HANDBOUND
AT THE
UMVERSITY OF
TORONTO PRESS
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BULLETINS
ET MÉMOIRES
DE LA SOCIÉTÉ
D'ANTHROPOLOGIE
DE PARIS
*Xi«.'
B*«ug*D<7- ^'"P LiiTray ûls & gendra
BU LLETl NS
ET MEMOIRES
A)E LA
SOCIÉTÉ D'ANTHROPOLOGIE
DE PARIS
TOiME SIXIÈME (V^ SÉRIE)
1 9 O 5 ' / V<^^
PAKÏS-Vr
A LA SOCIÉTÉ d'anthropologie, RUH DE l'ÉCOLE-DE-MÉDECINE, l'y
ET CHEZ MM. M/%8»ON ET C'», LIBRylIRES OE L^ACAOÉMIE DE MÉDECINE
120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN
1905 ^/^O^
6 6.'
i. C--J
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socii;tk d'anthropolog'ie
liK PARIS
(fondék en 1859. KKr.o.sNiK u'l'tilité plbliol'k en 1864)
15, rue de l'École-de-Médecine, 15
LISTE DES MEMHHES
ANNEE 1905
ABRÉVIATIONS : Hon., membre Imnoraire. — Ae, associé étranger.
Ce, correspondant étrangt-r. — Cn. correspondant national. — T, membre titulaire.
— T R, cotisation rachetée.
Akekman (S. Exe. H.), Ministre de Suède — 58, avenue Marceau, Paris, XVI
— 1901. Ae.
Albeut pr DE MoxAGo (S. A. S. le Prince), Corresp. de l'Inst. — 10, avenue
du Trocadéro, Paris, XVI. — 188:3. T:
Alezais (Henri), D M, Chef des trav. anatom. à l'P^c. de Médecine — 3, rue
d'Arcole, iMarseille (B.-du-Rh.) - 1886. T.
.\i.MERAS (J.-J.), D M, ex-Ghirurg. en chef de l'Hôp. d'Etampes —25, route
d'Harfleur, Montivilliers (Seine-Inf.) — 1862. T.
Amau (Jules), Lie. es-sc. — 62, boulevard St-Geriuain, Paris, V. — 1903. T.
Ambhosktti (Juan B.), à l'Institut gcogr. — Buenos- Aires (Rép. Arg.) —
1899. Ce.
Anuiuan-Werburg (Freih. Ferdinand von), Priisident der Wiener Anthro-
polog. Geselisc. —7, Burgring, Wien, I (.Xutriche) — et villa Mondigu-
ren, Nice (Alpes-Maritimes). — 1901, Ae.
An'ovtghi.ne (Dniitri X.), Prof. d'Anthropologie — Musée polytechnique,
Moscou (Russie). — 1893. Ae
Anthony (Raoul), \)M, Prép. au Muséum il'FIist nat. — 12, rue Chevert,
Paris, VII. — 1899. T.
Anton'owitch (Wladimir), Prof, à 1 Tniv. — Kiev (Russie). — 1X99. Ae.
Arakzadi (Telesforo de), DM, Gatedratico en la Faculdadde Farmacia —
Barcelona (Espagne). — 1893. T.
Arbo (G. O. E) D M, Brigadlàkare — 55 bis, Munkedamsvei, Ghristiania
(Norwège). - 1880. Ce.
ÂRisTOFF, Médecin de la marine russe. — 1893. Ae.
* MM. les Membres do la Société sont priés Je vouloir bien signaler au Secrétariat
le lacunes ou inexactitudes relatives aux noms, prénoms, professions et adresses.
y^ SlXIIKTK l»'A.NTHHn»'tt|.(tr.lK 1>K l'AlllS
AuN.ui» CF.). Notaire. Corr.>sp. «lu Min. -l.- riiibt. Pul.l. - Barceloniictte
(Bassps-Alpes. — ISSS T
\si'KLiv (I'r..f. Joliuii-H.)- lli'l>iii^'foi-s (Kinluude). - l8<t<J. Ae.
At.îieh (KiuiU'), M.Ml.-maj. de 1"> cl. au 120' d'inf. - 21. rue de la Briche,
St Denis (Seiin'). — 1878. T.
ALBKHT^Louis).M.''d.-maj. de U» cl , liôpuiil. Villemanzy — Lyon (Rhône).
— 1S87. Cn.
AiLT-ui -Mks.nil [Ci. I)'). — ^-.'8 r.du faub. St-llonoré, Paris, VIII. — 1881. T.
AvEBUUY (Lord). — (), 8t-.Iames Square. Loiuiou. — 1867. Ae.
Aya. I) M - iSSTj. T R.
AzoïLAY (Léon), D .M - 7-.>. rue de l'Al)bé-Groult, Pans, XV. — 1890. T.
liAJKNoFK (Dal^^oraukowsky), pêrécoulok, maison Labatcheff. — Moscou
( Russie ). — 190Ô. Ae.
BAJ.KOUK (Henry), Esq. Anthropological department Muséum — 11, Norham
(lardens, Uxford (Antîleterre). — 18'JU. Ce.
Bar (E.-F.-L. de', — 45, rue Boissière, Paris, XVI. — 1903. T.
Bahbkk ^E.-A.), Maître ès-arts de l'Univ. — 4007. Ghesnut st. Philadelphia,
Pa. (U. S. Am.) — 1886. Ce.
Barret (Paul), DM — villa Mesléan, .Tuan-les-Pins, ( Alpes- M arit.) — 1889. T.
Barthélémy (François) — 2, place Sully, Maisons-Laffitte (Seine-et-Oise).
— 18M. T.
Bassano (Duc de) —9, rue D union t-d'Urville, Paris, XVJ. — 1888. T.
Bastian (Adolf), D M. Direktor des K. Muséums fi'ir Volkerkunde — Kônig-
grâtzer Strasse, 120, Berlin (Allemagne) — 1899. Ae.
Baudouin (Marcel). DM — Secrétaire Général de la Société Préhistorique de
France — 21, rue Linné, Paris, V. — 1901. T.
Baye (Baron Joseph de), Corresp. du Min. de l'Inst. publ. — 58. av. de la
Grande-Armée, Paris XVII. — 1873. T R.
Beaunis (H.-E.), Prof. hon. à la Fac. de Méd. de Nancy — Direct, hon.
du Lab. de Psychol.-physiol. de la Sorbonne, — villa Sainte Geneviève,
promenade de laCroisette, Cannes (Alpes-Mar.). — 1863. T.
Beauvais, Interprète chancelier du Consulat de France à Long-Tcheou
(Chine) — 7, rempart de l'Est, Angoulôme (Charente). — 1896. T.
Beddoe (John), Esij. Vice-Pn'-sident of the Anthropological Institute of G.-B.
— The Chantry, Bradford-on-Avon, Wilts. (Angleterre). — 1860. Ae.
Bedot (Prof. Maurice), Dir. du Musée d'Hist. nat. — Genève (Suisse). —
1896. T.
Belluggi (Comm. Prof. Giuseppe), Rettore dell' Univ. — Perugia (Italie).
— 1893. Ae.
BfcNÉDiKT (Moriz), D M, Prof, fiir Nervenpathologie an der Uuiv. — 5, Fran-
ziskaner Platz, Wien (Autriche). — 1893.- Ae.
Ber (Théodore) — Lima (Pérou). — 1876. Cn.
Bertholon (Lucien), D M. Corresp. du Min. de l'Inst. publ. — 14, rue
St-Charles, Tunis (Tunisie) — 1896. T.
Bertilucs (Alphonse), Chef du service anthropométrique à la Préfecture de
police — 3fi, quai des Orfèvres, Paris, I. — 1880. T.
Bertrand (Georges), Doct. en Droit —8, rue d'Alger, Paris, I. — 1883. T R.
Bestion, d m. Méd. de l""» cl. de la marine — rue St-Roch, Toulon (Var). —
1879. Cn
Bezançon (Paul), DM. — .'>!. rue Miromesnil, Paris, VIII. — 189-^. T.
r.ISTE DES MEMBRES VII
BiANGHi f M"* M.) — 0, rue Jean Goujon, Paris, VIII. — ICMKl. T.
BiNET (Etlouard), D M —3:3, Bd Henri IV, Paris, IV. — 188'i. T.
Blakch.\hu (Raphaël), D M, lueniltre «le r.\cad. de Méd., Prof, à la Fao. de
M.'d. - 2M, Bd St-Geriuain, Paris, VII. — iH82. T R.
Blogh (Adolplie), D .M — ■^'t, rue d'.Vuuiale Paris, IX. — 1H78 T.
Boas (Franz), Prof. Natural Ilistorv Muséum .\iitliropology — New-York
(U. S. Am.) - 1899. Ce.
BoBAN (Eugène-A.), Antiquaire — 18, rue Tliibaud, Paris, XIV. - 1881. T.
BoBiUNSKOY (Comte Alexis A.) — Président de la Commission archéolo-
gique, 58 Galernaïa, St-Pétersbourg (Russie). — llKJl. Ce.
BoisjosLiN (J. DE) — Si, rue de la Pompe. Paris, XVI. — 180.'1 T.
Bonaparte (Prince Roland) — 10, av. d'Iéna, Paris, XVI. — 1884. T R.
BoNNARD (Paul , Avocat, Agr. de Philos. — 66, avenue Kléber, Paris, XVI.
— 188:3. TR.
BoNNEL DE Mé/ières (Albert) — 93, rue JoutTroy. Paris. XVII. — 1896. T.
BoNNEMÈRE (,Liouel), Avocat — 26, rue Chaptal, Paris, IX. — 188(J. T.
Bonnet (André), Paléontologue — 55, Bd St-Michel, Paris, V. — 1889. T R.
BoRDiER (Arthur), DM, Direct, de l'Ec. de méd. —Grenoble (Isère). 1876. T.
Bosteaux-Paris (Charles), Maire de Cernay-les-Reims (Marne). — 1890. T.
BouDiER (Victor) — Cambo (Rasses-Pyr.). — 1894. T.
Boulanger(C.), ancien Notaire - Péronne(Somme).— 1899.T. Prëhislorique,
BouTEQUOY, D M — Chàtillon-sur-Seine(Côte-d'Or) — 1878. T.
Brabrook'(E.-W.), Esq. Président of Folklore Society — 178, Bedfort Hill.
Balham, I.ondon, S. W. (Angleterre). — 1880. Ae.
Broga (Auguste), D M, Agr. de la Fac. de Méd., Chirurg. des Hûp. — 5, rue
de l'Université. Paris, VII. — 1880. T R.
Brouardel i,Paul), D M, Prof, à la Fac. de Méd., membre de l'Acad. des Se.
et de l'Acad. de Méd. — 68, rue de Bellechasse, Paris, VII. — 1875. T.
Busghan (Georges), DM — K. Marine-Stabsarzt, 18, Friedrich-Carlstrasse,
Stettin (Allemagne). — 1891. Ae.
Bltureanu (<jr.). Prof, au Lycée — Str. Pàcurari, Jassy (Roumanie). —
1898. T.
Cabred (Domingo), D M, Prof, à la Fac. de Méd. — Hospicio de los Mercedes.
Buenos-Aires (Rép. Arg.) — 1888. T.
Calonge (Belisario), DM — Truxillo (Pérou), — 1861. Ce.
Gambillard (A), D M — Précy-sous-Thil (Côte d'Or). — 1897. T.
Capellini (Giovanni), Prof, di geologia ail' Univ. — Bologna (Italie). —
1874. Ae.
Capitan (Louis), DM, Prof, à l'Ec. d'Anthropologie — 5, rue des Ursulines.
Paris, V. — 1881. T.
Capls (Guillaume), Direct, de l'Agriculture — Saigon 'Cochinchine fran-
çaise). - 1888. T.
Carr (Lucien), Peabody muséum. — Cambridge, Mass. (U.S. Am.) —
1879. Ae.
Carrière (Gabriel), Corresp. du Min. de l'Inst. Publ. — 5, rue Montjardin,
Nîmes (Gard). - 1894. Cn.
Carronv, DM— Canton (Chine). — 1879. Ce.
Cartailhag (Emile) — 5, rue de la Chaîne, Toulouse (Hte-Gar.) — 18«j9. T.
Castelfraxgo (Pompeo), Ispettore degli scavi e monumenti d'anticliità —
5. via Principe Umberto, Milano (Italie). — 1884. Ae.
Viii SCMMhrrÉ D'ANTIinoP(»LOGlK t)E PARIS
(U\iDKiu.iKu((i.), InK«Miiuur— A'I. Chaussée Vleur^'at, Bruxelles (Belgique)
l'.KM. T. — liéinotjraphie.
Ca/alis dk P'oNDoiT.K (l'aul), Lic. ès-Sc, Ingénieur, Corresp. (lu Min. de
rinst. Pulil. — IH. rue des Ktuves, Montpellier (Hérault). - 1805. T.
Cfci.KYHAN (I'aimk i>k), D M - 6. pue St-l'lorentin, Paris, I. — 1896. T.
«■.Ei.i.K (Kugéne), 1) M — San-Krancisro. Californie (U. S. Am.) - 1862. Cn,
ChaI'LIN (William), Ingénieur — Plac J. Laborde, Tananarive (Madagas-
car). — liM». T.
Charvilhat. dm — \, rue Blatin, Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme). —
VM^ T.
CuAssiN, D M — Vera-Cruz (Mexi(iue), — 1870. Cn.
CnATKi.i.iF.iKPaul du). Corresp. du Min. de l'Inst iml)l. — Kernus, par Pont-
r.\hbé (Finistère). — 1890. T.
Chaivet (.Gustave), Notaire, Corresp. du Min. de l'Inst. Publ. — Ruffec
(Charente) — 1875. T.
Chehvin (Arthur), DM, Direct, de l'Institut des bègues — 82, av. Victor
Hugo, Paris, XVI. — 1877. T R. — Dèynographie.
Choidens (Joseph <le), D M — Porlo-Rico (Antilles). — 1861. Ce.
Claine (Jules). — Consul de France à Rangoon (Birmanie). — 1891. Cn.
Clément-Rlbbens — 27, quai St-Michel, Paris, V. - 1890. T.
Clouu (Kdward), Esq. — 19, Carleton road, Tufnell Park, London, N
(Angleterre). — 1901. Ce.
Closmadeuc (G. de), DM — Corresp. du Min. de l'Inst. Publ. et de l'Acad.
de Méd. - Vannes (Morbihan). —1884. T.
CoccHi (Igino), Prof, à l'Inst. des études super. — Firenze (Italie). —
1872. Ae.
CoLLiONON (René), DM, Méd.-maj. de !■■« cl. au 25e d'inf., Corresp. du Min.
de l'Inst. Publ. - 6, rue de la Marine, Cherbourg (Manche). — 1880. T,
CoLLiN(Kmile).— 35, r. des Petits-Champs, Paris, 1 — 1888. T. Paie</ino?0(/^e.
CoLLiNGwooD (J. -Frederick), Esq. — 5, Irène Road, Parson's Green, Lon-
don, S. W. (Angleterre). - 1864. Ae.
CûRA (.Prof. Guido), Dirett. del Cosmos — 2, via Goito. Roma (Italie), —
1873. Ae.
Corne, Consul au Japon. — 1879. Cn.
CoRNiL (Victor), D M. — Prof, à la Fac. de Méd., membre de l'Acad. de Méd,
— 19, rue St-Guillaume, Paris, VII. — 1867. Hon.
Costa Ferreira (Antonio A. da), D. M. — Museu antropologico. — Rua Sa
da Bandeira, Coïml)ra (Portugal\ — 1902. T.
CosTA-SiMÔEs (A. A da.). Prof, à l'Univ. — Coïmbra (Portugal). — 1866. Ce.
CouRiARD (Alfred), DM — Grande-Koniuchenui, St-Pétersbourg «Russie).
— 1875. Ce.
CouRTY (Georges) — 35, rue Compans, Paris, XIX. — 1901. T.
CRÉgLi-MoNTFORT (Comtc de) — 58, rue de Londres, Paris, VIII. — 1903, T.
CuMONT (Georges), Avocat - 19, rue de l'Aqueduc, Saint-Gilles, Bruxelles
(Belgique). — 1901. Ae.
CuNNi.NGHAM, Prof. of Anutomv in the University of Edinburg. — 1905.
GuYER (Edouard), Prof, suppl. à l'Ec. des Beaux-Arts — 8, quai Debilly,
Paris, XVI. - 1886. T.
Daleau (François) — Bourg-sur-Gironde (Gironde), — 1875. T. Préhisto-
rique, ethnographie.
LISTE DES MEMBRES
IX
'Dalton (Ormonde M.) — Es(j., liritish inusnim. — Bloomsburv, Loiidon,
W. C. (Angleterre). - lUOl. Ce.
Darling (W.), Prof, d'anatoinie aux Univ. de New- York et Vermont —
New-York (U. S Am.) — 1x77. Ce.
Daveluy (Charles), Direct, géii. li«>ii. des Coutrihutioiis directes et du
Cadastre, Sous Directeur de l'Ec. d'Autln-opologie — 107, Bd Brune,
Paris, XIV. - 1889. T.
Deghelette (Joseph), Conservateur au Mu.sée de Roanne (Loire). — 1905. T-
Deglatigny (Louis) — 11, rue Biaise-Pascal, Rouen (Soine-Inférieure) —
1897. T R.
Delislk (Fernand), D M, Prépar. au Lab. d'Anthropologie du Muséum
d'Hist. nat. - 35, rue do l'ArbahMo, Paris, V. — 1883. T.
Delmas (Louis H.), D M — La Havane (Cuba). — 1878. Ce.
Delvincourt, Archéologue — 17, rue des Telliers, Crécy-sur-Serre (Aisne).
— 1901. T.
Deniker (Josepli), Doct. ès-Sc, Bibliothécaire du Muséum d'Hist. nat. -
8, rue de BufTon, Paris, V — 1881. T R.
Demonet (E.). D M, Méd. aide-major, 13« Rég. d'Inf. — Nevers (Nièvre).
— 1904. T.
Derizans (Benito), D M — Larangeiras (Brésil). — 1876. Ce.
Descamps (Auguste) — 1, Bd Beauséjour, Paris, XVL — 1807. T.
Despréaux (P.), DM — 11, rue Littré, Paris, VL — 1895. T R.
Destruges (Alcide), DM — Guayaquil (Equateur). — 1863. Ce.
Deyrolles, Lise, es-science, Méd. aide-major, 48» Rég. d'Inf. — Guingamp
(Côtes-du-Nord). — 1904. T.
Dharvent (Isaï), Archéologue, — Béthune (Pas-de Calais). — 1902. T.
Préhistorique
DiAMANDY (Georges), Député au Parlement roumain. — Bucarest(Roumanie).
— 1892. T.
DoKiNEAU (Albert) — 71, rue de la Madeleine, Xoisy-le-Sec (Seine). —
1898. T. Palelhnologie.
Donner (Otto), Prof, à l'Univ. - H^lsingfors (Finlande). — 18'.)0. Ce.
DoRSEY (George A.). — Curator Field Colombian Muséum Ethnologie.
Chicago. — 1904. Ce.
DouGLASS (Andrew E.), de New- Y'ork, chez M. Leroux, Editeur — 28, rue
Bonaparte, Paris, VI. — 1887. T R.
Dubois (Eugène), D M — 45, Ziljweg, Haarlem (Hollande). — 1895. Ae.
DucHESNE (E.-L.), D M, Lie. en Dr. — 15, rue Pigalle, Paris, IX. —
1885. T.
DucKwoRTH (W. L. H.) Esq. Lecturer on Physical anthropology. .lesus
Collège — Cambridge (.Angleterre). — 1901. Ce.
DuHOUssET (Colonel E.) —6, rue de Furstenberg, Paris, VI — 1863. Cn.
DcNANT (P.-L.), D M - Genève (Suisse). - 1868 Ce.
Dupont (Edouard), Membre de l'.Acad. des Se. de Belgique, Direct, du Musée
d'Hist. nat. de Bruxelles — Villa du Lac, Boitsfort (Belgique). —
1872. Ae.
DupoRTAL (Henry), Inspecteur gén. des Ponts et Chaussées — 4, villa Mont-
morency, Paris, XVI. — 1868. T.
DussAUD (René) — 133, avenue Malakoft', Paris, XVI. — 1900. T.
DuTAiLLY (Gustave), Député — 84, rue du Rocher, Paris, VIII. — 1887. T.
X «itXMlhÉ l»'\NTIinOPOI.O<iIK LE PARIS
lu \Ai. (Matliiiis;. 1) M, nnMiilirt! .lo l'A.-a.l. .!.■ M«'''i , Prof, à la Fac. de
Mé«l.,à l'Kc. d'Aiillirv)pologiei!tà l'ftc. <les li.;:iii\ -Arts - 11, cité Maies-
liorhes, rue des Martyrs, l'aris, IX. — 1H7.4. T R.
Dybowski (JeaiO. Dirt'it. du Jardin d'essai colonial — Viiicennes (Seine).—
l«»'i. Cn.
I-A:Hf:KAC. (M. i»'i, Inspecteur lion, «le l'Assistance i)ubli(iue — 21», rue de
Con-lt-, l'aris. VI — et G, dieinin des Coutures, Sèvres (S.-et-Û.). —
Isa». T.
EiGHTHAi. (Louis d') - Les Ht^zards, par Nujjrt'iit-sur-Vernis-on (Loiret). —
I8S1.T.
Kkjoy (l'aul d') Substitut du Procureur de la République — 19, rue de Ghilou,
Le HsUre (Seine-Inf.) — !«•'». T R.
KssLiNo (Prince d), — 8, rue Joan (ioujon. Paris. VIII. — 1871, T.
Evans (Sir. lolin) —Nasli Mills, Heniel Hempstead, Herts. (Angleterre). -
1877. Ae.
Fai.lot (A. , i) M. Prof, à l'Kc. de Méd. — 167, rue de Rome, Marseille
(P.-du-Rh.). - 1H79. T.
KAUVELLK(Ren.'). D M — II, rue de Médicis, Paris. VI. - 1893. T.
Fenerly-Effendi, [) M, Prof, à l'École de Méd —Constantinople (Turquie).
- 1865. Ae.
FÉRÉ(Charles), D M, Méd.deBicêtre - 2-2, Av. Bugeaud, Paris, XVI. — 1878. T.
Fkkxanoès (A.-F.), DM — Rio-de-Janeiro (Brésil). — 1861. Ce.
Fkhrazi>kMacedo (F), D M — Caîçada do Monte. 1, Lisboa (Portugal). —
1888. T.
FiAtx (Louis), DM — 22, rue Tocqueville, Paris, XVIII. — 1878. T.
FiRMiN (A.), avocat — Cap-Haïtien (Haïti). — 1884. TR.
Fischer (Henri), Clief desTrav. géolog. à la Fac. des Se. — 51, Bd St-Michel,
Paris, V. - 1893. T.
Flamand (C B M ), cbargé de cours à l'IOc. Super, des Se. — 6, rue Barbés,
Mustapba-Alger (Algérie). — 19(X). T.
Fontan (Alfred) — Mazamet (Tarn). - 1860. Cn.
Fontarge (A. Trumet de). D M - 2, rue Corvetto, Paris, VIII. — 1882. T.
Fouji; (Gustave), Palethnologue, S3, rue de Rivoli, Paris, IV. — 1896 T R.
FoiJHDHiGNiKH (Ed.), Corresp. du Min. de llnst. publ. — 24, Avenue
Wagram, VIII. — 1879. T.
Fraipont (J). D M, Membre de l'Acad. des Se. de Belgique, Prof, de pa-
léontologie à rUniv. —35, Mont Saint-Martin, Liège (Belgique). —
1896. Ae.
FHYER(Major), Commissaire du gouvernement anglais —Calcutta (Indes an-
glaises). — 1877. Ce.
FuMouzE (Victor), DM- 78, rue du Faub.-St-Denis, Paris, X. — 1872. T.
(jADEAU DE Kerville (Henri), Homme de sciences — 7, rue Dupont, Rouen
(Seine-Iuf.) — 1886. T.
Gaillard (Georges), DM- 47, rue Blanche, Paris, IX. — 1879. T.
Galdo (MaimelJ. de). Présidente délia Academia Medico-Quirurgica Espa-
iiola — Madrid (Espagne). — 1865. Ce.
Gallaju> (Frank), D M — 24, place Vendôme, Paris I — et à Biarritz (Basses-
Pyr.) — 1892. T.
Garcia Loi'K/. (Eduardo) — Abogado. Galle 63, no 518. Mérida (Mexique).
190:3. T
LISTE DKS MKMIIRKS X I
Garsox (John-G.). D M. Esq. Iiistructor on tlie metric systein of ideiitili-
calion — 14, Stratfonl Place, Loridou.W. (Angleterre) — 1893 A e.
Geoffroy (Jules), DM — 15, rue de Hambourg, Paris, VIII. — 187'J..T.
Geohges (Maximilieii). Airliitt'cte - 1 'i8, rue Lecourbe, Paris, XVI.— ISiKj.T.
(iiGLioi.i l'ruf. Kiirico H.), Diretlore del K. Museo zoologico (aniniali vor-
tebrati — 'i, Via Farinala degli Uberti. l'"ireiize (Italie). - 1S8'^. Ae.
GiovANETTi (Nubile Ciiulio), Étudiant, — 7. place du Collège de France,
Paris, V. - 1902. T.
GiHAKD (H.), Prof, à l'Éc. de nièd. navale. — Bordeaux (<îiroiide). — 1002. T.
GiRALX (Louis) — 9 bis, av. Victor-Hugo, Saint-Mandi' (Seine). — 1898. TR.
GiROD (Paul). Prof, à la Fac. des Se. et à l'Ec. de Méd. - 20, rue P.latin,
Clermout-Ferrand (Puy-de-Dôme). — 1900. T.
GiUFFRiDA-RuGGERi (V.), D. M, DocBute di anlropologia nolla K. Univ.,
26, via del Collegio roraano, Roma (Italie). — 1901. Ce.
Glai MONT (G.) Percepteur — Fleurance (Gers). — 1889. Cn.
GoDEL (Paul) — Grenoble (Isère). —1892. Cn.
GoDiN (Paul', D M, Mt'd. chef de l'Hùp.mil. deTarbes (Hautes-Pyrénées).—
1896. T.
Gordon (Antonio de), D M, Président de l'Acad. de Méd. et Se. phys. et
nat. — Habana (Cuba). — 1897. Ce.
GoRODicHZE(Léon), D M — 85, rue de la Bienfaisance, Paris, VIH, — 1902, T.
Gouhari (David), D M — Eiskoié Oukreplenie, District de HostoJl'-sur-le-
Don (Russie) — 18i»^>. T.
Gromoff (M'"« Anna). — Petrovka, maison Korovine. — Moscou (Russie).
1900. Ce.
Gross (Victor), DM- Neuveville, canton de Berne (Suisse). — 1882. Ae.
Guébhard (A.), Agrégé (géologie) de Fac. Méd. — Si- Vallier-de-Thiey( Alpes-
Maritimes). — 1902. T R.
GuELLiOT (Octave), D M, Gliir. des Hôp. — 9, rue du Marc, Reims (Marne).
- 1899. T.
GuiBERT, DM— St-Brieuc (Gôtes-du-Nord). — 1888. T.
Guida (Salvatore), Eieut. -colonel médecin — Roma (Italie). — 1894. Ae.
GuiMET (Emile) — 1, place de la Miséricorde, Lyon (Rhône), — et Musée
Guimet, avenue d'iéna, Paris, XVI. — 1877. T R.
Gdyot (Yves), ancien Ministre — 95, rue de Seine, Paris, VI. — 1874. Hon.
Haddon (Alfred-Cort).— Prof. F. R. S.Inisfail.HilIsRoad— Cambridge (Angle-
terre). — 1901. Ae.
Haeckel (Prof. Ernst) — lena (Allemagne). — 1902. Hon.
Hagen (A.), DM — 2 bis, place Gambetta, Toulon (Var). - 1894. Cn.
Hamy (Ernest), D M, membre de l'Acad des Insc. et B-L. et do l'Acad. de
Méd. Prof. d'Anthropologie au Muséum d'Hist. nat. —8, rue de Buffon,
Paris, V. - 1867. T.
Hanotte (Maurice), DM — 6, rue de la Tréraoille, Paris, VIII. — 1899. T.
Haynes (Henry-W. I, Prof, à l'Univ. — 2-39, Beacon street, Boston, Mass.
(U. S. A). — 1878. Ce.
HEGER(Franz),Leiterder Anthropol.-ethnographischen amk. k. naturhistor.
Hofmuseum — 1, RasumofTskygasso, Wien,III (.\utriche). - 1901. Ce.
Heger (P.) D M. Prof, de Physiologie à l'Univ. — 35, rue des Drapiers,
Bruxelles (Belgique). — 1884. Ce.
\II
so«:ii^rrK d'anthhufiu.imjik de paris
Hkikki.i (.IhUmIO - IWrnt fur l'r^-.-s.-l.i.-lit.' .ui -I.t Tniv. - Zuricli (Suisse).
IIX>I. Ce.
Hkikki. (Axel-O) - Helsini-fors (Kiiilaii.lc . - 18it'.t. Ce.
HkssiyfhIA ),imprimeur-.''diU'ur-7.riu'I)arcet,P!uis. XVII. — 1S81. TR.
Hkhhkht (.losei>h-.\inan.l). Coinmaii'liiiit .lu ^;.' nie eu retraite. — 19, rue
nHutt'f.'uiile. Paris. VI - l'.MJl. T.
HKHvft((;eorui'sl. D Nf. Prof, à TÈc. .l'Anthropologie - 8, rue de Berlin.
Paris. IX. - lH«<t. T.
Hernandkz (Fortunato), D M. Inspecteurdes Consulats. —Mexico. Mexique.
i\m. T.
Hii.DKBHANi. (Hans-0.), D M, Kiksantikvarie. K. Vitterhets-Historie och
Antikvitets Aka.lemieu — Stockholm (Suède). — 1874. Ae.
His (Wilhelm), Anatoiui.- l'r.^f. iii <ler Univ. - K.uiigstrasse, 22, Leipzig
(Saxe).- I86'i. Ae.
HoELDRR (H. von), Ober-Medizinalrat — Marienstrasse, 31, Stuttgart (Alle-
magne). — 1882. Ae.
H<)KHNEs(Prof. Moriz), < '.ustos-adjunct am K. K. Naturhistorichen Hofmuseum
- Fn^'argasse, 27. Wieii, III (Autriche). — 1901. Ae. Préhistorique.
IIoi.Bf:. Pharmacien — Villa des Pervenches — Mourillon-Toulon (Var).
— l'.>03 T.
H.jLMEs (W. H.i, Prof., Head Curator National Muséum Authropology,
Washington. — 190-3. Ae.
HoroH (Walter). Curator of the U. S. National Muséum (Ethnology) —
Washington (U. S Am. — 1899. Ce.
HorzÉ (E.), D M, Prof. d'Anthropologie à l'Univ. — 89, Bd de Waterloo,
Bruxelles (Belgique). — 1893. Ae.
HovEi-ACgUF. (Mme veuve Abel) — 38, rue du Luxembourg, Paris, VL —
1896. T R.
HovELACQUE (André) —38, rue du Luxembourg, Paris-VI. — 1901. T R.
HovonKA (Oskar v.), D M — Haciceva ulica, 19, Agram (Hongrie). - 1899. Ce.
HoYOS Sainz (Luis de), Catedratico del Instituto — Dos Codos, 9, O Sille-
ria, 1, Toledo (Espagne). — 1892. T.
Hkdi.icka. — Sous-direct, du Lab. d'Antliropologie U. S. National Muséum
Washington. — 1904. Ce-
Hubert (Henri) — 74, r. Claude-Bernard, Paris, V. — 1900. T. Préhistorique.
HuoiJET (.1. J. A.) DM— Prof. adj. à l'Ecole d'Anthropologie, — 11, rue
Violet, Paris, XV. — 1902. T.
Ingersou. (Smiih), Sous-Direct, des Collections Anthropologiques et du
Labor. d'\nth. Natural history Muséum. — New-York. — 1905. Ce.
Issei. (Arturo), Prof, di geologia ail' Univ. — Genova (Italie). — 1901. Ae.
JvANOVsKY (.\1.), Secrétaire de la Section d'Anthropologie de la Société des
.Amis lies Sciences, Musée historique. — Moscou (Russie). — 1879. Ce.
.lAcgrEs (Victor), D M, Prof, à l'Univ. — 36, rue de Ruysbroeck, Bruxelles
(Belgique). — 1893. Ae
Jalouzet, vice-Consul de France — Belfast (Irlande). — 1883. Cn.
Javal (Emile), D M, membre de l'Acad. de Méd. — 5, Bd de la Tour.
Maubourg, Paris, VII. — 1872. T R.
JouRDAN (Emile), DM- 3, rue Ampère, Paris, I. — 1897. T R
JouRON (L ). — Avize (Marne). — 1901. Cn.
Jous.sEAi.'ME (F.), D M - 29, rue de Gergovie, Paris, XIV. - 1866. T R.
LISTE Ub» MEMHRES XIII
JuGLAK (Mrae Joséphine) — 58, ruedesMathurins, Paris, VIII. — 1881. T R.
Julien (Pierre), Étudiant — 40, place Jaude, Clennont-Ferrand. — lVt03. T.
Kate (Hermann ten), D M — Batavia. — Java. — 187'J. T.
Keane (.Yugustus H.) — Esq. Late Vice-Presidont Aiilliropoloj^qral Iiistitute
G. B. et Ir. — Arajn-Gah, 70, Broadhurst (tardons, South Hampstead,
N. \V. (Angleterre). — 100-.2. Ce.
Keller, Ingénieur — 77, rue du Moiitot, Nancy (Meurthc-et-M.) — l'JOU. T.
Kessler (Fr.), manufacturier, Soultzmatt (Alsace). — 1883. T R.
Khanenko (Bolidan) — Kiev (Russie). — 1902. Ce.
KoLLMANN (Julius), Prof. de Zoolo;,'ie à l'Univ. — BAle (Suisse), — 1803. Ae.
KovALRwsKi (Maxime) — villa Batava, Beaulieu(Alpes-Maritimes). — 1894. T.
Labadie Laguave (Frédéric), D M, Méd. des Hùp. — 8, av. Montaigne,
Paris, VIII. — 1869. T.
Lacassagne (A.), Prof, à la Fac. de Méd., Corresp. de l'Acad. de Méd. —
1, place Raspail, Lyon (Rhône). — 1800. Cn.
Laghené (de). Consul de France - Moscou (Russie). — 1879. Cn.
Lalayantz (Ervand), Séminaire Nersissian — Tiflis (Russie). — 1805 Ce.
Laloy (F>.), DM, Bibliothécaire de la Fac. de Méd. — Bordeaux. — 1902. Cn.
La Mazellière (Marquis de). — 40,rueBarbit-de-Jouy, Paris, VII. — 1904. T.
Landry, Prof, à l'Univ. Québec (Canada). — 1801. Ce.
Lannelongue (0. M.), membre de l'Acad. dos Se. et de l'Acad. de Méd.
Prof, à la Fac.de Méd. — 3, rue François 1er, paris, VIII. — 1877. T.
Lapicque (Louis), D M — Maître de Conférences à la Fac. des Se. — 0, rue
Dante, Paris, V. — 1892. T.
La Tour (de), DM — 10, rue Cortambert, Paris, XVI. — 1902. T.
Launois. — 12, rue Port;dis, Paris, VII. — 1904. T.
Lavex (Désiré). — 11, rue Lamarck Paris, Vlll — 1905. T.
Laville (André), Préparateur à l'Ec. des Mines — 39, avenue des Gobelins,
Paris, XIII. — 1897. T.
Leboucq (H.), D M, Prof. d'Analomie à l'Univ. — Gand (Belgique). —
1884. Ce.
Le Coin (Albert), D M — 15, rue Guénégaud, Paris, VI. — 1873. T.
Lécuyer, DM — Beaurieux (Aisne). — 1887. Cn.
Le Double(A. F.), D M, Prof. d'Anatomie à l'Éc. de Méd., Corresp. de l'Acad.
de Méd. — 29, rue Nicolas-Simon, Tours (Indre-et-Loire). — 1876. T.
Lehmann-Nitsche (Robert), D M, et D. es Se nat. et en médecine. Jefe de
la seccion antropologica del Museo de La Plata. - La Plata (Répub.
Argentine). — 1897. T.
Leite de Vascongellos (José). — Director do Museu Ethnologico portu-
guès. — Bibliotheca nacional, Lisboa (Portugal). — 1899, Ae.
Lejars (Félix), D M, Agr. delà Fac. de Méd., Chirurg. des Hùp. — 90, rue
de la Victoire, Paris, IX. — 1889. T.
Lejeune (Charles), Avocat — 12, rue Soufflot, Paris, V, — 1890. T R. — Reli-
gions et Sociologie.
Lesouef (Aug.-A.) — 109, boulevard Beaumarchais, Paris III. — 1877. T.
Lesquizamon (D. Juan-Martin), Ministre du gouvernement de la province de
Salta (Rép. Arg.). — 1877. Ce.
Letourneau (Gustave), Avocat - 5<J, rue X.-D. des flhamps — Paris, VI.
— 1902. T.
Levasseur (Emile), membre de l'Institut, Prof, au Collège de France — 26,
rue Moubieur-le-Prince, Paris, VI. — 1881. T.
XIV sociKTk d'anthhopolcmiIk uk paris
LissAUER, L) M, Prof.. Vice- Président de la Soc. Anthropologie de Berlin
Alleinni^iie — llX^'i. Ae
Livi (.Kidolfo), I) M, .M:i^;^;iurt'-Mf<lico — 1», via Sommacampagna, Roma
(Italie). — iHin. Ae.
LoisEi. ((iustave), D M , (^hef du Lab. d'Histologie à la Fac. de Méd. —
t>, rue de THcole de Médecine, Taris, VI. — 1902. T.
I.«».sr.B.iis (Paul). Doct en Méd. de la Fac. de Paris, Chir. de l'Holel-Dieu
de Joigny. Membre de la Soc. des Se. hist. et nat. de l'Yonne. — 1905.
Loi;bat (duc de) — 'i7, rue Diiinoiit-d'Urville, Paris, XVI. — 1895. T R.
LoDYs (Pierre) - 29, rue de Houlaiiivilliers, Paris, XVI. — 1900, T.
LuuoL (Edouard), Avocat — 11, rue de Téhéran, Paris, VIII. — 1866. T.
LuMHOi.Tz fCarl), Consul général de Suéde — New- York (U. S. Am.). —
ISNii. Ae.
Lrst^.HAN (Félix vou), 1) .M, .\ssistent ani k. Muséum fiir V'ilkerkunde —
Friedenau bci, Berlin (.Uleniague). — 1878. Ae.
Magqi'aut (Emile) — 19. allée des Charmilles, Gargau-Livry (S.-et-(J.). —
1900. T.
Mac Gurdy (George-Grant), lustructor of Prehistoric Anthropology — 237,
Church Street, New Haven, Conn. (U. S. Am.). — 1896. T.
Magalhaens (José de), D. M. — 8, rue de la Sorbonne, Paris, V. —
1903. T.
Magnan (V.), D M, membre de l'Acad. de Méd. Médecin de l'Asile Sainte-
Aune, — 1, rue Cabanis, Paris, XIV. — 1876. T.
Mahoudeau (P. -G ), Prof. d'Anthropologie zoologique à l'Éc. d'Anthropo-
logie — 188, avenue du Maine, Paris, XIV. — 1887. T.
Malief ;N.-M.), Prof. d'Anatomie à l'Uuiv. — 41, Souvarowsky prospect,
St-Pétersbourg (Russie^ — 1882. Ae.
Manouélian (J.) — 57, rue Falguiére, Paris, XIV. — 1900. T.
Manouvrier (Léonce), D M-, Directeur du Lab. d'Anthropologie de l'Éc.
des Hautes Études, Prof. d'Anthr. physiologi(iue à l'Éc. d'Anthropo-
logie — 15, rue de l'École-de-Médecine, Paris, VI. — 1882. T R.
Mantegazza (Prof. Paolo), Direttore del Museo Nazionale d'Autropologia
Firenze (Italie). — 1863. Ae
Marin (Louis) — 13, av. de l'Observatoire, Paris, VI. — 1898. T R.
Marmottan (Henri), D M, —31, rue Desbordes-Valmore, Paris, XVI. —
1875. T.
Martin, (A.), D M. —Alger (Algérie). — 1879. On.
Martin (Rudolf), DM, — Prof fiir Anthropologie an der Univ. -•- Zurich
(Suisse). — 1901. Ce.
Marty (J.), d m, Méd. princ. à l'Hôp. Mil. — 7, rue de la Paillette, Rennes
(llle-et- Vilaine). — 1899. T. R.
Masbrenier (.Jean), DM— 24,av.Thiers, Melun (Seine-et-Marne).- 1902. T.
Mason (Otis-T.), Curator of the U. S. National-Muséum (Ethnology). —
Washington (U. S. Am.) - 1893. Ae.
Massignon (F.) — 93, rue St-Honoré, Paris, I. - 1883. T.
Masson (Pierre), édittMir — 120, Bd St-Germain, Paris, VI. — 1900. T.
Mathkws (Robert H.) — Hassall Street, Parramatta (N. S. W.) — 1899. Ae.
.Matiegka (Heniy), Pruf. à l'Univ. — Prague (Bohème) — 1901. Ce.
Maurbl (Edouard), D M. Prof, de pathol. expér. à l'Ec. de Méd. — 10, rue
d'Alsace-Lorraiue, Toulouse (Haute-Garonne) — 1877. T.
LISTE DK> MEMBRES XV
Mauss, Prof, à l'Ecole des Hautes-Etudes (section des Sciences Relig.). —
31, rue Saint-Jacques, Paris, V. — 1905. T.
May (Georges), Banquier — i, Avenue Hoche, Paris, VHI. — 1904. T. •
Mayet (Lucien), DM — 17, place Morand, Lyon (Rhône) — 1900. T. Anthro-
pologie générale. Anthropologie criminelle.
MEDftA (Eugone), D M — 3, Palescapa, Milan (Italie). — 1903. T.
Médina (Gabriel) — 9, rue d'Oran, Tunis (Tunisie) — I89<3. T.
Menahd (Saint-Yves), DM, Meniln-e de r.\cad. de Mi'd, Direct.de l'Institut
de vaccine animale — 8, rue Ballu, Paris, IX. — 1S87. T.
Mevek (A.-B.),Director des K. Zoologischen und antiiropologisch.-ethnogra-
phischen muséums — Dresden (Allemagne) — 1890. Ae. Anthropolo-
gie générale.
Meveh (Théodore) —98, rue deNeuilly, Gagny (Seine-et-Oise) — 1900. TR.
MiNKOv (Théodore), Ingénieur, ancien Secrétaire de la Section asiatique de
l'Exposition russe de 1900, - 28, boul. St-Marcel, Paris, V. —1901. Ce.
MiNovici (Mina), D M, Prof, de Méd. légale, Direct, de l'Institut médico-
légal. — Bucarest (Roumanie). — 1902, T.
MiNOVici (Nicolas), D M, Direct, adj. de l'Institut médico-légal. — Bucarest
(Roumanie). — 1902. T.
MiREUR (Hippolvte), D M - 1, rue de la Répul)lique, Marseille (Bouches-du-
Rhùne) — 1890. T.
Mohyliansky (Nicolas) — Vassilievsky ostrov, 7'' ligne, n« 60, log. 11,
St-Pétersbourg (Russie) — 1897. T.
MoLiNiEH, Pharmacien — 1878. Cn.
Mo.NCELON (Léon) — Ygrande (Allier) - 1880. T R.
MoxTANO (Joseph), DM — Gémil, par Montastruc (Hte-Gar.) — 1879. On.
MoNTELius (Oscar), D M, Conservateur du Musée royal d'archéologie, -
Stockholm (Suéde) - 1874. Ae.
Mop.EL (Léon), Receveur des finances, en retraite, Gorresp. du Min. de
rinst. publ. — 3, rue de Sedan, Reims (Marne) — 1880. T.
MoHÉ.NO (Francisco P.), Direct, du Musée de La Plata(Rép. Arg.) — 1893. Ae.
MoRENO Y Maiz (Th.), DM — Lima (Pérou) — 1864. Ce.
Morris (J. P.) — Ulverston (Angleterre) — 1867. Ce.
MoRSELLi (Enrico),Prof. di Neuropatologia nella Univ. — 46, via Assarotti,
Genova (Italie) — 1874. Ae.
Mortille;t (Adrien de). Prof. àl'Ec. d'Anthropologie, Président delà Société
d'Excui'sions scientifiques — 10, bis, av. Reille, Paris XIV. — 1881. TR.
Préh is torique, et h nog ) 'ap hie.
MucH (D'' Matthaus), Koiiservator der Kunst.-u. histor. Denkmale —
Hietzing bei VVien (Autriche) — 1878. Ae.
MûLLER (Sophus), Directeur du Musée des Antiquités — Copenhague
(Danemark) — 1899. Ae.
MuNRO (Robert), Esq., Secretary of Society of Anti(juaries of Scotland —
48. Manor Place, Edinburgli (Ecosse). — 1899 Ae.
Musgrave-Clay (R. de)J DM — villa Viviane, Salies-de-Béarn (Basses-Pyr.)
— 1889. T.
Myrial (Mni" Alexandra) — villa Mousmé, La Gaulette, Tunisie— 1900. T.
Myres (J.-L.), Esq. Secretary of Anthropological institut of G. B. andir. —
Christ church, Uxford (Angleterre) — 1901. Ce.
XVI sih:iktk d anthropologie de paius
Neis i,P:uil), I) M, M<'<1. (if If» cl. fio la marine — Saigon (Cochinchine fran-
çaise) - 18S1. Cn.
îîif:oi,AÏEv>KY ("'.onstaiilin, — 1»5. av. «le Versaill»;3. Paris, XV — 1900 Ce.
NiEOKKLK (Lubor).I) M, i^rof. d'Anthropologie à l'Univ. — Taborska ul. 1045
11. Pragiii' (.Vutri.-lie) — 1S93. Ae.
NovAUo (Bartlioioineo), l) M, Prof, à la Kac. des Se. — Buenos-Aires (Rép.
Ar-.) - i8TS. Ce.
NoviKOFF (J.) — ti, rue île la Poste, Odessa (Russie) — 1891. T.
OB<ii,oNftKi (Nicolas), DM, Prof, à l'Univ. — Kiev (Russie). — 1889. Ae.
OrvAiiOFF (Comtesse), Présidente de la Société archéologique de Moscou,
— Musée historique, Moscou (Russie). — 189i^). Ae.
Pa«;i.iani (Luigi), Prof, à l'Univ. — Toriiio (Italie) — 1877. Ce.
i*Ai'ii.i.Ari/r (Georges), 0 M, Direct, adj. du Lab. d'Anthropologie de l'Ec. des
Hautes Etudes, Prof, à l'Kcole d'Anthropologie. — 3, rue Malaquais,
Paris, VI. - 189;i T.
I'arIs ((ïustave), DM — Luxeuil (Haute-Saône) — 1880. T.
Paul-Hont.our (Georges), DM — 164, rue du faub. St-Honoré, Paris, VIII.
— 189i TR.
Pkchdo (J.), DM — Villefranche (Aveyron) — 1878. T.
Pèse (X.), - Ozon Park Woodaven, New- York, L. I. (U. S. Am.) — 1884. T.
Pknnetier (Georges), D M, Prof.de physiologie à l'Ec. deMéd. — 9, impasse
de la Corderie, barrière St-Maur, Rouen (Seine-Inf.) — 1868. T.
Perera (Prof. Andrews) — Slave-Island, Colombo (Geylan) — 1882. Ce.
Pétrini (Michel), D M — Direct, du Service de Santé, Bucarest (Roumanie)
— 1874. Ae.
PiCHARDO (Gabriel) — La Havane (Cuba) — 1878. Ce.
PiGHON, D M — Château des Faverolles, par Couches (Eure). — 1872. Cn.
PiÉRoN (Henri), D M, Prép. à l'Éc. des Hautes-Études — 96, rue de Rennes,
Paris, VI. — 1902. T.
PiBTKiEwiGZ (Valérius), DM — 79, Bd Haussmann, Paris, VIII. — 1878. T.
Piètrement (G. -A.), Vétérinaire militaire en retraite — 141, Bd St-Michel,
Paris, V. - 1874. T.
PiETTE (Edouard), Juge honoraire, Gorresp. du Min. de l'Inst. publ. —
Rumigny (Ardennes) — 1870. T.
PiQNÉ, D M — San Francisco, Californie (U. S. Am ) — 1868. Cn.
PiGORiNi (Prof. Luigi), Dirett. del Museo nazionale preistorico ed etnogra-
fico — Collegia romano, Roma (Italie) — 1881. Ae.
PiNOT (abbé), missionnaire — FortGood Hope, Rivière Mac-Kensie (Canada)
— - 1872. Ce.
Pittard (Eugène), prof, au Collège de Genève. 30 Florissant. Ce.
PoKRovsKi (Alexandre), Lie. ès-Se. nat., Privat-docent à l'Univ. — Kharkov
(Russie) — 1894. T.
PoRNAiN (Léon), DM — 16, avenue de Madrid, Neuilly (Seine). — 1888. T. R.
Posada Arango (prof. A.). DM— Médelline (Colombie) - 1870. Ce.
PouTiATiNE (prince Paul) — Ligofka, 65, St-Pétersbourg (Russie) — 1896. Ce.
Pozzr(Samuel), D M, memb. de l'Acad. de Méd., Prof, à la Fac. de Méd.,
Chirurg. des Hôp. — 47, àv. d'iéua, Paris, XVI — 1870. T.
Prengruebkr (A.), D M, Méd. de colonisation — Palestro (Algérie) —
1881. Cn.
Prieur (Albert), D M — 1, place des Vosges, Paris IV — 1892. T.
LISTK UKS MEMBRES XVII
Profillet (R. p.), missionnaire eu Haïti. — 1864. Ce.
PuTNAM (Prof. F.-W.), Curator of tlic Peabody muséum — Cambridge,
Mass. (U. S. Am.) — 1882. Ae.
Rabaud (Ktienne), 1) M et D. es Se, Prof. adj. à l'Ecole d'Anthropologie
— 104, rue d'Assas, Paris. VI. - 1902. T.
Raffegeai: (Donatien), DM— 0, av. des Pages. Le Vésinet (S.-et-O.) —
1880. T.
Ramaoieh, dm. Direct, do l'Asile des aliénés — Rodez (Aveyron) — MM.Cn.
Rangabé (Alexandre), membre de la Soc. d'archéologie — Athènes (Grèce)
— 186;j. Ce.
Ranke (Johannes), Prof, de Zoologie à l'Univ. — 25, Brienner Strasse,
Miinchen (Allemagne) — 188:2. Ae.
Raszwetonv (\V ), ancien Prof, de chirurgie— Moscou (Russie) — 1888. Ce.
Raymond (Paul), D M. Agrégé à la Fac. de Méd. de Montpellier — 34, av.
Kléber, Paris, XVI. — 1802. T.
Raynaud (Georges), Maître de conférences à l'Ec. des Hautes-Etudes —
82, rue Moulfetard, Paris, V. - 1899. T.
Read (Charles H.), Esq. Keeperof iiritish and Mediœval Antiiiiiities and Eth-
nography, British Muséum — 22, Carlyle Square, Chelsea, London
(Angleterre)— 1901. Ae.
Reboul (Jules), D M, Chirurg. en chef de l'Hôtel-Dieu — 1, rue d'Uzès, Nîmes
(Gard)— 1893. T.
Reclus (Elisée), Direct, de l'Institut géographique. —35, rue Ernest-Allard.
Bruxelles (Belgique) — 1889. T.
Regalia (Ettore), R. Istituto di Studi Superiori — 3, via Gino Capponi,
Firenze (Italie) — 1893. Ae.
Reonault (Félix), D M, anc. Int. des liôp. — 185, boul. Murât, Paris, V.
— 1888. T R.
REGNY-BEY(DE),(;hefduserv.deStatistique— Alexandrie (Egypte) — 1874. Ce.
Retzius (Prof. Gustaf) — Stockholm (Suéde) — 1878. Ae.
Reynier (J.-B.), DM — Sisteron (Basses- Alpes) — 1880. T.
Retoier (Paul), Agr. à la Fac. de Méd., Chirurg. des Hùp. — 12 bis, place
Delaborde, Paris, VIIL — 1883. T.
Rtbbing (Leennard de) — Lund (Suède) — 1898. T.
Ribemont (Alban), D M, membre de l'Acad. de Méd., Agr. à la Fac. de
Méd., Accoucheur des Hùp. —10, BdMalesherbes, Paris, VIIL- 1876.T.
RiBOT (Th.), Prof, au Collège de France, Direct, de la Revue philosophique ,
— Librairie Alcan, 108, Bd St-Gerraain, Paris, VI. — 1880. T.
RiCHET (Charles), D M, Membre de l'Acad. de Méd., Prof, à la Fac. de Méd.
— 15, rue de l'Université, Paris, VII. — 1877. T.
Ripi.ey (William Z.), Lecturer on Antlnopology at Columbia Univ. —
New York (U. S. Am.). - 1901. Ce.
RiPOCHE y Torrens (Diego), Fondateur du Museo Canario — 148, rue
Broca, Paris, XIII. — 1895. Ce.
Rivet, D M, Méd. delà mission géodésique française de la Rép. de l'Equa-
teur. — Guyaquil. — 1902. T.
RivETT Carnag (le Colonel J. H.), aide de camp de S. M. le Roi d'Angle-
terre — 40, Green street. Park Laue, London (.\ngleterre) — et château
de Wildeck, Aargau (Suisse) — 1883. Ae.
Rivière (Emile), Sous-Direct, de Labor. au Collège de France — 18. rue
Jouvenet, Paris, XVI. — 1874. T.
soc. u'anthrop. 19ÛS. ■'
XVIII SOi:iCTK KAMIIIIiii'td.iMilK liK l'AItlS
lioHiN (r.iul) — :>. pussiiK"' '1" Siiini.liu. l'aiis, XX. - 1881. T R. AnHivo-
poini'trie enfantine.
Hobin-Massi-: (Paul). I) M, cli.r.n -i.n .1.- 1 Hululai Peau — 6, me Castellaiie,
PuriK, VIII. — IIMH T.
Rc>CHE (JuU'H), Di'put."' —Square Monceau, 8/i, BJ des Batigaolies, Paris,
XVII. - 18iW. T.
RoQHEii (Emile), Corresp. du Min. -le l'iiist. Publ., Consul de France —
Liverpool (.\ngleterre) — 1S81. Cn.
Rothschild (baron Edmond de)— 41, rue duFaub.-St-Honoré, Paris, VIII.
— 1875. T.
Rothschild (baron Gustave de), consul <,'éni''ral d'Autriche — 23, av. Mari-
gny, Paris, VIII ~ 1870. T.
RoussELET (Louis), Archéolo-(U(; — l:2t>, Bd St-Gennain, Paris, VI. —
1872. TR.
RouviKUE (lieut. -colonel de), au ministère de la Guerre, — Paris, Vil. —
1867. Cn.
Roux, D M, Méd. major, Légion étrangère. — Roquemaure (Gard)
1901. T.
RowE (Léo Stanton), Prof., Univ. of Pennsylvania — Philadelphia (U. S.
Am.) — 1891. Ce.
RuDLER (F.-W.), Esq., Vice-Président of the Anthropological Institute —
25, Mornington Crescent, London, N W. (Angleterre). — 1881. Ce.
RuTOT (A.) - Conservateur du Musée d'hist. natur. — 177, rue de la Loi,
Bruxelles (Belgique). — 19U1. Ce.
Saint-Paul (G.),D M, Méd. major au 24« B»" de chasseurs. — Villa Laups,
Villefranche-sur-Mer (Alpes -Maritimes). — 1902. T.
Saintu (Octave), DM — 61, rue de Maubeuge, Paris. IX. — 1890. T.
Sakhokia (Théodote), Homme de lettres. — 1905. Ce.
Sa VLLLE (Marshall H.) American muséum of natural history — 8"' av
& west 77»'" Street, New-York City. (U. S. Am ) — 1895. T R.
ScHENK (Alexandre), Prof. agr. d'Anthropologie à l'Univ. — 31, rue Mar-
theray, Lausanne (Suisse) — 1809. Ce.
ScHLEiCHEK (.\dolphe), liljraire-t'diteur — 15, rue des Sts-Péres, Paris, VI.
— 1891. T.
ScHLEiCHER (Charles), libraire-éditeur — 15, rue des Sts-Péres. Paris, VI.
— 1807. T.
Schmidt (Oscar), puletlinologue — 86, rue de Grenelle, Paris, VII. — 1895. T.
ScHMiDT (Waldemar), Prof. iI'Egyptologic à l'Univ. — Copenhague (Dane-
mark) — 1875. Ae.
Schmit (Emile), Pharmacien — 24, rue St-Jacques, Ghâlonssui'-Marne
(Marne) - 1892. T.
Schradek (Franz), Prof, à l'Éc. d'Anthropologie — 75, rue Madame, Paris,
VI.— 1892. T.
Schwalbe (G.), DM, Prof. Director des anatomischen Instituts des Univer-
sitiits — Schwarzwaldstrasse, 39, Straf:sburg 'Alsace) — 1901. Ae.
Sébillot (Paul), Membre de la Comm. des Monum. mégal. — 80, Bd St-Mar-
cel, Paiis, V. — 1878. T. Liltérature, folklore, traditions populaires.
Sée (Marc), membre del'Acad, de Méd., Agr. à la Fac. de Méd. — 126, Bd
St-Germaiii, Paris, VI. — 1850 Hoa.
LISTE UE^ MKMHIIES XIX
Seeland (X.), 1) M. Médecin on chef do la province de Semirietschensk —
Viernyi iRussie) — ISîSC). Ce.
Séglas(J.), D m, Médecin des Hùp — 00, rue de Rennes, l^aris, VI. - 1884. T.
Second (Paul), D M, A^'r. à la Fac. de Méd., Ciiirurg. des Hùp. — 11, .juai
d'Orsay, Paris, Vil. — 1872. T.
Selys-Longchamps (baron Walther de) — ('.li>\teau d'Halloy, Ciuey (Belgi-
que) — 1877. T. R.
Sénéchal DE LA (THANGE(Eu^'èno)— .j«i, mode Londres, Paris, VIII. — ll)().;.T.
Sergi (Giuseppe). Direltore del' Instituto antropologico dell' Univ. —
Renia (Italie) - 1800 Ae.
Sérieux (Paul), D M, Méd. de la maison de santé de Ville Evrard — Neuilly-
sur-Marne (S.-et-O.) - 1801. T.
Serkano (Matias-Nieto), D M, Secrétaire de la R. .\cad. de Méd. — Madrid
(Espagne). — 1865. Ae.
SiGEHsoN(G.),DM,Prof.d'hist. nat. àl'Univ. — 3,(:larest., Dublin (Irlande)
— 1887. Ce.
Sinety (comte Louis de), I) M — 14, place Vendôme, Paris, I. — 1884. T.
Sommier (Comm. Stephen), Segretario délia Soc. italiana d'antropologia
— 3. via Gino Capponi. Firenze (Italie). - 1803. Ae.
Soularue (G. Martial), DM — Ch;\teau Désiré, par Le Gault (Mai-ne) —
1809. T.
SouRY (Jules), Direct. d'Études à l'Éc. des Hautes-Études— 6, rueMézières,
Paris, VI. — 1903 T.
SouTzo (Alexandre), DM— 5, rue Herschel, Paris, VI. — 1902. T.
Stanley (Davis-Charles-Henry), DM — Meridon, Goun., (U. S. Am.). —
1878. Ce.
Starr (Frédéric, Prof, à l'Université — Chicago. 111. (U. S. Am.). — 1899. Ce.
Stephenson (Franklin-Bache), D. M., Médical Inspecter in the U. S. Navy
— Portsmouth, N. H. (U. S. Am.). — 1878. T R.
Stihda (Ludwig), Prof. d'Anatomie à l'Univ. — Kœnigsberg (Allemagne) —
1879. Ae.
Stoenesco (Nicolas), D M, Institut médico-légal, 32, rue Isvor. Bucarest
(Roumanie) — Paris, VI. — 1902. T.
Su.maxgala, Principal du collège de Vidyodava, — Colombo (Geylan) —
1882. Ce.
Syamouh (M'i'o Marguerite), statuaire — G, rue du Val-de-Gr;\ce, Paris, V.
— 1888. T.
SzoMBATHY (Josef), Custos am kk. naturhistorischon Hofmuseum —
8, Sigmundsgasse, Wien VII (Autriche) — 1901. Ce.
Tarenetsky (Al. I.) D M, Prof. d'anatomieàl'Acad. de méd. militaire et Pré-
sidentdelaSoc.d'Antliropologie — St-Pétersbourg (Russie). — 1899. Ae.
Tarnowski (Mmo Pauline), D M — 104, quai de la Moika, St-Pétersbourg,
(Russie). — 1890. T.
Taxé, paléo-ethnologue — 9 bia, rue Michel-Ange, Paris, XVI. — 1807. T.
Tavano, DM— Rio de Janeiro (Brésil) — 1878. Ce.
Terrier (Félix), D M. Prof, à la Fac. de .Méd., membre de l'Acad. de Méd.,
Chirurg. des Hôp. — 11, rue de Solférino, Paris, VII. — 1871. T.
Testut (Léo), D M, Prof. d'Anatomie à la Fac. de Méd., Corresp. de
l'Acad. de Méd. — 3, av. de l'Archevêché, Lyon (Rhône). — 188^3. T R.
Thaxe (Georges D.), Prof, of anatomv in University Collège — Gower street,
London W C (Angleterre) — lÔOl. Ce.
XX SilClCTK l»ANTIIROPOLU(ilK HK l'AllIS
Thiklli.kn (Adiieii)— 72, rue d'vssas, i^arib, VI. — 1883. T.
Thomas (J.). D M - 3, place Pereire. Paria, XVII. — 1901. T.
Thomas (N. W.). Curator of thft Library of the nnthropol. lustitute of G.-B.
an.l Ir. - Loiidon (Antîleterri') - lltOl. Ce.
Thomson Arthur), Ks(i., l'rof of liuman Anatomy in tlip Univ. — Tlio
Muséum, Uxfonl (^Anyloterre). — 1895. Ae.
THOKRi.(Clovis), D M — 1, place Victor-IIut,'o, Paris, XVI. —1876. T.
Thi-uè (Henri), D M, Directeur de l'Kc. d'Anthropologie — 37, Bd Beausé-
jour, Paris. XVI. — \mj. T.
Thlkston (Mdgar), Superintendant Madras Go vernineut Muséum — Egmore,
Madras (Indes Anglaises) — 1894. Ce.
TiCHOMiHov (V. A.), prof, de Zool. à l'Univ. — Moscou (Russie) — 1879. Ce.
Tirant (Gilbert), D M, Adiuinistrateurcolonial — Saigon (C.ochinchine fran-
çaise). — 1874. Cn.
Tocilescu ((irogoire). Prof, d'archéologie à l'Univ — Bucarest (Roumanie)
— 1898. T.
Tommasini (André) — Avapesa, par Nuro (Corse). — 1902. T.
TopiNAHU (Paul), DM— 38, rue d'Assas, Paris, VI. — 186U. T R.
ToRoK (Aurel von), D M, Prof., Direktor des Anthropologischen Muséums
— Budapest (Hongrie) - 1893. Ae.
ToRRES (Mekhior), Agr. à l'Éc. de Méd. — Buenos-Aires (Rép. Arg.). —
1879. Ce.
TouRNAiRE (Albert) — i8, Bd du Temple, Paris, XI. — 1903. T.
Von Gennep. — 4, me du Moulin de Pierre, Clamart (Seine). — 1904. T.
Troutovsky (Wladimir C), Conservateur du Mu^ée des Armes — Moscou
(Russie) - 1888. Ce.
Turner (sir William), Prof, of Anatomy in the Univ. — 6, Eton Terrace,
Edinburgh (Angleterre) — 1878. Ae.
Tylor (Edward-B.), Prof, of .\nthropology — Muséum House, Oxford
(Angleterre). — 1880. Ae.
ValenztjEla (Théodore), anc. Ministre plén. de Colombie — Bogota —
187.5 T R.
Vanderkindèhe (Léon), Membre de l'Ac. des Se. de Belgique, Prof. àl'Univ.
libre de Bruxelles — 51, av. des Fleurs, Uccle (Belgique^ — 1874. Ae.
Vasghide (Nicolas), Chef de trav. au Lab. de Psychologie expér. de l'Ec.
des Hautes Etudes, — 56, rue N.-D. des Champs, Paris, VI. — 1898. T.
Vasconcellos-Abreu (G. dej — Coïmbra (Portugal) — 1875. Ce.
Vauchez (Emmanuel) — Les Sabljs-d'01onne( Vendée) — 1888. T R.
Vauvh.lé (O.), Archéologue — 17, rue de Christiani, Paris, XVIII. —
1890. T.
Verneau (R.), D M, Assistant au Muséum d'Hist. iiat. — 148, rue Broca,
Paris, XIIJ. - 1875. T.
Véron (Mme veuve Eugène) — chalet de l'Épée, chemin de Puits à Antlbes,
(Alpes-Maritimes) — 1891. T.
ViONON (Louis), l'rof. à l'Éc. coloniale, — 4 rue Gounod. — 1904, T.
ViLLARD. D M— Verdun, (Meuse) — 1897. Cn.
ViANNA, DM — Pernambuco (Brésil)— 1877. Ce.
Vielle (Alexandre), Juge de paix — Ecouen (S.-et-O.) — 1885. T.
ViNsoN (Julien), Prof, à l'Kc. des langues orientales vivantes — 58, rue
de l'Université, Paris, VII. — 1877. T R.
LISTK DES MEMBRES XXI
■ Viré (Armand), Doct. és-Sc. nat. — '^l,rue Vauqiielin, Paris, V. — ISOi. T.
VoGT (Victor) — 75, Bd St-Michel, Paris, V. — 18!t0. T.
Voisin (Heiiri-Aug.), D M — IC>, me Séguior, Paris, VI. — 189i>. T.
VoLKOv (Th.), Lie. es Se. nat. — 4, rue Monsieur-le-Prince, Paris, VI. —
1895. T.
Waldkykr, Prof. Docteur, 50, Luisenstrasse. Anutouiiciie Austalt. — Berlin,
{Allemagne). — 1904, Ae.
^^'ALTHEU ((".liarles), ex-M<'il. inspect. de la marine — Seuilly (Indre-et-
Loire) — 18(35. Cn.
Wegker (Louis de), D M — 81, av. d'Anlin, Paris, VIII. — 1868. T.
Wehlin, DM— 91, rue de Paris, Clamait (Seine) — 1884. T R.
Weisbagh (Augustin), D M, General-Stabsarzt — S[)arbersbachgasse, 41
Gratz, Il (Autriche) —
Weisukkber (Ch. -Henri), D M — (32, rue de Prony, Paris, XVII. —1880. T.
Wiener (Ch.) — 6, rue Margueritte, Paris, XVII. — 1878. Cn.
Wissendorkf (Henry), — Serguievskaïa, 88, St-Pétersbourg (Russie) —
188(3. T R.
WoLDUiGH (Joh.-X.), K. K. Universitàts-Professor. — Halekgasse, 76, Prag
(Autriche). — 1878. Ae.
WoRMS (René), Doct. ès-Lett. Agr. des Facultés, Direct, de la Revoie In-
tern. de Sociologie — 115, Bd St-Germain, Paris, VI. — 1893. T R.
Zaborowski (S.) — Thiais (Seine) — 1874. T R. Ethnologie.
Zograk(N. de), D M, Prof, de Zoologie et Anatomie à l'Univ. — Moscou
(Russie) — 1879. Ce.
iM.IKTK K'AMHItdl'uMMllK DK l'AIUb
Sociétés savantes, Bibliothèques et Recueils scientifiques
qui reçoivent les publications de la Société.
puvoi tlirecl du Mioislère do l'Instruction publique.
ODToi par l'intermédiairo liu Ministère (serTice des échanges).
PARIS
**
Acadf'inie de Médecine ~ iO, rup Bonaparte.
Anthropologie (1') — Masson et O", édit., i20, Bd St-Hermain.
Association générale des étudiants — H, rue des Ecoles.
Bibliothèque de l'Arsenal — /, rue de Sully.
— Mazarine — 23. quai de Conti.
— Ste-Géneviève — Place du Panthéon
— de l'Université.
— des Sociétés Savantes.
( loinniission des monuments mégalithiques — .9, rue de Valois.
Ecole d'anthropologie — i5, rue de l'École -de- Médecine.
Ecole des Hautes études. — Laboratoire d'anthropologie — 15, rue de
l'École de MMecine.
Ecole normale supérieure — Laboratoire de zoologie — rue d'Ulm.
Institut psychologique international— 14, rue Condé.
■ Ministère des Colonies. (Annales d'hygiène et de médecine coloniales).
' Ministère do la <iuerre. (Arcliives de médecine et chirurgie militaires).
Ministère do la Marine. (Archives de médecine navale).
' Musée d'Ethnographie — Trocadéro.
' Musée Guimet — Place d'Iéna.
' Muséum d'histoire naturelle (Bibliothèque) — 8, rue de Buffon.
' Muséum d'hist. nat. Laljoratoire d'anthropologie — 61, rue de Buffon.
Progrès médical — 14, rue des Carmes.
Répertoire bibliographique des principales Revues françaises —
l'er Lamm, éditeur, 7, rue de Lille.
Revue de psychiatrie — C Toulouse, Villejuif (Seine).
Revue scientifique — 41 bis, rue de Cluileaudun.
Revue des traditions populaires — M. F Sébillol, 80, Bd St-Marcel
Société des Amérlcanistes — 01, rue Buffon.
* Société nationale d'acclimatation de France — 41, rue de Lille.
* Société anatomique — 15, rue de l'Érole-de-Médecine.
* Société des Anti(juaires de Franco — Musée du Louvre.
* Société de biologie — 15, rue de l'École de-Médcrine.
* Société d'etlinngrapliie — 'JS. rue Mazarine.
* Soi-ièté d'Kxcnrsions sciciilififiues — [)bis, av. \'irtur lluyo, Si- Mandé (Seine).
* Société géologique de France — 28, rue .Serpente.
* Société de géographie de Paris — 184. Bl Si-Germain.
* Société zoologique de France — 28, rue Serpente.
DÉPARTEMENTS ET COLONIES.
Abbeville ** Soci»^té d'émulation.
Agen ** Bibliothèque.
Andelys{Les). ... * Sociétt' normande d'études préhistoriques.
Angers ** Société d'a;j;riculture, sciences et arts.
— • Société d'études scientifiques — place des Hallfis.
Ai-ras ** Académie des sciences, lettres et arts.
Autun ** Société éduenne.
— * Société d'histoire naturelle.
Auxevve * Société des sciences historiques et naturelles.
Beauvais ** Société acad. d'archéologie, sciences et arts.
Bel fort * Société belfortaine d'émulation.
Besançon ** Société d'émulation du Doubs.
BÔ7ie * Académie d'Hippone.
Bordeau.v ** Académie des sciences, belles-lettres et arts.
— ** Société archéologique de la Gironde.
— * Société de géographie commerciale — à la Bourse.
— * Société de médecine et chirurgie.
— * Société des se. phys. et naturelles — Palais des Facultés.
Boiilogne-sur-M . ** Société académique.
Bourg ** Bibliothèque.
Bourges * Société des antiquaires du Centre.
Caen ** Société des antiquaires de Normandie.
Chalon-sur-Saône * Société des sciences naturelles de S.-et-L.
CJianihëry ...... * Société sayoisienne d'iiistoire et d'archéologie.
Chdleaudun .... * Société dunoise d'archéologie, sciences et arts.
Cherbourg ** Société des sciences naturelles et mathématiques.
Constantine. .... * Société archéologique.
Dijon. ** Commission des antiquités de la Côte-d'Or.
Douai ** Bibliothèque.
braguignan ** Bibliothèque.
Dunkerque * Société dunkerquoise.
Epinal * Société d'émulation des Vosges.
Gannat * Société des sciences médicales.
Grenoble *" Académie delphinale.
— ** Bibliothèque.
— * Société dauphinoise d'ethnologie et d'anthropologie.
Guéret * Société des sciences naturelles et archéologiques.
nanoi(Tonkin).. . * Ecolo française d'Extrèrae-Oriont.
Havre (Le) * Société havraise d'études diverses.
Laon * Société académique.
Lyon * Académie des sciences, l)elles-lettres et arts.
— Archives d'Anthropologie criminelle — 1 , Place Raspail.
— ** Muséum d'histoire naturelle.
— * Société d'anthropologie — Palais St-Picrrc.
y^lV SOCIÉTK l»*A.NTHHOPOLOGIE DE l'AIUS
Milcon •' Académie «les sciences, arts et Itellos-lettres.
Mans {Lf) '* Sooi«''ti'' d'agr., sciences et arts de la Sarthe.
Marseille ** Acadt-mie des sciences, lettres et beaux-arts.
_ ♦ Musf'-uin d'histoire naturelle.
_ • Sofif'tô de Hit'^d. sanitaire mûrit. — 5i>, cours Lteutattrf.
Mnnlhrlitird ... " Suci«'-t.'- dV-mulatioii.
Montpt'llifr ** Bibliolii.'tiue.
_ ♦• Sociéti' archéologique.
_ *• Société de médecine et chirurgie pratique.
Moulins * Société d'ém. et des beau.x-arts du Bourbonnais.
y,tnri/ * Académie de Stanislas.
Nantes ** Société de Médecine.
_ ** Société académique.
_ * Société des se. nat. de l'Ouest de hi France.
iVimcs ** Académie de Nîmes.
— ** Bibliothèque.
_ • Société d'études des se. nat. — ^.çwa/rfe /rt Fontaine.
Xiarl ** Société de statistique, sciences et arts.
Poitiers ** Bibliothèque.
* Soc. des antiquaires de l'Ouest — rue des Grandes-Ecoles.
Reims ** Académie nationale.
Rouen ** Académie des sciences, belles-lettres et ai'ts.
_ * Société des amis des se. nat. — 40 bis,rue Sl-Lo.
— ** Société de Médecine.
Sl-I>enis [Réunion].. * Société des sciences, lettres et arts.
St-Omer ** Soc. des antiquaires de la Morinie — 5, rue Cavrntou.
St-Quentin * Société académique,
Senlis * * -omité archéologique.
Sens ** Bil)liothèque.
Soissons * Société archéologique, historique et scientifique.
SoHsse {Tunisie) . Société archéologie.
Toulon ** Bibliothèque.
Toulouse ** Société d'histoire naturelle.
_ * Société archéologique du midi de la France.
*' Société de médecine, chirurgie et pharmacie.
Tours * Société de géographie.
Troy-'s * Société académique d'agric, sciences de l'Aube.
Tunis * Institut de Carthage — rue de Russie.
Vannes * Société polymathique du Morljihaii.
Ven'lhn > * Société archéologique et scient, du Vendômois.
Versailles * Commission des .\ntii[aités de Seine-et-Oise.
Vienne ** Bibliothè(iue.
Ei:HA.N(iE>
ÉTRA NGE R
AIIeiiiti(;iie.
Berlin * Zeitsclirift Démographie «ler Juden. Halensee, Vertfâ-
lische btrasse, 46.
Be)'lin[S.\\':) ... * Berliner Anthropologische Gesellschaft (ZeitschrUt
fiir Ethnologie) — 120, KiJniggràlzer Strasse.
Braunscliireifj. . . * Deutsclui (îesellscluift fiir Anthropologie (Arcliiv fiir
A nlhropologie) — F. Vifiveg und Solin, éilit.
Dresden * Vereiu fiir Erdkuiifle — Kl. Briidergasse, 21.
Kônigsberg * Physikalisch - CEkonomische Gesellschaft — Lange-
Reihe, i.
Leipzig * Vereiu fiir Erdkunde — -/, Beethovenslrasse.
Mûnchen * .Miinehener Gesellschaft fiir Anthropologie [Beilràg.
zur anthropologie).
— * Bayerische Akadeniie der Wissenschaften.
Nilrnberg • Xaturhistorische Gesellschaft.
Steltin (I) Internationales Centralblatt fiir Antlu'opologie —
D"" G. Buschan, Friedrich-Carlstrasse, 7 .
Alsace-horraine.
Colmar * Société d'histoire naturelle.
Strassburg Zeitschrift fiir Morphologie und Anthropologie.
Prof. G. Srhu-allje, Srlwarzivald.'itrassf', 59.
Angleterre et colonies.
Dublin * Royal Irish Acaderay — 19, Dawson street.
Edinbuvgh * Collège of Physicians.
— * Society of Antiquaries of Scotland — Queen street.
— .... * Royal Society — Mound-Princes street.
London * Anthropological Institute of Great Britain and
Ireland — 3, Hanover square.
— Journal of Anatoiny and Physiology — Griffin, édit.,
E.reter street, strand.
— Nature — Macmillanand C», édit.,St- Martin' s street. W. C.
Bombay (India). * Anthropological Society.
Calcutta. — * Asiatic Society of Bengal — 37, Park Street.
Madras. — * Madras Government Muséum.
Sgdney(N.S.\V.) * Anthropological Society of Australasia. — 7, Lincoln's
Inn Chambcrs, Elizabeth street.
— * Royal Society of New South Wales — 5, Elizabeth
street north.
Toronto (Canada) * Canadian Institute — 58, Richmond Street East.
NewPlymouth(N.Z.) * Polynesian Society.
Antriche-Honjçrie.
Agram (Zagreb). * Jugoslavenska Akademija Znanosti.
Budapest * Ethnographische Abtheilung des Ung. National mu
seums — Csillag-utcza, i5.
Cracovie * Académie des Sciences. (Materialy antropologiczno-
archeologiczne).
XWl SOT.IBTK o'aNTUMOPOLOGIE DK PAUIS
Lembeifi (Liroir). • Towarzystwo ludoznawcze —ul. Zimorowicza, 7.
_ * Soriéti"' sriontiflquedeChevtchenko— 5<5,rMf CzarnecW.
PragiPniha) ... * Xarclopisiit"' Mustium Ceskoslovanské — Pr/Ao/ji/, 12.
_ • Musemii Ki-alovstvi C.eskélio (Pamatky nrchaeologicke).
Sarajevo * Hosuisch-Herzegoviiiisches Laiides-Museum.
Trieste * Museo civico di Storia naturale.
Wien (7) * Aiithropologische Gesellschaft — Burgring, 7 .
— ( ;eogjaj)liie Gesellschaft — in Vien W'allzeile, 33.
itel^iquc.
Bruxelles * Académie royale de Belgique. Palais des Académies.
— • Musée de l'État indépendant du Congo iO,j-Me de .Vawur.
— * Société d'anthropologie.
— * Société d'archéologie — il, rue Raveinstein.
— * Société de géographie — 116, l'ue de la Limite.
— * Société de géologie — 39, olace de l'Industrie.
Brésil.
Rio-de-Janeivo. . . * Museo nacional.
Chili.
Santiago * Société scientifique du Chili — Casilla 12 D.
Corée.
Séoul * Asiatic Society, Korea branch.
Danemark.
Copenhague * Société royale des antiquaires du Nord.
Egypte.
Le Caire * Institut Égyptien.
Espagne.
Madr'id * R. Sociedad geografica ^'21, Calle del Léon.
États-Unis.
Boston (Mass.)... * Boston Society of Natural History — Berkeley,
Boyleston street.
CambridgeiMass.) * Muséum of Comparative Zoology.
— * Peabody Muséum of american Archseology.
— The American Naturalist.
Chicago {lu.) The American Antiquarian.
Neic-York * American Muséum of Natural History.
PhiUidelphia{Pa.) * Academy of natural Science — Logan square
— * American Philosophical Society, 10 4, South Fifth st.
— .... * Free Muséum of Science and Art.
— .... * Numismatic and Antiq. Society, 70S, S. iras/im,7<on,S7.
St-Louis(Mo.) * Academy of Sciences — Corner street 16.
Salem {Mass.) ♦ Essex Institute.
ECHANGES
XXVII
WashingtoniD.C.) American Anthropologit^t. M F. \V.Hodge,l333 F Street.
— .... * Bureau of American Ethnology.
— .... * Suùtlisonian Institution.
— • . . . . " U. S. Geological Survey.
Grèce.
Athènes * Socii-ti' liistori.jue et ethnologique.
Hawaï.
Honolulu * Bernice Pauahi Bishop Muséum.
Hollaïule et Colonies.
Atnsterda)7i * Iv. nederlandsch Aardrijkskundijî Genootschap.
Leiden Internationales Arcliiv fiir Ethnographie. — Rapen-
burg, 69.
Batavia [Java).. . * Bataviaasch Genootschap van Kunsten en Weten-
schappen.
4\oPvège.
Trondhjem Société de Videnskaber Selskabs.
Italie.
Fivenze * Società italiana d'antropologia, — 3, via Gino Capponi.
Palermo La Scienza sociale. — Prof. Fr. Cosentini, Via Palazzo
Monteleone .
Mihino * Società italiana di scienze naturali. — Nuovo Museo
civico, Corso Venezia.
Napoli * Società reale.
Roma Bullettino di Paletnologia italiana — Prof. L. Pigorini,
Collegio Romano.
— Cosmos di Guido Gora — 2, via Goito.
Roma * Società geografica italiana — 102, Via del Plébiscita.
— * Società romana di antropologia — 26, via del Collegio
romano.
Torino . . * Accademia di medicina.
•lapon.
Tokyo * A nthropological Society — ,5, Rokvchomr Hongo.
— * Asiatic society of Japan — 17, Tsukijy.
— * Impérial University (Teikoku Daigaku) Hongo.
Mc\iqu(*.
Me.xico * Museo nacional.
Portugal.
Lisboa * Sociedade de geographia — rua de Santo Anlào.
— O archeologo português — Bibliotheca nacional.
Porto l'ortugalia — 5 18, rua de 'Jodufeila.
\ X V 1 1 I
Buenos-A iros
Cordoha
La Pltiht
Jassi/
SOCIÉTÉ o'ANTHROPOl.or.lK DK l'ARIS
R<^Iinblifiiip ArK<'ntiiie.
* Instituto j,'eofïrafico - Ploridn, friO.
• Museo luicioiial.
* AcaJemia iiacional de Ciencias.
* Miisiio de La Plata.
Boainaoïe.
* Société des luédecius et des naturalistes.
* Societatea stiintifica si literara.
1
RuNMie.
Ehaterinboiirp . . . * Société ouralienne des naturalistes.
H flsingf ors {Finlande) * Société finiio-ougrienne.
— ..... * Suomen Muinaismuistohdistys.
Kazan Société archéologique, histor. et ethnographique.
Kiev . * Université impériale de St-Wladimir.
— Areheologitclieskaïa Liétopis Yujnoï Rossiï —
M. BielacfiPWsky, directeur.
Miechoir Bibliotliéque et musée universel — M. St-Czarnovski,
directeur.
Mo!^con * Société des amis des sciences naturelles.
— . . . , Rousskiy antropologhitcheskiy Journal.
— Etnografitcheskoïé Obozrienié — Musée polytechnique.
— * Société impériale des naturalistes.
Nova Alexandria. Annuaire géologique de la Russie — M. N. Krych-
tafovitch, directeur.
St-Pétersbourg. . * Société impériale de géographie.
— ... * Société d'anthropologie — Académie de Médecine mili-
taire.
Varsovie Swiatowit — E. Majewski, rue Zlota, 61.
Saède.
Stockholm * K. Vitterhets Historié och Antikvitets Akademien.
— * Svenska Sàllskapet fôr Antropologi ochGeografi.
Susse.
Basel * Naturforschende Gesellschaft,
Genève * Société de géographie — à l'Athénée.
Lausanne * Société vaudoise des sciences naturelles.
Neuchàtel • Société neuchâteloise de géographie.
BIMŒAU UK HK)f)
\XI X
BUREAU DE 1905
Président MM. Sébillot.
1er Vice-Président Daveluy.
2e Vice-Président Giuahd de Rialle.
Secrétaire général Manouvrier.
Secrétaire général adjoint. . Papillault.
o '* ■ 7 ..^ \ Anthony.
Secrétaires des séances ... Rabald
Conservateurs des collections. . \ v:^^f',?Î2f^^^^^^■
Archiviste Zaboronvski.
Trésorier Huguet.
COMITÉ CENTRAL.
MM. Anthony. — Azoulay. — Collignon. — E. Gollin. — Cuyer. —
Daveluy. — Delisle. — Deniker. — D'Echérag. — Féré. — Fourdrignier.
— Maxiinilion Georges. — Huguet. — Laville. — Loisel — Mahoudeau.
— Manouvrier. —A. de Mortillet. — Papillault. — Paul-Boncour. —
Piètrement. — Rabaud. — Raymond. — E. Rivière. — Sébillot. —
TOPINARD. — ViNSON. — ViRÉ. — H. WeISGERBER. — ZaBOROWSKI.
Comme anciens Présidents : MM. Bordier. — Capitan. — (Ihervin. —
d'Ault du Mesnil. — Mathias Duval. — YvesGuYOT. — Hamy. — Hervé.
— Pozzi. — Thulié. — Verneau.
COMMISSION DE PUBLICATION
MM. d'Ault du Mesnil. — Deniker. — Verneau.
mm AD COMITE D'ADMINISTRATION DE L'ASSOCIATION POCR L'ENSEIGNEMENT
ANTHROPOLOGIODES-
MM. ViNSON.
Verneau.
XXX Sl'CIÉTK n'A.NTHRol'ill.oCIK liK l'AlUS
PRIX I)Kci;hnks par la société.
DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES COMMUNES
AUX PRIX GODARD, BROCA ETBERTILLON
Les iiit'iiilires .[ui cuiuiioseiit le Coinitt'' cciitnil «le la Socit'-ti' d'aiilliropolo
gie sont »eiils exclus des concours.
Tout travail qui aurait •'•té couroiuK- j)ar une autre Société, avant son dé-
pôt à la Société d'anthropologie, est exclu des concours.
Le jury d'examen comprendra cinq membres élus au scrutin do liste par
les membres du Comité central, choisis dans son sein et à la majorité ab-
solue des membres (jui It; composent.
Ce jury fait son rapport ef soumet son jugement à la ratification du Co-
mité central.
Le jury d'examen sera élu quatre mois au moins avant le jour où le prix
doit être décerné.
Tous les travaux, imprimés ou manuscrits, adressés à la Société ou pu-
bliés après le jour où le jury d'examen aura été nommé, ne pourront
prendre part au concours que pour la période suivante.
Dans le cas où, une année, le prix en concours ne serait pas décerné,
il serait ajouté au prix qui serait donné au concours suivant.
DISPOSITIONS SPÉCIALES AUX DIVERS PRIX
PRIX GODARD
FONDÉ EN 1862 PA.R LE DOCTEUR EHNEST GODARD.
Extrait du (estcnnenl. — « Ce prix sera donné au meilleur mémoire sur
un sujet se rattachant à l'Anthropologie; aucun sujet de prix ne sera pro-
posé. »
RÈGLEMENT
1. — Le prix Godard sera décerné, tous les deux ans, le jour de la
séance solennelle de la Société.
2. — Ce prix est de la valeur de 500 francs.
3. — Tous les travaux, manuscrits ou imprimés, adressés ou non à la So-
ciété, peuvent prendre part au concours.
Voir les dispositio7is commîmes à divers prix.
Le prochain concours aura lieu en 1905.
PRIX BROCA
FONDÉ EN 1881 PAR Mme BROCA.
« Ce prix est destiné à récompenser le meilleur mémoire sur une question
d'anatomie humaine, d'auatomie comparée ou de physiologie se rattachant
à l'Anthropologie. »
RÈGLEMENT
4. — Le prix Broca sera décerné, tous les deux ans, le jour de la séance
solennelle de la Société.
1>IUX DKCEnNKS PAU LA S<JCIKTK XXXI
o_ _ Ce prix est de la valeur de l,ôOO francs.
3. — Tous les mémoires, uianuscrits ou imprimrs, adressés à la Société
peuvent prendre part au concours; toutefois les auteurs des travaux impri-
més ne pourront prendre part au concours (lu'autani qu'ils en auront for-
mellement exprinii' Tiiitention.
Von- les dispositions communes à divers prix.
Le prodiain concours aura lieu en 1906.
PRIX BERTILLON
FONDÉ EX 1885 PAU MM. BEKTILLON FRÈKES,
CONFORMÉMENT A LA VOLONTÉ DE LEUK PÈRE, ADOLPHE BERTILLON.
« Le prix Bertillon sera décerné sans distinction de sexe, de natio-
nalité ni de profession, au meilleur travail envoyé sur une matière con-
cernant l'anthropologie, et, notamment, la démographie. »
RÈGLEMENT
1. — Le prix Bertillon sera décerné, tous les trois ans, le jour de la séance
solennelle de la Société.
2. — Ce prix est d'une valeur de 500 francs.
3. — Tous les mémoires, manuscrits ou imprimés, adressés à la Société,
pourront prendre part au concours; toutefois les auteurs des travaux im-
primés ne pourront prendre part au concours qu'autant qu'ils en auront
formellement exprimé l'intention.
Voir les dispositions co?nmunes à divers prix.
Le prochain concours aura lieu en 1907.
PRIX FAUVELLE
FONDÉ EN 1895 PAR LE D"" FAUVELLE (lOUIS-JULES)
RÈGLEMENT
1. — Le prix Fauvelle sera décerné tous les trois ans, au mois de décembre.
2. — (le prix consiste en une somme de 2,000 francs.
3. — Toute personne, sans exception, pourra concourir.
4. — Les mémoires susceptibles d'être couronnés devront traiter un su-
jet à'anatomie ou de physiologie du système nerveux.
5. La Commission d'examen sera composée de cinq membres élus par la
Société au scrutin de liste et choisis dans son sein, à la majorité des
membres pi-ésents, quatre mois au moins avant la proclamation du résultat.
Les auteurs des mémoires ne pourront pas faire partie de la commission.
6. — Le rapport sera rédigé par écrit et soumis à la Société, qui jugera le
concours et distribuera, s'il y a lieu, les récompenses ou les encouragements.
7. — Les travaux adressés à la Société par leurs auteurs devront être dé-
posés au secrétariat avant le jour de la nomination de la Commission.
8. — Toutes les œuvres, manuscrites ou imprimées, adressées ou non à
la Société et traitant un sujet conforme aux conditions de l'article 4,
pourront être admises au concours par la commission.
9_ _ Si le prix en concours n'était pas décerné, la somme non distri-
buée ferait l'objet d'un autre concours l'année ou les années suivantes.
Le prochain concoio's aura lieu en 1905
XXXII SDCIKTK u'ANTIIIlul'uLor.lK UK l'ARI^
ANCIEN iS PHKSlDENTS DE LA SOCIÉTÉ
MM. (1&')0) Martin-Ma(3ron. - (1800) Isidore Geoffroy Saint-Hilaiuk.
— (IStîl) Béclard. — (1862) Boudin. — (1S&3) de Quatuefages. - (1864>
Gratioi.et. — (1865) Pruner-Bey. - (1806) Périer. — (1867) Gavarret. —
(1808)Bert»and - -(1869) Lartet — (1870-71) Gaussin. — (1872) Lagneau.
— (^1S73)Bkrtii.i.on. - (187'i) Faiuherbe.— M875) Daixy. — (1876) de Mor-
TiLi.CT. — (1877) de Hanse. —(1878) Henri Martin. — (1879) Sanson. —
(1880) Ploix. —(1881) Parrot. - (1S82) Thulié. — (1883) Proust. — (1884)
Hamy. — (188ô)DuREAU. — (1886) Letourneau.- (1887) Magitot. — (1888)
Pozzi. — (1889) Mathias Duval. — (1890) Hovelacque. — (1891) Laborde.
— (1892) Bordier — (1893) Ph. Salmon. — (1894) Dareste. - (1895)
Issaurat. — (1896) Aii.lrt' Lefèvre. — (1897) Ollivier-Beauregard. —
(1898). Hervé — (1899). Capitan. — (1900) Yves Guyot. — (UXH) Ghervin.
— (1902) Verneau. - (1903 D'Ault-du-Mesnil. — (1904) Deniker.
i
ANCIENS SECRÉTAIRES GÉNÉRAUX
MM. Broc\ (Paul), 1859-1880.
Topinard (Paul), 1881-1886.
Letourneat^ (Charles), 1887-1902.
PRINCIPAUX DONATEURS
MM.
1862. — Ernest Godard (Prix).
1881. — Madame Paul Broca (Prix),
1884. — J. H. A. des Roziers (Legs).
1885. — Adolphe Bertillon (Prix).
1853. — Jules Delahaye (Legs).
1895. — Jules Fauvelle (Prix).
1897. — F. J. Audifred (Legs).
1900. — Auguste Dethorre (Legs).
1901. — Pierre-Ernest Lamy (Legs).
1902. — Charles Letourneau (Legs).
19<J3. — A. J. E Lou'Èt (Legs).
797"= SKANCK. — ^ Janvin l'JO.'i.
Prksidemîe i)k m. Skuillùt.
INSTALLATION DU BUREAU
pour l'année 1905.
Allocution de M J. Deniker, président sortant.
Dt'puis (iui'l(ni('s anni'es, le présitieni n'est plus tenu à vous faire un
rappuil sur la .siluation nioiale ri.! noire société. Mais il ne lui est pas in-
terdit pour cela de manifester pul)li(iueinenl sa joie à la vue de la pros-
périté de la savante compagnie dont il a eu l'honneur de diriger les débats
pendant une année Oi', je liens à constater, que malgré l'accident mal-
heureux survenu dans nos finances, la société a continué, comme par le
passé, sa marche régulière en avant. Ni la confiance de nouveaux membres^
ni Tactivité scientifique ne lui ont fai' défaut cette année. Les communi-
cations aux séances ont été aussi nombreuses que variées el nos publica-
tions sont là pour atlestei la vilalilé de notre association. C'est donc plein
d'espoir dans le progrès incessant de la Société d'Anthropologie de Paris,
que je quitte mes fonctions, et je suis heureux d'inviler à s'installer à ma
place un homme aussi érudit qu'aimable et bon, mon excellent collègue
el ami de vieille date, M. Sébillot. Vous le connaissez tous; son éloge,
comme homme et comme savant, n'est plus à faire. Je le prie donc, sans
phrases, de prendre possession du fauteuil de la présidence pour inaugurer
une nouvelle année d'études et de travail au profit de l'Anthropologie et
de la bonne confraternité scientifique.
Allocution de M. Sébillot, président pour 1905.
Mes chers collègues,
.le suis profondément touché de l'honneur (jue vous m'avez fait en
m'appelanl à la présidence d'une compagnie dont la réputation scienti-
fique est si considérable. Croyez-bien ([ue je sens tout le prix d'une pa-
reille distinction, et qu(! nulle aulre ne me parait plus enviable; aussi, vous
m'excuserez d'avoir inscrit au-dessous de mon nom, le titre de président
de la Société d'Anthropologie, avec celui de secrétaire-.i:énéral de la Société
des Traditions populaires, h la première page d'un livre qui constituera
une sorte d'encyclopédie du Polk-Lore de France, en songeant que j'ai
surtout eu en vue d'exprimer mon dévouement à deux sociétés qui me
sont chères entre toutes. En fixant votre choix sur moi, vous avez sans
doute pensé que depuis plus il'un (puirl de siècle je m'intéresse à vos
sy<;. n'ANTHHOi'. 1f>0h 1
2 5 JANVIKU i'.IOu
recherches, mais il est permis ih> supposer que vous avez euau^si ôgixrd à
mes travaux d'ethiiuLjrapliie trjulilionnelle cl do Folk-Lore, et que, vous
avez ainsi continué la lrailili<in (|ui a donné à notre société des présidents
qui appartenaient aux hranches les |)lus diverses de la science.
I/Anthropologie a en elTel toujours été comprise ici dans son sens le
plu'< large. Si h-s libres esprits (|ui, il y a quarante-cinq ans, fondèrent
notre société, avaient voulu lui donner une devise, ils auraient pu prendre
ce beau vers de Térence : Homo sum et nihil humani à me alienum pnto. 11
suffit de parcourir la table de nos Bulletins pour se convaincre que rien de
ce qui a trait à l'étude de l'homme n'est resté étranger aux préoccupations
de nos collègues; le programme initial, qui était déjà très vaste, n'a cessé
de s'élargir îi mesure que se développaient des sciences presque inconnues
à nos devanciers. On peut même dire que quelques-unes ont été, sinon
créées, du moins discutées, éclairée> et classées dans cette enceinte avec
une telle ampleur, avec une méthode si rigoureuse que ceux qui s'en
sont occupés, non seulement en France, mais h l'étranger, ont souvent
adopté les classifications et les conclusions qui avaient été formulées
dans nos séances : il suffira de citer la craniologie et le préhistorique,
dont les noms éveillent aussitôt celui de la Société d'Anthropologie. Mais
à côté de ces deux branches, l'ethnographie, la linguistique et bien d'au-
tres questions y étaient traitées. Je me souviens qu'un jour, conduisant
ici un illustre savant étranger, comme je lui parlais de la grande modestie
de notre installation matérielle, il me répondit : Qu'importe le local! il a
été remué plus d'idées fécondes sous cette voûte mansardée que dans
bien des édifices somptueux consacrés à la science officielle.
S'il revenait celte année, il constaterait sans doute avec plaisir que
dans la restauralion de la salle des séances on a su adopter une décora-
tion qui la rend plus digne de notre Société, et il serait aise de voir les
murs ornés des portraits ou des bustes de quelques-uns de ceux, qui ont
bien mérité de l'Anthropologie, et qui, à l'exception de Broca, notre fon-
dateur et incomparable secrétaire-général, ont occupé le fauteuil présiden-
tiel. La série est loin d'être complète, mais on peut considérer ce qui
existe comme l'esquisse d'un panthéon antliropologique. On y verrait,
sans compter les médecins, d'une réputation européenne, des représentants
des spécialités les plus diverses : d'illustres naturalistes comme Isidore
Geoffroy Saint Hilaire et de Quatrefages, Bertillon, l'un des créateurs de la
démographie, (iabriel de Morliliet dont le nom est inséparable de la pré-
histoire, le général Faidherbe, à la fois colonisateur, ethnographe et
linguiste, Henri Martin, l'initiateur de la conservation des monuments
mégaliihiques, André Sanson (jui expliquait avec tant de compétence les
rapports entre l'homme et les animaux, Abel Hovelacque dont la Lin-
guistique g^\. un modèle de clarté, le savant bibliographe Dureau qui, pen-
dant un demi-siècle, rédigea la table analytique de nos Bulletins, Letour-
neau, qui appliqua la Ihéoiie de l'évolution à la sociologie, enfin le
(tUVIlACES ilKFKHT> 3
ileinierdeceiix que nun> avons [icidus, Amlré Lefùvie, puAle, ethnographe
et histurieii
J'en passe, pour ne pas faire un i;alalof<ue, niai-< cette énumération ijui
ne comprend que les niorls, nionlie claiicnient que notre société a choisi
couimc présiilents tjes hommes de spéciaHlés très diverses. Que serait-ce
sijeparl.iis de ceux qui sont encore vivants et dont l'œuvre n'est pas
achevée! Je citerai pourtant parmi ceux-ci les deux savants qui ont été
mes prédécesseurs immédiats, et dont j'ai été en quelque sorte le çoad-
juteur pendant ces dirnières années : M. d'Ault du Mesnil, si compétent
en préhistoire, et qui nous donnera sans doute ()rochainemenl la synthèse
de ses lon^ues et fructueuses éludes, et M. Deniker, dont la science en
ethnoifraphie orientale est universellement appréciée. Tous deux ont été
des présidents modèles, et je ne pourrai mieux faire dans l'intérêt de
notre société, que de suivre, dans la mesure de mes forces, l'exemple de
mes deux prédécesseurs et amis.
NECROLOGIE
GiH.AKD DE R1A1.1.E. — .l'ai le regret, dit M. le Président, d'avoir à annoncer à
la Société le décès de M. Girard do Hialle, l'un des membresles plus anciens de
nolro compagnie, où il était entré en 1864; de celte époque à la période pen-
dant laijuoMe ses hautes fonctions administratives ne lui porniettaicnl guère
d'assister à nos séanci>s, il lit de nombreuses et intéressantes communications,
dont l'énoncé occupe nne colonne entière de la table, très serrée, de nos pu-
blications. C'est aussi lui qui rédigea, en 1874. les instructions pour l'Asie Cen-
trale.
Il fut secrétaire-général adjoint pendant près de cinq ans. Après avoir été
successivement directeur des Archives au Ministère des alVaii-es étrangères.
Ministre <le France au Chili, il venait de prendre sa retraite et se préparait à
regagner Paris, lorsqu'il est mort à Santiago après quelques jours de maladie,
presque au moment où il était élu second vice-président de notre Société. Il
revenait avec le désir de reprendre ses travaux scientifiques longtemps inter-
rompus, et je sais qu'il avait recueilli beaucoup île notes sur l'ellinograplue chi-
lienne, (piil se propnsiiit de nous coinmuniipier el qui auraient sans doute donné
lieu à des comparaisons et à des discussions intéressantes.
KoiJoN, ancien membre de la Société où il était entré en 1865 et dont il
resta jusqu'en 187() un membre 1res actif.
Ehnest Caueac u'.\cy. membre de la Société depuis l.S()8 et un de nos paleth-
nographes les plus estimés.
OUVRAGES OFFERTS
L. .Manouvrier. — L'individualité de l'Anthropologie. (Adresse lue par l'auteur
le 23 septembre 1904 au Congrcss of Artu and Science de l'Exposition miiver-
selle de Saint-Louis, U. S. A.). Kevue de l'Ecole d'Antlu'opologie. Décembre 19U4.
\ .) JVNVIKII I '.•(!."»
M. M; ivriiT fxposf li-s cinitiistiiiicM's i|iii ont dctiim- lieu à ce travail.
Li' «;niij;r.'s ol Aris Hiiil SfiiMir.' avait pour but lii' constitui-r, pour l'Expo-
sition Lniverst'lli- «le Saint-I.ouis. Missouri, uiio sorte de couronnement pliilo-
Bophiqut'. Son objet ctuil «-n oITct l'Iiistoir.- pliilosopliique dos scioncos et des
arts.
L'i'nst'Mihlf du savoir liuuiaiu avant été partagé en 7 divisions, 24 départe-
ments et 1:28 seelions, une assemblée <les professeurs américains l'ut chargée,
en 11K)3, de désigner les speakers olïiciels. à savoir : un (américain) pour
cii«.|uc .livision. deux (également amérieains) pour chaque département, et
lieux (un américain "et un européen) pour chaque section. Le président du Con-
grès était Simon Neweomb.
Chaipie officiai s/ieah-er devait lire une adresse sur l'un des deux sujets sui-
vants :
1" Les rapports dune science avec les sciences voisines.
2" Les problèmes d'une science ou d'un art envisagés depuis un siècle.
La durée d'une leeture ne devait pas dépasser 45 minutes. Cette concision
était imposée par le l'ail que le nombre des ailresses à lire s'élevait h. prés de
300 et qu'un peu de temps avait été réservé pour les communications libres.
Sur les 128 professeurs européens désignés, il veut environ 25 Français dont
une vingtaine se rendirent à Saint-Louis et turent considérés à tort, dans la
presse française, eomme délégués par leur gouvernement.
M. Manouvrier croit devoir dire, à titre d'invité reconnaissant, que les frais
de voyage des européens désignés étaient assurés protocolairement par l'Expo-
sition de Saint-Louis.
Après avoir rendu hommage à la splendeur de cette exposition et à l'hospi-
talité américaine, il expose ses impressions sur les institutions anthropologiques
des Étals-Unis, en insistant sur celles de Washington (National Muséum, de
Boston Cambridge (Harvard University . de iNow Haven (Vale University), de
New-York (American xNatural llistory Muséum et Colurnbia University), et de
Chicago (Field Colombian Muséum), sans oublier les exhibitions anthropolo-
giques temporaires de Saint-Louis qui furent extrêmement brillantes et nom-
breuses.
11 parle avec admiration de l'importance des Musées des Etats-Unis, de leur
grandeur, de la richesse des collections d'ethnologie américaine, du luxe de
leur installation, de leur arrangement et de la rapidité <le leur développement,
rapidité telle que des musées aussi énormes que ceux de Chicago et de New-
York n'existaient pas encore il y a dix ans et sollicitée par des conditions maté-
rielles vraiment extraordinaires. Il considère que les possibilités du dévelop-
pement intégral de la culture anthropologique dans les grandes universités des
États-Unis, surtout à New- York, sont de nature à autoriser, sous ce rapport,
les plus heureux pronostics.
M. Marcel Baudouin. — Je suis très heureux de la conmmunication de
M. Manouvrior. Elle me permet de redire qu'en 1893, il y a déjà plus de
dix ans, j'ai lait un voyage encoio plus sensationnel aux Etats-Unis,
aussi bien au point de vue nnthropologique que médical, comme chargé de
mission olïicielle.
Un grand nombre de mes remarques d'ordre anthropologique sont consi-
E. DEMUNKT. — RECIIEUCIIES SI R I, \ CAI'ACIÏI; VITALE 5
gnées dans le rappuit de Mission (jne jai pulili- ù celle «'[(oquo ', et dans
d'aiilies puidicalicjns [)liis spéciales '.
Je pourrais en dire long sur ma visite aux Musées el aux Universités ',
qui se trouvent placés entre New-York et San Francisco, sur les villes
chinoises américaines *, sur les mœurs el les coutumes de ce pays '. Je me
borne à renvoyer à mon livre, où mes impressions les plus vives et les
émotions vigoureuses que j'ai resssenties au cours de la visite de ces éta-
blissements sont presque toute ^ indiquées.
J'ajoute enlin que j'ai assisté à la naissance du Musée d'anthropologie
de Chicago, qui date de 1893, el que déjà on va reconstruire faute d'em-
placement! — Cela en dit sullisammi-nt sur la marche de la science au
pays d "outre- mer !
recherches sur la capacite vitale absolue et relative suivant le sexe
et suivant certaines dimensions du corps
Par m. le D"" E. Demonbt.
introduction
Le point de départ de ces recherches indique très nettement leur but et
leur' portée. Elles sont en connexion avec un récent mémoire du Prof.
Manouvrier, sur les <( Rapports anthropométriques et sur les principales
proportions du corps "^ ».
Décrire les variations analomiques humaines et leur donner une inter-
prétation physiologifjiie, <»u plus g«>néralement rattacher les unes aux
autres les variations organiques et les variations fonctionnelles, telle a
été l'idée directrice de ce mémoire. On la retrouve encore dans un certain
nombre de travaux, antéiieur» de M. Manouvrier^ et dans ceux qui ont
été faits sous sa direction, au laboratoire d'anthropologie à l'Ecole des
Hautes-Etudes (laboratoire de Broca).
* Baudouin (M j. — La médecine transatlantique. Paris, i893; in-4*, 368 p.. 115 fig.
* Souvenirs transatlantiques. Progrés méd., 189i. La médecine d l'Exposition
internat, de Chicago. Progrès méd. 189.1, 2» série, 70-71.
' Les Ecoles de médecine aux Etats-Unis. Rev. Scient. 18".>'i, n* 17, ô26-ii:W. — Les
Ecoles de médecine irréguliéres uu.r Etat.s-Unix Bull, méd., Paris, 1894. VIII, 569-
572. — La psychologip p.vpérimentale en Amérique : Le laboratoire et les cours de
Clark Universitij à Worre.slerr, Arrh de NeuroL, Paris, 1^94. X.WIII, 11-IS. —Les
grands établissements ho.'^pitaliers de Xcir-Yovk l'nion mi'd Piiris, 1K9'», ".\ s.,
L. VIII, 51-56.
4 La prostitution américaine. Progrès méd., 14 octobre IH93, 254-25r).
5 Le Y'elloicstone national Park. Rerue scient., 1894. n°' 8 et 9. cartps. — Assistance
chirurgicale instantanée. Le service à New-York. L'Assistancf, M janv. 1800. —
Un Vendéen en Amérique. Conférence .sur les Etats- t'nis. Ou.'.sl artist. et lilL, 190,
308-309. 8 fig.
6 In Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, '.'<' s(^ri.', loino II. 1002.
.> JANVIKII
l'jn;;
Etudiant i\ ce puiiit ilc vue les proportions des principaux segments du
corps, il a tWuis nu sujet des variations énormes constatées sous ce rap-
port dans l'.-spiV«> humaine, suivant l;i race, le sexe et les individus, une
thmrie cniiqiit', k la luis mécanique et pliysiolo,i,'ique expliquant par le
travail de cliacpje partie du corps son développement relatif et s'adap-
tanl par suite, ii de nombreux caractères morphologiques des plus impor-
tants.
C'est ainsi, par exemple, (juc l'inlluence dite de la taille ou de la race
sur les proportions du corps, l'accroissement transversal comparé à l'ac-
croissement en longueur (euryplastie et macroplaslie), la longueur relative
des membres par rapport ;i colle ihi tronc (macroskélie et brachyskélie,
du membre supérieur par rapport à l'mférieur, des divers segments de
membres comparés entre eux, les proportions du rachis et de ses diverses
portions, du bassin, de l'abdomen, du thorax, cotnmencent à posséder
une interprétation, une explication vraiment scientifique.
Depuis 1880, M. Manouvrier s'est particulièrement occupé des différences
sexuelles secondaires, au triple point de vue biolugi(jue, psychologique et
sociologique. Suivant la conclusion générale formulée par lui dès le début
de son enseignement, les deux sexes s'équivalent quant au développe-
ment cérébral quantitatif et morphologique; mais la femme présente sous
le rapport de la nutrilion une supériorité en rapport avec îses fondions
maternelles, tandis que l'homme l'emporte sous le rapport du dévelop-
pement et de l'énergie musculaires Ainsi, selon la formule presque uni-
versellement adoptée aujourd'hui : l'anabolisme prédomine dans le sexe
féminin sur le catabolisme. Cette supériorité de l'anabolisme est natu-
rellement en rapport avec l'adaptation maternelle. Celle-ci se traduit dans
l(^s proportions du corps par tout un ensemble de caractères typiques.
Dautre part, M. Manouvrier a réuni dans un tableau du mémoire que
nous citons toutes les données numériques mettant en évidence le grand
di'veloppeinent relatif chez la femme, des viscères abdominaux, com-
p.iiativement au développement des systèmes osseux et musculaire.
Au sujet du développement pulmonaire ou respiratoire, des données
pr.'cises lui firent défaut, et c'est ici ({ue se trouve le point de départ de
nus recherches. M. Manouvrier attachait d'aulant plus d'importance à cette
11!' ine que diverses données anthropométriques insulFisamment précises
jointes à des considérations théoriques, l'avaient amené à penser que le
développement relatif de la fonction respiratoire ne devait pas être, chez la
f(Mnine, proportionnel à celui des viscères abdominaux. Entre le très
grand développement relatif de ceux-ci et le très faible développement
relntif des muscles et de la force musculaire chez la femme, le dévelop-
pi'ment thoracique. dev.iit prenrlre théoriquement une place iiitermé-
diaire.
" La fonction respiratoire est pourtiint une fonction de nutrition, mais
d un ordre parlicullicr. Elle est ])lns particulièrement en rapport avec le
catabolisme; elle est précatabolique, car l'oxygène fourni par la respi-
ration est surtout destiné ii l'entretien des processus cataboliques, d'où
E. DEMONET — HECHERCHKS SI» LA CAl'ACITK VITAI.K 7
résulle la clialcui- animale et le Iravail. Mais la fonclion resplratoin' n'est
proportionnée au catabolisnie que dans la mesure où celui-ei est propor-
tionnel-à l'anabolisme. Il ne l'est pas chez lliomme quand le travail, sur-
tout le travail musculaire, est insulllsant eu égard h sa nutrition. Chez la
femme, c'est l'état normal, car pour les besoins du fœtus ou de l'enfant,
ou en vue de ces besoins, l'anabolisme l'emporte sur le catabolisme,
parce que la nutrition de l'enfant par sa mère relève purement de l'ana-
bolisme. »
M. Manouvrier admet encore que « l'amplitude thoracique est en rap-
port avec le développement des mus,:les, avec la quantité et avec l'intensité
du travail musculaire, toutes choses infériorisées chez la femme en vertu
de ses ronclious spt'L'iales, et des conséquences physiologiques de
celles-ci ».
Enlin, il résulle encore de ses travaux ' que : « le tempérament n'est
autre chose que la (juantilé de potentiel énergétique réalisable chez l'in-
dividu dans l'unité de temps, relalivement à la masse organique active,
quantité qui se traduit par l'intensité du travail. 11 y a des raisons de
penser (|ue l'oxygénation du sang ne constitue pas à elle seule le tempé-
rament sthénique, mais elle doit nécessairement influer sur le potentiel
développable dans une masse organique donnée. Elle met en jeu les qua-
lités proloplasmiques desquelles dépend le tempérament. Sous ce rapport,
le tempérament se trouverait en somme diminué dans le sexe féminin. Ce
serait là une importance sexuelle d'une importance capitale. »
C'est en raison de cette haute importance, qu'il se propose d'établir par
des recherches directes l'existence et autant que posible le quantum de la
diiïérence sexuelle en question, soit en mesurant ledéveloppement quan-
titatif du poumon dans deux séries suffisantes d'hommes et de femmes
adultes, soit en mesurant la capacité respiratoire.
Telle est l'origine des recherches dans lesquelles M. JNIanouvrier a bien
voulu nous engager et nous guider par ses indications et ses conseils,
autant que le lui a permis son éloignement.
Nous ne pouvions songer à étudier le volume des poumons comme on
a étudié le volume ou le poids des autres viscères. Cette manière de faire,
en elïet, n'était guère possible dans les salles d'autopsie lyonnaises : il
y aurait eu à éliminer la plupart des cadavres (lésions pulmonaires) et le
plus grand nombre des sujets valables n'aurait pu être à notre disposition.
Ces rechcîrches auraient exigé, dans de telles conditions, de longues
années. La diiricult»' cependant pouvait être tournée en abordant la ques-
tion par son côté purement physiologique. Ne pouvant alteindn' l'organe,
nous nous sommes adressé à la fonction qu'il était possible d'étudier soit
au moyen d'un spiromètre, soit au moyen d'un dosage chimique. Nous
avons préféré le spiromètre.
* Le tempérament (Hev. de l'École d'Anthr , 18%;. Caracléhsaiion physiologique
des tempéraments {Ibid., 1898).
8 5 jANViEH 1905
Certainement In comparaison de l'homme et de la femme au point de vue
res[»iratoir.' était le IjuI aucjuel devait temlre tous nos elTorls. Us devaient
aussi se |»orli'r ver.> une analyse ininulu-use des diverses dimensions du
corps, qui dans i-liai|ue scx.' peuvent iniluencer la capacité vitale. Tous
les auteurs qui se sont occupés de spiromélrie ont envisagé les relations
de la capacité vitale avec la taille, le poids, la circonférence thoracique,
l'amplitude du thorax. .Maëstrelli a parfaitement étudié dans le même sens
lu longueur du sternuni. Les données (|ui paraissaient délinitivement
acquises pouvaient se pas><er tie nouveaux chilfres contirmatifs. Mais elles
concernaient le sexe masculin seulement : il semblait que le sexe féminin
n'existât pas. Schnepf et Pagliani ont bien étudié la capacité vitale chez
l'homme et chez la femme, mais les résultats du premier sont trop vagues,
et ceux du second ne concernent que des individus de 18 ans, âge
auquel l'homme est plus loin que la femme des proportions adultes.
(iette négligence a rendu nécessaires de nouvelles recherches dans les
deux sexes. Aux facteurs que nous avons énumérés, nous avons ajouté la
largeur bi-acroiniale et l'indice de corpulence - de M. le Professeur Bou-
chard. Il était aussi nécessaire d'étudier de nouv^eaux rapports dont
M. Manouvrier vient de montrer la grande importance : le degré de
macroskélie ou de braschyskélie, ou rapport - (le membre inférieur S,
nipporté au buste li =r 100), et le degré de mégasomie représenté approxi-
mativement par les données suivantes :
i" Le poids total du corps dont la signification est toujours plus ou
moins troublée par les vai lotions de l'embonpoint;
2° La taille ou longueur du corps, multipliée par la largeur bi-acro-
miale, deux dimennsions qui ont l'avantage d'être squelettiques, mais ne
repK'sentant pas non plus la masse organique en totalité;
3" La longueur du buste inu!ti{)liée par la circonférence thoracique,
quantité représentant plus spécialement le développement du tronc.
Nous avons aussi cherché à évaluer approximativement le degré d'eu-
ryplastie déjà indiqué par l'indice de corpulence, en calculant le rapport
de la circonlerence Ihoracitpie ;i la taille.
.Assurément toutes ces indications n'épuisent pas le vaste sujet que
nous nous sommes proposé, et elles exigent d'être complétées par des
recherches ultérieures. Chacune d'elles cependant n'en a pas moins son
utilité réelle, et a souvent l'avanlage «le faire connaître un peu mieux un
point resté obscur jusque là.
DkKIMTIU.N — lIlSToRlyLE.
Les physiologistes définissent la capacité viiale : laijuantité d'air mise
en iiiouveiin'nl par une inspiration inaxima suivie d'une expiration
maxima. Ils la dilférencienl .'soigneusement de la capacité totale ou capacité
respiratoire, qui comprend en plus l'air résidual, ce dernier restant dans
E. DEMU.NKT. — IlEi'.lIKIlCHKS SI U r.A CAl'ACITK VITAI.K 9
le poumon .tprès une ex|)iration fitrci'i' l,;i ri'cln'n-lit' de la capacité
vitale se fera donc par des; procédés purement physiques : des procédés
chimiques pourront seuls permetlre d'évaluer la capacité respiratoire.
On admet classiquement que cliez un iiomnie adulte, hien portant, la
capacité vitale est de 3,o00 centimètres cultes, el la eapacité respiratoire
de i.oUO centimètres cubes.
Tous les étudiants ont présentes à la m'Mnoire les Idylles recherches de
( Jréh int, el tous connaissent aussi les spiromètres et les pneuinomètres, ces
instruments faisant partie de l'arsenal des lahoraloires de physiologie et
et de physique médicale. A F..yon, rinsirument d'Huti-liinson sert pour les
exercices de spirométrie, aux travaux pratiques de physique médicale.
La plupart du temps, ceux qui cherchent leur capacité vitale et la trou-
vent supérieure à 3.500 cenlinètres cuhes sont enchantés de la puis-
sance de leur thorax ; mais en revanche ceux qui n'atteignent pas ce
chiffre bienheureux, maudissent l'appareil qui ne leur accuse pas une
capacité normale ou supposée telle. Dans les hôpitaux, la spirométrie
est radicalement inconnue. \ peine pourrions-nous rappeler qu'à l'hô-
pital militaire, le répétiteur chargé du cours de propédeuli(}ue médicale,
montre, à titre purement historique du resie, le spiromètre de Boudin.
fj'ignorance dans laquelle on laisse ce mode d'exploration pulmo-
naire est générale. Les ouvrages de médecine les plus imj)orlants n'en
parlent pas ou ne lui consacrent que quelques lignes. Marfan écrit à ce
propos dans le traité de Charcot-Bouchard : « Ilutchinson et les médecins
qui après lui se sont servis du spiromètre ont établi que la diminution de
la capacité respir.itoire est un des principaux signes de la tuberculisation.
Aussi sous riniluence de Lasège qui vulgarisa leurs travaux, on cher-
cha à utiliser la spirométrie pour le diagnostic de la tuberculose com-
mençante. A ce point de vue la -piromélrie n'a |)as rendu tous les services
qu'on en attendait, et on l'a peut-être trop délaissée. » Cette constatation
mérite d'être soulignée. Elle [trouve d'une façon très nette que le
médecin se soucie fort peu de connaître la capacité vitale de son malade,
non pas parce que les renseignements qu'il pourrait en tirer n'ont pas
une très grande importance, mais uniquement parce que c'est une
recherche qui ne se fait pas.
Ce délaissement peut-il s'expliquer par ce fait que la spirométrie est un
champ d'études mexploré, et qu'on manque d'instrument jiour le mettre
en valeur? Loin de là. La littérature médicale est riche en documents se
rapportant ;i cette question. En tous pays, elle a suscité de nombreux
travaux parmi lesquels nous pouvons citer ceux de : Boudin, Capdevieille,
Oriou, Iley, Rigal, Villemin, en France; Lehrnbecker en Allemagne;
Livi, Maëstrelli en Italie; Morshall en .Angleterre; Henning, Lebedeff,
Seeland, Stolanoff, Wassiliew en llussie; Zwaardenacke en Hollande,
etc. Tous ces auteurs ont apporté des documents d'autant plus intéres-
sants qu'ils sont les résultats de recherches exécutées dans des circons-
tances à peu près identiques, se rapportant à des individus normaux, du
même Age, et que leur comparaison fournit des renseignements précieux
10 T) jANViKii 1905
sur Ifs dilTi» ronces que |teuv.'nl pivsenler les diverses races euro-
péennes.
Toulefois il t'sl incntitesl;il»le <iue riiislori(|ije de la S[»iroinélrie est
dominé par A nums : llulchinson. Scline|tf, Maëstrelli.
H seniil l/'inéraire d'allirmer (prilutrliinson, en 1846, a créé de toutes
pièces son spinjuièlre, et tpiela capacité vitale était coiii|>lètement inconnue
avant lui;mais il n'en a pas moins été un initiateur dans cette partie de
la [thysiologie, en traeant nettement la méthode (pi'elle exige, en cons-
truisant un instrument précis pouvant fonctionner entre les mains de
chacun, et fournir des résultats identiques dans les mêmes circonstances,
ot surtout en apj)orfanl un grand nombre d'observations <i l'aide desquelles
il a sérieusement étudié l'inllnence de certains facteurs : l'âge, la taille, la
circonférenee thoracique, etc.
Sans doute il n'a pas tout dit sur la question, et Schnepf, traitant en
1857, le même sujet, pouvait rappeler ce mot de Sénèque : « Multum
egerunt qui ante nos fuerunt, sed non peregerunt. » Certes le médecin
français rend justice à son prédécesseur. « (le sont, dit il, les travaux
d'Hutchinson seulement qui ont ajqjorté de la clarté et la méthode dans
l'appréciation de la capacité vitale du poumon. » Mais il croit devoir les
remanier, llutchinson avait étudié, par exemple, l'influence de l'âge sur
la capacité vitale sur i.775 personnes, tous hommes de 15 à 65 ans, et il
en avait conclu que celle-ci croissait jusqu'à 35 ans, pour diminuer en-
suite. Les recherches de Schnepf ont porté sur 962 personnes, seulement,
mais elles sont de tous les âges, depuis 3 jusqu'à 80 ans, « et au-delà
même en comptant les invalides ». Aussi se croit-il en droit de contester
les résultats du physiologiste anglais, et de leur substituer les siens pro-
pres. C'est pourquoi il admet que la capacité vitale augmente jusqu'à
20 ans, diminue insensiblement jusqu'à 25 ans, pour décroître ensuite
beaucoup plus rapidement. Ces modifications n'ont certes que l'impor-
tance qu'on veut bien leur accorder. Aussi Schnepfa-t il eu beaucoup plus
de mérite dans la tentative qu'il a faite de comparer les deux sexes non
seulement à l'aide d'observations personnelles, mais encore avec tous les
documents parus jusqu'à iui. Il pense avoir établi que si, pendant la pre-
mière enfance, les résultats semblent être identiques dans les deux
sexes, on trouve, dès l'âge de 8 ans, une différence marquée qui s'ac-
centue jusqu'à ce qu'enfin vers l'âge de 20 ans, la capacité vitale de la
femme ne représente guère plus (jue la moitié de celle de l'homme, et
ces relations restent à peu près constantes dans la période décroissante.
11 croit que la respiration n'est pas liée à la hauteur du tionc, niais à
la taille absolue du corps et que le poids est sans influence sur elle, ainsi
que le périmètre thoracique, et l'élasticité pulmonaire; elle ne varierait
que dans quelque cas suivant les professions, et serait modifiée par la
position assise ou oouchée, mais non par la grossesse.
L'influence exercée par Schnepf a été considérable : depuis 1875, il
n'est presque aucun travail sur laspirométrie, au moins en France, qui ne
le cite pre.sque toujours, le remanie souvent dans des proportions plus ou
E. DEMllNET. — llKi;llKU(.IIK> >M1 l,.\ CAl'ADllI. MIAI.E 11
moins considérables, et le rlénalure parfoi<. L'auteur d'une thèse récente
de l^aris ailiruie ijue la capaeité vitale d'un sujet bien constitué peut être
établie [)ar la loi suivante* de Sclinepf : « Le volume d'air mesuré au spi-
romètre est de -400 cenlimèlres cubes cliez l'enlant de 'A ans. et augmente
\)\v année de :260 centimètres cubes, soit environ de :21 cenlimètres cul)<.'s
pai' mois. » Nous avons lu et relu l'ouvrage de Scliii' pi' : nous n'y avons
jamais rencontré une formule de ce genre.
\in 1881, un médecin militaire italien, Maëslrelli, publie dans les Ar-
chives d'.Vnlhiopologie de Florence, un travail vraimt'ut original, sur
l'expression la plus correcte de la capacité vitale. Il recherche sur 166
hommes du :27« régiment d'infanterie, parfaitement sains, les relations
de la capacité vitale, avec la circonférence thoracique, le diamètre bilatéral
du thorax, le diamètre antéro-postérieur, la somme de ces deux diamètres
et la longueur du sternum. Il admet que les diamètres sont bien supé-
rieurs aux mesures [)érimélri(jues ilu thorax, comme expression de la
capacité vitale et que celle-ci suit plus lidèlement la longueur du sternum
que les autres dimentions du thorax Pour lui le volume du tronc de cône
thoracique donné par la foi-mule V -- (a. b ~) h, a étant le demi-dia-
mèlre bilatéral du thorax, b le petit diamètre antéro postérieur, et h, la
longueur du sternum, ne représente pas exactement la capacité pulmo-
naire, mais traduirait seulement des nombres à peu près proportionnels k
ceux qui expriment la capacité réelle. Comme tous ces calculs sont longs,
il propose des tables au moyen desquelles on obtient, en un instant,
le volume de thorax connaissant ses deux demi-diamètres et sa hau-
teur.
Il serait assez long et assez fastidieux d'énumérer tous les travaux parus
jusqu'à ce jour, sur la question. Toutefois, nous pouvons rappeler que
pour Kiiss il est un fait certain, c'est que tout individu a une capacité
vitale constante ou du moins extrêmement peu variable, entre 20 et 40
ans. Smith pense qu'elle augmente avec la taille de dO centimètres cubes
par centimètre, et Dupont allirme que chaque kilogramme donne droit h
50 centimètres cubes. Wassilliew admet que la capacité vitale dépend de
la longueur du corps et de la circonférence thoracique : si l'une d'elle
augmente de un centimètre, la capacité croit de 50 centimètres cubes en
moyenne. Hameaux n'est pas aussi simpliste. S'élevant aux hauteurs de
la spirométrie comparée, il prétend que les capacités vitales sont entre
elles comme les racines carrées des puissances 5 des tailles, et il érige en
principe la formule _L = \/Sl. De plus, il écrit ces lignes qui renfer-
mont tout un programme d'études : « Chez les vertébrés à respiration
pulmonaire et;» température constante, les dimensions de l'animal déter-
minent la capacité des organes respiratoires, de telle sorte que celle-ci
étant connue pour un individu de dimensions données, on peut, par le
calcul, en assigner la valeur chez un autre individu de même espèce,
pourvu seulement que l'on connaisse de celui-ci les dimensions corres-
pondantes à celles du premier».
12 r> JANVIKU 1 ".>('.■>
Certes, tous ces travaux ont bien jnécist' ([uelques détails; mais au
milieu de toutes ces com-liisioiis (|ui s'opposont, de toutes ces alïirmations
qui se détruisent, il est bien dillicii^'df se faire une idée exacte de la phy-
siologie de la capacité vitale, puisipi'elle manque de bases solides, incon-
testées. Sa patholoj^ie est bien [)liis vague encore. Les applications cli-
niques de la spironiélrie ont ilonné lieu aussi à de nombreux travaux.
Depuis Kentisch en 1814, ius(|u'à l*ra en 1900, on a cherché dans l'étude
de la capacité vitale, un moyen de diagnostic des maladies du poumon,
et en particulier de la tuberculose pulmonaire au début, et une expli-
cation des troubles apportés dans le développen)enl du thorax par la
scoliose et les airections des voies respiratoires supérieures. Mais on
cherche en vain dans toutes ces éludes, des chiffres, des rapports de
chiffi-es qui seuls seraient précieux dans quelque chose d'aussi délicat
que le diagnostic d'une baciliose au début.
Récemment, .MM. Hobin et Binet ont étudié les échanges respiratoires
chez les arthritiques, et ont rapporté la capacité viiale au centiuièlre de
taille. Leurs conclusions sur ce point spécial ne nous paraissent devoir
être acceptées qu'avec une certaine réserve parce que les rapports de la
capacité vitale et de la taille .sont loin d'être mathématiques, et parce que,
à l'état sain, la capacité vitale de plusieurs sujets d'une même taille peut
être très différente.
De telles variations dans les résultats obtenus ont de nombreuses causes :
Peut-être l'une des plus importantes consiste dans les différences que
présentent les divers instruments utilisés par les expérimentateurs. Cha-
cun d'eux, pourrions-nous dire sans grande exagération, a poursuivi ses
recherches avec un appareil de son invention, qui naturellement surpasse
tous les autres comme précision, commodité^ etc., etc. Au cours de nos
recherches bibliographiques nous n'en avons pas relevé moins de trente-
huit modèles qu'il serait intéressant de voir réunis dans un laboratoire de
physique médicale, et utilisés par un même individu. Sa capacité vitale
décrirait certainement des oscillations d'une amplitude démesurée. Voici
la nomenclature de ces instruments.
E. 1)EM(JNET. — UECKEm^HKS SIK \.\ C.M'XCATK VIIAl.K
\A
Datks
AUTEURS
1814 I K.'iitisfli
1847
1853 ?
1855?
1855
1856
185C.
1857
1859
18(>1
18(i2
1S()5
18(;0
1870
1872
1873
1874
1875
1903
llutchinsun
lioinliii
.Inliiii'
Kor^ttnaiiii
Ikiniu'l
Ciiillot
sciiiK'pr
.MiUh.'ll
[.mvis
Mowinami
Hroca
liaiii
Kaltray
lloliiii,M-('n
(•loitsiiiann
Key
1878
Holden
1881
Maëslrelli
1881
Kaltray
1882
i)ll[Mllll
1883?
(Wilaiite
1887
Forlanini
1887
ilanriol et
Kicliet
1887
Joal
1888
linicli et
Chanloii
1888
Jolies
1888
(Iddiarrli
1888
Steinberg
1891
Stanlev
1892
Denison
1893
Villfinin
1895
Wizeiilianstn
1895?
Verdin
1898
Papillon
1901
Tissot
19U2
Robin
1902
Dupont
INDICAlKiNs l'.IItLIiM.K M'IllOUES
Raser
An ai'cunnl ni Halb; willi a drawinj^ and a description ol a
Pnlnioiuetcr; and cases sliowing ds idility inuscertaing
tbe slale oï tbe liings in diseases.
riie spirnnnder.
C.ilé par Scinit'pr. 1857.
.1.
id.
Application du compteur à f^'uz à la niesiu-e de la respira-
tion. (:i)//i/)ft'-Jie/i<h( (le /'.If. des Scie/irrs.
Description d'un spironictre. Com/tte-lient/u Arad. di's Se.
(lapacitc vitale des poiunons. Les rapp(U-ts pbysiologiques
et palbologiqnes avec les maladies de la poitrine.
Iniprovcd spironieter. Arme. J. .'/ .V-
On tbe bydro spiromeler. A.-is Med. J.
A Scbeap" siiironicter. /irit. A»i. ./.
Instructions antbn)poliii.d(iues.
licolicrcbes sur la physiologie nicdicalc de la respiration à
l'aide de l'anapnograplie.
On a porlable spironieter. liri/. Med. Jour.
Conibined spironieter, aspirator and ueroscope. Lancet.
Om en spirograpli. Up-^ala {a h'erfor.
Tli,. spirometer; ils value and ulilily to lile compauies.
.]fed. Rt'c.
De la dvnamométrie et de la s|)irométrie appliquées au re-
cnitenienl des équipages, lîev. .Uarif. et Colon.
A pratical pneumatometer. Med. liée. S .-Y .
L'esponeiile [lui coretto délia capacila vitale. Arch. i)er
l'duth. Florence.
Description oi' a new tonu oT spironKder. Pacifie Med. a.
Chir. Journ.
Mesure de.bi capacité respiratoire à l'état pbysi(dogique et
à l'étal palliidogique, à l'aide d'un appareil nouveau.
Trib. Méd.
Utilisé par J\^ringuaz. Th. liordeau.v, 1883.
Une spiroinelro a conqtenzazione. Ossercatore.
Présentation d'un spinunètre. Soc. de Biol.
Un nouveau s[iirométre. Ass. franc. Cong. de Toulouse.
Tragbarer spirometer. lUa.'it. .\fona/.se/i. der nrtzli. Polyt.
Vacnum pneumatiq, spirometer. Tr. Loui.sinia .Med. Soc.
New.-Orl.
.New pneiinio. dvnamometer and spirometer. Zo«ce^.
Proi'. K. Uleischi von .Mcrxows neues spirometer. Central-
blatt fur Phys.
Note on a new s|tirometer. J. Anfh. Tnst
.\ new spiriimeter. J. Ain. .M. Ass.
Un nouveau spiromètre. Arch. de méd. et de pharm. milit.
.Nouvel appareil pour mesurer la respiration thoracique,
.Miinch Med. \\ooh.
»
Diagnostic précoce de la tuberculose pulmonaire, en parti-
culier cbez les cblorotiques. Th. Paris.
IMivsique biologique. Traité d'Ar.vmval.
Un nouveau spiromètre. Bull, et Mém. delà Soc. d'Anthr.
Equivalent du poids et de la capacité respiratoire. Soc. de
Biol.
Bull, de TAcad. de Méd.
44 ri jvNviKK \\H):\
[a- Difliotiii.liri' des Sciences Méfiioalos lapiioilc i|ii(i le premier spiro-
jiu'^tre en dalf i)'ét;iit autre chose (nriiiie baii^nuire ilans huiueile l'indi-
vidu en expérience faisait une ins|iiralion foicée ; l'eau qui s'écoulait
nit'^urail la i|tianlili'' d'air intri)duilt' dans les poumons. L'appareil était
assez peu porlalif; celui de laline l'est au suprême degré; il consiste sim-
plement en un boyau de mouton ifradtié ad hoc : mais son degré de pré-
cision est tel, (juc son auteur a eu le bon goût de l'abandonner.
Abstraction faite de ces deux spiromètres, tous ceux que nous venons
d'énumérer peuvent être divisés en deux groupes : les uns ont pour type
l'appareil d'Mutcbinson : ils emmagasinent l'air expiré; celui-ci ne fait
que traverser les seconds qui fonctionnent comme des compteurs à gaz;
le pneumomètre de Bonnet en réalise le plus simplement le principe.
Les plus connus sont ceux d'Hutchinson, de Boudin, do Galante, de
Broca, de Bonnet, de Verdin, de ilicbet; quelques uns, véritables ins-
truments de fortune ne le sont que par ceux qui les ont décrits. D'autres
ont eu les- honneurs d'une construction industrielle, mais en nombre
d'exemplaires si restreint, qu'ils doivent être d'une valeur inestimable
pour les amateurs d'objets rares.
Tel est l'exposé aussi exact et rapide que possible de la spirométrie, de
son instrumentation, de la place qu'elle occupe à la Faculté et à l'hôpital.
Ajoutons pour être complet, qu'on n'a pas cherché seulement en elle
un moyen de diagnostic; on l'a préconisée comme moyen de traitement.
Kûss et Sietîermann ont décrit les bienfaits de la pneumolhérapie, et
Lagrange vient d'exposer les avantages de la « gymnastique respiratoire. »
TECHNIOUE
Hutchinson et Schnepf ont doté la spirométrie d'une technique à
laquelle soixante années ont ajouté fort peu de choses. Mais si leur
« modiis faciendi » a été parfait, ou peu s'en faut, les résultats qu'il leur
a permis d'obtenir n'en échappent pas pour cela à des criliijues (]ui les
laissent intficts. (]es auteurs en efîet, donnent une foule de renseigne-
ments sans doute très utiles sur la façon dont ils ont conduit leurs expé-
riences, mais il ne fournissent aucun détail sur ce qui en fait le sujet. On
ignore absolument qui étaient les individus dont ils ont recueilli les obser-
vations, s'ils étaient sains ou malades, s'ils étaient en un mot, compa-
rables entre eux. Bien plus, Schnepf comparant la capacité vitale chez
l'homme et chez la femme de ^0 à 25 ans, ne se contente pas des dix-huit
cas concernant celle-ci, qui lui sont personnels. 11 y joint les vingt-deux,
observations publiées par Simon, Fabius, Arnold, et il conclut de ce total
auquel participent quatre auteurs, ayant opéré de ditférentes façons, avec
des instruments variés sur des sujets de races ditférentes, que la capacité
vitale chez la femme de 20 h 25 ans est de 2,500 centimètres cubes, à peu
près la moitié de ce qu'elle est chez un homme de même Age. La valeur
scientifique que l'on doit accorder à une conclusion reposant sur de tels
faits est minime.
Nous pouvons également criti(|uer la façon dont ces auteurs ont sérié
leurs observations. Ainsi Schnepf, étudiant l'influence de l'âge sur la
E. DEMONET. — UE(;IIEIU:HE> >L 11 I.A CaI'ACITK VITALE 15
capacité vitale, u classé ses cas pac périodes (J'iiiégale ilurée, comprenanl
2, 3, 5, 6 et '2'S ans, qu'il a comparées entre elles. Et, tort bien plus
grave, ces périodes embrassent des nombres de sujets tellement dilîérents,
que la valeur de leur lappiochement est fort problématique. 9 cas com-
prennent la période s'étendanl de 3 à 9 ans (nous serions curieux de voir
un bébé de 3 ans se servir d'un spiromètre); 342 celle de 18 h 20 ans, et
•4 cas une 3» de oO à 55 ans. Hutchinson .wait agi de la même façon;
seulement ses chillVes étaient plus élevés. Rappelons qu'il est assez sur-
prenant de voii" Schnepf opposer, ses 962 observations aux 1775 cas de
l'auteur anglais, et préférer les résultats que lui donnent des séries de
\o cas, à ceux (|u'avait obtenus ce dernier avec des séries cinq fois plus
fortes. Il les croyait meilleurs parce que c'étaient les siens. M. Manouvrier,
frappé de la fréquence de faits semblables dans la littérature médicale,
a insisté sur la stabilité et la validité des moyennes anthropométriques
suivant l'étendue des séries, en attendant (]u'il publiât une étude complète
de la question. Son dernier mémoire a démontré que des mesures excel-
lentes pouvaient donner des résultats inexacts par suite d'une sériation
défectueuse. Aussi, sur ses conseils, avons-nous classé toutes nos obser-
vations, pour cha(|ue sexe, en 3 groupes. Le premier comprend les
30 sujets quioni, par exemple, la taille la nidins élevée, le second corres-
pond aux 40 sujets d'une taille moyenne, le troisième comprend les
30 plus grands : et il en est ainsi pour toutes les dimensions et pour tous
les rapports.
Comme Elève de l'Ecole du Service de Santé Militaire nous étions ad-
mirablement placé pour poursuivre nos recherches sur cent adultes de
20 à 25 ans. Nous sommes heureux de remercier ici nos camarades qui
se sont soumis avec une bonne grâce parfaite aux mensurations longues
(ît pénibles que nous avons dû prendre sur eux. Appartenant presque tous
à la même promotion, ayant fait les mêmes études qui ont imposé à leur
genre de vie une certaine uniformité, ces adultes de 20 à 25 ans présen-
taient des conditions d'expérimentation remarquables. De plus le régime
de l'Ecole de Lyon, quoique militaire, n'est pas pour cela très actif. Le
temps, uniquement consacré au travail, se passe en effet, à l'hôpital, h
la Faculté ou en étude, et c'est à peine si deux heures et demie par se-
maine sont consacrées aux exercices physiques: équilation, escrime,
exercices militaires, etc.
Malheureusement ces circonstances exceptionnelles ne sont pas repro-
duites pour le sexe féminin, flomme il était absolument impossible de
trouver un ou plusieurs établissements (écoles, personnel infirmier, etc.)
où nous aurions pu rencontrer une centaine de jeunes femmes, menant
nne vie active, parfaitement saines au point de vue respiratoire et per-
mettant de prendre sur elles des mensurations délicates, nous avons été
obligé de recourir ;i des malade.s hospitalisées. Celles qui présentaient
les conditions les plus favorables, étaient assurément les femmes de la Cli-
nique et de la Consultation des maladiesciitanées etsyphililicjues de M. le
Professeur Gailleton Un peut admettre en efTet, avec l'éminent syphili-
\{\ "} JvNVlKli IMO")
graphe Ivoiiiiaih, *fl nos clnllVcs scraiciil coiilinnulits de celle manière
(lt« voin ((lie la (liaUi»>st' syphilitiiine n'inllneiice pas la capacilé vilale,
cl avec M. le l'rofess.'ur FuiirniiT <pie le poids des syphilili(|ucs n'esl
inudifi»' ni par leur allcdion, ni parle Irailemenl hydrar.^yrique auquel
ils sunl soumis, l ne maladie cul mée. loc.iliséeetnon tuberculeuse n'était
pas snllisanle pour nous faire exclure celle qni la présenlail, tandis qu'un
lupus, quelque étendue [>résenl!\l-il, était une cause absolne de non-utili-
sation. Nous avons pu ainsi. p.Mulant les diîux années qu'a exigées notre
travail, observer cenl ouvrières, ménagères, domestiques, femmes de la
campagne, parfaitement saines au point de vue respiratoire, qu'un séjonr
d'un ou denx mois à rii.ipilal ne pouvait faire considérer comme oisives,
et obtenir ainsi ponr le sexe féminin, des résultats sufiisamment compa-
rables à ceux que nous avaient donnés nos camarades de l'Kcole de
Santé, avec une réserve toutefois, que nous exposerons plus loin.
Il est un seul point sur lequel tous les auteurs qui se sont occupés de
spirométrie soient d'accord ïou< aftirmenl que la grossesse n'influence pas
la capacilé vitale; aussi importait-il de savoir si les femmes que nous
examinions axaient eu ou non des enfants.
Nous ne ferons qu'indiquer ici un fait qui mériteraii un plus grand
développement: l'intluence du corset sur la capacité vilale. Inutile de
dire que tous nos sujets possédaient cet instrument de première nécessité et
le portaient plus d'une fois par semaine. Nos recherches bibliographiques
ne nous ayant donné aucun résultat précis sur celte question, nous avons
recherch» la capacilé vitale de vingt femmes alors qu'elles poilaient ou
non leur corset. Dans le premier cas, elles nous ont donné une moyenne
de 2 323 cent, cubes, et dans le second, une moyenne de2. 783 cenl. cubes.
Par conséquent, quanduue ff mine porte son corset sa capacité vitale est diminuée
d'un sixième.
S'il a été facile de relever sur l'Annuaire du Service de Santé, l'âge de
nos camarades, les cartes des malades, rédigées sans un très grand souci
de l'exactitude, ne méritaient pas autant de confiance. 11 eut été hasar-
deux de nous en rapporter aux affirmations de l'intéressée. En nous ren-
seignant auprès des sœurs du service et des bonnes camarades de salle,
en contrôlant les unes par les autres, ces diverses indications, nous pen-
sons nous être rapproché autant que possible de la vérité, si tant est que
l'on puisse connaître, sans extrait d'acle de naissance, l'âge précis d'une
jeune femme.
La taille a été mesurée ;i la toise, dans les conditions ordinaires.
Le procédé enseigné à fKcole Pratique de Hautes Etudes, nous a per-
mis de calculer la longueur du buste. Le sujet assis sur un tabouret de
25 centimètres a les jambes verticales, le tronc bien droit, le regard hori-
zontal. Du cbilTre lu sur la toise, on déduit rapidement la hauteur du
tabouret.
X défaut d'un compas-glissièie (jue nous n'avons pu trouver dans les
laboratoires auxquels nous nous sommes adressé, le compas d'épaisseur de
Broca, nous a servi à évaluer la largeur bi-acromiale.
E. DEMONF.T. — RECHERCHES SUR I.A CAPaOITÉ VITALE 17
l'ar lungueur du sleinuui. nous (:um[»i'tMi()ns l'espace qui s'étend de la
fourchette slernale, à l'uniun du coi[)s de Tus et de l'appendice xyphoïde.
Son degré d'inclinaison a été nienlionnt'- pardes numéros de 1 ào, notant
les individus à pai'oi Ihoracitjue anléiieure honibée ou {liate, le n" 3
représentant l'inclinaison moyenne et 1 etîi, les cas franchement extrêmes
d'aplatissement et de projection
Le poids ;i toujours été recherché le malin à jeun, le sujet nu- (sexe
masculin) ou couvert de vèlem»-nts (sexe féminin) dont il était rigoureuse-
ment tenu compte. L'embonpoint a été également indiqué par des numé-
ros variant de I à 3.
Nous avons cru préférable, avecun grand nombre d'auteurs de prendre
la Circonférence Thoracique au niveau de l'union du corps du Sternum
et de l'appendice xyphoïde. La saillie trop volumineuse desseins, nous a
obligé, chez (jiielques femmes, à prendre cette mensuration quelquescen-
timétres plus haut ou plus bas.
Restait le choix d'un spiromètre. Rappelons h ce sujet l'ardente polé-
mique qui s'éleva en 1856, sur les avantages respectifs des instruments
fondés sur le principe des gazomètres, et surcelui des compteurs à gaz. Là
encore, Schnepf ne voulait pas de rival. Il <( dépensa beaucoup d'argent
et de temps » pour porter c|uel(|ue atteinte au « caractère scientifique de
l'honorable .M Bonnet, médecin lyonnais ». Il insinuaque le pneumomèlre
de ce dernier n'était qu'une copie d'un instrument construit dix années
auparavant par un mécanicien allemand, Forstmann. et il prouva, avec
beaucoup de cbillres ;i l'appui, que son appareil à lui, était bien supérieur
h tous les autres en général, et h celui de Bonnet en particulier. Nous ne
nous permettrons pas de contester une supériorité si bien justiliée, mais
nous ne montrerons pas non plus, pareille sévérité envers Bonnet. Nous
croyons en eiïet que ce dernier a eu raison d'employer le compteur h. gaz
comme pneumomètre, non parce que nous nous sommes servi pournos re-
cherches personnelles d'un instrument de ce genre, mais parce qu'il nous
a paru être réellement le meiileurde ceux qui étaient à notre disposition. Le
spiromètre de Boudin donne des chillres tellement faiblesque le discrédit
dans lequel il est tombé, s'explique facilement. Notre compteur àgaz se rap-
prochait autant du pneumomètre de Bonnet, que l'appareil de Schnepf, de
celui d'iiutrbinson ; et dans des expériences comparatives, il a toujours
accusé une capacité vitale .supérieure h celle que donnait dans les mêmes
circonstances, l'instrument de l'auteur anglais. Nous devons remercier ici
M. le l'iofesseur Doyon d'avoir bien voulu mettre à notre disposition les
ressources de son laboratoire, et nous prêter pendant de longs mois un
instrument dont la précision ne laissait rien à désirer. Aussi, sur les con-
seils de ce savant physiologiste, soutenu en outre par l'autorité de M. le
professeur Mathias Uuval conseillant ;i M. le .Médecin-Major Oriow, de
faire de cette façon des recherches spiromélri(|ues, avons-nous utilisé un
compteur à gaz de précision semblable à celui dont on se sert, pour des
expériences similaires, au laboratoire de médecine expérimentale de la
Faculté de Lyon.
soc. d'anthrùp. 1905. 2
18 ."• jvNviKit i'.>ori
Tandis ijui' certains aiitciir> liouvtMil i nlauiin IVmploi <lii spinimèlie,
«l'aiilit's allinntMil que l'on jrol)lienl pas facilcuienl ceik' manœuvre delà
pari de lous les sujets « (l'est une éducation à faire, en montrant
l'exemple. » Si cette ofiinioii est très vraie, peut-être a-ton exagéré
quand on a écrit : « Dans nos reclierclies, nous avions recours ;\ l'émula-
tion pour faire donner aux sujets en expérience leur maximum dampli-
tude respiratoire. C'était à qui donnerait les chiffres les plus élevés.
Il fallait même les surveiller pour les empéchei' de tricher en expirant
deux fois au lieu d'une. » Il s'agit de Parisiennes, et nous sommes obligé
d'avouer que bien peu de Lyonnaises ont montré pareil enthousiasme
pour la spiromélrie.
Si les diilicultés que ce mode d'exploitation pulmonaire présente ne
doivent pas être exagérées, elles ne doivent pas non plus être négligées. E
d'abord, il est certains sujets qui sont ab.solument incapables de se servir
d'un spiromètre. Pour<^uoi? Nous l'ignorons. Déjà, à lEcole, deux de nos
camarades nous avaient donné des résultats tellement diiïére;,ts qu'il
nous était impossible d'en tenir compte. Pareil lait s'est reproduit plus
fréquemment chez les femmes : comme nous leur en demandions la rai-
son, elles nous répondaient presque invariablement: Je ne sais pas, je
comprends fort bien ce que vous désirez, mais je ne peux pas ». Si leur
bonne foi peut être mise en doute, il ne doit certainement pas en être de
môme pour nos camarades. Aussi préférons-nous à cette opinion deSchnepf :
« La simplicité d'exécution de la spirométrie est telle qu'elle est à la por-
tée de toutesles intelligences >;, l'appréciation du Dictionnaire de Decham-
bre : Il va de soi que les indications spiromètriques n'ont de valeur que si
les personnes en expérience comprennent, veulent et peuvent exécuter sans
douleuicequ'on leurdemande. ».Maisest-ce bienladouleurquiintervientici?
Par contre Schnepfa parfaitement raison quand il écrit : « La respiration
lente et profonde est celle (jui donne les résultats les plus uniformes, et
les plus précis, par conséquent. Après 2 ou 3 actes respiratoires, on re-
marque déjà que la quantité d'air mise en circulation pendant chacun de
ces actes, reste à peu près constante et invariable; dès lors il est inutile
d'aller plus loin...
Nous faisons respirer les personnes par la bouche, sans nous préoccu-
per de la communication des voies respiratoires avec l'air extérieur par
les narines, l'air ne passant pas par le nez quand on respire parla bouche.
Toutefois, il ne faut pas se lier h toutes les personnes; il y en a qui s'y
prêtent tellement mal qu'il est difficile deleur faire comprendre cette petite
pratique. Ce qui nous amène à dire qu'il faut pources expériences une cer-
taine babilude.
Schnepf ayant démontré que la position assise donne les résultats
les pliis élevés, nous l'avons adoptée
Souvent, h la fin de l'expiration, le sujet en expérience fait volontaire-
ment ou non, une inspiration brusi^ue suivie d'une expiration très rapide.
Cette cause d'erreur se traduit immédiatement au compteur par un arrêt
K. DKMuNET. — UECHEUCURS SIK LA OAHACITÉ VITALK 19
et iiKhnc un iiiuiivciiKMit n'trugadt- do l'ai^Hiille qui mot on garde contre
elle.
La forme de l'euibouchure a également son importance. En général,
elle ressemble soit à un tuyau de pipe, soit ii colle que l'on adapte k un
clairon. Nous avons adoptécette dernière variété, parce que dans des re-
cliorchos comparatives, elle nous a tuujuurs d(jnné des résultats sensible-
ment plus élevés.
Enfin nous avons évité de prendre nos données spirométriques. après
un exercice violent, escrime, o(|uilalion etc., la capacité vitale nous
ayant paru angmenti'e do l.'iO à :200 centimètres cubes environ, chez plu-
sieurs do nos camarades, étudiés spécialement îi ce point de vue.
Kiiss pense pour l'avoir constaté sur lui-même ({u'uno variation de
200 cenliiiiétros cubes dans les résultats spirométriques obtenus sur un
adulte est physiologique. Nous avons pris pour cbifTre indiquant la capa-
cité vitale, la moyenne de trois expériences consécutives, scrupuleuse-
ment relevées dans l'ordre où elles ont eu lieu, après un certain nombre
d'épreuves pendant lesquelles le sujet apprenait h se servir de l'instru-
ment. Le premier chitlVe étant tantôt plus fort, tantôt plus faible que le
second ou le troisième, parfois égal à ces deux derniers, on doit donc
écarter toute hypothèse d'accoutumance k l'appareil, ou de fatigue résul-
tant de plusieurs inspirations forcées successives.
Voici les variations que nous avons relevées, au cours de nos recherches.
10 hommes
7
9
18
femmes
o —
30 —
11 -
18
—
43 -
48
—
Variatii^n nulle
— de 50 centiuièlres cubes. .. .
— de 100 — — ....
— de 150 — — . . . .
— de 200 — — ....
Nous pensions alors qu'en physiologie, il n'exi.^te pas, il ne saurait
existerdochinVos absolus. » Les forces vitales ne se traduisent pas par des
formules algébriques comme les forces physico-chimiques : on ne peut
tabler ici que sur des moyennes, étant donné la complexité intrinsèque
des phénomènes vitaux d'une part, et de l'autre, la multiplicité des fac-
teurs qui les influencent. » (Charrin). C'est pourquoi nous avons adopté,
pour faire nos calculs, la moyenne de trois expériences, représentant en
quel(|ue sorte, un maximum inoyen. Peut-être eut-il été préférable, d'adop-
ter le maximum absolu, représenté par le chilfro le plus élevé, fourni par
chaque sujet.
.Notre « modus faciendi » étant toujours resté identique à lui-même,
dans le cours de nos rechei-ches, nous avons cherché à échapper à des
causes d'erreur imprévues. l'our cela, nous avons constitué des « sujets
témoins » dont la capacité vitale, nollemeut déterminée était fréquem-
ment mesurée à nouveau. Comme elle est sans cesse restée sensiblement
constante chez tous, nous croyons être en droit d'en conclure, que dans
nos expériences, nous nous sommes rapproché, autant (pic possible, de
« ce qui est. »
-20
."» JANMKH l'.Mt;')
De la capacité vitale absolue et relative dans le sexe masculin.
Capacité vitale absolue.
Il eut élè fastidieux de publier en détail les mensurations prises sur les
deux cents personnes (jui se sont prêtées h nos recherches. Aussi expo-
serons-nous imniédiateinenl l'ordination des séries d'après les divers fac-
teurs que nous nous sommes proposé d'étudier.
Il y a un triple avantage à accorder la première place à la capacité
vitale elle-môiiie : cette mise en série résume les pages supprimées, donne
une idée générale des rapports que cette rapacité présente avec les
diverses dimensions du corps, et permet d'établir une moyenne générale
de l'une et des autres.
Tableau I
Ordination d'après la capacité vitale.
MOVKNXER DES DIMENSIONS
Capacité vitale
Taille. . , .
Buste
Membre iiii'érieur .
Lari-'eiir bi-acroiiiiaie .
Longueur du slernuiii.
Circonférence tlioracii|ue
Amplitude du thorax
Poids 59 . 4
Mégasomie approchée
bi-acromiale .
-Mégasoiuie approchée
rence tboracique.
Taille X Largeur
Buste X Circonlé-
MOYKXNES DES RAPPORTS
Taille ■=. 100. Capacité vitdle. .
Poids
Largeur bi-acromiale.
Circonférence thoracique.
Buste := 100. Capacité vitale. ...
Membre inférienr.
Mégasomie approchées 100 (Taille XLarg
bi-acroniiaie) : capacité vitale.
Mégasomie a])procliée =: 100 (Buste X ''ir-
conférenoe thoraciqne : capacité vitale .
I (30)
3.320
l.(i40
0.N03
0.777
0.354
0.154
0.818
0.0()8
58.06
70.59
2.024
.36.2
21.59
49.27
3.847
90.0
5.720
4.702
II (40)
3.863
1.711
0.883
0.828
0..360
0.165
0.840
0.078
64.7
61.60
74.17
2.258
.37.8
21.04
49.09
4.375
93.9
6.271
5.216
III (30)
4.568
1.747
0.901
0.846
0.370
0.170
0.871
0.095
70.3
64.64
78.42
2.614
40.2
21.18
50.20
5.066
93.9
7.066
5.830
1+11+111
(100)
3.912
1.700
0.882
0.818
0.361
0.164
0.842
0 080
64.8
61.37
74.26
92.7
D'une façon générale, à mesure que la capacité vitale s'élève, toutes
E. DEMONF.T. — RECHEItCHES sm LA (UI'ACITK VlTM.i: 2|
dimensions du corps aufimentmxt aussi ; il en est de même de la méiiusomie, de
l'eurtfplaslie et de l'indice de corpulence. Sans doute, le parallélisme n'est
pas étroit entre tous ces facteurs; l'accroisseinent de l'un n'entraîne pas
forcément une augmentation proportionnelle des autres. Cependant, il
nous est impossible de ne pas faire remarquer dans celle ordination quels
rapports étroits unissent la capacité vitale à la mégasomie, à l'amplitude
thoracique et à l'indice df corpulence.
La colonne IV du tableau I donne la moyenne de la capacité vitale
absolue, de toutes les dimensions du corps, et de tous les rapports qui
s'y rattacbent. Celle-ci est de3.'Jl2 centimètres cubes. Elle résulte de cbifTres
dont les valeurs extrêmes sont 2.730 et 5.730 centimètres cubes, séparées
par une différence supérieure ;i la plus faible d'entre elles. Maëstrelli, qui
a fait ses recbercbes sur des soldats italiens de vingt-deux ans environ,
admet qu'elle est de 3.911 centimètres cubes. Smilh la trouve égale à
3.770 et Scbnepf à 3.936 centimètres cubes.
Sans doute, il est intéressant de rapprocher ces chiffres, mais leur
interprétation rigoureuse exige qu'on ne perde pas de vue les conditions
dans lesquelles ils ont été obtenus, les moyennes dont ils dépendent et
dont ils sont inséparables. Tous ces auteurs, en effet, sont de nationalité
différente, leur technique est personnelle et par conséquent essentielle-
ment variable, et leurs expériences ont été poursuivies dans des circons-
tances dont la diversité rend plus ou moins valable la comparaison.
La seule conclusion indiscutable que l'on pourrait tirer de ce rappro-
chement est la suivante : Le chijj're de 3.500 centimètres cubes admis classi-
quement comme représentant la capacité vitale absolue d'un adulte bien constitué,
est trop faible; 3.900 centimètres cubes se rapprocheraient davuntaf/e de la
réalité.
Cependant, il serait inexact d'alïirmer brutalement que 3.912 centi-
mètres cubes représentent la capacité vitale absolue d'un adulte français
de 20 à 25 ans, d'une taille de l m. 700. Et d'abord la taille moyenne des
Français délinquants et non délinquants, est la même : 1 m. 653 environ.
Il existe donc dans notre chiffre, une différence importante, puisqu'elle a
nécessairement un retentissement considérable sur la mégasomie. L'expli-
cation de ce fait nous est fournie, comme nous le démontrerons plu€loin,
par les théories de M. Manouvrier. Les cent élèves de l'École du Service
de Santé militaire, pouvons-nous dire dès à présent, sont des macroB-
kèles par éducation, par inactivité musculaire, par station assis prolongée
pendant des années. Aussi, pour être exact, résumerons-nous dans cette
proposition (jui indique les principales conditions dans lesquelles nous
étions placé, les résultats que nous avons obtenus :
La capacité vitale absolue d'un Français de 20 à 25 ans, d'une taille de
1 m. 700, macroskèle marroplaste par éducation, est de 3.012 centimètres
cubes.
Ce n'est pas à dire pour cela que tout individu sain doit atteindre ce
chiffre : ce dernier n'est qu'une moyenne, et suivant les circonstance une
2i 5 JANVIER 1905
capacité vitalp de 2.7.30 centimèlies cubes est tout aussi normale qu'une
autre de 0.730 LPntiiut'tn-s cubes.
Nous ni' v»»ulons pas i\ co propos, entamer l'intéressante question des
applications clini.iues de la spirométrie. Après avoir eu son moment de
vo,2:ue et d'engouement, cette méthode est tombée dans un oubli profond
et mérité. .Nous ne croyons pas cju'il soit utile de lu faire revivr.'. Indé-
pendamment des dinicullés techniques qu'il présente, l'emploi du spiro-
mètre reste incontestablement soumis ;i la bonne volonté de celui qui s'en
sert, car il est bien difficile de forcer un sujet à faire une inspiration
forcée suivie d'une expiration maxima. C'est pourcjuoi, il est un peu sur-
prenant de voir un médecin militaire italien, d'une compétence incontes-
tée, Maëstrelli, suspecter la bonne foi des conscrits quand il prend sur
eux des mensurations thoraciqnes, ne pas la mettre en doute quand il
leur fait donner leur capacité vitale au spiromètre, et rapprocher dans
ces conditions celle-ci de celles-là.
Ce rapprochement lui-même, mérite-t-il d'être fait? Nous ne le pensons
pas quand il s'agit de cas pris isolément. A une même taille, à un même
poids, il un même buste, ii une même longueur du sternum correspon-
dent des valeurs tellement variables qu'un rapport déterminé laisse beau-
coup de doutes sur son exiclilude C'est ainsi qu'un relève pour la taille
l m. 61, 3.750 et 2.730 centimètres cubes, pour la taille 1 m. 83. 4.300
et 5.730 oentimètrescui)es. .V une longueur du sternum de 152 millimètres
correspondent 3 000, 4850 et 4800 centimètres cubes; pour la longueur
103 niillimèires on note 2930 et 4530 centimètres cubes. Il en est ainsi
pour toutes les dimensions et pour tous les rapports.
Obtient-on plus de précision quand on unit la capacité vitale à plusieurs
facteurs combinés? C'est possible. Nous avons vu que Maëstrelli avait, à
cet effet, dre-sé des tableaux qui sont restés dans le domaine de la pure
théorie Nous ne pouvons porter sur eux une appréciation quelconque,
nos dimensions n'étant pas celles de l'auteur italien. Mais ce que nous
affirmons de la façon la plus catégorique, c'est qu'aucune combinaison
des fadeurs que nous avons analysés, ne nous a permis d'obtenir une
c mclusion, d'établir une formule, s'adaptanl étroitenment à chaque cas
particulier. Un à peu près est insuffisant: il faut obtenir une exactitude
mathématique. Elle est encore à trouver.
Rapports de la rapacilé vitale avec la taille.
C'est à la taille (jue l'on a rapporté le plus souvent les données spiro-
métriques.
Tandis qn'llnlcliiiisdn cl Smilli atlirni''nt que la capacité vitale aug-
mente de 60 centimètres cube.s pu- centimètre de taille, Wassiljew pense
que cette augmentation atleint50 centimètres cubes seulement, et Schnepf
tout en reconnaissant une certaine influence à ce facteur, la suppose
E. DEMONET. — RECHI KCIIES SLR LA CAl' VCH1-: VITALE
-23
tellement peu iinporlaiile i|iril ne cherche pas ;\ In .li^îenniner, et la sa-
bonloiine à celle de làge,
Tableau II
Ordination d'après la taille.
MilYENXKS DES DIMENSIONS
Taillp . . . . .
Buste. . . .
Mi-nibre inlV-riciir .
Largeur bi-aei-oniialc .
Loiijjiieur du sternum
Poids
Mégasomie ap{irocliée : Tailli' X '-arir. hi-afroin,
id. huste XiJircontér. Ihorac
Cirronférence;lhorariqu<'
Amplitude du thorax
Capacité vitale
MOYENNES DES RAPPORTS
Tailh
100
Buste
Membre inférieur.
Largi'ur bi-acromiale.
Lonirueur du sternum
Poids ......
Circonférence thorar-ique
Amplitude du thorax
("apacité vitale ....
Mi-mitre inféripur. .
hargi'uV bi-af^riunialc
Longueur du sternum .
Circonférence thoracique
ipprochée (Taille X Largeiu' bi-acro
1(10 Capacité vitale .
Mésiigamii' ;ippri»chée : (Buste X Circou
lii(irari(pio) 2= 100: Capacité vitale .
Poids := 100: Capacité vitale. .
Busl.' — 1H(I
Mégasduiii
miale)
I (30]
1.628
().8(;-.>
0.706
0.:i53
0.154
58.8
57.40
70.86
0.822
0.671
3.418
52.9
17.1
21.7
9.46
30.1
50.4
4.3
2.100
88. 9
41.0
17.9
95.4
5.948
4.825
5.813
Il (30)
1.700
0.N78
0.822
0.359
0.166
65.0
61.09
73.88
0.846
0 OSO
3.916
51.7
48.3
21.1
9.76
38.3
49.8
4.7
2.304
92.7
40.9
18.7
95.2
6.410
5.300
6.025
m (30)
1.772
0.910
0.8(')2
0.374
0.171
70.7
66.27
78.62
0.865
(I.OSO
4.400
51.4
48.6
21.1
9.76
39.0
48.4
5.0
2.483
94.7
41.1
18.8
95.1
6.f)39
5.592
6.223
Le tableau II qui expose les relations de la capacité vitale et des autres
dimensions du corps, avec la taille, montre qu'à un point de vue absolu:
A memre que la taille s'élère. la cai'acité vitale el toutes les dimensions du
corps aufimenlenl aussi dans des jtroportions plus ou moins considérables.
Relativement à la taille :
La capacité vitale augmente.
Le membre inférieur, le poids, ram|ilitu le du thorax, la mégasomie
augmentent.
24 5 janvieu liKJ.'i
Le buste, la largeur bi-acromiale, la cirionférence Ihoracique, l'eury-
plaslif diminuent.
(,)uant ;\ la lon.i;ueur du sternum, elle au.^menle chez les individus de
taille moyenne, mais ne progresse plus chez les individus grands. Tous
ces rapports anlhrupom(^tri(|ues, sont en parfait accord avec ceux qu'a
exposés -M. Manouvrier dans son récent ouvrage.
Cependant la taill»; moyenne atteint dans nos recherches, Im. 700:
elle est de I m (i53 dans les statistiques de M. Bertillon, mises en œuvre
par M. Manouvrier. Cet écart important ne peut être expliqué par ce fait
que nous avons poursuivi nos ex[)ériences sur des individus d'une taille de
1 m. o&) et au-dessus, et par la présence d'un sujet mesurant I m. 900.
Cette différence est due à des causes bien plus importantes dont l'exposé
sera fait bientôt.
Cette ordination d'après la taille montre combien est juste la mise en
séries que nous a indiquée l'éminent professeur qui a bien voulu nous
prodiguer et son temps et ses conseils. Il est en etîet très intéressant de
noter que le deuxième groupe composé des cas moyens, a une taille et
une capacité vitale absolument i(lenlii|ues aux moyennes générales. En
outre la taillé moyenne du premier et du troisième groupe, composés des
cas extrêmes, s'éloigne respectivement de 7:2 millimètres de celle du
deuxième groupe; bien plus, la capacité vitale de ce dernier diffère de
4'J8 centimètres cubes de celle du premier, et de 484 centimètres cubes
de celle du troisième. Cette progression remarquable met en évidence
non seulement les rapports étroits qui unissent la capacité vitale et la
taille, mais encore le fait que nous avons atteint dans nos recherches la
série suffisante, et que nous l'avons ordonnée d'une façon aussi satisfai-
sante que possible.
Ainsi, le troisième groupe a par centimètre de taille 67 centimètres cubes
de plus que le second, et ce dernier a encore un avantage de 69 centi-
mètres cubes sur le premier. Il en résulte donc que, dans la limite de nos
expériences de I m. 628 a 1 m. 772, la capacité vitale est d'autant plus élevéeque
la taille est elle-même plus grande. Cette progresion est presque mathématique,
et l'on pourrait écrire que quand la taille s'élève de un centimètre la capacité
vitale aufjmente de 1)8 centimètres cubes. Mais qu'on ne se hâte pas de géné-
raliser cette conclusion, et surtout d'en faire des applications individuelles.
Ce i\\i\ est exact pour un ensemble de cas, peut fort bien ne plus être vrai
pour chacun de ces cas pris isolément; et il ne faut pas oublier qu'on ne
doit demander à une méthode que ce qu'elle peut donner. Aller au delà,
c'est s'exposer à des mécomptes certains.
Cette conclusion est en opposition avec les idées généralement admises
sur ce sujet. Celte contradiction n'est qu'apparente. Ilutchinson soutenait
déj.'i que la plus grande capacité vitale relative ne correspond pas à la plus
grandi' laille : c serait, dit-il, vers 1 m. 79, l'.'^ge étant le même, gue la
capacité vitale serait la iilusç/rande. Notre mise en série n'est pas en désaccord
avec l'aflirmation de l'auteur anglais. Notre troisième groupe a une taille
moyenne de 1 m. 772 et nous ne soutenons pas plus que la capacité vitale
E. DEMONKT. — UECHERCHES SIU LA CAPACITK VITAr.K 25
croit relaliveiuonl h la taille au-iicssiis do I m. 7110 qu'Hutchinson ne pré-
tend (|u'ell(' diiiiimu' au-dessus de I ni. 770. Hieu ne prouve que si nous
avions eu une trentaine de sujets grands, ayant comme taille 1 m. 790,
cette progression ne se serait pas arrêtée, et la relation, au lieu d'être
positive, ne serait pas devenue négative. (]'est du reste, ce (}ue semblent
indiijuer les quelques observations recueillies sur ceux de nos camarades
ayant une taille supéii(Mire ;\ 1 m (SO.
.M. .Manouvrier pense ([ue « la capacité vitale croit absolument, mais
non relativement avec la taille, parce que les organes de la nutrition n'ont
pas besoin jtbysiologiquement d'être développés proportionnellement à la
masse à nourrir, la surface ne croissant que comme la racine carrée du
volume, et la quantité du travail musculaire à fournir ne croissant pas
elle-même, en moyenne, proportionnellement à la taille ». Le tableau II
indique que l'amplitude du thorax croît avec la taille jusqu'à 1 m. 112.
Il ne fau irait pas en conclure pour cela qu'elle croît toujours en moyenne
avec la taille; mais il en est ainsi quand cette dernière ne dépasse pas la
valeur indiquée. Bien plus nos chilTres nous porteraient à croire qu'au-
dessus de 1 m. 80, l'amplitude thoraciciue n'est plus proporlionnnelle à
à la taille. S'il en est ainsi, ram|»lilude thoracique et If^ capacité vitale
affectent exactement les mêmes rapports avec la taille. Or, cette ampli-
tude du thorax « est en rapport avec le développement des muscles, avec
la quantité et avec l intensité du travail mu-culaire ». (Manouvrier). De
cette façon, ne saisit-on pas sur le fait les relations intimes qui unissent
la capacité vitale à ce second groupe des fonctions de l'organisme que
M. .Manouvrier a dénommé : énergie musculaire.
Le degré de mégasumie des grands individus peut aussi être considéré
comme une raison de cette anomalie apparente que Smith et VVawiljew
admettent quand ils écrivent sans restriction que la capacité vitale croît
de 50 à 60 cent, cubes par centimètre de taille : seulement ils ont négligé
cette conséquence de leur conclusion.
M. Manouvrier s'exprime ainsi sur la valeur delà taille adoptée comme
terme de comparaison : a IJien que la stature soit en rapport, d'une
manière générale avec le développement total de l'organisme, elle ne
mesure évidemment pas le degré de mégasomie ou de microsomie,
puiscjue l'on sait que les dimensions transversales sont très variables
pour une même stature, suivant la race, le sexe, l'âge, suivant les indi-
vidus, et même si l'on compare entre eux des groupes homogènes de
même âge, de même race de même sexe, et formés uniquement d'après
la stature. »
N'ayant pu prendre un diamètre antéro-po.^térieur du thorax, nous
parlerons, ù titre de compromis d'investigation seulement, de deux indices
d'une méffasomie approchée représentés l'un par le produit de la taille par
largeur bi-acromiale, l'autre par le produit du buste par la circonféience
thoracique. Sans nul doute cette manière de faire est imparfaite : aussi,
nous proposons nous de vérifier, dans un travail ultérieur, les résultats
qu'elle nous a permis d'obtenir.
26 o jANviKn l'.tn;i
Ov, la mégasoinie croft absoliimenl el relativement avec la taille, et la
capacité vitale croft aussi ahsoliimcnt et relativemenC avec la mégasomie.
Mais à inégasomie l'^ale, les plus gi'aruls oi)t une capacité vitale rjui tend
à ilevenir inlërieureà celle des petits. Cette contradiction met en évidence
ce fait que nos indices d<' tnéirasumie approchée sont suffisants pour
montrer les véritables rapports de la mégasomie et du développement
pulmonaire chez les plus grands, mais insuffisants pour exprimer la
mégasomie absolue.
Il y a dt^ sérieuses raisons de penser (juc le diamètre antéro-poslérieur
de la poitrine présente avec la taille, les mêmes rapports, plus accentués
encore, que la largeur bi-acromiale : il croît absolument, mais non rela-
tivement avec la stature. S'il en est ainsi la mégasomie résultera de deux
multiplications qui se feront en somme aux dépens des grands, et si une
a sufli pour rendre probable l'infériorité de ces derniers au point de vue
de la fonction respiratoire, cette probabilité aurait bien des chances d'être
changée en certitude par un indice de mégasomie absolue, obtenu par
la mise en œuvre des trois dimensions.
Le poids exprime aussi la mégasomie dans la mesure où il n'est pas
influencé par l'embonpoint. Certainement, cet'e cause d'erreur n'a pu
être évitée d'une façon complète, mais elle a été réduite à son strict
minimum par le fait que les élèves de l'Ecole de santé, ne présentent pas
entre eux, de très grandes diiïérences au point de vue du développement
du tissu adipeux. C'est pourquoi ce nouvel élément conlirme ce que nous
venons de dire au sujet de la mégasomie, en montrant que les petits ont
relativement à leur poids, une capacité vitale de très peu inférieure k
celle des grands.
L'influence de la inégasomie se substituerait donc à celle de In taille propre-
ment dite.
Cne autre explication peut être cherchée dans la façon dont s'opèrent
les échanges au niveau des poumons. Ce qui est vraiment utile pour l'orga-
nisme, ce n'est pas tant le volume d'air introduit dans la poitrine, que la surface
au niveau de laquelle s'opèrent les (khanges respiratoires. Or, les volumes
s'accroissent en raison de la puissance 3, et les surfaces en raison de la
puissance 2 seulement Dans la circonstance actuelle le volume se mesure
par la capacité vitale; il croît relativement avec la taille. Comment la sur-
face de ce volume peut-elle être représentée? Maëslrelli a démontré que
de toutes les dimensions du thorax, la longueur du sternum est celle qui
est le plus en rapport avec la capacité vitale : il a prouvé que le volume
du tronc de cône pulmonaire peut être avec assez de précision, représenté
par le produit de la longueur du sternum par la surface d'un plan passant
par le milieu de cette pièce squelettique Ce qui est vrai pour le volume,
doit l'être aussi pour la surface, si on prend pour représenter cette der-
nière, le produit de la longueur du sternum par la circonférence thora-
cique. La graisse n'intervient pas pour diminuer la valeur comparative
de celte dernière, puisque, nous le répétons, tous nos sujets ont à peu
près le même embonpoint, et sa mensuration effectuée au niveau de
E. DEMONET. — HECHEUCHES SIR I.A CAPACITÉ VITALE 27
l'union du corps «lu sternum ot de l'appendic* xyphoïde ne constitue pas
un défaut telleaicnt grave que la comparaison de nos S groupes soit à
ce point de vue nulle. De cette fayon : la surface des échanqes respiratoires
lie croit plus relativement à la taille; elle est sensihlemene la même pour tous les
individus: peut-être même hs individus jietits seraieiit-ils sous ce rapport plus
favorises (jue les yrands.
Cette application exigerait pour (Mrc rcrlaine, (jue la température de
l'air expiré soit plus élevée cliez les petits t|ue chez les grands, et (jue le
quotient respiratoire soit plus faiblr ihez ceux ci que chez ceux-là. Ce
sont lîi des faits soupçonnés mais non définitivement démontrés.
Toutes les recherches anthropométri(jues ont établi la diminution du
buste, et l'augmentation des membres inférieurs par rapport à la taille,
à mesure que celle-ci s'élève. C'est aussi ce qui résulte de notre tableau II.
Chez les grands le membre inférieur est i)lus long par rapport au buste
que chez les petits : par conséquent l'allongement du buste n'est pas pro-
portionnel à celui des membres. L'accroissement de la taille porte donc
principalement sur les membres inférieurs, contrairement aux résultats
obtenus par .M. [{ollet. et conformément aux résultats classi(]ues. C'est
une conclusion à laquelle, du reste, était arrivé M. Manouvrier en utili-
sant non seulement les mensurations de M. Bertillon, mais encore celles
de M. Rollet lui-même. Il a montré en effet, que la mise en séries de ce
dernier auteur était défectueuse, et c'est en séparant les vieillards et les
adultes, qu'il a rétabli l'exactitude des faits.
La largeur bi acromiale est relativement à la taille plus grande chez
les individus d'une stature élevée (^eux-là semblent compenser par cet
accroissement l'infériorité dans laquelle ils se trouvent vis-à-vis de ces
derniers par la longueur de leur sternum qui chez eux est relativement
plus courte.
La circonférence thoracique décroît relativement h la taille à mesure
que celle-ci s'accroît. Ce rapport avait autrefois une grande importance
dans le recrutement militaire. On supposait alors, ^sur la foi de certaines
moyennes anthropométriques qu'un homme bien conformé devait avoir
une circonférence thoracique au moins égale à la moitié de sa stature. En
conséquence, les conscrits ne remplissant pas cette condition étaient
déclarés impropres au service militaire. Cette règle est aujourd'hui rejetée
ajuste litre. Ceux qui seraient chargés de l'appliquer seraient les pre-
miers à s'y soustraire. En effet, les individus petits présentent seuls, en
moyenne, le rapport exigé : les sujets de plus de 1 m. 65 ne l'atteignent
pas d'une façon générale : il tend donc à les désavantager.
Nous savons déjà que le poids et l'indice de corpulence croissent abso-
lument et relativement avec la taille.
Enfin, la brachysélie et la macroskélie se rencontrent associées à toutes
les statures.
28
') J\NVIEH lî>()5
Happints lie la cupnritt' vildic nrrr In loiti^ueur du buste.
a Ce qui fait la valeur de la taille comme terme commun de comparai-
son, c'est qu'elle reprt'sente plus uu moins bien l'ensemble du corps. Ce
qui constitue son défaut, c'est (ju'elle est une expression bien imparfaite
du d«^veloppement général, et que ses propre variations dépendent de
deux facteurs pn^sque égaux et de signification très différente, la longueur
du buste et la longueur du meinbn' inférieur ([ui sont loin d'être propor-
tionnelles entre elles, et qui subissent tantôt simultanément, tantôt sépa-
rément, les variations considérables dont celles de la taille sont le» résul-
tantes » (Manouvrier).
Tableau HI
Ordination d'après la longueur du buste
MUYKONES DES DIMBi\SIO>S
Taillf
Buste
Membre inféri<'ur.|.
Largeur bi-acromiale.,
Longueur du sternum .
Poids. ...
Circontérence thoracique
Amplitude du thorax
Mégasoniie approehéo: Taille X I^arg. bi-acroni.
id. Buste X ^'iroonC. tliorar
Capacité vitale
MO'ENNBS DES RAPPORTS
Buste = 100 : Taille
Membre inférieur
Largeur bi-acromiale ....
Longueur du sternum . . . .
Poids .... . . . .
Mégasomie appr.: Taille X Largeur
bi-acromiale
Ciroonférenoe thoracique .
.\mplitude du thorax ....
Capacité vitale
Taille — 100 : Buste ] \
Largeur bi-acromiale ....
Longueur du sternuni ....
Conférence thoracique
Mésogaœie approchée = 100. (Taille X Lare, bi-
acromiale). C.aparité vitale
Mésogamie approchée =r 100. (Buste X Circonfé-
rence thoracique). Capacité vitale
1(30)
1.650
0.852
0.798
0.355
0.156
61.1
0.829
0.076
58.58
70.63
3.551
193.
93.
41.
18.
71.
68.76
97.3
8.9
4.168
51.6
21.5
9.4(;
50.2
6.062
5.028
11 (40) i m (30)
1.696
0.881
0.815
0.360
0.165
63.4
0.843
0.078
61.06
74.27
3.851
192.5
92.5
40 8
18.7
72.0
()8.18
95.7
8.9
4.371
52.0
21.3
9.73
49.7
6.307
5.188
1.7.58
0.915
0 843
0.369
0.168
70.0
0.862
0.087
64.88
78.87
4.354
192.1
92.1
40.3
18.4
76.5
70.91
94.2
9.5
4.758
52.1
21.0
9.56
49.0
(1.711
5.522
E. DEMONET — RECHERCHES àLR LA CAPACITÉ VITALE 29
11 Ptait (l'aiil.int plus intéressant pour nous de dissocier rintluence de
ces deux fadeurs, que celte analyse île la taille nous periiiettail de com-
parer au point de vue du dévoloppeinent pulmonaire, la longueur du
buste représentant associés les appareils nourriciers et régulateurs de l'or-
ganisme, et la longueur du membre inférieur, traduction bien imparfaite
du système musculaire, de l'appareil locomoteur de ce dernier.
Le tableau lll, ordonné d'après la longueur du buste, et constituant
ainsi le premier terme de cette analyse, montre que, en se plaçant k point
de vue absolu :
.4 mesure que le buste s'élève, la capacité vit'ile et toutes les dimensions du
corps croissent aussi.
Relativement à la longueur du buste :
La capacité vitale augmente. lien est de même pour le degré deméga-
somie et le poids. L'amplitude thoracique augmente seulement chez les
individus dont le buste est le plus grand.
La taille, la longueur du membre inférieur, la largeur bi-acromiale, la
longueur du sternum, la circonférence thoracique diminuent.
Le tableau précédent montre que la capacité vitale augmente du premier
au deuxième gioupe de 300 centimèlies cubes quand le buste croît de
29 millimètres : du deuxième au troisième groupe, ce dernier s'allonge
de 34 millimètres quand la capacité vitale gagne 503 centimètres cubes.
Elle augmente donc d'abord de 104 centimètres cubes puis de 148 centi-
mètres cubes par centimètre de buste. Il semble donc tout dabord que le
développement pulmonaire n'est pas lié d'une façon très étroite à la lon-
gueur du buste, et il est facile de comprendre que Schnepf ait méconnu
ces relations au point de déclarer que la capacité vitale était absolument
indépendante de la hauteur du tronc De plus, il est incontestable que la
taille, est à ce. point de vue un terme de comparaison bien supérieur à la
longueur du buste.
Et cependant, ce tableau n'est pas sans enseignement. Il faut recher-
cher l'explication de ces rapports un peu extrordinaires a priori dans les
variations concomitantes de l'amplitude thoracique et de la longueur des
membres inférieurs.
M. Manouvrier pense que le développement du thorax comme celui du
crâne est sous la dépendance absolue de son contenu. L'accroissement pul-
monaire tend à agrandir la cage thoracique, et à favoriser l'allongement
des eûtes il tend aussi à soulever celles-ci. Pour les poumons, la suracti-
vité musculaire favorise nécessairement l'agrandissement transversal,
lequel sollicite l'allongement des côtes, d'où résulte l'élargissement tho-
racique. Sans doute, le diamètre transversal de la poitrine nous fait défaut,
et il nous est impossible, pour cette raison, de démontrer directement
l'élargissement thoracique comme mode de croissance du poumon. Mais
il est facile de prouver que la suractivité musculaire agrandit la cage tho-
racique en allongeant les côtes.
En effet, du premier au deuxième groupe, l'amplitude thoracique
augmente de deux millimètres quand la ciixonférence thoracique en gagne
30 .") JANVIKII 1U0.J
(Iiial(»i/.«' ; ilu tli'iixièint' au troisième içroupc, celle-là s'accroît de neuf
milliinètres. et celle-ci aiJiïinciile de dixiieuf iiiilliinèlres. Ces variations
sont donr |)HiMllèl<'.-;, et exacleiniMit siip('r(»osal)li's ;i celle (jue pi'ésente la
capacité vitale elle-int'ui.'. I)«' [dus le tahieau 11 ordonné d'après la taille,
indique (ju'à amplitude lin thorax éuale, la circonférence Ihoracique croît
beaucoup [dus du premier au deuxième groupe quedu deuxième au troi-
sième. Le tableau III ordonné d'après le busie, montre que cette augmen-
tation est beaucoup plus considérable pour le ti'oisième i^TOupe que pour
le deuxième, jjarce que l'amplitude Ihoracique de celui-là est plus élevée.
Ce mode de développement pulmonaire est encore confirmé par la lon-
gueur des membres inférieurs qui présente une augmentation absolument
semblable. (Juand l'amplitude du thorax aui^menle de deux millimètres,
d'abord, puis de neuf millimètres, les membres inférieurs s'accroissent
en premier lieu, de dix-sept millimèties et enfin de vingt-huit milli-
mètres. Cette dernière augmentation est ici indépendante de toute consi-
dération de macroskélie, parce qu'elle est en parallélisme étroit avec
l'accroisemenc de la longueur du buste, de l'amplitude du thorax, de la
circonférence thoracique, et de la capacité vitale. Elle traduit donc d'une
façon satisfaisante, dans les circonstances présentts, le plus grand déve-
loppement relatif de l'appareil locomoteur, et par conséquent^ une surac-
tivité musculaire relative.
Il apparaît ainsi nettement que l'uccroissement pulmonaire se fait par
allongement des côtes. De plus celui-ci tend à les soulever. C'est cette der-
nière affirmation que pourraient soutenir les chiffres qui nous ont servi
k déterminer le degré d'inclinaison du sternum. La projection de celui-ci
en avant, se rencontre, en eiïet, presque exclusivement chez les sujets du
groupe m.
Un autre argument en faveur de cette manière de voir peut être tiré de
ce que l'énorme augmentation que présente la capacité vitale du troisième
groupe, s'accompagne d'un accroissement insignifiant de la longueur du
sternum. Carie poumon rencontre de grands obstacles pour se développer
en hauteur ; il le fait dans les autres sens, mais forcément alors les côtes
s'allongent.
En résumé, l'intensité du fonctionnement musculaire règle l'intensité du dé-
veloppement du poumon. Celui-ci se fait pur allonffement et soulèvement des côtes.
Cette double tendance de la croissance pulmonaire est parfaitement indi-
quée par les mouvements du thorax pendant l'inspiration, et surtout
pendant l'inspiration profonde.
Il n'est pas inutile de noter aussi la concordance parfaite qui existe
entre la capacité vitale d'une part, la mégasomie et le poids d'autre part.
Caria mégasomie faitde nouveau sentir son influence. A mégasomie égale,
la capacité vitale, croît absolument dans une sériation d'après le buste,
mais relativement à celui-ci elle diminue très sensiblement. Ceci est un
Corollaire logique de ce qui a déjà été dit au sujet de la taille. Il en est de
même pour le poids. El ces deux facteurs présentent dans leur accroisse-
ment les particularités que nous avons relevées pour l'amplitude du
E. DEMONKT. — KF.CUERCHES SUU LA CAPACITK VITALE 31
thorax etc. etc. Celle heureuse hariiionit,' démonlre la connexion intime
qui existe entre tous ces facteurs, et le relenlissenient (|ue les variations
de l'un (l'entn^ eux exercent sur les variations des autres.
Les plus petits husles, coinuie les plus petites tailles, cherchent à com-
penser leur infériorilé parun accroissement relatif do leur largeur bi-acro-
miale et de leur circonférence Ihoraçique.
M. Manouvrier a insisté sur l'intérétqu'il y aurait souvent à adopter le
buste comme terme iiénéral de comparaison, sa moindre complexité et sa
stabilité relative peuvent faire espérerque les rapports antliropomélriques
se rangeraient ainsi d'une façon plus significative qu'avec la taille. La
capacité vitale atTecle la tuille des rapports beaiicimp plus réguliers (ju'avec
le buste ; sans doute, parce que la st iture traduit mieux, le développement
général de l'organisme, le tronc n'en représentant seulement que les appa-
reils régulateurs et nourriciers associés.
La fréquence véritablement elfrayant'^ d'une scoliose plus ou moins
marquée chez nos camarades d'école exige d'être mentionnée ici, puis-
qu'elle se rencontre dans les 2/3 des cas environ. Ces affections doivent
être rattachées à une mauvaise tenue habituelle dans la station assis et à
une hygiène scolaire détestable, dont les méfaits nous occuperont bientôt.
Rapports de lu capacité vitale avec In longueur des membres inférieurs.
L'ordination d'après la longueur des membres inférieurs constitue le
second terme de l'analyse de la taille envisagée comme terme de com-
paraison. Toutefois celte longueur ne représente que très imparfaitement
le développement de l'appareil locomoteur : le rapport de la circonférence
du fémur et du tibia à la longueur de ces pièces squelettiques eut donné
une idée beaucoup plus exacte du développement musculaire de l'orga-
nisme ; mais il nous était naturellement impossible de calculer ce degré
d'eurypiastie des membres inférieurs.
Cette réserve faite, le tableau IV prouve que :
Toutes les dimensions, tous les rapports, et la capacité vitale augmentent à
mesure que la longueur des membres inférieurs s'accroît.
Relativement à celle-ci :
La capacité vitale, le poids augmentent. Il en est de même pour l'am-
plitude thuracique avec cette réserve cependant (|ue le deuxième groupe,
est, à ce point de vue, légèrement inférieur au premier.
La taille, le buste, la longueur du sternum, la largeur bi-acromiale
diminuent.
La mégasomie décroît.
Ces relations sont intéressantes à plus d'un point de vue. La capacité
vitale croît de 7-2 centimètres cubes, du l»' au -l" groupe, par centimètre
de longueur des membres inférieurs, et de 85 centimètres cubes du 2» au
3« groupe Ce rapport est d'une régularité satisfaisante qui mérite d'être
rapprochée de celle qu'affecte dans la même sériation, la capacité vitale
32
T) janvikii i'-Xiri
avec la taille. Celle ci entraîne par centimètre un accroissement de
60 centimètres cubes dans la capacité vitale cdriespundante. L'influence
de la Uille se substituerait à celle des membres inlériours elle-même.
Tableau IV
Ordination d'après la longueur des membres inférieurs.
.MilYE.NNES UKS DIMENSIONS
Taille. . . . . .
Buste
Membres inférieurs.
Largeur bi-acrouiiale. .
Longueur <lu sternum.
Poids
Circonférence tlioracique
.Vnipliluilc (lu thorax
Mégasomie raii[irocliée : Taille X I-'^rg- bi-acrom.
iil. Buste X Circonf. thorac.
Capacité vitale
MOYEN.NKS DES RAPPORTS
Membre inlér. rr 100 : Taille
Buste
Largeur bi-acromiale .
Longueur du sternum.
Poids
Circonlérenoe tlioracique .
Amplitude du thorax .
Mésoganiie approchée. Taille
X largeur bi-acromiale .
Mégasomie approchée. Buste
XCirconlér. tlioracique .
Capacité vitale
Taille =: 10(J : Buste
Longueur du sternum ....
Circonférence Ihoraciquc. .
Buste ^r 100 : .Membre in l'érieur. . . . .
Mésogamie approchée — 100. (Taille X Largeur
bi-acrouuale). Capacité vitale
Mégasomie approchée :r= 100. (Buste X Circonfé-
rence thoracique). Capacité vitale
1(30)
l.()32
o..S(;h
0 763
0 352
0.157
58.7
0.821
0.074
57.45
71.34
3.498
213.9
113.9
40.1
20.6
70 9
107. G
9.7
75.30
93.51
4.571
53.2
9.0
50 3
87.8
6.089
3.743
Il (40)
1.705
0 881
0.824
0.304
0.104
65.7
0.849
0.078
62.06
74.80
3.936
206.9
106.9
44.2
19.9
79.7
103.0
9.5
75.32
90.82
4.777
51.7
9.6
49.8
93.5
6.342
4.333
III (30)
1.764
0.898
0 866
0.367
0.1()9
69.7
0 861
0.088
64.74
77.31
4.292
203.7
103.7
42.3
19.5
80.5
99.4
10.2
74.76
89.27
4.956
49.1
9.6
48.9
98.6
6.629
4.820
Les rapports de la longueur des membres inférieurs avec la circonfé-
rence thoracique sont seuls intéressants. Ils nous permettent d'énoncer ce
rapport qui nous parait es-enliellement exact : a Un homme bien constitué
doit avoir une circonférence thoracique au moins égale à la longueur de ses
membres inférieurs. Lue légère restriction doit être faite : Quand la longueur
des meîubres inférieurs dépasse 85 centimètres une différence de deux centimètres
E. UKMONET. — RECHERCHES SUR l,A CAFACITK VITALE Xi
peut être tolérée. Si un indiviilii ne pivst'nte pus ce rappoil, sa robusticilé
est plus que suspocli'.
Celle notion pourrait rendre quelques services dans le recrutement de
l'armée, et les médecins uiililaiies la jugeraient à l'univre. Il est vrai que
son application nécessilei ait une nouvelle mensuration; celle du buste
qui donnei'ait par là même, celle des membres inférieurs, la taille étant
connue.
Rapportu de lu capacité vitale avec le rapport -
M. Manouvrier, à propos des avantages et des inconvénients de la
taille adoptée comme terme de comparaison dans l'étude des rapports
anlbropométriques, a surtout insisté sur l'intérêt que présente la re-
cherche des relations qui existent entre les deux composantes de la lon-
gueur du corps. Il appelle rapport - le rapport de la longueur du membre
inférieur S, à la longueur du buste B -- 100, et il désigne sous le nom de
brachyskéles, mesaiiskèles, macroskèles, les ditlérenls termes d'une série or-
donnée d'après ce rapport. Les applications de tout ordre auxquelles
donne lieu la connaissance de ce rapport, et l'importance capitale que
celui-ci acquiert au point de vue militaire, ont été magistralement
exposées dans un cbapitre de 1' « Etude sur les rapports anthropomé-
triques » à laquelle nous avons eu et nous aurons encore très souvent
recours.
Il était particulièrement intéressant pour nous de mettre en œuvre,
pour la première fois ces idées nou\\'lles, et nous serons très heureux
d'apportei' des faits qui sont une confirmation de leur exactitude.
s
Nous avons donc classé nos sujets d'après le rappport - ^ suivant un
tableau dont M. Manouvrier a bien voulu nous donner connaissance
avant de le publier. Il l'a construit en utilisant le tableau XI (p. 73) du
Mémoire qui vient d'être cité. On sait que les moyennes de .M. Berlillon
ont servi de base à ses calculs.
Notre technique ayant été identique à celle du Laboratoire d'Anthropo-
logie et à celle du service d'identilication anlhropomélri(]ue, nos chiffres
sont absolument comparables à ceux du .Mémoire de M. Manouvrier.
D'abord, la taille moyenne des élèves de l'Ecole de Santé est de i m. 700 ;
celle des sujels mesurés à Paris s'élève seulement à 1 in. 043 millimètres;
il existe donc une différence de 57 millimètres que les raisons déjà men-
tionnées sont insuffisantes à expliquer. La longueur du buste des premiers
mesure 0,883 millimètres, celle des secondes 0,877 millimètres, l'écart
signalé porte donc presque exclusivement ^ur la longueur des membres
inférieurs, .\ussi, tandis que le rapport - de ces derniers atteint 87,3,
celus des premiers s'élève à 92,7. (l'est ici qu'interviennent les théories
de M. Manouvrier.
80C. DANTHROP. 1903. «^
34
r» JANVIKII l'.K)?)
Tahi-kai' V
Ordination d'après le Rapport — ,
MOYENNES DES DIMENSIONS
Taille
Buste (B)
Membre inférieur (S) ^ • •
Buste — 100 Membre inférieur {Rapport — )
Largeur bi-afromiale
Longueur du Bternum
Poids . . .
Circonférence thoracique
Amplitudo du tliorax • • • •
MéRasoniie approchée ; (Taille X La''y bi-a'i'om.
id. (Buste X^irconl. thorac.
Capacité vitale
I
30+bra-
cliv.
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille — 100 : Buste
Largeur bi-acromiale
Longueur du sternum ....
Poids
Circonféronce thoracique. . . .
Amplitude du thorax ....
Capacité vitale
Mégasomie approchée = lUO : (Taille X I^argeur
bi-acromiale). Capacité vit ah'. . • •. • •
Mégasomie approrhée — 100 : (Buste X Circonl.
thoracique). Capacité vitale
1.697
0.901
0.796
88.4
0.362
0,164
64.9
0.842
0.080
61. /i3
75.86
3.978
53.1
21.3
9.66
38.3
49.6
4.72
2.344
6.475
5.245
1.707
0.885
0.822
92.9
0.362
0.165
65.5
0.8.52
0.081
61.79
:5.40
3.948
52.1
21,2
9.66
38.4
49.9
4.74
2.313
6.389
5.236
m
30+ m a-
roskèies
1.695
0.860
0.835
97.1
0.359
0.159
63.9
0.837
0.077
60.85
71.98
3.796
50.7
21 2
9 38
37.7
49.4
4.55
2.240
6.236
5.288
Les sujets sur lesquels il a calculé ses moyennes sont des individus
quelconques : les adultes qui nous ont permis de poursuivre nos recherches
ont été sélectioyinés, et ils l'ont été par Véducation. Les élèves de l'Ecole du
service de santé sont des bourgeois. lU appartiennent à cette noblesse de
robe condamnée dès l'enfance à un régime scolaire qu'à soulevé de tout
temps les critiques les plus vives et les plus justifiées. M. Manouvrier
qualifie de « odieux, barbare et imbécile » un système d'éducation que
M. xMarcel Prévost croit imaginé par « un garde-chiourme de profession,
ou un moine tortionnaire. « De neuf à dix-huit ans, en effet, les lycéens
restent assis treize heures par jour en moyenne, et pendant les deux ou
quatres heures de récréation qubtidieiuie, « ils usent de leurs jambes,
dit M. Manouvrier, à peu près comme des vieillards. » Sans doute, la
position assis est pour certains une position de travail, et pour d'autres,
et c'est le eus, elle représente une position de repos, très aimée des non-
E. UEMùNET. — »Ki;ni:iu;iiKs siit i.A r.Ai'Acrn': vitalr 35
cliahiiits (Jiii taxL'i'a d'exagiMalion M. Marct'l IMévust (juaml il déclare
X lieui'iHix, r<M('v<' qui sur les ti-ei/e heures de travail qui lui sont im-
posées, n'en consacre que douze à la flânerie et au sommeil furtif ».
M. Manouvrier pense que cette vie trop sédenlaii'e, cette station assis,
cette inactivité musculaire prolongée pendant les années (jui président au
développement de l'organisme, exercent sur celui-ci une iniluence détes-
table, et le prédisposent, h la macroskélie, et voici pourcjuoi :
« Les corps organisés, dit-il, n(; sauraient échapper à une loi aussi
générale que celle de la direction du mouvement dans le sens de la
moindre résistance. Or, l'accroissement des os en longueur se fait exclu-
sivement ou h peu près par les cartilages de conjugaison, et c'est une
nécessité mécanique que toute cellule tend à s'accroître dans le sens de la
moindi-e pression supportée par elle. Par ce seul fait, les cartilages de
conjugaison du fémur et du tibia qui sont soumis à une pression relative-
ment énorme dans la station debout, et surtout dans la marche, le saut et
la course, fournii'ont un accroissement en hauteur d'autant plus grand
qu'ils seront soumis moins souvent et moins longlem|is à c(;ttc augmen-
tation de pression vei'licale. »
« [/accroissement de l'os en grosseur se fait par dépôt périostique de
couches successives. Ici la pression verticale n'est plus en cause directe-
ment, mais les causes d'augmentation ou de diminution de cette pression
ne cessent pas de produire des elîets qui sont complémentaiies des pré-
cédents. La station debout, la marche, la course, les fardeaux, tout cela
représente une suractivité des muscles qui enveloppent l'os et s'attachent
à lui, une exitation fonctionnelle de la circulation musculaire, périostique,
osseuse même. Par conséquent, le mêmes causes physiologiques qui ten-
dent à diminuer la croissance en longueur au niveau des cartillages de
conjugaison, et au profit de la croissance en grosseur à ce niveau ne
tendent pas moins à favoriser la croissance transversale diaphysaire.
Pendant que la largeur croîtra au niveau des cartilages, la puissance
périostique augmentera la grosseur de l'os tout entier. I/os en totalité
tendra donc simultanément à être moins long et plus gros chez l'adoles-
cent actif que chez l'adolescent inactif dont l'accroissement enchondi-al
en longueur rencontrera uise résistance relativement faible pendant que
l'accroissement périostique ou en grosseur, restera languissant. » (Manou-
vrier. )
Cette théorie frçiiquc, à la fois mécanique et fonctionnelle, s'applique
à la morphologie des membres inférieurs comme à la morphologie cra-
nienni;. .\os résultais en sont une pi"euv(; t'videnle, puisijue sur nos cent
camarades qui ont été soumis pendant de longues années au régime sco-
laire, nous relevons :
8 brachyskèles. — 25 mésatiskèles. — 67 macroskèles.
Faisons remarquer en passant, combien est inexacte la croyance géné-
ralement adoptée par le public, que la station debout fait grandir. Qm
n'a entendu le : « Mais asseyez-vous donc; vous voulez encore grandir. »
Cette phrase presque sacramentelle, cette aimable invitation ressassée à
;i6 .*"» jANviKit l'jori
loisir. (>st aiclu-fauiîst', puisijiit' la station doljoiit s'oppose dans une cer-
taine mesure à raccroissenient de la taill»'. (|uc favorise au contraire, à
son maximum, la station assis.
Certainement, les chiffres nous niamiucnl pour établir d'une façon
déflnitive cette diminution de l'activité du périoste, et le faible accrois-
sement des os en épaisseur chez les niocroskèles. (les derniers cependant
donnent l'impression très nette que leurs pièces squeletliques sont longues
et étroites, peu volumineuses : les arêtes en sont saillantes, et les apo-
physes d'insertions musculaires peu développées. Tout porte donc à
croire que des mensurations ultérieures directes, démontreront avec la
plus grande évidence que la circonférence des os longs est beaucoup plus
faible chez les macroskèles que chez les brachyskèles.
Cette fréquence delà macroskèlie élail un résultat intéressant : il nous
causa cependant un léger embarras sur la faeon dont les séries devaient
être ordonnées pour l'étude des relations du degré de brachyskélie avec la
capacité vitale. Classer les sujets suivant leur degré de brachy ou de
macroskèlie absolue, c'était avoir des séries composées d'un nombre de
cas, insuffisant pour l'une, et tellement différent entre elles, que leur
comparaison était plus ou moins valable. Il était pi-éférable de former
trois groupes : le premier composé des 30 sujets les plus brachyskèles,
le dernier des trente plus macroskèles, et le second des quarante mésatis-
kèles. Cette manière de faire peut prêter le liane à certaines critiques :
elle n'en est pas moins la meilleure, bien qu'elle atténue très sensiblement
les différences qui séparent les divers degrés du rapport -g- .
Nous avons déjh dit que la valeur de ce rapport est absolument indé-
pendante de la taille. Celle affirnialion était fondée, parce que la taille des
huit brachyskèles oscille entre i m. 56 et 1 m. 8:2; celle des vingt-cinq
mésatiskèles est comprise entre 1 m. 58 et 1 m. 83; enfin, celle des
soixante-sept macroskèles varie entre 1 m. 57 et 1 m. 90. Il n'y a donc
rien d'étonnant h ce que la laille des 3 séries du tableau V soit sensiblement
la même.
s
Ce tableau montre en outre que, à mesure que le rapport - s'élève :
La capacité vitale diminue.
La largeur bi-acromiale diminue;
Les brachyskèles sont plus favorisés que les macroskèles sous le
rapport de la longueur du sternum, du poids, de la circonférence
thoracique, de l'amplitude du thorax, de la mégasomie. Ces divers
facteurs sont bien un peu plus développés chez les mésatiskèles, mais en
proportion tellement faible, que leur intluence sur la capacité vitale est
nulle, et ne peut contrebalancer l'influence contraire exercée par une plus
grande longueur du buste.
A taille rigoureusement égale, les trois groupes présentent encore entre
eux, des rapports exactement identiques.
On peut dire encore, malgré un chiffre légèrement contradictoire, qu'à
mégasomie égale, les macroskèles sont encore désavantagés au point de
E. DEMONET. — RECHERCHE? SUR LA CAPACITK VITAI.K 'M
vue respiratoire, et sous tous les rapports. Les an'-salisliAles. tout en
remportant sur eux, se voient devancés deijcaucoup par les brachyskèies,
qui occupent ainsi le premier rang.
Ceux-ci ont une capacité vitale supérieure de deux cents centimètres
cubes environ à celles des macroskèles : les mésatiskèles occupent une
place intermédiaire. C'est là une dilTérence d'autant plus sensible que la
taille du premier et du troisième groupe est sensiblement la même : on
peut y voir aussi une nouvelle preuve de ce fait que la taille à elle seule
ne règle pas les échanges pulmonaires. La brachyskélie entiaîne donc un
déviMoppement relativement plus cuiisidcrable de l'appareil respiratoire,
et cet avantage s'explique facilement par une augmentation parallèle de
la masse musculo-squelettique, et des besoins qui en sont la conséquence.
Le bilan organique des macroskèles se résume donc en une faillite
générale : ils présentent une inférioriti^ marquée sur toute la ligne.
Ceci nous amène à dire qu'on n'a voulu voir dans cette variété de
macroskélie par éducation (|u'une hypercroissance normale des membres
inférieurs, et on a déclaré que nos camarades étaient macroskèles parce-
qu'ilsétaientgrands. La phrase retournéeestplusexacte: ils sont plus grands
parce qu'ils sont macroskèles. Restait à expliquer cette hypercroissance. On
a voulu la mettre sur le compte de l'alimentation relativement plus riche,
plus abondante de classes soi-disant supérieures ou supposant tout au
moins une certaine aisance. Doser la quantité de viande absorbée par un
élève de collège ou de lycée, doser celle consommée par un ouvrier nous
parait assez délicat; et des considérations sur le nombre de pommes de
terre assimilées par l'un ou l'autre n'entraînent qu'une conviction relative.
Mais ce qui est certain, c'est que le degré d'eu)bonpoint, le développement
musculo-squelettique moyen de nos camarades est absolument le même
que celui de cent soldats pris au hasard dans le premier régiment venu.
Le poids ne peut être un argument, puisqu'il est essentiellement variable
avec les auteurs, et le chiffre de iM kilos 8 pour une taille de I m. 70,
n'a rien d'exagéré. Mais nous ne voyons pas comment une alimentation
plus ou moins riche provoquerait un excès de croissance localisé aux
membres inférieurs et respectant le buste, et nous nous refusons à
admettre qu'une cause de ce genre augmente la hauteur de la cuisse et
de la jambe et diminue en môme temps la longueur relative du pied.
Nous n'avons pas mesuré cette dimension, mais nous pouvons rapporter
un failqui est essentiellement démonstratif ;i cet efïel. Les élèves donnent,
à leur départ de l'école, aux garçons, leurs chaussures qui vont en der-
nière analyse à des ouvriers. Or, la valeur des chaussures est d'autant
plus grande que leurs dimensions sont plus élevées, parce que clles-là
seules trouvent un écoulement facil*; et sont plus rares. Les petites poin-
tures sont en effet beaucoup plus nombreuses que les grandes, et elles
restent longtemps en magasin, parcoqu'cllcs ne conviennent ([uc dillicilo-
ment aux acheteurs.
Ces faits sont en parfait accord avec la théoi'ie de .M. .Manonvrier : elle
explique très facilement pourquoi la station assis n'agrandit pas le pied,
38
ri JANVIER iOOo
tandis que la station debout l'allonge dans des proporlions plusou moins
consid<^rahles.
Le système d'éducation <'lant en <\iuse, il est ;i souhaiter qu'on lutte
contre son influence néfaste p.ii un ensemble d'exercices physi(jues
inte!li£?emmont compris.
Rajifiorts (If In cnpariti- rilali' mec lu hiriifiir In-ucromiale.
Tabi-Kat \\
Ordination d'après la largeur bi-accromiale.
MOYENNES DKS Dl.MKNSIO.NS
Tnille
iUiste . . .
MiMiibro inlëricur
Lanjpur biarromiale . . .
Ijin^'uour du sternum
Poids
Circonfi'i-enre thoraciqnc . .
Ampliludo du tliornx
Mégasomie approchée : Taille X ^^^'ë- bi-acrom.
i(l. tiuste X t.ii'conf. thoiac.
Capacité vitale
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille := 100 : Largeur bi-acromiale. ....
(".ircouft-renco tlioraciquo .
l'oids
Mrirasomio ajiprochéo : Taille X
Largeur hi-acromiale.
Mégasoiuie aj)pro(hée : Buste X
('.iiconlercnce llioracicjue
itiisle ^= 100 : Membre inl'érieur
Liirf,^eur bi-acromiale z= 10 : Taille
Buste
Membre inférieur .
Lonirueiir du ster-
num . . . .
-Vniplitudi'dutborax
r.apîieilé vitale .
.Méirasitmie appro-
clire : Taille X
Lnrgeur bi-acro-
uiiale . . . .
M(''j:as(imie appro-
eliée : Buste X
Cireonféreuce llio-
raeique
Mégasouiii- appriielit-e zzz 1(10 : (Taille X l^ariri'ur
bi-aeroniialr). (lapaiiti' vitale
Mégasouiie approelire ;= 100 : (Buste X <ii':inf.
Ilâorariipii'i. Capaeité vitab-
1 i30)
1.662
0.875
0.787
0 341
0.161
59.8
0.822
0.073
56.67
71.93
3.650
20.5
49.5
36.0
34 10
43.28
90.0
48.7
25.7
23.0
4.7
2.14
1.074
16 62
21.09
(i.441
5.074
11 (40)
1.700
0.877
0.823
0.361
0.163
64.5
0-845
0.081
61.37
74.11
3 864
21.2
49.7
37.9
36.10
43.59
93.8
46.7
24.3
22.4
4.5
2.24
1.074
17.00
20.53
6.296
5.214
111 (30)
1.738
0.897
0.841
0,382
0.1(58
(i9.6
0.861
0.086
06.39
77.23
4.237
22.0
49.5
40.0
38.20
44.43
93.8
45. ô
23.5
22.0
4.4
2.25
1.109
17.36
20.22
6.338
E. DEMONET. — RECHERCHES SUR LA CAPACITK VITALE H9
I.os rapports de la largeur hi-acroiniale avec la cipucili' vitali^ n'ont
pas encore étt' étudiés.
Le tableau \'I, ordonné d'après cette dimension, montre que :
A mi'sure que ta largeur bi-acrominle s'élève, la capacité vitale^ les dimensions
et les rapports nngmentent absolument.
Mais relativement à elle :
La capacité vitale n'augmente que du deuxième au troisième groupe.
Les membres inférieurs, l'aniplitude du thorax, la mégasomie aug-
mentent.
La taille diminue : les petits étant en etîet, relativement à leur stature,
favorisés au point de vue de cette dimension.
s
Le buste, la longueur du sternum diminuent aussi. Le rapport — aug-
mente d'abord; ensuite il reste stationn.iire, mais relativement à la taille
il décroît, de telle sorte que le troisième groupe est moins macroskèle
que le deuxième, le premier étant relativement brachyskèle.
Ces diverses relations expliquent les rapports de la largeur bi-acromiale
avec la capacité vitale.
(.^luand celle-là augmente d'un centimètre, la capacité vitale augmente
d'abord de 107, puis de 178 centimètres cubes, du premier au deu-
xième, puis du deuxième au troisième groupe Cette progression irré-
gulière ne peut être attribuée à la taille et à la largeur bi-acromiale elle-
même, puisque, dans les mêmes conditions, ces dimensions subissent une
augmentation sensiblement identique. Si la hauteur du buste et la lon-
gueur du sternum croissent beaucoup plus pour le troisième groupe que
pour le deuxième, ce dernier est en revanche i)lus favorisé sous le rapport
de l'amplitude thoracique et de la circonférence thoracique. Cette cons-
tatation est une nouvelle preuve de l'intluence de l'intensité du travail
musculaire, représentée par l'amplitude du thorax, sur la circonférence
thoracique, et par conséquent sur l'allongement des côtes et le dévelop-
pement du buste. Elle explique l'accroissement de la capacité vitale du
deuxième groupe.
Le troisième présente encore une augmentation sensible de son ampli-
tude du thorax, et par suite de sa circonférence thoracique. Mais ce qui
indue surtout sur sa capacité vitale, c'est sa longueur du sternum, sa
s
longueur du buste, et par conséquent son rapport — . Il est en moyenne,
moins macroskèle que le deuxième groupe, parce que les grands bustes
qui le composent ap[)artiennent à des brachyskèles, ou à des mésatiskèles,
ou encore à des macroskèles d'une taille élevée. C'est ainsi qu'éclate d'une
façon manifeste, une nouvelle preuve de rim[»ortance du rapport -jj-'
Quand la taille et le diamètre bi-acromial suivent une progression paral-
lèle, l'amplitude thoracique et surtout le rapport des membres inférieurs
au buste = 100 règlent les échanges respiratoires, président au dévelop-
40 5 JANVIEU 1905
pement pulmonaire, et ceux-ci sont d'autant plus intenses que la brachys-
kélie est plus prononcée.
La mégasoniie exerce encore ici l'inlluence «jue nous avons exposée à
propos de la taille.
Ainsi, la largeur bi-acromiale ne présente pas par elle môme une grande
importance dans ses rapports avec la capacité vitale : mais elle acquiert
un certain inlérél, quand elle se trouve combinée ;i d'autres ilimensions,
el contribue ;i déterminer le degré de mégasomie et d'eurypiastie, d'une
façon approchée.
Rapports df lu caiinciti' vitale avec la lonf)UPiir du sternum.
Nous savons que Mai'slrelli, cherchant l'expression la plus correcte de
la capacité vitale, pense que la cage thoracique peut être assimilée à un
tronc de cône, dont le volume mesure approximativement la capacité res-
piratoire, et dont la hauteur est assez bien représentée par la longueur
du sternum. Pour lui, cette dimension est de toutes celles du thorax, celle
qui présente les rapports les plus étroits avec le développement indmo-
naire.
Le tableau Vil, résume ces r.ipporls de la longueur du sternum avec
la capacité vitale, et les diverses dimensions du corps. Il monlre que :
A mesure que lo longueur du sternum s'accroît, la capacité vitale, les dimen-
sions du corps, el les rapports aufimentent aussi absolument.
Relativement à cette largeur :
La taille, le buste, les membres inférieurs, la largeur bi-acromiale, la
circonférence thoracique diminuent. Le poids diminue pour la 2® série, et
augmente pour la S''. L'amplitude du thorax, la mégasomie et la capacité
vitale diminuent.
Ouant au rapport -, il est sensiblement le même dans les trois groupes.
Ouand la longueur du sternum s'accroît d'un millimètre, la capacité
vitale augmentede 30,5 centimètres cubesdu premier au deuxième groupe,
elde ;-{6,6 centimètres cubes du deuxième au troisième. Cette progression
est h la rigueur satisfaisante, étant donné la dimension qui sert d'unité.
Elle tend à prouver toutefois que, quelle que soit la supériorité sur les
autres dimensions du thorax, de la longueur du sternum adoptée comme
terme de comparaison, les rapports qu'elle alfecte avec le développement
pulmonaire, sont loin d'être d'une exactitude mathématique, et ne peuvent
être comparés à ceux que donne la taille. 11 est nécessaire cependant, de
faire remarquer qu'îi longueur du sternum égale, les trois séries du tableau
N'il ont une capacité vitale sensiblement idenli(|ue, ce (|ui justifierait, dans
une certaine mesure, l'appréciation de Maëslrelli,
E. DEMONF.T. — RECHERCHES SUR LA CAPAGITK VITALE
41
'I'abijcm \'II
Ordination d'après la longueur du sternum.
MOYENNES \tfS Dl.MK.NSIUNS
Taille,
Bustp.
Monibros inrériciirs
Lari."''"" lii-afroinialo. .
Loiif/ueur il a stmium
Poi.ls
('.in^onlÏTPnre tlioracique
Aniplitudi' lin tliorax
Méj;asoniU' approdire : Taille X '-»i''e- bi-aorom.
iil . Musle X t'ir'oni'. thorac.
Capacité ritalp
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille
100 : LariTour bi-acromiale . . . .
l'oi.is
CirponiV'ren('(> thoracique .
l'iustc — 100 : .Mi'nibrc inlérieur
Long, du slt'rinnn -=z 10 : Taille
Buste
Mcnilu-e inlrrieur .
Largeur bi-acromiale .
Poids
Circonférence thoraci-
que
Amplitude du thorax. .
Mégasoinie approchée :
Taille X Largf'ur bi-
acromiale . . . .
Mégasomie approchée :
(Buste X Circonfé-
rence thoracique.
Capacité vitale .
Mégasomie approchée = 100 : (Taille X l'^'^g'
bi-aproinialc). Capacité vitale
.Mégasomie npproehi'e ■=: 100 : (Buste X Circonf.
thoracique). Capacité vitale
I (30)
1.G57
0.807
0.790
0.355
0.151
61.1
0.823
0.072
58.82
71.35
3 503
21.4
26.9
49.7
91.1
109.8
57.4
52.4
23.5
40.5
54.
4.
38.95
47.25
2.319
5.955
4.909
Il (10)
1.098
0.879
0.819
0.360
0.165
03.8
0.842
0.080
«1.13
74.01
3.930
21.2
37.0
49.2
92.9
102.3
53.6
49.4
21.8
38.7
51.
4.
0
37.05
44.85
2.382
6.429
5.310
III (30)
1.747
0.902
0.845
0 309
0.175
69.9
0.869
0.087
04.46
78.38
4.296
21 1
40.2
49.7
93.7
99.8
51.5
48.3
21.1
40.0
49.7
5.0
36.80
44.78
2.451
6.664
5.481
Il est bien difficile de préciser si la longueur du sternum est en con-
nexion plus intime avec la taille qu'avec le buste : elle affecte en effet les
m(}mes rapports avec ces deux dimensions ; son accroissement n'est pas
proportionnel k celui de ces dernières : le sternum étant d'autant plus
développé que celles-ci sont plus petites. Celte constatation a déjà été faite
plusieurs fois : elle mérite d'ôtre rappelée ici, parce que elle indique que
chez les grands individus, ou chez ceux dont le buste est le plus déve-
\i 5 JANVIER 1905
loppp, la portion llioiaci<jue de la colonno verlôbrale est relativement
plus courte; l'abduincn remonte (lavanlau;e, et s'oppose en quel(|ue sorte,
au (If'veloppemenl de l'appareil respiratoire. Il est ;i noter (lur la longueur
du sternum alfeele avec la larijeui' hi-aeromiale, le poids et la mégasomie
absolument les m^hiit-s rappurts que la longueur du buste.
I,a liingueur du sti-rnum croît aussi en raison inverse de celle des mem-
bres inférieurs : ce ra|)p(jrl ne mériterait pas dVMrc l'.ippelé, s'il ne nous
permettait de mentionner- les analogies remarquables que présentent les
ordinations faites suivant ces deux dimensions. Elles alîectent, en elTet,
des rapports identiques avec le buste, la mégasomie et la capacité vitale.
l'ne sorte de balancement paraît exister entre la longueur du sternum
et la largeur bi-acromiale, l'une s'accroissant en raison in verse de l'autre.
En etTet, du premier au deuxième groupe, le sternum s'accroît beaucoup
plus que la largeur bi-acromiale: ie contraire a lieu du deuxième au troi-
sième groupe Peut-être, pourrait-on en conclure que le poumon se déve-
loppe d'abord principalement en hauteur; mais son expansion dans ce
sens se trouvant bientôt limitée, elle se fait alors par allongement des
côtes que traduit une augmentation de la circonférence thoracique. On
aurait la preuve de ce processus dans ce fait que celle-ci augmente d'abord
de dix-neuf millions, puis de vingt-sept millimètres.
Comme conséquence de cet agrandissement transversal, le dernier
groupe est beaucoup plus mégasome que les deux autres; son poids est
aussi de beaucoup plus élevé.
Mais comme toujours, les microsomes auraient une fonction respira-
toire relativement plus développée.
Rapports de la capacité vitale avec le poids.
D'une façon générale, le poids, s'il n'était influencé par la quantité de
graisse, représenterait assez bien le développement général de l'orga-
nisme dans le cas où le degré d'embonpoint serait le même pour tous les
sujets examinés. Mais le plus souvent, il n'en est pas ainsi, et M. Manou-
vrier a bien mis en évidence cette cause d'erreur dans son « Mémoire sur
la quantité dans l'encéphale ».
Ee milieu un peu spécial dans lequel nous avons poursuivi nos recher-
ches, nous a permis d'éviter, autant que faire se pouvait, cette cause d'er-
reur, puisqu'il nous metlailen présence de sujets ni gras ni maigres, d'un
embonpoint normal ; les rares exceptions dans un sens ou dans l'autre
ayant été soigneusement éliminées.
Le tableau VIII ordonné d'après le poids, montre que :
A mesure que h poids aiiymente, la capacité vitale et toutes les dimensions de
corps croissent absolument.
Et relativement au poids.
La taille seule augmente.
E. DEMONET. — RECHERCHES SUR LA CAPACITE VIT.\r,E
43
Le rapport - reste à peu près constant : il en est de même de l'ampli-
tude du fhtirax.
Les autres dimension^ du < ..i|»s, tous les ta|tp(irls et la capacité vital»'
diminuent.
La ca|ia(Mfo vitale croit avec Ih poids, mais elle ne croit pas proportion-
nellement h lui. Tandis que du premier au deuxième .i^roupe, elle gagne
396 centimètres cubes, le poids s'accroît de 8 kilos, et du deuxième au
troisième groupe, celui-ci augmente de 9,4 kilos quand la capacité vitale
gagne 352 centimètres cubes seulement Elle augmente ainsi par centi-
mètre de 49,5 centimètres cubes d'abord, en second lieu de 37,4 centi-
mètres cujjes. Toutefois, la capacilé vitale correspondant à un kilogramme,
dans cha(]ue série est respectivement de 63, 61, 58 centimètres cubes
environ.
T.\BLEAU VIII
Ordination d'après le poids.
MOYENNES UES DIMENSIONS
I i30)
11 (40)
III (30)
Taille
1.646
(1.867
1.708
0.883
0 825
1.746
Buste . .
0.898
Membre inlériour
0.779
0.848
Lai'ireur bi-aeromiale .
0 349
0.362 •
0.165
64.4
0.846
0.082
61.83
0.372
Lontrueur du sternum
0 156
0.168
Poids. . .
56.4
0.808
0.072
73 8
Ciroonlérence
0,878
.\nii»lituile (lu tborax
0.086
MégasDiiiie approeliée : Taille X Lart?. bi-aerom
57.45
6 '1.95
i'I. Buste X Circonf. tborac.
70.03
74 . 70
. 78.84
Capacité vitale
3.529
3.925
4.277
.MOYENNES DFS RAPPORTS
Taille — 100 : Poids ... . .
34.2
89.8
37.7
93.5
41 7
Buste ^ 100 : Membre inlérieur
95.5
Poids — 100 ; liiiste
151
137
122
Membre inlérieur
139
128
115
Lar^'eiir bi-aeromiale. .
62
56
51
Loiii:ueur du sternum .
28
26
23
Cireonférenee tlioracique .
143
131
119
.Vnqtlitude ilii tborax. .
13
13
12
Méi.'asomio ap|iroe|iée : (Tailb
y
Largeur bi-aeromiale.
102
96
88
.Méf:asi)mie a|iproebée : (Buste
X
<'.ireoni"éreiiee Iboraeique.
124
116
106
e.apaeilé vilale
6.264
6.103
5.773
Méiiasoniie approebée — 100 : (l'aille X L<
irtr.
bi-aeromiale. ("apaeité vitale
614
(i35
580
Mi'^asoniie approebée — - l(lO : (Buste X Circonf.
tlioracique). Capacité vitale
504
525
566
44 5 JANVIER 1905
On no doit donc accepter qu'avec une certaine pf^serve la conclusion de
Dupont d'après laquelle un kilogramme donnerait droit à 50 centimètres
cubes de sa capacité respiratoire.
Non seulement le chiffre indiqua est inexact en ce sens qu'il est trop
faible : il c»msatre encun- une erreur dans son absolutisme : il ne tient pas
compte du f.iit (jue la capacité vitale n'a pas besoin de se développer pro-
purliunnellement à la quantité de substance h nourrir, (^estune constata-
tion, maintes fois renouvelée qui se trouve encore une fois à sa place ici.
l/importante question des rapports du poids et de la taille se pose main-
tenant. Tous les auteurs sont unanimes à reconnaître que le poids est
d'autant plus élevé que la taille est elle-même plus grande. L'accord s'ar-
rête Ih. M. le Professeur G. H. Lemoine, du Val-de-Grâce, vient de consa-
crer à ce sujet, une élude remarquablement documentée, oîi il a réuni
dans un tableau essentiellement instructif les poids moyens que chaque
observateur a cru devoir assignera une taille déterminée. Toutes les com-
binaisons possibles entre le chiffre des décimales de la taille et le nombre
de kilogrammes s'y trouvent exposées ; pour les uns l'augmentation rela-
tive du poids se fait par saccades, par à-coups; pour d'autres, elle est har-
monieusement rythmée, puisqu'elle est de 900, de 500, de 200 grammes,
par centimètre de taille. Il est hors de doute que tous ces résultats sont
excellents, étant basés sur un nombre plus ou moins formidable d'obser-
vations : leur rapprochement seul en atténue la valeur. Aussi M. Lemoine
ne voit-il dans ce rapport « qu'un indice important, mais non absolu de
robusticité, et un sérieux élément d'appréciation au point de vue de l'ap-
titude physique des conscrits )>.
S'il nous était permis de donner notre appréciation sur ce sujet si sou-
vent et si magistralement traité, nous accorderions aussi une valeur im-
portante à ce rapport quand on ne connaîtrait de l'individu que la taille
et le poids, et qu'on apprécierait ce dernier d'après ces seules dimensions.
Mais nous serions porté à ne lui faire jouer aucun rôle quand il serait pos-
sible d'examiner de visu, le sujet sur lequel on est appelé à formuler un
jugement.
Que demande-t-on au rapport du poids et de la taille? Un indice de
robusticité, de corpulence, d'embonpoint. D'abord, ces trois éléments ne
sont pas identiques : un individu gros n'est pas nécessairement robuste,
et un sujet robuste n'est pas forcément gras. Là surtout, il faut savoir
distinguer le développement du tissu adipeux, du dévelop.ement de la
masse musculo-squelettique : le poids est la résultante de ces facteurs,
et il est évident que leur rôle respectif ne peut être mis en évidence par
le rapport du poids à la taille.
Un de nos professeurs les plus distingués de chirurgie déclarait que le
plus souvent un diagnostic chirurgical est affaire de coup d'œil, d'im-
pression, de doigté. Nous pensons qu'il en est de même pour l'appréciation
de lu robusticité, de la corpulence d'un individu. L'œil suffît pour se rendre
un compte très net de la taille, des dimensions transversales^ du degré
de brachy ou de macroskélie, du degré d'embonpoint, du développement
K. DKMONET. — RECHEKCHES SUR LA CAI'ACITÉ VITALE 45
des masses musculaires, du poids môme et aussi du tempérament d'un
sujet. Le palper peut intervenir pour accenUierou modilier les notions
(ju'a acquises la vision pour déterminer d'une fa^on plus précise le déve-
loppement du tissu adipeux, le volume et l'élasticité des muscles, et les
saillies d'apophyses d'insertions musculaires. Un voit tout de suite qu'un
individu est plus ou moins bien constitué et un observateur tant soit peu
exercé acquiert hienlùt la notion du nuances que tous les chitTres du monde,
tous les rapports possibles et imaginables ne sauraient rendre. Aussi quel
intérêt y a-t-il à objectiver en quelque sorte des sensations par des chif-
fres sur la valeunlesfpiels personne n'est d'accord? Nous n'en voyons pas.
Sans doute une impression est essentiellement personnelle : elle a tout au
moins l'avantage de pouvoir être exprimée facilement ; et le tableau de
M. Lemoine ne montre-t-il pas que chaque observateur a aussi son équa-
tion personnelle et son angle visuel spécial pour interpréter des chillres,
et que tout, en dernière analyse n'est qu'impression.
M. le professeur Bouchard accorde une très grande importance au rap-
port - le poids P étant évalué en hectogrammes, et la taille H en centi-
mètres. Ce rapport constitue son « indice de corpulence » à l'aide duquel
il distingue les sujets maigres, normaux, gras, obèses, etc. Ces différentes
catégories sont indiquées par les chiffres qui sont les mêmes pour toutes
les tailles. C'est avec cet indice qu'il a calculé son fameux segment an-
thropométrique qu'il a utilisé pour déterminer le poids de l'albumine fixe
de l'organisme.
A ce double titre, il était intéressant pour nous, de rechercher les rap-
ports de la capacité vitale avec cet indice de corpulence.
Le tableau L\, ordonné d'après cet indice, présente les plus grandes
analogies avec le tableau précédent ordonné d'après le poids, et les con-
clusions de ce dernier lui sont parfaitement applicables. Il montre en
outre que :
L'indice de corpulence croit avec la taille.
De plus, si l'on s'en rapporte aux chitïres-limites de Bouchard, le pre-
mier groupe devrait être considéré comme maigre, et les deux autres
comme normaux. Ainsi, les grands seraient relativement beaucoup plus
gras que les petits, et ces derniers seraient maigres au sens absolu du
mot. Celte classification ne parait pas traduire exactement les faits
observés : seuls, ces chiffres accusent un développement relativement
exagéré du tissu adipeux chez les grands. Il n'apparaîtrait certainement pas
aux yeux d'un observateur consciencieux et impartial, qui classerait nos
trois séries de sujets dans des groupes d'un embonpoint identique, et cet
embonpoint serait assez bien représenté par la moyenne du deuxième
groupe 3, 8 Elle se rapproche beaucoup de celle que Bouchard attribue à
l'homme adulte normal, 4, 2.
46
5 jANviKR ii»or»
T.^BL^:.\L• IX
Ordination d'après l'indice de corpulence de Bouchard.
MOYENNES DE^ UI.ME.NSIONS
Taille
Buste
Membre inférieur .
Lar^'eur bi-apriuiiiale
Longueur du sternum
Poids
Tailler 1000 : Poids (Ind. de corp. de Bouchard)
Circonférence thoraciquf
.Vmplitnde du thorax
Mégasomie apjirochée ; Taille X '-"^''g bi-acrom
Id. 15usteX*-''"conf.XTborac.
Capacité vitale
MOYENNES DES RAPPORTS
Indice de corpulence z= 1 : Buste
Membre inférieur.
Largeur bi-acromiale
Longueur du sternum
Circonférence thora-
cique
Amplitude du thorax
Mégasomie appr:
Taille X Lai"g- bi-
acrorniale . .
Mégasomie appr:
Buste X Circonfé-
rence thoracique.
Capacité vitale .
Poids rn 100 : Capacité vitale. ......
1.657
0.,S75
0.782
(1.852
0.159
56.5
3.41
0.812
0.073
58.33
71.05
3.585
0.257
0.229
0.103
0.047
0.238
0.0214
17.12
20.81
1.05J
6.345
11 (40)
111 (30)
1.713
1.728
0.884
0.891
0.829
0.837
0.3<il
0.37U
0.164
0.167
64.8
73.1
3.78
4.17
0.848
0.872
0.08-2
0.084
61.94
63.97
74.96
77 . 70
3.954
4.179
0.234
0.214
0.219
0.201
0.096
0.088
0.043
0.041
0.624
0.209
0.0217
0 0201
16.39
15.34
19.89
18.63
1.046
1.O03
6.102
5.717
Cette classitication ne parait ainsi traduire exactement que la corpu-
lence des sujets d'une taille moyenne; elle convient à la généralité des
cas, mais elle ne s'applique pas aux individus petits qu'elle fait consi-
dérer comme trop maigres, et aux individus grands qu'elle favorise sous
le rapport de l'embonpoint. Cet écueil s'explique facilement parce fait que
le poids croît avec la taille, mais cette progression ne peut être traduite
par une constante, comme l'admet Bouchard. Son indice, pour être exact,
devrait présenter une gradation correspondant à chaque taille, être plus
élevé pour les statures petites, et plus faible pour les hautes statures.
L'analogie des rapports de la capacité vitale d'une part, avec le poids
et la mégasomie d'autre part, mérite d'être signalée. Le développement
pulmonaire eu effet est d'autant plus considérable, relativement, que ces
E. DEMONET. - RECHERCHES SUR LA CAPACITK V1T\(.R 47
deux facteurs sont plus faibles ; le poids exprime donc d'une façon satis-
faisante, dans les conditions où nous étions placé, les besoins de l'orga-
nisnie. Aussi pour subvenir à ces besoins, les sujets d'un poids peuéJevé
ont-ils un buste, un diaiuiMie bi-acroniial, une longueur du sternum, une
circonférence lhoraci(iue, une amplitude du thorax, proportionnelleuKMil
plus grands que les individus d'un poids plus considérable.
En résumé, le poids est une donnée anthropologique de premier ordie,
quand il concei'ne des sujets d'un embonpoint sensiblement identique : il
constitue alors un excellent indice de mégasomie qui alfecte des rapports
étroits non seulement avec la capacité vitale, mais encore avec toutes les
dimensions du corps.
Rapport de In capaciW' vitale arec la circonférence tfioracique.
Hutcliinsoii admi'i (|u'il n'y a pas de relation directe entre la capacité
vitale (lu poumon, el le périmètre de la poitrine ; Simon et Fabius croient,
en groupant leurs faits d'une certaine fayon, pouvoir conclure que l'in-
fluence de l'ampleur du thorax sur la capacité pulmonaire est évidente,
au muins chez les personnes dont la paroi Ihoracique n'est pas sur-
chargée de graisse. Wintrich ne confirme pas cette idée qui est reprise
par .Arnold. Schnepf, pour une fois, partage l'opinion d'Hutchinson :
VVassiljew pense au contraire que la capacité vitale augmente de 50 cen-
timètres cubes quand la circonférence thoracique croît d'un centimètre.
Nos sujets présentants un degré d'embonpoint sensiblement identique,
la graisse n'a pu intervenir pour trouijier les mensurations du périmètre
thoracique.
Le tableau .\, ordonné d'après cette dimension, montre que :
La capacité vitale et toutes les dimensions croissent avec la circonférence thora-
cique, d'une façon absolue.
Relativement à elle :
Le poids et la capacité vitale augmentent.
La taille, le buste, les membres inférieurs, la largeur bi-acrumiale, la
longueur du sternum, la mégasomie diminuent.
.\insi, la capacité vitale croît absolument et relativement avec la cir-
conférence thoracique, et cet accroissement est d'autant plus considérable
que la circonférence thoracique est elle-même plus grande. En effet, elle
croît d'abord de 79 centimètres cubes puis de 11:2 centimètres cubes quand
cette dernière s'élève d'un centimètre. Cette progression s'explique s'ex-
plique aisément ; le périmètre du thorax nv. préside pas aux échanges
respiratoires, il y subvient; il se développe sous l'influence de l'organe
qu'il entoure; ce dernier est réglé lui-même dans son accroissement par la
masse musculo-squelettique, et les diverses dimensions de l'organisme
doni l'inlluence a été exposée. Or le poumon croît en volume et l'accrois-
sement parallèle des côtes se fait en longueur. Il en résulte nécessairement
que la capacité vitale sera d'au'ant plus grande, relativement à la circon-
48
5 JANVIKH 1905
férenee thoraciiiue, que celle-t;i ell«'-in("'iiie ser.i plus élevée. Ceci est con-
firmô par le (l('vel(»ppeinenl parallèle de la capacilé vitale d'une part, de
l'amplitude du thorax, du poids, de la inégasomie d'autre part. Il n'est
pas étonnant, qu'à poids égal, les trois groupes présentent une capacité
vitale sensiblement identique.
Tablkau X
Ordination d'après la circonférence thoracique.
MOYENNES UES D1.MEN.«I0NS
Taille .
Buste .
Membre inférieur.
Largeur bi-acromiale
Longueur du sternum.
Poids
Circonférence thoracique
Amplitude du thorax
Mégasomie approchée: Taille X Larg. bi-acrom.
Id. Buste X Circonf. thorac.
Capacité vitale
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille = 100 : Poids
Circonférence thoracique.
Capacité vitale
Buste = 100 : Membre inférieur
Poids = 100 : Capacité vitale
Circonf. thorac. = 100 : Taille
Buste
Membre inférieur. .
Largeur bi-acromiale .
Longueur du sternum
Poids
Amplitude du thorax .
Mégasomie approchée
Taille X I^irg- acro-
miale
Mégasomie approchée
Buste X Circonfé-
rence thoracique .
Capacité vitale. .
1(38)
1.6G7
0.869
0.798
0.352
0.159
58 1
G 801
0.074
58.68
69.61
3.529
34.9
48.0
2.117
91.8
6.074
208.1
108.5
99.5
44.0
19.8
72.5
9.24
73.2
86 9
4457
11 (40)
1.697
0.883
0 814
0.361
0.162
6'i.o
0.844
0.077
61.26
74.53
3.868
38.0
48.5
2.278
92.2
5.998
201.1
104.7
95.4
42.8
19.2
76.4
9.12
72.6
88.3
4583
III (30)
1.741
0.896
0.845
0.371
0.169
71.4
0.887
0.090
64.59
79.48
4.351
41.0
50.9
2.498
95.4
6.093
196.3
101.0
95.3
42.0
19.0
80.5
10.19
72.8
89.6
4905
Les relations que présente dans cette ordination la longueur du ster-
num avec l'amplitude du thorax ne doivent pas être passées sous silence.
E. UEMU.VET. — UECHEHCIIEs SI» LA CAFACITÉ VITALE 49
Kn t'il'tl. la [irogression de ces deux facteurs est presque identique, (le fait
t>Miil à (ItMiioiitrei- que lo^ individus h circonférence Ihoracique élevée,
développent aussi leur cage tlioracii|ue on hauteur, et que les côtes s'ac-
croissent, non seulement en hauteur, mais encore en épaisseur.
Ilt'vi'iiir sur les rapports do la t tille et de la circonférence thoraiiqu.'
est inutile.
Rappelons seulement que la graisse est une sérieuse cause d'erreur
qu'on ne doit pas négliger (]uand on fait intervenir ce facteur. (Ju'il
nous soit cependant permis de faire remarquer que dans cette ordination,
le périmètre du thorax est toujours supérieur ;\ la longueur des membres
inférieurs : c'est une constatation en faveur de cette relation qui semble
mériter des recherches confirmatives.
Knfin, quand la circonférence thoracique augmente de HO millimètres,
le busle s'accroit de 44 millimètres, et la largeur bi-acromiale de 10 mil-
limètres. Des rapports assez étroits existeraient donc entre ces trois di-
mensions.
Un médecin militaire, .M. Pignel, a récemment appelé l'attention sur
les rapports que présentent la taille d'un côté, le poids et la circonférence
thoracique d'un autre enté. Il appelle : indice numérique la différence de
la taille, moins ces deux derniers facteurs. T. (Circonf. th. -|- Poids).
Il admet quun individu est d'autant plus robuste que son indice numé-
ritjue est plus faible. Nous ne pouvons apprécier ces idées qu'on a appli-
(piées ?i la pathologie. Elles ont été conlirmées par M. le Professeur
(t. H Leinoine qui trouve comme indice numérique moyen, chez les
sujets noimaux 17 environ, et chez les tubercult'ux 22.71. Il n'est pas
sans intérêt de noter que notre indice s'élève a 22.0; il est à croire que ce
chiffre élevé tient à la macroskélie de nos sujets, qui intervient encore ici
comme cause dépréciante de l'organisme. Son influence toutefois, ne doit
pas être exagérée, et il est impossible d'admettie que cet indice traduise
exactement la robusticité de nos sujets qui parait de la sorte diminuée
outre mesure. Du reste, le terme indice numérique ne nous parait pas
très -inuilicatif : tout indice résuite forcément de nombres : il est vrai que
1(; tout est de s'entendre.
Rapports de la capacité vitale avec la mégasomie approchée.
X propos de la taille, il a déjà été (jnestion de la rnégasomie. Nous
avons dit alors que c'était à titre de compromis d'investigation seulement,
et sous la réserve de recherches ultérieures confirmatives, que nous par-
lions d'une mégasomie approchée. En eff>it, un indice de mégasomie pour
être absolu, et représenter le développement complet de l'organisme,
devrait tenir compte de ses trois dimensions dans l'espace.
Le poids traduirait assez bien la masse inusculo-squelettique : malheu-
reusement il est influencé le plus souvent, par le tissu adipeux, qui, par
ses variations individuelles énorme.- atténue beaucoup la valeur de ses
indications.
SC.C. d'antubop. 190.'). •♦
no
ri JANVIKH 1 '.>().">
Celte cause d'erreur n'intervenait pas dans nos recherches, aussi avons
nous insisté, en temps opportun, sur les rapports étroits qui unissent le
poids il la capacité vitale.
La graisse n'intervenait donc pas énonuéinent dans la mensuration du
périmètre thoracique.
Il était ainsi possible de représenter d'une façon approchée, le degré
de mégasomie, d'une part par le proiluit de la taille par la largeur bi-acro-
miale, d'autre part par le produit du buste par la circonférence du
thorax.
Ces deux ordinations sont étroitement comparables entre elles : quel-
ques millimètres seulement séparent les dimensions et les rapports des
séries homologues, et quelques centimètres cubes, la capacité vitale de
celles-ci.
L'identité presque absolue de ces résultats, tendrait à faire admettre
que ces indices de mégasomie sont relativeinent satisfaisants et repré-
sentent d'une manière suffisamment exacte le développement général de
l'organisme.
Tableau XI
Ordination d'après l'indioe de mégasomie approchée. Taille x largeur
bi-acromiale.
MOYENNES DES DIMENSIONS
Taille
Buste. . . . . .
Membre inférieur.
Largeur bi-acromiale.
Longueur de sternum .
Poids
Circonférence thoracique
Amplitude du thorax
Méffasomie approchée : Taille'X. Larg. bi-acrom.
id. Buste X Circonf. thorao.
Capacité vitale
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille — 100 : Poids
Circonférence thoracique.
Amplitude du thorax.
Mégasomie approchée zr: 100. (Taille X Larg
acromiale). Buste
Largeur hi-acroraiale .
Longueur du sternum .
Poids
Circonférence thoracique .
Amplitude du thorax.
Capacité vitale ....
Hiistt' :rr 100 : Membre inférieur.
bi
I (30)
1.641
0.866
0.775
0.344
0.158
58.8
0.815
0.076
56.45
70.58
3.550
35.8
0.497
0.046
1.534
0.609
0.280
104.2
1.444
0.135
6.288
89.6
Il (40)
1.697
0.877
0.820
0.361
0 163
64.9
0.850
0.076
61.26
74.55
3.845
38.3
0.501
0.045
1.4.31
0.589
0.266
105.9
1.387
0.124
6.279
93.7
m (30)
1.764
0.906
0.858
0.379
0.170
70.4
0.868
0.089
66.86
78.64
4.337
39.9
0.493
0.050
1.355
0,567
0.254
105.3
1.297
0.133
6.487
94.7
E UK.MONKT. — IIKCIIEUCIIES SL'R LA CAPACITK VITALE 51
Tableau XII
Ordination d'après l'indice de mégasomie approchée. Buste < circonfé-
rence thoracique.
Mt)Vi:NNi;s OKs ihmknsions
Tnil
hiis
Mciiilirt- iiilÏTiciir.
Larj.'f'iir Iji-airoiiiialc
Loiii,Mi('iii' (lu stcnuiui.
Poifis
CirconIV'rencp tlioracique
.\ni|ilihnl(' «lu tliornx
M(''i:)is(»nii(^ aii|irft<-li(''o : Taillr X '""ti'r- lii-n'-rom.
i(l. Rustf X Circonf. tliordr.
Capacité ri/a/e
MOTBNNES DES RAPPORTS
Taillo — 100 : Poids
Cireonféronco thoracique
Auipliluilc ilii thorax
.Mri;.iMiiiiir ii|)|)r(i<;ii)''i' zn 100. (I*>usfc X <'il"''OntV'-
niiii- thitraci(|ui'). TaiMc
Loiiiiueui' ihi sicniiiiii ,
Poids
r,ircoiir('M'<'ni;e th(ira(i<|uf' .
Ain|intiiil(' (lu thorax.
Capacité vilahv
Husic =: ino : Membre iiilV-riciir . . . . .
Poids— 100 : (:a|.a.ilé vilah-
(30)
1.64S
0.858
0.790
0.344
0.157
59..')
0 8ls
0.074
5fi.()9
69 28
3.579
36.0
0.497
0.0449
L>.379
0.218
76.9
1 180
0.107
5.167
92.1
(i.OOf»
Il (40)
1.700
0.881
0.819
O.SCO
0.1 03
61.6
0.848
0.077
61.20
74.71
3.837
38.0
0.499
0.0153
2.275
0.214
86.1
1.135
0.103
:..136
9:{,0
5.940
(30)
1.753
< 1.908
0.84'j
0.380
0.169
70.3
0.866
0.090
66. ()1
78,63
4.344
40.1
0.494
0.0513
2.228
0.190
88 9
1.102
0.115
5 524
9;!.l
6.179
ï^cs lal)l('aux .\I et XII, montrent que, à un point de vue absolu :
.1 iripsun' fjuf ht m''fjasomie a'idève, la capacité vitale, les dimensions et les
rapports (inrjmenlent aussi.
Mai^, rt'litli renient au degré de mégasomie :
La ciipaiilé vitale dôcroit d'abord, puis augmente. Il en est de même
pour l'amplitude du thorax.
Le buste, la longueur di: sternum, la circonférence thoracique dimi-
nuent.
Le poids et l'indice de corpulence augmentent.
Ainsi, le développement pulmonaire absolu, suit en moyenne le degré
de mégasouiie, et celle-ci augmente avec la taille, les plus mégasomes
étant en même temps les plus grands et les plus corpulents. Ceci tend à
rendre les grands individus macrosUèles jusqu'h un certain point, mais
sans qu'ils soient pour cela macroplastes, ces derniers étant trop grands
pour leur poids.
On peut dire, que relativement h la mégasomie, la capacité vitale
52 .j jANviKit l'.tor»
décroil. Il a ilôjà éU* question ilo ce fait au chapitre de la taille. 11 n'est
"pas inutile de faire remarquer que ces deux nouvelles ordinations sont
unt' confirmation de ce qui' t)ous avions alors avancé : au point de vue de
la fonction respiratoire, les nilcrosonies sont plus favoris('s que les méga-
somes. Une seule multiplication a suffi pour montrer qu'.'i mégasomie
égale, les ipiarante sujets d'une taille relativement moyenne, ont un ap-
pareil pulmonaire moins développé que les trente sujets les plus petits :
et il est à peu près certain qu'un diamètre transversal, nous permettant
d'obtenir un indice de mégasomie absolue, nous eut •'•gaiement autorisé
h étendre au troisième groupe, cette conclusion, universellement admise :
La capacité vitale croit en raison inverse de la méffasomie.
On doit rapprocher de cette relation, les rapports que la mégasomie
affecte avec l'amplitude du thorax. 11 sont, nous l'avons vu, absolument
identiques k ceux qu'elle présente avec la capacité vitale. Les plus méga-
somes ont une masse musculo squeleitique proportionnellement beau-
coup plus développée, et l'appareil respiratoire suit une progression
semblable. Toutefois, nous avons fait une restriction ; il est très probable
que ce parallélisme n'est pas indéfini: mais ses limites ne sont pas
atteintes dans le champ de nos expériences. Et ceci est encore confirmé
par l'accroissement sensiblement identique du poids dont l'influence
s'exerce dans ces ordinations, et vient démontrer la justesse de nos con-
clusions. A poids égal, en efîet, les mégasomes ont une toute petite
supériorité sur les plus microsomes qui ont une capacité vitale relative-
ment plus grande que les sujets d'un développement organique moyen.
Ainsi, mégasomie, poids, amplitude du thorax, capacité vitale, tout
s'enchaîne, tout se combine harmonieusement, et si l'un de ces facteurs
varie, les autres, aussitôt, présentent tous des modifications presque
parallèles.
Il est intéressant, de rapprocher des rapports de la capacité vitale avec
la mégasomie, ceux que celle-là contracte avec la longueur du buste. Il y
a^ en effet, similitude complète entre cette capacité vitale absolue ordon-
née d'après la longueur du buste, et d'après la mégasomie. On peut donc
admettre que les plus mégasomes sont ceux, dont le tronc est le plus
développé en hauteur. A propos du buste, il a été question de la connexion
intime qui unit cette dimension, à la circonférence thoracique, et à
l'amplitude du thorax. Dans une ordination d'après la mégasomie, on
retrouve un développement parallèle de tous ces facteurs, d'une
part, et de la capacité vitale, d'autre part. Les plus microsomes ont^
relativement à leur degré de mégasomie, tous ces facteurs plus dévelop-
pés, ce qui tend à démontrer une fois de plus, que non seulement l'agran-
dissement du thorax est sous la dépendance très étroite de celui de son
contenu, mais que ce dernier n'a pas besoin de se faire proportion-
nellement à la masse à nourrir.
La capacité vitale est encore ici, dans de certaines limites, sous la dépen-
dance du degré de brachyskélie, c'est-à-dire du rapport S/B. Ceci est une
conséquence des rapports de cette capacité avec la longueur du buste.
E. DEMONET. — RECHERCHES SUR LA CAPACITK VITALE 53
En effet, l'accroissement absolu de la fomUion respiratoire du second
groupe est faible, parce que celui ci est beaucoup plus macroskèle que le
premier, et si cet accroissement est plus élevé pour le dernier, c'est que
celui-ci est de tous relativement le plus brachy^kèle.
En résumé, le produit de la taille par la largeur bi-acromiale permet
d'obtenir une expression de l'ensemble du développement squelettique,
qui peut ne pas être d'une exactitude mathématique, mais qui a du
moins, sur le poids du corps, l'avantage d'être indépendant de l'embcm-
point, et sur la taille seule, de représenter deux dimensions au lieu d'une
seule. C'est pourquoi M. Manouvricr le proposait en 1882, comme terme
de comparaison avec le poids de l'encéphale, en remplacement ds la taille
et du poids du corps. Cette expression donne également de très bons
résultats quand on la rapproche du développement de l'appareil respira-
toire qu'elle traduit avec une exactitude satisfaisante.
Rapports de la capacité vitale avec l'euryplastie approchée.
\
M. Manouvrier ne s'est pas contenté d'attirer l'attention sur l'importance
du rapport S/B. Il a pensé qu'il ne suiïisait pas de connaître seulement la
longueur des os, mais qu'il était aussi nécessaire de tenir compte de leur
épaisseur. C'est pourquoi il a créé les termes d'euryplastie et de macro-
plastie ; les sujets euryplastes étant ceux dont les os sont épais relative-
ment à leur longueur, les macroplastes étant ceux dont les os sont relati-
vement minces. Il a intimemenl relié l'euryplastie à la brachyskélie, tradui-
sant ainsi d'une façon parfaite les rapports qui existent entre les diverses
pièces squelettiques.
M. Manouvrier a démontré la supériorité de ce rapport quand il a étudié
la quantité dans l'encéphale, et les rapports de celui-ci avec le développe-
ment de l'organisme.
II nous était naturellement impossible de rapporter la capacité vitale
à un indice d'euryplastie ainsi comprise. Il était possible de tourner la
difficulté en utilisant comme indice d'euryplastie approchée les rapports h
la lailie, d'une part, du diamètre bi-acromial, d'autre part, de la circon-
férence thoracique.
Les tableaux qui résument ces deux ordinations présentent des séries
homologues suffisamment semblables, pour que les conclusions de l'une
s'appliquent aussi à l'autre. Sans doute, la largeur bi-acroraiale et la
circonférence thoracique diffèrent considérablement suivant que ces deux
dimensions servent ou non au calcul de l'euryplastie : ces légères diver-
gences forcées n'induent en rien sur la légitimité des résultats obtenus.
54
5 jwviKH IWO.'i
T.MII.KAI' XIII
Ordination d'après l'indico dVuryplastie approchée Largeur bi-acro.
miale à taille -- 100
MnVK\.M.s lih> lllMK.N^Il>.\s
1 (m
il (40.
III (30)
TiUllo
1.725
1.099
1.676
Uusic
,,.880
0.88(;
0.873
Menibro iiilV'i'iciii'
0.836
(1 813
0.301
0.S03
i.iir^'i'iir lii-ac Toiiiiiili'
0.:{48
0 . 375
LiuiL'iioiir du slenium
O.liO
0.1C)3
05.0
0.162
Poids
61.5
04.7
('.irconlércnre llinr<icu|iic . .
((.814
0.841
0.850
.\iri|ilitiide du thorax
U.070
0.080
0.080
Mt'icasoiiiie approrliéo : Taille X l'^i'^'oui- bi-ncro
ruiîilf
6(>.(i:i
01.33
62.85
Mi-iiasoniic ap|ir(tclico : IJusIc X •■ii'oniV'icin-e
lliniari<iu('.
75.(1:;
71.51
71.01
/:iiri//i/af>fie a/i/irorhée : Laif/nir biacromiale
Il Taille — 100
20.17
21.25
22.38
C'<i/)(tiifp Vilali'
3.980
3.889
3.870
MOYENNES DES HAl'POHTS
Taille — 100 : lUiste
0 515
0.521
0.479
0.521
Mendtre infériour
0.485
0,479
0.202
0.224
0.222
Lonffiiour du sternum ....
0.0962
0.0959
0.0967
i>oids
37.4
38.3
38.6
.\iiiplitude du thorax. ....
0.0458
0.0471
0.0477
Caiiaeité vitale
2.307
2.289
91.8
2 309
liiistp zr 100 : Membre inférieur
94.1
91.8
Largeiu- bi-arromiale ....
0.391
0.418
0.429
Longueur du sternum ....
0.187
0.184
0.185
('.ireonlérence thoraeique. .
0 949
0 949
0.974
LiHii:uoiuriuslernum = 10 : Largeur bi-acromiale.
20.9
22.1
23.1
id. Circonférence thora-
ciquc
50.9
51.6
52.5
Il est évident que daus les deux tableaux, la série III est eurypiaste
relativement à la série l qui est niacroplasle.
Le tableau XIIl montre que, à mesure que l' eunjplastie s'accentue :
Lu capacité vitale diminue.
Lu taille, le buste, le membre ivfirieur, la lonf/ueur du sternum diminuent.
La longueur bi acromialc, et la méf/asomie auf/mentent.
Le poids est sensiblement le même pour les 3 séries : il en est de même
pour l'amplitude du thorax.
La circonférence Ihoiacique diminue au second groupe, augmente au
troisième.
E. DEMONT.T. — nECHERCHES SUR LA CAPACITK VITALE 35
Pour interpréter d'une façon logique ces n^sult.as. il faut les rapporter
à la laill.' = 100.
On voit ainsi que l'euryplastie est surtout accentuée chez les individus
petits; les plus grands tendent en moyenne à la raacroplastie. Semblable
ronstatatiou avait été faite plusieurs fois : d'abord h propos de la taille,
où nous avons noté que la largeur bi-acromiale était relativement plus
grande chez les sujets petits : ensuite, h propos de la mégasomie.
Celte ordination, ne met pas en évidence, aussi bien que la suivante,
les rapports de l'euryplastie, avec la longueur du buste et celle des
membres inférieurs, c'est-à-dire avec le rapport -j^; aussi insisterons-
nous sur ce point dans quelques lignes. La longueur du sternum augmen-
terait aussi d'une façon constante, si le deuxième groupe, ne présentait
à ce point de vue, quelque infériorité. Ceci est un point important à
souligner : il montre en effet, que le sternum est, absolument, aussi long
chez les euryplasles que chez les macroplastes, et relativement h. leur
taille, les premiers l'emportent de beaucoup sur les derniers, quant à cette
dimension, il faut admettre que le sternum se développe surtout en
hauteur chez les euryplastes. D'autre part, comme la largeur bi-acro-
miale et la circonférence thoracique sont, relativement à la longueur du
sternum, d'autant plus élevée que l'euryplastie est elle-même plus grande,
l'accroissement du poumon se fait de la sorte dans les trois dimensions,
dans ces conditions. C'est ce que confirme encore la longueur du buste,
qui h taille égale, croît avec le degré d'euryplastie et toutes choses égales
d'ailleurs, la largeur bi-acromiale, la longueur du sternum, la circonfé-
rence thoracique sont d'autant plus grandes, relativement au buste^ que
lu macroplastie est plus faible.
Le poids et l'amplitude thoracique croissent naturellement du premier
au troisième groupe, quand on rapporte ces dimensions aux tailles cor-
respondantes. C'est une conséquence naturelle : les euryplastes étant en
même temps les plus mégasomes.
Dans le tableau XIII, la capacité vitale présente entre les 3 séries, une
différence tellement faible, 20 centimètres cubes environ, qu'elle peut
être considérée comme étant partout la même. Mais ce n'est là qu'une
apparence : une étude plus approfondie, démontre en effet, que les
euryplastes sont, relativement aux macroplastes favorisés quant à leur
développement thoracique. Là encore il faut faire intervenir l'inlluence
de la taille. Nous avons établi précédemment qu'une augmentation de
taille de 1 centimètre entraînait une augmentation dans la capacité
vitale de fiO centimètres cubes environ. Or, les euryplastes, ont en
moyenne, une taille inférieure de 5 centimètres à celle des macroplastes,
et la capacité vitale des uns et des autres est sensiblement identique. Il
en résulte évidemment que les premiers ont une fonction respiratoire
plus développée (jue les seconds, et cette augmentation de la capacité
vitale s'accorde parfaitement avec laccroissement parallèle du poids, de
l'amplitude thoracique, et de la mégasomie.
56
5 JANVIER 1905
Iahle.m' -XIV
Ordination d'après l'indice d'euryplastie approchée. Circonférence
thoracique à taille — 100
.MOYK.N.NKS DKS DIMENSIONS
1 (W)
il f40)
m (30)
Taille
1.72!»
1.703
0.882
1.669
Musle
0.893
0.873
Mt^mbro inlfrioiu . . . .
0.8:^H
0.821
0.796
Laryeur hi-acroniialc ...
0.3G2
0.360
0.360
Ldiif-Mieiir ilu sterniiiii .
0.104
0.164
0.162
l'ni.ls
63.8
65.8
64.8
Ciroonrérenre flniraiiqiii'
(t 819
0.845
0.868
.\in|tlitii(le ilii thorax
0.080
0.079
0.080
Mi'irasoiiiio a|ipi'o<hcc : (Tailli' X l-^irucur hi-
acroniialo
02.5!)
01.31
6(».08
Mi'j.'as(iiiiio a|ijtro(li('C : Ihistc X t-irconréi'enfi'
thiiracique
72.17
74.53
75.77
Hurypid.itic approchpe : CArinnfi'rencc thora-
ciqui' à ToUIp —- 1(K>
47.37
49.62
52.01
Capacité vitale
3.915
3.871
3.964
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille = 100 : P.iisle
0.516
0.518
0.523
MfiTibro inliTieur
0.48^
0.482
0.477
I.argeiir iH-acromialo
0.-210
0.211
0.216
0.0949
0.0963
0.0971
Poids
35.9
38.4
38.8
0.0403
0.0464
0.0479
Capacité vitale
2.270
2.273
2.375
Buste — 100 : Membre inférieur
93.6
93.1
91.2
Larircur bi-acromiale
0.406
0.108
0.412
I.onirucur du sternum.
0.184
0.186
0.186
Cirronférence thoracique .
9.917
0.958
0.994
Longueur du sternum = 10 : I^argeur bi-acromiale.
2.21
2.20
2.22
id. Circonférence tliora-
50.0
51.2
54.6
Le tableau XIV est en parfait accord avec celui qui le précède : toute-
fois il met mieux en évidence les rapports de la brachyskélie avec l'eu-
ryplnstie II montre en eiïet d'une façon indiscutable que la brachyskélie
s
est otroitement unie à i'euryplastie, puisque le rapport - décroît du pre-
mier au troisième groupe, et quC les macroplastes sont en même temps
des macroskôles. M. Manouvrier a longuement insisté sur ce rapport qui
se trouve ainsi conlirmé complètement. Il n'est donc pas étonnant que la
capacité vitale des euryplastes soit plus élevée que celle des macroplastes ;
et ceci s'explique aisément, non seulement parce que leurs dimensions
E. DEMONET. — RECHERCHES SCR LA CAPACITli VITALE 57
transversales, proportionnellement à la taillo, sont plus élevées, mais
encore parce que leur buste est, r;:;lativenienl à leurs membres inférieurs,
plus long. Aussi, M. Manouvrier associe la brachyskélic à l'euryplastie
et 1.1 macroskélie ;\ la macroplastie; mais il a fait remarquer qu'il n'}-
avait pas fiircémt'nt ol toujours i<lentité absolue entre les ItMines de
ces deux rapprocluMucnls. Nos conclusions sont en parfait accord avec
les siennes.
DE LA CAPACITE VITALE, ABSOLUE ET RELATIVE DANS LE SEXE FEMININ
1. — La capacité ritale absolue.
Schnepf, ayant parachevé l'œuvre d'Hutchinson, crut que désormais
toute investigation spirométrique demeurerait stérile. (IrAce ;i lui, on con-
naissait parfaitement le sexe masculin, quant à sa fonction respiratoire,
ets'il ne put étudier d'une façon aussi complète, le sexe féminin, il indiqua
la voie dans la(|uelle devaient s'engagor ses successeurs. « Les résultats
aux(juels nos recherches nous conduisent, dit-il, nous permettent dépenser
qu'on pourra, en recueillant des observations plus nombreuses, arriver à
préciser pour les âges de la femme, comme nous l'avons fait pour ceux de
rbtuume, l;i quantité dont la capacité pulmonaire croît ou décroît ; que
parmi les facteurs principaux qui agissentsur la capacité vitale du poumon
l'inlluence de l'âge doit occuper le premier rang dans les deux sexes; que
les autres iniluences qu'il nous faut étudier doivent être subordonnées à
celle de làge, et étudiées dans les dilîérentes périodes de la vie : que c'est
parce que nos prédécesseurs n'ont pu appliquer leurs investigations à
tous les Ages que l'importance primordiale qui s'y rattache leur a échappé
si généralement ; que pour toutes ces raisons, ils ont été conduits à donner
à des agents subordonnés une importance plus grande que celle qui leur
convient réellement, comme nous le prouverons plus tard; enfin qu'ils
devraient déplacer, comme ils l'ont fait, l'époque à laquelle correspond le
maximum de la capacité vitale du poumon. »
L'histoire de la spirométrie démontre que l'appel de Schnepf n'a pas
été entendu. En elTet, c'est à peine, si depuis ISriT, Pagliani a recherché
la capacité vitale de la femme sur des jeunes filles de 18 ans.
M. Manouvrier nous a conseillé d'étudier le développement pulmonairede
la femme, mais dans un sens radicalement opposé à celui (ju'avait conçu
l'auteur du mémoire de 1857. C'est qu'en eiïet l'âge n'occupe plus dans
les rapports anthropométriques la place importante qu'il occupait alors.
IJ'acteur princi|)al, il esttombé au rang de simple figurant dont ou restreint
auUint (jue possible les apparitions, et qu'on cherche à éliminer le plus
souvent.
Aussi avons-nous adopté pour la femme le plan qui nous avait gui<lé
pour le sexe masculin ; les dimensions et les rapports sont les mômes pour
58
.> JANVIEH
1905
l'un el pour l'aulre. l/âge a compris un nombre d'années tel (cinq) que
nos ri'cherclies ne fussent pas interminables, elque l'inlluence de ce facteur
fui réduite à un strict minimum. Ici encore, il était inutile d'aligner de
longues colonnes de cliilîres indi(iuant les dimensions de chaque sujet :
l'Ilcs ont été condensées diins le tableau XV' (|ui constitue le résumé des
(■apports de la capacité vitale avec ces dimensions, dans le sexe féminin.
Il montre ipie :
Tableau XV
Ordination d'après la capacité vitale.
MOYENNES UKS DIMENSIONS
(Capacité vit ah.
Tai'ile. . . .
Bustf. . . .
Membre inférieur
Largeur bi-acroniiale
Longueur du sternum
Poids
Cireonlérenre tboracique
Amplitinlc du tliorax
Mégasomie approchée: Taille X Largeur bi-
acrorniale . . .
Mégasomie approcbée : Buste X Circonfé-
rence tboracique
MOYENNES DBS RAPPORTS
Taille := 100 : Largeur bi-acromiale .
Circonférence tboracique .
Poids
Capacité vitale
Buste rr 100 : Membre inférieur .
Mégasomie ai»prncbée=r 100 (Taille XLarg.
bi-acromiale). Capacité vitale . . . .
Mégasomie approcbée z=: 100 (Circonférence
tboracique). Capacité vitale ....
I (30)
2.282
1.497
0.811
0.686
0.295
0.132
52.3
0.712
0.047
44.16
57.74
19.71
47.63
33.5
1.524
84.59
5.168
3.957
II (40)
2.712
1.553
0.830
0.723
0.309
0.143
55.8
0.739
0.054
47.99
61.34
19.90
47.59
35.9
1.746
87.11
5.421
4.421
m (30)
3.261
1.611
0.858
0.753
0.325
0.149
58.5
0.751
0.066
51.36
64.44
20.17
46.62
36.3
2.204
87.76
6.349
5.060
IV (100)
moyenne
générale
2.747
1.553
0.834
0.719
0.309
0.141
55.5
0.734
0.056
47.99
61.22
35.5
»
86.5
A mesure que la capacité vitale s'élève, toutes les dimensions et tous les rapports
augmentent.
La colonne IV de ce tableau représente la moyenne générale de tous ces
facteurs. Elle permet donc d'apprécier la capacité vitale absolue.
Rien de plus variable que les chifïVes donnés par les difTérents auteurs
pour déterminer la capacité vitale absolue de la femme. Les uns mentionnent
qu'elle varie entre 2 litres et 3 litres 500; les autres disent qu'elle oscille
seulement entre 2 litres 900 et 3 litres 400 ; pour le plus grand nombre,
E. DEMii.NF.r. — IlECHERCHES SUR I. A CAPACITK VITALE 59
le développement pulmonaire d'une femme adulte et siiine seiait assez
bien représenté par 2 litres 500 ou ',\ litres. Sohnepf estime que la capacité
vitale atteint son maximum à 20 ans, et qu'elle est alors de2.500 centimètres
cubes environ : elle décmît ensuite, et de 20 ?i25 ans, on peut la considérer
comme ('galant 2.lil8 cenlimèti'es cubes, moyenne de valeurs extrêmes (^ui
alteignenf 2.I<M) et 2. (iOO centimètres cubes.
// irsulli' ilr nos irclirirhes que la rnpnciti' vitale absolue d'une femme île 20
à 25 ans est en moi/enne de 2.747 cenlinu'ires cubes. La capacité maximuque
nous avons relevée est de 3.730 centimètres cubes ; la minima atteint
1.930 centimètres cubes seulement ; elles sont donc séparées par le chitTre
de 1.800 centimètres cubes, différence sensible, comparable de tout point
à celle qui a déjà élé mentionnée pour le sexe masculin.
dénombre, (2.500 centimètres cubes) est intéressant, parce qu'il précise
un point important de physiologie sur lequel on ne possédait que des
renseigiiemt>nts très vagues. Il représente assez bien, il est vrai, la
moyenne des valeurs extrêmes qu'on assignait h la capacité vitale de la
femme, mais ces dernières ne reposaient sur aucun fondement sérieux,
.\ ce point de vue, on peut opposer au grand nombre d'expéri-
mentateurs qui ont poursuivi leurs recherches sur le sexe masculin, le
nombre plusque reslreintde ceux (|ui onl fait des éludes analogues sur le
sexe féminin. S'il est, en 'efTet, très facile de trouver un certain nombre
d'hommes pouvant se soumettre à des recherches spirométriques, on
éprouve des ditTicultés réelles qui vont parfois jusqu'à l'impossibilité
absolue, quand on fait ces dernières sur des femmes. Des circonstances
spéciales, du temps et de la patience sont nécessaires, Nous croyons, comme
nous l'avons établi, dans notre a. technique » avoir tiré le meilleur parti
des conditions qui s'offraient à nous.
Rapports de la capacité vitale avec la taille.
Le tableau .Wl, ordonna' d'après la taille, montre que, d'une façon
absolue :
A mesure que la taille s'élève, la capacité vitale, toutes les dimensions et tous
les rapports augmentent aussi.
Mais relativement h la taille :
Le buste, la circonférence thoracique diminuent.
Le membre inférieur, la longueur du sternum, la mégasomie approchée,
l'amplitude du thorax, la capacité vitale augmentent.
La largeur bi-acromiale diminue et le poids augmente de la l'» à la
•2° série, mais ces deux facteurs restent identiques pour le 2" et le
3" groupes.
Il existe encore ici des variations individuelles considérables corres-
pondant à chaque taille A 1 m. 52, par exemple, sont affectés des cbifTres
osillant entre 2.030 et 3.230 centimètres cubes : les chiffres extrêmes
pour 1 m. 55 sont 2.280 et 3.580 centimètres cubes, et pour 1 m. 64 2.150
60
5 J.\NVIEH 1905
et 3.530 centimètres cubes. Ces différences doivent être considérées
coimne absolunn'nt normales, Ijicn qu'elles soient élevées, et il nous
paraît impossible de les raltacbcr comme le veut M Albert Kobin, à de
l'aithritisme ou à de la tuberculose.
La capacité vitale croit donc proportionnellement à la taille: en effet,
du l«' au ■2'' groupe, celle-là auiimente de 35,4 centimètres cubes, et du
3e au 3" groupe de 47,8 centimètres cubes quand la taille s'élève d'un
centimètre On ne peut donc établir que très approximativement cette
formule générale : Quand la taille augmente d'un centimètre, la capacité
vitale s'accroît de 41,3 centimètres cubes en moyenne.
Table.\u XVI
Ordination d'après la taille.
MOYENNES DES DIMENSIONS
1(30)
I (40)
m (30)
Tai/le. ....
1.475
1.555
0.834
(1.721
0.307
1.628
Buste. . . .
0.80!)
0 854
Membre inJérieur .
0.666
0.774
Largeur bi-aeromiale
0.301
0.321
Longueur du sternum
0.133
0.142
0.150
Poids
51.6
56.2
59.0
(^irronfércnce tliorarique
0.716
0.735
0.756
.Ak'gasomie approchée: Taille X Larg. bi-aorom..
44.40
47.70
52.26
Id. Buste X f'irconr. tboran.
57. '.)2
61.29
64.56
Amplitude du thorax . ,
0.052
0.055
2.727
0.061
Capacité vitale. .
2.244
3 076
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille = 100 : Buste
0:550
0.537
0.524
Membre inférieur
0.450
0.463
0.476
Largeur bi-acromiale.
0.204
0.197
0.197
Longueur du sternum
0.090
0.091
0.092
Poids
34.5
36.2
56.2
Circonférence thoraciqu
e .
0.485
0.473
0.464
Amplitude du thorax
(1.0352
0.0354
0.0375
Capacité vitale .
1.658
1.754
1.878
Buste = 100 : Membre inférieur
82.3
86.4
90.6
Lai'geur bi-arromialc
37.2
36.8
37.6
Longueur du sternum
16.6
17.0
17.5
Circonféreneo tboracique .
88.5
88.1
88.5
Megasomie approchée = 100. (Taille X Larg.
bi-
acromiale). Capacilé vitale . .
5.504
5.717
5.886
Megasomie approchée 100 = (Buste X Circonfé-
rence tboracique). Capacité vitale ....
4.218
4.448
4.786
Quelle que soit l'irrégularité de cet accroissement, il n'en existe pas moins.
E. DEMONET. — RECHERCHES SUR r.A CAPACFTK VITALE 61
et nous pourrions n^péter ici ce qui a d4jh été exposé au sujet du sexe
masculin. La taille ne représente que d'une façon très imparfaite le dé-
veloppement total de l'organisme, et un indice de mégasomie absolue,
montrerait certainement d'une façon très nette (jue l'accroissement pul-
monaire n'a pas l)esoin de se faire proportionnellement ;i celui de la masse
à nourrir. Le rapport de la capacité vitale et du poids le faitdéjh présumer.
Les indices de méij^asoniie approchée que nous avons adoptée rendent fort
plausible celte pi-obahililé. qui s'alïirme encore par ce fait que la surface df^s
échanges respiratoires, assez bien traduite par le prorluit de la longueur
du sternum par la circonférence thoracique, est beaucoup plus considé-
rable, relativement à leur taille, pour les femmes petites que pour les
femmes grandes.
Si le buste s'élève avec la taille, son allongement n'est pas pro|>ortionnel,
en moyenne, à celui des membres inférieurs, (^eux-ci s'accroissent relati-
vement davantage, et ils sont, par rapport au buste, plus longs chez les
femmes grandes que chez les femmes petites. L'accroissement de la taille
se fait donc principalement par celui des membres inférieurs: en etïet,
tandis que le buste décroil relativement à cette dernière, ceux-ci aug-
mentent d'autant dans les mêmes circonstances.
La largeur bi-acromiale croissant en raison inverse de la taille, cette
dimension est surtout développée chez les femmes petites, les grandes
étant désavantagées à ce point de vue. Il en résulte forcément que ces
dernières ont un indice de mégasomie. approchée absolument plus élevé;
mais d'une façon relative, ce seront encore les femmes du premier groupe
qui seront à ce point de vue, favorisées. A taille égale, elles sont plus
mégasomes que celles de la première série.
La longueur du sternum croît absolument et relativement avec la taille.
Cet accroissement relatif est, il est vrai, peu considérable, et il montre
que le développement du thorax en hauteur n'intervient que d'une façon
secondaire dans l'augmentation de volume du poumon.
Le poids croît aussi d'une façon absolue avec la taille, mais relative-
ment à elle, il augmente d'abord pour rester ensuite stationnaire. Si nos
sujets masculins présentent, à peu près, le même embonpoint, il n'en est
pas de même pour nos sujets féminins dont le développement adipeux est
essentiellement variable. Si parmi ces derniers nous n'en avons pas
rencontré d'obèses, et d'excessivement maigres, il s'en est présenté un
certain nombre qui devaient être considérées comme franchement maigres
et incontestablement grasses. Nous avons cru remarquer que les femmes
de taille moyenne étaient de préférence prédisposées à un développement
exagéré du tissu adipeux : c'est dans la série II que se classent le plus grand
nombre de sujets affectés du coefficient 4 ; les séries extrêmes et surtout la
série 3 n'en présentent qu'un chiffre relativement restreint. Ces considé-
rations expliquent les rapports du poids et de la taille déjà mentionnés :
elles entraînent d'autres conséquences sur lesquelles nous aurons bientôt
l'occasion de revenir.
La circonférence thoracique est d'autant plus faible relativement à la
i\-2 .") JvNVlKll l'.>0.">
taille que celle-ci est plusél».'vée Si on applique au sexe féminin le fameux
rapport <le la «leini-laillo à la circonférence Ihoracique, on voit qu'il est
inexact, même pour les femmes les plus petites. En elTet les 3 séries du ta-
bleau XVI présentent une circonférence thoracique inférieure A la moitié
de leur taille. Mali,'r.' leur degré d'embonpoint diffèrent, celles-ci paraissent
mettre en évidence une progression satisfaisante de la circonférence tho-
racique. Elle est facilement explicable par l'influence de l'amplitude du
thorax. Celle-ci en efTet, croît proportionnellement à la taille, mais d'une
fai^'on très irrégulière. Du 1" au 2» groupe, cette augmentation relative
est de '2 millimétrés seulement, tandis que du 2« au 3« groupe elle atteint
21 millimètres. La circonférence thoracique est pour le i^f el le 3^ groupe
en général, une dimension musculo-squeletlique, peu influencée par la
o-raisse ; dans le 2« groupe elle subit l'influence de l'embonpoint, qui na-
turellement augmente sa valeur. La graisse joue unrùle trompeur, parce
qu'elle donne une dimension trop grande qui n'est pas expliquée par
l'amplitude du thorax, traduction de l'intensité et de l'activité du travail
musculaire qui préside en somme au développement de l'appareil respi-
ratoire.
Rapports de la capacité vitale avec te buste.
Le tableau XVIL ordonné d'après la longueur du buste montre que :
ù un point de vue absolu :
Au fur el à mesure que la longueur du buste s'accroît la capacité vitale,
les dimensions du corps, et les rapports augmentent aussi.
Mais relativement à cette longueur :
La taille, la longueur du sternum, le poids, la mégasomie, l'amplitude
du thorax et la capacité vitale augmentent.
La circonférence thoracique et la largeur bi-acromiale diminuent d'abord
poui augmenter ensuite.
L'accroissement de la capacité vitale avec la longueur du buste est très
irrégulier : il est d'autant plus élevé que cette dernière est elle-même
plus grande. En efîet, du l"au 2'' groupe il atteint 125 centimètres cubes,
et du 2e au 3» groupe 179 centimètres cubes quand le buste s'allonge d'un
centimètre. Les rapports qui unissent ces deux facteurs sont trop vagues,
et les variations de la longueur du buste trop peu considérables, pour
qu'il soit possible d'établir cette formule, même approximative. La capacité
vitale augmente de 155 centimètres cubes quand la longueur du buste
augmente d'un centimètre.
L'augmentation absolue et relative de la taille et des membres inférieurs
par rapport au buste, est en connexion intime avec ce qui a été déjà
noté au sujet de ces deux dimensions.
Le diamètre bi-acromial et la circonférence thoracique seraient relati-
vement d'autant plus petits que le buste serait plus long, si le troisième
groupe n'était favorisé par ces deux facteurs. Ces relations sont en parfait
E. DEMOXET. — RECHERCHES SUR LA CAl'ACITK VITALE
63
accord avec l'ônorine augnientatiun que sa capacité vitale présente. En
effet, pour subvenir aux besoins d'une masse oiganique plus grande,
d'une mégasoniie plus considérable, d'un poids plus élevé, le thorax s(>
développe en hauteur, en largeur, et surtout par sa circonférence. Ce qui
présente un réel intérêt, ce sont les relations du buste et de la longueui'
du sternum, qui permettent de déterminer d'une façon satisfaisante, la
part qui revient à l'appareil respiratoire dans cette première dimension
qui représente « associés les appareils nourriciers et régulateurs de l'orga-
nisme. » Nous aurons bientôt l'occasion de revenir et d'insister sur cette
intéressante question.
Tableau XVIl
Ordination d'après la longueur du buste.
MOYENNES DES DIMENSIONS
Taille
Buste
Membre in rérieur . .
Largeur bi-acroiniaie
Longueur (lu slernuni
Poids
Cii'courérence thoracique
Mégasomie app. : Taille X Larg. bi-aeromiale
i(l. Buste X Circonl'. tlioraciiiiie
.■Vinplitude (lu Iboraiix. .
Capacité vitale
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille rr 100 : Largeur hi-acromiale ....
Poids . . .
Circonrérence thoracique .
Buste := 100 : Taille
Largeur bi-acrumiale ....
Longueur du sternum ....
Poids
Circonférence thoracique .
Mégasomie app. : Taille XLargeui*
bi acromiale . . . i . .
.\mplitu<le du Ihorax ....
Capacité vitale
Mégasomie approchée rr 100. (Taille X l'f>''g- bi-
acromiale). Capacité vilab'
Mégasomie approchée zr 100. i Buste X Circonlé-
rence thoracique). Capaeilé vitale
(30)
i.4;i3
0.806
0.687
0.3O1
0.134
51.9
0.712
44.94
57.-39
0.049
2.3G7
0.202
34.8
0.477
185.2 ■
37 3
16.6
64.3
88 3
55.77
0.0608
2.937
5.289
4.124
Il (40)
1.552
0.833
0.719
0.3<H)
0.141
56.5
0.730
47.49
60.81
0.056
2.703
0 197
36.4
0.470
186.3
36.7
16.9
67.8
87.6
57.01
0.067
3.247
5.692
4.445
m (30)
1.614
0.859
0.755
0.324
0.150
58.3
0.758
52.29
65.11
0.063
3.189
0.201
36.1
0.470
187.9
37.7
17.5
68.0
88.3
60.87
0.073
3.712
6.008
4.897
Il n'en est pas moins vrai, qu'ici encore, l'intensiti- du fonctionnement
musculaire règle l'inlensilé du déielopptment du poumon, et celui ci se fait pur
64
ri jxNviKH i'.)on
aUonfiemeni tl noult'-remful ili's rôles. Car, laiigincnliilion di' li circonférence
lhûracii|n<\ ahslraction faite du lissu adipeux qui fiil sentir son influence
surtout sur le Iroisif^'uie -rnupe,est inanifesleinenl réglée par un accrois-
sement parallèle de l'amplitude lhuraci(iue, « traduction de la quantité
et de l'intensité du Iravad musculaire ». {.'allongement [.arallèle de l'ap-
pareil locomoteur, indépendant de toute considération de macroskélie,
est une preuve de plus en faveur de ces conclusions
Rapports de la capaclt/' ritalc arec la hniineiir des membres inférieurs.
T\hu;au XVIU
Ordination d'après la longueur des membres inférieurs.
MOYENNES DBS DIMENSIONS
Taille .
Buste.
Membre inférieur
Largeur bi-acromialo
Longueur ilu sternum. .
Poids. . . .
Circonférence thoracique
Mégasomie approchée : Taille X Larg. bi-acrom.
id. Buste X Circonf. thorac.
Amplitude du thorax
Capacité vitale
1(30)
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille — 100 : Largeur bi-acromiale ... *
Poids
Circonférence thoracique .
Buste = 100 : Taille
Membre inférieur . . . . •
Membre inférieur --:z 100 : Taille
liuste
Largeur bi-acromiale.
Longueur du sternum.
Poids
Circonférence thorac .
Mégas. app. : Taille X
Larg. bi-acromiale .
Mégas. app. : Buste X
Circonf. thoracique.
Amjilitude du thorax.
Capacité vitale.
Mégasomie approchée := 100. (Taille X Larg. bi-
acromiale). Capacité vitale
Mégasomie apiwochée r= 100. (Buste X Circonfé-
rence tlioracique). Capacité vitale
1.478
O.SOC.
0.672
0 301
0.133
53.2
0.724
44.49
58.35
0.0.54
2.517
II (40)
0.204
36.0
0.490
183.4
83.4
2.198
1.198
0.492
0.197
79.2
1.058
65.15
86.83
0.080
3.745
5.658
4.314
1..558
0.834
0.724
0 308
0.143
55.2
0.728
47.99
60.72
0.056
2.688
0.198
35.4
0.468
185.9
85.9
2.152
1.152
0.426
0.197
76.3
1.005
66.28
83.87
0.077
3.712
5.607
4.428
III ^30)
1.626
0.855
0.771
0.320
0.150
.58.5
0.754
52.03
64.47
0.058
3 059
0.197
36.0
0.464
190.2
90.2
2.109
1.109
0.415
0.195
75.9
0.978
67.48
82.32
0 075
3.967
5.881
4.741
E. DEMONET. — REiniEUCIIES SlIU LA CAPAcMTI' VITALE 65
On voit, par lelableau XVIII, onlDniié d'après la longueur des membres
inférieurs, ijue, à un point de vue absolu.
Au fur et à mesure que la louf/ueur des membres inférieurs auijmente la capa-
cité vitale, toutes les dimensions du corps, et tous les rapports augmentent aussi.
VA relativement ;\ celte longueur.
La laille, le buste, la lai-geur biacroniiale, la longueur du steinum, le
poids, la circonférence thoracique, l'auiiililude du thorax diminuent.
La niégasoniie augmente.
La capacité vitale diminue d'abord pour augmenter ensuite.
Cette ordination présente une analogie étroite avec l'ordination
d'après la taille Dans l'une et dans l'autre, les chilTres sont sensible. nent
les mêmes, et c'est à peine, si on relève quelques diiïérences pour la cir-
conférence thoracique, l'amplitude du thorax et la capacité vitale. Mais
les rapports afîectent d'importantes variations parce que les chiffres
représentant la longueur des membres inférieurs sont moins élevés que
ceux de la taille, et surtout parce que leurs écarts sont l)ien plus consi-
dérables. Le rapprochement de ces deux facteurs s'explique facilement
parce que l'un est partie constituante de l'autre, et qu'il traduit imparfai-
tement, il est vrai, le développement de l'appareil locomoteur d'un orga-
nisme dont la taille indique approximativement le développement général.
Aussi, rapportant au tout, ce qui s'applique à la partie, pourrait-on
admettre sans aucune exagération, que l'ordination faite d'après la lon-
gueur des membres inférieurs, identique à celle faite d'après la laille,
montre mieux que cette dernière elle-même^ les rapports que celle-ci
affecte avec les diverses dimensions du corps.
Ce n'est pas à dire pour cela, que la longueur des membres inférieurs,
comme la taille, soit en rapport intime avec la capacité vitale II est
imposible d'affirmer qu'à une augmentation d'un centimètre de l'une,
correspond un accroissement même irrégulier de l'appareil respiratoire :
car relativement k la longueur des membres inférieurs, le second groupe
est moins favorisé que le premier sur lequel le troisième a encore l'avan-
tage. .Mais ces faits ne sont-ils pas un nouvel argument en faveur de cette
formule énoncée au sujet de la taille : l'appareil respiratoire est
relativement plus développé chez les microsomes. Il est ainsi mani-
feste, que les sujets dont les membres inférieurs sont les plus courts,
sont les plus favorisés sous le rapport de la capacité vitale, de toutes
les dimensions du corps et de l'amplitude du thorax. L'intensité et
l'activité du travail musculaire sont donc chez eux, plus considérables
également, et ceci permet d'admettre comme apparente seulement, la
supériorité que le troisième groupe présente au point de vue respiratoire.
Il existe aussi une ressemblance étroite dans les rapports que la capa-
cité vitale affecte, d'une part avec la longueur des membres inférieurs,
d'autre part avec la longueur du sternum.
soc. UANTHROP. 1905
r.fi
r» JANVIRII l'JOo
Ordinal ion d'après le rapport -.
g
Pour classer nos sujets f'-minins d'après le rapport -, nous avons utilisé
les données fournies par .M. Manouvrit^r dans son Etude sur les rapports
anthropomrtriques. (Ctiapitre XIIL). C'est à laide d'un tableau construit
sur le module de celui qui nous a servi pour le sexe masculin, et encore
inédit que nous avons fait notre répartition entre brachy, mesati et
macroskèles; mais suivant le plan adopté dès le début, nous avons, pour
la commodité de l'élude, ordonné notre tableau XIX, en trois séries com-
prenant non pas ces divers types absolument purs, mais des sujets qui
s'en rapprocbent le plus, et se trouvent être ainsi, relativement tout au
moins, mesati, macro ou brachyskèles. Les avantages de ce « modus
faciendi » ayant été exposés, nous n'y reviendrons pas.
Tableau XIX
Ordination d'après le rapport — ,
MOYENNES UKS DIMENSIONS
Taille.
Bust.-.
Membre inft'rieur
Buste ■= 100 : Membre inférieur {Rapport - .
Largeur bi-acromiale
Longueur du sternum
Poids
CircoiilV-rciico lliuiacique
Mégasomie approchée : Taille X Larg. bi-acrom.
id. Buste X Circonf. thorac.
Ampliluili' du thorax
Capacité vitale
MOYBNNBS DES RAPPORTS
Taille = 100 : Buste
Largeur bi-acromiale
Longueui- du sternum.
Poids
Circnniérence Ihoracique. .
Araplitudi' du thoiax
Capacité vitale ......
Mégasomie approi-hve ^z lOU : (Taille X Larg. bi-
acrnniiale). Capacité vitalf
Mégasomie approchée r= lUU : (Buste X Circonf.
tlinracique). Capai-ité vitale. ......
30+ Bra-
chy.
1.551
0.847
0.704
83.11
0.312
0.138
55.7
(1.735
48.39
62.25
0.057
2.793
0.546
0.201
0.089
35.9
0.474
0.0367
1.801
5.774
4.487
40+Mé-
30+Ma-
satis.
crosk.
1.551
1.558
0.832
0.820
0.719
0.738
86.42
90.00
0.308
0.307
0.141
0.143
56.3
53,9
0.741
0 724
47.77
47.83
61.65
59.37
0.057
0.054
2.769
2.672
0.536
0.526
0.198
0.197
0.091
0.092
36.2
33.9
0.478
0,465
0.0367
0.0347
1.785
1.715
5.797
5.586
4.491
4.484
K. DKM(JNET. — RKCIIEUCIIKS SIU LA CAl'ACITK VITALE 67
S
Kt d'ahonl, la moyenne gém'-iMl du rapport . atteint 86 5. Si on se rap-
porte aux chilTres utilisés pai' .M. Manouvricr, on s'aperçoit que celle de
130 femmes tjuelconques est de 8 4,9 seulement. C'est une diiïérence qui,
pour n'tître pas négligeable, est toutefois loin d'être aussi considérable
que celle lelevée au sujet du sexe masculin. Elle parait d'autant plus
difllcile à rattacher à une cause quelconque, que la division réelle sui-
vaut le<; dilTérents termes du rapport-, ne signale à première vue, rien
de bien particulier, puisque nous relevons :
2S brachyskèles, 38 mésatiskèles, 39 macroskèles.
Sans doute, une telle classification n'a jamais été faite, et il est par con-
séquent impossible déjuger par comparaison. Mais si on rapproche ces
chitVres de ceux qui ont été obtenus pour le sexe masculin, on voit quelle
diiïérence énorme existe entre les différents termes de cette sériation, et
il y a là une nouvelle preuve de la théorie émise par M. Manouvrier sur
le mode de croissane des membres inférieurs. Les sujets féminins, sous-
traits aux causes qui mit iiiiliii' sur le sexe masculin, n'avaient en effet
aucune raistm pour présenter une macroskélie exagérée.
Le tahleau XIX montre que, au fur et à mesure que le rapport- au//mente, à
un point de vue absolu.
La taille reste stationnaire ; elle s'élève cependant un peu chez les
macroskèles.
Le buste, la largeur bi-acromiale, la capacité vitale diminuent.
Les membres inférieurs et la longueur du sternum augmentent.
Le poids et la circonférence thora^'-ique augmentent chez les mésatiskèles
pour diminuer considérablement chez les macroskèles.
Mais relativement à la taille, les rapports sont absolument identiques :
L'amplitude du thorax et la mégasomie sont également plus considé-
rables chez les brachyskèles que chez les macroskèles.
Les relations de la capacité vitale avec le degré de macroskt'lie sont in-
téressantes parce qu'elles amènent à cette conclusion : le développement
pulmonaire est, toutes choses égales d'ailleurs, d'autant plus considérable
que la brach\ skélie est plus prononcée. La première série qui traduit
approximativement cette dernière, présente une supériorité de 121 centi-
mètres cubes sur la troisième, bien que les macroskèles aient un avantage
de 7 millimètres au point de vue de la taille : elle surpasse seulement de
24 centimètres cubes les mésatiskèles qui ont une hauteur identique;
mais cette supériorité est encore plus réelle qu'apparente parce que le
poids et la circonférence thoracique de ces dernières sont plus considé-
rables. Nous en verrons bientôt les causes.
La taille est encore ici, à peu près la même dans les trois termes de l'or-
dination. Il est donc légitime d'en conclure que la brachyskélie est abso-
ment indépendante de la stature, et qu'elle se trouve associée à toutes les
tailles.
Nous retrouvons de nouveau lebalancemiMit que nous avons eu déjà l'oc-
68 ;'» JA.NviKu 1905
casioii (le signaler «Mitre la lonj^ueur du sternum et la largeur hi-acroiniale.
Celte (iernitVe dimension est surtout développée chez les braclij'skèles
dont toutes les mensurations transversales sont relativement exagérées.
Mais les macroskèles ont une longueur du sternum plus considérable,
semblant ainsi compenser par un plus grand développement du thorax
en hauteur, l'insuflisance de leur accroissement transversal.
Nos sujets léminins, avons-nous dit, ne présentaient pas cette homo-
généité dans l'embonpoint qui caractérisait d'une façon satisfaisante,
l'ensemble de nos sujets masculins. La graisse intervient dans cette ordi-
nation pour fausser un peu les résultats absolus du poids et de la circonfé-
rence thoracique, car la deuxième série présente une augmentation mani-
feste de la valeur de ces deux facteurs. Ceci tient surtout à ce que c'est
elle qui présente de beaucoup le plus grand nombre de sujets gras; ceux
de la 1" et la 3» série étant relativement plus maigres. La supériorité des
mésatiskèles au point de vue de ces deux facteurs est donc seulement appa-
rente : ce qu'ils ont de réellement plus développé, c'est le tissu adipeux,
dont l'importance est secondaire. Mais le développement musculo-sque-
lettique ne présente chez eux rien d'exagéré; la 2^ série, a, il est vrai, une
amplitude thoracique égale à celle de la première, mais elle ne lui est
pas supérieure : ceci est en faveur de ce fait que ce n'est pas elle seule
qui intervient dans l'augmentation de la circonférence thoracique. Quant
aux macroskèles, elles sont infériorisées non seulement par le poids et la
circonférence thoracique, mais aussi par la mégasomie, qui, malgré la
taille relativement élevée de cette troisième série, n'en est pas moins infé-
rieure, ;i la mégasomie des deux autres groupes.
En i-ésumé, toutes ces dimensions et tous ces rapports traduisent une
supériorité incontestable des brachyskèles dont l'appareil respiratoire suit
l'accroissement parallèle de la masse organique totale.
Rapports de la capacité vitale avec la largeur bi-acromiale.
Les rapports de la largeur bi-acromiale avec la capacité vitale et les di-
verses dimensions du corps sont exposées dans le tableau XX. On voit que,
au fur et à mesure que cette largeur s'ilrve :
La capacité vitale et les dimensions du corps, augmentent absolument.
Mais relativement à elle :
La capacité vitale, la mégasomie, l'amplitude du thorax augmentent.
La taille, le buste, les membres inférieurs, le poids, la circonférence
thoracique diminuent. Il en est de même pour la longueur du sternum
mais <lu deuxième au troisième groupe seulement. Ce deuxième groupe
est surtout favorisé au point de vue de la brachyskélie qu'il présente à un
point beaucoup plus accentué que les deux autres.
Les rapports de la taille et du buste avec la largeur bi-acromiale ont
déjà été exposés; aux plus petites tailles et aux plus petits bustes corres-
pondent lelativement les plus larges épaules.
E. DEMONET. - RECHERCHES Sfll LA CAl'ACITK VITALE 09
Tabi.kau XX
Ordination d'après la largeur bi-acromiale.
MOYENNES DES DIMENSIONS
Taille
Hiisto 1!
McmbiT inférieur S
La r; leur bi-ncro m ialc.
Longueur du sternum.
Poids
ririont'érenre llioracique.
Mégasomie approehée : Taille X Larg. bi-acrom.
i(l. Buste X Circonf. thorac.
Amplitude du thorax
Capacité vitale. .
MOYENNES DES RAPPOUTS
Taille ^= 100 : Largeur hi-aeromiale
C.irconlërence tluiracique .
Buste =r: 100 : .Mi'mhre inlVrieur
Largeur bi-acroraiale -=2 10 : Taille
Buste
Membre inférieur .
Long, du sternum.
Poids
Ciroonf. thoracique.
Mégas. app.: BusleX
Ciroonl'. tborac. .
Amplit. du Iborax.
Capacité vitale.
Mégasomie approchée = 100 : (Taille X I^ai'g- ^>^-
acromiale). Capacité vitale
Mégasomie approchée = 100 : (Buste X Circonf.
thoracique). Capacité vitale
I (30)
1.521
0.821
0 700
0.290
0.1 ;i3
53 6
0.716
13.15
5.S.78
0.049
2.396
0.197
0.481
8.5.2
0.525
0 283
0.242
0.040
18.5
0.247
20.27
0.0160
830
5.553
4.075
II (40)
1.546
0.831
0.715
0.309
0.140
55.3
0.740
47.77
01.49
0.056
2.720
0.200
0.479
86.0
0.500
0.269
0.231
0.045
17.9
0.239
19.90
0 0181
880
5.694
4.423
III (30)
1.602
0.848
0 7.^4
0.329
0.149
57.9
0.746
52.71
63.16
0.063
3.137
0.205
0.466
88.9
0.481
0.258
0.223
0.045
17.6
0.227
19.19
0.0191
953
5.952
4.966
Il serait téméraire d'affirmer que la largeur bi-acromiale afîecte avec
la capacité vitale des relations intimes. En effet, quand la première croît
de 1 millimètre, la seconde augmente de 17 centimètres cubes du T"" au
2« groupe, et de 20,8 centimètres cubes du 2« au 3e groupe. Tout au plus
pourrait-on dire que la capacité vitale est d'autant plus considérable que
cette largeur bi acromiale est elle-inème plus grande. Celle ci doit donc
être considérée comme un facteur dont l'importance est secondaire, et
soumise en quelque sorte, h d'autres facteurs comme la taille, le buste, la
circonférence du thorax, et l'amplitude du thorax qui subissent dans les
mêmes conditions une augmentation considérable, et en proportion plus
régulière avec celle de la capacité vitale. L'avantage incontestable que
présente à ce point de vue le deuxième groupe est dû h son degré accentue
70 ?) JANviKH 1905
de brachysk/'lie, doiil l'iiilluiMicc se fait sentir ici d'une façun manifeste.
Quant à la longueur du sternum, elle favorise relativement les petits dia-
int^tres hi-acromiaux qui semblent compenser par une exagération de la
dimension en liauleui' de leur thorax, leur faible développeuicnt en lar-
geur. L'augmentation absolue (ju'elle présente dans le troisième groupe,
montre tjue la raarroské'lii! de ci* dernier lutte de cette mafiiéio contre l'in-
féi-iorilé que lui confère son rapport S B élevé.
Le poids, l'amplitude thoracique et la circonférence tboracique vont de
pair.
Leur corrélation est en parfait accord avec ce que nous savons de leurs
rapports réciproques et de ceux (ju'ils affectent avec la capacité vitale.
.Vu point de vue spécial que nous envisageons, le diamètre bi-acromial
n'a donc (ju'une valeui' secondaire. Il en acquiert une p'us importante
quand il entre dans la traduction de la mégasomie, du développement
général de l'organisme dont il représente seul exactement la dimension
transversale.
Rapports de la capacité vitale avec la lonrjueur du sternum.
Le tableau XXl expose les relations de la longueur du sternum avec la
capacité vitale et les diverses dimensions du corps 11 montre (jue, au fur
et à mesure que cette longueur s'accroît, la capacité vitale et les diverses
dimensions du corps augmentent aussi, d'une façon absolue et d'une façon
relative. La circonférence thoracique ne serait pas une exception à cette
formule, si la graisse n'intervenait pas dans son expression. Il est donc
permis d'aflirmer que la longueur du sternum suit assez bien le dévelop-
pement lotvil de l'organisme, sans affecter pour cela avec les divers fac-
teurs qui le traduisent, des relations bien intimes.
Et d'abord, quand cette dimension squeleltique augmente d'un milli-
mètre, la capacité vitale s'accroît de la i'''^ h la 2» série de 13 centimètres
cubes et de la 2" à la 3« de 20 centimètres cubes. C'est là une différence
importante qu'il est bien difficile de négliger, et qui tend pour le plus k
prouver que la capacité vitale d'un sujet est d'autant plus considérable
que sa longueur du sternum est plus élevée. On ne peut donc admettre
celle-ci comme traduisant exactement le développement de l'appareil res-
piratoire, et étant dans ce sens un interprète plus fidèle que toute autre
dimension squeleltique. Le fait suivant en est la preuve évidente : dans
cette ordination elle-même, la capacité vitale atTecle avec la taille des
relations beaucoup plus régulières. En effet, quand celle-ci augmente
de 1 centimètre celle-là saccroît d'abord de 58 centimètres cubes, puis de
64 centimètres cubes, proportion (jui, toutes choses égales d'ailleurs, est
incontestablement plus satisfaisante que les rapports de la capacité vitale
avec la longueur du sternum elle-même.
Comme cette dernière est relativement d'autant plus courte que la taille
et le buste sont plus grands, la cage thoracique paraît ainsi s'allonger fort
E DEMO.NET. — HECHEHtJHES Slll l.\ ilM'ACITi; VITAl.K
71
peu 'Ml hauteur, et tout porle à croire qu'alors la portion dorsale s'allonge
moins (|ue les autres segments de la colonne vertébrale: l'abdomen remon-
terait en quelque sorte davantage.
Ta m, KM. XXI
Ordination d'après la longueur du sternum.
MOYKNNBS UES DIMENSIONS
l (30)
Il (40 1
m (30)
ÏHill.'
1.511
1.552
1.599
Husto
0.820
0.831
0.847
Membre inférieur
0.6U1
0.721
0.752
l..Hrpi'ui" bl-arromiHle ....••••
o.;}<ii
0.310
0.142
54.9
0.729
0.317
LoïK/iiPur du sternum
0.124
0.157
I»oids
5:j.()
58.5
Circonlorence thoracique
0.729
0.749
.Méfj;asumie approi'liéc: Taille X '-■'•l'è''- bi-airorri .
45.48
48.11
50.69
Id. l$iisle X Cireonl'. llKjnic.
59.78
60.58
63.44
Amplitude du lliorax
0.(151
0.054
0.060
Capacité vitale
2.490
2.729
3.031
MOYENNES DBS RAPPORTS
Tailleur 100: Largeur bi-acromiale
0.199
0.194
0.198
Poids
35.4
35.4
36.5
Circnnlërence tboraoi(iue
0.482
0.470
0.468
Bustes 100: Membre iniërieur
84.3
86.8
88.8
Longueur du sternum =: 10 : Taille
1.218
1.077
1.018
Buste
0.t)61
0.577
0.540
Membre inférieur .
0.557
0.500
0.478
Largeur bi-acrom. .
0.243
0.218
0.202
Poids
43.7
38.7
37.0
Cireonf. thorac. .
0.588
0.513
0.477
Mégas. app. : Taille
X Larg. bi-aorom.
36.69
33.88
32.29
XCàrcoiif. thorac.
48.21
42 f)6
40.41
0.038
0.034
0.038
Capacité vitale . .
2.009
1.922
1.930
Mégasomie approchée =: 100. Taille X Larg. bi-
acromiale). Capacité vitale
5.477
5.672
5.979
Mégasomie a[»profbée : r= 100. (Buste X'''i''''on''"-
rence thoraeique'. Capacité vitale ...
4.165
4.506
4.777
Si le thorax est gt^né dans son développement en hauteur, il le sera
dans les autres sens, et c'est, en effet, ce qui a lieu. Son diamètre bi acro-
mial augmente beaucoup surtout ilu l""" au 2" groupe, et la circonférence
thoracique, du 2' au 3". Si cette dimension est égale dans les deux pre-
mières séries, c'est que cette mensuration est faussée par le tissu adipeux
plus abondant dans le premier groupe, composé de sujets, en gém-ral,
7Î 5 JANVIER 1905
pelils et gras. En réalité, là comme partout, lu circonférence thoracique
est sous la «iépendancp étroite de Tamplilude du thorax, qui, dans celte
ordination est en connexion assez étroite avec la capacité vitale.
Il est aussi intéressant de faire remarquer que la mégasomie et la capa-
cil»' vitale décroissent relativement ii la longueur du sternum. C'est la
première fois (jue nous trouvons cette relation austi nette : peut-être
aurait-on le dioit d'en cimclure, tout au moins, que l'accroissement du
poumon eu hauteur n'est pas proportionnel à celui de la masse à nouirir.
liopporls (le In rapacité vitale avec le poids.
Le tableau XXII, ordonné d'aprèsle poids, montre que, nu fur et à mesure
que ce dernier s'élève la capacité vitale et toutes les dimeusions du corps, sauf
cependant la largeur bi-acromiale et l'amplitude thoracique augmentent
Belativement à ce facteur, toutes les dimensions diminuent : seule, la capacité
s'accroît légèrement pour diminuer ensuite considérablement.
Les rapports du développement pulmonaire et du poids ne manquent
point d'intérêt. En effet, du premier au deuxième groupe, celui-ci gagne
7 kilogrammes et la capacité vitale 387 centiuiètres cubes ; du 2* au
3« groupe, cette dernière s'accroît de 16 centimètres cubes, quand celui-ci
augmente de 9 kilogrammes 300. En présence de semhiabli s résultats,
il est impossible d'établir des rapports intimes entre ces deux facteurs, et
l'on se trouve forcé d'admettre cette conclusion : Dans le sexe féminin, le
poids n'influence en rien la capacité vitale.
C'est qu'en réalité, comme nous l'avons répété bien souvent après
M. Manouvrier^ le poids représenterait assez bien le degré de mégasomie
d'un individu, son développement musculo-squelettiq .e, s'il n'était in-
fluencé par la graisse. Pour avoir quelque valeur, ce facteur doit s'appli-
quer à un ensemble de sujets dont le degré d'embonpoint soit sensible-
ment identique. C'est précisément le contraire qui se présente ici. Femmes
grasses et femmes maigres se trouvent mélangées dans diverses propor-
tions que des coefficients nous ont permis d'établir, et dont nous allons
donner un résumé. Nous avons dit qu'un grand nombre de femmes petites
présentaient un développement considérable du tissu adipeux. (4 ou 5), et
qu'un certain nombre de femmes grandes devaient être plutôt considérées
comme maigres (2). Ceci explique parfaitement pourquoi^ d'une part, la
taille du premier groupe est sensiblement supérieure à celle qu'on obtient
dans une ordination faite d'après ce facteur lui-même, et pourquoi aussi
la moyenne de la stature des deux autres groupes est sensiblement
identique, malgré une différence de poids considérable.
D'un autre cùté, il est curieux de rapprocher la capacité vitale, le poids
et la taille. Il semblerait qu'en réalité, c'est ce dernier facteur qui inter-
vient dans une ordination d'après le poids. Malgré une augmentation
considérable de ce dernier, le développement pulmonaire semble être en
parallélisme parfait avec le développement de la stature, et il est permis
de rapprocher les 52 centimètres cubes dont s'accroît la capacité vitale
E. DE.MO\ET. — RECHERCHES SUR L.\ C.\P.\CtrÉ VITALE
78
dans celle ordinalion, quand la taille augmenle d'un centiinèlre, des
48 centimètres cubes qu'elle gagne, dans les mêmes conditions, du 2» au
S*" groupe de l'or'dinalion faite d'après celte dimension squelettique. Ceci
laisserait admettre qu'en somme le développement du tissu adipeux qui
doit surtout être mis en cause dans celte progression n'intervient que
pour fort peu dans l'accroissement de l'appareil pulmonaire, et que, seule
la masse active, la masse muscul )-squelettique présiderait aux échanges
de l'organisme, Nous en avons une preuve dans ce fait que l'amplitude
Ihoracique est plus grande pour le second groupe que pour le troisième,
et si la circonférenc*' Ihoracique de ce dernier est supérieure à celle du
second, c'est (jue (;elui-ci présente moins de tissu adipeux, est relative-
ment maigre, tandis que l'autre est relativement gras.
ï.\BLE.\ll X.Xll
Ordination d'après le poids.
MOYENNES DBS DIMKNSIO.NS
1(30)
II (40)
m (30)
Taille
1 502
1.576
0.839
0.737
1.579
Buste . .
0 815
0 841
Membre inférieui- . .
0.087
0.738
Largeur iii-arroiniaif ....
0.299
0.315
0.313
Longueur du sternum . . . ...
0.132
0.139
0.146
Poids
47.9
54.9
64.2
(^rconlerenro th(ira<i(|iic
0.080
0.727
0.789
Mégasomie approclu'c : Taille X L«'"r- l>i-airom..
41.91
19.65
49.43
M. liiisle X '''''-onr. thorac..
56.22
61.00
66.35
Aiii|(litn<le du thorax
0.051
0.058
2.859
0 054
Capacité vitah . . . .
2 472
2.875
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille := 100 : Largeur bi-af^romiale
0.199
0.201
0.198
Poids
31.9
34.9
40.6
Cinonrérence thoraoiqiic
0.458
0.461
0.500
Miislc =1 100 : Membre inférieur
84.4
87.9
87.8
Poids = 100: Riist.'
1.702
1.530
1.310
MtMubre inlérieiu'
1 . 134
1.342
1.149
Larireur bi-açromiale
0.624
0..574
0.487
Longueur du sternum
0.275
0.253
0.227
• '.irconférenn' thoraclquf. .
1.438
1.324
1.229
.Mégasomie app. : Taille X Largeur
bi-afroinialc
93.97
90.44
77.00
Mégasomie app. : Uuste X ^■ii'''*^rifé-
l'éiici' tlioi-acique
117 4
111. 1
103.3
Amplilude du thorax
0.113
0.105
0.083
r.aparité vitale
5.161
5.208
4.478
.Mégasomie approchée = 100. (Taille X Larjr. bi-
aiTomiaie). ('.aparitr- vitale
5.501
5.758
5.816
Mi'gasomic apiu-oclir." rr 100. (Buste X Circonfé-
renfc thora(i(pie). i.apaiité vitale
4.397
4.687
4.3:33
7.7'i8
8.238
7.081
74 ?$ JANVIKU IWOO
La valeur du cliamAlre biacromial est une confirmation de cette hypo-
thèse : dimension purement squelellique, elle n'est pas modifiée par le
tissu adipeux, et précisément, elle est légèrement inférieure dans le
3« groupe, à ce qu'elle est dans le second.
Le [»oids mérite également d'être rapproché de nos indices de méga-
somie. Il en résulte en effet, que comme expression du dévelop|;ement
général de l'organisme, et par comparaison avec la capacité vitale, le
premier indice traduit par le produit de la taille par le iliamétre biacro-
mial. présente beaucoup plus d'affinité avec celte capacité vitale, que le
deuxième donné par le produit du buste par la circonférence tboracique
qui se rapproche en revanche, beaucoup plus tlu poids.
(^eci s'explique facilement, et démontre la supériorité (ies mensurations
purement squelcltiques sur celles où intervient un facti'ur aussi variable
et aussi peu important que le tisSu adipeux.
Du reste, dans celle ordination, le poids parait absolument indépendant
di' toute dimension squeleltiijue. Il n'est lii' pai- aucun l'apport no'i seule-
ment à la taille et aux deux facteurs qui la constituent, mais encore à la
largeur biacromiale, et pourrait-on dire aussi, à la longueur du sternum
qui suivrait plutôt l'accroi-sement de la taille, si du 2» au 3*^ groupe, elle
ne subissait une augmentation sensible qui semble compenser par un
excès en hauteur, l'insuflisance du développement transversal.
Le poids ne saurait aussi se rattacher d'une façon étroite à l'amplitude
du thorax, parce qu'elle n'est qu'un des deux facteurs dont ce dernier est
la traduction.
Aux poids les plus variés correspond souvent uno même amplitude du
thorax, et si, dans celte ordination, elle est légèrement inférieure pour
le S" groupe, cette infériorité peut traduire une activité moindre du tra-
vail musculaire, qui n'est pas en opposition avec une augmentation insi-
gnifiante de la capacité vitale, nécessitée par un faible accroissement de
la taille, et une masse organique totale plus considérable.
Mais en revanche, la circonférence tboracique est considérablement
influencée par la graisse, c'est-à-dire par le poids. Ces deux facteurs sont
toujours en parallélisme étroit, les variations de l'un entraînant des modi-
fications de l'autre, et masquant complètement l'iiifluence de l'amplitude
du thorax sur le développement des côtes. La signillcation de la cir onfé-
rence tboracique perd ainsi beaucoup de sa valeur.
Rapports de la capacité vitale avec l'indice de corpulence - de M. le Profi'sseur
Bouchard.
Les rapports de la taille et du poids paraissent avoir été d'autant moins
étudiés chez la femme qu'ils l'ont été davantage chez l'homme Les seuls
documents vraiment scientiliques qui aient été publiés sur ce sujet,
appartiennent à M. le Professeur Bouchard qui a appliqué au sexe fémi-
nin, son indice de corpulence -.
E. DEMONEÏ. — nECHERGHES SL'R LA CAPACITK VITALE 75
Tableai- Wlll
Ordination d'après l'indice de corpulence -|p de Bouchard.
MOYENNBS DIÎS DIMENSIONS
Taille
Hiist»'. . •
Mciiiliri- inlcrieiir
Largeur bi-acroiuiali'
Loii::iieur <lu sternum
IN.i.is
Taillo — 1000 : Poids (Indice de corpulence de
Bouchard)
CinonIV'rence Ihoracique
Amplituile du thorax
Capacité vitale
1 (30)
MOYENNES DES RAPPORTS
ïaill.
100 : Largeur
Cirt-onler
Capacité
Buste := 100 : Membre
Mégasnmie appi'oehée
acromiale). Capacité
Mégasomic approchée -
renée tlioracique Ca
Poiiis — lOU : Capacité
Indice de Corpulence ::
bi-acromiaie
enee lhoraci<pie.
vitale
inférieur
— ion. (Taille X Larg. l)i-
vitale. ...
(Buste X Circonfé-
k'ilale
1.529
0.H20
0.709
0 302
0.139
48.1
3.15
o.c.9;{
0.053
2.537
(40)
III (30)
0.197
0.454
1.659
8(3.5
5.412
- 100.
pacité
vitale
- 1 :
Buste
Membre inférieur.
Largeur bi.acrom.
Longueur du stern.
Mégas.app.:TailleX
i>arg. bi-acrom.
Mégas. app. Buste X
Circonf thorac.
Circonf Ihornc.
Amiilitude duthorax
Capacité vitale.
4.464
5.274
0.260
0.225
0.096
0.044
14.88
18.04
0.220
0.018
8.054
1.568
0.839
0.729
0.313
0.142
54.7
3.49
0.725
0.060
2.882
0.200
0.463
1.838
86.9
5.862
4.737
5.250
0.240
0.209
0.090
0.041
14.07
17.43
0.208
0.017
8.258
1.558
0.836
0.722
0.310
0.142
63.9
4 10
0.788
0.054
2.779
0.193
0.506
1.783
86.2
5.754
4.209
4.349
0.204
0.176
0.076
0.035
11.78
16.07
0.192
0.013
6.778
Le tableau \.\III, ordonné d'après cet indice, montre que, k unpointde
vue absolu. /'/ capacité vitale et toutes les dimensions du corps nugnindentau fur
l't à mesure que l'indice lui-même augmente. Cependant, le 3« groupe est un
peu moins favorisé que le deuxième sous le rapport de la capacité vitale, de
la taille, du diamètre biacromial et de l'amplitude du thorax.
Relativement à cet indice: la capacité vitale et les dimensions du corps,
ainsi (jue le mégasomie diminuent uniformément.
Si on rapproche ces résultats de ceux fournis par le tableau WH,
ordonné d'après le poids, on est frappé de leur similitude presque abso-
lue. Ceci ne saurait surprendre, car c'est le poids qui exerce encore ici
76 •') JANVIF.H 1005
une action prôpondôranlo. Aussi n'insislerons-nous que sur deux faits :
l'utilil»' de ia|i|ioil<'r le poids à la taille, el i'exaclilude des chiffres donnés
par IKun-harii coirune indices de corpulence.
.Nous avons dt-jà fiïleui-é la preuiiè-re de ces questions au sujet du sexe
masculin. .Nou> réi^'lerons encore i\nc. nous ne croyons pas nécessaire et
inénif" ulilf, pour aninui-r qu iiiii- fcunuo est maigre ou obèse que son
rapport - soit de 3, 1 ou de 5, et on sait qu'elle est dans le marasme avant
que la toise et la bascule aient donné un indice de 2, 3. Un œil tant soit
peu exercé perçoit des rapports, subit des impressions que cet indice est
absolument incapabledc rendre, et celte traduction mathématique, scien-
tifique au premier abord, ne vaut pas un court exposé de l'état général,
tel que le fait soupçonner le simple examen objectif du sujet. Du reste, sur
quelles mensurations Bouchard s'est-il appuyé pourétablir ses moyennes ?
Celles qui concernent le sexe féminin sont plutôt rares, et témoignent
des difficultés incontestables que l'on rencontre quand on veut faire des
recherches anthropométriques sur la femme.
Nous ne croyons pas que les moyennes assignées soient exactes. Si notre
premier groupe, que l'on peut considérer comme maigre est assez bien
représenté par un indice de 3,15, il n'en est pas de même pour les deux
autres dont les indices sont vraiment trop faibles. Le second groupe en
effet, présente un embonpoint normal qui devrait se traduire par un indice
de 3.9 au moins, et il n'est que de 3,49 ; le 3» groupe, franchement gras
n'est représenté que par le chitîre 4,1 nettement insuffisant. L'explication
de ces faits a été déjà fournie : l'augmentation du poids, et l'accroissement
ds la taille, ne sont point parallèles, et ne peuvent être traduits par une
constante, comme l'admet Bouchard : à chaque taille devrait correspondre
p
un rapport û différent. De plus, si la moyenne indiquant la maigreur est
excellente, l'indice 3,9 affecté à l'état normal est déjà un peu élevé, et
quand il atteint 5, l'obésité est alors dépassée, on touche presque au
a phénomène. »
Rapports de la capacité vitale avec la circonférence thoracique.
Le tableau XXIV, ordonné d'après la circonférence thoracique présente
d'étroites analogies avec les deux tableaux précédents, construits d'après
le poids et l'indice de corpulence. Comme dans ces derniers, on voit que,
au fur et k mesure que le facteur en cause augmente :
La capacité vitale, la mégasomie, et toutes les dimensions du corps s'accroissent
aussi absolument.
Et, relativement à cette dimension : Tous les facteurs diminuent, sauf
cependant l'amplitude du thorax et la capacité vitale qui augmentent
légôn-m^-nt pour le 2« groupe, avant de décroître pour le troisième, et le
poids qui présente un accroissement relatif très net chez les sujets dont la
circonférence thoracique est la plus élevée.
E. DEMONET. — nECHEUCHES SUR LA CaPACITK VITALE
77
Tahleau \XI\
Relations de la capacité vitale avec la circonférence thoracique.
MOYENNES DttS DIMENSIONS
Taille
Busto
Membre intérieur.
Largeur bi-acromiale
Loiiffueur fin slcrnum,
Poi.ïs
Circonff'rencf thoracique
Mégasoniie approclire : Taille X Larg. bi-acroin.
id. iiuste X Circonl'. Ihoruc.
Amplitude du thorax. ........
Capacité vitale
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille ^= 100: Largeur bi-acromialo
Poids
(".ircontërence fliorarique.
Buste z= 100 : ^leuibre inférieur
Mégasoinic approchée ■= 100. (Taille X I-^i©- ^J'-
acrouiiak'^. Capacité vitale
Mégasomic approchée :=: 100. (Buste X Circonlé-
n-not' thorarique Capacité vitale
Circonf. thorae. — 100 : Taille
I5ust.'. . . . . .
Membre inférieur.
Largeur bi-acrnmiale .
Mégas. app. : Taille X
Larg. bi-acrom .
Longueur du sternum
Poids
Amplitude du thorax.
Capacité vitale.
1.519
0.819
0.700
0.304
o.i:n
49.7
0.679
40.18
55.01
0.053
2.530
0.200
32 1
0.447
85.0
5.179
4.719
223.7
120.5
103.2
44.8
68.00
20.2
73.32
0.0781
3.726
65.82
19.3
72.9
0.0797
3 814
l3U)
1.507
1.569
0 839
0.840
0.728
0.729
0.311
0.312
0.143
0.143
53.9
63.6
0.729
0.799
48.73
4.S.95
02.00
(')7.12
0.0.59
0 055
2.819
2.871
0.198
0.198
34.4
40.5
0.472
0.508
86.8
86.8
5.785
5.865
4.547
4.277
212.0
196.4
113.5
106.4
098.5
090.0
42.3
39.0
60.07
18 3
79.6
0.068
3.685
Celle-ci est loin d'èlre intimement unie à la capacité vitale. En etl'et, celle
dernière gagne d'abord :289centimèLre.s cubes quand la circonférence tho-
racique s'accroît de 50 millimètres et ensuite 52 centimètres cubes seule-
ment alors que la seconde augmente de 70 millimètres. Il n'y a donc
aucune régularité entre le développement de ces deux facteurs, et il sem-
blerait au premier abord que l'un soit absolument indépendant de l'autre.
Ce n'est là qu'une apparence. En réalité, le périmètre du thorax est dans
cette ordination, sous la dépendance non seulement de l'amplitude tho-
racique, mais encore et surtout du poids, c'est-à dire de la graisse, qui
exerce ici son influence perturbatrice C'est le tissu adipeux qui s'accroît
sans grand profil pour le développement pulmonaire^ mais non l'activité
78 5 jANviKH 1'.)05
muRCulaire Aussi [joiirniit on dire iiiif celle dernière permet d'expliquer
raccruisseinent de la capacité vitale du premier au deuxième groupe: la
faible amplitude du llioiax du troisième groupe montre pourquoi son
pouvoir respiratoire ne grandit piesijue plus, tout en s.itisfaisant cepen-
dant aux besoins d'une masse orgaMi(jue totale qui parait beaucoup plus
considérable. Il en résulte donc que le tissu adipeux ne consomme que
fort peu d'oxygène pour son entretien, tout au moins, et que les phéno-
mènes nutritifs qui se passent dans son intimité sont aussi ralentis que
possible.
Il y aurait peut-être encore une interprétation de ces faits : nous avons
eu l'occasion de la noter. La laille, le buste, la largeur biacromiale, la
longueur du sternum, doivent exercer ici leur influence : or leur accrois-
sement est exactement parallèle h celui de la capacité vitale. On pourrait
donc admettre que celle-ci est soumise dans une mesure beaucoup plus
grande aux dimensions exclusivement squelettiques, qu'à celles compre-
nant des parties molles.
11 a été dit, à propos de la taille, que la circonférence thoracique, d'une
façon générale, croissait avec cette dernière. Dans une ordination d'après
la circonférence thoracique elle-même, cette relation est assez lâche, et
ne présente pas un caractère d'absolue nécessité. Cette dimension se
rattache beaucoup plus au poids qu'à la laille, et elle présente par consé-
quent avec celle-ci des rapports identiques à ceux qui unissent ces deux
facteurs. La circonférence thoraci<jue des deux derniers groupes qui ont
une stature presque identique, diiïère énormément parce que l'écart de
leur poids réciproque est considérable, et ceci rappelle que si l'adiposité
est indépendante de la taille, elle intervient dans la détermination du
poids et du périmètre thoracique.
Si l'on applique au sexe féminin le fameux rapport de la circonférence
du thorax à la demie laille, on s'aperçoit qu'elle ne se rencontre seule-
ment que chez les femmes dont l'embonpoint présente une exagération
manifeste: à ce titre il ne s'applique qu'au troisième groupe.
Il est bien difficile de mettre en évidence, dans cette ordination, l'in-
ilucnce de l'amplitude du thorax sur le développement de sa circonfé-
rence. On se heurte toujours au môme obstacle : la présence du tissu
adipeux qui varie avec les sujets et avec les séries, de quantités impossibles
à déterminer exactement. Aussi nous bornerons-nous à dire que l'ampli-
tude parait surtout présider à l'augmentation de la circonférence pour le
deuxième groupe, et que l'embonpoint, au contraire, paraît entraîner
l'énorme accroissement que présente ;i ce sujet, la dernière série
La circonférence thoracique vient d'être étudiée à l'état isolé, en quel-
que sorte. Nous allons rechercher sa valeur quand elle entre dans l'inter-
prétation de la mégasomie, du développement général de l'organisme.
Rapports de la capacité vitale avec la mégasomie.
C'est, bien entendu, à titre d'attente et d investigation seulement, que
E DEMitNKT. — UECIIERCHES SUH LA CAPACITE VITALE
79
nous avons adoptô comme indices de mégasomie approchée, deux produits,
l'un provenantde dimensions exclusivement squelclU(jues, l'autre dedcux
facteurs, l'un S(|iieiletitjue aussi et le second soumis aux variations dé l'em-
bonpoint. Quoiqu'il en soit, d'une façon générale, le tableau XXV, ordonné
d'après le produit de la taille par la larij^eur bi-acromiale, affecte les méme>
rapports, ou à peu prt>s, que le tableau XXVI, construit d'après le produit
de la longueur du buste par la circonférence thoracique.
Tableau XXV
Ordination d'après l'indice de mégasomie. fTailleX Largeur bi-acromiale).
MOYENNES DES DLMENSIONS
Taille
Buste
Membre inférieur
Largeur bi-acromiale
Longueur du sternum
Poids
Circonférence tlioracique
Méqasoinie ai)inorhèe : Tdillc X Imi'ij . hi-acrotn.
id. Hiisle X Circonf. Iborac.
Amplitude du thorax
Ca/jacifë vitale
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille = 100 : Poids
Circonférence du thorax. .
Amplitude du thorax
Buste = 100 : .Membre inférieur
.Mégasomie appro<liée z= 10 : (Taille X Largeur
bi-acromiale) : Buste
Membre intérieur.
Longueur du sternum. .
Poids
Circonférence thoracique.
Amplitude du thorax.
Capacité vitale
1(30)
1.486
0.812
0.674
0.292
0.133
52.7
0.719
43.39
58.38
0.050
2.361
35.5
0.185
0.034
88.0
0.187
0.155
0.031
12.1
0.166
0.0115
544
II (40)
1.558
0.830
0.728
0.309
0.141
55.5
0.733
48.14
60.84
0.055
2.723
35 . G
O-i^l
0.035
87.7
0.173
0.151
0.029
11.5
0.152
0.0116
567
III (30)
1.615
0.856
0.759
0.327
0.150
58.5
0.752
52.81
64.37
0.063
3.168
36.2
0.466
0.039
88.7
0.162
0.144
(1.028
11.1
0.142
0.0120
599
Ils montrent que, à un point de vue absolu , au fur et à mesure que la méga-
somie s'élève, la capacité vitale et les dimensions du corps s'accroissent aussi
relativement à cette mégasomie : la taille, le buste, le membre inférieur^ la
lanceur bi acromiale, la longueur du sternum diminuent: par contre, le
poids et la circonférence thoracique, l'amplitude du thorax et la capacité
vitale augmentent.
Ces deux tableaux, il est vrai, ne concordent pas de tout point: ainsi
80
r» JANVIER 1005
dans le tableau \\\ , la circoiiléitMice Uiuracique et le poids sontdautant
plus petits que la uK-gasumie est plus gramle, à taille égale. La page sui-
vante présente un rapport inverse. Ces variations sont évidemment liées
à celles des facteurs (jui interviennent dans ces ordinations. Dans l'une,
la circonférence tlioracique a un rôle secondaire subordonné à celui delà
taille; dans l'autre, c'est celle-là qui est au premier plan, cette dernière
n'ayant plus qu'une importance relative. Nous nous attemlions même à
des variations plus considérables, qui atteignent cependant une valeur
assez grande, en ce qui concerne surtout la capacité vitale absolue du
troisième groupe de l'une et l'autre sériation. Toutefois, il est incontes-
table que la première de celles-ci est de beaucoup préférable : ses rapports
sont plus réguliers, moins soumis à l'influence du poids et de l'embon-
point; mais la seconde n'en a pas moins sa valeur et son importance
puisqu'elle confirme presque complètement les données de celle-là.
Tableau XXVI
Ordination d'après l'indice de mégasomie approchée. Buste X circonfé-
rence thoracique.
MOYENNES DES DIMENSIONS
Taille
Buste
Membre inférieur .
Largeur bi-acromiale.
Longueur du sternum.
Poids
Circonférence thoracique
Mégasomie aitprorhée : Taille X Larg. bi-acrom.
BiistP X Circonf. f/ioi-ar.
Amplitude du thorax
Capacité vitale
Moyennes des nAPi'ORTs
Taille — 100 : Poids
Circonférence thoracique .
Amplitude du thorax
Buste r= 100 : .Membre inférieur
Mégasomie approchée = 100 : (Buste X Circonf.
tliorafique) : Taille
Mt-mbre iniV-rifur
Largeur bi-acromiale . . . .
Longueur du sternum.
Poids
Am[)litude du thorax . . . .
Capacité vitalo.
I (30)
1.499
0.812
0.087
0.2!)0
O.Ll:^
50.5
0.701
41.37
56.92
0.(119
2 474
32.3
0.468
0 n:V2
84.0
2.634
1.207
0.520
0.233
88.7
0.086
4.. 346
Il 40 1
1.563
0.838
0.725
0.311
0.142
56.1
0.735
48.61
61.59
0.058
2.783
.35.9
0 469
0.036
86.5
2.587
1.177
0.505
0 . 230
91.0
0.094
4.518
m ^30)
1.595
0.846
0.749
0.320
0 149
59.9
0.768
51 . 52
64.97
0.061
2.969
37.5
0.481
0.038
88.5
2.455
1 1.53
0.492
0.229
92.2
0.094
4.572
E. DEMONET. — RECHERCHES SUR LA CAl'ACITK VITAI.E 81
Nous connaissons les rapports (l« l.i még.isoinie avec la capacili- xilalc
Celle-ci croît absolument et relativement avec celle-là: il importe de faire
remarquer que cette progression est d'autant plus faible que le di'velop-
pement <le l'organisme est plus grand, et ce fait permet de supposer que
s'il nous avait élé possible d'établir des indices de mégasomie absolue,
cette relation, dictée par une lui bien connue en physiologie générale,
aurait été retrouvée. En effet, on peut faire une classification fort simple
de tous les facteurs dont nous avons étudié l'influence sur la capacité
vitale : les uns se rattachent au squelette, les auties en sont indépendants.
Or les premiers décroissent, et les seconds augmentent relativement à la
mégasomie. Ceci signilie nettement que si nos indices sont suffisants pour
mettre en luuîière les véritables rapports du développement tutal de l'or-
ganisme avec le squelette, ceux-ci sont en défaut en ce qui concerne la
circonférence thoracique, le poids, l'amplitude du thorax et la capacité
vitale. Ces trois dernières, avons-nous dit, croissent proportionnellement
avec la taille; ils croissent beaucoup moins avec la mégasomie, et il n'est
pas étonnant que dans ces conditions, le développement pulmonaire se
fasse proportionnellement à la masse à nourrir. Il est certain qu'un indice
de mégasomie plus exact, tenant compte des dimensions antéro-posté-
rieures du thorax, eut présenté les choses sous leur véritable jour. Une
étude complémentaire éclaircira ce point important.
Le tableau XXVI, présente une particularité qui mérite d'être signalée.
La capacité vitale et l'amplitude du thorax affectent avec la taille des
relations étroites. Celle-ci autant que la mégasomie elle-même, paraît
régler le développement du poumon. Mais la taille, ne traduit-elle pas
assez bien, la masse organique totale?
Rapports de la capacité vitale avec l'euryplastie.
.\prés avoir étudié dans le sexe féminin, les relations de la capacité
vitale avec divei'ses dimensions du corps, taille, buste, etc., le degré de
mégasomie et de brachyskélie, il était nécessaire d'envisager l'influence
exercée sur le développement pulmonaire par le rapport des dimensions
transversales de l'organisme, à des dimensions en hauteur. Pour exprimer
cette euryplastie, nous avons utilisé d'une façon approximative, il est
vrai, d'abord, le rapport de la largeur bi-acromiale à la taille - - 100.
puis celui de la cir:onférence thoracique au buste =: 100. Suivant la ter-
minologie adoptée, le premier groupe des t;ibleaux XXVII et XXVIII ren-
ferme des macroplastes, le 2^ des mésoplastes, le S^'des eurypiastes. Cette
classification est naturellement relative.
Il semble au premier abord que l'euryplastie n'exerce aucune influence
sur la capacité vitale, et qu'il n'existe aucun parallélisme entre la valeur
de l'une, et celle de l'autre. Il est facile cependant de la mettre en évi-
dence, en les rapportant toutes deux à la taille.
Un fait frappe immédiatement : l'euryplastie semble ab>oliiMienl imli'
sijCi h'amiiiiui" l'.'O^i ''
82
") JANVIKU I '.)('.■'•
pendante de la taille. Ceci est exact : à chai]ue slature se trouvent associées
des macro et des eurypiastes. CepL'mlanl. on pourrait dire avec raison
que le premier groujie du tableau X.W'Il est constitué par les tailles les
plus élevées, et que le même groupe du tableau XXVIII réunit les bustes
grands. Il est donc permis de dire que la macroplastie alTectionne les plus
les plus hautes statures.
Tableau XXVII
Ordination d après l'indice d'euryplastie approchée. Largeur bi-acromiale
rapportée à taille = 100.
UOYtNNES OKS DIMBNSIONS
Taille
Buste
Membre intérieur .
Largeur bi-acroniinle .
Longueur du sterninii.
Poids
Circonlérence thoraciquo
Mégasomif approchée : Taille X Larg. bi-acrom.
id. Buste X Circonf. thorac.
Amplitude! du thorax
Capacité vitale
Euri/plastie approchée : Largeur bi-acromiale
rapportée à Taille ^=100
MOYENNES DES RAPPORTS
Euryplastie app. -=z 10. (Largeur bi-acromiale h
Taille = 100). Capacité vitale
Taille = 100 : Buste
Membre intérieur
Longueur du sternum .
Poids
.Vnqtlitude du thorax
Buste ■= 100 : Meniljre intérieur
Largeur bi-acrouiiale
Longueur du slerniuii .
Circonférence thoracique .
Longueur du sternum :=: !0 : Largeur bi-acrom
Circonl'. thor .
Mégasomie approchée r= 100. (Taille X Larg. bi
arromiale). Capacité vitale
Mégasomie ap|)r(icb('e := 100. (Buste X Circonlë
rence Iburacique). Caj)acilé vitale
1.560
0.831
0.729
0.:;!93
0 140
54.6
0.723
45.71
60.08
0.052
2.562
18.78
1.641
0.533
0.467
0.090
35.0
0.3.33
87.7
0.352
0.169
0.870
0.209
0.516
5.605
4.294
Il (40)
111 (30)
1.566
1.529
0.838
0.826
0.726
0.703
0.313
0.321
0.144
0.141
56.5
55.2
0.742
0.736
49.02
49.08
62.18
60.80
0.056
0.059
2.856
2.791
20.00
21.06
1.824
1.825
0.535
0.540
0.4C>5
0.460
0.092
0.092
36.1
36.1
0.358
0.386
8.67
8.51
0.373
0.389
0.172
0.170
0.875
0.891
0.217
0.228
0 515
0.522
5.826
4.594
5.686
4.590
D'un autre côté, si on rapporte à la taille les diverses dimensions du
corps, on voit facilement que celles-ci sont, d'une façon générale, d'autant
plus grandes que l'enryplastie est elle-même plus élevée. Même résultat
H. UEMONKT. — KEt:HKR<;ilKS >l It I.A CAl'ACITli VITALE
83
si on prend le buste, an limi ilr la (aille, ((uninc lorine de comparaison.
Et il en est de même pour le |)oids, l'ainplilude du thorax, et la circonfi'-
rence thoracique. Bien plus, dans les mêmes cmditions, à longueur de
sternum égale, les euryplastes sont favorisés par l'augmentation relative
de leur diamètre bi-acromial et de leur circonférence thoracique.
Il est encore une autre relation sur laquelle il est important d'attirer
l'attention : c'est celle de l'euryplastie et du degié de hrachyskélie, c'est-
à-dire du rapport SB.
Tablkau XXVlll
Ordination d'après l'indice d'euryplastie approchée. Circonférence
thoracique rapportée à buste = 100.
MOYENNES DES DIMENSIONS
Taille.
Buste .
Membre inférieur .
Largeur hi-arnuniale
Longueur du sternum
Poids
Circonférence thoracique
Mégasomie approchée : Taille X I-arg. bi-Hcrnm.
irl. Buste X Circonf. thorae.
.\m|)litude du thorax
Capacité xntalp
Euryplastie approchée : Circonférence thorac
rapportée à Buste := iOO
MOYENNES DES RAPPORTS
Euryplastie aiiprncbée — 100. (Circonf. thorac.
à'^Buste = 100 1. Capacité vitale
Taille = 100 : Buste . . . ■
Membre inférieur . . . . .
Longueur du sternum . . . .
Largeur bi-acromiale . . . .
Poids
.\mplitu(le du tbnrax . . . .
Buste z= 100 : Membre inférieur
Largeur bi-acromiale . . . .
Longueur du slernum . . . .
Circonférenee thoracique .
Longueur du sternum := 100 : L.irgeur bi-aerom.
Circonf. thorac
Mégasomie approchée = 100. (Taille X Larg. bi-
acromiale). Capaeité vitble
Mégasomie apiirochée =: 100. (Buste X Cireonlé-
rencc thorai-i(iuc). Ca|iarité vitale. . . . .
I (30)
1 583
0.837
0.746
0.313
0.143
53.2
0.095
49.55
58.17
0.0.50
2.766
83.04
3.. 331
0.520
0.471
0.0933
0.198
.34.3
0.0354
0.891
0.374
0.171
0.830
0.-J18
0.480
5.582
II (40)
1.539
0.829
0.710
0.305
0.1 10
54.0
0.722
46.94
59.75
0.057
2.718
87.09
3.121
0.540
0.460
0 0!»10
0.198
.35.2
0.0370
0.857
0 308
0.109
0.871
0.216
0.516
.812
4.568
III (30)
1.543
0.833
0.710
0.312
0.141
60.2
0.789
48.14
65.72
0.0.-,8
2.768
94.72
2.922
0.540
0.460
0.0914
0.202
39.0
0.0374
0.853
0.374
0.169
0.947
0.221
0.560
5.750
4.218
84 •*> JANVIKII tlKl'i
Lt'S deux tableaux ordonnés d'après celle-l.'i montrent en effet, quo
le membre inférieur est d'autant plus court relativement au buste, ou
la brachyskélie plus accentuée, que l'euryplastie est elle-même plus
prononcée, il est donc incontestable que, d'une façon générale, les
macroplastes sont en même temps macrosUôles, et les euryplastes
bracbyskèles; les mésoplastes occupent à ce point de vue, une place
intermédiaire.
A taille égale, la mégasomie croît aussi avec l'euryplastie : le premier
et le deuxième groupe du tableau X.W'll, le deuxième et le troisième
du tableau XXVllI, dont les tailles sont sensiblement identiques, en sont la
preuve manifeste.
Etant donné ces relations, il n'est pas étonnant que la capacité vitale
suive le degré d'euryplastie, et suit plus grande, toujours relativement
à leur taille et à leur poids, chez les euryplastes que chez les macro-
plastes. El en etï'et, si on s'en rapporte surtout aux indications du tableau
XXVII, dont les données ne sont pas faussées par l'embonpoint qui tend
à l'euryplastie, on constate que les macroplastes et les mésoplastes dont
'a taille est sensiblement identique, présentent h l'avantage de ces der-
niers une différence de près de 300 centimètres cubes, dans l'appréciation
de leur volume pulmonaire et les euryplastes dont la taille est inférieure
de 37 millimètres à celle des mésoplastes, ont relativement à ces derniers,
une capacité vitale de 65 centimètres cubes seulement. Le tableau XXVIII
montre aussi que cette dernière est presque la même pour les macroplastes
et les euryplastes, et cependant, la taille de ces derniers est de 40 milli-
mètres plus petite que celle des premiers.
A l'euryplastie est donc lié un développement pulmonaire plus consi-
dérable qui s'explique facilement par une masse organique totale plus
considérable, une brachyskélie prononcée, et un accroissement relatif de
toutes les dimensions du corps, en rapport avec une intensité et une
activité plus grandes du travail musculaire.
Si nous comparons maintenant, d'une façon générale, les relations
présentées avec la capacité vitale par les diverses dimensions, et les dif-
férents rapports que nous avons examinés, nous voyons très nettement
qu'aucun d'entre eux n'est relié à celle-ci par une connexion intime. Il
est souverainement inexact de duc, que l'unité de taille, ou l'unité de
poids, donne droit à une capacité respiratoire de n centimètres cubes.
Une classification mettant en évidence la régularité des rapports qui
unissent chacun de ces facteurs au développement pulmonaire, est aléa-
toire. On peut dire toutefois, que la taille, est de toutes les dimensions
du corps, celle qui suit le plus exactement la capacité vitale, et nos
indices de mégasomie approchée lui sont même légèrement supérieurs à
ce point de vue. Puis viennent, là ongueur du buste, le degré de macro
ou de brachyskélie, le poids, la circonférence thoracique, la longueur du
sternum etc. Mais il serait illogique de subordonner à un facteur quel-
conque, tous les autres; chacun exerce son influence, plus ou moins
grande, il est vrai, mais qui n'en existe pas moins, et qui est suffisam-
E. DEMONET. — RECHERCHES SIR LA CAPACITK VITALE 85
mont iinpoilaiili' pour «léjouer toutfs les cmnliinaisons d'où il csl exclu
(.'ne remarque s'impose : c'est l.i supériorilé des dimensions S(|uelelliques
sur les autres. A cet égard, la comparaison, chez l'homme et chez la
femme, des rapports de la capacité vitale avec le poids est caractéristique.
Dans le sexe masculin, les séries présentent à peu près le même embon-
point : les rapports du poids avec la capacité vitale sont d'une régularité
satisfaisante; dans le sexe féminin, au contraire, où l'adiposité est beau-
coup plus variable, on ne retrouve plus cette connexion relativement
intime; aucune relation, même vague, n'unit plus ces deux facteurs. Les
mêmes considérations peuvent s'applii|uer à la circonférence thoracique,
dont l'expression est étroitement unie au développement du tissu adi-
peux. Le produit des deux facteurs, squelettiques ou musculo-squelet-
liques, nous a permis d'obtenir des indices de mégasomie approchée. Ils
ont incontestablement leur utilité, ils paraissent traduire, plus exactement
que la taille elle même, « ce qui est ». Il n'en est pas moins vrai, qu'à
eux seuls, ces produits sont également insulïisanls, pour déterminer une
capacité vitale, qu'on serait en droit de croire physiologique. C'est qu'une
multitude de facteurs entrent en scène; leur analyse est facile, leur syn-
thèse est impossible. Cette question ressemble au jeu d'échecs. On peut
connaître parfaitement le mouvement de chaque pièce, mais il serait
ridicule de prétendre donner des lois aux combinaisons auxquelles elles
se prêtent.
C'est le cas de répéter avec Charrin : « La plupart du temps, les
auteurs n'ont invoqué qu'un seul mécanisme. L'esprit est ainsi fait qu'il
veut le plus souvent, tout expliquer de la même façon, par un unique
mobile. A un ensemble de phénomènes plus ou moins nombreux, plus ou
moins disparates, il ne reconnaît qu'une cause, qu'une genèse. Malheu-
reusement, la biologie qui n'a pas à tenir compte de nos tendances, ne
se soumet pas à ces injonctions. Elle nous offre, au contraire, une foule
de problèmes dont la solution n'est pas simple. Dans les actes de la vie,
il y a en effet, association fréquente de facteurs multiples. » Les phéno-
mènes respiratoires sont une de ces associations.
VARIATIONS SEXUELLES DE LA CAPACITÉ VITALE
En 1882, une intéressante discussion s'élevait devant la Société d'.\n-
Ihropologie entre M. Manouvrier et M. G. Le Bon au sujet du rapport de
la circonférence du crâne au poids de l'encéphale dans l'un et l'autre sexe.
Ce dernier soutenait (lue « pour voir l'induence du sexe apparaître, il ne
fallait évidemment comparer que des sujets comparables, c'est-à-dire des
enfants masculins et féminins de même poids ». M. .Manouvrier affirmait
au contraire, que pour s'appliquer vraiment aux deux sexes dans leur
ensemble, le rapport devait embrasser la totalité des uns et des autres, et
qu'aucune sélection, aucune considération de poids, ne devait présider à
cette comparaison.
86 fi JANVIER 1905
Nous nous trouvons aujourd'hui en présence d'un problème absolument
identique, en voulant comparer la capacité vitale des deux sexes.
Il nous paraît évident, de prime abord, qu'ayant étudié le développe-
ment pulmonaire chez cent adultes masculins et chez cent adultes fémi-
nins, le plus simple et le plus naturel est d'adopter leurs moyennes géné-
rales respectives II était cependant possible d'utiliser une autre méthode
en ne comparant seulement que des hommes et des femmes de même
taille. Far un heureux hasard, notre série des plus grandes femmes pré-
sente exactement la même stature, 1 m. 628, que celle des hommes les plus
petits. Mais cette seconde manière de faire est-elle supérieure à la pre-
mière? Celte opinion ne saurait être admise, car elle est passible de nom-
breuses objections qui lui retirent une grande partie de sa valeur. On ne
tient pas compte, en effet, dans cette ordination, d'un caractère ethnique
indiscutable : la femme est en moyenne plus petite que l'homme : on rai-
sonnerait ainsi sur deux séries sélectionnées en sens inverse en rappro-
chant les femmes les plus grandes des hommes les plus petits, et on appli-
querait à la généralité des uns et des autres, ce qui ne serait vrai que
pour l'exception.
De plus, la taille^ traduit-elle suffisamment le développement total de
l'organisme, pour que son importance prime celle de tout autre facteur,
de toute autre dimension ? Et seiait-il illogique d'attribuer la même valeur
au poids, au buste, à la brachy^kélie, etc. et, dans le cas actuel, à la capa-
cité vitale elle-même? En admettant cette dernière hypothèse, la question
se ramènerait à comparer des sujets des deux sexes dont le développement
puhnonaire serait sensiblement identique, et à étudier les relations de
leurs diverses dimensions.
Insister davantage sur ces divers procédés serait oiseux. Le choix s'im-
pose. On ne peut pas hésiter un instant h mettre en œuvre les idées de
M. Manouvrier, partagées par M. Bertillon, et à accorder une place capi-
tale, presque exclusive, aux moyennes générales des deux sexes.
Celles-ci constitueront en quelque sorte, le fondement de cette dernière
partie de notre travail qui trouvera cependant un complément intéressant
dans la comparaison de deux séries de sujets masculins et féminins ayant
une taille identique.
Pour mettre en évidence les différences de la capacité vitale absolue
dans les deux sexes, nous avons eu recours au procédé graphique imaginé
par M. Manouvrier et qui joint à l'avantage de la clarté, celui de n'exiger
que le concours de la typographie On voit de celte façon, que le sujet
masculin dont la cage thoracique est la plus petite, a cependant une capa-
cité vitale presque égale à celle de la moyenne du sexe féminin, et qu'une
seule femme s'approche sans toutefois l'atteindre, de la capacité vitale
moyenne, de l'homme. De plus, celui-ci embrasse une échelle beaucoup
plus considérable que celle occupée par la femme^ puisqu'elle s'élend de
2.730 à .^^.730 centimètres cubes, c'est-à dire va du simple au double, et
même au delà, tandis que la seconde a comme limites extrêmes 1,930 cl
E. DEMONRT. — HECHERGHES SUR LA C.\PA<;nK VITALE
87
Taui.eau XXIX
Capacité vitale chez l'homme et chez la femme.
KHMMHS
IKniMFS
wut
1800 h
2000 h
2200 à
2400 .'i
2600 à
2800 à
3000 à
3200 à
3400 à
3000 à
3800 à
4000 à
4200 k
4400 à
460(J î^i
4800 îi
5000 à
52(X) î'i
5400 à
5600 k
5800
cultes
2000
3
2200
7
2400
13
2000
18
280(1
18
30(XJ
10
3200
7
3400
9
3000
8
3800
1
4(K)0
4200
4400
4600
4800
5000
5200
5400
5600
5800
1
3
3
12
12
17
13
8
13
8
5
2
2
3,730 centimètres cubes, le rapport de ces derniers chiffres étant plus faible
que celui de 2 à 1.
Ce maximum plus élevé au-dessus de la moyenne dans le sexe masculin
doit être rattaché à la plus grande étendue des variations de son système
musculaire. En effet, tandis que l'amplitude thoracique de la femme oscille
entre 4 et 8 centimètres, celle do l'homme s'étend de 4 à 12 centimètres.
Ceci est d'autant plus intéressant k noter que M. Manouvrier ayant cons-
truit un graphique semblable pour la force musculaire, a trouvé que
celle d'un seul homme correspondait à la moyenne du sexe féminin. C'est
pour le dire tout de suite, la confirmation parfaite, sur laquelle nous
reviendrons bientôt, de ce qu'il écrivait en 1885 : « La différence de la
force, c'est-à-dire des systèmes osseux et musculaire est une différence
sexuelle bien tranchée, au point que les femmes les plus fortes, surtout
dans les races civilisées, dépassent à peine, en force musculaire, les
hommes les plus faibles. »,
La capacité vitale absolue de l'homme est donc, en moyenne, de 3,912
centimètres cubes; celle de la femme atteint 2.747 centimètres cubes seu-
lement. Il existe entre ces deux moyennes une différence importante qui
atteint 1.165 centimètres cubes. On se fait une idée beaucoup plus exacte
de sa valeur, quand on rapporte la seconde à la première adoptée comme
unité ; on voit que, dans ces conditions, ces deux chiffres sont entre eux
88 S JANVIER 1905
comme 70 est à 400 : il serait possible d'admettre cette formule : La capa-
cité ritale moyrnne de la femme est de moins d'un tiers inférieure à celle de
riiomme. L'infériorilt'- de la femme au poinl de vue respiratoire, parait
absolument réelle et considérable. Toutefois, on a fait remarquer que
cette infériorité était exclusivement apparente. La femme reprendrait
l'avantage par un nombre de respirations plus élevé pendant l'unité de
temps, et l'état dynamique de son appareil respiratoire parviendrait ;i
compenser la moindre valeur de son état statique. Le nombre de respira-
lions est incontestablement plus élevé dans le sexe féminin, bien qu'il soit
déterminé d'une faeon peu précise, les chifïres classiques variant entre
un et trois. Retenons celte dernière valeur. Est-elle suffisante pour com-
penser beaucoup la faiblesse de la respiration de la femme? Il est bien
probable que non. D'autant plus qu'il n'est pas illogique de rappeler ici
ce fait bien connu en physiologie : deux respirations de 500 centimètres
cubes sont moins utiles pour l'organisme qu'une seule de 800 centimètres
cubes, el d'appliquer ce raisonnement îi la femme qui ferait 19 respira-
tions de 2,750 centimètres cubes pendant que l'homme en ferait 16 de
3,900 centimètres cubes. Cette dernière hypothèse serait en parfait accord
avec les différences sexuelles du sang sous ie rapport du nombre des glo-
bules rouges, de la quantité d'hémoglobine, de la densité du sang el de
sa composition chimique, et avec la moindre consommation d'oxygène
respiratoire en 24 heures.
La question devient singulièrement complexe quand on l'aborde par
son côté physiologique et par son côté chimique. Il nous est cependant
permis de penser que les données spiromélriques sont suffisantes pour
démontrer que ce ^ont les besoins de l'organisme qui président au déve-
loppement de la fonction re.spiratoiie, et qu'en définitive, la fonction fait
l'organe.
Le tableau XXX donne un aperçu général des variations sexuelles de
la capacité vitale et des "diverses diujensions du corps. Ses résultats s'har-
monisent parfaitement avec ceux que M. Manouvrier a obtenus avec les
séries lyonnaises de M. Rollel, et avec les fiches plus nombreuses du ser-
vice anthropométrique d'identification.
En rupportanl aux dimensions de l'homme prises comme unité les
dimensions correspondantes de la femme, on voit que ce qui est le plus
développé chez celle dernière, c'est en premier lieu le buste, puis succes-
sivemenl, le membre inférieur, la circonférence Ihoracique, la longueur
du sternum, le poids, la largeur bi-acromiale, la capacité vitale et l'am-
plitude du thorax. L'indice d'euryplastie, plus faible que celui de l'homme
présente cependant avec ce dernier une ditférence beaucoup moins sen-
sible que l'indice de mégasomie.
Les chiffres absolus de la taille des deux sexes ne présentent rien de
spécial à noter, pas plus d'ailleurs que leur rapport : il est compris dans
les limites, 90 à 93, que lui assignent les divers auteurs. Il n'en est pas
de mènie pour les relations (jui unissent à elle la plupart des dimensions
du corps.
B. DEMONET. — ttECHERCHKS SUR LA CAPACITE VITALE
89
Tableai XX \
Variations sexuelles de la capacité vitale et des dimensions du corps.
MOYENNES DKS DIMENSIONS
Taille
Buste,
Hommes
1 . 700
0.8S2
Femmes
Membres intérieurs 0.818
Largeur bi-acromiale 0.-%l
Longueur liu sternum
Poids ...
Circonférence thoracique •
Mégasomie approcliée : Taille X Larg. bi-acrom.
ni Huste X Circonf. tliorac.
Eurypl. ai)prorh. : Taille = 100 -. Larg. bi-acrom.
Muste — 100 : Cirronf. lliorac.
Amplitude du thorax
Capacité vitale
0.164
64.8
0.810
61.37
74.09
21.2
95.3
0.80
3.912
MOYENNES DES RAPPORTS
Taille = 100 : Huste
Largeur bi-acromiale. ....
Longueur du sternum ....
Poids
Circonférence thoracique .
Capacité vitale
Buste :=: 100 : Membre iuférieur. .....
Largeur du sternum = 100 : Larg. bi-acromiale.
51.9
21.2
9.7
40.5
49.4
23.01
92.7
2> 0
1 553
0.833
0.720
0.309
0.141
55 5
0.7.34
47.99
61.14
19.9
87.9
0.56
2.747
53.6
19.9
91
35.7
47.3
17.70
86.5
21.9
Hommes
— 100
Femmes
91.4
94.4
88.0
85.6
86.0
85.7
87.4
78.2
82.5
93.9
92.2
70.0
70.2
Le rapport du buste à ta taille est plus élevé chez la femme que chez
l'homme. Il entraîne comme corrollaire obligé un rapport inverse de la
longueur du membre inférieur h celle du buste = 100. Le rapport S/B
est en elTet plus grand dans le sens masculin. Il en résulte donc cette
conclusion très nette sur laquelle M. Manouvrier a insisté à plusieurs
reprises dans son mémoire : La femme est brachyskèle relativement à
l'homme.
L'exiguïté des dimensions transversales du thorax, féminin est un fait
bien connu qui explique parfaitement la supériorité considérable de
l'homme à ee point de vue, et a celui de la grande envergure. Malgré le
tissu adipeux toujours plus abondant chez la femme, celle-ci est très
nettement désavantagée par le rapport de la circonférence thoracique à
la stature. L'esthétique ne perdant jamais ses droits, et les formes graciles
étant toujours celles qui caressent le plus agréablement le regard, la
vanité féminine est d autant plus satisfaite, que la taille, au sens
mondain du mot, est plus allongée et plus frêle. Le corset contribue puis-
samment à ce triomphe sur lequel nous n'insisterions pas, si celte inter-
90 ?> JANVIER n^O.")
vention ne réagissait pas sur r<''l;it «lynamiqiio du poumon sous-jacent
qui souiïre, nous l'avons (l.Muuiiln'- par des cliilTres. avec bien d'autres
organes, de cette compression ilonl les méfaits vont de pair avec le résultat
esthétique obtenu. Celui-ci s'explicjuc. il est vrai, en partie tout au moins,
par un indice de corpulence plus faible.
Nous .savons que le buste est relativement plus long dans le sexe
féminin: mais il ne sullit pas de savoir que la femme est brachyskèle
relativement à l'homme, on doit se demander comment elle l'est, et quelle
est la portion du buste qui s'est développée davantage pour donner k la
femme une supériorité incontestable à ce point de vue. Le buste peut être
considéré comme la résultante de cinq portions plus ou moins distinctes :
la hauteur du crAne, de la colonne cervicale, thoracique, lombaire, 'et
entin sacrée et coccygienne. La première portion semble décroître.
M. .Manouvrier pense en effet que dans deux groupes d'hommes et de
femmes de même taille, le buste de ces dernières est plus petit parce que
la hauteur du crâne diminue chez elle. Les chilTres de Ravenel pour-
raient permettre de supposer que la colonne cervicale subit une légère
augmentation, et la colonne sacro-coccygienne une notable diminution :
ils autoriseraient a conclure, vu le parallélisme des segments lombaire et
thoracique de la moelle et du rachis, que la colonne thoracique présente
une diminution très nette, mais que le segment lombaire s'allonge énor-
mément. Les rapports de la longueur du sternum et celle du buste,
montrant que l'accroissement de ce dernier se fait surtout par l'augmen-
tation de la colonne lombaire. En effet, ce rapport est beaucoup plus
faible (15.7) dans le sexe féminin que dans le sexe masculin (18 6). Nous
avons eu l'occasion d'insister sur ce fait, mais nous avons attendu pour
en tirer la conclusion qui en découle. Il semble donc que, chez la femme,
la portion thoracique du buste est relativement diminuée, et elle ne peut
l'être qu'en faveur de l'abdomen qui remonte ainsi davantage. Il s'agit
donc là d'une différence sexuelle physiologique très profonde : l'abdomen
de la femme n'est pas seulement plus élevé relativement h celui de
l'homme, il est encore plus large : son thorax n'est pas seulement plus
étroit, il est encore moins haut. Elle s'harmonise parfaitement avec les
fonctions des organes contenus dans ces deux cavités d'autre part. Or,
on sait d'après les recherches de Lushka, Soularue, etc., que relativement
à la longueur totale du rachis le segment thoracique est plus court chez
la femme, tandis que le segment lombaire est plus long. Les deux dernières
vertèbres dorsales sont pour ce dernier auteur, un peu plus longues chez
la femme : elles méritent le titre de thoraco-abdominales sous lequel les
désigne M. Manouvrier. L'existence d'une sixième vertèbre lombaire est
tellement rare qu'elle ne mériterait pas d'être signalée, si rencontrée
exclusivement dans le sexe féminin, elle ne représentait l'allongement
lombaire poussé à ses extrêmes limites.
La cage thoracique est plus petite chez la femme, parce que son con-
tenu occupe un volume bien moins considérable. Nous avons démontré
«D effet que la capacité vitale de la femme est à celle de l'homme comme
E DEMONET. — RECHERCHES SUR L.* CAPACITK VITALE 94
70 est à 100. Il n'en est pas de même pour le contenu abdominal. Les
organes de la nutrition occupent en effet un volume relalivemenl beaucoup
plus considérable, puisqu'il atteint le rapport de 90 h 100 ; les reins
mêmes ont relativement les mêmes dimensions dans les deux sexes. Mais
en plus, la cavité abdominale de la femme loge les organes génitaux
internes qui prendront, à un moment donné, des dimensions considé-
rables : ils se logeront facilemenl dans un bassin relativement plus
large et dans une cavité abdominale relativement aussi plus liante. Il est
donc permis de conclure que l'abdomen de la femme est adapté en vue
de ses fonctions maternelles, qui ont présidé k son développement. Nous
avons dit que le buste représente associés les appareils nourriciers et
régulateurs de l'organisme. Il nous est naturellement impossible de dis-
socier l'influence de ces deux facteurs, mais il nous est permis d'affirmer
que dans le sexe masculin la longueur du buste est particulièrement
influencée par l'appareil respiratoire : tandis que dans le sexe féminin elle
est en connexion intime avec l'appareil digestif, et aussi avec l'appareil
de reproduction.
La variation sexuelle de la longueur du membre inférieur montre que
celle-ci ne représente que très imparfaitement le développement de
l'appareil locomoteur de l'organisme. En efl'el, cette longueur rapportée à
celle de l'homme = 100, atteint 88. Or, M. Manouvrier a démontré que
le poids du fémur de la femme, rapporté dans les mêmes conditions à
celui de l'homme, est de 63 seulement, et qu'il constitue une traduction
bien meilleure de l'activité musculaire. Aussi, n'insislerons-nous pas
davantage sur ce point que nous aborderons de nouveau bientôt.
Nous serons bref aussi sur la comparaison de la largeur bi-acroraiale
dans les deux sexes. Elle est intéressante surtout comme participant à
l'expression de la mégasomie et de l'euryplastie dont nous allons nous
occuper. La différence sexuelle est relativement élevée puisque cette
largeur est chez la femme, relativement à celle de l'homme comme 85.6
est à 100. Aussi celle-ci est-elle, comparativement h l'homme, micro-
some et macroplaste
La longueur du sternum présente une variation sexuelle presque iden-
tique : 80 : : 100. Elle nous a servi à mettre en relief le faible développe-
ment en hauteur de la cage thoracique chez la femme, et par le fait
même l'agrandissement considérable de sa cavité abdominale. Mais ce
qui mérite d'être souligné, c'est le fait que dans les deux sexes, le rapport
de largeur bi-acromiale et de la circonférence thoracique d'une part, à la
longueur du sternum d'autre part est absolument identique. C'est une
nouvelle raison de croire que l'exiguïté du thorax féminin doit être sur-
tout attribuée à son faible accroissement en hauteur.
Nous avons suftisamment insisté au second chapitre de ce travail sur la
valeur comparative du poids dans nos deux séries d'adultes pour qu'il soit
nécessaire d'y revenir maintenant. Il sufflra de faire remarquer que pour
Tenon, la <lifférence sexuelle est comme 88 est à lOf): W chiffre que nous
92 5 jANviEn 1005
avons obtt^nu est un iimi plus faible, puisqu'il atteint 86,7 seulement.
Nous en reparlerons h propos de la niéf^nsoinie.
La graisse qui intervient pour diminuer la valeur du poids comme tra-
duction du développement total d<' l'ori^anisme, exerce évidemment la
même influence sur la circonférence thoracique. C'est donc sous le béné-
lice de cette réserve qu'on devra accepter le ra|»port de 87,4 à 100 comme
représentant la dilTérence sexuelle de cette dimension. Elle se l'approche
par là beaucoup de la longueur des membres inférieurs, et si, à un point
de vue absolu, elle ne parait pas présenter un grand intérêt, elle en
présente un réel, quand on étudie à son sujet, un caractère sexuel qui s'y
rattache étroitement, et sur l'importance duquel les auteurs classiques
insistent énormément : c'est le type respiratoire. On répète après eux
que le type respiratoire de la femme est le type costal supérieur, et que
celui de l'homme est soit le costal inférieur, soit le coslo diaphragmatique
inférieur. Nous avons recherché avec soin la réalité de cette observation,
et pour cela, le mieux assurément, était d'utiliser les mensurations. Il est
évident que si, chez la femme, ce sont surtout les côtes supérieures qui
entretiennent les mouvements du poumon, on obtiendra à leur niveau
une amplitude thoracique beaucoup plus considérable que celle obtenue
au niveau des côtes inférieures. Nous avons recherché chez un très grand
nombre d'hommes et de femmes, cinquante au moins, les différences que
présentaient deux mensurations de circonférence thoracique prises l'une
au sommet du creux axillaire, l'autre à la base de l'appendice xyphoïde.
Elles nous amènent à cette conclusion indubitable : Dans les mouvements
réguliers d'inspiration et d'expiration forcée, l'amplitude du thorax est beau-
coup plus considérable au niveau des côtes inférieures, dans les deux sexes. Il
est donc logique d'admettre que dans les conditions normales, le type res-
piratoire est le même chez l'homme et chez la femme. Que pendant les derniers
mois de la grossesse, le développement exagéré du contenu abdominal
gêne les mouvements du diaphragme, que le cor.=et comprimant la partie
inférieure du poumon s'oppose à son expansion, que dans les deux cas il
se passe des phénomènes de suppléance au niveau des parties supérieures
du poumon, c'est possible : mais de là à conclure que le type normal res-
piratoire de la femme est le costal supérieur, il y a loin.
Il n'est en réalité qu'un type d'exception. Nous ne nierons pas cependant
d'une façon absolue son existence : nous en avons observé en effet deux
cas assez nets, mais il est impossible de généraliser un fait qui n'est pas
vérifié par l'immense majorité des cas. Chacun respire à sa manière,
pourrait-on dire, et les mouvements d'élévation et de projection des côtes
varient avec chaque individu : mais il est incontestable qu'ils obéissent
à une règle générale qui est la même pour l'homme et pour la femme..
Nous ne voudrions pas cependant laisser passer sous silence un type
respiratoire assez curieux présenté par un de nos camarades. On pourrait
presque le dénommer « type en corset » parce que, dans les mouvements
d'inspiration forcée, les côtes moyennes se déplaçaient relativement peu.
E. DEMONET. — RECHERCHES SL'll LA CAI'ACITK VITALE M8
tandis que les côtes supérieures et principalement les côtes inférieures
présentaient une ampliation beaucoup plus considérable.
Une autre observation mérite d'être rapportée ici au même titre : ellr
est caractérisée par une ami)lilude thoracique considérablement aug
mentée avec un jeu diaphragmalique très limité. Un de nos camarades,
très vigoureux, très bien constitué a une amplitude du thorax très élevée :
c'est la seule (jui ait atteint lit centimètres : sa capacité vitale mesurée à
maintes reprises était de 3.300 centimètres cubes seulement. Intrigué à
juste titre par cette énorme disproportion, et pensant à une localisation
bacillaire dont nous n'avions cependant aucun signe, nous avons utilisé
la radioscopie. Pas d'obscurité dans la zone pulmonaire. Mais ce qui frap-
pait surtout dans l'examen de l'écran, c'était le peu de mobilité du dia-
phragme, qui dans les mouvements respiratoires les plus violents, avait
un jeu d'excursion ne s'étendanl pas au-delà de deux côtes. Or si l'on
admet la description classique de M. Kelsch, que nous avons vérifiée plu-
sieurs fois, et d'après la([uelle les oscillations du diaphragme sont en
général comprises entre trois espaces intercostaux, on peut conclure que
ce dernier avait dans le cas actuel un fonctionnement nettement infério-
risé auquel cherchait en quelque sorte ;i suppléer, une exagération de
l'amplitude du thorax. Comme nous apprîmes alors que notre camarade
avait eu une pneumonie dans sa première enfance, et qu'il présentait
encore une légère dyspnée d'effort, nous avons conclu qu'il pouvait exis-
ter entre ces faits des relations de cause à effet, et nous nous sommes cru
autorisé à ne tenir aucun compte d'un cas dont le passé pathologique
était discutable.
On n'a pu, jusqu'à nos jours, établir une formule pouvant traduire
d'une façon précise le développement total de l'organisme, et exprimer
sa quantité Le poids en serait certainement la représentation la plus
fidèle, s'il n'était influencé par l'embonpoint. Nous avons suffisamment
parlé dans nos indices de mégasomie approchée pour rappeler ici qu'ils
ne permettent pas d'établir une variation sexuelle nettement définie
sinon dans son sens, du moins dans sa quantité. Cependant ils sont inté-
ressants, parce que leur comparaison, confîrmative des indications four-
nies par le poids, permet de conclure que, rclnliiement à l'homme, la femme
est microsome. Mais de combien? Le produit même des trois dimensions
ne l'établirait que d'une façon très approximative.
Les remarques précédentes ont encore leur application, au sujet des
indices d'eurypiastie. Aussi nous bornerons-nous à dire que ces deux
indices, par leur identité satisfaisante, établissent incontestablement que
la femme, est par rapport à l'homme, macroplasle. Pousser plus loin l'ana-
lyse de cette relation serait hasardeux : il est beaucoup plus logique de
rapprocher cette macroplastie de la femme de sa microsomie et surtout
de sa brachyskélie, et de rappeler à ce sujet les idées de M. Manouvrier :
« La brachyskélie, considérée dans l'ensemble du sexe féminin n'est pas
de l'euryplastie. Elle n'exprime autre chose que le développement supé-
rieur microsomique du tronc et de tout le buste relativement aux membres.
94
O JAiNVIKK 1905
Celte brachyskélie coïncide avec une maoïojilHslie accentuée. Le sexe
f(^niinin est à la fois brachyskèle et macruplaste. Les femmes sont du
reste macroskèles si on les compare à des hommes de mc^me taille qu'elles,
et les femmes absolument macroskèles sont doublement macroplastes :
comme macroskèles et comme femmes ». lîll nos résultats sont une con-
firmation parfaite de ce qu'il ajoutait : « Théoriquement, les iniluences
macroplastiques doivent produire sur le tronc des effets opposés à ceux
que produisent les influences eurypiastiques, L^ne activité musculaire
moindre pendant la croissance doit correspondre à une moindre somme
de pressions verticales, à un moindre développement transversal du tho-
rax, h un allongement relatif de la colonne vertébrale par rapport aux
diamètres transversaux du tronc. »
Table.m; XXXI
Variations sexuelles de la capacité vitale et des diverses dimensions du
corps dans 2 groupes d'adultes de mémo taille.
MOYENNES DES DIMENSIONS
Taille
Buste. ....
Membre inférieur .
Largeur bi-acroniiale
Longueur du sternum
Poids . . .
Circonférence thoracique
Mégasomie approchée: Taille X Larg. bi-acroni.
Id. Buste X Circonf. tborac.
Euryplastie approchée ; Largeur bi-acromiale rap-
portée à taille = lOO
Euryplastie approchée ; Circonférence thoracique
rapportée à Buste =: 100. .."....
Amplitude du thorax
Capacité vitale
MOYENNES DES RAPPORTS
Buste X 100 : Membre inférieur
Largeur bi-acromiale ....
Longueur du sternum.
Poids
Circonférence thoracique.
Amplitmie du thorax ....
Longueur du sternum := 10 ; Larg. bi-acroniinle
Circonf. tboiaeique
Hommes
1.628
0.862
0.766
0.353
f>.154
58.8
0.822
57.46
70.86
21.66
95.36
0.071
3.418
88.8
41.4
18.1
69 0
96.5
(1.083
22.9
60.0
Femmes
1.628
0.854
0.774
0.321
0.150
59.0
0.756
52.26
64.56
19.72
88.52
0.021
3.123
90.6
37.6
17.6
69.1
88,5
0.072
21.4
50.4
Hommes
+
+
+
+
+
+
+
+
Nous serons très bref dans l'anayae du tableau XXXI qui traduit les va-
riations sexuelles de deux groupes d'adultes masculins et féminins, ayant
E. DEMONET. — RKCHERCHES SL'U LA CAl'AClTK VIIALE îlo
une taille absoluiui-nt id.'ntiiiiie, l in. r»28 uiillinitMres. Il est évident que
les premiers sont des honmics petits, ci les seconds des femmes grandes.
On voit qup, d'une fa(;on gvnérale, l'homme l'emporte par toutes ses
dimensions et par tous ses rapports, ainsi que par sa capacité vitale sur
la femme; il lui est inf<M-ieur seulement par la longueur des membres
inférieurs et le poids. D'une façon générale aussi, ces résultats confirment
ceux qu'avait donnés le tableau précédent. Il est peut-être utile de faire
remarquer que le membre inférieur est, d'une façon absolue, plus long
chez les femmes et celles-ci sont macroskèles comparativement aux
hommes de même taille, comme l'a également prouvé M. Manouvrier
dans les mêmes conditions.
Elle présente aussi une légère augmentation de poids, en raison du
développement plus considérable du tissu adipeux sans que celui-ci exerce
un grand retentissement sur la circonférence thoracique. La mégasomie
et l'euryplastie sont plus grandes que chez l'homme qui présente quant à
sa capacité vitale une supériorité considérable, se chiffrant par un excès
de 300 centimètres cubes.
Il nous reste maintenant ;\ établir la conclusion générale de notre tra-
vail, d'après le rôle que joue la respiration dans l'économie humaine, et
les rapports qu'elle affecte dans l'un et l'autre sexes, avec les trois grandes
fonctions de l'organisme : la nutrition, llénergie musculaire et les fonc-
tions nerveuses. Ils nous paraissent tels que les avait prévus M. Manouvrier,
et nos résultats ne sont que la confirmation des théories émises par cet
auteur dans son « Etude sur les rapports anthropométriques et sur les
principales proportions du corps ».
La femme est particulièrement favorisée par ses organes de nutrition.
Sa brachyskélie relative est surtout liée h une augmentation énorme de
sa cavité abdominale qui est d'autant plus grande que la cage thoracique
est elle-même plus exiguë. Aussi le volume des organes qu'elle contient
est-il considérable puisque rapportés à ceux de l'homme, ils sont à ces
derniers comme 90 est à 100. Ce grand développement s'explique facile-
ment : les organes de la nutrition n'ont pas besoin de se développer pro-
portionnellement à la masse à nourrir, la micrOsomie féminine engendre
donc k ce point de vue des besoins relativement exagérés, et c'est pour
les satisfaire que les viscères abdominaux présentent une proportion si
élevée.
Au contraire, par son activité musculaire, la femme est nettement
infériorisée. Cette activité n'est pas univoque, et ce serait faire une
erreur, qu'exprimer par une seule donnée l'intensité du fonctionnement
de la masse musculaire. Cette intensité varie essentiellement avec la fonc-
tion qui lui est dévolue. Il est possible de dire avec une certitude presque
absolue, que les muscles masticnh'iirs sont ceux dont le développement relatif est
le plus co7isidérable chez la femme. Ils appartiennent en somme à la grande
fonction de nutrition ; c'est elle qui préside de la même façon mais avec
une intensité différente, dans les deux sexes, à leur fonctionnement ; celui-ci
96 5 JANVIEU 1905
règle raccroissemcnl de la mamiibiile qui esl chez la rfiinne proportion-
nellement à l'homme fomme 78 esl h iOO.
(le rapport S(jiielelti(jue est très élevé : il n'est dépassé que par le poids
comparé du cerveau. Far l'amplitude du thorax, la femme est à l'homme
comme 70 est A 100. On retrouve pour la capacité vitale elle-même une
relation absolument identique. N'est-ce pas une sérieuse raison de penser
qu'ici encore le contenu règle le développement du contenant, et que la
fonction respiratoire préside à l'accroi^^sement de la cage Ihoracique, à
l'allongement et à l'épaississement des côtes par l'intermédiaire des
muscles inspirateurs qui sont ainsi en connexion intime avec l'intensité
même de celte fonction. L'infériorité musculaire de la femme s'accuse de
plus en plus, quand on compare dans les deux sexes, le développement
musculo-squeleltique de l'appareil de la locomotion, bien mieux repré-
senté par le rapport du poids des fémurs que par la longueur des membres
inférieurs. Ce rapport est de 63 0/0 seulement chez la femme. Il s'explique
facilement par les conditions sociales dans lesquelles se trouve placée
cette dernière, par sa vie moins active, par son séjour permanent, pour-
rait-on dire, à la maison. Ces conditions sont également en parfait accord
avec l'infériorité bien plus manifeste que présente le sexe féminin quant
au développement du membre Ihoracique. Les lourds fardeaux, les tra-
vaux manuels pénibles et fatigants, exigeant un déploiement considérable
de force musculaire sont épargnés à sa faiblesse, et accomplis par son
compagnon plus vigoureux qui entretient et développe d'autant la masse
musculo-squelettique de son membre supérieur. Elle atteint des propor-
tions énormes, puisque M. Manouvrier a démontré que la force de serre-
ment des mains n'était pour la femme que les 57, 1 centièmes de celle de
l'homme, et que, selon Quételet, le rapport de la force de traction verti-
cale tombe même à 52,1 0/0.
Le travail des divers groupes musculaires de l'organisme est donc
essentiellement divers. Cependant, il n'est pas illogique de s'en faire une
idée d'ensemble qui serait assez bien traduite par cette formule : L'oc-
iivité musculaire de la femme est de très peu inférieure aux deux tiers de celle
de l'homme.
Quant aux fonctions de nutrition, elles sont relativement très dévelop-
pées dans le sexe féminin, et on pourrait admettre d'une façon très satis-
faisante, que chez la femme leur intensité est égale aux huit ou aux neuf
dixièmes de celle de l'homme.
Dans ses travaux sur la « Quantité dans l'encéphale » M. Manouvrier
n'a trouvé aucune preuve anatomique de la prétendue infériorité de la
femme au point de vue du développement cérébral.
(^A suivre).
E. DKMiJXET. — IIECHEHCIIES SlTt LV CAP ACITl': VITALE 9?
Ainsi cliez la femme, les foncUuns de nutriliun sont déveluppéea aux.
dépens de l'énergie musculaire, et dans les deux sexes, les fonctions ner-
veuses sont équivalentes, sous la réserve de certaines dilTérences qui
sont la consét[uence logique de la relation précédente. La femme présente
donc une infériorité catabolique très nette, et une supériorité anabolique
manifeste. « Et cependant, la fonction respiratoire est une fonction de
nutrition, mais d'un ordre spécial. L'oxygène fourni parla respiration est
surtout destiné à l'entretien des processus cataboliques : intermédiaire
entre l'anabolisme et le catabolisme, la respiration est précatabolique.
Elle n'est proportionnelle à celui-là, que dans la mesure, où le second
processus est lui-même proportionnel au premier. Or dans les conditions
présentes, il l'est cliez l'homme qui détruit au fur et à mesure les maté-
riaux apportés par la nutiilion, les transformant en chaleur et en travail.
Chez la femme, au contraire, l'énergie musculaire insuffisamment active
laisse accumuler dans l'organisme des matériaux incomplètement oxydés
qui pourront en faire partie intégrante sous forme de tissu adipeux, ou
qui circuleront sous une forme ou sous une autre jusqu'ji ce qu'ils soient
rejelés à des périodes plus ou moins régulières, quand ils ne sont utilisés
ni par le fœtus ni par l'enfant à la mamelle. C'est sous l'une ou l'autre
de ces formes que la femme se débarrasse de l'excès de ses recettes. On
peut donc dire maintenant avec M. Manouvrier : « Telle est la raison pour
laquelle le sang de la femme est moins riche en globules et en hémoglo-
bine. Sa fonction plastique est plus développée que chez l'homme relati-
vement à sa fonction préparatoire du catabolisme. Telle est aussi la rai-
son pour laquelle le poumon et le thorax féminins sont moins développés
relativement aux viscères abdominaux. Chez la femme, l'hématopoïèse
est relativement plus développée que l'hématose. »
Pour terminer nous ne pouvons mieux faire que reproduire ces lignes
du même auteur sur l'influence de la respiration sur les fonctions ner-
veuses et le tempérament : « Le catabolisme cérébral ne peut libérer une
certaine quantité d'énergie que par le passage de la constitution molécu-
laire éminemment instable de la substance neuronique h. un état plus
stable, passage qji exige une oxygénation. Et si faible que doive être
celle-ci, son intensité doit être en rapport avec le degré d'oxygénation du
sang artériel. Par conséquent, toutes conditions quantitatives, morpholo-
giques, mésologiques de toute sorte, égales d'ailleurs, il existe une cause
de minoration du travail cérébral dans le sang féminin, et ce n'est pas la.
seule.
Le tempérament n'est autre chose que la (juanlilé de potentiel éner-
gétique réalisable chez un individu dans l'unité de temps, relativement à
la masse organique active, (juanlité qui se traduit par l'intensité du tra-
vail. Il y a des raisons de penser que l'oxygénation du sang ne constitue
pas h. elle seule le tempérament sthénique, mais elle doit nécessairement
influersurle potentiel développabledans une masse organique donnée. Elle
met enjeu les qualités protoplasmiques desquelles dépend le tempérament.
Sous ce rapport, le tempérament se trouverait en somme diminué, dans
80C. d'anthrop. <905. T
98 ."» JA.NviHii 190;')
It' sexe ft'iiiiiiin. Il y ;i là. si je ne me Irumpe, une dillerencc sexuelle
(l'uiit' importance capilah'. »
RÉSUMÉ ET CU.NCLLSIONS
I. M. Manouvricr ayant constaté au cours de ses travaux sur la com-
pai'aison biologique des deux sexes, qu'il n'existait aucune
donnée vraiment scienliti(jue sur le développement comparé du
poumon, de l'homme et de la femme, a fait de cette question,
le sujet de ces recherches.
II. Far les difficultés de sa technique, et l'incertitude des applications
de ses résultats, à chaque cas individuel, la spirométrie ne sau-
rait donner lieu à des considérations pratiques, et être adoptée
comme moyen de diagnostic, surtout dans les conseils de revi-
sion. Utilisée dans des séries suffisantes, elle est un excellent,
et peut (Hre le meilleur mode d'exploration pulmonaire; elle tra-
duit d'une façon aussi parfaite que possible, le développement
de l'appareil respiratoire, et permet d'étahlir des moyennes
d'une jiortée biologique incontestable,
m. La capacité vitale absolue d'un français de 20 à 25 ans, ma-
croskèle macroplaste par éducation, est de 3.912 centimètres
cubes, en moyenne.
IV. La capacité vitale croît absolument et relativement avec la taille,
parce que celle-ci ne représente que d'une façon imparfaite le
développement total de l'organisme, dont les indices de méga-
somie approchée donnent une idée plus exacte. Tout porte à
croire que la surface des échanges respiratoires ne croît pas avec
la taille; ce sont, en définitive, les plus petits qui sont les plus
favorisés par la fonction pulmonaire. Pour eux seuls, le rapport
de la circonférence thoracique et de la demi-taille est exact.
V. Les rapports de la capacité vitale et du buste sont intéressants parce
qu'ils montrent que l'intensité du fonctionnement musculaire,
règle l'intensité du fonctionnement du poumon. Celui-ci se fait
par allongement et soulèvement des côtes. La cage thoracique
s'accroît donc sous l'influence de l'augmentation de volume de
son contenu.
VL H nous a semblé que, dans l'immense majorité des cas, un sujet
bien constitué avait la circonférence thoracique au moins égale
à la longueur de ses membres inférieurs. Cest un rapport qui
demande des recherches complémentaires. S'il était confirmé, la
mensuration du buste serait très utile aux médecins militaires,
aux(iuels elle fournirait un indice de robusticité, et un point de
départ pour des applications pratiques de tout premier ordre.
\\\. Elle leur permettrait surtout de calculer le rapport S/'B, c'est-à-dire
le degré de brachyskélie ou de macroskélie. Ce rapport, ainsi
k. UKMONKT. — iii-<:iii:ii('.iii:s siit i.v hapacitk viTvr.K 0.)
que 1.1 taille, est pour noire série, plus élevé que pour la moyenne
des Français adultes, délinquants ou non. C'est que nousavons
poursuivi nos recherches sur des jeunes gens sélectionnés par
l'éducation. Lu théorie ergique de M. Manouvrier sur l'accrois-
sement des os, explique facilement ces faits. Les brachyskèles
l'emportent par leur développement général et leur capacité
vitale sur les mésaliskèles et les macroskôles.
\ III . La largeur bi-acromiale ne présente pas avec la capacité vitale, des
rapports très étroits. Elle prend toutefois une réelle importance,
quand elle sert à traduire la mégasomie ou l'euryplastio. Nous
ne croyons pas avec Mai'strolli, que la longueur du sternum soit
de toutes les dimensions du thorax, celle qui traduise le plus
exactement le développement pulmonaire. Elle compense, dans
une certaine mesure, l'infériorité transversale des macroplastes.
I\. La capacité vitale croit absolument et relativement avec le poids.
Les rapports de ce facteur avec la taille ne présentent pas la
progression régulière qu'on leur a prêtée trop complaisamment.
L'indice de corpulence de Bouchard, s'applique assez bien, tout
en étant encore trop élevé, aux cas moyens : les cas extrêmes
lui échappent. Une formule mathématique est encore à trouver.
Nous la croyons inutile, parce que le poids ne traduit exacte-
ment la mégasomie que dans la mesure où il n'est pas influencé
par le tissu adipeux. L'n coefticient, qui pourrait èlre appelé
« d'impression » de 0 à 20, donné consciencieusement par un
médecin tant soit peu exerce, remplacerait avantageusement ce
rapport, comme indice de robusticité.
X. Le développement pulmonaire est d'autant plus grand que la cir-
conférence thoracique est plus élevée. Celle-ci est sous la dépen-
dance étroite de l'amplitude du thorax.
M. Nos indices de mégasomie approchée sont d'une exactitude satis-
faisante. Ils permettant de démontrer que la capacité vitale croît
en raison inverse de la mégasomie. Le poumon n'a donc pas
besoin de s'accroître proportionnellement à la masse à nounir.
La microsomie engendre des besoins, et ceux qui la présentent,
sont au point de vue respiratoire, les plus favorisés.
XII. La capacité vitale suit, assez régulièrement, le degré d'euryplastie.
Celle-ci, ainsi que la brachysk('lie est associée ;i toutes les tailles;
le plus souvent, la brachyskélie et l'euryplastie marchent de
pair; il en est de même pour la macroplastie et la macroskélie.
XIII. La capacité vitale absolue d'une femme française, quelconijue, de
20 à 25 ans, est en moyenne de 2.747 centimètres cubes.
XIV. Le corset diminue la capacité vitale d'un sixième de sa valeur
environ.
XV. La plupart des rapports concernant le sexe masculin s'appliquent
aussi au sexe féminin. Il n'en est pas de môme pour les dimen-
sions iniluencées par le tissu adipeux, poids et circonférence
^00 r» JANVIKII 100")
Ihoracitiue. Celles-ci ne coiilracleiil plus alors avec la capacité
vitale que des relalions essentieilcinent irrégulit^rcs.
X\ 1. Dans les deux sexes, la capacité vitale ne croît d'une façon inalhé-
maliquo avec aucun fadeur. 11 est souverainement inexact de
soutenir qu'un centimètre de taille ou de circonférence thora-
ciipie, ou bien un kilogramme de poids, donne droit ;i n centi-
mètres cubes de capacité vitale. Mais les dimensions squelet-
tiques, la taille et le buste surtout, semblent être en connexion
plus intime avec le développement pulmonaire, que les facteurs
soumis aux variations du tissu adipeux. Le poids et la circonfé-
rence thoracique n'ont seulement une réelle valeur que dans les
séries d'un embonpoint sensiblement identique. La taille affecte
avec la capacité vitale, des rapports plus étroits que le buste.
XVII. La capacité vitale absolue de la femme, est à celle de l'homme
comme 70 est à 100.
XVIIL La femme est microsome et macroplaste relativement à l'homme.
Elle est également brachyskèle par rapport à ce dernier, bien
que sa cage thoracique présente une exiguïté incontestable.
C'est que, chez elle, l'abdomen, remontant davantage, occupe
une partie beaucoup plus considérable de son buste.
XIX. Dans les mouvements réguliers d'inspiration et d'expiration, l'am-
plitude du thorax est beaucoup plus considérable au niveau des
côtes inférieures dans les deux sexes. Le type respiratoire est
donc le même chez l'homme et chez la femme; il présente des
exceptions variées.
XX. Nous considérons les documents nouveaux, et les faits exposés
dans ce mémoire, comme entièrement confirmatifs des idées
émises par M. Manouvrier, dans son enseignement oral et dans
ses travaux, soit au sujet des différences sexuelles, soit au sujet
de caractères anthropologiques concernant les proportions du
corps, dans un môme sexe.
OrVRAdES OFFERTS ^O»
798« SÉANCE. — 19 Janvier 190!i.
Présidence ue M. Sébillot
Nécrologie. - D^ (:ou..ne.u-. - Jai le regret, dit M. le l'résident de vous
Zn... !■ wf n.ul .1. notre coll.wue le D^ CoUiueau, membre du Com.te centra .
Il faisait parti., de la Société depuis ISiw, et il a été secrétaire des séances, et,
pendaut quelques années, conservateur des collections. 11 a la.t plusieurs com-
nmnications. dont la plus in.portante est celle sur le Délire rel.g.eux en 18/0.
Le D' PAPIL..ULT annonce que le l)r Collineau était membre de la Société
.rXutopsie.r.rAceaux convictions scientifiques de sa tamille et aux soms du
Docteur Leblais, le cerveau de notre collègue est venu sajouter a nos pre-
cieuses collections.
OUVRAGES OFFERTS
Vachvili. - yarodnaiameditcina,etc (Médecine populaire enTranscaucasie).
Tiflis, 1901, in-l° 131 p., avec 5 fig.
M Th. VO.KOV. - I/ouvrage de M. le D^ Yachvili, que j'ai l'honneur d'offrir
à la' Société, de la part de l'auteur, contient : 1° la liste et la description de
569 nKHlicaments populaires géorgiens; 2° les pratiques "^^dicales delransca,,
casie et 3» le contenu d'un livre de médecine populaire « ^-"^^ad ni ^ Dans la
première partie, parmi les médicaments «^'origine mmerale. nous tio von^^^^^^^^^^
indication très intéressante que les femmes géorgiennes qui n "^^t 1"^Y1 nid
viennent se frotter contre les certaines pierres qui ^"^^ ^T^^^^vJ^
gu.rir la stérilité ce qui rappelle certaines superstitions de la Bretagn^ I m
les matières médicales animales nous rencontrons la ^^'^^'^ ^'^ '^^H
de cigogne et d'autruche, les testicules du cerf et du veau H^ ou donne
contre nmpotence, les os humains, le sang de pigeon de gru . ' "" ^ ^^ ^
bouc, le cerveau de la pie, les excréments du chien, e placenta du chat et
verge séchée du cerf, ainsi que le sang menstruel et le lait des femme, l ou
provoquer la haine d'un homme contre la femme qu il aime «n Un donne ^
mang r. secrètement, bien entendu, les excréments de ^elle-cu C<^ p a I -
rappLnt certains procédés de la médecine moderne ne sont pa unqu .
M Sakhokia m'a raconté tout de suite un lait très remarquable a c po mt de
de vue. Quand quelqu'un meurt de phtisie en Géorgie, on fait l^.'l^'P '^J "^
enlève ses poum'ons' on les sèche et on les donne soiten PO->-^-'t d^^ «u
aux personnes pour lesquelles on a peur '1- '^>»-,P"--VT'n éhistr ue"
Mais le plus intéressant pour ceux de nous qui s'occupent de P ^^^^'^^''^^ "« ^
sont les\.ratiques chirurgicales et notamment l'opération de «^ -'«"f 7^:*;
crAne, faite ordinairement par les spécialistes nommée djarakhs l^^ ^s
où on suppose une hémorragie interne sous le crâne en suite de la contusion
'":;:;^l:tion du crAne se fait avec un trépan en forme d'alêne qu'on toiu-ne
pour pratiquer un ou plusieurs trous. Une autre variation de la m me
opérat^ion est encore plus intéressante. EH^ cons.se en un ,/.^^a^'^i--t^
dique de l'os crânien jusqu'à la mère-dure et se fait à 1 aide d un ciseaa
102 111 j\ NviF.it i'.>orj
II' tr.imlmnl rsl ('•Inri.'i «l'un c>i\i' sous l'an;.'!!' ilntil do inrino riianiôro que l'ins-
Iruuii'ul |i(iur sdiirl)!-.'!' des inrlnux. Le j:i'all!iiri' dure onviron deux houros, avec
Ifs pelilos infoiTii|)linns pour (airo reposer le sujet qui évidemment reste sans
moindre anestliésie L»' sang esl t-loifiné )i l'aide d'un morceau de ouate attachée
à une Iwiffuette. (Junnd l'os crânien devient liés miini' et commence d'éclater
sous la pression «le iiustniment. ee ([ui eti resie est éloiifné à l'aide dune petite
pince. A la lin de lopéralioii ou nelloie la surface ensanglantée et puis on la
panse avec les feuilles miles delà ltar<iaui' {Lappa fom<'ntosa). réduites en pAte
qu'on appliijue toutes chaudes. (Juehpiefois. au lieu de cela, on emploie un mé-
lange de miel avec du jaune d'œuf. Le |)r Minkévitch fini a dciiit le jiremier
cette opération dit qu'elle passe sans heaucoup de douleur.
La médecine pojiulaire géorgienne représente, comme nous le voyons, un
mélange d(> procédés tout à fait préhistoriques d'un côté et des pratiques de la
médecine aniiipie et du mo\en-àge. L'ouvrage de M. Yachvili a donc un intérêt
tout particulier an point de vue anthropologique et ethnographique.
M. Marcel Baudouin. — Il ne faudrait pas croire qu'il n'y a qu'au Caucase où
la médecine préhistorique ait laissé des traces manifestes encore à l'époque
actuelle. La Bretagne, la Vendée. l'Anjou, etc.. pour ne parler que de l'Ouest
de la France, présentent encore des superstitions de même ordre. .l'ai ai publié
un certain nombre dans la Gazette médicale de Pa/'î5 depuis plusieurs années.
Pour la trépanation, tout le monde sait <iu'elle est encore, chez les Arabes,
prescjuc à la période préhistorique.
Il faut i-approcher, d'autre part, de certaines coutumes géorgiennes (utili-
sation du poumon humain, après autopsie et dessication de la i)ièce anatomique),
l'usage de la fameuse graisse de momie, (pii n'est que de la graisse humaine,
qui est vendue dans l'Ouest par les garçons de salles d'autopsies des hôpitaux,
encore à l'heure présente, croyons-nous, et qui, en tout cas, l'était il y a quelque
vingt ans, à Nantes, quand nous faisions là-bas nos premières études médi-
cales '.
Présentations de photographies.
M. Zaborowski. — Avec son mémoire sur les Lolos M. François m'a
adressé, ce dont je l'ai vivement remercié, un certain nombre de photo-
graphies dont il a réuni une collection importante. Ce sont des vues de
la vallée du Kien-Tchang qu'il a parcourue, des portraits de Lolos en
bandes armées ou i)ar |)etits groupes avec leurs femmes, de Lolos soumis,
c'est-à-dire plus ou moins assimilés par la civilisation chinoise et fort
mêlés de sang chinois, de criminels sui)|»liciés. de goitreux du Yunnan,
de Chinois du Sud. Nous avons j»u reproduire quelques unes de ces pho-
tographies en imprimant le mémoire de M. François. J'en ai reproduit
quelques autres, en donnant les explications nécessaires dans une note
sur les Lolos, pour la Rrvite de l'Ecole dWnlhropolofiie. Je crois répon-
dre aux intentions de M. François en faisant rentrer l'ensemble de
ces documents au nombre de G2 dans les collections de notre société-
J'aurai l'occasion de les ulili.ser, de les analyser en détail devant vous,
sinon tous, du moins pour la j)luparl, au fur et à mesure que les ques-
' Voir Cabanes {Remèdes d'autrefois, 190b) et France médicale (1903, p. 10).
A. VAN CENNKI'. — lli;ltAI.I)l> \ IHtN DE I. A MMKJI K HK l'IlnfHIKI I, I (J3
lions qu'il nous aideront à éclaircir viiMidniul en discussion. J'ai déjà
dit qu'ils prouvent définitivement enln- autres choses que chez les Lotos
il y a un éléinenl ininiilif qui ne peut jias iHre classé parmi les races mon-
goliques.
NOTES SUR L'HERALDISATION DE LA MARQUE DE PROPRIETE
ET LES ORIGINES DU BLASON
I'aU .m. All.NOLD VAN GeNNEP.
.Mali^'ié les ciïiM'ts de plusieurs de mes collègues de la Société des Tra-
ditions Populaires, ren(puHe poursuivie dans la Mevue de cette Société
sur les marques de propriété en France n'avance que lentement. Des
recherches directes ont été faites déjîi en Bretagne par M. Sébillot, en
.Vuvergne par M. Gaudefroy-Demonbynes, dans le Perche par moi, en
.Alsace par le 1)'' L Laloy, dans les Pyrénées par MM. Rosapelly et
Uondou '; et les résultats obtenus ont été relativement si insignifiants
qu'on en vient à se demander comment cette coutume de marquer d'un
signe spécial les biens de tout genre a pu disparaître à ce point en France
alorsqu'elle est encore si répandue en Suisse, en Allemagne, en Russie, etc.
Dans ces pays on fait usage tantôt de la marque individuelle, tantôt de
la mirque collective; celle-ci est a'pp3lée en Allemagne Ilausm'irhe, mar-
que domesticjue, ou llofmarke, marque fermière. Elle est la propriété de la
famille ; le père de famille est seul à posséder une marque et les enfants,
mhne majeurs mais non encore mariés ni établis à leur compte, utilisent
celte marque paternelle.
Or dans un grand nombre de cas actuels, la marque domosliciue exprime
no'.i seulement l'appropriation d'animaux et d'objets, mais spécifie aussi
Il filiation du possesseur de la marque et son rang social. Dms sou
grand ouvrage sur les marques domestiques et fermières d'.VUemagne,
C. G. Homeyer a montré par (piels stades a passé cette héraldisation -.
Tacite disait déjà des Germains qu'ils distinguaient leurs boucliers par
les couleurs vives qui s'y trouvaient peintes» soUa lantunt Ifctissimis colo-
rihns ilistinriunt ".iGerin. C VI)^, et .\mmien Marcellin parle (.Wf, 12) des
sciita iiisit/nia des Gimbres. Plus tard les lois germmiques (Loi Salique,
Loi des lUpuaires, Edit de Rothairo, Loi des Visigoths, Loi des Ala-
manes, Loi des Frisons, et'--.) parlent des marques de propriété sur ani-
maux, sur arbres, sur bornes, sur outils *. l'eut-étre ces marques se
trouvaient-elles également inscrites sur les boucliers germains.
' Voir Revue des Traditionx Populaires, années 1902, 1904.
* C. G. IIOMEYER. — Die Ilnus-uml [Infmarken. 2>' éd. anaslaliiiue, lîcriin 1890,
8", 437 p. U pi. Cf. pp. lo3-l.o3.
>* HOMEYER. — Loc. cit. p. lo'J.
* Homeyer. — Loc. cit. pp. 8-1^.
lo'i l'.i jAwiKit lîiori
Or elles se retrouvent aussi sur les sceaux., domine vous savez, les
sceaux anciens représentaient le chevalier ;i pied ou à cheval muni de
ses arnies, ce mot pris dans les deux sens f|Ut' distinguent les deux, mots
allemands de Wa/ffu et de Wappen (has alld). IMus tard, seul l'écu
demeure mais d'ahurd penché, c'est-à-dire dans la position réelle, et sur-
monté du casque. Ecu, cas(pie et emblèmes inscrits dans l'écu ou sur-
montant le casque, constituaient i'armoirie qu'on peignait ou gravait sur
tous les objets appartenant au seigneur, qu'on brillait sur ses chevaux et
ses chiens, etc. L'armoirie servait donc — et sert souvent encore — de
marque de propriété.
Le champ de l'écu comprenait d'ordinaire des couleurs et des emblè-
mes; et c'est sous cette forme qu'on se représente généralement les élé-
ments des armoiries. Mais tout aussi nombreux étaient les écus dans lesquels
se trouvaient inscrits des signes géométriques ou alphabétiformesqui
n'étaient autres que des marques de propriété ancienne. Je ne recher-
cherai pas en ce moment si ces signes sont une déformation de dessins
d'après nature, ou si au contraire ce sont les dessins qui sont une ampli-
fication et une interprétation des figures géométriques; je ne discuterai
pas non plus l'opinion de Ilomeyer suivant laquelle c'est la forme du
signe qui en a suggéré le nom; enfin je laisse pour plus tard la compa-
raison de ces signes avec les anciens alphabets runiques ou runiformes.
Que la marque d'après nature soit antérieure ou non à la marque géo-
métrique, il n'en reste pas moins que celle-ci a peu à peu disparu du
blason devant celle-là. On connaît pourtant des cas, en assez grand nom-
bre., où la marque géométrique a subsisté longtemps en qualité de véri-
table armoirie. Homeyer en cite quelques-uns; et j'en trouve d'autres,
plus typiques même, dans un travail récent de II. G. Meyermann S sur
les marques domestiques et les armoiries des familles de Gôltingen.
C'est ainsi que la famile von Dransfeld, l'une des familles les plus
nobles de la région, a porlé successivement les armoiries suivantes
(fig. 1-4).
Ainsi en 1512 la marque de propriété primitive servait encore d'armoi-
rie aux Dransfeld.
La famille des Ciseler von Mûnden, également de très haute noblesse,
reçut comme armes en 1448 celles de la fig. 5; en 1476, Maurice Ciseler
se sert pourtant de sa marque inscrite dans un écu rond (fig. 6), marque
qui se trouve reportée entre les branches du cimier par Simon en 1488
(fig- ').
L'évolution a été encore plus curieuse dans les armoiries de la famille
von Plesse ; celle-ci avait pour marque dislinctive une ancre de muraille,
qui s'est peu à peu simplifiée et stylisée de 1329 à 1445, jusqu'à servir
d'attache pour la houppe du cimier (fig. 8- il).
Comme vous le voyez, les marques géométriques sont inscrites tantôt
* G. Meyermann. -- (Jdltinger Hausmarken itiul Familienirappen. Goltingcn,
Lùiier Borstmannj 1904, 97 pp. et 607 dessins sur 23 [A.
A. VAX CENNEI'. — IIKH M.DIS \TlnN DR l.\ MAItnlK I>E PUoPRléTÉ 10")
dans un écusson, tanlùt tlans un cercle, et celle inscription tlans un enca-
drement semble avoir (lé d'abord un privilège des nobles. Primitivement
les roturiers apposaient leur marque toute simple; puis, pour imiter leurs
seigneurs, ils l'encadrèrent en des écus de forme fantaisiste pour en lin de
compte copier l'écu béraldique '.
C'est ainsi que, toujours hGotlingen, lecuré André Mundemann appose
en 1540 le sceau de la fig. 1:2; IFans Miiiidemann so sert en 1500 et en loOi
des sceaux lig. 13 ot 1-i.
De même la famille roturière Speckbôlel partit du cercle pour arriver
à l'écu (fig. lo-IT).
Enfin llomeyer a relevé à Krfuit * des marines inscrites dans des
encadrements de forme bizarre (/?// 18-li)i, et l'on connaît des cas où
l'écu a été coupé de manière h porter d'un côté l'armoiric, de l'autre la
marque domestique '.
La noblesse étant quelque chose de relatif, on peut s'attendre h ren-
contrer les mêmes phases d'héraldisation de la mar(|ue dans des milieux
roturiers délimilés : vous savez que les paysans d'une région ou d'un
village, quoique également roturiers aux yeux d'un noble, reconnaissent
entre eux des différences de rang; il est des aristocraties paysannes; celle
de la Beauce est bien connue. Vous ne vous étonnerez donc pas que. dans
le Wurstenland par exemple, les paysans ordinaires, c'est àdire les plus
pauvres, aient apposé leur marque domestique telle quelle, sans ornement
ni encadrement, au lieu que d'autres, plus huppés, inscrivaient, dans un
cercle, un écusson, etc. simples on surmontés d'un casque ou de feuillages
marque soit seule ?oit accompagnée d'emblèmes; et qu'enfin l'aris-
tocratie paysanne du lieu, dédaignant la marque, ait apposé des écus-
sonsavec figures héraldiques imités des armoiries appartenant aux nobles
véritables.
Les quelques faits qui précèdent font assez comprendre le procédé
allemand d'héraldisation de la marque de propriété. L'évolution a été
exactement la même en Hollande et en Angleterre, ainsi qu'il ressort des
recherches de Homeyer '' et j'ai vu en Pologne des marques alphabéli-
formes sur ruches que j'ai su ensuite être en même temps des armoiries;
des armoiries polonaises constituécspar des marques de i)ropriété ne sont
pas rares et se trouvent dessinées dans les Armoriaux de la Schlaclila.
Quant aux faits russes ils étaient inconnus de Homeyer qui pensait que
l'inslilution des marques de propriété, soit individuelles, soit' domes-
tiques, d'après nature ou géométriques, était une invention proprement
germani(|ue. Richard Andrée ^ a montré que c'est là une institution
universelle et que des besoins idenli(}ues ont provoijué, partout, des
* L'écu cchanrré (fig. 13 ctc ) claii lo plus usilè en Allemagne.
• Z,oc. rîV., pl.XXXlII.
' Loc. cit., p. loG.
i Ibidem .
5 R ANimÉE. — Ethnographische Parallelen.'ii<i\XQ Folge. Leipzig, 1889.
ados i(Ioiili(|U('s. I/;irlic|p trAmlriM- date de 1889; non seulemont on a
publit"' depuis des oikjimHi's de détail; mais lui non j)lus n'avait pas utilisé
les documents russes, surtout l'ail iile intéressant de Kdmenko, paru
en 1874, sur les signes juridiques '.
IViur désigner la marque, les Ilusses ont un certain nombre de mots,
suivant la manière de faire cette marque : Piatno, c'est l'entaille à la
hache; h'ieimo c'est proprement le sceau et le tampon. Le KJrimo était en
môme temps la marque de propriété et l'armoirie: plusieurs Kleimo
anciens étaient alphabétiformes puis se sont stylisés sous forme de croix
laquelle est restée comme partie intégrante d'armoiries analogues aux
nôtres. En outre les Russes ont emprunté aux Turcs les mots de Taïu-o
(brûlure sur chevaux) de Tamgn et de Iasnk{marque brûlée ou peinte); et
Efimenko ayant étudié un certain nombre de cas typiques se croit
autorisé ;i dériver directement le blason de la marque de propriété*.
L'article de Efimenko eut une grande influence sur les ethnographes
russes qui s'empressèrent de relever les marques employées par les nom-
breuses populations de l'Empire, notamment par les Lapons, les Kir-
ghiscs, lesKalmyks, les Mongols, etc. La transformation de la marque de
propriété en arrnoirie ne s'est produite que là où il y a eu dilTérenciation
du groupe social en nobles et en roturiers, par exemple chez les Kirghises.
Pour le moment je laisserai de côté l'étude à ce point de vue des Tmnga
russo-asiatiques et me contenterai de vous montrer le même mode d'évo-
lution chez les Turcs d'Egypte.
Récemment a été publié par Yakoub Arlin Pacha sur les Tamga un très
beau livre intitulé Contribution à l'Etude du blason en Orient (Londres, 1902).
L'auteur a étudié de près les Tamqa inscrits sur les monuments, les
poteries, les cuivres, etc., égyptiens; c'étaient non seulement des marques
de propriété mais aussi des marques distinctives et honorifiques; mais
elles ne se transmettaient pas dans des familles fortement constituées
pour cette bonne raison que les Mamlouks h qui ces marques étaient
données par les sultans, se recrutaient parmi les esclaves. Un grand
nombre de ces Mamlouks étaient d'ailleurs originaires du Caucase; et
l'on n'a pas à s'étonner des ressemblances que présentent les Tamga iurco-
égyptiens avec ceux des Tcherkesses anciens et modernes. En Géorgie
même le Tamga est également devenu armoirie et est toujours en usage
comme marque de propriété à ce que m'écrit mon ami Adolphe Dirr à
qui trois années de voyages au Caucase ont fourni sur la question des
marcjues de propriété et de leurs transformations de nombreu.K documents
très intéressants.
L'étude des Tamga et des armoiries d'Egypte a conduit Yakoub Artin
Pacha à se rallier à la théorie de l'origine orientale de notre Blason. Mais
• P. Efimenko. — luriditcheskie snnki. Journal du Ministère Russe de l'Instruc-
lion Publique, 1874, a°^ d'octobre, novembre et décembre. Le grand volume et les
article de Solovicv sur le même sujet ne peuvent C-tre consultés qu'avec prudence.
2 Loc. cit., novembre p. 149.
A. VANCENNEP. — IIKHAMUSATION DE I.\ MAlloI E I.E PnnPniÉTÉ 107
d'après ce que je vous ai cxposo tout li l'hruiv sur l'r.sage ancien -le la
marque de propriélé en pays -crmaui.iue el slave, vous conclurez avec
moi (pie nous n'avions pas besoin d." IM trient [...ur inventer des marques
et un blason qui existaient déjà clie/. nous. Pour l'usage des couleurs, le
passage de Tacite est probant; et tout ce qu'on peut accorder, je pense,
c'est que le contact de l'Occident avec l'Orient au moment des croisades
a simplement contribué li accélérer et à systématiser l'évolution de la
vieille coutume germanique.
En tout cas Yalcoub Artin Pacha est amené, lui aussi, à dériver ces
armoiries turco-égypliennes d'anciennes marques de propriété K Et il a
constaté une transformation identi-pie, mais moins prononcée chez les
Arabes.
Les marques de propriélé sont appelées par les Arabes UVwm; je les ai
étudiées d'après quelques textes arabes et d'après les descriptions des
explorateurs dans un article de Vlulmintionnlrs Aicliiv fiir Elknoçimpliie
qui parut quelques mois à peine avant le livre de Yakoub Artin l»acha,
basé avant tout sur les auteurs arabes. Tout pourtant est loin d'être fait :
ainsi le grand dictionnaire appelé Lisin ol Arab n'a pas encore été dé-
pouillé h fond sur ce point *.
Tout comme la Ilnusmarhe, le Kleimo, le Tamfio, elc, le Wasm est d'or-
dinaire une marque familiale qui est soumi.se, en ce qui concerne l'hé-
ritage et la transmission, à des règles strictement fixées, grâce auxquelles
il est apte à servir de signe de parenté et d'armoirie. L'explorateur liuber
avait déjà él»'- frappé par cette analogie entre les Wasm el notre blason.
(( Un Wdsm, dit-il se compose généralement de plusieurs signes différents
([ui sont pir conséquent de vraies armoiries qui peuvent se lire » ; en
outre il remarqua (jue la manière de décrire un Wasm donné au moyen
de termes spéciaux et classés dans le même ordre rappelle noire langage
héraldique '. De môme Yakoub .\rlin Pacha dit qiie la conservation
depuis des siècles du môme signe de propriété dans une même famille en
a fait peu à peu k une maniue nobiliaire; aujourd'hui, en apercevant les
marques d'un chameau, nos Bédouins disent sans hésiter s'il est de sang
noble oa roturier, c'est-à-dire s'il appartient à une famille noble ou
roturière » K Quant aux signes eux-mêmes, il en est d'alphabétiformes et
d'autres qui sont copiés d'aj.rès des objets ou des animaux ; et tout comme
nos armoiries, ils subissent des modifications déterminées, par adjonction
d'un ou de plusieurs traits ou par accolement d'un autre Wasm simple.
Ce procédé de modification au moyen d'un ou de plusieurs traits est très
répandu (.Allemagne, Russie, Asie, etc), on pourrait presque dire général.
Avant de clore cette énumération, je voudrais encore vousdire quelques
muts des marques elarmoiries au Japon L'art béraldiquo a atteint en ce
' et. Yakoub .\rtin i>acha, lor. ci/., 1!W cl i.lanclip, /irj :u l el 31.1.
i M. Gaudefroy-Demombynes a entrepris ce Iravail .ini sera terminé d'ici peu.
' HuBEii. — Juurnal du voyage en Arabie, Taris, 1891. p. 177.
* Yakoub Artin Tacha, Iqc cit., p. 197.
108 1!» j AN VI EU 1905
pays m. ilcvolupiicincnl pour le moins aussi consifl(''ral)Io que chez nous.
La lilléiviture japonaise sur ce sujet est très riche ; elle a été récenimenl
dépouillée en grande partie par M. Il Lange, professeur au Séminaire
des Langues Orientales de Herlin '. Pour désigner leurs armoiries, les Ja-
ponais emploient les mots de Mon ou Mondokoro qui signifient dessin, mo-
dèle, et Shiriishi, qui signifie marque. On distingue Varmoirie domestique ou
familiale, qui indique la parenté de celui qui la porte; il est à remarquer
(ju'anciennement une même famille pouvait avoir plusieurs armoiries de
cette sorte. De plus il existe des armoiries secondaires, qui peuvent èlredes
différenciations de Tarmoirie principale, ou ne pas lui ressembler. Ainsi
le collègue de M. Lange h Berlin, M. Tsuji a pour armoirie principale la
figure iO, et pour armoiries secondaires les figures :2l-23, dont les deux
premières sont une modification de l'armoirie principale ^
« En outre des armoiries, dit l'auteur, chaque famille possède en-
core une Hausmarke, une marque domestique, qu'on désigne sous
le nom général de Shiruslii. En réalité, ces marques ne se distinguent pas
des armoiries, dont elles ne sont qu'une variante. On les appose sur les
vêtements des domestiques ou des ouvriers. On peut également apposer
sur ces vêlements l'armoirie familiale, de manière à bien indiquer leur
appartenance. C'était la mode que les clients inférieurs, les serviteurs des
daïmios (seigneurs féodaux) eussent tous sur leur vêtement la marque
dont il s'agit •'. » Ainsi le collègue de M. Lange, M. Tsuji a pour sliirushi
le signe de la figure 24.
Quant au mode et à l'époque d'origine du blason, M. Lange affirme '*
qu'on sait aussi peu de chose sur ce point au Jupon qu'en Occident. On
admet d'ordinaire que les armoiries sont dérivées des dessins qu'ancien-
nement (vers l'an 1000) on brodait sur les vêtements de cour ; mais lous les
historiensjaponaisreconnaissentque celte moded'apposer l'armoirie surles
vêtements date du XI v« siècle à peine; les plus anciennes armoiries représen-
tées sont celles qu'on voit sur des voitures impériales conservées k Kyoto.
V'oilà pour l'origine; quanta l'époque, on ne saurait prendre au sérieux les
récits d'allure légendaire qui placent les premières armoiries vers l'an 900 ;
et M. Lange conclut : « Il semble impossible de déterminer à quel moment
un modèle d'ornementation {Muster) qui d'abord a été employé par plusieurs
est devenu le signe dislinctif des membres d'une seule famille ^ » Posée
de cette manière la question est en effet insoluble : car elle sous-entend la
dérivation des armoiries d'après un motif purement ornementaire.
Or nous avons vu que l'autre nom de l'armoirie est Sliirushi, marque, et
que par shirushi on entend aussi plus spécialement une marque domesti-
• R. LtiSGE. Japonische Wappen. Mitloil. Sem. f. Or. Spraclien zu Berlin, t. Vt,
4903, pp. 63-281.
' R. Lange, hc. cit., p. 69.
» Ibidem, p. 73.
4 Ibidem, p. 78.
5 Ibidem, p. 79,
A. VAN GENNEP. — IIKIIaLDISaTION DE L\ MAHOTE DE PROPRIÉTK 109
111
IV
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110 i«« jANviKit 1 <)(>:;
(jiio. D'après ce que je vous ai exiiosô plus haut, cl surtout étant donnée
l'existence de la marque collective de propriété dans des groupements
non répartis en classes, et se trouvant à un stade de développement
éc()nomi(iucct social comparable à celui des anciens. Japonais, on se trouve
conduit à voir dans ces marques le germe des armoiries japonaises, tout
comme elles ont été le point de départ des armoiries turques, allemandes,
russes, etc.
.M. Lange donn;.- lui-même quelques faits qui mettent sur la voie de
cette explication. «. L'écu et plus tard le heaume, le cimier, etc. qui
jouent dans notre Blason un rôle si important ne sont pas des parties inté-
grantes de l'armuirie japonaise ; le bouclier carré japonais a parfois été
orné d'une armoirie peinte, mais il n'est jamais devenu une partie essen-
tielle de l'armoirie même '; bien mieux, anciennement les signes et dessins
ne se trouvaient même pas inscrits, comme ce fut la mode plus tard, dans
un cercle»'. Il semble donc que primitivement l'armoirie, ou ce qui en allait
bientôt être une, s'apposait telle quelle sans encadrement. En outre les
nobles n'étaient pas seuls à posséder des armoiries : les paysans, les ar-
tisans, les marchands, les acteurs et les geishas en possédaient aussi. Ou
du moins ils avaient des shi7-ushi, des marques de propriété individuelles
ou domestiques. Et la récrimination de l'historien Yanagisawa Rikyô qui
vécut dans la première moitié du XVIII* siècle: « même les paysans et les
citadins ont maintenant des armoiries (mon) et font de leur mieux pour en
acquérir, bien que strictement ni paysans ni citadins n'y aient droit ^ »,
doit s'entendre comme ne décrivant qu'un moment du processus d'hô-
raldisation de la marque domestique *. Son caractère ancien de signe
d'appropriation est d'ailleurs resté à l'armoirie : on l'appose sur toutes
sortes d'objets, sur les voitures, les armes, les harnais, les vêtements,
les maisons, les cassettes, les livres (en guise d'ex-libris), etc. M. Lange
ne parle pas de la portée juridique des armoiries et des marques de toute
sorte : mais nul doute qu'il existe dans les ouvrages japonais des ren-
seignements sur cette question qui mériterait d'être traitée à fond, comme
elle l'a été pour l'Allemagne par Homeyer.
Jusqu'ici, je ne vous ai parlé que de marques peintes, brûléesou gravées,
soit de forme géométriques, soit représentant des objets naturels. Mais il
est d'autres procédés signalétiques, l'un des plus répandus consistant à
entailler l'oreille des animaux appropriés. Souvent ce procédé est employé
concurremment avec l'autre : tel est le cas chez les Lapons, les Turcs,
les Arabes, les Sakalava, etc. Or l'entaille sert, elle aussi, non seulement
à assurer la propriété, mais encore à indiquer le rang social du proprié-
taire.
' Jbidem, pp. 73-74.
> Ibidem, pp. 77, 83-84.
3 Ibidem, p. 84.
4 C'est à la môme conclusion qu'arrive M. Gaudcfroy Demombynes dans l'analyse
qu'il a donnée du mémoiro de Lan^^e, Matujues des Armes ait Japon, Revue des Tra-
ditions populaires, t. XIX (1904), pp. 81-8i.
A. Van (iENNEP. — IlKltAr.DISATKiN DE I. A .MAlinlK Dl: l'Ilul'UlÉTÉ MI
C'est ainsi que l'explorateur Douliot Mit des Sakalava (qui se répar-
tissent en nobles et en roturiers*) : k Chaque propriétaire a sa marque
conservée depuis des siècles dans la famille comme un blason; il la trans-
met à ses héritiers et son ancienneté est un titre de noblesse; c'est une
découpure ou une échancrure parfaitement définie comme longueur et
composition; il y aune nomenclature très précise des formes d'oreilles,
constituée par des termes inusités dans d'autres cas, tout comme ceux du
blason. »
Ces faits suffisent, me semble-t-il, pour démontrer la polygénèse du
blason. Partout où sous l'inlluence de facteurs variés (économiques, poli-
tiques, etc.) la société s'est subdivisée en classes^ la marque de propriété
familiale (ou rfomps/Z^fM^) a pris la signification d'une armoirie; dans ce
cas le vocabulaire spécial destiné à désigner les marques simples et
leurs combinaisons a ac([uis le caractère d'un langage héraldique. Il me
semble donc parfaitement inutile de chercher, comme l'ont fait jusqu'ici
les héraldistes, quel a été le centre d'origine de notre blason. 11 s'est
développé de lui-même en partant de l'ancienne marque de propriété
dont l'existence nous est attestée par les vieilles lois germaniques.
Heste la question des emblèmes. Ici l'on est obligé d'admettre une in-
(luence orientale, à la fois persane turque et mongole. Je dis influence :
car ainsi qu'il est arrivé en bien d'autres domaines de l'activité humaine,
les Croisés n'ont fait que développer, suivant une direction plus nette et
plus compliquée à mesure, une institution qui, dans sa forme primitive,
leur était commune avec les peuples au contact desquels il se trouvèrent
pendant les (Croisades. C'est ainsi que sous l'influence des Orientaux les
les couleurs qui distinguaient les boucliers germains reçurent un sens nou-
veau et des dénominations nouvelles; de même les signes d'après nature
reçurent une interprétation symbolique nouvelle.
Et même cet usage dont parlent Tacite et AmmienMarcelHn, de distin-
guer les boucliers ne singularise pas les Germains : vous connaissez les
boucliers armoriés des Masaï, des Wadschagga, des Zoulous, etc. vous savez
que, en bien des régions, les boucliers des membres d'un môme clan sont
ornés du même symbole. Et voici que cette question des rapports de la
marque de propriété familiale et du blason nous amène au totémisme.
La représentation du totem sert chez les Amérindes septentrionaux h,
la fois de marque de propriété et de signe de parenté ' : mais c'est à tort
qu'on l'a assimilée à nos armoiries; elle n'est pas en eiTet une indication
de noblesse pour cette raison que la répartition en nobles et en roturiers
ne s'est pas instituée dans les sociétés amérindiennes. En Australie l'uti-
lisation de la représentation du totem comme marque de propriété n'est
pas générale.
' DOULIOT. — Journal rl'un roi/atje à la cnle ouext de Madagascar, Paris, 189»,
pp. 44 et 60-61.
* Cf. A. VAN Gennei'. — Tabou et Tolémisme à Madat/axcar. Paris, 1904, p. 140.
< Cf. J. G. Frazer - Le Totémisme, Irad. fr.. Paris, 18!J3. pp. 4o-'j7.
112 \\) jANviKu v.m
Pour conclure, on constate donc le fait suivant : les marques de pro-
priété sont lanlol individuelles, tantôt collecliv.?s, suivant la forme même
de la propriété; et parmi les marques collectives, il faut distinguer la
manjue de famille, la marque de clan, la marque de tribu et — dans le
cas où, comme au Hénin ', le roi est seul propriétaire, — la marque du
chef. Celte dernière est déjà une armoirie proprement dite : et parmi les
autres, seules les marques de famille et de clan ont pu être le germe d'ar-
moiries, lesquelles ne se sont établies (jue là où la société s'est répartie en
classes. Quant à la marque de caste, dont l'usage est courant dans l'Inde,
je ne sais encore si elle présente un caractère héraldique.
J'espère vous avoir montré par cesquelques Notes quel intérêt présente
l'étude des Marques de Propriété. Môme sur cette question de la Marque
et du Blason il reste beaucoup de points obscurs; encore est-elle relati-
vement facile à étudier. Il est également aisé de montrer les rapports de
la Marque et du Tabou '. Par contre l'étude des rapports de la Marque
avec les (ribal-tnarhs, avec les différentes formes de la propriété, avec le
totémisme, avec la monnaie primitive, avec les divers systèmes alphabé-
tiques, etc., est assez compliquée, et cela surtout parce que trop rares
ont été les explorateurs qui ont jugé intéressant de dresser des tableaiîx
vraiment complets des marques de ce genre qu'il leur était donné de
rencontrer, et d'étudier la portée, au point de vue sociologique, du signe
d'appropriation.
EOLITHES ET AUTRES SILEX TAILLÉS
Par M. A. Thieullen.
Vous le savez, Messieurs, ceux d'entre les préhistoriens, qui ne s'étaient
pas laissé hypnotiser par Gabriel deMortillet et sa doctrine, avaient depuis
longtemps prévu l'existence certaine et inévitable d'une industrie éoli-
thique ^ Le grand mérite de l'école belge et particulièrement de M. Rutot,
• Cf. H. LiNG ROTH. — Great Bénin. Halifax, 1903. passun.
« Cf. entre autres le chapitre XI (Tabous de Propriété) de Tabou et Totémisme à Ma
dagascar,
3 Lorsqu'eiï 1897, dans mou premier travail sur les Véritables Instruments usuels
de l'âge de la pierre, je tentais, bien inutilement du reste, de rompre les liens dans
lesquels de fau.v prophètes tenaient la préhistoire enserrée, j'écrivais :
« Tout d'abord, constatons la réalité d'un fait capital, qui, malgré son évidence,
« ne paraît pas avoir fixé sur lui toute l'attention qu'il mérite; à savoir que les haches
t chelléénnes que nous avons l'habitude de considérer comme les tout premiers ins-
« truments que l'homme ait façonnés à ses débuts, témoignent, tout au contraire,
t par le fini du travail, par l'harmonie de la forme, d'une civilisation déjà très
i avancée, ou tout au moins très éloignée de son point de départ. Ce n'est certaine-
n ment pas là le produit d'une industrie élémentaire; il faut bien du temps et les
« essais successifs de nombreuses générations, avant d'en arrivera ce degré de per-
A. Tllli:ll.l.i:\. — KilI.ITIIK^ KT AI'TURS SII.EX TMI.I.KS \ \'\
est d'avoir rencoiilré celle iiuluslru' sans mélange, parafl-il, dans un ler-
rain quaternaire déposé anléritiurement au diluviuni de Chi'll.'s, décou-
verte grosse de conséquences.
Le savant géologue i)eige, conservateur du Musée lluyal d luskuiv
naturelle de Bruxelles, vient de faire paraître un travail 1res inipoilanl,
ayant pour litre : (^oup il d'il sur iùlat des connaissances rclalioes ati r iiulus-
tries dtf ta pierre, à l'exclusion du n'olilhique, en 1903.
Disons de suite que ce coup d'œil, restreint aux éolilheset aux diverses
pièces classiques paléolithiques, n'embrasse pas, à quelques exceptions
près, cette immense variété de pierres travaillées par l'homme paléolilhi-
(jue, que le mailrc Boucher de Perthes avaient su reconnaître, mais (jui
sont restées inaperçues ou méconnues du plus graml nomhre des préhis-
toriens, ses successeurs.
Personne, plus que moi, n'admire les belles collections d'éolithes,
réunies au Musée lloyal par les soins de l'école belge, et dont chaque pièce
porte l'empreinte irréfutable de la main d'homme. Ce sont là les chaî-
nons retrouvés qui relient l'industrie quaternaire de Chelles h l'industrie
éolithique des temps tertiaires moyens ; mais lorsque M. Rutot passe de
l'exposé des faits à leur interprétation, lorsqu'il qualifie de retouches
d'utilisation le travail humain, il quitte la réalité pour la fiction, nous
présentant, comme faits positifs et démontrés, les hypothèses les plus
contestables que lui suggère son imagination. Les détails minutieux dans
lesquels il entre, au sujet de ce qu'il appelle avivage par retouches d'uti-
lisation, semblent dépure fantaisie. Sa technologie nouvelle, qu'il géné-
ralise outre mesure, tend a substituer un rituel nouveau aux anciens
dogmes classiques.
Il affirme péremptoirement que, durant le nombre incalculable de
siècles écoulés entre le miocène et la fin du quaternaire inférieur, l'homme
n'a jamais songé, un instant, à tailler les silex, ni a leur donner une
forme intentionnelle quelconque, n'ayant alors a sa disposition qu'un
seul et unique instrument, le grattoir, choisi parmi les éclats naturels
de silex. Puis, après s'en être servi quelques instants, l'homme aban-
flonnait sur le sol ce grattoir ébréché, devenu inutilisable, ou bien, à
l'aide d'une pierre, dite retouchoir, il en avivait le tranchant altéré,
« fection. Ces piùcos, si remarquables et parfois si fragiles, ne sont évidemment que
« des œuvres de choix, qui impli(iuent l'existence d'instruments plus rudimcntaires,
€ d'usage plus courant, de fabrication plus m la portée de tous... II est donc sensé
a d'admettre qu'à l'ùpoque des haches de Ghellos l'outillage était déj'i très varié. »
Bien d'autres préhistoriens, comme je l'ai appris plus tard, avaient fait, avant moi,
la même constatation, M. Chouquet, le premier explorateur des ballastiéres de Chelles,
et M. Florentino Ameghino présentaient, dès 1881, à la Société d'anthropologie, dos
observations très précises à ce sujet; de même M. Del vaux, en 1888, à la Société
d'anthropologie de Bruxelles. Dans ma lettre à M. Chauvet en 1898, je répétais
encore : « Non, le premier outil de pierre fabriqué par l'homme n'a pas été la hache
de Chelles. Non, celte piètre taillée n'a pas eu les destinations diverses qu'on lui
attribue. »
8
soc. d'anthhop. iOÛo.
lU 10 JANVIKH l'JOo
limilaiil ainsi son travail à desiinjiles rcloucliesd'utilisalion plus uu moins
renouvelées.
Non seulen)enl les dessins qui acconipagnenl la brochure, publiée en
1892 par Joseph Preslwich, sur les caractères primitifs des instruments
de pierre du plateau de craie du Kent \ démentent, comme vous pouvez
le voir ici, les assertions de M. Uutot ; mais, chose tout à fait inattendue,
les dessins, que M. Uutot luimôme reproduit, des éolilhes tant miocènes
du Puy-Courny, que pliocènes du Chalk Plateau du Kent, du Cromer
forest-bed, de Saint-Prest et du quaternaire inférieur, ainsi que les déno-
minations diverses et arbitraires qu'il donne h. ces dessins, contredisent
formellement ce qu'il vient d'affirmer. Ce sont : Racloir à encoche, racloir-
rabot, grattoirs simples à encoches, a tranchant transversal, rectiligne,
grattoir très bien retouché, pierre de jet, pointe racloir, enclume, retou-
choir, petit perçoir très bien travaillé, polyèdre grossièrement taillé, percu-
teur taillé sur les deux faces et toute une série de ces soi-disant percuteurs :
pointu, tranchant, accommodé, etc. Que la pierre soit concave, convexe^
rectiligne, pointue^ etc., elle est quand même et toujours déclarée, ou
grattoir naturel, avec retouches d'utilisation, ou percuteur. Cependant,
puisque, d'après M. Rutot, l'homme des temps éolilhiques taillait gros-
sièrement un polyèdre, et taillait un percuteur sur les deux faces, il devait
donc tailler toute autre chose quand bon lui semblait.
Mais je ne saurais mieux faire que de citer le texte même, afin de ne pas
m'exposer à dénaturer les idées de l'auteur.
« L'industrie primitive aux temps éolithiques, écrit M. Rutot, étant
(( homogène, semblable à elle-même depuis le miocène supérieur jusqu'à
u la fin du quaternaire inférieur, il est de toute impossibilité de dater,
« d'après sa composition et son aspect, l'une quelconque de ces industries,
« c'est-à-dire si elle est miocène, pliocène ou quaternaire... La stagnation
« complète de l'industrie éolitbique a di^i vraisemblablement dt'couler
« d'une stagnation semblable de la mentalité, et elle tend à faire de l'huma-
« nité primitive quelque chose de comparable à ce que montrent, de nos
1 Dans les Véritables Instruments usuels de l'âye de la pierre (décembre 1897)
j'iii donné la traduction d'un passage de celte intéressante brochure:
« Contrairement aux instruments des vallées, ceux des plateaux du Kent sont,
« d'une façon générale, des fragments de cailloux roulés...
« Il est manifeste qu'ils sont taillés, puisqu'on peut les classer selon certains types
(I qui sont très grossiers, mais qui répondent aux besoins d'un peuple très primitif. .
a Quelques personnes sont disposées à voir, dans ce travail si faible et si grossier,
« le fimple résultat d'éclats causés par les chocs produits pendant le Iranspoi't du
« diluvium. Cette manière de voir a prévalu un temps, mais aujourd'hui la plus
« simple pratique montre aux yeux exercés la différence qui existe entre ces spécimens
« presque informes du travail de l'homme, et les cailloux du diluvium....
« Il est bien évident que la plupart de ces instruments si grossiers ne semblent se
.< prêter à aucune de nos classiflcations. En cfifet, s'il en est quelques-uns plus dis-
« tincts pouvant rappeler les types de Saint-Acheuî, presque tous les autres sont
« plus rudimenlaires et ont un cachet parti?ulier qui leur est propre. On peut les
« diviser en trois groupes... etc., etc. »
A. Tllir.( I.I.KN. — Kiil.rriIES KT AITIUCS SII.KX TMI.I.KS 1i")
« jours, les colonies d'abeilles et de fourmis, ayant des mœurs acquises
« satisfaisant à leurs besoins et faisant toujours la nnhne chose, .parce
« qu'il est inutile de changer...
« Nous sommes tenl('s de croire (|ut' riiouiinc éi»lilhi(|ue (Hait enlière-
« renient velu...
« Lorsqu'on se livre à des essais réels d'utilisation au moyen d'éclats
« de silex, on reconnaît bien vile que, pour gratter ou pour racler, rien
« ne sert mieux, ne produit de travail plus elïicaceque letianchanl naturel.
u Au bout de quelques minutes d'utilisation, le tranchant naturel est
« émoussé et on ne peut plus en tirer de besogne convenable. Dés lors ce
« tranchant doit être avivé, et c'est pour opérer cet avivai/e qu'a été ima-
« fjinèe la relouche... Suivant l'époque, cet avivage est obtenu soit au moyen
« du retouciioir, par percussion, soit par d'autres moyens connus, parmi
H lesquels la pression. Or, c'est l'accumulation des retouches d'avivage
u qui a été confondue avec un prétendu travail de « taille » préalable à
« l'utilisation '...
» Ouand les amateurs rencontrent de pareils instruments a retouche
<( d'avivage peu avancée, ils les rejettent en déclarant que ce sont des
« déchets, ou des outils mal réussis, ou des ébauches. Ce sont des outils
« dont l'utilisation a été souvent — par fantaisie ou par absence de néces-
« site — moins prolongée que chez les autres.
« D'une manière générale, et a toute époque, un outil réputé « bien
« taillé», est simplement un outil bien utilisé, et plus un outil est « taillé »
M plus il est devenu inutilisable : c'est un rebut.
« Les grattoirs éolithiques sont des fragments irréguliers, dus à l'écla-
« tement naturel, dont on utilise une ou plusieurs arêtes tranchantes
« et qu'on rejette après émoussage de l'arête tranchante utilisée; ou bien
« les arêtes émoussées sont retouchées, et cela par une série de petits
« éclats contigus dont l'ensemble reconstitue un nouveau tranchant.
« Celte retouche peut avoir été opérée une fois, deux fois et même jus-
« qu'à cinq ou six fois sur la même arête, ce qui transforme peu à peu
« l'angle aigu du tranchant en un angle de plus en plus ouvert, jusqu'à
« devenir droit ou obtus...
« L'examen de milliers et de milliers de pièces h tous les stades d'utili-
« sation nous a conduit h cette conclusion très ferme qu'en général ce que
« l'on considère comme a la taille » des silex n'est que le résultat de l'accumula-
«. tion des retouches d'avivage.
« La nécessité de racler et de gratter se manifeste par la présence de
« très nond)reux racloirs ou grattoirs ingénieusement déjà très spécia-
« lises, bien qu'il ne dérivent, en réalité, (jue de simples éclats naturels,
« sommairement accommodés pour la facile préhension et parfois judi-
« cieusement choisis...
' M, Rutcit nous a montré, à Bruxelles, des gral loirs concaves dont la concavilé-
était due, selon lui, à la superposition de retouches d'utilisation cinq ou six fois répé
tées, et non à la recherche intentionnelle de la forme.
WCy VA jANViEii 1905
». Que puuvaii-nt hicii faire les populations éolithiques de la masse de
u percuteurs et d'outils h racler et à gialler (jumelles ont délaissés ? »
A celte interrogation de M. llutot je réjTonds : racloir et grattoir, ayant
la inème fonction, les éolithes se résumeraient donc en un seul et unique
inslriimont, ce (]ui ne paraît résulter ni dos probabilités, ni des faits,
comme nous l'avons déjà remarqué plus baut. Percuteurs et retoucboirs
ne servaient que comme pierres à préparer lesdits grattoirs et à les
aviver. Tout cela ne rappelle-t-il pas, à s'y méprendre, la fameuse affir-
mation de (iabriel de Morlillet, prétendant imposer la bacbe de Chelles
comme premier et unique instrument fabriqué par l'homme paléolitique
à ses débuts; outil qui, du moins, avait l'avantage platonique sur le
grattoir de M. Rulot, d'être baptisé instrument à tout faire?
Si les lois de l'évolution s'appliquent à tous les êtres indistinctement,
je me demande de quelle nature étaient l'instinct des abeilles et celui des
fourmis au moment où le cerveau de l'iiomme présentait, d'après M. Rutot,
tant de similitude avec l'instinct actuel de ces bestioles.
.Mais reprenons les citations qu'il serait utile, ;i mon avis, de relire
plusieurs fois.
« La transition si importante et qui s'accuse comme une des modifica-
« lions capitales dans la mentalité humaine a été rencontrée au seul
« niveau intermédiaire existant entre le cailloutis à industrie mes-
« vinienne et le niveau à industrie chelléenne. On se rappelle que celte
k modification consiste dans l'adjonction subite à l'industrie éolithique
« composée uniquement d'outils, d'instruments à faciès agressif et même
« d'armes obtenus par une véritable taille. A l'époque de l'industrie
« reutélienne (éolithique), il est certain que l'idée de débitage inten-
« tionnel des rognons n'est pas venue dans les esprits *.
« L'industrie de transition du Mesvinien au Ghelléen comprend à la
« fois des outils et des armes. Or c'est la première fois que ce mot
« apparaît.
((. Dans notre revue de tout l'éulithique actuellement connu, nous
« n'avons jusqu'ici rencontré que des outils.
« L'arme, c'est-à-dire l'instrument agressif ou défensif, fait entière-
« ment défaut, malgré la présence, dans réolithique, de la pierre de jet
« qui n'est, probablement, qu'un instrument de chasse.
« Il semble donc que l'homme de la transition, tout en continuant à
« utiliser les éclats de silex comme il l'avait fait aux temps éolithiques,
a ait abandonné son antique mode de retouche au retouchoir, pour adop-
« ter une nouvelle méthode qui parait consister dans l'éclatement par
« pression, sur os probablement...
« Mais peu à peu une branche de la mentalité humaine, jusqu'alors
« non développée, s'est attachée à l'appréciation de la forme extérieure,
« à l'élégance de la régularité des contours, et bientôt les rognons de
' M. Riiiot oublie qu'il a dessiné, quelques pages auparavant, des percuteurs
coliliques taillés sur les deux faces, des polyèdres grossièrement taillés, etc.
A. rilIKILLEN. — EUI.ITlirS ET AI TRES SILE\ TAILLES I I i
u funnes bizarres cl irréguliùros, bien qu'utilisables, uni élédélaissi-s. Le
« choix s'est alors porté sur les rognons aplatis à contour naturellement
K ovale ou auiygdaloïde et il s'est établi cunune une mode, qui n'a- été
« qu'en s'aflirmant dans la suite, la convention d'après laquelle, sans
« (ju'un y trouve en réalité d'avantages spéciaux, il fut admis que les
« formes ovales ou amygdaloïdes étaient plus harmonieuses ou plus
« commodes à la préhension, ce qui attira sui- elles la faveur et la pré-
ce férence... Mais nous sommes loin d'en avoir terminé avec l'industrie de
« transition; nous avons annoncé, en ellet, qu'à la catégorie des outils
« s'ajoutait celle des armes, casse-téte et poignards. Dans la lutte du
« casse-lète, les coups pouvaient se parer sans doute, grAce à une certaine
K habileté, à une certaine souplesse; il fallait établir le corps à corps, et
« c'est dans ce but que le poignard semble avoir été inventé... Pourquoi,
« peut-on légitimement se demander, cette invention des armes qui sem-
« blent inconnues jusque-là '?... Des tribus, se voyant presque subi-
te tement privées d'une de leurs conditions vitales (le silex), se mirent à
« la recherche d'autres gisements de cailloutis. Quelques-unes réussirent,
« mais le plus grand nombre trouva les gisements occupés., d'où, pour la
« première fois, choc d'intérêt pour une cause primordiale d'existence.
« L'équilibre harmonieux qui permettait aux populations éolithiques
« de se laisser vivre sans chercher ni modifications, ni progrès, fut
u rompu; pour la première fois peut-être il y eut des envahisseurs et des
« envahis, des assaillants et des défenseurs en conflit, avec leur triste
« cortège de brutalité et de cruauté. Chacun dut alors s'ingénier à être
a le plus fort, l'un pour l'attaque, l'autre pour la défense...
u (Certaines tribus, plus fortes ou plus heureuses, connurent ainsi
« l'ivresse des combats, les joies de la victoire, le profit du pillage, la
« considération des actions d'éclat et de la puissance; et les mauvais
(( instincts, accrus par le désir de vengence des vaincus, firent de rapides
« progrès'.
« C'est une grave erreur de croire que la pointe mousléiMenne et même
« le racloir soient des instruments fabriqués avec intention, d'après des
K vues conventionnelles.
« C'est l'utilisalion rationnelle de l'éclat par la méthode qu'ont employt'e
« les populations les plus primitives qui produit, avec l'aide d'un certain
« sentiment de régularité, la pointe mouslérienne.
« Celte pointe, dans sa forme la plus typique, est le résultat, sans tour
« de main spécial, d'abord du flébitage intentionnel de rognons de silex
« par percussion.
« Par ce moyen, on obtient une (luanlili' d'éclats de toutes formes.
(«) C.'Uiî n-jrraiiou pliilosopliiquc et (leàcii[)livc pourra'.eiil s'aiipliqiitT, avec plus
do vraisemblance, h. la giiMTJ riissoj ! poniiso acUicll '. Qaatil aux armes, on a tou-
jours cru, jusqu'ici, qu'elles avaient existé, sons nue forme ou une autre, (])ois.
pierre, etc ) à toutes les époques, l'iiommc ayant élé, dès sa venue sur la terre, dms
la nécessité de se mettre en garde contre l'attaque des animau.x dangereux.
IIK ii) JX.NVIKH lUO.")
u parmi lesques il en est toujours au moins un quart ou un tiers présen-
i« tant naturellement et pour ainsi dire fortuitement, la forme générale
« subtriangulairo requise. Ce que nous venons do dire est si vrai que
» môme au Moustier, pour une pointe de forme typique utilisée, il en
(1 existe, tout autour, des quantités de non utilisées, à bords partout tran-
« chants.
II. Pour obtenir, mémo î\ l'époque mouslérienne, une pointe mousté-
« rienne, on ne prenait donc pas un nucléus d'où l'on détachait, avec
« grands soins et précautions, une lame ou éclat avec la volonté de pro-
ie duire la forme d'éclat désiré; non, l'ouvrier prenait un rognon de silex;
« il en tirait successivement dix, vingt, trente éclats, sans précautions
a spéciales, puis, dans l'amas d'éclats gisant sur le soi après le débitage
K du bloc, il recherchait ceux dont la forme naturelle semblait le mieux
« convenir à l'usage et au mode de relouche. Les autres éclats étaient
« abandonnés sur le sol où nous les retrouvons intacts.
« Le ou les éclats choi.<^is étaient utilisés tels quels sans préparation
« aucune, grâce à leur tranchant naturel, bien supérieur à tout tranchant
(( arlificiel; mais bientôt, au bout de quelques minutes de travail, la partie
« utilisée des arêtes étant émoussée, la relouche nécessaire au ravivage des
« arêtes s'imposait.
« Selon la nécessité du moment, ou le nombre d'éclats convenables
« que l'on avait à sa disposition, la retouche pour avivage était répétée
« deux à quatre ou cinq fois maximum; après quatre ou cinq retouches
« d'avivage successives, le tranchant était devenu trop obtus pour pouvoir
« être utilisé avec fruit, sans compter que la retouche méthodique et régu-
« Hère devenait de plus en plus difficile et nécessitait plus d'effort. La
« pointe moustérienne était ainsi produite...
« C'est donc, h notre avis, basé du reste sur de nombreuses expériences
« personnelles, uue erreur complète de croire que les poinles et les racloirs
« moustériens — ainsi que tous les grattoirs et racloirs quelconques —
« ont été fabriqués inlcnlionnellement par « la taille » dans la forme que
(( nous leur voyons actuellement avant usage. Nullement, c'est l'usage pur
« et simple, nécessitant lu retouche d'avivage, qui est la cause du façon-
« nage des pièces telles que nous les retrouvons, toutes les pointes dites
« moustériennes, comme les racloirs de même nom, ne sont que des ins-
« truments plus ou moins utilisés, selon l'importance des retouches...
« En réalité, le Moustérien vrai, au lieu d'être l'industrie la plus ré-
« pandue partout, comme le pensent M>L de Mortillet et ses successeurs,
« est relégué dans le centre et le midi delà France.
« Peut-on saisir la raison de ce fait si étrange à première vue? Certai-
« nement.
« Nous avons vu qu'en Belgique, une diminution très sensible de la
« population a lieu à partir du Chelléen et ne cesse d'empirer jusqu'à
« l'Acheuléen, époque à laquelle la population est tellement faible qu'elle
« devient négligeable, avec indice de disparition prochaine et totale.
« Or nous avons constaté que la belle phase industrielle acheuléenne
A. THIKI I.I.K.N. — KOMTIIKS ET AITHKS S1I,E\ TArt.L'CS I |!)
K concorde avec l'apogi^e du deuxième glaciaire (]ualt'rnaire ; de là ;\ coii-
(( elure<|ue c'est à la fois à la rigueur du cliui.it et aux ddllcultés île la vie
» qui en découlent qu'est due la disparition drs Acheuléens en Belgique
a et en Angleterre, tout au moins, il n'y a qu'un pas.
u La calotte de glace venant du nord, les Acheuléens n'eurent [)0ur
«( ligne de retraite ([ue la direction du .sud. Ils éniigrèrent dune vers le
u sud.
« En résumé, tous les silex que l'on a regardés jusqu'ici comme tailles
(( n'ont cet aspect que parce qu'ds ont été utilisés préalablement aux
u retouches que nous leur voyons, retouches destinées à rendre ces silex
(( utilisables à nouveau, mais devant fournir, par le fait de ces retouclies,
a un travail moins complet qu'antérieurement à ces retouches. . . .
« Aucune découverte d'os travaillés ou même utilisés n'a été faite dans
« les gisements, époque du Moustier.
« A certains moments post-moustériens, l'approvisionnement des silex
« étant près de s'épuiser, on s'aperçut sans doute, qu'à la rigueur des
« fragments d'os pouvaient, en certaines circonstances, remplacer le
« silex rare ou absent. Ce fut ainsi, probablement, que l'usage, d'abord,
« puis le travail de l'os prirent naissance. »
M. Ilutot sera surpris d'apprsndre qu'il aurait pu s'éviter la peine
d'imaginer cette dernière hypothèse ainsi que les considérations ingé-
nieuses sur lesquelles il l'établit, s'il avait regardé au Trocadéro en iîJOO
notre vitrine collective, dans laquelle, avec le D"" Ballet, nous avions exposé
une douzaine de spécimens d'os taillés, récoltés par nous à la base des
alluvions de la Seine et de la Marne, c'est-à-dire dans un milieu où, loin
d'être rares, les silex se trouvent à profusion. Depuis deux années, une
demi-douzaine de ces os travaillés sont exposés dans la vitrine que M. le
professeur Stanislas .Meunier a bien voulu mettre à ma ilisposition dans
la galerie de géologie du Muséum (section des terrains quaternaires).
«. D'une manière générale, continue M. Rutot, on se fait une idée fort
<c inexacte de ce que l'on appelle « la taille » des silex. Par suite de ce
<( qu'il existe dans les industries les plus perfectionnées quelques formes
« d'instruments dont la production exige réellement une véritable «taille »,
(( on s'imagine que ce principe est nécessairement applicable à tous les
« silex, même à ceux simplement utilisés des industries pi imilives. [I n'en
<i est rien, et l'étude très précise et très détaillée que nous avons faite de
« la question par l'examen de milliers et de milliers de pierres à tous les
<< slades d'utilisation, nous u conduit à cette conclusion très ferme qu'en
K général, ce que l'on comidère cominj lu « tailL'. » dea. silex, nest que le résiiUal
« de l'accumulation des relrouclies d'avivaiie dei arêtes pendunl la durée de
« i utilisation, yos anoHves ont donc presque toujours uliiisé de pri'-fé-
« rence — à toutes les époques indistinctement — les tranchants naturels, et
« ce n'est qu'après émoussage de ces tranchants que se faisait d'abord
(' une première retouche, suivie d'une deuxième utilisation, nécessitant
« elle-même une deuxième retouche, et ainsi de suite jusqu'à ce que la
1-20 11» j AN VI Kit 1905
« superposition de ces retouches ait rendu l'arête désormais inutilisable,
« apr(>s quoi l'outil était dédaigneusement rejeté sur le sol. »
Oue de détails accumulés! (l'est ;\ ne pas croire; cela tient de la révé-
lation et de la double vue. J'avoue que, malgré la répétition incessante
des mêmes idées fixes, les assertions de M. Hutot ne peuvent m'entrer
dans la tête.
Aviver et réaviver sans cesse le tranchant ébréché d'un éclat naturel
de silex, au moyen d'une série de petites entailles, semble être un procédé
tout au moins original. Si avivage par retouches d'utilisation superposées
il y a eu, ce que j'ignoi'e, ce système singulier d'affûtage n'a du être usité
qu'à l'état d'exception et non de règle générale., comme le veut M. llutot;
et ce qui me donne à penser que je ne suis pas seul de cet avis, c'est que,
assistant dernièrement h une conférence sur les éolilhes, je n'ai entendu,
à aucun moment, le professeur faire la moindre allusion à la technologie
nouvelle imaginée par M. Rutot, ni parler d'avivage par retouches d'uti-
lisation accumulées.
Les éolifhes sont simplement des rognons et des éclats de silex, à peine
dégrossis, accommodés, avec un minimum de tailles rudimentaires, aux
besoins inconnus cl [dus ou moins limités des premiers humains.
Il n'est pas rare, toutefois, de rencontrer, à tous les stades de l'industrie
de la pierre taillée^ des éolithes mélangés à des silex mieux façonnés.
Rien, en effet, ne permet de supposer qu'il fût interdit de pouvoir tailler
sommairement des silex, autrement dit, de fabriquer des éolitlics, à toutes
les époques de la préhistoire, même à celle de la pierre polie ; observation
qui s'applique, cela va sans dire, à toutes les autres formes; chelléenne,
acheuléenne, etc. Chacun de nos objets usuels n'est-il pas fabriqué simul-
tanément, tantôt avec plus, tantôt avec moins de fini dans le travail?
Le grand mérite de M. Rutot, je ne saurais trop le redire, est d'avoir
pu constater la présence exclusive de ncolithes dans des alluvions quater-
naires déposées antérieurement au diluvium de Chelles. Quant aux hypo-
thèses géologiques, climatologiques, physiologiques, sur lesquelles il
s'appuie comme sur des réalilés, disons qu'elles semblent bien fragiles,
à l'heure où les géologues les plus qualifiés se montrent en désaccord
complet sur le mode de creusement des vallées, sur la façon dont s'est
déposé le diluvium, et même quant à l'existence, plus ou moins probléma-
tique fréelle ou fictive], des soi-disant époques glacières, interglaciaires,
postglaciaircs.
Deux fois nous avons surpris M. Rutot en flagrant délit d'erreurs : dans
ses appréciations sur les pierres-figures à retouches intentionnelles, ainsi
que sur les causes qui ont déterminé l'utilisation des os et le moment
initial de leur emploi. Son travail, quoique contenant des affirmations
trop absolues, des intciprétationg souvent imaginaires et certaines idées
préconçues, est, malgré tout, très utile h consulter. Les causes de la sta-
gnation dans laquelle sont demeurées si longtemps nos connaissances en
préhistoire s'y trouvent très judicieusement déduites; certains faits
exposés présentent un grand intérêt, mais ils devront être sérieusement
A. TIIIKI I.I.K.N. — Knl.nilKS F.T ALTriK> SII,K\ TAII.LKS 121
exaiiiitK's sans aucun parti pris, alin d'évit-r le reproche, qu'ailresse
M. Rulot lui-niiMne aux pn-historions qui ont accepté et colporté d.e con-
fiance les assertions de (iahriel de Mortillct, sans s'être donné la peine de
les contrôler.
Messieurs, je viens, une fois encore, insister «levant vo^is, sur celle
quantité vraiment prodigieuse de vestiges que rhiunm.' préhistorique, au
cours de son exislencp mille et mille fois centenaire, a laissés de son travail
lithologique dans les alluvions des lleuves et dos rivières.
A cette recherche, j'ai consacré plus de vingt années, et, après une si
Ionique étape, je me trouve arrivé au seuil d'une voie sans fin, sur laquelle,
si nous voulons la suivre, nous rencontrerons, chemin faisant, les témoins
de plus en plus nombreux, variés et insoupçonnés de cette industrie de
la pierre taillée, dont l'origine paraît remonter aux dépôts moyens de
l'époque tertiaire.
Le (ih 11)10 (lisce omnes est un adage souvent t- ompeur qui, d'une excep-
tion, tend parfois à faire une règle générale. Une femme rousse ne fait
pas que toutes les autres femmes du même pays soient rousses.
De ce que le faciès d'une pierre ébréchée est le résultat d'un accident,
il ne s'ensuit pas forcément que toutes les pierres ébréchées soient acci-
dentelles. Quelle cause a brisé ce silex? Il faut spécifier. Gel, choc, fis-
sures, sont-ils susceptible?, ensemble ou isolément, d'enlever ces éclats
plus ou moins nombreux qui vont parfois jusqu'à dépouiller complète-
ment le silex de son enveloppe naturelle? Le temps est passé où, pour
masquer son ignorance, on se payait de mots, en invoquant des causes
imaginaires. Aujourd'hui il faut préciser, démontrer, et ne pas se dérober.
Elles sont diverses et multiples, les preuves manifestes de l'intervention
humaine. Les unes dérivent directement de l'aspect de la pièce elle-même,
les autres résultent de déductions que des observations souvent réitérées
provoquent, comme je l'ai déjà montré à propos des tragos, des silex et
calcaires percés, de même que pour certaines formes particulières de silex
naturel qui ont reçu des tailles localisées toujours à un même endroit,
dans un but nettement déterminé, etc.
Mais, il faut le dire, ces remarques n'intéressent pas les théoriciens.
Un des principaux historiens de la Pr.'diistoii-e, m'écrit : « Je n'ai jamais
« douté de l'existence de silex taillés et utilisés qui ne sont pas en posses-
« sion « des signes classiques », seulement je ne sais pas les reconnaitie
u et ceux qui croient les reconnaître ne m'ont pas convaincu. » Autre-
ment (lit : /'uisqitc je ne sais pas, personne ne sauta jamais; donc nen a /aiie.
chercher, c'est perdre son temps.
Ce ne sont là que de pauvres prétextes destinés à donner le change,
afin de motiver une inertie inexcusable.
Que de choses, au premier abord, semblent impossibles à qui ne veut
ni tenter, ni persévérer un certain temps : lire, écrire, parler une langue
m 111 JANVIKIl l'JOo
ôlrangèiv, déchiffrer IV'crilure mu>ioaI(', calculer la dislance de la Terre
au Soleil, prcVlirc les éclipses à jour lixe, h l'heure, à la minute, etc., etc.
Nombreux sont les préhistoriens qui n'ont des yeux que pour les belles
pièces; le reste ne les intéresse pas.
Un maître es pierres taillées, croyant probablement me faiie une con-
cession, se contente de me dire qu'il ne repousse rien à priori, ce qui est
prudent mais insuffi.sant pour faire avancer la question d'un pas. Tout
différent est le rùle d'un chef. Celui qui, par sa situation officielle, a le
devoir de rechercher, dans l'étude de la préhistoire, autre chose que des
satisfactions de collectionneur, n'attend pas patiemment que des docu-
ments nouveaux viennent le trouver, il va au-devant et prend à tâche de
les découvrir, de les reconnaître, de les contrôler s'il y a lieu, partout où
l'on en signale. Nous les foulons aux pieds ces documents; pour les sai-
sir, il suffit de se baisser, et l'on constatera alors que les vestiges litho-
logiques, laissés par l'homme préhistorique, sont à la fois innombrables
et variés: mais que les signes classiques, en tant que témoignages du
travail humain, sont l'exception et non la règle. Tout cela est l'évidence
même et se résume en un seul mot : Cherchez. Mais pour le moment,
c'est à qui se dérobera, et ce sont précisément les plus intéressés à se ren-
seigner qui n'en ont cure. Les leçons du passé ne leur ont donc rien
appris? L'homme serait-il, par nature, plus sensible à l'erreur qu'à la
vérité?
Je voudrais maintenant, Messieurs, vous remettre sous les yeux quel-
ques-uns de ces silex taillés qui existent en si grand nombre, mais que
plusieurs d'entre vous continuent à ne pas voir. Tel est : 1° cet énorme
croissant, dont certaines tailles sont aussi larges que la main et qui peut,
grâce à une taille expressément donnée dans ce but, être posé droit sur
sa base; particularité remarquable qui du reste se représente assez sou-
vent sur des pierres taillées de toutes formes ;
2° Ce puissant cùne tronqué, taillé à ses deux extrémités; hauteur,
33 centimètres; diamètre à la base, 12 centimètres; poids, 10 kilos envi-
ron. Ces cônes tronqués et non tronqués se rencontrent en grand nombre
et en dimensions les plus extrêmes dans les alluvions; ils font partie inté-
grante du matériel lithologique. J'ai perché mon petit oiseau de pierre
sur un spécimen de ce genre.
Quant à cette forte géode, les bords frangés en ont été nettement tran-
chés à l'aide d'un procédé que je ne m'explique pas. Ces trois pièces,
avec beaucoup d'autres aussi lourdes, aussi encombrantes et de dimen-
sion analogue, ont été draguées ;i 12 ou l.j mètres de prondeur, au
contact de la craie, dans une sablière de Billancourt, ce qui est loin de
donner raison aux préhistoriens qui enseignent à tort que ces populations
paléolithiques étaient nomades.
Je dis que pour trouver les vestiges du travail de l'homme préhisto-
rique, il suffit de se baisser. C'est ce que je viens de faire, en passant
dans la rue de Rennes, transformée pour le moment en chantier du
Métropolitain.
A. THIF.l I.I.KN. — EOr.ITIlES ET AUTRES SILEX TAILLÉS 123
Sur un tas de. ballast, j'ai ramassé, en l'espace d'une vingtaine de
minutes, ces douze ou quinze pierres taillées de formes diverses : haches
ou pointes, silex perct's, cupules, croissants, elc , etc. Uemar(|uez l'ana-
logie, comme forme et travail, de ces deux croissants cordiformes, dont
l'un est paléolithique, l'autre néolithique; on les croirait contemporains ;
celui qui est néolithique, et que j'ai recueilli dans la vallée du (irand-
Morin, est le plus grossièrement taillé. A ce propos, voici un croissant
cordiforme qui présente le plus grand intérêt, au point de vue historique.
Sur une minime étiquette, il porte, de la main de Boucher de Perthes,
cette précieuse inscription : « Al/b. 1S17, dans le dilurium suus la rue
Millcroi/e ». Cette pièce du diluviuin de la Somme est, en tous points, sem-
blable à l'une des formes les plus fréquentes que je rencontre dans le
diluvium de la Seine, à Paris nuMiie. et partout ailleurs; vous pouvez en
juger par ce spécimen qui provient de la rue Locourbe, carrière du Mam-
mouth et du Ilenne.
Les silex taillés avec encoches tantôt nalur<ile?, tantiM artilicielles,
existent en quantité énorme ainsi que très variés de forme et de dimen-
sion dans les diluviums Ils ont probablement été utilisés très diverse-
ment, si l'on en juge par leur faciès; chez les uns, l'encoche est coupante;
chez d'autres au contraire, l'écbancrure, souvent simple dépression
naturelle, est mousse, arrondie, comme destinée à polir, à lisser et non
h gratter ; vous pouvez en juger par ces échantillons. C'est là une de ces
fréquentes constatations que seul peut arriver à faire celui qui cherche
sans se lasser, certain d'avoir toujours à découvrir (juelque chose passe
d'abord inaperçu.
Quoique peu familiarisés avec ces pierres d'un travail plus ou moins
rudimentaire, vous reconnaîtrez sûrement, chez chacune de celles que
vous avez sous les yeux, l'intervention de la main de l'homme.
Cette dent de rhinocéros a cela de particulier, qu'elle provient du sous-
sol de la rue de Rennes à l'angle de la rue Coëtlogon.
A ces spécimens gros et moyens, j'en joins une centaine d'autres plus
menus et quelques-uns même d'infiniment petits; car dans ma collection,
qui est peut-être unique en son genre, j'admets, sans distinction de forme
et de dimension , toute roche (silex, calcaire, grès, granit, etc.), sur Uuiueile
je reconnais que la main de l'homme a laissé son empreinte, si faible
soit-elle. Presque toutes ces petites pierres taillées ont été récemment
ramassées par moi sur la voie publique.
A quelques rares exceptions près, les pièces que je vous soumets ne
portent traces ni de signes classi(jues ni de relouches d'utilisation, et
cependant toutes n'en sont pas moins évidemment travaillées intention-
nellement.
La préniéditalion de la forme à donner, ainsi que l'intention apportée
au travail elTectué sont, pour ainsi dire, gravées sur chacune des pierres
façonnées par la main de l'homme ; ce qui n'exclut ni la part, toujours
possible, des hasards de la taille dans la forme obtenue, ni l'utilisation
plus ou moins ingénieuse du faciès naturel ou accidentel de la pierre
124 i\) j\Nvn:it l'JOr;
employée. Tous los moyens ôluiont Ijuiis pour oljlenir la forme désirée,
ce qui n'empêche pas certains procédés d'avoir été pius fréquemment
usités.
{Juc si maintenant vous me demandez à quels usages particuliers (soit
comme armes, outils, signes conventionnels, objets de culte ou de fantai-
sie, etc.) étaient destinées ces diverses pierres taillées, grosses, moyennes
ou petites, je vous répondrai franchement que je n'en sais absolument
rien, sauf pour quelques-unes que j'ai fait connaître. Aussi, craignant de
prendre un fétiche pour un outil, et un oulil pour une arme, je crois
prudent de ne désigner toute pièce taillée que d'après son faciès, pointe,
lame, biseau, croissant, etc.
Est-il possible, par exemple, d'assigner une destination tant soit peu
satisfaisante à ce cœur si remarquablement façonné, à ces petits silex
polyédriques, rappelant assez exactement les formes cristallines du dia-
mant, à ces silex en olive, partagés intentionnellement dans le sens de la
longueur, etc. '.
Il est vrai que je ne suis doué de l'esprit inventif ni d'un Jules Verne,
l'auteur populaire de romans scientifiques, ni de l'un de ces préhisto-
riens qui, d'instinct, ont réponse à tout, m.^.me h ce qu'ils voient pour la
première fois.
On a dénommé hache de Chelles certaine pierre taillée en pointe, n'ayant
aucun rapport de forme ni de fonction avec notre hache à laquelle elle
ressemble comme une pointe ressemble à un disque. Or, la voici, la vraie
hache de pierre, forme ancestrale, prototype de nos haches et hachettes
de fer ; je l'ai ramassée à Paris, rue Lecourbe, dans la carrière du
Mammouth et du Renne.
Un fait existe, on le constate ; mais les causes qui lui ont donné nais-
sance nous échappent presque toujours, et nos hypothèses pour expliquer
ces causes nous éloignent souvent de la réalité. Journellement nous en
faisons l'expérience à propos de faits contemporains très simples, au
sujet desquels nos conjectures sont généralement erronées. Combien plus
rigoureusement cette observation s'applique, lorsqu'il s'agit d'interpréter
' J'avais l'intention de ne présenter aujourd'hui que les plus sauvages d'entre les
pierres taillées de ma collection. J'en ai été détourné par des amis qui prétendent
que je risque de compromettre les résultats en cours, si je soumets ces pierres, qui
exigent quelque attention, à des collègues qui n'ont pas su voir ou pas voulu regarder
des milliers de pierres taillées préalablement exhibées devant eux, et dont le travail
intentionnel s'impose à première vue. J'ai cependant, à tout hasard, apporté une
trentaine de petits croissants de cette catégorie sauvage.
Au début de mes recherc/ies, j'étais loin de soupçonner que Je rencontrerais
preuves sur preuves de l'intervention de la main humaine dans la taille des
pierres paléolithiques, f 'ne des plus inattendues et des plus démonstratives de ces
preuves, celle que mes amùi me reprochent de ne pas rappeler asses souvent, découle
normalement de la reproduction exacte des formes de silex taillés, de petite dimen-
sion, sur d'autres roches de nature toute différente; répliques infiniment nombreuses
en calcaire, mais plus rares en granit, grès, quart: et meulière. Que de problèmes,
insoupronnès des théoriciens, surgissent et se posent nettement à l'esprit du chercheur
affranchi d'idées préconçues!
M. HAllHill.N. — IiKC'Ul VKIllK 11 I N MKMIIIt I'mMIIK SOl'S I.KS Dl'NES 1 ^rl
des faits anciens et qui se sont passés dans un milieu dilTérent de celui où
nous vivons.
Les conclusions prématurées, basées sur des documents insuflisants
ou interprétés trop ;\ la légère, sont les pires obstacles aux progrès d'une
science. .Aussi, le rôle des préhistoriens seuil)le-l-il élre, à cette heure,
d'entasser pierres sur pierres, de les classer, de les étudier, de les com-
parei" sans cesse, avec l'espoir, que de ces matériaux accunmlés, se déga-
geront peut-être un jour certaines lueurs capables d'éclairer quelque coin
obscur du passé mystéi'ieux de l'Humanité.
.Mais en attendant, ayons au moins la bonne foi et le bon sens de
confesser hautement notre ignorance, sans chercher plus longtemps à la
dissimuler sous de vains propos.
DECOUVERTE D'UN MENHIR TOMBE SOUS LES DUNES ET D'UNE STATION GALLO-
ROMAINE AUX CHAUMES DE ST-HILAIRE- DE-RIEZ Vendéei.
Par -M. le U' MAncEL BaudouIiN {de Croix-de-Vie).
Découverte. — En 1902, l'un de nos excellents amis du marais vendéen,
M. Fromenly (de Challans). nous signala que, dans lune de ses propriétés,
à St-lIilaire-de-Riez, il avait cru remarquer la présence, sous le sable
d'une dune, d'ane grosse pierre, en un endroit appelé le Creux d'Argent.
Immédiatement cette dénomination, si caractéristique, nous suggéra
l'idée de l'existence en ce point précis d'une pierre à légende, dans une
contrée où aucun vestige mégalithique n'avait été encore signalé; et nous
résolûmes de l'étudier sans plus tarder.
(juidé par M. Fromenty, dont la maisonnette se trouve au lieudit
des fJ haumes (don[ le nom était autrefois trôsjustilié), nous nous rendîmes,
le 20 août 1902, a l'endroit signalé, correspondant à une notable dépres-
sion du sol d'une sapinière, c'est-à-dire à ce qu'on appelle une (Jonche
dans les dunes d'Olonne, entr'autres.
L'aspect des lieux nous rappela de suite la ^onc/ie Verte, de la forêt d'O-
lonne, où, l'année précédente, avec notre ami G. Lacouloumère, nous ve-
nions de découvrir un menhir sous la dune ' ; et nous fûmes bientôt fixé
sur la nature de la trouvaille, en voyant pointer, sous le sable, au fond de
cette conche, le bout d'une grosse pierre, (jui nous parut être en grès. La
partie visible avait une largeur de 1 m. 40 et une épaisseur de Cm. 50.
Nous nous trouvions très probablement, donc, en face d'un mégalithe
nouveau, caché sous le sable de dunes anciennes, sur lesquelles avaient été
plantées récemment des sapinières assez touffues.
' Marcel Baudouin ET G. r,AC0UL0UMÈRE. — Z,'» Menhir delà Conche Verte dans
les dunes de la Forêt d'Olonne (Vendée). — Ann. de la Sor. d'Emul. de la Vendée,
1901. p. 60-10(3, 7 fifj. Tiré à part, in-8°, La Uoche-sur-Yon, 1902, //>/.
\-2i]
i'.) JANVIR» 1903
Fouilles. — Deux cultivateurs du voisinage vinrent alors avec leurs
pelles pjur déga^ru' la pierre et fouiller au voisinage. Mais, avant de com-
mencer tout travail, nous pûmes photographier les lieux, de façon à con-
server un document scientifique, fixant leur état réel, lors de notre arrivée
{F,;,. 1).
f'ig. i.
Notre épreuve fut faite, comme toujours, à un point cardinal, en
l'espèce du côté Ouest, le seul possible et utilisable, en raison des arbres
plantés dans la conche et de la forme de la dépression, inclinée du côté
de la mer *.
1 Dés le début de 1903, nous avons reproduit cotte photographie, sous forme d'un
dessin très démonstratif, dans un petit article spécial sur les Repères en chronologie
M. beaudouin. — ntcoiVEitTr, d'in mknhiii tomuk sous les uunes 127
11 fut tit'S facile d'enlever le sable do la dune qui élail tombé dans la
(•o»(7<'' L'I qui alleignait plus d'un mètre d'épaisseur (1 m. 50 environ);
puis di' dégager la pierre, car nous savions où elle se trouvait, grâce à
l'extrémité qui pointait à l'extérieur. Et on constata bientôt qu'on avait
aiïaire à un gros bloc, allongé, reposant horizontalement sur le sol, et
manifestement apporté là par les hommes.
On fouilla alors sur les quatre côtés, de façon ii bien l'isoler, et i étu-
dier les parages environnants. Maison ne découvrit alors que celle unique
grosse pierre, accompagnée de petits débris de grès, qui ne peuvent
être que des blocs de calaçie d'un mégalithe.
La face inférieure de la pierre, un peu bombée vers l'ouest, recou-
vrait une sorte de petite excavation du sol, connue des paysans, et cor-
respondant, d'après eux, aune fontaine, où l'on trouvait toujours de Teau
excellente à boire, dès qu'on creusait un peu.
Gela n'a rien d'extraordinaire, car ce point est le plus bas de la couche,
et partant toujours très humide. De plus, dès qu'il pleut, évidemment l'eau
doit se collecter dans ce trou, sous l'extrémité delà pierre. Ce qui explique
pourquoi, en fouillant à cet endroit précis, les gens du pays en rencontrent
constamment, en dehors de la saison chaude.
Une fois la pierre bien dégagée, il nous fut facile de la photographier
en place, et de l'étudier k notre aise.
Folklore. — Mais, avant de la décrire, il importe de souligner qu'avant
notre exploration elle n'était connue d'aucun archéologue. En dehors du
propriétaire, peu de gens en soupçonnaient l'existence; les chasseurs de
lapins seuls de la région l'avaient entrevue sous le sable. Mais, par contre,
presque tout le monde avait entendu parler du Creux ou Trou d'arfjent,
où l'un savait trouver toujours de l'eau excellente, dès que l'on creusait
un peu; et, pour tout le monde, le trou correspondait à l'extrémité ouest
et au bord méridional du bloc, qui est dégagé désormais.
Mais pourquoi ce trou s'appclle-t-il le Creux ou Trou d'argent'^ Tout
simplement, parce que, d'après la légende, ce trou correspondait à une
cachette (placée sous la pierre sans doute) où il devait y avoir un trésor
considérable.
La légende ajoute que les anciens ont cherché bien des fois ce trésor;
qu'ils ont alors vu la pierre (cachée à nouveau depuis par le sable), mais
qu'ils n'ont jamais pu trouver le bout de ladite pierre! La vérité est qu'ils
n"ontpas cherché à en mettre la base aujour (sans ceh, ils y seraient parve-
nus aussi vite que nous!), parce qu'ils ont eu peur de travailler h côté
d'un tel bloc, pour eux entouré de mystère!
préliislorique. — Marcel Baudocin. Les Mérjalithes des dunes comme repère de chro-
nologie préhistorique. La Nature, Paris, 1903, p. 40-41 3 fig. Voir p. 41, fig. 37.—
La vulgaris. scient., Paris, 1905, lo mai, 1 fig., p. 134. - De plus, nous avons cite
ce menhir dans plusieurs de nos mémoires antérieurs [Allée couverte de Pierre-
folle à Commequicrs, p. 79, note 5; etc. etc].
1f>8 19 JA.NVIK» 190.">
l'uiir que cotte légende existe eiicuie et ail persisté jusqu'h nos jours,
il f;nit (lune qu'il ne s'a:j;isse pas là d'une |>ierre naturelle, d'une simple
pici !•(> (lu sol uièuie, ou niéiiic d'un l)loc enaliqui'. l*]n N'endée, en elVel,
il n'y a guère cpie les mégalithes (pii soient la hase des légendes persis-
tantes. La conclusion s'impose : il ne peut s'agir ici que d'une pierre
d'un monument de répo(|ae mégalithique; et nous devrons discuter tout
à l'heure sa nature prohahle, après l'avoir examinée sur toutes ses faces.
llidorique. — 1" D'après ce que nous a raconté M. Fromenty, le Creux
d'urgent, comme fontaine à eau potable, est connu de mémoire d'hommes,
de môme que la légende du trésor caché.
Mais, jadis, et il n'y a pas plus de vingt-cinq ans de cela, l'existence
de la pierre était complètement ignorcîe. Elle n'aurait été découverte h
cette époque que par le père Rondeau, hahitant du voisinage, lors d'une
recherche qu'il fit au Creux d'argent, pour y découvrir le trésor en question.
On raconte qu'on y aurait trouvé, à ce moment ou depuis, car il paraît
qu'on fouilla plusieurs fois, des pièces de monnaie, au niveau du point oîi se
trouve la source ; mais cette donnée est sujette à caution '.
Ce qu'il y a de certain — et c'est ce fait qu'il faut surtout retenir au
point de vue scientifique — c'est que la pierre avait absolument disparu
sous le sable de la dune, au fond de la conche, et qu'on ne l'a remise au
jour, c'est-à-dire retrouvée, qu'il y a 35 ans. Mais l'endroit où elle se trou-
vait exactement a toujours été connu, grâce à la persistance de la Légende
du Trésor. C'est exactement ce qui s'est passé à la Conche verte d'Olonne :
ce qui prouve, une fois de plus, que les « légendes » sont très « vivaces » et
plus durables que les « pierres » elles-mêmes, puisqu'elles subsistent dans
la mémoire des hommes, longtemps après la disparition des monuments
qui leur ont donné naissance!
D'après certains renseignements, que nous avons eu beaucoup de peine
à recueillir etk débrouiller, mais que nous ne pouvons nullement garantir,
les paysans, qui, avec celui qui fit la découverte, virent au début le bloc
du « Creux d'argent », prétendent qu'ils trouvèrent la pierre, non pas hori-
zontale et couchée comme elle l'est actuellement, mais^-^i nettement inclinée
et penché du côté de l'Est.
Cette donnée, si elle était exacte, serait forte précieuse, car elle indi-
querait qu'autrefois la pierre fut dressée, et que par conséquent c'est bien
d'un menhir, tombé du côté de l'Ouest, comme cela est presque la règle
sur les côtes de Vendée, qu'il s'agit ici.
Malheureusement, nous le répétons, il est impossible aujourd'hui de
contrôler scientifiquement ces dires, que nous n'avons pourtant pas pro-
voqués.
2" Nous devons ajouter qu'à la fin de l'année 1904, en arrachant des
sapins dans les Grandes Chaumes, c'est-a-dire dans la pièce même oii se
trouve le Trou d'Argent, et où, en 1902, comme nous le dirons plus loin,
i Cela n'aurait rien d'impossible d'ailleurs, si du moins il s'agit de pièces modernes!
M. lurnariN. — Dicm vkutk d'in micmiik iomiik sdi s les di.nes l2l)
nous avions ilojà découvert des ossements liumninn, M. Fromenly a relrouvé
de nouveaux ossements, en quanlil*' considérable, et, non loin de ces
squelettes, des objets divers, d'après une lettre du 1-i janvier l'JOSde
notre dévoué correspondant.
Situation. — Le (heur d'Aigcnt correspond, d'après le plan cadastral de
la commune de St-llilaire de Riez, au champ ^2o.i, section C, appelé les
Grandes-Chaumes, dont le sol est une dune, plantée actuellement en sapins
et formant désormais un bois important.
11 se trouve presqu'au centre de cette pièce, à 100 mètres environ à
l'ouest de la borderie actuelle des Chaumes, qu'il ne faut pas confondre
avec l'ancienne Cabane des Chaumes, aujourd'hui démolie, qui est enclavée
dans le n^ 209, avec ses dépendances, les parcelles 210, 21 1 et 212, et qui
est distant, environ de Mo mètres du Creux d'Argent.
A l'époque actuelle, le n° 233, jadis très grand, a été subdivisé en plu-
sieurs lopins de terre; mais, pour retrouver la pierre, il suffit de prendre
l'allée centrale de la sapinière, située derriève la Chaumière, dénomination
actuelle de la petite maison neuve de M. Fromenly, dont la propriété s'ap-
pelle aussi les Chaumes.
Voie d'accès. — Les Chaumes ' correspondent à la partie centrale de la
commune de St-Hilaire de Riez. Et, pour y arriver, de la gare du chemin
de fer de l'Etat, il suffit de traverser le bourg, de se rendre au pont de
l'Arche ' par la roule de St-Jean de Mont, de prendre à l'est la route de
N.-D. de Riez, et de s'arrêter en face de la borderie des Chaumes, qu'on
aperçoit sous les arbres sur le côté nord du chemin, après avoir passé le
groupe de maisons dit de la Fenêtre^.
Altitude. — D'après la carte d'état-major et la nature des lieux, l'alti-
tude de cette région ne doit pas dépasser 5 h 6 mètres au-dessus du niveau
lie la mer, car la cote 10 mètres se trouve très au sud-est de la Fenêtre; et
le marais voisin n'atteint pas celle de 3 mètres.
* En dehors des Chaumes, dont nous parlons, il y a, à Saint-Hilaire de Riez, un
autre lieu dit Les Cliaume.t, qui se trouve au nord du Bois Juquaud, dans la presqu'île
des Malles.
* Le Pont de l'Arche se trouve sur l'ètier qui représente l'ancien bras de mer,
séparant /'//c de Riez Aq l'Ile de Sion (Saint-Hiiaire-de-Riez). Cette dénomination fait
snns doute allusion à l'existence d'un point fortifié (arx, citadelle), plutôt qu'à une
« arche » de pont, les ponts anciens n'ayant pas d'arches à proprement parler, et co
pont de Riez étant relativement récent (Voir : Jobarl, Archéol , p. 110).
3 Près de la fenêtre, il y a une fontaine; c'est la plus célèbre dans la contrée pour
la pureté de ses eaux. Elle est très précieuse, car, dans le Marais, l'eau de source
potable est toujours rare. — C'est la fontaine de la Glnjeole, dont le nom sonne
agréablement à l'oreille et dégage un indiscutable parfum de » limpidité »l Gela tient
sans doute à ce qu'elle filtre à travers un sous-sol formé de grès siliceux (Carrière de
la F-'nètrej. Cette dénomination rappelle sans doute un nom populaire de plante
aimant l'huinislitè, peut-être une Iridée [car //'/.v spuria, s'appelle en patois du Sud
de la Vendée : Glajou.c, et on connaît h Glaieul] ci sans doite Iris psfudo-acorus,
assez commun dans le Marais.
soc. D'ANTUnOP. 1905. 'J
i30
li> JANVIKH 1905
Description. — 1. Creux d'Arc.knt. — Le ^;jYMX(/'i4 ri^<'H/ est une conche ou
dépression, 1res visible sui' la pholoi^raphie que nous en avons Jaite
{Fig. i), située aujourd'hui uu inilii'u d'une sapinière.
dette espèce de cuvelle, qui semble creusée dans le sol, mais est natu-
relle, forme un entonnoir (jui a environ o à G mètres de diamètre, à la
surface, 2 h 8 mètres au fond ; elle est profonde d'environ 2 m. 50 à 3
mètres, suivant les points considérés.
Fil/. i>.
Son intérieur et ses talus plus ou moins éboulés sont plantés déjeunes
arbres, qui aiuKMit I humidité (une dizaine de peupliers, etc.), tandis qu'au
voisinage ne poussent, sur la dune aiidc, que de maigres sapins.
Elle constitue donc une sorte de minuscule oasis, au milieu de ce petit
désert de sable qu'est la région des Chaumes, dû évidemment à l'existence
souterraine en ce point d'une source non jaillissante, mais qu'il serait
sans doute très facile de mettre complètement au joui*.
Dans l'hiver, la couche est entièrement remplie d'eau et Veau recouvre la
pierredann son entier; celle-ci devient donc invisible et disparaît pendant
une partie de Tannée : ce qui permet presque de dire que l'on a là, à la
fois, un mégalithe de dunes et un mégalithe submergé! Cette eau provient
en partie des terrains voisins, car la conche se trouve sur le versant
ouest de l'Ile (eau d'écours), en partie de la source sous jacente.
il. PiEiuiE ELLE-MKME. — Actuellement, après avoir été bien dégagée des
sables qui l'entouraient, la pierre du Creux d'Argent est très visible.
M. HAIDOIIN. — KKCiH'V'EnTE u'i N .MKMIIIt TtiMliK SOl'S LES DL'NES
\:\\
Klle est horizontalt'iiii-nl [ilan'c au fond du trou, d»' ti-lli' sorlf ipn^ snu
grand axe est dirigi- de l'ouesl el à l'est.
(hi(')ihilion. — Si c'est un menliir lumljé, elle s'est inidiiit'-i' évideiuiin-nt
vers l'out'st, eoniine on piétend l'avoir constaté autr-efois, avant dtî deve-
nir liuri/oiitali'. Dans ces conditions, sa l'ace inférieure actuelle représente
l'ancienne face nuest et la supé'rieure la face est.
Il ri'sulte delà (jue redressée la pierre avait ses arêtes h peu près nord-
sud : ce (|ui est d'ailleurs ['urirnltition d(î tous les menhirs de la contrée.
Foniii'. — Sa forme, à peu près régulière, est celle d'un parallélipipède
allongé, l'ar conséijuent, il s'agissait, là encore, d'un menhir aplati, ou
mi'uhir plal, comme tous ceux de roche analogue qu'on rencontre sur les
rives de l'ancien golfe de Mont.
Fi(j.[ 3.
j3:> )*• JANVIER iQOî)
Un doit donc lui di^'crire deux faces : supérieure et inférieure ; deux
arêtes : nord et sud ; une base et un sommet.
Face siipcrieure. — C'est prubîiblemenl l'ancienne faCe est. Elle est très
visible sur nos photographies, qui ont été faites: l'une sur le bord de la
concheielle donne une vue d'en haut); l'autre sur le talus ouest du Trou
d'Argent i^ce qui donne une idée de l'arête sud). Elle est plate et sans
aucune particularité (dépression ou saillie); c'est à peine si vers le centre
on distingue une petite concavité {Fig. 3).
Face inférieure. — Comme nous n'avons pas soulevé encore le bloc avec
des crics, nous ignorons la véritable conformation de celte ancienne face
ouest; mais on peut en soupçonner l'aspect, par-dessous les arêtes nord^
etsud, bien dégagées, et surtout au-dessous du sommet (au point où l'on dit
que le trésor est caché !) ; car là nous avons creusé et mis à nu une partie
de celte face, où nous n'avons rien trouvé à noter.
Arêtes. — L'arête nord est bien visible sur l'une de nos photographies.
Epaisse et arrondie, elle est régulière et sans encoche, comme les autres
menhirs du pays. — L'arête sud est analogue, quoique plus faible.
Sommet et base. — Le sommet {Fiy. 3), qui est bien naturel, mais semble
taillé, en raison de la régularité de la taille qui permit de l'extraire de la
carrière d'où sort le bloc, montre de façon très nette que la roche est for-
mée de feuillets superposés, très distincts en ce point. La roche est de co-
loration brun noirâtre, au niveau de la partie qui a été de longues années
exposée à l'air, depuis son dégagement il y a quelque vingt ans.
Il n'y a rien à dire de la base, de coloration presque blanchâtre, qui
forme un bord arrondi ; elle est un peu rétrécie (1 mètre, au lieu de
4 m. 40, largeur maximum).
Dimensions. — Comme la pierre est désormais toute découverte, il est
très facile d'en mesurer les dimensions.
Sa longueur maximum est de 2 m. 50, sa largeur de 1 m. 40, et son
épaisseur d'environ 0,30 cm. en moyenne.
Par suite, son cube est le suivant, si l'on prend la moyenne des lar-
geurs (1 m. 40 maximum et 1 mètre en bas) c'est-h-dire 1 m. 20 = 2.50
X 1-20 X 0.50 = 1 me. 500.
Comme le grès qui compose la roche ne doit pas avoir une densité
supérieure à 2.30, le poids du bloc est de 1.500 X 2.30 = 3.450 kilo-
grammes, Il n'atteint donc pas 3.300 kilogrammes.
Pétrograpliie. — La roche constituante est un grès à grains fins d'un
aspect un peu particulier, presque feuilleté et jaunâtre.
I! ne s'agit évidemment pas ici d'une roche absolument identique à
celle des menhirs des rives du Marais : ce grès n'est pas non plus le même
que celui qu'on trouve dans les environs d'Apremont et dans le sud de la
Vendée maritime, qui est grisâtre, moins grenu, et non feuilleté. II présente
M. HAIDitllN. — DKCdlVKRTK D IN MKNMin TOMHK SOUS LES Dl'XES I ;{;{
un aspect intermédiaire, si bien qu'il nous e>t impossible de soupçonner
son origine. Ce n'est pas, sûrement, dugrès de.Noirmoutier, dutypeàgros
grains ; ce n'est môme pas une roche du type à grains très fins, c'est-à-diro
du type de celui où l'on trouve le ahnlites Sandet/dvnisis. Autrement dit, ce
grès ne ressemble pas aux 7>rs tertiaires qu'on connaît dans le pays.
Il n'est pas comparable, d'un autre côté, au grès dit cénomnnien , par
Walierant !
Dans ces conditions, il nous est impossible de soupçonner son Age et
d'émettre une hypothèse quelconque sur la carrière d'origine.
Certes, ces réllexions peuvent suggérer l'idée qu'il ne s'agit là que d'un
bloc erratique, et non pas d'une pierre apportée en ce point, c'est-à-dire d'un
mégalithe. Mais, cependant, nous ne pouvons admettre cette théorie, en
raison des faits signalés déjh, d'une part, et, d'autre part, de l'absence
de tout autre débris de grès de même ordre dans toute la région, à notre
connaissance. Aussi, si nous avions à émettre à tout prix une hypothèse,
nous nous rattacherions aujourd'hui * à celle d'un bloc de grès des
sables Crnontaniens, mais à une pierre provenant d'un autre lieu que des
sables de cette époque qu'on trouve dans les Chaumes.
Géolof/ie. — Nous avons tenu à déterminer exactement la nature du sol
au niveau du menhir. En creusant un peu au dessous de lui, nous avons
trouvé en eiïet, non plus le sable fin et clair des Dunes quaternaires, mais
un gros sable rouge à gros grains, qui, pour tous les géologues locaux, ne
peut être qu'un sable cénomauienj analogue à celui qu'on rencontre dans
le voisinage, soit près des carrières de la Chevalerie, au suddel'ancienne
fie de Riez, soit sur l'ancien rivage, c'est-h-dire sur la route de Riez à
Commequiers. Par endroit, ce sable est un peu marneux.
Cette détermination s'appuie, en outre, sur ce fait que nous avons
trouvé, au cours de cette fouille, au milieu de ce sable, des rognons de grès
jaunAtres, toutà fait caractéristiques comme grès cénomaniens. L'un d'eux
ressemblait même tout à fait à une boule ovalaire, ayant 6 mètres de dia-
mètre ; il était très régulier et très long ; un autre, très allongé et cylin-
drique, en forme de boudin, se rapprochait de certains appendices qu'on
voit sur les « pierres cornues », bien connues dans la contrée comme grès
des sables rouges.
.Afais cette couche de sable cénomanien doit être \\ très épaisse.
En effet, à 150 ou 200 mètres au sud environ, dans la pièce sablonneuse
de la section B située au sud du chemin de la Noivière, au lief de la Fenêtre,
passant en dessous du n" 253, section C, il y a, à fi ou 7 mètres de ce che-
min, un abreuvoir assez profond (2 m. 50) ; le fond de ce trou d'eau est
constitué par une sorte de marne blanchâtre, qui n'est certainement pas
autre chose que du calcaire décomposé -, très tendre, probablement du cal-
1 Nous avions cru jadis à un gré tertiaire i Sature, 1903, Loc. cit.).
* C Itc sorte de suii.çtance, qu'on appelle du kaolin et de la terre à potier, sur les
lieux mômes, Irailée par HGl dégage du Co -. — C'est donc bien du calcaire.
i;U -2 iKvniKii 100")
caire crétacé (ot non pas du calt-airc oocène). Cela n'a rien d'étonnant,
il'ailleurs, car on sait que vers Couiineiiuicrs, sous les sables et les grès',
jl y a une marne calcaire crétacée ', parfois assez épaisse ^.
IW SEANCK. — 2 FnTJcr 1905.
Présidence de M. Sébillot.
Élections. — M. Déchklette. (^onservalour du Musée <lo lioaiine, est élu
membre titulaire.
MM. Cu.NMNGHAM, prol'osscur à Dublin, il Holmes, conservateur en chel du
Musée national de Washington pour rAnlhropologie, sont nommés associés
étrangers.
M. I.\(;e.nole Smith, sous-Directeur des collcelions anthropologiques et du
Laboratoire d'Antliropologie au Natural Hislory Muséum de New-York, est
nommé correspondant étranger.
Commission de vérification des comptes : MM. Gio\ a.netti. (hRon. Lejeixe.
Commission d'examen de la bibliothèque et des collections : MM. Schmidt,
Anthony, Vauyillé.
* Il y a un gisement important de grès siliceux (cénomaniens saos doute) à la Fenêtre
au sud des Chaumes.
2 Ch. Mourain de Sourdeval (Loc. cit. plus loin) a écrit, à ce propos, cette
phrase très peu claire (p. 165) : Le centre de l'ile « sonjble être une projection d'argile
ocreuse, lancée comme une fusée par le diluvium. qui a couvert la France, en dirigeant
son cours de l'Est à l'Ouest... » Eu réalité, celte « glaise ocreuso », qui lormerail la
charpente de l'ile, surtout à l'Ouest, n'est qu'une marne crétacée, plus ou moins
colorée.
3 Si, à l'oucbt de l'ancienne ilc de Riez, on voitalïluer les sables calcaires cénoma-
niens, par contre, au centre de l'ile et dans sa partie orientale, il doit y avoir un
noyau éocéne, car nous avons vu, récemment, extraire d'une pulite carrière, voisine
de la gare N.-D. de Riez, et actuellement transformée en abreuvoir, des blocs d'un
calcaire tendre, analogue à celui qui constitue le sous-sol de tout le Marais de Mont
et que G. Vasseur a bien étudié dans sa thèse (1881).
Il semble résulter de là que le di'pAt de calcaire éocène, recouvrant les terrains
cénomaniens, n'est resté qu'au centre de l'ile ; il a disparu à l'ouest d'une façon très
complète. Cette disparition est peut-être en rapport avec l'effondi-ement du sol et
'arrivée de la mer à un moment donné en ces régions.
M MANOCVRIEH. — IIAPPORT SUR I.'aNXKE iOOi 135
RAPPORT DE M. MANOUVRIER, Secrétaire-général,
sur l'année 1904.
Mi^ssioiirs ot diors CoHéguos.
Pondant l'annco qui vient de se lerniiner, la Société a très régulièrement et
paisiblement rempli sa fonction. Son travail n"a pas été inl'érienr A celui de la
prospère année précédente. Mais il ne nous en iaul pas moins déplorer, comme
tous les ans. des [terles régulières aussi, hélas! e( qui n'en sont pas moins dou-
loureuses.
La mort nous a enlevé, en 1904, six ilo nos collègues, dont plusieurs étaient
des plus anciens et qui, presque tous, ont contribué puissamment à sa pros-
périté.
Le plus ancien élail !•' If A. Hiici'aii, un ami de Hroca et des plus (idèles,
entré en WVA. On ne le voyait que très rarement aux séances à cause de ses
fonctions de bibliothécaire à l'.Vcadémie de Médecine. Mais on était sûr de le
voir malgré tout aux séances du Comité central chaque fois que surgissait une
difljculté demandant l'intervention des vieux consi'illers, de ceux dont le dévoue-
ment et lexpérience nous présentaient le maximum de sécurité. Après avoir
été longtemps notre bibliothécaire, puis, en 18^,5, notre président, il était resté
bibliothécaire honoraire, mais ce n'était point pour se reposer. Ce membre
qu'on ne voyait iu'csque jamais était un des plus actifs pourtant. Car c'était
lui qui, bénévolement et avec une ponctualité louchante, se chargeait de ré-
diger les tables annuelles, analytiques, de nos Bulletins. El nous savons tous,
pour en avoir [irofité bien souvent, quelle conscience et quelle com[)étence aussi
apparaisscnl dans fcs tables. Klles étaient pré[»arées. on le voit, avec le sen-
timent d'un èrudil qui connaissait bien l'importance de sa tAciie nWht à la
fois aux auteurs consultés, aux investigateurs consultants, aux leclours ordi-
naires, à la Société d'.VnIhropologie, à la science par-dessus tout, tiu jimt dire
que c'est là une jolie lâche pour un nulhropologislc ayant quelques loisirs. La
place de notre regretté Dureau parmi nous est à prendre et nous espérons
bien qu'il se trouvera un de nos collègues pour s'en emparer généreusement.
A la grande perle sur laquelle je viens d'insister, parce qu'elle s'est produite
pendant les vacances et que personne fl'entre nous ne se trouvait là pour rendre
à la mémoire du If Dureau Ibommage que nous lui devions, s"<'sl ajouté le
décès du Marquis de .\adaillac, celui d'un ancien Président .Vndré Lcfèvrc et
d'im ancien Secrétaire-général-adjoint, («irard de Kialle. Encore trois anciens :
1869, 1874, 1864... et trois noms qui honoraient grandement notre annuaire.
Mais notre Président sortant, M. Deniker a déjà rappelé leurs mérites en
exprimant les profonds regrets que nous causent des perles aussi dillicilcmenl
réparables. .Ii- dirai seulement, à propos de Girard de Ftialle, que la Société
apprenait sa mort presque en même temps fju'elle le nommait vice-Président
pour l'année présente. Il était sur le point «le revenir en France et de travailler
avec nous après être resté longtemps au •IbiJi comme ministre plénipotentiaire.
Nous devons, il me semble, garder vacante jusqu'à la fin «le l'année, la place
de vice-Président que lui ont justenuMit attribuée les unanimes suffrages de ses
collègues. Nous avons d'ailleurs un deuxième vice-Président. M llaveluy, dont
la présence ne nous fait jamais défaut.
Un cinquième décès est à rappeler en dernier lieu, parce que c'est celui du
136 2 FKVPiEH 1905
monibre l»> moins ancion imrnii les disparus, le D"" Alban Foiirnicr. Ce « moins
ancien » parmi nos regrotlés confrères faisait rependant partie de la Société
depuis 26 ans et lui est resté fidèle, malgré son éloigncment de Paris, jusqu'à
la fin.
Les exemples de ce genre sont i^i noter Imimi (juils ne soient jias rares, car
ils font honneur à InSoeiélé. Ils montrent i\\u^ des membres très éloignés, em-
pêchés par leurs occupations professionnelles ou par toute autre cause de se
livrer à des travaux de recherche, n'en trouvent pas moins quelque satisfaction
inlellectuelle et morale ù rester membres titulaires. Ces membres apportent, en
summe, une sérieuse contribution i\ l'avancement de la science anthropologirjue,
autant par linlérêt qu'ils lui témoignent que par le concours jjécuniaire indis-
pensable et à la longue important qu'ils lui fournissent.
Dans les sociétés scientifiques ouvertes comme la nôtre à un nombre illimité
de personnes, il y a naturellement des membres de passage en quebjue sorte
dont la liste se renouvelle trop rajjidement. Mais il y a aussi un vieux fonds
composé de membres qui, au delà et au-dessus dequehiues avantages personnels,
ne perdent point de vue un intérêt général auquel ils peuvent s'honorer à
juste titre de rester attachés. La qualité de vétéran n'implique-t-elle pas, à elle
seule, un ensemble de qualités d'esprit que l'on sait reconnaître dans notre
société comme dans toute association scientifique?
Cela n'aurait pas besoin d'être dit si chaque année (|uelques membres trop
modestes ne se croyaient tenus de démissionner parce qu'ils ne peuvent plus,
disent-ils, participer activement aux travaux ou assister aux séances de la
société.
En 1904 le nombre des démissions s'est élevé à 7. II a été heureusement
dépassé par celui des admissions nouvelles, au nombre de 8. Mais en raison
des décès mentionnés plus haut le minime accroissement obtenu l'an dernier
se trouve remplacé cette année par une légèi'e diminution du nombre des
membres. C'est-à-dire que nous sommes toujours dans cette période de faibles
oscillations dont je ne vois rien à dire, cette année, de particulier.
Cependant, au sujet de l'influence que peut avoir sur le recrutement de notre
société la formation de nouvelles sociétés scientifiques s'occupant de ques-
tions connexes avec lAnthropologie, une constatation semble d'ores et déjà être
possible à propos d'une de ces sociétés qui fut regardée par quelques uns, à
son récent début, comme devant enlever beaucoup de membres à la nôtre.
Nous savons aujourd'hui que cette influence a été tout juste perceptible. La
raison en est qu'entre le Préhistorique et la Société d'Anthropologie de Paris
existent des relations d'évolution en commun et des liens créés par des services
mutuels; ensuite, que cette union n'a été le résultat ni de la fantaisie des gens
ni du hasard. Elle est résultée de rapports et de nécessités d'ordre logique,
par conséquent supérieurs à toute convention. Logiquement et scientifiquement le
présent et le passé de l'humanité sont liés comme l'avenir au présent.
On a toujours compris cela dans notre Société et l'on n'y est pas près de
l'oublier. C'est pourquoi les paléthnologucs se sentent chez eux et sur leur vrai
terrain à la Société d'Anthropologie.
A propos de cette liaison nécessaire, la Société apprendra certainement avec
plaisir que la conférence Broca sera faite en 1905 comme en 1904 par un
éminent confrère de province. M. Chantre traitera sans doute de l'Ethnologie
égyptienne ancienne et moderne. Ses recherches très considérables sur cette
matière viennent d'être exposées, il e§t vrai, dans un superbe ouvrage, mais
M. MANi»! VHIKR. — IlAl'PORT SUU l'aNNKE 1004 137
lo livre cl la conférence se coraplèlenl mutuellement, et la conférenci' Broca
de 1905 sera comme celle de M. Cartailhac un événement lienienx |,oiir le
public parsien.
Pour la conlërenee transformiste, nous avions compté sur un sav.mt iinato-
miste également éloigné <le Paris, M. li^ Professeur Testut. Notre dévoué
collègue a été empêché par l'état de sa santé, mais nous espérons que ce motif
no tardera pas à disparaître.
Il me reste à parler. Messieurs, du détournement commis au préjudice de nos
linaneos. Les membres de la Société en ont été informés {)ar le rapport de la
Commission annuelle île vérification dos Comptes. Le travail ordinaire de celte
commission tirée au sort a dû être remplacé celte année par une expertise appro-
lonilie ordonnée par le Comité central et laite par un comptable spéeialiste ap-
partenant i\ la Société générale de crédit, dépositaire de nos fonds. Lerapportde
la connnission ayant été expédié aux membres par son rédacteur, avant même
(favoirété imprimé pour le Bulletin, cette irrégularité regrettable a fait conce-
voir à des collègues de province des inquiétudes qu'il importe de dissiper.
Les détournements conimis par notre comptable, et qui duraient depuis
plusieurs années, consistaient en une mise en coupe réglée, pour ainsi dire, des
économies réalisables parla société, mais seulement de ces économies. Anodins
autant que chroniques ils étaient pratiqués, en outre, si adroitement, qu'aucune
des multiples vérifications statutaires très régulièrement prises r:liaque année
contre de tels accidents n'a réussi à nous protéger.
Comment un trésorier dont les hautes capacités financières égalaient la solli-
citude, comment les commissions annuelles tirées au sort et dont les vérifica-
tions étaient contrôlées strictement par un expert professionnel, comment ce
triple contrôle n'nboutissail-il qu'à dos compliments à l'adresse de l'agent infi-
dèle ? Il a fallu un heureux hasard pour nous l'apprendre.
Pour s'apercevoir du vol, et aussi pour le prévenir, il eut suffit de ne pas con-
sidérer comme authentiques certaines écritures qui étaient fausses; tout sim-
plement ! Le malheur, c'est qu'il est moins facile d'être perspicace à temps que
de faire après coup des réflexions aussi judicieuses que la précédente. Après les
aveux explicites du coupable contrôlés par un expert, il n'est pas malaisé de
spécifier la précaution précise qui eût empêché le vol d'être commis... de la
façon dont il a été commis. Mais si vous avez longtemps affaire avec un larron,
vous finirez toujours par être volé. Celte remarque fort juste émane d'un de
nos collègues instruit à ses propres dépens; elle me semble comme elle a semblé
au Comité central devoir être, en cette affaire, le vrai mot do la fin.
En somme, la Société, qu'on le sache bien, reste financièrement prospère.
Pour employer une expression commerciale elle n'a pas cessé d'être fort au-
dessus de ses affaires, et ce n'est point une diminution sans gravité de ses
avances pécuniaires qui l'empêchera de se maintenir à la hauteur de son rôle
6cienlifi(pie.
138 - KKVIIIEH lOOo
RAPPORT DE W. HUGUET, Trésorier.
Messieurs,
J'ai l'honnour de vous soumetlre l'exposé de notre situation financière
pour l'année expirée le 31 décembre 1904.
Je crois devoir la résumer en trois tableaux présentant :
Tableau A. — Les opérations financières de l'exercice 1904.
Tableau B. — L'inventaire de notre avoir à la fin de ladite année.
Tableau C. — Budget de prévision pour l'année 1905.
Tableau A.
RECETTES
Ordinaires :
Droits d'admission 240 »
Rachats de cotisations 700 »
Cotisations antérieures 630 » ]
— exercice 1904 6.210 » î 6.870 »
— — 1905 30 » )
Recouvrements de tirages 77 80
Vente de publications à la Société 291 65
— chez Masson 940 90
Souscription de l'Etat 1.000 »
Intérêts des fonds placés 93 05
Bénéfices divers 17 95
Arrérages de valeurs 2.947 50
Extraordinaires :
LegsAudiffred 1.548 05
Total des recettes 14.726 90
DEPENSES
Ordinaires :
PrixFauvelleà M. Rabaud 500
— Godard à M. Huguet 350 » 1 ^nn
Mention h M. Niceforo 150
A reporter 1.000 »
(tAl'lMiUT ItK M. limiET, THKS<iUli:i{ 139
JirporI ..."... 1.000 D
Frais g/'iKTaux :
Appoinlemenls et y;ralilicaliMns 1.974 UO
AHranchissemenls ^*^8 90 i
Chauffage 243 55 '
Eclairage ^" 30 3,890 05
Papeterie 295 60
Frais de bureau. — Entrelien 404 2o
Frais d'encaissement et droits de garde . . 115 55
Augmentation de la collection 66 »
Dépenses pour le mobilier 67 »
Achats de livres (bibliothèque) 248 65
Frais de publication 4.132 3o
E.rtranrdi)i(nn'S :
lléfeclion (lelasalle 549 60
Expertise de la comptabilité «^00 »
.\chal di" roiintmic '^0 "
Total des dépenses 10.303 65
Nos ressources de toute nature se sont élevées à . . . 14.726 90
Nos dépenses ont été de 10.303 6B
Ce (jui (liiiitie un excédent de recettes de . . . 4.423 25
qui ajouté à notre avoir disponible au l""" janvier 1904 :
1" Réserve disponible 9.199 44 j ^^ ^^^^ ,.^
2" Provision pour prix 2.750 30) "
(limiic un total di<i)onible de 16.372 99
De cette somme il y a lieu de déduire :
\" Le montant du détournement (pour
solde) 9.290 « j
2" La cai)ilalisalion du legs Audiffred . 1.548 05 f ^ r^-^-^ ^-
3" La capiLalisalion des droits d'admis- i
siôn et de rachats 535 52 )
(le qui ramène le reliquat libre à .... 4.999 42
Représenté par :
Réserve disponible 1.415 42
Provision pour prix 3.584 »
Tableau />' — Bilan au 31 décembre 1904
ACTIF
Encaisse :
Espèces entre les mains du trésorier . . . 515 68
Fonds placés à la Société Générale. . . . 5.945 79
Créance sur MM. Masson et C» 940 90
A reporter . . . 7.402 37
UO 2 FKVUIEU 11)05
%or/ .... 7.402 37
Porlofouille : (Prix d'achat).
Valeurs disponibles. . . 45.0'J3 01) /
— non disponibles . 51.780 » j ^^^-^^'^ 0'* 104.275 40
P.^5.M1'
Capital :
Fonds destinés aux prix 51.780 »
Droits d'ailmission 5.430 95
Rachats de cotisations 10.700 »
Dons et legs 14.072 90
Réserve :
Disponible 1.415 42
Capitalisée 8.289 24
Mémoires à payer 2.402 95
Provision pour prix h distribuer 3.584 » 104.275 40
Tableau c — Budget de prévision pour l'année 1905
KECETrKS
Droits d'admission 300 »
Rachats de cotisations 000 »
Cotisations 6.800 »
Vente de publications h. la Société .... 300 »
— chez Masson . . . . 900 » 1.200 »
Souscription de l'Etat 1.000 »
Arrivages de valeurs de Bourse 3.135 »
Intérêts de fonds placés et bénéfices divers 50 »
Total des recettes prévues 13.085 »
DÉPENSES
Prix Fauvelle 2.000 »
— Godard 500 »
Frais généraux :
Appointements 1.700 »
Affranchissements 700 »
Chauffage et éclairage 250 »
Papeterie 150 »
Frais de bureau 125 »
— de recouvrements 125 « 3.050 »
Bibliothèque et Collections 500 »
Publications, impressions 4.000 »
Reliure et gravure 800 » 4.800 »
Travaux d'entretien et réparations. . 300 »
Dépenses imprévues 200 »
Total des dépenses prévues. , 11.350 »
D'où il repsort un excédent i . 735 '
ItKRTHOLON. — S'OtES SI'R I.K >iiM liK MM ItKS l-il
M. IIkrvk olTre à la Sociéli' le poitrail d'Abel llovulacque, ancien Prési-
dent de la Société, ancien Directeur de l'École d'Anthropologie, (jui par
ses travaux si nombreux et si remarquables, mérite une place parmi les
savants dont la Société conserve fidèlement la glorieuse méindiri,'.
M. Ilir.iET présente des photographies sur la maladie du sommeil.
note sur le hom de i maures »
I'ar m. lk I)"" Bertholon.
Les divers auteurs qui ont recherché l'étymologie des noms africains
ont généralement fait fausse route. En efTet, quelques-uns hypnotisés par
le fait historique de la fondation de Carthage ont tout voulu expliquer
par le phénicien. Sous ce rapport, Bochart n'a pas été surpassé. D'autres
auteurs ont pensé que le langage berbère moderne pouvait leur donner
la clé de l'étymologie de ces noms anciens. De paît et d'autre l'erreur est
la même. La population de l'Afrique du Nord a été sémitiséeà une période
relativement récente par la conquête arabe. Primitivement, elle n'était pas
sémitique. Ce n'est pas de ce côté qu'il faut faire des recherches. Ce n'est
pas non plus du côté du berbère, car le berbère est une langue plutôt
moderne. Elle est née à la suite du contact du monde libyen parles con-
quérants arabes^ de même manière que l'anglais s'est formé après la
conquête normande, par l'action du français sur le saxon. Or on ne sau-
rait expliijuer avec sûreté une langue antique au moyen d'un dialecte
moderne, comme le berbère.
Pour ne pas procéder, d'une façon aveugle, dans l'interprétation, il fau-
drait commencer par établir la place du libyen et de son dérivé très altéré
le berbère, dans les grands groupes linguistiques. Bien des hypothèses
ont été émises à ce sujet. Nous ne les discuterons pas ici.
Au lieu d'hypoihèse, nous avons interrogé l'histoire. Celle-ci nous
apprend (jue de nombreuses tribus ont passé d'Europe ou d'Asie mineure
en Libye. Les documents de l'ancienne Egypte mentionnent ces faits
d'une façon indubitable. Le folk-lore de la Grèce épique permet égale-
ment de se rendre compte que le souvenir de ces grandes migrations
proto-historiques avait persisté dans le monde hellénique. La classifica-
tion des légendes ayant trait à la Libye nous a fait reconnaître des cou-
rants venus de divers points.
1° Courant venu del'Argolide (Mythes d'Io, Danaos, Perseus, Acacallis)
de 17Û0 à 1380 environ avant notre ère.
2° Courant venu de Thessalie (Aristaïos, Kyréné, ïeutamos, Jason) de
1330 environ à 1280, avant notre ère.
3" Courant thraco phrygien (Tliymoïtes, épopées homériques, Tyr
senos, compagnons d'Hercule de Salluste, .\mazones libyennes (1200 k
1000 av. notre ère).
442 -2 vh-MKH 190")
J'ai exposé dans un ouvrage spécial ces sources historiques *. Puisque
le Nonl de rAfri(|ue a été con(|uis par des tribus émign-es des deux rives
de la mer Kgée, il était lugi(jiit' de supposer (|ue ces trihus avaient imposé
leur langue avec leur domination. Des recherches, dans ce sens, ont
confirmé ce raisonnement. L;i langue des anciens habitants de l'Afrique a
un fond apparenté de très près avec les dialectes helléniques. Ce fond est
fort appréciable, comme je l'ai démontré, dans les dialectes berbères con-
temporains. Plus on remonte vers les temps anciens, plus l'influence hel-
lénique devient prépondérante, dans le langage de l'Afrique.
Ces données permettent de fixer avec une certaine certitude l'étymologie
des noms de Maure et de Berbère que M. Atgier le premier a entrepris
d'élucider dans sa communication récente à la Société d'Anthropologie
et après lui M. Bloch.
Dans maM?T, il est inutile de chercher d'autre élymologie que le grec
{laùpo;, noir : c'est une appellation- basée sur la pigmentation des tribus
asservies par les immigrants à peau claire — les Tahennous des Egyptiens
— envahisseurs du pays.
D'ailleurs, leS|jiaûpot proprement dits, n'étaient pas les seules tribus à
peau foncée du .Nord de l'Afiiquc.
On connaît des Erebeidon au sud des Dolopes (de èosSo;; foncé et eîoo; face).
11 y avait des Mélano-fjélides, ou Gétules noirs appelés ainsi pour les
distinguer des Gétules blonds de l'Aourès. Le nom des Ethiopiens A-.OioTTîi;
(Hom. llerod. Ptol.) signifie les visages brûlés.
Ces divers noms paraissent s'adresser à des groupes humains que nous
connaissons en .\frique. C'est ainsi que les Mélnno-Géfales pourraient être
les indigènes au type biuu très foncé appi^lés pir M. Collignon ' type des
oasis. Ce type est assez fréquent parmi les tribus serves des Touareg.
Les gravures rupeslres du Sud-Oranais figurent des individus dont les
cheveux sont arrangés à la manière des Bedjah ou Bichariés actuels.
D'autre part, l'étude des poteries néolithiques du Sahara a montré ;i M. le
professeur llamy, que ces terres cuites avaient été primitivement « pous-
sées dans des récipients en vannerie de fabrication plus ou moins compli-
quée, qu'on a brûlés ensuite à un grand feu, qui du môme coup cuisait à
peu près les parois. » M. Ilamy, ayant essayé de reproduire les dessins de
ces terres cuites au moyen de vanneries de provenances diverses, n'a pu
le faire qu'avec des paniers provenant du Somal -.
En rapport avec ces deux constatations, il existe^ tout au moins dans le
Sud Moghebin, des populations à teinte foncée et à fond rougeâtre. Ces
populations, que l'on est tenté de nommer noires, se donnent l'appellation
de rliomri, rouges. Parmi les types Bedjah que M. Chantre a photogra-
phiés et mesurés, dans son magnifique ouvrage sur l'Egypte ^ (Fig. 136,
* « Le3 premiers colons de souche européenne dans l'Afrique du Nord, Paris-
Leroux » 1899.
• Bull de géog. hixl. et descriptire. T. I, p. 181, 1880,
' H.*.MY. — Esquisse anthropologique de la régence de Tunis, p. 6.
^ Chantre. — Recherches anthropologiques sur l'Egypte. Lyon, 1904.
ItHKTHul.uN. NOTKS SLH I.K N(i.M 1>K MAIUES iAS
i37, 138, lil, 142, 148), on reconnaît de nombreuses figures que l'on
rencontre fit-queminenl en pays ltarljares(jue. Ces populations foncées peu-
vent correspondre aux anciens Ethiopiens. M. Bloch a réuni des documents
historiques concernant ces races primitives*. Ajoutons que la race doli-
chocéphale pentagonale î» face disharmonique n'a pas, tant s'en faut, le
teint clair.
Cet ensemble de faits biièvement résunn-s montrent (|uedes peuplades
au teint foncé paraissent avoir occupé le Nord de r.\fri(|ue au moment
de l'immigration berbère. Celte circonstance justilie l'emploi du nom de
ijiajpot, qui leur a été donné alors. Ce nom appliqué à certaines tribus
spéciales est devenu dans la suite une expression géographique s'adres-
sant ;i tous les habitants d'une contrée.
Le nom s'est étendu à notre époque, voici de quelle faron. i^es Musul-
mans envahisseurs de l'Espagne, venant du Maroc, ont re^u indistincte-
ment le nom de Mores. Quant il furent expulsés, la plupart se réfugièrent
dans les villes de la cote nord-africaine. D'où le nom de Maures que l'on
applique aux citadins : bien qu'ils soient, en général, plus blancs de peau
que la population ambiante. .Ajoutons que ces citadins, appelés <' maures »
par les élrangers, ne connaissent pas eux-mêmes ce mode d'appellation.
Ceux qui sont originaires d'Espagne se désignent sous le nom d'Andelsi
(.\nda!ous). alniire est une dénomination comparable à celle (pie nous
employons par exemple pour les Allemands qui s(i nomment Di-ustrki' ou
pour les Grecs qui portent le nom ù' Hellènes. Elle est fausse et selon nous
ne saurait entrer comme argument sur l'origine du nom antique des Mau-
res,comme .M..\tgier l'a clairement fait ressortirdans sa communicition.
La terminaison o'^T-.ot de \ltjovj<s\.'ji est fréquente dans les noms ethni-
ques libyens. Nous relevons dans Ftolémée les tribus suivantes : Koioau-
cijjto'., Naxui-cijjt'jt ; TaXao-ojaioi, MojyO-ojJtoi, Ma-;(-o'j<itoi, StYtTiX-ci'jj'.oi.
Cette forme de dialecte local montre que le nom de u^ôpoi était bien un
mot du pays et nom une appellation conventionnelle, comme, par exemple,
celle de maures des villes ou du Sénégal. Elle était antérieur»; à l'arrivée
des llomains dans le nord de r.\fri(jue.
Os diverses raisons paraissent condrmer l'opinion de M. Atgier rela-
tivement à l'origine du moi maure, s'étint adressé primitivement à des
populations de teint foncé. En résumé le nom de .Maure provient du gn'C
ijiajso; etsignilia't primitivement noir. (Généralisé à la population d'une
contrée, il a pris un sens géographique.
Discussion.
M. Atgier. — Le mémoire (juc je viens d'avoir l'honneur de vous lire
de la part du b"" Bertholon, de Tunis, dont les savants liavaux sur l'An-
thropologie du Nord de l'Afrique sont très connus et des plus appréciés
* Bloch. — « Races noires indigènes anciennes dans l'Afrique sept. « Congrès de
Carlhage k. F. A. S.
iU t\ JANVIER 190d
a été écrit h la suite de sa lecture du mémoire sur les Maures que j'avais
lu Ji notre séance du 17 décembre 1903.
J'avais, en ciïet, interviewé Bertholon à ce sujet, dans une lettre;, afin
de connaître son opinion des plus autorisées sur celte intéressante question
ethnique et linguistique que j'avais traitée devant vous, qui avait été
l'objet d'une controverse de la part de nos collègues, MM. Deniker et
Muguet et qualifiée par le D' Delisle de dénuée de toute preuve sérieuse.
(T. IV, p. rr2-i.)
Je suis donc heureux de voir aujourd'hui qu'un des plus qualifiés sur
ce sujet comme arabisant et berbérisant ne fait que cori"oborer l'opinion
que j'ai émise et qui ne paraîtra plus, je l'espère, dénuée de preuve sérieuse.
L'étude aussi savante qu'ardue à laquelle se livre actuellement Ber-
tholon dans la langue et la grammaire berbère dont il a si bien su dési-
gner les éléments libyens, grecs et phéniciens, le qualifiait mieux que
qui que ce soit pour trancher ce litige.
Je me permettrais toutefois une seule réflexion sur le mémoire que je
viens de lire de lui, non sur le fond, puisque nous partageons la même
opinion à son sujet, mais sur une question de détail.
Il avance que la population de l'Afrique du Nord n'a été sémitisée que
par l'invasion arabe du vii^ siècle, j'avoue que je serais moins aiïirmatif
à cause des invasions antérieures venant de Phrygie, de Phénicie, d'Asie
par l'Egypte, etc.
Pendant mon séjour en Algérie, dans des milieux purement kabyles
tels que les montagnes du Zacar (en 188"), du Djurjura (en 1888), du
Babor (en 1889), la population ne m'a paru nullement arabisée; les
mœurs et coutumes sont uniquement kabyles, les mariages n'ont lieu
qu'entre Kabyles, les types sont ou aryens ou sémitiques, ou aryo-sémi-
tiques, mais n'ont rien de l'Arabe, car ces deux types, arabe et berbère, se
distinguent facilement l'un de l'autre. Ces Kabyles sont restés Berbères
sur leurs montagnes comme nos Savoyards et nos Auvergnats de la mon-
tagne sont restés Celtes. De chrétiens qu'ils étaient du temps de la domi-
nation romaine, ces Kabyles ont adopté la religion du conquérant arabe,
mais sont restés indemnes de mélange arabe dans les divers îlots ethniques
cités.
L'élément sémitique de leur type et de leur profil en particulier ne pa-
raît pas provenir de croisements avec les Arabes; mais paraît avoir
préexisté à la conquête de ces derniers.
Depuis que ma communication sur les Maures a paru dans nos bulletins,
j'ai reçu du colonel Leguay qui a vécu en Tunisie, en Algérie et au Maroc,
sur la 3« signification, que j'appelle « historique « du mot Maure, la judi-
cieuse observation suivante :
« J'ajouterai à votre 3» signification que si le mot Maure est appliqué
parfois à toutes les populations musulmanes du Nord de l'Afrique, il est
plus spécialement employé par les gens cultivés qui habitent la région,
pour désigner les musulmans qui habitent les villes ou ceux qui sont
ou se disent les descendants des Maures expulsés d'Espagne.
IlERTUOLiiS. — Ni»TR Slll l.K< NOMS DE IIIKIIE-, IlI'.ltlIKUES KT \raiO\IN< I ï.)
X Jamais, en elTet, je n'ai ni au Maroc, ni en Algério, ni on Tunisie,
entendu appeler « Mauro » un Arabe do grande lenle ou un simple lié-
douiii. »
Le fait est vrai, mais pour l'iiommo seulement, jamais en Algérie on
appelle u Maure », en dehors des villes, l'Arabe de grande tente ou b;
Bédouin nomade du désert, mais néanmoins la femme, elle, est toujours,
dans chacun de tous ces cas, désignée sous le nom de « Mauresque »,
tju'elle appartienne aux campements mobiles du désert, aux ksour.s des
Hauts Flaleaux ou aux villes, c'est même là un fait bizarre et qui donne
lieu à la plaisanlorie suivante que l'on ne manque pas de faire aux nou-
veaux venus en Algérie : h Arabe au féminin fait mauresque ».
Au Maroc, le mot u Maure » est devenu expression aristocratique appli-
quée aux desL-endanls des anciens conquérants de l'Espagne qui n'ont
jamais pardonné aux Espagnols d'en avoir expulsé leurs pères et qui leui-
ont conservé une haine ([ui n'a peut-iUre pas été étrangère aux divers
échecs des Espagnols dans leurs tentatives de colonisation Marocaine.
800« SEANCE. — 16 Février 1905.
Présidence de M. Sédillot.
Élections. — .M. Désiré Lavex est nommé membre titul aire.
M. SAtnokiA osl élu correspondant étranger.
NOTE SUR LES NOMS DE IBÈRES, BERBÈRES, ET AFRICAINS
I'au M. Bertholon.
Lue par M. Atgier.
Je ne crois pas possible d'adopter l'élymologie du nom des Berbères,
donnée par M. Atgier. On ne peut pas expliquer des nom? antiques, par
une langue de récente formation comme le berbère moderne. Or M. Atgier
fait venir le nom des Ibères et des Berbères de : iberik, adjectif au
pluriel, les noirs.
L'étymologie présentée ainsi n'est pas conforme aux règles de la gram-
maire berbère. En effet, il n'y a pas à proprement parler d'adjectifs quali.
ficatifs dans cette langue. Ceux-ci sont remplacés par des verbes qui se
conjuguent. C'estainsi qneberrik, cité par M. Atgier, signifie : il est noir,
à la troisième personne du singulier. La troisième personne du pluriel
serait non pas iberrifc, mais herrikith, ils sont noirs.
En admettant qu'il ait existé un adjectif berik, noir, son pluriel d'après
les règles de la grammaire aurait été iberiken ou iberken. Ces variantes
n'ont aucune similitude avec le nom des Berbères ou d'Ibères.
* Les Origines de l'histoire, t. 11^ p. 402-403, par Lenonnant.
soc. d'anthrop. 1905. ■lO
liO ^^> FKvniER 1905
Sans préjuger de la parenté des noms des Ibères et des Berbères, je
crois que le nom do ces dciniers est un de ceux des principaux colonisa-
teurs de l'Afrique du nord, dans l'antiquité, les Phrygiens.
J'en trouve la démonstration dans un passage de F. Lcnormant '. « Les
Targoumines, dit-il, rendent Togarmah par Barbaryah... Dans les habi-
tudes du monde romain à l'époque impériale, auquel l'expression de
narhary-\h est certainement empruntée, en particulier dans les habitudes
du langage poétique, « harbaria » et « barbarus » ne prennent une
signilication géographique ou ethnique déterminée que pour désigner la
Phrygie et les Phrygiens. C'est ainsi que nous lisons chez Horace :
Grœcia Barbai-iœ lento collisa duel/o.
Le même poète appelle barbanim le mode phrygien de musique.
Sonanfe mijcttim tibiis carme/i fi/ra.
Hac (loriitm. il lis barbarum.
Servius, à propos de l'Enéide (IL v. 504), « dit que barbaricus et
phrygius sont exactement synonymes. Enfin, on appelle indifféremment
phrygiones et barboricarii les brodeurs, ceux qui fabriquent ces vêtements
brochés et brodés, dont l'usage était venu de la Phrygie et que l'on qua-
lifiait tantôt de phrygiœ, tantôt de barbnrise vestes. »
Ces rapprochements montrent que barbari et phrygii étaient deux appel-
lations identiques. On peut adapter ces données à l'Afrique. A côté du
nom de Berbères (barbari), on trouve celui des Phrygiens. En effet, nous
relevons dans le même ouvrage de F. Lenormant : « Le Midrach et les
Targoumines traduisent le nom de Gomer par Aphrigà, ce qui ne veut pas
dire l'Afrique, mais désigne sûrement un pays d'Asie, la Phrygie, ainsi
que l'ont reconnu Bochart et M. Rappoport K »
Le nom Aphriquâ, qu© l'on peut tout aussi bien écrire Africa désignait,
ainsi qu'on vient de le voir la Phrygie. Cette désignation explique le
nom de l'Afrique. Il provient comme celui de Berbères de l'invasion de
Phrygiens. Les indigènes désignent encore sous le nom de Ifriguia
(f, «t'iJYÎa) le territoire de l'ancienne province romaine d'Afrique jusqu'à
Kairouan. En résumé, les noms de Berbères et Africains sont deux syno-
nymes, provenant de l'invasion phrygienne. En Asie-Mineure, les phry-
giens portaient indistinctement ces deux noms.
Discussion.
M. Atgier. — Dans la dernière séance j'ai lu une note du D' Bertholon
sur l'origine du nom de Maîtres dans laquelle notre savant confrère cor-
robore complètement ma thèse émise sur ce sujet *. Aujourd'hui j'ai tenu
à vous lire sa note sur l'origine du nom de Berbères bien que cette fois-ci
• Loc. cit., T. Il, p. 382-3.
* Séance du 17 déceaibre 1S»j3.
DISCUSSION 1 iT
elle ne confirme pas ma llièse émise sur ce deuxième sujet ' et hien qu'il
m'ait laissé toute latitude pour la publier ou non.
Un avis aussi compétent (pie le sien est trop précieux j)our le passer
sous silence et ne pas en faire hénéficier la science. " Du choc des idées
jaillit la lumière, me dit il, surtout sur ces questions d'origine africaine
que j'espère quelqut; peu éclaircir un jour. »
Devant celte déclaration de sa part je crois pouvoir me permettre
d'ajouter les résultats de mes recherches personnelles, alors que j'étudiai
les populations au milieu desquelles j'ai vécu en Algérie pendant trois
ans.
Le mot liarbaria devint en etîel chez les Grecs et les Romains le syno-
nyme de Phrygia *, voici comment, car, le mot Barbarus changea de
signification comme celui de Maurus.
A l'origine, les Grecs et les Romains appelaient liarbarus tout étranger
au monde gréco-romain et Baibaria tout pays étranger à la Grèce et h
rUalie.
C'est dans ce même sens (lu'Horace, dans le vers cité plus haut par
Bertholon, faisant allusion à la Guerre de ïroie, emploie le terme de
Baibaria pour désigner la Phrygie parce que cette région fut longtemps
étrangère au monde gréco-romain et n'en devint que plus lard une des colo-
nies.
C'est dans le même sens qu'Horace désigne aussi sous le nom de cannen
bnrbarnm le mode musical phrygien pour le distinguer du mode grec
cannen dorium '.
Les Gréco-Romains ont donc employé tout d'abord le mot Barbarus pour
désigner tous les étrangers en général, mais il Tont réservé plus particu-
lièrement pour ceux qui étaient leurs plus proches voisins de l'Est, avec
lesquels ils avaient de fréquentes relations en paix comme en guerre,
c'est-à-dire les Phrygiens.
.\ qui sait la transformation du sens primitif que subissent les noms de
régions et les variations de signification ethnique, historique, etc. que
subissent les noms des peuples, il sera aisé de comprendre que des auteurs
grecs et latins aient pu, ;i une époque de leur histoire, employer le terme
générique de Barhari comme synonyme de l'expression ethnique de
Phriiyii.
Les Grecs et les Romains n'avaient donc aucune raison de ne pas appli-
quer le terme de Barbari aux habitants de l'Afrique du Nord puisque ces
derniers étaient étrangers eux aussi au monde gréco-romain et que de
plus ils étaient composés de quantité d'envahisseurs Phrijgii. C'est ainsi
que l'expression générique de Barbari devint dans les régions susdites
le synonyme de l'expression ethnique de Pliryyii.
Il en fut tout autrement en dehors du monde romain et de ses colonies,
• Séance du 4 février 1904.
- Ancien nom de la plus grande partie de l'Asie Mineure.
' Dorii Doriens nom primitif générique des Grecs.
as ifi FKVRIER 190o
le mol liavbari conserva son sens piimitil' d'étranger, témoin le nom de
Ihirbinrs donné au v" siècle aux envahisseurs de l'empire rumain dont ils
ne possédaient nullement la civilisation.
• Mais, dira-l-on, quelle relation exisle-t-il entre les mots Barbare et
Berbère, c'est-à-dire entre le sens du radical Bar et du radical Ber.
Comment les Phrygiens et les Lihyens prononçaient-ils primitivement
ce mot que les Homains prononçaient Barbarus et les Grecs jiapSapo;? Ce
mot n'avail-il pas une signification primitive tout autre, avanld'ôtre adopté
par les (îréco-llomains dans le sens d'étranger tout d'abord et de Phry-
gien ensuite?
Ici encore, comme dans nos recherches du mot Ibère^ il faut laisser de
côté la langue principale d'un peuple et recourir à ses anciens dialectes.
Le mot ^2p6apo; est en eiïet formé en grec par le redoublement du ra-
dical j3ap et complété par la terminaison 07 indice du masculin singulier,
or ce radical 3ap provient du dialecte atlique de la (Jrèce le plus raffiné,
devenu le langage national ; si nous recherchons dans des dialectes plus
archaïques, inusités par la suite et supplantés par le premier, nous trou-
vons qu'en ionien le radical p^p a le môme sens que le radical attique pap,
c'est ainsi que :
Sipêaoo; en dialecte altique • -r- . u 1
^ ^„ ' 1- I X • • ( signifient barbare, grossier, sauvage.
^£p6ép:oT en dialecte ionien \ '^ ' o 5 o
Sio:«Ooov en attique } ■ -f . «■
■^ ' ' . . signifient gouffre.
péoeOoov en ionien
5^
Il n'existe ainsi aucune différence entre le radical altique ^ap, le radical
ionien ^-.0 et le radical libyen BER, signifiant «noir» comme nous l'avons
vu S radical que Libyens^ Grecs et Romains, prononçaient chacun à leur
manière et qu'ils tenaient sans doute du Phrygien; radical qui par son
redoublement (BER-BER) forma un nom qui resta aux deux colonies
extrêmes de l'empire romain, Ylbérie péninsulaire et Vibérie caucasique.
A en juger par l'ignorance dans laquelle nous étions nous mêmes de la
signification primitive des mots Maures, Berbères^, Barbares, tout porte
à croire que les Grecs et les Romains eux-mêmes ignoraient la signification
primitive des mots fiîpoépto?, ^xpêapo;, Barbarus et qu'ils l'employaient
pour désigner les étrangers sans savoir que, d'après sa racine, ce mot
avait désigné primitivement des populations noires.
C'est ainsi que nous avons à leur suite pendant des siècles attribué le
nom de Maures à des populations de l'Afrique du Nord, sans savoir que
ce mot était attribué, à son origine, à des populations noires.
Le mot kabyle BERIK est en effet un verbe et non un adjectif comme
il paraît l'être dans d'autres dialectes berbères, il signifie bien « il est noir »
à la 3" personne du singulier ; la 3° personne du pluriel BER-RIKITH
< Maures, Ibères et Berbères, br-in S° 8 p., Paris ■1904.
ALLOCUTION DE M. SKHjI.r.uT 449
signifie « ils sont noirs », mais il n'en reste pas moins vrai que si nous
débarrassons ce mot de sudîxes et prélixes, nous retrouvons toujours son
antique radical libyen ou ionien BEll, ayant la signification adjective
de w noir, » radical que l'un nîtrouve inb^gralement dans les deux mots
suivants, l'un 11J1"][1 qui, on Tainacbek, prétixe d'un I, devient pluriel et
signiliait primitivement « les noirs », l'autre BElUJEll obtenu par un de
ces redoublements si communsdc mots monosyllabi(|ues dans les dialectes
de l'Afrique.
801« SÉANCE. — 2 Mars 1905.
Présidence de M. Sébillut.
Nécrologie. — M. le Présidonl annonce le docès de Madame C.\pitan et
adresse à notre cmincnt collègue rexprossion d(> la vive sympathie que la So-
ciété ressent pour sa douleur.
M. le l^résident communique ensiiilc ;\ la Société l'allocution (ju'ii ;i jirononcé
sur la lomho de Girard de Hialle.
C'est on ma double qualité de l*résident de la Société d'Anthropologie et de
Secrétaire général de la Société des Ti-aditions populaires «pie je viens rendre
hommage à Tiirard de Rialle et rappeler le rôle important qu'il remplit dans
CCS deux compagnies.
Sa réception à la Société d'Anthropologie date de 1864, fin(| ans à peine
après sa fondation; il fut de ceux qui contribuèrent à élargir le programme de
sesétudi's, et à y faire coniprendve. à côté dos sciences mérlicales et de la pré-
histoire, l'ethnographie envisagée flans son sens le plus large. 11 prit part à
nondjre de discussions, et ne tarda pas à être apprécié de ses collègues; c'est à
lui ipii- fut confiée, en 1874. la rédaction des Instructions anthropolo(ji(iucs
/touf l'Asie centrale; en 1876, il fut chargé du Rapport sur le prix de la
Société d' Ethnoloqie. Lorsque, en 1880, le D' Topinard succéda comme secré-
taire général à Broca, le fondateur de la Société, («irard de Bialle lui élu Secré-
taire général adjoint, et pendant plusieurs années il renqilit ce poste avec le
zèle et la conscienci' (|ii'il nielt.iil eu toutes choses.
IMus tard, les hautes fonctions administratives auxquelles il fut appelé ne
lui permirent plus d'assister assiftiimcnt à nos séances; mais beaucoup se sou-
venaient des services qu'il avait renrins. et aussi de ses aimables qualités
d'homme; et quand on sut qu'il revenait définitivement à Paris, un groupe
inqiortant jiosa sa r.imliil.iliiri' an sièire de seroinl viee |irt'si(leiil . .-iver la pens/'e
<|u'en 1907, snivani le riiuleiiienl (>ii usa^'e il.nis l;i Smieh'. il en ile\ ieiidrait le
vice-président elVi'el il'. Il lui ihi à la ipiiisi mi.iiiiinili''. presipie ;iii iiiniiienl on
il mourait bun de ncnis, sans avoir connn la nianpie île synipalliii' i|iie lui
donnaient ses collèfrnes, et à laquelle il am-ail été tout parlieulièrenienl si'u-
sible.
l/ailivité srienliii(iue de (iir.ird de Kialle ne se borna pas à sa |)arlicipation
aux travaux de la Société d'Anthropologie; il étudia aussi plusieurs questions
150 -J MMi^ l!)05
iiilcrossaiilis. ilmit l'une lit l'oLj.-! .luii li\ii'. Ses rcchenlics (■(liii()Ki""i'iii<ln«'s
l'avaicnl Hiiinn' ;i ra|i|inK-ii»'r les iilécs d." jiriiiillirs do relies dos civilisés à leurs
divers dejrrês de «idliiro. qui. ceiil ans anparavanl. avaient aussi préoccuité le
président de Hrosses. pour lequel tiirard do Hialle professait une légitime admi-
ration, eonime au précurseur des études mvlholoyiquos. C'est en 1878 <|ue
parut le premier volume de la Mijtliolof/ie comparée, dont le plan et le but
sont expliqués dans la préface si claire qui précède le livre :
« C'est, ilil-il, avant tout, une œuvre indépendante, une onivre de libre exa-
men. Lors(iuo nous nous sommes proposé de l'écrire, nous avons cherché la
méthode, ou. pour mieux parler, la doctrine qui devait présider à notre plan.
Nous l'avons cherchée dans les faits étudiés en dehors de toute conception a
priori, et nous nous sommes bientôt convamcii que. dans le domaine du déve-
loppement intellectuel et moral de l'humanité, la théorie de l'évolution trou-
vait une nouvelle vérilicalion ».
On voit aisément en lisant cet ouvrage (jue l'auteur est resté lidèle à ces
principes, et qu'il s'y montra, ce qu'il fut toute sa vie. un homme avisé et de
bonne foi.
Au cours de ses études mythologiques, Cirard de Hialle avait pu constater
que parfois les termes de comparaison ne sont pas aisés à établir entre les
civilisés et les sauvages, parce que, surtout en ce qui concerne l'Europe, nous
sommes moins bien renseignés sur les idées et les superstitions des paysans
qui nous entourent, que sur celles des peuplades lointaines. Aussi, lorsque la
Société des Traditions populaires fut fondée pour s'occuper de recueillir la Lit-
térature orale et l'Ethnographie traditionnelle de France, il y adhéra l'un des
premiers, et il prit une grande part aux réunions destinées à l'organiser. Pen-
dant deux ans, il occupa le fauteuil de la présidence, et durant cette période,
il donna à la Revue de la Société une collaboration très précieuse; il se propo-
sait du reste de la reprendre à son retour à Paris, et d'y publier une partie des
observations (ju'il avait faites pendant son séjour au Chili.
Tel est, brièvement tracé, le rôle de Girard de Riallc comme savant; il a
occupé une place des plus honorables à la fois dans le domaine des Traditions
populaires et dans celui de l'Ethnographie comparée. Il laisse, dans les deux
Sociétés qui déplorent sa perte, le souvenir d'un galant homme, d'une parfaite
urbanité, d'un commerce aimable et sûr, d'une science claire et logique, et je
suis certain d'être l'interprète de tous nos collègues, en assurant à la compagne
de sa vie et de ses travaux, (jne la mémoire de celui auquel nous adressons un
suprême adieu, restera chère à tous ceux qui ont pu apprécier ses qualités de
cœur et d'esprit, c'est-à-dire à tous ceux qui ont été en relation avec lui.
M. pApri.i.AL-i.T fait part à la Société des dernières volontés de Girard de Rialle :
notre regretté collègue avait demandé que son autopsie scientifique fût faite
avant son incinération. En conséquence on a ouvert le cercueil, le D'' Papillault
a procédé à la décapitation, et a conservé ainsi pour nos collections un cri\ue
très intéressant (]u'il présentera ultérieurement.
Il annonce aussi que Madame Girard de Rialle offre à la Société le cercueil
où son mari a été exposé avant d'être transféré en Franco. C'est un travail
d'ébénisterie fort curieux fait au Chili, et qui trouverait sa place à notre musée.
La Société consultée, a accepté le don de Madame Girard de Rialle et chargé
le D' Papillault de loi adresser ses remerciements.
0. VAUVILLt;. — SKI'LLTUUES NKOLlTUlgLES UE MoM Ii'.NY-I.'kNC.UAIN 151
A l'occasion de la lecture du procès-verbal de la dernière séance.
(J. Valvillk.. - La communicalion faite par M. Fourdrignior, h la
dernière séance, a été suivie d'une discussion dans laquelle il a été ques-
tion dos cendres et des poteries néolithiques, trouvées avec des sépul-
tures.
Il peut être intéressant de rappeler, à la Société, mes observations sur
les cendres et les poteries, constatées lors de mes fouilles.
Sépultures néolithiques de Montigny-l'Engrain (Aisne).
Dans la séance de la Société du l"'- décembre 1887. j'ai fait une commu-
nication sur : uw nouvelle j/alerie couverte située à Monliçjnij-l Emirain .
Fig. 1.
» Bulletins de la Société, vol. 1887, p. 712.
ir;-2 2 .MMi< i'.io3
Celle commuiiioalion (Hait faite avec la présenlalion des silex taillés et
polis et des poteries provenant des (ouilles, et de trois ligures que je pré-
sente de nouveau à la Société.
^Iv^ .
Fir/. 3
La première figure représenteV'ensemble'duj monument de 7 m. 90 de
longueur et^'^d^ 1 m. 30 dejpiofondeur. au-dê^ous^dùrnirèaïï^Tûei^d u
0. VAIVII.I.K. — -Kl'ir.TIItKS NKOl.ITHIorF.S OK MnNTICNY-l.'F.NHnAlN 153
sol, leiiuel était formé de fortes pierres plates, dressées verticalement.
Cette partie renfermait quatie groupes de sépultures bien dislinels : A,
B, C, et U, (ig. 1, de dilTérentes largeurs.
Le -fond était généralement dallé de petites pierres plate:^.
Les pierres de couverture du dessus avaient été enlevées bien avant
les fouilles, pour ne pas gêner la culture du sol, ce fait a été la cause (pie
les ossements étaient en très mauvais élat de conservation.
La figure 2 représente un croquis du plan du groupe des sépultures de
la partie I) du plan, fig. 4, comprenant 2 mètres de longueur sur 1 m. 70
de largeur '.
Le croquis figure 3 fait voir la coupe des sépultures, suivant .\, li de
la figure 2.
Je regrette que pour ma communication de 1887 on n'ait reproduit que
le plan d'ensemble du monument, dans les Bulletins de la Société; les
figures 2 et 3 offraient cependant beaucoup plus d'intérêt que la figure 1.
En 1887, n'étant pas encore membre de la Société, je n'ai pas pensé
demander la reproduction des figures 2 et 3, dont j'avais remis les des-
sins avec le texte de ma communication qui a n^.éme été abrégée -.
Comme je l'ai dit, la lig. 2 représente un groupe de sépultures dont les
corps ont éti disposés sur 4 coucbes régulières ( t méthodiques, comme on
peut le voir sur les figures 2 et 3; la face avait toujours été tournée en
bas, fait qui a produit l'écrasement presque général des tètes, après
l'enlèvement de la couverture du monument.
Entre les couches des squelettes se trouvaient assez fréquemment des
petites |)ierres plates.
Dans le faible espace de ce groupe, 48 cadavres avaient été déposés avec
soin, la tête placée comme l'indique la figure 2, et les pieds vers le centre.
En plus de ces 48 squelettes il y en avait encore 4 autres vers le milieu
du groupe, ce qui fait que 52 corps ont été déposés dans celte partie du
monument ^
Vers le centre, en C, fig. 2 et 3, se trouvaient beaucoup de cendres et de
charbons de bois, devant provenir très probablement du feu fait i>our
désinfecter l'endroit avant d'y déposer de nouveaux cadavres.
Le fait de nombreuses cendres et charbons de bois a été constaté
vers le milieu des sépultures des trois autres groupes A, B et C du plan
fig. 1, où les ossements, quoique en très mauvais état de conservation,
> Li^s s.jueluUes des figures 2 cl 3 sont rcprùsentés jusqu'au bassin seulement, pour
éviltr lu confusion des osseuienis vers le milieu, le haut tlo riiutnûrus csl aussi seul
indi uè pour le même motif. La promioro couclie du dessus de 12 sipielelles est
représentée en lignes noire?, comme devant être vue en plan, les trois autres couches
sont figurées en lignes pointées pour la tête ne devant pas être visibles.
* Sur la deniande du docteur Baudoin les figures 2 et 3 ont été reproduites.
» Los lettres l) cl E, fig. 2, représentent 2 haches en silex, placées en sens inverse
de la direction des squelettes, F la place d'un vase en terre, le seul intact des nom-
breuses poteries trouvées.
i:;i 2 .MAU> iiH).-;
ont l'ail voir If lUfine ranîjff'incnl iiuHliodiciuii des curps, les pieds vers le
centre, comme pour le grou|)e (1)) de la figure 2 '.
Les nombreuses cendres et charbons de bois, trouvés vers le centre des
sépultures de Monlif^ny ri']n;5M'ain, ne permettent pas de croire qu'il s'agit
là de terre |tréparée poui- faire de la [loterie, comme il en a été question
dans la dernière séance de la Société.
Poteries néolithiques d'Erondelle (Somme).
Dans la séance de la Société du 5 mars 1891, j'ai présenté de très nom-
breuses poteries, provenant d'une habitation néolithique d'Erondelle -,
dans lescjuelles il y avait 14 variétés d'ornementations diverses.
Toutes ces poteries, comme je l'ai dit à la dernière séance, étaient,
comme celles recueillies avec les sépultures de Montigny-l'Engrain, d'une
pâte mollc^ lors de leur découverte.
Les poteries d'Erondelle et de Montigny-l'Engrain, recueillies avec soin,
sont redevenues, après séchage complet, soit à l'air, soit au soleil, très
dures et résistantes, comme on peut s'en assurer par les fragments que
je présente à la Société, provenant de l'habitation et d'avec les sépultures
dont il vient d'être question.
On peut donc croire que si des poteries ont été faites avant l'époque
néolithique, comme le suppose M. Fourdrignier, on devrait pouvoir
recueillir, av('c beaucoup desoins, des débris de vases, qui après séchage
complet devraient retrouver une résistance assez convenable, comme cela
s'est produit pour les poteries néolithiques devenues molles, par suite
d'humidité prolongée, dans les sépultures de Montigny-l'Engrain et dans
l'habitation d'Erondelle.
* D'après l'Anniiairo du département de l'Aisne de 1828, page 4G, on aurait trouvé
en i780 à Saint-Gobain, dans un monument formé de 4 énormes grès posés de champ
et recouverts de même roche, cinq squelettes humains rangés autour les pieds au
centre (comme à Montigny-l'Engrain), il y avait 5 haches en silex et comme un mar-
teau arrondi.
* Bulletins de la Société, vol. 1891, p. 176.
j, |,,„.v^. _ N,,TK KrilNDliUACIlluUE SL'U LES l'Kl l'I, VDKS lll IIAI l-InMvlN
isri
NOTE ETHNOGRAPHIQUE SUR LES PEUPLADES DU HAUT-TONKIN •
(IV Territoire militaire).
l'Ait M LE DOCTEUU l'Ail. liOL'X.
Messieurs,
J'ai rapporté du lïaut-Tonkin, d'où je suis arrivé récemment, quclriucs
documents ethnoirraphirpics que j'avais confiés à M. Manouvrier pour
qu'il vous les muiitiAt eu une de nos séances mensuelles. Notre secrétaire
général m'ayant térnoigné le désir de me voir faire moi-même cette pré-
sentation, je réponds volontiers à son aimable invitation et j'en profiterai
pour vous donner quelques renseignements sur la i)opulation si variée au
milieu de laquelle j'ai vécu durant 2G mois.
Voici d'abord ces documents : une carte ethnologique du IV° Territoire
Militaire, reproduction de la carte d'état-major établie au i / 200.000°,
où tous les villages actuellement connus de cette région sont indiqués
par des cercles diversement colorés, chaque coloration, comme il est dit
dans la légende, ressortissant à une peuplade spéciale. J'ai fait modifier
e' compléter la carie oiiginalc d'où dérive celle-ci de façon à posséder le
document le plus exact et le plus complet de topographie ethnique qui se
rapporte actuellement à cette région. — G'e^t ensuite 14 poupées que j'ai
fait habiller ;i la mode du pays, groupées par couple de l'un et de l'autre
sexe : il m'a paru, en effet, que même pour des auditeurs scientifiques, il
était préférable de réduire les costumes de la région aux dimensions de
ces poupées et de les en vêtir plutôt que de rapporter des costumes
d'adultes qui ne sont guère intéressants pour l'oeil qui les examine vides :
j'ai néanmoins ici ce costume de femme Màn que je vous présente, autant
pour que vous en compariez l'exactitude, par rapport au costume d'une
de mes poupées, que pour permettre à ceux d'entre vous qui s'intéressent
à ces questions de retrouver peut-être dans ces broderies primitives la
signification de certains dessins. — Enfin un album de photographies
vous montrera les différentes races de la région sous des aspects plus
conformes à leur type respectif que ne l'ont pu faire ces poupées dont la
figure europénne détonne un peu quand il s'agit de peuplades dont le
faciès est si différent du nôtre.
C'est tout et c'est peu. J'aurais voulu vous apporter une collection plus
complète et plus intéressante et l'intention ne m'en a pas manqué. Mais
la servitude médicale devient parfois, sous les Tropiques, tellement absor-
bante qu'on n'a pis toujours le loisir de travailler à son aise une ou
plusieurs branches de l'Anthropologie.
Avant d'entrer dans la description des peuplades ([ue je veux étudier
sommairement, il est bon de bien spécifier le pays qu'elles habitent et de
donner une idée géographique de la région. Le IV Territoire Militaire
représente à peu près la 1/20° partie du Tonkin : c'est la pointe la plus
lofi 2 MARS 190r)
avancée do co pays vers le Nord-Ouost : il est liinilé au Nord par le Yu-
Naii, à l'Ouest par le Yu-Nan et le cummissarial de Yan-Hù qui le sépare
du Laos, au Sud par les provinces de Yen-Bay et de Tuyen-Quang, à
l'Est par la province de Tuyen-Ouang et par le 111° Territoire dont il est
st'paré, sur la plus grande partie de son étendue, par le Song Chaï,
atlluenlde la Rivière Claire. Ce Territoire est donc traversé en son milieu,
du Nord-Ouest au Sud-Est, par le Fleuve Rouge, la grande voie d'accès
vers le Yu-Nan, le dispensateur de la richesse agricole du Tonkin; c'est
lui qui a formé le Delta Tonkinois, c'est lui qui le forme encore cons-
tamment par ses dépôts annuels qui se chiffrent, en maints endroits, par
plusieurs mitres de terrains nouvellement formés. A Lao-Kay, chef-lieu
du Territoire, l'altitude ne dépasse pas 100 mètres : mais si l'on s'éloigne
des berges du Fleuve et qu'on suive une direction perpendiculaire à son
cours, on gravit, au milieu de sites pittoresques, de charmantes vallées
et de cascades sans nombre, toute une série de montagnes de plus en plus
hautes qui arrivent à atteindre 2,500 mètres et forment ainsi, à l'Ouest,
la ligne de partage des eaux entre le Fleuve Rouge et la Rivière Noire, à
l'Est la séparation des affluents du Fleuve Rouge et de la Rivière Claire.
Mais ces deux grandes Rivières ne conservent pas longtemps leur indé-
pendance et s'abouchent dans le Fleuve Rouge h environ 80 kilomètres
au-dessus d'Hanoï.
Le pays est peu habité, relativement à sa superlîcie. En dehors de
LaoKay, où la venue des Européens et l'entreprise des Chemins de fer
du Yu-Nan a groupé une population cosmopolite, il n'existe pas de très
gros villages et la plupart de ces agglomérations se réduisent h une
dizaine de cases. Abstraction faite des Chinois et des Annamites de
Lao-Kay, essentiellement nomades, le chiffre global de la population,
d'après les renseignements qui m'ont été fournis en 1904, s'élèverail à
35,950 habitants. Les éléments ethniques correspondants à ce chiffre
sont groupés dans le tableau suivant où je les inscrirai par ordre d'impor-
tance décroissante :
Recensement ethnique approximatif {IV° territoire).
RACES Population Proportion %
Méos... 8.813 24,51 0/0
Mans 7.930 22,09 0/0
Niûns 7.692 21,39
Thaïs ou Tli()S.. 7,430 20,6»)
Muïngs 2,690 7,48
Kouï-Tcheou . . 500 0,82
Poulahs 305 1,39
Laotiens 250 0,55
OuQis 200 0,69
Keu-Tiaï (Chinois). 140 0,38
p. IV)V\. — NOTE ETHNOGnAPlIinrE :^rR LES PEUPLADES Hf ILvUT-TONKIN 157
Le Koui-Tcheou et les Keu-Tiai étant des Chinois il s'ensuit, qu'avec
les Annamites, nous avons 10 races ou peuplades représentées dans" cette
partie de la Haute-Région. Laissant de côté les Chinois, les Annamites
et les Laotiens, sur le compte desquels la Société d'Anthropologie possède
sans doute de nomhreux renseignements, je ne conserverai, pour les
étudier, que sept de ces peuplades. Je commencerai par les Foulahs et
les Ounis, de façon à éliminer rapidement ces indigènes dont Icb rares
villages ne permettent pas une étude facile et documentée et j'arriverai
ensuite aux représentants des races les plus nomhreuses, les cinq pre-
mières de notre tableau, que j'étudierai, en parlant de la plaine, pour
aboutir à la haute montagne où se cantonnent les Méos.
Uunis. — Je n'ai rencontré ces indigènes que dans le Nord-Ouest du
Territoire, aux environs de Ni-Chi, à une altitude de 1,200 mètres, domi-
nant la vallée du Long-Po qui les sépare de la Chine. C'est une popula-
tion pauvre qui, dans son aspect physique, rappellerait les Chinois du
Midi si elle en portait le costume. Mais les femmes ont un costume tout
spécial. Leur coiiïure est formée d'une sorte de capote de cotonnade noire;
une veste de même étoffe, large,leur cache le buste et enfin des j)antalons
étroits descendent jusqu'aux mollets : ceux-ci sont revêtus de bandes molle-
tières de même couleur. Les hommes ont un costume qui ne diffère que
par le turban : il portent la tresse.
Les Ounis sont sales, comme beaucoup de pauvres : il sont doux et subis-
sent avec résignation l'occupation française. Us ont un patois propre
mais leur langue écrite est représentée par les caractères chinois et c'est
la langue chinoise qu'ils parlent dans leurs rapports avec nos interprètes.
Poulahs. — Dans la même région que les précédents. Je ne connais pas
le costume des hommes : mais les femmes sont à retenir à raison d'un
ornement spécial qui fait partie de leur ajustement. C'est une ceinture de
petits coquillages qui vient se terminer sur le devant du bassin et qui
demande du temps et de l'argent pour être réalisée: les coquillages sont
en effet récollés dans le sable de certains cours d'eau : ils font rares et la
jeune fille poulah est obligée de s'armer de patience et de faire de
fréquents prélèvements sur ses économies pour satisfaire ce désir héré-
ditaire.
Les Poulahs ont un dialecte spécial mais comprennent le chinois : leurs
enfants fréquentent l'école chinoise.
Thais ou Thôs. — Pour éviter des redites inutiles, j'insisterai davantage
sur cette race par la raison que c'est celle que je connais le mieux et que
la plupartde ses idées sur la religion, la famille et la société sont commu-
nes, en grande partie, aux races que j'examinerai ensuite. Je ferai cepen-
dant remarquer qu'elle n'occupe que le quatrième rang dans la classifica-
tion que j'ai établie.
Quel est d'abord son véritable nom, phonétiquement transcrit? Cette
race s'étend tout le long de la frontière sino-tonkinoise et se fait appeler
158 2 MAit< m):]
Tho du cùlé de Cao Bang et de Lang-Son. Mais dans le pays que j'ai
lialiité, les nombreux chefs que j'ai interrogés déclaraient obstinément
(ju'ils étaient bien des Thaïs tout en reconnaissant, sans pouvoir expliquer
celte diiïérence, (|ue leurs compatriotes de l'Est répondaient au nom de
Thùs.
Les Thaïs habitent la plaine : ce ne sont pas des montagnards. 11 pré-
tendent former deux variétés qui différeraient par la langue, la façon de
se coiffer et les rites funéraires. Les Thaïs noirs seraient les premiers
venus : leur langue est envahie par de nombreux mots annamites, ils por-
tent les cheveux tressés en un chignon semblable au chignon de l'Anna-
mite Tonkinois et ils brûlent leurs morts. Les Thaïs blancs cherchent au
contraire à imiter les Chinois : leur exode au Tonkin serait de date plus
récente; ils portent souvent la tresse, parlent, outre le Thaï, la langue
chinoise et procèdent aux inhumations suivant toutes les habitudes des
Chihois.
a) Caractères physiques. — Le Thaï est de stature moyenne, élancé, la
taille iîne, d'allure fort distinguée. Nu, c'est un joli homme, au sens
artistique du mot, bien proportionné. Bien que je réserve pour plus tard
les données anthropométriques que je dépouille au sujet de cette race, je
peux dès à présent, en me basant sur l'examen de 20 sujets présentés au
conseil de l'evision, fixer la taille moyenne à 160 centimètres, le périmètre
thoracique sous-mammaire à 0 m. 76 centimètres et le poids à 53 kilos.
Quoiqu'ils aient l'œil bridé et oblique, on voit parfois parmi les jeunes
gens des deux sexes de fort jolis spécimens : leur peau est moins jaune
que celle des Annamites: dans les endroits les plus protégés, surtout
chez les femmes, au niveau des cuisses, le tégument est celui d'une brune
de chez nous.
Les cheveux sont lisses et souples, parfois très beaux: beaucoup sont
chatain-foncé et peu des échantillons que je possède ont la coloration
franchement noire qu'on observe dans les races voisines.
Les dents sont bonnes et souvent laquées.
Le vêtement des hommes se compose d'un turban qui s'enroule très
artistiquement autour de la tète : les cheveux, également enroulés, sont
préalablement nattés chez les Thais blancs: chez les Thaïs noirs ils sont
ramenés en un chignon bas soutenu par le turban.
Une veste large et un pantalon descendant à mi-jambe, en cotonnade
bleue, complètent le costume. — Ordinairement pieds nus, les Thaïs,
quands ils ont des chaussures, portent des souliers chinois.
Quant aux femmes, elles s'enroulent les cheveux autour du crâne et
mettent un turban de cotonnade ou de soie foncée, chez les Thaïs blancs ;
chez les Thaïs noirs, elles partagent leurs cheveux en une raie bien
apparente sur le milieu de la tête, les ramènent ensuite en les lissant
sur les régions pariétales et les tordent en un chignon postérieur qui est
haut chez les vierges et qui doit être en situation plus basse chez celles
qui ont eu, avec le sexe mâle, des rapports légitimes.
I'. noix. — NOTE KTIIMXUiAPIlIQrF. SUR LES PEri'LAORS Dl" IlAUT-TONKrN 1 5<.)
Dans les deux variétés, les femmes portent un petit corsage et une
jupe (le couleur bleu foncé. Mais c'est là leur costume de travail el de
tous les jours : les jours de fête, elles revêtent une grande robe ample et
sans taille qui les couvre du cou aux pieds. 11 est tn^'s rare de voir une
femme porter des chaussures.
L'ouïe et la vue, dans celte race, sont excellentes : seule la variole,
malgré les tournées de vaccination, détermine encore trop d'infirmes ou
d'aveugles.
b) Caractères intellectuels. — Le Thaï est intelligent, courageux, honnête,
et je tiens à souligner cette dernière qualité qui ne court pas le monde :
il est franc, ce qui se rencontre rarement chez l'Annamite : il est bon et
aimable. Ce n'est pas à dire pour cela qu'il n'ait pas de défauts : il est
paresseux, mais élégamment paresseux : j'entends par là qu'il n'est pas
comme le nègre de la Côte Ouest de Madagascar qui, pour sa nourriture
fondamentale, le riz, jette la semence dans un bas-fond, le fait piétiner
par ses bœufs et attend tranquillement la maturité de cette plante qui va
pousser en compagnie d'autres végétaux qui ne peuvent que nuire à la
récolte : le Thaï n'en est pas là : il ne compte pas autant sur la nature : il
lutte contre elle mais n'en lire pas tout ce qu'il pourrait : ses rizières sont
belles, mais il n'y fait qu'une récolte alors qu'il pourrait dans maints
endroits en retirer deux : il aurait l'occasion de vendre cher ses volatiles
à la ville voisine, mais il préfère les garder pour lui : son grand travail
de l'année, travail pénible, est la préparation de la rizière. La moisson
n'est plus qu'un amusement. Après quoi le Thaï ilàue insouciant, fume
des pipes d'opium et ne dédaigne pas, les jours de fête, de boiie de l'alcool
de riz jusqu'à l'état d'ébrïété la plus complète.
La femme, en tout temps, est une ménagère modèle : les enfants, la
cuisine et la basse-cour sont l'objet de ses soins dévoués : elle seule,
lorsque la rizière est unie et aplanie, procède au repiquage du riz.
J'ai toujours entendu dire que les Thaïs sacrifiaient à un vice qui fui
en honneur autrefois dans la Grèce antique : on prétend même que la
fréquence des cas d'inversion sexuelle observée chez eux tiendrait en
partie à la difficulté qu'ils éprouvent à trouver des épouses. Il ne m'a pas
été permis de me faire une opinion à ce sujet et il me paraît qu'en
l'absence de données certaines sur la question, il y a lieu de faire béné-
ficier cette race d'un doute bien légitime et de ne pas la charger d'un vice
honteux qui, chez les Chinois, s'affiche au contraire avec une impudence
inouïe.
La lange thaï est la langue siamoise : mais j'ai déjà dit que beaucoup
de Thaïs comprenaient et parlaient le chinois et l'annamite : l'écriture
de la race est aussi l'écriture siamoise : mais je n'ai jamais rencontré,
dans le Territoire, un chef qui pût l'écrire assez couramment : les carac-
tères chinois représentent leur véritable écriture.
c) Religion. — Rites funéraires. — La religion de la race est le Bouddhisme,
mais combien tiède et peu pratiqué. 11 n'y a d'abord pas de prêtres : les
160 -2 M A us VM\
honzes, si nombreux au (lainbodgc, sont ici inconnus : un vioillarJ, s'il
est nécessaire, se charge, lors de certaines cérémonies, de prononcer
(jucUiucs paroles rituelles à l'adresse de la Divinité. 11 n'y a de pagodes
nulle i>iirl : h peine quelques pagodons, où l'on met parfois des baguettes
d'encens, ou certains bois sacrés que l'on réserve au milieu d'une rizière
et où l'on porte des offrandes. Je fus témoin, à Ba-Xat, d'un élan de foi
bouddhique dans les circonstances suivantes : une tigresse rôdait depuis
plusieurs nuits auprès du village et avait déjà emporté plusieurs cochons :
les habitants, pris de terreur, se rendirent au bois sacré voisin et trou-
vèrent des immondices sur un petit autel bouddhique qu'il avaient édifié
au pied d'un arbre superbe, étendant au loin ses branches entremêlées de
lianes, et dont des orchidées étaient venus panser d'une touffe de verdure
toutes les cicatrices. On nettoya l'autel : de retour au village on mangea,
on but surtout beaucoup en criant et tapant sur des instruments aussi
culinaires que musicaux : la tigresse disparut : le chef fut content de
Bouddha et de sa toute-puissance.
La véritable religion, le véritable culte, c'est celui des ancêtres. Les
souvenirs de l'Inde, de la Chine et de l'antiquité classique vous reviennent
sans cesse en mémoire quand on étudie la race thaï à ce point de vue.
Dans toute maison, en face de la porte, un autel est dressé. Des baguettes
y brûlent en permanence : on le pare au moment de certaines fôles, en
particulier à l'occasion du Têt.
Le père ou le fils aîné possèdent les tablettes de famille et ne manquent
pas de faire, en temps opportun, les évocations et les prières voulues
devant l'autel familial.
Les rites funéraires sont intimement liés au culte précédent. Mais un
grand point sépare les Tha'i's blancs des Tha'i's noirs. Ces derniers brûlent
leurs morts et enterrent ensuite les résidus de la crémation. Les autres
Thaïs ont adopté exactement la pratique chinoise : arrivés à un certain
âge, ils achètent leur cercueil ; on le met en évidence, à côté de la porte
ou, dans la cour, sous un abri. Il est d'un bois blanc et odorant, assez
analogue à notre pitchpin, dont on fait un grand commerce dans la
région : son prix varie de 7 à 30 piastres suivant le galbe, l'épaisseur des
planches et les caractères ou sculptures dont il est orné. L'aïeul n'éprouve
aucune peine à voir ces préparatifs : il lui est doux de penser qu'on
s'occupera de lui après sa mort et que son àme, loin d'être isolée et
d'errer en effrayant les vivants, recevra aux jours fixés au moins l'image
d'une nourriture substantielle, et viendra se joindre à celle des ancêtres
pour protéger les descendants qui entourent leur mémoire de soins pieux
et entendus.
Mais le jour des funérailles est-il arrivé? Des cris retentissent par toute
la maison, des femmes échevelées gémissent désespérément et, si l'on est
pauvre, le corps du décédé est conduit au cimetière dans une natte en
répandant sur la route des papiers dorés, symbole de richesse, et jetant
sur sa tombe des objets en papier rappelant ceux que le mort aimait et
qui constituaient son opulence relative.
i'. mux. — NMTK ETiiNor.HAPiiinrE -^ni i.i:> i'Eiim.auks ur ii ait-T(inkin l'il
Si un riche vient i mourir, il se passe de longs jours avant qu'on le
conduise au champ du repos : on embaume le corps, avant de le mettre
dans son cercueil; on dresse une sorte de catafalque dans l'appartement
central; des bougies sont allumées ou des lampes à huile : des oiTrandes
sont apportées constamment et l'on récite des prières, avec accompagne-
ment d'un fifre à son plaintif et d'un instrument improvisé avec une
caisse mélalli(iue. C'est un vacarme de jour et de nuit, avec un pseudo-
bonze recouvert d'ornements sacerdotaux, coille d'une sorte de mitre,
qui fait le tour du cercueil en psalmodiant d'une voix de fausset ses lita-
nies boui]dlii(|nes. La foule accourt sans cesse et admire respectueusement
les honneurs rendus au mort et tout l'attirail de victuailles, de fruits, de
chevaux, de chiens et de bulÏÏes en papier qui entourent le cercueil.
Ne demandiv pas à un Thaï ce qu'est l'àme : il ne saurait vous la
définir ; mais tandis ([u'un médecin célèbre ne l'avait jamais rencontrée
au bout de son scalpel, le Thaï sait fort bien ou croit savoir fort exacte-
ment que le mort une fuis en terre ne meurt pas tout entier: pourquoi
accorderait-il tant d'importance à tourner la tête du décédé du côté du
Soleil Levant, à l'inhumer dans un cercueil aussi épais que possible, s'il
ne voulait pas que quelque chose de lui repose en paix dans cette terre et,
comme on le dit encore de nos jours en employant une réminiscence
latine, que " la terre lui soit légère ». Comme le héros de Virgile, il
enferme une Ame dans le tombeau: une autre plane sur l'autel domes-
tique, une troisième enfin monte vers les cieux, vers Bouddha : c'est la
moins importante : les deux premières seules sont à prendre en considéra-
tion en raison des maléfices auxquels peut conduire un culte qui leur serait
maladroitement rendu.
L'n Thaï fort intelligent, avec lequel je causais souvent, prétendait que
les femmes avaient, après leur mort, 9 âmes, et les hommes 7.
Comme il me fut impossible, quoiqu'il parlât français, de me faire
expliquer la destination de ces âmes supplémentaires, je m'en tins aux
trois dmes dont je parlais ci-dessus et de l'existence desquelles ce jeune
homme était assuré.
Les âmes des gens qui n'ont pas de sépulture errent sans cesse autour
de ceux qui les ont abandonnées : ce sont des fantômes, des revenants,
les « Mâ-Kôui » des Annamites, les « Siâô-Koui » des Chinois, les « Phî »
des Thaïs.
d) La famille. — Le mariage. — Situation des enfants, des femmes, des vieil-
lards. — La famille est solidement constituée : le père en est le chef
écouté : à son défaut, la puissance passe aux descendants mâles par ordre
de primogéniture. Comme les mâles seuls sont admis à célébrer le culte
des ancêtres, on conçoit quelle importance le père attache à avoir un fils:
celui-ci vivant, le repos port mortem du père est à jamais assuré. — Le chef
de famille thaï est respecté de façon étonnante : chacun lui obéit sans
murmurer, et cependant son autorité est douce, silencieuse, peut-être
parce qu'il ne rencontre pas d'opposition. S'il veut marier son fils, celui-ci
soc. d'antuuûp. l'JOo 41
162 2 M Alt s mo:;
Ml' lui iVra ijin' rarement des reinonlrances au sujet de, son chuix : un
catleau est fuit au père de la liancée qui l'utilisera pour couvrir les frais
de la noce, car les invités doivent être bien traités et il importe qu'ils
jugent l'hospitalité de leur hôte à la layon dont ils auionl satisfait leurs
appétits gastriques.
La jeune épouse passe ainsi ;i une autre famille dont elle respectera les
ancôtres : ses aïeux ne lui sont plus rien; en elle se fonde l'espoir d'une
grossesse masculine ([ui l'attachera encore plus aux mânes de son nouveau
foyer.
Il ne faudrait cependant pas croire que le mariage thaï se réduise tou-
jours à des pourparlers pratiques entre les deux familles intéressées et h.
des démarches un peu brutales dont le sentiment semblerait exclu.
L'amour fleurit aussi chez les Thaïs noirs: ils n'ignorent pas les fiançailles
et, au dire du colonel Diguet, on les voit passer, les fiancés exotiques, la
main dans la main ou plus étroitement enlacés encore, se murmurant des
phrases qui doivent être des mots d'amour et n'ignorant certainement
pas les éléments du baiser.
A une époque oii rien ne faisait présager notre expansion coloniale, on'
nous avait accoutumés à considérer comme des Barbares ces gens d'Ex-
trême-Orient qui, nous disait-on, donnaient leurs enfants, et tout au
moins leurs filles, à manger aux pourceaux. Cette légende a vécu : le
Thaï, comme le Chinois, adore ses enfants ; il s'en occupe beaucoup et les
pèresou les grand-pères se promènent joyeux devant leurs demeures tenant
leurs enfants dans les bras. Lorsque ceux-ci grandissent les signes exté-
rieurs de l'affection sont cependant moindres que chez nous, à cause de la
suppression des caresses et des embrassements et aussi parce que les fils,
comme les filles, fondent de bonne heure une nouvelle famille.
La polygamie est permise, surtout si aucun enfant mâle n'est issu
d'une première union. L'autorité du chef de famille, sans violence, main-
tient les femmes dans un parfait accord et la plus âgée vaque aux soins
du ménage lorsque la plus jeune partage encore avec l'époux la couche
nuptiale.
Les thaïs se marient, en général, entre eux : les hommes ne dédaignent
pas de prendre parfois une épouse annamite mais il est rare qu'une jeune
fille Thaï épouse un homme d'une autre race.
Arrivés a la vieillesse, vers 60 ans, les vieillards sont dispensés des
plus durs travaux: si besoin est, ils gardent même un repos complet.
Le fils nourrit son vieux père sans acrimonie et sans récrimination. C'est
la coutume héréditaire. La propriété est indivise dans chaque commune :
chaque famille ou groupe de familles cultive les terrains qui lui sont
dévolus : on partage ensuite la récolte proportionnellement, sans oublier
les infirmes, les veuves et les parents dont le fils est dans les troupes
régulières ou dans les milices créées par les Français.
Les questions de justice sont maintenant soumises à la juridiction
française : avant notre arrivée, les chefs, à divers degrés, rendaient la
justice dans les provinces, les cantons et les communes. Leur justice était
p. UUI A. — NilTl-: KTlINotllt Vl'linjl K Sl'U LKS l'KlI'I.VDRS Dl llAT T- loNKIN |(;S
parfois excessive et leurs pénalilés, lerribles : la femme adultère, par
exemple, avait le cou tranché ainsi qm son amant. Depuis la réduction
des peines, prononcées par nos tribunaux, les Thaïs se plaignent que
leurs femmes sont moins fidèles et accusent notre administration de ce
relâchement dans les nidiui's.
e) Alimentation — Boissons. — L'alimentation fondamentale est consti-
tuée par le riz : le cochon est la viande véritablement nationale ; les poulets,
les canards et, accessoirement, lebufilesont aussi très recherchés de cette
population. Pour certaines fêtes, pour le Tét en particulier, pour les
mariages comme pour les décès, on fait des hécatombes de volatiles. Les
oignons, les salades représentent les légumes ; les fruits sont nombreux
et divers, oranges, mandarines, bananes, ananas, lelchis, papayes, pam-
plemousses, etc.
L'eau ou le thé sont la boisson ordinaire ; mais, dans une famille
(jui se respecrte on boit, par petites lasses, l'alcool de riz, ainsi que le font
les Chinois.
Au total, le Thaï vit à son aise et si, d'aventure, comme il m'est arrivé,
vous faites manger un chef à la française, so3'ez assuré qu'il aura tôt fait
de troquer ses baguettes contre une fourchette et une cuillère etqu'il saura
faire honneur au repas que vous lui servez. Il ne dédaignera surtout
pas le vin, car il est persuadé que ce liquide nous rend colorés et puissants.
L'industrie chinoise fournit aux Thaïs tous leurs ustensiles de cuisine :
grandes et petites marmites en fonte, tasses de divers modèles, théières.
f) Habitations. — Deux modèles : tantôt la case est à môme le sol,
tantôt le plancher ou plutôt les bambous écrasés qui en tiennentlieu sont
à 1 m. rjO au-dessus du terrain. L'espace libre sert alors de remise ou
d'écurie. Les maisons sont parfois fort grandes : de superbes bois durs
en constituent la charpente. Les parois sont de bambou écrasé et tressé,
le toit est en chaume, en tuiles de bambous ou en feuilles de latanier.
Dans une maison bien tenue il y a au moins deux compartiments : le
premier avec une table et de petits tabourets en rotin : c'est la salle de
réception; le second est la cuisine et le gynécée.
Les lits sont des lits de camp recouverts d'une natte. Ils sont à l'abri des
regards, derrière des cloisons de bambous.
L'habitation, comme celui qui l'habite, est propre: mais tout autour,
surtout les jours de pluie, c'est une mare fétide constituée par les eaux
ménagères et le fumier des animaux, surtout des buffles qui dispensent
abondamment leurs énormes excréments.
g) Industrie — Arts — Parure. — La race thaï s'cccupe surtout d'agri-
culture: Aussi l'industrie y est-elle seulement représentée par le lissage
des vêtements de colon, confectionnés au moyen d'un métier élémentaire
et teints ensuite avec l'indigo. — Tout ce qui est poterie vient de Chine
ou d'Annam.
Les arts n'existent qu'à l'état rudimentaire : la musique vocale s'exécute
104 -2 MAHs 1905
sous forme de mélopées plaiiilivos chantonnées à l'occasion des fêles ou
des décès el la musique insirumenlale consiste essenliellemenl dans une
sorle de biniou n'cmellant que quelques notes ou dans une guitare à
3 cordes dont le dessus est ordinairement recouvert d'un fragment de peau
de ssrju'nt.
Les enfants et les femmes portent volontiers des colliers en argent mas-
sif, des agrafes de corsage et des boutons de môme métal: mais, le plus
souvent, ces objets sont confectionnées par des artistes chinois.
,Ymji«î. — Ce sont des habitants de la plaine, comme les précédents avec
lesquels ils se partagent les basses vallées. Ils paraissent plus petits que
les Thaïs; nus, il affectent des formes moins robustes.
Dix-neuf sujets que j'ai pu examiner, m'ont donné, comme moyenne,
0 m. 76 centimètres de périmètre thoracique et 156 centimètres comme
taille.
Leur teint est celui des Thaïs : il y a parmi eux, et surtout parmi les
femmes, de forts jolis types. Ils m'ont toujours apparu comme une réduc-
tion de Chinois d'autant qu'ils en portent la coiffure et le costume. C'est
dire que le pantalon flottant est porté par la femme et qu'elle cache son
buste sous une veste longue, bleue, bordée de noir, qui est d'un effet
charmant.
Le Niân est calme, tranquille, point guerrier, un peu paresseux et tout
ce que nous avons dit du Thaï s'applique exactement à lui.
Il a un dialecte spécial, mais il parle couramment la langue chinoise
usuelle et emploie les caractères dans sa correspondance.
Nhùnf/s. — Au-dessusdes précédents, dansla basse montagne, les Nhùngs
ont élu domicile : mais il habitent surtout dans la partie du Territoire
située k l'Est du Fleuve Rouge.
Leur périmètre thoracique, d'après l'examen de 8 sujets, serait de
75 centimètres et leur taille de 1 m. 58. Les hommes sont habillés comme
des Chinois et portent la tresse, les femmes ont des vêtements qu'on ne
trouve dans aucune autre race : la tète est entourée d'une bande de coton-
nade bleue qui cache les cheveux et sur laquelle est plaquée, à la région
occipitale, une grosse rondelle d'argent. Un petit boléro et une jupe
plissée, demi-longue, de couleur foncée, complètent cet ensemble qui
devient ainsi très pittoresque surtout lorsqu'elles se coitïentde leur grand
chapeau de campagnardes.
C'est une race petite, mais résistante ; la flgure présente les traits carac-
téristiques de la race mongole.
Mêmes défauts, qualités et mœurs que les Thaïs blancs.
Dialecte spécial, mais usage courant du Khoùan-hoùa.
Mans ou Yàos. — Race montagnarde, stationnée entre 500 et 1,000 mètres
environ ; on distingue deux variétés : les M;\ns Lan Tén et les Mans Ta Pàn.
Ce sont surtout les costumes des femmes qui les différencient : femmes à
pantalons, toutes deux, mais la femme Lan Tén a une sorte de coiffe bre-
l'. aOUX. — N<»TK ETHNOlîRAPHIglE SUU LES PEUPLADES DIT IIAIT-TO.NKIX 165
tonne dont l'ornenientation consiste en une tresse do coton blanc et noir
qui passe sur le sommet du cr;\ne pour pendre ensuite de cliariue cùté
jusqu'au niveau du cou : sa veste, longue et son pantalon sont bleu foncé ;
quelquefois une garniture en soie, broderie primitive, se remarque sur
les extrémités de ces vêtements.
La femme Màn Ta l'An porte comme coiiïure une bande de coton rouge
vif qui, après lui avoir enserre la tète sous forme de capeline, est ensuite
rabattue d'avant en arrière et descend, flottante, jusqu'au niveau de la
nuque. Sa tunique, dont le fond est bleu indigo, est rehaussée de bro-
deries il la soie dans le dos et sur le pourtour des manches et du bord
inférieur : des flots de coton rouge, agrémentés de perles noires et blan-
ches, pendent en arriére du col. Le pantalon est de même étolTe et pré-
sente des broderies analogues à son extrémité inférieure.
Les hommes sont vôtus de toile bleue façonnée en veste ample et en
pantalon ; ils s'enroulent les cheveux autour de la tête et portent un
turban de cotonnade bleue.
Les Mans m'ont paru plus grands et plus forts que leurs voisins : ils
sont assez jaloux de leur liberté, mais fréquentent cependant beaucoup
les marchés de la plaine et viennent même faire des rizières sur les bords
du Fleuve Houge^ ce qu'on ne voit jamais chez les Méos.
En tant qu'agriculteurs, ils cultivent le riz, le maïs, la patate, l'indigo.
L'altitude à laquelle certains d'entre eux habitent leur permet d'avoir des
arbres fruitiers d'Europe et, en particulier, des pêchers dont les fruits
sont très beaux mais peu agréables au goût. Ils les mangent d'ailleurs
verts, comme les Annamites, pour ne pas les voir attaqués par les insec-
tes et aussi parce que les fruits trop mûrs, d'après eux, donnent de la
diarrhée.
Tandis que les tribus de la plaine font presque exclusivement des
rizières de plaine, c'est-à-dire des rizières irriguées, le MAn s'adonne sur-
tout à la rizière sèche dite rizière de montagne. 11 choisit un beau bois de
bambous ou d'autres espèces d'arbres, y met le feu et lorsque cette terre
est suffisamment fécondée par ces résidus de combustion, toute la famille
bêche avec ardeur ce sol nouveau, y jette la semence et la laisse ensuite
germer envoyant de temps en temps, jusqu'au moment de la moisson,
des émissaires qui viennent surveiller le champ pendant le jour.
Les M;\ns, si on n'y prenait garde, auraient tùt fait de dévaster le pays
et de le rendre semblable aux pentes nues et tristes du Yu-Xan où se
trouvent encore nombre de gens de leur race. C'est une peuplade nomade
qui change facilement de pays et ne s'attache pas au sol.
Ils ont un dialecte spécial et ont beaucoup de peine à se faire com-
prendre sur les marchés de la i)laine. Ils sont illettrés, sauf (|uolque.s
notaiy.es et chefs (jui possèdent quehiucs caractères.
Ils ne s'allient jamais aux peuplades voisines.
Mim. — Avec les Méos nous arrivons à la peuplade qui habite les plus
hautes altitudes, de 1,000 à 2,000 mètres, qui s'attache au sol plus que
I'»t> 2 M A II s 1905
la raccmànel qui ne descoiid jamais dans les basses altitudes, prétendant
que la plaine leur est funeste et qu'ils s'y infectent de paludisme.
Les Méos sont plu lot petits, mais très robustes : ils ont le teint beau-
coup moins jaune que les Thaïs, l'angle interne de l'œil souvent bridé
mais la fente palpt'-brale peu oblique. Ils sont lestes, durs à la fatigue et
placent en général leurs villages dans des endroits difTiciles h aborder.
Doux, hospitaliers, mais un peu sauvages, ils sont de grands chasseurs
de cerfs, de tigres et de panthères et forgent eux-mêmes leurs fusils :
ceux-ci se composent dun long canon de fer et d'une toute petite crosse
analogue à une crosse de revolver qu'ils assujétissent sur la joue pour
viser : un chien primitif et un silex complètent cette arme de chasse.
Leur poudre, à gros grains, est fabriquée par eux.
Les costumes des Méos sont, avec ceux des Mans, les plus curieux de
la région. L'homme porte la tresse enroulée autour delà tète : celle-ci est
coiffée d'un turban de cotonnade bleue, affectant des dimensions bien
plus considérables que dans les autres races et ayant une vague ressem-
blance avec certaines coiffures indiennes. La veste, bleu foncé, est courte,
dégageant le cou et s'arrètant h. la ceinture; un pantalon de même couleur
descendant au mollet est retenu à la taille par une ceinture de coton
rouge et des bandes molletières bleues complètent ce costume très seyant
et très coquet quand il est porté par des jeunes gens. En costume de
travail, la femme méo a un grand turban de toile blanche ou noire, une
petite veste de toile blanche et une jupe blanche plissée, arrivant à peine
au mollet et qui se meut autour de sa personne plutôt dodue de façon
fort comique. Les mollets sont le plus souvent emprisonnés dans des
bandes molletières. Enfin un grand col marin, h fond blanc, agrémenté
d'appliques rubanées rouges et bleues qui le bordent, descend du cou sur
le dos et les épaules. Lors de certaines fêtes, le costume se complique
d'un turban plus précieux, bleu et blanc, et d'une ceinture où sont ébau-
chées quelques primitives broderies de soie.
Les maisons des pauvres sont de chaume : les paysans plus aisés ont
des murs en argile ou en pisé.
Le Méo brûle les forêts, comme le MAn, pour planter : mais il cultive
mieux son terrain et dépense beaucoup de travail el de temps pour amé-
nager, sur les pentes de ses montagnes, des rizières à irrigation : il cul-
tive aussi le maïs, le chanvre qu'il fait rouir et dont il se sert pour tisser
ses costumes. C'est lui, ainsi que le MAn, qui possède les poulinières de
cette race chevaline tonkinoise, dont la taille moyenne est de 1 m. 20,
mais qui est si précieuse pour les Européens à raison de sa vigueur, de
sou endurance et de son agilité.
Les Méos ont un dialecte spécial, mais parlent couramment le chinois.
Je m'arrèle. Messieurs, car cefte communication me paraît déjà bien lon-
guepour appuj-er la modeste collection etbnographiquequeje vous apporte.
Je reviendrai ultérieurement, avec plus de détails anthropométriques,
sur la race annamite et sur la race thaï.
YVES GUYOT. — LA IMPILATION ET LES SUBSISTANCES KV
LA POPULATION ET LES SUBSISTANCES
l'Ait M. Yves Glyot.
Messieurs et chers collègues,
Hue la ((uestion de l'alimentation doive être étudiée à la Société
d'Anlhropolot^ie, je crois que je n'ai pas besoin de le démontrer, car, à
coup sur, dans l'évolution humaine, elle est de tous les facteurs scien-
tifiques celui qui a joué et joue le plus grand rôle.
Que la Société d'Anthropologie doive se préoccuper des problèmes
contemporains, je crois que je n'ai pas non plus besoin d'insister sur
cette nécessité : elle est d'autant plus grande que nous voyons, en France
et en Allemagne, des écrivains présenter, sous le nom de systèmes anthro-
pologiques, d'audacieuses fantaisies, et il est peut-être regrettable que
nous n'ayons pas abordé quelquefois ici des problèmes agités dans des
discours et des livres retentissants pour en déterminer les données
exactes.
Précisément, dans l'étude suivante, je vais essayer de montrer comment
se pose la question de la Population et des Subsistances, question qui joue
un aussi grand rôle dans le budget quotidien de chaque individu que
dans la vie économique des peuples, dont tout le monde parle à tout
hasard et qui donne si souvent lieu à l'exploitation des préjugés par des
intérêts. Tout progrès scientilique élimine quelques-unes des duperies
dont l'ignorant est victime.
Ici, comme partout, intervient tout d'aboid la question de méthode,
car il s'agit de savoir quelles sont la quantité et la nature des subsis-
tances nécessaires à l'homme.
Donc, mon travail est divisé en deux parties :
l» Détermination de la Ration type.
2° .\pplication de cette mesure aux groupes humains cl aux ressources
alimentaires.
La ration ti/pe.
.Uix Etals L'iiis, yO/ficeof Jicperinienl Station d'i Di'jiartnirnloflltr Ai/ricul-
ture a. commencé, sous la direction de M. A. C. True, il ya unn dizaine
d'années, une enquèle sur la valeur nulrilive des divers aliments et de
leur prix de revient. Ces enquèles ont été dirigées par M. W. O. .\twater,
professeur de chimie à la Wesleyan University de Middletown, entouré
de collaborateurs de premier (M'dn;.
-M. At\Yaler donne les évaluations suivantes pour les rations néces-
saires :
ir.S 2 .MAii> 1005
Matières [trot(5iquos
Total digcstivos Calories
grammes grammes
Homme sans exercioe musculaire. .. . 90 83 -2150
Avec exercice modéré 112 103 3050
Avec exercice modéré actif 125 115 3400
Avec Iraviiil musculaire dur 150 138 4150
Avec travail musculaire vie dure 175 161 5500
D'après des expériences faites en Ecosse sur des prisonniers employés
il casser de la pierre et travaillant huit heures par jour, le docteur Dunlop
trouve que 3,700 calories constituent le minimum nécessaire pour un
adulte ne faisant qu'un travail modéré actif.
On peut donc considérer (}ue la ration type donnée par M. Atwater
pour Tadulte homme faisant un travail modéré actif de 3, 400 calories est
un minimum.
En temps de paix, la ration du soldat français est de 750 grammes de
pain, 300 grammes de viande, sans compter les légumes, le sucre, le café.
En dehors du pain de table distribué en nature, il y a le pain de soupe,
distribué au taux de 425 grammes par soupe deux fois par jour. La ration
est ainsi portée à 1 kilogramme; mais le pain de soupe peut être rem-
placé par des substituts.
La ration de viande est la ration non désossée et crue, au taux de
300 grammes par jour. Mais, d'après le règlement sur la gestion d'ordi-
naire, il faut déduire du poids total I/o ou 20 0/0 d'os. Le cahier des
charges exige un rendement en viande bouillie, os compris, de 46 0/0.
Voici les résultats pour une livraison de viande, le 24 février 1905 à
l'Ecole militaire de Saint-Cyr : viande de première qualité de Paris (bas
morceaux, collier, bas de la cuisse jusqu'au jarret, un peu de bajoues dé-
sossées, plat de côtes) :
Poids brut 45 kilos, se décomposant en viande crue, 37 kilos 100; os
crus, 7 kilos UOO. Viande cuite, 26 kilos, os cuits, 5,100. Le rendement
est de 57 0/0. Dans le service de choix auquel j'emprunte cet exemple,
on estime que le rendement moyen est de 55 00. On peut donc évaluer
le rendement ordinaire à 50 0/0; Atwaler n'estime les déchets de la viande
qu'entre 16 et 20 0/0.
La viande, en moyenne, contient 15 0 0 de matières protéiques qui,
multipliées par 300 grammes, nous donnent 45 grammes.
Le pain ou son substitut : 10 hectogrammes X 9, 2 ;= 92 grammes,
soit un total de 137 grammes de matières protéiques absorbées. Nous
sommes un peu au-dessus du chirTrc d'.Vtwaler; mais nous sommes au-
dessous si on lient compte de la difTérence de l'évaluation du déchet.
Quant aux calories, 3(KJ grammes de viande —. 666
1.000 gram. de pain blanc rr 2.660
_ 3 326
0 kil. 010
i.e quart de la ration tie sucre . — ■ — = 0.025
4
YVES (ÎLVOT. — LA Pnl'l I.ATION ET LES SLIISISTANCES 469
donne pour i.7oO calories par livn> anglaise, 9 calories.
Il faut ajouter quelques Icgmiies. Mémo en ne tenant pas compte du
déchet, on arrive péniblement au chiffre de 3,400 calories, qui doit être
considéré comme plutôt au-dessous qu'au-dessus du nécessaire.
Dans son essai d'Arithmétique poli(iqi(e sur les premiers besoins intérieurs
de la République, publié en I7*JG, le célèbre mathématicien Lagrange avait
pris comme base d'appréciation la ration des troupes qui, pour chaque
soldat, était de 28 onces de pain (une livre trois quarts) et d'une demi-
livre de viande; puis il avait n'duit la population de 23 millions à 20 mil-
lions, soit d'un cinquième, pour tenir compte de la ration plus faible des
enfants, des femmes et des vieillards.
Suivant l'exemple de Lagrange, je prends comme type la ration du
soldat en temps de paix. Pour opérer la réduction que comporte la
moindre consommation des enfants au-dessous de 13 ans, des femmes de
i5 à 39 ans exclusivement, et des vieillards au-dessus de 60 ans, je répar-
tis, par grandes masses, la population à ses différents Ages d'après les
recensements de i87t) à 1891) '. J'exagère le chiffre des individus à con-
sommation réduite. Ainsi sur i.OOO personnes, je porte à 20 pour 1.000,
tandis qu'il n'est ({ue de 16, le chiffre des enfants au-dessous d'un an.
Pour 1.000 personnes des deux sexes, on a :
.\u-dcssous dun an ■2<'
D'un an à 14 ans révolus 260
De 15 ans à 59 ans GOO
.\u-flcssus (le 60 ans. . . 120
Total 1.000
Des physiologistes estiment que l'alimentation d'une femme représente
les 3 3 de celle d'un homme; que l'alimentation d'un vieillard peut être
assimilée à celle d'une femme; que l'alimentation d'un enfant représente
les 3/4 de celle d'une femme; j'en déduis complètement l'alimentation des
enfants au-dessous d'un an. Dans ces conditions je trouve, pour 1,000 ha-
bitants, les chiffres de rations alimentaires suivants : pour les hommes,
300; pour les femmes et les vieillards, 313 ;. pour les enfants, 193; au total,
810; c'est-à-dire les quatre cinquièmes exactemenf, soit la même propor-
tion que celle adoptée par Lagrange.
Je vais plus loin. Evaluant la population de la France à 40 millions
d'habitants, j'abaisse au quart la proportion du cinquième et j'ai un total
de 30 millions de rations.
Voilà la méthode. Maintenant, quels résultats donnet-ellecomnie appli-
cation? Ouelles sont les ressources alimentaires qui coirospondent au
besoin ainsi déterminé?
' V. Levasseur. — La population.
170 -2 MAU> 1U05
Lu m lion réf/élalc eii France.
D'après la vieille fornuilc, trop forlc, mais admise dans le tarif des
doiianes, 100 kilos de blé produisent 100 kilos de pain. Kn France, de
1893 à 1902, la récolte a clé, année moyenne, de 8.800.000 tonnes de
froment. D'après M. Garola, les semences en ont exigé 1.000.000 : restent
7.800.000 tonnes. 3G0 kilos de pain X 30.000.000 = 10.800.000 tonnes;
reste un déficit de 4 millions de tonnes de froment, soit de 2\) 0/0.
H est insuffisamment comblé par les importations. La farine est comptée
dans les importations de blé au taux de 70 kilos par quintal de blé, le
poids de 1 hectolitre de blé étant évalué à 75 kilos.
1897-1898 2.287.000 tonnes.
1901-1902 228.000 -
1903-1904 337.200 -
Voici maintenant la production des grains inférieurs qu'on peut regarder
comme des succédanés :
1902. — Seigle 1.159.000 tonnes.
Orge 947.000 —
Sarrasin 578.000 —
On doit y ajouter les pommes de terre dont la récolte en 1902 a été de
11.200.000 tonnes, dont 5 millions pour usage industriel, l'alimentation
des animaux, la distillerie, la semence. Alais, d'après le tableau donné
par M. Armand Gautier, sur 100 parties fraîches les blés donnent en
moyenne 12,6i de matières albuminoïdes, les pommes de terre 1,3. En
un mot, pour obtenir l'équivalent des substances protéiques, là oii il fau-
drait 1 million de tonnes de froment, il faudrait 9.720.000 tonnes de
pommes de terre.
En 1902, on estime aux chiffres suivants la récolte des principaux
légumes :
Haricots 96.000 tonnes.
Lentilles 84.000 —
Pois 53.000 —
Fèves 92.000 —
Total 325.000 tonnes.
Tous ces légumes, sans compter leurs déchets, contiennent une énorme
quantité d'eau.
Donc nous pouvons conclure qu'il y a en France pour la nourriture vé-
gétale un déficit qui ne s'élève pas à moins de 2 millions de tonnes, soit
20 O/Ô ou un cinquième.
Le blé dans le monde.
Je vais examiner maintenant les ressources en blé qu'otïre le monde
çntier.
YVES GUYOT. — LA l'Ol'LLATION KT LKS SLltSISTANCES 171
Lo Ihdtctin des Halles a donne' en heclolilro.s la moyonne annuelle de la
production en froment dans le monde pendant la période décennale 1^94-
l'JOli, et en 1904. Je les convertis en tonnes au taux de T.j kilos pour un
hectolitre et je trouve :
Production moyenne
189 i 190;! I90i
Tonnes Tonnes
Europe 40.800.000 39.400.000
Antres continents :
Amérique lO.OOO.iKJO 20.000. 000
Asie 8.200.000 11 .500.000
Afrique 1.200.000 1.400.000
Total "g9. 200. 000 72.600.000
La production pour l'Europe compte donc pour 5i) 0 0 de la production
mondiale.
Mais la population de l'Europe est de 411.000.000, d'après l'évaluation
donnée par M. Levasseur dans VAnniiaircdu JJitrraudcs Longitudes. Uéduitc
d'un quart, elle a h sa disposition 124 kilos de blé, soit 236 en moins que
la ration type.
Voici comment se répartit l;i production du blé entre les grands pays
européens :
189't-190i 190'»
Tonnes Tonnes
UusMe 10.700.000 10.800.000
France 8.800.000 7.800.000
Autriche-Hongrie... 5.000.000 4.o00.000
Italie 3.300.000 3.600.000
Allemagne 3.200.000 3.800.000
Kspagoe 2.700.000 2.500.000
Roumanie 1. 600.000 1.300.000
Angleterre 1. 500. 000 1.000.000
Déduisons la Russie d'Europe et ses 116 millions d'habitants; il reste
30 millions de tonnes pour 300 millions d'habitants, diminués d'un quart,
soit 135 kilos par habitant, ou 28."i kilos en déficit de la ration type.
Si on prend la récolte de 1904, la population de l'Allemagne est estimée
à 59 millions. Diminuée d'un quart, elle n'a donc que 67 kilos de froment;
déficit, 293 kilos.
Les habitants du Iloyaume-rni, qui, en 1904, sont de 42 millions et
demi, n'ont que 23 kilos; déficit, 337 kilos.
L'Europe, même sans la Russie, produit plus de froment que le reste
du monde. Cependant ^a proJuclion est loin de suffire même à son ali-
menlion actuelle si insuffisante qu'elle soit. Elle ne compte qu'un grand
pays exportateur, c'est la Russie ; et c'est le moins avancé en évolution.
La Russie exporte 80 0 0 du froment qu'elle produit. Le paysan russe,
mange du seigle,
m 2 M A us 1005
Sur It's 132 millions et demi d'iicclaros labourés dans la Ilussie d'Eu-
rope, la surface consa(:r('e au froment n'occupe que 12 millions el demi
d'hectares : un peu moins du double de li surface qui y est consacrée en
France.
La surface emblavée en seigle est de 28.700.000 hectares.
Toute la zone du Tchcrnozem, la terre noire, est cultivée et son aire ne
peut (.Hre étendue. Si féconde qu'elle soit, avec son épaisseur qui varie
de 0,30 cenlinuHres à 1 mètre, la culture extensive qui y est pratiqu('e
n'en obtient que 4 ou 5 grains de froment par semence. La récolte actuelle
monte à environ 5 hectolitres à l'hectare, tandis que la moyenne de la
France est de 18. dette culture, qui gaspille la semence et obtient une ré-
colte si faible, est due à l'ignorance et à la pauvreté du paysan.
Le plus souvent, le blé apporté sur le marché ne vient pas directement
du paysan. Il a été saisi et est vendu par le fisc.
Le cultivateur ne peut se procurer de machines agricoles ; les hauts
tarifs les lui interdisent et il n'a pas d'animaux de trait pour s'en servir.
Pendant les trois dernières années, les récolles de la Russie ont été
d'une richesse exceptionnelle, mais déjà, en lîJOi, elles sont moins bonnes.
Elles sont le jouet des accidents météorologiques.
En 1902, le professeur Lenz disait dans son rapport, au nom de la
Commission impériale d'enquête : « Les cultivateurs russes vivent sur
leur capital, c'est-à-dire sur les éléments fertiles du sol, système de cul-
ture qui doit conduire à l'épuisement du sol. »
D'après M. Lucien Wolfï, on peut prévoir l'épuisement des terres à blé.
Dans le cours d'une génération, la fertilité des terres noires a diminué de
27 p. 0/0.
Par conséquent, on ne peut compter sur une quantité illimitée du fro-
ment venant de Russie. Les charges nouvelles qui résulteront de la
guerre, au lieu de développer la production du froment, la retarderont.
Les jacqueries ne contribueront pas à la prospérité de la culture. Si un
meilleur régime transforme le développement économique de la Russie,
les cultivateurs, habitués à un état de disette, mangeront un peu plus du
blé qu'ils cultivent.
Après l'Europe vient l'Amérique au point de vue de la production du
blé; mais sa culture est concentrée dans trois contrées :
1903 1904
Tonnes Tonnes
Elals-Unis 16.000.000 14.000. 000
République Argentine... 2.000.000 3. 200.000
Canada 1.700.000 2.400.000
La population de la République Argentine est évaluée à la fin de 1903
à 5.200.000 habitants. Chacun a donc à sa disposition 768 kilos de blé,
soit 308 kilos d'excédent.
pans le Canada, la population dépasse açiuellement le chiffre de
YVES GlYOT. — I.A POPri.ATIiiN ET LES SUBSISTANCES 173
5.500.000. Chacun a h sa disposition 535 kilos de blé, soit 175 kilos d'ex-
cédent.
En dehors de ces deux pays, partout nousjconsta tons un déficit. Mais sur la
production mondiale, en lV«Oi, de 7:2.(>00.0OO tonnes, leur production ne
représente que 5.000.000 tonnes, soit 1,~- 0 0.
L'Australie a produit, en 1904, l.GOO.OOO tonnes, soit 2.2 p. 0/0.
Certes la production du froment a subi de grands accroissements depuis
un demi-siècle ; mais il ne faut pas croire qu'elle suive une ligne ascen-
dante continue.
.\ux Etats-Unis, depuis 1875, la superficie des terres à blé a passé de
26. 381.000 acres ik 4U.i04. 000 acres en 1903. Mais, en 1904, elle a été
ramenée à 44.224.000 acres (17.600.000 hectares).
De même, dans certains Etats, grands producteurs de blé, la produc-
tion a subi les plus violentes oscillations. L'indiana, qui avait produit
53 millions de bushels en 1891, 40 millions en 1892, n'en a plus produit
que 35,5 en 1902 et 24 en 1903. L'IUinois, qui en avait produit 38 mil-
lions en 1890, n'en a produit que 16,5 en 1903. Le North Dakota qui, en
1891, avait produit 52 millions de bushels, n'en a produit que 28 en 1898,
13 en 1900. Il est vrai qu'il est remonté à 55 millions en 1903. A l'ex-
Iréme ouest, la Californie, l'Oregon, Washington ont vu leur production
diminuer de 50 p. 0/0 dans ces dernières années.
En moyenne, la proportion par acre n'a pas augmenté depuis 1875.
Elle était alors de 11,1 bushels. En 1902 et 1903 elle a été, en moyenne,
de 9, soit 8 hectolitres à l'hectare. En 1904, la production a été de 12,47,
soit 10 hectolitres 63. En France, pour les cinq années 1900-1904, la
moyenne a été de 18 hectolitres à l'hectare.
Les Etats-Unis ont une étendue de 7.500.000 kilomètres, mais la pro-
duction du froment n'y est pas plus uniformément répandue que sur les
9.820.000 kilomètres de l'Europe. Les 12 Etats de l'Ouest central pro-
duisent de 60 à 65 0/0 du froment et du maïs. Tout ce qui est vendu en
provient. Les Etats du Nord-Est, la Nouvelle-Angleterre, New-York, New-
Jersey, la Pensylvanie, les Etals du Sud et ceux des Montagnes Rocheuses
ne produisent pas une quantité de froment suffisante à leur consomma-
tion, et, cependant, elle est au-dessous de ce qu'exige la ration normale.
La consommation par tète n'a pas augmenté entre les recensements de
1890 et de 1900 : elle est de 5,29 bushels ou 193 litres. Si nous l'aug-
mentons d'un quart, par suite de la déduction des enfants, des femmes
et des vieillards, nous avons 241 litres ; mais, en supposant que l'hectolitre
pèse 75 kilos, nous revenons au chilfre de 193 kilos par tète et par an,
au lieu des 360 kilos de la ration type. Déficit, 126 kilos. Quand l'Améri-
cain devrait manger 100 kilos de blé, il n'en mange que 68.
Pendant les 5 années 1900-1904, la surface emblavée aux Etats-Unis a
été de 47 millions d'ares, soit de 18.800.000 hectares.
En France, pendant les cinq dernières années, l'étendue emblavée en
froment a été de 6.500.000 hectares.
Tandis que la surface des Etats-Unis est à celle de la France comme
171 2 MMt< 1".m5
l.riOO csl à 100, la surface emblavée en froment n'est que comme 289 est
à 100.
Le rendement moyen tic la France a (Hé, de 1900 h. 4904, de 8.800.000
tonnes. Celui des Klats-Unis a été, de 1901 à 1904, de 17 millions de
tonnes. Quand la P^rance a produit 100 hectolitres, les Etats-Unis en ont
produit 190.
Est-ce que cet écart est proportionné à celui qui existe entre la super-
ficie des Etats-Unis et celle de la France?
Les agrariens européens dénonçaient en 1876 le péril des blés améri-
cains. Or, l'exportation ne s'est élevée à 70.500.000 hectolitres, soit
rj.iJSO.OOO tonnes, qu'en 1892; depuis cette année elle n'a dépassé ce
chitTre que quatre fois, avec un maximum de 5.800.000 tonnes eu 1902.
.Mais, en 1904, elle est tombée a 1.700.000 tonnes, et, en 1905, on prévoit
aux Etats-Unis une importation de 234.000 tonnes.
L'Inde est considérée comme devant donner une énorme réserve de
blé. Ses exportations ont commencé en 1873. Dans la période quinquen-
nalle finissant en 1877-78, elles avaient atteint en moyenne 34.400
tonnes; elles ontateint 1.515.000 tonne?; en 1891-92; mais, en 1900-01. elles
sont tombées a 2.500 tonnes; en 1901-02, elles se sont relevées à 3GG.000
tonnes et en 1902-03 à 315.000 tonnes. Ce grenier n'est pas toujours
plein.
Mais quelle est la part de l'exportation relativement à la production?
Elle a été en moyenne pour les cinq années de 1897-98 à 1902 03 de
6.300 000 tonnes, soit de plus de 2 millions de tonnes inférieure h la pro-
duction fran(;aise. Pendant cette période, la France a produit 140 tonnes
de blé quand l'Inde n'en a produit que 100, et elle n'exporte que 8 0/0 de
sa production. La surface emblavée est en moyenne de 8 millions d'hec-
tares; mais en 1902 03 elle n'a été que de 7.440.000 hectares.
La population est très pauvre et se nourrit mal : 1 livre 739 par jour
de grains de toutes sortes^ y compris le riz. Cependant elle absorbe déjà
plus de 90 0/0 du blé qu'elle produit.
De 1872 à 1901, le recensement indique une augmentation de 74 mil-
lions d'habitants; mais Sir G. A. EUiot, en éliminant un certain nombre
de causes d'erreurs, la ramène à 33 millions 1/2. Seulement sans les
famines de 1876-78, de 1896 97, de 1899-1900, elle eût été de plus de
41 millions d'habitants.
Voici les chilTresdes importations de l'Angleterre pendant les dernières
années :
Pays étrangers Possessions britanniqpies
tonnes tonnes tonnes
1902 5.400.000 4.120.000 1.270.000
1903 5.830.000 4.200.000 1.600.000
1984 4.930.000 2.500.000 2.100.000
Les importations se répartissent de la manière suivante entre les pos-
sessions britanniques :
YVES GUYHT. — I.A Pur'l I. vTlnN F.T l,ES SUBSISTANCES 175
1902 1903 ^90i
Canada 175.000 540 OdO iUO.OOO
In,le 110.000 850.000 1.270.000
Australie 220.000 000.000 530.000
L'appoint de rinde a augmenté de plus de 300 0/0, mais l'Australie
a fait complètement défaut en 1903 ; les importations du Canada ont baissé
de -40 0 0, et elles représentent moins du quart de celles de l'Inde.
Les grands pourvoyeurs de l'Angleterre sont :
190'i 1903 1904
Russie 3.030.000 8.060.000 1.300.000
Ktals-Unis... 2.160.000 700.000 350.000
République Argentine. 215.000 701). 000 I.IOU.OOO
En 11(04, les exportations des Etats-Unis sont tombées de 83 0/0.
Entre i'JOi et la moyenne des années 1893-1894, l'augmentation de la
production du blé dans le monde a été de :
72.000.000 tonnes
69.200.000 —
3.400.0C0 — soit 4,9 ou moins de 5 0/0.
Or, le ministère de l'Agriculture de Hongrie calcule que depuis 1898
la consommation a augmenté de 11 0/0. L'augmentation de la pro-
duction est donc plus lente dans la proportion de 0 0 0.
Si nous divisons ces 72.600.000 tonnes de froment par les 1 .600 millions
d'habitants, réduits d'un quart, qui peuplent le globe, nous trouvons
6 kilogrammes par tète et par an. La ration type est de 360. Le froment
ne surabonde donc pas dans le monde. Il est inconnu pour des populations
considérables, comme les Chinois, qui mangent du riz. Le paysan russe
qui récolte du blé mange du seigle. Dans les Etats-Unis, le maïs remplace
le blé dans une grande mesure. Ce n'est que la minorité des êtres humains
qui mange du blé. L'évolution, disait le docteur Gaétan Delaunay, est en
raison de la nutrition; mais la nutrition est aussi en raison de l'évolution.
Tout progrès de l'humanité se manifeste par une augmentation de con-
sommation. Les surfaces qui peuvent être emblavées en blé ne sont
pas indéfinies. La culture du froment ne tient qu'une petite place dans le
monde. En Europe, dans le Nord de l'Allemagne, elle est remplacée par le
seigle; dans l'autre hémisphère, il faut descendre jusqu'à l'Australie méri-
dionale et la République Argentine pour la retrouver.
La culture extensive a jusqu'ici prévalu aux Etats-Unis, en Russie, aux
Indes. Le cultivateur demande tout au sol et ne lui rend rien. Il l'épuisé
et il cessera d'obtenir des récoltes ou bien il devra reconstituer la fertilité
de la terre par les amendements et les engrais des cultures savantes. Il
devra engager, chaque année, des frais pour une somme de plus en plus
forte par hectare, et la légende de la fertilité des pays neufs sera finie.
170 2 MA us l'JOo
Lu ration imiinali' m France.
.M;iinl(MiaiiL jo vais tHudierla ration animale.
Kn France, pour la viande, la Slalinlique agricole annuelle ne donnant
pas la moyenne de la viande de boucherie produite, je prends les cliill'res
fournis par la Slatistigue agricole de 1892 (p. 304 et suiv.).
IViids net on viande des animaux indigènes livrés à la boucherie :
Hace bovine 720.810 tonnes
Hace ovine 125.868 —
8 10.678 tonnes
Kn chifTres ronds, 850.000 tonnes.
Or, nous avons à pourvoir à 300 grammes de viande non désossée
pendant 300 jours pour 30 millions d'habitants.
300 X 300 gr. := 108 kilogrammes par an ;
Pour 30.000.000 de personnes :
30.000.000 X 108 = 3.2i0.000 tonnes de viande.
La race bovine et ovine nous donnent : 850.000 tonnes de viande.
Déficit : 2.390.000 tonnes.
Il faut y ajouter la viande de porc : 401.000 tonnes. En temps de paix
la ration militaire de porc salé est de 240 grammes par jour; mais aux
461.000 tonnes qui représentent le porc frais, nous ne devons pas faire
subir cette réduction.
Donc nous avons :
Viande de boucherie 846.000 tonnes
A^iande de porc 461 .000 —
Total 1.307.000 tonnes
Nous avons à pourvoir à 3.240.000 tonnes
Déficit 1.930.000 tonnes ou 59 p. 100
En un mot, quand il faudrait 100 kilos de viande, nous en avons 41.
Lagrange estimait que la consommation totale de la viande en France
était de 80 livres par habitant, soit de 40 kilos. Au bout de plus d'un
siècle, nous arrivons au chiffre de :
1.308.000 tonnes
30 000.000 = ^^ ^''- ^' P"'" ^'^*^^°^-
Le progrès de la consommation de la viande est-il en rapport avec les
progrès de la civilisation réalisés depuis un siècle?
Les 5.000 à 0.000 tonnes de viande de l'espèce caprine, les 12.000 tonnes
de viande de cheval, les 30 millions d'animaux de l'espèce galline, les
10 millions d'oies, de canards, de dindes, de pintades et de pigeons, les
15 millions de lapins, comblent les quantités que j'ai négligées et ne
sauraient modifier le pourcentage de plus de 2 ou 3 0/0.
Ajoutons l'appoint du poisson dans l'alimentation animale. D'après la
YVKS lUYOT. — LA POPII.ATION ET LKS SL'IISISTANCES 177
statistique des pèches pour 1899, 1900, 1901, 1902, les produits des di-
verses pùches maritimes varient entre 2(t0.000 et 280.000 tonnes; en y
ajoutant les pèches d'eau douce et les pêches dont les produits ne sont
pas connus, nous obtenons environ 300.000 tonnes.
Il faudrait déduire de ce chifTre environ 40.000 tonnes exportées, dont
28.000 de morues. On peut donc dire que l'adjuvant apporté par le poisson
ne dépasse guère 230 000 tonnes. Si on compte largement, si on évalue,
malgré la quantité d'eau que contient la chair du poisson frais, qu'elle a
une valeur nutritive égale à celle de la viande, nous avons 1.608.000
tonnes de nourriture animale. La ration nécessaire est de 3 240.000
tonnes; le déficit est donc de 1.632.000 tonnes ou de 53 0/0. Quand il faut
100 kilos de nourriture animale, nous n'en avons que 47.
La Statistique agricole de 1892 évalue le produit d'une poule k 80 œufs
par an et à 2.885.000.000 d'œufs la production totale des poules de France
(p. 316». Si on estime le poids de l'œuf à 60 grammes (coquille comprise),
nous avons pour l'ensemble de la France 173.000 tonnes d'œufs.
M. Armand Gautier estime que, de 1890 à 1899, la consommation
moyenne des œufs, par chaque Parisien, sans distinction d'âge ni de sexe,
a été de 10 kilos d'œufs. Si on fait entrer dans chacune des 3 240.000
rations animales 10 kilos d'œufs, le déficit de l'alimentation en matière
animale serait encore de près de moitié.
Lagrange ajoutait le fromage comme succédané h. la viande h raison
d'une demi -livre de fromage pour une livre de viande; c'est une pro-
portion trop faible quand il s'agit des fromages secs, mais trop forte, au
point de vue des matières proléiques, quand il s'agit des fromages frais.
En 1802, la production du fromage a été de 136.650 tonnes; ne comp-
tant pas les quantités exportées, je double ces 136.650 tonnes et je les
ajoute à la ration de viande et de poisson, soit 273.000 tonnes.
Je ne parle pas du beurre qui, très riche en graisse, donc en calories,
ne contient pas de matières protéiques.
Nous pouvons dire d'une manière générale qu'en France nous n'avons
pas la moitié de la nourriture animale nécessaire.
Symptôme grave, j'ai fait une enquête auprès d'un certain nombre de
grandes villes : la consommation de la viande n'a pas suivi l'augmentation
de la population.
A Paris, d'après le recensement de 1876, la population était de
1.988.000 habitants, et la consommation de la viande de boucherie était
de 149.600 tonnes, soit 79 kilos par tète. En 1903, pour une population
de 2.657.000 habitants, la consommation n'(>st que de 161.762 tonnes»
60 kilos par tôle, soit une diminution de 24 0/0.
L'augmentation de la consommation de porc et de charcuterie, de
poisson a été plus lente que l'augmentation de la population. Seule celle
de la volaille et du gibier a augmenté plus vite.
La ration animale annuelle du Parisien adulte n'est que de 87 kilos
au lieu des 108 kilos du soldat. Il n'y a pas eu progrès, il y a eu recul.
Dans l'enquête que j'ai faite auprès des maires de seize grandes villes
soc. d'anthrop. 1905. 12
178 2 MAio 1905
(le France, sauf à Aiigoulême, la consoninialion do la viande n'a aug-
menté (jne là où elle était très faible en 1880.
Sauf à Bordeaux, à Angouléme et iMines, nulle pari la consommalion
n'atteint pour l'adulte les 108 kilos de la ration type.
Lu ration animale en Angleterre.
L'Anglais a la réputation d'être grand mangeur de viande.
D'après l'enquête faite par un comité nommé en novembre 1900 par la
lloijal slatistical Societi/, la production de la consommation de la viande
dans le Hoyaume-l'ni, dans les cinq années finissant au ai mai 1903,
donnent les chiffres suivants :
Tonnes
Bœuf et veau 662.520
Mouton 313.822
Porc et jambon 269.578
Total 1.245.920
La population du Royaume Uni dépasse 41 millions d'habitants. Réduits
d'un quart, s'ils n'avaient d'autre ressource que la production nationale,
ils n'auraient par an et par lêle que 38 kilos 220 de viande au lieu des
108 de la ration type.
Mais le total de la viande importée est de 962.000 kilos, ce qui donne
un total de 2.207 000 tonnes; la ration de l'Anglais est ainsi relevée à
69 kilos, et dépasse celle du Français de plus de 25 kilos.
Cependant ces 2.207.000 tonnes laissent un déficit de plus d'un mil-
lion de tonnes. Ces chiffres montrent que les Anglais ont raison d'aug-
menter la surface de leurs prairies.
Le second rapport du Comité montre la consommation de viande par
tête en Angleterre pour certaines catégories de personnes :
LiTre8de463gr.
par tôte et
par an
Groupe L — Ouvriers, mécaniciens, ouvriers de la ferme, 107
Groupe II. — Petite bourgeoisie 122
Groupe III. — Population aisée 182
Groupe IV. — Population riche 300
Encore faudrait-il distinguer dans l'intérieur de ces groupes, mais il
est évident que ce sont les hommes qui ont le plus besoin de dépenser de
la force musculaire qui la réparent le moins. Ils n'ont pas 69 kilos de
viande, et la ration du soldat français est de 108. Ils n'ont pas la ration
minimum nécessaire.
Par conséquent leur réputation de grands mangeurs de viande n'est
VVK> ClYdT. ~ I.V l'Ol'LI.VTln.N 1;t I.KS SI llSISTAN(:ii> |7<J
pas justifiée pour la grande inajorilé des Anglais; mais elle prouve que,
si la majorité îles Anglais ne mange pas assez de viande, les peuples qui
leur ont donné celte qualification en mangent encore moins.
La viande dans le monde.
Je prends dans le rapport de M. Levasseur sur les Procédés de la Stntis-
(iqxic agricole^ le t-ihleau suivantdes animaux deferme; etje le compareau
nombre des lialiilants des divers pays tel qu'il est indiqué par les statis-
tiques faites autour de l'année 1900
Tauleau coMi'ArtATiF de la moyenne décennale (1891-1900) des animaux de
ferme (^en millions de têtes).
^iranJe-Brelagne
Irlande
i*ays-I3as
IJelgique
France
Kmpire allemand
.\ulriche
Hongrie
Italie
IJounianie
Hussic (d'Ulurope)
Suède.
Norvt'-ge
Danemark
Klals-Unis (d'après le Cevsiis
de 1900
Habilauls
Bêle» à cornes
Moutoni
Porcs
Millions
6,6
27,0
2,5
»
4,4
4,3
1,3
41
1,5
0,7
1,1
5
1,5
0,24
1,0
7
13,3
21,1
6,2
39
18,3
11,4
14,5
56
9,0
2,9
4,1
»
6,7
8,1
7,3
45,4
5,0
6,9
1,8
33
2,5
5,0
0,9
6
30,3
47,2
11,2
100
2,5
1,3
0,7
5
1,0
1,2
0,1
2
1,7
1,2
0,1
2,5
67,8
61,6
62,9
80
172,1 200,14 116,7 422
Ouelles sont les ressources alimentaires (}u'indiquent ces chiffres glo-
baux? Quelle quantité de poids vif de viande représente chacun de ces
.mimaux? Le Comité de la Royal Statistical Society, après une enquête
minutieuse, est arrivé aux conclusions suivantes : un bœuf vaut 660 livres
(do 453 gr.j (300 kilos) de viande, un veau 95 livres, un mouton 65, un
agneau 40 et un porc 135.
Mais les produits anglais sont d'une qualité de beaucoup supérieure h
celle des autres pays. De plus, les bœufs et les veaux sont confondus; il
en est de même pour les moutons et les agneaux. Pour avoir le poids
moyen, je réduis donc d'un quart le poids donné par le comité pour le
* Institut international de statistique, t. XIII, 2" livraison, p. 85, 1902. On y troii-
vcTii l'indication des ùlèmenls avec lesquels co tableau a éti- composé.
180 2 M A us 1905
I élail cl les moulons anglais, Pour les porcs, je me borne à déduire un
cinquième en forçant un peu le chiffre.
Nous arrivons aux chiffres suivants :
Poids Millions Tonno»
kilos de lôtes de viandes
Bôles !\ cornes 224 X 172 38.528,000
Moutons 21,5 X 200 4.200.000
Porcs 50 X il<J 5,800,000
Mais celte quantité n'est pas disponible annuellement. Il faut compter
cinq ans pour le bœuf, quatre ans pour le mouton, deux ans pour le
porc *, ce qui donne :
Bœufs 7.700,000 tonnes annuelles
Moutons 1.080.000 —
Porcs 2.900.000 —
Total 11,680.000 tonnes annuelles
Nous devons déduire un quart des 422 millions de têtes de population
comptées dans le tableau ci-dessus, soit 105. Nous avons donc :
Tonnes de viande 11.600.000.000 kil.
— =r 36 kilos.
Nombre des habitants 317.000.000
kilos 36
— — — - z=z 100 grammes par jour.
Nombre drt jours 360
Je rappelle que la ration militaire française est de 300 grammes ; le
manquant est donc de 200 grammes.
Si je prends les chiffres donnés au nom du Comité de la Royal Statistical
Society ^ , je trouve le tableau suivant de la consommation moyenne de
viande et de produits de la laiterie dans divers pays :
PAY5 Viande Lait Fromage Beurre
— Lbs Gallons Lbs Lbs
(453 gr.) (litres 4,b4)
Royaume-Uni 122 15 10,5 18,5
Danemark 75 40» — 20,0
France 80 16^ 8,2 5,9
Allemagne 99 — — —
Saxe _ 46 — 33,0
Belgique 70 — — 25,0
Hollande . — — 11,0 13,0
Suède 62 40^ 4,6 15,8
Etats-Unis 150 25 3,7 20,5
Australie 262 — 3,5 16,7
Nouvelle-Zélande 212 — 4,4 17,8
' Vermorel. — Aide-Mémoire de l'ingénieur agricole.
2 24 juin l'J04.
3 Coiiiprcnaut la cronie et le lait à moitié écrémé.
4 Galciilce sur la production totale après déduction du fromage et du beurre.
YVES GUYOT. — LA l'Ol'LI.ATION KT LES SlUSISTANCEs 181
Le cliill'ro de 150 livres de viande [)oui' les Etats-Unis nous donne
t)7 kilog. 5. Augmenté d'un quart pour obtenir le chiffre de la ration de
l'homme adulte, nous avons 84 kilog. I> pur au au lieu de 108 kilos de la
ration type. Ce chilîre n'est dépass('' qu'en Australie et en Nouvelle-ZfMande.
Pour l'Australie nous avons 118 kilos qui, augmentés d'un quart, donnent
156 kilos par ration d'adulte.
Rapport de la population et des subsistances.
Quel est le rapport de la population et des subsistances?
En Angleterre, le major (Iraigie, le président de la Royal Statistical
Society en 1903 et 1904, a attiré l'attention de ses collègues, sur l'énorme
augmentation de la population du monde. Elle n'a pas doublé en vingt-
cinq ans, mais il estime, avec la plupart des autres statisticiens, qu'elle
a h peu prés doublé dans les soixante-dix dernières années, passant de
850 millions à 1000 millions, chiffres de MM. Levasseur et Bodio.
Population aux environs de
1830 1900
— en millions —
Europe 216 400
Asie 480 868
Afrique 109 178
Amérique 40 148
Océanie 2 6
La population de la Russie est comprise dans le chiffre de la popula-
tion européenne. Sa population aurait augmenté de 150 0/0 en soixante-
dix ans, et celle du reste de l'Europe de 67 0/0; mais en réalité, jusqu'en
1897, elle n'a pas été soumise à un recensement auquel ou puisse ajouter
loi.
La Russie déduite, la population de l'Europe a augmenté de plus de
moitié.
Pouï 100
1830 4900 en 70 ans
Royaume-Uni 24,4 41,6 70,5
France 32,5 38,9 19,7
Allemagne 30,0 56,4 88
Aulricbe-Uongrie 30,0 45,4 57,3
Italie et Suisse 23,2 35,8 51,3
Kspagne et Portugal 14,2 23,1 62,7
Suéde, Norvège, Danemark, Belgique, Hol-
lande 12,4 21,7 75
166,7 262,9 57,7
Nous avons vu que, malgré les progrès de l'agriculture, les subsis-
\H2 2 MAU> l'jor.
lances sont de beaucoup iiiféiicures à la ration de I "adulte telle (ju'elle
est di^terminée dans l'armée fran(;aisc.
Je conclus donc :
1° ijne la production du froment et de la viande dans le monde est de
beaucoup inférieure à la ration nécessaire, telle que l'ont déterminée les
travaux des pbysiologistcs, et, en dernier lieu, d'Atwater;
2" Hue l'augmentation de la population dans les soixante-dix dernières
années en Europe a été telle que, sans les importations de froment et de
viande des autres continents, elle serait à l'étal de disette ;
3" Que beaucoup de ceux qui ont le plus besoin d'une alimentation
réparative n'ont qu'une alimentation insuffisante;
4° Que les grands pays exportateurs de blé, la Russie, les Etats-Unis,
le Canada, l'Inde, l'Australie, la République Argentine n'offrent pas pour
l'avenir des réserves inépuisables; que le développement des récolles
n'y suit pas une ascension continue; que la fertilité de certaines terres
s'épuise et devra être renouvelée par une culture savante; que la consom-
mation de ces pays se développera en raison des progrès de la civilisation.
Leurs cultivateurs, au lieu de cultiver pour les étrangers, cultiveront
pour eux et leurs compatriotes : phénomène déjci réalisé aux Etats-Unis
et aux Indes.
Certains optimistes font croire aux naïfs, qu'il y a dans le monde des
terres qu'il suffit de gratter avec la charrue pour qu'elles rapportent indé-
finiment les moissons promises jadis dans le pays de Chanaan. Certains
pessimistes afiirment aux mêmes naïfs que les récoltes y sont tellement
abondantes et reviennent à un prix si bas, que les cultivateurs de l'Eu-
rope doivent cesser de cultiver leurs terres, s'ils ne leur opposent des bar-
rières douanières. Cependant l'Europe, même sans compter la Russie,
représente 59 0/0 du total de la récolle du blé dans le monde. La culture
exlensive sur les territoires dits vierges deviendra de plus en plus res-
treinte et de plus en plus précaire; et loin qu'elle puisse assurer l'alimen-
tation des générations futures, si la population suit un développement
semblable à celui qu'elle a suivi en Europe, aux Etats Unis, dans l'Inde,
elle devra être remplacée partout par la culture intensive, dont la puis-
sance n'a d'autre limites que les progrès de la science.
CEAULES LEJKINE — l'iIOMME DAN^ l'iNIVEHS 183
LA PLACE DE L'HOMME DANS L'UNIVERS ET DANS LA SERIE ZOOLOGIQUE
Pau m. Charles Lejelnb.
Le D' Alfred-Russel Wallacc, le célèbre l'-mulc de Ch. Darwin, après
avoir scandalisé les astronomes au début de Pannée 1904 en réhabilitant
l'ancienne cosmogonie, qui faisait tle l'homme le roi de l'univers, a
répondu h ses contradicteurs dans un livre (lui porte ce titre: Mans Place
in tfie Univers. M. H. Château a fait de cette œuvre une très complète
analyse dans le numéro de La Grande Revue portant la date du 15 oc-
tobre 1904.
M. Héné Quinton, qui s'est fait remarquer par des communications à
l'Académie des Sciences et à la Société de Biologie, vient de publier un
important ouvrage qu'il intitule : L'Eau de mer, Milieu organique. — Cons-
tance du Milieu marin originel, comme Milieu vital des cellules, à travers la
.série animale. L'auteur avait déjà fait paraître une partie de son travail
dans le numéro de La Bévue des Idées du 15 janvier 1904. Il conteste à
l'homme le droit de se considérer comme le dernier terme et le plus élevé
des vertébrés.
II m'a paru intéressant de signaler ces deux ouvrages tendant parleurs
conclusions: le premier, k relever la place de l'homme dans l'univers, et
le second, sinon à l'abaisser, au moins à le vieillir en reculant l'époque
de son apparition dans la série zoologique. Je n'ai pas la prétention
d'avoir les connaissances astronomiques ou zoologiques sulïisantes pour
discuter à fond ces deux thèses qui m'ont frappé par leur antagonisme et
leur intérêt anthropologique, mais j'ai voulu les rappeler dans l'espoir
qu'elles pourraient servir de base à nne discussion sérieuse entre ceux de
nos collègues dont les connaissances spéciales permettent de discuter ces
théories.
Nous allons résumer brièvement les principaux arguments de ccï? doux
s.ivants.
/<a Place de l'Homme dans l'univers.
Le D'' Wallace divise l'histoire de l'astronomie en trois cp^iues :
l" D'Anaximandre à Copernic, Ïicho-Brahé, Kepler et Galilée. La terre
était le centre du monde, l'univers n'existait que pour la terre et ses
habitants.
2° L'Aslrono:nie moderne s'arrête à 1800, ;\ la découverte de l'analyse
spectrale. La te- re ne se distingue des autros planètes par aucune supé-
riorité de grandeur ni de position, pourquoi les autres p'anètes ne
seraient-elles par habitées? W. Hersch-I, .1. Taylor et Arago adoptèrent
la théorie de Fonlenelle sur la pluralité des mondes habités. Ce n'est
qu'en 1833 que le D' Wewell la co nba'lit en émett:int celte proposition
que : Vorbite de la terre est la zone tempérée du si/stème solaire, permettant
184 2 MAits ioo:j
scult' CCS varialiuns modcivcs de fiuid et «le chaleur, de s<'clieressc et
d'Iiuiniditc nécessaires à la vie animale. M;irs pourtant lui semble hahi-
tal»le, Itien que les condilions de lemiiéialure h sa surface ne puissent
permettre que l'existence d'animaux de type inférieur tels que les Sau-
riens et les Iguanodons de rr-oUthique, mais il ajoute que la préparation
de l'homme sur notre terre ayant exigé des milliers d'années, il est inutile
de discuter de la présence d'êtres intelligents sur la planète Mars, jusqu'à
preuve contraire.
3» La troisième époque date de la découverte merveilleuse de Kirchoff
et Bunsen, L'analyse spectrale a permis de constater l'unité et l'évolution
du système solaire.
Il est généralement admis que la Galaxie a la forme d'un vaste anneau
irrégulier de section approximativement circulaire. Les étoiles sont beau-
coup plus nombreuses dans la voie lactée et ses abords, et la partie la
plus dense de l'univers est aplatie entre les pôles galactiques. Les nébu-
leuses sont au contraire abondantes en dehors de la Galaxie, mais elles en
sont des parties connexes et l'on est ainsi conduit à concevoir l'unité du
système stellaire.
L'auteur s'appuie sur M. Faye pour rejeter la théorie cosmogonique de
Laplace et admettre la théorie météorique de l'origine des étoiles et des
nébuleuses. Il considère comme probable, avec Newcomb et Cambell, que
les systèmes binaires ou multiples sont beaucoup plus nombreux que les
étoiles simples.
Newcomb de Washington dans Les Étoiles (1902) dit que l'univers est
d'étendue limitée, car si les étoiles s'étendaient à l'infini, les cieux tout
entiers seraient d'une lumière éblouissante comme le soleil, or la lumière
des étoiles n'est que la six millionième partie de celle du soleil.
Si l'on admet l'infini stellaire, deux causes peuvent seules expliquer
cette quasi-extinction: l°oula perte de la lumière à travers l'éther, qui est
sans valeur parce que les étoiles les plus brillantes ne sont généralement
pas les plus rapprochées, ainsi que le prouve le peu d'amplitude de leurs
mouvements propres et l'absence de parallaxe mesurable; 2" ou l'arrêt
de la lumière par des étoiles sombres ou des poussières météoriques dif-
fuses ; or Monck établit dans la revue ang'aise Knowledge de 1903, que la
lumière de la pleine lune ne dépasse pas un trois cent millième de celle
du soleil et que si les étoiles obscures étaient cent cinquante mille fois
aussi nombreuses que les brillantes, le ciel entier devrait briller autant
que la partie éclairée de l.i lune, tandis que la partie la plus brillante
de la Galaxie n'a pas la centième partie de la lumière de la pleine lune.
Le D"" Wallace nie l'infinité parce que les perfectionnements du téles-
cope et de la photographie n'auraient pas accru le nombre des étoiles
connues et parce qu'il y a dans la voie lactée des espaces vides qui n'exis-
teraient pas si d'innombrables étoiles, trop petites individuellement,
existaient au delà.
Le système sidéral étant considéré comme fini, on le regarde de plus
en plus comme un sphéroïde ayant pour équateur la Galaxie très proba-
CHARLES LEJEUNE. — I.'llOMMK HANS 1,'lMVERS 185
bl(?ment circulaire et en rotation pour avoir pu se former et se conserver.
Et comvie la voie lactée nie de ta terre divise la sphère céleste en deux parties
égales, le plan de ce cercle doit passer par la terre. Si la terre était plus ou
moins éloignée du centre de ce plan, nous découvririons plus ou moins
vile Texcenlricité de notre situation. Gomme nous ne pouvons la consta-
ter, nous devons appartenir h quelque groupe d'étoiles en rotation lente
autour de ce centre et nous devons bénéficier de tous les avantages
pouvant provenir d'une position centrale dans le système sidéral tout
entier.
Il arrive ainsi aux propositions suivantes : « 1" L'univers slellaire
n'est pas infini; 2" notre soleil est situé dans le plan de la Galaxie; 3<>il
est également situé pn'-s du centre de ce plan ; A" nous sommes en-
tourés d'un groupe d'étoiles d'étendue inconnue, qui occupe une place
peu éloignée du centre du plan galacli(iue et proche, en conséquence, du
centre de notre univers sidéral. »
La plupart <les étoiles de ce groupe ont un spectre de type solaire, elles
sont de la même constitution chimique générale et à la même période
d'évolution.
On objecte que si le soleil occupe actuellement une position quasi cen-
trale, c'est sans importance, car dans vingt ou cent millions d'années,
étant donnée sa vitesse de translation, il aura traversé l'univers d'un
bout h l'autre. Et M. Wallace répond qu'il est admis par les mathémati-
ciens que dans un grand système de corps soumis à la loi de gravitation,
il ne peut exister de mouvement en ligne droite de l'un de ces corps, de
même que l'action de la gravitation seule ne peut entraîner une masse
quelconque hors du système. 11 ajoute que si le soleil n'est pas exactement
au centre de gravité de l'Univers, on peut supposer que sa direction
trace une orbite autour de ce centre.
Après la question de position, Wallace passe à celle de l'hahitahililé des
planètes, dont la solution est subordonnée aux lois de la vie organique.
(( L'une des plus merveilleuses découvertes dues au speclroscope est
celle de l'unité des éléments et des composés matériels de la terre et du
soleil, des étoiles et des nébuleuses; celle également de l'identité des lois
physiques et chimiques qui déterminent les formes et les états présentés
par la matière. »
lien coucha que la nature animale, végétale et minérale est la môme,
au miiins p:jur tout l'univers que nous connaissons. 11 affirme (pie la loi
de la gravilalinn s'élcnil à loul riinivcrs physique etqu'il en est de môme
pour les lois de la lumière, de la i.haleur, de l'électricité et du magnétisme.
Les éléments et les lois étant les mêmes, les ôtres vivants organisés ont
partout, d'après la biologie, un<> unit'' I.MiilanicMtale de sub>t;ince et de
structure.
La base physique de tout organisme vivant est un protoplasme com-
posé essentiellement d'azote, d'hydrogène, d'oxygène et de carbone et la
plupart des phénomènes biologiques ne s'opèrent qu'à une température
variant de O'^ à 40°.
ISO 2 MAH.> \\m
Les conditions physiques nécessaires au développement el au maintien
de la vie, sont : 1" des variations légères de température; 2'' une quan-
tité suffisante de chaleur et de lumière solaire; 3° l'eau en abondance et
distribuée universellement ; 4" l/ne atmosphère de densité suiïisantc et
comi>osée des gaz essentiels à la vie végétale et animale; 5° et des aller-
natives de jour et de nuit.
L'auteur dit que l'habitabilité d'une planète dépend de sa dislance au
soleil el que les trop hautes ou trop basses températures sont également
contraires à la vie. Considérant l'extrômesensibililé du protoplasme et le
degré de coagulation de l'albumine, il croit pouvoir aflirmer que nous
sommes situés dans la zone tempérée du système solaire et qu'un grand
changement dans notre position actuelle mettrait la vie en péril.
L'obliquité de l'écliplique joue également un rôle de premier ordre en
produisant la variété des saisons. L'eau régularise la température et si
la proportion des océans et des continents était renversée, la plus grande
partie de la terre serait probablement inhabitable.
L'atmosphère doit être d'une densité et d'un volume déterminés qui
dépendent de la masse de la planète el de la température moyenne <i sa
surface, pour remplir les diverses conditions exigées par la biologie. Mer-
cure et Mars seraient impropres à la vie comme incapables de retenir la
vapeur d'eau, sinon peut-être une vie végétale assez rudimentaire pour
Mars dont la température serait presque constamment très au-dessous
de 0°.
Dans Vénus dont la rotation sur l'axe coïncide avec la révolution au-
tour du soleil, on trouve comme température une face intensément froide
et l'autre intensément chaude, dans des conditions qui ne permettent
guère l'existence du protoplasme.
Si la vie se manifeste sur la terre parmi les neiges arctiques comme
sous l'équateur brûlant, dans l'air comme dans l'eau, cela ne prouve pas
que la vie aurait pu se manisfester dans un monde offrant partout ces
conditions extrêmes.
Enfin les grandes planètes Saturne, Jupiter, Uranus et Neptune sont
de densité si faible qu'elles doivent être presque entièrement gazeuses.
Parmi les quatre petites planètes dont la densité est proportionnée à
la grosseur, la terre, qui est la plus grande et la plus dense, peut seule
conserver, à cause de son éloignement du soleil, une grande quantité
d'eau à l'état liquide et elle a toujours eu depuis l'apparition de la vie une
température égale. Nulle autre planète n'a possédé ces avantages dans le
passé et ne les possédera dans l'avenir. L'avis contraire des astronomes
et notamment de Proctor ne repose sur aucune donnée sérieuse, car la
durée tout entière de notre soleil a été utilisée pour l'évolution biologique
jusqu'à l'homme et les cinq à six millions d'ans qu'on lui accorde encore
sont bien peu de chose en comparaison de sa durée dans le passé.
En résumé le U"" Wallace considère comme évident que la terre est la
seule planète habitée de tout le système solaire. Déjà l'astronome Gore
{The icorlils of space) pensait que chaque étoile n'offrait qu'une planète
CHAKLE> LFJEINE.
l.'lInMMK liAN- I. I MMU- 187
présentant les conditions favorables pour entretenir la vie. Mais Wallace
élimine tous les soleils, qui n'ayant pas la masse du notre, ont moins de
chaleur. Il rejette tous les astres sis dans la voie lactée comme exposés
h d'elïrayantes collisions. Il n'admet de systèmes planétaires possibles
qu'au groupe d'étoiles dont fait partie notre soleil, il en exclut les étoiles
les plus brillantes, qui étant moins denses auront une moindre durée, et
le nombre des étoiles pouvant engendrer la vie devient ainsi très limité.
Puis comme il n'y aurait presque pas d'étoiles simples, qui seules pa-
raissent aptes h entretenir la vie, notre soleil seul, peut-être avecdeuxou
trois autres, serait capable de maintenir la vie sur une de ses planètes.
Si ces deux ou trois autres existent, nous ne savons pas s'ils possèdent
des planètes et encore moins si elles réunissent toutes les conditions de
cet équilibre délicat que présente la terre.
Enlin Wallace pense que notre position centrale ;i permis le maintien
de la chaleur solaire par agrégation de matières diffuses venues des ré-
gions extérieures à la Galaxie avec des vitesses si élevées qu'elles ont pu
maintenir pendant les périodes géologiques le pouvoir calorique et lumi-
neux de notre soleil.
Après avoir résumé le livre de l'éminent naturaliste, M. II. Château se
déclare frappé par le caractère systématique de ses conclusions. Mais il
ajoute qu'il a poussé l'analogie jusqu'cà ses plus extrêmes limites et a été
ainsi conduit à des déductions d'une trop grande rigueur.
« De ce que, dit-il, tout l'univers est partout constitué des mêmes élé-
ments matériels et sujet aux mêmes lois physico-chimiques, faut-il con-
clure à l'absolu des conditions climalériques, par exemple, qui ont pré-
sidé à l'évolution biologique? Mais certaines expériences de laboratoire,
en favorisant la théorie de l'origine extra-terrestre de la vie, viennent
saper quelques unes des conclusions du D"" Wallace. .\-t-on oublié les expé-
riences de M. Allan Macfadyen sur les basses températures? Exposées à la
température de l'air liquide (— 190') les bactéries phosphorescentes de-
viennent obscures et retrouvent leur luminosité après avoir été dégelées.
L'n résultat identique est obtenu à la température de l'hydrogène liquide
(— ioO^l Les mêmes organismes retrouvent leur vitalité après une im-
mersion de six mois dans l'air liquide. Rien ne s'oppose maintenant à
l'adoption de l'hypothèse de Helmhollz et Lord Kelvin, relative à l'ori-
gine cosmique de la vie, puisque les organismes résistent aux grands
froids intersidéraux. 11 est vrai que le D' Wallace accorde h un petit
nombre de planètes des possibilités de vie élémenlaire, mais la rigueur de
ses déductions s'accorde mal avec l'incertitude de nos connaissances
actuelles sur les conditions de la vie à la surface des planètes de notre
système, et il semble bien que la théorie relative à l'improbabilité de
l'existence de planètes appartenant à quelqu'autre soleil manque de
base scientifique sérieuse. »
J'ajouterai à ces justes remarques les considérations suivantes :
On peut objecter au D' Wewell prétendant que la vie animale n'a pu se
développer sur la planète Mars parce qu'elle ne serait pas dans la zone
188 -2 MAit> 11)05
teinpéive du syslt^'ino bolairo peniullaiil seule ces varialions modérées de
froid et de chaleur, de sécheresse ol dMiumidilé qui lui sont nécessaires,
que c'est dans la zone équalorlah; terrestre nianijuanlde froid et de séche-
resse, que cette vie est la plus intense. Il est tiès probable que la tempé-
rature de la terre était à peu prés partout uniforme quand la vie orga-
ni(jue y a fait son apparition. Il suflit que la vie ait été possible à un
moment donné pour (|u'on ne puisse allirmer que les êtres n'aient pu
s'adapter aux modifications du milieu dans lequel ils existaient et y pro-
gresser, car les nudifications ont dû être partout légères, progressives et
continues, si nous en jugeons par ce qui s'est passé sur la terre.
On peut répondre à Newcomb, qui s'appuie sur l'obscurité relative des
cieux pour limiter l'étendue de l'univers, que l'éloignement des étoiles par
rapport à la terre peut expliquer la perle de lumière et de chaleur qu'elles
subissent pour nos sens par leur rayonnement dans l'espace. On doit con-
sidérer aussi que la lumière et la chaleur émises par les étoiles diffèrent
selon leur état d'évolution, les blanches étant en pleine activité et les
rouges étant en train de s'éteindre.
Les espaces vides que nous constatons dans la voie lactée n'infirment
pas davantage l'infinité, car la répartition des étoiles n'étant pas régulière,
ils peuvent se trouver eux-mêmes devant d'autres espaces vides. D'ailleurs
la puissance de nos instruments d'optique ou de photographie a certaine-
ment des limites. Ce(iuile prouve, c'est que la photographie nous révèle
des étoiles que ne découvre pas le télescopé, ce qui indique bien que la
lumière se perd. Et ce fait peut expliquer que les étoiles nous paraissent
diminuer en nombre à mesure qu'elles diminuent de grandeur. Enfin
l'espace ne pouvant être considéré comme fini, d'innombrables systèmes
stellaires, comme des archipels dans un océan, peuvent être raisonnable-
ment supposés dans cet infini, à des distances hors de toute proportion
avec la portée de nos instruments d'investigation.
A propos de l'habitabilité des planètes de notre système solaire, l'eau,
la terre et l'air ayant précédé la vie. celle-ci s'est organisée selon le milieu
où elle devait exister et nous ne pouvons affirmer que là où l'atmos-
phère était plus ou moins dense, où l'eau, ou un liquide analogue, a pu
être plus ou moins abondante, une organisation différente de la vie que
nous connaissons n'a pas pu se produire. Si toutes les planètes doivent
suivre les lois de la terre, toutes seraient aptes à entretenir des organismes
vivants semblables ou dissemblables. Le jour où l'on aura trouvé, sans con-
testation possible, des débris d'êtres organisés dans les aérolithes, cela
pourra confirmer l'unité des lois biologiques sur lesquelles se fonde Wal-
lace, mais ruinera sa théorie de la terre seule habitable.
Pour ^■énus, sans parler de la chaleur intérieure qui a dû avoir une
grande influence sur la production de la vie sur toutes les planètes, entre
ses deux faces, l'une brûlante et l'autre glacée, il peut y avoir une région
relativement tempérée, maintenue par l'atmosphère et qui serait plus
favorable au maintien de la vie. Quant à la partie qui regarde le soleil,
en admettant que la chaleur qu'elle reçoit soit un obstacle au dévelop-
CIIAHI.KS I.KJFINK. — l.'lliiMMi: I)AN< l.'r.NIVKHS 189
pc:nont di' la vie, celle-ci [)niiiia ralli'a[iei' le temps penlu ([naiiil l'éclat
de noli'c soleil aura diminué.
Sans m'arréter ;i la plus giande densité de la terre ([ui, en admettant la
commune origine de tout le système, devrait être intermédiaire entre les
grandes et les petites planètes, comme elle l'est par sa masse et sa dis-
tance au soleil, les planètes les plus éloignées devraient pouvoir retenir
encore une plus grande quantité d'eau à l'étal liquide.
Les petites planètes ont dû avoir une évolution plus rapide et ont pu se
trouver plus tôt dans des conditions favorables à la vie organique, la-
quelle a pu s'adapter aux modifications qui se sont produites. Le milieu
terrestre a beaucoup varié aussi puisque les palmiers ont abondé aux
pôles pendant les temps primaires.
Il parait y avoir une contradiction dans l'opinion du D"" VVallace qui
considère que la chaleur de notre soleil est un obstacle h l'existence de la
vie sur certaines planètes et qui refuse aux soleils de moindre masse ou
d'évolution plus avancée la faculté d'entretenir la vie parce qu'ils
n'émettent pas assez de chaleur et de lumière.
Pour les collisions auxquelles peuvent être exposés tous les astres de
la voie lactée, on peut bien admettre qu'une partie au moins a dû échap-
per à ce danger, ce qui ruinerait encore un de ses arguments.
L'agrégation de matières diffuses, qui seule aurait pu maintenir la cha-
leur solaire, pourrait être invoquée comme un argument en leur faveur
par ceux qui attribuent l'apparition de la vie sur la terre h la chute de
matières venues de l'extérieur. Cette dernière théorie, fût-elle vérifiée,
ne ferait que déplacer la question, car si la vie sur notre terre vient du
dehors, il a fallu (ju'elle se produisît sur une autre planète, et alors pour-
quoi ne serait-elle pas née sur la terre?
Puisque chaciue étoile de la voie lactée est un soleil, n'est il pas bien
plus probable qu'il a, comme le nôtre, des planètes qui ont pu évoluer
d'une façon tantôt moins favorable, mais tantôt aussi plus favorable au
développement de la vie sur leur surface. Nous ne savons rien du volume
de ces soleils ni de leurs planètes et l'on suppose que notre système so-
laire serait presque le seul sur lequel la vie aurait pu se manifester et se
développer. N'est-il pas plus naturel de supposer que les autres systèmes
ont aussi des êtres organisés ou analogues à ceux de la terre ou différents,
puisque nous ne savons pas par quelles phases ont passé ces mondes
inconnus. L'unité de matière et de lois constatée dans l'univers doit faire
penser que les mômes phénomènes ont dû s'y produire. Nous ne savons
pas même quelle est la constitution de notre soleil et nous voulons juger
de ce qui ce passe dans les autres sylèmes solaires ! On sait combien le
milieu a d'importance au point de vue de la nature animale, végétale et
minérale, or que pouvons nous savoir du milieu des planètes de l'univers,
quand nous ignorons certainement une partie des lois qui agissent sur
notre terre ?
Les lois scientifiques que nous croyons les mieux établies peuvent être
d'un jour à l'autre modifiées par de nouvelles découvertes. M, Perrine
100 2 MARS 1905
viont de découvrir à l'Observatoire de Lick un sepli(^ine satellite de Jupiter,
dont le mouvement apparent est un mouvement direct, contraire à celui
du satellite récemment découvert. Ce nouveau satellite promet d'être
parmi les corps les plus intéressants du système solaire. Vouloir juger
des lois gouvernant les mondes qui sont à peine perceptibles à nos ins-
truments d'optique les plus perfectionnés, paraît être une prétention qui
n'est pas encore justifiée parles données de la science.
Est-ce au moment où l'on admet une fouie de radiations encore incon-
nues, où la découverte des rayons X a révélé des actions qu'on ne soup-
çonnait pas et où l'on discute la réalité des rayons N, est-ce surtout au len-
demain delà découverte du radium, dont les propriétés paraissent devoir,
sinon révolutionner, du moins modifier tout ou partie des lois générales
que l'on croyait les mieux établies, qu'il est prudent d'étendre nos pré-
leudues lois terrestres à tout l'univers? On a toujours tort de trop géné-
raliser surtout quand il s'agit de faits qui échappent en grande partie à
l'expérimentation.
M. II. Château paraît partager cette opinion quand il dit que ce livre
vient peut-être un peu tôt, mais qu'il est un résumé brillant de l'évolu-
tion organique et inorganique.
Il ajoute : « Il n'y faut point vofr une tentative de réhabilitation des
vieilles erreurs géocentriques et anthropocentriques. Tout au plus lui
accorderons-nous d'apporter une contribution sincère à quelque vague
spiritualisme, sans rites et sans dogmes; la croyance à quelque Dessein
infini parmi l'immensité des choses. »
Nous rendons justice au savoir et à la sincérité du grand naturaliste
anglais, mais nous ferons remarquer que c'est le plus souvent saos s'en
rendre compte que le savant se trouve porté à faire des hypothèses daas
un sens plutôt que dans un autre et l'esprit religieux, si profondément
ancré dans les cerveaux anglo-saxons, peut bien n'avoir pas été étranger
au choix de l'hypothèse défendue par le D'" Wallace et en faveur de
laquelle il a accumulé les raisons et les opinions qui peuvent lui être
favorables et qui tendent à conserver à l'homme son titre de roi de la
nature.
Nous reconnaissons d'ailleurs que les tendances spiritualistcs sont de
tous les pays. C'est ainsi que chez nous, M. Camille Flammarion, un
savant doublé d'un poète, à soutenu la thèse diamétralement opposée à
celle de M. Wallace, car il a remplacé les paradis déchus par une migra-
tion des âmes dans des planètes de plus en plus éthérées, tant l'esprit
humain a de peine à se détacher d'une croyance sans la remplacer par
une autre.
La place de l'Homme dans la série zoologique.
M. René Quinton établit, dans le volume que nous avons cité et qui
résume ses travaux, que la vie animale apparue h. l'état de cellule dans
les mers, a toujours tendu à maintenir, au cours de son évolution, les
CHARLES LEiBlXE. — I.lIiiMMi: DANS l'lNIVERS 191
cellules composant chaque organisme dans un milieu marin, en sorte que,
sauf quelques exceptions chez des espCîces inférieures et déchues : (ctout
organisme aninral est un véritable aquarium marin, où continuent h
vivre, dans les conditions aipiatiquesdes origines, les cellules qui le cons-
tituent. « Mais si la concentration saline des mers actuelles est de 33 gr.
de chlorure de sodium par litre, celle des mers dans lesquelles la vie
apparut était d'environ 8 à [) gr. et c'est ce milieu des cellules originelles
que les organismes les mieux doués ont tendu à maintenir Ji travers les
âges. C'est ainsi que le milieu marin intérieur des Mammifères n'est
concentré qu'à 6 gr. 8 et celui des Oiseaux à 7 gr. :2.
Avant d'entrer dans celte démonstration, l'auteur pose les principes
d'une Loi de constance thermique originelle qui nous arrêtera davantage
et qu'il formule ainsi : «En face du refroidissement du glohe, la vie ap-
parue à l'état de cellule par une température déterminée, tend à maintenir
pour son haut fonctionnement cellulaire, chez des organismes indéfini-
ment suscités h cet effet, celte température des origines. »
Voici les différents faits sur lesquels s'appuie cette théorie :
i" La température du milieu marin dans lequel, à l'état de cellule, la
vie animale fit son apparition sur le globe était, comparativement ii celle
de l'époque présente, une température élevée. Cela est prouvé par les
faunes et les llores fossiles et concorde avec les théories astronomiques et
géologiques.
2° A quelque organisme qu'elle appartienne, la cellule animale ne peut
vivre au-dessus d'une température de 44 ou 45°. C'est dans le voisinage
de cette température, de 41 à 45" que la vie est la plus intense. Il en résulte
que la vie cellulaire animale n'a dû se manifester sur le globe que lors-
que la température des mers fut tombée ;\ 44 ou 45" et qu'elle dût y ap-
paraître à ce moment même, cette température étant la plus favorable à sa mani-
festation. La géologie confirme la physiologie dans l'appréciation de ce
degré thermique pour les mers précambriennes dans lesquelles la vie
animale apparat.
3° De l'état de cellule la vie passe a l'état organisé. La diversité de
de ses faunes est immédiatement extrême: presque tous les groupes ani-
maux sont déjà représentés dans la faunecambriennc. Toutes les j ormes ani-
males qui composent la faune primaire sont dépourvues du pouvoir d'élever la
température de leurs tissus au-dessus de celle du milieu ambiant. Un fait décou-
vert par Langlois (,1901), tendrait même ù prouver que les reptiles ont
acquis la faculté de faire du refroidissement quand, grâce au rayonne-
ment solaire plus direct à l'époque primaire, la température s'élevait au-
dessus de 41". Cette faculté indique bien le sens du besoin imposé par
l'époque.
Lorsque le globe se refroidit, la cellule conserve la température
de son milieu, l'animal passe d'époque Ji époque à un état de r/edeplus en
plus ralentie. Le règne animal tout entier est soumis à ces conditions sauf
les classes des Mammifères et des Oiseaux.
En effet, dans l'embranchement des Vertébrés, la vie acquiert, par une
1<J2 -2 MAKS lOO.J
(.(jinbustion interne, le pouvoir de créer de la chaleur et de maintenir la
lenipéralurede ses tissus dans l'étal thermique qui permet leur aclivilé
maxima, c'est-à-dire dans la température originelle. A mesure que le
globe se refroidit d'un ou de plusieurs degrés, apparaissent des mammifères
nouveaux qui ont le pouvoir d'élever leur température d'un pareil nom-
bre de degrés. Lorsque le globe se fut refroidi de 4°, soit une tempéra-
ture de 40. les organismes nouveaux eurent la faculté d'élever leur tem-
pérature interne de 4°, et de maintenir ainsi leur maximum de 44'. Mais
ceux qui avaient paru lorsque la température du globe était de 43, 42, 41,
400, contiimôrent à ne pouvoir élever leur température spécifique que de
1, 2, 3 ou 4 degrés.
L'embranchement des Vertébrés est donc constitué par une série de
formes dont les plus récemment apparues possèdent toujours une tempé-
rature interne de 443; les au'res, de moins en moins récentes, ne possé-
dant plus que des températures de 43, 42,. 40, ....35, ...30 ...25 degrés
(ces derniers chiffres dépendant de l'état de refroidissement du globe), les
dernières enfin, celles du type le plus ancien (Reptiles, Batraciens, Pois-
sons) ayant simplement pour température de leurs tissus celle du milieu
extérieur.
Ainsi tout l'écart thermique que rOrnithorynque peut maintenirentre la
température de ses tissus et celle du milieu ambiant est de 5°. Il s'accuse
par là comme étant d'une époque du monde où la température moyenne
était d'environ 39' (39 + ^ = ^'*)- Sa température spécifique étant de 25°
la moyenne de la température ambiante aurait diminué de 19" depuis
son apparition (39 — 19 — 20).
M. II. Quinton se propose d'établir dans un ouvrage ultérieur l'ordre
d'apparition des espèces, au moins dans ses plus grandes lignes, par
l'anatomie, l'embryologie et la paléontologie combinées. Or l'observation
des températures spécifiques montrera qu'elles échelonnent justement les espèces
selon l'ordre de leur apparition, les plus anciennes apparues h température
spécifique très basse : Ornitorynque(Monotrème) 25°; Sarigue (Marsupial) '
33"; Tatou (Edenté) 34*'; etc. -• les espèces plus récentes, à température
spécifique déjà plus élevée (Mammifères de presque tous les ordres de la
classe, mais limités comme habitai aux régions chaudes de la terre)
de 35 à 37° environ ; exemples: Hippopotame, 35°, 3; Vampire 35°, 5 ;
Eléphant 35°, 9 — premiers Oiseaux, Raliles, Aptéryx 37° — Pri-
mates ; Homme 37°2 — les dernières apparues enfin, aux températures
spécifiques les plus hautes en même temps qu'à l'habitat le plus froid :
Mammifères carnivores et ruminants 39 à 41", Oiseaux carinates40 à 44°.
C'est sur ces faits, qui viennent d'clre exposés presque littéralement,
que l'auteur établit sa Loi de constance thermique originelle dont nous
avons donné plus haut la formule,
M. Quinton fait remarquer que l'Homme, situé dans le groupe des Pri-
mates, est un animal tropical. « Une vit à l'état de nature que dans les ré-
gions avoisinantl'équateur. Son habitat sous les latitudes plus hautes est
secondaire et tout à fait artificiel.il ne le maintient que grâce à des vête-
t:ilAULKS LKJKINK. — l.'lInMMK l)\NS l.'rNIVEU> I '.».'{
monts protecteurs qui ménagent son rayonnement et ;i l'usage du feu, par
lL'.|Ut'Iil élève la température du milieu ambiant. Comme les végétaux des
trùpi(|ue.s qu'il cultive induslrieusemenl riIom:ne, sous nos latitudes et
plus de dix mois de l'année, ne vit qu'en serre chaude.
Il ajoute : « Cet ordre d'apparition quant à l'Homme et à l'Oiseau, heurte
toutes les idées reçues, il est cependant l'ordre réel.
« l°L'IIomme n'est aucunementce qu'ilaété considéré jusqu'ici, le der-
nier terme et le plus élevé de l'embrancliernsnt des Vertébrés. Aucun de
ses caractères, anatomiques, embryologiques, physiologiques, géogra-
phiques, ne permetdelui assigner ce rang. Tous, au contraire, parfaite-
ment archaïques, le situent à la place qui vient de lui être martiuée.
Nous le démontrerons longuement par la suite. L'Homme, avec l'ordre
entier auquel il appartient (l'rimates) est apparu à une époijue ancienne
du globe, antérieure à l'épanouissement des deux ordres les plus récents
et les plus élevés des Mammifères, les Carnivores et les Ongulés. Aucun
douta ne pourra subsister à ce sujet.
« 2" De même la classe Oiseau, loind'étreantérieureetinférieureàlaclasse
Mammifère, comme elle a été considérée universellement jusqu'ici, lui est
postérieure et supérieure org uiiipiement. Tout le démontre: l'apparition
des premiers Mammifères au début de l'époque secondaire, celle des pre-
miers Oiseaux vers la tin stmle de cette époque; — l'extension maxima
de la classe Mammifère à l'époque tertiaire, le rôle subordonné qu'à cette
époque jouait la classe Oiseau (espèces fossiles, Mammifères, 3.200; Oi-
seaux, 500). — L'état de régression actuel de la classe Mammifère, l'ex-
tension actuelle de la classe Oiseau (espèces actuelles, Mammifères2.380;
Oiseaux 10 000). — Les différences anatomiques considérables réalisées
dans l'étendue de la classe Mammifères, preuve des temps lointains depuis
lesquels le type évolue ; l'homogénéité frappante au contraire de toute
la classe Oiseau, voisine encore de son type ancestral ; — la supériorité
anatomique et physiologique de la classe Oiseau sur la classe Mammifère
(anatomie à division supérieure du travail physiologique chez l'Oiseau;
organes et appareils nouveaux, etc.).
« Au sujet de l'Homme, faisons simplement remarquer que, pour le
situer au sommet de l'échelle des êtres, la science n'a jamais invoqué que
la supériorité de son intelligence. Or, l'intelligence n'est pas un caractère
classilicaleur. Aucun zoologiste ne se permettrait de faire servir à la clas-
sification des Carnivores ou des Proboscidiens, parmi les Vertébrés, l'in-
telligence spéciale dont témoigne le Chien ou l'Eléphant. C'est cependant
à celte seule intelligence humaine que les Primates doivent leur premier
rang dans la classification. De même le fait que l'Homme est sans fossiles
avant le quaternaire est d'une indication nulle quant à sa date d'appa-
rition : 1'^ l'ordre des Primates est d'abord un des plus anciens parmi tous
les Mammifères placentaires (apparition : premiers terrains tertiaires);
:2^ des ordres entiers sur l'antiquité desquels aucun doute n'est possible,
-ont sans fossiles connus (.Monotrèmes; tous les Marsupiaux d'Australie;
Mégachiroptères, Hiracoïdes, etc., etc.). »
soc. d'antiihûp. ^'JOo <3
\\)[ û MA us v.m
M. II. Oninton formule ainsi sa Loi générale de constance originelle
marine, thermitiue, osmolique et peut-être lumineuse :
t( En face des variations de tout ordre que peuvent subir au cours des
âges les ditVérents habitats, la vie animale, apparue à l'état de cellule
dans des conditions physiques et chimiques déterminées, tend à main-
tenir, pour son haut fonctionnement cellulaire, à travers la série évolu-
tive, ces conditions des origines. »
Il en conclut que la vie est un phénomène assujetti à des conditions
assez étroitement déterminées.
Enfin il fait ressortir le rôle à part et supérieur du Vertébré. Tandis
que tout le reste du règne animal subit les modifications du milieu, les
Vertébrés seuls en face de la concentration des mers, comme du refroi-
dissement du globe, maintiennent la concentration et la température ori-
ginelles et optimas.
« On remarquera encore que l'Homme cesse d'occuper dans la nature
la place isolée qu'il semblait y tenir jusqu'ici. Au milieu du monde phy-
sique qui l'enveloppe, l'ignore et l'opprime, il n'est pas le seul insurgé,
le seul animal en lutte contre les conditions naturelles, le seul tendant à
fonder dans un milieu instable et hostile les éléments fixes d'une vie supé-
rieure. Le simple Poisson, le simple Mammifère qui réalisent dans une
eau surconcentrée ou un habitat glacé le déséquilibre osmotiqueou ther-
mique que l'on sait, tiennent en échec les lois physiques essentielles. Quand
l'Homme s'attaque aux forces naturelles qui l'entourent, pour les dominer
dans ce qu'elles ont d'ennemi, il participe d'abord du génie du Vertébré. »
Je répondrai à cette dernière remarque qu'il y a cependant une difl'é-
rence entre l'adaptation inconsciente de la cellule animale et humaine
à un milieu qui se modifie et la lutte voulue contre les forces hostiles de
la nature ou leur utilisation intelligente.
Dirons-nous aussi de M. R. Quinlon que le choix de sa théorie qui, con-
trairement à celle du D'' Wallace, fait descendre l'Homme du piédestal
qu'il s'était érigé, a pu être déterminé par sa mentalité? Cela n'est pas
impossible, mais cela ne diminue en rien le grand intérêt qu'il y a à exa-
miner les faits scientifiques sur lesquels s'appuient ces deux savants. Je
n'ai pas la compétence nécessaire pour discuter des conclusions qui pa-
raissent reposer sur des bases très sérieuses et je laisse aux spécialistes
le soin d'en faire la critique.
Cependant on pourrait répondre que si l'intelligence n'est pas un carac-
tère de classification, il n'en est pas de même du cerveau qui est son or-
gane. Il est admis que le perfectionnement graduel consiste à avoir des
organes successivement plus compliqués et plus associés, qui rendent les
relations avec le monde extérieur plus délicates. Or, il me paraît difficile
de contester que dans la série des Vertébrés le cerveau humain, par la
complexité de sa structure et les associations de toute espèce dont il est le
siège, ne doive être considéré comme ayant un caractère de classification.
Cela reviendra au même, car si ce n'est plus l'intelligence, ce sera l'or-
gane qui l'a produit qui servira de caractéristique.
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< oniniission des linances.
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démissionnaires, dans la Commission d'examen de la bibliothèque et des
collections.
Nécrologie. — M. b- !>' Taitai.v, secrétaire général de la Guinée française.
OBJETS OFFERTS
0. VAUvn.LÉ. — Voici un silex imitant un tranchet, il m'a été remis hier par
le baron de Baye, il a été trouvé sur un tas de silex sur une place publique de
Paris.
Vax examinant cetti' pièce on i)eut la prendre d'un côté pour un tranchet,
mais si on la retourne on voit que c'est un simple éclat.
Premières origines des OmbroLatins et du peuple de Rome. — Dans la
Revue scientifique du 18 février 1905, par M. Zaborowski.
Les caractères historiquement bien connus des Ombro-Latins. par leur con-
traste avec ceux des Gaulois, des Germains, sont une des plus grosses difficultés
il résoudre pour établir scienlitiquement la parenté originaire des peuples de
langue aryenne. J'ai dû donner de ces caractères une explication conforme
avec ce que nous savons des caractères protoaryens. Nous avons des raisons
archéologiques et linguistiques pour affirmer que les habitants des terramares
sont les ancêtres directs des Ombro-Latins, et qu'en même temps il étaient des
indigènes de lEurope. d'abord sans mélange avec des Asiatiques. Leurs carac-
tères n'étaient jias ceux des Bomains de l'histoire. Mais alors nous devons trou-
ver dans les vicissitudes qu'ils ont traversées et les mélanges qu'ils ont subis,
la raison de leur transformation. Nous la trouvons en elTet. Et le rôle des
Etrusques, des Ligures et des Vénètes, dans le passé de l'Italie, est si considé-
raiile que le triomphe des langues latines dans la péninsule est un vrai miracle.
Il est dû à l'action des (irecs au sud et des Gaulois au nord contre ses éléments
anaryens. peut-être autant qu'aux Umbro-Latins eux-mêmes.
lîic. le. MMo 1905
contribution a l'anthropologie physique de la sicile enéolithique
Par m. Zaborowski.
M. (iiiilVrida lUiggiori vient de fournir une importante contribution h
l'anthropologie préhistorique de la Sicile. Et j'aurais été heureux de pou-
voir en signaler plutôt l'intérêt.
Dans un premier mémoire (Matériel palelhtwlofjigue d'une caverne naturelle
lihnello, près (^efalu, cote nord de la Sicile, 1902j, il a étudié cinq crânes
dont quatre complets, qui provenaient, avec beaucoup d'autres fragments,
d'une caverne sépulcrale, celle de Fico, dans la vallée d'Isnello, dans les
Madonie.
Cette caverne renfermait les objets caractéristiques suivants : 1° Deux
fragments de cuivre de la grandeur d'un centime, mais de forme hexa-
gonale irrégulière; 2° Six fragments de couteaux ou de racloirs en obsi-
dienne; 3'^ Huit vases en calcaire grossièrement travaillé, sans traces d'or-
nement. Des vases de ce genre ont été trouvés avec de l'obsidienne, non
seulement dans les Madonie, mais à Pantellaria et à Capri; 4° Menus
objets en pierre, ornements; 5° Restes de mandibule et dents de chèvre.
Un pareil matériel se rapporte à un âge de cuivre. On l'appelle cepen-
dant énéolilhique. Des stations qui lui correspondent à peu près, chrono-
logiquement, ne renferment pas toujours du métal.
Les cinq crânes en assez bon état qu'accompagnait ce maigre mobi-
lier funéraire, ont les indices suivants :
2.580 2.581 2.582 2.583 2.584
Céphalique.... 73,1 68,6 75,2 76 »
Ôrbitaire 79,4 87,5 78,9 » 84,6
Nasal 54,3 43,6 52,1 » 43,3
Facial 47 53,4 » » 48,4
M. Giuffrida Ruggieri remarque que ces cinq pièces présentent une
grande uniformité, sous le rapport de la forme du crâne ellissoïde, ou oval
allongé; mais que pour la face cette uniformité est rompue. En effet, la
face de trois d'entre eux a été mesurée et sous ce rapport ils se classent
chacun dans un groupe différent, le premier étant censément à face large,
cameprosope, le second à face étroite leptoprosope, le troisième à face
moyenne, mésoprosope. Sous le rapport de l'indice nasal, ils se classent,
deux parmi les plalyrhiniens, et deux parmi les leptorhiniens. Sous le
rapport de l'indice ôrbitaire, ils sont l'un ipsiconque, l'autre cameconque,
le troisième mésoconque. Ce classement ne répond pas à notre système
classique de subdivision en microsème, mésosème et mégasème.
M. Giuffrida Ruggieri a fait le relevé (p. 20) des autres crânes siciliens
préhistoriques mesurés jusqu'ici (19). Ils présentent dans leur ensemble
ZAUOROWSKI. — I.ANTllll01>l»U:ir.IK IMlVSInCE liR L\ SICIMC K\r;oMTIIIijrE i[)l
un ontrecroiseiiient pareil des caraclùres faciaux. Il rappelle aussi que
26 cnlnes masculins de l'Arj^ar (Kspagne), qui, sous le rapport de l'indice
céiihalique, ne présenlenl pas un écart de 11 unités, se répartissent néan-
moins en 0 leptorhiniens, 0 mésorhiniens et 7 platyrhiniens; en 18 came-
conques, 4 ipsiconques et 3 mésoconques, présentant de telles différences
dans les caractères des orbites et du nez que le D"" Jacques a reconnu en
eux trois éléments ethniques. Enfin M. (liulïrida Ruggieri reproduit mes
observations .\ propos des crûnes égyptiens. Les plus anciens crânes égyp-
tiens, tels que ceux de Heït-.MIan, sont étroitement unis par leurs indices
céphaliques. Kt j'ai dû reconnaître que pour les caractères de la face, ils
n'offraient pas la même homogénéité. Cette constatation impliquait, on Ta
penst', l'action il'une influence perturbatrice extérieure sur la race des
primitifs égyptiens.
M. Giuiïrida Ruggieri cependant, en constatant les mêmes variations
morphologiques sur ses cr;\nes siciliens, conclut qu'ils représentent
une race homogène. « Il est bien plus vraisemblable et plus simple, dit-il,
d'admettre que les oscillations des indices orbitaire et nasal sont les élé-
ments de la variabilité inhérente au type des dolicho-mésocéphales sici-
liens » (p. 22).
La conclusion a de la gravité. Mais nous trouvons-nous réellement en
présence d'oscillations d'une amplitude telle qu'elles dépassent les limites
des variations individuelles et qu'il soit interdit de leur dénier une valeur
ethnique? Les termes descriptifs employés en raison desquels les crânes
se trouvent séparés en des catégories distinctes, impliquent souvent des
différences qui, à voir les choses de près, n'existent pas toujours.
Ainsi dans la petite série d'Isnello, il y a un crâne (2581) remarquable
par l'ensemble harmonique de ses caractères. Très long absolument, avec
un indice céphali(iue très bas de 68,6, il a une face relativement symé-
tri(|ue avec sa voûte. Elle est absolument moins large et plus longue que
celle des autres crânes. Son nez, sans être bien moins large, a plus de
hauteur. W est bien franchement leptorhinien. Il l'est avec un autre, le 4",
Et tous deux font sous ce rapport un contraste évident avec les deux pla-
tyrhiniens. En môme temps c'est lui qui a les orbites à la fois les plus
larges absolument et les plus hautes. Or il est qualifié d'ipsicongue, de
crâne à orbites étroites, le seul dans la série. En r.'a'.ilé ses orbites sont
carrées, la différence entre leur hauteur et leur largeur est plus faible et
c'est pourquoi, son indice orbilairc s'élève davantage. Il reste néanmoins
mésùsème pour nous. Sous ce rapport encore, il se joint au crâne n" 2.580,
le leptorhinien mentionné à l'in-stant, également mésosème. Je séparerais
donc volontiers les crânes d'Isnello en deux types différents sous le rap-
port de la f;ice, plulùt (juc de conclure à des oscillations étendues des
caractères du nez et des orbites dans une race homogène de Siciliens pré-
historiques.
J'avais dit à propos des oscillations de ces mômes caractères chez les
anciens Egyptiens : Ce n'est guère que parmi nos dolichocéphales néo-
lithiques qu'on retrouve à côté de crânes à nez étroit, leptorhiniens, des
11>8 K". MAit> 11)05
crAnes à nez largo, plalyrliiiiions, coinine cela se présente dans la série
de Beït-Allan.
Il n'y a toutefois jamais dans nos séries d'Europe autant de pla-
tyrhiniens (p. G05).
Citant celle phrase M. GiulTrida-Ruggieri ajoute : Il n'est pas étonnant
donc (jue nous trouvions do la platyrhinie dans nos crAnes do Siciliens.
11 fait ainsi un rapprocheiuont qui niôritc toute l'attention. Les crAnes
siciliens rappellent les Egyptiens anciens, un peu au moins, par les va-
riations de leurs caractères faciaux. Ils les rappellont aussi par ces ca-
ractères mêmes, du moins certains d'entre eux, comme la forme carrée
des orbites des deux crânes leplorhiniens dont il vient d'être question.
Celte forme est en efTet justement celle que j'ai signalée comme explica-
tive des indices orbitaires élevés de beaucoup d'Egyptiens, indices en
rapport avec l'étroilesse des visages plus qu'avec une grande hauteur des
orbites.
Y aurait-il parmi les Siciliens énéolithiques au crâne assez délicat (Nuovo
materiale scheletrico délia caverna di Isnello, 1903, p. 9) et aux membres
robustes de marcheur, pâtre et chasseur, un élément identique à celui de
l'Egypte d'il y a sept mille années?
Une seconde grotte sépulcrale a été découverte à proximité de la même
localité d'Jsnello, dans lesMadonie. Elle e^t connue sous le nom de grotte
de Chiusilla. Son matériel archéologique était du même genre et de la
même époque : couteaux d'obsidienne, objets d'ornement en pierre, vases
d'argile grossièrement travaillée à la main, pointe de lance en cuivre brut^
lame ou couteau avec trous pour les fixer au manche, et tige carrée de
même métal. Bien que la grotte ait été violée et bouleversée par les cher-
cheurs de trésors, la récolte en pièces osseuses utilisables y a été assez
fructueuse : elle comprend 8 crAnes complets ou à peu près et o boîtes
crâniennes ou calottes en plus ou moins bon état, sans parler des os
longs et des mandibules.
Les os longs parmi lesquels abondent les fémurs à pilastre et les tibias
platycnémiques, ont fourni à M. (iiuiïridaRuggieri la matière d'une étude
d'où il résulte que les tailles de ces Siciliens énéolithiques s'élevaient pour
24 sujets hommes de 1 m. 575 à 1 m. 796, et pour 10 sujets femmes de
1 m. 541 à 1 m. 660. 11 y avait donc de grandes tailles, en raison des-
quelles la moyenne s'élevait pour les hommes à Im. 686 et pour les
femmes à 1 m. 59. Ces grandes tailles existent encore, paraît-il, mais en
proportion moindre, dans la population actuelle, car Livi a trouvé pour
la taille moyenne du canton de Cefalu, 1 m. 613. M. Giuiïrida-Ruggieri a
le droit de conclure que la population préhistorique des Madonic (il n'a
pas eu en mains d'os longsd'autres parties delà Sicile) était grande; plus
grande même que celle des Berbères (taille moyenne, 1 m. (57) dont il la
rapproche. {Terzo contribut) alT antropologia fisica dei Siculi eneolitici,
1905, p. 43-47).
Des mesures en nombre ont pu être prises sur 12 crânes ou calottes
crâniennes, et sur les visages de neuf de ces pièces.
TIIIKI'LLKN. — sut 1J.> l'Ii:UI(K> TAILLKES ANTI-CLASSIQUES l'.CJ
Le plus allongé d'entre eux {D. A. P. 197) présente une saillie considé-
rable des arcades sourcilières (N" 2756). Son indice céphaliquc est de 75,6.
Son visage est plutôt court et large, ses orbites basses (h. 29) sans être
très larges (indice orb. 74, -i) ; son nez moyen (ind. 47) le classe h la limite
de la leptorbinie. Il rappelle le type de Cro-iMagnon et est des plus inté-
ressants. Il ne me semble pas d'ailiours isolé dans la série.
Pres(]ue tous leurs indices sont ceux de la dolicbocéphalie francbc.
Cependant l'un d'eux s'écarte du type commun. Son indice d« 80, le
rapprocbe de la brachycépbalie et une autre calotte, par sa brièveté dans
le sons antéro-postérieur, se i-ange sans doute avec lui (N"27G1). Et enfin
une autre calotte, classée sous le N" 2766 est certainement brachycéphale,
appelée spbénoïde, d'après Sergi. A part ces pièces M. GiulTrida-Ruggieri
pourrait dire de celte série de Cbiusilla, ce qu'il a dit de celle de la grotte
de Fico, qu'elle est homogène au point de vue des caractères de la boîte
crânienne. Il ne tient cependant pas assez de compte de la présence de ces
trois pièces.
Au contraire, pour les caractères du visage, M. Giutïrida-Ruggieri croit
retrouver en elle la môme variabilité que dans la précédente série? L'écart
entre les indices de bauteur de la face est cependant un peu moindre, car
elle ne comprend pas d'individus à face allongée, comme le N°2o81 de la série
de Fico. Ils sont mesoprosopes. peut-on dire. Dans la population actuelle
il y a des faces très longues. Elles sont exceptionnelles, et, paraît-il, attri-
buables aux Arabes, car les Berbères ne présentent pas une dolichopro-
sopie aussi accentuée. Pour l'indice orbitaire^ l'écart est plus grand au
contraire que précédemment, car dans cette série de Cbiusilla nous avons
l'indice vraiment faible du crâne 2756, du type do Cro-Magnon.
Mais si nous nous en tenons à notre classification, celle de Broca, ce
microsème n'est pas seul. Nous trouvons dans la série 4 microsèmes contre
trois mésosèmes et pas un seul mégasème. Ces variations ne nous appa-
raissent donc pas comme aussi étendues qu'à M. Giufïrida-Ruggieri.
sur les pierres taillees anti-classiques
Pau m. 'I'iiiklli.kn.
Messieurs,
Au mois de juin de l'année dernière, j'ai eu l'avantage de faire, à la
Société d'Emulation d'Abbevillc, grâce à la bienveillante invitation de son
président, M. Vayson, un exposé démonstratif de quehiues-unes de mes
pierres taillées anti-classiques.
J'ai l'bonneur de déposer ici le compte rendu de cette séance, mémorable
pour moi, puisque j'ai eu la grande satisfaction de pouvoir mettre
sous les yeux des honorables membres de cette Société, si longtemps pré-
200
10 MM(^ l'.in")
sidt'c par IJoiicher de l'erllies, la [liècc irn'fulaljlc (|ui léiJiiit ii néant, une
fois pour luiilos, les soupçons injuri<'ux, l'-inis el propai^'és ;i la lég«''re, sur
la lucidité de l'iliuslre inventeur de la i'réhistoire. à propos des pierres
figures à retouches intentionnelles (ju'il présentait i\ l'examen de ses con-
temporains.
Personne, en eiïet, après examen de mon petit oiseau de pierre, n'a
élevé, que je sache, le moindre doute sur l'authenticité d<'S retouches in-
tentionnelles qu'a reçues ce silex ligure.
Uuant aux quelques préhistoriens oiïîciels enferrés trop avant dans leurs
raisonnements, leur attitude est plus que singulière. De l'oiseau, ils ne souf-
llent mot, la question n'a du reste que peu d'importance à leurs yeux, passe-
temps d'amateurs, disent-ils ; et puis pourquoi n'a-t-on pas encore rencontré
la figuration d'animaux disparus, mammouth, singe ou autres? Ils fei-
gnent ainsi d'ignorer qu'en ce temps là, la nature était l'unique créatrice
des ébauches auxquelles l'homme paléolithique ne participait — et pas tou-
jours — que pour quelques retouches données aux bons endroits : yeux,
nez, oreilles, bouche, bec, museau, etc.; aussi ces représentations sont-
elles souvent plus fantaisistes qu'exactes. De plus, la nature, très fan-
tasque dans ses manifestations, a très bien pu donner à un silex de
la craie l'aspect du bonnet phrygien, d'une lorgnette ou même la
silhouette de Rochefort, le polémiste, telle qu'en effet la voici, recueillie
par moi à Paris, dans le diluvium do la rue Lecourbe (carrière du iMam-
TIIIEII.I.KN. — SI» LKS I'IF.UHES T.Vlt.LKKS A.NTI-iILASSUjUES :Î01
moulh et du llenne) et avoir négligé la figuialion du uianiuiuuili .1 ,lu
singe, ce (|ui loulefois n'est pas ccilain.
« Les primitifs, aflirme M. llutot, n'ont rien vu. ni rien ' reconnu, dans
« les rognons ni dans les éclats zoomorphes, qu'ils utilisaient comme tous
« les autres. Nous seuls, actuellement, voyons (|uelque chose dans les
« pierres figures par suite de l'éducation de notre œil. »
.\ l'appui de sa thèse, le distingué géologue belge présente des consi-
dérations (ju'il prétend irréfutables, mais qui maintenant sont devenues
sans valeur. Inditîérente aux conceptions humaines, la nature n'obéit qu'à
ses lois. Devant le fait brutal il faut s'incliner, et les plus beaux raison-
nements du monde ne sont que phrases creuses.
Geoffroy St-Hilaire écrivait le 9 juin 1859 à Boucher de Perthes : La
science aide à prouver; mais trop souvent elle empêche de comprendre.
« Elle a ses idées, j'allais dire ses préjugés, et les ig)wrauts comme
a vous, vont plus loin parfois que les savants : vous l'avez montré
« par votre découverte que les savants ont mis vingt ans à accepter », et
ils se sont plu pendant oO ans, pouvons nous ajouter, à nier et à railler
sans raison l'existence, aujourd'hui démontrée, de vos pierres figures à
retouches intentionnelles, à propos desquelles ils vous ont traité d'hal-
luciné.
Cette autre lettre, écrite par Boucher de Perthes et qui m'a été obli-
geamment communiquée par M. Ch. Cauët, bibliothécaire adjoint à la
Société Linnéennc d'Amiens, ne me semble pas ici hors de propos :
Abbevillc le 20 o.tobre 18G0.
.1 Monsieur Victor Chatel.
« Monsieur,
« A la lettre que vous m'avez fait l'honneur de m'écrire le 17 courant,
« était jointe l'épreuve imprimée d'une autre lettre que vous avez l'inten-
« tention de m'adresser, je la trouve intéressante en tout point, et sa
« publication ne peut que faire ressortir vos découvertes. Mais il n'en
« serait pas de même si j'y ajoutais quelque chose; elle semblerait
« avoir été .écrite sous mon inspiration et d'accord avec moi. Il faut
« que le mérite de vos utiles travaux reste à vous seul, et si je fais
« paraître quelque chose sur la question, c'est en ce sens que j'en par-
« lerai.
« Ce n'est certes pas chose facile que de faire admettre une vérité. Le
« bon sens dit que les peuples primitifs qui faisaient des haches et des
" outils ont pu faire des figures, et l'on n'a pas encore rencontré un peu-
« pie, quelque brute qu'il fût, qui ne l'ait tenté. Ce besoin d'imiter ce qui
ft nous frappe est si bien dans la nature, que les enfants de tous les pays.
« sans qu'on le leur enseigne, dessinent ou modèlent aussit(jt qu'ils peu-
« vent trouver un crayon ou un morceau de pûte.
« Il y a plus de vingt ans que j'écrivais : « Je n aurais pas trouvé une
20i K; mau> 1!)(J5
« seule (le ces fiyiire$, que je dirais encore qu'il y en a cl qu'on en trouvera dans
« le diiuvium, comme on y trouve des haches, lorsqu'on en cherchera. »
« Dt^s 1841, j'en soumottriis des spi'ciinens à l'Institut et j'en publiais
« les dessins en 184G dans mon premier volume des Antiquités, qui a
a paru à celte époque sous le titre de « l'Industrie primitive ». Depuis ce
« temps, ma collection a été ouverte à tout le monde et visitée par presque
« tous les géologues et archéologues célèbres de l'Europe. Il m'a fallu
« près de vingt ans pour faire croire aux haches non polies où l'on ne
« voulait voir que des accidents.
« Quant aux .symboles et figures, bien que j'en ai recueilli des types
« dont on voit chez moi jusqu'à 50 analogues, oîi le travail humain est
« évident, je n'ai converti que bien peu de personnes, et dans le nombre
a pas un seul .\nglais. Pourquoi, me disaient-ils, ôtes-vous le seul qui
(( trouviez de ces figures? En a-t-on jamais vu ailleurs qu'à Abbeville,
« et citez une collection autre que la vôtre où l'on en montre?
« Aujourd'hui, Monsieur, on citera aussi la vôtre.
K Je ne dis pas que j'aurai encore gagné mon procès, mais la vérité
« aura fait un pas de plus, et frappera davantage, en venant de deux
« côtés...
« Dans votre exhibition à Paris, soyez sévère dans vos choix, n'exposez
«. que les morceaux où la main humaine est manifeste. Méfiez-vous des
« profils; j'en ai trouvé par centaines, mais après un examen attentif,
« j'ai reconnu que les trois quarts n'étaient que des accidents. Les létes
« d'oiseau fourmillent, mais beaucoup aussi sont des empreintes ou des
« jeux de la nature. L'œil convenablement placé est un signe certain de
« l'intention; lorsque les deux yeux y sont, il y a certitude, mais c'est
« rare... »
« Ce n'est certes pas chose facile que de faire admettre une vérité »
écrit B jucher de Perthes; il y a des moments, pour ma partj où je suis
tenté de croire que c'est impossible.
Un des principaux historiens de la Préhistoire m'écrit :
« Je n'ai jamais douté de l'existence de silex taillés et utilisés qui ne
« sont pas en possession des siç/nes classiques, seulement je ne sais pas les
« reconnaître, et ceux qui croient les reconnaître ne m'ont pas con-
« vaincu. »
Autrement dit : Puisque je ne sais pas, personne ne saura jamais; donc rien
à faire, chercher c'est perdre son temps. »
Ce sont là faux-fuyants destinés à donner le change pour motiver
une inertie inexcusable. (Jue de choses semblent au premier abord impos-
sibles à qui ne veut ni tenter, ni persévérer quelque temps : lire, écrire,
parler une langue étrangère. déchilTrer la musique, calculer la distance
de la Terreau Soleil, prédire les éclipsesà jour fixe, à l'heure, à la minute,
etc., etc.
Nombreux sont les préhistoriens qui n'ont des yeux que pour les belles
pièces; le reste ne les intéresse pas.
Un maître es pierres taillées, croyant probablement me faire une con-
nuiX. — LA l'ItiiSTITlKE JAPONAISE AL' TONKIN '203
cession, se contente de me dire, ;\ propos do mes pierres, qu'il ne repousse
rien a priori, ce tiui est prudent, mais insufllsanl pour faire avancer d'un
pas la question.
Tout autre semble être le rùle d'un chef. C.'lui qui, par situation oili-
cielle, a le devoir de chercher dans l'étude de la Préhistoire autre chose
que des satisfactions de collectionneur, n'attend pas tranquillement que
les preuves et documents nouveaux viennent le trouver, il va au-devant,
prend à tAche de les découvrir, de les reconnaître, de les contrôler, sous
leurs divers aspects, s'il y a lieu.
Pour le moment, c'est à qui se dérobera, et ce sont précisément les plus
intéressés à se renseigner qui se refusent à le faire. Les leçons du passé
ne leur ont donc rien appris? L'homme s-rait-il, par nature, plus sensible
à l'erreur qu'îi la vérité?
LA PROSTITUEE JAPONAISE AU TONKIN
Par .m. le Docteur Roux.
Depuis treize mois une guerre sanglante pratique une large saignée
aux flancs de deux grands peuples et les nations européennes, un peu
infatuées de leur supériorité, ont constaté avec étonnement l'évolution
surprenante des Japonais pendant ces dernières années : surprenante, en
elTet, car les évolutions sont d'ordinaire lentes et progressives et n'ont
pas pour habitude de procéder par bonds : « Natura non facit sallus. »
En présence du développement si rapide de l'intellectualité japonaise
et de cette assimilation intensive de nos sciences et de leurs applications,
l'anthropologiste doit chercher dans la psychologie du peuple Nippon,
dans ses coutumes et ses mœurs le « pourquoi » et le « comment» de
celte évolution.
.\ ce titre il ne faut dédaigner aucun document ethnographique se rap-
portant à cette race : c'est pourquoi j'ai cru intéressant de vous entrete-
nir des prostituées japonaises que j'ai soignées et étudiées au Tonkin,
car il m'a paru qu'elles présentaient, dans leurs habitudes et dans leurs
caractères, des difl'érences qui les séparent radicalement des prostituées
européennes et qui les classent, en tant que moralité, bien au-dessus de
celles-ci.
Je laisserai de coté la prostituée japonaise « chez elle », par la raison
(jue je ne l'ai pas observée dans son pays natal et que des livres fort
documentés nous ont apporté successivement, dans ces derniers temps,
tous les renseignements voulus sur le Yoshiwara et sur la prostitution,
en général, dans les îles du Soleil Levant. Je m'en tiendrai exclusivement
h l'étude de la prostituée japonaise au Tonkin, de la « déracinée » japo-
naise, dirais-je volontiers, en employant un mol qui a fait fortunée son
204 10 MAiis IDO")
heure et qui semble hieii applicable à ces inousmés qui quillenl pour plu-
sieurs années leur sol natal afin d'aller exercer leur dangereux métier
dans un pays si différent du leur par le climat, les mœurs, les habitants.
La Japonaise a dès lonj^temps envahi les ports de l'Extrême-Orient :
le Tonkin, depuis l'occupation française, a attiré l'attention des tenan-
ciers et, actuellement, les maisons de prostitution s'élèvent jusqu'à la
frontière de (Ihine, dans tous les centres où se trouve une agi^lomération
européenne suffisante. D'où proviennent ces Japonaises? Comment sont-
elles venues au Tonkin? Quel est leur exode dans ce pays d'adoption?
Quelle vie y mènent-elles? Autant de questions que nous allons mainte-
nant étudier.
i" Recrutement. — Mise en route. — Répartition. — Un a dit et répété
que les prostituées japonaises qui vont chercher, en dehors de leur pays
d'origine, le droit d'exercer leur industrie spéciale^ visaient à se consti-
tuer une dot pour rentrer ensuite dans leur pays, y choisir un époux et
se consacrer exclusivement, par la suite, aux devoirs du foyer, à l'édu-
cation des enfants qu'elles peuvent concevoir. La vérité n'est pas con-
forme, en général, à celte opinion. La Japonaise du Tonkin est issue de
famille pauvre : elle est devenue l'esclave d'un tenancier parce qu'elle
s'est engagée pour une somme fixée par contrat et dont le montant doit
venir en aide à ses malheureux parents : elle contracte ainsi une dette
qui va devenir l'origine de stratagèmes sans nombre de la part de son
créancier pour qu'elle ne parvienne jamais à l'éteindre et il est probable
qu'elle mourra à la peine, si un ami généreux ne vient un jour solder cet
arriéré et lui rendre sa liberté. Dans d'autres cas, une famille pauvre a
permis à des voisins d'adopter un de ses enfants : si c'est une fille et si
ses parents adoplifs veulent en tirer parti, ils l'engagent dans une maison
de thé. Enfin les déceptions amoureuses, la crainte de la colère paternelle,
les offres alléchantes des tenanciers racontant que la vie est plus facile et
le mariage plus commode de l'autre côté des mers, sont autant de causes
qui agissent sur l'esprit des jeunes .filles pauvres pour permettre aux
agents de prostitution de pratiquer à leur aise la traite des jaunes. Le
paupérisme, ici comme ailleurs, est donc à la base de la prostitution :
mais un caractère original doit être retenu qui dérive du système d'adop-
tion des enfants et de la piété filiale envers les parents poussée jusqu'à
l'engagement des jeunes filles comme caution d'une avance d'argent.
Ces recrues féminines, accompagnées de l'agent (jui les conduit, arrivent
ainsi à Ilaïphong où elles sont reçues ii la maison publique de la ville et
où se trouve l'agent général de la prostitution japonaise au Tonkin. Les
nouvelles arrivées rencontrent, de la part de leurs camarades qui les ont
précédées dans la région, un accueil enthousiaste et les conversations
vont leur train sur le pays natal auquel on pense toujours. Mais la répar-
tition commence : il serait peu pratique de laisser improductif ce capital
précieux : et les sous-maitresses, qui dirigent ailleurs des maisons secon-
daires, viennent chercher leurs pensionnaires pour les conduire jusqu'à
Houx. — LA PIIOSTITIKE JAPONAISE W ïdNKIN ^05
Ilanuï, Ven-Bay, l.ao-Kay ot Mong-Tsé. Ce dernier posle fui en cllel créé
au milieu de l'année llXIi.
Celle réparlilion n'est pas délinilive : si la niousnié du Haut-Tonkin
est fatiguée par le climat, on la fera descendre dans une région plus
saine, de môme que les femmes contaminées d'Haïphong et d'Hanoï
essayeront parfois un voyage dans le Haut Fleuve Rouge pour échapper
à la surveillance médicale du lieu et constater si le médecin de leur nou-
velle résidence aura la même sévérité que son collègue du Delta.
2" Mode d'existence . — Etude somatique et psychique. — l.ii prostitution
japonaise, en Indo-Chine, est élroilement réglementée. Les femmes sont
enfermées dans une maison bdlie en un quartier spécial et ordinairement
dirigée par une ancienne courtisane (]ui j(»uil d'une grande autorité sur
ses pensionn'iires et qui intervient, dans tous les cas, comme responsable,
vis-à-vis de l'Administration. Elle s'est substituée au tenancier d'Haïphong
qui lui a passé ses créances, sans aucun doute majorées : les jeunes femmes
qu'elle a recrutées lui obéissent très exactement, sans jamais murmurer
et la traitent avec déférence. Elle-même, quoique sachant rire à propos,
garde une tenue très décente et ne se commet jamais avec les clients. Elle
dirige la maison au point de vue domesticiue, exige que les chambres soient
d'une propreté rigoureuse, surveille l'alimentation et s'ingénie à entourer
ses élèves d'un cadre spécial qui leur donne l'illusion d'une maison
de là-bas : c'est ainsi que leur papier à lettres, leurs livres, les étoffes,
tout vient du Japon et elles augmentent d'autant plus leurs dettes qu'elles
se confectionnent davantage de kimonos voyants et de ceintures de soie.
Elle ne sortent guère que le jour de visite médicale, une fois par semaine
ou plus souvent si le docteur le prescrit : revêtues de leurs plus belles
toilettes, se dandinant sur leurs « gétas » de bois, elles se rendent ainsi en
groupe jusqu'au dispensaire où toutes, même les plus jeunes, se laissent
examiner sans récrimination, trouvant au contraire très naturel qu'en
protégeant la société on les protège elles-mêmes contre des maladies dont
elles connaissent fort bien les graves conséquences.
La dette qui les lie à la tenancière est en moyenne de 150 piastres. Si
un Européen veut en solder le prix, la prostituée est libre : elle se louera
alors à son nouveau maître pour 30 piastres par mois et deviendra une
maîtresse de maison sur le zèle de laquelle on peut absolument compter.
Ce n'est que de cette faeon qu'elle peut arriver à faiie des économies et
revoir le pays natal : car, dans la maison de prostitution, les tenanciers
ne songent que rarement à exécuter l'article 30 de la loi japonaise de 1896
disant : « En traitant avec les courtisanes, les tenanciers tâcheront de les
ramènera une vie plus vertueuse et les empêcher de gagner de l'argent
de pareille manière. » — L'âge de ces Japonaises est très variable : il va
de 14 à 30 ans. Mais le plus grand nombre des recrues est aux environs
de la dix-huitième année. La loi japonaise interdit la prostitution régle-
mentée au-dessous de 16 ans.
Ces femmes sont en général petites et mal faites : le buste est
20(5 in MAHs 1905
long, mais deux de ses éléments, la poitrine et le bassin, sont mal pro-
portionnés; les épaules sont fuyantes, la taille peu marquée et le bassin,
par contre, s'élargit en un évasenient très évident qui fait entrevoir des
conditions anatomiques favorables .'i la reproduction de l'espèce. Les
cuisses sont fortes et solides comme le bassin; les jambes courtes, par rap-
port à l'ensemble du membre pelvien et souvent cagneuses. Au total ces
prostituées sont en général bracbyskèles et on note, comme caractéris-
tique, la prédominance des parties qui avoisinent le système génital.
Les seins sont piriformes : mais ils se conservent peu de temps, ne
tardent pas à fuir plus que normalement vers les aisselles et diiïèrent en
cela étrangement des organes homologues des prostituées annamites qui
gardent jusqu'à un Age assez avancé la forme et la consistance des seins
de jeunes filles.
Le système pileux est assez développé : nous n'observons pas ici la
transmission héréditaire de l'opulente toison des Aïnos : mais les jambes
sont souvent couvertes de poils très apparents et le mont de Vénus est
fourni assez abondamment, beaucoup plus que chez les Annamites.
Les cheveux sont longs, épais et ramenés en des torsades savantes qui
représentent un grand travail : aussi la Japonaise tient elle h sa coiffure
et dort-elle, la nuit, le cou appuyé sur un oreiller en forme de fer à repasser,
de façon à ne pas déranger cet édifice capillaire péniblement et laborieu-
sement échafaudé.
Les yeux sont parfois très bridés : quelques-uns ont une expression
très douce.
Du côté de l'appareil génital, les petites lèvres font saillie, entre les
grandes, mais sans exagération; le clitoris est bien développé; les caron-
cules myrtiformes, vestiges d'une virginité périmée, sont très visibles et
témoignent de l'existence antérieure d'un hymen assezvolamineux.
A propos du système génital, il convient de dire combien les Japonaises
sont propres et soignées : de toutes les prostituées que j'ai examinées,
en différents pays, je n'en ai jamais rencontré qui arrivent à l'examen du
médecin sous un aspect de propreté aussi parfait.
Quant a l'anus, il est à l'ordinaire normal, avec des plis radiés très
réguliers que n'ont déformé ni les hémorroïdes, ni des pratiques vicieuses.
— L'intelligence est vive, éveillée, elles sont curieuses de rapprocher les
mœurs de leurs pays des nôtres et questionnent volontiers sur nos habi-
tudes et nos usages. Toutes celles que j'ai examinées savaient lire et
écrire : et leurs moments de loisir se passaient à coudre, à lire ou à écrire
à leurs parents.
Elles apprennent assez facilement le français ou l'annamite et sont douées
de beaucoup de mémoire.
Il est courant d'entendre nier la sensibilité chez la proslituée japonaise
et il est convenu de dire que c'est une femme de marbre : mais cette réserve
dans les ébats amoureux, dont on lui fait un reproche, pourquoi l'enfrein-
drait-elie? Elle exerce un métier, par raison, par nécessité : de quel droit
exige-t-on du sentiment dans une occasion où il n'a que faire? La Japo-
IliiLV. LA l'HôSTITl Kl-: JM'oNAlSE AL' ToNKIN iO~
naise sait qu'elle esl la prêtresse d'un sacrifice indispensable par lequel
elle conliibue, dans une certaine mesure, a l'assouvisseaienl de cef ins-
tinct sexuel par lequel nous sommes nés, pour lequel nous vivons et au
moyen duquel nous assurons, volens aut nolens, la pérennité de l'espèce.
Elle prête son corps : elle ne loue pas son cœur.
Mais si un protecteur paye ses dettes et la libère de sa tenancière, il ne
larde pas à constater que celte poupée orientale ne craint pas de faire du
sentiment et que, autant parafîection que par reconnaissance, elle lui témoi-
gnera son contentement par des caresses et des étreintes passionnées. —
En cas de maladie, elle se transforme en une infirmière dévouée, qui est
aux petits soins pour son malade et fait exécuter à la lettre les prescrip-
ptions du médecin.
Enfin, même dans la maison commune, ses sentiments atïectifs trouvent
à s'épancher dans de longues lettres quelle écrit très régulièrement à sa
famille et dont elle attend la réponse avec impatience.
La Japonaise rit facilement, mais se fâche très yite. Elle a son caractère,
je veux dire qu'elle est têtue. Dans le genre des petites ménagères de
chez nous, elle aime l'ordre, la propreté et tient à régir de très près tout
ce qui ressortit à une femme, dans l'administration d'une maison : n'allez
pas déranger une série de mouchoirs : vous auriez à coup sur une scène :
faites des observations aimables sur le repassage défectueux de votre
veste blanche : vous auriez sans cela à subir, pendant quelque temps,
l'ennui relatif d'un mutisme complet.
Il faut que cette femme, comme tant d'autres, fasse sentir sa volonté
de temps en temps : à défaut d'un client ou d'un protecteur, c'est aux
serviteurs annamites qu'elle s'en prend, car elle a le plus profond mépris
pour cette race, qu'elle considère comme une race de boys, et les Anna-
mites ne sont pas reçus dans les maisons de prostitution où sont employées
les Japonaises.
Mais le coté le plus intéressant, à mon avis, de la prostituée japonaise,
réside dans sa morale. Tout au moins dans les premières années de sa
réclusion, la courtisane ne pense pas que son métier puisse être taxé
d'infamie : ses jours de sortie, promenée dans son pousse-pousse, elle ne
cherche pas à éveiller l'attention des passants, bien différente en cela des
« maison Tellier » que Ton voit parfois, en province, se faire voiturer
lapageusement dans des costumes criards. Et pourquoi serait-elle hon-
teuse d'elle-même? Son métier la force à changer de mâle très souvent :
il l'expose à subir des maladies dont elle est la première à pàtir : mais,
en somme, elle n'est pas une dégénérée génitale : les rapports qu'elle
autorise sont conformes à la loi naturelle et les érotomanes n'ont rien à
faire h ses côtés. Combien de nos pauvres filles de la ville, prostituées,
pourraient se montrer sous cet especl, alors que la plupart d'entre elles
se prêtent à toutes les exigences de personnes déséquilibrées et oublient
si facilement l'usage physiologique de certains de leurs organes?
Ce fonctionnement génital normal, quoique hyperactif, lié à un état
psychique héréditaire, explique, à mon sens, que la prostituée japonaise
2(iH ir. MAit- i!»u:)
conserve des ijualilr'S inoi'ales (jiie nous ne liuuvuns sans duule pas au
miîme degtv parmi les autres races. L'honntHelé, par exemple, est fort
en honneur chez elle, sous ses diverses formes : le prix convenu, dans
une maison, n'est jamais majoré : si le médecin a reconnu une femme
malade et lui ordonne de garder la chambre, il est absolument certain
que la femme malade n'aura aucun rapport, malgré les olfres les plus
tentantes, avant que le docteur ait levé l'interdit qui pèse sur elle : et
j'insiste sur celle observation, qui est à coup sûr peu banale, et que j'ai
eu l'occasion de faire plusieurs fois.
.Mais le patriotisme de ces jeunes femmes est aussi un trait bien origi-
nal de leur vie psycliique : nous irions, dans une maison de prostitution
française, calomnier et insulter un de nos hommes d'Etat les plus en vue,
(jue les pensionnaires s'en soucieraient probablement fort peu et met-
traient ces paroles acerbes sur le compte d'une douce folie sans intérêt
pour elles. N'allez pas proférer des injures, dans une maison japonaise
du Tonkin, à l'adresse du Mikado et mettre en doute sa supériorité intel-
lectuelle : vous seriez très mal reçu et M"» Chrysanthème aurait tôt fait
de vous mettre à la porte si vous ne reveniez bientôt à des sentiments
plus japonophiles et à l'observance plus stricte des convenances et des
égards que vous lui devez. — La guerre russo-japonaise la passionne :
elle est assurée de la victoire et ne peut pas comprendre qu'on soit d'un
avis contraire El on réfléchit, en constatant cette foi dans l'avenir et
cette confiance si grande dans le cœur de ces prostituées, que ces sen-
timents doivent être exaltés dans toute la population du Japon, qu'un
peuple intelligent et courageux qui a une pareille force morale est sus-
ceptible de grandes choses et devient un ennemi redoutable.
Je n'ai pas de renseignements personnels en ce qui concerne l'espion-
nage pratiqué par ces prostituées. Mais ce que j'ai dit de leur patriotisme
peut faire présumer que les tenanciers japonais doivent être des auxiliaires
précieux pour leur gouvenemenl et les journaux ont prétendu qu'à Port-
.\rlhur, en particulier, le zèle de ces industriels avait certainement été
mis à contribution pour renseigner les gens intéressés sur les défenses
de cette place forte.
3" Patholofjie. — Les maladies vénériennes sont forcément fréquentes
chez la prostituée japonaise : la blennorragie, d'abord, grève lourdement
son budget pathologique et se traduit, comme ailleurs, par la série des
accidents urélhraux, vésicaux et utérins. Ces femmes prennent cependant
des précautions, ne vont pas avec n'importe qui et ne dédaignent pas,
quelquefois, d'avoir de la méfiance et de passer une visite élémentaire de
celui qui brigue leurs faveurs. Mais ne savons nous pas que la gonococcie
est de toutes les maladies la plus sournoise et qu'un homme qui paraît
sain peut contaminer une femme alors même qu'il a clé infecté il y a
longtemps et qu'il se croit guéri? La blennorragie, sauf dans sa période
aiguë et subaiguë, est donc une affection difficilement évitable pour la
biscifssioN 509
Japonaise : elle si' [ji'.'sorve par cunlre plus facilement ilii oluinci'c mou
et de la syphilis.
Le chancre mou iHanl la maladie des prosliluées sales, vous ne serez
point étonnés qu'il sévisse peu sur les femmes que nous éludions : il abonde
au contraire ciioz les Annamites, réglementées ou non réglementées. Quant
à la syphilis, elle m'a paru rare chez elles : je n'en ai pas observé parmi
mes clientes, soit qu'un vaccin héréditaire les ait immunisées soit que
leurs mœurs spéciales les aient mis ;i môme d'éloigner un amoureux
suspect.
Dans le Haut Tonkin, elles paient un large tribut à l'endémie palustre :
dans les premiers mois l'anémie est rapide : les muqueuses se décolorent,
le teint se fane et elles essayent vainement de le relever en mettant du
rose à leurs pommettes ou en se carminant les lèvres. Les cheveux, tombent
aussi et c'est là un de leurs déboires les plus douloureux, car la coiiïure
joue un grand rùle dans lu vie de ces courtisanes. Enfin quelques-unes
meurent là-haut de cachexie palustre ou d'accès pernicieux : mais d'autres
viennent les remplacer et ces remplaçantes continueront de monter vers
ces pays lointains tant que le Japon sera trop petit pour ses habitants et
que le peuple y sera voué à la misère.
J'ai terminé, Messieurs^ et je pense que cette brève causerie n'aura pas
été sans vous intéresser quelque peu à cette femme d'Extrême-Orient qui
conserve de la vertu jusque dans son métier vicieux et à laquelle peut
s'appliquer, avec un peu d'indulgence, cette pensée japonaise : « Le lotus,
dont les racines plongent dans la boue, ne produit-il pas d'admirables
lleurs? »
Discussion.
M. PvciLLACLT. — Les faits que nous expose notre collègue sont très
intéressants, c'est de la psychologie ethnique et de la meilleure. Il me
permettra seulement de ditTérerun peu de son avis sur leur interprétation.
La courtisane japonaise ne pense pas que son métier puisse être taxé
d'infamie. Je ne vois pas dans ce sentiment une grande supériorité mo-
rale sur l'Européenne. Il prouve au contraire que l'hélaïrisme est admis
au Japon comme une manifestation légitime de la vie sociale. La famille
continue à coiTespondre aiïectueusement avec la prostituée, sans con-
damner, sans soupçonner même son ignominie. Je sais bien que de pa-
reilles mœurs sont communes à beaucoup de peuples et ne sont pas
extrêmement rares en Europe. Il me sera cependant permis de souhaiter
qu'elles ne se gén(''ralisent pas, et que les victoires des Japonais ne nous
enthousiasment pas pour eux jusqu'à les imiter dans cette absence de
sens moral.
Le patriotisme de ces prostituées est un trait également intéressant du
caractère japonais, mais je ne crois pas non plus qu'on puisse y voir
une grande supériorité intellectuelle. Le sentiment qu'elles éprouvent en-
vers le Mikado est purement religieux. Une européenne, dans une maison
Sûc. ii'anthiiùp. 19ûo. a
210 0 Avitii. iw:;
publique, prend peu d'inlércH à lu vie politique de son pays, je l'accorde
hien volontiers à mon honoré l'olièguc, mais beaucoup de prostituées
seraient froissées si on insultait le Christ devant elles. Or l'irritation de la
japonaise est exactement du môme ordre, avec cette dilTérence que son
culte s'adresse a un homme vivant, et non à un être mythique idéalisé par
20 siècles de mysticisme. Le Japonais atteint actuellement le stade social
du llomain ijui adorait Auguste et lui élevait des temples. Je n'éprouve
aucun élan d'enthousiasme pour cet état mental. Je ne refuse pas de recon-
naître il ce peuple des qualités très remarquables, mais je crains qu'on
ait quelque tendance actuellement à les exagérer.
M. DE L.v M.uELiÈRE partage entièrement l'opinion du Docteur Papillault
et considère que le respect professé par la femme japonaise pour le Mikado
est en grande partie dil à des sentiments religieux.
Deux fois par an le Mikado absout ses sujets de leurs fautes et les lave
de leurs souillures par la célébration du grand office de la PuriGcation
générale. Le Mikado est le descendant et le représentant sur la terre
d'Armaterasu, la déesse du soleil. Le sanctuaire de la déesse est à Yamada-
en-se et ce sanctuaire est si sacré que, pour avoir soulevé de sa canne le
voile blanc du porche, le vicomte Mori, ministre de l'Instruction publique,
fut assassiné à Tokio le jour de la proclamation de la Constitution en
1889. Pendant des mois la foule ne cessa d'aller visiter la tomb3 de
l'assassin et d'y déposer des offrandes.
MM. Deniker, Bloch et Manouvrier prennent également part à la dis-
cussion.
803e SÉANCE. - 6 Avril 1905.
Présidence de M. Sébillot.
M. Manouvrier présente une table des couleurs de la peau (Hautfarben tafel)
envoyée à la Société par le professeur Von Luschan de Berlin et comprenant
23 morceaux de verre opaque ordonnés en série. Ils complètent la table établie
par le professeur Martin de Zurich, pour la couleur des yeux.
Discussion
M. DE MoRTiLLET pcusc quc lo brillant de ces plaques empêche de les com-
parer avec la couleur mate de la peau. Il faudrait de la peau de gant teintée.
M. Pai'illaii,ï insiste sur les diflicultés de ces recherches. Les couleurs éta-
lons changent avec la fabrication; il craint que, lorsque les 300 exemplaires du
professeur Luschan seront épuisés, on en fasse de nouveaux qui soient de teintes
un peu différentes. De plus la couleur de la peau varie beaucoup, chez un même
individu, dans les diverses régions du corps, et les voyageurs spécifient bien
rarement la région qu'ils ont observée. Enfin on n'a pas encore trouvé le moyen
d'évaluer quantitativement les intensités variables de pigmentation, de sorte
en. LEJELNE. UM'I'OllT IlF. I.\ i:i).MMI>SliiN l)'i:\ WIKN 1>1: 1. \ lUIll.ln IIlKnll-; '2\ [
i|ue les numéros d'ordre de toutes les tables que l'on a proposées jusqu'à pré-
sent ne représentent rien de préois à lespril.
M. FouRDRiGMBR fait également quelques observations.
RAPPORT DE LA COMMISSION D'EXAMEN DELA BIBLIOTHEQUE ET DU MU^EE
l'.\H M. Charles Lejeinb.
La commission d'examen de la Bibliothèque et du Musée, composée de
MM. Vinson, président, Ch. Lejeune et de Bar, membres, s'est réunie plusieurs
fois pour remplir la mission dont elle avait été chargée. GrAce à l'obligeance
de nos conservateurs, elle a pu se rendre un compte exact de la situation de
notre bibliothèque et de nos collections.
Les changements d'agents de la Société ont nécessité de la part de notre
bibliothécaire M. Zaborowski et de nos conservateurs MM. A. de Mortillet et
Cuver, un surcroît de travail qui a été courageusement accepté par tous, mais,
malgré leurs efforts, ils n'ont pu empêcher qu'il n'y ait eu, par ce fait, quelques
erreurs de classement qu'ils s'emploient activement à réparer.
Bibliothèque. — Les livres d'entrée des livres, brochures et périodiques ainsi
que les liches sont régulièrement tenus.
Nous avons reçu pendant le cours de l'année dernière 217 livres et brochures
et 985 périodiques.
Le registre de sortie et de rentrée des volumes prêtés nous a permis de cons-
tater que le temps pendant lequel les livn^s sont conservés est en général d'une
durée normale.
Notre bibliothécaire s'est occupé avec succès de faire rentrer les volumes qui
n'avaient pas été rendus depuis longtemps et le nombre des livres rentrés s'est
considérablement accru depuis l'année dernière. Les ouvrages importants, sur
la restitution desquels on ne pouvait plus compter, ont été rachetés moyennant
une somme relativement minime de 50 .francs environ et le reste doit être con-
sidéré comme à peu près perdu.
M. Zaborowski est en train de réviser la lisle des brochures, qui ne sont sou-
vent que des tirages à part des articles publiés par les Bulletins et Mémoires
de notre Société et de l'Kcole d'Anthropologie, mais qui contiennent aussi des
travaux originaux, souvent fort importants et qu'on trouverait difficilement ail-
leurs.
Nous rappelons que l'usage s'était établi de prélever sur les tirages à pari
lieux fascicules qui étaient déposés parmi les brochures de la Bibliothèque de
notre Société, mais que notre dernier agent a oublié de le continuer. Nous enga-
geons donc nos collègues à déposera la Bibliothèque les fascicules de leurs der-
niers tira-es h part, qui ne l'auraient jias été et .'i s'assurer, pour l'avenir, que
le prélèvement a été elTectué, car il nous paraît avantageux de continuer l'an-
eienne pratique.
Nos catalogues de la Bibliothèque remontant ,'i l'année 1891, il est regrettable
que nous ne puissions nous rendre compte îles nond)reux ouvrages qui sont
venus l'enriehir par dons, échanges ou achats depuis quinze ans, notamment
par le legs de notre regretté collègue M. le U' Ch. Letourneau. Nous émettons
21-2 r. Avmi. l'.tii:;
le viiii t|m' l'on fasse les sacrilii^os nrressairos pour «juc ims catalogiios soient
mis .'III ••Diii'iiiit . soil au niovoii d'im siip[ilrin('iit. suit par un rcmaniiMUPnt com-
pii'«.
Nous i)osst''(l(uis dans nos ivsim'vcs un ;,'rau(l noniltro daniuk's couiplrlcs de
nos nullfliiis ou de niMiK'ros <U''par('iili''s dans nos cinq séries, on dehors des six
volumes 1881 à 1880 mis liors eolleelion el ofïerls gratuitement. Nous souliai-
lons, dans rintérêt tie la Soeiélé. «pie nos collègues el les amis des snicncos
anlliropologitjues complètent leurs rollections en achetant le plus grand nombre
possible de volumes et de fascicules.
Nous appelons l'atlontion sur le petit iioiiil)rc de photographies (122 planches
et 6 photographies) qui ont été déposées au cours de Tannée li)04, parce que,
si ces dépôts ne peuvent avoir rien de régulier, il est possible que certains
oublis nous privent de documents intéressants.
Nous émettons aussi le vomi que les rejtroductions de gravures el de photo-
graphies, que nous insérons dans nos Hulletins. soient plus soignées, car nous
avons eu trop souvent à constater leur imi)erl'eclion pour ne pas dire davantage.
Sur le crédit de 600 francs volé à la HiMionièqiie pour l'exercice 1904, il n'a
été dépensé que 248 fr. 65, ce qui ne poiinail <|ii'ètre approuvé par une com-
mission des finances. Mais dans l'intérêt de la Hibliothèque, nous insistons sur
l'utilité qu'il y aurait à choisir et à acheter, parmi les publications qui se mul-
tiplient, celles qui viendraient le mieux eu aide à nos travaux et nous engageons
nos collègues à les signaler à notre bibliothécaire.
Collections du Musée. — M. A. de Mortillct continue avec ardeur à se livrer
i\ un classement méthodique de nos richesses archéologiques et ethnogra-
phiques, ce <iui est un travail considérable. En elTet. un grand nombre d'objets
de tout<; provenance avait été entassé avec plus ou moins d'ordre dans des
caisses d'où il est obligé de les tirer successivement en les classant par âges, par
séries el par nationalités. 11 s'emploie, le plus souvent avec succès, grâce à son
expérience, <i retrouver les noms des donateurs et les lieux de provenance en
compulsant les Hulletins de la Société, en comparant les écritures, en faisant
appel à SOS souvenirs personnels et à ceux de nos collègues qui peuvent encore
le l'enseigner à ce sujet et nous avons été heureux de constater que la plus
grande partie de nos collections a pu être ainsi classée et numérotée avec des
vernis indélébiles, de couleurs ditrérentes selon la nature des objets.
De son côté. M. Cuyer a fait le même travail avec autant de soins et de réus-
site pour nos collections anatomiques.
Le classement de l'arriéré pourra être l'ait dans un temps relativement pro-
chain et la majeure partie <le nos collections ayant alors trouvé sa place soit
dans les vitrines, soit dans les meubles «pie nous possédons, on pourra procé«ler
il la pose des étiquettes sur les tiroirs, ce qui facilitera des recherches actuel-
lement bien dilllcilos sans le secours des conservateurs, qui s'y prêtent d'ailleurs
toujours avec la meilleure volonté.
Il serait à désirer que l'on pût aussi teriiiim'i' ce long travail par rétablisse-
luenl «iiiii catalogue «les objets du Musée et d'un registre mentionnant les
entrées el les sorties des pièces prêtées pour l'élude.
Le classement des phono'.M-ammes, qui ont été récemiiMMit annexés au Musée,
nous a paru parfaitement établi par M. .\zoulay.
Nous n'avons pu que constater avec regret que le défaut «le place et pour la
lilliliotlièrpie el pour le Musée ren<l bii'ii dilhcile le l'iassemen! «les livres et
cil. I.F.JRI NK. — ISAl'I'iiItT HK I.A t;uMM1S>|o.N DKS KINANCK^
213
r.'\pnsilinii <l.s .(.llections et nous n-nouvelims les vœux qui sont .•xin-iiiiés
(•liHi]ue année iioiir THmclioratioii de ici étal île ilioses.
Nous terminerons ce rapport en adressant tous nos remei-ciemcnls à nos
(lévom'-s eoll.'Kii»'^^ >'M- Zal'orowski, A. de Mortillel, Cuver et Azonlay p<mr le
dévouement persévérant et le travail assidu qu'ils eonsaerent an classement
et à la conservation d.' nos livr.'s rt d.' nos colletions.
rapport de la commission des finances
Par m. Cii. Lfjeine.
La commission de vérification tics comptes de l'année 1904, désignée
par !e sort, s'est trouvée composée de MM. (iiovanetti, président,
Ch. Lejeune et de Har, membres.
Ce n'est pas sans une certaine inquiétude que nous avons accepté la
mission d'examiner les comptes et le rapport qui vous a été présenté par
notre trésorier. Des événements peu éloignés nous ont prouvé l'inefficacité
d'un contrôle exercé, môme avec le secours d'un expert, par des person-
nes souvent incompétentes, qui se trouvent un peu déroutées en pré-
sence d'une comptabilité en partie double, qui est peu en usage parmi
les membres d'une société scientifique.
Nul ne nous accusera de manquer de confiance dans nos trésoriers dont
le dévouement, tout désintéressé, a été quelquefois pénible et toujours
laborieux et nous n'oublions pas que c'est à notre trésorier actuel que
nous devons la cessation d'un état de choses si regrettable à tous égards
et que nous espérons ne plus voir se représenter. Malheureusement nous
savons trop que plus on est honnête plus on est exposé à être victime
parce que l'on ne soupçonne pas le mal.
C'est pour parer à ce danger que M. le D"" Iluguet a modifié les anciens
errements pour rendre le retour de pareils accidents presque impossible.
Nous n'avions qu'un seul agent ayant la gestion de la caisse et de la
tenue des livres avec la responsabilité sous la surveillance du trésorier.
Aujourd'hui c'est M. le 13^ Iluguet lui-même ([ui concentre entre ses
mains les divers éléments du livre de caisse et qui marque de sa griffe les
notes importantes, et toute la comptabilité est mise à Jour par un comp-
table de profession, M. Carlier, qui nous a prouvé sa compétence par
l'apurement des comptes des dix dernières années. Enfin il n'est plus
remis à l'agent que de petites sommes en compte courant, pour les besoins
journaliers du service et il en rend compte au trésorier. C'est ainsi que
nos valeurs et nos fonds sont toujours déposés à notre compte de la
Socii'ié générale ou entre les mains de notre trésorier.
Celte nouvelle organisation, qui n'est pas seulement pour le trésorier
une affaire de surveillance, mais qui lui impose, en dehors de la respon-
sabilité, tout au moins morale, un travail très important, nous parait
devoir rendre désormais bien improbable le renouvellement des abus de
'21-2 ti AVIML l'JO.'i
conliance dont nous avons soulîert, car elle constitue un contrôle réci-
proque et il faudrait supposer ou rincompétence, sur laquelle veille le
Coniilé central, ou la complicité des diverses personnes qui se partagent
le travail. Elle a déjà mis fin aussi ;i diverses pratiques qui, sous forme
de remise par les fournisseurs ou autrement, venaient grossir encore, au
détriment de notre Société, le bénéfice des actes frauduleux que com-
mettait notre ancien agent et qui lui ont valu, malheureusement par
coutumace, une condamnation par la Cour d'assises de la Seine à dix ans
de réclusion et h quinze ans d'interdiction de séjour.
Dans ces conditions il nous a paru que nous pouvions nous dispenser
du concours d'un expert. M. le D"" lluguet et M. Carlier nous ont donné
avec la plus grande obligeance tous les renseignements et explications
que nous leur avons demandés et nous avons mis toute notre attention k
l'examen de la comptabilité et du rapport sur notre situation financière.
Nous nous sommes fait représenter les factures, les quittances et les
divers livres de comptabilité, nous avons collationné entre eux les plus
important* articles de ces documents et nous n'avons relevé aucune irré-
gularité dans les écritures.
Le compte de la Société générale est bien d'accord avec le carnet de
celte banque.
Le livre de cotisations est régulièrement tenu.
Enfin le bilan de la situation de la Société présenté par notre trésorier
nous a paru parfaitement exact.
Dans le Rapport sur la situation financière à la fin de 1904, M. le tré-
sorier s'est efforcé de satisfaire au vœu qui avait été exprimé de donner
dans son résumé des détails plus complets que les années précédentes.
Il a cherché à imiter les exposés financiers des grands établissements de
crédit dans l'énuméralion :
1° Des opérations financières de l'année 1904;
2" De l'inventaire de notre avoir à la fin de ladite année.
Le montant de nos valeurs en portefeuille composé de 3,135 francs de
rente françaises 0/0 figure sur le compte au prix d'achat pour 96,873,09.
Leur valeur au cours de la Bourse du 31 décembre dernier (97,80) aurait
donné un capital de 102,201 francs, ce qui fait une plus value, qui serait
encore accrue aujourd'hui, de 5,327,91. Nous vous signalons le fait sans
l'apprécier, car la méthode contraire ne nous paraissait pas avoir d'in-
convénient.
Vous remarquerez aussi que le montant du détournement Lerouge
figure pour solde au chiffre de 9,290 francs. Notre trésorier a estimé que
notre situation était assez prospère pour que nous n'ayons pas à tenter
de masquer par un artifice de comptabilité le résultat d'une série de
méfaits imputables à notre ancien agent en échelonnant cette somme sur
une série d'an m'es.
Une autre modification consiste dans l'insertion au Rapport de 1904
du budget de prévision pour l'année 1905, ainsi que le font d'autres
sociétés. C'est une innovation qui paraît n'avoir que des avantages.
cil. LEJEL'NE. — UAPPiJHT l»R LA OtMMISSIoX DES FINANCES Hi
En ce qui concerne les legs, s'olevaiit cm iiiif pi'opric'lé à 130,000 fr.,
faits par noire ancien collègue et généreux duiialeur M. Louet, à qui nous
devons tant île reconnaissance pour le don cl pour rexenijile (ju'il a
donné, notre société a été autorisée à les accepter par arrêté préfec-
toral en date du 30 juillet 190i, transmis h M" Cottin, notaire, et notre
trésorier, qui suit celle affaire avec tout rinlérèl (ju'elle mérite, espère
bientôt être en mesure de signer les actes d'acceptation et de délivrance
de ces legs.
Certains de nos collègues ayant manifeslé le désir : i" de connaître
exactement le nombre des membres ayant payé leur cotisation dans
l'année courante; 2<* et de savoir le prix exact de revient de chaque
fascicule du Bulletin, voici ces renseignements :
1. — Cotisations versées en 1904.
Cotisations des titulaires (2U2 sur 23(5) 6.210 »
— d 'admisision (12) 240 »
— antérieures régularisées (21) 030 »
Rachats efTectuês :
MM. Tommasini (.André), fin de rachat 100 » 1
Azoulay, il. 100 » f
Masbrenier, les deux premiers termes 200 » / ' *
Hivet, rachat complet 300 » ]
Total 7.780 »
Nous sommes heureux de constater la régularité que mettent nos col-
lègues dans le versement de leurs cotisations.
Pour les cotisations arriérées qui s'élèvent à 3,040 francs, M. le Tré-
sorier propose à la Société, pour en terminer d'une façon définitive avec
ce compte qui risque de rester toujours pendant, de le supprimer, parce-
que ses moyens de contrAle sont insuffisants et ne peuvent lui permettre
une réclamation fondée auprès de nos collègues présumés retardataires.
Cette (luestion devra être tranchée par décision du comité central, en
vertu de l'article 10 de notre Règlement.
II. — Friiis de publication :
Les règlements effectués dans le courant de l'exercice de 1904 ont per-
mis à notre trésorier d'établir le tableau suivant relatif au prix de revient
des publications réglées dans le courant de cet exercice.
1 et :2. Four les factures de papier et de gravure, les sommes ont été
reportées proportionnellement au noml)re de feuilles de chaque bulletin.
Si l'on tient compte des deux fascicules manquant, la dépense totale pro-
portionnelle pour le bulletin complet de l'année, table comprise, s'élèverait
à 4,411 fr. 7o, soit un prix de revient moyen, par feuille, de 4 fr. 65
environ.
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NATURE
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Totaux
Fascicule V.
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233 70
133 75
408 55
2i2 n
53 10
F'ire Clairon (papier). *
» Uuckerl (gravures)'
896 40
500 05
233 70
133 75
Totaux . . . .
;!.69t; 75
521 50
689 »
122 75
447 20
845 20
1.071 10
3 &9
0 53
0 725
0 128
0 47
0 89
1 15!7
Les surcharges ont été de 480 fr. 50, soit une augmentation de frais
d'impression de trente et demi pour cent, dépense exceptionnelle, qui a
été explicjuée en séance par notre trésorier (^correction s nombreuses
imposées surtout par les tableaux du très important mémoire de notre
savant collègue M. Volkov).
Nous pensons que ces explications achèveront de vous éclairer sur
notre situation financière bien exposée dans le Rapport de M. le D"" Iluguet.
Avant de terminer nous rappellerons que notre trésorier^ avec l'appro-
bation du Bureau et du Comité central a pu, l'année dernière, faire pro-
céder à la remise à neuf de la salle des séances. Cet important travail de
réparation n'avait pas été effectué depuis de nombreuses années. Grâce
à la coopération de l'Ecole, qui a bien voulu participer pour la somme
de cinq cents francs aux modifications des locaux, nous avons pu obtenir
une salle de séance plus convenable. Nous remercions l'Ecole de nous
avoir aidés dans cette circonstance.
Enfin nous renouvellerons le vœu que la publication de nos Bulletins
ne continue pas à éprouver des retards aussi considérables.
En résumé, la commission de contrôle a l'honneur de vous proposer :
D'approuver les comptes de l'exercice de 1904 présentés par notre
trésorier ;
D'adresser à M. le D"" Iluguet nos sincères remerciements pour le
dévouement et le travail qu'il consacre, sans compter, à la bonne admi-
nistration des finances de noire Société;
Et de continuer votre confiance à M. Carlier, le seul employé qui nous
reste provisoirement.
CHARLES LEJEUNE. — l'iIOMMR DANS l'lNIVERS :2IT
LA PLACE DE L'HOMME DANS L'UNIVERS ET DANS LA SERIE ZOOLOGIQUE
{Suite ri fin).
Pau -M. Charles Lejeune.
I,'anllirop(»li»gio considère (jue l'homnie n'existe (luo depuis l'époque
qualernaiie et que nos ancêtres du tertiaire, et à plus forte raison ceux
di'S épO(iues antérieures, ne méritent que le nom de précurseurs. Elle fonde
cette manière de voir sur les changements profonds qui se sont produits
dans la forme et la dore de ces deux époques et aussi sur les variations
(les animaux, qui sont d'autant plus rapides que leur organisation est
plus com[»lexe. .J'avoue ({ue je n'ai jamais été (ju'un partisan très peu
convaincu de cette distinction. En effet, l'évolution animale a partout été
lente, progressive et continue dans son ensemble et nos divisions et subdi-
visions ne sont que des méthodes de classification, qui facilitent nos tra-
vaux, mais que la nature ne connaît pas.
i( En partant du principe de sélection naturelle avec divergence de
caractères, dit Ch. Darwin, il ne semble pas incroyable que les animaux
et les plantes se soient formés de (juclque forme inférieure intermédiaire.
Si nous admettons ce point de départ, il faut admettre aussi que tous les
êtres organisés, qui ont jamais vécu, peuvent descendre d'une forme pri-
mordiale uni(]ue. « Et M'"" Clémence Koyer fait observer que le nombre
des germes produits fut immense, mais que sans aucun doute ils furent
tous semblables. « Ce serait donc bien d'un type, d'une forme, d'une espèce
unique, mais non d'un seul individu que tous les organismes seraient suc-
cessivement formés. >»
On a rejeté avec raison les graTides révolutions du globe et les créations
successives de Cuvieret depuis les beaux travaux de Ch. Darwin sur l'Ori-
gine des Espèces, d'E. Ilœckel sur La Création naturelle, de A. (iaudry
sur Les Enchainements du Monde animal, et de leurs disciples, j'estime
qu'on doit admettre de plus en plus une transformation graduelle des
espèces en vertu de laquelle il n'y a pas eu, dans le temi)S, de solution de
continuité entre l'homme quaternaire et ses précurseurs des précédentes
époques géologiques. Je ne suis donc pas choqué de l'opinion de M. lia
Uainton ([ui vieillit l'Iiomme au delà de ce que nous nous sommes jamais
permis en anthropologie. Il me semble que l'évolution du monde animal
s'oppose à ce que nous puissions fixer le moment précis où notre espèce a
mérité d'être appelée humaine en dehors d'un intérêt de classification.
Si j'admets qu'on lui refuse cette qualification avant le quaternaire, c'est
\ la condition qu'on reconnaisse que notre ancêtre du tertiaire n'en dilTé-
rait que par des nuances imperceptibles, .le ne pense pas que la découverte
du Pithécanthrope faite à Java par M. le l)"" Dubois vienne infirmer ce
point de vue, car c'est un anneau de la grande chaîne ininterrompue de
l'humanité, qui prend sa place dans l'évolution générale du règne animal.
soc. DANTHROP. 190ij.
■2iH ^\ Avitii l'.io:;
NOTE SUR UN CAS D'INVERSION SEXUELLE CHEZ UNE COMORIENNE
Pau iM. Lk D' Roux.
J'ai eu l'occasion d'observer, en iDOO, dans l'île de Mainlirano, sur la
côte Ouest de Madagascar, un cas d'inversion sexuelle qu'il nie paraît
intéressant de vous communi(]uer à cause de sa rareté et de la présen-
tation des pièces qui servaient à cette femme pour essayer de réaliser des
actes normalement dévolus au sexe mâle.
On a déjà signalé à Madagascar, soit en Emyrme, soit en pays Sakalave,
une sorte de secte désignée du nom générique de Sekatra et dont les
membres répondent au nom de sarimbavy (sary, ayant l'apparence de...,
vavy, femme). Mes collègues des colonies, MM. Lasnet et flencurel, nous
ont décrit, en 1899 et 1900, cette perversion sexuelle dont les adeptes se
recrutent tantôt parmi des jeunes gens présentant un type infantile, tantôt
parmi des adolescents robustes et bien constitués. Ils s'habillent comme
des femmes, fréquentent ces dernières sans désirs génésiques, exécutent
les mêmes travaux et recherchent les faveurs des hommes, qu'ils sont
parfois obligés de payer, en laissant pratiquer sur eux rarement la pédé-
rastie, plus souvent le coït inguino-crural ou encore le coït dans une corne
de bœuf fixée entre les cuisses et remplie au préalable de graisse.
Aujourd'hui c'est d'une sarindahy que je veux vous parler, c'est. à-dire
du cas précisément inverse des précédents, d'une femme qui avait la
tournure, les vêtements et les désirs d'un homme (sâry, ayant l'appa-
rence... lâhy, homme).
En 1900, Fatima était une vieille femme d'environ tiO ans qui avait été
mariée et avait perdu son mari vers 1890 : c'est à partir de ce moment
qu'elle se rasa la tète, se coiffa de la calotte Comorienne, revêtit la grande
robe blanche qui est l'apanage des hommes Comoriens et rechercha les
faveurs des femmes sakalaves qu'elle payait largement.
Elle s'était confectionné un membre viril en ébène dont la base était
percée d'un canal transversal où elle faisait passer une corde qui s'atta-
chait à sa ceinture et les testicules étaient représentés par un petit frag-
ment de rafia pourvu d'une rainure antéro-postérieure et muni d'une
cheville qui permettait, le cas échéant, de l'enlever facilement ou de le
remettre en place.
Mais Fatima épuisa rapidement ses ressources pécuniaires et ses jeunes
amantes disparurent du même coup : elle se maria alors avec une femme
âgée^ qu'elle faisait vivre et auprès de laquelle elle remplissait avec moins
déplaisir son rôle masculin. Elle abandonna même le costume des hommes
et ne conserva que la coutume de se raser la tète.
Enfin, en 1899, Fatima a complètement cessé les pratiques vicieuses
auxquelles elle se plaisait jadis : plus instruite que la majorité des habitants
itlVRAC.K iiKKKItT 219
du pays, on lui passait volontiers, en 1U(X>, les erreurs génésiques tfe son
âge niCir et en entourait sa vieillesse d'une certaine considération.
Je vous présente la verge postiche de Fatiuia : c'est un document etli-
nographique rare, assurément, et qu'il m'a été fort diiricile de me pro-
curer. La vieille tenait à ce souvenir auquel elle attachait une grande
importance. C'est avec la coinplicité'd'un (ttlicier (jui causait couramment
le uialgache et (jui connaissait parfaitement les habitants, que j'ai pu sans
violence me faire donner ce phallus de bois précieux, promettant i\ sa
pruprit'faire que je l'emporterais bien loin et (pi'il valait mieux, pour sa
réputation, être débarrassée de cet objet compromettant.
Discussion.
.M. Zaboro\v>ki. — En ce (jui concerne les cas d'inversion et de perver-
sion sexuelles observés à .Madagascar, nous sommes, comme le dit
M. lloux, fort bien et depuis longtemps renseignés. Son observation sur
les habitudes d'une Comorienne qui pendant de longues années a joué,
auprès d'autres femmes, le rôle de l'homme, elle est nouvelle en tant qu'il
s'agisse du lieu où elle a été faite. .Mais les habitudes de cette Comorienne
nous sont bien connues comme étant fort répandues sur la côte orientale
de l'.VfrJque, de[>uis le pays des Somalis. C'est de cette région-là, de tout
temps en comnmnication avec Madagascar, qu'est venue aux Comores,
l'habitude observée par M. Roux, Des détails circonstanciés ont été donnés
sur elle, avec les instruments en ivoire simples ou doubles, auxquels ont
recours les femmes entre elles, dans la Zeitschrift fiir Ethnologie. C'est de
cette région là d'ailleurs aussi, je crois devoir le rappeler, que s'est
réj)andue la pratique de l'infibulation des filles et femmes (V. mon mémoire
sur la (Avconcision).
804" SEANCE. —20 Avril 1905.
Présidence de M. Sébillot.
OUVRAGE OFFERT
M. PiKTREMENT. — Ma convalcsccnco d'une maladie du C(Rur m'engageanl en-
core à ne pas sortir de chez moi avant les beaux jours de l'été, j'ai l'iionnour
d offrira la Société par rintcrniédiaire fie notre obligeant collègue le docleur Pa-
pillault, un exemplaire du tirage à part de mon mémoire inlitidé : Lps races
chevalines dans le temps et dans Fespace.
•2-20 :20 Avitii. 1<.»()5
(.f iiiéinoii'o ayaiil déjà juiru ilans ims Ihdlrdns de I Miiiit'c l'JUl. pai^^cs A['2
W 43G, ji' rappellerai seulement ceci :
lin rédigeant ce mémoire, j'ai tenu à faire connaître et à laire apprécier à
leur juste valeur les principaux résultats des études spéciales de mon ami le
professeur André Sanson sur le sujet, aussi l)ien ijuc ceux de mes propres re-
cherciu's.
On peut également v constater (|uc par le raiiprocliemcnt de certaines cou-
naissances ap|iarteuant à Sanson avec il'aulres qui m'étaient personnelles, je
suis |iarvenu à élucider beaucoup de questions plus ou moins intéressantes dans
mon ouvrage intitulé : Lfs chevaux dans les temps préhisfonques et historiques,
dont i ai offert un exemplaire à la Société, dans la séance du 7 décembre 1882.
LES LÉSIONS BREGIWATIQUES DES CRANES DES ILES CANARIES ET LES MUTILATIONS
ANALOGUES DES CRANES NÉOLITHIQUES FRANÇAIS
Par m. Robert Lehmann-Nitsche.
Dans une publication ancienne, mais néanmoins très importante sur
les anciens habitants des tles Canaries*, je viens de trouver le nom du chro-
niqueur à qui nous devons quelques renseignements intéressants sur la
médecine et la chirurgie des anciens Guanches de la GrandeCanarie, ainsi
que les notes sur ce point dont s'est servi évidemment M. Chil y Naranjo '
et que j'ai reproduites, d'après ce dernier, dans les Bulletins et Mémoires
de notre Société '. Elles se trouvent dans le livre de Fray Juan Abreu
Galindo écrit en 1632 et imprimé en 1848 k Santa-Cruz de Tenerife ^
dont l'Ecossais George Glas publia déjà en 1764 une traduction presque
littérale anglaise^. Voilà comment les cite M. Berthelot :
« Pour la guérison de douleurs aiguës ils scarifiaient la partie affectée
avec des pierres tranchantes, ou bien ils appliquaient le feu, et pansaient
ensuite la plaie avec du beurre de chèvre. »
• Berthelot. — Mémoire sur les Guanches. Mémoires de la Société Ethnologique.
Tome I, 1841, spéc. p. 129-231. p. 151, 159.
' Chil y Naranjo. — Mémoire sur l'origine des Guanches ou haljitants primitifs
des îles (Canaries. Coni/rès international des Sciences antliro/tolof/i(/i/es, tenu à Paris
du 16 au 21 août iSlH, p. 107-250, spéc. p. 178.
3 Lehmann-Nitsche. — Notes sur les lésions de crânes des îles Canaries ana-
logues à colles du cràtic de Menouville cl leur interprélation probable. Bulletins et
Mémoires de la Société d'Antliro/mlof/ie de Pai-is, 1903, p. 492-494. — Voir aussi
Manouvrier, ib. p. 4it4-/i98; Bertholou, ib. 19U4, p. 55-b6; Manouvrier, ib. 1904 p. 67-73
et fiev. mens, de l'Ec. d'Anthr. 1908, p. 431-436.
4 Juan Abreu Galindo. — Historia de la conquista de las siete islas de Gran-
Canaria, 1632. Ed. 1848. à Santa-Cruz de Tenerife.
5 George Glas. — The history of the discovery and conquest of the Canary islands,
London, 1764.
LEHMANN-MTSCHE. — LÉSIONS BnKGMATIOrES DES CRANES DES ll.ES CANARIES 221
M. Cliil y Naranjo, sans citer le nom de (ialimlo, s'exprima de la ma-
nière suivante, comme nous l'avons déjà reproduit.
Dans ces volumineuses éludes liistoriijues, climalologiiiues et patholo-
giques des îles Canarif^s ', M. ("Iiil dit ee (pii suit; ce sont toujours les
notes de (ialiudo ;
M Cuando sufrian dolores. practicaban escarilicaciones sobre la piel,
en el punlo afectado, cou sus cuchillos de pedernal, llamados 'A/toHfl.v,
y ademas empleaban la sangria cuando tenian sofocaciones, la (|ue prac-
ticaban con lancelas de pedernal apropiadas i este objelo. Curàbanse las
heridas con manteca de cabras hirviendo; mojaban en ella unosjuncos
niajados, y despues los pasaban por encima, produciendo uua cauteri-
zaciôn ' ».
Les notes ({ue nous venons de citer se réfèrent aux (luancbes de la
(Irande Canarie; voici ce que dit, selon le même M. Ghil ', Fray Alonso
de Espinosa ^ sui' les (iuanches de Ténérife :
« Para curarse del dolor de coslado enfermedad que padecian vulgar-
nienle segun Espinosa, se sangraban de los brazos, cabeza à frente, con
una tabona, como lo bacian en Gran-Clanaria •'. »
J'ai cru devoir compléter mon travail antérieur par cette petite com-
munication, car la découverte et l'interprétation des cicatrices bregma-
tiques de crAnes néolitlu(iues français, faite par M. Manouvrier, est très
importante pour la connaissance de la médecine préhistorique.
• Chil y Naranjo. — Estudios liist«jricos, climatologicos y palolôgicos de las istas
Canarias. Toino I, Las Paluias de Gran-Canaria, 187G, p. 618.
' Lorsqu'ils avaient des douleurs, ils faisaient des scarifications sur la peau de la
partie malade avec leur couteau en silox appelé « Tabonas ., et après ils employaient
iii saignée quand ils avaient des suffocations, qu'ils pratiquaient avec des lancettes en
sil.'x adnptèes à cet usage. Ils soignaient la blessure avec de la graisse de chèvre
bouillante, et trempaient dans la graisse des joncs réunis et après les frottaient en
produisant une cautérisation.
3 Chil y Naran.iu. — Tomo II. Las l'aimas di; (iraii-Ganaria, 18S0, p. 8o.
'» Alonso de Kspinosa. — Del origen y milagros de Ntra. Sra de Candel.iria que
apareiôenlaisla de Tencrife, con la descripcion de esta isla. Sevilla, 1S'J4. Réimprimé
i\ Santa-Cruz de Tenerife, 1848.
5 Pour guérir de la douleur decôlé, maladie d(jiit ils pâtissent fiécpieiiimi'iil li'apres
Espinosa, ds se saignaient dans le bras, dans la (èle il sur le front avec un «labona »
comme ils le faisaient dans la Grande-Ganaric.
222 :20 avril 1905
chronologie céramique
Vases Susiens. — Poterie dolmenique — Anciens procédés de fabrication
Pau m. Edoiaud Kourdrignier K
La céiami(iu(' a pris une place tellcmenlimpurlanle dans les recherches
archi-ologiques, que désormais, dans nos découvertes, nous avons à en
tenir compte et que le moindre tesson de vase n'est plus à négliger.
liien que son rùle comme auxiliaire ne fut pas méconnu, par suite de
considérations historiques mal interprétées, longtemps on fut attaniépar
une chronologie erronée des vases de la période classique. C'est même,
comme conséquences f;\cheuses, cette erreur de date qui retenait la
confiance et divisait historiens et archéologues.
l'^n elfel, tandis que les uns, se basant sur des mobiliers, des restes
d'industrie, proposaient une date, d'autres, s'appuyant sur les textes, en
présentaient une autre. Les synchronismes que l'on tentait ne concordant
pas, le doute persistait, on ne pouvait s'entendre. Il fallut les grandes
exploitations qui se sont poursuivies ces dernières années dans diverses
contrées de l'Ancien Monde classique, pour avoir des révélations capi-
tales et mettre tout le monde d'accord.
Or ces faits nouveaux, aussi positifs qu'inattendus, sont dus en ma-
jeure partie à la céramique: des fragments de vases ont tout expliqué. Ces
faits nouveaux sont tels, qu'ils modifient d'une façon profonde ce qui, il y
a quelques années, paraissait soutenable alors en chronologie comme en
origine.
L'importance de la céramique étant bien démontrée maintenant pour
l'Ancien Monde classique, il ne peut en être autrement pour les civili-
sations qui lui sont en dehors.
Si la plupart de nos poteries n'ont qu'un intérêt artistique bien relatif
etque, trop souvent recueillies en fragments, tout imprégnées de terre,
leurs quelques ornements et même leur forme soient peu reconnaissa-
bles, malgré celte apparente grossièreté nous n'avons pas à les dédaigner.
Ce n'est pas seulement pour nous la preuve d'une industrie lointaine:
mais bit'n dei témoins conlempurains d'Innomés dans l'Histoire dont ils
détiennent tout au moins la tradition. Un jour peut-être, si nous savons
les interroger,, fidèlement il nous répondront.
La fabrication delà poterie est une des industries les plus lointaines
de l'humanité puisque, bien avant la connaissance des métaux, du fer,
1 Travail piéseulé dans la séance du IG février i'.iQ.j (rnaiiascrit remis en retard).
EDOUARD Fornnnir.MEn. — les ét\pes de i.a cÉruMrnrE dans L'AMinrin; :223
du bronze elle fui iluii usage courant [MMulanl tdiilc la pi'riodo néoli-
thi(jU('.
Ouelques observations, encore isolées il est vrai, tendent à faire remon-
ter cette industrie tout au moins à la fin du quaternaire. Ainsi M. Ed. Piette
dit avoir <•. recui'illi de très raies et très [)elils fragments de |iuterie gros-
sière et mal cuite » à l'intèriinir de la grotte du Mas-d'.\/.il '. Plusieurs
archéologues belges aHirmaient même récemment, du moins pour leur
région, que des dt'bris de |iolerie s'étaient rencontrés associés avec de
l'industrie paiéolitbiciue -.
L'intérêt qui réside surtout pour nous dans la poterie : c'est que comme
toutes les autres industries, elle a subi l'inlluence des milieux et des épo-
ques. La céramique en est comme un rellel annexe : elle aussi s'y est parti-
cularisée, suivant cette loi d'unité dans l'œuvre humaine où, par
les mômes phases, à leurs débuts toutes les populations ont passé. Telle-
ment, que si nous rappi'ochons nos plus anciennes poteries de celles bien
plus récentes du l'érou, du Mexique, du continent Africain, nous y recon-
naissons une identité qui nous surprend dans les formes, dans les orne-
ments, dans une tecbnitiue commune.
Peut être même, (lu'encore aujourd'hui, [»ar delà (juelques îles perdues
de rOcéanie, quelques sauvages façonnent de ces mêmes vases, les inci-
sent et les décorent de traits, de chevrons tout aussi naïfs.
II
A son origine, la céraniiciue n'eut d'autre but que d'être utilitaire,
comme pour la conservation des graines, des liquides, la cuisson des
aliments. La surface molle de l'argile, qui rceoit si facilement les
empreintes, dût bien vite tenter pour y faire (juciqucs traits, quelques
enjolivures brisant la monotonie; peut-être même quebjues marques in-
diquant leur contenu ou leur usage.
Si ces dessins naïfs tout d'abord n'eurent aucune intention, aucune
pensée artistique, c'est pourtant avec eux qu'a pris naissance cet art décoratif
' F"ii F'iETTE. — Etif/i- Vf. Xo/in/ix rtir/iplr/zii-ii/airps si/r rAsi/Unn. Kxlrail do
l'Anl/irapoIftgip. — Tome XIV, 190:5, pag.- 'i.'iO.
' -Vu Goii;,'rt'\s de la Fi'di'vation arch<''olfKjique el Itis/orir/i/i' île /li-li/ii/ur nn\ eut lion
l'an dfrnier à Moris, une dos questions avait été réservée pour la poleiif; rpiaternair.'.
Dans la ."^éanct! dn ai juillet V.iO'i, .M. Rutot a cité des débris de poterie cxlrémcnieiit
roiig>';\tre, à intérieur grisàtro, recueillis avec des ossements humains et de l'indus-
trie paléolithi(jue. Cette céramique a bien été cuite au feu et aurait été faite avec le
limon niesriiiii'n: o- qui serait bien la preuve certaine d'une fabrication quaternaire
puisque ce limon mrsrinien, par suite de faits géulogiqnes, avait disparu avant l'épo-
que néolithique. — M. le D' Jacques a signalé également de celte poterie rougcâlre
trouvée près de Mons dans la Carrière Ilclin neilcmcnl caractérisée. — M. Ilouzcau
à son tour fait connaître, qu'il possède mémo un vase complet provenant du cette
station. — M. Hublard et d'autres membres du Congrès ont pris part à celle discus-
sion, tous admettent la connaissance du feu au quaternaire cl l'usage de la poterie.
2-24 20 AviuL 1905
céramique ayaiU |»r(Miuilc(>s v(''iital)les chefs-d'œuvre qui font notre admi-
ratitm. Jamais copoiidaut, dans toute l'antiiiuit*', le but utilitaire n'a été
perdu de vue. Le vase ayant seulement une ad'ectatiun [)Ui'einent déco-
rative, ti'llc (juf nous la eiini|treni)ns uuioiiid'liui, est une conception re-
lativement récente. Dans l'intéiieur des habitations ce que l'on recher-
cliait surtout : c'était le décor mural, puis l'espace et la facilité pour se
rassembler, se mouvoir. va([iier ;i ses occupations librement, sans être
encomhn'' de tout ce meublant moderne d-evenu pour nous une nécessité.
Pendant l'antiquitt' les salles étaient presque vides, tout comme encore
en Orient : (luehiues tapis, quekjues sièges et c'était tout. Les jours de
réceptions, on allait clicrcher dans d'autres chambres servant de magasins
ce dont on avait besoin. C'est ce qui explique les dispositions intérieures
des palais explorés en Crète, en Argolide, en Chaldée, en Egypte *.
Fendant toute la belle époque des vases grecs qui comportent les scènes
les plus diverses, pour tous, toujours on a songé à une destination utili-
taire : l'fenochoé réservée pour le vin, l'hydrie pour l'eau, l'aryballe
pour l'huile des athlètes, les amphores pour la conservation des liquides,
leur exportation ou môme pour contenir les huiles données en prix,
comme dans les fêtes panalhénaïques. Si sur la stèle des tombeaux on
retrouve des vases^ c'était pour y placer les offrandes des morts; ou,
comme en Egypte les canopes, y conserver les viscères des momies.
Si, nous éloignant de l'antiquité classique, nous nous reportons dans
notre Europe occidentale, toujours nous retrouvons dans les sépultures
ce but utilitaire évident. Dans les inhumations, beaucoup en effet de
ces poteries conservent des ossements d'animaux, reliefs de repas funé-
raires symboliques disposés pour les morts.
III
Il faut encore retenir qu'en archéologie et surtout pour la céramique,
quand elle touche à l'art, ce n'est pas seulement l'histoire de la forme,
des ornements que nous avons à y étudier, mais bien celle plus élevée,
l'Histoire des Idées. Chaque époque, chaque contrée, chaque milieu
laissent toujours son empreinte.
Ainsi, considérons ces gravures, ces peintures des grottes de la Dor-
dogne, ces dessins incisés sur ossements, sans doute qu'il faut admettre
là un spontané. Mais, quelque soit le sentiment naturel et artistique de
ces chasseurs de rennes, ce troublant réalisme, une unité de manière
aussi étonnante n'a pu s'acquérir sans préparation : nous ne pouvons
que préjuger comment ils y sont arrivés.
On possède ({uelques pièces paraissant des études qui prouvent que
depuis longtemps di'jà ce spontané était cerlain(îment aidé et entraîné.
' Cnurs de l'École du Louvre, loron rlii 23 février l'JO.J professée par M. Ed. POTTIER
à propos (les palais de Knossos.
KDOUARD FOURDRIGXIER. — LES ÉTAPES DE LA CÉRAMluLE DANS l'aNTHJLITÉ 225
Nous connaissons en effet dans la collection de notre si estimable collègue,
M. Kd. I^ielte, une gravure sur pierre provenant de (îourdan, puis" une
autre gravure sur os provenant de Lorlhet où l'on remarque des ligures
d'animaux superposées. Ces dessins enchevêtrés font songer à un papier
buvard avec le(|U(>l on aurait épongé successivement plusieurs dessins îi
l'encre '.
Nous nous sommes expliqué ces superpositions en supposant que ces
plaques, enduits d'une matière adhérente, servaient à silliouetter des
ébauclies(|ue l'on incisait ensuite profontlément jusqu'à entamer la surface
dure, quand on était satisfait de l'esquisse. Après, on égalisait h nouveau
la surface de matière adhérente quand on voulait faire une nouvelle
épreuve. IN'ut-élre même, était-ce une manière d'apprendre à inciser à la
pointe sur matière dure, en s'exerrantà suivre un dessin dont les contours
étaient amorcés.
Quoiciu'il en soit, ce serait peut-être là une preuve que toutes ces gra-
vures n'étaient pas obtenues seulement gr.\ce à une facilité artisli(jue de
race, mais plutôt par l'enseignement d'une école, par un apprentissage
donnant l'habileté.
Dans cet art si longtemps ignoré, on a voulu voir des rapports avec
notre art réaliste moderne, légalement, à propos d'une petite léle en os
sculpté provenant de Menton, à cause de son genre de coiffure, on a
songé aussi à une pensée égyptisante -. il en a été de même pour cet art
mycénien tout aussi réaliste. Serait-ce donc parce que l'on voit (juehiues
ressemblances qu'il y aurait à croire à une unité? Il y a kà comme un mi-
rage où il y aurait crainte de trop s'arrêter.
Comme le disait si justement avec son autorité M. Edmond Pottier': «S'il
u yaunt' solidarilt' ([iii unit le passé au présent et queconstamment nous la
« retrouvons, il est intéressantdebienenvoir leursorigines.En art, pas de
a progrès, mais comme le disait llenan : il n'y a que des (lux et rellux.
« C'est un éternel recommencement. Nous appelons ait nouveau ce qui
« était connu il y a plus de 4 000 ans : ce ne sont (pie des formules de
« décorations retrouvées. Il y a des recommencements, ce qui prouve
(( l'unité de l'esprit humain... Avant de conclure il faut songer que l'art
« est un langage, les moyens graphiques ne sont pas illimités : ils se
« retrouvent à toutes les époques. »
Il y a en effet, dans l'esprit humain, une unité trop constante pour ne
pas s'y arrêter. Elle est d'autant plus palpable et saisissante à l'origine,
' Ed. I'iette — Classification tlps sédiments formés dans los cai^ei^ies pcmlanl l'âge
du renne, \of art. Kvtrait de VAnthritpoloijie. Tome XV, l'.i04, page KiT li^,'. 60 avec
chamois et équidt's; pape 171 fig 04 avec cerfs et éqnifiés.
' Kd. l'rKTTE. — (iranire du Mas d'.lcil i-l slalurtirs ili- Mrnion. l'.vlr. ihs Liul. et
Mrin. de l.i Soe. d'.Viilli. WM'l [yj.. :). — S.vloMon Heinacii — Cours du Lourre, \eroa
du 17 fév. 19U5.
•■' Kcole du LouviiE. — EoMOND PoTTiER. — L'c.oiis du li janvier lltU-J sur les
fouilles Cretoises.
226 20 A vu II, 190.")
iiux (l<U)uls d'une industrie, d'un art, que ce sont généralement les ni(^ines
moyens (jui sont ;i lu disposition.
A part lu dilTérence des climats, des matières ouvrables plus ou moins
faciles, quand des précédents et les inilucnces font défaut, dans les résul-
tats il y a toujours une grande analogie de main d'œuvre. Mais s'il y a à
accepter ce spontané qui, un peu partout est à l'étal sporadique, s'il est
à songer à cette loi d'unité dans l'œuvre humaine, il y a également à
considérer qu'elle évolue pourtant mitigée par cette autre loi des flux et
reflux. D'où il résulte, qu'une œuvre, ayant des apparences semblables à
une autre, a pu être conçue avec une toute autre direction et qu'alors:
c'est l'Histoire des Idées dont il faut surtout tenir compte.
C'est surtout pour la céramographie qu'il y a lieu de ne pas perdre de
vue ces inlluences.
Quand on attribuait encore h la céramique qu'une importance relative»
on ne voyait que peu d'intérêt à étudier l'ensemble des régions par rap-
port il une autre. C'est ce qui existait surtout, pour cette vaste région de
l'Europe centrale et occidentale, en dehors des régions classiques. On ne
soupçonnait pas qu'un vase grec, une coupe étrusque d'un art autrement
avancé puissent être de quelqu'utilitépour toute celte poterie relativement
grossière.
Pourtant il était rationnel d'admettre, qu'un lécythe attique, qu'une
hydrie de Corinthe, qu'une amphore campanienne, durent passer par
bien des phases avant de posséder des formes si heureuses, des peintures
si remarquables et enfin d'atteindre une telle perfection. On proposait
bien, comme ancêtre, cet art déjà si avancé du mycénien, mais il laissait
pressentir une technique, des procédés fort différents et même, déjà d'ail-
leurs, lui-même était considéré comme la fin d'une époque très longue
déjà en décadence.
Pour arriver à nos origines il fallait aller plus loin, car nous avions
besoin de connaître d'autres commencements moins compliqués; quand
on ignorait encore la manière d'épurer les terres, l'emploi du tour, la
cuisson au four, le moyen de fixer les couleurs par le feu.
Ce sont les découvertes, les travaux faits depuis plusieurs années dans
diverses contrées de l'ancien monde classique qui, par les faits nouveaux
qu'ils ont révélés permettent aujourd'hui de mieux nous rendre compte de
la situation. Avec les modifications qui sont résultées pour la chronologie
des vases, nous pouvons maintenant tenter certains synchronismes ayant
trait il la céramique de notre Occident. L'intérêt de ces observations est
assez considérable, pour arrêter notre attention.
IV
Ce furent les fouilles pratiquées de 1885 à 1889 à l'acropole d'Athènes
qui suscitèrent les premières modifications dans la chronologie des
vases. On constata, que sous les ruines de l'ancienne ville brûlée et dé-
KDOUARD FOURDRIGMER. — LES ÉTAPES DE L\ CÉRAMIQUE DANS l'aNTIQUITK 227
truite en i80 par Xerct^s, dans les dt-conibres antérieurs à ce désastre, on
rencontrait de très nombreux fragments de vases peints, à iigures rouges
sur fond noir et (jue ces découvertes étaient faites dans un sol où U\ terrain
avait été niveli'> au temps d(; Pliiilias, pour i-econstruire à nouveau.
Un availdonc làune preuve décisive, cpie, la fabrication de ces vazes à fi-
gures rougesélait bien antérieure à 480. Or jus(]ue là, on admettait que ces
vases n'avaient commencé (jue vers environ ^rjO: il y avait donc une djlfé-
rt'iic»' de plus de deux siècles.
De ce fait. Imite la cbronologie des vases grecs fut entièrement modiliée
f'I les séries plus archaïques qui étaient rationnellement établies furent
descendues à leur tour. Comme on le pense, ces changements ne furent
acceptés qu'après bien des controverses.
Ce furent justement ces graves discussions qui confirmèrent encore la
réalités des faits ; car, en rentrant dans les détails, ce premier résultat fut
pour ainsi dire dépassé. En voici une preuve assez curieuse.
En étudiant une hydrie à figures rouges trouvée à Ilhodcs, conserv>3e
au Musée de Constanlinople ', M. Salomon Reinach fit observer que la
ville de Rhodes ayant été fondée en 408 et le commerce d'Athènes ruiné
en 404, ce vase de fabrication attique devait être placé entre ces deux
dates extrêmes et que l'artiste céramiste qui l'avait signé avait nécessai-
rement vécu en 250.
A ce propos, A. S. Murray, conservateur au Musée Britannique, mort
récemment, avait déjà signalé antérieurement un vase du Musée de Madrid
signé ANAOKIAllï vivant au commencement du y" siècle, artiste cjui avait
praticpié les deux manières de peindre les vases : la première avec figures
noires sur fond rouge et la suivanli» avec figures rouges sur fond noir.
Or, plusieurs de ses œuvres possèdent ces deux manières^.
Dans la plus ancienne, celle des vases à figures noires sur fond rouge,
les contours des dessins sont incisés à la pointe ft les traits ressorlent en
clair selon la couleur de l'argile avivée. l*ùur les vases à figures rouges
sur fond noir, les détails intérieurs sont faits au pinceau à la couleur noire.
Celte seconde manière, aurait été justement inventée par le céramiste cité
plus haut, AndoLidi-a, ^\\l'\, pour ol>tenirces traits si déliés se servaitd'une
petite plume tiri'e sous les ailes de la bécasse et aussi d'autres oiseaux
aquatiques. Cette petite plume porte le nom de plume des Peintres, penna
dei pittori ^. Elle e^t bien connue par les miniaturistes qui, il y a quelques
années, en faisaient encore usage.
' Salomon Reinach. — La nnissnncc di' P/oulos sur un rase décourt-rt à Rhodes,
19<X), article de la /{rr. Arrh.
■ A. S. MuKRAY. — .1 f/uidc lu thc dr/t. ()[' (jrrck and roman anHijuitics in Ihe Bri-
lish Muséum, ib'J'.l, |i. 158. — Voir rncore l'. voN BlEUKowSKi. — Zu-oi altisclic Am-
/j/torrit in Madrid, \'.)02.
^ I'. M.vRïwiG. — Die anirrrdunfi drr /■'rdi-rfalmi- liri dm f/rirc/iischeii Vaspnma-
lern: Jalirbuch, Arch. Inst. XIV, 189!i, p. l'iT-l<',7, pi. IV. — Kn. Pottikr. — drece
et Japon: Jour, des B.-A., I8J0, II, p. U2.
2-28 20 AVRIL 1905
On voit comhion ces discussions ont àlé profitnhlos pour faire connaître
l'origine de divers procédés ouldiés, et surtout, pour él.iblir une chro-
nologie écjuitable à la céramique.
On se souvient al<»rs, que dans plusieurs grandes sépultures découvertes
dans les pays rhénans et dans la n'-gion champenoise, quelques vases de
facture italio-grecque y avaient été signalés. Mais alors, sous la foi de
céramographcs très écoutés, comme on acceptait pour ces vases à (igures
rouges sur fond noir leur ap|»ariliun, seulement à partir de la seconde
moitié du m'" siècle : bien que Ion soit conduit par d'autres considérations
à attribuer à ces mobiliers une date plus antérieure, entre autres dans
les sépultures marniennes par la négation des monnaies, par la pré-
sence réitérée de vases de bronze, d'cenochoès de style, dit étrusque, du
VI» siècle, malgré ces indications assez contradictoires, on passa outre.
On admit que ces sépultures, comme à Rodenbach, à Courcelles-en-Mon-
tagne, puis comme pour celle de Somme-Bionne ' elles ne pouvaient être
descendues au plus, que vers 250*.
Les fouilles de l'Acropole d'Athènes amenèrent la conciliation, par l'évi-
dence du fait nouveau qui se révéla et mit tout le monde d'accord.
Il en est résulté que pour les grandes sépultures de Vépoque marnienne,
où des vases grecs à figures rouges y ont été découverts, nous avons une
date précise bien déterminée, le commencement du v^ siècle.
Un autre fait nouveau qui, il est vrai, ne se rattache qu'assez indirec-
tement à la céramographie, est encore dû à des fouilles très méthodiques
et n'est la suite que des observations auxquelles elles ont donné lieu. Ce
sont les fouilles d'Ulympie faites par l'École Allemande de 1874 à 1880^.
Elles révélèrent la présence de trépieds en bronze identiques à ceux trouvés
à Ilallstatt, puisa celui bien connu de la Haute-Bourgogne trouvé en 1832
dans le tumulus de Sainîe-Colombe près de Châtillon-sur-Seine ^.
Ces trépieds d'Ulympie étant positivement datés du vi" siècle, il était
difficile de les reporter au pillage du temple de Delphes de 279, ni même
à la bataille de l'Allia de 390. Ils étaient donc contemporains des sistes
à cordons et d'autres parties mobilières de ces sépultures.
• LÉON MoREL. — Album des Cimetiét'es de la Marne, \" livre, 1876. — H. Mazard.
— La Céramique du Musée de ^int-Germain, \Hl^i. —A. Bertrand— Archéologie
celtique et gauloise, 2" éd., 1869. — J. Dechelette. — Le Hradischt de Slradonic en
Bohême et lis fouilles de Dibracte, 1901.
' Ed. Fourdrignier. — L'âge du fer Hallstatt — Le Marnien — La Tène, Confé-
rence-proriienade au Musée des Antiquités .\ationales de Saint-Germain, Paris, 1904,
\ pi., 18 fig. — Douille sépulture gauloise de la (iorge-Meillet, 1878.
3 Salomon Reinach. — Le mirage oriental, 1890. — Cours de l'École du Louvre,
1903-1904.
4 Edouard Flonest. — Notes pour servir à l'étude de la haute antiquité en Bour-
gogne, 4» fasc. Les Tumulus des Mousselots, 1876.
h)DOrAUU FOURDRinNIE». — LES KTAI'ES DE I,A CKHAMInlE DANS I. ANTKjI ITK 2:Î9
Là encore, avec celte concordance, certains vases purent ;i leur tour être
mieux datés : leur chronologie nous servira bientôt ;i d'autres identidca-
lions.
Une nouvelle impulsion fut encore donnée par les découvertes récentes
faites dans l'île de Crète, à Knossos, sur l'ancien emplacement attribué
au jjalais du roi Minos, le Labyrinthe homérique. 11 faut également dire
que d'autres travaux de la même importance avaient précédé ces fouilles
de Crète et ont été poursuivis aussi, prcsqu'en môme temps, dans l'Ile de
Crête, dans les fies de l'Archipel, puis sur le continent, dans l'Argolide,
la liéotie, en Asie-Mineure où les recherches si heureuses commencées
par le D*" Schliemann furent reprises avec de nouveaux succès'.
Des savants éminents des écoles anglaise, allemande, grecque, italienne
et française s'y sont mis avec ardeur, tous ont rivalisé pour éclairer ces
graves (juestions : mais c'est surtout aux belles recherches de M. Arthur
Evans, faites à Knossos, que nous devons les plus magnifiques résultats.
I)'>puis lî>00 et encore ces derniers temps, toute une bibliographie com-
prenant de nombreux mémoires, des rapports et des articles variés a paru
sur ces émouvantes découvertes. Parmi les savants français qui se sont
surtout intéressés à la question Cretoise nous devons citer MM. Ed. l'ottier,
et S. lleinach, professeurs à l'Ecole du Louvre puis AL Ilené Dussaud, un
de nos savants collègues qui, dans leurs cours et par leurs publications,
veulent bien nous tenir au courant de ces travaux, la plupart faits à
l'étranger. Toutes ces révélations y sont présentées avec un tel attrait
({u'elles sont palpitantes d'intérêt '.
C'est qu'en effet, comme par un bond prodigieux dans l'obscurité sécu-
laire, de cette époque homérique où timidement, vers le xv« siècle, on
cantonnait le mycénien, on a pu reculer à plus de 2.000 ans en arrière,
une longue période historique méconnue, éclairée maintenant par des
témoignages contemporains de l'haraons d'Egypte de la xii" et x" Dynastie.
Et ce n'est pas tout. Sous ces couches maintenant historiques, d'autres
plus profondes ont été atteintes venant se relier entre elles, au del.\ de
• DoERPFELD. — Troja und Illun, J903.
* Edmond Pott'ER. — Voir Revue de Paris et lierue ilc l'Art nitrien l'I xuidcnie,
190'2. — Conférence du \ juillet 1!>01 à la Soriéti^ ftour l'Enrourayemeitt des Éludes
grecques. — Cours do l'École du Louvre, lî)03-l'JDi.
SaLOMON Reinach. — Voir sus arlicles dans V.iitlliropolor/ie, l902-l'J03-1901i. —
ICcoIr du Louvre, Le<;on professée le 12 juin 190'J. — La Crde avant l'Histoire, 1902-
1904. — La déesse aux ser/jenls au palais de t.'nosse (Crète). Gaz. des Beaux-Art?,
juillet 1904, p. 13 à 23.
René Dussaud. — La Civilisalion iinjcénienne et les récentes découvertes en Crète,
conférences faites à l'Ecole d'AnthroiJOlogie en novembre et décembre 1904. Voir arti-
cles Questions mijcéniennes dans la Revue de l'Histoire des Religions, 1904. — Revue
de l'Anthropologie : La Troie homérique, fév. 1905.
230 20 Avnii. 1905
lauroiM' lies iniHaiix, par une épo(Hie néolithique où bientôt, une curieuse
ccrainiiiue nous renseignera pour nous j^uiiler encore plus avant.
C'est sur reusoniblc tie tous ces faits nouveaux que nous aurions besoin
de nous arrêter, pour à notre tour, tenter quelques rapprochements,
([uolqucs synchronisnies avec celte céramique compliquée de ranti(juité
classi(|ue et nos poteries bien plus modestes de rEuro[je Occidentale.
iJien (|ue ces diverses civilisations paraissent très en dehors les unes
des autres, avec les éléments de cette chronologie nouvelle il pourrait se
faire que nous y trouvions aussi un intérêt nouveau.
VI
Depuis déjà longtemps différentes recherches avaient été faites en Crète,
parce que l'on considérait cette île, comme ayant été le foyer d'une civi-
lisation très ancienne. Ce sont les fouilles de M. .Vrlhur l-lvans, com-
mencées à Knossos, sur l'emplacement d'un ancien palais attribué au roi
Minosqui, par des révélations capitales pour l'Histoire et l'Archéologie,
ont confirmé ces présomptions.
Poursuivies avec fruit, l'ensemble de ces découvertes de Knossos est
comme le résumé de toutes celles qui ont été faites.
Voici, d'après M. .\rlhur Evans, une coupe qui en présente la stratifi-
cation '.
A partir de la surface, couche d'environ 80 centimètres avec indu>trie
mycénienne :
Dessous couche de près de 3 mètres où il y avait deux palais super-
posés. Celui du dessus, le plus récent (laie palace), compris dans environ
20 centimètres serait celui du roi Minos. Celui du dessous, le plus ancien
(early palace) avait une épaisseur de 60 centimètres. C'est dans cette
couche que se trouvait celte industrie créloise ignorée du minoen et du
frécrélois.
Enfin, sous ces palais^ une dernière couche de 7 à 8 mètres reposant
sur le sol vierge, avec industrie néolithique, silex, obsidienne et poterie
primitive.
Ces différents étages ne sont pas superposés directement, car ils sont
espacés par des couches plus ou moins épaisses d'humus, de terres battues
qui dénottent que l'occupation n'a pas été constante et qu'il y a même eu,
après quelques désastres, un abandon du sol, peut-être pendant plusieurs
siècles.
Ainsi il est acquis, qu'après la couche du mycénien crétois, l'abandon
a été définitif et ce, depuis le jiif siècle. Pendant le mycénien, après la
' .\rthur Evans. — riio m'olilhir seltlenionl al Knossos (M(in) 1902. - Thr palace
of Knossos. ReprincU'l from Uie aiinual oltlie brilish Scool at Atlicns u° VIII l'JOI-
1902-1908. — (Jours de l'Ecole ihi Lourvc . Ed. PoTTIER, loçoii du \t janvier 1905
sur les fouilles de Crète.
.KDOIARD FOURDUKlNlEn. — I.F.> KTvl'ES 1>K I.A CKlIAMIulK DANS I.'ANTIoriTl*. "231
tlestruclion du palais de Minos, les ruines ont élé visitées poury rep-endre
ce que Ton pouvait utiliser. Ce palais n'aurait été lui-même construit sur
le précéd.'ut .[uo longtemps après. Entre ce premier palais précrétois et
l'époque néolithique il y avait eu déjà un long espace de temps qui s'était
écoulé. Tous ces faits semblent démontrer qu'à Knossos, il s'est passé de
très graves événements politiques, des luttes de peuples, de races dont
nous^'ne pouvons que seul.Mu.Mil piviu^er. Le xii» siècle correspond avec
l'invasion dorienno.
D'autre part, ce .[ui a été constaté ,î Knossos s'est également passé sur
plusieurs autres points de la Crète, à Phaitos, à Karamès, à Zakro. Cette
civilisation crétoise se retrouve aussi dans d'autres fies de l'archipel, puis
à llhodes etjusiiu'en Chypre, où il y a eu des importations Cretoises, qui
certainement sont antérieures au commerce maritime des Phéniciens *.
Après les observations suscitées par ces découvertes, la chronologie
([ui était admise a di^ subir des modifications importantes. Il en a été de
même pour la classilication des vases et des poteries.
Ce n'est pas .seulement en Crète que l'on a trouvé le néolithique, mais
aussi sur plusieurs points de l'archipel, à Théra dans l'île Santorin, à Phy-
lakopi dans l'île de Milo où l'obsidienne y a été exploitée. Schliemann en
a retrouvé à llissarlik puis d'autres en Mésopotamie, en Susiane, enlin
.MM. J. de Morgan, Amelineau et Flinders Pétrie ont reconnu tout un ;Vge
(le la pierre à l'époque de l'Egypte préhistorique.
Fait déjà à retenir, c'est que la plupart de ces auteurs sont d'accord
pour comprendre ce néolithique entre 7 à 8.000 et 3.000 ans, sauf en
Egypte, où cet étage serait à descendre, peut-être de 2.000 ans. Mais en
plus, c'est que si l'on compare, pour chacune de ces contrées, les stra-
lilications des époques qui se sont superposées, on remarque que l'épais-
seur de la couche totale, à partir de 3.000, est généralement trois fois,
quatre fois moins profonde (jue (elle qui concerne l'âge de la pierre. Ce
ipii viendrait bien indiquer la longue durée de celle période, d'autant
plus qu'il y a ;i songer, qu'aux époques primitives, les constructions en
pierre ne semblent pas avoir été en usage, et qu'alors les matériaux des
temps plus récents ont dû fournir, comme remblais, des épaisseurs autre-
ment considérables.
Cette première industrie de la pierre parait assez uniforme dans tous
ces centres, à part quelques variantes régionales pour la matière: silex,
haches en serpentine, en hématite, des lames d'obsidienne.
Ouant à la poterie elle est faite avec une terre mal épurée mélangée
intentionnellement de petites pierres. Le tour n'est pas encore connu.
La foruie générale est celle du vase ouvert sans pied : des bols, des tasses
avec seulement quelques ornements linéaires incisés ou encore des dépres-
sions digitales. La cuisson est fort irrégulière.
> Il y aurait donc à faire niainteuanl des réserves sur la llièse si attrayante de
M. Victor Berard. Les Phéniciens et l'Odyssée, 1902,
-y\-2 2') Avim. 11)05
Kii «Irèleoldans l'Airliipol ' on rclrotivc celle puleric fuinigée d'un noir
mal ((ui, ;\ ne pas douter, est connue le précurseuf du buirhcro. Or, dans
l'Europe cenlrale el occidentale, aussi bien sur tout le littoral océanique,
depuis lo l'orlugal * jnsipren Bretagne, dans les Charentes comme en
Hongrie, en Hohènie, en (kraine, ce type céramique à incisions profondes
y est bien connu : mais il est plus récent et va jusqu'à l'Age du fer.
Il semblerait donc acquis, qu'entre 8.000 el .'Î.OOO, tout au moins dans
les régions de l'ancien monde classique, il y a eu une civilisation néoli-
thique universelle et prestiue identique.
C'est seulement à l'apparition des métaux que commence la diversité
dans les produits et. peut-être, la diffusion ethnique.
VII
C'est entre le néolithique et le mycénien, c'esl-à-dire entre .'Î.OOO et
1.500, que se place la période Cretoise, divisée en précrétois et minoen.
Le précrétois ou l'egéen s'étage entre 3.000 et 2.000. Il est caractérisé par
une céramique monochrome et polychrome ayant des blancs, des rouges,
dos pourpres qui sont peints sur engobe noir. Le type fumigé est mainte-
nant supérieur: c'est le bucchero nero dont on avait attribué l'invention
aux Etrusques du vmi^ et ix« siècle. La terre est assez soignée : mais dans
la tranche des cassures on remarque encore au centre, une zone plus
sombre que l'argile clair qui persiste là, comme souvenir de cette
ancienne technique qui demandait un lit de petits graviers entre les deux
épaisseurs de terre. L'usage du tour est connu : mais les formes restent
simples. Le cornet apparait.
Le dessin est encore géométrique : mais déjà on trouve la plante, le
coquillage. Puis la couleur noire sans être encore brillante, est maintenant
d'un mat supérieur.
Une date a pu être précisée par la découverte dans le premier palais de
Knossos, d'une statue en diorite avec une inscription égyptienne delà xiii«
ou \n*^ Dynastie. Puis en Egypte, à Kahoun, M. Flinders Pétrie a retrouvé
aussi des vases précrétois dans un milieu également de la xii" Dynastie,
de par conséquent environ vers 2500 '.
On désigne aussi ce précrétois par poterie de Kamarès, grotte près du
Mont Ida de Crète, où ce type archaïque polychrome s'est surtout localisé ^.
' DuNC.VN M.vCKENSiE. — The pottcrij of Konssds 1903. — BoSANQUET dans Mail.
Les excavations de Phylakopi l'JO'i.
* Em. Cauthailac. — -^{fes pi-éhistoviques de l'Espagne et du Portufjal, 188(3 page
'il'ù lig. 'jUl, iOii, 403. — Voir pour les Charentes G. Chauvet, puis J. Dechelette
pour la céramique de l'Europe Centrale.
' Flinders Pétrie. — The Eyypt exploration fuund, lllahuii, Kolmn and Gurub
1892. — E. ToRR puis Cecil SMrru dans classiral Heview 1892.
4 IIOGARTH el Welch — Primitive painted potevy in Crète 1901. — Potery of
Zahro dans Man 1903.
KDOUAIU) KOl'RDRIGMF.U. — LES KTAPES DE I.A CKItA.MInl K DANS I.'aN Tlyn TK 233
Nous arrivons inaiulenaiit au Miuoen, ainsi noinnu' parce que l'industrie
qui le caracti'rise SI' trouvait ilans lo palais |(liis n'-ront attriliu/' au' roi
Minos. Celte construction est beaucoup plus importante (jue la précédente,
l'agencement intérieur des chambres plus compliqué : c'est b\ que l'on
iroit reconnaître l'ancien Labyrinthe.
Nous avons bien ici le précurseur du Mycénien. Le vase polychrome ne
se rencontre plus : mais nous trouvons un type monochrome supérieur
avec un beau lustre ilont la terre est mieux soignée.
Nous remaniuons de grandes jarres k provision, le pithos, supportant
comme décor des reliefs imitant des cordages et de la sparteric. Au lieu
d'incisés, nous avons une peinture à dessins géométriques où les plantes,
les animaux marins sont stylisés comme le lys, le poulpe, le buccin. La
forme des vases est presque celle que nous retrouverons au Myc<'nien :
mais si l'amphore à trois anses est déjà une imitation de vases métalliques,
le vase à étrier ne se révèle pas encore.
Le vase caractéristique du Minoen : c'est le type cornet, le /.îpx; des Grecs .
Une peinture retrouvée sur un mur du palais de Minos représente, presque
grandeur naturelle, un jeune homme à la taille cambrée qui porte un de
ces cornets. Cette forme de vase nous était déjà connue par les fresques
de llekhmara, à Thèbes, où l'on voit des envoyés du paysdeKefti, vêtus à
la mycénienne, qui apportent des tributs à Thoutmès III, un des derniers
rois de la xvin» Dynastie.
Dans ce même palais, on a aussi recueilli le couvert d'un vase en albâtre
portant le cartouche d'un roi Hyksos, du nom de Khiani, de la xvii« Dy-
nastie que l'on date du xix» siècle avant notre ère. C'est sous ces obser-
vations que l'on a placé le Mi)ioen, ce crétois précédant le mycénien, entre
2.000 et 1. 500 '.
' Il y aurait à faire copendant cTlaines réserves pour ces synclironismes ; car pour
l'K^'yplo, CCS dates ne sont pas absolues. Les chronologies proposées par Bœckli,
par Lepsius, puis par Mariette, ne sont pas toujours d'accord. M. Maspero qui reste
dans une prudente réserve, ne compte que par Dynasties et règnes de rois. D'après un
article de M. Ed. Meyer de Berlin {.Eyi/plisrhe C/ironolof/ie lOOi) toutes ces dales
seraient à revoir et à rajeunir : ce qui modifierait alors la ciironologie Cretoise puis-
qu'elle se base surtout sur la xu" Dynastie qui descendrait de 2.500 à •J.OOO. Les
dynasties des Rois l'asteurs, les Hyi<sos, seraient comprises en 1680 et 4580. Ces écarts,
commo on le voit, sont assez sensibles; mais la question est trop délicate pour
pouvoir dès maintenant prendre fait et cause pour l'un des partis, c'est pourquoi
nous accepterons encore, pour la clironologie, les indications précédentes. Il est a
remarquer ici, que pour la vraie préliisloriqu'> qui semble contempora-ne du precre-
tois du plus ancien |>alais de Knossos, M. Doerpfeld pro[iose les dates de 2 bilOi'i 2.0iiO
(Troja une! Ilion) tandis que le précrétois préhistorique se terminerait vers 3.(100
' FcRTWENGLER et LoESCHKE. Mijkpnischc Vasen, 1880. — Salomon Heina«:ii.
Apnlln. Hiittnire rjpnérnlc (les arts plnaliquox, tOO'i.
SOCi D'ANTUnOP. 1905. "'
234 -20 AVRIL 1905
Mil
Après celle loiiguo jx'Tiode créloise : c'est le mycénien qui lui succède,
sans grande transilion apparente en Crète. On le place de 1500 à 1000,
comprenant les temps homériques. C'est l'ère du végétal stylisé qui s'épa-
nouit, tout en restant très réaliste, ayantcomme une sorte d'aversion pour
la ligne droite '.
Plus de vases polychromes, mais des figures noires sur fond clair avec
ce beau lustre brillant, qui désoniiais persistera pendant toute la période
hellénique. Quoique le secret pour obtenir ce beau noir soit encore à
retrouver, l'analyse a indiqué que sa base était un oxyde de fer avec
trace de manganèse.
La forme est maintenant élancée, très heureuse. Si le type cornet a fait
son temps, on trouve des coupes montées sur des pieds déliés fort élégants,
des lasses, des urnes avec anses délicates qui sont bien ici la copie
d'oeuvres métalliques.
Son fossile-directeur c'est le vase à étrier, généralement de petite dim-
mension, 8 à 10 centimètres, ainsi nommé à cause de la double anse qui
le surmonte. C'est l'ancêtre de l'œnochoé classique qui naît puis disparait
avec le mycénien.
L'époque mycénienne de 1500 à 1000 comporte deux subdivisions : le
mycénien crétois ou insulaire et le mycénien continental ou de l'Argolide.
On y a été amené par les fouilles de Knossos. En effet, on a remarqué
que sur le continent, certains motifs décoratifs y avaient perdu le sens
qu'ils avaient à leur origine. xVinsi la double hache, la bipenne votive des
crétois, sur le continent a été stylisée d'une telle manière qu'on ne la
reconnaît qu'avec hésitation. Puis, d'autres considérations étaient encore
à faire valoir.
En Crète, le Mycénien est comme une décadence du Minoen, quoique la
technique du dessin y soit supérieure. Les algues, les poulpes, les pois-
sons, les oiseaux aquatiques qui décorent les vases y ont comme un
grouillant de la vie. Mais là s'arrête l'effort pour atteindre plus haut. Le
Mycénien crétois s'arrête alors, vers le xii° siècle.
Transporté sur le continent, à Argos, h ïirynthe, à Mjxènes', ce pre-
mier mycénien insulaire y prend comme un nouvel e?sor dans ce milieu
nouveau et va s'élever en reproduisant l'animal, puis enfin, la personnalité
humaine. C'est bien une succursale de l'art crétois qui a été arrêté, dans
son élan, par quelques faits historiques.
Miais ce qui surprend dans ce mycénien continental : c'est de voir la
sculpture de ses bas-reliefs, des stèles de ses tombeaux si peu avancée.
♦ A Mycènes, on a retrouvé des plaques de terre émaillèe avec cartouche d'Ame -
nophis III, roi appartenant à la fin de la XYIII* dynastie, donc de vers le milieu du
XV* siècle avant notre ère, date toujours très concordante.
•KDOLARU KnlllDRIiiN'lF.R. — LES KTAl'ES DE LA CÈRAMIOrE DANS l'aNTKjUITK 235
comparativemeiU ;i l'ait de ses œuvres en inrtal, tels (jue ses poignards
damasquinés, sa vaisselle d'or si abondante h Mycènes et ces goblets si
curieux tle N'aphit». Il semble (ju'il y a là, comme deux éléments distincts
et que l'industrit' cérami(|ue a plutôt di^i s'inspirer de cet art supérieur.
Ce qui est.'i remarquer, au point de vue anthropologie, dans cet art Cre-
tois et au mycénien : c'est cette manière de représenter le corps humain.
I.a cambrure exagérée de la poitrine, ces membres élancés, cette taille
svelte et trapézoïdale présentent un type très dilTérent de celui que nous
connaissons pour l'époque hellénique. Il nous a fait plusieurs fois songer
à ce type basque si bien décrit et étudié par notre savant collègue M. le D'
Collignon '.
Le costume du mycénien est fort différent de celui des (irecs. Le torse
est nu, les reins et le haut des cuisses sont seulement entourés d'une
étoffe. La chaussure pointue monte jusqu'à mi-jambe : elle rappelle
celle des Hittites de l'Asie-Mineure et aussi celle des Etrusques (le tombeau
Lydiens). La chevelure longue est rejetée sur le dos. La barbe est toujours
rasée. Cependant aux masques d'or de Mycènes ' la barbe et les mous-
taches sont bien indiquées. Mais ces tombes sont de l'époque plus récente
que certainement les goblets de Vaphio ' qui semblent plutôt au type Cre-
tois si bien caractérisé au vase de Phaestos •*.
C'est en comparant ces diverses œuvres d'un art réaliste si avancé,
(jue l'on voit qu'ti la fin du mycénien, du continental, le type devient plus
trapu et s'éloigne de celui si élancé de l'époque Cretoise.
Pour les femmes : elles portent une jupe à volants qui retombe en cloche,
une partie du corps est comme dans un corset laissant les seins nus. Les
cheveux sont abondants, ébouriffés, retenus par des rubans flottants^.
IX
A partir du mycéni(Mi qui prend lin vers l'an 1.000, à part les modifi-
cations subies après les fouilles de l'acropole d'Athènes, la chronologie
céramique est restée ce qu'elle était depuis une dizaine d'années.
Sous l'influence dorienne nous voyons renaître le style géométrique
avec son caractère particulier. Avec le tijpe du Dipi/lon qui commence un
peu avant la fin du mycénien, vers le xii"" siècle, d'abord ce sont des vases
à dessins couvrant toute la surface et prcsqu'cxclusivement rectilignes.
D' René Collignon. Indices céphaliques des populations franraises.
' H. ScHLiEMANN. — Mycénes 1879.
' TsouNDAS. — Les vases de Vaphio. Eph. 188'J,
♦ '^fonurnenti antichi, et voir dsinsla. liecue ArchéologifjueJomel. 1904, lerésumèdes
fouilles italiennes dans un article de M. R. Weill, le vase de Phaestos (F. Halb-herr,
Orsi, Ravignoni etc )
*A. Evans — op. laud. — Lastatuette de bronze du musée de Berlin dite /a p/eurewse.
-)3(i ^0 Avuii. 1905
l'uis ce sont df .:;i''i'>J^ vases culossuls avec dos scènes navales, funéraires
où, jusqu'aux personnages très nombreux, tout y est stylisé.
Ue ToO à «OO, c'est le type archaùiue de Hliodcs, de Corintke avec
ses ligures noires opaques d'animaux stylisés, disposés en zone sur fond
jaune. Il y a des rehauts blancs, violets, et surtout au Corinthien, des
incisés pour donner le trait de force au dessin.
Au vu" siècle c'est l'école attique qui prend définitivement position avec
ses vases à figures noires sur fond rouge obtenues sur un engobe masquant
l'aririle.
A la (in du vi" siècle la technique se retourne : ce sont des figures rouges
sur fond noir. La pointe pour les incisés est délaissée pour le pinceau
avec le(juel les traits les plus déliés sont obtenus, comme sur les lécythes
attiques à fond blanc, où des scènes funéraires sont rehaussées par toute
une gamme polychrome.
Puis, après les 'guerres du Péloponèse, au iv» siècle, l'industrie des
vases peints se transporte dans Tltalie méridionale et la décadence com-
mence. Enfin, cet art si remarquable au iii« siècle prend fin, quand les
vases à reliefs les remplacent.
Mais ces vases à reliefs du iu« siècle avaient déjà une origine plus
ancienne : car nous les voyons très florissants au vn« et vi^ siècles en
Etrurie où, au moyen de cylindres et d'empreintes, l'estampage était
œuvre courante. Ces vases étrusques à surface noire et lustrée n'étaient
eux-mêmes que les succédanés d'un type bien plus ancien, le bucchero
nero, ces fumigés italiotes que l'on admettait du ix^ siècle au moins.
Par les découvertes de Crète nous connaissons maintenant une autre
origine que l'Etrurie. Elle est en effet bien plus lointaine, puisque ces
fumigés sont très antérieurs au précrétois de 3.000 et se rencontrent dans
la partie haute de la couche néolithique.
Bien que toute cette chronologie céramique de l'ancien monde classique
ne soit ici, que seulement amorcée à grands traits et qu'elle demanderait
un tout autre développement, on peut cependant avoir un aperçu des
avantages que nous pouvons en retenir. Beaucoup de rapprochements
sont désormais à tenter avec notre céramique occidentale qui, quoique
bien plus modeste, maintenant peut nous donner de sérieux résultats.
Autrefois, on délaissait trop cette poterie, elle aussi cependant possède sa
valeur.
X
La plupart d'entre nous se rappellent les fouilles si remarquables, faites
en Susiane par M. Jacques de Morgan, ainsi que la visite que nous fîmes
KDOUARD l-OlRDRir.NIER — f.ES KÏAI'ES DE LA (:i':RAMInIK DANS L'ANTIurilK 237
en 1902 de sa superbe culleclion '. Il vuiikil bien, avec une bunne giAce
donlnous lui savons gré, nous faciliter l'élude de plusieurs poteries très
anciennes, en nous les mettant en main.
Nous fûmes assez surpris, en remarquant (juc certains fragments avaient
une telle dureté, qu'à peine étaient ils rayables à la pointe d'acier. Celte
résistance était d'autant plus étonnante, (|U(> pour obtenir de tels produits,
ftMn|»arables à de la jtAle de verre, surtout quand les matières employées
-nul peu viliiliables, il avait été nécessaire de les exposer dans un foyer
caloriijuf 1res intense et certaincinent supérieur ;i celui cprexigela porce-
laine.
Comme une aussi haute température ne [)eut èlic atteinte (ju'avec nuire
outillage moderne, il y avait donc lieu d'être assez intrigué puur savoir
comment, à une époque si reculée, on s'y était pris pour y arriver.
Depuis ces observations, la lecture de difîérents textes anciens nous a
fait songer à une explication assez plausible, que nous pouvons mainte-
nant vous proposer.
On sait que c'est dans cette partie de l'Asie, située entre la MerCaspienne
et le Golfe Persique qui comprenait autrefois l'Assyrie, la Médie, la Su-
siane et la Perse, que de tout temps il a existé de ces feux naturels prove-
nant de l'inflammation de liquides ou de gaz souterrains à la surface du
sol. Pline, à propos du monde et de ses éléments, nous a laissé des rela-
tions fort curieuses de ce que l'on connaissait de son temps sur ces foyers
étranges *.
Il cite sur la cote de Lycie, près de Phasélis, une montagne, la Chimère,
qui jetait des flammes. Puis les monts lléphestiens qui prenaient feu à
rapproche d'une torche enllammée, tellement qu'en brûlaient les pierres
des ruisseaux et le sable dans les eaux elles-mêmes : ticdajlammanietacti,
fhigranladeo, ut lapides quoque rivorum et arenœ in ipsis aquis ardeant.
Si quelqu'un allumant un bâton à cette flamme liiiuide, en traeail des
sillons sur la terre, on voyait comme un ruisseau de feu qui en suivait
les traces. En Bactriane, un mont Cophante brûle la nuit : il en était de
même en .Médie et dans la partie de la Perse (pii y confine \
N'oici un autre passage (jui concerne tout particulièrement les fouilles
en Susiane : A Suse, vers la Tour blancltf, le feu sort dt^ (juinze foyers; le
plus grand flambe même pendant le jour : Sitsis qitidi'in ad harim albnm
r quiudi'ciin caminis : mnximo eonim, et iiiterdiii ''. (Juelle était cette tour
blanche'^ Sans doute le reste d'un monumeui de l'Acropole ou de l'.Apa-
dana.
Ces feux naturels étaient parfois considérables, puisque plus loin Pline
nous dit encuie : Dans les environs de Dabvlone, des flammes sortaient
• J. DE MORGAN. — Mission Scientifique en Perse (1889-1891). Vol. IV. Archéologie
iii-4o, iioinbrouses plaach s ot fi^'ures. i'aris, 1902.
- PLINE. — Nul. llis. Liv. I[ De muntio et elcmcnlix et sitlrrihux ; ç,\\. nyt De sr m per
nvilentiljus loris.
' Pline. — Op. rii., passini.
^ PLiNE. — Op. cit., passim.
-2:^8 -20 AVRIL 190.".
aussi (l'un(> piscine do la i^iandi'ur d'un arpont: Campus /inhijhniœ flagat
qmUlnm vcliili piscind, jii(/eri maijniUuline '. l.e jufierum pouvait avoir 3 à 4
hectares carrés.
Nous savions déjà (jue chez les Perses, comme aussi chez les Parlhes, on
se servait de l'huile de naplite pour s'éclairer et se chauiïer. Les^exploita-
tions actuelles de pétrole dans le Caucase et près de la Mer Caspienne en
sont, sans doute, un vivant témoignage.
Ces phénomènes terrifiants di'iient impressionner d'une façon profonde
ces peuples primitifs qui ne savaient se les expliquer, qu'en y voyant
une manifestation divine. C'est là, que se trouve l'origine de ce culte du
feu, si répandu autrefois dans tout l'Orient bien avant le Mazdéisme, bien
avant les Sectateurs de Zoroastre.
Ce culte du feu, qui a été pratiqué aux époques les plus reculées de
l'humanité, avant d'être advenu une religion aussi compliquée et aussi
philosophique que celles des Parsis, des Mages et des doctrines védiques;
qu'avant que le feu ne soit considéré comme étant l'élément primordial
de la vie et qu'en l'adorant, c'est adorer le véritable ancêtre du genre
humain ; qu'avant que le feu ne soit le symbole vivant d'un seul Dieu
lumineux, base du bien et du mal, ce culte du feu a dû, à son origine,
avoir une forme beaucoup plus simple.
Nous possédons un témoignage que celte origine est bien antérieure
à toutes ces civilisations: car, dans la plupart de leurs religions pourtant
si différentes, où la multiplicité des Dieux ne peut se compter, toujours
on y retrouve comme une part à ce premier culte du feu.
Chez les Mèdes, comme chez les Perses; dans l'Inde où le feu était
d'origine céleste et arpii le feu terrestre; chez les Phéniciens, comme dans
les cultes chaldéens qui reposaient sur l'adoration des forces naturelles^
la divination des astres et du feu se confondant avec l'éclair et le
soleil, il en est de mèm.
Enfin, jusque chez les Hébreux où nous retrouvons le feu purificateur
dans le sacrifice d'Abraham ; puis au temple de Jérusalem, édifié suivant
les instructions de Moïse, où l'on distinguait: le saint des saints où Jéhovah
rendait ses oracles, le sanctuaire pour les objets sacrés et le Parvis où se
faisaient les sacrifices et où était entretenu le feu sacré.
Partout, dans toutes les religions des peuples indo-européens, on
retrouve un usage symbolique du feu dans les cérémonies du culte, en
môme temps que les libations, les sacrifices, les offrandes pour implorer
la Divinité ou conjurer sa clémence.
Ce sont ces considérations qui précèdent où, comme nous l'avons vu
à Suse, près de la Tour blanche, ad turriiu alham, quinze de ces foyers
naturels flambaient, semper ardentibus^ qui nous ont fait songer que là, il
y avait eu quebjues cérémonies de ce culte du feu où des offrandes avaient
été déposées; que ces poteries, dont la dureté nous avait surpris, pou-
' Pline. — Op. cit., liv. Il; ch. lOG.
ÉDdlARD FOUnDRir.MEn. LES ÉTAPES DE I.A CKHAMIQUE DANS i/aNTIOITTÉ 239
valent être (luehjues restes de ces ex-voto: ou bien, si l'on récuse une
intention religieuse, les reliques d'une utilisation qui nous est ignorée de
ces foyers naturels, autronicnt inti'ns(?s(}ue ceux que l'on pourrait obtenir
artificiellement.
XI
Nous nous appuyons encore ici sur i'aulorili' di' IMiiic qui nous apprend,
à propos d'une céranii(|ue tout ii fait particulière, ou peut-être bien une
p;\te de verie, pioduil sur leipiel nous tenons à faire les plus gi-andes
réserves : que les vases {ou pierres) iniirrhins vii'ii tient de l'Orient : Oriens
myrrhina miUil. Puis plus loin il dit encore: on pense (jue c'est une sécré-
tion solidiliée sous terre par la cbaleur : humorem pidant sub terra calore
detisari '.
(Juoique Pline ici place les vases murrhins dans les pierres précieuses
naturelles, il est acquis par les relations de plusieurs auteurs du i»"" siècle,
que ces vases, comme ailleurs Pline le dit lui-même, étaient bien une
production industrielle. A cette époque, sous l'empereur Néron, il en
existait des collections : plusieurs de ces vases furent même estimés des
prix considérables.
Nous ne pouvons du reste insister sur cette question des vases mur-
rhins, mais retenir ici, qu'en Orient ils étaient obtenus, la matière au
moins, par la chaleur terrestre, sub terra calore.
Ces poteries de Susiane, en plus de leur dureté, se distinguent encore
par leurs ornements. Sur la terre grisâtre il y a des dessins linéaires, des
chevrons formés par des bandes alternant qui sont séparées par des inci-
sions assez profondes. Ces bandes, les unes sont piquetées, les autres lisses
avec tracés très visibles de couleur rouge. Certains fragments ont aussi
de petits annelels incisés; d'autres ont en même temps des tiges de plantes
et l'un d'eux la silhouette incisée d'un animal cornu. Or cette poterie a
été recueillie dans la coucheà silex taillés, à obsidienne et à cachets ronds.
Au dessus, la poterie est bien plusgrossière : c'est après (}ue l'on rencontre
les tablettes archaïques avec écriture indéchiffrable que M. de Morgan
estime antérieures à 4.000 '.
D'après la coupe qu'a bien voulu nous donnei' M. de Morgan, c'est dans
les 3 mètres du haut de la couche préhistorique, ayant elle-même 10 mè-
tres d'épaisseur, que cette poterie se rencontre. Dessus, la poterie plus
grossière, puis la couche élamite de G mètres et, avec la |)oteric émaillée,
4 à 5 mètres pour la période sassanide et achéménique; puis enfin, la
surface moderne avec industrie arabe.
' Pline. — Xat. Hist., liv. XXXVIK Cnntinelur orir/o gemmaruni : ch. II. De
gpntmis et de natiirn inijrrhinuruiii
• J. DR Morgan. — //istoire de l'EInni d'npvrs les innli-riaiir l'nurnis /l'ir les
fouilles à S use de iS97 a i90'2. Paris. 1902, pago 33. Ln dèlégatimi m l'me du
Ministère de l'Instruction Publitjue, Paris, 1902, page 3.
Ed. FouRDRiGNiER. — Les fouilles de S use et le Préhistorii/w. Paris, 1902.
i>'iO 20 Avitii. 1005
Si l'on veut bien se reporter maintenant aux fouilles de Crète, à Knossos,
on pont y ren^arquer, (ju'au pr/'crétois qui succéda aussi à la couche
néulilhi(|uo, c'est d'abord une céramique polychrome qui domine : elle dis-
paraît au Miii(ifn,pour rester monochrome. Sans doutequ'à la période Cre-
toise, ou expli(iue cette disparlion par le peu de résistance de celte poly-
chromiequi, n'étant pas bien lixée au feu, ne résistait pas à l'eau chaude.
Mais, quoi(iu'il en soit d'envisager le fait par un cùté pratique, il n'en
reste pas moins qu'en Anzan, en Susiane comme dans la Crète préhisto-
rique, la céramique polychrome, qui paraît pourtant plus conjpliquée, a
précédé la céramique monoclirume.
Sans préjuger outre mesure, il y aurait j)cul-étre lieu à ne pas se piu-
noncer, avant d'être certain que les couleurs que nous ne retrouvons plus
étaient peu durables et qu'alors, par suite d'un défaut industriel, en con-
clure que la polychromie avait été abandonnée. Car en effet, à l'époque
hellénique, où la technique était ])ourlanl ariivée à son apogée, nous
trouvons parfois des vases peints sur lesquels on voit des personnages
jetés dans le champ, avec des altitudes assises, ou s'appuyant sur un
quelque chose qui autrefois était peint, indiqué, dont maintenant il ne
reste aucune trace appréciable.
Pour ces grands événements qui ont eu lieu, aussi bien en Orient qu'en
Occident et se sont passés avant la guerre de Troie , avant l'Invasion
dorienne, on leur a attribué, d'une manière un peu trop absolue, des
causes qui souvent ont été bien indépendantes des intentions humaines.
Saris doute, s'il y a à tenir compte pour ces déplacements de peuples,
de l'accroissement de la population, du désir de conquêtes de quelques
belliqueux uKjnarques, il y a eu aussi d'autres faits graves et très impor-
tants qui les ont forcé à abandonner parfois, contre leur gré, les régions
qu'ils occupaient. De grands cataclysmes géologiques se sont produits
depuis l'époque quaternaire, des bouleversements considérables ont mo-
difié des contrées entières, semant partout les ruines, rendant inhabi-
tables les pays naguère les plus fertiles.
Tout récemment encore, nous avons vu un de ces tristes et lamentables
exemples dans ce désastre de la Marlinicpie. L'ensevelissement des villes
d'Jlerculanum et de Pompéï ne sont (jue des épisodes de ces grands dra-
mes du globe terrestre, dont la liste, donnée par les historiens, est déjà
si longue. Combien s'en est-il passé d'autres depuis l'aurore de l'huma-
nité^ à jamais oubliés dans la nuitdes temps. A peine quelques nébuleuses
légendes restent-elles, pour cependant des événements qui pourraient
tant nous instruire.
C'est surtout en Orient que des bouleversements considérables ont été
produits par les tremblements de terre qui duraient jusqu'à plusieurs
mois : comme celui du v® siècle de notre ère à Conslantinople précédé de
ceux du ni'î et iv" siècle où, surtout sur la côte d'Asie-Mineure, les villes
EDOUARD FOURDRIGNIER. — LES KTAPKS DE LA CKRAMIOfE DANS l'aNTIQUITÉ 241
s'effondraient. Sous (iallien, en Lyhie, la mer l)alayc toute la cote; sous
Dioclt'tien, Tvr, Sidon, la cùte de Syrie ne forment plus qu'une rui.ne;
puis à Antioche, h Ephèse, à Nioée en Hithynie, la mer se retire et la
ville se trouve dans une campagne voisine. Des nations entières dispa-
raissent. Hn T'ri, en Kgypte et en Orient, six cents villes sont détruites
en une seule nuit, ^'oilà déjà, pris au hasard, des désastres historiques '
qui expliquent, hien aulremenl que par la main de l'homme, la destruc-
tion de tant de monuuuMils. de tant de citi's populeuses dont le nom est
déjà même oublié.
Nous connaissons par les récits bibliques cet elfondrement di's villes
de Sodonie et (iomorihe (jue recouvre maintenant la Mer .Moite. Abraham
avait visité ces cités qui disparurent de son temps. iJans celle légende,
on ri'trouve le récit d'un grave événement volcanique, (jui ne parait pas
seulement avoir été ressenti en Palestine, mais dans tout le monde
entier.
(juand ce patriarche quittait les environs d'IIour et d'.Vgané de Chal-
dée pour aller sur les rives du Jourdain, il était lui-même entraîné dans
ce grand remous de peuples venant de l'Est de l'Asie qui se jetèrent par
l'isthme de Suez en Egypte, et, pendant près de cinq siècles, y fondèrent,
sous le nom d'Hyksos, les XV% XVI« et XV!!" dynasties. On admet cette
invasion comme ayant eu lieu vers le xxiii" siècle avant notre ère.
C'est encore sensiblement vers cette époque, que par des éludes faites
à l'île Santorin au point de vue géologique, on a été amené à dater un
désastre volcanique qui a fait disparaître une grandi; partie de cette île
et où, à Théra, sous une couche de lave, on a retrouvé de nombreux
vestiges de premiers occupants tout à fait ignorés de l'histoire'.
Tous ces grands événements qui se sont déroulés vers le xxni" siècle,
comme encore l'invasion élamile eu Chaldée (pie dirigeait le roi Kudur-
Nakliunla, tous ces faits importants ont de grandes relali(jns. (]ar ces
guerres ne furent provoquées que par des dé|)laceinents de peuples
obligés de fuira la suite des révolutions volcaniques qui avaient ravagé
les pays qu'ils occupaient.
C'est de là, et même déjà à la suite d'autres faits semblables et fort
antérieurs *, que cette grande diffusion des races s'est accentuée après les
temps néolithiques. < l'est ce que nous a fait connaîlre les découvertes de
l'égyptologue Mariette .à Saqqarah, où des inscriplions, datant du Pharaon
Papi l''^ de la VP' dynastie, d'environ 3.700, relatent une première tenta-
tive d'invasion en Egypte par des populations nomades.
Maintenant, quoique l'existence de Zoroastre soit assez contestée, en
' Voir les auleurs anciens : PriNE, Tacite, Sthabon, FOusèue.
* FoUQUÉ. — Sanlorin et ses èrup/ious,
Sonvcnons-noiis oncoro ici de colto tradilion d'un didn^'f univprsfi que l'on
r< trouve un peu pnilont chez Inus h-s peuples; c'est cerlninonient la suite d'un grand
cjitaclysnie cpii a dû influencer gravenuni pour les migrations. La disparition de
ci'Ite lerrc des .\li mies, les colonnes d'Hercule et tant d'autres que l'on pourrait
citer.
-42 20 AVRIL 1905
admettant suivant les indications du grammairien Suidas, qu'il ait fondé
sa doctrine au xvn'" siècle : c'est en rassemblant et coditiant bien d'autres
éléments antérieurs, r(>latifs au culte du feu alors très répandu. Une reli-
gion, et surtout (juand il s'agit de celles de l'antiquité, ne s'établit pas seu-
lement par le fait d'un bomme, mais bien comme déduction et à la suite
de tout un ensemble de dogmes consacrés par les siècles.
Ces synchronismes poui- l'Orient sont aussi en concordance avec ceux
de nos contrées d'Europe : le précrétois d'avant le roi Minos de 3000 à
2000, puis noire époque du bronze, (jui s'arrête vers 800, après l'époque
homérique, quand l'usage du fer est définitivement répandu.
(restée (pie nous indique déjà celte céramique polychrome déjà avancée
que l'on retrouve dans les couches préhistoriques de Susiane, de Crète
et des îles de l'Archipel. Comme nous la voyons suivie par celle d'une
couche superposée, où alors la poterie devient plus grossière : la fin du
néolithique parait donc marquée par un arrêt assez net dans son élan
industrie pour retomber dans la barbarie.
Si les données historiques nous font défaut, c'est hien la céramique
(}ui nous renseigne,
XII
Maintenant, voici un autre fait qui, selon nous, mérite encore une cer-
taine attention. Il s'agit d'une terre particulière avec laquelle des poteries
assez résistantes peuvent se fabriquer sans le secours du feu.
Il y a déjà quelque temps, en faisant des recherches dans un milieu
dolmenique situé près de Carnac, dans le Morbihan, on découvrit un
dépôt assez considéiable d'une terre noire, à aspect brillant, qui ne laissa
aucun doute pour avoir été fait dans un but intentionnel.
Cette découverte est d'autant plus heureuse qu'elle est due à notre dis-
tingué collègue, M. G. d'Ault du Mesnil et qu'il ne peut y avoir aucun
doute sur son authenticité. Ce dépôt était tout proche d'une habitation
peut-être bien de l'âge du fer. Il pensa de suite que cette terre spéciale
avait éié préparée pour faire de la poterie : c'est pourquoi il en préleva
plusieurs échantillons afin dans faire une analyse.
A cet effet, il en a été remis une certaine quantité à l'Ecole des Mines
où l'étude s'y poursuit. M. d'Ault du Mesnil voulut bien également m'en
confier quelques fragments afin d'en apprécier la plasticité. En même
temps, il me remit aussi des débris de vases recueillis non loin de ce dépôt,
restes de poterie paraissant avoir été obtenue avec cette terre spéciale.
Au premier as|)ect on reconnaît que celte terre et la poterie ancienne
sont identiques : même couleur noire lustrée, petites parcelles brillantes
de mica broyé, disséminées dans la masse.
Comme manipulations, nous avons d'abord essayé un malaxage après
avoir laissé détremper dans l'eau. Nous n'avons obtenu qu'une matière
poisseuse que nous n'avons pu utiliser ni par le modelage, ni par
l'estampage.
EDOUARD FODRDRir.NIER. — LES KTAPES DE F.A (^ÉRAMIQIE DANS l'aNTIOIITÉ 243
Nous avons alors broyé au mortier. Notre pulvérisé avait pris l'appa-
rence de la cemJie de bois. Ballu i\ la spatule, en y ajoutant lrr'>; peu
d'eau ordinaire, nous avons pu avoir alors une matière assez agglutinée,
mais trop pAteuse pour un modelage au doigt ou à l'ébauchoir. Repoussé
dans un moule en pl;\tre, après (juelques iieures pour l'absorption de
l'humidité, très facilem.'nt notre relief est sorti du creux.
Déjà, comme on peut s'en rendre compte par les dilTérentes. pièces
d'essai (|ue nous mettons sous les yeux, l'aspect noir et brillant est le
même ipie puur la [loterie ancii-nne : on rccunnait encore If mica. Mais
comme nuus avons broyé plus lini-iin'iil, les prliles [tarcelles brillantes
sont moins apparentes.
Pour la résistance elle est telle ,que la surface se raye difficilement k
l'ongle ou à la pointe de bois. 11 faut un certain cfTort pour rompre un
morceau. La tranche de la cassure a le môme aspect que celui de.s frag-
ments des poteries anciennes du gisement.
Nous avons alors employé une méthode usitée en Irlande qui consiste à
se servir du lait pour humecter la terre. On dit même que c'est un genre
de fabrication très ancien. Notre produit a déjà été supérieur car : si
l'aspect est encore le même, mais au toucher un peu poisseux, la résis-
tance, est telle qu'un essai jeté plusieurs fois d'une certaine hauteur ne
s'est pas brisé.
D'autre part, nous nous sommes souvenu de la solidité des briques
crues des anciens Egyptiens et aussi de celle des tablettes à inscription
de la tlhaldée et de l'Anzan que l'on agglutinait en mélangeant à l'argile
de la paille de blé ou de graminées *; puis aussi, de cette manière sans
doute très ancienne pour faire des murs en pisé. Nous inspirant de ces
méthodes nous avons fait une décoction de paille de blé et nous nous en
sommes servi pour malaxer notre terre broyée.
Le résultat a été tout ;i fait supérieur, comme on peut en juger par nos
produits. L'homoi;éi)éité esl parfaite. Le retrait de la terre, assez marqué
avec l'emploi de l'eau pure, devient presque nul. Puis, avantage à ne pas
méconnaître, c'est que la terre se dessèche cl durcit sans la moindre
craquelure, ce que nous n'avions pas toujours pu éviter avec le premier
moyen. Quant à la solidité elle est très belle, sous un choc la terre sonne :
ce qui indique bien que la pièce entière forme une masse compacte *.
.Mors, nous avons pris des fragments de poteries anciennes, de celles
considérées comme dolmeniques. Nous avons encore broyé au mortier
et fait subir les mêmes manipulations. Les produits obtenus sont à con-
fondre les uns avec les autres.
Déjà ces premiers résultats étaient pour nous très significatifs, nous
avons alors passé à l't'mplui du feu.
• Il est aussi queslioii dans la Genèse de briques avec de la paille, fabriquées par
les Hébreux quand ils étaient en Egyple, donc au mo n> du temps de .Moïse, vers
environ le xvii» sied ■ avant notre ère.
' On peut encore ajouter, qu'au lieu d'une décoctioa de paille de blé, une solution
à 2 ou 3 0,0 de tanin donne le même résultat.
244 20 vvnir. 100."
Sonl(^incnl d/'i^ourdio sur un f(nirneau à cliarhon de l)ois, ou môme au
foyer d'une chi'ininée. celle lerre ne se brise plus(jue dinicilemenl, même
en f'tanl jetf'e h (erre. L'aspect noir pai'liculier n'esl pas modifié.
Nous avons alors poi'léune de nos épreuves dans un four spécial et là,
nous avons cherché à lui donner ce (pie l'on appelle un coup de fou. Un
des côtés a suhi le rouge ceri.^e, tandis ipic les autres parties restaient à
la température couleur sombre.
Le résultat, comme on peut le voir, est assez cuiieux. Le c(jup de feu
a fait passer la partie surchaufTce à la couleur rouge brique et, toute
celte pièce possède un beau lustre, presqu'une glaçure vitreuse.
il s'agissait aussi de savoir ce (jue devenaient ces produits à l'humidité.
A cet effet nous en avons exposé, d'abord sous une pluie prolongée. Ceux
(jui avaient subi l'action du feu n'ont pas varié. Pour les autres, celui à
décoction de paille a résisté le plus longtemps, mais tous se sont ramol-
lis, délités et en persistant ils se sont effondrés, ne laissant plus (}u'une
boue noire. Noyés dans l'eau il en a été de même.
Cependant, si avant d'attendre une désagrégation complète, ces mor-
ceaux sont replacés dans un endroit sec, ils se raffermissent et reprennent
consistance : mais le lustré de la surface érodée devient terne.
Comme on peut le remarquer par les échantillons que nous présentons,
pour ceux d'entre nous qui ont recueilli sur le terrain, au moment des
fouilles, des poteries anciennes, ils reconnaîtront bien vite un aspect iden-
tique à celui de certains débris, quand ils sortent d'un milieu humide. Car,
dans beaucoup de découvertes, sur place on n'a aucun doute que l'on a là
une preuve que c'est de la poterie, de la terre qui a été travaillée ; mais on
n'y distingue plus déforme. Et, quand on veut loucher à ces morceaux,
ils se réduisent en miettes.
Nous avons encore observé, que les essais obtenus avec la terre dol-
ménique, quand ils ont subi l'humidité ne peuvent être confondus avec
les vases provenant des sépultures marniennes.
Ces derniers, au sortir des fouilles ont un aspect tout différent. La
lerre travaillée, après un long séjour dans des milieux humides s'est beau-
coup ramollie, elle est comme du chocolnf mouilli', pour se servir d'une com-
paraison (jui indiipie bien leur consistance. Mais pour ces poteries, la
forme s'y est maintenue, même quand les vases sont déjà fragmentés.
Il suffit de les retirer avec soin, de les placer à l'c mbre, afin de leur faire
perdre leur eau lentement, sans transition brusque. Bientôt, en quelques
heures à peine, ils redeviennent solides.
Mais pour les autres, du moins avec la terre spéciale qui nous a servi,
tout ce qui en reste après avoir été mouillés, puis séchés à nouveau, ce sont
des fragments extrêmement friables que l'on ne peut arriver à restaurer.
D'après ces essais et les résultats obtenus, nous admettons, qu'en em-
ployant une terre de ce genre, la fabrication de poterie sans le secours du
feu, n'est pas plus difficile que de se servir du plâtre.
Ces vases pouvaient fort bien être utilisés pour conserver des graines
et des matières sèches. Enduits de graisse ou de cire ils pouvaient, à la
KUOLAIID l-«»rRDRIi;MKK. — LES KTaI'ES DE I.A CKIlAMInlE DANS i/a.NTKJIMTK 245
rigueiu', contenir des liquides. Avec une cuisson légère, alors ils deve-
naient très résistants. Mais placés dans un milieu défavorable, à l'hu-
midité prolongée, bientôt leur désagrégation devient complète, sans même
parfois laisser de trace : car la matière boueuse qui en reste peut facile-
ment être confondue avec la terre où ils avaient été déposés.
Nous pensons que désormais il y aurait lieu de faire certaines réserves,
(|uand dans des fouilles, on ne rencontre pas de poterie. Si l'on ne con-
teste plus celte industrie au néolithique, nous savons encore par des dé-
couvertes faites en Belgique, dans des conditions exceptionnelles pour
la conservation, qm» dt^s poteries ont aussi été recueillies dans un milieu
positivement paléolithique. Des faits de ce genre ne peuvent être isolés
et n'appartenir seulement qu'à une région.
Il serait peut «Hre excessif, cpiand dans une exploration on n'a pas
retrouvé de poteiies,iranirmer qu'il n'y en a jamais eues, (lar, sion n'en
a pas reconnu de traces, c'est qu'elles ont pu fort bien disparaître.
XIII
Les vases sont des documents sûrs et les plus nombreux, car leur fabri-
cation est la plus répandue et la plus ancienne des industries humaines •.
L'homme primitif ne copiait pas seulement ce qu'il voyait : C'est de son
cerveau qu'il tirait ses ornements, suivant là une loi d'unité dans l'œuvre
humaine, qui fait qu'à leurs débuts, c'est par les mêmes phases que toutes
les populations ont passé.
Si l'art est bien un langage, par contre les moyens graphiques sont
limités. Il faut retenir encore, que le passé a une constante solidarité
avec le présent. Quand dans les vases grecs et crétois, nous reconnais-
sons des documents d'art et d'histoire, dont les peintures éclairent l'obs-
curité des textes et la vie réelle des anciens; dans les poteries plus pri-
mitives et plus grossières en dehors du monde classique, il n'en réside
pas moins un vif intérêt pour nous renseigner sur une fabrication, une
technique, des formes, des détails qui, eux aussi, sont inhérents aux cul-
tures civilisatrices qui les ont produites.
Les poteries sont comme le rellet de toutes les autres industries; de
simples fragments peuvent dire à quelle époque ils se rapportent. En
archéologie, la céramique est un guide indispensable : car le moindre
tesson appartient à l'Histoire de l'Humanité.
M. Marcel Baudouin. — Je crois devoir souligner l'intérêt de la com-
munication de notre collègue, car elle a surtout trait à une idée qui m'est
chère : l'application de V expérimentation à la science préhistorique et h
l'une des industries humaines les plus anciennes. C'est en procédant ainsi,
je ne cesse de le répéter, que désormais on réalisera les plus indiscu-
tables et les plus notables progrès.
• Edmond Pottier. — Catalogue des vases antiques de terre cuite du Musée Natio-
nal du Louvre. Paris, 1896, t. I, p. 13.
^46 ^20 AVRIL 1905
Je suis 1res hcuroux aussi de voir défendu par M. Koudrignier un autre
principe, (jui me guidn dans mes li-avaux : celui de Vimporlauce des phé-
twmi'iies j]i'olo(fiijHcs actuels par rapport aux restes préhistoriques. Ils cons-
tituent de réels chronouK^'lres, dont jusqu'à présent on a trop négligé
l'étude au moins en France. Et ce qui a eu lieu, 2000 av. .1. C, sur les
bords du Tigre et de l'Euphrale, a di'l avoir son pendant sur nos côtes de
Bretagne et de Vendée ; aussi cela doit nous rendre attentifs à tout ce qu'on
écrira désormais sur l'Atlantide et l'Orcanie, qui ne sont sans doute pas
aussi légendaires qu'on le croit encore.
La question de l'origine de la poterie reste, certes, des plus obscures,
car, jusqu'à présent, nous n'avons pas en mains les débuts vrais de la céra-
mique. Mais il est probable qu'elle remonte au moins au commencement
mèmedela période néolithique. Cequ'il ya decerlain, en tout cas, c'estque
nombre de poteries (/o//wt'n«gM<'A' indique encore une industrie dans l'enfance,
tellement elle est grossière. Mais, dès les mégalithes pourtant, on trouve
de la belle céramique, qui montre les progrès industriels déjà réalisés.
Discussion.
0. V.\uviLLÉ. — Les fouilles de l'allée couverte de Montigny l'Engrain '
(Aisne) et celle d'une habitation néolithique, sur le territoire d'Erondelle -
(Somme), m'ont fait découvrir de nombreuses poteries néolithiques de
diverses formes.
Les poteries en question, dont un certain nombre ont été présentées à
la Société, dans les séances du l*"" décembre 1887 et du 5 mars 1891,
étaient, lors de leur découverte, par suite de l'humidité, devenues d'une
pâte molle, au point qu'il fallait les recueillir avec soin pour ne pas les
détruire complètement; aprèsavoirétéséchéesà l'air ou au soleilel les rede-
vinrent dures et résistantes comme si elles avaient été durcies au feu.
On peut donc croire que si des poteries existaient avant l'époque néo-
lithique, on devrait trouver des restes de vases, de pâte molle, comme sur
Montigny-l'Engrain et Erondelle, qui étant recueillis avec beaucoup de pré-
caution reprendraient, après séchage complet, une résistance convenable.
Au sujet de ce que vient de dire notre collègue M. Baudouin, pour des
cendres, trouvées avec des sépultures, qui pourraient être comparées à la
terre présentée par M. I^'ourdrignier, je crois devoir rappeler à la Société
que lors de mes fouilles de Montigny-l'Engrain, j'ai constaté avec certi-
tude de nombreuses cendres et charbons de bois, trouvés vers le milieu
d'un groupe important de 52 squelettes humains *.
Les corps avaient été inhumés sur quatre couches bien régulières, les
tètes ayant été placées tout le tour à l'intérieur du monument funéraire,
les pieds vers le centre où étaient les cendres et charbons de bois.
1 Bulletins de la Société, vol. 1887, p. 710.
* Bulletins de la Société, vol. 1891, p. 176.
3 Bulletins de la Société, vol. 1887, p. 712.
l'Ail. I)'KNJ(tV. — PKN.VI.ITKS CHINOISES '2i~
PENALITES CHINOISES
Peines et supplices. — Sursis et revision.
I'au m. 1*.\i I, ii'I"]njov.
I. — Coiisiilrratious génrrtdrs.
Les peines que prévoit le Code chinois, coinine cliAlimeiits légaux de
ceux qui sont convaincus d'avoir transgressé ses prescriptions, sont nom-
breuses et diverses. Chacune d'elles se subdivise en degrés, qui permet-
tent de graduer la pénalité, en tenant compte des circonstances de la
cause. Alors que nous nous larguons, non sans quelque vanité — car,
la soumission de tous à la loi n'est-elle pas une chose élémentaire? —
du principe proclamé par notre Législation, qui consacre l'égalité devant
la Justice, le législateur chinois aiïecte, au contraire, avec une sorte de
complaisance, de sérier^ pour chaque crime ou délit, les peines qu'il juge
adéquates à la répression de la faute commise. Tandis que dans notre
Code pénal, chaque article interpelle invariablement quiconque, manifes-
tant ainsi sa volonté inllexihle de soumettre tous les coupables, quels
qu'ils soient, au joug rigoureux de la loi, le Code chinois, après avoir
décrit la nature du délit, édicté avec soin les pénalités spéciales qui lui
sont applicables, ayant le souci constant de baser son échelle de peines
sur l'Age, le sexe, la situation du coupable, ses liens de parenté ou ses
rapports avec la victime, recherchant par avance le détail des circons-
tances atténuantes ou aggravantes de chaque faute, de manière à ne rien
laisser qui soit imprévu. .Mlénualion ou aggravation, excuses ou charges,
tout est nu'ticulcuseincnt iiuli! dans le texte, tout est pri'vi-i, (ixé, catalo-
gué en quelqu(^ sorte, si bien que le mandarin, quand son opinion est
faite sur la matérialité des faits, n'a plus à rendre, pour l'apjjlication de
la peine, qu'une sentence pour ainsi dire mathématique.
C'est là, non seulement par certains cotés, une précaution [)rise contre la
faiblesse du mandarin que circonviendraient des gens habiles, entre autres
les intermédiaires ou avocats que la loi traite avec mépris d'experts en pro-
cès, apitoyant à tort le juge ou l'excitant à trop de rigueur, suivant les inté-
rêts en cause; mais encore et surtout, un moyen d'élever la justice, bien
au-dessus du fonctionnaire qui a mission de la faire intervenir; c'est la
placer hors des atteintes des parties, dans une souveiMinelé sereine; c'est
mettre la personnalité du juge en dehors de la sentence qu'il prononce,
puisque le jugement de chaque cas spécial est d'avance porté dans
la loi.
C'est aussi, — il faut le reconnaîln» — la volonté arrêtée, la préoccu-
pation incessante, la hantise, pour ainsi dire, de consacrer rigoureusement
l'application des principes supérieurs de justice et d'équité.
Si l'égalité devant la loi était entendue, en effet, de cette façon que la
peine dût être uniforme pour tous les coupables du môme crime ou du
même délit, sans distinguer entre les responsabilités diverses, ne serait-ce
-2 4 M :20 AVHii. ll>Or)
pas fausser odieusement ces principes el consacrer ipso facto la suprême
injustice? Siummum jus, snmma injiirin, disail-on on droit romain. I>a vraie
justice doit iHre humaine et non scienliliiiue. Il ni; lui faut pdinl de rai-
deur, mais de la souplesse, bille doit suivre la nature humaine dans ses
replis les plus tortueux et porter le cautère plus au fond des plaies qu'.à
leur surface. C'est pourquoi elle ne doit pas être égale pour tous. La vraie
justice est celle qui chAtie proportionnellement à la responsabilité, d'au-
tant plus sévOrement que le ronpahle (>sf plus haut placé, dure aux
|)uissants, miséricordieuse aux l'ailil.-, la justice (jui frappe ;i la tète.
L'égalité devant la loi n'est en réalité, dans notre (iode — il faut hien
le dire — qu'une étiquette placée en façade, sans autre portée qu'une
déclaration de principe visant, d'une façon générale, l'application de la
loi h tout le monde. Le législateur français, pour ne pas cesser d'être
juste, a dû rompre avec cette règle quand il a abordé le fond et établir,
comme le législateur chinois, à l'occasion de chaque crime et de chaque
délit, une échelle de peines, une graduation ; mais, au lieu d'être com-
pliquée comme l'échelle chinoise et de comprendre autant de degrés qu'en
comportent les possibilités pénales de chaque infraction, sa graduation
se chifïre, avec une simplicité quelque peu excessive peut-être, par
un minimum et un maximum, entre lesquels évolue le libre arbitre
du juge.
De telle sorte qu'en France — pour citer un fait vulgaire — un indi-
vidu qui vole un pain, encourt, en vertu de l'article 401 du Code pénal,
une peine de prison à arbitrer, sauf circonstances atténuantes à la dispo-
sition du magistrat, entre un et cinq ans de prison ; et que, s'il avait,
dans les mêmes conditions, dérobé un million, il n'aurait pas eu à redou-
ter un autre texte plus sévère.
En Chine, il n'en est pas ainsi, parce que, en plus des circonstances
ordinaires du délit, par exemple, la ruse et l'audace (vol furtif) et maintes
autres considérations, telles entre autres que la saison où le fait a été
commis (— certaines rigueurs de température ne sont-elles pas de mau-
vaises conseillères? — ) le Code a dosé sa pénalité sur la valeur du
produit illicite. Le grand voleur, le plus grand escroc sont beaucoup plus
châtiés que les auteurs de petits larcins. Il y a place, dans les textes, entre
dix coups de fouet et la peine de mort, avec ou sans sursis ; il y a des
culpabilités relatives et des culpabilités absolues ; il y a des fautes
rachetables cl d'autres sans rémission.
En France, le juge tient compte évidemment des circonstances de la
cause, comme on dit au Palais, quand il fixe le chifTre de la pénalité ;
mais il n'en est pas moins libre de sa décision. Souverainement il appré-
cie l'effet des charges et des atténuations sur le quantum de la peine,
sans avoir à justifier autrement la condamnation qu'il arbitre, pourvu
qu'il se tiennedans les limites du minimum au maximum. Le mandarin,
au contraire, est lié, comme nous l'avons dit, par le Code qui détermine
lui-même la pénalité. Il ne jouit à cet égard d'aucune latitude ; ce n'est
pas lui, c'est la loi qui juge.
[■Ali. d'rnjov. - pi':\Ai.rn:> chinoises :>i",)
l'uui- cmljiassLT une si vusle élenduo cl délimiler iin aussi gran.l
nombre de cas, il va sans dire que la législation chinoise comprend un.'
immense colleclion d'édils et que le nombre de ses dispositions est consi-
dérable. Chaque dynastie a tenu à honneur de refondre les lois anciennes,
de les compléter, de les mettre en harmonie avec les mœurs nouvelles,'
de telle sorte que le Code chinois est devenu comme le recueil de tous les
genres de crimes et .1.- délits ((ui aient été observés en Chine depuis quatre
mille ans. C'est à vrai dire une histoire de la criminalité à .travers les
Ages, une compilalion .l'arréts d'espèces, une colleclion Dalioz, si Ton
veut, de (|uatre millénaires.
On conçoit, dans ces conditions, que, s'il est vrai, à raison du principe
idéographique des caractères chinois, de dire qu'un lettré de Chine
apprend à lire durant toute sa vie, on peut également avancer qu'il y ail
quelque dilliculté à rencontrer dans le Céleste Empire un jurisconsulte
possédant à fond la science juridique de son pays. Mais la connaît-on
jamais parfaitement, même ailleurs (ju'à Pé-Kin ? J.a législation, c'est la
vie et la vie, qui oserait prétendre en pénétrer tous les secrets? Prolée
lui-même est moins complexe que l'homme.
Ces considérations faites, nous allons examiner d'une façon générale,
en elles-mêmes, pour ne pas entrer dans la forêt inextricable des textes
et nous y égarer, les diverses peines prévues parle Code chinois.
Ces peines sont de deux sortes :
r.es unes, principales, c'est à dire infligées à titre de chAtimént direct
pour l'infraction commise; les autres, accessoires, s'annexant aux pre-
mières comme leurs dépendances dans certains cas déterminés.
II. — Peines principales.
Les peines principales sont au nombre de huit : Le fouet ou baguette ;
la bastonnade; la détention avec travail pénible; la transportation ;
l'exil ; la déportation avec servitude militaire; la cangue et la peine de
mort.
Les deux premières et les deux dernières sont des supplices.
Le supplice du fouet est infligé au condamné, à l'aide d'une petite
baguette de rotang ou de jonc très flexible, de 2 pieds 7 pouces 5/10 au
moins et de 2 pieds 7 pouces G/10 au plus (dimension rigoureuse). Il est
appliqué aux fautes légères. Les coupables sont citiglés ou, pour mieux
dire, fouettés publi.juement. Le sentiment surlequel est basée cette peine,
disent les textes, est surtout la honte ({ue le coupable en épiouve. On le
corrige légèrement pour faire naître dans son cœur le regret de sa faute.
C'est un avertissement ou, pour traduire exactement le terme chinois:
une correction.
Elle est donnée, par exemple, à l'auteur de coups par imprudence, à la
condition que les blessures n'aient pas été graves, ou encore au <-,omplice
de vol furtif, sous la réserve que le produit illicite ne dépasse pas la valeur
d'une once d'argent.
soc. d'anthrop. 1905. ^7
2r,0 :iO AViui. iîior.
Ell.M-oinpurt.'cin.i (L-grôs drcimuiix, .le 10 à 50 coups. IJe nos jours,
son maximum li (H.' porL' jusqu'à 100 coups, mais avec obligation pour
le mandarin de convertir le fouet en bastonnade, à raison d'un coup de
bAt.)n pour .Unix coups de fouet. Le bîVton remplace donc actuellement
lancienne llagellation tombée en d.-suélude.
La bastonnade commence à 60 coups et s'élève par dizaines jusqu'à
100 coups, chiffre maximum Elle comprend par conséquent cinq degrés
décimaux.
Ce supplice est infligé à l'aide d'une latte en bambou, longue de
•2 pieds 8 pouces et dont la circonférence doit être comprise entre 1 pouce
•2 10 au plus et 1 pouce 1 ,10 au moins. Il est édicté notamment pour le
vol, lorsque le produit illicite ne dépasse pas 40 onces d'argent. Une once
comporte 60 coups; 10 onces 70 coups; 20 onces 80 coups; 30 onces
90 coups et 40 onces 100 coups, soit le maximum de bastonnade.
Ce maximum est immédiatement atteint par le voleur, et pour 5 onces
seulement de produit illicite, s'il est employé de l'Etat, sans compter la
peine accessoire de la marque.
Le même châtiment de 100 coups de bâton est prévu contre ceux qui,
chargés d'un travail pour l'Etat, se sont fait suppléer.
La détention avec travail pénible comporte une durée minima d'un an
et maxima de trois ans. Le condamné, convaincu de fautes assez graves
pour entraîner cette pénalité, est envoyé dans les relais de courriers de sa
province à litre de détenu, pour y être assujetti à tous les travaux que
l'administration locale juge convenable de ne pas faire exécuter par les
prestataires. Comme disent les textes, cette peine consiste en un esclavage
temporaire. Pour un temps, elle saisit le corps et le cœur.
Autrefois, quand le gouvernement percevait les impôts en grains bruts,
les condamnés étaient plus particulièrement occupés à décortiquer. On
les employa ensuite à draguer les canaux, à réparer les routes manda-
rines. En somme, ils font des corvées.
Il y a cinq degrés de détention avec travail pénible, basés sur la durée
delà peine qui peut être, suivant les cas, d'un an, de 18 mois, de 30 mois
ou de 3 ans, maximum.
Cette pénalité est appliquée à certains faits de corruption, aux vols
commis par les gardiens surveillants des biens de l'Etat, aux blessures
graves. Elle atteint aussi les vols commis par personnes ordinaires, dont
le produit dépasse 40 onces et les vols avec violences, au premier degré.
La transporlation est un châtiment dont les effets sont à peu près ceux
du domicile forcé. Ce domicile doit être fixé en un lieu situé à plus de
mille lis, c'est-à-dire à environ 300 kilomètres (444 k. 390 exactement)
de la résidence du coupable.
Dans la pratique, cette peine est remplacée par deux ans de détention
avec travail pénible.
L'exil comporte l'obligation de résidence comme la peine précédente;
mais il en diffère en ce sens que d'une part, il n'est pas tombé en désué-
tude et que, d'autre part, la distance du domicile forcé n'est pas comptée
PAIL U ENJOY. — l'K.NAMTKS CHINOISES 1251
en prenant pour base la résidtMice originaire du condamné. Il ne faudrait
pas non plus entenilre par exil (]uo le condamné est expulsé de la pairie
chinoise. Tout au contraire, le lieu assigné est toujours un point du terri-
toire soumis à la domination impériale. Les Chinois (pii n'ont pas de
colonies exilent aux provinces-frontières.
Les dépôts de convicts, qu'ils ont installés dans leui's marches uK-ii-
dinnales notamment, étaient naguère les récipients oii puisaient les
aventuriers qui infestaient de leurs bandes malfaisantes les montagnes
du Tonkin. Les pavillons, noirs ou jaunes, que d'aucuns croyaient être
des réguliers chinois en rupture de casernes, n'étaient certes pour la
plupart que des exilés refoulés au Yun-Nam ou au Quan-Si.
En résumé, la peine chinoise do l'exil correspond ;i notre relégation.
Elle peut être tixée à :2,000, !2,;')00 ou 3,000 lis; c'est-à-dire, en chiffres
ronds à 900, 1,100 ou 1,300 kilomètres.
L'exil est perpétuel.
La loi pénale obtient deux degrés de plus, en fixant, d'une part, un
minimum d'exil h 2,000 lis, sans adjonction de 100 coups accessoires de
bAton, tandis que pour les trois autres cas, cette peine accessoire est obli-
gatoire ; et en ajoutant, d'autre part, à l'exil de 3,000 lis, pour former le
56 degré ou maximum, une peine de trois ans de détention.
Il y a donc 5 peines d'exil :
A 2,000 lis, sans peine accessoire ;
A 2,000 lis, avec 100 coups de bâton ;
.\ 2,500 lis, avec 100 coups de bâton ;
A 3,000 lis, avec 100 coups de bâton ;
A 3,000 lis, avec 100 coups de bâton et 3 ans de détention.
Pour connaître l'origine des distances fixées et en comprendre l'appli-
cation, il faut remonter <\ l'édit de l'empereur Nghiôu, qui divisa l'Empire
en 5 zones concentriques de 500 lis chacune.
Les 3 dernières zones sont les marches assignées aux criminels exilés
ou pour mieux dire, relégués.
Pour les Tarlares des Bannières, la peine de l'exil est commuée en celle
de la cangue.
La déportation avec servitude militaire est une peine de fondation
relativement récente. Elle a été créée pour ceux qui doivent être châtiés
plus sévèrement encore que par l'exil, et qui, cependant, ne méritent pas
la mort. Tandis que l'exil consiste simplement en une déportation dans
une région où l'exilé vit en liberté, sous la n;serve de ne pouvoir quitter
la zone déterminée, la déportation avec servitude militaire, comme son
nom l'indique, comporte, non seulement l'éloignement aux frontières,
mais encore la privation de la liberté. Le déporté est, en effet, obliga-
toirement incorporé dans des corps de troupes analogues à certains de
nos régiments d'Afrique.
Ce sont des sortes de compagnies de discipline pour condamnés de
droit commun.
Les déportés, conduits en servitude militaire, sont convoyés par déta-
2:r2 20 Avmi. 11K)5
clioiiuMils (le ciiK} au plus, cliaryôs de cliaines et soumis au poil de la
cangue durant tout le trajet. Des peines rigoureuses sont prévues contre
les gens de l'escorte qui se départiraient de ces consignes sévères à l'égard
des condamnés dont ils ont la garde.
La cangue est un instrument de supplice, formé de deux pièces de bois
sec, longues chacune de 4 pieds 7 pouces, qu'on a pris soin de polir et
qui sont réunies à leurs extrémités par des traverses de bois doublées de
fer, de manière à ce que l'appareil forme une sorte de cadre lourd. Le
centre, où doit être enfermé le cou du patient, est également limité par
deux traverses, dont l'une, mobile, fait oflice de fermeture.
L'ensemble, rigide, pèse environ 10 kilos. Le poids doit en être d'ailleurs
gravé sur le cadre et les règlements s'opposent à ce que le chiffre précité
soit dépassé.
Cette peine consiste pour le condamné à avoir le cou rivé à ce lourd
appareil d'infamie et à être, de la sorte, obligé de le porter jusqu'à ce
que l'expiration de la peine l'en fasse délivrer. Elle comporte 8 degrés,
basés sur la durée, qui peut être d'un mois, de 40 jours, de 2 mois, de
3 mois, d'un an, de 2 ans, de 3 ans ou môme perpétuelle.
Enfin, la peine de mort est un supplice (jui, en Chine, peut être appli-
qué de 5 façons différentes. C'est-à-dire (}uc celte pénalité comporte
5 degrés.
Ces degrés sont :
1° L'exécution sur le cadavre.
2° La strangulation.
30 La décapitation.
4° lie pilori.
5» La mort lente.
L'exécution sur le cadavre a lieu, lorsque le condamné à mort décède
d'une manière naturelle avant le jour fixé pour son supplice. Si le crime
commis, quoique grave, n'offre pas de caractère particulièrement odieux,
on dit que la justice du ciel a frappé et qu'il n'y a pas lieu d'aller au
delà. Mais si, au contraire, le forfait mérite une sanction exemplaire, on
se saisit du cadavre et on exécute la sentence comme si le condamné était
vivant.
La strangulation est opérée à l'aide d'une cordelette de soie; la déca-
pitation, par un coup de hache que le bourreau lance horizontalement à
la volée, tandis que le condamné est agenouillé, les mains liées.
Quant à la peine du pilori, elle consiste, après la décapitation du cou-
pable, à fixer sa lèle au bout d'une perche qui supporte un écriteau sur
lequel sont marqués le nom du supplicié et les circonstances de son
crime.
La perche-pilori est placée bien en vue dans un carrefour de quartier
populeux.
Cette peine dont l'origine remonte au xi^ siècle avant Jésus-Christ,
porte, en Chine, le nom d'un oiseau qui, d'après la légende, dévorerait
ses auteurs et placerait ensuite leur tête au bout d'une branche.
PALI. u'eNJiiV. — l'K.NAl.lTKS CHINOISES 253
C'est une aggravation de la peine de la décapitation.
Enfin la mort lente est le su[)plice le plus horrible qu'édicté la législa-
tion chinoise. Elle consiste en les cruautés suivantes : d'abord on enlève
par lambeaux la peau du pnlii^nl jusi^u'à ce qu'il ait le corps entièrement
écorché. Ensuite, si c'est un lioiumc nii lui tranche les organes sexuels ;
si c'est une femme, on lui ouvre If \r\\[ro et on en retire les intestins.
Kniln, on termine cette abominable lnuicherie par l'arrachement des
membres, la section des articulations et le broiement des os.
C'est la peine réservée aux parricides et aux régicides.
Ouand on connaît les sentiments humanitaires qui, dès la dynastie des
ll.\N. ont fait exclure du Code chinois toutes les peines de mutilation, on
s'étonne de trouver encoi'e de ni»s jours, dans la législation chinoise, le
plus barbare et le plus horrible de tous les supplices. Mais, pour être
jiisti,', il faut ajouter que cette peine n'est plus (pi'un é(touvantail. La
mort lente, quoiijue inscrite dans le Code, est heureusement, dans la pra-
li(jue, tombée en désuétude.
m. — Peines accessoires.
Les peines accessoires sont la bastonnade et la inarque, soit deux sup-
plices.
La bastonnade, au chiffre de 100 coups, accompagne toujours la con-
damnation à l'exil, sauf pour le degré minimum. Elle est aussi l'adjonc-
tion obligatoire de la peine de la détention, dans les conditions suivantes :
fiO coups pour un an de détention ;
70 coups pour un an et demi de détention ;
80 coups pour deux ans de détention ;
90 coups pour deux ans et demi de détention ;
100 coups pour trois ans de détention.
La marque ou fer est appliquée aux voleurs, dans certains cas déter-
minés. Sur le bras du condamné sont imprimés trois caractères idéogra-
phiques, couvrant chacun un pouce et demi de côté. Chaque trait de
caractère est large d'un quinzième de pouce.
Les signes marqués spécifient le vol commis.
Telles sont les peines prévues |)ar la législation chinoise, peines dont
la variété et la divisibilité permettent, on le voit, de nuancer d'une façon
minutieuse les divers degrés de culpabilité et les diverses natures d'infrac-
tions. Cette diversité apparaîtra mieux encore quand on saura que les
pi'ines susvisées sont non seulement appliquées avec les nombreux degrés
iiu'elles comportent mais combinées entre elles par graduations; (jue la
loi, d'autre pari, ordonne, dans certains cas, et sous des réserves qu'elle
|>rend soin de spécifier, soit de surseoir à certaines condamnations ou
fractions de condamnations, soit de rendre ces condamnations ou cer-
taines parties de ces condamnations facultatives par le paiement de cer-
taines sommes d'argent, de commuer une peine en une autre et même de
racheter jusqu'à la peine capitale.
254 4 MAI 1905
IV. — Sursis et revision.
Il est intéressant, on terminant, de noter que la condamnation à mort
peut èlve ordonnée avec ou sans sursis et c'est là une distinction des plus
importanes.
En effet, si la peine est prononcée sans sursis, l'arrêt est exécuté aussi-
tôt après qu'il a été confirmé par le Ministère de la Justice, Hing-Pou et
l'Empereur, auxquels toutes les sentences capitales doivent être soumises
et qui disposent du droit de grâce.
Si la peine est prononcée avec sursis, le condamné est gardé en geôle
jusqu'aux assises d'automne. \ cette é[)oque de l'année se réunit le Tri-
bunal spécial dit des Trois Règles, qui est composé du Ministre, du Grand
Censeur et d'un magistral pris parmi les membres du Conseil des appels
à la Justice du souverain.
Cette juridiction évoque l'affaire. Scrupuleusement et inspirés du désir
de contrôler rigoureusement la sentence qui leur est déférée, les trois
hauts délégués de l'Empire étudient de nouveau la cause, examinant la
portée et la valeur des charges retenues contre le condamné, recherchent
si des faits nouveaux se sont produits depuis la première décision et
rendent enfin un arrêt qui est soumis également au Ministère de la Justice
et à l'Empereur.
Sur cet arrêt est pris, soit l'ordre définitif d'exécution — c'est la confir-
mation de la sentence du premier juge — soit une décision de prolonga-
tion de sursis : dans ce cas, un doute est né sur la culpabilité du con-
damné. Sa cause reviendra donc aux assises de l'automne suivant, pour
être examinée de nouveau et ce jusqu'à certitude de culpabilité ou d'inno-
cence.
C'est la revision, mais une revision beaucoup plus efficace que celle
introduite hier dans notre Code, une revision préventive, en quelque
sorte, qui, à la différence de notre procédure, provoque le fait nouveau,
l'appelle, l'attend au besoin.
Ainsi sont évitées des erreurs judiciaires que l'exécution des condamnés
eût rendues irrémédiables.
805" SEANCE. — i Mai 1905.
Présidence de M. Skbillot.
OBJETS OFFERTS
I»"" Fki.ix liEGNAULT. — La mo7'phogénip osseuse expliquée par Vanatomie
l)afh()l(iriiij}ie dans la Revue générale des sciences pures et appliquées, 15
mars lî)05.
CIlAftVlI.IlAT. — ANATUI.K lilUJuf 1841-1904 255
J'ai riiniinciir lie ilniiin'i' Il 1,1 l{ilili(illi('(iiii' (le la Socii-to un article siir la
ninrpli()i:t''iiie osseuse où j'ai résuiné le résultai de liies rechen-hcs laites ileiiuis
douze ans dans les musées anatonio-palliologiques et [larues m ilivi-is ncuiil^
aux Sociétés de biologie, anatomique et anthropologique.
Je ne veux pas expliquer ici pourquoi, ti l'inverse de WolIV. jf lais jouer dans
la forme des os une part eonsidéralde ;i l'aelion directe des muscles : eoux qui
voudront s'en rendre eompte n'auront (ju'à lire mon travail.
Je veux simplement. i\ l'oeeasion de cet article, insister sur I importance d'une
bonne méthode pour éclairer ces questions encore si controversées.
Il i'aut d'abord, quand on tente une explication, avoir toujours présent à la
mémoire la structure liistologique. pAcmple : un organe s'imprime sur l'os, le
D"" Papillault ' admet (pie le simple contact produit cette impression. Mais le
périoste est fcu'iné rl'une couche profonde vasculaire, peu dense, ostéogéne, et
il'une couche superflcielle. dure, libreuse. (pii ne participe pas à la formation de
l'os. Le simple contact de l'organe avec cette couche fibreuse ne peut donc agir
sur la couche ostéogéne. il faut qu'il y ait pression.
Le même auteur admet que la dépression des os. à l'insertion de certains
muscles, est ilue à une lutte entre ces deux tissus, lutte où le tissu musculaire
a le dessus. Mais cette lutte ne peut avoir lieu, comme nous l'avons montré ici-
inème *. puisque le muscle s'insère toujours au périoste par l'intermédiaire
d un tendon, celui-ci fùl-il minime et seulement visible au microscope.
l'ne autre cause d'erreur est due h ce que. plus ou ou moins consciemment,
nombres d'auteurs invoquent les causes finales. Le muscle creuse l'os à son inser-
tion parce que cela lui est avantageux, .\ussi M. Manouvrier admet que les besoins
d'un muscle fibial postérieur très volumineux amènent l'excavation de sa sur-
face d'insertion sur le tibia aplati des races préhistoriques. Or, la théorie des
causes finales est ajuste titre com[)lètement abandonnée.
Je crois que. lorsque les divers chercheurs se seront mis d'accord sur la (|ues-
tion de méthode, lisseront bien près de s'entendre.
M. Zahorowski présente des données statistiques sur l'origine du mouvement
actuel des grèves en Russie qui remonte j'i 1882 et a eu son [loinl île départ à
Vilna.
M. RoHi.N fait quelques observations.
-M. ZAH0R0\v>iKi fait une communication sur les derniers travaux et les décou-
vertes préhistoriques touchant l'origine des Lithuaniens.
(Manuscrit non remis).
• Mt^m. Société Anthrop. Paris, T. II. 3o série, fascicule 189C, p. lOG.
« Bull. Soc. Anthrop , 1901. p. 165.
256 4 MAI 1905
ANATOLE ROUJOU 1841-1904.
Pau i.e 1)'' Charvii.iiat.
Le l i (It^cembre 1904 s'éteignait brusquement ;i Clermont-FeiTand un
homme qui fut un anthropologiste de très grande valeur et un naturaliste
des plus distingués, Anatole Armand Saint Ange Roujou, docteur ès-
sciences, ancien cliargé do cours à la Faculté des sciences de Clermont-
Ferrand.
Né le 10 octobre 1841, à Choisy-le-Roi, A. Roujou montra de très bonne
heure les plus heureuses dispositions pour l'étude. Les sciences naturelles
surtout l'attiraient, : cette intelligence d'élite se complaisait dans l'observa-
tion, dans l'expérimentation, et toutjeune encore, presque un enfant, il pos-
sédait déjà un nombre considérable de connaissances scientifiques. Il fut
d'ailleurs admirablement dirigé et guidé dans ses études par un homme
d'une érudition profonde et d'un grand savoir, son père, François Armand
Roujou, docteur en médecine de la Faculté de Montpellier. Aussi savant
que modeste, il exerça longtemps à Clioisy sa pénible profession avec le plus
completdésinléressemenls'oubliant lui mèmepour ne songer qu'aux autres,,
qu'à ceux de ses malades qui lui semblaient les plus humbles et les plus
malheureux. 11 mourut accablé de fatigue, blessé dans une chute pendant
une épidémie de diphtérie qui faisait dans la localité de terribles ravages.
Après sa mort, la population de Ghoisy se souvint de cet homme, victime
du devoir qui avait été pendant de si longues années son bienfaiteur et
lui éleva au cimetière un monument funèbre attestant ainsi les services
qu'il avait rendus.
Au décès de son père, A. Roujou se trouva avec des ressources très
limitées; sa mère dont la santé était profondément affaiblie, perdit le peu
qui lui restait dans les tristes événements de 1870-1871.
Dès 18G3, il fut obligé tout en poursuivant ses études et ses recherches
avec cette ardeur et cette persévérance au travail qui ne l'abandonnèrent
jamais, tout en suivant les cours du Muséum d'histoire naturelle et d'autres
grandsétablissemenls scientifiques, de chercher à se créer des moyensd'exis-
tence et de subvenir, aussi bon fils que travailleur acharné, aux besoins
de sa mère dont la santé devenait de plus en plus délicate. A cette époque
nous le trouvons donnant des leçons et travaillant dans une administra-
tion. En 1807, il entra comme géologue de la Ville de Paris, au bureau
de M. Relgrand, inspecteur des ponts et chaussées. Pendant sept ans, il
fit ce service souvent pénible qui consistait à. relever des coupes géolo-
giques;! l'aris et dans le bassin de la Seine, à recueillir des fossiles et des
roches, à faire un certain nombre d'observations météorologiques et à
vérifier des instruments de précision.
Dans les excursions et les explorations (|u'il fit dans des carrières et
des galeries de mines, il fut atteint de rhumatismes et plusieurs fois blessé
par suite d'accidents. Bachelier es lettres en 1800, es sciences en 1862,
CHARVILIIAT. — ANATOLE ROUJOU 1841-1 00 i 257
licencié en 1873, il fui reçut eu 1874 à .Muulpellier, Docteur es sciences
naturelles avec deux thùses, l'une ayant pour titre : Recherches sur les
races humaines de la France., l'autre intitulée : Etude sur les terrains
quaternaires du hassin do la Seine et de quelques autres bassin.s.
La même année, eut lieu sa nomination comme chargé de cours à la
Faculté des sciences de Clermont. Il devait occuper ses fonctions fort peu
rétribuées, jusqu'à la fin de l'année 18HH. Trofesseur consciencieux et
entièrement dévoué 'i ses élèves etîi la science, A. lloujou s'elîorya d'être
utile à tous. Il fit des conférences dans h? département sur des ques-
tions intéressantes pour les agriculteurs (phylloxéra), ne négligeant
aucune occasion de rendre service ausssi bien dans les campagnes qu'à
la ville. Il organisa des excursions de botanique et de zoologie, et fit
surtout lies recherches anthropologiques dans ce pays si riche à ce
point de vue et avant lui sous ce rapport si peu étudié. On peut dire (juc
Roujou fut le premier qui s'occupa d'une façon sérieuse de ranlhropolo-
giedu Puy-de-Dùme et du plateau central, et le fit connaître.
Toutes ces recherches, tous ces travaux devaient forcément attirer sur
lui ralteiition publitiue. Dans un pays aussi béotien, on s'elTraya de vuir
un homme travailler quand tant d'autres ne faisaient rien. On di-nalura
tous ses actes et voulant se défaire à tout prix de celui qui avait Tin-
croyable audace d'aimer la science [)Our elle mèuie et de lui consacrer
son existence, on l'accabla de reproches injustifiés, on lui lit mille vexa-
tions, mille miséies. A C.lermont, A. Roujou ne fut jamais, jusqu'au der-
nier jour de sa vie, qu'un persécuté et un proscrit. .\vec cette philosophie
sereine qui faisait le fond de son caractère, il supporta tout sans se plaindre
ne l'encontrant de consolation que dans le travail et quand brisé par les
luttes qu'il eutà soutenir bien plus(piepai" la maladie, la mort vint brusque-
ment le surprendre, c'est un manuscrit inachevé que tenait encore sa main
raidie et sur lequel s'inclina pour la dernière fois le noble front du labo-
rieux vieillard.
A. Roujou a publié un nombre considérable de brochures et de mé-
moires, la plupart se rapportant à l'anthropologie et l'archéologie pré-
hislori(iue, ses sciences préférées, celles qu'il s'ellorça durant toute sa vie
de faire connaître et de vulgariser. Nous citons seulement :
Hecherclti'n et études sur les sépi/ltKres celtiques des environs de Choisij-lc'
roi. — Paris I8G;{.
Recherches et éludes sur l'ài/e de la pierre quaternaire dans les environs de
Choisij-le-roi. — Paris 18G5.
Du type primitif des mammifères. — Paris 1870.
Crânes gallo-romains, découverts à Saint-Germain, près de Corbeil. — Bul-
letins de la Société d'Anthropologie, 1HG3.
Station de l'âf/e de la pierre polie, découverte à Villen''uve-Saint-Geor(jes, par
M. Roujiiu. — id. même année.
De la jierftclihililé des unimau.r. — id. 1866.
ÎSote sur des foyers antéhistoriques découverts dans le hess des environs de
Choisy-le-roi. — id. 1866.
258 4 MAI 1905
Note sur un s(juelette humain de l'àf/e de la pierre polie, découvert à Ville-
neure-Saint-Georges par MM. de Mortillelel Roujou. — id. 1866.
Remarques sur des foyers anléhistoriques de V illeneuve-Saint-Georges , et sur
l'esistence de traces d'anthropophagie aux âges de la pierre polie et du bronze
— id. 18G7.
Considérations sur rhomme miocène. -- id. 1869.
^'ote sur une station de l'âge de la pierre polie déC"Uverte par MM. Wac-
quer et Roujou, à Athis. — id. 1869.
La Terramare des Champs Parlards, âge du hronze, près de Choisq-le-roi.
— id. 1870.
Recherches sur les terrains quaternaires et post-quaternaires des environs de
Paris. — id. 1870.
Note sur des stries observées sur des grès de Fontainebleau, des meulières de
la Bi ie, des silex, etc., etc., engagés dans les divers diluriums des environs de
Paris, par MM. Roujou et Julien. — id. 1870.
Note sur des galets striés trouvés dans le limon des plateaux entre Monde-
ville et la Padôle, par MM. Roujou et Julien. — id. 1870.
Note sur un silex taillé du type du Moustier découvert par M. Roujou à la
base du limon des plateaux, près de Metun, dans une formation antérieure à la
faune à Elephas meridionalis. — id. 1872.
Nouvelles observations sur les couches à blocs anguleux, le dtluvium rouge, le
limon des plateaux et les alluvions fluviales des environs de Paris. - id, 1872.
Note sur le type primitif des mammifères. — id. 1872.
Note sur quelques crânes humains récents découverts dans les environs de
Paris et appartenant à des races inférieures, par M. Roujou. id. 1872.
Phénomènes glaciaires du bassin de la Seine, id. 1872.
Note sur quelques types humains observés en France. id. 1872.
Note sur les cailloux striés des diluviums de la Seine, par MM. Roujou et
Julien. Bulletin de l'Académie des Sciences, séance du 25 avril 1870.
iJu type primitif des mammifères, par M. Roujou. — Bulletins de l'Aca-
démie des Sciences 1870.
Recherches histologxques sur la structure des fibres musculaires. — Bulletins
de l'Académie des Sciences, 1875.
Diverses observations d'archéologie et de géologie. — Congrès d'Anthropo-
logie de Paris, 1867.
Note sur les stations anléhistoriques des environs de Paris. — Congrès de
Copenhague, 1868.
Note sur les teri-ains quaternaires. — Congrès de Bologne.
Note sur quelques sépultures celtiques des environs de Choisy-le-roi. — Revue
d'Archéologie, 1863
Cimetière des Champs dolents appartenant à l'époque gallo-romaine et décou-
vert près de Corbeil . — id. 1863.
Note sur les sépultures du premier âge de ftr, découvertes par M. Roujou,
près de Choisy-le-Roi, au lieu dit : la butte du trou d'enfer. — Bulletin des an-
tiquaires de France, 1863.
JL'homme miocène, réponse à M. deMortillet. Société d'Anthropologie^ 1873.
r,. PAPILI.ALLT. — CRANES d'aHYOOS 259
Note sur une bande d'Ursari Serbes (Dal mates), observée /<)v<; dr Choisi/ Ir-
Roi, en juillet 1813. — Société d'Anthropologie, 1S73.
Du développement des poils chez l'homme ou point de vue palhuluniquc et au
point de vue ethnique. — id. 1873.
De quelques instruments de pierre encore en usage dans les montojines du
centre et du midi de la France. — id. 1874.
Note complémentaire sur quelques races et sous races observées en Frame. —
Etude sur les races humaines du plateau central de la France. — id., de 1875
à 1H7(').
De la persistance de l'inlerma-nllaire chez quelques montagnards du centre de
ta France. — id. IHTti.
Taille plus f/rande de quelques mammifères actuels pendant làge de la pierre
polir. — id. 1873.
Grande longueur de l'humérus et brièveté du fémur chez quelques montagnards
du centre de la France, id 1876.
Photographies me.vicaines établissant l'e.rislence dans ce pays de Mongoloïdes
et d'Australoides. — id. i873.
Catalogue des lirhens, des algues et des champignons inférieurs, observés dans
le départrmcnt du Pug-de-Dùme. — Assucialioii rranr-aise pour l'avancement
des sciences. Ciermonl-Ferrand, 1876.
Influence de la situation de la graine sur les piaules qui en proviennent. —
id. 1876.
Quelques mots sur l'analomie des yeux composes et de l'œil réputé simple. — (le
même travail avec de nouveaux développements dans les Bulletins de la
Socié'éde Boda 1877.)
Note sur les rapports de l'Anthropologie et de la Zoologie. — id. 1876.
Influence des phénomèn/'S géologiques sur les migrations humaines. — id. 1876.
Quelques 7nots sur les spermatozoïdes. —Mémoires do la Société des sciences
naturelles do Saùnc-et-Loire.
Les (Colonies cellulaires. — id. 1876.
Note sur quelques phénomènes météorologiques et les moyens de les étudier avec
précision. — id.
Etude sur la faculté du langage et sur l'intelligence chez les animaux. — Re-
vue internationale des sciences biologiques.
De l'archéologie et de quelques monuments préhistoriques du Puy-de Dôme et
des régions voisines. — Congrosarcliéologiquede France, Clermont Ferrand
1895.
Races humaines du plateau central et des régions avoisinantes. — Bulletins
de la Société scientifique, historique et archéologique do la (]orrèze.
Note sur un humérus humain, portant une apophyse particulière, déjà signalée
par Otto comme une très rare anomalie. — id.
Quelques mots sur rindu-ilne du fer, ses origines, ses transformations, les aciers
elles trempes. — id. 1901.
Des tremblements de terre, de leurs causes et des moyens d'atténuer en partie
leurs effets. — Clcrmont-Ferrand, 1903.
Etc., etc.
260
4 MAI lOOri
CRANE6 D'ABYDOS
l'Ait M. <i. I'aI'ILLVL'LT.
.1 ai riioiiiK'ur de vous prûscnlor les ossements que IM. Ainélineau a
bien voulu m'apporler et qui proviennent des fouilles qu'il a exécutées
à Al)ydos, avec la compétence (|ue vous lui connaissez. Ils présentent un
intérêt scientifique considérable, malgré la faiblesse des séries que j'ai
pu former avec les crftnes. Leur antiquité reculée, remontant, d'après
M. AimMineau, aux t<'mps prébisluri(|ut's a rendu, en effet, leur tissu
tellement friable que plusieurs me sont arrivés dans un état qui lendait
impossibles ou incertaines les mensurations. Douze d'entre eux seule-
ment étaient suffisamment intactes pour être bien observés; encore ai-je
dû mettre hors série un sujet, atteint de nanisme.
Les 11 crânes qui restent se divisent selon toutes les probabilités en
7 masculins et 4 féminins, nombre tout à fait insuffisant pour une
moyenne représentant le type de la population, d'autant plus que l'on
trouve des écarts considérables entre les individus. Cependant il ne pa-
raîtra pas inutile de les comparer h 2 séries de crânes très anciens étudiés
déjà par des auteurs dont la technique est exactement comparable à la
mienne; les crânes de Sakkarah mesurés par Broca, et ceux d'El Khozan
observés dernièrement par M. Chantre '. J'emprunte à ce dernier les
chiffres que je transcris à côté des miens, dans les Tableaux I et IL
Tableau I
EL-KIIOZAN
SAKKAHAH
ABYDOS
H.
F.
H.
F.
H.
F.
Nombre
24
11
31
20
7
4
1. Diamètre anléro-post.-max..
II. — Transvers. inax. . .
III. — Basilo-Brcgmatiq.
IV. — Frontal minimum.
V. — Bizygomatique . . .
VI Hauteur Naso'-alvéolaire
VII. — Naso-spinale
VIII. Largeur du nez
cm
18,2
13,3
13.0
9,2
12,1
»
4,8
2,5
2,4
3,8
Q 9
0,~
cm
17,8
13,3
12,8
9,1
11,7
»
4,8
2,4
2,4
3,7
3,3
cm
18,5
14,1
13,7
9,5
13,1
»
5,2
2,4
2,4
3,8
3,3
cm
17,4
13,6
13,9
9,2
12,2
))
4,9
2,4
2,2
3,G
q o
cm
18,4
13,8
13,2
9,3
12,9
7,3
5,2
2.5
2,4
3,8
3,5
cm
17,1
13,4
12,2
9,2
12,1
6,9
4,7
2,4
IX. — l3iorl)iiaire interne. .
X. Orbile : Largeur
2,2
3,5
XI. — Hauteur
3,5
i Recherches anthrnpolofiiques en Egi/ptc, par E. Chantre. Lyon, 1804, p, 57.
lî. PAPILLAll.T.
CltANi;- Il AKVIMI
201
On peut constater au premier coup d'ieil uni' ceilaine rcsseinlilance
entre les ctiillVes des trois séries surtout si on laisse de côté les ft'uinies
dont les (luaiitités sont [dus laihles el par suite les moyennes moins sta-
bles. Les 3 indices crAiiieus ne montrent pas, dans le sexe masculin, des
écarts dé()assant tiois unités, mais la face nous révèle des oscillations
beaucoup plus fortes.
L'indice nasal varie de la loptorhinie de Sakkarah (40, ij à la mésor-
binie d'KI-Kliozan. La forme de l'orbite est encore plus variable, elle est
mésosùme ;i El-Kbazan avec un indice de 84, elmégasèmei\ Abydosuù elle
atteint 93.
Ces variations nous prouvent ipu; les baliilaiils de la vieille Egypte ne
constituaient pas une race pure. Un peut fort bien admettre que ces chif-
fres tendraient à converger si les séries devenaient plus nombreuses,
mais cette hypothèse, en se réalisant, prouverait simplement que les élé-
ments ethniques étaientà peu près uniformément répartis àEl-Kliozan, à
Sakkarah, à Abydos. Ces moyennes seraient la synthèse arlilicielle de plu-
sieurs groupes, elles ne seraient pas l'expression numérique d'une race
fortement unifiée par la parenté et les croisements pendant une très
longue suite de générations.
Tableau II
INDICES
Céphalique II/I
Hauteur largeur IH/II.
Hauteur longueur III/l
Facial VI/V
.Nasal VIII/VII
OrbitaireX[/.\
EL-KIIOZAN
H.
7.S
97,7
71,4
»
52,1
84,2
74,7
%,2
71,9
»
50,0
89,2
SAKKARAH
H.
76,2
97,2
74,0
))
40,1
86,8
78,1
102,2
79,9
»
48,9
88,9
ABYDOS
95,0
71,7
56,5
48,5
93
F.
78,8
91
71,3
56,6
50
100
L'observation de cas individuels vaconfirmer celte première impression.
Le tableau III nous révèle (jue l'indice céphalique va de la dolichocéphalie
extrême jusqu'à la sous-brachycéphalie. Les autres indices, aussi bien du
crâne que de la face, varient dans des proportions aussi fortes et nous
placent devant le dilemne suivant : ou les mensurations n'ont plus aucune
signification^ ou il faut bien admettre que le peuple égyptien a été
formé par des races différentes.
-2i\-2 4 MAI 1905
Tahleai III. — Indio'S scrii's })(ir unlri' lie croissance.
r^p-ialiquu
llautoui largeur
Haut longiirur
Orbilairo
Nasal
Progoalliisme «
(;ti
SI
H8
8!»
II
77
7;{
•.(2
08
90
44
87
71
U2
()0
02
45
87
75
•••2
72
94
48
87
70
03
72
97
48
88
7S
03
73
100
48
88
78
•13
73
lOO
49
92
79
!).l
74
10(1
50
93
80
101
74
108
50
94
80
108
76
125
56
96
81
"
»
129
61
96
Il ne sulTil pas de prouver qu'il y a plusieurs éléments ethniques en
présence dans la composition de l'Egypte ancienne, car ce premier résul-
tat ne peut qu'exciter notre curiosité. Quelles sont ces races? D'où venaient-
elles? Dans quelle proportion se trouvaient-elles sur les bords du Nil?
Quel rôle a joué chacune d'elles dans la création de cette civilisation si
ancienne et si brillante? Autant de questions qui resteront sans réponse
tant que nous n'aurons pas à notre disposition un très grand nombre
d'ossements. J'ai essayé cependant déclasser mes crânes d'après l'ensemble
des caractères morphologiques que l'œil peut saisir, et j'ai pu ainsi facile-
ment former trois groupes assez nettement différenciés pour que plusieurs
épreuves faites a des époques éloignées, aient toujours été concordantes.
Ces trois types répondent fort bien a ceux que décrit le D'" Verneau *. Le
premier a une forme pentagonale très marquée, due à une saillie consi-
dérable des bosses pariétales, le sous-occipital est saillant et globuleux. Ce
sont les crânes marqués de la lettre P dans le tableau IV. C'est un type
très particulier et qui se distingue facilement des races méditerranéennes
que je connais. Je n'en dirais pas autant du deuxième groupe dont les
bosses pariétales et frontales sont effacées, la courbe antéro-postérieure
régulière (crânes E du même tableau).
Enfin un seul crâne, peut être deux, restaient à part (F. l'abt. IV). Les
bosses frontales et pariétales sont complètement effacées, le frontal est
long, les apophyses zygomaliques beaucoup plus marquées que chez les
autres; la mâchoire est forte, la voûte palatine très peu profonde. On le
mêlerait à des mésalicéphales français (son indice est de 78) que je ne
me chargerais sûrement pas de le retrouver.
Avons nous à faire â de véritables groupes ethniques, ou à des varia-
tions individuelles? Je ne saurais le dire. J'ai du moins essayé, par des
* Le prognathisme est calcule en prenant comme point de départ l'union du vomer
avec l'apophyse basilaire et en comparant cp.tre elles les distances qui le séparent
du nasioM et du point alvéolaire.
* Hulletins de la Société d'Anthrop. Paris, 189S p. 615.
• ;. l'Al'Il.LVlLT.
r.nAXES D AHYDUS
■2{\:]
ordinations variées, de découvrir i|iieliiuos rappuits enlro ces groupes el
des mesures craniologiques. Or le tableau l\' uie paraît i^rouverque
ces rapports existent, et que de grandes séries les mettraient faiMlcment
en évidence, [.es cr;\nes, ordonnés suivant la valeur dt-croissante du dia-
mètre fnuital niiiiiiniiui, se séparent nettement en trois groupes, répon-
dant à ceux queji' viens de décrire. Le cr;\ne V est seul en léte, et le douteux
est au 3» rang, puis viennent les crânes pentagonaux, puis les crAnes
elliptiques dont le frontal est le plus étroit. Le diamètre transverse di-
minue aussi d'une façon générale bien qu'il ne faille pas s'attendre h une
régularité qu'on ne rencontre jamais dans les sériations. dépendant on
peut dire que les crAnes elliptiques sont plus étroits dans leur ensemble
que les autres.
Tableau IV
Crânes ordonnés suivant leur diamètre frontal.
Diam.
Diam.
Diam.
Largeur
Hauteur
Indice
Indice
Frontal
biinas-
bialvéo-
minimum
Tiansv.
toidien
laire
longueur
Prognalh .
céphal.
cm
cm
cm
fin
cm
cm
cm
6 F
10,0
14,1
12,3
55
73
88
78
6 P
î),i)
14,4
12,0
53
G8
96
"iA
6 P.....?
9,8
14,5
13,0
56
73
87
79
Ç 1»
!),5
1:5,2
11,5
50
»
93
76
$ p
y, 3
14,8
12,0
53
74
91
81
9 p
9,2
13. G
12,3
52
72
. 88
78
9 1'
9.2
13. r,
11,0
51
76
87
80
9 K ?
9. G
13,6
11,0
50
68
87
80
6 K
8,9
13,6
12.0
52
h9
96
75
6 E
8,7
12,8
11,8
51
74
i i
73
9 E
8,4
12,6
12,3
56
72
92
66
Il est a remarquer que la base du cr;\ne est très indépendante de la
voûte. Le diamètre bimastoïdien ne diminue guère, surtout si on laisse de
côtelés crânes féminins, et le diamètre transverse du maxillaire supérieur,
pris au niveau du bord alvéolaire, paraît être également assez indiiférent.
Les indices bauteur, longueur et prognatbisme, (lue je donne à la suite ii
titre d'exemple, n'ont pas avec cette classification des rapports assez
étroits pour être démontrés par la petite série que nous possédons. De
grands nombres pourraient seuls nous révéler les constances que nous
cherchons.
Tels qu'ils sont nos chiiïres montrent : 1° que nous avons pu trouver
trois types que M. Verneau avait définis il y a quelques années; 2° que
ces types ne sont pas une simple apparence, mais ont des rapports qui
ne paraissent pas niables avec certaines dimensions du crâne.
Les origines de ces variétés ethniques me sont parfaitement incon-
nues.
■2(\i
A MAI mon
(.rnnc dit « il'Osiris.
M. Amôlincau m'a remis ctî cr.\ne dont il dt-cril ailleurs la découverlp,
pour (juc je l'éludie loul parliculirremcnt, et surtout que je fasse le dia-
gnostic du sexe auquel il appartient. C'est là une tâche assez délicate :
il est généralement fai:ilo do détci'miner le sexe probable d'un crAne. il est
extrêmement ardu de faire un diagnostic cfrlnin. La description (|ui va
suivre en sera la démonslration.
Ce crAnc est très détérioré et réduit à sa voiite. Il a en outre sul)i une
déformation posthume qui diminue légèrement ses dimensions transver-
sales ; je les donne cependant dans le Tableau V, car elles sont suflisam-
nient exactes pour la compaiaison que je veux établir entre elles et les
moyennes obtenues plus haut.
On voit de suite que ce crAnc est très petit. A part son diamètre antéro-
poslérieur, qui dépasse un peu la moyenne des femmes, mais reste beau-
coup inférieur à celle des hommes, toutes les autres dimensions sont
beaucoup plus petites que chez les femmes.
Ta lî LE Al y.
DIAMÈTRE
INDICES
Anléro-
postérieur
Transverse
max.
Frontal
minimum
Bi-
mastoïdien
cépbalique
Crâne « d'Osiris ».,
176
171
184
129
134
138
86
92
93
102
116
122
73,2
78
75
( Femmes
Moyennes }
( Hommes
Ce crâne très petit n'était pas celui d'un enfant. La forme générale n'a
aucun caractère infantile, les os sont bien développés; à la face interne
du crâne la suture coronale commence à se souder, sans que rien per-
mette d'anirmer que cette synostose ail été prématurée. Ce crâne très
petit a donc appartenu à un adulte.
Ce premier point établi, il nous reste encore plusieurs problèmes à
résoudre. Trois types dindividus peuvent avoir un crâne petit : des
hommes de taille normale, mais microcéphales, des hommes très petits
et des femmes. Ce crâne a, il est vrai, le frontal très étroit et les bosses
frontales très rapprochées. Cependant il n'a pas appartenu à un microcé-
phale de taille normale, car les insertions musculaires sont très faibles,
les apophyses mastoïdes très petites, les apophyses frontales externes très
grêles, et le rebord orbitaire mince et fragile.
Reste le dernier problème que nous avons posé : est-ce une femme ou
DISCUSSION ^(îri
un homme tn^s petit, très faible, au cerveau peu volumineux, en un mut uu
nain bien proportionné? Il me paraît impossible de lui lionner actuelle-
ment une solution catégorique. Mais si la cei'tilude absolue est rare en
science, il est permis de rechercher les opinions les plus probables. Or
dans l'alternative qui se présente à nous, il y a une solution répondiint
à un cas rare, c'est celui d'un nain bien constitué, ne portant aucune
trace pathologi(iuc sur sa voûte crânienne. Nous avons vu (|iir tel est
bien le cas du crAne d'Osiris : il a les bosses pariétales un peu saillantes,
mais c'est manifestement un caractère de race qui le rapproche du
groupe des crAnes penlagonaux. L'épaisseur que la voiHe présente par
endroits se rencontre assez souvent chez la femme, comme je l'ai montré
autrefois dans mon mémoire sur la Suture métopique. Nous sommes
donc en droit d'admellre la conclusion suivante : Le cr.lne « d'Osiris » a
très probablement a[)parlenu à une femme.
Huil me soil permis, en lerminaiit, d'adresser à M. Amélineau, nos
plus vifs remerciements, pour la collection si rare des crAnes qu'il a bien
voulu me conlier, alin de vous les présenter. La l;\che qu'il a accomplie
en Egypte mérite toutes les félicitations et tous les encouragements de la
Société d'Anthropologie.
Discussion.
M. Verneau. — La communication que vient de nous faire M. Papillault
présente un intérêt très réel, malgré le nombre un peu restreint de pièces
dont se compose la série qu'il a étudiée. Parmi les trois tètes qu'il nous
met sous les yeux, il en est deux qui diffèrent tellement l'une de l'autre
qu'il est impossible de ne pas les regarder comme représentant deux élé-
ments ethniques distincts. La troisième correspond peut-être à un autre
type; on pourrait également voir dans ses caractères les résultats d'un
croisement. Je me bornerai à présenter quelques observations au sujet des
deux premiers crânes.
M. Papillault a bien voulu me citer au cours de sa communication. Les
deux formes crâniennes dont il nous a entretenu me sont, en effet, bien
connues ; je vous en ai dit quelques mots lorsque M. Zaborowski nous a
rendu compte du travail de mon vieil ami, le D'' Daniel Fouquet, sur les
crânes anciens recueillis en Egypte par M. J. de Morgan •. Dans plusieurs
autres circonstances j'ai eu l'occasion d'y faire allusion. Permettez-moi de
vous rappeler que, en étudiant avec M. Lapicque les crânes que celui-ci
nous a rapportés d'Abyssinie, nous avons été frappés de l'existence de
deux types bien caractérisés, en laissant de C(jté les pièces à caractères
mixtes que renfermait sa collection. L'un d'eux est un type très dolicho-
céphale, très développé en hauteur, â uorma verticalis franchement ellip-
tique et à face mégasème. Le second, moins allongé, offre un certain sur-
baissement de la voûte et une norma verticalis pentagonale. La même
forme pentagonale se note d'une façon bien nette, quand on regarde la
• Cf. Bull, de la Soc. d'Anthr., 4» série, t, IX, séance du ib décembre 1898.
soc. u'anthhop. 1905. 18
:>i;(l \ MAI lî»05
tôle en anioir; elle csl due à la saillie cuiibidéiuble des bosses pariélales.
La face, dans le deuxième ly|>'*. est sensiblement moins allongée que dans
le premier.
Nous avions été amenés à comparer nos crAnes abyssins aux séries
d'anciens crAnes égyptiens que possède le Muséum et nous avions retrouvé
dans ces nombreuses séries les deux formes céphaliques que nous a mon-
trées M. Papillault.
La piédouiinance, en Abyssinie, du type étroit, elliptique, très développé
verlicalenienl nous avait conduits à le regarder comme le véritable type
éthiopien. Pour le second, nous n'osions guère nous prononcer sur son
origine, (^r, M. Papillault vient de nous dire que c'est lui qui l'emporte
numériquement de beaucoup sur les autres dans la collection de tètes
récoltées à Abydos par M. Amelineau. Et si, vraiment, ces têtes remontent
à une très haute antiquité, on sera amené à se demander s'il ne repré-
sente pas l'un des types primitifs de l'Egypte. La question de l'origine
des Egyptiens ne serait pas encore résolue s'il était démontré que l'élé-
ment pentagonal fût le plus ancien de la région; mais on aurait tout au
moins une base sérieuse, qui pourrait servir de point de départ à des
comparaisons précises.
De toute façon, les constatations de M. Papillault doivent être soigneu-
sement enregistrées. Elles corroborent et complètent très heureusement
celles que j'avais faites moi-même avec M. Lapicque. Au milieu des
mélanges qui se sont produits dans tout le nord-est de l'Afrique, on voit
se dégager au moins deux éléments ethniques, qui ont vécu côte à côte et
qui ont émigré de compagnie, puisque nous retrouv'ons les deux formes
crâniennes qui les caractérisent jusque chez les Peulh ou Foulbé. Or l'un
de ces éléments semble correspondre au type éthiopien et l'autre, comme
vient de nous le dire notre collègue, paraît représenter l'un des plus anciens
types égyptiens. Il convient de noter le fait et de rechercher, avant de
conclure définitivement, si l'examen de collections plus nombreuses nous
fournira de nouvelles preuves en faveur de cette manière de voir.
M. Zabohowski. — Ce qu'il y a de plus particulièrement nouveau dans
la communication de M. Papillault, c'est la proportion vraiment bien
grande de crAnes du type pentagonal qu'il a observée. Si la série qu'il a
étudiée est tout entière préhistorique, ce fait n'est pas sans troubler quelque
peu nos idées sur les primitifs Egyptiens, car je ne sache pas qu'une pro-
portion pareille ait été observée dans d'autres séries préhistoriques.
Nous savons bien que dans la primitive Egypte des types différents se
sont uionlrés, el d'après des documents indiscutables les plus anciens
Egyptiens eux-mêmes se présentent avec deux figures principales dis-
tinctes: une figure large à nez court, et une figure allongée, symétrique
avec le crAne, aux orbites étroiles, au nez haut, convexe ou busqué. Mais,
comme vient de le dire M. Verneau lui-même, deux races différentes, deux
types différents ne peuvent pas avoir pris naissance côte à côte. Il faut une
aire géographique distincte pour chaque race particulière. Et de toute
DISCUSSION 2fl7
nécessité, il y a eu d'abord dans la primitive Egypte un seul élément indi-
gène. Quel était cet élément? Voilà la question. J'y ai |)Our mon compte
répondu conformément aux faits les plus nombreux et les plus certains,
l/indigéne est l'Egyptien i\ face étroite, appelé par moi, proto-sémite,
(l'est en elïet celui-là qui, le plus nombreux, le seul nombreux dans les
plus anciennes séries, survit à tous les autres d'âge en Age. Troublé dans
sa traminille possession du sol égy|tlii'n, :\ loulos Ifs époques et dés^ les
plus reculées peut-être, dès la IV dynastie, tout au moins, par des' peu-
ples venus du dehors, il les a plus ou moins vite et plus ou moins com-
plètement assimilés. Sa permanence sur ce sol est unanimiMiient reconnue.
Et cette permanence comme sa force indéniable d'absor[)tion à l'égard de
tant d'autres peuples, sont en soi des preuves suffisantes de son indi-
génat. Je reconnais volontiers au type à crâne pentagonal la qualité d'in-
digène de r.\frique du Nord ; mais pour cela justement et pour bien
d'autres raisons, il n'apparaît nullement comme particulier à l'Egypte.
M. PapillauU nous présente les trois crânes de sa série d'Abydos qui
offrent, à leur plus haut degré d'accentuation, les trois types qu'il a ob-
servés. De sorte que ni l'un ni l'autre ne constitue l'Egyptien moyen, ne
représente la masse du peuple existant alors en Egypte. Le crâne mésa-
ticéphale est le témoin d'influences asiatiques, plus ou moins immédiates.
Personne ne le conteste. Il n'y a donc de discussion à établir que pour
les deux autres.
Celui à aspect pentagonal n'est pas pour moi, je le répète, l'autochtone.
Mais le troisième, à forme ovale allongée, ne réalise pas non plus tout à
fait, avec ses orbites trop hautes, le type classique de l'Egyptien. Il serait
toutefois nécessaire que je voie cette série entière de crânes d'Abydos,
que j'hésiterais à classer définitivement parmi les prépharaoniques, pour
me prononcer avec une assurance suffisante.
L'indice nasal compris entre 42 et 54,7 révèle la présence côte à cote
dans un même petit groupe, de leptorhiniens, de mésorhiniens, de platy-
rhiniens. Mais en réalité, sur sept indices, quatre relèvent de la leptorhi-
nie, un de la mésorhinie et deux de la platyrhinie. Ces différences dans
l'indice nasal ne semblent pas correspondre à des différences dans l'indice
céphalique. L'indice nasal le plusbas(42)appartientàun crAne d'un indice
céphalique de 73,3 ; et l'indice nasal le plus élevé (54,7) appartient à
un crâne dont l'indice céphalique est de 72,2 et qui est des plus longs
absolument. M. Giuffrida-Iluggieri a donc raison d'admettre, sous ce rap-
port, une variabilité assez étendue chez les Siciliens préhistoriques.
Puisque dans la première série de ses crânes, celle de la grotte de Fico,
nous avons relevé des écarts du même genre. Mais chez les Egyp-
tiens anciens, par exemple, ce n'est pas la leptorhinie qui domine-
comme chez les Siciliens, ce serait plutôt la platyrhinie. La dif-
férence est notable. Ht dans cette série de Chiusilla la présence d'un
élément modificateur, perturbateur, est irrécusablement attestée par
trois pièces. De l'une d'elles, la calotte n" 2766, M. Giufi'rida-Huggieri
nous dit (p. 17) que son type sphénoïde, très rare aujourd'hui en Sici'e,
:>(i.s 4 mm 11 mi:;
(-Hiiit luoiiis raie parmi It-s j)ll■l^i^^lul i<iiii's. Il est liés cuiumuii aujuuid liui
parmi les Eurasiates. C'est celui du crâne globuleux aux bosses parié-
tales rentlées (Serfp. Arii et Jtalici, p. 428, Sfenoide rolondo) commun
chez les Slaves. Des crAnes brachycéphales du même genre ont été trou-
vés en Sicile parmi les piéhisloriques du Monte-Bradoni, près Vollerra,
de Villafrali, prés Termini-lmeresc, à Salinas, près Palerme, à Orsi au
sud de l'ile {Maleriale pali-lnuluf/ico, l'J02, p. i9). C'est cet élément bra-
chycéphale (jue l'on a donné comme repiésenlanl l'élément sicule des-
cendu de I Europe le long du littoral occidental de l'Italie. Mais quelle
preuve a-t-on qu'il n'est pas venu en Sicile directement de l'Asie?
Nous ne voyons pas en somme parmi les Siciliens un élément sûrement
asiatique en dehors de lui. Nous n'y voyons môme pas d'élément sûre-
ment protoégyptien en dehors de rares individus aux orbites carrées.
M. Atgier. — Autant qu'il est possible de comparer des crânes à des
types vivants, je puis dire que les crânes d'Abydos qui nous sont pré-
sentés par mon excellent ami le D"" Papillault ne me paraissent pas prove-
nir de races disparues.
En effet, ces crânes qui n'ont, de par leurs indices, rien de négroïde me
rappellent les principaux types que j'ai observés parmi les Touareg du
Sahara.
Ce terme de Touareg ne doit pas, suivant mes observations, être pris
dans le sens de race berbère ou autre, mais dans celui de population, il
n'a, en conséquence, pas plus de valeur ethnique que le terme d'Algérien
ou même d'Européen.
Le peuple touareg, autant que j'ai pu m'en rendre compte par les types
dont j'ai étudié la tète et la face, est un peuple complexe, c'est-à-dire com-
posé d'éléments ethniques très différents les uns des autres.
Un de ces éléments ethniques est représenté par le l»"" crâne d'Abydos,
présenté aujourd'hui, conlinant à la brachycéphalie, mais s'en écartant
par des traces de métissage qui lui ont valu de la part de notre distingué
collègue M. Verneau, le terme de pentagonal.
Un 2® est représenté parle 2« crâne d'Abydos, plus ou moins apparenté
à celui de Cro-Magnon, caractérisé par une dolichocéphalie accentuée,
un faciès étroit et ovalaire, un crâne idem.
Un 3° est représenté par le 3° crâne d'Abydos, offrant les caractères
de métissage des deux premiers et confinant à la mésaticéphalie.
Un 40 est représenté par la brachycéphalie proprement dite, analogue à
celle que nous trouvons en Bretagne et en Auvergne.
Un 5" est représenté par la dolichocéphalie de nos Ibéro-Berbères ac-
tuels. .
Un 6« enlin est le produit du métissage de ces deux derniers.
En outre de ces six types différents, tous les autres éléments ethniques
rencontrés chez les Touareg sont nègres ou négroïdes et vivent côte à
côte avec les Touareg dont ils partagent le genre de vie et le langage ;
si donc les Touareg sont, de par leur dialecte, classés parmi les Berbères
L. CAPITAN. — CIIAVIERS Ol'ATERNAIItKS KK LA lU'R DE RENNES 209
au point de vue lin,iciiisti(|ii(', celle |)n|)iil;ili(jn nciinade (jue nous avons
connue par les prisoniiieis faits lors des razzia, est, au contraire, des
plus hétérogènes au puinl de vue i-Umique et oiTre un vaste champ
d'étude des plus intéressantes aux anthropologistes des populations
Sahariennes.
Lu primiliri' Ki/i/plf et ses races. - Dans la Science au A'A" siècle, du
15 janvier 11)05, par .M. Zaborowski.
Il s'agit d'un court article de vulgarisation publié ;\ l'occasion de
l'apparition de l'ouvrage de M. E. Chantr»». Il m'a siilli di; faire reproduire
trois des photographies de momies i|in' iloime M, Chantre pour faire
ressortir les rapports évidents (jui unissent la race égyptienne au pur
type sémite, rapports en raison descjuels j'ai justement qualifié de proto-
sémites les protoégyptieos. Le portrait d'une jeune fille copte placé à côté
de ces photographies montre à l'évidence combien on exagère en disant
que la race égyptienne s'est maintenue avec tous ses caractères essentiels
i\ travers les Ages jusqu'à maintenant. Les Egyptiens actuels sont un
mélange bien complexe.
806° SÉANCE. — 18 Mai 1905.
Présidence de M. Skuillot.
M. ilKitvÉ ih-pose sur le iiiireau un pli i'acli('t(" dcslinr ;'i èlrc oiiv<'r( et roui-
riiiini«|iii- i-n séance sur l.i iJeiiiaïKlc de Tauleur. La .Société accepte le dépôt.
RECHERCHES DANS LES GRAVIERS QUATERNAIRES DE LA RUE DE RENNES
A PARIS
Par m. L. Cai'Itan.
■l'ai l'honneur de présenter à la Société une dent de rhinocéros lichorinus
recueillie par M. Thieulen et une dent de mammouth recueillie par moi.
Elles proviennent de la couche de graviers quaternaires du fond de la
vallée que traverse le souterrain du Métropolitain actuellement en cons-
truction sous la rue de Rennes. Ces graviers présentent toujours le même
aspect qu'on retrouve dans Paris et aux environs : graviers assez gros
à la base, plus lins au-dessus, et enfin sable assez fin à la partie supérieure.
lUie de Rennes, vers la place Saint-Germain-des-Prés, le tout était agglo-
MK-ré en un calein extrêmement dur.
J ai soigneusement examiné ces graviers à maintes reprises, en jdace
dans le souterrain et sur les énormes tas qui avaient été faits en certains
points de la surface du sol. J'ai recueilli quelques rares lames et éclats
a bulbe, mais pas une pièce bien retouchée ; jvis de coup de i)oing. Par
contre les éolithes se trouvent en certain nombre. Leur étude et leur déter-
270 IS MM lî^OS
minalion technologique sont toujours fort délicates. Mais un certain
nombre de pièces paraissent neltcniont porter des traces d'usage, voire
même de retouches et dadaptation. .Vai l'honneur de vous présenter deux
percuteurs pointus à manche naturel comme il y en a en Belgique (c'est
undeslypesdeHutoD.On les retrouve identiques en MgypteiSchweinfurth).
Il y a aussi des percuteurs arrondis et d'autres tranchants, des racloirs
usagés, en général façonnés sur le bord d'un grand éclat obtenu par cas-
sure naturelle ou arlilicielle. Il y a aussi des outils à piquer ou percer
cumine la pièce pointue que je présente façonnée à grands coups et ù base
avec son cortex. Cette pièce est identique aux poignards des Belges.
Ces pièces ne sont pas extrêmement nombreuses, si, comme il est indis-
pensable de le faire dans les recherches de ce genre, on prend soin d'éli-
miner les pièces hypothétiques, celles dont les fractures, écrasements ou
esquillements naturels pourraient en imposer pour des traces d'usage
ou de retouches humaines. Cette sélection, — d'ailleurs assez délicate, car
elle nécessite une assez grande habitude de ces recherches — étant faite, il
ne reste qu'un nombre assez restreint de pièces dont ainsi la valeur docu-
mentaire est réelle. Ce sont celles-ci que nous vous présentons sans vouloir,
en aucune façon, généraliser la question et entrer dans un débat quel-
conque touchant la question d'ensemble des éolithes, dont on parle
beaucoup saus souvent la connaître pratiquement.
Discussion.
M. A. DE MoRTiLLET. — Cc n'était vraiment pas la peine de déployer
autant d'ardeur qu'en a mis notre collègue à combattre les silex éolithi-
ques du gisement tertiaire si intéressant de Thenay, pour venir
aujourd'hui présenter comme des outils des cailloux aussi grossiers que
ceux que nous avons sous les yeux. D'autant plus que ces cailloux pro-
viennent d'alluvions appartenant à une époque où l'on savait déjà pro-
duire de beaux coups de poing de formes souvent élégantes et des grands
éclats à bords très coupants. Les alluvions en question ayant assez fré-
quemment fourni, dans Paris même, des pièces parfaitement caractérisées,
il est au moins inutile de s'attarder à des fragments informes.
11 serait peut-être imprudent de nier d'une façon absolue que quelques-
uns de ces silex aient pu être employés aux temps préhistoriques, mais il
est, à coup sur, bien autrement téméraire d'alTirmer qu'ils ont été
utilisés.
Je n'ai en aucune façon l'inlenlion d'entamer ici une discussion sur la
question des éulilhes. Je tiens simplement à mettre en garde les palelh-
nologues contre celle théorie (]ui consiste à voir dans une foule de silex
ébréchés de tout i\ge et de tout aspect des instruments appropriés et uti-
lisés par l'homme.
Les pierres du genre de celles qui nous sont présentées ne peuvent
qu'encombrer inutilement les collections et, ce qui est plus grave, discré-
diter les études préhistoriques.
M. BAUDOUIN. — nKryirVEUTK I)"l N MKMIIIl ToMUl": SOUS LES HUNES 271
DECOUVERTE D'UN MENHIR TOMBE SOUS LES DUNES ET D'UNE STATION GALLO-
ROMAINE AUX CHAUMES DE SAINT-HILAIRE-DE-RIEZ, VENDEE l^7//^ «.
PAK
M. le D' Marcel BAUDOUIN.
C>: qui l'ail l'iiilértH île cette (rouvaille, coiiiine repère précis de chrono-
loilie f>réltis(nri({Hi', ce n'est pns seulement sa présence au milieu des dunes
et suus lesalil"'; mais le fait (pi'il s'agit ici de dimpu nasez anciennes, n(t\.\.Q-
muni (inlé-ro mai nex, et nullement comparables à celles de la parti(î ouest
de la forôt d'Olonne, qui bordent encore à l'heure présente l'Océan atlan-
tique. Kn cette région, au contraire, il s'agit de dunes spéciales, situées
désormais au milieu du Marais de Mont, c'est à-dire n'étant jdus en rap-
port direct avec la côte.'Elles correspondent, en réalité, à des amas de sable
qui se constituèrent à l'époque où cette partie de la commune de Saint-
Ililaire-de Riez était encore un ilôt spécial, et où le golfe de Mont s'éten-
dait jusqu'aux Chaumes. Elles formaient alors la limite ouest de cette
île, bien exposée aux vents, comme le rivage actuel qui lui est parallèle,
mais est reporté aujourd'hui à plus d'une lieue à l'Occident!
Cette formation remonte évidemment aux premiers temps de l'existence
de l'île, qui n'était pas sans doute dessinée à l'époque néolithique, car Riez
faisait alors partie du continent. Elle a été la conséquence, d'abord, deVef-
fondrement de la plaine calcaire qui est devenue le golfe de Mont avant l'épo-
que romaine *, puis du retrait pr-ofjressif des eaux, qui a constitué le Marais
de Mont et qui paraît contempprain du début du Moyen Age.
Au point de vue des modifications du sol, on remarquera (jue la pierre
repose directement sur les sables cénomaniens, sans qu'il y ait la moindre
parcelle de sable quaternaire ou de terre végétale, au-dessus d'eux. Il faut en
conclure que le menhir — si menhir il y a, — a été érigé sur ces sables,
avant la formation des dunes en cette contrée d'une part, et que, d'autre
part, il est tombé également avant cette période, c'est-à-dire avant l'arrivée
des Romains sur nos côtes.
N.^TURE DE LA PiERHE. — Ou pcut admettre deux hypothèses, à propos
de la l'ierre du Trou d'Argent. C'est ou bien un bloc naturel, en place ou
erratique; ou bien une pierre apportée là par les hommes, c'est-à-dire un
mégalithe vrai.
a) Bloc naturel. — Nous ne pouvons croire à un bloc naturel, formé là
sur place, ou à un bloc erratique, car il serait le seul de son espèce dans
tout le pays '. Certes, ce n'est pas impossible à la rigueur, en raison de
' Voir- le début, sôanc ^ «lu 19 jinvicr. p. 12d-loi.
^ V.n co point pr(*cis des côtos do VonJéc, relTomlroinu.il parait antérieur h l'éro
chrétioniK'; il semble au con^raiiia postérieur, entre lilc de îlont et l'Il î d'Yen.
' La pierre repose sur un sol cénotnanien. Or, d'ordinaire, les blocs de grùs céno-
maniens non erratiques se trouvent nu milieu des sables roug.s de cette époque.
Quant aux blocs erratiques de cette sorte, ils se trouvent sur des rlépôls rjuatcr-
naires (Apremont, sud de la Vendée maritime, etc.).
27£> 18 MAI 1905
sa silunlion sur les sables cônoinaniens, dont les dépôts supt'ripurs ont
pu être enlevés par la mer, puisqu'il .semble être en grés de celle époque;
mais ce n'est guère probable pour les raisons que nous allons énumérer
maintenant.
b) Mégalithe. — Nous croyons, en effet, à l'existence d'un bloc mégali-
thique: 1" en raison de la Légende du Trésor; 2" îi cause de la présence d'une
source ' (on sait que souvent il y a des menhirs prés des fontaines à su-
perstitions); 3° en raison de la /o/j»e de la pierre, qui j)araît avoir été
choisie h dessein pour sa régularité et de ses duneusions mêmes *; 4** à
cause, enfin, de l'existence de quelques petits blocs décalage '•^, du coté de
la base, c'est-à-dire à l'est.
Nous pensons, de plus, (ju'il s'agit d'un menhir tombé (il ne peut être
question, en effet, ici d'un pilierdedolmen ou (rall(''e couverte), parce que,
dans la contrée, il yaeu et ily aencore denombreuxnienhirsdecetle sorte,
c'est-à-dire à faces Irèsaplaties {ininifurs plats), orientés defaçon identique,
c'est-à-dire h grand axe nord-sud, et calés de cette manière.
On pourrait peut-être émettre d'autres hypothèses: celle d'unepierreà sa-
crifices, entr'autres, etc. Maisdiscuter davantage, quand on manque debase,
est inutile ; elil nous semble que nous en avons déjà assez dit pour prouver
que toutes les chances sont bien décidément en faveur de la théorie d'un
petit menhir tombé, à laquelle nous nous arrêtons jusqu'il nouvel ordre.
Trouvailles PRÉHISTORIQUES. — Nous avons recherché, dans les mémoires
des archéologues locaux, si l'on avait déjà trouvé dans l'ancienne île de
Riez d'autres vestiges néolithiques, en dehors du mégalithe que nous ve-
nons de décrire. Malgré une lecture approfondie, en particulier des tra-
vaux de M. Charles Mourain de Sourdeval sur cette contrée, qu'il connais-
sait bien S et de l'abbé Baudry, nous n'avons rien découvert.
a) Hache polie. — Toutefois, on nous a raconté, en 1902, qu'un M. Billon
avait trouvé, autrefois, non loin des Chaumes ^, c'est-à-dire assez près de
notre pierre, une hache polie, qui aurait été cédée ;i un M. Garet, habitant
les environs de Nantes (?). Cette hache aurait été rencontrée à l'ouest
• Dans la Forêt d'Olonne, la Couche des Trois Dames, lieu dit prèliistorique, est
voisine de la Fontaine des tt^ois Dames. A Avrillé, près de la fontaine de Saint-Gré, il
y a un menhir, cic. [Voir : Murcel Baudouin, Les Fontaines qui guérissent en
Vendée.].
- Debout, ce munhir avait à peu près 2 mètres de haut; ce qui est une hauteur
sufKisante.
3 Ce. dernier argument a, pour nous, une valeur considérable; en effet, pour main-
tenir dressés les menhir.s et les support de dolmen?, on est toujours obligé de les
caler avec de la pierraille.
^ Gh. Mourain de 8ouni>EVAL. — L'//r de Iii<-: — Mi^m. di- la Soriélr des Anti-
quaires d<- f Ouest, Poitiers, i86"J[l870J, p. 101-2-29.
5 II est probable que les Chaumes dont nous non-; occupons sont les « Chaume.s de
la dueule de Be.s.se >, cités dans un acte de 17 44 par M. Ch. M. de Sourdeval {Loc. cit.
p. 227). — A celle époque, c'était un « terrain de sable, inculte, et de nulle valeur. »
M. BAUDOUIN. — DKCOUVEnTE d'uN MF.MIIII TOMBÉ SOUS LES DUNES 273
près des riranges (commune (11' Riez), à l'ouest de la >■ hourrine » de M. bro-
chet; mais ne nous pouvons gaivinlir li véracité (le ce renseignement, [tour-
tant important au point de vue de la détermination delà pierre du Trou
d'Argent '.
b) Faux, su.ex. — Jusqu'à présent, en dehors de ce dm-nier objet, la com-
munede Sl-llilaire de-Riez ne paraît avoirprésentéaucun autrereslepréliis-
toriqueV Nous devons déclarer, toutefois, qu'on nous a apiiorté du lieudit
les lioiii's, (pii se trouve prés du l'issot, c'est-à-dire à la base de la pres-
(]u'ile sablonneuse des Malles, formée par d'anciennes dunes <pii sont
la continuation au nord de celles des tlhaumes, des morceaux de silex
cassés, qui nous ont beaucoup étonné tout d'alx^rd, parce (pie le sol ne
renferme aucune roche de celte nature.
Après examen attentif, nous reconni'imes d'abord (pi'il ne s'agissait pas
de vrais silex préhistori(iues ; et, après en(piéle sur place, nous ei^inies la
clé du problème.
Autrefois il y avait aux Roues un moulin h vent, dont le cerne est,
paraît-il, indiqué au cadastre; et les débris, recueillis dans la vigne qui
désormais occupe le cerne par le cultivateur qui nous les apporta, ne sont
en somme que les morceaux de la dernière meule utilisée dans ce moulin,
et cassée après démolition de la construction '■^'l
C'est la une cause d'erreur, importante à souligner pour tous les dépar-
tements maritimes, où il y a encore beaucoup de moulins à vent.
Découverte de squelettes. — On nous avait signali' tpi'à une ciiupian-
taine de mètres à l'oMes^ de la pierre, au niveau iriin monticule, mais
toujours dans la sapinière qui occupe aujourd'hui le champ n"l253, sec-
lion C, du cadastre, on avait trouvé jadis, par hasard, sur le sable de la
dune, et au milieu des pommes de pin tombées à terre, des débris osseux,
paraissant provenir d'un crâne humain, qu'on supposait avoir été déterré
par les lapins, pullulant en ces parages, et dont M. Fromenly lui-même
avait vu quelques morceaux.
1" Fouille de 1902. — Nous nous fîmes alors conduire au lieu précis
de cette rencontre: et, grâce à deux terrassiers, y fîmes pratiquer une
fouille méthodique, qui fut assez fructueuse.
En effet, dès les premiers coups de pelle dans ce sable très meuble, on
apereut, à 0 m. 45 ou 0 m. 50 au-dessous des débris végétaux jonchant le
* M. BiTTON {Doc. inédits) prétend qu'on a trouvé des silex taillés à N. I). de
Riez; mais il n'indique rien pour Sainl-Hdaire-dc-Riez.
* On connaît, près ilo Maltes, entre le Pvé-au.v-Bœufs l-1 les Tovves lildiiches, nn
roclii-r qui se trouve ilans un pré «it qui porte le non de Hoche Gar/nifjnl — Il s'a^'it
d'un pdintemi-nt de c ilcaire, c'est-à-ciire d'une roche naturelle.
•' .Marcel Baudouin et G. Lacouloumère. — Découverte frune station de silex
taillés (le l'ppotjiie moustérienne au Moulin-fJa.ssé de Saint-MarlindeBreni{\ endée).
Revue du Bas Poitou, 1903. — Tiié à part, Lafolye, in-8o, 11^., \\W6.
^"^ " is Mvi i90r
sol, des fragments d'os humains, d'aspect très poreux, et de colornliMnlrAi
jaune.
Ue fines racines les pénélraienl de (ouïe pa,(, indi,,uanlmanifeslemen(
ve;t B, slTninTT? "•'='-»"' P»'«npl'-'ce^ ils avaient «é bo„le-
Voici la liste des seuls /ragmeiîls J'os, q\ic noiïs avons pu alors extraire ;
ils désignent d'aiHeurs, par leur volume, un sujet plutôt j>j/w^.
a) Extrémité suplérileure du fémur droit, sans tôle et sans grand tro-
chanler, et dont Iç col fait uri ^nisle l^és ouvert avec le corps.
à) Tête fémorale du coté gauche, isolée;
c) Extrémité inférieure du fémur /jauche, sans lescondyles;
d) Tête humérale isolée;
c) Extrémité supérieure de l'humérus, sans la tête;
/) hxtrénlité inférieure de l'humérus gauche, avec cavité olécrànienne
(Jrofdnde, mais non perforée.
g) Moitié supérieure du tibia gauche, sans la surface articulaire. Cet
os QSi assez aplati latéralement (2«'"X3<''"^5).
t") Fragments divers cE'^o^ ilKic|;ue,. d:e vertèbres (apophyses el arcs), de
GÔtes^,. de phalangës; ëtc".
Tous ces ossements, qui étaient remplis de gable fin {ce qui indique biem
qm'il' s-'agil. d'un enfouissement postérieur à la formation^ de la dune),.
éiàieni d'âY\ê friabilité telle qu'il a été presque impossible de les con-
server. En ies lavant, ils tombaient en morceaux. Ils n'avaiewt pti& da
tout la solidité ries ossements trouvés dans les dolmens a sol granilique,.
ossements qui sont cependant bien plus fragiles que ceux des n?cga>-
lithes à sol calcaire.
Cela prouve que le sable des dunes et des plages est un Irè» mauvais
milieu pour la conservation des squelettes, qui s'j' altèrent vile; et cela
f^st certainement dû à ce qu'il est exclusivement cotiiposé de fins grams»
de quartz. '■mensions de tous les os consei'vés, il faut con-
En raison des faibles u..^ ^^^^^^^^^^ ^^^^ ^^^ .^e contrée on
dure à un .uiei jeune II " «^f P^-; ■ ^- ,,, ,. ^ ,^,^^,,^ ^as d'inhu-
^it affaire à un crime ou t^ UU suitiut. & f
mation avec cercueil, en pleine dune. r « - trou-
■ En elTet, le squelelte n'était pas très profondément en oui et se ^^
vait, sans aucun mobilier funéraire, au miUeu même du sable de la dune
non pas au-dessous de la dune. A notre sens, on peut admetlie, a
rigueur, que le cadavre ne fut pas à proprement parler enterre dans le
sable. Tombé sur la duue,il a dû plutôt avoir été ultérieurement recouvert
d'une façon spontanée, par une certaine couche de sable f "fP«;^^ P/;^
le vent, avant la plantation de sapins qui fut faite bien plus tard en ce^
dunes, car les sapinières y sont toutes modernes. ,,,;^„^. .
' En tout cas, il ne s'agit certainement pas \h ^'ossements prehtstonque^ ,
M. K.UUi.LlN. — DKCOlVEUTi: D IN MENlllU T.JMUK SULS LES UUNES 273
et ces restes nunl, h notre avis, aucun rapport avec une sépulture .jucl-
conque et surtout avec la Pierre des Chaumes.
2- Trounulles nouvelles de 1005. - Ces ligues étaieul écrites, quan.l
M Fromeuty nous tit part de nouvelles trouvailles faites le 11 janvier
1903 dans le même champ u» 253, et à peu près iv l'endroit ou nous
avions fouillé en 1902, en réalité dans un i;f;^on eVune douzaine de mètres
à peine.
En arracUan*;^ ^igg sapins, ses ouvriers ont découvert, à peine à 0 m. 30
.^e Pi"^'':bndeur : 1° Une douzaine de aidacrca, dont 8 cr;\nes ^oiil bien
Conservés, surtout "l'un d'eux auquel aucune dent ne manque ;
2" 4 vasesi en terre rouge, dont deux en très bon étal; tous étaient com-
plèler.ent vides; plus un fond de jiot routai», en terre grise;
3" Une sorte de menk, paraissant roiitainc:
4" Enfin deux anneaux de métal (pdvre ou broniè}^
Y compris les anneaux, nous avx^ns pu examiner toutes ces pièces,
fort intéressantes, tes cl'.'iuee cadavres plaident tout à fait en faveur de
Sa théorie ém\^è |^l\)s haut (sujets tombés sur la dune), quoique la pré-
sence des vm^ s'explique assez peu par celte hypothèse. Mai!>, ay^nt
de riea 'préjuger, il est indispensable d'étudier de près les osseifto'ïi'ts et
surt*:,ut les poteries, qui nous donneront une date assez précise et des rfift-
seignements précieux.
Kn tout cas, voici lout ce que nous savons actuelleweBa sur 1=^ uécou-
verte de notre ■ami Fromenly.
A) Squelettes. -^ Les dou^e ïifiieieUes ont été tous trouvés à la même
Iprotondeur, soil Ocn. 30 h'Q ihM, au milieu di gable de la dune, comme
celui que nou.s avons déci^ii plus haut,
Ils étaient »>\acés dav,s un rayon d'une douzaine de mètres autour .les
ossements exhU>*.<3s en 1902. Tous les .squelettes étaient disposés sur des
lignes paraHciDs a environ 1 mètre .-^O les uns des autres. Dix squelettes
cuir;,.t,pr^squ'au sud de la fouille de 1902; deux seulement à l'ouest.
'Les \etes étaient toutes à Vouest, et les pieds à l'.'st; mais, chose très
'CUiVeuse, les faces regardaient toutes du coté de la terre. Autrement dit,
tous les cadavres ont été ensablés, couchés sur le ventre. Ce qui semble
indiquer un dépôt spontané de cadavres, plutôt que des sépultures
vraies (sauf pour rf^w.r sujets), c'est-à-dire des cadavres abandonnés.
Les ossement.s n'étaient nullement enchevêtrés les uns dans les autres
et les douze squelettes étaient bien isolés'; il ne s'agit donc pas d'un
ossuaire.
D'après une renuirque de .M. Kru.n..nty, ces cadavres n'or..[ certainement
pas ete placés dans un cercueil, avant d'être enterrés.
Lu dehors des huit cnlnes mis décote, on a retrouvé beau.:oup.le libia's
e de lemurs, d'humérus, de radius et de cubitus, qui ont été conservés
étudi' ' Vf '' "^'^ "^'^^^'^^ Pet'^s ^s ^^ fragments osseux,^ gtqui seronf
276 18 MM 1005
li. Vases. — a) V^ srpullitri'. — Trois des vasos ont été trouvf's à côté
des parties d'un squelette spécial, isolé. Ils correspondent donc bien h
une sépulture. Ils étaient absolument vides (pas de charbon, ni de mon-
naie); nous savons qu'ils ne présentent pas de dépôts intérieurs.
Deux sont do même forme, mais de grandeur difTérente. Le troisième
est plusgrandj et n'a d'ailleurs aucune ressemblance avec les deux autres.
Ces trois vases sont en terre rouf/e samienne. Les deux premiers sont
guillochés sur une certaine partie et d'une forme difTérente du troisième.
Ce dernier a, peintes sur toute sa surface externe, des sortes de fleurs,
analogues aux « Marguerites » (Bellis ]ierennis, L.), bien ouvertes, ainsi
que nous avons pu le consialei- sur un croquis que M. Fromenly nous a
envoyé (Fig. 4).
Fig. 4. — Vase galln-romain, à col brisé. — Légende : F. fond du vase; M. corolles
peintes; b, b' 6"', guillochures du col C; A, insertion sur la panse de l'anse brisée.
D'après cette aquarelle, il s'agit d'un vase, en forme de sphère, dont le
col et le goulot, très étroits, sont cassés, ainsi que l'anse. Il a un petit
fond et une large panse, comme les cruches gallo-romaines de la nécro-
pole de Bernard. En dehors des corolles, peintes à la surface {Firj. 4, M), il y
a au niveau du col une sorte de triple anneau de guillochures (/>, b' b'').
Sa hauteur est de 0 m. 485: .son plus grand diamètre 0 m. 180; il est
donc presque sphérique. Il a beaucoup de galbe; et il s'agit certaine-
ment d'une cruche d'un certain prix '. Ce vase semble avoir été fait en
Gaule, à Tépoque romaine. Mais il a un cachet or(V/i7a/ indiscutable; et
ce pourrait bien être une poterie importée.
B) 2^ sépulture. — Un quatrième vase a été trouvé, à côté d'un autre
squelette. Il correspond donc à une seconde sépulture. Il est en terre
rouge comme les précédents et a été aussi trouvé vide.
< i'our la Nécropole de Troussepoil, l'abbé Baudry n'en a pas publié ayant même
allure, à notre avis (Puits funéraires du Bernard, 1873).
M. llAIDOriN,
DKCiHS'EIIIK It 1 N MllMIIIt inMlli: nui s i,i.;> DIN»
l'TT
C) Aniu'iius. — Les anneaux uni élé dt'cuuvcils à (ni('lijiio.s nièlres, envi-
ron 2 ou 'A, des squelettes, l'ar suite, ils ne font peul-ùlre pas partie d'un
mobilier funéraire et d'une sépulluie. Ils ne paraissent pasprovenii' non
plus d'un vôtemont qui aurait pu recouvrir un cadavre, et ressemblent
plutùtà des A;vz<y/c/i- cassés ; mais ils sont vraiment bien petits pour n^présen-
ter des objets de celte nature, à moins qu'il ne s'a^isse d'une parure
d'enfant; ce sont tous deux des anneaux nou fermt's.
Antu'uu l. — liO premier anneau, un peu déformé, a une extrémité
brisée de façon indiscutable {Fiii. 5, I, A); l'autre (I, li), écartée de ^1 centi-
mètres environ, est intacte, pointue, et aplatie en queue de serpent, avec
une sorte de V, très allongé et couché, tracé en pointillés à sa face externe
(I, B'C). L'anneau a un diamètre moyen de 4 centimètres. Il est formé
d'une tige métallique, dont la coupe représente une moitié d'ovale, à sur-
face interne aplalie, et qui a 4 millimètres de haut sur 2 millimètres
d'épaisseur. Les deux surfaces sont unies, sans ornements d'aucune sorte.
Il pèse 9 gr. 50.
//
Fig. 5. — Anneaii.v mélaliiqnt'S, en hraiise.
Anneaii II. — A peu près de mômes dimensions que le précédent, cet an-
neau qui est aussi ouvert, avec une extrémité très aplatie, brisée (Fif/. ~),
il, A), au niveau d'un œillet (A'C, ABC) (jui devait exister pour la ferme-
ture du bracelet, et rendait cette partie très fi-agile, tellement il était large
par rapport au volume de l'anneau. I/ouverlure est de 2 centimètres; et
l'autre extrémité intacte se termine en boulon arrondi (II, B).
Cet anneau a aussi 4 centimètres de diamètre, mais ne pèse que 6 gr.
Ce qui lient à ce qu'il est formé d'une tige métalli(]ue n'ayant que 3 mil-
limètres de hauteur. Il est semi-ovalaire à la coupe. La face interne
est aplalie; mais il n'est pas uni à l'extérieur : il présente une série de
godrons, qui occupent toute la face externe et ont chacun 2 millimètres
de large, si bien que nous avons pu compter 43 annelures, avec celle
correspondant à l'œillet d'articulation {Fuj. .7, II, 1-43).
Si ces deux anneaux sont bien des bracelets ', il ne peut s'agir, évidem.
ment, que de parures d'enfunts, car leur diamètre est de 4 centimètres au
maximum! On les a crus en cuivre, lors de la trouvaille; mais ils ont
* L'abbé Baudry n'a pas ligure d'objeis analogues dans son ouvrage.
27 R 18 MM IDO:')
bien l'appanMici- du hronze. de l'avis de loutos les personnes compé-
tentes '.
lU doivent (Hre contemporains des vases trouvés. (|ui sont tous gallo-
iiunains. (|uoi (|u'ils r.'ss.Midil-'id ass(>z à certains bracelets du premier
;\ge du IVm-.
Conclusions. — En présence de ces dernières trouvailles, il est dillicile
de conclure; et nous ne le ferons pas juscju'à plus ample informé.
Très probablement, il s'agit d'une station fialloroDuiine i\u n*' ou ni» siècle
après .l.-C, d'après les vases et les anneaux ; et celte hypothèse concorde
bien avec nos idées sur l'époque de formation de la dune, qui est pour
nous préromaine, puisque ces objets ont été trouvés à 0 m. 30 seulement
du sol actuel, et par consé(juent presqu'à la surface du dépôt sablonneux.
Mais c'est tout ce qu'on peut avancer.
(luant à savoir si les ossements sont des squelettes de soldats morts sur
un champ de bataille et abandonnés là à la merci de la dune, ou bien des
cadavres de naufragés, abandonnés par la mer sur l'ancien rivage de l'île
des Chaumes', ou bien au moins pour deux d'entre eux des restes d'inhu-
mations raisonnées.il est inqjossible de le dire actuellement. Mais, cepen-
dant c'est à l'hypothèse de naufragés (jiic nous nous rallions désormais.
La présence des vases semblerait indiquer, certes, au moins deux véri-
tables sépultures; mais la situation des cadavres, placés face contre terre,
et surtout sur la dune, est bien extraordinaire dans cette hypothèse, que
l'existence des bracelets (enfants) ne vient pas confirmer.
Laissons en tout cas à l'avenir et à l'anatomie le soin de résoudre, si
possible, ce problème, très important d'ailleurs pour l'histoire de la
Vendée maritime, car c'est la première fois qu'on se trouve en présence
d'une découverte aussi difficile a débrouiller et aussi considérable dans
le Marais du Mont \
' Peut-être s'agit-il de bracelets de femmes cassés, et transformés en bracelets
d'enfants.
* A l'époque romaine, les Chaumes se trouvaient, en effet, former le rivage de l'Ile
do Riez dans le golfe de Mont.
3 Dans riiypottièse du naufrage d'une barque d'origine éliangére, la présence des
vases et des bracelets peut très bien s'expliquer.
IMITAltl). — IMl.l RNt:E UK r.A TAII.I.K StU L INDICE GÊPHAMgUE :2T!»
INFLUENCE DE LA TAILLE SUR L'INDICE CEPHALIQUE DANS UN GROUPE ETHNIQUE
RELATIVEMENT PUR
Pau m. KniKNE Pittaru.
l/iiitluonce de la taille sur la valfur ilc l'iiidico c(^jthali(|UO, en laiil
(lu't'\|jri'ssion d'un caractère gém'ral, n'osl, pas cncoïc l)i«Mi conmie. Le
principal ubslaclo h la connaissance exacte de cette iniluencc provient du
faitcjue l'un a travaillé surtout avecdessériesd'Européens, c'est-à-dire avec
des populations en général très mélangées, et d'autre part aussi, avec des
séries trop petites. On sait que le mélange d'individus de « races » diverses,
dans des séries anthropométriques, est une cause d'erreur. Certaines cor-
rélations anatomiques peuvent être masquées par le défaut d'homogé-
néité ethni(iue d'une série, l 'ne cause peut agir pour inlluencer un caractère
anatomique de tel groupe humain alors qu'elle n'aura aucune inlhience
ou que son influence sera dilTérente sur un autre groupe humain.
Dans son mé'moiresurlesrapportsanthropométriques en général, M. Ma-
nouvrier ' a fait remarquer les inconvénients qu'il y a à opérer avec des
séries hétérogènes quant à la race et quant au sexe et à l'Age. lia montré
qu'il y en avait môme dans certains cas à mélanger des classes sociales
ou encore certaines professions.
Pour la série dont nous apportons l'étude, ces inconvénients sont ré-
duits h leur minimum.
.\u cours de jdusieurs voyages dans la Péninsule des lîalkans, priiici-
l»alemenl dans la Dobrodja, nous avons recueilli de nombreux documents
anlhropométrifiucs notamment sur les Tsiganes. Cette po[)ulation est
restée relativement pure. Nous l'avons montré par les chifîres de l'indice
céphalique. * Elle doit la conservation de cette pureté relative h. la noma-
disalion qu'elle poursuit encore ou à la demi-nomadisation. liUe la doit
aussi au mépris (ju'éprouvent pour eux les autres populations au milieu
desquelles ils vivent. liCS Turcs, les Roumains, les Bulgares, etc. ont en gé-
néral une répugnance véritable à s'allier avec un Tsigane.
Notre matériel anthropométrique est représenté ici par 1.205 indivi-
dus. Tous ont été mesurés par nous même. Sur ces 1.205 Tsiganes adultes
il y a 775 hommes et 430 femmes.
' L. Manouvrier. — Etude sur les rapports atifhropomélrùjucs en général et sur les
priiiripali-s proportions du corps. Bull, et niéiiioiros Soc. d'AnIhropologie Paris, 1ï)02.
- Eugène Pittard. — Voir en particulier, /'indice céphalique chez les Tsiganes
di' la Prninsule des ISalkans (1261 individus des deux se.ves) Bull. Soc. Anthrop
Lyon. 190'».
l'so im mm iî)o:i
.M. .Maiioiivrier, en ulilisaiil U's liclies ilc ;i.()Tl hoiumes de 21 à 44 ans,
lUL'suivs à l'aii.s. par lo piuci''(lé <l(.' .M. Heitilloii^ et en les ordonnant selon
la taille a Iroiivf" leschUîres suivants :
ibro (l'iDdiviilu<
Taille
indice céphaliquo
21
1"'40
83.1
128
1"'51
82.5
522
l'"56
82.2
1.U45
l'"61
82.2
1.177
l'"(i54
82.3
800
1"'70
82.4
313
ln>75
82.1
65 "
1-^80
81.1
M. Manouvi'ier, constatant les faibles chani^^enients qui s'opèrent dans
la valeur de l'indice céphalique, au fur et a mesure que la taille augmente,
n'insista pas sur ce caractère.
L'influence de la taille paraît cependant manifeste. Pourtant une ré-
serve importante est à faire. La population de Paris est très hétérogène
quant à la « race ». C'est un mélange de tous les groupes humains qui
peuplent la France. Et chacun sait que dans ce pays on distingue au
moins trois « races » : celtique, kymrique et méditerranéenne. Or a priori,
cette hétérogénéité ethnique peut influencer considérablement les résul-
tats exposés. Il y a des brachycéphaies de grande taille (les Savoyards
par exemple) et des dolichocéphales de petite taille (Méditerranéens). Sur
les 13 départements français caractérisés par la brachycéphalie, six pré-
sentent en même temps des individus qui sont h la fois les plus brachy-
céphaies et les plus grands.
Il résulterait néanmoins des chiffres ci-dessus que, dans une popula-
tion quelconque, même fortement mélangée, l'indice céphalique diminue
au fur et à mesure que la taille augmente.
Une autre réserve est encore à exprimer ;i propos de ce tableau. Le
premier et le dernier groupe sont constitués par de petites quantités
d'individus. Si nous éliminons ces deux termes extrêmes, le changement
éprouvé par l'indice céphalique au fur et à mesure de la taille accrois-
sante, devient presque inappréciable. Au surplus, on remarquera que le
chilîrede l'indice correspondant à la taille de 1 m. 70 est exactement celui
(il un dixième près) qui correspond à la taille de i m. 51. On comprend
pourquoi M. Manouvrier n'a pas insisté sur les chitTres de l'indice cépha-
lique.
(^ent cinquante femmes mesurées également au service d'identification
anthropométrique de Paris ont fourni les chiffres que voici :
ambre
Taille
Indice céphalique
40
1^483
83.3
70
1"'556
83.4
40
l'"602
83.1
E. PITTaRD. — IXKLUBNCE DE LA TAILLE Sllt L'lM>ir.E GKPHALIQUE ^281
Ce résultat est le intime que celui fourni par les lioniuK^. Mais la (jues-
tion ne nous parait pas tranchée par l'examen de ces deux laMeaux. Loin
delà. I.a constitution même des groupes humains ipii onlservià MM. Uer-
tillon et Munouvrier peut porter en elle des causes d'erreurs, il se peut
parfaitement que la variali«tn observée entre la taille et l'indice céphu-
lique se répèle dans des jiroupi's seiuhlalileuient composés ; mais il n'est
pas (iémontré qu'elle soit applicable à tous les groupes humains.
Il nous paraît donc légitime de continuer les recherches en vue de dé-
terminer les corrélations qui peuvent exister entre la taille et l'indice cé-
phalique — nous nous bornons i\ celles là pour le moment.
Nous avons déjà dit que le matériel dont nous disposons est relative-
ment pur. Il peut fournir en tous cas des résultats plus probants que ceux
obtenus sur des séries d'Européens quelconques.
En même temps que nous chercherons le rapport de cet indice cépha-
lique à la taille, nous indiquerons les rapports des deux diamètres du
crâne qui servent à obtenir l'indice céphalique (D. A. P. et D. T).
Tout d'abord la série des hommes. Nous avons fait dans les chiffres de
tailles quatre coupures. Pour les plus basses, nous avons admis une
différence de 10 centimètres afin d'avoir une série assez forte.
Taille Nombre d'individus Indice céphalique
de 1™50 à \^m (exclusivement). 130 78.88
— 1>^60 à 11=65 — . 250 78.69
— 1^60 à 1°>70 — 230 77.79
— 1™70 et au-dessus 165 77.77
Il y a entre le premier groupe et le dernier une différence de plus d'une
unité dans l'indice céphalique. On voit que la dolichocéphalic augmente
au fur et à mesure de la croissance de la taille.
En examinant la série des femmes, nous faisons la môme observation.
Elles sont classées selon la nomenclature.
Taille Nombre d'individus Indice céphaliqun
de 1 '"40 à 1 "'52 200 79.91
— l'^SS à 1"'57 140 79.76
— 1>"58 et au-dessus 90 79.12
La variation est moins grande. Elle n'atteint pas une unité en passant
du premier groupe au dernier. Les femmes sont moins influencées par les
causes modificatrices. Au surplus on voit qu'elles sont moins dolichocé-
phales que les hommes. Cela peut tenir à un moindre développement re-
latif de la région glabellaire. On le verra plus loin.
90C. n'ANTHflOP. OOd. ^^
-2H2 18 MAI 1905
Nuus avons mis on regard de la taille accroissante les chiffres des deux
diamètres A. P. et T. et nous avons cherché leurs rapports :
iJ'abord chez les hommes :
D. A. P. D. T.
Taille
U.A P.
I). T.
Taillo
Taille
l'»56H
187"""55
147""":i8
11.98
9.42
1"'62U
]88"'n'48
148- "'07
11.63
9.13
l'''608
190"'"'43
148"""16
11.41
8.87
l'"734
l«Jl"'n'7
148mm94
11.05
8.58
On voit que les grandeurs D. A. F. et D. ï. croissent, d'une manière
absolue, au fur et à mesure que croît la taille.
\u contraire, on voit que les rapports de ces deux grandeurs h. la taille
diminuent au fur et à mesure que cette dernière s'élève.
La dolichocéphalie plus accentuée des individus les plus grands pour-
rait provenir soit d'un plus grand développement relatif de D. A. P. soit
d'un plus grand raccourcissement relatif de U. T.
Les chiffres ci-dessus nous renseignent.
En cherchant les rapports des deux termes extrêmes de D. A. P. et de
D. T. à la taille, nous trouvons pour le premier 0.922; pour le second
0.910.
Nous voyons donc que D. A. P. diminue moins vite que U. T. au fur et
à mesure que la taille s'élève.
La dolichocéphalie plus accentuée des individus de haute stature n'est
donc pas due à un raccourcissement relatif de D. T.
Voici maintenant les chiffres des femmes :
D, A. P.
D. T.
Taille
D. A. P.
D. T.
Taille
Taille
1^486
177mm8
142mm2
11.96
9.56
l'"553
ISl^ml
143n.m5
11.66
9.24
1^612
182mni8
144mD.5
11.34
8.96
Nous faisons les mêmes constatations que ci-dessus pour les diamètres
absolus. Ce sont d'ailleurs des faits connus.
Les rapports des deux termes extrêmes de D. A. P. et de D. T. à la taille
sont 0.948 et 0.937. Ils imposent les mêmes conclusions que pour les
hommes.
Si maintenant, nous comparons entre eux les chiffres des rapports
ci-dessus dans les deux sexes ils nous fournissent des résultats qui ne
manquent pas d'intérêt.
Ainsi en bloquant, dans les deux sexes, les chiffres des rapports de
D. A. P. et de D. T., h la taille, nous trouvons :
HOUMES FEMMES
r. D. A. P. r. D. T. r. D. À. P. r. D. T.
11.52 9 11.65 9.25
E. PITTAUn. — INKLIENCE DE LA TAir.LE SIR l'iNDIOE CÉE'HALIOIE 283
Il en résulte que les diamètres horizontaux du crAne, D. A. P. t-t I): T.,
sont plus grands, relativement à la taille, chez les femmes.
Celles-ci ont donc, dans ce sens-là, un crâne relalivi'im'nt |)liis déve-
loppé.
(Jette question des dilTérences sexuelles est importante. Aussi nous avons
cherché à établir d'autres rapports que ceux ci-dessus.
Nous avons entre autres calculé la valeur de l'indice céphalique ;\ l'aide
du diamètre métopique pour pouvoir la comparer à celle obtenue à l'aide
de D. A. P. Les chiffres que nous avons trouvés sont les suivants, les
groupes étant toujours sériés selon la taille accroissante :
Chez les hommes :
Indice céphalique à l'aide de :
D. A. r. D. M. Différence
78.88 79.76 + 0.88
78.69 79.60 -f 0.91
77.79 78.95 + 1.16
77.77 79.08 + 1.31
Chez les femmes :
79.71 80.50 -4- 0.5!)
79.96 80.04 + 0.28
79.12 79.18 -j- 0.06
Il résulte de ces chiffres que D. A. P. étant plus grand ((ue 1). M. donne
un indice plus faible que ne le donne I). M. Et ces relations se conservent,
en fonction de la taille.
Mais au fureta mesure que la taille s'élève, cette relation, chez les
femmes, s'atténue. Les grandes femmes arrivent presque a uniformiser
les chiffres de l'indice, que celui-ci soit calculé h l'aide de D. .\. P. ou ;i
l'aide de D. M. Chez les plus grandes la différence est devenue insensible
{-{- 0.06). Chez les petites femmes, au contraire, la diiïérence est évi-
dente (4- o.:i9).
(ihez les hommes, c'est le contraire qui existe. Plus la taille s'élève,
plus les rapports présentent de différences (tandis que chez les femmes
plus ils s'égalisent).
Nous ne croyons pas qu'il intervienne ici un fait de hasard. Notre série
est composée de forts contingents: d'autre part, le groupe ethnique est
relativement pur, ce qui assure au caractère différentiel relevé, une plus
grande valeur.
On peut essayer de se représenter cette importante différence sexuelle
sous la forme suivante un peu simpliste :
Si nous admettons que la croissance de D. T. suit une marche régulière
284 18 MAI 1905
•H que vis-à-vis de 1). A. 1'. et de [). M. elle soit, en quelque sorte, une
quanlit»'' relativement iinniualjle, on constate :
1" (Jue chez les hommes et chez les femmes le L). M. diminue par rap-
port il 1). T. au fur et à mesure que la taille s'élève ;
2" Oue cette diminution n'est pas la intime dans les deux sexes;
3° Qu'elle est plus grande chez les femmes.
i/indice céphalique est considéré comme étant d'une indilTérence remar-
quable au point de vue physiologique, (l'est même ce qui lui assure sa
grande valeur en ethnologie. Cela nous parait plutôt un dogme qu'une
réalité, car on ne voit pas la raison pour la(|uelle il serait inaccessible
aux induences qui font varier certaines régions du corps.
Nous venons de démontrer que celte résistance n'est pas absolue. L'in-
dice céphalique est d'autant moins élevé que la taille s'élève. On avait
coutume de dire « qu'un chapelier ne sait pas pourquoi des tètes de même
grandeur sont plus ou moins larges relativement à leur longueur, et que
l'anthropologiste non plus ne le sait pas ». Cette proposition n'est plus
complètement juste.
Cette question de l'influence de la taille sur la valeur de l'indice cépha-
lique est intéressante pour d'autres raisons encore que des raisons mor-
phologiques.
On sait que certains sociologues ont vu dans l'indice céphalique un
moyen de séparer les hommes en supérieurs et en inférieurs, presque en
purs et en impurs. Les dolichocéphales blonds de grande taille, chasseurs
et guerriers qui auraient autrefois dominé, sinon domestiqué, les bra-
chycéphales passifs et laborieux, seraient appelés, de par leur forme
crAnienne (et en sachant se sélectionner entre eux avec intelligence)
aux plus brillantes destinées.
On a supposé^ d'autre part, que les villes, qui constituent les centres
intellectuels élevés exerçaient une sorte d'attraction sur les populations
des campagnes en attirant à elles (les villes) les meilleurs éléments anthro-
pologiques. Ceux-ci seraient déjà, ethniquement, d'une origine supé-
rieure et seraient ainsi naturellement portés à renforcer les éléments
urbains. Il va sans dire que ces meilleurs éléments ruraux sont carac-
térisés principalement par la dolichocéphalie, les cheveux blonds, une
taille relativement élevée.
RI. Manouviier a fait justice de celte pseudo-sociologie. ' Il a montré que
la moyenne de l'indice céphalique doit s'abaisserdanstoute agglomération
de quelque importance, parce que la population d'une ville n'est formée
qu'en partie iriiabitanls originaires de la région. Ces étrangers diffèrent
en bloc, pai- leur indice, leur couleur, elc, de la région considérée. Plus
• L. Manol'vrier. — L'indice rrphalii/uc et /a pseudo-sociologie. Rev. Ecole d'An-
thropologie, Paris, 18'J9.
E. r-lTTARD. — INFLUENCE DE L.K TAU. LE Sin l'iNDICE CÉPHALIQUE 285
la population des campagnes sera uniforme, plus ces caractères étrangers
interviendront avec intensité.
A ces raisons, toutes de composition ethnique, nous ajoutons celles qui
ilécoulent du travail que nous avons présenté.
Klles nuiis permettent de dire que dans une région pcjuplée de dolicho-
céphales, les contres urhains présentent néressairemenl un indice cépha-
lique moyen indiquant une plus grande dolichocéphalie.
Kn effet, nous connaissons rinlluence socio-physiologique des villes
sur ledévelop[)ement de la taille. Les urbains soumis, dans la lutte pour
l'existence, à des travaux exigeant moins de rudesse que les ruraux, dé-
velopperont mieux leur taille (moindre écrasement du corps des vi-rtèhres,
obliquité plus grande du col du fémur, etc.), de môme qu'en moyenne ils
raccourciront leurs pieds et leurs mains.
Or, nous avons montré que la taille influence la valeur de l'indice cépha-
lique. Les urbains étant plus grands seront aussi plus dolichocéphales
que les ruraux.
Et maintenant, si l'on considère une région peuplée d'éléments mixtes,
l'influence de la taille sera plus manifeste encore. Les dolichocéphales
urbains auront un indice plus faible que les dolichocéphales ruraux et
les brachycéphales urbains auront aussi un indice plus faible que les
brachycéphales ruraux. Et cela, parce que tous les deux seront en
moyenne plus grands.
D'un autre ciMé, au fur et à mesure qu'une population rurale se trans-
forme en une population urbaine, en subissant les modifications de tous
genres qu'entraîne cette transformation, elle deviendra plus grande. Elle
aura aussi un indice céphalique moins élevé, puisque D. \. P. tend à
augmenter relativement plus que I). T. au fur et à mesure que la taille
s'élève.
Ainsi disparaîtrait par l'exposé d'une simple loi de corrélation anato-
mique, tout un échafaudage de pseudo anthropologie sociologique, dont
on s'est beaucoup trop occupé, certains auteurs s'étant mépris sur les
causes.
Conclusions.
La taille .semble avoir une influence manifeste sur la valeur de l'indice
céphalique.
La dolichocéphalie s'accentue au fur et h mesure que la taille s'élève.
Les diamètres A. I'. et T. qui permettent d'obtenir cet indice croissent
d'une manière ahsulue au fur et à mesure que croit la taille.
•Mais cette croissance n'est pas dans des relations identiques. D'autre
part, en cherchant le rapport de D. A. P. et de D. T. à la taille, on cons-
tate que, au fui- et à mesure que la taille s'élève la grandeur relativede IJ.
\. P. et de D. T. diuiiiiue.
Mais le rappm t de D. A. P. ;\ la taille diminue moins, au furet à mesure
que la taille s'élève^ que le rapport de D. ï. à la même grandeur.
286 iS.MAilOOo
Donc raccroissement du dianiùlre antéro-postérieur du crAne semble
•Hre plus proportionnel îi l'accroissement de la taille que l'accroissement
du diamètre transverse.
Autrement dit, la dolicliocéphalie plus accentuée chez les individus de
haute taille provient d'une augmentation relativement plus grande du
diamètre anléro postérieur, et non d'un raccourcissement relatif du dia-
mètre transverse.
Dans un groupe elhiiiiiue formé d'individus dolichocéphales ce sont les
plus grands qui seront les plus dolichocéphales.
Si le groupe ethnique est composé de hrachycéphales, les plus grands
sont aussi, en moyenne, les moins hrachycéphales.
Les constatations ci-dessus détruisent les suppositions échafaudées ces
dernières années sur la prétendue attirance dos villes pour les individus
de haute taille et à dolichocéphalie plus marquée. Celle prétendue sélec-
tion sociale s'explique tout simplement par l'existence simultanée de ces
deux caractères : le développement plus grand de la taille dû aux con-
ditions de la vie urbaine et l'abaissement de l'indice céphalique lié à
cette augmentation de la taille.
L'indice céphalique n'a pas l'indifférence physiologique marquée que
l'on supposait.
Les faits ci-dessus se vérifient aussi bien dans les séries féminines que
dans les séries masculines. (Nous rappelons que nous avons travaillé avec
un groupe ethnique relativement pur). Cependant, à taille égale, la femme
semble présenter un crâne mieux développé dans les deux sens horizon-
taux que l'homme. Les rapports du diamètre anléro-postérieur et du dia-
mètre transverse à la taille diminuent plus vite chez l'homme que chez la
femme.
807« SEANCE. - 8 Juin 1905.
Présidence de M. Sébillot.
Une délégation est accordée ;i M. Volkov pour accomplir un voyage d'explo-
ration anthropologique dans les Carpalhes.
M. Emile Cartailhac à propos du savant mémoire sur les Céraunies,
publié par M. Baudouin dans le Bulletin de la Société, rappelle qu'il a pu-
blié lui-même un ouvrage sur ce sujet en 1878: L'âge de la pierre dans les
souvenirs et les superstitions populaires. Il a donné une série de suppléments
dans ses Matériaux pour l'histoire del'hommeK Ces anciennes publications
ont été fréquemment reproduites en partie ou résumées. En général, les
auteurs, notre regretté confrère le marquis de Nadaillac par exemple, ont
eu l'amabilité de citer la source des renseignements. M. Baudouin s'est sou-
vent servi de ces reproductions et il les indique avec son soin bibliogra-
1 M. Emile Cartailhac a communiqué, en 1892 et 1903, à l'Académie des Sciences
de Toulouse des cliapitres d'une seconde édition qu'il prépare.
(ÎIilVANETTr. — CRANES DE LA SAHDAIGNE. -yH!
phiqno ordinaire. Mais M. Carlailhac désirerait que l'on n'oublie pas, ai-nsi
«|ue l'a fait M. Baudouin, la |iarl qu'il piil à ces inléressanteSfHu des his-
toriques.
-M. Ikiudoin, induit en erreur par les copistes, a vainement cherché
dans l'Ime une curieuse citation. Dans « l'Age de la pierre » M. Carlailhac
indique qu'il s'agit d'un texte de Suétone, Vie de Galba VIII. « Non mullo
post in Canlabri.f lacum fulmen decidit: reperlJt'que sunt duodecim
secures liaud anibigunni suinmi iniperii signum. » L'empereur (ialba
inaugurait peut-être ainsi les recherches d'antiquités lacustres. Mais où
donc est le lac en t}ueslion?
M. .Mauckl Baldiii in, — Je n'ai jamais eu l'intention de ne pas citer,
de parti pris, M. Carlailhac, dont je suis le premier à admirer le talent
trorateur et les beaux travaux scientifiques. Si je n'ai pas mentionné son
livre, c'est que je ne faisais (jue la hiblmjvaphie de première mai» (qu'il ne
faut pas confondre avec celle de seconde), et que je n'avais aucune critique
à faire sur les appréciations de l'auteur : ce qui est un éloge, en l'espèce.
.le ne puis comprendre la remarque terminale de M. Carlailhac :
.M. Baudouin a rainetnenl cherché..., etc. » Je n'ai pas vainement
cherché, puisque j'ai trouvé, tout seul (en bibliograhe de première main),
le fameux passage de Suétone (Vie de Galba)!
La preuve, c'est qu'il est reproduit en entier à la page 547 (addendum),
de mon mémoire. — Je reconnais toutefois que c'est en lisant Suétone,
et non pas M. Carlailhac, que j'ai fait cette trouvaille, d'ailleurs après la
rédaction de mon travail. — Cela prouve seulement que les travailleurs
— comme les beaux esprits — se rencontrent parfois, au cours de leurs
excursions... dans le passé, et préhistoriques!
QUELQUES OBSERVATIONS ET CORRECTIONS SE REFERANT AU TRAVAIL
DE M. MEREJKOWSKY SUR LES CRANES DE LA SARDAIGNE
(Bulletin (/f la Société d'Anthropologie, année 1882).
Par m. (îiovanetti.
J'ai l'honneur de faire remarquer que dans la relation publiée par
M. Merejkowsky sur lescr;\nes de la Sardaigne (publication et relation
qui se trouvent à la page 164 du Bulletin de la Société d'Anthropologie de
l'année 1882), dans la table qui se trouve à la page 169 du même volume
il y a des indices soit céphaliques, suit nasaux-faciaux et orbitaires faux.
J'ai fait le calcul plusieurs fois et j'ai trouvé une grande différence de don-
nées que je propose dans une petite note insérée au volume à la fin de la
relation de Merejkowsky de modifier de manière que le tableau soit
complètement juste. Il est bon que les indices se trouvent bien à leur place
et que tout soit d'accord pour qu'aucune faute ne soit commise par les
anlhropologisles à venir.
Les erreurs dans les indices pourront évidemment confirmer les conclu-
sions de l'auteur sur la morphologie de ces crânes.
8 jLiN VM):\
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NU.MI un riK I.A SKIIIR
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DIAMKTHE AXTÉBO-POSTÉRIKUR MAXIMUM
DIAMKTRK TRANSVEH.SE MAXIMUM
DIAMKTHE VERTICAL (DASILO-BREGMATIQUE)
DIA.MKTHK FllONTAI, MAXI.MI M DK UROC.A
DIAMÈTRE FRONTAL MINIMUM
DISTANCE DU NASION AU BASION
(LIGNE NASOBASILAIRE)
DISTA.NC.E DU BASION AU POINT ALVÉOLAIRE
(LE PLUS SAILLANT EN .\V.\NT)
00
S
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LONGUEUR DE LA FACE OPHRYO-ALVÉOLAIHE
(DEPUIS L'OPHRYO.N)
LONGUEUR DE LA FACE NASO-ALVÉOLAIRE
(DEPUIS LE NASION)
o
CO
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DIA.MÈTRE BIZYGOMATIQUE MAXIMU.M
OU LARGEUR DE LA FACE
DISTANCE MAXIMA DU MAXILLAIRE SUPÉRIEUR
(LA PARTIE LA PLUS INFÉRIEURE DE LA SUTURE
MAXILLO-MALAIRE AU MILIEU DE LA CRÊTE)
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LONGUEUR DU NEZ (HAUTEUR)
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LARGEUR DU NEZ
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LARGEUR DES OS NASAUX SUPÉRIEURS
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LARGEUR DES OS NASAUX MINIMA
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INDICE CÉPHALIQUE
62.72
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59.83
66.38
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INDICE FACIAL
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INDICE NASAL
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32.5
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INDICE ORBITAIRE
SEXE
AGE APPROXIMATIF
m. V(»r,KiiV. — VllYACiES KN liAI,|i:iK OIIIKNTAI.K F.T KV IllKiiVIM ->^^^
RAPPORT SUR LES VOYAGES EN GALICIE ORIENTALE ET EN BUKOVINE
EN 1903 ET 1904.
Pau m. Th. \'olkov.
[.'annôe passée, cominn l'annoe précédente. la Société d'Anthropolop;!*;
de Taris a bien voulu ui'iionorer do sa délégation pour les études
anthropologiques on Galicie Orientale et en Bulcovine. Je viens de rem-
plir ina'niission et Je demande la permission d'en rendre (compte- et de
communi<pier à la Socié'lé les principaux résultats (jue j'ai pu obtenir,
grâce au bon ai^cueil (pie j"ai trouvé partout en qualité de votre délégué.
.\rrivé en VM^ à Léopol (Lember":) la capitale de la (ialicie Orii-nlali',
j'ai cil l'bunninir d'être présenté à S. E. le Comte A. Polocki, le slatllialler
ib; la (ialicic. .M'ayanl reçu avec beaucoup de bienveillance, ce premier
dignitaire du [)ays a bien voulu m'accorder une lettre de légitimation
m'autoiisant à faire mes recbercbes antbropulogiques et me recomman-
dant aux administrateurs de tous les districts que je voulais visiter. Muni
de ce document nécessaire'et de la mission anthropométrique de la part
de la Société scientifique de Chevtchenko à Léopol, je suis parti immé-
diatement à Pérémychle (Przemysl en polonais) oiî M. le Commandant de
la forteresse m'a permis de prendre les mensurations sur les soldats de
l'Hôpital militaire de cette ville. Après avoir fait ce travail à l'aide de
M. le l)"" M. Kos et de mes deux collaborateurs, iMM. Harmatiy et M. Rous-
sov, j'étais admis aussi à faire mes recherches dans l'hôpital civil où
j'ai eu l'avantage de mesurer les femmes. Ces travaux achevés, je me
transportai à la ville de Kolomya (Kolomea) où j'ai obtenu l'autorisation
de mesurer les malades de l'hôpital civil, les détenus de la maison d'arrêt
et les soldats delà garnison locale dans leurs casernes. Grâce au concours
très aimable des pouvoirs civils et militaires et de mon excellent collabo-
rateur M. le professeur J. Ilakovsky, j'ai pu faire ce travail. avec le succès
le plus complet. Parti ensuite dans les montagnes des Carpathes (du
district de Kossov), j'ai eu l'avantage de passer plus de dix jours dans
la maison hospitalière de M. le curé Ivan Popel à Dovhopole. Cet ecclé-
siastique aussi éclairé qu'aimable m'a facilité beaucoup ma tâclie
en participant à mon travail et en encourageant la population ruslicpio à
se prêter ;i mes oi)érations. Après avoir visité Kouly j'ai quitté la (ialiric
Orientale pour l;i Biikovinc Ai-rivéà Tchernovtzi (Czernowiz) j'étais reçu
par M. le l)"" l"'ilippovilcb, le savant directeur de l'Hôpital central du
pays, qui m'a lai.ssé toute la liberté de travailler dans ce grand établisse-
ment, ayant mis à ma disposition tous les locaux nécessaires et en
autorisant ses deux assistants, MM. les !)'« Chaniael Piolrovsky. à m'aider
dans mes travaux. De Tchernovtzi je suis rentré à Léopol pour y mettre
en ordre les résultats de mes recherches.
En été de 1904, je me suis proposé de changer un peu la direction de mes
soc. d'antuiiop. VM'i. "20
^90 H ji IN luor^
travaux ot an Im'ii de chercher à faire mes éludes dans les grands établis-
sements où on peut trouver ensemble les grandes quantités des représen-
tants de tous les districts de la Galicie Orientale, j'ai trouvé plus efficace
de m'occuper spécialement des montagnards ruthènes en les visitant dans
leurs demeures, ce cjui pourrait donner pour mes mensurations des séries
plus homogènes et me permettrait des études éthnngraphi(|ues beaucoup
plus amples. Muni de nouveau de l'autorisation officielle tiès obligeam-
ment acordée par l'intermédiaire de M. W. Zaleski, conseiller de la Cour,
j'ai eu une heureuse occasion départir dans ma première excursion dansle
pays de Hoïki's du Nord en compagnie de M. le l)"" Iv. Kranko, écrivain ('mi-
nent et ethnographe bien émerite, qui se rendait dans le même pays
comme délégué du Musée d'Ethnographie autrichienne de \'ienne. Pen-
dant notre séjour assez prolongé dans les villages de Mchanel/ et de
Dydiowa dans la vallée de San, j'ai pu faire beaucoup de mensurations et
de photographies, ainsi que visiter plusieurs localités voisines, les foires,
les pâturages dans les montagnes et faire beaucoup d'observations ethno-
graphiques. Grâce à l'aimable concours de M. le Chambellan de Wolko-
wicki, j'ai fait aussi quelques études intéressantes à Lokot près de Dydiowa.
Séparé de M. le D"" Franko je me dirigeai en compagnie de M. Kuziela,
élève très distingué de M. le prof. M. lloernes, notre savant collègue
viennois, dans la vallée de Stryi et de son afiluent Smorjanka, en passant
par les villages de Tarnava, Sokolyky, Tourotchky, Borynia, Vysitchky
(Wysocko) Komarnyki, Matkov, Smorjé, Toukholka et Kainé jusqu'à
Lavotchna (Lawoczna), en longeant aussi les sommets de la grande
chaîne des Carpathes faisant la frontière de la Hongrie. De Lavotchna
nous nous dirigeâmes par la vallée d'Opir (Opor) en s'arrètant presque
à chaque station de chemin de fer et en faisant des excursions dans les
villages voisins. Après avoir visité ainsi Slavsko, Toukhia, Hrebeniv,
Skolé, Synevidsko, Kortchine et Krouchelnytzia, nous entrâmes à Léopol
pour mettre en ordre les résultats de nos recherches.
Quelques jours après, je suis parti en compagnie de M. Riabko, un de
mes élèves à l'Ecole des Sciences sociales à Paris, pour étudier les llout-
zoules de la Bukovina. A Tchernovtzi (Czernowitz) avec l'aimable concours
de M. le D' Popovitch, Inspecteur général des Ecoles ruthènes du pays,
j'ai obtenu l'autorisation du gouvernement de faire mes recherches, ainsi
que les recommandations aux maîtres d'école de toutes les localités de
mon itinéraire. Après avoir passé presqu'une semaine à l'Hôpital de
M. le Dr Philipovitch où de nouveau j'ai pu étudier à mon aise une assez
grande quantité de personnes, et après l'excursion à Chypyntzi (Schype-
nitz) célèbre par ses trouvailles de l'époque prémycénienne, nous som-
mes arrivés li Brodyna où la population est déjà houtzoulo-ruthène et où
j'ai pu prendre d'assez nombreuses mensurations et faire une petite
excursion ethnographique à Chypote. En me dirigeant après cela dans la
vallée de Poutylivka, j'ai visité les villages de Ploska, Serguiyi (Sergie),
Storonetz-Poutyliv, Dykhtyntzi et Oust-Poutyliv (Putilla). Là, j'ai quitté
la Bukovine et après avoir traversé le Tcheremoche blanc, je suis rentré
ni. Vii|.Ki»V. SiiYAiîKS KN liVl.lCIK nUIl'.M Al.l! Kl KN III KiiVINK li'.ll
dans la (i.ilit'ii' Orientale où j'ai visité de nuiiveaii Dovliopoli'- et en me
transportant ensuite dans la vallée de Tchérénioclie noir, les villages
^ asseniv, Krvvorivnia et enfin Jahié, réputé comme la capitale du [lays
des lloiit/.oules. Dans cette dernière lui-alilé, gi-ice à rhiis|)italité amical*'
de M. le !)■■ Doboszynski et de son ami M. Maszkowsivi, artiste-peintre de
talent [len onlinaire, j'ai pu mesurer et photographier plusieurs personnes
dans rili'ipital syphililique diiigt' avec heaiicoiip de |)ersévérance par le
premier de ces messieurs. Rentré ensuite à Ddvliupoléje me dirigeai |)ar
W'vjnytzia (Wi/nilz) .à Knlomya, d'où, après tiuelques jours de travail
avec M. le professeur UalvovsUy je suis rentré à Li'-opol.
Les résultats scientiliques de mon voyage, sont assez considérahles
grAce au concours de la Société scientifiiiuc de Chevtchcnko à Léopol
(pii a subventionné très largement l'expédition, et à l'amabilité e\trème
de son président M. le professeur M. Hrouchevsky, ainsi que de mes
savants collahorateurs. J'ai réussi à mesurer pendant deux vacances jus-
qu'à 700 sujets, de faire une assez grande collection d'échantillons de
cheveux, et de faire plus d'un mille de photographies anthropologiques
(portraits en face et en profil) et ethnographiques (constructions, costu-
mes, industrie locale, etc.). En outre j'ai pris encore une assez grande
quantité de photographies de nus et j'ai recueilli une collection assez
importante d'objets ethnographiques, dont quelques échantillons plus
intéressants j'ai l'honneur de faire passer ici devant la Société.
(Juant aux résultats purement anthropométriques, mes calculs n'étant
pas encore complètement achevés, je les communiquerai ;i la Société plus
tard dans un mémoire spécial. Pour le moment je ne peux présenter que
quebiues chifTres généraux concei'nant la taille, l'indice céphalique et la
couleur de cheveux etd'yeux des Houtzoulsde la Bukovine et de Ia(îalicie
Orientale et des Boïki's.
L'examen des chiffres du tableau ci-j(jint nous démontre avant tout (jue
tous les montagnards ruthènes en (juestion ont la taille assez élevée et que
ce sont les lloutzoules, surtout de la (îalicie, qui l'ont la plus haute, l'armi
les Boïki's, les habitants des enviions de Toukhla, comme c'était démontré
parles mensurations de Kopernicki, ont la plus haute taille; leurs voisins
de la vallée de Stryi, désignés chez nous sous le nom de Bo'iki's orientaux,
ont la taille moyenne, tandis que les Boïki's du Nord ont la taille relative-
ment moins élevée quoique l(jujours au-dessus de la moyenne. Des chiffres
concernant l'indice céphalique il résulte que tous nos montagnards ru-
thènes sont franchement brachycéphales. Ce caractère atteint son maxi-
mum chez les lloutzoules de la Bukovine, dont l'indice céphalique moyen
est le plus élevé (85,1), et la proportion des brachycéphales est la plus
grande (66, :2 G 0). Les lloutzoules de la (îalicie ne diffèrent pas beaucoup
de leurs congénères de la Bukovine, quoique leur indice céphalique soit
un peu plus faible. Parmi les Boïki's ce sont ceuxde Toukhla qui sedislin-
guent parla brachycéphalic la [)lus prononcée et dont l'indice céphalique
est plus élevé que celui des Houtzoules en général. Mais les Baïki's du Nord
ont ce caractère un peu atténué, tandis que les Jioïki's orientaux les plus
0(J^
H JUIN 1905
avancés dans la [)lainf de la (ialir.ie suiil seulemeiil sous-l)rachycéphalcs.
Quoique noire chinVe les concernant coïncide presque coinpiôtenieiit avec
celui de Kopernicki, nous croyons (juand même qu'étant donné le nombre
assez restreint des sujets mesurés, il peut bien cbanger un peu après les
recherches ultérieures. En ce qui concerne la couleur des cheveux et des
yeux, les lloutzoules, surtout de la (Jalicie, se distinguent par la coloration
la plus foncée. Les IJoïki's ont les cheveux plus clairs, surtout ceux de
Toukhla, tandis que les Boïki's Orientaux sont plus bruns et ont les yeux
plus foncés en comparaison avec leurs voisins de TouUhIa et les Boïki's
du Nord.
TAILLE
INDICE CÉPUALIQUE .
moy
en ne
S
moyen
<D
p^
<D
o
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3
c
c
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a
00
3
O
.o
ta
Houlzoulos de la Buko-
.':!()
VI ne , . .
1695
»
85,1
1)
3,3
10,7
20,0
66,6
— dt'laGalicie.
1689
1686
84,2
84,5
1,2
12,0
27,6
56,7
8-2
— en général .
1691
»
84,4
))
»
»
»
»
112
Boïki's de Toukhla . .
1658
»
84,7
84.6
1,4
7,8
23,5
66.6
bl
— orientaux . . .
1654
»
?i;lî «^.«î
5,2
15,7
46,9
31,5
20
— du iXord. . . .
1633
1635
;)
12,5
30,3
57,1
b6
— en général
1646
»
83,8
»
»
»
»
1-26
1
30
82
112
51
20
56
126
Houtzonles de la Bukovinr
— de la GaJicic .
— en général . .
Boïki's de Toukhla . . .
— orientaux ....
— du Nord
— t'ii géïK'Pal. . .
COULEDR
DES CHEVEUX
16,7
3,5
5,8
»
2,3
3,3
11,0
^8,5
21,'0
19, (i
21,4
80,0
85.0
85
(-.8,0
78,9
76,8
73,8
COULEDR
DES YEUX
p
o
■2
S
13,3
26,7
25,5
18,2
22,0
20,5
31,3
21,0
19,6
5,2
30,3
29,3
17,8
16. ù
60,0
55,9
58,2
47,0
73,6
48,2
51,5
En confrontant tous ces caractères, nous sommes disposé à croire que
les lloutzoules de la Bukovine et ceux de la Galicie constituent un seul
groupe anthropologique, divisé administrativement. Les Boïki's de Tou-
TH. VOLKOV. — VOVAC.ES F.N (lAl.ICIK ORIENTALE ET EN BrKOVIN'E 293
khia ont beaucoup de caraclères qui les rapprochent des Houl/.oules, ce
qui donne lieu ;\ une supposition qu'ils ne représentent qu'un groupe
intermédiaire entre les Iloutzoules et les Boïki's, quoique la couleur plus
claire de leurs yeux indique un autre mélange assez prononcé. Les Boïki's
Orientaux par la couleur de leurs cheveux et surtout de leurs yeux se rap-
prochent des Iloutzoules. ([uoiipie leur indice céphalique soit beaucoup
plus faible.
Au point de vui' flhnographique la comparaison di; nos deux branches
de Uuthènes montagnards, les Iloutzoules et les Boïki's, est très intéres-
sante, étant donné surtout (ju'au premier regard elles dillèrent 1res
sensiblement, mais l'étude plus approfondie démontre à mon avis que
cette dilVérence n'est qu'apparente. Dans ce rapport très abrégé je ne peux
pas donner les détails que je communiquerai plus tard, et à présent la
Société me permettra de me borner à des indications générales. Les
Iloutzoules sont les vrais montagnards dont le sol ne permet pas de s'oc-
cuper d'agriculture, ils sont pasteurs et ils achètent le mais pour leur
koult'cha (espèce (Uj polenta) dans la plaine. Les Boïki's habitent les monta-
gnes moins élevées, où l'agriculture, quoique assez maigre (ils ne se nour-
rissent pour la plupart que d'avoine et de pommes de terre), est possible.
L'accès des éléments ethniques étrangers dans le pays des Houtzoules est
plus difficile (|ue dans celui des Boïki's et enfin les Iloutzoules ne ces-
saient jamais d'être libres et relativement plus aisés, tandis que les
Boïki's étaient toujours assujettis h la noblesse polonaise et supportaient
jusqu'à I84H toutes les conséquences du servage. De là, croyons-nous,
la diiïérence ethnographique entre ces deux tribus qui saute aux yeux, à
la première comparaison. Mais si nous regardons de plus près les nuances
de l'archileclure des Iloutzoules en commençant par leurs maisons parse-
mées ça et là sur les hauteurs et dont toutes les dépendances sont réunies
avec la maison dans un môme enclos tout fermé et sous un seul toit, et en
finissant jiar les maisons ouvertes enlourées des services séparés dans
les vallées et si nous comparons ces constructions avec celles de Toukhla
et du pays des Boïki's du Nord, nous y retrouverons toutes les formes
transitoires qui nous amèneront aux maisons allongées des Boïki's où
tous les services sont également sous un seul toit, mais alignés dans
une seule construction avec la maison, conformément à la situation des
villages dans les vallées étroites et à la nécessité de tourner toutes les
façades des maisons au soleil.
Nous trouvons les mômes transitions dans le costume et dans les
objets d'ornement. Le kiptar des Iloutzoules, espèce de gilet en peau
de mouton, qui dans sa forme la plus primitive ne présente (pi'une peau
avec un trou pour la tôle, se transforme chez les Boïki's de Toukhla en un
vêtement souvent avec des manches et les pans courts, qui chez les
autres Boïki's, ainsi que dans la plaine de la Galicie et de la Bukovine, se
développe successivement en un gikl en drap et enfin en colon d'un cùté
et d'autre côté en un vêlement long à manches en peau pour l'hiver et en
drap ou môme en toile pour l'été. Les objets d'ornement se transforment
0(>/j 1.') JlIN lilOo
aussi. Hiclics cl nonibroux chez les Honlzoulcs, ils deviemifiit pauvres et
rares chez les IJdïki's. Mais toutes les séries des formes transitoires laissent
à croire que les lloulzoules et les Boïki's ne sont qu'un seul peuple diiïc-
rencié, nuMiie anthropologiquement, sous l'inlluence des causes que nous
venons d'indiquer.
Quant à mes travaux de celle année, pour les(iuels je demande encore
une fois la délégation de notre Société, je crois que le plus intéressant
serait de finir les éludes sur les Iloulzoules en ajoulanl les recherches sur
les Iloulzoules de la Hongrie et d'explorer la partie des Carpalhes entre
les chemins de fer de Lemberg-Lavolchna-Munkacs et de Slanislau-Mara-
maros-Szighet, occupée aussi par la population rulhène.
808" SÉANCE. — lo Juin «905.
Présidence de .M. Séhillot.
Nécrologie. — Akerman, ministre de Suède, associé étran^'cr depuis 1901.
Élections. — Sont élus memliros titulaires :
M. 1)1 HiiKi il-Chamh.\ri)EL, présenté par .MM. Le DiMibif. Manouvrier, Sébillot.
M. l*.\Li S.vuj.MON. présenté par .MM. I"iiiiiiii. .M;iii(tiivriei\ Sébillot.
M. Cuver oITre à la Société, do la part de .M. .Mi.\(:.\rn. un moulage -de la tète
(l'mi supplicié.
M MiMivii.i. pi-ofessem- de nié(lçcine léi^ale à Bucarest, assiste à la séance.
y\. .Mareel iJ.xinoui.N. — Comme Secrétaire général du Comité d'organisation
du Congrès préhistorique de France, jai l'iionneur de déposer sur le bnreau de
laSocietedAnthropologie.au mmi de ce Comité, un exemplaire des diverses
circulaires relatives à ce Congrès et déjà publiées.
,1e signale que ce Congrès aura lieu en 1905 à Périgueux du 26 septembre au
loî" octobre, et qu'il sera suivi d'exeiirsions dans la région des Kvzies.
.OUVRAGES OFFERTS TENDANT LE PREMIER SEMESTRE
IiE.\uvAis (J.). — Notes archéologiques sur K'ing-Yuan-Fou. (Ext. « Toung-
pao ». — In-S". 15 p. avec fig. Leidc, 1905.
H. C. — Note sur M. Kdoniird l'ielte. — ln-8". 8 p. avec port. Vannes. 19U3.
Leh.m.\.n.\-I\itsch£. — .Mtpalagoniscbe. angeblicb sypbilitiscbc Knochen aus
deni Muséum v.w \a\ l'iata. {Aiia ilcr Zeitschrift fiir Ethnologie). — ln-8o,
10 p. avec fig. lleft G, 1904.
I.EH.MA.\N-rs'iTSCHE. — Sauinilunif l'xiggiani vmi indiaiiertypen ans dem zenlra-
len SiidameriUn. [Ans der Zeitschrifl fur l-:ihn'>lo;jii-). — ln-8", 5 p. lleft, 1904.
.Mmllkr (M. 11.). — Unebpu's notes frEIbnograjihie alpine. — ln-8", 27 p. avec
fior. Grenoble. 1905.
OI'VRAr.ES OFFEni> i95
PiKTHEMK.tT (C. A.). — l.i's raccs clu'valiiies ilans les tiMiips iH dans l'ospace.
ln-8°, 28 p. Paris. 11)05.
IMkttk (Ed.)- — l-os rnusosdfs irrandos extensions i^laciaires an\ Itnnps IMeis-
tiKt'iies. (Kxtr.'des Bulletins et Mémoires de la Société d' Anthropologie de
Paris). — In-8", 10 p. Paris. 1!)02: — CJassilication des Sédiuionts loMnés dans
les cavernes pendant l'Aire du Henné. (Extr. de l'Anthro/joloffie). — In-8°. 48 p.
avec fig. Paris. 1904.
Z.MionowsKi (S.). — Les Lolos cl les populatioi>s du Sud de la C.liine d'aprùs
les nuvrajjfs eliinois. (Ext. Retvte de l' Erole d' Anthrojiohnjie). — lu-S". 12 p.,
avee li^'. Paris, 1905.
.SÉBii.LOT (P.). — Ij>s traditions populaires en .Vnjou.
I)"" GiiKFRin.\-|{ir,r,iEiu. — Etat actuel d'une question di- l'al.lhuolo^'it' russe.
— ln-8o. 7 p., Paris. 1903.
Z.AHOROwsKi. — Le cheval domestique en Kur(q)i' et les Protoarvens. (Ext.
des Comptes-rendus de l'Assor. franr. pour l'av. des Se). — Conférés d'An-
gers. 1903. ln-8". 18 p.. Paris.
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italiques et Germains.
Le F)ouble (A.). — .\ propos de deux crêtes occipitales externes a poph^'saires
humaines.
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laquelle on retrouve des traces de la civilisation de Nécropoles de Tirvnthe.
Halltatt. Este et la Tène.
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de l'Asie. (Ext. des Comptes rendus de l'Assoc. franr. pour l'aranr, des Sr.)
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Géogr. hisf. et descriptive de I>aris). — In-8'\ 12 |i.. Paris. 1901; — Quelques
2i)(î i:. jiiN nion
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criptions et lielles Lettres de Paris). lii-S", 10 p.. l'aris, 1905; — La Tunisie
au débuf du XX- siècle, ln-8". 27 p.. Paris, 1901.
Mlle i)r l>Ki,i,KTii;«. — L'Kelio de la piMisée et la parole intérieure. (Kxt. du
Ihill. de l'Institut Général Psyvhnhxjiijue). — In-H", 23 [t., l'aris, 1904.
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aiitliro[»ologiselien Gesellschafl Gowikhlten Kouiniissioii lïir praliistorische Typen"
karten. (Erstaltet aiif der 35. Alli/e/nei/ien Versammtiinf/ in Geifswadl
am 4. Auy liste, 1904. Merlin); — X'erwallungsberichl l'iir das Jalir l'.l04; —
Scliadel <'incs SchoUleng aus Santa Calliarina, Hrasilien {Xeitsrhrift fiir Etli-
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sciences). — In-8o. 18 p. avec pi., New-York, mars 11X15.
M. Marcel Baudocin. — .l'ai riionnenr. ,iii num de M. Léon Dubreuil.
licencié es lettres, d'olfrir à la Bibliothèque de la Société dAnIhroplogie un
ouvrage que cet auteur vient de publier récemment et qui a pour titre : Mono-
ARTICLES A sn.NM.KIl li\.NS I.KS l'KUlODigUES i[)\)
grapltii' ih' lu lom/nuin' <h' liotiin ( NiMult-e). SaiiciM'iv, Pi^'clol. in 8". 1ÎIU5. —
C.'i'sl là (III cxft'llonl travail, roiiniiiiir' par la Socit'lé «les AgrinilliMirs île Kraiice.
où les Anlliro|t()lo^is(es (roiiveri)iit une l'unie de doiiiinonls «{'nnli'i' «léniogra
pliii|iit» t'I t''<oii(inii(|iio. — il serait à smiliailer (jut' ici exi'iiiiilr IVit suivi pour
les autres nuiiiiiuiios de notre pavs. car. avee île telles m(in(i;.'rapliii's. il serait
L'iilin possible d'avoir des hases sérieuses pour îles études d iiisiinMe.
J'insiste sur ee l'ait, très spécial, que {{(iiiin est la seule ciiiiiiimin' de I aiii ieiiiie
iledeeenoiii. ipii est aujourd'hui soudée au eniitineiit : ee ipii expliipn reitaiiis
des faits relaies |iar M. I,. nulireuil.
ARTICLES A SIGNALER DANS LES HKRIoniQlES REÇUS PENDANT LE PREMIER
SEMESTRE.
Aii/ia/fs ilti Musée Gtii/nef. lniin' \M. 1 vol. iyU4. — ('.hauli^ Vki.i.av : Le
culte et les tètes d'Adonis-ïhaiumouzdaiis l'Orient Anfiiiue:
C.onlërenees au musée (iuimet 1903-1904. — Svi.valn Lévi : l.a transmission
des Ames dans les croyances hindoues.
Antiales du Muséf Guimet. tome XVII. 1 vol. 1905. — Svi.valn Lévi : F.e
.Népal, l'tude historique d'un royaume hindou.
liulletin de la Société d' Anthropologie de Ayo/f, janvier-décembre 1904, tome
.\.\.\lll. ^ Lksbhe et l'oKGEOT : Etudes des circonvolutions cérébrales dans la
série dés iiiammilères domestiques; — Le capitaine Richo.mme : Note complé-
mentaire sur les dessins rupestres d'Kl-lLidj-Mimoun : — Ernest Chantre : Les
.Soudanais orientaux émigrés en Ej:ypte ; L'industrie préchelléenne ou éoli-
thique dans la vallée moyenne du .Ml; Nouvelles observations sur le dépôt
quaternaires acheuléo-moustérien de Villerraiiihe-sm-Saùne ; Observations
sur les deux microcéphales aztèques Maximo et Marlhola; Recherches anthro-
pologiques en Egypte; — Elgè.ne i'rrrAHo : L'iinliee ceiilialiliquc chez les Tziga-
nes de la péninsule des lialkans.
Bullettino di Palet iinhKjid Italiana. série III. loiiie X. 1904. — C'.ollm : La
C.ivillà i|(d broiizo in llalia. II. Sieilia ; I'aruikm : l'.oriii di emiseei-azione
iiulla prima et à del l'erro europea.
KiTui' de l'Ecole d' Anthropologie de Paris, mars lUdij. — .Suiihaihii I'.) : l.e
iiiniide russe; — Zahohowski : Ia'S Lotos et les populatiiuis du .Sud de l,i Cliiiir
d'après les ouvragi's ehinois ; — Caimtan etdwEix: Elude pétrograpliifiuedes ma-
tières employées pour la l'abrication des vases en pierre préhistoriques égyptiens.
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undGeliirnsohiidel hoini Meusolien und AlTen; — G. Sergi : Die Variationeni des
menschlichen Sclmdels und die Klassifikation der Rassen ; — Marie Andrée-Eysn :
Die Perchlen ini Salzburgischen; — Karr \agel : Die Aulstellung von Schàdel-
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description d'un fœtus achondroplase.
Par I'al'l Salomiin.
En éliidiant un fœlus achondroplase de la collection du Musée de
Lille, mon allenlion fui allirée sur certaines particularités analomiques
communes aux achondroplases en général et aux monstres phocomèles.
Ces particularités m'ont paru dignes d'être signalées, en raison de l'obscu-
rité qui règne sur la genèse de cette dernière catégorie de monstres
ectroméliens.
Observation (personnelle). — Le sujet de celte observation est un enfant
mort-né, presque à terme, du sexe masculin. Il (igurail depuis l86-i dans
la collection Dareste sous la dénomination de Phocomèle.
Ce qui frappe, au premier abord, chez cet enfant, c'est le développe-
ment excessif et l'épaisseur du système cutané; la peau, doublée d'une
épaisse couche de graisse, paraît trop large pour le corps qu'elle revêt.
La tète, très grosse, semble implantée directement sur le tronc, la région
du cou étant a peine distincte.
;{(»'j i:; jiiN iî)0r;
I^a face est boullic, le nez aplati, li' venti'c /'nonne. On ne conslate pas
sur Ii; tliorax de cliapelet rachiliciiic, ni de dévialion de la colonne vcrU'î-
biale, mais les pieds et les mains présentent du ■pemphiyus sijjthililique.
Les viscères n'offrent de particulier (ju'un développement énorme du
foie.
Les membres, surtout les inférieurs, sont remarquablement courts
dans toutes leurs parties. I^es membres supérieurs sont en pronation, la
main offre un type très net d(> la main m trident de Marie, le pouce est for-
tement porté en dedans.
Les os du bras et de l'avant-bras sont d'une brièveté extrême, les
diaphyses ossitîées, les épiphyses cartilagineuses et énormes. L'humérus
est incurvé en dedans, le radius présente, vers son tiers supérieur, une
coudure brusque à sommet postérieur.
Un reconnaît, à la dissection, tous les muscles de l'anatomie normale,
mais par suite de la brièveté, des segments osseux qui leur donnent
attache, leurs rapports sont notablement modifiés et leurs insertions se
confondent plus ou moins en se perdant sur le revêtement cartilagineux
des os. Le long supinateur et les radiaux sortent de dessous le deltoïde,
celui-ci très développé. Les extenseurs de la main sortent entre le triceps
et le long supinateur. Les muscles des couches profondes de l'avant-bras
sont enchâssés dans les gouttières antérieure et postérieure produites par
le radius et le cubitus déformés.
Les os et muscles de- la main sont normaux, mais ils sont courts
et épais.
Les membres inférieurs sont fortement incurvés en dedans. Extérieure-
ment on ne distingue nettement que deux segments : le pied et la cuisse.
La dissection montre cependant que muscles et os sont au complet.
Les os, courts et épais, diffèrent du type classique de Tachondroplasie.
Le fémur est aplati d'avant en arrière, dans toute sa longueur, et forte-
ment incurvé en dedans. Le tibia est aplati latéralement et incurvé
suivant un jdan antéro-postérieur; le péroné a une forme analogue, en
lame de sabre.
Tous les muscles de l'anatomie normale existent, mais ils sont encore
plus condensés qu'au membre supérieur. Ceux de la région interne de la
cuisse ont, sur l'os iliaque, des insertions distinctes, ils se confondent
plus ou moins en bas sur le bord interne concave du fémur. Ceux de la
face postérieure de la cuisse sont très gros et très courts, leurs insertions
sont normales. Le quadriceps fémoral est très puissant. Les muscles de
la jambe sont enchâssés en avant et en arrière, dans les profondes gout-
tières formées par le tibia et le péroné.
Les os et muscles du pied ne présentent d'anormal que leur brièveté.
Remarque I. — L'observation précédente montre d'abord que Ton a
bien affaire à un fœtus achondroplasique (aspect extérieur, épaississe-
ment du système cutané, localisation des malformations sur les membres
seuls, raccourcissement de ces membres, forme caractéristique des oSj
l'Ail. SAI.dMclN - DKSCltlITlMN It'lN IiH:1I S ACIluMilH (l'I. \>|, ;{();i
surlùulceus. ile> iiiriuhrcs su|M''rieurs, etc.). Ellefail Ijicii vuir aussi (fue le
système uuisculaire des achondiopla.ses n'est presque pas aiiuriual. Les
muscles sont seulement plus courts, plus gros, plus serrés.
Les caractères assez particuliers du membre inférieur, et aussi la prç-
sence sur le fœtus de stigmates sy[jliilili(pies (pempliigus) pourraient
cependant faire l'oltji't dt; (•onsidéralidiis spéciales, mais tpii snitiraient
du cadre de celte f'tiidi". Dans le cas actuel, ces parlirularili's luonlrcnl
surtout un exemple des variétés nombreuses que pn'senle le type clas-
sique de l'acbondroplasie. l'armi ces variétés il en est qui, bien (|ue rares,
méritent de fixer l'attention, ce sont les suivantes : 1" un cas de Ilegnault '
où l'acbondroplasie était limitée aux humérus seuls; 2° un cas plus
récent de Nobécourt et Paisseau *, où les membres inférieurs seuls pré-
sentaient un raccourcissement et des malformations caractéristiques;
30 le cas de Leblanc ^ observé chez un veau fiato, dont les segments
supérieurs des membres étaient réduits presque à leurs épi[ihyses, les
segments inférieurs, carpe, tarse, phalanges, étant normaux.
En somme, certains types d'achondroplasie semblent montrer, dans
les malformations qui les caractérisent : 1° une tendance à la réduction
de plus en [ilus complèle de la diaphyse des os longs, avec une intégrité
relative du système musculaire; 2" une tendance à la localisation des
malformations sur les segments supérieurs des membres. On sait d'ail-
leurs que l'achondroplasie de l'adulte est surtout rhizomélique.
Remarque If. — Les monstres ectroméliens phocoméles paraissent pré-
senter un type de structure comparable à celui des achondroplases.
il n'y a évidemment jtas lieu de s'arrêter longuement sur les ressem-
blances extérieures qui sont de peu d'importance. On conçoit, en effet,
qu'un achondroplase, par suite du raccourcissement des segments supé-
rieurs de ses membres, puisse ressembler à un pliocomèle. L'observation
exposée dans celte note en est un exemple, et bien des monstres dénommés
phocomèles par les auteurs anciens, seraient aujourd'hui classés parmi
les achondroplases.
Sous le rapport de la structure interne, il convient de rappeler les
exemples cités plus haut (cas de Reguault, de Nobécourt, de Leblanc),
où l'on voit certains achondroplases qui, par la seule considération des
membres, sont de véritables phocomèles.
Mais ce sont là des cas rares et discutables. Les véritables analogies de
structure entre les membres des achondroplases et ceux des phocomèles,
envisagées, à un point de vue général, sont mieux mises en évidence par
certaines remarques tirées des descriptions anatomiques des monstres
phocomèles publiées jusqu'à ce jour.
1 Regnault. - Bull, et Mém. Soc. Anal , Paris, 1901.
* Nobécourt et paisseau. — Un cas d'achondroplasie fruste. Soc. de Pediat., -1003.
' Leblanc. — Achondroplasie cliez le veau. Bull, et Mém. Soc. se. vétérin., Lyon,
1902.
soc. d'anthrop. 190o. 21
306 1.) Ji IN l'.tori
On sait, en ellel, ijue les phocomèles sont caractérisés par l'avortement
plus ou moins complet (et non par l'absence) de segments de membres
intermédiaires entre In main ou le pied, et le tronc. Il subsiste donc géné-
ralement des segments avortés, des traces plus ou moins importantes,
représentées par des parties osseuses et par des muscles.
Or, ces restes de portions avortées ne sont pas (juelconques.
1° Les parties osseuses. — Fréquemment les os longs sont représentés
par leurs épiphyses ou mieux par les parties qui s'ossifient en dernier
lieu. On trouve |iîu- exem|)le un rudiment de fémur comprenant infé-
rieurement les condyles, et supérieurement un petit os arrondi homolo-
guable à la tète fémorale (cas de Dumas) ', ou bien un fémur réduit à sa
portion trochantérienne (GomLault et llalbi-on) -, ou encore un humérus
réduit à sa lète (Sentex) '.
D'autres fois, ces portions d'os longs sont profondément déformées
et ne peuvent être rapportées avec certitude à une région déterminée du
membre, que par la considération de leurs connexions (Cas de Van Der
Hoven,de Collineau, de Humel)",
2* Les muscles. — Les muscles ne subissent pas une réduction propor-
tionnelle à celle des os des mêmes segments. Leurs insertions, leur forme,
leur volume, s'adaptent en quelque sorte, le mieux possible à la place
restreinte qu'ils doivent occuper. Ils subsistent même parfois presque au
complet alors que les parties osseuses correspondantes ne sont plus qu'à
l'état de vestiges inappréciables. L'étude des cas de phocomélie cités plus
hautel d'autres cas analogues viennent à l'appui de cette manière de voir ^.
On est ainsi amené à émettre par les considérations anatomiques précé-
dentes cette hypothèse (jue la réiliniion el les anomalies du système muscu-
culaire dans les segments de membres avortés des phocomèles, sont probablement
secondaires, comme le sont certainement les anomalies de forme et de
rapports de muscles chez les achondroplases.
Cette remarque, qui met en évidence le plus important caractère mor-
phologique commun aux achondroplases et aux monstres phocomèles
permettrait, si elle pouvait être vérifiée parla suite, de ne plus considérer
la phocomélie comme un arrêt simple de développement, car cet arrêt de
développement aurait pour point de départ un trouble très précoce de
l'ostéogénèse comparable à celui qui produit les malformations caracté-
ristiques des membres chez les achondroplases.
* J. Grynfelt. — Anatomie d'ua monstre ectromèlien. D'aprè-s un manuscrit du
professeur J. Farges. Oas. hehd. des se. méd., Moiilpellier, 1885.
* GOMBAULT et Halbron. — Un cas de pliocomùlie et hèiniraùli >. .V. /con. de la
Salpétrière,
' Sentex. — Quelques mots sur deux cas de tératologie Ann. d'hyg., Paris, 1894.
* Van der Hoven — L... Over phocomele, Nederl tijdschv. V. Genesk. Amst. 1881;
Collineau. — Sur un cas de phocomélie thoracique unilatérale, ^erwe^/'^;(//iro/3c//o-
gie, 1878 ; Hummel I. C. — Observatio de monstro oui nomen Phocomelus, Lt;yde, 1849.
3 Ghantreuil. — Note sur un monstre phocomélien, Bull. Soc. anat. Paris. 1868.
DlSClSSIitN ;^()7
Jr m<^ piupuse (le compl/'loi' ci'ttf ('tinlc li.iiis un prucliam inf^iuoin^ en pré-
cisant davantage le rôle qm- [wMit jouer l'alTeclion connue sous le nom
d'acliuiidrupldsif dans la pnMluolion des niohshfs frtnnui'lii'ns iihoronu-les .
Je dois ajouter que N ii-clidw, eu I8'JS, s'a(>puyant sur des considérations
un peu différentes, avait déjà aUiiV' r.iltention des anatomistes sur cette
question '.
Discussion.
M. Makcei. IJai douin. — La coinniunication de notre collègue montre une
fois de plus la justesse des idées de ceux qui ne voient dans la tératologie des
vionslirs simples, (ju'un chapitre de pathologie chirurgicale ou médicale.
— On peut, d'ailleurs, dès aujourd'hui, aller plus loin et ajouter (ju'il est
préjudiciable aux intérêts, d'une part, de la Science et d'autre part de la
Pratique médicale, de maintenir cette scission entre deux sciences, dont
la première est en réalité une subdivision de la seconde. La vraie térato-
logie est la Diplotéralologie, c'est-à-dire la tératologie des monstres doubles ou
plutôt itiiiltiplt's. 11 y aurait dès maintenant intérêt à rendre à César ce
qui lui appartient, d'autant qu'on y sera contraint très rapidement par
suite du progrès de nos conaissances en matière d'étiologie et de patho-
génie des prétendues anomalies, qui ne sont eu réalité que la résultante
de processus pathologiques f<etaux, dans certains cas, pouvant continuer
à évoluer dans l'enfance et à l'âge adulte.
M. Hervh; maintient la distinction entre la tératologie et la pathologie
infantile. Les différences dans les manifestations organi(iues sont trop
grandes pour qu'il n'y ail pas intérêt à séparer les deux domaines.
M. Marckl Baudouin. — (Juoi qu'en pense M. Hervé, il n'y a pas de dif-
férence entre la pathologie fœtale et la pathologie infantile. L'une n'est que
la suite de l'autre. — Ce qui m'a fait dire ailleurs - que la spécialisation
chirurgicale, appelée clinique chirurgicale infantile, était non seulement
une inexactitude technique, mais même une absurdité pratique, la nais-
sance d'un être qu'un incident, sinon un accident, de son évolution biolo-
gique.
Il est bien entendu qu'en tératologie des monstres simples, comme
eu diplotératologie, il n'y a, en réalité, ni genres ni espèces, et que ce
ne sont là que des moyens mnémotechniques ou des procédés artifi-
ciels de classement. En répétant le mot de Peler, on peut dire qu'il n'y a
pas en réalité de types tératologiques et qu'il n'y a.qucdes monstruosités t
On observe, en effet, tous les intermédiaires. Mais ce n'est pas sur ce point
que nous discutons. Ce que je prétends, c'estque ces formes pathologiques,
constatées à la naissance, ne doivent pas être séparées des formes ana-
» ViRCHOW. R. - Zeitschrift fiir Ethnologie. 1898.
* La clinique de rhit . ait. fie Reims. — Arrh. pror. de rhir., lOori, juillet.
:{()H i:\ jiiN iùor.
Jogues et de même naluif |>aUi(ii;t''iii(|uo observées aux dilTérents âges,
et constituer une science spéciale : la Tératologie des monstres simples.
Celle-ci doit être englobée de suite parla pathologie.
M. Atgier. — ('omme nos distingués collègues je ne puism'empècher de
reconnallro (|ue plus la tératologie est approfondie plus elle se désagrège
au bénéfice de la pathologie.
Comme nous l'avons fait remarquer ici dans un précédent mémoire '
et maint autre, nombre d'anomalies et difformités du crâne, des membres,
des régions et des organes, loin d'être des jeux du hasard de la naissance
ou de la nature, sont dues à des maladies ou des Iraumatismes ayant causé
des troubles, des écarts, des excès, des défauts ou des arrêts de déve-
loppement survenus pendant la vie fœtale ou pendant les diverses phases
de l'évolution humaine.
M. Fapillallt. — A propos d'un projet de classification des sciences
biologiques que nous a présenté, il y a quelques années, notre collègue,
M. Deniker, j'avais proposé d'unir étroitement la tératologie à la patho-
logie. Je suis donc convaincu depuis longtemps des rapports nombreux
qui existent entre ces deux sciences. Mais je ne voudrais pas aller trop
loin dans cette voie et conclure à une similitude complète, comme le fait
M. Baudouin.
J'incline, en effet, à admettre que les causes tératogènes sont patholo-
giques et très semblables, sinon identiques, aux causes pathologiques qui
frappent plus tard l'individu; mais les effets sont profondément différents.
A ce point de vue on peut reconnaître que ce n'est pas la naissance qui
marque une scission profonde dans l'ontogenèse, c'est la fin de la crois-
sance, l'apparition de la maturité. Les causes pathologiques, à cette
époque, atteignent seulement les tissus dans leur vitalité, mais elles ne
peuvent plus créer de monstres.
Au contraire, tant que dure la croissance, une cause pathologique peut
troubler la prolifération des tissus, l'accroître ou l'arrêter et causer une
modification profonde dans les proportions de l'organisme, qui devient
un monstre. Mais cette monstruosité a des degrés, qui ne varient pas seu-
lement en proportion de l'intensité des causes pathologiques, mais surtout
avec l'âge. Plus les organes ont encore à croître, plus leur trouble peut
être profond, et c'est pourquoi la tératologie fœtale, l^ien qu'ayant, comme
point de départ, des causes pathologiques banales, présente des troubles
si intenses, des malformations si monstrueuses qu'elle constitue un do-
maine de recherches tout particulier.
' Oxycèphalie et Scaphocéplialie sur le vivant. Bull, et Mém. dé la Soc. d'Anth.
1901, pages 'Jô et 143. Anomalies humaines comparées, in-S" br.
NÉCROLOGIE 309
809" SEANCE. — fi Juillet 190"^.
Phésidenge de m. Sébillut.
Nécrologie. — Ki.isrci: Recms. Diroclour de rinsliliit f,M'ogr!i|.liiiiiir Ul-
Knix.ll.s. Mriiil.iv liliilfiin" .l."[.iiis 188!). .\ •••• propos. M. le l'rL'si<lfiit proiioncf
les parnirs suivantes :
J'ai le cef.'i'et «le vous annoncer la niorl ilun île nos plus illustres rollèpues.
Kliséo Reclus, qui est (léeéclé avant-hier aux environs de Bruxelles à l'i^'e de
76 ans. — Klisée Reclus faisait partie de noire société depuis 1889, mais dans
plusieurs de ses ouvrages antérieurs il a cité les recherches laites par nos col-
lègues. Tous ses lecteurs savent d'ailleurs (pie la géographie d'un pays ne lui
paraissait complète que si elle était aceoin[>agnée de son anthropologie. C'est là,
parmi tant d'autres, une des raisons pour lesipielles son oeuvre sera durable. Il
aura eu la satisfaction de la voir achevée, puisque V Homme et la Terre, qui
forme la synthèse de ses innombrables monographies, était terminée quelques
mois avant sa mort.
La Société, sur la proposition de son Président, vote des remerciements à
M. de Morgan qui lui a adressé une invitation collective pour visiter ses collec-
tions de Mésopotamie.
M. .Anthony présente et oITre à la Société de la part de leurs auteurs une bro-
clnire intitulée ;
V. CiioLLET KT 11. .Nkuville : Xote préliminaire sur des mégalithes observés
dans le Soddo. IJull. Soe. Philomath, de Paris 1905.
Au cours diin voyage d'étude accompli avec M. de Rothschild en .Xbyssinie
méri.iionale. les auteurs ont eu l'heureuse fortune de pouvoir observer des
monuments mégalithiques dont la présence dans celte région encore très peu
connue est intéressante à signaler. Ces monuments, constitués en ihyolites lor-
tement aei(les. sont recouverts de signes i)articuliers (représentations anthro-
pomorphes. représiMilalioiis d'obji'ls usuels. n-|)r('sciilalioiis proiiableiiient idéo-
graphiques).
La note <le M.M. V. ChoUel et 11. Neuville, illustrée de 20 ligures, représentant
les mégalithes sous leurs dilïérents aspects, constilue une importante contri-
bution il la eonnaissance du préhistorique en Afrique.
;{lu (i jni.i.KT 11)05
LES GRAVURES SUR OS DE L'EPOQUE GALLO-ROMAINE A LA NECROPOLE
DE TROUSSEPOIL, AU BERNARD VENDEE).
Pah m. Marcel Baudouin.
Les gravures sur us d'animaux, à répoque de la piene taillée et polie,
sont connues depuis Joly Leterme (1852) et les bâtons de commandement,
etc. Dans ces dernières années, Massénat, et surtout Pielte ', en par-
ticulier, en ont publié de nombreux exemples, des plus importants
d'ailleurs.
Mais il a fallu arriver à ces temps derniers pour découvrir, sur des
05 de Vépoque (jallu-romaine, des graffiti, plus ou moins comparables, mais
en tous cas beaucoup moins artistiques et bien moins faciles à inter-
préter.
Nos premières trouvailles personnelles datent d'août 1902', et remontent
à nos fouilles de début dans les fosses sépulcrales de la nécropole de
Troussepoil, au Bernard (Vendée). Aussi ne fûmes-nous pas très étonné
quand, fin 4903, notre excellent collègue et ami, E. Rivière, nous fit part
de ses découvertes à la nécropole du Hameau, à Paris. Nous reconnûmes
de suite des faits exactement comparables à ceux observés par nous
plusieurs mois auparavant ^
Avant de donner quelques indications générales sur la signification de
ces gratrili, je crois devoir énumérer les principaux ossements, indiscuta-
blement travailles, que nous avons découverts, mon collaborateur, M. G.
Lacoulounière, et moi, au cours de nos campagnes archéologiques de
1902 et 1903. Je n'insisterai d'ailleurs pas pour l'instant sur les cas dou-
teux et susceplil)les d'être interprétés autrement que comme graffiti exé-
cutés avec intention, en particulier sur ceux qui pourraient rentrer, comme
je le montrerai plus loin, dans la catégorie des encoches ou des incisures
de dépeçage d'animaux.
Les os à graffiti ont été trouvés, d'abord, dans des fosses sépulcrales, en
1902 et en 1903; puis, en 1903, dans un puits funéraire. Jusqu'alors, tous
ceux qui, de 1859 k 1902, avaient fouillé la nécropole de Troussepoil,
n'avaient jamais songé à examiner les os d'animaux trouvés; par suite
' PiETTE. — Classi /irai ion des sédiments fnniirs dans les cavernes pendant l'âge du
renne. — Anlhropulof/ie, 1904, t. XV. mari-avril. — 'l'iii'î à part, Masson, 1904, in-S",
nombreuses ligures.
* M. Baudouin. — Itev. scient., Paris, i903, 5 septembre, p. 290.
■' Bull, et Mém. Soc. d'Anthropologie de Paris. — 1903. — Voir séance des
IG avril et 7 mai.
M. RACDOIIN. — l,ES liltWIRES SIU iiS DT (.'kPOOLE GALLO-ROMAINK 311
ils n'avaient jamais vu lie telles giavures, qui sont pourtant iiion visibles,
et assez fmiuenles, ([uand on veut se donner la peine de les rechercher.
I. Fosse n° 1. — La fosse n" 1, fnui 11*^6 en 1902, no nous a donné que
de rares os a mahoies. Ils étaient très peu intéressants d'ailleurs et au
nombre de trois seulement pour cette fosse.
I. Le premier constitue une [larlie d'un os des membres de chèvre (Çrt/>ra
hiiriis, L.) ' cassé; on y voit une encoche, assez pi'ofunde, sui- les bords du
fragment, avec une incisiire, légère et peu nette, ;\ un centimètre de l'enco-
che; h une extrémité, une autre encoche, profonde, mais également dou-
teuse.
2° A l'extrémité d'un autre os des membres d'une chèvre {Capra hirctis,
L.) probablement un métacarpien, il y a une sorte de V et une érallure;
mais il est possible que cette dernière ait été produite par une racine
d'arbre ayant rongé l'os en ce point. Une partie de l'os paraît un peu
rongée (épiphyse). Tant qu'au V, il semble bien net.
3" Un morceau de cote de bœuf (Dos taurus, L.) présente deux grandes
encoches parallèles, qui ressemblent \i des traces de dépouillement ; et, à
côté, il y a une êrajlnre involontaire, due, peut-être, à la pointe d'un ins-
trument.
J'insisterai ailleurs sur la signification de ces marques, qui ne sont pas
ici de véritables .9rai'?<res, sauf le V indiqué.
IL Fosse n° 2. — La fosse n" 2 a fourni des os .\ marques de divers
ordres. Ce sont, comme d'habitude, soit des encoches, soit des hicisures,
soit des éraflares. — Citons seulement les principaux débris, et surtout
certaines gravures, qui sont indiscutables.
A. Bœuf, a) Une tête de fémur âxi bœuf, à nombreuses ératlures, plus une
encoche profonde. Il nous semble qu'en outre on peut y lire, en chiffres
romains : IX ou IV, puis XI ou VI ou IX, et entin VII. Mais cela est
assez douteux.
b) Sur un tibia (?) (extrémité inférieure), ou lit le chiffre romain VII,
assez net; il paraît précédé d'un trait veilical, sur lun des bords.
c) Une côte présente une érallure, parallèle au bord inférieur, sur la face
interne, un peu au-dessous du milieu de la cote.
d) Une côte présente une encoche sur toute la face externe, en forme
de V, perpendiculaire aux bords, et deux autres sur le bord inférieur.
e) Une côte et deux petites incisares sur la partie supérieure de la face
externe.
/) Une 6'ô/<^ possède une encoche sur le bord supérieur au niveau du tiers
postérieur; plus trois longues incisures, semblent former un dessin, à la
face interne de l'os.
g) Une autre côte possède une encoche sur la face interne.
* J'expliquerai, daus un autre mémoire, pourquoi je dis toujours Chèvre et non
Mouton, quoique, anatomiquement parlant, il soit irniiosible de pré. iser, comme !<;
savent tous les palèonlologisles.
31-2
(') ji 1 1.1,1: 1' iKon
a) Une encoche.
|{. (jlièvre. a) Un calaineum piôsi'nle de petites incisures, nombreuses,
et très difficiles à débrouiller sur l'une des faces de l'os et au niveau du
bord inférieur.
III. Fosse n» 3. — La fosse n° 3 a donné quelques 05 marqués. Les
marques sont de trois ordres : des encoches, des incisures, et des traits,
d'origine inconnue.
\. Encoches. On en voit, en les rangeant par ordre ascendant d'ini-
por la ne:
1 côte declu'vre : très petite sur le bord supérieur;
1 apophyse épineuse de vertèbres : sur le bord infé-
rieur ;
1 corne de chèvre : sur le bord;
2 métatarsiens de chèvre : courtes;
i fragment d'ilion de chèvre (?) : profonde et courte;
1 métatarsien de chèvre : très profonde et grande ;
7 phalanges : peu marquées.
i côte de bœuf C^) : assez longue, au bord inférieur;
Us long : profondes.
Petit calcanéum : deux peu marquées;
Omoplate de bœuf : nettes.
Côte de bœuf : assez nettes :
Calcanéum de chèvre : très petites et très courtes.
On en reconnaît plusieurs sur deux côtes d'un Bovidé
(bœufj; elles sont presque perpendiculaires à Taxe de l'os et se trouvent
sur les deux faces.
C. Traits de nature spéciale : Gravures. — On ne les dislingue bien en
général qu'en mouillant l'os; on les voit alors se détacher en noir d'une
façon assez nette.
a) Fragment de petit os long : multiples éraflures .
b) Côte assez large (chèvre) : plusieurs traits en I et en \ .
c) Un petit os long (chèvre ?) : le chilTre romain VIII, mal tracé et
peu net.
d) Un gros os (bœuf) : le chiffre romain VIII, avec au-dessus un V
renversé, et d'autres traits au voisinage.
Jusqu'à plus ample informé, j'admets que, pour ces deux derniers os,
trouvés en août 1902, il s'agit sans nul doute àc gravures, en forme du
chiffre romain VIII, car ces graffiti sont tout ii fait comparables à
ceux décrits par M. E. Rivière, quoique les traits soient bien moins mar-
qués que sur les ossements trouvés à Paris en 1903.
Pour les autres marques, signalées jusqu'à présent, je crois prudent
d'être moins affirmatif.
y V. Fosse n° 0. —Cette fosse n"6 n'a donné en 1903 qu'un seul ossement
à gravure; mais il y avait en même temps de nombreux débris d'os d'ani-
maux, sans traces dignes de remarques.
6) D^wa; encoches.
c) Trois encoches.
B. fncisures. -
M. lIAL'IlOriN.
I.KS (IHAVIURS sru OS DE I, KPOOTE TiAM-iVllOM AINE
313
Il s'agit (le rextit'miU' infôrimire d'un radius tli' l)HHif. Sur l'un de >ies
l)()rds, surtout, on note la présence de signes gracrs ; mais il y en a encore
un grand nombre sur l'une des faces de la surface de l'os, impossibles à
déchifîrer, en raison de l'usure.
Fig. 1. — Hadius de liniif avec gravures. Légende : Ac, cxtrémilé arlioulaire;
a à m, traits gravés.
Nous avons noté une sorte de trait vertical, analogue à I, puis un N
majuscule qui est peut-être aussi un "V, précédé d'un I très rapproché]
{Fif). 1). Il faut noter qu'ici, dans cet 1\ ou IV , la partie V a chaque
jambage formé de deux petits traits parallèles très ilistincts et très rocon-
naissables ' . — Sur b; reste de l'os, on voit plusieurs V, droits ou renversés
(au moins trois), un iiail ()ljli(jae, une sorte d'X. et une figure formée
par un trait et une sorti.' de crosse. La. surface articulaire de l'os présente
un V et plusieurs inci^^ures, l'essetiiblant assez à des caractères cunéi-
formes.
y. Côtes d'un puits funéraire. — Enlln, en août 1!)'):i. ilan^ le piiit^ liiin''
raire que nous avons fouillé (n°XXXI[ de la nécropole i, nous avons trou v('',
dans des conditions que nous spécifierons dans un ;tiilre mémoire, des
eûtes de bieuf {Bus taurus, />.), dont quelques-unes présentent des f/i'a/fiti
indiscutables, mais dont les autres paraissent soit intactes, soit pourvues
seulement de traits sans intérêt apparent.
(les côtes ét.iient, toutes ensemble, rassemblées en une sorte de faisceau,
qui fut trouvé jusqu'au fond du puits, à côté d'une tète entière de lios
taurus, enfouie, elle, en chair, comme nous avons pu le prouver par un
examen très attentif de la pièce.
Ces ossements étaient placés à la partie supérieure dr* la cujiulc ii'imi-
' A Aprenionl (Vende'), au lieu dit la Haie, nous avons tiouvé un fiaginont de
polerie, d'apparence {.(••"•J-'oniaiiic, ayant une marque en \' anaJoguu. Chaque
brandie du V est au<si formée de deux traits, très rapprochés [Voir M. Baudouin et
G. Lacouloumère. Le Pn-historique à Apremont (Vendéej. Ann. de la Soc. d'Emul. de
a Vendée. La Roclie-sur-Yon, 1905. — (Sous pres&e).
314
(1 Jl II.I.KT lUOo
uale, au dessus de la couche la plus élevée des vases à lii|uides et des
vases funéraires, à une profondeur d'environ 9 inélres; ils étaient disposés
à plat, i\ côté d'autres objets trouvés dans la boue qui comblait la sépul-
ture, depuis la profondeur de 3 m. oO (Fiy. 2, C).
i«^ Caloltr ^lïcrrcs
Terre Ditrj^air L_ S \ T»"^°^ "^ Chemin. £.
- pi»».- «„^ ;^ ,,,._. J,5
Lvnon. I ".0$ ~ "'
des (tod .if\,-'
Roc _J
Scnùrtcs £fç^c»«Esi
Sericitz
jB^'-;'
.éTve nxfire
ij_ i^tP i Joitr.iÀoûKmajsU soir)
j ? ?7^ '.iTOuche. de pierres
■^ ê»^* Couche dcpierrcj
^'■
'?Tzp2^'our^Aoùl (mercredi)
• i3!I}£<uJfïoeau. de L'eau
^fm"r&>
fffiom
é'^o^ 3f Couche, de pierres
' 3tipur=6 AoCu ( jeudi l
1
^9K ïi37^.o_klour=J AoCtt (vendredi)
— iKetrecisscTncni
^T.6(L^f/aur=8Aoù/. (samedi,)
i O:
= ■, °»
^1 ^'^
"jDr'^o fi'jour-^W ÂoûtfhtndL)
= /< .O.CoucAe. de. pierres
EcKeHe.
£>
Fig. 2. -
Iraiit la
côtes.
cliéma du Puita funéraire gallo-romain «<> XXXII, vu en cf
ace où fuient trouvées les cotes t^rovées. Légende: C, emplc
coupe , mon-
acenient des
Ces côtes de bœuf, trouvées toutes ensemble, dans la matinée du mardi
il août, étaient au non)bre de dix. Elles sont longues et larges, brunes,
et parfois cassées à une extrémité.
Quatre d'entre elles, qui présentent des grarures, certes un peu frustes et
usées, mais indiscutables, doivent élre décrites avec détails.
La plupart des traiis sont gravés sur la face interne; au dehors, il n'y a
guère que des encoches ou des incisures. Pour bien voir ces dessins, il
faut mouiller l'os modérément; et alors une ligne noire apparaît nette
sur le fond brun ' de la côte.
a) Côte n" I. — La côte, à la(|aelle nous donnons le n" 1, est l'une des
plus intéressantes. Elle présente, à la face externe, au niveau du bord
inférieur, deux petites incisions. Mais la face interne est couverte de lignes,
comme le montre le schéma ci-joint {Fig. 3).
* Coloration due à un séjour dans la boue et comparable à celle des es des pale-
fittes .
M. UAinOUIN. — r,ES r,aAVl-RE> sir os de L'kPOQIE <:AM.O-Un.\|.\lNK 315
On y (lislingue un Ion:,' trait hoiizunlal, couj).- par (rauln-s li-nos, avec
une surtL' d'X, liorizuiilal.Mnciit j.lac' au-dessous et au milieu de l'os.
A noter un signe, en crosse, analogue à celui de Tes de la fosse n" r».
b) Côte n» 3. — La côte n° -2 est la plus curieuse. Sa face externe pré-
sente de nombreuses encoches, surtout au niveau de son bord supérieur.
A la face interne [Fig. -4), on voit soit une ébauche de tète .l'animal,
soit le col d'une poterie très allongée, soit tout autre chose, un diagnostic
précis étant impossible. Il y a aussi plusieurs signes en V, ou VV; deux
sortes d'X, .'l des traits horizontaux, obliques ou courbes, qui ne res-
semblent nullement à des caractères oghamiques. On y trouve aussi une
sorte de pied d'Equidé (cheval).
^ •ij^^i'^ ^.'\
Fif/. .V. — Sclit'iii!! (le la Cote n' 1 (Face iiili me).
Fin. i ■ — Schima de la <U)te n" 2 (Face interne).
Fi(i. .7. — Schéma «le la Côte if 3 (Face interne).
Fig. 0. — Sèiiéma de la Côte n" 4 (Face interne).
c) Cnte n"3. — La côte n° 3 a .«a face interne couverte également de traits
31 fi ♦! ji ii.i.Ki ll»05
{Fig. ô). A noter de longs Irails horizimlaux, coupés par des lignes obli-
ques, deux V, une sorte de or(jcliel, un S allongé, des traits en I obliques,
etc., etc.
A la face externe, deux incisinres parallèles.
d) Côten°4. — Celle-ci est la moins intéressante, parmi celles qui méritent
d'être figurées (Fig. 0). Notons seulement la présence de trois traits, plus
ou moins borizonlaux, coupés par des lignes presque verticales et droites.
Les autres cotes ne présentent guère que de grands et longs Irails a leur
face interne, et ça et là quelques encoches.
A notre sens, on doit considérer ces côtes gravées comme des sortes de
tablettes, ensevelies avec le mort, parce qu'elles avaient dil jadis lui servir
h écrire ou h noter ses idées. Ces « papyrus osseux » sont, par suite, très
précieux, parce qu'ils se sont conservés facilement dans les puits; et on
peut prévoircertainement désormais la découverte de nouveaux» manus-
crits sur os », du même genre, quand on fera de nouvelles fouilles dans
les nécropoles à puits funéraires.
Ces remarques montrent, d'une part.quelgrand intérétilyaa poursuivre
ces travaux, et, d'autre part, ({uelles perles la science a subies, quand on a
fait disparaître tous les ossements d'animaux, extraits par l'abbé liaudry
des sépultui'es de Troussepoil, au Bernard, de 18o9 à 1877!
Toutes les côtes, actuellement desséchées, ne semblent pas intéressantes ;
mais les signes qu'elles présentent nous ont pourtant frappés de suite, à
leur sortie du puits, parce que ces os étaient alors tout humectés de boue
et furent lavés (c'est-à-dire mouillés) immédiatement après leur mise au
jour. — Cela prouve que, pour bien apercevoir et pour pouvoir étudier
ces graffiti, il faut humecter avec une éponge ou un linge mouillé la face
interne des os principalement.
Il est indispensable d'ailleurs de ne pas répéter trop souvent celte expé-
rience, car les frottements répétés sous l'eau semblent amener une certaine
diminution dans la visiWililé des traits gravés; en etTet,à l'heure actuelle,
les signes notés sont L)ien moins apparents que lors de leur mise au jour
en août 190li, aussi l)ien sur les côtes du puits (jue sur les ossements
trouvés dans les fosses. Cela tient à ce qu'on enlève, par les lavages suc-
cessifs, l'espèce de matière colorante noire (venant piobablemenl de !a
terre noire de la sépulture), ([ui remplit les traits de gravure, d'ailleurs
très légers eux-mêmes.
1° CR.JkFFiTF. — On peut résumer de la façon suivante les trouvailles
précédentes^ en fait ûe graffiti indiscutables.
A. Caractères eh chiffres — l" Chiffres ressemblant à un V. — 1 exem-
plaire sur os de chèvre (Fosse n'^ 1); plusieurs autres sur os de bœuf
(Fosses no* 3 et 6, Fig. 2); plusieurs exemplaires sur côtes de bœuf (n" 2
et n" 3 du puits funéraire).
M. IIAl-'OiHIN. - I.ES CIUVIUES Si;i< IIS 1)K I.KroyilK (iAI.Lit-UoMAINK '.\\~
i" Chiffre rrgsnnblaul à unVJ. — I rxcmplaiiv sur ttU»! il»' ft'iiiurtlc Ij-iiul'
(Fosse M" -2), rt'sstMuliliiiil aii>si au cliilVio nuiiain \l, à la ri:.Mi»Mir (.'IVar.'-
nient de la partie inférieure).
3" Chiffres ressemblant à nu VU. — 1 sur tibia de hùnif (Fosse ii'^ 2);
1 sur tiîle de fémur de bœuf (^Fosse n° 2).
i" Chiffre ressemblant à un VIII. — 1 sur os Imii; de ebèvre (^Fossen^Si;
I sur os de banif (l'^osse n" 3).
5° Chiffre ressonbhntl à u» I\. — t i'xrni|ilaii e pouvant èlre un IV, sur
tète de fémur de iiœuf (Fosse n° "2).
6" Une sorte de lettre I\'. sur radius tle i)n'uf ^^Fosse n" fi, Fig. i'r, pou-
vant être aussi le chilfre IV, ou un V, précédé d'un trait.
7° Des sortes d'.V, à branches très allongées et contournées parfois
(Côtes n"» 1 et 2 du puits funéraire).
8° Une sorte de caractère en crosse, accompagné d'un trait unique. —
\ exemplaire sur radius de bœuf (Fosse n" 6, Fiy. 2)\ 1 exemplaire sur
côte n'^ 1, {Fig. 3) du puits funéraire.
lî. Divers dessins gravés, dont les plus nets sont un pied de cheval et une
espèce de col de vase (?) ou de lète d'animal (Côte n» 2 du puits funéraire).
(Fig. 4).
M. E. Rivière n'a guère signalé pour Paris que des chiffres, tandis que
nous avons des sortes de dessins très spéciaux, formés de longues lignes
plus ou moins droites et d'essais de flgures (pied de cheval, tète d'ani-
mal, etc.).
De plus les os de l*aris sont gravés assez profondément ; les nôtres au
contraire ont des traits très fins, exécutés d'une façon très légère : ce qui
les rend difficiles à dépister en général, et les différencie nettement de
ceux trouvés à Paris, qui sont véritablement creusés flans la substance
osseuse.
Peut-on se faire aujourd'hui une idée nette de la signification des graffiti,
représentant les chiffres ou les caractères cités, et ressemblant plus ou
moins à des chiffres romains? Je ne le crois pas. Mais, on peut faire —
ce qui sera bien permis — quelques rapprochements avec d'autres faits
connus.
On peut, certes, soutenir que la gravure F est vraiment le chitfre romain '
5 (cinq) ; mais cela n'est pas certain cependant. 11 me semble, en effet,
qu'on peut y voir aussi un caractère d'écriture, qui n'est sans doute pas
notre v ou un u, mais qui peut être cependant une lettre d'un alphabet
quelconque, à rapprocher en particulier de ceux publiés par Piette, et
' Les v des os gravés se retrouvent, à peu près avec la même forme, sur quelques
poteries trouvées dans les puits de la Nécropole de Troussepoil. Pour s'en reudre
compte, il suflît de jel.r un coup d'œil sur les Ggures 91, 92, <66 de l'ouvrage de
l'abbé Bnudry (Les puits funéraires gallo-romains de Troussepoil). Mais, dans ces faits,
il parait bien s'agir de chiffres romains vrais, comme dans ceux figurés par Habert
{Les poteries antiques parlantes, Atlas, pi. XXXVI).
;{|.s <■> Ji ii.i.KT 1'JÛ5
m(}ino (If ci'ilaiiis raractùi'cs o.;li.iiiiitiiies allures par des inlliiences iiini-
ques ou autres.
Je me base, pour éuiellre ci'llc liypolhèso, sur la loiinc cJes lettres de
l'inscription dite de la Madeleine, (igurée par Piette, dont quelques-unes
ressemblent à ce V renvers»^ soit a-
Fiette y voit l de ralpliabel lycicn ou la go cypriote; mais je me gar-
derai bien ilulItM aussi loin, .b; remarque seulement qu'on trouve aussi
un V, dans l'inscriplion, dite de Uocbcbertier, qui est aussi de l'Ago de la
pierre. Cette dernière, d'aulri- pari, fournit plusieurs sortes d'X, très
comparables aux grands X qu'on trouve sur l'os de la Kosse n" ti et sur
les côtes du puits funéraire '.
Certes, cela ne veut pas dire que les os gravés de la nécropole gallo-
romaine du Bernard portent des caractères réellement anciens, et non
pas des chiffres romains. Mais ces rapprochements montrent qu'avant
de formuler une opinion, il faut toujours être prudent en ces matières.
C'est ce que je ferai, je crois, en concluant seulement que ces graffiti res-
semblent à des chiffres romains^, mais que nous ignorons jusqu'à présent
s'ils en sont réellement, malgré les découvertes de M. E. Rivière, qui sem-
blent bien prouver, pourtant que celte hypothèse est la bonne, de même
que les remarques déjà anciennes de M. Ilabert '.
Il ne s'agit certes pas d'inscriptions vraies, mais de signes isolés ou
groupés, sans ordre apparent.
En tout cas, ces gravures sont certainement en rapport avec une cou-
tume ancienne, antérieure à l'introduction de la civilisation romaine importée
en Vendée; et il s'agit là, cela n'est pas douteux, de la persistance d'une
habitude, qui remonte peut-èire très haut. Aussi y aurait-il lieu de voir
si l'on ne retrouverait pas de tels os à gravures dans les sépultures mar-
niennes (La Tène I) et du Beuvraysien (La Tène II) ; il sera donc utile de
les rechercher.
2" Incisures et encoches. — En décrivant les ossements à marques des
fosses, nous avons dit qu'un nombre d'entre eux présentent des incisures,
des traits, et des encoches, plus ou moins profondes, disposés sans ordre et
sans caractères nets.
Dans le nombre, il en est qui sont certainement des traces de dépeçage ^,
» LUBBOCK. dans son livre classique (t. I. fig. 3, p. 10) a représenté des os de
l'époque de la Madeleine présentant des graffîli en forme de V et de X.
U n'est pas probable que ces X aient un rapport quelconque aAec le signe de la
croix (+) ; ils semblent plutôt dériver du V.
» Sur les poteries on trouve très souvent des chifïres romains, en graffiti indiscu-
tables ; par exemple les chiffres XÎII, XVIII, etc., etc.
» Habert {Loc. cit., pi. XXXVIj a représenté des graffiti, sur objets divers gallo-
romains, qui ont beaucoup d'analogie avec ceux dont nous parlons; mais il n'a pas
parlé des graffiti sur os, à ce que je sache.
* Il est facile, au Bernard tout au moins, de constater que les ossements d'ani-
maux placés en chair dans los sépultures, ne présentent jamais d'encoches ou
de traces de dépeçage, pas plus d'ailleurs que de graffiti; cela ne pourrait pas
M. llAIDnllN. — l,i:> (lit W IUKS SL'It OS DE i/kPO^TE (iAl.l.o- lluM.VlNi; 'A\\\
<•[ rcpréscritenl l'action il un iiistiiiincul Ifaiiclianl, érallanl ou allaiiunul
los, sans iilôe (lirci'liicf.
Mais d'autres seinbliMit rouf^cs ' p irdos clHt'ns^o.i pcut-ètro [)ai' l'iiuniMir.
D'un autre cùlé, certains traits ne p naissent [)as avoir les caractères
il.' traces d'attaques accidentelles; et on peut se demander ci' qu'ils S;igni-
lient. l'renons, par ex.em,de, ces longues lignes droites, ou légèrement
courbes, ({ui sont sur la face interne des eûtes Ju puits funéraire.
Ce ne peuvent être des incisions de dépeçage; et on est tenté de les rap-
procher de suite des lignes sur lesquelles on traçait les caractères ogkamiqiies,
daulanl plus qu'elles sont elles mêmes surchargées de traits obliques.
blnlin, quand il s'agit d'encoches profondes, analogues . a celles qu'on voit
sur certains os longs, on ne peut s'empêcher de les comparer aux entailles
des os de la période paléolithique, signalées par tous les classiques '. Et
cela est surtout vrai pour certaines pièces trouvées à Paris par M. E. Ili-
vière, dans la nécropole du Hameau, très analogue ii celle du IJernard.
M. E, Cartailhac * a écrit récemment à ce propos ce qui suit :
sVxpliquer (l'aill«îurs. Or, à côté de ces ossements intacts, on en trouve de marqués,
de grarés, etc. Cela prouve bien (jiron mettait, dans Irs fosses et puits, à ciUé d'ani-
maux entiers, d'iuic part des animaux dépecés, et, d'autre part, des os desséchés,
qui avaient été travaillés au préalable.
* On connaît des os à marques d'origine purement paléonlologique indépendants
ds la présence de l'tiomme, quoi que on ait dit, tels les os rayés ou incisés des
falluns de l'époque tertiaire, trouvés à Chavagnes-les-liaux et à Pouancé (M. et L.)
par l'abbé DolauuHy. Tournouer et Farge, parmi lesquels on peut citer des frag-
ments d'humérus et de côtes d'IIalilherium, avec entailles. On explique désor-
mais ces rayures par l'action des dents en scie de Carcharodon Megalodon, par
exemple [.Musée de Saint Germuin, n* 3210. — Voir : abbé Delaunay (Pontlevoy).
— Trace de l'homtne sur les ossements d'Halithcvium fossiles de Pouancé. Congrès
Préh., Paris, 1867, p. 74].
De plus, dans les terrains mioccne.s de Monle-.Vi>erto, on w trouva des ossements
semblables (rayures de squale). En effet, .■Capellini, au Monte Aperto, dans l'.Artien
de Toscane, a ol)servé des os de /jaleino])tércs, présenlanl des traces de morsures,
qui ont même origine et qui ne sont pas, d'après G. do Mortillet, l'œuvre de l'homme
comme l'a prétendu Gapellmi.
En 1869, Delfortrie, a signalé, dans les laluns de Léognan ^Gironde), des osse-
ments d'animaux marins présentant des stries et des entailles ; elles ont été pro-
duites par des carnassiers marins, et peut-être par le Sargus Serratus.
Voir au Musée do Saint-Germain, salle n' 11 (n* 28, 375), une entaille analogue
sur une apophyse épineuse de vertèbre lombaire; on dirait une encoche d'écoreage.
Voir aussi les n" 23, 376 et 23, 874 du même Musée.
* On a signalé assez souvent des os rongés au Bernard ; et on a découvert au cours
de fouilles faites ailleurs.
Les castors, les hyènes, les chiens, les porcs-épics, les écureuils, les rats peuvent
ronger des os dans des dolmens, dans des grottes, etc.
«Walter Houoh. — Arch. Field Work in Northwestern Arizona. Rep. Smith
Instit.. 1903) a figuré un os à encoche (PI. 56), dont les encoches sont placées sur le
bord, et qui fut trouvé à Stone Axe; pi. 81, il y a aussi une pierre à encoches, qui
est figurée. — Ces pièces sont à rapprocher de celles dont je veux parler ici.
* Catailhac. — Les stations des Bruniquel sur le bord de l'Aveyron. — L'Anthro-
pologie, 1903, tome XIV, n" 3, mai-juin, p. 2i5 [Voir p. 30G).
320 t> jiir.iKT l'.Ki:;
i< l^a liiotlt^ (lu Courln-l a livif- à M. de Laslic une série d'os, garnis dV»
tailles, courtes el parallè'lcs. (|ui rappellent les « marques », les « tailles »
de nos boulangers, et autres fournisseurs de nos ménages. J'ai vu aussi
les Ariégeois de Bethmale. j(juant aux caries, marquer la table d'échan-
crures analogues
« A propos des spécimens de ce genre livrés par la grotte des Baluts, j'ai
rappelé l'explicalion qu'a donnée de ces entailles M. (i. de Morlillet. Elle
est sans doule applicable à un certain nombre de cas ; mais comment dis-
tinguerons-nous les coches ;i signification de celles qui, sur des manches
d'outil, ont pour but de les empêcher de glisser dans les doigts? On obser-
vera que les petits traits des os de Bruniquel n'ont pas dans deux objets
surtout la simplicité, la profondeur que cette destination pratique récla-
merait. Quelle nécessité dans ce cas de bifurquer le trait en forme d'Y I
Ce détail, très net a, ce ine semble, son importance. Nous observons
ainsi que cet os a un petit volume et peut être enfilé. Nous pourrions con-
clure à une simple ornementation ou les rapprocher de ce que nous voyons
chez les sauvages Khas et Lolos indo-chinois. Leurs règles de bois à enco-
ches sont d'un fréquent usage dans les affaires importantes, telles que le
contrat de fiançailles, la déclaration de guerre; on les emploie même
comme message. »
De ce qui précède, on est obligé de conclure qu'en réalité nous ne
sommes pas encore fixé sur la vraie signification de ces traits et de ces
signes, de cesincisures et de ces encoches. Nous n'avons pas, d'autre part,
aujourd'hui d'éléments suffisants pour les classer et les bien différencier
les uns des autres. Il ne faut donc, pour l'instant, que pe borner k les
enregistrer avec le plus de fidélité possible el ;i les décrire minutieusement,
sans se lancer dans des hypothèses qui pourraient être nuisibles à la
science.
Mais il faut surtout ne jamais négliger l'examen approfondi des ossements
préhistoriques, qu'il s'agisse de l'homme ou des animaux, car, au moment
où l'on s'y attend le moins, il peut fournir des données tout à fait
iuîprévues, comme ce fut le cas pour les os d'animaux de l'époque gallo-
romaine, que nous avons trouvés au Bernard dès 1902.
RitUX. — KTIHK vNTimnpOI.nillOIF: I)K I.'aNNvMITF Ti»NKINi>I^ '^-2\
CONTRIBUTION A L'ETUDE ANTHROPOLOGIQUE DE L'ANNAMiTE TONKINOIS
V\l{ M. LE Dr IU»UV
(Médecin de l'Arrnoe).
Kii qiiitlant la France, en septembre 190:2, pour nous rendre au Tonkiii.
nous avions l'intention bien arrêtée de mettre à profit ce voyage olliiicl
pour récolter, cbemin faisant, tout ce (jue nous pourrions glaner de docu-
cumt'nts ayaiil IimiI ,iiix indigènes au milieu des(|uels nous aurions l'oc-
casion de résider. Le sort nous ayant désigné pour le Haut-Kleuve Rouge,
et nos fonctions se rapportant essentiellement à des tournées de postes au
cours desquelles il n'était guère possible de prati(]uer efficacement des
recherches anlhropomélriques, il en est résulté que nous avons surtout
étudié, au point de vue ethnographique, les populations du Haut-Tonkin
et que les .\nnamilcs, iuqiortés en cette région, nous ont fourni, avec les
Thaïs, les seules bases des recherches plus diMaillées (|ue nous commen-
cerons à exposer dans cette note.
Il importe au plus haut point qu'un observateur consciencieux, en
anthropologie, indique clairement les conditions dans lesquelles ses
observations ont été faites : il ii'iuq)orte pas moins, au risque de se voir
reprocher quelques longueurs, qu'il insiste sur la manière dont il a pro-
cédé à ses mensurations et à ses relevés anthropométriques, pour que l'on
sache quel crédit il convient de lui accorder, dans quelle mesure ses
résultats peuvent être rapprochés des recherches antérieures et si les
notations originales qu'il a pu. inventer méritent par quehjue côté la
confiance et sont l'expression de faits anatomiques ou physiologiques inté-
ressants.
C'est ainsi que notre étude sur les .\nnamites porte exclusivement
sur des militaires indigènes : c'est donc une sélection d'individus et il va
de soi que les renseignements, qui ressortiront de l'examen des chiffres
que nous avons recueilllis, seront moins intéressants que si nous avions
étudié le même nombre d'adultes pris au hasard dans un village annamite :
notre excuse sera (jue nous ne pouvions faire autrement. A tout prendre,
d'ailleurs, il semble qu'il ne soit pas indilïérent de pouvoir établir, en
quelque sorte, un critérium somatique du Tonkinois considéré successive-
ment dans les gens de taille et de constitution moyennes, dans les grantles
tailles et enfin dans ceux ([ui réunissent au maximum les conditions de
robuslicité. Laséiialion de nos indigènes en tirailbiurs, artilleurs et sapeurs
du génie répondra ;i cette division et, a défaut du type moyen de la po-
pulation considérée dans sou ensemble, nous obtiendrons ainsi le type
moyen tonkinois correspondant à ces armes différentes.
Les aitilleuis et les hommes du génie, en particulier, nous représen-
teront, dans la race annamite, la robuslicité maxima.
Nous avons regretté de nous être éloigné de Paris sans avoir eu l'occa-
SOC DANTHHOP. -1905. 2'2
322
r» jrii.i.Ki iUO.-'t
sion de nous initier h la prati-iue anlhropométrique sous les auspices de
M. Manouvrier qui dispense si largement, h ceux qui ont recours k son
obligeance, ses conseils éclairés et les ressources de son laboratoire. Mais
les travaux de ce maîlre, ceux de l'illustre fondateur de notre Société, les
livres de M. Topinard et le travail si intéressant de M. Papillault', que
nous reçûmes au Tonkin, nous ont permis peut-être d'exécuter nos men-
surations suivant les règles adoptées en France, ce qui nous était d'ailleurs
facilité par nos études anatomiques et surtout ostéologiques.
Nous avons d'ailleurs soumis nos documents à M. Manouvrier et n'avons
pas hésité à rejeter toutes les observations qui ne présentaient pas un
caractère d'exactitude suffisant. C'est ainsi que les diamètres crâniens
antéro-postérieur et transverse maxima n'avaient pas été pris d'une main
suffisamment exercée : nous les avons négligés, quoique cette omission
soit un peu dommageable k celui qui essaye de représenter par des chiffres
la morphologie d'un type exotique et nous mette dans la posture d'un
sculpteur qui exposerait une étude d'homme en l'amputant de toute la
région crânienne : mais nous savons que l'indice céphalique de la popu-
lation tonkinoise a été déterminé à diverses reprises par des anthropolo-
gistes très expérimentés.
Enfin bien d'autres mesures intéressantes, particulièrement en ce qui
concerne le membre supérieur, le thorax ou le bassin, n'ont pu être prises
faute d'instruments assez précis ou assez grands pour embrasser cer-
taines longueurs : car nous professons une médiocre estime pour les
mensurations dérivées de l'application du ruban métrique et il n'est sans
doute pas téméraire d'affirmer (jue, dans le diagnostic chirurgical, on
gagnerait en exactitude par la substitution, k celui-ci, des instruments
anthropométriques.
M. Manouvrier et M. le D^ P. Raymond, dont le souvenir restera lie à
notre initiation anthropologique, nous excuseront d'avoir répondu si mo-
destement aux espérances qu'ils avaient peut-être fondées sur nous : il
nous suffira de leur promettre de nous livrer, dans l'avenir, à des recher-
ches mieux conduites et de redire ici, ce qu'ils savent déjà : que la vie
du médecin, sous les tropiques ,est parfois très assujétissante, que la
sévérité du climat déjoue les meilleurs projets et qu'il est rare de ren-
contrer sur sa route des gens qui favorisent les études anthropologiques.
Du temps d'Aristote, au dire de M. Topinard, on appelait anthropo-
logues ceux qui dissertaient sur l'homme : espérons qu'à cette époque
lointaine ce mot ne possédait pas un sens péjoratif que des esprits
bornés lui ont appliqué depuis : car, lorsque Broca, en 1859, fonda notre
Société, combien d'adhérents se pressèrent autour de lui? On les compta :
nos Bulletins ont conservé leurs noms. A cette époque, en effet, on se deman-
dait quels étaient ces gens qui se réunissaient pour disserter sur l'homme
et on pressentait que le pouvoir et les croyances de l'époque ne sortiraient
» Dr Papillault. — L'homme moyen à Paris. In Bulletins, 1902.
aul'X. KTIDK ANTHHdl'Ol.iHîliJlE UK I," ANNA.MI TK T<»NKINtiI.-
323
pas indemnes de celte dissection analomitjiic, intellectuelle, morale et
sociale. De nos jours, dans certains milieux, on se méfie encore de nous
et c'est 11 cette méfiance injustifiée que nous devons de n'avoir pu apporter
à la Société plus de documents et surlout des pièces ostéologiques. Ce fait
est significatif. Il n'était pas inopportun de le signaler.
Dans ce travail, nous étudierons successivement les chapitres suivants :
I. — Données icouographi(jues.
M. — Données anthropométriques et anatomicjues.
m. — Données physiologiques et psychologi(iues.
I\'. — Données pathologiques.
C».\i'iTuii 1. — ■ Données iconogr.\phiques.
Nous aurions voulu donner plus d'étendue à ce chapitre, dans lequel
nous reproduisons des photographies deTonkinois, car nous estimons ([ue
ces photograpiiies valent mieux que toutes les descriptions et ({u'elles
appuient très clairement, pour des yeux exercés, les considérations anato-
mi(]ues dans lesquelles nous entrerons plus tard. Grâce à la publicité de
nos lUilletins, elles dolent nos collègues d'une collection qui a son intérêt
au point de vue ethnique et leur permettent de faire, avec des reproduc-
tions d'autres types, des comparaisons instructives. Nous regrettons seu-
1 2 1 '■2
1. Sapeur du génie, .'ia ans. Taille : l'n6o. Buste : 0.87 cm. Membre inférieur :0.78 cm.
Périmèlre Ihoracique : 0.79 cm Mollet : 0.33 cm, Biceps : UMj cm.
2. Sapeur du génie, 29 ans. Taille : l"'y9. Buste : 0.87 cm. Membre inférieur : 0.72 cm.
Périmèlre Ihoracique : 0.77 cm Mollet : 0.3i cm. Biceps : 0.27 cm.
324 •'» Ji M.i.KT lyO.*)
lement que des raisons mat<^rioIlos no nous permettent pas do faire tirer
aillant (r(''|)roiives (jiic nous l'aurions dôsir*^ et nous nous en titMidrons à
10 types présentés de face et de profil. I^es principales mensurations affé-
rentes h ces types accompagneront leur photographie.
Chapitre II. — Don.nées anthropométriques et an.itomiques.
Nos examens ont porté sur 70 sujets : mais 30 de ces indigènes seule-
ment ont pu être examinés à loisir et nous avons pratiqué sur eux 33
observations ou mensurations; le groupe restant, composé de 20indiviilus,
ne nous a donné que des mensurations réduites. Nous indi(iuerons donc
par un numéro, en regard de chacun desparagraphes suivants, le nombre
de sujets auxquels se rapporte telle ou telle observation, et il va de soi
que, lorsque nous ferons des comparaisons entre différentes mesures, elles
ne s'appliqueront qu'au premier groupe de 50 unités dans lequel, sauf
pour le poids, les mesures homologues ont pu être prises pour chaque
individu de la série.
j[ge. — N" 70 . — L'âge moyen est de 27 ans, avec un minimum de 21
et un maximum de 38. Parmi les hommes du génie, surtout, se rencontrent
des gens atteignant ou dépassant la trentaine, qui en sont à leur deuxième
ou troisième rengagement 11 ne faudrait pas voir là une tendance natu-
relle, de la part de l'Annamite, à rechercher le métier des armes : il l'a
au contraire en horreur; mais le corps du génie est celui où on fait le
moins d'exercices proprement dits, où l'indigène vit de sa vie naturelle
qui est, si l'on peut dire, en grande partie aquatique, ou il continue son
métier de charpentier, d'ouvrier en fer, et dans lequel, enfin, tout en
travaillant pour une retraite future, il arrive, avec des suppléments de
solde, et avec le bénéfice de l'habillement, à gagner des journées aussi
rémunératrices que celles qu'il pourrait avoir dans son village.
Taille. — N° 69. — Cette mesure a été prise le sujet complètement nu,
reposant sur un sol cimenté bien horizontal; les talons, joints, touchaient
une règle graduée par nos soins, et appliquée contre un mur dont la ver-
ticalité avait été au préalable reconnue. l'ne équerre libre nous permet-
tait de lixer la hauteurdu vertex, procédé qui nous a paru plus exact que
l'équerre-glissière habituelle dont le jeu, nécessaire à sa mobilité, peut
entraîner de sensibles écarts de son côté utile avec l'horizontale.
La taille moyenne est de 162 cent. 28. On voit que ce chiffre se rapproche
beaucoup de celui qu'ont donné, en 18î)0, MM. Deniker et Laloy, après
mensuration de23Tonkinoisdont21 militaires. Ilestsupérieur à la moyenne
de Breton (1 m. 57 j et de Mondière (1 m. 59). Mais il ne faut pas oublier
que nos hommes se composent de tirailleurs, d'artilleurs et d'hommes
du génie, qu'ils représentent par conséquent les meilleurs éléments,
à la suite d'une sélection étendue, des moyennes et des grandes tailles.
Retenons donc ce chiffre pour ce qu'il vaut, c'est-à-dire comme résultant
mil\. — KTIUE ANTHIliilMILOGIQUE DE I.'aNNAMITE TONKINOIS 325
de l'examen de la taille de gens choisis. Nous donnons ci-dessous quelques-
uns des facteurs ijui enlrenl ilans la coinposiliûii de celte moyenne :
Taille Nombre
1^51 1
1 52 1
1 53-1 °> 57 S
1 57-1 fiO 11
1 tiO-1 H5 .26
1 G5-1 70 17
1 70-1 75 5
Total fi9
Poids. — N" 32. — Le poids moyen est de 52 kil. 200 gr. avec un
minimum de 46 chez un liiailieur et un maximum de67 kil. 520 chez un
artilleur. Le poids moyen des tirailli'urs est de o2 kil. 09 : celui des
artilleurs : 37 kil. 07.
Bustf. — N'^ 09. — Cette mesure a été prise le sujet étant assis sur un
tabouret de trente centimètres de hauteur, adossé h. la toise qui nous ser-
vait pour la taille. Dans cette position, le corps droit, les jambes verti-
cales, les cuisses ne servent nullement de point d'appui et la hauteur
ischio-bregmatique est obtenue facilement en soustrayant du chiffre
marqué par l'équerre la hauteur du siège qui sert à faire asseoir l'exa-
miné.
L'ensemble de ces observations donne une moyenne de 87 cent. 57 dont
les éléments les plus importants sont indiqués ici :
Longueur du buslo Nombre
0">80 1
0 85-0™ 90 46
0 90-0 93 20
0 93 2
Total 69
Nous aurons l'occasion de revenir sur ces chiffres pour étudier les rap-
por.s de la taille avec ses éléments composants, à propos du membre
inférieur, ce (jui nous conduira à noter, dans laraceannamito, les propor-
tions relatives de la brachyskélie et de la macroskélie.
Périmètre thoracique. — N"^ 70. — Nous n'attachons pas à cette mensu-
ration l'importance que certains auteurs lui avaient attribuée, alors qu'ils
l'avaient appliquée au recrutement du soldat français et qu'ils avaient
essayé d'en déduire mathématiquement un coefficient de robusticité. Mais,
jointe k d'autres mesures, comparée à la taille, aux éléments composants
de celle ci, aux diamètres bi-acromial et bisiliaque, elle contribue à nous
donner de précieux renseignements sur les proportions du corps et doit
.■i2(> 6 JUILLET l;»O.J
retenir, sur ce point, l'attention de raiilliropolugislc. Le riiljan mt-lrique,
dans nos observations, passait exactement au-dessous des mamelons et
lechifTreretenureprcsentail l'observation pendant uneexpiration ordinaire.
Le périmètre thoraci(iuo moyen était de 79 cent. o'J, moyenne condi-
tionnée par les fluctuations suivantes :
• le 75-80 35
.le 80-84 [ 35
Tntal 70
Tour de laitle. — IN" (iU. —Nous avons tenu à prendre celte mesure
parce qu'elle nous paraît exprimer un caractère intéressant de la morpho-
logie de l'.Annamite. C'est la circonférence minima de la taille de .M. Ma-
nouvier prise entre les dernières côtes elle bord supérieur de l'os coxal.
La moyenne a été de 6o""':20 avec :
59-GOcra 1
60-65 .... 23
65-70 : ; . 28
70-75 17
Total "69"
Bi-spinal iliaque. — No 37. — Pour donner une idée plus exacte du
tronc annamite, le bisiliaque maximum eût été désirable : mais nos instru-
ments ne nous ont permis de prendre que le bi-épineux, qui, variant pro-
portionnellement au précédent, marque l'écartement des crêtes iliaques.
La ditricullé consiste à bien délimiter le centre des épines iliaques anté-
rieures et supérieures : lorsqu'on est placé dans un bon jour, on les voit
mieux qu'on ne les sent au doigt et il devient alors facile d'en marquer
à l'encre le centre apparent, les extrémités mousses du compas d'épais-
seur étant ensuite appliquées sur ces repères.
La moyenne de nos observations donne un bi-spinal iliaque de
24 cent. 27 avec un minimum de 22 cent. 4 et un maximum de 26 centi-
mètres.
Avant de poursuivre plus avant notre étude anthropométrique, essayons
de dégager des données précédentes la morphologie d'ensemble du tronc
de l'Annamite. Il e?t regrettable que nous n'ayons pu prendre le bi-acro-
mial qui nous eût donné le diamètre maximum supérieur; mais, de la
comparaison des circonférences sous-mamelonnaireet minima de la taille,
peuvent déjà naître des déductions utiles à connaître et confirmant
mathématiquement l'impression qu'emportent les Annamites des gens
étrangers à la science.
Contrairement à certains observateurs nous estimons en elfet que
l'Annamite est plutôt élégant et que ce qui fait le galbe de son buste
réside dans la hauteur de celui-ci et dans la finesse de la taille par lap-
port à la poitrine. L'Annamite attache, à se faire une taille de guêpe,
une importance considérable et il ne faudrait pas se laisser illusionner
nOVX. — KTIDE ANTHriOPOLOr.IQUE DE L ANNAMITE TONKINOIS Ml
par son vêtement ample et llottant pour dire ([iie TAnnamite « n'a pas de
taille » '. Ka plupart, au contraire, se serrent la taille au moyen d'une cein-
ture pour la rendre plus fine : mais nos chifTres montreront sans doute
qu'il y a \h un caractère ethnique qu'on ne retrouve pas dans notre série
d'Européens.
Nous avons examiné à ce sujet 20 militaires européens, Français, dont
l'âge moyen était de "25 ans et dont le tronc, à la simple inspection, ne
présentait pas cette finesse .le taille que l'on remarque chez l'Annamite.
La moyenne du périmètre thoracique a été chez eux de 82 cent. 35 :
la moyenne de la circonférence minima de la taille de 75 cent. 15. Pour
établir entre ces deux mesures une proportionnalité commode à apprécier,
on peut multiplier celle-ci par 100 et diviser par le périmètre moyen : ce
qui nous donnera un indice exprimant la circonférence de la taille en
centième du périmètre. On obtient ainsi, pour les Européens, 91.25.
La même opération, pratiquée sur les moyennes des circonférences
sous-mamelonnaires et minima de la taille chez les Annamites, nous donne
le chiffre de 81.1)4. On voit tout de suite combien est différent ce rapport,
chez des gens d'âge sensiblement égal et entraînés aux mêmes exercices.
La taille élégante des Annamites n'est donc pas une illusion : bien qu'ils
l'exagèrent, en se serrant au moyen d'une ceinture, elle est chez eux
l'expression d'une disposition anatomique naturelle : c'est un caractère
de race qu'il convient de retenir.
Crâne. — Nous rappelons que nous ne donnerons pas ici les résultats
de nos recherches sur l'indice céphalique. Indiquons seulement, pour
mémoire, que findicc moyen des Tonkinois (76 sujets) a été fixé à 83,7
(Breton, Deniker et Laloy).
a) Front. — N" 49. — Prise au ruban, celte mensuration n'est peut-
être pas d'une précision anthropométrique extrême, mais il nous a semblé
qu'elle donnait un renseignement intéressant sur le visage annamite consi-
déré de face et c'est à ce titre que nous l'avons recueillie.
De la racine des cheveux au point le plus saillant de la glabelle.
La moyenne est de 7 cent. 4 millimètres : et, en traduisant en chiffres
l'impression que donnent les fronts des indigènes tonkinois, suivant
qu'ils sont petits ou grands, on voit que les premiers vont de 54 milli-
mètres à 65 millimètres et les seconds de 87 à 95 millimètres.
b) Bi-orbitaire externe. — N° 50. - Pris avec le compas glissière, mo-
dérément serré, immédiatement au-dessus de la suture fronto-malaire,
facile à apprécier sous les téguments. La moyenne a été de 11 cent. 53
avec un minimum de 10 cent. 8 (deux cas) et un maximum de 12 cent. 4.
Face. — a) Nasio-alvéolaire. — N°50. - La pointe supérieure du com-
pas glissière remontant sur le dos du nez jusqu'à la suture naso-frontale,
la pointe inférieure est amenée entre les deux incisives médianes supé-
' ZiNQUETTl. — In Archives de médecine militaire,
1864.
:i-28 0 jtiLLET 1905
riourt's, au nivrau de leur collet. Muyonne : C» cenl. '^'^. Minimum :
r» ct'ul. 1). Maxiuunn : 7 cent. 8.
b) Bi-nnijulairc externe. — N»38. — Distance rejx'Tée au compas-glissière
et comprise entre les angles externes des deux yeux. Moyenne : 9 cent. 2i.
Minimum : 8 cent. 8. Maximum : iO cent. 7.
c) lii-nni)iilaire interne (Papillaull), on inieroadaire (Manouvi'ier). —
N° 38. — l'ris au compas-glissière, outre les angles internes des yeux,
après clTacomenl de la bride falciforme do la paupière supérieure qui
cache, dans certains yeux mongols, une partie do cet angle. — Moyenne :
3 cent. 46. Minimum : 2 cent. 9. Maximum : 4 centimètres.
d) Bizyfjomatique. — N" 50. — Ecartement maximum des zygomas,
obtenu avec le compas d'épaisseur. Moyenne : 13 cent. 98. Minimum :
12 cent, 8. Maximum : 44 cent. 9.
Le diamètre bi-malaire, qui joue un grand rôle dans le faciès mongo-
lique, ne sera pas noté ici faute de repères suffisants pour le déterminer
avec certitude.
e) Bi-fjoniaque. — N» 38. — Pris sur la face externe de la mandibule,
au niveau de l'angle, le masséter au repos, avec les grosses branches du
compas-glissière, modérément serrées.
La moyenne est de 10 cent. 64.
Cette mesure a sans aucun doute son importance dans la reconstitution
d'une face tonkinoise : mais elle est toujours inférieure h la quantité
qu'on serait tenté de lui attribuer de prime abord, avant l'application du
compas : l'illusion provient, comme nous nous en sommes assuré plu-
sieurs fois, de ce que le faciès de « batracien », observé chez quelques
indigènes, tient plutôt à un développement exagéré des massélers qu'à
une véritable éversion do l'angle du maxillaire.
ï) Nez. — N" 70. — Nous avons pris, en ce qui concerne celte obser-
vation anthropométrique importante, deux ordres de chiffres, de façon
à pouvoir calculer l'indice nasal transversal et l'indice antéro-postérieur.
Indice transversal. — La hauteur du nez a été prise en faisant remonter
la pointe supérieure du compas jusqu'au nasion tandis que la glissière
était amenée langentiellement à la sous-cloison, sa pointe butant contre
la partie inférieure de l'épine nasale. La largeur était mesurée au compas-
glissière, suivant le maximum d'écarlement des ailes du nez.
L'indice moyen, obtenu en prenant l'indice des moyennes, est de 73.60.
En prenant simplement l'indice des sommes des facteurs, on obtient le
chiffre de 73.61, plus exact que le précédent puisqu'il représente moins
de décimales négligées dans deux opérations préliminaires.
Cet indice classe nus Tunlvinuis dans le groupe des mésorhiniens. Sur
ce point nous sommes en désaccord avec MM. Denilccr et Laloy qui, de
l'examen de 23 Tonkinois, liraient un indice nasal de 86.2 et classaient
ainsi leurs sujets parmi les plalyrhiniens modérés. Ces Messieurs ajoutent
cependant : « Sauf un cas d'hyperplatyrbinie, il y a dans la série autant
de méso que de plalyrhiniens. » (Oeniker et Laloy, loc. cit.)
ROL\. — KTUDE ANTIIUUlMiUHWQrE DE l'aNXAMITK TONKINOIS 329
Indice tinté) 0 postérieur. — Ia' diam.Hrt! transversal rosl;'.nl 11- même, le
iliaraèlre antéio-poslérieur a été pris au moyen du C(jmpas-glissière : « Dis
tance entre les deux plans verticaux, passant, l'un par la face antérieure
de la ItH-re supérieure, dans la [)artie la plus élevée, l'autre par le point
médian le plus saillant du bout du nez '. »
Le rapport centésimal de la saillie ;i la largeur donne le cliilVre de
iT cent. 03, chill're bien inférieur à celui des Européens, mais supérieur Ji
celui que M Topinard paraît attribuer à la race jaune. « Sur les Nègres
et les Mongols il s'abaisse et peut aller, pensons-nous, au-dessous de 30.
N'ayant mesuré que peu de vivants, nous n'osons préciser. - »
La saillie, mesurée comme nous l'avons fait, représente bien le déve-
loppement du nez en hauteur, car, en dehors de quelques nez à peu près
droits, les autres sont généralement aplatis et c'est bien au niveau du point
où appuie la branche antérieure du compas que se manifeste le diamètre
antéro-postérieur maximum.
Nous ne relevons qu'un nez en lorgnette. Nous verrons plus tard qu'il
est associé à des malformations dentaires et que l'hérédo-syphilis n'est
sans doute pas étrangère à son ellondrement.
g) Oreilles. — N" 70. — Mesures prises au compas-glissière, la hauteur
suivant un axe légèrement oblique partant de la convexité de l'hélix pour
aboutir à la pointe du lobule, la largeur entre les deux portions les
plus distantes de la courbe de l'hélix. — La moyenne des largeurs est de
3 cent. 02; celle des hauteurs de 5 cent. 05. — L'indice auriculaire,
calculé d'après ces chitfres, est de 33.85. — D'une façon générale, on peut
dire que les Tonkinois ont des oreilles fines et bien constituées. Nous ne
relevons qu'une oreille en anse, cinq lobules soudés et un tubercule de
Darwin peu accusé.
h) Bouche. — Nous examinerons ici successivement les particularités
relatives aux lèvres et au système dentaire.
Uvres. — N° 02. — M. A. Bloch a bien montré l'importance que pou-
vaient avoir, au point de vue anthropologique, les observations se rap-
portant il l'orifice buccal '. C'est d'après ces idées que nous avons relevé,
chez nos Annamites, la hauteur et la longueur des lèvres. Les pointes du
compas-glissière étaient appliquées à l'union de la muqueuse et de la
peau, les lèvres étant rapprochées normalement, sans contraction, telles
qu'elles apparaissent à un observateur qui les note, surtout dans leur
hauteur, comme un des éléments importants de la physionomie.
La moyenne des hauteurs a été de 2 cent.043 ; celle des longueurs de
i cent. 77. Que si nous prenons l'indice labial, qui nous exprimera la
hauteur en centièmes de la longueur, nous arrivons au chiffre de 42.77.
* r)"" Papili.ailt. — L'homme moyen à Paris, 1902.
* D' Topinard. — L'Anl/iropologie, p. 367.
' A. Bloch. — Discussion sur les lèvres au point (h- vu»> unllirupologiqu'^. In 0»l-
lelins, 1898.
330
• » JLILLKT l'JUo
^ ... ~:r~:~ ~
.; ' ■ 4" 3 4
3. Sapeur du génie, 27 ans. Taille : d^es. Buste : 0.91 cm. Membre inférieur : 0.77 cm.
Périmètre thoracique : 0.84 cm. Mollet : 0 44 cm. Biceps : 0.27 cm.
4. Sapeur du génie, 31 ans. Taille : ■l'»64. Buste : 0.90 cm. Membre inférieur : 0.74 cm.
Périmètre thoracique : 0.80 cm. Mollet ; 0.33 cm. Biceps : 0.26 cm.
Mais il n'est pas indifférent de connaître approximativement les éléments
qui conditionnent la moyenne des hauteurs, celles-ci correspondant aux
petites, moyennes et grosses lèvres du langage courant. Nous avions
pris soin de noter les lèvres de nos Annamites, d'après ces dénominations,
et les chiffres nous ont rendu compte assez exactement de nos impres-
sions en nous donnant pour les petites lèvres (réunies) de 14-19 mm. de
hauteur, pour les moyennes de 20 à 23 et pour les grosses de 24 à 26
inclus.
En employant cette notation, la proportion des unes et des autres est,
dans nos obser^^ations :
Lèvres petites 22
Lèvres moyennes 33
Lèvres grosses 7
Total 62
Pour donner une portée ethnique aux chiffres précédents et mieux en
apprécier la valeur, nous avons pris des observations homologues sur
un groupe de 20 Européens, militaires, dont l'âge moyen était de 25 ans.
La hauteur des deux lèvres accolées a été de 1 cent. 42 et la longueur,
U(U\. — KTt IIK AMMHnl'uLiK.Kjll-: HK. I.ANN WIITF. TnNtlNOIS ;{."{ I
mesurée suivant l'axe buccal hdiizonlal, «le 5 cent. Kj *. Les deux ilinien
sions envisagées ont donc varié ici en raison inverse des quantités établies
chez nos Annamites : ce qui nous fait présumer que l'indice lahial sera
forcément moindre, le dividende ayant diminué alors que le diviseur a
augmenté. Le calcul attribue h ce groupement de Français un indice de
27.57.
Les Annamites occupent donc, h ce point de vue, comme pour l'indice
nasal, une place intermédiaire entre la race blanche et la race noire.
Dents. — [>es amateurs de jolies dents ne reçoivent pas une satisfac-
tion immédiate dans l'observation des dentures annamites : et l'on est
porté à attribuer aux Annamites des dents de mauvaise qualité lorsqu'on
aperçoit ces organes plus ou moins noircis et sans cesse souillés par la
chique sanglante du bétel. Nous verrons tout à l'heure qu'une observa-
lion plus attentive, question de coloration mise à part, permet au con-
traire de constater que ces dents sont bonnes et bien supérieures à celles
de la plupart des Européens.
Mais nous tenons à nous expliquer tout d'abord sur la coloration des
dents annamites de façon à écarter définitivement, s'il se peut, une ques-
tion qui a été plusieurs fois à l'ordre du jour de notre Société, que d'au-
cuns ont fort bien exposée, mais que d'autres auteurs n'ont pas vue sous
son véritable aspect. <c L'usage continu du bétel, dit Morice ', de l'arec et
de la chaux de coquillage blanche ou rose, qui forme la chique habi-
tuelle, colore les dents en noir, les carie et les déchausse. » M. Atgier,
dans une étude sur la crAniomélrie comparée de crânes mongoloïdes ^
parle aussi du « laquage des dents dû à l'usage du bétel. » Ces deux
opinions concordent donc pour exprimer une chose (jui n'est pas con-
forme a la réalité : le b'Hel n'entraîne au :une coloration dentaire chez les
populations qui ont soin de leurs dents i Indiens, Comoriens, Sakalaves) :
tout au plus leur donne-t-il une teinte sale chez i<>s Annamites qui iw les
nettoyent pas; mais li coloration noire plus ou moins foncée, le « la-
quage » des Annamites et des Thaïs, provient de toute une série de ma-
nœuvres ayant i)our objet d'entourer la dent d'un enduit imperméable
qui dure plusieurs années, ne s'exécute qu'a certaine saison et a pour
but, au dire des indigènes, de préserver leurs dents de la carie. Cette
coutume est fort répandue puisque nos 70 observés avaient tous les dents
laquées.
Notre manière de voir est d'ailleurs celle de tous ceux qui ont habité
l'Indo-Chine pendant un espace de temps suffisant pour y pouvoir observer
à l'aise : déjà Mondière '' avait fait très exactement la même observation :
* M. Testut donne comme moyenne, chez l'homme de race blanche, bS"" et chez la
femme 47. Ce dernier chiffre est celui de nos indigèni.s.
' Morice. — Sur l'aulhi-opolo^ie do l'Indo-Chine. In Bulletins, 1875.
3 D' Atgier. - In Bulletins, 190'j, p. 391.
♦ Mondière. — Monographie do la femme de Cochinchine. lu Bulletins, 1878.
33-2 r, ji iij.KT 1005
il avait lappurlô les drogues (jui servent au laquage et en avait indiqué
très clairement l'emploi.
Par la suite, M. Paul d'Knjoy * est revenu sur cette question et, avec sa
compétence toute particulière des questions indo-chinoises, aboutit au
même résultat que l'auteur précédent.
Laciuagi' ou qualité ethnique? Lequel tle ces deux facteurs peut expli-
quer la l)onne denture des Annamites?
Peut-être tous deux entrent-ils pour une part dans cette disposition hé-
réditaire. — Sur nos 70 .Annamites, dont l'âge moyen est 27 ans, avec
un minimum de 21 et un maximum de 38, nous ne relevons que 9 caries,
en tenant compte des dents avulsées : ce qui nous donne 1 '12« de dent
cariée par bouche. Comme terme de comparaison nos 20 Européens
nous fournissent presque 4 dents cariées par double mâchoire, exactement
3.8o. Ce dernier chiffre est encore inférieur à celui de l'armée française
qui accuse 4,14 dents altérées par individu, et de l'armée allemande qui
. en relève 5,9 '.
Les 9 caries observées se répartissent ainsi :
Molaires inférieures droites 4
Molaires supérieures droites 1
Prémolaires 3 .
Incisive supérieure 1
Total 9
Ces indigènes, à 32 dents par bouche, auraient dû fournir un total de
2.240 dents, tandis que nous n'en comptons, dans nos relevés, que 2,194.
Il y a donc un déficit de 46 dents dont 4 cariées, qui ont été enlevées, et
42 non poussées dont 2 incisives et 40 dents de sagesse. Le retard d'ap-
parition des dents peut se noter ainsi au point de vue de l'âge :
11 sujets de 22-25 ans inclus .... 20 dents en retard
12 sujets de 2()-30 ans inclus .... 12 —
6 sujets de 31-38 ans inclus .... 10 —
Total ... 42
Un des plus âgés (36 ans présente une incisive et deux dents de sagesse
en relard. Nous avons déjà signalé son nez « en lorgnette ».
Nous avons remarqué souvent l'étroitesse des maxillaires par rapport
aux dents inci-ives qui sont, suivant les cas, excessivement serrées et
j) irfois transposées en avant ou en arrière du plan normal. I^es canines
sont en général peu saillantes : les grosses molaires diminuent de surface
utile d'avant en an ièi'<'.
Membre supérieur. — Nous avons réduit au minimum les observations
prises sur le membre supérieur, [(référant mériter le reproche d'avoir
" Paul n'ENJOY. — Coloration dcutairc des Annamites. Jôid., 1S08.
' P'' RicHTER. —Deutsche, militar. Zeitsch., yanvier ^904.
Uor\. Kll UE A.NrilUul'ill.iMJIulK m; l. aNNAMITK lnNKlNii|> XV.]
fourni ;i ce sujot des docuineiils peu iuiporlaiils [tlulùl (|ue de cuiiiif le
rist]uo de présenter des chilïres inexacls. Nous in'gligerons donc nos
rerliorelii'S sur le pouce, les l'"" el H" iMél;ic;ii|>h'ns, pour ulilisrr seule-
ment les relevés se rapportant ii la circonférenci! du bras (au niveau du
biceps), à la largeur niaxima de l'Iunnérus et ii deux dimensions de la
main.
a) (Urconférence du bras au nivi'au du biceps. — l*rise au ruhan métrique,
au point culniiiianl di- lu saillie hicépitale, l'avant-bras ll/'idii à angle
droit sur Iiî bras. Celte mesure otVre un cerlain intérêt, car elle est d'ordi-
naire eu rapport avec la robusticité, avec le développement musculaire
(II- l'individu, surtout luisipn', comme chez l'Annamite, le tissu graisseux
est peu accusé. Kt il était au moins curieux, d'essayer une comparaison
entre ces soldats indigènes et nos Européens, les premiers étant taxés de
débiles par des observateurs inexpérimentés alors que les seconds parais-
sent au contraire réaliser des conditions maxima de vigueur et de mus-
culature.
Chez nos Annamites, la moyenne de la circonférence maxima du bras
a été de 25 cent. 17, avec un minimum de 20 et un maximum de 30 cen-
timètres. Ce dernier chitfre a été relevé chez un homme du génie qui
représente un des plus beaux spécinîens de notre série.
Nos vingt européens, formant un choix d'hommes d'infanterie et d'ar-
tillerie, nous donnent une circonférence moyenne de 27 cent. 5, avec 26
comme minimum et 30 comme maximum. Celui-ci est seul dans la série
et correspond ii un homme superbe.
On voit donc que, chez l'Annamite, les écarts sont beaucoup plus
sensibles que chez les Européens, mais que la moyenne est cependant
encore assez forte et témoigne d'un développement musculaire plus
accentué qu'on ne le croit d'ordinaire,
h) Epilrochléo-épicondt/lien. — N" 50. — Celle mesure marque la largeur
maxima de l'humérus obtenue en encadrant entre les branches mousses
du compas-glissière les points les plus saillants de l'épicondyle et de
l'épitrochlée.
La moyenne est de 64 mm. 0(3, avec un minimum de 57 millimètres et
un maximum de 70 millimètres.
c) LoïKjueur de la main. — N*" 50. — Déterminée avec la glissière, la
main en pronation, les doigts réunis, appuyée, ainsi que l'avant bras,
sur une table. On repère le point inférieur de la stylo'ide radiale, le bord
antérieur de la tète cubitale : une ligne droite joint ces deux points. Une
pointe de la glissière est au milieu de cette ligne, l'autre appuyé légère-
ment contre la pulpe du médius. La moyenne obtenue est de 18 cent 01.
d) Largeur delà main. — N» 50. — Les doigts réunis, la main posée à
plat, suivant la saillie des tètes métacarpiennes. La moyenne est de
7 cent. 75 avec un minimum de 7 et un maximum de 8 cent. 8.
La main annamite donne en général l'impression d'une main longue
et élégante : le poignet est petit, les doigts maigres, parfois termmés par
des ongles très longs et recourbés, surtout au petit doigt. Et cependant.
3a i r. jiri.i.KT \[)0o
en comparant encore aux Amiainitfs nuire stMiedMOuropéens, nous voyons
que les premiers n'ont pas une main beaucoup plus fine que les seconds,
ce qui tendrait ;i prouver que la main « aristocratique » en Indo-Chine,
comme en France, est une main de riche qui se rencontre rarement
parmi les travailleurs manuels.
En comparant, en eiïet, la largeur de la main à la longueur, les Anna-
mites nous donnent un rapport centésimal de -43.04 tandis que la largeur
de la main, évaluée en centièmes de la longueur, trouve son expression,
chez nos Européens, dans le chifTre de 45.69.
Membre inférieur. — a") Longueur. — N" 09. — F^a moyenne du membre
inférieur est de 74 cent. 86. Cette mesure est obtenue en soustrayant la
taille assise (buste) de la taille debout. Elle n'a d'intérêt que par les com-
paraisons auxquelles elle peut prêter : nou'^ ne retiendrons que la compa-
raison au buste qui a une valeur morphologique très importante ainsi
que l'ont établi les travaux de M. Manouvrier.
La moyenne du buste étant de 87 cent. 57, en rapportant à cette
moyenne : 100 la longueur moyenne du membre inférieur, on obtient le
chiffre de 85 cent. 4 : ce qui donne, poar l'ensemble de nos Annamites,
g
un rapport -j,- qui les classe dans la catégorie des brachyskèles. Nous
savons que la taille moyenne, déduite de nos recherches, est de 1 m. 62.
Mais il était sans doute instructif d'interpréter quelque peu ce chiffre
et de vérifier quelle modification lui était apportée suivant que l'on con-
sidérait les tirailleurs (tailles moyennes), les artilleurs (grandes tailles)
ou les hommes du génie (les plus résistants et les plus robustes).
Sur les 69 Annamites observés :
19 tirailleurs donnent : ^ 87.2
32 artilleurs — -g- 85.6
18 hommes du génie ^ ..... . 82.8
On voit que tous ces indigènes sont brachyskèles : ce sont tous des
paysans, adonnés depuis l'enfance aux travaux de la campagne, n'ayant
jamais mené une vie sédentaire, ce qui paraît conditionner, pour une
part, la morphologie que nous leur reconnaissons. Les chilTrcs ci-dessus
démontrent aussi que des hommes de grande taille ne le sont pas forcé-
ment et seulement par leurs membres inférieurs et que les gens les plus
robustes sont aussi les plus brachyskèles, ce qui est sans doute en rapport
avec un fonctionnement musculaire plus considérable qui a réglé, dans
ce sens, l'évolution des différentes parties du corps.
b) Mollet. — N'^ 69. — Circonférence maxima de la jambe prise au
ruban métrique. Le mollet est très développé chez l'Annamite. Nous
trouvons pour nos 69 sujets une circonférence moyenne de 33 cent. 21
avec un minimum de 28 et un maximum de 44. Notre série d'Européens
nous donne une moyenne plus considérable, 34 cent. 7, mais le chiffre
maximum ne dépasse pas 38 cent, 5.
IIOIX. — KTlIiE ANTIlIUil'or.iH'.IQlE l»K I.ANNAMIii: riiNKI.N(il> 335
c) Pied. — TU. — I.argL'ur. Au compas-glissiAn- suivant la ligne t[ui
réunit les ttUt's inôtalarsicnnes. Moyenne : 9 eent. H-2. .Miniinnm : ',> cenli-
mP'tres. Maximum: 11 cent. 3.
Lonijueiir. — Calculé sur l'empreinte planlaire ' suivant deux droites
dont une part du point nitMlien postérieur du talon pour passer par le
milieu de la ligne ijui joint les têtes métatarsiennes et atteint une droite
transversale menée par la partie la [dus anli-rieure du pied. La seconde,
issue du même point postérieur, forine un angle avec la première et se
dirige vers la [»artie la plus antérieure du gros orteil, passant par son
milieu. Les résultats de ces deux modes de procéder sont les suivants :
Longueur du pied.
Suivant l'aie du pied Suivant l'axodu gros orteil
Moyenne 24^-"'84 24c'n95
Minimum .... 22 7 22 8
Maximum .... 27 5 27 5
On voit que les chilïres fournis par ces deux méthodes sont très com-
parables, à quelques millimètres près qui traduisent, pour la seconde,
la plus grande obliquité de la ligne suivant laquelle on calcule la lon-
gueur du pied. •
Avant de terminer ce paragraphe nous entrerons dans quelques consi-
dérations sur un caractère tiré de l'examen de l'empreinte plantaire qui
est regardé, jusqu'à présent, par les ethnologues, comme particulier à la
race annamite. Nous voulons parler de Técartement du gros orteil des
autres doigts du pied : d'où le nom de peuple de Giao-Chi (gros orteil
écarléi atliihué, dans les temps légendaires, aux ancêtres des Annamites
actuels. Legrand de la Liraye, ' le docteur Thorel ^ ont insisté sur ce ca-
ractère ethni(jue qui a fait l'objet d'une communication intéressante de
M. Dumontier parue, en 1890, dans l'Anthropologie '.
Mais, des figures reproduites dans ce mémoire, la première seule repré-
sente bien le type de contour plantaire observé, chez l'Annamite, dans
une proportion que nous fixerons tout à l'heure : les trois autres sont, à
notre avis, des déformations pathologiques qui doivent reconnaître pour
cause le déterminisme habituel de l'hallux varus.
Chez 50 de nos Annamites, nous avons étudié la longueur relative des
deux premiers orteils et l'écartement observé entre eux : nous avons
trouvé :
' Le contour du pied est obtenu, suivant la tecimiiiue hatiiluelle, au moy(-ii du
crayon dédoublé.
* Notes historiques sur la nation annamite.
' Voyage d'exploration en Indo-Chine, Tome II.
i DuMOUTlER. — lo Anthropologie, 1890, p. 651.
'S'M\ »■> ji ii.i.F.T ii»or>
I.c grus urli'il plus long (\uo le second : '.V.^ lois, soil (10 Vo
Lo gros orteil et le second de in(>me longueur : (i lois, soil 12 %
I.e deuxième orteil jiliis long (|ue lo prciTiier : 11 fois, soit 22 %
Le gros orteil écarté du second ; 13 l'ois, soit 26 %
Le maximum d'écartement des deux orteils, mesuré au niveau de la
partie postérieure de l'espace interdigital, était de 14 millimètres. Dans
ces cas il existe une homologie évidente entre la main et le pied : celui-
ci devient alors préhenseur.
Le caractère indiqué, pour le pied des Annamites, est donc réel : mais
n'existe-t-il que chez eux? Inutile de rechercher ce signe chez nos Euro-
péens dont les pieds, déformés par la chaussure, présentent presque tous
de l'hallus valgus et, par suite, de l'eiïacement du premier espace inter-
digital. Mais les Thaïs et les Chinois, qui marchent pieds nus, nous
donnent des renseignements qui valent la peine d'être notés. Chez 50
Thaïs, en procédant aux mêmes mensurations que ci-dessus, nous avons
trouvé :
Le gros orteil plus long que le second : 38 fois, soit 76 %
Le gros orteil et le second de même longueur : 2 fois, soit 4 %
Le deuxième orteil plus long que le premier : 10 fois, soit 20 %
Le gros orteil écarté du second : 10 l'ois, soit 20 %
Le maximum d'écartement était de 14 millimètres.
Pour être un peu moins fréquent que chez l'Annamite, on voit que cet
écartement du gros orteil appartient aussi, à n'en pas douter, h. la race
Thaï.
Chez 20 Chinois, travaillant aux terrassements de la voie ferrée en
construction, nous relevons :
Gros orteil plus long que le second : 13 fois, soit 65 %
Deuxième orteil plus long que le premier : 7 fois, soit 35 %
Gros orteil écarté du second : 3 fois, soit 15 %
Mais cet écartement est bien moins marqué que chez le^; Thaïs et les
Annamites.
Système pileux. — C'est un fait bien connu que les races d'Extrême-
Orient se font remarquer par leur abondante chevelure et par la rareté
des poils il la figure et sur le reste du corps. iNous avons relevé, chez nos
.Vnnamites, les particularités relatives à ces deux caractères descriptifs.
Cheveux. — De coloration foncée, mais souvent parsemés de mèches
plus claires, tirant vers le châtain. Lisses, mais assez fins. L'Annamite en
a un soin tout particulier et ne les coupe que jusqu'à la douzième année,
tant qu'il est « bécon », c'est-à-dire petit garçon. Dans la suite, il est très
orgueilleux de l'abondance et de la longueur de ses cheveux et les tord
en un chignon qui occupe l'occiput et dans lequel il plante un peigne de
bois ou d'écaillé.
nof\. — KTiDE ANriiiini'iii.MiiniK DK I.' annamui-: TuNKiNni- ;^37
La longueur «les clieveux (If nus Aunamitcs vari;iiltleoO-8'J contiuiètics.
Ces organes diminuent avec l'Age, mais moins vite que chez nous : il
est rare de rencontrer, au pays d'Annain, des adultes possédant des crAnes
ravagés par la calvitie. Ils conservent, d'ailleurs, les cheveux arrachés
j)ar le peigne et en fout di's tresses auxiliaires (|ui vienm'iit, en temps
utile, renforcer leur cuill'ure : les femmes, cuuiuie ailleurs, si)ut particu-
lièrement expertes dans la confection de ces postiches, en usent et en
ahuseiit.
La calvitie parait |>lus tard que chez nous.
l'oils. — On note l)ien (]uelqutfs poils de moustache ou de harhe au
menton. Mais ils sont toujours isolés et ne sont jamais assez conlluents
pour arriver à produire une harhe assyrienne ou une moustache gauloise.
Les Annamites ont d'ailli^urs pour habitude de raser les poils de ces
régions.
Au puhis, les poils sont à peu près constants et assez abondants : ils ont
atteint leur développement normal vers 24 ans. Dans l'ordre de fréquence
décroissant viennent ensuite les aisselles et les mollets. Sur la poitrine et
l'abdomen nous n'en avons jamais noté.
Nous arrêterons là les renseignements anthropométriques ressortissant
à nos Annamites : le tableau suivant servira de conclusion à ce chapitre
en reproduisant les |irincipales mensurations permettant d'apprécier la
robusticité des tirailleurs, des artilleurs et des hommes du génie :
Moyennes chez
Mensurations
19 tirailleurs
18 sapeurs
liu génie
'6'2 artilleurs
Taille
IGl^-^Sl
1G0'='"41
163"'40
Busle
80
25
87
01
87 80
MoMilire inférieur . . .
75
21
72
77
75 18
l'iTiiiii-ti-e fliorariqiie . .
70
i5
7!)
05
80 08
("irtdiilV'rfiKN' (le inollel .
31
i:5
33
01
33 IS
<',irconlV'reiu*' hiripilale .
23
92
26
05
25 81
CHAPiruK 111. — Données phvsiolociques et psychologiques.
Après avoir observé, dans que'(jues-uns de ses détails, l'anatomie du
Tonkinois, il faut maintenant étudier (îettc machine humaine en action
dans l'accomplissement des différentes fonctions qui assurent la vie de
l'individu et ses rapports avec ses semblables.
Nous pourrons, ici, entrer dans des considérations plus générales que
précédemment, n'é'tant pas astreint h prendre comme champ d'études
nos seuls Annamites mesurés et pouvant, s'il en est besoin, noter les par-
ticularités spéciales au sexe féminin.
Acclimatement. — Dans le Delta, l'Annamite est bien acclimaté : il
résiste, en particulier, victorieusement au s(jleil, si dangereux pour nos
cerveaux européens. .Mais, dans le Ilaut-Tonkin, les conditions météoriques
soc. d'antiihop. 190;j. 2;^
338
() Jl ll.LET 1905
el lelluritjiH's riiupressioniicii! IVirU'ini'iil cl nous vorfons, dans un autre
chapitre, (juel trihut il paye à la murbidilé cl à la mortalité de la région.
En tout cas, à travail ct;al, il résiste beaucoup mieux «lue l'Européen.
0 6 5 0
5. Tirailleur, 30 ans. Taille : l^e'}. Buste : 0.89 cm. Membre inférieur . 0.74 cm Péri-
mètre : 0 79 cm. Mollet : 0.32 cm Biceps : 0.25 cm.
6 Artilleur, 27 ans. Taille : l^'O. Buste: 0.90 cm. Membre inférieur : 0 80 cm. Péri-
mètre : 0.82 cm. Mollet : 0.3i cm. Biceps : 0.27 cm.
Force musculaire. — Nous n'avons pu, faute d'instruments en temps
opportun, la mesurer au dynamomètre. Mais l'observation de tous les
jours apprend que si la force « manuelle » n'est pas très considérable,
la force « rénale » est très développée : on voit partout des Annamites
portant, au moyen de bambou ou de tiges de bois, sur l'épaule, des far-
deaux très lourds : la femme ne paraît pas être inférieure à l'homme sous
ce rapport. Contrairement k ce qui se passe en Europe, la femme a même
une tendance à rechercher les travaux les plus durs : terrassière, porte-
faix, on la voit aussi s'atteler au rouleau écraseur de façon à permettre
aux dandys d'Hanoï et d'ilaïphong de se prélasser, le soir venu, dans
leurs charrettes anglaises sur un macadam bien uni.
Digestion. — On peut dire que l'Annamite est végétarien : la viande de
porc entre bien dans son alimentation, mais en petite quantité : le riz,
les légumes, les fruits et la chair de poisson sont la base de ses repas.
L'indigène a, en général, un excellent appétit et mange plusieurs fois par
jour. Repas de courte durée, mais pendant lesquels il n'aime pas être
UOrX. — KTIIiE \NTHn(iI'ti(.(ii;i(jUK DE I.'aNN'AMITE ToNKnS'Ul> :{3',)
dérangé, estimant que le repos, inséparable d'uno collation utile, duit être
scrupuleusement respecté. Il préfère les mets épicés et adore un condi-
ment d'odeur fort désagréable, le « niôc-màm < dont il fait une grande
consommation. Cette nourriture n'est pas sans déterminer quelques irri-
tations gastriques auxquelles il faut attribuer, peut-être, les éructations
sonores dont les Annamites, comme les Chinois et les Arabes, vous gia-
tifient après un bon repas.
Les petits enfants ont, d'ordinaire, l'abdouien proéminent : cette dis-
position anormale peut tenir à des troubles intestinaux, liés à des vices
d'hygiène alimentaire, romme aussi ;i des organes spléniques hypertro-
phiés il la faveur du paludisme.
L'intestin est souvent le siège de lombrics, très fréquents en ce pays,
et le foie renferme, dans de nombreux cas, des douves qui ne traduisent
par aucun symptôme leur parasitisme obscur et qu'une autopsie seule
permet de déceler.
Respiration. — Nous n'avons rien noté de spécial de ce côté.
Ciiculaliun — Les pulsations ne nous ont pas semblé différer quantita-
tivement de celles de l'Européen : de conserve avec la température, elles
s'élèvent sous l'influence de la fièvre ou à la suite des émotions. Celles-ci,
comme l'absorption d'une certaine dose d'alcool, mettent en évidence des
phénomènes vaso-moteurs au niveau de la face dont les joues prennent
une teinte spéciale et bien caractéristique.
Appareil génital. — L'homme adulte, nous l'avons dit, a un pubis dont
le système pileux est assez développé : chez la femme le mont de Vénus
est moins bien doté sous ce rapport.
L'organe mâle, au repos, est en général de petit volume, le gland lar-
gement découvert : nous ne notons qu'un phimosis sur 70 observations '.
La puberté apparaît chez la femme vers 14 ans, chez l'homme vers
46 ans. Les seins de la femme se développent tardivement, mais se con-
servent longtemps. Un a l'occasion fréquente de voir, dans les villages,
des femmes de 35 à 40 ans dont les seins pointent sous la légère étoffe
qui sert à les voiler, sans que ces organes aient besoin, pour garder cette
situation, de l'instrument antihygiénique qui, sous prétexte d'utilité, met
en évidence, chez nos femmes d'Europe, les deux attributs les plus appa-
rents de leur sexualité. Chez des femmes de maison publique, nous avons
aussi constaté combien les seins conservaient une forme juvénile malgré
la débauche dans laquelle ces femmes vivaient depuis plusieurs années.
La durée de la gestation est de 9 mois lunaires : les accouchements
gémellaires sont rares : il est exceptionnel d'observer plus de deux enfants.
Organes des sens. — La vue est très bonne : il est rare d'observer des
' La circoncision n'existe pas, en tant que pratique génirale et rituelle, chez lea
Annamites.
340 fi jiii.LET 1905
maladies de l.i lôfrai-lioii. — L'ouïe est excellente, l'odorat elle goiU nor-
maux (juoi(]ue hén'ditaireinrnl dirigés vrrs la récolle d'impressions dif-
férenles de celles que nous reclierclions d'habitude.
Voix. — Les voix mdles, telles que nous en obseivons chez nous, sont
rares : dans le chant, l'Annamite détone constamment, ce qui ne l'empêche
pas d'arriver à éinetlie juste la dernièie note dont il a retenu la hauteur
et la portée. .Mais les ureilles dt'dicates, dont le lynq^an sensible est oi'ienté
pour recueillir les impressions musicales, feront bien de se tenir à l'écart
d'un groupe de chanteurs annamites.
Langage. — Il ne débute, chez l'enfant annamite, pas plus tôt que chez
les nôtres : sa taille moindre, son ensemble plus gracile ont probable-
ment induit en erreur les observateurs qui ont cru que l'Annamite était
plus précoce pour parler.
Fondions inlellecliielles. Moralité. Qualilt'-s. Vices et défauts. — a) Intelligence.
— Tous ceux qui ont écrit sur la race annamite, après avoir été en contact
avec elle, s'accordent à reconnaître que les unités de ce groupement eth-
nique sont douées d'une vive intelligence. Nous savons bien que celte
faculté psychique est diverse et qu'il conviendrait encore de l'étudier,
chez le Tonkinois, dans ses différents modes : mais, puisque nous avons
affaire à des gens du peuple et à des soldats, issus de la même origine,
il suffira de constater qu'ils ont celte intelligence générale qui consiste
à saisir vite et bien les explications qui concernent les choses de la vie
ordinaire et qu'ils font preuve d'invention et d'adresse en exécutant
ensuite un travail ou un mouvement parfois mieux que ne le concevait
l'Européen qui en a donné l'ordre.
On voit souvent des hommes de race blanche s'emporter contre des
Tonkinois et se laisser aller, devant leurs physionomies immobiles, à de
violentes colères, sous prétexte que ces gens exécutent mal un exercice :
dans la majorité des cas, les fautes proviennent de ce qu'ils comprennent
mal ou ne comprennent pas, à cause d'un interprète défectueux ou à
raison de son absence même; et l'Européen a grand tort de s'acharner
vainement à réveiller, chez ses administrés, des images auditives ou
visuelles qui seraient furt en peine de s'associer à des images motrices,
les premières n'ayant jusqu'alors jamais impressionné sous cette forme
le cerveau annamite.
Mais loi'stjue l'Annamite comprend le français, ou lorsqu'on a un bon
interprète, on se loue de sa facilité à apprendre. Un soldat se dresse en
peu de temps cl relient rapidement le maniement ou le montage de son
arme. Et rien n'est même curieux comme de voir ceux de ces indigènes
qui parlent notre langue ;i côté des soldats de l'infanterie coloniale ou de
la légion; en général ceux-ci leur sont inférieurs tant au point de vue de
l'élégance physique que de raffinement intellectuel.
La mémoire est très développée ; et cette qualité se remarque surtout à
l'occasion d'actes ou de fonctions se rapportant à des choses qui leur étaient
»iU\. KTIhE ANTimopKl.or.KjlE l»K l."\N\\\im: n>NKIMi|> 'Ml
complèlemenl ôtraiii^ères avant noire occupation, l'n cuisinier vtiit faire
un plat à la française : il le répétera de façon exacte, àquclque temps de
là. Le maître d'hôtel auquel on a appris à lleurir imk- table, à oiïrir une
gerbe de Heurs aux dames invitées, à mettre d'une certaine manière le
couvert, conserve précieusement emmagasinés dans son cerveau tous ces
menus détails et exécute son service avec une adresse n'inanjuable. .
On pourrait reprocher au Tonkinois île maïupier un peu d'initiative,
délie lio|» souvent un copiste lidèle, un imitateur étonnant : mais cela
provient sinlmil de rr que ses mœurs sont dilTérenles des nôtres et qu'il
sait, par expérience, ipiaiid il est au service d'européens qu'il n'a pu encore
étudiera loisir, que son initiative est parfois peugoiU(''e et lui attire souvent
des désagréments. Car le Tonkinois est très observateur : il a tôt fait
d'analyser un Européen et de connaître ses défauts : ces derniers servent
à alimenter les conversations entre camarades : la moquerie est, chez eux,
sans cesse ;i Torilre du jour.
b) Sensibilité. — Les sentiments affectifs sont moins développés que chez
les races blanches : peut-être nous restent-ils plus cachés en raison de ce
fait qu'ils trouvent, moins souvent que chez nous, leur expression phy-
sique dans des jeux de physionomie. Les sentiments envers les parents, et
surtout envers le père, sont cependant très développés : mais la religion
des ancêtres intervient pour fortitier ce penchant naturel.
Quant à la joie et à la douleur, elles se traduisent par des rires joyeux
ou par des cris perçants et douloureux : ceux-ci sont surtout de mise à
l'occasion des enterrements et augmentent d'intensité avec le degré de
parenté et le rang du décédé. Mais^ s'ils viennent à cesser, on est tout
éionné de ne constater sur ces visages, tout à-l'heure contractures parla
tristesse, aucun indice de larmes. Ce fait s'observe non seulement chez les
pleureuses de profession mais encore chez les parents ou à l'occasion de
souffrances physiques.
La sensibilité h la douleur est-elle moindre chez le Tonkinois que chez
nos races d'Europe? Exception faite pour certaines individualités, on peut
dire que, chez eux comme chez nous, la résistance à la douleur est plus
grande dans les classes pauvres que dans les classes riches : les gens de
la campagne, au Tonkin, présentent souvent cette hypoesthésie relative.
Nous la retrouvons aussi, chez nous, dans la même catégorie sociale : et on ne
compte plus les cas de paysans sur lesquels on taillade un phlegmon diffus
sansqu'ils profèrent uneplainle ou les jeunes soldats auxquels nous enle-
vonsdes dents trop cariées et cependant douloureuses sans une défense
effective de leur part.
Nous n'osons donc pas affirmer que l'Annamite est moins sensible a la
douleur, comme le font délibéreinment tant de gens qui débarquent en ce
pays comme en terrain conquis et se croient obligés de parler à leurs
serviteurs avec le rotin, n'ayant pas assez d'intelligence ou de volonté
pour entreprendre l'étude de la langue et essayer de se faire comprendre
avec leur cerveau.
34-2
6 JUILLET 190."»
c) Volonté. — Cflle-ci est très développée, souvent soutenue par la
fierté et l'amour-propre qui la conditionnent fréquemment. Il est heureux
qu'elle s'exerce parfois pour de bonnes causes ; mais ce n'est pas le cas
général : on la voit trop souvent lutter contre les idées du maître : le ser-
viteur ou le soMat annamite est têtu : il s'essaye à applicjuer ses idées
personnelles : c'est la revanche de son assujettissement. Cette volonté,
soutenue par un amour-propre très répandu, mêmechezlesjeunes, explique
en partie leur stoïcisme devant la souffrance ou devant la mort. Mais,
dans ce cas, ils se sont le plus souvent suggestionnés par l'obsession d'une
idée fixe qui élimine tout autre fonctionnement de centres cérébraux: tel
ce cas d'un prisonnier^ soigné dans une ambulance indigène^ que nous
avons vu s'amputer la région antérieure de la langue d'un coup de dent,
plutôt que de retourner dans une prison où l'attendaient l'inanition et les
mauvais traitements. Tel encore cet indigène illuminé prétendant que le
« mà-qui » (fantùme) l'empêchait de travailler et subissant à deux reprises
jusqu'au sang, la bAtonnade d'un maître imbécile et cruel avant de
reprendre sa tâche habituelle. La maladie, cependant, a parfois raison de
leur volonté : car, dans le Ilaut-Tonkin, l'Annamite du Delta ne se sent
pas chez lui : il est fréquemment atteint de mal du pays et cette asthénie
7. Tirailleur, <iU ans. Taille : ln>oG. Busle : 88 cm. 5. Membre inférieur : 0.78 cm. Péri-
mètre : 0.78 cm. Mollet : 0 30 cm. Biceps : 0.23 cm.
8. Tirailleur, 27 ans. Taille : lo'62. Baste : 0.87 cm. Membre inférieur : 0.75 cm. Péri-
mètre : 0.77 cm. Mollet : 0.28 cm. Biceps : 0.20 cm.
noix. — KTIPE ANTHUnroi.iKiluCE HE I.' A VN VMITE TuNKlMMS '^V^
nerveuse est préjudiciable au jeun»' soldat qui pay»^ alors rapidi'ui«'nl sou
tribut ;\ l'endémie palustre. La lièvre bilieuse h<''moglobinurii|ii(', en par-
ticulier, dont ils n'ignorent pas la gravité, abat les plus courageux.
« Ce peuple de tJiao-Cbi, dit Luro, était léger, changeant... » l/esprit
de suite, en elîet, n'est pas fréquent oht'z le Tonkinois. Inventif, nous
l'avons dit, mais se dégoûtant vile d'un travail assidu, insouciant et
prompt à la colère, (lelle-ci, en particulier chez les femmes, dégénère en
colloques rageurs au couis desquels les injures et les gestes obscènes
trouvent souvent leur place et se termine par des corps à corps où les
mains dt'roulent et tiraillent les longues chevelures noires.
d ) Religiosité. — En prenant ce mol dans son acception la plus étendu^,
on peut dire que l'.^nnamite possède héréditairement l'aspiration psy-
chique h laquelle il s'applique. Les tii-ailleurs, lorsque la nuit arrivait,
allumaient des torches pour continuer la route : les cris de joie de la
journée avaient cesse : il parlaient bas, car ils avaient la crainte du tigre
qui, Ji celte heure tardive et dangereuse, est appelé « Monsieur le Tigre ».
La nuit est favorable aux « mà-qui » Ames errantes, privées de sépultures,
sournoises et qu'il faut apaiser à tout prix. En traversant les endroits
dangereux, lorsque les rivières ont grossi et ne sont pas guéables, les
Tonkinois brfilent, s'ils le peuvent, des baguettes d'encens pour se rendre
favorables les mauvais génies. F^e long du Fleuve Rouge, au niveau des
principaux rapides, ils ont édifié sur terre ferme de petits pagadons. Par-
tout enfin, en face de la nature (jui riqipriiiic et (|u'il craint de ne pas
vaincre, l'indigène a peur, se fait petit et respectueux. Il est plutôt ani-
miste et fétichiste que bouddhiste : le culte de (jakyà-.Mouni ne l'intéresse
que médiocrement.
Nos militaires indigènes sont admis dans les formations sanitaires que
nous avons fondées, lorsqu'ils sont malades : c'est le règlement : c'est
bien aussi, parfois, h leur corps défendant, Car, bien que les médecins
soient là, comme presque partout, les représentants d'une humanitf' (|ui
ne connaît pas de races, les patients auraient préféré, si on les avait
laissé faire, s'en aller vers un sorcier quelconque qui, revêtu d'ornements
quasi sacerdotaux, et au bruit d'un orchestre cacophonique, aurait sûre-
ment débarrassé son organisme de ce mauvais génie qui a constitué la
maladie en se glissant en lui.
(•) l'diriotisme. ~ Ce serait mal connaître les Annamites que de sus-
pecter leur patriotisme : ils ont prouvé, d'ailleurs, au cours des siècles,
combien ils tenaient à leur indépendance et qu'un empire aussi puissant
que la Chine nt-tait pas toujours capable de refréner chez eux ce senti-
ment intime. Il faut voir avec q_uelle joie le soldat du flaut-Tonkin des-
ci'nd dans le Delta, avec quel sourire de satisfaction il parle d'Hanoï qui
est pour lui la ville rêvée, la capitale glorieuse. Dans le Ilaut-Tonkin, qui
était anciennement comme un Etat-tampon, une « Marche » entre le Ton-
kin et la Chine, tout est mauvais k son avis : l'eau, le riz, l'alimentation
quelle qu'elle soit. Le Delta restera toujours à ses yeux le pays idéal, la
W-H (t jui.i.KT 1905
terre promise et elTectivement occupée par sa race qui, de là, s'est essai-
niée on bandes guerrières et conquérantes vers l'Annam et la Cochinchine.
Ils ont d'ailleurs conservé précieusement le culte des deux héroïnes qui
luttèrent, aux temps légendaires, pour leur indépendance, contre les
Chinois, et la Pagode des Uames, aux environs d'Hanoï, perpétue ce sou-
venir patriotique.
11 n'y a {)a.s si longtemps que le vénérable l'IiAnh-Thành-Giang, qui
fut chef de l'ambassade annamite à l^aris en 4863, préféra mourir en
s'ouvrani les veines plutcH que de voir les Français s'emparer des pro-
vinces dont il avait la garde.
L'Annamite est donc patriote et il ne peut venir à l'idée de quiconque
réfléchit sérieusement de penser qu'il est dévoué à la France.
Il obéit maintenant parce qu'il a peur : mais il se tournera contre nous
il la première occasion. Ce sont là des choses qu'il est d'usage de cacher
en disant bien haut que le Tonkinois supporte non seulement notre civi-
lisation mais la reçoit avec plaisir et comprend la grandeur de notre mis-
sion chez lui. Nous adressant à des collègues qui ont pour habitude de
réfléchir et qui représentent une élite intellectuelle, sachant par avance
et non sans plaisir que ces lignes ne s'égareront pas sous les yeux de ce
qu'on est convenu d'appeler le Grand Public, nous n'avons aucune raison
de ne pas nous départir de la prudente réserve que leur situation impose
aux fonctionnaires qui gèrent notre colonie d'Extrême-Orient. Et on com-
prendra sans peine que l'Annamite, tout en reconnaissant notre supério-
rité, ne nous aime pas; la guerre a ravagé ses provinces que nous avons
conquises : comment aurait-il oublié cette blessure qui date à peine de
20 ans? Nous avons modifié ses mœurs, réformé son administration et
sa justice pour y mettre plus de droits et plus de liberté ; soit : mais il ne
nous en a aucune reconnaissance : il tient tellement k ses anciennes
mœurs qu'il préférait ses chefs prévaricateurs et sa justice cruelle.
Comme Montaigne, Paris, il aime sa patrie « jusque dans ses ver-
rues ».
Quelle prétention enfantine et ridicule, d'ailleurs, que de vouloir en si
peu de temps façonner à noire image une race si difTérente de la nôtre
alors que, pendant des milliers d'années, les Chinois n'ont pu l'absorber,
quoique la dominant par les belles-lettres, la religion et les mœurs fami-
liales qu'ils lui ont transmises?
f) Vertus domestiques. — On retrouve chez le Tonkinois l'ensemble des
coutumes que l'on connaît à la famille d'Extrême-Orient et sur lesquelles
nous avons insisté, dans un précédent travail, à l'occasion de la race
Thaï.
Rappelons simplement l'autorité du père de famille, la déférence des
enfants ;i son égard, les soins accordés aux vieillards et aux infirmes,
l'écuelle toujours prête pour le pauvre qui passe, le droit au gile accordé
au voyageur qui le demande.
g) Moralité. — Il est courant d'entendre dire que les Annamites sont
IliH \. — KTI liK AMIIIliil'dl.iHilulK liK l.'vNWMITK TdNKlNOIS 3 If)
des voli'urs; eu vuici, entre autres, une afiirmation r'crite : « Ils possèdent
tous le germe du vol, ce mut (Hanl pris dans un sens ahsolu, et ce germe
éclol à la premièie occasion... Le caï ou chef d'i''(|uipe pr*'lève son grain
de riz, sur la ration des travailleurs... li'liuinnu' du peu[)l<.' dcrobt' C(; (pi'il
peut » '. Nous avons à peine besoin d'ajouter (pir ccltL' opiuioii est par
trop absolue; les militaires indigènes (pu; nous avons connus ne méri-
taient aucunement cette accusation inl'amaute : ils faisaient même fort
bonne figure, en tant (pi'liouu(Heté, auprès des lidupes européennes (pii
se trouvaicut à proximité. Ou dira sans doute ipie la discipliue militaire
les rendait piudents; il se peut : mais nous savons, qu'eu France même,
le gendarme est pour beaucoup de gens la uieilleuic sauvegarde de' leurs
défaillances morales.
Nous ne pensons pas, d'ailleurs, que le paysan aniiaiuile, (pii repré-
sente la grande majorité de sa race, ditfère beaucoup de notre paysan
sous le rapport de l'honnêteté : tous deux ont une morale spéciale et con-
sidèrent comme de droit bien des menus larcins qu'un propriétaire trop
rigoureux classerait dans les délits à poursuivre.
Nous nous expliquons surtout la mauvaise opinion, que les Européens
emportent de l'honnêteté des Annamites, par les raisons suivantes : d^On
juge trop souvent de l'ensemble d'après les serviteurs ou les aides immé-
diats ; inteprètes, chefs d'équipe, etc.; or ceux-ci ont été déformés déjà,
moralement, dans les villes qu'ils ont habitées après le départ de leur
village; 2° Ce ne sont pas toujours les meilleurs d'entre les paysans qui
briguent ces fonctions spéciales, surtout lorsqu'il s'agit d'une colonne,
d'une expédition ou d'une ascension dans le Haut-Tonkin; 3° Les Euro-
péens, par paresse, leur donnent parfois trop de liberté et les exposent à
des tentations désastreuses. Témoin cet Européen qui confiait h son boy
la clé de son coffre-fort; -i"* Les mœurs licencieuses de certains de nos
compatriotes les maintiennent difTicilement dans une voie vertueuse et
leur inculquent mal un respect qui ne nous est dû que si nous le méri-
tons.
(Juant à la franchise on ne saurait en faire une (jualité courante de
l'Annamite. Le nn-nsonge est un de ses défauts les plus communs. Nous
aurons l'occasion de constater le contraire dans la race Thaï. 11 nous a
paru difficile de discerner le pourquoi de ce mensonge perpétuel C'est
peut-être parce qu'ils ont peur de nous et iju'ils escomptent sans doute le
bénéfice d'un mensonge accepté alors qu'ils n'ont qu'une médiocre con-
fiance dans l'immunité d'un aveu. Il serait intéressant, à ce sujet, de
savoir s'ils mentent aussi couramment entre eux; nous avons tout lieu de
penser qu'il en est ainsi. Pris sur le fait, ils opposent une dénégation
formelle à l'interrogation qu'on leur adresse. En voici un exemple : deux
tirailleurs, dans une maison indigène, étendus sur un lit de camp,
fumaient béatement des pipes d'opium, plaisii" défendu et poursuivi dans
les régiments indigènes. A travers les ais d'une porte disjointe nous
' Paris. — I '.\niminito. Si'S caractères etlinifjues. In Anthropolor/ie. 1891, t. II.
340
fi Jl II.I.F.T 100."
observions leur manf'^ge ; hruscjiicuu'nl, l'ami (jui nous accompagnait
ouvi'o la porlc : nous p/'iicHrons aussitôt : les deux coupabies, drossés sur
leur lit de camp cl saluant, assurent (ju'ils ne fument pas, cependant (juc
leur [)ipe vient rouler devant nous et (jue nous avons sous les yeux la
diMUonslration évidente de leur funeste passion.
b> Vires. - Jeu. — Ou a granil'peiue à empèclier li.'s militaires tonki-
nois d'aller à la maison de jeu : celle-ci existe encore dans certains terri-
toires et les enfants, dès l'Age où ils ont f|uelques sous, la fréquentent
assidûment. Les Annamites sont d'ailleurs d'excellents joueurs, calmes,
froids, impassibles et les maisons de jeu retentissent rarement de disputes
ou d'altercations violentes.
•J 10 'j li:
9. Tirailleur, 22 ans. Taille : ["'bô. Fkistc : 0.80 cm. Membre iiilcrifur : 0.75 cm. I^éri-
mèlre : 0.76 cm. Mollet : 0.33 cm. Biceps : 0.25 cm.
10. Tirailleur, 2'i ans. Taille : 1">;j6. Buste : 0.8b cm. Membre inférieur : 0.71 cm. Péri-
mètre : 0.8-2 cm. Mollet : 0.?.l cm. Biceps : 0.25 cm.
Opium. — C'est un danger croissant et l'on se rend compte de l'attrait
de cette drogue en constatant combien il est diiricile d'en préserver nos
indigènes. Dans les petits postes surtout, où l'homme s'ennuie, où il
regrette le pays natal et la famille, il cherche avidement l'oubli dans la
précieuse pipe qui détériore son organisme et le livre encore plus facile-
ment à la rigueur du climat. Les jeunes soldats sont vite dominés par ce
sinistre poison; on les voit alors fréquenter la salle de visites, hâves,
pâlis, exténués, les membres brisés, les pupilles dilatées, ce qui donne h
leur regard un éclat et un aspect tout particulier.
noix. — KTLDK AMllHOi'nl.udlijLK DE l.A.NNAMUK loNKINnlS 'Ml
Pédérastie. — I/alluro eiïf^minée des Annamites, lours longs c1h'v<'UX,
une certaine similihuJe clans les vêtements des deux sexes, sont des rai-
sons suflisantes pour expliquer que beaucoup d'Européens aient tendance
à les accuser de ce défaut. En tout cas ce vice n'est pas en honneur
comme chez les Chinois, où des mignons sont entretenus par tous ceux
qui peuvent se payer ce Inxe. Nous pensons même (jue la pédérastie est
rare à la campagne. A la ville elle devient, comme dans nos grandes
villes, le prix des passions séniles ou des appétits des dégénérés sexuels.
Chez les soldats in.ligénes du llaut-Tonkin, malgré les enquêtes aux(iuelles
nous nous sommes livré et les renseignements qui nous ont été fournis,
il nous a été impossible de la mettre en évidence. .Mais il ne paraît pas
improbable que, comme dans les groupements analogues d'Europe, cer-
taines individualités ne se livrent h cett<; aberration sexuelle. Nous nous
basons, pour soutenir cette opinion, sur ce (pie les .\nnamites, très ama-
teurs des femmes de leur race, en sont privés dans le llaut-Tonkin ou ne
fréquentent [)as les maisons publiques qui en renferment. Les visites de
santé, en nous révélant de très rares cas de contagion vénérienne, par
rapport aux troupes européennes voisines, nous autorisent à penser que
nos militaires tonkinois dévient leur instinct génésiipie ou s'astreignent à
une chasteté qui paraît un peu prnblématitiue.
Nous arrêtons là cette étude de psychologie et de morale: mais nous
en avons assez dit pour démontrer que cette race, tout comme une autre,
si elle a ses défauts a aussi ses qualités. Et il n'est pas sans intérêt de
signaler celles-ci car les ethnographes ont eu, il nous semble, trop de
tendance à exagérer ceux-là.
CiiAPiTitK IV. — Données i'Athologiques.
Ceci ne saurait être un chapitre de médecine : mais il semble cepen-
dant que des renseignements généraux sur la pathologie de nos Anna-
mites rentrent dans le cadre de cette étude, car, suivant le mot de Térence,
rien de ce qui louche à l'homme ne sauraitdemeurer étranger àl'anlhro-
pologiste.
Les maladies du Délia ne sont pas celles du Haut-Tonkin : dans cette
dernière région le paludisme sévit avec plus d'intensité et la mortalité
est plus considérable : et il convient de retenir que les Annamites envi-
sagés faisaient leur service inililaire dans ce pays, en bordure delà fron-
tière de Chine. Voici, à titre de document, la morbidité « hospitalière »
qualitative et quantitative, d'une compagnie de tirailleurs stationnée à
Pho-Moï, prèsdeLao-Kay, en 1902. L'elTectif moyen était de 170 hommes :
.4. Pathologie médicale :
a) Paludisnii- : Kii'vre paluiléeum- .... 57
1
Aices iiernnicux '■
Anétnie pahuléenne ...... i*^
Cachexie paludéenne
Bilieuse hcmoglobinuriquc . . . • '1
.•^18
6 JlIl.LET 1905
h) Appai-fil n's|»iralniiT : Lai'.viii.'itp aigiir
IJntiH'liitt' sim|ilt'
l'ncuindiiit'
Broiwhit»' cliroiiiciiif
TiihorculDSO |nilm<»iiair(' . . . .
f) Appart'il (lii;estir : Ictèn' calarrlial . .
f/) Svstt'mc nt'i'vciix : S(iatiqut« . . . .
Mvt'litt' aiiiut'
r) Malailii's jiéiiéralt's : Orfilloiis.
Dysenterie
/■) Parasites : Td'nia
Tctal
2
s
1
7 (lubciculosc probable)
2
1
1
1
9
1
112
R. Paf/iii/of/ic rhiriirf/icale ■•
a) l'i-aumatisines : l'Iaies des nicinhres inlé-
rieurs
Morsiire de chien
('-ontusion vertébrale
Subluxation vertébrale ....
6) Face : Conjonctivite
Otite
Pohpes de l'oreille
Polypes du nez
c) Tissu cellulaire : Furoncles
Anthrax
Phlegmon
.\dénite
fi) Fistule anale
Total
29
C. Maladips rritèriftines :
blennorragie .
Orchite'. .
Total
D. Maladïps ih- In peau :
Gale. ... .
Herpès circiné
Total
Il ne faut pas oublier que, dans ce relevé, les malades à la chambre
nous échappent et (lu'ils constituent cependant un appoint pathologique
considérable. Les malades graves ou chroniques seuU sont hospita-
lises.
Dans la statistique que nous venons de donner nous arrivons donc a
un total de 146 hospitalisations, représentant 85 0 U du chiffre de l'effectif :
norx. — KTUDE A NTHROPOLOCiIQUE DE l'annamite TONKINOIS .\\\)
le paludisme, sous ses diverses formes, coniplo pour 50 0/0 dan.s U:
nouibre des enlrées à l'hùpital.
Le paludisme est donc la maladie duuiiiiaiile, moins cependant que dans
les troupes européennes où olle atteint facilement 70 0/0 du chiIVre global
des maladies. De plus TAnnamile y résiste mieux que nous quand vilam.
Mais il ne présente jamais contre cette infection une immunité absolue : il
jouit seulement d'une immunité relative qui est réelle et (jui a été constatée
par tous ceux ((ui ont vu et décrit le paludisme de ce pays. Les nouveaux
arrivés payent rapidement l«'ur Iribul h l'endémo-épidémie régnante :
ceux qui y résistent peuvent ensuite rester dans le pays ûa longues
années et il font alors plutôt du paludisme chninique que du paludisme
aigu. (Certains postes du Haut- Tunkin possèdent des tirailleurs (}ui sont
dans la région depuis {] ou 7 ans.
La bilieuse liémoglobinurique elle-même ne paraît pas les atteindre
avec l'acuité qu'elle présente chez les Européens : il semble que ces gens,
de tempérament différent du nôtre, ne réagissent pas contre ces deux
maladies de la même faeon que noiis. D'ailleurs, sous le nom de bilieuse
hémoglobinurique, on comprend actuellement des états morbides fort
divers, et il faut attendre d'être plus exactement fixés sur cette maladie
pour en apprécier la distribution géographique.
Nous n'avons jamais observé de fièvres éruptives : la variole existe
cependant souvent dans la population, mais nos militaires en sont pré-
servés par les mesures préventives représentées, en temps opportun, par
les vaccinations et les revaccinations.
Les populations au milieu desquelles vivent nos soldats sont fréquem-
ment atteintes de goitre : nous n'en avons jamais observé chez les .\nna-
mites immigrés.
La fièvre typhoïde est rare : le rhumatisme articulaire aigu, presque
inconnu. Il faut avouer que le « froid » humide est cependant en
permanence, l'hiver, dans la région : mieux vaut dire que l'organisme
annamite est réfraclaire ou l'agent infectieux, encore inconnu, peu
virulent.
Nous n'avons observé, en :20 mois, aucun cas d'appendicite. Allaire de
race, d'alimentation ou de climat? Nos soldats européens, qui en sont
déjh atteints moins souvent en Algérie qu'en France, en ont été aussi
indemnes durant la même période.
Les diarrhées sont moins fréquentes qu'en Cochinchine. La dysenterie
est souvent constatée : de 1897-1903 les registres de l'ambulance de Lao-
Kay avouent lf»9 cas avec :24 décès.
Les plaies aux jambes dites « plaies annamites » représentent une
affection fréquente chez des gens qui ont souvent les mollets nus, d'où
exposition aux piqûres et aux excorations. On a écrit des volumes sur
ces ulcères et chacun a exposé des modes de traitement variés et divers.
Après une expérience de plusieurs années nous pensons, connue nous
l'avons décrit ailleurs :
350 •'» jni.i.KT 1905
1" ijno le paiisoincnl sec, applniiu; sur ces plaies, au début, est une
mamvuvre mauvaise et anlicliiruigicale.
û° Que le pansement humide, fait suivant ecilaines règles, avec l'appli-
cation éventuelle de topi(pies modificateurs et temporaires, est la méthode
éectuHs.
:{" Hui' ti>ufe piaii' " annamite » qui ne guérit pas ainsi est justiciable
en outre de l'iodure, à moins qu'il ne faille en même temps relever l'état
général (cachexie).
Maladies simulées. — b'n'Mjuentes et de même ordre que celles observées
chez les Européens : mais rien ne vaut l'Annamite pour se donner un air
souffrant et tragique, avec ses longs cheveux dénoués et emmêlés, ses
yeux qu'il s'est bien gardé de libérer de la chAssie nocturne et son visage
crispé quand il implore le médecin d'une voix tremblante. Les iluctuations
du chiffre des visiteurs médicaux sont directement proportionnelles au
travail exigé, ici comme ailleurs.
Maladies provoquées. — Assez fréquentes, allant jusqu'à la mutilation.
Dans les derniers mois de notre séjour, nous avons vu deux soldats
annamites qui, pour échapper à un chef de poste qu'ils redoutaient, se
sont tiré une balle dans la jambe gauche : l'un eut le mollet emporté;
l'autre un fragment de tibia de 0.10 centimètres.
— Nous n'avons pu, faute de temps, prendre à Hanoï les renseigne-
ments démographiques que nous voulions recueillir : mais le fait est que
la race annamite augmente sans cesse, malgré toutes les vicissitudes
qu'elle a été contrainte de traverser. Les vaccinations, les mesures d'hy-
giène pour la première enfance et l'hygiène générale sont de nature h
favoriser l'accroissement de la population, car, en ce moment, si nous
exploitons le pays, nous ne le peuplons pas et le danger ne saurait venir,
pour l'Annamite, que de ce côté. Mais l'horizon politique est loin d'être
serein : souhaitons à nos protégés qu'ils n'aient pas à changer de maître
pour recevoir des occupants ayant non seulement besoin d'argent mais
de terres. Ils disparaîtraient alors rapidement et pourraient répéter la
phrase de la vieille namaquoise de Barrow : « En ce temps-là on ignorait
ce que c'est que d'avoir le ventre vide : h peine aujourd'hui peut-on
se remplir la bouche! »'.
< [il ToPlNARD. — L'Anthropologie, page '129.
\r<;iEI<. — I.V VIENNE AlA TK.Ml'S l'UÉlIlSTitllInl 1>. 351
LA VIENNE AUX TEMPS PRÉHISTORIQUES.
I'aK m. LK I)'' AiiJlKU.
Au cours df ni;iiiil(? oxpluralion dans tous les cantuns du département
de la Vienne, pendant l'année \H\}'2 et pendant l'année IH'.tT, nous avons
recueilli de nombreuses notes sur les restes des temps préhistoriques,
notes provenant de nos observations personnelles d'une par» et prove-
nant d'autre part de tous les documonis écrits ou verbaux i|ui' nous avons
pu recueillir cbemin faisant.
Ces notes forment un chapitre du manuscrit * récompensé en 1895 par
la Société d"Anllinj[)uliii;ie de l'aris au concours pour le prix (iodard. Sur
le désir de ([uekiues-uns de nos collègues et amis de la N'ienne nous ve-
nons les résumer ici.
Avant d'entrer en matière, quelques mots sur la topographie du dépar-
tement paraissent nécessaires.
Dans ce département, la N'ienne a un cours de H6 kilomètres, son point
d'entrée dans le département, situé près la colline de Prun, voisine de
rfle Jourdain, esta :233 mètres d'altilude.
Son point de sortie, proche du coiilluent de la Creuse avec la Vienne,
est de 35 mètres.
La dilTérence d'altitude de ces deux points est donc de 200 mètres envi-
ron. Cette différence de niveau montre que le sol du pays est assez acci-
denté, ce qui le rend pittoresque bien qu'il ne soit pas précisément mon-
tagneux.
Il possède des bois, des forêts, des collines, des plateaux élevés, de, fort
jolies vallées, la plupart très encaissées, dont un exemple nous est fourni
par la petite vallée fertile du Clain à Poitiers, atïluent qui se jette dans la
Vienne à Ciiàlellerault.
Cette vallée à Poitiers est bordée d'une part par la colline de 1 15 mètres
sur laquelle est bùtie cette ville ancienne et d'autre part par les énormes
falaises taillées h pic qui se trouvent sui' la rive droite et portent dans
le pays le nom de dunes.
A l'entrée de la rivière, dans le déparlement au((uil elle donne son
nom, le sol est granitique couimeon le voit à l'île Jouidain où d'énormes
blocs arrondis, en granité, gisent depuis des siècles attendant que le
cours de la rivière reprenne sa puissance d'autrefois pour pouvoir les
mobiliser, les rouler, les entre-choquer et les arrondir davantage.
Dans la région de Poitiers le .sol est du calcaire jurassique et les bords
du Clain montrent aux yeux étonnés du géologue et du touriste des
• Anthropologie de la Vienne et statistique ethnique de l'Indre, Angers, 1895, ms
233 p , in-f» avec cartes et tableaux.
'Rivière qui prend sa source au plateau central, dans le dèparlomcnl de laCorrèze,
à 9o4 mètres d'altitude.
352 <) Jiii.i.r.T 1905
falaises on calc;iiii' (iiii dopassent en liautour i^cllos de nos bords de
l'oct^an.
Dans la it'gioii de Luiulun el de Chàlelleraull le sol est du calcaire
crayeux dont la blancljeur éblouil les yeux des nouveaux venus dans les
quartiers récemment conf-truits de ces deux villes.
Telle est en deux mots la physionomie d'ensemble du département
dans lequel nous allons retrouver les traces des races humaines préhisto-
riques.
1. — KPilOlR (^IIATEUNAIUE OU PALÉOLrrHIyUE.
■l"^ P l'y iode humide et chaude.
Industrie chélléenne. — lîace humaine dite de Néaiiderlhal.
Af/e du mammouth.
La N'ienne a été de toutes parts, l'habitaldela race humaincprimilivc,
dite de Néandertlial, spéciale à celte période chaude de l'époque qua-
ternaire.
Si aucun ossement de cette race n'a été rencontré dans ce département
l'existence de celle ci ne nous en est pas moins démontrée de tous cotés
par l'instrument de son industrie, l'instrument chelléen uniforme.
Celte race humaine n'avait pas encore pris possession des grottes natu-
relles, si nombreuses en cette région el dont nous parlerons plus loin, ne
se trouvant pas encore, avec son unique instrument de pierre, suffisam-
ment outillé et armé pour disputer, sans corps à corps^ ces grottes aux
grands fauves qui en avaient fait leur repaire.
Voici pourquoi, au lieu de retrouver l'instrumeut chelléen dans les
nombreuses grottes du département, nous ne le retrouvons que sur les
hauts plateaux, couverts alors sans aucun doute d'immenses forêts plus
ou moins impi-nétrahlcs, offrant une végétation tropicale à l'homme primitif
qui devait vivre à l'état sauvage dans des huttes ou dans des arbres,
La disparition de la race de Néanderthal dans cette région est trop
lointaine pour que l'atavisme y ait des représentants, après tant d'inva-
sions à la suite desquelles, selon les lois de la nature, la race la moins
privilégiée finit par s'éteindre au contact d'envahisseurs plus civilisés,
comme le fait a lieu encore de nos jours chez les Peaux-Rouges, les
Canaques, les Australiens dont les races s'éteignent peu à peu au contact
de la civilisation européenne.
Si l'atavisme complet n'a pas laissé se perpétuer le type de Néanderthal
dans la N'ionne, l'atavisme partiel nous a conservé certains traits irrégu-
liers el disséminés, comme nous avons été à même de le juger en mainte
circonstance.
Chez l'un c'est un front bas et fuyant, chez l'autre c'est une saillie
anormale des arcades sourcilières, chez un troisième c'est un menton
fuyant et effacé rappelant la mandibule de la Naulette, chez d'autres enfin
c'est un prognathisme plus ou moins accentué.
MOIKK. — I.A vrKNNK Al'\ TKMI'> l'UKIIISTnlUul» '.\^V,^
domine nous l'avon.s «lit. c'est surtout sur les plati'.iux que l'instruim.'nl
chelléen se retrouve. Les plateaux des enviions ilc (lliAli'Ueraull, (snrlnut
à Sommières, canton de (iençay), ceux des en virons île l'oiliers et de
Civi'ay ont été fertiles en découvertes irinstruineiits clielléeiis par milliers
en particulier sur le [ilateau de IJeaumont.
Le pays était tout indiipn' |)imr li faliiication de ces iii^lniin-'iils ;i
cause de la fré(|uence flu silex dans son calcaire crayeux.
Il possède en outre des carrières de jaspe (pii ont été utilisées pour
l'inslrumi'nl i-lii'lli'en.
La plus Ijclli' iiilli'i-tinn d'in^lruments clielléens (jne nous aj'ons visitée
dans la Vienne, outre cdli' du musée de la ville de Poitiers et celle de laSo-
ciélédesanli(piairesde l'ouest, eslcellede M. l)(;mairé, pi'ésident du Irihunai
<le Montinoiillon, quia eurexlrèine obligeance de nous montrer lui même
les plu? heaux types de son musée itrovenantde tous les points du dépar-
tement et en particulier de la région di' C.li.Vti'lIcraull et de Monlmo-
rillo^i.
(le petit musée prt'liist(jri(iuc n'est pas l'œuvre d'un collectionneur
accumnlant des spécimens sans en connaîtri; la valeur et l'origine, il
est l'œuvre d'un savant connaisseur, heureux de communiquer ses décou-
vertes à ceux qui savent les apprécier et les faire apprécier à ceux qui
ne connaissent pas encore cet instrument ingénieux retrouvé dans les
deux mondes.
2'^ Période glaciaire,
{//ifluslrif mouslrriennc) Rare Iminainc dite di' l'Ohiia {.{(je du ipdnd ours).
La race humaine de cette époque dans le département de la Vienne ne
nous est révélée par aucun ossement humain.
En revanche l'instrument mouslérien a été trouvé disséminé de toutes
p'irls dans le département; les arrondissements de Poitiers, Chàtelleraull,
Montmorillon en ont fourni une ample moisson.
.Nous avons eu la bonne fortune d'explorer dans la commune de Nellèches
(arrondissement de Chàtelleraull) en compagnie de notre excellent
collègue et ami le !)■■ l'apillault, flans le voisinage de sa jolie villa de
La lUonnerie, une carrièie qui fut jadis un atelier de fabri(;ation d'instru-
ments niouslériens.
Llleest située près l'abbaye de Fontmaure ou Foumeure, la pieire est
un joli jaspe brun et blanc dont la cassure ressemble, comme nuance, à
une tranche fraîche de jambon.
Celte station a été bien étudiée par notre collègue, le \y Capilan, qui en
conserve de beaux spécimens.
A Biard près Poitiers, à Montmorillon même, des instruments mouslé-
riens ont été découverts. De beaux (échantillons sont aussi conservés dans
le musée de M. Demairé à Montmorillon et dans les musées susdits.
La plupart sont des perçoirs ou poinçons usités sans aucun doul<' a
soc. h'asthikjp. 'yOo '^*
35-4 •') jiii.i.KT r.tor;
percer et romlrc li'- |><'aux traniiii.'ni\ ilonl la fumriire fui indispensable h
l'hommo pendant cfllf jtf'iiiMli' ;\ climat lif'sri'oid.
Les autres types d'instruments sont dos racloirs usités aussi pour la
préparation des peaux destinées h servir de vêtement, genre de fourrures
que l'homme de l'Olmo avait à disputer au Mammouth, au ilhinocéros
velu et autres fauves pour pouvoir suj)porler comme eux les rigueurs du
climat.
L'homme eut à disputer les habitations du grand ours des cavernes,
ici comme ailleurs, pour pouvoir lui aussi s'abiiter contre les froides
intempéries.
Les nombreux ossements d'animaux mêlés h l'instrument moustérien
et trouvés dans toutes les cavernes de la Vienne nous montrent que celles
ci, situées presque toutes sur les bords des vallées encaissées, ont servi
d'habitation à l'homme de ce temps.
Les grottes de cette époque qui ont été le mieux étudiées sont les
suivantes.
La Grotte de l'IIermitage, près Lussac-les-Chàteaux, a été explorée pour
la première fois par M. Aniédée Brouilletqui en a donné une description
savante et richement illustrée '.
Les instruments moustériens de cette grotte étaient en silex calcédo-
nieux; les autres grottes à Troglodytes de cette époque, au point de vue
de l'industrie, sont les grottes de la Bussière et de l'île Jourdain situées
sur les bords de la Vienne.
Les bords de la Dive, afïluent voisin, nous ont révélé l'existence des
grottes de i'Hommaizé et de Verrières.
Nous trouvons aussi dans le département de la Vienne, quoique situées
sur les bords d'un méandre de la Charente, les grottes intéressantes de
Lamartinière près i^harroux (arrondissement de Civray), du Chafîaud, de
Malmort, de Rochemeau, de Frédoc et de Cantes.
La première de ces cavernes a été explorée pour la première fois par
M. Amédée Brouillet qui en a fait une description dans l'ouvrage susdit
et l'a complétée dans un autre ouvrage plus récent *.
Citons encore comme terrain renfermant des instruments moustériens
l'étage inférieur de la grotte des Cottes située sur les bords pittoresques de
la Gartempe près Saint-Pierre de-Maillé, dans l'arrondissement de Montmo-
rillon, rivière afïluent de la (h"euse à La Roche-Posay.
Cette grotte des Gottés a été judicieusement étudiée par M. Raoul de
Rochebrune qui a publié le compte rendu de ses fouilles dans un mémoire
très richement illustré d'eaux-fortes par lui-même et par son père
M. Octave de Rochebrune aqua-fortiste aussi distingué que regretté •''.
La valeur de ce mémoire est dû en outre à ce que l'auteur a voulu que
son autorité fiU corroborée par l'autorité éminente de Gabriel de Mortillet.
• Epoque antédiluvienne du Poitou. Poitiers iSGS.
* Matériaux pour servir à l'histoire de l'homme, n* de mai 1865.
3 Les Troglodytes de la Gartempe. Foiilenay le Comte^ I8S1. 2 vol. in 4» illustrés.
ATlilKH.
r.A VIRNNK Al A TKMI'- l'UKIIISTORIQUES
Les bonis tie la (iarhMnpe, l;i grolle. tous les inslniniciils di-coiiviM-ts
l'n (|uanlilé cunsid/'rahle. sont rcprésenlés par des eaux-forles arlisti-
quos du plus bel olVel.
Ces bords nous ont révélé l'existence de nombreuses grottes de troglo-
dytes situées entre Moiitinorillon et La Uoche-Fosay, telles que les grottes
de liadoué, la Tuilerie, .lutreau, \ leux Cottes, Collés (susdilsi, Saint-
Pierre-de-Maillé, Uoche-à-Gué, La Guilière, La Bussière.
Sur raflluiMil noninn' l'Anglin existaient aussi les grottes de Dousse,
llemerlé et Moisdicbon.
I.KGENDE . C. I. Civray. GII.
ChaiTOUx. . . . . .
1. (M-otleiiu Chaffand: 2. G.
/Il' la Baionièro ; '•>. G. il'S
Mal()it'rros . 4. G rj»; la Mur-
tinit re; 6. G de Malmorl;
H. G. «le Rocheiiieau; 7. G.
de la Rochi' de Frédoc;
8. G. des Gantes; '.). G. de
Gretrier; 10 G. de Boric;
11. G du Biis dos Cades;
i'2. G. du bois dAiiiour;
13 G. de la Roche; l'i. G.
du bois do Gorce. . . .
LÉGENDE : R. La Roche Po-
say. Vicq. V. A. Angles. P.
St-Pierre de Maillé . . .
1. Grotte de Badoué : 2. G. de
Dousse; 3. G. de la Tuile-
lio: 4. G. de llemerlé;
ri. G. deJiitreau; <> G. des
Vieux Goiti'is; 7. G. îles
Goltés; 8. G. de Boisdi-
chon; 9. .G. de St-Pierre-
de Maillé: 10. (trotte de
Roche à Gué; i\. G. de la
Guitière; 12 G. de la Bus-
sière
LÉGENDE : C. Ghauvigny. L.
Lussac. G. Gouca. l. Isle
Jourdain. A. Availles . .
I. (îrotte de Jioux ; 2. G. de
l'Hommaizé; 3. G. des
Verrières; 4, G. des Fa-
dets; 5. G. de rHeniii-
tage; 0. Grolte de la Bus-
sière ; 7. Grotte de l'Isle
Jourdain
Par les diverses énuniéralions ci-dessus il est facile dese rendre. compte
combien celle région était, h. celle époque, peuplée de troglodytes
dont nous retrouvons, sinon les ossements conservés par les siècles,
du moins les instruments les plus divers el les nombreuses habitations
souterraines.
3-^ Période post-glaciaire et à températures extrêmes.
{Industrie nuif/dalénienne). (/iace humaine mcerfaint'). (Age du renne).
Nous ne parlons pas ici de l'industrie solulréenne dont il n'existe pas de
restes dans la Vienne el qui est resiée localisée à certaines régions de l'Lu-
rope pendant le premier quart de celle période.
;{;j(j i\ ji'iLLKT 1905
Nous possédons au cunUaire ilc iioml)rcuse preuves de l'exislence de
riionime pendant les trois derniers i|uailsde celle période correspondant
à l'industrie magdalt'-nienne.
Aucun reste humain de cette période n'a été rencontré dans la Vienne.
Aucune preuve non plus n'existe qu'une nouvelle race ait existé à cette
époque; aucune jireuve que les hommes d'alors fussent autres que ceux des
deux races susdites, hien que les crânes de Cro-.Mngnon et de Furfooz aient
été altrihués au quaternaire sans certitude.
Les animaux avec lesquels l'homme avait à combattre étaient encore le
Mammouth, cet immense éléphant velu qu'on ne retrouve aujourd'hui qu'à
l'état fossile ; le Henné dont les l)ois, la peau et les os devaient être d'une
très grande utilité dans l'industrie déjà plus raffinée et hien d'autres ani-
maux encore.
Aucun vestige de religiosité, de culte des morts, de sépultures rituelles,
ne nous est resté de l'homme de cette période qui, à en juger par ses restes,
devait être chasseur, pêcheur, nomade, ignorant de l'agriculture à demi
encore sauvage.
La Vienne nous a offert des preuves de l'existence de l'homme et de
son industrie magdalénienne dans la grotte des Fadets près Lussac-les
Châteaux, explorée par M. Broullet ',. grAce aux nombreux instruments
que cette grotte à révélés aux chercheurs.
Le silex est en partie détrôné pour les instruments fins et remplacé par
l'os, l'ivoire, le bois de renne, servant à la fabrication de javelots, sagaies,
flèches, harpons, etc.
L'homme est devenu plus industrieux, les armes à longue portée le
prouvent suffisamment.
Le second étage de la grotte des Cottes a fourni une ample moisson
d'instruments magdaléniens*.
Les plus célèbres des grottes de la Vienne ayant fourni des armes à
longue portée sont les 5 grottes du Chaffaud près Civray, sur les bords
de la Charente '.
Des harpons à deux rangées de pointes y ont été découverts ainsi que
des instruments encore peu connus en os représentant, gravés en relief,
des dessins d'hommes ou animaux.
Le premier de ces os gravés trouvé par M. Brouillé père a été déposé
au musée de Cluny. Après lui MM. Vibraye et Gaillard de la Dionnerie
y ont aussi rencontré de nombreux objets d'art de cette époque, re-
présentant des profils d'hommes et animaux, dessinés sur os ou sur
pierre.
M. Joly-Lelerme trouve en 1853, dans la grotte de Savignè, des os
' Kpnqui-, aiiléhisloiiijiic du l'oitou.
ï Jôid., L'o /ifiit.
'■> L"s (roKlodytes de la Gardompe, fouilles de la Grotte des Cottes, par Raoul de
Roehobrune, in-4<> broché. Fonteiiay, 1881, avec atlas d'eaux fortes, gr. in-4'>.
A. DA COSTA FERRFÎIRA — I.A CAPACITK CUAMENNE 'A")1
sculptés représentant des ruminants ; il les dt'-pose aussi au musée. de
t;iuny.
I^a collection Dt'main' à .MdiitmnrilJMii pii'scMti' de cui-iriix. s|i('ciiiicns de
silex artisticpn-s. rcpi'oiiuisaul des sillnun'tli's d'hoiiimi-s et d'animaux
tels ([ue chien, clnnal. etc.
.Nous n'avinns «'ncore vu nulli' pail mcniidn de découvertes de ce
irt'uri'. il a fallu l'u'il exercé d'un aiitln-nlo^ui' poui' découvrir cos curieux
prniils; un rap|)Oit circonstancié sur la décun verte et l'interprétation de
tes silex hizarres serait appelé à bien élucider cette question.
Outre les grottes citées plus haut, !em(''andre en question de la (Ihaiente
,1 fourni lesgrottes suivantes de l'époque du .Moustriei-etde laMagdeleine :
1° d'un côté (versant sud) grottes de La IJaroniére, des Malpierres, de
Grellier de Borie, du bois des Caves, de la Hoche.
2" de l'autre côté (versant nord) grotte de Malmorf, de Rocherneau, de
la Iloche-à-Frédoc, des Canles, du bois dWmour ou du bois de Corce.
Les bords de Ia\'ienne ont fourni également lesgrottes magdaléniennes
suivantes :
1" DeGioux près Chauvigny.
2» Entre Lussacet Availles, la grollc de lllermitage, les 3 grottes dt- la
[Jussière, les 2 grottes de l'île Jourdain.
Entln le petit alfluent de la Vienne, (jui s'y jette entre Chauvigny et
Lussac, a sur ses bords les 3 grottes de l'IIonimaizé et les H grottes de
Verrières.
Telles sont Ips traces qu'a laiss-ées l'homme primitif dans cette région,
restes bien .'•uffisants pour prouver son existence pendant ces trois pé-
riodes prélustoriques quaternaires.
LA CAPACITE CRANIENNE, CHEZ LES CRIMINELS PORTUGAIS
l'Ali .V. I)a CdSTA-b'ERRKUtA.
Il y a des profondes divergences entre les auteurs au sujet île la capacité
crânienne, chez les criminels. Les uns veulent que la capacité du criminel
soit inférieure à celle de l'homme normal : les autres, au contraire, lui
attribuent une capacité supérieure. Les uns et les autres présentent des
raisons et des documents à l'appui de leur opinion. Toutefois les résultats
ne peuvent être comparés entre eux, le modus facicndi du cubage n'étant
pas toujours le même, alors que le contraire est indispensable ; et ils ne
sauraient être discutés sérieusenuMit, du moment <pie l'on ne considère
que les valeurs de la capacité crânienne, et qu'on ne possède aucune
indication, tout au moins sur la stature, ou sni' U- volume du tronc,
facteurs principaux de la vai'ialion de la capacili' du ci;\n<!.
l'our uuus, comme pour Ladame cité par Dallemagne : SUhiikiIcs una-
(oiuiyues de la criminalité. (Encyclopédie des aide-mémoires), « il n'existe
:{:i8 r. ji n.t.n ton:;
.•iiicuru' .iiKtinalic consl.inlc diins la capacitt' cianionno dos criminols. «Il
011 est lie c<' caiaoïr'if cmumc de hoaiicoup d'aulros : sa valeur n'est ni
spéciale ni coiislanlo. Kii oliuliant les variations d'un caractère anthro-
p()li»!;i(|u<' sur une série do dc'linquanls, on trouvera fatalement des va-
leurs normales et des valeurs anoi'malos.
I.e crime est un attentai contre les luis et les usages établis, dans une
cerlame région el à un<! ceilaiiu' épu(|ue. Il varie avec la latitude et avec
If temjis. Il y a des actes qui, dans li'ur essence, sont paifailoment égaux,
au poiiil de vue scienti(i(iuo, et (jui, loutefois, en conséquence de prin-
ci[)os établis, sont tellotnonl dilîéionls.qiic les uns sont considérés comme
normaux, et même dignes d'admiration, tandis que les autres sont réputés
condamnables et criminels. Cependant tous impliquent, parfois, le même
fond somati(iue, la même constitution, la même organisation, le même ca-
ractère ; ce sont des formules dynamiques du même individu ; ce n'est
que la convention qui les sépare.
Combien de fois ces formules, ces manières de procéder ne sont-elles
pas propres à des organisations anormales et dégénérées ! Cependant la
plupart des anthropo-criminalistes, induits en erreurs par la conception
juridique du crime, chercbent en vain à les différencier.
Au contraire, que d'actes, considérés d'ailleurs comme criminels,
peuvent être, et sont commis aussi bien par des êtres anormaux et
atypiques que par des individus normaux et bien constitués!
Un acte criminel, l'infraction d'un principe social établi, peuvent être
déterminés par des causes infiniment variées.
11 y a des individus qui figurent dans nos statisti(iues comme nonnaux,
el dont (juelquefois, cependant, la constitution, le substractum propre,
est capable de les pousser ou de les contraindre au crime. Il ne leur
manque que l'occasion, le réactif; ou bien alors on laisse^ ou l'on fait
passer pour des faits sans importance, des actes d'une signification sus-
pecte commis par ces individus, actes qui, en réalité, sont souvent de
magnifiques stigmates pour l'orientation d'une prognose, ou pour l'appli-
cation d'une méthode prophylactique.
Et puis, la môme action criminelle peut avoir, tantôt, la signification
d'un acte physiologique, tantôt, celle d'un fait pathologique. Un principe
établi peut être enfreint ou violé par ignorance, par fatalité, et même par
supériorité ou avancement.
I.a justice, aujourd'hui, ne considère, pour ainsi dire, que le crime; il
vaudrait bien mieux qu'elle ne considérât que le criminel, et en même
temps, qu'au lieu de se préoccuper de classifier l'acte, elle portAt toute
son attention sur la valeur dos causes (jui l'ont détei'miné.
Nous sommes encore bien loin du temps où cette justice sera une chose
sérieuse et juste.
Nous trouvons à la page 8i d'un opuscule du l)"" Forraz de Macedo
[Os criminosos) une série d'exemples qui confirment et élucident notre
manière de voir, et démontrcnl d'une façon pittoresiiue le ridicule de la
A. Il V COSTA KKItlîr.lllA. I.V CAI'ACITK CUVMKNNE 3."n
IliérapiMitiqu»^ iTiiuiinMIc do dos jours: l.i prison il\ iirimisro, comin»' dit
K. Feiri.
Mais toutes ces considérations sont venues à propos de la capacité
crânienne. C'est qu'en étudiant une statistique que nous a envoyée de
Lisljonne, le savant anlliropouii'triste et criininaliste portugais, notre
cher et illustre ami M. le U' Ferraz de Macedo,<iui possède les plus riches
archives anthropologiques de Portu£;al, statistique où se trouvent consi-
gnées les valeurs de la capacité du crAne calculée, chez des normaux, des
assassins et des voleurs portugais (vivants), nous avons vu qu'il est
impossible de délinir un type criminel d'après la capacité crânienne. On
trouve chez les normaux, aussi bien (lue chez les criminels, presque toutes
les nuances de la capacité, et les limites de variation sont également
presque aussi larges dans les uns que dans les autres. Il y existe néanmoins
«juelques différences. La moyenne des capacités prises sur 2o normaux
est de l(>i-i c. c; elle est de 1708 c. c. sur 26 assassins, et de <634 sur
25 voleurs. La capacité atteint la valeur la plus élevée chez les assassins
et les voleurs; c'est aussi dans ces deux groupes de sujets qu'elle s'abaisse le
moins La proportion des grands crAnes est de 40 0 0 chez les normaux,
de 61 0 0 chez les assassins, ol de 48 0/0 chez les voleurs; celle des petits
crânes est de i6 0/0 chez les normaux, de 3 0/0 chez les assassins, et de
8 0 0 chez les voleurs. La moyenne de 6 cubages faits directement sur
)) crAnes d'assassins portugais, parmi lesquels figurent celui de Francisco
Mattos Lobo (crAne normalement constitué) et celui de Diogo Alves (crAne
plein d'anomalies) a donn<' le chilîrede 1565 c. c.,chilTre inférieur àcelui de
la moyenne générale de nos crAnes (1572 c. c). Mais celte série est petite
et encore y figure-t-il le crâne d'un Gallicien : Diogo Alves. Ce qu'il y a
di' plus curieux à noter c'est ijuc le calcul des capacités kormique-i
moyennes (capacités du tronc) dans les normaux, les homicides et les
voleurs, démontre que le tronc est plus développé chez les assassins
(jue chez les voleurs, et plus grand dans ces deux classes (juc chez les
normaux. Le tronc le plus volumineux appartient à un assassin; le plus
petit il un normal. Enfin les troncs les plus grands se trouvent plus fré-
quemment chez les assassins, et les plus petits chez les normaux.
Ln résumé, il nous semble que l'on peut conclure :
1° Hue les criminels portugais possèdent généralement une capacité
plus grande que celle des normaux;
2° (jue les premiers sont également plus corpulents que les seconds;
3° (Jue la corpulence doit étie le facteur princi[)al de l'élévation de la
capacité crânienne cbez les criminels;
4" Que l'on trouve, aussi bien chez les homicides que chez les voleurs,
des crAnes d'une capacité égale ;i celle des normaux ;
5° (Jue les limites de variation s'écartent ^encore plus chez ceux-là que
chez ceux-ci;
6'^ Qu'il est impossible de définir le type du eriminel d'après la capacité
crânienne.
300
() Jl II.I.KT 1U05
Tahleali a. — Mui/i'niies, ma.rimn, mi ni mu «>l umplitude des lariations cra
nii'iiiif.s i^nilciitées) chez ilrs iioniKtu.r l't des rrimiiK'l.s iiurliifinis. {\Y Forraz
»li' .Miici'ilu. )
Moyennes Maxiniuui Minimum Ahi|ililudede vjiialiun
Ntiniiaiix Ml J.
Ildiiiiriilfs 17(IS
Voleurs 1()34 ....
TahlkaI' |{. — (^'ipiicilés rulrulees de ht lèle et du Iroiic de ijueUfiies nurmnux et
de (j/irhjnes criminels jioylntjms '. ( I)'' Kcnaz de .Mac(iilu. '
15)35
i;!41
594
208(J
1414
642
2003
1342
751
Capacité calculéu du Iruuc
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Têto
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1 .'():>.
15'.)()
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iS'.Ki,
1521.
Tronc (ij
10104
11475
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15048
11553.
1102!),
14474
10327.
10125.
l()8lo.
I 1083.
13772
15108.
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Mi 181.
2(i394
12305.
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17012.
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050
741
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303
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010
520
707
785
571
971
040
IIIIMICIUES
Capacité calculée du tronc
et do la tète.
Tèlo
1595
1493
1519
1444
1093
1801
1080
1075
151!)
1050
1703
1748
2074
1787
1!)10
l 159
1024
1730
108!»
1701
1003
2080
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1582
1091
Tronc ^^1)
17!)38,
148!)0
10215
14908
14525,
19620
23 22719,
,21 I 10408,
.55 17507,
,45 17575.
12 17020,
,50ll0o70.
,71 I 10219.
,73 20351.
31 '2 1306.
10 14050.
,00 120134.
,î)0 15932.
33 10102.
85110717.
Tronc (Uj
908 1340(>,
007112003.
712
600
758
017
982
75!)
142
845
312
714
509
785
075
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12292
11099
11049
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19520
12221
13130
13844
14027
1303!)
13183
14870,
17077
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10024,
13180,
12396
050 113930,
î)2ij 13522
250 14143,
(•.87,15874,
4:^8 115022
187,17(108
075 128-:4.
250
042
550
642
509
285
!)03
552
357
323
343
404
794
371
0()8
875
068
781
600
875
2!)!i
750
500
747
801
025
Cipacilé calculto du tronc
et do la léto.
Télo
1740
1751
1722
1546
1727
1590
1579
1719
1577
14!)!)
1852
1707
1050
1599
1590
1702
17(54
1433
1802
1515
164!)
!343
1605
169!)
1478
.37
.07
.34
!»7
.14
.16
.92
.44
.08
.!I0
.50
.02
(J7
. !)4
.17
5!)
.73
.25
.53
.25
.61
.15
.13
.78
.52
Tronc (1)
15545.200
20!)30.00
185<^4.86
17623.23
15309.82
17588.71
1(5783 64
1<)022.36
15754.14
10219.90
19)73.69
16854.51
14!)73.71
156!j9.94
17008.97
10188.86
13420.11
17051.55
15387.43
14439.19
16082.38
1C836.76
17001.64
1!)570.70
14G0G.81
Tronc (11)
12392.37
10509. G3
l'i714.76
13365.00
10999.75
13132.27
12921.50
11280.10
12417.97
12876.53
15886,04
13119.80
10l65.i5
11578.12
14087.17
12812.57
9787.88
12101.10
11877.77
10799.40
11843.57
11!)!)3.31
14404.17
15523. 5(i
11348.34
1014.67
15298.(593 11505.138
708.88
17(543.586 13990.633
1(534.48,16751.93
12665.13
' L'- \)\rn\ii:\ niilicr h-'iriiiiiitn- ;t tU^' uIjIi'iiu c;i pri liant Ir |iroJiiit di.'s troio di i-
inèires : a) ilislanco dus doii.v iiciomion.s, h) du .sîerruini au rachis, c) du point
de jonctioa des clavicules au pubis; et le second, en prenant le produit des trois dia-
mètres : fl) du point de jonction des clavicule^; au pubis, h) du st:riium au rachis,
c) et la plus grande distance transversale de cote à côte.
I. MWmI VltlKlt. — Clt.VNIO l»K I.'kIMUjII; MKUdVlNGlKNNE MW
Discussion
D'' (j. Pai'Ii.i.mlt. — .le suis heuri'iix df (in-senlci- à la Suciél»'' lo travail
fort intoressanl df mon excellent ami le l)"" I)a (losla-Ferreira. ('/est une
lieureuse conliiljution à la grande eni|uèle bio-sociale du crime qui se
fait de nos jours dans tous les pays du niimd<!, et constitur un des côtés
les plus intéressants de l'Anlluopologie. Le crime, dans sa plus large
acception, est la violation d'un tabou social respecté par la grande ma-
jorité du grouj»e envisagé. Ceux (pii (b'fendiMil et lespectenl ce tabou, et
ceux (pii ont des tendances à le violer forment deux sous-groupes dont les
caractères distinctifs, variables peut-être suivant les peuples et suivant
la nature des tabous, ne seront jamais assez étudiés, car leur connais-
sance seule peut nous conduire à cette thérapeutique sociale, scientifi-
(luement aiq»li(iuée, (jui est le but ultime, la cause finale, pourrais-je
dire, des recherclies anthropologitjues.
Des critiques stériles ou des idées '/ priori ne feront point avancer la
science d'un pas. Elles la font même rétrograder en décourageant les
chercheurs. J'aime infiniment mieux une hypothèse hardie, une induc-
tion aventureuse et anticipée, une erreur même dans les rechercLes, car
elles suggèrent une réponse et des observations rectificatives. C'est la
discussion, la lutte, la vie, le progrès.
Le travail de M i)a Gosta-Ferreira ne rentre pas dans cette dernière ca-
tégorie. 11 nous présente les mensurations de notre savant collègue le
l> Ferra/ de Macedo dont la compétence est bien connue. On pourra sans
crainte utiliser des matériaux aussi solides, et nous ne pouvons ipie re-
gretter de n'en pas recevoir plus souvent de ce consciencieux observateur.
CRANES DE L'EPOQUE MEROVINGIENNE
M. L. .MA.\nLviui:ii. —J'ai l'honneur d'olîrir à la Société, au nom de noire
collègue M. C. IJouLANGER, de Péronne, cinq crAnes recueillis par lui dans
des fouilles récentes et qu'il désigne comme il suit:
« Les numéros I et :2 proviennent du cimetière mérovingien de Cléry,
canton de Péronne, [y\° siècle).
Les numéros 3, 4 et .5 proviennent du cimetière mérovingien de Maure-
pas, canton de Cambly (Somme, arrondissement de Péronne). Les numé-
ros 3 et 4 se trouvaient dans la partie du cimetière que j'estime être du
vin« siècle, et le n" .^i dans la partie que je crois pouvoir dater approxima-
tivement du xi" ou xn® siècle ».
.M. Boulanger devant publier à ce sujet une notice dans le Bulletin
ankéolo.jiqiie des travaux historiques et scientifiques, m'a prié d'examiner ces
crânes.
:U)2 r. ji iii.KT i!io:;
Il m'a paru inutile de les mesurer, parce que ce sont des crAnes isolés
in'a|»al>Io.s, pour et; nidlif, do fournir des renseignements utilisables pour
l 'Klluiolugie.
Lorsqu'il s'af,it des époques préhistoriques il n'en est pas de même.
La rareté des crAnes, jointe à leur antiquité, nous oblige à tirer parti de
tout document, et il y a un intérêt scientifique très grand à étudier minu-
tieusement même un spécimen unique.
Les restes squelettiques du vu» au xii" siècle sont à étudier dans les
conditions exigibles pour l'époque moderne, dans la mesure où les besoins
d'une statistique valable peuvent être satisfaits, à moins qu'il ne s'agisse
de cas spéciaux d'un intérêt particulier.
Parmi ces crânes en question, trois sont féminins (n°s 1, 2 et 3), deux
masculins.
L'âge de chacun n'importe pas davantage à l'Ethnologie.
Il n'y a point parmi eux, de type ethnique bien caractérisé. Leur indice
céphalique se rapproche plus ou moins de la dolichocéphalie.
Mais un de ces crânes se trouve être remarquable individuellement.
Son prognathisme très fort, la forme en (j de ses mâchoires et sa forme
générale lui donnent un aspect australoïde que corrigent seulement les
caractères de la région nasale.
Ouand bien même cette exception n'existerait pas, je n'attribuerais pas
à ce crâne une origine ethnique extraordinaire ou même seulement parti-
culière. Il se peut qu'il appartienne au même mélange ethnique que les
autres crAnes recueillis en même temps que lui, mélange qui comporte des
proportions infiniment diverses, régionales et familiales.
.Mais la forme probablement très exceptionnelle qu'il présente est sans
doute elle même résultante de conditions ethniques familiales et
indiv^iduellcs qui ont donné lieu à la réalisation d'un ensemble morpholo-
gique rappelant un état commun chez les ancêtres quaternaires.
L'ensemble réalisé dans ce cas particulier rappelle assez bien la forme
des crânes du Néanderthal etdeSpy en ce qui concerne la voûte crânienne,
mais les rebords orbilaires supérieurs s'éloignent de cette forme, et
comme en même temps la face, qui est entière, présente un progna-
thisme total très considérable, il s'ensuit un aspect général rappelant
non sans atténuation, le type australien, La robustesse squelettique du
sujet a certainement contribué h engendrer cet aspect grossier.
Si l'on rapproche de ce cas ceux dans lesquels on a observé des res-
semblantes plus ou moins réussies avec d'autres types exotiques (aspect
négroïde, mongoloïde), on trouve dans ces réalisations morphologiques
parfois assez complètes un argument en faveur de l'hypothèse monogé-
niste.
CMMIW Kl l'AI'll I \ll.l . — l.'iKK.M llliIvriiiN IH CUiWIlK l>K l'Ail, JnN|.> :{().'{
810" SEANCE. — Jll Jiiilld \m
l'i<K>i DK m:e !»[•: .M. S lui i.i,<» r.
M. KuritltlUlINIKH ntlV.' ili- l.l |iMll <\r l.l Sdriilc di's Idililirs ;il-cht'()l(l^'i(|lieS
tout (.-e i|iii a Irait à raiilliin|.M|ni,'ii' daiissuii i'\|MisiliMii. Le l'rési'l<'ii( riMiicrcie
au miiii (If la Sofii'lt'-.
L'IDENTIFICATION DU CADAVRE DE PAUL JONES ET SON AUTOPSIE 113 ANS
APRÈS SA MORT
V\[{ MM. L. Cai'itan et Pai'ILLault.
On sait que tout récemment le (iouvernement américain a envoyé une
escadre chercher à l'aris en grande pompe le cadavre de l*aul Jones,
M le père de l;i in.irine américaine » pour l'emmener solennellement en
Amérique et lui donner une sépulture nationale.
Deux mots d'historique d'ahord sur cet inqiortant personnage.
Né en 1747 à Arhigland (Ecosse), Paul Jones ayant pris du service dans
la marine américaine, reçut du Congrès le commaiidemenl d'une Hotte
envoyée contre l'Angleterre, En 177i), il s'ein[)ara d'un navire anglais
d'une force douhle du sien. Louis X\ I lui uUVil une épée d'honneur à poi-
gnée d'or. Après la paix, il entra au service (h; la Russie, fut nommé
contre-amiral pu- (lalherine II et partit avec l'olemkin pour la mer Noire.
Mais il se hrouilla avec lui et tut ohligé de (h'iuissioiiner. Il séjourna
quelipie temps (mi Hollande, puis en Suède et vint à Paris où il eut les
honneurs d'une si'ance de la Convention. Mais il ne put répomJre aux
discours de félicitation étant déjà atteint d'une alfection pulmonaire
assez grave. Il succomha, en ellV't, (]uel([ue temps après à des accidents
pathologiques sur lesquels nous reviendions plus loin. Il mourut à Paris
en 17'J2, et fut enterré le 20 juillet (d'après l'acte d'inhumation découvert
par M. Charles llead avant les incendies de 1871) dans le cimetière des
protestants étrangers, rue (irange-aux-Belles. Le colonel Hlakden, le der-
nier ami de Paul Joncs, écrivit à ce moment à la sœur de l'amiral, miss
Taylor à Dumfries, une lettre que l'on possède. Ii lui disait qu'il avait
placé le cadavre dans un cercueil de plomb en prenant toutes h s précau-
tions nécessaires en vue d'un transport ultérieur, lorsque sa patrie ferait
revenir les restes de son illustre enfant.
Depuis plusieurs années, le général Porter, ambassadeur des Ltats-
l'nis et le cûlon^l liailly Blanchard, secrétaire de la même ambassade,
recherchaient activement la sépulture de Paul Jones.
Comme on ignorait absolument en quelle partie du cimetière des pro-
'MM -20 ji ii.i.KT 1905
lestants (étrangers Paul Jones avait été enterré, il fallait le fouiller systé-
ni;tti(|ueinent, et comme son emplacement bien établi par le plan de Ver-
ni(|iii'l est acluelleiiienl recouvert de maisons, il fallait procéder au moyen
de galeries souterraines combinées de fii-iii) à pouvdir sonder complète-
ment tout le teirain.
I/amiral Porter obtint alors du piéfd de la Seine (|ue le p<;rsonnel du
service des carrières du département (!e la Seine serait mis à sa disposi-
tion, sous la diiection biérarchiqu-j de M. Wickersheimer, chef du service
des carrières du département de la Seine et sous la direction effective de
.M. Wejss, inspecteur dudit service. IM. Weiss lit exécuter à 5 mètres de
profondeur plus de 850 mètres de galeries de mine mesurant 2 mètres
environ de hauteur sur autant de largeur.
A 5 mètres environ de profondeur, sous une maison, on rencontra deux
cercueils placés l'un sur l'autre et déformés par la pression des terres.
Celui de dessus renfermait un squelette en mauvais état. Celui de dessous
avait été primitivement placé dans un cercueil en bois dont on reirouvait
les débris vers les pieds. Il ne portait aucune indication contrairement
auî précédents. 11 est probable que les fossoyeurs au moment où ils enter-
rèrent le cercueil de dessus avaient enlevé et déiobé la plaque qui devait
exister sur le cercueil inférieur. A la partie supérieure de celui-ci, à peu
pi'ès au niveau de la tète, on constatait l'existence d'un petit orifice qui
avait été bouché ultérieurement par un morceau de plomb soudé.
En écartant le plomb un peu fendu du cercueil au niveau de la tête,
après avoir enlevé la paille et le feuillage bourrant le cercueil, on
aperçut une tète parfaitement conservée, avec ses cheveux, et semblant
momifiée.
Le 9 avril, à l'Ecole pratique de la Faculté où avait été transporté
le cercueil, on procéda à son ouvertuie en présence de M. Bailly Blan-
chard, des représentants de l'ambassade, de M. Weiss et de nous deux.
Le cadavre apparut alors complètement entouré de paille bourrant absolu-
ment le cercueil. Celte paille noire brunâtre était imbibée du même liquide
que celui qui baignait le cadavre. Ce cadavre se présenta à nous admi-
rablement conservé avec ses longs cheveux, ses poils, ayant l'aspect d'une
momie brun noirâtre mais avec tissus encore assez mous et par consé-
quent loin d'être aussi rétractés que ceux d'une momie desséchée. L'as-
pect et l'odeur étaient ceux d'une vieille macération anatomique dans
l'alcool.
liC cadavre «Hait coiffé d'un bonnet de toile à fond circulaire rapporté,
vêtu d'une chemise et entouré d'un linceul. Un examen attentif permit à
madinnc Weiss de découvrir sur le devant de la chemise une marque
formée d'un .J et dun 1* associés en un seul chifïre pouvant se lire dans
les lieux sens.
11 fallait alois lentei- riderilili-alion du cadavre. Celle idcnlificalion
basée sur les caractères pbysujues a iililisé deux sources de documents :
quelques détails historiques sur lliabitus extérieur de l'amiral et deux
i:aI'1TAN KT l'Al'Il.LAlI.T. — l.'lliKNririi:\TlnN Dl CADAVUK. I)K l'Ali. JoNI> 'M\">
bustes du personnage ;iUril)ués ;i lloutlun. Nous allons les exainiiicr suc-
cessivement.
I. _ Documents historirjurs. — Ils sont malheureusement très succincts.
On sait que Jones est mort à (juarante cimj ans, que ses cheveux étaient
bruns, et que sa taille était île 1 m. 70.
L'examen du sujet a été en accord avec ces données: ses cheveux bruns,
letat des dents, la présence de quelques cheveux blancs montrent que
l'âge de la maturité est atteint. Quant à la taille, dont l'importance, comme
moyen d'idenlilication, n'a pas besoin d'être soulignée, nous avons trouvé
1 m. 71 c'esl-à-dire un cmtimètre en plus; mais il devait en être ainsi. En
effet, sans (jue la relation historique soit explicite surce point, il esta peu
près certain que la taille de l'amiral avait été prise debout, or la position
couchée, redressant les courbures du rachis, et accentuant la voussure du
pied, accroît toujours d'un centimètre au moins la longueur totale du corps.
En résumé les données écrites et nos observations se corres[)ondent
donc d'une façon très satisfaisante.
H. — Busle de Houdon. — L'un appartient au marquis de Biron, l'autre
au Musée de Philadelphie, l'n moulage de ce dernier existe au Musée du
Trocadéro. Nous n'avons pas utilisé le buste du marquis de Hiron, car il
montre une certaine négligence dans le modelé ; de plus il est plus petit
que de nature. Celui de Philadelphie est, au contraire, un chef-d'œuvre de
vérité et de vie. Les comparaisons que nous avons pu faire avec lui sont de
deux sortes. Les unes ont trait aux caractères morphologiques dont l'aspect
dépend faiblement des parties molles, les autres reposent sur des mensu-
rations :
1° Caractères morphologiques. — Implantation des cheveux, forme du
front, saillie des arcades sourcilières, os malaires, racine du nez, progna-
thisme générale de la face et prognathisme particulier de la mandibule,
forme du menton, disposition très particulière des cartilages de l'oroillle,
toutes ces régions, comparées avec le plus grand soin, ont montré une
ressemblance frappante.
2° Mensuration. — Nous avons pu releversix mesures comijarables surle
busle et le cadavre momifié, ce sont les suivantes:
Busle Ho
Philadelphie. Caiiavre
llaul.Mir .lu visage (racine de ehevcux a iiient..ir). . . . l'.>.'"'5 19,'-'"5
Hauteur de racine des cheveux à point sous-nasal. . . 12. ~ 12. fl
Hauteur .lu point sous nasal à menton '• ^ '■ ^
Hauteur .le la lèvre supérieure (du point sous nnsal
an boni des incisives supérieures) 2. 4 2. 5
Hauteur de la l.'vre inférieure et .lu menton 4. 6 4. fi
Largeur minirii.i .lu front l''-
L'identité des résultats est tout à fait extraordinaire; ils sont sunisants
:m\ -jo jrii.i.KT 1905
pour iilcntilior le suict, r,\r los vnriations de la faco chez l'homme sont
t''nurMio> : \)onv uiicliHe (run voliimo donné chacune des parties du visage
peut varier d'au moins un tiers. .Nous ne ferons pas un calcul des proha-
iités, convaincu que ses aj'plicalions à la hiologiesont parfaitement vaines.
Nous citei'onsle fait suivant (jui prouvera mieux la valeur démonstrative
de nos observations : sur 100 cadavres adultes masculins pris au hasard
nous avons trouvé à peine une di/aine de sujets dont la taille équivalaità
celle de V. Jones, à :2 centimètres près. 3 seulement avaient les cheveux
de couleur brune. Sur ces trois, aucune dimension de la face ne coïncidait.
On peut voir quelle quantité de sujets se trouve éliminée par les six dimen-
sions concordantes de la face et par les caractères morphologiques passés
en revue.
Incidemment nous appellerons l'attention sur la méthode de travail de
Houdon, qui dépasse en précision celle de tous les statuaires anciens et
modernes qu«^ l'un de nous (Papillault) a observés.
Enlin la cliniipie et ranalomi(3 pathologique nous ont fourni une troi-
sième source de documenlsd'idenlilication. Un sait que Jones avait présenté,
à diverses reprises, des accidents pulmonaires assez graves, particuliè-
rement vers la fin de sa vie et surtout localisés dans le poumon gauche.
C'est ainsi, comme nous l'avons déjà dit, que lors de sa réception à la
séance de la Convention, il ne put répondre aux discours qui lui étaient
adressés à cause des troubles pulmonaires dont il souffrait. Les rensei-
gnements de l'époque nous apprennent également que vers la fin de sa
vie il eut de l'hydropisie du poumon gauche.
D'autre part, quelque temps avant sa mort, il avait eu de l'œdème des
membres inférieurs ayant débuté par les pieds et étant remonté ensuite
jusqu'à l'abdomen. Ceci indiquait bien l'existence d'une alïection rénale
grave.
Or l'autopsie du cadavre nous a montré des viscères encore imprégnés
d'Un liquide alcoolique, rétractés, brunâtres, ayant l'aspect des vieilles
pièces anatomiques conservées pendant fort longtemps dans l'alcool.
Nous avons constaté d'abord quelques adhérences à la surface des
poumons, surtout du gauche. Sur une coupe on pouvait voir dans l'in-
térieur des deux poumons et surtout dans le gauche quelques petites
masses indurées ayant bien l'aspect de noyaux de broncho-pneumonie. A
l'intérieur et à l'extérieur des deux poumons, il existait, en assez grand
nombre, des amas blanchâtres assez durs du volume d'un grain de mil à un
grain de blé et que nous avions un moment considérés comme pouvant être
des tubercules. Mais leur existence également sur les membres inférieurs
nous fit éliminer prescjue aussitôt cette idée. On verra d'ailleurs plus loin
leur véritable nature.
Quant aux reins, tout en faisant la part de la rétraction due à la macé-
ration dans l'alcool, ils nous parurent plutôt petits et nous donnèrent l'im-
pression que l'un de nous (Capitan) exprima immédiatement qu'il pourrait
bien s'agir de reins atteints de néphrite interstitielle.
Il s'agissait alors de tenter l'examen histolûgique de ces divers viscères.
ni>(:i ssiitN ;UiT
Le professeur Cornil, avec son extrême et coutumière complaisance, vou-
lut bien se charger de cotipiM', colorer et oxaminor ces divers viscères. Il
en lit de reniar(|uaijlos pr/'parations qui furent admirahleinenl phologra-
phiées par nuire ami Muniiillard, (jui avait éyalcmeiil [)liologrititliii'' le
cadavre.
.\ notre élonncinenl à tous et au sien, le professeur (lornil nous lit cons-
tater que ces coupes étaient presque identiques à celles de viscères pro-
venant de l'autopsie d'un sujet actuel. Sur les coupes du poumon, on voit
de petits noyaux fortement colorés et entourés d'une zone scléreuse ayant
tout à fait l'aspect des petits foyers de hroncho-pneumonie chronique. Le
professeur (lornil a cherché soigneusement s'il n'existait pas de cellules
géantes; il a recherché également les bacilles de Koch. Cette double re-
cherche a éti- infructueuse. Il ne s'agit donc pas de lésions tuberculeuses.
Les coupes des reins ont montré un grand nombre de petites masses
arrondies entourées d'une zonede sclérose, correspondant à des glomérules
dégénérés. Quelques vaisseaux ont également leurs parois épaissies. Il y
a donc là l'indication d'une néphrite interstitielle avancée. Le foie est
sain, les coupes en sont fort jolies.
Les lésions histologiques cadrent donc parfaitement, on le voit, avec
les signes clinicjues présentés vers la fin de sa vie par Jones. Ces multiples
constatations tant anthropologiques qu'anatomiques nous ont donc permis
de conclure à l'identillcation du cadavre que nous avons examiné à celui
de l'amiral Paul .Jones, (^est, croyons-nous, la première fois que l'identi-
fication d'un cadavre est réalisée au moyen de ces diverses méthodes,
113 ans après la mort du sujet.
Discussion.
M. M.v.NOUVRiER. — L'idendité du cadavre de Paul Jones me paraît être
incontestable, comme je l'ai déjà dit à toutes les personnes qui m'ont
posé des questions A ce sujet.
Indépendamment des concordances que M. Capilan vient de nous
exposer et qui seraient suffisantes, il y a une ressemblance entre l'aspect
des traits du visage qui échappent aux mensurations et l'aspect des mêmes
traits sur les portraits qui ne laisse aucun doute h l'anatomiste.
Cette ressemblance est peut-être plus frappante si l'on considère le
buste de llomlon de trois-quarts ou le médaillon, si bien que lorsijue je
vis une grossière reproduction de celui-ci dans un journal je pensai (|u'il
s'agissait d'un portrait reconstitué d'après le cadavre que j'avais vu
quelques semaines avant. Cela tient à ce que la vue de côté met plus en
valeur certains caractères squelettiques importants dans la physionomie.
Au contraire, la comparaison des photographies est très peu convain-
cante à elle seule, si bien qu'elle disposerait plutôt au doute les specta-
teurs insuffisamment informés. Le visage du cadavre et celui du buste
ont paru tout a l'heure à plusieurs de nos collègues être de types plutôt
opposés. Ceci tient d'abord h ce que le nez paraît être mince et aquilin
•M\S -JO Ji'il.l.KT l'JU.'i
sur It' cadavre en raison df la rtHraclion des cartilages, tandis qu'il est
droit et lai'ge sur le buste, ensuite à ce (|uc l'ensemble du visage paraît
relativement large sur le busle. Il n'est pas impossible, du reste, (jue le
sculpteur ail élargi un peu le visage, volontairement ou non.
Je me demande si la mesure de la largeur bizygomati(jue a donné des
chiiïres aussi concordants que celle des dimentions longitudinales.
Pour mon édification personnelle et pour la sécurité de l'identification,
cela importe peu.
.\ux concordances des mesures, combien d'autres s'ajoutent (jui sont
tout aussi probantes .«-ans pouvoir être exprimées par des chiiïres; par
exemple la forme des soarcils. la forme non moins complexe du menton,
la courbure longiludinale du front, sa courbure transversale, etc.
Mais si notre conviction est faite ainsi que celle du public scientifique,
et si celte conviction doit entraîner celle du grand public, ce n'est pas une
raison, à mes yeux, pour négliger la satisfaction intime que i)eut ressen-
tir chaque citoyen américain en acquérant par le témoignage de ses
propres yeux une conviction égale à la notre; surtout si cette conviction
risque de se trouver affaiblie par une impression défavorable à la vue
des photographies et si des doutes lui sont suggérés par quelque écrivain
les ayant conçus pour son propre compte. Le sentiment populaire est
extrêmement vif aux Etats-Fuis à l'égard de Paul Jones comme à l'égard
de tous les grands hommes américains.
Or les doutes se sont déjà produits et sous une forme des plus violentes.
Une dame américaine m'a communiqué il y a deux jours un article d'un
journal de New-York oli l'ambassadeur des Etats-Unis à Paris est formel-
lement accusé d'avoir sciemment fabriqué un faux Paul Jones avec les
restes de qne\que convict français cl des témoignages de complaisance. La
violence de l'article et l'inanité de ses assertions indiquent trop l'intention
de nuire a l'ambassadeur pour que celui-ci ait besoin de répondre. C'est
une simple curiosité; peut-être môme un simple «pétard » de réclame. Mais
si le journaliste eût pu exploiter la dissemblance superficielle dont je
viens de parler, il est plus que probable que son attaque eiU produit sur
beaucoup de lecteurs un effet regrettable.
Pour prévenir des effets possibles de ce genre et pour éviter aux excel-
lents .Américains des doutes pénibles, il y aurait peut-être un moj'en. Ce
serait : 1" de mouler la tête du cadavre en entier après avoir disposé la
chevelure comme elle l'esl sur les portraits de marbre ou de bronze ; 2" de
confier a un anatomiste expérimenté tel que M. le D"" A. Spitzka, par
exemple, assisté d'un sculpteur habile, le soin d'effacer autant que possi-
ble, sur ce moulage, les altérations cadavériques, mais en respectant avec
le plus grand soin tous les traits fournis par le squelette.
La restauration de la forme des parties molles serait faite sons cette
expresse condition, d'après le busle et la médaille anciens et la critique de
l'anatomiste.
De cette façon pourrait être obtenu un document exposable dans les
Mvltlt; Kl M. l'KI.I.KTlKll. — illl \Mi;i: inMlK Kl UKilKNK» ATlitN OSSKUSE [Wj
musées cuiimi''iii(iialirs, iidinltit.'ux. aux l>l;tls-l iiis, à cùlé des représen-
tations amieiHii's d'ajiiés natiiic
Kxécuti' dans les conditions <|n(' je vii-ns de dire, un l)uste en plAtie. en
niailiie "iii l'ii lnonze. nionlrerail à tons les yenx, en nn'nie [t'm[ts que les
resseniltlani'es exprimâmes en eliillVes. des réalités que les altistes auteurs
des poitrails oriitinaux ont pu saisir et rendre, mais (|ue leur coni[ilt'xit(''
rend inaccessibles à l'antliropoimHrie et inex|)rimal>les même par des
.■ntaines de chilTres.
Pour plus de sécurité encore, l'exécution du j)rojet ci-dessus pourrait
être conliée à deux anatomistes et à deux artistes qui travailleraient simul-
tanément, mais séparément, sur le moulage cadavéri(|ue tiré à plusieurs
exemplaires. Mais ce serait, je crois, superflu, étant donné que le degré
de certitude actuellement acquis sullit largement aux personnes coiufié-
tentes et qu'il s'agirait seulement de donner une garantie plus tangible et
une satisfaction de plus à la noble sentimentalité patriotique du peuple
iméricain.
CRANIECTOMIE ET REGENERATION OSSEUSE
Par le 1)'' Maiue, Médecin en chef des Asiles
ET LE [)' .Madelelne I'elletier, Interne des Asiles.
La calotte crânienne que j'avais l'honneur de vous présenter est celle
d'un de nos anciens malades décédé dans le service et dont l'observation
(i été publiée en / 903 par MM. .\. .Marie et Buvat dans un travail intitulé
• Epilepsie et Trépanation. »
Sch... (Jacques). di\-liuil ans, de nationalité autrichienne, entre à
Vdlejuif en février i900, venant de Bicèlre où il était depuis 1894. C'est
un idiot : il porte sur le cr;\ne les cicatrices d'une cràniectomie dans la
région fronto-pariélale gauche, il a une cicatrice antéro-postérieure de
13 cent.; aux deux extrémités de la cicatrice, on voit deux autres lignes
d'incision perpendiculaires ;i la première, d'une longueur de -4 centimètres.
Nous ne savons rien sur les antécédents personnels et héréditaires du
malade qui n'est pas visité. C'est un microcéphale, les diamètres crâniens
sont les suivants: .\. P. 172, 142; angle facial 04; circonférence
crânienne 0,oi.
La trépanation n'a eu aucun efTet et sur l'état mental et sur les crises
convulsives.
Autopsie. — Faite 25 heures après la mort.
.\specl extérieur : léger œdème périma Iléolaire. Aspect un peu bron/.é
de la peau, mais la teinte est très légère, elle se retrouve au visage.
Crâne : épaisseur normale, sauf ;i l'endroit de l'opéiiation, sur une
soc. b'ANTUHÛP. "IQOo. "In
370
■20 ji lU.KT VM\
liaridr lU' liiiit Ji dix ceiitimi'lics de llln^l^l'lll^ .m iiivcaii de lu scissure
lenipoio-parit'tiilt'.
Ouelijut^s adlicTences de la duic-inèie au cràin' ; la pie-mùre n'adhère
pas à la substance cérébrale, mais est très mince et ditlicile à détacher
par ce fait même. Il y a quelques adhérences aux lobes occipitaux.
Rien à signaler au cerveau, si ce n'est le peu de développement des
circonvolutions frontales, qui sont très peu larges ; les sillons nombreux
et très profonds, les plis de passage effacés.
Rien aux coupes de Pitres.
Cervelet et bulbe normaux.
Poids : hémisphère droit (sans les méninges, 490 grammes);
— — gauche (sans les méninges, 480 grammes);'
(Cervelet et isthme : 160 grammes).
L'intérêt de la calotte crânienne au point de vue anthropologique
consiste en ce que la régénération osseuse a été à peu près complète,
malgré l'étendue considérable de l'exérèse.
'r t
__J
D'après la plupart des anatomistes, les os de la voûte crânienne
présentent en effet relativement aux autres la particularité de ne pouvoir
se régénérer au moyen du périoste. Il suffit, dit Tillaux, de jeter un coup
d'oeil sur les nombreux crânes trépanés que contient le Musée Dupuytren
pour constater que les rondelles d'os enlevées depuis nombre d'années
n'ont été nullement remplacées par un os nouveau; l'orifice ne se
rétrécit que par une sorte de rapprochement des bords. La non régéné-
ration des os de la voûte crânienne a été rapprochée par les auteurs du
fait que le décollement du périoste externe n'entraîne pas la nécrose de
l'os sous-jacent, et ils en ont conclu à une certaine indépendance entre
Tos et le périoste de la voûte du crâne, contrairement à ce qui a lieu
pour les os de cartilage
MaHII; Kl M. l'KI.I.KlIKIt. — r.llANlKi' luMlK Kï UKCKNKU A lIoN (ISSEISE 'M \
(lertcs los faits allcsltîs |)ar li's aiialomisli's t'I, l.-s cliinirgii'iis suiil
iiiconleslaLdes et iioinlue flo In'panalioiis ancionnt's ne piésHiiU-ril [)as la
iiioiinliv trace (If i('g(''iiér atimi ; oei)eiiilaiit le fait (jiie iit)iis apporluns ici
n'en i-st pas moins patent, et il e>t en oppnsilion manifeste avec les faits
signalés pnisipie, comme vous le voyez, la rét,'(''uération est à peu près
complète. Des cas iilentiipies ont été également signalés cliez des idiot^
cianiectomiés, |)ai- M li> i)"" Bourncville.
A notre avis lu solution est en ce que les trépanations attciennes por-
taient sur des individus trop avancés en Age pour faire de l'ostéogénèse
ou hien (pie les chirurgiens avaient eidevé le périoste avec la rondelle
osseuse ou bien encore avaient eu (juelques accidents sceptiques, d'où
naturellement l'absence de régénération; l'un et l'autre cas sont possibles
et peuvent même être combinés, tandis qu'ici nous devons avoir all'aireà
une craniectomie sous-périostée et aseptique, ce qui fait que l'os s'est
régénéré tout comme il se régénère après les résections sous périostées
des os de cartilage, d'autant plus (pi'il s'agisssait d'un enfant à l'époipje
de l'opération.
Ainsi lorsque l'on prend la précaution de laisser leur périoste et que
ITlge et l'absence de suppurations en assurent l'action osléogène, les os de
la voùle du crAne se régénéreraient tout aussi bien que les autres. Quant
au rù\e de chacun des deux périostes, périoste externe et périoste interne
dans cette régénération, ce n'est qu'un examen liistologique de la portion
régénérée qui pourrait le déterminer, mais macroscopiquement les deux
tables interne et externe semblent s'être r<>générées paralèllement, et l'ac-
tion du diploë peut suppléera celle du périoste interne.
D'après les auteurs, le périoste interne ou feuillet externe de la dure-
mère n'aurait d'ailleurs aucun r(jle puis<|u'il ne serait pas un périoste, et
aurait simplement pour but tout comme le feuillet interne de protéger
l'encéphale.
Mais des faits comme celui que nous apportons semblent montrer (jue
>ur ce point les études n'ont pas été suffisamment a|iprofondics, et il y
aurait lieu de demander à l'histologie de nous renseigner exactement.
Une autre particularité intéressante de cette pièce est que, ainsi que
vous le voyez, la suture coronale semble bien elle aussi s'être régénérée.
.\insi dans tous les points où il y avait de l'os et au niveau de la suture
il a régénéré la membrane suturale suivant un processus identique à
celui de la formation de la voûte crânienne, c'est-à-dire par ossitica-
tion convergeante des deux feuillets périostique formant fontanelle et
engrènement tinal des travées osseuses opposées. Si la craniectomie
sous-périostée avait été pratiquée à un Age plus avancé , la régénération
aurait-elle été osseuse? Mais comme le sujet était encore jeune, son périoste
crùnien était constitué de telle sorte qu'au niveau de la suture il ne pouvait
régénérer de l'os que par minéralisation de la membrane suturale sui-
vant le processus ordinaire.
-Vinsi It's sutures n'ont pas un nMe passif, ce ne sont point les sim[des
moyens d'union entre les os du cr;\ne; leur rtjle est au contraire très aciif
'M'I -20 jiii.i.KT 190.-;
et elles constituent les voies d'expansion «lu la voiHe crânienne luut
comme le cartilag»^ de conjugaison est la voie daccroisseraent des os du
squelette.
Entin l'observation du sujet montre l'inanité de la craniectomie comme
moyen thérapeutique de l'idiotie.
Certains psychiAlres ont pensé et pensent encoie (}ue chez les idiots à
petits crAnes l'insuffisance du développement cérébral Ment à la synos-
tose prématurée des sutures de la voûte crânienne ; le cerveau ne se déve-
lopperait pas parce qu'il se trouverait comprimé dans un cnlne trop
étroit. Ils préconisent donc la trépanation, afin de permettre au cerveau
de s'accroître.
En réalité entre le crâne et le cerveau il y a des relations intimes, et si
le crâne est petit c'est parce qu'il n'a à contenir qu'un petit cerveau. Il
est des cas où la synostose prématurée des sutures peut tenir à un pro-
cessus pathologique intéressant seulement l'os, mais alors l'expansion de
la boite crânienne se fait d'un autre côté, et on a un crûne déformé et non
un crâne microcéphale. D'ailleurs chez nombre de microcéphales il n'y a
aucune trace de synostose prématurée (Bourneville).
Discussion.
M. II. Anthony. — Le crâne que nous présente les D'* Marie et M. Pelletier
constitue en effet un bel exemple de régénération crânienne. La plupart des
chirurgiens et des médecins ont considéré jusqu'à ce jour, nous disent-ils,
que le crâne ne se régénérait pas. Cela tient, à mon avis, simplement à ce
que dans les craniectomies, ils ont négligé de conserver le périoste, et ont
dû opérer sur des sujets trop âgés.
Dans des expériences faites ces dernières années à la Station physiolo-
gique du Collège de France dans le but d'étudier la genèse de la forme
du crâne j'ai été amené à pratiquer sur des jeunes chiens des craniecto-
mies. Ces opérations étaient faites, soit le jour même de la naissance, soit
dans les deux ou trois jours suivants, et j'ai toujours eu le soin de conserver
le périoste. J'ai obtenu ainsi des régénérations crâniennes dont l'aspect
était très voisin de celle qu'on nous présente aujourd'hui. J'ai signalé ces
résultats au moment où je les ai obtenus dans les comptes rendus de
l'Académie des Sciences et dans les comptes rendus du Congrès de r.\sso-
ciation française pour l'avancement des sciences. Les pièces expérimen-
tales sont déposées dans les collections de la Station physiologique, et je
les montrerai à la Société.
Avant moi, d'ailleurs, Ollier, en opérant sur un jeune mouton, avait
obtenu une régénération crânienne (Ollier, La régénération des os, Encycl.
des Aides-Mémoires, G. Masson, édit , pages 51-52).
M. M.\NOUvniiiR. — Nous connaissions bien la possibilité d'une réparation
des pertes de substance des os de la voùle du crâne parosléogéniepérios-
tique, d'après divers cas publiés et les expériences de M. Anthony.
[.. CAPITaN. — PnKSENTATION DR SILEX DE (iUKRVlI.LE 373
Nous connaissions aussi le rôle des sutures dans l'arcroissfinent des os
crâniens ainsi que l'erreur qui a donné lieu à l'opération de la cranieclo-
mie comme moyen curatif de la microcéphalie. Cette erreur était manifeste
«•t ne manqua pas il'êlre relevée dés l'invention de ce singulier procédé
thérapeutique depuis longtemps discrédité. Mais la pièce présentée n'en
est pas moins intéressante et mériterait en elfet une étude approfondie.
('equ'il yade nouveaudans lacommunication qui vientdenousélre faite,
c'est l'assertion relative à la régénération d'une portion de suture enlevée
par la craniectomie. Ce fait me paraissait a priori très surprenant, et
j'avoue aussi ne point parvenir h comprendre l'explication qu'en donnent
los présentateurs.
Mais, après avoir vu, je suis obligé de dire que le fait en question me pa-
raît inexistant. La portion prétendue régénérée delà suture coronale qu'on
nous montre occupe un lambeau de crâne qui semble n'avoir pas été enlevé,
mais, Hu contraire, contourné par le chirurgien, comme ci celui-ci eût voulu
conserver précisément et préserver le plus possible la suture coronale,
comme moyen d'agrandissement du crAne. Là où cette suture a été cou-
pée par la craniectomie, elle n'existe plus.
M. Anthony. — Je suis de l'avis de M. Manouvrier; on ne voit sur la
pièce présentée aucune réparation de la suture coronale.
PRESENTATION DE SILEX DE GUERVILLE PRÈS MANTES
fpseudo-éolithes.)
Par m. L. Capitan.
On sait combien la question des éolithes passionne actuellement les pré-
historiens. Après des études très prolongées dans les gisements, après
l'examen minutieux de milliers de pièces de ce genre, j'étais arrivé à la
conviction très ferme que j'ai plusieurs fois eu l'occasion de formuler et
qui est la suivante : En VHat actuel de nos connnissnncfs sur la taille et
l'emploi du silex d'une part, d'autre part sur le rôle que jouent les agents
naturels dans la fracture et l'écaillement d'un nombre considérable de silex,
il me parait impossible <rexpli([uer autrement que par une action voulue,
intelligente, toute une série de fractures, d'éclatements et de retouches
tpie l'on peut constater sur un grand nombre de pièces depuis celles du Puy-
Courny jusqu'aux séries de certaines stations néolithiques de Belgique et
de Krance. Je ne parle pas des silex de Thenay au sujet desquels, mal-
gré nos recherches et celles de Uoussay, mon opinion n'a pas changé
depuis la publication de notre note avec Mahoudeau (Revue de l'Ecole
d'Anthropologie). Pour nous ces silex sont purement naturels.
• M- un fait nouveau vient de se produire; il moditie profondément et
d'une façon expérimentale les données que nous avions jusqu'ici sur les
374 -20 jiii.r.ET 1905
elTels des actions mécaniques non volontaires sur les silex. Il ôiail donc
de la plus grande importance d'étudier soigneusement ce fait nouveau et
d'examiner comment il pouvait chanijçer nos opinions au sujet des éoli-
Ihes.
(l'est à M. Lavilie qu'on doit cette découverte. Depuis longtemps déjà,
il avait remarqué à l'usine de ciment de Guerville près Manies (Seine-et-
Oise) les grands malaxeurs, cuves profondes de I m. 40 et larges de
5 mètres, dans lesquelles tournent à la vitesse île 5 mèlres à la seconde
des herses en fer qui brisent et mélangent au milieu de masses d'eau
courante les blocs d'argile et de craie pour en former une p;\te qui, cuite,
donnera le ciment hydraulique. Naturellement la craie renferme des
rognons de silex, ceux-ci roulent donc entraînés dans le malaxeur, se
choquent et s'entrechoquent di; mille fa^-ons durant les 31 heures que
dure l'opération. Ouand alors on vide les malaxeurs, on en extrait une
couche de 50 centimètres environ de silex dont l'étude est du plus vif
intérêt.
M. Lavilie s'était contenté de signaler le fait dans la « Feuille des Jeunes
Naturalistes » (1905, p. 110). 11 cominuni(iua ses observations au profes-
seur Boule et le conduisit h Mantes. Celui-ci lit aussitôt une communi-
cation à l'Académie des Sciences (séance du i2(i juin 1905). Il a publié
également sur le même sujet un très intéressant mémoire avec belles
photo-gravures dans l'Anthropologie tome XVI, fascicule 3.
Au commencement de ce mois, conduit par mon ami Obermaier, j'allai
à mon tour à Guerville et y passai avec lui deux journées. Grâce à
l'extrême amabilité du directeur M. CoifTu et au très empressé concours
du contremaître M. Lambert et du chimiste M. Bezomhes, j'ai pu d'abord
recuellir avec Obermaier une très nombreuse série de silex provenant des
énormes tas où on dépose toutes les 31 heures les silex sortis des
malaxeurs, puis ensuite faire toutes les deux heures environ un prélève-
ment dans chacun des trois malaxeurs ([u'on arrêtait dans ce but. J'ai
donc pu recueillir des séries de toute l'opération de deux heures en deux
heures.
C'est (juelques-unes de ces pièces que je montre aujour'l'bui à la
SociiHé. On peut remartiuer que les bords de toutes sont en général plus
ou moins écrasés, ou au moins usés. Huant aux cassures et écaillures
simulant assez bien les éclatements d'usage et même les retouches (sur-
tout les retouches d'avivement di; llutol), elles sont très nombreuses et
fort curieuses sur nombre di pièces. Elles peuvent simuler des percu-
teurs de divers ty|)eSj des racloirs, ries grattoirs, voire même des perçoirs.
Je présente ici une série de ces pièces et en même temps quelques silex
des graviers quaternaires (jue je considérais jusqu'ici comme deséolithes
et qui présentent la plus grande similitude avec les silex de Guerville.
D'autre, part, je montre aussi une série d'autres éo!ithes qui au contraire
se diiïérencient assez facilement des silex de Guerville et enfin des
pièces très grossières, simples fragments de silex retouchés, mais sur
lesquelles tout le monde est d'accord pour reconnaître un travail humain.
DISCUSSION 375
Tout coci pour montror, pièces on main, comment à mon puint»!»' vue
je consiilère (]ue le fait nouveau de l'usine de .Mant«'s doit mudilier notre
opinion sui- les éolilhes. l'our une grande part (mettons un tiers, peul-
tHre mt''me moitié) des éolithes (jue je pensais porter la trace d'un travail
volontaire je les considérerai dorénavant comme pouvant tout aussi
bien avoir été produits par des causes naturelles qu'utilisés ou façonnés
par un être intelligent. Mais pour le reste, leur étude technologique minu-
tieuse ne me permet pas de les ranger dans la môme catégorie et jusqu'h
nouvel ordre — tant que je n'aurai pas pour eux une démonstration de
leur fabrication naturelle comparable h celle des silex de Mantes, — je con-
tinuerai à les considérer comme ayant tous les caractères d'instruments
ou d'armes vraisemblablement utilisés ou façonnés par un être intel-
ligent. Tel sera le cas par exemple pour un bon nombre de silex du Puy-
Courny.
D'autre part, je dirai que ces silex présentant une extrême ressemblance
avec les silex utilisés ou même taillés, classiques, il s'en suit qu'on peut
considérer comme possible, peut-être même probable l'existence d'un
être intelligent (homme ou hominien), contemporain des couches où nous
trouvons les dits silex, quel que soit d'ailleurs l'âge de ces couches. Mais
la leçon de Guerville doit nous rendre très prudents et je n'affirmerai rien,
considérant, une fois de plus, que sur bien des points de la préhistoire,
nous devons nous contenter d'hypothèses déduites scrupuleusement des
faits, et souvent très vraisemblables, mais néanmoins révisables et modi-
fiables lorsque (le nouvelles observations ne permettent plus de les consi-
dérer comme valables.
Discussion.
A. DoiGNEAU. — Je vous demanderai. Messieurs, la permission de dire
quelques mots sur les outils de la période colilhique. Comme vous le savez,
le mot lui-môme est de Gabriel de .Mortillet ' et il a été admis sans contes-
tation aucune par tous ceux qui se sont occupés de préhistorique, parce
que, suivant l'expression môme que vient d'employer M. le D'' Capitan,
« nier Véolithe serait nier le soleil ».
Je rappellerai également à ce sujet ce tpie disait en 1898 notre très
regretté Président Letourneau - à propos de silex présentés par M. ThieuUen.
'< Les outils classiques se ramènent tous à quelques formes typiques
« et universelles parce que l'expérience du genre humain les a reconnues
« comme étant les plus avantageuses, les plus utiles; mais on ne saurait
« admettre (jue les ouvriers primitifs aient trouvé du premier coup ces
« formes avantageuses; elles doivent forcément résulter de nombreux
« essais et tAlonnements. »
' Gabriel de Mortillet. — Le Préhistorique, l" édilion, 1883, p. 22.
• Bulletin de la Sociétr d'Anthropologie de Pari:*, i898. p. :^)6.
MTn fîo jni.i.F.T loor;
(liHte manière de voir de notre ('iiiincnt pn-sident s'impose à tout esprit
impartial, l/niilil ('liciléen, en clVel, le c coup de poin,:; » de (îabriel de
Moililiil, ne [i.'ui pis iivoir été fabriqué sans que noire ancêtre ne s'essayAt
dans ili's l'haiiclii's s'en ra[)proeliant plus ou moins l'I ririsliMinicnt en
amande, im^ine le plus grossier, reprc'sente une somme d'ellorls (pie nous
ne saurons jamais trop apprécier.
Plus anciennement encore, il est de toute évidence (]ue le primitif,
homm»; au pn-curseur, a d'abord utilisé le caillou tel qu'il a pu se le
procurer, puis il a di'l remarquer qu'en se brisant à la suite de cbocs
répétés, ce caillou, au lieu d'être inutilisable devenait, au contiaire, grâce
au vif de ses arêtes, un outil pouvant lui rendre [)lus de services.
C'est ainsi que notre ancêtre apprit à casser intentionnellement un caillou
et fut amené à fabriquer le coup de poing chelléen. C'est aujourd'hui
presque banal de le dire, ici surtout, et je ne l'aurais pas rappelé si les
éolithes qui sont les produits industriels de la période de tâtonnement
préchelléenne ne venaient d'être niés ici même d'une façon catégorique.
Et avant d'arriver au type de Cbelles combien de cailloux qui sont en
somme les primitifs outils n'ont-ils pas été utilisés simplement ou éclatés
intentionnellement sans forme préconçue. Ce sont justement ces pièces qui
constituent ce que nous sommes convenus d'appeler les éolithes et à la
recherche desquelles s'était consacré dernièrement d'une façon toute par-
ticulière M. Rutot. Maintenant, le savant géologue belge avait-il trouvé le
critérium absolu qui nous permette de déterminer rigoureusement les
éolithes et de les distinguer des cailloux éclatés naturellement? Si, hier
encore la question pouvait être douteuse, il n'est plus permis maintenant
de suivre M. Rutot, après la très intéressante communication de M. le
D'" Capitan et les travaux de l'éininenl professeur au Muséum d'Histoire
naturelle, .M. Marcelin lîoule.
Il est de toute évidence (|uc les silex (jui nous sont présentés et qui
proviennent de la fabi'i(jiie de ciment ressemblent beaucoup à ceux trouvés
dans le diluvium. l'ourlant l'un de ces derniers considéré par M Capitan
comme douteux se rapproche considérablement du faciès chelléen infé-
rieur.
Maintenant si une exlrêuK; prudence s'impose plus que jamais et si
dans IV'tal actuel de nos connaissances nous ne sommes pas encore en
possession du critérium absolu tant désiré, ce n'est pas une raison pour
que nous renoncions à poursuivre l'éclaircissement de la question.
Convaincus de l'existence des éolithes nous devons, au contraire, en pour-
suivre l'étude et chercher le secret de leur détermination.
M. Veuneau. — La communication que vous venez d'entendre vous
prouve qu'il ne faut jamais se laisser aller h l'emballement quand il s'agit
de questions scientifiques. Je m'explique, d'ailleurs, la vogue dont ont
joui les éolithes. Lorsqu'on se trouve en présence d'instruments en pierre
aussi bien travaillés (}uc les haches de Saint-Acheul, on se dit qu'ils ne
représentent pas les premières ébauches industrielles de l'être humain.
niscrssiON 377
Avant qne l'ouvrier no possédAt l'ijabilolé l<'chni([n(^ révéléi^ par ces outils,
il avait "lu travoisor um- louj^uc iicrioili' de lAloiini'uifut. (Ii-, ou nous
montrait les produits de (••tle période ,'l l'cspril drvail l'Iie salisl'ail-
AujounThui, il est iK'cessaire de se tenir sur une prudent"' rést-rvt'.
Notre eollègue, M. (lapitan, avec une bonne foi (pii lui fait honneur —
et, jtour ma part, je n'attendais rien moins de lui — vous a exposé les
faits avec, tiélails. Vous inc permettrez d'ajouter quehjues mots, car j'ai
longuement examiné la belle collection de pseudo éolithes que, en cpiel-
ques heures, MM. Boule, Cartailhac et Obermaier ont récoltée lorsque
M. Laville les a conduits k (iuerville, auprès de Mantes. Dans cette
collection se trouvent tous les ty[)es décrits par M. llutot : on y voit le
percuteur'double, le retouchoir, le racloir ou grattoir à dos, le grattoir
à tranchant transversal, le grattoir-rabot, le disque, etc. Mais on y ren-
contre aussi des objets qui rappellent une phase industrielle bien plus
avancée, par exemple, un grattoir à extrémité semi-circulaire ipii fait
songer a l'époque de la Madeleine, et des pièces qui se sont elles-mêmes
retouchées fmement sur trois de leurs bords, et sur une seule face. On y
découvre mieux encore : je veux parler d'une certaine lame à encoches,
qui oiïre une apparence de travail si soigné qu'on serait tenté de la placer
au-dessus de la plupart de nos outils quaternaires. Par ses deux encoches
situées presque en face l'une de l'autre, par ses fines et multiples retouches,
elle m'a fait songer à quelques belles pièces du nord de rAfrifjue (pie j'ai
étudiées il y a peu de mois et dont la description va paraître prochaine-
ment dans l'ouvrage de M. Foureau.
Or, nous savons comment se sont faites les retouches sur l'objet
recueilli à (îuerville : l'ouviier a été lemplacé par un tourbillon liquide.
.M. Roule, qui va bientôt publier ses observations, a calculé (|ue, à la
périphéiie des cuves dans Icsipielles on délaye la craie, l'eau n'est pas
animée d'une vitesse de 4 mètres à la seconde, c'est-à-dire que cette
vitesse atteint ii peine celle de nos grands (louves pendant les périodes
des fortes crues.
Ainsi, pour produire des retouches que M. llutot déclare ne pouvoir être
attribuées qu'à une action humaine, il suffit qu'un cours d'eau soit animé
d'une certaine vitesse et qu'il entraîne des cailloux (|ui se heurtent \ei-- uns
contre les autres. Et ce ne sont pas seulement des « écaillures », comme
disait .\. de Quatrefages, qui peuvent en résulter; on observe des plans
de frappe, dos conchoïdos de percussion, etc. Une des pièces deGuerville,
bien plus fruste que la lame a encoches dont je viens de parler ou cer-
tains grattoirs que m'a montré M. Boule, offre néanmoins un caractère
intéressant: ses deux bords les plus longs, légèrement concaves, pré-
sentent des apparences de retouche; mais, d'un côté les éclats se sont
détachés sur une face, et sur le bord opposé c'est l'autre face qui semble
avoir été travaillée. Vous n'ignorez pas qu'on a attaché une grande
impoitrtnce, au point de vue flu travail intentionnel, k cette distribution
des relouches.
Si un tourbillon d'eau est capable de produire de tels phénomènes
3TS 5 ucToitUE 1905
lorsijuc l<^ dt^placoment du li([iii(l»' est inférieur h -4 mètres pnr seconde,
on se deinandi; ce que piMil faire un torrent quand il i-oule avec une
rapidité vertigineuse.
Les observations faites au|)rès dr Mantes déniuntient, je le répèle après
M.Capitan, qu'il faut élie d'une extrême prudence luisqu'on se trouve en
face de soi-disant éolithes. Elles prouvent que tous les caractères auxquels
les piéhistoriens croyaiont reconnaître une action inttntitinnelle sur un
silex dont la foiine n'était pas lji(;n définie, peuvent résulter de chocs
accidentels.
Est-ce à dire que tous les éolithes qui ont été recueillis par une foule de
chercheurs doivent leur origine à des phénomènes naturels? M. Capitan
ne le croit pas et je partage son opinion. Je ne pense pas me tromper en
avançant que M. Boule ne prétendra pas non plus fjue parmi les ohjets
en pierre qui ont été regardés comme des outils rudimentaires, il n'en est
aucun que l'on puisse considérer comme ayant été travaillé ou utilisé par
un être intelligent. Mais, encore une fois, il ne faut se prononcer qu'avec
réserve puisqu'il n'existe pas un caractère auquel on puisse reconnaître
avec certitude, sur de tels objets, un travail intentionnel ou une utilisation.
L'étude de la question doit être reprise en s'aidant des données nou-
velles que nous possédons maintenant. Il faudra, à mon sens, lorsqu'on
rencontrera quelques pierres offrant des apparences de retouches, s'assurer
tout d'abord qu'elles n'ont pas pu être entraînées par un de ces courants
d'eau rapides qui sont capables de leur imprimer des caractères auxquels
les archéologues les plus experts sont susceptibles de se laisser prendre.
81i« SÉANCE. — ri Octobre 1905.
Présidence de M. Sébilf.ot.
Elections. — Le D"" A. Fort, ancien démissionnaire deinando sa réintégra-
lion cuinnio membre titulaire de la Société. — Adoptr.
M. Pic. présente par MM. Zahorowski, Sébillot. DeniUer, est élu membre
associé étranger.
PRÉSENTATIONS
.M. Z.vuoHowski Hltirc riilti'ution sur Fouvrage de M. l'ic. Cechy na tis'vite
Dejin na caklade pra'historirke cbirh;/ musea Kral. ceskeho. Zvazek. 3. —
Prague, 1900, in-4« avec 100 planches.
Il est spéciaioraeni consacré ii l'élude des cimetières à incinération, des
champs d'urnes, qui ont tant d'importance pour la détermination des migra-
tions venues du sud, des mélanges des races, et du peuplement par les slaves.
M. Pic a d'ailleurs consacré un cliapiln; spécial à l'étude de l'origine des
slaves, et, comme il était inévitable, à lexemple de tous les palethnologues
DISCUSSION .^79
qui ont h traiter rlos plus rtVonIs Ai^'cs pn'liistnriqiif's, djins lo contro cl io nonl.
la question dos orifîinos arvcnues a aussi |iarti<ulit'rfMnent lixô son atlentinu.
lu résumé frau(;ais de ce Ih'I (luvrai^i". serait liifii m-rcssaire.
M. ZAïKiitnwsKi .itlin- .■••;;ili'tiMiil l;il Iciil imm mit \r Iniisinti.' voiuuii- de
l'ouvra^'e rousidérable (|ue M. Wiuiiiier, mi des l'iuidateurs de la seieiiee des
runes, a ennsaeré au relevi-. à la desi liption el au déihinVenieul de tous les
uinuuuieuls ruuiiiues du Danemark.
Winmier (Lud\ . l". A.i : Dr i/ttns/,r liiiiii-iniinlcsmui'rlyfr. liedje Hiiid, l v. t.
Copenhague, 1004-1905.
M. liKMKKit. invsenle l;i Iradiirtiou eu hul-are par M. V. Zlalarskv. de son
artirlo : « les Huljrares el les Macédunieiis. » [»uldié dans le n" 4 des liulletins
pt Mémoires dp la Soriété d' Anthropolonip. Celle traduetion jtorte le titre :
<< IM-iuos K'm' Autrnp(d(>j.dleli(>sk(il(i l/.oulclivane lia Hlgaritie » {Contrihnlion
à l'étude (inf/iro/iolof/ii/Kf île la fhdf/arip) el a paru dans le « IVrioditohesko
Çpi(;auie « {/{i-rueil /icrioili</iif' de So/ia, I. C\(]).
LES PYGMEES DE L AFRIQUE CENTRALE
M. Demker enl relient la Sociélé des l'ygmécs de l'Afriiiue centrale qu'il
a eu l'occasion d'examiner au mois de juillet, pendant une heure h leur
domicile à Londres, où on les exhibait à l'ilippodrome. 11 a pu constater
sur les -4 sujets niAles qui composaient la troupe, tous les caractères des
pygmées. Sur le> deux femmes, une ne lui paraît pas ôtre pygmée. L'Ins-
titut anthropologique d'Angleterre a nommé uncî commission qui a étudié
celle intéressante troupe et qui va faire paraître bientôt les résultats de
ses travaux. Aussi M. Deniker ne veut-il pas s'arréler plus longtemps sur
celle question afin de ne pas déflorer le sujet d'études de nos collègues
d'Oulre-Manche. Il se contente de signaler quelques particularités qui
l'ont fiappé.
Discussion.
.M. Ver.nkai. — Les Pygmées (pie .M. Dcnikei' a pu voir à Londres, ont
fait l'objet d'un arlicliMpii vient de paraitie dans LaNalure iw" du 1(5 sep-
tembre lîtO:> i. L'auteur de cet arlicb; ne |)arail jias, d'ailleurs, très au
courant de la fpiestion des Négrilles et il ignore, notamment, les belles
recherches de Schweinl'urtb et de tous ceux ipii onl précédé Stanley ; mais
il connait le travail de sir llarry Johnston sur les Wa-Mbutté ou Ouam-
bonlti. C'est, en efTet, à la description publiée en 1902 |)ar Sir Harry
Johnston iju'il l'iiquonle ses documents.
I)'a|)rès cet auteur, ce qui frappe le plus dans la physionomie des
Pygmées, c'est la forme du nez et de la lèvre supérieure. Le ne/- esta
peine saillant el démesurément large; son extrémité est i-iUiée presque
sur le même plan que ses ailes. Ouant à la lèvre supérieure, elle est plus
longue, plus « protubérante » et plus tombante que chez les autres nègres.
Sir Ilurry Johnston note aussi la brièvelé et la fuite du menton, le peu de
longueur du cou, la belle musculature des jambes, trop courtes pour la
taille, la grandeur des pieds, qui tendent à rentrer en dedans. Il nous dil
•i80 5 oCTi.ituK 11)05
que la peau n'est pas très noire et que les cheveux, très crépus, présentent
(les rellets rougeAtres. Il ajoute que la barbe est bien fournie et qu'elle
peut alleiniire, chez certains de ces petits hommes, 50 centimètres de
longueur. Kiiliti U's deux sexes auraient le corps couvert d'un fin duvet
ruussAtre formé par des poils droits analogue aux poils follets de nos
enfants de race blanche.
•le ne suis pas en mesure d'apprécier l'exactitude de cette description,
quoique je possède un bon nombre de documents inédits sur les Négrilles
de l'Afrique équatoriale, documents que je dois à divers voyageurs; mais
je puis dire deux mots des J'ygmées qu'on exhibe en ce moment à Londres
en me basant sur les bons portraits qu'en a donnés La Nature. 11 semble,
à première vue, que leur type ne soit pas parfaitement homogène et je
ne serais pas surpris que leur indice céphalique présentât ces éf^arts sur
lesquels j'ai insisté autrefois '.
Ce qui frappe de suite, c'est la largeur de la face au niveau des pom-
mettes et son rétrécissement considérable en bas : il en résulte une forme
triangulaire très accusée du visage. Le nez offre non seulement les carac-
tères que lui assigne sir Ilarry Johnston, mais il est en même temps d'une
étroitesse remarquable en haut et la racine en est sensiblement déprimée.
Un des sujets — le plus grand et le plus corpulent — a le menton saillant.
Quant à la lèvre supérieure, elle est très courte chez ce dernier; mais
chez les trois autres sujets masculins et chez les deux femmes, elle est
longue et tombante. Aucun des sujets n'a les lèvres charnues, volumi-
neuses du Soudanais; elles sont plutôt fines, surtout celle du haut. Par-
fois la tête paraît enfoncée entre les épaules, parfois, elle est supportée
par un cou assez long.
Cinq individus ont le front bombé et les bosses frontales proéminentes.
Les arcades sourcilièrcs font une notable saillie, de sorte que les yeux
semblent un peu enfoncés dans leurs orbites.
Il est impossible de se rendre compte du développement du système
pileux car les sujets de l'un et l'autre sexe sont vêtus depuis le cou jus-
qu'aux chevilles; l'un des hommes porte toutefois une légère moustache,
qui semble rare. Les cheveux, courts et extrêmement crépus, sont
implantés tantôt très haut, tantôt très bas.
Je signalerai un dernier caractère qui est singulièrement accusé chez
deux Pvgiiiées masculins : c'est l'écartemenl du gros orteil des autres
doigts du pied.
Telles sont les quelques observations que suggère l'examen des por-
traits. Je regrette que M. Deniker n'ait pas pu pratiquer de mensurations
sur ces nains: mais il est à espérer que nos collègues anglais, qui les étu-
dient actuellement, nous fourniront bientôt d'intéressants renseignements
sur les six nains de la forêt d'Ituri.
* R. Verneau. — De l.i i.lmalilé des Ivpcs ethniques chez les Négrilles, L'Anthro-
pologie, t. Vir, 18tt6.
l'UKSKNTATION.s IJ81
8I2" SÉANCK. — 19 Oclol.ic m^.
PrÉSIUKNCE de .m. SliUILLUT.
M. i)K Bah l'.iit ilnu il'ini silrx ,'i l.i Sncii-h'.
M. Lkjkink signale rintérOt d'iiiit' lii'ocliiirc iiitil iil<'i' : l.;i iiuu'îiIc cl la liiUe
pour la vie. par .M"'' M. l'elleliLM-.
M. C.Ai'iTAN préseiile (les pièces pi-('iiistiu'i(|iies pi-nvciiaiit du Moiislici- cl (ioiine
la topographie ilo la région.
PRÉSENTATIONS
M. Paul Skuiluit présente le tome 11 iln Folk-Lorc do France. Il comprend
deux grandes divisions : I. La Mer. 11. Les Eaux douces. La première partie
traite successivement des oiigines légen<laircs de la mer, des êtres surnaturels
qui se montrent à sa surface ou ipii habitent s<'s profondeurs, desenvaliissements
des flots et deslégendes de villes englouties. M. .Séhillot ;i traité avec plus d'am-
pleiu- que les autres celles de la ville d'is, non seulement en raison de sa célé-
lirité, mais aussi de ce qu'tui peut la suivre dans ses étapes successives. Les îles,
la ceinture des rivages, les sai)les, etc., sont aussi l'objet de mouograijhies dé-
taillées, ainsi que les grottes de mer naguère enc(ue habitées par des espèces
de fées locales, familières avec les marins et les prêteurs. Celle partie se termine
par les chapitres des .\avires léf/endaires, parmi Icsipiels on retrouve le bateau
chargé de lrans[iorter les morts, et celui du cullr (li:-< eau.r. La seconde partie
est consacrée aux Eau.r douces, et elle est beaucoup plus volumineuse que la
première, puisqu'il elle seule elle occupe plus de ."iOU |)ages. Llle débute par les
origines légendaires des fontaines, leurs hantises, leurs particularités; un cha-
pitre entier parle de la puissance des sources privilégiées, des pèlerinages publics
ou clandestins, des observances singulières dont elles sont l'objet. Les puits, les
rivières et les eaux douces sont envisagées aux uu'mes j)oinls de viu' ((ue les
fontaines. Ce second volume termine le Folk-Lore du monde [)hjsique; il con-
tient beaucoup plus d'observances médicales que le i)remier, et nos collègues
y trouvent noudire de renseignements qui intéressent directement l'Anthropo-
logie.
.M. Mahcel lUuDouiN. — J'ai riKumcui' de ivnicltre sur le Bureau de la Société
({Anthropologie le travail très comi)let (}ue j'ai publié dans la Revue de Chi-
rurgie, en 1905. sur une Luxation préhistorique de l'atlas sur l'axis, dont
j'ai eu l'occasion de parler dans cette enceinte même et dont j'ai montré ici
la pièce anatomo-pathologique.
Je ne crains pas de faire remarquer que cette affection est la première de
celte nature qui ait été signalée, et qu'elle n'a pu cire constatée «pie grAce à
l'emploi dune technique spéciale au cours d»>s fouilles des sépultures préhisto-
riques : le .tiiicator/e en place et en nia.9se des ossemmls découverts. C'est une
méthode que je me permets de recommander tout spécialenamt aux fouilleurs
qui travaillent actuellement d'une fa(;on véritablement scientiliqu(î.
M. Maucki. Maihoixn. — J'oUVc à la Sociôlr irAnlliropohif^k' au nom de mon
( ullalidi-alt'iir. M. (1. LAroULotMKHt, «'I an mi<>ii un lin- à \niv\ «If la .'Société /tré-
fiis/<iri</iif (If l'idiicf intiliilt' : Ih'rnan'rti- d'un mèpalit/u' fuiu-nnii' smis-
fuiiniliis au Mo/f/fii/fn/i dr Saint-Miirtin ili- limit (Vi'iidéf).
Dans ccllf |>la(|in'llr csl ili'cril un mégalitho nouveau, eu rormc ilc dcmi-
cromlcrk. i]ui navail rucuif élé ni siimah' ni (''ludit'. Ou y a trouvé inic s(''|»ul-
ture di' rt''pO(|U(' nt''olillii(|iu^ tout î\ l'ail typique, qu'on peut rapprocher dans
une rerlaine mesure des sépultures mé<(alitliiques de Brelayne. (Jn j a récolté
en eiïet. di's haches polies très belles, de petites haches polies perforées, des •
outils en >il('x du Grand-Pressigny très beaux, etc. Les auteurs ont fait des
études très complètes de mituumenls et de sou c(uitenu et sont arrivés ci des
conclusions intéressantes au moins pour la Vendée.
M. Maucei, Ualdoii.n. — J'ai l'honneur d'oll'rir à la Société d'.Vnthropologie,
en mon ncuii et en celui de mon collaborateur. M. G. Lacoulou-mère, une bro-
chure intitulée : Lp Ptr/iisfori'/uc à Aprpmnnt (Vendée). La Roche-sur-Yon.
1905. in-8".
On y trouvera toutes les données relatives aux trouvailles d'ordre préhisto-
rique laites dans cette commune de Vendée qui n'avait jamais été étudiée à ce
point de vue. Bornons-nous à indiquer ici qu'on ne connaît pas encore d'objets
paléolithiques qui en proviennent. Par contre, on y a rencontré des haches
polies et M. Baudouin y a découvert un menhir, resté inconnu jusqu'à ses
recherches, le menhir de la Fricamirre. Ce mégalitlnise trouve au milieu d'un
centre, dit celli(pie. en Vendée, appelé le FouUef, et ayant beaucoup d'analogie
avec ce qu'on désigne dans l'ouest sous le nom de Luc.
Ce travail renferme, en outre, le récit des fouilles faites par les auteurs aux
environs d'nn faux mégalithe La Pierre dressée de la haie, qui n'est qu'un
rocher naturel de pegmatite. On y a découvert d'ailleurs une petite station, soit
romaine, soit moyenAgeuse.
Oltes (Félix K.). — La Edad de la piedra en Patagonia. Estudio de
arqueologia comparada. 1 vol. gr. in-8°, Buenos-Aires. 1905, (avec un résumé
français cl 206 fig. intercalées dans le texte).
.M. ZAHoKOwsKi. en présentant cet ouvrage eu signale l'intérêt particulier et
riiMpurlance. Il rassemble et résume pour la pi-emière fois les documents
réunis dans une région sur laquelle nous n'avions que des renseignements bien
vagues. M. Outes énumère huit gisements paléolithiques sur une aire géogra-
phique qui s'étend entre le 43" 45 et le 49° 50 de latitude.
La plupart de ces gisements se trouvent sur les plateaux presque à la surface.
Les silex, dont M. Outes donne des figures sont des haches acheuléénnes incon-
testablement, leur ressemblance avec les silex des dépôts synchromiques de
l'Amérique du Nord, est complète.
L'époque récente de la pierre dans la même région se subdivise en trois
phases archéologiques. La première n'est qu'un développement du paléolithique
et se caractérise jtar une diversité un peu plus grande des fornies. La seconde
phase n'est à son tour qu'une suite le la preinière. La spécialisation des ins-
truments taillés y est plus marquée.
Ce n'est qu'à la troisième phase, évidemment peu ancienne, qu'il y a intro-
duction d'une civilisation nouvelle qu'ont peut qualifier de néolithique, Son
matériel consiste eu pierres polies, de « balas », de « manujas », mortiers,
pilons. Cette civilisation a été brusquement arrêtée dans son évolution par des
IIM'UUIIN KT I.ACnl'I.itlMKllK. — I.K iml.MKN KE i/kCIIaKKaIIi DU l'I.ESSIS ÀH'i
iiiviisioiis iioiivflli'S. Kllf iillVi' la |)liis j^M'aiulc siiiiililiiile iivi-r- le ni.ilfjiri
ifciifilli ilaiis les Etats do losl cl du sud-est «les Ktals-l'nis. D'après M. Outes,
l«'s dolichocéphales de la région patagouioniic y sont vçuus par le iiunl-cst cl
les Ijrarhyri'phalos par li" nord-ouest.
LE DOLMEN DE L'ECHAFFAUD DU PLESSIS AU BERNARD i VENDEE .
DECOUVERTE, DESCRIPTION ET FOUILLE.
M. LE 1)'" .Marcel Baidoufx, et M. G. Lacouloumère,
SECRÉTAIRE GÉNÉRAL ANCIEN INSPECTEUR DES BEAUX-ARTS,
DE LA SOCIÉTÉ PRÉHISTORIQl-E DE FRANCE. SOUS-PRÉKET.
Découverte. — .\u dt'bul d'aoùl 1903, à la lin de la campagne de fouilles
de cette année, l'un de nous alla visiter un amas de pierres, qui lui avait
été indi(|ué comme intéressant, l'année précédente (1902), par M. (îaudin,
riiislilutt'ur du Bernard, notre zélé correspondant et collaborateur. Il
n'eut pas de peine à reconnaître de suite qu'on avait alTaire à des restes
d'un dolmen, peu important il est vrai, mais très caract'ristique.
L'année suivante, en août 1904, nous avons pu louiller ce monument,
dont nous avons été obligés de déplacer légèrement la table et les piliers;
et c'est à la description de ces travaux de restauration que sera consacré
ce court mé-moire.
Nous avons donné à ce mégalithe le nom de Dolmen de VÉchalJ'aud du
Plessia. en raison de sa forme et de sa situation. Il se trouve, en elfet, au
voisinage du village du Plessis au Bernard (Vendée), et tout proche des
grands menhirs de ce nom, désormais bien connus, car nous les avons
étudiés il y a plusieurs années déjii '.
Historique. — (Ihose très extraordinaire, nous n'avons pas trouvé la
moindre mention de ce monument dolménique dans les mémoires des
auteurs (jui ont écrit sur le préhistorique de la commune du Bernard. Un
n'y fait pas, en eiïet, la moindre allusion dans les travaux de Uelange
(1836) et de Léon Aude (4840) *. L'abbé F. Baudry lui-même n'a pas eu
connaissance de cette station mégalithique, car il n'en a jamais parlé : ce
qui nous étonne beaucoup, bien peu des monuments anciens de N'endée
ayant échappé à son esprit investigateur et patient, surtout dans sa
propre commune !
C'est donc une découverte nouvelle, réelle et indiscutable, des missions
• Marcel Baudouin et G. Lacouloumkre. — Le.s Menhirs du J'Ies.sisau Bernard
(Ven<léo). Homme prélii.ilorùjue. Paris, 1004. t. Il, N" 2. — Tiré à part, Scldeiclier et
O', Paris, l'JO'i, 2-2 p.. /ig.
* Il n'y a aucune indication sur la Carte celtique de cet auteur.
;{S4 li> (icntiiitK 1905
archéologiques df VV'iuli'c. (|iii lui cnregisliée <mi d903, et doiil le inéiile
revient un peu ;i .M. (îaudin, (|ui, le premier, nota Texislence de ces
piei res aux cours îles excursions (ju'il lit dans la région du IMessis, à
noire instigation d'ailletirs, ii |»ailir di' l'.)02 '.
Folklore. — Malgré toutes nos investigations, nous n'avons pas retrouvé
la moindre trace d'une légende relative .à ce mégalithe. Et cette raison
est sullisante, ii notre sens, pour expliquer comment il a pu échapper à
la sagacité de l'abbé Baudry, toujours à l'alîut des vieux récits vendéens
et des contes de fées.
Eli/inolofiie. — Nous nous sommes expliqués ailleurs sur l'i-tymologie
du mot Plessis : nous i^'y l'eviendrons pas *.
Ouant ;i la significalion du terme Échajfaud, il est assez difficile de se
prononcer de façon catégorique.
Certes, il se pourrait que ce terme, V Echajfaud; qui ne peut être que
moderne, soit en rapport avec ce fait qu'on ait vu là jadis un « autel à
sacrifices pour les Druides », et par suite quelque chose d'analogue à
l'ÉcIta/faud, qui fit tant parler de lui en Vendée à l'époque de la Révo-
lution. Mais cela est peu probable.
'l'outefois, pour nous, jusqu'à nouvel ordre, il s'agit vraisemblablement
d'une altération de dénomination « VEchajfaud », pour le i(. Chaffaud ».
En eiïet, en réalité, chnjjaud est un vieux mot français ((jui d'ailleurs a
donné plus lard, par prononciation vicieuse, csikaffand), très analogue à
l'anglais scaffold"\ Or, d'après Toubin, il signifierait : haute plate forme'';
ce qui correspondrait très bien à l'existence d'un dolmen, pourvu d'une
large table, comme c'est le cas ici '•>.
Voie d'accèa. — Pour gagner ce monument, il suffit de prendre au Ber-
nard la route des Moutiers-les-Mauxfaits, puis de tourner à l'est sur la
1 La dénomination du lieu-dit du cadastre lui-même ne signalait pas, tout d'abord,
à l'atlention l'existence de grosses pierres en ce point; la découverte n'est donc due
en réalité qu'au hasard. — Toutefois nous croyonssavoirque le propriétaire du champ,
M. Martin, qui a été pour nous la complaisance même, on connaissait l'existence et
lésa indiquées à M. Gaudin. Mais il faudra prêter désormais allention, maintenant
que la preuve est faite, à tout lieu-dit appelé A'£'r/(a/7"a«^A
' Voir notre mémoire sur les Menhirs du Plessis [Loc. cit., p. a, note 6).
3 Ce mot an;,'lais, qui possède deux /', explique très bien, à noire sens, l'orthogra-
phe : L'Echaffauil du Pleasis (nvec d^ux F), tandis que le nom commun français
t échafaud » ne s'écrit qu'avec un seul F. — Cette difTéronce d'orthographe plaide
d'ailleurs en faveur de notre seconde hypothèse.
■4 D'après Tuubin, de Escha/'. Ce mot, au dire do cet auteur, représenterait la racine
sanscrite Skale, i:[a.ynv, ficher. D'après nous, Eschaf vient d'un terme celtique, inter-
médiair.', aujourd'hin inconnu, siguiliant, plus ou moins, <- plateforme ». Sans
doute, on y ajouta la racine Alt (Alt gaélique; Allt, welsch), signifiant, lieu élevé
(latin, altus). Chaffaud est donc un vieux mol dérivé du celtique. — Ce terme est à
rapprocher A'e.icabeau (évidemment scabellium en latin).
3 Si cette théorie est exaite, il faudra donc désormais rechercher des mégalithes
dans les lieux dits qui portent co nom, comme nous l'avons indiqué déjà plus haut.
IIALKOriN Kl I.Ailolt.Ol'MKHK. — I.K Dnl.MKN DK I. KCHAKFAIII Dl" I'LE>SI<
:i85
route ilu Plessis. On atteint alors, après avoir pénétré dans l'intérieur de
ce village, le Chemin dfs Tnidivières ', qui, dans la direction de l'ouest,
mène aux menhirs du Plessis [Fiy. 1, C, E, llK
/■'it/. 1. — Décalque fin Cadastn? du Bernard, aux environs du Dolmen fie rEciialTauJ
cf du Village du Plessis.
[Kclielle : 1/50U0; réduction do moitié du cadastre.]
Légende : D, dolmen, avec ses trois élémenls I, 2, .( (table et piliers) : o', o", blocs
voisins indépendants du niégalillie; M, petit menhir du Plessis; A B C D, chemin
vicinal actuel (nouveau tracé de B A D) fia Bernard au Plessis; C, E, H, chemin des
Tarfliviéres : a, b, /), chemin d'accès du mégalithe (voie princi()ale) ; c, voie accessoire
(en traversant le n» \'M). — Les flèche.t indiquent les voies d'accès au dolmen les plus
praticables.
S'engageant dans cette voie, c'est-à-dire vers l'ouest, après avoir passé
' C'est le premier chemin f^i'on rencontre à gauche, après avoir dépassé le-; pre-
mières maisons.
soc. D'aNTHROP. l'JOn. 2.)
3g6 19 OCTnllItl". lî>0."i
au carrcfuiii- ' nù l'on cruisi' un autre eh. 'min notil-smi, on laisse, à gauche
(c'est-à-dire an sud), ileux champs (n" 135 et n" 134 du cadastre), et
tro\ive, en entrant iniuiédiatement dans le champ qui suit (n" 133), un
routin («, h) pour les charrettes, «lirigé du nord au sud. On le suit pendant
250 mètres environ ; et, en longeant les terriers qui le séparent d'abord
du n" 134, puis du n" 132, on arrive hientùl dans le champ n" 130 et h
une trentaine de mètres plus loin sur le monument, qui se trouve au mi-
lieu d'un buisson du côté de l'est (Fig. i, D).
Situation. — Le dolmen, à moitié détruit, est situé sur la limite même
des champs n° 132 et 130, mais dans la pièce n" 132 de la section B du
cadastre, qui porte le nom d'EcItaff'aud du Plessis et appartenait à M. Martin
en 1904.
Cela correspond à environ 300 mètres au sud du petit menhir du Pies-
sis, soit à 270 mètres environ au sud du Chemin des ïardivières (n° 118)
du Plessis.
Les blocs constituants sont ;i peu près tous cachés dans les broussailles
du vieux terrier, avec arbres anciens, du champ 132. La partie la plus
méridionale du monument correspond à 00 mèties environ au sud de la
limite nord du champ 132 *, et à 29 m. 30 sud de la limite nord du champ
n° 130 (appelé Le Goulipeuu).
Le terrier en question, qui a une hauteur d'environ 2 mètres, était
jadis large de près de 3 m. 50 au niveau du dolmen. Son existence semble
très ancienne, en raison des arbres qui s'y trouvent; et il paraît notable-
ment antérieur à la confection du cadastre (1830).
Le terrier a été certainement éditié en ce point, parce qu'il y avait là un
mégalithe; et il est probable qu'on a à dessein tracé la limite des champs
132 et 130 de cette façon, pour éviter la formation d'un chiron '.
Les coordonnées géographiques et Vallilude sont à peu près les mêmes que
pour les menhirs encore debout du Plessis. Nous les rappelons ici seule-
ment pour mémoire.
Longitude ouest : 3H7 (4g20'30").
Latitude nord : 46'>27'30" (51?61').
Altitude : 30 mètres environ.
I A ce carrefour correspond l'ancien chemin rural du Plessis, élargi en ce point; la
nouvelle roule a été reportée, en ellct, vers l'est.
* Le champ n' 132 allait autrefois, du côté de l'est, jusqu'à la route du Bernaril au
Plessis; mais, aujourd'hui, cette pièce de terre a été divisée en deux parties par un
buisson, courant du sud au nord.
II résulte de là qu'on peut aussi atteindre le mégalithe, en s'arrèlant sur la route
(avant d'arriver au Plessis), en face le champ i32 et on traversant directement, de
l'est à l'ouest, les deux subdivisions actuelles du n' 13i!; il n'y a (ju'une barrière à
franchir (Fig. 1, c).
3 Un fuit analogue s'est produit, nous en sommes sûrs, à la Friconnière d'Apre-
mont pour le menhir que nous }• avons découvert (V^oir : M. Baudouin et G. Lacou-
loumère- Le Préhistorique à Apremotit. Ann. de la Soc. d'Emul. de la Vendée •1904,
La Roche-sur- Yon. — Tiré à part, lOOS, in-S», fig.).
HAUUtlLlN ET I.Ai:ull.<il MKUK.
I.K Itiil.MKN 1)K l.'ÉCHAKKAUD Dl' l'LESSI^ 387
Elal aurifii. — (Jiiaïul nous lavons découvert, cl encon', en aoiH 1904,
ce dulmeii élail engagé dans le terrier recouvert par un buisson épais,
qui forme la séparation des champs 132 et 130 et il en faisait partie inté-
grante. Du côté de l'ouest (Fig. 2), on voyait vers le sud la table incli-
née : ce qui lui donnait une forme île Cvnptvid : et, au nord, apparaissait
l'un des piliers, sur lequel elle reposait dans une étendue de 20 centimètres
environ.
Fi(j. 2. — Etat dans lequel se trouvait le Dolmen de l'EchafTaud du Plessis, au Ber-
nard (Vendée), aidant les Fouilles d'août 1904. — Vue du côté Ouest.
[Pholograpliie faite, à l'ouest, dans le ciiamp n» 130].
On distingue nettement le tei-rier, qui sépare le n* 130 du n* \21. On voit la table
inclinée au sud, au milieu de ce terrier, et les deux blocs adventices, situés au nord,
et placés sur le coté du terrier.
Du côté de l'est, par contre, on distinguait, au milieu des ronces, ce
même pilier nord et un autre, situé plus a l'est, ijui deviendra notre pilier
sud.
Le second pilier, situé en réalité, au nord-est de la table, et recouvert
par elle d'environ .")0 centimètres, n'était distant du pilier nord que de
10 centimètres environ.
Le long du buisson, au nord du monument lui-même et du côté de
l'ouest, se trouvaient en outre deux frfUjmenls de pierres, assez volumineux
{Fig. 2), ne faisant pas partie du dolmen, comme nous le diluons tout à
l'heure.
Les champs n" 122 (Le Goulipeau) et 130 (Le Tloulipeau ), qui se trouvent
à l'ouest du n" 132, étaient jadis couverts de blocs de pierre, qui, à l'heure
:i,S« 1'.) MCTnHHK lUO.'i
présente, sont ou l'nteny.s (comme on raconte (jue cela a et»'" fait autrefois
dans le champ n'^ 122), ou transportés du côté de la limite sud du champ
n» 130, et mis en dépôt le long du terrier correspondant.
Les pierres, qui persistent et que nous avons pu voir dans le n° 130,
ont un volume variable, car nombre d'entr'elles ont été brisées à la mine
ou autrement; mais les plus grosses n'atteignent pas un mètre cube. Or,
ce sont certains de ces blocs qui ont fourni les deux morceaux de pierre,
déposés le long du buisson de la limite ouest du n" 132, et que nous avons
trouvés placés près du dolmen.
Ils sont tous constitués par des fragments de granulite : ce qui semble
prouver qu'ils proviennent du sous-sol même *, recouvert seulement en
ces champs par la couche de terre arable et une certaine épaisseur de
limon des plateaux*.
Fouilles. — Au début d'août 1904, nous avons consacré deux journées
à quatre hommes, pourvus de notre matériel habituel, aux fouilles et à
la restauration partielle de ce mégalithe.
On commença d'abord par abattre toutes les ronces et tous les arbustes
qui cachaient les pierres {Fig. 2), de façon à bien les dégager pour
l'élude ; puis on coupa à peu près complètement le terrier au nord et au sud
du dolmen, de façon à l'isoler complètement. Du coté nord, on dut enlever
à la serpe une grosse racine d'arbre et un tronc mort'.
Cela fait, on dégagea le pilier nord, qui était renversé vers le sud-ouest,
et sur lequel la table reposait légèrement. On le plaça à peu près verti-
calement, mais sur le flanc, avec la base à l'est, grâce à quelques coups
de crics. On le consolida ensuite au nord, en reconstituant le terrier de
ce côté.
Immédiatement après, pour dégager le pilier nord-est, tombé sous la
table, on fit basculer celle-ci sur son bord ouest, à l'aide de crics, de façon
à ce qu'elle reposât sur ce côté, au lieu d'appuyer sur son extrémité sud.
De cette façon, on déblaya l'espace qu'elle recouvrait et qui correspon-
dait jadis au centre du monument.
* Nous ne croyons pas, en effet, qu'ils correspondenl à d'anciens cromlechs ou
uliynements, aujourd'hui détruits. Toutefoi?, celle hypothèse, que n'est venue, jus-
qu'ici, confirmer aucune découverte, n'est pas insoutenable, en raison de l'épaisseur
notable du limon des plateaux en ces points.
' L'ètymologie de « Goulipeau » est didicile à élucider. Certainement ; il faut voir li\
le radical tjoule (si;.,nii(îant aujourd'hui en patois <■ la bouche »), dérivé d'un vieux
ternie celtique, inconnu. A rapjiroch<^r du sanscrit rjal, manger, et du persan gfioul,
ogre. — Le fioulipeau était peut-être l'habitation des Ogres, autrement dit d'un Gar-
gantua quelconijue. Si cette hypothèse était prouvée, il faudrait peui-étre ne pas voir
dans les i)ierres du Goulipeau des rochers naturels, mais de véritables vestiges méga-
lithiques, — A noter que Goulipeau est un nom propre de famille, assez fréquent en
Vendée.
' A ce moment, on y trouva, sousles ronces, une vieille serrure en fer et des débris
de bouteilles modernes.
HAlDOriN ET l.ACOlLOlîMKRE. — I.E DOLMKN l»K I, KCIIAKK.M I» |i| n.l s>|>
:iHî>
Il fut alors facile de creuser une |)elile Irnnclnv dirii^i'-e de l'est ;i l'ouesl,
au-tlessous de celte table et au milieu di' la tei're grisAtre, Irùs sèche, (|ui
fui rencontrée en ce point. Son aspect seul indiquait un milieu In^-s défu-
vurable à la conservation des ossements; et, de fuit, on ne trouva gui^'re
|;i, — et pres<|ue à la surface du sol, — que de très rares débris d'os très
9^''
itta
/■'it/. 3. — Kl.it aciiicl tlu iJoliiicn île l.'KcljalV;.ud du l'iessis, au HeriianJ (Vendée;.
(Aoiil 19u4j.
Vue Ouest,: TaMe penchée de ce cbic/Fare mifn'rieurcj. — Pilier nord visibl.;.
[Pliulpgraiiliie cardinal" (Ouest) équidislante]
friables, quelques poteries, et des fragments de charbon. A rinspection
du terrain, il était facile de constater d'ailleurs que tout avait Hé bouleversé,
et que la sépulture, qui avait certainement existé en ce point, avait été
attaquée, lorsqu'on avait démoli le mégalithe ou élevé le terrier.
Dans le sol, on découvrit des blocs calcuires en grande quantité, dont
(|uel(jues-uns pi-ésenlaienl des fossiles reconnaissables. C'étaient certai-
nement des jiii'nrs rapportées et ayant fait partie du (/filf/al, très abondant,
qui autrfftii< se trouvait autour du monument. Ce calcaire était tantôt
Irns t.-ndre, lanlùl qréseur : ce qui indi(|ue bien sa provenance (bassin
liasiqut' du lieinaid, silu"!' au sud du monument i.
I.a tranchée terminée et comblée, on s'occupa du pilier nord-est
Pifl. '/), et on le plaça de champ, avec base îi l'ouest, de façon à pouvoir
-oulenir de ce coté, le côté est de la table, maintenue soulevée.
Aspect actuel. — \ l'heure présente (1904), le mégalithe, tout à fait
dégagé et très visible, ressemble à un Dohuen en Crapaud (Fifi. o', à table
•M)0
\\\ im;|(i|ii;K i'.td."
inrliii<'<>, reposant sur le sol ;\ l'ouest. Le bor-l nord de ce f,'ros bloc est calé
par le pilier nord, qui est placé de liane {Fuj. 'i), et qui est saidant de
1 mètre ; et son bord sud s'appuie sur le pilier nord-est, devenu pilier
sud.tjui est placé de champ é^'ah^nenl cl (jui dépasse aussi d'un mètre le
milieu du terrier.
Fîg. 4. — lilat acluel du Dolrnon de rÉcliaffaud (Aoùl l'JOi).
Vue Est : Table soulevéïi de ce côté [Face inférieure). — Vue de la face interne du
pilier sud ei de la face externe du pilier nord. — Entre les piliers, partie fouillée.
[IMiotographie cai-dinalc (Est) équidistante].
La table, relevée à l'est, laisse entrevoir le centre du monument {Fig. U)
qui a près de trois mètres" nord-sud et où la fouille a été faite, si bien
qu'une seconde tentative d'exploration serait encore parfaitement possible,
si le besoin s'en faisait sentir un jour. Le dolmen semble avoir désormais
son entrée à l'est; mais ce n'est là qu'une apparence, qui résulte de la posi-
tion nouvelle donnée aux piliers lors des fouilles, et dont il faudra bien se
rappeler l'origine, pour éviter plus lard des interprétations erronées.
Architecloniqiie. — Les blocs qui restent de ce monument sontau nombre
de trois : 1» La table; 2" Le pilier placé au nord; 3'^ Le pilier placé au
sud. — Il nous reste h les décrire, de même que les blocs existant au
voisinage.
1" Table. — La table reposait au milieu du buisson sur son bord sud ;
elle avait son extrémité nord, la plus irrégulière, relevée et appuyée sur
le pilier nord renversé.
Actuellement, elle est couchée sur son côté ouest {Fig. 3) : son bord
est, épais et régulier, recouvert de lichens {Fig. 'i), est élevé et bien
visible.
ItArDiiriN ET t.ACiill.DIMKIlK.
I.K IHII.MEX DE I, KC.II AI TM'I» Itl" l'I.KS>b
:wi
La roche coiisliluaiilr est de la <iifinuliU\
De forme h peu prvs (iua(Jrilatrre, elle présente sur S(tii bord nord une
sorte d'appendice saillant, bien visible sur l'une de nos fiiçures (F»</. ^ ^< 6).
Ses dimensions sont les suivantes ; H m. <)() de l'est ;i l'ouest, 2. m. 40
du nord au sud ; mais le bord sud \ a à !{ lu. Son épaisseur moyenne est
deO m. i"); mais file a dfspuiids faibles (0 m. 40) et d'autres plus épais
(0 m. a:i).
On peut admettre par >iii|e ((iiinne surface: 2 m. U) ^ :2 m. (50 =
»» m. :2i : et, eimime cube : (> m. 2i x 0 m. i.*i -= 2 me. ^<00 ; soit environ
3 me. — Cela donne, si l'on prend le cliiiïre .'{ comme densité de la granu-
lile, un poids d'environ O.OOO kilogr.
Fi;i .'). — b'oniUe lia DjIiiicii — /'hast- innijenne des Travaux.
V\\o{o<^vi\\\\w faite, à l'Iist, dans It! champ n* 132].
On voit If iiilicr nord dégagé et rcilressc. — On commence à rolovcr la (a[)le vers
l'c>t. — Le pilier sud est dégagé aussi et bien vit^ible, mais encore couche. — Un
ouvrier vient de trouver un objet au-dessous de la table.
Nous n'avons absolument rien remanjué sur les faces inférieure et
supérieure de cette table. La face supérieure, vers son extrémité sud et
lu coin est, était recouverte de lichens assez abondants {Fig. 5), comme
ses bords osl{Fifi. U) et ouest i¥\(j. 3), jadis les plus exposés aux pluies
et aux vents. La face inférieure, protégée, était très lisse, sans un lichen :
ce qui indique qu'il y avait fort longtemps (prelle n'était plus léchée par
l'air.
Pendant les manœuvres qui furent imprimées îi la table, la partie
adventice (F/V/. i'>, x) placée au côté nord, actionnée trop vivementpar les
crics, s'est fendillée, en raison de la friabilili- de la roche et de l'existence
;i9-2
10 ocTdiinE 1905
(lune f<Mure on ce point (Fiff il). C'est ce ciui nous a empi^ché d'essayer
(le renïonlcr tout à fait la table sur les deux piliers, que nous avions à
notre disposition, ci notis a forcé à la laisser s'appuyer, inclinée, sur eux.
2" Pilier nord. — Le pilier nord élail en réalité couclié au nord-ouest.
Une fois liien dégagé du terrier, il [>ul être mesuré. Sa longueur totale
est de 1 m. 'JO (ce qui correspoml bien ii la hauteur d'un vrai |jllier), sa
largeur île 1 u\. 20. et son épaisseur de 0 m. 30 en uutyeiine {Fifi- (h-
/■/Su
m yV^^yy
Fi(j. 6. — ScliLMiia (le la siluation du Dolmen au milieu du terrier et constitution du
mègaiitlie avant les fouilles.
[Eciu'lle i cm par mètre.]
Légende : I, table; X, son appendice; II. pilier nord ; III, pilier nord-csl, devenu
pilier sud; A et B, blocs voisins, indépendants du nKigali'he.
Sa base, c'est-à-dire la partie la plus large, était au nord, et sa partie
la plus elïilée au nord-ouest, sjous la table, sur une longueur de 0 m. 20;
il est probable que ce bloc, situé exactement au nord, s'est effondré par
glissement de la table vers le sud, et s'est renversé sous elle vers l'ouest.
Actuellement, il est placé de champ, avec base à l'est et repose direc-
tement sur le sol [Fig. U).
3" Pilier sud. — Ce pilier était i)rimitivement au nord-est, à 0 m. 10 du
BAUDOIIN ET LACOl-LOl'MÈRE. LE POLMEN DE I.'ÉCll AKI-'Ani Itf IM.ESSrs 301^
précédent. En raison de la situation dans la(|ut'lle on l'a trouvé (base au
nord-est, pointe sous la table d'environ 0 m. 'Mj, il a di^i tomber du côté
sud, et être entraîné au sud-ouest par le glissement de la table.
Il a la ménie longueur totale que le pré('édent, c'i'st-à-«lirc I m. 00, une
lai'geur de 1 mètre .'i la hase, et de 0 ni. 30 au sominet. Son extriMnité
pointue est épaisse et atteint 0 m. 40, tandis «luil n'a (jue 0 m. 20 d'épais-
seur à la base.
Aujourd'hui, il est aussi placé de champ, avec sommet à l'est et repose
sur le sol môme {Fig. //).
Comme on le voit, les dimensions de ces piliers concordent avec tout ce
que l'on sait de l'architectonique mégalithique ; et il est probable que les
piliers détruits au sud et à l'ouest devaient être analogues.
Partant, la table devait être élevée de 1 m. 30 à 1 m. 40 (1 m. 90 —
0 m. oO d'enfouissement maximum = 1 m. 40\ comme d'ordinaire.
4° Blocs voisins. — Les deux blocs de granulite. signalés à l'ouest,
n'ont, comme nous l'avons dit, rien à voir avec le dolmen. On nous a
raconté, en elTet, dans le village, qu'on se rappelait avoir vu le cultivateur
du champ n" 130 les déposer là, après avoir miné une grosse pierre qui
se trouvait au milieu de ce champ; et on peut voir d'ailleurs encore deux
moitiés d'un trou de mine manifeste sur ces deux fragments, dont le plus
méridional correspond à peu près ii un mètre au nord de la table. L'autre
distant de 1 m. 10 vers le nord, a environ 1 m. ."iO de long sur 0 m. 30
de hauteur {Fig. 6).
La roche qui constitue ces débiis de blocs est d'ailleurs une graiiKhti' n
grains un peu plus fins que celle des éléments dolméniques : ce qui indique
bien que les pierres n'ont pas la même origine et partant la même signi-
lication. Mais il est impossible d'aller plus loin et de dire de quoi il s'agit :
restes mégalithiques ou rochers naturels.
Pétrographie. — La roche, constituant tous les éléments du dolmen qui
persistent, est en elTet de la granulite typique à gros grains de feldspath.
C'est donc la même que celle des grands menhirs voisins. Evidemment,
les blocs du mégalithe de l'ÉchafTaud proviennent du même point et sans
doute du même gisement que ces derniers; aussi nous renvoyons à ce
que nous avons déjà dit sur l'origine de ces pierres, choisies à dessein
parmi les nombreux rochers libres de granulite, t\n\m rencontre dans les
vallées voisines, au nord du Plessis.
Il serait peut-être exagéré de conclure de celte similitude dans la
nature de la roche (juele dolmen est à peu près de l'époque des menhirs,
ou plutôt que les dits menhirs sont contemporains de cette st''|>iilture
mégalithique. Mais cette similitude constitue une [»résomption réelle: et
nous avons cru bon de la souligner ici, sans insister davantage sur la
signification de ces menhirs, qui, par rapport à ce dolmen et à l'allée
-.VM 19 i.cToHHE 1905
couverte" de la Krélxmchère vuisine, sont peut-être des pierres indicatrices
(le sépultures '.
Géotoffie. — Le sous-sol est exactement le nièine que pour les menhirs
(lu IMessis, tout |ir<»clies. Il coi-iespond ;i peu j)rè.s au bord du terrain pri-
mitif, qui limite au nord la bande liasique du Bernard.
La roche, sous-jacente au limon des plateaux, qu'on a trouvé sous ce
dolmen et (pii est assez peu l'pais en celte contrée -, est la granulite
irAvrillé.
En cette région, cette roche pointe vers le sud, sous forme d'un cap se
dirigeant vevsUi Fré/juucltère, entre un alUuentdu Troussepoil, le Jabriau,
à Test, et l'Alliaire (ruisseau du Bois-Renard), h Touest. Dans la partie
centrale de ce cap, le limon des plateaux * forme, en divers points, des
dépôts assez importants pour qu'on ait dû les figurer sur la carte géolo-
gique *.
Le Dolmen de l'KchafTaud est le seul de la commune du Bernard, qui
repose sur un sol i:;ranuliti(]ue, tous les autres étant sur sol calcaire. C'est
là une notion qu'il importait de souligner, car elle a son intérêt dans
l'étude des restes de la nécropole mégalithique agglomérée sur ce terri-
toire.
IVatuhe or MOiNUMR.NT — Pour nous, il s'agit là d'un petit dolmen assez
comparable à celui du Terrier de Savatole. quoiqu'un peu plus ancien;
les deux tables sont, en effet, très comparables •'.
(^e monument funéraire, qui devait être sous tumulus, et recouvert d'un
très important ^a/^ra/ en pierres calcaires du voisinage, a été attaqué aune
époque impossible à préciser. On a dii enlever d'abord les piliers du sud,
puis ceux d'e l'ouest, c'est-à-dire ceux correspondant au fond ''. Ceux que
nous avons appelés piliers nord et sud, parce que c'est la place qu'ils
occupent désormais, étaient en effet sous la table, le premier couché au
nord-ouest et le second tombé au nord-est. Il est probable que ce dernier
était renversé au niveau même de Ventrée du dolmen.
Lors de l'attaque, la table a glissé vers le Sud, entraînant dans son dé-
' Marcel Baudouin. — De la sionifica/ion des Menhirx. — Bull, de la Soc.
préhist. de France, 1004, avril. - Tiré à part. Paris, i9U4, 1. B. S., iii-S", 1 fig.
' A l'ouest du monument, le llinoD des plateaux forme une mas.se assez importante
et constitue une bande allongée nord-sud, assez puissante pour qu'on ait dû l'indiquer
sur la carte.
' Ce limon semble résulter ici de la décomposition de la partie superficielle de la
roche, granuliliquo, et par suite est très siliceux.
i G. Vasseur. — Carte géologique de France (Feuille des Sables d'Olonne), au
1/8O.0O0.
5 Marcel Baudouin et G. Lacouloumère. — Les Mégalithes de Savatole [Voir
Congrès préhistorique de France, Périgueux, I90ôj.
6 Ce qui tendrait à le prouver^ c'est que c'est de ce côté qu'ont été trouvés les
ossements humains et en particulier le fragment de cubitus, un débris de poterie,
et un morceau de charbon.
HAffinl IN RT I.AiIdri.OIMKRK. — I.K imr.l.EN l)K I.'kc.H vriAII) ni' l'I.RSS|s HOri
placement les deux pilicTs nonl-uiiest et nord osl, (jui sunl tombas vers le
sud, c'est-à-dire ;i l'intérieur même du mégalillif.
Orientation. — .Mais il est impossible, en réalil»'-, d'inili(|iirr l'orienUition
qu'avait ce nn'-galitbe et le point où se ti'ouvail l'entrée vi-ritable, si tant
qu'il y en ait eu une, car le monument était sans doute de forme très ar-
rondie. Par suite, d'une part, de la disparition di- plusieurs piliers à
l'ouest et au sud et de l'efTondiemenl di's autres : f'f.iiil donné, d'autre jiart,
l'absence de tout»* trouvaille caractéristique pouvant lixer les idées à ce
point de vue, nous n'avons aucun élément précis d'appréciation ; et il est
plus scientifi(jue de déclarer (jue ce pioblème demeure aujourd'hui inso-
luble, plutôt que d'émettre une liy[>otbése, n'ayant aucune base si'rieuse.
Toutefois le fait (jiie la table était tombée du coté sud, par ablation
de piliers de ce côt»'-, et que les ossements ont été trouvés à l'ouest semble
bien indiquer que l'entrée, c'est-à-dire la partie dépourvue de piliers, était,
comme d'ordinaire en ces contrées, plutôt du côté de l'Orient, et même
peut-être au nord-est. (lomme la disposition actuelle des blocs quiontété
remaniés, pourrait induire en erreur les observateurs à venir, nous insis-
tons à nouveau sur le fait que l'orientation actuelle ne prouve rien di'sor-
mais, en raison des remaniements opérés.
TiiouvAU.LRs. — Etant donné la nature du sous-sol du nu-galithe, tout
à fait exceptionnelle pour la commune du Hernard, nous nous attendions
bien à ne pas trouver d'ossements humains abondants; de plus, le dolmen
ayant été jadis complètement boulever.sé, de façon indiscutable, il était
à présumer que le mohilirr funéraire avait été enlevé ou dispersé à cette
occasion.
En effet, au cours des recherches faites sous la table, pendant qu'on la
déplaçait, et en remuant les deux piliers restants, nous n'avons découvert
que de très rares débris, dignes de remarques. Ce sont les suivants :
1'^ Churbon de bois. — Un très petit morceau de charbon de bois a été
trouvé sous la tal)le du côté de l'ouest. Il ne dépasse pas le volume d'une
noisette. Peut-être est-il préhistori(|ue. car il a été renconlré à côté d'un
débris de vase? Mais cela n'est pas certain.
2" Poteries. — Il n'y a îi signaler que trois fragments de poteries, appar-
tenant à /roj.s vases différents. Rien n'indique que ces débris soient de l'âge
du dolmen; mais c'est cependant probable.
a) Poterie à grains de qu irlz fins, rouge des deux côtés, avec partie
noire centrale au niveau de la tranche (fragment de quelques centimètres
carrés)... Peut-être est-ce le seul débris intéressant, au point de vue pré-
historique ? C'est, en tout cas, le plus caractéristi(jue de tous ceux trouvés.
b) Poterie analogue, rouge à la face extérieure, présentant des pail-
lettes brillantes de couleur jaune ; face interne noire, semblant recouverte
d'un dépôt, donnant la dite coloration.
c) Fragment de poterie grossière, indéterminable,
31H) 19 ncronuK ll>Or>
En ivalit*', ces iJél)ris sunl pit'S(|ii'iiiiililis;ililo.s pour iino (lélonninalion
pn'-cise (r(''puqiii» cl il esl linicilc df dire s'ils sont iié(jlitlii(iu(.'s.
'.\° (hsi'itienls irdinmaK.r. — I" Fragment d'un os long (partie inférieure
d'un métatarsien d'un oiseau), rencontré sur le sol, h côté d'un autre
df'bris analogue. Sans doute tn^'s moderne.
2° Dt'bris de parties sjjongieuses d'os de Jio.s, itidélerminables, rencon-
trés également sur le sol, à coté de parcelles osseuses compactes de la
mf^ine espèce. Ces ossements ne paraissent pas non plus préhistoriques.
4° Ossements huniinna. — Ils ne sont qu'au nombre de (jualre fragments ;
mais ils sont imliscutables; et leur diagnostic ne nous parait pas douteux,
malgré leur petitesse.
1° Péroné droit. Extrémité inférieure, cassée au niveau de la fracture
habituelle de cet os. Ce fragment uiesure H cent. 1 2 de long. La malléole
est entière et très reconnaissable.
Cet 05 devait être très gros et volumineux, si l'on en juge par les dimen-
sions du débris. La facette articulaire de la malléole^ en elTet, a 3 cent. 1/2
t! .; hauteur et une base supérieure de 2 cenlimètres. La circonférence de
coite e.Nlrémilé atteint 8 centimètres: et le péroné, au niveau de la cassure,
a :in diamètre de io millimètres. Les impressions ligamenteuses susarti-
c Maires, de même que la gouttière, sont des plus maïquces.
2" Rotiileâii coiéili'oit IVagment supérieur seulement, mais assez grand
pour quà la face posléiieure on reconnaisse la situation réciproque des
lieux facettes articulaires, et pir consér|uenl puisse faire le diagnostic du
cùté auquel correspond l'ossement.
Rotule assez petite en réalité, puisque le diamètre transverse ne parait
pas dépasser 3 cent, i/2 *; la facette extérieure a 2 cent, i/2 de large,
l'interne 1 centimètre seulement.
3° Cubitus. — Fragment du tiers moyen d'un cubitus, à peine déter-
minable, avec des points de coloration noirAlre, et faisant certainement
partie de la sépulture primitive, comme le péroné. Sa longueur n'est que
de 6 centimètres. Son diamètre est de i centimètre au maximum.
Rien ne permet de préciser le côté ; mais il semble bien qu'il s'agit du
côté droit.
4» Phalangette. — Une troisième phalange de la 7nain, qui nous paraît bien
être humaine, mais dont cependant la détermination absolue est discu-
table. En eiïet, elle parait très effilée. Elle est longue de 2 cent. 1/2 et
large, au milieu, do 8 millimètres. Elle correspond sans doute au doigt
annulaire (?); mais ce n'est pas certain.
On notera que la nature du sous-sol explique dans une certaine mesure
la rareté des ossements humains. En effet, nous sommes ici sur un terrain
primitif, comme en Bretagne, tandis que dans le reste de la commune du
Bernard, on est sur sol secondaire, c'est-à-dire calcaire. Rien d'étonnant.
» Larolule rl'un adulte ordinaire a 4 cm. i/2 de large [Sappey^
XI.LOClTIilN 1)1 l'UKSIDK.Nl 397
dt^s lors, à ce ijiie los os se soient mal conservés, el ;iii'til uni' .i[i|i.ii-i'nct'
un peu spongieuse.
Conclusions. — Il e.*l tlillicile, en raison des iMres décoiiverles f;iites dans
ce dolmen, <!e formuler des conclusions très précises; el il esl impossible,
en tout cas, de dire .-upielle époque approximative remonte ce mégalithe.
Les seuls faits acquis sont les suivants :
1" Il s'agit indiscutablement d'un mégalithe ;i scpidtiur, du type dolmm
proprement dit, puiscpi'on y a trouvé des ossements lut nmi us anciens, indis-
cutables, quoique très rares.
•2" Le ihegalitbe paraît relalivement vieux et a l'aspect des dolmens
de \a période «('o/(7/</(^w proprement dite, en raison de son architectonique
même, l'ar exception pour la région, il repose sur un sol granulilique,
3° Il paraît contemporain des Menhirs du Plessis, très voisins, situés
exactement au nord et même de l'Allée couverte de la Frébouchère, placée
au sud-ouest, ((u'il semble relier à ces menhirs.
4' Il est beaucoup plus ancien que l'Allée couverte de la Pierre folle du
Plessis', qu'on trouve à quelques centaines de m.Mres au sud-ouest, car
celle-ci est probablement du début de l'âge du bronze et que certains des
mégalithes de Savatole, tous situés sur sol calcaire.
.">" 11 a été alta([U('' à une épo([U(' inconnue, détruit en parlii\ d proba-
blement violé au point de vue du mobilier funéraire.
%IP SEANCE. — Novciiiln'c 1905.
. Présidence de M. Séiui.lot.
M. le Président entretient la société de l'hommaye qui vient d'être rendu îi
la mémoire de Gabriel de Morlillet. et comnuini(|iie rallocution iinil a prononcée:
Le nom de Gabriel de Mortillel est inséparable de celui de la Société
d'Anthropologie; aucun de ses membres n'y a joué un rôle plus impor-
tant, plus long, plus utile. Depuis l'année 180."), date de sa réception jus-
qu'en 18'J8, il y fait de nombreuses communications, qui souvent
éclairent quelque point de la science préhistori(|ue dont il fut un des
fondateurs. Il intervient aussi fréquemment dans les discussion-^, soit
pour critiquer, soit pour a[)prouver, ou mettre au point les opinions
émises. Elu président en 1876, il remplit avec autorité cette fonction
délicate. Il collabora aussi activement a l'organisation de la section
anlhropologitjue aux Expositions universelles de 1877 et de 188'.).
• Marcel Baudouin et G. Lacouloumère. — L'Allée couverte de Pierre folle du
Plessis au Bernard { Vendée). — L'Honnne prchistor., Paris, 1904. — Tiré à part, Paris,
Schleicher et C'o, 1904, in 8*, fig.
;{•»« 2 NuVKMItUK 11)05
Ces multiples services rendent son souvenir cher à la Société d'Anlhro-
pol(igi(', t'I elle f'st aujourd'hui heureuse et fière de saluer, dans ces
antiques an-nes de Lutèce, le monument élevé à la mémoire du savant
dont les patientes recherches ont si puissamment contrihué t^ recons-
tituer rhisluire lointaine des premiers âges de l'humanité.
PRESKNTATIONS
M. Kené DrssAi'D. — J'ai l'honneur d'oll'rir à la Société, au nom de M. Fré-
déric Maclcr, les Contes Arméniens. Paris. Leroux, 1905. qu'il a traduits de
l'arménien moderne. Os vingt et un contes, auxquels il faut joindre les quatre
contes publiés dans la Revue des traditions populaires et dans la Revue
Chrétienne de 1904, oui clé extraits d'un recueil composé au siècle dernier par
un prêtre arménien originaiio de Van. En dehors des traits du l'olkloi'c local,
ces coules révèlent une t'itrlc inllucuce arabe et persane qui s'est l'ail sentir
principalement par le chemin des caravanes.
Salnian et Rostoni sont prequ'aussi populaires en Arménie qu'en Perse. La
mention du peuple de "^'adjoudj et Madjoudj (tiog et Magog), celle de Zoulficar.
le sabre fameux i|U(' Mahomet donna à son gendre .\li. et les noms propres
géographiques indiquent assez la part de l'élément arabe.
Dans la même collection de contes et chansons populaires éditée parla maison
Ernest Leroux. M. F. .Macler a déjà donné un volume de Contes syriaques,
traduction de la version syriaque de l'Histoire de Sindban le marin. Il faut
remercier M. Macler du soin qu'il prend de rendre accessible au lecteur français
ces témoins des littératures orientales si précieux, en particulier, pour les
folkloristes.
M. le D"" Marcel Baudouin. — J'ai l'honneur de remettre à la Société d'An-
thropologie, pour la Bibliothèque, le « Manuel de Recherches préhistoriques i).
qui vient de paraître.
Conçu par le Bureau de la Société préhistorique de France, cet ouvrage est,
avec le Premier Congrès préhistorique, qui s'est tenu en septembre dernier à
Périgueux, l'une des manifestations les plus importantes de cette jeune et
intéressante Société.
Il est inutile, je pense, d'attirer tout spécialement votre attention sur l'im-
portance d'une pareille publication, la première de ce genre ; sur les services
que cet ouvrage est appelé à rendre à tous ceux qui s'occupent de préhisto-
torique: aux débutants avides de savoir, comme aux savants avides d'ensei-
gner. Les uns et tfes autres y trouveront, nous en sommes convaincu, toute
satisfaction pour leurs études et leurs enseignements.
Les savants techniciens qui l'ont rédigé, les éditeurs qui l'ont publié, ont
l'honneur de faire partie presque tous de la Société d'Anthropologie. Ainsi
présenté, le « .Manuel de Recherches préhistoriques » recevra certainement de
vous tous l'accueil qu'il me semble mériter, et sur lequel on comprendra que
je puis, moins que personne, insister.
M. Dbniker présente un album d'éolitbes.
M. le D"" Marcel Baudouin. — Qu'on me permette de rappeler que j'ai publié
M. ItAl 1)01 IX. — MAHllI.I.AilE I)F> iiUJET^ l'llKHlSTnniui-K>. ',\W
vi-tn^iuuK'iii ' mil' iiolo sur li's o/Ç*yV/.s « f'on/ies hutiidi/irs, à i»n>|iijs do AvVt'o.- si/nu-
la/it dis /tieds d'/iomnifs, que jo iio consitlore que roniim.' dos liisus nafunt'.
J'ai puldio la photogiv-iphio d'une de ces pièces, (|ui fif^'ure au Musée île La
Roi'he-sur-Von (Vendée). (Juant h la seconde pièce, ipii était do roi'uie soni-
hlaMo à la prouiière, je l'ai vue se délaclier, sous mes jeux, de la partie (('w-
trale d'un yi'os i)ioc de i-ali-aire à hAlir provenant dos carrières des Cliarentes.
Il i\y a dono pas do doide ; il s'agissait bien d'un silex absolinnent naturel
ayant ligure d'une région du corps humain.
Ces laits sulfisent i\ prouver quil faut se métier des pir ries- /if/ ares, au
moins quand elles ne portent aucune trace de taille inlenliomielle ou de
cassure.
MAQUILLAGE DES OBJETS PREHISTORIQUES
M. Maucel Baluoli.n. — Je signale à la .Sooiolé d Antlinipulugie un article de
M. .\. Dayot'qui. mal interprété par un cnllaboraleur dune autre Revue-',
a pu laisser croire que Boucher do l'crtlies avait voulu tromper ses collègues
en ce qui concerne la mâchoire humaine du moulin Quignon. Il y a intérêt à
no pas laisser saccrédiler une tidio légemie. qui peut porter iiréjudice aux
sciences préhistoriques, et je me permets de vous demandor do vous piononcer
on ce qui oiuicerno l'an'aire Boucher de Porthes.
Dun autre coté, M. Dayot parle d'antiquités celtiques du Poitou qui aui-.iiiiit
été truquées. Je liens à déclarer à ce propos que les accusations autrefois lor-
nnilées relativement à certaines trouvailles du Bernard (Vendée) sont fausses
et calomnieuses ; cela, évidominont, parce que la Vendée fait partie du Poitou !
Tout ce qiu^ labhé Baudry a publié est vrai, et on n'a pas le droit de mettre en
doute sa bonne foi '».
* Marcel Baudoin. — Les Curiosités de la nature: Lusus luitune. — La Viihiu-
risation scientifii/ue, Paris, 1905, p. 218, 1 figure.
■A. Dayot. — Le Matjuillage des œuvres d'art. — Je .mis tout. Paris, 1(103, 15 oclo-
bre, p. im.
* Intermédiaire des chercheurs et des curieux. Paris, 1904. 30 octobre.
* D'après cette discussioQ, les choses ont été remises au point dans les numéros de
novembre (10 et 20) de Vfntentiédiaire des chercheurs et des curieu.i-, à la suite des
réponses faites pur M. Marcel Baudouin, conformément au vicu émis en la séance
du 2 novembre 190.j par la Société d'Anthropologie.
400 -2 NilVKMKItK lUO.'i
LE PROBLÈME ANTHROPOLOGIQUE DES PARIAS ET DES CASTES HOMOLOGUES
CHEZ LES DRAVIDIENS
Pau m. L(ii is LAi'iCgUE.
J'ai été dans l'Imle en l'J03-U»04, chargé d'une mission du Ministère
de l'Instruction pulili(iue, pour essayer de déterminer quelle a pu être la
population primitive de la péninsule. A cette question se rattache d'une
façon essentielle l'étude des basses castes dravidiennes, des Parias, si l'on
veut prendre comme nom générique d'un type de population le nom par-
ticulier de l'exemple le plus souvent cité.
Castes ta moules.
Parias proprement dits.
Ce que sont les Parias n'apparaît clairement dans aucune des publications
que je connaisse: on a souvent donné à ce mot une compréhension énor-
mément plus grande que son sens primitif et on l'a employé pour désigner
par toute l'Inde les classes inférieures méprisées comme impures.
Mais même si l'on s'en tient au sens précis et si l'on désigne par ce
mot simplement une caste tamoule, on trouve que nos connaissances
réelles sur cette caste devenue presque légendaire sont singulièrement
limitées.
Qu'est-ce qu'est le mot d'abord?
Le Recensement {Censiis) de l'Inde en i901, vaste répertoire élaboré
par des spécialistes éminents de la sociologie et de l'anthropologie indienne,
Vécril Pn rail/an. Cette orthographe officielle correspond assez bien, pour
des Anglais, à la façon dont on le prononce dans le pays. J'écrirais
Paraien (en nasalisant presque à la française la dernière syllabe); au plu-
riel on dit Paraier ; telle est la désinence de toutes les castes en tamoul ; en,
au singulier; <?r, au pluriel. Le mot est d'origne inconnue; Caldwell
l'écrit Pareiyas, et le fait venir du mot Parei, mot tamoul qui veut dire
tambour,
« spécialement le grand tambour dont on se sert aux funérailles; le
« nom de Pareiya est en fait le nom d'une occupation héréditaire, les
('. Pareiya étant la classe de gens généralement employés dans les céré-
« monies et spécialement dans les funérailles comme joueurs de tambours.
« Il est vrai que leur nombre est maintenant si grand que beaucoup
« d'entre eux ne sont jamais employés ainsi, et que l'unique emploi de la
« grande majorité est celui d'ouvriers agricoles. Mais partoutet toujours,
«• quand on entend le bruit du parei, on peut assurer que la personne
(f engagée pour taper dessus est un Pareiya. Comme toute la caste, quoi-
« que peut-être la plus nombreuse dans la série des basses castes, est
I.olls I.Al'ICulK. — I.K l'IKIlILKMK .\.\Tllltii|'uLn.;|.jlK DKS l'AI(|\s \()\
.< (lôsigntV par ce n..in, il ,K,rai[ prolul.lo (lue b.illro du t.iinlM.ur .'.|,iiï h
>' l'oriirino son prim-ipal ompidi ' ,..
J'aicit.:- te.vluelle.noi.tcetteopinionde la plus graiulo a.ilorUé en matière
.liMvidienne pour donner tout de suite l'impression ({ue nous avons
l.esoin de nouvelles recherches. F.es Parias sont en elîet au nombre de
:2.i:;o OOO, d'après le Crusus qui les définit « la grande caste d'ouvriers
agricoles dans le pays tanioul ... VA comme les Tamouls sont en tout au
nondjre de 1-4 millions, l'homme le moins averti éprouve une répugnance
à admettre une telle proportion de tambourinaires. L'opinion de Cald-
well, pour afnrmalivr .|ir,"ll.- s.. il, repose sur une simple ressemblance de
radical, et l'on sait combien ces ressemblances son parfois fallacieuses;
aucun document n'établit la dérivation; les anciens textes ne contiennent
aucune mention des Parias. On rencontre le nom pour la première fois
dans une in.scription du xi« siècle de l'ère chrétienne, sans aucun.- expli-
cation et tel qu'il existe aujourd'hui -.
Au point de vue social, il faut écarter tout de suit.; uik; err.nir assez
répandue, c'est à savoir (|ue les Parias sont constitués par des hommes
exclus des autres castes pour une raison quelconque. Ils constituent une
caste parfaitement définie au même titre que toutes les autres castes. Je
ne peux pas entrer dans l'essence de la discussion de la caste hindoue,
mais, pour les Parias comme pour les autres, la naissance seule fait la
caste; on ne peut pas plus devenir Paria que devenir Brahmane; on est
Paria quand on est né d'un père et d'une mère parias. La caste a, comme
toutes les grandes castes, ses divisions fondées aussi sur la naissance, et
dans aucune, un oui cast ne peut, au moins théoriquement, trouver place.
Pour la religion brahmanique les Parias sont impurs; leur contact, ou
même leur approche, souille les individus des castes pures ; voilà le fait
qui a avant tout frappé les sociologues et les ethnographes, mais on ne
l'a pas expliqué. Il n'y a même pas, je crois, d'explication théologique
formelle. D'ailleurs on peut dire, d'une façon générale, que lorsqu'il s'agit
des Dravidiens, toute recherch<" dans la tradition aryenne ne fait qu'obs-
curcir laquestion; le système brahmanique, quelle qu'ait pu être sa signi-
fication dans .son pays d'origine, est ici dans le sud de l'Inde entière-
ment inadéquat, et les Brahmanes, voulant à toute force l'appliquer, ont
été amenés à des assimilations presque absurdes.
fl faudrait reprendre l'observation directe en faisant complètement
abstraction de toute théorie; cette observation je ne l'ai pas abordée
systemati(|uement, car mon programme ne comportait d'abord que l'étude
des ribus de la montagne et c'est par le pays tamoul que j'ai commencé
mon voyage, à un moment où je ne pen.sais pas avoir à m'occuper des
castes de la plaine.
Robert Caldweli.. — A comparalice grainmar nf Iho iJvaridian or Soulh-Imlidu
family nf Lnnyiuii/es, London, 1875. -2o édition, p. :i49.
«D'après (J/os:«ar!,orCa!i/s. Trih,'< mvl Rares, Mn'lnis l'rrsidmr,/, Cmisiis R.'i.u.t
soc. DANTaHoi'. 1905. 27
M^i -2 NdVKMiiKi; I'.)0:i
M;iis il y ;i (li's i'Iidsos <|U(' Ih voyageur noie en passant.
Dans une ville, il fsl inipussihle (Je reconnaître un Paria ni à ses vète-
menls, ni à ses allui'es ou aux allures di; ceux i[u\ l'appiuclienl, ni à sa
constitution physique, dette remarque pourrait d'ailleurs s'appliquer aux
castes en général ; celles que l'on peut diagnostiquer du dehors, pour
ainsi dire, sont l'exception. La caste n'est qu'une affirmation généalo-
gique : voila l'impression que l'on en ressent tout d'abord, et il semble
qu'iln'y ait là rien de plus réel que les titres de noblesse à l'heure actuelle
en France.
Les Parias sont la seule classe presque qui puisse, en raison des pres-
criptions rituelles, entrer au service domestique des Européens; dans ce
pays pauvre gouverné par des Anglais à gros traitements, où la roupie
est pour l'indigène ce qu'iHail chez nous autrefois l'écu, tandis qu'elle
n'est pour l'Anglais guèie plus d'un shelling, ces situations domestiques
sont une véritable source de richesse. J'ai fréquenté surtout les Parias qui
sont tenanciers des Unlibumjalons, sortes d'auberges de poste officielles.
Le bungalow n'étant pas ouvert aux indigènes, le tenancier fait observer
sa consigne vis-à-vis des gens de toute caste avec l'insolence classique du
fonctionnaire.
Quand ils sont enrichis, rien ne les empêche de s'acheter des terres et
des maisons; ils portent les vêtements les plus recherchés. Cette réelle
respectabilité sociale ne s'accorde guère avec le mépris dans lequel est
tenue leur caste, niéi)ris qui n'est pas limité pourtant au domaine théo-
logique, car eux-mêmes n'avouent pas volontiers qu'ils sont Parias.
J'ai eu comme homme de confiance et interprète pendant toute la durée
démon voyagi; un Hindou de l'ondichéry, citoyen français par conséquent
et parfaitement conscient de sa dignité civique; il est du petit nombre
de ceux qui ne laissent pas mettre leur vote aux enchères pai^ les entre-
preneurs de corruption électorale; il a beaucoup voyagé, a résidé à Paris
et possède une certaine lecture. Même quand nous fûmes bons camarades,
comme on le devient quand on a couru la brousse quatre mois ensemble,
jamais il ne voulut m'avouer qu'il était Paria, ce que je savais d'autre
part; et quand je lui demandais quelle était sa caste, il se réfugiait dans
de longs discours sur l'absurdité du système des castes.
A la campagne, on trouverait sans doute les difTérences sociales plus
marquées, et c'est là ce que je regrette de n'avoir pas examiné; mais il
n'y a rien, je pense, d'extrêmement caractéristique. Les Parias habitent,
dit-on, des hameaux distincts du village où demeurent les castes plus
hautes. En tous cas, ces hameaux ne s'imposent pas à l'attention par une
misère particulière, et j'ai vu des cabanes d'une même pauvreté habitées
par des gens de castes différentes, des Parias et des Vellalas.
Vellalas.
La caste des Vellalas est, tout à l'encontre de celle des Parias, la caste
agricole la plus haute en pays tamoul. Elle est assimilée par les Brah-
I.OIIS I.Al'ICglE. — I.K l'IlnIlLKMK AMlIllnl'ol.uClijrE DKS l'AUlAS 103
mant's sfiilfiiuMit à la i* des castes ili' Maiiuu, collo fies Suuilras : mais en
|iayslaimtiil lesSuuilras consliluenl (jiiasi une nol>lesse ; il n'y a piatique-
nienl aucun inlerniéiliaii'e cntie eux e( Il-s Uialnuancs : i-n luul cas les
>ellalas sont n-lii^ieuscnient purs; les Braliniam.'s peuvent reci'voir l'eau
(le leurs mains. Kntre les N'ellalas et les Parias s'étend au contraire le
fdssé infranchissable de la pollution. Eli hicn, (piand on voit des travail-
leurs des champs, on ne peut, en général, pas dire d'après leur aspect si
ce sont des N'ellalas ou des l'arias. Les Vellalas seront souvent proprié-
taires du champ iju'ils cultivent, mais ils peuvent aussi être de simples
journaliers agricoles comme les Parias : les uns et les autres sont vêtus
dans ce cas de la même manière sommaire; les uns et les autres, brûlés
du soleil, sont d'une même couleur très foncée, parfois de ce noir absolu
qu'on a comparé avec exactitude au ton du charbon de bois.
Mais leur mentalité se révêle dilTérente. Lorsque sur le point de (juilter
le pays tamoul, je voulus collectionner rapidement qui'hjues mesures
sommaires sur ces castes, je parcourais les environs de Coïmbatour avec
un peon, sorte d'huissier indigène mis à mon service par l'administration,
dont le baudrier à pKuiue me conférait un prestige officiel. Aucun de ces
licoits ne pouvait discernei- ;i première vue la caste des gens; ils devaient
les interroger; mais (|uand on avait alfaire à des Parias, ceux-ci se lais-
saient en général mesurer docileiucnl, <[uoique souvent avec crainte, et
recevaient avec satisfaction quelque menue monnaie. Les Vellalas exi-
geaient en général quelque diplomatie, refusaient parfois de se laisser
aucunement approcher, et d'autres fois repoussaient fièrement après la
mensuration rotIVe d'un petit cadeau; parfois aussi venaient en l'absence
de témoins chercher leur bakchich.
Bref, la dilférence de ces deux castes paraît exclusivement morale et
les faits d'aujourd'hui ne l'expliquent point.
Palier.
A cùté de la caste des Parias proprement dits, la caste des Palier se
présente comme très analogue. Dans le district de Coïmbatour, on place
les Palier au rang social immédiatement supérieur à celui des Parias.
Mais il faut bien se rendre compte que dans la hiérarchie des castes eiïec-
tives, une dillérence d'un degré c'est la quasi-égalité; les castes sont en
nombre très considérable et l'esprit hindou exige un classement sur une
seule ligne; aucune caste n'est supposée égale à une autre, elle doit tou-
jours se placer au-dessous d'une caste supérieure et au-dessus d'une caste
inférieure. En réaliti', les Parias habitent surluut la zone septentrionale
du pays tamoul ; les Palier me paraissent èlre leurs homologues de la
zone méridionale, les régions de Maduraelde Tinnevelly. Dans le district
de Coïmbatour, j'ai opéré surtout au voisinage de la montagne, dans une
région dont le peuplement est relativement récent; comme on se trouve
là à peu près à la hauteur du milieu du [»ays (amoul, les populations des
deux zones viennent s'y juxtaposer et, dans la hiérarchie hindoue, leurs
404 ^2 NOVEMBRE 1905
castes s'entrecroisent par des siipeipositions éminemment convention-
nelles. Il est fréquent de voir une caste récriminer au sujet du ran^ qui
lui est assii;né ; l(>s récriminations soni fondées sur des arguments tradi-
tionnels et ptiilosoplii(]ues, appuyés au besoin par des coups de h<Vton à
défaut de coups de fusil. La raison de la prééminence relative donnée aux
Pallei- sur les Parias m'est inconnue; d'après la régie la plus ordinaire,
il faudi'ait la chercher vraisemblablement dans des mœurs un peu plus
conformes aux prescriptions brahmaniques.
Comparaison physique des trois castes ci-dessus.
Les Palier smit, d'-ipiés le Census, au numbre de 825,000; les Parias,
comme je l'ai dit, 2,452,000. elles Vellalas 2,379,000. Des castes aussi
nombreuses répandues sur un grand pays n'y restent pas d'un bout à
l'autre identiques à elles-mêmes; pour les comparer entre elles, il est
nécessaire de prendre les documents sur l'une et sur l'autre au même
endroit. Les chiffres que je vais donner sont tirés du district de Coïmba-
tour, et plus spécialement de la petite ville de Pollachi entre Coïmbatour
et les monts d'Anémalé. A Madras, Thurston a trouvé pour les Parias et
pour les Vellalas des indices céphaliques plus bas: j'ai moi-môme observé
pour les Pallei" près de Tinnevelly un indice cépbalique plus élevé.
Le type physique de ces trois castes est essentiellement le même; j'ai
fait remarquer déjà que l'on ne pouvait d'après les traits diagnostiquer
la caste d'un individu; le type général est celui qu'on a souvent décrit
comme type dravidien. Les descriptions des divers auteurs ne sont
d'ailleurs pas tout à fait d'accord entre elles; elles insistent plus ou
moins sur le caractère négroïde, mais toutes sont d'accord pour faire du
dravidien quelque chose d'intermédiaire entre les blancs et les nègres.
Huxley* les rapproche des Australiens; Haeckel * en fait une espèce,
VHomo dravida « probablement très voisine de la forme ancestrale des
Euplocamiens », c'est-à-dire des Nubiens et des Méditerranéens; Grawfurd ^
avait déjà affirmé leur ressemblance avec les Abyssins. Les deux traits
que l'on retrouve dans toutes les descriptions sont : la peau noire et les
cheveux lisses ou ondes, ce qui revient à la constatation d'Hérodote sur
les nègres à cheveux lisses de l'armée de Xerxès.
Mais, pour la forme du nez, Haeckel le décrit comme saillant et étroit,
d'autres comme plus ou moins camus; Schmidt * distingue une sous-
race platyrrhinienne et une sous-race lepturrhinienne. En réalité, dans les
trois castes que nous considérons, il y a à la fois des leptorrhiniens et
• Huxley. — Anatomy of Vevichrated animait.
* Haeckel. — Histoire dp la création des êtres organisés, trad. Letoiirneau, Paris,
19û;i p. L»24.
' J. Grawfurd. — Hllniolotm of Af/i/ssinia. Trans. of tlie Ethuolog. Society of
London, t. VI, 1867.
4 ScHMiDT. — Die Anthro/i. Indiens; Globus, t. LXl, 1892.
r,(tri> i.viMi:ijrE. — i.k l'itnm.K.MK, ANTiiKni'ni.uciun', iik> i'AiiiA> iOri
des platyrrliinieiis, il y a des individus qui, vus de fa e et les cheveux
lachéspar leur turban, donnent loul à fait l'impression de nègresafrioains.
Comme toujouis, les enfants paraissent relativement p'us nègres ([ue les
adultes. Ces types négroïdes se rencontrent surtout chez les Parias et les l'al-
ler'; il y a d'autre part des individus <|ui avec un nez fin, saillant, doimenl
l'impression d'un blanc à peau noire; ce type se rencontiv plus tréiiuem-
ment chez les Vellalas, mais on le trouve aussi dans les d<Mi\ autres castes,
de même qu'il y a des Vidlalas négroïdes. I.a plupart des individus des
trois castes réunies rappellent rerlainemcnt li' muhVtre, en donnant h ce
mot son sens ordinaire, c'est-;i-dire métis d'Européens et de nègres
d'.\friqu<'. Par rapport aux vrais mulâtres pourtant, cette population pré-
sente les deux dilTérences suivantes : I" le teint est toujours foncé, dans
la gamme des bruns soutenus et ne tourne jamais vers l'olivâtre, 2° chez
des mulâtres présentant des traits négritiques aussi marqués, on obser-
verait une forte proportion de chevelures crôpelées qui font ici défaut.
Je me servirai pour le moment de trois mesures seulement :
l-' L'indice nasal; cet indice traduira en chiffres un des traits les plus
importants de la physionomie négroïde saisissable à l'œil ; nous verrons se
révéler, par" la dilîérence des moyennes, un fait qui apparaît à l'observa-
tion attentive, non des individus mais de groupes d'individus; c'est à
.sivoir (jue les Palier et les Parias sont plus négroïdes que les Vellalas.
.l'ai pris la dimension verticale du nez suivant la technique de
M. Papillault ', c'est-à-dire la limite supérieure à la mture naso frontale
palpée à travers les téguments. Celte technique a l'avantage de laisser
moins dindécision dans la mesure, mais il faut tenir compte que par
rapport à l'indice nasal tel que l'indique Topinard, elle donne des valeurs
sensiblement moins élevées dans le type nègre, tandis qu'elle ne change
pas sensiblement les valeurs dans le ty|ie blanc; il en résulte que la dif-
férence d'un type à l'autre est atténuée.
:2" L'indice céphalique horizontal, rapport largeur longueur suivant
les procédés classiques.
3° La taille debout; haul-nir du verl<'x au-<lessus du sol.
Tous les sujets dont je me servirai dans le présent travail, en en
donnant chaque fois le nombre, sont, sauf mention contraire, des mâles
adultes; les femmes m'ont pour certaines castes fait complètement défaut,
et pour d'autres, se sont présentées en nombre insullisant.
Voici les moyennes obtenues pour les trois castes que je range dans
Tordre des préséances sociales.
» Dans la plundie ci-joinlv les 3 Parias (Fiy. 1} muiitntit hi.ii le mélange de types :
l'individu du milieu esl assez fortement néyroïilo. L ■ j.uuo PolU-r (Fif/. :ij paraîtrait
très négroïde sans ses cheveu.^ roides.
» G. Papill.\ULT. — L'homme mni/en <i Paris. RiilLliiis et Mémoir. s de la Socié'é
d'Anthropologie de Paris, 1902.
iO() -2 NdVKMItltK lilO.")
Indico nasal Indico céplialiiiuo Taille
23 V.-lliil.is 75 7S.2 160,6
l\) l'all.'f 77 77.3 101
2;î l'.iiias 78 7('.. 1 16;J,7
l*oiir l'indice nasal, nous l'elruuvons dans ce cas particulier une véri-
fication très nette de la loi de llisley, ;i savoir (|ue l'indice nasal s'accroît
(juand on descend l'échelle des castes; il est remaniuahli- (|ue la petite
dilïérence sociale établie entre les Palier et les Parias concorde avec une
petite dilïérence de l'indice nasal.
Il est encore plus remarquable qu'en ordonnant les castes simplement
au point de vue social, on les ait du même coup ordonnées par rapport aux
trois valeurs anthropométriques choisies. L'indice céphalicjue dans un
cas tel que celui-ci ne se révèle en rien à l'observation directe et les
chiffres seuls peuvent montrer une loi de variation systématique. Ces
valeurs moyennes correspondent sûrement à une réalité et non ;i un
hasard de série comme on peut le voir par la répartition des cas indivi-
duels. Je donnerai ici seulement les cas extrêmes de chaque série; pour
l'indice céphalique, ce sont chez les Vellalas 73,3 et 85,8; chez les Palier
72,2 et 83,3; chez les Parias 71,5 et 81,3. Pour la taille, ce sont chez les
Vellalas 145 et 174; chez les Palier, 153 et 177 ; chez les Parias 155 et 181.
.l'ajoute que j'ai observé nombre d'exemples du même fait : pour moi,
il n'y a pas de doute qu'à la division en castes correspond une différencia-
tion ethnologique.
Castes du Mal.xbar.
Poulayer et Cheroumas.
Mais le cas du paria tamoul n'offre pas des conditions favorables à
l'étude. A tous les points de vue le pays tamoul ne présente des choses
dravidiennes qu'une image estompée; c'est un pays qui a été soumis à
trop de vicissitudes politiques. Le Malabar, sur la côte opposée de la Pé-
ninsule, prc'sente comme institutions et comme races les formes anciennes
beaucoup mieux conservées et par suite beaucoup plus faciles à com-
prendre, car elles sont restées dans la logique d'un système.
Dans le Malabar, il y a bien des Parias, mais en petit nombre. A part
ceux qui occupent un emploi auprès des Européens, ils sont très misé-
rables, habitant des huttes isolées dans les endroits écartés, parfois
nomades; ils vivent de menus métiers tels (pie li vannerie et la sorcel-
lerie. Ils ne font pour ainsi dire pas partie de la société régulière et
donnent l'impression de quelque chose d'adventice. Ce sont, je pense, des
descendants de Parias tamouls jadis réfugiés en !)lalabar.
La classe d'ouvriers des champs ici est composée de véritables serfs
attachés à la glèbe; dans le nord (Malabar britannique^ on les appelle
Cheroumas ; dans le sud (royaumes indigènes de Travancore et deCochin),
40»;
/'//. /. — Truis (Liiins lamouls, de l'ollarli
/'/'/. l\ — F.niiillr [luuhiyrr, de Mali.iloiir.
^'U- ^- — Jeune l'aller.
F/y. L. — Xayer, de Malialour,
LOi:iS LAl'ICOl E. — I.K l'IinllI.K.Mi: AM llll'il'ul.oiilol K |»KS l'MllAs U)7
on los appelle />iii(l(ii/rr. Voici le sens de ces (lénmniiialitjns : INjulayer
dérive de Ponln, poliulioii ; c'est le sens qui existe dans l'esprit des gens;
ce. n'est point une deiivalion théorique. Les gens des castes libres, (juand
ils disent Poul'ii/i'i\ pensent i éoliement ^^/rt'S im/>Mr5. Les Foulayer eux-
inOnies ne se donnent jamais ce nom , iinaiid im lem- deinande Umm- caste,
ils répondent qu'ils sont Puller.
Il me sennble que ce mot de Poulayer a été t'alni(|iit'' systi'iiialiqiienient,
|)ar une déroiinalidii voulue, puur être nue injure. Il parait ipie la dt'-ri-
vjition phoni-lique n'est [)as possil)le de l'til/rr à h)ul(ii/er: mais (juand il
s'agit de noms propres, on trouve part(»ut dans l'usage populaire des
calembours ou des à peu près du genre d(i celui-UV. En tout cas, il est
curieux tle reti'ouver ce nom de l'aller dans la bouche de pauvres diables
sans aucune instruction, ne voyageant jamais, et qui n'ont peut être
aucune idée des Palier tamouls.
Le mot de t'herouma est un mot spécial. M. et M""= Watts, tous deux
.\nglais de race pure, mais nés dans le Travancore et ayant passé toute
leur vie dans ce pays, m'ont donné le rcnseigricment suivant : ce serait
la désignation (jue les l'oulayer appliquent ii leurs enfants, clierouma pour
les garçons, cher mi pour les filles; c'est un mot qui n'est pas malayalam
ni lainoul. Dans une partie du pays, il aurait donc été emprunté par les
castes supérieures et appliqué ;i la caste inférieure avec une extension
analogue à celle du mot f/arron chez nous ou boif en anglais.
Dans toutes les parties du Malabar que j'ai vues (Cochin, Travancore
l'I .Malabar britannique), Cheroumas et Poulayer se ressemblent beaucoup,
•le fonderai ma description sur mes souvenirs du Travancore, le pays le
plus typique
Lorsque passant sur une roule on voit de loin de petites créatures qui
se précipitent derrière les buissons pour s'y cacher, ou bien, parmi les
rizières, s'écartent jusqu'à 50 mètres du chemin, piétinant dans la boue à
mi-jambe, on reconnaît des Poulayer qui se rangent pour éviter aux
passants le voisinage de leur impureté. Il faut de l'insistance et parfois
une certaine contrainte pour ((u'ils s'approchent ou qu'ils vous laissent
approcher, et alors ils s'inclinent, parfois même se prosternent et se
tiennent devant vous dans une posture humble et craintive leurs deux
mains jointes sur leur bouche*. Les hommes comme les femmes n'ont
qu'un vêlement sommaire autour des reins; les hommes ont généralement
les cheveux coupés ras; la petitesse de la taille est frappante; les visages
n'ont rien de particulièrement négritique; la couleur de la peau est extrê-
mement foncée.
Voici quelle est leur condition matérielle et sociale. Ils habitent, en
général, dans la rizière même qu'ils cultivent, des huttes de paille extrê-
mement sommaires, parfois plus basses que la hauleur d'un homme, et
ne contenant d'autre moltilier que quelques écuelles de terre : j'ai rare-
' Voir dans la pluuclie la fif^iu-u '■2; la pose reprcseutée oal le iiiiiiiuiiun (radoralioii
que j'ai pu obleuir de celle famille.
i08 2 NOVEMItRE 1005
menf vu de sauvages avec un logis aussi misérable. Ils sont propriété du
possesseur do la toi-re, vendus ou loués avec celle terre, quelquefois loués
séparénienl ctunuie travailleurs pour les plantations eurup<''ennes; ils ne
reçoivent aucun salaire, sont nourris avec la moins bonne partie de la
récolle et les cadavres des bestiaux morts de maladie. Le droit de pro-
l»riélé sur leurs personnes est formel et pif'cis dans les lois et coutumes
iudigr-nes; il s'appelle U; Djcumam ; le propriétaire ou Djentni pciû les faire
poursuivre et ramener s'ils s'enfuient de sa terre. Les Anglais ont théo-
riquement aboli cet esclavage et feignent d'ignorer qu'il s'est maintenu
en fait; tous les indigènes en parlent sans embarras. J'expliquais à un
Djenmi, en lui demandant de mcnsurer ses serfs, que je cherchais la
diirérence de caste entre les races, et que la petite taille des Poulayer
m'intéressait à ce point de vue; il me répondit froidement : « S'ils sont
petits, ce n'est pas la race; ils ne grandissent pas parce qu'ils Iravaillent
trop jeunes et ne mangent pas assez. » De leur côté, les Poulayer parais-
sent avoir le sentiment intime de leur inférioi'ité, et accepter sans résis-
tance leur abjection à laquelle ils n'ont d'ailleurs guère le moyen pratique
de se soustraire. Au voisinage des communautés chrétiennes ou musul-
manes pourtant, il en est qui se convertissent, et ainsi devenus Môplns,
défendus au besoin par leurs nouveaux frères, ils échappent à leurs
maîtres.
Les Cheroumas du Malabar britannique ne s'écartent de celte descrip-
tion que par des nuances : le Census donne comme synonymes les deux
mots Gherouma et Poulayer, il a néanmoins compté les uns et les autres
à part, suivant l'indication des fiches de recensement; il indique pour le
terriloire britannique 253.000 (Iheroumas et 3.000 Poulayer. Pour les
états deTravancore, 206.000 Poulayer-et seulement 700 Cheroumas (dans
Cochin, il donne 59.000 Poulayer et il ne mentionne pas les Cheroumas).
Ce qui revient à constater que les serfs agricoles, sensiblement homo-
logues dans tout le Malabar, portent deux dénominations différentes sui-
vant la région considérée.
Travancore et Cochin réunis présentent une population d'environ
3.800.000 personnes; si l'on en retranche 900.000 chrétiens et 250.000
musulmans (Môplas^ parmi lesquels les distinctions de castes sont effacées,
nous voyons que les Poulayer forment, dans ces royaumes, un dixième
de la société hindoue.
L'aspect physique des Poulayer et des Cheroumas m'a paru essentielle-
ment le même dans tout le Malabar; à part la petite taille il ne présente
d'ailleurs rien de particulier; comme chez les castes lamoules que nous
avons examinées, il rappelle avec de grandes variations individuelles
le mulâtre par beaucoup de traits et en diffère par quelques autres.
Les mensurations que j'ai faites sur divers groupes de Poulayer et de
t^heroumas en des localités diirérentes m'ont fourni des chitîres diver-
gents.
Voici ces séries :
Indice
Indice
nasal
cf^phaliquo.
Taille.
7(i
7(;.n
154,0
7S
71.(1
155,0
80
75.7
155.2
78
72,8
159
7ti
73.8
153,8
r.OnS I.APIC.yLE. — I.K l'UOm.KMK ANTIIllilPOLOr.IQUE DES l'AlU.XS iOO
l(i l'diil.ivtT il .Mali.itiiiir
10 PimlHVcr ;i AnjL'.iiii.ili
18 C-heroumas à Trii-liniir
0 C.hei'ounias à INnildupatli
12 l'oulavei- à Kalpclla
il [(L'iil y avuii", il y a niônni presque corluiiiemeiil dans ces t'carts, une
part qui revient à des hasards de séries un peu courtes; c'est ainsi que
la moyenne extraordinaire obtenue pour l'indice céphalique sur les l'ou-
layer d'Angamali n'est pas vériliée par une petite série de femni(>s du
môme groupe. Je mets ici ji titre de comparaison les 3 séries de femmes
(jue j'ai récollées dans cette caste :
Indice Indice
nasal. cc'phaliquo. Taille.
8 9 l'oiilay.M- à Maiialdiir 07,1 70.9 142,3
G 9 Poulayer Angainali 74,3 74,8 140,7
19 9 Cherounias à Tiirliour 75,4 76 144,6
Les femmes sunl en moyenne, comme c'est la règle dans ces popula-
tions, moins plalyrrhiniennes et moins dolichocéphales, mais les varia-
tions d'une localité à une autre ne se suivent pas dans les deux sexes.
Néanmoins je pense qu'il y a des différences l'éelles d'une localité ;i
une autre. Il n'y a aucune raison pour que celte caste présente une unité
anthropologique. Les Poulayer sont nécessairement très sédentaires,
presque parqués : il doit y avoir peu de communications, si même il y
en a, entre les l'oulayer de deux agglomérations s 'parées. .Vu contraire,
ils doivent subir, comme toutes les populations socialement inférieures
(et ceci a lieu aux Indes comme ailleurs, malgré les barrières rituelles),
l'influence des populations qui les entourent et qui ont avec leurs femmes
des relations irrégulières. Voici un exemple de cette influence.
Entre Maliatour et Angamali, il n'y a qu'une petite distance : 2 heures
de pirogue, plus 3 heures de charrette; mais iMaliatour est le dernier vil-
lage proprement travancoréen, au bord même de la montagne et de la
jungle où viventdes populations demi-sauvages qui sont relativement bra-
chycéphales (absolument parlant, elles sontsous-dolichocéphalesj. Anga-
mali est tout à fait en plaine, et les populations libres de cette plaine sont
extrêmement dolichocéphales. Ainsi s'éclaire la dilférence dans l'indice
céphalique des Poulayers des deux localités.
C'est à-(lire que les l'oulayer et Cheroumas ne i)résentent pas une ma-
tière anthropologique bien favorable pour élucider la question d'une race
primitive dont ils seraient les descendants. Même leur petite taille, qui
est seule assez constante, peut très bien n'être pas un caractère ancestral,
et l'explication physiologique donnée par le Djenmi, à savoir un arrêt
440 2 NOVEM»HE 1905
de développemonl par los mauvaises conditions do la vie, paraît avoir
une certaine n'alili'.
Ia\ cirt'l, 18 l'arias du I ravancore qui uul une existence encore plus
misérable que celle des l'oulayer, et sont d'ailleurs considérés par ceux-
ci comme inférieurs, m'ont donné une taille moyenne de 151,4 (le maxi-
mum étant HJU et le mininmm 141); cest 12 centimt'tres de moins que
les Parias tamouls dont iU descendent vraisemblablement: et de tous les
éléments étrangers (jui ont ont pu s'introduire dans la race, aucun n'est
aussi petit.
Mais ces Poulayer permettent au moins de compiendre ce que le Paria
a dû être primitivement au point de vue social. Les relations qui existent
entre eux et les propriétaires du sol sont les relations qui existent
fn'Hjuemmenl de maître à esclave, et dont nous trouvons chez des gens
de notre race des souvenirs encore vivants; telles ont été, aux Antilles
et dans l'Amérique du Nord, les relations entre nègres et planteurs.
Dans cet exemple, il est vrai, et dans les traces qu'il a laissées, intervient
la question de couleur, c'est-à-dire une différence de race très marquée.
En est-il de même aux Indes? C'est notre question même, et c'est une
question que les intéressés ne semblent pas se poser actuellement; d'ail-
leurs leur opinion n'aurait pas grande valeur. Nous avons vu pour les
les Parias tamouls une certaine indication anthropologique en ce sens.
Dans le Malabar, le Poulayer qui est resté bien nettement un serf, n'est
pas resté un Negrito ni un Nègre caractérisé; il peut rentrer dans la défi-
nition générale du Dravidien et se conformer à toutes les interprétations
contradictoires qu'on a donnné de ce type. Mais son maître présente, lui,
quelque chose de particulier, et dans certains cas se dislingue vivement
de la race des esclaves.
Nayer.
La classe des propriétaires du sol dans la Malabar est constituée essen-
tiellement par la caste des Naijey. Cette caste est célèbre. Dès le xyi^ siècle
nous en Iro .vons une mention pompeuse dans le poème de Camoëns qui
les dépeint tout semblables à nos barons du moyen Age. Les Radjahs
actuels appartiennent à la caste des Nayer. Propriétaires, guerriers, chefs
d'état : c'est donc une caste qui apparaît comme exactement homologue
aux Ksalrias de Manou. Pour les Brahmanes pourtant, ils sont seulement
Soudras, comme les Vellalas tamouls, et comme du côté tamoul aussi, les
Soudras sont considérés comme une caste noble et pure. Les Brahmanes
sont ici assez nombreux, surtout dans Cochin, mais ils sont superposés k
la société dravidienne et se présentent comme des immigrés, presque des
étrangers. On pourrait suivre encore, sans doute, les procédés par lesquels
ces envahisseurs, ;i la fois mendiants et arrogants, se sont imposés par
un prestige purement spirituel aux belliqueux et puissants Nayer, leur
accordant comme une faveur de les assimiler à la plus basse classe de
I.OIIS LAPICOUE. I.I-; l'Itnitl.KMK ANTIlIltd'ol.ni.lulE DK> l'AHl.VS 411
leur iialion. (tn trouvorait l;i, acliu'lloin<.'iU vivant, le processus de l'inva-
sion aryenne.
Les Nayer, c'est un fait hien eunnu, ont une des formes de constitution
(!.' la faniillc et de la [iroi»riiHé (jue l'on a classi'e sous le nom de mnlrinrail :
ils suivent la loi du mavumakhittaijnm dans le(|uel le hien detamille forme
un majorât ijui se transmet de mère à fille. Il est d'usage que l'époux de
!a lill." ain»'e des grandes l'amill.'s nayer soit un Brahmane; ce mariage,
d'ailleurs, parait tHre parfois purement rituel, <'t ne donner au mari au-
cun droit sur la personne de l'épouse. Je ne puis pas dire quelle a été l'in-
lluence réelle de cette coutume sur le mélange des deux races; mais, en
fait, on peut reconnaître un type nayer et un type hrahmanique. l/étude
précise de ces deux types demanderait une connaissance profonde de la
société malahare et toute une série de précautions fort délicates; une
telle recherche n'est pas à la portée du voyageur qui passe quelque se-
maines dans un pays.
I 11 type Nayer s'est dégagé [jour moi des observations fortuites et un
|).'ii sommaires ipie j'ai eu l'occasion de faire dans Travancore et Cochin.
.).' n'attribuais à cette conception qm; la valeur dune hypothèse provi-
-oire, d'une de ces directions intuitives ijue le naturaliste peut accepter
coinmi* amorce de recherches rigoureuses, en se gardant de la formuler
prématurément. .Mais comme j'ai obtenu plus tard une véiilication très
frappante de la réalité de ce type, je peux l'indiquer ici.
!/élément etlini(iuc caraclérisli(|ue chez les Nayer est grand, franche-
ment leplorrhinien, clair de peau, très dolichocéphale, avec des cheveux
noirs fins et ondi-s et un développement remanjuable du système pileux
sur tout le corps.
Le type brahmanique qui se rapproche de ce type i)ar certains traits (ce
sont tous deux des Blancs), s'en distingue par quelques caractères assez
visibles; il est beaucoup moins dolichocéphale et peut même être appelé
mésaticéphale. La forme de son crAne est facile à constater, car les Brah-
manes ont la tète rasée et ne portent pas de coilTure. Le raccourcissement
'le la partie postérieure, la chute très rapide, presque verticale de la
•ourbe occipitale attirent l'attention dans ce pays de crânes très allongés.
Les mesures des auteurs (je n'en ai pas moi-même pris sur cette caste),
donnent toujours pour les Brahmanes un indice plus élevé que ceux de la
population du même pays *. Le nez n'a pas le naême dessin que dans le
type Nayer: chez celui-ci il est aquilin et rappelle le nez des plus beaux
types sémites; chez le Brahmane il est plus obtus et ressemble à la
moyenne des nez de l'Europe Occidentale. Il est bien entendu que je parle
p'Hilement du Brahmane tel qu'il se présente dans le sud de l'Inde.
«Juant au Nayer, c'est sur quelques individus seulement que s'était
' Thurston. — lirnhiniin.t, KniiiiiHiluns, PnlU.s and Pciriahs of Marlras City,
Madras «jovernmcnl Muséum Bulletin, 181)0. Fasc. i.
Fawcett. — Soles onsome of the peopie of Malabar. — Ibid., 1900. Fasc. I.
Ku outre, divers documents inédits obligeanunenl coiuniuniiiués par .M. Thui'stou.
\[-2 2 NOVEMBItK inO."»
fondée ma conception avec une certaine part d'arbitraire dont je m'excuse
encore une fois, priant qu'on me fasse crédit jusqu'à une publication ulté-
lieure où le rapprocbement avec les Todas des Nilghiris sera ma justifica-
tion.
Je n'ai mesuré que 14 Nayer ; je ne les avais ni choisis ni cherchés :
ils se sont présentés à moi, comme j'opérais sur toutes les castes du
ïravancore; je ne pouvais évidemment établir de préférences, sous peine
de m'exposer à des déclarations fausses. Ces 14 sujets mesurés à Maliatour
donnent les moyennes suivantes: indice nasal, 75; indice céphalique,
73, 2 ; taille, 163. Il n'y a rien dans ces chifTres, sauf la taille, qui dilTé-
rencie nettement les Nayer des Poulayer. Mais il était évident a priori
qu'une série ainsi recueillie ne pourrait pas accuser le type primitif de la
caste. En effet :
1* Le Census accuse plus d'un million de Nayer ; 521 mille pour
Travancore, 112 mille pour Gochin, 410 mille pour le Malabar britan-
nique ; les maîtres seraient ainsi presque en nombre double de celui de
leurs esclaves, .\ussi le Glossaire des castes, dans le KapportduCensuspour
la Présidence de Madras, donne fort justement ceci comme commentaire
au mot Naijer : « c'était originellement une caste militaire, mais le terme
Nayer est maintenant si généralement adopté par des personnes de toutes
sortes de professions et employé si h la légère, qu'il n'est plus guère qu'un
titre. »
2° Même pour les Nayer qui descendraient authentiquement d'an-
ciennes familles, il ne faudrait pas s'attendre a leur trouver un type pur,
pas plus qu'il ne faudrait chercher le type pur des Européens chez les
créoles des Antilles.
Sur mes 14 Nayer ou soi-disant tels, une bonne partie présentait en
effet l'aspect mulAtre banal chez les Dravidiens. Mais quelques-uns m'ont
frappé comme des phj-sionomies que je n'avais point encore rencontrées
aux Indes, et cette physionomie particulière, qui sort du mélange ordi-
naire et qui n'est pas non plus le Brahmane, ne pouvait pas manquer de
s'imposer à l'attention '. (Juanl à l'extrême dolichocéphalie du type à qui
appartient cette phj-sionomie, je ne l'appuie pas, bien entendu, sur l'ob-
servation de spécimens choisis pour leur dessin du visage ; les crânes les
plus dolichocéphales n'appartiennent pas aux mômes individus que les nez
les plus fins. Mais je l'appuie sur les remarques suivantes :
1" Toute la population du Malabar est, en moyenne, plus dolichocéphale
que la population correspondante examinée dans le district de Coïm-
batour. La muyenne générale de tous les sujets que j'ai mesurés dans le
sud de l'Inde est d'environ 76; les trois castes examinées à Coïmbatour
sont au-dessus de 76, les Paryas en étant tout près ; tous les groupes
examinés dans le Malabar sont au-dessous (excepté les Poulayer de
Maliatnur (jui dépassent ce cbilTre de 9 dixièmes, et j'en ai donné la
' Voir dans la planclie fig. 4.
LOUIS LAPIOMlE. — LE PROItl.KME AN THHni'til.or.lyrK UKS l'ARlAS 413
raisonV Les castes supériouros, à (".uïinliatuur, sonl moins tlolichun'phuk's
(jue les castes inférieures; clans le Malabar, elli-s sont plus tlolicliucé-
pluiles: 73, 2 pour les Nayer «le Maliatour contre 7(i, 9 pour les PouUyer
(lu même lieu. Il apparaît donc au moins C(mime probable (pie si ces castes
proviennent de races ditrérentes, la race originelle du \ayer était la {ilu«
dolicbocéphalique de toutes.
2" La distribution des 14 cliilVres individuels tjue j'ai recutMllis sur les
Nayerdans un seul et môme village est curieuse: il y en a •> en un petit
groupe serré de r»7,T ;i 71,4; leur moyenne est 69,7; les H autn^s, laissant
entre eux et les premiers un intervalle de prés de '.i unités, s'éclielonm-nt
de 74 à 79; leur moyenne est 75,8, c'est-à-dire précisément la moyenne
banale, le cbilVre aux enviiims duquel on trouve un maximum à [mmi pivs
dans tous les groupes d'bomnn's que j'ai mesurés dans b- sud df l'Iiidr.
L'élément caractéristique, spécial de cette petite série de .Nayer, c'est
donc ce groupe de 6 byperdolichocépbales.
Le problémk etunologiqle.
En résumé, les l'arias, pris dans un sens général, nous apparaissent,
dans le stade archa'ique représenté par les l'oulayf^r du Travancore,
comme des esclaves agricoles. Mais appartiennent-ils, i»u plubM, appar-
tenaient-ils primitivement à une race dilTérenle de celle de b'urs maîtr.-s?
Dans l'état actuel de ces populations de la plaine, l'analyse anthropo-
logique paraît incapable de donner une réponse ferme. Il y a des indi-
cations, simplement, d'une dilïéience pbysiqu<\ L'byiM.lbé.sc dune race
noire primitive réduite en esclavage par une race blanclu'. hypothèse
souvent faite, peut rendre compte des faits observés ; elle est acceptable
mais elle ne s'impose pas, La solution du problème nécessite la connais-
sance d'autres faits; ces autres faits, nous irons les chercher dans les
montagnes. .Mais pour que les tribus de montagne, débris d'humanité
réduits parfois à quebiues centaines d'individus, prennent leur valeur de
témoins dans une théorie ethnogénique de l'Inde .Iravidimne, \\ faut
poser avec toute la netteté possible le problème des Parias, en b-nant
compte des documents de toute nature. In tel sujet, par certains côtés,
serait complètement en dehors de ma compébmce; je vais onquimler .'i
Caldwell un exposé extrêmement bien fait qu'il a mis en appendice à sa
célèbre grammaire '. La citation sera un peu longue, mais j.' pense être
utile aux anthropologistes français en traduisant c travail qui. peut-être
parce qu'il est dans un ouvrage essentiell-Mneiit philolugi.pi.', n.- paraît
pas avoir pris la place à laquelle il a dmil. D'ailleurs, j'ai besoin de -et
exposé pour ma discussion, et il est encore phis simple do transcn-r i-
passages essentiels que de les paraphraser.
Je réserverai mes observations pour la lin.
I Robert Caldwell. - Les Pareiyas du sud de l'Inde sont-ils Dravidiens,
ouvrage cité, p. 545.
•iJi -2 NuVKMHItK l'.tO.""»
Exposé dr (.'(ililii f/l.
u Ayant débarrassô lii ([ucsIiDii «les cireurs pupulaires et des matières
étrangères, nous en arrivons à la (jueslion elle-même. Les Pareyas sont-
ils Dravidiens? Kst-ce que les tribus des forêts, les basses castes, et les
prétendus « outcast '• qui parlent les langues dravidiennes, spéci;ilement
les Farialis Tamouls (piu|)renHMiL Pareyas), les Malas Telugu, et les
Puleyas Malayalain Kjui peuvent être pris comme les types de la classe)
sont de la même origine et de la même race (jue les Dravidiens des hautes
castes? Tandis que les deux classes ont droit à être appelés Hindous *,
est-ce que les hautes cables seules sont Dravidiennes, Tamiliennes, Ma-
layalis, etc.? Et les l\ircyas et gens de semblable caste doivent-ils être
regardés comme appartenant à une race différente. »
« A tout prendre, je crois qu'il est plus probable que les l'areyas sont
Dravidiens; néanmoins, la supposition qu'ils appartiennent à une race
différente, qu'ils sont descendus des véritables aborigènes du pays — une
race plus ancienne que les Dravidiens eux-mêmes — et qu'ils ont été
réduits en servitude par les premiers Dravidiens, n'est pas dépourvue de
probabilité. On peut concevoir que, de même que les Aryens ont été pré-
cédés par les Dravidiens, les Dravidiens peuvent avoir été précédés par
une race plus ancienne, plus barbare, et peut-être plus noire, dont les
DomselautresChandalas de l'Inde du nord, ainsi que les Pareyas et autres
basses tribus de la Péninsule sont les représentants actuels. »
« Si cette race primitive existait avant l'arrivée des Dravidiens, il a dû
arriver nécessairement que les uns se soient enfuis des envahisseurs
dans les montagnes difficiles et les jungles pestilentielles, comme les
Ragis ou Dùms de l'Himalaya, les Weddas de Geylan et les Mala (y) arasas
du GhAts méridionales, tandis que les autres, probablement la majorité
de la race, seraient réduits en servitude perpétuelle, comme les Pareyas,
Puleyas et Pallas. L'histoire de l'assujettissement des Soudras préaryens
de l'Inde du Nord formerait ainsi le pendant et le complément de l'histoire
de l'assujettissement d'une race encore plus ancienne. Tout cela peut se
concevoir comme possible, et il n'y a là contre aucune improbabilité
a priori; mais il convient de relever les circonstances et considérations
qui apparaissent comme de nature à appuyer cette hypothèse. »
« 1" Les Pareyas, les Puleyas et les Pallas et diverses autres tribus de
basse caste sont généralement esclaves des autres castes et la plupart
d'entre eux semblent avoir été toujours dans une condition servile : et il
est plus naturel de supposer qu'ils ont été réduits en esclavage par
conquête, que de supposer des tribus entières tombant en esclavage par
le jeu de causes sociales ordinaires. Si, alors, les castes en question
étaient un peuple qui a été subjugué, il faut que ce peuple ait été établi
' D'après les définitions données précédemmont par Galdwell.
unis I.Al'Ii'.Ul'E. — LK Pllnni.KMK ANTHHtt|'i»r.ni;in(|-: |»KS l'AlUA^ il.*»
dans If [)ays à un»' pôiiodi' plus ancitMine (|iio s(>s con(|ii<'iaiils . cl pio-
bableinenl il appartenait à une rare dillëieiile: »
« ^0 Les habitants de basse caste du sud de llnde sont séparés de la
catégorie enlière dos hautes castes par des marques très nettes, sans
erreur possible, d'hilulisme social.
« Le titre de Soudra qui a généralement été pris par les hautes castes ou
qui leur a été conféré par les brahmanes est refusé aux basse castes. Il
ne leur est pas permis de pénétrer dans l'enceinte des temples : DU
mnjorum ijenliitm : de plus, partout où les vieux usages Indous survivent
inéhranlés, comme dans les étals indigènes protégés de Travancore et de
Cochin, il est interdit ou il l'était jusqu'à tout dernièrement aux femmes
de ces castes de porter leur étoffe sur leurs épaules ; elles étaient obligées
délaisser le buste entier à découvert en signe d'infériorité sociale. On peut
dire que des distinctions de classe fortement marquées comme celles
ci-dessus (|ui séparent les gens de 10 ou 20 dilVérentes castes ou tribus
du reste de la population sont incompatibles avec la supposition d'une
identité originelle de races.
.( 3'^ Il y a diverses traditions répandues parmi les Pareyas tendant ;\ éta-
blir que la position occupée dans la société indigène à quelque |)ério(le
antérieure était bien différente de ce qu'elle est maintenant et beaucoup
plus honorable. Wilks remarque qu'il y a une tradition que les l'areyas
Canarais étaient jadis un peuple indépendant avec des rois à eux; les
Pareyas tamils prétendent quelquefois qu'à une ancienne période ils
étaient la caste la plus distinguée du pays. Ils disent qu'ils ont été réduits
à leur |tosition présente en punition des mauvais traitements que leurs
ancêtres tirent subira ([uclque ancien roi, et c'est en cette occasion que
les Vellalas ou caste des cultivateurs qui sont maintenant appelés Tamiran'
ou Tamiliens, jinr excellence, ont été élevés à la position qu'ils avaient
d'abord occupée eux-mêmes. Il y a une semblable tradition que les Kou-
rawasou Bohémiens fabricants de paniers, étaient jadis rois de la contrée
montagneuse dans le sud. »
« ¥ En diverses parties du pays, des Pareyas et des membres de castes
similaires jouissent de privilèges particuliers spécialement dans les fêtes
religieuses; ainsi au festival annuel d'P^gatlal, la mère unique, une forme
de Kali et déesse titulaire de la ville noire de Madras, quand un Tali ou
collier de mariage correspondant à notre anneau de mariage était noué
autour du cou de l'idole au nom de la communauté entière, il était d'usage
quun Pareya fiU choisi pour représenter le peuple comme fiancé de la
déesse. De semblables privilèges appartiennent aux Pareyas en d'autres
parties dé la contrée, spécialement dans le culte de divinités inférieures
telles que les Ammàs ou mères de village, et les gardiens des bornes.
« 5» Le plus fort argument qui peut être [troduil à l'appui de l'origine
prédravidienne des Pareyas et castes similaires consiste en cette circons-
tance que le nom national des Tamiliens, Malayalis, Kannadis, etc., leur
est refusé par Vnsiis loqunuU des langues dravidiennes et attribué exclu-
416 2 NOVEMIIIIK 11)05
sivciiu'nl aux liantes caslos. tjuand une personne est appelée Tuniirnn ou
Tamilien, cela signilie que ce n'est ni un Brahmane, ni un membre de
quelqu'une des castes inférieures, mais un Soudra dravidien. Il est entendu
que ce nom indique, non la langue parlée par la personne en question,
mais la nation à laquelle elle appartient, et comme les basses castes ne
sont jamais désignées par ce nom national, cela semblerait impliquer
qu'elles n'appartiennent pas à la nation, bien qu'elles parlent sa langue,
mais appartiennent, comme les IJrabmanes et les Mahométans qui parlent
tamil à une race différente. »
« Les circonstances et arguments qui viennent d'être allégués en faveur
de l'origine non dravidienne des basses castes sont indubitablement d'un
grand poids, mais je vais montrer qu'elles ne sont pas parfaitement con-
cluantes et qu'elles sont dans une certaine mesure contre-balancées par
des considérations que l'on peut apporter de l'autre côté. »
« 4° L'argument qui est tiré de la condition servile des Pareyas est
insuffisant pour établir la conclusion, car il est certain qu'il y a, en diverses
parties du monde, bien des esclaves qui ne diffèrent point de leurs maîtres
par la race s'ils en diffèrent par la condition.
« 2" Les traditions qui ont été mentionnées plus haut concernant la po-
sition honorable occupée autrefois par les Pareyas n'établissent pas le
point en question. A supposer qu'elles reposent, et ce n'est pas ce qu'il
semble, sur un fondement historique, elles prouvent non une différence
originelle de race, mais seulement l'ancienne liberté des Pareyas, et la
respectabilité de leur rang social avant leur réduction en esclavage. » •
(( 3° La circonstance que le groupe entier des basses castes comprenant
les Pareyas est séparé des hautes castes par les marques d'une distinction
sociale et qu'on lui dénie les noms nationaux de Tamiliens, Malayalis,
etc., est un fait auquel il faut reconnaître un grand poids; mais si cet
argument est très fort, il ne semble pas être absolument concluant, car il
est du génie de la législation hindû de punir la pauvreté par des incapa-
cités civiles et sociales et l'orgueil des hautes castes pourrait naturelle-
ment prendre la forme d'une appropriation exclusive même du nom
national. Nous trouvons un usage de termes analogue dans les S'âstras
sanscrits dans lesquels les nations qui sont considérées par ces Sastras
comme Chalria d'origine, par exemple les Yavanas et les Chinas, sont
appelées Mléchchas, non en conséquence d'une différence de races, mais
seulement en conséquence de leur abandon des rites brahmaniques. I! y
a un parallèle encore plus étroit dans la loi de Manou, à savoir que les
brahmanes qui se sont établis dans la contrée dravidienne, probablement
forêt sauvage au temps de Manou, doivent être regardés comme Mléch-
chas. »
« 4" Il ne semble pas qu'il y ait quoi que ce soit, dans le physique des
Pareyas, dans leurs traits ou dans la couleur de leur peau, qui nous
permette de supposer qu'ils appartiennent à une race différente de leurs
LOUIS LA Pli:yLK. I.E PUUBLKMK ANTMlOil'dLiMÎIgLE DES l'ARlA> -417
viùsins de haute caste. I.eiir teint relaliveiin'nl foiii/- a comliiil quelques
personnes ;i les supposer descendus d'une race de Négritos al •origines,
mais cette hypotlx-se paraît inutile. Le leint sombre, non seulement des
Pareyas, mais encore des l'oulaya de la contrée .Malayalam, une caste
encore plus noire, peut (itre rapporté h ce qu'ils sont continuellement
employés depuis une longue période en iilcin air, exposés à toute la
force du soleil vertical. Si les Fellah ou laboureurs et les Bédouins ou ber-
gers nomades d'Egypte sont admis comme Arabes de pur sang, malgré
le brun foncé de leur teint, il semble inutile de supposer que les Pareyas
qui travaillent sous un soleil plus brûlant que (-elui dhlgyijle sont d'une
race dillerenle du reste des Dravidiens dans le but d'expliquer C(»mmenl
leur leint est d'un degré plus foncé. Dans aucun pays du monde, on ne
voit des traits et des couleurs de visage aussi variés qu'aux Indes, mais
la caste, Irllr (ju'elle existe aux Indes, et spécialement telle qu'elle s'a[)-
plique aux basses casti's, est inconnue dans tout autre pays du monde.
Sépart'z pour toujours de la société de leurs conq)ali'iotes une classe de
liavailleuis ou de serfs agricoles; interdisez-leur les unions avec les
familles de conditions plus aisées; faites-les vivre dans des huttes misé-
rables, rejetées à longue distance du village habité par des fermiers res-
pectables; obligez-les à travailler dur toute l'année en plein airdans un
climat interlropical, dans un pays où le soleil passe deux fois par an juste
au-dessus de la tète; prévenez toute possibilité pour eux de s'élever à
une meilleure condition ou d'obtenir un emploi sédentaire à l'ombre'; pro-
hibez l'éducation, ne leur payez pas de gages, nourrissez-les parcimo-
nieusement, et habillez-les encore moins; encouragez-les à s'enivrer et à
manger de la charogne, interdisez aux femmes de s'habiller, même au
simple point de vue de la décence; traitez-les, en* un mot, pendant vingt
siècles, comme les Brahmanes et les hautes castes dravidiennes ont traité
les Pareyas et autres basses castes, et il ne sera pas nécessaire d'avoir
recours à la théorie de leur mélange avec une race primitive d'Africains
ou de Négritos pour expliquer leurs traits grossiers, leur petite taille et
leur peau noire. .Malgré tout cela si les Pareyas et les l'ouleyas en lant
que classe sont plus noirs ([ue n'importe ([uelle autre classe dans le sud,
nous trouvons parmi eux une tout aussi grande variété de couleur que
parmi les autres classes d'Hindous, et accidentellement, nous pouvons
remarquer des teints aussi clairs que ceux des hautes castes accompa-
gnant une grande régularité de Irait. (Juand les l'areyas ont acquis une
position d'aisance et de confort et ipie les Soudras ont été ruinés et obligés
de travailler dur au soleil tout le jour, leur carnation est luodifiée aussi
bien que leur position sociale et on dit qu'en quelques générations, le
Soudra devient noir, et le Pareya devient clair. »
« J'admets que les traits des Pareyas dillV-rent quelque peu de ceux de
la caste plus haute de celle de V'ellalas ou cultivateurs, comme les traits de
toute caste aux Indes dilfèrenl de ceux quelque autre caste. Mais il n'y a
pas de dilîérence entre le cultivateur et le Pareiya pour la forme de
de leur tète. Non seulement par leurs particularités de traits et de vét-?-
soc. d'anthrop. 1905 -^
448 2 novemurk 1*.H)5
nu-nts, mais encore par la loiine cl.' leurs I.Hes, nous sommes t^énérale-
nient en étal de distinguer les Tamiliens uu les Telougous, des Maho-
métans, Afghans ou Turco-Tarlares. Mais si l'on regarde la forme des
têtes seules, et qu'on laisse de côté le teint et les traits il est impossible
de distinguer un Tamilien, ou un Dravidien de haute caste d'un Pareya
ou de quelque autre membre des basses castes. La dilîérence de physio-
nomie est de peu ou de point d'importance dans celte (jueslion, car il est
notoire qu'il y a des castes qui procèdent de la même origine à la
fois dans la physionomie et le caractère, aussi fortement que s'ils habi-
taient des contrées différentes et éloignées. Les castes de soldats ou de
voleurs des Kallas et des .Maravas, diffèrent aulanl des hautes castes par
leurs ligures que les Pareyas et dans leurs habitudes d'esprit plus encore;
néanmoins ils prétendent être considérés comme de purs Tamiliens. »
« 5» L'unité essentielle de tous les dialectes dravidiensestun argument
pour l'unité de race, les basses castes comprises. L'origine mélangée des
Hindous des provinces de Gaura peut être conjecturée, non seulement
d'après des renseignements historiques, mais encore par un examen des
éléments qui composent les langues vernaculaires du Nord. Dans ces ver-
naculaires, nous pouvons signaler l'existence de deux courants, l'un Aryen
et l'autre non Aryen luttant l'un contre l'autre. Mais dans aucun dialecte
des langues dravidiennes, on ne peut découvrir de telles traces dequelque
idiome étranger d'un caractère différant de la masse de la langue. Toutes
les formes grammaticales de première importance dans tous les dialectes
dravidiens se tiennent ensemble et forment un système harmonieux. Si les
Pareyas et les autres castes serviles étaient supposés d'une race différente
des Dravidiens et seuls descendants survivants des vrais aborigènes, il
serait nécessaire de regarder les tribus montagnardes isolées, les Todas,
les Gonds, etc., comme des restes de la même race d'aborigènes, et si celte
théorieétait correcte, lelangagedecestribusisoléesdevrait se présenteravec
des différences essentielles du Telougou et du Tamil. Au contraire on n'y a
pas découvert de différences essentielles dans la structure grammaticale ou
dans les noms d'objets les plus importants. Les dialectes Gond, Ku,Tudaet
Kola appartiennent évidemment h la même famille que les langues dravi-
diennesplus cultivées. Il faut remarquer aussi que, bien que les Pareyas et
les autres castes serviles de la plaine vivent dans deshameaux particuliers
à une distance considérable des villages dans lesquels résident leurs
maîtres des hautes castes, il n'y a pas trace parmi eux d'aucune diffé-
rence idiomatique de mots particuliers ou déformes particulières de lan-
gage. La seule difïérence apparente consiste dans leur prononciation
incorrecte des mots dérivés du sanscrit, ce qui tient à leur défaut général
d'éducation, et dans bien des cas cette différence môme n'existe pas. )^
<( Donc, en résumé, la supposition que les basses castes des provinces dra-
vidiennes appartiennent à une race différente des hautes castes, m'apparaît
comme insoutenable. Il paraît plus certain que toutes les tribus indigènes
trouvées par les Aryens dans le sud de l'Inde appartenaient en principe
1..M Is I.Vl'hlijIK. — I.K l'ItuItl.KMK Wl'HltMl'nl.uilInl K UK^ I'AHIa-. il'.l
à une seult.' cl intMue race. Il est assez proljaljleciue les Uravidiens étaient
divisés en tribus avant l'émigration aryenne et que les distinctions, non
seulement entn> riches et |)auvre-:, mais aussi entre maîtres et esclaves,
étaient déjà en usage parmi eux. Ces distincliuiis doivent avoir formé le
fond du système îles castes qu'élevèrenl ceux (|ui leur apportaient la civi-
lisation hralimanique et(|ui fut cuiiii'' point |)ar point ;\ l'image du système
des castes de l'Inde du .Nord. >'
OusKRVATlitNS.
\ la suite de mes recherches sur place, que j'ai exposées sommairement
a l'Académie des sciences' et sur lesijuelles je reviendrai avec plus de
détails, je pense pouvoir démontrer la conclusion opposée ;i celle de
C.aldwell. Je n'ai donc point d'objections à faire i\ la première .séi-ie d'ar-
guments, celle qui conclut à la dilTérence de race entre les Parias et les
vrais Dravidiens ; je remarque seulement, avec l'auteur, que ces faits ou
raisonnements sont de très inégale valeur. Dans la série contraire, j'cC-
cepte, en conséquence, les n"* 1 et 2, qui, précisément, critiquent les
moins valables des premiers arguments. Sui; le 3*^, je suis encore du même
avis que Caldwell : le fait que les hautes castes, qui s'appellent de noms
dravidiens, refusent ces noms à leurs l^arias, est à la fois très important
et non péremploire.
Le paragi-aphe 4 est le plus directement anthropologique. Déjà par un
examen systématique des castes en question, nous avons vu une indica-
tion, sinon une preuve^ de dilTérence ethnique. Caldwell paraît avoir été
très fi'appé de ce que la forme de In tète est toujours la même ; il désigne
ainsi, évidemment, l'indice céphali(|ue horizontal; toutes ces populations,
en effet, sont dolichocéphales ; mais elles ne sont pas uniformément doli-
chocéphales ; et nous avons vu qu'il y a variation de l'indice céphali(jue
en fonction du rang social, llisley ayant déjà mis en évidence, aux Indes,
en général, la variation de l'indice nasal dans les mêmes conditions, nous
avons retrouvé ce fait entre les castes dravidiennes. Or, il est difficile de
voir dans ces caractères une adaptation physiologique à des conditions
dilTérentes, comme il est permis de le faire ijuand il s'agit de la taille ou
de la couleur de la peau.
L'étude des tribus de la montagne, rapprochée de l'étude de ces castes
de la plaine, m'a fourni, il me semble, des preuves démonstratives de la
dilVérence de race postulée ici.
Mais il me faut tout de suite répondre au dernier paragraphe, où
Caldwell, sur son terrain îi lui, sur le terrain philologi<jue, déclare que
« l'unité essentielle de tous les dialectes dravidiens est un argument pour
l'unité de race, les basses castes comprises. »
[1 importe, pour la critique du raisonnement et l'interprétation des
* L. Lapicque. Recherches sur l'ethnogénie des Dravidiens, Comptes rendus île
l'Acadèinit des Sciences, juin ft juillet l'.iUô.
'»-2() Û NuVKMI.Itl 1905
faits, {l'introdiiire une distinction très importante. Caldwell confond dans
un môme groupe ios castes scrviles de la plaine et les tribus monla-
gnardes, et cet ensemble représente pour lui au môme titre les aborigènes
hypothéticjues. Mais nous verrons que dans les tribus montagnardes,
il y a de tout; et c'est le cas général. En ethnologie, on a commencé,
presque toujours, par considérer les montagnards d'une région comme
représentants du type primitif de la population et. ensuite une étude
précise a montré, dans des vallées voisines^ des types divers et parfois
opposés ; chacune des vagues successives d'invasion peut avoir laissé là
un témoin. Le Caucase, pour l'Europe Orientale, est un bel exemple (Je cette
évolution dans les idées. Dans le sud de l'Inde, pareillement, constater
qu'une tribu de montagne, actuellement bien isolée, parle une langue
dravidienne, n'est point trouver une preuve que les premiers habitants
étaient dravidiens; il faut déterminer d'abord à quoi cette tribu de mon-
tagne se rattache. Les Todas, par exemple, sont incontestablement
dravidiens ; mais cela ne tend nullement à démontrer qu'il n'y a pas eu
de Frédravidiens, puisque rhypothèse du rrédravidien est fondée sur
l'examen d'autres groupes ethniques.
Reste donc l'argument : dans ces groupes ethniques mêmes que certains
phénomènes sociaux tendent à faire considérer comme descendants d'une
race plus ancienne, on ne trouve aucune forme verbale indiquant une
langue différente de la langue actuelle.
D'abord, il y aurait peut-être quelques réserves à faire sur le caractère
absolu de cette négation. Chez les Pareyas et les Palier du pays tamoul,
que Caldwell a plus spécialement étudiés, il peut fort bien en être ainsi.
Mais je me demande si l'enquête a été suffisante pour les Poulayer du
Travancore. J'ai déjà signalé le mot Ckerouma qui sert à désigner la caste
homologue dans le Malabar britannique et qui est employé, m'a-t-on dit,
par les Poulayer de Travancore pour désigner leurs enfants. Les mêmes
personnes qui m'ont fourni ce renseignement, Européens de race pure nés
là-bas ayant passé toute leur vie dans la région, parlant couramment le
Tamoul et le Malayalam comme leur langue maternelle, m'ont affirmé
que les Poulayer avaient, entre eux, un langage inintelligible pour les
Malayalis. Il y aurait là des recherches intéressantes pour un philologue.
Mais même si le fait n'est pas exact, s'il ne s'agit que d'un dialecte, d'un
patois essentiellement dravidien sans mélange de formes verbales plus
anciennes, comme le pense Caldwell, je ne vois pas ce que cette unité
fondamentale de langage prouverait par rapport à la question posée.
Est-il donc sans exemple que la langue des vaincus disparaisse devant
la langue des vainqueurs? Mais c'est la règle, au contraire. Je vais en
emprunter une démonstration à Caldwell lui-même :
« Les Aryens étaient un peuple si dominateur, avec une si haute con-
ception de leur origine divine et de l'excellence de tout ce qui leur appar-
tenait que partout où ils se sont établis, ils ont tout organisé autour d'eux.
« Il n'y a pas d'exemple ni de souvenird'un langage aborigène gardant
son terrain en face d'une occupation aryenne. Dans l'Inde du Nord et de
DISCUSSION 421
r< )uesl. ainsi que (lans lo lieiigale et l'Orissa, les anciens vernaculaires-
ont si complf''li'intMil (iisparii que c'est maintenant un pttint discuté de
savoir s'il y en a (juelques traces survivant dans la structure ou le voca-
bulaire de la langue des colons aryens ». Caldweil, op. cit., p. 576, et
plus loin, p. 578, je trouve la phrase suivante :
'< La langue des habitants priuiilifs de Ceylan a disparu laissant
extr»}menient peu de trace; même la langue parlée par les Veddas a été
reconnue comme étant essentiellement aryenne ».
Les Veddas sont bien considérés, pourtant, comme représentant une
race antérieure à la colonisation aryenne; on a môme énormément exa-
géré l'ancienneté et surtout la pureté de leur type primitif.
Si donc les Aryens ont, en fait, détruit des langues non aryennes chez
les peuples qu'ils ont soumis, pourquoi les Uravidiens n'en ont-ils |)as
fait autant'* Les Dravidiens, tels qu'ils m'apparaissent, semblent tout
aussi dominateurs que les Aryens, quoi([ue par des moyens différents.
La philologie ne fournit rien en faveur de l'existence des Prédravidiens,
mais elle n'établit rien en sens contraire.
Ainsi, la distinction de race que nous avons vu s'esquisser entre les
hautes et basses castes dravidiennes peut s'accorder avec les données de
tout ordre dont se compose l'ethnologie. Mais elle n'est pas démontrée. La
démonstration nécessaire est fournie par l'étude systématique des tribus
montagnardes et de leurs relations avec les castes de la plaine.
Discussion
.M. Adolphk Bloch. — Notre collègue, M. Lapicque, conclut de ses
recherches, sur l'ethnogénie des Dravidiens actuels, que ceux-ci ont eu des
ancêtres plus noirs qu'eux-inèm»;s, mais distincts des Négritos dont l'in-
dice céplialique est ditférent. De mon côté, je rappellerai que je me suis
également occupé de l'origine des Dravidiens dans une communication à
la Société en 1902, à proposde l'exhibition, au .Jardin d'acclimation, d'un
certain nombre d'Indous de la côte du Malabar*.
Mes conclusions sont les mêmes que celles de M. Lapicque, en ce sens
que j'attribue des ancêtres noirs-négroides aux Dravidiens, élimination
faite des Négritos que je n'ai d'ailleurs pas mentionnés dans ma commu-
nication.
Mais notre collègue cx[tli({ue l'origine des Dravidiens en disant :
l"que \e-i pn'draridien.<i étaient de type nègre; 2' que les prolodruvidiens
appartenaient au type blanc ; 3" ([ue ceux-ci sont venus dans l'Inde avant
les Indo-Aryens, et se sont mél.mgés aux noirs réduits par eux en escla-
vage, d'où l'origine de la population di'avidienne actuelle'.
Ici, nous nous séparons de M. Lapi(-ijue lorsqu'il s'agit d'interpréter le
' Bloi;ii. — Quelqutis remarques sur l'anllimpolo^'io d<s Fndous oxlnhùs au Judin
d'acclimatation. Bull. Soc. Anl/tr. lOûâ. p. 780-787.
'Note présentée à l'Académie des sciences. Séance du 10 juilkt l'JOi.
422 Ifi I.KCKMItllK fÛO")
modo (le formation ilf la laci' tiravidienue, car nous ne croyons pas au
mélange. En eiïel, commtMit M Lapiccjin' a-l il f'iudii? l'elhnogénio des
Dravidieiis? Parla m<Mno mi'lliudc antlirupolo^nquc (juc j'ai em[)loyt';c dans
le cas actuel, et (juc j'emploie toujours Itjrsfpie je reclierclie lf*s origines
des diverses races humaines, c'est-à-dire en étudiant certains caractères
anlhropolo^Mques que j'ai désignés sous le nom de cnracléres ataviques,
parce (juils rajipellent le type de la race ancestrale.
.l'ai particulièrement signalé sous ce rapport le rellet jaunâtre de la
sclérotique, la grosseur des lèvres, la pigmentation de la muqueuse buc-
cale, et la gracilité du mollet chez les Indousdu Jardin d'acclimatation.
M. Lipicque s'est surtout occupé de l'indice nasal, de l'indice cépha-
lique, de la frisure des cheveux, de la taille et des proportions du corps,
et c'est ainsi qu'il a reconnu qu'il existe encore dans l'Inde d'assez nom-
breuses tribus véritablement négritiques, dont la survivance vient con-
firmer la thèse que j'ai soutenue, c'est-à-dire l'origine négroïde des
Dravidiens, sans qu'il soit nécessaire d'y adjoindre un mélange quel-
conque.
8U« SÉANCE. — 16 Novembre 1905.
Présidence de M. Sébillot.
La Société a veçvi nno circulaire annonçaut que la X1II° session du Congrès
international d'anthr()}tologie et d'archéologie préhistoriques se tiendra à
Monaco, sous le haut patronage de S. A. S. le Prince Albert P"", du 16 au
21 avril 190G. Ci-joint la liste des questions proposées par le Comité:
PREMIÈRE l'ARTIE
Le Préhistorique (fans la région de Monaco.
1^ (jrotte des lîaoussé-nousso (Stratif/raphic et iialéoip'aphie : paléontolof/ie,
anthropologie et archéologie). — Le type luiiuain de (irimaldi (négroïde) et
ses survivances.
2" L'épopée néolithique.
3" Les enceintes dites ligures.
DEUXIÈME PARTIE
Questions générale?,.
1" Kluile (les [tierres dites utilisées nu travailléesauxteinps préquarternaires.
2" Classilication des temps quaternaires au triple point de vue de la stratl-
graphie^ de la paléontologie et de l'archéologie.
•3° Docimients nouveaux sur l'art de;!- f^avernes.
PAPILLATLT. (jrEsTlilNNAlIlE DE SOCIOLOGIE i-2'A
4" Etuilt' fies U'iups iiiti'niit'iliaircs fiitr»' If |iair'itlitlii(|iic d le néolithique.
5° Oi'igiiif lit' la rivilisation iit'(ilillii(|in'. I.cs pn'iiiicros (('rainifiiH-s.
(i« Géographii' des (Mvilisations de Mallstalt et de La Tciie.
7" Los civilisaliniis prolo-liistoriquos dans les deux bassins de la Méditer-
ranée (Egéen, Minuen, Mycénien, etc.).
8° Les industries de la pierre en Asie, en Arritiin- et en Amérique.
9" Unilication des mesures anthropologiques.
Commission pour la rédaction d'un nouveau
QUESTIONNAIRE DE SOCIOLOGIE
M. Papiij-ailt expose que la seconde édition du questionnaire de sociologie
est sur le point d'être épuisée et qu'il serait regrettable qu'on procédât à sa
réimpression sans lui faire subir des modilleations importantes. Il ne faudrait
pas interpréter cette proposition comme une critique de l'œuvre accomplie par
l'ancienne Commission et en particulier par Letourneau. Elle a rendu de très
grands services à l'anthropologie ; les réponses qu'elle a suscitées et qui ont
été publiées dans nos Bulletins en sont la preuve, et cependant elles ne repré-
sentent qu'une bien faible part des travaux que ce questionnaire a suggérés. Il
a attiré l'attention des voyageurs sur des problèmes qu'ils ne soupçonnaient pas
et les a lancés dans des recherches qui n'auraient pas été entreprises sans lui.
Son iniluence a été ainsi beaucoup plus grande qu'on ne pourrait le soupçonner
au premier abord. Combien de rebilions de voyage n'ont pas revêtu la forme
de réponse et doivent pourtant k ce guide les meilleures de leurs observations!
Mais il a vieilli, précisément parce que son action a été féconde. Les ques-
tions qu'il posait en ont engendré d'autres, auxquelles il n'avait pu songer;
les problèmes se sont élargis et précisés ; des coups de sonde heureux ont
ramené des profondeurs du monde social des formes insoupçonnées dont il
faut poursuivre l'étude. Siu* toutes ces nouveautés, il faut attirer l'attention
des observateurs et diriger leurs rerherehes suivant une méthode siire et autant
que possible uniforme. C'est là un travail difficile pour lequel une Commission
est nécessaire. La Société entière est d'ailleurs invitée à y collaborer, chaque
membre pouvant adresser à la Commission une liste des questions qui lui
semblent les plus intéressantes.
-MM. Capitan, Yves Guyot, Hervé. Mauss, Papillault, Sébillot, Verneau,
Vinson. Zaborowski sont désignés par la Société.
'r2i i«i N.iVKMHiu-. 1905
RAPPORT PRESENTE AU NOM DE LA COIVIiyiISSION DU PRIX FAUVELLE'
l'Mt .M. l'hlEN.NK IIaHAHI).
La commission chargée d'attriliufr le prix Fauvolle. en 1905, s'est
trouvée en présence de trois ouvrages très différents. Ce sont :
l'n travail manuscrit de M. Paul Wintrebert, « Sur les relations du sys-
tème nerveux avec les processus embryonnaires. >'
Un ouvrage de M. Eug. Bernard-Leroy, sur le Langage,
l'n ensemble de mémoires ayant trait aux névrites périphériques.
La commission a pensé que, pour diverses raisons, ces dernières publi-
cations ne répondaient ni h la lettre ni à l'esprit de la fondation; elles les
a écartées de prime abord.
Elle restait donc en présence du travail de M. Wintrebert et de celui de
M. Eug. Hernard-Leroy. La comparaison entre eux était rendue diiilicile
par leur dissemblance. La commission a où. tenir compte des qualités
générales, mettant en balance le degré d'originalité d'une part, cl d'autre
pari la portée des conclusions.
A ce point de vue, le travail de M. Winirebert se place incontestable-
ment au premier rang. M. Wintrebert a repris à pied d'œuvre la question
si controversée de l'intervention du système nerveux dans les processus
morphogéniques et histogéniques, ainsi que dans les phénomèmes de régé-
nération. Il l'a reprise par la voie longue et diflicile de l'expérimentation
sur les organismes très jeunes. Le manuscrit tout entier repose sur plu"
sieurs séries d'expériences se contrôlant les unes les autres, corroborées
en outre par l'examen hislologique, seul capable, en dernière analyse,
d'affirmer que les sections ou destructions ont effectivement libéré l'orga-
nisme de l'influence de l'axe cérébro-spinal parfois à peine différencié.
L'auteur est ainsi conduit à conclure que le développement embryonnaire
d'un individu privé denerfsdepuis la plus lointaine origine ne se comporte
pas autrement qu'un individu normal du même Age. Celte conclusion est
complétée par une découverte intéressante, celle de l'existence d'une sensi-
bilité primitive, indépendante des voies nerveuses, à localisation ectoder-
mique. Celle e.xcilibabililé cutanée permet de concevoir l'existen'^e, avant
toute intervention nerveuse, d'éliuiles corrélations, associant intimement
entre elles les cellules pour i'édilicalion de l'embryon. — 1^'indépendance
des processus de mélamorphose el de régénération vis-;i-vis du système
nerveux est également mise en lumière par un nombre considérable
d'expériences.
De ces faits, importants en eux-mêmes, découlent d'importantes consé-
quences. Sans insister sur la conlirmation que reçoit la Ibéoiie de l'origme
* La coiiimissioij élait romposôo iju MM. Denik^r, président, l'apiilanlt, Anthony,
Loisel et Rabaud, rapporteur.
KTIK.NNK UAIIAlIl. — ItVl'I'OliT MK LA i;n.\IMI»lnN IH nt|\ FAL'VELI.K 425
conlrale ilos iiorl's, nous relèvt'fons t\ue l;i thèse de rinlhicnce du syslèine
nerveux sui' la piuduclion des sli^inales de la dégt'iu'Tescence se trouve
contredite et compromise. Ajoutons enlin (|ue l'existence de nerfs tro-
phiques ne paraît pas conciliable avec la cicatrisation lapidc des plaies
chez les individus énervt's, ni avec les régénérations successives d'organes
rt-ndiis indépiMidanls de l'axe céréhro-spirial.
("..■t iiii|iiiitanl travail, (-lairement exposé, accompagné de schémas et
df planches phutitgraphi(|ues est une (cuvre purement personnelle,
résultant d'un elViut soutenu durant plusieurs années.
L'ouvrage de .M. Eug. Bernard-Leroy tient davantage de l'érudition que
de la recherche originale. Celle-ci, cependant, n'est pas absente et l'on
sent bien que l'auteur l'réiiuente assidCimiMil les services de la Salpèti"ière.
il ne nous apporte pas sans doute beaucoup de faits nouveaux, mais il a
contrôlé la plupart des faits connus. C'est l'étude psychologique du
langage à ses divers points de vue que M. Eug. Bernard-Leroy a abordée
et traitée presque complètement. Il fait appel à tous les instruments de
recherche que la science moderne met à la disposition du psychologue ;
il s'aide de la logique, de la grammaire et en particulier de la sémantique
utilisée au point de vue des causes intellectuelles ([ui ont présidé à la
transformation de nos langues; il s'aide également des phénomènes
pathologiques de divers ordres, aphasies, certains délires. Tous • es moyens
concourent à l'élude des signes du langage, de leur perception et de leur
intelligence; et cela conduit à examiner les [)hénomènes d'élaboration
préalable du langage, la façon dont l'individu pense les paroles et, d'une
faeon plus générale, les signes utilisés pour le langage.
A cette élude fait logiquement suite l'élude psychologique de l'émission
des signes.
L'auteur constate la liaison serrée qui existe entre les systèmes verbaux
d'images auditives el kineslésiiiues, entre la parole entendue et la parole
répétée, entre la parole inlérieure et l'aniculation inlérieure. A un point
de vue plus géni'-ral, l'auteur s'efforce de placer la fonction langage dans
son cadre normal, dans ses connexions avec Ten^enible des phénomènes
psychologicjues ; il montre par quelles racines profondes le langage tient
à tout le mécanisme psychologique.
C'est en somme une fort intéressante mise au point d'un»; grande
question, faite avec le concours de l'observation personnelle.
Néanmoins la contribution originale ne tient pas une place prépondé-
rante. Aussi la commission, tenant compte de la valeur intrinsèque de
l'ouvrage et de sa valeur relative, touten lui accordant une partie du prix
l-'auvelle. a cru devoir marquer une diiïérence entre cet ouvrage et le
précédent ; elle [iropose donc de diviser le prix en donnant :
A M. Winlreberl, une somme de 1 .400 fr.
A M. Eug. Bernard-Leroy, une somme de ^)0n —
4:26 16 NovKMiuiK IU05
CONTRIBUTION A L'ETUDE DE LA GEOGRAPHIE ANTHROPOLOGIQUE
DU DEPARTEMENT DU RHONE
I'au mm lks I)"> HorcHEHEAi ET L. Mavet. (le Lijon.
Notre but n'est pas (l'cntrepreinli-e ici une étuih; antliropologique et
ethnique de la population du département du Rhône, mais simplement
d'apporter un certain nombre de documents qui pourront être utilisés un
jour pour celte étude. L'ne partie de ces documents a été recueillie par
nous personnellement dans les différents cantons du département lors de
la tournée du conseil de revision : l'autre partie provient de recherches
statistiques faites avec les relevés ofïiciels ot portant sur une période de
temps très étendu^, pour réduire au minimum les causes d'erreur prove-
nant de l'imperfection de ces dernières publications.
Exception faite pour une faible étendue comprise dans les vallées de la
Saône et du llhùne, le déparlement du Rhône représente une région
montagneuse, constituée par une série de fragments de la chaîne des
Cévennes : les Monts du Lyonnais et du Reaujolais
L'érosion a découpé plus ou moins profondément les terrains cristallins
et calcaires de ces montagnes, creusant des vallées plus ou moins étroites
où coulent l'Azergues, la Brévenne, le Gier, l'Yzeron, laGrusne, etc. et où
ruissellent une infinité de torrents et de ruisseaux.
Dans ces vallées, sur ces montagnes, la population est nombreuse. En
lyOI : 843.179 habitants, pour une superficie de 285.934 hectares. Il faut
se hâter de dire (jue l'agglomération lyonnaise entre dans ce chiffre pour
plus de 500.000 habitants- et contribue à élever considérabiemenl la den-
sité do la population par kilomèire carré. Celle-ci était :
En 1801, ûe <j6,5 avec une population de 299,390 habitants.
En 1851, de 201 — 574,745 —
En 1901, de 294,9 — 843,179 —
Une série d'autres centres urbains y contribuent aussi : Villefranche-
sur-Saône (14.793 h.) Tarare (12. 334 h.) (Jivors (12 132 h.) Amplepuis
(7 097 h.) Cours (5.493 h ) Thizy (4.797 h.) Bourg-de-Thizy (4.667 h.), etc.
Tout autour de Lyon, une ceinture de communes non moins impor-
tantes : Villeurbanne (29 220 h.) Caluire et Cuire (10.926 h.) OuUins
(9.343 h.) Saint-Fons (4.983 h.) La Demi-Lune (4.056 h.) La Mulatière
(3.628 h.) Pierre-Bénite (3.161 h.) Sainte-Foy (3.106 h.).
Il nous a semblé y avoir quelque intérêt à rechercher quelle était
dans le déparlement du Rhône la répartition de ces caractères ethniques
importants : la taille, l'indice céphalique, la couleur des yeux.
Ce senties résultats que nous avons obtenus qui font l'objet du présent
mémoire.
BOUCHEREAl Kl MAVET. — KTri>K l>K I, A CKcM'.ltMMlK ANTHHOl'OLttlilyL K
miir
Nous avons pu relever l;i taille de Ions les jt'uncs ,i;ens examinés aux.
séances du Conseil de levisimi du di'parli'nient du Kliùm' rn l'.)(>5, dans
les divers cantons. Us fournissent une moyenne tli' taille de 1 m. 660
pour l'ensendjle du dépailemcnt. I^es six arrondissements de la \ ille
de l>yon dounnU une moyenne de 1 m. 665, sensiblement plus élevée
(pie la moyenne des 21 cantons extra-urbains, qui est de 1 m. 657.
Le détail en est donné par le tableau suivant :
Tableau tiuii(/ua/if h' ilctail de la moyenne de la faille dans- le dé/iarfement
du Rhône.
I. . . . \'ii.i.K iiK Lyon :
CLASSEMENT
ARRONDISSEMENTS
TAILLE MOYENNE
1 I I« Bellecour-Perrachc 1,674
Vie Brotteaux l,G67
Vo Saône (Kive droit.') 1.660
m» Cuillotiére 1,658
IV" Croix-Rousse 1,658
I« Terreaux 1,655
II.
Autres Cantons :
Classement Cantons
Taille innypnno
C.lassoinont Cantons
Taille moyenne
1. . Bellevillc. . .
1,680
13. .
('.(iMiirii'u . . . .
1 ,652
o
Heaujou . . .
1 ,675
14. .
Tarare . . . . .
1,652
3.
Neuville . . .
1,670
15. .
St.-Symphorien-
4.
Anse
1,670
s.-Coise. . .
1,651
5.
Mousols . . .
1 ,670
16. .
VMiif.^neray . .
1.650
6.
Villorranrhc. .
1,668
17. .
Aiiiiili'piiis . , .
1,650
7.
Limoucst. . .
1 ,666
18. .
Nillcnrhanne .
1,647
8.
Cilvors ....
1,661
10. .
MornanI . . .
1,647
9.
Thizy
1,660
20. .
Lo Bois d'Oingt
1,6.38
10.
" LWrhresIc . .
1 ,660
21. .
St. -Laurent -de -
11.
Lainuro . . .
1.680
Chaniousset.
1.638
12.
St-(ionis-Laval
1,654
Il peut y avoir quelque intérêt à compléter ce tableau par le suivant,
indiquant la fréquence des grandes tailles dans le départennent du lUione,
par cantons ;
i-28
H) M IV KM HUE l'.>05
/'/■(t/ti)/-/ lu/1 (/fs ;//(iiii/fx f(ii(/r.s : l m. 7:i cl ait i/t'là.
I. . . . Vii.LK DE Lyon.
CLASSEMENT
1
2. .... .
ARRONDISSEMENTS
. . Il" Bcllccoui-I't'iraclic. . .
. . I""" Terreaux
PROPORTION
pour tuât examinés.
... 20
... 17
3.
. . V|o Brotlreaux
15,3
4
. . Ili" (iiiillotièro ....
14,5
5
6
. . V'e .Saône (Hive droite). . .
. . VI« Croix-Housse
... 12
... 11
II. . . Autres cantons.
Classoment Cantons
l'rop. pour iOO
Classement Gantons
Prop. pour 100
1. .
Anse
24,0
12. .
L'Arbresle. . . .
13
2. .
Linionest. . .
19,7
13. .
St.-Sjmphorien-
3. .
Belleville. . .
19
s. Coise. . . .
12
4. .
Auiplepuis . .
17,2
14. .
Condrieu ....
11,8
5.
Beau) eu . . .
16. 6
15. .
Givors
11,7
6. .
Lainure . . .
15,9
10. .
Villeurbanne . .
11,4
7. .
-Neuville . . .
15.7
17. .
St.-Genis-Laval .
11,3
8. .
Villelranche. .
15,6
18. .
Monsols ....
9.2
9. .
Thizy
15,1
19. .
Mornant ....
7,9
10. ,
St. -Laurent- de
-
20. .
Tarare
7,2
Ciiainousset.
15.1
21. .
iioisdOingt. . .
4,2
11. .
Vaugnerav. .
13.3
Les petites tailles (au-dessous de 1 m. oi) sml assez rares dans le
département. Pour la viHe de Lyon la proportion pour cent des petites
est de 4 dans le 1"'' arrondissement. Pour les cantons extra-urbains, la
môme proportion maxiina est de 7 dans le canton de St-Laurent-de-
(Ihamousset; les cantons de Limonestet du Bois d'Oingt viennent ensuite
avec 5 0/0. Certains cantons n'ont pas présenté déjeunes gens ayant une
taille inférieure à 1 m 54 : ce sont ceux de Belleville, Thizy, et Monsols.
Compararaison de In taille et du poids. — L'usage est aujourd'hui établi
d'apprécier 1 1 valeur physique des conscrits par la comparaison du poids
avec la taille. L'excès des décimales de la taille sur les chiiïres du poids
qui sert généralement de comparaison, est un procédé arbitraire et man-
quant de précision; il faut considérer le rapport centésimal du poids à
la taille.
Pour une bonne conformation, ce rapport doit être au minimum de 35.
C'est-;\-dire qu'il faut en moyenne 35 kilogrammes de poids pour 1 mètre
de taille.
DOl'CHEnEAU ET MAYET. — KTIDE DE LA r.KdilllAPMIK ANTlIRitPOLôlîrOlE -420
A Lyon, dans le II" arrondissemiMif, nous trouvons une taille nioy(M)nc
lie 1,G74 et un poids moyen de .')<>. nOO gr., ce (jui correspond ;i l'in-
dice 35,5.
Dans le IVe arrondissement, à un poitls moyen de 57,r300 gr. corres-
[lond une taille de 1,1)58 et l'indice descend à 'M,V), au-dessous de la
moyenne désirabke.
Les c(»nsé(juences <|ui en résultent pour le iccrulement do l'armée se
traduisent par les résultats suivants :
IV.IN
Classés
dans les sorvicos
IV'a Arroiiii'^secneiil
Inscrits
Exompl-.
auxiliairos
Ajourni^s
Bons
Année 1904. . . .
273
20
21
01
171
\iMire 1905. . . .
288
25
3(1
78
149
Si l'on reporte aux. eliilVn's doiuK-s par les Ciimjilcs rcinhis du Sercice du
Fiecvutemeul de l'Armée, il ressort avec évidence que les moyennes de
la taille des vingt dernières années s'élèvent par un accroissement pro-
gressif dans le département du Rhùne :
En 1873, la taille moyenne était de 1 m. 040; en 1-875, de 1 m. 650;
en 1890, de 1 m. 658; en 1903 (classe 1902) de 1 m, 000, alors que la
moyenne de la France entière est de l m. ()48.
A titre documentaire voici la répartition des tailles dans le départe-
ment du Rhùne durant les trois années 1901, 190-2 et 1903 :
Taille do : 1901 vm 1903
Moins de 1T54 . ... Ô^) 100 iTs
1,54 à 1,62 . . . 1.191 1.442 1.341
1,63 ... . 236 293 272
1 64 ... 298 295 320
l'65 . . . . 341 392 403
1,66 ... . 322 337 319
1,67' A 1,69 . . . 914 936
1.680
863
Inconnu 233 109 368
1,70 à 1,72 . . . 850 804
1,73 et au-dessus. . 698 807 863
ToTAi 5.182 5.515 5.679
En 1905, la répartition de la taille est à peu près la même, avec une
moyenne identiijue : i m. 660.
Pour l'appréciation des chitTres fournis par les Comptes reudus du recru-
tement, il est bon de faire remarquer que, depuis vingt ans, diverses
modifications ont été introduites dans le mode de recrutement ainsi que
dans les subdivisions territoriales de la région, l'arrondissement de Ville-
franche n'étant rattaché au département du Rhùne que depuis quelques
années. Enfin, les moyennes ne comprennent pas l'ensemble du contin-
gent : les engagés volontaires ainsi que les hommes exempts de service
i;iU m NnVKMHIU: 11^)5
n'y lii^uronl pas el cos ûliininalions sonl susccplibles de inodilicr dans
une certaine mesure les résultats.
Ces n'-servcs faites, nous admcltons n<'iii)moins qu'il s'est produit,
depuis une vingtaine d'années, une auginentalion dans la moyenne de
la faille de la population.
La taille est .''Icvéo dans toute la i-('',irion !Vorl-Ksl du déparlement, dans
la ré.nion du Heaujolais et dans la vallée de la Saône. Le maximum de la
taille se trouve dans le canton di' l'.rlhnilhî et le miniumm dans les can-
tons de Sainl-l.aiirenl-de-Cliamoiissel et du Bois-d'Uingl, qui appartien-
nent à des régions agricules et montagneuses.
En gé.iéral. 0:1 conslale une (limiiiulion de la lailh; en allant du Nord
au Sud du déparleme il Le canton de Lamure, malgré le nombre élevé
de ses goitreux, occupe cependant un assez bon rang au point de vue de
la taille.
Dans la Ville de Lyon, les moyennes de la taille offrent des difîérences
notables, les moins favoi-isés. sont le l*^"" et le i° arrondissements.
Les elïets fAcheux dr ^ul•bani^me paraissent surtout s'exercer sur la
population suburbaiîic, à Villeurbanne (l^yon) et sur certains centres
industriels tels que Tarare. Celle inlluence de l'urbanisme se traduit
d'une façon encore plus manifeste avec le rapport centésimal du poids à
la taille et par des décbets de près de 50 0/0, dus au défaut d'aptitude
physique des jeunes conscrits, comme cela a lieu dans le IV^ arrondisse-
ment de Lyon.
Une bonne conformation physique exige nécessairement un rapport
proportionnel entre le poids et la taille, et l'insuffisance de l'un doit
entraîner rapidement l'insuffisance de l'autre. Mais le poids est par lui-
même un facteur inconstant, sujet à de nombreuses causes de variations
passagères, qui, le plus souvent, n'ont d'autre effet que d'apporter un
simple retard au complet développement physique des jeunes gens des
villes.
Les influences multiples d'un centre d'agglomération humaine aussi
important que la ville de Lyon agissant sur le milieu urbain lui-même
aussi bien que sur son voisinage rend très difficile l'appréciation de la
valeur ethnique de la taille dans le département; mais il nous a semblé
que celle-ci était subordonnée bien plus aux conditions de milieu qu'aux
influences de race. Il est superllu de rappeler combien la taille s'élève
dans les régions où la popoulation a le plus d'aisance, où la vie est plus
facile — cela quelle que soit l'origine ethnique de la population.
Il nous paraît intéressant et non sans utilité de jeter rapidement un
coup d'oeil sur quelques uns des travaux d'ensemble ayant pour objet
l'étude de la taille en France et d'apporter ici le résultat des recherches
que nous avons faites personnellement sur le même sujet.
Nous vérifierons ainsi la place occupée dans notre pays par le départe-
ment du Rhône au point de vue de la taille.
En 1885, Jacques Bertillon a publié dans le volume consacré au 25* an-
IlOl'CMEHKAI' HT MAVET. — KTIDE HK I.A HliiilU AlMIlK vM IIUc>l'ii|.(t(i|n( K i:\\
iiivei'sairc Ac la Sorirtr de Slatistiiiuc tli- l'uiis une i.i)|iitil:iiitc l'imli' «iii- la
Taille de l'Homme en Fuanck.
leS TAILLES EN FRANCE
PAR Jacques BERTILLON
oiir MS TMnu> sunnigoB n u nui h nui
_.,^!»<*T„\
ia ébtUtt ioiOÊB tétftul b ffé&Kt éHbÊ ij/fB it Ub
Uvfmlmié^iMfKKi'Bfeantémteanfa
lECENOE
\ ras 11-^
40^
C^iêi^
Fiqurc i. — Urpartilioti dos tailles en Fraii'^c (d'après J. Beiiillon).
Nous reproduisons ici la carie qui résume les recherches de J. Bertil
Ion sur 1» répartition géographique de la taille en France. Plusieurs
régions s'y trouvent délimitées ;
1*> ... La région du Nord-Est, où la taille médiane est relativement
élevée et varie entre 1 m. 06 et 1 m. 65.
2° ... Le Centre de la France, où la taille est au contraire très basse
(taille médiane de 1 m. 61 à 1 m. 64).
3° ... La Bretagne, où la taille est également basse.
4" ... Le Midi (Gascogne, Languedoc, Provence) où elle est un peu
plus élevée. L'examen de la carte {Fuj. 1) permet de se rendre compte
de leur étendue respective.
Topinard, dans son Anthropologie générale a reproduit, d'après Broca,
une carte de la taille en France, ayant pour base les exemptions par
défaut de taille pendant la période trentcnaire 1831-1860.
Nous résumons ici {Fig. i^) cette carte de Topinard, <|ui vient à l'appui
de sa conclusion générale suivante :
« Il existe en France une race de haute taille, qui prédomine dans le
Nord; une race relativement petite dans le centre de la France, le centre
de la Bretagne et les Alpes françaises; et une race plus petite sans doute,
4:^:
1(> NiiVRMIinK iOOn
<|in' li^s slalistiqiips de tailU' ne peuvent ;i elles seules dégager, dans le
Midi, chez les liasqucs par cxenr\ple ».
/ "^..c:- •-**•«-.
DIAPASON DES TEINTES
vinocr
1
2
',jtuUICI<Tl^^|^B|^
Ék^"-^j3
IHI
3
mT....^
UH..
«02.
"j,>- ---ï^-""v- *** .
Figure 2. — Carte de la taille cri France. Exemptions pour défaut de taille pendant
la période Irentenaire 1831 -1800 (d'après Broca-Topinard). — Blanc : (ail/es les
plus grandes — Gris : tailles intermédiaires. — Noir : tailles les plus petites.
Bien antérieurement, Boudin {Traité de Géographie et de Statistique médi-
cales, 1857) avait indiqué la môme répartition des exemptions pour défaut
de taille pour la période 1831-1849. Les chiffres de Boudin sont intéressants,
il n'est pas aisé de les retrouver... aussi pensons nous devoir les repro-
duire ici en groupant les départements suivant l'ordre du coefïicient que
cet auteur avait attribué à chacun d'eux.
Proportion des Exemptions pour défaut détaille pour 1000 examinés, pendant
la période 1831-1849)
(d'après Boudin.)
Doiibs . .
Jura . . .
Côte dOr
Nord. . .
Somme
Ardenues.
23
31
33,5
33,8
34
37,1
Marne ( Haute
Saône ( Haute
Pas-de-Calais
Seine-et-.Marne
Bas-Rhin.
Aisne ....
37,6
37,7
37,8
39
40
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41
. . . 4;{,i
. . . 44,3
. . . 44,5
. . . 4:^
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... 47
. . . 48,5
. . . 4<S,8
. . . 49,3
. . . 40,8
... 50
... 52
. . . 53,0
. . . 53,8
. . . 54,2
l>rùiiR« r)4,2
Mann' ......
I )ise
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S('ini^-t't-(tist^ . . .
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Calvados
Nièvre
Eure-et-Loir . . .
Eure
Vaucluse
Pyrénées (.Hautes) .
M.'urllio
Ihnit-Uliin (Ik'HorI)
Yonne
(".harenti'-lnlerieure
Maine-et-Loire . .
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Manche
Orne
Vcniiée
Hérault
<iaronne (Haute) .
Seine-Inférieure . .
Lot-et-Garonne . .
Ciironde
(iers
Loiret
Aude
Sarthe
54.5
55,5
55,8
55,9
50
56,1
58,2
58,8
58,9
00
63,4
03,7
63.8
64
67
7v>
70
.Saùne-et-Loirf . .
( '.reuse
Vienne
Loire
Landes
Loire Inférieure. . .
Ilaule-Loire (Haute).
Tarn-et-(iaronne , ,
Pyrénées-Orientales
Pyrénées (Basses) , .
Seine ,
Corse
Mayenne
.\veyron
Loir-et-Cher . . .
Indre
Alpes (Hautes) . .
Morbihan
Cantal
Meuse
lUe-et- Vilaine. . .
Ariège
Alpes (Basses). . .
Cher
Tarn. ....
.Vrdéche . . .
Lozère ....
Lot
.\llier ....
Charente . . .
Finistère . . .
Indre-et-Loire.
Cotes-du-Nord
Dordogne. . .
Puy-de-Uùnie .
Vienne (Haute)
France. . . .
77.7
77,9
77,9
79,2
79,3
79,3
80
81
8-2,4
82,9
85
87
91
94
95
97
98,5
98,6
98,9
100
100,5
101,4
101,5
103,7
103,8
105
110
112
113
114,5
114,6
117
125
131
149
176
76,9
Personnellement, nous apportons les renseignements suivants obtenus
parle classement des jeunes gens examinés aux Conseils de revision pen-
dant les années 1889-1896, soit les chiffres accumulés de dix années pour
la France entière.
Les documents auxcjuels nous avons dû. avoir recours nous ont été très
aimablement communiqués par M. Victor Tunjuan, ancien directeur du
Service de Statistique générale de la France et nous tenons à lui exprimer
ici notre sincère reconnaissance.
Il ne rentre pas dans le cadre de cette communication d'en donner tout
le développement. Nous retiendrons simplement les données extrêmes
relatives aux tailles inférieures à 1 m oi età celles supérieures à 1 m. 73.
soc. u'antuhop. 1905. 29
AU
[Ci NuVKMHllK l'.JO")
Elles se trouvent rôsuim^es par les tieux cartes ci-jointes (Fig 3 et 4) et
par les deux laltleaux servant de légende h ces caries.
Tableau iiuliqitnnt ht /irojtortiun (les hommes ayant moins de 1 m. 54 de
taille /loiir looO e.vaminés durant la période 1887-1890.
i-'"^^ -:é^ s.^-— .-^^^f
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Lucien MATET
Figure 3 — Carlo indiquant ia répartition des tailles inférieures à i m. 54 -. n
France. Proportion pour 1000 dans la France entière : 30 pour iOOO. Déparlements
teintés : ceux au-dessus de cette moyenne.
Proportion pour 1000 Déparloments.
9 à 10 Ain.
10 à 15 Ardennes, Côte -d'Or, Eure, Jura, Haute-Marne.
Meurthe-et-Moselle, Oise, Ilaule-Saône.
15 à 20 Allier, Aube, Meuse, Nord, Pas-de-Calais, Hellort,
.Saône-et-Loire, Seine-et-Marne, Yonne.
20 à 25 Aisne. Clier. Creuse, Eure-et-I^oir, Gers, Gironde,
Hérault, Indre. Isère, Loir-et-Cher, Loire-Infé-
rieure, Marne. Nièvre, Orne. Savoie, Haute-Savoie,
Seine, Seine-et-Oise, Deux-Sèvres, Var, Vienne.
25 à 30 Ardt'che. Aude, Doubs, Gard, Lot-et-Garonne, Maine-
et-Loire. Mlidiii-. Seine-inl'érioure, Somme. Vau-
cluse.
30 à 35 Calvados, Cantal. Corse, Indre-et-Loire, Loiret,
liasses - Pyrénées, Hautes - Pyrénées, Tarn -et- Ga-
ronne, Vosges. France entière.
UOl'CHKHEAr ET MWET. — KTUItE DR LA liKuiilt Al'IllK AN TlinnlMiljjC.KjUE 43o
l'ioporlion pour l(i()0. D(^parlomcii(s.
35 à 10 \I|MS Miiiiliiiics. Avcvron. Ifinnic. Loii-f. M.iiuhr.
l'vn'iiccs-dcioiiliilcs.
40 à 45 \ri(''f,'(', Hoiiclics - ilii - Hlioiir, ( li.iiTiilr - liilV'iifiii'c.
H)iut('-(jaroniu', L-iiuirs, lltiulc-Loirc, SaïUie.
45 il 50 Massi's-Alpos. Cliiin'iil(\ (■.(jtes-dii-.\ord. Finislùrc,
l.nl, Lozùn*, Tarn, N'omlrc.
50 à 55 .M.iyt'iint^, l'iiy-dc-Dùinc.
55 à GO lloi-(i()j,'iiiv
00 à (55 Ilaiilcs-Alpcs, llc-cl-N ilaiiic, .Mmliiliaii.
65 .'i 70 Ilault'-Vioimo.
70 r.oiTùzc.
Kha.nck cnlitTC. . . . 30 ponr 100(1.
Tableau indit/iuinf la /iraportion (/i'.<t hom/ncs ayant I m. 7:i et iih('<
lie taille pnur lOOO e.raminés drraiit la périotle ISS7 ■ ISUa.
Figure -t. — Carte in(li(jiiaiit la ivparlition des tailles rlo 1 m. 73 et au-dessus, en
Frano". Proportion pour la France entière : 10'2 pour \fS(SQ. Départements teintés :
reu.r nu-flessus de celte moyenne.
Proportion pour 1000.
32 à 35
35 à 4()
40 !\ 50
50 à 60
Départoinoiits.
HérauK, Landes.
Corrèze. Côtes-du-Nord.
Haulos-Alpes, Dordogno. llle-el-^'ilaine. Nièvre.
Corso. Finistère, Mayenne, l'vrènées - Orientales.
Savoie, Tarn.
\'M\ l() NnVK.MlillI l'.IOr»
t)() à 70 t .liJirciitf, .Morl)iliaii. l'iiN -ili'-hiiiiii'. ll.iiilt's-l'yrt'nécs.
75 A SO Hassos-Alpos, Avevron. ('.aiit.il, Haiite-Loire, Manche,
Sarlho. Vendée.
80 h î>0 Alpes-.Marilinies, Ardèche. Ariège. Charente-Inlé-
rieure. Drôiiie. Euro-cl-Loir, Gard, Haute-Garonne,
(;irt>nde. Indre-et-Loire. Lot, Lot-et-Garonne,
Maine-et-Loire.
90 A 05 <;iier. Basses-Pyrénées, Deux-Sèvres.
95 à 100 Aude, Creuse, (iers. Loir-et-Cher, Loiret, Lozère,
Haute- Vienne.
100 à 1(15 Allier, Calvados. Isère. Loire-Inférieure, Orne.
Franck entière.
105 à 110 Houches-du-Rhùne. Indre. Loire, Vaucluse.
110 à 130 Itoiiiis, Nord, Haute-Saùne. Var, Vienne,
130 à 140 \isne. Meurnie-fl-Moselle. Kliùne. Seine, Seine-et-
Marne.
140 h 160 Ain, Aube, Eure, Marne. Haute-Marne. Meuse. Haute-
Savoie, Seine-et-Oise.
160 à 180 Côte-d'Or. Pas-de-Calais, Bel fort.
180 à 190. . . , . . Ardenues.
190 Jura.
209 Oise.
Fr.-vxce entière. . . . 102 p. 1000.
Essayer d'indiquer aussi schématiquement qu'il a été fait par la plu-
part de nos prédécesseurs la répartition détaillée à la surface du territoire
des groupes ethniques formant la population française en se fondant sur
la taille, serait méconnaître profondément l'influence considérable du
milieu et du genre de vie sur ce caractère fort variable — même dans
une seule famille — et surtout vouloir demander aux documents statistiques,
dont nous pouvons actuellement disposer, beaucoup plus qu'ils ne peu-
vent donner.
Nous en voulons pour preuve la constatation suivante :
En isolantles chiffres concernant le déparlement du Rhône des tableaux
qui indiquent la proportion de chaque taille dans chacun des déparle-
ments, nous avons pu tracer le diagramme {Fig 5) qui indique la façon
dont se groupent les différentes tailles (proportion pour iOOO).
Ce qui frappe, si on vient à comparer cette courbe à celle de certains
autres départements — la Lozère, par exemple — ce sont les nombreux
accidents qu'elle présente.
Lans la Lozère {Fig. (j), la courbe est extrêmement régulière. Il n'existe
qu'un seul groupe de taille, très homogène, ayant pour moyenne i m. 63.
(Peut-être en analysant de très près la courbe ainsi tracée arrive-t-on à
constater un léger accident, en B, qui indiquerait un groupement minime,
mais distinct du précédent, et se plaçant autour de la taille de 1 m. 65 )
Dans le Rliùne, il y a trois groupes de taille. L'un, très important, ayant
pour centre la taille de 1 m. 65 qui dépasse comme fréquence 70 pour
iOOO; le second, bien moindre, ayant pour centre la taille de 1 m. 71 ; le
troisième a^l encore plus réduit et correspond à la taille de i m. 63.
BOLilHEREW ET MWET.
KTCliE ItE I.A liKiMJU Vl'IllK AM'IlIKlPdl.nClul-E
i37
Il esl livs iiili-ressant île voir rcs résullats, lii-diiils (II- la scuIl* ('tiult'
lliéori(iue île la cuurlie <!•' la laill»' ilaiis h' (ir-paili'iiHMil ilii lUiùiit', vt'iiiià
l'appui tk's données acquises ;i Taiil.' ili- recln'iiln's de naUiit' loiili' ililVé-
I i.Mite el aussi de voir conlii iiiei' par elles les leidierolu's jti l'iiiièies rie nii(>-
lelel et de .1. Meililloii dans un ordre tl'idées luil analo^ue.
" Deux ly[ii'sile taille — l'un supéiieur à I m. <)'.>, l'aulie de 1 ni. (U — ,
dit ce dernier auteur, coinnie eonclusion |»rineipale de son travail, évo-
luent dans tout le Nord-l'^sL de la France... > Nous venons de voir que le
département ilu llhône se rattache à cette région du .\ord-Est, intermé-
diaire à cette zone de tailles élevées dont le pays du Jura est un des
centres, et au IMateau Central, zone de tailles peu élevés.
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Figui-f 5. — UiaMiiiiiiiiiti iiulii|uant lo gruiiiieiiniil tics dillfreiites tailles dans le
dèparlemeiil du Kliôiio (l'rupurti.jii pour lOon. .Moyenne de 10 ann<;"es).
Nous pouvons nous rendre compte de linlluence des régions avoisi-
nantes sur la taille — comme d'ailleurs sur Tindice ccphalique «(ue nous
aurons à envisager plus loin — en étudiant les migrations intérieures de
438
Ifi NoVKMItRK lOOo
la Franco d'après los résultats statistiques fournis parles dernieis dénom-
brements.
Figure 6. — Diagramme (superposable à celui de la figure 5) indiquant le groupe-
ment des difTércntes tailles dans le département de la Lozère. (Moyenne de dix
années). — A. Taille moyenne : 1 m. 63. — B. Taille moyenne : 1 m. 65.
Quelle est l'origine des liabitants du département du Rhône?
Le Elhùne est un des départements qui comptent le plus d'immigrés.
En 1901 : 537 immigrants pour 1000 habitants nés dans le département.
En 1891, le recenseme nt avait relevé: 500. "tîo habitants nés dans 1p dépar-
tement; 270.3 l-i nés dans un autre département; 18.707 nés à l'étranger.
En 1890 : 520.040 liabitants nés dans le département; 300.198 nés dans
un autre département: 16 115 nés h l'étranger.
En 1901 : ... des <"liill'res du recensement de 1901 concernant le dépar-
tement du Rhône n'ont pas encore été publiée par le service du recense-
ment au Ministère du Commerce ..)
On se rend facilement compte du brassage intense que subit la popu-
lation d'un déparlement coiïime le Rhône du fait de son immigration et
de son émigration.
rnUClIKUKM Kl MAVKl". — KTUDK HK I.A (iKiMiU Al'IllK A M llllofoLOCIgL'K 439
L'immigration souli' doit nous préoccuper ici.
L'allraclion exerct!'c parlcilépartLMin'nldu llliùnc d plus spi'cialcmcnl par
l'agglouiéraliuii lyonnaise se l'ail surluul sonlir sur les régions liniilruplies.
Cela esl bien mis en évidence par la carti' i /m//. 7) que nous avons tracée
d'après les résultais du dénuinhniiiriit d^' 1H!)| . Ceux dr 189o auraient
2452
iV '^V ^- v.t.i.t ?*'""'< "^nq \!'""""^c^^''■ .^ \ *"" 456^ «oicu /oq^
•Q' -0...."^ 236, '150;- 1?,?. 3 \-.^nfi., >63*>.^-^-'-'' ^^^ ^^^
.560 ""y,.». . -*' , ,^35 ^
224 335V "o.. \
31(
341 fçô""" - ^^~^^;-:
■ """.U3-21r^ "
356
. 'ig296
^-921-.,
"460
Fif/itifi 7. — Carlti nioiilrniit l'immigration ilans le (i<^,p:irl(Miii'nt du Rhône. Nombre
«li-s ori^jinaires de chaque déparlemcril |irési;uts dan.s le Hbône.
\'>ir : plus de SOOO. Cris foncé: 4000 à. 8000. Gris clair : 1500 à 4000.
lilaiic : autres départements.
également pu être utilisés. Les départements qui euvoionl le plus d'émi-
grants dans le llhnne sont les suivants :
DEPARTEMENTS 1!^!>1 1^96
Isère . .". . . . 57.118 61.610
Ain 34.'.»37 34.785
Loire 32.874 34.877
Sa.iiie-ot-Loii-f . . . 17.086 18.143
Aniéehe 16.4S3 19.108
Savoie 13.2'.I3 15.955
Savoie (Haute) . . . 7.835 î).6(;6
Dnune 7.527 8.57!)
.lura 5.942 6.460
Puv-de-Dùine. . . . 5.735 0.081
Loire (Haute). . . . 5.579 5.972
etc.. etc.
440
m NHVE.MnnK 1905
Il csl ais(' (le const.iler les inlluciiccs f'lliiii(|in's i|iii voiil s'exercer —
ilii r.iil (Je ces iiiigr.ilioiis iiiléiicures — stir lu popiiliilinii du <l<'[)arloineiit
du llirtri.'. En ce (iiii coiirtMiie la taille, oii peut curislater iju'd subira
siirloiil I inlluenee des régions de l'Kst, oiî la taille est élevée; l'iiilluence
de la réf;i(»;i du l'iateaii Central est Niin d'être négligeable et introduira
dans le dé|)ari»'iii.'iil du Itbùne des l'iéinenls de petite taille : nous avons
constaté plus haut la iralil.- de l'une «-l de l'autre de ces deux influences.
Indice céphalomctrique '.
il nous a paru intéressant de mesurer les deux diamètres crâniens
antéro-postérieur maximum et transverse maximum chez les hommes
que nous avons pu examiner.
On sait, en eiïet, combien est grande la place occupée dans le domaine
de l'anthropométrie par lindice céphalique.
Nos observations ont porté sur la plus grande partie du département du
Rhône et seuls les quatre cantons de Condrieu, Mornant, Limonest et
Anse ont échappé à noire examen.
A Lyon, les jeunes gens examinés appartenaient au deuxième arrondis-
sement.
Nous avons recherché l'indice céphalométrique chez les conscrits qui
nous ont été présentés sans tenir compte de la décision prise par le conseil
de revision. Seuls les ajournés des annt'es précédentes ont été éliminés de
de la statistique afin d'écarter tout sujet ayant subi une sélection quel-
conque.
Comme résultats, nous avons obtenu pour la ville de Lyon :
Indice céphalique moyen: 83,82 (Max. : 89,94; min. : 77,08) avec un
diamètre antéro-postérieur maximum moijen de 188 m/m. compris entre les
dimensions extrêmes 201 m/m. et 179 m/m. et un diamètre transverse
maximum moyen de 159 m/m. compris entre les dimensions extrêmes :
167 m/m. et 148 m /m.
La mise en série des indices recueillis nous a donné le tableau suivant :
50 Indices céphalométriques de la Ville de Lyon {2° arr.).
Nombre
4.
2.
» .
6.
8.
2.
8.
Total .
Indice
Non
77
5. .
7
3 . .
79
4. .
80
4. .
81
3. .
82'
1 . .
83
)' .
50 indices
Indice moyen
Indice
8*4
85
86
87
88
89
90
83,22
' Le terme inJice rr/)hrtlitjue est employé dans le cours do cette communication
comme synonyme de indice céphalométrique.
BOrCIIERE.VU ET MAVKT. — KTIMIE [)K LA (iKiKJK AI'IIIK A\ THUUPOLOGIyLE 441
l/iiri <lt' riMiis ', au cimiis iIi' i fi'lnMclH's |toiii>ui\ irs il y a mn' ilizaiiie
d'années irlalivi-ini-nt à l't'tuJe aiillii()|)nloi;i(|ii<' do la j>u()nlatiun lyon-
naise, avait réuni une série de 3i>.S indices d'habilanls de Lyun (Lyonnais
de Lyon, Lyonnais d'origine diverses...) ayant donné comme indice
moyen : 82,35.
L indice cjjlin/iijue <{>• In pnpuInliDn /i/oinifiise, cunliiiné par ces deux
groupes d'observations, faites dans des milieux très dilTérenls, a une ten-
ilmur (les plus wllesù la brachijcéiihnlii'. Il est j rnnchement sous-brachycèphale :
82-83.
L'agglomération lyonnaise représente bien une grande partie de la po-
pulation du Ilhùne (en 11)01 : 459.01)1) b. sur 843.179 b.), mais la popu-
lation des autres cantons du département est peut-être plus intéressante
à étudier en ce sens qu'elle est peut-être moins influencée par les incessants
croisements qui résultent des migrations intérieures de la population et
de l'attraction par les grands centres ur! ains do la population rurale de
régions souvent fort éloignées.
L'indice céphaliijue moyen de l'ensemble des cantons du riépartement
du Hbone (Ville de Lyon et les quatre cantons de Condiieu, Mornant,
Anse. Limonest exceptés) nous a été donné {)ar T-2'.l indices. 11 est de
84,80.
Le tableau ci-ilessous iiidifjue sa répartition :
7:^.'^ Indices Ci'iikdlum Iritjitcs (lr.<i cantons ruraii.r du département il u Hhône.
Nombre
liiilico
Nombre
Imlice
1 . .
74
109 . . .
85
2. .
75
82. . .
m
2. .
7()
54. . .
87
7. .
77
44. . . .
88
15 . .
78
24. . .
89
23. .
79
24. . .
90
35. .
8(J
15. . . .
91
52. .
81
9. . .
92
55. .
82
1 . . .
93
88. .
83
1 . . . .
94
86. .
84
».
95
PAI,.
729 indices
liiilii't' iM()y(Mi.
84,80
Le pour cent de brachycéphalie est de 49, dont 7 environ d'byperbra-
chycéphalie (ind. de 90 et au-dessus); de mésaticéphalie, 5; de dolicho-
céphalie (au-dessous de 78), 1,6.
Le tableau suivant indique le classement des cantons d'après le degré
de brachycéphalie.
* Mayet (Lucien).
I8.'',i.
L'indice céphalii|ue Jtjs épilepliques Lyon Médical, octobre
442
in MlVKMItltK 1905
CANTONS
1. Lk'aujt'u
2. Bellovillo
3. Lo Bnisd'Oiiif;!
4. Laiinin'
5. Ani|ilt'|iuis. . . .
6. Tliizy
7. St- Laurent (lo-
Cliamousset .
8. Monsols
î). Taian-
10. Villolrarirhe . .
11. -\ouvill(-
12. Vaugneray . . .
13. St-Syinplioricn
sur-(".oise.. . .
14. Villeurltanne. .
15. L'Arhrosle. . . .
10. St-Genis- Laval
17. Givors
Moyenne totale. . .
INDICES
moyen.
max.
Ht>,33
92,27
85,79
92
8.-), 02
93,25
X5.00
90,28
85,58
92,90
85,57
91,99
85,36
92,61
85,35
92,34
85,05
91,70
84,92
92,09
84,02
94,99
84.45
87,77
84,28
89,41
83,70
90
83,60
91 ,25
83.20
92.43
83,10
90,52
84,80
.S2.()l
80,20
79,(15
77.55
80,02
79,48
78,94
78.35
76.20
74,01
75,38
81.90
79,16
75,24
70,19
78,40
DIAM. ANT.-POST
moyen, max. min
184,2
183,1
183,7
\Ki,H
181.0
180
184,5
184
184,7
184,4
187,1
185
180
180,5
185,3
187.7
187,3
185.4
200
195
i;t3
r.io
lii't
199
197
198
198
204
201
194
202
194
200
201
172
109
173
175
173
171
171
109
173
170
109
177
171
175
178
175
DIAM. TU ANSVEKSE W ,„
moyen.
159
157,3
157,8
158,2
158
159
l57,5
1.07
157,1
157,0
158,4
156,2
156,9
156,1
159.4
150,2
155,0
157,2
170
109
107
170
185
171
109
169
168
160
171
109
171
107
171
10!)
min
148
148
140
149
148
150
139
147
144
143
140
144
144
144
140
440
40
1>5
35
40
50
00
50
45
50
51
/lO
20
40
50
30
51
50
729
A ce tableau correspond la carte {Fig. 8] par laquelle nous avons
résumé l'ensemble des résultats auxquels nous sommes arrivés.
L'indice céphalique moijen pour le déparlement du Rhône peut être
fixé à 84 (Ind. céphalométrique s'entend) avec le maximum de vérité, nous
semble-t-il.
Ce chiffre, est plutôt un peu au-dessus de la réalité^ parce que l'indice
de la Ville de Lyon — 83,22 — est pris dans le 2^^ arrondissement, dans
lecentremème de l'agglomération urbaine, où la population est plus stable
que dans les autres arrondissements excentriques. De nombreux faits
semblent attester que les agglomérations ont d'autant plus de tendance à
la dolichocéphalie qu'elles sont plus llotlanles et de création plus récente.
Nous rappelons que d'autres recherches, portant sur l'ensemble de la
population, nous ont donné antérieurement un indice plus faible —82,35
— ce qui est une confirmation de ce qui vient d'être dit.
Nous avons pu noter pour quelques cantons les variations de l'indice
dans les communes; elles sont parfois très grandes. Dans le canton de
Villefranche, la population de la ville a un indice céphalifjue de 83,33
avec, comme diamètie 185 et 155, tandis que la population rurale a un
indice de 85,70 avec des diamètres de 184 et 157,7. Dans le canton de
Thizy, la population de Thizy-ville a un indice de 85 ; à ïhizfy-bourg —
centre ind'istriel de récente création et situé dans le voisinage immédiat
de Thizy-ville — l'indice moyen descend à 84,18. Pour les autres com-
noicii
EUEAl' ET MAYET. — KTIOE DE I.A OÉonilAIMIIE ANTlIUOl'OLOr.IQUK i43
mîmes la population est en sramli' partie agricole, l'indice céphaliquc est
de HM.Ori.
LOIRE
Figure 8. — Carte iiuliiiuant la n5|iartition (lel'indico céphalique par cantons dans le
déparlemenl du Khône. Les cliiffres correspondent au tableau de la paRC 442. En
noir les cantons hracliyccpliales.
l'ar son indice céphali([ue moyen de H4, le département dn llliône se
place parmi les régions à tendance brachycéphaie.
Cetle tendance est surtout manifeste dans le massif montaj^neux du
Beaujolais et son maximum s'observe dans le canton de lieaujeu. Oe cette
région considérée comme centre d'irradiation, la brachycéphalie s'étend
en diminuant [trogressivement du Nord-Est au Sud-Ouest, jusqu'au can-
ton de Sainl-Laurenl-de-Cbamousset. Son extension est interrompue par
une zone constituée par les cantons de l'Arbresle et de Tarare, ou
444
10 NdVEMllllK I1K)5
rinduenco des eon(i-ns irniiisliicls se fait sentir ilans le sons de la dolicho-
céphalio.
C'est en petit l'.e quon observe pour l'airondissemenl de Saint-Etienne,
enclave sous-dolichocéphale i8^,^) dans le massif hrachycéphale.
Rappelons avec M. OiMiiker ' d'après les remarquables et quasi définitifs
travaux de Collignon - pour l'ensemble île la France et de nombreux
autres auteurs pour les régions isolées (Cf. Ueniker, loc. cit.), que le mas-
sif hrachycéphale couvre la partie montagneuse de la France presque en
totalité et la courbe de oOO mètres d'altitude en maniue la limite. Il forme
un triangle dont le sommet répond aux IJasses-l^yrénées, aux Landes,
aux Hautes-Pyrénées, à la Haute-Caronne (cela partiellement); la base
s'appuie sur la frontière de l'Est de Vouziers à Barcelonnetle. La carte
{Fiq. 9) que nous avons tracée d'après celle de M. Ueniker donne une idée
d'ensemble de la répartition du massif hrachycéphale français.
iMCimn HUlTVT
Figure 9. -- L'i massif l)iaL-bycé|)h;ili- fnui(,'.us, d'aprùs Dcinkir. - Xoir ; lly|)'r-
br.iciiycéphalos : 88-60. Gris /'once : Biacliycf'-iili.il: s : 8Û-84 G?'is clair : S)iis bni-
chycèphales : 82-83. Blanc : Dèpartenn'iits où (loniiin' l.i tlulicliocoptialii'.
Nos recherches confirment la place attribuée par nos prédécesseurs au
* Deniker. — L'indice céplialiquo en Europe. Association française de l'avance-
ment des sciences. Saint-Élienne, 1897.
* Collignon. — Indice céphalique des populations françaises. L'Anthropologie, 1890,
HOlCIIEltKAl" Kl MAVKr. — KTIIIK l)K r.A iIKiMiUAl'llli; ANTHUul'iil.iMlIyl K -4 l."l
dé|)arleinent du Hhùno, zone de moindre bracliycéphalie entre N^s deyx
massifs très brachycéphales du IMaleau Central et de l'Est.
La ville de Lyon a comme indice moyen (82,33-8;i,2:i). (l'est un des
indices les plus faibles du département, bien inférieur à la moyenne des
indices cantonaux et pour cette raison il n'est pas possible, au point de
vue de l'indice, de considérer le cbef-lieu d'un département comme un
centre où viendraient s'égaliser toutes les dilTérences régionales.
Ce que nous avons dit au sujet des migrations intérieures de la France
concernant le département du Rhône en donne facilement la raison, en
montrant la diversité des éléments (|ui entrent en jeu dans ces migrations.
L'instinct migrateur grandit de plus en plus, guidé par des aspirations
nouvelles, par les nombreux besoins que développent sans cesse les pro-
grès de la (.'ivilisalion et se fait senlii" particulièrement sur la population
rurale au prolit dt; la population urbaine.
Prenons Lyon comme exemple : la pupuialion a passé de 177,190 habi-
tants en 1851 à 459,099 en 1901, alors que les naissances y compensent
péniblement les décès — et encore pas toujours. — Sans parler de l'in-
llucDce exercée par l'élément étranger fixé et assimilé, l'émigration rurale
semble pousser vers les agglomérations urbaines, par une sorte de sélec-
tion régionale, tous les éléments dolichoïdes tandis qu'au contraire les élé-
ments brachycéphales paraissent plus sédentaires et immobilisés dans
leur milieu, .\insi semblent s'être formés les centres industriels, à faible
indice céphalique, de Bourg-de-Thizy, de Cours, aux dépens des com-
munes et des villages voisins qui se sont en partie dépeuplés, tout en
conservant leur caractère de brachycéphalie.
L'élément étranger auquel il vient d'être fait allusion comporte une série
d'éléments secondaires dont il est assez malaisé d'apprécier exactement
^e rôle et la valeur dans l'assemblage urbain. Il n'est pas négligeable
puisqu'on a relevé, dans le département du Hhône, pour 10.000 habitants,
en 1851 : 258 étrangers; en i87G : 201 étrangers; en 1901 : 138 étran-
gers. Et nous ne pensons pas être contredit dans cette opinion que cet
élément étranger ne peut que contribuer à abaisser l'indice céphalique,
comme il est facile de s'en convaincre en jetant les yeux sur la carte de
la répartition de l'indice céphalique en Europe de M. Deniker.
Immigration étrangère et surtout immigration intérieure dans les villes,
ont en tous cas ce résultat certain d'abaisser l'indice céphalique. Témoin
Givors-ville oîi l'indice descend à 80,00 alors que la moyenne du canton
est de 83,10; \'illéfranche-sur-Saùne qui a un indice moyen de 83,33, les
autres communes du canton atteignant 85,70.
D'autres influences plus obscures s'exercent qui sont encore à indiquer.
L'accroissement rapide des centres urbains s'accompagne d'une ten-
dance manifeste à la dolichocéphalie. C'est ce qui peut expliquer en
partie le faible indice céphalique de la périphérie de l'agglomération
lyonnaise, notamment ;i N'illeurbanne qui est comme le centre d'accrois-
sement de la population lyonnaise, relativement aux quartiers plus cen-
traux de la ville.
iiO
K» NOVKMIIHK 11>05
I/;il|ilii(lo moindre des villes, établies le plus habituellemenl dans les
vallées, peu! iniluer aussi sur la brachycéphulie originelle pour l'allénuer.
l.a laille, tpii pour certains auteurs serait en corrélation avec l'indice
cépbali(|ue, nous paraît n'avoir aucune influence sur l'élévation ou l'abais-
sement de celui-ci. Dans le déparlement du lUiône, les deux cantons qui
présentent le maximum et le niiiiiimiin île, laille oui l'un <,'l l'autre un
indice cépbalique très élevé.
Entin, — et c'est là, nous semble-t-il, une des influences les plus intenses
— il faut tenir compte de la vie plus cérébralemeul active dans les centres
urbains. Ils sont de puissants modificateurs etbniques en influant non
seulement sur le développement physique de la population, mais encore
bien davantage sur le développement de son activité cérébrale. Or le
crâne se moule sur le cerveau sous-jacent et à un fonctionnement difîé-
rent du cerveau, semblent bien correspondre des modifications de forme
de son enveloppe crânienne...
Mais ce serait sortir du cadre de celte étude très limitée de l'indice
cépbalique dans le département du Rhône, que d'entrer dans le dévelop-
pement d'une telle (juestion.
Couleur des yeux.
En ce qui concerne la couleur des yeux dans les divers cantons, nos
recherches ont porté exclusivement sur les yeux de nuance foncée et les
yeux de nuance claire, c'est-k-dire facilement différenciables. Nous avons
éliminé les yeux de couleur indécise, intermédiaires ou mixtes, ces der-
niers ordinairement foncés au centre, dépigmentés à la périphérie et
d'observation fréquente dans la région.
Classement des cantons d'après le degré de nigrescence des yeux.
CA^iTONS
St-Genis-Laval .
Neuville
Villeuiitanne
St-l.aurenl-de-Chanioussel
Taiare
Thizy
Bellèville
lieaujeu
Amplepuis ....
Lauiure
St-Sympliorien-sur-Coisé
Le l'Jois il'Oin^t .
Monsols
Moyenne lotale
POUR CENT
des yeux
clairs foncés
35
30
34
40
36
40
42
50
42
45
48,5
53.3
41
41
40
31
24
30
21
20
17,5
24
15
17,5
20
13,3
EXCES
des
clairs ou foncés
24
-|- 16 foncés
5 (1°
1 ).
+ 10 clairs
10 d"
15 d"
20 i\°
24.5(10
26 d»
27 <l"
27.5 (f«
28.5 d»
40 d"
INDICE CEPHAL
des yeux
clairs
4- 16 clairs
84,11
84,63
84,00
86.29
85,14
86,08
85,09
85.93
85.65
85,14
84,78
86.15
85,03
foncés
85,33
83,52
85,21
83, 2()
85,28
85.44
85,50
85,03
87,30
85,60
86,34
84,66
85,59
86,45
INDICE
du
Canton
85,00
83,20
84,62
83,70
85,36
85,05
85,57
85.79
86,33.
85,58
85,60
84,28
85,62
85.35
85,08
H(»l i:ili:itK\l Kl \I\VK.T. KTIPI" HE I.A i;Kni;RAl'IIIK ANTHHOPOI.OCIOI'K 4 iT
A Lyon (2" an'OiiilissiMneiili li's ymix de niiam-t'. claire — gris nu fran-
chement lileus — sont dans la pn»portion de 'M O/Qet les yeux fonci'sde
'M 0/0. Soit, donc, uni. dillerence de <> 0/0 en faveur des yeux clairs.
I/indico ci'phnliqur pour les yeux de nuance claire est 83,10, pour les
yeux ronc'S 8:i.()l il pour les yeux de couleur intermédiaire, que nous
citons ici simplement pour mémoire, 84,05.
Pour les autres cantons du ilt'partement du Rlione, les résultats de nos
observations sont résumées par le tableau précédent.
Nous avons noté aussi les courbes d'indices de l'indice correspondant à
la coloration des yeux et obtenu :
(liiitrbes di' l'indice correspondant à In coloration des i/eu.r.
Tolaux
Indices
7 S
76
-7
78
79
80 81
82
83
84
8.n
86
87
88
89
90
91
92
93
9 5
Yeux apigmODU's . .
"
•
;!
^
(>
7 18
■17
2f)
29
35
23
12
2(»
9
11
6
4
1
'•
228
— JiileriiH'iiiuires
i
i
3
2
9
12 12
9
23
22
30
28
18
9
8
7
2
1
"
'
196
— foncés . .
I
i
2
3
■4
n
9
13
17
12
28
IS
14
8
4
4
6
3
1
1
153
Le degré de nigrescence de la population, en ce qui concerne la colora-
lion des yeux, est notablement plus manifeste dans les centres tels que
Lyon, Tarare, Givors... et c'est par les villes que semble se faire la péné-
tration de l'élément brun dans la contrée.
Lyon pourrait être regardé comme le principal centre de dispersion des
bruns dans le département — cela bien entendu de façon tout à fait
théorique — car il semble que le degré de nigrescence des cantons est en
raison inverse de leur éloignemenl du chef-lieu. Le canton de Monsols, le
plus éloigné de Lyon, est aussi celui où les yeux de teinte claire atteignent
leur fréquence maximum.
La proportion des yeux apigmentés s'associe à la brachycéphalie et
augmente d'une façon sensible en allant du sud au nord du déparlement.
Dans la région nord, la fréquence des yeux apigmentés s'associe h la bra-
chycéphalie; dans le sud, au contraire, ainsi que dans les villes, la ten-
dance à la dolichocéphalie s'accompagne en général «le prédominance des
yeux foncés.
Dans tout le département du lUiùnc, les conscrits aux yeux de nuance
claire ont un indice céphalique plus élevé que la moyenne de la popula-
tion ; ils présentent en outre une proportion de 40 0/0 d'hyperbrachycé-
phales alors que cette proportion n'est que de 6,8 0/0 pour l'ensemble.
Us semblent donc représenter le type adapté aux conditions ethniiiues du
milieu, dont le caractère essentiel est la brachycéphalie; l'élément aux
yeux foncés à prédominance urbaine serait, au contraire, d'immigration
récente dans la contrée.
\\H 7 IiKCKMlUtK iOO?)
l'ois sont, brièvement ei[)usés, lesTait*, les (iocumenls et les considéra-
tions qui nous ont paru présenter quelque intérêt pour l'étude anthropo-
logique du dép;irleinent du lUiùni;
Il nous eût été aisé de transci-iie ici une partie des Uches que nous
avons (K'puis longtemps rassemblées relativement à ces trois grandes
questions : Taille, indice cépliali<]ue, couleur des yeux... et de transfor-
mer ce court exposé en un Ir.ivail [)lein d'érudition. Mais nous avons cru
préférable de ne pas noyer les résultats de recherches personnelles sous
le flot d'une stérile compilation.
8I5« SEANCE. — : Detciiibre 1905.
Fhksidence de m. Sébillot.
Election tour le Bureau de 190G.
Le Président donne lecture du règlement. Le dépouillement du vote par
correspondance est fait par M. Delisle.
On tire au sort les noms de trois membres cbargés de l'aire le dépouillement
du scrutin : MM. Baudouin, Daveluv et Weisgerber sont désignés.
Sont élus (nombre de volants 94) :
Président Hamy, 85 voix.
i^r Vice-Président Zaborowski, 88 voix.
2" Vice-Président Cltkr, 93 voix.
Secrétaire-général Ma.nolvbier, 89 voix.
Secrétaire-général-adjoitit .... G. Papillault. 86 voix.
Secrétaire du Comité Central . . . Paul Boncour, 93 voix.
.\nthoxy, 89 voix,
Secrétaires des Séances in no •
Rabaud, 93 vorx
_ , j ^ I, ,• \ Delisle. 92 voix.
Conservateurs des Collections . . { ,, on •
\ DE MOHTILLET, 89 VOIX.
Bibliothécaire-archiviste d'Echerac, 92 voix.
Ti'ésorier HucrET. 92 voix.
in'AuLT DU MESxa, 92 voix.
Demker. 93 voix.
SÉBILLOT, 93 voix.
Nécrologie. — M. Lionel Boxnemkre membre titulaire de la société depuis
1880.
C'est, dit M. Sébillot. comme Président de la Société d'.Vntbropologie, et aussi
comme Secrétaire général de la Société des Traditions populaires que je viens
adresser un suprême adieu à un collègue avec lequel j'ai entretenu pendant
trente ans. des relations cordiales.
Lionel Bonnemère a été un membre très actif de ces deux compagnies. A la
Société d'Anthropologie, il a fait nombre de communications, parfois étendues,
sur ilt's i|iii'slkiiis (II' |in'liisl(irii|ii(' l'I d'.irt |M>|iiil;iirt'. l'I il ,v a lunulic. m les
ac<-'i>iii|)aj.'niirit iriiiliTOssaiils CKiniiuMilain's i|iii'li|iii's-mifs «k's |ii<!'rfs «le sa piv-
rii'iist' i-dllccliiiii irdriit'inciils nistit|iifs cl ilaimili'llcs. — Il a aussi fu'is j»lusicui--s
luis lu paroli' aux. irunions ili- la Sorit-lt- des Tradiliuiis |Mi|iulaii'i's, i'( diuiné à
sa ri'vuc des arliidcs sur IfS chausons. les loutuuics et It's su|it'istilious de l'Ati jou
son pavs ualal. ri di- la Hiria^Mi'. i|ui l'dail pnurlui uur si-coiidi' cl clicro poUle
l»alric. Liuucl Houncuicic lucUail. avi r |icauc(iu|i de bonne grâce, ses nulcs cl
si's colicrlions à la disposilicui i\f n-ux i|ui s'adressaient à lui jjnin- des rensei-
LTiicincnls sur les siiccialilés ijuil avait ctuiliées. Il ne comptait rjuc des amis
dans CCS deux sociétés, et tous ceux (|ui ont été en rapport avec lui garderont
le souvenir de ses ([ualilés d'iiuuiiiie et de son aniahilili' enuiplaisaulc île savant.
OUVRAGES OKF'ERTS
M. r.ii. Lkjkcne. — .lai l'honneur d'olTrir i\ la Société une brochure intitulée :
/.(i fjiies(it)ii t/p.\- Races. (Les peujiles inférieurs ont-ils des droits?) ^ dans
laquelle, après avoir rapidement passé sur les origines de l'humanité, j'ai
parlé des rapports du cerveau avec rinlelligencc et des raisons ipii me font
croire <pn_> l'on a peut-être accordé trop d'importance au poids et au volume du
cerveau, qui n'mil presque pas augmenté depuis l'Age de la pierre 4>olie. Passant
ensuite à rexamen de la mentalité des races intérieures et supérieures, j'ai
cru ()ouvoir établir que les reproches adressés aux premiers ne leur sont
pas spéciaux et ne sont jias de nature à em[>écher leur civilisalioii. Killërents
l'ail-; pei-metteiit de prévoir que le long espace de temps ipie 1 du supposait
nécessaire pour qu'une race s'élève intellectuellement pourrai! bien se trouver
abrégé dans des proportions considérables pour les nouvelles conditions de
milieu qu'ont a|)porlées. sui' luule la lerre, la l'réquence et la l'apidité des re-
lali(»ns inlerualionales.
Je suis ainsi amené à examiner la valeur de cette civilisation européenne
dont nous sommes si liers et dont le progrès ne réside pas tant dans la puis-
sance des moyens de production que dans l'amélioration des sentiments effec-
til's. de la justice, de la moralité, de l'intelligence et d'un altruisme londé sur
la lompréhension de l'universelle solidarité.
J'en arrive à conclure que les peuples civilisés ont encore beaucoup de-chemin
.\ l'aire pour accepter ces idées et les mettre en pratique et que jusque là, nous
aiu'ons il réclamer pour les peuples inférieurs des procédés moins barbares et
plus justes et le respect d'une liberté qui leur permettra de vivre en paix, de
s'instruire et de faire lu'ogrcsser leur cerveau. Les civilisés n'auront le droit de
tirer vanité de leur intelligence que lorsqu'ils ne remploieront qu'à îles leuvres
utiles à rensemble de l'humanité.
' A. Jacquiu, éditeur à Polij/ny (.liira). Prix : 0 fr. ."»0.
soc. d'anthbop. 1903.
-ioO 21 bÉCKMBKK 190o
8lti« StANCt. — 21 Décembre 1905.
Présidence de M. Sébillot.
Elections. — D"" Vahiot. méilecin des hôpitaux. Hmien //lembre titulaire tk'
la Société est réintégré sur sa demande.
Prince Viasemsky, présenté par MM. Anthony. Manouvrier, Volkov; —
M'"' Varujaku. présentée par MM. Anthony. Capitan, Manouvrier, sont nommés
membres titulaires.
OUVRAGES OFFERTS PENDANT LE DEUXIÈME SEMESTRE
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neolilhische Fumle aus mittelrbeinischen Niederlassungen.
Id., Band IV. Ileft 1. — BuiKNER (D') : Beitriige zur Kassenanatomie der Ghi-
neseii. Mit Tafeln I his, XX und 13 Abbildungen; — Barwi.nkel (D^) : Die Kor-
p.'rgrosse der WebrpHirhtigen der Unterherrschaft des Fiirstentums Schwarz-
burg-Siindersliausen. Mit 3 Kartenskizzen ; — Soi.herc. (D' 0.) : Uber die
Bàhos der Hopi. Mil Tafeln XXI his XXIII uml M Abbildungen: — Ohermaier
(I)"- Hugo) : Zur Eolithenfrage. Mit Tafeln XXIV bis XXXI und 1 Abbildung.
Internationales Archiv fur Ethnographie, Leiden, 1904, Band XVI, Ileft 6.
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logie, Ethnologie und Urgeschichte, heft II et III, 1905; — Appert (G.) : Die
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Heft5.PAssAR(;E(S.): Das Okawangosumpfand und seine Bewohner (46 Textabb.)
Zeitschrift fiir Morphologie und Anthropologie, Stuttgart. Band VIII.
Ileft 3. — \Vei.\ukr(; (Hicliardj : Die (Jehiruform der l'olen, 2 llulfte. Mit Tafel
XVlll-XVll: — Freind (Ludwig) : Das fernum von Ilolicore dugong. Mit Ta!'el
XXVllI und XXIX und 1 ligur im te.xt; — BiE.v iGerlrud) : Ein Fall von bila-
teral-symmetrischer Spaltung der grossen Zehe. Mit 3 Textfiguren.
Band IX. Ileft 1, 15 october 1905. — Frédéric : Zur Kenntnis der Ilautfarbe
der Neger: — Kraise (Budolf) und Klë.mp.ner (S.) : Untersuchungen ûber den
Bau des Zentalnervensystenis der Affen: — Buaukohd-Bodes .Ir (Charles) : The
(horaeie Index in the .\egro.
Zeitschrift fiir Démographie und Slatislik der juden, Berlin, juin 1905. —
Kri'iN (l)r Arthur): Das Wachstum der judicebeu Bovolkerung in Preussen.
Id.. Octobre. — Goluberg (B.) : Die luden nnter der slâdtiseben Bevolkerung
Kusslands. — Novembre : Fishberi; (Dr Maurice) : Beitràge zur pbysischen
Anthropologie der nordafrikanischen luden.
soc. d'anthrop. IQlo. 31
4:iS 21 DicKMBiii: 1905
LE TRUQUAGE DES MONSTRUOSITES DOUBLES HUMAINES.
UN FAUX DERODYME.
M. Marcel Baudoiin. — Jusqu'à présent, quoique spécialisé depuis
quinze ans dans l'élude des monstres doubles, qui constitue une science
trùs spéciale, la Diplotérnfologie, n'ayant rien à voir avec la Tératologie
ordinaire, ou étude des monstres simp'es, c'e.^t-àdire des vulgaires ano-
malies analoiniques, je n'avais jamais rencontré dans les cirques, music-
halls, foins, etc., que je fréquente pourtant assidûment en France et à
l'étranger, une oionstruosité double, lium line ou animale, exposée vivante,
qui ait él(' truquée, comme un simple tour de prestidigitation. — Jusqu'à
ces dernières années, quand on nous montrait dans des baraques de places
publiques ou ailleurs, des veaux à deux lèles ou à cinq ou huit pattes,
• les cochons à six pattes et des chats à (Jeux queues, etc , il s'agissait tou-
jours de véritables monstres animaux, qu'on avait réussi à élever ou au
moins ii conserver dans l'alcool; a fortiori, quand il s'agissait de monstres
doubles humains vicants!
Or, récemment, au cours d'un voyage dans l'ouest de la France, j'appris
par hasard, qu'une « femme à deux tètes » était exhibée dans une grande
ville des bords de la Loire. A lire Tairiche de cette attraction sensation-
nelle, un spécialiste averti ne pouvait songer qu'à un Xiphodi/me du genre
des sœurs Rilta-Christina, bien co mues des savants, ou des frères Tocci,
(fui, je crois, vivent encore en Italie, après avoir parcouru le monde entier,
en faisant une petite furtune] ; où, à la rigueur, à un Dérodijme, quoiqu'on
ne connaisse pas encore de Dérodyme humain, ayant atteint un Age avancé.
Inutile d'ajouter que je fus très intrigué et que je fis l'impossible pour
approcher de près le phénomène, qui me semblait inédit et en tout cas
m'était tout à fait inconnu : ce qui ne manquait pas de m'intriguer, étant
donné que je suis sans cesse à l'affût de semblables nouveautés. Malheu-
reusement, ce me fut impossible; le barnum m'échappa. Mais je le suivis
à la piste et j'appris bientôt qu'il était toujours dans une ville voisine.
Je déléguai, pour le visiter, un docteur en médecine qui est un de mes
vieux amis, et il se dévoua, avec un zèle scientifique admirable^ à la
tâche que je lui avais imposée. Voici ce qu'il m'écrivit alors, ce confrère,
dont je ne cite pas le nom, uniquement pour ne pas lui causer d'ennuis
possibles de la part de l'impressario.
« Dans un théâtre obscur, sur une scène, à parois tendues de noir^ on
voit une jeune fille de 14 ans. — Elle semble présenter deux têtes. Mais,
en regardant attentivement, on s'aperçoit que les deux têtes ne sont pas
sur le même plan. Celle de gauche paraît plus reculée et moins éclairée;
On y distingue certains reflets. Quand c'est cette tête de gauche qui parle,
la voix paraît plus lointaine. Il s'agit simplement de deux personnes diffé-
rentes, l'une vue en entier sur la scène; l'autre dissimulée et invisible,
mais dont la tête se trouve projetée au niveau du cou de la personne en
MAKCEI. Il\l mu IN. — TRol> CAS h' Al.lUMSMR l'AUTIEL 459
scAne, par un eiïct de glaces. On avoue du reste, :\ la longue, (jue c'est
un truc optique. »
('.'e?t la première fois qu'à ma connaissance on à recours ;i un truc sem-
blable, pour ligiiror une monstruosité double humaine de cette nature.
Certes, soienliliiiuement, cela n'a pas grand inlér(}t, puisque le premier
médecin venu est susceptible de dépister la supercherie! Mais, évidem-
ment, ce n'est h\ qu'un commencement et on poussera bientôt les choses
plus loin. Pour s'en faire une idée, il suffit de songer aux greffes d'animal
entier ou de parties d'animal, qui ont été tentées dans ce but (sans parler
des rats à trompe de Paul Ûert, etc.).
Certes, s'il est bien réussi, le truc est intéressant et montre ce que
peuvent donner les jeux de miroir! Mais il ne faudrait cependant pas
Ircftiiper le public de la sorte et lui faire prendre deux jeunes filles dis-
tinctes pour un Dérodijme, c'est-à-dire une seule jeune fille à deux tètes
sur deux cous isolés. En tous cas, les savants sont désormais prévenus,
et c'est le principal.
TROIS CAS D'ALBINISME PARTIEL
M. Marcel Baudouin. — Au cours du mois de décembre dernier, s'exhi-
bèrent, dans un music-hall parisien, trois acrobates femmes, très habiles
et très agiles, qui furent présentées au public sous le nom des Trots Grâces
tup-ées. Il s'agit lîi, en réalité, de trois cas d'albinisme partiel chez des
négresses, originaires de l'.Xmérique du Nord, où l'on sait que, dans la
partie méridionale surtout, vit -une grande quantité de nègres, importés
d'Afrique après la découverte de l'Amérique.
Ce n'est pas là ce qu'on a appelé jadis le Nègre blanc, mais le Nègre pie;
et il n'est vraiment pas de mot plus juste.
Cette sorte d'albinisme n'est pas très rare, comme on le sait, au moins
ians la race noire; et on a décrit un grand nombre de faits analogues.
Le D"" Trélal, dans son article du Dict. encycl. des Se. méd., raconte qu'il
jadis vu des albinos se donner en spectacle.
Ce qui fait l'intérêt, au point de vue anthropologique, de l'exhibition
quia eu lieu à l'Olympia, c'est d'abord qu'elle confirme cette remarque
<l'après laquelle l'albinisme présente son maximum de fréquence., chez
les nègres, parmi les individus du sexe féminin. De plus, la répartition
des taches albines est des plus curieuses, en particulier pour ce qui a
trait à la figure et surtout à la chevelure.
Il est inutile de décrire ici minutieusement ces taches; mais il faut
remarquer l'aspect vraiment curieux de ces plaques de cheveux crépus,
<l'une blancheur neigeuse, correspondant presque toutes à la partie anté-
rieure et médiane du crâne.
Il serait fort intéressant d'étudier a fond l'état de la peau du corps chez
I
460 21 DÉCEMBUE 1905
ces trois femmes, de haute stature, et d'une constitution véritablement
athlétique. Mais ce serait là chose presqu'impossible, à moins de dispo-
ser d'influences toutes spéciales...
Bornons-nous h ajouter que cette exhibition démontre, une fois de
plus, la vérité de cette affirmation d'un médecin albinos connu., à savoir
que cette anomalie cutanée, qui est bien toujours d'origine congénitale à
notre avis, quoiqu'en ait dit Ulysse Trélat, peut s'accompagner d'un état
intellectuel des mieux équilibrés, et qu'elle ri'indi<{ue pas du tout, comme
on l'a cru parfois, un développement incomplet du système nerveux. 11
suffit d'avoir vu à l'œuvre les Trois Grâces tigrées, qui sont des équili-
bristes remarquables, pour en être convaincu.
M. .MANorviuEU fait une communication sur les Crânes et Ossements , re-
cueillis dans les Sépultures néolithiques de Pocancy et de Menouville. (Manus-
crit non remis).
M. VoLKov fait une communication sur V Anthropologie des h'arpalhcs.
(Manuscrit non remis).
TABLK DtS DONS
A LA SOCllÎTl': 1)'aNTIIK()1>(jL0(j IR
Dons a la Sociétk : 3, 101, 102,
195, 2U>, 204. 295. 290, 297,
299. mK 301. 381, 382. 398
450. 451. 452. 453, 454, 455.
Adachi [u'' U.j.
.\DAr.(ll (.Mnio V.).
.\LI.E.N (J.-T.).
.\M)RIa.n (F. von).
AnTH'INY (d"" R.).
ATtilKR (d'' E.).
IIai.four (11.).
ItAR (i:.-F.-L d^).
liAL'DOUlN (d' .m.).
Oayk (iJaron J. de).
Okal'vais (J).
ItKRTHOLON (D"" L.).
i!.>As ,r.).
lioULANGKU [C).
IJRIfiGS (K. M.).
Hri.nkley (F.).
Hapitan (d"" I-.).
Castelfrango (P.).
Castlk (b:.-\V.).
Chantre (E).
Charencey (Comte de).
Chauvet (G.).
<;hesneau (G ).
Chollbt (V.).
CuLl.lNEAU.
Coi.occi (Marquis A.).
Dkloht.
Deniker (d"" J.).
Klbheuil (L.).
Dcnus (A.).
l>rMONT (A.).
Fahabee (\V.-C.).
loi.u.N (ll.-L).
F01..MAR (!).).
Fontaine (A.),
FuURbRIGNIKH (K.).
FuUHKAU (F.).
Krani;ois.
Caii lard (.M.-C).
Girard le Uialle.
«ilUFFRIDA RcGGIERI (V.).
GOBY (P.).
GODDARD (P. -F.).
GUKBHARD (H.).
llAEr.KKL (E.).
Hamy (d-^ E.-T.).
Héuer (F).
soc. u'anturùp. i9û5.
150. IIennëbico (L.)
298, 1Iirth(F.]. ~
449, Holmes (VV -11.).
llouzÉ (n').
IIrducka (Aies).
IIulbicrt (H.-U.).
Jakole (d"" C).
Je.nks (A.-E.).
.locGHE (E. de).
Kay (Ch. de).
Kate 11. Ten).
Klaatsch (11. von).
Kroeber (A.-L.).
Eacol'lolmkhe (G.).
Lambert (F.).
i.ASTEYRIE (H. de).
Laville (A.).
Le Double (A. -F.).
Lejeune (Ch.).
Lepesql'kl'r (P.-Ch ).
Leroy (or E.-B.),
LlSSAUKR (d' a.)
Livi (Df K.).
LORTET (d--).
Llmholtz (C).
Macdol'gal.
Macler (F.).
Manouvbier (d"" L.).
Mauss.
Mayet (d"" L.).
Mksser.sch.midt (d' L.).
Meumann.
MiNGAUD.
MONFALLET (D ).
-MOORE (CI.-B).
Mih.ler (.m. -IL).
.Nery Dklgado.
Neuville (IL).
Ohft.
OUTES (F.).
I'ai'illaclt (d'' g.).
Pelletier (x)'- M.).
Peyrony.
Pic (J.-L.).
PlERPONT (E. de).
PlÉTRB.MENT {(].-\.).
PlETTE (E.).
puLAK a.-.i.).
Po.\IMEROL (.M. -F.).
l'tICCIONI (N.).
PUTNAM (F.-W.l.
42
462
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Rkgnal'i.t (d^ F.)-
Reinach (S.).
Retzius (G.).
Rivière lE.).
Salas (C.-P.).
Schi.aginhal:fkn ((),
ScHMiDT (von E.).
Schneider (d'').
SchûKFFKR (Ch.).
Sr.HOEMBS (l)'l.
Schwalbe (G,).
Smalwood (M.-E.).
Stratz (d' C.-H.)-
Thrha (M. (Je),
Thiot (L.).
Thomas (C).
Thomas (N.-W.).
ToROK (Aurel von).
Vasgoncellos (.1 l.eito de).
Vauvillb (O.).
VoLKov (Th.).
Wagner (d'' P.).
Weisbach (d' a.).
WlEDMANN (d' a.).
WiMMKR (L.-F.-A).
Yachvili (Dr).
Zaborowski (S.).
TABLE DES FIGURES
Fig. I à -l.i. — Héraldisation de la mar-
que de propfiétc et les origines
du blason, p. 100, fig. l-t, armoiries de Y'va.
la famillo von Dransfeld ; fi;,'. 'l-V, armoi-
ries (le la l'aiiiillo Giseloi' von Miiudon ;
fig. 8-1), amnirios de la famille von
Plosse; fi. \'2. 1H, 1 }, sceaux d'Andri^ el Fig.
Ilans Miuideniaiin; fig. lo-17, sceaux de
la famille Spockbotol ; fig. 18-19, marques
relovées à Krturt; fig. ".iO, armoirio prin- Fig.
cipalo de M. T&uji: fig. 24-!2;>, armoiries
secondaires do M. Tsuji, p. 109.
Fig. 24 à 26. — Découverte d'un menhir
tomhé sous les dunes et d'une sta-
tion gallo-romaine aux (Jhaumes de
Saint ■ Hilaire de - Riez ( Vendée),
fig. 1. état des lieux, p. 126; fig. 2, Creux
d'argent, p. 130; fi'.;. A, tare supérieure,
p. m.
Fip 27 à 29. — Sépultures néolithiques
de Montigny ■ l'Engrain (Aisne), Fig.
fig. 1, ensemble de nouvelle galerie cou-
verte, p. ISl ; fig 2, croquis du plan d'un
groupe de sépultures, p. 152; fig. ;^, coupe
des sépultures, p. I.W.
Fig. 80. — Sur les pierres taillées anti-
classiques, fig , oiseau de pierre, p. 200.
Fig. 31 à 32. — Décoîiverte d'nn menhir
tombé sous les dunes et d'une sta- Fig.
tion gallo-romaine aux (Chaumes
de Saint Hilaire de-Riez ( Vendée),
fig. '♦, vase gallo romain, à col lirisé, p.
276; fig. n, anneaux métalliques, en
bronze, p 277.
Fig. 83 à 37. — Gravures sur os de l'épo-
que çallo-romaine, fig- I. radius de
bœuf avei- gravures, p. 313 ; fig. 2, schéma
de puits funéraire gallo-romnin ; fig. 3-6,
schémas do côtes de bœuf, p. 313.
Fig. 38 à 47. - FAude anthropologique
de l'Annamite Tonkinois, fig. 1, sa-
peur du génin, ilo ans; fig. 2, sapeur du
génie, 29 ans, p. 323; fig. 3, sapeur du
cénie, 27 ans : fig. 4, sapeur du grnic,
31 ans, p. 330; fig. S, tirailleur. 30 ans ;
fig. 6, arliliour, 27 ans, \k •"«3S;fig. 7,
tirailleur, 26 ans; fig. 8, tirailleur, 27 ans.
p. 342 ; fig. 9, tirailleur. 22 ans; fig. 10
tirailleur, ".^4 ans, p 3i6.
18. — La Vienne aux temps préhis-^
riques, carie préhistori(jun do la Vienne,
p. 3o5.
49. — Craniectomie et régénération
osseuse, fig., p. 370.
SO à 56. — Dolmen de l' Echaffaud
du Plfssis au Bernard {Vendée),
fig. 1, décalque du cadastre du Bernard,
p. 385; fig. 2, état du dolmen avant les
fouilles d'août 1905, — vue du côté Ouest,
p. 387; fig. 3, état actuel du Dolmen, vue
Ouest, p. 389; fig. !•, état actuel du Dol-
m n, vue Est, p. 390; fig 5, fouille du
Dolmen, phase moyenne îles travaux,
p. 391; fig. 6, schéma de la situation du
Dolmen et constitution du niégalillie avant
fouilles, p. 392
. 57 à 60. — Problème anthropologi-
que des Parias et des castes homo-
logues chez les Dravidiens, fig. 1,
trois Parias tamouls do Pollachi p. 406
bis ; fig. 2, famille Poulayor de Maliatour,
p. 406 bis; fig. 3, jeune Palier, p. 406
bis; fig. \, Nayer, de Maliatour, p. 40fj
bis.
61 à 6!). — Etude de la géographie
anthropologique du département
du Rh'ine, fig. \. répartition de.s tailles
en France \\. 431 ; fig. 2, rarte do la taillo
en France, exemptions p lur défaut do taille
do 1831 à 1860, p. '»32; fig. 3, carte indi-
quant la répartition des tailles inférieures
à l"";)'* (n France, p. i3'i; fig. 4, carte in-
diquant la répartition dos tailles do 1"'73
et au-dessus, en France, p i:'>o; fig. 5,
diagramme indiquant lo groupement des
différentes tailles dans lo Rhône, p. 437 ;
fig. 6, diagramme indiquant lo gioupe-
ment des dilTérontes tailles dans la Lozère,
p 438; fig. 7. carte moiitran! l'immigra-
tioii dans le l'iliônc, p. '»3!i lig. 8. carte
iiidi<piant la répartition do l'iiidiro c^phii-
Jique par cantons dans le Ithône, Ji. 453;
fig. ^>
p. i'tl.
lassif brachycéphalo français.
TABLE DES AUTEURS
Anlliony (I)' R.). 309, 372, 373.
Atgior (D'), li3, lifi, 308, 351.
Bau.louin (Marcoll. A. 125, -lih, 271, .307, 310.
38I,3S2, 383, 398, 399, 458, 't59.
Beilholon (D ), 141, 1 i5.
Blocli(D'), 210 421.
Bouchereau (D'), 426.
Capilan (L.;, 269, 363, 373, 381.
Carlailhac i Kmilo), 286.
Charvillal iD^-j, 256.
Costa Fcrreira (A. Da), 3.57,
Demonet (D"- E), 5.
Denikpr (J ), 1, 210, 379, 398.
Doignoau (A.), 375.
Dussau l (Roné). 398.
Knjoy (Paul d"), 217.
Fourilrignior (Edouard), 211, 222.
Giovanelti (N. <;.), 287.
(;uvot (Yves). 167.
Hervé iD'- G), 307.
Hugupt (D^), 138.
Lacouloumèro (G ), 383.
Lapicquo (Louis), 400.
LehmannNitsche (H.), 220.
Lejeune (Charles), 183, 211, 213, 381, 449.
Manouvrier (L.), 3, 135, 210, 361, 367. 372,
460.
Marie (D^), 369.
Mayet (l)^ L.). 426.
Mazcllière (Marquis de I.a), 210.
Morliilct (A. do). 210. 270.
Papillault (D-), 101, 209, 210, 260. 308. 361,
3C3, 423.
Pelletier (D' Madeleine), 36'J.
Piètrement 219.
Pittard (Eugène), 279.
Rabaud (D' Et.), 424.
Regnault (Dr Félix), 25».
Robin, 255.
Roux (D' Paulj, loo, 203, 218, 321.
Salomon (Paul), 303.
SébiUot (Paul), 1, 3, 101, IW, 309, 381, 31)7,
448.
ThieuUonlA.), 112, 199.
Van r.ennep (Arnold), 103.
Vauvillé(0.), 151, 195, 246.
Veineau (D'), 265, 376, 379.
Volkov (Th.), 101, 289, 460
Zaborowski (S.), 102, 195. 219,255, 266,26;),
378, 379.
TABLE DES THAYVIX OlîKiINAUX
DES l'HIXCII'AI.FS COMMrMCATlO.XS
AiV.^EE iiior.
AFCilKR (l)') .... I.;i Vieillie aux (eiii|is |»réliislorii|iieH, iSiil.
BAUDOUIN (Marcel). . Découverte ii"nn iiieiiliir tonilié ihoiis U-s iliines cl d'uuo
•station ^-nlhi-roiiiaiiie aux Cliauiiios ilo St-Hilairc-dc-
Riez (Vendée), \-2:,, -271.
— Les gravures sur os do r('iiO(iuc ijallo-romaino à la nécropole
de Troiisse|ioll, au Bernard fVeodéo), 310.
— Le trii«|iiaKe des mon.slruosilés doubles humaines. In faux
tléro«l>ine, io8.
— Trois cas d'albinisme partiel, io!).
I-.AUDOUIN iMarccl, cl LACdULOU.MÈRE (G.j. I.o dolmen de IKeliaÉTaud du Plessis
au Bernard (Vendée, di^couvcrle, description et fouille, 383.
liKRTIIOLON (Dr). . . \ote sur le nom do < Maures ... l'd.
— .\ote sur les noms de Ibères, Kerbèr«'sct Ai'rieains, l'iS.
BOUCHEREAU (D'; cl MAYET (D'' L.). Contribution à l'étude do la };<''«»K''«pl"C au-
tliro|iolo»i(|ue du département du Rhône, 't'iit.
CAPITAN (L.) Kfceliereiies dans les graviers quaternaires do la rue de
Rennes, à Paris, 269.
— Présentatiou de silex de Ciuerville, près Mantes, 373.
' ATITAN {L ) et PAPILLAULT. L'Identiiieation du cadavre do Paul Jones et son
autopsie 113 ans après sa mort, 363.
CIIARViLHAT (Dr) . . Anatole Itoujou 18il-1894, 2S7.
COSTA FERREIRA (A. Dai. La capat'ilé crânienne chez les erimiiifls portugais, 3H7.
DEMONET (D' E. ) . . Keeliereiies sur la eapaeité vitale alisolue et relative
suivant le sexe et suivant certaines dimensions du corps, î».
l.NJÔY (Paul d') . . . Pénalités chinoises. 2'f7.
FOURDRIGNIER (Ed.j . Les étapes do la eéramique dans l'auliquité, 22'2.
GIOVANETTl (N. G.) , . Quelques observations et corrections se référant au travail
do .>l. Merejkwosltj sur les crânes de ki Sardaigne, 287.
GL'YOT (Yves). ... La population et les subsistances, 167.
LAPICQUE (Louisi . . Lo proî.lèmo anthropologique des Parias et des castes homo-
logues chez les Dra\ldiens, 500.
LEHMANN-NITSGEIE (Robert). Les lissions breKinatiqiieB des crânes des Iles
Canaries et les niiililatioiis analogues des crânes
néolithiques fraBçais, 220.
LEJEUNE(Lliarlesj . . La placo de liiomme dans runiver* et dans la série ïooIo-
giquc, 183.
inC» TltAVAlX nlthlINAlX Kl IMIlNCIl'Al.r- i:uMMI MCATIONS
MANOUVRIER (Li. . . fràues* de lV|io(| m'Tovlnîflciiiie, 36t.
MARIE (D'i ol PELLETIER (D<- Madoloimi CraiiitM-loinic clrt'géiiératlon osseuse.
MAYETiL.) ol IJOUCIIEIIEAU il)'). Oiiliiliulioii à rétiid«> de la ^éoifrapliie authro-
|toloKii|iie du dëpartement du Rhôae, ii>i.
PAPILLAULTlG.) . . Crftiies d' Al.j.Ios. :?fiO.
PAI'ILLAULT oMUPITAN (L.). L'ideiilififatioii du cadavro de Faul .loues et son
aiilopsie 113 an$ ajirès sa uiort, Mi'S.
PELLETIER (D' Madeleine; & MARIE (Dn. Cranieetoiuie et régénération osseuse, 369.
PITTARD (Eugèoej . . Influence do la taille sur l'indice céphalique daos un
groupe pllinique rolatiTeniont pur, 27!).
ROl]X(D'i Nulc EtiinoKi'apliique sur les peuplades du Uaut-Touiiiu,
\ •:>■>.
— Li prostituée Japonaise au Tojiiiin, 203.
— \ote sur un cas d'inversion se:iuelie chez une C'omo-
rienne, SIS.
— Conlribuliou à l'étude anthropologique de lAnnainite
Tonkinois 3*21.
SALOMON (Paulj . . . Description d'un Tietus acliondroplase, 303.
THIEULLEN (A.) . . . Eolitlics et autics silex taillés, 112.
— Sur les pierres taillées anti-classiques, 109.
VAN GENNEP (Arnold;. \otes sur l'Iiéraldisation de la marque de proprii'té el les
origines du hlason, 103.
VAUVILI.É (0 ) . . . Sépultures néolitliiques do Montigny-l'Engrain fAisne\ 151.
VOLKOV (Tli.i. . . . Rapport sur les voyages en Galieie Orientale et en Bu-
kovineen 1!)03ot IOd'k 289.
ZABOROWSKI .... Contribution à l'anthropolos^ie physique de la Sielle
cnéolithiqué. 196.
WmM AiNALYllOl K II \LI>II AlîKllOl K
<lt's iiiali«>r<>s coiiliMiiirs «la;iH et* \«»iiiiiii*
1*AU M. D'I-lr.HicaAr^
I » <» .";
ALBINISME (Trois cas il — iiartiel), 459.
Annamites tonkinois. Eluilo anthropolo-
gique, ',\i\ : Doniites iconographiques. 3:j;i:
(lonnt'os anlhropouuHriques et anatoiniques,
ftgc. taille. ;^-24 ; Poids, busto, périmètre tho-
rariquo,3:2o;Tourile taille, bi-spinal liliaquo,
H'26: Criiie, frout, face, 'd'il; Imiice trans-
versal, ;t-28, Anléro-postérieur, oreilles, bou-
che, lèvres, 8-29; Dents, USi ; Membre supé-
rieur, ;H32; Inférieur. 8;U; Système pileux,
cheveux, 3:^6; Acclimatement, 3.37; Force
musculaire, dit^estion, 338: licspiration,
circulation appareil génital, organes des sons,
339; Voix, lanu-age. fonctions inlellocluolles,
3Ul; Sensibilité, .Ul ; Volonté, 3i'2: Reli-
giosité; Patriotisme, 3i3; Vertus iloines-
tiques, moralité, 344; Vice, jeu, opium, 3i6;
Pédérastie, données pathologiques, 347.
ANTHROPOLOGIE physique do la Sicile énéo-
lithique, 19K.
ARTICLES à signaler pendant le premier se-
mestre 190'-), ::>99; — pendant le deuxième
semestre 1903, iaS.
Bulgares et Macédoniens. Présentation de
l'article do M. Donikor, 379.
CAPACITÉ vitale, absolue et relative, suivant
le soxe et suivant certaines dimensions du
corps, ">; Définition, 8; Spirométrio, 9;
Indications bibliographiques, 13: Technique
de la spirométrie, li: La dialhèse syphili-
tique n'influence pas la — , ni la i;rosscsse,
Le corset la diminue, Ifi; Choix d'un
spiromètre, 17; Ordination d'aprè< la capa-
cité vitale : choi l'homme, "20: chez la femme,
57: D'après la taille, h. 2.:. f. r,0; D'après la
longueur du buste, h. 28, f. 63; D'ajiri-s la
longueur des membres inférieurs, h. .12, f. 65- ;
D'après le rapport 8 B, h. 34. f. 66; D'après
la largeur bi-acromiale, h. 38, f. 69; D'après
la longueur du steroum. h. 41, f. 71 ; D'après
le poids, h. 13, b. 73; D'après l'indice do
corpulence de Bouchard, h. }6, f 7a: D'après
la circonférence thoracique, h. 48, f. 77 ;
D'après l'indice de mégasomio, h. .^0, f. 79;
D'après l'indice d'ourypiastie approchée,
h. •">4, f. 82; Résumé et" conclusion, 98.
CÉRAMIQUE. Poteries néolithiques d'ErondclIcs
^Sominej, I5t; Chronologie céramique, vasos
susiens, poterie dolménique, anciens procédés
do fabrication, !222.
CI-.RAUNIES. — Observations de M. Ca. tailhac
à propos d'un travail do M. le D"^ Marcel
Raudouin sur les —, et réponse de celui-ci,
28*;, 287.
CIMETlF.RE ;i INCINÉHATION. — ( hamps
d'urnes, présentation do l'ouvrage de M. Pic,
378.
Congrès international d'aiilliropologio et d'ar
chéologio préhistorique so tiendra à Monaco
du 16 au 21 avril I90(i. Le préhistorique dans
la région de Monaco, questions générales, 422.
COULEUR DE LA PEAU. Table comprenant
23 morceaux do verre opaquo ordonnés en
série, discussion, 210.
CRANES d'Abidos, 260; Variations prouvant
que les habitants do la vieille Egypte no
constituaient pas une race pure, 2tjl ; Indices
sérJés par ordre décroissance. 262; — ordon-
nés suivant leur diamètre frontal, 26i, —
dit d'Osiris, 2(j'f ; Discussion, 2i^*); Observa-
tions sur les — do la Sanlaigno, 287 ; — de
l'époque méiovingienne, 361.
CRANIECTOMIE et RÉGÉNÉRATION OSSEUSE.
La trépanation n'a aucune ellet sur l'état
montai <t sur les crises convulsives, 3'i!):
Discussion, 372.
Criminels /portugais. (Lacipacité crânien-
ne chez les — ), 357; — jinssèdent générale-
ment une capacité plus grande que colle dos
normaux, 3')9; Discussion, 361.
DÉPÔT par le D' Hervé d'un pli cacheté dos-
tiiié à être ouvert en séance, 26'J.
DOLMEN do l'Écliafaud du Plessis, au Rornard
( Vendée ) historique, 38;',; Folklmo, ély-
mologie. voie d'accès, ASi : Situation, alti-
ludo, 386; Fouilles, 3s8 : Aspect aetuoi, 389;
Géologie, nature du monumoiil. 39 V; Trou-
vailles, 39.".
ÉLECTIONS.
— - Membre titulaire : M Déchelotte.
— Associés étrangers : MM. Cunninghatii et Hol-
mes
— Correspondant étranger : xM. Ingenole Sinilh
— Commission de vérification des comptes' :
MM. Giovanetli, Girod, Lejeune.
408
TATUr ANAI.YTIOIT. F.T AI.I'IIAllKTIOI'F
— Commission <i'oxaineu île la Biblioth^quo et
(les coUoclioii» MM. Scliuii.U, Anthony,
Vauvillé. I'!'..
— Moinhro titiilairo : M. lo D"" l'aul LonRhois.
— M. (le Bar remplace M. Giro let ilans la
Commission des Bnances : MM. Vinson et
«leBar romplaconl MM.Vauvilli'ctSrhinidt
dans la Commission d'examen do la Hi-
bliolhèquo et des collections, 19:..
— Mombrc.s liiulairps : MM. L»uliiouil, Cliam-
liardtl, Paul Sa'.omou, :294.
— MM. le D>-A. Fort, Hc, :n8.
— Questionnaires de sociolopic : M. M. Caj.ilan,
Yves Guvot, Eer\6, Mauss, Papilhmll,
Sobillot, Vcrneau, Vinson, Zabnrnwski,
'iiia.— Bureau de i90«.— Di-Variot, Piinco
Viasemsky, M™" Varigard, nommrs mc.n-
bros titulaires, 450.
ÉOLITHES et autres silex taillds, 112.
ETHNOGBAPHIE Los peuplades du Haut-
Tonkin, In";; Poulahs. Thaïs, 137 ; Carac-
tères physiques des —, InS; InlelloclnoU,
relig.on, rites funéraires, Iîi9; La famille;
lo nraria^o : situation dos enfants, des fonimos,
des vioiilards, l(il ; Alimentation, boissons,
habitations, industrie, art, parures, 16:^ ;
Niâns, Nhungs, Maus ou Y^os, 164; Méos,
I6r5.
Fauvel. Rapport présenté au nom de la Com-
mission du prix, i2i.
FOETUS achondrnplase. Le sujet est un enfant
mort- né presqu'à terme, du sexe masculin,
308; Les monstres ectroméliens phocomèles
paraissent présenter un type de structure
comparable à celui des adi ,305; Discussion,
307.
FOLKLORE de France. Tome II. La Mer, les
Eaux douces, 381 i Présentation).
GRAVIERS quaternaires de la rue de Rennes,
269; Discussion, 270.
GRAVURES sur os (D' Marcel Baudouiûj, 310.
HÉRALDISATION de la marque de propriété
et origines du blason, 103.
HOMME. Sa place dans l'univeis, 183, 217.
INDICE Cf'PHALlQUE Inllucnce de la taille
sur r —, 279; La taille semble avoir une
influence manifeste sur l'indice cépbalique,
283.
INVERSION sexuelle chez une comononno,218.
LÉSIONS brogmatiques dos crânes dos Canaries
et mutilations analogues dos crânes néoli-
thiques français, 220.
LUXATION préhistorique do l'atlas sur l'axis,
381 (Présentation).
Maures. Note sur le nom des —, "i'il; Dis-
cussion, 143: Ibères, Berbères et Atiicains,
14li; Discussion, 146.
MENHIR Tombé sous les dunes, et station
"alto romaine aux chaumes de Si Hilaire-de-
Riez (Vendée); Découverte, 125; Fouilles,
126; Folklore, 127; Historique, 128; Situa-
tion, 1-29; Description, 1.50, 131, 132, 133;
D.^côuverlo d'ossements, 273; De douze sque-
Icltos, 275: De vases, 276; D'anneaux, 277.
MONliMENTS RllNIQUES DU DANEMARK.
Pié.«ontaliun de 3 volumes do l'ouvrage de
M. Wimmer, 379.
MONSTRUOSITÉS. Truquage, un faux déro-
dyme, 158.
Mortillet ((labriol de). Hommage à la mémoire
de —, 397.
NÉCROLOGIE. Mort dn D^ Collincau, ICI : Mort
do M Capitan, do MM. Girard do Rialle
(allocution), li'.t; D' Tautain, 195, Anatole
Roujoii, 256; Akerminn. 29i ; Elisée Reclus,
309 ; Lionel Bonnemère i48.
OUVRA(.ES ET OBJETS OFFERTS. Docteur
Yachvili 'médecine populaire en Transcau-
casioj, 101; Photographies de Lolos, 102;
Portrait d'Aboi Hovo'acque, 14! ; Silex imi-
tant un tranchot, 195: Mémoire do M. l'iétre-
menl sur les races chevalines dans le temps
et dans l'espace. 219; Morphologie osseuse
expliquée iiar l'anatomie patholo;;ique. mé-
moire de M. le 'J' Rcgnault, 254; Liste des
ouvrages offerts pendant le premier .semestre.
^i9i; Note préliminaire sur les méi;alitlies
observés dans le Soddo de MM. Chollet et
Neuville, 309; Crânes de l'époiiue mérovin-
gienne, offerts par M. C. M. Boulanger, 361 ;
Pièces qui ont trait à l'anthropologie dans
l'exposition de la société des fouilles archéo-
giquos par M. Foudrignier, 3(;3; Un silex
par M. de Bar, 381 ; Découverte d'un méga-
lithe funéraire sous-lumulus au Mégaillon de
St-Martin-dc-Brom (Vendée). MM. Baudouin
et Lacouloumèro ; Lo préhistorique à Apre-
mont (Venlée), MM. Baudouin et Lacoulou-
mèro ; La edad do la piedraen Patagonia, 382 ;
M . Outes : Contes arméniens, Frédéric Mac 1er ;
Manuel de recherches préhistoriques, 398;
Question des races, Ch. Lejeuiie, 4i9; Liste
générale des ouvrages offerts pendant le
deuxième semestre 1905, 450.
Parms et castes homologues chez les Diavi-
diens, 400; Villalas. 40-2; Palier, 403; Com-
paraison physique des trois castes ci dessus,
40i; Poulayer et Choroumas, 406; Nayer,
410; Problème ethnologique, 413; Exposé
do Caldwell, 414; Discussion, 421.
Paul Jones, identification de son cadavre et
son autopsie 113 ans après sa mort, 363 ; Do-
cumsnts historiques; Buste de Houdon : Ca-
ractère morphologique: Mensuration, 363;
Discussion, 367.
PÉNALITÉS chinoises, 247; Peines principales
au nombre de huit, 249; Peine de mort ap-
pliquée de cinq façons, 252; Peines acces-
soires, 253; Sursis et révision, 254.
PIERRES TAILLÉES anticlassiques (Thieullen),
199.
POPULATION ET SUBSISTANCES. La ration
type 167; La ration végétale en France, Le
blé dans le mon lo, 170; La ration animale
on France, 176; En Angleterre, 178; La
viande dans le monde, 179.
PROSTITUÉE japonaise au Tonkin, 203; Re-
crutement, mise en route, répartition, 204;
Modo d'existence, étude somatique et psy-
chique, 205; Ces femmes sont généralement
petites et mal faites ; Seins piriformes ; Sys-
tème pileux développé; Cheveux longs ot
épais ; Yeux très bridés ; Les petites lèvres font
saillie: Anus normal ; Intelligence vive, 20b;
Leur morale, 207: Pathologie; Maladies
vénérieuues fréquentes, 208 ; Discussiou, 209.
TAHi.K ANAi.vrign-: i:t alphmiktiuik
iC,[)
l'YGMÉKti Dt LAlliiyUE CKNTKALi:. Di,-
cussion, :',T.),
HAPI'URT (lo M. ManouvriiM-, scci-(5lairo "éiu^rul
sur l'aniiro l'JUl. 135; — do M. Ilut-uct, lié-
sorior, l.{8: l5iblioilK''qiio et inuMS\ -Jli; _
(Je la Couiiiiissioa tlos linances, 5il3.
Rhône. CoDlril.ulion à TiMule <lo la Ri^>-ra-
phio aiilhropologiquo du drpait-jinoDl du'" —
ii'ii; Moyenne do la taille, 4^7; Comparaison
de la taille et du piids, -i-JS; Kxemption pour
défaut do taillo. 4;!->; Iiitlu. iice dos régions
sur la taille, VM ; Origine dos habitants du
département du —, 4;!8: Injjro eéplialo-mé-
Irique, HO, Couleur des yeux, 4t6.
SÉPULTUIIE néolithique de Monlij;ny-L'i:n-
grain (Alsnoi. Nouvelle galerie, 1;il.
SILiX de Cuervillo, près Minlos. Question dos
(^^^ohthes. Faits nouveaux, ii?;^ ; Discussion
;!7.') ; — du Moustier, asi.
IVmmc' (la) aux temps préhistoriques, ,151;
rério lo glaciaire O'i-lustrio moustérieiinoi '
Uaco huniaino dite de l'OImo, W.VA ; i'éiiode
post-glaciairo et à températures extrêmes;
Inluslrio magdah'nionno; Race humaine in-
cortiino, ■AYiVi.
VOYAGE on (Jalicie orientale et en Hukovine,
iS!t; — d'exploration; Délégation donnée à
M. Volkov, 28(i.
ERRATUM. - P. 2(i7 : Reporter le dernier alinéa à la paye m pour continuer farticlo
La pnmilirc Egypte el sfs rar,'s, du même auteur.
soc. d'anthrop. 190o.
33
H U L L E T I NS
KT MÉMOIRKS
DE LA SOCIÉTÉ
D'ANTHROPOLOGIE
DE PARIS
y, Imp. Lalfray lils & gendre
BU LLETl NS
ET MEMOIHKS
DE LA
f r
SOCIETE D'ANTHROPOLOGIE
DE PARIS
TOMI-: si:itii:mk. — v-- si:iîiI'
1906
I>\111S-YI^
A LA SOCIÉTÉ d'aSTHROPOLOGIE. RUH DE l"ÉCOLE-DE-MÉDECINE, I3
ET CURA \l\\. MASSO.X FT CK'j I.IItnAIRCIS DE l'aCADÊHIE I»E MÉDECI.VE
120, BOULEVARD SAl.NT-t.EB.MAIN
19 0 0
SOCIiriK D'ANTHROPOLOGIE
1)1-: l'Aïus
(fondée en 1859, RKCONXiE d'utilité publique en 1864)
15, rue de l'École-de-Médecine, 15
STATUTS
TITRE PREMIER. — but et organisatkjn de la socIl':T^';.
Akticlr i"'. — La Société il'Antliropologie de Paris a pour init l'étude
bcieiitilique des races humaines.
Akt. 2. — Elle se compose, on nombre illimité, de membres titulaires de
meiubres honoraires, de membres associés étrani^jers et de corresponcUmls.
Aui". ."1 — Tous les membres et correspoinhinfs de la Société sont nommés
par voie d'élection, sur la prop(jsition de trois membres, sauf l'exception
indiquée à l'article 11.
Akt. 4. — Un Comité central do trente membres, se recrutant lui-même
par voie d'élection parmi les membres titulaires, est chargé de veiller aux
intérêts matériels, moraux et scientifiques de la Société. Les membres du
Comité central peuvent seuls voter sur les modiflcations des statuts et
règlement. Les menil)res du Bureau et de la Commission de publication ne
peuvent être choisis que parmi les meml)res du Comité central.
Akt. 5 '. — Le Bureau, élu par la Société en séance publique, se compose
d'un président, de deux vice-présidents, d'un secrétaire général, d'un secré-
taire général adjoint, de deux secrétaires annuels, d'un archiviste, d'un
trésorier et d'un conservateur des collections. La Commission de publica-
tion se compose de trois membres. Tous ces fonctionnaires sont élus pour
un an, à l'exception du secrétaire général, dont les fonctions sont trien-
nales. Tous sont rééligibles, à l'exception du président, qui ne peut être
réélu qu'après une année d'intervalle.
AiiT. 6. — La Société est représentée par le Bureau.
TITRE II. — CANDIDATURES ET NOMINATIONS.
Art. 7. — Los titres de membre titulaire et de correspondant national ne
peuvent être conférés qu'aux personnes qui ont fait acte de candidature.
Les membres honoraires, les associés et correspondants étrangers peuvent
' ire nommés directement par la Société.
Art. 8. — Les conditions à remplir jtour devenir membre titulaire ou
pour obtenir le titre de correspondant national sont ; 1° d'être présenté par
trois membres, f[ui inscrivent leur proposition sur le grand registre et y
apposent leur signaturo; 2" d'adresser an président une demande écrite;
3° d'obtenir au scrutin secret la majorité des sulTrages des membres présents.
Ce scrutin a lieu dans la séance qui suit l'inscription de la candi<lature.
Art. 9. — Les associés étrangers et les correspondants étrangers sont
nommés individuellement et au scrutin secret, à la demande de trois mem-
bres, qui inscrivent leur proposition sur le grand registre et y apposent leur
signature. Le scrutin a lieu à la majorité absolue des membres présents,
dans la séance qui suit l'inscription de la candidature.
■ Modifié couforméruent au décret du 2 octobre iUGl.
VI STATUTS
Art. 10. — Tout membre ayant ronipli, pendant cinq ans au moins, les
fonctions de membre du Comité central (ou de niem})re titulaire, antérieure-
ment à la création du (lomité i-entral, et ayant fait partie de la Société
pendant dix ans au moins en qualité do nieniltre titulaire, (ou de meml)re
associé national, antérieurement à la création du Comité ct',ntral), pourra,
sur sa demande, être élu membre lionoraire, en séance publique, à la
majorité absolue des meml)res présents. 11 cessera, dés lors, d'être soumis à
la cotisation en continuant à jouir de tous les droits des membres titulaires
et à recevoir gratuitement toutes les publications de la .Société.
Aht. 11. — La Société, sur la proposition de cinq membres, confère direc-
tement le titre de meml»re bonoraire à des savants })ris hors de son sein,
et ayant rendu des services éminents à la science. Les présentateurs ins-
crivent leur proposition sur le grand registre et y apposent leur signature.
L'élection a lieu à la majorité altsolue des membres présents, dans la séance
qui suit l'inscription de la condidature.
TITRE IIL — ADMINISTRATION.
Art. 12. — Les ressources de la Société se composent :
lo Du revenu des biens et valeurs de toute nature appartenant à la
Société ;
2" Du droit d'admission pour les membres titulaires et pour les corres-
pondants nationaux. Ce droit est fixé à 20 francs;
3" De la cotisation payée par tous les memlires titulaires, résidants ou
non résidants. Le montant en est Jixé par la Société, suivant ses besoins;
40 Des amendes encourues suivant qu'il sera statué par le règlement;
5° Du produit des publications;
6° Des dons et legs que la Société est autorisée à recevoir;
7° Des subventions qui peuvent lui être accordées par l'Etat.
Art. 13. — Les fonds libres sont placés en rentes sur l'Etat.
Art. 14. — Les délibé>rations du Comité central relatives à des aliénations,
acquisitions ou échanges d'immeubles et à l'acceptation de dons ou legs,
sont subordonnées à l'approbation du gouvernement. Elles ne peuvent être
prises qu'après une convocation spéciale, et à la majorité des deux tiers des
membres du Comité qui assistent à la séance.
AuT. 15. — Les livres, ])rocliures, cartes, crânes, plâtres, pièces d'ana-
tomie, objets d'art et d'industrie, dessins, photographies, etc., qui composent
les collections de la Société, ne peuvent, en aucun cas, être vendus; mais la
Société pourra compléter son musée par voie d'échanges. Ces échanges ne
pourront porter que sur des objets possédés à plusieurs exemplaires. Ils ne
pourront avoir lieu qu'entre le musée de la Société et d'autres musées
d'une importance reconnue, et ils devront toujours être indiqués sur le
catalogue.
TITRE IV. — DISPOSITIONS générales.
Art. 16. — La Société s'interdit toute discussion étrangère au but de son
institution.
Aht. 17. — Un règlement particulier, soumis à l'approbation du ministre
de l'instruction publique, détermine les conditions d'administration inté-
rieure et, en général, toutes les dispositions de détail propres à assurer
l'exécution des statuts.
Art. 18. — Nul changement ne peut être apporté aux statuts qu'avec
l'approbation du gouvernement.
Art. 19. — En cas de dissolution, il sera statué par la Société, convo-
quée extraordinairement, sur l'emploi des biens, fonds, livres, etc., apparte-
nant à la Société; toutes les pièces du musée deviendront de droit la pro-
priété du Muséum d'histoire naturelle, à moins que la Société n'en dispose,
par un vote régulier, en faveur d'un autre établissement public ou d'une
société reconnue par l'Etat. — Dans cette circonstance, la Société devra
toujours respecter les clauses stipulées par les donateurs en prévision du
cas de dissolution.
REGLEMENT Vil
RÈGLEMENT
I Hrvisi' ni r.KlIi
Tri'IlI! PREMIP'R. — DES SÉANCES PUBLIQUES.
AitTif.i.K l''"". — Les séuiH't's publiques ont lieu le premier et le troisième
jeudi de chaque mois, de trois à ciiK] lifures de l'après-midi. Il pourra être
tenu des séances extraordinaires sur la proposition du Bureau et [»ar ilèci-
sion de la Société.
Aht. •*. — La périodicité des séances pourra être climi^rée par une simple
décision de la Société, à la majorité absolue des membres présents. [>ourvu
■ jue la Société en ait été prévenue une séance à l'avance par son président,
t que tous les membres aient, en outre, été convoqués à domicile.
Akt. 3. — La Société prend ctiaque année deux mois de vacances, en
loût et septembre
TITIUI II. — FONCTION DU BUREAU.
Art. 4. — Le président dirige les séances, proclame les décisions de la
Société et les noms des membres élus et nomme, après avoir pris l'avis du
Bureau, les commissaires chargés des rai)ports et des travaux scienlificjues.
Aht. 5. — En l'absence du président et des vice-présidents, le plus
ancien membre préside la séance.
Art. 6. — Le secrétaire général, élu pour trois ans et rééligible, re»^oit,
dépouille et rédige la correspondance. 11 prépare l'ordre du jour des séances
lie concert avec le président. 11 a la parole immédiatement après l'adoption
du procès- verbal, pour communiquer à la Société les i)iècos de la corres-
pondance. Il est chargé de la publication des Bulletins el Mémoires sous
la direction du Comité de publication, avec le concours des secrétaires
animels. Il est adjoint de droit à la Commission de publication et tous les
travaux destinés à cette Commission sont d'abord déposés enire ses mains.
Il est suppléé dans ces dilïérentes fonctions par le secrétaire général adjoint.
Art. 7. — Les secrétaires sont chargés de la rédaction des procès-ver-
baux. Pour concourir à cette rédaction des procès-verbaux, la Société
pourra élire, en dehors du Comité central, deux secrétaires adjoints piùs
parmi les membres qui, étant titulaires pendant plus d'une année, ont fait
à la Société une communication scientifique.
Art. 8. — L'archiviste est chargé de"la conservation des manuscrits, des
dessins, des livres et gravures, des paquets cachetés, des lettres adressées
\ la Société. Il date et paraphe toutes ces pièces le jour de l«ur réception.
Les pièces anatomiques, les moules et tons les objets olïerls à la Société
ou acquis par elle sont mis sous la garde du conservateur des coUectioiis.
Tous deux dressent un catalogue et un inventaire des objets de tout genre
qui leur ont été coniiés et en rendent compte tous les aus à une Commission
spéciale.
Art. 9. — Le trésorier reçoit le montant des cotisations et des droits
d'admission, tient toutes les écrilun-s ndutives à la comptabilité, signe, de
concert avec le président, les baux et les bordereaux des dépenses, solde les
frais de publication, touche chez les libraires le proiluit de la vente des
Bullelins el Mémoires, et rend, chaque année, compte de sa gestion à une
Commission spéciale.
TITRE III. — DU COMITÉ central.
Art. 10. — Les questions administratives, personnelles, règlcinontaiies
et eu général toutes les questions qui ne sont pas purement scientifiques.
VIII HKr.r.KMKNT
exception faite de celles qui sont mentionnées dans les arlicles 32, *iS et 7'i,
sont examint'es et résolues dans les séances du tloinité central.
Aht. 11. — Les réunions ilu Comité ne sont pas puhli(iues, et n'ont
jamais lieu le même jour <]ue les séances de la Société. lOllessont annoncés
liuit jours à l'avance par le président, en séance publique. Les membres
du Comité sont en outre avertis à domicile. Tous les membres de la Société
ont le droit d'assister à ses réunions.
Aht. 12. — Les membres du (lomité central qui, sans justifier de leur
absence, manqueront à quatre séances consécutives du Comité, seront
considérés comme ne faisant plus partie du Comité. Celte dispo.sition ne
concerne pas les anciens présiaents de la Société.
AuT. 13. — Dans ces réunions, tous les membres de la Société, indis-
tinctement, ont toujours voix consultative. Les membres du Comité seuls
ont voix délibérative.
Aht. 14. — Le bureau ilu Comité est le même que celui de la Société.
Toutefois, le Comité |iourra, à la demande des secrétaires, charger un de
ses membres de rédiger les procès-verbaux de ses séances.
Art. 15. — Les procès-verbaux des séances du Comité, n'étant pas des-
tinés à être publiés, sont transcrits par les soins du secrétaire sur un
registre spécial ijui reste toujours déposé dans les archives.
Art. 10. — Les séances du Comité ont lieu régulièrement : 1° en janvier,
dans la quinzaine qui suit la séance d'installation du Bureau; 2" dans la
première quinzaine d'avril; S° dans la première quinzaine de juillet;
4° dans la première quinzaine de novembre.
Art. 17. — Le Bureau a en outre le droit de provoquer une réunion du
Comité, toutes les fois qu'il le juge nécessaire.
Art. 18. — Lorsqu'une ou plusieurs places sont vacantes dans le sein du
Comité, le Comité nomme une (Commission de cinq membres chargée de lui
présenter une liste de candidats. Les personnes portées sur cette liste
devront appartenir à la Société depuis au moins un an en qualité de mem-
bres titulaires.
Art. 19. — La présentation de cette liste doit être motivée par un rapport
écrit qui est lu et discuté séance tenante. Le vole suit immédiatement la
discussion, et l'élection a lieu à la majorité absolue des membres qui y
prennent part. Mais elle n'est valable que lorsque le candidat élu obtient
au moins douze voix.
Art. 20 — Le Comité peut élire plusieurs membres dans la même séance
et à la suite du même rapport. Ces élections, qui ont lieu par scrutins suc-
cessifs et individuels, ne peuvent dépasser le nombre de trois dans la même
séance.
Art. 21. — Le Comité central nomme chaque année une Commission
permanente de cinq membres, qui est chargée d'examiner les candidatures
au titre de correspondant étranger ou d'associé étranger. Avant d'inscrire
une de ces candidatures sur le grand registre, les présentateurs doivent sou-
mettre à cette Commission les titres anthropologiques ou autres de leur can-
didat. Le jour de l'élection, le président de la Commission annonce, avant
le scrutin, que la candidature est présentée avec ou sans l'appui de la Com-
mission.
Art. 22. — Cette Commission est chargée en outre d'étudier la liste des
membres étrangers au point de vue des changements d'adresse, des va-
cances par décès ou par démission, et des lacunes à combler, suivant les
besoins de la Société.
Art. 23. — Les résultats des séances du Comité sont annoncés par le
président dans la plus prochaine séance de la Société, soit publiquement,
soit eu Comité secret, et sont consignés, s'il y a lieu, dans les Bulletins et
Mémoires. Cette communication ne peut donner lieu à aucune discussion.
TITRE IV. — RECETTES ET DÉPENSES
Art. 24. — Le droit d'admission est fixé à 20 francs pour les membres
titulaires et pour les correspondants nationaux. Les membres honoraii-es.
REr.LEMENT IX
los associps ôtrangers et les correspondants (étrangers sont admis t,M-atui-
tetuent.
Art. ■,'."». — Lt!s nuMulires titulaires fournissent chaque annét^ une cotisa-
tion «le 80 iranfs. qui jieut f'fre laclieti-e par le versement d'une somme
de o(»0 francs dont le paiement pourra être elTectué en trois anniiiiés uon-
si'ciilin's de 10(1 francs. Ils reroivent gratuitement un exem[>laire de
toutes les puldications de la Sociidé. f.es memlires nouvellement l'-lus ont
droit aux fascicules déjà puldit'-s des liiiUclina ci Mémoires de l'aiint'ie.
AuT. 2ij. — Le recouvrement des cotisations des membres titulaires ijui
ne résident pas dans le département de la Seine s'etVectue à domicile aux
frais de la Société. Toutefois les membres (jui résident hors de France doi-
vent désii,'ner à Paris une [jersonne ciiargée de verser leur cotisation.
AuT. 2/. — Tout membre qui aura laisse écouler une année sans acijuil-
ter le montant de ses cotisations, sera averti une première fois par le tréso-
rier, une seconde fois par le président; si ces avertissements sont sans
elTet, il sera considéré comme démissionnaire et perdra ses droits à la
propriété des objets appartenant à la Société.
Art. 28. — Les memlires iionoraires élus directement, les membres as-
sociés étranj,'ers et les correspondants, n'étant soumis à aucune cotisation,
n'ont aucun droit à la propriété dos objets a|»partenant à la Société.
Aht. 2d. — Les recettes provenant de la vente des publications de la
Société seront encaissées jjar le trésorier aux échéances convenues avec les
libraires chargés de la vente.
Aht. oO. — Les frais de locations, do iiureau et d'administration seront
réglés par le Bureau et acquittés par le trésorier, sur le visa du président.
Art. 4i. — Les frais de publication sont réglés par la Commission de
publication ; ils sont acquittés par le trésorier, sur le visa du président.
Art. 62. — Le trésorier présente ses comptes dans la première séance
lie février. Une Commission, composée de trois membres tirés au sort,
fait un rapport écrit sur ces comptes dans l'une des trois séances suivantes,
en comité secret. La Société vote sur le rapport et le président, s'il y a
lieu, donne ensuite décharge au trésorier.
Art. 33. — Dans la première séance de février, une Commission de trois
membres tirés au sort est chargée d'examiner le catalogue de tous les ob-
jets dont l'arcliivistc et le conservateur des collections sont dépositaires.
Cette Commission fait son rapport dans l'une des trois séances suivantes.
TITRL V. — l'UBUCATRJNS.
Art. '-'/i. — La Société publie des L'u/lalins et Ménioires originaux.
Art. /JO. — Tous les mémoires manuscrits lus ou communiqués à la So-
ciété, tous les rapports scientifiques et généralement tous les travaux qui
ne figurent pas dans les procès-vcrljaux des séances seront rerais à la
Commission de publication.
.\rt. 3G. — Les Bulletins el Mémoires sont publiés par le secrétaire gé-
néral, sous la direction du Comité de i)ublication, avec le concours des
Necrétaires annuels, et se composent : 1" des procès-verbaux des séances;
".'•' des travaux renvoyés par la Commission de publication pour y paraître
textuellement, ou en extraits, ou en analyses.
Aur. 37. — La Commission de publication se compose de trois membres
élus chacjue année au scrutin de liste et à la majorité absolue des votants.
Ils sont rèéligibles et ne i>euvent faire jiartie du Bureau I^e secrétaire général
est adjoint lie droit à cette Commission.
-VRr. .jX. — Cette (Commission dirige la publication des Itullelins el Mé-
moires de la Société. Ses droits sont absolus et ses décisions sans appel.
Elle décide, ajourne ou refuse l'impression «les travaux qui lui sont ren-
voyés et détermine l'ordre de leur publication; elle s'entend avec les auteurs
pour les modilicalions. les coupures et les suppressions qui lui paraiss«!nt
iipportunes, ou pour la rédaction des extraits qu'elle juge utile de puldier
I lu place «les mémoires primitifs.
Art. 30. — Les frais de gravure ou de litliograpliie et généralement tous
les frais de composition supplémentaire qui ne seront pas compris dans
\ RÈGLEMENT
les conventions passées avec le libraire sont snpportés par les auteurs, à
moins (jnn la Soi-iéto, sur la proposition de la < '.onimission de publication
et sur l'avis du Irt'sorier, ne décide qu'elb; prend ces frais à sa cliarge.
AuT. 'lO. — Tous les travaux im-dits lus ou a<lressés à la Sociélé devien-
nent sa propriété et ceux (jui ne sont pas i)ubliés textuellement sont dé-
posés aux arcliives avec les formes ollicielles destinées à en déterminer exac-
tement la date. (leux (jui émanent de i)ersonnes étrant,'éres à la Société ne
peuvent, en aucun cas, être repris par b's auteurs. Ceux-ci, toutefois, ont le
droit d'en faire prendre copie aux archives. Les planches, dessins, pièces
anatomi(iues ou moules peuvent être repris par ceux qui les ont présentés;
mais la Société se réserve le droit d'en ronserver la copie, la photogra-
f>hie ou la reproduction par tout autre i»rocédé, à la condition de ne point
es détériorer.
Anr. 41. — Tout manuscrit émanant d'un membre de la Société (jui ne
serait pas publié dans le délai d'un an, ou dont il n'aurait été publié «lu'un
extrait, ou qui serait déposé aux archives, sera remis à l'auteur sur sa de-
mande.
Art. 'i'2. — Les auteurs des travaux publiés dans les Bulletins et Mé-
utoires reçoivent gratuitement, sur leur demande, vingt-cinq exemplaires
d'un tirage à part sans remaniement; ils ont le droit de faire à leurs
frais un tirage à part supplémentaire.
TITRE VL — COMMISSIONS et travaux scientifiques.
Art. 43. — Tout travail inédit présenté par une personne étrangère à la
Société est renvoyé à une (Commission de trois membres désignés par le
président, sur l'avis du iiureau La Commission pourra, suivant l'impor-
tance du travail, faire un rapport verbal ou écrit; mais toutes les fois
qu'elle présentera des conclusions soumises au vote de la Société il fau-
dra que le rapport soit écrit et signé des commissaires.
Art. 'j4. — Quoique les Commissions ordinaires ne se composent que de
tro s membres, on [)eut, si on juge utile, adjoindre un ou plusieurs mem-
bres de plus à certaines Commissions.
Art. 45. — Les ouvrages imprimés adressés à la Société sont renvoyés à
une Commission, si les auteurs en font la demande; dans le cas contraire,
le renvoi à une Commission est facultatif, et le président peut ne désigner
qu'un seul commissaire.
Art. 46. — Dans toute Commission scientifique, les pièces sont remises
au commissaire nommé le premier. Il en accuse réception sur un registre
spécial dont l'archiviste est ilépositaire et c'est lui qui est chargé de con-
voquer la Commission. 11 garde le travail pendant huit jours pour en pren-
dre connaissance, après quoi il le transmet à ses deux collègues, qui ont éga-
lement huit jours ciiacun pour prendre connaissance du travail. Au bout
de trois semaines, la Commission se réunit et désigne son rapporteur. La
durée des préliminaires ne pourra être aljrégée que pour les rapports d'ur-
gence, sur l'invitation du président.
Art. 47. — Les commissaires en retard seront avertis tous les trois
mois par le président.
TITIIE VIL — DÉLÉGATIONS SCIENTIFIQUES.
Art. 48. — La Société, pour faciliter les recherches en pays étrangers, peut
confier de-; missions temporaires à des voyageurs nationaux ou étrangers,
qui reçoivent à cet effet des délégations spéciales sur parcliemin. Ces délé-
gations, essentiellement différentes des diplômes de correspondants, indi-
quent la date, la durée et la nature de la mission. Elles portent la signa-
ture du président et du secrétaire général, Leur durée sera déterminée
d'après la nature de la mission.
Elles sont renouvelables.
Art. 'iO. — Nul ne [leut obtenir une nouvelle délégation avant d'avoir
HKiiLEMENT XI
coinumiii-im'" ou transmis à la Socioti; les résultats scieiititiques dp la dé-
It'^'atiuii |)n''L'i'(leiite.
Akt. "iO — Toute personne qui désire obtenir une délectation doit f-n faire
la demande écrite et être présentée par trois nieniljresde la Société, qui ins-
oriveat la proposition sur un rej^Mstre spécial.
La Société peut voter sé;inc»^ ti-nante sur cette proposition.
Akt 51. — l-.n cas d'urgence motivée par le prompt départ du voya-
C'fur et par ridoigncinent de la première séance, le Bureau peut donner une
délégation dont la durée n'e.xcéde pas un an.
Aux. •>{. — Le Comité central pourra décerner des médailles aux per-
-onnes qui se seront aciiuiltées de leurs missions à la satisfaclinii (le la So-
ciété.
TITRE VIII. — ORDKE DES SÉANCES.
Art. 53. — L'ordre du jour est réglé par le président, après avis du se-
crétaire général. Ni-anmoins. sur la proposition de trois membres, la So-
liété peut modifier cet ordre du jour.
.^HT. 5'i. — Toute personne étrangère à la Société peut s'inscrire pour
une lecture ou une communication orale.
AiiT. 55. — Les personnes étrangères à la Société, ne pouvant obtenir
la parole sur la rédaction du procès- verbal, seront toujours invitées à ré-
sumer elles-mêmes par écrit leurs communications orales et à remet-
tre, dans un délai de 3 jours, leurs notes au secrétaire. Si elles ne ré-
pondent pas à cette invitation, elles ne seront admises à élever aucune
réclamation sur la manière dont le secrétaire aura rendu dans son procès-
verbal leurs paroles ou leurs o[)inions. Le secrétaire aura même le droit de
ne faire aucune mention de leurs communications.
-Vkt. 5«j. — lies lectures et conmiunications émanant de membres de la
Société sont discutées immédiatement, ainsi (jue les rapports. Lorsqu'il y
a des conclusions à voter, le rapporteur a le droit de prendre la parole
le dernier.
Aht. 57. — La parole est accordée, dans le cours d'une discussion, à tout
membre qui la demande pour rétablir la question, pour proposer la cl<Hure
ou l'ordre du jour pour un fait personnel.
Art. 58. — Le président rappelle à l'ordre quicoufiue dépasse les limites
«les discussions scientifiques, et à la «juestion tout orateur qui s'éloigne de
l'objet de la discussion.
Art. 50. — Le prési<lent ne peut, de sa propre autorité, interrompre
ou terminer une discussion, proposer la clôture ou l'ordre du jour; il ne
peut consulter la Société à cet égard (jue si la clôture ou l'ordre du jour,
proposé par un membre, est appuyé par deux autres membres au moins.
Toutefois, dans le cas où l'ordre ne pouiTaitêtre rétabli, le président, après
avoir consulté le Bureau, a le droit de lever la séance.
TlTl'iL IX. — élection du bureau et des commissions.
Art. 00. — La Société renouvelle son Bureau dans la première séance
de décembre, par voie d'élection, conformément à l'article 8 des statuts. Le
nouveau Bureau entre en fonctions dans la première séance de janvier.
.Vnr. 01. — Les élections du Bureau et de la (commission de publication
ont lieu à la majorité absolue des volants. Tous les membres titulaires sont
appelés à prendre part au vote.
Anr. 0-2 — Tout membre titulaire, qu'il réside à Paris ou liabite la pro-
vince ou l'étranger, peut voter soit en déposant son bulletin dans l'urne,
soitpar correspondance, suivant les furn'es indiquées dans les articles 64
et 6o.
Art. O;;. — Le Comité central, dans sa réunion de novembre, dresse la
liste des candidats (ju'il propose pour les diverses fonctions.
Art. 6'i. — Cette liste, avant d'être envoyée à tous les membres titu-
Xn REGLEMENT
laires, est communiqut''0 k la Socirté par lo président, dans la seconde
séance de novenilire. Toute candidaluro proposée par cinq membres est de
droit ajoutée à la listi-, jjourvu qu'elle soit conforme à l'article 4 des statuts,
et transmise au secrétaire p;éneral dans les trois jours qui suivent cette
séance ))uMique.
Aux. Oô. — Au terme de ces trois jours, le secrétaire {général adresse à tous
los momhres titulaires une circulaire renfermant ; l" les articles flu réj^de-
mtMit relatifs aux élections; iJ" la liste «les candidats proi)Osés par cinq
membres: 8° l'indication du jour on le scmtin sera dépouillé; 'i" un bulle-
tin de vote imprimé, sur lequel les diverses fonctions vacMUtcs sont énu-
niérées; 5" une enveloppe imprimée et numérotée, dans huiuelle lebulietin,
if-mpli et non si^jné, doit être renvoyé au secrétariat.
A ni- r,(3. — i_,e jour du scrutin, le président tire au sort, parmi les mem-
bres présents, le nom d'un commissaire scrutateur. Ce commissaire dicte
aux secrétaires les numéros d'ordre des enveloppes. Lorsque l'énuméralion
est terminée et qu'il est constaté quels sont les membres qui ont voté, le
scrutateur décacheté et dépose un à un les bulletins dans l'une. Les mem-
bres présents, qui n'ont pas voté par correspondance déposent ensuite direc-
tement leur vote dans l'urne. Le président procède alors au dépouillement
du scrutin suivant les formes ordinaires.
Art. 07. — Les candidats qui obtiennent la majorité absolue des suffrages
exprimés sont déclarés élus. Les billets blancs sont annulés.
Art. 68. — Lorsque, pour une ou plusieurs fonctions, il n'y a pas eu de
majorité absolue, un scrutin de ballotage a lieu dans la seconae séance
de décembre. Dans les cinq jours qui suivent la première séance de décem-
bre, il est adressé à tous les membres titulaires une nouvelle circulaire les
invitant à opter, pour chaque fonction vacante, entre les deux candidats
qui ont réuni, au premier tour, le plus grand nombre de sufTrajres. Le
nombre de voix obtenu par chacun des deux candidats est indiqué sur la
circulaire. En cas de partage, l'ancienneté de titre d'abord, ensuite l'an-
cienneté d'âge, décident entre les deux candidats.
TITRE X. — COMITÉS SECRETS.
Art. 69. — Sauf le cas d'urgence absolue, le Comité secret est annoncé
une séance à l'avance par le président, et annoncé do nouveau par lui im-
médiatement après la lecture du procès-verbal de la séance du jour.
Art. 70. — Les Comités secrets commencent à quatre heures et demie.
Les décisions y sont prises à la majorité absolue des votants et sont vala-
bles, quel que soit le nombre des membres qui prennent part au vote, sauf
l'exception indiquée dans l'article 74.
Art. 7L — Lfs (Comités secrets peuvent être provoqués de deux maniè-
res : 1" par le président au nom du Bureau; 2" sur la proposition de cinq
membres de la Société qui en font au président la demande écrite, en
indiquant l'objet de leur proposition. Le président, après avoir pris l'avis
du Bureau, accorde ou refuse le Comité secret; dans ce dernier cas, les mem-
bres signataires de la demande peuvent faire appel à la décision du Bu-
reau de la Société.
Art. 72. — S'il arrive (ju'une circonstance grave paraisse de nature
à motiver l'examen de la conduite d'un membre, la Société pourra lui de-
mander des explications et prononcer son exclusion. Mais cette mesure
ne l'ourra être prise que de la manière suivante : 1° une demande motivée
sera déposée sur le bureau et réclamera en même temps un Comité secret,
qui ne peut avoir lieu moins de liuit jours après et qui est précédé d'une
convocation spéciale; 2'' le jour du (lomité secret, le membre visé est ap-
pelé à donner des explications (jui lui sont demandées, et il a toujours le
droit de parler le dernier. Il se retire ensuite, et la Société délibère. Le vole
n'est valable que s'il réunit les deux tiers des sutTrages exprimés.
RÈGLEMENT \III
TITRE XI. — REVISION DU RÈGLEMENT.
AuT. 73. — Touto proiiositioii tiMiduiit à roviser 1»; ivi^'lomeiit devra ^tre
-itîiK'e par cinq ineninres au moins, dt-posc'-e sur le bureau et renvoyée au
(lomité central ([ui la fait oxaniinor par une Commission, (letto Commis-
sion fait son rapport et la pro])Osition est discutt'o immédiatement après;
tous les membres tle la Société peuvent prendre part à cette discussion;
mais les membres du Comité seuls sont ajipelés à voter sur la modilication
proposée, ainsi qu'il est dit en l'article 4 des statuts. 'J'ous les membres du
Comité doivent être convoqués à domicile.
A HT. 74. — Par exception aux dispositions précédentes, la revision des
articles 1 et 3 du règlcraeut s'effectuera suivant les règles indiquées en l'ar-
ticle 2.
LISTE l)i:S MKMHIŒS
ANNEE 1906
ABRÉVIATIONS : Hon., membre honoraire. — Ae, associé étranger.
Ce, correspondant étranger. — Cn. correspondant national. — T, membre titulaire.
— T R, cotisation rachetée.
Albert I^r de Monaco (S. A. S. le Prince), Gorre.'ip. de l'Inst. — 10, avenue
du Trocadéro, Paris, XVI. — 18^3. T.
Alezais (Henri), D M, Clief des trav. anatom. à l'Ec. de Médecine — 3, rue
d'Arcole, Marseille (B.-du-Rh.) — 1886. T.
Almeras (J.-J.), D M, ex-Gliirurg. en chef de l'Hôp. d'Etampes —25, route
d'Harfleur, Montivilliers (Seine-Inf.) — 1862. T.
Amar (Jules), Lie. es-sc. — 62, boulevard St-Germain, Paris, V. — 1903. T.
Ambrosetti (Juan B.), à l'Institut géogr. — Buenos-Aires (Rép. Arg.) —
1899. Ce.
Andrian-Wekburg (Freih. Ferdinand von), Priisident der Wiener Anthro-
polog. Gesellsc. —7, Burgring, Wien, I (Autriclie) — et villa Mondigu-
ren, Nice (Alpes-Maritimes). — 1901, Ae.
Anoutghine (Dmitri N.), Prof. d'Anthropologie — Musée polytechnique,
Moscou (Russie). — 1893. Ae.
Anthony (Raoul), D M, Prép. au Muséum d'Hist. nat. — 13, rue Ghevert,
Paris, VII. — 1899. T.
Antonowitgh (Wladimir), Prof, à TUniv. — Kiev (Russie). — 1899. Ae.
Aranzadi (Telesforo de), DM, Gatedratico en la Faculdadde Farmacia —
Barcelona (Espagne). —1893. T.
Arbo (G. O. E ) D M, Brigadliikare — 55 bis, Munkedamsvei, Ghristiania
(Norwége). - 1880. Ce.
Aristoff, Médecin de la marine russe. — 1893. Ae.
Arnaud (F.), Notaire, Gorresp. du Min. de l'Inst. Pul)l. — Barcèlonnette
(Basses-Alpes. - 1888. T. '
' MM. les Membres de la Société sont priés de vouloir bii.'ii signaler au Secrétariat
lys lacunes ou inexactitudes relatives aux noms, prénoms, professions et adresses.
LISTE DES MEMBRE!^ XV
Aj^pemn (Prof. Jolian-R.) — Ilelsinu'fors (Finlan.le). — 1H',>0. Ae.
Atoier (Kiiiilo), Mc'd. (le la Poudrerie Nationale. — 20, rue de l'aris, Li.vry
(Seine etoise). — 187S. T.
AuBERT (Louis), Mêd.-maj. de P« cl , Hiip mil. Villt-iiianzy — Lyon(Hliùije).
— 1887. Cn.
Ai;lt-du-Mesnil (G. d'), — 2-.2.S,r.du faub. St-Honoré, Paris, VllI. — 1881. T.
AvEBUUY (Lord). — G, St-.Iames Square, Londou. — 1867. Ae.
Aya, D m — 188;">. T R.
AzoiL.\Y (Léon), D M — 72. rue de l'Abbé-Groult, Paris, XV. — 1800. T.
Bajenoff (Dalgoraukowsky), pérécoulok. maison Labatchelï. — Moscou
(Russie). — 1905. Ae.
Balfour (Henry). Esq. Anthropological department Muséum — 11, Norham
(iarden.s, O.xford (Angleterre). — ISO'.t. Ce.
Bar (E.-F.-L. de) — i5, rue Boissière, Paris, XVI. — 190'}. T.
Barber (E.-A.), Maître ès-arts de l'Univ. — 4007. Chesnut st. Philadelphia,
Pa. (U. S. Am.) — 1886. Ce.
BARRET(Paul), DM — villa Mesléan,.luan-les-Pins, (Alpes-Marit,) — 1889. T.
Barthélémy (François) — 2, place Sully, Maisons-Laffitte (Seine-ot-Oise)
— 1894. T.
Bassano (Duc de) —9, rue Dumont-d'Urville, Paris, XVI. — 1888. T.
Baudouin (Marcel), DM- Secrétaire Général de la Société Préhistorique de
P>ance — 21, rue Linné, Paris, V. — 1901. T.
Baye (Baron Joseph de), Corres}). du Min. de l'Inst. publ. — 58. av de la
Grande-Armée, Paris XVII. — 1873. T R.
Beaunis (H.-E.), Prof. hon. à la Fac. de Méd. de Nancy — Direct, bon.
du Lab. de Psychol.-physiol. de la Sorbonne, — villa Sainte Geneviève,
promenade de laCroisette, Cannes (Alpes-Mar.). — 1863. T.
Beauvais, Interprète chancelier du Consulat de France à Long-Tcheou
(Chine) — 7, rempart de l'Est, Angoulême (Charente). — 1896. T.
Beddoe (John), Esq. Vice Président of tlie Anthropological Institute of G.-B.
— The Chantry, Bradford-on-Avon, Wilts. (Angleterre). — 1860. Ae.
Medot (Prof. Maurice), Dir. du Musée d'Hist. nat. — Genève (Suisse). —
1896. T.
Belluggi («lomni. Prof Giuseppe), Rettore dell' Univ. — Perugia (Italie).
— 1893. Ae.
Bé.nédikt (Moriz), I) M, Prof, fiir Xervenpathologie an der Univ. — 5, Fran-
ziskaner Platz, Wien (Autriche). — 1893. Ae.
Brr (Théodore) — Lima (Pérou). — 1876. Cn.
Bertholon (Lucien), D M, Corresp. du Min. de l'Inst. puld. — 14, rue
St-Charles, Tunis (Tunisie) — 1896. T.
Bertillon (Alphonse), Chef du service anthropométrique à la Préfecture de
police — 36, quai des Orfèvres, Paris, I. — 1880. T.
Bertrand (Georges), Doct. en Droit — 8, rue d'Alger, Paris, I — 188^j. T R.
Bestion, d m, Méd. de l""" cl. de la marine — rue St-Roch, Toulon (Var). —
1879. Cn.
Bezançon (Paul), D M. — 51, rue Miroraesnil. Paris, VHI. — 1892. T.
Bianchi iM^e M.) — 6, rue Jean Goujon, Paris, VIII. — 1900. T.
BiNKT (Edouard). D M — 33, Bd Henri IV, Paris, IV. — 188i. T.
Blanchard (Raphaël), D M, membre de l'Acad. de Méd., Prof, à la Fac. de
Méd. - 22<s Bd St-Germain, Paris, VII. — 1^82. T R.
XVI SOCIETK n ANTHROPOI.OGIF. DE PARIS
Blogh (A-lulphL'), U .M — 2'i, rue trAuiiiale Paris, IX. — 1878 T.
Boas (Franz), Prof. Natiiral History .\[iiseiiiii .\iithro|)ology — New-York
(F. S. \iu.) - 18"J9. Ce
HoBAN (lMi^,'<'n»^-A.), Aiili«|uain' — IS. rin; Tliiliaiid. l'ari--. XIW - ISSI. T.
li<ini!i.\sKOY ((.;oint(! Altïxis .V.) — l'rrsidcnl de la (^)iuiiiissi<tii arcliéolo-
^,'i<liie, 5S, Galernaïa, St-P('tersl)oiir{,r (Kussie). — l'.K.>l. Ce.
BoisjosLix (.1. de) — 8>, ruo de la Pompe. Paris, XVJ. — 1808. T.
BoNAi'AUTK (Prince Boland) — lU, av. d'Iéiia, Paris, XVI. — 188'». T R.
Bo.NNAHb (Paul', -\vocat, A'^v. de Philos. — (iO, avenue Kléljer, Paris. XVI.
- 1888.tr.
lîONXEL DK Mk/.ikrks lAlhcrt) — 08, rue JoufTroy. Paris, XVII. — 1890. T.
Bonnet (Andri-), Paléontologue — 55, IW St-Michel, Paris, V. — 188!t. T R.
BoKDiER (Arthur), DM, Direct, de l'Ec. de iiiéd. — Grenoble (Isère).-- 1876. T.
Bosteaux-Paris (Charles), Maire de Cernay-les-Reims (Marne). — 1890. T.
BouDiER (Victor) — Cambo (Basses-Pyr.). — 189''j. T.
Boulanger(( ;.), ancien Notaire — Péronne (Somme). — 1899. T. Préhistorique.
BouTEQUOY, DM — Chàtillon-sur-Seine (Côte-d'Or) — 1878. T.
Brabrook (E.-W.), Esq. Président of Folklore Society — 178, Bedfort Hill.
Balham, London, S. W. (Angleterre). — 1880. Ae.
Bretkuil (M'\de) — 10, avenue du Bois de Boulogne, Paris, XVI. — 1906. T.
Broga (Auguste), D M, Agr. de la Fac. de Méd., Chirurg. des Hôp. — 5, rue
de i'Université, Paris, VII. — 1880. T R.
Brouardel (Paul), D M, Prof, à la Fac. de Méd., membre de l'Acad. des Se.
et de l'Acad. de Méd. — 68, rue de Bellechasse, Paris, VII. — 1875. T.
BuscHAN (Georges), DM — K. Marine-Stabsarzt, 18, Friedrich-Carlstrasse,
Stettin (Allemagne). — 1891. Ae.
Butureanu (Gr.), Prof, au Lycée — Str. Pàcurari. Jassy (Roumanie). -
1898. T.
Gabred (Domingo), D M, Prof, à la Fac. de Méd. — Hospicio de los Mercedes
Buenos-Aires (Rép. Arg.) — 1888. T.
Galonge (Belisario), DM — Truxillo (Pérou), — 1861. Ce.
Cambillard (A), DM — Précy-sous-Thil (Côted'Or). — 1897. T.
Gapellini (Giovanni), Prof, di geologia ail' Univ. — Bologna (Italie). —
1874. Ae.
Capitan (Louis), DM, Prof, à l'Ec. d'Anthropologie — 5, rue des Ursulines.
Paris, V. — 1881. T.
Gapus (Guillaume), Direct, de l'Agriculture — Saigon (Cochinchine fran-
çaise) et 18, rue Nicole, Paris, V. — 1888. T. R.
Carr (Lucien), Peabody muséum. — Cambridge, Mass. (U.S. Am.) —
1879. Ae.
Carrière (Gabriel), Corresp. du Min. de l'Inst. Publ. — 5, rue Montjardin,
Nîmes (Gard). - 1894. Cn.
Carrow, DM — Canton (Chine). — 1879. Ce.
Cartailhac (Emile) — 5, rue de la Chaîne, Toulouse (Hte-Gar.) — 1869. T.
Castelfranco (Pompeo), Ispettore degli scavi e monumenti d'antichità —
5, via Principe Umberto. Milauo (Italie). — 188i. Ae.
Cauderlier (G.), Ingénieur — 221, Chaussée Vleurgat, Bruxelles (Belgique)
1901. T. — Démographie.
Gazalis de Fondouge (Paul), Lie. ès-Sc, Ingénieur, Corresp. du Min. de
l'Inst. Publ. — 18, rue des Etuves, Montpellier (Hérault). - 1865. T.
I.ISTK l>KS MEMHUKS \VII
CÉLEVUAN (Tai'Ié de), D M — (>. Tuo St-Floreiiliii. Paris, I. — In'.k;. T.
l 'ELr.K (Eu^'ène), DM— Saii-Fraiicisco, Californie (U. S. Aiu.) - 1811:2. Cn,
'iHAi^LiN (William), Ingénieur — Plac J. Labonle, Tananarive (Mailas^as-
car). - mr-'y. T.
< '.HARViLHAT. 1)M — 'i, ruL' lUatin, lllerniont-I-'orrand (Puy-de-Dôme). —
Il 10;-!. T.
Chassin, 1) M — Vera-Cruz (Mexique), — 1X70. Cn.
CHATELLiKR(Paul <lu), ( lorresp. du Miu. do l'Inst. |iiiM. — Kornus, par l'out-
rAbl).-(Finisl.-re). — 1890. T.
Chaimkt (Kdmond), DM — lOi. rue d'Assas, Paris, VI. — 19()t;. T.
Chauvet (Gustave), Notaire, Gorresp. du Min. «le l'Inst. Pulil. — RulTec
(Charente). — 1875. T.
Cheuvin (Arthur), D M, Direct, de l'Institut des bègues — 82. av. Victor
Hugo, Paris, XVI. — 1877. T R. — ])emogniphie.
Choidens (Joseph de), D M — Porlo-Rico (Antilles). — 18G1. Ce.
<;laine (Jules). — Consul de France à Rangoon (Birmanie). — 18'.i!. Cn.
Cli':ment-Rubbens — 27, quai St-Michel, Paris, V. — 1890. T.
Clodd (Edward), Esq. — 19, Carleton road, Tufnell Park, London, N
(Angleterre). — 1901. Ce.
Closmadelc (G. de), dm — Corresp. du Min. de l'Inst. Publ. et de l'Acad.
de Méd. — Vannes (Morbihan). — 1884. T.
CoGCHi (Igino), Prof, à l'Inst. des études super. — Firenze (Italie). —
1872. Ae.
CoLLiGNON (René), DM, Méd.-uiaj. de l''^ cl. au 25e d'inf., Corresp. du Min.
de l'Inst. Publ. — 0, rue de la Marine, Cherbourg (Manche). — 1880. T.
CoLLiN(Êmile).— 35, r. des Petits-Champs. Paris. I — [S^.T. PaIeth?iolo(/ie.
CoLLi.Nuwooij (J. -Frederick), Esq. — 5, Irène Road, Parson's Green, Lon-
don, S. W. (Angleterre). — 1864. Ae.
CoLocr (Mis) _ Catane (Italie). ^ 1905. T.
CoRA (Prof. Guido), Dirett. del Cosmos — 2, via Goito, Roma (Italie). —
1873. Ae.
Corne, Consul au Japon. — 1879. Cn.
CoRNiL (Victor), D M. — Prof, à la Fac. de Méd., membre de l'Acad, de Méd.
— 19, rue St-Guillaume, Paris, VU. — 18(37. Hon.
Costa Ferreira (Antonio A. da), 1). M. — Museu antropologico. — Rua Sa
da Bandeira, Coimbra (Portugal). — 1902. T.
Costa-Simùes (A. A da.), Prof, à l'Univ. — Coïmbra (Portugal) — 18(3(3. Ce.
CoLRiARD (Alfred), DM — Grande-Koniuchenui, St-Pétersbourg Russie).
— 1875. Ce.
CouRTY (Georges) — 35, rue Compans, Paris, XIX. — 1VH)1. T.
Gréqui-Montfort (Comte de) — 58, rue de Londres, Paris, VIII. — 1903, T.
Clmont (Georges), Avocat — 19, rue de l'Atjueduc, Saint-Gilles. Bruxelles
(Belgique). - 1901. Ae.
CuNNiNGHAM, Prof. of Anatomv in the University of Edinburg. — 19(15. Ae.
CuYER (Edouard), Prof, suppl. à l'Éc. des Beaux-Arts — 8, quai Dobilly,
Paris, XVI. — 1880. T.
Daleau (François) — Bourg-sur-Gironde (Gironde). — 1875. T. Préhisto-
rique, ethnof/raphie.
Daltok (Ormonde M.) — Esq., British muséum. — Bloomsbury, London,
W. C. (Angleterre). — 1901. Ce.
XVIII SOniETK n ANTUnnl'itl.oniE DK PARIS
DARi.iNri (W.), Prof, d'aiiatoluie aux Uiiiv. de New-York et Vermont —
New-York (U. S. Ara.) — 1877. Ce.
Daveluy (Charles), Direct, gén. iioii. des Contributions directes et du
Cadastre, Sous Directeur de l'I'k-. d'Anthropologie — 107, Bd Brune,
Paris. XIV. - 1««0. T.
Deghflettk (.Joseph;. Cunservatour au Musc'e do Roanne (Loire). — 1905. T"
DKOL.vriGNY (Louis) - 11, rue Biaise-Pascal, Piouen (Scine-lnférieure) —
1897. T R.
Dfi.isi.e (l'ernand), D M, Prépar au Lab. dWnthropologie du Muséum
d'Hist. nat. - Hô, rue de l'Arbalète, Paris, V. — 1883. T.
Delm.vs (Louis H.), D 1\I — La Havane (Cubai. — 1878. Ce.
Delvincuurt, Archéologue — 17, rue des Telliers, Crécj'-sur-Serre (Aisne).
— 1901. T.
Deniker (Joseph), Doct. ès-Sc, Bibliothécaire du Muséum d'Hist. nat.
8, rue de Bufïon, Paris, V - 1881. T R.
Demonet (E.). I> M, Méd. aide-major, Hôpital Militaire — Aumale (Alger)
— 1904. T.
Derizans (Benito), D M — Larangeiras (Brésil). — 1876. Ce.
Desgamps (Auguste) — 1, Bd Beauséjour, Paris, XVI. — 1897. T.
Despréaux (P.), DM — 11, rue Littré, Paris, VI. — 1895. T R.
Destruges (Alcide), DM — Guayaquil (liquateur). — 1863. Ce.
Deyrûlles, Lie. ès-sciences, Méd. aide-major, 48e Rég. d'Inf. — Guingamp
(Côtes-du-Nord). — 1904. T.
Dharvent (Isaï), Archéologue, — Béthune (Pas-de Calais). — 1902. T.
Préhisto)nqî(e.
DiAMAXDY (Georges), Député au Parlement roumain. — Bucarest (Roumanie).
— 1893. T.
DoiGNEAU (Albert) — 71, rue de la Madeleine, Noisy-le-Sec (Seine). —
1898. T. Palethnologie.
Donner (Otto), Prof, à l'Univ. - Helsingfors (Finlande). — 1899. Ce.
DoRSEY (George A.). — Curator Field Colombian Muséum Ethnologie.
Chicago. — 1904. Ce.
DouGLASS (Andrew^ E.), de New-\"ork, chez M. Leroux, Editeur — 28, rue
Bonaparte, Paris, VI. — 1887. T R.
Dubois (Eugène), D M — 45, Ziljweg, Haarlem (Hollande). — 1895. Ae.
Dubreuil-Chambardel (Louis), DM — 3, rue .Jeanne d'Arc, Tours (Indre-
et-Loire. — 1905. T.
DucHESNE (E.-L.), D M, Lie. en Dr. — 15, rue Pigalle, Paris, IX. —
1885. T.
DucKw^ORTH (VV. L. H.) Esq. Lecturer on Physical anthropology. Jésus
Collège — Cambridge (Angleterre). — 1901. Ce.
DuHOUSSET (Colonel E.) —6, rue de Furstenberg, Paris, VI — 1863. On.
DuNANT (P.-L.), D M — Genève (Suisse). - 1868. Ce.
Dupont (Edouard), Membre de l'Acad. des Se. de Belgique, Direct, du Musée
d'PIist. nat. de Bruxelles — Villa du Lac, Boitsfort (Belgique). —
1872. Ae.
DUPORTAL (Henry), Inspecteur gén. des Ponts et Chaussées — 4, villa Mont-
morency, Paris, XVI. —1868. T.
DussAUD (René) — 133, avenue Malakoff, Paris, XVI. — 1900. T.
DuTAiLLY (Gustave), Député — 84, rue du Rocher, Paris, VHI. — 1887. T.
LISTE I>KS MEMI»UE^ XIX
r)i_VAL (.Mrttlii:is), I) M, iiit'iulire de l'Aoail. de Méd., Prof, à la Fac. de
Méd.,ù l'Éc. d'Anthropologie et à l'Éc. des Beaux-Arts — U, cité Maies-
lierbes, rue des Martyrs, l'aris, IX. — IS;:}. T R.
DvBOWSKi (Jean), Direct, du .lardiii il'essai colonial — Vincennes (Seine). —
1894. Cn.
EcHÉR.\G (M. L)'), Inspecteur lion, de l'Assistance publique — 2*.), rue de
Condt', Ta lis. VI — et G, chemin des Coutures, Sèvres (S.-et-t).). —
i88(). T.
EiGHTHAi. i^Louis t)') — Les Bézards, par Xoj^ent-sur-Vernisson (Loiret). —
1881. T.
Enjoy (Paul d') Substitut du Procureur de la République — 19, rue de Chilou,
Le H;\vre (Seine-Inf.) — 1894. T R.
EssLiNf} (Prince d"), — 8, rue Jean (ioujon, Paris. VIII. — 18"/ 1, T.
Evans (SirJohn) —Nash Mills, Heniel llempstead, Herts. (Angleterre). —
1877. Ae.
Eallot (A.), D M, Prof, à l'Éc. de Méd. — 1C7, rue de Rome, Marseille
(B.-du-Rh.). — 1879. T.
Fauvellk (Hené), DM — U, rue de Médicis, Paris, VI. — 1893. T.
Fknkhlv-Effendi, I) M, Prof, à l'École de Méd. —Constantinople (Turquie).
— 18G5. Ae.
FÉnÉ(Gharles),DM, Méd.deBicf^re— 22,Av. Bugeaud, Paris,XVl. — I878.T.
Fkrnandès (A. -F.), DM — Rio-de-Janeiro (Brésil). — 1861. Ce.
FeurazdeMacedo (F.), D M — Calçada do Monte, 1, Lisboa (Portugal). —
1888. T.
FiAVx (Louis), DM — 22, rue Tocqueville, Paris, XVII. — 1S78. T.
Firmin (A.), avocat — Cap-Haïtien (Haïti). — 1884. TR.
Fischer (Henri), Chef desTrav. géolog. à la Fac. des Se. — 51, Bd St-Michcl,
Paris, V. — 1893. T.
l'f.AMAND (C. B M), chargé de cours à l'Ec. Super, des Se. — 0, rue Barbés,
Mustapha-Alger (Algérie). — 1900. T.
FoNTAN (.Vlfred) — Mazamet (Tarn). — IStJd. Cn.
FoxTARCE (A. Trumet de), D M — 5, Cité Montiiicrs, Paris, IX. — 18<S2. T.
Fort (J.-A.), D. M. — Villa Caries, Menton (Alpes-Maritimes). — 1880. T
Fouju (Gustave), Palethnologue, 33, rue de Rivoli, Paris, IV. — 1896 T R.
FouRDRiGNiEu(Ed.), Corresp. du Min. de l'Inst. publ. — 119, rue du Cherche-
Midi, Paris, VI. — 1879. T.
Fraipont (J.), d m, Membre de l'Acad. des Se. de Belgique, Prof, de pa-
léontologie à rUniv. — 35, Mont Saint-Martin, Liège (Belgique). —
1896. Ae.
FRVER(Major), Commissaire du gouvernement anglais — Calcutta (Indes an-
glaises). — 1877. Ce.
FiîMOUZE (Victor), DM — 78, rue du Faub.-St-Denis, Paris, X. — 187 J. T.
(tADEau de Kervillk (Henri), Homme de sciences — 7, rue Dupont, Rouen
(Seine-Inf.) — 1886. T.
Galdo (Manuel.!, de). Présidente délia .\cademia Medico-Quirurgica Espa-
iiola — Madrid (Espagne). — 1865. Ce.
Gallard (Frank), D M — Biarritz (Basse.s-Pyr.) — 1892. T.
Garcia Lopez (Eduardo) — Abogado. Calle 63, no 518. Mérida (Mexique).
1903. T.
Garsok (,Tohn-G.), D M, Esq. Instructor on the metric System of identifi-
cation — 14, Stratford Place, London,\V. (Angleterre) — 1893. Ae.
X\ vO<:lKTK n ANTIinOl'Ol.OC.IE DE l'ARI>
(jkukfhov (.Iules), U M — 15, luo «lo Hambourg, Paris, Vlll. — 18T'J. T.
Georges (Maximilieu), Architecte - l48,rueLecourbe, Paris, XV. — 1893. T.
GiGLiOLi (Prof. Eiirii.0 H.), Direttore del R. Museo zoologico (aniraali vor-
tebrati — 4, Via Fariuata degli Uberti. Firenze (Italie). — 1882. Ae.
GiovANErri (Nobile (iiulio), Étudiant, — 7, place du Collège de France,
Paris, V. - 1002. T.
Girard (H.), Prof, à l'Kc. de naéd. navale. — Bordeaux (Gironde). — 1002. T.
GiRAUX (Louis) — 0 his, av. Victor-Hugo, Saint-Mandé (Seine). — 1898. TR.
GiROD(Paul), Prof, à la Kac. des Se. et à l'Ec. de Méd. - 26, rue P.latin,
Cb^rmoiit-Fcrrand (Puy-de-Dôme). — 1900. T.
GiUFFRiDA-RuGGiERi (V.), D. M, Docente di antropologia neila R. Uni\ .,
26, via del CoUegio romano, Roma (Italie). — 19U1. Ce.
Glaimont (G.) Percepteur — Fleurance (Gers). — 1889. Cn.
GoDEL (Paul) — Grenoble (Isère). —1802. Cn.
GoDiN (Paul', D M, Méd. -Major do l-^o classe — Avenue Chancel, Montpel-
lier (Hérault). - 189<3. T.
Gordon (Antonio de), D M, Président de l'Acad. de Méd. et Se. phys. et
nat. — Habana (Cuba). — 1897. Ce.
GoRODicHZE(Léon), D M — 35, rue delà Bienfaisance, Paris, VIII, — 1902, T.
Gouuari (David), DM — Eiskoié Oukreplenie, District de Rostolï-sur-le-
Don (Russie). — 1890. T.
Gromoff (M™® Anna). — Petrovka, maison Korovine. — Moscou (Russie).
1900. Ce.
Gross (Victor), DM — Neuveville, canton de Berne (Suisse). — 1882. Ae.
Guébuard (A.), Agrégé (géologie) de Fac. Méd. —St-Vallier-de-Thiey( Alpes-
Maritimes). — 1902. T R.
GuELLiOT (Octave), D M, Ghir. des Hôp. — 9, rue du Marc, Reims (Marne).
- 1899. T.
GuiBERT, DM— St-Brieuc (Gôtes-du-Nord). — 1888. T.
Guida (Salvatore), Lient. -colonel médecin — Roma (Italie). — 1894. Ae
GuiMET (Emile) — 1, place de la Miséricorde, Lyon (Rhône), — et Musée
Guimet, avenue d'Iéna, Paris, XVI. — 1877. T R.
GuYOT (Yves), ancien Ministre — 95, rue de Seine, Paris, VI. — 1874. Hon.
Haddon (Alfred-Cort).— Prof. F. r. s. Inisfail.HillsRoad— Cambridge (Angle-
terre). — 1901. Ae.
Haeckel (Prof. Ernsl) — lena (Allemagne). —1002. Hon.
Hagen (A.), d m — 2 6is, place Gambetta, Toulon (Var). - 1894. Cn.
Hamy (Ernest), D M, membre de l'Acad. des Insc. et B.-L. et de l'Acad. do
Méd. Prof. d'Anthropologie au Muséum d'Hist. nat. —8, rue de Buffon.
Paris, V. - 1867. T.
Haxotte (Maurice), D M — 6, rue de la Trémoille, Paris, VIII. — 1899. T.
Haynes (Henry-W.), Prof, à l'Univ. — 239, Beacon street, Boston, Mass.
(U. S. A). — 1878. Ce.
HEGER(Franz),Leiter dor Anthropol.-ethnographischen amk.k. naturhistor.
Hofmuseum — 1, Rasumaffskygasse, Wien, III (Autriche). — 1901. Ce.
Heger (P.) D M. Prof, de Physiologie à l'Univ. — -35, rue des Drapiers,
Bruxelles (Belgique). — 1884. Ce.
Heierli (Jakob) — Dozent fiir Urgeschichte an der Univ. — Zurich (Suisse).
1901. Ce.
LISTE DES MEMltRK- ^^^
IlKiKKr. (Axel-0.) - IIelsint,'lors (FiiilaiidcV - ISU'.i. Ce.
1Iknnuykr(A ), imprimeur-rditeur— 7,nieDar.;tït, Paris, XVII. — 1K81. TR.
Herbert (Joseph-Ainan.l), Coinuiaii.laiit du -^n-nie en retraite. — U», rue
Hautefeuille, Paris, VI — ivWl. T.
Hervé (Geor^îes), D M. Prof, à VÈc. d'Anthropologie — 8, rue Je Berlin.
Paris, IK. — 18»». T.
Hernandez (Fortuuato), D M, Inspecleurdes Consulats. — Mexico. Mexique.
v.m. T.
Hii.DEBRAND (Haus-U.), D M, Uiksautikvarie, K. Vittt-ihets-Historie ocli
Antikvitets Akademien — Stockholm (Suéde). — 187'i. Ae.
HoELDRR (H. von), Ober-Modi/inalrat — Marienstrasse, 81, Stullt,'art (Alle-
magne). — 188:2. Ae.
HoERNEs(Prof.Moriz),Custos-adjunctaniK.Iv.XaturhistoriclienHofmuseum
— Ungargasse, 27. Wien, III (Autriche). — lÛOi. Ae. Préhistorujue.
HoLBÉ, Pharmacien — Saigon (Gochinchine française). — 190.'1 T.
Holmes (W. H.), Prof., Head Curator National Muséum Anlhropology,
Washington. — VM)'> Ae.
HouGH (Walter), Curator of tlie U. S. National Muséum (Ellmology) —
Washington (U. S Am. — 1899. Ce.
HouzÉ (E.j, D M, Prof. d'Anthropologie à l'Univ. — 89, Bd de Waterloo,
Bruxelles (Belgique). — 1893. Ae.
HovELACuUE (M"io veuve Abel) — 38, rue du Luxembourg, Paris, VI. —
189C. T R.
HovEL.\cuUE :.\ndré) —38, rue du Luxembourg, Paris-VI. — 19()1. T R.
HovoRKA(Oskar V.), D M — Hacicevaulica, 19, Agram (Hongrie). - ISvXt. Ce.
HoYOS Saixz (Luis de), Catedratico del Instituto — Dos Codos, 9, O Sille-
ria, 1, Toledo (Espagne). — 1892. T.
HRDLicKA(Ales), D M, Sous-direct, du Lab. d'Anthropologie U. S. National
Muséum — Washington. — 1904. Ce-
Hubert (Henri) - 74, r. Claude-Bernard, Paris,V.- 1900. T. Préhistorique.
HuGUET (.J. J. A.) DM— Prof. adj. à rp:cole d'Anthropologie, — 11, rue
Violet, Paris, XV. — 1902. T.
Inqersoll (Smith), Sous-Direct, des Collections Anthropologiiiues et du
Labor. d'Anth. Natural history Muséum. — New- York. — 1905. Ce.
IssEL (Arturo), Prof, di geologia ail' Univ. — Genova (Italie). — 1901. Ae.
IvAXOVsKY (Al.), Secrétaire de la Section d'.Vnthropologie de la Société des
Amis des Sciences, Musée historique. — Moscou (Russie). — 1879. Ce.
Jacques (Victor), D M, Prof, à l'Univ. — 3G, rue de Ruysbroeck, Bruxelles
(Belgique;. — 1893. Ae
Jalouzet, vice-Consul de France — Belfast (Irlande). — ISS-i. On.
Javal (Emile), D M, membre de l'Acad. de Méd. — 0. Bd de la Tour.
Maubourg, Paris, VIL — 1872. TR.
JouRDAN (Emile), D M — 3, rue Ampère, Paris. I. - 1897. T R.
JouRON (L.). — Avize (Marne). — 1901. Cn.
Jousseaume (F.), D M - 29, rue de Gergovie, Paris, XIV. — 18Gt.;. T R
JuGLAR (Mme Joséphine) — 58, rue des Mathurins, Paris, VIII. — 1881. T R.
Julien iPierre), Etudiant — 40, place Jaude, Clermont-Ferraiid. — l''i'3. T.
Kate (Hermann ten), DM — Batavia. — Java. — 1879. T.
soc. DiXTHKOP. i!)06. "
X\II SOCIETE D ANTlllH)l'OI,(ir.IE DE l'AIUS
Keank (Aujjiustus 11.) — Esq. Late Vicc-Prcsidciit Aiitliropolo^fical lustitule
(i. B. et Ir. — Araiu-(Jah, 7\), Broadliurst Gardens, South Hampstead,
N.W. (Anj^letei-re). — 1902. Ce.
Kelleh, Ingôiiieur — 77, rue du Moiilot, Nancy (Meurthe-et-M.) — 1900. T.
Kesslkr (Kr.), nianufacluricM-, Soultzmatl (Alsace). — 1883. T R.
KHANENKi)(Bohdan) — Kiev (Russie). — 1902. Ce.
KoLLMANN (Julius), Prof. de Zoologie à l'Univ. — Biïle (Suisse), — 1893. Ae.
KovALEwsKi (Maxime)— villaBatava, Beaulieu(Alpes-Maritinies). — 1894. T.
Labadie Laohave (P^éfléric), 13 M, Méd. des Hûp. — 8, av. Montaigne,
Paris, VIII. — 1869. T.
Lagassagne (A.), Prof, à la Fac. de Méd., Corresp. de l'Acad. de Méd. —
1, place Raspail, Lyon (Rhône). — 1869. Cn.
Lagrené (de), Consul de France - Moscou (Russie). — 1879. Cn.
Lalayantz (Ervand), Séminaire Nersissian — Tiflis (Russie). — 1895. Ce.
Laloy (L.), D m, Bibliothécaire de la Fac. de Méd. — Bordeaux. — 1902. Cn.
LaMazellière (Marquis de). — 40,rucBarbet-de-Jouy, Paris, VII. — 1904. T.
Landry, Prof, à l'Univ. Québec (Canada). — 1861. Ce.
Lannelongue (O. M.), membre de l'Acad. des Se. et de l'Acad. de Méd.
Prof, à la Fac. de Méd.— 3, rue François le"-, paris, VIII. — 1877. T.
Lapicque (Louis), DM — Maître de (Conférences à la Fac. des Se. — 6, rue
Dante, Paris, V. — 1892. T.
La Tour (de), DM— 16, rue Cortambert, Paris, XVI. — 1902. T.
Launois. — 12, rue Portails, Paris, VII. — 1904. T.
La VILLE (André), Préparateur à l'Ec. des Mines — 39, avenue des Gobelins,
Paris, XIII. — 1897. T.
Lebougq (H.), D M, Prof. d'Analomie à l'Univ. — Gand (Belgique). —
1884. Ce.
Le Coin (Albert), D M — 15, rue Guénégaud, Paris, VI. — 1873. T.
Lécuy'er, d m — Beaurieux (Aisne). — 1887. Cn.
Le Double (A. F.), D M, Prof. d'Anatomie à l'Éc. de Méd., Corresp. de l'Acad.
de Méd. — 29, rue Nicolas-Simon, Tours (Indre-et-Loire). — 1876. T.
Lehmann-Nitsghe (Robert), D M, et D. es Se. nat. et en médecine. Jefe de
la seccion antropologica del Museo de La Plata. - La Plata (Répub.
Argentine). — 1897. T.
Leite de Vasgongellos (José). — Director do Museu Ethnologico portu-
guès. — Bibliotheca nacioual, Lisboa (Portugal). — 1899, Ae.
Lejars (Félix), D M, Agr. delà Fac. de Méd., Chirurg. des Hôp. — 96, rue
de la Victoire, Paris, IX. — 1889. T.
Lejeune (Charles), Avocat — 12, rue Soufflot, Paris, V, — 1896. T R. — Reli-
gions et Sociologie.
Lesouef (Aug.-A.) — 109, boulevard Beaumarchais, Paris III. — 1877. T.
Lesquizamox (D. Juan-Martin), Ministre du gouvernement de la province de
Salta (Rép. Arg.). — 1877. Ce.
Letourneau (Gustave), Avocat — 56, rue N.-D. des Champs — Paris, VI.
— 1902. T.
Levasseur (Emile), membre de l'Institut, Prof, au Collège de France— 26,
rue Monsieur-le-Prince, Paris, VI. — 1881. T.
Lissauer, d m, Prof., Vice-Président de la Soc. d'Anthropologie de Berlin
Alleniague — 1904. Ae.
Livi (Ridolfo), D M, Maggiore-Medico — 9, via Sommacampagna, Roma
(Italie). — 1894. Ae.
LISTE DES MEMItRES \XIII
LoisEL (Gustave), D M , <;hc'f du I.ul). (rilistologio ù la Fac. di; Mrd. —
6, rue de l'Kcole de Mt'deoine, Paris, VI. — VM2. T.
LoNGBOis (Paul), Doct en Mtnl. de la Fac. de Paris, Ghir. <\t> l'ilotel-Uieu
de Joi}.;ny, Membre de la Soc. des Se. hist. et nat. de l'Yonne. — I W.'i.T.
LouBAT (duc de) — 47, rue Duniont-d'Urville, Paris, XVI. — IH'X,. T R
LouYs (Pierre) — 211, rue de Boulainvilliers, Paris, XVI. — 1900. T.
LuGOL (Edouard), Avocat — 11, rue de Ti-héran, Paris, VIII. — 1800. T.
LuMHOLTz (Cari), Consul général de Suède — New- York (U. S. Âm.). —
1880. Ae.
I.isf.HAN (Félix von), 1) M, .\ssistent ani k. Miisciini fiir V.ilkeikundtï —
Friedenan l»ei, Berlin (.Mieniai^ne). — 1H7S. Ae.
Maciui'aut (Emile) — 71, IJd Bon-Accuoil, Alger. — l'.HJU. T.
Mac Curdy (George-Grant), Instructor of Pi-ehistoric Anthropology — 237^
Church Street, New Haven, Conn. (U. S. Am.). — 1890. T.
Magalhaens (José de), 1). M. — 8, rue de la Sorbonne, Paris, V. —
loas. T.
Magnan (V.), 1) M, membre de l'Acad. de Méd. Médecin de l'Asile Sainte-
Anne. — 1, rue Cabanis, Paris, XIV. — 1876. T.
Mahoudeau (P. -G ), Prof. d'.Vnthropologie zoologique à l'Éc. d'Anthropo-
logie — 188, avenue <lu Maine, Paris, XIV. — 1887. T.
Malief (N.-M.), Prof. d'Anatomie à l'Univ. — 41, Souvarowsky prospect,
St-Pétersbourg (Russie^ — 1882. Ae.
Manouélian (J.) — 57, rue Falguière, Paris, XIV. — 1900. T.
Manouvrier (Léonce), D M, Directeur du Lab. d'Anthropologie de l'Éc
des Hautes Études, Prof. d'Anthr. physiologique à l'Éc. d'Anthropo-
logie — 15, rue de l'École-de-Médecine, Paris, VI. — 1882. T R.
Mantegazza (Prof. Paolo), Direttore del Museo Nazionale d'.\iitropologia
• Firenzc (Italie). — 1863. Ae
Marin (Louis) — 13, av. de l'Observatoire, Paris, VI. — 1898. T R.
Marmottan (Henri), D M, — 31, rue Desboi'des-Valmore, Paris, XVI. —
1875. T.
Martin, (A.), D M. —Alger (Algérie). — 1879. Cn.
Martin (Rudolf), D M, — Prof, fiir Anthropologie an der Univ. -■• Zurich
(Suisse). — 1901. Ce.
Marty (J.), DM,Méd. princ. à l'Hôp. Mil. — 7, rue do la Paillette, Rennes
(Ille-et-Vilaine). — 1899. T. R.
Masbrenier (.Jean), DM — 24, av.Thiers, Melun (Seine-et-.Marne). — 1902. T.
Mason (Otis-T.), Curator of the U. S. National-Muséum (Ethnology). —
Washington (U. S. Am.) — 1893. Ae.
Massignon (F.) —93, rue St-Honoré, Paris, I. - 1883. T.
Masson (Pierre), éditeur — 120, Bd St-Germain, Paris, VI. — 1900. T.
Mathews (Robert H.) — Hassall Street, Parramatta (N. S. W.) - 18!»!». Ae.
Matiegka (Henry), Prof, à l'Univ. — Prague (Bohème) — 1901. Ce.
Maurel (Edouard), D M. Prof, de pathol. expér. à l'Ec. de Méd. — K», Bd
Carnot, Toulouse (Haute-Garonne) — 1877. T.
Mauss, Prof, à l'Ecole des Hautes-Etudes (section des Sciences Relig). —
31, rue Saint-Jacques, Paris, V. — 1905. T.
May (Georges), Banquier — 2, Avenue Hoche, Paris, VIII. — 1904. T.
Mayet (Lucien), D M — 80, avenue de Saxe, Lyon (Rhône) — IQf)) T. An-
thropologie générale. Anthropologie criminelle.
,^y,V MIC.IKTK l) ANTlIROPnl.uC.IK DE l'ARIS
Mkuka (Eug.-mO. 1> M - 3. Palescapa, Milan (llalio). — 1908. T.
Médina lOabriel) — 9, rue d'Oran, Tunis (Tunisie) — !896. T.
Menaud (Saint-Yves), DM, Membre de l'Acad.de Méd., Direct, de l'Institut
de vaccine animale — 8, rue Ballu, Paris, IX. — 1887. T.
Meveh (A..-B.), Director des K. Zoologischen uiid anthropoloyisch.ethnogra-
phischen muséums — Dresden (Allemagne) — 1890. Ae. Anthrupolo-
f/ie générale.
Meyeh (Théodore) —98, rue deNeuilly, Gagny (Seine-et-Oise) — 1900. TR.
MiNKOv (Théodore), In^/éiùeur, ancien Secrétaire de la Section asiatique de
l'Exposition russe <le 1900, - 28. boni. St-Marcel, Paris, V. — l'.MJl. Ce.
MiNOVici (Mina), 1) M, Prof, de Méd. légale. Direct, de l'Institut médico-
légal. — Bucarest (Roumanie). — 1902, T.
MiNOvici (Nicolas), D M, Direct, adj. de l'Institut médico-légal. — Bucarest
(Roumanie). — 1902. T.
MiREUR (Hippolyte), DM— 1, rue de la République, Marseille (Bouches-du-
Rhùne) — 1890. T.
MOHYLIANSKV (Nicolas) — Vassilievsky ostrov, 7e ligne, no 60, log. 11,
St-Pétersbourg (Russie) — 1897. T.
MoLiNiER, Pharmacien — 1878. Cn.
MoNGELON (Léon) — Ygrande (Allier) — 1886. T R.
MoNTANO (Joseph), DM — Gémil, par Montastruc (Hte-Gar.) ~ 1879. Cn.
MoNTELius (Oscar), D M, Conservateur du Musée royal d'archéologie, - -
Stockholm (Suède) — 1874. Ae.
MoREL (Léon), Receveur des finances, en retraite, Corresp. du Min. de
l'Inst. publ. — 3, rue de Sedan, Reims (Marne) — 1880. T.
MoRÉNO (Francisco P.), Direct, du Musée de La Plata(Rép. Arg.) — 1893. Ae.
MoRENO Y Maiz (Th.), D M — Lima (Pérou) - 1864. Ce.
Morris (J. P.) — Ulverston (Angleterre) — 1867. Ce.
MoRSELLi (Enrico),Prof. di Neuropatologia nella Univ. — 46, via Assarotti,
Genova (Italie) — 1874. Ae.
MoRTiLLET (Adrien de). Prof, à l'Ec. d'Anthropologie, Président delà Société
d'Excursions scientifiques — 10, bis, av. Reille, Paris XIV. — 1881. TR.
Préhistorique, ethnographie.
MuGH (D*" Matthïius), Konservator der Kunst.-u. histor. Denkmale —
Penzingerstrasse, 84, Wien (Autriche) — 1878. Ae.
MûLLER (Sophus), Directeur du Musée des Antiquités — Copenhague
(Danemark) — 1899. Ae.
MuNRO (Robert), Esq., Secretary of Society of Antiquaries of Scotland —
48, Manor Place, Edinburgh (Ecosse). — 1899. Ae.
Musgrave-Clay (R. de), DM— villa Viviane, Salies-de-Béarn (Basses-Pyr.)
— 1889. T.
Myrial (M'n^ Alexandra) — villa Mousmé, La Gaulette, Tunisie — 1900. T.
Myres (J.-L.), Esq. Secretary of Anthropological institut of G. B. andir. —
Christ church, Oxford (Angleterre) — 1901. Ce.
Neis (Paul), D M, Méd. de l'"^ cl. de la marine — Saigon (Gochiuchine fran-
çaise) — 1881. Cn.
Nicolaïevsky (Constantin) — 95, av. de Versailles, Paris, XV — 1900 Ce.
NiEDERLE(Lulior). DM.Prof. d'Anthropologie à l'Univ. — Taborska ul. 1045
II, Prague (Autriche) — 1893. Ae.
IJSTK DES MEMBRES
NovARO (BartlioloiiKio), i) .M, l'rof. à l;i Fac. des Se. — Bueiios-Aires (Rôp.
Arg.) - 1878. Ce. .
NoviKOFF (J.) — 6, rue de la Poste, Odessa (Russie) - 1891. T.
Obolonrki (Nicolas), DM, Prof, à l'Univ. — Kiev (Russie). — 1880. Ae.
OuvAROFF (Comtesse), Présidente de la Société archéolo^Mr|ue do Moscou,
— Musée historique, Moscou (Russie). — 18tXt. Ae.
i'AOLiANi (Lui^^i), Prof, à l'IJuiv. — ■ Toriiio (Italie) — 1877. Ce.
Pahillault ((ieorges), D M, Direct, adj. du Lab. d'Anthropologie de l'Éc. des
Hautes Etudes, Prof, à l'Kcole d'.Vrithropologie. — 3, i[uai Malaquais,
Paris, VI. - 189;]. T.
Pahîs (Gustave), D M — Luxeuil (liaute-Saôiie) — 1880. T.
Patl-Boncour ((Teorges). DM — l(>i, rue du faul) St-Honoré, Paris, VIII.
— 189'i.TR.
Pkchdo (J.), d m — Villefrauclie (Aveyron) — 1878. T.
Pêne (X.), — Ozon Park Woodaven, New-York, L. I. (U. S. Am.) - 1884. T.
Pknnetirr (Georges), D M, Prof.de pliysiologie à l'Ec. deMéd.— 9, impasse
de la Corderie, barrière St-Maur, Rouen (Seine-Inf ) — 1868. T.
Perkra (Prof. Amlrcws) — Slave-Island, Colombo (Geylan) — 1882. Ce.
Pétrini (Michel), D M — Direct, du Service de Santé, Bucarest (Roumanie)
— 1874. Ae.
P[c (Dr J.-L.). Directeur du Musée Archcologi({ue — Prague (Bohôme). —
1905. Ae.
PiCHARDO (Gabriel) — La Havane (Cuba) — 1878. Ce.
PiCHON, D M — Ch;\teau des Faverolles, par Couches (Eure). — 1872. Cn.
PiÉRON (Henri), D M, Prép. à l'Éc. des Hautes-Études — 96, rue de Rennes,
Pari.s, VI. — 1902. T.
PiETKiEwiGZ (Valérius), D M — 79, Bd Ilaussmann, Paris, VIII. — 1878. T.
Piètrement (G. -A.), Vétérinaire militaire en retraite — 141, Bd St-Michel,
Paris, V. - 1874. T.
Piette (Edouard), .Juge honoraire, Corrosp. du Min. de l'Inst. publ. —
Rumigny (Ardennes) — 1870. T.
PiGNÉ, DM — San Francisco, Californie (U. S. A m ) — 1863. Cn.
PiGOHiNi (Prof. Luigi), Dirett. del Museo nazionale proistorico cd etnogra-
lico — Collegiaromano, Roma (Italie) — 18S1. Ae.
Pinot (abbé), missionnaire — FortGood Hope, Rivière Mac-Kensie(Canada)
-- 1872. Ce.
Pittard (Eugène), prof, au Collège de Genève. 30 Florissant. Ce.
PoKRovsKi (Alexandre), Lie. ès-Sc. nat.. Privât docent à l'Univ. — Kliarkov
(Russie) — 1894. T.
PoRNAiN(Léon), DM — 107, Bd Saint-Germain. Paris, VI. — 188s. T. R.
PosADA Akaxgo (prof. A.). D M — Médelline (Colombie) — 1870. Ce.
PouTiATiNH (prince Paul) — Ligofka,65, St-Pétersbourg (Russie) — 1896. Ce.
Pozzi (Samuel), D M, memb. de l'Acad. de Méd., Prof, à la Fac. de Méd.,
Chirurg. des Hôp. — 47, av. d'Iéna, Paris, XVI — 1870. T.
pRENGni;KBEU (A.), D M, Méd. do colonisation — Palestro (Algérie) —
1881. Cn.
pRiKiiK (Albert;, D M — 1, place des Vosges. Paris IV — 1892. T.
pROKiLLET (R. P.), missionnaire ci Haïti. — 18(;'i. Ce.
PuT.NAM (Prof. l-'.-W.), Cnrator ni llio |»eai)ody muséum — Cami>i'idge,
Mass. (U. S. Am.) — 1882. Ae.
WVI SOniETK D ANTHIKH^iiLOGlE DE PARIS
Rabald (Etienne), DMetD. es Se, Prof. a.lj. à l'Ecole d'Anthropologie
— 8, rue Vauquclin, Paris. V. — 19(_I2. T.
Raffeoeau (Donatien). D M — 9, av. des Pages. Le Vésinet (S.-et-O.) —
18S9. T.
Ramadikh, |) m, Direct de l'Asile des aliént-s — Roilez (Aveyron) — 18iM.Cn.
Rangabé (Alexandre), membre de la Soc. d'archéologie — Athènes (Grèce)
— 1865. Ce.
TUnke (Johannes), Prof, de Zoologie à l'I^^niv. — 25, Brienner Strasse,
Miinchen (Allemagne) — 1882. Ae.
Ras/avktow (\V.), ancien Prof, de chirurgie — Moscou (Russie) — 1888. Ce,
Raymond (Paul), D M, Agrégé à la Fac. de Méd. de Montpellier — .'34, av.
Kléber, Paris, XVI. — 18t)2. T.
Reao (Charles H.), Esq. Keeperof British and Mediœval Antiquities and Eth-
nography, British Muséum — 22, Carlyle Square, Chelsea, London
(Angleterre) — 1901. Ae.
Reboul (Jules), D M, Cliirurg. en chef de l'Hôtel-Dieu — 1, rue d'Uzès, Nîmes
(Gard)— 1893. T.
Regalia (Ettore), R. Istituto di Studi Superiori — 3, via Gino ( lapponi,
Firenze (Italie) — 1893. Ae.
Regnault (Félix), D M, anc. Int. des Hôp. — 185, houl. Murât, Paris, XVI.
— 1888. T R.
Regnv-Bey (de), <;hef du serv.de Statistique — Alexandrie (Egypte) — 1874.Ce.
Retzius (Prof. Gustaf) — Stockholm (Suède) — 1878. Ae.
Revnier (J.-B.), D M — Sisteron ( Basses- Alpesj — 1886. T.
Reynjer (Paul), Agr, à la Fac. de Méd., Chirurg. des Hôp. — 12 bis, place
Delaborde, Paris, VIII. — 1883. T.
Ribbixg (Lœnnard de) — Lund (Suède) — 1898. T.
Ribemonï (Alban), D M, membre de l'Acad. de Méd., Agr. à la Fac. de
Méd., Accoucheur des Hôp. —10, BdMalesherbes, Paris, VIII.— 1876.T.
RiBOT (Th.), Prof, au Collège de France, Direct, de la Revue i^hilomphiquc,
-^ Librairie Alcan, 108, Bd St-Germain, Paris, VI. — 1880. T.
RiCHEi' (Charles), D M, Membre de l'Acad. de Méd., Prof, à la Fac. de Méd.
— 15, rue de l'Université, Paris, VII. — 1877. T.
Ripley (William Z.), Lecturer on Anthropology at Columbia Univ. —
New York (U. S. Am.). - 1901. Ce.
RiPOCHE Y Torrens (Diego), Fondateur du Museo Canario — 148, rue
Rroca, Paris, XIII. — 1895. Ce.
Rivet, I) M, Méd. de lu mission géodésique française de la Rèp. de l'Equa-
teur. — Guyaquil. — 1902. T.
Rivett Carnac (le Colonel .T. H.), aide de camp de S. M. le Roi d'Angle-
terre — 40, Green street. Park Lane, London (.Angleterre)- et château
de Wildeck, Aargau (Suisse) — 1883. Ae.
Rivière (Emile), Direct, de Lubor. au Collège de France — 03, rue de Bou-
lainvilliers, Paris, XVI. — 1874. T.
Robin (Paul) —5, passage du Surrnolin, Paris, XX. - 1881. T R. Anthro-
po>nélri.e enfantine.
Robin-Mas.sé (Paul), D M, chirurgien de rHùpital Pèan — tï, rue Castellane,
Paris, VIII. — 1901. T.
Roche (Jules), Député — Square Monceau, 84, Bd des Batignolles, Paris,
XVII. - 1899. T.
LHTK nES MfcMBRES WVII
Rocher (Emile;, Corresp. du Miii. df l'Inst. Piilil., (:oii!>ul «li- France —
Liverpool (Angleterre) — 1881. Cn.
Rothschild (haron Edmond de) — 41, rue duFaub.-St-Honoré, Paris, VIII.
— 1875. T.
Rothschild (baron Gustave de), consul général d'Autriche — 2S, av. Mari-
gny, Paris, VIII — 1875. T.
RoussELET (Louis), Archéologue — 126, Bd St-Gerniain, Paris, VI. —
1872.tr.
RouviLRE (lient. -colonel de), au ministère de la Guerre, — Paris, VII. —
1867. Cn.
Roux, D M, Méd. major, - 12, Bd Henri IV, Paris, IV. — Hm. T.
RowE (Léo Stanton), Prof.. Univ, of Pennsylvania — Philadelphia (U. S.
Am.) — 1801. Ce.
RiDLEH (F.-W.), Esij.. Vice-Président of the Anthropological Institute —
2."», Mornington Crescent, London, N W. (Angleterre). — 1881. Ce.
Ruelle D M, Médecin de l'Armée Coloniale, eu mission — 1905. Cn.
RuTOT (A.) - Conservateur du Musée d'hist. natur. — 177, rue de la Loi,
Bruxelles (Belgique). — 1901. Ce.
Saint-Pail ((t.), L) m, Méd. major au 24° B"" de chassour.->. — Villa Laups,
Villefranche-sur-Mer (Alpes -Maritimes). — 1902. T.
Saintu (Octave), D M — 61, rue de Maubeuge, Paris. IX. — 1890. T.
Sakhokia (Théodote), Homme de lettres. — 1905. Ce.
S.vlomox (Çaul), D M — Saint-Thomas (Antilles Danoises). — 1905. T.
Saville (Marshall H.) American muséum of natural history — 8"' av.
& west 77»'' Street, New-York City. (U. S. Am ) — 1895. T R.
ScHENK (Alexandre), Prof. agr. d'Anthropologie à l'Univ. — 31, rue Mar-
theray, Lausanne (Suisse) — 1899. Ce.
Schleicher (Adolphe), libraire-éditeur — 15, rue des Sts-Pères, Paiùs, VI.
— 1801. T.
ScHLEiCHER (Charles), libraire-éditeur — 15, rue des Sts-Pères. Paris, VI.
- 1897. T.
ScHMiDT (Oscar), palethnologue — 86, rue de Grenelle, Paris, VII. — 1805. T.
ScHMiDT (Waldemar), Prof. d'EgyptoIogie à l'Univ. — Copenhague (Dane-
mark) — 187.5. Ae.
ScHMiT (Emile), Pharmacien — 24, rue St-Jacques, Ch;\lons sur-Marne
(Marne) - 1892. T.
ScHRADER (Franz), Prof, à l'Éc. d'Anthropologie — 75, rue Madame, Paris,
VI. — 1892. T.
Schwalbe (G.), DM, Prof. Director des anatomischen Instituts des Univer-
sitats — Schwarzwaldstrasse, 39, Strassburg f Alsace) — 1901. Ae.
Sébillot (Paul), Membre de laConim. des Monum. mégal. — 80, Bd St-Mar-
cel. Paris, V. — 1878. T. Littéralure, folklore, traditions populaires.
Sée (Marc), membre del'Acad. de Méd., .\gr. à la Fac. de Méd. — 126, Bd
St-Germain, Paris, VI. — 1859. Hon.
Seeland (N.), d m, Médecin en chef de la province de Semirietschensk —
Viernyi (Russie) — 188('). Ce.
Séglas(J.), DM, Médecin des Hnp. — 96, rue de Rennes, Paris, VI. — i<SSi. T.
Second (Paul), D M, Agr. à la Fac. de Méd., Chirurg. des Hôp. — 11, quai
d'Orsay, Paris, VII. — 1872. T.
XXVIII SOCIKTK Ii'aNTIII\o1'iiM)0IE DE PARIS
Srlys-Longchamps fliai-oii Walllier de) — Cliùteau d'Ualloy, Ciiiey (Belgi-
que)— 1877. T. R.
Sénkchaldeia (iHANGK(Kiig«'Mp) — 5»i, rue (le Londi-ps, Paris, VIII. — 1903.T.
Seugi ((iiuseppe). Direttore dt-l' Instituto antropologico dell' Uiiiv. —
Roma (Italie) - 18W Ae.
Skhieux (Paul), D M, Méd. de la maison do sauté de Ville Evrard — Neuilly-
sur-Marue (S.-et-O.) - 1891. T.
Sehkano (Matias-Nieto), D M, Secrétaire de la R. Acad. de Méd. —Madrid
(Espagne). — 1865. Ae.
SiFFRE (Achille), DM, — 97,- Bd Saint-Michel, Paris, V. — 19(>;. T.
SiGERsoN(G.),DM,Prof.d'hist. nat. à l'Univ. — 3,< llare st., Dublin (Irlande)
— 1887. Ce.
SiNRTY (comte Louis dej, DM — 14, place Vendôme, Paris, I. — 1884. T.
Sommier (Comm. Steplien), Segretario délia Soc. italiana d'antropologia
— 3, via Gino Capponi. Firenze (Italie). - 1893. Ae.
SnuRY (Jules), Direct. d'Études à l'Éc. des Hautes-Études— 6, rucMézières,
Paris, VI. - 1903 T.
Stanley (Davis-Charles-Henry), DM— Meridon, Conn., (U. S. Am.). —
1878. Ce.
Starr (Frédéric, Prof, à TUniversité — Chicago, 111. (U. S. Am.). - 1899. Ce.
Stephenson (Franklin-Bache), D. M., Médical Inspector in the U. S. Navy
— Portsmouth, N. H. (U. S. Am.). - 1878. T R.
Stirda (Ludwig), Prof. d'Anatomie àl'Univ. — Kœnigsberg (Allemagne) —
1879. Ae.
Stoenesgo (Nicolas), D M, Institut médico-légal, 32, rue Isvor, Bucarest
(Roumanie) — Paris, VI. — 1902. T.
SuMANGALA, Principal du collège de Vidyodaya, — Colombo (Ceylan) -
1882. Ce.
Syamour (Mmo Marguerite), statuaire— 6, rue du Val-de-Grâce, Paris, V.
— 1888. T.
SzoMBATHY (Josef), Custos am kk. naturhistorischen Hofmuseum —
8, Sigmundsgasse, Wien VII (Autriche) — 1901. Ce.
Tarnowski (Mm° Pauline), DM — lO'i, quai de la Moïka, St-Pétersbourg,
(Russie). — 1890. T.
Taté, paléo-ethnologue — 9 bis, rue Micliel-Ange, Paris, XVI. — 1897. T.
Tavano, d m — Rio de Janeiro (Brésil) — 1878. Ce.
Terrier (Félix), D M, Prof, à la Fac. de Méd., membre de l'Acad. de Méd.,
Chirurg. des Hôp. — U, rue de Solférino, Paris, VII. - 1871. T.
Testut (Léo), D M, Prof. d'Anatomie à la Fac. de Méd., Corresp. de
l'Acad. de Méd. — 3, av. de l'Archevêché, Lyon (Rhône). — 1883. T R.
Thane (Georges D.), Prof, of anatomy in University Collège — Gower street,
London W G. (Angleterre) — 1901, Ce.
Thieullen (Adrien) —72, rue d'Assas, Paris, VI. — 1883. T.
Thomas (J.), DM — 3, place Pereire, Paris, XVII. — 191)1. T.
Thomas (N. W.), Curaior of the Library of the anlhropol. Inslitute of G.-B.
and Ir. — London (Angleterre) — 1901. Ce.
Thomson (Arthur), Ksq., Prof, of human Anatomy in the Univ. — The
Muséum, Oxford (Angleterre). — 1895. Ae.
THOREL(Glovis), D M — 1, place Victor-Hugo, Paris, XVI. —1876. T.
LISTE UK> MEMBRES \XIX
Thuijé (Henri), D M, Directeur de l'Kc. d'Anliiropologie — 37, Bd Beausé-
jour, Paris, XVI. — 1866. T.
Thursto.v (Edgar), Superintendant MadrasGovernnient Muséum — Egmore,
Madras (Indes Anglaises) — 18iVi. Ce.
TiCHOMiuov (V.-A.), prof, de Zool. à l'Univ. — Moscou (Russie) — 1879. Ce.
TociLEscr (rirégoire), Pi'of. d'archéologie à l'Univ — Bucarest (Roumanie)
— 18'J8. T.
ToMMASiNi (André) — Avapesa, par Nuro (Corse). — 1002. T.
TopiNARD (Paul), DM— 28, rue d'Assas, Paris, VI. — 1860. T R.
ToRDK (Aurel von), D M, Prof., Direktor des Anthropologischen Muséums
— Budapest (Hon^;rie) - 180.'-!. Ae.
TojiREs (Melchior), Agr. à l'Éc. de Métl. — Buenos-Aires (Rép. Arg.). —
1879. Ce.
TouRNAiRE (Albert) — 48, Bd du Temple, Paris. XI. — 1903. T.
Troutovsky (Wladimir C), Conservateur du Musée des Armes — Moscou
(Russie) - 1888. Ce.
TuRNER(sir William), Prof, of Anatoniy in the Univ. — 6, Eton Terrace,
Edinburgh (Angleterre). — 1878. Ae.
Tylor (Edward-B.), Prof, of Anthropology — Musoum House, Oxford
(Angleterre). — 1880. Ae.
Valenzuela (Théodore), anc. Ministre plén. de Colombie — Bogota —
1875. T R.
Vanderkindèrk (Léon), Membre de l'Ac. des Se. de Belgique, Prof. àl'Univ.
libre de Bruxelles — 51, av. des Fleurs', Uccle (Belgique; — 1874. Ae.
Van Gennep. — 4. rue du Moulin de Pierre, Clamart (Seine). — 1904. T.
Varigard (M™») — 4, BdFlandrin, Paris, XVJ. —1905. T.
Variôt (G), DM, Médecin de l'Hôpital des Enfants-Malades — 1, rue de
Chazelles, Paris, XVII. — 1888. T.
Vaschide (Nicolas), Chef de trav.. au Lab. de Psychologie expér. de l'Ec.
des Hautes Etudes, — 56, rue N.-D. des Champs, Paris, VI. — 1898. T.
Vasgon'cellos-Abreu (G. dk) — Coïmbra (Portugal) — 1875. Ce.
Vauchez 'P^mmanuel) — Les Sables-d'()lonnc(Vendée) — 1888. T R.
Vauvillé (U.\ Archéologue — 17, rue de < Ihristiani, Paris, XVIII. —
1890. T.
Verneau (R.), DM, Assistant au Mus('uin d'IIist. iiat. — lii, rue Ferrus,
Paris! XIV. — 1875. T.
Vkron (Mn>e veuve Eugène) — cliàli-t de l'Épée, chemin de Puits à Antibes,
(Alpes-Maritimes) — 1891. T.
ViGN'ON (Louis), Prof, à l'Êc. coloniale, — 4 rue Gounod. — lUO'i, T.
ViLLARD, D M— Verdun, (Meuse) — 1897. Cn.
ViANNA, DM — Pernambuco (Brésil) — 1877. Ce.
Vi.\sEM>KV (Prince), Secrétaire de l'Ambassade Impériale de Russie — 79,
rue de Grenelle. Paris, VIL — 19(t5. T.
Vielle (Alexandre), .Juge de paix — Ecouen (S.-et-U.) — 1^85. T.
ViNsoN (Julien), Prof, h l'Éc. des langues orientales vivantes — 58, rue
de l'Université, Paris, VIL — 1877. T R.
ViRft (Armand), Doct. és-Sc. nat. —21, rue Vauquelin, Paris, V. — 1892. T.
VooT (Victor) — 75, Bd Si-Michel, Paris, V. — 1890. T.
VoLKOv (Th.), Lie. es Se. nat. — Musée d'Imper. .Mexandre III. Section
d'Ethnographie, Saint-Pétersbourg (Russie). — 1895. T.
XX\ SOCIÉTÉ d'aNTHROPOLOOE DE PARIS
WAt-iHCYKH, l'rof. Docteur, 56, r.uiseiistrassc. Anatoiniche Austalt.— Berlin,
(Allemagne). — liX)'.. Ae
Wai/i'HKU (Charles), ex-.M<'(l. iii>-pi''t. do la inariin; — Seuilly (Indre-et-
Loire) — 18«>5. Cn.
Wkiii.in, I) M —'■•1, ruedi- l'aris, Claiiuirt (Seiiiel — 1884. T R.
Wkishach (Augustin), \) M, Cieneral-Stabsar/.t — Sparhorsbaohgasse, 41
Gratz, II (Autriche) —
Weisgerber (Ch.-Uenri), D M — (32, rue de Frouy, Paris, XVII. - 188U. T.
VViENEa (Gh.) — 6, rue Margueritte, Paris, XVII. — 1878. Cn.
WissENDOHKK (Hpiirv), — Serguievskaïa, 813, St-P»Hersbourg (Russie) —
1886. T R.
WoRMs (René), Doct. ès-Lett. Agr. des Facultés, Direct, de la Revue In-
tern. de Sociologie — 115, Bd St-Gerraain, Paris, VI. — 1893. T R.
Zabouowski (S.) — Thiais (Seine) — 1874. T R. Elhnoloc/ie.
Zoghak(N. de), D M, Prof, de Zoologie et Anatomic à l'Univ. — Moscou
(Russie) — 1879. Ce.
LISTE DES MEMBRES ^^^'
Sociétés savantes, Bibliothèques et Recueils scientifiques
qui reçoivent les publications de la Société.
•• envoi direct du Ministère de l'Instruction publique.
* envoi par lintermédiairo du Ministère (service des (^changes).
PARIS
Académie de Médecine —16, rue Bonaparte.
Anthropologie (1') — Masson et Cif, èdil.. 120, Bd St-Germain.
Association générale des étudiants — -ii, rue des Ecoles.
' Bibliothèque de l'Arsenal — /, rue de Sully.
' — Mazarine — 23, quai de Conti.
r _ Ste-Géneviève — Place du Panthéon
' — de l'Université.
' — des Sociétés Savantes.
* Commission des monuments mégalithiques — .9, rue de Valois.
Ecole d'anthropologie— 15, rue de l'École-de- Médecine.
Ecole des Hautes études. — Laboratoire d'anthropologie — 15, rue de
l'École de MMecine.
* Ecole normale supérieure — Laboratoire de zoologie — rue d'Ulm.
Institut psychologique international— 14, rue Coudé.
'• Ministère des Colonies, (.\nnales d'hygiène et de médecine coloniales).
" Ministère do la (iuerre. (.\rchives de médecine et chirurgie militaires).
* Ministère do la Marine, (.\rchives de médecine navale).
* Musée d'Ethnograpliie — Tfocadéro.
* Musée Guimet — Place d'Iéna.
* Muséum d'histoire naturelle (Bibliothèque) — 8, rue de Buffon.
* Muséum d'hist. nat. Laljoratoire d'anthropologie — 61, rue de Buffon.
Progrès médical — /■/, rue des Carmes.
Revue de psychiatrie — Z)"" Toulouse, Villejuif (Seine).
Revue scientifique — 41 bis, rue de Chùleaudun.
Revue des traditions populaires — M. P. Sébillot, 80, Bd St-Marcel
Société des Américanistes — 61, rue Buffon.
* Société nationale d'acclimatation de France — 41, rue de Lille.
* Société anatomique — 15, rue de l'Érole-de-Mêdecine.
* Société des Antiquaires de France — Musée du Louvre.
* Société de biologie — 15, rue de l'École de-Médecine.
* Société d'ethnographie — 28, rue Mazarine.
* Société d'Excursions scienHûquen— 9 bis, av. Victor Hugo, St-Mandé (Seine).
* Société géologique de France — 28, rue Serpente.
* Société de géographie de Paris — 184, Bd Sttiermain.
* Société zoologique de France — 14, rue deCondé,
\XXII
SOCIKTK D ANTHROpiir.nr.lF. DE PARIS
DÉPARTEMENTS ET COLONIES.
Abbeville ** Socii'-té d'émulatiuii.
Api'H ** Bihliothéqup.
Am1elys{Les). ... * Société normande d'études préliistoriques.
Anpers ** Société d'apricuUure, sciences et arts.
— * Société d'études scientifiques — iplace des Halles.
Arras ** Académie des sciences, lettres et arts.
Auttin ** Société éduenne.
— * Société d'histoire naturelle.
Auxerve * Société des sciences historiques et naturelles.
Beaiivais ** Société acad. d'archéologie, sciences et arts.
Belfovt * Société l)elfortaine d'émulation.
Besançon ** Société d'émulation du Doubs.
Bône * Académie d'Hippone.
Bordeaux ...... ** Académie des sciences, belles-lettres et arts.
— ** Société archéologique de la Gironde.
— * Société de géographie commerciale — à la Bourse.
— * Société de médecine et chirurgie.
— * Société des se. phys. et naturelles — Palais des Facultés.
Boulogne-sur-M . ** Société académique.
Boîirg ** Bibliothèque.
Bourges * Société des antiquaires du Centre.
Caen ** Société des antiquaires de Normandie.
Chalon-sur-Saône * Société des sciences naturelles de S.-et-L.
Chambéry * Société savoisienne d'histoire et d'archéologie.
Chdteaudun .... * Société dunoise d'archéologie, sciences et arts.
Cherbourg ** Société des sciences naturelles et mathématiques.
Constantine * Société archéologique.
Dijon ** Commission des antiquités de la Côte-d'Or.
Douai ** Bibliothèque.
Draguignan ** Bibliothèque.
Dunherqve * Société dunkerquoise.
Épinal * Société d'émulation des "Vosges.
Gannat * Société des sciences médicales.
Grenoble *• Académie delphinale.
— •* Bibliothèque.
— * Société dauphinoise d'ethnologie et d'anthropologie.
Guérel * Société des sciences naturelles et archéologiques.
Hanoi(Tonkin) . . . * Ecole française d'Extrême-Orient.
Havre (Le) * Société havraise d'études diverses.
Laon * Société académique.
Lyon ♦ Académie des sciences, belles-lettres et arts.
— Archives d'Anthropologie criminelle — 1, Place Raspail.
— • • ** Muséum d'histoire naturelle.
— * Société d'anthropologie — Palais St-Pierre.
KCHANGES \XXiri
Mdcon ** AcadtMilie «les sciences, arts ef helles-lettres.
Mtms (Le) ** Société d'u},'!-., sciences et arts «le la Sartlie.
Marseille ** Acailémie des sciences, lettres et beaux-arts.
— * Muséum d'histoire naturelle.
— * Société de iiiéd. sanitaire marit. — 29, cours Lieutaud.
Muntbeliiird * Société d'émulation.
Montpellier ** Bibliothèque.
— ** Société archéologique.
— ** Société de médecine et chirurgie pratique.
Moiili>is * Société d'ém. et des beaux-arts du Bourbonnais.
Nancy * Académie de Stanislas.
Nantes ** Société de Médecine.
— ** Société académique.
— * Société des se. nat. de l'Ouest de la France.
Ximes . . ** Académie de Nîmes.
— ** Bibliothèque.
— * Société d'études des se. nat. — 0, quai de la Fontaine.
Niort ** Société de statistique, sciences et arts.
Poitiers ** Bibliothèque.
— * Soc. des antiquaires de l'Ouest — rue des Grandes-Ecoles.
Retins ** Académie nationale.
Rouen.. . . : ** Académie des sciences, belles-lettres et arts.
— * Société des amis des se. nat. — -JO bis, rue St-Lô.
— ** Société de Médecine.
St-Denis (Réunion).. * Société des sciences, lettres et arts.
St-Omer ** Soc. des antiquaires de la Morinie — 5, rue Caventou.
St-Quentin * Société académique.
Senlis * Comité archéologique.
Sens ** Bil)liothéque.
Soissons * Société archéologique, iiistori«iue et scientifique.
Sousse (Tunisie). Société archéologie.
Toulon ** Bibliothèque.
Toulouse ** Société d'histoire naturelle.
— * Société archéologi(jue du midi de la France.
— ** Société de médecine, chirurgie et pharmacie.
Tou)-s * Société de géographie.
Troyes * Société académique d'agric, sciences de l'Aube.
Tunis. * Institut de Carthage — rue de Russie.
Vannes * Société polymathique du Morbihan.
Vendôme ♦ Société archéologique et scient, «lu Vend«5mois.
Versailles * Commission des Anti«|uités de Seine-et-Oise.
Vienne ** Bibliothèque.
WMV
SOCIKTK n ANTHROPOLOC.IF. DE PARIs
ÉTRANGER
Alleii)ii{;iie.
Berlin * /^;its(•||I•ift filr l)omo;,rtapliic umi stalistik der Juden.
R( rliii-Haleiisop, Gf'ort,'Willienibtrassp, 22.
Berlin {S. W.) .. . * HerliiMM Aiithropolo<ïische Gesellschaft (Zeitschrift
fiir Ethnologie) — 120, Kôniggràtzer Slrasse.
Braanschweiy.. . * Deutsche Gesellschaft fur Anthropologie (Archiv fUr
A nthropoloyif) — F. Vietveg und Sohn, édit.
Dresden * Verein f'iir Knlkunde — Kl. Briidergasse, 2i.
Kunigsberg * Physikaliscl» - Œkonomische Gesellschaft — Lange-
lieihe, 4.
Leipzig * Vereiii fur Krdkunde — ^, Beethovenslrasse.
Mûnchen * Mi'inchener Gesellschaft fur Anthropologie (Beiirdg.
zur anthropologie).
— * Bayerische Akademie der Wissenschaften.
Ntirnberg • Naturliistorische Gesellschaft.
Stettin (I) Internationales Gentralblatt fiir Anthropologie —
D"" G. Buschan, Fricdrich-Carlstrasse, 7 .
Alsace-Lorraine.
Cohnar * Société d'histoire naturelle.
Strassburg Zeitschrift fiir Morphologie und Anthropologie.
Prof. G. Schwalbe, Srhuarztvaldsti'asse, 59.
Angleterre et colonies.
Dublin * Royal Irish Acadeniy — 19, Dawson street.
Edinburgh * Collège of Physicians.
— * Society of Antiquaries of Scotland — Queen street.
— .... * Royal Society — Mound-Princes street.
London * Anthropological Institute of Great Britain and
Ireland — 3, Hanover square.
— Journal of Anatomy and Physiology — Griffin, édit.,
Exeter street, strand.
— Nature — Macmillan and C", édit., St-Martin's street. W. C.
Boynbay (India). * Anthropological Society.
Calcutta. — * Asiatic Society of Bengal — 57, Park Street.
Madras. — * Madras Government Muséum.
Sydney (N. S. W.) * Anthropological Society of Australasia. —7,Lincoln's
Inn Charniers, Elizabeth street.
— * Royal Society of New South Wales — 5, Elizabeth
street north.
Toronto(Canada) * Canadiau Institute — 58, Richmond Street East.
NewPlymouth(N.Z.) * Polynesian Society.
Autriche-Honsrie.
Agram (Zagreb).
Budapest
Cracovie.
* Jugoslavenska Akademija Znanosti.
* Ethnographische Abtheilung des Ung. National mu
seums — Csillag-utcza, 15.
* Académie des Sciences. (Materialy antropologiczuo-
archeologiczne).
ECHANGE-
\X\V
Lemhei (j (A"-o ')
l'rag (Praha) . . .
Sarajevo
Trieste
Wien (/)
liru.celles
* Towarzystwo hulozuawcze — m/. Zimorowkza, 7.
* Société stMoiitifiqiUMle Chevtchetiko — Qfy^rueCzarnccki.
* Naroflopisiir Muséum ( leskoslovanské — PrJAo/vj/, 12.
* Muséum Kralovstvi Oského {Pamalhj nrrhaeologirke) .
* Bosiiisch-IIerzegoviuisclies Lauiles-Museuiu.
* Museo civico di Storia naturale.
* Anthropologische (îesellschaft— Burqring, 7.
lieographie (Tesellscliaft — ia Wien W'allzeile, 33.
BeiKiqae.
* Académie royale de Belgique. Palais des Académies.
* Musée de l'Ktat iudépeudaut du Congo iO, vuedeNamur.
* Société d'anthropologie.
* Société d'archéologie — tl, rue Raceinstein.
* Société de géographie — liO, rue de la Limite.
* Société de géologie — 39, place de l'Industrie.
Brésil.
Rio-de-Janeiro. . . * Museo nacional.
Chili.
Santiago * Société scientifique du Chili — Casilla 12 D.
Séoul.
Copenhague.
Le Caire- .
Madrid.
Boston {Mass.). ..
Cambridge(Mass.)
Chicago {III.
New-York. .
Philadelphia{Pa
St-Louis{Mo.).
Salem (Mass.).
Corée
* Asiatic Society, Korea branch.
Danemark.
* Société royale des antiquaires du Nord.
Egypte.
" Institut Égyptien.
Espagne.
* R. Sociedad geografica — 2i, Galle del Léon.
États-Unis.
* Boston Society of Natural History — Berkeley,
Boyleston street.
* Muséum of Comparative Zoôlogy.
* Peabody Muséum of american Archaeology.
The American Naturalisa
The American Antiquarian.
* American Muséum of Natural History.
* Academy of natural Science — Logan square.
* American Philosophical Society, i04, South Fifth st.
* Free Muséum of Science and Art.
* Numismaticand Antiq. Society, 708, S. Washington, Sq.
* Academy of Sciences — Corner slreet 16.
* Essex Instituts.
WXVI SÙC.IÉTK I) ANTlIROl'dLOfirE DE PARIS
^V<lxkin(Jlon{D.C.) Amencaii AiitlirupoIo},'ist. ^U h\\V.Hodgp,t333 I' Street.
— Bureau of Aincricaii Etiiiiology.
— .... • Siuithsoiiiaii Institution.
— .... "U.S. Geological Survey.
Grèce.
Athènes . . .... * Socit't»"' historique et ethnologique.
Hawaï.
Honnlulu * Bernice Fauahi Bisliop Muséum.
Hollande et Colonies.
Atiislei'ddt/i * K. nederlandscli Aardrijkskundig Genootschap.
Leiden luttunationales Archiv fur Ethnographie. — Rapen-
buig, 09.
Batavia {Java).. . * Bataviaasch Genootschap van Kunsten en Weten-
schappen.
."Morvège.
Trondhjem Société de Videnskaber Selskabs.
Italie.
Firenze. .'. * Società italiana d'antropologia, — 3, via Gino Capponi.
Palevmo La Scienza sociale. — Prof. Fr. Cosentini, Via Palazzo
Monteleone.
Milano * Società italiana di scienze naturali. — Nuovo Museo
civico, Corso Venezia.
Napoli * Società reale.
Rotna Bullettino di Paletnologia italiana —Prof. L. Pigorini,
Collegio Romano.
— Cosmos di Guido Gora — 2, via Goito.
Roma * Società geografica italiana — i02, Via del Plebiscito.
— * Società romana di antropologia — 26, via del Collegio
romano.
Torino * Accademia di medicina.
Japon.
Tokyo * Anthropological society — 5, Rokuchomc Hongo.
— * Asiatic society of Japan — 17, Tsukijy.
~ * Impérial University (Teikoku Daigaku) — Hongo.
Mexique.
Mexico * Museo nacional.
Portugal.
Lisboa * Sociedade de geographia — rua de Sanio Antào.
— G archeologo português — Bibliotheca nacional.
Porto Portugalia — 548, rua de Codofeita.
ECHANGES
XXXVII
Kc'itiibliiiiio .\rt;entiiio.
Buenos-Airi'n . . . . * Instituto geografleo - Flondu, l.'iO.
— ... * Museo nacional.
Cordoba * Acadeniia iiacioiial de Gieiicias.
La Platd * Miisco de. La Plata.
Roiiinanie.
'iissy ... * Société' des uirdei.iiis et des naturalistes.
— * Societatea stiintiûca si literara.
Russie.
Ekatevinbouvg . . . * Société ouralienne des naturalistes.
H''lsingforsi Finlande) * Société finiio-ougrionne.
— ..... * Suomeii Muiiiaisinuistohdistys.
Kdzan Société archéolo^'iiiue, histor. et ethnographique.
Kiev * Université impériale de St-Wladimir.
_ .\n-heologitcheskaïa Liétopis Yujnoi Rossii —
M. Bielachpwsky, directeur.
Miechotr. Bi})liothé(jue et musée universel — M. StCzarnovski,
directeur.
Moscou * Société des amis des sciences naturelles.
— . . . , liousskiy antropologhitcheskiy .Journal.
_ Etnografitcheskoïé Obozrienié — Musée polytechnique.
— * Société impériale des naturalistes.
y orti Alexandrin. Annuaire géologique «le la Russie — M. S. Krijch-
tafovitch, directeur.
St-Pëtembourij. . * Société impériale de géographie.
..." Société d'anthropologie — Académie de Médecine mili-
taire.
Varsovie Swiatowit — E. Majewski, rue Zlota, 01.
Suède.
Siorkholin * K. Vitterhets Historié och Antikvitcts Akademion.
_ * Svenska Siillskapet for Antropologi och Geografi.
SuiHse.
Bn.<<el * Naturforschende Gesellschaft.
Genève * Société de géographie — à l'Athénée.
Lausanne * Société vaudoise des sciences naturelles.
Xeucfuitel " Société neuchàteloise de géographie.
soc. u'anthrop. 190b.
WXVIII
SOCIÉTK d'aNTHRi»1'OL0IÎIE DE PARIS
BUREAU DE 1906
Prësi(h'nl M^ï
1er Vice-Présidf'nt
2P Vice-Président
Secrétaire général
Secrétaire général adjoint.
Secrét'tires dfx séances ....
Conservateurs des collections. .
Archiviste
Trésorier
ILVMY.
Zaborowski.
Ed. CUYER.
MANOrVRIER.
Papillault.
l Anthony.
} Paul-Boncour.
( Rabaud.
) Delisle.
i a. de mortillet.
d'Échkrac.
HUGUET.
COMITÉ CENTRAL.
MM. Anthony. — Azoulay. — Collignon. — E. Collin. — Cuyer. —
Daveluy. — Delisle. — D'Echérac. — Férk. — Fourdrignier. — Maxiini-
lion Georges. — Huguet. — Laville. — Loisel. — Mahoudeau. — Manou-
vrier. — A. DE Mortillet. — Papillault. — Paul-Boncour. — Rabaud.
— Raymond. — E. Rivière. — Topinard. — Vinson. — Viré. — H. Weis-
GERBER. — Zaborowski.
Comme anciens Présidents : MM. Bordier. — Gapitan. — < Ihervin. —
d'.\ult du Mesnil. — Deniker. — Mathias Duval. — Yves Guyot. — Hamy.
— Hervé. — Pozzi. — Paul Sébillot. — Thulié. — Verneau.
COMMISSION DE PUBLICATION
MM. d'Ault du Mesnil. — Deniker. — Paul Sébillot.
DILÉGDÉS AU COMITÉ D'ADMINISTRATION DE L'ASSOCIATION POUR L'ENSEIGNEMENT DES SCIENCES
MM. Vinson. — Verneau.
l'IUX nKCEIIXKS l'AK I.A StlClÉTK \\\l\
PRIX DÉCKRiNÉS.PAU LA SUCIÊTÉ. "
DISPOSITIONS RÉGLEMENTAIRES COMMUNES
AUX PRIX GODARD, BROCA ET BERTIULON
Les membres (|ui composent le Oomit/' central de la Socii'-ti- d'antliropolo-
gie sont seuls exclus des concours.
Tout travail qui aurait été couronin' par une autre Société, avant son dé-
pôt à la Société d'anthropologie, est exclu des concours.
Le jury d'examen comprendra cinq membres élus au scrutin de liste par
les membres du Comité central, choisis dans son sein et à la majorité ab-
solue des membres (jui le composent.
Ce jury fait son rapport et soumet son jugement à la ratilication du Co-
mité central.
Le jury d'examen sera élu ([uatre mois au moins avant le jour où le prix
doit être décerné.
Tous les travaux, iiupriiiiés uu manuscrits, adressés à la Société ou pu-
bliés après le jour où le jury d'examen aura été nommé, ne pourront
[•rendre part au concours (|ue pour la période suivante.
Dans le cas où, une année, le prix en concours ne serait pas décerné,
il serait ajouté au prix qui serait donné au concours suivant.
DISPOSITIONS SPÉCIALES AUX DIVERS PRIX
PRIX GODARD
FONDÉ EN 1862 PAR LE DOCTEUR ERNEST GODARD.
Extrait du testament. — « Ce pi'ix sera donné au meilleur mémoire sur
un sujet se rattachant à l'Anthropologie; aucun sujet de prix ne sera pro-
posé. »
RÈGLEMENT
1. — Le prix Godard sera décerné, tous les deux ans, le jour de la
séance solennelle de la Société.
2. — Ce prix est de la valeur de 500 francs.
3. — Tous les travaux, manuscrits ou imprimés, adressés ou non à la So-
ciété, peuvent prendre part au concours.
Voir les dispositions cotmniines à divers prix.
Le prochain concours aura lieu en 1907.
PRIX BROCA
FONDÉ EN 1881 PAR Mn'e BROCA.
« Ce prix est destiné à récompenser le meilleur mémoire sur une question
d'anatomie humaine, d'anatomie comparée ou de physiologie se rattachant
à l'Anthropologie. »
RÈGLEMENT
1- — Le prix Broca sera décerné, tous les deux ans, le jour «le la séance
solennelle de la Société.
\|. SCCIÉTK I) ANTlIRoPol.UIWE DK I'AIII>
■^. — (le prix est de la valeur de l.fjOt francs.
S. — Tous les mémoires, manuscrits ou im|»rim»^s, adressés à la Société
peuvent prentlrc part au CDiicours; toutefois les auteurs des travaux impri-
més ne pourront prendre part au concours qu'autant (ju'ils en auront for-
mellement exprimé l'intention.
Voir les dispositions communes à dir>ers prix.
Le prnchdin concours aura lieu en 1906.
PRIX BERTILLON
FONDÉ EX 188;j PAU MM. HEKTILLON FHÉRES,
CONFOHMÉMENT A LA VOLONTÉ DE LEUR PÈRE, ADOLPHE BERTILLON.
« [.e prix Bertillou sera décerné sans distinction de sexe, de natio-
nalité ni de profession, au meilleur travail envoyé sur une matière con-
cernant l'anthropologie, et, notamment, la démographie. »
RÈGLEMENT
1. — Le prix Bertillon sera décerné, tous les trois ans, le jour de la séance
solennelle de la Société.
2. — Ce prix est d'une valeur de 500 francs.
3. — Tous les mémoires, manuscrits ou imprimés, adressés à la Société,
pourront prendre part au cohcours; toutefois, les auteurs des travaux im-
primés ne pourront prendre part au concours qu'autant qu'ils en aiLrout
formellement exprimé rintentiou.
Voir les disjjosilions communes à divers prix.
Le prochain concours aura lieu en 1907.
PRIX FAUVELLE
FONDÉ EN 1895 PAR LE D"" FAUVELLE (lOUIS-JULES)
RÈGLEMENT
1. — Le prix Fauvelle sera décerné tous les trois ans, au mois de décembre.
2. — ("e prix consiste en une somme de 2,000 francs.
3. — Toute personne, sans exception, pourra concourir.
4. — Les mémoires susceptibles d'être couronnés devront traiter un su-
jet d'analomie ou de yjhysiologie du système nerveux.
5. La Commission d'examen sei-a composée de cinq membres élus par la
Société au scrutin de liste et choisis dans son sein, à la majorité des
membres présents, quatre mois au moins avant la proclamation <lu résultat.
Les auteurs des mémoires ne pourront pas faire partie de la commission.
6. — Le rapport sera rédigé par écrit et soumis à la Société, qui jugera le
concours et distribuera, s'il y a lieu, les récompenses ou les encouragements.
7. — Les travaux adressés à la Société par leurs auteurs devront être dé-
posés au secrétariat avant le jour de la nomination de la Commission.
8. — Toutes les œuvres, manuscrites ou imprimées, adressées ou non à
la Société et traitant un sujet conforme aux conditions de l'article 4,
pourront être admises au concours par la commission.
9. — Si le prix en concours n'était pas décerné, la somme non distri-
buée ferait l'objet d'un autre concours l'année ou les années suivantes.
Le prochain concours aura lieu en 1908
ANT.IKN- rUl.>ll>i;M> DE \.\ SilCIKTK
ANCIENS PRÉSIDENTS DE LA SOCIÉTÉ
.\I.M. ( 18.7.1; Maktin-Magron. — (1860) Isi(iore Geoffroy Saint-Hilaire.
— (ISOl) Héci.ahd. — (i8G--2) Boudin. — (ISCCJ) DE (JUATUEFAGEs. — (18«iii
(tkatiolet. — (18(iô) PRUNKR-IiKY. — (hSijd) Pérfer. — (1867) Gavarret. —
(1868) Bertrand. --(1869) Lartet — (187U-71) Gaussin. — (1872) Lagneai;.
— (1873) Bertillon. — (1874) Faidherbe.— (1875) Dai.ly. — (1876) de Mor-
TH.i.Eï. — (1877) DE Ranse. — (1878) Henri Martin. — (1879) Sanson. —
(18H())Ploix. —(1881) Parrot. - (1882) Thui.ié —(1883) Proust. — (18&4)
Hamy. — (188.-)H)rRKAr. — (188*;) Letourneau. (1887) Magitot. — (1888)
Pozzi. — (1889) Matliias Dlval. — (1890) Hoyelacuie. — (1891) Laborde.
— (1892) BoRDiER. — (1893) Pli. Salmon. — (189'i) Dareste. — (1895)
Issaurat. — (1896) Aiulré Lefkvre. — (1897) Ollivier-Beauregard. —
(189S). Hervé — (1899). Capitan. — (1900) Yves Guyot. — (1901) Chervin,
— (1902) Verne.au. — (1903; D'Ault-du-Mesnil. — (1904) Deniker. —
(190.5) Paul Sébillot.
ANCIENS SECRÉTAIRES GÉNÉRAUX
MM. Broc A (Paul), 1859-1880.
TopiNARD(Paul), 1881-1886.
Letourneau (Charles), 1887-1902.
PRINCIPAUX DONATEURS
MM.
1862. — Eroest Godard (Prix).
1881. — Madame Paul Broca (Prix).
1884. — J. H. A. DES RoziERs (Legs)
1885. — Adolplie Iîertillon (Prix).
1853. — Jules Delahaye (Legs).
1895. — Jules Fauvelle (Prix).
1897. — F. J. Audifred (Legs).
1900. — Auguste Dethorre (Legs).
1901. — Pierre-Frriest Lamy (Legs).
1902. — Charles Letourneau (Legs).
1903. — A. J. E. LouET (Legs).
SI?" SEANCE. — 4 JiiiiNicr VM.
Frésidenck i)k m. Il a. m y.
INSTALLATION DU BUREAU
pour 1906.
Allocution de M. Sébillot, Président sortant.
Mes (;heks Collègues,
Avant 'le (|iiilltM' la présiflence, je dois vous n'iiiorcier «le la (•oiislante
iiit'iiveillaiiLe t|iie vous m'avez témoignée ; je vous en suis iirolonili'mi'nl recon-
naissant, car vous avez reniln ainsi ma lAehe agréable el l'acile.
L'année qui vient de s'écouler a été signalée par des communications du [jIus
:.'rand intérêt, et votre nouveau bureau, de concert avec l'ancien, s'est préoc-
' iipé des moyens à employer pour les rendre en 190G. plus nombi'euses et plus
variées. Il sera puissamment secondé par votre nouveau président. Ses travaux
sont trop connus ici. el dans tout le monde scientillque, pour (pie j'aie à en parler.
Mais il m'est permis de constater ipie son dévouement à notre compagnie
remonte à une époque déjà lointaine, el (pi'il ne s'esL jamais démenti. Les
tables de nos bulletins attestent la part active qu'il a prise à nos discussions.
Son année de présidence l'ut une des plus fécondes que noti'c société ait
connues; et je suis persuadé que sous son impulsion, secondée par ses dévoués
collaborateurs, nos séances seront aussi lirillaiitcs «praux plus belles époques
de notre bisloire scienlilique.
C'est avec confiance que je remets' mes pouvoirs au docteur llamy. et que je
le convie à prendre, pour la seconde fois, place dans ce fauteuil, qu'il a déjà si
dignement occupé.
Allocution de M. Hamy, Président pour 1906.
Mes ghers Collègues,
Je vous suis extrêmement reconnaissant de l'iionueur exceptionnel iiuc vous
m'avez conféré en m'appelant une seconde fois à présider vos séances. Dans les
rirronstances particulièrement pénibles où vous avait placé la mort inopinée du
président désigné de 1906, vous avez jugé bon de faire appel à la vieille c\p('-
rience de l'un des anciens de la Société et vous avez désigné pour prendre la
place du cber défunt l'un des deux survivants de votre Comité central de 18G(S
(l'autre est mon vieil ami De Ranse), votre président de 1884 rappelé au fau-
teuil au bout de 22 ans. Cette périodicité à long terme ne donnera d'ombrage
à personne, je l'espère: le nombre de ceux de mes successeurs qui pourront
suivi-c cet exemple ne sera jamais bien grand (22 ans, c'est presque une car-
rière) et la tàcbe est fort utile à mon sens, qu'ils pourront remplir de temps
en temps, au milieu des plus jeunes, en évoquant la tradition des premières
années de notre compagnie.
Lorsque j'ai été nommé membi-e titulaire le 21 mars 1867 (il y foua bientôt
soc. d'anthrop. i906. t
-_> i j\N\ii;it l'.tIXl
39 Hns) il v a\ait dt'ja plusieurs HnMfOs(|ui' je suivais assidùnieul clia<|ue ijuiiizaine
les séanees de la Société. Nous étions quatre auditeurs derrière la jietite barrière
(ie bois (jui limitait reinpiacenicnt du public à la salle «le la rue de l'Abbavo ;
un otudianl en droit de mes amis, l'oncle de Damaschino qui servait de secré-
taire à Prùner-Bey et un amateur inconnu qui marquait assez mal et ()u'on a
su plus tanl èti-e le délégué de M. le Prélct de police.
Devant nous, assis à deu.\ rangs de petites tables disposées en double équerre,
tout un personnel d élite que Broca avait su intéresser à son œuvre; des explo-
rateurs comme Martin de Moussy et Carlier, des historiens et des archéologues
romme Henri Martin et Alexandre Bertrand. Mortillet etLeguay,des naturalistes
roinuii' (Jualrel'ages et Larlet, <les linguistes couinie (laussin, des etbnograpbes
riiinme Malaillard et surtout des médecins, médecins de l'armée ou de la marine,
méilecius litlérateiu's et médecins journalistes, médecins aliénistes. sociologisles
et statisticiens, Périer, Boudin, Daily, Brière de Boismont. Delasiauve, Berlillon.
Letourneau et bien d'autres que je ne saurais nommer, mais ilont r\o?^ Biif le/ in.s
nous ont conservé la mémoire.
Et au milieu de cet auditoire curieusement composite et remaïquable-
ment assidu, les deux antagonistes toujours en présence. Broca et Priiner-Bey.
deux natures aussi opposées que possible à quelque point de vue que ce IVit :
instruction très étendue de part et d'autre, mais profondément différentes,
méthodes scientifiques à peu près inverses, exposition aussi lourde chez l'un
qu'elle était aisée chez l'autre, convictions égales, amour égal de nos études,
même désir de servir la science et notre compagnie.
Ainsi constituée, presque dès ses débuts, la Société d'Anthropologie ne pouvait
manquer de prendre des développements qui la valent amenée à compter, quand
j'y entrai, le chiffre respectable de 335 membres dont 222 titulaires, llélas !
elle s'est presque entièrement renouvelée depuis: et il ne reste, je le constate
avec mélancolie, sur le tableau des membres publié, en janvier dernier, que /mi7
de nos collègues de l'année 1867. Si le personnel a changé, l'esprit aussi s'est
profondément modifié. Comme dans toutes les sociétés similaires, l'analyse des
laits a pris ie pas sur les <liscussions générales, tandis que de-ci de-làsur l'arbre
de la science poussaient de nouveaux rameaux.
Il n'en est pas qui ait plus rapidement bourgeonné et fleuri que cette greffe,
d'origine étrangère, qui porte le nom de folklore. Il faut avoir tenté, comme
tout jeune je l'ai fait, d'aborder l'examen de certains problèmes relatifs aux
traditions populaires, pour savoir dans quel abandon on en avait laissé
l'étude. Champfleury allait presque jusqu'à leur x-efuser l'existence et je me
rappelle avec quelle surprise et quelle joie je recueillis dès 1861 certaines
légendes locales, certains chants anciens de ma vieille province.
Vous avez voulu faire honneur à ces études nouvelles en appelant à vous
présider l'an dernier l'un des hojnmes qui ont le plus activement travaillé à les
développer dans notre pays. Je veux parler de notre savant et aimable collègue
Sébillol. qui consacre la lin d'une longue et laborieuse carrière à la publication
d'un vaste ouvrage d'ensemlde sur la tradition nationale. Je le salue en votre
nom. en le remerciant de tout ce qu'il a fait pour la Société pendant la prési-
dence qu'il abandonne et en le félicitant d'avoir édifié à la science qu'il connaît
si bien le monument que nous admirons tous.
.l'appelle .MM. les vice-présidents et secrétaires élus pour 1906 ù prendre
place au bureau.
illJKlS DE I, Ai;E UK l'IEltllK
OUVRAGES OFFERTS
M. Il.\\i\ r.iil linmiii.ii;!' ;'i la Suriclc irnii vnliiinc i|iril vient lir Imhi' |iiir.ii(n'
sous ce litre : Jnsfph Ihtinht'i/, /iif'derin. nahtffi/i.stt', arc/iètiliiijitr, i'.i:/i/iira(et()-
du Pérou, du Chili et du Brosil (1"781785); sa rie, son irurrr, sa corres-
/tondauce, iwet- un elioix ilo pièces relatives à sa mission, une carti- ol <inq
|iiani'lios li(»rs-(oxle (l*aris, (inilniolu. lîKiri. 1 vol. in-1^'^ «le cviii-ISI |» ). —
Jose|)li Ditinbev. dont ce livre lait eonuaili'e la vie el les niallii'iiis. n'a pas clé
stMilenienl un uatui'alisU' l'orl instruit, qui a enriehi «le iléeouverles ini|)orlanles
la ininéraloiîie. la zooloffie ot siirtoiil la liotauiipu' ilescriptive el appliipii'e. Il
lui aussi le londaleur de ri>tlinoi:raphi(^ péruvienne el ee sont ses touilles soil à
C.liareav. soil |dulol encore à l'aeliaraniai et Tarma ipii ont apporté aux an-
tliropologistes les premiers éléments d'une étufle ellinoiïraphi(pie de l'ancien
l'érou. Ces découvertes ont montré nettement l'existence de deux civilisalions
parallèles, localisées l'une aux hords du l'aciliipie, laiilre dans l'Kntra-Sierras.
KUes ont permis, en outre, de se rendre oomjite du de^'ré d'avancement de ces
peuplades au point de vue des transacti(Mis commerciales et de la perfection
qu'avaient atteintes chez eux certaines industries artistiques. Un a sjnfjulière-
ment accru depuis lors ces premières connaissances, mais il faut admettre en
bonne justice cpie Dombey en fid le véritable initiateur. Ces découvertes sont
exposées en détail dans l'étude bio^Mapliique «pii est en tète du volume et cette
partie du texte est accompagnée île trois gravures et d'une carte qui dcnine les
itinéraires du voyageur au Pérou.
M M. Baudouin i»résente. en son nom el en celui de son collaborateur
.M. (i. Lacouloumère. une brochure intitulée : />- Menhir de Saint-Martin de
Brem (Vendée).
Ce travail «ontii'ut la description absolumenl complète du nieiibir de la Cru-
lière, anciennement connu, et li'un menhir inédit, celui de la l'lanç()nnière,
découvert par M. lîauilouin. Les aut(*urs donnent ce mémoire i-omme un typi'
et engagent les préhistoriens à étudier toujours les menhirs de celle façon, (in
notera en particulier ce qui a trait à la idiotographie lardinale éqiiidislanle de
ces mégalithes, et A leur pétror/raphie, ainsi que la discussion des gisements
d'origine de ces pierres. Le tout est accouq»agni'' de dessins très précis et de
pholograph-ies des [toints d'origine ries blocs, et d'hypothèses sur les sépultures
correspondant à ces monuments indicateurs de néci-apole. d'après la théorie
que défend M. Marcel Baudouin.
Objets de l'âge (de pierre trouvés aux environs de Kayes iHaut-Sénégah.
M. Hamv communique un extrait d'une lettre (jue lui a adressée de
Kayes M. Fr. de Zeltner à la date du 2ij novembre dernier.
•M. Fr. de Zeltner faisait partie de la mission du Bourg de Bozas,
avant d'entrer dans l'adnninistiation coloniale et il a acquis pendant son
voyage en Ethiopie et au (ionial une expérience consommée en matière
d'archéologie préhistorique. Il a rapporté de cette expédition des colleo-
tions foit importantes qui sont en ce moment ii l'étude au Muséum.
A Kayes, oii M. de Zeltner est actuellement foncHionnaire, n'ayant que
\H jANVM-it \\HM\
peu diiislaiils à consacrer h ses recherches favorites, il cominonco
cependant à trouver des traces d'un âge de pierre, qu'il nous fuit connaî-
tre en ces termes :
« Ces pièces, écrit-il, sont en schiste dur ou en une sorte de porpliyre
rouge... J'ai trouvé un atelier avec pierres finies, nucléus et percuteurs.
Ce qui me surprend c'est de voir que ces rencontres se font surtout sur
les pentes douces qui avoisinenl les tleuves et qui sont formées d'allu-
vions paraissant peu anciennes ; sur les montagnes je n'ai jamais rien
trouvé. Il est vrai qu'elles sont formées d'un grès très friable et qui se
divise en une foule de cailloux arrondis : les recherches n'y sont pas
faciles et bien des choses ont pu m'échapper.
« Avec les instruments de pierre je n'ai retrouvé aucune pièce de
mobilier, sauf des fragments de poterie, identiques aux vases actuels, et
un morceau de bracelet en pierre dont le modèle n'est plus en usage ici.
Je ne sais si des fouilles donneraient de meilleurs résultats : en attendant
que j'en puisse faire, je vais explorer encore les parties montagneuses h
proximité de Kayes. »
M. Anthony. — L'adaptation du sternum chez les vieillards. (Manuscrit
non remis).
8188 SÉANCE. — 18 Janvier 1906.
Présidence de M. Hamy.
M. Debhiger fait un envoi de photographies de crânes trouvés dans des ter-
rains quaternaires d'Algérie. M. Delisle est chargé de leur examen.
Compte-rendu du Secrétaire Général pour l'année 1905.
M. L. Manouvrier. — Messieurs et chers Collègues, l'année qui vient de
s'écouler a été assez satisfaisante pour noire Société, c'est-à-dire ijue celle-ci a
pu continuer paisiblement son travail ordinaire et remplir sa fonction scien-
tifique sans tracas ni inquiétude.
Elle a eu naturellement ii déplorer le décès do (jiicliiues-uns de ses membres
et ses pertes de ce côté renouvellent comme toujours notre regret quand, à la
lin de l'année, il en faut faire la triste addition. Nous avons vu disparaître cette
année d'abord le D'^ Collineau, puis Elisée Reclus, l'illustre géographe et en
dernier lieu notre excellent et sympathique Lionel Bonnemère. Il convient
d'ajouter h ces pertes, celle du professeur Roujou, bien (ju'il ne lïl plus partie
de notre Société, parce que nous savons qu'il y était resté très attaché de cœur.
La Société a eu aussi le regret de perdre deux de ses associés étrangers :
M. Akerman, .Ministre de Suède à Paris et le D' Adolf Bastian, l'éminent direc-
teur du Musée rfEthnographie de Berlin.
Les nouveaux membres titulaires acquis en 1905 ont été assez nombreux.
RAPPORT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRA!. POUR l'aNNKE 1906 5
.N'cur ont él»' iiouvt'llt'iiionl »'liis ••! lii-iix anrions iléinissionnain-s ont ileiiiandé
lour réinlégralioH, ce <jui nous porim-l d'espérer le reluiir. dans l'avenir, de
<iuelqiies-uns des démissionnaires récents.
(k's derniers s(int au nond)re de six aiix(|uels il laul ajouter i|uel(|ues nieni-
lires raves pour défaut de pavement de la cotisation au n<unlire de six. — Le
Comité central est de lein[is eu temps obligé de sanctionner ainsi l'inellicacité
des invitations du trésorier lorsqu'elle [tarait être définitive.
.Vu total, la Société a perdu douze membres et en a reçu onze. Elle reste
donc, au point de vue nuiuérii|ue à cet étal iloscillations minimes que Ion
jteut appeler slationnaire.
Ainsi se trouvent conlirmées cette année encore les prévisions que votre secré-
taire général opposait il y a quatre ans à certaines afïirmations pessimistes et
qu'il basait du reste sur l'étude d'une courbe annexée à son rapport. La possi-
bilité d'une diminution sensible, comme celle d'une augmentation du nombre
actuel des membres titulaires, n'en persiste pas moins. Mais pour le moment,
aucune de ces éventualités ne se réalise.
Il tant considérer maintenant le travail scien(ili([ue.
Les Bulletins et Mémoires de la Société dans les trois années précédentes ont
été non pas en diminution, mais, au contraire, en accroissement très notable
relativement aux années antérieures, et cette augmentation est surtout due, il
importe de le noter, à la publiration d'excellents travaux anthropologiques. Ce
n'est pas à dire (pie nous n'ayons plus rien à désirer. Il s'en l'aut de beaucoup,
car nous devons aussi comparer le travail anthropologi(juc effectué en France
à celui qui se fait dans les pays dont la production est plus active.
Nous avons incontestablement à souhaiter que des travaux originaux en plus
^M'and nombre soient a[iportés à notre Société qui leur assure d'ailleurs une
édition convenable et une très large dilTusion dans les milieux où ils ont le plus
de chances d'être appréciés et utilisés selon leur valeur.
Le nombre des membres assidus aux séances a été cette année sullisant en
général et plusieurs fois très satisfaisant, mais il a été aussi quelques fois trop
faible. Il y aurait certainement intérêt pour la Société h ce que ses membres
parisiens fissent quelque etlort d'assiduité.
11 est bien rare que h; dérangement qu'on s'impose pour cela soit sans com-
pensation, car les membres assidus ont le bénéfice inhérent aux présentations
de pièces. Or. ces présentations sont Ireijuentes et l'examen n'en est que très
imparfaitement reiiijtlae/' parla lecture di' ce qui est publié à leur sujet dans
le Bulletin.
D'un autre côté, les présentateurs ont intérêt à rencontrer le plus grand
nombre possible de collègues^ capables d'émettre séance lenanle des avis com-
pétents sur les objets présentés.
La présence aux séances est donc pi'olitatde fi la fois aii\ |ireseiii;iieiii>. aux
assistants, à la science et à la Société.
Les deux conférences annuelles n'ont pas été laites en 1905. [tar suite d'em-
pêchements [lersonnels des conférenciers désignés, mais la conférence Broca
et la conférence transformiste préparées l'une et l'autre pour 1900 vont être
faites très prochainement sans préjudice pour celles de 1 année présente.
La Société a reçu en 1905, deux invitations collectives dont beaucoup dé
membres résidents ont [)u profiler avec plaisir et dont il convient de faire ici
une mention reconnaissante. La première a été adressée par M. de Mnri;an qui
a bien voidu faire eu personne à la Société d'.Vuthrtjpologie. les honneurs des
Q 18 JANVIHU 1006
noiiYcllos salli's 'lu Musi-f ilii I.oiivn' i|iii ri'iiIVriiu'iil rinrs(imal)l(' proiluil ilc
SCS missions on Perse, et rela le jour iiu-iiie do l'inauguration officielle de ces
salles. La .leuxiènio invitai iun nous est venue do notre Président actuel M. le
ProfessciM- llaiiiy qui nous a ina^Mstralonienl nionti'é au Musée du Troradéro
les récentes acquisitions relatives à I IMiuioî.M-aidiie «les Ksquirnaiix.
liie autre occasion a i-éuni en livs i/raud nombre les membres do la Société,
tous ceux i|ui iren élaieiil pas emi.érlié par leur éloignomonl de Paris, ('/est
rinauguralion du mcuiument élevé dans les Arènes de Lnlèce à la mémoire
de ('.altriel de Morlillet. La Société y était daillours orficiellemeni ropré
sentée par son |u-ésident. M. Sébillol. dont le <liseours inséré dans les Bidlotins
ne laissera certainomeni rien à désirer aux plus lervenls disciples du maitre,
disparu.
Il peut être permis île placer ici un souvenir qui n v sera pas hors de propos,
car c'est un souvenir do secrétariat. l*ar son assiduité remanpiablc et sa com-
pétence hors lijrne. (iabriel de Mortillej attirait certainomeni à nos séances
beaucoup di''colléguos et de présonlalions. Sou absence a produit sons ce rap-
port «le laltirance un olïol sensible.
Lu outre, il ne se bornait [tas à donner sur ciiafiue «jin-sliou louchant à son
dtunaino une appréciation orale. Toujours une note écrite suivait de près et le
secrétaire était sûr d(> la voir arriver la première. Cette manière d'agir qui
caractérise l'argumentateur vraiment compétent et sérieux, est évidemment
à imiter, car c'est un point de la conduite à tenir dans la discussion scienti-
fique, qui est l'un des nio\ons par lesquels une société contribue à l'avancement
de la science.
Il me reste, Messiom-s, à remercier la Société pour le haut témoignage qu'elle
vient de me donner en me confiant [)0ur une nouvelle période de trois ans le
poste de secrétaire général. La lâche qui mincombe était celle que Broca
s'était on quelque sorte réservée. Je trouve dans ce souvenir plus qu'une satis-
faction damour-propre : celle do penser que la conformité de mes sentiments
avec ceux que jai connus h mon maître me porte tout naturellement à m'oc-
ciipor lies intérêts de la Société dans le mémo esprit que lui.
LA TAILLE DES CHEVAUX CHEZ LES GERMAINS
ET DANS L'EUROPE PREHISTORIQUE.
Pau m. Zaborowski.
Dans nos Bulletins et Mémoires de 1904, p. 412, a paru le mémoire que
M. Piètrement nous avait annoncé à la suite d'une discussion engagée
avec moi. [Les races chevalines dans le temps et dans l'espace). J'ai répondu
verbalement à ce mémoire, très brièvement. J'ai eu tort de ne pas donner
le manuscrit de cette réponse'.
Depuis, en effet, je n'ai pas été peu surpris de lire dans un compte
' M. l'iélromeul ne pouvant prendre aucune part à des discussions orales, m'avait
demandé d'attendre la publication de son mémoire. C'est cette raison 'qui m'a fait
d'abord nlarderina répon.«:e.
ZAHliriilWSKI. — I.A TAir.l.E |)K> ClIEVAIV CHRZ I.KS liF.HMAIN- 7
ren<lu du im-moiie de M. l'irUcmL'iil que (.'clui-ci avait deiiiuiilié la
fausseté de mon opinion sur la taille des chevaux germains. Kn réalité
M. Fiélroinont a soutenu une opinion (lilTt-rcnte do la niionne, comme
c'est son droit, mais sans infirmer la mienne, comme pouriaient le faire
croire, il est vrai, certaines de ses expressions. I"U je ne voyais pas beau-
coup d'inconvénient à laisser la (juestion en l'état, puisqu'il déclare lui-
même son opinion irréductible. Xolnî dissidence portait essenliellcment
sur l'interprétation d'un texte de César. Là où M. i'iéli-emciil a lu : prnra
nlquo defonnia, j'ai lu : parvn atquc dcfonnitt, et cela non pas dans une
édition choisie ii ma convenance, mais dans une bonne édition classique
quelconque des plus répandues. Il n'y a pas eu choix de ma part, pas eu
préméditation. M. Piètrement me dit, p. 42;i : x J'ignore absolument
combien il y a soit de manuscrits latins soit d'éditions latines de UxGuerre
des Gaules, où se trouve le mot parva, petits. Mais y aurait-il dix ou vingt
fois plus de ces manuscrits ou de ces éditions que des autres manuscrits
ou éditions dont la leeon est au contraire le mot pra va, que je n'en per-
sisterais pas moins à affirmer que, dans le manuscrit original de la Guerre
des Gaules, il y avait le mot prava. »
Devant cette déclaration, je n'avais pas à essayer de changer l'opinion
de M. Piètrement. D'autant plus (jue je ne veux nullement élever la même
prétention que lui et déclarer son opinion insoutenable. Je persiste seu-
lement dans la mienne d'abord pour une raison que M, Piètrement recon-
naît qui est que « prara est synonyme de deformia ». Je ne vois pas pour-
quoi César, (]ui ne perdait pas son temps en paroles inutiles, aurait dit,
en la circonstance, deux fois la même chose. La suite du même passage
indique d'ailleurs pour moi que les chevaux en question étaient plutôt
petits. (( Us mettent, dit César des Suèves, souveut pied à terre dans les
combats, puis remontent sur leurs chevaux, qui sont accoutumés à
demeurer à leur place en les attendant, n Je ne vois pas comment les
Su'^.ves auraient pu se livrer à un pareil exercice, continuellement, au
cours d'une bataille, si lorsqu'ils étaient pied à terre, leurs chevaux par
leur taille les avaient gênés dans leurs mouvements et empêchés de faire
face à l'ennemi.
.M. Piètrement cite Tacite pour appuyer son interprétation du passage
de César; mais d'une façon incomplète. Voici le passage intégralement :
« Leurs chevaux ne sont remarquables ni par la vitesse ni par la beauté,
ni dressés h tourner en tous sens comme les nôtres. Us ne savent que les
porter en avant ou les jeter court à droite, en maintenant leur escadron
si serré que personne ne reste derrière. Comme leur infanterie en (jénéral
vaut mieux que leur cavalerie, ils ont le soin de les mêler » (^VI). Etc.
Parlant du sol de la (Jermanie, il avait dit, au paragraphe prècf'dent :
• Assez propre au blé, point du tout aux arbres fruitiers, il est fécond en
troupeaux, mais dont l'espèce est ordinairement petite... I^es (îermains se
dédommagent de la petitesse par le nombre. »
Ces passages justifient bien plus mon interprétation que celle de \[. JMé-
trement. Comment en elTet des fantassins, des piétons, auiaienl-ils pu iHie
8 l.S JANVIF.R IWfi
iiuMés ulilt'inent aux cavaliers, si ceux-ci avaient été montés sur des che-
vaux de la taille de ceux d'aujourd'hui? Au milieu decavaleries comme les
nùlrcs, ils n'auraient pu faire aucun mouvement utile; ils auraient été
écrasés, annihilés. La description de Tacite corr(;^pond parfaitement a
celle de (lésar et nous donne bien le cheval des Germains, lourdaud, petit,
dilTiMiiie et résistant, comme le descendant de noire cheval néolithique
resté encore sauvage, en (îermanie même.
Les autres citations de >L l'iétrement ne prouvent de même ni plus ni
moins et ne corroborent en rien ses affirmations. Il s'appli(|ue bien à
démontrer que les Germains étaient des hommes de grande taille. Ce
n'est pas moi (jui ai jamais songi' à é'iever de contestations à ce sujet.
."Mais qu'est-ce que cela prouve |»our la taille de leurs chevaux? Nous
voyons tous les jours des Arabes de grande taille se pavaner allègrement
sur des ânes si petits, que leurs pieds traînent à terre.
\ lire M. Piètrement, on croirait vraiment que je me suis contenté du
texte ci-dessus de César pour affirmei' que les chevaux indigènes de
l'Europe étaient petits. Or je ne l'ai moi-même cité qu'en raison de sa
conformité avec d'autres textes, celui d'Hérodote en particulier, qui décrit
si bien les chevaux indigènes de l'Europe centrale. Il n'a pour moi qu'une
importance infime. Et il n'existerait pas que mon opinion n'en serait en
rien changée. Je cite en effet des documents, ossements recueillis depuis
la Russie méridionale jusqu'au nord de l'Italie, dans lesTerramares, mors
de chevaux, qui valent bien un texte discuté. De ces documents si positifs
et témoignant de la petitesse du cheval indigène de l'Europe, et de sa
survivance, M. Piètrement ne souffle mot.
Nous avons des chevaux représentés par exemple sur un fourreau d'épée
de Hallstadt. Les cavaliers de ces chevaux toucheraient aisément terre,
s'ils n'avaient pas les jambes repliées. Ils paraissent très grands par rap-
port à leurs chevaux.
Nous avons des représentations de chevaux de l'âge du bronze sur des
rochers de la Suède. Ils sont tellement bas sur jambes, que leur tête vient
tout juste à la taille des hommes placés à côté d'eux. Et ils sont tous uni-
formément petits et de corps allongé.
Nous avons, sur les mêmes rochers, des cavaliers de l'âge du fer, aux
contours fort bien tracés (Monlelius — Sur les sculptures de rochers de la
Suède, p. 5, H et 15). Le cheval est bien plus haut sur jambes. Il reste
petit par rapport au ca\ali^r. Celui-ci, assis par terre, avait le sommet de
sa tête à peu près au niveau de la croupe de son cheval.
Sur la ?itule de Watsch au contraire, où nous avons affaire k des gens
d'origine asiatique, les chevaux sont notablement plus grands comparés
à leurs cavaliers. Sur une situle de Cerlosa, les cavaliers paraissent tout
petits sur leurs chevaux.
Avec des faits de cette nature, et surtout avec les ossements recueillis,
je puis bien me passer d'un texte, fùt-il de César, bien que je considère
celui lie Tacite comme très probant.
M. Piètrement me reproche d'appeler grand le cheval asiali(]uc. .le
ZABOROU'SKI. — I.\ TAU. LE 1)E> CIIKVAI \ CHF.Z I.ES (ÎERMAINS y
m'en suis tenu à la nomenclalurc d<; Sanson. Et ce n'est pas à moi h
régler le différend qui existait entre celui-ci et M. Piètrement (jui tient à
établir l'existence en Asie de deux races chevalines, l'une ari/cniu', l'autre
monrjoliqne. L'existence d'une race chevaline arijenni' est pour lui un élé-
ment de preuve pour ces fameuses migrations mi/i'imes que personne n'ad-
met plus. Je n'ai jugé de la taille du cheval introduit de l'Asie que par
ses ossements comparés à ceux du cheval indigène. Lors(]ue ce che-
val est introduit en Europe en effet, on l'a reconnu aussi bien dans la
Russie méridionale que dans l'Europe centrale. J'ai signalé ces faits tant
de fois (|u"il me parait superllu de les reproduire. Je conlinuf^rai donc à
appeler grand le cheval asiatique introduit de l'Asie, qui n'ost pas néces-
sairement pour moi la race spéciale appelée asiatique par M. Piètrement,
parce qu'en effet il se distingue par sa taille plus élevée. Mais je n'ai
nullement pris la mesure de sa taille et alfirmé qu'il avait 1 m. 56 ou
i m. 70 au garrot. Maison peut voir dans l'ouvrage de M. Piètrement lui-
même I p. 360), des citations abondantes d'où il résulte que le cheval
asiatique dont j'ai parlé et dont j'ai signalé les os, celui qu'on élevait en
Médie et en Arménie pour les armées Perses, était « grand » comme le dit
déjà Hérodote, et était très apprécié de toute l'anliiiuitè comme le montre
M Piètrement tout le premier (p. 362).
M. Piètrement reconnaît lui-même que toutes nos races quaternaires,
s'il y en avait plusieurs, étaient petites (p. 428 de son mémoire).
Elles avaient 1 m. 35 à 1 m. 40 au gaiTot. Elles étaient sensiblement
plus petites que celles introduites d'Asie, de son propre aveu. Il me chi-
cane donc par pur dilettantisme si ce n'est pour rompre une dernière lance
en faveur de ces fameuses migrations aryennes.
Ces petites races occupaient seules l'Europe centrale à l'époque néoli-
thique. Leurs restes se retrouvent dans les alluvions et jusque dans les
lombes protohistoriques, toujours si semblables à eux-mêmes, qu'on ne
peut pas distinguer les animaux récents des animaux ancien?, ni les ani-
maux sauvages des animaux domestiques'. C'est cet animal que les plus
anciens peuples de langue aryenne en Europe ont connu, chassé, mangé,
domestiqué. Les Aryens ne se présentent pas en Europe, tout d'abord,
avec un cheval introduit d'Asie. Voilà ce que j'ai voulu démontrer et que
j'ai démontré sans m'arréter à des déterminations de races trompeuses et
dans la circonstance sans objet. .M. JMétrement, qui a soutenu que la
patrie protoaryenne se localisait près du lac Balkach, ne me contredit pas.
Il lui incombait de démontrer que son cheval aryen, domestiqué à
l'ouest de l'Alatau ! (p. 116), avait été introduit en Europe par le peuple
des dolmens! (p. 572). Mais cela lui est impossible .. Sa thèse est du do-
maine du roman.
Après avoir reconnu fp. 428j que u certaines races chevalines euro-
' V. Congrus ilc l'Association française pour ravanccincnl dos sciences, Grfinnbliî.
VM'i. L'origine des animaux domestiques en Europe, p. 1039.
10 \H JANVIER 1900
pt'enncs paraissent avoir Joiilili' de volume et de poids depuis l'époque
de leur domestication >k il veut me démontrer l'influence considérable
que la nalui'e du climat el du sol a exercée sur la taille des populations
chevalines. Ce n'est pas à moi que celte leeon s'adresse, mais à lui-même
et aux zoologistes de l'école «le Sanson qui croient à la fixité des races et
alïirmenl. devant l'inerédulifé générale, que nos races de chevaux exis-
taient dès l'époque (piaternairc (p. 117, 123).
Il afTirme ensuite qu'il n'y a pas eu de croisement entre les races
indigènes de l'Kurope et les chevaux plus grands, mieux faits, importés
d'Asie (jue l'Anliijuité nous a signalés. Or dès qu'on fait de l'élevage, les
croisements sont le moyen le pli:s rapide et le plus sûr d'améliorer les
races. Tout le monde sait bien que nos meilleures races sont le produit
d'habiles croisements. Pourquoi doncles Gaulois auraient-ils payé si cher
des chevaux étrangers comme le dit César (iv, i i, si ce n'avait pas été
pour les croiser avec les leurs? M. Piètrement me demande de lui citer
des traces subsistantes de ces croisements (p. 430). Vraiment il abuse.
Je cite M. Piètrement lui-même h propos de crânes du lac de Hienne,
de l'âge du bronze et attribués par Sanson à sa race asiatique que M. Piè-
trement appelle race aryenne. Et je donne le numéro de la page. Seule-
ment ce numéro, à l'impression, a été retourné : de 573 il est devenu
375, et l'on sait combien sont fréquentes de telles erreurs qui échappent à
l'attention, .\lors iM. Piètrement, gravement, de me rectifier : c'est page
573, me dit-il.
J'avais bien dit : 5 ou 6 crânes du lac de liienne. M. Piètrement me
rectifie encore : j'ai donné des renseignements non pas sur 5 ou 6, mais
sur 10 crAnes. Fort bien. Mais en fait de crânes provenant du lac de
Bienne, il n'y en a que cinq ou six si on compte le crâne provenant,
d'après M. Piètrement lui-même, non du lac même, maisd'une tranchée de
Hageneck, près du lac. Les crânes trouvés dans le lac de Bienne m'ont
paru ofïrir un ensemble d'un âge à peu près certain. Je les ai cités en
raison de cette garantie que n'offrent pas tous les autres et parce qu'ils
viennent de stations lacustres. Je les ai cités fort exactement.
Pourquoi donc M. Piètrement se donne l-il l'air de me rectifier?
Pourquoi donc, au lieu d'attaquer de front la thèse que j'ai démontrée,
cherche-t-il à laisser croire qu'elle manque de solidité en relevant de ces
inexactitudes imaginaires?
Sur la question du cheval monté c'est lui que j'ai suivi principalement.
Car il s'est appliqué à démontrer que son emploi dans les guerres a été tar-
dif en Europe (p. 304). Mais il me dit que les Bretons, du temps de César,
avaient de la cavalerie, et qu'il l'a prouvé. Or le passage de César que
cite M. Piètrement lui-même, p. 585 de son livre, prouve péremptoire-
ment que les Bretons montaieflt des chars presque exclusivement. Je
reproduis le passage tel que le donne M. Piètrement : »< Cassivellaum,
désespérant de nous vaincre en bataille rangée, renvoya la plus grande
partie de ses troupes, ne garda guère que quatre mille hommes montés
sur des chars, et se borna à observer notre marche. » l'n peu plus loin,
A. BLOCH. — nOULEl'K DES VEIN ET DES CHEVEIX 1 1
il est vrai. M. Piétreinont cile un autre passage de César où, avec les
chariots, il cite la cavalerie des Bretons. César parle deux fois de la cava-
lerie des Bretons, mais jamais indépendamment de leurs chariots. Jai
donc en elVet été peut-être un peu trop loin en aflirniant que l'usage de
n<' coiuhaltre qu'avec des chariots attelés s'était conservé en Bretagne
jusqu'au temps de César (p. 858). Et pourtant, dans sa Vie (VAqricola dé-
crivant les mœurs des Bretons, Tacite ixn) s'exprime ainsi . « Leurs
forces consistent en infanterie. (Juelquesuns de ces peuplrs montent aussi
sur des chars, où le [ilus distingué tient les rênes... » Il n'est (|uestion de
cavalerie qu'en un passage obscur. Les Bretons comhattaienl déjà au lemps
de (lésar, montés aussi parfois sur des chevaux, .le suis d'aulanl plus dis-
posé à l'admettre que dans les sculptures sur rocher de l'âge du bronze de
la Suéde, il y a des hommes montés sur chars et sur chevaux.
Donner cette satisfaction à >L Piètrement ne me coûte vraiment rien,
d'ailleurs. Car, encore une fois, en quoi ce'a touche-t-il à la démonstra-
tion (|ue j'ai déjà faite? I-es protoaryens, ai-je dit, sont si peu venus
d'Asie en Europe en conquérants, en cavaliers fringants et tumultueux,
qu'ils ne connaissaient pas vraisemblablement l'usage du cheval monté,
tout en connaissant fort bien celui du chariot. Or, César ei Tacite, en
nous apprenant que les Bretons, encore à leur époque, ne se servaient
guère que de chars de guerre, nous fournissent du fait une démonstration
vraiment remarquable. Car ces Bretons conservaient ainsi un très vieil
usage abandonné ailleurs. Peu importe, en l'espèce, qu'ils aient su dès
lors monter à cheval. L'essentiel c'est la constatation de la survivance
du vieil usage du char, attestée, encore, d'après d'Arbois de Jubainville,
par la plus ancienne épopée de l'Irlande (Mon mémoire, p. 836).
COULEUR DES CHEVEUX ET DES YEUX DE 12,015 FRANÇAISES.
TAILLE DE 11,704 FRANÇAISES ET DE 491 ETRANGERES (PROSTITUEES),
d'après le Di' Parent-Duchatelet.
Pah .m. AixiLi'HK Blucii '.
Je ne sache pas qu'il existe, dans la science, une série aussi forte
de femmes françaises, sur lesquelles on ait mesuré la taille et étudié la
couleur des cheveux et des yeux.
Pour la taille, en particulier, les documents publiés jusqu'à ce jour sont
assez rares en ce qui concerne la femme, ou du moins ils ne rapportent
que des séries relativement faibles, en comparaison de celles que four-
nissent chez l'homme les opérations du recrutement militaire.
Aussi croyons-nous bien faire en communiquant ii la Société les rensei-
' Goimuunieatiou faite à la séance du 4 janvier l'tOii.
1-2 18 jA.NviKit iDor.
^in'iiit'nls (|iie nuus avons Irouvi's, à ce sujet, dans If célèbre ouvrage du
doeleur l'arenl-Dufhatelel sur In l'nislUudon thius In rillc ih' Vnris, contenant
des documents slalisliques |)uisés dans les archives de la l'réfeclure de
police '.
CuMinie riii<li(|ur le [iln> «le cet ouvrage il ne s'agit que de femmes
prostituées, mais il n'existe pas de caractère anthropologique qui dis-
tingue ces femmes des autres, et si l'on peut découvrir, chez un certain
nombre d'entre elles, des anomalies organiques, celles-ci ne ditlèrent pas
des anomalies (pie Ton peut rencontrer chez les dégénérés en généial.
il n'y a pas d'anomalie propic aux femmes prostituées, pas plus qu'aux
délinquants.
]y[me Tarnowsky, qui étudia, .-ous ce rapport, 150 prostituées russes,
remarque cependant qu'elles avaiepl souvent les yeux gris ou verts pail-
letés de jaune *, mais Parent ne signale pas cette particularité chez
aucune des 12,600 prostituées françaises ou étrangères, dont il est ques-
tion dans son livre.
La taille peut néanmoins se ressentir de l'hérédité morbide qui occa-
sionne les anomalies chez les dégénérés; ainsi, elle peut être extraordi-
nairementou trop grande ou trop petite chez ces derniers, ainsi que nous
l'avons montré dans nos recherches sur l'Hérédité morbide dissemblable ',
mais dans toutes les statistiques lelatives à la taille, quel que soit le sexe,
se trouvent compris des individus dont les antécédents héréditaires sont
plus ou moins suspects.
Pour tAclier de se rendre compte de l'influence du climat sur la couleur
des cheveux et des yeux, ainsi que sur la taille chez les Françaises, Parent
divisa la l'rance en trois parties, une du nord, une du centre et une
du midi.
Ces trois zones, dit-il, sont séparées par deux lignes ; une qui partirait
de Saint-Malo et viendrait aboutir au lac de Genève, laissant dans la zone
du milieu les départements d'ille-et- Vilaine, de la Mayenne, de la Sarthe,
de Loir-et-Cher, du Cher, de la Nièvre, de Saone-et-Loire et du Jura;
l'autre parlant de Bordeaux et arrivant à Chambéry, laissant encore dans
la zone du milieu, la Charente, la Haute-Vienne, la Creuse, le Puy-de-Dôme,
le Rhône et l'Ain.
* l'ARENT-DuCHATELET. — De la prostitulion dans la ville de Paris, eonsidériie
sous le rapport de l'hygiène publique, de la morale et de l'administration. Paris iS'oT,
2 vol. 3» édition compkHée par des ilocumenis nouveaux et des notes par Trébuchet
chef du bureau sanitaire etc, et Poirat-Duval, chef de bureau à la Préfecture de
Police. (Nous avons également consulté les deux premières éditions de l'auteur seul,
où se trouvent aussi les statistiques do la Préfecture).
* Tarnowsky (D^ Pauline). - Etudes anthropométriques sur les prostituées et les
voleuses. — Paris ISS'J.
» Comnninic.à l'Assoc. fr p.l'Avanc. des sciences 1893. — .Xalurc et jKithoyéniedp la
scrofule.
A. BMIGK. — COULEIR DKS YEI\ F.T DES CURVEIA J li
La promii'T*' do ces zones ' eom|>iciiil '2\) <l<'|»ail<'nii'iils
La seconde — :i7 —
La troisième — :2î< —
[ia (lorso n'y (ignre pas.
I^c lolal di's feimncs t'xaniinét's est de l:î,rt(lT, insofites à la Préfecture
de police, du 16 mais IHKIaul^l avril \X'A\.
Avant l'année 18:28 il pouvait arrivi-r (|iu' des lilics de 10 à \:\ ans aient
été inscrites i-oinnie ^u'ostiluécs, mais ;i partir de celte épotjue il ('■(ail
nécessaire d'avoir lîJ ans révolus, constatés par l'extrait de naissance
L'Age extrême de ces femmes allait j,usqu';i 65 ans d'après les tableaux
de Parent.
Huant au lieu de naissance des Françaises on arrivait toii|(iiirs à le
connaître exactement en même temps que l'âge.
Il est rare, dit notre auteur, qu'une fille qui se présente pour être ins-
crite sur les registres des piostituées, ait avec elle son acte de naissance;
elles ne conservent presque jamais les passe-ports qu'on leur donne pour
venir à Paris, si toutefois elles en prennent. Pour remédier à cet inconvé-
nient l'administration a pris le parti de s'adresserdirectement aux maires.
Les réponses aux lettres arrivent toujours. Lorsque la réponse d'un maire
prouve qu'une fille n'est pas connue dans le lieu qu'elle a indi(|ué, on la
mande pour lui faire subir un nouvel interrogatoire et l'on finit toujours
par découvrir la vérité *.
En ce qui concerne la nationalité des étrangères, il y en avait, parmi
elles, de toutes les parties de l'Europe, ainsi que des Américaines, des
.\fricaines et des Asiatiques.
Voici d'abord le résultat des recherches de Parent sur la couleur des
cheveux et des yeux, avec les remarques de l'auteur.
Particularités que présentent tes prostituées de Paris sous le rappo't
de la couleur de leurs cheveux, de leurs yeux et de leurs sourcils.
Les cheveux.
Sur M, 600 filles venues de Paris, de toutes les villes et de tous les
pays, il s'en est trouvé ayant des cheveux :
CliAlains G.73U ou 1 sur 1,87 ou 534,20 sur 1 .UUO
Bruns 2.642 - 4,77 — 209,68 -
Blonds 1.G91 — 7,43 — 134,44 —
Noirs 1.486 — 8,47 — 117,92 —
Roux 48 — 262,50 — 3,80 -
S
M de cette population, nous retranchons toutes les filles étrangères,
* Rappelons que c'était avant 1870.
' ParENT-Duchatelet. — Loc. cit. T. I* p. 553-057.
li l« nswFM 190fi
t't si, en n'examituinl qut! ks l-'iani^aibes, nous éludions successivement
colles tiui sonl venues des dillV'renles zones que nous avons admises, et qui
forment un total de 12,015 individus, peut-être découvrirons-nous, sous le
rapport de la couleur des cheveux, une influence quelconque du climat;
ce travail lait, nous trouvons pour chacune df ces zones:
Zntif (lu nord. - Populnlian 10.855.
Hrnns 2.2riU ..iilsui- 4,82 ou 207,17 sur 1 .(XMI
ChiUains 5.811 - 1,86 — 535,32 —
Blonds 1.502 — 7,22 — 138,30 —
Noirs l .24!» -- 8,09 — 115, OC -
Koux 43 — 252,44 — :{,% —
Zone du milieu — Population 960.
ChiMaiiis 480 un 1 sur 2,00 o^i 500,00 sur 1 .000
Hnins 239 — 4,01 — 248.95 —
Noirs 138 — G. 95 — 143,75 -
Blonds 100 — 0,96 - 104,16 —
Boux 3 — 320,00 — 3,12 —
Zone du midi. — Population 200.
Chiltains 101 ou 1 sur 2,00 ou 5(15 sur 1.000
Bruns 56 — 3,57 — 280 —
Noirs 29 — 6,89 — 145 —
Blonds 14 — 14,28 — 70 —
Boux 0 — 0,00 — 00 —
Quelque peu tranchés que soient les résultats de ces différents tableaux,
ils semblent cependant nous indiquer :
1" Que les cheveux noirs et les cheveux châtains deviennent plus fré-
quents à mesure qu'on descend du nord au midi ;
2° Que les cheveux bruns prédominent moins dans le nord :
3° Que ceux d'un ton blond se font d'autant plus souvent remarquer,
qu'on remonte du midi au nord ;
4° Enfin que la couleur rousse suit la même loi que la couleur blonde,
et ne se retrouve plus dans la zone des départements méridionaux.
Voilk pour les zones ou régions. Examinons maintenant quelle peut
être sur cette couleur de cheveux l'influence des villes et des campagnes;
il nous suffira pour cela de réunir la population de tous les chefs-lieux
et des sous préfectures, de mettre à part celle des campagnes, et de faire
sur ces deux groupes les mêmes opérations que nous avons faites sur les
populations fournies par les différentes zones.
\. III.OCII. — Oill.Kllt liK> VKl A Kl l>i:s CIIKVKI \ |.,
l'opuUilion jjKiieiiitiil lies vilh's S.'jtJ'J.
l.lMlaiiis 4.584 mi 1 sur l..S() dii r)34,'.»5 sur 1 .UUO
ISiui.s 1.787 — 4,;U - 208,51 —
lUoii.ls 1.15U — 7,45 — 13l,2)t —
Noirs 1.015 — 8,44 — 118,45 —
H.m\ 33 — 259,66 — 3.85
Pojinlatiun iiror,'ii(iiit ilfs caiHpdifues 'd.'i^tli.
r.iiiilaiiis 1.808 un 1 sur l.!)(» nu 524,60 sur 1 .0!)0
l'.ruMs 758 — 1,5.} — 2r.>,!'G
iJlon.is 406 - 7,3S) — I35.2.S
.Noirs 401 — 8,59 — 1 10,30 —
n.Mix 13 — 265,77 — 3,77 —
Ces nouveaux délalU seuibleiU (lémoiilior que, sous le rapporl de la
couleur des cheveux les populations des villes el celles des campagnes ne
diffèrent pas les unes des autres...
J'ai fait, sur les diiïérentes fouleurs des sourcils, un travail analogue
il celui que je viens de présenter pour les cheveux ; mais comme il résulte
de ce travail que la couleur, des uns et des autres, est presque toujours
semhlahle chez les mêmes individus, je crois devoir n'en pas parler.
Il n'en est pas de même des diiïérentes nuances (jue nous olVrent le .
yeux; ce sujet est encore neuf, el me parait digne de piquer la curiosité.
Lea yeux.
Le noir, le hrun, le gris, le hleu et le roux sont les cinq nuances qu'on
remarque le plus ordinairement dans les yeux, et que je trouve dans les
signalements qui me sont communiqués.
Sur 1:2,454 filles, appartenant à toutes les villes et .\ tous les pays, et dont
la couleur a été signalée avec soin, ces organes ont été trouvés :
(Iris 4.612 - ou 1 sur 2,69 ou 870,32 sur 1 .000
Bruns 3.529 — 3,52 — 283,36 —
lih'us. 2.878 — 4,32 — 231,09 —
Houx 730 — 17,20 — 58,61 —
Noirs 705 — 17,66 — 56,00 — '
Si dans l'examen de cette nouvelle question, et en T'cartant toutes les
prosUtuées étrangères, nous divisons par légion la population particulière
sur laquelle nous opérons, il nous viendra :
Zone du nord. — Population 10.833.
Gris 4.061 ou 1 sur 2,66 ou 374,87 sur 1000
Bruns 3.015 — 3,59 - 278,31 —
Bleus 2.527 - 4,28 - 233,26 -
Roux 641 — 16,90 — 59.17 -
Noirs 589 — 18,39 — 54,37 —
46 18 JANVIER 19Ufi
Zôue (lu milieu. — Population 939.
Gris 325 on 1 sur 2.88 ou 346,01 sur l.(M)<i
Bruns 301 — 3.11 — 320,55 -
Bleus 191 — 4,91 — 203,40 —
Noirs 66 — 14,22 — 70.28 —
Roux 56 - 16,76 — 59,64 —
Zone du midi. — Population 200.
Bruns 78 ou l sur 2,56 ou 390.00 sur 1 .000
Gris 541 — 3,92 — 255,00 —
Bleus 41 — 4,87 — 205,00 —
Houx 16 — 12.50 — 80.00 —
Noirs 14 — 14,28 — 70,00 —
De ces diiïérenls tableaux nous devons tirer celte conclusion :
i'' Que la couleur grise des yeux, considérée sur toute la population
que nous examinons est celle qui se fait remarquer plus souvent sur toutes
les autres ;
2° Que la couleur brune vient ensuite ;
3<* Que la couleur bleue suit immédiatement la brune;
4" Enfin, que la noire et la rousse se rencontrent quatre ou cinq fois
plus rarement que toutes les autres.
Que,, si pour reconnaître quelle peut être sur cette couleur des yeux
l'influence du climat, nous examinons les populations fournies par les
différentes zones que nous avons admises, nous trouverons que les diffé-
rences que présentent les populations sont si minimes, qu'on ne peut en
tirer aucune conclusion relativement à la question que nous voulons
éclaircir.
Il ne nous reste plus qu'à examiner l'iniluence des villes et des cam-
pagnes ; abordons cette nouvelle question :
Population venant des villes, 8.536.
Gris 3.100 ou 1 sur 2,75 ou 363,16 sur 1.000
Bruns 2.495 — 3.42 — 292,29 —
Bleus 2.009 — 4,24 — 235,35 —
Noirs 488 — 17,49 — 57.16 —
Boux 444 — 19,22 — 52.01 ~
Population venant des campagnes, 3.U36.
Gri.s 1337 ou 1 sur 2,56 ou 389,11 sur 1.000
Bruns 899 — 3,82 — 261,64 —
Bleus 750 — 4,53 — 218,27 —
Roux 269 — 12,77 — 78,28 —
Noirs 181 — 92.55 — 52.67 —
A. HLOCII. — COULEIH DKS YEIA ET DES CllKVEIA 17
Ici l'iirenl ne fait [)as de i"oniar(ni(>s, mais rappi'Ions (|ue relies qui pré-
cèdent sùnl de lui V
La hiille.
Parent, dans un tai)leau que nous reproduisons plus loin, nous fait
connaître ensuite la taille des prostituées.
Ainsi qu'on peut s'en assurer il indique à part, celle des Parisiennes,
celle des Mlles qui étaient nées dans les sous-préfectures, el celle des pros-
tituées nées dans les villages du département de la Seine.
Puis la taille: 1" dans la zone du nord ; ^^ dans la zone du centre; 3° dans
la zone du midi, en inscrivant séparément la taille dans les chefs-lieux
de départements, dans les sous-préfectures et dans les villages de cha-
cune des différentes zones.
Ensuite la taille des étrangères seules, celle des Françaises el des étran-
gères réunies, celle des femmes de chacune des trois zones, les villes
el les villages étant réunis.
Enfin la taille, dans les villes seules el dans les villages seuls de toute
la France.
Mais l'auteur ne donne que les chiffres hruls, depuis la taille de 1 m. 15
jusqu'à celle de \ m. 85, sans aucune remarque h la suite, el nous avons
di^l calculer, puis faire contrôler, par un calculateur de profession, les
sommes des différentes tailles, et les moyennes de toutes les séries, que
nous avons ensuite rassemblées dans un tableau récapitulatif (p. 20)
qui résume le grand tableau.
Quelle méthode devons-nous employer de préférence, celle des séries
ou celle des moyennes, pour exposer dans le cas actuel les résultats que
donne la compai'aison des nombreux chiffres de ce tableau ?
La sériation. en donnant le maximum <Je fréquence, est utile lorsqu'on
a un grand nombre d'observations à analyser, tandis que le calcul des
moyennes est une méthode de synthèse, qui est préférable surtout lors-
(ju'on n'a qu'un petit nombre de chiffres à sa disposition.
Ici nous avons des séries qu'on a rarement l'occasion de voir aussi
fortes pour les recherches anthropologiques ; néanmoins nous employe-
rons les deux méthodes l'une après l'autre, afin de pouvoir les comparer
entre elles.
L'on peut remanpier, sur ce tableau *, (]u'il y a chez les Parisiennes un
maximum de fréquence à 1 m. 50, qui est de 39i ; qu'il y a chez les filles
publiques, nées dans les chefs-lieux de déparlements de la zone du nord
un maximum de fréquence à 1 m. 60, qui est de 148, et chez les filles
nées dans les sous-préfectures de la même zone un maximum de fréquence
122 pour la même taille, tandis que chez les femmes, nées dans les vil-
lages de celte zone du nord, le maximum de fréquence 259 est à 1 m. 54.
' Loc. rit. : T. l". 190-196.
* Nous avons di'i y ruclilier trois erreurs de cliiUros.
soc. D'ANTimOP. 1906.
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18 JANVIKK 1900
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•20 18 jANviKH 1906
Dans le total général de toutes les prostituées, françaises et étrangères,
le maximum de fré([uence 1H)3 se rapporte à la taille de 1 m. 54, et il en
est de même pour les h'raiiraises seules rzz Hl\), ainsi que pour les Fran-
çaises de la zone du nord, y compris le département de la Seine — 793.
Il va, de plus, deux autres maximums de fréquence (plus petits que
le maximum principal) pour chacune de ces deux dernières catégories
(total général et zone du nord seule), l'un correspondant à la taille de i m. 50
et l'autre h celle de 1 m. 60. Ce sont les chiffres 829 et 806, dans la
colonne du total général, et les chiffres 712 et 677 dunsia colonne de la zone
du nord.
Dans la colonne des villes de France le maximum de fiéquence 686
correspond à la taille de 4 m. 50, tandis que dans la colonne des. cam-
pagnes le maximum 300 correspond à une taille plus grande 1 m. 54.
Enfin, remarquons que, dans les diiïérentes séries, les maximums de
fréquence les plus nombreux se rapportent à la taille de 1 m. 54. Ce sont:
i" les villages du département de la Seine ; 2° les villages de la zone du
nord ; 3° les préfectures de la zone du centre ; 4° le total général ; 5° la
zone du nord avec la Seine; 6° les villages de France.
Somme toute la taille de 1 m. 54 est fréquente dans les villes comme
dans les campagnes.
Quant aux autres maximums de fréquence du tableau, ils oscillent
entre 1 m. 50 et 1 m. 60 sans sortir de ces limites.
Voyons maintenant notre tableau des moj'ennes.
T.\BLEAc des moyennes suivant les seines totalisées.
nÉGIONS Nombre do sujets Moyenne de la taille
Paris 4.266 ln'o26
Sous-prrtV'clures de la Seine. . 39 1,553
Villages 233 1,538
Zone (lu Nopfl (préfectures) ... 1 . 804 1 , 544
— (sous-préreet.).. 1.382 1.551
— (villages) 2.836 1,541
Zone du Nord entière 6.022 1 . 544
Zone (lu fcntre (préfectures).. 480 1.548
— (sous-prèf.) . . . 214 1,537
— (villîiges) 251 1.510
Z(ine (lu Midi (préfeeliires). . . 110 1,5.53
— (sous-préfect.) . 37 1,547
— (villages) 52 1,548
Zone (lu .Nord avec le départe-
ment de la Seine 10.560 i,.537
Zone du Centre •. . . 915 1 , .544
Zone du Midi 199 1 , 551
Toute la France 11.704 1,538
Villes de France 8.332 1,535
Villages de France :{.372 1,511
i:iranger 491 1 , 505
A. HLOCll. — I.A Cori.EIR DKS YEl'X ET DES CHEVEUX 21
L'un peut oltsorver ([ue l.i luoyi.'iinc de la taille oscille entre I m. 526
t;t 1 m. 553, la plus petite se trouvant ii Paris, et la plus forte dans les
sous-préfeclnres de la Seine (sur 39 cas seulement) et dans les préfectures
de la zone du midi (sur ItO cas) ; mais si nous défalquons Paris qui se
trouve dans des conditions spi^ciales, ainsi qu'on va li; voir, et si nous
prenons la moyenne la plus petite qui vient ensuite, I m. 537, nous cons-
tatons (jue la moyenne en l'rance n'oscille plus qu'entre 1 m. 337 et
1 m. 553.
En effet, si la moyenne de Paris n'est que de 1 m. 526 c'est iju'on
y comprenait un certain nombre de filles dont la croissance n'était pas
encore terminée, ainsi qu'on peut s'en assurer sur le tableau de Parent,
où l'on observe que les tailles les [>lus petites se rapiioitent aux Pari-
siennes seules.
F^a raison en est que les toutes jeunes prostituées de Paris se trouvant
sur place, n'écbappaienl que diflicilenient ;\ la surveillance et a l'ins-
cription, tandis que les filles publiques, venant des déparlements et de
l'étranger, n'avaient sans doute pas toujours les ressources nécessaires
ni la facilité pour (juitler sitôt leur pays.
Par suite les prostituées arrivant du dehors avaient, en moyenne, une
taille plus élevée et dépassant même, dans certaines zones, la moyenne
trouvée dans d'autres pays, pour des femmes non prostituées.
L'on peut s'expliquer ainsi pourquoi la moyenne de toute la France
n'est que de 1 m. 538, à cause de l'adjonction des Parisiennes h la série
totale II en est de même de la zone du nord réunie au déparlement de la
Seine, qui n'a que 1 m. 337, et des villes de France qui n'ont que 1 m. 535.
Par contre la zone du nord, sans le département de la Seine, atteint
le chilTre de 1 m.'544, et la totalité des villages de France 1 m. 541.
Or ce chiffre 1 m 544 correspond presque exactement à la moyenne
trouvée par M. Manouvrier (1 m. 543) pour une série de 230 Françaises
de 20 à 45 ans, prise au hasard parmi les fiches du service d'identifica-
tion anthropométrique de M. Berlillon, à la Préfecture de Police '.
Rappelons que le maximum de fréquence, se rencontre six fois pour la
taille de 1 m. 54, dans le tableau de Parent-Duchalelet.
Signalons aussi ce fait inattendu que les plus fortes moyennes s'ob-
servent dans le midi, mais ici les séries sont faibles.
Enfin la moyenne des étrangères est de 1 m. 563, mais la série est com-
posée de sujets venus de toules les parties du monde.
D'après M'"" Tarnowsky la taille moyenne de 150 piosLiluées, natives
des gouvernements habités par lesGrandes-Hussiennes, était de! m. 535
et celles de 130 femmes honnêtes des mômes régions de 1 m. 556. Donc les
prostituées, dit-elle, sont en général plus petites. (Rappelons que d'antres
auteurs l'avaient déjà constaté auparavant — Riccardi et Marro en 1885
et 1889).
• Manouvribr. — Elude sur les rapports anthropométriques on général ot sur les
principales proi.ortioua du corps. Métn.de la Soc. d'anthr. Paris 1902, p 80.
22 1^ j\Nvii;it IIIOC)
Mais celle diminution de la taille chez les prostituées, si elle esl réelle,
peut aussi s'expliquer par ce fait (juc la plupart de ces filles sont issues
des classes pauvres, chez lesquelles la taille moyenne des deux sexes
est plus petite que dans les classes aisées, ainsi que l'avaient déjà dé-
montré Villermé, en 1829, pour les conscrits de certains arrondissements
de Paris, puis d'autres observateurs ultérieurement, pour le sexe fémi-
nin.
Ainsi Pfitzner a constaté (jue la taille moyenne de la femme adulte
est plus petite dans les classes sociales les moins favorisées de la popu-
lation '.
Dans la série des Parisiennes le maximum de fréquence est à 1 m. 50.
et la moyenne à \ m. 520. Ur il ne semble cependant pas que ce dernier
chiffre soit trop faible, car en 1869, un médecin militaire, le docteur
Champouillon a trouvé une moyenne encore plus petite. En elîet, il a pu
réussir à faire passer sous la toise un certain nombre de Parisiennes de 18
à 2-2 ans (non prostituées) et il résulte de ses chiffres malheureusement
difficiles en dehors des ateliers, dit-il, c'est que dans les A\ 12% 19"
et 20* arrondissements de Paris, la taille moyenne est de 1 m. 46. Mais
lauteur n'indique pas le nombre de femmes qu'il a mesurées -.
(Juanth notre moyenne de 1 m. 538, pourles Françaises, elleserapproche,
de très près, de la moyenne trouvée par M. Tschepurkowsky ' sur une
série importante de femmes russes (non prostituées) des gouvernements
de Saint-Pétersbourg, de Novgorod, de Poltava, de Twer et de Jaroslaw.
Cette série se composait de 637 sujets dont la taille a été mesurée, et qui
présentaient deux types diff'^rents, l'un du type blond dont la moyenne
était de 1 m. 5339, chiffre peu éloigné de celui des Françaises (1,538),
et l'autre du type foncé dont la moyenne était de 1 m. 5255, chiffre presque
égal à celui de nos Parisiennes (1 m. 526).
i'our d'autres pays comme lEspagne* et l'Italie (Lombardieet Emilie),
la taille moyenne de la femme est de 1,53 comme chez les Françaises de
notre tableau. Dans la province de Rome, dans les Marches et les
Abruzzes % elle n'est que de 1 m. 52 comme chez nos Parisiennes.
En Alsace (région de Strasbourg), elle esl de 1,5463, à peu de chose
près comme dans la zone nord de la France '^.
En 1901, M"'e Teumin mesura 100 femmes étudiantes de l'Université
de Zurich, dont elle a fait connaître la taille dans sa thèse de doctorat \
i Pfitzner. — Social, anthrop. Studien Zeitschrift. f. Morphol. u Anthr. T. I, III
et IV, 1899 et 1901.
* Champouillon. — Recueil de mémoires de méd. et de pharm. milit. Paris 1869.
s Tschepurkowsky. — Znr anthr. der russ. Frau Moscou 1904. Analyse dans Arcli.
f. Anlh.1906.
4 Olobiz y Aguiler.\. — La talla umaua en Espâoa. Madrid, 1896, p. 27.
3 S. PaGLIAnl — Italia. Torino, 1896, p. 107.
6 Pfitzner. — Loc. cit., T. I".
" Teumin. — Untcrsuch. ûber die Propoiiionsveihàlt. des weibliche Korpers.
Brauiischweig, 1901.
A. III.OCII. — I.A CiM I.KI II DKS VKL\ KV {)K< CMKVEIA 23
Il y avait parmi oUos i" juives dont 31 l'etites-llussiennesol Ki Polonaises,
32 Kussi's, 14 l'oldimist's, 3 Lilluianiennes, 3 Allemandes et 1 Arménienne,
Agées de IH à 33 ans. Klle a trouvé pour les juives Peliles-Hussiennes
1 m. 54 en moyenne, et pour les Polonaises 1 m. oo. Mais pour toutes les
étudiantes réunies la moyenne était de 1 m. 57.
Il seiait important de savoir aussi ;i (juelle époque la croissance est ter-
minée chez la femme, car l'on sait ipie le iléveloppement du squelette y
est plus vite achevé que chez l'homme.
D'apiés Ffilzner ce serait déjà entre 15 et 20 ans. Selon .M. Oloriz à
Madrid, le redoublement de la croissance, qui a lieu à la [)ul)erté, parait
terminé ;i l'Age de 16 ans chez la femme espagnole •.
H est certain <|ue cette époque doit varier suivant les races et suivant
les tempéraments, comme aussi avec les climats ; ainsi chez la femme ita-
lienne le développement serait complet entre 19 et 20 ans. d'après
f.. Pagliani.
Du reste la croissance des filles ne suit pas les mômes phases que
celle des gai-çons dans les diverses périodes du développement. En effet,
d'après Bowditch ' (jui mesura un grand nombre de tilles et de garçons
des écoles de Boston et des environs, les filles de 11 ;i 14 ans seraient
plus grandes que les garçons du même Age. (Les tableaux et courbes
de croissance qui indiquent cette particularité ont été représentés dans
le livre de .M. Topinard sur V Anthropologie générale, d'après les chiffres de
l'auteur américain).
Maintenant quelle dilTérence moyenne y a-t-il entre la taille de la femme
et celle de l'homme?
M. Topinard ' pense que l'écart est de 7 0 0, c'est-à-dire de 12 centi-
mètres environ.
Pfilzner * et M. Papillault * ne comptent que 11 centimètres de diffé-
rence, mais sur le cadavre.
Voyons quelques chiffres à ce sujet dans certains pays.
Dans la République .\rgenline la différence ne serait que de 8 centi-
mètres sur le vivant, d'après le docteur (Jache (1 m. 70 pour l'homme
et 1 m. 62 pour la femme) ; dans l'Uruguay dont la population est de môme
origine et de môme constitution ethnique, dit-il, il n'y a que 6 centi-
mètres d'écart (1 m. 70 et 1 m. lU).
Dans le Venezuela 11 n'y en a plus que 5 (1 m. 70 et 1 m. 65).
Au Mexique 11 y en a 9 (1 m. 70 et 1 m. 61).
Au Pérou l'on remarque une différence de nouveau beaucoup plus
grande, 12 centimètres (1 m. 62 et 1 m. 50).
' Oloriz y Aguilera. — Loc. cit.
' Bowditch. — On tlic growlh of chiidren. Boston, d877
3 Topinard. - Eléments d'anthropologie générale. Paris 1885, p. 459.
* Ffitzner. - Morphol. Arheiten, T. VII, lena. 1896.
* Papillault. — L'homme moyen à Paris. Variations suivant le sexe tt la taille.
Bull. Soc Anth «902, p. 42t3.
l'i is jANviKii \\m
Si nous passons en Asie nous voyons qu'en l'ersf. par cxem[»lt', l'écart
est (le ^20 centimètres (1 m. 70 et 1 ni. 50). d'après une communication
écrite du docteur Schneider à l'auteur que nous citons ; mais ici^ di(
M. Schneider, les femmes sont généralement petites et grasses, à cause
de leur vie sédentaire et de l'habitude qu'elles ont de se marier <\ 12 ans.
A peine mariées, elles ont plusieurs enfants, ce qui les épuise.
11 serait intéressant de comparer la taille de l'homme avec celle de la
femme pour d'autres régions du globe, mais nous nous sommes déjk
quelque peu écarté de notre sujet, et nous renvoyons pour cette étude au
mémoire ilu docteur Gâche • qui, dans un ouvrage sur la fécondité de la
femme, a ajouté les moyennes de la taille, dans les deux sexes, pour
70 pays dilTérents des cinq parties du monde.
Discussion.
M. Uknikkr. — La communication de M. Hloch est intéressante parce
qu'elle donne pour la première fois les chiffres relatifs à la taille de la
femme en France. Chez nous, comme dans la plupart des autres pays, les
chiffres de la taille sont fournis presque exclusivement par les mesures
sur les hommes, à cause des facilités que procure la mensuration obliga-
toire des conscrits. Pour la France, à part les chiffres donnés par
Manouvrier et la série de 100 cadavres de « parisiennes » publiés par notre
collègue Papillault, je ne connais aucune autre donnée sur la taille des
femmes. Il en est de même pour l'Italie, car les mesures citées par M. lîloch
sont données sans indication des détails, la Suède et plusieurs autres pays
dans lesquels on a mesuré les hommes par dizaines et centaines de mil-
liers.
Toutefois il ne faut pas regretter outre mesure l'absence de ces données
car il existe une relation fixe et constante entre la taille de l'homme et de
la femme. Cette relation a été établie, il y a 30 ans, par notre collègue
P. Topinard, qui a formulé cette règle : pour avoir la stature des femmes
d'une population donnée, il faut déduire 12 centimètres de la stature des
hommes. Cette formule empirique, basée alors sur la comparaison des
séries trop faibles reste vraie encore aujourd'hui. Dans mon livre « Les
Races et les Peuples de la Terre », paru en 1900, je donne les résultats
quej'ai obtenus sur 35 nouvelles séries plus fortes. Ces résultats nedillerent
presque pas de ceux de Topinard.
Depuis, j'ai réuni d'autres séries qui m'ont donné le même résultat,
confirmant grosso modo la règle formulée par notre collègue. Je me pro-
pose de revenir sur ce sujet dans une des prochaines séances de la Société.
M. Hervé prend également la parole.
* Gâche. - La fécondité de la femme dans 70 pays. (Communication au 2' congrès
médical latino-américain de Buenos-Ayros, 1904).
Il Ml l.l s l»K I.A liAMUIK 25
TUMULUS DE LA GAMBIE
I'au m. le (;,i|iilaini' Diiiiikniin.
Au cours d'un i/'cnit s<'j(Mir au Sénégal de 1903 à 1905, je fus chargé
par M. le Gouverneur (Jénéral Koume, de procéder, de concert avec une
Mission Anglaise, à l'abornemenl des frontières de l' Afriiiuc Occidentale
Française et de la (lambie Anglaise.
La petite colonie britannique se réduit, comme cliaeiin sait, à une mince
bande de territoire de part et d'autre de la (îambie. C'est un long boyau
qui s'étend jusqu'il 325 kilomètres, îi vol d'oiseau, de la mer, mais dont
la largeur ne dépasse jamais 30 à 40 kilomètres. Elle serait sans valeur
si elle ne contenait une des plus remarquables vuies de pénétration de la
Côte occidentale d'Afrique.
La Gambie, en effet, est un véritable canal maritime. Son entrée est
largement ouverte sur l'Océan et ne présente aucune des difficultés
d'accès que l'on rencontre ailleurs sur cette côte; son lit profond et libre
d'obstacles permet à la navigation maritime de s'exercer en toutes sai-
sons jusqu'il 200 kilomètres de l'Océan: quant à la navigation fluviale,
elle peut s'exercer toute l'année jusiju'aux extrêmes limites de la colonie
anglaise, et môme au delà sous certaines conditions de tirant d'eau. C'est
une voie commerciale de premier ordre dont rinllueiice se fait sentir bien
au delà des frontières conventionnelles; elle est l'artère essentielle d'une
vaste région et a servi de base pour définir la frontière Franco-Anglaise :
d'après la Convention du 10 août 1889, celle-ci doit se maintenir à une
distance invariable de 10 kilomètres des rives du lleuve, distance mesurée
jusqu'à la rive la plus proche.
Les opérations d'abornement dont nous étions chargés nous ont amenés
à traverser fré(]uemnient les deux versants de la vallée, de^iuis le fleuve
jusqu'à la frontière; nous avons même poussé nos itinéraires jusqu'à
10 et 15 kilomètres au delà, de façon à meubler un peu les blancs que
présentaient jusqu'ici les cartes de cette parlie de l'Afriijue.
C'est au cours de ces allées et venues, de part et d'autre de la frontière,
pendant deux voyages de six mois, que j'ai remarqué les monuments
mégalithiques dont je vais vous entretenir.
Je me propose de vous présenter tout d'abord quelques observations
générales sur les caractères particuliers de la région qui les contient, de
vous décrire en quelque sorte l'habitat de ceux qui les ont construits; je
résumerai ensuite, en décrivant ces enceintes de monolithes, les obser-
vations notées au hasard de mes découvertes, et vous exposerai en termi-
nant les résultats de fouilles qui, bien que peu abondants, nous fixent
cependant sur la nature funéraire de es monuments et sur la l'ace de
ceux qui y sont ensevelis.
IH JSNVIKK 1 '.>()(•.
mCflK.MlN. Il Ml l.l < I)K ',V liAMItlK 27
Nous tenions la brousse depuis limix mois el (Hions (jarvcnus ii environ
125 kilomètres de la mer, sur la frontière Nord, quand j'aperçus, [»our
la première fois, un de ces cercl-s de pierre?, au cours d'une reconnais-
sance dans les environs de Passy N'Gayen : une enceinte composée de
13 monolilhes taillés en forme de colonne se dressait dans la hrousse à
quelques mètres du sentier.
Vivement intrigué par ce monument dont j'ignoi"ais encore la nature,
j'interrogeai le chef indigène, un Wolof, qui m'aecompagnait dans ma
tournée; mais il me fut impossible d'en tirer aucun éclaircissement.
Nous ne savons rien de ces pierres, me dit-il, elles ont toujours tHé lii ;
il y en a beaucoup dans le pays; les hommes àgt's les dul toujours vues
là et leurs pères aussi !
l'^t i\ ma demande s'il n'existait pas([uelque légende, q ichjue tradition,
transmise de père en (ils, au sujet de ces pierres, il me répondit que ces
pierres n'avaient aucun caractère spécial aux yeux des indigènes, et
(|u'aiii-une légende n'avait cours dans le pays à leur sujet.
A partir de ce moment, je recommandai aux indigènes de me signaler
en cours de route tous ceux de ces monuments dont ils auraient connais-
sance. C'est ainsi que, dans la suite, je [)us relever l'emplacement d'une
quarantaine de gisements plus ou moins impoilants; mais il eu existe
un nombre bien plus considérable que seule une exploi-alion m(lliodi([ue
de la région aurait permis de découvrir.
J'ai également interrogé tous les chefs indigènes dont j'avais h traver-
ser les cantons : VVolof, Mandingues ou Peuhis; tous m'ont répondu
comme le premier : Nous ne savons rien de ces pierres qui ont toujours
été lii; aucune légende ne nous a été transmise à leur sujet.
L'indilVérence des populations à leur égard est d'ailleurs manifeste;
elles n'inspirent ni le respect, ni la crainte; autrement on ne verrait pas
des villages établis à quelques mètres d'un gisement, ou des champs de
mil ou d'arachides englober plusieurs tombes dont le centre seul n'est
pas utilisé pour les cultures.
Mais, si les recherches que j'ai poursuivies partout où les opérations
de la mission nous conduisaient, ne m'ont pas appris ii quelle peuplade
de l'Afrique il convient d'attribuer ces monuments, du inoins m'onl-elles
permis de déterminer, à peu près, les frontières de la zone (|u'elle a
occupée sur le versant Nord de la Gambie; ce sont presque des frontières
naturelles; ce sont en tout cas des frontières isolantes.
La vallée de la Gambie est uniformément plate dans sa partie inférieure ;
puis îi hauteur du grand coude de Kaoïir-Balangar, qui se trouve à
120 kilomètres de la mer, cette uniformité est rompue par des lignes de
stratifications, d'un relief de plus en plus accusé à mesure qu'on-s'avance
vers l'Est, donnant au pays l'aspect d'une région qui s'est affaissée en
laissant de place en place des témoins de son niveau antérieur.
Les escarpements que couronnent ces strates plongent toujours du côté
du fleuve; la vallée se décompose ainsi en une suite de cuvettes irrégu-
lières, aux bords très aplatis et fortement ébréchés par le ruissellement
28 1« JANVIEIt ^'M\
(le l'époque quaternaire, au travers desquelles la (iambie et ses allluents
ont dessiné leurs méandres.
Le chapelet de cuvettes que traverse le collecteur principal, peut être
assimilé à un long plissement anticlinal dont le fond est incliné vers le
Sud-Uuest; lu rivière se trouve ainsi constamment ramenée contre les
escarpements de la rive sud; il en résulte que le versant Sud est court,
à pente relativement accentuée, tandis que le versant Nord est beaucoup
plus large, particulièrement dans la haute vallée où aboutissent des
thalwegs prenant naissance dans le voisinage du Sénégal entre Bakel
et M a ta m.
En arrière du bord Sud de VAnliclinal, s'étend un plateau de latérite
dont l'uniformité n'est interrompue que par deux crevasses parallèles à
la direction générale du cours de la Gambie : l'une, étroite, débouche sur
le ileuve au-dessous du grand coude de Kaour-lîalangar; les escarpe-
ments de sa rive Sud rejettent la Gambie dans la direction de l'Ouest;
c'est le Sofaniama ; l'autre, plus large, débouche parallèlement à la Gambie
dans la partie uniformément plate de la vallée, c'est la rivière de Bintang
qui rejoint ensuite le lit principal.
En dehors de ces deux crevasses, on ne trouve ni terre cultivable, ni
eau; c'est un désert de pierres et de bambous où, pendant six mois de
l'année, on chercherait en vain un brin d'herbe ou une feuille verte; tout
est grillé par le soleil et réduit à l'état d'amadou; les animaux sauvages
eux-mêmes abandonnent le pays pour se rapprocher de l'eau. Pendant
l'hivernage, au contraire, c'est un excellent terrain de pâturages; des
mares se forment de place en place; les Peuhis nomades et pasteurs y
conduisent leurs troupeaux; le gibier y abonde : antilopes, biches, san-
ghers, et même éléphants, lions et panthères. C'est le Firdou ou Foula-
dougou.
Ainsi, sur la rive Sud, d'une part, la rivière ramenée constamment
vers le Sud par la pente générale du sol ne laisse que peu d'espace culti-
vable entre sa rive gauche et le pied des escarpements rocheux, d'autre
part, le sol du plateau de latérite qui se prolonge vers le Sud au delà des
escarpements, n'est apte à aucune culture.
Le versant Nord de la vallée offre des conditions bien plus favorables
aux établissements des hommes : une large bande de terres cultivables
s'étend entre la rive droite du tleuve et les escarpements Nord de l'Anti-
clinal; c'est là que se sont accumulés les limons de la rivière au temps
où elle coulait dans son lit majeur et les terres entraînées depuis par le
ruissellement des pluies d'hivernage.
De nombreux thalwegs rompent l'uniformité du plateau qui s'étend
en arrière vers le Nord, thalwegs sans cours d'eau permanent à ciel
ouvert, mais où l'eau se rencontre à une faible profondeur. Enfin le sol
même du plateau Nord offre, en maint endroit, aux cultures diverses,
une couche de terre végétale suffisante, le banc de latérite n'affleurant que
de place en place, principalement dans le voisinage des escarpements.
Cependant, ces caractères favorables ne persistent pas au même degré
DUCnEMI>'. — TIMIUS ItE I.A r.AMUlK 29
sur tout le versant Nord de la vallre ; à mesure qu'on s'élève vers le Nord,
le pays change peu .'i peu d'aspect et l'on arrive au Ferlo désertique
comparable au Firdou du versant sud; vers l'est également les espaces
déserts et incultes sont plus étendus et plus proches du lleuve; c'est le
Ouli occupé par des Peulhs pasteurs et plus ou moins nomades; vers
l'Ouest enfin la plaine qui s'étend jusqu'à l'Océan sans aucun relief, est
généralement marécageuse et malsaine,
La région particulièrement saine et fertile, comprise entre ces diil'é-
rentes zones désertiques ou peu peuplées, est celle où nous avons trouvé
ct^s nombreux gisements de mégalithps; elle s'étend sur la rive droite de
la Gambie depuis la rivière jusqu'au parallèle de Malem qui marque à
peu près la limite Sud du Ferlo; elle englobe la partie du versand Nord
couiprise <mtre le pays plat à l'ouest de Malem et de Médina et le ruisseau
de Touba-Kouta qui sépare le Sandougou du Ouli.
Un cercle de pierres a pourtant été découvert sur la rive gauche du
llouve, à Kouanko, par M, Todd, médecin colonial anglais; il est possi-
ble qu'il en existe quelques autres sur cette rive, aux points où, comme
à Kouanko, la rivière s'écarte sensiblement des escarpements.
La répartition des gisements dans celte zone correspond assez exacte-
ment, comme densité et comme importance, à la densité actuelle et à l'im-
portance des villages : nous trouvons presque toujours un village à pro-
ximité d'un gisement et les gisements importants, sauf exception, sont
dans le voisinage des plus gros villages.
De cet exposé nous pouvons conclure à une prédilection marquée par
les constructeurs de mégalithes pour une région fertile et saine, et pour
ime vie agricole et pastorale semblable à celle que mènent de nos jours les
peuplades, dernières venues dans la région : Wolofs, Mandingues, Peuhls
et Sarracolets paraissent, en effet, être les continuateurs de leurs devan-
ciers, occupant les mêmes emplacements de villages et cultivant les mêmes
champs.
Les Mandingues sont établis dans le lit majeur de la rivière, sur les
deux rives. C'est dire que leurs établissements de la rive Nord sont plus
nombreux et plus importants que ceux de la rive sud.
L'arrière-pays sur le versant Nord est occupé par les Wolofs à l'Ouest et
les Peuhis à l'Kst ; ces derniers nomadisenl dans toute la vallée : ils s'éloi-
gnent de la rivière pendant les pluies, s'en rapprochent pendant la saison
sèche et la franchissent même avec leurs troupeaux pour chercher de
nouveaux pâturages.
Sur le versant Sud l'arrière-pays est à peu près désert jusf|u'ai versant
Nord de la Casamance; on y remarque cependanldeuxoasisqui tranchent
par leur prospérité sur le pays environnant : le NyaminaSarracoletqui s'est
développé aux abords de lu partie navigable duSofaniama, et,dans leKan-
tura, un giuupe de villages également Sarracolets, récemment établis sur
les deux rives du Shima petit ruisseau d'eau courante. Quelques petits
villages Sarracolets .'ont disséminés sur la rive droite du fleuve, au milieu
des établissements mandingues.
30 iH jANviKit 1900
(le sont principaloincnl des Mandinmics; que nous trouvons éîal)lis de
nos jours dans la région qu'occupaient les constructeurs de mégalithes;
nous savons par les récits des voyageurs qu'ils occupaient déjà les rives
de la iJainhie au xvii<" siècle. Mais il n(î semble pas (pj'ils soient autoch-
tones; ils déclaient eux-mêmes ètie venus de l'Est, et pour qu'ils aient
conservé la mémoire d'une migration, il faut qu'elle ne soit pas très éloi-
gnée. Ont-ils él('' les surcesseurs iinuK'diats des conlruelrurs de méga-
lithes? on peut en douter (|uand on considère qu'ils ignorent luul de ces
vestiges, jusqu'à leur nature.
Puisque le souvenir d<; ce pe i|ile semltle avoir disparu de la mémoire
des hommes, peut-èlre pourra ton l'identifier par les rapprochements
que suggérera une description d -s vestiges qu'il a laissés.
Les tombeaux sont dispersés dans les limites indiquées piécédemment;
on les rencontre soit isolés, soit accolés deux par deux, soit assez fré-
quemment par groupes de 5 ou 6, soit enfin, mais plus rarement, en
groupes encore plus nombreux.
Les uns disposés sur un terrain légèrement bombé, à l'abri des inon-
dations, sont parfaitement conservés : d'autres, moins bien situés, sur
une pente ou près d'un thalweg ont souffert des affouillements des pluies
d'hivernage: leurs pierres sont renversées, parfois brisé-es et dispersées,
il est probable que quelques-uns ont disparu sous l'accumulation des
alluvions.
Ces gisements ne sont pas homogènes ; on y distingue 2- types de tom-
beaux : l'un caractérisé par une enceinte de monolithes sans tumulus cen-
tral, l'autre caractérisé par un tumulus sans enceinte de monolithes; on
trouve aussi quelques spécimens ayant un tumulus au milieu de l'enceinte.
Les uns et les autres sont précédés d'une rangée de monolithes taillés,
placée à l'Est de la tombe perpendiculairement à son diamètre Est-Ouest.
Le tombeau à enceinte est circulaire; il se compose de 8 à 22 mono-
lithes, espacés régulièrement sur la circonférence d'un cercle de 6 à 10
mètres de diamètre. Les monolithes sont taillés en forme de cylindres
presques réguliers; on reconnaît aisément qu'ils ont été d'abord décou-
pés en forme de parallélipipèdes rectangulaires dont on a ensuite abattu
les arêtes. Ils ont de 1 m. 80 à 3 mètres de hauteur et de 0 m. 70 à 1 mètre
de diamètre. Ils sont enfoncés en terre de 1 mètre à 1 m. 50, et légère-
ment penchés en arrière.
Ils ont été pris dans les parties dures et compactes des bancs de latérite'
qui affleurent sur le boid des escarpements dont il a été question;
l'extraction et le transport des inonolilhes devaient être facilités par cette
disposition du terrain qui permettait de faire rouler le bloc, une fois ter-
miné, au bas de la pente formée parles éboulis, puis de le traîner jusqu'à
* La latérite est le résultat de l'aUération cliiraiquo dos roches superficielles sous
l'acliou des influences aliiiosplièri(jues. Elle se présente sous des asptcls fort divers,
graviers mouvants, roche friable, roche dure, tantôt caverneuse, tantôt compacte et
vitrifiée, toujours ferrugineuse,
ni'CHEMIN. — TIMUMS DE I.A r.AMUIE 'M
l'emplacement du tombeau gént'ralemenl situô en contre-bas de la falaise
<[ui servait de carrière.
Le tombeau ;\ tumulus a l'aspect d'un mttnticuie haut de 0 m. 80 à
1 niHtre, large de 8 ;i 10 mt^'lres, et rccouviMl de nombreux di'-bris de
pierres.
Un certain nombre de tumulus oui di'i être rasés par les indigènes ou
nivelés par les pluies, car on aperçoit parfois au milieu des cultures ou
dans la brousse des lignes de 2 ou 3 monolithes qui proviennent sans
doute des lignes frontales placées à l'Est de tumulus disparus.
L'iirienlation des lignes frontales n'est pas toujours strictement Nord-
>ud, ainsi qu'on peut s'en rendre compte sur le relevé du gisement de
Kodiam, fait à la planchette déclinée et à l'alidade olométrique ; on peut
supposer que ces lignes ont été orientées par rapport à la direction du
>oleil levant au moment où elles ont été établies.
Les tombeaux à enceintes, accolés deux par deux, présentent un dispo-
sitif spécial : les centres des 2 enceintes sont placés sur une ligne Nord-
Sud il une distanrc de iO mètres ;i 12 mètres l'un de l'autre ; les encein-
tes ne sont généralement pas du même diamètre, ni composées du même
nombre de pierres ; les pierres placées en ligne sur le front Est sont plus
hautes et d'un plus grand diamètre que celles des cercles.
Nous avons observé plusieurs spécimens de ce type, entre autres k
N'iîayen où les 2 enceintes ont chacune 13 pierres; dans le gisement de
Keur-Sam où les 2 enceintes ont respectivement 21 et 22 pierres, près
du village anglais de Palol, enfin ,\ Dialato où les enceintes ont 8 et
10 pierres.
Le plus grand rinnilirc des gisements comprend plusieurs tombes; le
diamètre des enceintes et le nombre fies pierres varient dans un même
groupe, mais celles-ci sont toujours d'un type uniforme pour le même
tombeau.
Les relevés de gisements importants comme ceux de Kf^ur-Sam et de
Kodiam font ressortir la disposition des tombes en groupes alignés; mais
l'orientation de ces lignes paraît être quelconque.
Un tombeau à enceinte a été fouillé en 1904, à.Maka; c'est Monsieur du
Laurens, administrateur du cercle de Maka (^oulihentan qui a procédé à
cette opération ; il a bien voulu me communiquer les résultats de ses
recherches; ils sont tout ;i fait analogues h ceux que j'ai obtenus en 1905
à Dialato, où j'ai fouillé deux tombeaux accolés.
A .Maka, entre le poste et le village, on remarque deux tombeaux et
quelques pierres éparses provenant sans doute d'une ligne de monolithes
placée sur le front des tombeaux.
Les enceintes ont 7 mètres et 5 mètres de diamètre et se composent
chacune de 18 pierres de 2 m. 20 de hauteur et 0 m. 50 de diamètre.
Les pierres sont enlisées sur les 2 3 de leur longueur, daps un sol dur
et compact formé de terre rouge silico-argileuse.
.\ 1 m. 10 de profondeur on a trouvé des fragments de poterie gros-
sière. A 1 m. 80 gisaient 2 squelettes, l'un orienté à peu près suivant la
32
18 jANviKit loon
direction Ksl-Ouesl, la t(Mt' à l'Kst, r.iiitn' suivant nnc direftidn faisant un
angle de 'AO", avec celle du preniici'.
Les os tombaient en poussière; on ne put extraire (ju'un cr;\no très
fragile, mal conserv»^, mais dont difïï'rents caractères indiquent une ori-
gine purement nigriti(|u('.
Aucun ohjct n'a ('•((' trouvé dans la tombe.
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Fkj. 2.
— Les deux tombeaux fouillés à Dialato sont situés sur le bord d'un
plateau, au Sud d'un ravin peu profond à pentes douces. Une légère
dépression part du voisinage immédiat des tombes et aboutit au ravin;
au confluent de cette dépression et du ravin se trouve une large excava-
valion ovale de 40 mètres sur 30. orientée dans le sens de la dépression
à laquelle elle se rattache par un plan incliné ; cette excavation sert pen-
dant l'hivernage d'abreuvoir aux troupeaux des environs; mais il est peu
probable qu'elle ait été creusée pour cet usage ; il semble plutôt que ce soit
l'emplacement de la carrière d'où ont été extraits les monolithes des tom-
beaux. L'excavation e<-t profonde et son rebord n'est pas proportionné aux
déblais qui ont dû en sortir. Il n'y a pas d'escarpement rocheux dans les
environs. Les 2 tombeaux sont sur une ligne Nord-Sud, à 12 m. SOTun de
l'auti'e, de centre à centre; leurs enceintes ont G mètres de diamètre et ne
contiennent pas de tumulus.
L'enceinte Nord se compose de 10 monolithes à peu près cylindriques,
ayant 0 m. 80 de diamètre et 1 m. 80 de hauteur; les pierres font une
saillie de 0 m. 75 et sont légèrement penchées en arrière.
Une ligne de 4 monolithes plus élevés que ceux de l'enceinte est placée
k 2 m. ,')0 à l'Est du cercle perpendiculairement au diamètre Est-Ouest.
L'enceinte Sud se compose de 8 pierres de 0 m. 60 à 0 m. 70 de diamètre
et 1 m. 70 de hauteur, faisant une saillie de 0 m. 70 a 0 m. 75.
A 2 mètres à l'Est se trouve une ligne de 3 monolithes h peu près rec-
tangulaires, ayant 0 m. 80 de diamètre et faisant une saillie de 1 m. 30.
DUOHEMIN. — TUMULUS DE LA rtAMBIE
33
Fouille (lu tombeau Sud. — Aqiiohiues ctMitimètn's dt- la surface, au centre
du cercle, on elécouvre un i,Mand pol en terre cuite, pus(' l'ouverture en bas.
Après l'avoir dégagé complètement, on le retire de la fosse et l'on
constate alors qu'il est plein d'une terre rouge semblable à la terre qui
constitue le sol environnant, mais moins compacte.
I.a poterie est fendue et se brise dès qu'elle est vidée ; la terre qu'on en
a retirée ne contient absolument aucun débris, ni fragment quelconque.
La poterie est très ordinaire et ne dilfère pas de celles que l'on trouve
de nos jours chez les diverses peuplades de l'Afrique Occidentale.
i •
I
(j- I Strue.n't-s ^ m. fvrrtbt
à 7\4*rt*>/ui ■
Fig. 3.
Une tranchée est ensuite ouverte suivant le diamètre Est-Ouest. A l'ex-
trémité Ouest, à 0 m. 55 de profondeur, on découvre un fragment de
crâne : la botte crânienne seulement, les os de la face ont disparu. A
1 m. 60, à peu près au centre de la tombe, on découvre quelques osse-
ments, tibias, péronés, ossements de la main sans consistance; ces osse-
ments ne sont pas disposés dans un ordre naturel, ni dans une direction
normale par rapport au fragment de crâne trouvé précédemment.
La tranchée est approfondie jusqu'à 1 m. 80 sans qu'on y découvre
autre chose.
La terre est extrêmement compacte; c'est à peine si le pic peut y péné-
trer.
Fouille (ht tombeau Nord. — A 0 m. 10. au centre de l'enceinte, on dé-
couvre un grand pot renversé, dont la forme est un peu différente de celle
du premier : l'ouverture est évasée et ornée d'un décor grossier.
Nous ouvrons une tranchée Est Ouest.
A l'extrémité ouest, à 1 m. lO de profondeur, on découvre quelques
ossements enchevêtrés appartenant h un pied, puis divers ossements d'un
squelette qui paraît orienté N.E -S.O. : il faut élargir la tranchée pour
suivre les ossements qui sont nombreux et inégalement conservés : les
uns réduits à l'état de dentelles, l»'s autres encore pleins, mais très fra-
giles; il est évident qu'il y a l;i phi> d'un squelette
soc. o'aithhop. 190ti. "^
;{i IH jwviKli lîHMi
En élargissant encore la fosse vers le .Nord, on découvre enfin deux,
crûnes placés l'un a côlé de l'autre. Il est inipossihle de les dcga.y;er sans
les briser. J'ai pu cependant reconstituer en partie l'un de ces crûnes ; il
présente les mômes caractères que celui de Maka : prognatisme, dolicho-
céphalie et aplatissement des parois latérales, qui dénotent la même ori-
gine nigritique.
Les deux crânes étaient de 1 m. ^20 de profondeur; les st|U('leltes occu-
paient une longueur de 1 m. 75 à 1 m. 8U environ.
A Dialato comme à Maka, nous n'avons découvert aucune trace de mo-
bilier funéraire, d'armes ou de parures.
En résumé : dans le tombeau Sud, quelques fragments de squelettes à
des profondeurs différentes ; dans le tombeau Nord, deux, squelettes enche-
vêtrés au point qu'on ne peut distinguer leurs ossements respectifs que
par une différence notable dans leur état de conservation; ce désordre
s'explique aisément si nous admettons que les cadavres ont subi une pre-
mière inhumation provisoire, pendant le temps nécessaire a la préparation
de la tombe définitive, temps qui devait être assez long, puisqu'il fallait
tailler les pierres de l'enceinte et les amener sur place.
Je noterai enfin que le parfait état des deux pots trouvés au centre des
enceintes de Dialato est une preuve (|ue ces deux tombes n'ont jamais
été violées; si dans l'une de ces tombes, nous n'avons retrouvé que des
fragments épars, c'est parce qu'elle n'a jamais contenu autre chose.
Voilà, Messieurs, les quelques observations que j'ai pu faire; n'étant
pas compétent en ces matières, je ne puis en tirer de conclusions, et
laisse aux hommes de science le soin de faire des rapprochements s'il y a
lieu.
LES GAULOIS. L'INDUSTRIE DITE DE LA TENE EST PUREMENT GAULOISE.
les bastarnes
Par .m. Zaborowski.
A la suite de la présentation par M. Volkov de documents photogra-
phiques rapportés par lui des Carpathes orientales, et relatifs aux Hou-
zoules, j'ai intervenu pour donner quelques explications sur les origines
probables de ces lïouzoules.
Mon intervention a provoqué une discussion qui s'est généralisée et au
cours de laquelle des questions d'archéologie et d'ethnologie ont été sou-
levées au sujet des Gaulois. Gq n'est pas sans surprise que j'ai entendu
élever des contestations sur les caractères et la patrie originaire des
Gaulois qui nous sont bien connus. Je ne crois pas avoir à traiter à fond
des problèmes parfaitement résolus, et sur les données desquels chacun
peut s'éclairer à loisir dans une foule d'ouvrages. Je veux seulement ici
présenter en un tout coordonné les réponses que j'ai faites aux questions
ZAItOKinV^KI. — LES (ÎAULOtS 3o
ijui molli été posées, aux objeclioiis qu'on ui'a opposées au cours de deux
séances consécutives.
l — lai depuis longtemps répété à satiété combien c'était pour nous un
embarras que l'emploi du nom de Celtes dans un sens spécial qu'on pourrait
(lualifier de craniologique. Jamais k l'étranger on n'emploie, on ne. peut
.•in[iloyer ce nom dans le même sens que nous sans être obligé de le
délinir, sans le faire suive de ces mots : Desanthropolotiistes frtuirais. Certes
Hroca avait bien le droit de prendre un nom de l'bistoire pour l'appliquer
i\ un peuple déterminé pbysiquement. El il a appliqué le nom de Celtes
aux babilanls de la (Celtique de César après avoir défini ceux-ci, sur des
informations trop sommaires, comme brachycéphales et bruns. Dans cette
Celtique, circonscription administrative assez mal circonscrite, en Auvergne
même, dans la Bretagne, il y a des descendants de Gaulois blonds encore
aujourd'hui bien reconnaissables. Mais là n'était pas la question essentielle.
Le choix de Broca aurait pu être accepté, sanctionné à tout hasard, si le
nom de Celtes n'avait pas eu un sens historique déterminé. Mais il en a,
il en a toujours eu un. Et ce qu'il y a de plus grave, c'est que jamais, au
cours de l'histoire, il n'a été appliqué à un peuple brun brachycéphale. Son
emploi technique en anthropologie n'a pu changer, ni faire abandonner
son usage en histoire. De sorte ([u'il signifie deux choses différentes et con-
Iradieloires, selon qu'on s'en sert en France parmi nous ou que les savants
étrangers y ont recours. Il est devenu un mot dangereux, source perpétuelle
d'obscurités et de confusions. Voilà donc pas mal de temps que pour mon
compte j'ai dû le mettre de côté. J'ai montré que dans l'Europe centrale
et jusqu'à la Baltique, c'était surtout le nom historique des Venèdes qui
était lié à la propagation de la brachycéphalie. En Occident, c'est surtout
celui, également historique, des Ligures, cela jusqu'en Grande-Bretagne,
malgré les contestations auxquelles donne lieu la prédominance actuelle
de bruns dolichocéphales dans l'ancienne Ligurie. Mais, bien entendu,
ces noms s'appliquaient à des peuples plutôt qu'à des races.
Partout à l'étranger le nom de Celtes est employé comme synonyme de
celui de Gaulois, et c'est là en etîet son sens historique. Alors ici, en
France, je ne puis plus employer que celui de Gaulois.
Anthropologiquement l'épithéle de cellique y est l'équivalent de hrun
hiaclii/cépliule, alors que les (Jaulois, dont nous avons des portraits, beau-
coup de crânes et des descriptions très précises, étaient grands, decarnati(m
claire, dolichocéphales et blonds originairement iV. Strabon, IV, ch. iv,
1, 2 « Les Celtes, ou Gaulois, sont tous des hommes de haute taille. Nous
pouvons nous représenter ce (ju'ils étaient anciennement, par ce (ju"on
raconte des moeurs actuelles des Germains, car, physiquement et [)oliliqne-
ment, les deux peuples se ressemblent et peuvent passer pour frères...
VII, ch. I, 2 : « Comparés aux Celtes ou Gaulois, les Germains olïrent
bien quelques petites ditïérences, mœurs plus sauvages, taille plus élevée.
cheveux plus blonds, mais à cela près, ils leur ressemblent fort. » Folyli<'.
n. ch. m. parle de la grandeur et de la beauté de corps des (ianlois cis-
36 18 JANVIEH \m\
alpiDs, t'I les riiiiisal|)ins. dil-il, ne sont pus une naliun diiïé rente des
Gauluis, de ceux qui avaient pris llonie en 390.
Le nom de Celte semble avoir été emploj'é le premier '. Mais, comme le
dit César lui-même, c'est celui que les Gaulois employaient encore de son
temps de préférence pour se désigner eux-mêmes. « Ils s'appellent en
leur langue Celtes, et nous les appelons en la nôtre Gaulois. » Tel est le
sens du premier paragraphe de son premier chapitre. Et il ne fait pas de
différence entre Celtes et Gaulois, lorsqu'il dit par exemple des Suisses
qu'ils étaient les plus puissants d'entre les Celtes. Des Belges, « les plus
vaillants parce qu'ils sont les plus éloignés du luxe et du commerce de
Rome », i! fait la troisième partie de la Gaule (n, 1 1, et il semble en même
temps les distinguer des Celtes, mais pour, quelques lignes plus loin,
appeler Gaulois les Celtes de la frontière des Belges. Il emploie cou-
ramment le nom de Gaulois sans nullement par là désigner des peuples
différents des Celtes (iv, I, v, 5, 6, vi, 2). La description qu'il donne des
mœurs des Gaulois s'applique à ceux de la Celtique comme aux autres,
même à ceux de la Grande-Bretagne (vi, 2).
Mais il sépare nettement les prêtres et les guerriers du menu peuple
asservi qui était le peuple conquis (« On ne l'appelle point aux délibéra-
tions publiques, et la plupart se voyant chargés de dettes et d'impôts, ou
opprimés par la violence des grands, se mettent au service des autres qui
ont le même pouvoir sur eux que les maîtres sur leur esclaves », vi, 2).
Tous les auteurs anciens les plus sérieux, Appien, Pausanias, Polybe,
Strabon, ont, comme César, formellement attesté que Celtes et Gaulois
(forme latine) ou Galates (forme grecque), c'était la même chose, que ces
noms désignaient les mêmes peuples, de caractères physiques semblables,
et, je puis ajouter, de langues étroitement parentes.
Or, quoiqu'on ait pu écrire en France, les savants étrangers font au-
jourd'hui comme ces auteurs anciens.
IL — Auv" siècle, avant notre ère, Hérodote plaçait les sources de l'Ister
ou Danube, dans le pays des Celtes (II, 33). « Il commence dans le pays
des Celtes, auprès de la ville dePyrène... » Peu importe que dans son igno-
rance des régions occidentales de l'Europe, il se trompe sur les contiguïtés
de ce pays des Celles. Comme il n'y a dans son texte aucune ambiguïté
au sujet de l'Ister (jui est connu de beaucoup de monde, dil-il, traverse
l'Europe par le milieu et se jette dans le Pont-Euxin, il résulte que les
anciens Grecs ont su parfaitement que le Haut-Danube appartenait h la
patrie des Celtes ou Gaulois, ce dont nous trouvons une confirmation dans
Dion Cassius (170-235; qui fut gouverneur de la Pannonie* (Lagneau,
< Pausanias. — Description de la GrèceAtiique. Ch. III, p. 22, trad. Clavier: » Le
nom de Galales ne prévalut que très tard. Auciennement les Gaulois portaient celui
de Celles que les autres peuples leur donnaient aussi. »
' « Dans les temps les plus reculés, les habitants des deux côtés du Rhin portaient
le nom de Celtes. »
ZAnOROWSKI. — LES OAl L(llS 37
p. 639). Il en résulte aussi que le gros île la nation gauloise occupait
encore, au v^ siècle, la patrie prtniiière, Badi', Wurtemberg, Souabe, Ba-
vière, Franconie, Thuringe, jusiju'au Weser, Bohème.
D'ailleurs, le rapprochement que fait Hérodote entre une ville Pyrène,
peu après connue d'après Aristote, pour être la chaîne des Pyrénées, et les
sources du Danube, n'est pas aussi absurde (ju'il paraît. Il a du moins une
signification qui n'est pas absurde. Il correspond à une réalité. Il y avait,
dès lors, en elîet, des Celtes à proximité des Pyrénées et au delà. Des ren-
seignements recueillis par Hérodote, il ressortait que des Celtes se trou-
vaient en même temps sur le Danube et dans la région des Pyrénées. H
a donc rapproché la montagne du fleuve dont il ignorait l'éloignement,
alors qu'il n'y avait de relations qu'entre les deux peuples qui occupaient
l'un et l'autre. Les contradictions apparentes des anciens sur la présence
de Celtes ou de (îaulois, en des contrées très différentes, s'expliquent de la
même fa^on : elles sont l'expression d'une réalité, à savoir : l'expansion
dans tous les sens, ;i travers lEurope, dans les Carpathes, sur le Danube,
en Asie-Mineure *, en Gaule, en (irande-Bretagne, en Italie, même en
Espagne, de tribus gauloises conquérantes. Cette expansion, qui ne fut en
bien des cas qu'une dispersion de pillards vagabonds, n'est plus mise en
doute par personne, autant que je sache.
Des auteurs aussi positifs que César et Strabon auraient pu suffire à
nous éviter, à cet égard, des discussions stériles (César, \'I, 2, Tacite, 28).
Plusieurs fois, dans mes levons, j'ai insisté sur le grand rôle que les
conquérants gaulois du iV^ siècle ont joué sur le Danube. (V. Bullet., 1904,
p. 692) d'après l'archéologie et l'ethnologie. Strabon nous donne les ren-
seignements les plus précis sur les Scordisques et Taurisqueset il connais-
sait fort bien les caractères des. Gaulois du Danube, comme le montre ce
qu'il dit des Japodes, «. nation semi-celtique, semi-illyrienne. » (VII
c. m, 2 et c. v, 2.)
Les mouvements, en sens différents des Gaulois, ne furent possibles et
ne sont explicables qu'en raison 'de leur position au cœur de l'Europe
centrale. Et c'est aussi en raison de leur présence en celte région sur le
Haut-Danube, que les (îermains furent, comme nous l'avons constaté,
séparés par eux des influences méditerranéennes, jusqu'après l'intro-
duction du fer. Cette donnée archéologi([ue est (jn ne plus conforme à ce
(|ue nous venons de dire des renseignements recueillis sur eux par Héro-
dote au v» siècle.
La Bohème tient son nom de Gaulois, les Boiens, qui avaient envoyé
de leurs bandes jusque sur le Po, d'après Polybc (II, 8), au moins dès le
iv" siècle avant notre ère et jouaient encore un grand rôle sur le Danube
peu avant Strabon. Les aifluenis de droite du Rhin ont des noms d'ori-
gine gauloise. Tels étaient aussi les noms des montagnes, entre la
Bavière ot la Bohême, de la fortH hercynienne, occupée par les Boïens lors
' PoLYBE. — Le. I. Défaits à Dt-Iphes ('21 i av.) les Gaulois se jc(èienl en .\sie.
38 18 JANVIF.H lOOfi
(ir^ la grando invasion dos Cimbros, au ii" si<"'cle avant notre ôre; tels sont
h's noms de dillÏTcnles villes, Hanibcrp;, llatisbonne.
I.c nom du Hliin lui-ni(^mc est d'origine gauloise; et les Gaulois l'ont
ti-ansporté, sur le l'ù, d'une part, et en Irlande de l'autre.
I.a forme primitive de ce nom était Reinos. El il est passe sous cette
forme aux (iermains, donc ii une époque assez reculée, d'après d'Arbois
de Jubainville •.
Les Gaulois avaient remplacé la diphtongue ei par c avant d'envoyer
des bandes conquérantes dans le nord de l'Italie d'une part et de l'autre
peut-être jusqu'en Irlande. Le nom de la ville de Bologne en Italie vient
du gaulois Bononia, traduction du nom plus ancien de Felsina. Or, auprès
de Bologne se trouve encore une rivière qui porte le nom de Reno. Ce
même nom, dans l'irlandais, a le sens de grande étendue d'eau et s'ap-
plique à la mer. Or, les Gaulois étaient dans le nord de l'Italie au moins
au v siècle. Nous avons pour la prise de Rome par eux la date très sûre
de 390 avant notre ère, Polybe nous ayant conservé des détails circons-
tanciés sur la lutte entre Romains et Gaulois. Nous avons une date plus
ancienne pour l'émigration de Gaulois en Grande-Bretagne, mais peut-
être un peu moins sûre.
Dans les mots où entraient la consonne q, les Gaulois ont remplacé
celle-ci à une certaine époque par ;). Ce changement dans la prononciation
était déjà opéré lorsque certaines de leurs bandes franchirent les Pyrénées
vers le v^ siècle. Car dans les noms géographiques espagnols d'origine
gauloise, le q, d'après M. d'Arbois de Jubainville, est remplacé par/). Or,
en Irlande, en Ecosse, l'usage de q s'est maintenu et le nom primitif de
Bretagne était Qretanis. Encore au vi*' siècle, les Pietés d'Ecosse, dont on
a une chronique latine du x" siècle, s'appelaient Cruithne, forme voi-
sine de Qretanis. Ce sont des immigrants venus postérieurement à ceux
refoulés en Irlande et en Ecosse, qui de Qretanis ont fait Prêtants. Les pre-
miers émigrants gaulois de la Grande Bretagne y sont donc venus avant
le v« siècle ; ils y sont venus plusieurs siècles avant.
M. d'Arbois de Jubainville parle du xi» siècle et des archéologues
(Munro] rapportent à l'Age du bronze, entre 12 à 500 avant notre ère, les plus
anciennes migrations celtiques. D'autre part, le vieux nom gaulois du
fer, isarno pour aiz-arno, passé dans les langues germaniques, se retrouve
dans le Kymrœg haiarn et l'irlandais iarn. Il ne s'ensuit pas néces-
sairement (juc les plus anciens émigrants gaulois en (îrande-Bretagne
ont connu le fer. Ils auraient pu le recevoir, avec son nom, d'émigrants
venus après eux.
Il y a apparence cependant que les migrations gauloises en Grande-
Breta^gne, ayant laissé trace dans la langue et l'histoire, sont postérieures
à la connaissance du fer sur' le Haut-Danube. Cette connaissance re-
• Personne n'a critiqué plus Yivem-!nt que moi les fragiles échafaudages construits
par M. d'Arbois de Jubainville. Il n'en serait pns moins fort injuste de considérer ses
travaux comme non avenus.
ZAHitRn\V>KI I.K> li\I t.(»IS 39
monte d'ailleurs là au déhul de IV'pu((ue lialUlaiilicnne, à 800 ans avant
notre ère environ. Toulel'ois, des communautés lexiques existaient déjà
au moment de ces migrations, entre le gaulois et le germanique, comme
le prouve )»• vieil irlandais fid, « ai-ljrc », gaulois uwht, vieil allemand
nitu : l'irlandais iHhnr « cuir ", allemand Av/<?/; etc. Ces communautés
lexiques n'ont pu s'établir qu'alors que les Gaulois occupaient le sud de
r.Mleuiagne.
l'dur le point de départ <le tout Cf' qui est gaulois, suit d'un coté, soit de
Tautre, nous sommes donc ranien»^s invai'iablemenl au Khin l't au Haut-
Danube.
III. — Lindustrie du fer de l'époque de la Tène est gauloise. Elle s'est
it'pandue dans tous les sens autour de cette même région et sa diffusion
ménïc ne s'explique (ju'en raison de son existence dans cette région, comme
centre de rayonnement. Elle a pénétré de là en Scandinavie, et partout
ailleurs, elle a marqué l'inlluence, le passage ou l'établissement de (îau-
lois : dans les Carpathes orientales, comme en Gaule: sur le Danube et
sur le Pu comme en Angleterre.
J'ai consacré une leçon à exposer (1004-1005, lee. Il) que de nom-
breux peuples gaulois s'étaient signalés pour leur travail du fer long-
temps avant la conquête romaine : Tels sont les Eduens, les Arvernes,
les Bituriges, les Prétocoriens du Périgord, les Belges, les Nerviens, les
Bellovaques, les Helvètes, etc.
Dans une leeon sur le passé préhistori(}ue du Danemark, je me suis
étendu sur l'introduction du fer dans ce pays et en Scandinavie.
Je viens de dire que le vieux nom gaulois du fer, isarno pour aiz-arno
< cuivre fort », est encore employé au fin fond de l'Irlande sous la forme
i(ini, kymrœg, hainrn. Nous le retrouvons dans le vieux nordique isurn, le
gothique eisarn, le v. haut allem. isarn, l'anglo-saxon isem. Tous ces
mots dérivent bien d'une forme unique, et cette forme est bien gauloise,
iiDw n'ayant de sens qu'en (ïaulois. VA\c est passé(; chez les Germains
alors que ceux-ci parlaient encore une langue à peu près commune. Kt
nous savons (ju'en elîet quelques siècles antérieurement à notre ère,
surtout au iv^ ou au v« (date (ixée par les archéologues pour l'introduc-
tion du fer), les Germains sur le pourtour occidental de la Baltique devaient
parler la même langue. Les objets usuels ont, depuis ces temps reculés,
changé bien des fois de forme, les plus anciens ayant été remplacés par
les nouveaux pi us commodes, mieux fabriqués, que le commerce apportait.
Leur nom a changé en même temps. C'est ainsi que, malgré' la très
grande ancienneté de l'épingle et de l'agrafe, notre mot français lui-
même, u épingle », vient du latin « spina », u spinula », épine, epiniflc,
lequel se retrouve même dans le polonais» szpilka», épingle, et sans doute
dans le vieux h. allem. spnnr/a, fibule, épingle. L'irlandais delj, épine,
bioche ou agrafe, (((rniipie flslr, est sans doute le même mot que le
vieux nordique dalb-. Celte communauté lexi(jue a pris origine à l'épo-
que de la Tène. Elle ne peut pas être d'origine plus tardive. .Vous avons
10 18 JANVIKR 1906
su que les fibules ont été avec les agrafes de ceinture, les premiers objets
en fer importés en Danemark. Le nom gaulois a été introduit avec la
chose. Encore an temps do Tacite, celte tibule étaif l'objet essentiel delà
toilette des Germains: « L'habillement de la nation, dit-il (c. xvii) ne
consiste que dans une saie (le petit manteau gaulois), attachée avec une
agrafe ou faute d'agrafe avec une épine » C'est alors que s'est introduit
un autre nom d'origine latine ayant aussi le sens d'agrafe et d'épine.
Nous ne vo3'ons pas d'autre origine possible à spanga, v. h. allem., et à
l'allemand s/jaji^^' signifiant encore aujourd'hui agrafe.
Nous avons vu quel rôle jouait la lance chez les Gaulois, tout d'abord
h Hallstadt. Les fers de lance sont très abondants dans leurs stations. Ils
sont abondants en particulier à la Tène. Et les anciens Gaulois ont bien
marqué leurs préférences pour cette arme qu'ils fabriquaient à leur
manière. Aussi les Romains leur ont emprunté leur nom de la lance. Le
v. gaulois gaison, ou gaisos, irlandais actuel, gae, et ce même nom latinisé
gœsiim signifient arme à hampe de fer gauloise, et il est passé dans le grec
gaisos (yanoç), avec le sens de lance gauloise à hampe en fer. Or la lance fut
aussi communément employée par les Germains. Nous retrouvons donc
son nom gaulois dans les langues germaniques : v. nordique //^is/ « bàlon »,
geir, lance, v.h.all.etv.angl. sax.^ar, qui se présenlf souvent en compo-
sition : Ger-hast, — Ger-trui, etc. devenus des noms propres.
Cela exposé, je me borne à reproduire ici ce que dit M. Sophus Millier,
dans son ouvrage classique : Nordische altertumskunde (éâïL àW. Strasb.
1898, 2 vol. in-S"). Vercingetorix assiégé dans .Vlesia (Alise Sainte-
Reine. — Côtes d'Or) par César, fut secouru par une armée de 248.000
Gaulois, dont 8 000 cavaliers.
Les Romains pour se défendre à la fois contre Vercingetorix et contre
cette armée, durent creuser une double ligne de retranchements. L'empla-
cement de ces retranchements a été retrouvé et on y a recueilli une quan-
tité d'objets abandonnés par les Gaulois: Par exemple des umbos de bou-
cliers, en fer, des épées h deux tranchants dans un fourreau de métal à
bout large, des épingles à arc. Tous ces objets sont semblables à ceux
trouvés dans les tombeaux danois. On connaît bien d'ailleurs, par les
descriptions des anciens, le bouclier gaulois avec son ombilic, bosse
métallique à pointe conique, destiné à protéger l'avant bras.
Il est souvent question dans les Commentaires de César, de Bibracte, la
capitale des Eduens. L'emplacement de cette ville existe près d'.Vutun
(C'est le mont Beuvray;. Et entre les anciens murs et fossés qui l'entou-
raient, on a mis au jour de nombreuses assises de ses maisons. Or, au
milieu de ces ruines, il y avait beaucoup de ces épingles à arcs des tom-
beaux danois, et la ressemblance entre ces deux séries de pièces va par-
foisjusqu'à l'identité la plus complète.
Il n'y a pas de doute qu'à Alesia comme ;i Bibracte, nous avons bien
affaire aux Gaulois de l'histoire.
Mais nous avons déjà montré des objets semblables, la même industrie,
en ditîérents points de l'Europe centrale. Nous retrouvons cette indus-
ZABOROWSKI. — LKS GAULOIS 41
trie non spulement en Gaule, m.iis partout ou l'iiisfoire nous a signalé
des invasions de (Jaulois Elle ost donc bien gauloise aussi dans l'Europe
centrale. Des Gaulois ont été maîtres du nord de l'Italie. Or, dans des
cimetières étrusques, on trouve des tombeaux de guerriers dont le contenu
rappelle absolument celui di'.^ plus anciens tombeaux danois, l'industrie
d'Alesia, de Hil)ractt'.
Ces tombeaux se classent entre 400 et 200 avant notre ère, époque
où la région où ils se trouvent est tombée sous la domination romaine.
On a trouvé à Marzabotto, près Bologne, une fibule à arc pareille àdeux
fibules recueillies dans un vase avec des os brûlés, à lUbjerg, district
de Viborg, Danemark.
Des Gauloi.s du Danube sont allés s'établir jusque sur le littoral de
r.\driati(iue, se superposant à une population brûlant tous ses morts.
Nous avons montré cette su|)erposition en plusieurs cimetières. {y.Bullet.,
1904, p. 692).
Près d'.Ulelsberg en Carniole, à Saint-Michaël, à coté de tombes halls-
tadtiennes, sont des tombes de l'époque de la Tène. Celles-ci contenaient
des fibules à arc, des épées à deux tranchants et à un tranchant légère-
ment courbe, comme celui du Danemark.
A ces observations de Sopbus Mùller^ j'ajoute celles faites récemment
en Bohême. M. Pic a donné lui-même deux fibules en fer de Stradonice
(Cechy na usvite Dejin. Zwazek, 2, pi. III, fig. 32 et 33) qui sont à peu
près identiques aux fibules danoises.
Sans discuter, sans connaître ces trouvailles d'ailleurs récentes, de
Stiadonice, M. Sophus Millier, pouvait cependant dire, il y a déjà huit ou
neuf ans (p. 31 1 : « Nous avons suivi les principales formes celtiques des
antiquités trouvées en Danemark, a travers l'Europe Centrale, de l'ouest
à l'est, et discuté leur première origine. Elles se laissent suivre de la
Hongrie, de la Bohême, jusqu'à la Baltique. Sur toute cette étendue le long
de laquelle la nouvelle culture a gagné le nord, on a trouvé de nombreux
échantillons d'une fabrication semblable. Ces trouvailles attestent le fait
historique que les (Celles (M. Sophus Millier emploie inditîéremment les
noms de Celtes ou de Gaulois comme tous les autres savants étrangers),
le fait est historique, que les Gaulois, aux iv«et m" siècles, occupaient dans
l'Europe Centrale une place considérable. De là leur industrie, leur goût,
leur style ont acquis une pleine domination sur les peuples habitant au
nord de leur pays jusqu'au sud de la Scandinavie et jusqu'en Angleterre.
De puissantes tribus gauloises apparurent dans la vallée du Danube dans
tout leur développement. Pillant et volant, elles parcoururent la plus
grande partie de l'Italie, de la Grèce, de l'Asie-Mineure... Ce grand
déploiement de force, sur le terrain politique, correspondit naturellement
à un développement puissant et original de l'industrie et du style, comme
nous l'observons encore, lors du deuxième grand mouvement de peuple,
celui des invasions germaniques. Cette époque de la domination celtique
est désignée sous le nom d'époque de la Tène ou du récent Age du fer dans
le centre de l'Europe. Les éléments de cette nouvelle culture comprennent
.1-2 1^ JANVIKM l'.tOli
une partie de ceux ilu plus vieil âge du fer ou de llallstadt et quelques-uns
de ceux des pays classiques. Où il y a des antiquités celtiques, il y a aussi
des proiUiils d'industrie grecque et étrusijue. Notamment dans la région
danubicnnnf au miliou de riches trouvailles, il y avait de beaux vases
de bronze etd'autres objets de m^tal d'un travail classique, à côté de pro-
duits de l'industrie des (leltes. En Danemark aussi on a découvert quatre
vases de bronze d'un travail classique, qui sont du dernier siècle avant
Jésus-Christ. Ils ont sans doute été pris en Italie par les guerriers gaulois
et sont parvenus dans le nord après de longs détours. En tout cas ils
appartiennent aux monuments de la puissance des Celtes. »
Les observations de M. Sophus Miiller sur l'âge du fer danois, les
relations certaines qu'il démontre entre lui et la civilisation gauloise, sont
restées inconnues ici ou à peu pr^s. Leur importance décisive a été igno-
rée. Mais elles n'étonneront pas ceux qui ont suivi mes leçons. Et je n'ai
qu'à rappeler ce que j'ai dit encore il y a peu de temps, pour en faire
saisir toute la portée. C'est l'archéologie même qui parle par l'organe de
Sophus Millier.
Or, l'archéologie, sans rien connaître des recherches poursuivies
loin de son domaine, nous affirme, nous démontre, que ce sont les
Gaulois qui ont introduit, sur la Baltique, le fer, les premiers objets fabri-
qués en fer. Pendant ce temps, d'un autre côté, les linguistes, ignorant ces
résultats, découvrent que dans les langues germaniques, les noms du fer
el d'objets fabriqués en fer, ne sont pas germaniques d'origine, mais
gaulois. Encore aujourd'hui, au fin fond de l'Irlande, le nom du fer des-
cendant du nom vieux gaulois, est étroitement parent du nom gothique,
des noms germaniques, en général, du nom vieux h. ail. {Revue de l'Ecole
d'Anthrop., 1904, p. 217). N'est-ce pas là une concordance frappante et
n'avons-nous pas dans cette concordance même une base d'une solidité
à toute épreuve, pour la détermination précise des origines gauloises et
germaniques? Toutes les élucubrations inventées pour expliquer ces
origines, tous les romans de migrations et de pérégrinations, ne tom-
bent-ils pas à plat devanl-elle ? Qu'en résulte-t-il en effet? Uue les
(laulois étaient sûrement établis dans la zone centrale de l'Europe, des
Carpathes au Rhin, au moins avant la première pénétration du fer dans
cette région, avant l'époque de liallstadt, et que les ancêtres des Germains
au contraire étaient déjà éloignés alors de toute région où le fer était
connu, notamment de la mer Noire sur le littoral de laquelle les métaux
pénètrent ensemble avant le xii® siècle avant notre ère. Ils étaient
cependant à proximité de territoires gaulois. Les Germains n'auraient pu
recevoir le fer et ses noms des Gaulois, s'ils avaient été, a l'époque halls-
tadtienne, ailleurs que sur le pourtour occidental de la Baltique. Nous
' Schrader cite bien Sophus Miiller, mai? entre l'opinion qui fait de Hallstadt une
station préceltiqno, ot cell*^ qui i'attrihin^ aux Gaulois Taurisques, il ne se prononce
]>as{l, 174). Et il déclare ne pas savoir si les Gaulois ont emprunté leur art national
du ft-r aux Grecs de Marseille ou à l'Italie du nord.
ZABOROWSKI. — r.ES fiAILOIS 43
savons, d'autre part, que, en Suède, en Norvège, en Danemark, la popu-
lation est resiée à peu près identique à elle-même depuis la (in de l'âge
de pierre. Et nous verrons plus tard que tout le pourtour occidental de la
Balti(ju<\ à partir d'une ligne voisine de la rive gauche de l'Oder, forme
une même province arcliéolugique. (.es ancêtres des (iermains occupaient
donc cette petite partie de l'Europe, dès le moment où y apparaît la belle
industrie de la fin de l'Age de pierre. Et ils y sont restés conlinés absolu-
ment jusqu'aiirès le commencement de l'époque de la Tène, ou époqui'
gauloise du centre de l'Europe. Avant cette époque d aill'Mirs leur
langue était déjji bien distincte du (iaulois. El ils parlaient une seule et
même langue.
I\'. — Retournons-nous maintenant du coté de rextiênie-ouest .
E«^s Romains trouvèrent les habitants de la (îrande-Brelagne armés
de très longues épées en fer sans pointe (Tacite, Vie d'Agricola, xxxvi),
et faisant usage pour monnaies, d'anneaux de ïer (César, De hel. gai., v, 'S).
Us savaient bien que des (îaulois l'avaient |)euplée et que ceux-ci restaient
fidèles à leurs origines, car ils nous disent que les Bretons avaient sou-
tenu constamment leurs congénères de la Gaule contre eux (César, iv, 3).
Les Gaulois de la côte gardaient encore leur nom pour la plupart au
temps de César (v, 3). En général, on doit présumiT, dit Tacite {Vie
d'Agricola^ m) que des Gaulois se sont établis dans une contrée dont leur
pays n'est séparé que par un bras de mer. Tout favorise cette idée. Extrême
rapport entre les deux langues, même culte religieux, égal attachement
aux mêmes superstitions, etc. Confirmant cette opinion, Strabon nous dit:
<• 11 y a quatre points sur le continent d'où s'effectuent habituellement la
traversée dans l'île de Bretagne. Ce sont les bouches du Rhin, du Séqua-
nas (Seine), du Liger (I^oiiej et du (îarounas. Toutefois quant on part des
provinces rhénanes, ce n'est pas aux bouches mêmes du Rhin qu'on
s'embarque, mais sur la cAle de Morinie attenante au pays des Ménapes
où se trouve Itium où le divin César réunit ses llolles. » C'est donc par la
cote de .Morinie qui comprenait Bononia, Boulogne, que les Gaulois venus
du Rhin, ont passé en .\ngleterr('. I^es mines de fer exploitées, alors
connues, étaient situées principalement sur la cote (César, v, 3). On a
trouvé des preuves d'une très ancienne exploitation de mines de fer dans
les forèls du Sussex, sur le littoral, contre le Kent dont parle César comme
peuplé de gens ne différant guère des Gaulois en cruilumes. On en a trouvé
aussi à l'intérieur dans la forêt de Gloucester, qui est aussi riche en
mines de houilles qu'en mines de fer. Introducteurs du fer en (jrande-
Brelagne, du nom et de la chose,, les Gaulois y ont installé l'industrie qui
s'y rapporte. On connaît quelle importance les chariots avaient dans la
vie guerrière des Gaulois, par la place qu'ils occupent dans les tombes
de la Marne. César a retrouvé ces chars en usage chez les Bretons (V, iv),
et Tacite semble dire que ceux-ci combattaient à pied ou dans ces chariots,
plutôt qu'.-i cheval (Vie d'Agricola, xii).
Aussi, dans son ouvrage récent : Préhistoric Scotlaud and ils place iv
44 18 JANVIER 1906
Europenn ririlisntion. Edimbur-g. IHî)!>, in-S", M. Munro, l'archéologue
anglais ijui jouit aujourd'hui do hi phis grande autorité, appelle l'Age du
fer en (îrande-Hretagne, période celtique (récent celtique). L'industrie
de cette période, dit-il, est d'un style unique, f|ui est celui des Celtes ou
(raulois (p. 235j.
Chose peut-être encore plus significative, les Gaulois qui, au v» siècle,
envahirent la Haute-Italie, n'avaient pu y introduire le fer qui y était
employé depuis bien des siècles. Ils y introduisirent cependant une indus-
trie sidérurgique particulière. Et ils l'y ont conservée en face des civilisa-
tions italiennes supérieures. Elle florissait encore du tenaps des empereurs :
Bergame et Brixia en étaient les centres.
C'est donc bien indubitablement dans leur patrie d'origine que les
Gaulois ont appris h travailler le fer. Et détail fort curieux à noter, comme
on le voit par les citations que je viens de faire, de Sophus Millier, de
Munro, par celle que je pourrai faire de Pic, il n'y a plus qu'en France
qu'on refuse à l'industrie de la Téne, le nom qui lui appartient, à'indtisti-ie
gauloise.
Les Trévires qui habitaient l'Eifel et les bords du Rhin, furent juste-
ment célèbres dans l'antiquité pour la fabrication de leurs armes. L'Eifel
est une région montagneuse volcanique au nord de la Moselle inférieure,
entre cette rivière et le Rhin où elle débouche. Aix-la-Chapelle, (loblentz,
Trêves, sont à ses trois extrémités angulaires. Les mines y sont nom-
breuses, et on y trouve beaucoup de scories témoignant d'une exploitation
très ancienne. Aux environs même d'Aix-la-Chapelle, il y a des traces
de plus de cent exploitations anciennes. On en a trouvé aussi en Belgique,
en Suisse. Dans ce dernier pays, des scories de mines se présentent dans
de telles conditions qu'un de ceux qui les ont les premiers observés
(Quiquerez), fit remonter leur exploitation à un âge très reculé. Il est
vraisemblable cependant que ces mines ont été exploitées par les contem-
porains des habitants de l'oppidum de la Tène, lui-même.
Les habitants de Hallstadt, où les inhumateurs étaient tous de purs
Gaulois (dolichocéphales et grands), travaillaient déjà le fer. Ils fabri-
quaient surtout des pointes de lance mais aussi des épées de fer, dès le
vrii' siècle avant notre ère. Et la tradition de cette fabrication s'est conser-
vée dans la région, depuis lors. Car à l'époque romaine et même encore
après, les belles épées de fer venaient de la Norique.
Les archéologues tchèques comme le conservateur du musée de Prague,
M. Pic (Prœhistoricke Lebky v Cechach. Pragues, 1899, p. 4) appellent
aujourd'hui l'époque de la Tène en leur pays, « époque gauloise, » je le
répète.
En Bohême, on a découvert, parmi 200 oppidums, des stations d'une
richesse incroyalile appartenant a la seconde partie de cette époque,
à cette période où les bandes conquérantes des Gaulois s'étaient déjà
répandues de tous côtés en s'emparant d'un butin considérable Tel est
l'oppidum ou Hradisch de Stradonice au N. de Prague (V. Déchelettes,
Pic et ma leçon sur la Pénétration des Slaves en Bohême. Revue de l'Ecole,
ZABOROWSKI. — LES (lAlLUIS 45
l«'janvier 1900, p. 75). La trouvaille qui l'a signalé k l'atlentiou est celle
faite on 1877 de deux cents monnaies d'or gauluises. Ces monnaies classent
Stradonice auprès de l'ancieune Bibracte, la ville du mont Beuvray, non
loin d'Autun, qui était aussi un centre de fabrication métallurgique.
Dans les deux stations, cependant bien distantes, on a recueilli des clous
en bronze émaillé. A la ïène, il y avait des clous en fer émaillé.
Les Gaulois connaissaient donc l'art de l'émailleur. Et ils ne l'avaient
nullement emprunté à l'étranger. Leurs émaux sont rouge sanguin
(Déchelettes, 23). L'invention de l'étamage a été aussi attribuée à une
peuplade gauloise, les Biluriges.
Les Gaulois ont exploité anciennement des mines de fer même au delà
de la Bohême, en Silésie. Des Ciothins qui l'habitaieiit encore au temps
de Tacite, celui-ci dit (XLIII) : « Ils parlent la langue gauloise; il est
visible qu'ils ne sont pas Germains... Et d'ailleurs pour comble d'oppro-
bre, ils sont employés aux mines de fer. »
Les Gaulois employaient sans doute aux mines les prisonniers qu'ils
faisaient en grand nombre. Lorsque les Germains furent maîtres de leur
ancienne patrie, ils les contraignirent à leur tour ;i ce travail qu'ils avaient
sans doute fait eux-mêmes, puisqu'ils sont devenus les introducteurs et
propagateurs de l'industrie du fer sur le littoral oriental de la Baltique.
Devant les preuves linguistiques du grand rôle des Gaulois sur un
immense espace, des auteurs comme d'Arbois de Jubainville, ont admis
l'existence d'un empire celtique également immense. Les conquérants
gaulois sont restés en relations entre eux comme le prouvent les richesses
accumulées dans leurs camps ou oppidums de la Bohême et les objets
précieux qu'ils ont disséminés jusqu'en Danemark, après les avoir ramas-
sés dans leurs pillages du noird de l'Italie et en Grèce. Mais un lien poli-
tique durable n'a pu subsister longtemps entre eux. Ils n'avaient d'ailleurs
qu'une organisation politique bien sommaire. L'existence d'un immense
empire celtique, au sens propre, est sans doute un mythe. Et nous avons
vu les Gaulois du Danube perdre assez rapidement leur personnalité en
se fondant avec les indigènes.
D'autre part, en voyant les historiens anciens, à commencer par Héro-
dote, mentionner des Celtes ou Gaulois en tant d'endroits dill'érents et sur
des teiritoires aussi considérables, des auteurs ont supposé que ces noms
n'avaient eu qu'un sens géographique et avaient été appliqués à des
peuples très différents. C'est là une supposition gratuite, contredite non
seulement par la linguistique, mais par les faits très matériels d'ordre
archéologique énumérés plus haut. Elle est contredite aussi par l'ethno-
logie. Les Gaulois de l'histoire sont bien des peuples sortis d'une race
unique un peu partout en voie de mélange, mais ayant encore des carac-
tères physiques peu variables, parlant des dialectes parents de môme ori-
gine, ayant des mœurs et une industrie semblables, qui d'un centre unique,
se sont répandus à travers l'Europe, jusqu'en Asie d'une part, jusqu'en
Irlande de l'autre. Et cette immense dispersion n'a rien de plus extraor-
dinaire que celle des Goths qui du Gothland, sont allés fonder un empire
\{\ \H jwvii-it i'.»(»r.
sur la mer Noire, puis en Italie, et furent un instant les maîtres de toute
l'Espagne et de la moitié de la Gaule : elle n'a rien de plus extraordinaire
que celle des Germains qui l'a suivie, et que celle des Normands, qui, par
les rivières, ont pénétré jircsque jusqu'au c<eur de notre continent et,
partis de la Norvège, sont allés fonder des royaumes jusqu'en Sicile.
Ai-je besoin de rappeler (jue les préhistoriques de l'Allemagne du sud
sont presijue exclusivement dolichocéphales? Un les a tous confondus et
il y a des germaniques dans le nombre.
Mais les inhumateurs gaulois de llallstadt étaient tous exclusivement
de la i,M"ande race dolichocéphale. Les crAnes tchèques des tombes à sque-
lettes repliés antérieurs à l'époque de la Tène sont presque exclusivement
très allongés. Sur 86 crânes, 74 ont un indice au-dessous de 75 et qui des-
cend à 65, à 62, îi 60. l'n seul est vraiment large et quatre seulement
sont de type brachycéphale. (Pic : Proekistoricke lebkjj r Cechacit. Praha
1899, p. 35.) A l'époque de la Tène (tabl. 3 et 6 et p. 92) cette situation
est peu changée, bien que les brachycéphales fassent d'avantage sentir
leur intluence. Sur 38 crAiies \H ont un indice de 75 et au-dessous, et 10
un indice de 80 à 85. V. en outre les mesures que j'ai données : Revue
Ecole ,rAnth. \90i].\i.l.
V. — Du côté de l'orient, j'ai signalé il y a longtemps, des trouvaillesde
pièces faitesdans des tombeauxdu Uniestre (Rakowkont), qui se rapportent
aussi à l'industrie de la Tène. J'ai signalé des trouvailles récentes de tom-
beaux à tumulus du Dniestre où. avec une pointe de lance en bronze du
type de Hallstadt,se trouvait une pointe de lance en fer du même modèle.
Ces trouvailles ont été et sont peut-être encore l'objet d'interprétations
que j'ai autrefois acceptées moi-môme, et que je suis bien obligé de
dénoncer comme erronées. On voyait en elles des preuves d'un passage,
de migrations de Gaulois se répandant en Europe déjà armés du fer.
Or les ancêtres des Gaulois étaient, dès l'époque de la pierre, là même
où nous trouvons les Gaulois des époques de Hallstadt et de la Tène, sur
le haut Danube.
Voilà à quelle occasion je me suis occupé des Houzoules et des Bas-
tarnes. .l'ai montré dans une de mes leçons le portrait d'un Houzoule
publié par la Zeitschrift fiir Ethnologie (1893) qui rappelle trait pour trait
les figures de Gaulois à cheval, d'un fourreau d'épée de Hallstadt.
J'étais donc fondé à dire qu'on devait retrouver parmi les Houzoules
des descendants de Gaulois. Dans la série de photographies rapportées
par M. Volkow, il y a, pourrait-on dire, un peu de tout.
Mais le grand intérêt des recherches sur cette population serait de
reconnaître parmi elle, des traces de Gaulois. Leur pays a été occupé
pendant de longs siècles par les Bastarnes. Or il est inadmissible que
ceux-ci aient pu disparaître sans laisser de traces, alors qu'il nous est
encore facile de retrouver des descendants plus ou moins altérés des (Gau-
lois au sud-ouest du Danube, du côté de l'Adriatique.
On a voulu, il est vrai, voir des Germains dans les Bastarnes, pour
Z\llilllO\V^KI. - l,F.< r.Alt.dl» 47
appuyer l'Iiypolhèse, que je déclare une l'ois de plu^ absuluuienl insoute-
nable avec les savants Scandinaves et allemands au couianl di- ta scii'-m-e.
d'une origine orientale des Germains.
Les Bastnrnes ne penvenl pus avoir été des Uerinains. Les restes archéo-
logiques anciens» se rapportant à leur présence, sont de répocjue de
Hallstadt ou de la Tène. Ils ne sont pas tfcrmantquvs. Il n'y a aucune trace
ijuelconque d'une mif^iatiun i/ennaniqui' ijuclrnnqun |)uur répo(jnt' r^'culée
où les Bastarnes s'installent autour et au nuid des (larpathes orientales.
C'est d'ailleurs probablement en raison de leur présence que les anciens
ont qualitié la population de cette région de celto-sci/the, d'après une indi-
cation relevée dans Strabon (XI c. vi, p. 2). Et ils étaient en elTet établis
dans la Galicie orientale dès la fin du iv" siècle, au moment de la grande
expansion des Gaulois sur le Danube. Tacite nous dit expressément
(Germ. iti) que leurs chefs, s'étant alliés par des mariages avec les Sar-
mates, ont introduit chez eux quelque chose de l'habillement de ces
derniers et que cela contribue à les défigurer. Il n'avait pas toutefois de
renseignements sur eux et il ne les nomme qu'incidemment. Il dit : « Je ne
sais s'il faut compter au nombre des (îermains ou des Sarmates les Heu-
cins, lesVénèdeset les Kennes.
Les Feucins, que quelques-uns nomment aussi Bastarnes, ont la langue
et l'habit des Germains.... »
(Jn a supposé qu'alors les Bastarnes étaient déjà mêlés de Germains.
.Mais cela est peu vraisemblable. Car au temps de Tacite les Goths étalent
encore sur la Baltitjue. Et comme Tacite les énumère avec deux autres
peuples qui n'étaient ni Sarmates, ni Germains, bien qu'il semble déclarer
qu'ils doivent être l'un ou l'autre, nous n'avons pas h faire état de son
choix, visiblement arbitraire.
Près d'un siècle avant Tacite, Strabon avait dit (VU c. n p. 15) : « Près
des bouches de l'Ister est une grande île appelée Peucé. Ce sont des Bas-
tarnes qui l'occupent actuellement, et ils en ont pris le nom de Peucins ».
En réalité, d'après un renseignement conservé par Plutarque, un con-
temporain de Tacite (Lagneau, Anthropologie de France, p. 093), les
Bastarnes se donnaient eux-mêmes comme Gaulois. Et Polybe semble
bien confirmer ce renseignemment, car lui-même il les appelle des Gau-
lois. Dans le courant du in« siècle, pendant le règne de Philippe V en
.Macédoine (220-179), les Bastarnes avaient été lesalliés de ce prince conli»'
les légions romaines et contre les Dardîiniens, anciens habitants du sud
de la Serbie actuelle. Ils furent aussi quelque temps les alliés de son sijc-
cesseur Persée. Les Dardaniens envoyèrent alors des ambassadeuis ;i
Home. « Us informèrent le sénat, dit Polybe, (L- 20 frag. vn), (|ue leur
province était inondée d'une multitude de Bastarnes, peuple d'une gran-
deur gigantesque et d'une valeur extraordinaire, avec lequel, comme avec
les Gaulois, Persée avait fait un traité d'alliance »
Il s'agit des autres Gaulois du Danube, des Scordisques établis au
nord de la Serbie, qui se répandirent jusqu'en Dalnuitie et avec qui les
Bastarnes qui les comprenaient, vivaient en alliés naturels.
48 >H JANVIEH i90fi
Un ptHi plus truii sif^cle apiAs, Slruljoii pla(;iiit dtîs lifislarnesà l'embou-
chure du Uamibe. Plus tic (Jeux siècles après, ils se répandaient furl loin
au nord des Carpalhes, d'après les indications de Tacite.
La descente des Goths sur la m<ir Noire, les a rejetés un peu plus au
sud, sur la Dacie à la tin du ii" siècle de notre ère.
Au ni*' siècle ils vont attaquer les Romains au delà du Danube. Les
Goths les ont refoulés et absorbés. Car il n'en est plus question h partir du
iv« siècle. Us n'en ont pas moins été établis autour des Carpathes orien-
tales d'une façon permanente pendant plus de 600 ans.
Tout ce qui est germanique dans la région de la mer Noir, et en parti-
culier l'art, dit barbare, avec ornementation animale, est postérieur aux
Goths, autant que je sache. Et la période archéologique des Goths est
bien datée là par la présence de produits de la culture romaine. L'industrie
de la Tène y est représentée par des pièces d'un âge antérieur, fort dis-
tinct. L'industrie de la Tène étant partout indiscutablement gauloise, les
Bastarnes qui l'on introduite, puisqu'ils étaient là au m' siècle avant notre
ère, au plus tard, étaient donc Gaulois. Le nom des Boïens se retrouve
encore aujourd'hui dans les Carpathes (Boïki). II y avait encore des Gau-
lois en Silésie au temps de Tacite {les Gothins). Dans les Carpathes se
sont conservés jusqu'ici, dans le vêtement, les motifs de décoration, les
broderies, même des traces manifestes de l'inlluence de la civilisation
hallstadtienne....
VI. — Protoaryens et Gaulois.
J'ai plusieurs fois comparé aux Gaulois les Protoaryens, pour bien
faire comprendre la position, et la nature du rôle et de l'expansion
de ceux-ci. La langue-mère aryenne a pris naissance dans la zone
mitoyenne de l'Europe centrale. Et de ce qui s'est passé, cette langue
une fois formée, nous avons en effet un tableau fort exact dans ce qu'ont
fait les Gaulois sur ce même territoire ou plutôt à sa limite occidentale.
Ils ont porté leur langue jusque dans l'Asie Mineure et jusqu'au fin fond
de l'Irlande, et cela en quelques siècles seulement, en l'espace de trois à
cinq siècles au plus, du vni« jusqu'au iv* et m^ siècle avant notre ère.
Etablis en Asie Mineure au-delà de la Phrygie et entre celle-ci et la
Cappadoce, depuis 272 avant notre ère, leurs descendants y parlaient
leur langue, 400 ans après notre ère, d'après Saint Jérôme. Ils ont donc
implanté cette langue dans un territoire limité, une région hostile, assez
fortement pour qu'elle s'y soit maintenue plus de 600 ans, en dépit des
influences adverses. Ils ont laissé des traces, reconnaissables encore, de
leur domination ou de leur présence, dans les Carpathes, sur le Danube,
dans la Haute Italie, au cœur de la France Des dialectes de leur
langue qui a couvert à la fois pendant un temps, l'Allemagne du Sud, la
Gaule, le nord de l'Adriatique, de l'Italie, de l'Espagne, la Grande
Bretagne, sont encore parlés en France, en Angleterre, en Ecosse, en
Irlande.
DISCUSSION 49
L'expansion des peuplades parlant la langue-mère couicnune à la lin
de l'époque néolithique, des peuplades protoaryennes en un mot. n'a
absolument rien de plus miM'vcilUMix (pie la leur. Accomplie de 2.000
à 1.500 ans environ à travers des territoires souvent à moitié vides
d'habitants où ils ne rencontraient pas l'obstacle de fortes organisations
politiques, comme en ont rencontré les (xaulois, elle n'est de proportion
plus vaste ((u'en apparence. El ses résultats ne paraissent si gi'ands
aujourd'hui qu'en raison des événements politiques qui les ont à la
longue développés et consolidés.
Les protoaryens avaient les mœurs des (iaulois, les progrés industriels
dont ceux-ci ont bénéficié misa part. Ltces mœurs nous les avons retrou-
vées encore en partie chez les Germains de Tacite. Ils n'élaient donc pas plus
sédentaires, pas mieux tixés au sol (pie ces derniers. .\u contraire. Ils ne
formaient pas un grand état. Leur organisation politique était encore plus
simple, moins solide que celle des Gaulois. Pas plus que ces derniers, ils
n'ont créé de vaste ompii't\ bien qu'ils aient enraciné leur langue en des
régions très distantes l'une de l'autre.
Discussion.
.M. .Manolvrier. — .le n'ai aucune opinion personnelle à formuler au
sujet des origines et des migrations des Celtes ou des Gaulois et je m'en
rapporte vaguement là dessus à l'érudition d'autrui. .le suppose seulement
que la diversité des opinions tient à ce que l'on désigne sous ces noms
tantôt des peuples, tantôt des bandes guerrières. Lorsqu'il s'agit non
plus d'histoire ou de linguistique mais de caractérisation anatomique
et par conséquent de races, alors la question me semble être tranchée
parfois un peu arbitrairement. Tout à l'heure M. Zaborowski paraissait
admettre cemme certaine une différence anatomique des Gaulois et des
Celtes que je crois très contestable ainsi que l'association naturelle
devenue trop classique de la doliehocéphalie avec les cheveux blonds, les
yeux bleus et une haute taille, de la brachyçéphalie avec la couleur
brune et une taille peu élevée. Ces derniers caractères seraient ceux
des Celtes de César (Gaulois habitant enlie la Seine et la Garonne)
tandis que les premiers auraient été ceux des Belges de César (Gaulois
habitant entre le Seine et le Hhin). (^et essai louable de caractérisa-
lion ethnique pouvait être admissible en 1839 lorsqu'il fut tenté par
Broca, mais les documents sur la taille et sur l'indice céphalique en
France étaient fort insuffisants à cette époque. Nous voyons bien encore
aujourd'hui qu'il semble exister en Europe une race du Nord, une
race du Midi périméditerranéenne et une race occupant surtout la zone
centrale. Nous reconnaissons aussi ces trois races au nord, au centre
et dans le Midi de la France malgré des mélanges très profonds. Mais
nous ne pouvons plus associer h la brachyçéphalie ni la couleur brune,
ni la taille petite par contraste avec l'association de la coub'ur claire et
soc. d'antbrop. 1906. 4
50 1^ jwvii-ii r.tdii
de lii tailli- (•levée avec la dulichuci'pliiilie dans la race septentrionale de
l'Europe.
Dans un mémoire publié ici même en 190:2, j'ai exposé ' des chiffres
éloquents à ce sujet. Sur les 13 départements français présentant les plus
hautes moyennes pour la taille, 0 ont une moyenne d'indice céphalique
indiquant la brachycéphalie, et sur les 13 départements qui présentent
le maximum de brachycéphalie (moyennes) 6 accusent une moyenne de
taille supéiieure à la moyenne génf'i-ale de la France.
Les faits analogues ne manquent pas dans le reste de l'Europe. On y
trouve maints pays où la brachycéphalie s'associe à une taille élevée. Et
plusieurs de ces pays ne sont-ils pas précisément de ceux dont on parle
lorsqu'il s'agit des Gaulois?
Rien ne prouve du reste que les Gaulois fussent une race particulière
et que l'on puisse attribuer ou refuser h lois ou tels la ([ualilé de Gaulois
en vertu de caractères anatomiques.
Au temps de César on nommait la Gaule tout le pays compris entre le
Rhin, les Pyrénées et les Alpes sans compter la Gaule cisalpine, et les
Gaulois de César, qui devait bien les connaître, étaient tous les habitants
de ce pays. Mais César distinguait parmi les Gaulois de sa Gaule tran-
salpine (la nôtre) des Belges au nord, de Celtes au centre et des Aquitains
au sud-ouest. Il y avait donc dans cette (Jaule Gaulois et Gaulois, comme
dans la France actuelle, il y a Français et Français. S'il en était ainsi
dans un pays auquel les Galls envahisseurs avaient donné leur nom, il
n'en était sans doute pas autrement dans les autres pays plus ou moins
Gaulois selon les historiens.
Après l'invasion des Galls, il y eut celle des Kymris, autres Gaulois dit-
on. Mais si ce nom de Gaulois est un peu vague déjà historiquement, il
est certain (jue les caractères analomi(|ues capables de caractériser une
« race gauloise » ne sont rien moins que sûrs.
En ce qui concerne l'indice céphalique, nous savons (ju'il y avait dans
notre pays, aux temps néolithiques des brachycéphales, mais beaucoup
plus de dolichocéphales d'après les documents que nous possédons, et la
taille moyenne était faible. Gomme je le disais dans ma récente commu-
nication sui' des ossemenls préhistoriques, il semble que les invasions
postérieures aient introduit chez nous, si c'est à elles que sont dûs les
changements, une augmentation moyenne de la brachycéphalie.
Mais cette remarque ne saurait trancher une question sur la complexité
de laquelle j'ai voulu attirer l'attention une fois de plus.
MM. Atgier, de Mortillet, Hauy, Hervé et Fourdrignier prennent égale-
ment la parole.
• Etude sur les rapports anthropométriques e,i général et sur les principales pro-
portions du corps. (Mémoires de la Sociélù d'Antliiopologie de Paris, .S" série t. II,
chap. vir, p. ''iS et suiv.)
VAllKiT KT i;HAlMKI'. — TAlILES DE r.a(i|>SANnE DES ENIANTS l'AUISlEN- -il
TABLES DE CROISSANCE DES ENFANTS PARISIENS DE I A 16 ANS
Dressées en 1905 par MM. Variot et Chalmet.
Ces tables ont été établies d'après les mensurations île t 100 enfants des deux sexes.
Pour arriver à des moyennes stables, ont a enregistré la taille et te poids d'au
moins cent enfants de cha</ue se.re, />unr une anm'e d'àr/e. Ce rhiff're de cent a et''
{jénéraleinenl di-fiassi-.
Nous avons riionneur »lo présenter à la Société d'Anlbropologie lo
résultat do nos reclierches inélhudinues sur la taille et le poids des enfants
parisiens des deux sexes. L'an dernier, l'un de nous a été conduit par ses
recherches sur Yhijpolrophic infantile à faire construire un instrument spé-
cial, un pédiomètre. (jui permet d'enregistrer prcsciue simultanément le
poids et la taille des enfants.
C'est cet instrument très précis qui nous a servi à faire toutes nos men-
surations.
Il n'existe pas en France, à proprement parler, de tables de croissance,
-auf celles dressées par les accoucheurs pour la première année de la vie,
et, en particulier, celles de Houchaud, généralement acceptées.
On s'en réfère encore de un à 15 ans aux tables de Quételet qui ont été
établies, il y a plus d'un demi-siècle, à Bruxelles, surdos enfants d'une
race un peu ditïérente de la nôtre.
Nous avons donc entrepris un travail île pédiométrie nécessaire, en
nous plaçant dans les conditions d'observations les plus rigoureuses pos-
sibles.
'loules nos mensurations ont été faites à Paris avec le mémo insli iiment,
par la même personne; elles n'ont une valeur réelle que pour les enfants
parisiens en 1905; mais elles pourront servir de type de comparaison
pour d'autres mensurations du même genre, pratiquées ultérieurement
dans les diverses parties do la France.
D'ailleurs, la plupart des enfants que l'on rencontre dans les écoles de
la Ville de Paris ne sont pas de vrais Parisiens; ils sont nés de parents
provinciaux qui ont immigré dans la capitale. Nous avons soigneusement
éliminé de nos moyennes les étrangers et les très rares enfants difformes
ou anormaux.
Nuus nous sommes astreints a mesurer les enfants dans des milieux
variés, autant que possible.
M. de Selves. préfet de la Seine et M. Bédorez, nous ont autorisés à
pénétrer librement dans les écoles municipales du IX« arrondissement '
* Liste des écoles et établissements divers où nous avons mesuré les enfants
KctiLKS MATERNELLES Rue du Retrait.
Rue liu Ttilèi^Mapiie.
Rue Jls .Martyrs. Ru« de la Cuui des .Noues
Rue RoJier. Rue dts Mùiiers,
32 IS jvNVini \\MH\
{^Oiiern. [Kumlalion aisée) el dans celles tlii \X* {Belleville, population
ouvrière), nous avons utilisé les écoles maternelles, les consultations des
dispensaires et des hôpitaux, les Crèches, pour les enfants les plus jeunes;
nous avons eu la facilité de mesurer les enfants assistés, les enfants de
quelques orphelinats et aussi les enfants des écoles primaires supérieure
el professionnelle de la Mlle de Paris Edgar d-Quinet , Sophie Germain , filles);
(Diderot, garçons). I.a plupart de nos mesures de 13 à 16 ont été prises
dans ce dernier milieu, peut-être im peu différent du milieu des fau-
bourgs; les enfants reçus dans ces écoles après concours appartiennent
h la classe riioyenne de la population *.
Tous les enfants, avant de passer sous la toiso, quittaient leurs chaus-
sures et il a été tenu compte, aussi exactement que possible, du poids de
leurs vêtements, qui a été défalqué du poids total enregistré.
Sauf pour les petits enfants des (Irèches (entre 1 et 2 ans) qui ont été
étendus sur le plateau mobile du pédiomètre et mesurés dans le décubitus
dorsal, tous les autres enfants ont été toisés debout. Pour les filles, on fai-
sait glisser le curseur du pédiomètre sous les cheveux, afin d'afïleurer le
verlex. Un nous a objecté qu'il eût été plus rigoureux de mesurer la taille
de tous les enfants couchés. Mais, il paraît bien difficile d'atteindre une
précision absolue dans les opérations de ce genre; d'ailleurs, les mesures
prises dans la station debout sont toutes comparables entre elles, ce qui
est l'essentiel ; de plus, elles peuvent être mises en parallèle avec celles
dressées par les auteurs des tables de croissance à l'étranger, qui ont aussi
toisé les enfants debout.
Rue fie Tourtille.
Rue de Lesseps. Écoles de Filles
Boulevanl de Bellevillc
Rue de Vaugirard, 140 Rue Buffault.
Rue des Cendriers. Rue Clauzt^l.
Rue des Balkans. Rue de Lesseps.
Lazaret des enl'anls assistés. Rue du Télégraphe.
Rue Milton.
Enfants Assistés.
ÉcuLES DE Garçons Sophie Germain, Ecole suiiérioure de iilles.
Edgard Quioet, Ecole supérieure de filles.
Rue ïurgot. Orphelinat des sœurs de Ménilmonlant.
Rue Milton. Crèche Furtado -Heine.
Rue Henri Chevreau. Crèche de la Santé.
Rue Pelleport. Crèche du Télégraphe.
Boulevard de Bdleville. Crèche passage Pékin.
Rue.de Lesseps. Crèche Sainte- Amélie et de Gharonne.
Ecole professionnelle Diderot. . Consultation externe des Enfants-Malades,
Enfants Assistés. Consultation de l'Hôpital Trousseau.
Orphelinat des sœurs de Ménilmonlant. u Goutte de Lait » de Belleville.
* Nous devons f.iire observer qu'aux mêmes âges, le milieu mensuré est exactement
le même daus les deux sexes et que par conséquent les dittérences observées pendant
la durée de la croissance au moment de la puberté en particulier conservent toute
leur valeur.
VAIUUT ET CHAIMKT — TAHLKS l>K .:Ui.l»AM.K Dl.^ KNIANTS l'AmSIKN> "VA
A Paris, tout au moins, pour (1rs raisons de fonvenance sur lesquelles
il est superflu d'insisler, il sérail assez malaisé de faire acc-pler la men-
>uration dans le décubitus dorsal par les jeunes lilles.
(ç c ni 'ï -ni -ni -oj -tj ■<ï n» 'Ti -nj -^ m -i^ tï
-«.««CN f>o J. u-, io (^ Qo «T) es ^ ISj'"^ ~i- >-o
Ages
Fi;/. 1. - Courbe générale de la croissance de l à 16 ans (Taille et poids^.
54 1« JANVIER 1906
C'est un travail plus long et plus dilficile qu'on ne pourrait le supposer,
d'enregistrer le poids et la taille de plusieurs millieis d'enfants, même
avec un instrument aussi couimod».* et aussi précis que le pédiomèlie. 11
faut compter avec les obligations administratives, les exercices scolaires;
mais la bonne volonté des directeurs et directrices dans les écoles muni-
cipales nous a facilitt'' notre tâche.
Nous eussions désire mesurer les jeunes filles dans un lycée, mais le
recteurdc l'Université de Paris, M. Liaid, pour des raisons qu'il ne nous
a pas fait connaître, s'y est opposé.
Par contre, sur la recommandation d<' M. Amliroise Rendu, M""^ la
Supérieure générale des filles de la Charité nous a autorisés a pénétrer
dans les orphelinats de Saint-Vincent-de-Paul, pour poursuivie nos
recherches.
Sur les conseils de M. Manouvrier, professeur à l'École d'anthropologie,
dont la compétence est grande dans ces questions, nous avons adopté le
chilTre minimum de 100 pour chaque année d'Age, et pour chaciue sexe,
afin d'arriver à une moyenne à peu près stable. Très généralement, ce
chiffre do 100 a été dépassé ol nos calculs de moyenne, pour une année,
ont porté, le pins souvent, sur loO et même 180 sujets.
Les chiffres que nous donnons d'une année à l'autre, de 1 à 2, d? 2 à
3 ans, etc , pour la taille aussi bien que pour le poids, n'ont aucune pré-
tention àla précision mathématique ; ils exprimentsimplementla moyenne
de la taille et du poids des enfants nés dans le courant d'une même année.
Leur approximation la plus grande se rapporte à )a demi-année, puisque
no> mensurations ont porté sur des sujets nés à tous les mois, sans dis-
tinction. Mais cette approximation n'est pas d'une exactitude stricte
puisque nous n'avons pas absolument le même nombre d'enfants pour
chaque mois. A supposer qu'il soit utile de dresser des tables de croissance
aussi précises, il faudrait, pour établir une moyenne, toiser et peser au
moins cent enfants de chaque sexe par mois, soit au moins 2.400 par
année d'âge, soit plus de 30.000 de un an à 15 ans. On a commencé à
l'étranger des recherches de ce genre, mais nous nous demandons si leur
intérêt égalera l'énorme somme de travail matériel qu'elles exigeront.
Quoi qu'il en soit, nous pouvons affirmer qu'il n'existe pas en France
de tables de croissance d'ensemble pour les enfants des deux sexes dres"
sées, suivant une méthode scientifique rigoureuse, comparable à celle que
nous avons adoptée et nous croyons que nos tables sont celles qui s'ap-
prochent le plus de la réalité.
Il n'sulte de la lecture de ce tableau et des courbes très démonstratives
qu'il est aisé de construire avec ces séries de chiffres, que la taille à partir
de 1.1 à 12 ans chez le> filles, 134,4, l'emporte sur celle des garçons 133,4
et que cette supériorité temparaire se prolonge jusqu'à 13 et 14 ans, où
la taille est réciproquement de 148,6 pour les filles et de iAoA pour les
garçons. L'année suivante, de 14 à 15 ans, les garçons passent à 153,8 et
les filles se laissent distancer à 152,9. A partir de là, la taille restera plus
élevée chez les sarcons.
VAitior KT ciiAiMKT — rAiiLi;> 1)1-: i;iiiii>^ wck I)1> km am- i'aiii>ii;.v- oo
Moijeiitirs ilu pDiils i'I de la Inillr lif la prrmii'ie l'i la seizième nnnée, irnprè.'i
^t.UOO mensurations dans les Ecoles de la Ville et dans les crèches, dispi-nsaires
et consultations externes, etc.
Ces moyennes sont calculées sur des séi'ies de 100 a 190 individus
pour chaque année d'âge et pour chaque sexe.
Tableat a
TAILLE EN CENTIMÈTRES
Ages
Garçons
Filles
Garço
ns
Fi Mo
Diffé-
r>iffé-
Diffé-
Diffé-
1 H 2
74 2
rence
73.6
ronco
•).500
rence
9.300
rence
•> à 3
82.7
8.5
81.8
8.2
11.700
2.2
11.400
3.1
3 à 4
SO.I
6.4
88.4
6.6
13.000
1.3
12.500
1.1
4 à 5
96.8
7.7
95.8
7.4
14.. 300
1.3
13.900
1.4
5 à 6
103.3
6.5
101.9
6.1
15.900
1.6
15.200
1.3
6 à 7
109.9
6.6
108.9
7.0
17.500
1.6
17.400
2.2
7 H 8
114.4
4.5
113.8
4.9
19.000
1.5
19.000
1.6
8 à 9
119.7
5.3
119.5
5.7
21.1(10
2.1
21.200
2 2
9 à 10
125.0
5.3
124.7
4.8
23.800
2.7
23.900
2.7
10 A 11
130.3
5.3
129.5
5.2
25.(JO0
1,8
26.600
2.7
il à 12
133.6
3.3
134.4
4.9
27 . 700
2.1
29.000
2.4
12 ;i 13
137.6
4.(1
141.5
7.1
30.100
2.4
33.800
3.8
13 à 14
145.1
7.;.)
148.6
7.1
35.700
5.6
38.300
4.5
15 il 15
153 8
8.7
152.9
4.3
41.900
6.2
43.200
4.9
15 ;i 16
159.6
5.8
154.2
1.3
47.500
5.(1
46.000
2.8
POIDS EN KILUGRAMMES
l'our les variations du poids, suivant les sexes, il résulte de nos tables
que dès l'Age de 9 à 10 ans, les tilles préparent leur accroissement plus
précoce que celui des garçons, vraisemblablement en rapport avec l'ap-
proche de la puberté.
De 9 à 10 ans, le poids des tilles, jusque-là presque égal à celui des
garçons, s'élève à 23 k. 900, au lion i\o -23 k. 800. De 10 .^ I L le poids est
pour les lilles de 26 k. liflO au li.'u de 2:> k. 60(1. puis de 1 1 à 12, d<' 29 k.
5«
18 JANVIKM 1906
au lieu de 27 k. 70(). puis de !-> à 13, de 33 k. 800 au lieu de 30 k. 100,
de 13 à U, de 38 k. 300 au lieu de 3o k. 700; de 14 à 15, de 43 k. 200 au
lieu de 41 k. UOO et enfin de 15 à U\, les garçons reprennent le dessus
avec 47 k. 500 au lieu de ifi k. pour les filles. La supériorité temporaire
du poids des filles sur le poids des garçons a donc duré six années.
Centimètres
o — rocAj-F^cncn^oocD
Fig. 2. —'^Accroissement annuel rie la taille de 2 à 16 ans.
VAltniT ET CHAI MKl. — lAItl.KS l)K CUOISSANCE DES ENFANTS PAKISIENS .M
L'élude de ces chillVes démontre bien l'eiTeuf dans laquelle est tombée
iM. Comby ', lorsqu'il a voulu calcuIiM- parjuno formule mathématique le
Kilogs.
ro 04 -f^ en <D vj
^ 'mmmmm
Fig. 3, — Accroissement annuel du poids de 2 à 16 ans.
' Traiffj ries maladies de l'eiifnnce, public par MM. (jraiicher et Goiiiby, loiiie I.
58
18 JA.NVIKR 1906
poids réciproque des gai\;ons »3t des lilles, en parlant du poids de nais-
sance un peu plus faible de ces dernières. Il dit que le poids des garçons
à 15 ans sérail de 4»3 kilos et celui des filles de 31) kilos seulement. Or,
ces dernières, de 14 à 15 ans, pèsent 43 k. 200 et les garçons seulement
41 k. 900. L'écart des chilîres fournis par l'observation, de ceux donnés
par des calculs théoriques, est assez considérable pour être relevé.
Tables comparatives de rroissanre (taille) contenant les résultats de Variât et
Chaiimet {Paris), ceux de (Juételet {Bruxelles), de Bowditch {Etat de Massa-
chussets), de Rotch [Boston).
Tableau B
GARÇONS
FILLES
Tailles
At;6s
Tailles
Ages
Quételol
1
Bow-
ditch
Morgan
Rotch
Variot
et
Chaumet
Quételot
Bow-
ditch
Morgan
Rotch
Variot
«t
Chaumet
1 à 2
69.8
74.0
73.8
74.2
1 à
2
69.0
70.8
74.1
73.6
2 à 3
79.1
83.4
84.5
82.7
2 à
3
78.1
80. 2
82.3
81.8
3 à 4
86.4
92.1
92.6
89.1
3 à
4
85.4
90.6
90.7
88.4
4 à 5
92.7
100.3
98.2
96.8
4 à
5
91.5
97.4
97.0
95.8
5 à 6
98.7
105.6
103.9
103.3
5 k
6
97.4
104.9
103.2
101.9
6 à 7
104.6
111.1
109.3
109.9
6 à
7
103.1
110.1
108.3
108.9
7 à 8
110.4
116.2
114.3
114.4
7 k
8
108,7
115.6
113.8
113.8
8 à 9
116.2
121.3
119.4
119.7
8 à
9
114.2
120.9
118.9
119.5
9 à 10
121.8
126.2
124.2
125.0
9 à
10
119.6
125.4
123.4
124.7
10 à 11
127.3
131.3
129.2
130.3
10 à
11
124.9
130.4
128.3
129.5
11 à 12
132.5
135.4
133.3
133.6
11 à
12
130.1
135.7
133.5
134.4
12 à 13
137.6
140.0
137.7
137.6
12 à
13
135.2
141 9
139.7
141.5
13 à 14
142.3
145.3
143.0
145.1
13 à
14
140.0
147.7
145.4
148.6
14 à 15
146.9
152.1
149.7
153.8
14 à
15
144.6
152.3
149.8
152.9
15 à 16
151.3
158.2
»
159.6
15 à
16
148.8
155.2
»
154.2
• Quételct ayant mesuré lis mêmes sujots, fii très petit nomlire, d'année en année,
le résultat ab.solu ne peut l'tri- comparé aux antres tables, qui sont dressées sur de.-;
individus compris entre deux années consécutives : 1 à 2, 2 à 3, etc.
VAlUOT ET CHAL'MET.
TAULES DE CROISSANCE DES ENFANTS PARISIENS
59
N'ûici iniinlenant un tableau coniparatif. tt'l.ilaiil mis rtsuHaU, n-ux
de Quételet, de Bowditch et de Holch.
I^es chilTres que nous avons obtenus par le calcul de nos moyennes,
d'une année k l'autre, sont bien comparables à ceux de Bowditch et de
Rotch en Amérique, mais non à ceux de Quételet, qui ont fait autorité,
cependant, jusqu'à ces dernirires années, parmi nous.
Huételet mesurait ses sujets à ilate fixe, après une année entière révolue ;
il ne dit pas d'ailleurs exactement sur combien d'enfants portaient ses
mensurations, en général, il prenait dix ou vingt sujets types. Mais ce que
n«jus savons, c'est qu'il a mesuré des enfants belges à Bruxelles et que
les cbilVres qu'il a notés ne sont pas rigoureusement applicables à des
enfants parisiens, ni à des l'rancais.
Tableau C
hiiUquaut ini centimètres) les yna.ritna et minima de In tnillr dans les
inensin-ations dr Variât et Chnumel.
(.ARÇONS
FILLES
Af!f-S
Minima
Maxima
Moyennp
Minima
Maxima
Moyenne
1 i\ 2
68
84
74.2
65
84
73.6
2 à 3
72
93
82.7
71
92
81.8
3 à 4
81
101
89.1
75
99
88.4
4 à 5
8r.
107
96.8
84
111
95.8
5 à 6
91
117
103.3
88
117
101.9
6 à 7
95
125
109.9
94
123
108. i)
7 à 8
99
127
114.4
95
128
113.8
8 fi 9
102
132
119.7
107
133
119.5
9 à 10
111
141
125.(1
111
142
124.7
10 à 11
118
141
130.3
115
145
129.5
11 à 12
121
151
133.6
119
151
1.34.4
12 ri 13
122
155
1.37.6
121
159
141.5
13 à 14
128
166
145.1
128
167
148.6
14 ;. 15
136
171
153.8
131
167
152.9
15 h Ifi
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159.6
142
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154.2
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Taille. — Gamnis. —
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de 8 à y
ans
ans
aits
ans
ans
ans
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< 22 sujets
lOti sujets
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•174 sujets
16o
sujets
iS6 sujets
176
sujets
491 sujets
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68
7
72
1
82
4
86
1
92
3
100
2
102
4
104
3
70
16
74
3
84
4
88
5
94
3
102
7
104
4
106
2
72
21
76
3
86
14
90
8
96
12
104
16
106
6
108
4
74
27
78
6
88
15
92
19
98
12
106
20
108
14
110
3
76
16
80
16
90
12
94
22
100
12
108
29
110
15
112
10
78
12
82
12
92
10
96
31
102
28
110
26
112
20
114
13
80
15
84
25
94
16
98
24
104
26
112
18
114
26
116
17
82
5
86
18
96
14
100
23
106
30
114
19
116
25
118
18
84
3
88
15
98
11
102
23
108
21
116
7
118
24
120
30
9(1
5
100
6
104
8
110
10
118
9
120
17
122
23
92
2
102
1
106
5
112
3
120
2
122
11
124
21
108
5
114
116
118
2
2
1
122
1
124
126
128
4
4
2
126
128
130
132
23
13
8
3
VAlIliiT KT lUIAL'MET. — l Alil.KS l»E CKnlSSA.NCE DES KNFA.M> I'AU1>IEN> Gl
Composition (les Sénés.
de 9 à 10
1")<i sujols
112
114
116
118
120
122
124
126
128
130
132
134
136
138
140
1 2
19
18
23
19
17
18
10
3
5
1
3
1
lie 10 à 11
ans
159 sujols
h-
.o
■ —
=
f-
118
')
120
5
122
fi
124
11
126
19
128
22
130
132
134
136
138
140
142
144
30
22
18
8
9
3
3
1
Je 11 à l2
ans
Uii sujets
122
124
126
128
130
132
134
136
138
140
142
144
146
148
■>
2
10
15
11
23
20
27
16
15
7
10
5
1
■ lo 12
à 1:5
ans
l(>6 sujets
1
■S
s
S
7r.
122
1
124
2
126
5
128
4
130
7
132
9
134
17
136
138
140
142
144
146
148
15(1
152
154
25
19
12
26
20
10
7
(I
l
l
do l.'U 14
16,1 sujets
12^
130
132
134
136
138
140
142
144
146
148
150
152
154
156
158
160
162
164
166
do lia lo
ans
ton sujets
M
19
14
18
14
17
11
4
7
2
3
2
l
136
1
138
1
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2
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11
152
12
154
17
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1()()
1
162
3
164
«,1
166
4
168
2
170
1
do iuà li>
ans
100 sujets
148 3
150
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VARIOT ET CHaIMET. TAlU.E- HF. CROISSANCE DE» ENFANTS PARISIENS t>3
Composition des Séries.
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64 IH J\NviEit p.>on
Les tables tle (Juélelet doivent èlre cuiisidéiees comme inexactes dans
les années (jui précùdent la puberté, aussi bien chez les filles que chez les
garçons. Il y a, h ce moment, une poussée brusque de croissance, qu'il a
méconnue, parce qu'il était dominé par des idées théoriques sur la régu-
larité uniforme des manilestations de cette force.
En jetant un coup d'œil sui- les chiffres obtenus par Bowditch et par
llûtch, on verra t(ue nos chilîres de 10 à i5 ans se rapprochent sensible-
ment de ceux déjà relatés par ces obsiM'vateurs, quoi(ju"il apparaisse que
la poussée de la puberté soit plus précoce et plus forte dans nos climats.
Nous donnons, dans deux tableaux, la composition de nos séries; le
maximum de fréquence avoisinant généralement la moyenne obtenue par
le calcul, on pourra juger rapidement si la taille d'un enfant s'éloigne
plus ou moins de la normale parle nombre des sujets qui appartiennent
à sou groupe
Four rendre la lecture plus facile, nous a^vons pris comme module de
sériation ileuu- centimètres.
Discussion.
Di" Papillault. — Les résultats auxquels sont parvenus MM. Variot
et Chaumet sont fort intéressants, mais il est regrettable que la même
technique n'ait pas été suivie dans toute la série ; en effet, les enfants les
plus jeunes ont été mesurés couchés et les autres debout. Les résultats ne
sont plus comparables entre les deux groupes.
Je m'efforce d'ailleurs de répandre le plus possible la technique que
j'ai préconisée il y a plusieurs années, dans mon mémoire : ïHomme
moi/en à Paris. Notre collègue, M. Lapicque, l'a adoptée depuis lors,
et M. Viola, à Padoue, l'emploie également dans ses recherches d'anthro-
pométrie appliquée à la clinique. Quand un procédé est mauvais, on ne
doit pas s'y tenir, sous prétexte qu'il y a déjà de nombreuses moyennes
fondées sur lui, puisque ces moyennes elles-mêmes ont une faible valeur
et j'ai suffisamment démontré quelles fausses indications donnent la taille
debout, pour que j'y revienne ici. En chimie on remplace un procédé
d'analyse par un nouveau dès que ce dernier semble plus précis, sans se
préoccuper du nombre d'observations prises sur le premier. Le progrès
est à cette seule condition.
M. Manouvrier. — Un est obligé de mesurer les cuiavres couchés et il
peut être avantageux dans certaines occasions ou pour l'élude de certaines
questions de mesurer aussi les sujets vivants dans cette position couchée.
Mais ce n'est pas une raison pour abandonner la position debout adoptée
jusqu'à présent dans la technique anthropométrique.
Il y a des avantages et des inconvénients dans tous les systèmes. Il ne
faut pas sans nécessité introduire dans une technique enseignée depuis
50 ans et suivie par une foule d'investigateurs des changements qui, pour
être favorables à un certain uombie de comparaisons, en gêneront d'autres
L. (JAPITAN. — l'NK ColCHK DE S[I.E\ TAILLÉS fj."
l'n beaucoup plus grand nouibre. Les nécessib's de la slatisti(|ue iinposenl
une grande réserve dans l'innovation en anthropométrie.
J'ai insisté quelque peu là-dessus il y a quelques années dans la Revue
• le l'Ecole d'Anthropologie i Généralités sur t'Authroponn'trie, 1900). J'ai
'xposé vers la même époque les résultats de quelques recherches person-
nelles sur la différence entre la taille debout et la taille couchée, ainsi que
l'allongement volontaire momentané de la taille ' par redressementdes
courbures du tronc qui s'etïacent plus ou moins dans le décubitus dorsal.
i'e sont des indications sur la question. Je rappelle aussi que M. Godin,
au début de ses importantes recherches sur la croissance ^ imagina d'adop-
ter la position couchée (en 18yfii mais qu'il y renonça après un essai
-l'-iieu.v puui' levenii" à la pusiliun classique. A uiuu avis aucune position
n'est il sacrifier ,111 protil de l'autre. Il y a des cas et des recherches pour
lesquelles la position couchée est nécessaire ou utile. En général la posi-
position debout est à conserver.
M. Hluch. — Je dois rappeler que la taille mesurée sur un sujet debout
n'est pas égale à celle qui est mesurée lorsqu'il est dans la position
horizontale. Ainsi Plitzner, comme d'autres observateurs avant lui, indi-
quait une dilTérence de I à 2 centimètres en plus pour la lonaueur du
corps prise sur l'homme vivant couché à plat.
11 en est de même sur le cadavre qui a fait l'objet principal de ses
mensurations '.
Il s'agirait maintenant de savoir si un phénomème semblable se produit
chez les enfants.
UNE COUCHE DE SILEX TAILLÉS, USÉS, SUR LA TERRASSE MOYENNE DU MOUSTIER
Par L. Capitan.
Depuis les fouilles anciennes de Lartet et Christy, de de Vibraye,
Massénat, etc , la station classique du Moustier ne fournissait plus sur ses
terrasses que des pièces erratiques. Les fouilles exécutées au commence-
ment de cette année par le lieutenant Bourlon, sur la terrasse moyenne,
en avant de l'ancien abri lui ont fourni un nombre considérable de pièces
et lui ont permis de constater l'existence de plusieurs foyers superposés
avec industries variables. (Y. Société préhistorique de France, juin i905).
Dans le fond de la tranchée, .M. Bourlon avait signalé une petite couche
de silex roulés, et, d'après lui, sans formes définies, ni caractères de taille,
parfois agglomérés en brèche assez dure. Or, au mois de septembre de cette
' Association française pour l'avancement des sciences, 1897.
» Paris, Maloino, 1903.
* Pfitzner. — Social aathr. Studien. Zeitschrift f. Morpli. a. Ant/tr., 1901.
aoc. û'antorop. 4906. u
i;t;
IH j\.\vii:ii iîxh;
.iiiiicf, jai |tu cunslalei', dans une nouvelle lruncli<'e exéculéepar mon éiôve
et ami le docteur Clerj^'eau, la superposition suivante, identique h celle que
Peyrony, observant avec le lieutenant Bourlon, avait relevée au com-
mencement de l'année; (très analogue d'ailleurs à celle publiée par
Bourlon).
0,80 c
Sable rouge avec industrie magdalénienne (renne et cheval).
0.10 c.
Couche sableuse brun clair ; puintes inoustériennes à retouches
très lines.
0,40 c.
Couche brun foncé sableuse avec industrie moustérienne typique
très développée; grands et beaux racloirs, pointes fines, disques et
plusieurs belles haches de type acheuléen.
(1.50
à 0.80 c.
Magma de silex très usés, souvent agglomérés en une hrèch.
rougeàtre compacte.
0,10 r.
.'^abI»' brun foncé avec petits instruments; nombreux éclats
d'usage et quelques haches en amande (renne et cheval).
0.10 c.
Sable gris-clair (même industrie que dans la couche sus-ja-
cenle).
Je ne m'occuperai ici que de la couche de silex usés.
Parmi ces silex, il en est un grand nombre qui sont, en effet, des frag-
ments informes de silex noir local, très usés, rarement en rognons.
Mais en examinant soigneusement un grand nombre de ces cailloux, on
peut arriver à constituer une série de pièces plus ou moins usées mais qui
sont tantôt des éclats simplement écaillés, rappelant les silex des malaxeurs
de Mantes, tantôt des éclats authentiques avec bulbes très nets et parfois
retouches évidentes. Enfin, pour quelques pièces, il s'agit de véritables
instruments (pointes, disques ou racloirs, souvent bien retouchés, tous
indiscutables et tous usés plus ou moins). C'est là, en somme, un dépôt de
foyer très analogue aux autres sus et sous jacents et non des cailloux roulés
.venus de loin. Par places, ces silex mélangés de quelques pièces pas ou
à peine usées et de fragments osseux, sont réunis par un ciment calcaire
fort dur et le tout constitue une vraie brèche. Les silex des couches au
dessus et au dessous ne sont nullement usés.
Comment expliquer cette particularité curieuse? La première hypothèse
que l'on peut faire, c'est que, dans une de ses crues, la Vézère est montée
jusqu'à ce niveau (lïî mètres environ au dessus de son niveau actuel), et
que, c'est elle qui a usé ainsi ces silex faisant partie de foyers alors à la
I.. l'.Al'lTAN. — UNE ilolCHE DE sILEV TAlLLé> (17
surfact,' (lu sol, «-n les malaxant, les frottant et les usant avec le sable en
suspension.
Mais il n'est pas possible d'admellie que la Vézère ait pu avoir pareille
crue, à moins toutefois qu'elle n'ait coulé à cette époque à un niveau nola-
blotnent plus élevé qu'aujourd'hui. On reviendrait ainsi h l'opinion dos
anciens auteurs qui considéraient le creusement de la vallée de la Vézère
comme non complètement terminé à l'époque moustérieone. Et alors on
expliquerait ce fait dobservatiun déjà ancienne, à savoir que tous les
gisements moustériens de la vallée de la Vézère sont toujours à une assez
grande hauteur : au moins 10 à 1:2 mètres au dessus du niveau actuel de
la Vézère et souvent bien plus hauts. L'observation de ces silex de foyers,
usés par le passage d'une eau courante chargée de sable corroborerait
donc cette hypothèse. C'est celle qui paraît la plus vraisemblable.
Il y a pourtant une objection. Il est po.ssible qu'à cette époque deux
phénumènes locaux aient pu se produire. Dans le premier, les choses se
seraient passées ainsi : un cours d'eau souterrain a pu se faire jour à une
petite distance de ce point qui faisait peut-être alors partie d'une caverne
ou d'un abri surplombant, aujourd'hui démantelé. Ce cours d'eau pas-
sant sur les silex de ce foyer a pu les ussr, les rouler et leur donner cet
aspect. C'est Ik une particularité qu'on observe dans maintes cavernes de
la région. Rien pourtant dans l'observation des lieux ne démontre le bien
fondé de cette hypothèse.
Dans une seconde hypothèse, on pourrait admettre que dans la petite
vallée latérale qui, précisément s'ouvre en ce point, il existait à l'époque
moustérienne un cours d'eau torrentiel ayant pu produire ces modifica-
tions de la surface des silex ; mais dans cette hypothèse encore, il fau-
drait admettre un niveau de la vallée latérale beaucoup plus élevé
'|u'aujourd'hui.
En somme, on le voit, la constatation de cette couche de silex taillés,
si usés, intercalée entre les foyers intacts de la terrasse du Moustier,
constitue un intéressant petit problème et permet d'émettre l'hypothèse
d'un niveau élevé de la Vézère, dont ce point serait un témoin et consti-
tuerait une terrasse quaternaire moyenne de la Vézère. D'ailleurs les phé-
nomènes de creusement et d'alluvionnement quaternaires de la Vézère sont
fort compliqués. Cette conclusion ne serait nullement en désaccord avec
ce i]ue montre leur observation.
MM. uE Mijhtillkt. Hamy et Atgier font quelques remarques à ce sujet.
lis l®"^ I KVltlK.lt l'.KKi
819e SÉA^CR. — le' Pévrier 1906.
FnÉSIDENCE DE M. Hamy.
M. Vem.neai donne quelques renseignements supplémentaires sur le Congrès
d'Anthropologie et d'Archéologie préhistoriques de Monaco.
M. Ke.nk Woh.ms invite les membres ilo lu Société à participe!" aux travaux,
du quatrième Congrès colonial français, qui doit se tenir en juin 1906. à
l'Ecole des Hautes Etudes Commerciales (108, boulevard Malesherbes, Paris),
sous la présidence de M. François Deloncle, député de la Cochinchine.
Ce Congrès comprend notamment une sedion de sociologie et d'ethnographie
coloniales, qui a cette année pour président d'honneur M. K.r. Hamy. pour
président M. René Worms, pour vice-président M. Adrien de Morlillet. Elle a mis
à l'ordre du jour ilc ses séances de 1906 l'étude des populations indigènes de
Madagascar.
MON OPINION VRAIE SUR UN POINT DE MORPHOGÉNIE OSSEUSE
Par le D» G. Papillault.
J'ai publié en 1901 dans la Hevue de l'Ecole d'Anth7'opolo(iie un article
intitulé : Essai sur les modifications fonctionnelles du squelette. J'y
signalais particulièrement l'abus que l'on a fait en morphogénie osseuse
des explications purement mécaniques ; jusqu'alors la traction musculaire
expliquait toutes les saillies osseuses, la pression déterminait toutes les
fossettes. Je choisis un certain nombre d'exemples où les rapports étaient
renversés, des tractions musculaires continues s'exerçaient précisément
en des points où la surface osseuse était déprimée.
L'existence de ces fossettes ne pouvant s'expliquer par des causes
mécaniques, j'invoquai des actions bio-chimiques exercées par le muscle
sur l'ossitication. Mais ici ma pensée a été mal comprise.
Le D'- Regnault {Bull. Soc. Anth.. 1901, p. 614 et 1905, p. 255),
m'objecte que le muscle ne s'insère pas directement sur l'os et le
D' Anthony, dans un article où j'ai le plaisir de lui voir accepter mes
principales conclusions {Bull. Soc. Anth., 1903, p. 125) me fait la même
objection, k Le muscle, écrit-il, n'est donc jamais en contact avec les os.
et la phagocytose, par conséquent, ne peut rien expliquer.
On semble donc admettre que j'ai basé ma théorie sur une action
directe de la substance du muscle en contact immédiat avec l'os. On
comprendra que je ne puis laisser passer cette interprétation, puisque
j'avouerais avoir cru à des rapports complètement erronés entre le muscle
et l'os où il s'insère. Je cite donc le passage essentiel de mon travail
p. 78, pour empocher qu'une légende défavorable se forme sur lui.
G. PAPILI.AULT. — MURPHOI.KME OSSEISK HU
.. Toutes les cellules de l'organisme sont, selon l'expression de W.
lioux, en lutte perpétuelle les unes contre les autres. Celles qui pré-
sentent les échanges les plus actifs prennent largement leur place aux
dépt-ns des autres. Ce sont, comme partout, les plus fortes (jui l'emportent ;
mais la force n'est pas ici une substance mécanique, les plus forte- sont
les plus vivantes, les plus actives, celles dont les composés albuminoïdes
subissent les compositions et les décompositions les plus rapides et les
plus intenses.
« Cette activité intracellulaire peut avoir des causes pathologiques et
constituer dans l'organisme un accident destructeur. Qu'un épithélium
se mette ainsi à proliférer, il engendrera des éléments jeunes qui dévore-
ront tous les autres tissus. De même, si le tissu cellulaire est irrité par
im agent quelconque, que ce soit une infection générale comme la
syphilis, li" rhumatisme, etc., ou que ce soit une cause locale, un corps
étranger, un anévrisme, une fracture, des éléments jeunes se forment,
qui vivent aux dépens des cellules normales, et les font disparaître bientôt.
a Si maintenant nous envisageons un organisme normal, nous consta-
tons que ces ditTérents tissus ont une activité propre très différente, sui-
vant laquelle on pourrait les sérier assez facilement. L'os, les cartilages,
les tendons, les aponévroses, tout ce qui forme en un mot le squelette,
possède une activité fonctionnelle très faible. Leur fonction est de sup-
porter, de soutenir les autres éléments, autour desquels ils se disposent
et qui les plient à leurs besoins. Les fibres musculaires ont au contraire
des échanges extrêmement intenses. Constamment excitées par les influx
nerveux, qu'elles soient en état de tonicité ou de contraction, elles agissent,
elles absorbent, elles dépensent dans des proportions énormes; on peut
donc être certain que leur présence seule suffira pour empêcher le tissu
osseux de se former.
« Or, nous avons vu que les faisceaux supérieurs du masséter ont une
longueur rigoureusement déterminée par le mouvement de la mandibule ;
leurs extrémités resteront donc en contact avec l'os, »ii plutôt arec If périoste .
Klles agiront vis-à vis de lui comme un tissu .Millammé agirait sur les fibres
musculaires elles-mêmes, elles absorberont les sucs nutritifs, apiiaurri-
ront les éléments actifs du périoste, affaibliront d'autant sa fonction ostéofjène, el
l'os ne présentera à leur niveau qu'un accroissement très faible ou même
quelquefois nul. >^
.le mets en italiques les passages les plus expressifs. Ils convaincront
Mûrement mes deux collègues que ma pensée était bien la suivante : Le
uuisole étant parfois, pour des raisons que j'ai déterminées, en contact
avec le périu^te par une de ses extrémités, agit sur la couche osféogène
de ce dernier, et imbibe son action ossifiante. Les produits chimi(|ues
décrétés par ce muscle et déversés par lui dans le milieu voisin, traversent
facilement soit par exosmosc, soit par les voies circulatoires, la couche
nitreuse du périoste, et vont troubler les éléments ostéogènes voisins.
•l'ai émis cette hypothèse pour expliquer des faits sur lesquels jai été
le premier, je pense, a attirer l'attention. Personne n'a pu, à ma connais-
70 \" FKvniF.R 1006
sance, en donner une autre explication. J'ignore quel sort lui réserve
l'avenir, mais il nie semble que beaucoup de faits parlent en sa faveur.
Les sucs des glandes thyroïdes et pitaitaires modifient à de grandes dis-
lances la croissance des squelettes, on comprend a fortiori que les poison-^
sécrétés par le muscle agis.sent sur l'os dans un voisinage immédiat,
quand ce ne serait même que les substances acides dont la présence em-
pêcherait les dépôts calcaires de se former localement.
.le ne sais, je le répète, comment cette hypothèse supportera l'épreuve
des expériences futures, je tenais du moins à bien préciser sa portée,
puisque je n'avais pas su, dans mon premier article, la rendre suffisam-
ment claire à ceux (]ui m'ont fait l'honneur de la discuter.
contribution a l'histoire des megalithes
Par m. g. Hervé.
-M. (i. Hervé entretient la Société, dans une brève communication, d'un
document ayant jusqu'ici, semble-t-il. passé inaperçu, encore que de
nature à appeler l'attention des préhistoriens et des traditionnistes pour
qui ce que l'on peut appeler la .survivancp des cultes tnégalithiques est sujet
d'intérêt.
Les faits relatés dans ce document, et qui remontent au xv^ siècle, nous
fournissent tout d'abord une des premières mentions précises que l'on
possède de monuments mégalithiques, définis a la fois par leur situation
et par leur espèce. Or, on sait combien sont rares, antérieurement au
xvn" et presque même au xv!!!"^ siècle, les observations de ce genre; car
les canons des plus anciens conciles (vio-viiio siècle) se bornent d'une
façon générale à jeter l'interdit sur les pierres qu'honorait la superstition
ou auxquelles elle acquittait des vœux, mais ils n'en spécifient ni l'em-
placement ni les caractères.
D'autre part, si le Folk Lore français est intiniment riche en traditions
où les pierres consacrées par la foi populaire se trouvent associées
à l'existence des lutins et des fées, au culte du diable, à la présence et la
recherche de trésors cachés, ce que Ion connaît de ces croyances, de ces
pratiques superstitieuses, a presque toujours été rapporté par ouï-dire,
après avoir passé de bouche en bouche durant des séries de générations ;
et l'on compterait les cas oii des témoins oculaires, bien plus encore les
acteurs eux-mêmes sont venus raconter les scènes et cérémonies secrètes
auxquelles ils ont pu ou assister ou prendre part.
C'est précisément un récit fait dans de telles conditions que nous livre
la procédure suivie à Nantes, en 1440, contre Gilles de Laval, maréchal
de France et sire de Rays.
La légende, qui s'est emparée de bonne heure de ce sadique et effroyable
c. HERVK. — t:(»^f^n[B^Tlo^• \ i. iiisthihk uk< MKUALirtiK- 71
personnage, lui a sans doiilf lipauroup pi-ôlé. Peut-être succomba-t-il,
ainsi que M. S. Heinach l'a récemment soutenu, sous des acuisalians
que la justice n'avait pas été seule à inspirer. Toujours est-il que ses
avHux mémps pt ceux fie sps complices, s'ils n'ont point été dénaturés,
nous le montrent dûment convaincu d'opérations de sorcellerie, de
magie, de démonolàtrie. Comme beaucoup de ses contemporains, Gilles
de Laval croyait à l'action des puissances infernales; il entretenait,
attachés à sa personne, des astrologues, des nécromants et invocateurs
(dont le plus célèbre fut l'Italien François Prelati, de Florence); il se livrait
en leur société à l'évocation des démons et à la poursuite de l'or.
Un de ses complices et artidés, condamné avec lui et qui avec lui subit
le supplice, Etienne Cornillaut dit Pontou, fit à ce sujet, devant le tribunal
présidé par Pierre de l'Hospital, grand juge de Bretagne, des déclarations
circonstanciées. Elles ont été recueillies, et nous donnent à lire, entre
■tutres, ce qui suit :
« — Ne iùtes-vous pas témoin (I'huIits in.iléliics et invocations diaboliques?
demanda le président de Bretagne.
« — Si fait, messire ; car monseigneur (Gilles de Rays) ordonnait que je
restasse le plus possible à ses côtés... Jetais en peine dassister à une invoca-
tion, pt priai maître François (Prelati) de m'avertir, ce qu'il fit de l'aveu de
monseigneur. Une nuit, par un grand vent, monseigneur et maître François
eurent fantaisie d'invoquer certain démon qui tient sous sa puissance les trésors
rachés : nous partîmes de Macheooul vers la mi-nuit, rouverts de <^.apes de pluie,
oar il viMitait o\ pleuvait à merveille ; nous allâmes ainsi pn an pré où sont
rlr f/randes pierres levées. Maître François traça un cercle magique avec un
nutelas trempé dans le sang, et planta ledit coutelas au milieu, la pointe
<\\ haut ; après quoi il nous dit de venir dans le cercle, pour éviter l'atteinte
lies démons, et il alluma une torche, en appelant Barion et autres diables.
J'eus merveilleuse peur à ces cris, et j'aurais fait le signe de la croix, si mon-
seigneur et maître François ne m'eussent eonjun-de n'en rien faire, sous peine
de nous perdre tous. Barion el les autres ne vinrent pas loutefois à l'appel,
i-l maître François prétendit que c'était moi qui les en empèrbais. eoiiime ayant
liaiiie et rancune contre eux. Donc, je ne vis et ir<'nteiidis rien, si ce nest
le tonnerre et la pluie qui redoublaient. Mais. T'iaiil sorti du ceicb' et avant
éteint la torche, je sentis un grand cliien qui passait dans mes jambes, et qui
me lit presque choir. Maître François assura que ce cliien n'était autre <|ue
Harion. et qu'un trésor devait exister caché dans ce pré... » '.
En résumé, il y a là, raconté par un assistant, un cas type de cérémonie
mégalithique : scène, un lieu désert, planté de menhirs, de pierres levées;
la cérémonie s'adresse au diable ; la découverte d'un trésor caché en est
|p but.
Reste l'authenticité du document. .M. Hervé, naturellement, s'en est
préoccupé. Quoique les textes cités par Paul Lacroix (P.-L. Jacob) repro-
• P.-L. Jacob. — fJuriosités de l'histoire de France (2« série, Procès célèbres), 1858.
p. 84.
72 1" FKVRIKIÎ lOOfi
duisent « la copie qu'Anne de Bretagne avait fait faire dans les archives
de Nantes, et qui existe encore h la Biblioth<^que (Nationale), n" 8357
de l'ancien fonds » ; quoi qu'ils aient, en outre, pour garant « un extrait
fait avi^c soin sur les originaux, détruits en partie à l'époque de la Révo-
lution, et beaucoup plus circonstancié, beaucoup plus fidèle aussi, que
la rédaction abrégée due aux secrétaires d'Anne de Bretagne ' », une
demande a été adressée, grâce ii l'obligeance de M. Paul Sébillot, à M. l'ar-
chiviste de la [joire-lnférieure. qui a bi^n voulu promettre de vérifier sur
les pièces originales.
Discussion
M. Marcel Baudouin. — Je me permets de faire remarquer que les cita-
lions de Mégalithes dans les documents historiques ne sont peut-être pas
aussi rares qu'on le croit. .J'en ai découvert en assez grand nombre déjà,
principalement dans les vieilles chartes; on en trouvera d'autres. Les
mentions de cet ordre deviennent plus fréquentes encore dans les relevés
de pi-opriétés à partir du xviie siècle. Il suffit d'y chercher avec soin.
La trouvaille de M. Hervé est fort intéressante; mais il est probable
que les « grandes pierres levées » en question devaient être assez éloignées
de Machecoul, situé d'ailleurs sur le bord d'un marais où il ne peut y avoir
de mégalithes S puisqu'il est de formation post-romaine (Marais Breton,
ancien golfe de Machecoul). En eiïet, on n'en connaît pas aujourd'hui
dans celte commune à ce que nous sachions; et M. P. de l'Ile du Drenem
n'en cite aucun dans son ouvrage classique ■''. Il est vrai que ces pierres
(menhirs ou dolmens), ont pu être détruits depuis l'époque de Gilles de Retz.
Il y a, par contre, des mégalithes dans les communes voisines (Ste-Pa-
zanne, Port St Père, etc.
xM. IIionvÉ dit que la légende de Barbe-Bleue, aussi bien que la
validité des accusations portées contre (îilles de Rays, reste étrangère
à sa communication. Toute la question est de savoir si la scène de l'évo-
cation dans un champ de pierres levées a été exactement rapportée par
P. Lacroix; rien, jusqu'à présent, ne permet d'en douter. (Juant à la dif-
(Irullé de retrouver, aux environs de Machecoul, un lieu répondant à la
dcsonptiijn, il faut bien reconnaîtra que les pierres, depuis quatre siècles
et plus, ont eu le temps d'être détruites.
M'. Paul SÉbiLLOT. — La communication de M. le U' Hervé est fort inté-
ressante : elle ajoute une mention relativement ancienne à celles assez
rares qui s'appliquent avec certitude à des dolmens, des menhirs ou des
* Op cit , p. .3.
- Il est dit : « Pierres levées dans un pré ». Mais ce pré ne devait pas être dans le
Marais.
3 P. DE l'Ile du Drenem. — /)/rf. du Hi-ii. Avchénl. de la Loirc-Inferieure, a
Nantes, ihiST, iii-8', toine 1.
DESPLAGNES. — [.E PLATEAl CENTRAL NIGÉRIEN 73
alignements. Les écrivains antérieurs à la lin du xvui" siècle qui parlent
des superstitions et des cultes qui s'attachent aux pierres, ne s'expriment
pas toujours avec assez de clarté pour que l'on sache au juste s'il s'agit
de mégalithes véritables ou de gros blocs naturels qui sont l'objet de
croyances très apparentées, parfois même identiques. D'autre part, si les
réunions de sorciers et de sorcières, leurs danses où leurs divers ébats se
tiennent assez fréquemment dans le voisinage des pierres légendaires, les
opérations de sorcellerie du genre de celle qui est décrite dans le passage
dont il vient d'être donné lecture, sont à ce point rare que dans les nom-
breuses recherches rétrospectives que j'ai faites pour réunir les matériaux
du Folk-Lorp dr France, dans le dépouillement du traité de démonologie et
de sorcellerie, je n'ai pas rencontré d'exemple aussi caractérisé que celui
qui est rapporté dans le procès de Gilles de Retz.
LE PLATEAU CENTRAL NIGERIEN
I'ar .m. le Lieutenant Desplagnes.
Dans la partie moyenne de son cours, après avoir reçu le Bani sorti
comme lui des plateaux de la (iuinée et du Libéria, le Niger décrit un
grand arc de cercle vers le Nord, autour d'un haut massif rocheux véri-
table plateau central soudanais.
Ce sont les contreforts N.-E.) de ce plateau que le fleuve a rompu et
franchi, ditïicilement dans la branche orientale de son cours pour se
frayer un chemin vers le golfe de Guinée au Sud; tandis que ses eaux
s'étaient librement el largement étalées dans la plaine, à TOuest, au pied
des falaises rocheuses avant d'atteindre le point culminant de sa course
dans le Nord vers ïombouctou.
Dans cette immense [)laine symétriquement et de chaque côté de son
lit principal, les inondations emplissent les cuvettes du sol et forment
deux belles régions lacustres qui retiennent les eaux fertilisantes.
Dès la première année de notre installation dans le Nord'de la Boucle
après la prise de Tombouclou la région lacustrp du Nord -Ouest dont
Goundam occupe le centre fut rapidement connue, étudiée et relevée car-
tugraphiquement, nos colonnes ayant été obligées de la parcourir en tous
sens pour assurer la soumission des Touaregs.
Au contraire, pendant cette période de conquête et d'organisation, la
région lacustre du Sud-Est s'étendant au pied du plateau de Bandiagara,
fut un peu négligée car elle faisait partie des États d'un de nos grands
tributaires, le fama de .Maçina.
Aussi, jusqu'à ces dernières années, elle n'était que vaguement connue
par les itinéraires de Barth et les reconnaissances de quelques officiers.
Chargé par l'.Vcadémie des Inscriptions et Belles-Lettres de rechercher
~\ 1" KKVMIKR 19()fi
les vestiges il'une anliquf civilisaliun pr/'hisliMinue dont les munumenls
s'élèvent nombreux ilans lonle celle région Nord, j'ai pu, pendant ces
trois dernières années, relever topographiquement ce bassin lacustre
ainsi que le plateau rocheux qui en lorme le rebord Sud, et pendant ce
voyage d'étude j'ai recueilli quelques documents intéressants tant au
point de vue géographique qu'ethnographique et économique; aussi,
vais-je résumer rapidement les dillérenls aspects de cette région afri-
caine.
Le système montagneux du massif central de l;i boucle nigérienne
se trouve constitué par un énorme soubassement de grès généralement
ferrugineux orienté S.-U. N.-E. faisant suite aux plateaux granitiques du
Haut-Dahomey et dont les ramifications vont dans le N.-E. se ressouder
aux plateaux de l'Adrav oriental en plein Sahara.
Au-dessus de ce soubassement se dressent des séries de plateaux, mas-
sifs rocheux, tables, pitons, séparés les uns des autres par de profondes
cassures. Ils dominent de 4 à 600 mètres les plaines environnantes, for-
mant de véritables masses chaotiques érigeant brusquement dans le ciel
clair leurs silhouettes découpées, leurs rochers monstrueux et leurs pics
isolés.
Toutefois, le rebord des grands plateaux se présente le plus souvent
sous la forme de murs abrupts surplombant une série d'éboulis escarpés
d'où le nom de Falaises de Bandiagara, de Hombori, etc, qui leur a été
donné.
La partie supérieure de ces plateaux est traversée par de fortes rides
rocheuses toutes dirigées vers le N.-E. au pied desquelles coulent des tor-
rents dans des ravins encaissés.
L'aspect général de ces provinces montagneuses rappelle assez bien nos
causses du Quercy.
Tout ce massif délimite le rebord sud de la grande cuvette lacustre
nigérienne, reste d'une mer intérieure dans laquelle se jetaient les grands
Oueds sahariens ainsi que le démontrent les documents rapportés par
M. E. F. Gautier au rdour de son récent voyage (Planclie 1, n" 2, aspect
de la montagne).
Actuellement, le Niger ayant rompu ses digues naturelles et s'étant
creusé un lit à travers les seuils rocheux de l'Est, il ne reste de ce primitif
bassin intérieur que la double série des grands lacs nigériens au Nord et
au Sud du fleuve qui prolongent et retiennent une partie de l'inondation
au milieu des sables.
En effet, seul le Niger avec ses inondations, ses dérivations et ses
déversoirs, constitue tout le régime stable des eaux de la région ; car les
masses liquides jetées dans le pays par les tornades de l'hivernage n'ar-
rivênt pas à i;onstituer un régime régulier. Elles forment des mari-
gots torrentueux dans la montagne, s'épandant brusquement dans la
plaine où elles se voient absorbées par les terrains sablonneux, ou rete-
nues temporairement par les cuvettes naturelles formant des mares de
peu de durée.
DESPLAGNES. — I.E l'I.ATEAl (.ENTKAL NIGÉRIEN 75
Toutes ces eaux d'orages sont divisées par le plateau centrai nigérien,
qui leur sert de ligne de partage, entre les deux branch<'> du Nigt^T -.mi
Nord et à l'Est et la V'olta au Sud.
Dés la fin de septembre, grossi du Bani collecteur des torrents d'eau
que l'hivernage a déversé dans la région forestière, le Niger couvre de
ses inondations toutes les provinces riveraines de la région qui ressem-
blent alors k de vastes prairies d'où émergent sur les îlots de sable les
paillotles des villages entourés de leurs palmiers de Thébaïque.
Kii novembre et en décembre l'eau se cherche, par d'innombrables
canaux entre les dunes, un chemin vers les bas-fonds dp la cuvette et
forme alors îles chapelets de lacs.
En janvier la crue se termine et les eaux refluent vers le Niger, laissant
à découvert des terrains immédiatement cultivables ; autour d'une réserve
d'eau qui subsistera toute l'année.
Dans la région Sud, au pied de la Falaise, ces lacs sont au nombre
d'une douzaine formant deux groupements principaux ayant chacun leurs
canaux de remplissage particuliers. Cependant ils sont reliés entre eux
par un large marigot, le Foko.
Ces lacs sont d'abord le Kararou, l'Oumi, l'Haougondou, le Nyamga'i et
le Dû qui forment le premier groupement lacustre au pied de la Falaise,
recevant dès octobre les premières eaux de la crue; dès que son remplissage
est terminé, au milieu de décembre, il se déverse par le Foko dans le
second groupement (Bado, (îarou-Gakoré, Tinguéré, Titolaouen, Kabongo,
Haribongo, etc ..) qui lui-même était en relation avec le grand fleuve et
la zone inondée, aux environs d'El-Oualdji près de Tombouctou.
Malheureusement le régime des eaux du Niger étant très instable, ces
immenses cuvettes ne sont complètement remplies qu'aux années de
grandes inondations. Aussi, lorsque la crue vient a manquer, ces lacs ne
sont pas réalimentés, et peu à peu comme les « Daouna « du nord de
(joudam, ils se dessèchent complètement et sont perdus pour l'agriculture
jusqu'à ce qu'une nouvelle grande crue vienne les féconder. (Plancy 1,
n" 3, types de pécheurs Bozos, descendants des primitifs nigériens.)
Malgré cette instabilité, l'immense plaine nigérienne toujours bien
irriguée, merveilleuse zone de pâturages, et riche terre à céréales, fut de
fout temps un puissant attrait pour les peuples. Aussi cette région afri-
caine parait avoir été très peuplée dès la plus haute antiquité.
A l'âge de la pierre polie africaine, une brillante et dense civilisation
régnait dans toute cette région : de nombreux monuments mégalithiques,
une grande quantité d'armes et d'instruimmts en pierre témoignent
amplement de l'industrie avancée de ces populations ii cett>^ époque
primitive.
l/observation des monuments mégalithiques qu ils nous ont laissés,
l'étude des objets, instruments et ossements recueillis dans leurs tombeaux,
enfin les dilTérents produits de leur industrie paraissent devoir nous
donner l'indication de rechercher vers l'Est l'origine première de ces
Tfi i"' FévHiF.n !906
aborigènes tous proches parents, saii> doute des ancêtres de populations
éthiopiennes actuelles Gallas-Somalis.
J'ai pu recueillir une belle série de ces documents, témoignage d'une
époque lointaine. Actuellement au Muséum d'Histoire naturelle, cette
collection tigurera en partie à l'Exposition de Marseille et au Musée
d'Ethnographie du Trocadéro avec les objets en métal recueillis dans les
tombeaux de ces primitifs.
Car bieu avant notre ère, ces populations connurent l'art de travailler
les métaux, de tisser les étoffes, de fabriquer des poteries, et nous en
trouvons de multiples témoignages dans les gigantesques tumuii que ces
populations riveraines du fleuve élèvent dans toute cette vallée nigérienne
pour servir de tombeaux à leurs chefs.
Mais les populations nomades et pastorales sahariennes refoulées du
Nord par l'arrivée des peuples nouveaux furent sans cesse attirées vers
ces beaux pâturages toujours irrigués. De même les tribus sauvages des
forêts du Sud cherchèrent de tout temps à se faire jour vers les clairières
du Nord, terres à céréales et à élevage. Tous ces peuples nouveaux se
jetèrent sur le Soudan en formant de grandes confédérations politiques,
ils créèrent des clans de tribus prenant des noms d'animaux comme
emblème, et successivement chacun d'eux chercha à établir sa suprématie
dans la vallée du fleuve. Mais les uns et les autres, pasteurs et chasseurs
venus des déserts du Nord, cultivateurs et trappeurs sortis des forêts du
Sud, étaient également inaptes aux travaux de l'industrie, de la construc-
tion et des arts. Aussi réduisirent-ils en servage les primitifs en formant
avec eux une sorte de caste de serfs industriels, gens non libres, supé-
rieurs aux esclaves, mais avec lesquels les membres du clan vainqueur
ne devaient pas s'allier. C'est ainsi que nous trouvons dans les forgerons,
les tisserands, pêcheurs, potiers, griots, une grande partie des primitifs
asservis, alors que quelques-unes de leurs tribus arrivaient à conserver
leur indépendance, leurs coutumes et leurs traditions en se réfugiant soit
dans les îles du fleuve (Sorkos), soil dans les sites escarpés des mon-
tagnes (Habbès). {Planche II, n"» 4,3; Planche I. n" 1 et Planche IJI, n» 2.
Tumuii, Inscriptions).
Ces Habbès ne constituent pas actuellement une race particulière, car au
courant des siècles ils se sont métissés avectousles groupements noirsqui,
chassés de la plaine fertile par l'arrivée de nouveaux conquérants, venaient
demander un refuge et la liberté aux escarpements des plateaux rocheux.
Cependant leurs traditions, coutumes, mœurs, habitations, industries,
idées religieuses les différencient complètement des populations noires de
notre Soudan occidental et même de leurs frères asservis dans les pJaines
qui ont, en grande partie, adopté le langage, les coutumes et la religion
des derniers envahisseurs.
En général grands, de teint très noir, la face presque orthognate, ces
indigènes se sont construit, sur les flancs des falaises au sommet des
éboulis, des villages fortifiés avec de véritables maisons ne ressemblant
en rien aux agglomérations de paillottes et de huttes des noirs soudanais.
KFSPI.AiiNKS. — LE PI.ATF.Ar CENTKAl, Nir,KRIE\ 77
Habitations. — Les maisons, généraleriit-nl à l'tages, sont construites
soit en briques rectangulaires, soit en pierres posées les unes sur les
autres avec un art véritable; elles rappellent les maisons de Tombouctou
et de Djenné dont les constructeurs appartenaient à leur race. Les cham-
bres à coucher sont au premier étage et on y accède le plus souvent par
une échelle faite d'une grosse fourche.
Les toitures sont en terrasses et l'écoulement des eaux, de la saison des
pluies y est assuré par de petites gargouilles en bois.
I..es cases des chefs et des notables sont décorées sur la fat^ade exti'-
rieure d'une ornementation en terre ou en brique foiinée de colonnades
ou d"ogives superposées d'un elfet décoratif des plus inattendus ; de même
les serrures, les panneaux des portes et les volets sont souvent sculptés
trt^s originalement.
Dans cliaque famille les récultes sont enfermée> dans des greniers en
l'orme de tour, également ornementés, et dans les villages en bordure dès
la plaine du Sud ces « Kroukrousà mil » sont coiffés de grands chapeaux
de paille qui leur donnent un aspect pittoresque de clochers.
Entin, au dessus des villages, dans les parois verticales des rochers ou
dans les sites escarpés des pics sont accrochées aux aspérités de la mon-
tagne^ d'innombrables petites constructions en briques ou en maç^-onnerie,
auxquelles on ne peut souvent accéder que par des crampons de fer plan-
tés dans le roc et en se hissant par des cordes. {Planche IV, n"^ 1, 2, 3;
Planche II, n" 2; Planche III, n° i. Villages et constructions.)
(higines. — Les légendes attribuent ces constructions aux. premiers
habitants de la région, ancêtres des populations actuelles, des hommes
rouge-cuivré venus du Nord et les alliés aux noirs pécheurs primitifs et
aux nains des montagnes. Ces petites cases paraissent avoir été habitées
et avoir servi les unes de retraite contre les envahisseurs, les autres de
greniers pour mettre en sûreté les provisions de l'éservc, enfin d'autres
de tombeaux pour les ancêtres.
doutumes. Organisation sociale. — Parmi les plus curieuses coutumes qui
se sont le mieux conservées chez ces populations subsistent les restes
d'une organisation sociale des plus inattendues chez ces primitifs noirs.
Alors que chez toutes les populations voisines nous voyons se créer de
véritables féodalités dès qu'elles ont cherché à perfectionner l'organisa-
tion anarchique du village, souvent simple groupement de familles indé
pendantes, nous trouvons au contraire chez les Habbès un véritable
régime théocratique électif.
Hogon. — En effet, dans chaque groupe de village composé de gens de
la même famille, ou d'une même origine, les chefs de famille âgés,
vieillards prudents et sages, interprètes des génies familiaux, véritables
esprits des ancêtres nomment, à l'élection généralement, un chef nommé
u Hogon » (cependant dans les petits groupements familiaux, le pouvoir
78 !•'■ iKVKiK» I90H
de Hogoii nnienl île droit au vieillard ji- plus Agé de la liilni, grand prêtre
naturel des esprits ancestraux).
Tous ces llogons de cantons réunis désignent, en grande assemblée,
l'un d'entre eux comme grand chef suprême de la confédération, prési-
dent du conseil des vieillards.
Aujourd'hui ce Har Hogon n'a plus qu'une vague puissance religieuse,
mais autrefois son pouvoir était ahsolu comme grand chef politique, jus-
ticier et religieux. Toutefois, quoique le chef de la guerre fût sous ses
ordres directs, le Hogon n'eut jamais entre les mains la puissance mili-
taire, car il est de son strict devoir de vivre seul dans la retraite, sans se
déplacer, auprès des autels de la patrie. En revanche, gr<\ce à son carac-
tère religieux, il jouissait en temps de guerre d'une immunité complète et
sa personne restait intangible même dans une ville prise d'assaut.
Aussi dans les siècles passés son autorité morale s'étendit très loin dans
toute la boucle nigérienne el l'un d'eux vit même sa renommée parvenir
en Europe.
En effet, les Portugais eurent un moment l'idée, vers la fin du \v* siècle,
d'adresser une ambassade au Hogon qui gouvernait alors les Moschis et
dont l'existence leur avait été révélée par le Wolof Bemoy.
Idées reli(/iei(ses. — Cette organisation sociale imprévue a pour origine
la conception particulière que ces peuples se sont faite de la Divinité et
des Êtres supérieurs qui sont censés peupler l'univers.
En général ces Habbès croient à l'existence d'une Divinité toute puis-
sante nommée Amba, Amma, Ammo, souveraine dispensatrice des événe-
ments heureux et malheureux; mais ce Dieu résiderait dans les immen-
sités célestes, très loin des infimes événements humains, dont il s'occupe
fort peu. En revanche, comme la majorité des populations soudanaises
d'ailleurs, ces montagnards sont convaincus de l'existence d'une foule
d'êtres supérieurs d'importance et de puissance variables qui ont en
apanage les différents sites terrestres près desquels ils habitent. Ces
génies du lieu sont de caractères indépendants mais en général bien-
veillants, ils protègent les humains établis sur leur apanage terrestre,
qui se sont acquis leur protection spéciale et qui les honorent habituelle-
ment par des sacrifices et des libations. Un des caractères les plus curieux
de cette protection est qu'elle se trouve exclusivement réservée à l'homme,
à la famille ou au groupement qui le premier a fait alliance avec cette
puissance divine, et avec qui il a été échangé un signe de reconnaissance
(nommé par nous improprement Gris-Gris comme les amulettes). Ce
signe sacré est le seul lien qui réunit extérieurement la divinité à son
protégé ou à ses descendants et seule la possession de cet objet peut
obliger « le Dieu » à révéler sa puissance et à intervenir en faveur de ses
protégés.
Par suite, les « Gris-Gris » du village et des familles sont soigneusement
cachéset jalousement gardés. Seuls les vieillardsconnaissent leur cachette;
le Hogon les garde généralement près des autels de la patrie et des malé-
DESl'I.AdNES. — I.K l'I.ATKM' CK.NTHVl. M<;KK1KN 7*1
(licliuns terribles sont à craindre pour ceux «(ui s'approclieiit ilii li.Mi mi
on les a placés, car leur vol ou leur perle enlèverait tout droit à la pro-
tection divine.
Plusieurs faits historiques sont en concordance avec cette croyance,
.^u Mossi dans la plupart des révolutions nous voyons les compétiteurs
chercher immédiatement à s'emparer des x Gris-(iris » protecteurs avant
môme de tenter la lutte.
dette idée d'alliance personnelle avec la tlivinilé locale et les pro-
priétaires du sol obligea souvent les conquérants envahisseurs à faire
montre d'une certaine modération envers les vaincus, car il est admis
que si le maître maudit le sol celui-ci reste improductif.
Cependant ce pays ayant été malgré tout le théâtre de nombreuses
luttes, une partie de sa population dut disparaître ou émigrer et géné-
ralemenl on croit qu'un grand nombre de ces djinns (génies) furent
abandonnés de ce fait par leurs serviteurs et laissés sans culte.
Devenues vindicatives et méchantes, ces divinités s'acharnèrent depuis
sur les humains, suscitant les accidents, semant les maladies et la mort
en réclamant des offrandes.
Laggam. — Naturellement un intrigant est né pour exploiter cette idée:
c'est le Laggam, espèce de sorcier qui est censé être l'intermédiair»^ sur
naturellement désigné entre les divinités malfaisantes et le village. Soit-
disant en relation avec les génies, il leur olîre des sacrifices au nom de la
tribu pour les écarter et les apaiser.
En principe soumis au Hogon, il reste cependant inamovible, car sa
nomination ne se fait que trois ans après la mort de son prédécesseur et
lorsque les divinités l'ont frappé de signes divins pour faire connaître
leur choix.
Les animaux sacrés doivent aller coucher près de lui qui est tenu de
découvrir un collier et les insignes de sa fonction cachés dans la mon-
tagne par les vieillards, enfin en des crises d'hystérie mystique il doit
prophétiser devant la foule et tomber en catalepsie.
Très craint des noirs, il habite seul au sommet de la montagne dans un^
case très ornementée de sculptures et de bas-reliefs. Personne ne devant
le toucher, il ne pénètre dans les villages que pour les fêtes religieuses
afin de sacrifier sur les autels des divinités en les priant de ménager les
récoltes.
A sa mort, seuls les gens du village voisin viennent l'enterrer pendant
la nuit et le placent toujours assis face au nord dans une chambre funé-
raire, sous un gros tumulus dans la plaine, ou dans une fente de rochers
de la montagne.
Tout ce qui lui a appartenu est sacrifié ou brisé sur sa tombe; sa mai-
son et ses champs sont abandonnés. {^Planche F, n^' let 3. Chefs.)
Avec ces génies locaux plus ou moins bienveillants, chaque famille
honore et prie les Esprits des Ancêtres considérés coumie des divinités
protectrices et tutélaires servant d'intermédiaires entre les membres ter-
HO !'■'■ KKVKIFR 190fi
resli'ps t]c la famille et le hiul puissant « Ainha ». Un [irélend inêni<' (jue
ce sont eux qui se réincarnent dans la famille pour prolonger la race ;
aussi chaque foyer a son autel des Ancêtres, pierre conique, devant lequel
le chef de famille oiïre des libations et des sacrifices, à chaque événement
important, aux fêles et chaque fois que l'on a une requête à présenter.
Le vieillard le plus Agé de la tribu, nommé Kasanna, considéré comme
le grand prêtre des Esprits des .\ncêtres a des honneurs tout particuliers
et le plus souvent il cumule les fonctions de Hogon.
D'après cette conception de la divinité et de ses relations avec les
humains, on comprend combien pour ces primitifs la personne du Hogon
devient sacrée et par suite, de quels respects ils entourent les vieillards
chefs de famille et le pins Agé d'entre eux.
donseil des Aneicnt;. — Hoi/on. — Toutes les affaires du pays et la jus-
tice sont du domaine du Conseil des vieillards que préside et rassemble
le Hogon. Celui-ci a pour premier devoir de faire exécuter les décisions
de ce ('onseil, et son pouvoir est tel en cette circonstance qu'il lui suffit de
dresser son bâton de commandement devant la case du coupable pour
qu'elle soit démolie immédiatement et celui qui l'habite banni. En vertu
de son caractère religieux d'intermédiaire de la divinité, le Hogon est
chargé de la garde exclusive des « Gris-Gris » protecteurs et des autels
de la cité, puis il offre les sacrifices aux grandes fêtes des Semailles, des
Moissons et des Ancêtres. Ces fêtes ont lieu en public avec le concours de
tout le peuple, contrairement au mystère dont s'entourent les cérémonies
cultuelles chez les Bambaras et les Soudanais de l'Ouest.
Fêtes religieuses. — Au jour fixé, le Hogon, accompagné de tous les vieil-
lards, suivi par la foule et les joueurs de trompe et de tambours, se rend
dans les rochers à l'entrée de la grotte qui servit de première habitation
à leurs pères.
Là il fait sacrifier un bouc noir et un poulet noir dont les cendres sont
jetées au vent, tandis qu'il invoque l'esprit des ancêtres; pendant cette
cérémonie le peuple garde un silence religieux.
Ce sacrifice terminé, le Hogon se rend à l'autel de la cité fait de trois
pierres coniques, où le Laggam vient le saluer. (Planche V/, n*» 1, 2, 3.
Autels).
On ofïre alors aux divinités prolectrices des libations et les prémices
des récoltes ou les graines à ensemencer, puis on sacrifie sur l'autel des
animaux blancs : moutons ou bœufs, dont la chair est partagée entre les
chefs de famille avec beaucoup de bière de mil préparée d'avance.
La foule chante et danse pendant le sacrifice et la fête se prolonge fort
tard dans la nuit.
L'n grand nombre de jeunes gens exécutent, masqués et travestis, des
danse- rituelles, ils sont censés représenter l'Esprit des Ancêtres. D'ail-
leurs, chaque famille doit entretenir et orner plusieurs de ces travestis-
sements dans les associations des jeunes gens. (Planche Vil, n°^ 1, 2, 3^
Autels.)
DKSl'l. \iiNK>. — l.K l'I.VIKM i:i:Nllt\l. MiiKItlKN 81
Association de jeunes tjens. — En olVet, dans toute ci'tte cuntri'e, dès que
les garrons peuvent se passer des soins de leur mère, ils iiuittent la maison
paternelle et vont vivre par associations dans des maisons qu'ils cons-
truisent en dehors du village; toutefois ils ont encore le devoir de cultiver
la propriété de famille, mais en revanche, ils ont droit à la nourriture
fournie par la maison paternelle.
Ces jeunes gens, hors la saison des cultures, chassent, pèchent, font
du commerce, tissent des étoffes ou fahriqucnt des instruments en fer,
car toutes les professions et tous les métiers sont également libies et
honorés chez ces montagnards. Ils cherchent ainsi ;i augmenter leur for-
tune personnelle et s'organisent avec le secours dos camarades de l'asso-
ciation une maison pour installer leur ménage à la première occasion.
Les lillettes vivent, en principe, dans la maison paternelle s'occupant
de la préparation des repas et aidant leurs frères aux travaux des champs.
Mais, dès l'Age de 10 ans, elles se choisissent toutes des amoureux dans
le clan des jeunes gens de leur Age et chaque jour elles vont passer la
soirée auprès d'eux échangeant des cadeaux. A ce petit jeu, elles gagnent
facileinent un enfant (jui est accueilli avec la plus grande joie par leur
mère, car en se montrant féconde, elles onl la certitude d'être demandées
en mariage dans le plus bref délai.
Quant à ce premier enfant, il est offert par la mère à sa fan)ille puni-
l'honorer, et son oncle maternel devient son père légal.
Mariages. — Les mariages ont lieu généralement en décembre après
les récoltes. Le jeune homme, après avoir obtenu le consentement de
sa fiancée, fixe le jour de la cérémonie, puis, aidé par les jeunes gens de
son clan, prépare vivres et boissons pour la fête, enfin il se rend généra-
lement accompagné d'un ami chez le père de la jeune fiancée et lui annonce
>;on accord avec la jeune fille pour fonder une famille.
Le jour du mariage, les jeunes gens donnent une grande fête à la(]uelle
tout le village assiste excepté les parents de la future mariée. Au milieu
des danses, les amis du mari enlèvent à ses compagnes la jeune fiancée
et l'emportent au domicile de son époux.
Le premier jour favorable qui suit l'enlèvement, le mari rassemble ses
luiis, et fait prier le vieillard le plus Agé du village de venir consacrer
^on nouvel autel des ancêtres, demandant d'attirer la protection divine
sur le nouveau couple.
Le mari sacrifie lui-même les victimes sur l'autel, sa femme en prépare
immédiatement un repas, dont le vieillard offre les prémices h la divinité,
enfin tous festoient en l'honneur des ancêtres et de la continuation de
la famille.
Après ce repas tous les hommes vont saluer le père du mari chef de
famille, qui offre en général un cadeau au jeune ménage, de là le nouveau
marié se rend chez son beau-père et lui porte une offrande, celui-ci en
l'acceptant doit également faire un cadeau à sa fille.
Car les biens des deux époux sont absolument indépendants les uns des
soc. D*ANTUaOP. 190b. 6
H-1 l-f iKvmi;» I90(i
aiili"''^, '"l l'i r«'iiiiiir cnriMTvt' fil loiil'' |nopii(''f •' sa IV)iIiiim' iH'isiinnelIc
dont ell«î «lispose CDtniiuî elle reiilenJ.
A la mort de leurs parents, les garçons héritent exclusivement du père,
les lilles de la mc^re, excepté pour la propriété de famille qui revient de
droit au plus âgé des lils avec la maison contenant l'autel des ancêtres.
En général, ces mariages sont très stables quoique ces indigènes soient
tous polygames. Ils donnent comme raison principale de leur polygamie
la coutume qui les oblige à cesser toute relation avec Une femme mère
pendant l'allaitement de l'enfant, temps qui se prolonge souvent jusqu'à
18 mois ou deux ans.
Divorce. — Cependant le divorce existe dans les coutumes, la stérilité
d'une union surtout en est la cause la plus fréquente. En principe il ne
peut avoir lieu qu'avec le consentement du mari. Alors le mariage se
rompt par un sacrilice devant l'autel des ancêtres Toutefois la femme, si
son mari s'oppose au divorce, a toujours la ressource de se faire enlever,
car dés qu'elle s'est placée sous la protection des ancêtres du ravisseur
en franchissant le seuil de sa maison, le premier époux perd tout droit
sur elle.
A côté de ces coutumes et de ces fêtes qui accompagnent le mariage on
est étonné que la naissance et l'adolescence ne donnent lieu à aucune
cérémonie spéciale autre que quelques sacrifices sur l'autel des ancêtres ;
on peut remarquer seulement que c'est après leur circoncision^ vers 9 ou
10 ans que les jeunes garçons offrent, dirigés par leur père, le premier
sacrifice sur l'autel des ancêtres et qu'au contraire les femmes ne sacrifient
à la divinité que mariées et en présence du mari, car dans la montagne
elles ne sont pas excisées comme dans l'Ouest du Soudan.
Funérailles. — En revanche les rites funéraires nous montrent un grand
nombre de cérémonies des plus curieuses. Elles varient un peu entre la
plaine et la montagne et naturellement entre une personne jeune et un
vieillard.
Plus une personne est âgée plus on l'honore et plus les cérémonies mor-
tuaii'es seront brillantes, puisque c'est presque un ancêtre qui rejoint
l'autel de famille, maison le pleurei'a bien moins qu"uii jeune homme car
il a vécu entièrement sa vie et accompli sa destinée.
En général, dèsqu'une personne meuit dans un villagede la montagne,
les femmes qui l'entouraient poussent de grandes clameurs, annonçant
dans toutes les directions que les génies malfaisants et féroces ont arraché
un être à la vie. Aussitôt tous les hommes se précipitent sur leurs armes,
puis, criant, hurlant, il tirent des coups de fusil et lancent des tlèches
contre le ciel en cherchant à mettre en fuite les esprits cruels mangeurs
de vie humaine, et en insultant les divinités impassibles.
Le Laggam, qui, lui, a été impuissant à écarter le malheur prend une
crise d'hystérie pour montrer la volonté supérieure des Génies.
Pendant ce temps la famille en signe de deuil se rase la tète, se couvre
DESPLAGNES. — LE PI.aTF.AI' tlKNTRAl. NIGIÎRIEN 83
de cendre et déchire ses vêtements, les femmes ne pourront pas quitter la
maison avant six mois ou un an. Installées avec les pleureuses sous la
vérandah de la case, elles clament les vertus du mort en demandant :
Mon frère le généreux qu'en a-t-on fait puisqu'il n'est plus?... Mon
époux fort comme le taureau, courageux comme le lion, qu'en a-t-on
fait ? » et la foule des pleureuses répond : » Il dort là-haut, là-haut dans
les rochers. »
Dès que les gens des villages voisins sont accourus, le corps, après avoir
été lavé, coloré en rouge et roulé dans un grand linceul ouvert sur la
bouche, est placé sur une civière de bois que l'on grimpe dans la monta-
gne jusqu'aux petites cases sépulcrales placées sous les fentes de rochers.
Arrivée la-haut, la foule se retire après avoir insulté encore une fois la
mort aveugle el les divinités malfaisantes.
.Seuls les camarades du mort le placent dans le tombeau de gens de son
Age, l'étendant sur le sol ou l'asseyant la face au Nord suivant son rang
ou ses fonctions. Puis ils referment le tombeau, le murant, en laissant
loutefois une légère ouverture. Devant celle ouverture ils brisent le vase
qui contenait l'eau apportée pour façonner le ciment, el placent un petit
tabouret de bois sur le rocher.
Ue même ils disposent des libations devant l'autel des ancêtres et sur
les sentiers qui mènent de la maison mortuaire au tombeau, pour que
l'Ame puisse se reposer et s'abreuver pendant ses voyages entre son corps
périssable et l'autel anceslral qu'elle va habiter.
Pendant une semaine tous les soirs les camarades se rendent auprès de
l'autel de famille du mort, y déposent des offrandes et avec ses parents le
pleurent en mimant toute son existence avec force danses et festins ; à la
lin du dernier jouron fête son entrée dans le royaume des ancêtres.
Les tribus habitant les plaines de l'Est ont des cérémonies funéraires à
peu près semblables : toutefois chez elles le mort esl assis ou couché dans
une petite chambre funéraire sous un lumulus entouré d'une foule de
cadeaux qu'on lui confie pour remettre aux parents défunts. (P/aHcAe VIII,
fombeaux.
En présence de ces coutumes antiques, de ces monuments étranges, de
ces curieuses inscriptions encore indéchilTrées, de ces tombeaux et de ces
abris sous roches renfermant tant d'instruments de l'âge de la pierre
p ilie dont cette région soudanaise esl si abondamment fournie, on com-
prend facilement combien l'esprit de l'Européen se sent attiré par l'inconnu
de ce problème : l'existence de ces primitifs noirs et de ces peuples d'hom-
mes rouge cuivre, premiers conquérants civilisés de la région dont par-
lent les traditions locales (s'identifianl probablement avec les Ethiopiens
rouges de nos classiques anciens). Les traces nombreuses laissées par ces
constructeurs, déjà signalées par le D' Ruelle à travers le Mossi jusque
dans la haute (^ùte d'Ivoire, viennent d'être retrouvées par .M. l'.Adminis
trateur .Arnaud de la Mission Coppolani en pleine Mauritanie dans le
Sahara occidental.
Si I" i-KViiiKii iKoi;
Coitiitii'ict'. — (iepeiidaiil actnelltiinciil, gr;\ce ù la sf'rurilô (juo nous avons
su imposer au |)ays, ces populations trop resserrées sur les plateaux des-
cendent de plus en plus dans les plaines apportant une vi^ueuc nouvelle
k leurs frères de race tmHisse et soumis aux envahisseurs.
Seuls les aînés restent encore dans ces montagnes qui leur ont si long-
temps servi de refuge, et conservent jalousement avec l'autel des an-
cêtres leur vieilles coutumes et traditions.
(Jette émigration n'a fait (jue donner une activité nouvelle aux échanges
entre les populations riveraines du tleuve, pécheurs, cultivateurs, les
pasteurs nomades des plaines et les cultivateurs industriels des montagnes;
aussi depuis ces dernières années un grand progrès s'est réalisé. De gros
marchés d'échanges ont surgi aux pieds du plateau rocheux à la limite
de la zone d'inondation sur les hords du Bani et du Niger. Actuellement
il n'est pas rare de voir rassemblées aux grands marchés de Korienza, de
Fatouma, Sampara, et de Kaka, près de 6 à 7.000 personnes. Ces marchés
ou plutôt ces foires hebdomadaires dépendent économiquement des deux
antiques métropoles commerciales du Soudan Djenné et ïombouctou
qui restent toujours les grands entrepôts indigènes et même le centre
d'activité des maisons commerciales européennes. Là surtout habitent
toujours les familles des courtiers, commissionnaires, banquiers noirs et
marocains, des entrepreneurs de transports, tous gens qui font la Bourse
soudanaise donnant le cours journalier aux marchandises et accordant le
crédit aux petits commerçants et colporteurs.
Devant les résultats acquis en si peu de temps dans cette colonie, et si
nous songeons que nous avons ici comme auxiliaires les descendants des
peuples qui ont créé Dienné, Tombouclou, Gao, villes commerciales si
célèbres dans le monde au xMoyen Age qu'elles excitèrent jusqu'il nosjours
la curiosité et l'imagination de l'univers, nous devons envisager avez beau-
coup d'espoir l'avenir en restant persuadés que nous pourrons continuer
à appliquer le proverbe arabe :
« Contre la gale du chameau emploie le goudron
« et contre la misère, un voyage au Soudan. »
DKSI'I.AiINKS. — LE l'I.ATKAl CENTKAI. NKIKIUKN S;")
Discussion
M. Zaborowski. — Nous remercions vivement M. Desplagnes de sa très
intéressante coniinunication. Vous nous avez apporté, une des contribu-
tions les pins richement documentées que nous ayons reçues depuis long-
temps. Permettez-moi de vous féliciter de l'abondance, de la précision et
de la nouveauté de vos observations.
.M. Papillault. — Je m'associe bien volontiers aux félicitations de
M. Zaborowski, car certaines observations de M. Desplagnes sont de toute
première importance.
86 1" FKvniER 1006
LEGENDES nE> PLANCHES
PInurhe I
1° Tuinulus do la Région de Goundam (Killi).
'l' Monts Onallo. Types de la monlagno.
3- Types de pécheurs Bozos.
Plauche II
1" Groupes de pierres levées Tondidarou, près de Niafunkè (lac Takadji).
'l' Village de Kikera sur la pente Nord du plateau de N' Dalla.
'iP Inscriptions de Songo (1o kil. N.-K. Bandiagara).
Planche III
I" Grenit r à mil avec orneinetUalion en haut relief (Kroukrous).
•2* Tuiiiulus dTI-Oualedji et résultais des fouilles.
Planche IV
1* Une maison de Kori-Kori.
-2' Maison de Toure avec, sur la droite de la porte, laulel du chef de village.
3* Ruines d'un village de refnge dans leis jiarois verticales d'une falaise.
Planche V
1" Gogouna chef «le Kani (a été envoyé à Tornbouctou par Amahdou Scheickou,
amir, roi des Foulbés d'Hamdalahi, pour oidonn» r aux gens de la ville de
renvoyer le docteur Barth, 185n).
2* Bankassi. Abri-repos du village de Bankassi dans la plaine. (Emblème de tribu
femelle).
3o Le Hgoon de Bankassi devant sa maison (plaine Sud).
Planche VI
V Autel sur le plateau des Haroua (Harou) (tribu mâle des Oiseaux).
2' Autrd au pied do la Falaise du Sud de Bandiagara.
3* Autel à (rois pomles sur lequel le Hogon fait des sacrifices pnur la triad>'
divine.
1" Amma le (iiand Tout laissant. 2° Le principe mâle, oo Le principe femelle.
Plnnrhe VII
1° Danse religieuse dans une tiibu du clan des Oua (Oiseaux) et des Buftles ou
Antilopes.
2" l'ne danse de jeunes gens pour accompagnnr le chef religieux.
3* Nama, entretenu par chaque famille, se promenantdans les champs au mument
de la fête des semailles.
Planche VIII
I*- Tombeaux du ravin de Kani-B/.on.
2* Case funéraire, abri sous roche Monls-Dalla.
']• Case sépulcr.ile. Tombpaux du Mont Boubani-Kaui.
Pi.wc.m: I
Planche II
^J^MM ■'>■»■*:;-■
l'i.ANCiii: III
-♦-
^!*^'*
Pi.v.nCiii: IV
Pl.AM.llK \
U
Pi.ANCiii-: VI
•^^i
Pi.wr.iii \'ll
■SU
•^C.^'^JÏI
l'i.ANClli; \lll
PAI I, n'KNJiiV. — l,K ^l'lUiri>MK EN illlM. HT
W0« SÉANCE. — lo Février l'.IOti.
F*RÉS1DENCK DE M. CtîTEH.
Elections. — M. 1'' Mairiuis hk hHKrKiiL. pn-scnlr par MM. Hervé. Deniker.
^ vos Gu.vot. Séhillot ; M. A. Sii-kke. [)rostMilf' par MM. Capilan. MahniiHpau,
Manouvrifr. soni iioinmés memhrps fifii/nirfs.
M. le I.iptitfnîiiit I)k^ci,ai..nes. pn-stMil»' par MM. Hamy. Vorneau. Delisle,
Horvf •'( l'apillaiill. fsl mimmé rorrpxpo/irfa/if iifitinnal.
LE SPIRITISME EN CHINE
Par m. Paul d'Enjoy.
Les Esprits jouent dans l'imagination populaire chinoise, qui en peuple
le monde, un rôle des plus importants. 11 n'est pas d'événement heureux
ou malheureux, qui ne soit attribué par le vulgaire à l'influence, bien-
veillante, malicieuse ou cruelle, d'une puissance occulte et cette croyance
est tellement répandue, elle répond si exactement au besoin de mysticisme
qu'éprouve le Chinois, qu'elle a gagné jusqu'aux classes instruites de la
nation.
Les lettrés, imbus des idées morales et positivistes de l'illustre Kon-
Phoii-Chéou, ce philosophe pratique pai- excellence, qui excluait de sa
doclrine. comme fliscussions superlhies, spécieuses, vaines, toutes les
questions purement théoriques ou spéculatives et n'admeltail de débats
philosophiques que ceux qui déterminent des applications réelles, ne
croient évidemment pas à ces intervcmlions, au moins en tant (ju'émanées
de puissances démoniaques. Ce sont, j\ leur sens, des fantaisies gros-
sières, de nature superstitieuse et soties. Fidèles au Vou-Kiao, ils ont foi
en l'existence d'un principe supérieur de vie, indépendant de la matière,
ipii l'anime, la vivifie; en un mot. ils croient à l'àme, comme entité
vitale; mais leur doute naît pour ce cjui suit là mort physique. Un point
d'interrogation se pose dans leur esprit, relativement à la conséquence
du (iivorce consiuiimé entre l'ilme et le corps. Ils ne savent quoi penser
de l'existence du principe subtil de vie et, par conséquent, des manifes-
tations sensibles de cet élément spirituel dans le monde matériel, lorsqu'il
a dépijuillé son enveloppe charnelle, qu'il a abandonné le corps pour le
livrer à l'œuvre du néant.
Kon-Phou-Chéou, interrogé sur ce point par un de ses disciples, le
célèbre Ki-Lou, qui s'inquiétait de ce que devenait l'Ame après la mort,
lui répondit : ^ Frère aimé, comment oserions-nous scruter les mystères
" de la mort, nous qui n'avons pas pu pf-nctrer encore" les secrets de la
88 i:i KKvniKit 1006
" vif"? » Et comme Sé-Kon, un autre disciple cher au philosophe, insis-
tait auprès (Je lui pour savoir au moins si les m;\nes pouvaient avoir
connaissance de ce qui se passe sur terre, le maître s'exclama : « A (juoi
(( hon me demander ce que tu apprendras certainement un jour par toi-
i< même? »
Kon-Phou-Chéou ne voulail-ii pas ou hien ne pouvait-il pas répondre
k ces questions, intéressantes au premier chef pour un peuple dont tout
l'édifice social repose sur l'unité de la Famille, constituée en dogme? Les
lettrés sont divisés sur ce point. Aucun n'ose affirmer, nul n'ose nier
que les morts, comme le croient les gens du peuple, ne vivent autour de
nous d'une vie spirituelle sans doute, mais agitée des mêmes désirs, mue
par les mêmes passions, soumise aux mêmes entraînements des sens,
en proie aux mêmes émotions. Qui sait? disent les sages, en hochant la
tête. La forèi des pinceaux frémit, jusque dans ses profondeurs, des
mêmes angoisses à l'égard des Esprits que le vaste et onduleux champ
populaire, car il est bien vrai ce vieux proverbe chinois :
Les pefilfs IV-uilles (|ui Irciiihlcnt l'ont vii)rer le prros tronc.
Après la mort, ([ue devient l'âme? Où vont, où sont, que font les mânes
des ancêtres? (Jrave problème, qu'on n'agite qu'en frissonnant etqu'on ne
résout jamais de quelque incertitude qu'on soit saisi, qu'en s'abrilanl
derrière les rites cultuels, comme pour y chercher u;i refuge au trouble
de l'esprit (jui interroge. Les mânes, concluent les lettrés qu'on presse,
doivent survivre puisqu'on les évoque; ils s'intéressent sans doute
à la vie puisque les rites prescrivent en leur honneur des cérémonies
familiales et que ces cérémonies ont précisément pour but d'établir,
notamment au retour de l'an, une communion mystiijue entre les morts
et les vivants. A quoi tendraient les formules d'invocations, particulières
à chaque foyer, qui se transmettent pieusement de père en fils, si les
àmes évoquées ne pouvaient les entendre? Pourquoi les convier à des
festins rituels, si elles n'épiouvenl plus, dans le monde immatériel où
elles llùttent, les appétences des aliments? Les Esprits de la Famille ne
viennent-ils pas aspirer les fumées des cassolettes où se consument l'en-
cens, le bois de santal et ks feuilles d'eucalyptus? Ne se complaisent ils
pas au parfum des baguettes de fiente de buffle ou de chameau, impré-
gnées d'essenccî balsamiques? Pourquoi leur fait-on, s'ils n'ont pas de
besoins, des oITrandes d'or et d'argent, en brûlant devant les tablettes où
est gravé le chiffre de la Famille, des papiers recouverts d'une mince
couche de ces métaux, représentative des barres d'or et d'argent qui leur
sont données pour satisfaire aux nécessités de leur vie spirituelle? Pour-
quoi enfin confectionne-l-on à leur intention des vêtements complets en
papi.r de soie, des maisons de carton, des temples en miniature, qu'on
incinère cérémonieusement dans des braseros p'acés au pied des autels
dédiés au culte ancestral, si les Esprits ne visitent jamais les toits qui
abritent leur descendance, si les défunts ne survivent pas à la mort
PAUL d'eNJOV. — I.K SPIRITISME EN CHINE f^O
physique d'uno manière immatôrit'llf mais concrète, s'ih ne peuplent pas
l'espace qui nous environne, si leurs ombres n'errent pas sans (;esse «lans
les endroits qui, de leur vivant, leur étaient familiers?
Telles sont les incertitudes troublantes qui agitent l'esprit des lettrés
chinois et qu'ils laissent volontiers en suspens, alTectant une attitude com-
plaisante aux superstitions populaires. Le peuple, avec son apprécialion
simpliste, n'hésiste pas dans sa foi robuste. Le bouddhisme d'ailleurs est
venu, sous la dynastie des llan, lui donner le goût des divi^iités tangibles.
Pour le vulgaire, la mort n'all'ranchit pas des passions. Les Ames, puis-
qu'elles existent, procèdent de l'être qu'elles continuent après la mort.
Klles aiment t'I li;iïssent surtout terriblement et c'est là ce qui motive la
terreur superstitieuse du peuple, avec une violence que décuple, pour
ainsi dire, leur délivrance des contraintes charnelles.
Elles souffrent, elles gémissent, elles crient, elles effraient les humains
par leurs plaintes sinistres. Que signifient le-; hululements qu'on entend
parfois, dans le silence d'une nuit calme, plus particulièrement, d'après
"opinion commune, aux carrefours déserts, sinon qu'un Esprit se plaint
les angoisses de la faim? Pourquoi perçoit-on, aux époques voisines du
louvel an, des gémissements étouffés qui semblent provenir du milieu
ouffu du bois sacré d'une pagode, sinon que des mânes n'ont plus de
imille vivante pour entretenir leur culte ou que leurs descendants les
égligent, qu'elles pâtissent du froid, de l'abandon, du man(iue de nour-
iture, de la misère spirituelle enfin, si proche de la misère humaine? Et
Is petites llammes bleues qui sautillent le long des ruisseaux herbeux,
Is feux follets errant autour des tombes, ces phénomènes physiques
i^us de l'humidité, qui ont tant tmublé nos paysans franeais, sont, pour
U Chinois, les corps lumineux des Esprits, l'âme elle-même dégagée de
s> liens physiques, le principe subtil par excellence.
L'immense majorité du peuple affirme catégoriquement que les divers
plénomènes mystérieux de la nature ne constituent que les manifestations
p;- lesquelles les Esprits se révèlent à nous ; et ce qui angoisse le Chinois,
c'tt cette opinion (pie les bons et les mauvais génies, car il y eut toujours
sui terre de bonnes et de mauvaises gens, hantent les abords de sa
deieure et que, s'il n'a guère à espérer l'intervention des Esprits bien-
veiants, en dehors des époques rituelles où il les convie à prendre place
à su foyer, il a, à tout instant du jour, et surtout de la nuit, à redouter
que]ue fâcheuse entreprise d'un gnome pernicieux, tout réjoui du mal
(pi'i s'ingénie îi causer. Ce que craint l'homme du peuple, ce sont les
visés cruelles des Esprits malins, des Ma-Koua"i", ces diables maudits qui
voi en sarabandes folles à travers monts et vallées, toujours en quête de
quî'que mauvais sort à jeter.
Acette suggestion^ le Chinois pâlit et tremble comme un de nos enfants
à qui on annoncerait la venue de Croquemitaine.
feo Se, un philosophe contemporain de Kon-l'hou-Chéou, qui a laissé
en Uiine un souvenir des plus populaires., a cru devoir sacrifier, à ces
90 15 fKVRiF.n 190R
tenHanrps mystiques du peuple chinois ol a imaginé, pour lui complaire,
Imite une doctrine spiritiste.
A son sens, la question des Esprits ne fait pas de doute : Les Esprits
existent. Mais qui sont-ils? Ils sont les mânes des morts, survivant spiri-
tuellement il l'anéantissement physi'jue.
Ces esprits sont disposés, par ordre de mérite et selon ce qu'ont été
lours actions durant leur vie humaine, en cinq classes, dont les deux
fxtrèmes sont l'assemhlée des génies, Chen-Sien et la secte des démons,
Kouaï-Sé.
Les Chen-Sien, comme leur nom l'indique, ont acquis par leurs vertus
une situation privilégiée : ce sont des dieux. Entièrement libérés de tout
souci terrestre, ils habitent un Eden merveilleux. Leur àme a usé par son
ascétisme, son détachement des plaisirs et sa graduelle indifférence des
biens de ce monde, les liens qui la rattachaient à la terre. Elle s'est
envolée, telle une goutte d'éther qui s'évapore, vers le séjour enchanteur
des Trois-lles, demeure des bienheureux.
Ces Iles s'appellent Pon-Laï, Ton-Chan et Yn-Chéou. Elles sont situées)
h 700 lieues environ du rivage chinois, au milieu de la mer Jaune, vers!
l'Orient, et on peut avoir une idée de leur beauté en regardant le soleil
jaillir des flots un matin de printemps. Il est inutile d'ailleurs de chéri
cher à les découvrir. Leur situation mystérieuse ne saurait être cunnu|
qu'après la mort et on n'y peut aborder que si on a conquis le droit d'^
résider.
Un sorcier, nommé Soun Ché, aurait bien un jour, à ce qu'il paraij
arraché à l'Esprit qui le visitait, le secret de la situation géographiqi
de Trois-lles et se serait empressé de le révéler à l'Empereur Che-Kouai
Ti qui régna 219 ans avant Jésus-Christ; mais l'expédition qu'ava^
aussitôt envoyée ce monarque, quoique composée de l'élite de la Sociéi
chinoise, jeunes gens les plus instruits et jeunes filles les plus belles ji
Céleste-Empire, ne fît qu'entrevoir au loin l'atmosphère nimbée de rqe
de cet Eden. Un vent violent s'était élevé tout à coup, qui, gonflM
furieusement les flots, avait rejeté la flottille profane sur les côtes ^u
Pé-Chi-Li
Les âmes trouvent, dit-on, dans les Trois-lles, une herbe fine et odor^te
dont elles sont friandes. Elles se nourrissent aussi de fruits raerveill^x,
de pierres précieuses, de perles et de diamants. Elles déjeunent du ]^r-
fum d'une rose ; goûtent d'un rayon de soleil, soupent d'un air de musijue.
Elles boivent des gouttes de rosée dans le calice des fleurs et se plor^ent
dans un torrent de nectar qui jaillit d'un rocher de jade. Ces lots,
pétillants et sucrés comme un vin fermenté, donnent une ivresse qui
confère la jeunesse éternelle : c'est une sorte de fontaine de Jouvéne
La vie des génies s'écoule dans un perpétuel enchantement. Ils voi: où
leur fantaisie les pousse, soutenus par une brise parfumée qui leur cbéit,
montés sur des cigognes roses qu'ils chevauchent à volonté. Ils réafeent
leurs désirs aussitôt qu'ils les conçoivent : en un mot, ils vivent daR un
rêve prestigieux.
PAII. n'ENJOY. t.R sriUlTI'NMF. EN CKINF, 91
Essentiellement bons et mispricnrdieux, niioique enclins aux sérénitps
passives, lf>> Chen-Si^n écoutent volontiers les prières que |pur adressent
dévotement les humains vtMtueux. On les respecte, on les vénèrp au titr^
de protecteurs. L'un d'eux, qui est considéré en Chine comme l'ange du
foyer, est un petit gnome à face réjouie qui est représenté gambadant
follement, la cigarette aux lèvres, la bouche largement fendue par le rire.
On place son image auprès du feu. C'est le génie du Bonheur domestique ;
quelque chose comme les dieux lares des Romains.
Il y a aussi la déesse Ma-Sou, qui est l'emblème de la piété filiale. De
son vivant, elle était la fille de pauvres pécheurs de Sin-Houa. Un jour,
elle s'endormit sur les vêtements qu'elle était occupée à raccommoder,
tandis que son père et ses deux frères étaient en mer. Dans son sommeil,
elle rêva qu'une tempête mettait les barques de ses parents en péril. Les
malheureux allaient être engloutis, lorsque Ma-Sou put saisir avec cha-
cune de ses mains les deux bateaux montés par ses frères, et avec ses
dents, la nef où se trouvait son père. Elle les ramenait ainsi, en nageant,
jusqu'au port; mais, avant de toucher terre, elle entendit la voix de sa
mère qui l'appelait. Sans songer au résultat de son imprudence, elle
répondit à cet appel et sa bouche ouverte laissa retomber la barque de
son père qui s'engloutit dans la mer.
A la vision de ce malheur, Ma-Sou se réveilla. Elle fut heureuse de
constater que cette aventure n'était qu'un cauchemar. Cependant sa poi-
trine demeurait oppressée et elle redoutait un malheur. Son rêve était,
en effet, un avertissement. Elle apprit bientôt qu'une tempête avait
assailli les barques de ses parents; que ses frères avaient été sauvés
presque miraculeusement de la mort; mais que son père avait été ravi
par la mer en furie.
Alors, prise de désespoir, elle résolut de s'immoler en expiation de sa
légèreté et mourut pour conjurer les mânes irritées de son père.
.Ma-Sou est devenue un génie; elle a ses temples et ses fidèles. Les
marins l'ont choisie pour prolectrice ; ils l'implorent quand la tempête
fait rage. La première étoile qui paraît le soir dans le zénith est son
àme inquiète qui surveille la chute du soleil dans la nuit pour ne s'éloi-
gner qu'au nouvel aurore.
Les Kouaï-Sé, au contraire, sont des esprits essentiellement mauvais,
issus d'êtres humains pervers el méchants par nature, dont la vie a été
malhonnête et scandaleuse. En expiation de leurs crimes — beaucoup ont
été décapités sur terre— ils sont condamnés à errer éternellement, tou-
jours attirés par les lieux qu'ils fréquentaient de leur vivant. Seuls, agités,
maudits et redoutés, ils ne savent qu'imaginer pour faire du mal. Leur
nature, mauvaise en soi, s'irrite chaque jour davantage à la souffrance de
leur existence précaire, et leur méchanceté s'aiguise s ir le malheur qui leur
est échu. Ce sont des démons. Point n'est besoin, hélas ! de les invoquer
pour qu'ils s'occupent des gens. Us ne cherchent que l'occasion d'inter-
venir dans les affaires humaines, pour les embrouiller, faire naître des
discordes, provoquer des catastrophes : ils sont les ferments du mal.
92 15 KKViuKH 1906
KouaT, leur ntmi 2;pnéri(jii(', csl une expression ijui signifie à la fois
tortue et diable. Dans la cosmogonie chinoise, la tortue abjecte, a con-
sommé avec le serpent, être odieux, le premier adultère. Elle est consi-
dérée dans cet ordre d'idées comme une biHc maudite, emblème de l'infi-
délité la plus méprisable.
Ce sont les Kouaï quon entend ricaner ;i travers la tempête et qui se
poussent, en hurlant dans le vent, les jours d'orage. Leurs plaintes et
leurs malédictions se répandent à la surface de la terre où elle font des
bruits terrifiants.
Pour les conjurer, le peuple place aux endroits qu'ils fréquentent habi-
tuellement de petites tablettes peintes en blanc, sur lesquelles un sorcier
écrit des formules d'exorcisme en caractères cabalistiques, faits de traits
noirs et rouges.
Plusieurs fois par an, surtout dans les campagnes, on leur offre des
sacrifices. Des animaux sont immolés à la terre, qu'on laisse s'imbiber
du sang des victimes. Il semble que les esprits malins en soient avides;
« Recevez, ô Esprits! » dit le sacrificateur. Les Esprits reçoivent par le
sol qui boit.
Tandis que les génies se complaisent, quand ils visitent la terre, dans
la lumière éclatante du soleil, les Kouaï s'environnent toujours d'ombre.
Us se cachent, durant le jour, pour se répandre au milieu des êtres vivants,
lorsque la nuit étend ses voiles, protectrices de leur hideur. Plus les ténè-
bres sont épaisses, plus le lieu est désert, plus leur audace est grande.
Ils organisent des courses vagabondes dans les forêts, évitant soi-
gneusement de traverser les clairières ou de couper un rayon de lune.
Us composent des farondoles qu'on entend passer dans les airs avec
grand bruit et à l'effroi des paysans chinois. Leurs refuges préférés sont
les bois profonds, les entrecroisements de route, les ponts, les fondrières,
les carrières abandonnées, les ruines et les tombes.
Entend-on, dans le silence de la nuit, le cri sinistre de la hulotte ou la
plainte de quelque autre animal nocturne? Aussitôt on lui donne la signi-
fication d'un mauvais augure. C'est l'oiseau aux Sept-Tètes qui appelle un
malade; c'est le quadrupède Ke-Lin, qui brame à la mort. Si un voisin
est souffrant, chacun y voit le présage de son décès prochain. Qu'il meure
et c'est la confirmation de la conjecture. Qu'il survive, la superstition n'est
pas atteinte par cet échec : le cri n'était, sans doute, pas destiné au village
qui l'a perçu, ou bien le sort a été conjuré par l'intervention opportune
d'un ancien bonze, parent du malade, dont la piété a laissé dans la
contrée des souvenirs impérissables.
D'après l'Y-Kin, genèse du monde physique, les génies procèdent du
principe mâle de la vie. Yn,. l'éclair, la force indivisible. Les Esprits
malins sont issus de l'ombre, Yan, principe femelle, que l'éclair illumine,
traverse et féconde. Pour représenter ces deux entités, on a recours à de
simples traits de pinceau. Une ligne droite continue figure Yn; une ligne
coupée en deux sections égales, scindée en son milieu, donne l'idée de
Yan. En combinant ces deux schémas, on obtient les huit Koua ou tri-
l'Ail. DKNJOY. — I.K ^l'IKITI-MK KN CHINE i>3
Kiammcs de l"'o-lli, qui, rangés dans le ceivl»' initial «lu ni-anf, runslilii.'ul
la ligure idéale de la création.
Ces diverses Iransformalions, phases d'où est issu le inonde inatéri.'l,
sont ainsi transcrites : trois traits nulles pour Téther; trois traits femelles
puur la terre; un trait femelle et deux traits in;\les pour le llui le liquide
pur. un trait femelle entre deux traits nu\les pour le feu pur; un tiail
mâle et deux traits femelles pour le tonnerre; deux traits mAles et un Ir.iil
femelle pour le vent; un trait m;\te entre deux traits femelles puur l'eau ;
enfin deux traits femelles et un trait m;\le jujur les montagnes.
Le fonds et le tréfunds de la terre sont peuplés d'êtres surnaturels.
C'est Yn-Van-Sé, le composé de deux principes de vie, qui préside au
t.'inp-. l>émon au visage mi-partie noir, mi-partie blanc, il est le maître
du présent et de l'avenir. 11 y a aussi le grand diable blanc, Chan-lMn-
Kouaï, aux yeux ronds qui sortent, sanglants, de leurs orbites, aux che-
veux emmêlés semblables à un nid de serpents en furie, à la langue
pendante apte à happer une proie imprudente, et Aï Pa-Kouaï, le petit
lulin noir, gnome ditlorme, tout velu, dont la langue, fine comme une
épée, semble une vipère prête à s'élancer. 11 y a toute une théorie de
démons cornus à l'eavi, grimaçants jusqu'à l'horrible, en tout semblables
aux diables de l'enfer du christianisme.
Dans les Pagodes, les bonzes montrent au visiteur qui les en prient, de
longs Kimonos sur lesquels des artistes se sont complus à figurer des scènes
épouvantables des supplices infernaux. On y voit des Esprits maudits à
tête d'oiseaux, de chevaux, d'Anes ou de porcs, torturer des humains de
toutes les façons les plus odieuses que puisse supposer une imagination
en délire. Ce sont des malheureux embrochés et grillés; des patients livrés
aux tortures de la roue qui, en tournant, arrache avec chacun de ses
crochets, un lambeau de leur chair. Ce sont des condamnés au pilon qu'un
gnome manœuvre en riant d'une façon sardonique, tandis que le supplicié
se fait tout petit et cherche, mais en vain, à se garer, en se serrant contre
les parois du mortier où il est placé, des coups terribles qui broient son
corps. Ce sont des individus suspendus par des crampons plantés dans la
peau du ventre, à des potences incandescentes d'où ruisselle de l'eau
bouillante; des hommes lentement sciés; des femmes éventrées dont les
intestins s'enroulent sur des poulies hérissées de pointes. Ceux-ci servent
de cibles à d'ignobles farfadets à tête de serpent, au corps de porc, aux
pieds de canard qui les criblent de fièches; ceux-lh, liés à des poteaux,
sont éborgnés par des démons à face de vessie gontlée de graisse et à corps
de bouc, qui se servent des yeux de leurs victimes, comme de boules pour
jouer au tonneau et les jettent dans la gueule ouverte d'un hideux lézard.
Les uns sont plongés dans des cuves d'huile bouillante; les autres dans
des tonneaux emplis de poix entlammée. Ici on arrache la langue d'un
homme avec des tenailles ; là on coupe les bras et les jambes d'une femme ;
là-bas on écorche un enfant. Dans cet angle, à l'aide d'énormes blocs de
pierres, on lapide de pauvres gens qui se cramponnent à un démon sar-
castique dont le rôle infâme consiste à les protéger et à les attirer d'une
()4; 15 l-KVHII-.ll 19(18
main, tamlis ([n'il leur Jelt*- <le l'iiiUrf du {liouili foiulii «lans la gorge.
(> sont aussi Jes scènes hideuses de porcs, de boucs et de serpents accou-
plés où s'anichent des procédés pornographiques et scatologiques. Tout
cela s'agite, se lord, se convulsé au milieu des llammes tourbillonnantes
qui lèchent les suppliciés, sans jamais les consumer.
Voici d'autres sites de désolation. Après le feu, la glace. Eclairés vague-
ment par une lune falote, d'iiuiuenses glaciers sont figurés dans une
région aux horizons bas, au ciel de nuit. Là, trône une sorte de déesse,
que les artistes des pagodes s'elfurcent de représenter sous les apparences
d'un être à la beauté fatale, aux regards voluptueux, aux gestes attirants :
c'est la fascination du mal. Elle est assise au haut d'un arbre hérissé
d'épines. Tout autour d elle, captivée par ses séductions, grouille une
loule en rut (ju'une niégèir dépouille de ses vêlements. Hideux de passion
besUale, les malheureux ne paraissent pas s'inquiéter du froid intense qui
bleuit leurs chaiis. Ils ne vivent que pour la luxure. Tout leur être est
tendu vers la femme convoitée. Ils se ruent à l'assaut, se pressent contre
l'arbre «^ui porle la déesse et s'immolent d'eux-mêmes sur ses épines qui
les transpercent, tant et en si grand nombre qu'un démon prévoyant est
fort occupé à arracher ces grappes humaines dont le sang est exprimé
sur le tronc infâme, pour les jeter dans un fleuve gluant qui coule, vis-
queux non loin de là et va se perdre dans la nuit.
Que ne feraient les Chinois pour conjurer ces monstres, éviter leurs
embûches, échapper à leur damnation? Ils en ont une telle frayeur, qu'ils
tremblent à l'idée même de prononcer leur nom et cette terreur se conçoit
aisément quand on songe que les pauvres gens croient fermement à la
réalité de ces supplices. 11 leur semble que les démons, sans cesse en quête
d'une victime, soient attirés par le seul fait que leur nom est proféré dans
une conversation, si banale qu'elle soit et, pour rien au monde, ils ne
voudraient les avoir suscités.
Comme les Esprits sont mus par des sentiments exactement semblables
aux sentiments humains, il y a, quand ils s'acharnent sur une personne
vivante, deux moyens de les conjurer : la prière ou la menace.
Seules certaines personnes, douées d'un pouvoir surnaturel, peuvent
leur en imposer, les effrayer, les tenir en respect et même les mettre en
déroute. Ces êtres privilégiés ne sont pas, comme on pourrait le croire,
des prêtres, mais bien de simples gens du peuple, individus à la vérité
quelque peu étranges, dont les allures bizarres révèlent une communion
liabituelle avec un génie.
Ces personnages ont le regard égaré, la figure émaciée, la voix rauque :
ce sont des sociers.
Pour quelque menue monnaie, ils consentent à se mettre en communi-
cation avec la puissance occulte qui leur est familière et au milieu d'une
mise en scène extravagante que les plus sceptiques, gagnés par l'effroi,
regardent sans riie, ils chassent le démon.
Leur intervention est surtout recherchée dans le cas où une maladie
résiste aux traitements lies médecins. D'après les croyances populaires,
l'Ail. It KNJOY. — t.r. >l'IHiri>MK KN CHINE 95
mil' «It'S fiiciilt<''s (les l^lspritss malins consiste ;i se g;lit-ser sournoiscmenl
dans le corps des èlres vivants pour y causer des désordres, provo(juer
des malaises, susciter des maladies et metlie en péril la vie même «If
leurs victimes. Chaque maladie a son démon. La langueur, l'anémie, Ks
pâles couleurs sont dues à des gnomes, (jui ont ouvert les pores de la
peau pour faire fuir par degrés la chaleur vitale. La fièvre e^t apportée
des régions souterraines par un farfadet qui souille dans la tête du malade
un des tisons soustraits au foyer infernal. Il n'y a pas jusqu'aux maladies
contagieuses et épidémiques, comme la variole, le choléra, la peste, qui
ne soient attribuées à la malignité des démons. En un mot, l'état de
maladie, c'est la possession par l'esprit du mal.
Kn vertu du pouvoir que lui confère le génie bienfaisant dont il est
animé, le sorcier va droit au mal et l'exorcise.
L'opération spiritiste se fait toujours de nuit, afin <ju'on soit certain
d'être en présence de l'esprit maudit, dont les ténèbres favorisent l'action
délétère. C'est dans sa toute puissance même qu'il faut le frapper.
Le sorcier, bizarrement accoutré, la tète surmontée d'un bonnet pointu,
la ligure maquillée de manière à lui donner une expression effrayante,
les sourcils allongés et relevés vers les tempes, les lèvres cerclées de
lignes blanches et noires, pénètre dans la demeure où il a été convié et
prend place dans une antichambre voisine du malade. Il s'assied tout
d'abord devant une petite table recouverte d'un tapis d'autel, sur laquelle
brûlent deux bougies et où fume un brùle-parfums. Il demeure un instant
[lensif ; mais il ne tarde pas à s'agiter, comme la Pythie sur son trépied.
lUenlùt ses mouvements s'accentuent, il se meut comme s'il galopait sur
un cheval fougueux: il fait des bons désordonnés que rythment, pour
ainsi dire, des exclamations rauques et gutturales. Sa poitrine est oppres-
sée, ses yeux s'enllamment, on voit croître en lui une émotion intense :
c'est le génie qui vient.
Enfin le possédé se calme un peu. Il parait transliguré et ses gestes
semblent embrasser l'horizon. Il parle; mais les mots (jue scandent ses
lèvres, appartiennent à un langage mystérieux que nul ne comprend.
Parfois cependant cet ignorant, cet homme du peuple illettré, surprend
ses auditeurs en s'exprimant correctement en langue mandarine, en Couaii-
Houa. Mais sa voix, d'abord posée, devient bientôt saccadée. Ses paroles
sont entrecoupées de hoquets nerveux ; ses mains s'agitent de nouveau
d'une façon désordonnée. Il tend les bras et par une mimique expressive,
explique qu'il désire un objet tranchant, pour sa bouche. Le geste est
compris par les assistants qui lui tendent un sabre. Aussitôt il s'en saisit,
le porte à ses lèvres et d'un coup sec, se fait une incision sous la langue.
Le sang qui s'échappe de cette blessure est recueilli dans un bol. Le
sorcier s'en sert comme d'encre, pour, à l'aide d'un pinceau ordinaire,
tracer sur des feuilles de papier jaune des signes cabalistiques qui, aux
dires des croyants, constituent des injonctions impérieuses contre les
Esprits malins.
Taudis qu'il écrit en bat-*, les assistants nhésitenl pas à dérober
m» in iKvitiKK iiMjr.
t|Ut.'l(|UL's-unes de ces IViiillcs pivcieuses pour leur usage personiiel. Ce-
pendant, le sorcier à fini de gritTonner. Alors, se saisissant de toutes les
feuilles miculées de son s;ing, il se It^ve et passe dans la chambre du ma-
lade. Celui ci a ('lé étendu ;i terre; sur une natte. (Jn a placé auprès de lui
deux grands candélabres dans lesquels brûlent des cierges rouges. Tout
autour de sa couche, on a jeté des [)apiers d'or et d'argent, on a jonché le
solde feuilles de prières.
Gambadant comnie un fou, autour du patient immobile, les mains
croisées sur la poitrine, le soicier hurle à pleine voix ; il jette une à une
ses formules d'exorcisme, dans une sarabande échevelée, fait un tapage
extraordinaire.
Pour accroître la puissance de son exorcisme, des gens s'évertuent en
même temps à frapper à coup- redoublés sur des tam-tam, des gongs, des
cymbales, sur tout objet sonore quelqu'il soit, et celte cacophonie sauvage,
que complètent les cris poussés à qui mieux mieux par les assistants
qu'entraîne le démoniaque sorcier, n'a d'autre but que de mettre en fuite
l'Esprit malin, en l'épouvantant.
Enfin, épuisé, ses forces vaincues, l'exorcisle pousse un grand cri aigu
spasmodique, se raidit et tombe à la renverse.
La cérémonie est terminée. On fait cependant boire au malade, par
excès de précautions, les cendres des papiers jaunes sur lesquels ont été
écrites les formules d'exorcisme, en les mêlant à une potion faite d'alcool
de riz et d'une infusion déplantes balsamiques.
Si la guérison ne survient pas dans les jours qui suivent, c'est que le
mauvais Esprit est plus tenace et plus pervers encore qu'on ne le suppo-
sait. Le danger n'en apparaît que plus grand pour le malade. On recom-
mencera donc, de semaine en semaine, les exorcismes jusqu'à ce que
le malade guérisse ou meure.
En temps d'épidémie, lorsque le mal s'étend sur toute une aggloméra-
lion, on procède de faeon dilïérente. La puissance néfaste est manifeste-
ment trop forte pour qu'on songe à la violence. On emploie alors la
douceur.
Dans les villages pauvres, on se contente de fabriquer un petit radeau
sur lequel on entasse des victuailles, principalement du porc dont les esprits
sont, paraît-il, friands, des gâteaux, des fruits, du vin de palmes. On
orne ce radeau comme un autel: on le surmonte de petits étendards mul-
ticolores en papier de soie ; on y allume des baguettes d'encens ; on y dé-
pose des sapèques d'élain et de cuivre. Enfin, on le porte, en grande
pompe, auprès du fleuve voisin. Après avoir attiré les Esprits malins de
la région par toutes sortes de paroles aimables, d'invitations déférentes,
de captieuses promesses, on les convie à goûter ce festin offert par la
commune. Quand on suppose .que les génies du mal ont été circonvenus et
que. glouton.^-, ils se hâtent de se repaître sans prendre garde au piège
qui leur est tendu, on abandonne doucement le radeau au cours du fleuve
C'est une façon polie de mettre le fléau à la porte ou plutôt de l'en-
PAll. DK.NJOY. - I.K SI'iniTISME EN IMIINK 97
voyer — ce qui n'est guère charitable pour le voisin — exercer ses ntialé-
lices ailleurs.
Dans les communes plus riches et lorsque l'épidémie ou la calamité
exigent, pour être conjurées, de plus grands sacrifices, on procède, à des
cérémonies somptueuses dans les pagodes. Ce sont les l*ou-ïou, rites pro-
pitiatoires, si la colère des Esprits est seulement appréhendée et qu'on
veuille éloigner tles malheurs futurs, ou expiatoires si le mal règne et
qu'on lente de désarmer les courroux des démons.
Les cérémonies de Pou-Touont lieu la nuit au milieu d'un grand con-
cours de peuplo, en présence des autorités de la région. Elles durent quatre
jours etcomporlent des illuminations publiques qui consistent en éclai-
rage des rues, des maisons particulières, des édifices publics et des
[)agodes avec des lanternes de papier colorié. alTectant des formes d'ani-
maux extraordinaires.
Durant toutes les cérémonies, les bonzes officient, revêtus de leur
l(jngue toge de soie jaune, ayant à leur tête celui d'entre eux qui, par
rimposilion du feu sur le crAne, a été proclamé saint et dès lors jouit du
privilège exclusif de porter une mitre dorée, semblable à celle des
évèques catholiques.
Le premier soir, ont lieu les cérémonies d'invitation. On apporte
d'abord un petit sujet en carton qui représente un homme à cheval. Un
bonze écrit en chantant une formule de politesse sur une feuille de papier
jaune qu'il roule ensuite et passe dans la main du fantoche. Muni de ce
libelle, le cavalier est jeté dans un brasero où il est incinéré avec sa mon-
tuie. Ce personnage représente l'ambassadeur que la ville délègue auprès
ilu trône de You-Houan, le dieu de Jade, pour l'inviter à la cérémonie.
Les mandarins du lieu vont ensuite se prosterner au pied des autels, y
déposent des baguettes de santal qu'ilsallumentet font chacun, lentement,
neuf génuflexions respectueuses. On apporte alors cinq tuiles, qu'on place
à terre, cote h côte, et qui figurent les régions infernales. Sur chacune
d'elles sont jetées pèle-mèle des silhouettes en papier, simulant dt»s Esprits.
Un bonze tourne autour d'elles en psalmodiant, brise tour à luur, à coups
de maillet, les cinq tuiles et emporte les silhouettes. Ce rite a pour objet
de détruire les obstacles rocheux qui pourraient empêcher les divinités
conviées de (juitter les entrailles de la terre pour émerger sur le sol de la
Commune.
Afin (i"indi(iuer aux Esprits la route à suivre pour venir à la Pagode,
on hisse, de loin en loin, aux arbres des environs, des globes lumineux sur
lesquels sont inscrits îles signes cabalistiques. Y a-t-il un lleuve dans les
enviions? On se rend en procession sur ses bords et on dépose sur ses
eaux de petits vases en forme de fleurs, qui portent des lampions et qui
constitueront les nefs sur lesquelles les Esprits pourront prendre place.
La seconde soirée est affectée à la réception des Esprits. Les invités sont
arrivés. On brûle en leur honneur des monceaux d'encens ; on incinère
des liasses de papiers dorés et argentés. Tout autour du temple, on a
dressé des boutiques en miniature oii trônent des mannequins en car ton,
suc. b'AMllUul'. l'JOti. 7
!»S i:» II'. VII II: Il lîKUi
patrons ot commis de ces magasins fictifs, (l'est là que les Ksprils sont
censés aller s'approvisionner de tout ce qui leur est nécessaire. Ils y
trouvent tailleurs, chemisiers, cordonniers, coilTeurs, barbiers, ))Pdicures.
On leur uiïre des vêtements complets, du linge, des chapeaux, des chaus-
sures, le tout liguré en papier et mis en étalage dans les boutiques de
carton.
On les comble aussi de victuailles. Ce ne sont sur des rayons superpo-
sés qu'entassements de fruils, de viandes hachées, de poissons salés et
fumés, pyramides de gAleaux île riz, montagnes de pains dorés, échafau
dages de pAtes molles multicolores.
On veille à leurs plaisirs, en leur consacrant une fumerie d'upiun» et
une maison de jeux, également en carton.
Dans un coin retiré de la Pagode, derrière des stores pudiquement
baissés, on leur a ménagé des appartements. D'un côté, les hommes ; de
l'autre, les femmes. Ces réduits contiennent des nattes de paille, des
oreillers de carton, des couvertures de chiffons. On y a aussi déposé
des jarres pleines d'eau pour les ablutions et des feuilles de papier qui
doivent faire office de serviettes.
Le troisième soir, a lieu la réception proprement dite. C'est le jour du
banquet. Les idoles de la Pagode y assistent, placées en cercle autour
de la table que servent les bonzes, ayant, en la circonstance, les fonctions
de maître d'hôtel. Le festin est des plus soignés. Tout ce que peut fournir de
plus raffiné la cuisine chinoise, y est apporté. Les Chinois se surpassent
en extravagances culinaires pour arriver îi capter les Esprits qu'ils veulent
se concilier.
Après la consécration du festin, qui se fait à l'aide de prières el de can-
tiques, on allume un immense bûcher sur lequel on incinère toutes les
offrandes, au bruit des feux d'artifice, au crépitement des pétards l't à la
lueur des fusées multicolores.
Enfin lequalrième jour, on donne un second repas, mais plus modeste,
aux Esprits retardataires et aux impotents, qui n'ont pu assister aux
agapes de la veille.
Les mêmes oITrandes sont faites. Toutefois leur quantité est moins
grande et il y a lieu de remarquer que cette fois, on multiplie les sauces
et les bouillies, attention délicate pour les Esprits fatigués qui ne pour-
raient goûter aux mets relevés et pour ceux des gnomes qui, décapités
de leur vivant sur la terre, ne peuvent qu'ingurgiter dans leur cou béant.
des coulis et des purées.
C'est ainsi que les maux sont conjurés, les épidémies "vaincues, les
catastrophes évitées. Si les Esprits sont satisfaits de la réception (jiii leur
a été faite, ils retournent à leur domaine infernal et le bonheur renaît
dans la commune qu'ils ont cessé d'infester.
Excessivement prompts à relever ce qu'ils croient être une injure à leur
puissance, les Esprits sont aussi éminemment jaloux du bonheur des
humains. C'est pourquoi il faut se bien garder de faire étalage de richesses
ou seulement se féliciter d'être heureux. Voici un père, qui, fier de l'en-
l'Ai (, d'iONJOV. — l,K >l'll!ll I^MK KN CIIINi: 91)
r.iiil (|iii lui L'sl né, v;u)tt' [»;itloiit sa uifïfc II lui a iloiiiii' un |)n'iinm
aiinal)lL'. Il l'appollc diamant, rusée, aiirurc, boulon dr lolus, giaino dur,
perle fine, par exemple. 0"''lle sollise ! (lette imprudi'nre siifTil ;i exciter
la jalousie d'un démon (|ui, a|ti)ccnant Ir bonheur de cdlf famille,
s'acharne aussitôt sur elle, y sème la discorde et les nialadies, y propage
la mort.
Aussi voit-on nombre de personnes prudentes donner aux nouveau nés
des noms de mépris ou des appellations dégradantes. Ce sont des laideurs,
di's chagrins, des pestes. Kn temps d(! choléra, le prénom de dysenterie
est des mieux appropriés : on le considère comme une sorte de talisman.
(In criminel est-il exécuté sui- la place publique? Aussitôt que sa tête
est décollée, les spectateurs s'empressent de pousser des cris discordants
pour faire fuir sa vilaine Ame. C'est évidemment un esprit malin de plus,
puisqu'il a commis un crime puni de la peine capitale et il y a tout lieu
i\o craindre qu'il ne hante maintenant ces lieux pour y faire des malé-
fices.
Dans les régions infestées de tigres ou de serpents, on élève de petits
temples à ces animaux divinisés. Ce sont des chapelles de bois en forme
di' niches, placées au pied de grands arbr<'s, dans lesquelles on dépose
quelques ossements de ces êtres redoutés. Soigneusement les bonzes de
la Pagode voisine y entretiennent des feux d'encens et chaque passant
jette une pierre contre l'arbre, de telle sorte (|ue bientôt le petit temple
est entouré d'une véritable pyiamide de cailloux.
In moyen d'apaiser les Esprits malfaisants consiste à leur immoler des
volailles. On prend un poulet, on lui ficelle les pattes et on le suspend,
la tète en bas, au bout d'une perche fichée en terre. Ceci fait, on se met
à le plumer tout vif, en invoquant les démons auxquels on fait complai-
samment l'éloge de la chair de la victime. Quand on a suffisamment
excité la convoitise de l'Esprit et que l'animal est entièrement plumé, on
lui tranche le cou et on laisse le sang dégoutter sur le sol.
litres humains dégradés et damnés, animaux sauvages et féroces, bétes
apocalypli(|ues, tout un monde grouillant de créatures maliaisantes
habite, selon la croyance populaire, dans les entrailles de la terre et ;i sa
surface. Le peuple chinois, comme un enfant maladif, imagine les démons
les plus hideux, serpents à mille tètes, lézards à gueules eiïroyables,
éléphants et mastodontes épouvantables. Le ciel lui-même est peuplé par
son cauchemar d'animaux fantastiques dont il croit voir les formes dans
les nuages. Il divinise jusqu'il la pluie et au vent, dont il fait le dragon
et le phénix.
Le dragon, en ei'i'el, repr<''scnl(i la pluie. On le figure comme un animal
à tête de tigre et au corps de serpent. La gueule ouverte laisse échapper
des trombes d'eau et des tourbillons de fumée noire. Il a des dents mons-
trueuses, longues et acérées, des yeux en boules semblables à ceux des
homards, qui lancent des éclairs et se meuvent comme des projecteurs
éleclriques. Il porte sur le front deux cornes giratoires qui tournent en
sifllant lorsqu'il est en colère. Son corps; souple et ondulcux, se compose
100 15 i-i:vuiKit ll»Or)
de mille anneaux fiiniunls, qui se lordenl au milieu de flammes bleuâtres.
Il glisse, il rampe ;i travers les nuages et, s'il est irrité, il avance par
bonds, en se servant tantôt de ses deux courtes pattes aux cinq grifîes
crochues, tantôt de ses ailes en forme de nageoires. Alors, c'est le typhon.
Humide et suant, il passe dans une trombe et ses mugissements sont ceux
de la mer en furie.
Le dragon est le dieu des nuées. C'est à lui que le peuple adresse des
prières durant les périodes de sécheresse. C'est lui également qui a les
honneur-; de la procession annuelle du premier jour de l'an; au cours de
laquelle, dans l'espoir de pluies bienfaisantes, on promène avec pompe, à
travers les rues populeuses, son image en carton et toile |teinte, soutenue,
agitée, secouée par mille coolies en délire, aux applaudissements de la
foule joyeuse.
Le phénix est un oiseau au riche plumage. Ses plumes sont teintes des
cinq couleurs chinoises fondamentales : noir, rouge, azur, blanc et jaune.
Cet animal a un chant mélodieux, comparable au son de la flûte. Il est
infiniment doux et bon par nature, mais très susceptible. Contrarié, il
appelle le dragon et tous les deux, s'unissanl, déchaînent des tempêtes.
Au calme, le phénix représente la brise; à l'étal de mécontentement, c'est
le vent plus ou moins violent; dans l'irritation, c'est le cyclone.
Par flatterie, on assimile l'empereur de Chine au dragon et l'impéra-
trice au phénix.
Telles sont, dans leurs principaux traits, les superstitions chinoises,
issues du panthéisme déformé de Kon-Phou-Chéou, du Laoséisme aggravé,
du Bouddhisme matérialisé et de toutes sortes de pratiques de sorcellerie.
Il faudrait écrire dt.'s volumes — et ce serait une œuvre fastidieuse — si
l'on voulait noter toutes les croyances spiritistes de ce peuple. Ces fan-
taisies sont si nombreuses et si confuses qu'elles se contredisent les unes
les autres : mais le vulgaire les accueille toutes, avec la même faveur, les
yeux fermés. Il aime ces inventions macabres, en savoure le mysticisme
puéril et frissonne à l'évocation de ce monde imaginaire, parce que son
esprit vieillot s'accommode mieux de la légende que de la vérité et que,
comme pour les êtres humains dans leur individualité, il est un âge où les
peuples reviennent à l'enfance.
l-a Chine est bien vieille! Renaitra-t-elle comme le Phénix?
I,^;^,Y. — PIERRES LEVKES ET FIGURES HUPESTRES IH' TAf.ANT 101
PIERRES LEVÉES ET FIGURES RUPESTRES DU TAGANT
I'ah m. E.-T. Hamy.
M. Robert Arnaud, qui .'liiit attaché à la mission qui vient d'explorer
une partie de la Mauritanie, a recueilli, chemin faisant, dans le Tagant,
quelques observations ethnologiques (ju'il a bien voulu me communiquer
.'t dont l'intérêt m'a paru considérable. D'une part, en effet, il a relevé
des alignements de mégalithes fort curieux et d'une autre part, il a pho-
tographié un certain nombre de figures rupestres qui marquent la limita
orientale et méridionale de cette épigraphie particulière.
1
Les mé>,'alithes, observés par M. Robert Arnaud, se dressent dans le
iieu dit Zirt-el-Ilaïch, entre les restes de construction, désignés sous le
de Ksar-el-Rarca et le passage de Dikel dans la barrière du Tagant. Ce
sont des dalles de grès, sorte de stèles grossières, arrondies au sommet et
(jui mesurent en moyenne \ m. 20 de hauteur au-dessus du sol, 1 mètre de
largeur et 0 m. 40 d'épaisseur. Leur face regarde le Sud, elle est à peu
près lisse et ne porte aucune trace de caractères. Huit de ces pierres sont
plantées en une sorte de quillier aux pièces équidistantes (on mesure
environ 2 m. 50 d'une pièce à l'autre) auquel manquerait celle du Nord-
Ouest reportée en avant et au milieu de la face occidentale. Entre cette
dernière pierre ainsi fichée à 2 m. 50 au-devant delà médiane et celle qui
marque l'angle Sud-Ouest, on en voit une neuvième, a demi-tombée et que
notre observateur es!ime avoir été charriée là par les eaux. Ine dixième
et dernière pierre, de même forme et de mêmes dimensions que les neuf
premières, gît à 4 mètres dans le Nord juste au milieu de la rangée cor-
respondante.
Cet ensemble de pierres debout, qui parait ancien et au sujet duquel
notre informateur n'a rien recueilli de particulièrement instructif, m'a
rappelé, dans une certaine mesure, les S'nobs des Denhadja que ces mon-
tagnards dressaient encore naguère dans un certain ordre sur les hauteurs
qui séparent l'Oued Aïn el 'Haleb de l'Oued Khamis, et que leurs voisins
les Ouled-Meçaoud et les Hazelsa s'acharnaient à renverser et à précipiter
dans les ravins, quand ils étaient vainqueurs de ces adversaires, réputés
des Djouhala, des pa'i'ens.
Aussitôt la paix rétablie, les Denhadja s'empressaient de relever leurs
pierres sacrées et Sergent auquel j'emprunte ces renseignements a encore
vu en 1870 un certain Snob Gossem, érigé par ces indigènes en l'honneur
!•>- In FKViiiKii IHOd
de leur ancéliv le plus c<Mèbre el qui dressait au milieu de leur cimetière
sa masse enfoncée de 0 m. 30 el qui atteignait 1 ni. 20 au-dessus du sol '.
II
Les roches peintes ou gravées que M. Robert Arnaud a découvertes et
photographiées, s'accumulaient au voisinage des sources de l'Oued-
Garaoual. Le ruisseau qui porte ce nom sort d'une gorge très étroite entre
d'immenses roches verticales el ses eaux abondantes se précipitent sous
bois de bassin en bassin jusqu'à la plaine d'Aflout. Cl'est sur ces hautes
parois de pierre naturellement dressées que le voyageur, qui allait
rejoindre par ce chemin dilficile ses compagnons parvenus à El-Haous-
sinia, a reconnu la présence de ligures nombreuses et variées, plus inté-
ressantes, il faut bien le reconnaître, parleur situation géographique que
par leurs caractères intrinsèques. On n'y distingue, en effet, que des
représentations déjà connues ailleurs et parmi lesquelles je retrouve tout
d'abord un bouclier dans le genre de celui (ju'a vu Nachtigal ;i l'enn^^ii
Oudèno, près du Val Bardai, au Tibesti *; la croix à double contour
est remplaeée ici par un large pointillé.
Trois ou quatre guerriers, représentés isolément sur la même roche
de Garaoual, sont armés de boucliers analogues et brandissent im javelot
au bout d'un bras démesurément allonsé.
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Figures, rupestres des sources de Garaoual.
(D'après les photographies de M. R. Arnaud.;
Des cavaliers figurent sur la même pierre, montés sur des quadrupèdes
que le cou allongé et les jambes très longues feraient prendre au premier
abord pour des chameaux, mais que l'absence de bosse et certains détails
• Cf. Bull. Soc. d'Anthrop., 2o sér. T.iV., p. 54-5;.. 1870.
' D' G. Nachtigal. .S'o/ifl/Y/ et Soudan, trad Ir. T. I, p. 178-179. Paris, 18«l, iu-8».
IIAMY. — l'IKIlHKS I.KVKES KT KKilllKS III PESTIIKS l»l ■rA(iAM |(IM
(le l;i tête ou de la queue inonlrenl bien tUre des équidés. L'un de ces uni-
maux de trait porte une selle d'une forme encore restée dans le pays. ■
Je vois encore sur la photographie de M. 11. .Arnaud une autruche bien
re'.'onnaissable; un ovale orné d'une croix, canlonnée de quatre points et
encadré d'abord d'un bord strié, puis d'un large cercle pointillé : notre
explorateur croit y retrouver l'image de la tortue terrestre, de môme qu'il
rapproche du caïman (|ui abonde dans les bassins de r()ued une singu-
lière ligure oclopode formée d'un corps cylindii(|ue d'où partent des
deux côtés des traits obliques en avant, puis en arrière. Ces rapproche-
ments me paraissent malheureusement (JiHiciles à admettrt\ je ciois i|iri|
vaut mieux, pour l'instant, s'abs!enii' de commentaires.
.\ucun signe ne rappelle dans tout cet ensemble de ligures les al|>liabt'ts
berbères, anciens ou actuels.
.le le répète, en terminant cette courte note, ces dessins rupestres de
roued-tîaraouel sont surtout intéressants par l'emplacement où ils ont
été rencontrés. On ne connaissait jusqu'à présent aucune figuration de ce
genre au Sud des itinéraires du rabbin Mardochée dans le Sous-.Maro-
cain '. M. K. .\rnaud a donc marqué les étapes les plus méridionales des
auteurs de ces décorations rupestres dont M. Foureau limitait récemment
l'aire géographique au puits de Taghazi et à l'Oued -Tidek dans le Sahara
Central, tandis que le lieutenant Luigi Talainonti fixait en Erythrée celte
même frontière vers Culliléet Dinaé dans la basse vallée de Baica *.
' Cr. H. DuvEYRiKK. ScuJ/)lures antiques de la prorince marocaine de Sous,
(lécourei-tes jtar le rabbin Mardochée (Bull. Soc. de Géoqr. VI' sér. T. XFI, p. 129,
* F. Foureau. D'Alger au Congo par le Tchad. Paris, 11)02, 1 vol in-S», p. 151-
136. — CONTI KOSSINI CarLO. Docunienti per iarcheologia erilrea iwlla bas.sa
rallf del Barra. Koina, H. Ace. ili Liiicoi, 1003, br. in-8', p. 'i, .S .t 10.
ml iï) KKvmi;» i'.KJ»)
SURVIVANCES ETHNOGRAPHIQUES
L'écorçoir dans les Ardennes, l'Indre et l'Yonne.
l'Ait M. .). IlliliEMr,
lnspeel''ur au Miisr--- d lillino^irapliie du Trocaderu.
Dans une courle cominunicilion, .uJressée à la Société d'Anthropologie
lie Bruxelles, le 29 décembre IHDJ, M. le tlapitaine Delvaux décrivait un
instrument d'un caractère très primitif qu'il avait vu manier quelques
années auparavant par des hii ;herons dans le bois d'IIavré, près de Mons.
C'était un radius de cheval, détaché du cubitus, et taillé en biseau à un
tiers de l'extrémité distale. Une lame de couteau en fer se trouvait em-
manchée à 2 centimètres environ sous le bord de l'articulation huméro-
radiale. M. Uelvaux n'avait pu que dessiner exactement l'exemplaire qu'il
avait vu et en construire un identique pour sa démonstration à la Société
belge d'Anthropologie, en substituant toutefois une lame de couteau en
silex à la lame de fer pour restituer dans son état primitif l'instrument
préhistorique.
Le Musée d'Ethnographie du Trocadéro montre, dans une des vitrines
de sa section française, une collection d'outils exactement semblables à
celui d'Havre venant de la forêt des Ardennes; suivant M. Mélard, qui
nous envoyait le premier en 1888, ils sont tombés en désuétude vers
1870. A l'appui de sa lettre d'envoi M, Mélard joignait quelques mots
extraits du « Cours d'exploitation des bois » par H. Nanquette, Nancy,
1859.
ilSS^:
Morvan.
#■
Indre.
« Dans les taillés des Ardennes. dont les écorces sont renommées, on
HKftFJa. — vi'RVIVANr.ES ETIINur.RAPlIIOrES 105
procède avec beaucoup ilo soin à l'exlraclion «le l'écorce. I /ouvrier se
u sert à ct'l elVel tl'un iiisliiiinonl en us ({ui se lompuPt' d'un libia de
(' cheval taillé en hiseau par l'une de ses oxlrétnités, el armé tJ'une lame
courte, forte et hien tranchante à l'aulre extrémité, elc , etc. <>
(]'est donc un écorroir, appelé » pi-lone » en langage wallon des Ardennes,
d'aprt's les renseignements fournis par M. le (lommandant W'aulliier,
par l'entremise duipicl M. l'acut a olVeit un nouvel instrument en 1889.
Les autres ont été envoyés en 1888 au Musée par M. Durocher, Conser-
vateur des forêts ;i Charir'ville.
Nous avons donc à notre disposition G instruments venant tous des
.Vrdennes formés de 4 radius gauciies, et de 2 droits. La longueur varie
de 25 à 35 centimètres, la largeur de 0,07 cent, à 0,095 mill., une des
extrémités taillée en chanfrein, de manière à opposer le biseau à la cour-
bure de l'os. La longueur de la partie polie varie de 0,08 cent, à 0,H5
mill., la largeur de 0,046 mill., à 0,06 cent., à la tranche. Le biseau est
taillé sous un angle variant de \8" à 25<'.
La partie supérieure de l'os est armée d'une lame de fer, probablement
d'un couteau, placée plus ou moins obliquement, la saillie de l'os est cou-
pée droit, le fer apparent est de 0,03 à 0,04 centimètres de longueur, et
de 0,016 à 0,022 mill. de largeur, cassé carrément sur 3 outils, en pointe
triangulaire sur 2, et arrondi sur 1. Ces lames de fer sont maintenues par
une sorte de gomme dans deux instruments, sur un autre la lame est
tenue par un morceau de cuir. Les autres fers sont enfoncés à force; dans
l'un d'eux, la soie dépasse et est rivée sur l'os, et le fer a, dans toute sa
longueur, 0,105 mill.
Ces outils, débarrassés des saillies, taillés el limés, sont bien en main.
Il est intéressant de constater que cette industrie primitive ne se ren-
contre pas exclusivement dans l'ancienne forêt des Ardennes. On a en
effet signalé des engins analogues dans les Cotes-du-Nord, où l'oscorn
ffliV servait encore tout récemment au décorticage des jeunes chênes '.
.M. Doré-Delente a signalé des pi'loirs à écorce employés naguère dans les
forêts de Dreux, de ChAteauneuf-en-Thimerais et de Seneuches *.
En voici enfin deux encore, l'un venant de l'Indre, l'autre, de l'Yonne,
où déjà M. Salmon en avait vu de pareils ^
L'instrument de l'Indre dépourvu de fer, sert, d'après M. Reauvais son
donateur, « à faire de l'écorce au printemps, el se nomme leverette ou
chevrette ». Il est plus petit que ceux des Ardennes. La longueur est de
0.21 cent., la largeur de 0,065 mill., la longueur du biseau est de 0,07
cent., la largeur de 0,038 mill., et un angle de 20".
L'instrument de l'Yonne aussi en os, beaucoup plus petit et de forme
' P. AuBRY. — Ecorçoiv moderne en os. Bull. Soc. d'Anthrop , IV série, t. IV,
p. 201, 1893.
* Dore-Delente. — Erorçoir en os. Ibid , t. III, p. 199, 1892.
' Ibid., p. \m.
soc. d'anthhop. 190G 8
406
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E.-T. IIAMV. — IJL'ELUIES MoTS Slh M. Cil. l'IKlREUKNT lOT
un peu dill'éreiite a élt^ doiiiié au Musée par M. Landrin et vient du Moi-
van. La longueur est de 0,175 luill., la largeur 0,03i luill.; la longueur
du biseau de 0,1-2"» inill., la largeur de 0.02'J niill., et un angle irrégulier
d'environ 10".
Je joins à cett.' euiirte note un pîtit tableau (jui réunit les diverses
mesures de ces buit outils aux allures prébistoriques et deux ligures qui
reproduisent les dernières de ces pièces, les autres répétant exactement
celle que M. le Capilaiii.' D.'lvaux a figurée dans le lUilb'tin de
Uruxell.'s.
m' sÉ.wc!-:. — I'' Mars lyui).
PuKSHtKNr.E i)i; M. IIamv.
QUELQUES MOTS SUR M. CH. PIETREMENT
Wkh m. K. t. Hamv.
Président de la Société.
La Société d'Anlbropologie vient de faire une perle très sensible en la personne
de M. Charles-Alexandre I'iétrement. ancien vétérinaire eu 1*^ au 5" régiment
d'artillerie, ancien président de la. Société Centrale de Médecine-Vétérinaire,
membre honoraire de llnslitut égyptien. Chevalier de la Légion d'hon-
neur, etc.
Le regretté défunt a succombé le 15 février à l'âge de 81 ans, après avoir
fait partie de notre Compagnie pendant près de trente-deux ans. Il avait été
nommé membre de notre Comité central dès 1885.
Ce collègue très aimé et très estimé est demeuré jusqu'à la lin de ses jours
un de nos membres les plus fidèles et les plus assidus et, malgré son grand Age,
il présentait encore, il y a quelques mois à peine. îi la Commission de publica-
tion un mémoire d'une certaine étendue imprimé dans notre avant-dernier
volume.
Les Bulletins de la Société d'Anthropologie cdiitienn. ni un grand nutiibre
de travaux dus ;"» sa plume infatigable et consacrés pour la plupart à l'his-
toire du cheval, depuis la note qu'il rédigeait sur les ossements de Solutré
en 1874 jusqu'il ce mémoire de 1905 que je viens de rappeler et (jui étudie les
races cherali/tes dans l'espace et dans le tem/js.
Piètrement a été le savant et persévérant historien des (;bevaux ; il s'occupait
déjà de ces études aux lanciers de la garde sous le second Kmpire et c'est un [)eu
avant la guerre qu'il a donné son premier livre sur les Origines du cheral
domestique. Il faisait paraître les années suivantes deux mémoires curieux siu- les
Chevaux dans les textes védiques ; en 1872. il éditait ses recherches sur V Intro-
duction du cheval en Chine, insérait en 1875 au Recueil de Médecine cétèri-
408 1*^^ M vit- i'.>on
nairt' srs y'nurrau.r ducunu'iils sur i/Uf'/(jucs poinls ih' ihislnire du cheval
depuis les temps p(ilf'iut(ol<if/i</ut-s, ciilin <'l siirloul il ri-siimait vingt longues
unnt't's tlf lîiln'urs dans < i- vnlnniinrux (luvi-uge île 77<) pages que connaissent
et |tralit|nent Ions les lii|i|ii)|(igiies el (|iii es! intitulé: Les cheraur dans les
temps prehistiiriques et /listu/ii/ues (ISS.'ij.
Léniilition |iarlieuiière île l'ictirmrnt éliiil vraiment exre|iliunnelk* el ses
éeril> spéciaux (ii'nieiirei'nnl penilanl luniileiniis iiassii|ues.
I.'inhuniation de notre regrellé collègue ayant eu lieu dans lu plus stricte
inliniilé. votre Président n'a pu coninie il l'ei'it désiré, rendre un public
lionnnage à sa niénioire. Mais votre bureau s'est fait votre interprète auprès
de sa veuve en lui adressant l'expression des plus vils regrets et des plus
respectueuses synipatliies.
M. le Président annonce, en outre, la mort de M. Jan.-Nep. Woldrich, doc-
teur en philosophie, professeur de géologie et de paléontologie et ancien doyen
de la Faculté de Philosophie de l'Université Charles-Ferdinand de Prague,
membre d'un granil nombre de sociétés d'Anthropologie et notamment de celle
de Paris dont il avait été nommé associé étranger dès 1878. M. AN'oldrich a
succombé le 3 janvier dernier à l'âge de 72 ans et le Sénat de l'Unniversité
lait part officiellement de cette perle à notre Compagnie.
LES FOUILLES RÉCENTES DANS LES CYCLADES ET EN CRETE
Par m. René Dussaud.
{Communication à la Société d'Anthi-opoloyie le 15 février 1906 )
J'ai visite en Crète, au printemps i905, le site de Cnosse rendu célèbre
par les découvertes de M. Arthur Evans et de ses collaborateurs (Mackensie,
llogarth, elc.j, membres de l'Ecole anglaise d'Athènes, les sites de Phaeslos
et de Ilaghia Triada fouillés avec un égal succès par la mission italienne
dirigée par M. llalbherr avec la collaboration de MM. Pernier, Savignoni
et Paribeni. J'ai étudié les objets conservés au musée de Candie et confiés
aux soins éclairés de MM. Hadzidakis et Xanthoudidis. Les vases en
métal, pierre ou terre cuite, les sculptures, fa'iences, fresques, bijoux,
armes, sarcophages, tablettes inscrites, cachets ou empreintes, etc., de
l'époque préhellénique, réunis dans ce musée incomparable, proviennent
des fouilles de Cnosse (Evans), Phaestos et Haghia Triada (Halbherr),
(journia imiss Boyd), Zakro (Hogarth), Praesos et Palaekastro (Bosan-
quet), {laghios Onouphrios (Evans), Koumasa, Axos, Artsa et Mouliana
(Xanthoudidis), de la grotte du Dicté près Psykro (Hogarth), de l'antre de
l'Ida (Syllugue de Candie, publication par Halbher et Orsi), de la grotte
de Kamarès sur le versant sud de l'Ida, etc.. On trouvera (es noms de
lieux sur la carte que nous avons dressée (Fig. 1).
Je n'ai pas l'intention dans cette note de revenir sur l'exposé des
« DL?SALD.
LE.> KOLILLEs RECENTES DAN? I-Ei i;Vi;L.\IjE^ ET EN CIIKTE
io:>
fouilles ', ni sur la description dôtaillcc des nionumenls. Il me sullira
d'en faire passer (luelques-uns devant vous ' au cdurs d'un rapide exposé
chronologique et de dégager ensuite les grands faits qui, dès maintenant,
s'imposent.
1j Cinrf
C 5*M0NI0(;
<21 Qs.i.
fig i_ _ Lii.E PE Crètk. — Sites: I, Antre do Zoiis Ilaio,; 1. Grollc do Kaiinrès;
3.Haglii03 Ononfrios; 4, llagliia Triada; u, Grotte du Diclô(l'sykTO^ ; fi, 8pinalonga ;
7, Hagliios Nicoluos, à dislingutT d'une localité du nicme nom près raliokostro;
8, Vasdiki ; U, Uolfc de la Sude; 10, Milalo; 11, Arklianès.
Aux révélations fournies par la Crète avaient préludé les découvertes
de Phylacopi dans l'île de Milo. Ducs à ri':cole anglaise d'Athènes, elles
ont fourni, pour la première fois, une série complète des céramiques
égéenne, minoenne et mycénienne, en un mot de tout l'àgc du bronze
dans les Cyclades. Trois villes superposées ont été reconnues sur le site
de Phylacopi. La première a été édifiée vers la Un de l'époque énéoli-
Ihiqae; la deuxième pendant le plein ;\ge du bronze, c'est à-dire à la
belle époque crétuiseou minoenne; la troisième ville est d'époque mycé-
nienne. J'uis le site fut déserté et cessa d'èire occupé '.
Les Cyclades n'ont pas été habit-'es à lépoque néolithique ou, du
moins, à cette époquo, ipielqurs familles suffisaient pour exploiter les
gisements d'obsidienne dans l'iji' de Milo et pour approvisionn<M' un com-
merce restreint. L'usage des couteaux en obsidienne s'est développé k
l'époque énéolitbique et s'est perpétué pendant tout l'Age du bronze.
A rencontre de ce qui s'est produit pour les Cyclades, la Crète donna
asile à l'homme dès répoijue néolithique. Le site de Cnosse a fourni une
< Col exposé a été f.iit avec autoril.' par .\I. Salomon REiNACudans V Anthropologie.
particulièrement depuis 1002. Voir du mùuio savant, Apollo. i- l<.;oii. M. K Imond
POTTIEK a Irailt'î do ces découvorlos dans la /{crue île Paris cl la Revue de l'art an-
rien et moderne de 1002. Consulter ét^alemeni rexcollonle otudo do nolr^ colloque,
M. Edouard Fourdrignier, Les étapes de la céramirjuf- dans Vnntiquitè, dans nos Bul-
letins et Mémoires, 1903, p. 2*'2-2'i.'5.
' Une trentaine de projections ont permis do monti- r lo.s sites cl les niMunnionls
les plus remarquables.
' Pour plus do détails, nous nous perm .tlous do renvoyer à noire arliolo sur La
cirilisation prehelh-nique dans les Ci/clades. dans Revue de l'Ecole d'Anilirnnoln,,io,
1906.
110
1" MAlt< 1900
couchr de débris nt'(»lilhi(]uos qui alleint jusqu'il 8 mètres par endroit.
La céramique mal cuite, faite à la main, est décorée de traits et de points
incisés, parfois avec insertion de matière blanche (Fig. 2). Ce dernier
V \
m
Fig. 2 . — Céramique néolithique de Gnossc. Musée de Candie. Croquis de l'auteur.
détail se rencontre surtout dans le néolithique moyen. Parmi les objets
découverts il faut signaler une statuette primitive féminine de type sléa-
topige avec des>in incisé {Fifj. S) et dans la pose assise des statuettes bien
connues de Hagiar Kim ;i Malle '.
Les Cyclades furent colonisées à l'époque énéolithique qui corresj^ond
au début de l'époque minoenne. Les tombc^
signalées à l'aros, Oliaros, Amorgos, Milo,
Siphnos sont du type connu par ailleurs :
fosse peu profonde, revêtue de six dalles, le
corps posé sur le côté et accroupi. Le mobi-
lier très simple consiste en vases de marbre,
pierre ou terre cuite grossière polie ;i la main
Fiij. 3. — Slatneties iroiiyèes gj incisée de dessins géoméirinues. On v a
.lans la couche ncolilhiquH. . . ^ . ,., , .j. ,•,,',
àCnosse. C-llede gfiuihe en jomt des oul\ls en obsidienne, des inolcs dr-
uiarbre, celle de droite en jg |^ ^q^^q dite en violon jusqu'à la statuette
tinrccuite. Musée de Gindie. ' •* ^
Croquis de l'auteur. figurant unedéesse aux bras croisés, rarement
des armes de bronze. Ces tombes s'étendent pendant toute l'époque énéo-
lithique jusqu'aux débuts de la céramique peinte, c'est-à dire jusque dans
les premiers temps de l'âge du bronze. Les tombes de Syra, où les dalles
posées de champ sent remplacées par de petits murs en pierres sèches
posées en encorbellement, appartiennent à l'époque la plus récente.
On a découvert dans l'e.Ktrème est de la Crète, près de Pa!aekastro, a
Hagliios Nikolaos une grotte à inhumation qui remonte à l'époque
énéolithique et à Houssolakkos un ossuaire un peu plus récent. En ces
deux points on a pu étudier le type de l'ancienne race dite méditer-
ranéenne. M. Duckworlh a calculé que la taille moyenne des représen-
tants de cette race était de I mètre 623 '.
Avec l'âge du bronze proprement dit, nous trouvons en Crète et dans
les Cyclades les premières constructions en pierre. Le bronze sert à fabri-
quer <les poignards h lame courte et encore triangulaire. Le décor peint sur
engobe apparaît en céramique, mais il reste géométrique. Un des rcsul-
« WelCH. — Annu'il nf the Bristixh Srhnnl, Vf. p. Sil — KvanS. — Mnn, 1901,
p. 184 et s.
2 British School Annual, I.X, p. 330.
R. Dl'SSALD. — LE> Knl n.LK> HKCENrES DANS LES CVCLADES ET EN CHÈTE I I I
tats les plus imporlanls des fouilles de Phylacopi est d'avoir montré que,
bien avant le style mycénien, on avait pratiqué un décor géomélriquc
l>eint (]ui transpose et compliijue le primitif décor incisé de l'âge énéoli-
thique. La première ville de Phylacopi pendant la(]aelle apparaît le décor
géométrique peint est de peu postérieure à la deuxième ville d'Ilissarlik
(Trftie préhistorique).
M. Evans, dont nous suivrons la classilicalion, divise les couches archéo-
logiques du site de Cnosse faisant suite au néolithique, en trois grandes
époques : Minoen ancien, Minoen moyen, Minoen récent. Chacune de ces
époques est divisée en trois périodes marquées par l^s chiffres romains,
I. Il, III.
Le .Mi.voEN ANciE.N I n'*'sl aude que rénéolilhicjue. M. l'Jvans le croit
contemporain de la première dynastie égyptienne.
Le .MiM)EN ANciK.N II Voit apparaître, dans les par[i(^s les plus anciennes
du dépAt de Haghios Onoufrios, les sceaux en marbre, ivoire ou pierre
tendre de forme conii|ue ou cylindri(]ue. Le décor, souvent spiraliforfiie,
imite le décor des scarabées égyptiens très anciens.
Il faut classer à cette époque une des plus remarquables dc'couvertes
lie la missirin italienne à Haghia Triada : une tombe circulaire sous voûte
dite en forme de Iholos '. Son diamètre est d'environ neuf mètres et on y
accédait par un cduiI ih-onms. ilurs de la tholo>, mais en co.nmtinicatioi)
avec elle par le moyen du dromos, on a mis à jour un groupe de dix
pf-tits réduits. Tholos et ri'duils étaient remplis de squelettes littérale-
ment entassés les uns sur les autres. Les ossements étant extrêmement
friables, ce n'est qu'approximativement qu'on a compté deux cents sque-
lettes dans la tholos et une cinquantaine dans les réduits. Ils ap[)arle-
naient à des hommes, h des femmes et à des enfants. Fait à noter, l'usage
de sarcophages en terre cuite a été constaté dès celle époque reculée,
l'après AL llalblierr, ce serait à l'imitation des pratiques égyptiennes. Il
est certain que les sarcophages en teri'C cuite sojil imoiinus à I ancienne
civilisation cycladique.
La trouvaille a fourni un grand nombre rie coquillages déposés pour
servir de nourriture aux défunts. La vaisselle (vases en marbre, sléalile,
granit, terre cuite) et les armes de bronze (lames de poignards la plupart
triangulaires I sont en partie semblables à celles des tombes primitives des
Cyclades et d'.Amorgos. La décoration des objets, particulièrement celle
des cachets, évoijue le décor on faveur sous l'ancien empire égyptien.
I n lot important de cachets en ivoire, os, stéatite, pâte blanchâtre et terre
cuite, confirme les conclusions tirées par M. Evans dans la trouvaille
d'Haghios Unoufrios : les dessins sont imités des cachets en forme de
' Halbherh. — Rapporta .. sugli scavi e^egniti dalla Missione avvh. italiana ad
Haghio Triada et n Fesfo upW anno 1904, dans Mémoire del lî. /nstituto lombarde,
XXI, fasc. V, Milan, lOOo.
112 r^ MAiv^ lUOG
lioiilons liouvés dans les dépôts égyptiens delà IV" dynastie cl suivantes.
l*anni les slaluoltes en stéalite et alabastre, une série s'écarte du type
des Cyclades pour se rapprocher des figurines trouvées dans la Haute
Egypte et les tombes libyques; elles ont l'aspect de momies. On a trouvé
peu d'or, quelques objets d'argent, des ornements de colliers en ivoire,
stéalite, cristal de roche; enfin, une grande quantité de lames d'obsi-
dienne. Mieux que toutes les découvertes faites jusqu'ici cet ensemble
funéraire allesle l'influence de l'Egypte sur les débuts de la civilisation
Cretoise.
Au MiNOEN ANCIEN III apparlicnncnl les objets les plus récents du dépôt
de Ilaghios (3noufrios. Les cachets sont le plus souvent triangulaires et
en pierre tendre. On y relève des signes pictographiques d'un type pri-
mitif.
Le MiNOEN .MOYEN correspond au plein .'Igc du bronze, ci la deuxième
ville de Phylacopi et à l'époque la plus brillante de la civilisation Cretoise.
Il rst caractérisé par l'emploi de la polychromie en céramique. L'orange,
le vermillon elle blanc sont posés sur un fond noirâtre; le décor est
angulaire ou spiraliforme, souvent aussi emprunté au règne végétal. Ce
sont les beaux vases aux formes et au décor extrêmement variés dits
vases de Kamarès parce que les premiers exemplaires ont été découverts
dans la grotte de ce nom sur le mont Ida. L'écriture pictographique de
l'époque précédente prend dans le Minoen moyen une forme convention-
nelle dite hiéroglyphique.
M. Evans caractérise le Minoen moyen II par la construction des premiers
palais de Cnosse et de Phaestos. Quelques objets égyptiens trouvés à ce
niveau, ainsi que l'imilation par les artistes crétois de motifs égyptiens,
établissent que le Minoen moyen II est contemporain de la Xll° dynastie
égyptienne '. C'est la belle époque des vases de Kamarès faits d'une
argile très fine prenant à la cuisson un ton jaune clair. Le décor est
posé en divers bruns et rouges, aussi en blanc, sur le fond d'un noir plus
ou moins franc. Parfois le jaune clair de l'argile cuite est réservé.
Le céramiste ne craint pas de combiner le relief avec le décor poly-
chrome dans un procédé à la barbotine. Les pièces les plus abondantes
sont des gobelets ii une anse. Il faut signaler les belles aiguières à trois
anses et des vases à deux anses larges et peu profonds aux bords déli-
catement ondulés. La richesse et la variété de ce décor sont tout à fait
remarquables. Le Minoen moyen II prend fin sur une catastrophe qui
amène la ruine des premiers palais de Cnosse et de Phaestos.
Le Minoen moyen III voit élever les seconds palais de Cnosse et de
Phaestos {Fiy. //), ceux dont les ruines remaniées sont aujourd'hui dé
♦ On sait que le septième roi de la XII« dynastie régnait vers 1876-1872 avant
notre ère.
• n. DL»AII). — l-K> nu 1LI.K> HKCKMKS DANS LES GYt:LM»E,'> KT KN iMllMK 113
blayëes'. La crrainiijue pol><"hromo se transforma : l'urange, le vermillon,
le carmin |.Mi<l.'nt A disparailre et font place ;ui «l-'-.or blanc sur fond lilas
ou mauve.
/Viy. 7, — Couloir iiiiiicipal du l'aluis du l'iiaubluû.
Au second palais de Cnosse appartiennent les plus anciennes sculptures
misps au jour par les fouilles de M. Evans; en particulier une série d'objets
en faïence fabri(jués dans le palais même et qui prennent rang parmi
les œuvres d'art les plus reinanjuables découvertes en Crète. L'une d'elles
est déjh célèbre sous le nom de «déesse aux serpents ». J'ai essayé ailleurs
de démontrer qu'il n'était pas probable que ce fût une idole '.
' Nous avons spécialement Irailé de l'arcbiteclure ininoenne dans noire élude: La
Troie homérique et les récentes découvertes en Crète dans Revue de l'Ecole d'Anth ,
I90r;, p. ;(T-55.
' Questions ini/cénirnnes dans Iteriiede l'Histoire tirs Religions, \, p. 40(1005, p. 27
du tirage à pari). Dans FurKvaengler, Aeyinn, Heilifjtuw des Aphaia, Municti, \'M),
p. 372, M. H. ïliiersch a apporté un argument nouveau. Le bronze mycénien de
Berlin [ibidem, fig. 2%; Perrot el Chipiez, Hist. de l'art, vi, fig. 359 ot 350), femme
faisant le geste d'adoration, est du type de la « déesse au.x serpents ». En effet, trois
114 l^r y^ns |<J06
Notre tigiire ."» montre qu('l(|ucs produits des fouilles de Cnossc, la plu-
part à rapporter ;\ cette épo(|ue. A gauche une télé de lionne en marbre
sorte de vase ou rhyton à ajouter à la liste nombreuse des vases en forme
de tète d'animaux. Au-dessous, des lampes en pierre. On remarquera le
style égyptien de la plus haute. A droite de beaux vases en pierre et au-
dessus un de ces coquillages à usage funéraire ou votif car si les uns sont
naturels d'autres sont dos imitations en pierre.
Les progrès faits dans la technique du bronze conduisent aux poignards
à lame allongée qui annoncent les épées de l'époque suivante. Vers la
fin du Minoen moyen III, une écriture linéaire apparaît à côté de l'écri-
ture hiéroglyphique.
I.e MiNMEN I!i';i;e.nt I est ilUi.stré par les belles trouvailles de la mission
italienne à llaghia Triada dans le voisinage de Phaestos. Trois vases en
stéatite oiïrent des reliefs du plus haut intérêt. Le plus connu représente
une procession de moissonneurs.
Quant aux deux autres, l'un sera décrit plus bas, l'autre est de forme
conique, haut de 45 centimètres et décoré en quatre zones. La première,
en commençant par le haut, figure des guerriers; les scènes sont séparées
par des colonnes qui s'évasent vers le bas et portent des chapiteaux rec-
tangulaires. I\iis vient une course de taureau ou une chasse au taureau
du type des gobelets de Vaphio (homme projeté en l'air). La Iroisiènae
zone est décorée de guerriers dont la tète est couverte d'un casque aux
gardes-joues rabattues; des colonnes séparent les scènes. La dernière
zone offre également des scènes de pugilat, mais ici le casque est différent
et laisse le visage à découvert.
Nous ne pouvons signaler, même rapidement, toutes les particularités
de ce vase. Jl en est deux cependant qu'il faut noter. D'abord la forme
des colonnes qui confirme certaines fresques de Cnosse et montre qu'à
côté du type a la base plus mince que le sommet, type en bois et déri-
vant du pieu, on utilisait la colonne, sans doule en pierre, s'évasant vers
le bas. D'autre part, on sait quelles discussions ont suscité les casques
mycéniens et homéri(jues. Or, au moment où M. Ilelljîg s'avouait vaincu
et se ralliait aux théories de Heichel ', voici que le vase conique en stéa-
tite de Phaestos nous fournit un casque minoen très voisin du casque
corinthien ancien. Les découvertes de Crète mettent singulièrement à
l'épreuve la sagacité des archéologues.
De leur parenté avec le vase en stéatite de Phaestos, on concluera que
serpents enlacent son cor,JS. Celte remarque de M. Thiersch écarte en même temps
le rapprochement fait par MM. Furtwaengler et Collignon avec le tN-pe des pleureuses.
Sur la valeur religieuse de ces représentations voir ci-après, p. 19-20.
' Reichel. — Ueber homerische Waffen, -2' édit., p. 102 et s., avait fait admettre
par tout le monde (S. Reinscti, L'Anthropologie. 1896, p. 274 et s.; Helbi?. Sur les
attributs des Saliens, p. 29) : 1° Que le casque mycénien n'était pas en métal, mais en
cuir couvert de plaques métalliques; 2" qu'il formait bonnet et ne couvrait pas la
figure comme le CMsque corinthien.
R. DISSAID. >- LE.> rmiLLES HKCEMES DANS LES CYCLMlES ET EN CRETE
ii;
les fameux gohelols en (ir de \aphi(» ne sont pas de beaucoup postérieurs
et qu'ils peuvent avoir été fal;rii|ués en Cvvlc. Les fresques du palais de'
llai^hia Triada sont de brillantes enluminures d'un dessin habile.
l/épée de bronze est entrée en usage. Sur un des vases en stéatile de
llaghia Triada, on voit un jeune chef appuyé sur un long sceptre et devant
lui un oflicier tenant l'épt-V — au port d'arm<\ Le niveau corespondant du
palais de Cnosse a fourni un lot de vases en liroiize arlisHijuiMinMil (ra-
yai liés au repoussé.
/•iij, .->. — Ohji.'ls provenant des finiillcs de Ciiosso. Musée de Candie.
L'écriture hiéroglyphique est définitivement remplacée par l'écriture
linéaire dite de la classe A et qui se distingue de la classe B en ce qu'elle
contient encore quelques signes hiéroglyphiques. On a trouvé des tablettes
couvertes de cette écriture à Haghia Triada, à Gournia, à Falaekastro. On
saisit donc sur place l'évolution de l'écrilure minoenne. Dès l'instant
qu'elle devient une écriture linéaire, elle ressemble à d'autres systèmes
linéaires ; mais ce serait u n anachronisme violent que de comparer l'écriture
linéaire Cretoise contemporaine de la xviiio dynastie égyptienne avec l'écri-
ture des vases archaïques d'Abydos et de Negadah antérieurs aux premières
10
l«r .MAH> t'.lOf)
dynaslics nieinpliites ou en.'orc avoc récriture préhistorique do nos régions
signalée par M. l'ielte '.
Pn^'s de Palaekastro, à Zakro, ou a recueilli de cette époque un lot im-
portant d'empreintes sur argile aux types fantastiques. On [)eut suivre
la transformation de ces représentations et, h travers la fantaisie du gra-
veur qui assemble des lôtes d'animaux à des corps humains ou donne
des mamelles h des oiseaux portant des jupes, on pressent un folk-lore
très riche dont il ne nous a été conservé que des lambeaux comme la
légende du Minotaure. On constate, en tout cas, l'idée de communauté de
nature entre liommes et animaux, (|ui est à la base des croyances primitives
et populaires.
Le MiNOEN RKCENT II cst Caractérisé par un remaniement des seconds
palais de Cnosse et de IMiaestos. Des synchronismes très nets ont été
établis entre la civilisation Cretoise de cette époque et la civilisation égyp-
tienne de la xvni" dynastie. Ainsi, dans le tombeau de Rekhmara, grand
Fi g. G. — Tombe royale près Cuosse.
' PfETTE. — Bulletin de la Société d'Anthi-opologie de Paris, série iv. t. VIII,
p. 248 el L'Anthropologie, 1905, p. i-H.
•R. ni'SSAUD. — I.F.> FnllI.I.F.S IIKCENTKS PANS LES CYCI.AUFS ET EN CItKTE 117
vizir df la xviii" ilyiiaslie, sont peintes des fresques liguraiil des Koltioii
iippùrlaiil les présents des Ues, On y reconnaît la vai>st'lle minuenne.
Au nord de Cnosse, M. Kvans a découvert un cimetière minoen au
lieu dit Zafer l'apunra. Ine cnilaiin' de tombes ont été ouvertes en 1904.
A deux milles au nord de ce ciinctiéie, le savant explorateur a déblaye
une tombe royali' avecdromos. Malbeureusenn'nl la fosse ipii contenait le
cadavre avait été violée dans ranli(|iiilé. I ne luiii;ne t'pingle d'oi-, des
fragments de deux vases d'argent et un grand miroir de bronze témoignent
cependant de la ricbessc de cette sépulture. On a relevé aussi des em-
preintes de cacbels sur argile donnant probablement le sceau royal, un
vase de porpbyre, de nombreux alabiistni importés d'Egypte, des perles de
lapis-lazuli, etc.. '. La forme du mausolée avec sa cbambre carrée est
remarquable; mais le plan carré, du moins pour les chambres secondaires
des sépultures, n'est pas inconnu. Notre figure 6 donne une vue de celte
tombe royale et j)arliculièremcnt du dromos. Le corps était déposé dans
une fosse qu'on aperçoit en partie en avant et à gauche.
Dans le second palais remanié de Cnosse, on a trouvé de grands et
beaux vases en terre cuite au décor déjà stylisé que M. Evans désigne
sous le nom de stijle du palais (Palace style) parce (juc les mêmes éléments
du décor se retrouvent sur les fresques qui décorent les murs du palais.
La plupart des fresques découvertes à Cnosse appartiennent à cette épo-
que. Les sujets sont très variés : défilés de personnages, scènes animées
dans une foule, sous des arbres ou autour des palais, courses de taureaux,
animaux divers, entr'autres une fresque de dauphins et de dorades
{fig. 7) fortement restaurée. A signaler encore de grands dépôts de ta-
blettes en argile portant l'écriture linéaire (Firj. 10) dite de la classe B.
Au second palais remanié de Cnosse appartient dans la région des ma-
gasins un appartement avec cuisine dont la pièce principale est dite salle
du [rùnc {Fig. S). Uecevantle jour par en haut, elle est munie de bancs le
long des murs et, entre ces bancs, se dresse un siège à dossier en gypse.
La forme ogivale du dossier a beaucoup surpris. Cependant une forme
analogue s'était déjà rencontrée dans une statuette (harpiste assis) de
Kéros dans les Cyclades *. Four une salle du trône cette pièce est vraiment
trop exiguë. Nous devons considérer plutôt l'ensemble comme l'apparte-
ment du grand intendant du palais situé à proximité des magasins.
A la fin de cette période les palais de Cnosse et de Phaestos sont défi-
nitivement détruits par un incendie d'autant plus violent que les parties
• KvANS. — Bfitish Srhool Annual, t. X, p. ». L'uisciiiblo doit faire l'objet d'une
publication spéciale de M. Evans, The Minnan Tombs uf Knossos.
* Le siège de la figurine de Kéros est du type en X que bien des civilisations ont
naturellement imaginé. 11 n'y a donc pas lieu de conclure avec M. Blinkenberg, Méin.
des antiquaires du Sovd, 1896, p. 2i), à un rapport enire la statuette du barpiste
assis de Kéros et les statues de Goudéa. Si l'on voulait cbercber des analogues au
décor du siège de Cnosse dit tri'jne, on les trouverait en Egypte sur certains escabeaux;
cf. Spiegelberg, Gesch. der ùgyptischen Kuiisl, p. M, flg. lo.
lis
l-^r MU(s \\){){\
sujuTieures <lo ces édilices étaient construites en bois. La catastrophe qui
s'abattit alors sui' la Cr<''le ;i (b'-linilivcinent lirisc sa puissance.
fiy. 7 . — Fr.'sqiie Ju i^alais de Cliùsso.
La deuxième ville de Phylacopi (Milo) a prospéré pendant le Minoen
naoyen et le commencement du Minoen récent. Les vases de Kamarès et
les vases en stéatite originaires de Crète trouvés dans la deuxième ville
de Phylacopi comme, d'autre part, les vases fabriqués à Milo trouvés
dans le palais de Cnosse, attestent des échanges actifs. Les ruines préhel-
léniques de Théra (Santorin) ont été recouvertes par le tuf ponceux vers
le début du Minoen récent.
M. Evans attribue au Minoen récent 11 les tombes à fosse de l'Acropole
de Mycènes. Cette date est sans doute un peu basse, mieux vaut classer
ces antiquités à l'époque précédente.
Avec le Minoen récent 111, l'hégémonie passe sur le continent. Cette
période est le mycénien proprement dit. Dans la troisième ville de Phy-
lacopi qui date de ce temps, l'inlluence Cretoise est remplacée par l'in-
fluence continentale; ainsi le palais est du type mycénien continental.
La décadence de la puissance Cretoise est soulignée par une réoccupa-
tion partielle du palais de Cnosse à la fin du Minoen récent IlL La petite
chapelle du palais de Cnosse et celle de Gournia avec leurs figurines datent
de ce temps. Également un curieux groupe en terre cuite de Palaekastro
composé de femmes paraissant danser une ronde autour d'une joueuse
de lyre. Nous reproduisons (Fig. 9) cette dernière car on l'a publiée à
. R. DUSSAl'D. — LES F(U ll.l.KS l(Kt ENTES 1>\N- I.K< CYl'.I.AliES ET EN i:IU:TE 119
lort comme une déesse aux serpents '. La lyre est du type qu'on voit, pur
oxemple, sur les sarcophages peints de Hagliia Tri.ida.
fiij, s. — Sallfilitu lin tiôiii". l'jl.iis iJo Ctio>;se.
Au xi° sièclf avant notre ère, l'invasion dorienne, apportant l'induslrie
du fer, anéantit sur le continent et en Crète la civilisation de l'âge du
lironze qui avait jeté un tel éclat pendant le second millénaire. Doréna-
vant, les ruines du palais de Cnosse resteront hantées par la légende
du Minotaure et du Labyrinthe. Ce dernier mol remonte h l'époque de
Minos puisque, labri/s signilianl bipenne dans les dialectes égéens, ce
terme de labyrinthe parait avoir désigné le « palais de la bipenne ».
Avec le fer, la fibule devient d'usage courant, l'incinération remplace
l'inhumation, l'art perd ses traditions et la céramique revient au décor
géométrique. Celle décadence laissera le champ libre à une forte influence
orientale.
Des sondages elTectués dans la cour ouest du palais de Cnosse a permis
à M. Evans de fixer, dans cette région, la hauteur des diverses couches-.
Nous donnons ses mesures dans le tableau suivant.
MINOEN ANCIEN =1"'33.
NKÛLITIIKjLi:, 6"'43.
I. 0™33. Enéolilliiqiie.
If. 0"'56. IV« dynastie égyptienne.
111. U'n44.
» British Srhool Anitual, X, p. 217 et suiv.
* Evans. — Biitish Srhool Annual, X, p. 19.
•20
MINtilVN \u,\E\ --t1"50
MlNor.NmkKM— 2"'50.
I. (Manque t'ii ce point).
il. Oi"50. l'roinicrs palais lic Cnosse i-t di' l'Iiaostus.
.Ml" dynastie égyplienn»'.
III. 1 m. Seconds palais de Cnosso el de Phaeslos.
Xlllo dynastie égyptienne.
1. Hagliia Tiiada.
il. Hnnanienient des seconds palais de Cnosse et de
IMiaeslds. .Wlll"-" dynastie éf^yplienne.
III. .Mycénien. Wlll \i\" dynastie égyptienne.
Ces découvertes étendent et dépassent celles de Schliemann ; elles
renouYellent toutes nos connaissances sur les anciennes civilisations du
bassin de la Méditerranée.
Parmi les faits nouveaux, le plus inattendu, le plus important, est
l'usage très répandu d'une écriture dont on avait relevé quelques indices
à Troie sur les fusaïoles, à Mycènes sur des vases, à Théra sur un bloc de
lave. La sagacité de M. Evans avait formellement reconnu cette écriture
sur les pierres gravées avant que des milliers de tablettes inscrites aient
obligé à renoncer définitivement au dogme d'une civilisation préhellénique
muette. Les textes attendent le déchiffrement, mais M. Evans a reconnu
que la numération était décimale. Et déjà, les théories admises sur l'in-
vention et la diffusion de l'alphabet sont battues en brèche de toutes
parts.
En deux mots, voici où en est la question de l'alphabet.
On s'accordait à dériver l'alphabet phénicien, et par suite tous les
alphabets connus, de l'écriture égyptienne. Cependant,
les rapprochements établis sont devenus de moins en
moins probants à mesure qu'en a connu des formes plus
anciennes des lettres phéniciennes. Pour un grand
nombre de lettres l'écart avec le prototype est tel qu'on
est obligé de renoncer à établir une filiation. On a donc
proposé (J. Halévy, Lidz-barski) d'admettre que les
Phéniciens auraient emprunté quelques lettres el qu'ils
auraient inventé eux-mêmes les autres. Cette invention
acceptable pour un très petit nombre de lettres c'est-
à-dire, pour des lettres complémentaires, ne l'est pas
pour le grand nombre qu'on suppose. Car la difficulté
de l'invention de l'alphabet ne réside pas dans l'in-
vention de signes, mais dans la décomposition de la
parole en consonnes et en voyelles, dans la percep-
tion des sons simples. Certains peuples, comme les Chinois, n'en ont
même pas eu conscience. D'autres, comme les Egyptiens, avaient imaginé
des signes alphabétiques à côté des signes syllabiques. C'est certainement
d'un de ces derniers systèmes, par élimination des signes syllabiques,
Fi g. 9. — Terre
cuite de Palaekas-
tro (Crète orien-
tale).
■ II. ULSSAID. — LES FolII.LES IIKCENTES DANS LES CYCLAUES ET EN CRÈTE IH
ijiie l'alphalifl a tH»'- lire. L'invention do l)iit rn hlanc est inadmi;^-
sible.
Kst ce de r/MTÉlure égyptienne qu'ont été extraits les signes alphaljtHi-
ipies i Les comparaisons tentées ne sont pas favorables à cette hypothèse.
.\ussi M. Lvans et à sa suite .M. Saloinon lleinach, pensent (juc les carac-
tères alpliahétiques dérivent plutôt de l'écriture égéenne ou Cretoise. Les
Philistins en éinigrant de la mer Egée en Syrie l'auraient apportée avec
eux et, à leur contact, les Phéniciens auraient procédé au travail élimina-
toire d'où est sorti l'alphabet. Ici, la comparaison de l'alphabeL phénicien
le plus ancien avec les caractères de l'écriture linéaire Cretoise, est favo-
rable à l'hypothèse. Mais la démonstration ne pourra être établie
que le jour où l'on connaîtra la valeur des signes du linéaire crétois.
Toutefois, si la question d'origine reste en suspens, nous possédons
des documents suffisants pour, dans bien des cas, résoudre la question
de dilfusion, ce ({ui nous ramènera indirectement à la question d'origine.
.\yant eu l'occasion d'étudier l'origine des alphabets de l'Arabie méri-
dionale (alphabet dit minéen, sabéen ou himyarite), j'ai été amené à
conclure que l'alphabet sabéen ne pouvait être dérivé de l'alphabet
phénicien tandis que, d'autre part, il présentait avec certains alphabets
grecs archaïques des affinités si étroites qu'un emprunt entre ces deux
termes s'imposait '.
En l'état de nos connaissances et sous réserve de nouvelles découvertes,
il paraît très vraisemblable que l'alpha-
bet sabéen a été tiré dès le ix« siècle
avant notre ère d'un alphabet grec ar-
chaïque. Dans ces conditions, on peut se
Fiy. îO. — Itisciiiiiion du type li- demander si l'alphabet type ne serait
..è.nre B sur un piUios de Phacs- p^g p'utôt de l'invention des Grecs. Ils
l'auraient extrait du linéaire crétois avec
des variantes soit phonétiques soit purement grapliiques qui explique-
raient la multiplicité des alphabets grecs archaïques *.
Celte substitution de l'activité Cretoise à ractivitc phénicienne, à une
haute époque, doit se poursuivre sur d'autres terrains. On ne peut plus
admettre aujourd'hui que la civilisation mycénienne, ni celle de la Ci-ète
(minoenne), ni celle des Cyclades (égéenne) soient d'origine phénicienne.
Le rôle des Phéniciens et des Cariens dans la mer Egée est postérieur h
l'invasion dorienne. Hien avant l'apparition des Phéniciens dans les
Cyclades, ces îles ont été dominées par la Crète et il faut accepter les
traditions grecques qui reconnaissent un souvenir de la thalassocratie de
' Nous développerons ces conclusions dans une élude inlilulée : La pénéiralion
fies éléments arabes en Syrie avant l'Islam.
*- Voir Journal Asiatique, 190^;, I, p. ^57-361.
soc, d'anturop. 1900. ^
m l'f MAii> lOOG
Mioos dans le terme de Minoa appliqué, par i-xemple, ;i Amorgos, à
l'aros, à Siphnos ol iiKÎinc h la ville philisliiie de (îa/,a.
i'iiisqiio ni les IMiéiiiciens ni les Cariens n'ont été les initiateurs de la
civilisation Cretoise, quel est le peuple qui a stimulé cliez les néolithiques
de Cn'^te le goiH des arts? Nous avons vu que l'inlluence égyptienne s'est
fait fortement sentir dans l'ile dès une haute épo(|ue. 11 n'est pas douteux
qu'elle a déterminé le prodigieux essor révélé depuis peu.
Il est im|)ortant, à ce i)oint de vue, d'établir que la marine égyptienne
a sillonné de bone heure la Méditerranée et que la marine égéenne a été
construite sur le modèle des navires de course égyptiens '.
Mais, si les Cretois primitifs ont emprunté à l'Egypte la technique
de la peinture à fresque -, l'art de la faïence, nombre de motifs déco-
ratifs ', etc., leur activité propre a été telle qu'on doit leur attribuer une
grande part d'invention.
Il est remarquable que les palais de Cnosse et de Phaestos soient d'un
type local sans aucune imitation directe des monuments égyptiens ou
mésopolamiens. Le type crélois du mégaron avec supports dans l'axe
du bâtiment et une profondeur moindre que la largeur, n'est pas sans
relation avec le méga.'on continental tel qu'il apparaît dès la deuxième
ville de Troie ni avec certains édifices de la sixième ville (Troie homé-
rique), mais la formule définitive a été élaborée en Crète. Ainsi s'affirme
la communauté de civilisation dans le bassin de la mer Egée ^.
La position géographique des Égéens devait les soumettre non seulement
à des infiuences diverses, mais aussi à des apports de population extrême-
ment variés. A l'époque classique, la Crète passait pour être divisée en
un très grand nombre de peuples parlant des dialectes différents. Trois
inscriptions de l'époque classique, en caractères grecs, trouvés dans l'est
de la Crète, la rîgion des Etéocrétois ou vrais Crélois, se rapportent à un
dialecte inconnu et n'ont pu être déchifTrées. On doit donc prendre garde
que, sous l'unité de civilisation que nous constatons en Crète et dans les
Cyclades, se cache, dès l'époque minoenne, une grande diversité de groupes
ethniques. Toutefois, l'élément dominant ou dominateur, l'élément achéen,
est a rattacher aux Indo-Européens.
Les inestimables documents religieux fournis par les fouilles de Crète
u vrent un chapitre nouveau de Ihistoire des religions ; ils rej)lacent la
* Reçue de l'Ecole d'Anthropologie, •1906.
* Nolaminont la convenliori de peindre en blanc le corps des femmes et en rouge
le corps des hommes.
3 Cf. le sphinx, imitation Cretoise d'un modèle égyptien, trouvé, dans une sépulture
de Haghia Triada, Paréi)Ciii,.Vo/u/w. ant. dei Lincei, XIV, 2, p 7l9 ci s.,flg. 4i ft 45.
* lievue de l'Ecole d'Autliropoloffie, 1900, p. 51 et s. Noter dès la deuxième villa
de Troie la division en appartement des hommes et appartement des femmes.
■ II. Dis^Ai I». — i.Ks i(irii.i.i-> ni':cRNTRs dans m:s cYCi.vnF.s et en orkte 1ii3
mylhulogie créluise élans la ivalilé tloù les conleuis l'avaient tirée, l.i'.
gendes et tnonii'.nonls s'éclairoiil mutuellement.
Les Minuens n'ont pas connu le temple. Les fouilles île IMmestos ont
dégagé le sanctuaire (pii a servi au i»renner palais (Minoen moyen 11)
contemporain df la xii" dynastie égyptienne. Il se composait de trois
petites pièces conligurvs '. Dans l'une on a trouvé une fosse à sacriûces
et l'emplacement du foyer. La pièce la plus reculée (3 m. G3 X - m. OO),
ipii fut plus tard recouverte par la terrasse du second palais, consti-
tuait la chapelle. Des bancs de pierres très bas s'appuient contre trois des
murs. Une table à libation en terre brune fichée dans le sol occupait
le centre de la chapelle. Cette table a libation oiïre un creux vers le
milieu; deux des bords sont décorés de spirales doubles, fes deux autres
moitié (h spirales, moitié de taureaux. Le palais de Phaestos avait déjà
fourni une table à libation en terre cuite des plus curieuses avec s[)irales
doubles et au centre une série de vases tenant à même à la table.
D'autres tables à libation ont été trouvées en Crète, notamment dans la
grotte du Dicté.
Ce sanctuaire du premier palais de l'haeslos ne contenait aucun vestige
mycénien, toute la céramique peinte était du type de Kamarès, Signalons
encore un de ces grands coquillages qui figurent dans les sanctuaires
Cretois et qu'on déposait également dans les tombes, une empreinte de
cachet rappelant les cachets égyptiens de la .\u« dynastie, diverses coupes
en pierre.
Les ruines de(iournia et celles du palais de Cnosse ont également fourni
de petites chapelles, mais d'une époque moins ancienne. On a trouvé en
jilace sur un autel en forme de banquette les idoles, les figures votives
et les attributs divins : cornes de consécration et hache double. Devant
l'autel étaient placés un trépied bas et des vases divers.
Les cornes de consécration, l'ustensile sacré le plus répandu du culte
minoen, sont le symbole du dieu-taureau. On s'explique dès lors l'impor-
tance du taureau de Crète dans la mythologie grecque. Le caractère divin
de cet animal est nettement marqué dans les légendes d'Europe ' et de
l'asiphaé, variantes d'un même mythe crétois. Souvent la bipenne, autre
symbole du grand dieu crétois, est associée aux cornes de consécration ;
elle est plantée enlre les deux cornes.
Il se peut que cet attribut de la hache double ait contribué à faire iden-
tifier, par un groupe itali(jue, le Zeus crétois de Phaestos avec Vulcain ^
* Peunieh. — Monumenti anl. dei Lincei, XI V, ±, p. iOG cl s.
* Dans nos Sûtes de Mythologie syrienne, p. b"-88, nous avons essaye de montrfr
que le mylhe d'Kiiropc ne pouvait être un mjllie phénicien. Le caractère crétois est
assuré par le parallèle de Pasiphaé.
' .\ Pliacstos le dieu porte l'épilhéle de FeX/.xvo; = étrusque Velkanu = Volcu'
nus. Quant à l'élément italique il parait attesté par lis trois te.\tcs indccliilTrés do la
région de l'raesos (Ktéocritois). Dans son élude Sur les attributs des Saliens,
•M. Helbig a appLlé l'attenlion sur les rapports entre la civilisation niinocnne et
l'ancienne civilisation italique.
1-21 i"' M A 11^ \m\
Un aulif alUiltiit. ou symbole du Dieu est le bouclier dit, à cause de ses
t'i-bancrurcs, le bouclier en 8. Sur une bague d'or (leMycènes(F»5. 11), le
dieu est représenté de telle sorte que son corps disparaît derrière le bou-
clier. On s'explique le nomlirc de boucliers votifs, particulièrement en
ivoire, qui ont t'-lé trouvés dans les fouilles. La bague de Mycènes représente
le dieu armé (Cf. Zens opiusmins) que les Gurùtes miment dans leur danse.
Fif/. 11. — Bague en or de Mj'cènes, agrandie au double.
(Juand on eut perdu le sens rituel de cette danse, on prétendit que les Curetés
avaient voulu étouffer, par le bruit de leurs armes entre-choquées, les
vagissements de Zeus nouveau-né. Au-dessous du registre céleste — où
figurent le dieu armé, son symbole la double hache ', le croissant lunaire,
le soleil ou une étoile et la voie lactée. — se place le registre terrestre. On
a voulu reconnaitre une déesse dans la femme assise à l'ombre de l'arbre
sacré, c'est plutôt une prétresse du dieu qui reçoit les offrandes, fleurs et
fruits.
Le Zeus crétois ou Zeus Krétagénès a conservé dans la mythologie
grecque des traits particuliers. Les légendes Cretoises exaltent non sans
raison son enfance et sa jeunesse, car le Zeus crétois n'est pas l'auguste
maître de l'Olympe, mais un dieu jeune et imberbe. C'est un dieu céleste.
Sur une gemme mycénienne, il se révèle dans une apparition céleste aune
adorante^ qui fait le geste d'adoration. Sa naissance dans une caverne
est analogue à celle d'autres dieux lumineux, tel Apollon. A Gorlyne, il
porte l'épithète d'Aslérios qui se rapporte à sa nature céleste et il est clair
que le roi Astérion, qui dans le mythe d'Europe devient l'époux de la
déesse, n'est qu'une forme anthropomorphe du dieu-taureau.
' On a prétendu que lu double hache pouvait représenter aussi la déesse; nous ne
le pensons pas. Les femmes des moules de Palaekastro (Karo, Archiv fur Religion-
icissenschaf't, lOO'i, p. 14C, fig. 27-30) dont l'une brandit des bipennes et l'autre des
Heurs ou pavois fout comme ici, sont simplement des prêtresses du dieu et non des
déesses. Voir Revue de l'histoire des Religions, 1905, I, p. 2(J-27 l'p. -i-B du tirage à
part).
n. DISSAIO. — LES liiriLI.ES RKCENTES DANS LES CVtM.ADES ET EN CUKTE 1:2"»
Dans les récils de 1 opoque i^recque Minos a souvent pris la place du
dieu; il en est plus spécialement la inanifestatiou anlliropomorphe. l*ar
exemple, dans ses rapports avec Uritomarlis dont Prucris n'est qu'une
Il y posta se.
Le dieu céleste dispense la pluie, donc la fertilité et la fécondilé. C'est
là le sens primitif de toutes les légendes amoureuses soit du dieu-taureau,
soit di' Minos considéré comme liyposlase du dieu. Naturellement, à me-
sure que l'esprit grec tendra vers une forme divine supérieure, ces
légendes paraîtront vides de sens et, avec la complicité des conteurs,
Iles tourneront ;i l'aventure scandaleuse.
D'autre part, le Zeus cnHois est, en quelque sorte, un dieu de la végé-
tation. Vénéré sous la forme de bétyles, de cornes de consécration, île
doubles haches, de boucliers en 8, il avait aussi ses arbres sacrés; tout
comme h Dodone, le /eus épouxde Dioné rcndaitdes oracles par l'intermé-
diaire d'un chêne sacré. Le Zeus créloisest un dieu qui naît et qui meurt,
ce qui caractérise généralement les dieux agraires. 11 naît de la Terre-mùre
dans une caverne, il est confié aux mains dos nymphes, des cérémonies
rituelles sont pratiquées par les Curetés sanj doute pour aider la renais-
sance annuelle de la nature. Par contre, on montrait sur le mont louktas,
au sud de Cnosse, la tomlie de Zinis.
On s'explique ainsi que les monnaies de Phaeslos représentent le dieu,
au corps juvénile et h la face imberbe, assis sur un tronc d'arbre, entoure
de buissons et de plantes tandis qu'au revers est figuré le taureau.
Il ne faut pas oublier un détail de la monnaie de Phaestos : le jeune
dieu porte un coq sur les genoux. Dans le culte minoen, un oiseau —
colombe noire suivant les uns, corbeau ou aigle suivant d'autres, — est
en relation avec le dieu. Notamment sur le sarcophage peint d'ilaghia
Triada, dont nous parlons plus loin, l'oiseau est posé sur la double hache.
11 est possible que l'oiseau attribut ait diiïéré suivant les régions. Car, si
nous ne pouvons retenir que les caractères généraux du dieu, il ne faut
pas perdre de vue l'existence de variétés locales.
la déesse est de définition moins aisée. A la vérité, on p-^ut discerner
deux déesses dont la seconde n'est qu'un reflet de la première et finit
par se confondre avec elle. Les légendes mentionnent Hhéa. Elle est la
Mr-.r^p opzit] créloise désignée sous le nom de i l'îa'^x, la déesse de l'Ida,
ou de A'/.T'jvva, la déesse du Dicté '. C'est la Terre-mère, la Déméter. Une
genune la montre debout sur la montagne, entre deux lions affrontés,
tandis qu'un fidèle placé plus bas fait le geste d'adoration. On peut donc
lui attribuer foutes les figures de femmes entre deux lions aiïrontés. Par-
fois la di'esse est remplacée par un autel entre les lions, c'est le motif
-ulpté en bas relief au dessus de la porte aux lions de .Mycènes.
La Terre-mère est la mère des animaux comme des humains. Tous les
* CeUc explication de Diclyniia est de Wernioke. dans Pauly-Wi.sîowa, Hml En-
n/clopedie. H, p. l.Srî'), q u conjecture que dans l'égéen primitif la racine Sut avait
le sens de monlasuo.
12\] i" MAIO l'.IOC
aniinaux lui sonl consacrés, parliculièrcmenl les lions, mais aussi la
colombe qui pose sur la lèle d'une idole levant les bras en signe de béné-
diction (chapelle de Cnosse)'.
Le serpent, animal chlonien par excellence, est en relation intime avec
la déesse. A (iournia, une chapelle a fourni une idole de la déesse iden-
tique à celle de la chapelle de Cnosse, à ce détail près que la colombe
manque, mais que des serpents enlacent son buste et ses bras. Auprès
d'elle étaient rangés des vases autour desquels rampaient des serpents,
l'rinias, entre l'banslos et Cnosse, a fourni des idoles et des vases iden-
tiques -.
De même (jue le dieu était conru sous la forme d'un homme ou d'un
taureau, la déesse ajiparaissait comme femaie ou comme serpent. Il est
tentant de l'econnailre, dans les charmeuses de serpent signalées plus
haut ', des femmes ou des prêtresses accomplissant un rite religieux.
Pour poursuivre la comparaison avec le dieu, nous aurions là un exercice
semblable aux courses de taureau qui, primitivement du moins, ont dû
constituer de véritables cérémonies religieuses'*.
Il vint un temps où ces figures de déesse et de femmes aux serpents
ne furent plus comprises. Elles provoquèrent alors la légende d'après
laquelle Minos, tenant ici la place du dieu, n'avait pu engendrer, du fait
des sortilèges de Pasipbaé, que des reptiles, des vipères.
Il semble qu'à côté de Hhéa, dclaM/^rr^p ôp;ir,, se place une déesse jeune
qui s'unit au dieu. Telle Coré (Proserpine) auprès de Démêler (Cérès).
Toutefois, cette déesse jeune ne devait pas diiïérer essentiellement de la
grande déesse puisque les Grecs de l'époque classique les ont confondues.
La déesse jeune est Britomartis (la douce ou la bonne vierge) identifiée
h Arlémis et que poursuit Minos; elle est Europe qu'enlève le taureau
divin ou encore Pasipbaé qui se donne à lui. La légende de Britomartis a
été dénaturée par l'identification tardive de cette déesse avec Dictynna.
" Voir neviie de l'Hisl. des lielif/ionx, 1905, I, p. 20-21, /i.g.4 et ô.
2 Les vases .sont des ustensiles du culle comme le prouvent les cornes de consé-
cration que portent les vases de Gournia Mais l^s terres cuilos aux bras levés repré-
.sentent bien la déesse. L'îs objections formulées pnr IF. T.'iierscli dans .Egina, Ilei-
lifjluin dcr Aphaia, p. '371 et par Paribeni, Monumenti aniichi dei Lincei, XIV, 2,
p. 741 et s., ne sont pas décisives. Le geste de lever les deux bras est bien, à celle
haute époque, un geste de la divinité; Cf. Rev. Jlist. des Relifjions, 1905, I, p. h't
(p. 22 du tir. à part). D'autres terres cuites assez voisines, du moins comme facture,
mais ne levant pas les bras représent nt dos adorantes ou do- déesses. On peut s'as-
surer au Musée de C/»n lie que la basa cylindrique constituant le corps aa-dcssous
de la tiille s'inspire des robes en cloche. Une slatuclle de Hagliia Triada porte sur
sa robe une décoration en cônes qui, à première vue, pourraient être pris pour d';s
mamelles; Cf. Monitm. nnt. dei-Lincei, XIV. 2, j». 725, flp:. 2'j. Notons encore que
l'idole de la chapelle de Cnosse (Cf Revu? Ilist des Rel.. lO^a, L p. 2% fi^'. 4 h) n'a
pas co;nme on l'a dit une main ouverte et l'autre fermée; toutes deux sont ouvertes,
la pauclio se présentant de iirofil.
3 Cf. p. 6.-
4 S. Reinach. — L'AnlItropologie, 1U04, p. 270-273.
. II. nL>>M'n. — I.KS lut ILI.KS ItKCK.NTKS OANS |,i:> CYCI, \I)KS El' KN CUKrE I2i
Une rcprésenlalion parallèle ;i celle du Zous crétois est fournie par le
Dionysos crétois ou Uionysos-Zagrens. Plus tard, on racontera que ce
dernier est né de l'union de Zeus avec Déméter ou encore avec Corc. Celle
juirenté trahit simplement une ressemblance. Le taureau e»l une des
formes de Dionysos aussi l)ien que du Zeus crétois. Le couple Dionysos-
.\riane équivaut au couple Zeus-I3rilomarlis.
Pour les Orphiques, l)ii)nysos symbolisait l'Ame universi'lle; c'était un
développement de la conception de Dionysos en tant qu'cs|)rit de la végé-
tation, dieu agraire. On peut se demander si les cultes bacchiques ne .
rt-munlenl pas ;i r<'poqm' minoenne, notamment le sacrifice du taureau
divinist' dont les inilii's m;ing('aient la viande crue lomophagie) pour
communier dans le corps du dieu, les sarabandes extatiques qui résul-
taient de celle possession du lidùle par le dieu, les déguisements ou mas-
carades religieuses. On cx[)liquerail ainsi bien des scènes ligurées sur les
fresques ou les pierres gravées.
.Nous avons signalé les principaux objets de culte découverts dans les
fouilles. 11 n'y a j)as lieu de ranger dans celle catégorie les piliers décou-
verts dans le p liais de Cnosse bien qu'ils portent le signe de la double
Firj. 12. — Trois cach '(s en sloiilit'î pi'ovcnant do C'ùte.
hache, .l'ai essayé de montrer ailleurs que la colonne; figurée entre les lions
sur la porle aux lions de Mycènes, de même que les piliers de Cnosse,
n'avait aucune valeur religieuse'. En visitant les ruines du palais de
.Minos, j'ai pu constater que les marques gravées sur les blocs de gypse se
répr-tent dans le sens de la hauteur. On a ainsi marqué naturellement
d'un même repère les blocs qui constituent les fameux piliers. De plus,
pour éviter qu'on n'engageât ces blocs dans un mur, pour indiquer aux
maçons que toutes les faces devaient être libres, on a repété le repère sur
toutes ces faces.
Au point de vue religieux, les gemmes mycéniennes nous oflVenl de
précieuses scènes religieuses, malheureusement assez difïlcilesà interpré-
ter. Nous en avons déjà fait usage. Nous reproduisons trois cachets en
« Reçue de l'Histoire dea Religions, l'JOÔ. I, p. 32et miv. (p. 10 etsuiv. du lir. à part.
1:28 l«r M^n^ jcjoo
slcjitile on noire possession. Sur l'un on voit un poulpe, sur l'autre pro-
hahleinonl des signes (IT'criluredont un bouclier en 8. Knfin le troisième
nionlre une femme devant un autel avec corne de consécration. Au-des-
sous de l'autel le croissant lunaire, au dessus un rameau sacré'.
Signalons encore un petit monument trouve dans une tombe à Haghia
Triada; une curieuse amulette en or ayant une forme de cœur et portant
en relief : une main, un scorpion, un serpent, un scarabée et une spirale
ou serpent enroulé *.0n sait que ces mômes symboles se retrouvent beau-
coup plus tard sur les mains panthées.
Les lieux de culte les plus anciens et les plus vénérés étaient les
cavernes (antre de Zeus sur l'Ida, grottes de Kamarés et du Dicté) dont
quelquosunesconservèrentleur vogue jusqu'au triomphe du christianisme.
Les fouilles pratiquées en ces points ont le mieux établi le lien qui rattache
les légendes Cretoises à l'époque minoenne.
D'autres sanctuaires, figurés sur les gemmes, étaient constitués par de
petits enclos entourés d'un mur bas. C'est la disposition qu'on trouve à
Mycènes autour des tombes de l'Acropole^. Le rapprochement est justifié
par le fait que le culte des morts paraît en relation étroite avec le culte
des dieux — sans vouloir préjuger par là de la question d'origine. Le
célèbre sarcophage peint de Haghia Triada confirme ce point de vue.
La scène principale représente une scène de sacrifice en l'honneur du
mort.
Celui-ci se tient debout dans son linceul, sorte de manteau blanc à
franges, devant un édicule qui peut représenter la tombe, mais aussi
la demeure terrestre du défunt. Devant le mort se dressent un arbre et un
* Ce dernier cachet a étépublié^ mais imparfaitement, par M. Evans, The Mycena'
ean Tree and Pillar Cuit, p. 86-87, fig. 50 et reproduit d'après ce dernier par Karo,
Arrhir. f. Rcligionicisa,, 1904. p. 148, fig. .3 >. Quand M. Evans en a pris un
croquis rapide, ce cachet faisait partie d'un lot d'objets découverts à Ligortyno,
el, depuis, entrés an Musée du Louvre par les soins de M. Clormont-Ganneau.
Ces objets ont été publiés par Savignoni, Momumenti antichi dei Lincei, XIV, 2,
p. 6ô8-6.yj. A ce propos, nous indiquerons rapidement les objets crétois conservas
au Louvre. Dans la salle des Origines comparées (Céramique, salle A) on étudiera
la trouvaille de Ljgorlyno : vases divers en terre cuite, un coquillage (toîtwv), un
vase en forme de tête de taureau, un trèt/icd. A coté de plusieurs cachets en sléa-
tilc on verra quelques fragments de grands vases peints (stylo du palais), plus
loin un sarcophage en terre cuite rapporté par M. Clermont-Ganneau. Les terres
cuites de Pisesos sont d'époque gr^.-cqiie. Au milieu de l'escalier Daru sont posés de
part el d'autre d'un sarcophage étrusque deux pithoi provenant des premières fouilles
tcntt'>es à Cnosso par Miiios Kalokerinos. Dans la salle des peintures antiques (grande
vitrine des verres antiques), un fragment de fresque donnera une iilée de la mer-
veilleuse ligure du musée de Candie surnommée « la Parisienne » ; Cf. Edm. Poltier
Vasrx antiques du Lourre, p. 21, pi. 19, A 480, 2-7 «t Héron de Villefosse, DuUotiii
des Antiquaires de Fvnnre, l'JOô, p. 147-lol. Enfin, signalons au Cabinet des mé-
dailles quelques belles pierres gravées provenant de Crète dans la vitrine l'auverl de
la Chapelle n" 1-6 et peut-être n» 72; cf. le catalogue de M. Babilon.
* Paribeni. — Monum. ant., XIV, 2, p. 736 et suiv.
' Cf. Rev. hist. des Religions, 1905, I, p. 28 et suiv. (p. 0 et suiv. du tir. à part).
• n. Di>>Mn. — i.i> rmii.i.Ks ni';i;i:Mi'.s hvns i.ks cyclades i:t i;n cukik li',)
priil .iiilol. Tioi-^ liommes apportent, lim une soilf de giamlc oornc, les
autres do jtninos veaux passés sous le bras, l/aulrc inoitié rie la uK^mefaco
ligure une libation : deux poteaux peints en vert sont lirhrs surdos bases
on pierre peintes en rougo et blanc. Des bases semblables avaient été
trouvées dansb's l'uuilles sans (ju'on piU jusipiMci déterminer leur usage.
Ces poteaux portent cbacun à leur soniinel une double liacbo sur la(|uello
pose un oiseau. Kntre les deux poteaux on bois est un batiuet, dans
|e,piel une fenune verso le liipiide d'un vase. Derrière, se tient une
l'euinie coiiïée d'un cbapoau avec loulTe semblable à celui que portent
•■rtains spbinx mycéniens. Cette femme soutient au bout dune barre
de bois deux vases semblables à celui que vide la preniiére femme.
Derrière, un liomme vêtu en femme joue de la lyre a sept cordes. La
face opposée du sarcophage représente le sacrilice d'un taureau. On y
voit un édifice surmonté de quatre cornes de consécration, un poteau
avec une hache double portant un oiseau, un joueur de double fhUe
habillé en femme à ce qu'il semble.
Ainsi les symboles usités pour le culte des morts sont les mêmes que
dans le culte des dieux. Les découvertes faites par Schliemann dans les
lombes de IWcropole de Mycènes en tirent une signification nouvelle.
Les bractées d'or figurant une double hache entre les cornes d'un taureau
sont des endjlèmes religieux. Les morts étaient enterres avec leurs vêle-
ments les plus somptueux, leurs bijoux, leur vaisselle d'or, d'argent et de
cuivre, dans l'idée qu'ils continuaient à jouir de leurs richesses, avec leurs
armes et le diadème pour leur assurer l'usage de leur puissance, avec des
images du palais pour leur perpétuer une demeure digne d'eux ', tandis
que les oiïrandes consenties leur procuraient la nourriture nécessaire.
On a constaté à Milo ', à Egine el à Cnosse, la pratique d'enterrer les
enfants morts en bas-t^ge dans des jarres et sous le sol des maisons.
Les fouilles récentes de Palestine ont révélé le même usage dont on a
niaint exemple en Egypte. On sait qu'à l'époque classique, en Grèce, les
enfants morts à la mamelle n'étaient pas incinérés mais inlnm)és.
En Crète, le mort était placé accroupi dans les cuvos funéraires en terre
cuite ou en calcaire (sarcophage peint de Ilaghia Triada décrit plus haut
et un autre exemplaire du mémetypc). Nous avonsrcncontré, a une haute
époque dos enlassements de cadavres, provenant sans doute d'inhuma-
tions secondaires.
Celte civilisation minoenne et mycénienne fut trop brillante elde durée
trop longue pour avoir disparu sans laisser do survivances. Devant l'in-
vasion dorienne elle se replia sur l'Oiiont où, tout en subissant les
' Hnue de l'hist. des religions, 190.^, I, p. 30-31 (.t 12 (p. 8'.i (t :20 du lir. h l'arlj.
* Ejxavations al Phylacapi, p. 15.
130 lo' MAits l'jon
inlliiences locales, elle se perpétua longlcnips, surtout îi Illiodes et
à (ihyprc.
I.es archéologues classiques reconnaissent que l'art ionien a Jcs
attaches lointaines avec l'art mvc<''nien. D'autre part, C(; sous-mycénien
oriental s'est propagé vers l'ouest. Il a p(''nétré au viii'^ siècle en Sicile et,
peu après, en Kspagnc. Le décor en usage dans la céramique ihérique
est « la suite ah.Uardie du mycénien ^ ».
Discussion.
y\. 'I'atk — Je relève dans la connnunicalion de .M, Diissauil le mot de
murs en « gypse » ou pierre à pl.Ure.
.le crois que c'est la première fois que l'on signale dans ces monuments
antiques « le gypse » employé comme pierre à biUir, alors que partout
on rencontre la pierre à hàlir en carbonate de chaux, grès, granits etc.
J'en ai fait la remarque à M. Dussaud qui me confirme que pour lui
aussi c'est le seul exemple qu'il connaisse. Il serait intéressant de le con-
trôler.
Cet emploi du « gypse », me permet d'émettre une autre opinion con-
cernant la destruction de l'étage supérieur, que l'on suppose avoir été
construit en bois.
En elfet si toute la construction était en gypse le résultat a pu être le
môme : car si le fui a pris au plancher de l'étage supérieur le feu à dû
cuire le « gypse » et le changer en plAtre, ce qui n'a rien d'excessif
comme résultat puisque la déshydratation du gypse ou sa transformation
en plâtre s'opère au-dessous de 150° centigrades. On comprendra facile-
ment dans ces conditions l'écrasement et l'écroulement des murs au-des-
sus du plancher de l'étage; le vent et les intempéries se sont facilement
chargés de disperser ces restes ayant subi l'action du feu.
Je pense qu'il y aurait toujours intérêt à relever la nature des maté-
riaux employés, aussi bien pour la maçonnerie, que pour relier les pierres,
comme également les enduire. Comme on le voit ici, on pourrait en tirer
quelquefois des déductions permettant des solutions très simples.
MM. Delisle, IIervk, Deniker et Z.^noaow^Ki prennent également la
parole.
' Kdm. Pottieh. — Journal des Savants, 1005, p. TiSS.
i'oiiE>Tir.a. — i.i;> o-skments i'Ariioij»iiin(F.> 131
LES OSSEMENTS PATHOLOGIQUES DU CIMETIERE DE L'ANCIENNE EGLISE
D'AIX EN SAVOIE.
Par \.k \y l'oaESTiRR.
Au mois (Je janvier (iL-niioi- dos travaux (IT'ilililô ont nécessité le
nivcllcmont du terrain sur lequel s'élevait l'ancienne église d'Aiven-
Savoic. Pondant le déblaiement j'ai pu recueillir un grand nombre
il'ossemenls pathologiques dans la masse de ceux mis à jour par les
louillos. Frappé du nombre de pièces vertébrales, je me demandai si celte
proportion plutôt considérable de celles-ci était le fait de malades venus
aux eaux d'Aix-en-Savoie, dans le cours des 2 ou 3 derniers siècles et,
y ayant décédé. Jo parlai de la chose à M. le docteur Capitan, que je
savais avoir étudié les ossements des catacombes de l'aris. Son opinion
fut que la proportion des ossements pathologiques vertébraux était cxcep-
lionnellc et devait dépondre d'une particularité locale.
M. Capitan me suggéra alors aimablement de faire la présentation de
ces ossements à la Société d'Anthropologie et, c'est ainsi que j'ai l'hon-
neur de vous faire une brève communication sur ce sujet.
Comme vous le voyez toutes ces pièces sont des vertèbres à l'exception
do trois, une ankylose radio cubitale du coude, un condyle fémoral avec
l''sions d'ostéo-arlhritc et une tumeur osseuse indéterminée.
Parmi les 17 pièces vertébrales, i sont constituées parades segments de
3 vertèbres soudées ensemble : vertèbres lombaires présentant à la face
antérieur du corps vertébral des productions osseuses ostéophytiques.
Il s'agit là de lésions correspondant à ce que l'on appelle aujourd'hui
.^jwmlylose a nhijlom nie.
Trois autres pièces présontenl des vertèbres tassées, cunéiformes, évidées
et correspondent vraisemblablement à des lésions de tuberculose verté-
brale ou Mal de Polt.
Les autres vertèbres pathologiques otïrent des lésions d'ostéo arthrite,
qu'on ne peut confondre avec les altérations purement séniles dont il y a
ipiel(iues spécimens.
Il y aurait des considérations pathologiques intéressantes à faire sur
ces lésions vertébrales, mais ce n'est pas ici leur place.
Au point de vus anthropologique et historicjue, qui seul est à envisa-
ger un peut se demander si les lésions vertébrales sont en plus grand
nombre que d'habitude. M. le docteur Capitan admet, m'a-t-il dit, qu'il
y a là une proportion très supérieure à celle (|u'il a renoontréo dans les
cim?lièros parisiens.
En ce cas, il faudrait admettre que le cimetière d'Aix aurait reou une
classe de malades sprc.aux. par ce fait que la réputation des Eaux d'Aix
dans les siècles derniers y aurait attiré toute une série d'infirmes grave-
ment alleinls.
132 1" M.uo iUOC
Les registres mortuaires de la paroisse font fui que les ensevelissements
se faisaient au déhut du wii'' sit'^cle dans le sol mthne de l'église, et se sont
aussi faits jusqu'en 178o. Les ossements seraient donc vieux de trois
siècles peut-être et d'un siècle au moins.
Discussion.
-M.M. MANoLvuiiin, l'Aruj.ALLT et Uelisle font fjuelques observations.
THNOGENIE DES PEUPLADES HABITANT LE BASSIN DE L OGOOUE.
Par m. le Lieutenant Avelot.
Selon le désir que m'a exprimé M. le docteur Hamy, je viens aujour-
d'hui vous comnmniquer sommairement le résultat de mes recherches
sur l'ethnogénie des peuplades habitant le bassin de l'Ogôoué. Je suis
trop heureux de pouvoir m'acquitter — oh! bien faiblement — d'une
partie de la dette que j'ai contractée envers M. le docteur Ilamy, et de
pouvoir lui témoigner ici toute ma reconnaissance pour l'aide et l'appui
qu'il a bien voulu me prêter dans mes modestes travaux.
Les premiers habitants du Congo, comme d'ailleurs de toute l'Afrique
équatoriale, furent les Pygmées, les Négrilles. Il est inutile, surtout ici,
d'insister sur ce fait bien connu. Inutile également de rappeler que l'aven-
turier anglais Battel les a connus au xvii^ siècle sous le nom de Malimha,
dans le bassin du Kwilou, où ils portent encore aujourd'hui le nom de
Marimba.
Fait moins connu : la priorité de l'occupation du sol par ces Négrilles
est confirmée par la tradition : les noirs les considèrent, et eux-mêmes se
donnent comme les propriétaires légitimes de la foret; les indigènes de la
Likwala leur attribuent l'invention du feu, ceux de Fernand-Vaz, l'inven-
tion de la métallurgie. Un noir de Bâta dit en parlant d'eux : « Ce sont eux
qui étaient au commencement, et ils ont gardé la science des choses
cachées. Ih sont à la racine du monde. »
Quels furent les premiers éléments ethniques qui se superposèrent aux
Pygmées? Nous n'avons que des indices à ce sujet: les Shéké, Shékiani
ou Boulou, les Ba-kota, les Ba-njavi sont fortement métissés de sang
négrille, et leur installation dans le bassin de l'Ogôoué est antérieure
à l'arrivée des Européens, et même à celle de toutes les autres tribus dont
nous allons nous occuper.
Les premières données précises que nous possédions sont celles concer-
nant l'extension de la race flotte au xvi« siècle : Dapper nous apprend que
AVEf.f'T. ^ KTIlNiMiKME 1>V> I'Rri'I,\ItK> IIAIUTANT I.F, ll\>>IN DE r.'ur.ùurK \M
les ri'pivsoiilaiils de coite r;ice porlaienl d'abonl le iiuiu (Je Uramn : ce duiu
(jui uest autre que l'ethnique Rama. |iréc»''dé du prolixe ha marque d.u
pluriel (Ba rama) est encore porté jcir une Iribu à l'ouosl du Ngounyé.
Ces Barama vivaient d'aliord *'n triltus sauvages et cannil)alos, ne subsis-
tant que do la chasso; ils furent organisés en royaume jiar .Mani-Lovango
(le chef Locanijo).
D'aprrs une autre tradition recueillie par l'infurluné de Behagle, les
Flottes seraient venus du sud-est en faisant halte dans la région de San-
Salvador. Le grand Foumou-Congo {roi du Congo), qui résidait en celte
ville, avait deux fils : Ca-Congo {le petit Congo) et Mani-Lovango {le roi
Luiango), qui organisèrent en royaume la région au nord du Zaïre.
Uuarte Lopez dit (jue ce royaume s'étendait jusqu'au cap Lopez inclus.
En fait, la bande de terrain, qui, sur la cote, va du Gap Sainte-Catherine
à la rivière Coanza, et s'enfonce dans l'intérieur sur une profondeur de
iOO à «)00 kilomètres, est habitée par une race aujourd'hui une par la
langue ot les caractères ethniques; c'est la famille flotte du rameau ban-
tou, du mot fiot qui veut dire noir. Un sous-groupe de celle famille,
le sous-groupe ivili, a môme envoyé une de ses colonnes par le Ngounyé
jusqu'à rOgôoué où ses descendants se sont gabonisés.
Les relations du wii*^ siècle nous parlent d'un grand empire d'Anzico,
Anzichi, Anzicana, qui, aux temps où florissait le royaume du Loango,
avoisinait ce royaume à l'est. Anzico, ou mieux Nzèké, c'est tout simjtle-
ment l'inlérieur, et le litre que portail son roi, Ma-koko, signifie tout
bonnement, chef du fleuve. Mais, du fait que plusieurs chefs batéké por-
taient encore récemment le titre de Makoko, on peut déduire que les Batéké
occupaient leur emplacement actuel dès le xvii» siècle.
C'est à peu près dans le même temps que les Mpongwé arrivèrent au
• iaboii, se taillant la meilleure place dans les forêts occupées par les She-
kiani ou Boulou; l'événement est placé par l'amiral Fleuriot de Langle
à une date peu éloignée, par le Rév. M. Haug au xvii*' siècle. Il est impos-
sible de mieux préciser : Artus a bien laissé un court vocabulaire du lan-
gage pailé au cap Lopez vers l'an 1000, mais ce n'est qu'un sabir lusitanien
qui est au portugais ce que sont le petit nègre au français et le pigeon-
eniiUsIt à l'anglais.
n'après la tradition conservée encore aujourd'hui, ces Mpongwé seraient
originaires du Haut-Ngounyé; il auraient descendu cette rivière jusqu'à
son confluent, puis l'Ogùoué, où se seraient établies les tribus oroungou et
galoa; les Mpongwé proprement dits .seraient arrivés au Gabon par le
Vambi, le Rhamboé et la rivière 3Iafouga.
Quant au sous-groupe nkomi, son exode serait plus récent, et il ne
serait arrivé dans la région de Fernan-Vaz (ju'au début du xix^ siècle; ils
auraient asservi les Flottes Gama, premiers habitants du sol auxquels ils
ont imposé leur langage.
Bowdich, qui, en 1817, séjourna quelques semaines au Gabon, est un
des premiers voyageurs qui aient su questionner ; grâce aux renseigne-
i34 I" MAH> lOOG
ments recueillis pai' lui, renseignemenls que complotent les traditions
encore vivaccs aujourd'hui, j'ai pu tracer le domaine de clui({ue grou-
pement impoitunt au commencement du siècle dernier; c'est là l'objet
de ma première carie.
Nous y voyons le littoral au nord du Gabon peuplé par les Benga.que
pressent en arrière les nombreuses tribus kombé, occupant la majeure
partie des bassins cotiers. l.es Jieiiga venus du nord-est sont apparentés
aux Ba-kalai et non aux Okandé, comme l'a dit de (lompiègne. Les Kombé
sont apparentés aux Shekiani.
Le cours moyen de rOgùouc est occupé par la famille adouma-okota,
apparentée à la famille flotte; les lia kota descendus du nord est par la
voie de TOkano se sont établis à l'est; les Adouma à l'est. Les commu-
nications entre eux furent interrompues par l'irruption de la famille
okanda-apingi-eshira, ([ue les Pahouins venaient de déloger du haut
Ivindo.
Ceux-ci étaient en effet en marche ; leurs têtes de colonne arrivaient
d'une part, sur le haul-Bénito, d'autre part, au coniluent du Lazio et
de rugôoué, où ils touchèrent pour la première fois le grand lleuve
en 1825.
Entre eux et les populations colières sont comprimées dans les bassins
du Mouni, du Como et de l'Abanga, de grosses agglomérations ba-kalai.
Ici se pose la question de l'origine de ces Ba-kalai et de ces Pahouins
qui, par leur grande taille, leur peau claire, leur système pileux très
développé, contrastent si fortement avec les populations fiolles, mpongvvé,
Adouma.
D'abord les Ba-kalai, Ba-ngomo ou Ba-ngoué. Ils sont aujourd'hui
dispersés par petits paquets sur une immense étendue de terrain du
Gabon à la Sanga^ du Fernand-\'az ta la Passa. Où est leur berceau? Quels
chemins ont-ils suivis? Les traditions sont peu nombreuses et contradic-
toires.
J. de Brazza a trouvé un petit groupe de Ba-ngomo près des sources
de la Likwala ; il a vu là le centre d'origine des Ba-kalai.
Barrât, adoptant celte donnée, dit que, partis de la rivière Sébé, ils ont,
après avoir fait un détour, occupé le bas-Ogôoué, le Rhamboé, le Como
et le Gabon.
Braouezec les fait originaires de la rive gauche de l'Ogôoué.
Serval dit qu'ils se sont avancés vers le milieu du .tviiio siècle par
le lac Zonangué sur le fleuve Ogùoué, d'où un de leurs corps déboucha
dans le Gabon par le Rhamboé.
D'après Lenz, ils seraient venus du sud-est, le long du Ngounyé, disper-
sant devant eux les Shekiani.
Enfin M. Haug rapporte qu'ils sont établis dans le bas-Ogôoué depuis
un nombre de siècles impossible à évaluer, mais en tout cas anlérieure-
ment à l'arrivée des Mpongwé, donc au xvii<= siècle; ils auraient occupé
. AVF.f.itT. — ETHNOr.KXIE DRS PKIPI, ADES IIvIHTaNT I.K Iî \-^>in i»r. i/oiiùiin': 135
pi'iniitivemeiil l'espace compris enlre le lac Azingo et l'Abanga diiiie
part, et la rivii^TO Ofùoué d'autre pari.
Oue croire?
l^QS renseignements si précis de Bowdich nous prouvent qu'on se
trompe en plaçant des iii-kalai sur le bas-OgO>oué avant le xix° siècle; les
données de Koelle, de du Cliaillu et de Serval sont aussi alTirnialives en ce
(pii concerne la non-présence des Ba-kulai dans la bouche de lOgùoiié.
.Mais un argument décisif est fourni par du Chaillu : les Ha-kalai auraient
émigré du nord vers le lac Zonangué et ne seraient arrivés sur l'Ovenga
i|ue -20 ans avant le passage de l'explorateur, donc vers 1843; ils se seraient
ensuite répandus sur les bords du Ngounyé.
Il faut donc admettre que si les Ba-Kalai ont leur berceau dans la llaute-
Likwala, ils ont d'abord émigré vers l'est par l'Okano et l'Abanga; ils
formaient au début du xix° siècle un groupe compact entre l'Okano, le
Mouni et le Campo. Ce ne serait qu'entre 1820 et 1843 que poussés par le
Ilot pabouin, ils auraient franchi lOgùoué vers Samkila et de là bifurqué
d'une part vers le l'ernand-Vaz, d'autre part vers le haut-Ogooué.
Les traditions sont mieux établies en ce qui concerne les Pahouins, et
cela grùce aux travaux de l'amiral Fleuriot de Langle, du P. Trille et de
M. Largeau.
Leur pays d'origine serait proche des plateaux séparant le lîahr-el-
Ciazal du haut Quelle ; ils en furent chassés dans le courant du xviu^ siècle
p:ir les liemvou, dont les descendants peuplent encore le Ilaut-Arouhimi;
leur exode vers l'est aboutit ù Koumaza, au conlluenl de la Kadeï et delà
Matoui (liaute-Sangha), cl de là ils envahirent toute la partie nord de
notre colonie, les Osyeba, ou Fan Makeï ou .Makina formant partout
l'avant-garde, les Fan Dedzi ou .Mazouna les suivant, poussés à leur tour
par les Fan Dzem ou Dzimou.
La deuxième de mes cartes représente la Gabonie en 1864. Les princi-
paux changements sont marqués par les progrès de l'invasion pahouine
et l'entrée en ligne des Ba-kola.
Les Pahouins ont atteint les vallées supérieures des rivières cotières,
oi'i les a rencontrés du Chaillu; du coté du Como et du Ilhamboé, ils ont
pénéti'é comme un coin dans le bloc akalai qu'ilsont séparé en deux frag-
ments inégaux : le plus petit reste autour du Gabon; le plus considérable
a été refoulé sur la rive gauche de l'Ogoùué, ne laissant sur la rive droite
que des arrière-gardes entre les confluents de l'Okano et du Ngounyé.
Kn amont du confluent de l'Okano, jusqu'au confluent du Lazio, ils ont
bordé toute la rive droite du fleuve, mais ils ignorent tout de la naviga-
tion ; de plus, les fiers Okandé, qui les avaient d'abord bien accueillis, leur
déclarèrent la guerre vers 1860 pour cause de règlement de dot; aussi ne
purent-ils forcer le passage de l'Ogooué, et les derniers arrivés, poussés
sans cesse par de nouvelles tribus, sont obligés de s'écouler vers l'aval.
A l'est des Pahouins s'effectuait à la môme époque et dans le même
inr, 1*^^' M Ali- mon
sens une imporlaiile inigraliun de liihus lolaleinenl dilîérenles mais for-
mant un grou|>e au.>si homoir^ne <'l peul-<Hre aussi nombreux, (".'étaient
les lia-rabemba, .Mi-mb.Hé cl Ha-kola tb» l'est, (ju"il ne faut pas confondre
avec les Hii-kola de l'ouest, apparentés aux Adouma. D'après les renseigne-
ments recueillis par -M.M. l'onel etClo/A'l, cette famille, (jne son langage
rapproche des liatéké, habitait au commencement du xix'» siècle le bassin
supérieur de la Sangha, à côté des Pahouins; ils en furent chassés vers
AH'AO par un clan des IJaya, les Yangéré, (jue poussaient eux-mêmes les
Foulbé musulmans, et ils se mirent en marche vers le sud, mais ils ne
devaient arriver à l'Ogùoué que vers 1870.
Ma troisième carte représente la (Jabonie en 1884. Les Pahouins ont
poursuivi leurs progrès; ils avaient atteint Libreville en 1805; dix ans
plus tard, ils arrivaient enfin àli mer entre le Gabon cl le delta de l'Ogùoué
séparant ainsi les Mpongwé de leurs frères Ouroungou ;danslehautOgùoué,
grâce aux fusils fournis par les Européens, ils avaient brisé la résistance
des Okandé, et, franchissant le fleuve sur des radeaux de comho-combo
ils avaient envahi la rive gauche, en 1869, d'après de Brazza, en 187:2,
d'après Compiègne. Les Okandé forment encore un groupe assez homo-
gène de 2 à 3.000 individus dans 60 villages, mais les Bakola de l'ouest
cernés dans les îles du fleuve ne comprennent plus que quelques villages
et sont réduits pour vivre à la pèche et au pillage des épaves.
Parallèlement aux Pahouins, les tribus ba-kola de l'est, ba-mbemba,
mi-mbété ont comme eux poursuivi leur marche envahissante, et cela
d'autant plus facilement qu'elles n'étaient pas gênées par notre influence;
déjà leurs tètes de colonne n'étaient plus qu'à deux jours de marche du
Kwilou. Les débris de la famille anzicani, Mi-ndoumbo, Aoumbo, Ba ka-
niké, qui occupaient antérieurement le haut bassin de l'Ogôoué ont été
obligés comme les Ba-kota de l'Ouest de chercher un refuge dans les îles
du fleuve.
Enfin ma dernière carte représente l'état actuel de notre colonie.
La période actuelle est caractérisée par la disparition à peu près complète
des races primitives, par l'extension déplus en plus grande des Pahouins
et des Ba-kota orientaux et aussi par la formation à notre contact d'un
nouveau type ethnique.
Les Benga, Kombé, Bonlou, Mpongwé atteignent à peine le nombre de
100.000, les Ba-kalai celui de 25.000; les Pahouins bordent presque par-
tout le littoral du Campo à l'Ogôoué, et ils débordent largement sur la
rive gauche de ce fleuve; les Ba-kota de l'est ont atteint le Kwilou, et, si
nous n'y mettons obstacle, ils arriveront eux aussi à la côte, submergeant
les derniers Flottes. En même temps se constituent autour de nos princi-
paux établissements, à Libreville, Lambaréné, Ndjolé, Loango, de grosses
agglomérations où se forme un type nouveau, que j'appellerai le type
néo-gabonais, résultante du mélange des Pahouins, des Mpongwé, des
Flottes, des Yakoma, des Indo-Chinois, des noirs de toute la cote occi-
dentale, et même, faut-il le dire, des Européens.
DISCUSSION i^l
Aussi, et je in'arrt^lerai sur ce vœu, serait-il furl h souliailer (|u'(jn se
lu\le de recueillir le plus de documenls anthiopologiqaes possibles sur
les populations primitives, avant leur complète disparition. Les Henga
n'ont plus que deux villages^ au cap Saint-.loan et ;i Corisco, et n(jus ne
possédons, que je sache, de mensurations complètes pour aucun individu
de leur race.
Discussion. <
M. IIa.my frlicito .M. le Lieutenant Avelot de son intéressante communi-
cation.
M. I'apillailt. — La forme du thorax chez les Ilovaset chez les nègres
africains et Malgaches (contribution à l'élude de l'indice tboracique) '.
Discussion.
.M. C. Lejeune. — Je suis porté à croire (juc l'indice tboracique plus
grand chez la femme que chez l'homme est un nouvel exemple des carac-
tères qui rapprochent la femme de l'enfant et des races inférieures.
Peut-être pourrait-on en trouver l'explication dans ce fait que la femme,
en raison de sa faiblesse musculaire, a été traitée dans là suite des siècles
et presque jusqu'à nos jours chez les civilisés et l'est encore chez la plu-
part des peuples sauvages et barbares, comme une bote de somme char-
gée des plus durs travaux. L'habitude de porter sur le dos les éléments
d'une tente, les outils, les ustensiles de ménage et les jeunes enfants
gênait sa respiration, ce qui, d'après les observations de M. PapillauU,
produit un thorax plus bombé. C'est probablement cette longue domesti-
cation qui a conservé chez la femme des caractères d'infériorité physique
cl ([ui, intellectuellement, l'a rendue plus attachée à la religion et a tourné
son esprit vers la ruse qu'elle considérait comme les meilleurs moyens de
se défendre contre la tyrannie du plus fort.
MM. HuGUET, Anthony et Manouvrier prennent également la parole.
* Paru dans la Itevue de l'Ecole d'Anthropologie de Paris, février 190C.
soc. d'anthrop. i906.
10
i38
1" MARS 1906
RAPPORT DU TRESORIER POUR L'EXERCICE 1905
Messieurs,
Conformément à l'article 31 du règlement, j'ai l'honneur de vous sou-
mettre les résultats de la gestion de votre trésorier, pour l'année échue le
31 décembre 1905.
Comme précédemment je les ai résumés en deux tableaux.
Tableau A. — Opérations linanciùres de 1905.
Tableau li. — Inventaire de notre Cortiine à la fin de ladite année.
A. — Résumé des opérations financières.
RECETTES
Droits d'admission
100
100
Cotisations
5.520 ))
40 »
1.149 60
Rachats de cotisations. .
échues ....
exercice courant. .
Recouvrements de tirages à part
Vente l à la Société .
de (chez MM. Masson
publications [ et C'»
Subvention de l'Etat 1.000 »
Intérêts des fonds placés 10 50
Bénéfices divers 61 50
Arrérages de valeurs 3.072 50
Total des recettes 11.054 10
390 »
5.130 »
202 35
947 25
DEPENSES
Prix Fauvelle
Ordinaires :
!h MM. Demonet
leD'"Launois
le D^ Roy .
àxMM.Wintrebert .
E. Bernard .
Frais généraux :
Appointements. Gratifications.
Affranchissements. Convocations
Chauffage
Eclairage
Papeterie
Frais de bureau. Entretien ,
Frais de recouvrement .
Droits de garde
Divers ....
600
450
450
1.400
600
2.340 40
628 23
81 30
103 45
365 20
211 30
45 30
9 05
5 »
1.500 »
2.000 »
3.795 23
A reporter
7.295 23
rappurt nr trksorfer phir i.'vsmk \[HK\ 139
/{rport .... 7.2'»:; -23
Augmentation de la culloction '»'• »
.\chals <lo livres 23i 4."»
Frais (Je publication 3.68i 55
Ertraordituiin's :
Autopsie Girard de Rialle. . . 40 10
Transport de momies .... 34 58
Uéfection de la salie des st'ances. 131 »
Installalitjnd'unesallede Inilletins 885 i>5
l.O'JT 03
Total des dépenses .... 12.357 8!)
Si du total des dt'penses nous rapprochons celui des
receltes, soit 11.054 10
Nous constatons un excédent de dépenses de ... . 1 .303 76
Cet excédent de dépenses, malgré le chiffre des frais généraux peu
■levé pour l'exercice et l'économie réalisée sur le cha|titre des publica-
• alions. s'explique par les raisons suivantes :
1" Le montant des prix décernés celle année s'élève à 3.500 francs,
chiffre supérieur à la totalité des arrérages des valeurs en portefeuille.
2' Le montant des dépenses extraordinaires, dont la presque totalité a
été absorbée par l'installation d'une salle pour nos collections de bulle-
tins. Cette dépense qui était de première urgence s'élève à 883 fr. 95.
3" En dernier lieu, je dois attirer votre attention surlechilTre des coti-
sations qui de 0.870 francs en 1904 (chiffre de la moyenne normale) ne
ligure plus pour cet exercice que pour 5.520 francs, dans le montant de
nos recettes, soit une diminution dans le prélèvement de nos cotisations
de 1.350 francs, chiffre qui est représenté par des reçus récents qui seront
très vraisemblablement portés dans l'exercice 1900, pour la presque tota-
lité.
Si de notre avoir disponible au l'^'" janvier 1905 :
lléserve disponible 1.415 42 )
F^rovision pour prix 3.584 » j '
Nous déduisons :
Le montant du déficit de l'exercice 1.303 76
Nous constatons que notre reliquat liquide est encore de . 3.095 00
Se décomposant comme suit :
Réserve disponible 1.779 01 i „
Provision pour prix 1.916 05 j ^.090 66
140
l^f MAn> 190G
Tableau // — Bilan au 31 décembre 1905.
ACTIF
Espèces entre les mains du trésorier.
Fonds placés à la Société Générale .
Créance chez MM. Massun et C'^.
l'ortefeuille (au prix d'achat) ' :
Valeurs disponibles . . 45.093 09
— indisponibles. . 51.780 »
PASSIF
Capital :
Fonds destinés aux prix.
Droits d'admission
Rachats de cotisations.
Dons et legs
Réserve :
Disponible
Capitalisée .
Provision pour prix ....
285 82
2.462 59
947 25
96.873 09
51 . 780 »
5.530 95
16.800 »
14.672 90
1.779 01
8.089 24
1.916 65
Budget provisoire pour 1906.
Ressources :
Droits d'admission .
Rachats de cotisations.
Cotisations
échues . 1 . 200
courantes. 0.200
Vente de ) Société . 300
publications | Masson . 900
Subvention de l'Etat .
Arrérages de valeurs .
Bénéfices divers. . . , ,
:i
200
600
7.400 »
1.200 »
1.000
3.135
50
13.585 »
100.568 75
100.568
13.585 »
* Notre portefeuille de valeurs en bourse à l'estimation du 31 décembre 1905 avait
une valeur de 103.611 7û
Son prix d'achat pour lequel nous le faisons figurer dans notre inven-
taire étant de 96.873 09
Il en ressort donc une plus-value de 6.738 6iî
illVRAGE> OFFERTS
Charges :
J Broca . . . 1.500 » ) ^.OOO
*^" j fîodaid . . . 500 .. )
Frais généraux :
Appointements. (Iratilications. . 2.500
Aiïranchisscments 000
Chaulîage. Eclairage .... 250
Papeterie 350
Frais de bureau 200
— de recouvrement . . , 150
Bibliothèque et collection. 500
Publications. Impression. . . 4.200
Reliure et gravure 800
Travaux d'entretien et ri'|iaralions. 300
Dépenses imprévues .... 200
Soit un excédent de recettes de
lil
2.000 »
>7 10.0.50
d2.050
i.5:î5
82:!« SEANCK. — lo Mars 1906.
Présidence de M. Hamy.
OUVRAGES OFFERTS
M. Edoiard Ci'TER. — .l'ai l'honneur, au nom de M. le D' Laurent, ancien
médecin en chef des asiles publics d'aliénés et des hôpitaux de Kouen, d'offrir
à la Société un ouvrage dont il est l'auteur, ouvrage ayant pour titre « Pliysin ■
nomie et mimique chez les aliénés. » Ce travail, qui a paru dans les Annales
iin'ilico-psyrliologiipies. est une addition à un mémoire di'jà ancien, compose
en 18G2 el puhlir .-n 1863 dans les mêmes Annales. Le but du travail actuel a
été surtout diiisisler sur <pielques idées particidiéres qui. ne ressortant pas
sullisammenl. avaient alors été méconnues.
M. le Df Laurent a [>ris pour point rie dépari lonvrage que j'ai publir sui- la
Mimique en UK)2. et \c premier rbapitre lui est exclusivement consacré.
r.'est dans le troisième chapitre que sont développées les idées originales de
l'auteur : 1° que dans les diflérentes formes de folie, il y a un syndrome
phfisionomif/ue commun qui liadiiil précisément une altération conumme à
ces formes : l'état de folie •> ; 2" l'extériorisation de ce syndrome se manifes-
terait de la façon suivante : « Le rapport existant entre Vœil et les centres
mimiques faciaux oculaire et buccal est modifié de faron à présenter un
aspeit plus ou moins caractéristique qui. au milieu des parties situées autour
de cette expression physionomique, se manifci^lc par une désbarmonie spéciale
ii2 15 .M.\n> 11)06
plus ou uidins «{iparonlc. Il v a <lans co nouveau rapport (pitilcjut.' chose de
|iarli<ulit'r ipii sonihle se rallachcr surtout à l'expression fournie par l'œil. »
Teih'ssoui les idées rondanii-ntiili-s de n- rnéiiioirc. idées émises pai- l'auteur il
V a (piaraute trois ans.
Itapptdanl (pie les mouvements produits à l'extérieur font suite à un cert^ain
nouil)re d'aeles efTeetués à l'intérieur. M. le I)'" Laurent se trouve entraîné dans
l'examen du mécanisme de la physionomie et la recherche du centre directeur
lies mouvements physionomi<|ues do la face; avec Beohterew, il place ce centre
dans lescoiiêlies opli(jues.
Mettant à profit les travaux d'.\nthropologie. il fait remarquer que le sys-
tème nerveux de Ihomme est particulièrement caractérisé par son extraor-
dinaire centralisation.
.\prés l'exposé de considérations psycho-plijsiologi(iues intéressantes, il conclut
« que par suite de la concentration dos éléments organiques d'association, se
forme, en une sorte de réseau conncctif, un lien anatomique incontestable pour
l'union fonctionnelle des actes de la vie intellectuelle et la constitution des
rapports fondamentaux nécessaires à notre unité substantielle. »
Uevonant à l'examen des signes extérieurs. M. le D' Laurent s'occupe de
l'innervation do la face et du fonctionnement dos nerfs (|ui se rendent à celle
région. A ce propos, il traduit un passage d'un mémoire du physiologiste russe
Sikorsky. Il s'arrête ensuite à l'examen du regard. 11 signale un contour ?nimi-
que à cachet spécial comme caractéristique chez le fou.
En résumé, le travail de AL le IV Laurent est lo résultai d'une savante expé-
rience, une étude clinique en même temps que l'exposé d'une manière de voir
originale qui témoigne, en môme temps, d'une profonde érudition.
La Démence par le D'" Marie, Médecin en Chef à l'Asile de Villejuif.
C'est un essai de psychologie expérimentale appliquée à la démence sous ses
divers aspects. (Démences précoces, d. paralytiques, d. séniles. etc.)
L'auteur tonte \me psycho-palhologie générale des démences fondée sur
l'autonomie cellulaire consécutive aux alléralions endo cl péricellulaires diver-
ses des neurones corticaux. II établit un parallèle entre ces alléralions histolo-
giques et les lacunes psychologiques diverses mises en lumière par les méthodes
d'enregistrements variées, chronométrie et mesures des temps de réactions,
application des tests, etc. Les recherches toutes récentes relatives à l'anatomo-
cliniquc dos drmoncos précocos sont l'objet do développemonts intéressants,
basés sur les rochorches cliniques et nécropsiques de l'auteur complétées par
les préparation hislologiques du D"" Klippel. Les problèmes de l'étiologie des
démences précoces et paralytiques et de leur terrain dégénératif sont chemin
faisant abordés ainsi que celui du mécanisme des insonescences démentielles.
L'auteur termine par un aper(.-u généi-al des [)roblèmes biologiques, sociaux,
et juridiques qui se posent à l'occasion do la démence ainsi que par des données
générales démographiques statistiques et d'assistance.
ULHaKLlL-i;il\MlIAltUEL. — DKS DKVIATluNS I.ATKIIAI.KS l»fc;.> lJ(tl(ii,>
liii
DES DEVIATIONS LATERALES DES DOIGTS
(L'Index Varus).
Tau m. i.e I)"" Louis DuBREiiL-CiiAMUAnDEL, de Tours.
I.'obsorvalioii tie «luelques fails curieux de dévialions latérales des
doigts, et, d'autre part, les divergences d'opinions qui ont été émises sur
cette question d'anatomie, m'ont engagé à présenter, sur ce sujet, une
courte note devant la Société d'Anthropologie de Paris.
Il convient, tout d'abord, de s'entendre sur les qualifications à donner
aux déviations latérales des doigts, et, nous basant sur l'homologie des
li'sions qui ont été depuis longtemps observées aux orteils, nous nom-
merons vavHS les déviations vers le bord radial de la main, et vaUjus les
déviations vers le bord cubital.
Ceci dil, il importe de remarquer iju'il existe normalement une dévia-
tion des doigts, c'est ce que F. Uegnault ' a clairement démontré. « Cette
incurvation se fait, dit-il, suivant un mode constant; le second doigt se
courbe latéralement vers le troisième; le quatrième et le cinquième éga-
lement vers le troisième, celui-ci est légèrement courbé vers le qua-
trième. »
Ces déviations, surtout celles de l'auriculaire, sont constantes, et,
d'après nos recherches, se rencontrent chez 75 pour 400 des sujets; mais
elles sont, le plus souvent, très légères, ne dépassant pas un angle de
170 degrés. Parfois, cependant, elles peuvent s'exagérer, et lorsqu'elles
forment un angle moindre de 170*', constituent une anomalie véritable. Ce
fait s'observe surtout pour la phalangette du 5" doigt fortement inclinée
vers l'axe de la main, au point qu'on penserait a une subluxalion.
Ces anomalies sont rares. Ayant, à l'efTet d'en étal)lir la proportionna-
lité, examiné 2.o00 sujets tourangeaux, c'est-à-dire 5.000 mains, nous
avons obtenu les chiffres suivants, qui ne concernent que les déviations
formant un angle de moins de 170".
POUCE
V«rus
Valgus
Varus
Vali'us
15
MKIHUS
Varus
Valgus
ANNfl.MRE
Varus
Valgus
AUUlCULAmE
Varus
14
Valgus
Depuis Ilegnault (1894), plusieurs auteurs se sont occupés des dévia-
» F. Regnault. — Courbures des doigts de la main et mouvement d'opposition.
Revue Scienlifique, 1894. Toiuc 1°', p. 801.
{ii i.-i M A 11- i'.»ort
lions de rauriculaiie varus. Nous citerons surloul les travaux de Ch. Veré '
et de M"'« Derscheid-Dclcourt *.
Pauly a publié en 1902 un cas d'index valgus '.
Dans tous ces faits, il s'agissait donc d'une anomalie consistant dans
l'exagération d'une disposition normale.
1.03 déviations latérales du pouce ont été i)lus souvent signalées par
HolTa *, Werner Kunimel ', Joachimsthal ^ Kirmisson ", etc. Mais, il est
à remarquer que ces déviations du pouce se rencontrent fréquemment
sur des mains présentant d'autres anomalies, telles que la polydactylie
ou la syndaclylie. Nous en avons, pour noire part, deux obser^^ations très
nettes, encore inédites, et au sujet desquelles nous comptons présenter
ultérieurement une note.
Avant notre communication à la Société Médicale d'Indre et-Loire '** du
12 janvier 190G, on n'avait pas signalé de cas d'Index Varus. C'est là une
déviation d'une nature diiïérente des précédentes. Il ne s'agit plus, en
efïet, de l'exagération d'une disposition normale, mais d'une déviation
en sens contraire de la disposition normale. C'est ce qui fait l'intérêt des
deux observations que nous donnons plus loin.
Très exceptionnellement, on rencontre une déviation totale des doigts,
nous n'en avons aucune observation personnelle. La déviation ne porte
liabiluellement que sur les deux phalanges distales et le plus souvent,
seule, la phalangette est déviée.
Les déviations des doigts sont pres.]ue toujours bilatérales. Les faits
publiés par Feré, Pauly, Derscheid-Delcourt et la plupart de nos obser-
vations personnelles le prouvent abondamment. Mais un point sur lequel
on n'a pas encore, croyons-nous, attiré l'attention, et qui, pour
les déductions pathogéniques qu'on en peut tirer, a une très grande
importance, est le fait de la coïncidence fréquente aux orteils de déviations
homologues. Nous avons noté plusieurs fois cette coïncidence dans nos
observations.
• Charles Feré et .1. Perrin. — Xote xitr lex nnomalies des doiç/ts et en parlicu-
lie?' du petit doif/t valgus. Revue de Cliiriir^ie, 1905, pngc GG.
Charles Fere — Note sur une anomalie drs doif/ls et en particulier du petit
doigt dévié. Id , 19G6, p. d8o.
* Derscheid-Delcourt. — Un cas de doigt varus double congénital et héréditaire.
Journal Médical do Bruxelles, 11^03. page 3.{.
3 Pauly. — Doigts en valgus. Revue de Médecine, l!l).3, p. 1078.
4 HOFFA. — Deutsche Zeitschrift ftir Ortliop. Chirurgie, 1873. Bd. II, Ilelfl 4. Lehi-
b'ich der Orlhop. Chirurgie. 189'i.
5 Werner Kummel. — In Kirmisson.
'j .JoACHi.MSTHAL — Cfjer augeboreiie Seitlic/ie Deviationea der Finger phalangen.
Vcihandl. dor Berliun- med. Gcsellsch. IBJ, T. S. 2B8.
Id. — L'eber congé. ninle Fi:i(jer- anomilien. Zjitschr. fiir Or lup. C'iir. DJ. Il, Il'jlfl
8. 1892.
' Kirmisson. — Traité des maladies chirurgicales d'origine congénitale, 1898.
Masson et G''", Pari?.
« Dubreuil-Chambardel. — De l'inde.v varus et des déviations latérales des
doigts, Gazelle Médicale du Cenlrc, lOOtJ, pa^e 55.
DinRELIL-IJIlA.MIl.UiDKt.. — HKS DKVIATluNS LA TKltALKS KES IXtlC.TS 1 i">
Lîi déviation la plus accentuée que nous ayons rencontrée a été, dans
un cas d'Index \arus, de i'M'\
L'examen radiographiijue de ces dévialiitus, ainsi que le squeletl»'
d'une main présentant cette même dilYormifé, nous permettent de bien
étu^'ier les déformations t[ue subissent les phalanges.
Le corps de l'os ne subit, en général, aucune déformation et un ne
constate aucune courbure anormale. II n'est pas atrophié. Dans (juelques
cas, cependant, le corps de la phalangine est un peu diminué de longueur;
le doigt est donc un peu plus court qu'à l'état normal. C'est ainsi que dans
ciM(jC\s d'inde.K. varus, la déviation étant i-éduite, rexirémité du doigt
arrivait à peine au niveau de rextrémito supérieure de la phalangette
du médius '.
Les déformations portent essentiellement sur les extrémités articulaires
des phalanges et plus particulièrement sur les extrémités inférieures.
Les condyles, externe ou interne, des extrémités distales de la phalange
et de la phalangine sont comme atrophiés, ce qui fait que les plateaux
des deux condyles externe et interne ne sont plus suivant un même plan
horizontal. Les condyles internes ne sont cependant pas augmentés de
volume, ou du moins de façon peu sensible.
Uu côté des extrémités supérieures de la phalangine et de la phalan-
gette, on constate une légère augmentation de volume de la portion
externe.
Par suite de ces légères déformations, il se produit comme une sorte
de subluxation et la région articulaire paraît augmentée de volume.
Du coté des parties molles, nous n'avons rien à signaler, si ce n'est la
l)résencede bourses séreuses supplémentaires au niveau des articulations.
Ces bourses séreuses sont très susceptibles ;i s'enflammer. Nous noterons
aussi que les doigts déviés possèdent des mouvements de latéralité par-
fois assez étendues.
L'hérédité joue un rôle très important dans l'étiologie des déviation
latérales des doigts. On sait, d'ailleurs, et c'est un fait d'observation
courante, qui a été souvent étudié et dont la démonstration est aujourd'hui
bien établie, (|ue les déformations digitales sont essentiellement hérédi-
taires et familiales. Je n'insisterai pas davantage sur ce point, qui est
traité longuement dans tous les ouvrages de pathologie générale.
Les déviations latérales des doigts ne contredisent pas à cette règle et
la confirment, au contraire., de façon très nette, comme vont le montrer
les observations suivantes, qui nous sont personnelles.
' Celle même constalalion a élu faile par .M. Charles Fcré dans le cas d'auriculaire
vnrus [op. cil. et .Vole sur l'oUtjodactylie cubitale. Soclét6 de Biologie, 1894, p. 021).
C.;l auteur iIoudî à c-tlc disposition le nom d'oligodactyiie. « L'anomalie osseuse si'
caiaclérisc p.ir une atrophie di la plnlanginc qui est. |)]us courte en général et sur-
loui en dtfaut du côté externe du plateau articulaire contigii à la phalangette. '
(Revue de Chirurgie, i'JOl}). Il nous semble que ce mot d'oligodaclylie est mal cho.^i.
Il s'oppose, en elTet, à celui de polyJaclylic cl indiiiuerait une diminution du
nombre des doigts plutôt qu'une diminution de longueur d'un doigt.
146 i;i .M\i;^ i'.ior>
( ) U s E n V A T 1 (J N I
Index Vnnts.
Kamillo IJjud..., dcineuranl à Tours, rue Lcgras. M. ]i..., ouvrier
niaron, a un index varus très prononcé de la main droite. La plialange
forme avec la phalangine un angle de 135 degrés. L'index de la main
gauche, amputé il y a dix ans, présenlait, paraît-il, une déviation aussi
accentuée. Les seconds orteils des deux pieds sont fortement déviés en
varus.
De son mariage avec M'i" C... sont nés onze enfants, dont six sont
actuellement vivants. 11 nous a été donné d'examiner ces six enfants le
15 septembre 1905.
Ilippolyte, 15 ans. Index varus à droite de 150". Index varus à gauche
de 150°. Rien de bien net aux orteils.
Louise, 14 ans . . Pas de déviations appréciables.
Emile, 11 ans. . . Index varus à droite de 170°.
Index varus à gauche de 170'^. Léger varus du 2« or-
teil à gauche.
Joseph, 10 ans . . Index varus à droite de 160".
Index varus à gauche de lOS". Rien aux orteils.
Marie, 4 ans . . . Index varus à droite très léger.
Index varus à gauche de 172". Déviations légères aux
deux orteils.
Jeanne, née le 31 août 1905. Index varus à droite de 154°.
Index varus à gauche de 138°.
2" orteil gauche, varus de 170°.
2" orteil droit, varus de 170'.
Sur les cinq enfants qui sont morts, deux, parait-il, présentaient de
très notables déviations latérales des index. L'un des deux, Gustave, mort
à 18 mois, présenlait à sa naissance deux index varus aussi accentués
que ceux de la petite Jeanne et avait également les orteils en varus.
D'après les renseignements qui nous sont donnés, le père de M. lî... et
un de ses frères olfraient aussi de beaux exemples d'index varus.
Voici donc une famille dans laquelle nous pouvons suivre la même
déviation latérale de l'index pendant trois générations successives. Sur
les dix sujets porteurs de ces déviations les difformités étaient bilatérales,
et, sur presque tous, coïncidaient avec des déviations aux orteils.
.Observation II
Index varus.
Famille Kad. . . , demeurant à Tours, rue Saint-Pierre-des-Corps. M™" R ••
uLiiitKiiL-i:ii.\MiiAiu>i.i.. — iiK> i»i;viATi"iN> i,Mi,u.\r,i;s iJK> Diiicrs t i7
a à chaque main un index varus de 170", il n'y a pas de déviations aux
seconds orteils. Son mari, aujourd'hui décéd(S n'avait aucune déviation".
Trois enfants vivants tml tous trois la mémo dilTormité.
.Ii'ai)'. 17 ans .... Index varus droit de 172".
Index varus gauche df Ki.")".
(liibrielle. iri ans. . Index varus droit de 170\
Index varus gauche de 1G3".
.Marcel, 8 ans. . . . Index varus droit de 17")°.
Index varus gauflu' do 102°.
Kieo à signaler aux orteils.
Dans ces quatre cas, les déviations comprenaient les deux dernières
phalanges de chaque index.
Observation III
Auriculaire varus.
M. B..., à Tours, présente à chaque main une déviation lat'-ralede l'au-
riculaire en varus. Le degré de la déviation est d'environ 165°. M. B...
ignore si son père présentait la même malformation, mais deux de ses
oncles, encore vivants, ont également un varus assez accentué des deux
auriculaires.
Dans ces trois cas, la déviation latérale n'intéresse que la phalangette.
Plusieurs auteurs ont également, avant nous, signalé le rôle joué par
l'hérédité.
Diverses théories ont été proposées pour expliquer la palhogénie de
ces anomalies digitales.
M"'* Derscheid-Delcourt y voit la conséquence d'une mauvaise attitude
(lu fœtus dans la cavité uttMine et signale la « pression exercée pendant
la vie intra-utérine sur la phalangine par suite de la fermeture exagérée
du poing du f(clus. »
M. Ch. Feri', dans sa note de 1903, accepte cette exi)licalion. « Comme
le fœtus dans l'utérus, dit-il, a la main fermée, on peut, peut-être, admettre
que ce trouble d'ossification est dû à une fermeture exagérée de la main
du fœtus et, par suite, à une pression exagérée portant sur l'épiphyse
inférieure de la phalangine. »
dette théorie n'explique pas la bilatéralité de l'anomalie, son caractère
héréditaire et, surtout, pourquoi on rencontre aux orteils des déviations
homologues. Nous ne l'acceptons donc pas.
Boix ' explique la pathogénie de la déviation en coup de vent de tous
les doigts par l'insullisance de l'aponévrose palmaire. Nous ne pensons
pas que cette théorie puisse s'appliquer aux cas qui nous occupent.
' E. Boix. — Déviations des doigts en coup de vent et insuffisance de l'aponévrose
palmaire d'origine congénitale. Nouvelle Iconographie de la Salpêlriére, 1897, p. 180.
148 ir; MAio 1906
Tous cos auteurs accusent la position anormale en flexion des doigts.
Mais cette position qui pourrait, peut <Hre, exagérer les déviations nor-
males des doigts, n'aurait aucune action pour provoquer les déviations
de l'index varus.
Il est évident que dans les cas qui nous occupent, on ne saurait faire
intervenir l'influence des muscles.
Le fait sur lequel nous avons insisté, h savoir :
1° Bilatéralité de l'anomalie;
2" Coïncidence de déviations homologues aux orteils ; nous permet d'en-
visager l'hypothèse d'une localisation corticale. Y a-t-il un centre cortical
déterminant le développement du squelette? l'ne lésion de ce centre ne
pourrait-elle pas provoquer un arrêt de développement des points homo-
logues des phalanges des doigts et des orteils?
Faut-il faire de ces déviations des stigmates de criminalité, de démence
ou de dégénérescence? M. Ch. Feré paraît assez disposé à répondre pour
l'affirmative. Sur i-SO aliénés il aurait observé des déviations de l'auricu-
laire sur 70, c'est-à-dire sur 88,88 0/0; et seulement 19 fois sur 100 sujets
normaux. Mais M. Ch. Feré n'indique pas le degré des déviations qu'il a
observées; il ne nous est donc pas possible d'accepter sa statistique, d'au-
tant plus, ainsi que nous l'avons déjà dit, qu'il existe une déviation nor-
male de l'auriculaire que nous avons rencontrée sur 75 0/0 des sujets.
Pour notre part, ayant examiné deux groupes également nombreux,
l'un de pensionnaires de l'asile d'aliénés de Tours, l'autre de sujets nor-
maux, nous n'avons trouvé entre les deux aucune dilTérence sensible.
Les sujets chez lesquels nous avons rencontré ces déviations au
maximum, ne présentaient aucune tare héréditaire pathologique, ni
aucun trouble de démence, et étaient parfaitement sains.
Les déviations latérales des doigts ne constituent donc pas, pour nous,
un caractère de criminalité ou de dégénérécence.
Discussion.
M. C. Lejeu.ne. — Je ne sais si le fait que je vais citer rentre dans la
communication de M. Dubreuil-Chambardel, le voici : Mon père avait la
dernière phalange des deux pouces d'une longueur réduite de moitié
environ. Cette particularité s'était produite au moins pendant un certain
temps dans la famille de sa mère qui s'appelait Vigreux, car on disait
couramment : u c'est le pouce des Vigreux. » 11 avait un oncle et une
cousine germaine, (jue j'ai connus et qui présentaient ce même pouce
réduit. Je regrette de ne pouvoir citer des détails plus précis, mais c'est
une confirmation de l'hérédité des malformations. J'ajoute qu'au point de
vue de l'intelligence, mon père était un très modeste, mais très remar-
quable jurisconsulte.
M. Blocu. — Je dois observer que l'incurvation du petit doigt vers
DISCUSSION 449
l'axe de la main a été particulièrement signalée chez des enfants idiuls
par Telford Smilh ', S. P. West » et Bournevillc'.
.Mais West a également remarqué celle distinction de laiiricuiaire sur
des enfants normaux.
.M. l\\rii.i.\ri T. — La communication dr .M. DubifMiil-i lliambardel est
fort intéressante, mais il me semble (lu'elle doit être poussée plus loin.
Elle s'arrête, en somme, sur une constatation négative : il n'y a pas plus
souvent de flexion latérale des doigts chez les aliénés que chez les normaux.
Noire collègue trouve que la théorie de I.ombroso est en défaut, et semble
satisfait. <Ju'il me permette de lui faire remaïquer (ju'il est en trop bonne
voie pour s'en tenir à celte critique stérile, et qu'il se doit de nous appor-
ter des faits plus positifs. Déjà, en effet, il a découvert que la déviation
frappait parfois d'une fayon remar(]uable les extrémités digitales homo-
logues des pieds et des mains. Il faut donc une cause profonde pour frapper
des organes aussi éloignés, et il le sent si bien qu'il va jusque dans les
centres corticaux en chercher le point de départ. Je ne choisirai pas entre
les théories explicatives dont il nous fait l'hislorique. Ce sont des hypo-
thèses qui ne sont vérifiables que par des faits nouveaux. Or il ne faut
pas s'en tenir à ces rapports très généraux que nous révèlent les statis-
tiques : elles établissent de vagues concomitances entre telle malformation
et des étals aussi mal définis que la santé, la maladie, la dégénérescence,
la criminalité, la folie. Ces recherches ont été utiles, quoiqu'on en ait dit,
mais il faut maintenant les pousser plus loin, et établir des concomitances
plus étroites entre ces malformations et des faits plus précis, tels que
caractères morphologiques de la main, des membres, etc. La communi-
cation de notre collègue me fait espérer qu'il nous apportera bientôt la
découverte d'une de ces relations qui seule peut jeter de la lumière sur
la genèse encore si obscure de ces « stigmates de dégénérescence »,
' Telford Smith — A peculiarely in Ihe shape of llio lian lin Idiots of llic mongol
typo (.1/W*. of Ped., 189C).
' West (S. P. A.). — Note on Iho lilllc fin^fcr of llic niongolian Miols and of nor.
mal children {Arch. of Ped., 1001).
3 UoLRNFA'iLLE. — Rech. clin, et Iftérap. sur Viipilcpsie, l'hystérie el l'idiotie, 19U1
et 1902. Traité de méd. de Drouardel et Gilbert. T. IX, 1902.
150 ^•"» M^'^" ^^0^>
LES FAUX EOLITHES
Par m. Au. Thieullen.
Messieurs,
Plusieurs d'entre vous, je suppose, ont eu connaissance d'un article :
« Oriiiine des éolithes », publié dans l'Anthropolojie (mars-avril 1905) par
M. MarceUin Boule, professeur de paléontologie au Muséum.
L'auteur nous dit avoir été conduit par M. Laville dans une usine de
ciment, à Mantes. Là, dans une cuve, une roue horizontale armée de
herses en fonte fait seize tours à la minute pendant vingt-neuf heures
dans un mélange d'argile et de craie, cette dernière empâtant un certain
nombre de rognons de silex,
« Entraînés dans un mouvement tourbillonnaire, comparable à la
« vitesse du Rhône en temps de crue, ces rognons de silex, écrit M. Boule,
« sont donc soumis, pendant une période de vingt-neuf heures, à des
« milliers de choc naturels dont on perçoit parfaitement le cliquetis, ana-
« logue au bruit d'un torrent qui roule des pierres. La plupart de ces
« cailloux sont devenus des galets roulés identiques à ceux de nos ballas-
« tières; mais, comme dans toutes les alluvions anciennes à silex, qu'elles
« soient oligocènes, miocènes, pliocènesou pléistocènes, il y a ici un grand
« nombre d'échantillons qui présentent des « retouches ». 11 va sans dire
« que je ne parle pas seulement d'éclats distribués un peu partout, comme
« au hasard, mais d'éclats localisés sur une seule face du silex, groupés
« sur tels ou tels points, comme dans un but intentionnel, c'est-à-dire de
« véritables retouches, au sens donné à ce mot par les partisans de la
« théorie des éolithes...
« Nous possédons des pièces tout à fait semblables à celles que M. Ilutot
« désigne sous le nom de percuteurs, racloirs, grattoirs, retouchoirs, silex
« àencoches. Certains échantillons, d'une perfection véritablement extra-
« ordinaire, paraissent avoir été l'objet d'un travail fini, de « retouches
« méthodiques et plusieurs fois répétées. »
Je passe. Messieurs, sur les détails intéressants donnés par l'auteur,
pour en arriver de suite à ses conclusions.
(f Je ne prétends pas, écrit-il, que tous les éolithes soient d'une origine
« naturelle... On pouvait, en se basant sur les éolithes, admettre comme
« possible l'existence de l'Homme dans nos pays pendant l'ère tertiaire,
« on n'avait pas le droit de l'affirmer.
« Comme paléontologiste, je crois fermement à l'existence de l'Homme
« tertiaire; je ne doute pas qu'on trouvera un jour ses traces sur quelque
« point du globe; mais, pour être irrécusables, ses traces devront avoir
« une valeur tout autre que celle des éolithes. »
Pendant la lecture de ce travail sur l'origine des éolithes, j'ai attendu
Ail. TiiiKn.i.EN. — r.F.s FAr\ koi.itiie? d54
inutilement le moment où M. Houle allait nous apprendre qu'avant de
conclure il avait tenu à voir, à étudier les importantes collections d'éolithes
du Musée royal de Bruxelles, afin d'en faire la comparaison avec les
éûlithes fabriqués mécaniquement. Il garde le silence le plus complet à ce
sujet et ne cite même pas le nom d'un préhistorien qui, après examen
sérieux de ces collections de Fielgique, soit resté fermement incrédule sur
l'intervention de la main humaine dans le faciès des éolithes helges.
Si je me permets, quoique tardivement, pour cause de maladie, de
donner mon avis dans une (jnestion préhistorique de cette importance,
c'est que non seulement j'ai vu les éolithes helges, mais que j'ai examiné
aussi une vingtaine des éolithes de Mantes que AI. Lavillcaeu rohli,i:;cance
démettre à ma disposition. Disons de suite que, parmi ces éolithes de
fabrication mécanique, il en est deux ou trois que l'on croirait vraiment
intentionnels, ;i ce point (}u'un instant j'ai eu la pensée qu'ils avaient pu
tomber de la surface du sol et s'être trouvés accidentellement mélangés
à la craie.
Mais, de ce fait (ju'une machine peut parfois donner mécaniquement à
des silex un faciès éolilhique, s'ensuit-il nécessairement que les éolithes
humains soient condamnés ti rester éternellement douteux et qu'il soit
impossible de les distinguer jamais des éolithes accidentels?
Ce serait vraiment trancher bien prestement une question préhistorique
.pii, par son importance, mérite tout au moins d'être étudiée minutieuse-
ment à l'aide de tous les renseignements possibles.
l'armi les éolithes de fabrication mécanique que j'ai eus sous les yeux,
ici a l'École des mines, je n'ai vu que des rognons de silex et pas une
seule plaquette à retouches d'utilisation, comme il s'en trouve, si j'ai
bonne mémoire, un grand nombre dans les collections de Belgique.
Que d'observations à faire, que d'essais 5 tenter avant de conclure si
précipitamment !
Dans nos régions les courants quaternaires, ;i l'époque de Chelles,
n'ont jamais eu la violence que M. Boule veut attribuer aux courants
tertiaires dont il compare les effets à ceux d'une roue horizontale munie
de herses en fonte, et faisant pendant vingt-neuf heuresseize tours dans
une espace limité.
Certains objets de forme très fragile : haches, couteaux, coquillages, et
certains silex naturels, restés intacts dans leur fragilité, démontrent sura-
bondamment que les courants n'avaient pas alors le caractère de brutalit('
dont M. Boule les gratifie avec tant d'assurance. Dans quel état devieu-
draienl ces pièces fragiles des alluvions, si elles étaient exposées vingt-
enuf heures au régime tourbillonnaire de ces moulins armés de herses en
fonte et faisant seize tours à la minute? M. Boule devrait bien en faii'e
l'expérience.
Que deviendrait le faciès de ces silex de Mantes si, au lieu d'être bras-
sés mécaniquement durant vingt-neuf heures, ils l'étaient pendant des mois,
des années et des siècles ?
Ces silex qui se trouvent dans les cuves sont-ils tous, sans exception,
452 |j MAit> i'J06
plus ou moins ébréchés après les vingl-neuf heures de traitement'? Il con-
viondrait d'on noter exacleincnt le faciès à l'entrée et à la sortie de la
cuve.
Si ces roues de moulins à craie ne portaient pas Je herses en fonte,
quels aspects prendraient les silex soumis pendant vingt-neuf heures au
seul mouvement giratoire, plus en rapport, semble-l-il, avec les courants
qui ont déposé les alluvions ?
Les pierres emportées dans un mouvement tourbillonnaire ne devien-
nenl-elles pas des galets très arrondis, comme le sont, en eiïet, les pierres
qui reposent au fond des marmites des géants?
Si l'on en juge par les dessins qu'en a donnés J. Prestwich, les éolithes
du Kent ont des faciès très différents de ceux des éolithes provenant des
terrains belges. A-t-on comparé les éolithes anglais à ceux de fabrication
mécanique?
Bien d'autres recherches seraient à faire, avant de formuler un juge-
ment, qu'on présente comme définitif et sans appel, sur une question
il peine ouverte. Une simple visite au Musée royal de Bruxelles, où il
serait facile de mettre en comparaison les spécimens les mieux réussis
des éolithes de production mécanique avecles puissantes collections des
éolithes récoltés par M. Rutot dans les terrains belges, permettrait peut-
être à M. Boule, après examen, de conclure tout autrement qu'il n'a fait,
en se basant sur quelques pièces prises isolément.
J'ai lu dernièrement, dans un numéro du Correspondant (:25 décembre
■190o)un article de M. de Lapparent, ayant pour titrai: alaFableéolithiquc ».
C'est avec un gr.indintérètquej'ai prisconnaissancede ces pages littéraires
et humoristiques, au cours desquelles l'auteur mefaitl'honneurdeciter mon
nom, à propos des pierres figures à retouches intentionnelles, « une des
« idées, écrit-il, qui avaient hanté le cerveau de Boucher dePerthes, vers
« la fin de sa carrière, idée reprise par M. ThieuUen '. » Puis le savant
géologue, après avoir transcrit fidèlement les théories que M. Rutot a cru
bon d'établir à ce sujet, se garde bien de faire connaître son opinion sur
une question qu'il n'a probablement jamais eu le loisir ni le désir d'exa-
miner sérieusement. Aussi «OMS laisse t-il aux prises M . Rutot et moi, en
citant ce gai propos de la servante de Molière :
Qu'ils s'accordent entre eux ou se gourment, qu'importe ?
1 Boucher de Perthes jusqu'aux derniers jours de sa vie, conserva intacte sa pleine
lucidité d'esprit, comme en témoigne la clarté de ses derniers écrits ; il est mort à
quatre-vingts ans. Que de personnes parlent de lui sans le connaître ! Il est évident
que M. de Lapparent ignore complètement la haute valeur intellectuelle de l'homme
éminentdont il ne parle que par ouï-dire. Aussi lejuge-t-il sur les racontages mis
en circulation par des gens qui, honteux de ro])po?ition acharnée que pendant vingt
ans ils avaient faite ouvertement et sans raison à la découverte géniale du Père de
l'archéologie préhistorique, ont cru atténuer leur responsabilité en faisant planer
sur la belle intelligence du Maître d'ineptes suspicions accueillies sans contrôle et
colportées inconsidérément par ce gros public toujours disposé à admettre avec em-
pressement les imputations calomnieuses, si insensées qu'elles soient.
Al>. TIIIEl I.I.E.N. — LES KAIV Kdl.ITlIKS iljS
Malheureusemenl la inîinc prudence, à propos des éolitlies do 15r uxelles,
n'a pas été observée par M. de Lapparent, qui, n'ayant jamais vu et par
conséquent jamais étudié les superhes collections réunies au Musée royal,
ne craint pas cependant de porter un jugement définitif qui condamne
les éolilhes, et cela, sur les dires de M. Boule, qui lui aussi n'a pas été
voir ces collections belges, pas plus du reste que M. Lavillc
Est-ce bien là un procédé scientifiiiue? Un peut en douter, quoi(ju'il
ait été employé par le célèbre géologue académicien Klie de Beaumont h
l'égard de la découverte géniale de Boucher de Perlb(»s. Juger sans voir,
à dislance, par ouï-diro, semblait être une métliude d(''linilivcment aban-
donnée; a-t-elle donc l'ail école'/
Sans être grand prophète, on peut prédire ((uo le jugement rendu sera
cassé pour insuflisj'.nce d'information, lui elfet (jueNjues l'ares témoins
ont été entendus, les aulres n'ont pas été appelés; les accusés eux-mêmes
n'ont été ni vus ni interrogés par les juges qui les ont condamnés à la peine
de mort. Mais si ces Messieurs croient bonnement avoir tué les éolithes,
c'est qu'ils ont l'illusion facile. Ils ont fait, au contraire, sans le vouloir, la
meilleure réclame en faveur de l'existence de ces premiers outils humains,
en obligeant les préhistoriens soucieux de se renseigner exactement
sur la (juestion, de se rendre à Bruxelles pour visiter les collections si
probantes du .Musée royal ; ce qui n'empêche pas d'être prudent, et tout
parliculièrement à l'endroit des théories bizarres auxquelles les éolithes
ont donné lieu.
L'arlicle de M. de [.apparent n'élant qu'une réédition agrémentée de
la brochure de M. Boule, je n'ai rien à ajouter aux observations que j'ai
présentées ii propos de V « Origine. des éolithes », observations qui s'ap-
pliquent tout aussi bien àla« Table éolithique ». Les deux auteurs sont en
accord parfait.
Pour votre agrément,, .Messieurs, je veux vous citer les deux paragra-
graphes littéraires qui, sous forme d'actions degi'àce, terminent joyeuse-
ment la «( Fable éolithique » ; ils m'ont procuré une douce gaieté que vous
partagerez, je suppose :
" Espérons que l'expérience de Guerville, écrit .M. de Lapparent, sera
« jugée décisive, et que non seulement Beutel, mais Thenay et les autres
« gisements du même genre sont enlisés pour toujours, en compagnie de
« l'homme tertiaire, au sein de la bouillie du malaxeur.
« Merci donc aux industriels qui nous ont procuré ce bénéfice ! Il vaut
« bien l'absolution pour le petit dommage que leurs usines peuvent avoir
« causé au paysage mantois. Merci surtout aux connaisseurs, comme
« M. Laville et M. Boule, qui, n'ayant jamais capitulé devant le mirage
(c éolithique, ont su, si à propos, lui opposer la triomphante réponse des
« silex façonnés par entre-choquement mutuel. Encore un triomphe de
« ce mutualisme, aujourd'hui si fort à la mode !
« Jadis, l'habile et spirituel crayon de Grandville dotait l'art français
« d'un livre qui a joui en son temps d'une vogue légitime et qui s'appe-
« \ai\\. les Animaux peints par eux-mêmes. Aujourd'hui, par la grAce des
soc. d'aithrop. 1906. H
154 iîj M A us 1906
« cailloux de Mantes, un nouvel ouvrage, celui-là écrit au tout au moins
<( inspiré par des hommes de science et susceptible d'être enrichi de
« photographies parlantes, pourrait venir s'ajouter avec avantage au
« catalogue de la littérature à la fois instructive et joyeuse; c'est le livre
« qui aurait pour litre : les Sile.r taillés par eux-mêmes ».
Et voilà la question définitivement jugée, condamnée, enterrée ad vilam
seleniam.Yoxis venez d'entendre l'oraison funèbre des éolithes : Requiescant
in pace !
J'ai reçu tout dernièrement de Belgique une brochure de M. Georges
Engerrand, professeur à l'Institut des hautes études, tes Éolithes et ta
logique, u II est évident, écrit l'auteur, qu'on peut toujours imaginer un
« ensemble de circonstances particulières, ayant abouti à la production
« d'un éolithe naturel ou même d'un instrument plus compliqué. Cepen-
« dant ce sont là des cas tout ii fait spéciaux, qu'un homme raisonnable
« ne se refuse pas à envisager, mais auquels il serait tout à fait ridicule
« d'attribuer les milliers d'éolithes que l'on rencontre en position strati-
« graphique. » C'est la même idée que bien des fois j'ai exprimée, en
déplorant la manie que l'on a trop souvent de vouloir généraliser et con-
clure sur des pièces isolées et non sur un ensemble. « Il faut souhaiter,
« écrit M. Engerrand, que M. Boule, après tant d'autres, se décide à venir
« étudier les éolithes et qu'ainsi il apprenne à les reconnaître des cailloux
« sortant des agitateurs. »
J'ai reçu de M. Laville une note parue dans la feuille des jeunes natu-
ralistes et dans laquelle notre collègue donne la description de quelques
fragments de silex qu'il a recueillis en Eure-et-Loir dans une couche
d'argile à silex.
Ce sont bien, comme M. de Lapparent l'avait prévu, des silex taillés par
eux-mêmes, puisqu'ils ont été extraits, paraît-il, du centre de rognons
fendillés, c'est-à-dire de l'endroit même où ils ont pris naissance, et que,
chose assez inattendue, ils portent ce que M. Laville appelle des fausses
retouches, ce qui fait que le malaxeur de Mantes devient inutile: les
éolithes se produisant par génération spontanée, tes chocs ne sont plus
nécessaires.
Je me suis empressé d'aller examiner les pièces originales. Ce sont des
fragments informes de silex avec quelques petites échancrures. D'après
M. Laville, l'un simule une lame rompue paléolithique ou néolithique avec plan
de frappe et conchoide; un autre a l'aspect à'un large racloir mousléricn; un
troisième ressemblerait à un grattoir concave avec fausses retouches. Il en est
un qui est usé à certains endroits, etc., etc. Quelle que soit la cause
occulte de leurs ébréchures, ces débris de silex ne présentent vraiment rien
d'assez caractéristique qui permette de les assimiler, même de loin, aux
éolithes que j'ai vus au Musée royal de Bruxelles. Quant à ces fragments
à l'aspect moustérien, ils n'auraient rien de curieux, selon M. Rutot qui a
toujours soutenu que ce type moustérien avait existé de tout temps, et
qu'il se trouvait fréquemment parmi les éclats naturels de silex.
M. Laville est un chercheur intrépide de pièces classiques, mais il ne
AD. THIEn.I.F.N. — I.F- 1- \l \ KDMTHE^ 153
s'intéresse nulloment aux collections (lu'il sait ùtre composées de pièces
en dehors des types reconnus par l'École, comme j'ai pu, à nouveau le
constater, par l'indilTérence (jue mettait notre collègue à regarder une
cinquantaine de petits silex anticlassiques que je lui montrais. J'appelais
son attention sur îles échantillons très l'cinarquahles, je lui signalais des
tailles bien supérieures, comme intention éviilenle, ;i tout ce que l'HcoIe
admet, l'engageant à les examiner à la loupe. C'est à peine s'il y jetait un
rt'gartl distrait; il semblait gêné, comme s'il eût craint d'y voir la condam-
nation des idées préconi^'ues qu'il partage avec nombre de préhistoriens,
.le ne crois pas trop m'avancer en disant, qu'étant occupé à l'Ecole des
mines, à l>i porte du Luxembourg, il n'a jamais eu l'idée de consacrer une
heure à rechercher quelques-uns de ces intéressants petits silex taillés dont
II' sable de ce jardin m'a fourni une si ample moisson. Se déjuger, recon-
n.n'lre son erreur, quauil on s'est ti'ompé, est-ce donc au-dessus des forces
humaines* Il semble (|ue, plus on apporte de preuves décisives (M1 faveur
d'un fait nouveau, moins la partie ailverse est disposée ;i entendre raison
et à se rendre à l'évidence.
En résumé, l'existence des éolilhes intentionnels n'a rien à redouter des
productions mécaniques et accidentelles, malgré les parrains bénévoles de
ces contre-façons.
De même n'est nullement compromise la prodigieuse longévité de ces
inlinis milliards de silex taillés qui sont enfouis, ignorés, dans le diluvium,
et dont je recueille chaque jour, depuis plus de vingt ans, de curieux
spécimens, partout où je me trouve, malgré les dénégations» sarcasmes
et lins sourires de bonnes gens qui, ingénument, s'imaginent qu'ils sont
les détenteurs patentés des secrets de la Préhistoire, et qu'il ne peut exis-
ter de silex taillés intentionnellement, sans leur permission.
Il devrait être interdit, sous peine d'être taxé de déloyauté, à toute
personne s'occupant, tant soit peu sérieusement, d'une science quelconque,
de formuler des affirmations pour ou contre une question en litige, sans
avoir préalablement épuisé toutes les sources de renseignements possibles,
afin d'être moins souvent exposée à méconnaître une vérité ou à propager
une erreur. Il est si facile de se taire et d'attendre, lorsqu'on est insuffi-
samment documenté! Malheureusement, nombre de gens ont la manie
incurable de vouloir conclure avant d'avoir étudié une question à fond, à
l'aide de tous les documents connus; et pourtant l'expérience du passé est
là qui devrait leur imposer prudence et discrétion.
Discussion.
M. M.wiMiLiEN Georges. — Dans celle question des éolilhes si contro-
versée et encore si obscure, il y a lieu de tenir compte des observations,
à mon point de vue si judicieuses, que notre collègue, M. Thieullen, nous
a faites ici, et auxquelles je vous demanderai de vouloir bien joindre les
quelques réflexions qui vont suivre, que me suggèrent les actions méca-
456 i5 M MIS iH06
niques ijut' l'on met en cause pour la produclion des soi-disanl faux
éolilhes qui sortent des cuves d'une fabrique de ciment, signalés par
M. Laville. Mes observations ne porteront donc absolument que sur ces
actions mécaniques comparées à ce qui se passe dans le lit d'un torrent
ou d'un neuve, puisque celte comparaison a été faite.
D'après M. Marcellin Boule, h qui j'emprunte les renseignements tech-
niques qui suivent, on vcise dans une cuve de 5 mètres de diamètre et
1 m. 40 de profondeur un mélange d'eau, d'argile et de craie que l'on
malaxe pendant une trentaine d'heures à l'aide d'une roue horizontale
armée de herses en fonte, qui marche ;i la vitesse de 4 mètres par seconde,
à la périphérie.
J'ai cherché à me rendre compte, par le calcul, du genre de travail qui
se produit dans ces conditions particulières dans la cuve, et aussi de celui
qui peut se produire dans un fleuve à régime torrentueux, pour les masses
de cailloux et de sable qu'il transporte; mais je vous préviens, et pour
ne pas y revenir, que tous ces calculs sont très approximatifs — il ne
peut d'ailleurs en être autrement.
Voici donc pour la cuve ce qui doit s'y passer :
La vitesse moyenne de la masse liquide qu'elle contient mise en mou-
vement par les herses est approximativement de 2 mètres par seconde;
car si cette vitesse est de 4 mètres à la périphérie elle est presque nulle
vers le centre.
Tout ce contenu tourne avec ensemble, car une masse liquide soumise
à une action dynamique de ce genre est, après un certain temps de mar-
che, animée du même mouvement que le système entraînant.
On doit cependant réduire un peu celle vitesse pour la masse pâteuse
par ce fait que la cuve étant alimentée d'eau courante le passage de cette
eau oppose un peu de résistance au mouvement d'ensemble. Il faut tenir
compte aussi de ceci, qui a beaucoup plus d'importance : Les bras des
herses tournent à 0 m. 20 au-dessus du fond et lorsque l'opération est
finie on retire (d'après M. Capitan) une couche de silex d'environ 0 m. TiO
d'épaisseur qui repose-sur ce fond, et que je suppose n'avoir été intro-
duite dans la cuve que progressivement. Celte énorme quantité de cailloux
(près de 10 mètres cubes) occasionne par son frottement contre le fond
et les parois un ralentissement dans le mouvement de la masse liquide.
Donc celte vitesse de 2 mètres par seconde devrait être encore réduite.
Je trouve, en calculant 1res largement, que les herses font un trajet
circulaire moyen d'une dizaine de mètres qui, à raison de 16 tours par
minute, donne un parcours de 160 mètres par minute, pour 60 minutes
9.600 mètres, et pour 30 heures 288.000 mètres ou, plus approximative-
ment encore, 300 kilomètres.
Dans celle masse en mouvement composée d'eau, d'argile, de craie et
de cailloux, j'ai la conviction qu'il ne peut se produire aucun choc capable
de faire éclater des silex, car ils ne subissent d'autre pression que celle de
leur propre poids, très réduit dans cette masse pâteuse dont la densité,
il ne faut pas l'oublier, est approximativement de la moitié de la leur;
niscL'ssiuN 157
ils roulent tous entraini's les uns sur les aulrcs dans ce mouvement lour-
billonnaire, en somme pas Irùs puissant, où ils ne font (jue se frôler sans
pouvoir se choquer au point de produire des éclats; car il faut bien se
rendre compte de ceci : pour obtenir un éclat sur un silex il faut, ou le
frapper d'un coup assez violent ou lui faire subir une forte pression.
On ni' pourrait admettre ces phénomènes d'éclatement que si ces
cailloux pouvaient être serrés, coincés assez fortement les uns contre, les
autres, mais il ne peut en être ainsi dans un milieu d'une densité pareille
et animé d'un tel mouvement d'ensemble. A plus forte raison, à mon
p jint de vue, il ne peut se produire rien de semblable à ce que l'on cons-
tate sur les silex qui ont ce faciès particulier à ceux reconnus comme
ayant réellement reçu une taille intentionnelle.
Ne voyant rien qui puisse, dans ces conditions, nous expliquer comment
se sont produits les éclats que l'on constate sur ces silex après leur sortie
de la cuve, j'en arrive, avec M. ThieuUen, à me poser cette question :
Ces éclats n'existaient-ils pas dessus avant leur introduction dans la cuve?
I^our ma part je crois devoir y répondre par l'affîrmative. Sans cepen-
dant prétendre qu'il ne puisse jamais s'en produire, ce qui serait vouloir
[)0usser mon raisonnement jusqu'à l'absurde; mais s'il s'en produit, ce
ne peut être que de rares exceptions et sur les parties des cailloux les
plus faibles.
Maintenant, examinons ce ([ui doit se passer dans un lleuve ;i courant
rapide tel que le Rhône, par exemple. (Comment la masse caillouteuse
qui constitue son lit se meut-elle?
Cette masse subit probablement un mouvement constant très lent dans
tout son ensemble sous la pression continuelle du courant dont la vitesse
et la puissance, surtout en temps de crue n'ont, évidemment, aucun rap-
port avec ce qui se passe dans la cuve dont nous venons de parler. Le
courant détruit une berge d'un côté, ravine lentement un banc de cailloux
de l'autre, remplit et exhausse des bas-fonds, pour recommencer toujours
le même travail sans trêve ni arrêts. Mais la non plus il ne doit pas se
produire de chocs capables de faire sur des silex des éclats du genre
lie ceux qui nous occupent, car tous ces mouvements se passent plus ou
moins lentement dans l'eau qui amortit tous les chocs, ou dans ces masses
sableuses dont la pression, qui est considérable, s'exerce dans tous les
sens.
l'our la durée du trajet employée par le lleuve je propose l'hypothèse
suivante : Les déplacements des bancs de sable et de cailloux peuvent
être pour l'ensemble, d'une trentaine de mètres en moyenne par année,
ce qui fait que le Rhône mettrait 10 siècles à leur faire effectuer le par-
cours de Lyon à la mer, qui est d'au moins 300 kilomètres.
Y a-t-il un rapprochement possible à faire entre ce qui se passe dans
les malaxeurs de l'usine de ciment et ce qui se passe dans le fleuve? Je ne
le crois pas.
Néanmoins, puisque l'on a voulu voir une analogie entre ces deux
mouvements, admettons-la et regardons quel en est le résultat pour le
158 i-> MAit> ^^06
neuve : un immense apport à l'aval, de cailloux roulés dans lesquels il
serait diiïicile, je pense, de trouver beaucoup d'éolilhcs.
.le crois devoir vous citer aussi l'exemple suivant de brassage de
cailloux dans l'eau : c'est ce qui se passe au bord de la mer, sur les
grèves ou, surtout pendant les tempêtes, des masses de galets sont sou-
levées par les vagues pour retomber ensuite avec fracas, sans cependant
produire de silex taillés comme ceux qui nous intéressent.
Ue tout ce qui précède je conclus donc que la cuve ne fabrique pas
d'éolithes et que la nature elle-même, à part de rares exceptions, dans
ses torrents, sur ses grèves ou dans ses fleuves ne produit pas de silex de
ce senro.
SUR LA TAILLE, L'ENVERGURE, LE PERIMETRE THORACIQUE
ET LA HAUTEUR DU BUSTE CHEZ LES POPULATIONS DE L'INTÉRIEUR
ET DES COTES DE LA NORVÈGE
Par m. le Diuectelh A. Daae et le \)^ II. Daae,
Médecin-majov de 1'° classe deinnnée.
Par une lettre du 14 ayril 1902 émanée de la Société de Médecine Mili-
taire et adressée aux médecins militaires des différents détachements de
l'armée, ceux-ci furent invités à procéder pour chacun de ses hommes, et
conformément à une instruction de détail, à la mensuration de la taille,
de l'envergure, du périmètre thoracique et de la hauteur du buste.
Pareille invitation fut encore en 1903 adressée aux médecins militaires
d'un certain nombre de détachements militaires. Au cours de ces deux
années on a reçu en tout des résultats de mansuration concernant 5.776
personnes nées en Norvège. Les personnes mensurées étaient originaires
de toutes les préfectures ; pour la préfecture de Tromso il n'y en avait tou-
tefois que 5, toutes originaires de la ville même et aucune appartenant
aux districts ruraux.
Sur les o.T'G personnes mensurées, on mit à part toutes celles plus
âgées ou plus jeunes que la 23" classe d'âge. On fit en outre, dans la 23*
classe, abstraction d'un certain nombre de personnes dont on ne connais-
sait pas avec certitude le lieu de naissance. On écarla ainsi un total de
1.821 personnes, et il n'en resta que 3.955, dont les mensurations furent
utilisées.
Sur ce nombre 3.529 étaient originaires des campagnes.
426 des villes.
3.955
Comme, lors du recensement du 3 décembre 1900, le nombre total des
A. DAAE ET H. DAAE. — LA TAILLE CHEZ LES POPULATIONS KE LA NORVÈGE 159
hommes de 22 à 28 ans était pour les districts ruraux de 1 1.39;), le chiffre
de 3.529 représente pour tout le pays 31 0 0 de total des ruraux de 22 îi
23 ans.
Pour toute la Norvège In tniUc moyenne est de 172.132 '. La moyenne
maximum est celle de la préfecture de Jarlsberg-Larvik, qui est de 173.451 ;
le minimum se rencontre dans la préfecture de Finmarken, où il est de
16S..Vil.
Tour toute la Norvège l'envergure moyenne est do 178.243. La moyenne
maximum est celle de la préfecture de Hedemarken, qui est de 179.579,
et le minimum 174.32tî se rencontre dans la préfecture de Finmarken.
La moyenne du rapport entre l'envergure et la taille est pour toute la
Norvège, si on pose la taille = 100, de 103.550. Les chifîres les plus
élevés concernent les préfectures de Hratsberg et de Hedemarken avec
10i.7-l0et 10i.32.S; le miniuium est accusé par celle de la préfecture de
lîergenhus-Sud, 102.228.
domnie on le sait, renrerriure est presque toujours un peu supérieure à la taille.
Ku règle générale onpeul admettre, que plus est grand Iccartentre l'enver-
gure et la taille plus est grande aussi la longueur des bras, et inversement,
que moins cet écart est grand, moins grande est la longueur des bras.
Pour toute la Norvège l'écart moyen est de 6.11. Les chifîres maxima
sont fournis par la préfecture de Bratsberg et la préfecture de Hedemar-
ken, 8.11 et 7.45. Dans la sous-préfecture de Solor^ près de Kongsirnger,
au voisinage de la frontière suédoise, l'écart moyen atteint même 9.39.
Le minimum d'écart est accusé par la préfecture de Bergenhus-Sud,
3.91. Dans cette préfecture les cantons suivants : Sund et Austevold, Fjeld,
.Vlversund, Manger et Herlo ont ensemble une envergure ne dépassant la
taille que de 1.04. La population de. ces cantons s'occupe essentiellement
d'un bout de l'année à l'autre à la pèche, qui a lieu avec des bateaux à
rames. 11 semble donc que l'usage constant des rames pendant des géné-
rations contribue à raccourcir les bras.
La hauteur moyenne du buste est pour toute la Norvège de 91.19; le
maximum est fourni parla préfecture de Ncdenœs 91.87, le minimum
90.13 par celle de la préfecture de Finmarken.
.^i l'on pose la taille --= 100, la hauteur moyenne du buste est pour
l'ensemble de la Norvège de 52.98. La moyenne maximum est dans les
préfectures de Trondhjcm-Nord et de Finmarken, 53. Gl et 53.47 ; on
trouve le minimum dans la préfecture de .larlsberg-Larvik, 52.40. La
hauteur du buste relative a son minimum dans toutes les préfectures
cMières depuis la préfecture de Jarlsberg-Larvik jusqu'à la préfecture de
Kumsdal, à l'exception de la Bergenhus-Nord.
Ensouslrai/nnt la hauteur du buste de la taille totale, on trouve la longueur
approximative des jambes.
' Toutes les mesures sont indiquées en cenlimôtres.
' Los préfecUu-cs f.\mt) se divisent en sous-profeclurcs (Fogdori) et ccll-s-ci en can-
tons ^Thiuglagj;
160 i:, MAio 1000
l'uur l'oiiseinblo de la .Norvège la longueur moyenne des jambes, ainsi
calculée, est de 80.94. Le chillre moyen maximum est fourni par la pré-
fecture de .larlsberg-Larvik 8:2.-40, le minimum par la préfeclurede Fin-
marken 78.42. Le rapport moyen entre lu longueur des jambes et la taille,
celle-ci étant posée =: 100, est pour l'ensemble de la Norvège 47.02; le
chiffre maximum est accusé par la préfecture de Jarlsberg-Larvik 47.54,
le minimum parles préfectures de Trondlijem-Nordet de Finmarken 46.39
et 46.53. Si l'on excepte ces deux préfectures, on trouve que la population
des préfectures cùlières a toujours les jambes relativement plus longues
que celle des préfectures de l'intérieur.
Le périmètre moyen thorucique est pour l'ensemble du pays de 87.35;
le moyen maximum se constate dans les préfectures de Trondhjein-Xord
et de Bergenlius-Nord 89.59 et 89.03, le minimum dans les préfectures de
Finmarken et de Bratsberg, 86.20 et 86.22.
Le chiffre moyen du rapport entre le périmètre thoracique et la taille
est, lorsqu'on pose celle-ci = 100, de 51.04 pour l'ensemble de la Nor-
vège, avec maximum dans les préfectures de Trondhjem-Nord et de
Bergenhus-Nord 52.52 et 51.81, et minimum dans la préfecture de Jarls-
berg-Larvik, 50.15.
Il est rare qu'on trouve à la fois une large envergure et un grand péri-
mètre thoracique, c'est ce qui est pourtant le cas dans la préfecture de
Bergenhus-Nord. .\u contraire la règle est de trouver une envergure consi-
dérable associée à un périmètre thoracique peu considérable.
Le périmètre thoracique est d'une façon générale un peu supérieur ù la moitié
de la taille. L'écart entre le périmètre moyen thoracique et la moitié de la
taille est pour toute la Norvège de 1.78 en faveur du périmètre thoracique.
Cet écart atteint son maximum dans la préfecture de Trondhjem-Nord et
dans celle de de Bergenhus-Nord 4 30 et 3.11, le minimum est fourni par
la préfecture de Jarlsberg Larvik 0.25.
Le périmètre thoracique est presque toujours un peu inférieur ù la hauteur du
buste. L'écart entre la hauteur moyenne du buste et le périmètre moyen
thoracique accuse pour toute la Norvège un déficit de 3.34 pour le péri-
mètre thoracique; le délicit minimum est fourni par la préfecture de
Trondhjem-Nord 1.80, le maximum se rencontre dans les villes etdansla
préfecture de Iledemarkcn 4.64 et 4.58.
La distinction entre les populations côtières et celles de l'intérieur est
basée sur le genre d'occupations de ces populations. 11 nous fallait
cependant instituer encore un troisième groupe, que nous appelons
populations intermédiaires. Elles habitent des districts où l'on ne vit
qu'en partie de la mer; ce sont esseniiellement l'intérieur des fjords et
la majeure partie de la côte sud.
Nous avons autant que-possible dans cette répartition laissé les villes
en dehors de notre statistique.
La carte VIII résume la répartition de ces districts.
.A. liAAE ET 11. UAAE.
LA lAll.l.E ClIKZ LES l'nl'l LAilO.NS HE LA .NuUVEiiE
101
Kn faisant abstrarlion dos villes, la inovi'ime
est itour les 3.529 individus considérés .
Sur ros indiviiius, il y en a :
2.077 piiii' riiitc'iii'iir
857 pour les districts inlenu(''<liairos
595 pour la côte
172. 1S8
172__U8'
172.999
171. 196
178.183
178.8(10
178.481
177.()55
9 3 ■«
a ca 3
91.22
-91.21
91.30
91.12
88.04
.S7.71
88.73
88.17
Ecart entre le périmètre thoracique et la demi-taille :
histricls de l'intérieur.
Histricts intermédiaires
Districts cùtiers.
55.5"
87.714
88.735
88.173
86.059
86.500
85 748
1.655
2.235
2 425
Longueur moyenne des jambes {différence entre la taille el la hauteur du buste)
1
Taille
t-5
Si
tD£.
o ^
o «
^ <v
■a
histricls de l'intérieur. .
Distriits intermédiaires
histricls cùtiers
172.118
172.999
171.496
91.212
91.305
91.116
80.906
81.()94
80.380
"i l'on po.se la taille =: 100, on trouve
102
i:\ M Alt s 1900
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Districts do rinlôrifiir
103.882
52.094
52.778
53. 130
50.962
51.292
51.414
47.000
Disliicts inteniR'fliairfs
Dislricls côliers
10:3.109
Kia.ryji
47.222
40.870
On lire de là les conclusions suivantes :
1. Que les diatricts intérifiirs ont le maximum absolu iVenverfjure.
2. Que toutes les autres mesuii's absolues maxima sont accusées par les dis-
tricts intermédiaires sauf en ce qui concerne l'enienjure {longueur des bras).
3. Que les districts côliers ont toutes les mesures absolues minima, sauf en ce
qui concerne le périmètre thoracique.
Si l'on pose la taille ^ 400 :
1. On trouve le maximum d' envergure dans les districts intérieurs.
2. Le maximum de la longueur des jambes dans les districts intermédiaires.
3. Fa le maximum de hauteur du buste et du périmètre thoracique dans les
districts côliers. ,
Les mesures qui caractérisent les districts intermédiaires s'étendent dans
la contrée au delà des limites adoptées à l'origine pour ces districts.
Pour pouvoir dire avec quelque précision à quelle distance vers l'inté-
rieur s'étendent ces districts intermédiaires, il faudrait qu'on disposât
d'un nombre de mensurations bien autrement grand que celui [qu'il nous
a été donné d'utiliser. La limite tracée par nous est en conséquence plus
ou moins arbitraire.
Nous comptons comme intermédiaires les 9 préfectures côlières depuis
et y compris ce!le de Nordiand jusques et y compris celle de Nedenœs.
Les parties de ces préfectures, qui ont été comptées comme districts
côtiers, sont conservées par nous comme tels; le reste est compté comme
« intermédiaires ». Gomme intérieur nous comptons dans leur entier les
7 préfectures du Sud (voir la carie IX).
Si en dehors des villes, on fait abstraction de la préfecture de Finmar-
ken, où la population par sa petite taille et le grand développement de son
buste, se distingue si nettement du reste de la population, les résultats
énumérés plus haut ne sont guère modiflés, sauf que toutes les moyennes
augmentent un peu, surtout en ce qui concerne les districts côtiers.
Pour les 3.440 individus restants, les résultats sont comme suit :
' Les chiffres soulignés d'un long Irait sont les maxima, d'un court trait sont les
chiffres moj'ens ; les chilTres non soulignés sont les minima des résultats pour les
3 groupes : dislricls de riiUérieur, intermédiaires et côtiers.
\. DAAE KT H. UAAK. — LA I Vll.l.b: CHEZ LES l'Ul'L L V I lO.NS UE L\ NORVEGE iO^i
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l'dur Ips ( pn'h'iM lires <!•■ 1 inté-
rieur (1569 personnes) , . .
171.901
179.015
91.14
87.33
1.38
80.76
Pour les districts intermédiaires,
c'est-à-dire les 9 préfectures
côtières ;\ l'exception des dis-
tricts considérés dès l'origine
comme C(Miers(13ri6 personnes)
172.872
178.225
91.36
88.77
2.33
81.51
Pour les districts entiers (505 per-
sonnes)
171.937
178. 16G
91. 20
88.59
2.62
80.68
^^^
Si l'on pose la taille -~ 100, les différentes proportions seront comme
suit :
1
B
3 "m
O 3
3-«
^ 3
— -a
" 3
S. H"
Il •
m
3 .a
ec.5,
c
o 03
-3
l'uur les 7 pri/roolures dt; l'intérieur.
ioi.ir,4
53.02
52.85
53.08
50.80
51.35
51.53
4(J.99
l'our les districts intermédiaires, les
9 préfectuies cùtièi'cs, moins les dis-
tricts cùtiers
Pour les districts cùtiers
103.097
103.623
47.15
46.92
On voit ainsi que que les 0 préfectures côtières, prises ensemble et défal-
«alion faite dos districts considérés dès l'origine comme cùtiers, accusent
le maximum de mesures absolues sauf pour lenverfiure, qui atteint son maximum
(tans les 7 préfectures de l'intérieur.
l'ar rapport à la taille, ce sont les districts cùtiers qui ont le maximum de
hauteur du buste et du périmètre thoracique. Les districts intermédiaires, c'est-
îi-dire les 9 préfectures cùtières, abstraction faite des districts côtiers, ont
la longueur maximum des jambes et les 7 préfectures de l'intérieur ont le maxi-
mum d'cmergure {lonqueur de bras) cl le périmètre thoracique minivium.
i<»i 15 MAILS v.m
La portion exinhne de la cote vers la mer du Nord, l'Océan Atlanti(jue
cl l'Océan (llacial a une population chez qui la taille est généralement
moins élevée, les jambes plus courtes et la poitrine plus large que le
reste du pays.
Dans les districts cùtiers intérieurs — ceux que nous avons appelés dis-
tricts intermédiaires — la taille va en croissant, et avec elle, toutes les
mesures absolues sauf l'envergure. Mais ce surcroît de dimensions s'étend
en outre plus loin vers l'intérieur, ce qui semble indiquer, qu'il n'est pas
motivé exclusivement par les occupations maritimes, mais aussi par un
climat plus doux, une meilleure nourriture et la vie dans un terrain acci-
denté, exigeant un usage plus développé des différents muscles du corps ;
il va sans dire aussi que l'air vivifiant de la mer doit exercer son influence
bienfaisante jusque assez loin vers l'intérieur.
Discussion.
-M. Papillault. — Les faits anlhromélriques que nous résument MM. Daae
sont sans aucun doute bien établis, car il est présumable que les divers
opérateurs ont employé la même technique; mais il est bien difficile d'in-
tsrpréter ces faits avec quelque probabilité; on n'a utilisé que quelques
mesures, et les rapports qu'elles révèlent sont d'ordre si général qu'on
pourrait indéfiniment discuter sur leur genèse. Je pense du moins qu'il
faut se défier des facteurs immédiats et que la race joue un rôle que des
mensurations plus nombreuses auraient sans doute mis en relief.
M. Zaborowski insiste également sur le facteur ethnique trop négligé
par les savants norwégiens.
ORGANISATION SOCIALE DE QUELQUES TRIBUS AUSTRALIENNES
Par R. h. Mathews L. S.
Associé étranr/er de la Société d'Anthropologie de Paris.
{Traduit par M. Oscar Schmidt).
En 1901 j'ai contribué à la Société un article contenant quelques remar-
ques rudimentaires sur l'état social des Yungmunni et quelques tribus
qui leur sont alliées et qui occupant une région étendue du plateau sépa-
rant les sources des rivières Roper et Daly du Territoire du Nord, nom
donné aux parties septentrionales etcenlralesde l'Australie Méridionale '.
Depuis cette époque j'ai pu me procurer des détails beaucoup plus
* Bulletin de la Société d'Anthropologie de Paris, lonie IL Série V, pages 41b à 419»
■MATHEWS. — unr.ANISATION SOdrAl.E DE OfEf.QrES TRinUS AUSTRAUEXXES Ki;",
complets sur la sociologie des tribus indigènes en (juestion ([iie je consi-
di're comme un devoir de communiquer ;i la Socicli'.
Des occujialions plus urgentes m'ayant empêché de me irndrc person-
nellement dans ces trihus, j'ai eu la bonne fortune de faire la connaissance
(le pruprii'laiies cl de gérants de plusieurs « liinis » - de cette partie de
l'Australie. Je leur ai envoyé dos listes bien précises de tous les sujets sur
lesquels je désirais étr(> informé en leur donnant, en même temps, des
indications sur la manière de procédera leui's investigations. La confiance
(jue m'inspircmt mes cori'ospondants et la connaissance personnelle que
j'ai du sujet me permettent d'affirmer que les renseignements contenus
dans cesp:iges peuvent être acceptés en toute sécurité.
Tour donner plus de clarté au sujet, je suis obligé de rappeler au
lecteur la Table 1 dé mon précédent mémoire, reproduit à la page 415. La
seule dilTérencc entre la Table actuelle et la précédente c>t que la colonne
« Epouse » est placée en premier et celle du u Mari » après. Cet arran^-e-
ment fait mieux ressortir le cycle des femmes.
La tribu enlière est divisée en huit sections ayant chacune un nom
distinct, ce qui permet de reconnaître facilement les membres de chaque
division; l'identification est, de plus, facilitée par la forme masculine ou
féminine de chacun de ces huit noms.
Table 1
Cïclo
Epouse
Inlcagalla
Imballaree
Imbawalla
Imbongarec
Mari
Eemitch
l'nmarra
Uwannee
Tabachin
Fils
Uwallaree
Urwalla
Uwungarec
Yungulla
Fillo
Imballaree
Imbawalla
Imbongaree
Inkagalla
B.
Immadenna
Tabadenna
I m ban née
Inganmarra
Yungalla
t'w un garée
Urwalla
Uwallaree
Tabachin
L'wannee
Unmarra
Eemitch
Tabadenna
Imbannee
Inganmarra
Immadenna
La table ci-dessus nous montre la mère, le père, le fils et la fille sur la
même ligne de gauche à droite. Il est à remarquer que les huit sections de
femmes sont classées en deux séries distinctes que nous avons dénom-
mées «cycles », chaque cycle comprenant (juatre catégories déterminées de
femmes se répétant perpétuellement comme il suit.
Examinons la moitié supérieure de la Table : le cycle A. Nous trouve-
rons que les femmes des colonnes « Epouse » et « Fille » se reproduisent
dans un certain ordre déterminé. Par exemple : Inkagalla est mère
* t Run » est le terme consacré pour dérinir'un Icrritoirc servant à l'élevage de
toutes sortes de bêle.
466
i:\ MARS <906
d'Imballaree et celle-ci a comme (illf Imbawalla ; Imbawalla, h son lour,
protluil Imboni;arec qui devient inèrc d'inkagalla; or lokagalla est le
nom de section par lequel nous avons débuté. Cette série se répète indé-
finiment n'importe avec quel nom nous commençons. Désignons cette
série de femmes comme le « cycle A ».
Si nous prenons les femmes de la moitié inférieure de la Table I
(cycle B) nous trouvons que Immadennaest la mère de Tabadenna; Taba-
denna produit Imbannee et la lille de celle-ci est Inganmarra; Ingan-
marra, h son tour, produit Immadenna et cette série, que nous dénom-
mons le « Cycle B », se répète indéfiniment comme la première.
Revenons à la Table I: Eemilch épouse Inkagalla, Unmarra épouse
Imbaltaree et ainsi de suite pour tous les autres. Ce sont là les alliances
normales et générales et peuvent, en conséquence, être désignées comme
niariaiJ[e « tabulaires ». Mais des reclierches plus minutieuses sur les lois
matrimoniales de cette tribu ont démontré ({u'un liomme d'une section
quelconque est qualifié à se marier dans trois autres sections de femmes
qui viennent s'ajouter à ou plutôt remplacer celles mentionnées ci-
dessus.
Pour faire ressortir tous les mariages possibles entre sections, il nous
faut étabir une autre Table qui démontrera que les quatres sections de
femmes dans lesquelles un homme: Eemitch, par exemple, peut se
marier, peuvent être également réclamées par trois autres sections d'hom-
mes, savoir par : Uwannee, Urwalla et Yungalla, aussi bien que par ce
même Eemitch. La table suivante indique une catégorie de quatre sec-
tions de femmes parmi lesquelles quatre catégories spéciales d'hommes
sont tenues de prendre leurs femmes, conformément aux règlements que
nous expliquerons en détail dans les Tables III et IV.
Table II
Pliraliio
Maris
Eemitch
Uwannee
Urwalla
Yungalla
Unmarra
Tabachin
Uwungarec
Uwallaree
Epouses
Inkagalla
Imbawalla
Imbannee
Immadenna
Iniballaree
Imbongaree
Tabadenna
Insan marra
Prosér.ilure
Les enfants de chaque
femme, prise indivi-
duellement, sont les
mêmes qu'à la Table
I, sans aucun égard
au nom du mari.
Dans tous les cas, c'est de la mère dont dépend irrévocablement le nom
de section à laquelle appartiendra sa progéniture. Si Eemitch épouse
Inkagalla, ses enfants sont Uwallavee et Imballavee; s'il épouse une
Imbannee, ils seront Unmarra et Inganmarra; s'il prend une Imbawalla,
ils seront Uwangaree et Imbongaree et s'il s'allie à une Immadenna, ils
• MATHEWS. — iiRtiANISATION Siii.lAl.E DE gUELQUES TRIBUS Al'STUAI.lENNK- 1«'»7
seront Tabachin et Tabadenna. Voir à la Talilt' I l<' nom dos enfants de
chacune et de toutes les sections de femmes.
Une femme donnée de la colonne « Epouse -) de la Table 11 pouvant
tHre épousée par un membre quelconque d'une des quatre sections
d'hommes de la colonne x .Maris », il est évident que le nom du père de
son enfant sera indillrrcnt. car il dépendra d'une des (jualre sections où
elle l'aura pris.
Par exemple, prenons l wallaree, le premier des noms de la colonne
« Fils » lie la Table I. Si sa mère. Inkagalla, avait épousé Eeinitch, celui-ci
serait le père direct ou <' Piemier Père » dTwallaree (voir Tables III
et IV). Si, au contraire, Inkallaga épousait Twannee, celui-ci devien-
drait le père alternatif ou w Second l'ère )i d'L'wallavee. Si elle se mariait
avecUrwalla, celui-ci serait le « Troisième Père » et si enfin, avec Yun-
gulla, ce dernier serait le i> Uuatrième Père » d'Uwallaree. Ce (jui revient
à dire iju'il importe peu lequel de ces quatre maris Inkagalla aura choisi
— son iils restera quand même lAvallaree.
-Admettons provisoirement le terme « Phratrie » poui- désigner chacune
des catégories ou assemblage de femmes figurant àla colonne « Epouses»
de la Table II. On remarquera que les hommes de la colonne « Maris » de
Phratrie A produisent les hommes de la colonne de Phratrie B, sous la
réserve que cette filiation est limitée par celle que nous avons qualifiée
de « Premiers Pères » que nous trouvons sur la môme ligne de gauche à
droite. Les k Epouses » d'une des colonnes Phratrie produisent également
les « Epouses » de l'autre, sans aucune limite, la descendance dans cha-
que se.'îtion étant réglée parles mères. 11 est donc manifeste que tout en
s'alternant une phratrie reste apparentée à l'autre.
Nous avons montré dans une page précédente que bien qu'un homme
ne puisse avoir (ju'un père réel, le nom de section de ce père dépendait
de celui qu'aura épousé sa mère. 11 s'ensuit qu'un homme d'une section
(luelconque peut avoir différents grands pères paternels. Mais, en retra-
çant la filiation de plusieurs familles, grâce au concours de correspon-
dants dignes de confiance qui ont habité le district pendant des années,
je trouve qu'il y a, pour ainsi dire, quatre sortes d'hommes dans chaque
section ; par exemple, il y a quatre Eemitches de descendances différentes
que nous distinguerons sous les N°5 1, 2, 3 et 4.
Examinons la Table 111. Nous trouvons, à gauche, que le père d'Eemitch
N" 1 est Uwallaree et que le u l'^'' Père » d'Uwallaree est Eemitch. Eemitch
N» 1 épouse comme « 1'"'' femme, » Inkagalla, fille de Tabachin qui est le
fils de la sœur de son « Premier Père; » ou bien, il épouse, comme
« 2« femme, » Imbannee, fille de Tabadenna, fille de la sœur de son
« Premier Père. »
Conlinuons la Table 111 et prenons Eemitch N*' 2 avec une descendance
différente : il épouse, comme « 1^° femme, » Imbawalla, fille du fils
d'Imbannee, sœur d'Uwannec son « 2e Père », ou père alternatif; ou
bien, il épouse comme « 2" femme », Iramadenna, tille de la fille d'Im-
bannee, sœur d'Uwannee, son « 2" Père. »
168 io Mvns im\
Prenons maintenant, Table IN', Komilch N° 3, fils d'Uwallarec qui, k
son tour, a Urwalla coinuie « 3» Père; » prenons également Eemitch
N" 4, fils d'IJwdllaree dont le « A" Père » est Vungulla. Les autres détails
sont les mêmes que ceux donnés dans notre explication de la Table III.
I/examen de ces deux Tables démontre que, quelle que soit l'une des
quatre femmes qu'il soit permis à un boinme d'une section donnée
d'épouser, celte femme lui est toujours apparentée bien que la filiation
soit dilîérente.
Si, Table III, j'ai réuni Eemitch et Uwannee comme grands-pères c'est
parce qu'en se reportant à la Table I nous trouvons que ces hommes,
tout en appartenant a deux sections, prennent leurs épouses directement
et normalement dans le même Cycle de femmes. J'ai, pour les mêmes
raisons, réuni l'rwalla et Yungalla comme grands-pères dans la Table IV.
A la Table III nous voyons Eemitch N*^ 1 épouser une Inkagalla ou une
Imbannee comme l""" ou 2"= femme. Eemitch N» 2 prendra, de la môme
façon, une Imbawalla ou une Immadenna. Eemitch N" 3 (Table IV),
épouse une laibannee ou une Inkagalla et Emitch N° 4 s'allie à une
Immadenna ou à une Imbawalla L'examen attentif des Tables III et IV
démontre que chacun des quatre Eemitch de notre exemple peut épouser
sa «' première femme » parmi celles du Cycle A, Table I, et sa « seconde
femme » du Cycle B de cette même Table.
Il existe cependant quelques extensions ou variations coutumières à ce
dernier paragraphe. Un Eemitch peut, par exemple, épouser, dans cer-
tains cas, une Inkagalla comme « première » femme et une Imbawalla
comme « seconde » femme; dans ce cas les deux femmes seraient prises
dans le même cycle (Cycle A, Table I).
Bien que chaque section comporte quatre catégories d'hommes —
quatre Eemitch par exemple — ils se réduisent, de fait, h deux, suivant
qu'ils épousent des femmes du Cycle A ou qu'ils les prennent au Cycle B,
ce qui, en réalité, réduit chaque section à deux parties au lieu de quatre.
Dans toutes les tribus australiennes les enfants appellent les frères de
père du même nom que ce père. Grâce à cette coutume, l'Eemitch de nos
exemples pourrait faire remonter sa filiation à travers l'un des frères de
son père qui aurait un « Père N^ 2 » ce qui en modifierait les détails.
A la Table III nous avons indiqué qu'Eemitch N° 1 épouse Inkagalla,
c'est-à-dire que si Tabachin s'allie à Imbongavee, comme dans la Table II,
sa fille sera Inkagalla et pourra être considérée comme sa fille « tabu-
laire. » Mais, supposons que ce même Tabachin épouse une des trois
autres femmes de la Phratrie A, sa fille pourrait être Imbawalla, ou
Imbannee, ou Immadenna; cette fille serait donc « Première femme "
d'Eemilch. La même variante se produirait pour la « Première Femme »
des Eemitch N'^^ 2, 3 ou 4. D'autres variantes pourraient être citées, mais
le principe fondamental demeure immuable pour toutes.
Cependant bien que les phratries se reproduisent mutuellement, elles
ont ce caractère particulier de ne pas se marier entre elles. Prenons, par
exemple, les « Maris » et les « Epouses » de Phratrie A^ Table II. Leurs
V\THE\V^. — .in.:\M>ATI(.\ -M.iALK DE yUEr.ulR^ THIlilN Ar^TRAI.IEN'NE- 169
Fils .. el .. Filles » deviennent les « Maris » et « Epouses » de Phratrie B,
mais ils se marient exclusivement entre eux. Leur progéniture devient, à
son tour, les .. Maris .. et les . Epouses .. de la Phratrie A et se marient
entre eux exactement ..umme lavaient fait leurs parents. Il n'y a donc pas
de mariage étranger pussihj,.. ni dans les sections, ni dans les Phratries,
si nous adoptons la Table II.
Kevenant à la Table I, il est clair qu'Ecmitch p..urra épouser Inkagalla
u.i Imbawalla du Cycle A, ou il peut prendre pour femme Imbannee ou
hnmadenna, ces unions étant réglées comme nous l'expliquons dans les
Tables III et l\ . C'est-à-dire qu'Eemitch cherchera sa femme dans
l'un des deux cycles, coutume qui exclut péremptoirement toute exogamie
ou mariage étranger.
Si nous poursuivons l'examen de la Table I il nous révèle ce fait inté-
ressant que, pris dans leur ensemble, les quatre sections de la Colonne
« Mans .. du Cycle A, peuvent se marier, en moyenne, avec toutes les
huit sections de femmes de la colonne « Epouse ». Il en est de même pour
une moyenne de quatre hommes du Cycle B qui peuvent, de la même
favon, prendre femme dans toutes les huit sections de la môme table La
conclusion qui s'impose donc, c'est que le mariage étranger n'existe pas
dans aucune des tribus dont il est question dans cet article.
Les pages qui précèdent font ressortir la manière dont se pratique et
se perpétue le mariage dans les différentes sections. Etablies sur celte
base, les unions entre deux personnes données sont réglées par un système
de liançailles qui a lieu à la naissance d'un enfant et, assez souvent
avant cet événement. Le choix d'une femme ou d'un mari est fixé par les
grands parents des futurs conjoints.
Les graphiques généalogiques qui suivent donnent un abrégé ,,iii
permettra au lecteur de suivre mon exposé.
Ln abrégé sommaire de la succession des « totems >> n'est pas sans
mterêt. Les traditions de ces tribus sont remplies de contes fabuleux
concernant les ancêtres de chaque totem. Tandis que .luelques-uns d'entre
eux ressemblent aux hommes et aux femmes de notre épo.jue, d'autres
sont des êtres fabuleux créés par la légende indigène. Dans les temps
recules, comme de nos jours, les ancêtres des totems formaient des
familles, ou des groupes de familles, possédant chacune leur terrain de
chasse dans une partie du territoire delà tribu. Nés dans une localité
déterminée, ils l'occupaient par droit de naissance. Les uns étaient
désignés, par exemple, comme des cygnes, d'autres comme des chiens,
ou des kangourous, ou des serpents, ou des corbeaux et ainsi de suite'
Les membres de chacun de ces groupes de familles étaient répartis dans
les mêmes huit .sections qui existent parmi eux aujourd'hui.
Uuelques-unsde ces totems tiaditionnelsétaint in vestis d'une plus grande
j autorité que d'autres, comme le sont les chefs de quelques groupes toté-
I iniques de nos jours. Certains de ces territoires fabuleux élaienl grands,
! d'autres petits. Lorsque la mort enlevait un de ces hommes légendaires,'
, son esprit était censé s'établir dans quelque endroit bien connu de son
soc. d'anthrop. -1906. ,o
i:o
15 .MAU> I90G
lorrain de chasse, tel iiiriin rocher, ou un arbre, ou une colUne, ou une
mare, ou hicn s'enfoncer sous l-'rre. Il pouvait aussi, en vertu de son pou-
voir surnaturel, ahanJonner i|uelques parcelles de son esprit, en guise de
don spécial à sa lignée, dans diderenls endroits, tels que les lieux où il
avait campé, ou accompli une action d'éclat, ou célébré quelque céré-
monie d'invocation, et ainsi de suite. Les lieux consacrés par ces faits
étaient disséminés dans dill'érents endroits di- la localité (|nil avait
habités.
taiu.e m
Twannee Kemilch
»° (UTO i" p'IO
Immadenna
Uwallaree
labachin labadenna
Eemitch .■ppusc Inkagalla Imbannee
1" l'pouse 2' opousc
Imbannee
Unmarra Inganmarra
Imbawalla immadenna
i" épouse
cpouse
Table IV
Yungalla
'.' pjro
Urwalla
3° pire
Imbawalla
Inkagalla
Uwallaree IJwungaree Imbongaree T'wallaree Imballaree
Eemitch épouse Imbannee Inkagalla Immadenna Imbawalla
1'= épouse î* cpouso 1" épouse 2' épouse
Tous les membres de sa famille possédaient, naturellement, des droits
pareils sur les mêmes terrains de chasse et leurs esprits hantaient,
h leur tour, de la même manière, certains lieux. A la suite de nom-
breuses générations, tous les campements, toutes les mares, tous les
grands rochers, les sources, les collines, les arbres remarquables, etc., de
ce territoire étaient comblés, saturés, pour ainsi dire, d'esprits. Il y avait
ainsi des « bandicouts » dans certains endroits, des serpents, des porc-
épics, etc , dans d'autres. Quelques-uns de ces animaux, plus nombreux
que d'autres, laissaient une nombreuse progéniture d'esprits, tandis que
d'autres, plus rares, n'avaient qu'un nombre limité de représentants.
L'emplacement exact de chacun de ces sites célèbres est parvenu par
MaTlIF.SVS. — onr, \NISATION SOCIALE DE OLEL(H'E> TRIRUS AlNTRAl.IENNE- 171
Irailition orale à tous les indigènes acluels (jui ii<' manifuenl pas d'orner
les hauts faits de ces ancOtres île toutes les vertus (jui' peut inventer leur
imagination.
(Ju'ils aient forme luimaiin' on ([ue ce soient des monstres, ces créatures
fantasques ou exagérées de liuspii-ation intligéno possèdent des pouvoirs
surnaturels. Les uns faisaient jaillir des sources ou des ruisseaux, d'au-
tres soulèvent des collines et des rochers dans certains lieux historiques.
Toutes les tribus indigènes croient fermement à la réincarnation des
uinhres de leurs ancêtres, la première phalange des esprits, pour ainsi
dire, s'incarnant perpétuellement d'un humain à l'autre. Ces indigènes
ignorent les lois naturelles de la procréation et sont convaincus que la
conception est tout à fait indépendante il'un concours sexuel. F.orsi|u'une
femme a senti, pour la pi-iMuière fois, l'enfant remuer dans sein, elle se
rappelle spécialement l'endroit où le fait s'est produit, et l'annonce aux
peisounes présentes. On croit alors que c'est l'esprit ou l'Ame d'un as-
cendant défunt qui, à ce môme instant, est entré dans le corps de la
femme. Celte entrée a pu s'effectuer par un des orifices naturels ou par
une partie quelcontiue de la peau.
Lorsque lenfant est né on lui donnera le nom tolémi(|ue de l'ancèlre
mysti(}ue attribué à cette localité spéciale. Si, par exemple, le fœtus a
remué, pour la première fois, près d'un rocher remanjuable, ou près
d'une colline, d'une mare, d'un campement, connu pour être hanté par
l'esprit de l'oiseau « galah », l'enfant appartiendra au « totem galah », à
part du totem de son père et de sa mère.
Il e>t important de se rappeler en ce qui concerne la succession des
totems, que dans toutes nos tribus indigènes la femme est emmenée dans
le groupe familial ou « triblet » de son mari et qu'elle parcourt son pays
avec lui. Si, par exemple, il est « corbeau » il passera une grande partie
do son temps, avec sa femme, dans les endroits particulièrement hantés
pur son ancêtre. Lorsque sa femm3 reconnaît, pour la première fois,
iprelle est enceinte, elle se trouvera, très probablement, dans un lieu
consacré à quelque corbeau des temps passés, parce qu'elle habite le pays
des « hommes-corbeaux ». Dans ce cas l'enfant deviendra « corbeau »
comme son père.
Si, au contraire, le fœtus remue pour la première fois lorsqu'elle se
trouve en visite chez les siens, c'est-à-dire dans le district où elle est née
et où elle a grandi, il est très probable que le fait sera rattaché à un de
ses propres ancêtres; mettons (jue celui-ci soit « porc-épic», l'enfant sera
« porc-épic » comme sa mère. Si, à ce moment critique, elle se trouvait
sur un terrain de chasse hanté, plus particulièrement, par des esprits
« pigeons », son enfant deviendra « pigeon ». Il se pourrait donc que
! quelques-uns de ses enfants soient voués à des totems différents; cepen-
dant comme leurs parents habiteront toujours, de préférence, le pays
« corbeau », comme nous l'avons dit, il est plus que probable quela majorité
de leur progéniture sera ■< corbeau ». C'est donc par erreur que d'autres
oxplurateursont pu prélen.liv -iiir hi liliuUun de^ totems s." faisait par
le père.
Certains lieux, tels .lu'un rocher, une source, un arbre, etc., sont
censés hantes par les esprits d'animaux d'espèces très rapprochées qu'ils
fréquentent ensemble comme ils le faisaient de leur vivant. Si une mère
ressentait le premier muiivemenl de son fœtus dans un tel endroit il serait
impossible de décider leqii.-l des esprits aurait pénétré dans son corps et
il devient très dillicile aux vieillards de la tribu de décider à quel
u totem » l'enfant appartiendra.
La place que vous voulez bien m'accorder dans votre journal étant
Umitée, je suis obligé de clore cet intéressant sujet. Qu'il me soit permis,
avant de finir, de rappeler que dans de précédents articles j'ai déjà essayé
de prouver que !'« exogamie » le mariage étranger, n'existe pas dans les
tribus australiennes. Traitant, en 1894, des lois du mariage dans la tribu
des Kamilaroi j'ai fait ressortir que bien qu'une femme Butha était
l'épouse habituelle d'un homme de la section Murri, un Murri pouvait
aussi épouser une Matha \ c'est-à-dire, qu'un homme de la section pouvait
prendre femme indilleremment dans l'une ou l'autre u Phratrie ». Kn
4897 j'ai de nouveau appelé l'attention sur une coutume établie dans les
tribus Kamilaroi et Wirraidyuri permettant à un homme de se marier
dans ces deux phratries '. 11 est donc évident que l'exogamie ne peut
exister chez les Kamilaroi, Wirraidyuri, Ngeumba, ou autres tribus sem-
blables de la Nouvelle-Galles du Sud.
En 1898, j'ai décrit la sociologie des ^ Dippil et autres tribus occupant
plus de la moitié du Qaeensland. Dans cet article j'ai indiqué qu'un
liomme Barràng épousait une femme de la même section. Depuis, j'ai
poursuivi mes recherches, dans tout le Queensland, parmi les principales
tribus et j'ai pu affirmer sérieusement, dans d'autres rapports, que l'exo-
gamie n'y existait pas.
En 1904, j'ai également fait connaître une série de faits concernant la
sociologie des tribus indigènes de laîSouveile-iiallesdu sud et de Victoria
qui réfute, incontestablement, l'existence de l'exogamie dans ces deux
états '.
Si mes articles précédents sur cet important sujet sont rapprochés du
présent exposé, nous ne pouvons qu'en déduire une seule conclusion, c'est
que l'exogamie est tout à fait impossible dans les tribus indigènes, soit
du Territoire Septentrional, soit de la Nouvelle-Galles du sud, de Victoria,
du nueenslanduu de l'Australie Occidentale. Il se dégage donc ce fait que
» « Le syslème de classes chez les Kamilaroi ». Proc Société Roy. Géog. de Bris-
bane, v. x, page 24,
2 « Divisions totéiniques dos tribus australiennes ». Juuni. Société Roy. N. S. Walen,
vol.'xxxi, pp. l5ti-17iJ.
3 « Divisions des Tribus du Queensland » Proc. de la Société Philos. Amer, de
Philadelphie, F. U , vol. XXXVII, pp. 328-380, avec carte du Queensland. ^
■J . .Notes etliuoiogiques sur les Tribus indigènes de la Nouvelle-Galles du sud e
de Victoria, » pp. li-lS et pp. 84-103.
DISCUSSION \ 73
daprès toutes les recherches que j'ai poursuivios il n'existe auruiH' trace
fJ'exMgainie parmi les tribus indigi-nes do loule lAusiiali''.
L'étude que j'ai faite, pendant de nombreuses années, de la sociulugie
australienne m'a convaincu que ni la promiscuité sexuelle, ni ce qui a été
appelé" mariage dégroupa ,. aicnl Jamais existé parmi les tribus austra-
liennes. Je suis également si"ir qm- l.^s divisions on cycles, phratries et
sections n'nnt pas été institué-os pour einpôdior di\s mariages consan-
guins, mais (|u'olles so sont dévoloppi'cs grddu<'llpmi'nl <(ims l'influiMici' du
milieu.
Spencer et (iillon dan-; leur « Tribus Septonlrionalfs de rAusIralio
Centrale <) (11104) ont dress; dos Tables de tribus dont la sociolo'..;ie res-
semble à celle des Yungmunni, qui divisent leur tribu en huit sections.
Les Tables publiées par ces deux auteurs ne peuvent donner aucune idée
d'une répartition pratique des sections en cycles, phratries ou en quoi que
ce soit et ne sont qu'un mélange confus et héléroclite. C'est une erreur
d'affirmer, comme ils le font. (|ui' la filiation des sections s'opère par les
hommes et ils se trompent tout à fait en déclarant (|iie la communauté
est divisée en u deux groupes exogamiques. »
Dans son livre sur les -' Tribus indigènes du sudcst de l'Australie «
M. .\.-W. Ilowitt prouve qu'il n'entend rien aux principes élémentaires
de la Sociologie Australienne lorsqu'il prétend que « toutes les tribus
australiennes sont divisées en doux moitiés et qu'il est défendu à chacune
de ces moitiés de se marier dans son propre milieu. » II se trompe aussi
complètement on parlant de la « division de la communauté en deux
moitiés exogamiques. »
Discussion.
M. I'ai'illai i.i. — J'avoue ne pas très bien cumpienilrc l'i^xposition de
M. M.tlhews, peut-être parce qu'il a donné une form3 trop concise à sa
pensée. (Juoi qu'il en soit, il y a des phrases qui semblent contra Jicloires
ou tout au moins difficilement conciliables : «. liien que les phratries,
dit-il, se reproduisent mutuellement, elles ont ce caractère particulier de
ne pas se marier entre elles. » Mais « les quatre sections de la colonne
mari du cycle A peuvent se marier avec toutes les huit sections de femmes
de la colonne épouse? » ('omment dès lors, lo choix d'une femme ou d un
mari est-il lixé par les grands parents des futurs conjoints?
L'auteur ajoute un peu plus loin que l'exogamie ou mariage l'I ranger
n'existe pas dans les tribus australiennes. Est-ce de l'exogamie d(^ pbi-a-
Irie dont il veut parler seulement, ou de l'exogamie de clan en même
temps ?
Tout'' celle exposition est donc très obscure, et comme les renseigne-
ments sont de seconde main, fournis par des éleveurs dent l'érudition
sociologique doit être assez faible, il me sera permis de trouver les con-
clusions de M. Mathews vraiment trop tranchantes, llowill n'onlond ri'-n
aux principes élémentaires de la sociologie australienne !
174 5 Aviiii. lOOr.
(iillen cl Spencer ont des tables qui ne sont « qu'un mélange confus et
hél('ro(Mile »! J'aurais préféré une discussion point par point avec ces
éuiinents sociologues, dont j'avais admiré toujours la conscience et la
pénétration.
Au fond, je pense môme que M. Malhews n'est pas loin de partager
mon estime envers eux. En eiïet, tout ce qu'il nous raconte sur la suc-
cession des totems, sur la fécondation des femmes par des esprits, sur
l'ignorance si curieuse où les Australiens sont encore des lois les plus élé-
mentaires de la fécondation, est longuement développé par Spencer et
(iillen, qui, avec Roth, sont les premiers qui aient, à ma connaissance,
attiré notre attention sur cet ensemble de faits.
Mais ici encore, M. Mathews ne compare pas les observations de ses
correspondants avec celles si complètes de ses prédécesseurs : il oublie
même de les citer...
8i>3« SEA^CC. — n .^viil 1906.
PnKSIDENCE DE M. IIaMY.
Elections. — MM. u'Echérac, Van (Iennep et Weisiikhueh sont nommés
iiiL'iiil>res de la Commission de Contrôle des finances.
MM. Oscar Schmiut et Verxeau sont nommés délégués de la Sociélc au Con-
grès de Monaco.
les troglodytes de l'extrème-sud tunisien
Par m. Emile Macquart.
Messieurs et chers Collègues,
Vous avez eu la grande bienveillance, il y a trois ans, lors de mon
départ pour l'Algérie, de me confier la mission de recueillir des documents
dans les pays que je parcourrais. Mon état de santé ne m'a malheureuse-
ment permis, à mon vif regret, de n'efîectuer qu'une petite partie de ce
que j'aurais voulu y faire. Je n'en ai pas moins parcouru quelque chose
comme huit mille kilomètres à travers nos possessions de l'Afrique du
Nord, de la mer au Sahara, et de la frontière du Maroc à la frontière tri-
polilaine. Je n'ai pas la prétention d'avoir rien découvert; mes voyages
n'eurent en aucune façon le caractère d'explorations. Ils m'ont cependant
fourni l'occasion de voir et d'observer, notamment dans l'Exlrcme-Sud
tunisien, des choses, sinon inconnues, du moins fort peu connues et
extrêmement curieuses, et dont je vais avoir l'honneur de vous entre-
tenir.
E. MACylART. LES TROGLODYTES UE lVaTRÈNIR-SID Tl-.NISIEN 175
Je (lois d'abord définir rExtn'me-Sud tunision.
Cl' que nous appelons TExtrihiie-Sud tunisien, c'est la partie la plus-
reculée de la llégcnce, nommée par les indigènes la « Grande Province >»,
qui s'étend de la ligne des Chotts à la frontière tripolilaino.
Celte région comprend deux contrées bien distinctes : au sud d<>s
Chotls, \eNefzaoua: au sud de Gabôs, le pays des Ourfjhnmmn.
Le iXefzaoua, qui constitue le versant sabarion de rKxlréme-Sud tuni-
sien, ne présente pour nous rien de particulièrement caractérisliciue; c'est,
à tous les points de vue, le môme « sud » que celui de nos provinces
algériennes, et en particulier (jue celui de la province de Conslantine. Je
n'en parlerai plus.
Le pays des Oarfihnmnnt, (pii constitue, lui, le versant méditerra-
néen de l'Kxtrème Sud tunisien, est au contraire une contrée essentiel-
lement montagneuse, dont les parties les moins tourmentées ne sont pas
sans analogie avec les plus sauvages des paysages kabyles, à cela près
qu'on n'y voit pas de verdure et encore moins d'babitants. Ce pays, —
dans leiiuel j'englobe les villages du Mahnala qui géograpbiquement.
d'ailleurs en font parlie bien qu'adminislrativemenl ils relèvent du Cercle
de Kebilli (Nffznowt) —, ne compte pas plus en cITet de cinquante cinq
mil'e babitants, pour une immense étendue de vingt-quatre mille kilo-
mètres carrés.
Sur ces cinquante cinq mille babitants, les gens de la Confédération des
Oiiifihamma entrent pour une (juarantaine de mille, répartis à peu près
également entre cinq tribus complètement indépendantes : les Accarn,
les Kliezour, les Toiiazine, les Ouderna et les DjebcUia, qui se subdivisent
elles-mêmes en un assez grand nombre de fractions.
Ces Oiiffihamhia sont un mélange d'Arabes, d'Arabes berbérisés et de
Bi-rbères, ces derniers en constituant d'ailleurs l'élément prédominant.
Les Malmnti, dont le nombre ne dépasse pas une quinzaine de mill<',
constituent au contraire une tribu berbère d'une remarquable bomogé-
n«'ilé.
Mais, Onrffhammu ou MalnKtli, tous les babitants de celle partie de
1 Kxtréine-Sud tunisien, la bande littorale cxce|)tée, poss("'(lent un carac-
l'-re Cduimun qui en fait un groupement d'une originalité absolument
uni(pie au monde. Tous en effet sont des troglodytes : troglodytes sou-
l'-rrains à Kalaa-Matmala, troglodytes « grimpeurs » dans la région de
Foum Talaboiiine, et troglodytes <> artificiels », si j'ose ainsi m'exprimer,
il Médenine et Melameur.
Kalaa-Melmata est situé à um; cincjuantaine de kilnmrlres au sud de
Gabès. Ce grand village (il compte plus d'une centaine de maisons) pré-
sente la singularité d'être complètement invisible
Lorsqu'on y arrive de Gabès, après une chevauchée de sept à huit
176
f) VVltlI.
1000
heures d'une (écrasante monotonif, dp aperçoit soudain, à un tournant
brusque de la piste, une luosqut'e en miniature sur le sommet d'un ma-
melon. (Quelques minutes ensuite c'est, à un second crochet de la route,
l'apparition encore presque sondainf' des coupoles basses d'une petite
zaouin. Vn peu plus luin et un peu jdus haut, sur le flanc d'une colline
bordant la piste à droite, le bAliment modeste des « Affaires Indigènes »
met une tache d'un l)Ianc sale. l'U c'est tout. Aucune autre construction
n'est en vue. On est en plein centre du village et rien ne le décèle, 'l'out
le village est renfermé sous cette plaine jaune (pii déroule à perte de vue
jusqu'aux montagnes environnantes son inextricable réseau de dos d'ànes
et de ravins.
Inlérieur de la cour delà maison du Clieikli Kalaa-Matmala.
Cependant, si l'on s'écarte légèrement de la route, on^distingue bientôt
un grand trou à peu près circulaire de quatre à cinq mètres de diamètre,
puis un second, un troisième... On dirait d'énormes puits. Ce sont des
«trous de cours » de maisons souterraines des troglodytes de Matmata.
Je dis bien : maisons : les Matmati en effet n'habitent pas des cavernes,
mais de véritables maisons, spacieuses et relativement confortables, et
u
Ft(j. 1. — Mèdenine. Les vieilles t Khorlas ».
fig. i\ — Intérieur de la cour de la maison souterraine de Si Abd-AUab,
chaouch de Kalaa Matmata.
E. MAiJjlAUr. — LE> TROGLODYTES DE l'eXTHKME >V0 Tt'NISIEN ITT
((110 rien d'essentiel m- dill'Menrie de la maison aralx- classique; Cùnniii'
•die-ci, la maison du Matmali est composée d'un, de deux, même de
dois éta£;es de chambres entourant une cour à ciel ouvert; mais, tandis
f|ue la maison arabe ordinaire est construite sur le sol, la maison malmati
>t creusée doux le sol, ce qui fait, soit dit «mi iia>?,iiit, i|iie son rez-de-
chaussée, en somme, c'est son toit.
.l'ai déjà dit que toute la plaine (|ui conli^nl le, villagt; de Kalaa-Mal-
mala, se présente sous la forme d'un inextricable ri'>eau do dos d'Anes et
de ravins; il faut ajouter (|ue ces ravins sont étroits, profonds et très rap-
proché?;, et que tniit h' li'rrain (pji constitue celte plaine est une espèce de
terre gypseuse, compact^ et imperméable, (l'est la réunion de ces deux
conditions : la forme et la nature spéciales du terrain qui a permis la
construction, autrement impossible, de ces maisons originales.
Voici comment procède... jp n'ose pas dire le maron matmali.
Lorsqu'il a fait choix d'un mamelon pour y établir sa demeure, il le
décapite de manière à In transformer en une espèce de cône tronqué pré-
sentant une section de (juatre à cinq mètres de diamètre et plus. Il évide
ensuite le petit plateau ainsi formé jusqu'à ce qu'il ait creusé une sorte
de puits aux parois verticales d'une profondeur variable, qui atteint et
dépasse môme parfois dix mètres, et qui est toujours calculée de façon à
ce que le puits puisse être réuni à l'un des ravins bordant le mamelon
par un couloir en pente légère, — cela pour permettre l'écoulement des
eaux de pluie. C'est ce couloir unique, parfois très court et même
inexistant (dans ce cas c'est une ouverture de chambre qui débouche di-
rectement à liane de coteau), parfois au contraire d'une longueur déme-
surée quand le profil du sol l'exige, qui assurera les communications de
l'intérieur avec la campagne. Puis on creuse les chambres. La terre pro-
venant de ces travaux est amoncelée à l'extérieur tout autour de l'orifice
du puits qui devient ainsi à peu près invisible tant que l'on n'a pas^ c'est
le cas de le dire, « le nez dessus », ainsi que devant l'ouverture du couloir
où elle simule des accidents de terrain destinés à en masquer Vdnivôe.
Les chambres, généralement très vastes^, sont uniformément taillées en
ogive, ce qui est une condition de solidité. Elles donnent toutes sur la
cour intérieure par une ouverture unique, la plupart du temps très exiguë,
et qui alïecte les formes les plus dissemblables : carrée, rectangulaire,
ovale, triangulaire, « gothique », etc. ; parfois cette ouverture est boisée,
môme maçonnée. Les plus bel'cs chambres sont naturellement habitées
par l'Indigène ; les moins confortables, celles du bas généralement,
servent de greniers et même d'écuries; l'une d'elles sert de cuisine.
Bien entendu, nulle part il n'existe d'escaliers; des saillies ménagées
dans les parois de la cour permettent d'accéder, non sans difficulté, aux
étages supérieurs. Inutilo de dire aussi qu'aucun local n'a été prévu pour'
l'usage que vous savez...
J'ajouterai encore que le sol de la cour est non pas plat mais convexe,
sur un plan légèrement incliné du côté du couloir (cela pour faciliter
l'évacuation des eaux); au centre de la cour sont dressés d'immenses
\'^ 5 A VII II. lÙOO
paniers en forme d'amiiliures, lissés avec du ^w^-tZ/wM variété dV/rtZ/a) qui
conliennonl i^énéralcinent de l'orge.
Un peut se demander quels sont les motifs qui ont bien pu déterminer
les montagnards malmati à se terrer ainsi dans ces maisons singulières.
La raison en est très simple : ces habitations sont saines et agréables.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, elles ne sont pas du tout
liuniides. (iiAce .-i leur situation souterraine, elles présentent l'avantage,
inappréciable dans ces pays à temjiéralures extrêmes et à écarts brusques
et violents, d'être, relativement, chaudes en liiver et fraîches en été, et
uniformément douces de jour comme de nuit.
Les « troglodytes artificiels », — ou du moins les Indigènes auxquels
je me suis permis de donner ce nom — , sont principalement groupés k
(Jacer ' Médenine, grand village de deux mille habitations, situé à GO kilo-
mètres à l'Est de Kalaa-Matmata et ù 80 kilomètres au Sud-Est de Gabès,
ainsi qu'à Qacer Mctameur, petite agglomération éloignée de Médenine
de 5 à. G kilomètres au plus, au pied du djebel Tadjera.
Ce qui fait l'originalité tout à fait extraordinaire de ces deux villages
et en particulier de Médenine, c'est le type d'architecture unique, stupé-
tîant, incompréhensible, de leurs habitations, les « Rhorfas ».
Il est extrêmement difficile de donner de ces « Rhorfas » une description
qui permette de se les représenter; mais il serait peut-être encore plus
malaisé d'en fournir une explication rigoureusement satisfaisante. La
supposition qui m'a paru la moins invraisemblable est que leurs construc-
teurs, ancien troglodytes (et d'une espèce rudimentaire, comme ceux que
nous allons retrouver tout à l'heure dans la région de Foum-Tatahouine),
lorsqu'ils ont transporté leurs demeures à la surface du sol, leur ont con-
servé, par la force de l'habitude, leur forme souterraine. Je ne donne cette
hypothèse que pour ce qu'elle vaut. Je dois signaler cependant qu'elle
emprunte une singulière force au fait suivant : dans toute la région des
« troglodytes grimpeurs », des « Rhorfas » en plus ou moins grand
nombre, mais toutes relativement récentes, avoisinent les cavernes habi-
tées par les Indigènes ou même les desservent directement; dans ce der-
nier cas en particulier, on est frappé de voir la forme et la disposition des
deux pièces aussi remarquablement analogues.
Quoiqu'il en soit, je vais m'efforcer de donner une idée de ce qu'on
appelle une « Rkorfa », et de l'aspect général de Qacer Médenine.
Une « Rhorfa » est essentiellement une longue construction voiVtée, en
•pierres sèches, et dont voici les dimensions habituelles : largeur, 2 à
* Qacer ou t)àsr, pluriel Qçouv, signifie village.
En Algérie, où l'on parle un arabe corrompu, les Indigènes prononcent et les Euro-
péens écrivent Ksar; dans le Sud-Oranais, on prononce même Gçar.
E. MACMl AIIT. — l,KS TUDiK-ODYIF.S PU i/kXTUKM l'-Sll) TINISIKN 17!)
3 inèlrcs; longueur, H à l'i m'Hies; liaulcur, û m Mies nu f)liis. Cellf cons-
liuclion est percée h l'une de ses cxtréinilés d'une ouverture dont les
lignes suivent assez exactement celles de la fa(;ade, et qui est close par
une porte en planches mal jointes. Celte ouverture est toujours très basse;
il en existe même qui ont tout juste iO cenliim^tres de large sur .'JOde haut ;
elle est généralement ilan(|uée de deux trous un peu plus gros que le poing
et qui sont des fenêtres.
Ces logis l»i/.arres ne sont pas isolés; au contraire, ils sont, et en grand
nombre, collés les uns contre les autres et entassés les uns sur les autres,
de Forte que les « lihvfn'i » se pn-scnlenl sous la forme inattendue et
déconcertante d'un extraordinaire amoncellement de deux, trois, et même
cpiatre étages de séries de cavernes voûtées, semblable à quelque immense
b;\timent sans portes, mais percé d'une multitude de fenêtres rapprochées,
et dont d'étroits escaliers sillonneraient obliquement la façade.
Je dois ajouter ici (}ue les «. Rhorfas n ne sont pas des chambres, mais
i|u'elles constituent, au contraire, chacune une demeure particulière,
totalement indépendante de celle îi laquelle elle est superposée, qu'elle
avoisine ou qu'elle soutient.
Disposons maintenant ces « Bhorfas » en cercle, et imaginez une quan-
tité de ces cercles communiquant entre eux par de courts boyaux, et vous
aurez une idée de l'aspect général de la ville. Médenine est en effet
presque exclusivement composée d'une quantité de places n'ayant en
général qu'une voie d'accès. Toutes les façades des « Rkorfas » donnent
uniformément sur ces places; le coté de la campagne est solidement muré.
Chaque place constitue ainsi comme une espèce d'immense cour intérieure
commune parfois à plusieurs centaines d'habitations.
Les « Rhorfns » sont à peine habitées; tout le qacer est d'ailleurs désert
d'une faeon à j)cu près permanente ; les Khezour (tribu de la Confédération
des Ourgliamma) qui habitent le territoire du Cercle de Médenine, comp-
tent, en effet, une très petite minorité de sédentaires; leurs « Rliorfas »
leur servent surtout de greniers et de garde-meubles : et cela ajoute
encore à l'étrangeté de cette cité singulière, qui, selon l'heure à laquelle
on y arrive, apparaît au voyageur comme uns immense ville endormie,
ou comme une interminable et lugubre nécropole.
Metameur, ipii est habité par une fraction de la Iribu des h'Iieznur, les
ilariiizn, est un petit .Médenine. moins pittorescjue, mais plus vivant.
La région des « troglodytes grimpeurs » commence au très curieux
petit village de (Ihouinrassen, qui est situé à une quarantaine de kilo-
mètres environ de .Médenine, dans la direction S.-S.-O. Elle s'étend
jusqu'au sud de Foum-'l'atahouine. Celte région, qui est horriblement
accidentée, renferme un très granJ nombre de villages, dont la plupart
sont d'ailleurs en ruines; ces villages, qui sont calqués sur un modèle
unique, de sorte qu'en décrire un, c'est les décrire tous, présentent le
180 5 AVHir. 1900
caractère tout h fait original d'être toujours situés précisément là où vous
n'imagineriez jamais qu'ils puissent être : au sommet des pilons les plus
élevés et les plus inaccessibles; et cela à un point tel que, chaque fois que
dans renchevètrement de collines abruptes qui bossellent constamment
l'horizon vous distinguez une créle pirticulièrement aigu(\ vous pouvez
affirmer hardiment qu'un (Jacer, habité ou non, y est juché.
Pour comprendre pourquoi les malheureux Djebalin qui peuplent celte
contrée ont pu avoir l'idée de s'installer ainsi dans de véritables nids
d'aigles, alors qu'il était si simple et si commode d'habiter les vallées ou
môme les lianes de leurs montagnes, à proximité de leurs jardins et dps
rares points d'eau, il faut se rappeler qu'il y a quinze ans, vingt ans tout
au plus, ce pays sur lequel nous n'avons étendu que progressivement
notre dominalion pacilique, élail encore continuellement bouleversé et
ensanglanté pai- d'alroccs luttes de « rof » ' et par les incursions et les
razzias des hordes nomades du Sahara (l'pst la nécessité de se mettre k
l'abri des exactions et des pillages qui poussa ces sédenlaires à jucher
sur les pilons les j)lus élevés et les plus inaccessibles de leurs montagnes,
leurs q<;our, qui consliluent ainsi de véritables acropoles. A leur sommet
se tenaient conslamnienl des veilleurs, prêts à faire retentir le tambour
de guerre si quelque bande suspecte apparaissait à l'horizon; et l'on
conçoit que ces pics isolés dont l'escalade pénible n'est possible qu'à la
queue-leu-leu, constituaient comme autant de forteresses naturelles que
viiigt hommes pouva"ent défendre viclorieusement contre l'assaut de
centaines d'agresseurs.
(l'est ainsi que des villages entiers existent ou existaient jadis, incrus-
tés dans le roc, sur la cime de presque toutes les collines en falaise, de
Ghoumrassen jusqu'au-delà de Foum-Tatahouine. Leurs maisons consistent
généralement en deux pièces : l'une, la pièce intérieure où se tient la
famille, est une caverne creusée dans le tuf séparant deux bancs calcaires;
l'autre, la pièce extérieure où sont logées les provisions, est une construc-
tion en pierres sèches mal jointes, voûtée comme les « Rhorfas » de
Médenine ou de Metameur.
Il est superflu de dire que rien ne subsiste plus aujourd'hui des raisons
qui ont motivé la création de ces véritables nids d'aigles. Dans tout
l'Extrème-Sud Tunisien, la sécurité des personnes et des biens est absolu-
ment complète, aussi complète que dans nos campagnes. Cependant,
c'est à peine si l'on commence ii noter une tendance de la part de ces
montagnards à déserter leurs anciennes demeures; ils bâtissent bien des
« Rhorfas » aux lieu et place de leurs cavernes, mais ils ne se décident
pas à descendre vers la plaine; les exceptions sont individuelles et rares.
J'ai cru comprendre qu'ils gardaient comme une « arrière-crainte » d'un
retour oITensif des nomades.
En dehors de Ghoumrassen, les qçour les plus intéressants de la région
* 'foules les tribus indigènes sont divisée? en deux partis rivaux appelés » çof »,
pluriel « cfouf » ,
K. MArOUART. — J.K- TU(ir.r,nliY lh> I»K 1 'l- XTltlMi:-!!» TIVHIK \ \X\
des '< truglodyles grimpeurs » sont : Clueruiessu, qui se présente sous la
forme d'une énorme tour crénelée évasée à sa base; Chenini, dont le
rocher pyramidal, du moins vu du côté par lequel y l'ai abordé, est
llanqué d'une mosquée dont le minaret s'incline comme la fameuse t(jur
de Fise; Douirel, is^vund village zénète qui compte un bon millier d'babi-
lations souterraines dont certaines sontétagées par séries du plus étrange
aspect de la base au sommet du piton qui les renferme; enfin, lîeni-IJaika
qui dresse au-dessus des collines environnantes sa silhouette rébarbative
d'ancien chdteau-fort écroulé.
Tous ces Orour entourent notre grand poste militaire le plus avancé de
l'Kxtréme-Sud Tunisien, b'ouinTalahouine. Les trois premiers n'en sont
pas éloignés di," plus de vingt à vingt-cinq kilomètres, Guermessa au
nord-ouest; Chenini à l'ouest; Uouiret au sud-ouest. Bciii-Barka n'en est
guère situé qu'à cinq kilomètres, au sud.
tjuant à Koum Talahouinc môme, ce rudiment de village ne figure
nième pas sur la carte de reconnaissance au 200 000c jn service géogra-
phique de l'armée, où il occupe à peu de chose près le point marqué
(t Kr. Mgeubla », a cin(juanle kilomètres à vol d'tjiseau exactement au
sud de Qacer Médenine, au jiied du djebel Abiud.
J'ai dit (jue tous les habitanls de celte partie de l'Extréme-Sud tunisien,
littoral excepté, qui comprend le pays des Ourfjhamma et le pays des
Matmad, possédaient un caractère commun : celui d'être des troglodytes;
ils possèdent un autre caractère, encore jilus commun, si j'ose dire : celui
d'être des malheureux. Ces gens sont en eiïct horriblement misérables,
et on peut à peine s'imaginer qu'ils aietit pu l'être davantage. Cela est
pourtant vrai; il y a quelques années, avant notre occupation, ils atten-
daient encore avec espoir les vols de sauterelles, parce (|ue, les sauterelles
c'était, pour quelques semaines, la nourriture assurée!
C'est que ce pays est essentiellement le « pays du caillou » ; on n'y voit
que du caillou, et rien que du caillou; sauf quehiues maigres loulVes de
graminées sahariennes, rien n'y pousse, tellement sa climatologie est dure
et son eau rare et mauvaise. Un détail : les officiers du poste deMédenine
doivent aller faire chercher à dix-liuil kilomètres de là, à Bir El-Ahmeur,
l'eau qu'ils boivent.
Et cependant, à force de persévérance et d'ingéniosité, les Indigènes
sont arrivés à faire pousser quelque chose sur celte terre inhospitalière,
l'our utiliser le plus d'eau possible des pluies rares et torrentielles, ils
ont imaginé d'établir, à toutes les tètes d'oued où ils ont pu le faire, des
barrages de hauteurs décroissantes, dont les espaces intercalaires, comblés
soigneusement avec de la terre végétale, constituent comme autant
d'immenses gradins. El, sur ces gradins, ils ont planté un palmier, plus
souvent un figuier ou un olivier, quand ils n'y cultivent pas quelque
céréale, principalement de l'orge. 11 est presque inutile d'ajouter, que,
lfi-2 n Avnir. 1000
cuDlrc un travail forcené, ces malheureux n'obtiennent jamais, pour
meilleure récolte, qu'un rendement qui serait considéré chez nous comme
un désastre.
Oiiand le (lommantlant Foucher fut nommé il y a quelques années,
conuuandant supérieur du Cercle de Médenine, avant de créer la pépi-
nière vraiment merveilleuse, et (jui lui fait le plus grand honneur, qui
entoure les glacis du camp, il songea, pour améliorer la situation des
Indigènes, h leur inculquer (pieUjucs notions d'agriculture européenne.
El, pour frapper un grand coup, il décida d'employer la méthode expé-
rimentale; il clioisit un champ, le laboura profondément, le fuma soigneu-
sement (pn sait que ce que tout le monde en général et nos agronomes
officiels et superficiels en particulier reprochent à l'Indigène, c'est ses
« semblants de labour » et sa « non-restitution »), et y sema de l'orge.
Cette orge vint admirablement. Elle jioussa si drue et si serrée que, de
dix lieues à la ronde, on accourut voir le champ d'orge du commandant
Foucher.
Mais il arriva... ce qui arrive toutes les années; la pluie manqua de tom-
ber en temps opportun (quand je passai à Médenine, en avril 1905, il y
avait cinq mois qu'il n'y avait pas plu; or il n'y pleut jamais que l'hiver...
quand il y pleut); tous les épis du champ du commandant Foucher dessé-
chèrent sur place, et il n'en relira pas un grain. Cependant les Indigènes,
qui n'avaient fait, eux, que gratter la terre et ne s'étaient pas soucié de la
fumer, obtenaient, sans doute leur mauvaise récolte habituelle, mais une
récolte tout de même.
Le commandant Foucher recommença cette expérience à plusieurs
reprises, toujours avec le même succès.
Je tiens le fait du commandant roucher lui-même, qui me le conta
avec une certaine mélancolie, un soir que nous causions de l'avenir de
l'Extrême-Sud tunisien.
C'est surtout de leurs troupeaux que les indigènes retirent le plus clair
de leurs ressources ; ces troupeaux, encore peu importants i^ils se seraient
accrus dans d'énormes proportions au cours de ces dernières années),
comprennent sensiblement plus de chèvres que de moutons, Sans leur
lait, leur viande et leur toison, l'Indigène ne pourrait pas vivre.
Bien entendu, nulle part rien n'existe qui mérite le nom d'industrie.
Comme partout dans le Sud, les femmes filent et tissent. A Matmata, elles
fabriquent en outre, avec le yuedim (variété d' fiai fa), des nattes à dessins
variés, et de grands paniers en forme d'amphores, qui sont, en partie,
envoyés à Gabès. A Douiret, elles brodent de jolis voiles, les tadjira, qui
sont vendus sur le marché de Foum-ïatahouine.
Quant au commerce, il est entièrement entre les mains d'Israélites et
de Djerbiens. Je dois signaler à ce sujet que le Juif indigène, en tout cas
dans le sud, ne m'a pas paru en aucune façon être le commerçant exploi-
teur et sans scrupules dont il a la réputation. Je n'ai pas remarqué non
plus qu'il fut pour les Musulmans l'objet de mépris qu'on s'accorde à
reconnaître en lui.
E. MAC.il-ART. — LES TROOLODYTES DE I.'fA ^a^^IE >ID TfNISIEN 183
ïaiulis.iue les Matinati coiisliliu-nl un groupement berbère d'une rc-
inar.]uable hoiuo^'énéil.', les (lurgbamma au conlrairc, sont formés d'un
mélange d'Arabes, d'Arabes berbériscs et de Berbères, ceux-ci en consli-
luant d'ailleurs l'élément prédominant. On estime que sur quarante mille
Ourgbamma environ, il peut exister iî.rJOO Arabes purs, 4.(XK) Arabes ber-
bérisés, et 34.000 Berbères purs.
On rencontre naturellement dans l'une et l'autre iVaction les types les
plus dissemblables; cependant si je pouvais me basarder à donner un
élément de comparaison, je dirais (jue rOurgbamma ra|»pclle plutôt le
Kabyle, tandis que le Matmali rappellerait plutôt, lui, Ibabilantdu Mzali.
Kt encore cela est-il très exagéré; car le Matmali n'a ni la p;\leur niali".
ni la barbe nuire courte et frisée du Muzabite, ni son obésité. Mais il en a
l'allure lourde, l'aspect trapu, la taille moyenne, et, comme lui, il a les
muscles des jambes généralement très développés.
L'Ourgbamma est habituellement plus grand, plus élancé, très muscl«''
également, mais d'une façon moins épaisse; le type blond y est au moins
aussi fréquent sinon plus que chez le Matmati, où il l'est autant que chez
le Kabyle. Je signalerai ici que toutes les femmes que j'ai pu apercevoir,
— je dois convenir que j'en ai vues fort peu —, étaient de couleur beau-
coup plus foncée que la plupart des Indigènes mâles.
il est bien entendu (jue tout cela n'a que la valeur d'une indication.
Mais voici un point sur lequel j'attirerai votre attention :
On est tout étQnné, lorsqu'on arrive dans ce pays de Berbères, d'y
constater l'existence de toute la hiérarchie arabe ; chaque douar a à sa
tète un cheihk ; chaque tribu un KItalif'i; chaque fraction importante un
Caid. J'en ai eu l'explication : cette hiérarchie, c'est nous qui l'avons
créée de toutes pièces; elle n'existe là que depuis quinze ans. Auparavant,
dans ce pays, comme encore en Kabylie, c'est par des Assemblées de
notables {djamaa, viiad) qu'était exercé le pouvoir.
Comme dans tous les pays berbères, la femme occupe, dans l'Extréme-
Sud tunisien, une situation sociale et morale infiniment supérieure à celle
de la femme arabe.
Des voyageurs, parce qu'ils ont rencontré, par exemple en Kabylie,
un homme commodément assis sur un bourricot qui trottine, tandis
que, derrière, la femme, horriblement chargée, suit péniblement son
« seigneur et maître », en ont conclu que la femme berbère était traitée
par son mari comme une véritable bète de somme. Je puis affirmer qu'en
tout cas pour ce qui concerne l'tlxtrème-Sud tunisien où C3 spectacle est
de tous les jours, cette interprétation est complètement erronée. La
vérité, c'est que la femme indigène met tout son honneur à être capable,
prciiiièrement d'eiïectuer les plus longs trajets chargée des plus lourds
fardeaux; deuxièmement, de faire le plus grand nombre d'enfants. Far
dessus tout, la femme de l'Extrème-Sud tunisien est fièrede deux choses :
48 1 fi Avini I'JOi;
lie su lurot.'t'l df su fi-comlili''. Cela lésulle et de faits ([lie j'ai pu (jltseiver
inui-nit}me, et de toutes les inlorinatiuiis que j'ai pu recueillir.
Quant à son influence, elle est tellement considérable qu'elle est la
plupart du temps nettement prédominante, non seulement dans les
afTaiies de son ménage, mais dans celles de sa tribu. Je pourrais citer
plusieurs cas, — et si je ne précise pas, c'est parce que je n'en ai pas le
droit — , où des ofllciers, ayant conclu des accords avec certains chefs
indigènes, virent ceux-ci revenir sur les engagements pris sous prétexte
(jue leur tribu n'avait pas voulu les ratifier. Et, pressés de dire pourquoi
la tribu se refusait maintenant à souscrire à des engagements que pres-
que chaque indigène avait approuvé individuellement, d'où leur venaient
ces scrupules intempestifs, ces objections baroques, ces doutes inattendus,
dont jamais au cours des pourparlers il n'avait été question, chaque fois,
— il s'agit d'officiers, d'indigènes, d'années et de lieux dilTérents — , ils
finirent par convenir, ce qui fut d'ailleurs vérifié par la suite, qu'ils
avaient dû céder devant l'opposition des femmes.
Celte opposition des femmes se manifeste constamment de la façon la
plus réactionnaire, à propos de tout et à propos de rien, de parti-pris. Un
officier supérieur de la plus haute valeur^ que je ne puis malheureuse-
ment pas nommer, résumait ainsi l'opinion qu'il venait de me formuler
h ce sujet : « En somme, ce qui nous sépare radicalement de l'indigène, ce
n'est pas tant ses mœurs, son ignorance, sa langue ou sa religion ; c'est
sa femme! » — Et il ajoutait sur un t(jn comique en levant les bras au
ciel «... et sa mère donc ! »
Cela est-il une conséquence de ceci '? En tout cas, dans l'Extréme-Sud
tunisien, la monogamie est la règle. Toutefois, étant donnée l'effroyable
misère des habitants, il serait peut-être hasardé d'en induire qu'ils sont
monogames par goût. En fait, ils ne le sont que par nécessité. Tous ceux
qui « en ont le moyen » — il est vrai qu'on les compte — ont plusieurs
femmes.
Comme partout en pays musulman, les indigènes se marient très
jeunes; cependant, et contrairement à une légende trop accréditée, le
mari attend toujours, pour posséder sa femme, qu'elle soit pubère. Ils ont
un très grand nombre d'enfants ; mais la mort fait dans leurs rangs de
terribles ravages. Cela lient certainement en majeure partie à la misère,
au manque de soins et de propreté, mais cela tient aussi à certains pré-
jugés bizarres. Ainsi, par exemple, il est admis partout sans discussion
qu'au-dessous d'un certain âge, un enfant ne souffre pas du froid. Voici,
ù ce sujet, ce qui m'est arrivé, une après midi, àQacer Douiret.
Comme nous devisions, accroupis sur des rochers, en face de la vallée
qui s'ouvre devant le village, un vent vif se leva. Et, comme je relevais
le col de mon manteau, je vis mes compagnons s'enrouler frileusement
dans les plis de leur burnous, ou pour plus exactement parler, dans la
longue pièce d'étoiïe brune appelée ouzera (jui remplace dans ce pays le
burnous de nos Algériens. Cependant deux enfants qui jouaient autour
de nous, l'un de quatre ou cinq ans vêtu d'une mauvaise cotonnade,
E. MACgLAUT. — I.K> rUO(if.i»inTE.N DE l.'lCMHKMK SI I) TlMslEN iSîJ
l'aulrc une lilIoUe plusjeuiioet complùloment luio, élaienl vtînusse serrer
autour de l'un des liuinnies «[ui m'entouraient, leur père •'■videniment.
.le lui dis : -< Pouniuoi ne couvres-lu pas ces enfants:' Ils vont prendre
du mal. >' — Il me répondit en haussant les épaules : « C'est petit; ça ne
sent pas le froid !» — Et tout le monde de hocher la ItHe en signe d'as-
sentiment, et tic sourire en me regardant comme si j'avais dit une sot-
tise.
Puisque j'ai parli' de pn-jugés, j'en signalerai encore un autre :
On rencontre assez fréquemment dans l'Extrème-Sud tunisien, en outre
de tout un iminde de scorpions blancs ou noirs et de serpents variés, un
grand lézard ijui atteint et dépasse même un mètre de long, et que les
indigènes appellent « ourane ». Cet ournne a la réputation de frapper
d'impuissance tout homme qu'il louche de sa queue, aussi les indigènes
en ont-ils une peur intense, et détalent-ils à toutes jambes dès qu'ils en
aperçoivent un. Je n'ai pu parvenir à savoir sur quelle légende reposait
ce préjugé.
L'ourane a encore la réputation d'être très friand de lait. Tous les indi-
gènes m'ont certifié à l'envi qu'il satisfait couramment sa gourmandise
en tétant à même les chèvres, lesquelles se laisseraient faire bénévole-
ment. Mais aucun d'eux ne put ni'afïirmer avoir constaté le (ail de visu.
.le ne dirai qu'un mot de la question du vêtement.
Celui des femmes est le même que partout ailleurs dans le sud. Il con-
siste essentiellement en deux bandes de cotonnade indigo appliquées l'une
sur le dos, l'autre sur la poitrine, et dont les pointes sont réunies immé-
diatement au-dessus des seins jiar deux grandes épingles d'une forme et
d'un système de fermeture particuliers, les « bzaim ». Ces bandes ne
tombent pas plus bas que le genou! Une simple corde les fixe à la cein-
ture.
Comme cette corde est plus ou moins lAche et que, la plupart du temps,
ces malheureuses n'ont pour tout vêtement que ces deux minces bandes
d'élutTe bleue qui flottent, elles sont, lorsqu'on les voit passer de profil,
prali(juemenl nues, ce qui m'a permis de constater, en même temps (\\iq
la coloration généralement très foncée de leur p3au, dont j'ai parlé tout
h l'heure, la pureté et la beauté réellement admirables de leurs formes
et de leurs proportions, même quand il s'agissait de mères de famille,
c'est-à-dire de femmes, relativement vieilles pour ces pays, de vingt à
vingt cinq ans. J'ai été particulièrement frap|)é par la finesse tout à fait
remarquable de leurs attaches.
Le vêtement des hommes se distingue, comme je l'ai déjà indiqué, de
celui de leurs correligionnaires des autres parties de nos possessions de
l'Afrique du Nord, par la substitution au burnous de nos Algériens d'une
longue pièce d'étolTe brune tissée par les femmes, Vouzera, dans laquelle
ces Indigènes se drapent et s'enveloppent complètement des pieds à et y
compris la tète.
Tous les hommes portent régulièrement, comme la plupart des Musul-
mans, une longue toulfe de cheveux au sommet du crâne soigneusement
soc. d'anturop. <906. 13
m) ■; Aviui. iDOc.
rasé. Mais, à l'cnconlre des Marocains, ils la dissimulent, je dirais presque :
avec pudeur. Chaque fois que j'ai tenté d'avoii- une explication à ce sujet,
ils ont iinni/'dialeiuent détourné la conversation.
Ce qu'on voit de la coilTure des femmes, — car elles ont toujours la léte
couverte d'une troisième bande de leur éternelle étoiïe bleue, — permet
de constater qu'elles sont coiiïées « à la chien ». Mais, au lieu de laisser
tomber naturellement leurs cheveux sur leur front, elles les frisent et les
enroulent de façon à en former une série de rangs serrés de petits cordons
tout reluisant d'huile, qui leur tombent jusque sur les yeux.
La coutume du tatouage est très répandue, beaucoup plus à mon avis
que dans les autres régions de l'Algérie et de la Tunisie, sauf peut-être
dans le Djerid (^Gafsa, Tozeur, Nefta). Ce n'est pas tant du reste les visages
qui sont ainsi décorés que le dos des mains et le bas des jambes. Les
hommes, tout au moins, d'après le petit nombre d'observations que j'ai
pu faire, seraient sensiblement plus tatoués que les femmes, alors que
le contraire paraîtrait plus normal. J'en ai vu un entre autres dont les
mollets n'étaient qu'un dessin. Tous ces tatouages représentent unifor-
mément, — du moins ceux que j'ai vus, — des figures géométriques.
Je me propose de parler ultérieurement des bijoux, dans une commu-
nication particulière, au cours de laquelle j'aurai l'honneur de vous pré-
senter la collection, incomplète, mais assez curieuse, que j'ai rapportée
de l'Extrôme-Sud tunisien.
Je manquerais à un devoir, qu'il m'est infiniment agréable de remplir,
si je terminais cette communication sans exprimer ma gratitude — à
vous-mêmes, mes chers collègues, pour le grand honneur que vous m'avez
fait en me confiant votre délégation, et aux personnalités tant civiles
que militaires qui ont préparé et facilité mon voyage, qui furent pour
moi des informateurs précieux, des conseillers sûrs, ou des hôtes char-
mants.
Je citerai spécialement :
A Tunis, MM. L. Grandury, chef-adjoint, et Emile Violard, attaché au
Cabinet de M. S. Pichon, Résident-Général de France, et surtout M. le
Commandant Brunck, Directeur du Service des Affaires Indigènes à la
Division d'Occupation, à qui la France doit la pacification de l'Extréme-
Sud Tunisien.
A Gabès, MM. le Colonel Pujat et le Capitaine Tribalet, du Bureau des
Affaires Indigènes, ainsi que le Contrôleur civil, M. Theller.
A Médenine, M. le Commandant Foucher, Commandant Supérieur du
Cercle.
A Foum-Talahouine, le Lieutenant Ilarlé, chef de poste.
A Kalaa-Matmata, le Lieutenant Tardy, chef de poste également.
Qu'il me soit permis de leur renouveler ici l'expression de ma recon-
naissance.
t^H. LEJEINE. — I. nRir.INE DES «SCIENCES ET LA RELIGION IST
Discussion.
MM, IIir.rtT el IIamv font i]ut.'I(]iirs remarques sur les oltservalions de
M. Macquarl.
L'ORIGINE DES SCIENCES ET LA RELIGION
Pau m. Charles Lejeine.
Dans !e dernier numéro de l'année 1905 de L'Anthropologie, M. Salomon
IJeinacli s'esl proposé de di'monlrer que hi relif/ion a été In noiirrio' et
l'i'duculion de l'humanile.
M. S. Ueinach a sur luules choses des vues toujours originales et
atlrayanles, s'appuyant sur la plus vaste érudition et il les exprime dans
un style littéraire (lui ajoute au charme de la pensée. C'est presque à
regret que l'on est amené à discuter ses opinions, mais nous pensons que
c'est rendre hommage à un auteur que de présenter avec sincérité les
objections qui nous viennent à l'esprit en lisant ses ouvrages.
M. S. Reinach affirme que le blé n'est pas, comme on l'a dit, d'origine
babylonienne, car la plante d'où est sorti le blé parait avoir existé en
Europe dès le quaternaire et les survivances de son culte sont telles en
Europe qu'il ne peut s'agir, pas plus que pour le chêne, d'une plante
importée. 11 n'y a pas en Europe de culte du maïs et de la pomme de
terre, mais nous avons encore pour le bh' et le pain un respect supersti-
tieux. Les textes nous montrent non seulement le culte, mais l'adoration
et l'exaltation de l'épi de blé.
Je ne veux pas entrer dans la discussion de l'origine du blé que .M. (i.
de .Mortillet fait apparaître en Arménie et M. Zaborowski en Mésopotamie,
car il y a pour le blé comme pour les hommes une question de polygé-
nisme et de monogénisme. Tous les blés ne sont pas nécessairement
sortis d'une seule gra minée, nous en avons encore plusieurs sortes et il
est plus probable qu'il y a eu, comme pour les hommes, différents centres
d'apparition et de culture mais on comprend qu'il lui ait été rendu par-
tout des honneurs en rapport avec son utilité. Les mystères d'Eleusis ont
emprunté aux institutions et aux dogmes de l'Egypte. M. Lenormant dit
que la symbolique éleusienne s'éclaire par le rituel funéraire égyptien.
L'Egypte elle-même a été en relation presque constante avec la Chaldée,
on discute encore sur le point de savoir quelle est la plus ancienne de ces
deux grandes civilisations et nous voici reportés à une origine chaldéenne
possible du culte du blé.
En somme il est naturel que l'homme ait vénéré partout la plante (jui
le nourrissait, comme il a honoré partout le feu qui lui rendait la vie
meilleure. .Xprès avoir célébré le grain qui nourrit le corps, les idées
i,S8 r; Aviui. luoG
s'élevant, on a pu le considérer comme le symbole de la science (jiii nour-
rit l'esprit cl, le renouvellement de la nature étant infini, comme la pro-
messe d'une résuri-eclion après la mort. L'esj)iil humain s'étant développé
sous toutes les latitudes d'une façon analogue, ce qui explique l'évolution
parallèle des institutions sociales et des rc.'ligions chez les diiïérents
peuples, les cultes de la nourriture comme ceux du feu se sont si bien
pénétrés au contact les uns des autres, que César identifiait les dieux de
la (laule avec ceux de Rome, que les Espagnols reconnaissaient le culte
catholique dans celui des Mexicains et que M. S. lleinach a raison de voir
dans le rite chrétien de la communion un emprunt fait aux mystères dont
certains comportaient l'exaltation d'une substance divine par le prêtre et
son absorption par les fidèles. On a prêté partout aux .Molochs, aux Teu-
tatès, aux Mexitlis les goûts sanguinaires des primitifs qui les avaient
imaginés; un peu plus tard les victimes gorgées de nourriture et rassasiées
de plaisirs sensuels ont été traitées comme des dieux avant d'être mangées
selon les rites et c'est plus tard encore que la victime humaine fut rem-
placée par un bœuf ou un agneau et que celui-ci fît enfin place à un
gâteau passé au rang de dieu.
On peut contester que la religion soit à l'origine de la culture des cé-
réales et de l'élevage car l'expérience seule a pu enseigner aux hommes
à bêcher et à labourer la terre pour en accroître la fécondité. 11 a suffi
de remarquer qu'une graine tombée dans un terrain remué levait plus
vite et que sa proximité de matières en décomposition favorisait sa crois-
sance, pour le faire volontairement sur une plus grande échelle. Des
chasseurs ont dû ramener près de leur hutte et enclore de jeunes animaux
vivants pour s'en nourrir le jour où la chasse n'aurait rien produit. Il n'en
a pas fallu davantage pour faire naître la culture et l'élevage. On ne peut
refuser aux hommes ces facultés d'observation et d'application quand
nous voyons des fourmis, à qui nous n'attribuons pas de religion, semer
et récolter et élever des pucerons qui sont pour elles de véritables ani-
maux domestiques.
Au commencement de l'humanité, comme aujourd'hui, les grandes
découvertes sont dues surtout à l'observation et à l'expérimentation et les
primitifs, comme les enfants, sont de bons observateurs. Nous ne pou-
vons savoir si ces observations ont été faites avant qu'il y eût des sorciers,
mais ceux-ci plus intelligents peut-être, ne sont pas d'essence particulière
et il me parait plus probable que les humbles débuts deces sciences, dont
le développement devait être si important pour l'humanité, doivent
remonter à une époque assez lointaine pour que l'on n'eût pas encore
pensé à constituer une religion organisée.
La greH'e qui est très ancienne et se produit naturellement dans les
forêts par le contact des branches, est-elle à l'origine, un rite religieux,
une sorte de mariage sacré? Je ne le pense pas, parce que pendant de
longs siècles l'union entre les hommes ne méritait pas le nom de mariage,
parce que pendant bien longtemps on ne se demanda pas comment
l'enfant naissait de la femme et que lorsqu'on se le demanda, on crût et
CM. I.EJKINK. — t,'olil(ilNI-: IiES SCIENCES ET LA IIEI.KIION ISO
l'on croit encore à des esprits fécondant les vierges. Ce fût probablement
lorsqu'on voulut faire do l'tMevageque l'on commenf-a à se rendre compte
de la nécessili'' du m;\le pour féconder la femelle et c'est à celte époque
(pie doit remonter le culte du pballus qui célèbre l'importante découverte
lie son nMe d;ins la génTalion. Il était plus facile d'observer la grelfe
nUurelle et de la reproduice.
t^est encore pour les mêmes raisons qu'il ne me parait pas possible
d'affirmer (jue les premiers hommes qui ont recueilli et entretenu le feu
liaient des magiciens. On ne s'explique pas un culte pour un objet qu'on
n'eiU pas cri*! ulib' r-t l'ulililé se démontre par l'expi-ricinee. [^es .\uslraliens
ne sont dé'jà plus les primitifs des premiers A'^cs et cependant ils ne
peuvcntètre considérés comme adorant le feu. Ils le conservent cependant
avec granl soin pour s'éviter la p^ine de le rallumer parce qu'ils en con-
naissent l'ulililé cl ils cliarjjent la femme d'entretenir le tison qu'elle
transporte, avec le reste du mobilier, dans tous les déplacements de la
liibu. Je veux bien que ce soit là le germe d'où sont sortis le culte du
foyer et l'instilution des Vestales, mais je n'y vois pas le magicien.
Il est bien cerlain (jiie riuimanilé piiniilive n'arriva pas du premier
coup h l'utilisation industrielle des métaux, car elle est restée de si longs
siècles il l'âge de pierre qu'elle n'a su d'abord qu'imiter en cuivre ses
armes de silex. Tous les progrès ne se font qu'avec une extrême lenteur
et s'il est très probable que l'on a d'abord recueilli le métal nalifqui frap-
pait les regards par son éclat et intéressait par sa malléabilité, il n'est pas
sûr qu'il ait été plutôt employé comme talisman que comme parure. Chez
les oiseaux, qui ne paraissent pas avoir de féliches, le mâle sait parfaite-
ment faire la roue ou étakr les plumes brillantes qui forment fon
vêtement de noces pour plaire à la femelle et l'on sait qu'il en est qui
parent les abords de leur nid de fleurs et de cailloux remarquables.
Mais quel q l'ait été l'emploi du métal natif, il y a loin de sa récolte
à l'extraction des métaux de leur minerai et à leur mélange et rien ne
prouve que celte conquête de l'homme ait été le résultat d'opérations
magiques.
Si les hasards heureux n'ont pas tout fait, ils ont dû contribuer pour
une notable partie aux découvertes les plus importantes. On a dit, pour la
poterie, qu'une empreinte de pied dans l'argile ayant conservé l'eau de
la pluie, avait pu donner l'idée de façonner des vases. Si l'on ne peut
accc[)ler scienliliquement la légende de l'origine du verre racontée par
IMine, il n'en ressort pas moins rpie la découverte de ce produit, (pii a aussi
une grande importance dans l'inilusliie, était attribuée au hasard par les
anciens. On pouirail citer des découvertes de premier ordie (pii n'ont pas
eu fl'autre eau>e. La recherche de la pierre philosophale a créé la chimie
et on prétend (juc c'est grAce à un bouillon de culture laissé ensemencé
pendant quelques jours de vacances, que Pasteur a trouvé le principe des
sérums qui ont révolutionné notre thérapeutique. Ces hasards ne se pré-
sentent qu'aux chercheurs et aux observateurs, mais il y en a eu de tout
temps.
IDO 5 A vil H. 1900
J'ai déjà coml)aUu » l'idée que la religion est tout au début de l'huma-
nité et si j'ai signalé dans lu Jtelifiion à inné du Tienne * les gravures et
peintures des cavernes qui sont, d'après M. S. Heinach, une œuvre de
magie destinée, par la représentation de l'animal^ à amener le gibier
au chasseur, je n'en ai parlé que comme d'une opinion digne de discus-
sion.
!.a religion est sortie de l'association et des sociétés secrètes, qui furent
le premier eiïort pour arriver à une organisation sociale, mais dans le
principe, les primitifs ne pensaient pas encore à remonter aux causes, ce
qu'ils n'ont pu faire qu'avec le temps et une tranquillité relative. Le chef
guerrier, le plus fort de la bande, a dû précéder le chef religieux, ce n'est
que lorsque ce dernier fut devenu une puissance, que ces deux forces ont
compris l'avantage de s'associer pour dominer et les chefs de la tribu
réunirent souvent les deux pouvoirs. Je vais lâcher de justifier cette
manière de voir par l'examen des sauvages et des enfants.
Les peuples sauvages, qui se sont perpétués jusqu'à nos jours, repré-
sentent un stade déjà un peu supérieur, mais très comparable à celui des
premiers hommes. Or, M. J. Vinson constate dans : les Religions actuelles,
que des témoignages indiscutables ont appris qu'un certain nombre de
groupes humains non seu'cmcnt ne connaissent aucun dieu, non seule-
ment n'ont aucune idée de quelque chose de surnaturel et d'extérieur au
monde visible, mais même sont absolument réfractaircs à toute conception
religieuse.
C'est surtout en Afrique que les athées abondent et il est toujours utile
de rappeler aux intelligences qui se sont élevées jusqu'à la conception du
bien et du mal absolus, d'une âme immortelle et d'un bon dieu d'ailleurs
toujours doublé d'un mauvais, les réponses si pleines de franchise, de fine
observation ou de bon sens qui ont été faites par certains chefs aux mis-
sionnaires qui voulaient les convertir. D'après les témoignages rapportés
par M. J. Vinson, l'un de ces chefs, disait: « Le ii>»j, c'est quand je prends
la femme d'un autre, le mal, c'es-t quand on prend la mienne, Cammoro
répondait à S. W. Baker qu'on déterrait les os des morts parce que c'est
une coutume transmise par les ancêtres. Il ajoutait : J'ai peur des élé-
phants et des autres animaux quand je suis dans les bois la nuit, mais je
n'ai peur de rien autre. — lions et méchants, tous doivent mourir. —
Beaucoup de gens sont mauvais; s'ils sont forts, ils dépouillent les faibles.
Tous les bons sont faibles; ils sont bons parce qu'ils ne sont pas assez
forts pour être mauvais. — El comme Baker lui démontrait la vie future
par la métaphore de Saint Paul sur le grain mis en terre qui renaît: —
(]e n'est pas le grain orbjinal qui se relève ; celui-ci pourrit comme un
homme mort et comme lui est fini ; le fruit produit n'est pas le grain même
qu'on a enterré, mais le produit de ce grain. Ainsi de l'homme, je meurs
et je me dissous et suis fini ; mais mes enfants poussent comme le fruit
1 Bulletins cl Mémoires de la Société d'Antliropolorjie de Paris, année 1902, p. 107.
* Bulletins — — ' année 1903, p. 629.
cil. LEJEINE. — l'origine DES S(:IEXi;KS F,T I,A IIKI.ICKiN 191
(lu grain. Beaucoup d'hommes n'ont pas d'cnfanls et beaucoup de grains
périssent sans donner dt^ fruits; ils sont finis pour jamais les uns cl loS
autres.
Lcvaiilant parlant des grands Namaquois, qu'il avait visites avant l'ar-
iivée des missionnaires, s'exprime ainsi : « Pour ce qui est de la religion'
du culte, des pnUres, des temples, de l'idée d'une Ame immortelle, tout
cela est nul pour eux ; sur ce point, ils sont ce que sont tous les autres
sauvages, leurs voisins; ils n'en ont pas la plus légi^rc idée. Campbell
ajoute : « Ils croient qu'ils jneurent tout entiers, comme des botes. »
MCh. I.clourneau dans VEroliilion relifjicnse rapporte un certain nombre
de récits de voyageurs ou de missionnaires des([uels il résulterait que les
Vcddahs de Ceylan, les Tasmanicns, les Australiens, les JJoschimans,
ilollentots et Cafres seraient dépourvus de toute idée religieuse et
M. Abel Hovelacque fait la même constatation dans les Ihiccs liumainrs.
MolVat, le beau père de Livingstone désirait trouver (pielque idée reli-
gieuse qui lui donn;\t accès aujirés des limtous, mais aucune idée de ce
genre n'avait jamais traversé leur esprit. Ses discours sur un créateur
provoquaient des éclats de rire. — L'homme, disaient-ils, n'est pas plus
iumiurlel que le bœuf et l'Ane. — On ne voit pas les Ames.
'1 Toutes leurs facultés, dit Livingstone, sont absorbées par les besoins
(Ju corps et il en est ainsi depuis que cette race existe. »
l'n chef proposait au missionnaire de les battre pour les faire croire.
Cependant .M. Ch. Letourneau reconnaît (|ue la plupart de ces peuples
ont des illusions animiques plus compliquées qu'on ne l'avait cru Cer-
tains Cafres abandonnent dans la foret le corps de leurs parents pour
qu'ils soient dévorés par les animaux sauvages et l'on s'ippose qu'ils
pensent ainsi empocher leurs esprits de revenir. D'autres les inhument
et foulent bien la terre sur le corps, peut-être pour -(lue le double ne
s'échappe pas. L'abandon des cidavres est pratiqué aussi chez les Esqui-
maux.
Il ajoute que la croyance aux fétiches et à la magie, cette aberration
mentale de l'humanité sauvage, pour être extrêmement répandue, n'est
pas constante. D'ailleurs : « les gris-gris, les talismans, les fétiches en
général ne sont pas des esprits ni des objets logeant des êtres spirituels,
distincts de la matière : ce sont simplement des corps vivants ou inanimés,
capricieusement choisis dans le monde ambiant et aux(|uels ou attribue
certains pouvoirs magi(|ues. »
>» Le fétichisme, dit M. .). N'inson, est certainement une étape, une
phase de l'évolution religieuse de l'humanité, mais je ne crois pas qu'on
paisse l'appeler une religion. Il ne saurait y avoir une religion, à mon
sens du uioins, sans une cM'tainc conception m-Haphysique, sans une
croyance à un être, ;i une puissance extérieure A la nature ambiante,
à une personnalité extra humaine qui se manifeste par des phéno
mènes matériels, en un mot sans la croyance à une cause invisible
d'eiïels visibles. Or les peuples qm en sont encore au fétichisme, ne
sortent pas des limites de la nature, Burton est très catégorique a cet
lOfï T) AVitu. loor,
égard, et il a bien raison de faire remarquer que les Africains, quand ils
témoignent leur vénération à leurs fétiches, n'adorent pas ces objets
comme des types, des mythes, des émanations divines, des personnifica-
tions d'une divinité : ils les adorent pour eux-mêmes. »
Le commandant Toulée, dans son livre Du iJaliomé au Salidra dit que :
« les habitants du Dahomé font en général rebelles au sentiment reli-
gieux, sauf les Peuls, qui sont d'intelligence supérieure. On ne trouve pas
un teiiq)le du 4° au 14" et si Ton rencontre quelques idoles en terre cuite,
peut-on les appeler dieux ou ne sont-ce que des mystifications de sorciers
jiour agir sur les esprits? » Ceci rappelle ce que le llév. F. W. Farrar
disait en 18G4 ;i la Société d'Anthropologie de J>ondres, après avoir cité
bon nombre de peuples qui n'ont pas de religion : « ces témoignages
ne seraient pas affaiblis par des cas comme celui des Pionniers, qu'on
suppose croire à une intelligence supérieure parce (ju'ils considèrent le
monde comme fait par un grand animal et le soleil par un lapin habile! »
M. le D'' L. Lapicque a constaté dans son récent voygage en Asie que
les négritos andamanites ont un vague sentiment de survivance de leurs
ancêtres qu'ils manifestent en suspendant à leur cou un fragment de
côte des déc(';dés et en le gardant tant qu'ils s'en souviennent; mais au
bout de quelques semaines, do deux ou trois mois au plus, ils s'en débar-
rassent, ne sachant plus ce qu'il représente. C'est un commencement du
culte des ancêtres qui n'absorbe pas beaucoup leurs pensées et qui n'a
probablement pas même toujours existé.
Il y a surtout dans ces usages fétichistes qui ont persisté jusqu'à nous,
une question de tradition et d'habitude et j'espère qu'une partie au moins
des civilisés qui continuent à porter des médailles, des croix, des cœurs,
des ancres, ou des cochons, de la corde de pendu et des trèfles à quatre
feuilles, n'ont pas plus de confiance dans ces porte-bonheur que le nègre
qui jette son fétiche pour en prendre un autre quand il a constaté son
impuissance à le préserver du danger qu'il redoutait.
M. J. Vinson fait remarquer que : « dans le culte des ancêtres des
Chinois et des autres peuples il n'y a rien d'immatériel, on croit encore
à une âme matérielle, on leur porte des aliments et l'on ne saurait expli-
quer ni justifier autrement la matérialité vu'gaire des peines et des
récompenses de la rie future ».
Si nous passons à l'étude de l'enfant, il me semble qu'on peut y trouver
la confirmation de l'absence d'idée religieuse au début de l'humanité. J'ai
déjà cité ' des observations personnelles qui me permettent d'aflirmer
que l'enfout à qui il n'a jamais été parle de divinité, de survivance
après la mort, d'àme immorîelle, n'en a aucune idée, mais j'ai constaté
aussi que parmi les mentalités infantile-:, les unes ont une tendance à
croire au surnaturel, tandis que les autres y sont réfraclaires; certains
enfants admettent volontiers, sans los discuter, toutes les affirmations qui
leur sont faites et d'aulrcs se refusent absolument à croire ce qu'ils ne
' Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, année 1902, p. iOl.
CM. LEJEINE. — l.'niiiiiiM-; HKS SCIENCES ET t,\ KKI.KiinN 103
compronnont pas ou ;'i la rraliliî lie co qu'ils nr voiml pas. Ino petite
lille de cin<j ans se refusail à croire au b(jn Dimi lar)l qu'on ne le lui
aurait pas montré, (les divergences de dispositions proviennent probable-
ment d'un instinct transmis, dans un sens ou dans l'autre, par les
anci'lrcs de ces enfants.
(ju'un enfant, rarement laissé seul, soit abandonné par une nuit sonibn;
dans un endroit (pfil ne connaît pas, il est tout naturel ipril ('-prouve
une certaine crainte, car il peut se heurter ;\ des objets qu'il ne voit pas,
labandon auquel il n'est pas liabilué dépi-imera son esprit et il aura
je s.Mitiment \yn< mi ninin<^ va^'U(> ([n'il peut cuurir un danger. |/aiii-
iiial lui même a pi'ur de ^lm^onnu. .Mais si l'on n'a jamais [)arlé à cet
enfant de loups-garous ou de voleurs, si on ne lui a pas conté des his-
toires de fées bonnes et mauvaises, s'il ne connaît ni dieu ni diable, sa
crainte n'aura rien d'exagéré. 11 est malheureusement bien peu d'enfants
dont on n'ait pas surrexcité l'imagination par des récits de nourrices, des
prières à Dieu et des menaces; c'est un des grands défauts de notre
éducation, dont l'influence se fait sentir souvent pendant toute la vie.
Il en est de même de la peur du tonnerre et de la mort, elle peut par-
faitement ne pas exister si l'enfant ne l'a jamais constatée chez les per-
sonnes qui l'entourent, mais c'est une circonstance qui se présente rare-
ment et on ne peut lui demander d'être plus raisonnable que les grandes
personnes. On m'a dit que dans mon jeune Age j'avais répondu que je ne
voulais pas mourir parce qu'on ne mangeait plus. L'enfant ne s'effraie
pas d'un danger qu'il ne comprend pas.
La tendance animiste existe incontestablement chez tous les enfants,
mais c'est le plus souvent par imitation et par jeu plutôt que par con-
viction. In petit garçon fera du premier bâton venu un cheval et une
petite tille une poupée, mais ils ne se font aucune illusion sur la réalité
de l'objet. Tous les enfants s'amusent à marcher sur les ombres des per-
sonnes qui se promènent, mais c'est encore là un jeu qui n'implique pas
que l'enfant croit à une émanation de la personne, il n'en cherche pas
si long. Knlin en ce qui concerne les songes les enfants bien portants
D'en conservent pas ordinairement le souvenir.
L'enfant ramasse les cailloux brillants ou des objets de forme originale
auxquels il donnera un nom qui lui sera suggéré par une ressemblance
quelconque, il les gardera, il y tiendra et considérera leur perte comme
un malheur; qu'il lui arrive un accident au moment de cette perte il
pourra croire ([ue l'un est la conséquence de l'autre et voilà une des ori-
gines du fétichisme.
La religion a joué dans l'évolution des sociétés un njle considérable, mais
son effet ne s'est fait réellement sentir qu'avec 'es sorciers et les magiciens
précurseurs des prêtres et des alchimistes. Lorsque l'humanité se distin-
guait à peine de l'animalité, les premiers hommes cherchaient d'abord à se
nourrir et à se garantir le plus souvent par la fuite, contre les grands
phénomènes de la nature, mais ils ne pensaient pas encore à s'expliquer
ces phénomènes, l'eu à peu des gens se sont trouvés qui ont prétendu
iO-4 5 A vit II. 1006
connaître l'organisation du monde et avoir sur lui un pouvoir spécial.
On les a crus sur parole comme le font encore beaucoup de petits et de
grands i.'nfanls. (Iliaque fois qu'une grande découverte h été faite, ils s'en
sont cmpaivs pour en tirer parti et les inventeurs légondairesont été impo-
sés i»ar eux comme des dieux o;i des envoyés de la divinité. La légende
d'Oannès nous montre trè^ proljahlcment l'invasion d'un peuple plus
civilisé venant, [)ar mer^ apporter à de plus primitifs des rudiments
d'agriculture, de céramique, de métallurgie, d'organisation sociale où le
civil et le divin se mêlaient étroitement. On a expliqué partout par le
surnaturel la découverte du feu, les commencements de la culture, les
principes de la métallurgie et ce n'est qu'après cette explication que le feu,
le blé et les métaux sont devenus divins.
Les sorciers ont été partout d'babiles interprètes des événements, si
ceux-ci étaient beureux, ils étaient dus à leurs conjurations; s'ils étaient
malheureux, c'était un signe de la colère des esprits, mais dans un cas
comme dans l'autre c'était toujours d'offrandes qu'il s'agissait pour re-
mercier ou se faire pardonner. L'art de tous les pays nous représente des
(Idèles oITrant et implorant et des prêtres recevant et bénissant, et comme
il n'y a rien qui >e conserve plus longtemps que les rites religieux, le
spectacle n'a pas cbangé jusqu'à nos jours. Les fidèles sont peut-être de-
venus un peu moins nombreux, mais la crédulité du plus grand nombre
est la même et les fanatiques n'hésitent pas à croire que les tremblements
de terre, les incendies, les accidents, les épidémies, les maladies de la
pomme de terre et de la vigne sont des punitions du bon Dieu et l'on se
demande ce que le mauvais aurait pu faire de pire.
Pour accaparer les découvertes utiles à l'humanité, les religions ont
employé depuis la plus haute antiquité les moyens dont elles se servent
encore de nos jours. La fable de Lourdes parait avoir été suggérée à une
hystérique de douze ans par une dame qui y trouvait le moyen de dégui-
ser la légèreté de sa conduite. Ce n'est que lorsque la légende se fut ré-
pandue que les prêtres s'en emparèrent pour l'exploiter à leur profit. Il a
dû en être de même pour une grande partie des croyances qui lorment le
fond des cultes et sur lesquelles ont été établis les rites religieux. Le
prêtre est dans de mauvaises conditions pour faire des découvertes scien-
tifiques, car il n'aime pas le changement, travaille peu en général et vit
d'autant mieux que l'instruction est moins répandue. Pour avoir le blé et
les autres produits de la terre, il fallait qu'ils fussent des dons de la
divinité, qu'ilspûssent augmenter ou diminuer parleurs paroles magiques
et que l'on eût intérêt à leur en offrir les prémisses et les dîmes pour
s'assurer de bonnes récolles. Il en fût de même pour les poteries^ les
métaux, les animaux, môme pour les femmes quand, pour en imposer à
la multitude, ils se condamnaient, en apparence, au célibat et je ne parle
pas de la santé. Enfin quand les dons volontaires extorqués par la
crainte des enfers nesufiisaient pas.rentente aveçlebras séculieramenail
tout le monde à composition.
en. LEJEUNK. — l'oHKJINE CES SCIENCES ET I.A IlKI.lClnN 10')
M. G. Papillaulf, dans son cours de sociologie de celte année, considère
que iM. S. Ileinach exagère et généralise ti'op en disant que tout a pris"
une forme religieuse chez les inférieurs et que toutes les grandes décou-
vertes dont nous avons parlé ont une origine purement religieuse. 11 cite
à ce propos les associations des peuples primitifs du Mexique, dont la
partie sociale était bien religieuse, mais (jui, en dehors de la Faculté,
avaient des irrégulieris, des chamans, qui guérissaient aussi avec des
simples et des paroles magiques et qui étaient naturellement très mal
vus, comme tous les concurrents. 11 fait ronnrquer (pie les effets de la
coca ont été conMalés [ym iiin' cxpi'rimental'un (|iii n'était pas religieuse,
au moins au début.
Kn résumé la religion a été un puissant moyen de diffusion et de con-
sjrviition des connaissances acquises, mais, conservatrice par essence,
elle a constamment été en retard sur la civilisation, elle a toujours persé-
cuté les savants et les novateurs qui n'étaient pas d'accord avec ses
dogmes et rien n'autorise à penser (jue ce soit à elle que l'humanité soit
redevable de toutes ses grandes conquêtes sur la nature. Il me parait
résulter des observations qui précèdent que, dans l'antiquité la plus
reculée comme aujourd'hui, l'observation et l'expérimentation, qui ne
sont ignorées ni du sauvage, ni de l'enfant, ont contribué pour une part
plus ou moins importante aux grandes découvertes qui ont fait pro-
gresser l'humanité.
Ce point de départ admis, je suis tout disposé à reconnaître qu'à partir
de la constitution des grandes religions, l'histoire de l'humanité est,
comme le dit M. S. Ileinach, celle d'une laïcisation qui est loin d'être
accomplie. Je souscris également à : k l'enseignement du respect des
religions, tout en persuadant aux hommes qu'elles ont fait leur temps,
partout du moins où l'origine purement humaine peut en être reconnue
et démontrée » parce qu'il s'agit ici de la liberté des consciences et qu'il
ne me parait plus possible^ après les travaux des E. Renan, E. Ilavet,
A. Lefèvre, C. Lelourneau, Girard de Rialle, J. Vinson, A. Réville,
M. Vernes, S. Reinach et autres, d'en contester l'origine purement
humaine.
Tous les savants doivent reconnaître avec M. S. Reinach que : x le
courant qui descend de la religion au rationalisme n'emporte pas à la fois
et d'une vitesse égale toutes les fractions de l'humanité, ni toutes les
parties, toutes les classes d'un même peuple. » Son explication de la
décadence de la Grèce et de Rome est pleine d'intérêt et de vérité et il a
raison de faire remarquer que si le christianisme était un progrès, « il
n'était pas exempt de tabous gênants, de pratiques abêtissantes et oppres-
sives. » Je ne suis cependant pas certain (jue le grand mouvement de la
Réforme, « en adoptant une forme plus stricte, c'est-à-dire moins évoluée
du christianisme, étouffa le rationalisme renaissant, » car l'autorisation
d'interpréter individuellement la Bible, me parait avoir favorisé l'essor
du libre examen et de la liberté de penser.
J'admets encore que: u la réaction religieuse qui remplit une bonne
1% ri Avitii. lonr,
pnrlip du XIX" siècle, fût prépai^'c par la llévoUition, qui avait fermé ses
temples. >• (Cependant ces éléments arriérés, qui prirent le dessus sur les
autres, c'était le jjcuple qui se battait pour la défense des Droits de
l'homme et c'était bien 1;» une conquête de la raison qu'il a si largement
contribué h répandi-e dans le monde. l*ar contre la compression du second
empire a préparé le triomphe partiel du rationalisme, qui prend une
extension toujours croissante dans les masses profondes.
Enfm ce que je veux retenir encore de l'article de M. S. Reinach, c'est
que partout où la partie lationalisl"^ d'une nation se trouve submergée
par un flot de gens superslilieux, il n'y a pas régression comme on le dit
souvent, mais mélange et que, grAce au livre, à l'école laïque, aux levons
de la science et de la critique, h; progrès du rationalisme est appelé à
s'étendre indéfiniment. C'est une pensée consolante de pouvoir se dire
que rien ne se perd des idées justes et que les semences de liberté, de
vérité el de raison lèvent tùl ou tard pour le progrès indéfini de notre
humanité toujours en tiavail pour la pensée plus haute et la vie plus
heureuse.
Discussion.
M. Papill.\ult. — J'aurais beaucoup à dire sur la communication de
M. Lejeune dont j'estime particulièrement le libéralisme éclairé, mais
dont je ne partage pas toutes les idées en sociologie. Je me permettrai
seulement de donner mon avis sur quelques points. Je pense en effet, que
M. Salomon Reinach, dans ses études si captivantes sur l'origine des
religions, leur a prêté, pour certaines découvertes, un rôle qui ne me
«emble pas démontré. La religion est un phénomène essentiellement
social, dont les causes, la raison d'être, sont sociales. Si les hommes se
sont livrés à l'animisme et à la magie avec une sorte de frénésie, s'il n'y a
pas de société un peu compliquée sans phénomènes religieux intenses,
c'est évidemment qu'il existe, à un stade donné de l'évolution, un rapport
étroit et nécessaire entre ces diverses manifestations de l'activité des
groupes humains. Cette constatation, qui me parait évidente, me
permet de prendre place entre les opinions de M. Lejeune et celles de
M. Reinach.
Je pense qu'une découverte positive est en partie seulement un fait
social ; par ce côté elle dépend de l'état de culture, des traditions, des
mœurs et de la religion. Mais elle est aussi, pour une part importante, un
résultatde l'effort individuel, et c'est sous cette forme surtout qu'elle se
manifeste quand elle se réalise. Or ce côté n'entre pas nécessairement
dans le domaine religieux quelqu'étendu qu'il puisse être. Je pousserai
la concession jusqu'à admettre que la religion peut être occasionnellement
un facteur de cet elTort individuel, mais je ne puis accepter qu'elle le
détermine et même le constitue à elle seule. La forme religieuse enveloppe
les conceptions qui sont susceptibles d'une discipline, d'une uniformisa"
tion ; la découverte est le contraire, une originalité de pensée, un acte
A.MIIu.NV. — KTI Lie DK LA Itl'.tlKM'.UATIiiN itsSKUSE Dl CUANK 107
(lindiscipline qui alliro souvent sur son auteur un ili.Uuiienl ilu corps
social ligué contre lui.
Mais d'un autre côté, je trouve (jur M. LejeuiK! nionlre trop de ten-
dances avoir dans la religion un simple accident.
J'ignore à (piel stade de l'évolution elle est apparue, mais je sais que
les Australiens ont une niyllutlogie compliqu('e tout en ayant des carac-
tères morphologiques qui les placent ;i peine au niveau de la race de
Spy, et je tais aussi que la liste des peuples sans idées religieuses dimi-
nue tous les jours et est bien |)rés de se réduire h zéro. La religion a joué,
il faut le reconnaître, un rùle énorme, et si l'on peut acquérir des doutes
sur sa por-lée future, ce n'est pas en scrutant le passé de l'humanité ou
ses bas fonds, c'est en observant ses sommets les plus lumineux.
821-^ SEANCE. — 19 avril I90(i.
PHKSn>EN(:E DE M. ZAlumOU'SKI.
La Sociélé (l'Emulation d'Abbevillc ayant invité la Société d'Anlbropologie iï
lui donner son concours pour l'érection d'une statue k Boucher de l'erthes. « à
Abbevillc, près des carrières de [cailloux où Boucher de Perthes fit ses décou-
vertes géniales ". un don de 200 francs est voté.
M. le Président annonce la présence de deux savants étrangers, M.M. Ferraz
«le Macedo, de Lisbonne, et Ivan Bloch, de Berlin. Au nom de la Société, il
leur souhaite la bienvenue.
M. Manouvrier. — Sur la capacité crânienne des criminels.
(Manuscrit non remis).
contribution a l'étude de la régénération osseuse du crane
Pau m. K. A.nthonv.
J'ai l'honneur de présenter ;i la Société un crâne de chien dunt j'ai
rejjrésenté dans la ligure 1 une portion de la Norma verticalis.
Dans le but d'étudier le mécanisme de la régénération osseuse crânienne
et d'autres questions connexes, j'avais à la Station physiologique du Col-
lège de France fait subir à cet animal une craniectomie sous-périostée
intéressant à la fois les pariétaux^ le frontal et l'interpariétal. Cette opé-
ration avait été faite le jour môme de la naissance, le 31 août 1902.
Le 10 juillet 1903, ranimai a été sacrifié. Sa paroi crânienne s'était
198
do Aviui. lonr.
régénérée en 1res graiiJe i»ailio et présenlail alors l'aspect de la figure \,
c'est-à-dire celui d'une surface osseuse formée de parties assez nombreuses
se réunissant suivant des lignes compliquées, paraissant quelconques,
n'ayant rien de commun en tous cas en tant que topographie avec les
sutures normales. 11 convient de se reporter ii la légende de la figure 1.
Fig. 1. — Représentation, d'après une photographie, de la paroi crânienne régé-
nérée d'un jeune chien craniectomisè le 3! août 1902 à la Station physiologique du
Collège de Franco ; /), limite de la craniectomie ; s, emplacament des sutures vraies
(pointillé); /", fausse suture secondaire; e, espace non encore envahi pas le tissu
osseux régénéré (fausse fontanelle); P, Os pariétal; F, Os frontal; /, interpariétal.
Le crâne en question fait partie des collections de la Station physiolo-
gique du Collège de France.
J'avais simplement signalé, en temps opportun, au cours d'une com-
munication à l'Académie des Sciences ', le résultat de celte expérience.
Il ne me paraît pas inutile aujourd'hui d'y insister davantage : i° Au
point de vue spécial de la question de la régénération des os du crâne;
2" Au point de vue des connexions des parties osseuses régénérées les
unes avec les autres.
I
La régénération de la substance osseuse crânienne n'est pas, comme
l'on sait, généralement admise par les Chirurgiens et les Médecins.
Elle est néanmoins bien loin d'être impossible et l'expérience actuelle
suffirait à le prouver, si tant d'auteurs qui ont obtenu des résultats aoa-
* Anthony. — De l'action morphogénique des muscles crotaphyles sur le crâne et
le cerveau des Carnassiers et des Primates. C. R. Acad. Se. 1904.
ANTHONY. — KTIDR DK I.A ni'cf.NKR \ TlnN OSSF.l'SR Df C.HANK 100
logucs sur riiomino et les animaux lOllier' nulaininciU ijui a expi'-ri-
menté sur le iiioulon) n'en avaient (Ji''j:\ pris le soin.
Celte opinion île beaucoup de Chirurgiens considérant que la régéné-
ration osseuse crAnienne ne se produit pas et (jue le pcriosle des os du
crAne ne joue (ju'un rùlc restreint dans Imir nutrili(jn lient à mon avis,
aux deux raison.s suivantes :
1° Parce qu'ils ne prennent peut-être pas assez de soins de conserver
ce périoste ;
-2" Parce qu'ils pratiquent Imirs craniectomies le plus souvent sur de.s
sujets déjà Agés et chez lesquels le périoste ne fonctionne plus guère.
Ce qui semble prouver que l'insuccès des chirurgiens est bien dû à ces
causes, c'est (prollier, moi même, et tant d'autres en prenant bien soin
de conserver le périoste, et, en opérant sur des animaux suffisamment
jeunes, avons obtenu de superbes régénérations crAniennes. Le périoste
du crAne jouit donc absolument des mêmes propriétés que celui des autres
os.
H
Comment d(jil-on inlerpréler les lignes sinueuses suivant lesquelles, sur
un crAne réparé, se réunissent les parties osseuses régénérées? Doit-on
les considérer comme de véritables sutures? Evidemment non, et, nous
allons voir pourquoi. Mais il est indispensable de rappeler auparavant
ce qu'est une suture et comment se produit normalement l'agrandisse-
ment du crAne.
Oq sait qu'il son premier stade de développement le crAne est membra-
neux, l'n peu plus tard, les partiesniembraneuses de la base sont rem-
placées par du cartilage, la voiUe continuant à rester membraneuse.
Dans cette dernière, l'ossification se fait directement, c'est-à-dire sans
(ju'elle soit précédée, comme cela se passe pour la base, par un stade car-
tilagineux.
La membrane du crâne |)rimilif est constituée de deliors en dedans
par trois couches :
1" Couche superficielle qui deviendra le périoste du crAne adulte;
2» Couche moyenne;
3» Couche profonde qui sera la dure-mère.
La couche moyenne joue dans le développement de la voûte le rùlc du
cartilage dans celui des autres os. C'est dans son sein que se développe le
tissu osseux, et, sur les crAnes un peu plus Agés, c'est elle qui forme la
membrane oblitérante des fontanelles. Lorsque les crAnes sont plus Agés
encore, et que les os qui les constituent semblent se toucher s'engrenani
les uns dans les autres suivant ces lignes compliquées que l'on appelle
des sutures, la membrane moyenne semble ne plus exister; il en persiste
cependant un reliquat dans la suture elle-même, c'est là membrane suturale
' Ollier. — La régénération des os. Encycl. des AiJe-Mémoires, p. Sl-52.
200
i{) AVIUL 1900
qui joue vis-à-vis des os du cràiie le rôle dos cai'lilagcs de conjugaison
vis-à-vis des os à formation carlilagineuse comme ceux des membres per-
mettant l'agrandissement de la boîte crânienne par l'augmentation de
surface des os suivant leurs bords. Une coupe de la paroi du crâne peut
être schématiquement représentée à ce moment de la façon tigurée (voy.
fig. 2). A unûge plus avancé encore, la membranedisparaît tout comme les
cartilages île conjugaison disparaissent, il n'y a plus de suture et la boîte
crânienne ne peut plus s'agrandir'.
fifj, 2. — Coupe tiansvirsale scliémaliquc d'une suture crânienne;», Paroi osseuse
crânienne; .v. Périoste (couche superficielle du crâne membraneux) ; m. s. Membrane
suturale 'couciie moyenne de crùne membreux) ; />, Dure- mère ('couche profonde du
crine membraneux).
Etant donné ceci, qu'arrivera-t-il donc lorsqu'une craniectomie sous
périostée intéressant une suture aura été pratiquée ? C'est précisément
le cas de l'expérience dont je vous apporte ici les résultats. La membrane
suturale aura été détruite et on ne conçoit pm qu'elle puisse régénérer. Le
périoste conservé continuera à produire de l'os suivant la périphérie de
l'orifice pratiqué, suivant aussi d'autres points de sa surface, et ces dif-
férentes zones néo-osseuses s'agrandissant peu à peu finiront par arriver
au contact les unes des autres suivant des lignes sinueuses, quelconques,
qui rappelleront parleur aspect des sutures mais qui en différeront essen-
tiellement, d'abord parce que leur topographie n'aura rien de commun
avec celle des sutures normales, ensuite parce qu'elles ne posséderont
pas comme elles de membrane suturale, et, que pour cette raison, elles
souderont presque immédiatement aussitôt leur apparition. On peut les
appeler des fausses sutures; sur la pièce que je vous présente on voit des
traces de ces fausses sutures déjà synostosées.
Une suture véritable n'est donc pas seulement la ligne suivant laquelle
s'accolent deux os du crâne, mais elle est avant tout caractérisée ; l"^ par
* Il résulte de tout ceci qu'il n'est pas exact de considérer, comme on le fait dans
tous les livres d'uncnlomie, les sutures crâniennes comme des articulations et les os du
crâne comme des individualités osseuses. Les sutures crâniennes sont analogues aux
sutures qui dans les fémurs jeunes par exemple séparent la tète du corps, et, les
os du crâne n'ont en réalité par rapport les ulis aux autres que la signification des
difièrcnts points épiphysaires delà léle du fémur entre eux.
DISCUSSION 201
la pn-sence de la membrane suturale. 2* par son emplacement propre
(|ui failque les tlillerenles sutures sont dénommées .sfl//<7/rt/é', tv>/o«a/c, etc.."
Pour iju'une suture se régénère i\ faudrait donc supposer : 1° une recons-
titution de la membrane suturale, ce (]ui parait a priori difïicile à
admettre; ^^ l'interventiun d'un facteur quelconque et bien spécial qui
forait naîlre celte membrane suturale de néo-formation précisément
à Tendroil même où existait la membrane suturale détruite.
Les lignes de séparation des os que l'on voit sur les crAnes répan-s ne
sont en réalité que des fausses sutures et c'est le hasard ou une production
égale de tissu osseux suivant les bords de la plaie osseuse lorscpie cette der-
nière est symélri(iue par rapi)ortà une suture, qui leur fait prendre par-
fois la direction df suliucs véritables.
A noire séance du 20 juillet 11(05, il nous a été apporlfi la calotte crâ-
nienne d'un individu ayant él<''craniectomisé et qui aurait présenté d'après
les auteurs ' : 1° une régénération de la substance osseuse ; 2° une régé-
nération partielle de la suture coronale.
La régénération de la substance osseuse n'était pas discutable. C'est
donc simplement là une observation qui vient s'ajouter à tant d'autres.
l'ar contre, il nous a été aussi impossible qu'à M. Manouvrier de voir
sur le crâne qui nous a été présenté quelque chose qui puisse être inter-
prété comme une suture régénérée. Au surplus si cette régénération de
la suture coronale avait existé réellement, cela eût été, pour les raisons
exposées plus haut, dénature à nous surprendre au delà de toutes mesures.
Je compte reprendre incessamment ces expériences sur la régénération
du crâne en m'atlacbant plus spécialement maintenant à l'examen histo-
logique des tissus régénérés.
Station phijxiolof/iquc du Collège de France. IS avril 1900.
Discussion.
M. I'ali. Boncouu. — Je n'ai pas assisté à lacomiuunicalion de M. Marie
et de M"e Pelletier: ils ont cité parmi ceux qui sont d'avis que la régéné-
ration osseuse est possible M. liourneville. En eilet j'ai vu chez ce dernier
des crânes d'enfants craniectomisés extrêmement intéressants, où la régé-
nération osseuse est évidente: et d'aillears depuis de longues années
M. Bourneville attirait l'attention sur ce fait (Voir comptes rendus de
Bicétrej. Mais je ne suis pas d'avis que la régénération des sutures soit
possible. M. Anthony vient de donner ses arguments; à mon tour, je cite-
rai un crâne bien connu au musée Bourneville, où la suture coronale a été
touchée par la craniectomie. Or le résultat a été une synostose complète
de la suture, c'est-à-dire la disparition des diMitelures (jui existaient avant
* Marie et Pelletier : Grauieclomie et Régénération osseuse. Bull. Soc. Anlhrop.
Paris 1905.
soc. d'anthrop. <906. li
20-2 <y Avnii. 19(M>
l'inlervention opératoire. C'est là une véritable expérience que je signale
à l'attention de M. Anthony.
M.M. M.\NOuvRiER et Zaborowski font également quelques remarques k ce
sujet.
LA PRÉTENDUE SYPHILIS PREHISTORIQUE
I'ar le D'' Ivan Hlogh (de Berlin).
M. le professeur Manouvrier a bien voulu m'inviter à vous faire une
communication sur mes recherches concernant la prétendue syphilis
préhistorique. Arrivé récemment à Paris, je n'ai pas eu le temps de voir
les squelettes préhistorisques qui ont été décrits par Parrot comme syphi-
litiques. Lorsque je les aurai examinés, j'ajouterai quelques observatioDS
à ma communication présente.
Celle-ci est extraite de mon second volume sur l'origine de la syphilis.
Le premier volume parut il y a cinq ans', le second est sous presse.
M. le professeur Bayet de l'Université de Bruxelles en a donné une analyse
détaillée dans plusieurs numéros du « journal médical de Bruxelles ». Il
a l'intention de traduire ou faire traduire l'ouvrage entier en langue
française après la publication du second volume.
Le premier volume contient l'histoire critique de l'origine historique de
la syphilis pour l'ancien monde. Dans cet ouvrage j'ai réfuté les nom-
breuses erreurs et surtout les étonnantes falsifications sur lesquelles se
fondait l'opinion que la syphilis était aussi ancienne que l'homme lui-
même. J'ai alors prouvé qu'elle avait une origine autochtone de mérne
que la lèpre, le choléra, la petite vérole, la fièvre jaune, etc. M'appuyant
sur de nouvelles sources littéraires, j'ai encore décrit l'introduction de la
syphilis en Espagne à la fin du quinzième siècle et sa propagation dans
l'ancien monde, dans les divers pays de l'Europe, de l'Afrique, de l'Asie.
Le résultat de mes recherches est que la syphilis est une maladie spéci-
fique du nouveau monde, spécialement de l'Amérique centrale. Elle n'a
pas existé du tout dans l'ancien monde. Cette opinion, fondée, comme
vous savez, il y a à peu près deux cents ans, par votre célèbre compa-
triote Astruc, a été vivement contestée et défendue de part et d'autre.
Aujourd'hui la plupart des savants allemands et français partagent
l'opinion d'Astruc, et il est bien caractéristique quesurtout les spécialistes
en dermatologie et syphiligraphie les plus éminents comme par exemple
M. Alfred Fournier, M. Unna, M. Blaschko et beaucoup d'autres ont affirmé
leur conviction de l'origine moderne de la syphilis dans l'ancien monde.
La question serait décidée au moment où l'on trouverait dans l'ancien
* Ivan Bloch. — Der Ursprung der Syphilis. lena, 1901.
IVAN ni.iM^H. — r.A l'RKTENDLE SYPIIILIs PRKHISTORlQrR 203
monde des os sypliililiques antérieurs ;i la découvorle de rAméritjne.
(.^esl éiçalemenl le grand mérile de plusieurs savants français d'avoii'
reconnu les premiers la grande inipoitance des recherches sur les osse-
ments dos temps préhistoriques et de l'antiquité, et c'était surtout dans
votre société qu'ont eu lieu plusieurs discussions très intéressantes sui' la
syphilis préhistorique. Je suis donc heureux 'd'avoir l'occasion de faire
également une (;umiiuiMicaliun sur ce sujet dans la Société d'Anthropologie
de Paris.
Le résultat de mes recherches sur la syphilis osseuse préhistorique se
résume en deux. mots. Il n'y a ni syphilis préhistorique, ni syphilis
antique dans ranoien monde. î'n seul fait curieux suffit à lendre scepti-
(pie au sujet de la prétendue syphilis préhistoricjue. On a hien truuvé
quelques cri\nes ou d'auti'es parties de squelette de provenance préhisto-
riipie, mais il y a une grande lacune entre ces temps préhistoriques et les
temps modernes dans les trouvailles des os syphilitiques des temps de
l'antiquité ou du moyen ;\ge. Il fallait les trouver en grand nomhre, si la
syphilis av;iit existé dans l'anti(iuit('. Mais la plujkart des os anciens ([ui
ont été décrits comme syphilitiques appartiennent à l'époque préhistorique.
C'ostétonnant et très peu favorahleà la théorie de l'antiquité de la syphilis.
On connaît ladilhculté du diagnostic anatomiquc de la syphilis osseuse
sur les pièces fraîches. Que dire, dès lors, de pièces remontant à une
antiquité aussi reculée, qui a peut-être connu des maladies aujourd'hui
disparues dont l'action pouvait comme celle de la syphilis amener des
lésions des os. 11 convient donc d'apporter dans un tel diagnostic les plus
expresses réserves. De plus il y a beaucoup d'altérations osseuses pseu-
dosyphilitiques que l'on doit connaître pour éviter de graves erreurs. Je
dois rappeler brièvement l'état vermoulu du crâne qui caractérise la
nécrose syphilitique, mais qui peut être produit par l'action de racines de
plantes ou de petits vers, comme Virchow l'a démontré sur un crâne de
Porto-Uico, et je dois rappeler également les recherches intéressantes de
M. le professeur Manouvrier sur les cautérisations artificielles du crâne
comme action thérapeutique. De même nous savons que beaucoup de
maladies peuvent déterminer sur les os des lésions très voisines comme
aspect macroscopiciue de celles qui dérivent de la syphilis. Il y a des
exosloses et des hyperostoses d'origine héréditaire, traumatique, arthri-
tique et nerveuse qui ne peuvent pas être distinguées des exostoses et des
hyperostoses syphilitiques. D'après .M. Fournier un simple traumatisme
suffit parfois à produire des exostoses tout à fait comparables aux exos-
loses spécifiques. De même la fièvre typhoïde produit de semblables
exosloses pseudosypbilitiijues, et on trouve également au voisinage des
ulcères variqueux des hyperostoses tibiales simulant des lésions syphili-
tiques. La nécrose des os par l'induence du phosphore et l'ostéoporose
sénile sont aussi des véritables lésions pseudosyphilitiiiues des os. Il y a
en réalité peu de marques certaines qui facilitent et justifient le diagnostic
de la syphilis. C'est surtout la nature des cicatrices produites par la carie.
Ces cicatrices syphilitiques ont une excavation centrale de couleur blanche
504 19 witii. loor.
cl (le constriictiim radiairc, [»eii(lanl que luuironlour est épaissi cl s'élt*'ve
en fornit' d'une liyiieiostuse (!(-' coultnii un peu plus obscure. Jusciu'ù
niainlenanl on n'a Irouvé aucune cicatrice de Iclle nature sur des os
préliisloiicjues ou anlinues. Oulre ces cicatrices bien caractéristiques il y
a une liypcroslose partielle du frontal ou du nasal que lJi-oca a di'claré
être une preuve certaine de la syphilis. J'ai vu un crùne japonais dans le
musée elhno,i;rapliique de Berlin montrant une semblable byperoslose du
nasal d'un centimètre d'épaisseur.
Il va cinq ans, j'ai fait des recherches scrupuleuses dans les collections
dn Musée Hunier à Londres où il y a un grand nombre de squelettes de
l'époque ancienne et médiévale provenant des fouilles et d'^s cimetières
d'Angleterre. Mais je n'ai pas trouvé un seul os avec des lésions spéci-
fiques. Il n'en existe également ni dans les collections du Musée South
Kensinglon à Londres ni dans celles du Musée d'histoire naturelle à
Cambridge, ni dans un aucun musée allemand.
Il faut donc en arriver à celte conclusion que la syphilis n'a existé ni
dans les temps préhistoriques, ni dans l'antiquité. Il n'y a pas de syphilis
préhistorique. C'est une maladie moderne pour l'ancien monde.
Je ne veux pas toucher aujourd'hui la question intéressante de la
syphilis osseuse précolombienne dans le nouveau monde, parce que je
n'ai pas encore fini mes recherches. Vous en trouverez tous les détails
dans mon livre. Du reste, c'est une question secondaire pour l'existence
ou la non-existence de la syphilis préhistorique en Europe.
En somme, je suis persuadé, absolument persuadé que plus l'on con-
tinuera les recherches sur la syphilis préhistorique dans l'ancien monde
plus on arrivera à celte certitude qu'elle n'existe pas.
P. S. — Je n'ai trouvé ni au Musée Broca, ni au Musée anthropologique
du Jardin des Plantes, les ossements décrits par Parrot.
Probablement, ils ont été transférés avec d'autres parties du squelette
dans un galetas de l'I^colc antliropologique, où l'on en a réuni un grand
nombre par manque de place. Je n'ai vu que le crâne du dolmen de l'Au-
mède (collection Prunières 17 349 n" 199) présentant deux exosloses de
l'occipitale qui sont, d'après mon opinion, loin d'être caractéristiques
pour la syphilis, opinion partagée déjà par Broca (Séance de la Société
d'Anthropologie de Paris du 16 mars 1876). Egalement les lésions d'un
crAne de Bray-sur-Seine (M. Lorillon, n" 9 du musée Broca) ne sont pas
de nature syphilitique.
Selon M. Manouvrier, il s'agit d'une ou plusieurs larges cautérisations
du cuir chevelu, probablement pratiquées avec des moxas^ à la façon des
anciens Guanches, et sur le sujet jeune. Ces cautérisations difficiles à
régler et nécessairement irrégulières ont atteint le périoste,- et sur tous
les points où le périoste a été endommagé, la croissance des os en épais-
seur a été compromise tandis que, sur les points où le périoste n'a pas été
atteint par la cautérisation, l'épaisseur des os est devenue normale. De
là, les enfoncements irréguliers que nous constatons.
Malgré le résultat négatif des recherches sur les os préhistoriques pré-
IVAN Itl.nCII. - I.V l'UKTKNDI'E SYPHILIS PHKIllSTOlU'Jli: 20.">
toiiilups svpliiliti^liies, on <^l(,>it roconn.iilro l'nirol (•()iiuno ('('liii (|iii ,i lo
pi'.'ini'M- li.iilt" ainplemoiil colle questiuii, ri m ilgr.; ses crrtîiiis il lui roslc
le in-Mile dîivûir reconnu l'imporlancc da pioltlème scienlirniue. Il <:oin-
iiT'nra ses recherohes (mi 1877, mais Ircize ans avanl, en 180 i il y avait
iJ.'jà une liiscussion sur le même sujel dans la Société d'anlliro[»rjlogie de
Londres. Le président, M. James Ilunl. déclara (ju'il n'avait jamais ren-
conliv des lésions syphilitiques sur un ancien cnVne, mais qu'il les avait
vu'.'S fré([uemmenl sur les cr;\ncs modernes postérieurs à la découverlc
(le l'Amérique. Plus lard d'autres anlhropologistes comme Viridiow,
M. von Lusclian, .M. Manouvricr, ont confirme cette expérience.
Broc.i, qui défendait la théorie de l'existence ancieanc de la syphilis,
- ■ déclara cependant prudemment sur la syphilis osseuse préhistorique à
l'occasion de la démonstration d'exostoses crâniennes des Dolmens de
r.\um''de, p?ndant que de Ojilivfases et Topinar 1 affiiin lient l'origine
moderne de la sy()hilis.
Hiianl au\ travaux de Farro!, ils sont plus vastes (ja'exacts, et ses opi-
nions ont été vivement comhattucs par les anthropulo-^i^tes et syphili-
graphes français, p irce qu'el'es sont trilîs peu critiques. Par exemple il
regarde les exostoses tihiules du squelette de Solulré exhumé par l'ahhé
Ducrost en 1872 comme syphilitiques, quoiqu'il n'y ait pas d'autres
l.'sions sur les autres os et (juoique ces exo^tos-s tihiales n'aient rien de
spé':ilique. Encore plus douteuses sont les opinions de Parrut sur les signes
de la syphilis héréditaire du crAne. Son « craniotahi s congénital peri-
hregmaliipie » qui se trouve symétriquement sur les frontales et parié-
tales le long de la suture sagittale est inconle.-tahlement d'origine
lacliitique. De même les hosscs piriétalcs et la soi-disante dé ormation
naliforuv; du crAne dans la région de hi grande fontanelle sont des mar
ques biensc mnues de rachitisme. E-iîln l\irrot a distingué d'une manière
subtile une fu ilc de dJformalions dentaires (\ l'i! croit être de nature
liérédo syphilitique, comme par exempb une " alioplii(! iu[)uIiriM'me >>
des dents, une « drophie sulciforme », une «atrophie cuspi lionne », une
« atrophie en hache ». On sait que ces déform itions ppuvent être pro-
duites par l'eclampsie infantile, par le rachilism«', la scrofulose et
d'autres maladies ; au contraire elles ne se trouvent dans la syphilis que
1res rarement et alors on peut toujours démontrer la coexistence d'une
de ces autres maladies. Ainsi l'atrophie sulci'"orni .• d-'s (lent< il'un crûnc
iTiM-ovingien du cimetière de Hrény n'est pas du tout v.nr preuve cerl line
de la syphdis comme Parrot le suppose.
Sur ro:cipitale dun cvCum-. du dolm:;ii de Cauquenos, trouvaille du
Dr. Prunières, Parrot a décrit ileux perforations « identiques à celles que
produit le craniolabes syphilitique » mais il ajoute: « Autour d'elles, la
table interne est un peu poreuse, comme il est habituel de la trouver chez
les rachitiques ». Le résumé (ju'il donne de ses recherches est très
remarquable et d'après mon opinion une réfutation méni'? de l'ancienneté
de la syphilis. Car Parrot prétend que la >y[diilis préhistorique était d'un
206 JO AvuiL 1900
caractère très lionin cl (ju'il est i)ruljal»lc que les compagnons de (lolomb
avaient introduit un virus exotique beaucoup plus toxique.
On trouve une excellente critique des hypothèses de Parrot dans une
thèse de Paris que M. Le Biron a publiée en 1881 sur les « lésions
osseuses de l'homme préhistori(iue en France et en Algérie. » Il y décrit
cent vingt et un os avec des lésions pathologiques dont il trouvait un
seul suspect de syphilis. C'est le fragment d'un tibia du dolmen de Léry
où se trouve une liypertrophie vers le milieu de la crête. Mais je ne crois
pas que cette unique hyperostose soit suffisante pour le diagnostic de la
syphilis. Du reste M. Le Baron prononce l'opinion, que la syphilis était
« relativement rare dans les temps anciens », opinion très remarquable
si l'on se souvient que les mœurs n'étaient pas meilleures, mais proba-
blement plus mauvaises que les mœurs des temps modernes.
Assez longtemps après, encore deux savants français, Fouquet et
Zambaco ont remis de nDuveau en jeu la question de la syphilis préhis-
torique. 11 s'agit des squelettes des nécropoles de Negadah, Karwamil,
El-Amrah en Egypte. Zambaco a fait une conférence sur les lésions patho-
logiques de ces os dans la séance du 3 juillet 1900 de l'Académie de
Médecine de Paris. Il y décrit un squelette de la nécropole de Karwamil,
dont les lésions constituent d'après mon opinion un cas typique d'ar-
thrite déformante. En effet les diaphyses sont toujours intactes ; et ni la
diaphyse des os longs, ni la crête antérieure du tibia ni les côtes, ni le
sternum, ni la clavicule ne présentent des lésions hyperostosiques. Enfin
la symétrie des lésions est une preuve contre leur nature syphilitique.
Egalement MM. Gangolphe, Fournier et Bayet se sont prononcés très
vivement contre l'hypothèse de lésions syphilitiques des os de Karwamil.
tJne commission a laquelle appartenaient MM. Fournier, Perrier, Filhol,
Cornil et Lannelongue, fut chargée par l'Académie de Médecine de faire
des recherches sur la syphilis osseuse préhistorique. Mais, comme je l'ai
appris par M. Fournier, cette commission n'a jamais commencé ses tra-
vaux. Dix ans avant M. Eve avait déjà démontré dans la Société patholo-
gique de Londres de semblables lésions des os de l'ancienne Egypte h
celles décrites par M. Zambaco, mais il en avait nié avec raison la nature
spécifique.
Discussion.
M. Fa. Fkrraz de Macedo. — Quand je faisais mes recherches anthro-
pologiques (188o) sur l'encéphale humain à la Faculté de Médecine de la
Ville de Rio de Janeiro, j'eus l'occasion d'examiner une grande quantité
d'ossements d'indigènes [caboclos). Quand j'étudiais anthropométrique-
ment la grande série de crânes d'indigènes brésiliens des cavernes, des
simbaquis (koekenmoedings) et contemporains — exposés au Muséum
.\ational de Rio de Janeiro — .j'examinai, en détail, pcut-clre plus de
500 exemplaires anciens et modernes de ces habitants primitifs du Brésil.
DEL
Vl.MXirUT KT HAIDRT. — lH»l ULE TltKl'AN A rin.N IIIIHI - I nHlIjLE 207
Dans tous ces ext'mplaires, j> ne me rappelle pas nvinr rencontre qneh^ie
trace révélatrice de syphilis.
Toutefois, il faut ilire quo mon allenlion ne s'est jamais tixée spécia-
lement sur cet objet.
MM. Manol VRIE», DE MoRTiLLET ct AiGiER font également quelques re-
marques.
DECOUVERTE D'UNE DOUBLE TREPANATION PRÉHISTORIQUE A MONTIGNY-SUR-
CRECY, CANTON DE CRECY-SUR-SERRE (Aisne).
Pau m. m. Delvixcolrt et Baudet.
MM. Delvincourt et Baudet, membres de la Société académique de Saint-
(juentin, communiquent aux membres de la Société d'.Vnthropologie deux
crAnes trouvés dans une sépulture néolithique à Montigny-sur-Crécy,
arrondissement de Laon.
La sépulture creusée dans la craie, avait la forme d'une excavation
rectangulaire soigneusement délimitée par des grès assez volumineux dont
deux véritables monolithes, elle renfermait 67 individus, hommes, femmes
et beaucoup d'enfants, orientés inditVéremment du nord au sud ou du sud
au nord, brachycéphales, qu'accompagnait un riche mobilier funéraire se
décomposant comme suit :
3 haches polios avec emmanchure en corne de cerf polie.
1 emmanchure en corne de cerf polie.
1 emmanchure en corne de cerf non polie.
2 poinçons en os.
i collier formé de rondelles en nacre, schiste et os.
P^t d'environ 100 silex taillés et non taillés.
Deux crânes méritent une mention particulière :
Le premier porte deux trépanations : la première est sincipilale et
semble présenter qu.M(iue5 traces de guéri.son; la seconde intéresse le
pariétal droit et la portion écailleuse du temporal et parait avoir été
suivie de la mort de l'individu.
Le second crAne a appartenu comme le premier h un individu de .jO a
60 ans, il porte sur le sinciput la trace d'une altération osseuse probable-
ment due ;i une cautérisation pratiquée ou à une blessure reçue pendant
la période de l'adolescence.
Discussion.
M Manouvrier pense que les deux trépanations ont été faites après la
mort de l'individu.
M. .\. DE MouTiLLET au Contraire est d'avis que, si une des trépanations
208 I") Aviui. 1006
est ccrlainemcMil poili'rioiiro à la mort du sujet, r.uiln' peut très bion avoir
Ole faite de son vivant (juoi(|iM' le sujet ne semble pas avoir survécu long-
t<;nips il l'opération. Kn outre il croit la sépulture de Monligny-sur-ilréry
être un dolmen dont la table supérieure serait disparue.
l)'a[irès M. llaudet, la situation de la Sf'pulture, la présence d'un fossé
que précède une sorte de tremplin pour faciliter l'intromission des corps
dans l'excavation entourée de grès, confirment l'opinion de M. A. de
Mortillet. L'enlèvement de la table du dolmen à une époque plus ou moins
reculée pourrait même être la cause de la dénomination bien significative
du lieu dit où se trouve la sépulture : le Champ à Fosse.
Ensuite un rapprochement est fait par M. Delvincourt entre la sépul-
ture de Montigny et une sépulture analogue découverte et publiée à Uibe-
mont par M. J. Pillay. A Ribemont le corps et les objets de la sépulture
ont été anéantis par le feu ; au contraire à Montigny-sur-Crécy les sque-
lettes étaient d'une parfaite conservation ; aucun des objets composant le
mobilier funéraire n'a subi l'action du feu. Cependant une mince couche
de cendres a été remarquée au fond de la sépulture.
Le cr;\ne bilrépané fait partie de la collection Pol Baudet, îi Crécy-sur-
Serre, Aisne.
U. Vauvillk. — Les sépultures, comprenant 67 squelette? humains, dont
il vient d'être question, paraissent cire de même époque et de même genre
de monument funéraire que ceux du département de l'Aisne, dont j'ai
entretenu la Société dans les séances de la Société du i''^ décembre 1887 '
sur : Montigny l'Engrain, V'ic-sur-Aisne et Saint-Christophe à-Berry
(canton de \'ic sur-Aisne i; de celles de Serches - (canton de Braisne); et
des allées couvertes de l'Oise de : Coui'lieux, Saint-Pierre-les-Bitry ' et
une autre découverte en lU03sur Saint-Etienne du Croutoy ''•(canton d'At-
lichy).
Des sépultures du même genre ont été aus'i découvertes h Saint-Gobain ^
La constatation des cendres de bois avec les sépultures de Montigny-
sur-Crécy, est intéressante à faire remarquer. Lors de mes fouilles faites
en 1887, à l'allée couverte de Montigny-l'Engrain, j'ai constaté vers le
centre des quatre groupes din"érents des sépultures fouillées, beaucoup
de cendres et de charbons de bois '\ Ce fait m'avait permis de conclure
que ces cendres cl charbons devaient provenir, très probablement, du
feu fait pour désinfecter l'endroit avant d'y déposer de nouveaux cadavres.
La constatation faite aussi de cendres dans les sépultures de Montigny-
sur-Crécy, paraît confirmer mon opinion.
' Bull, de la Socirté. 1887, p. 723 et vol. ISOi?, p. ii7i.
- Kl. 1892, p. 57i).
3 id, 1887, p. 724 et 1892, j.. 575.
* id. l'J03. p. 171.
5 Annuaire 'lu département de l'Aisne, 1828, p. 40.
•^ id. ■1887, p. 712.
L. . MANilVltlF.il. — l.!'>inN SVnill.ITl'.'l 1- l>I- ClîWK l'Ill IlIMnlilMl K -J(l<.)
(). Wvt vii.i.K. — Il n't'st |ns admissihli' coiiiint' li' pi'ii^i' M. \. «I'- .Mi'i-
lillot. que It'S ossements des sépultures aient (''|.'' diaii^i's di- place pour
los fouilles tpie j'ai fail<'.<. Kn eiïet, j'ai lii'Mi constaté (lan>; les divers
j^roupes de .Montigny l'Kngrain, malgré la très mauraisp owsennlion ilrx
ossrmriils, ipi.' tous les s(iuelettes étaient bien rangés méthodiquement et
qu'ils se trouvaient cneore l)ien dans leur position analomi([ue.
^ly SK.\.\CL - ù .Mii l'.iOll.
Présidence dp: .M. Z.miuikiwski.
Nécrologie. — Cu'i.mknt Ri'buens, membre titulaire (le(iiiis 1800 ilonl lu
|irts.ini- assiiiUio à nos séances sera vivement regrettée <lc tous nos collègues.
OUVRAGE OFFERT
M. EnoiT.MU» C.rYKU. — J'ai l'iinniieur d'ollVii' i'i l.i Société, au nom ilc M. le
.qMlaiiio l'arJier. réeeninient encore professeur dliistoire et de géographie à
1 Kcolc Militaire de larlillerie et du génie de Versailles, un ouvrage dont il est
laulcur, ouvrage ayant pour titre : Méthode tlecartfxj rapide, cartes à main
levée et de mémoire. Tracés rapides.
\.i\ méthode de .M. le capitaine l'arlier reiiose non scidcmciil sin- les dnuuces
fournies par la conslitiiliou physique du glohe. mais encore sur un rapport
iicKemenl et rigoureusement établi entre les princii>es généraux qui sont la
Imsc de l'enseignement du dessin et l'indication des divers cléments que com-
portent, ilans leurs représentations, les cartes géographiques.
Il y a là une association des plus intéressante et sur laquelle je me féliriic
de pouvoir attirer votre attention.
LA PRETENDUE LESION SYPHILITIQUE DU CRANE PREHISTORIQUE
DE BRAY-SUR-SEINE
VWK .M. L. M.VNOUVIUE».
Le crâne en question est loin d'être un nouvel arrivant dans notre
Musée. Il s'y trouve depuis de nombre.ises années et jouit même d'une assez
grande notoriété, car c'est une des rares pièces sur lesquelles s'appuya
l'opinion que la syphilis existait chez nous à l'époque néolithique, dette
opinion émise par le professeur Parrot parut contestable à I5''0ca, mais
comme aucun autre diagnostic plus certain no s'imposait, la question resta
pendante.
•2\0 3 MM 1900
Le crAnt' de |{i\iy-siir-Seinc inc fui présenté ces temps derniers d'abord
par notre collègue le l)"" Raymond puis par le C Ywan Bloch, de Berlin,
nôgaleur tle la syphilis préhisloriijue et venu d'Allemagne exprès pour
examiner les pièces invoquées à l'appui de l'opinion contraire.
Je (lois avouer que si j'avais examine ce crâne il y a dix ans, c'est-à-
dire avant (l'avoir pu idenlilier, au moyen d'une série de pièces successi-
vement découvertes, les lésions crâniennes produites par des cautérisations
chirurgicales et avant d'avoir pu indiquer la façon dont ces lésions se pro-
duisent conséculivement aux caut(''risalions, je n'aurais pas été moins
embarrassé que mes confrères et prédécesseurs. J'aurais pensé que Parrot
avait pu se tromper mais qu'après tout il avait peut-être eu raison de
considérer les lésions très étendues et vraiment bizarres du crâne de Bray-
sur-Seine comme un résultat de la syphilis en attendant un diagnostic
plus vraisemblable.
Mais je crois être en mesure, aujourd'hui, de faire ce diagnostic en rap-
prochant ce crâne des divers autres sur lesquels j'ai montré le résultat de
cautérisations soit en forme de T sincipital complet ou incomplet, soit
punctiformes, soit en plaques plus ou moins larges. Les lésions dans le
cas en question, sont seulement plus étendues que dans tous les autres
cas, mais elles peuvent recevoir la môme explication qui est la suivante :
Destruction du périoste sur certaines parties de la voûte crânienne par
la cautérisation pratiquée pendant l'enfance du sujet. Arrêt consécutif de
la croissance du crâne en épaisseur sur les points dépourvus de leur
périoste pendant que les parties respectées ont acquis leur épaisseur nor-
male. En définitive des creux linéaires, punctiformes ou à surface plus ou
moins large et irrégulière sur le crâne devenu adulte partout où le périoste
a été détruit.
En d'autres termes, les lésions chirurgicales au moment de leur pro-
duction étaient limitées au périoste; elles étaient profondes pour le cuir
chevelu, mais n'atteignaientque très superficiellement le crâne. Dansquel-
que cas cependant l'os lui-même pouvait être atteint à l'endroit où la cau-
térisation avait agi le plus profondément et dans ces cas l'on voit une
petite perforation crânienne au fond de la fosse qui semble être une perle
de substance produite sur le crâne adulte. Mais ce n'est pas une perte de
substance, c'est un simple défaut d'accroissement en épaisseur des parties
où le périoste a été attaqué par le cautère.
11 n'existe aucune ressemblance entre ces perforations et les trépana-
tions.
Ce qui est particulier au crâne de Bray-sur-Seine c'est l'étendue consi-
dérable des parties atteintes, de sorte que toute la région sincipitale ne
présente que creux et bosses.
Il est probable que nous voyons ici l'effet de brûlures irrégulières
produites par plusieurs moxas appliqués sur la tête de l'enfant, tandis
que les crânes qui présentent un T sincipital à branches droites et régu-
lièrement creuses indiquent l'opération soigneuse faite au moyen d'un
cautère conduit par une main experte.
DISCISSION
2H
Il f.'xisle diirn; à piv'sciil iiiu' explication i)l;uisii)li' des lésions du ciAno
de Bray-sur-Seine, explicalion appuyée par la série de mes cr;\nes caulé-
lisés etilonnant le niéc;inisine même suivant le(|uel sont réalisées de telles
lésions. 11 n'y a donc plus lieu de faire intervenir la syphilis, explication
absolument vague «[ui n'<Hail appuyée par aucune comparaison satisfai-
sante et ne possédait en si faveur, je le n'-pète, (jue le défaut d'une autre
••x|»lication mieux justifiée.
•le ferai observer, que l'explication ci-dessus peut être scindée. Il n'est
jias nécessaire d'y faire entrer la cautérisation volontaire ou chirurgicale
pour (jue le crAne do Uray sur-Seine ne soit plus considéré comme syphi-
lili.pie. Au lieu de celle opération curalive, on peut imaginer tout acci-
dent susceptible de léser le périoste sur un crAne en voie de croissance
et de produire consécutivement les creux ici constatés.
La syphilis ainsi écartée, la nature chirurgicale et non pas accidentelle
de la lésion primitive est mise en évidence par le rapprochement des
diverses pièces présentées dont l'une (la calotte crânienne de Menouville)
montre réunies les diverses formes de cautérisation dont j'ai parlé y
compris celle qui est identique aux altérations du cnlne de Bray-sur-
Seine.
Discussion.
M. Cai'itan émet (]uclques doutes sur la pathogénie invoquée par
M. Manouvrier.
M. Manolviuer. — Je crois avoir répondu d'avance à l'objection de
M. Capitan. Il dit que la lésion primitive du périoste pourrait avoir été
produite par une maladie du cuir chevelu ou un arrachement par les
grifîes d'un animal féroce aussi bien que par une cautérisation. Nous
sommes d'accord là-dessus. On peut imaginer aussi bien une chute
malheureuse, une vaste brûlure accidentelle et en général tout accident
capable de détruire le périoste crânien sur une large surface. Cela ne
contredirait en rien ce qu'il y a d'essentiel dans mon explication anatomo-
palhologique.
Mais je ferai observer que mon hypothèse relative à la cautérisation
chirurgicale possède sur les autres hypothèses imaginables une supério-
rité qui consiste à n'être pas une hypothèse hasardée ou en l'air. Le
crAne de Bray-sur-Seine entre très naturellement dans la série des crAnes
néolithiques trouvés comme lui sur les rives de la Seine et portant des
lésions sincipitalcs dont l'origne thérapeutique est devenue de plus en
plus incontestable à mesure que les cas se sont multipliés.
M.M. IkcuET, i)K MoiiriLLET et Antmonv prennent également la parole.
M. .\ VAN (Jexxep — Pusicurs de nos collègues ayant fait allusion en
termes généraux aux mulilntions d'un caractère cérémoniel, il ne sera
pas inutile de citer des cas précis de blessures volontaires à la tète.
212 3 MM 11(00
Se frappiM' la U'W coiifri> un mur. contr.^ dos pierres, de, est un rite
funéraire fort répand u clioz les demi-civilisés ; mais c'esl d'ordinairo le
Iront ou ['uccipiil (|iii sont alors Idessés.
Chez les Australiens centraux, la région atteinte est précis(''inent celle
qui présente (ies malformations si intéressantes sur les crAnes présentés
|)ar.M. Manouvrier. Lors de la mort dun mari, toutes les femmes qui
se trouvent par rapport au di'funt dans une relation détermin'ie de
parente ont, entre autres, à se frapper l'une l'autre sur le dessus de la
tête avec leur bâtons à déterrer les racines {dù/fjinj-slich). Ces bâtons
sont en bois dur; et les blessures sont telles que le sang coule à flots sur
les visages. (Spencer et Gillen, The Native Tribes of Central Australia,
Londres, 1899, p. 507). Il ne s'agit pas ici de simulacres : car le but du
rite semble être de rougir de sang le petit monticule élevé sur l'un des
cùlés de la tombe.
Ce même rite est exécuté par les femmes en cas de mort de l'une d'elles :
h un moment donné toutes les femmes apparentées se jellenl sur la tombe
et se frappent mutuellement de leurs btUons (c'est leur unique arme et
oulil) de manière h faire couler le sang à flots. « Chacune d'elles avait
apporté son b;\lon à déterrer les racines dont elle se servait pour se don-
ner à elle-même et aux autres des coups bien assénés sur la tête, aucune
ne tâchant de les éviter, bien au contraire : s'oiïrant à eux » (Ibidem,
p. 509).
On peut voir une cicatrice î'ésuUant de coups de ce genre dans le
deuxième volume de Spencer et Gillen {The Northern Tribes of Central Aus-
tralia, Londres i90o);i la W^. 18 qui représente une vieille femme.
A signaler encore que le coup sur le dessus de la tète est une punition
répandue dans i'.Vustralie centrale et dans le Queensland, tant pour les
hommes que pour les femmes (Cf. entre autres W. E. Rolh, North Queens-
land Eihnographtj, lîullelin n^S, 1906, section 13). Le nombre des coups ;i
recevoir varie avec la gravité de l'o.Tense: il sont assénés soit par un
guerrier délégué, soit par une sorte de bourreau attitré, avec le plus de
force possible ; l'instrument est tantôt un boumerang. une massue ou
même un tomahawk. Les quelques Européens qui ont assisté à des scènes
de ce genre se sont émerveillés de la force de résistance des crânes austra-
liens â des coups qui nous assommeraient net.
Malheureusement, il est difficile de savoir si ces coups sont donnés à
un endroit déterminé du sommet de la tète ou au liasard.
En tous cas, comme des coups de ce genre sont reçus par des individus
des deux sexes d'âge variable et non pas seulement par ceux qui sont
d'un âge avancé, on peut suppos3r que des traces doivent en rester non
pas seulement sous forme d^ cicairrices du cuir chevelu mais que la partie
osseuse doit présenter également des malformations dans le genre de celles
qui rendent si remarquables les crânes présentés par ^L Manouvrier.
Il ne s'agit plus ici, on le voit, de cas accidentels, mais de rites intéres-
sant des générations et des communautés tout entières, c'est-à-dire de
l'élément d'appréciation que M. Manouvrier considère à juste titre comme
U. Dl'SSAUD. — I.A MATKHlAl.lSATIiiN HK I.A l'IUKItK KN (tHIKNT 2IM
le plus iniporlant, j>uis(|iie ce n'est pas un crAne isolé, mais loiile une
série (le crAnes piéhisturiipies (jui se distinguent par des uialioi inatinns
>emblables entre elles.
la matérialisation de la priere en orient
Pau m. IUxb Dussaud.
(Conimuiiicalinii à la SocitHé d'Anlliropologie le S mai 1900.)
On n'a pas fait à la matérialisation de la prière la place qui lui revient
dans les préoccui»alions religieuses populaires. ,Ius(iu"ici, on n'en a signalé
des exemples que chez les Indiens d'Amérique depuis le Pérou jusqu'en
(lalifornie. Nous nous proposons de montrerque la prière matérialisée n'est
pas inconnue aux peuples de l'Urient. Nous limitons nos recherches à ce
groupe, mais la diversité des éléments qui le composent aussi bien que la
diiïusion des pratiques sur lesquelles nous nous appuierons, permettront
aisément de généraliser nos conclusions si elles sont admises.
Le problème posé e.^l le suivant : il s'agit pour l'individu de transmettre
par ses propres moyens une prière (naturellement une prière-demande) à
une puissance invisible.
La jxirole est, certes, un moyen très efficace. Une formule usuelle des
anciennes inscriptions sémitiques — phéniciennes aussi bien qu'ara-
méennes — est le remerciement du fidèle à la divinité « parce qu'elle
a entendu sa voix ». Mais il est un procédé non moins en faveur (\u'\ peut
se définir ainsi : la puissance invisible se matérialisant ou, si l'on veut,
s'incorporant dans certains objets, ïl suffira de matérialiser la prière et de
mettre en contact les deux objets pour que la prière atteigne ou, comme
nous disons, touche la puissance invisible.
Ce schéma secompliquedepratiquessurérogatoires, pratiques d'offrande
ou de contrainte, qui augmentent les chances de réussite; mais, quand les
faits sont bien observés, on n'a pas de peine h reconnaître le caractère
secondaire de ces praticjues superposées.
L'exemple le plus net, parce qu'il utilise des moyens qui nous sont
familiers, est fourni par les Juifs de Palestine. Un procédé très en faveur
pour obtenir une guérison ou l'accomplissement d'un vœu quelconque,
consiste à rédiger une supplique et e\ la glisser par un trou ad Aoc jus-
qu'aux tombeauxd'Abraham,d'Isaac,de Jacobet de leurs saintes épouses.
La tradition place les tombes de ces patriarches dans la mosquée d'IIébron.
M. Frédéric Macler a publié plusieurs de ces missives ' qui constituent
• Fr. Macler. — Correspondance épislolaire arec le ciel. Lettres adressées par
les Juifs d'Hébron et des environs aux patriarches, tratluitos de l'hébreu ol annotée.'?,
d^m Revue des Traditions populaires, février-mars 190j, p. 65-82. M. Macler rap-
proche justement ces pratiques de celles qui ont cours chez nous dans le culte de
Saint Antoine de Padoue.
■2ïi :< MM I !>•-)('.
des types de priôres-domandes et dont le pi-ucédé d'envoi rappelle celui
des labellic devolionis antiques. Mè'me, certaine de ces lettres demandant
que les concurrents du fidèle soient mis en état d'infériorité respire un
paifum de ilcrotio.
Le Juif de Palestine n'est pas un indigène. Pour étudier les pratiques
locales dans leur forme primitive, il faut observer les paysans devenus
musulmans. Sous celte enveloppe moderne, M. Clermont-Clanneau a par-
faitement mis en évidence le conservatisme de leurs croyances.
« Non seulement les fellahs, comme Robinson le pressentait déjà, ont
conservé, par l'érection de leurs qoubhês musulmanes et grûce à leur féti-
chisme pour certains grands arbres isolés, l'emplacement et le souvenir
de ces sanctuaires que le Deutéronome signale à l'exécralion des Israélites
entrant dans la Terre promise et leur montre couronnant les hauts som-
mets, surmontant les collines et s'abrilant sous les arbres verts; mais ils
rendent presque le même culte que leur rendaient aloi's les adorateurs deg
Elohims, ces kouffars (villageois : par/ani) chananéens dont ils sont les
descendants. Ces magoms, — c'est ainsi que les appelle le Deutéronome,
— que Manassé construisit encore, contre lesquels les prophètes épuisent
en vain leurs invectives grandioses, ce sont, mot pour mot, chose pour
chose, les maqnms arabes de nos (/oïms modernes recouverts par ces petites
coupoles qui ponctuent si pittoresquement de leurs taches blanches les
horizons montagneux de l'aride Judée '. )i
Naturellement, ces antiques lieux de culte sont devenus la dernière
demeure d'un ancêtre vénéré {chaikh), d'un saint [icéii), d'un prophète
(nébi) ou do telle entité mythique plus ou moins lloltante comme Kliidr
souvent identifié à Saint Georges. Dans toutes les religions monolhéistes
les croyances populaires trouvent un refuge dans le culte des morts ou des
saints. Aussi, le caractère propre de ces cultes locaux est de rompre les
cadres des religions officielles et de réunir dans une même vénération les
confessions les plus diverses. Juifs, Chrétiens, Musulmans et, suivant les
régions, Druzes ou Nosairis, viennent au même lieu accomplir les mômes
rites : prières, vœux, offrandes, sacrifices. Et tandis qu'on ne laisse péné-
trer qu'à regret l'étranger — quand on l'y autorise, — dans une mosquée,
on ne lui refuse jamais l'accès du maqâm, simple enclos renfermant un
cénotaphe que recouvre souvent une petite bâtisse carrée surmontée d'une
coupole. C'est que sous le nom juif, chrétien ou musulman, on continue
à y adorer le Genius loci.
Un exemple suffira à le prouver. En Syrie, à l'est du Djebel IlaurAn,
sur le limes syrien, l'ancien fortin romain qui a nom en-Nemàra, possède
un soi-disant tombeau de Chaikh Nemàr. Les Druzes du Djebel llauràn le
vénèrent à l'égal des nomades. A peine avions-nous mis pied à terre pour
visiter la ruine que notre guide arabe se rendit pour prier sur le soi-
* Glermont-Ganneau. — La Palestine inconnue, Paris, ISTO, p. 49-50.
R. DUSSAl'D. — I.A M VTl';lt[\I.IS\TluN \)V. \.\ IMtli-.RK KN uHlKNT 21;')
disant lûinheau. La prière finie, il déposa une pi.'rie sur la loml..' <>t se
relira.
Le nom d'en-NeniAra rsl ancien puisqu'il apparaît dans les textes
safaïtiques du début de notre ère. Chaikh Nen);\r est une véritable entité
mythique; c'est l'éponyme du lieu, le Genius loci. Mais c'est, si l'un peut
dire, un Genius loci à compétence étendue, en somme un dieu local. Car,
il faut mettre à un degré inférifur le simple Genius loci innumé, le simple
sdhib el-tnahdn i^ \e mi\\[vc du lieu >. (lue les Arabes imaginent en tout
endroit, mais dont le pouvoir est forcement limité puisque, n'ayant pas
de nom, il ne peut être invoqué ipi'au lieu même.
L'indigène vient au inminm, prie et dépose une pierre sur le mur du
sanctuaire ou dans uiu' l'enb' (|iianil il ne déchire pas un boutde son vête-
ment jiuur le glisser par la l'enèlre ou l'attacher à une des branches de
l'arbre qui abrite le sanctuaire. Ces pratiques, souvent décrites, ne son t pas
spéciales à l'Orient, mars c'est en Orient et dans l'Afrique du nord qu'elles
ont peut-être conservé le plus d'intensité. Récemment, M. Edmond Doulté
les a étudiées à nouveau au cours de ses recherches dans le sud du Maroc.
Sa monographie est un modèle du genre et elle n'a pas manqué d'attirer
l'attention. Le savant explorateur voit dans ces pratiques une transfor-
mation du jet de pierres sous l'influence de l'Islam et plus particulière-
ment du maraboutisme. Il se rallie à l'explication de M. Frazerpar l'expul-
sion du mal, avec celte nuance que l'islamisation tend à convertir le rite
en un geste d'oITrande '.
A notre avis, il y a lieu de distinguer nettement le jet de pierre destiné
à chasser le mauvais esprit ou même dans certains cas, comme pense notre
M. van (Jennep, à lever le tabou, d'avec le dépôt d'une pierre ou d'un bail-
Ion sur la tombe d'un saint. Encore moins est-on autorisé à dériver l'un de
l'autre. Ces deux rites n'ont de commun que l'usage des pierres, mais
comme la pierre n'agit pas par ses vertus propres, le rapprochement est
tout superficiel. Si le premier rite s'explique, entr'autres, par l'expulsiun
du mal, cette explication ne convient pas au second.
Prenons, comme exemple, le cas où l'individu, venant dans le mnqàni
demander ^nGenins loci une bonne récolte, dépose près du cénotaphe un
peu de terre de son champ, quelques grains serrés dans un bout d'élolfe
ou une écuelle contenant de la farine. Il est difficile d'admettre que le
rite tende à l'expulsion du mal.
Toutefois, M. Doutté, a la suite de M. Frazer, s'efforce de l'établir : « Si
l'on met dans un nouet de la terre d'un champ cultivé, que l'on veut voir
fertile, c'est que la pensée primitive était de concentrer dans celle petite
portion du champ tout ce qui peut y avoir de mauvais en lui; même sens
primitif dans l'acte de celui (jui, pour se procurer une bonne récolte,
' Voir Jaussen. — Revue Biblique, 1906, p. 97.
* Ed. Doutté. — Les tas de pierres sacrés et quelques pratiques conne.res dans le
sud du Maroc, extrait do Voyages d'études au yfaroc. Analyse par M. Salomon
^ziSKZVi, L'Anthropologie, \9QZ, p. 226 et suiv.
21 6 :\ Mai 1«»U6
porte au maiabuuL un fluuel rempli ilo grains d'uige, ou qui, pour proté-
ger ses troupeaux, va déposer clans le sanctuaire du saint des toulîes de
laine de ses moutons ' ».
Le raisonnement est ingénieux; mais il ne s'appuie pas sur des faits
précis, il est simplement le fruit d'une généralisation *. Nous essaierons
de montrer ci-après, par des analogies bien constalées, (]ue le dépôt de
terre, de grains ou de farine sur la tombe d'un saint a un tout autre sens.
La dilTiculté d'expliquer le rite par le transfert du mal est encore plus
grande dans le cas où l'on demande un bon voyage ou (juand on accom-
plit le rite au moment de pénétrer sur le territoire du Geniiis loci.
Ce territoire est naturellement défini par le rayon visuel ' et c'est là une
dos raisons qui font choisir un point élevé pour le sanctuaire. Dès (|u'on
aperçoit le mur du muqntn ou la coupole du wili, on a le sentiment d'être
sur le terrain du génie du lieu *. A ce moment, dans les exemples correc-
tement rapportés, les Voyageurs signalent que les indigènes s'arrêtent,
font une prière ^ et déposent une pierre sur un tas qu'ils supposent en
relation avec le génie du lieu.
En somme, le dépôt d'une pierre dans un maqâm est d'une autre nature
que le jet de pierres; la ditTérence essentielle tient à ce que ce dernier
n'est pas accompagné d'une prière. Le premier rite ne peut donc être une
islamisation du second. Et cela était évident a priori puisque ces deux
rites se retrouvent également chez les peuples les plus divers et dans les
civilisations les plus distantes.
Quand un indigène dépose une pierre sur le mur du maqâm ou sur un
tas qui passe pour être en relation avec le Genius loci, quand il noue un '
lambeau d'étoiïe à une branche de l'arbre qui abrite le sanctuaire, il
accompagne toujours son acte d'une prière. Si on l'interroge adroitement,
* DOUTTÉ. — L. c, p. 35.
* II. UsENER, Archiv. fur Religionsirissenschaft, l9o4, p. 2/5, repousse également
celte théorie. Il suggère, dans le cas du dépôt de terre, une consécration du champ
à la divinité (pars pro toto) qui doit en assurer la fertilité. Mais une consécration
s'accomi)agne de rites significatifs. De plus, par le fait qu'elle ne s'appliiiue que
dans un cas, celte explication est insuffisante. M. Henbi Hubert, Année sociolo-
gi(/ue, VU, p. 300-301 a également noté l'insuifisanoe de l'explication par l'expulsion
du mal.
3 Cette conception du territoire délimité par le rgard est formellement exprimée
dans Genèse, XIII, 9-11 et 11-15.
4 Non loin d'En-Nemâra, dans la Rouhbé, plaine fertile près du Safà, Chaikh Seràq
est un Genius loci fort redouté, l'héritier de Zeus Safathènos; Cf. R. Dussi.UD et
Fr. Macler. — Voyage archéologique au Safà, p. 40-43. Tandis .que nous chemi-
nions dans la Rouhbé, un de nos guides avisa une outre oubliée sur le bord du sen-
tier et s'en empara. Mais, en remontant à cheval, il aperçut le petit sanctuaire de
Chaikh Seràq. Aussitôt, il abandonna son larcin, car Chaikh Seràq l'avait vu.
5 Les voyageurs négligent souvent de mentionner la prière qui accompagne le
geste. C'est le cas pour la Zàwiga marocaine de Moulay Ibrahim où seuls d'entre les
auteurs cités par Doutté. /. c, p. 10, Dali, et Hooker mcnlionnent la prière avant
le dépôt de la pierre.
R. nr>>\ri). — i.\ \i \Ti:iti\r.i-AThiN iie i.\ i'Uikiif. r\ hiuf.nt 'û\1
il ost aisé di' disconi»'!' un cas l)ien (li'lonnim'' ilr luali'riali.salion di' la
|iri<"-ii'.
A Aïii-l''i(IJ''', l .iiicit'iiiiL' ll',;^', |)rL'S de iJainas, une iKiysaiiiie priait
s'adivssanl ii l'ail)!'.' du luè/i de Chaikh Uîhàn comme elle se f(H adressée
à Dieu. Inleriogée par .M"'" Crawford de Damas, elle répondit (lu'clle
s'adressait à Dieu tout en parlant ;i l'arbre et elle expliqua (|u'elle atia-
iiail un (liilVon à l'arhre dans le but d'obtenir (jue sa prière fiH exaucée',
lia voit qu'il n'est nullement ((uestion d'expulsion du mal.
D'ailleurs, les explications fournies par les Marocains h M. DduIIi' ne
dilTèrent pas sensiblement. La pierre dé'posée serait, d'après eux, u une
.sorte de gage du vœu qui a été fait ». « Le dépôt d'une pierr(! est sur-
tout ell'eclué |)ar ceux (jui ont une grâce à demander au saint * ».
D'une farnn plus prtjcise c'est une matérialisation de la prière-
demande. On met la prière matérialisée, pierre ou cbilTon, en contact
avec le Genius loci, matérialisé lui-même par soncénotapbe, par tout cequi
le touche ou l'approche comme le mur du ninqâm ou l'arbre qui l'abrite.
.Souvent, l'esprit divin est plus spécialement matérialisé par le linteau,
le montant ou le seuil de la porte d'entrée. C'est pourquoi quand on sacri-
fie en son honneur, on enduit le linteau, les montants ou le seuil du
sanctuaire avec le sang de la victime tout comme les anciens Syriens
enduisaient de sang le bétyle. C'est pourquoi encore les prêtres de Uagon
sautaient par-dessus le seuil du temple.
(Juand au lieu d'une pierre ou d'un cliilîon, on dépose de la terre de
son champ ou un paquet de grains, c'est pour mieux exprimer l'objet
du vœu. Les Juifs modernes de Palestine pensent que l'écriture est plus
efficace.
Le rite, nous l'avons dit, peut se compliquer d'une offrande ou d'une
formule de contrainte ^. L'idée de contrainte perce dans l'acte de nouer
un cbilïon à l'arbre. L'idée d'expulsion du mal est réelle dans le cas où le
malade, avant de la déposer, se frotte le corps avec la pierre. Mais ces
notions ne font que se superposer à la matérialisation de la pierre.
Il nous faut parer à une objection grave. Nous avons établi (juc la ma-
térialisation de la prière était pratiquée actuellement par les indigènes
d'Orient. Mais celte conception est-elle primitive?
' Rapporté par Curtiss — Ursemilische lldirjion, p. 98. Nous signalons tout par-
liculièrement cet cvt'ajplc, car il se présente flans des conditions d'ol)servalion excel-
lentes : une femme indigène interrogée dans sa langue par une femme liabitant li'
pays et lui répondant en toute confiance. La fenimo indigène ne distinguait plus entre
le Saint et Dieu. La conception de l'arbre incorporant la divinité, si nettement expri-
mée, peut s'illustrer par les scène.« qui, dans les civilisations les plus diverses,
figurent l'adoration d'un arbre ou encore être comparée aux anciennes expressions
grecques de Entendros, Dendritès ou Dendrilis appliquées à telle ou telle divmilè.
De nombreuses légendes peuvent aussi être rapprochées.
* DOUTTÉ. — L. c, p. l.j.
' DouTTÉ. — L. c, p. 36-87, cite une de ces formules.
soc. d'a.nthrop. 190G. I-'»
518 n MAI lOOG
Nous n'Iit'ï^iluns pas à l"aniiinor et nous croyons pouvoir le démontrer
par comparaison avec les observations de prière matérialisée faites en
Amérique, cntr'autres par M. Soll)ergcliez les Indiens llopi de l'Arizona '.
Ces Indiens emploient le hAlonnct de prière qu'ils appellent baho. Ils le
préparent suivant des rites compliqués, avec des cérémonies purificatrices
(jui en font un objet sacré. Au balw sont toujours attachées des plumes des-
tinées à porter la prière. En réalité, ce sont les plumes qui matérialisent
la prière. Elles correspondent au chiffon ou à la pierre des indigènes
d'Orient, tandis que le hAlonnel est l'intermédiaire snxré qui répond h.
l'arbre ou au mur des maqâms d'Orient. Souvent, pour préciser la demande
d'une bonne récolte, les Indiens Hopi joignent au bAtonnet muni de
plumes, un petit sac en feuilles de maïs, rempli de graines ou de farine.
Ou encore, ils peignent des cercles noirs sur le bAtonnet de prière pour
obtenir la pluie; ils peignent le bâtonnet en vert pour faire croître les
plantes, etc. En un mot, ils pictographient leur prière.
Il apparaît que le rite, encore si vivace dans l'Afrique du nord et en
Orient, est de tout point comparable au rite des Indiens Ilopi de l'Arizona.
La seule dilTérence réside dans l'intermédiaire qui incorpore ou matéria-
lise l'esprit divin. Ici, l'objet est fabriqué, mais on lui confère par des
cérémonies appropriées le caractère sacré tandis qu'en Orient, ce carac-
tère résulte naturellement du contact de l'arbre ou du mur avec l'esprit du
Saint enterré auprès.
Nous avons vu que les Juifs de Palestine matérialisaient leur prière
par l'écriture. Entre cette pratique d'un ordre relativement élevé et les
matérialisations grossières des paysans de Syrie, il y a des degrés tels que
la représentation figurée du désir par la pictographie ou même en nature.
Étant donné son caractère très primitif, on peut conjecturer que la maté-
rialisation de la prière a joué, à côté d'autres procédés magiques déjà
signalés', un rôle important dans les manifestations d'art primitives et
dans l'élaboration des écritures pictographiques. Certains objets néoli-
thiques à caractères pictographiques, particulièrement les bâtonnets
d'ivoire, pourraient être des prières-demandes matérialisées. Peut-être
aussi, les soi-disants bâtons de commandement.
Nous répétons, en terminant, (]u'il serait facile de relever dans les civi-
lisations les plus diverses des survivances de prière matérialisée. Ainsi,
le cierge que l'on met — c'est l'expression consacrée^ — àNotre-Dame-des-
Victoires n'est qu'une matérialisation de la prière- qui équivaut h la
> 0. SoLBERG. — Archiv. fur Anthropologie, 1905, p. 48 et s.; résumé du D' L.\LOY,
L'Anlhropologie, i90li, p.7||-71"2.
- En parliculier par M. Salortnon Reinach, l'Art et la Magie, dans Cultes, Mgthes
et Religions, 1, p. l-2o-I3l el par notre collègue M. le D-^ Capilan.
» Voici le texte de la prière qui accompagne le dépôt d'un cierge el l'expression du
désir devant l'image de Notre-Dame-des-Victoircs. On remarquera la curieuse formule
de contrainte du début: « Souvenez- vous, ù très miséricordieuse Vierge Marie, que
l'on n'a jamais entendu dire qu'aucun de ceux qui ont eu recours à votre sainte pro-
pierre ou au rhiiïon ries Orionlaux. Par col exemple on saisira mieux
l'erreur dans huiuclle on lomlje t|uan(l on l'allaclie au jet de pierres lo
dépôt d'un objet sur la tombe d'un ^ainl musulman.
Discussion.
M. Ed. FounDRir.NiKR. — A propos des cierges de N.-D. des Victoires, il y
aurait peut-être lieu ici de rappeler que cet usage de brûler des cierges,
encore trè.-^ répandu, a conservé des souvenirs populaires permettant de
fixer une date assez précise sur son origine et son inlroduotion dans les
cérémonies du cuUe.
Ainsi, àArras, en .\rtois, il existe comme objet de vénération celui de
la Saintr-CliaïKlcIle. D'après la tradition ce serait un cierge miraculeuxqui
aurait été déposé dans la nuit du 2G mai 1105 aux pieds de l'autel de N.-U.
(le l'Aurore situé dans la Cathédrale. A celte époque une peste désolait la
n'-gion; c'est ;i la suite de prière publi(]ues pour conjurer celte calamilé
(ju'eurent lieu plusieurs miracles. Pour perpétuer leur .souvenir des pèle-
rinages furent établis, tels que : à Cambrai celui de N.-D. de Grâce ; à l.illc
celui deN.-l). de la Treille; à Valenciennes celui dcxN.-D. duSiint (^3rJon,
etc.... Tous ces faits se rapportent au xi" et xn« siècle.
N[ais pour l'u-sage des cierges il [> irait plutôt remonter aux premiers
siècles .lu christianisme et nous èlre venu de l'Orient.
Dins la célèbre mosquée de Cordoue, commencée en 786 par le calife
Abdérame sur l'emplacement d'une première église chrétienne du temps
desCîoths. précédée elle-même par un ancien temple à Janus, parmi le
nombre considérable de luminaires que l'on y employait, il y avait aussi
un cierge colossal en cire qui brûlait près de l'Iman. Celait un des nom-
breux emprunts des Arabes au culte chrétien d'Orient et d'Egypte par
imitation au cierge (fue l'on plaçait dans les églises primitives près du
•lubé, sans doute pour écliirer l'o'.ïiciant quand il lisait.
«>r, d'après les auteurs, ce fui à Bagdad, au temps du calife .\lmanzor>
que l'on commença ;i faire usage dans l'éclairage de la cire qui se substi-
tua à l'huile employée antérieurement.
Si d'après ces relations, l'usage des cierges dans les cérémonies du
culte remonterait en Orient au viiic siècle, cette innovation pourrait bien
avoir une origine touti^ occidentale et autrement loinlaine.
On sait qu'en ce qui concerne la cire, pour le moulage et la fonte de
pièces très délicates en bronze, puis aussi pour l'éclairage, déj.\ depuis
des temps fort reculi'^ les peuples Scandinaves n'en ignoraient aucun
secret.
Il est assez curieux de constater dans l'hisloire des peuples, commrnt
lecJionailëlè jamais abandonné. Remplie et animée d'une pareille confiancf, ô Mère
des mères, j'aocours et je viens à vous. Je me prosterne ù vos piodscl vous prie d'ixau-
cer ma prière. Sainte Vierge Marie, ayez pilié de moi ; Sainte Vi-.rgc Uu\>\ :^y ^ j"'''^'
de moi; sainte Vierge Marie, exaucez ma prière. »
220 3 MAI lono
des coutumes religieuses longtemps accréditées ont perdu maintenant
toute signilication et au contraire, comment des pratiques fort simples
ont pris une place considérable dans les croyances. Tels sont les cierges
matérialisant la prière et pouvant par leurs flammes faire obtenir des
grAccs particulières.
M. C. Lejeune. — La prière est essentiellement un acte intéressé, do ut
des, c'est un contrat qui se conclue par la prononciation de paroles ma-
giques qui obligent inéluctablement la divinité ou son émanation envers
celui qui a accompli les rites, gestes et récitation de formules.
Le dépôt d'un objet matériel dans l'endroit consacré au Genius loci me
paraît être l'équivalent de la signature d'un contrat, c'est lui qui constate
l'accomplissement du rite et qui doit rappelerà l'être divin qu'il se trouve
engagé vis-à-vis du postulant.
Ceci ne contredit en rien la théorie de noire collègue M. Dussaud, dont
la compétence nous est bien connue et dont nous suivons toujours avec
ntérêl et profit les substantielles conférences et les remarquables com-
munications.
MxM, ViNsoN, Atgier, IIkjuet, lîi.ocii et Manolviuer prennent également
la parole.
M. R. Duss.^uD. — Les observations présentées par nos savants collègues
constituent de précieuses confirmations des considérations que je viens
d'émettre devant vous et qui n"onl d'autre but que d'appeler l'attention
sur les pratiques, encore en usage, de prière matérialisée. A ma connais-
sance, cette notion n'avait pas été appliquée aux pratiques religieuses
de l'ancien monde et elle fournit l'explication cherchée des gestes supers-
titieux tels que le dépôt de pierres ou chiffons sur les tombes de saints.
Même dans le cas où le dépôt revête le caractère d'une offrande, l'idée
essentielle est la matérialisation de la prière. Sur ce point, je crois que
nous sommes tous d'accord.
Je n'aurai qu'une réserve à faire au sujet des ex-voto qu'on doit éviter
de confondre avec la prière-demande matérialisée, dans la plupart des
cas tout au moins car leur forme varie à l'infini. En général, l'ex-voto
sert à acquitter un vœu, c'est une action de grâces. J'écarterai aussi, parmi
les rapprochements qui ont été présentés, les fétiches en général, les
porte-bonheur, le buis bénit, car ils ne rentrent pas dans les termes exacts
du problème tel qu'il a été posé en débutant.
Je crois avec ftL Lejeune que la pierre déposée sert à prolonger la
prière; mais, précisément, cela exige que cotte pierre soit considérée comme
une matérialisation de la prière. De plus, on ne peut négliger le soin que
l'indigène apporte à assurer le contact de la pierre avec l'esprit di\in
matérialisé. On sait toutes les conséquences que les piimiiifs et le popu-
laire tirent du contact et toutes les précautions, toutes les interdictions
dont ils l'entourent. Dans le cas particulier qui nous occupe, c'est le
contact qui est efficace.
M. ItAllinl IN. — I N Nul VEAl' MONSTllE DKLIJLE VIVANT 221
8:^0" SFANXE. — Il mai lOflf..
Présidence hk .M. Z.jituuowsKi.
M. IIamv soxciiso «le no pouvoir iirr^idcr los séances «le la Sociolé jusqu'aux
vacances, élanl retenu loin «le Paris |nMidanl l'es i|iii'l(|nes mois.
OUVRAGES OFFERTS
y\. Maiu;kl liAiiMii i.\. — J ai I linum-iir d'otlrir à la Hililiolliriiuf de la Sofirti-
ilAnlbrupologie un travail que je viens de publier sous le litre : « Le (îelasi-
mus Tanyeri. rrustacë d' Andalousie, Mœurs et chasses, etc. (Kxtrail des A un.
des Sr. Xat..Zool , Paris, 1906. n" 1) ». — J'ai déjà eu l'occasion de parler des
faits que signalent ce mémoire ici même '; je crois donc de mon devoir d'olTrir
h la .Société mon travail dans toute son étendue. On y trouvera relatée une
coutume andalouse fort curieuse et des détails sur l'aulolomie et la régénéra-
tion des pinces d'un Crustacé. particulier îi ce pays.
M. Chervi.n. — Au nom de M""^ Soldi, mère de notre ancien collègue récemment
décédé, M. Chervin a l'honneur d'offrir à la Société une collection complète des
travaux fl'Emile Soldi publiés sous le titre général de la Langue sacrée sur les
origines de l'iiomme et <le la civilisation. Les volumes parus sont au nombre de
quatre, format grand in-S" :
1° Le mystère de la création, origine des religions. Un volume de 677 pages
avec 900 dessins réunis dans 400 figures.
2" L'origine de l'art. Un volume de 299 pages avec 230 figures.
3» Origine de l'écriture et de l'alphabet; évolution de la lettre S. Un volume
de 158 pages avec 136 figures.
4" Tableau général de l'origine de l'alphabet; évolution des lettres teth et
zaïn. Trois fascicules faisant 168 pages avec 187 figures.
Otte publication reste malheureusement inachevée. Mais Soldi laisse de nom-
breux manuscrits à peu près terminés et il faut espérer que les élèves qu'il avait
formés : MM. Hesson. Delifis. .lourd'liriiil. Le Poil. Viry et d'autres continueront
son œuvre.
Un nouveau Monstre double vivant. Le second Thoracoxiphopage
du Brésil.
•M. .Maucel Baudouin. — Au nom de mon ami, .M. le D'' Chapot-l'révost
(de Uio-de -Janeiro), j'ai l'honneur de pré.senler à la Société la photogra-
phie d'un nouveau monstre double, actuellement vivant au Brésil. Il
s'agit d'un second cas de 27torrtfat//>//o/)a7iV, observe par ce chirurgien,
qui a déjà été cité par lui dans un journal local *.
Ce cas me parait être tout ii fait superposible à celui qu'a iléjà opéré
' Bull. Soc. d'Anthrop.. Paris, 1905, n* 5, p. 551.
* Chapot Prévost. — .Voco leralojiaf/o Oraci/eiro ciro. Brazil .Med., Rio de-
Jaiieiro, m'a, XIX, iicli.
222 17 MM mOfi
M. (Ihapot-l'révosf, R,osalina-M;iri;i '. Il est acluellement ùgé d'un an et
demi. La radioscopie a prouve (jne les foies sont largement unis, et
qu'il y a inversion des cortirs : ce qui était ;i prévoir, car cette inversion du
cœur me pai-ait tout à fait caractéristique de la thoracopagie.
Je ne peux pas donner de plus amples détails sur ce fait, pour ne pas
déllorer les recherches en cours de M. Chapot-Prévost; mais j'ai tenu à
vous faire part de l'existence de ce monstre, qui sera aussi opéré un jour
et je l'espère avec un double succès.
Séparation chirurgicale des deux sujets composant le monstre double
Pygopage Rosa-Josepha Blazek.
M. Marcel Iîaudouin. — Je viens d'app.endre par un journal étranger
{The Sh'tclt, 1906, 17 janvier) que le pygopage Hosa-Josepha H'azek vient
d'èlre opéré avec succès par M. le I)'' Kukula, aux Etats-Unis.
N'ayant pas de détails sur celte opération sensationnelle, je ne puis
insister; el je me borne à vous signaler que j'ai été le premier en France
à décrire ce sujet en 1801 et que j'ai déjà traité la question de Vopéra-
bilite de ce monstre dans deux publications assez considérables, auxquelles
je renvoie '. La seconde -^ surtout est à consulter.
Je profile de la circonstance pour vous présenter des photorjrapliies à dif-
férents âges de Rosa-Josepha Blazek, photographies qui serviront à illus-
trer un travail que je prépare sur la Croissance des monstres doubles. Ce
pygopage. je le rappelle, est né le 20 janvier 1878.
M. CiFERvix offre à la Société pour son musée trois léles momifiées pro-
venant des fouilles faites en 1905 par M. Gayet a Antinoë (Egypte). Dans
le cas où il paraîtrait utile à la Société, pour faciliter les éludes de trans-
former ces tètes momifiées en crânes secs, M. Chervin donne, d'avance,
sa pleine autorisation à cette opération.
Discussion
M. Zaborow.>ki. — ^'ous n'avez sans doute pas oublié, Messieurs, que
sur les propositions et l'intervention de notre collègue dévoué, M. Four-
drignier, une partie des collections exposées par M. Gayet au Petit Palais
des Champs-Elysées au nom de la Société des fouilles archéologiques dont
' Chapot-Prévost. — Chirurgie des Tératopages. Paris, I B. S., 1!>)l, iii-8*.
* Marcel Baudouin. — Les Monstres doubles opérables. Revue scient if., Paris,
<893 t. I, 73 78, 3 lig.
3 Marcel Baudouin. — Les Monstres doubles autoritaires opérés et opérables.
Revue de Chirurgie, 190i, mai, XXV, p. 513-577, 16 ligures.
K.-r. irvMY. — ICilNtiCIlAl'IlIK .MKH.ITtoNl.sTF ■2-2'A
notre ancien collègue défunt Sokli l'tail le secrétaire général, a été otTerte à
notre Société. Je nie suis rendu au Petit Palais et j'y ai fait choix pour
notre musée de momies conservées intégralement. Elles y sont exposées,
l^n outre de ces pièces de choix, M. (îayet nous a adressé des caisses
contenant des débris de toutes sortes, quelques cr.\nes et autres os, des
lambeaux de vêtements.
M. Manouvrier a récolté' poui- son laboratoire, la plupart des pièces
osseuses. I>a plupart des autres débris n'étaient pas conservables ou ne
méritaient pas d'être conservés. On est souvent frappé en observant toutes
ct'S relii|ues du modernisme de traits, de mœurs et de la plupart des vélo-
nii'nls des habitants irAntiiioi"-. .Ainsi voilà un cràn(^ C(jill'('' d'un bonnet
de (li'ap rouge ra|i|»L'iant la coilliiic de nos /.oiiavi's, (jiii est la véritable
CÀi'chia actuelle avec cordons de couleur faisant le tour de la tète. Les
chaussures (Haient bien conservées. Et elles ne dillèrenl pas des nôtres.
\oici un pied portant encore un chausson de laine.
Ce modernisme dans le vêlement, la toilette, l'allure, est pres(|ue une
caracléristiipie dans les villes égyptiennes où a fleuri la civilisation
greco-romaine.
Antinoë, d'ailleurs, fondée par Adrien, empereur romain de M7 à 1.38
après Jésus Christ, sur Tancienne ville de Besa, en mémoire de son favori
Antinous qui s'était noyé dans le Nil (130), n'est pas, pour l'ensemble,
sensiblement antérieure à la première phase de l'époque byzantine. On a
trouvé dans ses ruines un papyrus rédigé en l'an 453.
827« SÉANCE. — 7 Juin lOOfi.
l'itKSIDENCE MV. M. ZaBOUOWSKI.
Election. — M. le I)"- SI-.Mauti.\. présenté par MM. Aiillionv. Aliiier. Manon-
Mi' r csl clii ini'inbre tilulaire.
Nécrologie. — Edoiahd I'iktti:. membre (ilulairp (le|iuis 1S7().
(Une nulirt' hiograpliiciuo paraîtra dans la prochaine séance rédigée parnoire
vice-présiiienl M. Zaborowski sur cet éminent archéologue.)
ICONOGRAPHIE ABOLITIONISTE
Présentation par iM. E. T. IIa.my.
J'ai décrit rapidement, en passant, dans 1/1 ?i</jrofo/o(/ie de 1895 (p. 544)
le sceau modelé par Hackwood pour la Société pour l'abolition de la traite et
(le l'esclavage à la demande de Josiah Wedgwood (1787). On sait que celle
figure représente un nègre, le genou droit en terre, levant au ciel ses
bras chargés de chaînes avec la devise :
f>2t 7 jriN 1000
AM I NOTK A M AN A M) A ItltOTHEK?
Elle a éli^ propagée sous les formes les plus diverses par les abolilionisles
anglais; l'historien de W'edgwood, Eliza Meteyard, nous apprend nola-n-
nient que le célèbre céramiste en a fait faire un bois pour servir de
fronlispioe à l'une des brochures de Clarkson. Or, ce bois a passé la
Manche el est devenu la vignette qu'on voit en Icte de plusieurs des bro-
chures de la Société des Amis des Noirs de l'aris, avec la légende francisée :
NE SUIS-JE PAS TON FRÈRE?
On trouve, par exemple, cette adaptation du dessin de Ilackwood dans
letitredes publicalionssuivantes,que j'airéussiàme procurer, bien qu'elles
soient devenues très rares et que je présente à la Société : Adresse à l'Assem-
blée Nationale pour l'Abolition de la Traite des Noirs par la Société des Amis
des Noirs de Paris. Février 1790. Paris, Potier de Lille, br. in-S** de 22 p.
— Discours sur la Traite des Noirs par M. Petion de Villeneuve, Membre
de l'Assemblée Nationale^ Paris, Desanne, etc. Avril 1790, br. in-8° de 80 p.
— M. Lamiral réfuté par lui-mêmejOu Réponse aux opinions de cet auteur, elc^
par un ami des Blancs et des Noirs. Paris, Potier de Lille, 4790, br. in-S^
de 80 pages...
Cependant la manufacture de Wegdvvood exécutait des plaquettes et
des camées ?i relief noir sur fond clair reproduisant le nègre agenouillé,
qui devenait bientôt la figure centrale d'un token de 29 mm , qui porte à
l'avers la composition de Hackwood et sa légende et au revers deux mains
serrées avec cette invocation :
MAY SLAVERY ET OPPRESSION CEÂSE THROUGHOUT THE WORLD '.
Le petit esclave enchaîné devint aussi cachet, anneau, épingle, bouton
de chemise, bouton d'habit, etc., etc., et c'est sous cette dernière forme que
mon ami M. Blanchet, le numismaste bien connu, me l'a tout dernièrement
offert. C'est un large bouton de cuivre, tout à fait plat, de 35 mm. de
diamètre, qui porte encore des traces de dorure dans les contours du per-
sonnage central et des lettres de l'exergue; il reproduit la douloureuse
exclamation du pauvre captif. A7n 1 note a man and a brother?
Je rappelerai en terminant cette courte note que l'image symbolique
créée par Hackwood a aussi franchi l'Atlantique, mais toutefois en chan-
geant de sexe. Vattemare nous a fait connaître, en effet, une médaille fort
rare, frappée aux Etats-Unis, où se voit une petite négresse. Le genou droit
en terre, les bras levés couverts de chaînes, elle prononce ces paroles :
AM I NOTE A woMAN AND A siSTER? Nc suis-je pas Une femme et une sœur. On
trouvera un exemplaire de cette pièce au Cabinet des Médailles de la Biblio-
thèque Nationale. {Coll. Vattemare, n" 89).
• .M. Ilamy montre un exemple de ce token. .Je n'ai pas encore réussi, ajoule-t-i!, à
me procurer le /oA'e/j plus grand (33™™) qui porte au revers l'inscriplion : whatsoever
\E WOUI-D THAT MEN SHOULD DO TO YOU, DO YE EVEN 80 TO ÏHEM.
ATr.IEIl. — I-nKSENTATION DE KRAr.MENTs DE POTEHIR T.At UHSK
i':2;>
PRESENTATION DE FRAGMENTS DE POTERIE GAULOISE
l'\U M. AïiilKll.
Je présente à la sociëlé deux échantillons de poterie gauloise, antérieure
à répoi|ue gallu-roniaine :
l-^ FragmtMils Aun vase uni en Icnc nuir«' argileuse au nouibrt' de
(|uatit', se rapportant au même vase et offrant les particularités suivantes :
— Cassure absolument noire comme du charbon.
— Paroi interne présentant une surface unie, offrant un semblant de
vernissage et des stries circulaires furnianl un léger relief tout autour du
vase.
— Paroi externe mate, présentant des stries circulaires régulières légè-
rement en creux, ne correspondant pas avec les stries en relief de l'extérieur,
montrant néanmoins que la poterie est faite au tour.
Ces fragments ont été trouvés dans une tranchée faite dans les sables
calcaires du département de la Vienne à Lancloître.
2° Fragments d'un vase en terre noire argileuse au nombre de deux,
se rapportant tous deux à un même vase et oiïiaut les [)articulaiit('s
suivantes :
— Cassure absolument noire comme du charbon.
— Surface interne unie, presque vernissée, offrant également des stries
circulaires, formant un très léger relief et se continuant tout le tour du
vase.
— Surface externe présentant des signes plus nets d'industrie quoique
rudimenlaire encore. Des lignes creuses formant des cercles réguliers et
superposés au nombre de 3 tout autour du vase montrant que la poterie
a dû être fabriquée au tour.
Deux petits mamelons formant relief semblent avoir dû servir d'anses
rudimentaires mais suffisant |)our éviter la brùlui'e des mains en retirant
I'' vase du feu.
Ces fragments ont été trouvés par moi-même dans une tranchée faite
dans le sol crayeux en Normandie aux environs de Gaillon.
soc. D'ANTUnOP. lOOli.
16
•2-2i) 1 JiiN l'""'
Discussion.
M. iiK MuKTiLLET fait (iiii'li|iii's lemaïques siii- la présentation de
M Algicr.
M. (>. Vaivillk. — Les poteries gauloises de l'op|ii(inni de Pommiers
(Noviodunum des Suessionsj ont été failes à l'aide du tour. Les nombreuses
poteries que j'ai présentées à la Société, dans la séance du lo mars 1894',
en sont une preuve certaine.
A. DE MoRTiLLET parle des poteries gauloises marniennes qui ont été
faites à la main.
U. V-i^uviLLÉ. — Je suis d'accord avec M. A de Morliliet, les poteries des
sépultures dites marniennes, comme celles que j'ai présentées à la Société
dans la séance du 19 décembre 1893-, venant d'une fouille faite sur
Mercin, à la distance d'environ 2.200 mètres de l'oppidum de Pommiers,
ont été faites à la main.
Au contraire toutes les poteries usuelles de l'enceinte de Pommiers ont
été faites avec le tour, dans la dernière époque gauloise se rapprocliant
de la conquête romaine.
Cependant l'oppidum de Pommiers a pu être occupé longtemps avant,
car, vers 1840, le nommé Denis Ilenriquet a découvert, en extrayant des
pierres, vers l'est de la lettre N du plan de l'enceinte produit dans les
bulletins de la Société, vol. 1894, page 268, une sépulture humaine sur
char, dont on a retrouvé ies fragments de roues.
RECHERCHES ANTHROPOLOGIQUES SUR LA CROISSANCE DES ÉLÈVES DE L'ÉCOLE
militaire de s. a. r. le prince de bulgarie, a sofia
Par le D"" N. Kirkoff.
Ancien Médecin en chef de l'École Mililaii'e.
Résumé par l'auteur de son article publié dans VOulchilichten Pregled, 1905,
présenté par M. J. Deniker.
Pendant trois ans de service à l'Ecole Militaire de Sofia, nous nous
sommes trouvé en bonnes conditions pour entreprendre des recherches
anthropométriques sur la croissance des élèves. Comme médecin de la
dite école il a été de notre devoir non seulement de préserver la santé des
élèves par tous les moyens hygiéniques in usage, mais en plus, de suivre
de près leur développement physi(jue. Dans ce but, il était nécessaire
d'avoir des mesures anthropométriques, comme bise pour l'apprécia-
» Bull, de la Société, v. 1894, p. 281.
* Bull, de la Société, v. 189."), p. 7i0.
\. KIKKoll'. — > IIECHEHCIIKS AMIlUol'OMKTRiyUES
227
liuiidu iléveloppemenl dos sujets oxamiin's. Des recherches de cet ordre
n'avaient pas été encore faites en lîulgarie sur des sujets de 1 1 à 20 ans, et
les données (juc nous avons pu trouver dans la littérature étrangère ne
pouvaient être utilisée-! telles quelles à cause de difTérence de race et des
particularités des conditions du milieu. Nous avons doncentrcpiisd'étahlir
ces données par nos recherches personnelles. .\ous avons pu mesurer
les mêmes élèves régulièrement tout les trois mois pendant une période
de trois ans; les mesures que nous avons obtenues pour les diiïérents
Ages représentent donc la marche générale de la croissance h laquelle
pourra être com[)arée très exactement la croissance individuelle d'une
antK'c à l'auln', comme l'a bien dit M. le j)rofesseur Manouvrier.
Munis (le l'autorisation bienveillante du chef de l'Ecole, le Général
SavolV, nous avons commencé les mensurations périoiliques des élèves en
août l'JOO. En trois années consécutives nous avons pu faire en tout
4.874 séries de mensurations, dont nous donnons les résultats dans le
tableau suivant.
AGE
DES ÉLÈVES
mosur-'s
annuel
annuel
11 a 12 ans.
.Xccroisscnicnt
12 ;'i 13 ans .
Aceroissenienl
13 à 14 ans .
.Vf-rmissi'iiii'iil
14 à 15 ans .
Arcroissonn^il
15 à 16 ans .
A(( r(»isspni('nt
10 à 17 ans .
.\c< roisscniiMit
17 à 18 ans .
Accroissement
18 à 10 ans.
AieroisscnienI
V.) à 20 ans .
Total...
annuel
annuel
annuel
annuel
annuel
annuel
i)2
315
791
995
915
7G6
621
294
8.-)
Ëa milliinèlrcs
4874
1378
42
14-20
.-a
1474
67
1541
oi'i
1596
45
1641
56
1677
26
1703
13
1715
642
.36'
67S
r>4
712
S.-)
700
2S
793
.7/
824
26
850
2.7
87:5
12
885
726
56
7<;2
2/
78:'!
.77
820
5')
853
22
87:
n
892
/.)
905
7
912
307
54
341
26'
363
57
424
6o
m)
41
rm
-,8
571
.12
606
26
m2
1400
200
1600
200
1800
ÔOO
2100
400
2500
500
2800
500
3100
.500
3'i(H)
.700
3700
FORCE
musculaire
(le la
maÏD droite
en kilos
18
2
20
4
24
6
29.5
5
35
5
40
3
43
.5
'i5.7
48.5
28
6
34
7
41
//
51.9
7
59
9
67.5
6
74^
7
81
5
80.2
MESURES
de la tête
en millimètres
Diamètres
'ëô
o
1
'3
u
o
C
<e
170
2?3
02
04
172
227
0.1
0/
175
228
03
03
180
233
02
0.7
182
236
00
02
182
236
02
0.5
184
24!
Oi
02
185
243
145
05
148
02
150
00
150
00
150
02
152
00
152
01
153
Voici les conditions dans lesquelles ces mensurations ont été prises :
Chaque année il entre h l'école 150 à 200 élèves, suivant le nombre de
places déclarées vacantes par le ministère de la guerre. Les candidats doi-
■2-2H
7 JlIN llHKl
vi'iil avoir |-J à IH ans et il(Mni; sonl ailinisaii concoiirs seuls les candidats
donl l'aptitude pli^sit|U('. a été conslatée apivs un examen im-dical minu-
tieux. Après leur admission i\ l'école, (tn eonsliliiail une liche indivi-
duelle |M»ur cliacpn; élève; celte (iclie portail les indications suivantes :
l'Age de l'élève, les dates aux(piellcs il a été mesuré, et les mensurations
faites cliaijue fois, i.es moyennes du tableau ont été obtenues de la
manière suivante: les chllfres indiquant les diirérenles mesures ont été
extraits des fiches et classés selon les Ages auxquels ils corres|)ondaient ;
le total de chaipie m(isui"e a été divisé par le noniltrc di-s individus
mesurés.
Nous n'avions pas l'intention de publier les résultats de nos recher-
ches avant d'avoir poursuivi la croissance des élèves pendant une période
de 5 années au moins; mais à noire grand regret, ayant été nommé h un
autre poste, il nous a été impossible de réaliser ce projet. Nous publions
donc les résultats de nos observations de trois années seulement, dans
l'espoir que quelqu'autre chercheur pourra les compléter.
Les chiffres du tableau de nos mesures montrent que la taille, la cir-
conférence thoracique, le membre inférieur et le poids du corps subis-
sent des variations assez notables dans leur accroissement d'un âge à
l'autre, et que le maximum de cet accroissement, pour presque toutes les
mesures, se trouve a l'Age de 14 à 15 ans, c'est-à-dire à l'époque qui
précède immédiatement la puberté.
I. — La comparaison de nos mensurations avec celles que l'on connaît
chez d'autres populations nous donnent les résultats suivants :
ACCROISSEMENT _ AGE
(le la taillo en millim. chez los élèves i'ii\ 14-15 15J6 16-17 Total Moyenne
Belges (Quételet) 58 60 51 40 = 209/4 r= 32
Russes (Dik) 48 64 57 24 = 193/4 = 48
Allemands (Ketelmann) 57 54 74 53 — 238/4 = 59
Anglais d'Oxfoi-d (Maklaren) . 68 57 51 50 = 226/4 z= 56
Anglais (lioherts) 51 56 67 39 r= 213/4 = 53
Ilaii.Mis (l'agliani) 25 86 26 02 = 139/4 = .55
Franrais (Oodin) 46 57 46 35 = 184/4 = 46
Bulgares (Kiik. .11) 51 67 55 45 — 221/4 = 55
AGE
TTÎS^TS^ Total Moyenne
Belges (Uuételet) 10 15 =: 234/6 = 39
Allemands (Kelclniann) 15 15 — 238/6 = 39.6
Anglais (Boheris) 19 18 — 250/6 =: 41 .6
llaiiens (l'agliani) 29 17 — 185/5 := ■ 31
Bulgares (Kirkoir) 36 20 = 283/6 = 47
Pour la période de 13 à 17 ans l'accroissement de la taille des élèves
bulgares est inférieur à celui des Anglais d'Oxford et des Allemands, mais
il est supéi-ieur à celui des Italiens, des Français, des Russes et des
N. KIllKiil-l'. — UECIIEUCIIKS ANTIIItnl'iiMI. lltlnlK- 229
Belges et des autres An^iais. D-inslcs années suivantes (17-11>), l'accrois-
sement tle la taille des ('li'vos ludgaies surpasse l'accroissement des autres
nations (Belges, Allemands, Anglais, Italiens), prises comme terme de
comparaison.
Les observations des auteurs ont établi ([ue la taille et le périmètre
lhoracii|m' enVcliK'tit leur ai-i-roisscMuonl niaxiuuiin |)i'ndant la [)ériode
i|)ii pri'i-.Mlt' iiniu<''(li;iiciii('iil la pul)iMl<'', <'t coiilinuciit h croître, mais
moins vite, au cniirs de la [lubrrl"', lauijis que le poiils i-éalise son princi-
pal accroissi'ment au moment de la [(ubfMté et que cette augmentation
durr aillant (|tir la péiituln de puberté elle-même (D' P. Godin '). L'accrois-
sement principal de la taille des élèves bulgares s'est ed'ectué de L3 h
ii ans ainsi ([ue celui du périmètre tlioracitiue; tandis que l'accroissement
du poids a pris son maximum dans l'année suivante. Les résultats que
nous avons obtenus pour les Bulgares ne font donc pas exception à la
règle générale.
MM. Carlier et (Jodin ont trouvé que Taccroissemant de la taille à 15 ans
est supérieur de il millimètres de l'accroissement réalisé à 14 et àlGans;
pour les mêmes années nos résultats ont donné 13 et 12 millimètres.
Il, — ia circonférence Ikoracique. — Nous avons pris la circonférence
Ihoracique au niveau des mammelles en avant, et sous les angles spinaux
des omoplates en arrière, après expiration ordinaire, les bras étant
abaissés sur les cotés du tronc.
L'accroissement annuel du périmètre tboraciiiue de nos élèves aug-
mente de 13 à 13 ans, puis diminue jusqu'à 20 ans, assez régulière-
ment (Voy. le tableau). L'accroissement ressort à 30.3 m/m en moyenne
par année.
La comparaison avec les autres peuples conduit aux résultats suivants :
[i 15 It) 17 Total Moyoïmo
Belges (Qiiétdot) 22
Busses (i)ik) 20
AlIcMiarids (Ketelinanri) 39
Anglais (Maklarcn) 20
— (Bùhei-ts) 4.S
Français (l'. (Jufiin^ 38
Bulgares (Kirkoll'i 34
Bfl-i'S (Uiirlclcl)
Allemands (Ivclolin.iiin)
Anglais (Bubcrls)
Bulgares (KirkolT)
22
24
28
zr
9(5 : 4 =: 24
42
42
23
■zz.
133 : 4 = .7.5
42
32
.'57
rr:
150 : 4 = 37
(12
74
.fl
—
13G : 4 = .74
3!)
37
41
=
105 : 4 = 41
38
3S)
23
z=.
138 : 4 m 34
53
28
31
=:
140 : 4 =: ,7C
AGIi
18
V.»
Total Moyenne
2t
21
■= 138 :
G =r 23
l.'j
10
= 1
75 :
G — 29
32
18
= 2
1.5 :
0 = 36
20
23
= 195 :
0 = 32
* P. GoniN. — n''cherr/iesan/hropomélri'/ues sur fa croissance. Paris (Maloinf>\
1903, 212 p.
-2'M) 7 ji IN lULlC»
La moyenne de l'accroisseinenl |miiii- la j)i''i'ioil(' dr 14 à I!) ans nionlre
que cliez les ('lèves l»uli,Mi"es, la puiliine se dévrloppi' plus faililenient ([ue
chez les Anglais, mais pluh forlemenl que chez les Allemands el les Helges.
Jusqu'à 17 ans, le développement de leur périmrde llioiacniue n'est
dé|)assé que chez les Anglais et les Allemands.
III. — Pour la mensuration des membres inférieurs, nous avons pris la
longueur de l'épine iliaque antérieure et supérieure et la pointe de la
malléole externe. L'accroissement annuel moyen est de 23 m/m.
Le memhie inférieur effectue son accroissement maximum de 14 à
15 ans et de 12 à 13 ans; à partir de la 16« année, son accroissement
diminue progressivement. M. le D"" Godin a trouvé dans ces recherches
sur les Français que l'accroissement annuel moyen est 27.2 m/m; pour
ces mêmes périodes (14 à 17 ans;, nos mesures ont donné une moyenne
annuelle d'accroissement de 28.2 m/m. L'accroissement de nos élèves
pour les 4 premières années (13 à 16 ans) est de 127 m/m. ; tandis qu'il
est de 59 m m. seulement pour les 4 dernières années (17 à 20 ansj.
De la comparaison de cet accroissement du membre inférieur pendant
les deux périodes, il ressort que l'augmentation générale de la taille est
due à l'accroissement du membre inférieur jusqu'à lu 15' année, et qu'à
partir de celle année l'augmentation de la taille est due plutôt à rallon-
gement du tronc.
IV. — Le poids du corps a été reconnu comme un élément de grande
valeur pour apprécier la force physique des sujets; dans beaucoup de
pays, il a été adopté par les médecins des conseils de révision comme cri-
térium de l'aptitude dos conscrits au service militaire. Le rapport du poids
à la décimali^ de la taille sert d'index du développement physique et de la
force des consciùls.
Plus le chitTre du poids (en kilos) se rapproche de celui des décimales
de la taille, plus robuste est le sujet; le résultat est encore plus favorable
si le chitïre du poids dépasse celui des décimales de la taille, exception
faite des gens obèses (Dr E Tartière '). Nos recherches sur les élèves dans
ce sens ont montré que le cliiiïrc du poids était inférieur à celui de la
décimale de la tail'e de 7 h 12 unités; vers la 20'' année, la diiïérence était
de 8 unités.
Le principal accroissement du poids de corps s'effectue pendant les
15«, 14", et Ifie années; pendant les années suivantes, il diminue progres-
sivement.
L'accroissement total pour les 8 années est de 32.5 kilos, par consé-
quent 4 kilos 00, en moyenne, par année.
En comparant cet accroissement du poids avec ceux (jui ont été donnés
pour les autres nations, nous trouvons :
• D' E. Tartikue. — De l'aptitude des conscrits au sercice militaire dèti-i-minèe
par la relation de la taille et du poids des homjties: Caducée (lOOi), n* 15.
N. KIHKiilK. — UKi:ilEUi;ilK-« AN lllltn|'i)MKTIUnUKS 'l'M
ACE
POIDS EN KILOS "TT "io ^ It) \^ IH Total Moyen
B.'lîi.>s ((Jtu'ï^l.'l) J.l l.t) (i.O 3.2 5.0 = 23.5:5=4.7
Alleinan.ls (Kftclmaim]. 4.'.) 4.7 3.4 8.0 0 =21.0:5 = 4.2
Italiens (l'.ii;liaiii) 1.3 G. 3 2.4 1.3 1.5 = 12.8:5 = 2.5
Fianrais ((io.liii) 3.8 4.8 6.2 4.(3 =19.4:4 = 4.8
HuigaiTs (.Kirkoll) 2.0 5.7 0.5 4.7 3.8 = 23.3:5=4.7
V. — pniii' inesiitvr la force musciilaiii', nous nous sommes servi du
dynaniomèlre de CuUin et nous avons mis ;i l'épreuve les sujets à la pres-
sion et à la traction avec la main droite.
Le maximum de l'accroissement de la force musculaire se manifeste
entre la i4° et la 15" année. M. le D"" Ouetelet a donné pour les Belges en
moyenne 4.4 d'accroissement par année, tandis que nous avons trouvé
pour les élf''ves bulgares en moyenne 4.7, pour les 5 premières années
(de 13 à 17 L
VI. — Pour la mensuration de la tête, nous nous sommes servi du compas
de Broca; dans le tableau général, nous donnons les mesures de trois
(liamMres : fronlo-occipital, menlo-occipital et bi-pariétal. De ces trois
diamèlres, le mento-occii)ital a subi le principal accroissement d'une
année à l'autre, tandis que les deux autres se sont agrandis très peu. Le
diamètre fronlo-occipital, dans la période de 12 à 20 ans accuse un accrois-
sement total de lo m/m.; pour menlo-ocoipital, cet accroissement a été
2 m/m. et pour le bi-pariétal 8 m/m. seulement. Ceci montre que la tète
a di"» effectuer son accroissement principal avant l'âge de 12 ans.
Nous pensons (pie les résullals. au^piels nous ont conduit nos recher-
ches sur les élèves sont probablement bien près des rapports réels et sont
une image assez (idèle du développement des adolescents Bulgares, parce
(pie les mesures, les accroissements respectifs que nous avons obtenus
sont déduits de mensurations régulières faites sur les mêmes individus, qui
ont pas«é conséculivement d'un Age à l'autre pendant la période de nos
observations. Celte dernière condition est d'une haute importance pour
la valeur des données anthropométriques, comme il a été bien établi par
le professeur .Manouvrier : « Si l'on étudie, dit-il, la marche de la crois-
sance individuelle sur 100 sujets, dont chacun sera mesuré régulièrement
chaque année ou tous les six mois depuis sa nais.sancc jusipi'à dix ans,
ou de dix ans cà vingt ans, on connaîlra les cent croissances particulières
dont la moyenne générale représentera la marche moyenne de la crois-
sance. A celle ci pourra être comparée très exactement la croissance de
chaque individu, et la série totale pourra être soumise aux divers pro-
cédés d'investigation (pie comporte la méthode des moyennes indépen-
damment de l'examen des cas iii<liviiliiels. »
Discussion.
M. Demkeh. —Il existe, comme vous le savez bien, deux procédas pour
2n:i 7 jiiN l'.lO(î
étudier la croissance des oiifanls. I^c jircinier consiste à mesurer en une
seule fois des sujets il'î\;^e dilTérenls cl coui|)arer ensuite les mesures d'un
i\gG h l'autre; le deuxième procédé comporte les mensurations des mêmes
individus suivis pendant plusieurs années.
Jus(]u'à ces derniers temps, priîsque tous les travaux sur la croissance
ont été faits d'après la première méthode, beaucoup plus facile et expédi-
tive que la seconde. A part des mesures de petites séries par Quetelet,
DiilTuei-, Carlier el Landsbcrger, il n'existait aucun travail de ce genre
jusqu'à la i)uljlicalion du mémoire du 13'" (îodin, auquel notre Société a
décerné le prix Broca, il y a trois ans.
Le travail du D"" Kirlcoff est comparable à celui de notre lauréat. Comme
lui, il a pris les enfants d'une école militaii-e, venus de tous les points
du pays et soumis à leur entrée à une sélection assez semblable;
et si le nombre de mesures est moindre chez le D"" Kirkoff que chez
le D"" Godin, le nombre de sujets est plus grand et ils ont été suivis
jusqu'à un Age plus avancé. Quant à la classe sociale dont proviennent
les sujets, malgré les différences locales, on peut dire que ce sont des
classes plutôt aisées dans les deux cas, et comme le régime alimentaire
et en général le genre de vie sont à peu près égaux dans les deux cas, on
arrive à peu près aux mêmes résultats.
Ainsi, les élèves de 17 ans ont, dans les deux cas, déjà presque la taille
des sujets adultes, telle qu'elle ressort des mesures sur les conscrits de
^0 h 21 ans en France ou des soldats de 21 à 24 ans en Bulgarie *. Notons
aussi que les mesures ont été prises d'après la même méthode.
Toutefois^ il faut rappeler que M. Kirkofï n'a pas suivi tout à fait le
même système que M. Godin : il n'a poursuivi les mesures sur les mêmes
élèves que pendant quatre ans et a confondu dans ses séries par âge, ces
élèves avec ceux qui n'ont été mesurés que pendant trois, deux et une
seule année.
Mais si la comparaison des mesures de M. Kirkofï avec celles de M. Godin
est tout à fait légitime et profitable, on ne peut pas en dire autant pour la
comparaison avec les résultats des autres chercheurs que cite le savant
docteur bulgare.
Ainsi, les Italiens de Pagliani, étaient des pensionnaires d'une colonie
agricole pour les enfants très pauvres, el ceux qu'avait mesurés lloberts
en Angleterre provenaient en grande partie aussi des écoles primaires où
sont les enfants des classes sociales plutôt pauvres qu'aisées. Seuls, les
Allemands de Kctelmann se rapprochent, au point de vue des conditions
sociales, des cadets de M. Kirkoff. Ce sont, en effet, les élèves du Johan-
neum de Hambourg, sorte de lycée où sont les enfants de la bourgeoisie
de cette ville libre. Je ne connais pas les conditions sociales des enfants
* Taille des « cadets » de M. Kirkoff de 17 à 20 ans : 1 m. 715 ; celle des soldats bul-
gares : 1 m. G65. (Voy. Wateff, Bull. Soc. Aulhrnpol., 1004, p. 4"J7) ; taille des « en-
faols de troupe » do M. Godin à 17 ans et demi : 1 m. U3ij ; taille moyenne des cons-
crits français : 1 m. 640.
I,. I.Al'IC.urK. — I.KS NKlillKS l)'\>IK KT I. A IIACK NWillK KN C.KNKItAI, iîl53
qu'uni iiK'sini'S l)ik ri Malclaii'ii ; iiu.iiil h niiclclcl, on sail iju'il (.Iniisissait
SCS sujels.
D'ailleurs, la liste tles aulcuis (|iii (lal mesiiii'^ les eiifaiils n'rsl pas
épuisée avec ces cilaliuiis : il y a pins de viii,i,'l aulri's oiivfages donl il
faudrait coiii[tar(M' soii^Mieuseuieiil les données |)uuf arriver à des rompa-
raisons ayant une portée au p(»int de vue etimiipu'.
Oiioi ipi'd en soil, II' travail di- .M. KirUoiï est uni' cuMlriludion di' pre-
mier ordre dans ce ^cnri' iliHudes et surtuid ilans la série des ohserva-
tions, ti'op peu nondinnises encore, laites sur les mêmes sujets pendant
phrsieiirs années de suite. A ec litre, il mérite toute noire atti.'Mlion.
M. I'ai'ili.ai i;r exprime le regret qm? M. KiriiolV n'ait [»as suivi 1 i
morne technique (pi'eii France dans ses mensuiMtions. Il ajoul(! (ju'il serait
désirable de porter mainlenant l'investigation sur des mensurations plus
particulières que eell<'s (jui ont été employées. Il est entendu ([u'à l'époque
de la puberté, la taille augmente d'une façon considérable, «lue la face
augmente plus que le crâne cérébral, etc. Ces résultats ont été trouvés
aussi bien chez les nègres que chez les blancs; c'est vers des faits nouveaux
que des chercheurs dévoués à la science comme M. KirkolT devraient
tourner leurs investigations.
M. Sm'khe fait une communication sur la troisième molaire du gorille.
(Manuscrit non remis).
LES NÈGRES D'AStE ET LA RACE NÈGRE EN GÉNÉRAL >.
P.\n M. INOUÏS L.\picQUE
Maître de Conférences à la Sorbonnc.
Mesdames, Messieurs,
La Société d'Anthropologie m'ayant fait l'honneur de me charger cette
année de la Conférence Broca, j'ai eu l'audace, dont je dois m'excuser
tout d'abord, de prendre un sujet très vaste et plein de pierres d'achop-
pement.
Je vais être amené à formuler des opinions contraires aux idées cou-
rantes. De cela, je ne songerais pas à m'excuser dans ce milieu de libre
criti(iue. Mais voici ce qui est grave : dans le cours de cette Conférence,
en une heure, je n'aurai pas le temps de confronter mes allirmations
avec les affirmations contraires, de signaler et de discuter les objections.
Je suis oblige de m'en tenir presque à l'exposé unilatéral d'une thèse per-
• Cunfvrencc annuelle Bvnca, faite h la Société d'Antliropologic do Paris, le 8 mars
1906, avec projections.
'2M 7 ji IN 1 !»()()
sonnelle. Je vous prie de n'y voir aucun parti-pris sommaire; il y a
douze ans que j'ai commencé, sur le terrain, l'élude de ces questions, et
c'est peu i\ peu, par la pousséi; des faits, que j'ai été amené au point de
vue (pi"' jt' Viiis vous suUMicltrt'.
(Jii't'st-if qu'un Nèijre? — Posons la notion du nèfjip dans le sens de la
langue courante, du nègre tel qu'il existe dans notre imagination avant
toute analyse scientifique.
AVr/o', c'pst le mot latin Nii/cr: cela veut dire )wi)\ L'appellation est
donc tirée d'un premier caractère, en efîet très frappant : la couleur de la
peau. Mais en histoire naturelle, il ne faut pas attribuer un trop grand
crédit à la coloration. Ne nimis crede colori, disait le fondateur de notre
classification des êtres vivants.
Il y a en effet des hommes qui sont noirs, ft (pii. de prime abord, se
distinguent des Nègres; par exemple, les habitants du Sud de l'Inde,
que nous aurons tout à l'heure à examiner. Dans l'impression intuitive
que nous essayons de préciser en ce moment, il entre assurément autre
chose que la nuance foncée de la peau. Un dessin schématique ou une
photographie avec des valeurs totalement faussées, peut évoquer un
Nègre par la conformation du visage et l'aspect de la chevelure.
Pour répondre à la notion élémentaire du Nègre, il faut donc, outre la
couleur, certains traits et une chevelure particulière.
Celte chevelure caractéristique est crépue; quand elle est très crépue,
on la compare à la laine du mouton. Les cheveux, recourbés en petites
spires extrêmement serrées, s'accrochent entre voisins pour former des
touffes, ou bien s'emmêlent tous uniformément en une espèce de feutrage.
Une telle toison diffère nettement de la chevelure des Européens, même
frisés.
Parmi les traits du visage, le plus différent par rapport aux nôtres est
la forme du nez, qui est large et plat.
En second lieu, la bouche est saillante, avec des lèvres épaisses, dont
la muqueuse se rejoint plus ou moins largement de la supérieure à
l'inférieure, empâtant le dessin des commissures. Tout le bas du visage,
d'ailleurs, vient en avant, est profpintlte ; le terme d'origine savante est
passé dans la langue ordinaire pour traduire une observation banale,
moins fondamentale pourtant que celle du nez camus.
Un Nègre est donc un homme qui a la peau noire, les cheveux crépus
et le nez camard.
Ou trouve-t-on des Nègres? — Pour l'antiquité, où le type que nous
venons d'esquisser était nettement perçu et exprimé, le Nègre était
l'Africain. La découverte d'u-n monde plus grand, il y a cinq siècles, a
révélé dans des contrées éloignées de l'Afrique de nouveaux Nègres que
les voyageurs ont immédiatement reconnus comme tels.
Jetons un coup d'œil sur l'Océan Indien.
Gest un vaste demi-cercle, que l'Equateur traverse à peu près à mi-
hauteur; largement ouvert au Sud, irrégulièrement dentelé, il est borné
I,. I.Al'lCnlK. — I.KS NKdllKS DASIK Kl I. \ UAi;i. NKilUK KN l'.X.NKIl Al. '2'M)
au Nord par les rives inériilionules de l'Asie; à l'Oiiost. c'est rAfri(iue ; h
lEst, les archipels océaniens.
L'Afrique et l'Ocivinie sont les deux duinaincs n^-gres classi-jucs, se
faisant pendant à ilroitc et à gauche du tahleau: l'Afrique, dont les
hahilaiits ont révélé le Nègre à notre antiquité; l'Océanie, dont une
division porte ce nom caractéristique, Mélauésin, iles des Noirs.
l'ne mer large de deux mille lieues sépare ces deux domaines, mais
sa rive nord dessine de l'un à l'autre comme une arche de pont. Sur
celte rive, parmi des races absolument diiïérentes, nous trouvons des
hommes qui ressemhL'iit à des nègres : les Ilindoiis, d'abord, [lupiilation
nombreuse à caractères ambigus; Hérodote les appelait des Elhiopiens à
cheveux lisses, tandis qu'lleckel y voit des Méditerranéens à peau noire;
et puis de petites liibus éparses, aux îles Andaman (golfe du Bengale),
dans la péninsule de Malacca. Ce sont des sauvages noirs, crépus, camus,
et comme ils sont de petite taille on les a appelés Negritos, pclils nèrjrës,
du nom donné par les Espagnols aux cclianlillons trouvés dans les IMii-
lippines.
Ailleurs dans le monde, il n'y a point de nègres, il n'y a point de
noirs. Ceux d'Amérique ne peuvent être pris ici en considération; nous
savons commenl nos ancêtres les ont arrachés à leur sol natal; ils rentrent
donc, pour l'hisluiie naliirelle, ilans les nègres africains.
Si nous considérons les origines géographiques, nous ne trouvons par
tout le globe terrestrf, d'hommes a peau noire iju'autour de l'Océan
Indien.
Ainsi les Noirs du sud de l'Asie, jalonnant une communication inter-
rompue des nègres d'Afrique aux nègres d'Océanie, apparaissent non
seulement comme une curiosité en eux-mêmes, mais comme un document
primordial pour la connaissance de toute une partie de l'humanité. Existe-
l-il une race nègre avec des modalités diverses, ou bien des races nègres
n'ayant entre elles qu'une ressemblance superficielle? Les Noirs d'Asie
sont la clef du problème. Il faut voir, en les confrontant aux Nègres
d'Orient et d'Occident, s'ils peuvent se ramener avec ceux- i à un type
commun, établissant du même coup l'unité d'habilat, c'est-à-dire toutes
les conditions d'une race, ou si l'on veut d'une espèce, déterminée.
Nègres africains; races mixtes en bordure. — Toute la partie médiane de
l'Afrique est le pays nègre par excellence, l'origine du prototype de la
notion. Il n'y a donc qu'il en regarder quebjues spécimens.
Mais deux dépendances de cette région vont n(tus oiïrir l'ocasion de
remarques générales qu'il est utile de présenter tout de suite.
Madagascar, ii bien des points de vue, est distincte de l'Afrique dont
elle est voisine : sa llore et sa faune lui donnent mi caractère particulier;
mais son anthropologie, encore insuflisamiiniil (tudiée, la rattache sur-
toutà l'Afrique. L i généralité des Malgaches présentent un aspect négro'ide
liés marqué. D'autre part, on lésait, deséléments ethniques tout dilïérents
lui sont venus de la Malaisie, bien loin, de l'autre coté de l'Océan Indien.
236 7 jiiN IIIOC.
C'est que riionune est un animal tcnililement voyageur; les mers ne
rarrôtent pas, môme quand il resté aux stades rudimenlaires de l'ins-
trumentation nautitiue. Un bras ile mer étroit, mais ancien, peut séparer
deux faunes terrestres; l'humin*! sort de sa patrie quelles (jue soient les
harrir-res (|ui l'entourent. Il franchit les montagnes comme les mers ; il
peut changer de climat, car, ses conditions de vie, il les modifie dans une'
large mesure; il emporte avec lui une paitie de son milieu, s'en recrée
une autre; il s'assuie ain«-i une marge énorin*' d'adaplahilité.
Il a des races <pii ainn'iil Ir changfmriil, et ilonl les colonies aven-
tureusi's, successivemenl essaimées durant des milliers d'années, peuvent
avoir parcouru toute l'étendue des terres, bien avant (jue les Espagnols
et les Anglais n'aient fait pareille dissémination sous les yeux de l'His-
toire. D'autres races, il est vrai, semblent attachées à la terre nourricière
et s'étendent à peine de proche en proclie quand les conditions leur
sont favorables; mais les migrateurs les traversent, les bousculent, les
refoulent ou les emmènent en captivité.
De sorte que les cartes ethnologiques, au lieu de présenter, comme
elles font, des teintes plates en larges espaces, devraient, pour rendre
compte des origines, constituer une mosaïque à petit point, avec de vastes
jonchées pour certaines couleurs.
-Mais une telle mosaïque ne correspondrait pas à l'anthropologie phy-
sique. Il s'établit toujours des relations sexuelles entre les populations
qui viennent en contact. Aucune haine nationale, aucune interdiction
religieuse, aucune distinction de caste n'empêche ce mélange.
Et comme il n'y a qu'une espèce humaine, ou s'il y a plusieurs espèces,
que les croisements de ces espèces sont indéfiniment féconds, il se crée
des races mixtes. On peut même dire qu'il n'existe- h peu près pas de
race pure. Il n'y a presque jamais non plus de limite tranchée entre
deux races. Par dessus les frontières politiques, sociales, linguistiques,
les mélanges font des dégradations insensibles; seuls, les hasards de
l'histoire découpent, dans cette série continue, des groupements artificiels,
transitoires, qui s'appellent eux-mêmes des peuples, et se croient des races.
Ni l'affirmation patriotique, ni la philologie, ni l'ethnographie ne
doivent être pris pour le signe d'une race. Tous les bâtards veulent être
nobles; les mulâtres s'appellent créoles; et les Français du Nord, descen-
dants authentiques de Gaulois et de Germains, opposent aux Anglais et
aux Allemands, leurs frères par le sang, la solidarité des races latines.
Après une guerre de conquête, comme au cours d'une infiltration
pacifique, vainqueurs et vaincus, autochtones et immigrants, s'unissent
et se fondent. Celle fusion est un nouveau conllit dans lequel la puissance
sociale et la puissance zoologique de chaque race interviennent presqua
indépendamment l'une de l'autre. Deux appellations nationales, deux
langues^ deux civilisations se confrontant, celle qui correspond au degré
inférieur d'organisation peut disparaître devant l'autre; mais ce que sera
la population dépend du nombre et de la capacité prolifique des généra-
teurs, comme aussi de certains caractères physiques qui marquent chez
L. I.MMCnrE. — I.K» Nir.nES n'.VSIi: KT la HM'.E SVMWF. F.S (iKNK«AL 237
lis int'lis la ivssoml)laticc pivdoininanli' d'un lios lypos, loules choses (|ui
n'ont pas de rapporl avec la supôriorilc sociale. De sorte (juc le nom
.pu subsistera s'appliquera généralement ;\ un type anthropologique diffé-
rent de celui ([u'il désignait à l'origine, parfois à un type tiV-s voisin de
celui des [leuples qui est, «mi apparence anéanti.
Pour les Malgaches, on ne pouvait s'y tromper Les plus noirs des Sa/v/Aar.v
ou des Belsimisarahes, encore mieux les Baras ont beau parler uniformé-
ment une langue malayenne, on ne peut les confondre avec les Hovas,
qui se distinguent nettement par leur type physique et leur situation tant
géographi(iue que sociale. On voit tout de suite (lu'il y a k\ deux éléments
essentiellement distincts. Mais c'est que les Ilovas sont venus à une époque
relativement récente et pourtant déjà la plupart d'entre eux sont forte-
ment négrilisés, môme parmi les plus nobles. (le ijue nous voyons mainte-
nant, c'est la fusion en train de se faire, et on [)eul se représenter ce
qu'elle donnerait dans peu de siècles, livrée à elle-même : une population
négro-mongoliiiue, à caractère africain prédominant, avec une langue et
certaines coutumes malaises.
Les anthropologistes me paraissent avoir tenu un compte insuffisant
du phénomène capital mis en relief, pourtant, déjà par les poètes grecs :
Aphrodite se plaisant à mêler la race des dieux et celle des bergers.
Us cherchent à définir un certain nombre de types humains, et paraissent
considérer ces types comme autonomes ; on ne voit dans leurs classifica-
tions les races mixtes que comme des cas particuliers peu importants.
Je pense, au contraire, que c'est le cas le plus général.
L'Afrique nous en présente un exemple qui me paraît aussi net que
méconnu, et qui offre un intérêt spécial pour notre sujet.
A l'angle oriental de ce continent, le groupe ethnique formé des Abyssins
ou Éthiopiens, des Danakil et des Somali, est généralement considéré
comme constituant une race distincte. Sous le nom équivoque de Hamites,
on les sépare formellement des nègres leurs voisins du sud et de l'ouest.
Ils sont pourtant noirs, ils ont les cheveux si frisés qu'on pourrait les
dire crépus, mais ils ont des visages moins camus. Ces visages, en réalité,
si on considère une série suffisante d'individus parcourent toute la gamme
qui va du vrai Nègre au pur Sémite dont la patrie est toute voisine à l'est;
la plupart des Éthiopiens se tiennent vers le milieu de celte gamme, à
mi-distance du Nègre et du Sémite. C'est là un exemple de ces transitions
qui s'observent à peu près constamment lorsqu'on examine les hommes
suivant leur répartition topographique. Entre deux types tels que le Nègre
et l'Arabe, si nettement tranchés à l'état pur, s'intercale géograp'iique-
ment une population à caractères mixtes.
Comment y aurait-il lieu d'admettre une race distincte pour ces inter-
médiaires? Il faut supposer ou bien évolution d'un type extrême à l'autre
extrême en passant par ceux-là, ou bien un mélange des deux types
extrêmes qui sont venus en contacta une époque ancienne*. Pour le cas
' .le ne dis pas que ces types extrêmes sont les seuls éléments du mélange.
•2:\H 7 JIIN i*.»(»ti
parlic,uli(M' «les lilliiopions, (fcst celle (Ituixièiiie liypullii''se (jui s'impose,
piiis(jue nou<< avons la preuve de l'inlluence sémitique sur l'Abyssinie.
Les Océaniens. — Les Nègres pioprein<Mit liils (l'Afrique, ipii se pré-
sentent en masse compaele, peuvent sans dout<' être subdivisés en varié-
lés diverses, mais tous ont du moins une ordonnance générale identique
dans les traits de leurs visages ; tous répondent, avec des nuances, au
schéma i^énéral que nous eu avons tracé.
l'our les nt»gres d'Ooéanie, il n'en va pas de môme. iJ'abord leur habitat,
morcelé déjà par sa nature d'archipel, est tout semé d'enclaves apparte-
nant à une race bien distincte, les Polynésiens, qui sont |)lutot des blancs.
El puis, leur apparence très diverse les a fait séparer en plusieurs groupes
que les classifications placent même souvent en des chapitres différents.
Il y a les Aiisiraliens, qui ne sont évidemment pas des nègres typi(|ues,
mais qui sont loin aussi d'être homogènes, et beaucoup d'entre eux sont
décidément négroïdes. 11 y a les Mélanésiens dont on distingue encore tout
un ensemble sous le nom de Papous. Ce dernier mot est une corruption du
mol malais Pouapoua, qui veut dir^e crépu; cette désignation met en relief
un car'actère nègre qui marche avec la couleur ti'ès foncée de la peau,
mais beaucoup d'auteurs, donnent comme signe propre du Papou, un nez
saillant et aquilin.
Il y a en elïet à la Nouvelle-Guinée (et j'ai eu occasion de le retrouver
aux îles de la Sonde Orientale qui en sont le plus proches), un nez très
particulier, en bec d'oiseau de proie, ornant certains faciès dont le reste
est assez négr^oïde. Mais dans les fies de la Sonde, au moins Flor'ès, Solor,
Timor, j'ai vu cet appendice nasal voisiner dans une même tribu, dans
une même fariiille, avec des nez fortement aplatis. Les chevelures se pré-
sentent de leur coté en assortiments fort étendus. J'ai photographié dans
un villège de Florès un gr^oupe de G sujets, l'assemblés par le hasard, qui
présentent une gamme complète, depuis le cheveu frisé à petites boucles,
presque crépu, jusqu'au cheveu à peine ondulé.
Sur toutes les photographies que j'ai eu l'occasion de voir, on retrouve
pour les Papous la même impression de mélange, quoique la proportion
de sang noir y paraisse en génér\al plus considérable que dans les îles de
la Sonde, où naturellement s'accuse davantage l'inlluence des races de la
Malaisie, Malais proprement dits ou Indonésiens.
Les Mélanésiens autres que les Papous donnent aussi une impression
de métissage ; parmi les collections de photographies, il faut chercher
pour trouver des gr-oupes où le caractère nègre soit franchement marqué
sirrlous les sujets. .Vlors, c'est sensiblement du Nègr'e tel que nous l'avons
délini, mais encor'e un peu atténué.
Par exemple, la classique, chevelure en vadrouille, caractéristique des
Papous, nous la connaissons ailleui's comme produit d'un métissage
certain entre nègres africains authentiques et diver'ses autres l'aces '.
* Je note, en passant, que la chevelure des Abyssins, si l'on fait abstraction d'un
mode d'arrangctTient arlificipl, est tout à fait comparable à la vadrouille des i'apous.
I,. I.Xl'ICiJl K. — l.t;> NKiiUKS d'asIK Kl" I. \ lUCK NKilllK 1:N ilKNKIlAr. 'IM)
Sur la s<'rio assez noinhrciiso di» siincleilos niôlanésions, appaib'iiaiU
aux collecliuiis du Mus(''uin, (Ui peut, paralliMeiuonl aux faits ci-dessus,
noler le inan(|ue d'homogénéité dans les faces osseuses ; il y a des faces
bien nègres, d'autres (jui le sont à peine.
En résumé, je ne sais où trouver le nègre d'Océanie ; il y a du nègre
partout dans i-ette région, mais partout il l'Sl métissé. Aclutdlemont, le
noyau de population noire le plus important est la Nouvelle (Juinée, dont
le nom est assez significatif. Vers l'Est, il y a un éparpillement irrégulier
dans les archipels. Vers l'Ouest, il y a des po[)ulati<ins mixtes, dont le
caractère négrilique s'atténue progressivement, et (jui forment ainsi la
transition vers la Malaisie.
Nègres de Malnisie; Nef/ritos. — La Malaisie est essentiellement un archi-
pel. Mais la péninsule de Malacca, ou péninsule malaise qui, d'ailleurs n'est
rattachée au continent asiatique que par une langue de terre étroite et
basse, de formation relativement récente, ne peut, au point de vue ethno-
logique comme au point de vue géographique, être séparée de Sumatra
et des îles voisines. Nous la comprendrons dans la région que nous
appellerons Malaisie, qui se trouve ainsi à cheval sur la limite ordinaire-
ment tracée entre l'Asie et l'Océanic.
Cette région, comme son nom l'inditjue, est censée la pairie des Malais,
race dont on fait souvent une des divisions importantes de l'humanité.
En réalité, la population de la Malaisie est fort peu homogène; il ne
serait même pas possible d'en donner une diagnose générale. Au sens
propre, les Malais ne sont qu'une petite partie de celte population ; les
Javanais et les Soudanais en sont bien dislincls ; les tribus barbares de
Bornéo et de Sumatra en ont été séparées avec raison, dans les classifica-
tions récentes, et, sous le nom d'/ndouésiens, rapprochés des Blancs. Aux
Philippines on a, dès les premières éludes, décrit des groupes ethniques
divers. Et dans la péninsule malaise, en arrière des Malais qui peuplent
ses rivages et ses basses vallées, les montagnards offrent des types
variés.
Il y a pourtant un trait commun aux Malais et à presque toute la popu-
lation de la Malaisie : c'est la présence, en proportion jdusou moins forte,
du sang manifestement mongolique.
Je considère les Malais et tous les peuples intriqués dans leur domaine,
comme des races mixtes. Un grand courant d'Asiatiques jaunes est des-
cendu dans la direction du Sud-Est ; les traces de cette immigration sont
faciles à relever. L'n autre mouvement entraînait des Asiatiques blancs,
de l'Ouest à TEsl. Ces deux éléments se rencontrant, se sont mélangés
à des degrés divers, et suivant b^s proportions du mélange ont formé les
types variés que l'on constate.
Mais il faut y ajouter un troisième élément : la population primitive de
ce coin du globe n'était ni blanche, ni jaune; elle était noire, et elle a laissé
son empreinte sur les populations actuelles; c'est d'elle, je pense, que les
Malais tiennent leur forte pigmentation, leur couleur d'un brun chaud
'2iO 7 jiiN 1U0()
<|ni va parfois jusqu'à la imaiice cliucolal. l/cxislonci? de la raco noire
primitive est (léinontrée par des léinoins peu nombreux, mais très
Irappanls.
C'est aux IMiilip|)im-s qu'on l(!s a liouvés d'abord, et les voyageurs espa-
gnols. d(''s une époque ancienne, leur ont donné le iioiu très expressif de
Nrgrilox drl monte (petits nT'gres de la montagne).
Tn objet de cui-iusilé plus extraordinaire encoi'e fut découvert aux îles
dans le golfe du Jiengale; un pi'lil arcbipel entièrement peuplé de Nègres,
entre l'Inde et l'Indo-Cbinr!
Ii;i, aux Andamans, c'est une population bouiogène, jture, si ce mot a
un sens en etbnologie^ du moins, isolée de toute autre race humaine
depuis une époque extrêmement reculée; elle peut donc avoir conservé
le tjpc d'une race fort ancienne.
Or, ces Andamanais sont indiscutablement des Nègres; qu'on en pré-
sente un spécimen quelconque à un naturaliste érudit ou à un simple
matelot ayant touché les ports d'Afrique, le premier coup d'œil amènera
la même réponse : « C'est un Nègre. »
Us ont la peau parfaitement noire, les cheveux crépus au maximum,
et le visage camard.
Ilssontpeu ou point prognathes, il est vrai, et ils se distinguent en
outre, parles deux caractères suivants :
10 Ils sont petits ; 1 m. 50 pour les hommes, 1 m. 40 pour les femmes,
voilà en chiffre rond les moyennes de mes mensurations qui concordent
au centimètre près avec celles des autres auteurs. Les nègres africains ou
océaniens sont en général grands.
20 Ils sont soiisbrachi/céphales; les nègres africains ou océaniens sont en
général franchement dolichocéphales^.
Ce dernier caractère n'intervient dans l'apparence extérieure que d'une
façon presque insaisissable; il n'est guère révélé que par les mesures, et
constitue, par suite, uncaraclôre que l'on peut appeler ais/rai'/. Mais on lui
fait jouer un rôle de premier ordre dans les classifications anthropolo-
giques.
Considérant donc la sous-brachycéphalie et la petite taille commune
aux Andamanais, et aux Negritos des Philippines, les auteurs ont créé
une section spéciale dans les races noires pour ces deux groupes humains,
et en ont constitué, sous le nom générique de Negritos une race opposée
aux nègres d'Afrique d'une part et aux Papous de l'autre.
* Le crànc luimain, vu par en haul, dessine un ovale plus ou moins allongé; on
peut exprimer avec précision l'allongement de cet ovale en comparant sa longueur
à sa largeur. Il existe une nomenclature qui répartit en catégories les crânes déter-
minés à ce point de vue. Quand la largeur est moindre que les trois quarts de la
longueur (75 centièmes), on dit que le crâne est <'/o//r/iOfe;j/ia/e; quand elle dépasse
les cinq-sixièmes (83 centièmes), on dit que le crâne est bvachijcéphale. Le rapport ou
indice crânien hori sont al aiieinl pour les Andamanais en moyenne 82 centièmes;
une série de nègres d'Afrique a donné 72; une série de Papous, 71.
I,. i.Ai'ir.ijiK. — i.Ks NK(;i(E> d'asik i;r i.a uack M:i;ni': kn (;i:nkrai. '2ii
i.u notion de AV^/w'/o ainsi comprise doit (Hre rapportée à Crawfurd (1848).
Aux deux témoins ci-dessus désignés, Crawfurd en ajoutait un troisième,
situé entre les deux premiers, la péninsule malaise. Il avait vu, sur la côte,
un jeune garçon [irovenanl (Je l'intérieur, et([ui, dit-il, ressemblait exac-
tement aux Andamanais. Un de ses amis avait vu aussi un sauvage de la
même région, et (jui était -( un vrai Xègre, mais avec une taille de 4. pieds
1) pouces seulement, bien (pi'il fiU adulte. ••
En 1893, on n'avait recueilli encore que des données fragmentaires et
assez confuses sur ecs petits Nègres de la péninsule, lorsque je réussis à
en visiter deux tribus bien caracté>risées. Les Mrnlks de la haute vallée du
Pévuk sont brun foncé, camus et crépus; leur indice céphaliiiue moyen est
79. Mes observations conlirmôrent la conception du Negrito, car cette
station intermédiaire, une fois ])ien établie, montre que toute la région
doit avoir été peuplée par les ancêtres de ces petits noirs '.
Kn elTet, partout où on trouve les témoins actuels, ils apparaissent net-
tement comme la population la plus ancienne, aulochlone, si l'on veut bien
prendre ce mot dans un sens relatif. C'est ce que démontre leur situation,
tant sociale que lopographique, par rapport à leurs voisins.
Nègres de l'Inde. — Dravidiens et prédavidiens. — L'Inde est aussi une
péninsule rattachée ;i l'Asie depuis une époque géologique récente^ par
les alluvions du Gange et de l'Indus. Au Nord de ces alluvions se dresse
l'Himalaya (jui ferme d'une muraille quasi infranchissable les communi-
cations avec le continent.
D'autre part, sa structure est dessinée à grands traits simples; elle
présente de vastes plaines, large plateau de faible altitude; elle n'a de
montagnes un peu élevées que doux petits massifs accouplés vers la pointe
sud; elle n'a d'annexé insulaire notable que Ceyian.
L'Intle, dépendance adventice de l'Asie, est donc une région naturelle,
à la fois bien distincte et relativement homogène.
Cette région est habitée par une population très nomljreuse, 200 mil-
lions d'individus en chiffre ronds, qu'il faut nécessairement considérer
dans son ensemble, car d'un bout à l'autre, les divers éléments qui la
composent ont réagi les uns sur les autres. Néanmoins, tout le monde
admet que c'est une population mixte; car ici la masse réagissante est
tellement grande qu'aux deux extrémités, malgré une pénétration réci-
proque très ancienne, se sont inainienues deux apparences physiques
impossibles ;i confondre. Et puis, tout c(; qui se révèle aux savants qui
élu lient riiumanili' dans les documents écrits, la [)hilologie, les tradi-
tions, rhist(ure, montrent des premiers occupants et des envahisseurs.
' La raco Ni';,'rilo ot sa dislribiilion {^èogiMpIiiinc, Annnlos île géof/raphie, Paris,
1"i juillet IS'JtJ Daiiscc ruomoiro, sous rinlliiciicc lics iloclriii'^s classiquus cl nolam-
Mient des écrits de Qualniages, el n'ayant pis encore analyse comme je vais le faire
les proportions du corps et des nnembres je m'étais beaucoup exagéré ladiflérenciation,
des Negritos par rapport aux autres Nègres.
soc. d'antukûp. IDOG <7
■2\'l 7 jiiN lUOO
On suit qu'un peuple p.iili ilu Vcninh. e'csl-à-dinMh! l'angle Nord-Oucsl,
s'est irradié en conquéiunl \eis 1 Est cl le Sud-Ksl, ;i travers toute la
région, (^e peuple, ce sont les Àri/ns, définis par leur langue apparentée
aux langues européennes actuelles, définis aussi par une religion et des
coutumes particulières. l'Iiysiquenient ce peuple était blanc, cniicasiqiic,
si l'on veut bien revenir à l'ancien mol qui avait l'avantage de com-
prendre un ensemble de traits. Les Aryas rencontraient devant eux un
autre peuple, (|u'on désigne aujourd'hui du nom de Draridiens. Ce terme
s'applique à une notion essentiellement philologique; il désigne une
famille de langues profondément diUV'renles des langues aryennes. On
retrouve les langues dravidiennes parlées aujourd'hui encore par plu-
sieurs dizaines de millions dhonmies dans l'Inde, localisés de deux façons :
d'abord un groupe compact occupant lo;il le sud de la péninsule, c'est-à-
dire le coin le plus éloigné du point de départ des Aryas ' ; ensuite, un
peu plus au nord, et dans l'est, un certain nombre d'îlots qui correspon-
dent aux régions accidentées les moins facilement accessibles à une inva-
sion. Cette distribution est typique; nous connaissons la marche des
Aryas par leurs histoires légendaires qui ont été beaucoup étudiées en
Europe, mais nous pourrions la reconstituer rien que par carte linguis-
tique.
Au physique, partout où on les trouve, les hommes qui parlent des
langues dravidiennes présentent une couleur de peau plus foncée que Icg
Aryens. Dans l'ensemble de l'Inde, la pigmentation va en augmentant dans
le sens de la migration aryenne, c'est-à-dire que les Indous du Sud et de
l'Est sont plus foncés que ceux du Nord-Uuest; et là où se rencontrent des
îlots dravidiens en pays aryens, les tribus ou castes dravidiennes sont
plus noires que leurs voisins d'alentour.
On admet donc que les Hindous (au sens large du mot) sont le produit
du mélange en proportion diverse d'une race blanche et d'une race noire.
Quelle est celte race noire? Voilà maintenant notre problème.
On considère généralement que celte race est représentée par les Dravi-
diens actuels, c'est-à-dire par les Hindous qui parlent une langue dravi-
dienne, et on en conclut que s'ils sont noirs, ils ne sont pas nègres, car
ils ont les cheveux lisses ou simplement ondulés, et ils ont souvent le nez
fin et droit. Sur ce dernier trait, les auteurs ne sont pas d'accord, et fina-
lement, quelques anthropologistes ont trouvé nécessaire de diviser les
Uravidiens en deux sous-races, l'une à nez fin, l'autre à nez camus.
Pourtant, un anlhropologiste anglais qui a recueilli aux Indes un
nombre énorme de mensurations, Hisley, a établi depuis bien des années
déjà que la forme du nez présente une gradation régulière dans l'ensemble
de la population.
1 Geylan, plus au sud encore que la pointe de l'Inde, est aryanisêe, mais les
légendes nous apprennent que les Aryas y sont venus, de loin, par mer ; et nous
savons, en oITet, d'une t'aroii générale, que les migrations vont plus vite et plus loin
par mer que par terre.
I.. I.Al'lCglK. — I.KS M;i;UE> D 'a«-IE et I,\ UACE NKCIIE EN (lÉNKllAr. :i43
Sociali'iMcnl. ci'llt' [iiipulalinii est liivisi'e en castiy, c'est-à-dire en
classes basées sur la naissance et entre lesquelles le mariage n'est pas
permis, nuehjues-unes de ces castes sont criùhres en Kurope, sans y
(Hre d'ailleurs lôujours bien comprises. Par exemple, la caste des lirnh-
iiKines, de lai|Melle sortent les pnMr-es des grands temples, casie qui jouit
du plus haut di'yré de respectabllil*'- sociale; et la caste des Parias, qui
est au contraire l'objet du mépris universel; ses membres sont voués aux
besognes pénibles et rebutantes ; on leur dénie presque la qualité
d'bommes.
Entre les deux, il existe un très grand nombre de castes dont la dilïé-
rence est professionnelle, religieuse, philologique, topographique, etc.
Mais quelle que soit l'origine de la dilTérence, et que ces castes habitent,
sans se mcMer, aux mêmes endroits, ou qu'elles habitent des territoires
voisins, elles sont soumises entre elles à un ordre de préséance formel;
un homme d'une caste donnée sait toujours clairement quelles sont les
castes qui lui sont supérieures; Aryens et Dravidiens sont compris dans
la môme hiérarchie.
Eh bien, si on établit avec un nombre de sujets suffisants, la forme
moyenne du nez dans les castes ', et qu'on range les castes d'après cette
forme, les nez les plus lins en hauteur de l'échelle, les nez les plus camus
en bas, l'ordre ainsi établi correspond, sauf de faibles écarts, à l'ordre
de préséance sociale.
Dans la région où il y a des Parias, ce sont eux qui possèdent en
moyenne le nez le plus large.
Cette loi, établie par Ilisley dans le Centre et l'Est de l'Inde, où Aryens
et Dravidiens s'entremêlent, se. vérifie parfaitement dans le Sud, au sein
d'une masse compacte de Dravidiens. Ces Dravidiens sont donc eux-mêmes
une race mixte, de même que la population de l'Inde dans son ensemble.
Ils ont une plus foile proportion de sang noir que les Aryens, mais ils ne
sont pas la race noire primitive. La constatation ainsi faite sur la varia-
tion de la forme du nez avec la position sociale ne peut s'expliquer que
si la race noire soumise par les concjuérants caucasiques avait originelle-
ment le nez tout à fait camus.
C'est donc un trait nègre que nous retrouvons avec la couleur foncée de
la peau; mais l'ancêtre qui possédait ce trait avait-il aussi l'autre carac-
tère nègre essentiel, le cheveu crépu?
Dans les montagnes des Niighirris et d'Anémulé, les seules vraies mon-
tagnes de la péninsule, situées au cœur de la contrée dravidienne, on a
signalé depuis longtemps des petits sauvages crépus, qu'on a même pensé
pouvoir, sur des documents insuiïisants, identifier avec les Negritos.
' La forme du n.z. priso (i.ins un certain SMi.s, s'exprimo |)ar un chiffre, qui est
Vindice nasal. C'est le rapport de la largeur à la hauteur. Ouaiifl le nez est très
camus, Il lirgcnr est à peu près éjralc à la hauteur, ie rapjiort est égal k 100 cen-
tièmes. Quand le nez est très fin, la largeur n'est ipio la moitié de la hauteur; le
rapport ou indice, égale 50 centièmes.
2\\ 7 jii.N I9CW'.
Kn réalité, il n'existe pas dans ces montagnes, ni probablement nulle
part dans l'Inde, un témoin de la race primitive comparable, comme
pureté, aux Andamanais ni même aux autres Negritos. Ce (jue l'on trouve
là, c'est simplement, mais c'est fort précieux, une population métisse
qui continue au-del;i du Paria la série générale de l'Inde. Au bord de la
forêt vierge ou dans les collines partiellement défrichées, il y a des castes
demi-Parias, demi-sauvages. La hiérarchie sociale les classe au-dessous
du Paria; leur nez est plus camus en moyenne que celui du Paria; on
peut même trouver des groupes où le faciès nègre, nettement dessiné, est
tout à fait prédominant.
Eh bien, dans ces groupes, les chevelures sont en général frisées, et on
en observe quelques-unes qu'on peut même appeler crépues.
Un a donc le moyen de prolonger par rimagination la série des castes
indiennes jusqu'au type primitif qui était (nous n'avons plus qu'un pas
à faire pour le reconstruire), un petit nègre.
Il faut reconnaître que, par rajiport à l'intensité des autres caractères
nègres observés chez les Dravidens les plus noirs, on trouve les cheve-
lures plus lisses qu'elles ne le seraient chez des métis de nègre africain
possédant la même proportion de sang noir.
Par exemple, les Abyssins, dont les traits présentent avec ceux des
Dravidiens une ressemblance depuis longtemps signalée, ont en général
une chevelure remarquablement frisée.
Il serait difficile de considérer comme une objection grave une telle ques-
tion de plus ou de moins dans des matières où notre méthode et nos con-
naissances sont encore si peu précises.
Mais le hasard m'a fourni un fait qui a presque la valeur d'une expé-
rience et qui répond directement à l'objection possible.
Aux Andamans, j'ai vu une femme, de la pure race indigène, avec des
cheveux extrêmement crépus comme tous ses congénères; cette femme
avait deux enfants d'un père inconnu, probablement Hindou; ces deux
enfants avaient les cheveux soyeux comme ceux des Blancs et des Hindous,
à peine ondulés chez l'un, frisés à grandes boucles chez l'autre.
Ainsi un demi-sang de Negrito ne laisse plus apparaître le caractère
nègre de la chevelure. Ce caractère chez les Negritos est donc relative-
ment récessif. Et les Negritos sont les nègres géographiquement les plus
proches de l'Inde.
Nous sommes arrivés à reconstituer les traits nègres d'un type disparu
en prolongeant une série graduée de métis. Par la même méthode nous
pouvons déterminer théoriquement la forme du crâne de ce type. Avec
une assez grande certitude, je puis aiïirmer, après de nombreuses mesures
systématiques, que le nègre primitif de l'Inde él&il sous-dolichocéphale avec
un indice moyen de 73 ou 76.
Sa taille, plus difficile à préciser, car les conditions de vie modiflent
* Voir au Louvre les monuments reportés par .M. Marcel Dieulatoy et notamment
la frise lies A7C fiers.
L. LAPicgrE. — r.Es nècres d'asie et la i«a«;e ni;(;he en (iKM:iiAi, 2i')
ce caracUVe, devait iHre pi'lito, plus liaulo pmirtanl ijuc celle des Anda-
manais.
Quant au nom qu'il convient de lui altrihuer, la discussion des faits
sociaux et linguistiques sur lesquels est fondée la notion de Dravidien per-
met d'élaMir que ce nègre était antérieur aux Dravidiens; il faut donc
l'appeler Preilrnridicn, ou si nous voulons lui dounerun nom qui ne soit
pas relatif A uno atitrc population, on pi'ul l'appeler Ni'';iir l'uriu.
De l Inde <) lu Mir /^*/^/'^ — l'our r.'joindre ces nègres de l'Inde à ceux
de l'Afriqu'N il faudrait trouver quelque témoin ancien au milieu des
populations iraniennes ou sémitiques qui occupent aujourdliui l'inter-
valle. Ce témoin, je l'ai vainement clicrché tout le long du rivage nord
du golfe d'Oman et du golfe Persique. Les documents archéologiques de la
Suzianne établissent peut-être qu'il y avait aux temps reculés qui ont vu
bàlir ces monuments dans la région du Cliott-EI Arah, des hommes à
visage noir, mais ceux-ci étaient en tout cas non des Nègres, mais
des métis. Et puis les documents sont vraiment d'une signification dou-
teuse.
Aujourd'hui tous les rivages, de l'Inde à la Mer Rouge, présentent en
abondance des traces de sang nègre; on y trouve même des Nègres très
purs. Mais ceux-ci viennent directement d'Afrique. La traite, qui n'est
probablement pas encore totalement arrêtée, sévissait d'une façon osten-
sible quand j'ai visité ces pays il y a une douzaine d'années.
Les esclaves noirs ont été en grande quantité amenés de Zanzibar et
des c6tes voisines dans toutes les tribus arabes ; et, avec les mœurs musul-
manes, l'assimilation et le métissage sont très rapides.
Au point de vue (jui nous occupe, ces noirs sont donc sans intérêt, et je
n'ai rien vu d'autre. Il faut remarquer que ces pays sont nus, peu fertiles,
(}u'il serait bien diflicileà une race primitive de s'y maintenir d'une façon
indépendante; d'autre part, l'infusion permanente de sang noir africain
par la traite ne permet pas de retrouver la descendance d'ancêtres noirs
autochtoïK's; enfin, l'histoire et surtout la préhistoire de ce coin du globe
nous est peu connue. La lacune peut donc s'expliquer par une disparition
totale sur laquelle nous ne pouvons nous prononcer; elle ne constitue en
tout cas nullement, dans l'état actuel de nos connaissances, un fait qu
doive entrer en ligne de compte.
Race iiPfivc unirjue. — .\in^i, de l'un à l'autre di"^ domaines nègres clas-
siques, nous avons trouvé les traces de Nègn-s aujourd'hui conservés à
l'état de faibles spéoimens isolés au milieu d'un flot d'envahisseurs, ou bien
fondus dans de grandes races mixtes. Nous concevons, dans une époque
ancienne, une population nègre continue tout autour de l'Océan Indien,
et celte population est bien nègre au sens que nous avons défini en com-
mençant.
Assuréuient,elle n'a jamais été identique à elle-même d'un bouta l'autre
(le cette immense aire de dispersion, mais y a-t-il lieu de la diviser en
246 7 juN l'.inn
l>lnsiciirs races? I*]xamiiinns les laisoiis pour lesquelles les nt''i,M('s ont été
ainsi partagés dans la classilicaliun et voyons si ces raisons subsistent.
l'' Les Nègres océaniens ont été séparés des Nègres africains surtout
parce ([u'on n'a pas songé à les rapprocher à travers la distance. Mais
on n'a jamais établi entre eux une uill'érence physique si-rieuse. Ces
Nègres océaniens sont tous diversifiés par des métissages; si on en prend
les traits communs essentiels, le type abstrait constitué par ces traits
revient au type abstrait du Nègre africain ;
■2° Les Negritos ont été séparés des Nègres précédents en raison de deux
caractères différentiels, la taille et l'indice céphalique.
L'indice céphalique est certainemenl un très bon caractère héréditaire;
ni a priori, ni a posteriori, il ne paraît influeneé par l'adaptation, et il est
très utile })Our suivre des filiations et des métissages dans un intervalle
de temps de quehjues siècles. Mais peut-il servir de b-ise à une classifica-
tion? D'abord, toute classification faite sur un caractère est artificielle;
mais ce caractère en particulier serait mal choisi pour cet usage. Dans
tous les grands groupes humains naturels, c'est-à-dire reposant sur un
ensemble de caractères, on trouve h la fois des brachycéphales et des
dolichocéphales.
Et puis, on ne peut plus séparer les Nègres en deux portions nettement
tranchées par la différence d'indice. Entre les chiffres classiques des
Papous et des Africains, 71 et 72, d'une part, et celui des Andamanais, 83,
d'autre part, viendraient se ranger d'autres Africains qui sont plus ou
moins relativement bracliycéphales, et dans le cycle que nous venons de
parcourir, les Ménihs de la l*cninsule Malaise avec 79, et les Nègres parias
de l'Inde avec 76. Nous avons une série continue, non plus deux groupe-
ments Opposés.
La taille, elle, est abandonnée depuis longtemps comme caractère de
race ; on sait combien les conditions de vie la font varier. Notamment,
les animaux des îles sont en général plus petits que ceux des continents.
Or, il est digne de remarquer que tous les Negritos, et à côté d'eux les
nègres Parias, habitent soit des îles, soit des terres qui furent autrefois des
îles.
Les Negritos apparaissent donc, non plus comme une espèce (ou une
race) distincte se r.-ipprochant des autres Nègres par plusieurs caractères,
mais bien comme un rameau d'une race nègre unique, ayant légèrenvent
varié dans un certain sens.
Si l'anatomie ne fournit pas de raison de diviser les Nègres comme on
l'a fait, en fournit-elle pour les fondre en une race unique?
l'ne classification naturelle doit tenir compte de tous les caractères.
Une classification est toujours établie sur quelques caractères seulement,
et par conséquent artificielle quant à son établissement; mais elle se révèle
bonne, correspondant à la nature des choses, quand un caractère impor-
tant qui n'a pas été considéré h l'origine vient concorder avec ceux qui
ont servi de base.
Nous avons défini le Nègre par la couleur de la peau, le nez et le che-
r,. I.AIMCQIF, — r.ES NktillES n'ASIE ET I.A HAf.E NÉf.HE ES tiKNKUAI. '2 iT
veu. Mais dans les proportions du corps el des membres, il y a ([uel([ue8
particulariU'S qui sont connues pour caractériser le Nègre africain; telles
sont la longueur de l'avant-hras et l'étroitesse des hanches. Ces parti-
cularités sont imporlantcb, non seulement parce ([u'elles diiïérencifiit de
toutes les races blanches, jaunes, rouges, les Nègres étudiés jusqu'ici,
mais, en outre, parce qu'elles paraissent manni.-i- mi slade intermédiaire
dans la descendance zoologique de l'homme, l'ar son curps comme par
sa face, le Nègre manpie un degré (h; rapprochement vers les singes.
Nous n'avons pas jusqu'ici fait entrer dans notre question cette confor-
mation du cori)s, et les anthropologistes ne l'ont pas étudiée au point de
vue de la comparaison entre les diverses races nègres qu'ils ont créées.
En ce qui concerne les Nègres d'.Vsie, j'ai fait cette étude sur deux
groupes de Negrilus et sur les castes de l'Inde les plus proches du Nègre
paria théoritiue. J'ai observé que le type nègre considéré i\ ce point de
vue nouveau se reliouve d'une façon bien marquée.
Cette similitude m'était apparue autrefois très incomplètement, parce
que je n'avais pas tenu compte d'une correction qui s'impose pour des
raisons d'anthropologie générale. Quand, dans une même race aussi ho-
mogène que p()ssd)le, on pas.se d'un groupe d'individus grands à un
groupe d'individus petits, il y a une variation systématique de proportion
du corps et des membres.
Chez les individus petits, les membres sont relalurmcnl plus courts, et
le corps relativement plus large.
Si donc nous comparons des Nègres afiicains d'une taille de 175 centi-
mètres à des Negritos de 150 centimètres, nous devons retrouver, entre
eux. si les Negritos cl les Nègres apparlienuenl au même type physlipie,
une dilTérence de ce genre.
Le caractère nègre étant d'avoir des bras longs et les hanches étroites,
ce caractère sera moins mar.pié che/Jes Nègres petits que chez les Nègres
grands, non parce ([u'ils sont moins nègres, mais [)arce rju'ilssont petits.
En fait, le Negrilo garde encore par rapjtort au litanc de taille moyenne,
c'est-à dire beaucoup plus grand (pic lui, une forme de corps nettement
nègre.
Iwlice rndio-pclvicn. — Je ne donnerai de chiffres que sur un seul rap-
port, qui me parait tout particulièrement caractéristique. L'avant-hras
étant chez le nègre nMali veinent long et les hanches relativement étroites,
j'ai pensé (pi'on trouverait une expression saisissante de son anatomie
spéciale en établissant le rapi)ort <le la première mesure à la seconde.
C'est ce que je propose d'appeler indice radio pd vif n '.
Il ne sera question ici que du sexe masculin.
Pour le Blanc (européen), je trouve, en calculant d'après la nombreuse
série de M. l*a[>illault sur cent Parisiens, un indi'-e radio-pelvien de 80
• Le rapport, en ci-mièmes, de la longueur du radius au diamètre Iransvetse oxlcrnc
du bassin (pelvixj.
248 7 JiiN 1006
(avec une taille de iOl). Les .'{0 plus pdits donnenl une valeur de .S3 fi
(taille, l('.l).
Pour le n^^re d'Afriiiiie, 2 Soudanais rencontrés en Abyssinie m'ont
donné une moyenne de \'2Î'} (taille ITO); 9 Sénégalais mesurés en Europe
m'ont donné 107 (taille, 18:2).
J'ai examiné systématiquement à ce point dr vue les collections ostéo-
loijiques de Paris.
Sur le squelette, on voit à priun ipioii doit obtenii' des chiiïres plus
élevés que sur le vivant ou le cadavre entier, la mesure du radius étant k
peu près la même, tandis que la largeur des hanches est diminuée de
l'épaisseur des parties molles.
9 squelettes de Français, au Musée de l'Ecole d'Anthropologie, donnent
la valeur 87.
Les squelettes de Nègres les plus anciens dans nos musfies sont quel-
quefois étiquetés Nègre sans autre indication, ou d'autres fois, Nègre mort
à Paris. Or, après avoir passé une heure à essayer de démontrer que tous
les Nègres se valent, je suis obligé de remarquer ici qu'il y a Nègre et
Nègre. Les Nègres américains, malgré leur origine africaine bien connue,
présente une atténuation manifeste du caractère en question.
Ce qui peut s'expliquer très naturellement par du métissage.
Ainsi, dans mes mesures prises au Muséum, voici les Nègres purement
africains, — 2 Mozambique, 109 et 114 — 1 Malinké, 118 — 1 Haut
Ogooué, 109 — 1 Fernand-\az, 112 — 1 Pahouin, 110, Moyenne, 112.
Et d'autre part, 2 Mozambique esclaves au Brésil, 91 et 97 — 1 Guade-
loupe, 100.
Enfin 2 Nègres morts à Paris donnent l'un 101, l'autre 110.
Les 15 squelettes de Nègres de l'Ecole d'Anthropologie, parmi lesquels
il ne m'a pas été possible de faire le départ des provenances, donnent
comme moyenne générale 105.
11 faut donc choisir, parmi ces collections, et c'est le chiiïre de 112 qui
doit être provisoirement adopté.
On voit quelle différence s'accuse du Blanc européen au Nègre africain.
Ces chiiïres ont besoin d'être précisés par de nouvelles études, mais il
est évident (lu'il y a une différence considérable entre les deux types. Et,
par une heureuse coïncidence, l'un est au-dessus de l'unité, et l'autre au-
dessous.
Voici quelques chiiïres se rapportant à des types qui ne sont ni des
Noirs ni des Blancs européens, chiiïres que j'ai recueillis sur les squelettes
du Muséum.
4 Japonais, 86 — 2 Tonkinois, 90 — 2 Tagal, 93—2 Dayaks, 97 —
2 Maoris de la Nouvelle-Zélande, 91 — 2 Hawaï, 92 — 5 Péruviens an-
ciens, 85 — 2 Eskimos, 82 — 2 Fuegiens, 90.
(^es séries sont certainement trop courtes pour donner la valeur de
l'indice radio-pelvien dans les races correspondantes; mais tandis que
les Nègres purs se tiennent tous au-dessus de 100, aucun de ces chiiïres
I,. LAI'ICQIE. — LES NKGHES Ii'aSIE ET L\ IIACE NÉCIIE EN CKNÉUM. fî ii)
n'approche de 100, excepté celui des Dayak-;, dont la signification serait
à discnliT, s'il était conllrmi'.
J'ajoiitt' (|ne de t'tus les siinclelles nionli's du .Mii^'''nni. un si.'ul cas indi-
vidnel, en drhors des Noirs, allrinl UK). (iV'st nn Siamois (?)
il y a donc là un caractère (jui iind les .N'è^i'cs afiicains à part des autres
types humains. Nous pouvons maintenant rechercher ce caractère chez
les autres Noii's.
Pour les Mélant'siens, ITi squelettes du Muséum, (Nouvelle-Hrelagne,
Nouvellfs-lléhrides, Nouvelle tialédonie), m'ont donné une moyenne de 1)8
pour l'indice radio-pelvien. Ce qui correspond bien à l'idée du métissage
(|ue nous avons, pour des raisons dilTérentes, admis dans ces régions.
3 Australiens donnent iOJ.
Sur le vivant, une série nombreuse d'Ethiopiens mesurée par moi me
donne le chiiïre de 96 pour l'indice radio-pelvien (avec une taille de 108).
La moyenne de diverses castes hindoues, où le type du Nègre paria, sans
être pur, loin de là, est très a|)parent. atteint 100 (avec une taille de 160).
l'our les Andamanais. les plus purs des Negritos, j'ai malheureusement
perdu un cahier de notes contenant les chiiïres qui m'auraient servi pour
ce calcul; d'après les silhouettes des [)hotographies. je pense que l'indice
en question aurait, sur le vivant, une valeur voisine de l'unité.
3 squelettes de Negritos des Philippines, au iMuséum, donnent lOi.
A F.ondres, au Collège des Chirurgiens, j'ai examiné (i squelettes non
montt's d'Andamanais. Je n'avais pas d'instrument de mesure; mais^ par
la superposition directe, j'ai constaté que dans les 6 cas, le radius était
plus grand ([ue le plus grand diamètre du bassin.
Si l'on lient compte que les .\ndamanais sont très petits, le caractère
nègre semblera ici bien marqué.
Les Ménili de la péninsule malaise, Negritos métissés, doimcnt Uo ^avec
une taille de 152).
.V titre de comparaison, voici le chifTre que me donne une tribu de
./(//■f)/<H5, sauvages de l'intérieur de la Péninsule malaise, géographique-
menl voisins des .Ménik, race très mélangée, mais bien malaise (au sens
large) par la prédominance du sang mongolique : indice radio-pelvien, 84
(avec une taille de lo-4).
Il y a donc une conformation particulière du corps, résumée en un
chilTre par l'indice radio-pelvien, qui se retrouve chez tous les Noirs et
rien tjue chez les-Noirs. (le caractère n'a nullement été visé dans les pré-
misses de notre classification ; il pourrait constituer à lui seul une déîini-
tion d'une race; or, sous la réserve de sa variation avec la taille, qu'ime
formule 'ff/ //oc pourrait facilement éliminer, il suit exactement les carac-
lèri's sur lesquels nous nous sommes basés, s'altiTiuanl comme eux par
le métissage.
C'est donc une preuve, en quelque sorte cruciale, (jue la race des
hommes à peau noire est fondamentalement une, comme nous amène à
le penser toute l'ijtude soulevée par la question des Noirs d'Asie.
250 21 JUIN 1906
8:'8" SEANCE. - :^l Juin lîlOD.
Présidence de M. /vhouuwski.
Election. — M. !•■ lapitaiiic I'ahuer. lucsciitt' par MM. Cuver. Hervé, Zabo-
luwski. est élu iiK.'iiibre de la Suciélé.
OIJVKAGES OFFERTS
BAUuoriN (D' Marcel) et Lacoiloumère (G.). — Les Menhirs <le Saint-Martin
de Hrera (Vendée). 24 p. Sccrétarial Général di' la Société Préhistorique de
France. Paris, 1905.
Boas (Franz). — Tho Iluntinglon California Expédition. Antliroponictrv of
central California. {Bulletin of Ihe American Muséum of Naluval Hislory,
vol. XVIL part. I\', pp. 317-380). New-York, november 4, 1905.
Hamy (D"" E.-T.). — .loséph Donibey. médecin, naturaliste, archéologue, explo-
rateur du Pérou, du Chili et du Brésil (1778-1785). — Sa vie. son œuvre, sa
correspondance, avec un choix de pièces relalives à sa )nission, une carte
et cinq plancfies liors texte; in-8'\ 434 p., 5 pi., 1 carte. Paris. Guilmoto, 1905.
Paiw (L. de) et WiLLEMSKN (G.). — Note sur les cétacés échoués dans l'Escaut
en 1577. (Extrait des Annales du Cercle Archéolof/ique du pays de ^yaes.
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Origine de l'écriture et de l'alphabet. La lettre S. 160 p. Paris, E. Leroux, 1900.
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cule 2. Les armes magiques. Le signe do la croix. Première partie: L'enveloppe
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des Beaux-.\rts. 76 p. Paris. E. Leroux. 1903.
SoLui-CoLBERT DE Beaui.ieu (Emile). — La langue sacrée. IV" volume, fasci-
cule 3. Les armes magiques. Le signe de la croix. Seconde partie : Le divin
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ARTICLES A SIGNALER DANS LES PÉRIODIQUES
Revue de l'Ecole d'Anthropologie de Paris, janvier 1906. — Zaborowski
(S.) : Fénélralion des Slaves et transformation céphalique en Bohême et sur la
Vistule: — UrGiEï(J.) : Recherches sur les habitants du Mzab. — Livres et revues:
— DiBOis (l)"" P.) : Les Psvchonévroses et leur traitement moral; — Lejeine
(Ch.) : La question des races.
Id., février 1906. — Rabaud (Etienne) : La forme du crâne et le développe-
ment de l'encéphale (cours d'anthropologie anatomique); — Brecil (H.) : Les
Cottes. Une grotte du vieil tige du Benne à St-Pierre de Maillé (Vienne) (avec
11 lig.); — Papillai:i.t (G.) : La forme du thorax chez des Hovas et chez des
Nègres Africains et Malgaches. Contribution à l'étude de l'indice thoracique; —
Capitan et Arnaud d'Agnel : Un curieux mode d'importation de silex taillés
d'Orient en Finance (avec 9 llg).
Id., mars 1906, — Peredolskv (\V.) : Dessin figuratif sur une poterie de
l'époque néolithique (avec 6 fig.); — Mortii.let (A. de) : Le grand menhir de
Glomol (Cùtos-ilu-Nord) (avec 9 fig); — Manoivrier (L.) : Une application
anthropologi(jue à l'art militaire; — IIuguet (J.) : Les Oulad NaïK Nomades
Pasteurs.
Id., avril 1906. — Dussalu (R.) : La civilisation préhellénique dans les
Cyclades (avec 18 fig.); — Hervé (G.) : De Charles Estienne et de quelques
recettes et superstitions médicales au XVl" siècle. De la maison rustique. Con-
grès international d'Anthropologie et d'Archéologie préhistoriques.
Id., mai 1906. — Kuppel (M.) et Rabaud (Etienne) : Hémimélie thoracique
droite (avec 3 fig.); — Landrieu (M.) : Lamarck et ses précurseurs; — Bardon
(L.) et BouYSSONiK (J. et A.) : Outils écaillés par percussion. Livres et revues.
Id., juin 1906. — Mahoudeau (Pierre-G.) : Documents pour servir à l'Ethno-
logie de la Corse; — Capitan (L.). Breuil (IL). Bourinet et Perony : L'Abri Mège,
AUTICI.ES A SMNAI.F.lt MANS l.Rs l'KItti ilHuUES îilid
une station m.iL'<l;ili'iii.iiiiii<' à T.vj.il (I)cii<Iojl;ih'); — (',ai>itan (I-.) : l.o Mil"
Congrès iiitornalioiiHl (l'Aulluuitolugii' l'I d'Airliéolof^ie préliislori(iues.
Bulletin de l'Institut Egyptien, Le Caire, 6 mars 1905, l'asc. no2. — Loktet
(!)"■) : Momies de sin^^es et nécropole du Dieu Tliot.
The American Ndluralist, Hoslon, l'idiniarv. IDUG. — \vi:ns (IM- Il ) ; Tiio
V(\\[y ol" liie (iiiatlmslome Type.
Atti delld Societu lioniana di Aniropolufjia, iloma. \ (d. \11, lasc. II. —
Krassetto (F.) : Sopra ilue crani rinvciiuli ncll' aiitico sepolcrclo di hovolone
veroiiese allribuito ai Icrramariroli. ('rani rinveniili in l(jmbe etrusche; —
('iiiKKuinA-Ki(;r.Kiu (V.) : Kleneo de! inalcrialc schelelrico [ireislorico e prolos-
torico d(d La/io; — Vuam (L'.-C.) : I''raninienti sclieletrici in tombe erisliane
presse NiUsii (Monténégro). Melodo [ter dclerminare lindinazione del l'orbila-
Ski«i!I (G.) : Conlributo ail' antropolof^ia amcricana.
Coxmos diGuido Cora, Roma. Sér. Il, \'(d. 13. — Gontribuzione ail" clno-
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— lUi'i'i.N (!)"■ .\rlbnr) : Die nissiclien Imlen narb d(>r N'oiksziiblnnf,' von 1897.
Id., lévrier l!)0(j. — Jirpi'iN (IK .\rlluir) : Die russisclicn ludcn nach der
N'olks/iibhini,' von 1897. II. Scbulbesueh ebrisllieUer und jùdiselier Kinder im
Winterlialbjabr 19U4 in lierlin.
/(/., mars 19(JG. — Jacohs (Joscpii) : Die luden in don Verciniglcn Slaalen ;
— Rii'i'iN (D' .\rtbur) : Die russi(dicn luden uarii dci- Volksziililuni,' von 1897.
III (lin); — lii.ocK (ilans) : Die KindiM-slerblichkcil in Krakau.
Id., avril et mai 190G. — Elkinu (I)'" .Vrkadius) : .\ntbropologisehe Untcrsu-
clningen (iber die rnssiseli-polnisclien luden und der Wert, diescr Unlersuelmn-
gen fur die .Vnlbropologie im allgemeinen.
Arrhii: /'iir Anthropologie, Mrauus( bweig. 190G. liand l\. Ilell 4, —
.V.NKEH.MA.NN (if DiMiiliard) I Uber dcii -('i.'cu\v;irligen Stand der IHbnograpbie
.1er Sùdhairte .Mrikas. Mit 17 Abbildungen und Tafel X.\XV bis .\X.\IX; —
.Mehlis (l'rof. D' C.) : Der Bronzezeilfund von Klingenmùnstcr i. d. Pfalz und
der « Goldene Ilut » von Scliifrersladt. Mit 10 Abbildungen; — Koch-Ghunbeik;
(Tbcodor) : Die Maskentiinze d(u- Indianer des obereu Rio Negro und Yapura.
-Mit 5 .Vbitildungen; — Ohekmaier (Di" Hugo) : Reitrage zur Kcnnlnis des Quar-
lars in den Pyrenacu. Krster Teil. Mit 5 Abbildungen und Tafel XL und XLL.
La Géographie, Paris, Masson, XII, n» 6. Les Rochimans du Kalaharl.
Id., \\\\, n" 1. — Gautiek (K.-F.) : Du Touat au Niger {avec une figure
dans le texte); — Roule (Marcellin) : Lémuriens et Lémurie.
Id , n» 2. — Desi'la(,xes (M.) : Une mission arcliéologique dans la vallée du
Niger [avec quatre figures dans le texte); — Demkek (J.) : Les récentes publi-
calions sur Lhassa et le Tibet (avec neuf figures).
Mitteilungen der Anthropologischen Gesellschaft in Wien, Wien, 1906,
XXXVI Band. 1. und II Ileft. — IIehman.v (Otto) : Zum Solutréen von Miskolcz
(mit 4 .Vbbildiingen im Texte).
Mitteilungen der Kais. Konigl. Gcographisclicn Gescllscjuift in Wien,
Wien, 1906 Raiid XLIX, n" 3 u. 4. — Lasch (R.) : Rin u.Mier Beilrag zur Kun<le
der Eingeborenen Westaustraliens.
Ymer, Stockholm, 1905. Hait 4. — Kjei.i.mauk (Knul) : Une nécroimle di' la
dernière |)ériode de l'âge du l'cr près dAs en .lenlland; — Kùust (C.-M.) : Les
squelettes humains trouvés dans la nécropole indiquée ci-dessus ; — Skottsiierg
260 -21 JUIN VM\
(C.) : Soiiit' ri'iiiiirks iiiion llie googruithiinl (lislriliuli<Hi df vo{.'clatioii in tin.-
colder Soutb(M'n Hcmispliore.
Bullellino di Palclnologia Ilnliana. l'arma. 1905. N. i 7-12. — Pkhmer
(Luigi) : Tombe (Mioolilliiolio dcl \'ileibose; — Jatta(A.): Un sepolcro primitivo
ad .Vndria o ICneolitico ncll .\pulia Barese ; — Culi.m ((j. .\jigelo) : Necropoli
a grotte artiliciali scoperta dal Prof. A. Taramelli nel territorio di Alghero
(Sassari).
Transactiona of the Dcparltnent of Archaeology. Free Muséum of Science
and Art. Vol. I. Part III. 1005; — Oordo.x (George Byron) : The Serpent Motive
in the ancient Art of Central .\nu'rica and Mexico.
Journal 0/ Analomy (Uid J^liysiology, London. .\pril 1906. — WiLSON(Pror.
.1. T.) : On the Anatomy of the Calamiis Région in the Hnman Biilb; witii an
Account ol" a hilhertho undes cribed « Nurlcus Postremus ». Part I ; — Parsons
(F. G.) : Notes on Ihe Coronal Suture : — Svminc.ton (Prof. Johnson) : .V Note
on the Topographioal Anatomy of the Capul Gyri Hippocampi.
Transactions of the Asiatic Society of Japan, december 1905; — Lloyd
(Rev. A.) : Notes on Japanese Village Life.
L'Anthropologie. Paris. 1905. n» 6. — Hamy (D"" E.-T.) : Notes sur un gise-
ment de labradorites taillées, découvert par le D' Maclaud au confluent de la
Féfiné et du Rio Grande (Guinée portugaise): — Bkelil (.\bbé H.) : Prétendus
manches de poignards sculptés de l'âge du renne; — Dichemi.n (Capitaine) ; Les
mégalithes de la Gambie (lettre à M. le professeur Hamy); Decorse (L)f J.) :
L'habitation et le village au Congo et au Chari.
Archives d' Anthropologie criminelle, Lyon, 15 mars 190ô. — Locard (E.) :
Les services actuels d'identification et la fiche internationale.
Revue Scientifique, Paris. 26 mai 1906. — I.ngegnieros (José) : D'une classi-
fication des criminels fondée sur la psychopalhologie.
Id., 16 juin 1906. — Sir Archibald Geikie : La géologie au début du xix^ siècle,
Lamarck et Playfair.
Nécrologie
EDOUARD PI ETTE
Par m. Zaborowski.
Je viens seulement d'apprendre la perte considérable que viennent de faire la
science et notre société dans la personne de M. Edouard Piette. Faire complète-
ment connaître cette grande et curieuse figure de louilleurémérite et de savant,
et donner une analyse même succinte de ses travaux est nne tâche que je ne
suis pas en mesure de remplir. Elle ne peut d'ailleurs être remplie par personne
au pied levé. Mais nous ne saurions laisser passer l'événement de sa dispari-
tion, sans exprimer notre respect ému pour l'homme, pour l'ardeur désinté-
ressée qu'il n'a cessé de montrer malgré la maladie et le poids des ans, et
toute notre gratitude pour l'œuvre qu'il a accomplie,
M. Louis-Edouard-Stanislas Piette, né à Aubigny (Ardennes), le 11 mars
1827. est mort à Rumigny (Ardennes) au château de la Cour des Prés, le 5 juin
ZAHOROWSKY. — KDOlAIll) l'IETTK
-261
1906. «laiis sa SO" année. 11 a ôlt- entfiiv à Hmiiiu'iiy le U juin, date où la nou-
velle nous est parvenue.
Dans le rourant de riiivoi- ilerniei' il ma lait un envoi ijui iii"aji(iarait bien
aujounlhui eomme la dernière attention dun homme qui sent sa fin prochaine,
et comme une précaution pour l'avenir des idées qui lui tenaient le plus au
cœur.
Dans cet envoi, avec sa carte, était comprise une notice sur lui-même conte-
tenant un portrait. Cette notice, à mon prand regret, ne nous apprend presque
rien de sa vie. Il y est dit seulement que. « juge honoraire, il a pris sa retraite
au pays natal, à Rumigny, après une carrière durant la(iuelle sa fermeté, son
impartialité et sa loyauté de magistrat ne furent pas sans lui susciter de graves
ennuis ». Elle contient après cela une simple nomenclature des travaux (ju'il a
publiés sm- ses fouilles, ses études et les questions prèhisioricpies qui s'y lal-
tachent. Cette nomenclature comprend 57 numéros. Le premier de ces travaux
que M. Piette lui-même a jugé à propos de rappeler, date de 1869 et est consa-
cré aux sépultures de Chassemy. Le dernier qu^il mentionne est son grand ou-
vrage suvVArf pendant l'df/e du renne, qui comprend 100 planches en chromo-
lithographie, paru en IDOO. Depuis celte dernière date. M. IMette a publié d'autres
mémoires et uolamnient dans la Revue V Anthropologie en 1904 et en lî)05.
La dernière communieation tpi'il nous a faite date de .1902. Klle est relative ;i
des gravures du Mas d'Acit et à des statuettes provenant d'une des grottes
de Menton. 11 s'était fait admettre comme membre titulaire de notre société le
17 février 1870, étant juge .le paix à Craonne (.\isni'). Il avait été présenté par
Dureaii. l'nini'r-Hey et Lartel. Dès l'année suivante, en 1871, il a donné dans
nos bulletins, son premier mémoire sur la grotte de (loiu-dan. Kl ses fouilles de
Gourdan sont justement dignes de figurer au premier rang dans son o'uvre
personnelle et au premier rang des fouilles les plus méthodiquement eonduiles
qui nous ont fait pénétrer le plus avant dans la connaissance des mieurs de
l'Age du renne de notre midi.
202 2\ jiiN l'.tdC»
llaltitiiiil coiistiiiiiimiil 1)1 iirovinco nii il riait rctonu \»iv su charge; de juge
(If ji.iix, il n'a |iii prcnilrc i»i(Mi rr(''(|iiciimii'iit pari à nos «lisciissions. Il osl venu
ro|MMiilaiit iha(|iio l'ois nous l'aire coiiiiailrc ses <lécouv('rtes rapilalcs: <'<'llcs
lin Mas (lA/.il avor ses galcls coloriés (1895) qu'il a fait (''dilor par la revue
VAitt/iropolof/ie (25 jdanciies in-4" 189G); celles de IJrasseinpouv avec ses éton-
nantes sculptures féminines (1894, 1895), qu'il a données également à l'An-
ihrnpologie (année 1898, i.'B pages avec 37 figiu'es dans le texte). Il a fait de
ciiaciitie de ces grandes stations pyrénéennes une étude si complète et si minu-
tieuse qu'il a su en tirer des renseignenicnls extrêmement alxmdanls qui nous
ont ouvert des vues nouvelles sur la civilisation des troglodvtes artistes de notre
midi. Chacune d'elles, Gourdan, IcMasd'Azil, Brassempouy, restera comme un
type de culture, nous fournissant des points de repère très surs et des termes
de comparaison pour nous guidei-dans les temps quaternaires.
Comme tous les inventeurs (jui s'absorbent dans leurs découvertes, il n'a pas
su résister à la tentation de légiférer. 11 a voulu faire une classification k lui
des temps préhistoriques, subordonner l'ensemble des observations acquises aux
résultats de ses observations personnelles. Il a changé et remplacé des termes
usuels avec lesquels tout le monde était familiarisé. Il a créé des termes nou-
veaux, toute une nomenclature nouvelle. VA comme il est resté presque seul à l'em-
ployer, il n'a pas en s'en servant, atigmenté la claretédans l'exposition de son
œuvre. Il ne s'en est pas tenu là. Il a poussé le besoin de réforme jusqu'à s'en
prendre à l'orthographe. Il a écrit de ses études, ses titres de mémoires, en or-
thographe simplifiée, pourchassant les h: notre ph, au profit des f. Et il
a consacré plus d'une brochure à exposer et à défendre ses classifications nou-
velles: Nomenclature de l'ère antro pique (sic) /;/■««? /^/re (in-S" 1889); Fases
successives de la civilisation pendant l'dye du renne dans le midi de la
France fAss. fr. 1892); l'époque éburnéenne et les races humaines de la pé-
riode glyptique (1894)...,.
Les pièces importantes, et il y en a dont l'importance est capitale, qu'il a dé-
couvertes, par suite des préoccupations dont elles étaient incessamcnl l'objet de
sa part, ont fini par prendre dans son esprit un relief obsédant. 11 voyait un peu le
reste de l'univers à travers ce qu'elles lui apprenaient. Elles se suffisaient et elles lui
suffisaient pour trancher les questions les plus difficiles et les plus complexes.
C'est ainsi que nous l'avons vu pendant de nombreuses années, décider de lapré-
sence. du caractère, des affinités de races humaines diverses avec de rares petites
figurines souvent informes, alors qu'il nous est si difficile de déterminer avec cer-
titude ces mêmes races quand nous en avons de nombreux débris osseux. Ainsi il
croyait qu'une seule statuqtte féminine de Brassempouy, aux fesses proéminentes
et à parties sexuelles plus ou moins exagérées suffisait pour établir la présence de
la race bochimano dans celte station. Il a écrit dans nos FiuUetins mêmes (1902,
f». 773. 774): « La figuration des organes sexuels des statuettes, m'a fourni une
des preuves les plus évidentes de la présence delà race bochimane aux temps
glyptiques dans les cavernes.» Et il est arrivé à se persuader que ti-ois races
dilférentes, très distantes l'une de l'autre, ont vécu en même temps, dans ces
mêmes cavernes. Il le dit textuellement («6/c/., p. 776; : « Il est donc à peu
près certain que notre race fut aussi l'une de celles qui vivaient dans les ca-
vernes à l'Age glyptique. Ainsi la race de Néandcrthal, celle des Somalis et la
notre sont représentées par des statuettes de Brassempouy et de Menton. »
Le respect que nous inspiraient son grand âge et ses longs travaux nous ont
fermé la bouche devant ces étranges déclarations. Son imagination restée vive»
ZAIumowSKI. KDiHAHIt l'IKTIK
:>03
sost donnée rours mm iiii>iiis lihrciiKMit h propos des galets colorés du Mas
dAzil.
Pour lui d'abord les lar^'es lijjjnes peintes sur ces galets étaient tout au plus
fffs symboles, et môme cependant aussi des formules de morale et de piété.
■• Ils pouvaient, nous dit-il, représenter des objets, des mots, et peut-être même
des pbrases entières » (fiullet., 1897, p. 284). Mais il est arrivé à croire que ces
sipnes f,'rossiers avaient fourni des éléments des plus anciens alpbabets liislo-
ri<pi.s. IN Les si,i,Mies asvliens ont traversé l'AjE^e ilu bronze, nous dit-il (ifjid.,
p. 280). On les retrouve eu partie sur les l'usaïoles de la ïroaile. dans le sylla-
baire cb.vpriod'. dans l'écriture égéenne. Ils sont plus nombreux encore dans
les alpbabets des IMiéniciciis. des Crées et des Italiotcs. On s'est étonné des/es-
senddanccs de certains caraelères runiques avec ceu\ de l'alpbabet étrusque,
l-es peuples du nord et i-eux de l'Ilalie ont [tuisé à un niènie loiid curiiiniin d.-
siL'ues |irébistoriques. »
Les runes sont une imitation des lettres romaines, sans aucun doute possible.
Kl leur intervention est postérieure à notre ère. On voit par celaseul. de quelle
laible portée sont les vagues ressemblances dont se contentait M. Piellequi ne
semble pas dailleurs avoir connu les découvertes si importantes des vieilles
écrilures ibériques, dont il aurait pu tirer avantage. Son langage si étrange-
ment li.irdi a cependant eu de l'écho. Des années ai)rès l'avoir tenu, il en déve-
lojqiait la même idée. Dans deux de ses derniers articles, il montrait d'abord, en
réiluisant les signes peints des galets à des lignes régulières, que, après ce chan-
gement complet d'aspect, plusieurs d'entre eux offraient ime ressemblance avec
des caractères phéniciens et grecs {Notions corn pi émeut aires sur l'asi/lien. L'.Vn-
fhropologie, 1901), et parlant ensuite délibérément d'inscriptions quaternaires
<le Courdan. de Lourdes, de la Madeleine, etc., des Écritures de l'âge ijlyp-
tique (L'.Vntbropologie. 1905). il exposait qu'entre la date de ces écritures qua-
ternaires formées de caractères pictographiques, et celle des signes graphiques
di-s poteries .l'.Vbydos et de Négadah. iiy avait une dislance «le 4.500 à 5.000 ;ins.
Cette distance pour lui n'était pas une dillicullé. ou un obstacle à la possibilité
de la transmission des Pyrénées à l'Egypte, de signes symboliques : « Cétait
le temps nécessaire à une écriture pictographique pour se former, évoluer et
aboutir à une écriture cursive ». Il dé<ouvn( (l'.iilleurs une « écriture cursive »
même à (lourdan (1. c. p. 9).
Kn réalité, rien ne prouve que les inscriptions <piaternaires de M. Pietle
soient toujours autre chose qiicdes motifs de «lécoralions. Il s'y mêle peut-être des
signes de sorcier, plus ou moins cabalistiques ou mnémotechniques. 11 n'y a
rien de plus probablement. VA ce n'est pas par fantaisie, c'est en raison d'obser-
vations précises et nondjreuses que nous réduisons ainsi la valeur de ces soi-di-
sant écritures à peu de chose. Elles ont été l'objet des dernières préoccupations
de M. Piette. Il embellissait par elles, en la relevanl. la vie des hommes qu'il
avait étudiés pendant plus de trente ans. Là nu il ny avait que des tribus de
chasseurs aux goiils artistiques d'ailleurs siniiren;inls. elles lui faisaient voir
tout un mond 'i le llambeau de notre civilisation actuelle s'allumait, mon.le
cependant biei dé. puisipiil y trouvait jusqu'à <|es P.ochimans. De telles illu-
sions sont pardonnables à làge où il était, sous le verre grossissant de son
amour pour ces vieux troglodytes dont il lui siMublait |)resque partager l'exis-
tence.
Quelques années avant île mourir, il a pris des mesures pour que ses vues
générMies sur les à-es .piat. -maires fuss-'ul <-onnues de tous el s'imposnsseni .
264 21 jiMN IllOO
Il il l'ail ilciii i\o sa roUcction ontirro ipii t'sl sans jn-ix. riant données siiilcinl
lt>s nierveilios d'art (nialornairo (jnelle rontonne, au musée do Saint-iicrniain.
il la fait sous certaines conditions. M. Salomon Keinach a l'ait connaître ces
conditions dans une note de la Revue archéologù/ue. Cette collection ne pourra
jamais être divisée et dispersée. Elle restera assemblée dans la même salle por-
tant le nom du donateur et exposée suivant Vordre .stratif/raphir/ue, confor-
mé/lient à 1(1 classification et à la terminolofjic adopff^es par lui. M. l'iette
s'est réservé pour dix ans le droit d'emporter temporairement, de l'aire dessiner
et pliolofTiapliier tous les ohjols. PeiUlanl ces dix ans. aucun île ces olijets, saut
ceux publiés par lui tlepuis plus d'un au. ne pourra être photographié, ilessiné
ou moulé, si ce n'est par lui-même ou ses ayants-droit après sa mort.
La collection IMelte restera longtemps et peut-être toujours une des grandes
attractions pour les visiteurs prévenus du musée de Saint-(iermain.
On s'est l)eaucoup étonné qu'après ce don magnifique, qu'au moins après ce
don. son auteur honorant à la l'ois la science et son pa^s. n'ait point été l'objet
d'une distinction officielle marquée. Le fait peut être apprécié diversement.
Je ne connais pas quels furent les sentiments personnels de M. Piette.
En réalité, nos gouvernements no sont point avares de ces distinctions
Ils se donnent ii eux-mêmes force et prestige, lorsqu'ils les accordent au
mérite éclatant et au désintéressement. Mais beaucoup de philosophes et de
savants pensent que leur action est en dehors et au-dessus de la compétence
des fonctionnaires des administrations si haut placés qu'ils soient. Et il nous est
bien agréable en tout cas de compter l'iette, qu'au surplus, les sociétés savantes,
les mieux qualifiées pour le juger, ont comblé d'honneurs, parmi les grands
serviteurs de cette science indépendante qui donne tout ce qu'elle récolte d'une
main prodigue, aussi dédaigneuse dos sanctions d'apparat que des récompenses.
M. le Df ^larcel Baidoiin, secrétaire général du Comité d'organisation du
5* Congrès histovi<jue de France, annoncé à la Société qu'en 1906 le Congrès
préhistorique se tiendra à Yannc^s du 21 au 26 août, sous la présidence de
M. A. de Mortillet.
Les Compagni(;s de chemins de for ont accordé les réductions d'usage et trois
journées seront consacrées à de grandes excursions. La première aura lieu
dans la mer du Morbihan, où l'on pourra étudier les etfets de la mer sur les
mégalithes des îles, et les autres dans la région do Çarnac et de Quiberon.
11 y a urgence à se faire inscrire le plus tôt possible pour ces excursions.
M. IIekvk présente à la Société des phologra|ihios représentant des types
négroïtlos rencontrés parmi les populations aciuclles du Var.
ETTE. — VASE l'KINT l'IKtVKNANT OKS SKPI'LTI'UKS UK ST-IIII,AlltK-I>l -IIIK/. '205
DEGHEI
SUR UN VASE PEINT PROVENANT DES SÉPULTURES DE SAINT-HILAIRE-DU RIEZ.
l'A» M. Dkciiei.ktte.
A propos lie l'arlii-lo d.; M. Mar.<'l P.amlouin sur les sépultures de
Sainl-llilaire d.'-Hiez ', je crois ulile de vous faire parvenir queliim'simli-
calidiis sur l'atlribution chronoloiAi'iue du vase peint, reiieuiiliV' .laiis
cclll' t'iniillc.
11 ap|.arlieiil à un." s.'mk" dunl l.-s .ix..-inplaires sont rares, mais (jui peut
.Mre flass.'e avi'c cerlitu le aux m" et iv« siècles de notre ère.
J'ai décrit comme suit, dans mon récent ouvrage*, ces poteries peintes
-allo-romaines, dont j'avais constaté la présence dans la région de
l'oiliers, c'est-à-dire dans un département limitrophe de la Vendée, où
M. Marcel Baudouin a recueilli ce nouveau spécimen : « 11 faut encore
classer dans la série qui nous occupe [vases en forme de figurines, un
modèle de cruche assez répandu, dont le col représente la forme d'une
tète humaine, ordinairement féminine. L'exemplaire que reproduit la
pi. VllI (Fi;i. 3) provient de Jazcneuil (Vienne), et se trouve déposé au
Musée des Antiquaires de l'Ouest, à Poitiers. C'est un type céramiipie des
\n''-n" siècles, qui apparaît dans la plus récente des deux n(''ciopoles
d'Andernach (Musée de lionn).lJn exemplaire, provenant de la région de
Worms et conservé au Musée de Mayence, a été publié par M. Lindenschmit
fils, sur une planche en couleurs du tome IV des Allerihiimer {VI. IV,
Fi;/, 'i).
Ces vases ne sont pas rares en Allemagne; mais on les trouve aussi en
Angleterre et dans le Nord de la Caule, notamment au Musée de Bou-
logne et jusqu'cà Poitiers. La panse de plusieurs exemplaires (Voir :
/'/. Vin, Fig. 2) est engobée, comme le vase de Jazeneuil, d'une couverte
rouge-brun, tachetée d'étoilures {)lus claires, décor très caractéristique
obtenu, sans doute, au moyen d'enlcvages au pinceau ou à l'éponge.
L'âge de la nécropole d'Andernach a pu être déterminé avec une
entière précision. Située dans la vallée du Rhin entre Coblentz et Ander-
nach, elle a été explorée en 1870 par les soins du Musée de Bonn, où se
trouve déposé le produit des fouilles. Les périodes pré-romaine, romaine
et franque y sont représentées.
Les tombes romaines constituent deux groupes bien distincts, dont le
premier est contemporain d'Auguste et de ses premiers successeurs jus-
qu'à Néron, tandis que le second ne débute qu'au iii" siècle '.
Je vous remets ci-joint un calque du dessin de l'exemplaire que j'ai
publié.
» Bull,, l'.'Oô, p. 271.
* Les vases céramiques, II, fp. 324-325).
Cf., ibid., p. 62.
■2m 21 jiiN inoti
Le col (lu vase de Saint-llilaire. .n Inniio de buste féminin, ne s'est pas
conservé ; néanmoins, el quoique la description donnée par M. Baudouin
soit incomplète, le rapprochement que je propose me semble fondé.
Discussion.
M. Marcel Baudouin. — Je suis très reconnaissant à M Décheletle d'avoir
bien voulu apporter la preuve technique que le vase décrit par moi est
bien fjnllo-romain, et du ni"-iv° siècle. J'avais écrit ii"-!!!" siècle, lors de la
rédaction de mon travail ', alors qus je n'avais sous les 'jeux qu'une aquarelle
de celte pièce. Mais j'ai, lin 1903, vu le vase lui-môme, et pu le photo-
graphier. Sa description complète paraîtra dans un mémoire ultérieur, avec
celle des squelelles recueillis en même temps. Aussi, dès aujourd'hui, je
crois devoir le rajeunir d'un demi-siècle au moins : ce qui fait que je suis
tout il fait de l'avis de mon collègue (pour d'autres raisons, purement
/ocrt/cs, c'est-à dire vendéennes, d'ailleurs).
Il est évident (jue le rapprochement proposé par M. Déchelette peut se
soutenir, même dans les circonstances présentes, c'est-à-dire l'absence de
col en forme de buste féminin. Toutefois, je n'oserais pas être aussi affir-
matif que cet auteur, car je trouve des dilférences notables, surtout au
niveau de la base du col qui, dans mon vase, est très petite, et n'a pas la
forme d'un cou de femme. J'ajoute qu'il est plus ventru et moins haut que
celui décrit ci-dessus. Les analogies résident donc surtout dans la déco-
ration de la panse. Je n'oserais affirmer qu'elle soit sulfisante pour pouvoir
conclure à une identité de forme.
* Loc, cit., |). lo'j.
AVELOT.
I,E JEU DES r.ODETS 267
LE JEU DES GODETS
Un jeu africain à combinaisons mathématiques.
I'ah m. Avei.ot
Lieulonant il Iiifuiilerie.
Co jeu est parliciilièronn.'iil iiilôfcssanl en ce sons qu'il est exclusivement
africain ', et qu'il s'est répandu dans tout le continent à l'exclusion de la
rf'Lîion méditerranéenne.
Dans sa fortiie primilive, il se compose d'une pièce de bois dur en forme
de prisme reclangulaiie d'environ un mùtre de longueur; sur une des
faces douze petites cuvettes ont été creusées en deux rangs parallèles
de six; à chaijue extrémité se trouve une case beaucoup plus grande
•'l plus profonde, qui contient les graines dont on se sert en guise de
jetons.
Ce jeu est praticjué :
Par les Peubis, les Yolofs et les Mandingues qui l'appellent ouii : ils
utilisent comme jetons les graines de baobab - ;
Par les Krou du Cavally, (pii l'appellent oura, et y jouent avec des
graines de la liane ouvaloii ^ ;
Par les Agni de la Cùte-d'I voire, ipii rappellent anarc, et y jouent avec
des graines appelées aic<i)c-l,ivin '^■,
Par les .Vsluuili, (pii l'appellent vora '^ ;
Par les Accra de la Cùte-d'Or, qui l'appell.Mit lami '^ ; Monrad y a vu
jouer des négresses, qui se servaient comme jetons de noix ondées de
couleur grise ; ces noix, encbassées dans de l'or, se portaient suspendues
à des chaînes de cou " ;
Par les Dahoméens, chez lesquels le jeu, nommé adjilo. a huit, dix ou
douze godets '^ ; l'exemplaire représenté par Foa est artistement travaillé
et orné de statuettes en bois ;
Par les Nogo du Vorouba et les Minas des Popos, (pii Tapp^^llent (tijo '';
' D'après Bow.licli, ce j<'u serait aussi connu en Syri<' ; malgré des recherches
alleutivcs je n'ai pu conirùler celte assertion.
' iiOh\iV.\iiC{. — Fragment d'un royar/e m Afrii/uc. Paris, IT'JI, t. II, p. /iSO et sq.
3.1 lu PIQUET. — Le Bri.sCfirall!/ français (liuli. Coin. Afr. franc, l'JOS. Suppl.
n- II, p. 2S;i).
'» M. I)El.Aros.SE. — h's.iai de manuel de la lanr/ue ar/ni. Paris, I!) >l, i' 2',).
5 Edw. BowniCH. — Misxian from Cape Coasl Cas/le te Ashantee. Lond., I«19.
6 Renseign< ment personnel.
" II. -C. Monrad. - Gemalde dm- Kiïste von Guinea. Tiail. du danois, 182^.
■< .John Duncan. — Trarels in weslern A/'rira, Lond. 1S17, l. 1, i). l'tO. - F.. FOA.
— Le Dahnmeji. Paris, i89o, p. 249-50.
J Abbé Pierre Bouche. — Sept ans en Afrique Occidentale. La Cote des Esclaves
pl le Dahomei/. Paris. IS8.Ï, p. 10M03. - A.-L. u'Albéca. — La France au Daho-
mey, Paris, 18'Jb, p. 166.
268 i>l jiiN 100»)
Par les Mpongwé du (iahon, (jiii rapjtellcnt cihérhè, et y jouent avec les
tckongé, petits fruits verts semblables à des olives; chez eux le jeu a tou-
jours douze cases ' ;
Par les Kadches d'entre Tchad et Bt-nuué *;
Par les N'iam-Niam ou Azandé, qui lont enseigné à toutes les peuplades
du Hahr-el (iazal, sauf aux Momboullon qui y sont restés réfractaires ' ;
les Niaui-Niam l'appellent nhnmja, les Bongo, lohi, les Diour ou Shillouk,
mtM ; les Nubiens eux-mèuies l'ont adopté, et lui ont ïlonné le nom de
manfjala ou monnijalu '", mot arabe dérivé de nagn/, qui signifie « déplacer,
transporter d'un lieu à un autre » ; chez les Niam-xNiam le jeu a seize
fossettes; il en a dix-huit chez les Nubiens; les uns et les autres emploient
de petits cailloux comme jetons '•' ;
Par les Kimboundas, qui l'appellent Islicla ; chez eux le jeu a cjuaranle
trous '' ;
Par les nègres de l'Ouroua, qui le nomment kisolo, et se servent des
graines masoko ^;
Par les Ilottentots, qui l'appellent « jeu du tigre et de l'agneau », et
y jouent avec des crottes de brebis dans des trous faits en terre au nombre
de vingt à quarante '■' ;
Enfin aux îles Comores, où il s'appelle m'yaântsou *".
De tous les voyageurs qui ont signalé cejeu, quatre seulement en ont
donné la règle : (îolberry, l'abbé Bouche, Foa et d'Albéca. Schweinfurth
se contente de dire que chaque joueur est pourvu d'environ deux dou-
zaines de petits cailloux, qu'il faut adroitement faire passer d'une pochette
dans une autre, et Bowdich avoue humblement qu'il ne put comprendre
le vora.
Les règles données par les quatre voyageurs sont assez compliquées et
donnent lieu à des combinaisons intéressantes. Les dflTérences qu'elles
présentent sont considérables. Je les donne ci-après, en les faisant suivre
de la règle du jeu tel qu'il est joué au Gabon ; cette dernière est elle-même
différente des quatre autres, mais se rapproche cependant un peu de la
règle du jeu nago.
• Renseignements personnels.
î D'après l'autorité de Schweinfurth, Au cœur de l'Afrique. Paris, i875, t. II,
p. ys, mais je n'ai trouvé nulle part ailleurs de mention de cette tribu des Kadches.
' Schweinfurth. — Loc. cit.
* Schweinfurth. — Linguistische Ergebnisse einer Reise nach Cenfralafrika.
Berlin, 1873, passim.
5 Mangala dans Au Cœur de l'Afrique, moungala dans Linguistische Ergebnisse.
6 Schweinfurth. — Au Cœur de l'Afrique, t. Il, p. 28.
7 P. Bouche. — Loc. cit. Mérpe observation que pour les Kadches. Il s'agit proba-
blement des Kimboundas, nom sous lequel les nègres de Beuguéla désignent les
nègres sauvages de l'intérieur (Serpa Pinto).
8 V.-L. Cameron. — A trarers l'Afrique. Paris, 1878, Append , p. 542-o43.
3 Le Vaillant. — Second voyage en Afrique, ISOS, t. II, p. 325.
*o J, Repiquet.— Op. cit.
AVKI.uT. — l.E JEl DES liODETS 269
Règle nr jeu sknkcki.ais '. — (!li;ii|U(' join'iii' a vin^l-t't-iim' lioiilrsii
placiM"; les coups sont allornalifs, cl la piimaulô se lire au sort. Il faut
(ju'à la fin do la partie, les six cases de ehacfue coté aient été employées;
qu'à la sixième case, les vingl-et-une houles aient iHé toutes placées ;
et, par la combinaison de ce jeu, le gain de la partie apparlieut à celui
(|ui a mis son adversaire dans l'impossibiliti' de jouer son dernier coup,
en observant les règles du jeu qui varient suivant certaines circonstances
de la partie, et suivant le nombre pairet impairdes premièies boules placées.
Par exemple, si celui qui a gagné la primauté débute par ne placer qu'une
boule, son ailversaire est forcé par la règle du jeu, d'en placer au moins
deux; mais il peut aussi en placer trois. Celui qui a joué le premier, et
qui va jouer son second coup, est forcé de placer un nombre pair de
boules, soit au-dessus du nombre trois, soit au-dessous. L'intrigue et la
combinaison de ce jeu consistent à mener la partie de manière qu'au der-
nier coup à jouer il soit resté dans la main de l'adversaire un nombre de
boules qui ne soit pas conforme à la circonstance de la partie et aux
règles du jeu. Si cela arrive à celui qui a eu la primauté, il a perdu, et
l'adversaire est dispensé déjouer son dernier coup; si cela arrive ii l'ad-
versaire, la partie est perdue pour lui; mais, si celui-ci a joué de manière
qu'il arrive aussi à son dernier coup avec un nombre déboules conforme
aux conditions et aux règles du jeu, la partie est nulle. L'ouri a plus de
combinaisons que le jeu de dames ; et cependant les femmes seules le
jouent, et les hommes ne s'en s'amusent jamais.
Rkt-.LR DU JEU D.xfioMÉEN ^. — Les deux joueurs ont chacun une rangée.
Au début, on met dans chacun des trous trois graines fort dui'es. Le jeu
consiste, en changeant successivement les graines de place, à arriver à
mettre la dernière seule dans un trou vide en face d'un de ceux de l'ad-
versaire bien plein ; on a ainsi le droit de tout prendre. On ne doit pas
sauter de trou ; c'est celui qui a pris le plus de graines à l'autre qui a
gagné la partie.
Règle du jeu nago '. — Chacun des deux joueurs a vingt-quatre graines
servant de jetons, distribuées quatre par quatre dans les trous de son côté;
chacun à son tour prend les jetons d'une case dans la rangée du vis-à-vis,
et les place un par un dans les cases suivantes, en allant de gauche' à
droite; celui qui rencontre dans les cases de son adversaire un ou deux
jetons seulement s'en empare, et la partie continue jusqu'à ce que l'un
des deux ait tout pris à l'autre. « Les combinaisons de ce jeu, souvent fort
compliquées, exigent une grande tension d'esprit ».
' D'après Golberry.
' D'après Foa.
' D'après r&bbé l\ Bouche et d'Albéca.
270 -M J' IN 1'.»0<)
Wmi.E DU JEU r.AHONAis '. — L'crhén- est placé onlrc les deux joueurs,
chacun ayant à sa gauche la case dans laquelle il placera son gain, et
chacun ne devant jouer qu'avec les tchougé placés dans la rangée de son
côté. La jtailie se dispute en plusieurs luanciies.
1'° Manche. — Après avoir j)lacé quatre tchongé dans chaque trou, on
tire au sort à qui commencera ; le joueur désigné prend les tchongé placés
dans un godet quelconque de son côté, et les dépose un à un, sans sauter
de case, dans chaque godet, en allant de la gauche à la droite dans la
rangée de son coté, puis, s'il y a lieu, de la droite à la gauche dans la
rangée de son adversaire (en d'autres termes, en sens inverse des
aiguilles d'une montre). A cha(iue coup, quand le dernier tchongé placé
complète à deux ou quatre les nombre des tchongé qui se trouvent déjà
dans le godet, le joueur les ramasse; il ramasse également les tchongé des
godets immédiatement voisins, si ces tchongé sont au nombre de deux ou
quatre; ces gains ne peuvent se faire que dans la rangée de l'adversaire.
La partie se continue jusqu'à ce que l'un des joueurs n'ait plus un seul
tchongé dans sa rangée.
2" Manche. — Le joueur gagnant place dans sa rangée vingt-quatre
tchongé, quatre par quatre, les tchongé gagnés, en surplus restant dans la
case à ce destinée. Le joueur perdant place les tchongé qui lui restent,
également quatre par (juatre, dans les godets de sa rangée, en commen-
yant par la gauche, le dernier godet pouvant ne contenir que un, deux
ou trois jetons; les cases restées vides sont « brûlées », c'est-à-dire qu'on
les saute pour jouer. On joue alors de la même façon que précédemment
jusqu'à ce qu'un joueur n'ait plus un seul tchongé dans sa rangée.
La partie se continue ensuite, s'il y a lieu, par une troisième, une
quatrième manche, jusqu'à ce qu'un joueur n'ait plus un seul tchongé.
Discussion.
MM. HuGUÊT et Hervk font quelques remarques sur la communication
précédente.
M. Z.\BOROWSK[. — L'existence de ce jeu a été constatée déjà au
xvii« siècle en Afrique? Il est donc ancien, et c'est cette ancienneté qui
explique sa diffusion si grande. Les Pahouins ne le connaissent pas?
Leur arrivée au Gabon est en eftet récente. Mais ce jeu n'était donc pas
connu dans leur pays d'origine qui est plus ou moins oriental, du moins
par rapport à leur habitat actuel? Le fait a quelque apparence contradic-
toire. Je crois volontiers que les nègres ne sont pas les inventeurs du jeu
' Jo donne celte rè^,'le telle qu'elle m'a été enseignée par mon hôtes.se de Libreville,
Miss Kate Luttcrliold, mais conime Miss Kate est originaire d'Accra, il se peut que
juie appris en réalité le jeu de la Cote d'Or; je ne le crois cependant pas.
E.-T. IIAMV. — r.KS <:ENT 01 AllANTK NICCRES IJE M. d'aVaIA :>71
des godets et qu'il leur est venu de la cote orientale. Mais je ne crois jxas
([u'il y ait lieu de parler à celte occasion des Malais. Les seuls introduc-
teurs possibles sont les Arabes ou des nriclis d'Arabes anciens. Il y a d'ail-
leurs du santr arabe jusque chez les Cafres qui sont venus du N.-E.
Je n'en conclus pas d'ailleurs que les Arabes sont de même nf'cessairomfnt
les inventeurs du jeu en question.
LES CENT QUARANTE NEGRES DE M. D'AVAUX A MUNSTER i1644).
Anecdote ethnologique racontée
Pau m. E. T. Hamy,
Piésideiil de la Société.
Jamais le luxe habituel aux ambassades du Hoi de France ne s'est étalé
avec plus d'ostentation que dans les conférences qui réunirent h Miinster
et à Usnabriick les plénipotentiaires qui devaient traiter de la paix avec
l'Empire. L'ambassadeur français, M. d'Avaux, dont l'agent Sainl-Komain
préparait les logements à Munster dès septembre IG43 ', arrivait dans cette
cité le 17 mars suivant * et le faste qu'il faisait paraître à son entrée rem-
plissait d'admiration Contarini et le maf/istrat de la ville, bien qu'il n'eût
encore dit Saint-Romain, qu'une pnrlia de son monde à sa suite.
\ lui seul, écrivait qutilques jours plus tard le même agent au baron de
Uorté, autre ambassadeur du Roi « estant maintenant à Embden », à lui
seul M. d'Avaux a autant et plus de train «que les cinq Austricbiens
ensemble » et il conte à ce propos à son correspondant une anecdote qui a
your des anthropolof/istes une saveur particulièrement piquante.
La Semaine Sainte est survenue, et les Ambassadeurs font publique-
ment les démonstrations religieuses accoutumées : les Espagnols entrent
au Dôme de Miinster et le trouvent envahi déjà par les gens de M. d'Avaux.
(Jui croirait que dans ce cortège figuraient cent quarante n/'i^res ? Le té-
moignage de Saint-Romain est pourtant formel, les Espagnols eurent hor-
reur à cet asjwct et' s'en allèrent faire leurs dévotions ailleurs, et notre brave
agent se réjouit de cet échec, le second qu'ait déjà subi la vanité des
Impériaux depuis l'arrivée des Français. Je transcris in-extenso la lettre
de Saint-Romain à Rorlé qui renferme ce curieux dfUail liien fait pour
étonner les anthropologistes.
Nous savions, en elTet, qu'il venait, bien avant cette date, des nègres
(Moros) en Europe et dès la fin du xV-' siècle, les comptes de René d'Anjou
font soigneusement, la distinction entre le more blanc du bon Roi, quelque
* Bibl. de l'Inst. Fonds Godefroy. T. 273, l" 56. Lettre de SaiiilHoiiiaiii à Uorté du
septembre 1G43.
' Ibid., f 128. Lettre du 19 mars 16'»i.
•21^2 '2\ JiiN 1906
berbère, arabe ou lurcsaiis ibnile, el ses autres x/ojv.s qui devaient (Hrc des
gens de couleur '. Mais qui ib) ncjus eût soupçonné qu'un anihassadeur de
France traînerait à sa suite en mars 1(>44 de La Haye ù. Munster « cent
qniiraiile m'-gres pour le moins >< couiuie l'assure la lettre (jue l'on va lire.
A M. le baron de Horté.
Monsieur.
Voici la rcsponsi' tio Monsieur !\ la lellrede M. Siil\ius(|ne vous biy envoyastes
par la poste impériale, nous sonnnos dans les dévotions el je n'ay rien à vous
diresinon que Monsiem-flAvanx, eslanl liieid.insle Donie, les trois .\mbassadein's
(ri''spa}i[ne pensaient y venir à rol'liee, nuiis estans entrés dans l'église ils aper-
ceurenl Monsieur avee une suite de cent quarante nègres pour le moins Ils
eurent borreur à cet aspect el ressorlirent par une autre porte un peu confus et
allèrent l'ère leur dévotion ailleurs. C'est la seconde l'ois qu'ils cèdent publique-
ment. .\ la venue de M. le Nunce ils avoicnt concerté avec les hiipériaux den-
vover au devant de luy et d'unir leurs forces pour nous faire alTront, M. d'.Vvaux
me commanda de monter à cbeval et d'aller avec vingt de ses gentilsbonunes sur
le cliemin (juc tenoit led. Nunce pour prendre garde que ceux qu'il envoioit à sa
rencontre tinssent partout leur rang. Les Inipéiiau.x nous virent sortir de leur
fcnestres et après plusieurs consultations quittèrent la partie et les bnpériaux
envoyèrent seuls i\ la rencontre du Nunce. Cela est rçmarquable à Munster d'oii
vous connoissez la partialité. Il y a d'ailleurs cinq Ambassadeurs de la Maison
d'Autricbe* et M. d'.\vaux y est seul de l'autre part; fier est de faire belle res-
ponse et d'estre bien accompagné. Monsieur d'Avaux a autant et plus de train
seul que les cinq Autricbiens ensemble. 11 ne leur veut pas insulter pour cela;
nous sommes en termes de reconciliation, il faut accommoder nostre langage au
temps et à ce pieux dessein et ne point faire les braves, mais vous n'avez que
faire de cet avis. M. d'Avaux vous baise les mains et moy je demeure toujours,
Votre bumble et obéissant serviteur.
S.M.NT Romain.
Lorsque vous viendrez ici, j'espère que je serai en estât de loger votre personne
et Monsieur le veut ainsi; et l'on verra si l'on pourroit acconmioder votre équi-
page ailleurs que dans une bostellerie, cela sera diflicile.
Les négociations pour la paix que des questions de préséance entravaient
à chaque instant comme elles avaient fait à Vervins (15'98)et à Boulogne
(1600), duraient encore en Août. Nous- ignorons si les i40 nègres engagés
pour la circonstance, sont demeurés au service de M. d'Avaux, quand il
s'est transporté à Osnabnick à la fin d'avril 1644. Combien il eût été inté-
ressant desavoir quelque chose de leur destinée ultérieure I Ne serait-ce
pas un des leurs, par exemple que l'on voit moulé en plâtre et peint en
* et. A. Lêcoy de la Marche. Extraits des comptes et mémoriaux du Roi René pour
servir à l'histoire des arts au XV' siècle. (Documents historirjues publiés par la
Société de l'Ecole des Chartes.) Paris, 1873, ia-8, pass
* MM. le Comte de Nassau, Kriui, le Comte d'Auersberg, M. de Neuhof et encore
un autre.
DISCUSSION 273
noir dans cette curieuse gravur»^ imprimée en IlMo de VArt de conna lire 1rs
llonwies^ seize ans seulement après Miinstcr.
Celle planche représente un vieux savant, orné de la longue barbe (|ue
portaient les médecins, la létecoilTée d'un bonnet fourré, le corps enveloppé
d'une ample robe à longues manches retombantes. C'est Cureau de l.a
(Miambre ; il mesure de la main gauche avec une sorte de compas un buste
en pUltre posé devant lui sur une table, tandis qu'un registre sur Itquev
la main droite appuie, attend le cliilïre que l'observateur va inscrire. Une
image pi(iuée au mur montre de face une figure en pied sur laquelle sont
imliipiés par des fiches un certain nombi'c de jioiiUs sini/ulios: au dessus
sur une lablette grimacent trois autres phVtres, dont une tète de nèyre par-
faitement reconnaissable, celle peut-être d'un des cent quarante serviteurs
du fastueur M. d' A taux!
Discussion.
M. G. Hervk fait suivre celte très curieuse anecdote de quelques considé-
rations sur le rôle, peu connu, de l'élément nègre dans l'ethnogénie de
certains peuples européens.
Si, en ce qui concerne la F'rance, ce rôle est tout hypothétique, —
quoiqu'il ne semble pas impossible que les courses elVectuées durant plu-
sieurs siècles par les Sarrasins, jusqu'au cœur du pays, lui ait permis de
s'exercer, — nous sommes mieux renseignés en ce qui concerne les
contrées du midi, Espagne et Portugal.
Dans ce dernier pays, d'après les recherches historiques et anthropo-
logiques du Df Ferraz de Macedo, du sang nègre aurait été infusé en
quantité considérable, et cela bien avant les grands voyages maritimes des
Portugais. La dilution et l'absorption progressives qu'il a subies n'empê-
cheraient pas d'en reconnaître les traces, notamment chez les populations
de l'Algarve et de l'Alenlejo.
En Espagne, l'existence du royaume maure de Grenade et ses longues
relations avec les Etats barbaresques furent cause, pareillement, de
l'introduction prolongée d'un nombre, probablement très élevé, de nègres
esclaves.
M. Hervé cite, à ce sujet, le passage suivant, tiré de VUtstoire du régne
de Philippe II, par W. II. Prescott, et relatif à la période comprise
entre la capitulation de Grenade et l'expulsion définitive des Musulmans
d'Espagne :
« La première loi importante, concernant les Mores, date de 1500^
année oii les Cortès de Caslille présentèrent une adresse h la couronne,
pour réclamer contre la liberté laissée aux infidèles de se servir d'esclaves
' J'ai reproduit cette curieuse figure dans mon mémoire ititilulé ; Recherches sur
les origines de l'enseignement de l'anatomie humaine et de i anthropologie au Jardin
des Plantes. {Nouv. Archiv. du Muséum, 3" Sér. T. VII, p. 10, 1895.)
soc. d'anthbop. 1906. 19
27-4 :il Ji IN i9Û()
ni'grcs, (jiii, assun'mciil t'Icvrs \m\\ leurs niaîlics dans 1rs [iiiiicipi's du
mahûinclisiiie, i^rus&issaienl la p(»i>iilali('n anlicInrlicniiL' du pays (Mar-
mol, Ili'bi'lion de los Moriscos, 1, 13")); une pragmatique royale fut donc
publiée, qui défendait au peuple de (îrenade d'employer des esclaves
africains. Celte interdicliun causa un grand méconlenlcMncnt. car la
classe aisée était dans l'habitude de recruter ses domestiques parmi ces
nègres, qui, dans les campagnes, étaient en grand nombre chargés des
travaux agricoles. » (Op. cit., Irad. française de Rensun et Itbier, t. IV,
p. 110). On peut se flemander si là ne serait pas l'explication de certains
caractères anthropologiques propres aux pitimlalioiis aiidalouses, et ({ui
font nettement contraste avec ceux des autres jiDpnlalions ilȎri(]ues.
M. Marcel Iîaudouin. — La remarque faite sur la jisijcholofiie des Portugais,
en ce qui concerne les rapports des Blancs et des Nègres dans ce pays, est
corroborée parce qu'on observe encore de nos jours en Amérique du Nord,
dans les régions où il y a, d'une part, des nègres (partie sud : Washing-
ton, Nouvelle-Orléans, Floride, etc.) et, d'autre part, des Chinois (Port-
land, San-Francisco, voire même New-York). Je n'insiste pas ; ce sont
des faits bien connus de tous ceux qui ont habité ces pays.
M. Deniiver. — Il y a beaucoup d'anthropologistes en Portugal qui ne
partagent pas les idées de M. Ferraz de Macedo.Je me souviens qu'il y a
de cela 6 ou 7 ans, xMM. Fonseca Cardoso et M. Rocha Peixoto, les deux
distingués rédacteurs de l'excellent recueil ethnographique et anthropolo.
gique « Portugalia », m'ont écrit de longues lettres pour protester contre
l'assertion émise jadis par Elisée Reclus et qu'ils ont retrouvée dans un
article de notre collègue M. Zaborowski, à savoir, que les caractères de
race nègre se rencontrent fréquemment dans la population portugaise
actuelle.
Ils affirment que l'observation directe ne révèle rien de semblable, et
que, si dans quelques ports les esclaves ou domestiques nègres importés
du xv° au xvu*^ siècle pouvaient peut-être influencer la population d'alors,
le sang nègre n'a jamais pénétré dans l'intérieur du pays. D'ailleurs, les
vestiges de cette altération ont disparu aujourd'hui même dans les ports.
Le nombre de nègres était insignifiant pour produire une modification
profonde même si l'on admet les unions mixtes malgré le préjugé de race
et de classes sociales hostile à ce genre d'unions.
M. Marcel Baudouin. — J'ai parcouru jadis toute l'Aniérique du Nord
et ait visité des régions à Peaux-Rouges. Il est certain que les Blancs
Yankees ne deviennent pas ro'uges par le seul fait qu'ils habitent les régions
où il y a eu, où il y a encore des Peaux-Rouges ! Le milieu n'a jamais agi
à ce point sur les individus, dans de telles conditions I Ce sont là théo-
ries absolument fantaisistes.
M. Zaiîorowki. — Il est difficile de trouver des témoignages positifs
dans les auteurs portugais d'aujourd'hui sur la présence de nègres en
DISCUSSION 275
Purliigal anciennement. Ils mcllt'nl un ceilain ani(iui-|ii"opre à nier tonle
infusion de sang noir sur le sol.
Maison sait bien qu'autrefois, les mêmes répugnances n'existaient pas.
Dans la (luinée des noirs portent de grands noms portugais et ont indu-
bitablement de purs Portugais parmi leurs ancêtres. Comme je l'ai dit
dans ma notice très écourtée sur la raco en Portugal (Le Porliif/al, l vol.
gr. in-8'\ l'aris, I8!>9) des métis sont nécessairement venus s'établir sou-
vent dans le pays de leur générateur, malgré l'absence de témoignages
positifs à cet égard. Les Portugais qui étaient des négriers, des marchands
d'esclaves, ont nécessairement aussi pris des nègres dans leur domesticité.
M. Hervé vient de dire ((ue jadis Lisbonne était pleine de nègres. .l'ai
des raisons de croire qu'il fut un lenqjs où tous les petits métiers de la
rue à Lisbonne, comme nous le voyons un peu à Alger, cireurs, mar-
chandes de galettes, de poissons, d'orange, etc , étaient remplis surtout
par des noirs.
>L u'l^cuEu.\c. — Dans la petite ville de l5oniiy-sur-Loire on rencontre
parmi les vieillards, les adultes et même les enfants de véritables niu-
lAlres plus ou moins atténués.
Chez la plupart d'entre eux la coloration de la peau est revenue au
blanc jaunAtre ; mais les cheveux sont restés crépus, le nez épali; et les
lèvres lippues.
Ces descendants d'une race noire sont issus d'un nègre qui s'appelait
Zenon et (jui avait été ramené de l'île lîourbon, par M. de C..., pro-
priétaire du chAteau de la Sablonnière, conseiller au Parlement de Paris.
/énon était fort laid et de plus il était manchot. Néanmoins les
filles du village le reciierchaient parce qu'il passait pour riche et promet-
tait une partie de sa succession à toutes celles qui consentaient à avoir
pour lui des bontés.
Ses conquêtes furent donc nombreuses et c'est pourquoi, à l'heure
présente, se voient encore à IJonny et aux environs des traces de ses
bonnes lortunes.
M. Capitan résume devant la Société les travaux du Congrès d'Anthro-
pologie et d'Archéologie préhistoriques tenu à Monaco en avril dernier.
Discussion.
M. ^Larcel Bai dolin. — .Je suis très étonné d'apprendre que, d'après
M. Capitan, on n'a pas encore trouvé en Italifunc hache polie en.v^Ve.r .'Tou-
tefois, je rappelle qu'Aldovrandi ctMercatus, savants italiens, qui ont décrit
il y a longtemps les haches polies des anciens Musées d'Italie, — et en parti-
276 'il Ji IN l'.dir»
culior Mercaliis, (|iii ii j);irlé des haches polies qui existent encore au Musée
du Vatican à llouie — , ont écrit, comme je l'ai public ici même ' :
iMercatis : w (Juam ctiam ob causam eos chalybe percussos scinlillKs
emiltrre credun[ »; c'est-à-dire : <• Us croient même que, si on frappe ces
pierres avec un morceau d'acier, elles déj^aujent des étincelles. »
Aldovjiandi : «« Ht durissimu's erat silici vulgari simihs, et ex ipso,
chalybe adhibito, iflnis educebatur » ; c'est-à-dire : « Très dure, elle res-
semble au i'»7('.r vulgaire, et on en [dit jtiillir dn feu avec du fer. » (Musée
de Bologne).
J'avais cru jusqu'à présent qu'il s'agissait là du silex, (jue nous connais-
sons tous.
11 y aurait un moyen de vérilier au mnins la citation de Mercatus; ce
serait d'examiner les haches (juisonl encore au Vatican. La chose en vaut
la peine. Et un examen microscopique ne serait peut-être pas inutile.
M, Zaborovvski. — Je remercie M. Capilan des renseignements qu'il vient
de nous donner sur les résultats du congrès de Monaco et de ses visites
en Italie. Le préhistorique italien n'est pas connu, en effet, intégralement
ici. Son âge néolithique a, comme vient de le dire M. Gapitan, une phy-
sionomie propre. Il est marqué de bonne heure par une iniluence à dis-
tance de peuples connaissant déjà les métaux. Aussi les palelhnologues
italiens l'ont-ils divisé depuis longtemps en période néolithique proprement
dite et en période énéolithigue. Au cours de cette dernière, le cuivre se
montre inégalement, et à la suite un âge du cuivre s'est manifesté avec
une netteté qu'on n'observe pas ailleurs.
M. BouDiER fait une communication sur l'Ère du Bon sens.
' Marcel Baudouin el L. Bonnemére. — Les haches polies dans l'histoire. —
Bull, et Mém. Soc. d'Authroj)., Pari.s, 19Uo, !2I juillet, passim.
ZABkRmWSKI. — l'ATlUKS PRdniCKItM \MhI K K.r l'HUTn aHYKNNF, Z I I
PATRIES PROTOGERMANIQUE ET PROTOARYENNE.
Réfutation des opinions de MM. Kossinna et Penka.
Pau m. /AltOROWSKT.
/.'/ t/i''se ilo M. Kossinna. — Lfs léf/enr/fs du iléliii/f. — La connaissance et les noms
de la mer, de l'ani/m'lle. du ser/>eiit. du saumon, du hêtre, de l'if.
Les detui/es en Dimeniarix et en Hntlande.
1. — Au l'oiif.s des discussions (|ii(' j'ai souleiuics ici au >ujet des origines
ai'yeiines, j"ai été accuse de confondre les ancêtres communs des peuples
de langue aryenne avec les ancêtres païUiculiers des (îermains, de les
faire descendre de la souche giM'manifjue ou de les faire venir de la patrie
progermanitjue. Je dis accusé; car, en effet, c'est une véritable accusation
et presque une accusation scandaleuse qu'on entendait faire peser sur
Ynoi. Elle devait discréditer, dans lopinion de ceux qui la formulaient,
la thèse que je soutenais contre la théorie asiatique^ l'hypothèse des
grandes migrations venues de l'Asie par le nord de la Caspienne pour
|)eupler l'Europe à l'aurore de l'histoire. Or ce faisant, on m'a attribué des
idées que je n'ai jamais professées. J'ai toujours dit que les ancêtres com-
muns des peuples de langue aryenne, se confondaient avec nos grands
dolichocéphales néolithiques de l'Europe Centrale. Je ne connais pas les
caractères extérieurs des hommes de cette race. Ils étaient à coup sur
à téguments clairs. Je n'ai rien dit de plus. Et je croyais même que les
idées qui m'étaient attribuées n'étaient plus en réalité soutenues par per-
sonne, après les travaux de cr'S dernières années, mon enseignement, mes
publications.
Je me trompais d'ailleurs, et c'est la ce que je veux montrer. Ces opinions
qu'on m'attribuait en les ridiculisant, apparaissent encore comme si peu
excentriques, en .Mleinagne, (|u'un grand nombre de savants de ce pays,
prenant à la lettre le nom usuel d'indo-gennanique, pour désigner les
|teuples de langue aryenne, les tiennent pour l'expression môme de la
vérité. El j'ai constaté cette année même, non sans (|uelque étonnement
d'ailleurs, que parmi eux se trouve un anthropoiogiste qui nous touche
de près, notre collègue, le docteur Buschan. Le recueil anthropologique
le plus autorisé en Allemagne, IdZcilschri/l fiir ellnwluyie a publié en 1902
(p. 161) un très long mémoire de M. Kossinna : La (jueslion indo-f/ermu-
nique résolue par l' archéologie , où celui-ci prétend résoudre délinilivement
la question de la patrie protoaryenne, à l'aide des dernières études archéo-
logiques. Il faut lire ce mémoire pour se rendre compte de l'état d'esprit
qui règne en Allemagne où l'on admet comme un doyme (ijrannique doui
se plaignent quelques-uns, que la patrie des protoaryens et celle des
progermains se confondent, et que ces derniers sont comme la souche de
tous les aryens, il faut lire ce mémoire pour comprendre aussi la situation
que j'occupe dans le débat. J'en ai fait longuement la critique dans une
278 2! jiiN l'.tOO
(If mes lerons. .le ih' iiui> pas iiu^ dispenser de vous en donnei' au moins
les conclusions. Il n'y a plus aujtjurd'hui aucun savant ayant un nom,
dit M. Kosssinna, qui soutienne encore la Ihéurie orientale dans la question
des origines aryennes. C'est fort bien. Et la même chose a été proclamée
par d'autres. « La patrie des Germains, dit-il encore, est le pourtour occi-
dental de la i{alti(jue, sur toute l'étendue où se retrouve, avec les construc-
tions mégalilliiques et la céramique qui s'y rapporte, à l'Est jusqu'à
l'eudiouchure de l'Oder, au sud jusqu'à l'Aller et la région de Magde-
bourg. ^'.J'ai dit aussi cela ici-même et l'ai écrit déjà en 1900. Je l'ai bien
établi dans mes cours. Mais c'est de cette même patrie des Germains que
M. Kossinna fait venir tous les aryens, et voici en quels termes dont le
ton absolu et péremptoire m'a un peu scandalisé (p. 212).
« Au cours d'une des plus n'ccntes périodes de la pierre^ mais cepen-
dant au commencement du 3^ millénaire, il yaeu,du centre nordique, deux
courants d'ïndo-Germains vers le sud, du coté de l'ouest, le long de l'Elbe
et de la Saal, par la Thuringe, et du côté de l'est en remontant r()der.
De leurs tribus occidentales, est sorlie^en Thuringe, Hesse, sud-Allemagne),
à la fin du 3« millénaire, par mélange avec les migrateurs du sud-est de
l'Europe de l'époque de la Bandhernmik\ une dégénérescence des Indo-
Germains. De ce mélange se sont développés, en 2000, deux peuples :
Les Italiens et les Celtes (commencement du bronze). Pareillement vers
2000, se sont répandus de la Saale et de l'Elbe, à travers la Bohême,
la Moravie, la Basse-Autriche, des peuples d'où sont immédiatement sortis
les Illyriens et les Grecs, ces derniers ayant pénétré dans leur patrie rela-
tivement tard. Lorsque vers 1600, les Grec-Illyriens parurent à l'intérieur
de la Hongrie, les Thraces, de leurs territoires dispersés, se réunirent en
un groupe compact. Plus loin à l'est, les Indo-Iraniens ont quitté avec les
Slaves l'.VlIemagne Orientale, déjà au début du 3e millénaire. Pour
les .\ryens nous sommes en situation de mettre nos recherches en rap-
port avec des dates historiques. Les vues extravagantes sur l'âge des
Indiens dans l'Inde, au sujet duquel Jacobi, avec des calculs astrono-
miques basés sur une indication des Vedas, a surpris le monde, ont été
réfutées par Oldenbourg et d'autres. L'an 1000 avant Jésus-Christ se
présente comme la date la plus vraisemblable de la conquête de l'Inde par
les Indo-Germains. Beaucoup plus anciens sont les témoignages des
inscriptions cunéiformes sur des peuples indiens de la Mésopotamie. »
M. Kossinna continue sur ce ton, tranchant avec la même désinvolture
toutes les questions pendantes d'origine.
Tout n'est pas faux dans ce qu'il avance. Et nous savons bien, par
exemple, aujourd'hui que les Aryens n'ont pénétré en Asie que vers 1500
avant notre ère, ce que j'ai exposé longuement, il y a plus de quatre ans.
Mais nous savons aussi que les événements de la dispersion des Aryens
et de leur pénétration dans leurs résidences historiques, ne se sont pas
accomplis avec celte simplicité schématique qui caractérise les solutions
de xM. Kossinna. A l'encontre de ces solutions viennent d'ailleurs tous les
renseignements, ceux tirés de l'archéologie qu'invoque particulièrement
ZAïJonowsKr. — pvn!ii> i'Unr(ii,i:ii.M\MMi i. i.i pitiii..\iai \m. :27'.I
>r. Kossinna, comme les autres, (jue nous avons dès mainlenanl, sur le
passé et les résidences successives de cliacun des peuples aryens, les
(iermains mis à part. Ces solutions, ce tableau de migrations îi partir du
centre nordiiiue, tiu'on peut rap|trocher des anciennes légendes sur les
mijjraliims asiali«piés, ne mérite donc peut-être pas une réfutation en
régi.'. Mais il ."-t impossible de ne pas s'arrêter aux arguments de faits
aboutissant à Incaliseï- la patrie proto-aryenne dans le centre nordique ou
-ermatiKiue. Des arguments précis de ce geni'e sont encore produits, ot
d importe de savoir si nous devons les laisser dans la science, y apporter
le troid)le ou tout au moins l'incertitude.
II. — Le savant qui peut passer pour le premier inventeur du dogme
do la localisation de la patrie proto-aryenne sur le pourtouroccidental de
la Ualtique, de l'identification de la souche commune aryenne avec la
souche germanique, est sans doute M. Penka. J'ai pour ce savant la con-
sidération la plus grande, je dois le dire, car d'abord ce n'est pas un
dogme nouveau qu'il entendait ériger, mais une protestation contre le
dogme ancien dont nous avons longtemps souffert, de l'origine asiatique
de tous les peuples aryens. Et j'avoue d'ailleurs que je croyais qu'après
les derniers travaux parus en Allemagne même, ceux si remarquables
d'Otto Schradcr, il ne se tenait plus à cette localisation étroite, et déjîi
suspecte d'inexactitude en raison de cette étroitessc même. Je me trom-
pais. Encore l'année dernière, il y a peu de mois, M. Penka, sachant bien
sans doute trouver ici des lecteurs attentifs, nous a envoyé un travail :
Die Flulsar/en di-r arischen Voilier (^Sondcrdruck aus dcr politisch-anthropo-
gischen Revue, f^eipzig, 1905) dans lequel il produit des arguments nou-
veaux en faveur de la provenance ouest-baltique des protoaryens. Quelle
que soit la portée de ces arguments, ils ne sont pas à dédaigner du mo-
ment surtout qu'ils viennent de lui.
Ils se fondent bml d'abord sur les légendes relatives à un déluge (pii
.luraientété conservées par tous les Aryens. Il existe en effet des légendes
relatives à des déluges, un peu partout.
La plus connue et la plus répandue est celle rapportée par la Genèse.
Elle s'est propagée par contact entre les peuples. Cependant on peut jus-
tement contester que cette légende sémitique ait été la source de toutes
les autres. Les légendes du déluge existant chez les Perses, les Indiens,
n'aurai(>nt pas une origine biblique. De plus la légende biblique elle-même
n'est (pie le fruit de vieilles traditions babyloniennes. Mais celles-ci corres-
pondant à d'émouvantes réalités, ont eu sans aucun doute un retentisse-
ment, des répercussions dont nous ne pouvons mesurer la portée, ni la
durée. En relevant l'existencedelégendesdu délugeche/Jespeuplesaryens,
M. Penka ne peut donc réfuter l'opinion de Lenormant, de Darmesteter
qui admettent des relations entre les légendes persanes, indiennes et sé-
mitiques par exemple, ni mêiue ce!b3 qu'il rapporlf! d'ailleurs conscicn-
cieusementdeL'nsener(^DieSundllutsagen,l}oun, 181)11), pour qui la légende
grecque de Deucalioa elle-même est d'origine séiniliipie et les légendes
280 21 jiiN r.»on
lilhuaniennes, d'inspiialion biblique ou chrétienne. Quand on considère
(|uo des b'^gendcs semblables existent jusque cliez les sauvages tels que les
Indiens de l'Auiériiiue du Sud, en consé(juence du cheminement inaperçu
des récits plus ou moins altérés des missionnaires chrétiens, on est certes
bien enclin à donner raison à Unsener. D'autre part, il y a eu de tout
temps des déluges locaux. Et il y en a encore. Lorsqu'on voit les ravages
qu'entraînent les grandes inondations, les désastres elTroyables causés
par les ras de marées qui, tout dernièrement encore, anéantissaient au
Japon des milliers et des milliers d'existences en quelques heures, on peut
légitimement su imposer que bien des déluges locaux d'autrefois ont été
plus qu'impressionnants et ont donné naissance à des légendes indépen-
dantes les unes des autres. Or la simple constatation de leur existence
isolée chez des nations étrangères l'une h l'autre, a pu fort bien inspirer
l'idée d'un phénomène quasi universel. Ce rapprochement entre des
légendes relatives à de grands phénomènes locaux, est peut-être mémo
une des sources de l'idée d'un déluge universel. Celle idée a été corroborée
singulièrement par l'explication donnée encore au xix<^ siècle |)ar les
savants eux-mêmes, sur la présence de coquilles marines jusque sur les
montagnes.
Si donc M. Penka voulait utiliser les légendes du déluge existant chez
les peuples aryens, pour déterminer la patrie protoaryenne, il aurait dû
d'abord prouver que tous les peuples aryens possèdent de ces légendes,
cela depuis très longtemps, avant leur dissémination ou en tout cas
avant leurs relations avec les peuples mésopotamiens, indépendamment
de toute influence sémitique et surtout avant la propagande chrétienne.
Or celte démonstration, il ne l'a pas faite, et je crois bien d'ailleurs qu'elle
ne peut pas être faite. Il n'est pas démontré donc que tous les peuples
aryens possèdent sur un même déluge des légendes anciennes et il est
encore moins démontré que les légendes existantes chez eux ont toutes la
même origine, ou plus exactement, sont toutes des exemplaires dispersés
d'une seule et unique légende qu'ils auraient emportée avec eux de leur
commune patrie.
M. Penka ne produit m^me pas à ce sujet d'afTirmations explicites, se
contentant d'appuyer les auteurs qui ne veulent voir dans certaines
légendes ar^-ennes, aucun élément sémitique ou chrétien. Les Ougro-fin-
nois, nous dit-il par exemple, ont subi, tant dans leurs caractères physi-
ques que dans leur langue et leurs mœurs, une profonde influence des
Aryens qui déjà aux temps préhibtoriques, se sont répandus par infiltra-
tion sur leur vaste territoire. Or si l'on considère que les légendes du
déluge font défaut dans le no;d et l'Asie centrale, on admettra sans peine
que les légendes du déluge relevées chez les Vogouls par Réguly, y ont
été introduites par les Aryens.
M. Penka croit-il avoir démontré par cette observation, la seule qu'il
fournisse, l'ancienneté de la légende du déluge chez les Aryens? Si oui,
il se trompe à tel point qu'on peut s'en montrer surpris. Les .Aryens dont
il parle en la circonstance sont les lUisses Si ce ne sont pas les llusses,
ZAII-)Ri)W>KI. — PATIUK> l'IlMTnlîEnMAMurF. F.T l'HOTdAUVENNE '2H\
il faudrait le montrer et montrer aussi (juc les légendes en question sont
d'origine scythique. Mais si ce sont les liasses, nous pouvons allirnvM- que
ces mêmes légendes sont d'origine chrétienne.
Car les Russes n'avaient pas encore probablement atteint le p;iys des
\ogouls lorsque le christianisme s'enracinait chez eux. Ne savons-nous
pas d'ailleurs (jue des légendes chrétiennes figurent déjà dans le vénérable
Ktilernla, recueil de la plus ancienne lillératun' ptipulaire on Finlande?
Voilà de quoi se contente M. Fenka comme point de di'part. Sans autre
preuve, il afRrme que les légendes du déluge aryennes ont un fond com-
mun et qu'elles sont indépendantes des sémiti(iues. l'uis il raisonne
ainsi : (c S'il est établi que sur le territoire de la palrio protoaryenne de
vastes étendues ont été englouties par les Ilots déjà à l'âge de pierre,
nous n'avons aucune raison d'ordre clironologiiiue pour ne pas rapporter
à cet événement naturel les légendes du déluge des peuples aryens. »
M. Penka va donc rechercher dans les territoires qu'il a déjà désignés
pour être ceux de la patrie protoaryenne, s'il s'est produit ou simplement,
s'il a pu se produire des invasions de la mer ou des inondations... Et si
(le tels phénomènes ont eu ou ont pu avoir lieu, il nous donnera l'exis-
tence de légendes du déluge d'origine quelconque chez les peuples aryens,
comme une preuve sérieuse, solide, de la localisation qu'il a faite de la
patrie protoaryenne. On sent bien, sans que je le dise, combi^^n une
semblable manière de raisonner est faible, combien môme elle est insuffi-
sante.
J'ai donné, dit M. Penka, le sud de la Scandinavie ou le haut Danemark
comme VVrlieimat aryen, le territoire dans lequel les ancêtres des peuples
aryens formaient une unité sans mélange, par la langue, par la culture,
par le type physique, <!t d'où la langue et la culture aryennes se sont
répandues sur l'Europe continentale et la Scandinavie. Cette vue repose
sur des données de l'anthropologie physique, de l'archéologie préhisto-
rique, de la géologie, de la géographie dos plantes et des animaux, do la
linguistique, de l'histoire. Et celles d'ordre géologi(iue et géographique
sont d'une importance particulière. »
Après cette déclaration impressionnante .M. Penka discute les données
d'ordre géographique. 11 a besoin de les dégager des critiques sous les-
quelles leur valeur s'éclipsait.
111. - Les protoaryens ont connu la mer. Cela résulte d'une commn.uité
de mots qui embrasse à la fois le latin, le gaulois, le vieil irlandais, le
gothique, le vieux slave, lo lithuanien. Ce mot ne se relouve pas dans le
vieux perse et le sanscrit. M. Penka passe surcctte dillicullé et en arguant
que tout argument ex silentio est caduc. Et il raisonne ainsi : Les ancêtres
des Germains au moins, comme l'admettent les archéologues (Montelius),
ont gagné la piesqu'île Scandinave au temps néolithi(|uc, en un temps
où leur langue était proche de la langue mère. Là, leur langue influencée
et enrichie par les langues des autres Aryens continentaux, s'est déve-
loppée en langue germanique particulière fortement dilTérenciée. Là, ils
282 -21 jiiN 11)00
sont restés isolés dos autres. Cependant le germanique lui-même a un
nom de la mer commun avec le lalin, le gaulois, le vieux slave. Il faut
donc que ce mol ait a[>p;utenu à la langue mère. Le peuple proloaryen a
donc aussi connu l'idée et la chose (]u'il exprime.
Ine fois isolés dans leur patrie reculée, les (iermains n'ont pu établir
aucune communauté nouvelle entre leur vocabulaire et celui des autres
langues, (le raisonenient n'est pas tout ii fait inallaijualjie, car on sait
bien qu'un môme mot, nous l'avons vu pour le nom du fer, peut se ré-
pandre avec une même chose chez des peuples diiïérenls et éloignés. Un
auteur dont l'opinion est de poids, Kretschmer a môme soutenu que la
communauté du nom de la mer était due à une série d'emprunts faits aux
Gaulois. Je ne le crois pas.
Les protoaryens ont ciïeclivement connu une mer. Mais quel mer?
La mer Noire? M. Penka pense que ce ne peut être ni la mer Noire,
ni la mer Caspienne, que ce ne peut être que la mer Baltique et la mer
du Nord. Ici, il omet une circonstance des plus graves, sur laquelle il
eût dû s'expliquer. Les protoaryens n'ont pas connu les marées. Les Grecs
anciens, sans parler des Romains, n'en avaient aucune idée jusqu'au
iv° siècle avant notre ère et aucun mot [pour les exprimer.
M. Penka conteste-t-il ce fait? S'il ne le conteste pas, il ne peut pas légi-
timement faire venir les proaryens de la mer du Nord. Mais, dit-il, ceux-
ci ont connu deux poissons qui n'existent pas dans les fleuves se déversant
dans la mer Noire. Ces deux poissons sont le saumon et l'anguille. Sur ce
fait encore, malheureusement pour lui, il trouve des contradicteurs
obstinés.
Lui-même d'abord ne peut pas citer, en dépit du raisonnement qu'il
tenait l'instant d'avant, un nom germanique de l'anguille qui soit commun
aux autres aryens. D'où il devrait conclure d'après le raisonnement que
je rappelle, que le nom germanique n'est pas d'origine protoaryenne. Il
devrait conclure que les Germains étaient dans leur patrie, à l'époque
néolithique, étaient séparés des autres Aryens alors que l'anguille n'était
encore connue ni des uns, ni des autres. Il devrait conclure en un mot
juste le contraire de ce qu'il fait, à savoir : que la connaissance aryenne
de l'anguille n'a pas été acquise sur les rivages de la mer du Nord, et
qu'elle n'est d'ailleurs pas primitive. M. Penka raille ceux qui, comme
Schraâer, ont donné le nom de l'anguille commun au grec, au latin, au
lithuanien, au slave, comme un diminutif de celui du serpent : « Anguille,
petit serpent ». Les anguilles sont plus longues que les serpents d'Europe,
dit-il.
La chose est vraie quoique non constante. Aussi la question ne se pose-
t-elle pas comme on l'a posée. Ce qu'il faut se demander c'est ceci d'abord :
quel est celui de ces deux animaux qui fut le plus familièrement, le plus
généralement, le plus anciennement connu? Or c'est, sans contestation
possible, le serpent.
Les langues aryennes sont riches en noms de serpents et en noms qui
leur sont communs. Or tel n'est pas le cas pour l'anguille. Le nom ger-
/.Ait<ino\v>hi. — iv\Tiiii:> l'Uurn.iKitMAM'jrK k.t imiotoaiiyesnf 283
1,1,1111, [lie (le ranguilli', '//, est d'origine inconnue et ne se retrouve pas
ilans les autres langues. Leudui germanique du « serpent >-, v. nordique
.. simuie », est ."videmiu.'nt i<l(Mitique (juant à son origine, au latin miuuis,
litiuianirn ai>;iis, sanscrit âhi, grec ly.i, irlandais esain<j, slave onzi. Kl
les relations de ces noms avec ceux <le l'anguille «ont plus (nrévi<lenles.
Le germani(]iie lui ui.^me .s7rt»//'', v. h. allem. shutnu (allem , srhhmfie)
correspond à un procellique slmifiio. Or celui-ci a le sens d'anguille.
De m(\ine, le grec £/•.; « vipire a, est bien le générateur d(î ^'f/tr-»^,
anguille .>. Comme le latin muiuis, « serpent n, est le générateur iVan-
Huiiln, anguille; le lithuanien nufiis, serpent, le générateur d'un<ii,ni.'<,
V. prussc auf/uyiiis, anguille.
D'un passage d'Homère (jue cite Otto Sclirader, il résulterait que les
anciens (irecs distinguaient absolument l'anguille des poissons. Ce n'était
pas un poisson pour eux.
Nous-mêmes ne connaissons pas encore bien ses mœurs. (Ju'elle ait été
longtemps confondue plus ou moins avec le serpent, il n'y a en cela rien
qui ne soit parfaitement naturel. Nous ne devons, au surplus, pas perdre
<le vue que les Proloaryens ne recouraient pas, en général, à la pèche
pour leur alimentation, qu'ils ne devaient pas bien connaître les diiïérentes
sortes de poisson. Le saumon, l'anguille, rien qu'en raison de celte cir-
constance, leur étaient mal connus, sinon inconnus.
L'argumentation de M. PenUa se retourne donc finalement contre lui.
Des noms employés pour l'anguille, il résulte, en elTet, que les Protoa-
ryens ne l'ont d'abord pas connue. Ils ne lui ont même pas donné de nom
propre, particulier, sauf les Germains. Et cette circonstance désigne le
bassin du Danube, où elle ne s(; trouve pas, comme leur patrie originaire.
L'argumentation de M. Penka en ce qui concerne le nom du saumon
n'est pas moins désastreuse pour lui. Il nous dit que le saumon a le même
nom dans l'anglo-saxon, len.r, dans le v. h. allem. lahs, dans le lithuanien
lasziszn, v. prusse lasasso, dans le lette lasis, dans le polonais Insos. Il
s'abstient de nous dire que cette communauté de noms ne s'étend à aucune
autre bingne avijenne, ni au latin, ni au grec, pas même au gaulois. Car il
lui est, en effet, impossible d'expliquer cette circonstance, d'où il résulte
et cela plus clairement que pour l'anguille, que les Protoaryens n'ont pas
connu le saumon dans leur patrie originaire. Or cette circonstance si
embarrassante pour lui est au contraire pour nous une démonstration
décisive. Le saumon ne se trouve, en elîet, ni dans le Danube, ni dans
aucun des fleuves qui débouchent sur la mer Noire. Il se trouve, au con-
traire, dans ceux ijui se déversent dans la lîallirpie. ,\insi on ne le voit
pas dans le Dnicpre et on le voit dans la Vislule, l'Oder, IKlbe, le Itbin.
Ce n'est que lorsijuc les (iaulois ont été établis sur le Rhin, (ju'ils l'ont
connu et nommé. Piine désigne le saumon du Itbin sous le nom (Yesox,
que nous retrouvons dans le proceltique e^nks, le kymrœg eog, comique
choc, breton eok, irlandais eo. Les Germains de môme n'ont connu le sau-
mon qu'une fois sur l'LIbe et la Baltique. VA ils l'ont nommé de leur côté.
( )r c'est d'eux, de leur langue, non de la langue protoaryenne que les rive-
284 i^l JiiN l'.>Ot)
rains dos autres lleuvcs voisins de la Halliquc, liorusses, Litliuaniens,
tiennent leur nom du saumon. Nous on sommes d'autant plus certains
(juo ceux-ci ont emprunté aux (îermains ((îoths) bien d'autres choses et
bien d'autres noms, en particulier des noms de poissons de la liallique,
ce qui est bien naturel.
M. Penka nous dit que l'emprunt du nom du .saumon aux Germains
n'est pas récent en raison de ce ((ue son nom originaire se terminant par
la palatale germanique hh, est transformée en dentale sibilante .v (progerm.
Lakh, letle lasis) il y a longtemps. Soit. Mais j'ai surabondamment dé-
montré que slaves et lithuaniens n'étaient pas sur la li.illique ou a pro-
ximité depuis peu de temps seulement.
IV, — M. Penka revient enfin sur celle fameuse question du bétre.
« A la végétation protoaryenne, dil-il, appartenait deux arl)res qui
n'existent pas dans l'Europe orientale et les parties voisines de l'Asie,
à cause de leur climat continental : le « hêtre « Nangl. hok, v. h. ail. biiohha,
latin fàgus, grec otjvo;, ce dernier signifiant « fruit à manger], et 1' « if »
(lat. taxus, grec toçov, « arc », le bois de 1'!/" étant préféré pour faire les
arcs, angl. ir, ijr). La limite orientale du hêtre en Europe s'étend de
Kônigsberg vers Lemberg et les bouches du Danube. De même, les limites
de l'if, » Ces limites excluraient de la patrie protoaryenne, en effet, les
territoires avoisinant l'Asie. Mais h part cela, le hêtre a une vaste exten-
sion. On le trouve fort bien au sud de la Russie, en Crimée, au Caucase,
au sud de la mer Noire, en Asie-Mineure, dans les montagnes de la Grèce
et jusque dans celles de la Sicile. Par contre, il n'existait pas, justement
dans la patrie protoaryenne de M. Penka, dans le nord du Danemark, h.
l'époque protoaryenne, llildebrand lui en a fait l'observation depuis bien
longtemps.
Le hêtre qui est très commun en Danemark depuis l'époque romaine
au moins, était absolument éliminé par le pin, puis par le chêne, à l'époque
de la pierre. Car on ne le rencontre pour ainsi dire pas dans les tour-
bières : ce sont de nouvelles conditions climatériques défavorables au
chêne qui lui ont donné son essor actuel. Que répond M. Penka à cette
constatation brutale? Que le hêtre existait en Suisse à l'époque néolithique,
qu'en Danemark le climat est devenu alors maritime, que le même chan-
gement climatérique qui y a favorisé le développement de la civilisation
y a attiré le hêtre et que celui-ci a dû y pénétrer dès le commencement
du néolithique d'après des trouvailles des tourbières.
De tels raisonnements, de si vagues assertions ne suppléent pas des
constatations de faits absentes. Ils sont plus qu'insuffisants pour nous
faire admettre que les noms aryens du hêtre proviennent de la région
du Danemark. Les Germains y ont apporté son nom d'autre part. Ils ont
connu et nommé le hêtre avant leur installation sur le pourtour occidental
de la Baltique.
Cet arbre n'a d'ailleurs joué aucun rôle particulier au temps de la com-
plète unité protoaryenne. Le nom grec ot^yo;, qui correspond au v. h, ail.
/.AltoIlnWSKI. — l'ATItlKS IMlnTOilKUM \Nlnl K Kl l'HiiTnAllVENXE ÛH^'i
hiinhhn, n'a, rn elïel, pas dë>igné le liètre. Il s'est «le tout temps aijplicpié
au cliL^ne à glands comestibles, peut-être au chAtaignier. El comme les
(jreos ont puur le kèlre un nom tout à fait à pari, o;ja, ipii est ancien, on
pourrait sup[)0ser qu'ils n'ont connu cet arbre (pra|)rès leur séparation
d'avec les (iermains et les Latins. On pourrait niAme peut-iHre soulenii-
(jue, de même tpnî or,-,'o;, le germ. bnulilm, et le latin /anus, s'appliijuaienl
d'abord aussi au chêne à glands comestibles. Le ra[)purt de ot.yo; avec
•iaYc'.v, ic manger », indique qu'on ne pourrait en ellet désigner sous ce
nom qu'un arbre à fruits abondants et à production régulière comme
le chêne (pii a de luul leni[)s joué un si grand rôle dans l'alimentation,
et non le bôtre dont les /nlncs ne peuvent êlre une ressource sérieuse que
tous les quatre ou cinci ans. A combien de peuples s'étend au surplus cette
communauté de noms supposée proloaryennc? M. Fenka ne peut citer
(jue les (Iermains, les Latins, les llrecs. .Nous ne connais.sons pas en effet
de nom gaulois du hêtre. Les Slaves ont un nom, bulc, récemment em-
prunté à l'Allemagne; les Lithuaniens ont un nom tout à fait à part :
skirp-slas, qui sendjle s'être appliqué d'abord à l'orme, v. prusse skerptus.
Les Finnois n'ont pas de nom du tout.
On a peine vraiment à comprendre, dans de telles conditions, que
M. Penka ait songé à fonder une argumenlationen faveur de sa thèse, sur
les noms aryens du hêtre. L'//' semble avoir été l'objet d'une connaissance
plus précise, peut-être plus générale aussi. Le nom latin tiuus, correspond
au grec -o^ov, « arc ». Et c'est bien l'arbre qui a, en eiîet, donné son nom
à l'arc. Car le vieux nordique ijr, et l'irlandais ibhar, signifient en même
temps (( if » et « arc ». Le nom grec de l'if, 7aiXa;, ar|jnXo?, est de même en
rapport avec ^[jl'.Xti, outil pour tailler ou sculpter, le bois d'if étant excel-
lent pour sculpter et tourner.
Nous n'avons pas une communauté de noms particulière entre le groupe
germanique et le groupe greco-romain. Le nom le plus commun est l'an-
célre de notre nom français. Peut êlre en rapport avec le bas-latin ivus, il
se retrouve dans le kymrœg yv, comique /iiu<'«, bret. /rùt.dansle v. h. ail.
ina, angl. sax. iw ; dans le vieux prusse invis, le lilb. jeaa ; dans le slave
ira, saule. On remanpiera le horusse invis « if », en raison surtout de cette
circonstance que les limites de l'if à l'P'sl sont les mêmes (pie celles du
hêtre. Elles restent en deçà delà patrie actuelle des Lithuaniens, sinon de
celle des Horusses. D'où un indi'^e de plus de la présence ancienne des
Lithuaniens sur le Dniester et la mer Noire. Comme le hêtre, l'if existe le
long de (a mer Noire, jusqu'au Caucase, en dehors des steppes. Il y a
aussi en russe un nom slave commun, lisii. Usé, pour l'if. Et ce serait
là, si nous en avions besoin, encore un indice de la provenance occiden-
tale et danubienne des Slaves. Car il est probablement en rapport avec le
vieux slave tcsati, « tailler, sculpter », comme tuiXot avec oixili).
Mais que peut-on trouver dans ces faits qui désigne particulièrement
le Danemark comme la patrie proloaryennc? M. Penka ne le dit pas et
pour cause.
On a trouvé des traces assez nombreuses de l'emploi de l'if, dans l'ou-
286 21 jiMN i90()
lillagp, Jès l'Age de In |tierre. M.iis où? Kn Suisse. Les donnéi's archéolo-
giques concordent encore remarijuahlenient en ceci avec les données lin-
guisliques et les renforcent. Car dans les plus anciennes palafiltes suisses
on a trouvé justement des arcs, des couteaux, des peignes, des armatures
de scies, de silex et d'autres outils, en bois d'if.
Mais tout cet ensemble de documents et d'observations que M. Penka
invoque encore maintenant on faveur de sa thèse, exclut justement toute
idée d'un territoire étroitement limité, pour la patrie proloaryenne, toute
idée d'une localisation de celle-ci dans le centre progermanique en parti-
culier.
V. — Cela étant, le Danemark n'étant pas par avance désigné, il n'y a
plus de raisons de rapporter les légendes du déluge aryennes, aux événe-
ments qui ont eu lieu sur le pourtour occidental de la Baltique, .\dmettons
cependant le contraire un instant. Admettons ainsi qu'il y a, depuis
l'époque de la pierre, une tradition relative à des déluges parmi tous les
peuples aryens, tradition qui leur soit particulière, chose que n'a nulle-
ment prouvée M. Penka, et qu'il ne pourra jamais prouver, d'ailleurs.
Avons-nous dans l'histoire passée du Danemark, des événements géo-
logiques assez considérables pour qu'ils aient donné naissance nécessai-
rement à l'idée d'un déluge universel?
M. Penka s'est souvenu que d'après un renseignement conservé par
l'histoire, une des premières invasions des Cimbres aurait été provo-
quée par une inondation du sol du littoral nord-oriental de r.\llemagne,
par une grande marée.
Et c'est ce renseignement sans doute qui lui a inspiré cette idée un peu
inattendue, de rattachera la presqu'île du Jutland la légende relative à un
déluge universel. Il n'y a, je le crains, pas autre chose comme point de
départ et fondement à son mémoire.
Il nous cite une station de la pierre à Husum, au milieu d'une forêt
aujourd'hui au-dessous du niveau de la mer. Il s'agit là d'un affaissement
tout local. Depuis l'époque des Kjukkenmuddings, on le reconnait à la
distance de ceux-ci du littoral actuel, il y a eu plutôt un relèvement du
sol du Danemark.
Une partie du pays des Cimbres, nous dit M. Penka, a été recouverte de
la mer par suite d'un affaissement, de 350 à 3G0 av. J. Ch. Il s'agit d'un
affaissement brusque où nombre d'hommes auraient trou vé la mort, affaisse-
ment qui ne rentre pas dans le cadre des phénomènes ordinaires. Or écou-
tons Strabon (vu, c. ii, 1) : « Comment admettre que les Cimbres aient été
chassés de la Chersonèse, leur primitive demeure, par une grande marée
de l'Océan, et que ce soit là. la cause qui a fait d'eux un peuple de bri-
gands et de nomades, quand nous les voyons aujourd'hui encore occuper
les mêmes lieux qu'ils habitaient naguère. Il est constant que l'ambas-
sade qu'ils ont envoyée à Auguste pour lui offrir en présent ce qu'ils
avaient de plus cher et de plus précieux, venait de la Chersonèse et y
est retournée Je ne crois pas non plus ce que nous dit tel historien,
ZABOllOWSKI. — l'ATniK> l-IlitTliCFllMAMnir. F.T l'IlnTiiARYENNE 287
(juc It'S (liinltics menacent cl repoussent de leurs aimes le Ilot qui monte,
ni ce qu'avance Epliore au sujet des Celles ou Gaulois, (|ui, pour s'çxercer
à ne rien craindre, regardent tranquillement la mer détruire leurs
hahilalions, se contentant de les rebAlir après, et que les inondations ont
toujours fait chez eux. plus de victimes que la guerre. Si ces historiens
eussent lélléchi à la régularité des marées et à celte circonstance, que des
peuples habitant les bords de lOcéan devaient connaître la limite
atteinte par le Ilot, ils n'eussenl pas assurément écrit de semblables
absurdités. »
Je pourrais laisser M. Penka en face de ct^ texte. .Mais tenant pour cer-
taine l'inondation dont parle Slrabon, M. l'enka ajoute :
« De pareilles inondations ont pris quelquefois le caractère d'un vrai
déluge; Tel le Ilot de 1277 (jui a déterminé la formation du golfe de Dol-
larl à l'emboucliure de l'Ems et englouti 43 paroisses et 80.000 hommes ;
telle la « grande buvée d'hommes » du S sept. 1362 où disparurent
30 paroisses et des parties du sol des îles de Sylt et de Fôhr. Tel encore
le déluge de 1717 où dO.328 hommes et DO. 000 pièces de bétail furent
noj'és. Ces chiffres rappellent ceux des Indes orientales. Le Zuiderzée qui
a aujourd'hui 3.139 kil. carrés, était autrefois un lac de 1.375 kil. carrés
appelé Fleio par les Romains. Ses rives nord ont été englouties par les
ilols au commencement du xiii^ siècle, lia acquis son contour actuel en
1287 où 80.000 honmies doivent avoir péri. Pas moins de 14.760 kil.
carrés du territoire de la Hollande, sont au-dessous du niveau de la mer
dont les irruptions sont arrêtées par des œuvres d'art. Ainsi trouve son
explication la formation des légendes du déluge chez les peuples aryens;
ainsi ;i leur tour, celles-ci sont une nouvelle preuve de la justesse de l'hy-
pothèse de l'urigiue sud-scandinave des aryens. )>
M. Penka mêle et confond, pour aboutir à cette conclusion, des choses
différentes qui n'ont pas de rapports avec elle, du moins des rapports
nécessaires.
La Hollande est un don des grands tleuves qui viennent encore se
répandre chez elle en canaux innombrables, et un don récent. La mer aban-
donne ou reprend les molles et mouvantes alluvions de son sol, suivant
que les dunes qu'elle forme elle-même, sont plus ou moins consistantes.
ici les terres se consolident; là elles se délitent et s'affaissent. Il n'y a pas
de mouvement général, soit de relèvement soit d'abaissement.
Et loin que la Hollande ait été autrefois plus étendue et plus sure, elle
n'a jamais été aussi habitable qu'aujourd'hui. Il n'y a pas eu dans son
passé brusque changement d'état par catastrophe violente d'invasion des
eaux. Et au contraire, c'est peu à peu, par le travail patient de l'homme,
préparé par les apports incessants des fleuves, qu'elle a été retirée pour
ainsi dire de dessous les nappes liquides qu'entretenaient les rivières et
les pluies sur une grande étendue. Les invasions de la mer y furent, y
sont encore un événement de tous les jours, une menace permanente.
Elles n'ont jamais eu rien d'inattendu. Elles n'ont donc jamais eu un
caractère cataclystique. Et ce n'est que dans les temps modernes qu'elle a
288 1*1 Ji IN iy06
pu causer les désastres que rappelle M. Penka, puisque les territoires de
formation récente où elles se produisent, n'étaient pas habitables autrefois,
ne furent jamais habitables avec sécurité et ne le seraient pas encore
sans l'œuvre accomplie longuement par un peuple bien organisé.
Personne n'a prouvé, M. Penka ne prouve pas que sur ces territoires,
sujets à des inondations maritimes, des cités préhistoriques ont été englou-
ties. Ils n'étaient pas habités en des temps reculés. Ils ne l'étaient pas
surtout à l'époque néolithique. Et M. Penka lui-môme ne nous parle pas
d'eux comme patrie des .\ryens. Il a placé celle-ci, dans le sud de la
Scandinavie et en Danemark. O n'est pas la même chose apparemment.
Ce que iM. Penka nous donne comme des preuves, sont des faits- à côté^
en dehors de la question à résoudre. Et dans toute son argumentation
nous ne trouvons rien de solide. Elle ne renferme que des à peu près et
des apparences.
En se contentant d'à peu près pareils, d'apparences légèrement prises
au sérieux, on perpétue stérilement les discussions et les divergences.
Entre savants de bonne foi, les contradictions n'ont en effet leur source
que dans des observations incomplètes, ou mal faites, ou illusoires, dans
des lacunes de la connaissance. Une révision rigoureuse de tous les
arguments de faits invoqués peut suffir à les faire disparaître. Or nous
devons les faire disparaître.
Si, après la critique que je viens d'en faire, il ne reste rien dans la
science des arguments de M. Penka, ce sera un bien, je suis obligé de le
déclarer.
Discussion.
M, Atgier. — Je suis étonné de voir invoquer des documents linguis-
tiques aussi incertains que des étymologies de noms d'animaux quelcon-
ques, pour juger du foyer d'origine d'une race, quand on sait combien révo-
lution de la linguistique est peu en rapport avec celle de l'ethnologie,
quand on sait que certaines races, que certains peuples ne parlent plus
leur langue d'origine, mais celle de leurs conquérants ou celle du milieu
ethnique dans lequel ils se sont confondus.
L'hypothèse que la race blonde est originaire de la Scandinavie, parce
que c'est là que le type s'y est conservé le plus pur, ne tient pas debout.
Si la race blonde s'est conservée plus pure dans celte région, c'est parce
que cette région est une limite de migration, d'une part, et d'autre part,
parce qu'elle n'est pas sur le passage des invasions comme le fut l'Europe
Centrale de l'est ;i l'ouest, comme le fut jadis la France du Rhin aux
Pyrénées.
La race blonde, lorsqu'elle eut pénétré à l'époque néolithique
en Scandinavie, n'ayant plus été envahie et pénétrée par d'autres
migrations humaines^ il n'est pas étonnant qu'elle s'y soit conservée plus
OUVRAlîES OFFERTE 289
pure. Cette pureté n'est donc pas un argument h invoquer pour prétendre
que la race blonde est orii;inaire de Norvège ou du nord d'Allemagne
lorsque tant de laits militent en faveur d'un berceau asiati(|ue, bien (lue
ce berceau soit envalii aujouid'luii par les Mongols de la Tarlarie.
81)9^ SÉANCK. — ,ï Jiiillol lOOli.
Présidence de M. Zaborûwski.
Élections. — Sont ikiiiiiik's membres titulaires :
M. AvELOT. pioseiilc pMi' MM. llainy, llci'vt' d W'rneaii.
M. .ScHWEKTZ. ik' Ziiiirli, [ircsenté |i.ii' MM. Zaborowski. MaiioiiviiiT cl
l'apiliault.
OUVRAGES OFFERTS
liO D"" F. llKiiN.xuLT oITre à la Société : L'évo/ulion de lu prostitution. Flam-
marion, éditeur, prix : 3 fr. 50.
(!e livre envisage la f)rostilulion à tous ses points de vue si diiïérents,
etbnograpbi(pie, bislorique, médical^, liygiènique et social.
La prostitution est-elle un retour de l'atavisme dans nos sociétés
actuelles? La promiscuité a-t-on dit, était la règle chez le primitif. Asser-
tion dénuée de preuves et que vient même contredire la vie actuelle des
sauvages: ceux-ci ont des lois matrimoniales très rigoureuses bien que
différant profondément des nôtres.
Si actuellement la prostitution fleurit chez la plupart des peuples sau-
vages, c'est qu'elle leur a été apportée, et même trop souvent imposée par
les européens; en effet les peuplades qui ne sont pas fréquentées par
eux, ignorent ce fléau.
Un mot sur la proslilulion religieuse : les prêtres furent les premiers
ijui imaginèrent de tirer profit de la fornication. Tant il est vrai que le
sentiment religieux n'impli([U3 pas forcément et toujours l'idée morale.
Quand Solon ouvrit à Athènes les premières maiso;is publiques ou dicte-
rions, il ne fit que substituer dans l'exploitation de ces dernières l'Etat
au clergé.
Ce qui intéresse le plus dans l'histoire de la prostitution est le dernier
stade de son évolution, l'actuel. A l'inverse de ceux qui, s'occupant d'évo-
lution, restent confinés dans le passé, j'ai jugé qu'il importe surtout
d'étudier les transformations qui s'opèrent de nos jours.
Les maisons publi([ues disparaissent; on a beaucoup épilogue sur ce
soc. d'anthuop. ^'Mii iO
â90 5 jriM.RT lyOfi
fait ; il est (\\\ simplement au changement des mœurs. Les lois empochent
actuellement les tenanciers de se livrer a la traite des blanches, ils ne
peuvent prendre que des lilles majeures, par suite non aptes à la servi-
tude.
Aussi les maisons fermées se tiansformenl-elles en maisons de ren-
dez-vous où la fille plus libre n'est pas logée et où elle participe aux
receltes.
Dans les villes à quartier réservé, comme Marseille, existe une transfor-
mation analogue : la maison fermée devient maison ouverte, c'est-à-dire
n'est qu'un garni en quartier réserve.
L'état sanitaire des maisons fermées et des maisons de rendez-vous
s'est beaucoup amélioré : la syphilis y devient rare, tout simplement
parce que ces étahlissomonts sunl IfMiiis de ne prendre (jtie des filles ma-
jeures. Or les prostituées attrapent presque toutes la syphilis au déhul de
leur carrière, et elles débutent mineures. Aussi sont-elles en général
vaccinées quand elles entrent majeures en maison.
Passons à la réglementation policière, tous la critiquent. Certains veu-
lent la supprimer, mais la plupart ne demandent qu'à l'améliorer. Dans
quel sens doit-on porter ces modifications? La réglementation sanitaire,
telle qu'elle est comprise au Danemark et en Norvège, mériterait de fixer
davantage l'attention de nos législateurs. Elle fait rentrer les prostituées
sous la loi commune, les mesures sanitaires sont prises vis-à-vis des
vénériens comme vis-à-vis des autres maladies contagieuses, il n'y a
plus de souveraineté policière. C'est le médecin ou la commission sani-
taire qui est chargée de faire respecter la loi, et la police est à ses ordres.
Partant plus de mise en cartes, plus d'inscriptions arbitraires, plus d'ho-
pital-prison.
Comme tout vénérien des deux sexes, la prostituée est obligée de se
soignera domicile ou à l'hùpital.
Elle y est internée d'office si elle constitue un danger social et ne peut
en sortir qu'avec l'autorisation du médecin.
D'autre part il imports d'améliorer notre système d'assistance: nos con-
sultations et notre service d'hospitalisation réclament des réformes urgen-
tes. Inutile de les rappeler ici.
La meilleure prophylaxie dérivera de la science elle-même. Peut-être
le temps n'est pas loin où on pourra se préserver de la syphilis.
Certains sociologues admettent que le jour où les maladies vénériennes
disparaîtraient totalement, nos conceptions morales changeraient, et la
débauche serait considérée comme légitime. On ne saurait trop s'élever
contre celte théorie. Sans doute la morale n'est pas une entité absolue;
sont réputés moraux les actes favorables, et immoraux les actes défavo-
rables à la société.
Mais si les maladies vénériennes étaient supprimées, la débauche reste-
rait encore nuisible.
Elle le serait de par les contagions morales qui subsisteraient toujours.
Car elle exerce sur ceux qui s'y adonnent une in fluence démoralisatrice,
OUVRAGES OFFERT>< ^'M
foussantàla paresse, aux dépenses exagérées, favorisant ralcoolisine,
faisant éclore les aberrations sexuelles.
En dehors des maladies vénériennes, elle sullit i\ altérer la santi' :
riioinme (jui s'adonne aux plaisirs vénériens ne sait pas garder une
juste mesure, il abuse comme abuse tout être qui cède ;\ une passion. (Jr
rien de plus déprimant que les luttes d'amour qui l'ii outre s'accompa-
gnent trop souvent de veilles répétées et d'excès de table et de boisson.
La débauche ne tue pas seulement ses adeptes, elle frappe les géné-
rations à venir: les anc-iens le savaifiit qui nqiri'st'ntaicnl la N'imus liber-
tine écrasant ilu pieil un fœtus.
Admettons |iar hypothèse ((ue la ih'hauche n'ait aucun df ces inconvé-
nients. Elle garderait toujours un défaut capital d irrémédiable, inhé-
rent à sa nature; elle avilit notre idéal: elle est la négation d'un des
sentiments les plus élevés que puisse éprouver l'être humain, l'amour,
elle le réduit à un besoin sensuel, rendant rhominc bestial et avilissant
la femme.
Kt pourtant l'humanité est encore loin de voir disparaitn' h' hideux
Iléau. Si nous pouvons concevoir la société de l'avenir (pii ne soulTrira plus
des maladies vénériennes, il nous est impossible d'imaginer celle si loin
de nous qui ignorera la prostitution.
M. Uegn.xli.t présente en outre à la société des photographies de terres
luites grecques et expose ses idées sur le déboisement au point de vue
social.
M. V.vN Genepp. — J'ai l'honneur de présenter à la Société un ouvrage
que je viens de publier chez l'éditeur E. Guilmoto, iniilulé M ytkes et Légen-
des d'Australie, études d'ethnographie et de sociologie. Ce livre est formé de
deux parties : d'abord une Introduction de cent pages environ ; puis un
Recueil de récits traditionnels. Chaque récit est accompagné, soit de ren-
vois à l'introduction, soit de notes explicatives ou critiques. Parmi ces
notes, je vous signalerai celles de la Légende n" I; elle précise à quels
phénomènes d'ordre géologique et géographique fait peut-être allusion
cette légende qui est de type évolutionnisle, ainsi que les suivantes.
Dans une note de la légende n" XXVII, je crois démontrer que nuralie, et
dans une note de la légende n" LXVI, que baijamie ne sont pas des noms
propres, comme on l'a cru jusqu'ici, mais des noms collectifs et désignent
une catégorie d'Êtres analogues aux Mnramura des Dieri et aux Ancêtres
de VAlcheringa des Arunta. (Juant aux textes mêmes je les ai choisis de
telle manière qu'ils servent en quelque sorte d'illustration vivante à
l'introduction théorique.
Celle-ci est formée de dix chapitres où j'étudie successivement : d'abord
les rapports entre le type somatique et le type culturel des Australiens.
Vous savez quelles controverses ont suscitées les théories de l'école anthro-
posociologi(pie, dont les protagonistes ont à diverses reprises soutenu
qVil existe un véritable lien de causalité entre la race et la civilisation.
-2'.t-2 5 ji ii.i.KT 1900
Vn cxcmpli' i'(''C('nl, d îles plus iiilt'rcss.iiils, do rapplicaliun de celle
théorie a été donné par M. Wollmann dans son étude sur le rôle des
(lermains dans la Henaissanco Italienne. De même, mais sans être un
anlliroposociologue à outrance, M. Itidgeway, d'Oxford, a pensé pouvoir
expliijuer la superposition, dans la Grèce ancienne, de deux formes de
civilisation, par la superposition de deux races distinctes. J'ai voulu voir
à quel résultat conduirait l'élude, à ce point de vue, d'une agglomération
sutTisamnient homogène de trihus demi-civilisées, l'^n gros, on jieut dire
(jue les dilïérentes civilisations auslraliennes ne correspondent pas à des
races distinctes. 11 est vrai que la définition de ces formes culturelles ne
laisse, malgré les puhlications descriptives récentes de Spencer et Gillen,
de llowitt, de Koth, etc., et malgré les éludes com|taralives préliminaires
de Grœbner et de N. W. Thomas, d'être assez dilTicile. Je crois d'ailleurs
que la méthode slatistique ne saurait en ces matières conduire à des résul-
tats utiles qu'après une application rigoureuse de la méthode biologique.
Dans le deuxième chapitre, je montre que les discussions sur les sys-
tèmes de filiation sont caduques pour cette raison qu'on n'a pas démontré
encore l'antériorité de l'un de ces systèmes par rapport à l'autre; dans
une Note additionnelle, je recherche si on a le droit de traiter les Arunta
de primitifs ou de sociologiquemenl anormaux.
Le quatrième chapitre est d'ordre sociologique : j'y anal^'se le méca-
nisme des modifications sociales dans les sociétés australiennes et l'impor-
tance du rùle joué par l'individu.
Dans les chapitres 1\' et V j'étudie les idées des Australiens sur la con-
ception et la réincarnation, et je prends parti pour M. Frazer et contre
M. Lang à propos de la théorie sur ï origine conceplionniste du totémisme.
Enfin les (juatre derniers chapitres traitent : des deux doctrines reli-
gieuses (exotérique et ésotérique) et du rhombe sacré; de l'idée de puis-
sance magico-religieuse; des rapports du mythe et du rite; et du contenu
des légendes : un certain nombre d'entre elles ont une valeur historique.
Enfin, je signale aux préhistoriens les notes (p. XVIl-XIX de l'Intro-
duction) sur l'industrie de la pierre en Australie, notes en partie de portée
méthodologique générale; et ma discussion des théories de Klaatsch,
Schœtensack, Enolenius, Grœbner et Ankermann qui admettent un lien
de parenté entre les civilisations australiennes actuelles et celles de l'Europe
et de l'Afrique préhistoriques et protohistoriques.
(}. VARMT. — srn LA Pr.AfilOCKPHAr.IE ET LE GRAXIOTABES 293
SUR LA PLAGIOCÉPHALIE ET LE CRANI0TABE3
V\[\ M. <i. Variot.
Noire (''iniiienl secrétaire gt-iiéral, M. .M.inoiivrier, ino disait réçeinnifiit
(jne le iiiéoaiiisine do la plagiocéphalif, cetti' déionnalion crânienne si
fréquente n'était pas encore entièrement élucidé; que, à son avis, on
avait fait jouer un r»Me trop important à la pesanteur, et que des obser-
vations nouvelles sur ce sujet, faites dans le premier Age de la vie étaient
encore nécessaires.
Soit à l'hôpital des Enfants malades, soit à la Goutte de lait de Relleville,
je surveille l'élevage d'un très grand nombre de nouveau-nés, que j'ins-
pecte régulièrement chaque semaine, il m'a donc été aisé de saisir dès
l'origine, cette anomalie plus ou moins prononcée dans l'accroissement
et dans le développement du crâne.
11 est très commun de constater chez les bébés, à partir de trois ou
quatre mois, une légère asymétrie crânienne qui passe toujours inaperçue
si on ne la recherche pas en examinant le crâne de haut en bas : on
remarque alors une proéminence peu accusée, mais bien nette, de l'une
des bosses frontales, avec une dépression correspondante du même côté
dans la région pariéto-occipitale. Les cheveux étant clair-semés et peu
épais, à cet âge, la forme générale du crâne n'est nullement masquée :
ce n'est que chez les chauves ou dans la vieill<.'sse (jue l'appréciation de
la plagiocéphalie redevient aussi facile.
Le plus ordinairement la bosse frontale droite est plus saillante que la
gauche; mais la disposition inverse n'est pas rare.
A ce faible degré, l'asymétrie crânienne m'a paru exister chez un tiers
environ des enfants (jne j'ai examinés : mais ce n'est l.-Kju'une impression
générale, car je n'ai pas tenu un compte exactde toutes mes observations.
La plagiocéphalie vraie, avec déformation très apparente, est peu
commune, et chez une douzaine d'enfants de trois à neuf mois, je l'ai vue
coexister avec cette altération singulière de la paroi crânienne qui a reçu
le nom de craniolabes.
Ce trouble d'ossi(icati(tii si- caractérise par un amincissement de la paroi
crânienne, à la partie postérieure du pariétal et dans la région de la su-
ture pariéto-occipitale, tel qu'elle se déprime sous la pression des doigts
comme une lame de parchemin. Il n'est donc pas surprenant (juc le poids
de la tête, dans le décubitus latéral droit ou gauche, suffise à aplatir cette
lame osseuse si mince dans la région pariéto-occipitale, et que, par com-
pensation,.la région frontale proémine sous l'influence de la pression
continue transmise par l'hémisphère cérébral correspondant.
Mais il n'est pas douteux que dans ces cas, si la pesanteur exerce son
action déformante, au point, comme on l'a dit, que le crilne paraisse subir
un mouvement de rotation autour de son axe vertical, il n'est pas douteux,
294 5 jiiu.KT 1906
(Jis-jc, que riiilliK'iici' du (li-ciihitiis se manifeste à cause de la dystrophie
anléc(''(lentc' (jiii a tlimimn'' la résistance liabiluellc du tissu osseux.
(letlc dyslropliio reconnaît d'ailleurs des causes multiples : C'est à tort
qu'un observateur aussi éminent que l'arrot, dominé par des idées sys-
tématiques, ;\ i>u annoncer (jue le craniotabes était une lésion syphili-
tique.
On la renittnlrc, il est vrai, au cours de la syphilis héréditaire, ou
ronime un accident |»arasyphiliti(iue, suivant l'expression de M. Fournier,
mais le craniotabes n'est pas une lé'sion spécili(|ue de la syphilis, puis-
qu'on le voit bien plus souvent sous la dépendance du rachitisme seul, ou
chez les prématurés, ou encore dans d"autres circonstances moins com-
munes.
La syphilis est une maladie très répandue surtout dans les grandes
villes, mais le rachitisme causé par une alimentation défectueuse, atteint
un bien plus grand nombre d'enfants dans la classe populaire.
Or, le rachitisme agit spécialement sur tout le squelette dont il trouble
la nutrition et l'accroissement ; plus d'un tiers des enfants du peuple, à
l'époque du sevrage, offrent des vestiges de cette dystrophie soit aux
épiphyses, soit au thorax. Il est très vraiseml^lable que l'asymétrie crâ-
nienne que l'on observe si communément à un faible degré, est due à la
pesanteur qui manifeste son action continue, lorsque la résistance du tissu
osseux est plus ou moins abaissée sous l'inlluence du rachitisme.
Au contraire lorsque la nutrition est normale chez le jeune enfant,
lorsqu'il ne présente pas de tare héréditaire, lorsqu'il n'est pas né préma-
turément, la croissance et le développement du crâne sont réguliers, le
décubitus ne produit pas de déformation ni même d'asymétrie apparente.
Discussion
M. le D' Delisle. — Que le craniotabes ait une action dans la production
de la plagiocéphalie, cela s'explique, mais tous lesplagiocéphales ne sont
pas d'origine craniolabélique. Il est vrai que les observations que vient de
rapporter notre Collègue le Docteur Variot sont prises dans un milieu très
favorable au développement de cet état pathologique.
Mais il y a autre chose dont il faut tenir grand compte dans le dévelop-
pement de la plagiocéphalie et depuis longtemps signalé par Guéniot,
c'est le mode de couchage des enfants,
il arrive souvent que les enfants sont couchés dans un berceau placé
toujours dans le même local, au même endroit, recevant la lumière dans
une direction invariable. Que se produit-il alors? L'enfant très bien por-
tant, chez lequel il n'y a d'influence craniotabétique, cherche à voir le
jour, tourne un peu la tète du côté lumineux et assez rapidement, étant
donné la flexibilité des régions pariétales postérieures, il se jiroduit un
léger aplatissement origine de la plagiocéphalie, et comme la famille n'y
porte aucune ationtion, les sutures se complètent et la malformation
devient définitive et, suivant les sujets, plus ou moins accentuée.
DISCUSSION 295
Cette inattention de la mt^re est souvent accentuée par des pratiques qui
invulontaii-einent arrivent à provoquer de véritables déformations arti-
licielles qui >iuiulenl cet aplatissement du crâne qu'on retrouve au Pérou
.■l dans certaines régions de la Colombia River sans arriver urdinaiiemenl
aux cas exagérés obtenus par de vérilaiiles pratiques déformantes.
11 t'st louti'fuis possible, en agissant à temps, de modérer le développe-
ment de cette plagiuccpbalie passive en modifiant les conditions du cou-
rbage et de permettre au crâne de récupérer un pou de la forme qu'il
tarait eue normalement.
Une autre cause dedéveloppomeiitd." la plagiocéplialie, c'est la tendance
à la production de synostoses prématurées ((ui, par cela seul, ont pour
conséquence une malformation. 11 se produit là un fait pathologique qui
peut être en rapport avec un état craniotabéti<iue nun reconnu, lleste îi
savoir si, par des conseils opportuns, les mères des enfants sauront et
voudront aider le pathologiste qui les conseille.
En résumé, le craniotabes peut faciliter la production de la plagiocé-
phalie, mais dans le cas où on ne cherche pas à atténuer son action par
un couchage logique tantôt sur un côté du corps, tantôt sur l'autre; il y a
d'autres causes qui aident à la formation de la tète plagiocéphale.
M. Marcel liAUDoiiN. — Le cas des jumeaux cité par M. le D"" Delisle n(3
prouve pas grand chose. En effet, ces jumeaux étant de même sexe, peuvent
provenir d'un seul œuf et, par suite, avoir une dystrophie osseuse congé-
nitale du crâne, siégeant de côté opposé (c'est un fait d'observation (jue,
chez les sujets composant les monstres doubles, souvent les lésions sont
ainsi symétriques).
Cela étant, ces deux jumeaux auraient eu de la plagiocéphalie du côté
primitivement atteint. Ce cas est donc plutôt en faveur de la théorie sou-
tenue par M. Variot et moi en nous basant sur la clinique (existence d'une
pn''dispositiijn osseuse), qu'en faveur de la théorie de M. Delisle, qui
admet C()inme suffisante, une action mécanifjue. Pour nous, l'action méca-
nique n'est (lue secondaire et accessoire; la cause primordiale est une
dystrophie congénitale, encore indéterminée.
M. Vaiui.t. — Je ne suis pas surpris que d'autres observateurs, avant
moi, aient cherché à établir les rapports qui existent entre le craniotabes
et la plagiocéphalie, et M. Guéniut, en particulier, avait un excellent
terrain d'étude à l'hospice des Enfants assistés; j'ai simplement voulu
apporter un stock d'observations pour servir à élucider le mécanisme de
cette dt'-furuuition crânienne sur lequel on discute encore.
Il me semble difficile d'accepter roi)inion un [)eu exclusive de M. D.'lisle,
qui voit dans l'action de la pesanteur, dans le décubitus, le facteur uni-
que qui intervient pour produire la plagiocéphalie.
Pour que celle-ci apparaisse il ne suffit pas que l'enfant soit couché
toujours sur le même côté, il faut encore une prédisposition qui consiste
dans une dystrophie osseuse causée par des états morbides tels (pie la
296 5 jTiM.F.T 1906
syphilis ou le rachitisme. Je suis très heureux d'ôtre sur ce point d'accord
avec notre collègue M. Baudouin. Huant îi l'induence de l'hérédité sur
la production du craniolahes elle est hien probahle, soit qu'il s'agisse de
la syphilis, soit qu'il s'agisse du rachitisme.
M. Manoivrieu prend également la [tarole.
LES GROUPES ETHNIQUES DU BASSIN DE LA RIVIERE CLAIRE
(Haut Tonkin et Chine Méridionale).
Par m. le Commandant Bonifacy,
de l'Infanterie Coloniale.
Généralités.
Dans la partie inférieure de son cours, la Rivière Claire arrose un pays
peuplé exclusivement d'Annamites, mais dès qu'on pénètre dans les mon-
tagnes qui s'élèvent sur ses rives et dans lesquelles prennent naissance
ses nombreux affluents, les villages annamites se font rares et ne tardent
pas à disparaître complètement, pour laisser place aux hameaux des Mon-
tagnards.
Certains voyageurs, de nombreux administrateurs, civils ou militaires,
ont voulu opposer ces Montagnards aux Annamites du Delta, en prêtant
à ceux-là toutes les qualités physiques et morales qu'ils déniaient à
ceux-ci. Il résulte des observations que nous avons faites pendant un
séjour de près de 12 années dans ces régions, qu'en réalité les Monta-
gnards sont les très-proches parents des Annamites. On retrouve chez les
uns et chez les autres les mêmes caractères physiques, les mêmes coutumes
ethniques, le même système de langue. Placés dans un milieu différent,
forcés par la nature du sol à demeurer isolés ou à ne former que des
groupements restreints, leurs sociétés se sont moins développées que chez
les habitants du Delta, et ils sont généralement restés h un stade infé-
rieur de civilisation.
Nous nous proposons dans celte élude, non pas de décrire complète-
ment les divers groupes ethniques du bassin de la Rivière Claire, mais de
les énumérer simplement, en, donnant quelques uns des caractères qui les
différencient. Cette simple énumération a toujours présenté quelques
difficultés, tenant aussi bien au grand nombre de groupes et de tribus,
qu'aux divers noms (ju'on leur donne suivant les lieux; pour cette der-
nière raison, les groupes paraissent encore plus nombreux (ju'ils ne le
sont réellement. D'ailleurs les figures que nous donnerons dans le texte,
noNiFACV. — cnorpEs ethniqies nr bassin de i,a rivière i.i.aire 2\)~
|iormeltront il'' distinguer l'apidement les individus des di(T»'rentsgroupes.
haiis chacun d'oiix, en etVct, les femmes ont toujoiu-s conservé un costume
particulier, dont la couleur, la forme, a souvent donné le nom ii la tribu.
Qu'il nous soit permis de remercier ici un de nos plus précieux
collaliorateurs, le sergent Hoyer de l'Infanterie coloniale, qui a visité avec
nous toutes les tribus de la Uivière Claire, et (jui a mis son beau talent de
jiliotographe ;\ notre disposition pour produire les clichés qui serviront à
nos démonstrations, clichés dont les éprouves ont été faites par M. Hau-
douin, photographe à Marseille.
Caractères somatiques.
Entraînés par leur sympathie pour les Montagnards, les administrateurs
et voyageurs dont nous parlions ci-dessus, ont cru souvent reconnaître
chez eux des caractères appartenant aux races aryennes. Cette opinion a
été soutenue tantôt en ce qui concerne les Mèo, tantôt en ce qui concerne
les Mân, tantôt en ce qui concerne les Thai ', en réalité, les individus de
ces groupes ne sont pas plus rapprochés des Indo-européens que les
Annamites, auxquels ils ressemblent beaucoup. Placés dans des conditions
d'existence plus dures, ils sont jdus petits, moins forts et en même temps
moins aiïinés que ces derniers, bien qu'on ait soutenu précisément le
contraire.
Tous ces groupes ethniques paraissent formés de races différentes; on voit
chez tous des individus aux yeux non bridés, au nez droit, aux cheveux
légèrement ondulés, tandis que d'autres présentent les caractères du type
dit mongolique. La masse des individus oscille entre ces deux types
extrêmes, tout en présentant de grandes variétés individuelles. Dans les
photographies debuste que nous donnons de face et de profil, nous avons
cherché à choisir dans chaque groupe les types extrêmes. Pour que les
yeux ne soient pas égarés par la difï'érence des costumes, nous avons
pris nos modèles parmi les soldats.
Plancht' V, fuj i. — Aiinamites du Delta, Kiuli ou Kèo.
Fiij. 2. — Lt'S mémos, de profil.
Nous savons que les mesures anthropométriques, prises par des ama-
teurs, sont fort sujettes à caution, nous croyons cependant qu'il est utile
de donner ici les moyennes de celles que nous avons relevées. La concor-
dance de ces moyennes avec celles obtenues par M. le docteur Denikci', en
ce qui concerne les Annamites du Tonkin, rassurera un peu sur leur
valeur. Dans tous les cas, comme les mômes erreui's se sont sans nul doute
' Nous écrivons liiai pour nous conformiM- à ru-saj^i', inai.s nous faisons obsi-rver
qu'en Chioo et qu'au Tonicin io t nesl pas aspiré et l'a e?! bicl', en quôc ngu anua-
mite, on doit écrire tày.
298 5 jcii.LET 1906
reproduites, les moyennes, m<Mnes erronées, ne serviront pas moins à
différencier relativement les différents groupes. Parmi ces moyennes, nous
ne donnons que les plus essentielles.
Annamites du Delta, soixante un hommes mensurés, presque tous soldats.
Taille 1.594
Indice céphaliquc 8:2.5
Indice nasal 87.9
Les Annamites du Delta forment certainement le groupe où les diffé-
rences individuelles sont les plus accusées.
/'lainlic VI, li(j. 1 — Thaï, Thù noirs de Baolac.
Fig. 2. — Les mêmes, de piulil.
G'estsans doute sur les groupes thai du Tonkin que les renseignements
les plus controuvés ont été donnés. Sans parler de leurs qualités morales,
qui ont été exagérées d'une façon hyperbolique, leurs caractères somati-
ques mômes ont été embellis, amplifiés, on en a fait une race supérieure,
non seulement aux Annamites, mais même aux Français comme taille,
vigueur, endurance; or, voici quelles sont les moyennes des Thai, les
individus qui les ont fournies sont pour la plupart des soldats, exempts
de tares physiques; ils appartiennent aux sous-groupes Thô noir, Thù
blanc, Nông an, Giày.
Deux cent un hommes mensurés.
Taille 1.572
Indice céphalique 81.1
Indice nasal 94.9
La taille est donc inférieure à celle des Annamites du Delta, la tête est
plus allongée, mais le nez est beaucoup plus aplati. Chez un nombre assez
appréciable d'individus (25 pour 100), la largeur du nez est plus forte que
sa longueur.
Planche II f, figl. — La qua ou Pen ti lolo.
Nous nous étendrons plus loin sur ce groupe qui a été jusqu'ici confondu
avec les Lolo. Nous regrettons vivement de n'avoir pu mensurer qu'un
petit nombre d'individus. Les chiffres moyens que nous donnons plus bas
ne sont que provisoires.
Sept hommes, dont trois soldats.
Taille i:604
Indice céphalique 83.9
Indice nasal 96.3
Si ces chiffres se confirment, les La qua sont les plus grands, les plus
BONIFACY. — onOlPES ETlIMnrES DV HASSIN 1)E LA IIIVIKUE Cr.AIRE 299
brachycéphales et les plus platyrhiniens des indigènes du haiil-Tonkin.
Nous n'avons pu, à noire grand regret, mensurer des Lao et des La ti ;
nous sommes persuadé, en etTet, que ces indigènes sont, avec les La qua,
(les plus intéressants à décrire, car ils représentent sans doute les restes
des groupes ethniques, peut-être même des races, stationnés depuis le
plus longtem[»s dans la région.
Mi'ni ou ïiio. —Etant donnés les sentiments d'indt'qiendance de ces indi-
gènes, et pour ne pas froisser des traditions resjM'ctaMes, on ne les a pas
soumis au service militaire ', et il serait à désirer ijue l'on agisse partout
et pendant longtemps de même, si on veut arriver à les fixer au sol. Nous
renvoyons donc à la descri|ition des groupes pour les photographies.
Voici les données anthropométri(iues fournies par la mensuration de
(piarante-deux individus des tribus OuAn côc, Ta pan et Lan tiôn.
Taille 1.393
Indice céphalique 78.4
Indice nasal 90.9
Les Mân sont donc en moyenne sous-dolichocéphales comme les Lolo ;
ils se rapprocheraient par ce caractère du type Indonésien, mais il faut
remarquer que leur pays d'origine est le plus septentrional, si l'on en
croit les traditions, et que la brachycéphalie paraît s'affirmer de plus en
plus quand on va du Nord au Sud dans la Chine et le Tonkin (si on
excepte les Indonésiens, et en ne tenant compte que des peuples que l'on
considère comme immigrés <m Indo-Chine, Khmers, Annamites, Thai).
Peut-être faut-il attribuer cette dolichocéphalie à une déformation
acquise, analogue à la déformation toulousaine, que nous avons constatée
chez quelques Mân, et qui paraît venir de l'habitude qu'ont ces indigènes
de couvrir la tète de leurs enfants d'un lourd bonnet conique.
Pa leng et Na ê. — Nous n'avons fait aucune mensuration dans ces
tribus.
Mèo ou Miao tse.
Plaurho Vil, fiii. 1. — Mèo ou Miao Is.' I>1.
Fig. 2. — Los mêmes de prolil.
N'oici les données anthropométriques en ce qui concerne ce groupe. Les
moyennes ont été obtenues en mensurant quarante-huit hommes ailultes,
dont une trentaine de soldats.
Taille 1 .o37
Indice céphalique 80.2
Indice nasal 89.9
* Au moins dans le III' Territoire Militaire.
300 f) jiir.i.F.r 1000
Faisons remarquer on passant ([iie les Mèu ont été souvent classés
parmi les Aryens, llien ne peut juslilier celle liypolhèse si l'on se réfère
aux caractères somaticjues, ethniques et linguistiques du groupe.
LolooH La.
Planche VIII, fuj. 1. — Lolo noirs.
Fif/. ^. — Les mêmes, do profil.
Les Lolo viennent de l'Ouest, d'après toutes leurs traditions. Leur
langue est apparentée, comme forme et comme vocabulaire, aux langues
birmano-thibélainos. On trouve parmi eux des individus ressemblant aux
Thibétains et rappelant même le type des Tsiganes.
Voici les moyennes obtenues parla mensuration de vingt-six hommes
adultes, dont trois soldats seulement.
Taille 1.556
Indice céphalique 78.8
Indice nasal 87 . 1
Notons encore que le système pileux est plus développé chez les Lolo
que dans les autres groupes, que les cheveux sont quelquefois plus fins
et légèrement ondulés, mais cela est relatif, et il n'en faut pas conclure
que les Lolo sont barbus comme des Européens, et frisés comme des
Somalis, ce que n'ont pas manqué de faire quelques voyageurs toujours
portés à l'exagération.
Les figures que nous avons données ne représentent que des types indi-
viduels; pour bien donner la physionomie générale du groupe, nous
croyons indispensable de reproduire ici des photographies d'ensemble.
On verra que les mêmes types y apparaissent, au point que certains
officiers, cependant persuadés que les Thai, les Mèo, etc., appartiennent à
des races différentes de celle des Annamites, confondaient parfaitement les
uns et les autres, et prétendaient même reconnaître parmi les Thai ou les
Mèo, l'ordonnance indigène ou le boy du Delta qu'ils avaient eu à leur
service quelques années auparavant.
Planche I, fig. 1. — Groupe de liraillciirs tonkinois (.Vnnainile du Delta, Kinh ou Kèo).
Fig. 2. — Groupe de tirailleurs tonkinois (Thai, ThA noirs de Bac lac).
Planche II, juj. 1. — Groupe de tirailleurs tonkinois (Mèo ou Miao tse).
En résumé, et pour revenir a ce que nous disions en commençant ce
chapitre, les habitants du llaut-Tonkin et les Annamites du Delta ne
peuvent être considérées comme formant des races distinctes, mais comme
des fjroupes dhniques dans la composition desquels entrent, à doses inégales,
diverses races qu'il est bien difficile de déterminer en l'état actuel de nos
ItoMKACV. — UKitUl'KS KTlINInLKS DU ItASSI.N [)E l.\ lUVIKHK CLAIltK 301
connaissances. La nioytMun' dn ly()i' varie légèrenicnl suivanl iiin' l'une
ou l'autre de ces races coni[>osanles prédoniino.
Nous avons décrit lirii^veuient les plus importants caractères moiplKj-
logiques des Annamites et des Montagnards. En ce qui concerne les carac-
ir-res physiologiques et pathologiques, nous dirons qu'ils sont les mômi.'s
pour tous les giouiies, saut' les (pielques dilîérences produites par la
diversité des milieux, .\insi le goitre, très rare chez les Annamites, est
fréipient chez les Montagnards, les épidémii's sont plus terribles chez
ceux-là que chez ceux-ci, etc., etc.
CARACTÈRES ETHNIQUES
Langues. — Nous avons donné, dans le linUclin de l'Ecole française
d' Extrême Orient (Juillet-Décembre 1905), une élude sur les langues par-
lées par les groupes qui nous occupent. Nous y renvoyons le lecteur
désireux de se documenter et nous ne retiendrons de cette étude que
ceci :
Tous les groupes du Haut-Tonkin parlent des langues monosyllabiques,
comme l'Annamite, sans tendance ;i l'agglutination *.
Certaines de ces langues (annamite, thai, la qua, mân), terminent sou-
vent leurs mots monosyllabes par des explosives; les autres (lào, lati,
pa teng, mèo, lolo), n'ont pas d'explosives, mais elles possèdent, comme
les premières, des syllabes nasalisées.
Toutes possèdent des particules numérales, caractéristiques d'une
famille d'objets, mais ces particules sont plus ou moins nombreuses sui-
vant la langue. La langue lào possède certainement le plus grand nombre
de particules.
.\u point de vue de la syntaxe, l'annamite, le thai, le la (jua, le liio et
le la ti ont la construction directe. Dans le mân, le pa teng et le mèo,
comme en chinois, les compléments et qualificatifs du substantif ou du
sujet se placent devant lui, la syntaxe du verbe est directe. Enfin dans le
lolo et ses idiomes, le verbe est rejeté en fin de phrase; de plus cette
langue, comme ses parentes (birman, thibétain, etc.), porte des traces de
llexion, et les monosyllabes y sont souvent joints pas des affixes dont la
valeur n'est pas bien déterminée.
Outre leur langue propre, certains groupes ont des langues d'échange,
tfu Sud l'annamite, qui est en outre compris par tous les Thô, au centre
et à l'Est le Thai, au Nord l'idiome chinois dit kouan hoa du Yunnan,
défiguré par la suppression des consonnes aspirées.
Gomme écriture officielle, ces groupes ont le chinois ancien, le kou
wen, comme les Annamites, les Japonais, les Coréens; les Mân l'emploient
* Le chinois moderne, qui a penlu ses tons et ses explosives, surtout en ce qui
concerne le kouan hoa, est obligé d'employer des mots doubles et des sullixes pour
être intelligible, il devient agglutinant.
302 S JUILLET 1906
cxclusiveint'iit, miiis les Thai, comme les Aniiamilcs, ont encore formé
des caractères phonéliques et iiléo-phonétiques, pour li-anscrire les mots
de leur langue. Ktant donné la présence d'explosives dans cette langue,
les Tliai, nnhne ceux qui habitent le Yunnan sont obligés de prononcer
à la cantonnaise ou à l'annamite; on voit combien peu est justifiée la
théorie de ceux qui prétendent que la prononciation chinoise dite
kouan hoa suffit pour donner le son des noms géographiques imposés
par les Thai *.
Enfin les groupes ethniques ayant été civilisés par les Chinois, un
grand nombre de mots abstraits, de noms d'outils, etc. viennent du
chinois, mais ils ont souvent conservé leur ancienne consonnance, qui
s'éloigne considérablement de la prononciation kouan hoa actuelle, pour
se rapprocher de la consonnance sino-annamite ou cantonnaise. Beau-
coup de mois thai ainsi empruntés au chinois, ne l'ont pas été direc-
tement, mais par le canal de l'annamite. Ainsi les Thô disent bût pour
pinceau, et non pi comme en kouan hoa, ou put, comme en cantonnais.
Cela est aussi vrai sur les frontières du Yun nan que sur celles de Kouang
si, nous nous refusons donc absolument à diviser les Thô en deux groupes,
un à l'Est influencé par les Annamites, un à l'Ouest influencé par les Chinois
du Yun nan. Ayant vécu sur les deux frontières, nous n'avons jamais pu
croire, justifiée cette difi'ércnce. Quelques Thô voisins du Yun nan parlent
le kouan hoa, très mal d'ailleurs, tandis que ceux voisins des frontières
des deux Kouang parlent le cantonnais beaucoup mieux, parce que sa
morphologie est semblable à celles des langues thai et annamite.
Sociétés. — La société si perfectionnée des Annamites n'a que des équi-
valents grossiers chez les Montagnards. Dans le Sud de la Rivière, on
trouve la commune régulière annamite, plus haut, les habitants de cette
commune n'ont pas dépassé le stade communautaire et se partagent les
terres fertiles, en principe tous les trois ans. Plus haut encore, la com-
mune n'existe que de nom, le ly truong thô devient un chef féodal, et ses
vassaux, bien qu'ils portent les mêmes noms que les notables annamites,
lui sont en tout subordonnés. Enfin on retrouve sur la frontière la pro-
priété particulière, limitée aux meilleurs terrains. Presque partout, les
terrains maigres de montagne sont cultivés par des usufruitiers qui ne
paient qu'une redevance^ insignifiante d'ailleurs, au chef féodal de la
région.
Le groupe familial est de forme patriarchale, tempéré quelquefois par
l'entrée d'un gendre dans la maison de son beau-père. En dépit des lois et
bienséances chinoises, la femme est libre., et les mariages se font au choix
* Un exemple sufTira pour le démontrer. Si on prononce en kouan hoa les carac-
tères que les Thai emploient pour écrire Pak nam, on dira Pé nien ce qui n'est pas
la même chose. C'est celte prononciation erronée des caractères qui a amené des
confusions dans le nom des tribus^ des doubles emplois, car souvent ou a cru qu'il y
avait autant de tribus que de prononciations diCférentfs des caractères.
lloMFAt:Y. — i;HOrPRs KTIINIuIKS DI' IIASSIN DR I.A lUVIKRF. CLAIRE 303
des parties, choix, qui est toujours sanclionné par les parents. La puis-
sance paternelle est en général bien établie; cependant chez les Môo, les
enfants se passent du consentement des parents pour contracter mariage.
Le régime du clan, tel qu'il existe en Australie, en Afrique, en Amé-
rique, a presque disparu. On ne trouve des traces de totémisme que chez
les Ma n (légende du chien l'ien ming hu). On remarque une survivance
d'exogamie par rapport au village, d'endogamic par rapport à la tribu.
Par contre, les Chinois, puis les Annamites civilisés pareux, ontcalalogué
les familles dans les linh (^)', que l'on peut assimiler à des clans. Dans
le Delta, les membre de ces litik ont des réunions rituelles, cela n'existe
pas dans le Nord, mais il est de règle, comme en Chine, que les membres
il'un même /j/i/t, considérés comme parents, ne se marient pas entre eux.
Cette régie est pourtant bien souvent violée
La religion otricielle est celle de Confucius; le culte des ancêtres, dont
If chef de famille est prêtre, est assez bien suivi. On trouve desdevins, des
exorcistes qui se réclament de Lao tse ou de Huddah, sans trop savoir ce
que sont ces personnages. En réalité, la religion du peuple est un animisme
tout à fait primitif, mélangé au culte des forces naturelles. On fait un
assez grand usage de la magie sympathique. Les maladies sont causées
par les mauvais esprits que les sorciers savent découvrir et apaiser. En
un mot, nous trouvons chez les Montagnards du hautTonkin les croyances
qui sont communes aux peuples primitifs et dont on retrouve la survi-
vance au sein des sociétés les plus civilisées.
Nous excéderions les limites de cette étude, si nous traitions de tout ce
([ui touche la vie matérielle. Disons seulement que, en ce qui concerne
l'habitation, on trouve quatre types de cabanes: les unes sont bâties sur
le sol, d'autres sur pilotis ; d'autres, sur un terrain très incliné, à moitié sur
le sol et à moitié sur pilotis; enfm le quatrième type, que nous avons
trouvé chez les lieu i et chez les Lolo noirs, comprend, sous la même
surface couverte, une partie formant rezde chaussée, tandis que l'autre
forme une espèce d'estrade. Les matériaux des maisons sont le bois, le
bambou, la paillotte, très-rarement le pisé en dehors du Delta.
Les vêtements sont généralement confectionnés dans la tribu. On
ignore le tatouage, les mutilations ethniques, sauf le percement des
oreilles des tilles et quelquefois celui des oreilles des garçons, dans le but
de tromper les génies malfaisants sur leur sexe.
L'agriculture est la ressource habituelle du montagnard. Suivant le
cas, il se sert d'un bàlon pointu sur défrichement par le feu, ou bien
il travaille à la houe: d'autres labourent le versant des montagnes et
sèment à la volée le riz de montagne, le sarrazin, l'éleusine coracana;
d'autres défoncent la rizière inondée. Tous élèvent des bestiaux, soit pour
les manger, en user comme animaux de labour ou en faire le commerce.
Quelques-uns de ces bestiaux sont réservés pour les sacrilices. La pêche et
' Les caractères chinois ont été prêtés par Ilmpriineric Nationale.
304 O JUILLET 190()
la chasse viennent ajouter aiiv ressources de la famille. On use d'exci-
lants et de slupi'llanls tels (ju'alcoul, tabac, opium.
Nous nous contenterons de dire quelques mots sur les myllies. On
croit, avec les Chinois, que la terre et le ciel furent créés par Ban cô
(kûuan hoa : Pan kou), dont le corps, les os, le sang formt^rent la terre,
les pierres, les eaux. Une autre version altiibue la création de chaque
chose à la puissance d'un génie particulier. On parcourt ensuite des
époques d'obscurité et de lumière trop vive, puis un déluge universel
vient détruire le genre humain. Deux enfants, le frère et la s<eur sont
seuls sauvés. Sur le conseil de la Tortue et du Hambou, ils s'unissent par
le mariage, et dans un enfantement merveilleux, la a jeune soeur », mère
du genre humain, donne le jour aux trois cent soixante familles humaines.
Celte légende est commune à tous; si on compare de même les rites de
la naissance, du mariage, de la mort, les croyances populaires, le folk
lore, on sera intimement convaincu que tous les groupes, quelle que soit
leur langue, sont de môme souche ethnique. Et il ne faut pas en cela
croire à l'intervention des Chinois civilisateurs, car la légende que nous
venons de raconter, les rites que nous avons observés, se différencient
totalement, de ceux des Chinois, dont ils choquent le plus souvent les
coutumes. Nous mettons à part, bien entendu, les personnes aisées et ins-
truites qui croient bien agir en adoptant les faeons chinoises, qu'ils s'effor-
cent de copier; il ne faut pas oublier d'ailleurs que la Chine etsa cour fut un
modèle que le peuple et le roi d'Annam s'efforcèrent toujours d'imiter et
dont ils copièrent presque servilementles lois, sans que la sage tolérance des
autorités aille jusqu'à prescrire l'obéissance absolue à leurs prescriptions.
Nous ne citerons qu'un exemple : d'après la loi chinoise, les filles n'héritent
pas; d'après la coutume annamite, toujours suivie, les filles reçoivent
leur part de l'héritage paternel. En général, et malgré le travail que doit
fournir la femme dans certaines tribus de la montagne, on peut dire que,
en Annam et dans les tribus k barbares » du Sud, sa condition est infini-
ment plus relevée qu'en Chine.
Avant de passer à la nomenclature des groupes, nous devons bien spé-
cifier que tous les renseignements quenousdonnonsont été recueillis direc-
tement par nous, le plus souvent sans l'intermédiaire d'un interprète, et
dans la tribu même des intéressés. Nous conseillons vivement à ceux
qui voudront faire des études pareilles, de se méfier des sources chinoises,
écrites ou orales. Les Chinois racontent autant d'absurdités sur les Barba-
res du Sud qu'il en ont raconté sur les Européens. Ils ne savent même pas
les représenter fidèlement en images, et le barbare est placé et habillé
d'une façon convenue, souvent contraire à la vérité. Nous n'avons jamais
vu que le costume nông, d'ailleurs d'une grande simplicité, qui soit donné
par les Chinois d'une façon tant soit peu fidèle.
Nous classons, pour plus de facilité, les groupes ethniques en trois
grandes divisions, suivant les trois formes de la syntaxe. Nous faisons dès
à présent observer que parmi les Rlan ou Yao, deux tribus, les Cao lan et
HOMKACY. .IRdlF'KS RTlINrOIF^ IH ItASSiN DR I.A HIVIKHE (CLAIRE 305
et les nii;\n cùc ne |»arleiil pas la langue de leur groupe; les premiçrs
parlent lliai, les autres un chinois arcliaï(|ue de forme méridionale.
DEScnil'TlON DES GROUPES
1"> Dicisinn. — (Jroup.îS pariant des laii;,'ue,s ayant la inéine syntaxe que la langue
annamite.
Anmt/iilcs. — Dans leur langue, les Annamites se disent hommes de
IWnnam (ngùoi .\n nam), ou Khih (i^j ce fjui signifie nombreux ou
hommes de la capitale ; Qw WvA\ on les appelle AVo '. Nous croyons ne pas
avoir à parler de ceux d'entr'eux qui sont stationnés dans les plaines du
Delta, ils sont suffisamment connus, mais nous mentionnerons les Anna-
miles montagnards, parlant la même langue, ayant les mômes coutumes,
mais stationnés dans des maisons sur pilotis, portant leurs enfants dans
le dos comme les autres Montagnards, et dont les femmes, les jours de
ftHe, ont des turhans, des ceintures et des cache-sein de couleur voyante.
P/am/ii' /X, /l'y. 1. — Annamites inonlagnards.
L'existence de ces Kinh en pays insalubre, paraît remonter à l'époque
très éloignée où les plaines du Delta étaient encore submergées. Elle
semble contredire la théorie, devenue pres(jue un axiome, qui prétend
que les Annamites ne peuvent vivre en pays de montagne. Leurs bonnes
relations avec les Thai et les Man, leurs voisins, dénient aussi la prétendue
inimitié qu'on se plaît à supposer entre Annamites et Montagnards.
(.ROUl'E TH.\I.
Nous englobons dans ce groupe toutes les tribus (jui parlent des idiomes
thai, bien que seuls les Thù acceptent au Tonkin cette dénomination de
càn làij * (hommes thai).
Planche IX, fig. 2. — Thù méridionaux.
Les rAô(i OU i ^), en kouan boa : Cou on V on j en, en cantonnais :
Von fuîn, sont les Thai établis depuis longtemps dans les vallées du
Tonkin et des deux Kouang. Us sont frères des Laotiens, des Siamois, et
des indigènes insoumis de l'île de ILainan qui prononcent leur nom sai et
non tày. Ceux que nous présentons ci-dessus furent dirigés, il y a deux
siècles, de la province de (^ao Bang sur les boids du Sông Dày, alTIuent
• Le nom de Giao clii (orteils écartés), n'est connu que des gens instruits,
* Nous nous servons, autant que le |)enncltent les ressources de la typo^^iapliic, de
la notation qu6c n^u, en ce qui concerne les mots annamites. Dans ci llo notation
on doit orlliographier tAy.
soc. b'ANTURÛP. 1901). 31
306 5 Jini-KT i90()
infrrieiii' do la llivi^rn Claire. Ils y vivent comme leurs voisins les Kinh
montagnards, et portant le môme costume. Ils ont encore conservé Tiisage
de leur langue, qui m- laidera pas, sans doute, à faire place h l'anna-
mite, que tous parlent couramment. Ils i.2:norenl s'ils sont Tiiy blancs, ou
Tày noirs.
Planche X, juj. 1. — Tiio blancs de Ilii gianf^.
Ces Thai se trouvent sur la rive dioite de la Ilivière Claire, depuis Vinh
Thuy jusfju'en Chine. Leur costume est différent de celui des Thai noirs,
qui habitent la rive gauche de la Hiviére, les bords du SAng g;\m, et le
haut Sông Chay. Leur idiome diffère aussi un peu de celui des Noirs, qui
s'accordent à le trouver plus doux que le leur. Nous ignorons si les Tàxj
hlido (blancs), ont droit ou non à cette dénomination,, il nous suffit qu'ils
y tiennent et qu'ils la reçoivent de leurs voisins pour la leur donner.
Planche XVII, fig. 1. — Tliù noirs de Baolac.
Comme on le voit, les Tài/ dàm (noirs) comme les Tày khao, ont adopté
la couleur indigo foncé, et nous croyons que ces expressions de blancs et
de noirs, que nous retrouvons souvent dans les livres chinois quand il
s'agit des barbares, indiquent un degré différent de civilisation ou plutôt
de soumission, et non un détail de costume ^
Les Thô sont encore appelés Pa i dans le Yun nan ; nous croyons qu'il
n'y a là qu'une prononciation vicieuse de tày, le ^ et le jo permutant
souvent en passant d'une langue dans l'autre.
Les Thô sont des philosophes qui préfèrent la vie calme et contempla-
tive de la campagne à la vaine agitation des cités. Ils sont soumis à leur
chefs féodaux, et vivent tranquilles, autant que le leur permettent les pi-
rates chinois ou les contrebandiers qui les ont remplacés. Ce sont eux qui
sont propriétaires du sol, les autres Montagnards, pour la plupart nouveau-
venus de Chine, leur paient une légère redevance, qui sert surtout à
affirmer leur droit de propriété. Nous avons tout intérêt à nous appuyer
sur les Thô, fidèles serviteurs de l'Annam et de l'ordre établi.
Les Thô habitent des maisons sur pilotis. Ils cultivent de préférence la
rizière de plaine (na), et ne font qu'exceptionnellement la rizière de mon-
tagne (rày). Ils pratiquent savamment l'irrigation au moyen de canaux,
ou de machines élévatoires actionnées par la force du courant, mais ils
laisseraient dépérir toute leur récolte plutôt que d'élever l'eau à bras
comme les Annamites du Delta. Sauf l'abatage des arbres, le labourage
et le battage, les travaux agricoles sont faits par les femmes. Dans son
langage rudimentaire, le Thai emploie la même épithète pour dire belle
et active, quand il parle d'une femme.
Heu i (kouan hoa) ou Hùc i (cantonnais). Ces mots sont les pronon-
' Vers l'I'^st, à partir de la réf^ion de Gaobang, les Thô so disent de nouveau Tày
khao, disant que les Khao sont ceux qui suivent les coutumes policées.
ItoMKACV. illlULl'ES ETUNIulKS 1)1 ItASSIN DE I.A lllVlKltE CLAIHK M)1
cialiolis (les deux caraclfivs M ^ ipii sigiiili.'iil Im/jit mtir. Dans leur
langue, ces Thai se nomment Nông-suiu/ (prononcer sungue). Sur ce mot
(le nùng, (ju'il prononce nô, le père Vial a élahli une théorie pour expli-
quer le mot lolo. Si les .Nùng sont quehjuefois seigneurs des Lolo, en
Chine, oTi ils exercent des petites fonctions, ils n'en sont pas moins Thai
et Nnng, et il est invraisemblable (jue le mot lolo, qui se pi-onori<ait
autrefois lala comme actuellement en annamite, vienne (h; nùng nùng.
L'idiome des lieu i ressemble étonnamment ;i celui des Thù noirs de
iJao lac. Parmi les dilTérences que nous avons notées, signalons tu tiic
(le mâle) qui correspond à con duc (prononcer luque et duque) annamite.
Au Tonkin, les lien i n'habitent guère que le nord du canton de Nam
(|uang, dans le IMui de Baolac. En Chine, on les trouve à l'ouest du
Kouang si et à l'est du Yun nan. Ceux que nous avons vu prononçaient
les caractères à la canlonnaise et savaient écrire leur langage au moyen
de caractères démotiques.
Planclic .\\/ig. 2. — Homme et jeunes filles lieu i.
Les lieu i habitent des maisons sur pilotis, ou avec une partie intérieure
sur pilotis. Ils sont bons agriculteurs et font beaucoup de cultures de
montagne et de rizières irriguées étagées.
Dans son Ethnographie du Tonkin septentrional \ le commandant
Lunet de Lajonquière confond les Heu i et les Tchong Kia, il donne à
ces derniers le costume des lieu i. Il y a là une erreur que les photogra-
phies suffîront à dissiper.
Nôuf) an. — On ne connaît, en fait de Nâng (fj^) *, dans le bassin de la
Rivière Claire, que les Nông Sungou Cliuong dont nous venons de parler,
les Nùng an dont nous donnons la photographie, et les Nông quâij son,
dont nous parlerons plus loin.
La filiation de ces Nùng est assez mal définie, car on appelle aussi Nùng,
les métis de Chinois et de femmes du pays. Sur le Sùng Gtlm inférieur, on
trouve un village (IMiù trinhj, où les femmes portent le costume thù, les
hommes le costume chinois, y compris la tresse, ce sont aussi des Nùng.
Sur les frontières du Kouang si les hommes et les femmes nùng portent
le costume cliinois, mais parlent un langage thai, qui ne dilfère du thù
que par les accents toniques, une plus forte proportion de mots empruntes
au chinois, et enfin par une accentuation toute particulière des syllabes
explosives. Ces syllabes sonnent absolument comme aken, apen, etc. en
allemand, ainsi pâc (bouche) se prononcera pakcn.
Sur la frontière du Yun nan, les femmes Nùng portent un costume
particulier, bien représenté dans l'ouvrage de Devéria sur la frontière
* Paris, Ernesl Leroux éditeur, d906.
* La prouoncialioii do ce caraclére, «[in est un iioiii d> c\xn, m inè.iie Irrnps (|u'ii(i
nom de tribu, est Nùng et non Nùng.
308 -j Ji ii.i.Ki llKHi
siiiti-aniiainilo, mais dans \c phii de Maolac, les fcmiues oui un |iantalon
sous la jupoqui n'est pas plissée. Les hommes ])ortenl le cosluine chinois
ou le costume annamite.
Du côté de lia giang et de lloang Ihu 15i, les femmes Mùng ont la longue
jupe plissée, sans pantalon, celte jupe est relevée par derrière et forme
une sorte de pouf qui entoure une petite gibecière.
Enfin lorsqu'on va vers le Sud, les hommes et les femmes prennent le
costume thô, mais sans collet.
Les Nong an se sont installés, avec la permission des autorités thô,
sur des teri'es libres, en plaine ; ils les cultivent parfaitement et se mon-
trent plus industrieux (|ue leurs voisins. Leurs maisons sont bAlies sur le
sol et non sur pilotis. Les femmes accouchent couchées et non assises.
Les Nông ont un certain respect du chien et l'expliquent ainsi : L'ancêtre
de leur race, étant enfant, se laissa choir de l'étage de la maison, qui se
bAtissail alors sur pilotis. La chienne de la maison prit soin du petit être
et l'allaita.
Les Nônfi qwhj son (seune), ne se trouvent pas au Tonkin, mais nous
avons vu à lia giang des ma fou de cette tribu qui y venaient pour les
besoins de leur commerce. Leur nom est le plus souvent prononcé
Planche XI, fifj- i. — Femmes et ûllettes nông an ds Iloang tbu Bi.
Long au lieu de Nông, on l'a écrit phonétiquement f| (dragon), et
cela a suffi pour faire croire à l'existence d'une nouvelle tribu. 11 résulte
des renseignements que nous avons pris auprès d'un Français résidant
à K'ai boa fou, que les Long parlent facilement le cantonnais, mais
s'expriment avec difficulté en kouan boa.
Giây. — Les Giârj habitent la partie du Yun nan qui se rapproche de
la frontière tonkinoise, sur la Rivière Claire; la partie occidentale du phu
de Baolac; ils ont pénétré plus bas, dans le sud-est du cercle de Ha giang,
mais ils y ont abandonné leur costume distinctif pour prendre celui des
Thô, toutefois ils ne portent pas de col à leur habit.
Le commandant de Lajonquière, dans l'ouvrage cité plus haut, identi-
fie les Giây aux Nhang du IV* Territoire. Cette identification nous parait
prématurée. Les Giày ignorent absolument ce terme de Nhang ou Jang.
Ils se nomment eux-mêmes Giây et transcrivent phonétiquement ce mot
par le caractère |^. Les Chinois leur donnent le nom de Pa i et de
T'ou jen, comme aux Thô. Interrogés sur la signification de leur nom,
ils répondirent qu'ils l'ignoraient. Ils savent que Gai (avec l'accent remon-
tant) signifie grand en thô, pour exprimer la même idée, ils se servent
du terme hung lao.
Le dialecte thai dont se servent les Giây s'éloigne encore plus de
l'idiome thô que celui des Nông; les aspirées y remplacent les gutturales;
r est toujours employée à la place de n et de s. Homme se dit hun au
IlONIFACY. — (.nilIPES ETIINrnlKS ni' lt.\»r\ DK r, V ItlVIiaiK cr.AIIIE .'^09
lieu de c.'\n (llin) ; six se «lit rùc au lieu de soc (lliù) ; eau se dit lani
au lieu de nani (thùj.
Les maisons des tlidy sont construites sur pilotis coninic ct;lles
des Thù.
Les (Ji;Vy sont relalivciiii-iit l('ttr<'-s. Ils lisi-nt les caiacli-i'cs en les
accentuant ;i la cantonnaise. Nous insistons sur re fait i(ui dénote. l'ori-
gine orientale des GiAy. Ils ont également une transcription phonétii(ue
de leur langue, cl pendant notre séjour chez eux, nous ei^lmes la bonui'
fortune d'avoir entre les mains un manuscrit, c'était une complainte sur
les malheurs des Gi;\y, obligés de (juittei- la terr(5 de Ilàc (région des deux
Kouangj, pour venir occuper des pays étrangers. Nous avons souvent
trouvé, dans les diverses tribus que nous avons visitées, des écrits de ce
i^enre, et nous pensons (ju'ils sont dus à un refoulement des Barbares du
.Sud par les Chinois lorscjue ceux-ci s'emparèrent des terres fertiles des
deux Kouang. On sait que les llakka sont des envahisseurs venus du Nord
au Sud, dans les provinces précitées.
l'idiii-lu' Xl, /i(j. 2. — .Icuiie couple giày.
La figure ci-dessus vaut mieux ({u'iine description du costume. Nous
dirons cependant qu'habituellement les femmes ne portent que la jupe;
en cérémonie, elles mettent au-dessous un pantalon et relèvent la jupe
pour le laisser voir.
Dans les environs de Hà giang, les Giày sont presque toujours appelés
Gidy Que, ce qui veut dire sans doute GiAy du pays.
Trung Cka, — Si on prononce l'a de cha bref^ on a dans le mot ainsi
orthographié à l'annamite, la vraie prononciation des Trunff cha eux-
mêmes quand ils prononcent leur nom. Ils se disent encore Cha jen, et
sous ces deux noms, sont répandus dans le Kouey tchéou, le Kouang si
et le Yun nan. On n'en trouve qu'une douzaine de familles au Tonkin,sur
le plateau de Lang dan à 25 kilomètres environ au nord de lia giang.
On discute beaucoup pour savoir si on doit écrire le nom de cette tribu
^1^ ^) S ^5 S ^ . Le premier système n'a qu'une valeur plio-
iiétique plus la clef des chiens, avec laquelle il est de bon ton, en Chine,
de désigner les tribus non chinoises, i^e second signilie maison double
ou lourde, et le troisième cuirasse double ou lourde. On transcrit géné-
ralement la prononciation kouan boa de ces caractères : Tckonr/ kia.
Ouant ;i (Uia jeu ((piùc ngu), on devrait écrire Kia jen car les caractères
que donnent les 1 runu cha eux-mi''Mit's pour rcpn'senb'r ce sou sont :
'^i A.
Les maisons de ces indigènes ne sont jtas b;Uies sur pilotis.
Les Trung Cha parlent un idiome thai, mais très éloigné du tbô, et
comprenant un assez grand nombre de mots ijui ne sont pas thai, par
exemple : vAn (h me). Les n, les 1, sont généi'alement rcnq^lacées
par y. yam (eau) tbô, nam ; yeum (prononciation) (veut) thù, lom.
310 ." jiii.i.KT 1906
Nous rappelons (juo les Trunj,' ciui ne doivent pas (}tre confondus avec
Heu i.
PlniH'hc XH, /Uj. l'. — KiiMiiiu liuiig clia iii coi^lumo nalioiial.
Le costume des femmes trung cha est orné de couleurs vives, brodées
en soie. C'est une dérogation à la règle des costumes sobres imités des
Annamites. Le dessin de la jupe est obtenu en appllcjuant de la cire sur
la toile blanche, avant de la plonger dans le bain d'indigo. C'est le
procédé qui est employé par toutes les tribus au costume bariolé.
GROUPE LA QUA.
Dans le Nan-tchao-ye-che ', tous les Lolo sont appelés Kouolo ^% ^M 5
dans la frontière sino-annamite de Déveria ', ou classe les Laqua,
toujours sous ce nom de Kouolo, parmi les Lolo noirs. Il est vrai que plus
loin (page 150). il est fait allusion à une famille La ka. Dans son Ethno-
graphie des Territoires militaires ^, le commandant de Lajonquière les
classe parmi les Thai, sous le nom de Pen-ti-Lolo, mais dans son Ethno-
graphie du Tonkin septentrional '*, cet auteur les replace, sous le même
nom, parmi les Lolo.
En réalité les La qua, ou Lo kouo si on emploie la prononciation
kouan hoa, et qu'on replace les deux caractères dans l'ordre usité dans
le pays, ne sont ni des Thai, ni des Lolo, ainsi que le prouvent leurs
caractères somatiques, ethniques et surtout linguistiques.
Ce nom de Pen-ti-lolo, ou Lolo aborigènes, leur est bien donné par les
Chinois dans la langue vulgaire, mais en caractères ils sont toujours
désignés par le nom de ^g ^^.
Les Thai les appellent Mon, alors qu'ils nomment les Lolo, Mia; les
Lolo les nomment Me nha, alors qu'ils se nomment eux-mêmes Màn zi. Ils
se donnenteux-mèmes le nom de Ca Beo, ou Ha Beo car la prononciation
des lettres C II et T est presque la môme. Ce préfixe ca ne signifie pas
homme, c'est une particule très employée; homme se dit ca dao. Ils
nomment les Lolo, Kha.
La langue des La (|ua a un vocabulaire distinct, mais sa syntaxe est la
même que celle de la langue annamite. Le système de numération, fort
complet et qui n'emprunte que le chiffre dix mille (u;ln), au chinois, a
' Krnest Leuoux, l'diteur, iS'.l'i. Voir Ir livre II, rlinp. lY.
* Krnkst LeR(JUX. (''(litonr, iSSfi. Voir jm^'cs 141, ohsorvation 1, ot 1.^0 premier
]inr.ij^ra|)lie.
•■' Hanoi, iniprimcrie F. -II. Sciinoiilcr, 1904. Voir page K)'!.
'* Krnest Leroux, éditeur, 1()06. Voir pa^ce 339.
IlllMl ACY. — liUori'ES ETIIMUI'ES OV lt.\>SIN DK I. A IIIVIKHK Cr.AlItR 311
ceci de particulier que les noms de nombre sept, huit, neuf sont précédés
de meu (prononciation) qui signifie cini] '. .
Planche A 17/, ////. 2. — Groupe de f^a qua.
Le costume des femmes la (jua est fui't rem.iiiniahlc, ainsi que le mon-
tre la gravure 2 de la planche XVII.
La maison n'est pas sur pilotis. La religion est excessivement primi-
tive. L'autel des anct^tres se compose d'une petite étagère, à rebord, sur
laquelle se trouvent des urnes, séjour des esprits. Ces esprits répondent
aux questions qu'on leur fait en faisant osciller un poids de balance.
Les La qua se trouvent aujourd'hui au milieu des Méo, qui plus pro-
lifiques et plus travailleurs (ju'eux, s'emparent peu à peu de leurs teires.
De leur long contact avec les Thô, ils ont conservé l'habitude de chanter
exclusivement en langue thai, et ils ne connaissent guère que le sens de
leurs chants. Les femmes sont coquettes et se livrent facilement aux
étrangers, soldats annamites, oHiciers ou sous-ofïiciers français; elles
s'expatrient au besoin pour suivre leurs amants dans le Delta,
GROUPE LAC,
Dans le Nan-tchao ye-che, il est question des T'ou lao (voir page 188).
Il est également question de T'ou lao dans l'ouvrage de Déveria déjà cité
(voir page lii) et on cite en outre les Ki lao, (page 104) * . Dans l'Ethno-
graphie du haut Tonkin, le commandant de Lajonquière sépare les T'ou
lao des Keu lao et place les premiers parmi les Thai, les seconds à la suite
des Muong (page 356).
Voici ce que dit la tradition, d'accord avec les chroniques chinoises,
sur les Lào.
Ils habitaient en grand nombre la province de Tuyèn Ouang; c'étaient
des honnnes cruels,, sachant se transformer en animaux malfaisards,
mangeant de la chair humaine. Les Chinois les firent chasser par des
soldats venus de l'Est, les Lao furent tués en partie, d'autres s'expa-
trièrent, (juelques uns seulement restèrent dans le pays. Leurs vainiiueurs
s'emparèrent de leurs filles et de leurs femmes.
V^oici ce que nous avons vu; une douzaine de familles Kè lao, habile
le canton de Dùng Huang, dans le phu de liao lac, trois familles T'ou lao
habitent le haut Sùng chay, à une trentaine di3 kilomètres au Noid-Ouest
de Hoang Ihu lîi : nous n'avons pas visité ces trois familles.
Planche IV, jUj. 1. — Kè lao blanc, de face.
' Cette trace d'une numération par cinq est unique dans les langu(>s de la région.
On la rclrouv.' dans les )ant,'ues des peuplades sauvages du sud de l'Annam et chez
les Cambodgiens.
* D'autres ouvrages parlent de Sing lao, etc.
342 5 JtiLLET 1906
Les Ko lao parlonl une langiio de môme syntaxe que 1(^ thai. Ou trouve
m(^nie (juclciucs mots comparahles au thai, d'autres à l'annamite, mais les
particules ai)(»ndenl, la ianjj'ue est excessivement gutturale, et possMe de
nombreuses silllantes et chuintantes comme le chinois *. Les mœurs des
Lao sont à pou pr(''s semblables à celle des Môo, au milieu desquels ils
vivent.
Mais au poinf de vue historique et anthropologique, ces Lao sont
excessivement intéressants, d'abord par leur ancienneté constatée dans la
région, ensuite parce qu<; leurs caractères morphologiques paraissent
sensiblement différents de ceux des autres groupes. 11 serait donc désirable
que les quelques Lao qui subsistent encore au Tonkin et dans les parties
voisines de la Chine soient examinés sérieusement au point de vue
anthropologique.
Dans leur langue, les Lao se nomment Thu (prononcer comme l'u
français). Malgré leur petit nombre, ils se divisent en quatre tribus, les
blancs, les bleus, les rouges et les forgerons ou batteurs de fer, qui
paraissent avoir toutes la même langue et le même costume. Les deux
premières tribus sont seules rej)résentées dans le Dông quang.
Ils disent ca tsu (u français) pour homme. Les Mèo les appellent des
Khi. Le caractère phonétique qui les désigne dans le pays est ■^.
GROUPE LA TI.
Les La ti, au nombre de 76 familles, habitent sur le haut Sông chay,
dans les environs de HoAng thu Bi. Ce groupe a été très peu étudié; il
n'est cité que dans l'Etude sur les groupes ethniques de la Haute Rivière
Glaire, que nous avons publiée en 1904 dans la Revue indo-chinoise -, et
dans ]' Ethnographie du Tonhin septentrional du commandant de Lajonquière.
Nous avons, à la fin de 1905, visité cette intéressante tribu et nous
donnons une gravure représentant les La ti dans leur costume de fête.
Plniirho. XVI II, fi<j. 2. — Ln li.
Comme on le voit, les La li portent le costume annamite, agrémenté de
quelques broderies chez les femuies; ils se proclament d'ailleurs Anna-
mites, bien qu'une partie do leur pays, le canton de Tu long, ait été cédé
à la Chine.
Le vocabulaire de la langue la ti est absolument différent de celui des
groupes environnants, mais la syntaxe est semblable à la syntaxe
annamite.
* Il est à remarquer que les noms des plantes inditîènes se ressemblent beaucoup
dans les langues lao, lliai el annamilc. Il pouirail se iuiie (|ue les envahisseurs venus
du Nord aient einiimnlé ces noms aux Lao aborigi-nos.
- Revue indo-r/iiiioise, juin et juillet l'.t()4.
HONIFACY. — C.HOri'ES ETIIN[nlES UV 1IA>S1N PK I. \ UIVII.HR f.r.AIHK 313
Dans leur langue, ils se nonimoiif A Khn (a khou), les /<o/«»;^s..Ils
vivent dans des maisons sur pilutis, cuiiimc Ns Tliai, font les mômes
cultures.
Leur religion est ranimisme primitif, môle au culte des forces natu-
relles. Ils offrent de l'encens aux génies, et seulement des mets et de
l'alcool de riz, contenu dans une corne de butlle, aux ancôtres.
D'après eux, les hommes ont plusieurs Ames, l'une d'elle vient animer
un enfant aprôs la mort, et on l'appelle pour qu'elle s'incarne dans le
nirpsd'unt' femme; lors(|ue lenfant naît, uu agit de môme pour em|)ôclier
l'Ame de (piiller le corps.
hivisiiin. — Groupes pnilant des langues dont la syntaxe est la mémo i|uc dans
la lansuo chinoise.
GROUPE MAN OU YAO.
Ce groupe est le mieux défini du Tonkin et de la Chine méridionale.
Les Man se considèrent en elïet comme un corps de nation, ils ont des
traditions qui sont communes à toutes leurs tribus, ces traditions sont
écrites, ainsi que leurs chants religieux et autres.
Le mythe de la création du monde est celui que nous avons donné plus
haut. Quant à l'origine du groupe mân, voici comment on le rapporte :
In empereur de Chine était en guerre avec un roi barbare, il fit afficher
un édit promettant sa fille et la moitié de son royaume a celui qui lui
apporterait la tête de son ennemi, l'n chien dragon, nommé l'ien ming
II" 1^ '}^ pMi) se présenta et tenta l'entreprise. Il rapi)0rta la tète du
barbare, et comme l'empereur hésitait à tenir sa promesse, il saisil la
princesse par le bas de son pantalon.
L'empereur, obligé de tenir sa parole, accorda à Pien ming ilu la
main delaprincesse.il envoya le jeune couple dans bis montagnes de Koei
Ki, dans b' rcbi' Kiang actuel, et donna aux enfants de sa fille les mon-
tagnes bleues, en stipulant, contre certains avantages, qu'ils n'empié-
teraient pas sur les rizières des hommes <les cent familles, et (ju'ils cul-
tiveraient avec le couteau et sèmeraient avec le feu, habitant des huttes
de feuillage; au milieu des oiseaux, des singes et des gibbons. Le récit de
ces événements est donné dans la chartp des Man, qui contient en outre
des maximes religieuses, peu intelligibles, et la copie de plusieurs cer-
tificats et permis de passage, flonnés par les autorites chinoises ou tbai
aux familles màn ayant habité le pays qu'elles administraient.
On reproche aux Français du Tonkin de désigner par le terme m;in, le
groupe que les Chinois nomment yao, en faisant remarquer que le carac-
tère mân ^ ne désigne pas une peuplade, mais tous les Barbares
du Sud. Gela est vrai, et le terme màn est employé dans le même sens
par les Annamites, qui disent mân mèo, mân la qua, man khoanh (lolo),
mais il faut observer que le terme mân, tout seul, a fini pai- être appliqué
314 ") Ji ii.i.ET 1906
aux fils de Pien lui. Kiix- mômes se désignent oITicielleinent par ce
caractùrc, mais pour on felirei' toute idée insultante, ils l'ont fait pré-
céder i\o la cler (les hommes \^ . Actuellement les IMi'in méridionaux
ont pi'es(iu(' tous oublié \o torme Yao, et ceux qui l'emploient ont changé
le caractère, (pii ivst insultant. ^^ yao rx gros chien), et prononcent diu,
sieou, ou dzieou. Dans leur langue, ils S(; nomment en géni'ralisant les
hommes de la montagne, Kim mirn ou hiiii mun, et en caractère, les fils
de la montagne, les (ils du chien dragon, les lils de la montagne aux
habits bigarrés.
Ainsi que le dit la tradition, les M;in sont originaires de l'Est de la
Chine centrale, le Nan-tchao ^'e-che ne les cite pas comme tribu du Yun
nan ; ce sont pourtant les barbares qui sont les mieux connus des Chinois.
Actuellement leur aire de dispersion s'étend du Sud du IIou nau jusqu'au
Delta tonkinois et au centre de la chaine annamitique au Sud, à l'Ouest,
au Thibet et aux Etats chans. Deux tribus surtout, les Ta pan et les
Lan tien sont représentées sur cette sui'face; l'habitat des quatre autres
est beaucoup moins étendu.
Tribu Quân côc (en annamite pantalons courts), dans leur langue Tsan
sieu nin (|lj ^ A)*-
Planche XII, fuj. 2. — .louiie homme cl jeunes filles iiiiiii (juàii côc.
Nous avons dit que ces Man parlent un chinois archaïque. Ils sont fort
habiles agriculteurs, et leur matériel de culture dans lequel figure un
traîneau aussi ingénieux que bien approprié au terrain, est fort perfec-
tionné.
Stationnés depuis longtemps dans la région de Mon cay, ils furent
transportés en partie, dans le milieu du xviii* siècle, sur les pentes du
Tarn dao; un canton entier, celui de Hôî Ké -, dans le huyèn de Son
Duong, est peuplé de Mân quân côc.
Tribu Cao tan. — Ce nom est celui que cette tribu se donne, concurrem-
ment avec celui de Son ti ou Tsan tsay (prononciation cao lan), mais il
semblerait ipie, dans certains villages^ les Tsan tsay seraient jtius diffé-
renciés et parleraient un dialecte chinois, au lieu du dialecte lliai habi-
tuel; nous n'avons jamais pu vérifier le fait,, bien qu'ayant beaucoup
* Ces caractôres signifient certainement iiommcs yao de la montagne, mais par
suite d'un changement de racine, pour éviter la clef des chiens, on doit le traduire
par : hommes du loinlain montagneux. Ce changement de clef donne donc une tra-
duction fort éléganfe des sous tsan sieu nin, sans les altérer. I-^lle fait honneur au
lettré qui l'a trouve»;.
' C'est la prononciation sino-aunamilc du nom de la monlagno du Tcho Kiaugqui
l'ut le premier séjour des Màn, d'api'ès la tradition.
BONIFACV. — r.ROlTpES ETHNIOPES DU BASSIN DE LA IIIVIKRE CLAIRE 315
fréquenté los Cao lan. Ceux d'onlr'eux ([ui lial)ili'n( dans les Cent Mille
Monts, province de Kouang tong, parlent aussi l'idiome Ihai.
Les Cao lan sont aussi bons travailleurs que les (Ju;\m cùo. Ils s'acco-
uiodent de tous les terrains, et changent leur mode de culture d'après
leur lial»ilat. Ils ont beaucoup d(> tendances à adopter les formes sociales
des Aniiaiiiilr>. dunt \\< \u\\\i-\\[ presque le costume, et duni la langue.
dans le midi de leur habitat, est devenue leui- langue d'échange. Ils sont
pmirlant encore attachés ;i leurs traditions, et portent dans leurs céré-
monies, faites d'après le rituel mân, leur costume Iradiliiuinel.
Planche XIII, fiij. 2. — Jeune lioinme el jeune liile ni.m cao lan dans son coslunie
traditionnel.
Ce costume porte, sous les bras, des pièces blanches, qui représentent
les traces des pattes du chien ancêtre, et sur les deux omoplates, des
losanges brodés, qui sont un souvenir des morsures (ju'il fit à la prin-
cesse, sa femme, dans ses transports amoureux. Il est à remarquer que
les Kha du bas Laos portent le même costume, et assignent à ces stig-
mates la même origine.
Les Cao lan habitent au sud les limites Nord du Delta, les environs de
Mon cay, et les montagnes qui se trouvent sur la limite des deux Kouang,
en Chine.
Les caractères qui les désignent ]^ ^, cao lan, signifient hautes orchi-
dées. Quant aux caractères lil ^, ou [Il ^ tsan tsay, ils sont phoné-
tiques: le deuxième caractère est peut être employé pour ^, dans ce
cas, l'expression signifierait fils de la montagne, ce qui est le nom de
tous les Miin.
Tribu (Judn lr(tn(/. — (iette expression signifie pantalon blanc, elle est
traduite dans l'idiome de ces indigènes par pè coa mun, signifiant
hommes au pantalon blanc.
Planifie XVII/, fiij. 1. — Jeunes filles et fillettes quàn Irang avec leurs diverses
coilTures.
Cette tribu parle un dialecte man ; elle a cela de particulier (]ue tous les
jeunes garçons, vers douze ans, sont soumis à une initiation qui les rend
aptes à remplir certaines fonctions sacerdotales. Les plus instruits
subissent une deuxième initiation, pendanl laipielle les inilialetirs font
subir au ni'ophyle des épreuves représentant la mort et la renaissance U
la vie spirituelle. L'initié au premier degré porte le costume des prêtres
taoïstes, l'initié au second degré un habit rouge, avec écharpo el mani-
pule, plus un chapeau représentant le visage d'un génie.
Les cérémonies funèbres sont fort curieuses, et se terminent par la cré-
mation lorsque le défunt est un chef de famille Agé. Comme coutumes
familiales, on peut citer la monogamie, l'obligation du stage chez le beau-
père pour le gendre, et l'entrée fréquente de celui-ci dans le clan de sa
femme.
316 •> J'iMT.T 1906
Les Qui\n Iranc; habitent le l)assiti moyen de la Rivière Claire, à hau-
teur de Tuy«}n (Juang.
Tribu Lan tien. — Ces deux mots signifient en chinois teinture d'indigo
^! H$ '• 1'^'^ ^^"' ''<"" eux-mêmes prononcent dam tin. Très souvent ils sont
appelés simplement ^'ao, ou Yao jen.
Les autres noms sont, en annamite : Chàm, (indigo); du coté de Cao
bang : San ti ou San tscui (prononciation) (ils de la montagne; dans les
Cent mille Monts et à Mon cay : Pan i * fet non pang gui), habits brodt's;
près de Tuyôn Quang : Ao dài, habits longs. Par corruption au Laos,
dans les Etats Chan, on écrit lanten, lantenne, etc.
Dans leur langue, les Lan tien s'appellent Kim mun (hommes de la
montagne). Les femmes portent, sur leurs cheveux artislement arrangés,
un diadème aplati^, en argent, appelé doat, elles le recouvrent d'une pièce
blanche brodée.
Planche XIII, /i//. 1. — Jeune femme lan tien, en costume de mariée.
Les Lan tien se plient à toute espèce de culture, ils sont très industrieux,
très éveillés. Leurs femmes jouissent d'une très grande liberté. Comme
leurs cousins les Ou;\n trang, dont ils comprennent l'idiome, ils brûlent
le corps des vieux chefs de famille, mais ils ne font initier qu'un certain
nombre d'enfants destinés au sacerdoce. L'aire de dispersion des Lan
tien est la même (jue celle des Ta pan, mais au Tonkin, leur village le
plus méridional sur la Rivière Claire est environ à hauteur de Vinh Thuy.
Tribu Siao pan. — Ces mots >J> IiS ^ signifient petite planche. En anna-
mite on donne à la tribu le nom de Deo tien, orné de sapèques, dont on
a fait Tien, par abréviation, ce qui permet de les confondre avec les
Lan tien.
Dans leur langue, les Siao pan se disent dzot ton mien, hommes à la
petite coiffure, et ils qualifient les Ta pan de tum dzot mien, hommes à la
grande coiffure.
Les sapèques pendues au collet, au nombre de sept, sont en relation
avec les âmes.
Planche A7A, //y. 3. — Jeunes hommes siao pan portant des bijoux déjeune liila,
par crainte des mauvais génies, et jeunes filles portant la « petite coiffure » qui
donne son nom à la tribu.
Les hommes Siao pan, ainsi que les Quàn eue, les Cao lan et les Quân
trang, portent la coiffui^e annamite. Celte particularité, fixe leur passage
1 Les caractères sont ïtt ^.
* En annamite on prononce Tien ban, (accents ri^montants). Les planches dont il
est question sont les bois qui se trouvent dans la coifTure.
lliiMKACV. — r.HOUl'K> ETHNIgL'ES IH UASSIN DR l.\ HIVIKUE CI.UUK 3iT
en Annain à une éj)uque anléiieuie à celle de l'avi^nenienl ilf la dynastie
Tsiiiy en Chine.
Les Siao ]ian, stationnés sur le moyen Song GAm, et dans les parties
;ivoisinanli>s des provinces de (lao Hang et de Thaï Nguy<"'n, parlent le
Ihai connue langue d'échange. Un certain nonihre d'enlr'eux parlent en
outre l'annamite.
Tribu Ta pan. — tlaraclères J^ W (grande planche), on prononce
encore Tai pan Icantonnais) Dai ban (sino-annamile), et par corrup-
tion, dai van, thanh van. En annamite on dit encore sung (prononcer
sungue) corne, en thai coc, mOme signification. Les Ta pan partagent
aussi avec les Siao pan le nom de Son (Seune) dàu, télé cirée. Tous ces
mots ont rajiport à la coitTure.
Mais la tribu se subdivise elle-même en trois sous-tribus.
I" Les petites cornes, en chinois : ton k«j yao ; en man : ngohg nang
mien.
Phinrhi- MW/if/. t. — Homme et jeunes filles la pan courte corne (Dôug Van).
â" Les grandes cornes, en chinois : san kù yao; en man : ngông dao
mien.
Planche XIV,fi(j. 2. — Homme et femme ta pan f^rande corne, la femme, en costume
de noce, porte la coiffure qui donne son nom ;i la tribu.
Ces deux sous-tribus reçoivent le plus souvent le nom thai de côc.
A l'Est, vers Cao Bang, Bao lac, leur turban ordinaire est bariolé de
rouge.
Vers l'ouest, au contraire, le turban, plus gros est tout bleu.
Les hommes de ces tribus portent un costume sombre de forme chinoise.
30 Les Yao bananes, chinois pa tsiao yao; m;in, hommes au couteau
rond, du cun mien (dgiou koune mienne).
Planche XV, /ig. 2. — Dai ban au couteau rond, la jeune fille de droite porte
la coifTure nuptiale.
Ceux-ci reçoivent plus particulièrement les noms de consonnance anna-
mite donnés plus haut. Les hommes portent le costume annamite. Quel-
ques-uns sont encore stationnés sur les limites des deux Kouaiig, ils y
reçoivent le nom de Tinh pan ]1 )i5 (sommet, planche).
Les trois sous-tribus sont réparties du Nord au Sud, les Du cun habi-
tant la partie méridionale. Les Ta pan sont regardés par les autres Mân
comme les aînés du groupe. Ils se font remarquer par leurs aptitudes
industrielles, ils savent traiter les minerais de fer, travailler les autres
métaux, le bois, etc. etc. Ils sont souvent les fournisseurs des autres
groupes ethniques.
318 5 Ji ii.i.KT iyoti
CUOl l'E PA TENO.
7'////// /'u /('/«//. — On confoinl souvent les l'a teng avec les Yao, mais ils
allirment ne pas descendre du chien l'ién llu. Voici leur origine, d'après
leurs légendes : la « jeune sœur » sauvée du déluge demeurait stérile
après son mariage avec son frère, lîn génie eut pitié d'elle et lui remit
huit doliques, en lui disant (pu; rha(]ue fois qu'elle en mangerait une,
elle mettrait au monde un fils. Dans son désir d'être mère, la jeune
femme avala les huit graines à la fois, et elle mit au monde huit fils, qui
devinrent les ancêtres des huit clans. Les mots pa teng, ou mieux pa
sing (A ^\ signifient en effet « huit clans ». Dans leur langue, les Pa
teng se nomment Y viang mliê et qui signifie : hommes coupeurs de bois.
Planche II, fig. 2. — Femmes et enfants pa teng.
Les Pa teng sont très en retard, ils ne connaissent que les procédés de
culture les plus primitifs. Les femmes accouchent debout, les hommes
sont portés en terre assis et maintenus sur un siège par des cordes.
Cette tribu est stationnée à 1 Ouest de Bac Quang, entre ce poste et le
Sông Chay.
Fait à noter, les Pa teng se sont révoltés en 190-4 contre les autorités
thô. Une reine leur était née et devait, paraît-il, donner la suprématie
aux Montagnards. Ce mouvement fut rapidement étoufl'é parles autorités
militaires du cercle de Hà giang. En 1905 nous avons logé, sans arme,
dans la demeure de l'un des chefs qui avait été emprisonné à la suite de
cette rébellion. Nous avons été touché de la confiance et de la bonne
volonté de ces pauvres gens, émerveillés de nous entendre lire le voca-
bulaire de leur langue, que nous avions pris deux ans auparavant chez
d'autres famille de leur tribu. Comme beaucoup de primitifs, les Pa teng
croient qu'une partie dé leurs Ames se trouvent dans leur reflet. Contrai-
rement ;i ce qu'auraient fait des civilisées, les jeunes filles ne voulaient
pas se regarder dans mon miroir de poche, craignant sans doute que je
n'emportasse leurs âmes. Malgré cette crainte, elles consentirent à poser
devant mon objectif, mais je dus leur promettre de leur renvoyer l'image
ainsi obtenue *.
Tribu Na r ou Nong ê. — La langue des Pa teng est telle, qu'il esta peu
près impossible de savoir si la voyelle finale est pure ou nasalisée. Les
Naê sont désignés à Bao lac et dans les environs sous le nom.de Kouey
tchéou et passent pour des Chinois. Nous interrogeâmes ces indigènes
' Voir à ce .sujet le Bnmeau d'or de Frazcr, tome I, traduction française, pages 224
et suivantes. Tous les Tonkinois ont la même croyance, en ce ijui concerne la pho-
tographie, et les Annamites du Delta eux-mêmes ne veulent pas se laisser mutiler,
en pemieltanl de faire une photographie de buste.
BilNIKACV. i;ilHll'l> KIlIMnl l> lU IIAS^IN HK I. A UIVll.ltK i.l.AlHK 'A\[)
(laii> plusieurs l;in,i;iic'S, el nous IViiucs 1res tHonnésen reconnaissaiil(|u'ils
parlaient celle «les l'a teng.
l'idiuhv III, jiij. 1. — (jrou|pu <lo Na è.
Le coslu me (les Na t^ est dilïérent, leur industrie hien plus grande,
mais la langue, les traditions et les coutumes ethniques s(»nl celles des
l'a tong. Ils disent (pie de nombreux individus de leur race vivent dans
le fou de Kouaui; nan, ;i ri''st du Vun nan. Certains d'entr'eux auraient
abandonné la langue maternelle et les vieilles coutumes, ils les appellent
Aj /'/H (mangeurs de riz) en cbinois, ce qui n'est (pie la traduction des
mots na è (ou nong ô) mangeurs de riz en pa tcng.
Les autres Kouey tcheoii que nous avons visités, dans le canton du
D(jng quang, étaient par contre des émigrés chinois venus du Hou nan
depuis une centaine d'années environ. Ils ont conservé les coutumes chi-
noises, et leurs femmes entourent leurs pieds de bandelettes, sans toute-
fois aller jusqu'à la mutilation.
GROUPE MEO.
Sans vouloir discuter longtemps sur la question de savoir si les Miao
tse descendent oui ou non des San miao, si on doit écrire leur nom avec
!j, tïSj lui donnant ainsi le sens de chat, ou seulement |g, semis ou
herbes naissantes, nous nous permettrons de faire remarquer qu'au
Tonkin et dans le Sud de la Chine, on a traduit miao tse par le mot qui
signifie chat (mèo), et non par semis (ma ou na). L'agilité de ces mon-
tagnards justitie le nom, et il nous semble d'ailleurs préférable que les
ethnographes rapportent fidèlement ce qu'ils voient et ce qu'ils entendent
sur place, que de puiser leurs informations dans des vieilles chroniques
écrites dans des régions fort éloignées de celles où ils op(''rent.
Les Méo sont appelés mAu mèo, ou nif^o seulement par les Annamites;
mèo ou pu mèo par toutes les tribus thai, les La qua, les La ti ; la gu
(u français), par les Lao; miao ou mèo par les Màn ; ma mieu par les Lolo.
lisse donnent à eux-mêmes le nom de Mông, (jue nous n'avons jamais
entendu proncer Hmôiuj.
Les Mèo sont habiles agriculteurs et élèvent de beaux bestiaux qu'ils
logent mieux (ju'ils ne se logent eux-mêmes. Ils connaissent nombre
d'industries, y compris celle du fer et sont si habiles dans l'art du char-
pentier que les Min prétendent (ju'ils descendent de Lu [)an, le i)atron
chinois des ouvriers en bois.
Ils ne connaissent pas ou ne veulent pas donner l'origine de leur race,
mais ils repoussent absolument les idées totémiques des Mân sur le chien.
Contrairement aux habitudes de leurs voisins, ils mangent sans répu-
gnance la chair de cet animal, tandis qu'ils s'abstiennent de viande de
chat ou de cheval. Le chat, disent-ils, chargé d'apporter le feu aux
;^20 •"' Ji ii.i.iM VMi
lioinmi's, s;ici|iiilla litltMeinenl de son message, tandis (jue le chien (|ui fut
inandi' pour leur apporter le grain, dans sa queue en fornied'épi, mangea
en route une partie de celui qui lui avait été confié. Ils croient au méta-
morphisme, et sont persuadés que devenus vieux, ils se changent en
tigres, s'ils ne sont assistés à leurs derniers instants par un devin, qui
envoie les âmes où elles doivent aller. Us croient que ces âmes des morts
pénètrent dans le corps des femmes, pour donner la vie au fœtus. Après
la naissance, le placenta des filles est enterré sous le lit de la mère, celui
des garçons sous un pilier de la maison. Ils agissent ainsi, disent-ils,
afin qu'après la mort les âmes viennent se revêtir du placenta qui devient
leur habit, sans quoi elles ne pourraient retrouver le chemin du lieu où se
trouvent les ancêtres. Ces croyances, ou d'autres analogues, sont d'ail-
leurs communes à tous les groupes.
Les Mèo, habitant des hautes montagnes, sont descendus peu à peu du
Sse tchouen vers le Sud; ce mouvement se continue insensiblement,
et ils i)euplenl depuis 25 ans le plateau de Trais ninh sous la latitude
de Hué. Leur exode se fait en droite ligne vers le Sud, cependant on en
trouve, paraît-il,, dans l'île de liai nan où ilsont sans doute été transportés
par les Chinois.
Les Mèo sont laborieux, mais ivrognes et cruels à l'occasion ; on se sou-
viendra longtemps dans le Haut-Tonkin, des massacres auxquels ils se
sont livrés vers 1850, sous les ordres de Siung Ta (^| ;^), originaire
du plateau de Duong Thuong au sud du canton de Dông Quang. Ce
chef mèo se déclara empereur, prit le titre de règne Thuàn Thién Chua
(M ^ i' obéissant au Seigneur du Ciel), appela à lui tous les Mèo
des pays circonvoisins, leur donna comme enseigne le pavillon blanc,
et les lança contre les habitants des plaines, épargnant ceux des mon-
tagnes. Ce brigandage qui s'étendit au Sud jusqu'à Tuyèn Quang, ne
cessa que lorsque la contrée fut devenue un désert et que les Mèo eux-
mêmes, épuisés par leurs courses dans les vallées malsaines, durent rega-
gner leurs montagnes.
On trouve au Tonkin et dans les pays circonvoisins quatre tribus qui
sont :
1° Les Mèo blancs, chinois /)t; Miao, dans leur langue mông daeu on ttaeu
(prononciation).
Planche XIX, /iij. 1. — Un jeune couple do riches méo blancs et les deux sœurs
du marié.
Cette tribu, la plus nombreuse, se distingue par la jupe blanche et le
turban en toile circulaire. .
2° Les Mèo rouges, chinois honfj miao, dans leur langue iWôn^ /en (signi-
fiant Mèo brodés).
Planche XX, /ig. 2. — Groupe de Mùo rouges.
BOMKACV. — liHill l'KS KTIIMnlK> Df IIASSIN DE I.A UIVIKKK CI.AIItK 3:21
dette tribu se (lisliiifjiic par sa jupi! biudôe cL son liiih.ui, l'ail df clii'-
veux tuinbés tressés en cordelettes, Ils n'acceptent pas le nom de nièo
rouge, parce que les Mèo rouges ont la réputation d'«5tr<^ les plus cruels
des Mèo. Peu nombreux, on trouve leurs babitations parmi celles des
Mi'^o blancs.
',\' Les Mé(j ;i bHc [)encbée, cliinuis pieu Icnit niino, dans leur langue
W()h// A'(M (mèo à peigne), ou manu clià pia (mè(Mpii bint nmd). Ce nom
vient de la i-oiiïiirt' ordinaire des femmes; elles roulent leui's cliciveux et
les lixenf par un [)eigne sur le cùté rlroit d».' la ttUe. lin cért'nntiiie
comme dans la ligure, elles puilnil un (miiaii en lunno de cœur, dunl
la pointe est tournée en avant, (les .Méo babilent sur le flanc des mon-
tagnes. Nous on avons même trouvé dans une vallée, sur le Sông Mien.
Planche XV, /i(j. 1 . — Mèo à tète penchée, une aïeule et ses petits-enfants*
■4° Les Mèo noirs, cbinois lieu niiao, dans la langue des autres Mèo,
mùng du (mèo noirs) dans leur idiome mông sa (mèo à peigne).
Les Mèo noirs vont, en enfants perdus, sur les limites de l'habitat des
.Mèo, ils se dissimulent si bien dans la montagne, (jue les autorités fran-
çaises ignorent quelquefois leur présence. Une famille isolée de cette
tribu vivait sur les montagnes du haut Sông Dày presque à hauteur et à
l'Kst de Tuyèn Quang.
Planche XVI, jh]. i. — Homme et fillette mèo noirs.
Les Mèo noirs ne veulent pas être appelés ainsi, nous n'avons pu savoir
pourquoi. Ils préfèrent le mot .sa (peigne). Comme on le voit leur pronon-
ciation diiïère un peu de celle des autres Mèo, et le vocabulaire est un
peu différent, surtout en ce qui concerne les noms de plantes. On peut en
conclure à une séparation déjà ancienne des autres tribus mèo. Le cos-
tume des Mèo noirs est de couleur bleu foncé. La seule coiffure des femmes
est un peigne, placé derrière la tète, et retenant grossièrement les cheveux.
5» Division. — Groupe parlant une langue de forme l)irmnno-thibétaine.
GROUPE LOLO.
Si l'on considère que l'un des préfixes le plus souvent employé dans les
anciennes langues du llaut-Tonkin et de la Chine méridionale est /a dans
les noms de peuple, on pourra en conclure que la, lala devenu plus tard
/o, lolo en chinois, a pu devenir synonyme de peuplade, puis s'être appli-
qué à certain groupe de peuplades. En annamite, les Lolo sont les La dûn
(ÎS Je), le peuple La, quelques tribus sont appelées Pu la, ce qui signi-
fie en thô, les La, les hommes ou le peuple la.
Nous avons déjà parlé des Lolo au point de vue somatiquc et lin-
guistique; au point de vue moral ce sont des hommes doux el un peu
soc. u'abtukop. l'JÛO. 22
:\-2-2 ri jiii.i,KT i'.)Oc.
apathiques, se laissant évincer facileuienl par leurs voisins. Ils sont bons
cullivaleurs. habiles vanniers, leurs feinuies montrent beaucoup de
patience pour orner crapplicpies aux ligures géométriques, broder et
teindre leurs vétcnienls.
lueurs traditions sont assez semblables à celles d(;s groupes voisins.
Dans leur légende du déluge universel et de la création, le bambou joue
un rùle pn''[)ondéranl ; non seulement il invita le frère et la sœur à s'unir,
mais son ombre protégea leurs embrassements. Il s'en suit (jue les nou-
veaux mariés ne peuvent couper le bambou. C'est sur l'écorce brillante
qui se trouve à la base des nœuds de bambou, disposée sur une cloison,
que les Lolo placent les grossières images qui représentent leurs parents
morts. Us mettent autour quelques feuillages et suspendent au-dessous la
mâchoire inférieure des animaux immolés dans le dernier sacrifice.
Us appellent les esprits Né, le plus grand est celui du ciel Mo nô, mais
celui qui intercède pour les hommes est Tchung ne. Les esprits des mon-
tagnes, des eaux, etc., ainsi (jue les Ames des ancêtres s'appellent aussi
Ne.
Autrefois, ils ne pouvaient manger du canard, du poulet, de l'oie et du
cochon, mais actuellement ces viandes ne sont tabou que pour les femmes
mariées.
A la naissance d'un enfant, le mari demeure à la maison 15 jours,
avec sa femme.
Les Lolo qui habitent le haut bassin de la Rivière Claire peuvent se
diviser en cinq tribus que nous allons énumérer.
1° Mung ou Miiong (prononcer u comme en français et o comme en fran-
çais.) Au Tonkin le mot muong ne désigne pas seulement une conscrip-
tion thai, on trouve quelques tribus qui portent ce nom. L'une d'elles est
établie sur le haut Sông gàm^ vers Bac Mè. Ses membres portent le
costume thô et parlent thô, ils prétendent même ne pas connaître d'autre
langue, et pour obtenir un vocabulaire, nous dûmes nous adresser aux
femmes. Ce vocabulaire et la syntaxe de la langue sont purement lolo,
mais l'idiome diffère assez de celui des Lolo noirs de Uao lac. On reconnaît
encore les Mung, (c'est le nom qu'ils se donnent et c'est celui qu'ils reçoi-
vent, même des Lolo noirs de Baolac), parce qu'ils ont conservé l'usage
de la hotte lolo dont la courroie se passe au front.
D'après les Thô qui les environnent, ils se sont constitués en famille
comme eux, pratiquent le culte des ancêtres comme eux, ont les mêmes
droits et les mêmes devoirs qu'eux. C'est pourquoi, probablement, les
hommes que nous avons interrogés ne voulaient pas nous révéler leur
nationalité réelle.
Le commandant de Lajonquière a trouvé, à Bao ha, sur le Fleuve
Rouge, des Xapho, clients des Thô et qui, comme les Mung, sont des
Lolo.
En février 1904, nous étions en visite à Chi ne, dans le pays des
Muong; en revenant de ce poste administratif à Nam Diuh, deux miliciens
IIONIKACY. — (ÎROLTES ETHNIQUES Dr BASSIN DE I.A ItIVIKUE CI.AIIIK 323
muong nijus si-ivaii-iiL d'est-orti.'. Ils iiousdéclan^renlque dans k'ur langue,
ils se nommaicnl cho (prononcer cli comme le c italien, o internit'diaire
l'iitre o et eu.). Le reste de leur vocaliulaire «Hait d'ailleurs i\ peu pivs
annamile, mais avec prononciation dilVérenle, ainsi (|ue u(jus le savions,
rius lard, vers la fin de 1*J0j, nous avons trouvé ce mAme mot pour
désigner Thouime chez les Pu la. * Nous croyons qu'il serait intéressant
de rechercher si les Muong sont des Thai annamitisés, les restes des
anciens (îiao chi, des Indonésiens ou des I.olo. Faisons remarquer à ce
propos que certains Kka, classés parmi les Indonésiens, parlent des idio-
nii's lolo, i[iu' l'une et l'autre race est dolichocéphale. Les Thai et les
Annamites étant sous-brachycéphales, il serait facile de déterminer par
des mensurations si les Muong de la Rivière Noire et de la province de
lloà binli appartenaient aux Indonésiens ou aux Lolo d'une part, aux
Thai ou aux Annamites d'autre part.
2° Lolo noirs. — Dans les environs immédiats de Baolac, on appelle
|ilus particulièrement les Lolo noirs Man hhoanh (sinoannamite galon),
ils parlent le thai comme langue d'échange, les hommes ont le costume
des Thô, et les femmes, sauf à l'époque de leur mariage, ont supprimé
les broderies, ou plutôt les appliques du panlalon et du pagne.
Les Lolo de Baolac ne veulent pas apprendre à lire, ils sont persuadés
([u'un génie les feraient mourir s'ils le faisaient.
On trouve chez ces Lolo une coutume analogue à celles qui sont décrites
dans le chap. H de l'ouvrage de Westermack sur l'origine du mariage
dans l'espèce humaine. Dans le premier mois de l'année annamite ou chi-
noise, qui coïncide avec la fin des récoltes et l'époque où les travaux
des champs ont cessé, les jeunes gens sont libres de se fréquenter comme
ils l'entendent. IJe nombreux mariages se concluent à cette époque. 11
faut dire d'ailleurs que les mois d'hiver, alors que les greniers sont pleins,
sont particulièrement mis à profit par les Indigènes de tous les groupes
ethniques, pour célébrer leurs fêtes de famille.
IHanchi' X.\, /uj. 1. — Lolo noirs de Bao I;ic; dits Màn Ulioanii.
Les Lolo de Mai) lac (Millivent la rizièn^ de monlagiie, avec labour et
seuuiilli' à la volri-, et la lizièiv irriguée étagéc. Ils se groupent par
hameaux (jui dis|)araissent au milieu des voj'gers. Aux arbres à fruit des
tropiques, ils joignent les poiriers, pommiers, pêchers, abricotiers, noyers
et châtaigniers qui viennent bien à celte latitude sur les hauts plateaux;
on y trouve même une vigne sauvage dont les fruits sont analogues à
ceux de nos ri paria.
Dans le Hong Quang, on désigne les Lolo noirs par le nom de :Mia lai
(lolo brodés) en thai, et de lloa lolo (^même signification) en chinois. On
• Les autres Lolo disent so ou sa.
324 5 jiii.LET 1906
accole aussi h leur nom l'adjcclif qui signifie noir dans les dilTérentes
langues ; enlin on les appelle encore Kan teou lolo en chinois.
Nous avons vu, dans les difrérents ouvrages qui traitent de l'ethnogra-
phie de la Chine occidentale, qu'il y avait une tribu de Kan lolo, ou de
Kan Kouolo ( .^ Kan), ce qui se traduit par Lolo secs. Ici, on écrit
^ M 1S ^M, t'« <i^*i signifie Lolo coupeurs de tètes. Voici l'expli-
cation (le celle appellation : les Lolo nuirs enli-rrent leurs morts dans
le hameau, à proximité des maisons, ils mettent un bambou dans la
terre, une extrémité touchant le cadavre, et lorsqu'on approchant leur
nez du bambou ils ne perçoivent plus aucune odeui-, ils déterrent le
cadavre et vont enlerrer les ossements dans la montagne. Leurs voisins
prétendent qu'à ce moment ils prennent les os de la tète, les placent dans
un panier et les suspendent à proximité de leur case, pour ne pas perdre
le souvenir de leurs parents. La coutume n'a rien d'extraordinaire, et
on la retrouve dans certaines îles de l'Indonésie, mais les Lolo eux-mêmes
soutiennent que cette allégation est un mensonge. Peut-être que sous la
pression des idées chinoises, qui tiennent cela pour un horrible sacrilège,
ont-ils perdu cette coutume.
Planche XX/, /if/. 2. — Jeune garçon et femmes lolo noirs.
Les Lolo noirs n'habitent au Tonkin que le phu de Baolac, ils y étaient
plus nombreux autrefois, et les Mèo occupent des terres dont ils étaient
jadis propriétaires. Encore aujourd'hui, nous devons défendre celles qui
leur restent contre les entreprises de leurs absorbants voisins.
Dans leur langue, les Lolo noirs s'appellent Mân zi (prononcer Meun zi).
5" Lolo blancs. — D'après certains auteurs chinois, les Lolo blancs sont
au dernier degré de l'échelle des Barbares et sont sujets des Lolo noirs;
pour d'autres, au contraire, leur langue est facile, ils savent lire et écrire
et ils ressemblent à des Chinois. Dans ces descriptions, nous ne trouvons
de vrai que ceci, ils habitent la préfecture de K'ai hoa fou et paient l'impôt,
Platiflii' XXI, fifi. 1. — Groupe Lolo blancs.
Les Lolo blancs reçoivent le même nom que les Lolo noirs, en chan-
geant l'adjectif. Ils vivent en paix avec leurs congénères noirs et con-
tractent mariage avec eux, mais dans ce cas, la femme conserve son
costume, tandis que ses lillos prennent celui de la tribu du père. Leurs
maisons sont sur pilotis, les coutumes et la langue sont les mêmes, sauf
quelques légères différences. Leurs outils ngricoles, comme leurs <:ostumes,
sont faits beaucoup plus finement que ceux des Noirs, ils les brodent avec
de la soie qu'ils obtiennent eux-mêmes. Nous avons même vu chez eux
des guitares h deux cordes.
Les Lolo blancs se nomment eux-mêmes Màn za, leur habitude de porter
les cheveux longs les font nommer quelquefois Tckanfi mao lolo par les
BONIFACY. — r.niHPKS ETMMiJI K> l>l IIK>-IN l>K l.\ niVIKRF. i:i.\inE 325
Chinois. On trouve leurs villages parmi ceux des I.olo noirs dans la partie
Nord du plui de Bao lac, et des fou de K'ai lioa et de Kouaujf nan au
Vun nan.
Pli i(j _ On trouvi^ dans le bassin de la HiviAre Claire au Tonkin :
4'> Douze familles Pu la dans le secteur de ll.iàn^' thu Bi, pn^s de Xin
nian; ils sr en. i. Mit dilTérenls des Lolo, et de fait, leur langue, bien que
piVs.Mitant l.'s m.iiies racines, est bien plus chargée d'alîixes (|ue celle de
ces derniers. .Nous avons remaniué qu'elle ressemble bien plus à celle des
Lolo du père Viul, ({ue celle-ci ne ressemble à celle des Lolo du phu de
Bao lac.
Les I*u la du hameau de Nam sing phù, près de Xin man, se donnent
enlr'eux le nom de Pu pà. Nous n'avons pu voir ni leur village, ni leurs
femmes, dont le costume est d'ailleurs donné dans la planche XX de
l'ouvrage du commandant de Lajonquière, que nous avons plusieurs fois
cité. Nous avons photographié les deux hommes qui nous ont donné leur
vocabulaire et nous les reproduisons ici.
flanche AlV, /ùj. 2. — Pu la de la tribu pu p'à.
5° On trouve encore sur le plateau de Lang dan, au Nord de ilk giang,
deux familles pu la introduites par le Capitaine commandant le secteur
dcOuan ba pour défricher des terres incultes. Ces familles étaient en plus
grand nombre, mais les conditions climatériques ne leur ayant pas con-
venu, la majeure partie d'entr'elles est retournée dans le fou de K'ai hoa,
d'oi"! elles étaient venues.
J'ianrhr IV, /iy. i'. — l'a la cho eu (tclieu lio).
Ces Pu la se donnent le nom de Cho cô, qm signitle hommes à cornes,
à cause de la coiffure des femmes qui ressemble à des cornes de bélier.
Leur langue est celle des autres Pu la, avec quelques différences dialec-
tales.
Nous avons vu que ce nom de Cho est semblable à celui que se donnent
les Muong de Chi ne.
Nous n'avons pas parlé des Thô ti, en chinois t'ou sse, dans l'énuméra-
tion des groupes ethniques. Ce nom ne s'appli(|uc pas, en elfel, à un groupe
ethnique, mais il est l'apanage de familles seigneuriales auquel il fut
donné, suivant le cas, par l'Empereur de Chine ou le Uoi d'.Annam. .\ctuel-
lement, les descendants d'un chef de canton prennent le litre de thô ti
dans la haute région. Il se peut qu'il y ail parmi eux quelques familles
ayant un ancêtre annamite, mais ce n'est pas une règle générale. Nous
avons connu des descendants authentiques d'Annamites fix^s dans la
haute région qui n'étaient pas Ihô ti : par contre, nous avons eu sous nos
ordres des thô ti qui étaient des thai purs, nous avons même connu des
Mèo qui se paraient officiellement de ce titre. Les deux caractères i ^
326 ^ JUILLET 1906
qui forment cetto expression, signifient gouvernour, régisseur de la
terre, du pays.
Nous venons de donner, aussi fid^Ienienl que possible, un aperçu
rapide des groupes ethniques du liant Toidvin. Notre alVectiun poui- nos
anci(;ns administrés, (pii nous ont prodigué, pendant notre long séjour
au milieu deux, tant de marques de leur filiale alTection, nous amène à
foiiuuler lin vieii. Nous souhaitons de toute notre Ame ipie l'on ne trouble
pas, sous prétexte de civilisation ou d'assimilation, l'Ame naïve de ces
fils des montagnes. On ne décrète pas le progrès, et l'évolution des
j)euples n'est pas l'eeuvre d'un jour. .\près une longue période de trouble
et de soufîrance, ces tribus ont d'ailleurs besoin de se refaire, et toute fis-
calité exagérée, toute mesure administrative tatillonne ne peut que leur
faire perdre la confiance qu'elles avaient mise en nous au lendemain du
jour où nous les avons délivrées des pirates chinois.
Pendant cette lutte, elles ont pris résolument notre parti, il ne faudrait
donc pas qu'aujourd'hui on les laisse sans défense livrées aux entreprises
de leurs anciens tyrans, et on marche dans cette voie en désorganisant
la ligne des postes frontières. Nous perdons ainsi tout prestige aux yeux
des populations montagnardes de la Chine et de l'Annam, on taxe notre
attitude de recul, on raille notre défaut d'esprit de suite qui nous fait
abandonner nos entreprises en voie d'exécution, et nos protégés en vien-
dront à regretter amèrement de s'être compromis pour la cause de gou-
vernants aussi versatiles.
J'ai entendu ces plaintes et ces critiques, j'ai vu les effets néfastes de
notre mouvement de retraite, et je saisis cette occasion pour faire con-
naître les vœux et les critiques de mes amis montagnards. Mon plus
grand désir serait de voir ces vœux pris en considération.
Discussion
M. Zauorowski. — Je remercie vivement M. Bonifacy d'avoir bien
voulu faire défiler devant nos yeux les très nombreux documents qu'il
a rapportés du Tonkin. 11 nous en a montré de très précieux. Et
après ce qu'il vient de nous dire, avec une connaissance plus complète de
ces populations montagnardes, dans leurs caractères et leurs langues, il
est manifeste qu'il y a dans la science des conclusions h leur sujet qui
étaient prématurées. H appartiendra à M. Bonifacy de confronter avec elles
ses observations et de nous en faire une révision. Jl voudra bien, je l'es-
père, faire un choix des types qu'il considère comme les plus divergents,
les plus accentués, types que nos bulletins reproduiront comme représen-
tant, d'après lui, les éléments essentiels qui entrent dans la composition
de tous ces peuples.
M. Deniker. — Permettez-moi, chers collègues, de vous signaler toute
l'importance des recherches ethnographiques et anthropologiques que le
DISCUSSION
327
comniandanl Uonifacy a accomplios au Tonkin. Vous venez d'enleiidie
le résumé clair, quoique Uès succinct «le ces reclierclies; mais ce que sa
modestie nous a fait ignorer, c'est qu'il a passé 12 ans dans ce haut pays
de Tonkin où vivent cO)te à cùle tant de groupes ethniques divers et qu'il
a consacré pendant ce long séjour tous les moments lihres ([ue lui laissent
ses occupations multiples d'ordre militaire et ailministralit', ii létude du
chinois, de l'annamite et de nombreux dialects des langue- thaï, màn et
lolo d'abord, puis aux recherches ethnographiques et anlhropologiqufs
de cet immense complexe ethnique qui s'appelle la population du llaut-
Tonkin.
KnetTet, dans celte région montagneuse, chaque vallée, chaque plateau,
est occupé par une peuplade, qui diffère de ses voisines, par les mœurs,
par les costumes, par le dialecte. On ne peut mieux faire que de comparer
ce pays, au point de vue ethnique, au Caucase : môme multiplicité et
même diversité de langues, de mœurs, etc., qui, longtemps, n'offrait aux
anthropologistes, qu'un chaos de noms propres : Man, Tho, Meo, Miao-tse,
Vao, Pa-y, Y-gen, Man-tsé, Mousso, Lolo, Lao, Muong, Nang, Giay, Khas,
Kouis, etc., qui n'ont pas souvent une grande signilication.
Les recherches du commandant Honifacy, ainsi que celles de plusieurs
de ses collègues, officiers et administrateurs, nous permettent aujourd'hui
de nous orienter et de mettre un peu d'ordre dans ce chaos. GrAce au
volume important public tout récemment par le commandant Lunet de
Lajonquière S on peut même se faire une idée très exacte de la répartition
géographique des ditférentes tribus, et de leurs caractéristicpies générales
au point de vue ethnique. On peut se rendre compte aussi, et c'est en cela
(jue les recherches du commandant Bonifacy sont d'une grande utilité, on
peut se rendre compte, dis-je, que malgré la multiplicité de noms, les
groupes ethniques peuvent être réduits à un nombre relativement res-
treint, et que dans ces groupes, on ne rencontre que deux ou trois types
somatiques ou races : Indonésien, Mongol méridional et Tibeto-birnian.
D'ailleurs, je ne veux pas m'arréter sur la question des races de l'Indo-
Chine et du Tibet; il y a là encore beaucoup à faire, et j'espère que le
commandant Bonifacy, de retour au Tonkin, continuera de nous aider
dans nos efforts pour débrouiller l'ethnogénie de l'Indo-Chine et des pays
avoisinants.
' Ellinof,'rapliie du Tonkin septentrional, rédigée sur l'ordre de M. Bean... par le
loinmandant E. Lunet do Lajonquiore... d'après les éludes des Administrateurs civils
el militaires des Provinces septiMitrionales. Paris (Leroux), lOOfi, 379 p., av. pi. et
carte, 28 cm. Les travaux du commandant Bonifacy, en partie inédits, occupent une
place importante dans ce volume.
328 S jriLi-ET 190G
I.ÉCKNUES DES PLANCHES SUIVANTES
l'IaiK-lic I.
Fig. 1. — Soldats Annamites du Tonkin.
/.'iff o — Soldais Iho noirs d(î Hao lac.
Wluiirli.' II.
Fi(/. 1. — Soldats Méo.
Fig. -J. — Fcninics et enfants.
Planche 111.
Fig. I . — Soldats La-Qna.
Fig. 'J. — Les Na-è, analof,Mies aux l'a-tenj;.
Planche IV.
Fig. 1. — Ke-lao blanc.
Fig. 2. — Pu la cho cù.
Planche V.
Fig. i. — Tirailleurs (Annamites).
Fig. 2. — Les mêmes (profil).
Planche VI.
Fig. 1. — Tirailleurs (Thô noirs de Bao lac).
Fig. 2. — Les mêmes de [irofil.
Planche VII.
Fig. 1. — Tirailleurs (Mèo).
Fig. 2. — Les mêmes de profil.
Planche VIIL
Fig. 1. — Tirailleurs (Lolo noirs).
Fig. 2. — Les mêmes de profil.
Planche IX.
Fig. 1. — .\nn;imitcs montagnards.
Fig. 2. — Tho méridionaux.
Planche X.
Fig. 1. — Thô blancs de \\h Giang.
Fig. 2. - Homme et jeunes filles Heu i.
LÉGENDES [)E> l'I.A.N(;ill> 329
l'I.iiirlio Xi.
Fiff. l. — l'ctmiics cl tillcllc iiong de Hoaiij.' Ilm 151.
/•'///. ;'. — ,liMiiii> coiiiili' K'i^y.
rillllrli.' Ml.
I''i;f. I. — l'ctiiriH' liiiiiL' <li;i en cdsIiiiiic iiiilidii.il.
Fi;/. -*. — .li'iiiir liiiriitiH' ri jciim-s lillcs iiiiii ipi.lti tin\
IMariclh' Mil
Fiij. l. — .Icuiu' It'inmo lan fiOn on costinno <io inariéo.
Fig. 'J. — ■Iciinc lioiiinic et jeune Mlle iinin cao lan dans. son enslunie
Iraililionnel.
IM.nirlie \IV.
Fif/. L — llDinnie el jeunes Mlles la pa eourle eorne (Dùiii,' Van).
Fiif. i'- — Homme e( l'emnie ta pan grande corne, la lonime, en cos-
liime de noce, porte la coilTnre qui donne son nom à la
Iriliu.
Planelie W.
Fif/. t. — Mèo à tête penchée, une aïeule et ses pidits enlanls.
Fi(/. i\ — Mai han au eouleau r(jn<l. la jeune lille de droite porte la
cnilTurc nuptiale.
l'iaueli.. \\\.
Fif/. i. — llommt; et lillelle mèo noirs.
Fi(j. i'. — l'u la de la tribu pu p'à.
l'Ianehe .Wil.
Fiy. /. — riid noirs de Bao lac.
Fif/. 'J. — (lroii|ie de La r|ua.
l'Ianehe Wlil.
Fiy. 1. — .leiines lillcs cl lillettcs quAu truug avec leurs diverses
coi (Turcs.
Fifj. J. — La li.
l'Ianehe MX.
Fif/. I. — Un jeune eoujiie de riches m-'o hlanes el les deux su'urs ilu
mai'ié.
Fif/. 2. — .leunes liDUHues siao pan pnriani des hijouv de jeune lille.
par crainte des mauvais génies, et jeunes lillcs (lorlanl la
« petite coitrure » qui donne son nom à la trihu.
soc. d'anthrop. 19Q6 --
330
5 Jl ILLET 1006
Planche \.\.
pi,j^ /. _ Lolo noirs de Bao lac, ditsMân Khoanh.
i:'i,j_ o _ Crnujie <U' Mèo rouges.
Planche XXI.
fig^ /. _ Groupe de Lolo hlancs.
pig^ o _ Jeune garçon et femmes lolo noirs.
REGNAULT. — EMPREINTES DE MAIN;- m"MAI^■E^ DA.N> I.A illKUTK HE i.Alti.A- XW
EMPREINTES DE MAINS HUMAINES DANS LA GROTTE DE GARQAS (Hautes-Pyrénées.)
Par m. Fki.ix Uegnault (de Toulouse) '.
Les empreintes d»' mains humaines signalées par M.M. Carlailhac et
l'abbé Breuil dans les cavernes <r.\llamira et i.lf Marsoulas ayant (''v<illé
1
' Communication présentée par M. G. Hervé.
332 •' Jiii.i.ET l'.xin
mon attention, j'ai examiné avec soin la grotte de Gargas oîi je me trou-
vais le 1 1 juin de cette année.
Quand on a dépassé la salle des Colonnes, en tournant sur la gauche,
sur les draperies stalagmiliques qui tombent de la voûte, on peut voir très
noltenient l'empreinte de deux mains sur un fond rouge brun se détachant
en rose clair, et formant ça et 1;\, de larges taches rouges au milieu des-
quelles uni' main est imprimée.
Dans un réduit qui forme une petite chambre de 4 ii 5 mètres de long
sur 2 et 2 m. 50 de large, les grandes taches rouges sont abondantes, et
garnissent j)resque toute la paroi de la roche.
Sur ce point, dans celte chambre, l'empreinte des mains humaines est
très nombreuse. Comme les précédentes, elles se détachent en rose p;\le
sur un fond d'ocre rouge foncé, les cinq doigts toujours tournés en hau-
teur.
Enfin dans une fissure étroite, à 2 mètres de hauteur environ en se
hissant dans cette sorte de faille, on constate que tout le fond de celte
cavité est peinte en rouge, et sur le côté gauche, sont marquées quatre
bandes de traits rouges parallèles et horizontaux.
La grotte de Gargas, comme la plupart de celle des Pyrénées, est
recouverte de concrétions stalagmiliques plus ou moins épaisses, qui
recouvrent peut-être des dessins analogues à ceux de la Dordogne et de
Marsoulas.
Si le fait que je signale paraît digne d'intérêt, dans une prochaine
campagne je relèverai ces empreintes que j'ai l'honneur de signaler
aujourd'hui en joignant à cette note, le croquis fait sur place et à la hâte
de ces étranges peintures, relevées dans une grotte déjà célèbre comme
gisement paléontologique, et archéologique par ses foyers dont j'espère
pouvoir continuer l'étude.
Analyse chimique des Peintures rouges.
M. C. Fabre, Professeur à la Faculté des Sciences de Toulouse, a ana-
lysé des fragments de peintures rouges de la faille de Marsoulas (Haute-
Garonne) et a reconnu que ces peintures étaient obtenues par l'oxyde de
fer.
Les peintures rouges qui entourent les mains de la grotte de (îargas,
soumises également à l'analyse de M. Fabre, ont donné des résultats iden-
tiques. C'est l'oxyde de fer, répandu en fragments et en galets dans toute
la chaîne des Pyrénées, qui semble avoir servi aux artistes préhistoriques
de nos cavernes, pour leur ornementation d'animaux et de signes mysté-
rieux. Cette couleur rouge à l'oxyde de fer, a aussi servi à colorer certains
silex taillés et des pointes de (lèche en os, sans doute des armes de choix,
que j'ai recueillis dans les foyers de la faille de Marsoulas.
OL'VUACES OKKEUTS 333
8Ô0- SKANCE. — l'J juillet TJUO.
Présidenck de m. /aiioriiwski.
Élection. — M.iili'miiisclii' Oi'i-kmikim. pri-st'iilri' |i;ii- MM. Muimivrier. Va-
ri(»l. Aiitliimy.
OUVRAGES OFFERTS
M. DEN'iKEn, otlVe ;i la Suciélé le ruimrni do juiii l'.HIt) <lii Jmrnnl des
Savants conlenanl son arliclc sur le « Catalogue Inlernalional do Lilléra-
tui'c sciontidiiue. »
Kn olTranl ce numéro, M. DeniUer s'exprime ainsi :
L'article que je viens de publier est l'exposé de l'état actuel de l'entre-
prise du Catalogue Interational dont j'ai déjà eu l'honneur d'entretenir
Il Société à plusieurs reprises. Actuellement on est a la publication de la
i» série annuelle (pour lUO:M"JOi) qui a paru prosquo en entier.
A partir de la 6° série annuelle (pour 1'J0,j-1906) plusieurs modifications
vont être introduites dans la publication.
D'abord, les classifications, sans être modifiées quant à leur ordonnan-
cement général ont subi de notables corrections et des additions qui les
mettent à la hauteur des exigences de la science moderne. De ce chef,
plusieurs volumes du Catalogue vont môme changer leur titre : ainsi la
section J (Géographie physique) devient « Géographie » ; la sectien 0
(Anatomie humaine), se transforme en « Anatomie humaine et comparée
(y compris l'histologie et l'embryologie) » ; enfin la section P (Anthropo-
logie physique), qui nous intéresse plus particulièrement, s'appellera,
dans son cadre élargi : « L'Anthropologie » sans autre qualificatif, com-
prenant ainsi, outre la somatologie, toute l'ethnographie et le préhisto-
rique. La section N (Zoologie) va subir aussi de profonds remaniements,
par suite de sa fusion avec le recueil bien connu et apprécié dans le monde
savant depuis plus de 40 ans : « le Zoological Record ». En somme l'œuvre
du Catalogue International vient de donner des preuves irrécusables de sa
vilalilé; elle a devant elle un avenir très brillant. Notre Société ne man-
(juera pas, je l'espère, de lui continuer comme parle passé, son bienveil-
lant concours, afin de faciliter ;i ses membres les recherches bibliogra-
phiques en aiilhropologie qui deviennent de plus en plus dilïiciles et
compliquées.
M. A. Gi:ÉBH.\RD,cn offrant à la Société une note sur le M urum* duplex des
Gaulois, d'après Jules César, rappelle les dilïïcultés d'interprétation aux-
quelles a donné lieu celte expn-ssion, et la solution toute naturelle qu'en
a fournie l'observation du mur doublé visible dans \cs caslelars de l'rovence,
aussi bien que dans les Forts d'Kcosse, et autres enceintes préhistoriques
en pierres sèches.
' Pour murus. Barbarisin.; bas-lalm regrollultlriii.'iil u.]u[ilr par raiitcui-, à la .suite
d'une cilalion ecclésiastique.
soc. o'anthrop. 1906. ^^
334 i'J ji iM.KT IDOn
Discussion.
M. l'Ai'ii.i.M i.T rappelle à la Société avec quel soin et quelle constance
M. Guôbhard poursuit ses patientes recherches sur la géologie et l'ar-
chéologie de la Provence.
M. Vauvillk compare les castelars provençaux avec les enceintes gau-
loises et insiste sur la nécessité de fouilles systématiques.
M. GuÉBH.MtD dit que certainement ce serait le meilleur moyen de vérifier
si, comme il semble, bon nombre d'entre les ca&lelars provençaux en
pierres sèches ne seraient point contemporains de certaines enceintes gau-
loises en terre levée, que les savantes études de M. Vauvillé tendent à
rapprocher du Néolithique.
Malheureusement, l'absence habituelle de fossés, et presque de terre,
rend fort difficiles des fouilles dont les conclusions restent elles-mêmes
souvent aléatoires à cause du mélange ordinaire, sans stratification,
d'époques très diverses, que vient encore de constater M. Paul Goby, au
camp du Bois-du-Ilouret. (A. -M,).
L'IDÉE DE SOLIDARITÉ EN CHINE AU V» SIÈCLE AVANT NOTRE ÈRE.
Le Philosophe Meh-ti.
Par Madame Alexandra David (Myrial).
Trois philosophes Chinois sont généralement connus des Occidentaux.
Le célèbre Khoung-tse (Confucius), son disciple Meng-tse (Mencius) et
Lao-tse, l'auteur du Tao-te-king. Tchou-hi, le chef du Néo-confucéisme,
qui occupe cependant une si grande place dans la philosophie chinoise,
sort déjà du domaine des connaissances du public cultivé pour appartenir
à celui des orientalistes... Le penseur à qui je compte consacrer pro-
chainement un ouvrage est plus inconnu encore. Pas une ligne n'a été
publiée sur lui en français. Quant à la bibliographie étrangère, riies
recherches personnelles et les indications que je tiens de l'obligeance
de l'érudit sinologue, M. Vissière, m'ont montré qu'elle était peu impor-
tante.
Meh-ti vivait vers le v« siècle avant notre ère; il fut le contemporain,
ou précéda de peu, Meng-tse, son adversaire acharné. Nous manquons
de documents sérieux relativement à sa vie. Ses œuvres furent englobées
dans la destruction générale des livres ordonnée par l'empereur Thsin-
chi-IIoang ti. De môme que les autres écrits des philosophes, qui nous
sont parvenus, les livres de Meh-ti se retrouvèrent, plus tard, dans des
ALEXANDRA DAVID. — L IDÉE DE SOLIDARITÉ EX CHINE 333
cachelles où des Lelliés zélés les avaient déposés pour conserver à la pos-
térité les doctrines des vieux Maîtres.
Les caractères chinois employés par Meh-ti comme litre général de son
enseignement représentent une main saisissant deux tiges de blé. L'inter-
prétation qu'en donnent les auteurs chinois les plus autorisés est celle de:
>( Amour égal pour tous, Amour universel. » C'est sous ce titre de Philo-
sophie de l'Amour égal et universel que j'entendis pour la première fois
parler du système de Meh-ti par un Lettré d'Extrême-Orient. Celte déno-
mination éveilla mon intérêt. Je me demandai si, contre toutes prévisions,
il fallait voir dans la doctrine de ce maître une doctrine de charité, au
sens chrétien du mot. L'hypothèse me semblait assez improbable, ce fut
alors que je m'attachai à l'idée d'étudier l'œuvre de Meh-ti et d'en livrer
au public les parties les plus essentielles. Il me faut ici rendre hommage
au concours bienveillant que ma app>orté M. le sénateur .Stephen Pichon,
ex-amhassadeur à Pékin et aujourd'hui Résident général de France
à Tunis, qui s'est spontanément offert à faire les démarches nécessaires
à mes recherches et a, ainsi, grandement facilité ma tâche.
L'étude du traité de Meh-ti devait pleinement conGrmer mon opinion
première. Ce n'était pas, en effet, l'Amour du prochain, de l'Humanité...
l'.Xmour, avec tout ce que, sous ce terme, nous entendons de passion
impétueuse, d'entraînement irraisonné, et souvent irraisonnable^ que
prônait le vieux philosophe chinois, mais un sentiment plus terre à terre,
d'essence purement sociale, une règle utilitaire visant l'ordre dans l'État,
la sécurité et le bien-être publics, un précepte de sage prévoyance portant
ses fruits en lui-même et non une vertu abstraite. En un mot, dans
r u Amour Universel )> de Meh-ti je retrouvai l'idée de notre moderne
Solidarité.
La pensée du Maître chinois s'exprime avec une simplicité, une can-
deur que les esprits entichés des philosophies à panache trouveront sans
doute pauvre, voire mème^ peut-être basse et triviile dans le but. franche-
ment avoué, que nous propose le précepte fondamental : Aimez votre
prochain comme tous-même pour votre plus grand profit mutuel. Il ne s'agit
point, ici, de sentiments spéculatifs : aiw^rpour notre philosophe signiGe
accomplir des actes bons pour autrui. Dans ses discours il ne s'attarde pas
à discuter sur la valeur morale ou le bien fondé de l'amour réciproque
qu'il préconise, mais envisage ses résultats. La raison qui doit nous porter
à nous aimer mutuellement, ou plutôt, à agir les uns envers les autres
comme des gens éprouvant les uns pour les autres des sentiments cor-
diaux, c'est que chacun de nous y trouvera un bénéfice tangible. Le senti-
ment n'est intéressant que par ses fruits. Meh-ti s'appuyant sur le cas le
plus ordinaire où les actes matériels s'inspirent des dispositions mentales
de l'individu, exhorte ses disciples à cultiver en eux les sentiments de
bienveillance afin de les amener à se conduire en hommes bienveillants ;
mais l'on peut très bien imaginer les théories de ce Maître adoptées par
des hommes, enlevant à la pratique de i'entr'aide réciproque toute filiation
336 1!» Jiii.i.KT 190r.
morale pour 'on faire une loi strictement d'intérêt matériel assurant la
sécurité et le bonheur de chacun des membres de la Société.
Le caractère d'égalité que semble comporter l'Amour universel prêché
par Meli-ti ameuta contre ce dernier un parti considérable de Lettrés :
« La secte de Meh, dit Meng-tse, aime tout le monde indistinctement,
« elle ne reconnaît points de parents. Ne pas reconnaître de parents
« c'est être comme des brutes et des bêtes fauves. » (Meng-tse, !«' livre
VI, y).
La logique paraît exiger, en elTet, que le principe de l'Amour universel
comporte l'égalité de cet amour. En supposant que nous accordions aux
indilTérents — dont nous sommes, aujourd'hui, enclins à léser les intérêts
à notre profit ou à celui des êtres qui nous sont chers — une part dans
notre affection, part minime n'égalant pas celle que dou? donnons à nos
proches, leur situation ne sera guère modifiée. Au lieu de l'indifférent nous
aurons le moins aimé qui en maintes occasions demeurera comme devant
le sacrifié.
Meng-tse et les autres détracteurs de Meh-ti n'avaient point manqué de
pousser le principe jusqu'en ses plus rigoureuses conséquences et d'en
profiter pour exciter les colères des Chinois contre le téméraire capable
d'oser prétendre, sur la terre classique de la Piété Filiale, qu'il convient
d'aimer, d'égal amour, son père, son fils et le passant inconnu que l'on
croise dans la rue.
Reste à savoir si Meh-ti poussait ainsi ses idées à l'extrême ou si, comme
la plupart des philosophes, il n'y apportait pas les tempéraments néces-
saires pour les rendre plus aisément acceptables. Nulle part, nous ne le
voyons renier ou attaquer les sentiments familiaux. Au contraire, nous
l'entendons fréquemment qualifier de « désordre » les cas où la piété
filiale, l'amour paternel et fraternel sont offensés. Il accepte tout entière
la loi morale des devoirs des enfants envers leurs parents et place sur
la même ligne, les concevant comme aussi impératifs, les devoirs des
parents envers leurs enfants. Ces devoirs, Meh-ti, sans s'attarder à des
questions de sentiments, les porte immédiatement sur le terrain positif
où il se meut d'habitude. L'entr'aide mutuelle, le dévoûment dans les
circonstances critiques, le bien-être matériel assuré à ses proches par tous
les moyens dont l'on dispose, voilà ce que vise notre philosophe dans le
cadre des relations familiales, voilà ce qu'il rêve d'étendre à la grande
famille comprenant la Chine tout entière.
Par une coïncidence bizarre, Meh-ti se rencontre avec l'Evangile dans
le tableau succinct qu'il trace, des œuvres de celui qui a adopté le principe
de r « Amour Universel ».
« Celui qui adhère au pi'incipe de la distinction, dit : Comment pour-
« rais-je être pour la personne de mon semblable comme pour ma propre
« personne et pour les parents de mon semblable comme pour mes propres
« parents? Raisonnant de cette manière il peut voir son semblable avoir
« faim et ne pas le nourrir, avoir froid et ne pas le vêtir, être malade et
« ne pas le soigner, mort et ne pas l'ensevelir. Le langage et la conduite
ALEXANDHA DAVID. — I.'iDÉE DE SOLIDARITK EN CHINR 337
« de celui qui adhère au principe de l'Amour l'niversel sont dilTèrenls.
« Celui-ci dit : « J'ai compris (jue celui qui veut jouer un rôle élevf' parmi
« les hommes doit considérer la personne de son semblable comme sa
« propre personne, les parents de son semblable comme ses propres
u parents. Ce n'est qu'ainsi qu'il peut parvenir à ce rang. Raisonnant
(i dans ce sens, quand il voit son semblable avoir faim, il le nourrit; avoir
« froid, il le v(H ; être malade, il le soigne: mort, il l'ensevelit '. »
C'est précisément en se basant sur la matéiialité de ses desiderata que
Meh-ti arrive à concilier, jusqu'à un certain point et avec une ingéniosité
attrayante, la doctrine de l'amour <( égal pour tous ^> et les attachements
particuliers des liens du sang ou de l'amitié. Comme toujours il en appelle
à notre intérêt :
« ... Ceux qui condamnent le principe de r.\mour Universel disent :
,( . — n (l'amour universel) n'est pas avantageux au dévoùment entier qui
« nous est prescrit (envers nos parents); il fait injure à la Piété filiale.
« Notre Maître dit '. « — Un fils pénétré de piété filiale a à cœur le bon-
ce heur de ses parents. Il envisage donc comment celui-ci peut être assuré.
« Dans cet ordre d'idée doit-il désirer que les hommes aiment ses parents
« et leur procurent des satisfactions. Il est évident qu'il le désire. Que doit-
« il faire lui même en vue d'atteindre ce but? Il faut qu'il s'exerce à aimer
« les parents des autres et à leur procurer des satisfactions afin que l'on
« se conduise de même envers les siens... »
Le philosophe veut nous faire comprendre qu'en lésant les intérêts des
parents ou des amis d'autrui, nos parents ou nos amis courent le risque
de souffrir l'effet de représailles. Ce mode de conduite, ajoute-t-il, ne doit
pas être considéré comme applicable seulement en quelques cas isolés. Il
peut, il doit s'étendre jusqu'à devenir une règle générale car il est en
parfait accord avec le sens naturel. Et il termine en citant ces antiques
vers du « Livre des Rois » :
« Chaque parole trouve sa réponse
« Chaque action sa récompense
« On me donne une pêche
« Je rends une prune ».
Ce principe de l'.Xmour Universel, dit Meh-ti, beaucoup le combattent
ou le raillent et cependant, dans la pratique, n'est-ce pas vers lui, vers
ses adeptes que l'on se tourne :
« Voici un officier revêtu de sa colle de maille, de son hausse col, de
« son casque. Il est sur le point de prendre part, comme combattant, à
« une bataille; quelle en sera, pour lui, l'issue : la vie ou la mort?... On
« ne peut le prévoir... Ou bien voici un olTicier sur le point d'être chargé
' Comparez Evangilo de Matthieu, chap. XXY, verset 34 et suivants,
î Gomme les ouvrages analogues, le traitù contenant les doctrines de Meh-ti fut rédigé
par un ou quelques uns de ses disciples; d'où la forme employée : « Notre Maître dit.. «
338 19 ji ii.i.KT lOOG
ft d'une expëdilion dans un pays lointain : l'issue du voy.igo, r.illci-, le
« retour sont ploins d'incertitudes. Dans ces deux suppositions, ;i qui cet
« offîciercontiera-t-il la surveillance de sa maison, la garde de ses parents,
« le soin de sa femme et de ses enfants? Je pense qu'il n'y a pas sous le
« ciel, un homme, une femme assez stupide pour — s'il condamne le
« principe de l'Amour Universel — maintenir sa foi jusqu'au bout (en
« accordant sa confiance à un égoïste qui n'a point le respect des intérêts
« d'autrui)... C'est en paroles que l'on condamne le principe de l'Amour
« Universel et quand vient l'occasion de choisir entre lui et le principe
« contraire, c'est à lui que l'on donne la préférence. Les paroles et la
« conduite sont, ici, en contradiction... »
Meh-tise retourne ensuite contre ceux qui, tout en admirant ses théories,
les déclarent impraticables, l'amour de x soi » parlant trop haut en chacun.
La puissance de l'égoïsme, la crainte causée par la souffrance, l'ardeur
passionnée que l'on apporte à la recherche de la jouissance, le penseur
chinois ne les ignore pas, mais son calme philosophique n'en est point
troublé. — Des chuses plus difficiles ont été accomplies par les hommes,
répond-il. Ils ont su maintes fois vaincre leur égoïsme, subir volontaire-
ment la douleur, renoncer aux joies de la vie, parfois à la vie elle-même
et cela, souvent, pour un but ridicule, une ambition grotesque, des pré-
jugés absurdes. Puis, aussitôt il cherche à confirmer ses dires par des
exemples puisés dans l'histoire de son pays :
« Le prince Ling de Ching aimait beaucoup les hommes minces. A son
« époque, les officiers l'éduisaient d'eux-mêmes leur nourriturejusqu'à la
« valeur d'une seule poignée de riz (afin de ne pas engraisser). Ils pous-
« salent même le zèle si loin que certains étaient devenus d'une faiblesse
« telle qu'ils ne pouvaient marrher qu'avec l'aide d'une canne et, au cours
« de leurs promenades, devaient s'appuyer aux murailles (pour se sou-
« tenir).
Une phrase brève, un tranquille haussement d'épaule devant cette
manifestation de la sottise humaine, est toute la conclusion du philosophe :
(( Il ne faudrait pas plus d'une génération pour changer les mœurs du
« peuple, tant est grande son envie de calquer les siennes sur celles de
« ses supérieurs. »
Un autre exemp'e succède à celui-ci. Par deux fois on le retrouve
dans l'ouvrage de Meh-ti, soit que le trait qu'il rapporte fut très populaire
en (Ihine à l'époque de notre auteur, soit que celui-ci le trouvât particu-
lièrement caractéristique, ce qu'il me paraît être, en effet.
« Kâu-chien, le roi de Yiieh admirait passionnément la bravoure. 11
« employa trois années à y ex'ircer ses officiers, puis, ne sachant pas s'il
« était arrivé à les rendre vj'aîment intrépides il fit mettre le feu à un
« navire sur lequel ils se trouvaient réunis. Alors saisissant un tambour,
« il se mit à le battre de ses propres mains, les pressant d'entrer dans le
« feu. Quand ils entendirent le tambour, les officiers se précipitèrent à
« l'envi parmi les fiammes, les derniers rangs marchant sur les corps de
« ceux qui les avaient précédés, et ils piétinèrent le feu. Une centaine
ALEXANDHA DAVID. — f/lDKE DE Sl)LII)AUITK KN CHINE 339
u périrent ainsi, soit dans les flammes, soit noyés, mais les survivants ne
« se retirôi'ent que lorsque le souverain battit de nouveau le tambour pour
« les rappeler... »
K Faire le sacrifice de sa vie, supporter la mort dans les flammes est
« chose dilïicile, ceux-ci se trouvèrent capables de l'accomplir parce (ju'ils
« désiraient plaire a leur souverain... »
Le philosoplie laisse tomber ses exemples, mais il ne conclut pas, comme
l'on pourrait s'y attendre, en paroles véhémentes. Le déterminisme placide
qui constitue le fond de la sagesse asiatique, s'y oppose : Les hommes
sont tels qu'ils peuvent être. Le penseur, peut-être plus pour sa propre
satisfaction que dans l'espoir de les transformer, leur signale les erreurs
de conduite qui causent leurs maux; si la foule à qui il s'adresse, ne peut
le comprendre, il ne s'en irrite point.
Pouniuoi, alors qu'elle est rationnelle, alors que non seulement elle
répond à nos sentiments idéaux d'humanité, de générosité, mais satisfait
également nos intérêts matériels, pourquoi la doctrine de l'Amour Uni-
versel ou solidarité n'est-elle pas mieux accueillie?...
« Elle ne plaît pas aux grands, aux « chefs » répond Meh-ti.
Faut-il chercher, sous ces paroles, une arrière pensée de révolte, l'ex-
pression d'un socialisme combattif?... On en éprouverait aisément la
tentation, mais il convient, je crois, de s'en irarder.
Pouniuoi les « grands » repoussent-ils la doctrine de l'Amour Universel
et entravent-ils sa propagation ? — Pensent-ils que la désunion des petits,
leurs luttes entre eux sont la meilleure sauvegarde de la situation pri-
vilégiée dont ils jouissent? Pensent-ils qu'à la faveur des dissensions
séparant les éléments populaires, leur autorité, leur tyrannie, leurs exac-
tions s'exercent plus aisément?... Peut-être Meh-ti le croit-il, mais il ne le
dit pas, et semble même plutôt, attribuer l'hostilité des « grands » à un
défaut d'intelligence, de compréhension de leur part : « Ils comprennent
les petites choses et non la grande » (qui est d'établir un bon gouverne-
ment). Nous risquerions donc de travestir sa pensée en nous lançant dans
la voie hasardeuse des déductions trop légèrement fondées.
Ce que Meh-ti n'a dans tous les cas pas songé à attaquer, c'est le prin-
cipe de la hiérarchie. Le Haut et le Bas, le Noble et le Vil — suivant les
expressions très caractéristiques des auteurs chinois — les gouvernants et
les gouvernés forment une dualité sociale dont il ne conteste en aucun
niumcnt la légitimité et la haute nécessil(;.
L'idéal de Meh-ti est un Gouvernement fort : « Il faut que le kaul gou-
« verne fortement et (|ue le bas travaille fortement, alors la paix ré-
« gnera... »
-Après avoir failli voir, en notre philosophe, un révolutionnaire, il ne
faut pas se hâl(M', sur une phrase, telle (pie celle dernière, de le consi-
dérer comme un soutien du despotisme et de l'autocratie. Ce serrait errer
plus grandement encore :
<f Ce système (celui exposé par Meh-ti) ne consiste pas à gouverner le
« peuple par Tomnipotenee d'un seul dont l'autorité s'exerce sur tous... »
:\\0 W) JIU.LF.T IDO»)
Les chefs, les gouvernants seront ceux (jiiisont capables de gouverner :
les intelligents, les sages. Les gouvernés seront les esprits médiocres in-
capables de vues profondes, ignorants qu'il convient de tenir en tutelle.
Mais le haut et le bas sont des démarcations éminemment transitoires,
dépendant de la seule valeur individuelle et momentanée.
« ... Les fonctionnaires n'ont pas de noblesse d'Iiiiilive, le peuple n'a
(( point de bassesse irrémédiable... »
a... On élève les gens capables, fussent-ils ouvriers ou cultivateurs, on
« leur donne des fonctions élevées avec de gros appointements... »
Meh-li n'en était pas à croire que la fonction put contenir, en elle même,
les éléments de démoralisation que l'on attribue, souvent, aux seuls
mauvais penchants de l'homme qui en est investi. Il préconise l'établis-
sement d'une étroite solidarité unissant tous les degrés de l'échelle hié-
rarchique, chacun s'employant selon ses facultés pour le bien commun,
chacun occupant la place qui convient à ses aptitudes naturelles et s'en
contentant.
(c De là beaucoup de crimes (suivis) de cliAtimenls sévères, avec ces
« deux choses un royaume est troublé. »
« On voudrait en vain, alors, qu'il n'y ait pas de troubles, cela n'est
« plus possible. '»
La vertu majeure de l'individu dans l'Etat est son utilité, les sentiments
familiaux, eux-mêmes, ne peuvent pas faire accepter l'être inutile :
« Un père, même s'il a le cœur lendro, n'aime pas un fils sans utilité. »
Il faut donner de soi à autrui et recevoir de lui; les avares, les soli-
taires sont les ennemis du bonheur public.
« Celui qui détient des richesses sans vouloir les partager avec autrui
« n'est pas digne que l'on soit son ami. »
Et les richesses ce ne sont pas seulement l'or, la terre et ses produits, ce
sont aussi les richesses de l'intelligence, les aptitudes physiques ainsi
que nous le voyons dans les préceptes suivants do'nt l'observance fait de
l'homme un sage :
« Celui qui possède la force doit aider l'homme; celui qui possède des
« richesses doit les par'ager avec l'homme; celui qui possède la doctrine
« (c'est-à-dire qui est instruit) doit enseigner l'homme. »
Je ne puis m'étendre d'avantage sansdépasser les limites d'un mémoire
de ce genre. Dans le volume que je compte consacrer à Meh-ti je pourrai
suivre cet auteur dans les multiples développements par h squels il s'efforce
de nous démontrer qu'en tous les domaines la solidarité est productrice
d'ordre, d'harmonie, de bonheur moral et matériel. Pour donner plus de
poids à ses assertions, le philosophe chinois ne manque pas, selon l'inva-
riable coutume de son pays, de nous représenter son principe d' « Amour
Universel » comme directement inspiré par l'exemple du Ciel « dont les
dons généreux sont sans partialité » « qui procure à tous des biens utiles »,
etc. H invoque aussi r.\nt:quité, cette époque héroïque de l'histoire chi-
noise où vivaient les Yao, les Chun et autres saints monarques qui passent
pour avoir été le modèle de toute sagesse. Par maints traits empjuatés
\I.K\.\M)IÎA DAVID. — l'iDKK DK SOLIDAIUTK K.N CIIINR 341
aux vit'illes clironi(]U('s i! nmis les monlio pr;ili(|iiaiil li' [nincipc de
r (( Amour Universel », mais au milieu •Icce'^ discours — concession faite,
peut-être, aux mœurs conlemporaines — Meli-ti n'abandonne point son
principal argument et c'est toujours le tri-s utilitaire : u Aimez-vous les uns
l.'>^ autres j»our votre mutuel avantage » (jui revient comme la raison délini-
live devant emporter notre adhésion au principe de la solidarité.
Ainsi, en dépit des 25 siècles qui les séparent, le vieux penseur chinois
et nos sociologues modernes peuvent se rencontrer sur le terrain commun
de cette sagesse pratique, doublement sage, qui n'essaie point de géné-
raliser parmi les huinains des verttis exceptionnelles et anormales, mais,
prenant l'homme tel (juil est, s'appuie sur son instinctif et légitime
égoïsme, s'ellbreant de lui démontrer que l'intérêt bien compris de cet
égoïsme, doit le porter à ce respect de l'égoïsme d'aulrui sans lequel il ne
peut exister ni sécurité, ni ordre, ni bonheur social.
Le llnut, le Nobh-, malgré la supériorité que lui confère le savoir, l'in-
telligence ne doit pas se contenter de régir avec une dédaigneuse bien-
veillance \eBas, le Vil; il faut que le dirigeant se pénètre de la mentalité
du dirigé et qu'entre tous les deux il y ait « échange de pensées » :
u Les anciens saints rois ont compris qu'ils faut nommer des chefs en
« accord avec le peuple, alors, entre le Haut et le Bas, il y aura échange de
« pensées. »
Monarques et fonctionnaires, tous ceux qui ont à conduire les masses
populaires, ne peuvent le faire avec équité et pour le bien du pays, que
s'ils sont arrivés à entrer dans la manière de voir du peuple, à comprendre
la façon dont il envisage les choses :
« Qu'est-ce qui détermine la paix entre le Haut et le Bas. C'est que les
« monarques s'assimilent les sentiments du Bas. Alors règne la paix, au-
trement c'est le trouble. »
.( Quand les souverains se sont assimilé les sentiments du Bas, par ce
« fait ils comprennent ce ([ui est le bien et ce qui est le mal du peuple. »
(( Quand les souverains ne se sont pas assimilé les sentiments du peuple,
« ils ne comprennent pas le bien et le mal du peuple. Alors les châtiments
« et les récompenses qu'ils distribuent ne sont point conformes a la justice
« et le royaume est troublé. Donc, lorsqu'on doit récompenser ou chAtier,
« si l'on ne s'est pas encore assimilé les sentiments du Bas il faut absolu-
« ment se livrer à un examen préalable. » C'est-i-dirc se rendre compte
des sentiments d'après lesquels le peuple juge et agit.
« Comment se fait-il aujourd'hui que ceux qui sont en Haut ne peuvent
« pas gouverner ceux qui sont en Bas et que ceux (pii s(jiil (^n lias ne
« peuvent pas servir ceux qui sont en Haut? »
« C'est parce que le Haut et le Bas se méprisent imiUD'Ilement. »
« Pourquoi?
« Parce que leur manière de voir est différente. »
La nécessité de la solidarité est présentée de mille façons diverses dans
l'ouvrage de iMeh-ti, soit qu'il l'envisage dans le domaine matériel, ou
'M-2 1<» ji ii.i.KT 1900
dans le domaine intellectuel. 1! ne manque pas d'affirmer l'étroite relation
entre les faits niatéri(,'ls et les conséquences morales qu'ils engendrent.
La misère du peuple est la plus grande source de désordre publique, le
luxe outré des classes du Haut entraîne inévitablement la dépravation et
la révolte chez celles du Bas :
«... Ainsi les riches vivent dans le luxe et le peuple souffre le froid et
« la faim. »
NOTE SUR LES OSSEMENTS NÉOLITHIQUES DU DOLWEN DE CURTON ET DE LA
CAVERNE DE FONTARNAUD (Gironde).
Pau m. L. Manouvrier.
Ces ossements ont été recueillis par M. l'abbé Labrie qui a fouillé avec
beaucoup de soin et de compétence les deux sépultures. Il a bien voulu
envoyer au laboratoire d'Anthropologie tous les restes squelettiques pour
leur étude spéciale, bien que leur très mauvais état de conservation ne
parût pas très encourageant.
J'ai examiné tous les menus fragments qui composaient la plus grande
partie de l'envoi sans y trouver matière à la plus mince remarque. Les
fragments plus ou moins utilisables, après avoir été étudiés, ont été ren-
voyés à Lugasson, par Frontenac (Gironde).
M. Labrie a étudié lui-même les sépultures ainsi que leur mobilier
funéraire et il doit publier dans le Bulletin de la Société archéologique de
Bordeaux, un mémoire sur le dolmen de Curton.
Je puis toutefois donner ici quelques indications que l'auteur a eu l'obli-
geance de me fournir.
Le mobilier funéraire du dolmen de Curton se composait de trois coquil-
les percées, d'une pendeloque en os, d'un os travaillé analogue à celui qui
fut trouvé dans le dolmen de Fargues (Matériaux, XP vol. p. 22 à 70,
fig. 20), de quelques débris de poteries et de silex, notamment d'une belle
herminette en silex poli.
La Caverne de Fontarnaud a surtout donné des restes de l'industrie
magdalénienne. Mais une sépulture néolithique fut établie parmi ces restes
et fut elle-même bouleversée par des occupants gallo-romains.
Caverne de Fontarnaud.
M. Labrie estime que cette sépulture a reçu au moins six individus
dont quelques enfants. Mais il n'en est resté qu'un petit nombre de frag-
ments et un tibia complet.
Parmi les fragments j'ai pu reconnaître des restes de quatre (?) sujets
MANOl'VRIEH — NoTK SI II I.I> OSSKMKNTS NKOl.lTHIOlKS 1»! iml.MKN Kl' CI IITON lU.'i
adultes, unoLideuN. lioinincsct deux jeunes f(?iniiios, [ilusciiiq eiifaiils dunl
le plus âgé avait enviiH)n dix ans.
Les débris de crines et la plupart des dél)ris d'os lonj^s ainsi que qu<'l-
(|ucs os des extrémités et des fragments de mandibules ne m'ont rien
présenté de mesurable ou de noliiile.
Tiliia complet, masculin.
Longueur = 332 """. correspondant à une taille cadavérique de 1 "". 592,
1 "'. 37 sur le vivant.
Circonférence minimum r= 78.
Rapport de la grosseur i\ la longueur = 23.4.
Cet indice est très supérieur à la moyenne actuelle des hommes pari-
siens : lU.f) (Uahon '").
Il indique ddiic un degré notable d'euryplastie, d'où nous pouvons
inférer (jue la taille du sujet était probablement supérieure de quelques
centimètres à celle indiiiuéc ci dessus.
Diamètres au niveau du trou nourricier:
.-Vnléro-post. = 36. Transv. = 24. Indice de platycnémie = 60. G.
Angle de rétroversion r= 13" ; d'inclinaison = 8°.
Largeur maxim. de la tète du tibia == 70.
Largeur maxim. de l'extrémité inférieure =: 36.
t]n somme, euryplastie, platycnémie et rétroversion notables.
Partie supérieure d'un fémur féminin adulte.
Ce fragment de fémur est remarquable pour la faible inclinaison du col
(non mesurable exactement) et pour la platymérie très accentuée :
Diamètres " 30.5 et 20. Indice = 63.6.
La gouttière hypotrochantérienne est profonde et longue. 11 existe, en
outre un 3^ trochanter de forme oblongue qui se prolonge entre les deux
lèvres de la gouttière de façon à occuper, au total, une étendue de 32 mil-
limètres en hauteur.
Ce 3° trochanter allongé de haut on bas forme une sorte de crête aplatie
à surface rugueuse présentant avec une parfaite évidence, dans toute
son étendue, les caractères d'une forte insertion musculaire.
Pour ces raisons ce fragment de fi'inur a (''!(■ |)l.ic('> dans la collection
du laboratoire d'.Vnthropologie.
Il provient d'une femme adulte, mais très jeune. Son indii:e pii,.!=trique
= 100.0 (23 : 23), chiffre très bas qui forme un contraste avec li; grand
développement des insertions musculaires de la partie supérieure de l'os.
,1'ai montré d'ailleurs qu'il en est ainsi en général *, mais le cas présent
est des plus accentués sous ce rapport.
• Reconstil. de lu taille préhist. (Mèm de la Soc. d'AnlIir.)
- Mémoires sur les variations du corps du fémur d.in.s !'. spèce humaine. {Bull,
Soc. d'Anth., 1893),
;u4
l'.l jiiM.irr IWfi
Un fragment (l'humérus féminin présente la perforation de la fosse
olécrAnienne, ce qui est en rapport avec la gracilité du sujet coïncidant
un travail musculaire assez intense.
[/extrémité supérieure d'un cubitus masculin présente, en arrière et en
dehors, vers la base de l'olécràne., une cavité à parois lisses pouvant
loger un petit pois et résultant d'une blessure faite par une flèche ou un
autre instrument piquant.
Parmi les débris squelettiques se trouvait un fragment de fémur non
humain et non adulte paraissant provenir d'un animal de la taille du
renne mais dont je n'ai pu reconnaître l'espèce.
nOLMEN DE CURTON.
Parmi les débris provenant de ce dolmen beaucoup plus nombreux que
ceux de Fontarnaud, j'ai pu former deux petites séries de fragments
mesurables de fémurs et de tibias.
La sépulture a reçu au moins 8 individus adultes dont 5 hommes et
3 femmes.
Tibias.
Diam. antéro
post.
Transverso
Sonim(
Masculins . . ,
37
24
61
40
20
60
—
35
21
56
—
33
24
57
Féminins
29
22
51
— ...
28
21
49
—
26
19
45
Indice de platycnémie.
64.9
50.0
60.0
72.7
75.8
75.0
73.1
La platycnémie est faible chez les trois femmes.
Elle est beaucoup plus accentuée sur trois tibias masculins et remar-
quable sur l'un de ceux-ci qui provient d'un sujet robuste.
Diamètres
Fémurs.
Indice de platymérie.
antéro-post.
Transv.
Somm
Masculins
84.8
28
33
61
—
81.2
26
32
58
—
74.2
23
31
54
■^
82.1
23
28
51
—
88.8 •
24
27
51
Féminins
72.4
21
29
50
—
66.6
20
30
50
—
81.4
22
27
49
—
68.9
20
29
49
DISCDSSION .'l't.">
Autres fragments :
lûilice pilastrique.
114.3
32
28
60
107.1
30
28
58
112.0
28
25
53
La platynitMie peut ùlre considérée comme faible dans la plupart des
cas. L'indice pilastrique est à peu près moyen.
Discussion.
M. Marcel Baudouin. — Jeserais très heureux de voir le Laboratoire dWn-
thropologie de Paris entreprendre des études qui auraient pour but de nous
permettre de calculer la taille des individus, en se basant, non plus sur la
dimensions des os bugs entiers (ce qui se fait actuellement!, mais seulement
sur les fragments, et surtout les fragments supérieurs des dits os. En effet,
dans nombre de dolmens etde grottes, on ne peutpas recueillir des os nUî^rs ;
et, actuellement, ces ossements brisés sont inutilisables à ce point de vue.
En ce qui me concerne, je me suis attaché à ce problème; et j'espère
qu'un jour on pourra arriver à des résultats pratiques. En attendant, je
signale les efforts faits jadis par certains chirurgiens, en particulier par
M. le P' Jaboulay (de Lyon).
Cela a un certain intérêt, car, si l'on possède nombre d'os longs néo-
lithiques entiers, il n'en est pas ainsi pour les os paléolithiques, dont on ne
trouvera guère sans doute dans l'avenir que des fragments. Par consé-
quent, c'est là un problème fort important, qu'il ne faut pas négliger;
mais, incontestablement, il y a là une méthode nouvelle à trouver. Les
procédés classicjues, modernes, ne nous permettent pas d'entrevoir
aujourd'hui une solution.
Je demande surtout à ce (jue, dans les calculs anthropométriques, on
n'étudie pas en un seul bloc tous les ossements préhistoriques. Il faut,
dès aujourd'hui, isoler les paléolithiques des néolithiques et des hommes
de l'âge des métaux. — Cela est indispensable, si l'on veut faire désor-
mais progresser la science.
M. Manouvrier. — En ce qui concerne la reconstitution de la taille
d'après des fragments d'os longs et notamment d'extrémités, je puis
assurer M. Baudouin que sa proposition et son espoir sont chimériques.
Déjà, avec des os entiers, les variations des proportions du corps en-
traînent des erreurs de détermination qui, dans les cas individuels, peuvent
atteindre, comme je l'ai montré dans mon Mémoire sur la détermination
de la taille d'après les os longs des membres (Mém. de la Société) 10 et
même 15 centimètres— et parfois plusieurs centimètres dans les moyennes
ethniques. Si, à ces erreurs qui peuvent être corrigées en partie dans
certains cas venaient s'ajouter les erreurs commises dans l'évaluation de
34G ^*J jiiu.ET 1U0H
la longueur des os eux-mêmes et i\u\ seraient inévitables même avec des
fra'Miienls assez imporlanls de ces os, alors les erreurs ci-dessus rares
avec des os entiers deviendraient tellement fréquentes qu'il n'y aurait pas
à tenir compte des chifTres de taille obtenus, si ce n'est comme on le fait
à vue de ne/, en disant: taille probablement grande ou petite— sans viser
une fausse précision.
Quant à l'indication des époques et même des diverses sépultures aux-
quelles apparlieniicnl les os qui ont servi à reconstituer les tailles préhis-
toriques, elle a toujours été donnée.
NOTE SUR DES PIÈCES SQUELETTIQUES MAXILLO-DENTAIRES NÉOLITHIQUES
Par m. Le l)"" Siffhe.
La note que j'ai l'honneur de vous lire, est relative à des pièces maxillo-
dentaires, provenant d'un ossuaire néolithique d'Esbly. Cet ossuaire
exploré par M. Collin et M. Tapitan, est, d'après une note que ce dernier
m'a donnée, du « pur néolithique ».
Je remercie MM. Manouvrier et Anthony de me procurer l'agréable
devoir de venir vous entretenir de sujets qui, bien spéciaux cependant,
pourront être de quelque utilité aux anthropologistes.
Les pièces que j'ai en ma possession sont des maxillaires supérieurs et
inférieurs et un nombre assez considérable de dents.
Je n'ai pu encore fixer le nombre d'individus que représentent toutes
les pièces, car il y a une reconstitution laborieuse à accomplir et le temps
m'a manqué pour cela. Néanmoins j'ai pu faire deux lots : un premier
composé de toutes les pièces appartenant à des enfants; un second de
toutes celles appartenant à des adultes.
C'est à propos du premier que j'ai l'honneur de vous entretenir
aujourd'hui.
Un premier point me semblait intéressant à établir : le nombre d'enfants
que les pièces osseuses représentaient.
Bien que ce nombre ne puisse être qu'approximatif, puisqu'il a pu se
perdre pas mal de j)ièces — non point tant susceptible de compléter
celles qui existent, que d'en augmenter la quantité — ce nombre n'en est
pas moins instructif.
Il est possible d'affirmer que 32 enfants de moins de 12 ans ont été
inhumés.
Ce nombre résulte du nombre même des premières molaires inférieures
gauches que j'ai trouvées soit isolées, soit portées encore par les mandi-
bules ou fragments gauches de mandibules.
J'ai pris comme meilleur document la première molaire inférieure de
lait parce que cette dent a une forme si spéciale qu'il est impossible de la
SIFFRE. — NOTE Slll DES PIKCES SQLELETTIUIES MA\IL(.0-I)ENTAIUES 'Ml
confondre avec aucune autre dent, soit de la série temporaire, soit de la
série permanente.
Le lot de pièces appartenant à des enfants se compose de :
Maxillaire supérieur (î. et 1) -7 p.
Maxillain? inférieur ayant l'arc dentaire 9 —
Portion G. de maxillaire inférieure i'A —
Portion D — l.'l —
Dents de lait isolées 200 —
Laissant de cùté pour le moment toutes pièces n'étant pas ou ne por-
tant pas de première molaire inférieure gauche de lait (c'est la dent
de ce cùté qui est en plus grande quantité), nous avons :
Dents i^'- mol. inf g. \ Mandibules avec arc dentaire figuré ' 9
portées par : ( Portions gauches de la mandibule 13
l'«* mol. inf. g. temporaires isolées 10
Tutal 32
J'ai dit que ces enfants avaient moins de douze ans; c'est qu'en effet
sur aucune des pièces formant le l'^'" lot la 2° molaire n'est sortie.
Voici du reste l'âge approximatif que donnent les 22 pièces osseuses
portant des dents.
8 pièces n'ont pas de f" gr. mol. permanentes, c'est-k-direque leurs pro-
priétaires devaient avoir moins de six ans : en effet, on peut donner à :
1 environ 2 ans 1/2
3 — 4 ans
4 — 5 ans
14 pièces ont la dent de six ans. Sur ces 14 pièces 12 sont à cette phase
où la dent de six ans vient de sortir et les dents incisives centrales infé-
rieures de lait viennent de tomber ou vont tomber. C'est donc environ
7 ans 1/2 qu'on peut donner à ces pièces.
Deux pièces sont un peu plus âgées, les i incisives inférieures sont sorties
et l'on peut voir sur l'une d'elles la 2^ gr. mol. g. pointer, ainsi que la
canine; la 1''^ molaire inférieure est remplacée parla première bicuspide:
à l'une nous donnerons 9 ans ; à l'autre 10 ans.
Sur les dix dents isolées, sept ont des racines complètement formées
mais aussi « intactes » c'est-à-dire pas de commencement de résorption
radiculaire.
Les propriétaires de ces dents devaient donc avoir environ de 8 à 9 ans.
Je dis 9 ans, maximum, car le 1" bicuspide qui remplace la 1" mo-
laire de lait, doit avoir terminé son évolution vers 11 ans. Or en donnant
» C'est-à-dire ayant encore des organes permotlant de Iracir la courbo formant l'arc
dentaire.
348 l'.> Jiii.i.ET IDOC)
2 ans entre le placement dr''linilif et la première trace de résorption radi-
culaire, on est dans le vrai, ce qui permet de dire U ans.
Les 3 autres dents restant, nous donnent à peu près:
L'une 2 ans
La seconde 2 ans 1/2
La troisième 10 ans 1/2.
La première de ces dents est représentée par la couronne seulement, les
racines ont dû être fracturées, mais la dimension de la chambre pulpaire,
les cuspides très aiguës, le peu d'épaisseur d'ivoire au niveau, de la frac-
ture radiculaire ne permettent par l'erreur.
La seconde a des racines à peu près formées à moitié.
Le troisième, a ses racines complètement résorbées, c'estdonc parce que
la bicuspide vient de pointer hors la gencive. En mettant G mois au moins
nécessaires pour le complet placement de la bicuspide, on est aussi dans
le vrai. On peut donc dire 10 ans 12
Nous laisserons pour le moment les portions mandibulaires droites.
Quelques unes peuvent s'apparier avec les portions gauches que nous
venons de voir; quelques autres semblent ne pas correspondre à ces por-
tions gauches.
Peut-être pourrait-on individualiser certaines de ces portions droites
ce qui augmenterait le nombre des sujets; mais en dehors de cette aug-
mentation numérique nous n'aurions rien à retirer de leur étude, qui
puisse donner un plus grand intérêt à la présente note.
En résumé on peut dire qu'il y avait au moins 32 enfants âgés de moins
de 12 ans.
Ainsi classés.
3 sujets d'environ 3 ans (2 ans 1/2 à 3)
3 sujets — 4 ans
4 sujets — 5 ans
19 sujets — 8 ans (7 à 8 ans)
1 sujet — 9 ans
2 sujets — 10 ans (10 ans 1/2 à 11)
Les portions droites de mandibules qui portent des dents, corroborent
ces chiffres.
Ces nombres nous permettent de constater que la plus forte mortalité est
pour les enfants d'environ huit ans. Nous avons en effet 19 cas de cet âge.
Il serait intéressant de connaître les causes de la mort ? Je ne sais si
les autres parties du squelette donnent des indications sur ce point.
Tout ce que l'on peut constater sur les pièces que je possède, c'estqu'elles
appartenaient à des sujets normaux, et en bonne santé antérieure, car il est
impossible de déceler traces d'hypotrophie, de carie ou d'affection gingi-
vale à retentissement osseux.
On constate seulement que les enfants faisaient bon usage de leurs dents
l^l.ANCliK 1
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Pi.ANCiii-: XX
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Pi.wciii: XXl
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Dis«:us.sioN 340
(Jf lait, les cupules d'ivuire, el même les tables d'ivoire formées par dis-
pariliun de l'émail usé par la mastication, en sont une preuve manifeste,
.le pense donc que la mort doit avoir été déterminée par une cause
violente, ou tout au moins à ctïet rapide, .l'ajouterai que les dents per-
manentes en formation, ([ui sont en grand nombre, ne portent point non
plus trace d'arrêt de développement indiquant une maladie de longue durée.
Discussion.
M. Marcel Baudûun. — .l'attire l'attention sur cette remarque faite par
notre confrère : htsure lirs marquée mémo sur ces dents d'enfants; et
l'absence piesque totale de carif, sur lesdites dents, comme sur celles
des adultes. — .l'ai présenté ici ' des pièces analogues.
Ces constatations plaident en faveur des idées que j'ai soutenues
ailleurs -, à savoir qu'il y a une sorte de balancement entre l'usure et la
carie à l'époque néolilhi{|ue et aux âges suivants. La carie ne se montre
guère qu'à la fin de la pierre polie, tandis que l'usure est très marquée
dès son début. On doit en conclure qu'à l'origine du néolitbique la nourri-
ture était surtout végétale. Un hroievicnl prolongé était nécessaire.
Il est bien certain que les néolitbiques consommaient un peu de viande
cuile^ comme tous les peuples pasteurs ; mais il ne faut pas exagérer, car
nos paysans français de Bretagne et de N'endée, il y a peu de temps
encore, ne mangeaient que très rarement de la viande (presque toujours
du porc conservé, d'ailleurs).
Il y aurait lieu de comparer la carie dentain.', trouvée dans les dolmens
et sépultures du centre du bassin de Paris (région calcaire), avec celle des
dolmens bretons, situés en pays granitique, car on sait que la carie est
bien plus rare en paijs calcaire.
Pour le paléolithique, les dents ne nous apprennent encore rien, puis-
que les sujets d'observation manquent; mais on va peut-être un peu loin,
en affirmant que les paléolithiques étaient exclusivement fa/»/ro?-e.
M. Zaborowski. — Si j'ai bien compris M. Baudouin, il prétend que les
néolithiques avaient une belle dentition et que chez leurs descendants de
l'âge du bronze, l'usure des dents devient au contraire de plus en plus
commune et grande, et il attribue cette différence, la moindre usure chez
les néolithiques, à ce que ceux-ci se seraient nourris de végétaux et non
de viande. Je ne crois pas qu'une relation plus particulière soit établie
entre l'usure des dents et l'usage de la chair. Les fellahs de l'Kgypte,
les conducteurs de chameaux qui ne connaissent guère l'usage de la
viande, passent pour avoir les dents beaucou]» plus usées que nous, parce
' Makcel BauiiOUIN. — Ma.Lilltiire inférieur d'en/uni a t' denlitions. — Bull,
et Mém. Soc. d'Anthvop., Paris, l!i04. — Bull. Soc. Préh.de France, VJ04. p. 327.
' Marcel Baudouin. — [Les dents préhistoriques]. Bull. Soc. Préh. de France,
Paris, 1904, p. 2G3-266; 1905, p. 40-48.
soc. d'anthrop. i906. 28
350 1^ ji ii.i.KT 4906
qu'ils inAchent incessainmenl des fèves sùclies. D'autre part, dos sauvages,
des nègres de la Côte-Uccidenlale, les DahotiK-ens qui mangent de tout,
ont les dents très belles et intactes parce que, faisant bien cuire leurs
aliments, ils ont peu à mastiquer.
Et il est certain que la nourriture des néolithiques i-tait i)rincipalement
carnée. Nous savons bien par l'énorme (juantité d'os brisés et brûlés
qu'ils ont laissés dans leurs foyers, qu'ils se nourrissaient d'abord princi-
palement d'animaux de chasse et (jue peu à peu ils ont fini par se nourrir
principalement de la chair de leurs animaux domestiques. Et leurs habi-
tudes ont persisté chez leurs descendants éloignés des centres de civilisa-
tion. Nous savons 1res bien que les Cimbres, les Germains migrateurs,
ceux môme de l'histoire, et jusqu'auxGaulois avant notre ère, se nourris-
saient principalement de la chair de leurs animaux domestiques. 11 n'y a
donc rien d'extraordinaire, rien de douteux dans ces mœurs.
M. de Mortillet dit que les néolithiques se nourrissaient généralement
de céréales '! S'exprimer ainsi c'est donner de leur vie une idée peu exacte.
Ils ont connu et cultivé l'orge, comme je l'ai éiabVi {La céréale protoari/enne.
Bull., 1904, p. 87); ils ont partiellement connu le blé. Des grains d'orge
et d'un blé petit rappelant un des plus anciens blés de l'Egypte, ont été
trouvés dans des palafittes de l'Age de pierre en Suisse. Mais le blé était
introduit du dehors. Et nos néolithiques ne faisaient pas de cultures
assez étendues avec une régularité suffisante pour que leurs produits
aient pu entrer pour une forte part dans leur alimentation. Ils faisaient
surtout de la cueillette, et ils avaient assurément recours à toutes sortes
de graines qu'ils écrasaient plus ou moins avec leurs grossières petites
meules. On a trouvé dans les palafittes une préparation de grains de
céréales. Il est dérisoire de lui donner le nom de pain. C'est une grossière
galette renfermant des grains entiers, des glumes, de la pierraille des
meules. L'usage d'une telle préparation dure et sèche, et celui de grains
coriaces auraient sûrement déterminé l'usure rapide des dents. Si les
néolithiques n'ont pas en général les dents très usées, c'est qu'en général ils
recouraient peu à cette alimentation végétale. Et cela est bien d'accord
avec ce que je viens de dire. J'ai fait, je crois, la démonstration du peu
d'importance du blé et du pain, d'un simili-pain, en Europe aux âges pré-
historiques dans une note qui est déjà imprimée et paraîtra incessamment
dans la lifiue de l'École. Nous savons qu'à l'Age du bronze, la culture,
celle de l'orge surtout, puis du blé, est devenue bien plus générale en
Europe. Il serait intéressant de constater qu'en même temps l'usure des
dents est devenue plus commune. Ce serait cependant, je crois, une
erreur, de conclure d'un fait semblable, que l'usage de la grossière galette
des palafittes ou d'un pain un peu moins fruste, était répandu partout
dès lors. Nous savons positivement que les graines céréales furent d'abord
consommées plus souvent en nature, après un grillage sommaire ou
réduites en farinç et sous-forme de bouillies.
Lons DrBnEi'n.-i:ii\MiiAHi"»i:i. — i.v i. \nglie scrotale 3."1
LA LANGUE SCROTALE
Par m. le D"" Louis Dubrelil-Chamuardel (de Tours).
D'iniporlanls travaux, dans ces dernières années, ont été publiés sur la
langue scrutait' ou lamine plicaturée. Si je reviens aujourd'hui sur cette ques-
tion, c'est qu'il l'occasion de plusieurs observations personnelles, mon
attention a été attirée sur divers points qui, scmble-t-il, n'ont pas encore
été étudiés.
La langue scrotale — (nous conserverons cette appellation expressive du
professeur Horand, de Lyon) — est cette variation analomique consistant
essentiellement dans la présence, sur la face supérieure de l'organe et sur
ses bords, de sillons profonds, plus ou moins réguliers, qui lui donnent
assez exactement l'aspect plissé de la peau du scrotum.
Il faut tout d'abord distinguer cette anomalie de deux états bien dif-
férents :
1° Lés sillons pathologiques (jui apparaissent sur la langue h la suite
de diverses maladies : syphilis, cancer, tuberculose, certaines fièvres
éruptives, etc. ;
20 Les sillons que j'appellerai physiologiques et qui existent à l'état nor-
mal chez la grande majorité des personnes adultes et vont en s'accentuant
avec l'âge. On sait que la langue de l'enfant est tout à fait lisse; chez
l'adulte au contraitre on trouve des fissures, des plis plus ou moins pro-
fonds, plus ou moins réguliers. D'après les observations inédites de M. le
D"" Edmond Chaumier, de Tours, et les noires, ces sillons physiologiques
existeraient chez 60 0 0 des personnes ayant atteint l'âge de 50 ans. Je
ne crois pas que cette particularité ait été signalée.
La langue scrotale est une variation analomique rare comme l'a fait
remarquer le D"" Ludger Cruet, et qui, à notre avis, ne se rencontre pas
une fois sur 1.000 sujets.
L'organe a un aspect très caractéristique. F^e sillon médian est forte-
ment indi(iué, plus large et plus profond qu'a l'état normal. De part et
d'autre de ce sillon partent des sillons latéraux, également profonds, qui
se dirigent vers les bords qu'ils échancrent et passent, en s'allénuant,
sur la face inférieure. Suivant la disposition de ces sillons, on a des types
divers : foliacé, cérébriforme, transversal, etc.
Il existe parfois une hypertrophie des papilles linguales. Faut-il ad-
mettre comme MM. Cruet, Barthélémy et plusieurs autres que « la langue
scrotale n'est que l'état exagéré de la la langue papillaire »? Nous ne le
pensons pas. Dans cinq cas de langue plicaturée que nous avons observés,
il n'existait aucune hypertrophie papillaire manifeste. D'autre part sur
plusieurs langues papillaires nous n'avons constaté aucun sillon anor-
mal, même à l'état de vestige. Nous ne voyons donc là qu'une simple
coïncidence et n'établissons aucun rapport entre ces deux anomalies.
35i
1«.) ji ii.ij;t VM)
l ne ftiis, sur un soldai du ."')« cjiirassins, nous avons vu. à lliôpilal
inililaire de Tours, avec M. le médecin principal Teslevin, une langue scro-
lale absolument dépittirvue des grosses |)apilles du V lingual, niais sur
reniplacement du V lingual, on remarquait tout un champ de petites
papilles hyperlropliiées.
La langue est rouge vif, couleur de la viande saignante ce qui l'a fait
comparer, par ipichpies auteurs anglais, à un morceau de beefsteak.
Langue scrolalo du type folincé avec hyperlrophio papillaire.
(Observation prise avec M. le D' Testevin^.
Mais ce qui frappe de suite l'observateur c'est la largeur tout à fait
anormale de l'organe qui est étalé et comme aplati. Ce fait a amené cer-
tains anatomistes allemands et anglais, à expliquer de la façon suivante
la pathogénie de l'anomalie : la langue trop large, pour s'adapter aux
dimensions du maxillaire inférieur, doit se plisser en tous sens. C'est là
une manière de voir que nous n'adopterons pas et pour la raison suivante
qui nous paraît convaincante. En elfet, j'ai constamment remarqué, dans
les onze cas personnels que j'ai pu étudier, que les sujets, porteurs de
langues scrotales, avaient un maxillaire inférieur très large : la courbe
de l'os, chez tous, était très manifestement hyperbolique ainsi que 1 ar-
unis DUllUEin.-CllA.MIlAnDEI.. — I.A I.ANGUE SCROTALE 353
cade denlairo. Que faul-il cunclurc di' cetlf iotn;u(|U('? <Ju'il y à >^ans
doute uno corrélation entre la forme de la langue et le développement du
maxillaire inférieur et que celui-ci est peut-être modelé par celle-là, de
même que le crûne l'est par le cerveau.
La langue scrolale esl-l-(^lle un stigmate d'hi-rédo-sypliilis, coninii^ l'ont
admis MM. Kournier, (jaucher, iJarlhélemy et beaucoup d'autres? Nous
n'avons aucune raison d'accepter cette opinion et, pour notre part,
aucune des onze personnes ([ue nous avons examinées n'avait eu la sy-
philis et ne pouvait être soupçonnée de syphilis héréditaire.
Faut-il, comme certains, attacher une grande importance, à la coïnci-
dence de troubles rachitiques et de langue scrolale ? Non plus, car ce n'est
pas là un fait général.
La langue scrotale peul-dle être déterminée chez les t''[)ileptiques par
des morsures répétéiîs au cours de crises et serait-elle un signe d'épi-
lepsie comme semble l'admettre le D'' Bianchinif Nous ferons remarquer
qu'il n'y a aucune comparaison îi établir entre les sillons de la langue
plicaturée et les empreintes dentaires causées par les morsures au cours
des crises épileptiques.
Somme toute la pathogénie de cette disposition ne peut être expliquée
de façon satisfaisante par l'hérédo-syphilis, le rachitisme et l'épilepsie.
La langue scrotale est une anomalie congénitale, simple variation ana-
tomiquc comme beaucoup d'autres, et dont nous ne saisissons pas encore
la morphogénie.
Nous avons pu deux fois constater son caiactère nettement héréditaire.
Dans une famille de Tours, la mère et quatre enfants étaient porteurs de
cette anomalie et il paraîtrait que le grand-père et un frère de la mère
présentaient celte même malformation. Dans une autre famille, nous
avons vu l'anomalie chez le père et une tille de façon très accentuée. Le
D' Payenneville a signab'; plusieurs observations où cette hén^dité était
manifeste.
Terminons par quelques constatations secondaires. La langue scrotale
est une langue humide. Nous avons remarqué que chez les porteurs de
cette variation, il existait un développement exagéré du systèmesalivaire,
aussi bien des glandes parotides, sublinguales etsous maxillaires que des
glandules linguales.
Nous avons noté aussi une circulation veineuse liés développée; les
veines ranines étaient toujours liés saillantes et présentaient de nom-
breuses varices.
Enfin, chez tous nos sujets nous avons été frappé de la grande régu-
larité du système dentaire, tant au point de vue di- l'implanlalion, du
nombre el de la forme des dents, que de leur bon état île conservation.
Nous tenions à fixer ces quelques remarquer qui aideront peut-être à
expliquer un jour la genèse de cette curieuse variation anatomlipie.
354
l'J JUILLET 1906
QUELQUES REMARQUES D'ANTHROPOLOGIE SUR LES CAIVIBODGIENS ACTUELLEMENT
A PARIS
(Avec présentation de portraits).
Par m. Adolphe Bloch.
On sait que le roi du Cambodge se ti'ouvait encore hier à Paris,
accompagné des membres de sa famille et d'un certain nombre d'indi-
gènes, hommes, femmes et enfants, en tout, plus d'une centaine d'indi-
vidus. Paimi les femmes ce sont les danseuses dont on parlait le plus,
mais comme il ne s'agissait pas là d'une exhibition dans le genre de celles
que nous avons souvent vues à Paris, au Jardin d'Acclimatation ou aux.
Expositions universelles de 1889 et de 1900, on n'a pu songer à demander
l'autorisation de mesurer les sujets de S. M. Sisowath. 11 a donc fallu se
contenter de les voir sans y toucher, mais toute espèce de remarque sur
les caractères extérieurs des Cambodgiens, aussi incomplète qu'elle soit,
pourra toujours nous être de quelque utilité jtour les recherches anthro-
pologiques.
Je viens donc soumettre à la Société quelques observations que j'ai eu
l'occasion de faire sur les Cambodgiens des deux sexes, et montrer, en
môme temps, divers portraits sur lesquels sont représentés le roi, ses
enfants, sa sœur, des danseuses, etc.
Fig. 1. — sisowath, roi du Cambodge (Phot. Dieulefils, Hanoï).
Voici dans quelles conditions j'ai pu faire mes observations. En face
A. HUtCH. — iJlKLiJlES UEMARQIES d'aNTHIMI'OLDGIE SUR I.KS CAMBODGIENS 355
l'hôtel du roi liabitaient les femmes, danseuses ou autres, de sorte qu'elles
étaient obligées de traverser la rue pour rendre visite à leur maître, et
pour s'en retourner ensuite chez elles.
Mais ces allées et venues se répétaient très souviMit dans le courant
d'une matinée, et il nous était donc facilt> de voir et de revoir les physio-
nomies qui nous intéressaient particulièrement. Quant aux hommes qui
haliitaienl avec le roi l'on pouvait aussi les rencontrer fréquemment.
Outre cela j'ai pu voir le roi et toute sa suite qui se rendaient, avec les
danseuses, à la matinée ufficielle de l'Elysée.
Enfin aux deux représentations du Cirque Métropole qui eurent lieu le
3 et le 11 juillet, en l'honneur des Cambodgiens hommes et femmes, je
me suis trouvé placé dans leur voisinage, ce qui me permit de les obser-
ver pendant plusieurs heures. Quant aux danseuses il était préférable de
les voir en dehors de la danse, car la plupart d'entre elles sont obligées
de se farder pour paraître en scène, et l'on comprend que dans ces con-
ditions l'on ne peut pas reconnaître la couleur naturelle de la peau.
Du reste, ainsi qu'on peut en juger d'après les portraits que jo vous
présente, les mouvements de torsion des doigts et des mains, pendant la
danse, sont absolument semblables à ceux des danseuses javanaises que
tout le monde a pu voir à l'Exposition de 1889, et dont j'ai d'ailleurs
parlé dans une communication sur la forme du doigt, à V Association fran-
çaise pour l'avancement des sciences. (Congrès de Paris, 1889).
Parmi les caractères anthropologiques il y en a trois qui nous ont par-
ticulièrement frappé dès le premier moment : 1° la coloration de la peau ;
2" les dimensions des lèvres et la grandeur de la bouche; 3° la forme de
la tête.
Après les avoir décrits succinctement nous dirons aussi quelques mots
des autres caractères extérieurs.
10 Coloration de la peau. — Les Cambodgiens font partie, comme on le
sait, du groupe des races jaunes del'Indo-Chine, mais leur couleur est en
général plus foncée que celle des Annamites donton a pu voir, en France,
de nombreux spécimens aux dilïérentes expositions, et qui, sous le rapport
anthropologique, sont mieux connus que les Cambodgiens.
Ceux-ci ont la peau d'un rouge brun (couleur mirron); aussi sont ils
considérés comme étant les moricauds de l'Indo-Chine. Ajoutons, en pas-
sant, que l'Annamile, (]ui se considèro fomme blanc et dédaigne fort les
hommes de couleur, méprise cordialement le Camliodgien, mépris (jue le
Cambodgien lui rend du rfste avec usure. Il lèsiille n.ilnr.'l!pm<Mit de
celte antipathie mutuelle que les métis sont as>ez rares '.
Mais il va sans dire que cette leinlp foncée de la peau n'est pas ki
même chez tous les Cambodgiens que nous avons vus. Il y a, comme
' Bulletins rie la Snciété d'Anthropologie, 1875, p. ri2l43 (comiimnicalion de
M. Monce, sur l'anthropologie de l'Iudo-Chiue).
356
iU ji ii.i.KT 1906
partout, des variations de couleur; ainsi les femmes ont, en général, le
teint plus clair, bien que l'on puisse remarquer, chez elles, des types dont
la peau est hvs foncée.
Il semble aussi que la coloration de la peau devient plus foncée avec
l'âge; ainsi le roi et sa sœur ont le teint bronzé, tandis que l'un des fils
du roi, encore enfant, a la peau presque blanche : (il a aussi le type quasi
européen (F///. '2} mais ses autres frères l'ont moins à cause de la confor-
mation de la bouche.)
Fif/. 2. — Les fils du roi (Universel- Photo).
Parmi les danseuses, il y avait des petites filles dont la peau était d'une
couleur claire, blanc jaunâtre. Si l'on songe que c'est à l'âge de la puberté,
Firj. 3. — La fille du roi. (Universel-Pholo.) Couleur de la peau n* 37 (brun très
foncé) du tableau de Broca.
A. BLOCII. — OlEI.gUES KEMMlMl-ES I)"aN rHHii|'OlJl(;iE Sl'Il LES CAMHODCIENS 357
et rien (ju'à cet âge, (lue se produisent les plus iinpiirtitiites luuilificaliuns
que l'organisme est susceptible d'acquérir, l'on peut admettre que c'est
aussi h ce moment ([u'apparait le type d<' la race à la(|uelle appaitiennent
les enfants dont nous venons de pailer. Mais il ne faut pas oublier cepen-
dant iju'il y a aussi des enfants qui, dès la naissance ou quelque temps
après, ont déjà plus ou moins la couleur et le type qui caractérisent leur
race. Sur le portrait de la lille de Sisowafh Ton remarque (jue la couleur
de la peau est déjà très foncée et que les lèvres sont déjà épaisses.
{Fig. 3). (Il est possible que la mère de cette petite n'était pas la même
que celle des garçons.)
2° Dimensions des lèvres et de la bouche. — La grosseur des lèvres était
très variable; ainsi l'on en voyait qui pouvaient, quoique rarement, être
aussi minces que celles des Européens, mais chez beaucoup de Cambod-
giens, hommes et femmes, les lèvres étaient épaisses ainsi qu'on peut s'en
assurer sur le portrait du roi {Fig. 1) ', sur celui de sa sœur ( F ig. U) et sur
^
Fiff. 4. — La sœur du roi (Universel-Photo;.
Outre le volume des lèvres reman|uoiis aussi la dépression de la racine du nez.
ceux de certaines danseuses (F/^. 5). Par contre les lèvres et la bouche de
la première danseuse ont des dimensions ;i peu près européennes {Fig 7).
En général la largeur de la bouche marche de pair avec la grosseur des
lèvres, ce que l'on remarque surtout sur les danseuses au type grossier
(Fig. 5).
Quelques individus avaient aussi les lèvres pigmentées, c'étaient ceux
qui avaient ces organes particulièrement épais.
Ainsi que nous l'avons montré en 1808, dans une communication à la
Société -, le volume des lèvres constitue un caractère anlhrop(jlogique de
premier ordre, qui permet de classer les différentes races humaines
* Nous ne reproduisons ces porlrails iju'à litre de docutnenls sur le type cani-
bo Igien.
' Bloch. — Essai sur les lèvres au point de vue nuthr(jpolo(ji<iui', Bull. Soc. .Anthr.
1898.
358
il» JIILLKI lUOC.
suivant le degré de pigmentation do la peau. Nous avons aussi montré»
dans une autre comiTiunication en 11)01, que les lèvres épaisses peuvent
être considérées comme un caractère alavi(|ue rappelant l'origine négroïde
des races qui, sans avoir les lèvres aussi volumineuses (|uc les véritables
nègres, les ont cependant beaucoup plus fortes que les races blanches.
Ce sont particulièrement les races jaunes asiatiijues qui rentrent dans ce
groupe, et conséquemment les Cambodgiens; et l'on peut d'autant plus
admettre l'origine négroïde de ces derniers qu'il y en avait parmi eux,
comme nous l'avons dit, dont les lèvres étaient pigmentées et en même
temps épaisses. Je n'insiste pas plus longuement sur ce sujet, et je m'en
réfère à mes communications antérieures sur la transformation des races
et sur les caractères ataviques qui le démontrent.
3° Formelle la tête. — Les femmes ayant les cheveux coupés en brosse,
laissés un peu plus longs sur la face supérieure de la tète que sur les côtés,
il semble que la tète a une forme carrée qui évidemment ne peut provenir
que de cette façon de porter la chevelure, sans que la boîte crânienne y
participe. Mais l'on remarque que la région occipitale est particulièrement
aplatie, ce qui se voit d'autant mieux que les cheveux sont courts à ce
niveau. Cet aplatissement de l'occiput, ou plutôt le peu de saillie de cette
partie de la tète, s'observe chez presaue tous les individus, naturellement
avec des degrés plus ou moins prononcés, et il correspond en réalité,
ainsi que nous le verrons plus loin, avec une longueur relativement petite
du diamètre antéro-postérieur du crâne'.
D'autre part, chez quelques Cambodgiennes, le front a une forme
particulièrement négroïde, c'est-à-dire qu'il est haut et bombé, ainsi qu'on
Fi{f. 5. - Type grossier de la race. (P. Dieulefils, Hanoï).
* Cette particularité delà région occipitale a été également observée, sur presque
toutes les Gambod^'iennes par une artiste sculpteur Mii« R. de Vèriane qui avait été
chargée parla Ville de Paris de modeler le buste du roi.
A. IILDCII. — (jLELyrES IIEMAltylKS d'aNTIIKdImiIJXJIE SIU I.KS CA.MIIODCIENS 359
peul le constater sur ruin' îles danseuses de la figure 5. chez laquelle l'on
remarque encore d'autios oaraclt"'rcs conélati/s cumnie raplatisscini'nt du
nez et la grosseur des lèvres.
Celte forme négroïde du front est donc <!nc(irc uti oaraclt-rc atavi(juc
ijui rappelle l'origine nnire dos Cambodgiens.
4" Autres caractères extérieurs. — Les cheveux, les yeux <H le nez sont
ceux de toutes les races jaunes asiati(|ues.
Les cheveux sont noirs d'ébène et lisses, et si. sur certains portraits, ils
paraissent crépus cela résulte de la coupe particulière de la chevelure.
Les yeux ne m'ont pas paru souvent obliques et bridés.
Le nez est généralement déprimé à la racine et peu saillant, môme lors-
qu'il se rapproche de la forme caucasique; aplati à sa base dans le type
grossier et plus ou moins étroit dans le type fin chez lequel, malgré cela,
les narines sont presque toujours écartées.
Les dents paraissent généralement droites.
En ce qui concerne la taille, sur les 70 individus du sexe féminin, il
n'y en avait que 6 qui étaient d'une assez belle stature, mais c'étaient les
favorites du roi et par conséquent des sujets de choix.
Toutes les autres femmes étaient de petite taille, abstraction faite des
enfants qui s'y trouvaient mêlées.
Quant aux liommes (une trentaine environ), ils sont relativement beau-
coup plus grands et d'une taille au-dessus de la moyenne, mais nous ne
devons pas oublier de dire qu'il y avait, parmi eux, quelques Annamites.
D'après M"« de Vériane le roi n'aurait pas plus de l'»o5,et les autres Cam-
bodgiens seraient également de petite taille.
Fig. Cl. — Le roi d»' prolil. (L'nivcrsfi-l^hofo.)
Remarquons l'appialissement de l'occiput.
360 '•' Ji ii-i-M i'""»
Le rui Agé <renviion (i3 ans, qui csl repiV'senlc sans barbe sur son por-
trait, a (In (Mre rasé avant de débarquer à Marseille, car j'ai vu un autre
portrait fait au (lanibodge même, où Ttui rcmaiiiiu' une moustache et de
la barbe au menton.
Il parait, d'après M. Mdiira ', ancien résident an (lamlioilge, (jue la
barbe, chez les indigènes, ne punsse (|u'('ntre '.i^î e( 40 ans.
Disons aussi doux mots du profil dont on parle rarement dans les des-
criptions anthropologiques. La lace des jaunes étant plate, le profil doit
nécessairement avoir un tout autre aspeet que celui des Européens, qui
est proéminent. C'est ce ([uc l'on peut constater sur la figure Ci qui montre
le roi de profil.
Enfin nous avons remarqué que les muscles du mollet sont bien déve-
loppés, contrairement à ce (pic l'on voit dans d'autres races foncées,
comme certains Diavidiens.
Il résulte donc de ce qui précède, (pi'il existe, parmi les Cambodgiens,
deux types différents, un type grossier et un type lin, qui appartiennent
tous les deux à la même souche, le deuxième étant issu du premier, par
le seul fait de l'évolution et non par suite d'un mélange de deux races
différentes; mais il va sans dire qu'il est indispensable de compléter cette
trop courte esquisse par l'étude du squelette, et principalement par le cal-
cul des rapports de longueur du bras avec l'avant-bras, de la cuisse avec
la jambe, du membre supérieur avec le membre inférieur, calcul qui,
dans le cas actuel, est aussi utile que celui de l'indice céphalique, pour
pouvoir déterminer l'origine des Cambodgiens.
Comparaison avec les descriptions des principaux explorateurs.
Si nous comparons les quelques remarques que nous avons faites sur
les caractères extérieurs des Cambodgiens avec les descriptions de quel-
ques explorateurs, nous remarquons qu'elles concordent avec leurs obser-
vations. Ainsi le D' Mondière - a comparé la femme cambodgienne à la
femme annamite, à la femme chinoise et à la femme Min-Huong. Or de
ces quatre races, c'est la Cambodgienne qui a le plus court diamètre
antéro-f)Ostérieur du crâne, aussi bien pour le diamètre maximum que
pour le diamètre iniaque ; voici du reste les chiffres indiqués par l'auteur :
Diamètres antéro-postériour do crâne.
Maximum
Iniaque
Par contre le diamètre bi-pariétal vient en deuxième ligne comme lon-
* MoDRA. — Le royaume du Cambodge, Paris, 1H83, 2 vol. gr. ia-8°,
' Mondière- — Monographie de la femme annamite in Mém. Soc. Anthr., iSTô.
55
46
13 27
Annamites
Chinoises
Minh Camboiigiennes
177.00
184.50
178.77 172.65
170.00
170.06
179.77 165.92
A. Itl.OCH. — QUELQUES REMARQUES D'ANTIlIUll'iif.OiilE SUR LES CAMIIODGIENS 361
gucur chez la Canibodici'Minc, car il est de 148,25 chez la Chinoise, de
146,29 chez la Caiiibodgieiine, de lir».r)4 clie/, la Minli. ot d<' 1:{7,H4 chez
l'Annamite.
CAMBODGE
Phnom-Penh
Pho, Première Danseuse
Fig. 7. — Type lia de la race. (Phot. iJieulelils, Hanoï).
L'indice céphaliqiie, suivant M. Mondière, est de 85,11 chez la Cambod-
gienne, de 83, o2 chez la iMiiili. de 82,12 chez la Chinoise, de 81,23 chez
l'Annamite.
Cet auteur pense aussi que le volume de la tète est presque un quart
'M\-2 I'.) jiii.i.iiT 1900
plus petit chez la Cambodgienne (jue chez la Chinoise '. De son côté
M. Moura trouve (jue le volume ilu cr.'lne est généralement faible.
iJaprùs M. Maurel l'indice céphali(jue est de 82,74 pour i3 Cambod-
giens mesurés *.
l*our la taillf M. .Mondiùre dit (pio la Cambodgienne est la plus petite
de toutes les races jaunes précitées, mais cbcx le Cambodgien, Maurel a
remarqué deux types dilléienli^, l'un svelte et mince, l'autre court et trapu.
En ce (|ui concerne la ( oloratiot) de la j)eaii, .Mondiére trouve qu'elle
est très foncée, même très biune chez la Cambodgienne, presque noire
chez quelques sujets. Ce <pii la sépare, ;ijoule-t-il, de ses voisines les An-
namites, les Chinoises, les .Minh-Huong.
Suivant .Maurel, la couleur de la peau variechez les Cambodgiens, entre
le 28 et le 30 du tableau de iiroca. Chez les femmes elle est moins foncée,
dit-il encore.
Le N° 30 de ce tableau est couleur marron, le 28 est d'une teinte brune
noirâtre (couleur chocolat).
A titre de curiosité nous reproduisons ici un tableau qui se trouve dans
l'ouvrage de M. Moura, et qui indique, d'une manière générale, le teint de
chacune des races de Tlndo-Chine, en commençant par la plus foncée,
d'après l'observation même des indigènes de la presqu'île indo chinoise.
i" Les Khmers et les sauvages du Nord et de l'Ouest (Samies, Cuois et
Pors) qui ont été de tout temps môles aux Cambodgiens;
2" les sauvages de l'Est (Phuongs, Stiengs) qui sont considérés comme
assez purs;
3° Les Malais et les Cham, tous mahométans et aujourd'hui bien
confondus;
4" Les Siamois.
S** Les sauvages Chreais et Rodes, fixés très à l'Est, sur les confins de
l'ancien Ciampa et (|ue l'on dirait croisés de Cham et d'Annamites.
6" Les Laotiens;
7» Les Annamites ;
8" Les Chinois.
Nous trouvons pour notre compte, dit M. Moura, que cette classification,
établie d'un commun accord par les indigènes de la presqu'île indo-chi-
noise, est vraie, et qu'il faut l'admettre comme règle générale, malgré les
nombreuses exceptions qui sont dues aux causes que nous avons en par-
tie indiquées ^
Pour ce qui est des autres caractères anthropologiques que nous avons
observés, nous nous accordons également avec les auteurs qui les ont
décrits.
* MoNDlÈRE. — Lnc. cit.
* Maurel. — Anthi'op. du Cambodge m Mémoires de la Soc. d'Anthr., 2" série, t. III
et IV.
' Moura. — Loc. cit., t. II, p. 400.
A. nLonn. — QUEi.rtrEs nEMAROi'Es d'antiiuopologie sur r.EscAMBonr.iENs 363
Ainsi, d'après M. Maurel, le nez est le plus souvent droit mais un peu
aplati, avec des urifices transversaux ou obliques.
Selon M. Moura le nez est peu proéminent i\ la racine, mais il se déve-
loppe vers rexlrémiti' et atteint une dimension moyenne; il est tantôt
aquilin et tanlùt a[)lali, mais les narines sont presque toujours dilat(''es.
ijuaiit à la houehe et aux lèvres des (lamliodgiens, Morice dit que la
bouche est généralement t^^'ande et (]U(> les lèvres sontgiosses '.
Mondiére sur .'Kl Cambodgiens a trouvé des lèvres de volumi' variabje,
il fois grosses, 17 fois moyennes et 2 fois seulement fines *.
M. Moura a également remarqué tie la variété sous ce rapport. La
bouche est un peu grande, dit-il, mais pas mal faite; les lèvres sont
épaisses, sans exagéiation, et on les liuuve même fines chez quelques
sujets.
Toutes ces descriptions correspondent, par conséquent, aux deux types
que nous avons remarqués, c'est-à-dire soil au type grossier, soit au type
fin.
Même le type négroïde, que nous avons observé sur les Cambodgiens,
a été également remanpié dans le pays par le DMIarmand ; bien plus il dit
aussi qu'il y a des Cambodgiens qui ont les cheveux presque frisés, avec
des traits négroïdes.
Pour nous ce sont encore là des témoins de lorigine négi'oïde des Cam-
bodgiens.
Mais, dira-ton, quelle est celte race noire de laquelle sont descendus
les Cambodgiens?
Nous croyons que c'est celle des Négritos, qui jadis, devait occuper
toute cette partie du globe actuellement habitée par la race jaune.
Ici nous ne sommes pas d'accord avec les anthropologistes qui se sont
occupés de l'origine des Cambodgiens.
En efîet il existe au Cambodge, ainsi qu'on le sait, des monuments
anciens (Angkor-Thom et Angkor-N'at) qui ont été élevés par les Indous,
et certains auteurs ont conclu de là que les Cambodgiens étaient origi-
naires de rindoustan.
Telle est, en particulier, l'opinion de M. Moura ainsi (jue celle de
M. Maurel qui s'appuie en cela : 1° sur l'architecture des monuments
Khmers et surtout sur leur distribution ; 2° sur les traces évidentes de la
religion brahmanique au Cambodge; 3° sur l'écriture des inscriptions;
4° sur la signification des bas-reliefs d'Angkor-Vat, représentant l'épo-
pée du Ramayana; 5" enfin, sur une tradition très vivace au Cambodge'.
Lors de la discussion qui eut lieu, à ce sujet, à la Société d'Anthropo-
logie en 1880, Girard de Rialle objectait qu'à côté des inscriptions sans-
crites il y en avait en langue Khmère qui elle, n'est pas d'origine indienne.
* Morice. — Loc. cit., p. 143
* Mondiére. — Loc cit.
' Maurel. — Loc. cit.
364 l'.> Ji iM.KT 1906
13e plus, ajoule-t-il, il n'est pas démontré que deux peuples aient une
même origine par le seul fait qu'ils ont ou ont eu la môme architecture '.
Celle objection est parfaitement juste, croyons-nous. D'abord certains
de ces monuments, comme ceux d'Angkor-Vat, ne seraient pas très
anciens, puisqu'ils ne dateraient guère que du x" siècle; d'un autre côté
les caraclèies anthropologiques des Cambodgiens sont tout différents de
ceux des Indous.
Il est clair aussi que le pays élail dcji occupé avant l'arrivée des pre-
miers immigrants, et, comme le dit bien M. Ilarmand ^ les Indous ou
bien se sont fondus dans la masse des imligènes, ou bien ils n'ont con-
tracté aucune alliance avec ceux-ci à cause de rinslilution dos castes.
Ouaiil au tyi-e des personnages qui sont représentés sur les bas-reliefs
ou sur les ï-l.ilues, il n'est pas unifurme; il est même fort varié d'après
M. L)ela|(url('. .Ainsi, à cùté du sauvage indigène ligurenl, dit-il, l'Anna-
mite cl II' Laulien ^
On y vuil aussi des guei'riers qui ont le type que Ton appelle arifen, au
neza(|uilin et aux lèvres fines; mais l'on y remarque des tètes de Hrahma,
i|iii (Mil (les lèvn.'s épaisses, la i)uiirlic allongée et le nez large; il en est
de iiHMiie des déesses du culte brahinaniijue, les bayadères célestes. On
constate ainsi que IJralima et par suite les Brahmanes, qui sont considé-
rés comme de purs Aryens, uiit cependant les lèvres épaisses, comme
d'ailleurs un grand nombre d'Iudous de toutes les castes; mais à part
cela ils n'ont rien de mongolique, et les Cambodgiens ne peuvent pas
en être les descendants, pas plus que des Indous (}ui ont les lèvres fines.
Discussion
M. Zaborûwski. — M. Bloch qui nie la constance, la valeur héréditaire
de nos caractères de race, semble conclure de la présence au Cambodge de
caractères opposés, qu'ils ont pu passer là de l'un à l'autre, et que, par
exemple les cheveux frisés ont pu par une transmutation spontanée
y prendre la forme des cheveux mongoliques. Or la vérité est que les
Cambodgiens actuels sont un produit assez complexe. Nous savons en
particulier, pertinemment, que les introducteurs de leur civilisation sont
des Hindous. Ces civilisateurs n'ont jamais formé la majorité. Mais il est
tout naturel que certains de leurs caractères, comme les cheveux frisés,
se soient plus ou moins conservés, ou se représentent sporadiquement
dans leur intégrité.
Dans un mémoire sur l'Origine des Cambodgiens qui date de 1897 {Buliet-
* Bull. Soc. Anthr., iSSC. Etude anthropologique du peuple Khmer, parMaurel,
Discussion, p. 422.
* Harmand. — Notes de voyage en Indo-Ghine. Annales de V Extrème'Orient, t. IV,
Paris, 1879.
^ Uelaporte. — Voyage au Cambodge. L'architecture Khmer. Paris^ 1880.
cil. ItIK.ntICT. — Ulisi;i.TATS DU CONSKII. I.K ItKVIM.iN |,K l.'lM.; I,K I.A IIKUNK.N :}Oij
Suc. Anili., IHDT. p. ;{,Si, jai âôrnùlô .■xaclniieiil. I.'s (■lémonls .iiii' sont
entrés dans la lonnation de ce peuple. Et certes depuis, mes conclusions
ne sont devenues .pic plus claires et plus certaines, puis(iuc sur les monu-
ineiils (i'An,:,Mior on a relevé des inscriptions en sanscrit, :\ C(Mé de celles
en langue Klnn.'r. et puisque celle-ci, notainniciit dans son vorahulaire
religieux, est pénétrée d'éléments hindous
S.il» SEANCK. — 4 Ocldlirc 1907.
PaÉsinENCE DE M. Zaborowski.
M. Dexiker, ancien pivsiJeul ,!,- lu Société, est délégué par elle pour la re-
présenter à rina.iguration du nouveau Musée d'Elhnograpl.ie de Cologne .pii
doit avoir lieu le 12 novembre prochain.
M. le Président annoiiee que, au mois de septembre dernier, le sénat acadé-
mique de rUniversilé dAberdeen (Ecosse), à l'occasion des fêtes du 4* cente-
naire de cette Université, a décerné à M. Deniker le titre de Docteur honoraire ;
il lui adresse, au nom /le la Société, ses sincères ieli-ilalioiis.
RESULTATS DU CONSEIL DE RÉVISION DE L'ANNÉE 1905
A L ILE DE LA REUNION
et évaluation de la robusticité d-^s éléments ethniques qui forment le contingent
créole basée sur 1463 mensurations et sur lapplication du procédé Pignet.
Pau m. le I)"" Ch. Bhoouet,
Médeciu-major ûc 2" classe de rarniée colomale.
PREMIÈRE PARTIE
Etude du pays et des races gui forment le contimjent. — Résultats du conseil de
révision de la classe lOO'i. — Maladies ayant motivé l'exemption.
L'Ile de la Réunion, autrefois Bourbon, est située dans l'Océan Indien
k i-iO lieues à l'est de Ma'lagascar, à 33 lieues marines au Sud-Ouest de
l'Ile .Maurice entre 52"r)5' etr^JHOde longitude Est et 20050 et Sl^oS' de
latitude Sud. Elle a la forme .l'une conoïde à base elliptique dont l'axe
est dirigé du Sud-Est au Nord-Ouest. Le grand axe de la pointe dos (ialets
c\ la pointe Ango mesure 74 kil. 200 et le petit axe allant de Ste Suzanne.
àSt-Pierre mesure 50 kil.GOO m. Les eûtes se développent sur 207 kil.
300 et la population est d'environ 173.3 l.j habitants ; la superficie de l'île
couvre 251.100 hectares.
De nature volcanique Bourbon présente deux régions bien distinctes:
La région du littoral et la région montagneuse constituée par deux
massifs dont l'un celui du Sud est un volcan en éruption et dont l'autre
soc. d'anthhop. 1906. 26
366 4 ocToiiRE 1906
présente un point culminant do ;j.U(l!l mT-tres « Le Piton des Neiges » qui
domine les 3 cirques de Cilaos, Saluzio (.'iMafalte habités par une popu-
lation assez dense.
Les deux massifs sont reliés par un isthme de i.600 mètres d'altitude
(Plaine des Palmistes et Plaine des Cafres) qui forme une région de sites
grandioses habitée par une population importante.
Découverte, croit-on, en l'année 1513 par les Portugais, l'Ile fut ensuite
occupée par des Français établis à Madagascar. Son sol fut mis en valeur
par les premiers colons et par la Compagnie des Indes Orientales et les
nombreux esclaves tle la côte orientale d'Afrique, de Madagascar, des
Comores, qu'elle recruta pour le service de ses plantations de café, de
girofle, de cacao et de cannes à sucre (1665-1764).
En 1704 la Compagnie des Indes rétrocéda l'île au roi et son sort fut
alors lié à celui de l'île Maurice jusqu'en 1810. Prise à cette époque par
les.\nglais elle ne fut rendue à la France que le 6 avril 1815.
Après 1848 et après l'abolition de l'esclavage, les planteurs eurent
recours à la main-d'œuvre anglo-indienne qui leur donna toute satisfaction.
Depuis quelques années la convention conclue avec l'Angleterre, pour
le recrutement de ces Indous, a été rompue et l'Ile dont la situation éco-
nomicjue est critique et qui ne peut trouver chez elle les éléments de
travail nécessaire à l'exploitation totale de son sol fait sans grand
succès des tentatives de recrutement d'engagés k Madagascar, dans les
Iles Comores (Mayotte-Anjouan-Mohéli) sur la côte Est d'Afrique et jus-
qu'en Chine et au Tonkin.
En même temps que les engagés Indiens, vinrent s'établir des commer-
çants de Bombay ou d'autres villes commerciales importantes de l'Inde
qui se fixèrent dans le pays: et il n'est pas de mois où n'arrivent
d'Extrême-Orient, de Hong-Kong et des ports de la côte chinoise des
commerçants chinois qui s'implantent aussitôt dans toutes les villes et
villages de l'Ile dont ils détiennent le petit commerce.
Cet historique rapide était nécessaire pour comprendre la diversité de
peuples et de race réunis dans celte île de Bourbon.
Blancs et descendants de blancs, petit blancs retirés dans l'intérieur ou
sur certaines parties du littoral, mulâtres de teintes variées ; Arabes,
Chinois, Annamites ', Indiens (Malabars) -de Calcutta de Madras, de Pondi-
chéry, de Bombay, Cafres, Africainsde la côte deZanzibar ou de Mozam-
bique, Malgaches, Comoréens et Anjouanais, enfin fusion de toutes ces
races et métis de tous ces peuples. Hommes du littoral, impaludés ou cachec-
tiques ou montagnards robustes. Créoles de la classe aisée, Cafres athlé-
tiques, Indiens malingres', petits blancs affaiblis par le climat, le palu-
' En très potit nombre.
* Nom par lequel on désigne comniunénifint les Indiens de l'Ile de la Réunion.
3 Au sujet des Indiens le décret du 22 décembre 1898 B. 0. p. 310 relatif à l'incor-
poration de la classe 1890 dit : Les jeunes gens nés à l'Ile de la Réunion de parents
Indous introduits dans l'ile sous le régime de l'immisration et domiciliés dans la
en. UROlJL'ET. — HKSI;LTATS Ul' CONSEIL DE UÉVISION DE l.'lLE DE LA nÉLMON [Mu
disine', l.i misère, pMil-t'tro les liaisons consanguines, voilà les éléments
ethnicjues variés (lu conlingenl lléimionnais dont nous allons étudier le
degré de robusticité et les aptitudes au service militaire.
Division politiijHc et juiliciairi'. — L'Ile est divisée ou deux circonscrip-
tions électorales correspondant aux arrondissements de France pour les
élections législatives suivant les divisions naturelles de l'Ile.
Le premiei' arrondissement k du Vent » comprend les 4 cantons de
St-Denis, Ste Suzanne favec la commune deSle-Marie), St-André (avec la
commune de Salazie), St-Benoit (avec les commune duBras-Panon — de
Ste-Uose et de la plaine des Palmistes).
Le deuxième arrondissement « Sous le Vent » est formé de cinq cantons :
St Paul (avec les communes de la possession et du Port) St-Leu, (avec les
3 Bassins), Si Louis (avec les communes des Avirons et de l'Etang Salé),
St-Pierre (avec la commune de St Philippe)"-.
Le Conseil de Révision ^ tient ses séances dans les mairies des chefs-
colonie à lépoque de leur inajorilé, seront maintenus dans leur.s foj'ers jusqu'à
ratification des conventions internationalt s en cours.
* Le paludisme a fait son apparition à l'Ile delà Réunion on 1838: depuis cette époque
la malaria n'a pas cessé de servir dans l'Ile et parait menacer les blancs et descen-
dants de blancs et les autres races du littoral, qu'elle atteint dés le plus bas âge.
* V. St-1'hilippe de la Réunion dans Tour du Monde, n» 24 — 1906.
3 Règlements et décrets. — La loi militaire du l.'i juillet 1889 a élé appliquée à l'Ile
de la Réunion par une loi en date du 1"" août 189o. Le service du recrutement fut or-
ganisé dans la colonie par un décret du 2'i septembre ISO-j Les opérations du tirage
au sort eurent lieu du 10 au 27 Juin 189f3 ; celles du conseil de Révision du 20 juillet
au 20 Août 189G. Les 3 articles suivants réglementent la composition du Conseil
de Révision.
Art 7. — Le conseil de révision cantonal, institué dans la métropole par l'art. M de
la loi du Jo juillet 1887 est dans la colonie de la Réunion ainsi composé.
1* Le secrétaire général, président ;
20 Un conseiller privé, titulaire ou suppléant, de nationalité française désigné par
le gouvernement ;
3" Deux membres du conseil général autres que ceu\ élus dans lo canton ou la
révision a lieu, désignés par la commission coloniale.
4" Le commandant des troupes ou un officier désigné par lui, un officier du com-
missariat désigné [lar le gouverneur, le commandant du bureau de recrutement, un
médecin des corps de troupes désigné par le commandant supérieur des troupes ou à
son défaut, un médecin du corps de santé des colonies ou un médecin civil désignés
parle gouverneur sur la demande du commandant des troupes, assistent aux opé-
rations du conseil de révision.
Les maires ou administrateurs des communes au.vquelles appai tiennent les jeunes
gens appelés devant le conseil de révision assistent aux séances.
Ils ont le droit de présenter des observations.
Art. 8. — Le conseil de révision colonial est compose des membres du conseil de
révision cantonal auxquels sont adjoints deux antres membres du conseil général
désignés par la commission coloniale.
Art. 9. — Les opérations du conseil de révision cantonal et celles du conseil de ré-
vision colonial s'elTectueiit dans les formes et conditions déterminées par les disposi-
tions de la loi du la juillet 1889 sur les opératious du conseil de révision cantonal et
du conseil de révision départemental dans la métropole.
â68 -4 ocToHHK iy()6
lieux de cantons où se rendent aux dates indi(]ut''es, les conscrits des
diverses localités. Il est procédé ;i leur examen exactement comme dans
la métropole et conformément aux instructions sur l'aptitude physi(juc au
service militaire par un médecin rpuind le nombre des consciitscsl inl'é-
rieur Ji 100 et par deux médecins quand il est supérieur à ce nombre. Cette
visite est encore plus importante sous les tropiques qu'en France car en
plus des fatigues que nécessitent l'examen complet des liommes s'ajoutent
celles dues au climat et à la chaleur qui règne dans les salles exiguës.
Résultats du conseil de révision delà classe idOli.
Sur 484d inscrits aux tableaux de recensement de la classe 1904, 27
ont été rayés par décès ou double emploi, ce qui ramène à 1814 le chiffre
des jeunes gens sur lesquels le Conseil a été appelé à statuer. 1329 ont été
examinés et 485 ne se sont pas présentés et ont été déclarés « Bons
absents » soit 27 2 0/0. Sur les 1329, 308 ont été reconnus bons, soit
23 0 0 ; 441 ont été exemptés, soit 33 0/0; 480 ajournées, soit 36 0/0;
61 dispensés, soit 4 0/0; 39 versés dans les services auxiliaires^ soit 2 0/0.
Si nous nous reportons aux ajournés des classes 1803 et 1902 que le
conseil de cette année avait également à examiner, nous trouvons que
pour 242 ajournés de la classe 1903, 4 ont été rayés et que sur les 238
jeunes gens examinés à nouveau, 50 ont été reconnus, soit 21 0/0 ; 50
exemptés, soit 21 0/0; 123 ajournés encore, soit 51 0/0 ; 6 dispensés
soit 2 0 0; 9 classés dans les services auxiliaires, soit 3 0/0.
Pour les ajournés de 1902, sur 29 inscrits examinés à nouveau 10 ont
été reconnus bons, soit 34 0/0 ; 9 exemptés, soit 31 0/0; 10 classés dans
les services auxiliaires, soit 34 0/0 *.
De ces résultats nous ne retiendrons que la proportion considérable des
exemptions et des ajournements et nous rechercherons quelles sont les
maladies qui les ont motivés.
Le tableau ci-dessous nous éclairera tout d'abord sur les affections qui
ont rendu 441 conscrits impropres à tout service. A l'examen de ce tableau
deux chiffres attirent notre attention: ceux des colonnes 8 et 14; 71 hom-
mes sur 441 soit 160/0 étaient atteints de splénomégalie ; 175, soit 39,7 0/0
de faiblesse de constitution et dans ce terme nous avons compris les in-
suffisances de développement, les anémies profondes, la maigreur, l'infan-
tilisme, la cachexie, toutes affections qui nous ont paru relever au pre-
mier chef du paludisme, à tel point que nous pouvons dire que 246
exemptés de la classe 1904 sur 441 soit plus de 55 0/0 l'ont été pour
paludisme.
1 Tous les tableaux détaillùs donnant les résultats du Conseil ont été transmis par
le service du recrutement et par M. le Secrétaire Général du Gouvernement de la
Réunion à M. le Ministre de la Guerre; aussi croyons-nous inutile de reproduire ces
documents plutôt d'ordre administratif que médical.
CH. BROQUET. — RKSILTATS DU CONSEIL UK IlÉVlSloN DE l.'ll.E DE LA UÉUNION 369
Tableau n» I. — Maladies ayant moltv>' l'e.rrmplion.
SYSTEME
CUTANE
VISION
441
'ourcenlage.
2
0,4
4
0,9
0,4
AUDITION
0,2
0,2
D 5
1,8
1
0,2
œ ^
rOITRlNE
1
0,2
16
3J
11
1.2
ABDOMEN :
Hypertrophie
21(<)
4
71
10%
1
0,2
MEMBRES
Nombre de coDscrits
exemptés
SYSTEME
OSSEUX
13
2.0
SYSTEME NERVEUX
4
0,!)
o
o
o
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3
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o
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B
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-O
o
c4
Xi
a
•^
1
175
0,2
39,7
54
12
Cette affection inconnue jadis à l'île de la Réunion parait avoir fait son
apparition vers l'année 1868 et depuis cette époque elle ne cesse de frap-
per les habitants du littoral de l'Ile dès leur plus tendre enfance, n'épar-
gnant ni la race, ni le sexe, mais atteignant avec plus d'intensité les
l)lancs et les descendants des blancs. Depuis quelques années, la malaria a
envahi, m<iis cependant avec moins d'intensité, les hauteurs oh l'anophèle
fut signalé par Vassal à Cilaos. Le Conseil de Révision, chaque année,
étale au grand jourcette plaie qui menace le pays dans ses sources vives.
L'an dernier pour la classe 1903, sur 1 402 conscrits examinés, 603
étaient exemptés dont 215 pour faiblesse de constitution, 40 pour spléno-
mégalie ou cachexie palustre, 33 pour tuberculose pulmonaire; 242 étaient
* Sur ces 21 cas d'afTections diverses de la poitrine nous avons noié 11 cas d'asthnit
Celle maladie parait très fréquente à la Réunion.
liTO
4 OCTOHKE 1906
ajournés poui' défaut de taille ou faiblesse de constitution. .Nous avons vu
les résultats de cette année pour la classe 1904.
Les résultats du Conseil de Révision permettent aussi de se rendre
compte des localités les plus éprouvées.
On verra par le tableau ci-dessous que les communes de St Benoît et de
St Joseph sont les foyers de malaria les plus intenses; à St-Benoît sur
49 exemptés 29 l'ont été pour splénomégalie ou cachexie palustre, soit
46 0/0; à St Joseph la proportion est moindre, mais elle est encore de
22 0/0. Ces 2 localités sont aussi celles où la misère due à la crise éco-
nomique atteint son plus haut degré mais dans les autres localités le pour-
centage varie entre 8 et 15.
L'homme qui par faiblesse de constitution n'est pas reconnu apte au
service militaire ne peut pas faire un bon travailleur et l'on ne peut pas
plus exiger de travaux militaires que de travaux des champs d'organis-
mes épuisés par la malaria et atteints d'affections telles que la splénomé-
galie où la rate remplissant l'abdomen gêne la marche et empêche le
corps de se plier.
Tableau n^ IL — Exemptions dues à la splénomégalie et à la cachexie palustre.
LOCALITÉS
.2
c
B
'5
73
6
»
»
G
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cS
3
v.
o
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v:
34
1
1
1
3
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CQ
a
o
o
"-5
1/3
'5
o
c
'S
(73
3
e
'3
3
5
o
Nombre total des
exemples
49
18
50
44
6
14
84
7
1
4
441
Splénomégalie
9
1
1
11
22%
1
60
Cache.\ie palustre
1
4
»
1
15%
»
6
Splénomégalie et ra-
chexie palustre
11
Total
6
18%
23
46%
1
7%
12
77
Pourcentage %
8%
8%
14%
17%
Si le relèvement économique de l'Ile est lié à l'introduction de nouveaux
engagés indiens comme le croient des avis autorisés, il l'est certainement
CH. BROQUET. — RKSILTATS DU CONSEIL DE RKVISION DR I.'lLE liK l,A UKINIuN 371
davantag»:' aux mesures hygiéniques et sanitaires (jui si'iont prises pour
lutter contre la malaria. Depuis que le paludisme sévilà Hourljon et malgré
l'exemple si [)roljanl (|ui a <''té donné par des payscouime l'Italie et l'Amé-
rique (assainissement de Cuba) aucune lutte antim;ilaiii[ue ralionnelle n'a
encore été entreprise dans notre ancien m- colonie.
Que! que puisse être le sort de la loi sur le recrutement elle aura eu le
mérite de permettre de mettre le doigt chaque année sur la plaie qui
ronge le pays et en la montrant au grand jour et d'une manière scienli-
flque irréfutable de permettrede la combattre efticacement.
Les autres affections les plus importantes ayant motivé l'exemption
ont été les affections cardiaques (hypertrophie) chez les montagnards;
les alïections de poitrines: la tuberculose (:î. 4 0/0) l'asthme, l'épilepsie
(1,8 0/0) fréquente à tous les dges; dans les maladies relevant de la pa-
thologie externe les hydrocèles (22 cas) et les déformations des membres
pieds bots etc.. (13 cas) sont avec les altérations dentaires les affec-
tions les plus fréquemment notées. La lèpre existe dans presque toutes
les communes de l'Ile et en particulier dans celle de St-Louis. Nous de-
vons noter la rareté des affections des organes des sens.
DEUXIÈME PARTIE
Il est d'habitude dans l'armée d'évaluer le degré d'aptitude physique
des conscrits au moyen d'un certain nombre de données (taille, périmètre,
poids) qui n'ayant chacuneséparément aucune valeur absolue, permettent
par leur rapport d'évaluer la robusticité approximative des sujets. Il nous
a paru intéressant d'étudier ces divers facteurs chez les conscrits des dif-
férentes races que nous avons examinés, d'établir ensuite les rapports de
ces mensurations en établissant le coefficient de robusticité d'après la
méthode Pignst et d'essayer de déduire quelle est à l'heure actuelle, de
toutes ces races, celle qui est la plus susceptible de fournir au contingent
des hommes robustes.
Étude de la faille, du périmètre thoracique, du poids.
A. Taille. — La taille varie suivant les races, le milieu, l'état de santé
antérieur. En Europe, la taille de l'homme adulte paraît être en moyenne
de 1 m. 64 à 1 m. 65. Il était intéressant de savoir si, ;i la Réunion, nous
retrouverions ce chiffre chez les blancs et quelles seraient les tailles des
muUUres, des noirs et des Indiens. Or pour les blancs nous arrivons ii une
moyenne de 1 m 64, chez les Indiens 1 m. 6-2, chiffre indifjué par Toi)inard'
pour riude Anglaisc.Transgangétique. Pour les noirs Cafres, Topinard
donne le chiffre de 1 m. 71 alors que notre moyenne est de 1 m. 62, mais
nous avons classé parmi les noirs différentes races, Malgaches, Como-
' L'anthropologie par P. Topinard. — Reinwald, 1895, p. 330.
:r,-2 4 OCTOBRE 1U06
riens, etc.. dont le type n'est plus pur d'ailleurs. Enfin pour les mulAtres
nous trouvons le cliiffre de 1 ni. 63, intermédiaire entre celui des noirs
et celui des blancs.
Tableau n^ III. — Tailles.
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Indiens . .
10
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39
38.2%
7
6%
1.77
1.50
1.62
201
Noirs
14
42
12
6,9%
92
343
185
45%
73
253
172
36%
22
8U
73
10%
1.84
1.91
1.85
1.40
1.43
1.32
1.62
718
Bruns
5,8%
47.7%
35,3%
11%
1.63
442
Blancs ...
2,T%
420/
38,9%
16%
1.64
_.
Le même tableau nous montre que si c'est la race blanche qui fournit
le plus petit conscrit (i m. 32). c'est aussi elle qui nous donne le plus
de hautes tailles (16 0/0) et de tailles au-dessus de la moyenne (38,9 0/0),
le moins de tailles au-dessous de la moyenne (42 0/0) et de petites tailles
(2.7 0/0). Ce sont les bruns ou mulâtres qui nous fournissent le conscrit
le plus grand (1 m. 91), le plus de hautes tailles (11 0/0) après les blancs,
mais aussi, s'ils ont également après les blancs le moins de petites tailles
ce sont eux en revanche qui ont parmi ces races le plus de tailles au-des-
sous de la moyenne (47,7 0/0). Les petites tailles sont plus nombreuses
chez les noirs et surtout chez les Indiens (9 0/0) que chez les bruns et les
blancs. Les noirs et les Indiens ont également plus de tailles au-dessous
de la moyenne (43 O-'O que les blancs mais ils en ont moins que les mulâ-
tres. Pour les tailles au-dessus de la moyenne, les Indiens peuvent presque
rivaliser avec les blancs (38.2 0 0 et 38.9 0 0) mais les noirs sont mani-
festement inférieurs. Enfin pour les hautes tailles les Indiens sont infé-
rieurs aux noirs et ces deux races sont encore inférieures aux mulâtres
et surtout aux blancs.
On peut donc conclure de celte étude que la race blanche conserve
manifestement la supériorité de la taille sur les autres races de Bourbon.
CH. BHOyUET. — UKSILTATS Df CONSEIL DK UKVISION DE l'iLE DE LA MÉL'NION 373
B. — Périmètre thoraci<iw\ — Tailles et PérimtHn's.
Le périmètre thoraciqiie a été pris au moyen du ruban métrique à 2
cenlimôlres, au-dessous du mamelon. Bien que n'ayant pas une valeur
absolue cette mesure peut être considérée comme un bon élément d'ap-
préciation de la robusticité. Laveran a constaté que les jeunes gens dont
le périmètre n'atteint pas au moins 0 m. 78 pour les tailles moyennes et
les petites tailles sont rarement aptes au service militaire. On admet
également que pour les tailles inférieures à 1 m. 65 l'aptitude au ser-
militaire est conciliable avec une circonférence égale ou peu inférieure
à la demi taille. Pour les tailles supérieures à 1 m. 65 le périmètre tho-
racique peut rester de plusieurs centimètres au dessous de la demi-taille
sans que l'inaptitude soit ix'elle. Chez les sujets bien constitués le péri-
mètre thoracique est supéineur à la demi taille de deux h six centimètres.
Nous voyons que: si nous appliquons ces données au contingent créole:
pour les tailles inférieures à 1 m. 65 si chez les Indiens la différence entre
la demi-taille et le périmètre trouvé est assez importante ( — 4)elle est insi-
gnifiante chez les noirs et les bruns et nulle chez les blancs.
Pour les tailles supérieures à 1 m. 65 la dilTérence est importante chez
les Indiens ( — 10) et diminue ensuite du noir au blanc (de —6 à — 5).
Ici encore, les mensurations nous font constater chez les Indiens une
insuffisance de robusticité et dans les autres races des rapports conformes
aux règles établies et une aplitude moyenne suffisante pour le service
militaire si l'on ne tenait compte que de ces seules données.
Tableau n" I\'. — Tailles et périmètres.
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Moyenne des tailles
inférieures ou égales
à 1 m. 63
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c = =
Moyenne des
péiimélres corres-
pondant à ces tailles
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Indiens . .
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Blancs .. .
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79
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79
79
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4 OCTiiHUK 1906
Tailles inférieiwes à i^65.
Ko porimi'tro doit i-lro égal ou peu inréi-ieur à la (Icini-laille.
RACES
Taillo
Doini-taille
IVriinèlre
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Indiens
1"'58
1.58
1.58
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79
79
79
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78
79
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Noirs
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Mriins
— 1
Blancs
0
Tailles supérieures à i'^65.
Le périmètre peut rester de plusieurs centimètres au-dessous de la demi-taille.
Indiens
1.68
1.68
1.68
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84
84
84
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79
—10
Noirs ■
— 6
Bruns
— 5
Blancs
- 5
C. — Poids.
Si le poids n'aura jamais, lui, non plus une valeur absolue et mathéma-
tique pour l'appréciation de l'aptitude militaire (Duponchel), il constitue
l'une des données les plus importantes. Lemoine ' dans un article auquel
nous engageons le lecteur à se reporter, a bien étudié les rapports du
poids et de la taille pour l'appréciation de la robusticité.
Le minimum du poids exigé dans les armées étrangères pour un
homme de 18 à 20 ans qui a la taille la moins élevée de l'aptitude mili-
taire varie de 62 à 56 kilos. Vallin estime que le poids minimum en France
pour un homme de 1 m. 54 peut être abaissé à 50 kilos, et pour
un homme de 1 m. 64 à 54 kilos. Les différents auteurs qui se sont
occupés de la question sont d'avis différents: pour une taillle de 1 m. 65
Vallin donne comme poids minimum 56 kil. 7, Morache60, Duponchel 55
(poids minimum] ou 60 (poids moyen), Tartières 58 (poids moyen).
D'une manière générale on peut estimer que chez les hommes qui ont
une taille de 1 m, 60 à 4 m. 65 le poids est représenté en moyenne par
' Caducée, 19 mars 1904.
CH. IIRiiijLKT. — IU:>I I.TATS 1)1 (:ilN>Kll, DK IIKVI>|IIN DE 1,'ll.K l)K I.A UKl'NION 375
autant de kilos ([ue la taille a •!»• oeiiliini''tres au dessus d'un niôlre.
Chez les hommes qui ont une taille de 1 m rjl à I m. (>0 ont trouve en
général le chilîre des kilos supérieur ;i celui des centimètres. Chez les
hommes qui ont l m. 65 de taille et au-dessus le chiiïre des kilos est sou-
vent inférieur au chiiïre de centimt''lres.
En appliquant ces données au contingent créole nous remarquons la
faiblesse du poids dans les races: 07 Indiens sur 102 n'atteignent pas 50
kilos, 31 seulement ont un poids de 50 à 64 kilos et l'on observe un poids
minimum de 35.3. Enlin la moyenne des poids est de 48 kilos 33 alors
que la moyenne des tailles est de i m. Vrl. Ce chiiïre de 48 kilos 33 est
d'ailleurs sensiblement le même que celui cité par Topinard pour les In-
diens de caste inférieure (48.7).
Pour les autres races du contingent créole nous trouvons des poids
inférieurs à ce qu'ils devraient être dans un pays salubre et sur des types
purs mais nous constatons encore la supériorité de robuslicité de la 'race
blanche. Le nombre de poids au-dessous de 50 kilos n'est que de 25 0/0
alors que pour les noirs et les mul;\lres il est de 36.80/0 et 35,4 0/0. La
moyenne des poids pour une taille de i">G4 n'est, il est vrai, que de 53 kil. 5
alors qu'en France elle devrait être d'après le tableau de Lemoine de
54 kilos (poids minimum de Vallin) à 64 kilos (poids fort de Tarliôres).
Pour les noirs et les mûlAtres la différence est encore plus sensible
comme on le voit dans le tableau n° 5 ci-joint.
Cette donnée est importante en l'espèce car elle paraît bien en rapport
avec l'état d'insalubrité actuel du pays, avec l'état de misère des habi-
tants de la plupart des localités, et avec la lutte qu'ils soutiennent contre
la maladie. Il eut été intéressant d'avoir des données semblables sur l'état-
de robusticité des créoles avant 4868 c'est-à-dire avant la date d'invasion
du paludisme dans l'ile.
Comme nous allons le voir en parlant du coefficient Pignet, ces chiffres
inférieurs de poids en abaissant la valeur du coefficient ont motivé un
grand nombre d'ajournements pour faiblesse de constitution. Si le contint
gent créole était assimilé aux troupes Indigènes dont l'éfiuijtenient est
tout dillérend de celui des troupes métropolitaines il y aurait peut-être
lieu de se demander si quelques restrictions ne pourraient pas être appor-
tées aux règles qui président à leur recrutement, mais dans l'élat actuel des
choses le contingent créole étant assimilé aux troupes métropolitaines
malgré les différents cléments qui le composent, et ces éléments ayant à
supporter l'équipement et les mômes fatigues que le fantassin de France
avec en plus celles inhérentes au climat des tropiques, le médecin du
Conseil de Révision doit appliquer dans toute sa rigueur le règlement
sur l'aptitude physique au service militaire dans la métropole'.
' Les Indiens, les noirs, la plii|).Trl des conscrits mulâtres et blancs sont habitués
à vivre cUtz eux pieds nus. \oliis de costumes li-f^ers ib; loile ou de coutil. Malgré
leur apparence malingre confirmée parla mensuration, quel(|ues-uns d'entre eux sont
d'excellents marcheurs cl grimpeurs et portent des poids considérables sur leur tête
376
4 OCTOBRE l'JOO
ÏADLEXr N-o V. — Poids.
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Blancs. . .
25%
311
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31%
53\5759
TROISIEME PARTIE
Le coefficient de robusticité Pignet appliqué au contingent créole.
On appelle coefficient de robusticité un procédé imaginé par M. le
médecin-major Pignet, pour déterminer par un chiffre obtenu d'une façon
presque mathématique le degré de robusticité des jeunes conscrits. Ce
procédé utile dans les conseils de révision peut être appliqué dans toute
autre circonstance.
Des diverses mensurations, taille, périmètre thoracique, poids, que
nous avons passés en revue, nous avons vu qu'aucune n'a de valeur
absolue, mais si on les combine et si on les rapproche toutes les unes
des autres on arrive à établir un rapport qui a une signification réelle.
C'est ce qu'a fait M. Pignet. En additionnant le poids et le périmètre
et en soustrayant ce total de la la taille exprimée en centimètres il obtient
un indice numérique qui représente la force de constitution du sujet
examiné.
Taille — (périmètre + poids) = Indice numérique.
en gravissant des pentes abruptes, mais quand du jour au lendemain on les habille
de la capote du fantassin, qu'on leur met de lourds souliers aux pieds, et un sac de
plus de 20 kilos sur le dos, ces hommes deviennent incapables de produire les efforts
qu'ils produisaient avant leur incorporation. Si on les laissait faire ils retireraient
souvent leurs souliers et leurs lourds vêtements et nous les avons vus gravir des
pentes en mettant leur sac sur leur tète.
CH. BROgUET. — lŒSlLTATS DV. CÛNSEII. 1)E lu';VI>IO.\ IiK l.'lI.K DE I.A UKl'NION 377
Plus cet indice sera petit plus le sujet sora foit, plus au contraire il sera
grand et plus la constitution du sujet sera faible.
Le rapport entre le coellicient et lu constiluliuii r>l ainsi (Habli :
Coefficients Ci institution
0 — 10 tri's forte.
11 — 15 forte.
16 — 20 bonne.
20 — 25 iiioyenno.
25 — 30 f.iil.l.'.
30 — 35 Irùs faible.
supérieur à 35 très médiocre,
Le D' Butza', médecin chef de l'hôpital militaire de Bucarest d'après 816
observations, estime que l'on a par le procédé de M. Pii,'net le « critérium »
delà constitution de l'hoinme surtout pour les douteux; il ajourne tous les
jeunes conscrits dont l'indice numérique est supérieur à 23 et il exempte
ceux qui présentent des maladies ou inûrmités incompatibles avec le ser-
vice militaire.
Lemoine *, qui a établi l'indice numérique de près de 500 tuberculeux
et de 200 hommes non tuberculeux conseille de suivre cette règle et
d'ajourner ou de rejeter de l'armée les hommes présentant des indices
supérieurs à 22 et à 25 « sans cependant jamais établir une règle à ce
sujet et une limite réglementaire, un des éléments de la formule étant
trop sujet à des variations individuelles de la part de l'observateur ».
Comme nous n'avions pas à la Réunion la table à calculer de Pignet et
que sans elle la recherche du coefficient exige plus de temps que l'on ne
peut en disposer dans un conseil de révision, nous avons procédé à l'exa-
men de 4,463 conscrits créoles en nous basant uniquement sur les men-
surations ordinaires et sur tous les signes physiques de l'aptitude au
service militaire, signes très suffisants pour le classement des hommes
s'ils sont recherchés avec le plus grand soin par des médecins ayant la
pratique des conseils de révision. Nous avons plus tard établi les indices
numériques et nous avons recherché si les coeiïicients établis suivant la
méthode Pignet concordaient bien avec le résultat auquel nous étions
arrivé par les autres méthodes.
1° Par l'étude de ce tableau n° 6 on constate que 311 conscrits seule-
ment sur 253 présentent un coefficient inférieur ;i 25 tandis que 1.152
c'est-a-dire trois fois plus ont une valeur numérique supérieure à 25.
Tandis que dans les séries de Butza le chilîre le plus élevé des conscrits
correspond aux valeurs numériques de 16 à 25 et diminue pour les valeurs
supérieures a ce chiffre dans le contingent créole nous voyons au con-
traire que le nombre des conscrits croît avec la valeur de l'indice numé-
' Butza. - Revue sanilaria Mil. Bucarest, avril et mai 1902. Caducée, G mai 1905.
* Caducée. 19 mars 1904, p. 77.
378
•i (.CTOHIU-. 1906
rique ol tandis (|iie 281 (78 -\- 203) conscrits seulement uni un indice de
ir» à 25, 858 (358 -f- 500] ont un indice supérieur h. 30 et dépassant
même 35.
Tauleat n" VI, — Tableau général des divers coefficients des jeunes gens
de la classe i'J05
lie df la liéunion. (Conseil rie révision 1903),
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»
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»
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faible
»
190
19%
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»
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très faible
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14
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»
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»
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27
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228
15
1.463
»
»
»
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»
442
»
23%
476
1.4
600
53
1.46
3
63
Cependant 204 créoles de couleur seulement sur 1,021 soit 19.9 0/0
ont un indice numérique supérieur ou égal à 25 tandis que 107 créoles
blancs sur 442 soit 23.7 0/0 présentent le même indice. Il y a donc là
encore malgré la grande faiblesse totale du contingent une supériorité
marquée en faveur des blancs.
On voit que le plus grand chiffre de « Bons )i (97) correspond au coef-
ficient moyen et que les chiffres des exemptés et des ajournés augmen-
tent avec la valeur du coefficient ce qui est bien conforme à la régie de
Pignet.
Toutefois en tenant compte de certains détails de races nous avons
reconnu bons 180 conscrits dont les coefficients dépassaient 25 et cepen-
dant le nombre total des « Bons » n'a pas dépassé le chiffre de 334 c'est-
à-dire de 23 0/0.
CH. BROQUET, — HÉSL'LTATS DU CONSEII, 1)K HKVISION l>K 1,'lLi: DK I.A HKUNIoN
Taui.eau n" \ll. — (coefficients.
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154
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293
29
442
Blancs
59,5
2
31,42
111
139
180
12
2° Ce tableau n° 7 nous montre que la moyenne des valeurs numéri-
ques n'a pas été inférieure à 31.42 et que par ordre croissant elle s'est
élevée de ce chiffre à ceux de 32.04 chez les créoles bruns, 33.6 chez les
noirs, 44.6 chez les Indiens...
Le nombre des « Bons » s'est élevé de 11 chez les Indiens à 54 chez les
noirs, 154 chez les bruns, 111 chez les blancs.
Ta h
JLEAU no VIII.
— Tableau
général.
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25,1%
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40,7%
12
2,7%
30 Enfin ce tableau résumé de tous les autres nous permet déjuger d'un
380
4 OCTOBllK l'.lOCt
CMii|> (l'ii'il la valeur du contingent créole. Malgré ce que nous avons vu
plus haut lie l'indice numérique des blancs, on voit que le pourcentage
des (( Bons » a été de 28.3 0 0 chez les noirs alors qu'il n'était (jue de
:2.").l chez les blancs. Cela tient à ce que nous n'avons pas appliqué à la
lettre les données du coefficient Pignet.
Si nous nous étions servi des tables à compter de Pignet nous aurions
vu (jue le coefficient qui résume et confirme toute les autres données
taille — périmètre — poids établit que jusqu'à présent, dans le contingent
créole, ce sont les conscrits blancs qui offrent les meilleures garanties d'ap-
titude physiq\ie au service militaire.
4" Si nous examinons maintenant les résultats du Conseil dans les
diverses localités nous voyons que le chifïre des « Bons » a varié depuis
32 0 0 chiffre maximum obtenu à Saint-Leu jusqu'à 17 0/0 minimum de
Sainte-Suzanne. Voici ces chiffres dans l'ordre décroissant :
Saint-Leu 32 0/0
Saint-Louis 28 0/0
Saint-André 25 0/0
Saint-Benoit / on a /a
Saint-l'icrre i ^»- ^2 0/0
Saint-Paul
Saint-Joseph. . .
Saint-Denis. , . .
Sainte-Suzanne.
21 0/0
19 0/0
18 0/0
17 0/0
Les hauteurs de Saint-Leu, les localités « Trois-Bassins » et des « Coli-
maçons y) jouissent en effet d'un climat salubre et c'est dans le canton de
Saint-Louis que se trouvent la commune de « l'Entre-Deux » et le Cirque de
Cilaos avec son climat merveilleux et ses eaux thermales réputées comme
les meilleurs de l'ile, qui font de cet endroit le meilleur sanatorium de la
mer des Indes.
De plus ces localités, aussi bien celles du littoral que celles des hauteurs
ont joui jusqu'à maintenant d'une certaine prospérité. Il n'y a donc pas
lieu de s'étonner de rencontrer dans ces régions les conscrits les plus
vigoureux tandis que les plus faibles viendront des endroits de l'Ile ou la
misère et les maladies offriront le plus d'intensité.
5° Maladies et coefficients. — Dans les rapports des maladies et des coeffi-
cients nous nous sommes borné à l'étude de la « splenomégalie », de la
tuberculose et des affections pulmonaires, de la cachexie palustre et d'un
cas de lèpre.
Dans ces affections nous voyons par le tableau n° 10 ci-dessous que les
moyennes des valeurs numériques sont très élevées 35.5 pour la tuber-
culose et les affections pulmonaires suspectes, 39.9 pour la cachexie
palustre, 39 pour la lèpre et enfin 41 pour les 74 cas de splenomégalie.
Ici encore l'indice numérique est bien en rapport avec la faiblesse des
organismes et ne fait que confirmer le résultat de la pesée qui seule
aurait pu suffire à affirmer l'inaptitude de ces conscrits au service mili-
taire. La moyenne du poids est en effet de 45 kilos pour la cachexie
palustre (21 cas), 48 kilos pour la lèpre (1 cas) 49 kilos pour la splenomé-
galie (74 cas) et 51 kilos pour la tuberculose pulmonaire et les affections
pulmonaires suspectes.
cil. ItUdijIKT. — HKSlf.TATS Df CONSEIL DE UKVISIoN DE l.'ll.K DE l.A UKINKt.N 381
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T.MiLKAi; 11" IX. — Maladifs i-l (Jne/ficients.
.MALAKIKS
Splénomé^'alie.
Tuberculose pulmonaire. .
Imminence de tuberculose.
Mronchite rhriniique f
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48''
CONCLUSIONS
1° L'élude de la valeur physique du contingent créole permet de
constater que les conscrits, descendants de la race blanche établie à l'Ile
de la Réunion ne présentent plus les mêmes qualités de robusticité que
leurs frères de la métropole. — Les principaux facteurs de cette déchéance
paraissent être le climat et la malaria.
Toutefois il résulte de nos recherches que la race blanche à Bourbon
maintient sa supériorité physique sur les autres races de l'Ile et sur les
métis.
2° En établissant chaque année la robusticité exacte du contingent par
le procédé Pignet, qui peut être considéré comme le « critérium » de la
constitution de l'homme, le Conseil de Révision donnera des renseigne-
ments utiles sur la robusticité des diverses races et sur l'état de la santé
publique à l'Ile de la Réunion.
Il mesurera d'année en année les réactions anthropologiques de la race
blanche vis-à-vis de ce milieu si différent de son pays d'origine et servira
à résoudre le difficile problème de l'acclimatement de la race blanche sous
les tropiques.
Discussion.
M. AvELoT. — Les chiffres donnés par M. le D"" Broquet sont fort inté-
SIFFRE. — «APPORT DE r.'os ET DE I.A DENT 385
ressauts, mais il serait iiiij)rii(lent, je crois, d'acconier la in<Mn<' valeur
aux diirérentes moyennes ressortissant à chacun des groupes ethniques
envisagés. 11 y a lieu en effet détenir compte des dilTérences. d'ailleurs
encore mal connues, qu'ollre dans chatjue race le procexsns de l'évolution.
Le noir est complètement formé à l'Age de 21 ans, et les moyennes de
taille et de périmètre thoracique des « appelés « nègres de la Réunion
représentent bien, eu égard au grand nombre des mensurations, la taille
moyenne et le périmètre thoraei(iue moyen delà population noire mascu-
line adulte de l'île. Il n'en est pas de même pour le blanc, dont le parfait
développement n'est atteint qu'à l'Age de 30 ans. J'ai constaté chez cer-
tains sujets, pendant la seule durée du service militaire, un accroissement
de taille de 2 centimètres, un accroissement de périmètre thoracique de
10 centimètres. Je sais que le créole est plus précoce que l'Européen.
Néanmoins il me semble que les moyennes des mensurations prises sur les
conscrits de race blanche de la Réunion doivent être inférieures à cellesde
l'ensemble de la population blanche masculine adulte de l'île, surtout en
ce qui concerne le périmètre thoracique.
Dans l'armée, le périmètre thoracique est mesuré au-dessous des ma-
melons, à l'inspiration et à l'expiration.
MM. Coi.LiGNON et Anthony prennent également In parole.
RAPPORT DE L'OS ET DE LA DENT
A propos d une mandibule de gorille fracturée au moment de la formation
de la 3° molaire.
Pau le !> Siffre.
(irAce à l'amabilité de mon savant collègue, Monsieur le professeur
Manouvrier, t'ai l'honneur de vous présenter une observation concernant
une mandibule de gorille inAle appartenant au musée du laboratoire
d'anthropologie de l'école des Hautes-Ktudes.
Cette pièce osseuse nous oiïre un intéressant sujet de démonstration des
rapports entre le tissu dentaire et le tissu osseux, et particulièrement, la
déiTionstration de l'influence qu'un état pathologique de ce dernier peut
avoir sur le premier.
Il s'agit d'une fracture de la mandibule et d'un changement dans la
forme de la 3« molaire gauche inférieure.
Bien que l'on puisse commettre une erreur en diagnostiquant une
lésion, par les signes que la guérison a laissés sur une piè:e osseuse, on
est, je crois, dans la vérité, quand on dit que cette mandibule a été frac-
turée, que la facture s'est bien consolidée, et que, si l'on constate quelque
différence entre les deux côtés, le côté sain et le côté fracturé, on est
386
4 tiCluHHK l'.)(J(j
aussi dans la vériU- oi\ iiieltanl la tlilTérence sur le cumplo de celle frac-
ture et de toutes ses conséquences.
Je pense que le sujet a été frappé en parfait état de santé, dans un point
très limité de son individu — l'angle gauche de la ni;\choire inférieure —
et que la lésion comme les conséquences de celte lésion sont d'ordre pu-
rement mécanique. Nous verrons pourquoi plus lard.
Cette mandibule pèse 410 grammes. Elle a perdu les 4 incisives trop à
l'aise dans leur loge alvéolaire séchée. Nous constatons qu'au point de vue
de la constitution, le coté droit, denture et os, est absolument normal.
Toutes les dents sont présentes, normales, tant par la forme que par
la constitution.
J'insiste sur ce fait: toutes les molaires sont parfaites, et point n"est
possible d'y découvrir la trace d'un arrêt de développement correspon-
dant à un trouble de la nutrition, érosion, dyslropliie, elc, démontrant
qu'elles aient eu à subir l'inlluence liypolrophiante d'un état pathologique
général du sujet, acquis ou héréditaire.
Fif/. 1. — Cùlcs G et D montrant les- rn|ipnr.s do la 8" avec l<i bradclic nionlaiiti
D, cù'.o ^'aiiihc; G, cùlo droit ; 8, Ji" mol. ; 7, ii" mol. ; 0, 1" mol. ; 5, 2" bic sp.
A gauche, les dents sont aussi bien normales,, jusqu'à la T" molaire,
bien que celle-ci soit fracturée. {Fig. 1. G G.)
Ldi i" molaire manque. La 3" molaire est différente de sa' synonyme
droite, et bien qu'elle aussi, comme toutes les autres dents, gauchps et
droite;^, nep orte [as de signes d'hypolrophic, imputables h un état patho-
logique général, arrêtant le développement de l'individu et aussi de fcs
df.'uts, celte 3« molaire présente cependant les traces indéniables d'un
trouble survenu au cours de sa formation, et quoique l'action pertuba-
Irice n'ait pas été très prolongée, elle a été néanmoins assez puissante
pour transformer la couronne de celte molaire.
Cette transfcrm.ilion très particulière et très intéressante, je n'hésite pas
à la rattachera l'influence d'une lésion d'ordre traumatique, à une frac-
ture, dont nous allons rechercher les autres signes sur la mandibule.
Nous reviendrons en détail sur l'histoire de cotte 3" molaire, après
l'examen du tissu osseux.
Ce coté gauche de la mandibule présente au niveau de la jonction du
corps avec la branche montante la trace d'une cicatrice osseuse ancienne.
SIKFRE. — HAI'I'OIIT liK \.'n> VA liK LA DKM
n87
fig 2. — Montrant les npports des brandies inont.intfs. C, D, côte sain; C, G,
côlè traumatisé; F. croie de consolidation; E, éclinnrriirc ou la branche semble
passer sur la face externe du corps de l'os.
Sur la face externe de la hraiichc, dans un trajel allant de l'angle
de la mâchoire à l'angle formé par le bord alvéolaire et l'apophyse coro-
noïde. existe une ligne ondulée accompagnée par une crête osseuse qui
part d'une échancrure formée elle-même par la brisure de la ligne du
bord inférieur du corps de l'os et de la branche montante. Celte crête se
perd un peu avant d'atteindre la base de l'apophyse coronoïde.
Les rapports du corps et de la branche semblent être, au niveau de
l'échancrure, comme si la branche était appliquée sur le corps et non
point comme lui faisant suite ; ce que l'on peut constater sur le côté droit
de la mandibule.
fig. 3_ _ Bord postérieur do la liranolie. G, ■gauche; D, droite; c, c, c, insertions
musculaires.
388 4 OCTOBRE 1900
Sur la face interne de la branche existe aussi une ligne, correspondant
a la crête externe, simulant la loge d'un organe voisin que ne porte point
la face interne de la branche droite.
Vue |>ar la partie postérieure, c'est-à-dire par le bord postérieur des
branches montantes, on constate que le condyle gauche est moins large
que le droit. Il est aussi plus épais, et plus empAté à son col. {Fig. .?).
Ce bord postérieur, qui du col du condyle à l'angle de la mandibule
porte ses crêtes d'insertions musculaires, diffère à gauche de celui de
droite : d'abord il est vertical et une ligne passant au centre du condyle
passerait aussi par l'angle. A droite, une môme ligne verticale passant au
centre du condyle passerait îi plus d'un centimètre et demi en dedans de
l'angle mandibulaire.
C'est qu'en effet, à droite, la branche est oblique en dehors, la face
externe regarde en haut; à gauche, elle est verticale.
La hauteur de ce bord postérieur, du condyle à l'angle, est beaucoup
moindre h gauche qu'à droite, un centimètre.
Ce même bord postérieur porte des crêtes d'insertion s musculaires qui sont,
à gauche, un peu plus épaisses mais moins nombreuses qu'à droite (Fig. 3
c. c. c).
L'apophyse coronoïde est plus en arrière et l'échancrure plus creusée à
gauche qu'à droite.
Je pourrais ajouter bien d'autres signes; mais j'estime qu'il est suffi-
samment démontré, par ceux que nous venons de constater que la man-
dibule « a subi » une lésion et ses conséquences perturbatrices. Celte
lésion unilatérale, localisée h l'angle gauche, a été de courte durée. Elle
résulte très vraisemblablement d'un traumatisme qui a dû produire une
fracture incomplète de la mandibule. Si l'on peut constater des modifica-
tions pouvant être produites par dyslrophieelhypotrophie ostéo-dentaire,
elles ne peuvent pas être rattachées à un état pathologique général du
sujet, acquis ou héréditaire, dont nous constaterions sur la mandibule
en question une manifestation localisée.
Il n'y a, sur aucun point osseux ni sur aucune dent, la signature d'un
trouble de la nutrition.
Seule la 3^ molaire gauche porte sur sa couronne une partie transformée,
et cette transformation précise exactement le moment et la durée de l'action
perturbatrice et en donne si ligoureusement le début et la fin, que nous pou-
vons dire que le traumatisme s'est produit au moment de la formation de la
partie coronaire postérieure, puisque les trois cuspides seules, formant cette
partie de la couronne, sont distrophiées, et que les conséquences de ce trau-
matisme avaient cessé quand la racine a commencé à se former, puisque
nous constatons que la racine postérieure, c'est-à-dire celle qui tire son
origine des trois cuspides distrophiées, est, au point de vue du dévelop-
pement et de la struclure, absolument normale. Nous reviendrons en
détail sur tout ceci.
La 3« molaire droite, que nous tenons pour normale et qui l'est réelle-
ment, présçftte une couronne presque rectangulaire dont le diamètre meso-
^I^■1•■I1K. — ItAI'lMiin DE \. t\> El liE I, \ DENT
■AH[)
distant lie la face IritiiiMnlo est de 0,017 ; ce iinhiic diaiin'liv ineso diSlant
au collet fHantdi) 0,01(i; le diaim'^lre linirnal-jui^al de 0,01.") aux cuspides
antérieures et 0,013 aux cuspides postérieures. Elle porte nettement 5 cus-
pides, 3 externes, -2 internes; sauf la cuspide antéro-interne qui a con-
servé sa fMiinto adamantine, les quatre auti-es ont l'ivoire découvert par
usage. Le périmètre de sa couronne est de 0,0.ji, son [ oids ogr. 2. (Fig. 'i)
Fig. 4. — Vue, Face Uiluraiitr. D, (liuile;G, g.uiclie. c, c, apoph. coronoïJ*»;
8-8, 3«s gr. molaires. 7, 2« gr. mol. droite. G, l'" gr. mol. gauche.
La 3® molaire gauche présente une forme presque circulaire. Le dia-
mètre meso-distant de sa face triturante a 14 millimètres, il n'a que 13 au
collet. Le périnètrede la couronne a 48 millimètres.
Le diamètre meso-distant est à peu près de même longueur que le
diamètre lingual-jugal. Cette 3° molaire pèse 4 gr. 5, soit 0 gr. 5 de moins
que la droite.
Cette dent porte aussi 5 cuspides, mais disposées différemment que
celles de la synonyme: elle ii en etlet deux cuspides antérieures, corres-
pondant à la racine mesiale; immédiatement en arrière de ces deux cus-
pides deux autres plus petites légèrement écartées l'une de l'autre et
correspondant à la racine distale, et enfin entre ces deux dernières cuspi-
des une 5® de même taille qu'elles.
Dans la dent droite, c'est-à-dire la normale, les cuspitles forment (3 en
dehors et 2 en dedans) 2 lignes presque parallèles; dans la dent gauche,
la dent anormale, les 3 cuspides externes forment une ligne coui'be dont
la concavité regarde la concavité d'une ligne courbe formée par les deux
cuspides internes.
Dans la dent droite les cuspides distales au nombre de deux sont
parallèles au diamètre transverse de la dent et elles forment avec les
autres cuspides, soit les l»"" et 2" externes, soit avec rantero-interne, un
angle droit.
Dans la dent gauche on peut dire rju'il y a 2 plans de cuspides, un
antérieur et un postérieur, l'antérieur formé des 2 cuspides interne et
externe et le postérieur formé par la 2" interne et la 2" et 3" externes. En
somme la 3° cuspide externe est logée entre les 2*^' interne et externe.
Elle esl fiisi(mn(''e entre ops deux cuspides, réalisant, par suite du IrouJjle
jt'té p:u" le trauinatisine au moment de leur formation, ce (jue nous voyons
sur l)eaucoup df molaires humaines : amoindriss<'menl de la partie ullra-
distale amenant en (in de compte la disparition de la dernière cuspide
ap[)ai-uc, la 3" extei"ne (chez l'homme et chez l'anthropoïde), et ramenant
par ce procédé logique, mais inverse du procédé ordinaire de mullicus-
pidisation, la dent à 4, puis à 3 cuspides, prévues et indiquées par
(iaudry.
En somme une dent ào cuspides est Irouhlée pendant qu'elle groupe
et fabrique sa couronne. Ce trouble se traduit par une diminution de
volume et conséquemment de disposition de ses cuspides en formation;
ce sont les dernières venues qui subissent les conséquences du choc dans
le cas présent, parce que les 2 cuspides antérieures étaient déjà for-
mées et groupées. Nous en avons une démonstration évidente en compa-
rant les dents 3^* molaires, portées par cette mandibule de gorille. Cette
mandibule traumatisée évidemment nous donne donc des documents très
utiles en odontologie et en anthropologie.
Ce traumatisme, qui a dû être violent, a chassé la 2° molaire dont le
souvenir semble être conservé seulement par un infundibulum confluent
à l'alvéole de la racine postérieure de la 1'''* molaire, cet infundibulum
ayant dû contenir un débris radiculaire fracturé lors du traumatisme.
La première grosse molaire a été fracturée et la face triturante est
constituée par une table d'ivoire brun foncé, lisse, qui va obliquement en
arrière et en dedans, de la moitié de la f^ cuspide externe au collet de la
2° cuspide interne.
L'absence de la 2« molaire, la fracture de la f", démontrent péremp-
toirement que nous somm!!s bien en présence d'un traumatisme. Et
comme d'autre part, du coté traumatisé, une dent, la 3° molaire, est
dilTorine, nous en j)ouvons déduire que ce traumatisme s'est produit pen-
dant la confection de celte dent, puisque les mêmes éléments de droite
sont parfaitement normaux.
La position de cette troisième molaire gauche est telle que l'apophyse
coronoïde passe à plus de 5 niillim, en arrière d'elle. La position de la
3^ molaire droite est telle que cette apophyse passe entre la 2^ et la 3^ cus-
pide externe. Comme ce n'est pas l'apophyse qui a bougé, on doit en
déduire que la dent gauche s'est avancée ; cela est vrai, car l'espace
occupé jadis par la 2° grosse molaire gauche n'est plus que de 6 millim.
La même dent à droite a 10 millim. de diamètre.
On a prétendu qu'un vide existant en avant d'une dent, celle-ci s'in-
clinait dans le vide et transportait ainsi sa face distale au lieu et place de
sa face triturante, d'où l'impossibilité de résister longtemps aux elïorts de
la mastication dans cette position, et nécessité de disparaître précoce-
ment; j'ai prouvé que cela n'était pas exact chez l'homme, la mandibule
de ce gorille prouve que cela n'est pas exact non plus chez le singe, car
la dent, 3« molaire gauche, est bien droite et l'image est manifestement
SIKKHK. — IIAl'I'iiUT DE I. ns Kl HK I.a DKNT
:v.)i
indiquée par les cupules d'ivoire (|ui uni succède ;iux cuspides d'émail
usées.
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Fig. '>. — liaciiics iJi's 3' iiio!. gaiiclie et droilo. — .1. Droile; H. (i.iucho; IIA. lliic.
iiiiléritHire ; lU'. U.ic. poslôiiouro ; CliA. Coupe dclarac. aiilérieurc;
<'J{P. Coupe (\c la rue. pnslérionre.
La forme des racines est bien intéressante. I^a racine antérieure plate
d'avant en arrière, de forme et de volume presque identiques dans les
deux dents, continue la forme et le volume normaux de la [lartie normale
de la couronne, c'est-;\-dirc les deux cuspides antérieures, et nous savons
qu'à gauche o* 'i droile la 3" molaire est normale dans cette partie coro-
naire; il élait logique qui; la paitie radiculaire le fiU aussi, puisque rien
n'est venu entraver la formation.
La racine antérieure de la fient droite a li millim <1<; contour, celle de
la dent gauche 13 millim. 1 :2, et toutes deux du collet à l'apex 20 millim.
La racine [)Ostérieure offre des diiïérences à gauche, logii|ueiiient en
rapport avec la partie de la courorme déjà dilférente: la postérieure.
Sur la droite, nous voyons la racine alfenter l;i furine triangulaire résul-
tant de l'arrangement coronaire des 3 cuspides poslérieure.«, 2" et
3« externes, 2^ interne, et plus parliculièi'emenl triangulaiie pai- la posi-
tion ullra-distale de la 3" cuspide externe qui ('..nne justement le sommet
du triangle radiculaire dont la hase est fm-ini'i' par le- ^"^ cn.^pides
externe et interne.
A gauche, se ressentant du gr.)upement cu^pidien posténcin', la racine
formée parla sui4,e, des cuspides 2« et 3" externes et -^ inicrne alli-cle une
forme plate d'avant en arrière, semblable ;V la rac ne anl»'-! iciire et pres-
que aussi volumineuse, car si elle est moins larse, elle est pln^ épaisse.
Celte racine est bien en rapport avec les cuspides postérieures groupées
presque transversilcmciil. presquesur une ligne linguale-jugale, comme le
grand diamèlre de celte racine postéi-ieure est lingual-jugal, aloi's que
normalement, dans toute> les 3"^ molaires inférieures des anthropoïdes et
dos gorilles en particulier, le grand iliamètre de (;"llc racine postérieure
est meso-dislal comiue le groupe de cuspides posU'i ieures.
31)2 -i «•ciitiim; li>Or.
En résuiiii', nous pouvons tirer de cette observation les déductions sui-
vantes :
A. — In traunialisino survenant pendant la formation des cuspides
adamantines d'une dent détermine une h^'polrophie et conséquemment
une transformation dans le i^roupement des cus|)ides, l'ensemble de ces
perturbations réalisant un amoindrissement de la partie ayant eu à
souffrir du traumatisme.
H. — L'hypotrophie cesse quand les conséquences du traumatisme
cessent elles-mêmes et l'organe, primitivement amoindri, reprend, dans
l'état ultérieur normal, sa formation normale.
il. — Mais si la formation de la racine en quantité de tissu est aussi
considérable qu'elle l'aurait été sans le traumatisme. la forme même de
cette racine est dilTérente puisqu'elle est déterminée par un arrangement
différent des centres dentinigènes.
I). — L'absence de la 2" molaire a permis à la troisième d'avancer et
prendre en partie sa place.
E. — Cette dent, 3^ molaire, a migré en avant et ne s'est pas inclinée,
n'a pas transformé ainsi sa face triturante en face mésiale.
F. — Elle a été parfaitement utilisée, car elle porte les traces mani-
festes de l'usage , représentées par les cupules d'ivoire; la 1'' cuspide
interne est elle-même disparue et remplacée par une cupule d'usure, cela
est expliqué par la migration qui a changé les points d'antagonisme.
Je suis très très heureux d'avoir eu la bonne fortune de posséder un
document très rare en somme, et qui pourra grandement servir à l'his-
toire de la 3^ molaire, chez l'homme surtout. C'est en effet un très heu-
reux hasard qui a fait coïncider le traumatisme avec le moment précis
de la formation de la couronne de la 3^^ molaire. Heureux hasard qui se
double de l'intérêt de constater l'influence de ce traumatisme justement
sur une mandibule d'animal, un gorille, chez lequel les fractures du
maxillaire ne doivent pas être très fréquentes.
Je ne sais si, parmi les pièces osseuses d'anatomo-pathologie que
possèdent nos musées, il se trouve un échantillon humain semblable. Je
me promets de chercher de ce côté; et si j'ai la chance de découvrir un
pareil document, je m'empresserai de vous en entretenir.
ANTHONY. — ADAl'TATKlN 1)1' THn»A\ Al\ KONCTIONS l<h>l'lHATUlUE> 393
UNE ADAPTATION DU THORAX DES VIEILLARDS AUX FONCTIONS RESPIRATOIRES
Le mécanisme de production de l'articulation intrachondrale
de la première sternocôtei.
l*Ai{ M. II. .\miidny.
Au moment où je faisais, au Laboratoire d'Anatomie de la Faculté de
Médecine de Lyon, ma Ihùse de Doctorat en Médecine sur « Le Sternum et
ses connexions dans la série des Mammifères » (1895-1898) ',, j'eus l'occasion
d'examiner un très grand nombre de cadavres humains au point de vue
de l'anatomie de la région thoracique antérieure.
Au cours de ces recherches le fait suivant me frappa : un grand nombre
d'entre eux présentaient dans le corps même du premier cartilage costal
ou sterno-cùte une articulation ayant tous les caractères d'une diarthrose ;
particularité remarquable, cette diarthrose supplémentaire se rencontrait
uniquement chez des vieillards.
Tout en songeant que là ne devait point être une simple coïncidence
et qu'on réalité cette articulation ne devait se développer (pi'avec l'âge,
je ne me rendis pas compte sur le moment du mécanisme exact de sa
production, et, tout entier à l'étude spéciale qui m'occupait alors, je remis
à plus tard le soin de résoudre cette question.
Ayant depuis cetlfdale examiné encore un grand nombre de squelettes
à ce point de vue, je crois être maintenant en état de résoudre ce petit
problème d'adaptation mécanique qui, il m'a paru du moins, n'est pas
sans présenter un certain intérêt.
Rappelons d'abord très brièvement en vue d'aider à la compréhension
du sujet : 1° les connexions normales des différentes pièces de la région
thoracique antérieure chez l'homme ; 2° la marche de l'infiltration osseuse
des cartilages costaux avec l'Age.
l. Le squelette de la région antérieure du thorax chez l'homme com-
prend, on le sait, outre les clavicules dont nous n'avons pas à nous
occuper, le sternum et les cartilages costaux ou sternocotes.
Le sternum au lieu d'être formé de sternèbres séparées comme il l'est
chez les Carnassiers et les Singes inférieurs par exemple, est formé, chez
l'homme adulte, de trois parties: ^t, le manubrium qui représente la !'«
sternèbrc et l'ensemble des vestiges des sternèbres préthoraciques. ?, le
mesosternum qui représente les sternèbres 2, 3, 4, 5, 6 synostosées.
Y, le xiphisternum ou appendice xiphoïde qui représente les vestiges des
sternèbres post-thoraciqucs * .
1 R. Anthony. — Du sternum et de ses connexions avec le membre thoracique,
Paris, Oct., Doin. ùditeur, 1898.
- Voir à cî sujet: B. Anthony. — Notes sur la morphologie du sternum chez les
Mammifères {Bull. Soc. d'Anthrop., 1900.
:{!ll i (ii;T(tliltK iiKir.
|,t" iiiimihrium esl joint au mesosleinuin par une arliculalion qui esl
taiilùl uiif ainphiaiUirusi; du j^enro des symphyses, c'est-îi-dire forméo
d'un (il)ru-cai'lilai;o assez lAclie, lanlùL uni' diailhrose véritable ou arlicu-
lalion cavilaire. Ces deux pièces fornienl entre elles un angle très obtus
à saillie antérieure (jue les médecins appellent souvent Vaiu/le de Louis-
(Jnelle que soil la nature di- l'articulation de l'angle de Louis, elle est
généralement ilouée chez l'adulte d'une mobilité appréciable.
Le xiphislernum est souvent en continuité osseuse avec le mesoster-
num ; d'autres fois il en est simplement séparé par une mince couche
carlilagineuse qui ne permet pas en tous cas une grande mobilité.
Le sternum est en rapport par ses Ijords latéraux avec les clavicules et
les carlilages costaux. Ceux de ces derniers i\n\ sont en connexion avec
le sternum sont normalement comme l'on sait au noml)rede 7. Le l*"", très
court 1^:2 centimètres d'ordinairej. s'articule avec le manubriuin par une
articulation du genre des synchondroses, la substance cartilagineuse de
l'arc costal étant directement juxtaposée à la substance osseuse du
nianubrium sans interposition de cavité synoviale ou de fibro-cartillage
lâche. La synchondrose est une articalalion immobile. Les 6 autres car-
tilages costaux s'articulent avec les bords du mesosternum au niveau des
anciens espaces intersternébraux; le premier d'entre-eux qui est le 2» de
la série complète s'attache au sternum au niveau de l'angle de Louis qui
marque l'union de la U« sternèbre à la 2®. Les articulations chondro-ster-
nalessont (^sauf la première) desdiarthroses à cavité très bien développée
et permettant des mouvements d'une amplitude assez grande. La cavité
articulaire très bien développée pour les premières articulations chondro-
slernales à partir de la seconde, l'est beaucoup moins pour les suivantes ;
les sternocôtes ne se trouvent alors reliées au mesosternum que par du
tissu fibreux assez lâche.
Par leurs extrémités distales les cartilages costaux s'unissent tous aux
cotes par des synchondroses analogues à celle de la première articulation
chondro-sternale.
Rappelons enfin la présence extrêmement fréquente au niveau des
arcs costaux 6, 7 et 8 et entre eux d'articulations diarthrodiales permet-
tant à ces arcs des mouvements de glissement les uns sur les autres.
II. D'après Rambaud et Renaut ' dont la remarquable étude sur
l'origine et le développement des os constitue encore l'un des documents
les plus importants que l'on ait sur ces questions, l'ossification des carti-
lages costaux suivraient la marche suivante :
Jusque vers 30 ans les sternocôtes resterit cartilagineuses, A partir de
cet ilge le I*" cartilage costal s'ossifie à sa surface, principalement à ses
deux extrémités et dans ses parties supérieures.
A 60 ou 70 ans environ il arrive àéire complètement enveloppé d'un cy-
* Rambaud et Ren.vlt. — Orif/nieel développement des os, Paris 1804.
AliAI'l vntiN Ul' Tllnltv\ U \ l'iiNCTKiNS ltl>riU ViiHltK
:{'.).•■.
li ndit' osseux souvoiil divisé t;n di'iix. iiinit.'s, rmic slfinali', r.nilii' costale.
Quant iui\ aiilifs cartilai^cs. ils (■omiiicin'craiiMit à s'ossidcr vers 40 ans
suivant un mode analoLruc à cflui qui vii-iil d'iMn; oxposi''. (''est-à-dirc en
débutant par les extrémités, les faces anli-iieures et les bords.
D'une l'aeon générale rossili;ation inliMiie dé'InileiMii |iliis (,ird que
l'externe et ne serait jamais complète.
Chez la l'emme l'ossirication des cartilages costaux ne eoinmence guère
qu'a GO ans et est moins complète (]ue chez l'homme.
.\os constatations personnelles corroborent à peu près l'exposé classi-
que de Kambaud et Renaut.
Ajoutons toutefois que l'on sait fort bien aujourd'hui ([uà partir d'un
certain âge, variable suivant les individus mais toujours au delii de la
soixantaine, nous semble-t-il du moins, l'articulation sterno-manubriale
commence à s'infiltrer de substance osseuse. A un certain moment son
ossification devenue complète rend tout mouvement impossible en cette
région.
Fig. 1, — Squelette de la région thoracique antérieure chez l'Iiomme : 1, 2, 3, 4, 5, 6,
7, 8, 9, arcs costaux. — x, y, Ligne paralli'ile ;ï l'axe de rotation du sternum au
moment de l'inspiration. — a, a', Lieu d'élection de l'articulation intractiondrale
de la !'■' sternocùte.
Au sujet de l'articulation supplémentaire sise dans le l'"' cartilage cos-
tal, voici ce que nos observations nous ont permis de constater. Elle se pré-
sente avec les caractères suivants : elle est paire, généralement symétrique,
existe le plus souvent à peu près au milieu de la sternocôte, mais ne coïncide
jamais avec le point d'union du l^"" cartilage costal soit avec la côte osseuse,
soit avec le sternum (voy. /fV/. /). C(; caractère empêche parconséquent de
pouvoir la confondre avec la 1" articulation chondro-sternale qui se trouve
dans certains cas anormaux être unediarthrose. Au point où elle setrouve
396 4 ocToiiHE 190G
il existe loujoursun gondement assez marqué de la slernocôte, et, c'est au
niveau de ce gonlleinenl môme qu'on perroildes mouvements articulaires.
Si on fait une coupe longitudinale par rapport ;i l'arc costal (coupe coro-
nale) de cette sorte de petite tumeur, on voit qu'elle est ainsi constituée
d'une faron très schémati(jue :
En dehors, le périchondre épaissi forme une sorte de manchon fibreux
h l'intérieur duquel sont les deux extrémités de la sternocôte ossiQée,
rugueuses, mais néanmoins nettement encroûtées de cartilage. Le pour-
tour de la cavité aiticulaire est rempli d'une sorte de contenu caséeux
dont l'origine sera ultérieurement expliquée. (Voy. fig. 2.)
1.
,--.
--
4
'3
--
6.-
i'
5
Fig. 2. — Disposition schémntique de l'articulation intrachondrale de la i""» sterno-
cùte : 1, premier arc costal. — 2, manubriuru sterni. — 3, cavité articulaire. —
t, cartilage articulaire. — 5, capsule articulaire. — 6, magma caséeux intraarticu-
lairc.
L'ensemble de ces caractères morphologiques (gonflement, irrégularité
des surfaces articulaires, présence d'une sorte de magma caséeux) empê-
chent, en admettant même que l'on fasse abstraction de la position si spé-
ciale, de confondre cette articulation avec une diarthrose chondro-sternale
anormale.
En raison du raccornissement inévitable que subissent les parties car-
tilagineuses et de la section qu'on fait du l^r arc costal pour les besoins
des autopsies et du montage, il est difficile de constater la présence ou
l'absence de la diarthrose supplémentaire du l^f arc costal sur des sque-
lettes secs et montés. Ce sont donc surtout les cadavres frais elnon autop-
siés qui se prêtent à sa recherche. Or, on sait combien dans les Ecoles de
Médecine il est difficile de s'en procurer en suffisamment grand nombre.
Néanmoins, pendant le cours de trois années, j'ai pu en examiner 59 à la
ANTHONY. — ADAPTATION DP THORAX AIX K(»NCTIONS RESPIRATOIRES 397
Facullt! lie .Mi'Jo^ine de Lyon. Kl il in'u él'' possible de ré[>:irlir, ;iii point
de vue de leur âge, ces o\) cadavres en cint} catégories :
l""" Oatégorie Ftetus 14
2e Culéyoric de. 0 ii 20 ans 10
3« «liitégoric de 20 il 40 ans i:{
4" Catégorie de 40 ii (»') ans 8
5" Catégorie au-dessus de GO ans 14
Sur ces 59 individus, j'ai rencontré 5 cas seulement de diarthroscs sur
le trajet de la l""" slernocôte. Tous les cinq se rapportaient à la 5« caté-
gorie, celle des vieillards ayant 60 ans et plus, laquelle était ainsi consti-
tuée.
Cf (JO ans (articulation).
P . . . (jl ans.
cf 01 ans.
cf 00 il 05 ans environ,
cf 05 ans.
p 68 ans (arlirul.iUon).
cf 71 ans.
p 72 ans.
p 77 ans.
cf !^0 ans (articulation).
p 80 ans.
p 81 ans.
cf 82 ans (arliculalion).
p 85 ;ins.
On peut donc dire qu'avant 60 ans on n'a guère de chances de rencontrer
la diartlirosc supplémentaire du 1" arc costal, mais (ju'à partir de 60 ans
on la rencontre dans environ 35.71 pour 100 des individus.
Notre série se compose exactement de 7 hommes et de 7 femmes.
Sur les 7 hommes 4 présentaient la diarthrose en (juestion .
Sur les 7 femmes 1 seule la présentait.
On pourrait donc dire si notre série était suffisante en nombre :
1" Chez l'homme à partir de 60 ans la diarthrose supplémentaire du
1"' cartilage costal se rencontre dans 57.14 pour 100 des cas;
2° Chez la femme à partir de de 60 ans elle se rencontrerait seulement
dans 11.11 pour 100 des cas.
En résumé, ce qui est certain, c'est que l'articulation diarthrodiale de la
l" sternocote paraît exister exclusivement au delà de 60 ans, et, cju'elle
semble notablement plus fréijuente chez l'homme (}ue chez la femme.
Pour essayer de comprendre le mécanisme de sa formation, il est indis-
pensable de faire appel aux connaissances que nous possédons sur les
mouvements du sternum et le mode d'amplitude antéro-postérieure de la
cage Ihoracique au moment de l'acte respirjiloirc.
Les physiologistes admettent qu'au moment de l'inspiration le volume
soc DANTHROP. "1906. 28
398
4 OCTOBRE 1906
(le la cavilt' Ihoracique augmente ;\ la fois suivant siîs trois diamètres
anléro-poslérieur, bilatéral et vertical. L'augmentation du diaiurlie an-
téro-postérieur se produit de la façon suivante : les côtes tournent autour
d'un axe perpendiculaire ;i la colonne vertébrale et passant par les arti-
culations costo-verlébrales et costo-transversaires droite et gaucbe cor-
respondantes. 11 en résulte que le sternum est projeté en avant et en baut.
Si les côtes étaient toutes égales, le sternum se déplacerait parallèle-
Fig. 3. — Schéma destiné à rappeler le mouvement de bascule du sternum au mo-
ment de l'inspiratinn : x, y, direction générale du rachis. — \, 2, 3, 4, ô, 6, 7, po-
sitions des arcs costaux pendant l'expiration. — 1', 2', 3', 4', 5', 6', 7, positions de
ces mêmes arcs costaux pendant l'inspiration. — o, o', points par lesquels peut
passer l'axe de rotation du .sternum.
ment à lui-même d'arrière en avant et de bas en haut (voy. Fig. 3) comme
cela a lieu pour la portion de cet os comprise entre 6 et 7, les côtes 6 et 7
étant en projection sensiblement égales; mais comme elles diminuent de
longueur de bas en haut il subit en réalité un mouvement de bascule
tournant autour d'un axe bilatéral situé quelque part au voisinage de
son extrémité supérieure et parallèle à x y (voy. fig. 1).
ANTIIilNV. — AOAl'TATInN; 1)1' TIKIUAX AIX Ko.vmONS RESPIRAT(JIRKS 3'Jt)
Dans la ligure 3 j'ai essayé de représenter très sohéinatiqueineftt les
éléments osseux de la cage thoraciquo humaine, x. y figure le rachis
dont, pour la facilité de la démonstration, j'ai supprimé les courbures.
i, 2, 3, 4, 5, 6, 7 représentent pendant l'expiration les sept premiers arcs
costaux avec leurs longueurs relatives on projections, c'est-à-dire directe-
ment d'une extrémité à l'autre. On voit que ces arcs diminuent progressi-
V3ment de longueur de bas en haut, les G« et 1' étant toutefois sensible-
ment égaux ; la diminution de longueur devient plus rapide pour les
côtes supérieures. Je leur ai donné sensiblement l'inclinaison qu'ils pos-
sèdent on réalité sur le rachis et j'ai supposé que cotte inclinaison était
semblable pour tous, bien qu'en réalité elle soit un peu plus grande pour
les côtes supérieures que pour les cotes inférieures (je veux parler bien
entendu do Viiulinnlson de lu liijne jai'jnnnl (es (leur extrémités de l'arc coslnl).
{', -2', 3', i', o", G", 7' représentent los mômes arcs costaux pendant l'ins-
piration. J'ai supposé que l'ampliludo du mouvement de rotation autour
de l'axe transversal était le mémo pour chacun d'eux; on réalité, ce mou-
vement de rotation parait être un peu moins ample pour les arcs costaux
supérieurs. Quoi qu'il en soit, celte figure permet de se rendre compte
que le sternum qui au momentde l'expiration est en 1-7 passe au moment
de l'inspiration on 1', 7'. Si on prolonge les lignes i, 2 et 1', 2' on voit
qu'elles se rencontrent quoique part en un point situé sur l'axe de rota-
lion. La diminution d'amplitude du mouvement de rotation du premier
arc costal abaisse le point 0 jusqu'au 0' très voisin de l'extrémité supé-
rieure du sternum. Pendant les mouvements d'inspiration, quand 1,7
passe en 1' 7' les angles que font les arcs costaux avec le sternum chan-
gent nécessairement de valeur, comme la figure 3 permet de s'en rendre
compte, et cela n'est possible que grâce à la liberté des articulations
costo sternales. Les six dernières côtes sont munies, on le sait, d'articu-
lations diarlhrodiales, avec le sternum. On comprend donc aisément
comment les choses peuvent se passer, mais pour le l*"" arc costal dont
la substance est en continuité directe avec celle du sternum, le change-
ment de valeur de l'angle i, lorsque i passe en 1', ne peut être obtenu
que par un certain mouvement de torsion de la portion cartilagineuse de
cet arc.
C'est ainsi en réalité que les choses se passent tant que l'homme est
jeune et (juc son l*»- cartilage costal est (Icxible. Mais à mesure qu'il
vieillit, ce cartilage s'infiltre de substance osseuse, laquelle, partant à la
fois de la côte et du sternum, limite de plus en plus l'espace llexible,
celui où la torsion est possible. Comme de cette façon la torsion se fait
sur une longueur progressivement réduite, elle devient de plus en plus
ample et le cartilage s'usant peu à peu, il Unit par se former au milieu
de la l""» sternocôte une véritable articulation. Le magma caséoux (|ui
l'entoure n'est autre chose que le produit d'usure dos cartilages.
La formation de l'articulation supplémentaire du l»"" cartilage costal est
donc bien nettement la conséquence de l'ossification avec l'Age de ce pre-
mier cartilage costal.
400 ^ oCToiiuE 1900
Une autre cause, (M1 quelque sorte adjuvanle, de sa production, est
aussi i'ankylose progressive avec l'Age de l'articulation de l'angle de
Louis. Comme on peut s'en rendre compte sur la ligure 3, pendant le
mouvement d'inspiration le sternum se replie, pour ainsi dire, et si sa
longueur réelle reste la même, la distance de son sommet 1 à sa terminai-
son 7 est diminuée ; dans la réalité des choses, ce résultat est surtout ob-
tenu par une légère flexion de l'angle de Louis. L'ankylose de ce dernier a
pour elVet d'augmenter encore le mouvement de torsion dont le i»-"" carti-
lage costal est le siège et participe de ce fait à la production de son arti-
culation supplémentaire.
Dans celte démonstration nous avons complètement fait abstraction de
la lioxibilité des cartilages costaux des côtes 2, o, 4, 5, 6, 7, elle a cepen-
dant son importance ; mais cela nous eût entraîné trop loin de notre
sujet. 11 y a d'ailleurs beaucoup a dire encore sur les caractères d'adap-
tation fonctionnelle des différents éléments de la cage thoracique et nous
comptons y rcvenirultérieurement dans un mémoire spécial.
Bien des anatomistes ont vraisemblablement avant moi constaté la
présence de l'articulation supplémentaire du l"^"" cartilage costal, laquelle,
tout compte fait, n'est point rare, mais aucun n'a paru nettement saisir
le mécanisme exact de sa formation. Le premier qui en ait parlé est lleu-
singer ' qui en cite un exemple pair et symétrique chez un homme de
56 ans. Luschka ^ en a donné également deux bonnes représentations,
l'une complète chez un homme de 60 ans, l'autre en formation chez un
homme de oo ans. llelm ' en cite aussi un cas assy métrique chez une
femme de 60 ans. M. Leboucq '', enfin, a écrit dans un mémoire récent le
passage suivant :
« Articulation dans te corps de la l'° côte. — Il s'agit d'un vieillard chez
lequel la 4'" cote présente de chaque côté un épaississement considérable
avant de s'unir au manubrium du sternum.
La partie épaissie occupe environ le tiers antérieur de la côte. Le carti-
lage a complètement disparu sous des plaques d'ossification, de sorte que
l'extrémité distale des !'«» côtes et le manubrium sont complètement
synostosés ; mais à droite, à une distance de 25 millimètres en dehors de
la limite latérale du manubrium encore assez bien distincte, il y^ a une
articulation entre le segment vertébral et sternal de la côte. Les surfaces
en contact sont raboteuses, mais recouvertes de cartilages et un fort
' HEU.SINGER. — Merkwurdige métamorphose de Brustheins und der ersten Rippen.
Meckel's Arch., VI, 1820.
' Luschka. — Die anomalen articulationen des ersten Rippenpai'es. Sitsungs
der Math. Naturirisscnsch. Classe der K. Akad der Wissenschaften. Bd. 39, 1860,
Wien.
•'' IIelm. — Einseilige rudimentâie Entwickelung der ersten Rippe, etc. Anatom.
Anzeicjer. Bd X. a* 17, 1895.
* liEBOUCQ. — Reclierches sur les variations anatomiques de la première côte
chez l'homme. Archives de Biologie,!. XV, 1897.
OUVRAGES OKKKnTS 401
ligament périphérique les maintenait en contact. — Pour le reste, rien
(le particulier à mentionner; le manubrium est encore distinct du corps
du sternum; il y a sept paires de vraies eûtes ».
En recherchant soigneusement dans la lillt'raturi' anafonii(juo, on trou-
verait certainement d'autres cas encore.
Leboucq, qui vient de faire, assez récemment, une révision des variations
anatomiipies de la première côte, considi'^re simplement tous ces cas
comme des cas de rudiincntnlion de la /'« côle. Apri^s l'exposé de ce qui pré-
cède, nous croyons inutile d'insister davantage sur l'interprétation qui
nous parait devoir être donnée à ces faits.
Le seul auteur (]ni pensait en avoir entrevu l'explication rationnelle est
llcdm. Dans son travail déjà, il émet cette opinion que la production de
l'articulalion qui noife occupe pourrait l)i(Mi être considérée comme une
sorte de compensation à la perle, par le fait de l'ossification, de l'élasticité
du !"■ cartilage costal.
CONCLUSIONS
1° Il existe parfois chez ihonime une diarthrose supplémentaire sur le
ti-ajet du 1"' arc costal cartilagineux ;
'2° Cette diarthrose semble être le plus souvent paire et symétrique ;
3" Elle n'a guère été olj^ervée que sur des sujets ayant moins de 60 ans.
A [tarlir de 60 ans, on peut la rencontrer dans 33.71 pour 100 des cas en-
viron, ilisons en gros dans 1 cas sur 3 ;
4" Elle paraît plus fréquente chez l'homme (où on l'observe dans 57.64
pour 100 des cas, disons en gros dans 1 cas sur 2), que chez la femme
{OÙ on l'observe dans 11.11 pour 100 des cas, disons en gros dans 1 cas
sur 10). Cela est d'accord avec ce fait que l'ossification des cartilages
costaux est plus tardive chez la femme que chez l'homme ;
o" La formation de cette articulation supplémentaire paraît être en rap-
port avec les nécessités respiratoires et être la conséquence de la perte
d'élasticité par ossification progressive du l'r cartilage costal et accessoire-
ment de la perte de souplesse de l'articulation manubriomésosternale.
832« SKW'CE. — IS Oclolii'c lOOli.
Présidence de M. IIamv.
OUVRAGES OFFERTS
Marcki, Haiddi in ot G. Lacoiloi-mkhi:. — Découvertes de stuUnns rjullo-
romaines sur Vancien rivage du ILivre de la Cac/i^i'-e (Vendée). — Urorh.,
in-S". 41 p., 14 fig.
Cette brochure, extraite de Y Annuaire de la Société d'émulalioi de la
Vendée pour 1005, contient la description très détaillée de trois stations
gallo-romaines inédites, des côtes de la Vendée, découvertes au cours d'une
40-2 18 OCTOBRE 1906
mission dont les aiitcms l'iironl diargt's pour rechercher \a situation ihi / orlus
Secor, en Vendée.
L'une d'elles corres|)oiul h une villa, dont il siii)sisto enrore de nombreux
restes; elle est importante, parce quelle indique l'existence d'un centre romain
i\ l'entrée du ilAvre de la (iachère. Les deux autres sont moins importantes.
Ces trouvailles démontrent que les Romains s'étaient établis, en somme, tout
le long de l'Océan vendéen, et qu'ils ont laissé des traces, même là où. jusqu'à
présent, on n'avait pas soupçonné leur pénétration.
Makcei. Haidoiin. — Contribution à l'étude du préhistorique dans les
Marais modernes. — Paris. liK)6, in-S». 12 p., 3 fig.
Cette plaquette est consacrée à la description d'une cachette de l'âge du
brome, trouvée dans le marais de Saint-Hilaire-de-Riez (Vendée), et d'une
trouvaille de haches polies faite dans le même endroit, au Loisson.
Ces découvertes sont intéressantes, parce qu'on ne peut les expliquer, au
milieu des marais de formation post-romaine, que par des faits particuliers, très
intéressants au point de vue de la géologie du Néolithique et de la chronométrie
préhistorique.
Dans le cas spécial du Loisson, l'existence des vestiges trouvés est dû à ce
qu'il y a eu jadis tm îlol, qui était réuni au continent à l'époque de la pierre
polie et du bronze, et qui s'est formé vers l'époque romaine, pour se réunir à
nouveau au continent à la période moderne.
11 n'y a guère qu'en Vendée qu'on peut observer en France des phénomènes
de cette nature : et c'est ce qui constitue le principal intérêt de ce mémoire,
présenté au /«'" Congrès préliistorique de France à Périgueux en 1905.
Mahcel Raidouin et (1. Lacoui.oumkhe. — Les vestiges mégalithiques de
Sainl-Marlin-de-Breyn (Vendée). — Paris, 190fi. in-S", 40 p., 11 fig.
Cette plaquette, extrait des Bulletins de la Société préhistorique de
France (19U6). contient la description des mégalithes et des restes mégalithi-
ques de la commune de Saint-Martin-de-Rrem (Vendée), qui n'ont pas déjà fait
l'objet de mémoires spéciaux de ces auteurs.
Ces vestiges de l'âge de la pierre polie ont des caractères particuliers, en
raison delà nature du sol, qui ne fournissait que de très petits éléments d'ar-
chitectonique. Ils sont pour la plupart de signification encore indéterminée, car
ils sont tous à moitié détruits, ou complètement disparus. Des fouilles, faites au
niveau de certains d'entr'eux, n'ont rien donné : ce qui n'a rien de surprenant.
Les auteurs en tout cas. ont examiné le cadastre avec le plus grand soin et
en ont tiré une foule de renseignements préliistoricjues. inédits et insoupçonnés.
De nombreux plans situent «le façon très précise tous les monuments décrits.
Marcel Raudouîn et G Lacouloumère. — Découverte d'unpolissoirà Saint-
Yincent-sur-Jard (Vendée). — Paris, 1906, in-8", 10 p., 3 fig.
Cette plaquette, extraite du / ■" Congrès préhistorique de France, session
de Périgueux (1905), contient la description détaillée d'un bloc de grès cénoma-
nien, qui jusqu'à présent avait été pris pour un élément dolménique et qui en
réalité n'est qu'un bloc erratique, à 2 cupules de polissage très caractéristiques.
On trouvera dans ce mémoire d'intéressants documents sur le préhistorique
de la commune, qui vient de faire l'objet d'un nouveau travail, plus important,
des auteurs, soumis au [[" Congrès j^ràhistorique de France, à Vannes, en
1906.
AVEun. — sun in questionnaire de linguistique i03
SUR UN QUESTIONNAIRE DE LINGUISTIQUE
1*AR M. AVELOT.
Vous devez être frappés comme moi de la difficulté (]ue Ton éprouve
à se procurer des documents ethnographiques, môme 1res simples, sur
des peuplades pourtant fréquentées depuis longtemps par les Européens.
Il y a c\ cela deux causes principales : l'ignorance de certains informa-
teurs, la négligence des autres.
Un voyageur, fùt-il doué d'un esprit cultivé et chercheur, ne connaît
généralement pas les points sur lesquels il doit porter plus spécialement
son attention. 11 nous raconte longuement les épreuves qu'il a dû affronter;
il nous fait d'une façon suffisante la géographique physicjue et économique
des régions qu'il a vues: mais il ne nous donne qu'une image très impar-
faite des peuples qu'il a visités, soit qu'il n'ait pas su observer, soit plutôt
qu'il n'ait pas cru ce qu'il voyait digne d'èti-e noté. Vous connaissez
l'histoire de l'okapi. Un officier belge revenant d'Afrique, étonné d'ap-
prendre qu'un Anglais a découvert un helladothevium vivant dans les
forêts du (longo, va visiter l'okapi empaillé du .Musée de Tervueren et
laisse échapper cette exclamation : u Ça! il y a dix ans que j'en mange. »
Eh bien! cette histoire est celle de !a presque totalité des voyageurs,
qui n'ont pas su se préparer à leur mission par un dressage spécial.
H abêtis reum confitentem.
Vous avez cherché à remédier à celte ignorance par la création d'un
questionnaire de sociologie et d'elhnographi(\ questionnaire logique, clair,
complet, fort bien fait en un mot. 11 y a vingt-trois ans (|ue ce question-
naire existe. Et cependant les monographies qu'il aurait dû susciter peu-
vent se compter facilement Pourquoi?
Premièrement ce questionnaire est trop peu connu. Je l'ignorais au
moment de mon départ en Afrique^, et c'est pour moi un regret de tous les
instants de songer aux précieuses informations que j'aurais pu recueillir
facilement si j'avais pensé à poser certaines questions. Je sais d'ailleurs
bien des camarades qui sont dans mon cas!
En second lieu, le questionnaire est un peu long pour rKuropécn,
militaire, fonctionnaire, missionnaire ou colon, dont les occupations pro-
fessionnelles absorbent une grande partie du temps. Trois cents (piestions,
et des questions dont quelques unes appellent des réponses dem.mdant
un certain développement! C'est beaucoup, surloutdans les pays tropicaux,
où le blanc anémié voit souvent sa volonté frappée dinhiliilion.
Enfin et surtout le questionnai.'c s'adresse à une minorité cultivée,
alors que les informateurs les plus nombreu.x ne sont pourvus (juc d'une
instruction rudimentaire. Dans notre empin; colonial, po:ir ne parler que
de ceiui-là, il n'est aujourd'hui pour ainsi dire pas de tribu près de laquelle
ne se trouve un sous-officier, un commis des affaires indigènes ou un
404 IH ocroHUK lUOti
agent de factorerie. Ces braves gens nous tlunueraicnt volonliors leur
modeste collaboration, si nous la leur demandions, et j'estime (jue nous
aurions le plus grand tort de la négliger.
C'est qu'en elTel il faut se hAter : les progrès de la colonisation sont
devenus si rapides que les anciennes coutumes disparaissent à vue d'œil;
les objets indig<^nes sont remplacés par des produits manufacturés
d'Europe; les groupements ethniques importants se mélangent et se trans-
forment; les petits disparaissent. Un exemple : il y a une vingtaine
d'années, les environs de Franceville étaient peuplés de tribus nombreuses,
Anziani, Awoumbo, Ba-Kaniké, Mindoumbo, sur lesquels nous ne possé-
dons rien, absolument rien, pas même de vagues données morjibologiques;
aujourd'hui ces tribus ne sont plus représentées que par quelques indi-
vidus qui se sont réfugiés dans les îles de l'Ogôoué. Autre exemple : à la
Cùte d'Ivoire, autour de la lagune de (Irand-Bassam, se pressent les der-
niers descendants des anciennes peuplades refoulées par l'invasion agni-
ashanti : Avikam, Aradyan, Ari, Abé, Ae, Adyoukrou, etc., ne nous sont
guère connus que de nom ^ Et ils vont prochainementdisparaîlre! Et auprès
d'eux habitent en permanence des centaines d'Européens, qui ne voient
en eux que des nègres pareils h tous les autres,
(jue faire ;i cela ?
D'abord il importe de faire connaître notre questionnaire ethnographi-
que ; le résultat semble devoir être atteint aisément par l'intermédiaire
des gouverneurs de nos colonies, des chefs de corps de notre armée colo-
niale, des supérieurs des missions chrétiennes.
En second lieu il nous faudrait rédiger un petit questionnaire très court,
très simple, à lusage de ceux de nos compatriotes dont l'inslruclion est
modeste; après un examen, assez rapide à la vérité, il m'a semblé que ce
questionnaire pourrait êlre réduit a une cinquantaine de questions deman-
dant des réj)onses très courtes, parfois même un simple « oui », un sim-
ple « non ».
Enfin, et j'insiste tout spécialement sur ce point, il est urgent d'établir
un petit questionnaire de linguistique. A défaut de mesures anthropomé-
triques, les données philologiques constituent encore le meilleur critère
ethnogénique, et n'importe qui peut, sans fatigue, à bâtons rompus,
aligner dans une colonne les mots indigènes correspondant aux mots
français de la colonne voisine. C'est qu'en effet il ne faut pas songer à
demander autre chose. Le paragraphe « langues » de notre questionnaire
laisse l'informateur libre de choisir lui-même son système de transcrip-
tion, les mots, les phrases à traduire; le chapitre « linguistique » des
Inslritrtions aux voyageurs de la Société de Géographie repousse avec
dédain l'établissement d'un vocabulaire, et préconise la confection d'une
grammaire avec indications savantes sur la nature de la langue étudiée.
• Exception faite cependant pour les trop courtes, mais si précieuses données lin-
guistiques fournies par M. Delafosse.
VVHIOT. - IlECHKItCUKS ANrillliil'n(.i){il(jlK> SIU l,'uS>IKl(;ATHtN iO.")
Notre questioiinairc n'est pas assc/. |>ircis: les Insl initions (Icmaiidcnl
trop. Concluskm : nous n'avons rion !
Voici comment je comprendrais le (luestionnaire linguistique dont je
viens vous proposer l'établissement: sur la premi(^re page, une notice
explicpiaiit sommairement le prix que nous attachons aux renseignements
demandes ; sur la deuxième page, un alphabet de transcription très sim-
ple, sans signes diacritiques, sans lettres étrangères; l'alphabet officiel de
l'Etat indépendant du Congo peut servir de modèle; enfin, sur les deux
dernières pages, une cinquantaine de termes et une dizaine de phrases,
ces dernières choisies de telle sorte que nous puissions en déduire les
principales règles grammaticales, sans (jue l'informateur ait à s'en préoc-
cuper.
•l'ai dtme l'honneur de vous proposer la nomination d'une commission
spéciale de linguistique; il y a longtemps que j'hésitais à le faire : il ne
sied point en elTet au disciple d'élever la voix devant 'les maîtres. Je
songeais même à faire aupaiavant une expérience à dire piivé, en utili-
sant les nombreuses relations (pie j'ai gardées sur la Côte occidentale
d'Afrique. Mais notre vice-président et M. le Docteur Delisle, auxquels
j'en ai parlé, ont bien voulu m'encourager, et, fort d'un Ici appui, je
suis venu vous soumetti'c ce projet dont j'attends les meilliMus ri'sultats.
NOUVELLES RECHERCHES RADIOGFîAPMIQUES SUR L'OSSIFICATION
DES METACARPIENS ET DES PHALANGES CHEZ LES ENFANTS NORMAUX
ET CHEZ LES HYPOTROPHIQUZS
Erreur d'un anatomiste français sur l'époque d'apparition des points
complémentaires '.
Pau .m. (i. \'AnioT.
Mes éludes antérieures sur les modalités anormales de la croissance,
aussi bien chez les nourrissons que chez les enfants du deuxième ;^ge,
m'ont permis d'i'tabiir sur des bases solides la noliun d'atrophie et
d'hypotrophie infantiles ^
* Communication à la Société d'Anthropologie de Paris.
' Voir mes publications antérieures sur ce sujot et spécialement : Le Tmilenuiit de
Y Atrophie infantile par le lait stérilisé. Bulletin de la Société ries Hôpilau.r. 1898.
La ration alimentaire îles nourrissons atraphif/i/rs [Clinit/ue Infantile \Wf)). Ktude
radiographiquc des mains et des pieds dans lro\s cas à'hi/pnlrn/jliif InfuniWe) Bulle-
tin de la Société des H6pitau.i\ lyO.i). Les caractères difTérenliels île l'hypotrophie
et du rachitisme Société des Ilùpilaur, 1905). Les caractères diiïércntiels de l'iiypo-
trophie et du rachitisme (Société des Hopitau.r, 1905. avec planche radiof^ra-
phique). Voir aussi Bulletin du Congn-s international des douttes de Lait (Rapport
sur les Gouttes de Lait considérées comme champs d'observation uiéthodiriuc pour
les pédiatres). Edition de Fécamp.
•iCM) 18 .Mrn.HiiE 190H
A l'aide (li> la balance el de la toise, qui nous fournissent des rensei-
gnements iinniédiats el précis sur le poids et la taille des enfants, nous
constatons si le dt'-veloppoment d'un enfant est ou non normal.
Mais hien plus, en comparant le poids et la taille d'un enfant avec les
ehilTi-es inscrits dans nos tables de croissance, nous établissons un rap-
port (|iii nous (ixe sur le </<'9>v' d 'atrophie et d'bypotrop'iie.
F-a pédiométrie dans l'avenir prendra une importance de plus en plus
grande, car en même temps qu'elle nous indique la marche de la crois-
sance, elle classe les enfants en catégories dont la résistance vitale
semble augmenter avec le développement organique général, ou inver-
sement : la mortalité infantile qui est de 15 0/0 dans la première année
de la vie, descend à 5 0/0 dans la deuxième. Si un enfant de deux ans
n'a que le poids et la taille d'un enfant d'un an, ce qui n'est pas rare, il
est bien à craindre qu'il réagisse contre les processus morbides ou infec-
tieux non pas suivant son âge, mais suivant sa masse. C'est ce que nous
sommes appelés à vérifier tous les jours dans nos services hospitaliers où
le processus d'hypotrophie est si commun chez les enfants du peuple.
Ces considérations d'ordre un peu général suffisent à montrer le haut
intérêt des recherches analytiques sur les causes, le mécanisme intime du
processus d'atrophie et d'hypotrophie. Les lecteurs de \a. Clinique Infantile
ont eu sous les yeux les beaux travaux expérimentaux de MM. Charrin
et Leplay, sur rinfiuence des poisons d'origine gastro-intestinale injectés
sous la peau pour produire l'atrophie, le ralentissement de la croissance
chez les animaux.
Dans une autre direction, nous venons apporter un nouveau stock de
faits anatomiquos précis qui nous éclairent sur la formation et le mode
de développement du squelette à l'état normal el au cours de l'hypo-
trophie.
Bien que les os soient cachés plus ou moins profondément, leur étude
anatomique, sur lo vivant, est devenue bien plus aisée que celle des
autres systèmes, ou des autres organes, si l'on recourt à la radio-photo-
graphie. C'est ce que nous avons fait dans notre service de l'hôpital des
Enfants-Malades.
Une centaine d'enfants, depuis l'âge de 4 mois jusqu'à 8 ans, la plu-
part entre 1 an et 3 ans, ont été envoyés par nous au laboratoire central
de radiographie de l'bùpital Necker; ce laboratoire est dirigé parM. Contre-
moulins.
Pour avoir des termes de comparaison rigoureux, j'ai fait radiographier
une trentaine d'enfants de 1 an à 3 ans d'un développement normal
poi.r leur âge; les autres étaient des atrophiques ou des hypotrophiques.
J'ai choisi le squelette de la main comme objet d'étude, car, ainsi que
je l'ai établi antérieurement, on y trouve des repères tout à fait fixes en
rapport avec l'apparilion des points d'ossification complémentaires aux
premières phalanges et aux métacarpiens.
Vhi même que le point d'ossification de l'extrémité inférieure du fémur
annonce qu'un fœtus est à terme, de même l'apparition des points épi-
VAIUOT. — UECllEUniKS A NHIIli>l'iil.o(;inl K> Slll l'iiSSIKICATION 407
physairos métacarpiens et plialangicns montre (ju'nn enfant approche de
la deuxième année, ou plus exactement que son développement corres-
pond à une taille d'environ 75 centimMrcs. car l'ossilicalion marche avec
la taille et non avec l'Age cliez l'enfant '.
Avant d'entrer dans le détail de mes ohservations, je tiens à faire
remanjuor que la radio-photographie est une méthode d'analyse anato-
mique extrêmement pénétrante et commode pour le squelette. Dans le
cartilage des épiphyses, très clair et très bien traversé par les rayons X,
le point d'ossification se distingue aussitôt qu'il apparaît, par une tache
d'ombre très petite et très légère, correspondant à la calcification initiale
de la substance hyaline.
Plus tard, cette tache, d'abord à peine perceptible, grandit et s'opacifie
à mesure que l'ossification empiète sur le cartilage.
Il est bien probable que les anatomistes, en coupant les extrémités des
phalanges ou des métacarpiens, ont dû méconnaître les rudiments des
points d'ossification à une période oii ils sont déjà décelés par les
rayons X.
C'est ainsi que l'on doit expliquer les erreurs qui ont cours actuellement
et qui sont propagées dans nos grands ouvrages classiques français sur
la date d'apparition des points comi>lémentaires aux phalanges et aux
métacarpiens. Le scalpel a pu passer à coté dn point riidimentaire inclus
dans le cartilage.
D'ailleurs, c'est une lâche plulùt longue et ingrate de sectionner un
grand nombre de pelils os pour fixer avec précision un détail d'ossification
dont la portée n'est pas évidente à première vue.
Combien il est plus simple dé regarder, à l'œil nu ou à la loupe, des
petites mains radio-pholographiées! Les contours des os se montrent avec
la dernière netteté et les points opaques se voient dès leur origine dans
le cartilage épiphysaire. En examinant une soixantaine de radiographies,
on arrive à des résultats plus concluants que si Ton coupait plusieurs
centaines de métacarpiens et de phalanges. En outre, comme les os sont
en place, on peut noter quel est l'ordre d'apparition réciproque dans les
phalanges ou dans les métacarpiens et dans chique os en parliculier sur
la même main.
Voici le tableau qui montre les grandes divergences qui cxislent entre
Cruveilhier el Kolliker et les traités c'assiques d'anatomie de Sappey et
Poirier, pour la date d'apparition des points d'ossification du métacarpe
et des phalanges.
Il est à présumer que M. Poirier, dans son traité, a rcprolui; les asser-
tions de Sappey sans le> contrôler, bien (|u'elles s'écartent plus de la
vérité que celles de notre grand analomiste Cruveilhier, comme nous
allons le voir.
1 Je dis communément que le s^iiielettc des enfants m l'iigo de leur taille.
408
18 OCTODHK llM»r»
'•"^■mm"
I. — Radiographie de la main d'un enfant noi'mal de 4 ans.
Les points d'ossification des premiers métacarpiens et des premières phalanges ont
leur développement normal. Mais, par suite d'une anomalie rare, plusieurs points
complémentaires maiiqii'mt à certaines phalanges.
D'après nos nombreuses observations personnelles, tant sur les enfants
normaux que sur les hypotrophiques, l'opinion de l'embryologiste alle-
mand Kollikei' se rapproche beaucoup de la réalité. Cet auteur avance,
en effet, que les points complémentaires aux métacarpiens se montrent à
partir de la deuxième année, et aux phalanges à partir de la troisième
année.
VAUloT. — HECHERCHES ANTIIHOPULOGIQUES SUR L OSSIFICATION .
409
II. — Radiojthotofjrapliii^ (le lu innui <l'un enfant normal de 3 ans. Taille .88 cent.;
poids : 13 kilos.
Les points d'ossification complémi'iitaires sont apparus à tous les métacarpiens et
presque à toutes les phalanges sauf à l'index et au petit doigt.
Le plus souvent, à létal normal, c'est de 18 à 20 mois, lorsque la taille
des enfants est de 75 à 78 centimètres, qu'on voit poindre l'ombre radios-
copique dans le cartilage épiphysaire aux deuxième, troisième et qua-
trième premières phalanges, et presque simullanément aussi au deuxième
métacarpien.
Quelquefois les points métacarpiens semonlront un peu plus lût que les
points phalangiens, mais à (iuel(]ues semaines, à un mois près; l'appa-
rition inverse des points phalangiens m'a paru plus commune.
A partir de 22 mois, avec une taille de 78 à 80 cent.,, la plupart des
points complémentaires sont bien visibles dans les deuxième, troisième,
410
18 OCTOBRE 1900
(jiialri^me cl cinijuitMiie premières phalanges, et môme dans la deuxième
phalange du pouce, ainsi qu'aux deuxième, troisième, quatrième
métacarpiens.
J
m. — Raàio photographie delà main d'un enfant normal de 20 mois. Taille : 74.5;
poids : 10 kilos.
On aperçoit seulement les points complémentaires dans les cartilages de l'extré-
mité proximale des trois premières phalanges. C'est l'ébauche la plus précoce des
points épiphysaires et le type le plus fréquent d'apparition de ces points.
A 2 ans, avec 80 centimètres de taille, les points sont visibles aux
deuxième, troisième, quatrième et cinquième premières phalanges, à la
deuxième phalange du pouce; et parfois même on aperçoit quelques
points aux deuxièmes phalanges.
A 3 ans, avec un développement normal, et une taille de 88 à 90,
tous les points complémentaires des phalanges et des métacarpiens sont
VARloT. — HECHERCHES AXTHROl'OLOfilQUES SUR l'oSSIFICaTION 1 I I
visibles. C'est dans le cours de celte troisième année qu'apparaissent les
points (les dciixirmes «.'l dos troisir-ines rangées de phalanges et tout à fait
à la lin Ifs puints cuinpléinenlaires du premier nii'lai.'acarpien et de la
premii'^re phalange du pouce. Le point complémentaire du premier méta-
carpien est parfois encore plus tardif '.
Voici ({uelques observations de détail ; mais il serait vraiment fastidieux
de les rapporter toutes; elles sont généralement concordantes j\ quelques
exceptions prés, que je mentionnerai et (]ui pfuvent être considérées
comme des variétés rares ou des anomalies.
En me plaçant au point de vue pratique, je me suis borné à l'élude du
métacarpe et des phalanges dont l'ossilicalion constitue, comme je l'ai dit,
un repère très fixe, pour apprécier le développement du squelette à la
fin de la deuxième année; j'ai négligé l'étude du carpe dont les points
d'ossification se montrent bien plus tard, à l'exception de ceux du grand
os et de l'unciformequi sont visibles sur les radiographies dès le quatrième
mois dans certains cas.
Jusqu'à l'Age de 18 mois et tant que la taille n'atteint pas 75 cent, envi-
ron, je n'ai pas vu dans le cartilage de taches opaques correspondant aux
points complémentaires.
I — Enfant de 19 mois avec une tnillc de 15 cent. — On aperçoit trois
points complémentaires aux deuxième, troisième et quatrième pi-emières
phalanges.
II. — Enfant de 2 ans, 72 cent, de lonf/ueur. — Xolablemenl hypolro-
phique, aucun point complémentaire visible.
III. — Enfant de 2 ans avec une taille de 11 cent. — Un aperçoit trois
points aux deuxième, troisième et quatrième phalanges et un point au
deuxième métacarpien.
IV. — Enfant de 26 mois, 16 cent. 1/2 de taille. — On aperçoit un point
complémentaire à la deuxième phalange et un au deuxième métacarpien.
Hypotrophie notable.
V. — Enfant de 2 ans. 19 cent, de taille. — Trois points aux deuxième,
troisième et quatrième phalanges et deux points au deuxième et au troi-
sième métacarpien. En outre un point unique à la troisième phalange de
la deuxième rangée.
VI. — Mal formation de la main chez un enfant de 23 mois d'une taille nor-
male. — La main ne consiste que dans le pouce, l'index et le médius,
avec un petit appendice latéral au médius. La radiographie montre que
le carpe est réduit par l'absence de l'unciforme.
II n'y a que trois métacarpiens.
Les points complémentaires des métacarpiens et des phalanges sont
apparents comme normalement; on voit, en outre, deux phalanges aber-
* Suivant la remarque de M. .Vntbony (du .Muséum), ce point qui est tourné vers le
carpe, rapproche tout à fait le premier métacarpien des phalanges au point de vue
morphologique.
il -2
18 OCTOBRE 190G
railles dans l'appendice charnu ajuiilé au médius et qui représente une
ébauclic do l'annulaire.
lY. — Radio-photographie d'une fille âgée de 5 ans moins un mois, atteinte d'hypo-
trophie d'origine gastro-intestinale sans 7'achitisme. Taille : 78 cent. ; poids .
9 kilos.
La taille normale à cet âge serait de 96 cent. Les points épipliysaires métacarpiens
et phalangiens correspondent à peine à l'état normal d'un enfant de 2 ans.
VII. — Enfant de 21 mois. Taille SI cent. 5. Poids i2 k. 250. — En état
de croissance anticipée. On voit les points d'ossification très nettement au
niveau des premif'res phalanges et même des deuxièmes phalanges. Cet
enfant a d'ailleurs la taille normale moyenne d'un enfant de 2 ans 1/2.
VIII. — Enfant de 2 ans 5 mois, rackilique flùiide avec les tibias très incur-
VAUlut. — HRilMKUCIIES AMIIIlUPoLtXJlgUES SUR l/oSSIlMCATION 413
vés. Taille 77 cent, l'itiils 9 l,\ lui). — Tous les points complémenlaires sont
appaients même aux tlernir'res phalanges. Le processus rachitique ne
retarde donc pas l'apparition des points d'ossilicalion épipliysaire.
IX. — Enfant rachitique de 2 ans, sans incurvation des tibiaSy 72 cent, de
lailli'. — Aucun point compb'mentaiie visiijle.
X. — FiHc lie ~t ans moins un muis. U/fiiotropItie sans racliilisme. Taille
7S cent., poids 9 kilos. — Les points complémentaires sont les même qu'à
'1 ans (voir planche IV ).
Il s'agissait bien d'une liyputro[)liio simple, d'origine gastro-intestinale.
L'enfant, relevant d'une scarlatine a été gardée dans la salle Gilette pen-
dant (juatre mois, et, soumise à un régimealimentaire convenable, a gagné
5 centimrtres de taille et o kilos environ. C'était une petite lille apparte-
nant à des parents tn-s nialbeui'oux et (jui avait l'ié inanitiée depuis sa
naissance.
V. — /Jijpolro/ihie //'oiu'f/iiii' f/us/tu-i/i/es/inale alun rlcgrè tri's arnnn;. Aye : i21 mois ;
(aille : 05 cent.; poirls : (i kil. SôO.
Les os sont 1res transparent-^ a cause il; leur faible cili-ilicilion, et le développement
général de la main correspond à. Celli^ d'un cnfunt normal de 4 à d mois.
Je dois mentionner cependant quelques anomalies et quelques variétés
soc, d'anthbop. 1906. 29
444 18 ocTonHE lOOfi
]»eu frf^quenles et qui n'inlinuent pas la rrirle (juc nous avons posée de
la premit're apparition des points complhnentaitrs dans les prnnii'ies phalanges
et les mi-lacarpiens, vers l'âf/e de i8 à 20 viois ou plus exactement lorsque la
taille atteint ITi ou Ki cent., puisque c'est la taille et non l'Age, comme
nous l'avons remarqué, qui règle le processus d'ossification.
Une seule fois, chez un enfant de 3 ans, très paie, ne de parents tuber-
culeux, nous n'avons pas encore vu de points complémentaires, quoique
la taille fiH \\ peu près normale.
Il arrive quelquefois que les points complémentaires des dernières
phalanges manquent jusqu'à 4 ans, comme on le voit dans le cas
reproduit (planche 1).
Rarement les points des deuxièmes phalanges se montrent avant ceux
des métacarpiens.
J'ai eu l'occasion de vérifier plusieurs fois, depuis l'an dernier, sur des
radiographies d'enfants rachitiques, de 2 à 3 ans, que la dystrophie
osseuse spéciale qui caractérise le rachitisme ne relarde pas l'apparition
des points complémentaires dans la main; il faut, pour qu'il en soit
ainsi, que le processus d'hypotrophie vienne s'adjoindre, se superposer
en quelque sorte au rachitisme. Cette combinaison du rachitisme et de
l'hypotrophie, à des degrés divers, est très fréquente, il faut bien le dire :
mais il est commun aussi de rencontrer des cas de rachitisme simple et
d'hypotrophie pure. La distinction du rachitisme et de l'hypotrophie est
capitale pour nous permettre de progresser dans l'étude des troubles de
la nutrition et de la croissance.
Certains états dystrophiques exceptionnels, tels que le myxœdème et
l'achondroplasie, peuvent reculer de plusieurs années l'apparition des
points complémentaires dans les phalanges. J'ai observé dernièrement un
myxœdémateux âgé de 4 ans 1/2, ayant 66 centimètres de taille, et dont
toutes les épiphyses phalangiennes étaient absolument transparentes. Cet
enfant, sous l'influence du traitement thyroïdien, a grandi de 5 cent. 1/2
en quatre mois et commence seulement de faire ses premiers pas k 5 ans.
Je me propose de surveiller, par la radiographie, l'époque exacte d'ap-
parition de ses points complémentaires.
Il résulte de cet exposé que les troubles de nutrition et de d'assimi-
lation déterminés si souvent, dans le premier âge, par l'allaitement
artificiel défectueux et les gastro-entérites, ralentissent spécialement
l'activité du processus d'ossification et retardent l'apparition des points
complémentaires dans les épiphyses.
Le système osseux étant le régulateur de la taille joue donc un rôle
capital dans le syndrome de l'atrophie et de l'hypotrophie infantiles *. La
radiographie de la main nous permet de suivre, avec une rare précision,
les modalités normales et anormales de la croissance dans le squelette des
enfants.
1 Le rôle de l'atrophie et de l'hypotrophie infantiles dans l'abaissement de la taille
dans les faubourgs de Paris (Société d'Anthropologie, 1905.)
VARKtT. — RECHERCHES ANTlIROPOI.oC.lOrKS SIFl r.'dSslIlCATION 415
VI. — Main d'une petite fille rachititjue de 4 ans 1/2 non hijjwlrnjtkique.
Tous les points osseux coinplémonlaires sont bien apparents.
416 18 ocTonuK 1ÎM)G
pretendue preuve de décharnement sur un femur du mas d'azil
Par m. le D"" Zaborowski.
Je désire signaler à la Société d'Anthropologie un fait en lui-même bien
petit, mais qui peut néanmoins avoir beaucoup d'importance.
Il existe depuis longtemps une théorie d'après laquelle les nécropoles
néolithiques, les dolmens eux-mêmes, servaient à enfermer les os des morts
après décharnement, d'après laquelle les cadavres étaient décharnés avant
d'être inhumés. Comme on trouve les squelettes entiers avec tous les os
dans leur juxtaposition naturelle, cette théorie n'est pas soutenable en
tant qu'elle implique le décharnement comme règle générale. Mais je ne
veux pas lui faire son procès maintenant, je ne veux pas la juger.
Le décharnement fut quelque peu pratiqué en Egypte à une époque pré-
pharaonique; il l'a été jusqu'à nos jours par des sauvages, mais qui
avaient recours uniquement à l'exposition à l'air ou à l'immersion dans
l'eau.
Ce que je veux signaler c'est ceci à savoir que depuis pas mal d'années
on dit assez fréquemment qu'à l'époque néolithique on décharnait les
cadavres à l'aide de silex et que cela résulte des observations faites par
M. Piette au Mas d'Azil. M. Piette, en effet, a afûrmé plusieurs fois, avoir
observé des preuves d'un décharnement à l'aide d'un silex sur un fémur.
Moi-même dans Mon homme prékistorique, j'ai reproduit, je n'ai fait que
reproduire et je regrette aujourd'hui d'avoir été seulement jusque là, un
passage de son important mémoire : Notions nouvelles sur l'âge du renne
(1891), où il dit catégoriquement (p. 11) : « Les os longs et la mandibule
d'un squelette humain gisaient légèrement rougis, dans la couche à galets
coloriés du Mas d'Azil, à quelques centimètres au-dessous de la surface.
Deux rayures sur l'un des fémurs prouvaient qu'il avait été décharné avec un
silex. Le soin avec lequel ces ossements avaient été rassemblés, le contraste
qu'ils formaient, étant tous intacts, avec les os longs des animaux brisés
pour l'extraction de la moelle, la teinte rouge qui leur avait été donnée
intentionnellement ou qui résultait de la coloration d'une peau dans
laquelle ils auraient été enveloppés et qui se serait détruite par l'effet du
temps, m'ont fait penser que je me suis trouvé en présence de la sépul-
ture d'un squelette que l'on avait inhumé après avoir laissé le corps
exposé à l'air jusqu'à complète putréfaction et en avoir raclé les chairs
restées adhérentes. »
Toute l'hypothèse qu'il formule d'un décharnement préalable à l'inhu-
mation, repose, pour M. Piette lui-même, sur la présence de deux rayures
comme preuve d'un raclage des chairs.
Il a bien présenté à la Société d'Anthropologie, séance du 18 juillet 1895
{liullH., p. 485), le fémur en question.
Et dans la note qu'il a donnée à nos bulletins, il dit : « Quelques os
/AIKtHOWSKl. — l'IuVrENDlK l'RICrVK l)K UKDIIAUNEMKNT >ll< IN IKMltl 417
étaient rayés par le tranchant d'un silex... Sur le fémur un voit plusieurs
rayures très distinctes faites avec un silex. «Je n'assistais pas à la séance.
Mais il ne paraissait pas douteux, d'après les ternies employés par
M. l'ielte, qu'il s'agissait di' multiples traces de raclai^e sur toute la lon-
gueur de l'os.
.M. Pietle a donné au Musée de Sainl-iirruKun sa collection entière (}ui
)>sl sans [irix et comprend des pièces extraordinaires. Je suis allé la visiter
pendant les vacances dernières. M. Champion, statuaire, directeur des
ateliers du Musée, m'a guidé dans cette visite avec beaucoup d'attention
et d'empressement. Il m'a donc montre- les os humains du Mas dWzil, ces
l)ièces n'étant pas d'ailleurs encore toutes classées, ni par conséquent
exposées au public. Et j'ai vu alors ce fémur autrefois présenté ici. Et
quel n'a pas été mon étonnement en constatant que les empreintes de
raclage dont avait parlé M. Piette, consistaient uniquement dans deux petites
rainures à peu près parallèles, situées à une extrémité de l'os et transver-
salement à lui. Lorsque je rappelais quelle signification leur avait été
attribuée, M. Champion eut la même exclamation que moi: « Ce n'est pas
là une preuve de raclage. » Une empreinte de raclage intéresserait plus
ou moins nettement et irrégulièrement l'os entier dans le sens longitu-
dinal. Or il n'y a sur cet os que deux petites rainures très régulières.
Et elles n'ont pas pu être produites à la suite d'une opération de
raclage.
Il est donc inadmissible qu'on vienne dire, comme on en a pris l'habi-
tude, que M. Piette a donné la preuve qu'à l'époque néolilhiciue on
décharnait les cadavres préalablement à l'inhumation avec des silex.
Les os humains qu'il a trouvés dans son assise à galets coloriés, étaient
en tas, sans ordre. Ils ne représentaient pas un squelette complet. La tête
et les petits os manquaient. Ces circonstances peuvent être facilement
expliquées autrement que ne le fait M. Piette. La première idée qui vient
à l'esprit est qu'il s'agit de restes d'un corps mal enterrés que des carnas-
siers sont venus dévorer en partie. Mais on peut supposer également qu'ils
représentent des débris humains arrachés à quelque hôte féroce après un
dépeçage partiel.
J'ai vu également au Musée de Saint-Germain le cnlne humain presque
entier que M. Piette dit avoir trouvé « dans l'amas tarandien de la rive
droite, au Mas d'Azil. » Je ne comprends pas que cette pièce, précieuse
comme d'âge quaternaire, n'ait pas été soumise à une étude attentive.
Il m'a paru, d'aprèsun premier coupd'œil, d'ailleurs bien rapide, que l'opi-
nion de M. Piette sur son âge, était également susceptible d'être révisée.
J'ai revu enfin ces fameux galets coloriés qui sont ornés de larges
bandes rouges aujourd'hui très piVles. Et je me suis extasié devant la
fertilité d'imagination de M. Piette qui a tiré de ce bariolage des signes
graphiques, des caractères linéaires semblables à ceux des plus anciens
alphabets phénicien et grec, considérés comme des générateurs de ces
derniers. Il les a également rapprochés des signes mnlquQs {Bullet., 18!)7,
p. 286) et a fini par affirmer l'existence de deux écritures, l'une hiéro-
ils 18 ucn.miK lîWn
glypliiquo, rauire cursive, chez nos troglodytes de l'Age du renne (L'An-
thropologie, 11H)5, p. 9).
I II savant Portugais fort distingué, encouragé par son exemple, s'est
lancé dans la même voie aventureuse à propos d'inscriptions sur pierre,
assez suspectes, de dolmens de Traz-os-Montès. Et il a rapproché décidé-
ment les runes des caractères néolithiques de la Péninsule. Or, les signes
runiques, comme je l'ai exposé longuement, nous sont, je le répète, bien
connus dans leurs origines. Ils proviennent d'une imitation des lettres
romaines. Et cette imitation n'a eu lieu qu'après le contact des Germains
et des Romains sur le Rhin. Le plus ancien monument runique existant
(la lance de Kowel), ne peut pas èlre antérieur au ii'^ siècle. V. Revue de
l'Ecole d'Anthropologie, 1907, p. 1 Communauté de langue de la Germanie,
l'écriture runique...)
LES MORES DU ROI RENE
Par m. le D^ E. T. Hamy.
Président de la Société.
C'était, h Angers comme à Aix en Provence, une Cour singulièrement
originale que celle du bon roi René, dont je vous disais récemment quel-
ques mots à propos des mores blancs ou autres que l'on y pouvait voir.
Ménestrel eitunnenrs (ténors), acteurs de mystères et de moralités, farceurs,
balleurs, jongleurs, danseurs de corde affluaient autour de ce prince
curieux, aimable et généreux. Puis c'étaient des musiciens, harpiste ou
doulçainier, trompette, tabourin ; c'étaient des fous ei petits sots, un cer-
tain Triboulet entre autres, sorte de nain microcéphale, somptueusement
vêtu, dont la tête, nous disent les seigneurs de Bohême qui visitent
Angers en 1466, ne dépassait guère le volume d'une orange ^
C'étaient enfin les înores du Roi, Turcs, Barbaresques, Nègres, auxquels
il faisait la vie douce et facile, en les transformant en chrétiens. Villeneuve-
Bargemont nous a conservé le souvenir d'un de ces convertis qui recevait
un florin d'or « pour faire ses pasques ^ » le 11 avril 1476^.
Ces personnages exotiques, achetés à des courtiers ■* ou reçus en
• Lecoy de la Marche. — Le roi René, sa vie, son administration, ses travaux
artistiques et littéraires, t. II, p. 151, Paris, 187S, in-8».
' Villeneuve-Bargemont. — Histoire de René d'Anjou, duc de Loîvaine et comte
de Provence. Paris, 182.i. in-8*, t. III, p. 351. — Lecoy DE La Marche, op. cit.,
t. II, p. 3(i7.
3 .Ircfi. des Bouches-du-R/iône, B. 21o, f* 5. — Je tiens ce renseignement et tous les
autres empruntés à la mêm ; source de la conplaisance d3 M. J. Fournier, archiviste-
adjoint, do Marseille.
•4 Id. ibid. t. III, p. 3ol. — Cf. Arch. des Bouchesdu-Rliône, B. 2û, f» 17.
K.-T. HAMY. — r.ES MORES DO ROI RENÉ 419
cadeau *, comptaient pour une certaine part dans le personnel inférieur
de la Cour Angevine ou Provençale, et les comptes de 1447 h 1449, les mé-
moriaux de 4450 à 1489, analysés par Lecoy de la Marche* fournissent à
leur sujet des renseignements caractéristiques dont l'analyse peut oiïrir
un certain intérêt à nos yeux.
Les premières comptabilités qui nous ont été conservées nous mettent
en présence d'un personnage qualifié more blanc el qui répond au nom de
Monnet Alibcrl. Il est compris dans une note de tailleur de 1447 avec
quatre autres serviteurs dont deux petits tnores qui reviendront plus loin et
par contraste devaient être des mores noirs.
Monnet-Alibert fait parti de la a fourrière duilit seigneur ». Il nous appa-
raît vôtu d'une jaquette de drap à pointes doublée de toile, d'un pourpoint
de futaine et d'une paire de chausses, et monte un cheval acheté pour lui
au prix de 20 florins de « messire Isnard de Correis, prebstre de
Toulon. »
Moiinel-Aliberl, le more blanc, est un des hommes de confiance du Roi,
qui tantôt l'envoie à Fréjus « pour aucunes de ses affaires » et tantôt lui
donne mandat d'aller à Tarascon « emballer et mectre a point certaines
choses estrangesque icellui seigneur envoie en Angers » par son serviteur
Maincque.
Un second more, Falco, que les comptes distinguent du précédent sous
le nom de çjrand more, a été présenté à René le 19 septembre 1447 par le
ménestrt'l Robin Françoys, joueur de doulçaine, qui l'a amené de Solliès.
C'était quelque Turc ou quelque Barbaresque. On lui fournit entre autres
équipements, des robesde sarazin acquises de l'orfèvre Raoulin ou de l'apo-
thicaire Marc et « ung couteau turquoys » et l'on sait avec quelle atten-
tion le roi-artiste, au service duquel il entrait ainsi, poursuivait la
recherche de la couleur locale.
Falco a vécu seize ans à Angers, en compagnie des dromadaires et des
chèvres du Roi; il y est mort en octobre ou novembre 1463. Il jouissait
d'une j)ension de 72 11., était habillé par les soins du concierge du
château et nourri sur la recette de Chantoceaux et les rachats de la Tur-
melière et de Lire. Trois mandements de René au receveur de ces biens
Jehan Verde, en date des 7 novembre 1450, 10 novembre 1451 et
21 janvier 1452, enjoignent de payer, baillier et délivrer à « nostre bien
amé servicteur Ivhes Cadorat la somme de 66 h t... pour nourrir et
alimenter nos more, dromadaire et chèvres estans en noslre chastel
d'Angiers. »
1 Francisque Michel r.icoiito l'histoire d'un Turc qui fut offert au petit Jehan fie
Saiiitrè par un gentilliomme espagnol avec sa feinru.! el sus enfants « Ir.'s grands
ouvriers de fil d'or et de soie » (Francisque Michel : Recherches sur les étoffes de soie
.d'or et d'argent pendant le moyen âge. Paris, 18."j4, in-4', (. Il, p. 311.
- A. Lecoy de la Marche. — Extrait des comptes et Mémoriaux du Roi René
pour servir à l'histoire des arts au XV' siècle (Docum. hist. publiés par la Soc. de
l'École des Chartes. l>aris, 1873, in-8-, pp. 92, 94, 96, 607, 744, 767, etc.).
.i20 18 OCTOBRE 1906
Au «léct'^s (le Falco la rente dont il bônélit:iait fui attribuée à Bertrand
(iosmes, le gardien des bêles sauvages et des oiseaux du Roi ' et h Oes-
selle, sa femme, elle aussi qualitiée de inore (5 novembre 1463), Bertrand
(lOsmes a reçu cette pension jusqu'en avril 1477.
Je n'ai dit qu'un mot plus haut des deux petits mores qui, par opposi-
tion h Monnet dit more blanc étaient sans doute des mo^rs noirs, des
négrillons plus ou moins purs. Il semble qu'ils soient arrivés à la Cour à
la fin de 1447, car c'est à la date du 10 novembre de cette année qu'ils
apparaissent dans la comptabilité oITicielle pour recevoir un complet
équipage. Ce sont des robes vertes, doublées de blanc, qu'on fait confec-
tionner pour eux par les cousturiers Claux et Berthault, des houzeaux,
des "souliers, des baudriers « pour saindre » qu'on achète a Jacquet,
cordouannier suivant la Court. Ce sont encore « trois cannes de blanchet »
que l'on paie à Pierre Corpecy, drapier d'Aix « pour couvrir les bardes
(selles) que « fait faire ledit seigneur pour les deux asnes » que vont
monter les moricauds (moriscos).
Le Juif Bonmaquetdu Pont de Tarascon, un des fournisseurs ordinaires
du roi René leur apporte le 13 décembre 1448 « quatre chemises garnies
de petiz draps lonsg » deux pourpoints de futaine, deux paires de chausses
blanches, deux « jacquetes de drap gris de Josselin », deux bonnets blancs,
deux ceintures de cuir, des aiguillettes et cordelettes et il n'est pas trop
malaisé de se représenter à l'aide de ce petit inventaire ces jeunes
étrangers qui contribuaient pour leur part au pittoresque de la Cour.
Les comptes permettent de soupçonner un de leurs principaux emplois.
C'étaient ces moricauds, probablement, qui exécutaient devant le roi à
Orange ou ailleurs cette danse more ^Ethiopum que l'on appelait la morisque.
Bien d'autres choses étaient aussi à la morisque, dans le matériel de la
Cour; estreefs (étriers) et éperons, épées et couteaux, touaitles (toiles) de
mores, targettes (petits boucliers) « à la fasson de Turcs », etc., et contri-
buaient à constituer un milieu approprié à ces personnages exotiques de
races diverses au milieu desquels se complaisait la fantaisie du bon Roi.
Le mémorial de 1476, que j'ai déjà cité plus haut d'après M. J. Four-
nier, nous fait connaître un dernier More, joueur de flûte celui-ci, et qui,
avec le fou Paillon et les tabourins Pierre et Coquillon, contribue à égayer
les voj-ages de René ^ Enfin celui de 1478 conservé aussi à Marseille nous
parle d'un « Turc venu de Turquye qui sçait parler tous langaiges ». Le
Roi l'a fait baptiser à Avignon au mois d'août de cette année « et porter
son nom ». On lui a payé 14 florins sur sa cassette « pour s'en retourner
son chemin -^ ».
* « Autrusses, serfs, biches, connils, paons et autres bestes et oayseaux estans en
sa sarde audit chastel d'Angiers » Ces animaux ont été remplacés le 17 septembre
1471 par t une bisclie cornue, une brcbiz de Barbarie, une brébiz de Prouvence, ung
bouccstain (bouquetin^ unj^ porc e?py, ung cinge et une cingesse. »
* Les mentions relatives à ce personnage se lisent des f* '6 au f* 3b de ce registre
et se placent entre le \-2 avril et le 6 août.
^ Arch. des Bouches dxi-Iihône, B. 2483, f 9.
nONS A LA SOCIKTK 1:21
83:J« séance. - 8 Nnveiiihro 1901).
l'itKSIDKNtlK l»K M. SkIIII.LOT.
DONS A LA SOCIÉTÉ
.M. <». N'ai \ii.i,K ollVc [idiir la l)ililiollu'(jiio «le la Société :
1" Une brochure avant pour titre « l'Enceinte de Pommiers {Noviodu-
niim des Suessions) », comprenant 22 lijj;ures dont un plan de l'oppidum qui
a déjà été reproduit dans les bulletins de la Société (vol. 1894. p. 261); un
autre plan, qui est reproduit ci-dessous ', avec la légende, représentant la
même enceinte trauloise et celle du camp de César, dune superlicie d'environ
77 hectares 20 ares, située au nord de l'oppiduni.
Le camp romain, très bien situé pour l'attaipie de. la rurlercsse gauloise com-
prend environ 29 hectares 59 ares sur le territoire de Pommiers, 35 hectares 01 are
sur Pasly et 12 hectares 69 ares sur le territoire de Vanxrezis.
La découverte de ce camp, avec fossés généralement de l'orme triangulaire,
analogues à ceux d'Alésia. dont il a reproduit les coupes, pour les coujparcr h
celles de fossés, découverts par lui en 1904, sur Pommiers, Pasly et Vauxrczis.
ne laissent aucun doute que c'est bien là l'enceinte du camp de César, venu en
l'an 57 avant J.-C, pour faire le siège du Noviodaniim des Suessions.
Pour les détails il renvoie à son article dont il a offert un exemplaire du
tirage à part, extrait des Méinoires de la Société des Antiquaires de
Fratice. t. LV, 1904-1905. p. 45.
Knsuite il fait remarquer que divers auteurs ont pensé et écrit que l'enceinte
de Pommiers était sur l'asly, c^est là une erreur, attendu que l'oppidum est
limité, du côté de Pasly, par un hameau de Pommiers dit le Le Ville, qui
comprend trois maisons et neuf grottes où sont 36 habitants de Pommiers,
d'après le dernier recensement.
Le chemin de ronde qui existe devant les grottes et les maisons sé|)are les
territoires de Pommiers et de Pasly.
Ou ne [)eul donc considérer, comme étant sur Pasly, (|ue les 35 hectares
faisant partie du camp de César, de même que 12 hectares 69 ares se trouvant
sur le territoire de Vauxzezis. dont il n'a jamais été fait mention dans aucune
publication, avant la découverte récente de ce camp de César.
'Z° Il offre ensuite un exemplaire du tirage à part de son article ayaiil pour
titre ; « Monnaies gauloises de Suessions à la légende CRICIRV » com-
prenant la reproduction de 31 variétés de ces monnaies : paru n'icuirncnt
dans la Revue numismatique. 1906, p. 117.
422 8 .NOVEMBRE 1906
PRESENTATION ET DESCRIPTION D'OBJETS DIVERS, DECOUVERTS DANS L'OPPi-
DUW DE POMMIERS (NOVIODUNUW DES SUESSIONS).
Pau m. 0. V au ville.
Comme il vient d'être question de l'enceinte gauloise de Pommiers,
située à environ 3.500 mètres au nord-ouest de Soissons, je pense qu'il
peut (Hre intéressant de présenter à la Société un certain nombre d'objets,
parmi les très nombreuses pièces qui y ont été trouvées et indiquer aussi
les principales découvertes *.
Je crois que cet oppidum, d'après le très grand nombre de monnaies
recueillies isolément dans l'enceinte, a été abandonné complètement vers
l'an 51 avant J.-C, contrairement à ce qui a eu lieu au mont Beuvray,
Alésia, etc., qui ont été occupés après la conquête romaine.
I. — Armes, outils et objets divers.
1. Pièce avec douille de 28 centimètres de longueur, avec lame tran-
chante d'un seul côté, de forme triangulaire de 17 centimètres de longueur
sur 52 millimètres à la base de la lame.
2. Même forme que le n° 1, longueur de 22 centimètres, lame de
152 millimètres de longueur sur 32 millimètres à la base.
3. 4 et 5. Même forme que les n°* précédents, variant de 16 à 18 centi-
mètres de longueur totale, lames de 9 à 12 centimètres de longueur et 15
à 22 milimètres à la base *.
6. Pointe de javelot à douille, de 15 centimètres de longueur; le milieu
forme nervure de chaque côté pour donner de la résistance^. D' Pic. Cechy
na usvite Dejin. Zwazek 2, pi. XXIX, cf. fig. 3 et 20 * (V. Praze, 1903).
7. Des pointes de javelots à douille, forme feuille, de 13 à 18 centi-
mètres de longueur. Musée Saint-Germain, salle 13, vit. 26, d'Alésia.
Pic, pi. XXIX, 23.
* La collectioa de M. L. Brunehant est celle où sont le plus grand nombre de ces
pièces.
* Les objets en fer avec douille, nos 4 à 5, que des auteurs ont pris pour des cou-
teaux, peuvent très bien se rapporter à une arme, genre de lance, comme le prouve
la pièce n» 5, dont la pointe se trouve très fortement recourbée, probablement par
suite d'un choc sur bouclier ou autre pièce résistante. A ma connaissance il n'a été
trouvé qu'un seul fer de lance; cela se comprend, les véritables armes ayant été
livrées à César. B. G. L, II. ch. xni.
' Pour certaines pièces j'indiquerai où il en a été trouvé du même genre. Les
objets no» 6 à 3t sont en fer.
* Dans la suite l'indication Pic se rapportera à la même publication sur les décou-
vertes faites à Stradonitz, en Bohême.
VALVIM.K. l'IlKSENTATION KT DKMiltlI'lluN ll'uUJKTS DIVK.KS 423
8. Pointes de flèches ;i (louille, forme feuille, de 95 millimètres do lon-
gueur. Musée Saint-Germain, salle 13, vit. :2t), .Mésia ; vit. 18, Bovidés
(Meuse), Pic, pi. XXIX, cf. •>.
9. Pointe de llèche, forme Iriangulaiio, ;i soie, longueur 111 milli-
mètres. Pic, pi. XXIX, cf. y (même forme mais avec douille).
10. 11, 17, 18 et 19. Pointes de Huches à soie, longueur de 51 à 111
milimèlres. Musée Saint-Germain, salle 13, vit. 21, Saint-Pierre-en-
ChAlro (Oise).
12, 13, 1 i, 15 et 16. Pointes de (lèches à douille, longueur de 40 à 60
millimètres. Musée Saint-(îermain, salle 13, vit. 21, Saint-Pierre-en-
Châtre; vit. 26, Alésia.
20, 21 et 22. Talons d'étendards ou autres. Musée Saint-Germain, salle
13, vit. . ., Mont Beuvray; vit. 26, Alésia.
23 et 24. Couteaux à soie, longueur 152 et 158 millimètres. Beuvray,
Bulliot, pi. XL VU, 9; Pic, pi. XXXIV, cf. 3.
23 et 26. Outils?, forme de ciseau de chaque bout, le milieu, plus
étroit, se trouve renforcé, longueur 111 et 130 milimètres.
27. Grandes clefs courbes, avec anneau de suspension ', celle du n" 27
de 243 millimètres de longueur. Musée Saint-Germain, salle 13, vit. 18,
Bovioles; vit. 21, Saint-Pierre-en-Châtre. Beuvray, Bulliot, pi. XLVI, 6,
7 et 8.
28 à 31. Styles en fer, longueur de 10 à Ho mil li mètres.
32. Styles en os ou en ivoire (plusieurs dont la collection de M. Brune-
hant), longueur du n° 32 de 1 11 millimètres. Pic, pi. XLIII. cf. 1 et 4.
33. Spatule en bronze, longueur 166 millimètres; arrondie d'un bout,
de l'autre extrémité forme de lancette. Pic, pi. XXl\', cf. 11 et 23.
34. Aiguilles en fer.
35 à 40. Epingles, alêne et poinçon en fer,
41 à 43. Poinçons en os. Pic, pi. XLVIll, 2 et 12.
II. — Objets de parures * et autres.
44 et 45. Grains de collier, en verre vert foncé, rubanés de jaune. Pic,
pi. VI, 4 et 32.
46 à 31. Grains de collier, de diverses couleurs, en verre. Pic, pi. VI,
cf. 9,10, 15 et 16.
52. Grains de collier, forme allongée avec aspérités, en verre bleu.
Pic, pi. VI, cf. 45.
53 à 59. Grains de collier en bronze, déformes diverses. Pic, pi. XN'III,
1, 3, 4et5.
60 à 64. Grains de collier, de diverses formes, en terre cuite. Pic,
pi. LVII, cf. 13,16, 38el39.
' Celle forme de clef était tiiorc en usage en Champagne, il y a quelques années,
pour ouvrir do l'extérieur, par un Irou de la porlo, l>s venoux placés à l'inlérieur,
* Les fibules seront l'objet d'un article spécial.
i'2\ H NOVEMBRE 1906
05. Grain de collier en os. Pic, pi. XLIII, 14.
»)(> h 68. Grains de collier en silex perc*^.
69 à 74. Fragmenls d'objets, de l'époque dite du bronze, destinés àêtre
refondus '.
73 ;\ 77. Anneaux ou bagues en bronze.
78. Bague en fer avec chaton (la pierre manque).
79. Bague en argent avec chaton, intaille en cornaline. Cette pierre
gravée a 13 millim(''tres de diamètre, elle représente un arbre à droite,
sur plan incliné; à gauche un massue dressée *.
Au sujet de cette bague je dois dire qu'il existe, dans la collection de
M. Brunehant, trois bagues en fer, avec intallle, qui ont été trouvées,
comme celle du n" 79, dans des fonds d'habitations gauloises, bien datées
par des monnaies.
M. Brunehant a eu l'amabilité de me les confier, pour les communiquer
à la Société des antiquaires de France '. Voici la description des bagues
et les empreintes.
La première est ornée d'une agate grise, de forme ovale, de 10 milli-
mètres sur 7 millimètres, sur laquelle on voit une massue entre deux
traits. La deuxième, aussi avec agate à plusieurs couches, ovale, de 9
millimètres sur 0 m. 0075, représente un paon a gauche au repos. La
troisième, la plus intéressante^ est ornée d'une superbe intaille, sur agate
également à plusieurs couches, ovale, de 13 sur 12 millimètres. On y a
représenté un pégase galopant h droite, dessus, entre la tète et l'aile, V;
entre l'aile et la queue, EL ; entre la queue et les pieds de derrière, VG ;
sous le cheval, NL L'inscription de cette bague est à étudier, car elle
peut varier suivant le départ de la lecture.
Il est intéressant de faire remarquer que le pégase de cette bague res-
semble, comme forme et allure, à celui des très nombreuses monnaies
en bronze, à la légende CRICIRV, qui ont été trouvées avec les bagues
dans les fonds d'habitations.
80. Bague en bronze filigrane. Pic, pi. VII, 7.
81. Chaton de bague en verre bleu. Pic, pi. VII, cf. 30.
82. Verre sphérique vert de 15 millimètres de diamètre, ayant proba-
blement servi pour parure.
83. Pendeloque en bronze, ornée de pointillés, de 42 millimètres de
longueur.
84. Fragment de miroir.
85 et 86. Rouelles en bronze, de 43 millimètres de diamètre'*. Pic, pi.
X, cf. 36 et 40.
87 et 88. Petits disques en os, de 12 à 13 millimètres de diamètre.
» Voir Bulletins de la Sociélé, vol. i904, p. 491,
* Pic, pi. VII, il y a dans cette planche plus de 20 bagues à chaton représentées.
* Séance du 30 mai 1906, reproduite, dans les Bulletins de la Société.
* Une rouelle du même diamètre est quelquefois genre sous le cheval des mon-
naies en or à la légende CRICIRV.
VAl'VILLK. — PnKSENTATION ET DKSCniI'TIUN d'iiHJETS DIVERS 425
89 et 90. Objets de bronze, indéterminés.
91. Boucle, (lo forme rectangtilairi', en bronze, de 10 millimètres de
largeur. IMc, pi. XXIII, cf. DO.
92 à 94. Boucles, de différentes formes, en bronze, de 18, 1!> et 21 mil-
limètres de largeur. Beuvray. Bulliot, pi. L, cf. 12, 27 et 29.
95 à 97. Boucles en bronze avec pKuiuette double et rivets, ayant servi
à fixer à une courroie, de 13, 15 et 17 millimètres de largeur.
98 et 99. Hameçon et harpon en bronze, pour la pèche.
100. l'iaquetle rectangulaire, en os, de 43 millimètres de longueur sur
10 millimètres de largeur, ornée de trois cercles centrés. Tic, pi. XLIV,
cf. 6 et 7.
101 à 106. Objets indéterminés en bronze.
107 <à 111. Petits outils, en bronze, de 24 à 39 millimètres de longueur.
112. Petit crampon en bronze. D'autres enfer ont été trouvés dans les
fouilles.
113 et 114. Clous rivets, en fer, avec large tète sphérique creuse. Un
très grand nombre de clous en fer, avec tôle plate, variant de 3 à 20 cen-
timètres de longueur, ont aussi été trouvés dans les fonds d'habitations.
115 à 120. Clous coniques en fer, pour chaussures(?J avec pointes sous
la tète pour les fixer.
121 à 130. Gouttelettes ou parties de bronze provenant de la refonte
de ce métal dans les habitations gauloises.
131. Forte partie d'émail ayant coulé dans une habitation. Beaucoup
d'autres objets en fer ont été aussi recueillis dans les fouilles, tels que :
fragments de cercles de roues, ronds de timons (■?), ciseaux à froid pour
couper le fer, disques troués, coins de fer, pointes à base cylindrique,
anneaux divers, fausses mailles, clous a œillet, clous à crochet, gâche,
creusets et pelle d'émailleur, etc.. Ces objets sont analogues à ceux du
Mont Beuvray. Musée Saint-(jermain, salle 13, vit. 8 et 9. Des pinces à
épiler en bronze (collection de M. Brunehanl). Musée Saint-Germain, salle
13, vit. 13 et 21, de Saint-Pierre-en-Chàtre. Pic, pi. XVII, 20.
Une sépulture humaine avec char a aussi été trouvée, un peu à l'est de
la lettre N du plan reproduit dans les bulletins de la Société, vol. 1894,
p. 260, par un nommé Denis Ilenriquel, en extrayant des pierres, vers
1840.
111. — Fibules.
De nombreuses fibules ont été trouvées dans les fouilles faites dans
l'oppidum. La collection de M. Brunehant en comprend 83, plus 44 que
j'ai pu recueillir, sans celles passées à d'autres personnes.
Cette série, bien datée, par de très nombreuses monnaies gauloises,
trouvées dans des fonds d'habitations avec les fibules, est très intéres-
sante.
Voici la description des principales formes et le nombre de celles que
je représente à la Société et celui de celles de M. Brunehant :
.i20 8 NOVKMHRK 190<)
1'^ Uuil libules en for rond (lig. i), avec ressort en spirale et fermoir,
longueur de 60 h. 80 millimètres.
Il y a dans la colleolion de M. Brunchaiit 1 i fibules en fer rond, plus
7 autres en fer ayant le dessus plat.
2° Trois fibules en bronze, en tige ronde, ressort de 6 tours •, l'une
d'elles, de 77 millimètres de longueur, est représentée (ûg. 2); la partie
du fermoir e?t ajourée.
Coll. H., 20 pièces variant de 40 à 99 millimètres de longueur.
3° Fibule en bronze, demi-rond, longueur de 36 millimètres, ressort de
6 tours (fig, 3); l'épingle manque.
4" Belle petite fibule en bronze, de 44 millimètres de longueur, ressort
de 4 tours. Le dessus est orné de deux nervures saillantes sur le bord, et
de trois traits en travers.
5" Une belle fibule en bronze, de 110 millimètres de longueur. Le des-
sus plat est orné de deux lignes droites sur les bords, ressort de 8 tours,
fermoir ajouré (fig. 5).
6° Cinq parties de fibules en bronze, dessus plat, de forme triangu-
laire, ressort de 6 tours, les épingles manquent. L'une d'elles est ornée
dessus de deux lignes ; la partie du fermoir est large et non ajourée, lon-
gueur de 68 millimètres (fig. 6).
Dans la coll. B. il y a 10 fibules en bronze, comparables à celles des
n"* 5 et 6.
7° Une fibule en bronze, le dessus en partie plat, ornée de cinq lignes
parallèles, ressort de 4 tours, longueur de 47 millimètres (fig. 7).
B» Deux fibules en bronze, le dessus plat de forme triangulaire, ornées
de 6 lignes droites, épingle à charnière formée par une pièce à part reliée
par un petit rivet, longueur 34 et 36 millimètres (fig. 8).
Cinq fibules analogues dans la collection de M. Brunehant.
9" Une fibule en bronze, le dessus très large, ornée d'une ligne perlée
an milieu, deux autres lignes pleines sont sur les bords, longueur de 36
millimètres, l'épingle manque (fig. 9).
Collection B. une pièce du même genre.
10" Trois fibules en bronze, le dessus de forme triangulaire, ornées
de quadrillés séparés au milieu, par une partie droite un peu saillante,
épingle a charnière * (fig. 10).
Dans la collection B. il y a 7 pièces du même genre.
Il» Une fibule en bronze, le dessus large en forme de losange, ornée
de trois traits et d'une petite collerette, longueur de 48 millimètres, l'épin-
gle a charnière manque (fig. 11).
Collection lî. 4 pièces du même genre en bronze.
120 Quatre fibules en bronze, le dessus assez large, ornées de diverses
* Toutes les pièces indiquées avec le nombre de tours sont à ressort à spirale.
* Les fibules avec épingle à charnière sont plus rarement trouvées avec l'épingle
que celles à ressort à spirale, ces dernières étant plus résistantes que les premières.
VÀUVILLK. {"UlCSENTATION ET DESCRIPTION u'oHJETS DIVEHS 427
manières, collerette un peu plus large ([ue celle du n'' 11, l'une déciles '
est ornée do traits, de petils anndclset de lignes perlées, longueur de 50
millimétrés (lig. 12).
Collection B. trois fibules en bioir/»î du même genre, dont une avec col-
lerette ajourée.
13° une très belle libule en bronz-e , avec collerette de 11) millimètres
de diamètre, ornée de deux cercles de grônetis, le dessus, du coté du res-
sort de 8 tours porte des lignes perlées; sur les bords, du coté du fer-
moir, sont deux autres lignes perlées; le milieu est orné de zigzags, lon-
gueur 51 millimètres (fig. 13) '.
140 En plus des fibules dont il vient d'être question, voici 12 fragments
d'autres en bronze, avec ressort ;i spirale.
M. Brunchant a aussi 12 autres fibules de diverses formes.
.le pense qu'il est intéressant de faire remarquer que la fibule du genre
du n" 13 est représentée ouverte, sur les monnaies en or à la légende
CRICIllV, comme l'a fait remarquer .Maxc-Werly *.
IV. — Poteries.
Un très grand nombre de fragments de poteries gauloises, bien datées
par de nombreuses monnaies de cette époque, ont été recueillies dans les
fouilles de fonds d'habitations.
Les formes, les dimensions et les orneaients de ces poteries varient
beaucoup; je renvoie pour les détails aux Bulletins de la Société, vol. 1894,
p. ^78, au sujet de 112 fragments de poteries gauloises présentées par
moi à la Société, dans la séance du 15 mars.
y. — Monnaies.
\o Monnaies fiauloises. — A ma connaissance, il a été recueilli, dans
l'oppidum de Pommiers, environ 2.000 monnaies gauloises, trouvées dis-
séminées, dans les fouilles d'habitations et dans toutes les parties de l'en-
ceinte.
J'ai donné dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de France,
» Cette fibule a été étamée on argentée.
« Les 13 variétés de fibules ont été représentées dans : Mémoires de la Société des
Antiquaires de France , t. LXVI (1906), p. 10.
,» Une fibule analogue a été trouvée dans l'oppidum du Cliatelet (Haute-Marne) et
décrite par l'abbé Fourot, dans les Mémoires de la Société des lettres, arts, etc., de
Saint-Dizier, t. IV (1887), p. 88, pi. LIV.
Une autre, du môme genre, a été recueillie au Monl-Beuvray par M. J. Dehelelte.
Ces deux fibules avaient leur ressort à spirale protégé par une enveloppe métallique,
indiquant certainement l'influence romaine, contrairement à toutes celles de Pom-
miers dont le ressort n'est pas garanti.
4 Bulletin monumental, 1884, p.
i-2S 8 NOVEMIIRE 1906
T. LV, 1904-1905, p. 79', un inventaire de 1.945 monnaies gauloises,
comprenant 456 pièces de la collection de M. Brunehant.
l/examen de cet inventaire est des plus intéressants, on constate en
effet qu'il comprend de très nombreuses monnaies gauloises étrangères au
pays, telles que celles des peuplades suivantes * : Massilia, d'Avenio,
Segusiavi, Tectosages, Arverni, Aedui, Sequani, Bituriges, Carnutes,
Eburovices, Lexovii, Caletes, Veliocasses, Meldi, Silvanectes, Bellovaci,
Ainbiani. Atrebates, Nervii, Treviri, Aduatici, Leuci, etc., qui prouvent
évidemment que les habitants de iVotu"o(/u»M?/i avaient des relations, très
probablement commerciales, avec ces diverses peuplades, avant la con-
quête romaine.
Les monnaies gauloises les plus communes sont :
l» Celles en bronze à la tète de Janus, lion courant ou au repos au revers
(349 monnaies sur 1.945), qui sont dans la proportion de près de 18 0 0.
2° Les monnaies de bronze, d'argent ou d'or à la légende GRICIRV
sont de beaucoup les plus fréquentes (956 pour 1.945 monnaies), leur pro-
portion est de plus de 49 0 0.
Les découvertes des nombreuses monnaies à la tête de Janus^ de même
que celles a la légende CRICIRV, dans l'oppidum, ont permis de les attri-
buer avec certitude aux Suessions.
Les monnaies de CRICIRV, aux variétés si nombreuses, est l'une des
séries les plus importantes des pièces gauloises avec nom de chef, recueil-
lies dans le nord de la France.
Un certain nombre de ces monnaies ont été reproduites dans diverses
publications '. Comme parmi les 1.286 pièces que j'ai pu recueillir ^, de-
puis 1863 ■", de l'oppidum, il se trouvait 12 variétés inédites, j'ai donné
dans la Revue numismatique, vol. 1906, p. 117, un article ayant pour titre :
« Monnaies gauloises des Suessions à la légende CRICIRV », dont j'ai
oiïert le tirage îi part à la Société, 31 monnaies différentes y sont repré-
sentées, dont 18 variétés en bronze, 10 en argent et 3 en or. Sur ces trois
dernières la fibule n" 13, dont il a été question précédemment, y est repré-
sentée ouverte.
-2° Monnaies romaines. — Les pièces romaines trouvées dans l'oppidum
sont relativement peu nombreuses; voici, ;i ma connaissance, celles qui y
ont été recueillies, en comprenant 7 monnaies de M. Brunehant " :
1° Monnaies trouvées disséminées :
1. Un as frappé.
* Page 35 du tirage à part que j'ai offert à la Société. •
* Bévue numismatique, ]899, p. 270.
3 nevue uumismatifjue, 1S36, pi. X, 6; i833, pi. I, 3; 1885, pi. VI: 1886. pi. XI et
XII; 1893, pi. VIII. Jîerue archéologique, 1881, pi. VI, 24.
4 Ces monnaies ont été trouvées disséminées dans l'enceinte, principalement dans
des fonds d'habi'.ations.
5 Bulletin de la Société archéologique de Soissons, T. XVII (18G3), p. 282.
6 Mémoires de la Société des Antiquaires de France, vol. 1881-1885, p. 86.
VAIVII.I.K. - l'UlisENTATlON KT DKM'.ltU'TKiN d'oiuETS DIVERS ii>0
2 il 4. Trois deniers avec la tôte de l»allas à druile, de date inceitaine.
5. Famille PINAIIIA, éin. vers 200 av. J. Ch. '.
(). — PAIMIUA. — 13î) —
7. — l'o.Ml'l-IA, — 1-2'J _
8. — ANTESTIA, — \'2l —
9. - mi:mmia, — <)i _
10. - IN'.XIA. — HU _
11. - KNHUIA. — m —
1-2. - TiliMUA, ém. entre 1 1 1 et T'J av. .I.'cii.
i:{. — rUnCILlA, ém. vers 7!) av. J.-Ch.
U. — COIINKLIA, ém. entre Si il 1-2 av. .I.-Ch.
\">. — AUIUA, _ 44 î _
16. — CLAVDIA, — 43 —
17 et 18. Deux monnaies dWuguste.
18. Une de Tibère.
20. l'ne de Victorin.
2" .Monnaies de la trouvaille 1875 '^ :
Celte découverte, faite en extrayant des pierres, comprenait un petit
trésor, caché sous une pierre, composé d'environ 100 monnaies en argent,
comprenant des gauloises éduennes et séquanes et 5 pièces romaines se
rapportant aux familles suivantes :
1. MARCL\, émission vers 174 av. J.-Cli.
2. FViNDANIA, — 101 —
3. CIPIA, — 94 —
4. CORNE Ll.\, — 72 —
5. CASSIA, — 54 —
En plus des découvertes dont il vient d'être question, on a trouvé dans
l'enceinte de Pommiers beaucoup de silex taillés et polis de l'époque néo-
Ihitique, indiijuanl (jue cette position a été occupée ;i cette époque.
Conclusions.
1" Les nombreuses découvertes faites dans l'oppidum de Pommiers, la
très grande largeur du fossé et la haute muraille de la fortification prin-
cipale ^, la récente di'couverte du camp de C'^sar, d'environ de 77 hec-
tares, permettent bien d'affirmer que c'est bien là l'emplacement d(; l'an-
tique Noviodum des Suassions.
• Les dates d'émissi(jns sont celles ailmiscs par M. Raiielon Jaiis ses Monnaies de
la république romaine.
* Le peu de monnaies romaines, postérieures à l'an 57, de mémo qtic quelques mon-
naies gauloises émises après cette date trouvées dans l'oppidum, prouvent bien que
l'enceinte a été à peu près abandonnée après le passage de César. Ces quelques mon-
naies proviennent probablement des habitants des grottes creusées dans la contres-
carpe du relmncheiuent ou décolles du Ville: ces dernières ^Tottes sont méni • en-
core habitées de nos jours.
■' Bulletin arrhéoln(/i(/ue de Soissons, vol. IS82, p. «8.
4 Bulletins de la Société, vol. 1894, p. i'6t et fi^'. 2 et 3.
soc. u'antuhop. ^yOU 30
430
8 NOVEMHltK 1906
o.Vtui4,tlL.
^•-i?^
Plan de l'enceinte gauloise et du camp romain au 1/20.000* (i).
2» Le peu de monnaies gauloises et romaines, émises après l'an 57,
recueillies dans l'enceinte, prouve bien qu'elle a été abandonnée peu après
le passage de César.
♦ l.e cliché de ce plan a été prêté par la Société des Antiquaires de France.
VAl VII.I.K. — PIlKSENTATKtN ET DESCIIIPTION d'oUJETS DIVEHS i'M
'A" La fltM-ouvcrlc de IHT;'», cuiiiprciiaiil des uiDimaics (kluennes el sé-
quanes et 5 deniers .le la nipuldiqiu' [(jinaine, dont la plus n^cenle est de
l'an 54, peniiPt de croire t|u'après la di-faite des IJeliuvaciues sur l'Aisne
(J'A av. .I.-Cli.), César a oecupé l'uppiiluni, en passant, pour se rendre
dans la région située entre le Khin et la Meuse où Ainliiorix se révol-
tait V
C'est très probaiilement à ce moment (jue la haute muraille de l'oppi-
dum de Pommiers (environ Kî in-Hres de hauteur) a été versée dans le
fossé où les pierres sont actuellement recouvertes de plus de 3"'50 de rem-
blais '.
LKGENDE du I'LAN.
r.onrlii^s é(|ui(lis(antes do 5 en 5 mètres (raltilinic.
Liniilc lie territoire coiniuiiniil.
Souliers
N"' 1. 2. 3 et 4. Fouilles .le li)03. où lo lui" a été creusé |ioiu- forlilier le cainp
romain.
5, 6, 7 et 8. Talus, restes de la f()rtili<alion.
9 et 10. Tuf taillé, sur une forte liaiitour |)()ui' la défense.
11-12. Ouvrage do défense pour cimiiirendi'e les smirces A et \i dans l'eii-
ceinte.
13. 14, 15 et 16. Fossé do fortillcation bien conservé dans les bois.
17, 18, 19. 20 et 21. Parties do fossé de fortillcation bien visibles dans les
boie.
22. 23. 24 et 25, Talus bien conservé.
26. 27. 28 et 29. Restes de fortilicalions encore visibles.
30 et 31. Beau et fort talus de l'enceinte romaine.
32. Reste de la fortification romaine au point le |)lus rapproché de l'oppi-
dum.
A, B, C. D. E, F, G, II. el I. Sources utilisées par les Romains.
J, K, L. Fossé de forlitication de l'est du camp romain.
M, N, 0. Fossé de la fortification romaine, sur le front de la fortilieatioii (iriii-
cipale de l'enceinte gauloise.
P et Q. Roches visibles sur les choMiins in<li<|iMiil la dillicidlé de cieuser pro-
fomlémenl sin- la partie du fossé M. N, U.
H. Fndroil île la terrasse élevée par les romains pour }' établir des tours.
S. Partie la moins fortifiée de l'oppidum.
T. Puits, le 17'= découvert dans l'enceinte gaidoise.
U. Puits contigu à une habitation.
V. Puits ayant servi aux habitants rios gnjttes creusées dans la eonlresearpe.
U". V, et \. Fort ruisseau venant de .luvigny. à 5()0 mètres du noni-est du
camp où les chevaux des Koniains élaienl abreuvés.
» B. G. L. VII.
3 Bulletins de la Société, vol. 1874, p. 274 et tij,' 14.
43-2 8 NOVEMBRE 1906
MON OPINION SUR UN POINT DE MORPHOGENIE OSSEUSE
1*AR M. LE iJf FÉLIX ReGNAULT.
.le lis dans le Bulletin, séance du !•■■ février*, que j'avais attribué à tort
au l)nJ. Papillault une théorie de morphogénie osseuse qu'il n'avait ja-
mais émise ; à savoir l'action phagocytaire des muscles sur les os pour
expliquer la formation des fossettes osseuses. Je m'incline devant sa rec-
tification, et me serais incliné avant s'il n'avait attendu près de cinq ans
pour la faire.
Mais je ne voudrais pas que l'on put croire que je lui avais attribué une
théorie fausse pour le facile plaisir de la réfuter. Je tiens donc à dire les
raisons de mon erreur. Elles résident dans les quelques lignes qui précè-
dent et qui suivent la citation qu'il fait de son travail, lignes qu'il a
omises ; qu'on me permette de les citer :
« Rappelons, avant d'aller plus loin, une expérience très simple. Si
une aiguille osseuse pénètre dans les tissus, elle ne tarde pas à diminuer
de volume, et elle finit par disparaître complètement au bout d'un certain
temps. Ce n'est ni la pression sanguine, ni la tonicité des muscles, ni
l'élasticité des téguments qui a vaincu cette matière résistante. On sait que
ce sont les phagocytes qui l'ont entourée, se sont appliquées sur elle, ont décotnposé
la substance osseuse par leurs sécrétions, et l'ont en un mot digérée peu à peu.
« Or on sait que cette action ne s^ exerce pas seulement sur les corps inertes. »
Suit la citation faite par M. Papillault, page 69 du Bulletin. Cette cita-
tion se termine par ces lignes également omises :
« On peut même aller plus loin; si les mouvements augmentaient
d'amplitude, si les cellules avaient besoin de s'étendre, l'os céderait
devant elles, non par suite de leur pression, tnais à cause de leur surcroit
d'activité de la même façon que notre aiguille osseuse cédait aux phagocytes. »
Je mets en italique les passages les plus expressifs. Mon honorable col-
lègue conviendra qu'on pouvait s'y tromper et admettre que les muscles
digèrent l'os directement de la même façon que les phagocytes digèrent
les microbes comme l'a montré si heureusement le D"" Metchnikoff.
J'ai expliqué comment cette lutte était impossible puisque le muscle
n'est pas en contact avec l'os, il en est toujours séparé par un tendon.
C'est là le point qu'il importe de bien marquer, car le D"" Papillault, nous
répète dans sa rectification « le muscle étant parfois, pour des raisons que j'ai
déterminées, en contact avec le pé)'ioste par une de ses extrémités, agit sur la
couche ostéogène de ce dernier et imbibe son action ossifiante ». .
Si le muscle agit sur le périoste par ses produits chimiques il ne peut
le faire qu'indirectement, à la façon dont la glande thyroïde agit par ses
sécrétions sur les organes de l'économie.
1 Voir Bulletins de la Société d'Anthropologie, 1906, p.
• Id., p. 69, sixième avant-dernière ligne.
K.-r. IIA.MY. — NOTE SUR DES COLLECTIONS ANTHROPOLOC.IQUES 133
Celte action indirecte du muscle sui le pi^^rioste est, je le reconnais, une
nouvelle hypothèse dont je n'avais pas entendu parler. Mais elle uo s'ap-
puie jusqu'à présent sur aucun fait positif.
Discussion.
M. P.\piLLALLT. — Je renonce à me faire comprendre de M. Regnault.
Je rappelle seulement, pour les lecteurs de ces Bulletins, que mon article
sur la morphogénie osseuse comprenait ileux parties :
4" Une partie critique, qui montrait l'impossibilité d'explitjuer la forme
des os par des actions purement mécaniques des muscles dont on invo-
quait partout les etîels. On n'y a jamais répondu et pour cause. J'espère
ne plus voir admettre dans les essais futurs de morphogénie osseuse ces
processus hypothétiques dont l'action n'a jamais existé que dans l'imagi-
nation des auteurs.
2° J'ai fait h mon tour une nouvelle hypothèse sur l'action biochimique
que les muscles exercent sur l'ossidcation. J'attends, non qu'on discute
sur des mots, mais qu'on m'apporte des faits en contradiction avec elle,
comme je l'ai fait pour la précédente.
NOTE SUR LES COLLECTIONS ANTHROPOLOGIQUES,
recueillies par M. le Lieutenant L. Desplagnes,
DANS LE MOYEN-NIGER
PakM.E.T. Hamy,
Président de la Société.
Les deux campagnes, conduites avec autant de bonheur que de cou-
rage par M. le Lieutenant Desplagnes dans la région moyenne du Niger,
n'ont pas eu seulement des résultats de l'ordre géographique. Aux ren-
seignements tout nouveaux qu'il a recueillis sur la chaîne qui limite la
bouche du fleuve dans la direction du Sud, aux indications précises qu'il a
rapportées sur ce long chapelet de lacs à peu près inconnus qui reprodui-
sent dans la plaine à l'Est du grand fleuve les mômes phénomènes qu'on
avait observés déjà vers sa rive occidentale, M. Desplagnes a ajouté, en
effet, une quantité énorme de documents particulièrement précieux sur les
premières populations de ce vaste bassin, dont il a retrouvé les restes,
à l'état d'ilols ethniques, soit dans les lies et les marécages, soit dans les
hautes falaises méridionales '.
* Cf. L. Desplagnes. — Une mission archéologique dans la vallée du Niger (La
Géographie T,Xn\. p. 81-90, fig. 17-20, 1906). — Id. Le plateau contrai nigérien
(Bull de Géogr. Hisl. et Descriptive, 1906. p. 6.0-81 carte. Cf. Bull. Soc. d'Anthrop.
1er février 1906, p. 73-86.)
^3i 8 MJVEMUHK l'.»nO
Ces tribus, à peu près inconnues jusqu'ici, portent les noms de Sorkos,
dans la vall«îe, de Habis dans la montagne, et M. Desplagnes a fixé dans
ses notes, ses photographies ' et ses collections les survivances que distin-
liuiMil les unes et les autres, des nouveaux venus qui ont dépossédé les
aiicn'ns liahilants du sol et les ont refoulés dans les sites où on les retrouve
aujourd'hui.
Sorkos et Habés avaient largement développé jadis une civilisation
analogue ;i celle de notre période néolithique, et M. Desplagnes a réuni dans
unt' étonnante vitrine du Musée du Trocadéro des spécimens a la fois très
nombreux et fort remarquables de cette archéologie caractéristique.
Les Habés de nos jours ont d'ailleurs conservé un certain nombre
d'habitudes et de pratiques représentées aussi dans les matériaux de la
mission de M. Desplagnes par un certain nombre d'objets dont l'interpré-
tation lui a fourni des données ethnographiques instructives.
Knfin, gr.Ace à une petite collection de crânes et d'ossements, offerts au
Muséum et provenant d'anciennes sépultures fouillées par ce voyageur
dans les falaises de Bandiagara et des monts Dalla et Ilombori, nous
sommes en mesure de commenter, à un autre point de vue encore, cette
l'thnologic si nouvelle, et je me propose d'abordei- rapidement dans les
lignes qui vont suivre l'étude des affinités anatomiques de ces néolithiques
nigériens, hier encore tout à fait ignorés des antliropologistes.
La première série que nous ayons à analyser se compose de trois crAnes
exhumés d'une sorte d'abri sous roches entre Tougoume et Sigama, dans
\o cercle de Bandiagara. La sépulture avait été déjà violée; on y recon-
naissait toutefois des restes fort apparents de deux enceintes en pierres
sèches de formes arrondies ; la plus interne contenait de nombreux
restes humains orientés de l'Ouest à l'Est et des poteries rouges, bien
cuites, sortes d'escabeaux h pieds courbes ajourés, qui avaient dû servir
d'offertoires.
Les crânes recueillis dans celte tombe sont tous trois masculins, et rela-
tivement volumineux (capac. cr;\n., moyenne 14o5 ". circonf. horizont.
0 m. 513).
Cette augmentation de volume se traduit dans toutes les mesures diamé-
trales qui l'emportent, inégalement d'ailleurs, sur les mesures correspon-
dantes des Soudaniens actuels. Les diamètres moyens antéro-poslérieur et
Iransverse s'élèvent, en effet, à 0 m. 189 et 0 m. 137 et comme ce dernier
a pris une importance relative un peu plus considérable, l'indice céphali-
que, de 60.7 qu'il est chez les Soudaniens de la région du Niger s'élève à
7-2.4 chez les Habés de Bandiagara. Par contre, l'accroissement du diamètre
basilo-bregmatique étant moins scnsib'c que celui des deux autres dia-
Au nombre de plus de 500.
F,. -T. HAMY. — NOTE SUR HES COLLECTIONS ANTHHOI'OLOGIQLÎES 435
mètres, le rapport de l.i hauteur à la longeur s'abaisse k 7i,9 et l'hypsisté-
nocéphalie, habituelle à tous les f;roupes nigériens actui'ls «lisparatt,
l'indice (le liauleur-Iargeur demeurant inférieur à 100. f'J!>.2)
Ces crânes oITrent d'aillpuis la uiurphulogii- lial»i(in'll<' aux Soudaniens,
mais avec (|uel(|ue chose de plus massif et de [dus brutal. Ils ont surtout
les arcades sourciiiéres plus prononcées et les insertions de la baso beau-
coup plus apparentes. I.a région pariétale est relativement plus impor-
tante. La face est d'une rudesse frappante.
Toutes si's dimensions sont augmentées ;i la fuis en largeui' et en hauteur,
mais l'amplialion des dimensions verticales étant plus considérable, l'in-
dice facial de 710 qu'il est chez les Soudaniens modernes monte à 731.
Les arcades zygomaliques se détachent notablement, surtout sur un des
trois sujets, le plus grossier d'aspect de cette petite série, où elles devien-
nent de véritables mwe capitis.
Les mesures de l'orbite varient peu du Suudanien moderne au noir
ancien de Bandiagara et l'indice orbitaire change à peine d'un groupe à
l'autre (haut. 33""", larg, 38°"", ind. orb. 8()8j. L'indice nasal pris sur deux
de nos sujets seulement (le troisième est déformé par un vaste polype)
est un peu plus platyrrhinien chez les llabès que chez les Soudaniens;
la largeur du nez atteignant :28, la hauteur demeurant la même (50), l'in-
dice nasal se chiffre par 56 au lieu de 54.
Le prognathisme se traduit par des angles faciaux alvéolaire et sous-
nasal de 08° et de 78°; les mêmes angles mesurent chez les Soudaniens
63° et 76°.
Un fémur gauche, le seul os long rapporté par M. Desplagnes de Ban-
diagara mesure 477"»'", ce qui correspond h une taille de 1 m. 75 au moins.
II
Une deuxième série de crAnes provient des montagnes de Dalla. Ils ont
été tirés, le 12 février 11)05, d'une petite case en ma;;onnerie de 4 mètres
de long sur 2 mètres de large et 1 mètre de haut, ménagée dans un abri
sous roche à 200 mètres environ d'altitude dans la falaise qui borde au
sud le bassin lacustre dont il était question plus haut. M. Desplagnes sup-
pose que cette sépulture, qui renfermait les restes d'une (juinzaine d'indi-
vidus serait antérieure à l'arrivée desSonrhays dans la région (xii» siècle.
De ces cin([ crAnes de Dalla, (juatre .sont masculins; le cinquième a
appartenu ;i une femme relativement vigoureuse et un peu homasse pour
ainsi dire. Ces gens du Dalla appartiennent à deux types notablement
ditl'érents, l'un qui se rapproche plus à certains égards des Soudaniens
modernes, l'autre qui s'en écarte davantage au contraire.
Le premier type du Dalla, tout en conservant dans ses trois dimensions
une suprématie notable sur le Soudanien actuel présente des indices crâ-
niens presque identiques. Les trois diamètres mesurent respectivement
0 m. 191, 0 m. 133, 0 m. 139. Les indices correspondants se chiffrent par
43(> 8 .NovKMiinK 1Î)8G
0!(,(»; 7-', 7; lUi,;"). (Jiez les Soudanicns les mômes diam^-lres sont lepré-
senlés par 0,182,0,127, 0,133, mais les indices demeurent 69,7; 73,0;
101.7.
Il en est de môme des proportions faciales; les dimensions sont un peu
plus grandes, mais l'indice facial varie peu (71,4 ou bien 71,0) l'indice
orbilairc est exactement le m(}me, l'indice nasal exagéré (62,5 au lieu de
5i,0) dans le sens de la platyrrhinie.
Les angles faciaux sont presque les mômes; l'alvéolaire un peu plus
fermé (61°) le sous-nasal à peine un peu plus ouvert (77°).
Le second type du Dalla tend vers celte autre race nigritienne dont
j'ai essayé naguère de dégager le type sous le nom de nouba-haoussa * et
dont les sept tribus de ce dernier peuple représentent l'élément occiden-
tal. Ce sont presque les mêmes diamètres et les mêmes indices que l'on
relève chez les uns et chez les autres (Dalla (2) ind. céph., 76,7; 73,5
95,7. Haoussas, 77,2; 73,4; 95,0). Les variations des indices S(5nt.plus
étendues à la face, qui est proportionnellement un peu plus haute, mais
avec son nez qui reproduit les éléments numériques du type Dalla n° 1.
Les crânes des monts Hombouri, dont il me reste k dire quelques
mots, ont été trouvés le 8 février 1905 dans des fentes naturelles de rochers,
que recouvrent des blocs de pierre rapportés formant de petites chambres
irrégulières. Plusieurs sujets à la fois occupent la même cavité et sont
habituellement assez emmêlés pour qu'il soit impossible de faire, suivant
l'expression du voyageur, l'attribution individuelle exacte de chaque osse-
ment. Un sujet, sur les quatre qui nous ont été rapportés, est atteint de
scaphocéphalie; c'est une femme. Les trois autres sont masculins. Ils dif-
fèrent considérablement les uns des autres; le premier paraît rentrer plus
tôt dans le type que je viens de définir sommairement sous le nom de
Dalla n° 1, tandis que le 3^ rappelle de préférence le type n« 2 de cette
région.
Par les chiffres, la petite série du mont Hombouri s'écarte même assez
peu de ce deuxième type, quelques mensurations seules accentuent cer-
taines particularités telles qu'une brièveté un peu plus marquée delà face
et du squelette nasal en particulier.
La taille moyenne donnée par trois fémurs recueillis par le voyageur
serait k peu près la même que celle du sujet de Bandiagara, mais il n'est
pas inutile d'observer que l'un de ces trois os atteint 524"°'», ce qui cor-
respond à une taille des plus élevées.
En résumé le rapide examen que nous venons de faire nous apprend
que les Ilabés sont très franchement nègres dolichocéphales en moyenne
(74 d'indice) beaucoup plus prognathes que ne le soupçonnait notre voya-
geur (angl. fac. s. nas. 76° alv. 64"). Ils sont en outre d'une taille élevée
(moy. 4 fém. 0 m. 475) ainsi qu'il le proclame.
Ces nègres des montagnes ne constituent pas une race particulière
» Cf. Cranta Ethnica. p. 340 et suiv.
K. T. II\.MV. NOTE sru HKS Ciir.l.KCTIiiNS AM llUnl'itl.ui.lul l>
t:r
(M. Des{>l;i;L,Mies l'avult bien constiU(') ' mais lappillcnl les deux types
fondamentaux du Soudan actuel, Soudanions et Noubas *, sans (|u'il soit
possible d'établir d'ailleurs avec les Barliiresquns 1ns aHinilés que leur
elbno^'rapliio p.irail mollr^' on évidonrc
Ciiifl's antions il
3 la noIUclion Do
<|ilagiic.s
Crânes moilcrnos
Itan-
Oalhl
Hom-
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ML>1 i;i,s
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1455
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(an'oiif. li(iri/iiiitnli>
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525
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»
501
513
1). ant.-|)<ist
ISl)
lîll
ISC.
178
180
1<S2
181
— tiansv. ina\
137
133
143
138
136
127
140
— i.asii.-bn'-
13',;
72.4
71 !i
W 2
13!)
72.7
104.5
130
70.8
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70.5
97.1
12!) _
75.5
71.1
94.8
133
0!).7
73.0
104.7
136
Indice lar^'. Idiij,'
77.2
— liaiil. \t)u<i
73.4
— liaul. lai-fï
i»5.0
Diaiii. Iiotil. iiiax
115
111
110
113
115
lO'.l
116
— — min
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9()
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— l)i(irli. ext
110
110
110
100
105
101
108
— hizvyiim
134
133
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129
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130
Kaec liant
!»S
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8:1
indice lacial
73.1
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08.4
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38
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89.4
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80.1
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28
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27
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27
50
20
— baut
47
Indice na.sal
5ii.O
62"
740
G2.5
(il-
77'^
50. 8
63°
740
50.0
(i4"
810
60.0
65»
750
54.0
03"
7()"
55.3
Angle lac. alv
0>"
— s. nas
70"
_
I Bull, de Géogr hi.it. et descript , lOOG p. (i7.
* Cf. Cvania Elhnica, p 34fi et 3:J2.
438 2ii NovKMHRE 190r,
854" SÉANCE. — 22 Novembr.' 1900.
Présidenck i»e m. Il \MY.
M. AriiiKU |tn's('nt(^ îles (il))('ts en ds iii'iivcn.inl ilu I iinmhis ilu l'crs-Picrroiix.
au l'iiii-i^iix lie l'Ile (le !{(•.
.M. liKMKER rcml roiii[ilo (Je riii.iiiîîui'alion (lu nnuvoau Musée il'Kthnnrrraphie
(le Cologne, i'i la<|iit'lli> il avait assisté comme délégué odiciel de la Scjciélé.
VERIFICATION POST-MORTEM D'UN PELVIGRAWME RADIOGRAPHIQUE
obtenu par la méthode d i Professeur Fabre'.
PAR
M. P. Trillat, et m. J. Jarhicot,
Moniteur Clit.'f du Ltboialoire
do la Clinique obstétricale de Lyon.
Nous avons eu l'occasion de faire l'autopsie d'une malade morte à l'Hôtel-
Dieu de Lyon de tuberculose pulmonaire et qui avait été, un an aupara-
vant, radiographiée par la méthode du Pi^of. Fabre.
Il nous semble intéresssant de faire connaître les résultais que nous
ont donnés les mensurations comparées du radiogramme et du bassin
sec.
Nous avons pu examiner le cliché radiographique dû à l'habileté du
Dr Destot.
La liialade avait été soumise à l'action des rayons X en position « sur
le ventre », l'ampoule dominant le plan du lit de 50 centimètres et le
rayon normal d'incidence tombant à 20 centimètres en arrière de la règle»
pubienne. Autour de la malade le cadre denté avait été disposé suivant la
technique usuelle.
Les belles qualités photographiques du cliché rendent aisée sa lecture
et n'autorisent aucun doute, aucune approximation sur les contours du
détroit supérieur. — Nous retrouvons du reste dans ce phototype les
avantages incontestables de la position « sur le ventre ». — L'angle sacro-
vertébral se détache nettement sur le fond clair de l'excavation. Les
vertèbres sacrées ne donnent qu'une image légère et transparente.
La symphyse pubienne et tout l'arc antérieur s'enlèvent en traits vigou-
reux *.
* Pour l'exposé de cette naéthode et sa bibliographie, voyez Donnezan. — De la
mensuration des diamètres du détroit supérieur par la radiographie. Thèse, Lyon,
1906.
* La reproduction en simili-gravure laisse malheureusement à peine deviner la
précision de l'image originale.
TRIM-AT El JAlîlUCnT. VÉRIKh: A I luN Ii'l N l'KI.VKlH \MM|-. It \I)|(h,|; vl-MIul K i.'{!>
iiO 22 NoVEMitiiK 190G
l.e radiogramme ayant été redressé avec soin p.ir la méthode ordinaire
sur le [lapier quadrillé au millimiHre^, voici les chiffres que nous avons
oblenus :
TRILLAT F.T JARRICOT. — VKRIFICATInN n'i N l'KI.VIilU AMMK H AlHiiCIt AlMMul K i41
Diamètre promonto-puLien miiiiimiiu 6.,7
— Iransvcrse médian 12.7
— transverse niaxiniuni 14,3
— <>l)liiiue droit 12,2
— iil)lii|LH' gauche 12,0
— sacro-cotyloïdien droit b,9
— sacro-cotyloïdien gauche 7,1
Le Ijassin recueilli ;i l'autopsie a ét<'' décharné par les procédés ordi-
naires de macération mais non chaulé; il a été d'ailleurs vissé avant la
macération, suivant la technique du Prof. Fahre*. Les rapports des diiïé-
rentes pièces osseuses sont donc sur le hassin sec exactement ce qu'ils
étaient sur le vivant.
Les mesures que nous comparons à celles du radiogramme sont prises
sur la pièce sèche ; mais les recherches de l'un de nous ont montré que
les variations hygrométriques des os du bassin sont minimes et (ju'en
tout cas, « si l'on veut calculer avec une approximation aussi possihle
que possible les dimensions cadavéri(iues d'une série de bassins secs
vissés, il faut et il suiïit d'augmenter do :2 à 3 millimètres leurs princi-
paux diamètres » -.
Sous le bénéfice de ces remarques, il est évident que nous sommes
dans les conditions les plus satisfaisantes pour vérifier l'exactitude de
notre radiogramme. Or, voici quelles sont les dimensions relevées sur le
bassin sec.
Ceotiinètres.
Diamètre promonto-pubien mininmni (),5
— transverse médian 12.9
— — maximum 14,2
— iliauiètre oblique droit 12
— oblique gauche. 12,5
— sacro-cotyloïdien droit (>.(>
— sacro-cotyloïdien gauche B,i)
Si nous comparons terme à terme les mensurations du radiogramme et
les mensurations du bassin sec, nous obtenons des diiïérences faibles au
point d'être pratiquement négligeables. — Par rapport au bassin sec, le
promonto-pubien minimum du radiofjrainine csi augmenté ào. 2 millimètres;
le transverse maximum de! millimètre; l'oblique droit de -2 millimètres,
* Les résultats que donne cette précaution ont été bien étudiés par Bourrud. —
Du vissage, des os du bassin avant la macération, technitjue et résultats, travail du
laboratoire de la clinique obstétricale de Lyon, 1904.
* J. .Jarricot. — Le degré d'humidité des os joue-t-il un rôle important en ostéo-
métrie? —Bulletins de la Société d'Anthropologie de Lyon. 190li.
4.iiJ -- NOVEMltRK 1900
l'oblique gauche de 1 millinit'*lre ; le sacro cotyloïtiien droit de 3 milli-
nuMios ; le sacru-folyluïdien j^'auche de û millimètres. — Le transverse
médian semble di7ninni' au contraire d*e "2 millimètres. — On peut voir du
reste que dans la région de l'arc antérieur le contour du radiogramme
est interne par rapport au contour du bassin sec (pointillé) tandis qu'à la
région sacrée c'est le contraire.
Voici l'explication de ce fait paradoxal.
Nous avons superposé nos deux courbes en les orientant d'après le
transverse maximum, ce qui est irréprochable.
Nous avons cru devoir d'autre part ne rien interpréter dans nos dessins
et donner les contours tels quels.
Or, nous comparons à l'H. A. * du bassin sec la projection radiogra-
phique d'une région assez mal déterminée et composée en tout cas de
plusieurs plans. Kn opérant avec des bassins secs cerclés de fils métal-
liques, l'expéiience nous a appris que — toutes choses égales d'ailleurs —
l'Il. A. passe, dans l'arc antérieur, à 3 millimètres environ en arrière des
contours donnés par la radiographie.
Il nous eut été facile — et légitime — d'interpréter notre phototype et
de redresser en conséquence notre ladiogramme. Nous avons cru plus
correct de nous borner à fournir cette explication.
Le tableau suivant va faciliter les comparaisons. Nous y indiquons les
chiffres des mesures, les écarts absolus et le pourcentage de l'erreur.
Mensurations comparées du radiogramme et du bassin sec.
Les mesures sont exprimées on millimètres.
Si D. du B. sec =
Sur le Sur le Ecart 100 centim.
Radiogr. Bassin sec absolu l'écart =
Promonto-pubien miniinum . 67 65 — 2 S^niO?
Transverse maximum 143 142 — 1 0,7
Transverse médian 127 129 +2 1 , 55
(H.iiqiif droit 122 120 —2 1,6
(ll.li(pie gauche ,. 126 125 —1 0,4
Sacro-colyloïdien droit 69 66 — 3 4,5
Sacro-cotyloïdien gauche ... 71 69 — 2 2,8
En somme, Verreur moyenne est de 2 millim. Il ; mais cette erreur, si
minime déjà, doit être réduite encore par une épuration correcte des
calculs, c'est-à-dire en tenant compte de la variation hygrométrique (2 à 3
millimètres) dont nous avons parlé.
1 /foî-i contai Anthropologi(/iie pour la .signification et la détermination de ce plan.
Rf. J. Jaruigot. — Méthode et appareils pour obtenir des figurations rationnelles du
détroit supérieur, in Bull, df la Société d'Aulli7'opolo(/ie de Lyon, 190G et Remarques
et expériences sur une méthode radiograpliique de mensuration des diamètres du
détroit supérieur. Eod. loco, 1906, ±2 lig. et in Thèse de DoNNEZAN.
K.-T. IIAMV. — AUl EMUAS, WAlUiLAS, HANGO-llANCOS M'A
On jugera sans doute avec nous (lu'un toi résultat se passe de commen-
taires et qu'il démontre d'une manière ijéreniploiic rexcellenco de la
méthode radiographique du Pruf. Fahre.
Discussion
M. Papillault. — Je me suis fait un plaisir de présenter le travail de
MM.TrilIat et .larricot, car il nous apporte la scjlntiun d'un problème très
important en anthropométrie. I.es dimensions du bassin et son inclinaison
dont j'ai présenté une étude, il y a quelques années, dans mon mémoire
« I/homme moyen ;V Paris » constituent des caractères fondamentaux de
la morphologie humaine. La souplesse de la marche, la gnïcc de l'attitude,
chez la femme surtout, dépendent de l'inclinaison du bassin. La ligne des
hanches, la forme des fesses et du ventre, se rattachent aussi ù cette
inclinaison et aux diamètres de l'organe. Malheureusement on ne pouvait
établir entre les caractères du squeilette et les apparences esthétiques du
corps vivant aucun rapport certain ; quand, en etî'et, on pouvait mesurer
le squelette, le cadavre était déformé, et quand on pouvait noter les carac-
tères esthétiques, on ne pouvait étudier le squelette. La technique de
MM. Trillat et Jarricot ouvre aux chercheurs une voie nouvelle, et j'es-
père que ces ingénieux chercheurs ne manqueront pas d'utiliser eux-
mêmes leur découverte, en établissant entre la forme du tronc et le
squelette sous-jacent des rapports numériques précis.
AOUEMBAS, WAROUAS, BANGO-BANGOS
Notes sur une petite collection de crânes rapportés par M. Ed. Foâ de la région
des grands lacs africains.
Par m. E.-T. FIamy.
Nous ne connaissons guère les peuplades localisées dans les régions
intermédiaires au Nyassa et au Tanganyika que par la monographie du
D"" Fulleborn publiée à Berlin en 1902. L'auteur de ce précieux travail a
constaté dans cette région la présence de tribus à la fois nombreuses et
variées. Les plus puissantes sont établies dans les plaines fertiles, les plus
faibles ont été refoulées dans les monts Livingston et sur les plateaux (jui
s'y rattachent.
M. Fulleborn a mesuré 234 indigènes appartenant à sept groupes diffé-
rents et sur ce nombre total, 95 seulement offraient des indices céphaliques
inférieurs à 75 ; 20 ont présenté des indices de 80 et au-dessus et l'en-
semble se décompose à peu près de la manière suivante :
Dolichocéphales (au-dessous de 75). ... 40 0/0
Mésaticéphales (de 7G à 80) 52 0/0
Brachycéphales (au-dessus de 80) 8 0/0
\U 22 NOVEMIIRE 1î)0fi
Sur ces 234 sujets, mesurés parle voyageur allemand, 28 appartenaient
à la population des plateaux et sur ces 28 sujets 11 rentraient dans la pre-
mière catégorie, 13 dans la seconde et 3 dans la troisième, donnant les
coefficients iO, 40 et 14.
Il se rencontre donc chez les peuples des plateaux, comme dans la masse
totale des nègres au Nord de Nyassa, 40 0/0 seulement d'individus fran-
chement dolichocéphales, les sujets mésalicéphalcs l'emportant sur ceux-ci
de 6^12 0/0, tandis que 8 à 14 0/0 de la population dépassent l'indice 80*.
Cette prépondérance des formes intermédiaires (46 à 52 0/Oj ne s'aurait
s'expliquer, à mon gré, par l'action plus ou moins hypothétique d'un
élément plus ou moins brachycéphale qui nous fait complètement défaut
dans l'ethnogénie sud-africaine. Mais je serais tenté d'y chercher l'inter-
vention de ce groupe ethnique particulier, que j'ai essayé autrefois de
dégager dans une communication au Congrès de Moscou qui est devenue
le chapitre X des Crania Ethnicn. Ce groupe que j'ai qualifié d'abord de so?/-
danien n° 2, par opposition au soudanien proprement dit (n°l) comprenant
Nigériens et Nilotiques,. a reçu depuis lors le nom de Nouba, emprunté à la
nation la plus connue entre celles où prédomine la morphologie cranio-
faciale particulière qui me le faisait distinguer. Il embrasserait les Nou-
bas du Nil Bleu et du Takkalé, certains nègres des montagnes du Kor-
dofan et du Darfour, les Ahbîts du Dar Bertat, etc. J'y ai rattaché pro-
visoirement les populations haoussa *.
Ces tribus dispersées sur une aire immense avaient comme caractéris-
tiques communes, au point de vue craniologique, un volume plus consi-
dérable (cap. cran. 1.455"; cire, horiz. 513°"»); un indice céphalique
sensiblement plus élevé (77.2) grâce à l'augmentation considérable du
diamètre transverse (140™'") ; la diminution corrélative de l'indice verti-
cal qui se maintient au-dessous de 100 (95); la dilatation générale de la
face(diam. bizyg. 139°i°>) enfin un type particulier de prognathisme où
se combinent un certain degré de projection du squelette facial déjà sen-
sible vers l'espace inlerorbitaire, et une sorte de torsion transverse qui se
manifeste au niveau de la plus grande largeur et a pour résultat de ra-
mener légèrement en bas et en arrière l'arcade maxillaire en dilatant
quelque peu les malaires. Ceux-ci sont comme projetés en bas et en
dehors et l'angle inférieur devenu saillant dessine parfois une sorte de
bec au-dessous de la pommette. Le profil facial prend par suite de cette
torsion une convexité très apparente, la mandibule est de force moyenne,
le menton fuit et la branche montante est fort inclinée sur l'horizon-
tale «.
Ce type dit Nouba-Haoussâ ne se rencontre pas seulement dans les ré-
gions où je l'avais d'abord localisé, à l'aide des collections que je connais-
< Cf. Man. 1902, n" 21. Fulleborn, anal, de Shrubsab.
* Crania Ethnica, p. 3'i0 et suiv. Il faut bien se garder de confondre les Noubas
en question avec les Nabous qui sont des Chamiles uégritisés.
3 Ibid.. p. 342.
K.T. HVMV. — A<»Uii:.MHAS, WaIIOI'AS, UANGO-BANCOS 445
sais il y a un ijuail de siècle. Il s'étend beaucoup plus loin et je viens de
le retrouver extraordinaireuienl accusé parmi les |ii<>ces, en trop petit
nombre, recueillies par le regretté Ed. Foà dans cette partie du Continent
Noir, dont j'ai dit quelques mots en commençaol cette lecture.
En etîet. parmi les crânes rapportés au Muséum par ce voyageur des
contrées (jui s'étendent entre le Xyassa, le Tanganyika et le Haut-Congo,
il s'en trouve un, qui accumule et exagère la plupart des caractères
résumés ci-desus; c'est celui d'un adulte, de sexe maculin, (]ue Foâ s'est
procuré dans le pays des Ouvouas * entre le Tanganyika et la Louvoua *.
C'est une tète d'un grand volume qui se traduit k la fois par une large
capacité (1745'-'^) et une circonférence considérable (cire, horiz. Om. ,"i40);
toutes ses dimensions sont représentées par des chiffres élevés, le trans-
verse est surtout développé et donne un indice céphalique qui dépasse 80,
tandis que le basilo-bregmatique ne dépassant pas les dimensions ordi-
naires, l'indice de hauteur largeur reste au voisinage de 89 (d. a. p.
0 m. 188; d. tr. max. 0 m. 15:2; d. bas. bregm. 0 m. 130; ind. céph.
80.8; 7:2.3; 89.4).
Toutes les autres mesures de largeur sont également très étendues; le
frontal atteint un maximum deO m. 132 avec un minimum de 0 m. 101;
le biorbitaire externe monte à 0 m. 114 et le bizygomalique s'élève jusqu'à
0 m. 141. La hauteur de la face ne dépassant pas les dimensions habi-
tuelles, l'indice facial s'est abaissé à 64 o. L'espace interoi'bitaire est élargi
(0 m. 029) et si les orbites n'olfrent rien de particulièrement remarquable,
le squelette nasal se montre à la fois dilaté et raccourci (haut. 0 m. 049,
larg. 0 m. 028) et l'indice monte à 57.1. Le prognathisme est mesuré par
des angles faciaux de 77", 64° etoS*'.
Une partie de ces caractères se retrouvent avec des atténuations diverses,
chez le Bango-Bango, rapporté par Edouard Foà des plateaux, entre
Mtova et Nyangoué '. La capacité diminue, tout en demeurant supé-
rieure à celle des Nègres vrais, tous les diamètres sont amoindris, mais la
tète demeure sous-dolichocéphale et n'a pas reconquis son hypsisténocé-
phalie. La face se rétrécit, la platyrrhinie n'a point diminué et l'angle
facial sous-nasal s'est sensiblement fermé.
Ainsi que le montre le tableau de mensurations annexé à cette note, ce
Bango-Bango est à bien des égards une sorte d'intermédiaire entre le
rouroua dont je viens d'exposer les meilleurs caractères et l'Aouemba
dont je vais maintenant dire quelques mots. Cet Aouemba, rapporte par
Edouard Foà de Ngouana, village nègre sur un alïluent du Tchanibézé,
entre le Nyassa et le Tanganyika ' est fort semblable au vrai Soudanien,
* Uruha d'Edwarl C. Hore {On the titelve Tribes of Tanganyika Journ. Anthrop.
fnsfil of Great Britain and Ireland, vol. XII. p. 2, pi. I); Rua do V. Giraiil {Les
lacs dA'Alt'ique Equatoriale, Pari.s, 1890, iii-8*, p. 220).
•Voyez la carte qui accompat,'nc le livr.i d'Ed. Foà (Chasses aux grands fauves
du Zaïnbfse au Congo français. Paris, 19(t0, 1 vol. in-8").
' Voyez la même carte, Hore ne parle pas de cette tribu qui n'est pas riveraine du
lac.
soc. d'anthhop. i906. 31
4i<.» 22 NovEMUUE iOOG
avec sa capacité' médiocre, s;i doliclioci'plialic cxagcrôe (70), son indice
vertical su|)('ri('iir ;\ 100(iO;{.l) ses propoi'lions faciales, de. Je n'insiste
pas sur les détails d'un type d'ailleurs bien défini, et je veux seulement
appeler une fois encore l'attention en tenuinanl sur cette juxtaposition
de typ^'s ethni(|ucs qui siMuhlent répéter- en les exagérant dans ces régions
nouv(>lles qui s'ouvi-entà nos études, les phénomènes de même ordre cons-
tatés déjà dans les contrées moins ignorées du Soudan Nilotique ou
Nigérien.
Al. Ilouzé, <]ui a eu l'occasion d'étudier en 1886 trois crânes provenant
d'une région comprise dans les mêmes limites que ceux de la collection
Vo:\, est arrivé aux mêmes conclusions générales que moi-même '. Com-
mentant en passant les mesures que Dulrieux ' nous a données de dix
crânes de Wanyamouezis, il déclare que le tableau qu'il en adressé com-
prend trop de mésaticéphales « pour n'admettre chez ce peuple qu'une seule
race », et négligeant cet élément particulier sur lequel j'insistais un peu
plus haut et dont noire M'Roua reproduit si bien la plupart des carac-
tères, il se montre disposé à aller chercher l'explication de ce dualisme
morphologique chez les Pygmées de la grande forêt équatoriale "*, ce que
rendent tout à fait inacceptables, à mes yeux, la plupart des traits relevés
par M. Ilouzé lui-même sur les sujets dont il a si bien exposé les carac-
tères céphaliques et faciaux.
(Juoiqu'il en soit, nos renseignements sur les populations des plateaux
intermédiaires aux grands lacs et au cours supérieur du Congo, sont
encore bien précaires. Six sujets répartis sur une aire immense sont bien
insuffisants pour édifier une théorie quelconque. Aussi me bornerai-je (et
ce sera la conclusion de ce court travail), à constater la concordance géné-
rale des renseignements que ces six crânes nous fournissent, d'une part,
avec ceux que la cràniométrie nous avait précédemment appo'rtés au sujet
des régions plus ou moins voisines ^, et de l'autre, avec ces mensurations
de M. Fulleborn dont je parlais au début de celte communication, qui
mettent en présence, dans la même grande région géographique d'où
proviennent nos documents d'aujourd'hui, deux groupes, l'un dolichocé-
phale, l'autre mésaticéphale, qui pourraient bien se rattacher aux deux
* Ed. Foa. — Traversée de l'Afrique Equatoriale, de l'embouchure du Zambése..,
à celle du Congo par les Grands Lacs. {Compt. rend. Soc. Géogr. 1898, p. tM-118). —
Cf. V. GiRAUD, Op- cil , ch. XI et sniv.
' Voyez notamment la p. 48 du Bulletin de la Société d'Anthropologie de Bruxelles,
pour 1»8G-1887. (IIouzÉ. Les tribus occidentales du lac Tanganyika.)
' P. DuTRiEUX. — Souvenirs d'une exploration médicale dans l'Afrique intertro-
picale, Bruxelles, 1885 br. ia-8', p. 118 et suiv.
* Ibid., p. 50. ^
5 Cf. V. Jacques. Contribution à l'Ethîwlogie de l'Afrique Centrale. Huit crânes
du Haut-Congo {Bull. Soc. d'Anthrop. de Bruxelles, t. XV, p. -188. - R. ViRCHOW.
Schadel von Batuba und Congonegern (Verhandl der Berlin, Anthrop. Gesellsch.,
1886, s. 766).
E.-T. IIAMV
AOIRMIIAS, WMtDl A>, llAN(iO HANiîOS
441
types crAniens (juo je (•oinmonr-.iis à dislingiici- di'-^ ISHO d.ins ^Af|•i^|lle
l']qnatoriaIi' -
Cràno <!
5 la collcc
ion Foà
Crànos do lu coiloclion Storins
(liaiiiy 1
(llûuzd)
MKSIRKS
M'Houa
banj-o
M 'Bomba
M'run^a
.M'l'ainp:i
MTûin-
houa
i 6
1 6
1 6
1 6
1 6
1 6
l'.îipar. ( raiiicniK» apinoilK'c
1745--
14:)5''^
1405-'
1600"-
1600''-
1370--
('.in-niilÏTcnrc liDriziiiilalr. .
5.10-
510"-
512"-
528
53.')"""
510""
liiaiiK'trc aiit. post. iiiax.. .
188
182
187
188
189
190
— Iraiisv. max
152
139
131
140
136
125
— liasild-lireiMii . . .
13C.
138
130
137
136
135
Iiiiliii's lai'if. lonj?
80.8
76.3
70.0
7'i 4
71.9
65.7
— liant. 1(1111.'
72.3
.S9.4
75.8
99.2
72.7
103.8
72.8
'.•7.8
71.9
100.0
71 0
— liant. lari(
1<»8.0
1). iront, ninxiiiinni
1:52
IIC)
110
110
116
102
— — iiiiiiininni
101
104
90
100
95
100
— Itiorl). cxlcnii'
114
29
141
91
04.5
m
28
131
92?
70.2?
108
24
135
96
71.1
115
29
137
95
69.3
108
29
134
88
65.6
113
— inlpi'orljitain'
30
— l)i/V','oniali(ine
134
Ilantenr face
90
Indice racial
67.1
Orbilo Inngncni'
39
34
87.0
49
28
41
31
75.6
49
28
41
34
82.9
5()
29
45
37
82.2
51
33
40
35
87.5
48
25
43
— hauteur
33
Indice nrhitaire
7(i 7
.Nez hauteur
42
— Iar;,'eur
28
Indice nasal
57.1
77"
57 1
72û
51.7
770
64.7
750
52.0
70°
66.0
.\ngles faciaux sous nasal..
72<^
— alvéolaire . .
64"
()2"
»
66^
65»
63°
— dentaire
59°
»
»
»
»
»
* Crania Ethnica, p. 340 et suiv.
.448 6 dkcembre; 190G
8di)« SÉANCK. — 0 Décembre lOOli.
Présidence de M. IIamv.
Election pour le bureau de 1907.
Le Président donne lecture du règlement. Le dépouillement du vote par cor-
respondance est lait par M. Weisgerber. (Jn tire au sort les noms des trois
membres cliargés de faire le dépouillement de scrutin. MM. Rivet, Avelot et
Ch, Schleicher sont désignés.
Le nombre de votants étant de 87 sont élus :
Prt'sident Zaborowski : 79 voix.
^cr Yire-Prèsident Cuver : 80 —
5« Vice-Président d'Echerac : 80 —
Secrétaire général adjoint Papillault : 75 —
] Anthony' : 84 —
Secrétaire des Séances ^ Dussaud : 86 -
, ^ ,, ,• ( Delisle : 86 —
Conservateurs des Collections. • ■ ] i, oc
ou«oc#i/« ^ DE MORTILLET : 85 —
Archiviste-Bibliothécaire Rabaud : 85 —
Trésorier Huguet : 87 —
( Demker ; 86 —
Commission de publication . . . . < Hamy : 84 —
f SÉBILLOT : 86 —
Élections de membres titulaires.
M. DuBDA.\. présenté par MM. d'Ault-du-Mesnil, Capitan. Paul Raymond.
M. Jarricot, présenté par MM. Hamy, Papillault, Anthony.
M. le Commandant Bonifacy, présenté par MM. Deniker, Manouvrier. Anthony.
M. de Mortillet fait entendre à la Société des Phonogrammes de musique
bolivienne.
M. le D' Rivet présente des observations sur cette musique et compare celle
des régions équatoriennes avec celle des hauts plateaux boliviens.
DON ET PRÉSENTATION D'OUVRAGES
M. Ed. Fourdrignier. — J'ai l'honneur d'offrir à la Société une petite étude
intitulée : UÉclairage des grottes j^aJéolithiques devant la tradition des
7noninnents anciens où j"ai tenté, par suite de déductions, de proposer une
explication des moyens avec lesquels les troglodytes avaient pu s'éclairer dans
leurs habitations souterraines.
Depuis longtemps cette question préoccupe plusieurs d'entre nous, auxquels
les explications données par l'emploi de lampes très rudimentaires ou une dis-
DON ET PIIÉSENTATION d'oUVRAGES i i'J
jiosition particulière de l'œil ne paraissent pas bien concluantes. Nous avons
songé alors à plus do probabilités par un fniploi factice de la lumière directe
du jour.
Vn éclairaj:e do co yonro do caves oliarn|ionoises, d'une élondue parfois consi-
dérable puisque cortaiiies ont jusqu'à dix kilomètres, nous mit sur la voie.
Dinërents textes du poète Fortunat que nous eûmes h étudier à [)ropos d'im
éclairage assez curieux et fréquemment usité dans les églises du vi« siècle qu'il
avait visitées de son temps, nous amenèrent ii expliquer l'obscurité de certains
passages et de quelques expressions do Fortunat. en admettant do l'analogie
avec l'éclairage des caves champenoises.
Or, si les Mérovingiens d'alors étaient ingénieux pour éclairer leurs monu-
ments, sous ce rapport les anciens depuis longtemps les avaient devancés. Leurs
ronnaissances sur l'optique sont démontrées par leur haute science astrono-
mique. Puis, en ce qui nous concerne, l'immensité des vaisseaux de leurs
monuments, décorés aussi, souvent dans les endroits les plus profomls, prouve
bien qu'ils savaient y ménager la lumière pour que l'on puisse les voir et (ju'ils
n'ignoraient aucun des secrets d'un éclairage entendu et parfait.
C'est ce dont nous avons pu nous convaincre aussi bien dans les monuments
de l'Egypte, les palais assyriens, les temples de l'Inde que dans les trésors
mycéniens.
Partout c'était la lumière directe du jour qui, savamment dirigée, servait à un
éclairage autrement puissant que tout autre artificiel qui, dans plusieurs de ces
hypogées, n'aurait pu suffire.
Ce sont ces multiples observations qui nous ont fait accepter, que cette
manière, aussi simple que naturelle <lo faire pénétrer la lumière du jour, directe-
ment ou par réflexion sur des surfaces propices dans les endroits profonds,
avait été conservée jusqu';\ nos jours par suite de traditions extrêmement loin-
laines et que la simplicité de ce moyen d'éclairage pouvait aussi avoir été connue
par les chasseurs de rennes des grottes de la Vezère.
Telles sont les conclusions où nous avons été conduit. Comme nous nous
devons aussi n la vérité, depuis la publication de cet essai nous avons reçu un
assez graml nombre de lettres, même certaines assez curieuses comme éléments
nouveaux.
Si presque la plupart sont très encourageants, en acceptant volontiers la
probabilité de notre proposition, quelques-uns, rares il est vrai, mais qui ne
sont pas les moindres dans la manière, pensent que si cette hypothèse est sou-
riante, pour eux ils ne peuvent l'accepter : parce que avec lagencement actuel
de ces grottes, il ne leur parait pas possible ({u'un rayon ilo la lumière du jour
ait pu jamais y pénétrer.
Nous ne sommes encore qu'il l'aurore de ces révélations, le dernier mot pour
nous n'est pas non plus encore dit. Aussi, tout en nous inclinant devant l'au-
torité de nos aimables contradicteurs, c'est avec sérénité que nous attendrons...
Chi lo sa?
150 6 DkcKMiiiti; iDOd
WUSIQUE BOLIVIENNE
Par m. Edouard Kourdrignier.
L'audition de différents morceaux de musique recueillis parmi des indi-
g<^nes de Bolivie, au moyen du phonographe, nous a conduit à plusieurs
observations '.
Il y aurait d'abord deux parts assez distinctes à faire dans les phono-
grammes que nous avons écoutés :
La première comprend les airs chantés. Ce sont la plupart des mélo-
pées H mouvement lent, d'un accent triste, soutenues par quelques accords
d'instruments à cordes pincées.
Pour la seconde^ les morceaux ont une allure différente et plus animée.
Ils sont exécutés par des instruments de cuivre de facture européenne
qui rappellent ceux de nos fanfares.
Le premier groupe, considéré comme étant d'inspiration indigène, pos-
sède plusieurs particularités. En dehors d'une tonalité fort peu différente
de la nôtre, ces airs se caractérisent surtout par leurs mouvements. Tout
en appartenant aux mesures à trois temps qui, selon les règles com-
prennent un premier temps fort^ un second faible et un troisième moyen-
nement fort, pour eux il arrive souvent que le premier temps fort est
déplacé et qu'il se retrouve au second temps pour produire alors une
syncope avec le troisième. Puis le mouvement à trois temps, par sa len-
teur devient assez indécis et la mesure alors passe en deux temps toujours
assez vagues. Ces mesures alternent alors et se réunissent pour composer
des dessins qui s'enchaînent, pour former la phrase mélodique, à la ma-
nière habituelle des stances d'une poésie ou des vers d'un quatrain.
D'après les auteurs, les mesures à trois temps, dites de mouvement ter-
naire, sont celles que l'on retrouve le plus .souvent dans les airs les plus
anciens et aussi dans beaucoup de ceux des peuples primitifs. Mais les
mesures à deux temps, ayant un premier temps fort et un second faible,
ainsi que leurs diverses subdivisions qui constituent le mouvement bi-
naire, bien que considérées comme étant plus récentes, se rencontrent
aussi quelquefois dans les chants anciens.
La combinaison de ces deux mouvements binaire et ternaire, assez
variée et même parfois compliquée, donne le rythme mélodique aux
' Sociélé d'Anthropologie, Séance <lii G décembre 190!î. Présenlalion par M. Adrien
do Morlillel, de phonogrammos rapporlos d'une n-iission scientifique dans l'Amérique
du Sud.
ED. FOURDRIGNIER. — MUSIQUE IIOLIVIENNE 451
notes plus ou moins élevées qui se succèdent pour fonncr un air ou un
morceau.
Quand on rapproche et compare plusieurs de ces airs entre eux, on y
reconnaît faciloment plusieurs parentés qui sont communes h tout un
groupe ethnique. Puis dans celte formule générale, on peut encore dis-
tinguer quelques accentuations qui constituent, dans le langage musical
commun, des idiomes en quelque sorte particuliers, alTérents h chaque
nationalité.
C'est ainsi, qu'en France par, exemple, nous reconnaissons facilement
un habitant du Nord d'un habitant du Midi à sa manière de prononcer et
de parler pourtant la même langue. Dans certaines provinces où des
patois ont été conservés, on arrive môme à ne pas confondre ces parlers
de village à village.
Pour le rythme musical, quand il s'agit seulement de mesures à deux
temps ou à trois temps et de la combinaison de ces mouvements, il n'y a
pas grande difficulté pour les reconnaître et notre transcription musicale
habituelle, à la rigueur, est assez suffisante.
Mais il y a d'autres nuances bien plus délicates qui, tout en se saisis-
sant assez bien à l'exécution d'un morceau, ne peuvent être que fort rela-
tivement transcrites avec la manière actuelle dont se servent nos musi-
ciens.
Ainsi dans certaines occasions, nous avons pu entendre le même mor-
ceau exécuté par des orchestres de nationalités différentes. Quoique com-
posés du môuie nombre de musiciens, jouant les mêmes instruments et
se servant de la même musique imprimée, nous avons pu parfois remar-
quer, sans être pourtant bien connaisseurs, qu'il y avait quelque chose,
comme une manière dilTérente dans leur exécution. C'est ainsi que sans
trop hésiter, pour chacun de ces groupes de musiciens, nous avons pu
reconnaître si c'étaient des Italiens, des Français ou des Hongrois jouant
à la dzarda.
Pourtant, telle que maintenant et partout la musique est enseignée,
avec les mêmes méthodes, l'emploi d'instruments d'une fabrication iden-
tique et l'interprétation presque des mêmes œuvres de maîtres pour for-
mer l'éducation musicale, on peut dire que de tous les arts, c'est bien la
musique qui constitue un véritable langage universel qui se lit, s'entend
et se comprend dans tout le monde entier. Cependant, comme nous venons
de le voir, il y a certaines accentuations propres i\ chaque nationalité (jui
permettent de les distinguer à l'exécution.
Mais notre enseignement actuel n'a pas toujours été ce qu'il est, les
instruments ont été souvent très différents. Plusieurs même ne sont plus
usités et, quaux aux œuvres à interpréter pour propager le goiU, selon
les temps et bien d'autres considérations, l'art musical de régions à régions
s'est modifié d'une façon profonde.
\:\'}, 6 DÉc.EMBiu-: 1906
Ce sont toutes ces caractéristiques quil nous importe de connaître et
do préciser tout autrement que nos moyens habituels nous le permettent :
car, même pour ceux déjà versés dans l'art musical, il ne leur est pas
possible de transcrire les subtilités si minimes de ces nuances de style.
Au plus, avec une certaine virtuosité, pourraient-ils les indiquer en accen-
tuant sur leurs instruments ou par la voix certains passages.
La manière de transcrire les sons et la musique mérite donc toute notre
attention : car pour atteindre des résultats nous avons besoin d'une tout
autre fidélité. Une méthode autrement scientifique s'impose.
On voit donc, combien l'emploi du phonographe devient intéressant
pour nos recherches. Il enregistre tout ce qu'il entend et qui est mis à sa
portée : la tonalité des sons plus ou moins élevés d'un chant, les nuances
subtiles d'une diction et pour les mouvements, le rythme qu'altère fré-
quemment un ralentissement ou bien une accélération. Tous ces moindres
détails qui ont leur valeur pour nous se trouvent par lui fixés chronomé-
triquement.
Comme on peut faire reproduire au phonographe plusieurs fois la
même audition, en ralentissant au besoin le mouvement réel, la valeur
des observations a une tout autre importance. Puis il n'est plus besoin
alors pour observer d'avoir de grandes connaissances en musique, à part
pour les sons qui demandent une éducation de l'oreille. Et encore bientôt,
il n'en sera peut-être plus besoin puisque tout récemment on est arrivé à
photographier la parole et par suite tous les sons musicaux.
Si la dictée musicale a bien sa valeur, elle est artistique; tandis que les
phonogrammes en ont une autre, qui est scientifique. Comme rapproche-
ment, ils sont entre eux ce qu'un dessin parfait est à la photographie
d'un objet qui nous renseigne souvent au delà de ce que l'œil peut per-
cevoir.
Ajoutons encore, comme on l'admet et paraît vraisemblable, c'est qu'à
leur origine, les premières modulations rythmées furent une aide, comme
un besoin, pour régulariser les efforts réunis de nombreux ouvriers dans
des travaux d'ensemble. Ainsi la traction d'un fardeau, l'érection d'un
monument, les coups de rames en cadence d'une embarcation, le pas régu-
lier d'une troupe en marche et aussi dans certaines cérémonies des gestes
d'ensemble, tous ces mouvements se trouvaient facilités par des chants
qui précisaient un coup d'énergie.
Par la suite ces excitations cadencées se modifièrent, les paroles chan-
tées prévalurent, la mélopée s'accentua pour former un air, la phrase
musicale.
Enfin, ce que nous apprend encore l'histoire, c'est que de tous les arts,
c'est la musique qui se développe le plus tard dans chaque période civi-
lisatrice et c'est seulement, quand elle arrive à son apogée, que cet art à
El), lui Rin<ir,NIEU. — MlSIoUE BOLIVIENNE iDS
son tour s'y épanouit. Alors tous les sentiments de l'Ame humaine s'y
révèlent les instincts guerriers, rexallalion religieuse, les joies, les tris-
tesses, tout ce qui personnilie le caractère d'une nation se rellète dans
son art musical.
L'étude de la musique d'un peuple nous ulVrc donc de précieux rensei-
gnements pour le connaître plus intimement, expliquer ses gloires, ses
faiblesses jusque même ses faits politi(juos. Souvent encore, nous y recon-
naissons des influences, suite de rapports extérieurs ignorés qui ont
parfois modifié certains côtés du caractère national.
Après ces quelques observations générales, il nous sera plus facile de
faire quelques remarques sur les pbonogrammes concernant la musique
bolivienne.
Nous n'avons que peu a nous préoccuper des modes et des tonalités de
cette musique, parce que sous ce rapport, elle procède de la môme ma-
nière que la nôtre. Les intervalles se composent, en efl"et, de tons et demi-
tons bien définis, donnant la gamme chromatique classique.
Quant aux accords (jui accompagnent les motifs, ils rentrent aussi dans
les règles de l'harmonie qui nous est enseignée, à part quelques sur-
prises assez audacieuses de cadences auxquelles nous sommes moins ac-
coutumés.
Sur cette partie technique nous pouvons déjà conclure que, si antérieure-
ment les modes étaient différents, ils ont maintenant un caractère fran-
chement européen, que l'on peut faire remonter jusqu'à la conquête.
Ce qui s'explique très bien par les influences de noire musique importée,
les cantiques et chants religieux des missionnaires du xv^ et du xvi" siè-
cle, les jésuites du Paraguay, région peu éloignée, qui confine la Bolivie.
Or, on sait, surtout quand il s'agit de populations mélomanes, avec quelle
rapidité un air s'apprend vite et devient |)0pulaire. Aussi, de la manière
ancienne des modes et de la tonalité nous n'en retrouvons plus de traces
certaines.
D'ailleurs les instruments nouveaux introduits, le genre guitare accordé
différemment des leurs et surtout les instruments en cuivre de facture
européenne ont bien vite fait abandonner les anciens. L'éducation de
l'oreille est devenue tout autre.
Ce n'est donc ni dans leur harmonie, qui est une conception assez
moderne et n'a pris son essor que vers la Renaissance, pres(jne ;iu mo-
ment de la découverte du Nouveau-Monde, ni sous le côté mélodique
que nous pouvons retrouver une origine.
Ce que l'on peut remarquer sous ce rapport, c'est qu'à des airs plus
anciens, sans doute indigènes, il y a eu des adaptations de l'harmonie
importée. Quand les accords étaient trop compliqués, on les a simplifiés,
voilà tout.
Ainsi dans une cadence de sous-dominante puis do dominante pour
l.'jl fi rtKCEMHHE 1906
tomber sur la toniijuo, il est rare que l'accord de sous-dominante n'ait pas
disparu,
l'ar exemple au lieu de la marche harmonique avec accords sur la basse :
fa. sol, do, nous les trouvons sur celle de : sol, sol, do.
Enfin le passage aux tons relatifs du majeur ou mineur est comme
interverti par des alternances de (juinles, ceijui produit des effets bizarres.
Il est encore à remarquer pour la musique en fanfare, que les accom-
pagnements reproduisent servilement ceux qui conviennent seuls aux
instruments ;i cordes pincées, types guitare; c'est une imitation constante
du pizzicato. Four les airs du premier groupe dits indigènes les quelques
accords toujours en pizzicato n'indiquent pas non plus que les instru-
ments à archet, tels que les violons, aient été en grande faveur.
Ouant aux autres instruments à vent comme les flûtes, les liautbois
plutôt destinés à jouer un chant qu'à faire de l'accompagnement, quelques
anomalies qui consistent en notes que rationnellement on devrait trouver
diésées ou bémolisées et persistent à rester naturelles, elles font préjuger
de ce qu'ils étaient précédemment. C'est que la tablature de ces instru-
ments ne permettant pas de faire la noie accidentée, on s'est servi alors du
doigté de celle possible d'à côté.
Aux premières auditions de ces escamotages, on est un peu surpris, car
on sent bien qu'il y a une faute, mais peu à peu, à force de l'entendre,
on s'y habitue. C'est ainsi que l'éducation de l'oreille peut se fausser. Par la
suite, cette anomalie devient une caractéristique, laissant une preuve de
l'usage d'instruments moins perfectionnés seulement n'étant propres qu'à
une musique moins savante que la nôtre.
Les instruments à vent et à trous peuvent, comme on le voit, donner
aussi des renseignements complémentaires assez utiles pour reconnaître
des influences et édifier sur une musique à modes difîérents de ceux pour
lesquels on les a conservés.
Ces anomalies prouvent même une connaissance assez sommaire des res-
sources de ces instruments : car plusieurs de ces notes accidentées sortent
justes et très bien en employant certains doigtés qui ne souffrent aucune
difficulté. Ce qui indique bien qu'ils sont joués par routine.
Le premier groupe de morceaux indigènes, étant le moins influencé,
attire donc plus particulièrement notre attention.
Ces airs n'ont pas, comme notes, une très grande étendue, la plupart
ne comprennent, au plus, qu'une quinte presque toujours à tierce mineure.
C'est dans l'agencement par exemple des six notes : ré, mi, fa, sol, la
que nous les retrouvons tous cantonnés. Si le ton du morceau est plus ou
moins haut, l'ordre des intervalles reste toujours dans ce sens. Mais il ne
s'ensuit pas, comme notre règle musicale nous y invite, qu'un morceau
commencé dans un ton s'y termine.
Ainsi, un des premiers phonogrammes entendus commence pour les
ED. (lit UDItlilMKIl. — Ml SlglK llnl.l VIKNNE i")0
deux premii'res mesures, on la inint'ur, relonilje soudain en la majeur et
repasse en la mineur, (^omme finale, il se termine i\ la quinte en n'- naturel
mineur avec l'accord de ré, fa, la sur le la ; nous ne sommes pas lial)itu<5s
à cette finale ('transe (jui nous laisse dans rallciid', com si la |tliias<' mu-
sicale n'élail pas finie.
Dans une rumplainte (Ju('idnia, d'un luuiivcmenl en 4 .S allcrnant avec
triolel de mouvement ternaire et un temps de deii\ notes en -_' -i, le thème
commence en ré majeur, passe dans son relatif si mineur, l'uis. après
moilulations semblables se termine par un accord de quinte augmentée
sur le ré ré, fn (dièse), la (dièse)J pour cadencer en si nalurel mineLir
'si, ré (nalurtd), fa (dièseV.
Cet accord ré, fa Cdiôse), la (dièse); avec son ré nalurel pourrait être
considéré en ré.ililé comme un renversement de l'accord imliqué de sep-
tième sur le fa (dièse), avec sa quinte augmentée, ré ; naturel) pour do
(dièse).
.Mais ici nous pouvons reconnaître que c'est un inslrunuMit (pii en est
cause; car sur les (lûtes primitives, sans la clef spéciale pour donner un
do (dièse), elles ne descendent qu'au ré naturel qui a été substitué pour
tourner la difficulté.
D'autres exemples de ce genre seraient encore à produire. Us indicpient
les influences d'une musiipie étrangère et la persistance d'instruments
plus anciens comme usage.
.Mais c'c^sl surtout dans les mouveiinMils, les rythmes p niiculieis puis,
dans ces accentuations subtiles que seul le phonographe p'iil enregistrer,
que des observations utiles nous sont réservées. Dans les airs chantés
nous retrouvons les influences de la langue parlée, la somtrit*' des ses
expressions, les règles d'une versification cpii p;é.-cnlent (b's T-carls assez
manjués avec les formules auxipielles nous sotumes habitués.
l'our bien se pénétrer de ces diffère n ces. il faudrait dresser un tableau
assez compli(pu'^ (pii, bientôt sera facilité par des photographies de la
parole, dette étude est donc encore à réserver pour lui donner l'ampleur
(ju'elle comporte. (Quelques exem[)les pouiront cependant en dcuiuer une
idée.
Comme nous l'avons d/'j'i t'ait observer |)ltis haut, ces mébjdies. au lieu,
selon notre règle étal)lie. de se composer noruialeuKMil de de«^sii s r('guliers
alternant pour furmer la phrase miisicali.', par suite du mouvement lent,
finissent i)ar avoir leurs mesures à trois temps (|ui ."e confondent avec les
mesures à deux temps et alors les dessins n'ont plus de régularité.
Ainsi pour transcrire une complainte Ouéchua, d'après son audition, on
peut former son premier dessin de deux mesui'cs à trois temps, puis de
deux à deux temps qui rend assez bien le rythme Mais cette régularité
n'est pas exacte, car en se rapportant au phonographe, chronométrique-
ment on trouve en décomposant par temps, une mesure à trois temps
450 6 DKCEMBHK 1906
suivie de trois mesures à deux temps: c'est ce (jui montre bien l'indécision
difficile à saisir pour certains passages.
Dans une autre conipUùnlG [Verde limeticito), le premier dessin est de
cinq mesures et le second de quatre, toutes h deux temps. .Mais on peut
remarquer que si ces mesures à deux temps sont df^composées et battues
à quatre temps, le temps fort tombe sur la deuxir'me de ces subdivisions
et se lie avec la troisième pour former syncope. Cet effet rythmique parti-
culier est bien connu, il est vrai, mais nous pouvons observer qu'il est
très fréquent dans la musique espagnole à mouvement ternaire, où c'est
encore au second temps qu'il se produit pour se lier au troisième.
Puis dans plusieurs de ces morceaux, ce qui vient contribuer à donner
au chant réel un indécis dans le rythme et laisser, comme dans le vague,
la mélodie et même ï'h peu près des accords qui la soutiennent : ce sont-
des enjolivures de notes, des ^n<j9/)e/<î ternaires et binaires qui compliquent
encore.
Ces notes d'agrément appartiennent surtout à cette musique légère, très
en vogue aux siècles derniers auprès des maîtres italiens et espagnols. La
musique du Barbier de Séville de Rossini en est un exemple bien connu.
Cette manière a une origine assez ancienne^ car elle était très goûtée au
moyen t\ge et à la Renaissance. Le plein chant nous l'a conservée par tra-
dition et nous pouvons nous en faire une idée, en comparant les chants
rituels avec la musique moderne à la mode.
La musique des anciens Boliviens aurait-elle subi les influences de
chants religieux entendus jadis dans le Paraguay? Leurs gruppetti en sont-
ils une survivance? C'est ce que nous ignorons. Mais, d'autre part, ce qui
est attesté par plusieurs auteurs, c'est que dans la péninsule ibérique,
pendant l'occupation des Maures, il y eut des chanteurs et des chanteuses
célèbres, qui savaient agrémenter ainsi leurs chants d'une façon admirable.
Leur manière devait s'écarter assez sensiblement de la nôtre puisqu'ils se
servaient d'une autre tonalité. Au lieu d'avoir, comme dans nos gammes,
des intervalles composés de tons et de demi-tons, ils en avaient de bien
plus subtiles, ayant pour base des tiers de tons.
Nous avons pu nous faire une idée de ce genre si différent du nôtre, en
entendante nos Expositions des orctiestres exotiques jouant de la musique
arabe.
Sans doute que pour nos oreilles européennes cette musique laisse un
peu à désirer. Mais la musique est bien aussi un langage; il suffît d'y être
habitué et de le comprendre pour y trouver des charmes, tout comme avec
une autre à laquelle on est initié.
Voir dans la musique bolivienne une réminiscence d'une influence
directe des Maures, c'est ce que nous ne proposons pas. Mais il est certain
que, pour toutes les deux, cette superfétation mélodique des gruppetti
n'était pas inconnue.
Mais quant à l'influence de la musique espagnole, elle e.<;t de toute évi-
dence dans les morceaux interprétés par les instruments en cuivre. Nous
y retrouvons de nombreux motifs empruntés à son répertoire. Le type
ED. FODRDRIGNIER. — MUSIQUE HOLIVIBNNE 4")?
boléro, fandango, la manière de l'orcheslrer, les mômes effets très parti-
culiers aux instruments à cordes pinc»'*es que s'efforcent d'imiter les ins-
truments à vent, cuivre et buis, qui cependant sont destinés à jouer une
musiijue n'y ayant pas rapport.
Ce que nous avons retenu de cette audition, c'est que la musique boli-
vienne, si certainement elle conserve encore plusieurs caractéristiques
rappelant un art dpja existant avant l'uccupation, depuis elle a subi des
moditications profondes qui tendejit de plus en plus ;i la rapprocber de
celle qui est usitée en Europe.
A propos des instruments en cuivre, on a fait remarquer qu'ils avaient
des sons aigres et très aigus, comparés à ceux de nos fanfares. Nous
croyons en trouver l'explication dans la facture des instruments qui sont
la plupart d'industrie allemande.
La perce de nos instruments français n'est pas la môme. La nuire est
beaucoup plus conique, tandis qu'en Allemagne, en Suisse et dans l'Italie
du nord, le tube formant le corps des instruments tend à être cylindrique :
c'est ce qui donne déjà des sons plus stridents.
On peut très bien s'en rendre compte en comparant les sons émis par
les différents instruments en cuivre d'une fanfare. Les bugles, les altos,
les basses et surtout les cors ayant des tubes conoïdes, ont leurs sons plus
ronds et plus veloutés. Tandis que les cornets à pistons, les trompettes et
les trombones k coulisse dont les tubes sont presque cylindriques et plus
étroits ont leurs sons plus clairs et plus éclatants.
Les anciens Scandinaves, qui étaient des maîtres dans le travail des
métaux et surtout du bronze, connaissaient déjà au premier millénaire
avant notre ère cette particularité acoustique des tubes sonores. On peut
voir, en effet, au musée de Copenhague, d'immenses instruments de musi-
que en bronze, ayant plus de deux mètres de dimension, dont les tubes
sont conoïdes.
La plupart ont à l'emboucbure 6 millimètres de diamètre, tandis qu'ils
se terminent au pavillon avec un diamètre de 6 centimètres. Leurs sons,
tout en étant très puissants, se rapprochent beaucoup de ceux de nos
barytons et basses en cuivre.
Ces instruments sont connus sous le nom de lour. Le musée Saint-Ger-
main en possède deux exemplaires.
Dans cette région du nord de l'Europe, l'art musical s'y est développé
dans une très haute antiquité puisque 4'on considère les lours comme
étant de la seconde période de l'âge du bronze Scandinave, de vers le xv«
siècle avant notre ère, par conséquent bien avant l'antiquité classique.
S'il y avait une origine à rechercher pour les instruments de cuivre, c'est
bien vers celte contrée du nord qu'il faudrait tourner les yeux.
ihH
G DKCEMnnR iOOG
Une aulre cause conlribue encore à modiiïer la qualité du son : c'est la
forme de l'embouchure. Plus la cuvette, où se produisent les vibrations
par les lèvres, est longue et profonde, plus les sons deviennent voilés,
("'est ce que nous remarquons pour les cors d'harmonie.
Plus cette cuvette, que l'on nomme bocal, est courte, plate selon l'ex-
pression admise, avec une élroitesse de diamètre dans le fond, plus les
sons produits sont stridents, comme pour nos trompettes de cavalerie.
Fif/. 1. — Embouchures d'instruments en cuivre (gr. rel.). — A, de trompette (sons
stridents); — B, de trompe de ci:asse (sons puissants); — C, de cor d'harmonie
(sons voilés).
Cette modification du timbre de l'instrument obtenue par une embou-
chure est assez saisissante avec notre clairon d'infanterie. Son tube étant
conoïde, ses sons devraient être plutôt sombres tout en étant puissants.
Or, son embouchure étant à fond plat, on arrive alors à des notes très
éclatantes, quoique cependant moins stridentes qu'avec la trompette.
Ce sont ces deux particularités, de la perce et de l'embouchure, qui
modifient la sonorité des instruments en cuivre fabriqués en Allemagne
d'avec celle des nôtres. Rien donc de bien surprenant si ceux des Boliviens
sont de facture allemande, qu'ils aient des sons ayant les mêmes qualités.
Il y a peut-être encore une cause d'un autre ordre, à considérer : c'est la
contexture des lèvres des musiciens qui, selon la diversité des races, sont
plus bu moins conformées pour un genre d'instruments.
Il en est des lèvres comme de la gorge et du gosier, tout le monde n'est
pas doué par la nature pour avoir une voix de ténor. Il y a des contrées
qui sont, C(jmme on le sait, plus privilégiées pour avoir certaines voix
spéciales.
Il en est de même pour les instrumentistes. Grâce à des dispositions
ED. FOURDRir.NIER. — MUSigUE BOLIVIENNE i"A)
naturelles certains naissent musiciens et ublicnni'iil, sans eiïorl, une ap-
préciable viituosité, où (l'aiilres n'y arrivent ([iii- par ''\,eptiun et ;i force
de travail.
La disposition des lèvres est donc h considérer. A notre sens, les lèvres
d'un sani? mêlé ne pouvant être les mêmes que celles d'un Européen ou
d'un Ciermain, les sons produits ne peuvent être non plus les mêmes.
Ur, parmi nos nationaux instrumentistes, il y en a aussi (jui ont les lèvres
plus ou moins avantagées. Les uns obtiennent facilement les notes élevées,
ils montent sans trop d'elTorts suivant l'expression consacrée. Tandis que
d'autres à l'inverse descendent mieux aux notes graves, ayant une pro-
pension ?i h\cher les lèvres. Afin d'obvier à cet inconvénient ces derniers
se servent alors d'embouchures plus étroites. Ils peuvent monter, mais la
qualité du son s'en ressent, il devient aigre, moins puissant et paraît plus
aigu.
C'est sans doute aussi ;i cette dernière cause, jointe à la facture des ins-
tiuments, qu'il faut attribuer l'aigreur du son des fanfares boliviennes.
Nous pouvons ajouter incidemment, qu'en même temps (|ue les lèvres,
il faut aussi tenir compte de la dentition et du prognathisme plus ou
ou moins accusé des races, l-ln effet, si les vibrations sont bien dues aux
lèvres, celles-ci s'appuyent sur les incisives. Une obliquité dentaire trop
exagérée peut modifier l'orbiculaire des lèvres et parfois devenir un obs-
tacle, une gène même douloureuse pour la pression indispensable de l'em-
bouchure.
Enfin, la capacité thoracique a également son importance afin de pou-
voir retenir un volume d'air permettant de donner plus de puissance aux
sons, ou de pouvoir le ménager pour soutenir assez longtemps une note.
Sans insister plus, ont voit combien les éléments physiques peuvent
faire dévier la propension de certains peuples dans leur goiH des instru-
ments à vent et par suite, influencer une éducation musicale. N'étant que
le résultat de l'audition d'un genre de morceaux souvent écoutés, la mu-
sique de certaines races subit aussi l'action du tempérament qui leur est
propre.
Dans chaque groupe ethnique, l'art musical s'y étant développé quand
déjà leur culture civilisatrice était fort avancée, l'étude de leurs musiques
peut donc les faire connaître plus intimement : car c'est bien en quelque
sorte, l'àme de la nation (}ui s'y reflète.
Sans doute qu'avec certaines connaissances musicales, on peut arriver
à des observations qui ne manquent pas d'intérêt; mais avec notre mé-
thode actuelle, ce n'est pas suffisant, nos investigations ont un caractère
trop artistique. Une autre s'impose, afin de mieux saisir les détails qui
nous échappent. Puis, il faudrait que ces études puissent se poursuivre,
sans être nécessairement obligé d'être musicien. L'emploi du phonographe
nous paraît donc tout à fait indiqué. Et quand bientôt, tout ce que cet
appareil sait enregistrer pourra so lire dans des transcriptions photogra-
460 6 DÉCEMBRE 1906
phiques autrement serviles que celles actuelles, des révélations inattendues
sont à prévoir : car c'est alors que nos observations posséderont ce qui
leur manque aujourd'hui : un caractère scientifique.
DEUX CRANES DE WHYDAH
Par m. E. T. Hamy.
Les pièces anthropologiques bien authentiques, provenant de la Guinée
supérieure, sont encore très rares dans les Musées d'Histoire Naturelle.
Si paradoxale que paisse paraître celte aiïirination, à quiconque songe
à l'elfrayante consommation de Noirs qui s'est faite si longtemps sur ces
rivages, elle n'en est pas moins d'une rigoureuse exactitude. A part les
Ashantis, dont le Musée de l'Ecole de Médecine navale de Netlley possède
une large série recueillie jadis par Sweeney, on ne connaît jusqu'à pré-
sent que des pièces dispersées se rapportant aux Krous et aux Bush, aux
Fantis, aux Popos, aux Dahoméens, aux Yebous et enfin aux Calabars *.
Après bien des efforts, en frappant à toutes les portes, je n'ai pu réunir,
pour les Crania Etknica, qu'une quinzaine de crânes dont les origines
étaient plus ou moins précises, et j'ai accueilli, avec une véritable satisfac-
tion, les deux belles têtes, bien complètes, que feu Edouard Foâ s'était
fait envoyer de Whydah, cette vieille capitale d'un des anciens royaumes
nègres de la Côte des Esclaves.
On sait que cette ville de Whydah ou Ouïdah, soumise aux rois du Daho-
mey depuis 1727, n'en a pas moins gardé une physionomie particulière *
et qu'elle est demeurée le centre principal de Vophiolàtrie sur toute cette
côte '.
Les deux têtes fort complètes que le Muséum doit au zèle d'un voya-
geur trop tôt enlevé à ses travaux zoologiques, constituent des types
excellents de la morphologie des deux sexes chez les peuples nègres,
refoulés dans les lagunes par les invasions descendues de l'intérieur. J'en
ai pris soigneusement les mesures principales et j'ai rapproché les chiffres
ainsi obtenus et leurs rapports ou indices principaux des mômes données
numériques tirées des moyennes fournies par les séries ethniques que
j'avais précédemment présentées aux anthropologistes *.
Chacun sera frappé, en examinant ces mesures, des relations étroites
* Cf. Crania Ethnica, p. 3f)3 et suiv.
' Voy. Ann. Maritim. et Coloniales, ■1845 et i846. (Rev. Col, p. 406, 407 et 18).
^ Cf Ed. Foa. — Le Dahomey; histoire, géographie, mœurs, coutumes, commerce,
industrie, expéditions françaises, J891-1895. (Bibl. de l'Explo7^ateur. Paris, Heu-
nuyer, 1895, in-8, p. 415-420 et carte).
* Cf. Crania Ethnica, p. 370, etc.
K.-T. IIVMV. — DEL'\ CHaNKS IIK WIIYDaH .{{][
qu'elles signalent. Tous ces crv\nes nègres sunl, en etTet, sous-dolichocé-
phales (76.1 ) el moins hauts (|ihî larges dX».!)); ils sont, en outre, inésopro-
sopes, mésosèmes et platyrhiniens, c'esl-à-dire (|u'ils ont les indices fa-
ciaux («)8.3) orhitaires (86.4) et nasaux (54.0) qui correspondent h ces
su hdi vision s sysl('niali(iues.
C'est tout un groupe de peuples très anciens du littoral (juise diirérencie
nettement des nouveaux v.mhis, .\slianlis. Dahoméens, Mandingues,
devant Icsipuds ils ont dt'i fuir vers les lagunes et les marécagcîs des cotes,
où l'arrivée des Blancs a pu seule les [U'éserverd'unecouiplète destruction.
W'iivDAiis l'oi'os. KTc. (Ialahahs
Mksikks 15 1 Ç 05 4 ^
Capacité crânienne
('.irconlércnee horizontale
Diamètre aul. post. max
— transv. max
— bas. brog
Indice larg. long
— haut, long
— haut, larg
D. Iront, max
— — min
— hiori). ext
— bizygom
Haut, face
Indice facial
Orbite larg
— liant
hulioe orbitaii-e
.Nez haut
— larg
Indice nasal
lllO
1410
1425
1425
507
497
509
485
18'.
177
181
182
138
136
135
137
132
132
VM
132
75.0
76. 8
74.5
75.2
71.7
74.5
72.3
72.5
95.(')
97.0
97.0
96.4
117
106
116
112
91
89
97
98
110
101
108
108
131
128
130
130
95
89
89
90
72.5
68.7
68.4
69.2
39
40
38
38
31
33
33
33
87.1
82.5
86.8
86.8
50
48
48
49
28
27
26
26
56.0
56.2
54.1
53.0
soc. d'ânthhoi'. 1906. 33
UM 6 DKCEMBRK 1 OOG
LES TERATOMES NE SONT QUE LE VESTIGE DE L'UN DES SUJETS COMPOSANTS
d'un monstre double
Par iM. le D"" Marcel Baudouin.
Il y a loiii:;leiaps qu'l. (leolFroy Sainl-lliiairo ' a classé, parmi les Hlons-
truosités doubles, nombre de Tumeurs, que les cliniciens connaissent bien,
el qu'on peut appeler des Tératomes*.
Mais, jusqu'à présent, les cliirurgiens, d'une part, ont décrit aussi sous
ce nom des productions, congénitales ou non, qui n'ont rien à voir avec
la Diplotératologie : et, d'autre pari, nombre de faits ont été publiés qui
sont venus compliquer l'exposé diiJactique fait alors par le célèbre fonda-
teur de la science lératologique, et sou article si remarquable sur les
Monstres doubles Endocijmiens, les anciennes inclusions fœtales.
Pour nous, nous employons le mot Tératome dans son sens clinique le
plus général, c'est-à-dire dans le sens de tumeur importante par son
volume.
Nous laissons, en effet, décote les lératomes histologiques, c'est-à-dire les
inclusions embryonaires de tissus divers en d'autres ^t'ssMS (par exemple inclu-
sion de tissu thyroïdien dans le tissu musculaire du cœur, etc.), car ces
productions sont comparables aux Dermoïdes vrais, dont nous ne nous
occupons pas ici.
Dans notre esprit, le terme Tératome a ici un radical ayant le même sens
que celui des mots Tératologie, Tératopages, etc. Il s'applique à une mons-
truosité, correspondant à un fœtus tout entier, et non à un organe donné de
ce fœtus.
Cela nous permet de distinguer nettement :
4° Les Tératomes vrais, dont nous voulons parler exclusivement ';
2° Les Faux Térato7nes, dont le type est la tumeur ou kyste dermoide,
* I. Geoffroy Saint-Hilaibe. — Traité des Monstruosités, t. III.
î Brouha (Contr. à l'étude des tumeurs tératoïdes de l'abdomen. Rev. de Gyn. et
de Chir. abd.^ Paris, 4902, p. 401) emploie le terme de « tumeurs tératoïdes », qui
est inexact parfois en clinique (il y a des cas où il n'y a pas de tuméfaction appré-
ciable), et qui est plutôt chirurgical que biologique. — Nous préférons le terme Té-
ralome, qui implique d'ailleurs l'idée de i tumeur», sans la mettre trop en vedette.
D'autre part, les Tératomes ne sont pas des tumeurs /e/'a^oirfes, c'est-à-dire ressem-
blant à des Monstres (ripa, monstre; liSo:;, semblable), mais bien des tumeurs qui
sont des ?nonstrex! — Brouha aurait donc dû écrire : Tumeurs tératiques.
Le mot Embrijome a été créé par Wilms (1896); mais il lui attribue un sens tout par-
ticulier, qui n'est pas celui indiqué ici (Tumeur due à la profilération des cellules
sexuelles).
5 M. le D"" Maurice Ghevassu (Thèse, Paris, 1906) appelle, après Wilms, Tumeurs or-
ganoides, par exemple, l'adénome tosticulaire ; et Embryomes les inclusions fœtales. Le
premier mot, qui ne préjuge rien, peutse défendre ; mais le terme Embrijome a le tort,
en l'espèce, de ne pas indiquer l'origine delà tumeur hètéropique. — Tératome me
semble donc préférable, jusqu'au moment du moins où l'on aura démontré que la
théorie de l'origine diplotératologique ne peut plus se soutenir
MaUCKL DAlDOUrN. — TÉHATÛMKS DR MONSTRES DOI'HLES 463
et pour les(|U('ls il reste à trouver mi nom spi'oi.il. par exemple celui
d'Orfjanome, ilunt l'étymologie est claire.
Nous voudiiuiis, dans la l)rève élude (jui va suivre, redire que, depuis
longtemps, nous acceptons l'hypotlK^se de I. (ieolTroy Saint-llilaire, et
bien spécifier, ce qui n'a pas encore iHé fait, que le Tértitow n'est qu'un
rt'stifje (le l'un de ses sujets composaitls d'au monstre double, s'étant dêvelojifiè
ou ayant pénétré dans l'organisme de l'autre sujet par un mécanisme facile à
comprendre, mais encore un peu confus dans l'esprit de nombre de savants.
Nous voudrions reiJire sui'loul(pie certains /i7/.s7('i- dennoides, parexemplc
ceuxde Vovaire, sontaussi des Tératomes, taudis qm- d'autres n'en sont pas :
distinction non faite par M. I. (ienlTroy Saint-llilaire, ayant décrit sous
le même titre: 1" et les Monstres Endociimxens ou inclusions aljdominales ;
2o et \eîi Monstres Dermocijmiens ou inclusions sous-cutanées; 3° et toutes les
productions dermoïdes connues ;\ son époque!
Si cette tbéorie est exacte, il en résulte (jue les Monstres uovai.ES, complets
et incomplets, c'est-à-dire autositaires et parasitaires (ces derniers compre-
nant les tératomes et certains dermoïdes), pour employer le langage des an-
ciens, sont en réalité beaucoup plus (réguents qu'on ne l'acru jusqu'ici : cequi
revient à dire, toujours si cette théorie des Monstres doubles est exacte,
qu'en réalité les Œufs à deux Germes (pouvant donner tantôt des monstres
doubles vrais, tantôt des Jumeaux de même œuf ou univitellins), s'observent en
nombre beaucoup plus considérable qu'on ne se l'est figuré jusqu'à
présent!
Par quel mécanisme psychique, sommes-nous arrivé à cette conception,
qui a, au moins, le mérite de la simplicité, et qui nous a déjà fourni des
théories spéciales pour l'inversion des viscères ' et les grossesses multiples *?
C'est ce qu'il nous serait assez difficile d'exposer clairement ou tout au
moins de dire, de façon à être utile aux psychologues et aux anthropolo-
gisles! Ce qui e-^t certain, c'est que cette conviction s'est établie dans notre
esprit petit à petit et par phases successives, à la suite des études que
nous poursuivons de[)uis près de (piinze ans sur la Diplotëratologie ; et c'est
surtout l'examen d'un grand n(jmbre de types de Monstres doubles, autosi-
taires ou parasitaires, et même de Monstres dits simples ', qui nous a amené
' M. Baudouin. — Théorie nouvelle de l'inversion des viscères. — Gaz. méd de
Paris. iOOl, i2 s., I, p. 33. — Rev. de Méd., i90'i, XXIV, p. 827.
' M. Baudouin. — De l'existence et de l'origine des œufs à germes 7nulli/tles_
Gnz. méd. de Paris, 1903, n* 2b, p. 205. — Un œuf à deu.i: jaunes peut-il donner
naissance à des jumeaux adhérents? Gaz. méd. de Paris, 1903, n* 27, p. 224. —
Un cas de grossesse triple avec trois enfants vivants. Gaz. méd. de Paris, 1902,
p. 139-140. — Un nouveau cas de grossesse triple arec iruf à deu.c germes. Gas.
méd. de Paris, 1904, p. 374. — Un cas de r/ro.s.'^es.se (/uadrup/e, formée de deux teufs,
dont l'un à trois germes. Gas. méd. de Paris, 1902, p. 3(>.)'570. — La gm.isesse
sextuple. Gas. méd de Paris, 10P4, p. 157 ; p. 20;'. Fraueuarls, 190.';, W,
loi, i;)5, 244, •>'Ô2 {Texte allemand).
3 M. Baudouin. — La Cyclopie est ute monslruDsilé doulile . Gas. lurd.de Paris
1902, 12 s., H, 177.
.iiVi G DKCEMItllK 1900
h celle [manière de voir, ol surtoiil r<'lii(lo de ccrlaines formes rares de
Monshrs cndoci/mlens ' {Fa-tus in fa'lu).
Oui plus est. ces derni(>res recherches ont même abouti à un fait assez
inattendu, que j'ai été obligé d'admettre comme démontré, à savoir que
certains Tératomes sont en réahté les vestiges de Monstres triples, et non
pas seulement de monstres doubles ; ce qui, d'ailleurs, n'a rien d'extraor-
dinaire, puisqu'aujourd'hui l'existence des œufs à trois germes et des
monstres qui en dérivent est admise par tous les tératologisles, depuis
I. (ieolTroy Saint-llilaire.
Classification. — I. Les Tératomes classiques qu'on peut rencontrer chez
l'homme alfectent surtout les régions suivantes : 1" Bégion coccygienne;
2° Bégion inguino-scrotale ou testiculaire. II. Les Kystes dermoides, qui peu-
vent en être rapprochés, sont surtout les kystes dermoides de l'ovaire.
Nous nous bornerons, pour aujourd'hui, à ces trois ordres de faits pa-
thologiques, laissant de côté les autres tératomes et dermoides.
1» Disons de suite que les Tératomes sacrocogcygiens peuvent recon-
naître deux origines, qui, d'ailleurs, ne sont peut-être pas toutes les deux
prouvées de façon aussi indiscutable.
La première, qui me paraît la plus fréquente, est pour moi démontrée
d'une manière certaine par les faits, c'est à-dire Vanatomie 'pathologique
elle-même. La seconde est simplement probable, jusqu'ici du moins, car
elle ne s'appuie pas sur des observations bien démonstratives.
a) i'o Catégorie. — D'après moi, la première catégorie est le résultat
d'une Omphitlûpagie, avec Inclusion ultérieure de l'un des sujets composants
dans l'abdomen de l'autre, ou d'une Inclusion primitive, avec Extériorisation
ultérieure de ce sujet, au niveau de la région sacrococcygienne.
:2« Catégorie. — D'autres Tératomes coccygiens sont, par contre, des Téra-
topages, incomplets ou parasitaires, du groupe des Pygopages, dans lequel
l'un des Pages ne s'est pas développé, tandis que le sujet normal a grandi
sans accroc.
2" Les TÉRATOMES iNGUiNO-scftOTAUX sout, au contraire, du groupe des
Omphalopages (c'est-à-dire des Pages abdominaux avec simple union ombi-
licale), dans lequel l'un des sujets composants a subi une Inclusion dans
l'abdomen de l'autre ou des Inchisiojis primitives, Sivec soudure et fusion avec
la glande génitale mâle, et Extériorisation secondaire par la région inguinale,
lors de la descente, physiologique et normale, du testicule.
3° (^kuant aux Kystes DERMomas ' de l'ovaire, du moins ceux qui sont de
* M. Baudouin.— Tn nouveau genre de monsU^e double. Un Endocyme cardiaque.
Gaz. méd. de Paris, 1901, p. 309. — Le cas de M. Guérin (Fœtus in fœtu). Int.
des Cherch. et des Curieux, 1904, 10 déc, p. 879-889 ; 30 déc, p. 996-997.
* On trouve des Kystes dermoides : a) Dans les organes internes (on note l'esto-
MAnCEL ItAUDOUIN. — TKHATOMKS UK MuNSTHES UOUULES 405
véritables Tôratomes (c'est-à-dire tous h nuire avis), ils rôsultenl, par le
même mécanisme, de la fusion avec la qlanJf géiiilnle femi'lle de l'un des
sujets composants d'un Omphdlopage ou d'une Inr/iisiun primilivc , mais ici
le tératome reste intraabdominat, comme le Monstre double endocyme {Fœlus
in fœtu).
Les léralomes précédents sont donc des monstres doubles soit dcrmûcijmes,
c'est-à-dire inclus sous la peau, pour employer une expression ancienne ;
soit iutrn-abdominanx primitifs.
Ce qui nous a mis sur la voie de ces diverses origines, ce sont :
a) Pour les tératomes sacro-coccygiens, des travaux antérieurs, comme
par exemple celui de Ed. Pfisler ', en ce qui concerne la Pygopagie; les
rares cas de monstres endocymiens, accompagnés de tératome périnéal, et
dans lesquels on a pu constater l'union du fœtus in fœtu, c'est-à-dire d'un
tératome intra-abdominal (endocyme), avec un tératome dermocyme (on
en connaît au moins trois - observations).
6) Pour les tératomes inguino-scrotaux, la connaissance des tératomes
ovaricjues, et de la descente normale du testicule.
De tout cela nous avons pu déduire un certain nombre de conclusions,
qu'on peut résumer, de façon synoptique, dans le tableau ci-dessous :
Origine des Tératomes.
i i«^ — tératomes de monstres doubles.
I. Inclusions sous-gutanées ou Monstres Dermocymiens, comprenant :
i° Les Dermocymiens péri-ombilicaux, qui peuvent cire situés tout autour
de l'ombilic.
En haut : D. Epigastriques (cas de Gaither).
En bas : D. Hypogastriques (cas de Lécluse).
D. Inguino-cruranx (cas légendaire de B. Lot) (?).
Dans ces cas, Vinclusion n'est qu'incomplète, avortée pour ainsi dire.
2" Les Dermocymiens sacro-coccygiens, qui sont les Tératomes sacro-coccygiens
des chirurgiens, pour lesquels un phénomène nouveau s'est joint ;i l'in-
mac, l'intestin, etc., mais surtout les ovaires cl les testicules). — Ceux des glandes
génilales sont souvent des tératomes, sinon toujours.
b) Au niveau des fentes de l'embryon : Face (queue du sourcil, nnxiliaires); Cou
(fontes branchiales); r/jora-r; (Mùdiastin, etc.).
Ces kystes dcrmoïdes là conslituenl les Dermoïdes vrais, parce qu'ils ne résullcnt
que d'une inclusion d'une partie do psau (et non d un fœtus entier).
Celte remarque a été déjà faite, dans l'art. Kystes du Dict. Envyvl. des Se. Méd.;
mais on n'y a pas prêté assez d'attention i ncorc et mis eu relief sa signilication jus-
qu'à présent.
* Egypte médicale, 1!>02, p. 448, 5.o2.
' Ce sont les faits dô Fattori fH:'!»), Schaumann (1839), de CoHN (190C), caracté-
ristiques; d'HiMLY, de J. Gilles, etc., etc.
46*» <) DKCKMIUIK IDOO
cliision complèlc ou abdominale : une extériorisation primilire du ftetus
inclus.
Il y a donc ici Inclusion compliquée.
II. Les Inclusions intra-abdominales proprement dites, ou Monstres Endo-
CVMIKNS.
C'est là l'inclusion classique, le fœtus infœtu proprement dit.
III. Les Inclusions abdominales complexes, c'est-à-dire av^ec fusion à la
Glande génitale, que l'inclusion soit primitive ou secondaire (point dis-
cuté).
Elles sont de deux ordres, suivant le sexe.
a) Sexe féminin : Ovaire (sans extériorisation) : Tératomes ovariens ou
Kystes dermdides faux de l'ovaire.
b) Sexe masculin : Testicule (avec extériorisation secondaire, postérieure
à la naissance). Tératomes testiculaires, ou Tumeurs fœtales inguino-scro-
lalesdes chirurgiens.
Ce sont de vrais Endocymiens à l'origine, transformés en faux Dermocy-
miens, par suite de la descente du testicule.
I II. — Tératomes de Monstres triples.
i° Inclusion abdominale double.
Monstre Endocymien double (2 fœtus in fœtu).
a)CasdeMayer. i Cas de 836; de 1672; du xvii» s. (filles),
b) Cas légendaires, particuliers | ^
2° Inclusion abdominale et Extériorisation pkrinéale. — Monstre endocy-
mien avec Tératome coccygien : 2 cas connus (filles).
I. Inclusion abdominale proprement dite ou Endocymie. — Je n'ai rien à
dire de spécial sur celte monstruosité double, quoique, jusqu'à présent, on
ne lui a pas encore donné le nom de Tératome intr a- abdominal, qu'elle
pourrait porter.
Je me borne à faire remarquer que j'explique cette monstruosité de
deux façons :
1° Inclusion secondaire. — On admetalors l'existence préalable d'une Om-
phalopagie, réduite à sa plus simple expression, c'est-à-dire l'existence
d'un œuf à deux germes qui se sont développés sans se souder et ont donné
deux jumeaux univitellins, dont l'un à un moment donné a été absorbé et a
disparu dans la cavité abdominale du sujet normal. Il est probable que
cette absorption, produisant Vinclusion intrapérilonéale proprement dite^
est causée par des troubles de nutrition se localisant au niveau du pédicule
vasculaire de l'un des sujets, tœubles sur lesquels ce n'est pas le lieu
d'insister.
MARCEL ItAUDOUIN. — TKIIAniMKS l»K MONSTRES DOUHLES 4ti7
2" Inclusion primitive. — Ici, d'après les Ihi'ories modernes, un œuf se
développe dans l'intérieur nirme de l'autre.
Si l'une ou l'autre de ces Ihéoi'ies de VEndocijme ou f(Ctas in fœlu est
exacte, le fœtus inclus doit (ître loujouis du même sexe (jue le sujet déve-
loppé. — Mais, sur ce point encore, nous ne pouvons nous a|>pesantir au-
jourd'hui sans sortir de notre sujet'.
II. Inclusion sous-cutanée ou Uermûcymie i-rimitive, — A côté de l'inclu-
sion abdominale, l. G. Saint- llilaire avait déjà placé l'inclusion sous cuta-
née, qui, depuis, a reçu le nom de Dermocymie, par analogie avec VEndo-
cymie.
Mais les cas du savant tératologiste correspondent à des inclusions
siégeant dans des régions diverses : Epiyasfrc ', Hypcf/astre \ /légion coc-
cyf/ienne, etc.
Or, il faut mettre à part les rares cas qui ont trait aux régions épigas-
tritjue et hypogastricjue. En clfet, ils représentent, d'après les uns, des sortes
d'inclusions abdominales incomplètes, dans lesquelles le 2° fœtus n'aurait pas
encore pénétré profondément dans l'abdomen, et suerait resté en route; ils
sont des stades intermédiaires entre VOmphalopagie simple el l'Ompbalopagie
incluse ; mais l.-i, il n'y a pas, comme dans les cas de Dermocymes coccygiens,
extériorisation ultérieure. — D'après les autres, il faudrait au contraire ad-
mettre une extériorisation par l'ombilic.
m. Inclusion abdominale avec Extériorisation ou Dermocymie secon-
daire. — Les Tératomes sacro-coccygiens, au point de vue de leur insertion,
peuvent se diviser en deux groupes :
a) Ceux qui s'insèrent ;i la partie antérieure du sacrum et du coccyx
font saillie au périnée, en arrière de Vamis qu'ils repoussent en avant,
ou en avant de l'anus. Ceux-ci sont parfois réductibles.
b) Ceux qui s'insèrent à \a partie postérieure du sacrum ou au sommet du
coccyx.
Comment expliquer ces points de départ dilîérents avec la théorie
actuelle? C'est bien simple.
a) Les premiers sont les sujets avortés et inclus d'un Monstre Endocy-
mien, qui s'est e.rtériorifé plus ou moins, par suite du manque de place à
l'intérieur de l'abdomen, et est sorti près du rectum.
b) Les seconds représentent le sujet avorté d'un Pygopage.
Les premiers seuls rentrent dans la catégorie que nous avons à étudier
tout d'abord.
1 Nous faisons rentrer dans la catégorie des Tératomes inclus infra-abdominaux,
c'est-à-dire des inclusions f.elales, ayant lieu dans la cavilù aLidoniinale, non .seu-
lement les Monstres Eftdori/ miens cAaii:i\quc<. (/wlus in fa-lu), mais aussi nomi)rc de
Kystes dermoïdrs t]e l'ablomen, de l'utérus, du ligament larg.\ du ligament rond,
etc., et-:. — Le même mécanisme s'applique à ces inclusions ([ui ne difTèrent que par
leur siège anatomique.
2 Cas de Gaither (1810).
3 Cas de Lécluse (1746).
.108 0 I.KCKMHKK r.lOO
a) Inclusion fœtale. — Il est bon de rappeler que depuis longtemps on a
soupçonné celte tht''orio, puisqu'on a donné jadis à ces tumeurs le nom
d'im-lusiun fœtale (par analogie avec les Monstres endocymiens ou de «i Mons-
truosité parasitaire », sans toutefois spécifier de quel genre de monstruosité
il s'agissait : ce que nous faisons très nettement aujourd'hui. Citons,
il ce propos, les noms de Meckel (1818), de Hinily [Fœtus in fœtu), de
Constantin Paul, Cabbet, Stolper, Hagen, etc.
Depuis, cette question a été terriblement embrouillée, parce qu'on
n'avait pas d'idée directrice bien arrêtée; mais nous ne perdrons pas
notre temps à résumer à nouveau toutes les hypothèses émises.
5. Duplay, en 1868 *, toutefois, et Ghauvel ', ont soutenu plus tard la
même opinion, qu'il y a au sacrum de véritables inclusions fœtales à classer
parmi les monstres autositaircs endocymiens ou par inclusion.
.\ notre avis, C, PauP a entrevu la vérité; mais il n'a pas insisté sur la
nature exacte de ces monstres parasitaires. Il ne faut pas les classer dans
les endocymiens, car ils ne sont nullement inclus dans le sujet bien déve-
loppé, comme dans les cas de Fœtus in fœtu, mais au contraire très nette-
ment extériorisés par rapport au dit sujet.
S. Duplay a noté, jadis, que jamais on ne trouve dans l'intérieur des
tératomes sacro-coccygiens de vestiges des organes génito-urinaires^ . Celte
remarque très importante était jusqu'ici restée h peu près inaperçue, et,
en tout cas, n'avait pas été expliquée. Notre conception des tératomes
permet de soupçonner une raison, qui est peut-être la bonne. Si l'on
admet, en effet, que les tératomes sacro-coccygiens sont pour la plu-
part, au début, des endocymiens, c'est-à-dire des tératomes inclut, on peut
très bien concevoir que toutes les fois que les tératomes présentent
des traces des organes ^^«tïaMaj (et par suite génilo-ur inaires), ils devien-
dront des tératomes inguino-scrotaux ou ovariens [K. dermoïdes), au lieu
d'évoluer comme tératomes périnéaux. D'où cette conclusion qu'il n'y a
lératome sacro-coccygien que lorsque le fœtus est soumis déjà à l'exté-
riorisation avant l'apparition du système uro-génital sur l'embryon.
Le téralome observé par Xan Dnepe (1895), qui fut évacué par le rectum
au cours d'un accouchement, n'a pas été compris; il s'explique pourtant
bien facilement ! C'est une inclusion fœtale qui, en s'extériorisant, s'est
engagé dans le rectum, et est sorti par là au lieu de continuer sa route
dans l'espace périrectal et d'apparaître dans la région coccygienne.
Ce cas est donc, en réalité, un fait intermédiaire, qui vient éclairer sin-
1 Bien entendu, nous ne parlons ici que des tumeurs congénitales, qui ne sont ni
des hernies, ni des hydrorachis, ni des néoplasmes.
* Dlplay (S.). — Des tumeurs congénitales de la région sacro-coccygienne [Revue
critique]. Arch. génér. de Médecine, 6* éd., t. XII, 1868 [Résumé].
3 J. Ch.\uvel. Art. SACRO-coccYGiENNE (Région). — Dict. encycl. des Se. Méd.,
Paris, 1898, p. 65.
4 Constantin Paui, — .Avchires générales di> Médecine, Paris, 1802, t. XI.\ et XX.
5 Puurtcinl, Kirmisson, ou 1906 (Rec. d'Orlhop., liJOO, p. 141), dans un cas, aurait
trouvù « un rein en miniature ».
MARCEL UAl'DnriN. — TKIlAT(iMK> HK .MuNSTHES DOUHLES 409
gulièrenienl noire explication des lératomes coccygiens. Il coirespohii ii
une descente de la tumeur après débouchenient du rectum dans l'anus.
b) Pyyopaffie avec atrophie d'un sujet. — Le tératome sacro-coccygien
peut évidemment n'être qu'un sujet composant d'un Pi/uopni/e, qui ne s'est
pas développé, qui est resté au début de sa course, ou plutôt dont la vita-
lité a été très notablement modifiée et arrêtée par des raisons analomi-
ques ou physiologiques qu'il reste à trouver.
Mais il ne sutïit pas d'affirmer do la sorte; il faut démontrer le bien
fondé d'une telle hypothèse, rappelée par l'fister ( l'J02).
Quelles sont donc les données anatomo-palhologiques, qui plaident en
ce sens? Y a-t-il tous les intermédiaires entre le composant d'un Pi/gojiage,
c'est-à-dire un fœtus normal soudé ii un frère jumeau de même œuf, et le
tératome sacro-coccygien lypiijue en clinique? 11 parait bien en être
ainsi.
Dans les cas où l'on suppose qu'il y a eu Py()opagie (Faits île Sinmiunds
(1880) ', Buzzi (1887), etc.), on a noté, parfois, des os plais, paraissant cons-
tituer le bassin du Pygopage avorté.
Mais, d'ordinaire, dans la Pygopagic, les bassins des '2 sujets sont coudés
par le sacrum au moins ( ce qui n'était pas le cas dans le faitdeSimmonds).
D'autre part, dans le fait de Buzzi, la « face postérieure du sacrum ne
paraissait pas présenter de fissures » (ce qui n'est guère en faveur de la
Pygopagie, également).
Aussi Dénucé donne-t-il, croyons-nous, trop d'importance à cette théo-
rie de la Pygopagie ou de la Pygomélie dans son récent ouvrage *. Si elle
présente quelque chose de vrai, ce doit être dans des cas rares et plus
typiques que ceux qu'il cite !
En tout cas, déjà en 1868, dans trois faits, Duplay avait trouvé une
communication avec la cavité rachidienne. Or, chez les Pygopages, il en est
presque toujours ainsi.
Mais, pourdiscuter ces divers points, il faudrait raj)i)eli'r ici la constitution
exacte du point d'union des Pygopages classiques, normaux ^i l'on peut
dire. Tout cela nous entraînerait trop loin; et, pour l'inslant, nous laissons
cette théorie de coté, car elle nous éloigne trop du sujet que nous étudions
plus spécialement,
III. Inclusion audominale de monstkes tiupi.es. — I " Inclusion double. —
Nous ne savons pas si l'on a jamais observé, en dehors du cas de .Mayer,
des cas d'inclusion abdominale double, c'est-à-dire dans lesquels il y a
* Dans l'observation de Simniomls, où il s'agit probablemi'iit d'un tératomo coccv-
gien par pygopagie, on a cru rccoiinailrp l'existence d'un testicule (ce ne peut être
un rein, si la rof;le de Dupl.iy est exact-') ; or, précisément, le i^ujel porteur était un
garçon. Celte ob>crvatioii, où les sexes sont les Uit*'mes, |*lai bnl nelteinent en faveur
de la Monstruosité double.
* Maurice Denucé. — Le Spina bifida Paris, 11'06, t. I, p. 437.
470 0 DÉcEMitiu: 190G
deux fivlus in fœtn, qui soient absolumenl à l'abri de critique ' : ce qui
s'explique par rinclusion de 2 des fœtus d'un œuf à 3 germes, dont l'un
contient les deux autres, c'est-à-dire la monstruosité triple, comme l'a
bien dit jadis 1. (ieoffroy St-IIilaire.
2° Inclusion abdominale et extériorisation périnéale. — Mais on a trouvé
(les cas où un tératome sacrococcygien h se trouvait en connexion avec une
seconde tumeur fœtale, incluse dans l'abdomen », du sujet porteur du tératome,
avait dit M. .1. Chauvel' . Comment expliquer avec notre théorie ces faits,
qui doivent être très rares en réalité?
Pour nous, la chose est facile, quoiqu'elle paraisse peu en rapport avec
les données de la science actuelle. Pour comprendre ces faits, il suffit, en
effet, d'admettre : 1° l'existence des monstres triples, point qui paraît dé-
sormais hors de doute d'après nos recherches personnelles; 2" la possi-
bilité de Vinclusion, qui est indiscutable désormais; 3° les données ci-des-
sous, qui sont nouvelles et hypothétiques.
Nous admettons que, dans ces circonstances, il y a, soit combinaison de
VOmphalopagie extériorisée avec VOmphalopagie interne (qui donne le fœtus in
fœtn), soit plutôt existence de deux Tératopages internes, dont l'un d'eux
s'est seul extériorisé par le périnée.
Parmi les observations de cet ordre, on peut citer les trois faits sui-
vants, qui sont tout à fait caractéristiques, et, à notre avis, tout à fait
probants.
Obs. I. — Fattori (1815) ».
Fœtus de six mois, avec 2 tumeurs (parasitaires). — Sexe féminin.
1° Ttimeur intra-abdominale {Fœtus in fœtn), située dans le bassin. —
Adhérence avec l'utérus, les trompes et les ovaires du sujet sain. Chorion,
amnios, et placenta (?). Vaisseaux. 2 pieds, très reconnaissables.
2° Tumeur périnéale. — Elle se poursuivait dans le bassin, avec le fœtus
intra-abdominal. On y a trouvé : des os ; une main, très reconnaissable;
2 pieds, avec à chacun 5 orteils avec ongles. 1 jambe (1 tibia). Débris
d'intestin bifurqué, de poumon, et du cœur.
Ce cas est très intéressant. — En effet : l" Il s'agit d'un monstre triple.
(un sujet normal; 1 fœtus in fœtu abdominal; 1 fœtus périnéal). 2° Ce qui
prouve qu'il y avait bien là 3 sujets, et non 2 (dont l'un aurait été divisé),
c'est qu'il y avait ^ pieds dans les 2 tumeurs. 3° L'union du Fœtus abdo-
minal avec celui de la région périnéale, dans le bassin, était très nette.
1 Pour l'être, les deux fœtus inclus doivent être l'un et l'autre de même sexe, et,
de plus, du même sexe que le sujet porteur de la tumeur. En outre, ils doivent être
bien distincts et faciles à reconnaître par l'existence d'organes en nombre voulu.
' J. Chauvel. — Loc. cit., p. 63.
3 Sânto Fattori. — De feti che rachin doiio feti, detli volgermente gravidi.
Parma, 1815. — Himly, Loc. cit., p. 22.
MARCEL llAUnoriN. — TÉRATOMES DE MdNSTRKS DOl'IlLES itl
Donc le jji-rincal s'est Irouvé, avec VabdomxnaL dans le ventre. Le plus
avancé a été chassé du oenire par le périnée ; l'autre n'a pas pu sortir.
Le sujet était du sexe féminin. La lésion aurait pu donner un ki/ste
dermoide deVovaire, si rcx[)ulsion n'avait pas été si prématurée, et niéuie
deux kystes dennoides, dislincls (Explication des kystes dermoides ovariens
doubles).
ObS. n. — SCHAUMANN (4839).
Enfant à terme, niorl-né. — Sexe féminin. — Avec 2 tumeurs.
1« Tumeur intra-abdominale. — î fcelus complet {?). Communication Si\ec\a.
tumeur périnéale.
"2" Tumeur périnéale. — Rattachée au sujet par des bandes fibreuses h la
dernière vertèbre sacrée et aux ligaments sacro-sciatiques. (Donc origine
interne).
Observation 111. — Duaghiesco et Cohn (1906) '.
Térutome sacro-coccygien chez un ft'tus jumeau.
Ayorloment gémellaire au Vl" mois. — Un Fœtus normal , de sexe inconnu^.
Autre fœtus, de sexe masculin, avec tératome sacro coccygien.
Diagnostic : Grossesse trigemellaire, la tumeur étant le .?" fœtus {sic).
Etat de l'œuf : « une seule masse placentaire avec 2 poches ammio-cho-
riales, du poids de 800 grammes. Hydramnios aiguë.
Il s'agit donc bien d'un œuf à trois germes, puisque le placenta est unique.
Tumetir : « implantée au périnée, entre le coccyx et l'arc pubien ». —
Pas d'.^nus. Scrotum normal, inhabité. — k La tumeur se continue dans l'in-
térieur (lu pi'Iris fœtnl... Elle proémine dans l'intérieur de la cavité péri-
tonéale, en poussant la vessie vers la paroi abdominale antérieure. Adhé-
rence légère à la face antérieure du sacrum et du coccyx, ainsi qu'à
V arcade pubienne. — Pas de rectum : Colon pelvien terminé en anse en
forme d'U, située à gauche ».
Cette observation récente est extrêmement importante au point df vue
de la théorie que nous défendons ici : h savoir Vorigine intra-abdominale des
tératomes sacro-coccygiens I
Dans ce cas, en efl'et, en dehors de la constatation qui a été faite que la
tumeur « se continuait h l'intérieur du pelvis », on note : 1" que ce pro-
longement passe entre la vessie et le colon pelvien : ce qui indique la voie
de descente; 2" qu'il adhère à Varcade pubienne, aussi bien (ju'à la (acr anté-
rieure du sacrum : ce qui prouve que la tumeur a franchi, av -c contact,
le détroit supérieur, aussi bien en avant qu'en arrière. Par suite, la
* GOHN. — Bull, et Mém. de la Soc de MM. de Bucavext. Bucarest, 190(i, W, n» \,
mars, p. 18-20.
* Une lettre roctMile. r. rue du D'' Colin, nous a appris qm- les tteu.r sujets liaient
bien de même sexe comme nous l'avions prévu, et du soxo masculin 1!
3 Par suite, il s'acit d'un œuf a trois germes du sexe masculin.
il -2 0 DKCEMlillE 11)06
tumeur s'est développée de haut fn bas, et non de bas en haut, car dans
cette hypothèse l'adhérence pubienne ne s'expliquerait guère.
De plus, on a à enregistrer deux anomalies très importantes : 1° ab-
sence d'anus ; â*" absence de rectum. Or, étant donné le mode de développe-
ment inverse de ces deux organes, on comprend très bien leur absence
dans le cas de tumeur pelvienne s'extériorisant par en bas, îi leur niveau.
S'ils manquent, c'est que la tumeur a passé au-dessous du colon, au mo-
ment où le rectum se formait et allait rejoindre l'invagination anale pro-
venant du périnée; et la tumeur a ainsi empêché l'ouverture du tube
digestif inférieur ii l'extérieur du corps.
Le fait de Gaetano Mocito(i850) a trait, croyons-nous, <i une inclusion
abdominale double, c'est-à-dire à une Monstruosité triple, chez un homme
(1 tibia de 2 mois; 1 tibia de 3 mois : ce qui semble prouver que les 2 fœtus
continuèrent à se développer assez longtemps dans l'abdomen de l'autre).
Ces divers cas prouvent nettement que les tumeurs périnéales viennent
de Vintérieur de Vabdomen, comme les inclusions testiculaires.
Ce qui n'exclut pas la possibilité qu'il s'en forme par le mécanisme de
la Pygopagie; mais les pygopages, vrais, étant extérieurs, doivent se déve-
lopper presque toujours facilement.
IV. Inclusion abdominale avec fusion primitive avec la glande cénitale. —
Nous devons envisager successivement ce qui a trait au sexe féminin,
où le phénomène est le plus simple, et au sexe masculin.
1° Sexe féminin {Kyste dermoide de l'Ovaire). — Il est indiscutable qu'il
y a plusieurs espèces de kystes dermoidcs et que certains d'entre eux sont
des tératom,es vrais, c'est-à-dire des vestiges d'un fœtus non parvenu à son
développement normal et constituant une monstruosité formant tumeur.
Nous ne pouvons ici nous appesantir (ce qui nous entraînerait trop loin)
sur les raisons qui nous font admettre cette subdivision des dermoïdes de
l'ovaire. Mais nous sommes obligé de rappeler que certains d'entre eux
au moins sont bien des tératomes, pour que ce qui va suivre soit intelligi-
ble et démonstratif.
Déjà Velpeau divisait les kystes dermoïdes de l'ovaire en 3 genres :
1° K. dépendant de la même cause, qui a produit l'organisme qui les
contient; 2» K. dépendant d'une fécondation incomplète; 3° K. dermoïdes
véritables.
Si l'on réunit la 2» catégorie à la l'«(^. par inclusion, kyste pilidentaire), on
a là nos kystes-tératomes. Depuis, les auteurs ont poussé plus loin les distinc-
tions. Mais, en somme, cette vieille division est restée.
Autrefois, on croyait que les kystes-tératomes avaient pour point de
départ : 1° Une grossesse extra-utérine (ce qui est faux) : 2o Une inclusion
[Kystes fœtaux par inclusion] : ce qui est vrai.
Mais personne n'avait songé aux Monstres doubles, sans réfléchir que
Vinclusion, sans monstruosité double ou sans jumeaux de même sexe, n'était
pas possible.
MARCEL IlAl'DOUIN. TKRATOMES DE MONSTRES IRirHLES iTll
Jadis, les théories suivantes ontéti' émises [loiir expliquer en particulier
les dei'moïdes df l'ovaire.
l» Féconditllou incompltHt' d'un ivnf ^pcrml . Mais iJaiiies a prouvé
iju'ils n'avaient aucun rapport avec la conception. De plus faillie en a
trouvé chez des enfants, ipii n'avaient jamais été uienslrué'.-s. 2° Accident
lit' formation (Byford). 3'^ Inrlusiou sur nn jiniiit ijuclcomine du hlnstodenne.
4° Elhnnxt sjiermatique, égaré lors de la lécundation, et emprisonné dans
les parties péripliériiiues de l'ovule. 5" Prolifération d'un hj^te ordinaire
(Ranvier). ti» Production naturelle par /^rtj-f/jcjto^^n^.se (lleinlin) [Voirthèse
Répinj.
« Il est permis de croire que les diiïérents mécanismes peuvent se
réaliser », concluait l'auteur de l'article du grand Dictionnaire de Méde-
cine '. — Ce n'est pas prouvé.
Actuellement, les Dennoides de l'Ovaire n'ont pas encore d'explication au-
dessus de toute critique. Mais les tératomes deviennent très conqjréhen-
sihles. si l'on admet notre théorie (Monstruosité double par inclusion
dans la glande génitale, hypothèse qui n'a pas encore été indiquée, ou
l'a été d'une autre façon) *.
Le Professeur S. Pozzi, dans son beau livre ^ a écrit : « La théorie de
la diplof/énèse par inclusion fœtale est inadmissible, et la présence d'un
nombre excessif de dents sulTit à la ruiner o. lia ajouté : « La théorie admise
aujourd'hui est celle de V enclavement d'un (jlobule polaire fécondé ou d'un
hlastomèse isolé, évoluant pour son propre compte ».
En réalité, la théorie qu'il accepte revient à ceWe dos œufs à deux germes,
donnant naissance à deux œufs inétjaux, soudés /'«u à l'autre. Or, c'est pré-
cisément la nôtre, et celle, en réalité, de Vinclusion fœtale, non pas sous la
forme ancienne, mais au sens propre du mot. Seulement il y aurait pour
lui inclusion primitive et non secondaire, comme nous le pnHendons.
Il a donc eu tort de dire plus haut que la Po///ot/onfie ruinait la théorie de
la Diplogénèse! En somme, cette Polyondotie ne prouve rien en l'espèc'e, si ce
' Art. Ovaire (Palh.). Dit. encyc. Se. Mèd., p. 02.
' Pour démontrer que les dernioide.s de l'ovaire étaient bien des Monstres doubles,
j'ai cherché à me rendre compte de la couleur des cheveux dans les kyst.s de cet
ordre qui en présentent; mais je n'ai pas terminé ces recherches.
En effet, on sait que chez les monstres doubUs (ceux ayant vécu surtout), de même
(pie chez les jumeaux de même sexe et univitellins, toujours les cheveux sont de la
même couleur, eu raison de la même origine des fo.'tus et de leur grande ressem-
blance physique !
Si donc il est constaté un jour que, dans un certain nombre di; cas, il y a identité
de coloration entre les cheveux du sujet porteur du Kyste et ceux du Dermoïde, ce
fait pourra constituer, dans ces cas, au moins un comraenccMiient de preuve, quoi-
qu'on puisse dire qu'un sujet qui a des cheveux d'une couleur donnée puisse pré-
senter une tumeur à poils de coloration différente.
Je dois signaler d'ailleurs qu'un auteur anglais a récemment publié une courte note
sur ce sujet [Bell (R. -H.). The coluur of the huir in ovariaa dermnidrs.Brit . mcd.J..
Lond., 1906, ii, 599].
» S. Pozzi et JiAYLE. — Traité de Gynécologie, Paris, 1907, t. 11, p. 045 et 940.
-iT-i 6 DÉCEMllHE lOOfi
n'est que l'embryon léralulogi(iue, en raison du trouble formidable sur-
venu dans son évolution, peut très bien présenter cette bypergénèse des
dents.
Uépin ', d'ailleurs, n'a pu se dispenser d'écrire : a Nous nous rallierons
à cette hypothèse la nôtre Jjien volontiers dans certains cas déterminés...
Celte présomption se changerait pres(jue pour nous en certitude, si
Nous croyons donc à la réntité de l'inclusion ovarienne dans certains cas
rares, faisant pendant à l'inclusion testiculaire... Nous allons même jus-
qu'à admettre que, parmi les dermoïdes de l'ovaire, quelques-uns sont, en
réalité, des inclusions! Mais ces concessions sont les dernières. »
Pour nous, nous n'hésitons plus. Tous les dermoïdes de l'ovaire sont
des tératomes : ce qui montre une fois de plus combien est en réalité fré-
quente la Polygcrminnlilé et surtout la Bigerminalité ; combien est impor-
tante la théorie des Œufs à deux germes et de la Diplogénèse.
On a trouvé dans les kystes dermoïdes de l'ovaire qui nous regardent :
des dents, des os maxillaires, des cheveux, des os plats (du crâne, évi-
demment), de la matière cérébrale, etc. — Tout cela prouve qu'il y a eu
un crâne dans cette tumeur, à un moment donné.
On a, d'autre part, la preuve que ces kystes sont bien congénitaux et dus
a un phénomène antérieur à la naissance. En effet, on en a observé, pour
18 cas : trois cas chez des fœtus de huit mois seulement; 4 sur des fœtus h
terme; 6 sur des enfants de 6 mois à 2 ans; 5 sur des vierges de 12 ans
(Pigné). Le doute n'est donc plus possible.
On a prétendu que ces kystes étaientp/us fréquents d'un côté quede l'autre;
mais c'est le contraire qui paraît être la vérité; et cette objection n'a, par
suite, pas de valeur dans le cas présent.
11 y a des kystes de l'ovaire doubles, quoique dermoïdes. Mais ces téra-
tomes doubles de l'ovaire peuvent à la rigueur s'expliquer par une
inclusion double, démontrée par les faits comme nous l'avons dit, et la
théorie des monstruosités triples; ou même autrement.
2° Sexe masculin {Tératorm inguino-scrotal). — Voyons maintenant com-
ment nous pouvons expliquer les Tératomes de la région inguino-scrolale,
qui forment une catégorie clinique très importante, puisque tout récem-
ment David G. Hilton * a pu en relever, en un tableau d'ensemble qui
nous a été fort utile à consulter, 91 cas probants!
Siège. On peut les classer ainsi, en tenant compte de leur siège :
J droit 22
A3 dàïïsles Testicules ) gauche 17
( côté indéterminé 4
» RÉPiN. — Thèse, Paris, 1891.
* D. C. Hilton.— Teralomaof theinguiao-saolal région. — Annals of Surgery^
1906, oct., p. 388.
MARCEL UALDÛLIN. — TKUATÙMES DE MONSTRES DULULES 475
30 scrotum.
48 dans le ImiuiI de desccnlc des teslivules ) *"* "^'^^^^ ini;uinal.
i luni(ju<' va.i,'inali.'.
'^ divers.
On remarquiTa d'aburd, si l'on additionne coinnu' nous venons de le
faire ce qui a trait au scrotiun, au canal inguinal, à la tunique vaginale
(ce qui est très logi(|ue, puistjue ces diverses régions anatoniiques cor-
respondent en somme au trajet parcouru par le testicule en descente)
qu'on a le chiffre 48 pour le canal de la migration testiculaire, et de 43 pour
le testicule : ce qui signifie qu'il y a autant de rltam-es de trouver un tératome
dans la glande elle-même que dans les parties voisines, situées sur le trajet
qu'elles parcourent. Ce qui est très compréhensible, avec notre théorie, qui
voit dans la descente de la glande génitale la cause de l'appai'ition du
tératome à la région inguinale, alors qu'il était primitivement intra-alnlo
minai.
Pourquoi y a-t-il des localisations intraranaliculaires dans les circons-
tances où nous sommes placé? Tout simplement, parce que la tunique
vaginale dérive en partie du péritoine qui entoure la glande génitale à son
apparition, et parce que les éléments du cordon, qui traversent le canal,
de même que certaines parties du scrotum, proviennent des tissus péri-
testiculaires. Rien d'extraordinaire, nous semble-t-il, en cette affaire!
Contenu. On peut classer ainsi le contenu des tératomes, d'après 70 ob-
servations utilisables.
a) Organes. — Parties fœtales nettes : 5 fois.
Dents : 7 fois.
Cheveux : 28 fois.
Peau et dérivés : 29 fois.
Corne : 2 fois.
b) Tissus. — Tissu osseux : 17 fois.
Tissu cartilagineux : 19 fois.
ris.su muqueux (Epilhelium) : 22 fois.
Tissu conjonctif : 3 fois.
Tissu nerveux : 1 fois.
Tissu musculaire : 5 fois.
Tissu élastique : 1 fois.
c) Divers. — Concrétions calcaires : 1 fois.
En examinant cette statistique, il est facile de constater que ce qui se
trouve le plus souvent dans ces tératomes, c'est la peau (29 fois) et les
muqueuses (22 fois) : ce qui s'explique fort bien, puisque ce sont les deux
téguments, interne et externe, de tout animal qui vient au monde!
Mais, ce qu'il est bien curieux de noter, c'est le nombre de fois où l'on a
rencontré des cheveux (28 fois), c'est-à-dire presqu'autant de fois que pour
la peau. Or, qu'est-ce que cela prouve?
Étant donné que les cheveux ne sont qu'une production de la peau
476 6 DHfiEMnuF. lîW»
[comme le tissu corni- qu'il faut y ajouter (2 fois), il en résulte que, sur
70 tumeurs, on a trouvé, en réalité (29 4" 28 + 2 = 59) 59 fois de la
fieau : c'est-à-dire "presque toujours /Ce qui n'est pas fait pour nous étonner,
au demeurant.
D'autre part, les cheveux correspondent à la peau d'une région unique :
celle de la tête, et plus spécialement du crâne. Qu'en conclure, sinon que
29 fois au moins sur 70 cas, il y a eu un crâne dans notre tératome?
Cette proportion nous parait très importante à noter, car nous ne trou-
vons pour les dents que 7 cas et pour les autres parties fœtales que 5 cas
indiquant la face; au total 12. Enfin, dans un cas, on a trouvé des
vertèbres et des côtes, c'est-à-dire un tronc *; et cela prouve que Varrêt de
développement survient parfois assez tardivement.
Etant donné ce que l'on sait de l'époque de l'apparition du crâne, qui est
la région qui apparait la première et progresse le plus rapidement chez un
embryon normal, il nous semble possible de conclure de ces seuls chiffres
(ju'au début le tératome ne fut qu'un fd'ttcs humain inclus dans le sujet
porteur du tératome, primitivement abdominal.
Cela étant, on retombe dans le cas des fœtus in fœtii ; et tout le monde sait
aujourd'hui que cette afi'ection est une monstruosité double, dans laquelle
un des fœtus est resté dans l'autre, et a été arrêté dans son développement.
De plus, sur 39 tératomes testiculaires à côté connu, nous en avons
22 pour le côté droit et 17 pour le gauche, c'est-à-dire encore presque
égalité pour le côté atteint. Ce qui semble indiquer que la notion du côté
n'a pas grand intérêt.
Peut-il y avoir des tératomes doubles, c'est-à-dire se développant sur les
deux testicules à la fois? Oui, étant donné ce que nous savons des kystes
dermoïdes doubles de l'ovaire; et nous avons donné plus haut des expli-
cations plausibles pour ces tératomes. Répin nie cependant la bilatéra-
lité.
Au point de vue théorique, les tératomes du testicule ont été étudiés
par Wilms, qui leur a donné le nom d'embryoïdes ou d'embryomes : ce qui a
réussi à, compliquer tout à fait la question. Mais cependant il a bien
montré qu'il fallait rattacher à ces formations les faux-adénomes du testi-
cule décrits par Langhans (1887), qui n'ont rien à voir avec les adénomes
vrais (Lecène et Chevassu, 1907) : ce qui augmente encore le nombre des
tératomes testiculaires et les rapproche une fois de plus de ceux de l'ovaire.
La. fréquence des tératomes testiculaires n'est pas aussi grande que celle
des tératomes ovariens, à supposer même que nombre de kystes dermoïdes
de l'ovaire ne soient pas comptés comme tératomes vrais, mais tumeur
particulière. Pourquoi ? Théoriquement, on ne voit pas pourquoi les
monstres doubles à inclusion génitale du sexe féminin seraient plus
fréquents que ceux du sexe masculin.
Pourtant, si l'on songe qu'en général les monstres doubles du sexe féminin
1 Nous ne parlons pus des membres et de leurs os, dont l'apparition est tardive.
Marcel iiAinmiN. — tkkatumks i»k monsthes doi-hles .477
sont nolablomenl {dus fré(|uenlsque ceux du sexe masculin, on comprend
déj.i pour(|ijoi il y a un.- dilTérence. Mais celle-ci esl-olle suffisante?
L'avenir nous le dira.
Verneuil (1853) a monlré.jue les lératomes lesliculaires sont toujours
para tfsticulnires el non inlra-testiculaires. Ils se sont donc, à un moment
donné, surajoKtrs X la glande, qui d'ailleurs a été gênée dans son propre
développement.
Les tératomes testiculaircs sont petits, parce que les gros restent inclus
dans l'abdomen et ne peuvent pas s'extérioriser, lors de la descente de l'or-
gane. C'est ce que prouve un cas, extrêmement important, parce qu'il
représente un stade intermédiaire de révolution ûosténitompstcsticulaires,
et qu'il a été catalogué jusqu'ici comme inclusion alxloininale^erveiiv de dia-
gnostic, qui prouve la valeur de notre théorie): c'est celui de Bornhuber
(1831). En voici le résumé, d'après Répin, (jui en a d'ailleurs bien reconnu
la nature.
« Homme né en 1741. Depuis Venfance, dans l'hypochondre //riMc/tf', tu-
meur, peu volumineuse, qui grossit peu à pru. Mort à 30 ans, en 1831.
Autopsie. Grosse tumeur dans l'hypochondre gauche, adhérant au
diaphragme et à V estomac. Le testicule gauche manque seul. Fœtus calcifié
(planche probante dans le traité d'.Vhfeld), avec cordon ombilical ». »
Nous nous sommes demandé si quelques-uns de ces tératomes ne pour-
raient pas correspondre à des téralopages soudés par \a. partie antérieure de
l'extrémité inférieure du corps, et par suite être analogues à certains
tératomes sacro-coccygiens.
Théoriquement, cela peut-être possible, puisqu'il y a tous les intermé-
diaires entre les Omphalopages et les Pygopages, en passant par les hchio-
pages, les IJgpogastropages, etc., etc.
En prati(iue, étant donné le phénomène de descente des testicules,
nous croyons qu'il faudra bien rarement song>r à cette origine, surtout
d'après ce qu'on sait des tératomes ovariens, qui éclairent d'un grand
jour toute la question des Tératomes inguino-scrotaux. D'ailleurs l'ana-
tomie pathologique ne plaide pas en faveur de cette hypothèse.
V. — IIem.\rques générales <,vi{ les Térato.mes.
Certains points de l'évolution des Tératomes, en dehors de la forme
clinique sous laquelle ils se manifestent, seraient intéressants à élucider.
Malheureusement, on ne peut que soulever ces questions, sans avoir la
prétention de les ré.soudre de façon di-Pinitivc à l'heure présente.
On doit distinguer :
A) [ai période de début ; \i) L'écolutiou ullrri/'ure.
* On pourrait peut èlre tu riip|)roclier le ca.s d'iiiclusiori firUlo d'Ilighinore (1818).
30C. d'anti«\op. 190(j. 33
478 6 DÉCEMBRE 1906
A. Pkriode de DicitrT. — Actuellemenl il y a deux théories :
I. Throrie (le l'inclusion sccoudnirr, dite ancienne { Monstres doubles).
H. Théorie (Ir l'inclusion primifire, di(e nouvelle [Deux Germes).
I. Inclusion secondaire. — 1° Mécanisme. Le fœtus destiné à rinclusion
se trouve ramené, son canal vitellin personnel ne se développant pas et lui-
mOme restant ;i un stade très jeune, au contact de l'intestin du fœtus
porteur; il doit s'engager forcément, ce dernier se développant sans cesse,
par dessus le canal allantoïdien, en avant du rectum et en arrière de la
vessie, dans le cul-de-sac de Douglas.
Immédiatement, il constitue un corps étrnmjer dans l'abdomen du fœtus
porteur, dont le futur péritoine réagit et crée des adhérences entre les deux
fœtus frères.
Si l'adhérence se fait très intime et très rapide au niveau de la glande
génitale., le fœtus inclus donnera un fératome génital {oxnnen ou testiculaire).
S'il glisse au-devant de cette glande, il descend beaucoup plus bas et
devient ultérieurement un tératome sacro-coccygien , sorlSinl du bassin entre
le rectum et le sacrum.
Il est bien certain que l'endocyme peut être, pour une raison quel-
conque, arrêté en route et par suite être fixé au niveau de la paroi abdo-
minale, soit en haut, soit en bas ; il constitue alors un dermocyme vrai
périombilical ; mais c'est la grande exception. D'ordinaire, il s'engage fran-
chement dans l'intérieur de l'abdomen : ce qui s'explique très bien par la
disposition du canal vitellin réunissant les deux fœius, ou plutôt les deux
intestins '. S'il y reste, le monstre endocymien est constitué.
2<* Epoque d'inclusion. — Peut-on dire à quel moment de la vie intra-
utérine se produit cette inclusion secondaire, qui est alors \e fait primordial?
Il n'est pas possible, à notre avis, de le préciser encore. Le fait qu'il y a
des membres ■ dans les inclusions ne prouve pas que l'inclusion fœtale a
eu lieu après Vapparition dece'xx-ci sur le sujet inclus, car l'inclusion n'em-
pêche pas certaines parties de continuer à se développer, alors que la plus
grande partie des cellules de l'organisme est atteinte.
Mais il y a des données intéressantes à noter. C'est d'abord la fréquence,
relativement très grande, des inclusions abdominales intra-génitales (chez
les filles: ovaires; chez les garçons: testicules).
Pour que cette inclusion si spéciale ail lieu, il faut évidemment qu'elle
soit antérieure au développement et surtout à l'isolement de la glande
génitaledu reste des organes du sujet porteur. Or cette glande (l'épithélium
germinatif) apparaît de très bonne heure, parfois le 5® jour chez le poulet.
D'autre part, nous avons V extériorisation pcrinéale primitive. Or, pour
que celle-ci se produise, il faut évidemment que le plancher périnéal ne
soit pas formé tout à fait; ou plutôt ce phénomène doit avoir quelque
1 Celle disposition explique les tératomes intva-stomachaux et intra-intestinaux,
qui ont été signalés, mais qui sont très rares.
- Ils apparaissent d'ordinaire du 209 au 25^ jour.
MAUCEL DAIDOUIN. — Tl';it\TnMK> liK MON^TtlKS IxtlHI.KS i79
rapport avec la commiiiiicitiufi qui st.' pitMliiil enln' le iccluin t-t l'aims,
ainsi rpie le [(i-diivf le cas «le Colin ( lUOC)).
I.e fait (pi'on trouve îles <inses iiilcslinuli-x dans les Tératoincs sai-ro-
coccygiens hii-n pins son vent ' qnf dans les Tcrnhtmra (fi-uUnu.r scmijlo
indiquer ipio rincliisiin) pinir ces di-iincis ;i lieu iijnh l'appurition dn tube
digestif, c'est .à ilire après le 10"" jour.
13e même, le fait que les tératomes sacro-coccyi^iens sont moins déve-
loppés que les petus in firlii nu h^nilori/mrs propreuient dits si-nilile indi-
quer que ces derniers ne sont inclus (juassez tardivi^menl.
Si ces réflexions sont exactes, i'ordie d'inclusion seconda iresevaii donc le
suivant :
Du o" au iO" jour : Térntovies f/niitaux (faux dermoïdes), etc.
Du 10® au iJO" jour : Téralomes sacro-cocci/f/iens.
Ultérieurement : Monstres Enducymcs proprement dits.
Ur il est curieux de constater que cet ordre est précisément celui de la
fréquence de ces diverses malfoimalions, les Endocymiens étant plus rares
encore que les Tératomes sacro-coccygiens.
II. Inclusion primilire. — Telle est la vieille théorie classique, basée sur
la notion des Monstres doubles. Mais des auteurs modernes (Bonnet, Wilms,
etc.) ne font pas intervenir cette notion primordiale de Monstruosité. Ils
admettent seulement Vinclusion primitive d'un sujet dans l'autre, simple-
ment par le fait du développement d'un /œlus dans l'autre, en raison de l'exis-
tence de deux germes.
Par suite, ils n'admettent pas l'inclusion, au sens de I. (ieoiïroy Saint-
Ililaire, c'est-à-dire cette inclusion secondaire à la formation des deux em-
bryons distincts. Nous enregistrons cette théorie, sans la discuter ici, car
cela nous entraînerait trop loin. D'ailleurs, cette explication ne change
rien à tout ce (pie nous avons voulu prouver !
III. Evolution ui.tkrirl'uk. — Pour la suite de l'évolution des Téra-
lomes, la théorie, que nous allons résumei' maintenant, nous paraît la
seule admissible.
1° Époque de l'extériorisation. — La sortie hors de l'abdomen d'un
fœtus inclus doit être évidemment régie pai- une hti biologique, plus ou
moins comparable à celle (pii correspond à l'expuisitui des corps étran-
gers infectés de l'organisme. Mais aucun fait, jus(|u'ici, n'a permis de la
surprendre à l'œuvre. Toutefois il y a des observations qui doivent faire
ouvrir les yeux.
C'est ainsi qu'on a pu prendre V extériorisation presque sur le fait, dans
un cas d'IIimly, publié en français par C. Paul '. En effet, d;ins cette
observation, il est noté que le tératomc sacro-coccygien faisait en partie
1 Ce tiiit peut rire aussi on rapport avic la PijydpiKjio, qui donne <les tératomes
sacro-coccygiens.
* Constantin Paul. — Klwlr pour .temr à l'his/oirr des monstruosités parasi-
taires ; De r inclusion fietale située dans la région sacropévinkilf. Arcli. yènér. de
Médecine, 186:2, H' sér., t. XIX et t. XX (.Mémoire capital, en l'espèce).
480 6 DKCEMUHK 1906
« saillie dans le bassin, et remontait jusqu'au milieu dcVépine dorsale n. — Dans
un autre fait, celifi do J. (iillcs (^i8:{:i), la tumeur s'eniunçait entre les deux
ischions, et, en haut, elle adhérait au coccyx. — H y a encore d'autres cas
analogues, mais moins probants, sans parler des faits déjà cités ici.
2° Extériorisation d'un fœtus après la naissance. — L'extériorisation d'un
fu'lus inclus, (jui pour nous est démontrée au moins pendant la vie intra-
ulérine, et qui se produit de très bonne heure, est-elle susceptible de se
montrer après la naissance?
Aucun fait, authentique et indiscutable, ne le prouve; mais, si elle est
possible, ce que l'avenir nous dira, elle peut expliquer, de même que les
légendes expliquent certains laits géologiques ou historiques : 1° le récit
d'Otto et Clauder (xvif siècle), relatif à un accouchement d'un petit fœtus
femelle chez une fillette de 8 jours (/rt notion de sexe, qui est la même, donne
ici du poids à la légende, si c'est une légende, et plaide en faveur d'un
monstre double, à fœtus inclus, expulsé après la naissance).
2° Le cas du moine ïsabord de Amelluxen, datant de l'an 836, qui peut
s'expliquer par une inonstruositi; double, avec deux fœtus inclus (mais l'un
dans l'autre ici : ce qui n'est pas impossible), extériorisés par le porteur,
âgé de 19 ans.
30 Le cas de G. Clauderius (1672), identique à celui qui précède, au point
de vue pathogénique. (Encore ici deux enfants du sexe féminin).
4" Le cas de liertrandus Lot (1697) : Enfant dans la cuisse d'un homme
(Inclusion crurale). On remarquera que l'enfant était du sexe même du père :
ce qui est un fait très important et plaide en faveur de l'authenticité du
cas !
L'inclusion directe dans la région crurale me semble parfaitement pos-
sible ici, cela tout aussi bien qu une extériorisation crurale après inclusion
abdominale.
Par conséquent, L Geoffroy St-Hilaire a eu tort de dire que le cas de
B. Lot n'est qu'une « variante absurde delà fable mythologique de Jupiter
et de Semélé ».
C'est le contraire qui doit être vrai. C'est un fait du genre de celui de B. Lot
qui, au contraire, a dû donner naissance à la Légende de « Jupiter et de Se-
mélé », pour ce cas comme pour d'autres légendes mythologiques, ayant la
monstruosité pour origine. — Nihil est in intellectu quodnon erat in sensu / 11 y a
longtemps que le regretté Mathias Duval a dit que la Mythologie et certaines
Religions ont beaucoup emprunté à la Diplotératologie!
3° Nature de la monstruosité originelle. — Si l'on admet la théorie de la
Monstruosité double vraie, et non celle de l'inclusion primitive, pourquoi n'y
a-t-il de lératomes congénitaux que dans la catégorie des Pa^es? Pourquoi
n'y en a-t-il pas dans les Dymes et dans les Adelphes? Parce que leur pro-
duction est bien plus facile avec les Tératopages, et en particulier avec les
Omphalopages, évidemment.
Et surtout parce que l'Omphalopagie est une chose normale à chaque
MVliCKI. IIAUDOUIN. — TKItATO.MKS liK MONSTRES DOOULES IHl
fois (lu'une naissance gemellairo est consécutive au (léveloppem<Mit il'un
œuf à deux germes.
On peut même ilire qu'à pii'soiit on no cunn.iil ^uèrc ipii' !<'■< ihiijihdlo-
par/es internes et inclux (cVst-à-<lire les fœtus in fœlii), et(|ue lesOmphalopagos
vrais, ou externes, sont très rares, tamlis (jne les Xipliopages sont assez
fréquents.
Jusqu'ici, nous n'avons parlé que de Clinique. — Mais, en dehors des
données fournies [yàvVAnatomo-pathologie, puisqu'on a désormais cette idée
directrice pour point de départ, idée qui permettra d'avoir des notions
l)lus exactes sur la constitution des Tératomes, il est maintenant une autre
méthode qui permettra, avant leur ablation, de se faire une idée plus
nette encore de leur origine et de l'endroit d'où partent leurs éléments
principaux : c'est la fiadiograpliie, dont depuis longtemps nous prônons
l'emploi pour les monstruosités simples, comme pour la Diplotératolor/ie^
Il est bien évident qu'il faudra dorénavant recourir à ce moyen d'étude,
non seulement pour les Tératomes extériorisés, mais môme pour les kystes
dermoides de Tovaire, supposés d'origine tératologique. et surtout les
Monstres endocymiens. Nous sommes convaincu qu'un nouveau champ
s'ouvre de ce côté aux recherches des ïératologistes et surtout des Clini-
niciens diplolératologistes -. Donc, désormais, il faut radiofirnplner tous les
tératomes, et par suite tous les kystes de l'ovaire, pour y dépister le téra-
tome, si possible.
l'ar cette simple ébauche, on voit toute l'importance qu'a, en réalité, en
pathologie externe, la Tératologie et même la Diplotératologie. Nous
avions donc un peu raison quand, il y a quelque temps, nous demandions
la création ' en France, soit à la Faculté de iMédecine, soit à laSorbonne,
soit mieux au Collège de France, d'une Chaire de Tératologie humaine et
comparée.
Hépétons ici encore que, sans laboratoire spécial, sans auditeurs, sans
milieu intéressé à la poursuite de ces études, il sera très difficile chez nous,
I Marcel Baudouin. - La térntolnyie et lex nu/ons X. Prngn's mi'diml, 1807,
5 juin, 11» 33, p. liiJ'i.
* On [icut Hirc (ju'L'n rtvilili' il n'y a pas fie Téraloingio df.s monstres simp|p.«. p\
qunn somme il n'y a-qu'iine /'oli/téralologie. J'ai soulcnu di-jà celle nianiôre de voir
;i la Société d'Anthropologie de Paris, en montrant que la iiluparl des anomalies et
monstrnosilùs simples étaient désormais du ressort delà Cfiirurfficinfantile propvQ-
ment dite, au point de vue éliolosiquc comme au point de vue clinique, tandis que la
Patfioyénie des monstres multiples est quelque chose de tout à fait spi^cial, qui n'a
aucune analogie avec ce qu'on observe en patbologie ordinaire.
' M. Baudouin.— Une chaire de Tératologieà Paris. Gas. mvd. df Paris, 1902, 1-2 s.,
II, 193.
t^:^ 20 UKCEMItUK l'.lOG
où cfs travaux sonl à peine appréciés, de créer un courant d'opinion capa-
ble d'entretenir le zélo des viais chercheurs et surtout de faire éclore les
initiatives nécessaires pour le développement de cette Science, pourtant
d'origine bien française '.
836* SEANCE. — 20 décembre 1906.
Présidbnce de m. Zaborowski.
Élection. — M. Choc)Uet présenté par MM. Ilain.v. Vorneau et Rivet, est élu
iiiciuhi-e titulaire.
Présentations,
Présentation d'un ouvrage intitulé : Infradurtion à l'étude des Sciences
physufiies et îiaturelles : Exercices d'observation, par M. Louis Lapicque.
L'ouvrage que j'ai l'honneur de présenter à mes collègues est d'un ordre bien
modeste ; c'est un manuel pour les petites classes des écoles primaires. Voici
à (|uel titre je puis espérer qu'il intéresse la Société. La Société d'Anthropologie
(le Paris a toujours considéré comme une partie importante de son rôle de
répandre le transformisme, cette conception qui a bouleversé notre connais-
sance de la nature animée.
Le petit livre en question introduit, pour la première fois, je crois, le trans-
formisme d'une façon explicite à l'école primaire. Il n'y a pas un chapitre
spécialement consacré à la théorie de l'évolution des êtres vivants; le plan
même de l'ouvrage ne le permettait pas, puisque s'intitulant E.vercices
d'observation, ce manuel s'est imposé de rester sur le terrain du fait direct ;
mais l'idée transformiste court au long de toutes les leçons qui traitent des
êtres vivants ; c'est cette idée même qui en fait l'unité ; mise particulièrement
en relief par des exemples systématiquement choisis, elle est en outre rapportée
à ses auteurs légitimes par une citation, sous forme de lecture, de Lamark et
de Darwin.
Il m'a semblé qu'il n'y a pas raison de craindre de communiquer k des enfants
de 8 à 10 ans cette précieuse conquête du xix« siècle ; non seulement le tians-
forniisnie n'est pas difficile à «omprendre, mais en outre lui seul met une cjai-té
lof:iqiie dans la connaissance des ditférenles formes de la vie. L'accueil bienveil-
hint fait par les instituteurs aux premiers spécimens qui leur ont été adressés
moidre d'ailleurs que la tentative n'est pas inopportune : ce petit manuel est
établi d'ailleurs dans des conditions commerciales norriiales ; il est conforme
aux programmes, et sa première édition comporte un tirage de trente mille.
' A'.' moment de remettre c« manuscrit, nous apprenons que la Cliambre des
I)i''pulés vient do voter i.i rrénlion d'une Chaire de Tératologie à la Faculté des
Scif>ncrs de Paris — Il esi regrettable que ci-tte création n'ait pas ôé faite an Collège
de France, car les étudiants ès-science.s non spécialisées ne peuvent guère s'intéres-
ser aux questions de cette nature.
PRÉSENTATIONS 483
C'est .Inné II" (iMMsIoniiisme pénétrant elïcrtivriiMMit à léculc in-irnfiiic i|Uf'jo
iiit' permet» tle sigiinlcr à la Soiiélé.
M. ÉuouAHi) Ci'VKit. — J'ai I liumieiir dolliir à la Sciciéd' iii) arlirlc sur
I KuseifjriuMiii'iit ilii ili'ssiii |ilaslii|iii' dans rKnseiirncnuMil j^'énéi-aj, (|iii' je viens
i|i' publier dans « l'Kdueateur uiodiTUc ». la tivs iiitéressanle revue l'ondée et
diri^'ée par nuire colIrL'ui' le l)i l'aul {{(imour en collaboration avec le D"" Jcau
riiilippe '.
i'.tant données les eri(i<pies Imuuilees eiudrela méthode olïieielle d'enseipne-
uienl du dessin, par les partisans di' la mélhode intuitive, je me suis altarlié
j"! rechercher jus(ju";"i tpiel pitii'.t ces critiques étaient léiçiliines. j^i méthode
employée actuellement étant basée sur la raison, tandis «pie la méthode
adverse repose uniquement sur le sentiment, Je pense (pi'il serait l'Aeheux de
vdii'. dans l'enseignement général (pii n'a pas pour but de former des artistes,
la preiuiére remplacée exclusivement par la seconde. .Mais je crois, et c'est là ma
conclusion, «pie, dans une certaine mesure, elles piinrraieul tHre associées
l'une à l'autre.
Zahokowski. — Les conclusions de M. Cuyi'r m' seront pas contestées par
ceux qui sont au cnurant des nécessités de renseignemenl.
W Louis Dubreuil-Chambardei. (de Tdm-s). — .le lais hommage à la Société
d iiu exemplaire de mon travail sui- les Tniiis tle la .'<i/mp/ii/s(' du menton.
I»aus cette note, j'ai cherché à fixer la morphologie des trous et des canaux
qui traversent la sympinse du maxillaire inférieur et j'ai d(''crit un trou et
iiu canal sus-géniens, un trou et un canal inira-géniens, un trou et un canal
sous-géniens. Les premiers qui existent normalement chez les singes inférieurs,
et à titre exceptionnel chez les anthropomorphes, constituent une variation
auatomique d'ordre réversif. Les derniers qui n'existent dans aueuu groupe
zoologique sont liés à la présence des os meiitouniers. qui sont spéciaux à
l'homme, et constituent une variation d'ordre progressif. La dill'érence de
vascularisaliou vient conlirmer cette diversité d'origine; h; canal sous-génien
étant irrigué par une artériole issue de l'artère sublinguale ; le canal sous-
génien recevant une branche de l'artère sous-mentale.
.\u nom du l)"" René Héron (de Tr)urs), je dépose îi la bibli(ilhèr|ue de la
Société un exemplaire de son important mémoire sur les Clinodartiilics laté-
rti/t's coiu/énitdh's. Aucun li'avail d'ensemble n'avait encore été fait sur les
déviations digitales et jusqu'à présent on ne trouvait dans la littérature rpie des
observations isolées. L'auteur, s'inspirant des doctrines de l'Kcole de Tours,
étudie d'abord les déviations normales des doigts, puis les déviations amu'males
qui sont de deux ordres suivant (pi'elles exagèrent la disposition normale ou
suivant ipi'elles sont en sens inverse de cette dispositimi normale. DiscidanI de
très près les dillérentes théories proposées pour expliipier l'aïqiosition de ces
variations, il démontre leur origine osseuse et lait remaïquei' leur caractère
nettement héréditaire (|ui conlirnu- la loi de Mcndel. (.i- travail illustré de noni-
breuses photographies et radiographies, riche en observations originales, fixe
un fait curieux d'aualomie humaine.
• Henry Paulin et C'e, éditeurs, Paris.
48.\ 20 DKCEMIIRK inOG
La Socirto a roçu la Icllro siiivanti- (|u fllr est liciiivuse dinsrrci- <lans ses
Bulletins :
€ Fusagasuga (Colombie), le 2b août lOOfci.
« Monsieur le Président de la Société d' Anthropologie de Paris.
•(. .lai Ihonneurilo vous remeltre une pioce assez curieuse pour quelle puisse
être dans les galeries de votre Musée. Il s'agit d'un hamac que jai acheté aux
Indiens de la rivière du Vichada dans les pampas de Cundimamarca à l'est de
la Colombie.
« Le travail est bien solide pour faire le filet capable de soutenir le poids
d'une personne couchée : il est tissé avec la matière textile extraite d'un palmier
qu'on appelle moriche.
« La corde ci-jointe qui sert pour attacher le hamac aux arbres et aux pieux
est tirée d'une plante « le Ilenequen ».
« C'est le seul lit connu dans ces endroits et il n'est pas possible de coucher
d'autre manière à cause du climat et des inondations: le terrain est tout à fait
plat et très humide par la pluie et les forêts : on n'y trouve ni pierres, ni
cailloux d'aucune espèce.
a Les Indiens du Vichada disparaissent de jour en jour faute d'une bonne
nourriture : ils mangent du poisson, de la banane et de la yuca.
ft Ils parlent à peine quelques mots d'espagnol et le mot le plus affectueux est
mon beau frère quand ils distinguent quelqu'un.
« Les indiens du Vichada sont brun foncé, petits, trapus, peau lisse, sans
barbe et vont au soleil sans chapeaux et ils travaillent ainsi du matin au soir.
« Pour tout vêtement, ils portent une toile dans les parties honteuses par devant
et par derrière, et demandent pour leur salaire des rubans, bagues, boucles
d'oreilles, chapeaux et leur manière de compter est d'une l'une à l'autre.
« Quand on arrête son canot, ils demandent du sel, chapeaux, toiles ou étoffes
que porte le voyageur, et à être baptisé prenant dans ce cas le nom et prénom
du parrain.
^ M. AvA.
EXOSTOSES DU FEMUR
Par m. le D"" F. Delisle.
Dans .son travail sur le Pithécanthropus Erectus, iM. le D' Dubois a
figuré un fémur exhumé à quelque dislance de la calotte crânienne du
Trinil. Une particularité de cette pièce, fort intéressante du reste a d'autres
points de vue, c'est la présence d'une exoslose étendue au sujet de laquelle
M. Dubois a donné une interprétation erronée en la regardant comme la
conséquence d'un anévrisme.
M. Manouvrier en a au contraire parfaitement expliqué la nature, mais
il a été, à notre avis, trop loin en disant au sujet de celte exostose « qu'il
« s'agit d'une anomalie extrêmement rare, au point qu'elle n'a probablement
« jamais été observée à ce degré dans l'espèce humaine. »
Très certainement M. le D' Manouvrier ne s'était pas préoccupé de savoir
V. DKLISLE. — EXOSTOSES DL' FKMlll iH'\
ce (lue pouvaient posséder les collections des diiïéients établissements
scientifi<iue.s à sa portée, sans cela il n'auiail pas é'té aussi anirniatif.
Les collections ostéolo^iquesdu Lahoratoiie d'Anthropologie du .Miis(Mnn
d'histoire naturelle possèdent un assez grand Uduilire de fémurs liiuuains
porteurs d'exostoses, mais toutes n(; présentent pas les mêmes caraelèrfs
au point de vue de la cause génératrice, du développement, de la situation
sur l'os, etc.
La plupart de ces pièces ont été réunies dans le courant du xvni'" siècle
et font partie de ce lot de la collection ipii constituait le Cabinet du Jardin
du Roi.
Parmi ces pièces se trouve un fémur dont l'extrémité inférieure manque.
Voici la description telle qu'elle est donnée dans 1' « Histoire natu-
relle générale et particulière avec la description du cabinet du Hoy »,
T. 3% p 89, n° CLXXIIL Autre exostose sur un os de la cuisse.
« Celte exostose est au-dessous du petit Irochanter, sa forme est fort
irrégulière, ce sont des lames allongées qui forment des espèces d'arcades
sur l'os, ou qui se terminent en pointes plus ou moins acérées. Les plus
grands intervalles n'ont pas un demi-pouce dans la dimension la plus
grande, et les pointes les plus longues n'ont pas un pouce; on voit par
l'une de ces lames qui a été entamée, (jue la substance osseuse est fort
compacte, et par conséquent fort dure. Il y a encore des marques d'exos-
tose sur la partie inférieure de cet os, et il a été scié à quelque di-tance
de son extrémité; on reconnaît par cette coupe que la partie solide de l'os
est plus compacte, et le tissu cellulaire plus serré et plus dur qu'à l'ordi-
naire. »
Cette pièce, sans être absolument identique au fémur du Trinil, a son
exostose dans la même région, au voisinage et au-dessous du petit tro-
chanter, région d'insertions musculaires. La partie inférieure, c'est à-dire
une partie du corps de l'os et les condyles manquent, mais il y a l'indice
de lésions pathologiques qui se manifestent par une couche d'os nouveau
et on pourrait à bon droit se demander si on ne se trouve pas en présence
d'un travail de néo-formation se rattachant à une syphilide gommeuse.
Je profite de l'occasion pour présenter aussi un fémur de nègre trouvé
dans une sépulture sur le terre plein de Grand-Bassam, Côte d'Ivoire, par
le Docteur Henri Vergoz, médecin-major des troupes coloniales en 1899.
Cette exostose située vers le milieu de la face postérieure du fémur olfre
une forme particulière en crochet et paraît correspondre à une partie de
l'insertion du muscle crural. Des faits analogues ont été signalés sur des
sujets de race blanche (Bulletin de la société anatomique).
Les exostoses sont certainement plus fréquentes qu'on ne peut le sup-
poser, mais par suite des circonstances ordinaires de la vie. ce n'est que
par exception qu'on peut l<;s observer et elles ne sont pas spéciales h telle
ou telle race humaine.
^^^ 20 DKCEMHItK l\m
Discussion.
M. l'M'ii.i.AiLT. — L^'s itiv.s(Mil;ili<)iis de M. Delislo suiil fort inléres-
Siuitos. Kllfs prouvent, en ell'et, (|ue les exustoses du Pithecanlrope ne
sont pas très rares. On les avait signalées en Allemagne depuis longtemps
sous le nom de maladie des cavaliers; mais des observations ultérieures
ont montré qu'i^lks se rencontraient chez des personnes qui n'avaient ja-
mais connu réquitation. En dehors des abcès locaux, il faut sans doute
songer à des myosites interstitielles avec ossification progressive plus ou
moins généralisée.
M. Mau(]f:i. BAunniiN. — A mon avis, la pièce ancienne, provenant du
Jardin du lloi, présentée par M. Delisle, est patlioloffique. On trouve des
traces de lésions osseuses, remontant des condyles sur la face antérieure du
fémur, et allant en diminuant de bas en haut, comme si l'apparition avait
débuté par le genou ; par suite, les osteopliyles de la région sous-trochan-
térienne doivent être dues à une ostéopériostite de même nature. — Quant
à l'autre pièce, il semble qu'il s'agisse de V ossification d'une insertion tendi-
neuse, au niveau du milieu de la ligne .-^pre. On a parlé des ostéomes des
cacatiers; je rappelle que, quand ils adhèrent aux os, c'est surtout du côté
du pubis que cela s'observe, si mes souvenirs sont exacts, et que leurs
adhérences ne sont pas souvent osseuses.
DEUXIEME NOTE SUR LA LANGUE SCROTALE
Par m. le D"" Louis Dubreuil Chambardel {de Tours).
Vous me permettrez de revenir sur un sujet qui a fait déjà l'objet d'une
communication de ma part :\ l'une de vos précédentes séances : la langue
scrotale ou langue plicaturée ' . Je le fais, parce qu'ayant eu l'occasion de ren-
contrer en août dernier un cas très typique de cette curieuse variation
anatomique, j'ai pu vérifier chacune des conclusions que je posais ici en
juillet et faire quelque nouvelles constatations sur lesquelles je crois
devoir insister, par suite de l'importance qu'elles peuvent avoir en an-
thropologie.
\oic[ tout d'abord l'observation détaillée de ce nouveau cas, prise à
l'Hôpital militaire de Tours le 8 septembre 1906 par M. Seigneur, étudiant
en médecine :
* Cf. Louis DubreuilChambardel : Bulletin de la Société d'Anthropologie de Pa-
ris, 1900, no 4.
Id. : Quelques coDsidération.s sur la langue scrotale, in Archives générales de Mé-
decine, Nov. 1906; Gazette Médicale du Centre, 15 dèc. 190G; Province Médicale,
janvier 1907.
Df»RFA'll.-(:il\Mll\Hlti:i,. — I.A LANGUE sr.KOTALB
4«?
Eugène Sa..., Agé (W -H) ans, wi^ ;'v Au.vt'rro. einploy»^ lie foiniiuTce,
acluellemonl soldai au »j»>^ <!•' ligne, est eiilréà riln[»ital inililaire deTours,
division lies contagieux, salle A, lit 1. |i<>ui' ilyseiilerie.
Àt,tfét^dcnls hi'-ri'thlan-fs. — Le pt'-re (V)-! ans), aurait eu des attaques de
'nerfs (f) il y a i|uel(|ues années; la mère (48 ans), est artliritiiiue. Les
grands-parents paternels, Agés de î>;{ et ',»!> ans, sunl en parfaite santé.
Ni frères, ni soeurs.
ÀnÛcéâents pei.wnnrls. — S... a eu dans son enfance, jusqu'à ITl ansdes
bronchites fréquentes. A 8 ans il a eu la rougeole avec épislaxis A 11 ans
il a eu successivement la scarlatine, ladolhiénentérie, un ictère. (Juelques
mois après il a souffert d'un urticaire (1) qui reparut pendant plusieurs
hivers consécutifs et nécessita un traitement de 6 mois à l'Jlùpital Saint-
Louis à l'aris. A 16 ans il a eu la coiiueluclic. Enfin, à plusieurs reprises
il a eu des aphtes localisés à la pointe de langue et de légères amygda-
lites. Il n'y a chez lui aucun symptôme de syphilis, de rhumatisme, ni
d'épilepsie,
ËMmen (k la bouche. — Le maxillaire inférieur est large et nettement
hyperholique. L'indice maxillaire est deGl,9 Les dents sont helles etim-.
plantées très régulièrement sur une large arcade. Il n'y a pas de malfor:
roation de la voûte palatine. Le système s^livaire est lrt?s dévejoppé; la
houche est toujours humectée par de la saliyç ^bonc)ante. S... déclare (ji^^
photo. Sijhoot's.
iH8 20 DKCEMlIltK lUOC)
tous les malins, ;i son rt'veil, son oreiller osl humide ii cause de la salive
perdue pendant la nuit, les glandes sublinguales sont représentées par
deux masses volumineuses qui sailllenl sur le plancher de la bouche. Il
n'y a pas de végétations adénoïdes et les amygdales palatines et linguales
sont normalement développées.
Examen de la langue. — La langue est large, étalée, de couleur unifor-
mément rouge; le sillon médian est à peine indiqué ailleurs qu'à la pointe.
Sur toute la face supérieure de l'organe on remarque des sillons en assez
grand nombre, dont quelques-uns arrivent sur les bords qu'ils incisent
largement. Ces sillons sont à direction transversale. Ils existent aussi sur
les marges de la face inférieure. Assez profonds de (0 m. 001 — 0 m. 002) ,
à la partie antérieure, ils s'atténuent bientôt de plus en plus à
mesure que l'on approche du V lingual, mais existent encore dans la
région pharyngienne. Ils sont courts; leur longueur n'excède pas
0 m. 010 — 0 m. 015. Leur largeur est de 0 m. 0015 en moyenne D'après
S..., ces sillons existaient dès sa naissance. Le V lingual est normal,
mais on remarque une hypertrophie papillaire se continuant jusque sur
la face pharyngienne. Les veines et les artères ranines sont très saillantes
sur les cotés du frein de la langue.
En résumé, S... présente un bel exemple de langue scrotale congénitale
à type transversal. On n'a pu vérifier si d'autres membres de sa famille
avaient cette même anomalie.
Examen de la salive. — L'examen de la salive a pu être fait par M. E.
Michelon, pharmacien à Tours, qui nous a rerais la note suivante :
EXAMEN d'un ÉCHANTILLON DE SALIVE
Cette salive au moment de son prélèvement était incolore, un peu opa-
lescente, filante, à réaction presque neutre, tendant plutôt vers une très
légère alcalinité.
Analysée, elle a donné les résultats suivants :
Extrait sec 1 gr. 50 I
Eau 98 er. 00 ( ,„^ , ,.
p, , n " o« / pour 100 {grammes de salive.
Clilorures 0 gr. 22 i
l^hosphate de soude.. 0 gr. 18 I
Comparant ces résultats à ceux donnés par Jambowitsch pour unesalive
moyenne, nous voyons que la quantité des éléments qu'elle renferme
est environ le i/3 de la dose normale, ce qui n'a pas lieu de surprendre le
sujet salivant très abondamment.
La quantité de salive recueillie étant très faible, il m'a été impossible
de doser la ptyaline, mais les résultats précédents permettent d'en évaluer
la quantité à environ 0 gr. 60 0/0.
Dans cette observation nous retrouvons les différentes particularités
DUBREUIL-CHAMBARDEL. — LA LANtilE SClloTAl.F, 489
qui constituent le coinplexus anatoiniiiue do la langue srrotalc et que nous
avons signalées précédeuiinent :
i" Largeur de l'organe très manifestement exagérée;
2° Sym-Hrie parfaite des sillons latéraux par rapport au sillon médian ;
3° Augmentation de largeur du maxillaire inférieur;
40 Régularité absolue et bonne conservation du système dentaire;
5° Hypertrophie très nette du système salivaire.
Ce sont ces cinq particularités, que nous avons trouvées constamment
dans toutes nos observations, qui caractérisent cssentiellemet l'anomalie
en question.
Indice maxillaire. — Nous avons es-ayé de déterminer la largeur du
maxillaire inférieur par une formule précise et nous avons pensé qu'il y
aurait peut-être intérêt à établir un indice maxillaire. Cet indice est cal-
culé d'après les deux mesures suivantes : 1" distance maxima des deux
angles maxillaires; 2'' distance séparant le point mcnlonnier du point où
la ligne perpendiculaire, menée de ce point mcnlonnier, coupe la ligne bi-
angulaire.
Nous avons, à l'amphithéâtre de l'École de Médecine de Tours, pris,
tant sur le squelette que sur le cadavre, de nombreuses mensurations sur
des sujets tourangeaux, et nous avons pu constater que l'indice maxil-
laire ainsi calculé, variait dans de grandes proportions de 77 à 68. Nous
avons essayé d'appliquer cette méthode sur le vivant, et, bien que la tech-
nique soit assez délicate, nous avons été conduit aux mêmes résultats.
Nous présenterons d'ailleurs ultérieurement une note à la Société d'An-
thropologie dans laquelle nous donnerons le détail de nos recherches sur
cet indice maxillaire.
Je tenais cependant à entrer dans ces quelques explications pour dire
que chez tous les sujets porteurs de langue scrotale, que nous avons exa-
minés, cet indice maxillaire a toujours été trouvé plus petit que l'indice
moyen. Dans l'observation que je présente aujourd'hui l'indice maxillaire
était de 61,9. Dans d'autres nous avons trouvé : 65,4; 64,3; 63,2; 67, etc.
11 était donc intéressant de constater cette plus grande largeur du
maxillaire inférieur, coïncidant constamment avec l'exagération de lar-
geur de la langue. Y a-l-il là une relation de cause h effet? Nous serions
assez tenté de l'admettre.
Hypertrophie salivaire. — Nous avons signalé parmi lespartieularités de
la langue scrotale, l'hypertrophie du système salivaire. Ce fait est très
manifeste dans l'observation que nous donnons ici. Les glandes submaxil-
laires et sublinguales sont très facilement appréciables et manifestement
augmentées de volume. Les glandes parotides forment de cha(iue côté de
la face, des masses saillantes et rénitenles, qu'on peut très aisément pal-
per. La salive est bien plus abondante qu'h l'état normal ; le sujet se plaint
d'avoir toujours la bouche humide et d'être obligé de cracher souvent;
chaque matin à son réveil son oreiller est abondamment mouillé par la
490 -t) UKCEMIIUK 1900
salive qu'il a perdue la nuil. iNous en avons fait faire l'analyse chimique
par M. E. Michelon, et il a été reconnu que la quantité des éléments de la
salive est d'environ un tiers de la dose normale. Cela n'est pas pour nous
surprendre puisque le sujet salive très abundamment. Dans les :24 heures
la quantité de ces éléments ne sérail donc pas supérieure à celle produite
par un homme normal, mais se trouverait diluée dans un liquide bien
plus abondant.
HégularUê du système deniain'. — l'our ce qui est du système dentaire
notre attention a été portée sur les trois points suivants : 1° régularité des
dents, implantées sur une large arcade (les dents sont très belles, régu-
lièrement espacées, d'un développement normal); 2" bon Hat de conserva-
tion des dents qui sonl rarement et tardivement cariées; 3° précocité des
cinquièmes molaires ([ui souvent ont apparu chez nos sujets dès l'âge de
15 ans et sont volumineuses.
Voici donc toute une série de constatations qui rendent particulière-
ment attrayante l'étude de cette curieuse variation anatomique. Quelle est
l'origine de cette variation? Nous avons déjà dit qu'elle ne pouvait être
considérée comme un symptôme d'hérédité pathologique; nous avons
signalé aussi son caractère nettement héréditaire et familial. Nous ajou-
terons qu'on ne saurait le prendre pour un stigmate de dégénérescence;
rien, dans nos observations, ne pouvant appuyer cette hypothèse.
On nous permettra de ne pas entrer plus avant dans l'explication des
faits. Nous franchirions la barrière qui nous sépare du domaine des
théories.
Discussion.
Le D'' Rivet s'étend sur l'hérédité de la langue scrotale.
TOUKOU LE HAOUSSA
Souvenirs de laboratoire.
Par m. E. A. Hamy
Président de la Société.
.î'ai eu longtemps pour modèle au Muséum un nègre de race supérieure,
d'une plastique assez remarquable pour avoir fixé l'attention d'artistes
tels que Benjamin Constant ou Tony Noël. Toukou — c'est son nom, —
Haoussa de race, posa en eiïet pour le célèbre tableau du premier de ces
msi\lrt's,l' Entrée de Mahomet 11 à Conslantinople et il n'est autre qu'un de ces
superbes gladiateurs, modelés par le second pour le vestibule du nouvel
Hôtel de Ville de Paris.
E.-T. IIAMY. — TOUKOl' LE HAOUSSA 4'J 1
J'avais connu le personnage a l'hùpital Cuchin où mun ami feu le
D' Desprôs me l'avait présenté, et comme il montrait une morphologie très
caractéristique, je l'employais pour les démonstrations antliropométriipies
que j'avais instituées pour les voyageurs dans mon vieux laboratoire de
la lUie Cuvier.
Nous avons mesuré et remesuré, dessiné, plioti>grapliié. moulé notre
modtMe, j'ai donné le profil de son buste en plâtre, réduit au (juart, dans
les Crania Elhnica *, mais son obsenmtion est, je ne sais pourquoi, demeurée
inédite. Or, comme le sujet asa valeur(7//H/y«<'inlrinsè(pieet(ju'ila fourni en
outre le modèle d'œuvres d'art justement célèbres, je crois bon d'olTrir à
la Société ce document, sur lequel je viens de remettre la main, en y joi-
gnant des commentaires iii(lis[K'nsables.
Ouelques mots d'abord, si vous le voulez, pour bien «Hablier l'oiigine
très authentique de cet intéressant sujet. Toukou est né dans la banlieue
de Sokoto ou Sakatou, la capitale de l'Etat llaoussa sur les bords du
Goubbi N' Sokoto, allluent de gauche du Niger. Il avait gardé le souvenir
très net des cases rondes de son village natal et de sa pauvre mère en-
levée avec lui dans une razzia par des hommes rouges (jui ne peuvent être
que des Foulahs.
Vendu et revendu h travers le pays noir, marqué chaque fois d'une
nouvelle cicatrice sur le front ou sur les joues, Toukou avait enfin trouvé
la liberté un jour que ses derniers maîtres s'étaient fait prendre par un
goum algérien ; il pouvait avoir alors de 7 à 8 ans.
On plaça le jeune libéré dans le village noir d'Oran oîi il fut bap-
tisé sous les prénoms de Pierre-Martin et à dix-huit ans il entra au
2" tirailleurs avec lequel il fit la guerre en Crimée, où il gagna leMédjidié
qu'il portait en en cachant le vert, — petite supercherie que les noirs ne
sont pas les seuls à commettre.
Son congé terminé, il venait en France, épou.sait à Paris... une blan-
chisseuse et protégé par un de ses anciens officiers, il devenait concierge
d'un immeuble de la place de Grève. Quand je l'ai connu, Toukou
posait chez les artistes et vivait assez largement de ses gains.
Fort glorieux des compliments que lui avait valu sa plastique de la
part d'artistes en renom, il portait beau, suivant une expression courante.
Toujours correctement vêtu, linge blanc, cravate de soie de couleur
voyante, gants jaunes à barrettes rouges, le ruban à la boutonnière,
vous l'auriez pris pour quelque diplomate haïtien, n'était son type qui avait
quelque chose de bien spécial et ses cheveux qu'il serrait d'un cordon au-
dessus du vertex et dissimulait dans son haut de forme, les laissant
retomber en mèches floconneuses quand il prenait la pose. Cette chevelure
avait l'aspect que les planches des anciens voyages donnent aux per-
ruques des Tasmaniens aujourd'hui disparus; c'étaient de longs entor-
tillements cylindriques qui foisonnaient en manière d'anglaises crépues,
» Cran. Ethnie, fig. 309, p. 348.
492 20 DKCEMDiiK lOOn
de 10 à 15 cenlimèlres de longueur, tout autour de la tôte *. Cette coiffure
donnait à Toukou une très originale sauvagerie. Je n'ai jamais revu
depuis semblables cheveux chez un noir d'Afrique et ce trait me paraît
tout à fait caractéristique d'une race à part, dont notre noir accumulait
d'ailleurs les caractères en les exagérant.
• Sa couleur de peau était d'un ton chocolat tirant un peu sur le brun
jaune-brun dans les parties le plus claires, les paumes des mains, les
plantes des pieds correspondaient aux n'^» 30-40. L'iris était noir (n» 1),
la sclérotique teintée (n" 5). Les muqueuses des lèvres et des gencives
étaient violacées; les dents fortes, d'un blanc jaunâtre, offraient une usure
très prononcée aux molaires, obliquement taillées en dehors et en bas.
Les ongles, épais et arrondis^ formaient un peu la griffe, la lunule s'y
montrait très marquée. La pilosité était presque nulle ; une faible mous-
tache avec quelques poils de barbiche et un semblant de favori et c'était
à peu près tout.
La taille de Toukou était exactement de 1 m. 670; assis il mesurait
0 m. 860, et le rapport centésimal du second de ces chiffres au premier
était de 514/1000. Sa grande envergure atteignait 1 m. 740 et dépassait
sa taille de sept centimètres, ce qui donne le rapport 104. 1/100.
La distance du vertexau menton était de 23 centimètres, ce qui donnait
au sujet sept têtes un quart, comme on dit en style d'atelier.
La tète, dont les courbes horizontales et transverse supérieure sont
représentées par 0 m. 560 et 0 m. 390, est mésaticéphale (d. a. p.
185 mm. d. transv. 157 m. ind. ccph. 79) reproduisant à peu près les
formes relalivement arrondies des sujets de Katsena et de Kano photo-
graphiés naguère par La Gaze du Thiers. Cet indice céphalique, réduit de
deux centièmes suivant les approximations les plus habituelles, se
ramènerait à 77 pour la boîte osseuse, chiffre qui représente le crâne
moyen de la race Nouba-Haoussa d'après de précédentes recherches *.
Les largeurs des diverses parties de la face ont été représentées par les
chiffres suivants : front, min. 105""".; biorb. ext, 115, bioculaire externe
100; introculaire, 36; distance des pommettes 125, d. bi-auricul. 130,
bizygomalique, 140, bigonial, 105, largeur des narines, 45, de la bou-
che, 54.
Les hauteurs correspondantes sont déterminées par ces autres chiffres :
hauteur du front (partie découverte) 64"'™, du nez 45, de la lèvre supé-
rieure 32, de la lèvre inférieure et du menton 43, total de la face 185;
longueur de l'oreille 60.
La saillie du nez ne dépasse pas 43'""\ les trois angles faciaux s'ouvrent
approximativement sur 82°, 72° et 68'^.
Je renvoie au tableau qui suit pour les chiffres relatifs au tronc et aux
membres :
' En tiraut sur les plus longues de c s luèclies. J'ai mesuré 16 centimcU-es.
i Cran. Ethnie, p. 330.
K.-T. HV.MY. — mi K'.'l I.K lIAOlsS.V
l'J3
Toukûu liolkhcii- b>'n Aiba Ali Olliinart-Ali
Uuoussa Hournou Comuli Arabo d'Aden
Tîiill.' .l.'l.oiil. 1.(170 1.670 I.()7U 1.070
— assis SiiM 700 805 808
— (iii monloii 1 .457 1 .450 1 .450 1 .400
Hauteur au-dessus du sol :
de l"arliculati(m d.' l"éi),iule... I.;î5'» 1.300 1.380 1.400
de la hanche 805 040 920 910
de Toinhilir 905 1.070 1.0:J0 1.010
du mollet 340 370 390 370
Circonférence de la tête 500 530 5 10 5 10
Diamètre anléro-postérieur ma\. 185 188 190 19.5
— transversal max 1.50 137 140 145
— frontal minimum 105 107 120 110
— hi-auriculaire 130 123 140 135
— bizygomatiquc... 140 134 130 130
— Bigonial 105 90 115 110
Distance bi-ooulaire lUO 97 117 110
— inter-oculair(> 30 30 30 ".^8
Longueur du nez 45 49 43 00
Largeur du nez 45 49 43 33
Largeur de la bouche 54 52 52 47
Distance des seins 205 184 210 210
Largeur des épaules 390 400 420 400
— du bassin 270 227 230 240
— dos hanches 310 283 280 270
(jirconférence des épaules 980 1 .040 1 .020 1 .000
— du haut des seins. . 865 850 880 900
— de la taille (min)..- 700 720 7.30 740
— aux hanches 870 8.50 870 880
— du bras 240 200 280 265
— de la cuisse 490 410 510 460
— de la jambe 340 290 315 315
Longueur du bras 289 300 300 300
— de l'avant-bras 244 290 255 265
— de la main 200 180 185 195
— du membre supérieur. 733 770 740 700
Grande envergure 1.740 1.800 1.770 m
Longueur de la cuisse 412 450 445 420
— de la jambe 398 430 420 405
— du pied- 2.52 Ml 270 -iOO
— rétro-malléolaire 70 ni 02 05
Ce tableau met en présence les nuMisiirations d-Haillées di; noire per-
sonnage et de trois autres sujets africains de rac-s nelleiivMit (lilïércnls,
et qui mi-sui aient c.vncteiiienl la mèmi' taille (|ue notre Haoussa. Ces mesures
sont empruntées au registre antliropumétrique du LahoratoiK-du Muséum
et la comparaison des chiffres ainsi rapprochés va mettre en évidence du
premier coup d'reil une série de variations ethniques inlére.ssanlos.On y
soc. d'antubop. 1906. ''*
494 20 DICCEMDHE 1 90H
verra, par exemple, le rapport de hauteur de l'homme assis et debout
varier entre i")") chez le Uouniou et 514 chez nuire ilauussa, dont le tronc
est sensiblement plus long, l^a hauteur de tête atteindra de 21 à 22 centi-
mètres et la taille comprendra par suite 7 têtes 1/2 (Bournou) à 8 têtes
environ (Arabe).
i/ombilic sera placé plus bas chez Toukou que chez tous les autres,
tandis que ce sera sur ce sujet qu'on verra le mollet descendre le plus
bas, le Çomali se montrant à ce point de vue plus nègre que le Bournou.
La tête plus forte chez notre ilaoussa est cependant la moins longue
des quatre, elle est en même temps la plus large et l'indice qui était
de 72 pour le Bournou se hausse chez lui à 81. Il est aussi le plus large de
figure (d. bizyg. 140) ; le nez, surtout sur le vivant, est sur nos trois sujets
nègres exactement aussi large que haut, tandis que sur l'Arabe il est à la
fois bien plus haut et bien plus étroit, la largeur de la bouche est aussi
sensiblement moindre chez ce Sémite que chez les trois nègres qui lui sont
juxtaposés. La racine du nez est aussi chez lui sensiblement plus étroite
et l'œil est plus largement fendu.
C'est chez le Haoussa que l'harmonie des largeurs est la plus parfaite; il
n'a ni l'exagération de largeur des épaules, ni le rétrécissement extrême
du bassin qui s'accentuent plus ou moins sur les autres, et l'on conçoit très
aisément qu'il ait obtenu les préférences d'artistes tout épris de belles pro-
portions tout autant que de formes à la fois élégantes et robustes. Son bras
est le plus fin et le plus court, ses proportions relatives sont bien plus avanta-
geuses que celles du Bournou dont l'avant-bras est relativement si allongé.
La grande envergure est aussi bien moindre chez le Haoussa que chez
le Bournou.
Ses jambes sont plus courtes, son pied est plus petit, mais la partie rétro-
malléolaire est relativement plus longue et ce dernier caractère se montre
très apparent dans le dessin à l'échelle qui accompagne cette rapide
description.
Je dois ce dessin que j'ai l'honneur de présenter à la Société en
terminant cette courte lecture à l'habile et patient crayon de mon vieil
ami Duhousset dont vous avez si souvent eu roccasion d'apprécier l'exac-
titude artistique.
Toukou est mort sans enfants, il y a quelques années. Enterré chré-
tiennement dans une concession à long terme, il ne nous a laissé de sa
précieuse personne (en dehors des œuvres d'art que j'ai déjà citées et de
quelques autres qui se retrouveront sans doute dans les ateliers parisiens)
qu'un buste moulé par Slahl, des photographies et une mèche de ces
cheveux caractéristiques dont j'ai dit un mot plus haut.
On n'a gardé de lui dans son quartier que le vague souvenir d'un
prince noir, qui fut concierge et modèle. Il avait, en effet, réussi à se faire
passer dans son entourage comme un grand seigneur déchu. « Dans mon
pays, disait-il, plus on a d'incisions à la figure et plus on est noble. » Et
comme, vendu tant de fois, il était zébré de cicatrices sur le front et les
joues, les voisins en concluaient qu'il était au moins fils de roil
E.-ï. IIAMV. TOlKiil I.E llAlil SSA
49r>
'l'oiik(jii le lliiuiis>.i
d'apivs iiii ■l.ssiii à 1/10 de M. le Colonfl Duhousset
496 20 DKCEMHUE 190C
.r.iHjuelque part une carie de visil»' (lu'il m'a remise une des dernières
fois que je l'ai vu. VA\e était ainsi formulée :
Snid, de Tombonclou, modèle de premier choix dans les genres Al(/érien et
Orienta l.
Et comme je lui observais qu'il avait changé son nom et celui de son
pays d'origine, il me répondit sans sourciller : Cela fait mieux!
Saïd ou Toukou, le prince a sa statue dans notre palais municipal, mais
celte gloire anonyme ne sullit pas à sa naïve vanité. Je grave donc sur le
socle de bronze son nom désormais impérissable, à côté de celui du grand
artiste qui a immortalisé les traits de l'esclave de bronze de Toukou le
HaoKSsa !
M. Choqubt fait une communication sur : Les dents selon le sexe et
selon la race (manuscrit non remis).
MiM. Lapicque, Baudouin et Papillault font quelques remarques sur le
travail considérable de M. Choquet.
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A l'étude des sciences physiques et naturelles. 33 leçons graduées. -Nombreuses
indications d'expériences faciles pour les maîtres et les élèves. Résumés. Ques-
tionnaires. Lectures. 1G5 illustrations originales. (Enseignement primaire. Col-
lection A. Aulard. Cours élémentaire, l^e année du Cours moyen). 224 p. Paris,
Edouard Gornély.
ARTICLES A SIG.NALKR DANS LES PÉRIODIQUES
Heviie de l'École dWnlhropologie, juillet 1906. — Thulié (H.) : Le terrain
mystique; — Commo.nt (M.) : Les Découvertes récentes à Saint-Acheul. L'Acheul-
léen. avec 19 fig.; — Breuil (H.) : Rhinocéros gravé sur schiste de la Grotte
du Trilobite, à Arcy-sur-Cure O^nne), avec 4 fig.: — Zaborowski (S.) : Rap-
ports du Gothique et du Lithuanien et de eelui-ci avec le Grec.
Id., août 1906. — Manouvrier (L.) : Conclusions générales sur l'anthropo-
logie des sexes et applications sociales; — C.\pitan (L.) : Le Congrès Interna-
tional d'Anthropologie Préhistorique de Monaco (1906); — Mortillet (A. de) :
La Pierre-Folle de Bournand et les Dolmens du département de la Vienne (avec
^ 1^Q-)\ — Jacouot(L.) : Dessins rupestres de Mogh'ar (Sud-Oranais [avec 2 fig.);
— Rabaud (E.) : Anomalie de la deuxième circonvolution pariétale (avec 1 fig-);
— Zaborowski (S.) : Pour le nom d'c Aryen ».
Id., septembre 190G. — Mortillet (A. de) : L'allée couverte de Coppière
(Seine-et-Oise), (avec 25 figures); — Giuffrida-Ruggeri (V.) : CrAnes euro-
péens déformés; — Fourdrigxier (Ed.) : L'éclairage des grottes paléolithiques
devant la tradition des Monuments anciens [avec 4 fig.).
Id., octobre 1906. — Her\-é (G.) : Noirs et Blancs. Le Croisement des Races
aux Etats-Unis et la Théorie de la « Miscégénation »; — Zaboromski (S.) : Le
Blé en Asie et en Europe et le Culte du Pain). Associations de Jeunes gens chez
les Turcomans. Livres et Revues.
Id., novembre 1906. — Huguet (J.) : Origines et migrations des Tribus Ber-
bères et particulièrement des Beni-Mzab (Cours d'ethnographie générale); —
Verxeau (R.) : La Race de Spy ou de Néanderthal: — Bardo.n (L.), Bouysso.me
(J. et A.) : Grattoir caréné et ses dérivés à la Coumbo-Delbouïtou (Corrèze).
Livres et Revues.
Id., décembre 1906. — Schrader (F.) : L'impulsion du milieu et la pensée
cosmologique; — Capitan (L.), Brelil (H.) et Pevront : Les gravures de la
grotte des Eyzies.
Journal de la Société des Américanisles de Paris, 15 avril 1906. — IIamy
(E.-T.) : Sur une statuette mexicaine de la déesse Ixcuina ; — Vignaud (Henri):
Sophus Ruge et ses vues sur Colomb.
Revue des Traditions Populaires, Paris, novembre 1906. — Laurext
(Pierre) : Légendes et Superstitions préhistoriques CXL. Une pierre à frictions
en 1832.
La France Médicale, Paris, 25 septembre 1906. — Marie (A.) et Viollet :
Envoûtement et Folie.
.\UTn:i.K> A >iii.NAi,i:.. ijan> i-Es i>K»nM)ini'Es ri03
Revue Scientifique, Paris. 6 octobre 190«. — FnF.DEv (Louis) : La roncfpfic.n
humaine de l'Univers. Revue bibliograplii<iue: — M. Jacques Lckh, Professeur
(le physiologie à l'Université de Californie : The Dynaniiks of living Militer
{Vortesimr/en iiber die Dyndtnik der Lehenserrheinunffen (II. riiimi).
Id., 13 octobre 1906. — Hiudoi' (Dr) : La joie morbide.
Id., 15 et 22 décembre 1006. — Lapie (Paul) : Civilisations en contael.
La Géographie. Paris. 15 juin 1900. — Laim-arent (A. de) : Les épocpies gla-
ciaires dans le massif alpin et la région pyrénéenne.
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/rf., octobre 1900. — Lombkoso (C.) : Discours d'ouverture du VlM longrès
d'.Vnthropologie criminelle î'i Turin: — Lombhoso (Gina) : La pitié dans la jus-
tice; — Ryckkre (de) : La criminalité ancillaire; Matignon : La prostitutidu au
Japon (avec photographies).
Id., novembre 1906. — Lacaspagne (.\.) et Martin (Ht.) : Les données de la
statistique criminelle (trois graphiques).
Id., décembre 1906. — Reiss (P. A.) : Les méthodes scientiliiiucs dans les
enquêtes judiciaires et policières; — Martin (Et.) : Macrodactylie (hypertrophie
congénitale de l'auriculaire droit chez un dégénéré épilepti(|iic incendiaire),
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Bulletin de la Société Dauphinoi.se d'Ethnologie et d'A>Uhropologie.i.\U.
>'*> 2, juillet 1905. — Jacqvot : Charmeurs et magiciens arabes.
Revue Tunisienne, Tunis, novembre 1906. — Behtholon : L'année anthro-
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Annales de la Société d'Archéologie de Bru.rellcs. livraisons I et 11. 1906.
— ScHWEisïHAi. (Martin) : Histoire de la maison rurale en Helgii}ue et dans les
contrées voisines; — Mauxieix (E.) : Les stations préhistoriques des environs
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Bulletin de la Société Vaudoise des Sciences Naturelles, Lausanne, juin-
septendire 1906. — Schenk (Dr Alexandre) : Etude d'ossements et crAnes hu-
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Zeitschrift fiir Morphologie und Anthropologie . Stuttgart. IM l.\, Hft 2.
— Fischer (Eugen) : Die Varialionen an Radius und llna des Mens.hen. Mit
Tafel XI-XIV und 16 Textfiguren : - Frédéric (.1) : Untersuchuiigen uber .lie
Rassenunterschiede der menschlichen Kopl'liaarc Mil Tafcl X^ , ond \\l.
Id., M IX. Hft 3. — ik-NTAHo AbACHi: Das Knorpelslii.U in <ler l'iica scmilu-
naris conjunctiva' der Japaner. Mit Tafel XVII; — Frédéric (J.) : .Naclitrag zu
den « Untersuchungen ùber die Sinushaare der Atïen ». Mit 1 Hgur; — Hurst
(Cari M.) : Einiges iiber anthropologische WinkelmessungiMi und idjer cm Ins-
trument fiirWinkel-und IndexRestimmungen. Mit TalVl XVIII und 1 Texttigur.
Id., Bd X. Hft 1. — ScHWAi.BK (G.) : Uber das Cchirn Reliefder Schlafengegend
des menschlichen Schadels. Mit 7 T.'xtfiguivn und TalVI 1-VI; — Zlckkrkandl
(E.) : Uber die palmaren TasIballen von Myopolamus coypus. Mit Tafel IX; —
Adlokf (P.i : Einige Bcson.lerheilen des menschli<-b.'n C. -bisses und ihre stam-
mes geschichtiiche Bedeunlung; — BECK(Frie<l. R) : Fine Méthode zur Bestim-
504 1>0 DKCEMIJItK 1!K)0
munpdes Schiiilolinhaltes und llii-ngewichtes ani Lehcntlen und ihre Bozicliungen
zuin Kopfuinfang. Mit Tafel X und 1 Textfigur; — Peahson (Karl) : On a Trigo-
noiiii'ler for use in Crar)iologie; — Furst (Cari M.) : Narhlrag zu moiner Arbeit:
« Kiniges ùher antliropologischc Winkclincssiingcn, efc.
Archiv fur AnDiropolugic, nraiiiiscliwcig. Ncue Folge-Baml \'. llfll 3/4. —
Stei.nman.n (Prof. I)"" (1.) : Dio paliiolithisolie Renntierstation von Munzingen am
Tuniherge bei Freiburg i. lî. Mit 53 Abbildungen im Toxt.: — Kollmann (Prof.
!)•■) : I)pr Schiidel von Kleinkenis und dio Ncandcrllial. — Spy-Gruppe. Mit 5
Aliliildungon ini Text.
Kon-csjiondeuz-Blatt der deutschcn Gesellsclmfï fiir Anthropologie,
KUtnologie und Urgeschichte. Braunschweig. Deccniber 1906. — Walkhoff
(Professor D') : ZurFrage der Pliylogenie des menscbliclien Kinnes.
Zeilschrift fur Démographie und Slalislik der luden. Berlin Halensee,
juin 190(i. — KxopFKi. : Stand und Bewogung dor jùdischen Bevolkerung in
(irossiierzogtuni Hcsson wahrend des 19. lahrhunderts; — Sofer (D"" Léo) : Zur
Biologie und Pathologie der jùdischen Basse; — Straus (D"" E.) : Die Haupter-
gebnisse der Unterrichtsstatistik im K<>nigreioh Bajern fur das Schuljahr, 1903-
04.
Id., oktober 1906. — Wadler (Arnold) : Die .luden in Serbien: — Margolin
(D"" S.) : Die Entwicklung des jùdischen Handwerks in Bussland.
Id., dezember 1906. — Ruppin (D"" A.) : Juden und Arnienier; — Smelianski
(W.) : Die jùdische Bevolkerung in Jaffa : — Thon (D' .lakob) : Die Juden in
den preussischen Stiidten.
Zeitachrift fiir Ethnologie. Berlin, 38 lalu-gang 1906. Heft IV u. V. —
Maass (A.) : Die primitive Kunst der Mentawai Insulaner (Taf. VII-IX und 32
Textabb.); — Verworn (M.) : Archaolithische und palâolithische Beisestudien in
Frankreich und Portugal (35 Textabb.); — Schlaginhaufen (Y.) : Zur Morpho-
logie der Palma und Planta der Vorderinder und Ceyloner (25 Textabb.).
Mitteilungen der Kais. Kônigl. Geographischefi Gesellschaft in Wien.
Band 49. No 11 u. 12. — Bauer (D' Viktor von) : Eine Reise auf der Insel
Sawaii (Samoa).
Mitteilungen der Anthropologischen Gesellschaft in Wien. — XXXVI Bd.
Der dritten Folge VI. Bd. III und IV Hft. — Much (M.) : Die Trugspiegelung
orientalischer Kultur in den vorgeschichtlichen Zeitaltern Nordeuropas (Mil 11
.\bbildungen im Texte.) — Muhko (M.) : Zur Geschichte des volkstùmlichen
Hauses bei den Sùdslawen (Mit 9 Abbildungen im Texte). — Krone (R.) : Die
Guarany-Indianer des .\ldeamento do Rio Itariri im Staate von Sâo Paulo in
Brasilien.
Bullelino di Pnletnologia Ilaliana. — Parma, giugno-settembre 1906,
n^' 6-9. — Paribeni : Vasi dell' Italia e dell' estero con figure animali nell'
intorno e sugli orti. — Colim : Le Scoperte archeologiche dell dott. G. Rosa
nella Valle délia Vibrata e la civiltâ primitiva degli Abruzzi e délie Marche.
Archivio per l'Antropologia e l'Etnologia. — Firenze. Vol. XXXVI, fasc. 2,
1906. — Chérié-Lig.nière (Massino) : Ancora sui derivati del secondo arco bron-
chiale nell' uomo adulto. — Gmjffrida-Ruggeri (V.) : Caratteri sessuali di
affinamento e altre quistioni antropologiche. — Biasutti (Renato) : A propo-
sito dei caratteri cranici di una razza primitiva. — Mochi (Aldobrandino) : Dati
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District; — Abehcromuy (llon.-Jolin) : Tlio Chroiiolugy of pieliistorio Glass
Boads and Assoiiati'ti cerauiic Ty\H-s in Hrilain (wilh l'Ialcs XVIll-XXIl): —
Grant (William) : Magato an.l liis Tribo: — Kose (H. -A.) : Ilindu Pivgnancy
Observamt's in tlie l'unjab: — WiLi.oitiHin" (Kev. W.-C) : Notes on Ihe Tote-
mism of the Becwana; — l\\r. (An.irew) : The- Primitive an.l tb.' Advanced in
Totemism: — r.oTxsciiLLNG (Hev. E.) : The liawendaia Sketch of tbeir History
and Cnstoms; — Torday (E.). and Joyce (T.-A) : Notes on the Ethnography of
the Ba-Mbala (wilh IMalcs. \\VIII-\\X); — Lewis (A. -L.) : Prehislorir. Romains
in Cornwall.
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1906. — DucKWoRTH (W.-L.-H.) : Note on an unusual Anomaly inCrania from
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Man dissocted at llu- Analomy Srhool. Cambridge, during, 1905; — Kidd (Wal-
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The American Xaturalist, Chicago. August. 19U6. — LuLL(ProfessorR.-S.) :
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Mythology of the Plains Indians; — Peet (Stephen D.) : Copper Relies from:
the Mounds.
TABLE DES DONS
A LA SOCIETE D A N T 11 ROPO L OG I E
Dons a la Société : 3. 4. 141, 142,209,
221. 222, 250. 251, 252, 253. 254. 255,
256,257, 258, 2.S0, 291,401. 402. 421,
448, 482, 483, 484. 496, 497, 498, 499,
500,501. 502.
Adrian! (N.).
Alix (G.).
Almgren (0.)-
ANTHnNY (d"" K.)-
Avelot (R.).
Aya.
Babeau.
IJalfour (II.).
Ba.\dklier(A.-F ).
Baudouin (d'' .M.).
lÎEDDOE (J.).
Bkrtillon (J.).
BlASUTTI (H.).
BiGBARD (R.).
Blagden (Ch.-O.).
Bloxdel (d"" Ch.).
Boas (Fr.).
Boucher de Grèveccecr (A.).
BOWDITCH (Ch.-P.).
BoTD (H. -A.).
Brandstetter.
Brette (A.).
Brecil (II.).
BUCHNER (L.).
Bdshell (S.-W.).
Cagnat.
Caix DR .Saint-Aymour (C" de).
Cartailhac (E.).
Castelfranco (P.).
Castle (E.-W.).
Cazalis de Fondouce (P.).
Chantre (E.).
C'.hauvet ((!.).
Cherrie (G.-K.).
CouHBO^ (d"" P.).
CUYER (K.).
Daleau (F.).
Dastre (A.).
Davenport (C).
Debruge (A.).
Deniker (d"" j.).
De.nnett (R.-E.)
Dubreuil-Chambardel (Df L.).
DOBUS
Dyar (H. -g.).
Fischer (H.).
Forbes (A.)
Fourdrignier (E.).
(îaleotti (G.).
GlUFFRIOA-RUGGhRI (I)'' V)
Guébhard (dt A.).
(it'IDO CORA.
Hackman (A.).
IIaeckel (E.).
IIampei. (J.),
Hamy (d"- E.T.).
Hauser (K.).
Hazard (a.).
HÉRON (d' r.).
IIewett (E.-L.).
Holmes (W.-II.).
HouzÉ (d').
HOWITT (A.-W.).
ISSEL.
Klerck ('Ë.-S. de).
KœzE (G. -A.).
Krause (F.).
Lafaye (G.).
Lahy (J.-M.V
Langi.et (dt).
Lapicuce (d' L.).
Lasch (d' R.).
Lasenhy-Liberty (A.).
Laurent (or .\.).
Laville (A.).
Lecointe (G.).
Le Double (d"" A. -F.).
Leumann-Nitsche (d"" r.).
Levi (S.).
Lissauer (A.).
LiviNi (F.).
Loret (V.).
Luschan (Von).
Maire (A.).
.Manouvbier (d' L.).
.Marie (d^ A.).
Mathusen (A.).
Mattirolo (0.).
Mayet (d"" L.).
Menant (D.).
.Merriam (.I.-C.).
Meunier (P.).
Miller (E.-V.).
MiLLùuÉ (L. de).
Mingaud (G ).
NUTTALL (Z.).
Outes (F.).
r.08
l»ALUAnY (P.).
|>AL-\V (L. DE).
l'KAKSAIX (K.-T.)-
Pkllati (F.).
Penka (K.).
l'iKÏTE (Ed.).
l'OTTlKK (Ed.).
l'LTNAM (F.-\V.).
Hkinach (S.).
Uktzius (G.).
HUVILLK (J.).
RlVKT (D').
HOLIN (H.).
RosEN. (E. von).
RUTOT (A..).
Salas (C.-P.)-
Salkeby (N.-M.).
Savoyb (Cl.).
SCHAEFFKU (Ch.;.
SCHKERER.
TAULES DES DONS
SCHKTKLIG (H ).
SCHI.AGINHAUFKN (d' 0.).
SCUMELTZ (l)"" J.-Ù.-E.).
SCHULLEK (R.).
SCHWALBE (d"" g.).
SCUW'ARZ (J.-A.).
Seahs (J.-H.).
Seune Kok (J.).
SOLDl-COLBERT DE BeAULIEU (E.).
Stieda 1,0' E.).
SWANTON (J.-R.)-
Thiel'llen (A.).
Thiot(L ).
Van iiENNEP (A.).
Vaschide(N.).
Vauvillé (0,).
Verneau (R.).
ViNSON (J.).
VURPAS C^l-).
Walter (H.-E.).
TABLE DES FIGLUES
Pig I à 3. — Tumulus de la Gambie,
fig. \, carte, p. 26: fig. 2, lomlieaux à
enceiDtes, p. o'2: fig. A, giseinouts do
tombes à tumulus, p. 3;!.
Fig. 4 II G. — Tables de croissance des
enfants parisiens, fig. 1, courbe géni^-
rale do la croissanco <lo 1 à Ui ans (taille
et poids), ]). ïVi; fij;. '1, ai-croisseiiu^nt
annuel de la taillo de 2 à l(i ans. p. ol!;
fig. 'A, accroissement annuel du poids do
tJ à IG ans, p. 57.
Fig. 7. — Pierres levées et figures rii-
pestres du Tagant, 1 fig., figures ru-
poslres des sources de Garaoual, p. 10^.
Fig. 8 à 9. — Survivances ethnograplii-
ques, fig. 8, écoiçoir du .Morvan ; fig. 0,
écorçoir de l'Indre, p. lOi.
Fig. 10 à :21. — Les fouilles récentesdans
les Cyclades et en Crète, fig. \ , l'Ile
de Crète, p. 109; fig. '2, céramique néo-
lithique ilo Cnosse; fig. o, statuetlrs trou-
vées dans la couche néolilhiquo à Cnosse,
p. 110; fig. i, couloir principal du pala's
de Ptiaostos, p. Ilo; flg. .=j, objets prove-
nant (les fouilles de Cnosse, p. 1 1.') ; lîg. 6,
tombe royale près Cnos.so, p. Ilfi; fig. 7,
fresque du palais do Cnosse, p. 1 18; fig. 8,
salle dite du trône. Palais do Cnosse, p.
119; fig. 9, terri' cuilo de Palaekaslro
(Crète Orientale), p. 1-20; fig. iO, inscrip-
tion du type linéaire H sur un pithos do
l'haoslos, p. I-Jl; fig. 11. bague en or ilc
Mycènes, agrandie uu double, p. I2i; fig.
1"2, trois cachets en sléatite provenant do
Crète, p. l;27.
Fig. 22. — Les Troglodytes de l' Extrême-
Sud Tunisien, fig., int''riour do la
cour do la maison du Cheikh Kolaa-Mat-
mata, p. I7G.
Fig. 2;-{ ;i '2*. — Contribution à l'étude
de la régénération osseuse du crâne,
fig. I, représentation, d'a|irès une photo-
graphie, do la paroi crânienne régénérée
ii'un jpuno chien cranieclo.nisé, p. 19^ ;
fig. "2, coupe Iransvoisalo schématique
d'une suture crânienne, p. 200.
Fig. 23 — Présentation de fragments
de poterie gauloise, fig.. échantillons
do poterie gauloise, p. 225.
Fig. 2(). — Edouard Piette, deux portraits,
p. 261.
soc. ii'anthhop. 1906.
Fig. "27. — Sur un vase peint prorenant
des sépultures de Saint-IIilaire-du-
Riez, fig , vase provenant do Jazenouil
(Vienne), p. 266.
Fig. 28. — Empreintes de inains humai-
nes dans la grotte dj Gargas (Hautes-
Pyrénées), p. 331.
Fig. 29. — La langue scrotale, fig.,
langue scrolalc du type foliacé avec hyper-
trophii' papillaire, p. 3o2.
Fig. 30 à 36. — Quelques remarques
d'anthropologie sur les Cambodgiens
actuellement à Paris, fig. 1, Sisowalh,
roi ilu Cambodge, p. 3ol; fig. 2, lo.« fils
du roi ; fig. 3, la fillo du roi. p. 356;
fig. 4. la sœur du roi, p. 357; fig. 5,
type grossier de la race, p. 338; fig 6,
le roi de profil, p. 339 ; fig. 7, type fia
do la race, p. 361.
Flg. 37 à il. — Rapport de l'os et de la
dent, fig. 1, côtes G et D montrant les
rapports do la 8" avec la branche mon-
tante, p. 386; fig. 2, montrant les rap-
ports dos branches montantes; fig. 3, bord
postérieur de la manche, p. 387; fig. 4.
vue, face triturante, p. 389; li;. 5, racines
dos 3''s molaires gauche et droite, p. 391.
Fig 42 à ii. — Une adaptation du tho-
rax des vieillards aux fonctions res-
piratoires, fig. H, squelotto do la région
thorayiquo auiérioure clio/. l'homme, ]>.
39,S; lig. 2, disposition schémaliquo do
l'articulation intrachimdralo do la Irostcr-
not;ôte, p, 396 ; fig. 3, schéma destiné à
rappeler le m «uvomenl do bascule du ster-
num au momi'nt de l'inspiration, p. 398.
Fig. Va à 50. — Nouvelles recherches ra-
diographiques sur l'ossification des
métacarpiens et des phalanges chez
les enfants normaux et chez les hy-
potrophiques, fig. 1, radiographie de la
m.iin d'un enfant normal do 4 ans, p.-
4ii8 ; fig. '2, ladio-photographie de la
main «l'un enfant normal do 3 ans, p 409 ;
lig. 3, radio-pholKgrnphio do la main «l'un
enfant normal ilo JU moi-;, p 410; lig. 4.
radio-photographie d uno fillo à^éedo 5,ins
moins un mois, aUeinto d'hypertrophio
ii'origine i.a>lro-inlestiu3lo sans rachi-
tisme, p. 412; fig. 3, hypotrophie d'ori-
33
ilO
TABLE DES FIGURES
pi 00 pastro-intestinale à un (legré très
avancé, p. 41:!; fig. (\ main d'uno i)eliti'
fillo lacliilique do 4 ans '^ non liypoitro-
phiquo. p. 41.'>.
fig. 51. — Présentation et description
d'objets divers découverts dans
l oppidum de Pommiers \Noviodu-
num des Siiessions), fig., plan de l'en-
ceinte gauloise ot du camp romain au
ViO.OOO-, p. 430.
Fig. n2 à 5S. — Vérification post-mortem
d'un pelvigramme radiographique,
fig. 1. p. 4;^9, lig -J, p. ;40.
Fig. 54. — Musique bolivienne , fig , em-
churos d'inslrumenls en cuivre, p. io8.
Fig. î>5. — Deuxième note sur la langue
scrotale, p. '«87.
Fig. o6. — Toukou le Haoussa, Toukou le
Haoussa d'après un dessin à 1/10 de M. le
Colonel Duboussct, p. 495.
PLANCHES HORS TEXTE
Le Plateau central Nigérien, par M. le
Colonel Desplagncs, p. 86
Planche 1. — \^ Tumulusde la région deCoun-
dam (Killij: -1' Monts Onallo. Types de
la moutngno; 3° Tjpes de pêcheurs Bozos.
Planrhc 11. — 1' Groupes de pierres levées
Tondiiiarou, près de Niakunfédac Takadji);
2* Village «le Kikfra sur la ]iente nord du
plateau de N'Dalla; .'i" Inscriptions de Songo
^1?) kil. N.-E. Bandiagara).
Planche 111. — 1» Grenier à mil avec ornemen-
tation en haut relief (Kroïkrous^ ; io Tu-
mulusd'El-Oualcdjiet résultats des fouilles.
Planche iV. — 1" Une maison de Kori-Kori ;
2* Maison de Touro avec, sur la droite de
la porte, l'autel tu chef do village; 3° Rui-
nes d'un village de refuge dans les parois
verticales d'une falaise.
Planche V. — 1° Gogouna, chef de Kani fa été
envojéà Tombouctou par AmahdouSchcic-
kou.amir, roi des Fculbès d'Hamrialahi,
pour ordonner aux gens de la ville de ren-
voyer le docteur Barlli (18oo); 2" Bun-
kassi, abn-repos du village de Ban-
kassi dans la plaine 'omblêmo de tribu
femelle); .i° Le Bogon de Bankassi devant
sa maison i plaine Sud).
Planche VI. — Autel sur h- plateau des Ha-
roua(Harou) (tribu mâle des Oiseaux);
2° Autel au piel de la falaise du Sud de
Bandiagara; o° Autel à trois pointes sur
lequel fe Hogon fait des sacrifices pour la
triade divine.
Planche Vil. — 1° Danse religieuse dans une
tribu du clan des Oua (Oiseaux) et des
buffles ou anlilopes : 2» Une danse de jeunes
gens pour accompagner le chef religieux;
A" Nama, entretenu par chaque famille, se
promenant dans les champs au moment de
la fête des semailles.
Planche VIII. — lo Tombeaux du ravin de
Kani-Bzon; 2" Case funéraire, abri sous
roche MonlsDalla; 'i° Case sépulcrale.
Tombeaux du Mont Bouljani-Kani,
Les Troglodytes de l'Extrême-Sud Tuni-
sien, par M Emile Macquart, p. 170 bis.
— 1° Médinine Les vieilles « Khorfas » ;
2" Intérieur delà cour do la maison sou-
terraine de Si Abd-AUah, chaouch de Ka-
laa Matmata.
Les Groupes ethniques du Bassin de la
Rivière Claire, par M. le Commandant
Bonifacy, p. 328-330.
Planche I. — Fig. \, soldats Annamites du
Toukin ; fig. 2, soldats Thô noirs de Bao lac.
Planche M. — Fig. 1. soldats Méo; fig. 2,
femmes et enfants.
Planche III. — Fig. 1, soldats La-Qua; fig. 2,
les Na-ê. analogues aux Pa-teng.
Planche IV. — Fig. 1. Ke-lao blanc: fig 2.
Pu la cho cô.
Planche V. — Fig. 1, tirailleurs (Annamites);
fig. 2, les mémos iprotil).
Planche VI.— Fig. 1, tirailleurs (Thô noirs de
Bjo lac); fig. 2, les mêmes de profil.
Planche VII. — Fig. 1. tirailleurs (Méo); fig.
2, les mômes de profil.
Planche VIII. — Fig, 1, tirailleurs (Lolo noirs);
fig 2. les mômes de profil
Planche IX. — Fig. \, Annamites monta-
gnards; fig. 2, Thô méridionaux.
Planche X. — Fig. 1, Thô blancs de Hà Giang;
fig. 2. homme et jeunes filles Heu i.
Planche XI. — Fig. 1, femmes et fillette nông
tic Hnang thu Bi ; fig 2, jeune couple Giày.
Planche XII. — Fig. \, femme truog cha en
costume national ; fig. 2, jeune homme et
jeunes filles mân quân côc.
Planche XIII. — Fig. 1, jeune femme lan tien
en costume de mariée ; fig. 2, jeune homme
et jeune fille mân cao lan dans son cos-
tume traditionnel.
Planche XIV. — Fig. \, homme et jeunes fliles
ta pan courte corne (Dông Van); fig. 2,
homme et femme ta pan grande corne, la
femme, on costume de noce, porto la coif-
fure qui donne le nom à la tribu.
Planche XV. — Fig. 1, Mêo à tôte penchée,
une aïeule et ses petits enfants ; fig. 2,
Dai ban au couteau rond, la jeune fille de
droite porte la coilTure nuptiale.
Planche XVI. — Fig. i, homme et filetle Méo
noirs ; flg. 2, Pu la de la tribu Pii p'à.
Planche WIl. — Fig. 1, Thô noirs de Bao lac;
fig. 2, groupe do La Qua.
Planche XVIII - Fig. 1, jeunes filles et fil-
lettes yuan trang avec leurs diverses coif-
fures; fig. 2, La ti.
Planche XIX. — Fig. 1, un jeune couple de
riches Méo blancs et les deux sœurs du
marié ; fig. 2, jeunes hommes Siao pau por-
tant des bijoux do jeune fille, par crainte
des mauvais génies, et jeunes filles portant
la n petite coiffure » qui donne son nom à
la tribu.
Planche XX. — Fig. 1 , Lolo noirs de Bao lac, dits
Màn Khoanh ; fig. 2, Groupe de Mêo rouges.
Planche XXI. — Fig. 1, groupe de Lolo blancs ;
fig, 2, jeune garçon et femmes Lolo noirs.
TABLE DES AUTEURS
137.
Anthony (D' R.), 4. \M. 197. 2tl, 385. 393. Gui'bhard (A.), 333, 33».
At-ior (D'i, 50. 67.207. '220, 2-25. 288. Haiiiv lE.-T). 1, 3, SO. 67, 101, 107, 1
Avolot (R.n IM, 26-, .384, 403. 187. 223, 271, 418, 433. 443. 460, 490.
Ava ihM 484 Hébert ;J ), 104.
HtMvé iD^ G ). 24, f<0,70, 130, 264, 270, 273
Hu^uet (Di- J.). 137. 138, 187, 2M, 220, 270
Jarricol iD J.l, 439.
Kirkoff(N.), 226.
Lacouloumèro (G.). 3, 401. 402.
Upicquo (Louis). 233. 482, 496.
I.ejeuno (Ch.), 137, 148, 187, 220.
Aya (U'). 484.
Baudet, 207.
Bauluoin iD" Marcoll. 3. 72, 221, 222, 264.
266. 27 4,275, 295, 345, 349, 401,402,
462, 486. 196.
BlocluD' A.loipho). 11, 65, 148, 220, 334.
Bloch (D- Ivan). 202.
Bonifacy tCoiiimaniiant), vJOG.
Boutlier, 276
Broquet (Dr C\\.>. 365.
Capilan (D' L.), 65, 211, 275.
Chaumot (D'), 51.
Cheivin (D'n 221, 222.
Choquet, 496.
Collignon (D'), 385.
Cuver (Ed), 141, 209, 483.
Daao, 158.
David (M"'« Aloxandral) (Myrial), 334.
Déchelette (J.), 265.
Delisle (D^ F.). 130, 132, 294, 485.
Delvincourt, 207.
Deniker (J ), 24, 130, 226, 231. 274, 326,
333. 438.
Desplagnos, 73.
Dobreuil-Cham! ardel (D'j. 143, 351, 483, 486.
Ducheinin. 25.
Dussau.l IR.), 108, 213,220.
Echerac (D'), 275.
Enjoy (Paul d'), 87.
Ferraz de Ma.edo, 206.
Forestier (D""), 131.
Fourdngnior (Ed.). 50, 219, 448, 450.
Georges (Max.), 155.
I.ejeuno
Macquart (Ein.), 17 4.
Manouvrier(L.). 4. 49, 64, 132, 137, 197,202,
207, 209, 2H, 220, 'idG, 342, 345.
Marie (D'i, 142.
Malhews (R.-H.), 164.
Mortillct (A. de), 50. 67. 207, 211, 226. 448.
Papillauit (D' G.), (i4, 68, 85, 132, 13/, 149,
164. 173. 196, 233, 334, 433,443, 486, 496.
Paui-Boncour (D' G.), 201.
Rognault (D'' F.;, 289, 299, 432.
Resnault (Félix), 331.
Rivet (U'-j, 448. 490.
Sthmidt (Oscar), 164.
Sébillot (Paul). 1. 72.
Siffro (A), 233, 346. 385.
Taté, 130.
Thieulien (Ad.), 150.
Trillat (D' P.), 438.
Van Gennop (A.), 291.
Variot (D' G.j, 51, 293, 295, 405.
Vauvillé (0.), 208, 226, 334,421. 422.
Vinson (J ), 220.
Zaborowski (S ), 6, 34, 85. 130, 164. 202,
2-22, 260, 270. 274. 276, 277, 326, 3i9,
364, 416, 483.
TABLE DES TRAVAUX ORIGINAUX
DES PRINCIPALES COMMUNICATIONS
AI>iI>iÉE i90«
ANTHONY (Dr R.). . Contrihution à l'étude de la réî;énération osseuse du
eràue, 197.
— ... Une adaptation du thorax des vieillards aux fonctions
respiratoires. (Le mécanisme deproduclion inlrachondrale
de Ja première sternoeôto), 303.
ATCIER (D'' E.) . . . Présentation de frajjmcnts do poterie g^auloise, p. 225.
AVELOT (R.) .... Etlinogcnie des peuplades habitant le bassin do lOgooué,
— .... Le jeu des godets; un jeu africain à combinaisons mathéma-
matiques, 267.
— .... Sur un questionnaire do linguistique, 403.
BAUDH Découverte d'une double trépanation préhistorique,
à .>iontigny-sur-Crécy, canton de Crécysur-Serro (Aisne),
207.
BAUDOUIN (D' Marcel). Les tératomes ne sont que le vestige de l'un des sujets com-
posant.-i d'un monstre double, IG2.
BLOCH (D"" Adolplic) . . Couleur des cheveux et dos yeux de 12 015 Françaises. Taille
de H. 704 Françaises et de 491 Etrangères (prostituées), d'après
le D"" Parent-Duchatelct, i\.
— . . Quelques remarques d'anthropologie sur les Canïbod-
giens actuellement à Paris (avec présentation de portraits),
354,
Rl.OCil (Dr Ivan) ... La prétendue Syphilis préhistorique, 202.
BONIFACY (Commandant) Les i;rou]tes ethniques du bassin de la Rivière Claire
(Haut-Tonkin et Chine Méridionale), 29(i.
BROQUET(D' Ch.). . . Résultais du Conseil de revision de l'année 11303 à l'Ile
de la Réunion et évaluation de la robusticité des éléments
ethniques qui forment lo contingent créole basée sur 1.463
mensurations et sur l'application du procédé Pignet, 365.
CAPITAN (L ) , . . . Une couche de silex taillés, usés, sur la terrasse moyenne du
nioustier, 65.
CHAUMET (D' Ed.) . . Tables do croissance des enfants parisiens de i à
i(] ans, 51.
DAAE Sur la taille, l'envergure, !o périmètre thoracique et
la hauteur du buste chez les populations de l'intérieur et
des côtes do la \'orvège, -loS.
DAVID fM">= Alexandra) (.Myrial). L'idée de solidarité en Chine eu V siècle avant
noire ère. Le philosophe Meh-li, 334.
TltAVALX itmtJI.NALX i;i I'UINCII'.\LK> l'.D.MMUNlCATIDNS
:ii:{
DÉr.HELETTE (J.)
OELISLE (D' F.)
DELVINCOURT.
Sur un %aso point provenant des sépultures do Salnl-Ililulrc»
dn-ltirz, 26'i.
KiLostosrs du fémur, i^l.
Déi>otivort«> d'uni' doiiblo tri'panallon pri^lilstorùnic,
à Moiili<;iiy-sor-<'rrcy, canton d(i Crécy-surSeiro ( Aisne),
'JOT.
(l'index
DUSSAUD (René) .
ENJOY (Paul d'i
FORESTIEK i\)') ,
FOURDRIGN'IER (Ed
HAMY (D' ET).
DESPLACNES .... le plaleaii rouirai iii(;r>ricn, 7;i
DUCIIE.MIN Tiimnliis do la Oniiiliie. '2!'..
DUBREUIL-GHAMBARDEL (Dr Louis). Dos drviatiunH latérales des doigl^
varus), as.
— La langac scrotale, 3o1.
— Deuxième note sur la langue scrotale, 486.
Les fouilles récentes dans les Cycladcs ot en Crète, 108.
La matérialisation de la prii^re en Orient, '2)3.
Le spiritisme eu Cliiiie, 87.
Les ossements patliolo;;i<|ues du cimetière de lancionne
église d'Aix-eii-Savoie, llîl.
Slnsique bolivienne, 450.
rievrt's lovics et ligures rupestres du TaKan*» ^^"•
Ieonoi;ra;9liie abolitioniste, ti^.'J.
Los epiit f|iiarante nègres de M. d'Avaux, à lHunï>(cr,
(1644). '271.
Los Mores du Roi René, 418.
Xole .sur les eollectious anthropologi«iues, recueillies par
M. le lieutenant L. Desplagnos, dans le .Moyen-Xîger, 433.
— ... Aonembas, Waronas, Ban^o-ltangos. Notes s-ir une
petite collection de crânes, rapport('s parEd.Foâ, do la région
des grands lacs africains, 413.
— ... Deux crsïnes do AVIiydali, 4<iO.
— ... Toukou le llaoussa. Souvenirs de laboratoire, 491.
HÉBERT (J.) .... Survivances ethnographiques. L'écorçoir dans les Ar-
donnes, l'Indre <■[ l'Yonne, 104.
HERVÉ (G) Contribution à l'histoire des nK^galithes, 70.
Vérilieation posl-mortcm d'un pelvigramme radio-
graphique 0 tenu par la méthode du professeur Fabre, }38.
Recherelies anthropologiques sur la croissance des élèves
de l'école militaire do S. A. II. lo l'iinco de BulKarie, à Sofia,
000.
Les \'ègrcs (r.%sîe ot la race nj^gre en général, 233.
L'orieine des seienees ot la religion, 187.
Los TroRloilytes do l'ExIrême-Sinl Tunisien, 17'».
La prétendue lésion syphilitique liu erAne [)irliist(irique de
Rray-sur-Seine, 209.
îVote sur les ossements néolithi<|ues du dolmen de C'arlon
et de la caverne de Fontarnaud (Gironde), 342.
Organisation sociale de quelques tribus australiennes,
164.
Mon opinion vraie sur un point de morphogénle osseuse,
68.
REGNAULT (Félix), de Toulouse. Empreintes do mains humaines dans la grotte
de Gargas (Hautes-Pyrénéesj, 3:11.
JARRICOT (D' P ) .
KIRKOFF (D' N). .
LAPICQUE (D' Louis).
LEJEUNE (Charles) .
MACQUART (Emile) .
MANOUVRIER(D' L.)
MATHEWS (R. H ) .
PAPILLAULT (D- G.;.
ÔU
TRAVAUX ORIGINAUX ET PRINCIPALES COMMUNICATIONS
HEr.NAULT ^D' Félix)
SIFFRE (D' A.) . .
THIEULLEN (A.) .
TRILLAT(D' I'.) .
VAIIiOT (D' G.) .
VAUVILLÉ (0 ) .
ZABOnOWSKI (S )
MoD opinion sur un point de nior|ilioK<:'nie osseuse, 432.
I\otc «ur dos pièces Mquclettiquc!» uiaxillo-deataires
iK'oiithiques, 346.
Kappart lio l'os ot de la dent. A propos d'uno inandiliiile de
;;'oriiIe fracturée au moment de la formation de la troisième
molaire, iJ8.").
Les faux é«»lithes. 150.
Vt^rilieation posl-inorleni d'un pelvi^raninie radio-
;;-rapiii«|ue obtenu par la méthode du professeur Fabre, 438.
Tables de croissance des enfants parisiens do 1 à
16 ans, 51.
Sur la plagiocéplialie et le eraniotabes, 2!>3.
Nouvelles recherches radiographi((ues sur l'ossiHeation des
métacarpiens et des phalan:;;es chez les enfants
normaux et chez les h^potrophiques. 40o.
Présentation et description d'objets divers, découverts dans l'op-
pidum de Pommiers fNoviodunum des Suessionsj, 42'2.
La taille des chevaux chez les Germains otdans l'Europe
préhistorique, 6.
les Gaulois L'industrie dite de la Tène est purement Gauloise.
Les Bastarnes, 34.
Edouard IMette, 260.
Patries protogermanique et protoaryenne, 247.
Prétendue preuve de décharneiHcnt sur un fémur du Mas-
d'Azil, 416.
TABLi: ANALYTIUt'E Ll ALIMIABÉTIQUK
«les iii:ili«-i-fs «Mtiiloiiiirs dans co voliiiiir
l*Mi M. 1)'Im'.iii';h.\c.
I il o (i
AGE DE PIERRE — Objets trouvés aux envi
rnns do Kayes fhaut Sén(5ga!), 3.
ANCIENS PRi:siD NTS (li< la socii'lé. Anciens
secri'taires généraux, XLl.
Aouembas, M'arouas, Bango-Bangos.
Notes sur une collrclion do crânes rapportés
par M. E. Koa de la région des Grands lacs
africains, 4'»o; Tableau, 447.
Australiennes. Organisation sociale de quel-
ques tribus — , KIk Table 1, 1H5. Tablo II,
166. Tablo 111. 170,
BOUCUEli DE l'ERTHES. Erection do sa statue
à Abbevillo. Uno conscription de 200 fr. est
TOléO. 1!I7.
BUREAU de la société pour 19il6. XXXVill.
Son installation: allocution du président sor-
tant; — du président entrant, t, "1.
Cambodgiens. Quelques remarques sur les
— actuellement à Paris, .SMi; Coloration do
la peau, ',^ï>n \ Dimension dus lèvres et do la
bouche, 857; Forme de la têtu, 8oS; Autres
caractères extérieurs, Holt; Comparaison avec
les descriptions des principaux eiploratcurs,
360; Discussion, 364.
CHEVAUX : leur taille chez les Germains et
dans l'Europe préhistorique, 6; Rappel d'une
discussion entre M. Zaborowski et M. Piolre-
moni. D'après M. Piètrement les chevaux
germains étaient grands; ils étaient petits
d'apiès M. Zaborowski, 7 à <1.
CHEVEUX et YEUX. Couleur dos — de 12,01;;
françaises; Taille de 11.704 prostituées fran-
çaises et do 4!)1 p. étrangères, d'après le
D' Parent-Duchatelet, M; Influence du cli-
mat, 12; Particularités que présentent les
prostituées de Paris sous le rai)port do la
c. des ch. et de la taille, 13, 14, l.'», 16.
17; Tableau des tailles, 18, 19; Tableau dos
moyennes suivant les séries totalisées, 20;
Discussion, 24.
COMITÉ central, XXXVUl.
COMMISSION de publiration, XXXVIII.
COMPTE-RENDU du secrétaire général pour
l'année 1905, 4 à 6.
Congrès de Monaco. Renseignements supplé-
mentaires donnés par M. Verneau sur — , 00 ;
Quatrième — colonial français, M. Worms
invilo les membres do la f ociélé ii y participer.
BS; Résumé des travaux du — par le D' Ca-
pitan, 275.
CRANE. Contribution à l'étude do la régénéra-
tion osseuse du — , 11>7; représentation
d'après une pliologi-ajdiio de la paroi cia-
nionno régénérée «l'un jeuno chien cianioc-
tomisé, 19S; Coupe transversale schématique
d'une suture crânienne, 200, Doux crânes de
Wliydah, î()l; mesures, 461.
CROLSSANCE des enfants pirisiens do 1 à IG
ans, 51 (tables); modo et procédé de men-
suration, 51, 52; Courbe générale de la
croissance de 1 à 16 ans (taille et poids),
.")3; Moyenne du i)oids et do la laillo, ^5
(tableauj; Accroissement annuel de la taille
de 2 à 1I> ans, 56 (graphique) ; du poids, 37 ;
Tables comparatives do croissance, 58; —
maxima, — minima cl moyenne garçons et
filles 5'J; séries. GO, 61, 6i', G3; Discussion,
6i. Croissance des élèves do l'école militairo
de S. A. R. le Prince de Ruigario ii Sofia;
Recherclies anthropologiques .••ur — , 22tl;
Comparaisons de mensurations, '228 ; Circonfé-
reme thoracique, 229; Mensuration des
membres inférieurs; poids du corps, 230;
Mensuration do la tête; Discussion, 231.
Cyclades et Crète. Fouilles récenlos, 108;
L'ilf de Crète; Les Cyclades n'ont pas été
habitées à l'époque néolithique. A rencontre
do co qui s'est produit pour les Cyclades, la
Crète donna asile à l'homme dès l'époque
néolithique, 109; Céramique néolithique île
Cnosso; statuettes trouvées dans la couche
néolilhiquo de Cnosso, 110; Le minoen ancien
I n'est aiilro que l'énéoliliquo ; Lo minoen
ancien II voit apparaître dans les parties les
plus anciennes du dép(\t de Haghios Ononfrios
les sceaux en marbre ivoire ou pierro tendre,
111; Au ininoon ancien III appartiennent les
objets les plus récents du dépôt do Haghios
Onontiios , Lo minoen nioytm correspond au
plein âge du bronze; Lo minoen moyen III
voit élever lo second palais do Cnosso et de
Phaeslos, 112; Couloir principal du palais
do l'haestos, 113; Objets iirovcnant des
fouilles de Cnosso, 115: Lo minoen récent II
est caractérisé par un remaniement du second
palais do Cnosse et de Phaostos ; Tombe royale
près de Cnosse, 116; Fresques du palais de
510
TAULE ANALYTIQUE ET ALPHABETIQUE
Cnossc; Avoc le minoon nVonl UI l'hé^iéma-
nio passe sur le continent. IIS; Salle liile
(lu liôno. palais île C.noss", li'J; Terre cuite
(le l'alaekastro (Crète orientale i, 1-20; Inscrip-
tion ilu type linéaire 15 sur un pithos de l'Iia-
uslos, 1-21 ; Les ilocuinonts fournis par les
fouilles (le Crète ouvrent un chapitre nouveau
(le riustoire des religions, l'2-»; Les minoens
n'ont pas connu le temple, 123; Bague en or
(le Mycèno: Le Zeus crétoisou Zous kretijç*''-
nès a conservé dans la mythologie grecque des
traits narticuliers, l'2i; Trois cachets on
sti^atito provenant de Crèlo, 127.
DÉLKCATION donnée à M. Doniker pour repré-
senter la société à l'inauguration du nouveau
musée d'Klhnographio do Cologne, Jibo;
M. Oeniker rond compte de celte inaugura-
tion. 438.
DÉLÉC.UÉS an comité d'administration de l'asso-
,iation. XKXVllI.
DENTS. Comiiiuiiicdlion sur les — selon lo
sexe, remarqnos et obscrvitions, 196.
DÉVIATIONS latérales dos doigts (l'index
varusi, 143; Les déviations des doigts sont
presque toujours bi-latérales, Ui; L'hérédité
joue un rôle très important dans l'étiologje
des déviations latérales des doigts. 145;
Index varus.obiiervations 1 et 2. Ilti, Obser-
vation 3, auriculaire varus, iil.
DONATEURS (principaux), XLl.
DONS. Par M. A va d'un hamac acheté aux
indiens de la rivière Vichada dans les pam-
pos du Cundimamarca, 404
ÉLECTIONS. M. le Marquis de Bret-îuil et
M. Siffre, nommés membres titulaires, 87;
MM. d'Echérac, Van Cennep ot Weisgerber
sont nommés membres de la commission du
contrôle des financeô; M.tf. Oscar Schraidt et
Yerneau sont nommés délégués de la société
au congrès de Monaco, 17 4; M. 'c D' Saint-
Martin" est élu membre titulaire. 223;
MlleOppeinheim, nommée membre titulaire,
333; Bureau de I'JOT. Membres titulaires :
MM. Jourdan, .(arricot. Commandant Boni-
fary. 448; M. Cboqucl, 482.
?:OLITHES. Los faux —, loO.
ETHNOliRAl'HlE. Survivances ethnograplii -
ijurs: L'é(or(;oir dans les Ardennes, l'imlre
et l'Yonne. 104. 103, 106, 107.
FÉMUR. Prélonduos preuves do décharnemont
sur un — du Mas d'Azil. 416; Exostose du
— , 484; Discussion, 485.
Gaulois (Los). L'industrie dite de la Tène est
purement Gauloise ; Les Bastarnes, 34 ; Le
nom de Celtes prèle à de regrettables é([\i\-
voques scientifiques; Comment il faut l'en-
tendre. 35; L'industrie du fer de l'époque
de la Téne est gauloise; Ello a précédé de
hoaucoup la conquête romaine, 39; Les Gau-
lois de l'histoire sont bien dos peuples sortis
d'une race unique, 45; On a tort do voir des
Germains dans \(i^ Rasfaynes, 46, 47; Proto
ariens cl Gaulois, 48; Ils avaient dos mœurs
semblables, 49; Discussion, 49, 50.
Groupes etliniques du bassin de la Ri
viàfe Claire (HaulT'Mikin et Chine méri-
dionale). Généralités. 296; Caractères soma-
tiques, 297; Caractères ethniques, 301;
So'!iétés, 302 ; Description des proupes ;
Groupe Thaï, 305; Nong an, 3o7 : Giay. 308 ;
Groupe LaQua, 310 ; Groupe l.ao, 34 ; Groupe
La II, 312; Groupe Man ou Yao, 313; Tribu
Cao lan, 314; Tribu Quan Irang, 31. j; Tribu
Lan tien; Tribu Siao pan, 316; Tribu Ta
\r.in, 317; liroupe Pa teng; Tribu Naô ou
Nong é, 31.S ; Groupe .Méo, 319; Groupe Lolo,
321 ; Tribu Mung ou Muong, 322; l.olo noirs,
;;23: Lolo blancs. 324; Pu la, 325; Discus-
sion, 326; Légende des planches placées à la
fin de rarticle", 328.
ICONOGRAPHIE abolitionniste, 223.
Ile de la Réunion. Résultat du Conseil de
révision pour l'année 1905; Elude du r.ays et
des races qui forment le contingent; Résuit it
du conseil de révision pour la classe 1904,
368; Maladies ayant motivé l'exemption.
3H9; Exflmjitions dues à la splcnomegalio et
à la cachexie palustre. 370 ; Elude de la taille,
i!u pjrimètru thoacique, du poids, 371;
Tailles, 372; Périmètre thoracique. 373;
Poids, 374; Coefficients de robusticité, 376;
Tableaux de ces coefficients. 378, 379, 380,
381, 382, 383; Maladies et coefficients ; Con-
clusion, 384.
JEU DES GODETS. Jeu africain i combinaisons
mathématiques. 267; — Règle du jeu séné-
galais, du jeu Dahoméen, du jeu Nago, 269;
Du jeu Gabonais; Discussion, 270.
LANGUE SCROTALE. La —. 331; Deuxième
note sur la — . 486; Antécédents héréiiitaires,
personnels; Examen de la bouche, 487; de
la langue, do la salive, 488 ; Indice maxillaire;
Hypertrophie salivaire, 489; Régularité du
système dentaire; Discussion, 4"J0.
LINGUISTIQUE Sur un questionnaire do —,
403.
LISTE des membres de la société, XIV à XXX ;
— des sociétés savantes, bibliothèques et
recueils scientifiques qui reçoivent la publi-
cation de la socié',6, XXXI; — des échanges,
XXXIII à XXXVII.
MÉGALITHES. Contribulion à l'histoire dos — ;
Survivance des cultes mégalithiques : exem-
ple tiré du procès de Gilles de Rays, 71 ;
Discussion, 72.
MON.STRE double vivant. Le second thoraco-
xiphopage du Brésil, 221.
Mores. Les — du Roi René, 418.
MORPHOGÉNIE osseuse. Opinion vraie ile
M. Papillault sur un point de —, 68, 69, 70 ;
Opinion de M. le D' Félix Regniult, 432;
Discussion.
Moyen-Niger. Note sur les collections anthro-
pologiques recueillies par M. le lieutenant
Dosplagnes dans le —, 433.
Mythes et légendes d'Australie, études
d'etJinographie et de sociologie. Présen-
tation d'un ouvrage intitulé —, 291.
NÉCROLOGIE. Clément Rubbens, 20:) ; Edouard
l'ieltc, 225, 260.
Nègres d'Asie et race nègre en génJral,
2.i3; Qj est-ce qu'un no;zro; Où irouve-t-on
des nC'grc^, 234; Négios africains: Races
mixtes on boiduro, 235; Los océaniens. 238 ;
Nègres de Malaisie, négritos, 239; Nègres de
TABLE ANALYTlyl'K ET ALl'llAHKTIOLE
517
rinde; Diavidions et pr(''draviJions, 241:
De l'Inde à la Map Roupe; Race nègre unique,
:245; Indice radio-pelvien, 247.
Les cent (|uaianto nèjjres do M. d'Avaux à
Munster i ItiU), aneciolo ethnologique,
271 ; Discussion, 273.
négroïdes. l>r<<sontation de types phnto'ira-
phiés parmi les populations actuelles du Var,
26'».
Nigériens. Le plateau central. 7S; Lo Niger
constitue tout I»^ régime établi des eaux de
la ié;;ioii, 71; Nombreux monuments méga-
lithiques; Grande qiii'.nti té d'armes et d'ins-
truments en pierre, 7o; Aspect dos indigènes,
7G; Habitations; Leur origine; Coutumes et
organisation sociale; Ho;;on."7; Idées reli-
gieuses, 78; Laggara, 79; Conseil des an-
ciens: Fêtos reli;.;ieuses. 80; Association de
jeunes ^ens; Mariai^es, 81; Divorce: Funé-
railles, 82. 8<; Cuminerce. 8t; Discussion,
83; Huit planches annexées, 86.
Norvège. La ta. Ile, l'envergure, le périmètre
thorariquo et la hauteur du buslo chez les po-
pulations de l'intérieur et des rôles do la — ,
158; Pour tout? la Norvège la taille moyenne
est de 172. 132; L'envergure moyenne de
178. 243; La hauteur moyenne «lu buste. !ll
19, lo9; Le périmètre moyen Ihoracique est
do 87.33 d'une manière générale un peu in-
férieure à la moitié de la taille et presque
toujours un peu inférieurfl à la hauteur du
buste, 160; Tableaux, 161, 162, 16;i.
Ogôotié. Ethnogénie des peuplades habitant le
bassin de — , 132.
Oppidum de Pommiers. Présentation et des-
cription d'olijets divers: Armes, outils, 422;
Parures. 423; Fibtiles, (2.->; Poteries, mon-
naies gauloises, 427; Monnaies romaines,
42»; Conclusion, 429; Plan, 430; Légende
du plan, 431.
OS. Rapport do l'os et de la dent, îl propos
d'une mandibule de gorille fracturée au mo-
ment do la formation de la 3' molaire, 3So ;
Présentation d'objets «mi — provenant du tu-
mulus de Pers-Pierroux au Poireux de l'Ile
de Ré. 498.
Ossements pathologiques du cimetière
de l'ancienne église d'Ai.v-en-Savoie.
131 ; Ossements néolithiques du dolmen do
Curtoû et de la caverne de Fontarnaud (Gi-
ronde), 3i2: Tibia, complet masculin; Par-
tie inférieure d'un fémur féminin, 343; Dol-
men de Carton, d'' bris, .lit ; Discussion, 343.
OSSIFICATION. Nouvelles recherches radio-
graphiques sur — des métacarpiens et des
pbalangi^s chez les enfants normaux et chez
les bypotropbiques, 403.
OUVRAGES offerts et dons divers par M. Hamy,
son livre intitulé : Joseph Domhey, médecin
naturaliste, archéolomie, explorateur du Pé-
rou, du Chili et du Brésil. Par M. lo D' Bau-
douin : Le Menhir de Sain!-Martin-de-Brem
(Vendée), 3. Par M. Cuver au n ni de M. lo
D"" Laurent, un ouvrage ayant pour titre :
Physionomie et mimique chez les alié-
nés. 141. La démence, par le D'' iMurie;
Par M. Guyer, au nom de M. le Capitaine
Parlior, ouvrage ayant pour titre Méthode de
soc. h'antiiiiop. 1906.
cartographie, cartoî à main levée et de mé-
moire, tracés rapides, 209. Par M. le D'
Bau louiii. 1.' travail qu'il vient de publier
sous lo titre de : (ielasimu: Tangeri,
crustacé d'Andalousie, mœurs et chas-
ses, etc. Par M. lo D"" Chervin. au nom de
M""" Soldi, une collection complète des tra-
vaux d'Emile Soldi. jiubliés sous lo tire gé-
néral do Ca/aM^î<^ sacrée. 221. Par le
mémo, trois têtes momifiées provenant
ries fouilles faitos en 19IIÎ') jiar M. Gayei à
Anlinoë i E^'ypte), 222, 2M) à 238. Evolution
de la prostitution par M le D"" Re^'oault,
2S'.t. Par M. Deniker, Journal des savants
contenant son article sur ■ le catalogue inter-
national de littérature scientifique ». Par
M. (luebhard, note sur lo Munis duplex
des Gaulois, d'après "Jules César, 333.
Par M. Marcel Baudouin et G. Lacouloumère.
découverte de stations gallo-romaines sur
l'ancien rivage du havre da la Gachiro (Ven-
dée). 401. Les vestigt-s mégalithiques do
Saiut-Martin-do-Brem (Vendée). Découverte
d'un polissoir à Saint-Vinrcnt-sur-Gard (Ven-
dée), 402 ; Par le môme, contribution à
l'étudo préhistorique dans les marais mo-
dernes. 401 Par M. 0. Vauvillé, brochure
avant pour titre i l'Enceinte de Pommiers
(noviodunuin dessuessionsi, 4-Jl . ParM, Four-
drignier, d'une étude intitulée « l'Eclairage
des'grotles paléolithiques devant la tradition
des monuments anciens», 4i8. Par M. La-
picque, « Introduction à l'étudo des sciences
physiques et naturelles, exercices d'observa-
tion » 4;.2. ParM. Guyer. d'un article sur
l'ensciLinemerit du dessin plastique : Par
M Dubreuil-Chambar.lel « Trous do la sym-
idiyso (lu menton, 483. Liste des ouvrages
offerts pendant lo deuxième semestre, 49(> \
TjOS.
PELVIGRAMME RADIOGRAPBIQUE obtenu
par la méthode du professeur Fabre, 438;
Discussion, 443.
PERIODIQUES. Articles à signaler dans les —
238.
PIIONOGRAMMES DEMUSIQUE BOLIVIENNE.
M. do Mortillet fait entendre dos — ; M. Rivet
présente des observations sur cette musique,
448; Otiservations sur cette musique, 430
PIÈCES SQUELETTIQUES MAXILLO-DEN-
TAIRES NEOLITHIQUES. Note sur — ,346;
Discussion, 349.
piètrement. Quelques mots sur — , 107, 108.
PLAGIOCÉPHALIE ET CRANIOTABES. Sur la
— , 293; Discussion, 29'k
POTERIES GAULOISES. Fragments —, 223,
226
PRIÈRE. Matérialisation de la — en Orient.
213.
PRIX décernés par la Société; — Godard,
— Broca, XXXIX; — Bertillon; — Fauvel. XL.
Protogermaniques et Protoaryens. Réfu-
tation dos opinions do MM. Kossinnaet PenVa,
277; Discussion, 288.
RÈGLEMENT do la Société revisé en 1900,
Vil à XIII.
SCIENCES ET RELIGIONS. Origine des -, 187 .
548
TABLE ANAYYTIQLE Kï ALPHABETIQUE
SILKX TAILLÉS. Une coucho sur la terrasse
movenne du Moustier. 6:^ ; La constitution
.1,- celte couche de silex taiUt^s très usés in-
tercalée entre les foyers intacts delà terrasse
du Moustier, permet do supi)Osei' que la Vé-
zère a coulé à cotte .époque à un niveau
beaucoup plus élevé qu'aujourd'hui (12 mètres
environ au-dessus de son niveau actael, bb,
67.
SOLIDARITÉ. Idée de la — au v« siècle, 334.
SPIRITISME En Chine, que devient l'àmo
après la mort? 87, 88; Incerlitude trou-
blante; L'immense majorité croit aux esprits.
8t- Le socret de la position géographique
des Trois îles. 90; L.< Chen-Sien; La déesse
Ma-Sou; Les Kouai-Sé, 91; l.'y-Kin, genèse
du monde phvsique, 92: Yu-Yan-Sé le com-
posé de deux principes de vie préside au
temps. 93 ; Les sorciers. 9i. 9S, 96. Les ce.
rémonies de Pou-Tou, 97; Le Dragon, 99;
ST.\TUTS DE LA SOCIÉTÉ, III et IV.
SYPHILIS. Prétendue préhistorique, 202, 209.
Tapan. Pierres levées et fiijures rupestres du
—, 101; Figures rupestros des sources do
Caraoual, 10-2.
TER ATOMES. Ils no sont que le vestige de
l'un des sujets composants d'un monstre
double, 46-2; Classification, 4t54: Origme :
Tératomcs de Monstres doubles, 46o; Téra-
tomes de monstres triples; Inclusion abdo-
minale proprement dite ou endocymie, 4bb;
Inclusion abdominale avec extériorisation ou
dermocymie secondaire, 467 ; Inclusion abdo-
minale de monstres triples. 469; l^e obser-
vation Fattori (1815), 470; 2* observation,
Schauiiiann (183'J); 3' observation, Dra-
phicsco et Cohn (1906) ; Inclusion alidommale
avec fusion primitive avec la glande génitale
472 ; Remarques générales sur les tératomes ;
477; Inclusion secondaire; Mécanisme, 478;
Inclusion primitive ; Evolution ultérieure;
Epoque de l'extériorisation, 479; Nature de
la monstruosité originelle, 480.
THORAX. Adaptation du — des vieillards aux
fonctions respiratoires, 393.
Toukou le Haoussa. Nigre de race infé-
rieure — , 490.
THllPAN'ATION. Découverte d'une double —
préhistorique à Montigny-sur-Crécy, canton
de Crécy-sur-Serre (Aisne), 207.
TRÉSORIER. Rapport du — pour l'exercice
190o, 138.
Troglodytes de l'extrême-sud Tunisien, 174:
Intérieur de la cour de la maison du cheikh
Kalaa-Matmata, 176: Médeoino; Les vieilles
Rhorfas; Intérieoir de la cour de la maison
souterraine de .Si Abd-Allah, chaouch de Ka-
laa Matmata, 176 bis; Les troglodytes arti-
ficiels, 178; Les troglodytes grimpeurs, 179.
TUMULL'S de la Gambie. Observations géné-
rales sur la région qui les contient, 25;
Carte de cette région, 20 ; Prédilection mar-
quée par les constructeurs de mégalithes
pour les régions fertiles et sainas, 29; Les
Mandingues; Disposition dos gisements; Na-
ture des matériaux, 30.
VASES PEINTS provenant de? sépultures de
Saint-Hilaire-de-Riez, 263; Discussion, 266.
^
BINDING ZZ _ T. JUL 11 Wf
GN Société d'anthropologie
2 de Paris
S6l Bulletins et mémoires
ser.5
t. 6-7
PLEASE DO NOT REMOVE
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