (Van), L's Lamentations de Mathcolus, 1 334
Hasdeu, Genealogia poporelor balcauice 173
Herzstein, voy. Tractatus.
Hervieux, Avianus et ses anciens imitateurs 343
TABLE DES MATIERES 637
IvE, Die Istrianischen Mundarten 629
JoRET, La rose dans Tantiquité et au moyen âge 171
KoscHwrrz, Les parlers parisiens 342
KuRTH, Histoire poétique des Mérovingiens 342
Lanusse, De Johanne Nicotio philologo 337
Lenz, La Fonetica 333
Leseur, Histoire de Gaston IV, comte de Foix, p.p. Courteault 630
Libro (//) dd Viiii e délie Virtùy pubbl. da G. DE Gregorio 334
Levy, Provenzalisches Supplement-Wôrterbuch 337
LoTH, Les mots latins dans les langues brittoniques 333
Maignien, voy. Dante.
Marchot, Phonologie détaillée d*un patois wallon 626
Marsy (De), voy. Cucharmoys.
Martin, voyez Proverbes,
Matheolus (Les lamentations de\ p. p. Van Hamel, I 3 34
Meyer (G.), Die rom. Bestandtheile im Wortschatze des tûrkischen 341
Meyer (P.), Sur un ms. contenant d'anciens miracles de la Vierge. . . 628
Meyer (P.), Sur le recueil de miracles de la Vierge du ms. fr. 818. . 628
MoNACi, Suir alba bilingue 626
MoNACi, Suir antichissima cantUena giullaresca 627
Nordfelt, Les couplets similaires dans la vieille épopée française 632
Prompt, voy. Dante.
Proverbes au Comte de Bretagne^ hgg. von Martin 175
PsiCHARi, Études de philologie néo-grecque. 33$
Rajna, Gaia da Camino . . 174
Redi di Francia (/), per cura di Vandelu, 1 334
Restori, Musica allegra di Francia nei secoli XII et XIII 341
Restori, Tre preghiere francesi del secolo XV 342
Ritter, Glossaires et lexicographes genevois 629
RoTTiG, Die Verfasserfrage des Eneas und des Roman de Thebes 333
RûDOW, Geschichte des Rumànischen Schrifttums 336
Sainénu, Istoria filologiei romane 336
Salvioni, Lampyris italica 175
Santy, La comtesse de Die 63 1
ScHULTZ, Die Briefe des Trobadors Raimbaut de Vaqueiras 338
ScHWAN, Grammatik des Altfranzôsischen 342
Sten gel, Romanische Metrik 343
Storm, Englische Philologie, 1 333
SuDRE, Les sources du Roman de Renart 339
SuDRE, Ovidii Metamorphoseon libros quomodo nostrates imitati sint. . 342
Thormann, Thierri von Vaucouleurs Johannes- Légende 335
Thuriet, Traditions populaires de la Haute-Savoie et du Jura 335
Tisseur, Modestes observations sur Tart de versifier 341
Tobler, Etymologisches 340
638 TABLE DES MATlàRHS
Tractatus de diversis histonis Romattorum hgg. von Heristein. , 17^
Trojel, voy. André le Chapelain.
Vandelu, voy. Reali di Francia,
Wagker, Franzôsische Qjuantitât , , . . , ._,.,.. 3f8
Wahlund, Livres provençaux , * _.,...,**. éi'j
PÉRIODiaUES,
Bulletin de la Société des anciens text^ fratiçais, 1S92, 1 * \H
Propugnatore (II), 1891 , , , . Pî
— 1892 ...,,.,,. p6
Publications of the Modem languages Association of America, VIQ. ,, 577
Revue de philologie française et provençale, VI , • • 3^3
Romanische Forschungen, IV , . . . . J20
— — V J22
— — VI m
Studies in philology and literature of the Harvard University, | 580
Zeitschrift fur romanische Philologie, XVI, 3-4 , 315
-^ — — xvn, 1-2 , 565
CHRONiaUE.
Nécrologie : Ed. Màtzner, S. Luce, 168; Ed. Schwan, G. Papami,
W. Sporon, 618. — Centième anniversaire de la naissance de Diez, 618.
— Nominations de professeurs, chargés de cours, etc. : MM. Gauchat,
Matzke, Todd, 328 ; Marchot, 619. — Prix décernés à MM. Rousselot, 328,
Picot, 619; médaille à M. Loth, 328; mention à M. Devaux, 328. —
Publications nouvelles : Almaiiac de VAriejo, 169; Vie de saint Edfnotid, de
Denis Pyramus, par Th. Arnold, 170; G. Paris, V altération du c latin eti
rontan^ 336, Les preuves épigraphiques et palcographiqucs alléguées en faveur de
V altération du c, 331 , nouvelle édition des Extraits de la Chanson de Roland
et des Extraits des anciens chroniqueurs (publiés avec A. Jcanroy), 330-31,
Jaufré Rudel, 623, Lj U'getuie de Sahdin, 623, Poènie latin sur Saladin, 62} ;
Latcinischc Denkmâler des XV. und XVI. Jahrhutulerts, 170; Tobler, Die
romanisclye Philologie au} den d^utschen Universitàten , 328; C. Morel,
Anciennes traductions françaises de Dante ^ 624 ; W. Meyer-Lùbke, Gratnttmtik
der rom. Sprachcn, II, i, 624; A. Suchier, Altfran^dsisclje Gramnmiiky I,
623 ; A. d'Avril, Nouvelle bibliothèque bleue {Le chien de Montargis, Girard
de Roussillon), 624 ; Schuchardt, Der nul)riielige Fragesat^, 624 ; Rizler.
Naimes von Baiern und Ogier der Dàne, 328. — Rassegna bibliografca
TABLE DES MATIÈRES 639
delîa letteratura itàliana, 169. — Publications annoncées : Histoire de la
littérature française dirigée par H. Petit de Julleville, 330; Geschichte der
fran^ôsischen Litteratur, par H. Suchier et H. Morf, 3 30; Piaget et Bou-
genot, Œuvres poétiqttes d'Hugues de Ber^é, 624 ; E. Gorra, ouvrages divers,
331; Sudre, Roman de Renart, 624; Bourdillon, Chronique saimongeaise,
331 ; Dorveaux, Legrant Herbier de France, 624. — Publications en Thon-
neur des noces Cassin-d*Ancona (MM. Bacci, Barbi, Buonamici, Del Lungo,
Mazzatinti, Menghini, Morpurgo, Novati, Pitre, Rajna, Sanesti, Torraca),
328, 620. — Le Mêliador de Froissart retrouvé, 624. — Société des parlers
de France, 328, 619; Société d'hbtoire littéraire de la France, 620. —
Quarante-deuxième congrès des philologues allemands (mémoires de
MM. Tobler sur l'adjectif employé substantivement dans les langues
romanes, Friedwagner sur la critique des anciens textes poétiques français,
Zenker sur la légende de Gormond et Isembart; plan d'un recueil des
formes du latin vulgaire), 329; — Troisième et quatrième congrès des
philologues Scandinaves (mémoires de MM. Storm sur la diphtongaison
dans les langues romanes, Vising sur le latin vulgaire, Geijer sur les noms
de plantes en français), 621, 622, 623. — Lettre de M. Hartwell Jones,
62s.
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E. Phiupon, Les par!ers du Foroz cîs-Iigérkn aux Xill= et Xiv* sièctes*.
A. Jeanroy^ Trois dîts d'amour du xiii* siècle • • -
R.-J. CuERvo, Las scgundas porsonas de plural en h. conju^soR casid-
lana ,.**,** _ _ - *-
P. Me^'er, Les mimuscrÎEs de Bertrand Boyssct (fin) ^7^
MÉLANGES
P. GuiLHLERMOZ, Unc clurtL* dc Gacc Brûlé < "7
A. Thomas, Les prcinieri» vers de Charles d'Orléans -,_.....- i*^
COMPTES RENDUS
Études romanes dédite à Gaston Paris (G. P.) • îî4
W. GoLTilER, Geschichte der deutschen litteratur (P. G.) 164
CHRONIQUE iftî«
Les prochains numéros contiendront :
P. Mhylr, Phonétique provençale. A tonique (avec carte).
G. Paris, La Omnson irAutiOiJje provençale et la Gnin Conijuisfa de UllrH'
vutr (fin). — La destinée du f latin en français.
W. G. C. BijVANCK, \'illon inédit.
H. Cais de Pikrlas. Mémoire, en provençal, présenté en 1398 au comte Je
Savoie par les Grimaldi de Hueil. '"•^^
W. CLOi/n'A, Le Mystère Je ri'poux.
H. Moui-, Notes pour servir à l'histoire de la légende de Troie (suite). ^ -^
A. PiAGKT, Simon Grcban ei Jacques Millet. — Jean de Garencières.
b. Picot, Fra«,qncnis de mystères de la Passion (suite). — Les plagiats
d'Antoine Vérard.
ii. L.-D. Ward, Recherches sur Merlin.
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français S^
O* E. Cais de PiERLAS et P. Meyer. Mémoire en provençal présenté,
en 1398, au contte de Savoie par les Grimaldi de Beuil 40S
A. PxAGET. Jean de Garendèies 4>>
A.^ Morel-Fatio. Notes de lexicologie espagnole 4^2
Nota. Pour ne pas trop retarder l'apparition de ce numéro, que nous
comptions faire double, nous publions id une première partie, qui ne contient
que des articles de fonds. La seconde, comprenant des articles de fonds, les
comptes rendus, les périodiques et la chronique, paraîtra très prochainement.
Los prochains numéros contiendront :
P. Mi-YiiR. Phonétique provençale. A tonique (avec carte).
Ci. Paris. Les accusatifs féminins en -ain. — La destinée du e latin en fran-
sMis.
J- l^r.DU-R. Fragment d'un ancien mystère français.
W. C;. C. RijVANCK. Villon inédit.
n. Mour. Notes pv)ur servir à l'histoire de la légende de Troie (5wi7f).
»■• Vic.or. Fragments de mystèrcs de la Passion (suite).
A. Thomas. Noms de rivière en -am, -au.
1-- \'oKj.r/i:M. Sur Ausas th- Oirtdgi.
" L-IV Ward. Lailoken (or Merlin Silvester).
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