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SÉANCES GÉNÉRALES
TCM'ES
A SENLIS
EXCURSION ARCHÉOLOGIQUE
DANS LE DÉPAITEMENT DC LOT
■ ^^B
\MmM
CONGRÈS
ARCHÉOLOGIQUE
DE FRANGE
XLIV SESSION
>^B
SÉANCES GÉNÉRALES
TENUES
A SENLIS
PAR LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D'ARCHÉOLOGIE
nm U COiSERf ATM» n U OESCMPTIOII des ■OiOKITS
EXCURSION ARCHÉOLOGIQUE
PAIYS LE DÉPA&TEMENT DU LOT
DERACHE, — CHAMPION, LIBRAIRES
TOURS
PAUL BOUSEEEZ, IMPHIMEUE
1878
LISTE GÉNÉRALE
DES MIHIRX8 DE U SOCIÉTÉ FRàlÇAlSE D'iRGIÉOLMIE
Par ordre Géographique et Alphabétique (\),
Bureau Central
MM.Lgon palustre, directeur, rampe de h Tranchée, 61, à
Tours.
le comte db MELLET, directeur honoraire, au château de
Chaltrait (Marne).
l'abbé LE PETIT, cbaDoine houoraire de Reims et de Bayeux,
doyen de Ti II y-su r-Seu Iles, secrétaire général,
Db LAl'RlfeRE, secrétaire général adjoint, 15, rue dos
Saints-Pèrts, à Paris.
De BEAI repaire, conseiller à la Cour d'appel, secrétaire-
adjoint^ à Caèn.
B(JUET, conservateur du musée et archiviste, rue de l'Aca-
démie. 6, à Caen.
L. GAUGAIN, trésorier, rue Singer, 18, à Caen.
I. 0«i lie MM. le» Membm île U Société dont les noms seraient omit tar
rvtir liftc, et oc«x qoi taraient à indiquer des rectifications poar leur* noms,
fcahit-ftov liomicile. sont priés d'adresser leurs réclamations à M. le Directear
•le U SKiété, o« a M« G.%r<:m, trésorier rue Singer, 18, à Caen.
XUV* SBSSIOIf. A
Il LISTE BES MEMBRES
Comité permanent.
ë
MM.LéoN PALUSTRE, président.
DB LA MARIOUZE, rice'présfdenf .
CAMPION, secrétaire.
i;abbé Le PETIT.
DE LAUHIËHE.
DE BËAUREPAIRE.
GAUGAIN.
DE FONTETTE.
Julien TRAVERS.
Comte DU MANOIR.
VILLERS.
L'abbé LBFOURNIER.
DR BRÉCOURT.
BOUET.
DE FORMIGNY DE LA LONDE.
LE FÈRON DE LONGCAMP.
Inspecteurs divisionnaires.
l'e division.
Nord, Pas-de-Calais et Somme.
Inspecteur: M. DESCHAMPS de PAS, correspondant de l'Ini
ingénieur des ponts et chaussées en retraite, à Sainl-Omer.
%^ dlirlsloii.
Seine, Seine-et-Oise, Seine-et-Marne, Aisne et Oise.
Inspecteur : M. EGGER, membre de l'Institut, rue Madame
à Paris.
DE LA SOCIETE FRANÇAISE D ARCHEOLOGIE. III
S« division.
Calvados, Manche, Eure et Seine-Inférieure.
iHxpecteur : M. db BEAUREPAIHE, conseiller à la Cour d'appel
de Caen.
•f« division.
Ille-et-Vilaine, Côtes-du-Nord, Finistère, Morbihan
et Loire-Inlérieure.
*
Inspecteur : U. AUDREN db KERDREL, vice- président du Sénat,
411 château de Saint-Uhel, près ferlent.
&<- division.
Sarthe, Mayenne, Maine-et-Loire et Indre-ct-Loirc.
Impecteur : M. le comte de MAILLV, ancv.Mi pair île France, au
'lialeau de la Roche- de- Vaux, près le M^ns.
•• division.
Eure-et-Loir, Loiret et Loir-et-Cher.
Ivpecieur :
t« division.
Cher, Indre, Nièvre et Allier.
inspecteur : M. Tabbé LENOIR, cure de Chàlillon-sur-hidie.
IT JUSTE BES MKlIBtR^
Vendée, Deax-Sèvres,Vienne, Charente et Chareate-lnférieui
hupeeteur : M. l'jbbé AUBER, cliaooine titulaire, à Poitiers.
Haute-Vienne, Creuse, Gorrèze et [lordogne.
Inspecteur : }i. Tabbé ARBELLOT, chanoine titulaire, 1 1 , vieu\
de la Corderie, à Limoges.
Gironde, Landes, Lot-et-Garonne, Gers,
Hautes et Basses-Pyrénées.
Inspecteur :
11* MvlBioii.
Tarn-et-Garonne, Tarn, Lot et Aveyron.
Inspecteur : M. le comte db TOULOUSE-LAUTREC, au chàte
de Saint-Sauveur, près Lavaur.
Haute-Garonne, Aude, Pyrénées-Orientales et Ariége.
luMpecteur : M. db BONNEPOY, à Castelnaudary et à Touloui
3, rue Durant! .
13« division.
Hérault, Gard, Ardèche et Lozère.
Inspecteur : M. A. RICARD, à Montpellier.
Dfi LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D'ARCnÉOLOGlR. V
14* dlirisloii«
Bouches-du-Rhône, Vaucluse, Var, Basses-Alpes,
Alpes-Maritimes et Corse.
impecfeur : M. de BERLUC-PERUSSIS, à Porchères, près
Foriali|uier.
1S« dlYUion. ^ I
Rhône, Ain, Savoie, Haute-Savoie, Isère, Drôme
et Hautes-Alpes.
Inspecteur : M. MARTIN-DAUSSIGNY, directeur des musées de
ia ville, à Lyon. ,
■•« division.
Puy-de-Dôme, Cantal, Haute-Loire et Loire.
inspecteur : M. J.-B. BOUILLET, à Clermont-Ferrand.
19* division.
Côle-d'Or, Yonne et Saôue-el-Loire.
Inspecteur : M. BULLIOT, à Autuu.
19* division.
Doubs, Jura et Haute-Saône.
Inspecteur : M. Eo. CLERC, président honoraire à la Cour
d'appel de Besançon.
i9« division.
Meuse, Meurthe-et-Moselle, Vosges et territoire de Bell'ort.
hupecieur :
VI UST£ DES M£MBfi£S VE lA SOCIÉTÉ.
Marne, Ardennes, Aube et Haute-Marne.
Inspecteur : M. le comte db MELLET, aa chàleau de Chai
près d*Ëpenjay.
Algérie.
Inspecteur : M. CIIERBONNEÂU, correspoDdaot de Tlos
inspecteur des écoles musalmanes d'easeignement supérieur, à A
LISTE GÉNÉRALE DES MEMBRES
1/aslérisqiie (*) désigne les membres de la Société abonnés
au Bulletin monumental (i).
(Lei MU des nembres do Conseil sont désigics par le caractère italiqoe.
Ain.
Inspecteur: M.
Maitix (l'abbéN cur^* de Foissiat, canton de Montrevel, près Bourg
AisTie.
Inspecteur : ' M.
'BioT.NET (de), ancien président du Soissons.
tribonal civil, à Saint-Quentin. Piettf., juge de paix, k Craonne.
'f>tHo\ (lahbé), vicaire, à Saint- Thkvenart (l'abbé), chanuino hono-
Quentin. raire, archiprêtre de Laon.
DcRsr.juge honoraire, à Laon. Willot, secrétaire de la Société Ar-
^LFïRt (Ed.), à Vorges, près Laon. chéologique de Soissons, à Namp-
1^ CUrr de la Prairie (Jules), prési- celle-la-Cour, par Vervins.
<i^t (le la Société Archéologique, h
1/ Le i^uZ/ffm monumen(a/, qui a conquis, depuis 45 ans, un rang si distin-
J>Jé parmi les publications archéologiques de la France et de Tétranger, parait de
Ml semaines en six semaines, illustré d'un grand nombre de ligures. Pour le rece-
voir, les membres doivent o/ou/er irs/r. « leur rotisation annuelle^ pour la
f^raiice, et 1 S /r. pour l'étranger.
VIII
LISTE DES MEMBRES
.^llior.
Inspecteur : M. Albert de Bcrf.s, k Moulins.
Baillcal- (Jh.), médecin, h Pierrelllte-
sur>Loire.
* BcRSS (Albert de), à Moulins.
BotxiiARD, aTocat, id.
* CoTfXY (Mgr de), protonolaiFe aposto-
lique, k Moulins.
* Dadolk (E.)i architecte, à Moulins.
Dksrosiers (l'abbé), curé de Bourbon-
l'Archambault.
* Drevx-Brézé (Mgr de), évëque de
Moulins.
* EsMONOT, architecte du département,
k Moulins.
" ËsTOiLE (le comte de T), k Moulins
La Couture (Ernest), k Franchesse, |
. Bourbon-1'A rchambaul t.
CorTtniER (Lucien), architecte, k Vie!
Mbillbcrat des Prurbacx (Louis)
Moulins.
* Mélim (l'abbé), k Moulins.
MiUNOT (D.-M.), k Chantelle.
* QuRYROi, directeur du musée, k M^
lins.
'Salvert-Bbllenaves (de),k Bellena^
* Saulnier (Maurice), k Moulins.
TixiBR (Victor), k Saint-Pont.
Alposs (BusKOs).
InspeeCeur : M.
Berluc-Perrussis (de), k Porchères,
près Forcalquier.
Carboxel (l'abbé), k Nioielles, près
Forcalquier.
HoDOCL (l'abbé), curé de Mane, près
Forcalquier.
Macrel (Victrice-Pierre), paléographe,
k Sisteron.
Pardigom (Emile), employé des ponts
et chaussées, k Sisteron.
Rasirai'd (Pabbé), k VilleneuTe-I
Voix.
RiPKRT-MoNCLAR (marquîsde), chat
d'Allemagne, prôs Riez.
Tardiei' (Gustave), pharmacien
l"" classe, k Sisteron.
Terrasson (l'abbo), curé de Fon
quier.
Alpos (H.auto*«).
GciLDERT (Mgr), évoque de Gap.
Templier (l'abbé), chanoine honoraire.
Inspecteur : M.
aumùnier de Técole normale, k C
m: LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D* ARCHÉOLOGIE.
IX
Alpos->Iax*itiiiios.
Inspecteur : M. Brux, irchilecte, à Nice.
Bmsst (Emile) f oolaire, k Tourelles-
de-Vente.
'Buxc (Edmond) f a Vence.
Hro, architecte, rue Saiut Etienne, à
Nice.
* Cavalucs (Denys), à Grasse.
'CiAMBicM DE RosEMOïiT (de), avcuoe
lie la Gare, S6, à Nice.
Gazax, colonel d'artillerie, à Antibes.
IfouciNS DE Roquefort, docteur en
médecine, a Antibes.
Randon (Philippe), architecte, à Nice.
Rastoix - Brévoxd, 8, ruti des Pon>
chettes, k Nice.
Sardou (Antoine-Léandre), trésorier de
la Société des lettres, sciences et arts,
à Nice. I
ArilèoUo.
Inspecteur : M. Ollier de Marichard.
BaïuT (Odilon), au château de Sépio-
w(, près les Vans.
<asH)3i (Et. de), à Vidalon-lès-Annonay.
HutARD (l'abbé), curé de Mêlas, par
leTheil.
* Mariciiard (Jules Ollierde), a Vallon.
Montravet (le comte Louis de), à
Joyeuse.
-Vraoniios.
Inspecteur : • M. C«h:ty, architecte, a Sedan.
C-HDi^Y, ingénieur des ponts et chaus-
«^. 3 H^lhel.
• CoiTY, arcliilecte, à Sedan.
A tI «»«<».
Inspecteur : M. Jules dk L\ii0Nnf:&, à Pamiers.
LwioMiM (Jules.dc;, a Pamiers. Vii»u. (rabb6\ curédeNuIre-Dame-de
îi' niiuit> (labl»*'*). professeur an pelil Camou, h Camnu, par Mirepoix.
^^tniaaire, à Pamiers.
XLIV* SESSION.
B.
XII
L1ST£ DES MEMBRES
Oalvctaos.
Inspecteur : * M. Bouet.
ArvRAY, architecte de la ville, à Caen.
Ha/.im (Raoul), à Condé-sur-Noireau.
Bazin (Alphonse), courtier de navires,
à Caen.
Beaucourt (\e coinle de,, au château
de Moraiuville, par Blangy.
' BBAtJOi'R, iioliirc honoraire, k Caen.
* Bbaurepaire (de), conseillera la Cour
d'appel, à Caen.
Blangy (vicomte Auguste de), au châ-
teau de Juvigny, par Tiliy- sur •
Seul les.
BoissiM (Elisée,, au château de Lon-
«raye.
BoMMECiiosK (de), k Monceaux.
BoscAiN, graveur, ii Caen.
* Boi'ET, Id.
Brécoirt (de) , ancien ofncier de ma-
rine, h Caen.
'Brioubville (le marquis de) ,kGuéron.
* Campiofi, avocat, secrétaire général
de la mairie, à Caen.
C\»trl, agent-voyer chef en retraite, à
Baycui.
* Cal'Momt (M-« de), à Caen.
Ca/.i?«, propriétaire, il Vire.
CiiATEL (Victor), k Valcongrain, par
Aunay.
CoRNL-LiER (le maniuis de), k Fontaine-
Henry. •
* Cr»8Y DE JocoviLLB (le marquis de), k
la Cambe.
Dalger (le baron), propriétaire, au
château d'Esquay-sur-Seulles.
Delavmay, Architecte, k Bayeux.
DEAiiAYbs, architecte, k Caen.
Doi'ETii., k Vire.
Doi'cET, banquier, k Bayeui.
DuDutRG, juge booon
civil, k Falaise.
Du Ferrage, propriéli
* Du Manoir (le comte
Di! MksoiK (Thibault)
* Dupray- l.amahirit
Cour d'ap]K!l, k Cae
ËMACLT (Ovide), mail
BayeuY.
Emgerahd, avocat, r
Caen.
Farcy (Paul de), k Ba
Fëdérique (Charles-A
Vire.
* Klanhin, membre di
ail chitcau de Kallp
l'Èvùqup.
Floi^hkt, correspond!
au château de Fo
d'AnjouSaint-Hon<
* Fonte Ue (le baron
ancien député, a Mr
* Formign\i de la Lo
ForyrEs (l'abbé), cur
par Evrecy.
Fonmier (l'abbé), cui
par May-sur-Orne.
* Gaigaim, rue Singei
'Gkrard (le baron He
par Bayeux.
* GuERBT fA.), avocat,
GrKRMER, peintre, k
GrF.RMER (rabbé Lé<
Thospice Saint Lou
* (;Mi76erM Georges),
Gi'iLi.ARn, coniervatf
peinture, id.
* IIandjéri (le prince
DE LA SOCIETE FRA^iCAlSE d'aRGHEOLOGIE.
XI
Bo u.oties-d.u.-JE11idTie.
Inspecteur: M. de Payak-Dumodun. comeillerf à Aii.
litTVEUCMT (le docteur), villa Doria,
boilevard Cbavet, à Maneille.
ItauiAT, sciUpleor, à AU.
luMiAAo, archivikle du département,
àManeille.
BuTOGUo (Louis), a Arles.
B11AU051 (Honoré), à Arles.
BoioLAaDT (Oscar), 68, rue Monlgraiid,
à Marseille.
Caima?!, notaire, à Tarascon.
* Cl.ur cHonoré), président de la (^m-
■ission archéologique, à Arles.
Curpiui (Félix^, l'*" avocat général, à
Ail.
Ecale cflfmmaDale de Saint-Rem y.
E!>(CEULUiDT (docteur Emile), cours
Pierre-Pnget, 18, à Mtrseille. -
Passi?( (Emile), avocat, a Arles.
' Gaitieii- Descottes, notaire, à Arles.
Gactiui Descottls (Marc), à Arles.
'Gti.«iDA (Gonxague), archilectc, II, rue
Barberont, à Marseille.
H»iT (Théodore), rédacteur du Petit-
MarseillttiSy .57, boulevard National,
a Marseille.
(niLUBEBT (Fabbé), curé-doyen, aui
Martigues.
'HtAiT^ conservateur du musée, à
Arles.
KoTBi:'^, 45, rue Saint-Basile, à Mar-
ifille.
'LiLiTJkLD, bibliothécaire de la ville,
a MarKille.
' Mi*niiAL-BFR!«ARD, conseiller général,
maire île Saint-Remy.
MoNGRs (Jules), négociant, rue La-
fayette, 2, à Marseille.
MoREL (l'abbé), curé de Saint^Barthé-
' lemy, près Marseille.
Marim de Carranrais (François de).
Cours Pierre-Pnget, I, à Marseille.
Meyer (Georges), mécanicien, attaché
au bassin de radoub, a Marseille.
Municipalité de Saint-Remy.''
NoDET(Gh.),7, boulevard Dugommier,
à Marseille.
Payan-Domoi'li.^ (de), conseiller a la
Cour d'appel, à Aii.
pE?iO!f, directeur du musée Borély, à
Marseille.
Poi-G!iBT (Fabbé), 8, rue Rougier, à
Marseille.
Retbacd-Tre.'<ovibr, rue des Prêtres,
a Arles.
RoLLA.^D (Fabbé), aumônier du collège
Bourbon, à Aix.
Roman, photographe, k Arles.
Sabatier, fondeur, rue des Orfèvres, 8>,
à Aix.
Salles, ingénieur des ponlH et chaus-
sées, a Arles.
Saporta (le comte de), à Aix.
Sardou (Jean -Baptiste), archiviste, rue
Cannebièrc, 14, li Marseille.
Sai'm (Auguste), ancien bibliothécaire
de Strasbourg , II, rue de FObé -
litque, à Marseille.
Setmard (A.), conseiller honoraire, ii
Aix.
'-Véran, architecte, à Arles.
XII
L1ST£ DES MEMBRES
Oalvctaos.
Inspecteur : * M. Bouet.
AiviAY, aixbilecte de la ville, à Caen.
Ha7.i?( (Raoul), à Condé-sor-Noireau.
Ba:tn (Alphonse), coortier de navircf ,
k Caen.
Bbaocourt (le comte dei, au château
de Morainville, par Blaogy.
* Bbauoi'K, notaire honoraire, k Caen.
* Bkacrepaikk (de), couielller à la Cour
d'appel, à Caen.
Bla.ngy (vicomte AuBOste de), au châ-
teau de Juviguy, par Tilly • sur-
Seullei.
Boisan (Èliséei, au château de Lon-
graye.
Bo?iMECHOSK (de), à Monceaux.
BoscAiM, graveur, a Caen.
* BocET, id.
BaÉcoi'nT (de) , ancien orflcier de ma-
rine, à Caen.
* Briqubville (le marquis de) ,k Guéron.
* Campion^ avocat, secrétaire général
do la mairie, à Caen.
Castel, agent-voyer cher en retraite, à
Bayeui.
' Cacmo.oit (M-« de), k Caen.
Ca7Jm, propriétaire, k Vire.
Chatel (Victor), k Valoongrain, par
Aunay.
CoRNt'LiBR (le marquis de), k Fontaine-
Henry. •
' CrssT DB JuœviLLB (le marquis de), k
la Cambe.
Dauger lie baron), propriétaire, au
château d'Esquay-sur-Seulles.
Dblaunay, architecte, k Rayeux.
Desiiates, architecte, k Caen.
DoLÊTiL, k Vire.
Doucet, banquier, k Bayeux.
DuDotRG, juge honoraire au tribunal ,
civil, k Falaise.
De Ferrage, propriétaiic, à Caen.
* Du Manoir (le comte), mairede Jnayc.
Dr Maxoir (Thibault), k Juaye.
* Dupray-iMmakérie, conseiller k la
Cour d*appcl, k Caen.
Émaclt (Ovide), maire de Blay, prè»
Bayeui.
E'fGERAHD, avocat, rue Pémagnic, a
Caen.
FARtnr (Paul de), k Bayeux.
F^DÉRiQUE (Charles-Antoine), avocat, a
Vire.
* Flamdim, membre du Conseil général,
au château de Rallcvillc, près Pont-
rÉvéque.
Floqukt, correspondant de rinstitui,
au château de Formcnlin, et roc
d'AnjouSaint-Honoré. 52, k Paris.
* Fontette (le baron Emmanuel de\
ancien député, k Monts.
* Formigny de la Londe (de», a Caen.
Foi\»rEî» (rabbé),curé de Trois-Monts,
par Evrecy.
Fonmter (l'abbé), curé de Clinchamps,
par May-sur-Orne.
* 6Ari;Ai!<f, rne Singer, 18. k Caen.
*Gi:r.\rd (le baron Henri), k Rarbcville,
par Bayeux.
* GuÈRBT ^A.), avocat, k Vire.
GiLRMER, peintre, k Vire.
Gi'F.nMF.R (Kabbé I>on), aumùnier ilo
rhospice Saint-Louis, k Vire.
* Ctuilbert (Georges), banquier à Caeii.
GiiLLARO, conservateur du musée de
l>eintiire, id.
* IIamdjkri (le prince), au ch&teau de
DE LA SOCIÉTÉ FRAIfÇAlSË D'ARCHÉOLOGIE.
XIH
Vaterbe.
'HiicocRT (le duc d»), i ThoryHir-
conrl.
'HoTiEB, conseiller géDénl, h Cteii.
Hcc(nn (Mgr), évoque de Bayeai et
Ltsieai.
JicQDiEiitScnlpteqr-décoriteur, à Caeii.
Ugetay frabt>é\ chanoine titulairef
i Bayeax.
* La Mario vze de Fréearin (de), an-
tm direrleur des domaines, à Caen.
Laiottk, arcbilecte, a Caeu.
U Pom (Augustiu de), roule de Pont-
rÉfèqve, à Liaieui.
UBlaxc, imprimeur-libraire, h Caen.
U FïïMos DK Loxcc\iip, docteur en
drail, à Caen.
'LcFFitoY, propriétaire, id.
U Gori\ (Kabbé), curé d'Aulhie, par
(^«en.
U GiK (Louis) , maire de Lilleau ,
près Bayeux.
'U Petit «rabbé), curé doyen deîilly-
Mr-Senlles.
LÉTtvT. propriétaire, ii Caen.
'LiDfjiAftD, propriétaire, id.
'but il'abbé). cuié de Saint-Martin-
de Bienfaiie, par Orbec.
VitociaiT de Rochkkort (L(H)uce|, a
Vier^ille.
VoLi\M. l'It*). a Kayptu.
Ho^TMiaai.feY (le comte de), a Fcrva-
qaes.
Vo«EL (l'abbé), vicaire à la calliédrale
à* Lifieui.
' <Hj%t.. maire d'Ellon. rue Écho, a
Daycui.
* Fannier, avocat, à Lisieux.
* PiKRRES (de) , membre du Conseil
général, à Louvières.
Picot (l'abbé), supérieur des Mission-
naires de la Délivrande, près Caen.
Rampax (Léonard de), à Ecrammevllle
RiocLT DE Nkvtillk (le vicomte Louis
de), a Livarot.
Rdault dc Plcssis- Vaidikrk, conseiller
k la Cour d'appel, a Caen.
Saint-Jkan, membre du Conseil géné-
ral, à Brelteville-le-Rabet, par Lan-
l*annerie.
Saint-Rémy (de\ à Caen.
Salles (Emile), noUire, à Trévières.
Senot de Lalosidc, il Parrouru-l'Eclin.
Tavic:<y, il Bayeux.
TiRARD (J.), h Condé-sur-Noireau.
* TissoT, coosenrateur de la Biblio-
thèque, à Liftieux.
TousTAiN (le vicomte Henri de), ancien
oHIcier de marine, au château de
Yaux-sur-Aure.
* 7Varerf, ancien professeur a la Fa-
culté des lettres, secrétaire perpétuel
de TAcadémic de t'aen.
Travers (E.), ancien conseiller de pré-
fecliiif, à Caen.
Vk>c;eon (rabbé), curé de Luc-sur-Mer.
Xu.w (II»"!!! i de", insprcicnr do» forAls
en retraite, à la Petile-Lande-de-
Cerqueux, par Orbec-en-Auge.
niUrs (G.\ à Bayeux.
Voi5i?j (l'abbé), curé do Canthy.
VvoRY, sculpteur, il Hayenx.
CTaii tu I.
insprcleuT : M. AinEi>i.>, archiviste, à Aurillac.
AtvM\, archiviste, rue de la Gare, à Cn\i.YET m: Rih.hrmuntkin 'Adolphe
Aanllac. de), maire de Cheyiade, près Murât.
XVI
LISTE DES MEMBRES
Od tes-d u.-Wor tl .
Inspecteur : M. Gaultiks or Mottav.
• CiADLTlER Df MoTTAY. k Plérïll, p|■^S
Saint- Hrieuc.
Hrrmot, sculpteur, à Laniiioii.
Kbkanflkcu (le comte dc), au château
<|p Queieuec, par Miir-dc-RrclaQne.
Ub Mari^chal (l'abbé),
par Bourbriac.
PisoT (rabbé),profes»c
Saint- Charles, k S.ai
Oroiijso.
Intpecteur : M. Georges Callier.
' Callier (Georges), au château de
Villepréaux, près Saint Vaulry.
Chaussât (le docteur}, k Ahun-Ies-
Mine».
CorsTiN DK Masnada
Henri de),auchàteai
Bénéfent.
Sapim (rabbé), curt^ d(
I>oriiou:iio*
Inspecteur : M. A. de Roomejocx, k Périgueux.
* Arzac de la Douzk (le comte Ulrich
d'), à Borie- Petit, commune de
Cbampsevinel.
* BoRGt'KT (M*« du), au château dt*
Portboutout, par Ribérac.
Fayolli; (le marquis de), au château de
Fayolle, par Tocane-Salnt-Apre.
* Gkrard (Gaston de), à Sarlal.
GOYF.NÊCUB (l'abbé), ci
parMussidan.
Mo!<TARDY (Gaston de),
NeuTÎc, arr. Je Péri)
' KuiMEJOUx (Anatole
de Rossignol, par B(
Vasseur (Charles), à
de-Belv««», arr. de Si
OoubM,
Inspecteur : M.
*C.\STAM (A.), consert a leur de la biblio-
thèque publique, à Besançon.
* Clerc (Edouard), président honoraire
à la Cour d'appel, k
Pai'li!«if.r (Mgr), archi
çen.
DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D* ARCHÉOLOGIE.
XVII
SntiTtAiT (le comte de), trésorier- * ViiLLEmn-, contenrateor ilo mutée,
r«Tf«r général, à Besançon. rue Stint-Jesn, 41, à llesançon.
nx^me.
inspecteur: * M. Valli:«ti!<, jo0e, à Montélimar.
Ni<.rc5 iAlpItoMe), à Romans.
PwTMTX (d«), k Romans.
Smuimarqvit de), k Vatenee.
* VALLEimx (Ludovic), juge d'instruc-
tion, h Montélimar.
Iî2ai*o.
Inspecteur : M.
luji (l'abbé Emile de la), curé de
Stiat-Oucn -du -Tilleul.
tHiiUL-llARETTE, peintre-vcrricr, à
ETreii.
Fit le vicomte du), b Verueuil.
GcauBo (E.), avoué, h Louviere.
LuR (^»iaiir,s a Saint I>ger4ie-R6tes,
ff«» Bemay.
Ukx^, architecte, b Louviers.
U liiMJiKc LB NocMiT (le vice'amiral
kr«o Clément de), sénateur, au ctià-
ban de Cracouville, près Èvreui.
LoBEun d'abbé), chanoine titulaire,
aEvmn.
U BtjO!!», eatreproMur de bâtiments.
h Gisors.
L018CL, ancien maître de poste, b la
Rivière-Thibouville.
Ii\i80>s {comte Robert des), maire de
Caumont, par la Bouille.
IfÉRY (Paul), à ÉvreuT.
' Posée (l'abbé), curé de Bournainville.
Prétavoinb, maire de Louviers.
* Qi-i:s\LL Tabbé), curé de Claville.
QcBViLLT 1 Henry), k Beaumesnil.
RusTOLVN ^le comte de), a ÊvreuT.
ScBiOLLKK, au château de Biiy, prés
Veroon.
Société libre de l'Eure.
ISoLPo-^et-X^ol r.
inspeetevr : * M. Charles d'ALViiARs, à Dreui.
' ALviMiRE (Ch. é\ k Dreai.
'Owrmmd Paul), k Chartres.
* loBJiT» Orchid isle. k Chartres.
Mmriumre de,>,aU,kNofent-le-Rotrou.
* SAiïrr-LACiftR (<!«>), ancien maire de
Chartres.
• TtLLOT I Henri ^ a Drent.
XLIV* SESSION.
G.
XVI
LISTE DES MEMBRES
Odtes-dix-M'or a .
Inspeeleur : M. Gaqltiei di* Mottay.
'GADLTiEt nr Mottay. k Plériii, près
Saint- Brieuc.
Hkknot, scttipteur, à Lannion.
Keranflech (le comte de), au château
lie Qucieuec, par Miir-tlc-BretaQue.
Lb MaaiU»ial d'abbé), curé «le Magoar,
par Bourbriac.
Pi:«OT (l'abbé), professeur à rinstitution
Saint-Charles, à i^ainl-Brieur.
Croii«o.
Intpecleur : M. Georges C allier.
* Caixier (Georges), au château de
Villepréaux, près SaintVaolry.
CiiAOftSAT (le docteur), â Ahuii-Ies-
Miiies.
CoitSTiN DE liASNADAOD (le Hiarquis
Henri de), au château de Sexerat, par
Bénéfent.
Sapim (l'abbé), curé de Geulloux.
r>oi*iiou; no.
Inspecteur : M. A. de Roomejoox, à Périgueux.
* Arzac de la Douze (le comte Ulrich
d'), à Borie- Petit, commune de
Champterinel.
* BuRGUET (M*« du), au château de
Portboutout, par Ribérac.
Payolle (le marquis de), au château de
Fayolle, par Tocane-Saint-Apre.
* Gérard (Gasloii de), à Sarlal.
GoYENÊCHB (l'abbé), curé de Bourgnac,
parMussidan.
MoNTARDY (Gaston de), a Douxillac, par
Neuvic, arr. Je Périgueux.
* RoiMEJOCX (Anatole de), au château
de Rossignol, par Bordas.
Vassecr (Charles), k Saint-Germain-
de-Belvès, arr. deSarlat.
r>oui>M.
Inspecteur : M.
* Castam (A.), conserva leur de la biblio- à la Cour d'appel, â Besançon.
thèque publique, à Besançon. PÀrLl?iiER (Mgr), archevêque de Besan-
' Clerc (Edouard), président honoraire çon.
DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D*ARCHÉ0L06IE.
XVII
SorLTRAiT (le comte de), trésorier- ' Vlilleret, conservateur do musée,
payeur général, à Besançon. rue Saint-Jean, II, fa Besançon.
i>x*ôiii.e.
Inspecteur : * M. Valletitin, juge, à Montélimar.
NcccEs (Alphonse), à Romans.
PMmorx (du), à Romans.
SiETÉs (marquis de), à Valence.
* Vallentin (Ludovic), juge d'instruc-
tion, h Montélimar.
E:ai*o.
Inspecteur : M.
Balu (l'abbé Emile de la), curé de
Saiot-Ooen-du-Tilleul.
DruAHCL-yARETTE, |)eintre-verrier , à
Eîreax.
Fit lie vicomte du), il Vemeuil.
CciLLARD (E.). avoué, k Louvicrs.
LâiB. Casimir), a Saint L^gcr-tle-Rôtes,
I>ré< B<»rnay.
Lalcx, architecte, à Louviers.
La R<»>cièke le Nocrry lie vice-amiral
baron Clément de), sénateur, an châ-
teau de Cracouville, près Évreui.
Lekccrifa (l'abbé), chanoine titulaire,
a Èvreux.
Lb Blo?(D, entrepreneur de bâtiments.
à Gisors.
L018EL, ancien maître de poste, h la
Riviëre-Thibouville.
li\i80NS (comte Robert des), maire de
Caumont, par la Bouille.
Méry (Paul), à Évreux.
* Purée (l'abbé), curé do Bouruainville.
Prétavoine, maire de Louviers.
' (^l'ESMiL Tabbé), curé de Claville.
Qt'EviLLT (Henry), k Beaumesnil.
RosTOLi?( (le comte de), à Évreux.
ScHiCKLER, au château de Bixy, près
Vemon.
Société libre de l'Eure.
E:ui*o->et-I^oi r.
Jnspectevr : ' M. Charles d'ALviHARE, • Dreoi.
' ALTtVARE 'Ch. d* . a Dreux.
• Durand Paul , a Chartres.
* Uua,tjf archi^i^le, a Chartres.
Mttritsure tle , ûls,a Nogenl-le-RoIroo.
* SAirr-LArMER d* , an<im maire de
Charlm.
' lïÀÀjn H«^ri , a Ilreut.
.XLIV* SESSION.
C>
XVIII
LIST£ DES MEMBRES
B^lnlstèi*e.
Impeeteur: M. Paul du Ghatellibr.
* Blois (le Ticomte A. de), à Qoimper.
* Do Ghatbllibr , membre corretpon-
diDt de rinstitut de France, au châ-
teau de Kernui, près Pont-l'Abbé.
Du Ghatbluer (Paul), id.
* Hallégcex, à Gtiàteauliu.
LsvAiïiviLLB, ancien préfet, k Bénodet,
prèi Fouesuant.
Madec (Pierre-Marie), professeur an
petit séminaire de Pont-Croii.
oard.
Intpeetewr: * M. Pabbé Gabbiso, supérieur du grand séminaire, à Nîmes.
Alëgre (Léon), bibliothécaire, à
Bagnols.
* Brugcier-Rocrb (Louis), au Pont-
Saint-Esprit.
* Ddramd (rabbé), ficaire à Saint-Bau-
dile, à Nîmes.
* Gareiso (l'abbé), supérieur du grand
séminaire, à Nlme».
* Lavillb (Pabbé de), chanoine, à Uiès.
Revoil (H.), architecte des monuments
historiques, à Ntmes.
ViLLEPBRDRix (Louis de), au Pont-
Saint-Esprit.
Oax*on.n.o (flaixto).
Intpeetewr: M. de Saint-Simon, rue Tolosane, à Toulouse.
Barrt, ancien professeur à la faculté
des lettres, à Toulouse.
BiGOUEN (le comte), trésorier-payeur
général, k Toulouse.
* Bernard (Bertrand), peintre-décora-
teur, à Bagnères-de-Luchon.
• Cartailuac (Emile), directeur des
MatériaiuB pour tervir à P histoire
primitive de Vhomme^ 5, rue de la
Chaîne, à Toulouse.
Glausade (de), président de la Société
archéologique du Midi, rue Mage, à
Toulouse.
Crazanne (de), sous-intendant mili-
taire, *2*2, rue Ninau, à Toulouse.
Faure de la Ferriére, rue des Fleurs,
à Toulouse.
* Gantier (A.), au château de Picayne,
près Galères.
Geze (Louis), hôtel d'Assézat, à Tou-
louse.
GouRDON (Maurice), a Bagnères-de-
Lucboii .
Héron, I bis, rue Eliot, à Toulouse.
DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE d'aRCHÉOLOGIE.
XIX
Uyiolus (vicomte de), 5, roe Tolo-
Moe, à Toulouse.
IfiLAFOssE (Louit de) , cbàteaa des
TareoDcs, près Villefranche.
MtKTEL (Ptalin), a Castelmaurou.
* MAtTtRÉ (le docteur), médecin mili-
liire, allées Lafayette, 39, à Toa-
loote.
MoiEi^ arocat, à Sainf-Gaudeiis.
Paca."!, 6, allées Saint-Étieuoe, à Tou-
louse.
PoTTiBR (Raymond), 37, me Boalbonne,
à Toulouse.
* Saint-Simon (de^, rue Tolosane, 6. à
Toulouse.
Sévérac (Henri de), à Toulouse.
* SoLAGES (le comte Paul de), me
Ninau, 19, à Toulouse.
Trutat (Eugène), conservateur du
muséum, à Toulouse.
* ViREDERT (Gaston), 4, me Fourbas-
tard, k Toulouse.
Oers.
ln$peetevr: M.
* Laveic!I£ (Adrien), à Castillon de Mellis (Max),à Fleurancc.
Bail, par Yle-Fexensae.
Olronde;
Inspecteur : M.
'ArzAc DE LA Marti MIE (d'), proprié-
taire, k Pnjols, par Castillon-sur-
Dordogne.
' Ck^glegnier (le comte Alexis de), me
da Plessis, 5, à Bordeaux.
Cin*T DE LA Ville (Mgr), Camérier de
S^., doyen de la Faculté de Théolo-
ei^^ 10, rue de la Concorde, id.
CotBiM (l'abbé), curé de Roaillaii, par
Langon.
*Dls Cordes (Georges), au chfttoao de
Malfard, par Saint-Denis-de-Piles.
DicIlbct-Lafargue , 179, boolevard
Candéran, à Bordeaux.
Jabouin, sculpteur, me Bonafonx, I.
Marocessac (le baron Henri de), rue
de CheTerus, 36, id.
Méredieu (de), atoué, me Castillon, 9,
id.
PiGANKAr.secrélaire delà Société archéo-
logique de la Gironde, 17, coursd'Al-
bret, id.
f^illeneuve (Hélion de), sous-inspecteur
des forets, 10*2, cours d'Alsace-Lor-
raine, id.
• "Villers (de), trésorier-payeur, à Bor-
deaux.
Méx^ault.
Intpecteur : M.
Usit4T, architecte- inspecteur des tra- AzaIs (Roger), rue Clappier, 3, k Mont-
^»ni diocésains, rue Boussairolles, a pellier.
Moalpcllier. Balestrier (Jules de), k Lansargues.
XXI 1
LISTE DES MEMBRES
Isèro.
Inspectevr : * M. Leblanc, bibliothécaire et conienratear do m»
BiKOT (Ernc&t), «rcbitectf, court Ro-
nietttns, h Vienne.
Rryb (docteur de), place Saint«Mau-
rioe, k Vienne.
Daudru»-, graveur, à Vienne.
David (Auguste), docteur- médeclD, à
MoretteL prêt la Tou
* Garifx, conservateur
thèque, à Grenoble.
* Leblanc, à Vienne.
* V ALLIER (Gustave), plai
à Grenoble.
•Iu.i*u.
Inspectevr : * M. Cabtan , correspondant de Tlnstltut , consen
bibliothèque publique de Besançon.
T^atiaos.
Inspecteur: M. le baron ns Cauma. ii Saint-Sever.
B<»icHER (Henri du), à Dai.
* Cai NA (baron de), à Saint-Sever.
* LouiT DE Mon VAL (de), h Dai.
• PoNSB (l*abbé), curé «
Mugron.
I ^<> 1 r-o t-O 11 <> r .
Inspectevr : ' M. le marquis de Virraye, à Cour-Chevc
Arcy (comte d*), à Celetles, près Blois.
Bon.\RD DE LA JAC0Pitf^.RK (Anatole de) ,
su chàlcao de Saint-Ouen, près Ven-
dôme.
l>Ki.ACNE (Jules), avoué licencié, ii Ru-
niurantin.
HAii;<»r (rabbé\ curé de Fontaine en
Sologne, pjr Bracieui
Lai'nay, prorestcur au <
dôme.
• Le Nail (Ernosl), pcin
Maricourt (le baron de;
Thiéraie, parleGaul
Nadaillac (marquis de
I)£ LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE d'aRGHÉOLOGIE.
XXI
ff
r.
^ •te-
indre.
U
lupeeuur: * M. le docteur Fauconneau-Dufrbsnb, à'Chàtcauroux.
fiiLtcBET (rabbé), •amônier du lycée,
jj.
DiiGrso^, juge, • Ghàteauroux.
Oijfi^aunTi (l'abbé), k Ghàteauroux.
'Fircti.i.xciu-DcFBESXE (le docteur), à
Cbâtetaroox.
Gnuiao, ancien agent-Toyer, id.
* Jisnx (Joies), à Buzaoçais.
* La VfLuciLLE (de), k Dangi, par
Reuilly.
* Le Noir, curé de ChAtillon, chanoine
honoraire.
Lenseigne , conducteur des ponts et
chaussées, à Argenton.
RouEDE, receveur des domaines, k Ghà-
tillon.
* F'oifin (l'abbé), curé de Douadic
(canton du Blanc).
I n d.i*o-o t-HiO i r e .
Inspecteur: M. Gh, de Grandhaison, archiviste, k Tours.
' BiE5COCRT (le marquis de), k Azay-le-
Ridean.
BocscRKZ, imprimeur, k Tours.
BuiTf >?i-l>i BRBciL. k la Grouatière, près
U Graod-Pressigny.
* Bct orcT. k Fonlenay. près Bléré.
' CflATH;>Y (F^lix ile), k Ghinon.
Collet (Mgr), archevêque de Tours.
D»r>z (Félix\ k Ghinon.
DnLA5D f Tabbé). aumônier de l'hospice,
id.
* GiBACDET (docteur), k Tours.
' CrmméwuUion (de), archiviste d'Indre-
et-Loire.
'Caérm, architecle, k Tours.
* HitMo^i, architecte, k Tours.
'JAcnoc, k la Hoberdiërc, près Na-
iHles.
Lachoix de Si^xiLHEs, incieu receveur
des flnances, a Loches.
* Lapercbe, k Saint-Gyr, près Tours.
' LoBiN (Léopold), peintre-verrier, k
Tours.
* Micuelle (Paul), à Tours.
* Palistre (Léon), k Tours.
Petit-Tiiol'ars (G. du , au château du
Petit-Thouars, près Candes.
RoRiTi (rabbé\ curé de Saint-Ours, a
Loches.
* Saint-Georoks (le comte de) , au
ch&teau de la Brèche, près Tlle Bou-
chard.
* Salhon de Maisonroi'gk, k Tours.
* Sarcé (de), au ch&tcau de Hodbert,
Sailli-Christophe.
Sonnay (de), k Gravant.
XXI 1
LISTE DES MEMBRES
Iaèx*o.
Inspectevr :* M. Lt.BLAJiCy bibliolhécairc et coiisenratear du musée, à Vienne.
BizoT (Erne&t), archileete, cours Ro-
mesUng, k Vienne.
Brte (docteur de), place Saint-Mau-
rice, à Vienne.
Dardelbt, graveur, à Vienne.
David (Auguste), docteur- médecin, a
Morestel, près la Tour-du-Pin.
* Gariel, conservateur de la biblio-
thèque, à Grenoble.
* Leblanc, à Vienne.
* Vallier (Gostave), place Saint- André,
k Grenoble.
«Iu.ru.
Inspecteur : * M. Gastan , correspondant de l'Institut , consenrateur de la
bibliothèque publique de Besançon.
Ijandes.
Irupecteur: M. le baron m Gac:(a, k Saint-Sever.
Boucher (Henri du), k Dax.
* Cauma (baron de), k Saint-Sever.
* LoBiT DE MoMVAL (dc), k Dax.
* Po?iSE irabbé), curé de Nerbis, près
Mugron.
X^olr-ot-Clior.
Inspectevr : * M. le marquis de Vibraye, k Cour-Cheverny.
Arcy (comte d*), k Cclettes, près Blois.
RunARn DE LA Jacopièrk (Anatole de) ,
au cliâleau de Saint-Ouen, près Ven-
dôme.
Delaune (Jules), avoué licencié, k Ru-
niorantin.
llAKior (l'abbé), curé de Fontaine en
Sologne, par Bracieux.
Lai'nay, professeur au collège de Ven-
dôme.
* Le Nail (Ernest), peiotre, k Blots.
Maricourt (le baron de), au cbAteau de
Thiéraie, par le Gault.
Nadaillac (marquis de), k Vendôme.
DB LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D'ARCHëOLOGIE.
XXV
*abbél, oiré de Daravel, ptr
>f<qBe.
, k LeatillAc, près Figeic.
s (A.)» profetMar an collège
•e.
ÉiMpw), • Caliort.
Liu(Paol de\ k Cahora.
JU vJcAB de), k Cahdri .
Crabbë), asBteierdo collège
kc.
(loitpli),aCahon.
Mabti!!, avocat, k Boissor, près Luiecb.
Mauit (Pabbè), cbaaoine k Cabort.
Massabie (l'abbè), corè de Notre-Dame
da Puy, à Figeac.
MoiRLUON (Lucien), k Auloire, prêt
Saint-Cèrè.
MoBAT (Gabriel), k Auier.
MoBAT (Victor), k Ansier.
Po.iTiÉ (Francis), avocat, k Cahors.
RoissY (de), k (khori.
XLiO t-o t-O a r o n. n. o •
IngpteUwr : ' M. Tbolix, à Agen.
KMiLAfrOMiB (de), k Agen. "^ Tholix, iarcbiviste, boulevard Sca-
imàtmir), k Fanel. liger, a Agen.
n (rabbè), c«rè de Devilhac.
inspecteur: M. Hoisskl, député.
trchivttte, a Sfende. Polce ^rabliè), vicaire général, iJ.
:, i«féaie«r des pooU et cbans- * Roussel (le docteur), id.
\raln
t-i^oiro.
tnêpecleur: * M. Godabd*Fai:ltbieb, à Angers.
âr, f rasd vicaire, me du Fan-
StiatSaHMOB, 18, k Angers.
■ <r«bbè), oirè de Gombrée.
y «^1, cwMelller k la Cour
d'à •fer*, me Tolney, 1.1.
jtmi* de), rue du Parvis-Saint-
e, g, • Asfers.
Iffrl, èvéqoe d^Augers.
.TLIV* SESSION.
* Galbubebt (le comte de\ au château
de Parpacé. près Baugé.
* Ggdabd-Fai'ltbibb, conservateur du
musée Saint-Jean, a Angers.
* Joly-Lbiermf, architecte diocésain, k
Saumur.
L\iB (Charles), château de Blou, près
Iwonguè.
D.
XXVI
LISTE DES MEMBRES
Lambert (•Iné), préiideot du tribuDil
de commerce et de la chimbre oon-
sulUtiTe des irU et minufieturei, k
Siumur.
Mayaod (Albert), k Saumur.
Parrot (A.), rue de Chàtetu-Gontier,
30, t Angers.
QUATRSRARBES (U COmtCf
RoFFAY, architecte, k Sto
Tardif, chanoine, lecrétai
k Augeri.
>fanolie.
Inspecteur : M, ^v&nwLT^ k Coutancen.
Railliincourt (Guitafe de), receveur
particulier det finances, k Mortain.
De8PLA?i0iiEs, k Sainte-Croii de Saint-
Lô.
DuDOUTT (Guslave), percepteur, k
Bricquebec.
Laine, k Avranches.
Le Beuf, k Cherbourg.
Le Creps, propriétaire, k Saint-L6.
Le Mesle (l'abbé), curé de Savigny,
près Saint-Hilaire-dtt-HarcouOt.
* LsMi'ET (Léon), k Coutances.
Mot'Lix, maire de Mortai
Onfroy DE Tract, pem
vray.
* Pontgiraod (le comte <
château de Fontenay,
bourg.
* Qu£?iAULT, ancien tous-|
tances.
Rou<;£ (le comte de), ai
Saint-SymphorieD,par :
du-Harcouêt.
Marno.
Inspecteur : * M. Givelrt, rue de la Grue, 12, k Reims
Barbât de Bignicourt , château de
Bignicourt, près Pargny surSauU.
' Bayi (Joseph de), k Baye.
* Bibliothèque de la ville de Beims.
* Bordé (l'abbé) , au château de Baye.
CovNiiAYi, k Suippcs.
De!<is (Auguste), k Ghâlons-sur-Marne.
Dooi'iMiLLi , membre de l'Académie ,
14, rue Talleyrand, k Reims.
' FouRDRiuNitR, receveur des contribu-
tions indirtctes, k Suippes.
* GiVFXiT, membre de l'Académie, rue
delà Grue, IS,k Reims.
Godard (Isidore), k Épen
GooLET (François- And ré),
Reims.
* Jot'RON (Léon), k AviM.
Laumois, percepteur, k Re
* Le Comte (Frédéric), a (
LoRiNST, a Vitry-le-Fratt«
Mairfjii' (G.)i 23, rue de
Reims.
* MsLLET (le comte de), di
raire, au château de Ch
MoiGMOM (Ernest), conseil
ture, k Cbâions.
DE LA SOCIÉTÉ FEANGAISE B* ARCHÉOLOGIE. XXYII
iitcptflir, nw de TAutre'
èCliàl0iis.
4oelc«r>, • Vitry-le-Fran-
ifasle), • Chàlom.
literie, à Cbàloos.
iaîlc), k Cbàloos.
4a Ciolire, 4, à Reimi.
SiMoif , nie de l'Unifenité, 9, à Reims.
SiiiO!f (C.),clier d^esctdront d'arlillerie
en retraite, k Fismet.
* Société d'Agriculture de la Marne, à
ChAlons.
* Varjukr, professeur au collège d'Éper-
nay.
* Vix-Rara, à Afiie.
Max* ne (flauto).
Impeeieur : M.
, a Saint-Dîner,
é de), château de Dinte-
fillCf par Chàleaufillain.
MayeniiOt
intpecUMT : * M. Le Fizkliir, à Laval.
I., à Jablains.
(Louis., rue de TÉf^hé,
r (M** la marquise de\
de Craoo.
ué, a llayenuc.
%t (Cb.i, à Laval.
lis), arcbilecle, à Laval.
Lautouii, procureur de la République,
, a Laval.
* Le Fi7.elif.ii, vice- président du cunseil
de préfecture, rue de Bel • Air, à
Laval.
PatonoMME (l'abbé), aumônier de
l'bospice Saint-Louis, à Laval.
Meux*tlio-ot-MoMOllo.
Imgpecltur : M. Himbuit, arcbitecte.
« Guerrier de), corres- Cbarles III, 30 bis, à Nancy,
rimlilul. à Nancy. JAinifus, avocat, rue Poissonnerie, iO,
iciea) , arcbitecte , rue à Nancy.
.XXYlll
LISTE DES MEMbUES
Mouso.
Inspecleur: M. Lik:(ARd, secrétaire de la Société PhiloDiathlqi
RuvicNiER (Ariiiand), k Verdun. ^ Dames, près Montm^
Enard (l'abbé), caré de Koeur, par * LiÉ>iARD« secrétaire
Sampigny. Philomatbique, k Vi
Hamniom, aumônier du lycée, k Rar-le> Morbi. (l'abbé), curé d
Duc.
* Laulocette, peintre, à Juvigny-les-
Petitot^Bellatoini, i
Morbllian.
Intpeeleur: M.
At:DREM UËiKiRDRCL, V ice- président du Sénat, au chkieau de
Lorient.
Nièvre.
Impecteur : * M. le comte G. de Soultrait.
* Hérom db Villlfos»!:, archiviste du
département, k Nevers.
Jacqvinot (le docteur), à Sauvigny-les-
Bois.
Lespinassi: (René de>, au château de
Luanges, par Uray.
* SoiLTRAiT (le comte
château de Toury*
Dômes.
ViOLLRT (l'abbé), arch
Nord.
Inspecteur : M. le comte de («ailaimcoi rt, lOâ, rue Roya
B<)!ivARLET (A.), consul de Danemark,
6, rue Nationale, a Dunkerque.
Brassard, archiviste, k Douai.
Oaïist (Victor), professeur k l'Univer-
sité libre, k Lilk.
Cai'lai!scoi'Rt (le comi
Lille.
CoRTTL (l'abbé), mem
m le d'Archéologie f
de Wyider, par Ber
DE LA SOCIÉTÉ PAANGAISE B ARCHEOLOGIE.
XXVII
'Mwtl, percepteur , rue de rAatre'
Moide, S^ à ChÉloDS.
Vorcn (le docteur), a Vitry-le-Fran-
(•il.
*Xic4isi (Aogute), k Ghàlons.
NftCL, irchitecle, k Ghàlons.
PuMcx (Emile), k Ghàlons.
KoiOT, me da Glollre, 4, à Reims.
Siiio:<, nie de l'UniTenité, 9, à Rein».
Siiio!< (G.), chef d'escadrons d'artillerie
en retraite, à Fismes.
* Société d'Agriculture de la Marne, à
Ghàlons.
* Varnisr, professeur au collège d'Éper-
nay.
* Vix-Baba, à Afixe.
>lapiie (Haute).
Impecieur : M.
Màicn cPolj, à Saint-Dixier. ville, par Chàteauvillain.
j locct (Hervé de), château de Dinte-
Mayenixo.
Inspecteur : * M. Le Fizilier, a Laval.
ÏAaat cHeari), i Jublains.
^WTWMEBi (Louis), rue de l'Èvèché,
« Util.
•Cbamfauîiit (M— )a marquise de),
«a duteao de Crion.
«JitMir. avoué, à Mayenue.
I>r„WDtLiîcxÉ(Ch.),àUval.
GiMiu (Unis), architecte, à Uval.
Lautour, procureur de la République,
. à Laval.
* Le Fixelif.r, vice-présideut du cunxeil
de prérecture, rue de Bel - Air, à
Laval.
PrIdbomhe (l'abbé), aumônier de
l'hospice Saint-Louis, à Laval.
Meurtno-ot-Mosollc.
Intpecteur : M. Himblrt, architecte.
^*«»tt iVaron Guerrier de), corres-
^F«a^l Je l'Institut, k Nancy.
CUdea), architecte, rue
Charles 111, 30 bis, à Nancy.
Jambois, avocat, rue Poissonnerie, *20,
à Nancy.
f _.
XXVlll
LISTE DES MEMbUES
Mou se.
Intpecieur: M. Lie.'iard, secrétaire de la Société Philomathiqoe , à Verdan.
RuviGNiEB (Armand), k VerduD. ^ Dames, près Montroédy.
£:<iARD (l'abbé), caré de Koeur, par * Liénard, secrétaire de la Société
Sampigny.
Philomatbique, k Verdun.
HAN?iio?i, aumônier du lycée, h Rar-le- Morel (l'abbé), curé de Sampigny.
Duc.
* Lallooetti:, peintre, à JuTigny-les-
Petitot^Bellavoini, à Verdun.
Morblliaxi.
Irupecleur: M.
AuDREN deIKerdrel, vice-présîdent du Sénat, au château de Saiot-Ubel, près
Lorient.
Nièvre.
Inspecteur : * M. le comte G. de Soultrait.
* Hérom de Villefosse, archiviste du
départeàient, à Nevers.
Jacqvi?(Ot (le docteur), a Sauvigny-les-
Bois.
Lespinasse (René de), au chAteau de
Luanges, par Urxy.
* Soi'LTRAiT (le comte Georges de), an
chftteau de Toury-sur-Abron, par
Dômes.
ViOLLET (l'abbé), archipr. de Cosne.
Nord,
inspecteur : M. le comte de Cmlaiscoirt, 10-2, rue Royale, à Lille.
BoNVARLET (A.)t consul de Danemark,
6, rue Nationale, à Dunkerque.
Brassard, archiviste, à Douai.
Camet (Victor), professeur h l'Univer-
sité libre, à Lill<^.
GAiLAiNCOt'RT (le comte Anatole de), à
Lille.
CoRTTL (l'abbé), membre de l'Acadé-
mie d'Archéologie de Belgique, oiré
de Wylder, par Bergues.
U. ZJk ifninDS: HlhO^AHl O JhUOHWliMMI.
vvtv
hncMii
9^ kH. 4 liiir.
1k\MHK »iBM<ijl>rp 1>K»mn»Mmv « ihiNwiN.
VuJiis tl^feMon^ xJN^ifi^ (WMNtitlx ¥A.
Oise.
Irnspeciem- : M. le comte di IIaiist, i Conpiéfiie.
ktUÈLt («Ik d*), à Ch•Dlill^
* Cajx we Sakt-Atiiocii fA. de), con-
•eîller féoénl, • Senlit.
Cktujsb 3*T™oi>^)i *3, me des Dô-
■Him, à Compiègoe.
0m>«if, préfideot honor., à BeaoTais.
Dcpcis (Em.)i k PooUrmé, par la Gha-
pelle-eo-3erTal.
FiAsa-DirrF (Boberl), h Chantilly.
Urrtf.'x (LndoTic), direclear de la fa •
brique de Tllrtui |»eliiti, I Meinth
Saint-Kirmln.
L«coT(rabbé),rur^ de Malitt*ANt(ttitv»
k Complégnn.
Manuri. (l'abbA) , curé de (UfN-liMi'Melto.
Maricoirt (comte de), k VlHemélrlei
prèi Seolli.
Maricourt (Mil* Clotllde de), Id.
M ARicocRT M"* Lttcte dei Id.
Mar»t (le eomle d#), k <>>tiipl«t|fi4«.
Ortie.
tu^teti
Unm M Ls ^y/fif JC, t^Nitel^arf « Ak*vM»,
BABaaFr(dei.aB
aEHay.
c«H«« de Trio.
0«i
IU1
r
XXXI 1
LISTE DBS MEMBRES
Saône-et-1LiOlre.
Inspecteur : M. de Surigny, k Màcon.
Bathaolt (Henri)', secrétaire de U
Société archéologique f à Ghàlon-
sur- Saône.
Bi'GfiioT (rabt>é), aumônier militaire,
missionnaire apostolique, id.
* BuLLioT, président de la Société
Édnenne, à Autan.
' Canal de Chizy (Marcel', à Préty,
par Tournus.
Chevriir (Jules)« à Cli
FoNTENAT (Harold de) i
graphe, k Autun.
Lacroix père, pharmac
* pAiLLOux (le docteur),
Ambreuil, arr» de Gh
SuRiGNT (de>, a Màcon.
^arttie.
InspeeUvr : M. Huchir, membre non résidant du Comité des trav
* Alms (l'abbé), chanoine titulaire,
rue de Ballon, 15, au Mans.
Bertrand (A.), rue de Flore, au Mans.
Boit:nRT (Paul), architecte, rue d*Hau-
teville, 19, au Mans.
BocRGUK.No:^, ingénieurarehitecte, au
Mans.
Blottière, sculpteur, id.
Ceuir (Aletandre), avenue de Paris,
31, au Mans.
Chardon, ancien élève de l'école des
Chartes, au Mans.
* CuARLEH (l'abbé R.), k Ik Kerté-Ber-
nard.
* CiiEVREAi: (l'abbé), vicaire général,
au Mans.
CosNARD, avocat, S.1, rue du Bourg-
d'Anguy, au Mans.
* CiMOMT (le comte Charles de), au chà>
teau de l'Hôpiteau, par Sillé-le-Gui|.
laume.
Deslais (l'abbé), curé
rue du Mouton, 14, a
* Dunois (Gaston), arcb
phe, 33, rue de Ballo
* EsxAVLT (l'abbé Gu
Ballon, 39, au Mans.
Ètoc de Ma7.y, mèdeci
aliénés, id.
ËviiLLARh (l'abbé He
au petit séminaire d'
Gatffikr (A. de), 15, r
au Mans.
GoMDERT, architecte, i
HucheTy lue de la Mai
* LKnRi' (l'abbé), pro
séminaire de Précigi
Le Pelletier, doct.-m
LiVET (l'abbé), chan
curé du Pré, rue N.
' Mailly (le comte de)
France, au château
BB Ik SOCIÉTÉ FRÀNÇAISB d'ARGHÉOLOGIE. XXlin
rèileMam.
(^Elbexjck (Samael), •« chl-
tÏMléoii, ptr T«ffé.
IHrGubiii» membre ds Coiueil
k MMtbiiof , près Ballon.
irred\ S4, HMde !• Minette^
■
(Fabbéi, chanoine titulaire,
Cëàtenni 31, id.
iBMs (Tlcomletae de), ehà-
la Bodie, prêt Vaat.
iin,attMani.
RuiLLÉ (Georget), loas-inipectevr 4li
forèta, me AoTray, au Mans.
* SAiïTr-PATSiNB (le comte de), k Saint-
Paterne.
* SiMCBci, me du Quartier-de-Cata-
lerie, 37, an liant.
* RoDict , architecte an Mans . me
CaoTin, 8.
Soyez, architecte, me aai Lièvret, an
Mans.
* To!i:(iLLiui, k la Flèche.
Iiupeeieur : M.
^lère de racole des
krlB, h Albertville.
(FranfoU), secrétaire de la
d'histoire et d'ar-
chéologie, k Chambéry.
* TuniNAZ (Mgr), évèqve de Tarenltise,
à llotttiers. «
Savoie (Haute).
Impeeteur : N.
înMpecleur : * 11. Daicel, asi Gobelins, k Paris.
(Aimé d*), dircclear de VAr-
Mpèeial de Framce, bonloTard
n, U, a Nenillysor*Seine.
(le cemmandenr), me d*An-
rt-Hoooré, 9, id.
architecte attaché sut bâti-
ivils, 15, me Charles T, id.
t ▼lciomtede),fW, me lliromé-
lUY* SESSION.
Barthélémy (Anatole de), me d'Anjoa-
Saint-Honoré, 9, id.
Barthélémy (le comte Édooard de),
rttederUuiversilé. 80. id.
BAL-DicocRT(Théodule de), juge an tri-
bunal civil, boulevard Saint-Michel,
id.
* Beat;! (Stéphane), avocat, me Mal-
her, », id.
B.
ZXXIT
USTB DIS XBMBMBS
IttcHU, fraftvr ea nédtUlM, 15,
qmi dt Coati, id.
Blacas (te CMito SUDklu d«), ine de
VareoMS, 5:1, M.
BocHi!!, rue de Profwee, 58, id.
BomiBviL (de), rue Stiat-GiiiUauiiie,
Si, id.
* Bo.ivoi:loir (le comte Aagvite de),
rae de l*UniTeraité, 15, id.
Bosc, architecte. S, rue Ségaier, Id.
BOOLAY DB LA MlL'RTBK (Alfred\ 23,
me de rUoÎTersité, id.
BauYÊii, curé de Saint-liartin, id.
BiXAiLLi (GaitaTe), mode Parii, SI8,
id.
Capklli, rue Garreaa, S. id.
'Cbakoo!! (Em.), architecte, 7, me Ma*
lesherbei, id.
* Chéri-Lcmoimc-IIontigxt, 75» me de
la Tour, k Pauj.
*CLAt-8&B ^Guitafe), 9, rue de MuriUo
(ParC'Slonceaux). id.
CoLLARD^H.),l>ouleTard de Strasbourg,
39, id.
Go^(TADEs (marquis de), 15, rue Louis-
le-Grand, id.
Casi'zoT, uéQociaot, 33S, rue Saiot-
Honoré, id.
Damibns, statuaire, rae du Cherche-
Midi. 55, id.
* Darcel, directeur de la manufacture
des Gobelins, id.
DELO?cGUciL,graYeur,rne Royale- Saint-
Honorét 8, id.
* Dks Cars (le duc), rue de Greoclle-
Saiol*Germain, 79, id.
DiUARD (Georges), rue Neuve- des-Pelits-
Champ«, 97, id.
IHIK>^(T (A**) , professeur de belles-
lettres, avenue de Neuilly, |46 bis.
DcRBAU (A.), rue de la Tour-d'An-
Yergoe, 10, id.
BiTAaiPBa (le comte Théodore d'), bou-
levard HaussmauB, 56.
^Bggbk, menbra i
Madame, 48, td.
Grellbt (Aleiaiidn
80, parc Saiat-Mai
Hatacx do Tillt, 18
à Paria.
* JoAM!fB, me de Vaai
* La PEaaitBB (le coi
Peuthièvre, id.
LAHBBar (Fabien), ai
leur des travaai
Monsieur* le-Prinof
Laffolyb (A.) archilf
sierdam, id.
Lami (SUalsIas), »
Pauy.
* La Trihocilui (do
rennes, 89, id.
LaoriBre (Jnlee de),
Pères, 18, id.
LauriBrb (Ferdiaaad
parte, id.
Lb Bla!it (Edmond),
stitut, rae Lerovi,
Le Cordier, ingéniet
Petit-Parc. 87, id.
Letsuil, 09, rue Richi
LiEsviLLE (de) , aui
Ganthey, i8, id.
LiuKT, architecte, ra<
10, id.
*MAGtiiBL (René), 40, i
MARons (Léon), ingéi
8, id.
'MEi8SA8 0'abbéde),ai
pice Greffulhe, 78, i
Levallois.
Mb'igy, ingénieur dti
Madame, k Paris.
MiNORCT (E.), rue Mer
* MiRBPoix (le duc de
niinique-Saint-Gei
MoNTKERRAND (Ch. de)
Unances, 40, rue du
M tk SOGIÉI^ fltAIfÇAISB D'ARGHÉOLOGIB. ZXXT
, f ne llarie>Lo«ite, id.
m ui Falcojoébe, 17, r«e Pon-
itet'GcMrycSf lu.
Ubmi\ MBBMiidaBt d'artll-
retitHe, 100, rut des Fesil-
MMi««bécalre à r<co1e des
kffi^li.
Bvri), «leva d« Técoto det
kfli» f«ai d« la Méf inerie,
da), rae do Regard,
M LannÉaB, attaché a« ml-
dca ■■aocat, n, me Gay-
■b), aBcicB kiblioUiéeaire de
ie Brfaat, qaai dca Graadt
aa,5, id.
■Mal, BeaBbre de Flnaiilot,
tWfvrtité, n.
Chartei), 16, me da Roi-de-
d.
K (le Branpiif Armand de),
iUe, m, id.
ft^ABÉcociT (le Tieoaile de),
rCnhertilé, It, id.
n-RrSA!iB (Placide), orférre,
«lta.15, id.
|(aéral,dîrecteord« féaie,id.
RoTt«-(k>LLARD (Paal), 46, me dea
Écoles.
RoTa] (le Ticomte Emett de), 11, plaea
Vendôme, id.
'Sai^tt-Pacl (P.-L. de), atocat, mt
d'Affnetseau, I, id.
* SAt!<T-PACL(Anthyme^, roe Monge, 71.
* SAUia (de), rédacteur en chef de la
France iUuttrit, 40, me de la Fon-
taine, k Attteoil.
Saladin (Henri), me de Seine, IS, Id.
StMOïi (F.-X.), négociant, bouletard
d'Enfer, 17, id.
SiLTtSTVB (le haroB Frani dt), me d«
Pré-aox-Clercs, 5, id.
Thiollbt , patMge Sainte-Marie, 8, Id.
* Yaulocé (Franiz de) , me da Gentil,
6, id.
* Vacx (baron de), me de Tooraon, 4.
Vacx (René de), me de Touruon, 11.
YicNACx (Eugène de), 34, me des
Francs- Roorgeois, id.
'TiLLKrossB (Antoine Héron de), atta-
ché k la coosertation des Antiques,
an LooTre.
A^tnceii/, me Legendre, 94. aox Rati-
gnolles.
'YoccB (le comte Melchior de), ambas-
sadear k Vienne, me Fsbert, 1.
.* 'LéoneeiNt Glaxtillc, directenrde TAssociation normande,
k Rooeo.
Ot CMita dO, rue de Foole-
,k Rom».
B la Scbbb, io«s-inspacte«i
to, rue de FHdtai-do-Ville,
y père, rue de la (Hialne,
lecle.id.
y ila, architecte, boslerard
BeauToisine, S5, id.
RACOtT (Paul), 1, place de la Motte,id.
'Rba CREPA ihe (de), archifiste de la pré-
fectare,meChasselière,Sbis> Roneo.
Reozeville, rédacteur en chef du Jour-
nal de Rouen t me du Bac, 4i, id.
* RoMET , sculpteur, rampe Rouvreuil,
86, id.
zxxnr
U8TE DBS MEMBRES
i, frtTtar eo médiilles, 15,
qnai dt Cooti, id.
Blacas (te CMito SUnltUt de), rue de
Vareooes, 5i, id.
Bocm^t rue de Profence, 58, id.
BomuciL (de), rue Stint-Guilleume,
Si, id.
* Bo!IVOoloir (le comte Augofte de),
rae de rUnifersité, 15, id.
Bosc, arcliilecte, S, rue Séguier, id.
BoOLAY *DB LA Meurthk (Alfred^ 23,
me de rUoitertité, id.
Bkutêie, curé de Saiot-Mirlin, id.
BuCAiLLi (GusUTe), rue de Paris, SI 8,
id.
Capelu, rue Garreaa, S, id.
'Cbardox (Em.), architecte, 7, me Ma-
letlierbeB, id.
* CHiBi-LEiioiïiE-MoNTiGifT, 75» me de
la Toor, k Paaay.
'Claussb (Giulave), 9, rue de Murillo
(Parc-Monceaui). id.
Collard (H.>,l)Ottlerard de Strasi>ourg,
S9, id.
CoxTADBS (marquis de), 15, rue Louis-
le-Grand, id.
Crbuzot, uégociaot, 33S, me Saiot-
Honoré, id.
Damibms, statuaire, rue du Glierclie-
Midi, 55, id.
* Darcel, directeur de la manufacture
des Gobelins, id.
Delo.icceil, graYeur,rue Royale- Saint'
Honoré, 8, id.
* Des Cars (le duc), rue de Grenelle-
Saint-Germain, 79, id.
DiGARD (Georges), rue Neure- des-Petits-
Ctiamptf, 97, id.
DopoNT (A^*) , professeur de belles-
lettres, avenue de Neuilly, 446 bis.
DcRBAL' (A.), rue de la Tour-d'An-
Tergne, 10, id.
Estampes (le comte Tliéodore d*), bou-
levard Hauumann, 56.
* Egger , membre da l'Institut, iw
Madame, 48, id.
Grellbt (Aleiandre), rtcbm d« FBil,
80, parc Saint-Maur (près Paris).
Hataux do Tillt, 18, rae de f«lsbowi^
k Paris.
* Joamne, me de Vaagirard, M, bis, Id.
* La Perrière (le comte de), •, mt dt
Peuth lèvre, id.
Lambert (Fabien), architecte, iMspec-
teur des travaui de la lille, me
Monsieur- le-Prince, 48, id.
Laffolts (A.) architecte, SI, raed'Afli*
sterdam, id.
Lami (Stanislas), 97, rae DanC, h
Passy.
* La Trihouilui (duc de), rae de Yr-
rennes, 69, Id.
LauriBre (Jules de), rae des SrIqIr»
Pères, 18, id.
Lauriêre (Ferdinaiidde), 47, rae Beat-
parte, id.
Lb Blasit (Edmond), membre de 11e-
stitut, me Leroui, 7, id.
Le Cordier, ingénieur clril, rae Ém
Petit-Parc, 67, id.
Letbcil, 99, rae Richelieu, id.
LiESviLLE (de) , aux Batifoolles, rae ^
Gauthey, 28, id. ^
Liget, architecte, rue de Belledkaae»
10, id. '
* Magimbl (René), 40, me de Berlin, Id. ^
Marquis (Léon), Ingénieur, rue LlRBé,
8, id.
* Meissas O'abbé de), au mônier de IIms*
pice Greffulhe, 76, rue de VilUers, h '^
Levallois.
Mexgt, ingénieur des minet, 5S, rae
Madame, k Paris. ^
MiïiORET (E.), rue Marillo, 6, Id. ^
* MiRBPOix (le duc de), rae Saint-Df» ^
minique-Saint- Germain, lOi, II* *
Montferrand (Gh.de), inspecteur ém
linances, 40, rue du Bac, id. ^
DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D'ARGHÉOLOGIE.
(Paul), 46, rue des
Mouuoif, 9 rae Marie^Looite, id.
* Mnmi DE LA PALCoifitiE, i7, me Fon-
teiBe-8«iDt-6eorfet, id.
*lfowiT (Robert), commaDdiot d'arlil-
loie CB retraite» 100, me des Fenil-
heUMt, id.
*Mncn. bibliothécaire k l'école des
Bcaai-Arfs, Id.
'KouT (Béori), élève de Técole des
Beau- Arts, qsai de la Méginerie,
»,id.
RiccaT 00 comte de), me da Regard,
S,id.
FiUâB» Bc LabitiAre, attaché an mi-
aisière dea flnaocei, 8S, rue Gay-
Lanae, id.
FâBM (Loaia), ancieo bibliothécaire de
la vflic de Rriint, qnal dea Grands
iagwliiM , 5, id.
hw (Fa«llB), membre de rinsiilat,
raeiarUBiTersilé, tt.
huior (Charlet), M, me da Roi-de«
fidle, id.
'Hbrbic (le marquis ArmaoJ de),
faedeUlle,€7,id.
* fovres D'AHfcocaT (le Tioomte de),
m 4e FUaiTertité, 18, id.
hoBiiifirE-RcsAïn» (Placide), orféTre,
rmCaMctle. 45, id.
''ttfaaT,géBéral,directeorda génie,id.
ROTBB-COLLARD
0
Ecoles.
RoTsHla vicomte Ernest de), 1t, place
Vendôme, id.
*Sai!it-Paul (P.-L. de), avocat, rae
d'Agaesseau, i, id.
*SAi:<T-PAUL(Anthyme), roe Monge, 71.
'Salies (de), rédacteur en chef de la
France illvitrét, 40, rue de la Fon>
taine, k Antenil.
Saladin (Henri), rae de Seine, 4S, Id.
Simon (F.-X.)» négociant, boulevard
d'Enfer, S7, id.
SiLVESTRB (le baron Prani de\ rae d«
Pré-aox-Glercs, 5, id.
Thiollbt, passage Saiofe-Marle, 8, id.
* Vaclogé (Prantx de) , rae do Gentil,
g, id.
* Vaux (baron de), rae de Touraon, 4.
Vaux (René de), rue de Touruon, IS.
YiGNAux (Eugène de), 34, rue des
Francs* Bourgeois, id.
*TiLLRF08SB (Antoine Héron de), atta-
ché è la conservation des Antiques,
au Louvre.
yincentt rue Legendre, 94. aux Bâti-
gnolles.
'YoGVÉ (le comte Melchior de), ambas-
sadeur è Vienne, rue Fabert, 2.
0ei XI e-Izxf 6r i e u re •
: 'Léonce DÉ Glaxville, directeur de l'Association normande,
è Rouen.
Qê coBBte d'), rue de Fonte-
adk, 31, à Rooeo.
BB la Sebbb, sous-inspecteui
rue de l'Hdtel-de-Ville,
B,àBewB.
i/rtUiemof père, nie de la Ghalne,
lkaT«Ulec1e,ld.
Ills, architecte, boulevard
Beauvoisine, 35, id.
Baudrv (Paul), 3, place de la Motte.id.
'Beai'repaire (de), archiviste de la pré-
fecture.rueGhasselière,Sbi8,k Rouen.
Beozeville, rédacteur en chef du Jovr-
nal de Rouent rue du Bac, 43, id.
* Bo!fET , sculpteur, rampe Bouvreuil,
56, id.
xxxTin
LI8TB DES MEMBRES
* Uhnval^ chiDoiiM tiluUire, id.
BaMiGjrr (d'), à Péronne.
* Payuliiet (Gaston de) , chàleao de
RaincheTal, près Amiens.
Janyibr (A.) ancien président des Anti-
qvairet de Picardie, à Amiens.
MAsaOR, 48, rae Saint*Denis, à Amiens.
Mathan (le baron Bdfi
nant colonel en reiraii
Noyon, k Amiens.
* Mbmnschbt, conseiller
pel, à Amiens.
MoacAN (le baron Thomi
laire, id.
Intpecteur: M. Rossignol, à Monlans, près GallUe.
▲■AGON (le roarqnis Charles d'i, an
château de Salies, k Albi.
Bonnet (Henri), recefeur des Domaines,
è Rabutens.
BnoGcilsi (Aof oste), cnré de Milhars,
par Gaillao.
Casals, coré de Saint -François, à
Lifaar.
* CoMBCTTES ne Lcc (le comte Loab
de), k Rabastens.
" CoHBCTTES-LABOimEUC (Louis de), an
chàteao de Labourelie, près Gaillac.
PALGCiâBE (le baron de), k Rabast«ns.
GooTTEs-LAGikATB (le bsron de), an
chàteto de Lsgrare, près GailUr.
Gmbllet-Balgcerie. Juge d'instruction,
k Lafaur.
Madbon (Henri de), k Cadalen.^
Mazas (Etienne), k LaTsur.
MiaiAu (Vabbé), curé de la Madeleine,
k Albi.
O'Btbnb (Edward\ au château de Saint-
Géry, près Rabastens.
0*Btrnb (Henri), id.
Petbonnet (A.) , pharn
tens.
* Riviêrei (le baron E4
château de Ririères, p
Rossignol (Élie-Anloim
près Gaillao.
* SoLAGES (le marquis d
de la Verrerie do Bl
maux.
* Thomnac -Villeneuve
Gtillac.
* TODLOUSE-LAlJTBRC(leC«
de), directeur de Vint
f inces, au château de i
près Laraur.
Vetbiac (Auguste), k Ca;
VmÊs(T. de, k Vifiès^l
Voisins • Lavebniêbb (J
Saint-Georges, près L
Tf EBSEN (le baron Jean i
Xarn-et-Oaronne.
intpeettwr : * M. l'abbé Pottirb, président de la Société arehl
k Montauban.
Abnocx bb Bbossabb (d'). k la Crow, Bbun (Victor), directeur
près SaiBi Porquier. Montauban.
DX LA SOClÉTi FRANÇAISE d' ARCHÉOLOGIE. XZXTI
Intpectew : M. le ? icomle db Bomxicil, k Melvn, et à Piris,
rue Siint-GuilUoniei 39.
lonniL (ficomfe de), à Melnn.
'Ekitiui {\e comte), à Chepois, per
bChàlelet
*Thibrcbu!< (l'abbé), curé de Saint-
Augottin, près Coulommien.
Inaptetêwr : " M. db Diosi, à Monlfort-rAmiary.
iaâCBf (l'abbé), coré d« Yétbcil .
'ïhn (Adelphe de), k Moutfort
FABany.
GnoT (Jeiepb). tu château de Donrdan.
HMBB-LBraiB, k Monirort-rAmaury.
LâOBir-LAfei» (Heary), aTeoue de la
Reine, 108, k Venaillet.
Marti?i (L.), rue de rOccident, 18, k
Yenailles.
llESMiL'DrRAND (le baron de),
Saint- Honoré, 40, k Yersailkfl.
Sèvres (Deux)*
impêcleur ; * M. Ledaim, k PoitierB.
DiTo, aocicD député au Corps légis-
hlir, k Niort.
UfOMB (Henri), id.
PuiJtuj (Ifédéric de), directeur du
Crédit induilriel, k Niort.
Piet-Lataudrib, rue Yvert, k Niort.
Rocoi]ET,k YilIe-des-Eaux, prèi Cbixé.
' Société de Statistique, k Niort.
Sommo*
Intpeeleur: M. Menmechet, conseiller k la cour d'Amient.
iiTOT (Émeric), capitaine au 149* ré-
lîacat d'infanterie de ligne, k
ibimil (Yictor de), k Montdidier.
* RoN^AULT d'Hoi'et (H. de), château
d'Haines, près Morcuil, et k Paris,
19, rue Jacob.
Delfortrie, fils, architecte, k Amiens.
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ér SaaI-FraacMi, k Bocwa^^at.
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*TM»:«3(AC>Tusvrt¥ fHari éH« k
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OVfKVB : Utnri^ , Mckàlna et Suai-
* TovLM9C-L%rTaBq.1r4
éet.éirtcftnr «le
«ÎBccs, •• cliàlna et SsMt-SMnnr,
Ti^ts T. 4c , à Tivks^prèi CHtics.
Toisns > LàTim-iiEu Imfli ée), h
S>i»t Cw i<>y pris L«T««r.
Ttebs» 'le Unm àtmm r.s à Gûllac
iMpcrfcar .- * M. Tabbé Pornau pr4»ideat de U SMÎélé
k VeataetaB.
»E Baosa^is i4^. ë la Cnae,
|Vicl»r\
«il
DE LA SOCIÉTÉ FEANCAI8E D'aECHÉOLOGIÉ. XU
Imptetevr : M.
liPcrdisaM), à Robéoourt, par VrécooH.
Impeeteur : M.
iT>To!r(tiaB (le doc de), ao IUvi!i, notaire, k Villien-Sairil-Be-
la d*A«ey-l«-Prane. nolt.
.prétidcnl do Iribonal chil, Rocciu 0*«bbé), curé de Saiot-Eo-
s. tèbe, à Aoxerre.
■. iitbif Ule do déptiiemenl, à * Toxxellier, greffler en chef do tri-
ne. bonal citil, k Sent.
Province d.*AlBor.
ntJic, correspondant de Tint- mânes d*enscigiioinent sopéricor, k
iaapcdeor des écoles mosol- Alger.
* TaÉMAOx, k Tipaza.
Provlnoo d.o Oon«taii.tl no.
Impeeteur : M.
M M, capitaine ao S« cbas- indigènes, k Tebessa.
, cbef do boreao des affaires Dclapako (l'abbé), coré de Tebessa.
Alaiaoo-rjorraino.
impeeteur : M. l*abbé STiAim.k Strasbourg.
Isrit, k Gocbwiller. Gi-bbof.r (rabl>é V.), coré de Saint-
, ordiilerl^, k Mets. Georges, k Ilagoenao.
xLnr SESSION. p.
XL
U8TE DBS MEMBRES
Vondéo.
Impecteur: M.
BAROSt ancien dépoté, k Fonteniy.
BAODikT (I*ibbé F.)i coréda Bernard.
DEL1B05, notaire, à Saiut-Gilles-tar-
Vie.
PiLLOx (Benjamin), à Saint-Cyr en
Talmondaii.
GcÉtix (l'abbé), cvré-doyen, à Saini-
Fulgent.
RocuEBBO!<E (OcUre de), k Pontenay.
Tressât (Vabbé du), chanoine k Lnçon.
Viexme.
Intpeetewr : M. Alfred RiCBAio, arehitiile, k Poitiers.
* AOBIR (rabbé), chanoine titolaire, k
Poitiers.
* BARBiEBns Mo?iTACLT(Mgr), k Maris,
par Jaolnay.
*BBRTÉ(lepère),id.
Dklayeau (Camille), an château d'Éter-
nes, prèi Loadun.
La Brosse (le comte de), k Poitiers.
*La Croix (R. P. Camille de), me de
l'Indostrie, k Poitiers.
La Tocrette (Gilles de), propriétaire,
k Loudan.
La Tocrette (Léon de), k Londan.
Le CoiNTRE-DtTO!iT, k Poitlors.
' Leda» (B.), id.
Rêdel^ archiviste honoraire dn dépar-
tement, id.
*OvDi:< (Hilaire), roe de l'Éperon, k
Poitiers.
Richard (Alfred), archiviste da dépai^
tement, id.
ToucHois (Aognste), rue Saint-Denis,
k Poitiers.
Vienne (IRaixto).
Inspecteur : M.
'Arbelot (rabbé), chanoine honoraire,
11, rue de la Corderie,k Limoges.
Bocdet (Victor), boulevard du Mar-
ché-aux-Cbevkui, 16, h Limoges.
FoRGERO!«T (André), k Chalus.
Maobla!<c (de), k Saint- Junien.
* Société archéologique dn Limousin.
Ta!<deao db Marsac (rabbé), chanoine
honoraire, rue porte de Toumy, lit
k Limoges.
DE LA SOCIÉTÉ FEANÇAISS D' ARCHÉOLOGIE. XU
VoseeSi
Intptetevr : M.
Piuna (Ferdinand), k Robécoart, pir Yrécourt.
Yonne.
Intpeelevr : H.
CuiaoTr-TointnRB (le doc de), m
chètetn d*Anqr-l<!-Frane.
UUier, président do tribanil civil,
à Sens.
(hiatUtn, arcliif isle do déparlemenl, k
Anierre.
Ravin, noUire, à Yillien-Sainl-Re-
noit.
RoGViBR 0*ibbé), curé de Saint-Eo'
sèbe, k Auxerre.
* ToNNELLiER, grefOef en cher do Iri'
banal citil, k Sens.
Province d.* Alger.
CmioTfïiRAii, correspondant de l'InS'
tilat, inspecteur des écoles mosol-
nianes d'enscifnoinent sopéricor, k
Alger.
* Tbémaox, k Tipaza.
Province d.o Oonatantino.
Inspecteur : M.
BofaoM)!! (de), capitaine ao 3* cbas- indigènes, k Tebessa.
•«un, chef do boreao des affaires Delapard (Kabbé), co ré de Tebessa.
A.lsaco-Xjorraine.
Inspecteur : M. Fabbé Stracb, k Strasbourg.
Fm (Henri), kGucbwiller.
^oxms, architecte, k MeU.
XLIT* SESSION.
GuERDER (l'obbé V.)} curé de Saint-
Georges, k Haguenau.
P.
XLIV
LISTE DES MEMBRES
MEMBRES ÉTRANGJ
Ar^I^BMAOT^Ii:
AoESWOLD, préiideut de la régence, à
TrèTei.
AuTEMBs (le biron d'), directeur du
muiée germiulquc, à Nuremberg.
Baeiir, profeiteur do l'UnUenité de
Heidelberg.
Batui (A. de), conienralcur des monu-
meolt historiques, k Cêrlsruhe.
Brikckb!! (de) , conseiller d'État, à
Brunswick.
Dectopf (le comte), k Gœttingen.
FiRMEMiCH (Jean-Mathieu), homme ile
lettres, à Berlin.
Flobencoi'RT (de), directeur du musée
d'antiquités, à Trères.
FoRSTER, de plusieurs académies, k
Munich.
FcRSTEMDERG-STAMnEiM (le comtc de),
k Apollinarisberg , près Cologne.
Gergins, secrétaire de la Société ar-
chéologique, k Mayence.
Hcun, membre du Conseil supérieur
des bâtiments, k Carlsruhe.
K0ED6IR, membre de plusieurs rociétés
sarantes, k Cologne.
KiRCHorER (Théodbre), k Stuttgard.
Kriig oEHocnFELDE!ii,ai(]e de camp du
grand- duc, k Baden-Baden.
Ki'GLER, professeur k l'Académie de
Berlin.
KOLL, prof, k l'Académie de Berlin.
LixDiMstuiiiDT, consertiteur du musée
de Mayence.
Lb?iuart (F.), sculpteur
LsuTscn (Charles-Ch
WeUlar.
Marccs (GustRTe), llbn
Mayemfiscii (le baron é
de S. M. le roi de Pn
le prince de llohensol
gcn, k Sigmaringen.
Mayer (F.), k Francfor
Messmer, professeur, c
musée, k Munich.
Mo:<E*, directeur des
raies du graud-duch
Carlsruhe.
MosLKR (Charles), prol
demie de Dusscldorf.
Miller (le docteur Ch
gard.
NAiiUYS(le comte), mem
sociétés savantes, k \S
Not'E (le comte Arsène
droit, k Malmédy.
Olfers (d'), directeui
musées, k Berlin.
PiPERS, professeur de
directeur du musée
chrétienne, k Berlin.
Reicue?(sper(;er, conse
de cassation, tice-p
chambre des député
Berlin.
Rlidbr, professeur k 1'
nique de Bamberg.
D£ UL SOCIÉTÉ FAAMÇAISE d'ARCHÉOLOGIE. XLllI
31. MirooiT (Albert), à MatiBnyï par
HaiD (Somme).
Si. TiiLLijrr (Yictor-Julet-Françoii), k
BoiIofoe-tor-Mer.
83. Pact&at di la GcArikièie, me dei
Aitns, ta Mans.
Si.UGcmLijuceaa tribunal d'Arrst.
35. Sus (Georges), k Arrat.
3ft. (^i;RTiLLOLEa(de), à CoartiloUet,
ptr Alençou.
37. Tbesvacx dc Fraval, rue du Lycée,
à Uval.
38.Moai9i DELA BeacluèR£ (Louis), à la
Dnijoterie,par Entrammes (MayeDue).
39. VifHKAT (de), au Rocher, prèa
Uni.
40. BocLAXCl, à Arru.
4^. Giron (Gaston), au Puy (Haute-
Loire).
4a. Marchessod (Léon), au Puy.
43. Brive (Albert de), ancien conaeiller
de préfecture, au Puy.
ik, Hedde, banquier, au Puy.
45. Sagnier (Alphonse), juge suppléant,
k Atignon.
46. Bardaman (Nicolas), peintre déco-
' rateur, à Avignon.
47. CuREL-SiLVESTRB (FéUi), à CaTail-
lon.
48. Eysseric , ancien magistrat , à
Sisteron.
49. BoiRC» , inspecteur des écoles , à
Sisteron.
50. IsNARD, archiviste, à Digne.
51. GcGUEUUjà Saint-Florent (Corse).
Total des Membres français à la date du 10 juillet 1878 :
MILLE SOIXANTE ET QUINZE.
XLVI
LISTE DES MEMBRES
Société ircbéolooiquo du comté de STCAST-MiimAU llli
Kent, à Cintorbéry. House*Bith.
Stvart-M£mteah (Cb.)i à Entry-HiU- Yam der Vtnu, doc
Hoofc-Bitli. Jeriey.
AUXniOHES
CzOERXtG (le baron de), président de !•
Commistion impériale pour la con-
senration des monuments, k Vienne.
FoRSTER, professeur d'arcbitecture, k
l'académie des Betoi
WiESEKFBLD, prorosseu
à Praiiue.
8. M. LE ROI DES BELGES, à Bruxelles.
Altim, prércl bonoraire des études, à
Liège.
Amdriks (l'abbé J. 0.)i cbanoino, h
Bruges.
BETnD:<E (Mgr), chanoine, professeur
d'archc'ologie au grand séminaire, k
Bruges.
*Bloiime (Arthur), juge, k Tcrmonde.
Brctbnxe (Justin), architecte, k Tour-
nay.
BuRDt'RE (le chcT. Léon de), de 1* Aca-
démie archéologique, k Anvers.
BcsscuKR (Edmond dei, de l'Académie
royale, k Gand.
Casterman, colonel du génie, k Bru-
lellcs.
Cramen (Victor), industriel, rue de la
Bienfaisance, 3, Bruxelles.
CoppiBTTERs (le docteur), k Ypres.
Delvi(;?ie (A.), professeur d'archéologie
au séminaire de Malines.
Devilliers (Léopold) , président du
Cercle archéologique, k Mons.
DiEGKRU.H, archiviste, k Ypres.
Dogm£e de Villers, k Liège.
DoGNËB (Eugène), id.
Durlet (P.), k Anvers.
FADRY-RoMirs, docleo
des Célestins, k Liégi
Francard (A.), avocat,
Oelluand de Merten (
maîiste, k Bruxelles.
Genard (P.),conserTat«
k Anvers.
GuiLERY, professeur, it
dOmic, k Bruxelles.
IIagemams, membre de
représentants, k Brui
IIamiiam, négociant, k >
Uaulteville (de) , lit
xelles.
IIe?irard (Paul)t k Brv
Honr (le baron Ludo
en droit, rue Marie
Bruxelles.
IIUGtET (rabbé), k Tou
Ji'STE (Théodore), cons<
séc d^antiquilés, k !
Kervym nE Letenhovi
cien ministre, k Bru
DE LA SOCIÉTÉ FRANÇAISE D 'ARCHÉOLOGIE.
XLV
SirtiiL-SoiiiAixB (le btron de), k
Praocfort.
ScBiiA?!, proressear ao Collège royil
de Trères.
SoLv^sif conseiller k la Coor de cas-
ttlion de Berlin.
Stielfiied (le baron de), grand'miKro
dn cérémonies do palais, k Berlin.
Staipc (de), préaidenl du tribunal de
Maoïler.
SdCLTE (l'abbé), doyen deFrekendorfl;
diocèw de Munster.
Urucrs, professeur, directeur do mu-
sée d'antiquités, k Bonn.
WsTTBR, membre de plosieurs acadé-
mies, k Mayence.
WrrMAMN, directeur do la Société ar-
chéologique, k Mayence.
Wallebstbim (le prince), ancien mi-
nistre, k Munich.
Willem, directeur de la Société Trao-
çaise, k Sinsbcim.
Zestebma!!!!, professeur, k Leipsig.
AlHOtjE2XI3RIiE3
BiaroiT (Sa Grâce le duc de), Brighton-
Sqaire,k Londres,
teviia (le colonel), juge de paii du
CMDtéde Kent, k Rochester.
kxiiifM**;, k Rochester.
BoLD (Ed.), capitaine de la marine
royale, k Soutbampton.
Bioini (le docteur W. H ), k Londres.
Bnuxs, architecte, k Londres.
BiUE (Peler), membre de Tlnstilut
des architectes, à Londres.
diÊMVii iGeorges-Edward), k Londres.
Coi (lieut-col. C), k Fordvrich, près
(^nlorbéry.
Coi (M-«),kForawich,id.
Dktit, trchitecte, k Londres.
Di^usTON, secrétaire de l'Institut des
ircbitecles, à Londres.
DirtaT (John-Henri), k Norw icb.
FiA^&s (Auguste W.), directeur de la
Société des Antiquaires, à Londres.
FiiEii^t, antiqotire, k Londres.
FiT()iits Katherine), k Plashet, près
Sinifort.
OKA>T(Mer}, éYéqoe de South\\aith, à
Londres.
iuiaii'ir Walter), baronnet, membre
de la Société archéologique du comté
de Kent, k Sandwich.
KcocKER (Edward), esq., ancien maire
deDoorres.k Castel-Hill.
MiLLiGAU (le Rév.H.M.M. A.), membro
delà Société archéologique du comté
de Kent, k Sutlon-Valence.
Mayer (Joseph), k Bebington, près
Liverpool.
Ogylvy |G.), esq.. Muséum Strcci, 41,
k Londres.
Pagn, ancien maire de Douvres.
Parkers fJohn Henry), Ashmolean mu-
séum, à Oxford.
RiDEL (sir W.-B.), baronnet, membre
de la Société archéologique du comté
de Kent.
RoAcn-SMiTH, membre de la Société
des Antiquaires, k Strood, près de
Rochester.
RoDSON (Edward]", architecte, k Dur-
ham.
RussEL (lord Ch.), ^ Londres.
Stirlimg (sir Walter), baronnet, nicm*
bre de la Société archéologique du
comté de Keiit, k Tunbridge-Wcls.
Syone (Rér. Canon.)* membre de la
fe. r
t I. LI ICt :© ÎÎLi^. 1 Fï-EEfljS.
JPEIT-
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imie Brâeituvptrn;. i j i- -«^^
Ta. JE» ""L-i»r iiu'&ir-t!, "-k à a
^ISL^iT F.. *
T ^HT^îhiMicrSk tti
«^'i^-j- ii--i!«M«r ihaiArr it r Jet-
^-LsaL-xs^ iitr?i.'.*r? h* ja âdffl^rc <iei
.j 'if ireni»f«r. a
DK U SOCIÉTÉ FRANÇAISE p'ARCnÉOLOGIE.
VLIX
Jouisse:
(de^, consemtcor Jes ir-
Zmrich.
■r protcftUnI, k Genèf c.
),Beoibredo omseild^Étal,
hGeoèfe.
inttoiatute, k Genèf c.
Keulkr (le doctcor), «ecrétaire de la
Société archéologique, k Zurich.
ScAKicBUt profesaeur det scieucct
auxiliaires historiques, k l'Unitersilé
de Fribourg.
Sbarpes (Edmond), architecte anglais,
k Génère.
ri* SESSION.
c„
I
mm DES RECETTES ET DES DÉPENSES
DE L'ANNÉE IS77
RENDU PAR LE TRESORIER,
iUETÉ PAR LE COMITÉ PEIMANENT DE LA SOCIÉTÉ ,
DANS SA SÉANCE DU i8 JUIN 1878.
RECETTES.
EuMut do compte de 1976 I,l3â II
iMlenrrÉUt i,000 •
>me lénée par M. de CanrooDt 730 •
AMrtistcuicat de hait colitalioi» 800 «
SieicriplkMi de M"* de Cemnoot pour U retUoration du
■■■■■lit eoaméflBoralif àe la bataille du Val des Dunes. . iOO •
SiUe dct fotes émU par le Conteil général de TOise et le
•^•«Mil ■••ieipal de Sentit iOO •
Salie des cotisationt de 1876 et cotisations de Tannée 1877,
'•caiMéesa«90jninf878 9,990 >
Total. 15,099 ff
DÉPENSES.
Frai» de rec««f rêiBent des cotisations par la {hmIo, par les
ia^aim et par les membres correspondants 307 SO
Frais de rrtoar de traites non payées 96 10
de» lillMfraphies du compte-rendu du Congrès d'Arles. 1,790 •
de rimprcssion et de TeuToi de ce compte-rendu. . . S,0I9 10
ë Cmb 191 90
.•i reporter 7.S64 30
LU COMPTE RENDU PAR LIS TRÉSORIER.
Repott
Impressions et frais divers k Senlis
Frais de la conférence de M. Parker, ao Coogrèa de Seolii. .
Port de lettres, de caisses, de livres et affranchissements divers.
Achat et Gravure de médailles et jetons
Travauv de menuiserie k It bibliothè<iuc de la Société. . .
Excursions archéologiques dans le nord, le centre et le midi
de la France
Frais généraux d'administration et traitement d'employés. .
Loyer d'appartements, à Cacn et à Tours, pour le dép^t des
livret de la Société
Traitement des concierges et fournitures
Payé k valoir sur l'impression du Compte rendu de Senlis. ' .
ALLOCATIO.NS SOLDÉES.
Membres chargés de Ir sur-
veillance et de la direction
des travaux.
M. Palustre.
MM. Castagne et de Fo:«-
TEXILLRS.
M. DU Caix.
M. l'abdé Lafirrière.
M. l'addé Coffixkt.
M. DE Bbrluc-Piri'ssis.
M*« la vicomtesse de
QrATREDARBKS.
M. Bernard.
M^ LE MARQUIS DE RoCUAM-
BEAU.
M. DE BniXOlRT.
M. DE Mar(;|}erit.
Plaque en marbre avec inscription,
k l'église de CravanI, apparie-
nant k la Société
Fouilles des opplda gaulois du Lot.
Fouilles dans les arènes de Senlis.
Fouilles de l'aqueduc de Saintes.
Réparations k l'église de Lhullre. •
Réparations k la maison natale do
Gassendi
Fouilles sur l'emplacement du
théâtre romain de Ganncs. . .
Restauration des peintures de
Cazeaux
Restauration du château de Lâvar-
din
Restauration du monument comme-
moratif de la bataille du Val des
Dunes
Réparations k l'église de Viervillc.
.4 reporter. , . .
.#
COIIFTB ABKDU TAR LE TRÉSORIER LUI
Report I4,G88 15
ILUVcton. RéptratioBt k réglise de Saint-
Pierre de Tooqaet iOO ■
t. M Rawaïi. Réparations k réglised'EngrenTille,
propriété de la Société. .... 100 •
Smicriftion à la SlatiâUquê Monumentale da déparlemciit
itOitr 3S 50
SttKriptien à la Société des archives photoffraphiqacs. . . i5 •
TuTAL 15,045 05
BAUNXE.
Reortlct. 15,09-2 II
15,015 05
ExCÉOA!(T. ... 4640
Caci,le«j«iallf7«.
Le Trésorier y
L. Gaugaix.
ALLOCATIU^S A SOLDUI.
ckvfés do h wu-
ft dahdNracliMi
•1.
I. Iftri^nai-llocai:. SobTentiuu i>oar la conservation des
peintures do xv« siècle dans le
lofis derOEoTreda Saint-Esprit.
U I. P. Lona m Goua-
xi,cnt«KGosHCE». Béporations k Téglisede Conqoes.
là •
200 .
LIV COMPTE RENDU FAH LE TRÉSORIER.
M. PAOGÊRB'DriioiiiiG. SouKriptioii h l'albom de Baplette.
M. VaUre-Maiiti!(. Foulllct sur le Monl-Cavetu. . .
M. LR vicoMTi: DE Grillk. Coniolidatioli d'aiie travée de la
chapelle du château des Bau«.
M. A. Véran. Rélablittement dMnscriptioot dans
regllse de Taratcoo
M. Anthyme Saixt-Paol. Souscripliou à la carte archéolo-
Siqae de France
M. diCaix. Réparations k réglise de Sainl>
Prambourg, à Sentit
M. Vi.NCKNT-OiRAXD. FouiUct à Fcan
M. Palustre. Restauration de la chipe de Saint-
Mexme
M.Bir:<ard. Conservation de sculptures, h Saint-
Bertrand de Cominges
M. Caluer. Consolidation de TégUsc de Malval.
M. Léon AttoRE. Restauration de la crypte d'Uzèt. .
M. Nicolas. Fouilles dans le département de
Vaucluse
M. ut marquis de Rocuam- Consolidation du château de Lavar-
BSAU. din
M. Cartailii Ac. Fouilles de dolmens, dans le dépar-
tement de la Haute-Garonne. . ,
M. Dk Salies. Souscription k l'histoire de Troo.
M. Jadart. Plaque commémorative de Dom
Mabillon
M. Le FisLLiEn. Somme à la disposition de l'inspecteur
do la Mayenne
.M. Palustrk. Somme à la disposition de M. le
Directeur de la Société. . . .
Ln TréiorUr^
L. Gaixiaim.
AVIS IMPORTANT.
Sur la demande do plusieurs membres de la Société, la qv
•
lion de ramorlisscmcnt des coUsalions a été mise à Tordre
jour et résolue affirmativement dans la séance administrative
25 août 4876. Après avis de M. le trésorier, cet amortissemt
a été ensuite fixé à CENT FRANCS, En conséquence, t(
les membres qui voudront se libérer définitivement envers
Société, pourront, dès ce jour, verser la somme indiquée cnl
les mains de M. L. Gaugain, 48, rue Singer, à Caen.
CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE
DE FRANGE
XLIV« SESSION
TENUE A SENLIS
EN MAI 1877
Programme .
4. Des études préhistoriques dans la région du nord de la
FriDce et particulièrement dans Tarrondissemcnt de Senlis. —
Sur quels points ont été reconnus des stations ou des ateliers des
difTérentes époques de la pierre? Quelle a été la conséquence
de semblables découvertes au point de vue des connaissances
arcbéologiques et ethnographiques?
S. Déterminer les rapports qui existent entre les monuments
loégalitbiques de Tancien pays des Silvanectes et ceux du reste
de la France ; refaire la carte des dolmens, menhirs, etc.
3. Quelle conclusion faut-il tirer de la présence d'instruments
eo matière tendre, tels que calcaire, grès, etc., dans les stations
préhistoriques? — Existe-t-il dans la région des stations lacus-
tres ou palustres?
4. Des objets de Tâge du bronze. — Déterminer le lieu des
découvertes et signaler les ateliers de fondeurs?
5. Des mardelles. -- En existe-t-il dans la région?
6. De quelles études ont été l'objet les tombelles ou tumulus
signalés jusqu'ici? — Connaît-on des oppides antérieurs à
l'époque romaine?
XLIV* SESSION. 1
1
2 CONGRÈS ARGUÉOLOOIQUE b£ FRANGE.
7. Topographie générale des environs de Senlis à !'(
romaine et antérieurement. — Quelle étail rélenduc de
rains couverts d eau et do forùts? Préciser leur emplaceu
dresser une carte comparative du pays aux teni]» ancicni
nos jours.
s. Trouve-t-on dans la région des monuments de la
indépendante?
9. Numismatique gauloise du Pagus silvanectensis.—Q
conclusions peut-on tirer des trouvailles de monnaies faitt
qu'à ce jour?
40. Numismatique mérovingienne. — Trouvailles, >
taires, etc.
H. Ucchercher l'origine des Silvanecles.* — Senlis csl-i
lancien Autjustomagus; quelles conclusions tirer du ne
RatomnrjHs appliiiué par Ploléniée à Augustomagui
QuVtail-cc que le Pag us rosson tenais et a-t-il quelques
ports avec le Pagus silvanectenmf — Étudier la siguific
do l'expression Siiranecfes lîberi,
M, Faire connaître le tracé des voies roroaineSi
ancienneté et leur importance comparatives. — Reciie)
remplâcemont do Litannbrign et de Braluspantiun
avait-il dans les Gaules des voies antérieurement à roccapi
romaine? A quel caractère peut-on les reconnaître?
43. Quelle est la véritable signification à donner aux
mansio \iimHtatio dans les Itinéraires?
4 4. Des Lêtes. — Quel a été leur rôle à Senlis?
45. Étudier les divers lieux-dits qui paraissent remon
l'époque romaine ?
4C. Des cumps romains. — Uechenlu^r le lieu de la ba
de <2ésar conlre. les Hello\a«|ue.^,
47. Étudier les monuments de l'époque romaine : Arèn
théâtre de Cliamplimi, temple d.: la i'urét d'IIalatle, muraill
l'ancienne cité de Senlis, etc. — J]st-il po.ssildo de faire i
ces dernières constructions du ix* siècle?
IN. Signaler les villas {^iillo-romaines et les emplaceu
sur lesfpiels on trouve de^> traee> de roceupatiun romaine.
XLIV* SESSION, A SEXLIS. 3
19. Existe-l-il des traces tranciens palais mérovingiens? —
Rechercher la localité où se Irouvait le Palafiiun vernum, —
A*t-OD trouvé (les emplacements destinés à la chasse à la
haie?
20. Des différents systèmes de sépnlluic.en usage durant lan-
liquilp. — L'étude de ces sépultures peut-elle jeter quelque
lumiërn sur les invasions germaniques dans nos contrées? —
Retrouve-t-on des sépultures en forme de puits?
21. A quelle époque faut-il faire remonter la prédication du
«brisliauisme dans le Par/ us silvanectensis ?
il. Quelles sont les églises les plus anciennes de l'arron-
fament deSenlis?— En connaît-on d'antérieures à Tan 1000?
23. Étudier les principaux monuments religieux de la con-
trée. — Faire connaître les anciennes abbayes. — A quel style
particulier [teut-on rattacher le plus grand nombre de ces
ôdiûces ?
24. Inventaire descriptif et cri(i(nie des trésors d'églises. —
Signaler les anciennes Nerrières et tous objets mobihers remar-
quables, encore dans leur place primitive ou gardés actuellement
dans les musées et collectioiiS particulières.
ï). De l'utilité des études iconographiques. — Dans quel
sens doivent être conçus les ou\rages qui Irailent de ces ma-
lières ?
20. De rimagerle dite reli|iiou<o. — Ui'tornies à opérer dans
ie sens de la véritable intori>rctation du symbolisme.
27. De la nécessité de publier ww code d'instructions relatives
aux objets mobiliers des églises.
25. Dresser d'après les Charles et les di[)lôme5 la liste des
anciennes villes cpii'Cupaîos do la l'iauco. — fHudier la varia-
•i'Jîj des limilos assigiu'es aux diorèses st.-us loa Mérovingiens et
rocliArcher, particurunrnuMil «i.ui • la ii'vi-"» '-''i iiord-esl, (|uels
•'taien! les supérieurs d'abbasc j«rai.-siUil dc< juivil/'ges de l'épis-
ii). Nuiuismaticpie du moyen âge ; Dos iiii:miaies frappées
dans le déparleiaont de l'Oise. — SlalliuirtiM/.ie : Étudier les
anciens poids et mesures; indiquer les monuments de ce genre
4 G056li3 AftCHÉOLOGIQUS DE FIAKCB.
qui ezîslent encore el les ntlacher aux diven syslèmet ooosU-
lés dans les provinces voisines. — Sîgîllognphîe : Déetire les
sceaux des anciens comt^ de Seolis, des seigneurs, évèqoes,
abbés, boorgeois, corporaiioos, eic. En dresser le calalogne ek
signaler particolièremenK ceax qui manquent dans la collection
des ardiives nationales.
30. Collections pobliqaes et privées du département de FOise;
signaler leur importance et ètodler les pnncipaoxoltjeîs qu'elles
lenfennent. — Faire lliisloire des diverses bibliothèques de
Sentis : ville, diapitre. etc. Ëtuiier les ubiettes de cire conser-
vées à la bibliothèque de Sentis.
3t. Retrouve4>on des carrelages èmaiUés dans les églises et
châteaux de la lésion ?
32. Signaler les monuments les plus curieux, au point de vue
général, parmi ceux qui ne sont pas classes; indiquer les meil-
leores mesures i [irendre pour leur conservation.
33. Ëpigraphîe. — In«cripi:oDS anU^aes. pienes tombales,
ckches. etc. Donner le rei-ueil des inscriptions du moyen âge,
toît en lanme latine, s*:-!! en langue vu les ire.
\o(a : Uae oedaille d'ar^eot sera décernée à l'auteur du
meillecr travail épîp-aphjqae,
3i. ArcLi'jKture mi :Laire. — Décrire les châteaux de Monté-
pilty. ôe Ver. e*^.
35. lrci:*.ec::re c:\;> el doTesiiqTie. — Anciennes habila-
L^€tt «-CLfur-iltt :■- :•>:.. r^ es: !5e<: 'if-r? consircctenrs et prin-
3*. A rar':>r;»c.:-e io-:-"a rfp.r:e:!esciiesqceron trouve
liur.i^l i.: n* :-£^ niiKLS ,2f la ^il.e Je S-Llis? QaeWe était leur
ùesiiai::'- :r;i*:-;c':
37. EU-:.re g*s ïDîierses n:e> »îe Seaiis. — Topographie
ÏJSLzrj-'* ti *r:it*c'.:c::-e; e25- iiies. vîeu\ manoirs, hôtek
'>. Paks *: ;irlsi ErraeDc-nii.le M: rief.caine. Chantilly,
î*. Sry.-jr i^iiis i SrLi-S e: a-:r^5 Iccil::'-? voisines: actes
i'aâatc asàtrU :l.*Lis^ oni r^côos.
I
XLtY* SESSION, A SENLIS. 5
iO. Histoire et descriptioD de Thôtel de ville de Compiè-
4f . Êtade générale des lieux-dits rappelant des monuments
danoyee âge.
4!. lostitatîoDs administratives, financières , judiciaires et
cxdésiastiqoes avant 1789.
^\ Rechercher les origines et suivre le développement
à€ TiDstitntion dn notariat dans Tarrondissement de Sentis.
-- ladiquer Favantage qu*il serait possible de retirer, au
p«Dl de vue historique, de Tétude des registres des anciens
loUires.
14. Proverbes et chants populaires. — Donner les contes et
Irgeades répandus dans la contrée; faire connaître les mœurs et
•u^ particuliers.
45. Faire connaître Thistoire des compagnies d'archers et
d'iiquebcûers; donner les surnoms des diverses compagnies et
neipliquer l'origine.
16. T a-t-ii eu dans le département de l*Oise des trouvères,
fa aéoestrels? Signaler leurs œuvres imprimées ou manus-
oites.
47. Dresser le catalogue des auteurs antérieurs au xvii* siècle.
- Étudier leur vie el leurs mœurs au point de vue hibliogrn-
phîqoe, httéraire et philologique.
4S. £xiste-t-il d'anciens textes en langue vulgaire? Faire
dans l'étode du dialecte parlé autrefois et de nos jours la part
de riofloeoce picarde et de l'influence française; dresser le ca-
lilefoe des mots patois encore employés dans le pays et signaler
pirticaUèrement ceux qui n'existent pas dans les dictionnaires
et MM. Uttré et Gorhlet.
19. Étudier les sources auxquelles on peut rattacher les diver-
ict dénominations territoriales.
50. Donner la biographie des plus célèbres antiquaires et éru-
diis nés dans le département de l'Oise. — Faire connaître le
axvement des études archéologiques depuis vingt ans dans la
■èoie région.
51. Topographie archéologique. —Bibliographie archéologique.
6 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
— Dresser le catalogue de tous les travaux publiés sur les a
quitcs (le rarrondissement de Senlis.
Des excursions seront faites à lieauvais, Compièt
C/iampiieu, Pierre fonds et Morienvat.
Liste des adhérents au Congrès
archéologique de Senlis (1)
1. Alep^o, proî)riélairo i\ Senlis.
*2. Aniolot (coinlc;. nie. Sa'nl-noînin'mtuv '>i, à Paris.
3. Auhrelicque, sônalenr. maire do Ccmipièguo.
4. Auxy (le comte AllMMir »!*}, à Mous (lielgiiiue).
;>. Halze,ihâfeau de Clifialis ;Ois<'\
«). lîaudiard, prt^idcnt du Tribunal de Senlis.
7. Baudon, nitMlofin. à Mouy ;(.)ispj.
5. Baudoin (Henri', iG, l»oul«'v;inl Haussmann, à Paris.
*.). Belfort 'de), .'i-î, rue d.» I Univi'i>.ite, à Paiis.
10. Benoist, notain*, fj Senlis.
11. Beruier, capitaine en rclniiUî, à Senlis.
12. Bot,e, arcliiteele, ,\, rue S«'»"^'uier, à Paris.
4 J. Boucher, inspecteur di^ rensci^njunent primaire, à Sen
1 i. Boulanj^er, receveur de.'? domaines, à Senlis.
1 ">. Boulanger, fabricant de Ciirreaux m.)sui<iues,à Auneuil (C
4 0. Bouy, chimible, à Senlis.
47. Bottier, jugiî suppliant, à (!<Mnj)iègne.
18. Boudin (l'abb:''), cure de Saint-Firmin Oise
(l; Dans (oUo Ii^t^' im* Hijineiit pas les niotnî>io> ili- la Sociék^ frai
<rAri'iu^olo|;ii>, au iioiubic de l20iK*uviroii, «|iii fuiit ili> «Jiuit parlic de
les concrH.
XUV* SESSION, A SENLIS. 7
49. Bourgeois (rabbé), aumônier de la Pitié, 1, rue Lacepède,
à Paris.
20. Boursier, docteur-médecin, à Creil (Oise).
21. Cador (Auguste), architecte, membre et fondateur de la
Société palcontologique et archéologique de Charleroi, et
membre correspondant de la commission royale des
monuments, à Cbarleroi (Belgique),
îl Camara (Martial de la), professeur d'architecture, à Valladohd
(Espagne).
llCapelle(M°»«}, àSenlis.
U Caudel (Fabbé), curé de Montlévôque, près Sentis.
1). Chantérac (marquis de), 47, rue Bellechasse,à Paris.
26. Challan de Belval . médecin-major des hôpitaux militaires, à
Sentis.
Vi. Chairnin, avoué, à Sentis.
% Chanbard (l'abbé), curé de Creil (Oise).
Î9. Chalenay, conseiller général (Oise).
ÎO. Clavé (Jules), administrateur du Domaine, à Chantilly (Oise).
31. Cochet (l'abbé), curé de Brégy (Oise).
31 Commission historique du Nord (Lille).
33. Comié (baron de), château de Montataire (Oise).
■<4. Constant dTan ville, lieutenant-colonel de cavalerie, membre
de plusieurs sociétés savantes, 20, rue de la Fcrme-des-
Malhnrins, à Paris.
3j. CoQdret, notaire, à Compiègne.
36. Daudin, à Boissy, près Chaumont (Oise).
3'. Debray, 5, rue du Plat, à Lille.
38. Decroos (Pierre), avocat, membre de la Société des anti-
quaires de la Morinie, 1.3, rue Saint-Pry, à Béthune
'Pas-de-Calais).
30. Deladreue (l'abbé), curé à Saint-Paul (Oise).
iO. Delaporte, avoué, à Scnlis.
^1. Deshais, propriétaire, à Senlis.
*•. Desmarelz, 28, rue de Condé, à Paris.
<3. Di'sjardins. agrégé à la faculté de droit, 30, rue de Condé.
à Paris.
8 GON&RÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
44. Delaville-Leroulx, 40, rue de Lisbonne, à Paris.
45. Détaille, libraire, 40, rae des Beâux-Arts, à Paris.
46. Dufourmantelle, archiviste-paléographe, 23, rue de Rocroy,
à Paris.
47. Dunkin, à Dartfort (Angleterre).
* 48. Dupuis (Ernest], vice-président du Comité archéologique de
Senlis, à Pontarmé (Oise).
49. Dulilleul, conseiller général, à Elincourt-Sainte-Marguerite
(Oise).
50. Dupont, conseiller général, à Beauvais (Oise).
5t. Dumaine, vérificateur de l'Enregistrement et des Domaines,
à Sentis.
5S. Eclancher, directeur de Tusine de Saint-Leu d'Esserent
(Oise).
53. Fautrat, sous-inspecteur des Forêts, à Senlis.
54. Felizon, notaire, à Senlis.
55. Flammermont, 23, rue Malesherbes, à Paris.
56. Fleury, secrétaire général delà Société académique de Laon.
57. Fontaine, notaire honoraire, à Senlis.
58. Fraser-Duff (Thomas), à Chantilly.
59. Fraser-Duff (Robert), à Chantilly.
60. Francart, avocat, docteur en sciences politiques et adminis-
tratives, à Mons (Belgique).
61. Fremy, juge suppléant, à Senlis
6i. Frossard, 4 4, rue de Boulogne, à Paris.
63. Galle, propriétaire, à Creil.
64. Gosselin, inspecteur général des Ponts et Chaussées, à
Senlis.
65. Grésy, propriétaire, à Senlis.
66. Groos, curé de Lévignen, canton de Betz (Oise).
67. Guibourg, ancien sous- préfet, à Senlis.
68. Guibourg (Robert), à Haraucourt (Ârdennes).
69. Harlé, conseiller général au Marais, commune de Chevrières
(Oise).
70. Hayaux du Tiily, à Saint-Léonard, près Senlis.
71. Haye (François de la), juge à Senlis.
XLIV* SESSION, A SENLIS. 9
71 HahD (Alexandre], officier d'Académie, membre de plusieurs
sociétés savantes, à Lûzarchés (Seine-et-Oise).
73. Hnrard, architecte, 6, rue d'Assas, à Paris.
7i. Herbet (Désiré), propriétaire, à Senlis.
75. Héron, i, rue Clémence-Isaure, à Toulouse.
76. Jaquinot,docteur en médecine, à Sauvigny-les-Dois (Niëtre).
77. Janvier, président de la Société des Antiquaires de Picardie,
i Amiens.
78. Jobey, notaire, à Crépy-en-Valois (Oise).
79. Joussemont (vicomte de), à Cavillon (Somme).
80. Junot (M"« Blanche), à Senlis (Oise).
8<. Laurièrc (Ferdinand de), à Paris.
81 Lagache, conseiller général du canton de Gourcelles-Epayelles
(Oise).
83. Laurent (fabbé), curé de Senlis.
84. Lambertye (comte de), à Compiègne.
85. Lac (du), juge suppléant, à Compiègne.
86. Lamî. 27, rue Duret, à Paris. ^
87. La Perche, receveur des Finances, à Senlis.
88. La Perche (Stanislas), chùteau de Saint-Sulpice (Oise).
89. Lebrun (l'abbé), à S«nlis.
90. Lefranc (rabbé), curé de Bonneuil, près Breteuil (Oise).
91. Legoix, spcrêlaire général de l'Êvèché, à Beauvais.
91 Lcmaire, 14, rue de Provence, à Paris.
93. Lion, conducteur des Ponts et Chaussées, ^1, rue Lauriston,
à Paris.
94. Longpérier (A. de), membre de l'Institut, à Paris.
95. Lonîîp^rier-Grimoard (comte de) , président du comité archéo-
logique de Senlis.
96. Lucay (comte de), château de Saint-Aignan , par Mouy
(Oise).
97. Madden, rue Saint-Louis, 6, à Versailles.
^H. Manuel (l'abbé) , curé de Cires-lès-Mello , missionnaire
apostolique.
99. Maricourt (comte du Mesnil de), à Villcmétrie, près Senlis.
100. Margry (Âmédée), à Senlis.
10 CONGRÈS ARCUEO LOGIQUE DE FRANCE.
101. Martin, ctiltivatear à Ermenonville, près Sentis.
402. Marsaux (rabbê), à Sentis.
103. Mazière. notaire, h Ritiécourt (Oise).
104. Méresse, arcliilecle à Corapiêgne.
105. Méteil Jabhé}, vicaire, à Sentis.
106. Meyer, manufacturier, à Ourscamps fOiseV
107. Micliel, à Compiègne.
408. Millet, docteur en mé'\ecine, à Nantenit-le-Haadoio (Oise).
109. Millescamps, 10. boulevard Mateslierbes, à Paiis.
410. Minière ^t'abbô). vicaire générât, à Beauvais.
4 M . ilillot, docteur en médecine, à Beauvais.
112. Moinct, géomètre, à Sentis.
109. Moison, conseiller général, à Mouy Oise).
44 4. Monsile Cercle archéologique de). Belgique.
115. Montaiglon (de), professeur à TÉcole des Cliartes, 9, place
des Vosges, à Paris.
1 16. Monturier l'abbéV curé de Pontarmé ^Oise).
4 17. Moquei »'Constaut". cultivateur, à Brégy (Oise).
418. Morgan (Thomas), trésorier du British arclieological Asso-
ciation, Palace Road, Streatham-Hill, LondoD.
IIM Moreau, docteur en médecine. 37. rue de l*Universilé, i
Paris.
120. Morel. nolairo, à Sonlis.
121. Morilh>n. 9. ruo Maiir-I.ouise, à Paris.
122. Mouchy l'ijc d-? châîoau de Mouchy (Oise).
!2.3. Muller rabb»' . vii^aire, à Senlis.
124. Noché. filj, né.-'0'*ianl. à S'^nlis.
l2o. Olive, iiiLvniour, 2, rue Mosnier,à Paris.
426. Panckoucko, château d'Aiimont, près Sentis.
4317. Parseval, château de Chevilly Loiret).
125. Payen iHImiouî , notaire, à Pont-Sainte-Maxencc (Oise).
129. Payen, Qjl:iir» h):i'>raire, à Ponl-Saintc-Maxence (Oise).
130. Pelletier, c rnseiilor général, à Onsembray (Oise).
431 . Pcrriur ;ra*»î).* , secrotaiic de l'archevêché, à Rouen.
132. Picard, «oiisi'iller gruéral de TOise, ù Gerësme, près
Crépy (Oise',.
• ILIV" SESSION, A SENLIS. H
133. Picl-Lataiidric, 1, rueMarigny, à Paris.
13i. Pierret, à Eve, par Plcssis-Belleville (Oise).
135. Pielte, juge de paix, à Craonne (Aisne).
436. Plé (Jusl), conseiller général du canton de Marseille
(Oise).
^37. Plessier, conducteur des Ponls et Chaussées, à Maignelay
(Oise).
138. Pommeret des Varennes, à Étampes (Seine-el-Oise).
439. Prévost, conseiller général du canton de Chaumont (Oise).
UO. Puissant, ingénieur civil, à Scnlis.
Ul. Rauch, docteur-médecin, à Oberbronn (Alsace).
Ul Rend», architecte, à Conipiègne.
U3. Rihan (M°»«), à Scnlis.
Ui. Rheins, gérant du Con^^ulat de Franco, à Tiflis.
Uo. Robert (rabbé), vicain; de Sainte -Agathe- de -Longuyon
(Moiirlhe-el-Mosclle).
146. Roberval Me), château de Robcrval, par Pont-Sainte-
Mâxencc (Oise).
U7. Roland, cultivateur, à Barberie, près Sentis.
U8. Roucy (de), président du tribunal, à Gompiègne.
Ii9. Rongé (de), capitaine au G* cuirassiers, cbàleau de Dinte-
ville, par Chàtcau-Villain (lîautc-Marno>.
Ia>. Ruugô (llorvé de), cliàloau do Diiitevillo, j^ar Chàteau-
Villaiu (llaule-Marne).
451. Saladin (Henri), an'hitecte, 1.?, rue «îe Souw., à Paris.
<*>2. ScheJoiii (man|uisde), 121, boulevard ITaussmann.à Paris.
'■"'3. Séneniaud (Edmond), arcbivisie des Ardennes, à Mézières.
loi. S^^re-Dcpoin, anrion maire de P«mtoiso, à Ncuilly-sur-
Seine.
<'"»o. Serrin (Henri., maire de NeuilIv-en-Tliellc (Oise).
t'»0. Sorel, juge, à Conipiègne.
l->7. Sylva (da), architecte du roi, à Lisbonne (Portugal),
loii. Thomas, à Cires-lès-Mello (Oise).
16). Tuiirly-Godin, conseiller général, à L.ilandclk' (Oise),
l'd. Ti.'nleli\n>s (rabbé), curé de Cliamant, près Senlis.
161 Vachelle (l'abbé), curé d'Ormoy-Villcrs (Oise).
12 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE PRiNGB.
■
163. Vaillantjt, ru» Tour-Notre-Dame, k Boologne-sor-Bi
46i. Vantroys, avoué, à Senlis.
465. Warn (Jules de), à Senlis.
i66. Watin, à CoUimance, par Betz (Oise).
466. Valin, à Senlis.
468. Vatller (rabbé), curé de Saint-Léonard, près Senlis.
469. Vernois, à Senlis.
470. Vion, 32, rue Louis-le-Grand, à Paris.
XLTV* SESSION, ▲ SBNUS. 43
SÉAiNCE D'OUVERTURE, DU 28 MAI 1877.
PlÉSlDENGB HE MONSEIGNEUR LE DUC d'AuMÀLE.
Bien avant Theure fixée pour la séance, une foule
''élite eavahissait la salle synodale de Tancien évéché,
<^ avec goût pour la circonstance. On remarquait sur-
Wot dus l'assistance, un grand nombre de dames, qui
tniat, comme toujours, tenu à honneur de prouver par
Inr présence l'intérêt qu'elles portent à toutes les choses
<e l'esprit.
A deux heures et demie précises, Mgr le duc d'Aumale
pend place au fauteuil de la présidence, ayant à sa
bà\B Mgr Gignoux, évéque de Beauvais, Noyon et
Salis, et à sa gauche H. le Préfet de l'Oise. M. Adrien
le LoDgpérier, membre de l'Institut, M. Léon Palustre,
linelear de la Société française d'Archéologie, M. Odent,
aaire de Senlis, et H. le comte de Longpérier-Grimoard,
K^sident du Comité archéologique, siègent également au
koreau.
Après un brillant morceau exécuté par la Société mu-
ùie, la parole est donnée à M. le comte de Longpérier-
Grimoard. Nous détachons de son discours le passage
nivaDt :
• En choisissant notre ville pour y établir le quartier
ifaêral de tos explorations archéologiques. Messieurs,
luu doute TOUS nous aves causé un plaisir extrême que
voai partagerex, j'espère ; mais vous vous êtes une fois
de plus, montrés les dignes successeurs de M. de Caumont,
i4 CONGRÈS ARCUÉOLOGIOUE DE FRANCE.
qui s'était bien prumis, — p'est à nous que devait demeu-
rer l'avantage, — de renouveler sa visite ici, regardant
comme une simple reconnaissance sou apparition à Senlis,
qu'il ne quittait, disait-il gracieusement, le i"août 1866,
qu'en emportant l'espoir d'y revenir pour un temps plus
long.
a Avec la sagacité qui lui faisait envisager si vite et si
justement toute chose, Messieurs, votre illustre fondateur
avait compris que, sur cet espace de terre si riche en sou-
venirs, à l'intérieur aussi bion ([u'à l'extérienr de la cité
sylvanectienne, il y a lieu de s'arrêter.
a C'est ce que nul n'ignore actuellement, surtout ceux
qui pensent, suivant Cicéron, que l'antiquité est la
source où nous puisons de quoi arroser nos petits jar-
dins : « Fontes quibus hortuios nostros irrigamus d.
« Que n'oiVro pas, en eflet, aux érudits, ce sol géné-
reux?
« Les ouvriers de la dernière heure, dans l'ordre de
présence, au chantier de la science, ceux qui s'occupent
spécialement dos comuiencemonls de l'existence humaine,
pourront parcourir de vastes champs couverts do nom-
breux spécimens do l'-'iLte de pierre.
« Avançant dan? la vie du monde, l'intérêt s'accroîtra
h la vue des curieux in^tru monts laissés par ces couches
relativement nouvelles des tenip? préhistoriques, que nos
pères regardaient comme reiuv?< entant la race autochtone
de leur pairie, et los anlhrcipul.'iristes srront satisfaits.
« L'épnqiic <].! l'nci'ui):il.'«ui romaine ro révélera d'abord
par ses belles et largo? voios, dont plusieurs tracés sem-
blent pourtant encore à Tôtudo; puis viendront de très-
importants monuments, à la léle de&jjuels se placent tout
naturellement les arènes.
« La visite que vr.us ieroz aux autres édifices, qu'ils
XLIV* SESSION, Â SENLIS. 15
soient debout ou en ruines, qu'ils se trouvent en sous-sol,
comme ces cryptes remarquables par leur ornementation,
qu'envieraient bien des églises, ou qu'ils s'élancent dans
les airs, comme les flèches si élégantes de nos cathédrales,
celte visite, dis-je, réveillera chez vous, Messieurs, en en
imprimant de nouveaux, d'inefiaçables souvenirs.
c L'admiration sera réelle quand vous contemplerez
aussi ces beaux paysages qu'offrent certains parcs de la
contrée et que la main des artistes les plus habiles n'au-
rait pu créer sans le concours du grand architecte de
l'univers.
c Enfin, vous verrez encore assez de types de nos mon-
naies particulières pour vous rappeler l'existence des ate-
liers de fabrication qui appartenaient, je crois, à la Gaule-
Belgique.
« Hais, mieux que personnne, Messieurs, vous con-
naissez les éléments d'attraction qui expliquent bien la
préférence accordée, cette année, à la ville de Senlis. Con-
tinuer l'énumération de ce que vous aurez à voir serait
donc perdre un temps précieux; d'ailleurs, nous avons
hàle d'assister à vos intéressantes discussions et de recuciU
lir toutes vos paroles. »
M. Léon Palustre s'exprime ensuite en ces termes :
MESSEIGtEURS,
Messieurs,
On ne saurait se dissimuler qu'il est toujours dange-
reux de reparaître devant les mômes personnes dans
un état d'infériorité à ce qu'on était tout d'abord. Aussi,
n'est-il aucun d'entre vous qui ne se rond compte du
sentiment d'hésitation bien légitime que nous avons
16 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE I^B FRANCE.
éprouvé, lorsque nous nous sommes vus en présence d'une
proposition on ne peut plus gracieuse, il est vrai, mais,
enfin, qui avait pour conséquence de nous ramener dans
une région déjà visitée, il y a moins de onze ans. Or,
depuis cette époque, la mort semble avoir pris à tâche de
frapper les meilleurs d'entre nous; que dis-je? elle n'a
même pas épargné l'illustre fondateur de la science ar-
chéologique en France, le savant renommé auquel notre
existence était si intimement liée qu'aux yeux de bien des
gens nous ne paraissions pas pouvoir sans lui vivre long-
temps. Cependant, dans la situation qui nous était faite
par une perte aussi sensible qu'imprévue, notre rdle
n'était-il pas tracé d'avance? Tailler dans le marbre
l'image d'un maître vénéré ne suffisait pas, il fallait
encore perpétuer les œuvres dont il avait péniblement
jeté les bases et qui, grâce à ses efforts, avaient acquis un
développement inespéré. C'était, croyons-nous, en effet,
la meilleure manière de recounaitre les services rendus,
de montrer qu'en créant de toutes pièces une institution
sans analogue dans notre pays, Arcisse de Caumont n'a-
vait,en quelquesorte, fait que répondre à un besoin général,
et nous ne doutons pas que si, de son vivant, il avait
eu à choisir entre la statue de Baveux et l'existence assu-
rée de la Société française d'Archéologie, toutes ses préfé-
rences ne se fassent tournées de ce dernier côté.
Mais, parle fait mcuic de notre organisation, nous som-
mes obligés de paraître chaque année sur un nouveau
théâtre, et, naturellement, entre les offres qui nous sont
faites, celles qui ont le plus de chance de donner de bons
résultats l'emportent dans nos conseils. A ce point de vue
la ville de Seulis devait d'autant plus facilement réunir
les suffrages que le passé dans la circonstance était un sûr
garant de l'avenir. Et puis ne savions-nous pas que les
XLIV* SESSION, A SEXLIS. i7
éludes archéologiques toujours vivaces parmi vous s'étaient
encore ranimées, en un certain sens, sous riniluence
d'une importance découverte qui, dès Toriginc, a grand«>-
ment attiré l'attention du monde savant. Désormais l'ar-
gument que l'on tirait d'une dénouiination mal comprise,
pour justiiier les attaques d'un écrivain du moyen âge
contre votre cité, ne saurait plus être invoqué et tout
porte à croire que Ton a trop longtemps accepté la lettre
dan mot, évidemment pris dans un sens figuré. D'ailleurs,
le débat auquel nous faisons allusion, déjà vieux de cinq
sièdes, ne manque pas d'enseignement, et nous pouvons
eooore répéter avec Jean de Jandun dans sa réponse au
bkiâteur :
t Être à Sentis, c'est être dans de l)elies demeures ter-
mces des murs les plus furts, non d'un fragile plâtre,
mais des pierres les plus dures et les plus belles, disposées
iiec une industrieuse habileté. Dans ces maisons, les caves,
entourées de solides constructions de pierres, grâce au
degré de leur fraîcheur, refroidissent tellement les vins
liins la saison d*été que la gorge et l'estomac des buveur<
en ressentent une volupté suprême.
« Être à Sentis, c'est encore être sur une gracieuse col-
line d'une médiocre élévation, en sorte que les pavés de
il ville ne sont presque point souillés de taches de bouo,
maïf sont tout à fait unis, propres et nets. Le souffle mu-
ûtre des vents non-seulement purifie lair des vapeurs
malfaines, s'il y en avait, mais apporte les parfums com-
^^ deâj^lantes des forêts et des lierl>es des prés (1 . ••
Nous ne poursuivrons pas plus loin re pané^^yriquc
|.i a\ait pour but de démontrer que le ^êjuur do Seulis
<: Iniiif des Louanyes de Piirfs, par .lt>an de Jaihlnti.
è' i^iLe. J 7-îl.
XLIV* SESSION. '2
18 CONGRÈS ARGHÉOLOGIOnS DE FRANGE.
pouvait, sans trop do désavantage, ^trc comparé à
do Paris. Mais il est bon de constater en passant qu'i
des charmes de la nature se rencontraient dans vos
toutes les ressources de l'esprit. Le palais de vos évé
celai-Ià nu>nio 011 nous siép^cons'à cette heure, ïihi
ment ouvert aux persécutés de la montagne Sainte-(
viève, fut i\ Toccasion témoin de plus d'une discu
hardie dont l'histoire a conservé le piquant souv
Aussi, dans un autre ordre d'idées, n'avez-vous eu
suivre les traditions d'indépendance qui vous et
données par vos devanciers, et personne, aseurémen
saurait se plaindre que deux d'entre vous aient rele^
gant qui vous était jeté pur un maître, relativement
vieille enceinte de votre cité (1).
Mais vous avez fiiit mieux encore, et revenant, sa;
être sollicités, sur vos premicVes études, avec la bonn
la plus pari'uite, vous avez reconnu vos erreurs et subst
une théorie inattaquable à quelques aperçus légèren
hasardés (â). Il n'est pas jusqu'aux questions brûlati
de temps en temps remises au jour dans chaque ^
épiscopale, ({ui ne vous trouvent inébranlables dan
voie de la vérité et tout naturellement on serait tcnt
croire que vous avez pris pour devise cette parole d
célèbre auteur de l'antiquité : Ne quid falsi audeat
quid veri non audeat historiu (.'().
Je viens tie parler de riiisloin». Messieurs; n'avoz-^
pas été les premiers à niiaitrer de quelle ressource
pouvait être dans l'étude d'une science qui semblait
(1) lierherctifs sur la date de renceinte de Senlis,
MM. Flammeniioiit et Diipuis.
(ï) Ltffmnint/fe de Senh's, par J. Flnnuiierinont.
i.ïi C.ii'éron./^tf Orat.'ii. \'\.
XIIY*" SESSION, A SENLIS. i9
i&eurer ea dehors de son action (1 ), devançant ainsi une
tendance qui, nous aimons à le constater^ s'accentue de
plus en plus chaque jour.
Après cela, il n'est pas étonnant que les plus flatteuses
récompenses vous aient été accordées récemment, et tout
le monde, croyez-le bien, a ratifié la décision qui plaçait
le Cinnùé archéologique de Sentis parmi les Sociétés de
province dont le sort est enviable à tous égards.
Quoi qu'il en soit, il ne manquerait pas encore de gens
qai, méconnaissant les principes certains et indiscutables
nr lesquels se règle la science que nous cultivons, croi-
ront iaîre œuvre de sagessse en méprisant ce qu'ils ne
comprennent point. Parce que dans les difl*érents genres
d'études, nos recherches sont véritablement sans limites
et que nousnenous bornons pas à examiner quelques types
d'une remarquable perfection, ils nous accuseront de per-
dre notre temps à mettre en lumière ce qui ne méritait
pu un tel honneur, tandis que, à leur exemple, sans
doute, il serait bien plus profitable de se retrancher uni-
quement dans le culte du beau. Mais qui ne sait que la
méthode historique a toujours été la meilleure, quand il
s'est agi d'approfondir les œuvres de l'antiquité? Dans les
arts comme dans les lettres, il faut remonter aux origines
si l'ont veut bien se rendre compte du merveilleux épa-
nouissement qui s'est manifesté à un moment donné, et
Phidias ne se comprend pas plus sans les Eginèles que les
écrivains du siècle d'Auguste sans le poëme de Lucrèce et
les fragments d'Ennius.
\\ résulte de là. Messieurs, que les œuvres parfaites
sont, quoi qu'on en dise, loin de présenter les plus solides
éléments d'instruction. L*erreur et ses effets ont une bien
1/ Voir les travaux de M. Millcscainps sur Caranda.
20 CONGRÈS ARGHÉOLOGIOUE DE FRANGE.
autre influence, et leur commerce seul a lavanta
nous initier au développeinenl régulier des arts, (1(
dévoiler certains procédés qui, mieux compris, n'e
pas manqué d'assurer le succès.
Mais, de ce que nous préconisons les roonumei
passé, quelle que soit d'ailleurs leur valeur esthétiq
ce que nous eu recommandons Tétude approfondie,
s'ensuit aucunement, comme on voudrait à tort 1(
croire, que nous sommes partisans de leur rcprod
minutieuse et inintelligente. Le conseil qu'Horace d
aux écrivains de son temps est applicable aux artii
toutes les époques :
Scribendi recte sapere est et principium et fotis
Il faut savoir discerner ce qui est véritablement
ble, de ce qui ne doit être qu'un sujet d'inspiratio
chaque siècle amène avec soi des idées particulier
il faut tenir compte dans une certaine mesure, si
veut risquer, en faisant fausse route, de perdre tout
d'action.
J'aurais fmi. Messieurs, s'il ne me restait encore
voir à remplir et le plus agréable, en vérité. Le
archéologique qui a pris Tinitiative du Congrès et
bilenieiit préparé, la ville de Senlis qui nous <
gracieusement l'hospitalité et a décoré cette salle t
goût que vous ne manquerez pas d'apprécier, le d
ment de l'Oise cniiu qui est venu (técuniairemcut
aide, ne sont pas seuls, en effet, à mériter ici n<
(1) Sa])€re est ici pris dans toute retendue de son s
losophique , il signillit \o di^coriienicnt du vrai et du ft
beau et de sou contraire. Or, <liins les arts eomme
lettres, on ne saurait aller à iVncontre, de ce que la rais
goût pn*conisent.
XLIV* SESSION, A SENLIS. 3f
sincères remerciements. Dans le témoignage de notre gra-
titude nous ne devons pas oublier le prince ami des lettres
(t des arts, qui a su dérober quelques heures à ses graves
•<cupatiou3 pour venir encourager par sa présence nos
modestes travaux. Sans doute, il s'est souvenu qu'avant
délire rhistoire des Condés dans un style qui rappelle
yè^M\ue du plus grand d'entre eux, il avait pris part à
la lutte, longtemps engagée autour d'une localité de la
Bourgogne que l'on voulait déposséder de sa gloire pas-
sée, en lui cherchant ailleurs des équivalents affaiblis.
Sioous n'avons pas ici des questions â traiter d'une im-
portance aussi générale que l'emplacement d'Alcsia, il ne
manquera pas dans notre programme de sujets d'études
propres à intéresser les esprits les plus élevés; c'est l'es-
{•oirque nous caressons tout au moins.
M. le Président donne alors lecture des tniis premières
■{ustious du programme ainsi conçues :
1. Des études préhistoriques dans la région
du nord de la France et particulièrement
dans l'arrondissement de Senlis. — Sur
quels points ont été reconnus des stations
on des ateliers des différentes époques de
la pierre? — Quelle a été la conséquence
de semblables découvertes au point de
▼ne des connaissances archéologiques et
ethnographicpies ?
2. Déterminer les rapports qui existent
entre les monuments mégalithiques de
l'ancien pays des Silvanectes et ceux du
reste de la France ; refaire la carte des
dolmens, menhirs, etc.
22 CONGRÈS AKGHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
3. Quelle conclusion faut-il tirer de la pré-
sence d'instruments en matière tendre,
tels que calcaire, grès, etc., dans les sta-
tions préhistoriques? — Eziste-t-il dans
la région des stations lacustres ou palus-
tres?
La parole est à M. le comte de Maricourt :
Topographie préhistorique d'une partie
de l'arrondissement de Senlis.
Messieurs,
Avant de vous donner un texte explicatif destiné à ser-
vir de commentaire à la carte préhistorique du déparle-
ment que j'ai l'honneur de présenter au Congrès, je dois
rappeler les travaux antérieurs qui ont facilité l'achève-
ment du mien.
Le nom de M. Raoul Guérin, mon collègue à la Société
d'anthropologie de Paris et membre de notre Comité
locaU devait figurer sur la carte. 11 avait déjà présenté
celle de l'Oise de petit format et avec des indications
incomplètes, il est vrai, mais c'était acquérir un droit
inamtestable à la priorité.
11 avait, comme je Tai fait depuis, compulsé les écrits
do M. Graves qui, avec le répertoire de M. W'oillez, con-
tiennent des renseignements alk^udants et précieux, mais
recueillis à une époque où Ton confondait les dates des
monuments mégalithiques, et où les recherches préhisto-
XUV SESSION, A SENLIS. 33
rjques n'étaient pas en vogue, si bien que ces renseigne-
ments doivent être sévèrement contrôlés.
Les ouvrages de M. le docteur Baudon (de Mouy], Pon-
thieux (de Beauvais), ont été également consultés, et je dois
ajouter que ces messieurs ont mis une complaisance par-
faite à me fournir les indications demandées. Il faut en
dire autant du docteur £. Robert de Précy, dont il m'est
difficile de partager les opinions, mais à l'obligeance du-
quel je me plais à rendre justice; de M. Plessier (de Mai-
goelay), auquel je dois la connaissance de nombreuses
stations ignorées jusqu'à présent dans le canton de Betz
et rarrondissement de Clermont; de M. le comte de
Narsy, de notre collègue M. Guillemot, etc. etc. Enfin,
pour ne pas trop nous oublier nous-mêmes, ajoutons que
notre regretté collègue, M. Louchez, MM. deCaix de Saint-
Aymour, Tabbé Caudel, Vinet, Fautrat, ^çrgry, etc.,
ont largement contribué à l'exploration dR cantons de
Sentis et Grcil au point de vue préhistorique.
J'ai adopté dans le travail la méthode de M. de Mor-
tiilet,et, pour la partie matérielle de la carte, les signes et
couleurs que, comme rapporteurs d'une commission pré-
bistorique internationale, lui et M. Chantre ont proposés.
Il est nécessaire de rappeler sommairement en quoi
consiste cette méthode, parce que plusieurs de nos col-
iques l'ignorant ou la repoussant, on s'expose à des
tâtonnements et à des erreurs, faute de s'entendre sur la
valeur exacte des mots employés.
Tout d'abord on a divisé les temps dits préhistoriques
en deux grandes époques; les temps géologiques et les
temps modernes. Les temps géologiques, en tenagt
compte à la fois des modifications de terrains par stratifica-
tions, érosions ou alluvions, de la flore et faune, animaux
et plantes disparus ou émigrés, et enfin des produits de
24 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
l'iodustrie humaine pendant toute la période géologique,
comprendraient en remontant de bas en haut.
. i° Les pierres taillées des terrains tertiaires dont nous
n'aurons pas à faire mention, puisque rexistence de
l'homme à cette époque ne parait pas Suffisamment dé-
montrée à tous (quoiqu'elle soit incontestable suivant moi),
et que notre département, jusqu'à présent^ n'en a pré-
senté aucune trace.
Dans les terrains quaternaires se trouvent :
2° Les instruments appelés haches deSaint-Acheul, trop
connus pour que nous en fassions la description : dans
l'exposition de la salle du Conférés, M. de Caix a fait figu-
rer quelques-uns des plus beaux spécimens connus de
cette époque. Type de Saint-Acheul ou acheuiéen.
3° Type du Moustier ou moustiérien ; les haches amyg-
daloïdes de Saint-Acheul, se transforment en pointe et ne
se taillent que sur une seule face.
A^ Solutréen, — Pointes en losange plus ou moins
allongé, très-soigneusement taillées sur les deux faces;
grattoirs longs.
5*" De la madeleine ou magdelénien. — Lames, grat^
toirs longs, emploi de l'os et du bois de cervidés, sculp-
ture sur os. Ici s'arrêtent les temps géologiques, désignés
au point de vue de l'industrie par les noms de archéo-
paléolithiques ou époque de la pierre taillée.
Je dirai tout à l'heure pourquoi je repousse cette der-
nière appellation.
Arrivent les temps modernes, géologiqueraent parlant,
ou néolithiques, au point de vue de l'industrie.
• 6° Période dite de Robenhausen, ou de la pierre polie.
Je serai amené à rejeter cette qualification de même que
la précédente comme cause de surcharge et d'erreurs dans
la désignation des outils.
XUY* SESSION, A SENLIS. 25
Un peu plus haut dans la série industrielle arrive le
bronze divisé lui-même en deux époques, puis les âges du
fer, et ici le root préhistorique s'efface. Gomme nous ne
nous occupons que de la pierre, il est inutile de mention-
oer les subdivisions adoptées.
J'ai essayé, dans la petite exposition dont je parlais tout
à l'heure et qui est destinée à décorer la salle du Congrès,
de rassembler ces types caractéristiques des diverses
époques, de faç')n à présenter, pour ainsi dire, une page
préhistorique. Disons de suite que la méthode de M. de
Hortillet que je viens de résumer a provoqué beaucoup
d'objections, dont quelques-unes sont très-légitimes; par
exemple : les divisions si nettes sur le tableau le sont-elles
dans la nature? Est-il probable que l'humanité tout en-
tière et tout d'un coup ait délaissé l'usage des haches
acbeuléennes pour adopter les outils moustiériens? que
tous les hommes se soient mis à vivre dans les cavernes
et à sculpter les os à un moment donné, etc., etc.?
Faisons observer que cette classification s'applique spé-
cialement à nos régions, qu'elle a un sens restreint et
relatif et fournit aux recherches françaises un cadre tout
fait où peuvent se loger les découvertes nationales. On n'a
jamais prétendu que les hommes aient vécu en troglodytes
dans les pays où il n'y avait pas de cavernes. Je ne pense
pas que l'on ait voulu dire quB M. de Mortillet, lui-
même, ait prétendu que l'on ait passé d'un type à l'autre
sans transition et simultanément partout. Nous admet-
tons parfaitement qu'il y a eu contemporanéité, entre
l'emploi d'outils différents, suivant l'état plus ou moins
avancé de civilisation sur tel ou tel point, ou suivant les
différences de vie imposées par les différences de climat et
de stations; que, par exemple, dans le Périgord, on chas-
sait le renne et l'on s'abritait sous des cavernes, tandis
^^ CONGRÈS aRCHÉOLOGIOCE DE FRANCE.
que nos prédécesseurs pouvaient pécher aux bords de-
rOise et peut-éire commençaient à s'essayer à Tagricul-
lure. On a ici mém»? reproduit ciTtaines objections adres-
«•'ts à M. 'le Mortillet. à savoir celle de M. d'Acy. à pro-
j-K"^s lie la fiiniiltinLMtê des tyj^es acheuléen et moustiérien
d:ins lo? alluvions anciennes, fait que nous signalons
a'.îssi dans L^ trisemeiit de Monttruiilain (îoinconrt^. Mais
■ -n a në^liî^t'' do repro.hiire la réponse de M. de Mortillet,
.]ui explique cette anomalie apj.arente. de manière à sa-
tisfaire les contradi'.teurs.
G'îume nous ne voulons faire ici que de la démonstra-
î:on oî v.on de la polémique, nous n'insisterons pas et
u irons que la classification propc^sce n'est qu'un système
].1;îs lU moins liypoihôiique, transitoire et relatif si l'on
veut, ir.ais système qui vise autaiit que possible au vrai,
satisûiî Tesprit par s*'n extrême clarté et lui impose sous
sa forme sMiûptique une ci"«m préhension rapide. Nous
r ro\ oîi s do\ i ' : r I c ropro.i n ire a u t aMca u .
TI.Mr> (il-.01.(HiKa K> Archcoh'thiquef .
TFRTIAIRES
S;uï^ rc]Mosrn!;u:;> iia;i> l'u-Sr.
^I K iKNAWitS
\\y,' »»i'. s .:. II. «l'-isliqui^s
M. n h.'itiM I\-.îi:i :.. ii\ >.,: iinc sc\i!e laœ.
". i«i(M'. n ( 4> .i4M.\ '.>p(> manquent dans
\t»î..I il.' Ml. M le <îeriarti;mc-nt.
XLIT'' SESSION, A SENUS. 37
TEMPS MODERNES [Néolithiques].
RobenhauMen (1). Polissage de certains outils. Monuments
mégalithiques.
Fer. bronze, et leurs subdivisions.
Les expressions archéolithique et néolithique ont )M)ur
synonymes : âge de la pierre taillée et âge de la pierre
fw/if. Je demande la suppression de ces deux désignations
fvœ qu'elles font double emploi d'abord et ensuite
qu'elles sont la cause d'erreurs regrettables. En effet, à
TépDque néolithique on ne polissait pas tous les outils, les
hiches seules et quelques ciseaux sont polis, mais les
haches taillées quelquefois grossièrement, souvent avec
QDSoin extrême, sont à la même époque aussi fréquentes
{ue les haches polies ; certains amateurs s'en tenant au
pied de la lettre et trompés par la différence du travail,
ont très-souvent rapporté à des époques difTércntcs lès
pruiuits d'une même industrie.
Vous savez, Messieurs, qu'on a signalé entre les derniers
temps géologiques et le début des temps modernes, entre
l'arcbéolithique et le néolithique un brusque hiatus; rien
ne relie l'industrie des sauvages troglodytes à celle des
peuples qui polissent la hache et bâtissent les dolmens.
Or. M. le docteur Jacquinot, de Sauvigny, près Nevers,
oous apprend qu'il a trouvé le type intermédiaire; le fossé
lenit comblé par les silex de Sauvigny, et nous aurions
i intercaler entre archéo et néolithique le type de transi-
I' Je proposerais aussi la suppression de ce terme étranger;
puisque le néolithique n'est pas subdivisé, il n'y a pas de confu-
uoQ poKible.
M
... . .^K. > .A S— • 'a
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t ?
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r - •• ■• - ?.i -.-X-r.-*-:! •'t le
XLIV* SESSION, A SENLTS. 29
carte, jetons-y un coup d'œil d'ensemble avant d*abordcr
le point spécial de ce petit travail. Reprenant notre classi-
fication, constatons, dans les temps géologiques, l'absence
de tout travail humain connu aux temps tertiaires. Dans
le quaternaire, tous les signes teintés en jaune indiquent
des gisements acheuléens et moustiérens. Les deux types
suivants n'ont pas de représentants chez nous. Ces gise-
ments sont de deux sortes : dans des alluvions ou à fleur
de terre. Dans le premier cas, les pièces acheuléennes
peuvent être mêlées à celles du moustier, mais c'est la
prédominance du type qui date le gisement; voilà pour-
quoi Montguillain est rangé dans le Moustiérien, quoi-
qu'il s'y trouve des haches acheuléennes. 11 peut aussi y
avoir eu débordements tumultueux roulant et mêlant les
pièces. Dans le second cas, c'est-à-dire celui des trouvailles
quaternaires à fleur du sol^ rien de plus simple : les allu-
vions ont respecté certaines hauteurs occupées par les
hommes des époques primitives et leurs outils sont restés
surplace, mêlés plus tard aux débris d'industries plus
récentes, ce qui a fait croire à tort à la contemporanéité
des pièces.
Vous voyez .que la période archéolithique est assez ré-
pandue dans notre département et sur diflérents points de
l'arrondissement de Senlis, vers Betz et Nanteuil.
Si nous passons à l'époque néolithique, nous constate-
rons une dizaine de dolmens, beaucoup de menhirs,
quelques grottes sépulcrales, des tumuli et enfin un
nombre considérable de stations néolithiques, quelques-
unes formant atelier; nous nous en tiendrons là, les
époques du bronze et du fer devant faire l'objet d'études
spéciales qui comprendraient les cités palustres dont nous
pouvons soupçonner l'existence.
L'énumération de tous ces monuments par circonscrip-
.'10 0O^ùRl:^ ARCHÉOLûGIvl'K !•£ F&A.\C£.
tions aJniinistntives ferait fastidieuse* et je dois me con-
tenter eu rcftrei^uaut le i.adre de déiacher pour ainsi dire
un luûreeau du texte explicatif destiné à faire comprendre
uotre carte.
Nous allou? 4!u.iier une partie de notre arrondissement
au piâui de vue prv hisî«"'n»iue .
Eu piisaul u pu'Uite d'un compas sur Montépilloy et
dècnvam une circi-aicience avt-c un ravon d'environ huit
kilùmêtres. nous délimitons une région qui a fourni à
M. Tablée Caudtl et à moi les éléments de collections assez
riches et interesoùntes dans c^ quelles ont de tout à fait
lival.
ùcx'kciquemen:. cette galeiic. s'il mest permis de
mVxpnustr a:asi, iecoujtiecans u cùrte. se compose d'un
Ij.; vie •,i..^:rv *::v'îSit:, lose du lerraîa du Valois, tra-
\tr« i^^z u:.c iviiiùc ie ihàtius dipuis Aufer-Saint-Vin-
.x::: ;->4u.i V...v^^-^.l:li;-F^â•^'^. .:r^. eî dans lequel
tii-rr^-r:-:. ..-^i::! its :.rï, ie M. i.t-Ôjraj'U, Montépilloy,
K.z.r:^^, :.r::-t:ï u '.i iust ir^ *;rv;^ de Beauchamp. et cou-
:.--•?? i- i^.u.re là:;:f::e iiivycii qui forme ie territoire
--M-1:.T-; iji-:rvî .:-:nf:;:es vtr? Yvilâers et Saint-
•-:.T.î;.:ir. ^z.\zl.: ^ .^-: sj-aïuif: jlû cypse. Les forêts
:.«: zzL..L.\:z -.: ...zlx n.irf ... iii^vis en :ra^*an! la cir-
..l:-.:^:..-. >.-^'. i.,7 .•: ,::-? it bai-.iuiiii». auquel on doit
.c îii.t :- ?.. Lr.i : .:.< ;:i--.ti -..-.vr..:2s dans cette
:-*.-:* ^ -. : .Ml:.: .... v. {±y , K.::t:v^, 153'^; elle
\t ■ • . -• - 1\"- - i «i ■ • • .^^ VI»
~> ■»-.•■-. ~ . .. I -.' • . . ». ~ .*! ^"I .. ..? t .■J>k.*4 U7 vHI •
L- :-. -.-; ::i-.-.rî'.T l^i^ .-«? :«:;.ws r;v crts de Nonette
■» . «*....
i V^--"' -•••■- — ' ■-- i .t.-- : .i::jL..-:j:.îa:i±euieenne
XUV** SESSION, A SENLTS. 31
lait étant isolé et le transport de cet objet ayant pu être
accidentel, nous nous contentons de le mentionner, sans
Toaloir en tirer de conséquences.
2" Monuments. — Dans l'âge néolithique, le seul dont
nous ayons désormais à nous occuper, plusieurs grands
monuments : le dolmen de Ghamant, fouillé et étudié
d une façon sérieuse il y a plusieurs années, le menhir
de Borest fort connu et bien décrit, celui du Mont-Cornon,
deux autres près Châalis et Ermenonville détruits, ceux
de la forêt de Halatte, et une rangée de pierres levées, en
partie détruites, que M. Margry nous a signalée et que
ouus avons visitée avec lui. Tous ces monuments méga-
lithiques, considérés isolément, pour rester fidèles à notre
délimitation rigoureuse, font cependant parlie de groupes
et lignes que Ton peut retrouver en voyant l'ensemble de
la carte. En parlant de lignes, je ne fais nullement allu-
«on au système du savant conservateur de Saint-Germain,
qui, dans une série d'articles réunis en un volume, sous
le titre de : Archéologie celtique et gauloise, veut prouver
l'existence d'un peuple spécial bâtissant des dolmens et
laissant sur son parcours les traces de son industrie. Je
me rangerais plus volontiers parmi les adeptes de M. de
Mortillet, dont l'opinion peut se résumer ainsi : Il n*y a
pas eu un peuple ou une race des dolmens, pas plus qu'il
n'y a eu une race ou un peuple boudhique, chrétien ou
musulman, mais il y a eu un ensemble de peuples ou races
qui, sous les intluences d'un dogme commun, ont eu un
culte, des rites et des pratiques religieuses semblables.
Or, ce dogme et ce culte reposent sur la croyance à
l'autre vie, par conséquent à Texistcuce de l'âme comme
principe, principe sans doute plus matériel que nous ne
pouvons l'admettre, mais principe survivant à Tenveloppe
a»rporelle.
.'ii CONGRÈS ARCIIÉOLOGIOUE DE FRANGE.
Les trous ménagés dans le vestibule dolménique,
armes brisées ou non et placées près du défunt sont
témoignages de ce spiritualisme ou mieux fétichisme
mitif. Le trou favorise les allées et venues de ràmeeni
attirée par les liens terrestres. Les armes, comme ailh
les chevaux, femmes et esclaves immolés sur la tombe
guerrier lui feront cortège dans le séjour mystérieux o
va entrer.
Suivant certaines croyances encore en vigueur c
des peuples africains et océaniens, l'objet fabriqué devi
un être et possède, s'il est possible de le dire, un sou
vital ; le briser c'est affranchir son âme, créée par r«
vricr qui l'a faite, et lui permettre de rejoindre son posi
sour. Ainsi, d'après plusieurs auteurs, s'expliquerait
fréquence des haches de pierre intentionnellement b
secs que rcnrenncnt les sépultures néolithiques; ceci te
tcfois n'est qu'une supposition que la présence de bea
coup d'instrumculs d'une conservation parfaite vii
contrebalancer.
Notre dcilinen de Chaniant avec ceux de Trie-le-Chàte
et de Conflans-Suinlc-Hunorine [transporté dans les fo»
du Muséc-Saint-(îcrniain) et de la Pierre Turquaise
un des spécimens ptirfaits de la sépulture néolithique.
A côté des dulniens et comme témoignages d'une méj
civilisation, indiquons les grottes sépulcrales représentt
chez nous pur Urrouy, Séry-Magneval et Nogeut-h
Vierges; je rappelle aussi lu sépulture de daignes, et
diôe et décrite par M. Calland.
Ici S4Î place un modo d'inhuniatiun que nous u'avo
pas rencontré encore dans le pays; je veux parler des pu
funéraires dont j'ai l'ait la description l'année dernière
parlant dos roiiillos que j'avais visitées dans h^s nécropol
do Itologno. Toutoi'ois, ces puits ayant été signalés s
XLIV* SESSION, A SENL1S. 33
différents points de la France, et étant assez difficiles à
recoonaltre puisque rien n'indique leur présence à la sur-
lace du sol, il pourrait se faire que nous en possédions
sans le savoir dans notre région. .
Les menhirs, pierres levées, pierres branlantes, pierres
à légendes sont assez fréquents dans notre arrondissement^
la présence de gros blocs de grès indigène rendant facile
l'érection de monuments semblables. Celui de la Pierre-
qui-Come (d'Halatte) et celui de Borest, situé sur la route
même, sont les plus connus de nous. M. Graves affirme
qu'en bce du dernier se trouvait une sépulture cou-
^rte d'un tumulus, fouillée et détruite il y a plusieurs
aimées.
On a considéré ces pierres comme des limites de terri-
toire, des signaux funéraires, des monuments commémo-
ratib; dans certaines régions ils ont été longtemps l'objet
d'un culte superstitieux que les ecclésiastiques du pays
avaient beaucoup de peine à combattre.
Je ne puis m'empécher de me rappeler ce passage du
Iteutéronome et ce précepte de Moïse aux Hébreux après
avoiiitraversé le Jourdain.
i Vous bâtirez au Seigneur votre Dieu un autel de
pierres que le fer n'aura pas touchées.
« De pierres informes et non polies, et vous offrirez
sar cet autel des holocaustes au Seigneur votre Dieu. »
Cette citation ne veut pas dire qu'il .y ait la moindre
relation de parenté et de religion entre les Sémites et nos
prédécesseurs néolithiques; elle serait d'ailleurs de nature
à induire en erieur, le mot d'autel rappelant la formH
des dolmens couverts de pierres plates qui, longtemps, les
ont fait confondre avec des autels druidiques. ^
Je voulais seulement sigualcr une analogie et l'idée
religieuse qui, aux époques et dans les temps les plus
XLIV* SESSION. 3
;U r.0NG1lÈâ AKCnÂOLOOIODE PB FRANCK.
oloi^ué» Icâ uns des autres, s'attache à la pierre itrut
Dans uu des derniers numéros des Matériaux
rkisioire primitive de rhomtne, uu auteur signale
les Pyrénées plusieurs groupes très-intéressants de p
levées qui, encore à présent, sont le théâtre de pral
hiiarres : il y en a de forme phallique qui assun
fécondité des femmes.
Je puis« sans trop sortir du sujet, mentionner u
intéressant pour nous. M. Plessier, de Maignela^
j*ai déjà cité, a trcuvé dans notre arrondissement, «
de Betx, dans un gisement néolithique, uu sile3
dit intentionnellement taillé en phallus. N'ayant
Vobjet je uVu puis rien dire, mais il est fâcheux q
u ait pas attaché plus d'importance à cette déco
Pareil objet rapproché des dolmens, menhirs, prati(
trê\miiation , chirurgie, amulettes, etc. etc. ,aug
rait les notions que Ton peut avoir sur les couti
KT\»yauces des iHîuples néolithiques.
Les monuments, ci-dessus mentionnés, dolmenf
louverles, gnutes sépulcrales, menhirs, etc. et
diquout Uivessairement la présence de peupla
l'iouui^, mais no précisent pas topographiquement
do leur habitation. En effet, tandis que les p
wurs des teuips géologiques, trojçloilylcs, chass
ivmu\ Ole. etc., abandonnaient liîiirs morts sur j
uu^uio le» mangaient y% nos honuiu-i^ de la périw
llnquo ont ap^n^rté un soin particulier h la sépul
\\) l''on m'a fait obser\-er que ceiio pn-sniplion di
leur avait |u>ur but iréviler toute re|»nVi»lalion idolàl
\i^ i'ai ouleiuhi aninner ce lait, qui parut è^ayor u
do ra»iliioiro,.iKir M. Pigoriin, dans iin»MouloitM!ce ù
mai IMIG.
XL1V* SESSION. A SENLIS. 3.%
leurs, comme le prouvent les mobiliers funéraires et Par-
diitecture des dolmens ; mais il faut remarquer que ces
moDQQients sont souvent placés sur de hauts plateaux,
ibrt arides, impropres par conséquent à l'habitation, d'où
l'on doit conclure que, par suite d'un sentiment decrainte
^U|ier8tîtieu5e, de répugnance, peut-être, tout en rendant
un culte aux défunts, les néolithiques les éloignaient de
kun villages, et transportaient, comme nous le faisons
nuiotenant, leurs cimetières loin des habitations.
Je n'ai pas voulu parler des lumuli que renferme notre
dicoDBcription, car ou il n'ont pas été fouillés ou ils l'ont
W X une époque où V%n confondait toutes les dates. C'est
<ioocintenlionnellement et jusqu'à plus ample informa-
lion que je les passe sous silence.
Quittant les généralités pour me rapprocher de l'objet
^ial de ce petit mémoire, j'al)ordc la description des
silex travaillés qui, trouvés dans le rayon indiqué forment
la base de la collection de M. l'abbé Caudcl et de la
mienne.
3* Ateliers et stations néolithiques. — A première viio,
Jaos la région circonscrite que nous avons indiquée, rien
ne parait se prêter à l'habitation néolithique. Absence de
çraods cours d'eau et de positions défendables, aucune de
«s éminences formant cap et promontoires, comme Can-
neviile et le camp de César au bord de TOise, et plusieurs
stations que j'ai signalées le long «le la Seine dans Seine-
et-Marne (I). Cependant les traces de l'industrie abondent
iur le sol.
Il faut observer que ces plaines, transformées par les
<)^fri«Thements et une longue et savante culture, ont ^'tê
I) Sauf un petit promontoire doniiiinul rAunolle, près de
Brav. $ur le territoire de Dailio rie.
30 CONGRÈS ARGIIÉOLOOIQUE DE FRANGE.
des forêts marécageuses ou rhommc pouvait subvenir aui
besoins de son existence par la chasse et la pêche. Notre
petite vallée de Nonette, avant que le cours d*cau fût arti-
ficiellement exhaussé, était un large marais; les vallQnne-
ments pouvaient aussi former de petits étangs qui conte-
naient assez d'eau pour les nécessités des tribus habitant
sur les légères éminenccs voisines.
On remarque, en parcourant les champs, l'abondaDce
et la dissémination des silex taillés; indépendamment des
travaux de culture qui ont dii disperser les objets, cette
dissémination doit s'expliquer par cglle de la population
elle-même. L'imagination se représente facilement des
huttes ou abris groupés de ci et de là au milieu de grandes
forêts suivant la fantaisie ou les besoins des familles,
comme on peut encore le voir dans les landes du Bor-
deaux.
Le nombre relativement considérable d'outils et armes
que l'on rencontre en se promenant et que la charrile met
à nu ne doit pas non plus faire conclure que la popula-
tion fut très-donsc. Certains outils étaient de fabrication
facile, comme ceux connus sous le nom de grattoirs où les
éclats formant lames devaient être taillés rapidement et
abandonnés sur place après avoir été utilisés : de là leur
fréquence.
Ajoutons que beaucoup de générations ont dû se servir
de pierres, et qu'il y aurait eu, suivant moi, une période
de splendeur et de décadence dans les Ages néolithiques.
D'après des preuves directes fournies par Bray-sur-
Aunette et des inductions tirées de certains passages de
Grégoire de Tours, je disais que, longtemps après l'in-
vention et l'usage des métaux, et même après la conquête
romaine, certains indigènes, dans nos »mtrées, conti-
nuaient à employer le silex, mais le taillaient plus mal
XLIV* SBSSION, A SENLIS. 37
que leurs ancêtres et n'hésitaient pas à briser de belles
haches polies pour en faire des percuteurs.
J'ajouterai un nouvel argument eu faveur de la per-
sistance probable de la pierre à travers les civilisations
plus récentes. C'est en recherchant les traces des anciens
chemins gallo-romains ou gaulois romanisés que notre
collègue, l'abbé Caudel, qui s'est fait une haute spécialité
ilansce genre, rencontre des silex taillés.
Est-ce un simple hasard qui les groupe sur les passages
fréquentés à une époque relativement moderne?
Si disséminés que soient nos objets, on Iss rencontre
accumulés en plus grand nombre sur certains points, et
priucipalemeut sur le territoire de Bray-sur-Aunette,
hameau de Rully, qui semble avoir été un lieu de fabri-
catioo, une station-atelier, comme l'indiquent de nombreux
débets, des ébauches et l'emploi des matières locales.
Voici le moment de parler des substances utilisées pour
Uconfection des armes et outils, et en même temps de
répondre à la troisième question du programme, ainsi
formulée :
Quelle conclusion faut- il tirer de ta présence d'ins-
trumenl» en pierre tendre, tels que calcaire, grès, etc.?
Elle provoque certaines observations que je me permets
de vous soumettre. Tout d'abord elle suppose la présence
•le ces instruments, qui est réelle, mais qui a été long-
temps niée et l'était encore récemment par un cminent
archéologue, M. Fleury, lequel aftirmait que, trompés
par certaines analogies de forme, des archéologues avaient
^u à tort dans les blocs calcaires naturels des outils
facr^nnés Je lui montrai la hache que possède notre
MiiT"^;. et il reconnut immédiatement le travail humain,
«ij'iiifaiit que cette pièce eiiununchéc au IniuI trun hàUm
^'Hiiait le hfiyaii destine à retourner la terre pour y con-
38 OONGRÊS ARCIIÉOLOGIUUE DE FBAI«CE.
fier le grain. Ces instrumente auraient donc servi & Tagri
culture primitive; ils sont rares, car le bois et les corm
d'animaux semblent avoir servi plus spécialement ù a
usage.
Quant au grcs qualifié de pierre tendre dans le prc
gramme, je le vois chez nous destiné au polissage d
silex et parfois utilisé pour faire de gros et vilains gral
toirs; il se prête moins facilement que le silex à la taili
régulière, mais forme des haches que Ton peut polir. Nou
en possédons plusieurs échantillons.
S'il s'agit de tirer une conclusion de ce fait, je ne sai
trop que dire, si ce n'est que le grès provenant de sable
quartzeux agglutinés par un ciment siliceux et offraii
une texture aigre et cassante pouvait cependant fourni
des outils très-durs, et comme il est plus répandu sur cei
tains points de notre sol que le silex, nos prédécesseur
l'employaient quand ils l'avaient sous la main. Le proverb
dit que faute de grives on prend des merles; j'avoue n
pas avoir très-bien saisi le sens de la question.
A ces faits, iM. Woillez en ajoute un qui mérite coniir
mation. Il dit (]ue dans la foi^t de Compiègne on a trouv
dos haches façonnées avec de l'argile. Crs outils n'auraien
été que des simulacres dont l 'emploi possible m'échapix
complètement, à moins (|uo l'on n'y retrouve quelque
symbole religieux.
Le chapitre des matières tendres épuisé, revenons aus
substances qui entrent le plus fréquemment dans nos
ustensiles de Hrav et liiMix circon voisins :
m
1° Le silex local répandu sur le soK celui que Ion em-
ploie pour macadamiser nos routes, vi ({ui, sous forme de
cailloux plus uu moins rouUV, provient d'alluvions qua-
tcrnaiiTs et se reliront re à (loyr rt dall^ les sablirrcs; il
se revêt souvent de patine blanche
XUV* SKSSION, A SEiNLIS. 39
2" Le silex également local abondant û Montépilloy,
présentant l'aspect du grès à grains serrés; uniformé-
meut gris et terne, il se polit sans prendre aucune patine.
3* Le silex strié de bandes irrégulières bleuâtres, silex
d*eau douce se prêtant moins bien que l'autre à la taille.
4* Le silex jaune et caverneux, qui se rapprocherait du
sikx meulière.
5' Le silex pyromaque, translucide sur les bords, à cas-
sure concholdale, de couleur variant du noirâtre au
blond. Comme il se trcuve principalement en cordons de
gn« rognons dans les bancs supérieurs de la craie; il a
bllu que nos néolithiques allassent le chercher à une cer-
taine distance ou se le fissent apporter en échange d'autres
objets.
6* Une hache trouvée à Raray avait tout à fait l'aspect
du marbre, et comme tous les objet rencontrés étaient en
substance à base siliceuse, ce fait de l'emploi du calcaire
sous forme marmoréenne chez nous nie semblait étrange.
Soumis à un examen attentif, celui-ci a été reconnu être
en quart! vert, de même que plusieurs petites haches.
D'autres sont en roche amphiboleuse, eu jadéite, etc.
Eu un mot, les substances provenant de terrains primi-
tifs ne se rencontrant qu'assez loin de notre région, il y a
U une preuve de colportage. J'en rencoutrc une autre
dans la trouvaille par luoi faite d'une pointe de poig^iard
c'est ainsi que Ton désigne ces objets) en silex du Preï^-
signy(i).
Désignation des instruments.
J'ai trop abusé de votre patience i>cndant les années
I M. Cliablaiug tils, en su qualilô du lllilltTaUlgl^tc, a liieii
«•lulo examiner cesdi^ersvs pièces et eu déterminer la nature.
40 CONGRÂS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
précédentes pour ne pas vous faire grâce aujourd'hui del
longue énumération d'objets recueillis sur notre sol. C
sont toujours les haches polies ou non, grandes et petitei
plates et globuleuses, les grattoirs, lames, percuteurs ^
pointes, enfin l'outillage néolithique connu, qui forinen
rensemble de nos collections. Je veux seulement attira'
votre attention sur quelques objets d'un intérêt spécial.
Les nucléi sont généralement massifs et présente^
rarement ces longues faces régulières résultant de Tabla-
tion des lames qui se voient sur les nucléi du Pressigny
et de Preslong, mais plusieurs ont une configuration
spéciale qui semble intentionnelle; les pièces détachées
du bloc primitif donnent à celui-ci l'apparence d'un som-
met de pyramide, et cette forme souvent répétée noua fait
croire à un parti pris. A quoi pouvaient servir pareils
objets? C'est dans le silex gris et terne (|ue j'ai essayé de
décrire et que Ton rencontre principalementà Montépilloy
qu'ils sont taillés.
Plusieurs de nos grattoirs sont assez curieux en ce
qu'ils présentent une t'oraie très-allongée, comme celle
du grattoir des cavernes; co sont des lames dont le bout
est retaillé en grattoirs.
Nos percuteurs sont généralement massifs; mais au
contraire quelques-uns d'entre eux, petits et anguleux,
utilisés dans leurs parties les plus saillantes, semblent
avoir sisrvi à la confection de pièces délicates.
J'ai des ciseaux de grande dimension avec un tranchant
admirablement poli.
Quelques haches d*unc diuiension minuscule, peuvent
être considérées comme objets votifs ou amulettes; j'y
verrais volontiers des petits eisiraux on rabots emmanchés
dans une gaine du l'aron à ne présenter que le tranchant.
Je vous lais ^rXœ dv nos pcrçoirs et pointes de llèchc,
XITI* SESSION, A 8BNU8. il
quoique beaucoup d'entre eux soient d'une grande per-
Cectioa, car ces types sont fort connus; mais j'appellerai
votre attention sur deux ou trois scies à encoches, plu-
sieurs pièces soigneusement retaillées sur toutes les faces
et formant un outil en forme de fuseau ou cigare;
d'autres, de petite dimension, ont pu être des engins de
pécbe; certains silex nous offrent une concavité semi-
circulaire de dimensions variables qui devait servir à per-
fectionner les bois de flèche ou les menus outils en os,
comme épingles et aiguilles. Absence de flèches à tran-
dttot transversal (I). Beaucoup d'objets dont je vous
épargne la description échappent au cadre des classifica-
tions connues.
Indépendamment de la diversité des matières employées,
liya une grande difiérence dans la main-d'œuvre; les
triTailIeurs semblent avoir appartenu à plusieurs écoles.
Beaucoup d'outils sont taillés avec une rare perfection;
d'autres, d'aspect grossier, de grande dimension, semblent
être le résultat d'un travail hâté et dédaigneux. Si nous
nous trouvions sur le terrain d'alluvion superficielle que
décrit M. Jacquinot, je serais disposé, eu comparant, ces
dernières pièces à celles qu'il décrit dans sa brochure, à
les ranger dans le type de transition sauvinien qu'il pro-
pose; je les mettrais à côté d'outils du mcîme genre par
moi trouvés dans les alluvions de la Seine. Ici l'assimila-
tion nous est interdite par la nature du sol, et j'y vois
tout au contraire l'ouvrage maladroit des derniers ouvriers
de la pierre, après l'introduction du métal.
On remarquera peut-être que dans Ténumératiou des
t/ Cette anîmiation est trop absolue; nous avuns Iruis un
luairc échantillons de ce ly|N!, mais leur (!imeni>ion et leur raclure.
(MMirraieot les faire rentrer dans la caléguric des petits ciseaux.
4:2 COA'GRÈà ARCHÉOLOGIQUE HE FEAliCE.
iiulils, je n*ai pas mentionné le polissoir qui a dû joLi^i*
un si grand rôle dans la fabrication des pièces en silex ii>'
dijrène. Jo n? parle pas des autres qui peuvent être du^
à rimpi^rtation. L'absence de polissoir connu dans notre
région est cause de ce silence : je sais bien que quelques
fragments de grès présentant des traces d'usure peuvent
avoir servi au polissage, et sont désignés sous le nom
de polissoir? à main. Mais je crois qu'il fout ne les oonsi-
dên^r que comme la pierre à aiguiser du repasseur qui
piiraohève Tcruvre commencée par la meule. Ces instni-
ments seuls, sans polissoir lixe. devaient occasionner à
l'ouvrior une besogne fastidieuse, rebutante, exigeant une
patience t^t un déploiement de force extraordinaires. J'ai
vu en prcsontant à la meule quelques silex, avec quelle
ténacité e: quelle vigueur il fallait appuyer pour obtenir
un resuhat toujours assez leni. J'en cctudus donc à la pré-
senct" pr.-hable. dans notre rayon ou enviions, de polissoirs
::xes, fn^s blocs de grès avec cuvette et rainures profondes^
comme celui de Sâint-Germain. ou ceux que Ton peut
voir dans le Vend^Nmois scus le nom de pierres cochées.
La culture a i>u îes enfc-r-ir ou les briser.
I! ne :r.f reste qu'un ■.îtr.îier ms>: à dire. La vue des pièces
•le cc«5 .^::v:t:>:îs eût abrt-fé no::>e nomenclatuie, car un
. . -p :' ■ .'. fait mieux saisir !es ch-^ses que les descriptions
lt< r'.-s iLin-t'euses: iiitis îe transport d*uiie collection
L'-e^t T.is i:«. Au>*. -t.is-'e vrier ceux d'entre vous
:-. v-u^ii: : en <*.::\re :.05 ttudcs tt qui désireraient de
:._? i:i.:.5S rr::5c:*2tu:^::t5 d^ ^eu:r les cherther à notre
^1 -tii.-; ..II-..::... -..à: .j. .->.: i>: .:u ui^sn.'ine suivant.
:- M. M. .-:<*:i:; :■?. u:::i:':o- i-, ^^ >x;€:t' d'antropol^ie
XLIV* SESSION, A SENLiS. 43
Les monuxnents mégalithiques de Thimé-
court, près Luzarches (Seine-et-Oise] ,
constructions contemporaines de l'âge de
la pierre taillée.
De longues et palientes recherches, entreprises sur de
bibles indices et poursuivies pendant les années 4875 et
1876, m'ont permis d'exhumer deux monuments d'une
haute antiquité qui, n'ayant laissé que des traces à peu
près imperceptibles à la surface du sol, étaient demeurés
jusqu'à ce jour complètement ignoréx.
Ces deux monuments distincts quoique contigus sont
situés sur le territoire de Thiraécourt, hameau dépendant
de Lcxarches (Seioe-et-Oise); ils occupent un point élevé,
à l'altitude de 105 mètres environ, sur le versant sud de la
petite vallée de l'Isieux. Tout autour s'étend une lande à
peuprès stérile, dont le sol est'saluré de pierres calcaires
et de débris de carrière. Le sous-sol, qui appartient à
l'étage inférieur du terrain tertiaire, est formé, suivant
les pïaces, de marnes fragmentaires et de calcaire gros-
sier. C'est dans ce terrain dur et pierreux que les instru-
ments primitib Je quelque tribu de l'ùge de la pierre
taiilée ont paisiblement creusé une vaste et profonde
excavation que nos outils modernes n'ont pas rouverte
sans difficulté.
lie premier de ces monuments, apparent en trois points
seulement, était composé de sept grès, de grandes dimen-
fions, placés les uns près des autres à plat ou légèrement
luclinés et reposant sur leur (dus large surface.
Le second monument, complètement enfoui et formé
44 CONGRÈS ARGHÉOLOGIOUE DE FRANGE.
de huit grès, dont sept dressés et maintenus par des cales
dans la position verticale, était de moindre importance,
couvrait un espace plus restreint et semblait être un
appendice de l'autre. On pourrait y voir un essai grossier
de dolmen, bien que la disposition des monolithes soit
aussi peu régulière que possible etque leur juxtaposition
presque complète ne laisse aucune place libre pour la
chambre qui constitue l'intérieur du dolmen propre-
ment dit.
Quant aux grès du premier monument, la situatton
dans laquelle ils ont été trouvés^ ne semble pas indiquer
qu'ils aient jamais reçu une disposition architectonique
quelconque. Cependant il est incontestable que tous ces
monolithes, étrangers au sol, ont été apportés et placés là
par la main de l'homme.
Deux tranchées, l'une, à peu près ovale, mesurant
9 mètres sur le grand axe et 7 sur le petit; l'autre, car-
rée, présentant un côte de 4*50, avaient été creusées à la
profondeur moyenne de 4 mètres, dans le sol mentionné
plus haut qui recouvre un banc de calcaire. Pour com-
bler cette double excavation, les constructeurs des monu-
ments mégalithiques dont il s'agit avaient été chercher, à
une assez grande distance, une argile grasse, humide,
compacte. Dans cette espèce de ciment naturel ils avaient
jeté une quantité considérable de fragments de grès, de
différentes dimensions, lesquels, mélangés à l'argile, con-
stituaient un blocage d'une grande résistance. C'est sur
Tépais massif de cette maçonnerie primitive que repo-
saient les blocs de grès qui formaient la partie extérieure
des monuments.
Après IVnlôvLMiiOiit d-^ c<'s gK»s, «jui opposaient un obs-
t ••:1e insurmontable à une fouille sérieuse, on trouva sur
l'^us les iHiiuts du massif d'argile et de pierres, des
XLIV* SESSION, A SENLIS. Aiï
tnœs de foyer, des débris de charbon de bois, un grand
nombre de silex,le8 uns bruts, les autres taillés.
Parmi les silex, dominent les éclats; on distingue quel-
ques couteaux; on n'a rencontré ni perçoirs, ni racloirs,
DÏ grattoirs.
Enfin, le trait nouveau, inattendu, caractéristique de
eette fouille c'est que, contrairement à toutes les prévi-
HûDs, elle n a offert aucun objet appartenant à la
(Mode de la pierre polie. La pierre taillée y règne exclu-
sivement, elle est même représentée par les deux types
les plus anciens que l'on connaisse jusqu'ici : le type de
Sntd'Ackeul et le type du Mouslier. La hache de Saint-
Acheul se présente sur tous les points, à toute profon-
deur, associée aux pointes du Moustier; évidemment ces
deux instruments ont dû être concurremment employés
par les constructeurs, quels qu'ils soient, des monuments
daus l'intérieur desquels ils ont été soit intentionnelle-
Dwot jetés, soit involontairement abandonnés. Aucun
doute ne peut s'élever sur la parfaite authenticité des
monuments mégalithiques de Thimécourt, sur la com-
plète intégrité de leur intérieur, sur l'impossibilité maté-
rielle d'un remaniement dans le milieu qui renfermait les
objets qu'on y a découverts.
Deux faits, aussi nouveaux qu'importants pour l'archéo-
iûgie préhistorique, se dégagent doue pour la première
^^Mis de ces fouilles :
I* La concomitance du type de Saint-Acheul et du
type du Moustier rencontrés ensemble dans des conditions
uïdiscutables d'authenticité.
î* L'existence de monuments mégalithiques remon-
■iQt à la période de la pierre taillée, alors que dans
!ou« ceux connus jusqu'à ce jour, on n'a jamais constaté
]ue la présence de la pierre poue.
4() t;ONGRÈS AECHÉOIOGIQUE DE PBANGE.
Otie lecUire tcnuinéc, el après un nouvel intermède de
lu Société musicale, M. Tabbé Eugène MûUer, premier
vicaire de Notre-Dame de Senlis, est invitée répondre à la
!il* question ainsi conçue :
A quelle époque iautril faire remonter la
prédication du christianisme dans le Pa-
gus silvanectensis 7
t'.etto question, Mes^sieurs. à mon humble avis, ne sera
JAuiais tranoluv uvtv une certitude rigoureuse; les on-
Kuus de h\ pluivirt de nos églises, dès qu'on sort de la
substaïuv du fait p^mr envisager le détail, se refusent
*i \à clairtf vue. Voici cependant quelques conclusions
briNviv», que votre érudition. j*espèr«, voudra bien accepter.
FiKMiKKK lO.Navsiox. — .Vi» /Kry$ OM/ reçu dis le pre-
fHtirr itrt-.V i^u^ltfujfi cla^iés du christianisme. — Si la
iinssioii yt'iie^rtt.V , oî'îioielle du nord de la Gaule ne
siAU\ d\ipés tvaiuvup. que du m* siècle, néanmoins
qihlquç- >v«LiA: ohre:::?a I . jvnîu ddus les stations de
iluiuplie», lU* ii'.»u\ieu\, i-:? C*?sdfomagus , quelque
l'Jivvtuiui iiî.viîii;.. ^;,:ei4Le prvdLCJLieur isolé dut porter
:-.* ii.'Lu i.i Chri>: ju>».'^ue iaus :îos f^:r^:5. emlter chex les
iliu.-.'îj '-'ur 5c':î'.:v^ei:: vt .:e rimiuortaiité par le récit
.>.-? fVrst\ -•..,•->, ox'.wr.vr .e< [•j^rr'j'.'iioU'? «le Dieu quand
">|.' :i : i.;\ K.'L'Jsi !!> :e.:rs \oies luer^eilleuses. el
XUV* SBSSIOX, A SENLIS. M
réaliser 1« prophélie : « In omnem terram exivit sonus
ctrm (f )• » C'est le sens de beaucoup de textes des
Pim (91, la pensée des hagiographes les plus aulori-
iéi (3), et une vérité, permettez-moi cette expression, de
haute convenance divine.
Dnxmu CONCLUSION. — Y a-t-il eu dès le premier
mie une mission officielle dans nos pays? — Saint Clé-
DeDt(en91) (i), pour préciser, a-t-il envoyé à nos pères
niât Denis et ses compagnons (ses compagnons, d'après
certains), saint Lucien, saint Rieui?...
Vous savez mieux que moi qu'il existe ici, armées l'une
contre l'autre, des sévérités légitimes de la critique et aussi
trop souvent des traits du persiflage, deux écoles con-
traires, Tune qui s'intitule fièrement école historique^
l'autre qui est appelée légendaire. Les partisans de l'école
haionquef les abbés, pour ne citer que des savants de ma
robe, les abbés Eugène Bernard, Chevalier (de Tours], etc.,
$*appuyant sur un texte célèbre de Grégoire de Tours
■ Il Fs. xviii, 5.
\t\ Saint Justin, Hégésippe, Arnobe, Laclance, Eusëbe, Tcr-
toliieD, etc.
(3> c Probabiliter saeculo primo Evangelium per universum
ccbein propagalur. » Boll. XXV. cet. —Voir M. Paulin Paris
HUL Oit. de la France), Doro Cbamart, rabt>é Cas. Chevalier,
ée Tours, etc.
i4} Je u'îgoore pas qu'il existe sur saint Clément deux
mléfiies de chronologie, que le catalogue des écrivains ccclé-
iiaitîqacs attribué & saint JérAme distinguait déjà : • Clemens,
Uflsetsi plerique Romanonim secundum post Pelrum aposlolum
(Kiinit fuisse (système latinl, quartus |m)sI Pelrum Itomaî épis-
rt»piis [fuit]. • Il n*csi point de mon sujet do poser leur valeur on
df les coDcilier.
48 OONORËâ ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
(Hitt. Franc, lih. I, cap. xxviii), sur nne étude plu
rigoureuse des sources premières, sur une notion pli
exacte du ix* siècle, sur la rareté des monuments épigrs
phiques, sur les lacunes des catalogues épiscopaux, el(
tiennent qu'un orgueil mal entendu de clocher a altéré I
légende de nos saints, qu'ils sont^ venus seulement ai
m* siècle, que le nom de saint Clément est une interpo
lation^ que saint Denis de Paris est autre que saint Deuy
d'Athènes, etc.
Les champions de l'école légendaire, eux, opposant tan
bien que mal les contradictions du Père de notre histoire
nationale, le respect de ce qu'ils nomment Tancienne tra-
dition, les légendaires et les diptyques de nos églises, etc.,
persistent à afTirmer que nos origines chrétiennes remon-
tent aux débuts même de TËvangile, que saint Denis,
saint Lucien, saint Rieul, voire môme saint Firmin (1)
ont visité notre sol dès le i*' siècle, que saint Clément est
l'inspirateur de leur mission, que saint Denis de Paris est
le saint Dcnys d'IIêliopolis et de l'Aréopage, etc. a Non
tiostrum est tantas componere liles.n La sagesse de l'Église,
on le sait, ne réclame de nous, en ces. questions, qui ne
sont que de chronologie, que cette convenance de formes et
celte humble réserve (2) dont ne se départent jamais les
véritables savants.
TROisiÈiTE CONCLUSION. — Pour Ce qui regarde saint
Denis en particulier, le coniesscrai-je? je ne vois au-
cune raison probante de lixer au T' siècle sa mission
ù Lutëce.
(1) Sic M. Th. Salinon.
Il) VoirBt'iiotl XIV « De Scrvoriiin Dei bealilicalioDe et rano-
iiitaliniie •, lit». IV, pars II, c^p. 47.
XLIV* SESSION, A SENLIS. iO
Inutile de faire observer de nouveau : I** que la question
de saint Denis est double : Saint Denis de Paris doit-il
être confondu avec saint Denys TAréopagite? Saint Denis
de Paris, qu'il soit l'Aréopagite ou non, a-t-il été envoyé
par saint Clément (I)?
i* Que ce problème historique, qui a tellement irrité
les esprits depuis Hilduin jusqu'à nos jours, que Ton a
pa l'appeler la guerre aréopagitique, est abandonné par
Rome aux jugements libres des hagiographes.
Tout en confessant que le nom de saint Cléitient se
rencontre dans presque tous les manuscrits des actes dits
ÊMikeniifuei de saint Denis, que Domitien apparaît dans
les Acia fabuloia^ que la doctrine de Taréopagitisme est
antérieure à Hilduin, je comprends que plus d'un hagio-
graphe se tienne ici dans une situation de défiance. La
formule ■ tradenie $aneio Clémente Pétri apostoli succès-
iorei n'a-t-elle point été substituée à l'expression plus
dubitative c asuccessoribus apostolorum d, sous l'influence
de la lettre apocryphe de saint Clément à saint Jac-
ques (2? La chronologie : a ut Domitianus... eum ad se
mpalatium suum venirejusserity d laquelle est une addi-
tion aux actes de première main, n'est-elle point une con-
cession à un système (3)? L'aréopagitismc, lequel semble
.I.Sic Bède, Florus, etc. — c Quos referunt a Clémente
Hp> io Galliam mi&sos. • Rabau Maur. — Saint Adon établit une
£:»tiDctiou entre saint Denys de raréopage et saint Denis de
Pïrîs, et fait venir ce dernier au ui* siècle.
.2 Cinq mss. de première valeur de la vie de sainte Gene-
virTe,qne Ton attribue au plus tard au début du vi* siècle, ne
rrafpfment point la phrase Incidcutc sur saint Clément, que
1 00 «irprend dao^ les autres mss. de ce iibellus.
J Suidas, Michel Syncelle, etc., fout mourir saint Denis sous
Trajaa-Adrien.
XUV* SESSION. i
50 G0N6KÈS ARGHÉOLOGIOUE DE FRANGE.
à peu près iuconnu en France avant le ix* siècle,
n*e8t-il point une conséquence nécessaire des admirations
qu'excitèrent, avec raison, les aréopagitiquesî La co-so-
ciété de saint Denis avec des saints du m* siècle, saint
Crépin et saint Crépiuieu, n*augmente-t-elle point les
obscurités de cette question (i)?
(\) Les Pères dn deuxième concile de Soissons en 866, dans
le privilège du monastère de Solignac, disent que saint Êloi avait
fondé vers 631, un monastère en rbonneur des apètres Pierre
et Paul, des martyrs saint Denis et ses compagnons Crêjdn
et Crépinien. • Innotuit synode, qualiler vir venerabilis atqoe
beatissimus Eligius Viromandensis ecclesiae episcopos oœoobioin
ipsum in Limovicino rure \)uod Sollemniacus vocatur in hoDore
omnipotentis Dex et veneralione beatorum apostolomm Pétri et
Pauli ac martyrum Dionysii et sociorom ejus Crispini et Crispi-
niani »
Ce document (Société de saint Denys, saint Crépin et saint
i'.répinien). gagne en importance si l'on tient compte de ces
deux faits :
\a) Le notaire qui a rédigé le diplôme : « Innotuit • se rap-
porte non pas à Topiniou des Pères du synode, ce qu'une criti-
que rigoureuse pourrait appeler un sentiment noaveaa» mais i
la pensée de saint Ëloi.
v^ Co privilo^e de Solignac est souscrit par Hincmar qui
contredit |»ar res^v^t de rantit]uitô sa doctrine personnelle, en
assivîant saint Denis qu'il croit être TAréopagite i saint Crépin
et à saint Crt^piuion.
Hilduin avait sou(\vunè que ses adversaires lui objecteraient:
« \i\\\à otiain passiones di>ersi«rum sanolorum martyrum sab
vanis in^vralonlMis intoritvîoruiu conlineanl eosdem cum hoc
sauotis^iimo \ir\> vDïonysio bas [^r*es adiisse. »
- Opinu» \|ua* l>ion\sium Siivulo m» missiim statuit longe ve-
ri>uiul)or ao prv^peniodum etiani ivrla pronunciatnr. » Boll.,
S \îi. do S. |)iou\su^.
XLIV SESSION, A SENLIS. 51
OUATRiÈME CONCLUSION. — Saint Lucien, Tapôtre du
Beauvaisis, soulève la même querelle de dates. Voici^
pour toucher seulement la question, les principaux argu-
ments que les deux écoles contraires peuvent mettre en
ligne :
I.
L'opinion que saint Lucien est venu au i" siècle,
ihvoque en sa faveur :
i^ L'autorité d'Odon, évéque de Beauvais, car je trouve
à peu près nulles (i) les raisons pour lesquelles on veut
retirer à ce grand homme le panégyrique qui a traversé
les siècles à l'abri de son nom ;
(4)11 importe de remarquer qu*il existe deux principales ver-
libiude la passion de saint Lucien : 4oUn sermon (A) que tout
conseille d'attribuer à un moine beauvaisin de la fin du vni<'
siècle. S^Un panégyrique (B) que nous croyons devoir, nonobstant
les objections de dom Cellier, du chanoine Delettre et de l'abbé
Sabatier, laissera Odon, évêque de Sauvais (860^81). Ces deux
versions, si on les étudie parallèlement , offrent certaines diffé-
rences de récit, qu'il importe de signaler et qui témoignent de
deux écoles historiques opposées. Par exemple :
La version (A) associe à la même mission saint Lucien, saint
Quentin et saint Denys, place leur martyre sous Julien : c Cum
Julianus impiissimus Caesar décréta principum accepisset, erat
enim lune persecutio generalis >, dit de saint Lucien que a a
Beato Dyonisio presbyterii sumpsil offîcium, etc., etc.
La version (B) biffe le nom de saint Quentin, ajoute au texte
primitif un long épisode sur saint Denis, son voyage à Rome, sa
rencontre avec saint Clément, etc., alfirme que saint Denis
conféra à saint Lucien la dignité épiscopale, place leur martyre
sous Domitien et Fescennin Sisinnius, etc. etc.
52 CONGRÈS ARGHÂOLOGIOUE DE FRANGE.
2*" L'affirmation des Acta fabulosa de saint Denis et des
hagiographes grecs Métrodore, Méthode et Métaphraste
qui les ont copiés;
3® La co-société de saint Lucien avec des saints que l'on
veut rattacher au i^' siècle, saints Chrysole, Eugènei
Marcel, Piat, Rieul, Yon ;
V La chronique de Luitprand^ évéque de Tolède, chro-
nique, oserai-je le dire? peu digne de l'attention sérieuse
des savants ;
5"" Le sentiment de Vincent de Beauvais. Inutile de
faire ici le procès au Miroir historial du crédule Jacobin.
Le dominicain Melchior Cano, parlant Je Vincent de
Beauvais et d'Antonin de Florence, ne dit-il pas : ^Apud
criticos graves atque severos auctoritate carent (i) ? •
6® Le nouveau martyrologe romain de Baronius (qui
supposait deux saints Lucien) (2), et le propre du diocèse
de Beauvais.
(0 l)e locis Ibeologicis, lib. XI, cap. vi.
(t) Cette dualité de saint Lucien est acceptée par les abbés
Corblet et Sabatier. Louvet avait déjà indiqué cette façon de se
tirer d'embarras a qui a donné lieu à plusieurs, pensant conci-
lier les auteurs, do dire, qu'il y a deux martyrs en Bauvaisis.
dénommés du nom de saint Lucian, dont le premier estoit con-
temporanée à saint Denis qui souffrit la mort sous Domitian;
l'autre estoit conipaguon de saint Quentin, de saint Crespin et
de saint Crespi nia n que Ton dit avoir souffert le martyre sous
Dioclêtian i. [Histoire de la ville et cité de Beauvais,
MDCXIII.)
HLIY* SESSION, A SENLIS. 53
II.
Une opinion contraire fait venir saint Lucien au
in* siècle. Les tenants de cette vieille thèse objectent :
I* Des raisons négatives, comme la ressemblance qui
«uste entre Métrodore et Odon (i), le peu de fonds qu'il
but faire des sources grecques, etc.
2* L'autorité, plus grande à mon avis que celle d'Odon,
Taotorité du moine anonyme, lequel associe à saint Lu-
cieo 6t'à saint Denis saint Quentin, parle de Julien
César, etc.
3* Le mutisme des Actes authentiques de saint Denis
sur saint Clément, Domitien et saint Lucien.
4^ La oo-société de saint Lucien avec des saints qu'il
faut rattacher au iti« siècle, sainte Benoite d'Origny, Cré-
pin et Grépinien, Fuscien et Victoric, Quentin (2), etc.
(Il « La vie de saint Lucien, par Odon fulescrite vroy sembla-
biement sur la vie de saint Denys, par Métliodius (Métrodore),
ao temps d*Anastase et de Méthodiiis, qui est droictemenl le
t^mps où les Grecs firent beaucoup de fourbes en Occident
Sar ceue opinion que saint Denys est rArcopagite, on pourroit
bien avoir fait ou corrigé quelques martyrologes et anciennes
Mes de nos saints... «(Loisel : Mémoires des Eveschés et Etes-
pies de Beaurais, MDCVIL pag. 76 et 77.)
\i) Tous les mfs. de saint Queniin lui donnent pour compa-
snoQ saint Lucien de Beauvais. Celte co-société est un fait qu*on
M pent nier sans taxer d'erreur tous les monuments hagiogra-
phi<|ues. Donc, ou bien il y a deux saints Lucien, ce qui n'est
•|u une hypothèse imaginée p(»ur le besoin de la c^uso ; ou bien
^4uit Lucien n'est |>as le compagnon de salut Denys; ou bien
Mioi Quentin, saint Lucien, saint Denis sont venus au iii^ siècle.
Il y a longtemps que le problème est ainsi |»os<\ Le \ i jan-
5i COSGUIS ABCHÉOLOGIQUE DE FEA5CB.
5* Le sentiment de saint Ouen. de Sigebert '1), de saint
Hélinand, moine de Froidmont, etc. etc., lesquels disent
de saint Lucien : Coliega $amcti Quiniini.
6" Le silence que gardent les plus anciens martyro-
loges. Tantiphonaire du Mont Renaud, etc., sur la oonfra-
temité de saint Lucien avec saint Denys TAréopagite (i),
etc. etc.
Quoi qu'il en soit de ce secret hagiographique, dont
probablement nous ne saurons qu'au ciel le dernier mot, —
« de Dionysio et Luciano, » disent les BoUandistes, • illud
vier 903, Raimbert, êvèque de Novod. présidait • à une tamu-
latîon des s4iDts martyrs Quentin et Victoric et da cooresseor
Cassien > dans l'église de Saint-Qoeotin. Or. le discours qui nous
a été conservé sur cet évéDemeot. • dans un très-aDcieo registre
de cette coll^iale. ^ rapporte que de Roaie «^ on envoya soos
I^ixktien et Maximien. Quentin. Lucien. Crépin, CrépiDleo,
Fuscien. Viclorio. Rnfin. Valère. Marcel. Eugène. Pial, Rienli;
ii ajoute : la plupart des éi'rivains tiennent que saint Denys rAréo-
paçite arriva ave. ces saints missionnaires: mais la chronologie
re[«ousse ce sentiment (temporom séries refellit; et la raison de
la vérité ne permet pas qu*on le croie nec ratio veritatis credi
sinit . En effet . ce précieux confesseur du Seigneur a atteint
ia (lalme du mart\Teau temps de Domitien; les autres, ao con-
traire. KDt entres dans les Gaules à l'époque de Dioclétien et
deMaximien. Saint Quentin lixa son séjour i Amiens. Le bien-
heureux Lucien gagna Beau vais. etc. etc. • Hemerœus. Augusta
Viromanduorum vindicata.)
( Sigebert ratontant.sous la datede 1074. la fête de la déd\-
rii?<r de rëzlise abbatiale de Saint-Quentin, prés Bean^ais. dit :
• Hic er£o sanctorum sonorutn Qnintini et Luciani corpora
^ibi oSviaoi faria suui. »
(i ÏJA martyrologes de Florns. de Raban. etc.. se sont inspi-
ra avw peu de critique des deux >ies de saint Lucien.
XLIY^ SESSION, A SEMLIS. 55
unieum nvnc siatuimus^ non liquere^i> — que saint Lucien,
évéque de Beauvais, nous obtienne d'imiter les ardeurs de
son zèle !
CINQUIÈME CONCLUSION. — Reste saint Rieul, dont les
mérites sont le plus sûr palladium de notre vieille cité,
dont la mort sans violence attestait déjà, disent les anti-
ques traditions, la douceur qui fait le caractère particulier
de ses habitants. Vous devinez que les interrogations que
l'histoire pose à propos de saint Deais et de saint Lucien,
elle les répète ici nécessairement. Quand saint Rieul a-t-il
évangelisé le Pagus silvanectensis? M. l'abbé Blond, dans
une notice qui témoigne en peu de pages d'une grande
érudition et d'un jugement très-sûr, M. l'abbé Blond a déjà
posé le problème, indiqué les règles de critique qu'il
importe de suivre pour l'éclairer, pesé la valeur des
documents hagiographiques qui le contiennent et con-
damné à bon droit les excès de certaines méthodes.
Son Mémoire sur la date de r apostolat de S, Rieul {\)^ bien
qu'il soit peut-être trop respectueux pour la légende, ne va
pas cependant jusqu'à lui donner une valeur chronolo-
gique incontestable. Je crois devoir, en cela, imiter cet
excellent guide.
I.
L'opinion qui attache saint Rieul à une mission du
I" siècle^ allègue : les anciennes vies manuscrites de
saint Rieul, les liturgies anciennes de Senlis, d'Arles et
de Saint-Denis, les diptyques d'Arles et surtout l'argu-
ment (le prescription.
1} Extrait du Courrier de l'Oise, Mars 4863.
56 G0N6EÂS ARGHÉOLOGIOUE DB FRANGE.
Anciennes vies maniucriies de saini JtieuL
Les vies de saint Rieui sont au nombre de trois :
Une première vie, que la critique la plus autorisée attri-
boe au ix* siècle, d'après les manuscrits de Saint-Ouen.
(BoUand. XXX, martii.) L'on pourra voir dans lemémoire
de l'abbé Blond, une analyse de ce document hagiogra-
phique et de ceux qui suivent.
Une deuxième vie, du x* siècle, d'après les manuscrits
plus ou moins complets de Saint-Cîermain-des-Prés, de
Ch&lis (4), de Longpont, deRougeval, d'Utrecht, etc. etc.
(Bolland. ibid.). C'est la vie que Gui, abbé de Saint-
Denys (â), Vincent de Bt^uvais, et autres ont reproduite
et analysée.
Une troisième vie, d'après un manuscrit d'Arles, du
milieu du xir siècle.
a On regrette, dit Carlier, une ancienne vie authen-
tique de saint Hieul, dont on n'a que des fragments, par
exemple. aOppida, rura, casaSy vicos, caitella pera-
grans, • et dont le manuscrit de Saint-Omer dit : a ut qui-
dam metrocanorius in suo pompavii pcemate. »
Ces légendes sont d'accord à placer l'épiscopat de saint
Rieul à la fin du V^ siècle ou au début du il'' à l'abri du
pape sainl Clément et de saint Denis. Quelle est leur auto-
rité chronologique? L'ancienne liturgie senlisienne, le cré-
(4) AfTorly. (fiibliothèque municipale de Senlis). IV, 438
« Vita sancti Regxdi episcopi Silraneciensis ex manuscripto
CarolHoci desumpta. » Elle roronience par ces mots : t Postsa-
cratissimnm Dominica; ascensionis venerandumque Iriumphum,
ciim ad doclarandam rhrisliaiiir rcll^ionis |K'rdiversas terrariim
parlos saiirli Aposloli dispiTsi ruisMMil... » ot Unit par le miracle
u|)éréeii la personne de Judith, (ille de(!lharles le Chauve.
12] 49.')6 et Jaulnay, Histoire des èvêques de Senlis, p. 373.
IWf* SESSION, ▲ SENLIS. 57
dale Jaulnay (I), lé nouveau bréviaire du diocèse la recon-
naisseot. Elle trouve au contraire des hostilités impi-
toyables dans Carlier, Deslions, Afforty (2), etc. etc.
ff Les légendes, dit Carlier, rapportées dans la collection
des BoUandistes, sont des romans faits à plaisir par des
écrivains mercenaires pour être débitées pendant la fête
de la dédicace de l'église bâtie à Senlis en l'honneur de
saint Rieul par un effet de la piété du roy Robert. » N*est-
ce point excessif?
Pour éclairer votre jugement, Messieurs, voici quelques
traits de la légende de Saint-Rieul,. traduits mot à mot,
du manuscrit de Saint-Ouen : a Saint Rieul, associé à la
compagnie des vénérables collègues Denys, Rustique et
Eleuthère et autres, dont le très-saint successeur du bien-
heureux Pierre, Clément, embrassant volontiers et joyeu-
sement rhonorable union, etc.. (Rien d'Arles). En
semant avec fidélité la semence de la divine parole, etc..
Par quoi il arriva. Dieu guidant, que le très évéque Rieul
s'était hâté vers les murs des Silvanectes... C'est pourquoi
(1) DeslyoDs, parlant de l'ouvrage de Jaulnay, porte ce juge-
ment : t Quae vero pro historici niunere contra eum su m die-
turus, dicta velim absque ullo prejudicio in alias hominis
virtutes, pielatem scilicet, religionem vitxque omnino eccle-
sîastics modestiam. Vir erat inter nos simplex et rectus ac
limens Deum. Sed si laudandi mores quos habuil optimos et
proprios, exarandi sunt potius errores quos passus est et fura-
tus aliènes. » (Deslyons, première préface, apud Aff. 5704).
(2) ÂfTorty, après avoir copié cette phrase du t^ tome des
Réflexions sur les règles et l'usage de la critique^ p. 1 06 : « On
a banni du bréviaire de Paris plusieurs compositions où il y
avait des choses fausses ou choquantes, ou supposées, ou alté-
n^, > ajoute : « On peut mettre de ce nombre l'histoire de saint
Rieole. > Âfi., III, 3^5. >
58 CONGRÈS ARGHÈOLOGIQUB DK FEAIfCE.
le bienheureux aréopagiie Denys, d'abord couronné pa:
le très-invincible apôtre Paul de l'infule blanche du pon
tificat, puis destiné par saint Clément aux Gaules, rési-
dant à Paris, dirigeant volontiers le saint et glorieu}
Rieul, décoré du même honneur du souverain présulatai
castrum de Senlis, envoya par contre (vero) Lucien et sa
compagnons, Lucien, embelli de l'ordre sacerdotal à Beau<
vais... Le peuple de Beauvais... supplia.. • Rieul d'élevei
son athlète à l'autorité épiscopale... Rieul n'hésita pas â
aller (vers saint Lucien) d'un pas rapide... Le susdit
Lucien avec Lucius s'appliquait à mener dans le servia
de Dieu (les Bellovaques). » Saint Lucien était mort dans
une (sédition de grands). Rieul l'apprend à ville Canaan
(Canneville, près de l'Oise). Ajoutez, si vous voulez, que
saint Rieul avait été baptisé par saint Jean l'Évangéliste,
détail que Demonchy et Jaulnay ont recueilli certes avec
joie après le manuscrit de saint Germain des Prés, Vin-
cent de Beauvais et un martyrologe bénédictin de Saint-
Nicolas, près Senlis, dont Afforty rapporte : a Extrait d'un
livre ancien, relié en parchemin sur ais de bois où se
trouve au haut de la première page d'une écriture mo-
derne : a Martyrologium regulœ S^^ Benedicii et necro-
logium quœ leyebaniur quotidie post primam in capUulo
S** Nîcolai. 9 Au martyologe se trouve : « IX* Kal.
maii, apud Silvaneciis urbem, depositio S^^ litguli, ditei"
puli 5*' Johannis Evangelistx qui cum Dianyiio in GallioM
i^eniens predicie urbis ordinatus Fpiscopus, in eodem loeo
plurimis virtutum signis venerandus usgue hodie refulgei
(Atr. X, 573). » Complétez cclto série d'additions et de
fourrures, vous arriverez à lu vie do saint Rieul que le
bon Jaulnay a si amoureusement traduite (voir Vincent
de Beauvais], embellie et commentée, et dont voici les
chapitres : ch. I. Saint Rieul , né « en la ville d'Ar-
XUY* SESSION, A 8ENLIS. 59
giYe, située près d'Athènes, bien qu'aucuns tiennent
qa'il était natif Hycène, près d'Argive » courut en Judée
«Dtendre saint Jean l'Évangéliste, reçut de ses mains le
baptême, revint dans son pays où, trouvant ses parents
morts, il vendit ses biens. — Ch. II. Saint Rieul, re-
toarnant vers saint Jean, est consacré au Seigneur par
la tonsure cléricale, et recueille de la bouche de son
maître l'affirmation prophétique qu'il ne mourrait point
martyr. — Gh. lU. Saint Rieul avait quarante -deux
ans lors de l'exil du grand disciple à Pathmos. —
Ch. lY. Saint Rieul visite saint Denys à Athènes.
Tous deux avec Rustique et Éleuthère se rendent à
Ephèse pour saluer Jean qui vient de retrouver sa
liberté , puis à Rome où saint Clément occupe le
siège de Pierre. — Ch. V. Saint Rieul est ordonné
prêtre par saint Clément, réunit les membres de la
Mission Gauloise, reçoit pour chef saint Denys et est
consacré évéque par le même saint Clément, qui transmet
à Denys Rieul et la puissance que lui-même a reçue du
Christ. — Ch. VI. Saint-Rieul est laissé à Arles par saint
Denys, qui lui demande d'aller, sitôt sa mort, au lieu de
son martyre et de là à Sentis. Temple de Mars renversé
par saint Denys. (Vincent de Beauvais). Mort de saint
Denys en 119. — Ch. VII. Missions de saint Saturnin,
de saint Eugène, de saint Martial. — Ch. VIII. Saint Rieul
aune vision du martyre de saint Denys. — Ch. IX. Saint
Rieul, laissant à Arles saint Félix ou Félicissime, va à
Paris où la sédition n'est pas encore calmée, loge chez
Catulla qu'il convertit, voit le pays débarrassé des fureurs
de c Fe$senniu8ii, qui court à Rome à la première nou-
velle de la mort de l'empereur, est o nonce » ou plutôt
«deuxième évêque de Paris » , dédie la chapelle Saint-
ûôiys l'Estrées, consacre Mallon (Mellon] à sa place et
60 GONGABS ARGHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
gagne Senlis par Louvres (Lavitra. Vincent de Beauv.) —
Ch. X. Saint Rieul à Louvres : statue de Mercure ren-
versée, église bâtie sous le vocable de la Trinité et de Notre-
Dame. — Senlis : Gilice ou Calice (Callicie. Vincebt de
Beauv.) parente de Catulle, reçoit saint Rieul; âne d'Ana-
tolius d'Arles. — Ch. XI, XII, XIII. Prodiges à Senlis:
Délivrance des prisonniers, conversion du préfet Quinti-
lien et de tout le peuple; bapténae public; cimetière;
église bâtie, etc.. — Ch. XIV. Fontaine miraculeuse for-
mée de ses larmes. — Ch. XV. Saint Rieul arrive trop
tard pour sacrer saint Lucien. — Ch. XVÏ. Grenouilles
de Rully (à Vicus Juliacus, Vincent de Heauv.) Saint Rieul
meurt le 23 avril 161, cinquante et un ans après saint
Jean, quarante après saint Denys. Il avait cent neuf ans.
Sépulture brillante en sa cathédrale, « à l'Orient de U
ville, » dit Vincent de Beauv., dans l'église des Saints-
Apôtres Pierre et Paul. Est-il nécessaire de faire remar-
quer combien de ces traits de la vie de saint Rieul sup-
portent difficilement une critique un peu sévère?
V Saint Rieul m) à Argive ou à Mycènes! Le nom de
saint Rieul ne trahit guère une origine hellénique. J^
suis porté à croire qu'il exista une certaine mode de faire
venir de Grèce nos premiers missionnaires. Voir légende^
des SS. Autonin, Sanctin, Nicaise (né à Athènes), etc. clr.
2° Ses relations avec saint Jean ne sont-elles point nue
des manifestations de cet amour de clocher qui voulait
illustrer chaque patron, en imaginant entre lui et quel*
ques héros de Tévangiie des liens d'intimité (I)?
3° Saint Rieul, selon la légende, vint avec saint
Denys, saint Eugène (Marcel) et autres, que saint Clément
envoya dans nos pays. Pour saint Denys, l'on saitlesopi-
(1) Mission aj)ostolique; — baptême donné par saint Pierrp;
XLlV SESSION, A SENUS. 61
lions diverses qui séparent et sépareront toujours les
hag:iograph^s. Pour saint Eugène (Marcel] qui, d'après les
manuscrits, la chronique plus que singulière de Flavius-
Dexter, le diptychon Toletanum de Jérôme de la Hi-
gnera, etc., fut évéque d'Arles, de Toulouse, de Tolède,
panégyriste de saint Denys, son maître, et martyr à
Deuil, dans le Parisis, qui ne sait combien sa légende
s'est inspirée comme beaucoup d'autres, de la légende de
ttint Denys. — a Les autres » quels sont-ils?
4* a Quos Clemens amplectens, etc. » dont l'idée et
quelquefois le mot à mot se rencontrent dans les passions
ie saint Denys, de saint Lucien, de saint Julien, etc. etc..
ne sent- il pas l'influence de l'épître supposée de saint
Jacques à saint Clément, laquelle, avec les fausses décré*
taies, fut une des grandes duperies du ix'' siècle?
5* L'expression a divini verbi semina » décèle pareille-
ment une imitation évidente des vies de saint Denys.
6* L'épisode très- étendu de saint Denys l'Aréopagite,
%e de saint Paul, évéque d'Athènes, visiteur de saint
Clément, etc., n'est-il point une addition faite sous l'in-
âueuce des opinions aréopagitiques.
7' La parenté de Gallicia avec Gatulla me trouve un peu
iocrédule.
8* Certaines légendes de saint Rieul amoindrissent saint
Lucien au profit de l'apôtre de Senlis. Saint Lucien,
qui ne parait aucunement dans les gestes de saint Rieul
que Vincent de Beauvais nous a conservés, est intro-
duit en d'autres versions comme un disciple subalterne.
9* Pourquoi la légende de saint Rieul parle-t-elle simul-
tanément d'un Lucianus et d'un Lucius? L'hypothèse très-
- bâton ressuscitant de saint Pierre entre les mains de saint
^ront, de saint Euchaire, de saint Martial, etc.
tu CONGRÈS ARCHÉOLOGIOrS VE FRANCE.
II.
Une seconde opinion amène saint Rieul dans le pays
de Seniis à la fin du m* siècie ou même au début du
IT*. Sic Deslyons dont je n*ai point l'intention , Dieu
m'en garde! de me constituer le champion, qui fait
de saint Rieul l'un des douie prédicateurs de la Gaule-
Belgique; Tabbé du RueU un chanoine de Seniis, auteur
de remarques sur les évéques de Sentis (Aff. X 5728), le
chantre Rouyer (1766), le bréviaire que M. de Roque-
laure édita en 1176, etc.^ qui placent sa mort en 280;
Broisse qui préfère la date de 290; Carlier, et à sa suite
M. Vatin, qui reculent ce bienheureux trépas jusqu'en 295.
Selon ces derniers, saint Rieul aurait vécu sous quelqu'un
des successeurs de Maximilien Hercule -;305) ; à quelle
époque précise? « On ne saurait le dire. » Le martyrologe
d'Csuard se contente de cette indication très -générale:
« Apud castnim Silvanectensium depositio sancti R^:uli
qui et confessoris. • « Les empereurs* » dit Carlier, cité
par Afforty, t. XI, page 22, « qui succédèrent à Maxi-
mien Hercule confièrent le gouvernement des Gaules à
des préfets moins animés amtre les chrétiens que Rictio-
vare. Saint RieuK qui vécut sous ces empereurs, profita
de leurs sentiments pacifiques, etc.. • M. Graves fixe le
« dies natalis • de saint Rieul à Tan 312.
Voici les raisons négatives et positives que l'on allègue
en ia\eur de cette chronologie.
1* Le peu de crédit des légendes que j*ai indiquées et
dont la source première semble à Deslyons ^i , le Gélestin
« Arrortv X. 57U.
XLIY' SESSION, À SENLIS. G5
d'Irlande, dont il est parlé dans le maanscrit d'Arles.
• Les partisans de ces dernières opinions, o disent les Bol*
landistes, a traitent à peu près les légendes de saint Rieul
comme de pieux romans, n
^ Le silence sur ce point, de certaines sources hagio-
graphiques importantes. Le martyrologe de saint Etienne
d'Âuxerre annonce seulement : a Saint Rieul, évoque de
SeDhs B ; le martyrologe d'Arras : a Depositio S. Reguli,
episcopi et confessoris a ; les manuscrits de S. Martin de
Toumay et de Lessies : o Silvanectis depositio S. Reguli
episcopi et confessoris (i) o; Bède et Adon : a Apud cas-
trum Silvanectense depositio S. Reguli ejusdem urbis
episcopi » ou d Apud castrum... episcopi et confessoris
primi civitatis ipsius », ou a In Francia civitate Silva*
nectisS. Reguli episcopi et confessoris d, ou autres for-
mules semblables.
Les éditions les plus pures d'Usuard ne sont pas plus
explicites : a Kalendas aprilis apud castrum silvaneclen-
sium depositio S. Reguli episcopi et confessoris. d — Le
martyrologe de Senlis, lequel fait mention de la mort de
saint Rieul n'en marque ni le jour, ni l'année; on y lit
seulement: a Beati Reguli, peractaprsedicatione,sanctitate
etmiraculis clarus...inipso territorio sanctoquievit fine.»
Nota. — Il faut, pour être exact, avouer qu'un martyro-
loge ancien de saint Rieul contenait : a IX'^ Calendas maii
apud Silvanecti civitatem depositio sanctissimi Reguli
episcopi et confessoris quem S. Glemens pontifîcâlis ordinis
gratia consecratum cum beato Dionysio direxit in Gallias
peractaque prœdicatione in ipso territorio sancto quievit
fine j>, ce qui sent l'interpolation.
3* Les contradictions que cette chronologie rencontre
(1) Voir Aff. IV, 4920, etc.
XLIV* SESSION. 5
60 CONGRÈS ABCHÉOLOOIQUE DE FRANCE.
dans plus d'un monument important, comme les vies
des saints Fuscien, Yictoric et Gentien, telles qu'elles sont
rapportées par du Bosquet, par les anciens lectionnaires de
Senlis, etc. (AfF. X, 5725), — comme les actes de saint
Quentin, etc., lesquels font de saint Rieul un confempo-
rain a de cette bande de martyrs divers qui est venue
sous Dioclétien sanctifier notre sol ». (Boll.)
4^ Le soupçon d'une confusion entre deux Rieul, Tan,
évéque d'Arles; l'autre, évéque de Senlis. Notre saint
Rieul fut-il évéque d'Arles? la légende de saint Tau-
rin (I) Taffirme ; le nouveau martyrologe romain le dit ;
la vie de saint Rieul, d'après les manuscrits de saint Ouen
et les matyrologes supra indiqués se taisent sur ce point.
t> a La liberté , t dit Carlier, a avec laquelle saint
Rieul a exercé son zèle, confirme déplus en plus le senti-
ment qui le fait vivre après les persécutions de Dioclétien
et de Maximien. On peut croire qu'il a rempli sa mission
sous Constance Chlore. » Qu'on lise plutôt ces détails de
sa légende dans Vincent de Beauvais, lequel, dit Des-
lyons (2) , est d'accord mot à mot, avec les légendes de
Notre-Dame de Senlis : a Saint Rieuiarrive à Senlis. L'âne
d'Anatolius marque le sol du signe de la croix. Conver-
sion de beaucoup de ceux qui étaient là. Colère des prêtres
(4) La légende de saint Taurin (M août), rapporte entre autres
choses que sainl Denis étant à Arles, y laissa saint Rieul et envoya
Taurin à Ëvreux; que l'apôtre de Paris mourut âgé de 90 ans,
sur les derniers jours de Domiticn; que saint Taurin opéra des
miracles sans nombre; qu'il convertit le préfet Licinius, etc.
D'après des traditions locales, S. Taurin aurait été envoyé
par saint Pierre ; d'après le martyrologe romain, consacré par
saint Clément.
(2) AffortyX,5716.
JLIY* SESSION, A SENUS. 67
Aei idoles. Quiotilien excité par eux. Prison. Délivrance.
Apparition à Quiutilicn. Quintilien et toute la ville béuis-
loit le Christ. Jeûne de trois joues. Dédicace en église d'un
temple païen. Autel de la Vierge. Bapléme du peuple (1).
iCam autem ordinatis ecclesiasticis rébus, ecclesiis con-
gruLS in locis per vicos sdificatis et pastorali soUicitu-
jine parochiam ex more peragraret ut si in officiis divi-
oiset ecclesiasticis cultibus aliquid negligentius fieret,
fidelis Christi cultor cognosceret, coutigit ut quadam die
advicum Juliacum... non modicam christicolœ plebis
iovcnerit multitudinem... catbedram pontifîcalem extra
eodoiam sub dio parari pnecepit... » Suit le miracle des
gRoouilles.
11 est important de remarquer qu'il est arrivé plus
d'une fois que des panégyristes maladroits ont donné à
ia actes très-anciens une tournure plus moderne et que,
ptr conséquent, une critique très-prudente ne doit pas
engérer la valeur de tel ou tel détail de mœurs.
8* Les partisans de l'école qui fait venir saint Rieul au
01* siècle, mettent encore en ligne le catalogue très-court
des premiers évéques de l'église de Senlis. Voici ce cata-
logue, d'après une liste manuscrite que Ton rencontre
lor la marge d'un sacramentaire de saint Grégoire, acheté
far l'évéque Hadebert, entre 871-897 (2).
Regulus, Jogundus,
NiCKXCS, Protritus,
IIahsuetus, Modestus,
Vetustus, Levangius.
Takitus,
I AlfoTty, X, 5744.
<î Sditt Antiqua et xelecta ecclesix Sylianectensis monu-
■ma, etc., par Jean. Deslyons, Alforly, X, 5707.
68 CONGRÈS ▲EGIIKOLOQIQUIS DE FEAKCfi.
qui fut au premier concile d'Orléans en S06-507
plutôt 511. Cette brièveté de catalogue est un arf(umc
de peu de valeur. Le catalogue est-il complet ? rien ne
démontre. Si après le tu* siècle les noms d'Alo, de sai
Amand, de Gontbcrt et d'Yves P' sont omis, semil
extraordinaire que l'on eût fait quelque oubli pour i
temps plus reculés? Puis le catalogue fAt-il complet,
pourrait -on, sans manquer aux règles d'une critiq
sérieuse, supposer des vacances, des évèques régio
naires?...
Cette seconde opinion, qui est la nôtre, a-t-elle le dn
de s*a[iirmor avec un caractère d'invincibilité tel qu'el
puisse taxer d'erreur très-certaine le sentiment adverse?
crois pour ma part qu'il serait excessif de l'affirmer.
Bref, prédications isolées dans le nord de la Gaule, d
le i*' siècle ; œntrovcrse entre les hagiographes sur cet
question : Y a-t-il eu dès cette époque ane mission ofl
ciellc générale dans nos pays? Aucune raison probante i
fixer au T' siècle IVpiscopat de saint Denis de Paris, i
de le confondre avec s;iint Deuys TAréopagite; de gravi
raisons d*amonor saint Lucien dans le Beauvaisis a
nr sitVio. \Au\M que do lattachor à la mission Clémentini
aucune oontianoo soriouso à prêter aux circonstances c
ohriMiologie et aux traits de mœurs que l'on renconti
dans la vie de s^iint Uieul. a In dubiis libcrtas. »
M. laMv de Meissas. aumônier de l'hôpital Greffulhe,
Tans, deiuand*' la j^arolo e; fait des nfeerves sur les opi
nu^n* e\\^niu<vs |v^v M. Muiler. Il annonce qu'il se pro
jv\!«,^ de lui i>i^|v\i»lix^ *ians une privhaiuo séance.
M. le r«\s\,ïeni .vv,;ne a^îe J^ M, do Meissas de ses ré
XLIY* SESSION, A SENUS. 69
f, et loi répond qu'il est inscrit pour traiter dans une
piDchaiiie séance la 21* question du Congrès.
Enfin, H. de Gaiz de Saint-Aymour, secrétaire général
la Congrès, lit une note sur les Arèues de Senlis. Cette
note est aintfi conçue :
Arènes de Senlis.
Dans la dernière séance de son Conseil d'administra-
tion, la Société française d'Archéologie voulut bien voter
DM petite somme pour faire procéder à la fouille d'une
pirtie de nos Arènes, qui préoccupait à juste titre les ar-
diéologues : je veux parler du puits qui se trouve du côté
de la principale entrée, à deux mètres seulement du
podium. Ces fouilles viennent d'être terminées, et je suis
chargé par notre savant directeur de vous en rendre un
eoopte sommaire. Il a même désiré, Messieurs, que je
profite de la circonstance pour rappeler en quelques mots
U découverte et donner une courte description du monu-
ment que nous devons aller visiter au sortir de cette
iéaoœ, et qui d'ailleurs, par sa construction aussi bien
foe par U rareté de ces cirques dans le nord de la Gaule,
eit une des grandes attractions archéologiques de notre
petite cité senlisienne. Je me suis rendu au désir de
fiance dans non sans émotion, mais avee une pleine con-
H. Palustre, votre bienveillante attention.
I.
Tout le monde sait ici, Messieurs, mai^ il est bon de
ienppelor de nouveau publiquement, que la découverte
•ies Arènes de Senlis est due à l'initiative d'un honorable
70 CONGRÈS ARCUÉOLOGIÛUE DE FRANGE.
habitant de Senlis, M. Félix Vernois qui, guidé par son
flair de chercheur curieux et par son désir d'augmenter
les illustrations de sa ville natale, fut mis dur leurs traces
en iSM.
Rapprochant le nom d'une ancienne fontaine, la fon-
des Reines, appelée dans des titres du moyen âge fom
arenarum, d'une dépression circulaire du sol qui existait
dans un plateau en terrasse situé au-dessus de ladite fon-
taine, il eut l'audace de braver le scepticisme et les mo-
queries et de faire donner les premiers coups de pioche
dans ce sol qui recelait le plus important des monuments
antiques de notre ville.
Les débuts furent heureux, car deux jours de recherches
le mirent sur la trace du podium, et les rieurs se tour-
nèrent bientôt du côté de celui que l'on appela dès lors,
dans notre Comité archéologique, l'inventeur, ou plus fami-
lièrement, le père des Arènes. Je ne rappellerai pas ici,
bien que ce soit de Thistoire ancienne, et parce que ces
souvenirs sont hors de propos, les difficultés financières et
autres à travers lesquelles le Comité archéologique de Sen-
lis dut passer pour arriver à mettre nos Arènes dans l'état
où elles se trouvent aujourd'hui. Mon devoir se borne
uniquement à vous donner une description sommaire des
monuments, et je commence sans autre précaution oratoire.
Les Arènes de Senlis forment un cercle elliptique de
7!) mètres dans son plus grand axe et de 68 dans son
plus petit. Quand on se place au milieu, sur Téminence
de terre que l'état de nos ressources n'a pas encore permis
d'enlever, on aperçoit tout d*abord du côté de la ville une
grande entrée qu'il n'a pas encore été possible de déblayer
entièrement, et de chaque côté de laquelle se trouvent
des espèces de loges servant probablement de déga-
gement.
XLIY* SESSION, A SENLIS. 71
En iaoe de celte entrée, vers la ville, se trouve une
autre issue vers la campagne, de même largeur que la
précédente, bordée également de deux loges carrées, com-
muniquant d'un côté avec l'entrée, de l'autre avec l'arène
(lle-méme. Cette entrée est d'une construction tout à fait
semblable à la précédente; elle en diffère seulement en ce
que eeile-ci, celle qui se dirige vers la ville, porte dans sa
muraille des traces de voûte qui, par leur direction ascen-
dante, indiquent qu'on avait à faire en cet endroit à une
rampe rachetant, sans doute, la différence de niveau entre
le fond des Arènes etleplat.eau sur lequel est situé la ville.
Des fouilles ultérieures, lorsqu'il sera possible de les con-
tinuer, éclaireront, du reste^ ce point complètement.
Dans l'autre axe de l'arène se trouvent deux particula-
rités que nous devons noter ici et qui en sont peut-être les
parties les plus intéressantes. Ce sont deux petites cellœ
Btuées en face l'une de l'autre et faisant le pendant des
deux entrées. Ces deux cellœ ont une porte sur le podium
qui ouvre directement sur l'arène. L'une, celle qui se
trouve du côté de la route de Chantilly, ne présente
rien de particulier dans sa construction ; l'autre, au con-
traire, offre dans ses parois plusieurs niches où l'on a
Toulu voir des emplacements destinés à recevoir des statues
de divinités, ce qui a valu à cette construction le nom de
9ateUMm, qu'on lui dunne généralement à Scnlis. Sans
vouloir entrer ici dans une discussion qui ne serait pas à sa
{•lace, — puisque mon rôle doit se borner uniquement à
TOUS donner quelques indications préparatoires à la visite
que nous ferons tout a l'heure, — nous pouvons dire que,
selon nous, ce prétendu sacellum ne serait autre chose
qu'une loge où les gladiateurs venaient se préparer à la
lutte, et les soi-disant niches à statues pieuses, de simples
armoires destinées à recevoir sans doute les onguents,
73 CONGRÈS ARGIIÉOLOGIOUE DE FRANGE.
huiles et autres essences dont ils s'oignaient lecorpsaTu
de descendre dans Tarène.
Si nous quittons maintenant le sol de l'arène propn
ment dite pour monter sur les gradins de l'amphithéâb
lui-môme, nous constatons que cet amphithéâtre éta
desservi seulement, outre ses deux portes d'entrée, pa
deux petites portes, ou vomitoires, accompagnés de dea
corridors qui ne dépassaient pas quelques mètres, de cba
que côté dudit vomitorium. Ces deux dégagements secoo
daires se trouvaient précisément au-dessus des deux petite
loges dont nous venons de parler, et la présence des rest^
de gradins en pierre unis à une construction peut-étr
plus soignée, indiquent que les sièges des personnages le
plus importants de la cité romaine des Sylvanectes 8<
trouvaient précisément au-dessus du prétendu saccllum
Vous voyez par cette description très-somraaire, Mes-
sieurs, que nos Arènes de Scnlis étaient très-pauvres de
construction et qu'elles répondaient parfaitement à ce que
nous appellerions aujourd'hui un thé&tre de province.
Bien qu'on ait trouvé la trace d'une grille ou palissade
qui devait couronner le podium, peu élevé, du reste, on a
peine àcroire qu'on ait pu donner dans ce cirque des combats
de hôtes féroces. 11 est beaucoup plus probable que les létes
germains qui tenaient garnison à Senlis à l'époque où
l'on i)eut faire remonter leur construction, faisaient seuls,
avec quelques troupes de gladiateurs de passage, les frais
des représentations auxquelles ils conviaient sans doute les
habitants paisibles de la cité. Peut-être même ne serait-il
pas trop téméraire d'affirmer que ces Arènes furent faites
pour le délassement de ces soldats germains romanisés, à
l'exemple de ce qui se fit a Champlieu, que nous verrons
samedi prochain, et ailleurs.
Ce qui prouve plus que tout le reste que nos Arènes de
XUT' SESSION, A SENLI8. 73
Seolis sont un monument établi au meilleur marché pos-
sible, c'estlafaçondontonaprocédé pour leur construction.
Une s'agit pas ici, en effet. Messieurs, d'un amphitéâtre
bâti à grands frais au-dessus du sol, comme ceux que nous
admirons à Rome et dans les pays classiques du monde
romain; à Senlis, on a assis les Arènes le long d'une pe-
tite colline, on a commencé par entailler la pente de façon
à établir l'amphithéâtre d'un côté sur la dépression du
terrain; puis les terres mêmes qui provenaient de cette
espèce de déblaiement ont servi à former de Tautre côté
un remblai sur lequel on a construit le reste des gradins.
11 y avait ainsi à la fois économie de transport et écono-
mie de matériaux. Nous signalons tout spécialement à
votre attention cette particularitéde construction très-rare,
puisque, dit-on, elle est unique en Gaule, sauf à Trêves,
et qu'il faut aller en Italie et en Asie Mineure pour trouver
des analogues. On a voulu voir dans ce fait une preuve
d'antiquité et une sorte de fantaisie archaïque; nous
croyons qu'il faut y voir seulement la nécessité de faire à
bon marché et par de petits moyens. En archéologie
comme en toutes choses, les explications les plus simples
sont presque toujours les meilleures.
Comment étaient placées les personnes qui assistaient
aux représentations données dans les Arènes? J'ai dit plus
baut qu'on avait trouvé au-dessus du sacelium quelques
gradins en pierre dont un, mémo, contenait un graffiteou
inscription à la pointe. C'était là, sans doute, que se pla-
çaient, avec les officiers de la garnison, les magistrats de
la petite cité. Quant au peuple, il s'asseyait soit sur le gazon
qui tapissait les pentes, soit, si l'on veut lui prêter cet excès
de luxe, dans des tribunes en bois qui pouvaient être éta-
blies sur les gradins en terre de Tamphitéàtre. Ces tri-
bunes existaient certainement dans plusieurs parties au
74 CONGRÈS AKCHÉOLOGIOUE D£ FRANCE.
looins du cirque et Ton peut expliquer ainsi le grand
nombre de tuiles romaiues que Ton a rencontrées partout
dans les fouilles. Si ces tribunes réservées existaient, elles
étaient, comme on le sait pour d'autres amphithéâtres,
destinées aux femmes, ce qui prouverait, en passant, que
le respect des dames n*est pas nouveau dans notre vieille
ville de Senlis. Ces tribunes ont d& être détruites par un
incendie dont on a trouvé partout des traces nombreuses.
A quelle époque remontent nos Arènes? Je ne tirerai
aucun argument de leur construction. Vous les verrez
tout à l'heure, Messieurs, qui avez bien voulu venir
assister de tous les points de la France à ces assises scien-
tifiques, et c'est à vous de nous dicter une opinion sur ce
point. Nous ne pouvons que vous fournir des éléments
d'appréciation en vous difant que les médailles qu'on a
trouvées dans nos fouilles vont de César à Gratien, mort
en 383. Les plus nombreuses sont celles des empereurs
gaulois Posthume et Tétricus II, sous lesquels la Gaule
jouit d'une grande prospérité; il semble donc que l'on
doit faire remonter la construction des Arènes au moins
au m° siècle. C'est, du reste, l'opinion de presque tous les
savants qui les ont vues jusqu'ici; à vous, Mesieuis, de
vous prononcer en dernier ressort.
Je ne vous parlerai pas, Messieurs, des objets que nous
avons rencontrés dans les Arènes. Ces objets sont nom-
breux, et si nous ne pouvons citer avec orgueil quelques-
unes de ces œuvres d'art qui auraient été l'honneur et
l'illustration de notre jeune musée, nous pouvons du
moins vous faire voir dans nos vitrines un cachet d'ocu-
liste, lapis primus sylvanectensis, étudié par notre savant
confrère, M. Adrien de Longpérier, et beaucoup d'autres
menues antiquités qui ont été signalées déjà dans nos bul-
letins, et que n oubliera pas la monographie qui se fera
xtnr* SESSION, a senlis. 75
certainement un jour de notre amphithéâtre, lorsque l'état
l*a?ancement des travaux des fouilles permettra d'en-
tieprendre cette étude générale. Je n'insiste pas sur ces
oli)et8, puisque vous pouvez les voir dans notre petit
Musée.
II.
Mais je dois vous parler un peu plus Içnguement, Hes-
neurs les Membres de la Société française, du puits de nos
Arènes et des objets qui y ont été retrouvés, puisque c'est
àTotre libéralité que nous avons dû la possibilité de fouil-
ler ce puits. Précédemment on avait seulement mis au
jour la margelle, composée de débris sculptés évidem-
ment d'origine romaine, et l'orifice jusqu'à un banc de
aillasse superficielle d'une épaisseur de 0"Gd centimètres.
Les fouilles, commencées lundi dernier 21 mai, ont dé-
gagé entièrement le puits jusqu'à une profondeur de5*dO
to-dessous du banc de caillasse, soit de 1^3i au-dessous
an bord de la margelle de pierres de taille, qui a elle-
même une profondeur de i*09. Jusqu'à ce niveau de 7*34,
le puits se continue régulièrement avec un grand dia-
mètrede 2*i7 et un petit diamètre de ^^^Oi. C'est assez vous
dire que sa forme est elliptique. Puis tout à coup, nous
avons constaté la présence d'un retrait d'environ 0"35
centimètres, profond de 0">37, réduisant le grand dia-
mètre à i"40 et le petit à i"22. Au fond de cette petite
excavation, le banc de la pierre, percée d'un petit trou de
mine de 0*20 à 0*25 centimètres, probablement destiné
adonner issue à l'eau qui devait sourdre du fond.
Ainsi donc. Messieurs, ce puits, dont la construction
FTéoccupait depuis si longtemps tous ceux qui venaient
76 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
visiter nos Arènes, et où l'on avait voulu voir tour à tour
et selon la fantaisie de chacun, l'entrée d'un sous-sol de
l'amphithéâtre, l'ouverture d'une carrière antique, Té-
gout de l'arène ou un passage souterrain communi-
quant extérieurement, n'était autre chose qu'un vulgaire
puits creusé postérieurement à l'abandon des Arènes pour
fournir de l'eau dans un but impossible à déterminer
d'une manière certaine. Le niveau auquel nous sommes
arrivés est, en effet, à peu près celui des puits voisins
encore en service, et si l'on tient compte de la baisse
très - sensible des eaux dans notre localité, il est certain
que le puits des Arènes devait, à l'époque où il a été
construit, en donner en abondance.
Ce puits enlevé à la pointe, est, en effet, de construc*
tion très -ancienne. On suppose que les Arènes ont été
comblées au plus tard au xv' siècle, lors de la construction
de nos secondes fortifications, et dans tous les cas, il est
certain qu'une batterie était établie sur leur emplacement
lors du siège de la ville, en 1589.
La nature des objets trouvés dans le puits ne laisse
d'ailleurs aucun doute sur son uncienneté. Il était litté-
ralement rempli de débris r<)mains provenant des Arènes,
débris dont plusieurs, par leur importance, nous don-
neutla preuve que lorsqu'ils y ont été jetés, l'amphithéâtre,
quoique abandonné, contenait encore des ruines très-inté-
ressantes dont les restes furent plus tard dispersés et uti-
lisés sans doute dans des constructions, comme c'est
toujours l'usage en pareil cas. Parmi ces objets, je citerai
des restes de marches d'escalier en pierre dure usée par
un frottement séculaire, de beaux fragments de colonDes
dont le diamètre varie de O'iO à 0">50 centimètres et la
hauteur de OKiO à 0»90 centimètres; dos bases, des cha-
piteaux, des fragments du bahut du [mdium, etc.
XLIV* SESSION, A SENUS. 77
Parmi les objets mobiliers, je citerai, outre des ceu-
taioes de tuiles et de aombreux morceaux de fer parmi
lesquels des restes de fourches et de scellements de porte,
des meules aucienoes (une de ces meules a été retrouvée
intacte, la meule tournante encore posée sur la meule dor-
mante), quelques poteries brisées, etc. Mais je dois surtout
attirer votre attention sur une une tuile portant en belles
apitales la fin d'un nom de potier (M]ATRONIS, et quel-
ques fragaients d'ustensiles en bronze, une sorte de petit
vase à onguent en forme de coquetier, les débris d'une
espèce de cassolette en bronze et deux fragments qui ont
pu faire partie de deux lampes. Tels sont, Messieurs, les
modestes résultats de la fouille du puits des Arènes qui,
grtoeà vous, a enfin livré son secret et ne sera plus dans
notre monument comme un mystérieux inconnu. Le
résulut est presque négatif, mais les résultats négatifs ont
ausi leur prix en archéologie.
J'ai fini, Messieurs; puisse la visite que vous allez
faire aux Arènes de Senlis, en attirant de nouveau sur
cet important monument l'attention du monde savant et
des administrations compétentes, devenir le signal du
prompt achèvement de nos fouilles et de la mise au jour
complète d'un amphithéâtre qui, depuis la destruction
it celui de Paris en 1870, est non-seulement le plus
voisin de la capitale, mais encore le seul existant en
France au nord de la Loire !
Avant que la séance soit levée, M. Palustre soumet aux
membresdu bureau et à rassemblée les plans exécutés il y
quelques années par M. Moinet, des restes du vieux châ-
teau et des remparts romains de la cité.
La séance est levée à quatre heures.
78 C05GRiS ÂRCaÉOLOGIOCB DB njJICB.
SÉANCE DU MARDI 29 MAI I8T7.
PRÉ51DE.NCB DE M. PÂLUSTBB.
La séance est ouverle à sept heures et demie du mitio*
Siègent au bureau MM. A. Janvier, président de laSociéli
des Antiquaires de Picardie, et Bélisaire Ledain, anckl^
président des Antiquaires de TOuest. La parole est à
M. l'abbé de Meissas, docteur en théologie.
Évangélisation des Gaules. — Prédication
du Christianisme dans le Pagus Sylva-
nectensis.
Le problème qui Tait l'objet de ce mémoire se rattacha
par tant de points à la question générale de l'évangélisa-
tion des Gaules, qu'il est impossible de l'en isoler. Ne vous
étonnez donc pas si je consacre à cette question une grande
partie de ma lecture. Vous verrez, je l'espère, que c'est
encore là le chemin le plus sûr pour arriver à la solution
du cas spécial qui nous est proposé.
Saint Régulus, vulgairement nommé saint Rieul, à
qui l'on rapporte la fondation de l'église de Senlîs, fit
certainement partie d'une pléiade de missionnaires qui
répandirent la lumière de TÉvangile dans tout le nord-
ouest de Id Gaule. Mais quelle fut Tépoque de leur mis-
sion? Les uns disent la fm du i*' siècle, les autres
la seconde moitié du iir, et chacun s'attache à l'une
de ces deux opinions selon les idées qu'il adopte sur la
manière dont le christianisme se répandit primitivement
dans les Gaules.
JUy* SESSION, A 8ENLIS. 79
Eo dTet, deux écoles se trouvent ici en présence.
La première, qui revendique le nom d'école tradition-
xuliste, et que ses adversaires appellent l'école légendaire,
ratache la fondation de presque toutes les églises de nos
oootrées à saint Pierre ou à saint Clément (t). Tant par
eux-mêmes que par une foule d'envoyés, dont la plupart
seraient des personnages mentionnés soit dans les Évan-
gila soit dans le livre des Actes, ces deux évéques de
Some auraient complété dès les temps apostoliques la
conquête spirituelle d'un pays pour lequel la providence
divine avait manifesté déjà la prédilection la plus tendre
en (lisant aborder à ses rives Marie-Madeleine, Marthe et
laare, les amis de Jésus à Béthanie.
La seeonde école s'intitule école historique; ses adver-
•ûes l'accusent d'être anti-traditionnalisto. D'après ses
ptrtisanSj le christianisme ne pénétra d'abord que dans
|li Les églises auxquelles on prête ainsi une origine aposto-
lique sont :
Oioi la Gaule Narbonnaise : Marseille, Arles, Aix, Tarascon,
Fvvjus. Oap, Vienne, Narbonne, Avignon, Orange , Saint-Paul-
Tnis-Chàteaux, Toulouse, Bèziers, Apt, Lodèvc, Saint-Papoul ;
Ou» la Gaule Lyonnaise : Besançon, Annecy, Sens, Paris,
Hem, Orléans, Troyes, Rouen, Baveux, Évreux, Séez, Auxerre,
Nerers, Tours, le Mans, Angers, Rennes, Nantes;
Ou» la Gaule Aquitaine : Limoges, Bordeaux, Agcn, Poitiers,
Aogoulènie, Mende, Rodez, Caliors, Saintes, Périgueux, Auch,
loorges. Germond-Fcrrand, Le Puy, La Limagne, Autun;
OiDs la Gaule Belgique : Trêves, Strasbourg, Metz, Toul,
Verdna, Cambrai, Tournay, Arras, Reims, Soissons, Cli&lons,
Beannîs, Senlis, Amiens ;
Sans compter que saint Pierre et saint Philippe auraient
evangélisé ia Gaule méridionale; saint Paul, le Roussillon, et
taint Lqc, FArmorique.
80 CONGRÈS ARGUÊOLOGIOUS DB VRASGB.
la Narboonaise, seule partie de la Gaule àt%k devenue, un
siècle après César, assez romaine pour offrir à l'Évangile
un terrain préparé pour le recevoir. Vienne, Arles, Nar-
bonne, auraient été d'abord conquises à Jésus-Christ; puis
des missionnaires se seraient peu à peu avancés vers Lyon,
Besançon, Toulouse, Autun, Bordeaux vi)v villes que
Strabon présente comme les plus considérables des Gaules
à la fin du i*' siècle de notre ère. L'an loâ, une mission
grecque aurait établi soa centre a Lyon, et grâce à ses
efforts, le christianisme, franchissant les bornes de la Nar^
bonnaise, aurait remonté la vallée du Rhône jusqu'à
Langres et à Dijon i.2j. Puis il y aurait eu un arrêt causé
par les persécutions de Marc-Aurèle et de Septime-Sévère,
et ce serait seulement vers le milieu Ju ui* siècle que
l'œuvre de Tévangélisation des Gaules fut reprise avec
assez de succès pour qu'il se trouvât des ^lises sur presque
tous les points au commencement du iv* siècle (3).
J'ai fait une étude assez approfondie des arguments des
deux écoles; la vérité m*a semblé du côté de la seconde, et
je ne crois pas que réglise de Senlis, plus qu'aucune autre
[\j AÎQsi s'explique l'existence d'églises sur les bords de la
Garoooe dès le ir siècle. V. Hieron., ép. un, ad TÂeodoram,
yS De là les premiers martyrs de la Gaule sous la persécution
de Marc-Aurè!e. vers 177 ^V. Sulpice Sévère, livre II), et la
possibilité pour saiot Irénée de réunir à Lyoo. eo 480, no pre-
mier concile bientôt sui\i d'un second.
3 Nous entendons ici par église une chrétienté permanente,
gouvernée ^^r un êvèque « lequel est remplacé quand il fait
défaut. Qu'antérieurement à ces églises, qui seules ont ooe his-
toire, il ait pu y avoir des chrétiens épars dans la Belgique et
ailleurs, nous ne le nions pas. On verra même dans notre appen-
dice que nous produisons un texte de saint Paschase Radbert en
favenr de ce sentiment.
XUV* SESSION, A SENLI8. 81
de nos églises du Noril, puisse justifier la prétention de
Tvfflonter aux temps apostoliques. Sans viser à instruire
ici personne, je présente humblement mes réflexions.
QiuDd vous m'aurez entendu, Messieurs, si quelqu'un
d'entre vous prend la peine de me réfuter, nul ne s'esti-
nien plus heureux que moi de mettre à profit les lumières
nouvelles qu'il produira sans doute.
1" PARTIE.
UAXBSI DES ARGUMENTS DE L'ÉGOLE LÉGENDAIRE.
En attendant les arguments imprévus, je commencerai
pu dire quelques mots des documents invoqués jusiju'à
«jour en faveur des prétentions apostoliques de la plu-
part de nos églises. Ils sont de deux sortes : P des textes
''auteurs connus; 'i* des légendes.
I.
LES AUTEURS CONNUS.
En lait d'auteurs, on cite Tertullicn, S. Irénée, Eusëbe,
Lactanœ, et la lettre des sept évéqucs à Uadegoude. Vi yons
leurs textes :
§ I. — Tertullien.
Le prêtre de Carthage place, dit-on, au rang des peuples
qai croyaient au Christ dès son époque les diverses nations
^ la Gaule, Galliarum diversœ naiionef.
Le passage auquel on fait allusion se trouve au cha-
pitre vu du Traiié contre les Juifs. Les trois mots : GaU
Imm diverisenationes s'y trouvent, eu elfet, mais ils n'y
XUV* SESSION. 6
8i CONGRÈS AHCUKOLÛtilOCE DE FEA>'C£.
ont pas à beaucoup près, croyous-nous, la portée qu*oi
leur attribue. Vous allez eu juger. Messieurs.
Le véhément Africain, entraîné par un de œs mouve-
ments qui lui sonl habituels et dans lesquels il ne prétend
certes pas donner à ses paroles la précision de celles d'un
historien, presse les Juifs à l'ai Je des interrogations sui-
vantes :
In quem enim alium univers» génies credideruni, nisi in
Chrislum qui jam venitf Cui enim et alix génies credide»
runt, Parthi, Medi, Etamitœ; ei qui inhalniant Mesopota-
miam, Phrygiam, Cappadociam; ei incalenies Ponium, ei
Asiam, ei Pamphyliam ; immorantes jEgyptum et regionem
Africx quœ est irons Cyrenem inhabiianiest Rwnani et
incolx; iunc ei in Hierusalem Judxi, et cœierx génies; ut
jam Geiulorum varidaies, et Maurorum mutti fines; His-
paniarum omnes iermini ei Galliarum divers» naiiones, et
Britannorum inaccessa liomanis Inca, Chrisioverosubdita;
ei Sarmaiorum , ei Dacorum , ei Germanorum et Seytka"
rum; et abditarum mullarum geniium; et provinciarum et
insularum muUarum nobis ignoiarum , et quœ enumerare
minime possumusF In quibus omnibus locis Christi nomen^
qui jam venii, régnai.
J'ai cité in extenso pour quo chacun de vous, Messieurs^
puisse juger du Ion do celte page de Tertullien, en appré»
cier l'enflure, et reconnaitre le danger qu'il y aurait à en
prendre au pied de la lettre toutes les expressions. Alors
même que Galliarum diversa* nationes signifierait l'en-
semble des peuplades diverses, au nombre d'environ
quatre-vingts, que Ton pouvait compter dans la Gaule, ces
paroles n'auraient pas plus à mes yeux le caractère d'un
témoignage historique sérieux et précis que leurs voisines :
Univers» génies crediderunt, ou bien : Hispaniarum omnes
iermini.
XUY* â£;>SIOiN, A SKNUS. H3
Mais il y a plus. Galliarum dîversœ nationes veut dire
iussi bien diver$ei nation» des Gaules que les diverses
Mtkm$deâ Gaules, et il eût suffi que des quatre- vingts,
trois ou quatre eussent reçu l'Évangile pour permettre à
TerluUien de s'exprimer comme il Ta fait, même en lui
iuppc«aDt une précision rigoureuse, dont il ne se piquait
cotainement pas.
§ 11. — Saint Irinée.
L'èvéque de Lyon, dans le premier de ses cinq livres
eoQtre les hérésies, cite les Celtes (KAroe) au nombre des
psaples chef lesquels on trouve des églises professant cette
unité de foi qu'il invoque contre les dissidents (i). Quel-
ques-uns prétendent que par le mot Kc^roe, saint Irénée
eotend les peuples compris entre la Garonne et la Seine;
mais, malgré la dénomination de Gaule celtique donnée à
cette partie de notre territoire, cette assertion ne parait pas
iondée. Le mot Celtes avait une acception beaucoup plus
vaste : les Cimmériens de la Tauride, les Scordisques et
les Taurins des rives du Danube, les Boïens de la forêt
Hercynienne, les Cimbres du Jutland, étaient des Celtes.
Et quand on fit du nom générique de tant de populations
éparses dans l'Europe centrale et occidentale un synonyme
<leGalls ou Gaéls ((ra//i), pour désigner l'ensemble des
habitants de la Gaule, c'était déjà dans un sens très-res-
treiut. Nous croyons que c'est dans ce sens qu'il faut
entendre saint Irénée.
Il JLmi evTi al i» riooaviac; é<$ovocvxe *Exx^y;9t9Cc x^e;
ti7iTrrjis9cy, i £ÛL«ic ira^aoc^îôag'tv o-/ri cv tscï; I'Itî^îscc;, 'dvtc
b Ikùntçi ovri xarà rdcç xvscTOÀdèç, ovrc cv \î'fj7rT», ovTt îv
ArC-jq, ovrc «î xorà ftwa roO xo^uov iSpucvoci. (Contra ha
ma, Ub. I, cap. S.
■yjSièJS AlSLIOIt^lTZ 3Ï njJBQL.
*2i*c;: ¥zz-zr.is^ r fciJ^rr? ro*. aisff m» ripi.e
fctciflf ^ ciicfir :•: -r "t Gei> ^la îam* qrd Aënrne à
£it f:::i:'--: fcf-cîXrmx. . ît f-r-ir-^isr. îti» If oc4:»Der: des
5 m. - Tuèéif.
Au iLiz.'jre ii:t î^ ilnq-Lj^-^JT '.im 5e dco htstoire,
uiL^ :i Gi^ilr. %>-%^u ''*"2:rva Çt-Ji^ ^xml u G^Um.
Ccs ÎTrrf*. i.:-::i. r.T :»f-ït-: c^rr qoe à» év^éques.
D'ib»:ri li lî.rsc u^ffcn.:^^- ::r: ::.'^:ifc:T-: puis. quand
<icli ïcrs::. zSiz. ::;-:! ire? :-M t ivi:: ik-rs ea Gauk
d'au**r«s r-sr^q-if "i; .-îr L. î: Ly:::. Jiiiâ pc:^'*Diie ne
:i L: r-f 5.:-? 1:< ^.:.^:i*5c-^^ ir r».zj;:.ra. prinos bons
•e: ".ijerii,'^. :. CsV ivi : r^&s U2 :■:.:: if Tfrre «i reculé où
^i 'T*L\zyizL il vri: l'.e « i:>ù". r.i5 r^fi^icrf . Ce qui prouve.
XUV* SESSION, À SfNUS. 85
Pour nous, nous constaterious seulement ici clicz Lac-
tanoe, s'il était vraiment Tauteur de ce traité (i), soit une
iguorauce profonde de l'état réel du monde, soit un parti
pris d'exagération; et, dans un cas aussi bien que dans
l'autre, nous ne saurions tirer de son texte aucun proGt
pour l'histoire.
§ V. — La lettre des sept évéques à Radegonde (2).
On y lit, à propos de la mission de saint Martin dans
kl Gaules :
AafMe cum ipeo catholicœ religionis exorlu cxpissent
Gellieanit in finibui venerandœ fidei printordia respirare,
HMuead paucorwn notitiam tum ineffabilia perveniisent
Trmiiatii dominicx sacramenta...
Mais, pour citer ce passage à Tappui d'une prétendue
cnogélisation générale des Gaules dès les temps aposto-
liques, on supprime la seconde proposition, do laquelle
il ressort trop clairement que les eirorls des premiers
apôtres de nos contrées n'ont eu que des résultats très-
limités; puis, dans la partie conservée, on traduit Galii-
cmù m fimbus par dans les pays de la Gaule , de façon
à bire ententlre qu'au témoignage des sept évéques, la
religion avait pénétré au cœur de la Gaule, tandis qu'ils
disent seulement qu'elle avait franchi ses frontières.
Pour nous, Messieurs, nous ne saurions trouver aux
<lenz propositions que nous avons citées intégralement
d'autre sens que celui-ci :
Le christianisme pénétra dans les Gaules dès ses débuts
• i I La diose est fort douteuse. Voir Dom Ccillier, Bibliothèque
eu ttuieurM sacrés, tome III.
(t) Candi. GalL, 1, I, p. 348. — Gregor. Turon., 1. IX.
80 CO.NGRÈS ARCaÉOLOGIQUe DE FRANCE.
(personne ne le nie)^ mais la prédication n'y oblint
d'abord que de faibles résultats [c'est précisément ce que
soutient l'école bistorique\
Il y a plus. Qu'au lieu de se borner à cette citation, on
prenne dans son ensemble la page à laquelle elle appar-
tient, on verra que d'après les vénérables auteurs de la
lettre, la divine Providence amena en Gaule saint Martin,
né de race étrangère, précisément pour donner à la Gaule
ce qui lui manquait encore au iv* siècle, même après des
efforts qui remontaient aux temps apostoliques, et ne pas
la laisser en retard sur le reste du monde : Ne quid kk
minu$ acqmireretj quam in oràis circula, prœdieamtiha
aposiolà, cbtinertt.
Voilà pourtant. Messieurs, en dehors des légendes, les
seules autorités qu'on ait pu invoquer^ du moins à notre
connaissance, çn faveur de l'opinion qui veut faire péné-
trer le christianisme dans la Gaule entière dès la lin du
i*' siècle ou le commencement du ir.
Arrivons maintenant aux légendes, et voyons ce qu'il
ep faut penser.
II.
LES LEGEin)E5.
Ici les documents abondent, mais je cherche en vain
les garanties qui seules peuvent fonder la certitude histo-
rique.
En voulez- vous un échantillon? Ouvrons l'immense
collection des Boliandistes, où sont rapportées à l'article
de chaque saint, non toutes les légendes recueillies sur son
compte, mais celles que les pieux et savants rédacteurs ont
jugées le moins indignes d'être prises en considération.
XLIV^ SESSION, A SGNLIS. 87
A la date du 90 mars, nous en trouvons deux pour saint
Wjrulus. La première ost celle que les Bollandistes croient
li plus ancienne et la plus véridique (antiquior et since*
fw). Ed voici la très-fidèle analyse :
Régulus, Grec de naissance, arrive à Rome poussé par
lamour des saints apôtres Pierre et Paul , et s'y trouve
associé à un collège de missionnaires dont saint Denys est
le persounage principal. Clément qui, là comme dans la
plupart des pièces analogues, semble être le successeur
immédiat de saint Pierre, bien que Rome ait eu deux
évéquet intermédiaires, les envoie en Gaule. Ils viennent
tout d'abord à Paris, ville dont, suivant le narrateur, le
ïéjour était alors recherché à cause de l'agrément de ses
pilais royaux, aussi bien que de ses fruits et de ses vignes.
Pertenere.,, ad vrbem Parisiacûm,., primiîuSy qvœ tune
tmporii ex Regum palatiis et frvgum copiis atque vineis
akiTtmis amstnior colebatur. Là les missionnaires se par-
tagent le pays : la cité des Sylvanectes échoit à Régulus.
A peine à l'œuvre, le nouvel apôtre voit les foules se
presser sur ses pas, avides de sa parole. Conversions nom-
breuses. Affluence de malades et d'infirmes : à l'un Régu^
lus rend la vue, à un autre l'ouïe, à un troisième l'usage
de ses jambes, etc. etc.
Suit un portrait du personnage. Il est beau, doué de
toutes les vertus, savant avec cela, et passé maître [péri-
tittimus doctor) en langues grecque et latine. C*était bien
le cas de noter qu'il parlait aussi la langue des Silva-
oectes* d'ajouter à la liste des miracles opiircs en sa faveur
U connaissance infuse qu'il on avait reçue, ou à celles do
ses vertus la longue et patiente étude qu'il en avait dû
(îiire avant de pouvoir se mettre à prêcher. Mais sur ce
point, silence complet.
Cependant Lucien, celui de ses compagnons à qui
88 CONGRÈS ÀRGHÉOLOGTQnE DE FRANGE.
Beauvais était échu en partage, vient d'y être martyrisé.
Régulus, appelé par le troupeau veuf de son pasteur, se
hâte d'accourir. Dès son arrivée, il rend la vue à un
aveugle, en mémoire de quoi le peuple construit aussitôt
une église. Puis il se met à parcourir le pays, préchant,
baptisant, oignant les populations du saint chrême, dédiant
les églises qui s'élèvent de toutes parts.
Un jour, à Kully, l'afiluence du peuple est telle que le
vaisseau pourtant vaste {amplae parietei) de l'église ne
peut le contenir. Régulus fait alors transporter sa chaire
en plein vent, sur le bord d'un étang. Mais son discours
se prolonge tellement que le soir arrive, et les grenouilles
l'interrompent par leurs coassements. Alors il leur
ordonne de se taire toutes, à Texception d'une seule; il
est immédiatement obéi.
Là-dessus, l'auteur ajoute que Régulus a opéré encore
tant d'autres merveilles, que jamais personne ne pourra
tout raconter, et qu'il mourut le 3 des calendes d'avril,
sous le règne de Notre-Seigneur Jésus-Christ, indication
très-pieuse, assurément, mais qui n'aurait rien perdu de
sa portée au point de vue de l'édification, si elle avait été
jointe à quelque chose de plus précis dans l'ordre chrono-
logique.
Eh bien. Messieurs, qu'en dites-vous? Cette pièce vous
semble-t-elle offrir les caractères d'un document histo-
rique ?
Pour nous, il nous est difficile d'accorder la moindre
confiance à un auteur qui parle de Paris sous Domitien
ou Nerva, comme à peine on aurait pu commencer à le
faire au temps de Constance Chlore ou de Julien; qui
parait croire que dès la fin du i" siècle, Tusage du latin ou
du grec était répandu dans toute laGaule; qui certainement
ignore quelles difficultés saint Irénée éprouvait encore à
XL1T* SS8S10N, A SERLIS. 89
(aire comprendre, non pas des contemporains de saint
CUinent, mais de leurs petits-fils, dans une ville, non pas
fwrdue comme la cité des Sylvanectes derrière les bois et
les marais de la Gaule celtique, mais située en pleine
>arbonnaise, pourvue d'un athénée avec des chaires, des
«coles, et pleine de Grecs et de Romains; un auteur qui, à
part cette vague et défectueuse indication de saint Clé-
ment successeur de saint Pierre, sorte de lieu commun
dont remploi se retrouve dans cent pièces analogues, ne
peut préciser aucune date; qui, dans tout le cours d'un
très-long récit, n'a pas un trait, pas un mot qui révèle
quelque idée ni des croyances, ni des mœurs, ni de l'état
social, ni de rien de ce qui pouvait, soit faciliter la mis-
sion de Régulus, soit lui faire obstacle; qui ne sait qu'en-
tasser miracle sur miracle, ayant soin de nous avertir
qu'il en omet une foule, parce qu'il y en a tant que per-
sonne ne pourrait tout raconter; qui présente les régions
de Sentis et de Beauvais comme envahies par l'Évangile
et définitivement conquises à Jésus -Christ dès le temps
de leurs premiers apôtres.
Quoi! voilà des populations entières converties à coups
de miracles (et de fait il n'y avait guère alors d'autre
moyen de les convertir), dos églises bâties partout, un
nombre de fidèles pour qui leurs vastes vaisseaux sont
déjà trop étroits. Fort bien! une chrétienté pareille ne va
pas sans doute rentrer tout à coup dans le néant d'où elle
vient de sortir si merveilleusement, et nous allons la voir
se conserver, sinon s'étendre, puisqu'elle ne parait avoir
plus rien à gagner, sous les successeurs de Régulus.
L'histoire dira ses luttes héroïques sous les persécuteurs
qui, pendant deux siècles encore, ne laisseront guère de
lepos à l'Église; elle comptera ses martyrs, elle attestera
du moins qu'il y en a trop pour les compter.
90 GONGRÈS ARCIIÉOLOOIQUE DE FRANCE.
Au lieu de cela, rien, Messieurs, rien absolument jif ^
qu'au Yi" siècle, excepté sept noms (i) qu'on prêtée^ ^
représenter la suite des pontifes entre saint Régulus ^
saint Lévangius, évoque de Senlis, le premier dont o^
sache quelque chose, et qui mourut en 513.
Ainsi, neuf pontifes auraient rempli un intervalle d^
de quatre cent vingt ans environ, c'est-à-dire qu'ils au-
raient gouverné en moyenne l'église de Senlis chacun
pendant plus de quarante-six ans!
Mais, dit-on, il y a eu des interruptions du sacerdoce
causées par les persécutions.
Comment! au sein d'un peuple gagné en masse à
l'Évangile par tant de miracles que personne ne pour-
rait les raconter tous, voilà que la religion dépérit bientôt
au point que nul ne se trouve plus pour porter le fardeau
do l'épiscopat! Et ce retour aux ténèbres dont elle avait
été si merveilleusement tirée, laisse si peu de traces
dans les souvenirs de la population, que pas un seul
des successeurs immédiats de saint Régulus n'est seule-
ment honoré comme martyr!
D'ailleurs, le renouvellement rendu nécessaire par cet
anéantissement de tous les fruits d'un premier apostolat,
quand, comment, par qui a-t-il été opéré? Il n'y en a
pas trace. Messieurs, en sorte que, pour accorder créance
à l'auteur de notre légende, il faudrait, entre autres énor-
mités, admettre absolument celle-ci, que nul souvenir ne
se serait conservé d'une seconde évangélisation dont
l'effet dure encore, tandis qu'on aurait des détails précis
(1) Ces noms sont, (rapr6s le;; ailleurs de la Gaiiia Chri^
«//rrna ; Niccnus, Mansuolus, Ventislus, Tanitus, Jocundos,
Protatus, Âlodestus.
XLTV* 8B8STOIf, A SEITLIS. 9t
'I rirooostaDciés au sujet d'une première dont tout le
lit se serait rapid^ent perdu I
Et puis, comment admettre Texistence d'une tradition
remontant à saint Clément, laquelle aurait traversé au
xr et au in* siècles huit des grandes persécutions, au y*
Ws formidables invasions qui renouvelèrent la face de la
Gaule, et n'aurait rien gardé de ces terribles secousses,
tandis qu'elle conservait avec tant de soin l'histoire des
grenoailles de Rully?
Pourtant, Messieurs, ce n'est pas un auteur, c'est cent
parmi les légendaires qui rattachent nos fondateurs d'é-
glises à saint Pierre ou à saint Clément. Il semble qu'à un
moment donné, probablement après les invasions du
T*fiècle, les souvenirs aient perdu leur précision, et que
bns une ignorance à peu près générale, la passion du
merreillleux jointe à je ne sais quel amour-propre de
docher, peut-être, hélas ! à des motifs moins nobles, ait
tût éclore de toutes parts ces récits dans lesquels on reliait
on saint au premier pape ou à celui qu'on croyait son
nioesseur immédiat, comme on lui faisait anéantir des
dngons, guérir des malades, ressusciter les morts, ou
porter sa tète dans ses mains après son martyre. Tout
cela rehaussait le mérite du personnage, et profitait à
l'église ou au monastère.
Eh bien, s'il faut vous dire, Messieurs, toute ma pensée
SOT les invraisemblances, pour ne pas dire les impossibi-
lités entassées dans de pareils documents, je n'en vois pas
de plus signalée, de plus flagrante, que la date assignée
par eux à la diffusion du christianisme dans le centre et le
nord de la Gaule.
Ces parties n'étaient pas, en effet, avant l'an 100, péné-
trées par la civilisation romaine, comme Tétait déjà la
Narbonnaise; les voies ne s'y trouvaient pas encore pré-
9i CON'.RÈS ARCUÈiItLoGIOrK !« FIAXGE.
parées et par le tliscrëdit des dieux officiels et par la diffu-
sion dos idées monothéistes, double effet du temps et du
prosélytisme judaïque, dont la Narbonnaise était redevable
à ses centres commerciaux. Bien autre était la résistanoe
offerte à la foi nouvelle par le druidisme, encore pleine-
ment florissant dans la Breta^e, le centre et le nord,
par les cultes germains qui avaient pénétré TAlsaoe et la
Bourgogne, par rattachement profond des Gaulois à leurs
croyances et à leurs mœurs traditionnelles, par les habi-
tudes de vie solitaire, égoïste, indépendante, dans les-
quelles chaque peuplade était rentrée depuis Teffort com-
mun contre César.
Un siècle et demi ou deux siècles plus tard, l'Aquitaine,
la Celtique, la Belgique, étaient percées dans toutes les
directions de voies telles que les Romains les faisaient,
vérifiant à la lettre dans leur construction la parole de
l'Ëvangile : c Tuutc vallée sera comblée, toute coUiue
sera abaissée (1). » Des cités importantes, cités toutes
romaines, avaient surgi sur divers points de leur par-
cours, là où il n'y avait auparavant que des habitations
éparses, tout au plus une enceinte grossièrement fortiQée.
Les cent peu[)lus de la Gaule se trouvaient enserrés dans
les liens d'une organisation qui les forçait à des rapports
multiples, soit entre eux, soit avec les Romains. Le chan-
gement (lu droit public, le renversement du pouvoir des
druides, l'abolition des sacrifices humains, avaient pro-
gressivement modifié Tétat dos esprits. L'usage de la
langue de Rome, la connaissance de sa littérature, avaient
fait davantage encore. Enfin, le mélange des dieux de
rKinpire avec ceux do la Gaule avait ébranlé déjà des
convictions séculaires, les vieilles croyances se détacliaient
(I) Saint Luc, c. ni, v. 5.
XUY* SESSION, A SENLIS. 93
de l'âme du peuple; le besoin d'une autre foi se faisait
sentir, en même temps que l'habitude du changement
en matière religieuse prédisposait les oreilles à recevoir
sans trop de surprise la première annonce de la bonne
nouvelle.
Il me parait impossible, Messieurs, quand on compare
les deux époques, de ne pas être frappé du terrain tout
différent qu'elles offraient pour la prédication de l'Évan-
gile. Assurément la difSculté devait être grande pour les
missionnaires, même après l'an 250 (la lutte qui se pro-
longea durant quatre siècles encore dans nos contrées
entre le paganisme et le christianisme, ne peut laisser
un doute à cet égard); mais, bien que difficile, leur
oeuvre parait alors possible. Il n'en est pas de même un
ûècle et demi ou deux siècles plus lot.
Ah! sans doute, Dieu pouvait envoyer chez nous
ses missionnaires dès les temps apostoliques, comme il
pouvait leur faire guérir des malades, ressusciter des
morts, même anéantir des dragons, quand il eût dû créer
des dragons tout exprès pour cela. Nous ne repoussons pas
de pareils faits en eux-mêmes; mais, pour les admettre,
nous demandons des preuves. Nous en demandons sur-
tout pour celui de tous qui en a le plus besoin, parce
qu'il est de tous le plus invraisemblable, le fait de l'évan-
gélisation de la Gaule antérieurement à cette préparation
providentielle qui précéda TÉvangile dans tout le reste
de l'Empire.
Où sont les témoins? Nous n'en connaissons pas un
seul, et l'on ne produit rien, que des récits anonymes.
La date de ces récits peut-elle au moins être fixée? \tï
des efforts inouïs ont été faits par des hommes aussi
pleins d'érudition que de zèle, pour démontrer que dès
le Yi* siècle, même dès le V siècle, on rapportait aux
94 CONOaÈS AaCUÉOLOGIOUK DK FEADiGE.
temps apostoliques la mission d'ua saint Martial à LimO'
ges, d*un saint Clément à Metz, d'un saint Denys à Paii
ou d'un saint Rieul à Seulis.
Admettons qu'on ait réussi. Qu'aura- 1- on prouvé
Souticndra-t-on que, par un étonnant contraste avec k
siècles présents, tout ce qui s'écrivait alors était vrai?
Dira-t-on que ces antiques parchemins ne sont que di
témoins de la tradition? que leur témoignage est celui c
la foi publique des églises qu'ils concernent? On l'affirmi
je le sais; mais on ne l'a jamais prouvé, du moins
ma connaissance, tandis que les arguments de Técole hii
torique en faveur de l'affirmation contraire me paraisse]
décisifs.
Que plus tard, et grâce à un concours de circonstano
que je ne veux pas examiner, on ait pu croire à cet
prétendue tradition, j'en tombe d'accord; mais c'e
d'une manière absolument subreptice qu'elle s'est intn
duitc jusque dans la liturgie. Ni les Eusèbe, ni les Jérômi
ni les Grégoire de Tours, ni les Sulpice Sévère, ni u
seul des personnages savants et saints qui ont traité, di
le vr, le v% et même le iV siècle, la question de nos or
giucs, n*a cru que révangélisalion complète des GauL
datAt des temps apostoliques. Quant à ces pièces an<
nymosoù se reflète une pareille opinion, si elles cxistaiei
dt^jÀ ilo leurs temps, une chose parait claire, c'est qu'i
les tonaiont dans le plus profond mépris.
Iri« Mcssioiirs. j'arrive à la partie principale de cet
i^tudo. .rai nunitro pourquoi les arguments de l'éco
h^^iiMidairt' 1)0 uio sonihlont pa^ valables; il me reste
vouïi diiv pour%|uoi Tocolo hiétoiique base à mes yeux s
alliiiuations sur los puMvcs le* plus sérieuses.
XUV* SESSION, A SEMLIS. 95
II* PARTIE.
DKS ARGUMENTS DE l'ÉGOLE ilISTOElOUS.
L'école hi;?torique appuie ses affirmations sur deux
sortes de documents : 1** les historiens; i2° Tépigraphie.
I.
LES HISTORIENS.
En fuit d'historiens, nous citerons principalement saint
Grégoire de Tours, Sulpice Sévère, saint Jérôme, Eusèbe,
dont les témoignages sont positifs. Nous mentionnerons
«unité quelques autres auteurs dont le silence nous
semble d'un poids considérable.
§ I. — Saini Grégoire de Tours.
Voici, Messieurs, non plus un anonyme sans autorité,
mais un auteur, que ses antécédents, ses relations, sa
haute situation, la noblesse de son caractère, l'époque à
laquelle il écrivit, recommandent entre tous. Né en 5U,
d'une Ikniille illustre, au pays des Arvernes, petit- neveu
de saibt Dizier, évAque de Lyon, neveu de saint Gall, évé-
•{ue de Clermont, élevé par eux et par saint Avit, archi-
diacre et successeur de saint Gall, Grégoire devint évéque
de Tours, et gouverna vingt et un ans cette église. 11 avait
beaucoup voyagé dans la Gaule. Ses nombreux écrits
'êmoignent de l'élévation de son esprit non moins que de
irieudue de ses connaissances, et quelques défauts qu'on
puisse leur icprocher, personne n'osera nier qu'ils éma-
oeot d'un homme curieux de s'instruire et d'instruire
i ■
96 CONGRÈS ARGUÂOLOOIOUK DB ffEANGB.
les autres. Sil y eut au vi'' siècle un personnage informé
des circonslances qui avaient accompagné Tévangéli-
sation de notre pays, certes ce fut celui-là. N'eu8:$ioDS-
nous de lui que des écrits sans aucun rapport direct avec
la question, nous devrions encore les étudier avec le soin
le plus assidu, et noter au nombre de nos renseignements
les plus précieux le moindre membre de phrase dans le*
quel nous croirions trouver quelque reflet de la pensée de
Grégoire sur les origines de nos églises. Eh bien, Mes-
sieurs, cet homme a consacré précisément ses veilles et
son savoir à celle de toutes les études qui pouvait avoir
avec l'évangélisation des Gaules le rapport le plus direct:
il nous a légué une histoire des Francs.
Certes, si tant d'églises avaient été fondées chez nous
dès les temps apostolique?, si la fleur des personnages
dont il est fait mention dans l'Évangile ou dans les Actes
des Apôtres se fût partagé les cantons de la Gaule poui
les conquérir presque tous à Jésus-Christ, si nos pères
avaient eu pour premiers instituteurs de leur foi, non-
seulement Lazare et ses sœurs, mais saint Pierre, saint
Paul, saint Luc et saint Philippe, Joseph d'Arimathie,
Nathanaël, Zachée, Simon te lépreux, Denys l'Aréopagite,
Sergius Paulus, Trophime, Crescent, Lin, Clément, plus
douze ou quinze des soixante-douze disciples, sans
compter l'hôte de la Sainte Famille en Egypte, son servi-
teur à Nazareth, l'aveuglc-né, l'enfant béni par Notre-Sei-
gneur, le flls du Cyrénéen, l'homme de la dernière Gène,
un domestique du cénacle, et d'autres peut-être que d'autres
légendes font venir dans nos contrées; si la plupart d'entre
eux les eussent arrosées de leur sang, Grégoire Taurait-
il ignoré? Le sachant, l'aurait-il passé sous silence, alon
que, commençant son histoire par un résumé des événe-
ments ecclésiastiques qui précèdent l'arrivée des Francs
XLIV* SESSION, A SENLIS. 97
au-delà du Rhin, il parle explicitement de NéFon, de Do-
mitien, de Trajan, les trois premiers persécuteurs? Au lieu
décela, silence complet jusqu'à Marc-Aurèle (161-180.)
Arrivé à cet empereur, Thistorien des Francs men-
tionne les martyrs de saint Justin et de saint Polycarpe.
Puis il ajoute : a Dans les Gaules surtout, un grand
nombre de martyrs ont remporté pour le nom de Jésus-
Christ la couronne céleste; on conserve encore fidèlement
parmi nous la relation de leurs souffrances. Au nombre de
ces Taillants soldats fut Pothin, premier évéque de Lyon,
qui, plein de jours, expira dans les supplices. Son succes-
seur, le bienheureux Irénée, que saint Polycarpe avait
envoyé à Lyon, convertit, par ses prédications, presque
toute la ville au christianisme. Dans une nouvelle persé-
cution, la cinquième, ordonnée par Sévère, le démon se
senrit de ce tyran pour déclarer à la religion du Christ
une guerre si cruelle que Ton vit égorger une multitude
innombrable de fidèles, et des fleuves de sang inonder les
places publiques (1). d
Notons avec soin ces expressions : «On conserve encore
fidèlement parmi nous la relation de leurs souffrances, )>
Quorum passionum historiœ apud nos fideliter retinentur .
Elles ne sont pas d'un homme à qui les documents font
défaut.
Après cela, il faut aller jusqu'à la persécution de Decius
pour trouver une nouvelle mention des Gaules, dans le
passage suivant, objet de tant de controverses : « Sous
l'empereur Decius la guerre fut déclarée de nouveau au
christianisme, et l'on fit de ses fidèles un tel carnage que
les martyrs ne sauraient se compter. En co temps-là, sept
hommes qui avaient reçu la consécration épiscopale furent
.1) IJLstoire des Francs, liv. ï, cli. xxvi.
XUV« SESSION. 7
98 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
envoyés dans la Gaule pour y prêcher, comme on l'ap-
prend par les actes du saint martyr Saturnin. Nous y
lisons en effet que sous le consulat de Deciuset de Gratus,
ainsi qu'on en conserve un souvenir fidèle, la ville de
Toulouse reçut son premier évêque, saint Saturnin. Voici
les noms de ceux qui vinrent dans notre pays : à Tours,
l'évoque Gatien; à Arles, l'évéque Trophime; à Nar-
bonne, l'évéque Paul ; à Toulouse, l'évéque Saturnin ;
chez les Parisiens, Tévéque Denys; chez les Arvernes,
l'évéque Seréraoiue ; à Limoges, l'évéque Martial. »
Ici, Messieurs, git le point capital du débat. Tout a été
dit pour infirmer l'autorité d'un passage si net et si pré-
cis. Voyons à quoi tant d'efforts ont abouti.
Premièrement, on accuse saint Grégoire de citer inexac^
tement les actes de saint Saturnin. Et pourquoi? parce
que, en 1793, deux érudits espagnols, Ménabrea et Ma-
cédo, découvrirent à Florence, dans la bibliothèque
Riccardi, une copie des actes de saint Saturnin qui, au lieu
de la mention du consulat de Oecius et de Gratus, si con-
forme à l'usage antique, porte cette autre mention, aussi
vague que peu usitée, croyons-nous, dans les documents
des premiers siècles : sous Claude, successeur de Caligula.
Mais ce manuscrit que les prétentions les plus exagérées
ne sauraient faire remonter au-delà du x® siècle, parait
seul de son espèce. Surius, qui édita le premier les actes
de saint Saturnin, en 1570, y avait lu la même leçon que
saint Grégoire de Tours, et Dom Ruinard, qui, pour les
insérer dans son excellente collection des Acta Sincera,
prit la peine de les collationner avec de nombreux ma-
nuscrits (i), dont il donne avec soin les variantes, n'en a
(1) L'un de ces manuscrits, appartenant h i'abbaye de Saint-
Maur-des-Fossés, remontait au commencement du ix* siècle; par
XIIV* SESSION, A SBNUS. 99
point connu d'autres. C'est donc bien évidemment l'au-
teur du manuscrit de Florence qui a mal copié, et non
saint Grégoire qui a mal cité.
Secondement, on rapproche le chapitre xxyiii de saint
Grégoire des actes de saint Ursin, tels qu'on les trouve à
la bibliothèque nationale (Manuscrit de saint Germain,
fonds de M. de Harlay, numéro 369). Or, dans ces actes,
on retrouve les sept mêmes noms d'évéques missionnaires,
sauf celui de saint Martial, dont la place est raturée, et
saint Ursin est désigné comme leur compagnon, en quoi
le récit s'accorde avec celui de VHUtoire des Francs. Mais
en même temps l'apôtre de Bourges est donné comme
l'un des soixante-dix {sic) disciples du Seigneur, envoyé
par les apôtres. On en conclut que les sept vinrent aussi
dès les temps apostoliques, et saint Grégoire est démenti.
Mais, Messieurs, n'est-ce pas procéder bien lestement?
Avant d'opposer au témoignage de l'évéque de Tours,
corroboré par celui de Sulpice Sévère, par celui de saint
Jérôme, par celui d'Ëusèbe, et par tant d'autres preuves,
ainsi que nous vous le ferons voir, un autre témoignage,
avant surtout de déclarer ce dernier prépondérant, ne
conviendrait- il pas de savoir au moins de qui il émane?
Or, Tauteur aussi bien que la date des prétendus actes de
saint Ursin, sont inconnus.
Cette pièce a-t-elle au moins les allures d'un document
sérieux (1)? Qu'il nous suffise, Messieurs, de remarquer
conséquent ii était de beaucoup plus ancien que celui de la
bibliothèque Riccardi.
(0 Ceux de nos lecteurs qui ne pourraient se reporter au
maouscrit de la bibliothèque nationale, retrouveront le texte
dans l'ouvrage de M. Faillon, Monuments incdiis... t. II,
p. 425 et suivantes.
100 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
qu'après avoir constaté le succès très-restreînt des prédi-
cations d'Ursin, en quoi il est d'accord avec Grégoire de
Tours, l'auteur parle d'une multitude innombrable de
fidèles gagnés par lui, en quoi il contredit son propre
récit, non moins que la vraisemblance et i'bistoire
sérieuse; qu'il fait de Léocadius un gouverneur général de
la Bourgogne et de l'Aquitaine, tandis que Grégoire de
Tours, qui descendait de Léocadius et qui parle de lui
très-explicitement, n'eu fait qu'un sénateur.
Et parce que, soit ignorance, soit flatterie, un pareil
écrivain accole la date des temps apostoliques aux quelques
vérités historiques qui subsistent dans son récit, voici
qu'un savant, un saint, un homme à qui sa situation,
son caractère ne permettaient pas de rester étranger à la
question, un homme plus à même que personne d'être
renseigné, Grégoire de Tours, en un mot, est démenti !
Et avec lui Sulpice-Sévère, saint Jérôme et Eusèbe,
sans parler des autres! En vérité, Messieurs, si de pareils
procédés de critique devaient prévaloir, que nul d*entre
nous ne travaille plus à écrire l'histoire des événements
même qu'il a le mieux connus. Loyauté, savoir, talent,
labeur, rien n'y ferait. Si dans quatre ou cinq cents ans
le premier venu s'avisait d'écrire des choses en désaccord
avec nos affirmations, des gens se trouveraient quelques
générations plus tard pour exhumer sa prose de la pous-
sière, et tout fiers de leur belle trouvaille, proclameraient
que nous avons menti.
En troisième lieu, on a tenté de mettre saint Grégoire
eu contradiction avec lui-mômc. Et comment? Parce qu'il
dit de saint Ursin (Gloire des confesseurs, ch. clxxx) et
de saint Saturnin (Gloire dos martyrs, ch. cxLviii) qu'ils
furent ordonnés par les disciples des apôtres, ab aposiolth
rum dtscijjults. Mais rien n'est plus vague que celte exprès-
XLIV SESSION, ▲ SENLIS. 104
sioD, et les règles de la saine critique ne permettent pas
de l'interpréter autrement qu'à l'aide des passages simi-
laires du même auteur. Qu'on se serve des chapitres xxviii
et XXIX de VBistoire des Francs pour élucider le texte de
la Gloire des Martyrs et celui de la Gloire des ConfeS'
mnrs, et l'on verra que saint Grégoire n'a pu vouloir par-
ler à propos des saints Ursin et Saturnin des disciples
mmédiats des apôtres.
Autre contradiction prétendue. Dans la Gloire des Mar-
tyrs (ch. LVi), l'évéque de Tours dit de saint Eutrope,
évéque de Saintes : A beato Clémente episcopo fertur di-
nctvs m Gallias (i). Mais ce n'est là qu'un on-dit, fertur:
on rapporte, il y a des gens qui disent. Pour qu'il y eût
contradiction, il faudrait que Grégoire niât ailleurs que
l'éloignement des temps, la perturbation jetée dans les
souvenirs par les terribles invasions du y* siècle, le défaut
général d'études, eussent produit dès son époque dans
plus d'un cerveau les confusions les plus étranges entre
les origines de telle église particulière et celles du chris-
tianisme lui-même. Or, il n'a nié nulle part l'existence
des récits auxquels cette confusiou donnait lieu, et s'il
survint à cet égard quelques changements dans son esprit,
c'est qu'à l'époque où il écrivit la Gloire des Martyrs, il
pouvait supposer encore que l'opinion de ceux qui fai-
saient remonter l'église de Saintes aux temps apostoliques
n'était pas absolument indigne d'une mention, tandis que
(I) Les auteurs de la Gallia christiana ne relèvent pas de
date certaine dans l'histoire de Téglise de Saintes avant Tan 51 1.
Celle année-là, Pierre !*••, son cinquième évêque, assiste au
concile d'Orléans. Y a-l-il quelque apparence que cinq évoques
aient rempli plus de quatre siècles? Voyez à ce sujet ce que
Doas disons p. A 01 pour l'église de Sentis.
102 CONGRÈS AECHÉOLOGIODS DE FRANCE.
plus mûr et préparé par des études spéciales à ionBù"
îoire dei Franci, il ne crut pas devoir faire à de pareille^
idées rhonneur d'en parler seulement*
Quatrième objection. Grégoire, dit-on, est en contra--
diction avec des écrivains antérieurs. Mais lesquels? Oa
cite Irénée, Eusèbc, Lactance, et les sept évéques dans
l'épitro à Uadegonde (1). Vous les avez entendus, Mes-
HJours, et vous savez quelle différence existe entre ce qu'on
prétend leur faire dire et ce qu'ils ont dit. De plus, vous
verrez tout à l'heure combien il s'accorde avec Sulpiœ
Sévère, saint Jérôme et Rusèbe, sans parler des autres (9).
(Cinquième et dernière objection. Grégoire, dit-on, s'est
trompé |)Our Trophime d'Arles et Paul de Narbonne.
Il y a là, on effet, un point obscur, car il parait acquis
h l'histoire que les églises d'Arles et de Narbonne avaient
été fondées antérieurement à l'an 3^0 par deux person-
nagtw nommés rospectivement Trophime et Paul. Mais
l'historien dos Knmcs ne dit pas que ceux dont il parle
fussent los tiuidateurs. Tout ce qu'on peut conclure de la
mnnièrr do s*oxprimor« c'est que vers 950 les sièges
dWrloii ot do NarlHunio so tn^uvaiont vacants et que deux
dos ;(opt évé(|uos missionnaires en prirent possession.
Ouaut ;^ la sinulittido dos noms, no sVxpliquerait-elle pas
par uno praliquo dont on tnnivo d*autres exemples, pra-
fii|«o qui a fitii pur pn^valoir sur lo siéfc de Rome, où
ollo f^t on*vn^ on xuuour, lo choix d'un nouveau nom
\M\T los Mouvoauv oxôqut^ .' H s<T.u; tout naturol que ceux
qui Nouinout nv\;oUhr Thonîaco lU s s;ùuts fondateurs des
OjjhM^* dWrIos i\ s\c NarlsMiuo, aionî voulu t^re appelés
lAMumo ou\.
XLIT* SESSION, A S£NUS. 403
Qui U0U8 dit aussi que dans les sept il n'y en eut pas
tout simplement deux qui portaient les noms des deux
foodateurs, et que cette coïncidence ne fut pas le motif
qui fit choisir pour l'un l'évéché de Narbonne, pour
l'autre celui d'Arles?
Quoi qu'il en soit, la correspondance de saint Cyprien
{Ep. ui, ad AntanianuTn) nous apprend qu'il y avait en
Gaule, au milieu du m* siècle, un évéque du nom de
Trophime. Un peu plus tard^ la même correspondance
Ep. LXTli, ad StepAanum) nous montre Marcien évéque
f Arles. Admettons que Trophime soit précisément le pré-
décesseur de Marcien, et voilà Grégoire de Tours justifié.
Mais, Messieurs, l'historien des Francs n'a pas besoin
de justification. C'est à ceux qui l'attaquent de prouver
qu'il s'est trompé; or, s'ils affirment, nous ne voyons
pas qu'ils prouvent.
Enfin, trouvât-on dans son texte une erreur portant
sur un ou deux noms, et fût-on en mesure d'établir que
oette erreur est imputable à l'auteur lui-même et non à
»8 copistes, que son autorité u*en diminuerait pas à nos
yeux. Qu'est-ce, en effet, qu'un nom d'homme, un nom
de ville, dans la question générale qui nous occupe ? Un
détail, important peut-être, mais rien qu'un détail. Nous
admettrions sins grande dilTicuUé que saint Grégoire ait
pu glisser daus sou récit, soit par iDadvertancc, soit môme
4 raison de l'inexactitude de quelque renseigucment par-
tiel, un nom pour un autre. Mais de là à admettre qu'il
fe suit trompé de deux siècles au sujet des origines du
christianisme dans les Gaules et des origines de sa propre
église, il y a des abîmes.
104 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
§ II. — Sulpice Sévère.
Nous avons d'ailleurs, Messieurs, pour contrôler Gré-
goire de Tours un autre histcrien, Gaulois comme lui, et
qui l'emporte, sinon par la gravité du caractère et la con-
science comme narrateur, au moins par un6 antériorité
de deux siècles, jointe à un talent littéraire de beaucoup
supérieur.
Né vers 363, dans l'Aquitaine, d'un iamille riche et
noble, voué dans son âge mûr à la pauvreté chétienne, à
la prière et à l'étude, attaché pendant des années à saint
Martin, Sulpice Sévère, qui entre autres travaux nous a
laissé une vie de ce grand pontife, savait mieux que per-
sonnne dans quel état religieux la Gaule se trouvait de
son temps. Les lumières ne lui manquaient pas touchant
les efforts qu'avaient pu faire les devanciers du saint
évêqne de Tours dans nos diverses provinces, contre ce
paganisme dont il constatait autour de lui la résistance
encore si formidable. Si son principal ouvrage n'est pas,
comme celui de Grégoire de Tours une histoire particu-
culière de la Gaule, c'est une histoire de l'Église jus-
qu'à l'an 400.
Malgré ce caractère générai et la forme abrégée de la
narration, ce livre, Messieurs, doit évidemment oflïir
dans le peu qu'il dira relativement à notre pays^ le reflet
(le la pensée des hommes pieux, savants et bien informés
du iv* siècle.
Eh bien ! ouvrons YHistoire sacrée. Au livre !!•, le Sal-
luste chrétien passe en revue les empereurs et signale
ceux qui ont persécuté TÊglise : Néron, Domitieu, Tra-
jan, Adrien. Pas un mot des Gaules à leur sujet. Enfin
il arrive à Murc-Aurèks et, parlant de sa persécution, il
XLIY* SESSION, A SEMUS. i05
ajoute : Ac htm primum irUra Gallias martyria visOf
«rms iran$ Alpes Dei religione suitcepta.
Voilà qui est clair et formel : pas de martyrs chez nous
iTint la persécution de Marc-Aurèle (i). Vous vous sou-
vena qoe Grégoire de Tours n'en signale pas non plus
auparavant, et qu'il commence d*en signaler alors. Mais
il n'explique pas son silence; Sulpice Sévère ne laisse
aocune place au doute. Et s'il prenait fantaisie à quel-
qu'un d'ajouter pour la Gaule au privilège d'être devenue
miraculeusement chrétienne dès les temps apostoliques
edui d'avoir échappé non moins miraculeusement à la
puissance des Néron, des Domitien, des Trajan, des
Adrien, voici que l'auteur de VHùtoire sacrée explique
lui tout au contraire, et de la façon la plus naturelle du
oiondey le manque de martyrs par le manque de chré-
tiens : Serius irans Alpes Dei religione suscepta.
Quand il arrive à Dioclétien et Maximien, sans rien
dire de spécial à la Gaule, le Salluste chrétien parle en
homme qui n'ignore pas quel trihut de sang elle a payé
dans leur persécution. Omnis fere orlns martyrum eruore
infeetus, nous dit-il ; et il signale les actes qu'on en con-
serve : Extant enim mandaiœ litteris prxclar» ejus tem-
pons martyrvm passitmes, qva$ connectandas fwn putavi,
nemodum operis excederem.
Sans doute, Messieurs, il est profondément regrettable
que Sulpice Sévère ne donne pas ici des noms propres, au
moins pour nos provinces. Vous y auriez vu, sinon celui
de saint Régulas, puisqu'il ne fut pas martyr, au moins
ceux de ses compagnons. Mais loin de reprocher à notre
auteur cette stricte fidélité à son plan, nous nous réjouis-
\j Ceci ne doit peut-èlre sViitendro que de la |»ersccution
officieltetneut organisée.
iW CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE PE FRANCE.
sons d'y trouver la marque d'un esprit d'autant plus
digne de notre confiance qu'il est plus ferme et mieux
ordonné.
Telles qu'elles sont, d'ailleurs^ ses paroles nous Boat
infiniment précieuses. Elles suffisent pour justifier un
triage des actes qui nous sont parvenus de certains saints,
martyrs comme saint Denys de Paris, ou compagnons
avérés de martyrs comme saint Rieul de Senlis.
Parmi ces documents, les uns rapportent l'histoire de
ces personnages aux temps apostoliques, les autres i It
fin du m* siècle. Nous rejetons les premiers comme
inconciliables avec VHistoire sacrée, les autres pouvant
rentrer dans la catégorie de ceux dont Sulpice Sévère re-
connaissait l'authenticité, sont par là même admissibles.
§ ni. — Saint Jérôme.
Vers le moment où naissait Sulpice Sévère, saint
Jérôme, plus âgé que lui d environ un tiers de siècle,
consacrait deux années à parcourir la Gaule dans tous les
sens. Il séjournait chez ses divers peuples, étudiant leurs
mœurs, compulsant les bibliothèques, interrogeant les
liommcs de qui la science et lasatressc lui faisaient espérer
des lumières nouvelles. A chacune de ses haltes, il recueil-
lait les souvenirs locaux transmis par la tradition, il con-
versait avoclos vieillards, de qui la jeunesse avait traversé,
déjà virile, la persécution de Maximien et Dioclctien.
Ces considérations, jointes à ce que tout le monde sait
du caractère de saint Jérôme, nous disent assez de quel
poids est son témoignage dans la question de nos origines.
Eh bien! qu'on ouvre la (hronique (TEusèbe qui, vous
n<> rignorez pas, MesKieurs, ne nous est parvenue que tra-
XUy* SESSION, A SENLIS. i07
dttite par saint Jérôme, et qu'on lise d'abord la préface du
Inducteur. Il la termine en nous avertissant expressé-
nent que depuis la prise de Troie jusqu'à la vingtième
auiée de Constantin, il a ajouté de nombreux détails.
Certes, avec un pareil système de traduction, il ne se
lut pas gêné, en ce qui concerne les origines de TËglise
gtilicane, pour suppléer le silence ou corriger les erreurs
d'Eusèbe, d'après les connaissances étendues qu'il avait
SOT la matière. C'est donc bien le témoignage de saint
Jérôme que nous donne ici la Chronique.
Or jusqu'à Marc-Aurèle, comme Y Histoire des Francs
de Grégoire de Tours, comme Y Histoire sacrée de Sulpice
Sérèie, la Chronique se tait sur la Gaule. C'est seulement
4 l'an 169 que nous y lisons : a Dans If^s Gaules un
grand nombre de chrétiens sont glorieusement mis à
mort pour le nom du Christ, et aujourd'hui on conserve
eocore la relation de leurs combats héroïques. »
§ IV. — Eusèbe.
Aux témoignages de saint Grégoire de Tours, de
Sulpice Sévère, de saint Jérôme, nous sommes en droit
«i'ajouter celui d'Eusèbe.
L'évéque de Césarce, qui écrivait au commencement du
n* siècle, n'était pas Gaulois comme les deux premiers; il
o*y a même aucune apparence qu'il ait jamais visité la
Gaule, comme saint Jérôme; malgré cela, si l'évangélisa-
tion de notre pays s'était opérée dès les temps aposto-
liques* si les personnages que la légende fait affluer chez
uous avec une mission reçue soit de saint Pierre, soit de
saittt Clément, y étaient eliectivement venus et y avaient
f'jndv tant d'églises, il n'eût pu l'ignorer : le sachant, il
108 CONGRÈS AECHÉOLOGIOUE DE FRANGE.
l'aurait écrit. Or, ni dans son Histoire Eceléstoiiiquei où
pourtant il consacre à la Gauledes chapitres entiers, ni dan»
sa Chronique, à laquelle saint Jérôme ne nous dit pas qu'il
ait rien retranché, nous ne trouvons rien de semblable.
Eusèbe, comme les autres historiens sérieux des pre-
miers siècles, n'a rien trouvé chez nous qui méritât noe
mention avant Marc-Aurèle. Sulpice Sévère nous en a dit
la raison.
§ V. — Saint Justin, saint Irénée, saint Clément d'Alexan-
drie, Tertullien, Origène, saint Cyprien, Amobe, Lac-
tance, saint Hilaire de Poitiers,
Pour en finir. Messieurs, avec cette catégorie d'auteurs,
penncttcz-moi d'ajouter une remarque. Rien que dans les
quatre prcmicrssiècles,oulreceux déjà cités, nous trouvons
au moins onze écrivains ecclésiastiques qui ont beau-
coup écrit, et desquels nous avons presque toutes les
œuvres. Tous furent des hommes d'une érudition assez
vaste pour ne pas pouvoir ignorer la merveilleuse histoire do
révaugélisatiou de la Guule, au cas où cette histoire, telle
({uc la raconte aujourd'hui l'école légendaire, se fût
trouvée vraie; à\\n génie tels qu'ils n'eussent pus man-
qué de saisir le parti qu'ils en pouvaient tirer.
Eh bien! on peut lire en entier saint Justin, saint
Irénée, saint Clément d'Alexandrie, Tertullien, Origène,
saint Cyprien, Arnobe, Lactance, saint Hilaire de Poitiers;
on n'y trouvera rien, absolument rien, qui puisse favo-
riser les prétentions do l'école légendaire (i).
(1) Voir page M rt suivantes la discussion des textes de
saint Irônce, d*^ Tertullien et <lo Lactance, invoqués par cette
école.
XUy* 8I8SI0II, A 8ENLIS. i09
C'en est asses, je crois, sur cet article. Sans revenir sur
t lettre des sept évéques à Radegonde qui pourtant, vous
Taves vu, abonde dans notre sens; sans entrerdans la dis-
CQMîon des actes de saint Saturnin et de quelques autres
iocaments du même genre qui nous sont absolument
Imnbles, nous sommes en droit de conclure, si je ne me
tXMnpe, que Tétude des écrits vraiment historiques de
DOS premiers siècles ne permet en aucune façon d'ad-
mettre que le christianisme se soit répandu chez nous dès
la temps apostoliques.
H.
l'épigràphie.
Quelque solide que paraisse déjà cette conclusion, elle
le trouve pourtant confirmée encore par l'étude de l'épi-
gràphie.
S'il y avait eu au ii*" et au m" siècle des Églises dans
la Gaule entière, surtout des Églises aussi nombreuses et
aosii florissantes que les peignent en général ces mêmes
documents qui rattachent invariablement leur origyie à
saint Pierre ou à saint Clément, elles auraient laissé
quelques monuments. Or notre sol a été fouillé du midi
aa nord et de l'orient à l'occident d'une manière à peu
près égale; mais nulle part, en dehors de la vallée du
Rhdne ou du littoral de la Méditerranée, on n'a trouvé
ni un tombeau, ni une inscription chrétienne, antérieure
au rv* siècle. Cependant, si les prétentions de l'école
légendaire étaient fondées, ce n'est pas un monument
ÎRilé, ce sont de vastes cimetières que l'on devrait mettre
au jour, car il nous paraîtrait incroyable que les chré-
440 CONGRÈS ARGHÉOLOOIOUK DE FRANGE.
tiens n'eussent pas profité dans les Gaules comme en Italie
delà facilité que la loi romaine leur laissait d'avoir des
lieux de sépulture spéciaux (1).
Vous connaissez tous. Messieurs, l'excellent ouvrage
publié il y a quelques années par M. E. Le Blant sous ce
titre : Inscriptions chrétiennes de la Gaule. Le savant
auteur s'était proposé, en restituant à chaque contrée les
inscriptions fouirnies par elle, de constater, comme il le
dit lui-même, la marche, les progrès de la foi (2). Or
qu'cst-il arrivé? Les données de i'épigprapbie ont absolu-
ment confirmé les témoignages de l'histoire, contraire-
ment à ces prétendues traditions locales qui servent de
fondement aux théories de l'école légendaire. Mais lais-
sons ici la parole à M. Vitet (3) : a II n'est guère de diocèse,
disait-il eu parlant de la France, qui n'ait la prétention
d'avoir reçu lu semence divine presque au premier
moment de sa propagation, et de l'avoir reçue sinon de
saint Pierre et de suint Paul, au moins de leurs premiers
disciples. U'où il suit que cet heureux sol gaulois serait
devenu chrétiou, non-sculcmeut dès la première heure,
mais À i>eu pri's partout en même temps. Kn regard de
ces traditions, fi vous interrogez l'histoire proprement
dite et SOS n'prêsoiitunts.los plus anciens, les plus voisins
\\) Nou» vernuis uu |»eu plus loin, page 413, qu'une des
vie:» legoudairt's do >aiut He^ulus lui attribue letablissemeot
d'un cuut'tièro chrt'tiou ù U {*oxw Ue S^ulis. L'emplacement est
doM^uo d'uno ifXs^\>\\ A>^t^t pr<\'iM' |K>ur qu'on ait chance de le
i^tr\ui\or.sit> jidau>ivnojis>t'rtiou\)aolque chose d'historique,
t^tto its^horv'.he >or4it d:^uo do tous le:> soins du cooiité local,
et l'on ivmpreiui ilo \\\w[W un^s^rtunoe il serait de constater
l'o(H^i|ue A t4v|uollo ivuL'iitotii U'> M'pultures les plus aDciennes.
^.n .'v'te'H*!^ Urs vV.Mi'*:>. uur> tSiO» p. lio.
XUy* SESSION, A SENUS. ili
de l'époque en litige, Sulpice Sévère, par exemple, ou
bieo encore Grégoire de Tours, ils vous répondront que la
ibi De s'est introduite dans les Gaules que très-tardive-
oeot; qu'elle h suivi d'abord le littoral de la Méditerra-
née, puis remonté la vallée du Rhône et pénétré au
œntre et vers le nord, mais avec des fortunes très-diverses
et des progrès très-inégaux. Voilà deux versions en pré-
leooe. A laquelle Tépigraphie donnera- t-el le raison?
Quelle 8oit en droit d'intervenir, personne, ce nous
semble, ne peut le contester.
« Les monuments antiques trouvés jusqu'à ce jour,
d'où nous sont-ils venus? De terrassements, d'excavations
que l'exploitation de la propriété privée, les travaux
d'utilité publique, les besoins de la vie sociale, en un
mot, rendent sans cesse nécessaires, dans une mesure à
peu près égale, sur tous les points du territoire. Si donc, de
province à province, la différence est grande en ce genre
de richesse, cette différence signifie quelque chose. Les
découvertes ont dû se multiplier là surtout où la terre
avait gardé des monuments en plus graud nombre, et les
lieux qui n'en ont point fourni, assurément en avaient
peu reçu. L'épigraphie, sur ces questions, est donc fondée
à rendre des arrêts à peu près souverains. Or, que dit-elle
ici? Que dans la Narbonnaise, dans la Viennoise, dans la
première Lyonnaise, les monuments chrétiens sont infini-
laeDt plus nombreux et plus anciens que dans les pro-
vinces du centre, du nord et môme du sud-ouest. Les
données de l'épigraphie concordent donc exactement avec
celles de l'histoire, et opposent un démenti formel aux
prétentions des traditions locales. »
Telle est. Messieurs, la conclusion de M. Vitet, telle est
celle de M. Edmond Le Hlant; jusqu'à preuve du con-
iTiire* elle est aussi la nôtre.
iiS CONGRÈS JLROHÉOLOOI0U£ D£ FRANCE.
III* PARTIE.
ÉPOQUE DE U. MISSION DE SAINT RÉ6ULU8.
Maintenant que nous avons déblayé le terrain, nous
pouvons revenir à saint Réguius pour ne plus le quitter.
Déjà les considérations précédentes nous donnent lieu de
penser qu'il n'a pu se. trouver dans le Pagus sytvanec'
ienêis, je ne dis pas quelque chrétien isolé, mais un fon-
dateur d'église, avant le m* siècle. Cependant comme
nous voyons vers l'an 250 l'Évangile arriver avec saint
Denys chez les Parisiens, il y a toute apparence que
leurs voisins les Sylvanectes ne le reçurent pas beaucoup
plus tard. C'est en eifet ce qu'établit l'étude des docu-
ments qui nous sont parvenus sur saint Réguius.
Ces documents. Messieurs, sont de deux sortes. Les uns
le font venir avant la fin du i" siècle, les autres rejettent
sa mission vers la fin du iir. Mais les premiers n*ont
aucune valeur, ainsi que nous allons le montrer.
I.
Déjà, Messieurs, dans la première partie de cette étude
nous avons examiné l'une des deux pièces publiées par
loH H()llan(listt>s, sous le titre de Vies de saint Hégutus;
vous nvox vu (v ({u'il on faut penser.
Passouit à riLiialysi^ dtî la seconde.
li(V}(ulus, ^rer <l(* naissance comme dans la première,
est Imptist* par saint J(*an l'Évaiigéliste; il distribue ses
lueiis aux pauvres, el euirc dans les ordres. Son premier
JLiy SESSION, A SENLIS. 113
lUltK ayant été relégué à Pathmos, il s'attache à saint
Deo?8 l'aréopagite, et vient avec lui à Rome, où saint
Clément leur fait Taccueil le plus honorable.
L'auteur, qui n'écrivait pas avant le ix' siècle, puisqu'il
raconte la guérison d'une fille de Charles le Chauve au
tombeau de son saint, n'en rapporte pas moins les propres
termes d'un fort beau discours du successeur de saint
Pierre, à la suite duquel saint Denis, sacré évéque, est
envoyé en Gaule. Il arrive à Arles avec Régulus. Le
peapie de cette ville se convertit en masse avec une faci-
lité merveilleuse, si bien que l'Aréopagite, ne voyant plus
là qu'une besogne de seconde importance, celle de gou-
verner une église toute fondée, la laisse à Régulus, et
part pour Paris avec deux autres compagnons. Rustique
et Ëkathère.
Mais un jour, Régulus, disant sa messe, voit sur la
aoiz de l'autel trois colombes portant sur leurs poitrines
en caractères de sang les noms de Denys, Rustique et
Êleuthère. Comprenant que ces trois saints ont reçu la
couronne du martyre, il laisse Téglise d'Arles à Félicifi-
iime, évéque envoyé en mission dans les Gaules par saint
Gément qui se trouve là tout à point, et vient à Paris
où une chrétienne nommée Catulla lui donne l'hospi-
Ulité.
U est chez elle depuis trois jours, quand Fescennius, le
magistrat auteur du martyre de saint Denys et de ses
compagnons, apprenant la mort de Domitien son maître,
en éprouve un tel trouble qu'il quitte son poste et re-
MQToe à Rome (eonfusus Romam rediit,. Ce détail nous
apprend que, d'après l'auteur, nous sommes à la fin de
l'an 96, Domitien ayant été tué le 18 septembre de cette
^née-là.
(Cependant Régulus signale sa présence par des oeuvres
XUV* SESSION. 8
114 CONGRES ARGHÉOLOGIQCE DE FRANGE.
miraculeuses. En un lieu nommé Villa Lavira, il trouve
une foule d'adorateurs devant uue statue de Mercure.
D'un signe de croix, il renverse l'idole ; le peuple émer-
veillé s'empresse de recevoir le baptême.
Bientôt la renommée du thaumaturge arrive jusqu'à
Senlis, où une matrone du nom de Gallicia, d'ailleurs
cousine de Catulla, a un fils possédé du démon. Régulus,
imploré par elle, arrive monté sur un âne. A son premier
commandement, le diable sort de Tenfant sous la forme
d'une chauve-souris, et va se loger dans l'âne. Celui-ci
fait aussitôt un signe de croix avec sou sabot, ce qui met
définitivement le diable eu fuite. L'auteur prend soin de
nous avertir ici que le pontife n'avait pas dressé sa mon-
ture à ce genre d'exercice.
Après un événement si merveilleux, le saint fait un
discours dont l'auteur ne manque pas de connaître le
texte, comme il a connu celui du discours de saint
Clément. Après quoi il baptise le fils de Gallicia avec
une grande foule de peuple, cum maxifna populi muiti-
tudine.
Les prêtres des idoles, qui voient ce succès avec un
déplaisir extrême, vont se plaindre au préfet Quintilien.
Celui-ci les console eu leur ordonnant de préparer pour le
lendemain un grand sacrifice, auquel il se propose de faire
participer Régulus. Pendant ce temps-là, le Pontife achève
sa journée en ouvrant, par le simple contact de son bâton
pastoral, la porte delà prison pour délivrer quelques chré-
tiens qu'on y a enfermés.
La nuit suivante, saint Denys et ses compagnons
martyrs, apparaissent à Quintilien. Sa femme, aver-
tie de cette vision, lui conseille de bien traiter Régulus.
Mais le jour ne revient que pour aggraver la colère
(les prêtres des idoles. En efiet, comme ils venaient de se
XUY* SESSION, A SENUS. il5
cooibrmer aux instnictions données la veille par le préfet,
i'évéque est entré dans leur temple, et sa seule présence a
reoiersé toutes les idoles, qui sont maintenant en pous-
sière.
Aussi Quintilien se voit-il forcé d'abord d*écouter les
ffé&nes, qui demandent que Régulus soit brûlé vif. Mais
b notables (majores populi) intercèdent en sa faveur.
Eofin Régulus survient en personne et prend à son tour
Il parole. Son discours amène au baptême le préfet (que
l'iateur appelle en cet endroit-là comte, cornes)^ sa famme,
les prêtres des idoles et tout le peuple.
R^ulus ayant achevés! heureusement d'établir l'Église
iie Senlis, n'a plus qu'à la gouverner. Aussi le voyons-
nous procéder tout d'abord au choix d'un emplacement
pour un cimetière chrétien (i).
Après cette narration qui tient deux chapitres, l'auteur
en consacre un troisième à trois miracles principaux qu'il
a précédemment omis.
Le premier est le jaillissement d'une fontaine en un
lieu où le peuple manquait d'eau.
Les deux autres sont la guérison de l'aveugle de Beau-
Tais, l'histoire des grenouilles de Ruily, tous deux racontés
déjà par l'auteur du manuscrit de Saint-Omer (2j. Mais
il V a des différences.
Avant la guérison de l'aveugle, le second narrateur fait
(I \ Les iodicatioDs dooDées à ce sujet par Tauleur me pa-
nuseat importantes. Le lieu était extra portam ciritatis,
M pfurima exercebantur negotia. Erant enim ihi deorum
simuiaera, sacerdotum tnensx sacri/icii victimas renden-
timm . atque dirersi tormeuti f/enera quibus sacrificare
Mofenies yrnriter afficiebantur. Voyez la noie 1 «le la p. HO.
4, Voyez p. 88.
116 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE PRANGB.
partir Régulus pour Beauvais où il devait sacrer Lucien
que Denys avait seulement ordonné prêtre ; il apprend
en chemin le martyre de celui qu'il comptait rejoindre.
Le premier le faisait partir seulement sur la réception de
cette nouvelle.
Quant à l'histoire des grenouilles, le second narrateuf
ajoute à ce que vous avez appris du premier un détail
curieux. L'ordre du saint aurait été donné aux gre-
nouilles non-seulement pour celles qui le reçurent, mais
pour leur postérité. Aussi le biographe assure-t-il que
de sou temps elles s'y conformaient encore; c'est sans
doute pour cela qu'il ne nomme pas, comme le premier,
l'endroit où le miracle avait eu lieu.
La mort du saint évéquo est mentionnée, comme dans
le manuscrit de saint Omer, à la suite de ce dernier
récit. L'auteur donne à sou épiscopat une durée de qua-
rante ans.
Vient ensuite un quatrième chapitre consacré aux
miracles opérés près du tombeau du saint. Nous ne
voyons rien à y relever, sinon cette particularité que l'un
de ces miracles n'ayant pu avoir lieu qu'au ix* siècle,
ainsi qu'on l'a déjà remarqué, la composition de l'ouvrage
ne saurait être antérieure à cette épo(iue.
Si maintenant, iMessieurs, l'on compare cette pièce à
celle qui nous a servi de type lorsque nous avons traité
de la question des légendes eu général (1) ; il semble dif-
ficile de ne pas se ranger à l'avis des Bollandistes. Les
deux se ressemblent, mais la première parait plus
ancienne, moins chargée de fables, aniiquior et sinceriar.
J'inclinerais fort à croire que l'auteur de la seconde avait
sous les yeux la première, et qu'il la seulement habillée
(4) Voyez p. 87.
XUY* SESSION, A SBNUS. H 7
à sa mAOière, en y faisant certaines additions dont voici
ks principales :
i« La mention de saint Jean comme premier maître de
aint Régulus ;
3* Les deux on trois discours placés dans la bouche de
les personnages ;
3* La conversion d'Arles par saint Denys, et Tépisco-
pit de saint Régulus dans cette ville avant sa venue à
Puis;
4* Les relations du saint évéque avec les matrones Ca-
tollietGallicia;
5* Plusieurs miracles, ou circonstances ajoutées à des
oiFKles du premier récit pour les rendre plus merveil-
leux encore;
0* L'instantanéité de la conversion du peuple de
Sentis;
7* La fondation d'un cimetière chrétien à la porte de
cette ville ;
S* Une précision plus grande dans les dates.
Ce dernier trait, Messieurs, pourrait au premier abord
sembler favorable aux prétentions de l'école légendaire,
ialheureusement , si le côté chronologique du récit se
rouve traité d'une façon plus complète en apparence,
I en est de même du côté merveilleux; aussi bien que
les faits qui jiourraient passer pour historiques. Or,
lumnd un auteur produit ou enjolive des anecdotes comme
selles du diable-ohauve-souris, de l'âne, des grenouilles,
|uand il ne fait passer son héros par l'évéché d'Arles
|u'â la condition de faire de saint Denys l'Aréopagite le
;»remier évéque de cette ville, et d'un certain Félicis^ime
inconnu aux dyptiques d'Arles, le troisième évéque de la
ooéiDe église, on peut affirmer sans crainte que chez lui
ks détails accusent, non des renseignements plus com-
118 C05GBÈS AIGHÉOLOGIOUE DE F1A5€S.
piets, mais une bameur plus lantaisiste et un mépris plus
grand de la vérité.
Sans doute* il peut y avoir, perdues dans les erreurs de
sa narration, des choses historiques. Ainsi le lieo qui rat-
tache saint Régulus à saint Denys« premier évéque de
Paris, nous parait très-admissible ; il se peut eneore que
saint Régulus ait vraiment occupé le siège d'Arles avant
avant celui de Senlis (1^ ; et ainsi de plusieurs autres cir-
constances. Mais si ces circonstances sont, dès maintenant
ou plus tard* considérées comme acquises à l'histoire, c'est
t^u'en elles-mêmes elles n*ont rien qui répugne, c'est de
plus qu'on aura rencontré pour les établir quelques preu-
ves étrangères aux singuliers documents que nous possé-
dons sous le titre de Vies de 5. Régulus.
Il en est tout autrement de l'époque à laquelle leurs
auteurs rapportent l'existence et la mission de l'apôtre de
Senlis. D'une part, nous avons vu dqà combien U est
invraisemblable qu'elle remonte à la fin du i*' siècle ;
de l'autre, si le vrai peut quelquefois n'être pas vrai-
semblable, il faut au moins, pour être admis comme
vrai, qu'il soit prouvé, et les preuves ici font absolument
défaut.
t La liste des preoiters «^vèqaes J'Aries est donnée d'une
manièie tres-iiilTerente|>ar lesaaWors de U Gaifia CÂristiana
et par les d>pt:qaes qu'a publies Dom Mabilkm Analccta. 1, lU,
p. 4v>:i. édition tie 1690 . Oa trouva d'un oite des Mies de pon-
tites. alUnt jusqu'au nombre de se|'C entre CoocorUos ei Eros..
dout il n y a (sis trace do L'autre. Maigre ceU. il se trouve de
jvir: et d*au;re un K«:ulu> : de fart et d'autre, il succède âTro-
ph:mo e: u:u à Deny^. Duos les dxptiques il a pour soccessenr
imme^.iiat ManQu> rendis que U O-rMia CAristiama met entre
eu\ Martiauus et Yiour : mars ni dacs une liste ni dans Taotre il
n'esc question de Fel.otssiaHf .
ZLIY* SESSION, ▲ SBNLIS. 119
Mais si elles manquent pour le i*' siècle, elles abon-
dent pour le III*. Les Bollandistes en avaient déjà fait la
lemirque ; nous n'avons guère qu'à les suivre dans cette
dernière partie de notre étude.
Il
Les savants auteurs qui nous servent ici de guide, rap-
portent à l'empire de Dioclétien la mission de saint Régu-
las. Us citent à l'appui de leur opinion les actes des saints
Quentin et Lucien, des saints Fuscicn el Victor, des saints
Crépin et Crépinien, de saint Piaton et des saints RuGn et
Vtière.
rious passerons en revue ces divers documents.
§ I. — Aetez des saints Quentin et Lucien.
Claude Héméré, chanoine de Saint-Quentin, a publié
eo 1613, sous le titre : Augusta Viromanduorum vindicata
etillustrota, etc., une histoire de son Église, dans laquelle
il a transcrit un très-ancien manuscrit qu'on y conservait.
Nous y lisons ce qui suit :
> Au temps des empereurs Dioclétien et Maximien,
beaucoup de chrétiens souffraient une très-grave persécu-
tion... A cette époque, le bienheureux Quentin et le très-
sainl Lucien partirent de Rome, et le Seigneur les amena
dans les Gaules. On rapporte aussi, et leurs actes l'at-
testent, qu'avet: eux arrivèrent pareillement les saints
Crépin et Crépinien, Rufin, Valère, Marcel, Eugène,
Victor, Fuscien, Piuton et Régulus (I). »
(1) Temporibus Diocietiani et Maximiani imperatorum
120 CONGRÈS AJIGHÉOLOOIQUE HE FRANGE.
Les actes de saint Quentin, tels que les donne le char-
treux Surius (1), nous montrent également saint Quentin
arrivant avec saint Lucien à Amiens, où ils se séparent.
Us concordent donc avec la tradition constatée par le
manuscrit de l'église de Saint-Quentin, tradition qui nous
montre douze personnages, au nombre desquels on compte
saint Régulus , arrivés de Rome dans les Gaules à la
même époque, et plusieurs d*entre eux martyrs sous Dio-
ctétien et Maximien.
Quant à l'époque, elle ne saurait faire l'objet d'un
doute, car nous la retrouverons indiquée de la façon la
plus formelle pour tous ceux de ces douze sur lesquels
nous avons des données tant soit peu précises.
§ II. — Actes des saints Cripin et Crépinien.
m
Ces actes racontent d'abord la venue dans les Gaules de
Quentin, Lucien et Eugène, trois des douze, au temps de
Maximien et Dioctétien ; Crépin et Crépinien les auraient
muiti christianorum gravissimam persecutionem patie^
hantur, Hac itaque tenipestate, beatissimus Quintinu* et
sanctissimus Lucianus Homa egressi. Domino ducente^ in
Gallias venerunt, Fertur etiam, sed et libeiii eorum cer^
taminum testantar, cumeis SS. CrispinMtnetCrispianum,
Ruffinum, Valerium, Marcelium, Eugenium, Fictoricum^
Fuscinianum , Piatonem atque Regulum pariter adre^
fUsse.
il) Surius a publir û Cologne, des 1570. une collection inti-
luléo : y Ha sanctorum ab Aloysio Upomano olim cons-
criptiv. Ce recueil esl encore aujourd'hui précieux i consulter,
surtout pour la partie de l*année <|ui manque aux Bollandistes.
(/est le cas (wur Miint Quentin, dont la fête tombe le 31 octobre.
XLfT* 8B88I0N, A 8BNU8. 121
suWis. Quoiqu'ils ne disent rien des sept autres, l'Église
de Soissons a toujours regardé ces saints fondateurs
comme ayant eu, non pas seulement trois, mais bien dix
associés.
Dans le bréviaire de cette église, édité sous l'épiscopat
de Charles Bourlon (1656-1685), se trouve un office des
saints Crépin et Crépinien, dont bien des parties, entre
autres les antiennes qui sont prises à peu près textuelle-
ment dans les actes, accusent une rédaction beaucoup plus
ancienne. La leçon IV de Matines commence ainsi :
c Crépin et Crépinien, frères, nobles romains, ani-
més d'un désir ardent de propager la religion chrétienne,
vinrent de Rome dans les Gaules avec dix compa-
gnons (I), sous l'empire de Dioctétien et Maximien. »
Dans un autre bréviaire, celui d'Osnabruck (Hanovre),
édité à Cologne en 1652, par ordre de Tévéque François-
Guillaume, on trouve au 25 octobre un office double des
mêmes saints martyrs. La IV* leçon de Matines, tirée
presque textuellement de Surius, ainsi que les suivantes,
débute en ces termes :
« Sous l'empire de Dioctétien et Maximien, qui s'u-
nirent dans leur impiété pour persécuter l^glise du
Christ, les bienheureux Quentin, Lucien, Rufin, Valère
et Eugène, nés à Rome de familles illustres, se transpor-
tèrent dans les Gaules pour y annoncer le Christ, et ayant
consommé le cours de leur saint labeur par un heureux
martyre, ils s'en allèrent vers le Christ. Crépin et Crépi-
'1; Crispinus el CrUpinianus fratres, nobiles Romani,
Mocteiiano et Maximiano imperatorihus , propagandx
TtliginniM Chrhtianx studio cum decem sociis Roma in
CaUUu profecii,aliis aiio ex conrento euntibus, Suessionem
iS2 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DK FRANCE.
nien, leur» pareils par la foi, la piété et la Daiasanoe, les
ayant suivis, vinrent à Soi88ons(i). »
§ IIL — Actes des saints fiufin et Valère.
Marlot, dans son Histoire de l'Église de Reims, au cb*'
pitre XX, cite un vieux manuscrit rémois, dans lequel ^^
Ht :
« Lorsque Quentin, Lucien, Valèrc et Ruiin, a*^
d'autres, quittant Rome, leur patrie, furent Arrivés d^^
les Gaules, et qu'ils eurent choisi les endroits où ^
devaient prêcher, Rufin et Valère vinrent dans l'antic)*^
ville de Reims, métropole de la Gaule (2). »
Bien que l'époque ne soit pas ici autrement indiqué^ ^
on no saurait douter que ce nc^soit la même que noiJ^
avons constatée pour les saints précédents.
En effet, les actes des saints Rufin et Valère, tels qu'ils
sont donnés par les Bollandistes, au i4 juin, rapportent
(1) Sub Diocietiano et Maximiaiw imper atortbus, qui
una animi impietat" C/tristi ecclesiam oppitgnandam sus-
cepere, beaii viri (Juinthuis, Lucianus, Hufinus, f^aierius
et Euyenius, Roiniv claris orti natalihus, in Galiias Chris-
tum annundaiuri sese contulerunt : feiicique martyrio
sancti taboris cursum consummantes, ad Christum corn-
migra r un t, I-Jos secuti pari fidei derotivne et generis
spfendore Cris pi nus et Crispinianus Suessionetn rené-
runt.
(t) Cum Quinfinus, Luc/anu,s, Valerius et Rufitius, cum
aliis, Roma jjatria relicta, in OaiHas pervenissent, elegis-
xentque sibi toca f/uibus prxdicarcnt, liufinus et yaieriu*
antiquam urbem liemorum Catlix m€troj)olim venerunt.
XL1Y* SESSION, A SENLIS. IS3
leur martyre à Rictiovarus, sous Dioclétien et Maxi-
mien.
Nous lisons également dans la passion des mêmes
saints, composée par saint Paschase Radbert, d'après un
manuscrit que de son temps, c'est-à-dire au ix* siècle, on
regardait comme fort ancien :
t En ce temps-là (il s'agit de la persécution de Dioclé-
tien), des hommes émineots par la constance de leur foi
et la sainteté de leurs mœurs, Quentin, Victor, Fuscien,
Rufin et Valère, partirent de Rome, et, prêchant la parole
de vie aux peuples de la seconde Belgique, encore retenus
par la superstition des Gentils, les appelaient du joug des
démons à la liberté du Christ (1). »
§ IV. — Actes de saint Piatan.
Le martyre de saint Piaton est aussi rapporté par ses
Actes au temps de Dioclétien. On y voit que ce saint
avitété ordonné prêtre par saint Denys et envoyé par lui
à Tournai. Un discours placé dans sa bouche au moment
de son supplice, lui fait rendre grâce à Dieu de ce qu'il
va partager le sort des bienheureux martyrs Denys,
Quentin, Lucien, Crépin, Crépinien et autres nom-
breux (2).
§ V. — Actes des saints Fuscien et Victor.
Daus les Actes de ces deux saints, publiés par Bos-
(<) V. l'Appendice.
[f\ V. les Bollandistes, au l*»* octobre.
124 CONGRÈS ARGHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
quet (1), puis par les Bollandistes, d'après de très-anciens
manuscrits, on lit qu'ils étaient venus de Rome en com-
pagnie des saints Quentin et Lucien, Crépin et Crépinien,
Piaton et Régulus, Marcel et Eugène, Rufin et Valère. Un
peu plus loin, l'auteur raconte incidemment l'arrivée
de Régulus à Senlis, ses • prédications, la conversion des
habitants, etc.
Vous le voyez. Messieurs, Taccord entre ces diverses
pièces est aussi parfait qu'on peut le désirer :
V Toutes nous disent que sous Dioclétien et Maximien,
un certain nombre de missionnaires romains se parta-
gèrent diverses villes de la Gaule-Belgique (2) ;
2® Le nombre des missionnaires est plusieurs fois fixé à
douze, jamais à un autre chiffre ;
3® Les quelques noms cités dans chaque document sont
parmi les douze que donnent au complet les actes des
saints Fuscien et Victor, aussi bien que les actes des saints
Quentin et Lucien (3) ;
4"" Saint Régulus, apôtre de Senlis, est l'un des douze.
Cet accord. Messieurs, joiut à une vraisemblance qui
manque de toutes parts aux narrations des légendaires,
me parait absolument décisif; et, tant qu'un fait ou un
argument inattendu ne sera pas venu renverser l'écha-
(4) Ecclesiœ galUcanx historiaruin, liber 1, Paris, 4633,
in-8».
(2) Reims, Soissons, Aiuicns, Tournai, Saint-Quentin, Senlis,
Beauvais, Pontoise.
(3) Certains dôfenseurs do rôcolo lê^'cndaire ont avancé que
les noms des douzo ne sont pas les nièuios dans tons les (*.ocu-
menls. Il eût p(Mit-êlr« élô pins exari do. dire (|ue pour n-haus-
sor la gloire de rortains sainis, connue saint Euvcro, on a cher-
cha à les rattachera cette pléiade, tjnoiqirils n'en aient pas fait
partie.
XUY* SESSION, ▲ SKNUS. 125
biidage de preuves que j'ai essayé d'élever, je propose
aa CoDgrès de conclure avec les Bollandistes que le chrîs-
tiiQisiDe n'a pas été prêché dans le Pagus Sylvanectensis
iTint la fin du m* siècle.
APPENDICE.
Parmi les auteurs que nous avons cités, il en est
an sur lequel nous croyons particulièrement intéres-
sant de donner quelques renseignements complémen-
taires.
Né dans un diocèse de la seconde Belgique, celui de
Soissons, Paschase Radbert était, vers le milieu du
n* siècle, abbé de Gorbie, dans un autre diocèse de la
même province, celui d'Amiens. Saint et savant à la fois,
il est vraisemblable qu'il connut l'histoire ecclésiastique
de son pays aussi bien qu'on la pouvait connaître de son
temps. Notre impartialité nous fait un devoir de revenir
sur son témoignage.
Les habitants de Basoche, dans le Soissonnais, lui
ayant apporté un manuscrit fort ancien et mal rédigé, qui
racontait l'histoire des saints Rufin et Valère, le prièrent
d'en tirer parti pour leur donner sur le même sujet quelque
chose de meilleur. Nous devons à cette heureuse circon-
stance l'opuscule intitulé : Passio SS. Bu fini et Valerii^
qui termine le volume des œuvres de saint Paschase,
édité par le P. Sirmond, en iGi8. Ce n'est pas, comme
on pourrait le penser, une simple trauscription, ni même
une traduction en latin correct et élégant du manuscrit
de Basoche; c'est une oeuvre propre, pour la composition
de laquelle, la rédaction le prouve, saint Paschase ne
iS6 CONGRÈS ARGHÉOLOOIOUS DE FRANGE.
8*68t pa8 interdit de puiser à d'autres sources que la prin-
cipale.
Le récit débute par un tableau magnifique de la diffu-
sion du christianisme dans les trois premiers siècles.
Bientôt Tautcur arrive à la persécution de Dioclétien,
dont la description précède immédiatement le passage
suivant :
0 En ce temps-là (on peut aussi traduire : dans cette
tempête) (i), des hommes considérables, aussi illustres par
la constance de leur foi que par la sainteté de leurs mœurs,
Quentin, Victor et Fuscien, Rufin et Valère, Crépin et
Crépinien, avec d'autres qui étaient leurs compagaons,
originaires de Homo, préchant la parole de vie aux
peuples do la seconde Belgique, les appelaient du joug
des démons à la lil>erté du Christ. »
Il s*agit bien ici de la mission des doute, à laquelle se
rattache certainement saint Régulus. L'auteur, il est vrai,
ne rappelle pas le nombre, mais les sept noms qu'il inu-
mère ne laissent aucuue place au doute (2). Il continue :
« Ces hommes admirables par leur doctrine, illustres
(Hir leurs vertus, illuminaiout les Gaules comme des astres
rayonnants. Ou priHend qu'ils avaient franchi les fron-
tièrt's dos Gaulos avtv le bienheureux Denys, que le bien-
houmux Clément, (Kmtife romain, avait envoyé pour
ranimer les iwurs gluciS^ dos Gentils par la chaleur de la
foi : mais cola uVst ivi$i\uiciliablo avec la chronologie (3).
Kn oiToU saint IVnys n\nit la ixnironne du martyre sous
yl H%tc tfmfHr;ft*Vf, Si nous :^upprimon$ le lexie latio, c'est
à 04UsoUo s» loii^uour , on lo tr\m\oruit4u:i^ le$ œuvres de saint
r«s<iu><» RAdlvrl *M«u>os |Mr lo IV S rmond. on 1618. in-fol.
il \o\o«p \ik
XLIY* SESSION, A SENLIS. 137
Domitioi César, la seconde année de son empire (1);
tiodis que ceux-ci arrivèrent à la gloire immortelle sous
les augustes Dioctétien et Maximien. Cet espace de temps
ne contient pas moins de deux cent dix ans... Ce qu'il y a
de plus vraisemblable, c'est que Denys éclaira les Belges
quand ils étaient encore pleinement plongés dans la nuit
du paganisme, et commença d'écarter de leurs âmes les
téoèbres de l'infidélité. Pour ceux-ci, comme la clarté de
la lumière avait déjà dissipé les ombres nocturnes, sans
les amener pourtant au plein jour Je la foi, ils appa-
mrait semblables aux rayons éclatants du soleil de vérité,
et portant avec eux la parfaite lumière de la foi, ils chas-
sèrent pleinement la nuit du paganisme... Au temps donc
où une cruelle barbarie ensanglantait sur les autels des
démons les mains qui leur rendaient un culte plutôt impie
que religieux..., où aucune lueur de vérité n'éclairait
encore les cœurs ténébreux des Gaulois, la divine miséri-
corde eut enfin pitié d'eux, et pour dissiper les ténèbres
de la mort, elle donna à des hérauts de la grâce nouvelle
la mission d'arracher la Belgique à l'erreur pour lui faire
commencer de voir la vraie lumière de la foi, et depuis
lors avançant journellement dans la voie du salut, jus-
qu'au temps des susdits Quentin, Rufin et Valère, elle
leoCenuait, quoique ornée d'églises du Christ, des adora-
teurs des démons, o
Nous avons fait dans cette page un certain nombre de
coupures pour ne pas allonger la citation outre mesure ;
mais nous avons conservé avec le plus grand soin, outre
les passages décisifs dans leur intégrité, la physionomie
de reusemble. Elle prouve que saint Paschasc Radbert,
'l)r;e<t-â-direon l'an Hi (\t\ l'cre chrelienne. Il va sans dire
<)ueui»u> taisons ici nos réserves.
128 GONORÉS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
tout ea rattachant la miseion dont faisait partie saint
Régulas, à l'époque^que nous lui avons assignée, ne
croyait pas qu'elle eût travaillé sur un terrain neuf. Son
opinion (i) à cet égard se résumerait en deux propositions
principales :
i® Il y aurait eu dès les temps apostoliques une pre-
mière évangélisation de la Gaule-Belgique;
2® Saint Denys eu aurait été le principal auteur.
Examen de la première proposition. — La première
de ces deux propositions ne nous parait pas inadmissible.
En eflet, les arguments développés dans le cours de ce
mémoire démontrent seulement que la Gaule n'a pas été
conquise à Jésus-Christ dans son entier dès les temps aposto-
liques, et qu'en général la succession régulière des évèques,
à partir des personnages qu'on s'accorde à regarder comme
les fondateurs de nos Églises, ne remonte pas au-delà de
la Qn du m'' siècle ; mais ils laissent le champ libre aux
suppositions pour les temps antérieurs. Le christianisme
portait en lui-même une force d'expansion prodigieuse,
et les obstacles présentés par l'état des pays au premier
siècle de notre ère, tout en s'opposant à sa conversion en
masse, n'ont pu empêcher que des adeptes de la nouvelle
foi y pénétrassent^ môme qu'ils y fissent quelques prosé-
lytes. Les textes de Grégoire de Tours, de Sulpice Sévère,
de saint Jérôme, d'Eusèbe, le silence de tant d'autres
écrivains, inconciliables avec les prétentions de l'école
légendaire, ne sont pas contraires à cette hypothèse. Nos
remarquesmémc surl'épigraphie, incompatibles avec l'exis-
tence de chrétientés nombreuses qui auraient eu certaine-
i4) Hcinarquez qiio cette opinion est très-peu aflirmative. Le
saint abbé de ('.orbie la propose seulement comme lui parais-
sant vraisembiable.
XLIV* SESSION, A SKNLIS. 129
uieot des cimetières spéciaux avec un mode de sépulture
caneténstique, s'accorderaient très-bieu avec l'existence
de chrétiens peu nombreux et dont les tombes auraient,
été mêlées avec celles des païens, sans que rien les en
distinguât. Or, quand saint Paschase parle d'églises
fondées dans la Belgique dès le i"" siècle, il est évident
qu'il n'entend par là que des réunions de chrétiens bien
peu nombreuses et peu florissantes, puisque de son propre
aveu, après plus de deux siècles d'existence, elles s'éten-
dirent tout à coup, non par leurs propres ressources et les
efforts du clergé indigène, si tant est qu'elles eussent un
clergé, mais seulement grâce à une mission envoyée de
Rome ; puisque l'histoire sérieuse prouve qu'elles n'atti-
lèrant pas l'attention des persécuteurs ; puisqu'elles n'ont
laissé aucun monument; puisqu'enfin les personnages
auxquels les siècles suivants se sont accordés à attribuer la
fondation de ces églises ne sont venus, nous l'avons
démontré et Paschase en convient (excepté pour saint
Uenys), qu'à la fin du m" siècle.
ExAifEN DE ul seconde PROPOSITION. — Quant à l'opi-
nion du saint abbé de Corbie sur la mission de saint
iienys au i^ siècle, et son martyre eu l'an 8i de notre
en, nous la croyons absolument fausse ; mais son erreur
s'explique par les considérations suivantes:
Ce qu'il dit lui-même de la façon dont il fut amené à
écrire la Passion des saints Rufiu et Valère, montre qu'à
cette époque il était abbé de Corbie, ce qui place la com-
t^jsition de l'ouvrage entre 8-44, année de son élection, et
H5I. année où il donna sa démission. Mais à ce moment-
il. le monde ecclésiastique, et surtout le monde bénédic-
Mi. venait d'être saisi par Hilduin, abbé de Saint-Denys-
>:'ii-Krd:ice, de la question <lo ruri'u(iagitisinc.
Lu lettre dans laquell*^ ÏAm'i^ lu l)ôli(»niiairc demandait
XLIV" SESSION. \)
130 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
■
à Hilduin un recueil des actes du premier évéque de
Paris, la réponse de Pabbé au monarque, et l'épitre adres-
sée par lui à tous les catholiques pour confirmer son sys-
tème, parurent de 836 à 838. Paschase, encore simple
moine, eut certainement connaissance de tous ces docu-
ments. De plus, il est extrêmement probable que des rela-
tions personnelles s'étaient produites entre lui et Hilduin.
Tous deux étaient bénédictins, et l'abbaye de Saint-Médard
de Soissons, pays natal de Paschase, avait été donnée à
Hilduin avec plusieurs autres par la libéralité royale.
Enfin, si l'on tient compte de la profonde humilité qui fut
un des traits saillants du caractère de Paschase, si l'on se
rappelle qu'Hilduin était de famille noble, tandis que lui-
même était un pauvre enfant trouvé à qui la charité
chrétienne avait seule permis de vivre et de s'instruire ,
qu'Hilduin était prêtre tandis que lui-même voulut tou-
jours rester simple diacie, que la position d'Hilduin près
du monarque, dont il était archichapelain, aussi bien que
dans Tordre de saint Benoit, dont il détenait trois riches
et puissantes abbayes, devait lui sembler bien supérieure
à la sienne, on admettra sans peine que l'autorité de l'abl^é
de Saint-Denys dut en imposer considérablement a celui
de Gorbie. Ce dernier, sans doute, était peu disposé à con-
trecarrer une opinion que le premier s'attachait avec la
passion la plus acerbe à faire prévaloir. Peut-être même
s'y rangea-t-il avec une confiance aveugle, qui annulerait
sur ce point l'autorité de son témoignage.
Discussion. — M. l'abbé Mùller ilemande la parole ot
s'exprime ainsi au sujet du travail dn M. de Meissas :
Liiliscussion, (]u*un(» nîiicontn» lorluitea >oulov<'>eonlro
M. Vixhhô de Moissas et niiii, préseiilo parmi d'autres
XLIV SESSION, A SENLIS. 131
aspects originaux celui-ci : Nous sommes d'accord sur ce
poÎDt (l'hagiographie que saint Rieul est venu dans le
Pagus Sylvanectensis vers la fin du iii*" siècle, mais/xir/a-
gi's sur la valeur démonstrative des arguments qui servent
de hase à ce sentiment, M. de Mcissas leur conférant haut
la main une force de certitude absolument irrésistible,
moi leur refusant un brevet semblable d'évidence. M. de
Heissas est-il trop autoritaire? Suis-je trop mou dans mes
conclusions? Subjudicc lii est. A vous, Messieurs, aux
critiques sérieux qui pèsent la valeur des documents, dis-
cutent le sens exact des textes, reconnaissent le côté encore
obscur des opinions, respectent les découvertes de l'ave-
nir..., aux critiques consciencieux seuls de décider.
Vous comprendrez que je n'ai point l'intention de suivre
dans ses détails l'étude de M. de Meissas ; voici en résumé
les réserves que je ferais, s'il m'était permis, sur ce tra-
vail qui se distingue plus par la forme de l'affirmation
que par la nouveauté des arguments (i).
I
C'est une faute de raisonnement que nous commettons
tous plus ou moins, mais que la critique historique doit
éviter scrupuleusement que de torturer les faits à la façon
de Procruste pour les asservir à des Ibcories préconçues.
M. de Meissas s'est-il suffisamment n)is en garde contre
cet écueil?... Quelques exemples :
f Un texte de TertuUien : a Les diverses nations des
Gaules adorent le Christ » est gênant! a Galliarum
I Voir MM. Taillar, i'ahbe Chevalier, de Tuurs. r.tl»lK> Eugène
BeiUrtrtl. lie Paris, etc.
132 GONORÈS ARGHÉOLOOIQUE DE FRANGE.
divereœ nationes et Britannorum inaccessa Romanis loca
Christo vero subacta. » (Âdv. Juds^s, cap. vu.) Faut-il,
pour diminuer son autorité, alléguer ce que l'on nomme
« l'enflure hyperbolique de l'Africain », ergoter sur le
sens du mot diversx, qui pourrait, ditK)n (je le nie), se
traduire par a diverses*» au lieu de a les diverses d ?
2® Sulpice Sévère qui, pour avoir uni dans son histoire
la gravité du fonds à Télégance du style, a mérité, comme
le répète avec raison M. de Meissas après l'abbé Chevalier,
le surnom de Salluste chrétien, Sulpice Sévère nous a
laissé un texte célèbre.
Parlant de la persécution que Marc-Aurèle excita à
Lyon en 177, il dit : « Sub Aurelio deinde, Antonini
filio, persecutio quiata agitata actum primura intra Gai-
lias martyria visa, scrius trans Alpes Dei religione sus-
cepta (1). » (Hist. sacr., lib. Il, cap. 32.) A-t-on le droit
de conclure en dehors et au delà de ces affirmations : (a)
Avant 177, Ton ne vit point en Gaule de martyres comme
ceux de Lyouy c'est-à-dire exécutés sur une vaste propor-
tion ? — (b) La religion du Christ ne fut accceptée au
delà des Alpes par les masses qu'assez tard. — (c) Cet
assez tard doit ôtre placé avant l'année 177, puisque les
hécatombes chrétiennes dont il est parlé supposent un
certain temps pour former les victimes?... Que l'on me
permette de citer parmi d'autres témoignages, ceux d'O-
rose, d'Eusèbe et de saint Jérôme : a Persecutiones Chrù-
tianorum^ dit Orose (vu, 15.), quarta post Neronem vice,
in Asia et in G allia graves prœcepto ejus extiterunt mul tique
sanctorum martyrio coronati sunt, u Dans les Gaules, »
c'est Eusèbe qui s'exprime ainsi en sa chronique à Tannée
169, « dans les Gaules, un grand nombre de chrétiens
^1) Voir sur ce texte riililu; Chevalier, th* Tours, \). 31.
XLIV SESSION, A S£NUS. 133
sont glorieusement mis à mort pour le uom du Christ, cl
aujourd'hui l'on conserve encore la relation de leurs com-
bats héroïques. » Saint Jérôme, qui a séjourné longtemps
en Gaule et vécu en relation intime avec les hommes les
plus saints et les plus savants de la Gaule, raconte à Théo-
dore /Ep. un) la fondation, vers la 6n du ii* siècle, de
plusieurs Ëgiiees dans TAquitaine et sur les bords de la
Garonne.
d^ Tout le monde connaît le fameux passage de Gré-
goire de Tours : « Hujus [Decii] tempore (entre 249 et
iSljseptem viri [ou episcopi] ordinati ad prasdicandum
in Gallias missi sunt, etc. etc. (Hist. lib. I, cap. zxx,
al. xxvni.)
Certes, j'aime mieux voir Grégoire de Tours avec
les yeux de dom Ruinart qu'avec la critique sèche de
Kries; pourtant n'est-ce point agir avec trop de sans façon
que d'oublier les controverses peut-être insolubles que ce
texte a soulevées et par suite la prudence que tout con-
seille eu ces sentiers.
(a^ Qui ne sait les réserves que font sur les affirmations
de Grégoire de Tours Barouius, qui parle a de auctoris
âiniplicitate )> , Papebrock (Boli. junii, t. IV), Cantu.
Guizot, Quicherat, qui le qualifie de a légendaire »,
etc. etc.?
h. Les actes de saint Saturnin, qui sont l'une des
sources historiques que Grégoire de Tours a confondues
dans le passage supra indiqué, ont-ils une autorité incon-
testable (1).
■ IMI S4>fnble que si (îrégoire de Tours a pris la date a sub
Dfeio • aux actes de saint Saturnin, en revanche il a emprunté
les noms des sept évèques aux actes de saint Ursin, lestjuels les
rattacbeot à une mission apiistolique.
134 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
(c) La version a SubDecio, etc. », n'est-elle point con-
tredite par les manuscrits de Florence? Des critiques
graves, entre autres dom Chamard, estiment que le texte
de la légende de saint Saturnin est très-authentique dans
sa substance, mais renferme des interpolations, par
exemple la phrase a ante annos L, etc. »
(d) La chronologie de l'histoire des Francs n'est^lle
point abandonnée et condamnée dans les Traités de la
Gloire des Confesseurs (cap. lxxx) et de la Gloire den Mar-
tyrs (Lib. L, cap. 48-56) où Grégoire de Tours Tait ordon-
ner saint Ursin de Bourges et saint Saturnin de Toulouse
par les disciples des Apôtres?
(e) La mission des sept évêques n'est-elle point battue en
brèche par plus d'un document qui donne des nomK, des
dates différentes? Sic les actes de saint Ursin, les actes de
saint Saturnin, le pape Sozime en 417 et les évéques de
la Provence qui reconnaissaient qu'Arles avait reçu son
premier évéque de saint Pierre...
£t puis quand Grégoire de Tours oilrirait une autorité
historique et un texte inattaquables, résulterait-il du pas-
sage que nous étudions qu'il n\ aurait point eu de mar-
tyrs, de hérauts de la foi, d*Ëglises constituées avant la
mission des sept ? Dom Huinart trouve cette conclusion
excessive: a Quelques-uns,)) dit-il, «pensent que Ton
peut conclure des écrits de Grégoire de Tours qu'il existait
de son temps en Gaule une double tradition sur les pre-
miers Apôtres de l'Église gallicane, les uns s'efforçant de
ramener leur mission à l'époque des Apôtres eux-mêmes,
les autres la fixant au temps de Dèce ou de Marc-Aarèle.
Ils vont jusqu'à reprocher à Grégoire de Tours de n'être
pas d'accord avec lui-même sur ce point, de patronner le
premier sentiment dans son livre des Miracles, le second
dans son Histoire. Mais c'est se tromper que de croire que
XUV*" S£&>ION, A SKNLIS. i35
Grégoire, lorsqu'il parle des martyrs de Lyon ou des sept
êréques, venus à son avis sous Dèce, nie par là qu'il y
ait eu en Gaule avant eux des martyrs ou d'autres hérauts
de h parole divine (I). x>
4* Les sept évéques de la Gaule semblent à certaine
école sortir des limites de l'utile dans cet endroit de leur
lettre à $ainte Radegonde : a Itaque cum ipso catholicœ
leligioois exortu ceepissent Gallicanis in finibus veneran-
dsfidei primordia respirare, etc. (Grég. Tur., Hist.
Fraoc, lib. IX, cap. 39.) — Peut-on, sans offenser dans
sa substance le contexte, proposer comme tenable cette
traduction : a Sur les confins de la Gaule » au lieu de
■ Dans le territoire de la Gaule o. Que dit ce texte pris
dans son entier? Le voici, (a) Il y eut dès le début même
de la religion chrétienne une première initiation de nos
pays à la foi. (b) Cette foi était seulement une lueur faible
qui n'éclairait qu'un petit nombre d'intelligences:...
tfRespirareet adh'ucad paucorum notitiam tune ineffabilia
pervenissent Trinitatis Dominical sacramenta, etc. » (c) Il
était réservé à l'intluence monastique de saint Martin et de
ses disciples de généraliser la connaissance de l'Ëvangile.
.V Ailleurs le nom de saint Trophime d'Arles apparaît
avec le prestige de l'antériorité d'origine chrétienne. On
M tire sans façon d'embarras en répétant à la suite de
Uufraisse, de l'abbé Chevalier, etc., qu'il y eut deux Tro-
phime. C'est possible, comme il est possible qu*il exista
deux saint Denys de Paris, deux saint Lucien de Beau vais,
deux Ursin de Bourges. Mais pourquoi affirmer une dua-
lité qui mérite tout au plus d'être indiquée comme un
(Il Doiii Ruinart, préface aux œuvres de saint Grégoire de
Tours, lil. De primordiis lidei in Galliis. — Voir SirmomJ,
iib. L cap. 16-2S.
i'M) CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRAKfCE.
moyen de concilier Grégoire de Tours et la lettre des
évoques de Provence à saint Léon ?
Bref, il me serait indifférent, même agréable, que Ter-
tullien, Sulpice Sévère, les sept évéques des Gaules et
Grégoire de Tours aient dit exactement ce qu'on veut leur
faire dire; mais je tiens qu'il ne faut jamais dénaturer un
texte ou exagérer l'autorité d'une source dans l'intérêt
d'une thèse, si vraie qu'elle puisse être. Comme M. de
Meissas, j'ai trouvé aussi exacte que belle cette expression
d'un hagiographe : a La vérité est la sainteté de l'his-
toire I B Mais je crains que la vérité ne perde autant et
plus aux partis pris de certains théoriciens qu'aux admi-
rations, naKves si vous le voulez, des anciens.
11
M. de Meissas a-t-il pour nos légendes un reipect suffi-
sant ? Je conviendrai avec mon spirituel contradicteur que
parfois les légendes contiennent des détails indignes de
l'attention des historiens^ que la passion du merveilleux
les a chargées de chapitres de prodiges, que l'admiration
(>our le héros sacré a immolé la vérité aux hyperboles de
la louange* que t Tamour ambitieux de quelques-uns
pour leurs Églises < T iv a poussé des écrivains à reculer
leur antiquité* que dos motifs moins nobles ont pu cor-
n^mpre leur sincérité pn?mièro, etc. etc. Voir les appré-
ciations do Sulpioo Sévèro, do Guibert de Nogent (2), des
.1 •« Vmbiluxsns o><l <)UAn«1o.|uo pm^ sinciilis fcclesiis suis
- <pi<^niti;tUm 9m«^r mMI. \\\ ivt — Voir los munies.
\Mi «si IV «MUMio «wWunim Ganianim. »
i IV s4inoUMiim |M«:nonbiis. !tb. I . wày. m.
XLIY* SESSION, A SENUS. i37
Pères du Concile de Latran, de Baronius, des Bollandistes
ViedesamtYon)^ de Monseigneur Freppel (saint Irénée),
à^U, l'abbé Chevalier, etc. etc. Mais autre chose est de
balayera la (prosse, à la suite des Baillet, des Godescard et
des hagiographes de l'école naturaliste ; autre chose de
séparer le respectable du mauvais avec la dignité d'une
critique chrétienne à la suite des dom Ruinart et des Bol-
landistes. Voici quelques règles auxquelles, pour ma part,
je voudrais obéir dans l'emploi des légendes:
1* Leur mesurer l'estime selon leur source : autobio-
graphes,— témoins oculaires, — contemporains ou pres-
que contemporains, — panégyristes se servant de docu-
meots authentiques, — ouï-dire.
2* Leur accorder volontiers et premièrement créance ;
tf Quoique les actes de seconde main, » dit dom Ruinart,
■ n'atteignent point à la pureté des actes de première
ûri^e et fourmillent presque toujours de fautes, je ne
crois pas qu'il faille les rejeter absolument. »
3* Leur laisser pieusement leur côté du merveilleux,
toutes les fois que ce merveilleux n'est ni indigne de Dieu,
ni contredit par des faits certains, ni ajouté à la simplicité
d'une légende primitive dans un intérêt vulgaire. Il n'est
pas de foi sans doute que saint Denis, saint Lucien et
autres bienheureux aient porté leur tête en leur main,
que saint Rieul ait imposé silence aux grenouilles de
Rully, etc.
L'on trouvera dans les Bollandistes plus d'une façon
légitime d'interpréter ces détails de nos légendes : traduc-
tion en une forme sensible d'une intercession céleste,
influence d'une représentation matérielle, style inétapho-
rii|ue... Mais je ne tfache pas que le lait soit impossible et
«i*>i\r être nié absolument départi pris. La science hagio-
jrdphiquc ne pourrait que perdre à celte façon brutale de
i38 CONGRÈS AROHÉOLOtilQUE D£ VRANGE.
procéder, comme la poésie des légendes, Tari et le reste^
Si je montre à m'exprimer de la sorte quelque simplicité,
je m'estime on assez noble compagnie avec saint Augustin,
les Bollandistes, Mabillon, de Montalembert et une foule
de génies chrétiens.
111
M. de Meissas, lorsque M. l'abbé Vattier et moi, lui
objections Tactique tradition de l'Église de Senlis sur la
date de l'apostolat de saint Rieul, me parut traiter cette
tradition comme une hypothèse qui doit tomber d'elle-
même, si elle ne peut présenter en sa faveur des raisons
positives. Je trouve cette façon d'argumenter inexacte.
La tradition, à mon avis, demeure a mole sua stat»,
dans la plénitude de sa force avec un certain droit au
respect, tant qu'elle n'est point convaincue d'erreur par
des faits certains, ni ébranlée par des objections graves.
N'a-t-elle point le bénéfice de la possession, le droit au
soleil de l'histoire, d'une aflirroation qui a traversé les
siècles, la réputation présumée d'avoir eu pour principe
un auteur respectable? Ce fertur, ce fama est, lorsqu'il a
attaché le souvenir de tel détail touchant ou miraculeux
à quelque héros chrétien, inspiré des œuvres d'art, des
pèlerinages..., fixé son existence orale dans des monu-
ments hagiographiques, pris sa place dans la liturgie,
obtenu sans contradiction la créance de nombreuses géné-
rations, doit être traité avec égards. Tout le conseille,
l'estime pour le bon sons et la religion de nos pères, la
crainte des découvertes que l'avenir ménage peut-être, le
caractère de haute réserve qui convient au véritable savoir
et la conduite elle-même de l'Église qui, dans certains
XLIV* SESSION, A SENLIS. 139
cas, se D)DteQte de cette tradition, a La critique,» dit
l'abbé Chevalier, « est un art difficile. »
On lisait par exemple, dans des listes du xiii* siècle
«l'érèques de Noyon le nom d'un Alomer, prédécesseur,
dlsait-oo, feriur, fama est, de saint Médard ; où les cha-
ooioes d'alors Tavaient-ils rencontré?... Je l'ai retrouvé
par hasard dans les litanies carlovingiennes d'un manus-
crit du «• siècle (I) : Sancte Ailumre, ora p'O nobis. Et
pour mettre ma pensée à l'abri d'une haute autorité^
M.Edmond Blant, dont on recueille si volontiers le bel
argument tiré de l'épi^phie (2), a écrit avec la même
sûreté de jugement cette phrase, dont on oublie aussi
volontiers U grand sens : a L'élude nous habitue chaque
jour davantag e à compter sérieusement avec les tradi-
tions.»
(I: Aolipbooaire du Mont-ReDaud.
[i] Paisqoe j'ai parlé de l'épigraphie, certes je re(.oonais que
les ioscriptioos sont uoe source hagiographique doot il faut
leoif compte aussi bien que des traditions et des légendes.
Vais pour user de crt élément nouveau de savoir avec la sage
rnerve et la prudence dont M. Edmond Le Blant nous donne le
précepte H Texemple, je ferai obser\'er bur le Pagus Silvanec-
leosis :
I* Que le témoignage de Tépigraphie ne me paraît pas encore
avoir été recherché suftisamment, puisque l'on n'a point ou
presque point exploré les cimetières anciens d'Avilly, de Chan-
tilly, de Montataire, de Saint-Nicolas...
t* Que la nature mèiuc des matériaux qui ont dû servir les
préservait mal de la destruction.
3* Que des découvertes toutes n'ceiilcs, par exemple celle du
tfDiple païen de Ilatatte Taite par MM. Fauiras et raldiéCaudel,
fi cimtuiuée |>ar M. de Caix. nous indiquent que notre pays ne
teiele point tout de suite ses secrets.
UO CONGRÈS ARGHÉOLOGlgUE DE FRANGE.
Je ne m'arrôterai point à des escarmouches de détail^
par exemple : le chiffre de douze missionnaires venus au^
m" siècle évangéiiser le Nord de la Gaule, est-il démontré '^
historiquement? L'on s'appuie pour l'affirmer sur les
actes des saints martyrs Fuscien, Victoric et Gentien (1),
et sur une lettre des Pères du concile de Paris (825) à
Eugène [l, inspirée des actes précédents. Sic les abbés
Pocquet, Chevalier de Tours, de Meissas, etc. Mais les
actes des saints martyrs Fuscien, Victoric et Gentien ne
sont pas d'accord avec les noms des missionnaires; mais
les Pères du concile de Paris placent leur mifision sous
saint Clément : « S. Dionysius... qui a sancto Clémente...
in Gallias cum duodenario numéro primus praedicator
directus est ; » mais les saints que l'on veut rattacher à
cette mission des douze, ont dans leurs légendes un
nombre très-variable de compagnons... (2).
Bref, je le répète, dussé-je passer pour hésitant dans
mes opinions et peu net dans mes résultats, je ne crois
pas [et c'est à mon grand regret) pouvoir donner à mes
sentiments sur la date de l'évangélisatiou de nos pays et
de la mission de saint Denis, de saint Lucien, de saint
Uieul....' une i'orniule plus précise. Ce n'est pas une ques-
tion de piété ; ce n'est pas même au pied de la lettre une
question d'hagiographie; c'est une question de philoso-
phie : de prémisses, qui ne m 'apparaissent pas absolu-
ment certaines, ai -je le droit de tirer des conclusions
certaines? Certes, j'ai dans ce système de prudence, de
réserve, d'hésitatiun, si l'on veut (le mot n'est pas humi-
liant), des maîtres qui ne sont point à dédaigner. C'est
par exemple du Bosquet, u homme, n disent les Bollan-
I Cilies«|ui»Me. Jc/tt s(iï}r/<fnim Uelgiiy l. I,p. K^\.
2) Voir M. (*.h. Saliuoii. Vie de saint Firmin^\\, H9.
XLrV* SESSION, A SENLIS. i41
distn, «illustre par sa science, o qui, levant des doutes sur
les premiers évéques de la Gaule, s'exprime ainsi : (Boll.,
t. m martii, 22 mart., pag. 370) : a Pour ce qui est des
premiers hérauts de l'Évangile dans la Gaule, les
hagiographes ne sont point d'accord ni dans les listes
qu'ils en donneut, ni dans le temps qu'ils assignent à
leur mission, car la plupart tiennent que les apôtres
Pierre et Paul ou leurs disciples sont les premiers Ton-
datears des Églises des Gaules; d'autres attribuent à
saint Clément et aux pontifes romains, qui leur ont
immédiatement succédé, l'envoi des premiers évéques
des Gaules; d'autres retardent jusqu'au second siècle
soit vers l'an 170, le lever en nos pays de la lumière
évaugélique. Ces questions sont tellement obscures que
l'oQ ne saurait affirmer aucune de ces opinions avec
une êbsolue certitude. Les défenseurs de la première
opinion n'ont été amenés que par un amour longtemps
endormi de l'antiquité à rapprocher les débuts de
l'Église gallicane des origines de l'Église univer-
selle, etc. etc. »
Poursuivons la vérité: soyons assurés qu'elle ne perd
nullement à être connue dans sa totalité; mais n'affir-
nions de ses traits sacrés, quand elle veut demeurer encore
•iazis la pénombre, que la quantité qu'elle-même consent à
d^uvrir à nos regards.
M. l'abbé de Meis$as, à son tour, demande la parole et
répond en ces ternies au précédent orateur :
«Il n'est pas possible d'outrepasser la portée de> textes de
TiTlullien et de Lictance toxle qui n'i'st pas do Lictance,
• «luine j»' l'ai déjà déiiioiilré.. Il y a toujours di» IVxa^'é-
rdtiiiu dans IVrtullitai, «.'t on ne peut pas 1<* prendre à la
142 C05GRÈS ARCHÉOLOGIOCE I>£ FRA5Œ.
lettre, surfout quand on voit avec quelle sévérité il a^
jugé par plusieurs de ses contemporains et notammeû^
par saint Jérôme.
« Quant aux l<^gendes, je ne nie pas qu*on ne puisse 1
trouver quelque chose de vrai à défaut de documenl^^
mais si ces histoires sont édifiantes, elles ne me semble^^
pas appuyées sur des preuves assex sérieuses ; nous dévoie
appliquer à la critique historique les mêmes règles qu ^
cellesexig^es pour la doctrine chrétienne. Quant à la ques^^
tion de Trophime, saint Grégoire n*est pas le seul hîsliH^
rien que je puisse invoquer, et son témoignage est con-
forme à ceux de Sulpice Sévère, de saint Jérôme et
d'Eusèbe. n
M. l'abbé Mîjller termine en disant qu'il accepterait
bien volontiers que saint Uieul soit venu au m* siècle,
niai" il estime que son honorable adversaire s'est servi,
d'arguments négatifs contre des traditions, il maintient
la forme de réserve avec laquelle il a dû conclure la
veille.
M. le président déclare la discussion sur la 21* question
entièrement close cl donne la parole à M. Millescamps,
qui lit au nom de M. Hahn une note sur le cimetière de
Gompan.
Le cimetière du Compan, près Luzarchest
sépultures de Tâge de la pierre^polie.
Sur le môme territoire de Luzarchcs et dans la vallée
de risieux é;^altMucnt, m.iis à raltiludc de 60 mètres seu-
hîiiiciit, cVsl-à-(iir(î à un point luMucoup plus bas que les
moriunicnts mégalithiques de Tljiiuécourt et à moins de
XLIT* SESSION, A SbNLIS. 143
deux kilomètres de distance de ces derniers, a été décou-
vert un véritable cimetière de Tâgc de la pierre polie. Le
lieu-dit où il se trouve, déjà désigné dans un titre de
l'aDoée i1G3, a toujours été connu sous le nom de
Gompan.
Signalé dès Tannée 1854 par M. Hahn, de Luzarches,
Àiatlention de M. Serres alors professeur d'anthropologie
iQ Muséum d'histoire naturelle de Paris, Tossuaire du
^pan fut, à cette époque , Tobjet d'une exploration
iu»i rapide que superficielle. M. Serres se borna à
Kcueillir quelques crânes et un petit nombre d'ossements
<|ui furent transportés au Muséum. Le reste fut complé-
teioent négligé. Reprises en 4801, suspendues pendant
huit années et terminées en 4873, par MM. Ilahn et Mii-
Ic^mps, les fouilles ont [)ermis de déterminer Tàge
excluiivement néolithique des sépultures.
Ce cimetière préhistorique, orienté de 1 ouest ci Test,
i'éteodail sur une longueur de 44 mètres et une lar-
geur de S^GO; le sol n'avait été creusé qu'à la profondeur
de 1*40. Quatre grès de grandes dimensions avaient été
piaoéfl sur divers points de la fosse. L'un, trouvé debout
et à fleur du soL semblait fermer l'extrémité nord-ouest;
un autre était renversé le long de la paroi nord ; un troi-
^iéIne• aplani en forme de table, délimitait l'extrémité
«ud-est; le dernier était entièrement en dehors. La dis-
tance à laquelle ces quatre grès se trouvaient les uns des
autres ne permet d'établir aucune relation outre eux ; il
ne semble pas qu'ils aient été disposes dans un ordre régu-
lier; rien n'indique les vestif^es d'une allée couverte ou
même d'un dolmen. Il n'y avait non ]>ius auiMine trace
d^ murs élevés soit pour maintenir les lerns. soit pour
établir di>s cloisons iiitéri«Mir<s. Li> trait p.irtir(ilii*r do la
M'pult jrc était un diilla<jri- posé dans le fond avec le plus
ii4 CONGRKi ARCIIÉOLOGIOUE D£ FRANGE.
(çraiid soin et niaintcDu de niveau malgré la déclivité du
terrain. Il consistait en pierres calcaires plates, habilement
juxtaposées, présentant les dimensions moyennes sui-
vantes : lonfçucur, O^GO; largeur, 0^45; épaisseur,
0"()rî. r/ost sur ces du! les que reposaient les corps d'une
centaine d'individus des deux sexes et de tout âge.
Aucun n*a été retrouvé dans la position horizontale ; tous
étaient plus ou moins affaissés, écrasés, le crâne et les
membres supérieurs retournés, aplatis sur les inférieurs,
eu qui dénote évidemment un mode particulier d'inhu-
mation, celui que caractérise l'attitude repliée ou accrou-
pie donnée au mort.
U'ri corps ainsi placés avaient été recouverts de terre,
puis d'une osptVo de plafond en pieri'es généralement
plates, formant une sorte de second dallage très-inégal et
Ik'auooup moins régulier que celui du fond. Au dessus
s'étendait uno cmu'lio do terre brûlée contenant des par-
cellos kW cliarbiui, indices de foyers, et un grand nombre
d'éclats de silov hrutsot taillés.
l.os iustru monts divois eu os et eu pierre, qui ont été
rocueiths, so trouvatont dis:>ominés sur tous les poiuts de
la iosso et piuuipalomout dans Tintervalle compris entre
li's di*u\ dalLi^os. I) tant noter i-eiH^ndant qu'une partie
dos pu\vs los l'ius mtoivssautts était groupée dans Tes-
|vciiv d'un uu^tro oarrw ù lexlrt^milé sud-est de la sépul*
tmv. iVtio soMo do ^aoboUo r^ntormait notamment trois
baotu*s (stt)os« viuaiiv .vuu\ui\, irvus (vîntes de tléches de
u*uiu> kli\ii>o>, qoA.iv :vî:uv:i> iU <»s, uu grattoir et
dou\ (vii:> K.>oai;\ v .i >..o\. Nv*w> douuons le uom de
viv.iii a viii ^s... .^.i ».:.,•'.;: -, :: > .-.A vie forme triaugu-
;i iv. .:»■-., .1 A.-.- ,'*. .a:...-. ;\-. !• >^-:i:: li^'. o'. Quelques
i,x •.. . ^v:.'> ^.•. . . - .• ... .>.v',v iv ;:-auchet uue
-u .',■.-.■. , ,' .1 ■ .V. .• *'.'. i : f. : ■ A •4'.* *•/ «ni irunsvenalp
Sépulture néolUhique du CorripRn (i.uzarri ;,sy
'^'ot\ ^^^ '^^ la- Pierre
Ûà-Ae iroÉUTer-saie /.
Wure I /bmt.- Jt iinci- ■
2 foiat,- Je l.,n,e
3 Ciîoiu- fdi-Bivnmi
+ teinU de fie,^ .
5 ^/h. disque
6 Feei, disette fa scAJsie- eoùaile m az/rain siiùxitê.
Cra/ideilr aa/ure/ie..
XLIV' SESSION, A SENLIS. 145
mais nous uc peusous pas que cette attribution soit
justiûce.
La poterie ne nous a offert que des fragments informes
de vases de cette terre grossière et mal cuite qui est parti-
culière à la céramique des dolmens.
Il ne sera peut-être pas inutile de noter en passant
quelques spécimens d'instruments en matière tendre. Ces
pièces, faites en calcaire, présentent ordinairement la
forme de haches; elles sont rares au Compan. Nous les
avons recueillies à titre de curiosités : quelle était la des-
tination ou la signification attachée à ces simulacres? C'est
un point bien obscur sur lequel nous ne nous hasarderons
pas à jeter le moindre rayon de lumière.
Citons, en terminant, parmi les L^ijets les plus intéres-
sants, une belle pointe de lance en silex, finement retaillée
sur l'une de ses faces (fig. i); cette arme, longue de
185 inillimèlres, était brisée en trois morceaux, qui ont
été successivement retrouvés. Une pièce également peu
commune, c'est un disque en schiste coticule percé de
lieux trous et présentant la forme d'un hausse-col. Des
di^i]ues analogues ont été rencontrés à Mizy (Marne], à
Chaflaud ; Vienne), à Mcudon, à Argcnteuil et à Vauréal
■ Seine-et-Oisc), mais partout à l'état d'unité. Le Compan
seul, à notre connaissance, en a livre deux (fig, 5 et 6),
dont l'un ramassé sur les débris d'un squelette de
femme (fig. G). C'était, selon toute apparence, un orne-
iiH-nt ou une amulette destinés à être portés au cou.
Nous donnons la roproduclion, en grandeur naturelle,
de six des principaux obji'.ts exhumés du Compan :
quatre de ces objets ont été mentionnés ci-dessus; les
deux autres sont une seconde pointe de lance (fig. 2) et
nue pointe de firchc (fig. -i).
Ou voit, par cette courte énumération, que le mobilier
XLIV" SESSION. 10
146 G0N6RÂS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
• \\\
funéraire des sépultures de la pierre polie a été recua^ ^
presque en entier au Compan.
L'état dans lequel a été retrouvé ce qui subsistait ^
l'ensemble de ce cimetière préhistorique, ne permet f^
de savoir s*il était recouvert d'un monument még^''
thique dont auraient fait partie les quatre grès enfo^^
dans le sol. Le dallage sur lequel avaient été placés M^^
corps, était la seule partie absolument intacte; le re^
avait été, depuis des siècles déjà, plus ou moins atteint ^
bouleversé par la charrue.
Ce qui est certain, c*est qu'aucune trace de métal n^^
été vue dans les fouilles, et que le cimetière du Compa^
appartient incontestablement à la période purement néo^
lithique.
Discussion. — M. Jouron rappelle qu'il a vu dans la
collection de Daye une flèche à tranchant transversal fixée
dans une vertèbre, et que Tusage de cette arme est aujour-
d'hui parfaitement déterioiné.
M. Millescamps répond que cet exemple n'a pas la portée
qu'on lui attribue, et s'appuyant sur le témoignage de
MM. de Mortiliet et Leguay, il considère cet instrument
comme un ciseau uu un tranchet.
M. Ed. Fleury croit qu*il faut y voir un de ces outils
usuels primitifs qui recevaient plusieurs destinations à
la fois.
M. de Maricourt demande à M. Millescamps de vouloir
préciser le sens de la première partie de la question 3^ :
Quelh conclusion faut-il tirer de la présence d'imtruments
en matière tendre, tels que calcaire, grès, etc., dans les
stations préhistoriques ?
M. Millescamps reprend le passage qu'il vient de lire
XLIY' SESSION, Â SENLIS. U7
la communication de M. Hahn ; il n'a pas, ajoutc-
t-il, d'opinion faite sur la signification de ces simu-
lacres.
H. de Caix de Saint-Âymour signale une hache en
calcaire tendre trouvée en Champagne et appartenant à
M. de Lavaulx.
M. Edouard Fleury parle à cette occasion des agglomé-
rations siliceuses naturelles qui offrent l'aspect de ces
simulacres. Ces rognons cali:aires se trouvent, dans le
département de l'Aisne, par gisements énormes, et notam-
ment à Sablonnière, dont le cimetière a été exploré par
MM. Moreau. Là des tombes mérovingiennes présentent
ces simulacres rangés de la même manière que des vases
dans d'autres sépultures. Un assez grand nombre de ces
tombes nous les montrent entre les jambes du mort, et
nul doute que ces pierres n'aient frappé l'attention des
hommes de cette époque, qui devaient y prêter le même
culte superstitieux que naguère encore on attachait aux
pifrres de tonnerre. Quelquefois ces pierres ont été travail-
lées légèrement, et on a cherché à leur donner la forme
de croix grossières.
M. Ed. Fleury, revenant sur la question de l'époque de
l'introduction du christianisme dans le Nord, dit qu'il ne
faudrait pas conclure de l'absence de monuments épigra-
phiques chrétiens, que le christianisme n*y a été introduit
fu'à une époque postérieure. Il espère pouvoir, dans la
' prochaine partie de sou livre (1), établir par l'identité du
style et de l'ornementation Texistence de monuments
chrétiens à une époque où on n'a pas cru devoir en
admettre jusqu'à ce jour la présence.
(1) Antiquités et monuments du département de V Aisne,
1"* partie, seule parue.
448 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
M. Millescamps a de nouveau la parole pour la lecture
d'une note adressée par M. Vieille :
Station de la fin de l'âge de la pierre polie
à Thimécourt.
A environ seize kilomètres au sud-ouest de Seulis, dans
le département de Seiue-ct-Oise, près du département de
l'Oise et de l'arrondissement de Scnlis, sur la commune
de Luzarches, à cinq cents mètres au nord-est du hameau
de Thimécourt, existe un de ces endroits où Ton trouve
sur le sol des silex travaillés, et que l'on appelle : a Station
de l'Âge de pierre, d
Cette station est située à l'extrémité ouest du plateau
sur lequel ont été déjà di^couverts le cimetière mérovin-
gien fouilléen i874-lH75parMM. MillcscdmpsetHahu(f),
et les monuments mégalîthiquos exhumés en 1875-i87G
par M. Millescamps (-2). Elle est à rallilude de iOi mètres
environ et s'éleiid sur plus d*iin hectare de terre en
culture, au lieu dît « la Uif^Mlle », on lace du chemin du
Noyer à la Drouarde, à coiit ciuquaiitu mètres de la voie
de Beaumont à Survilliers, et à quatre-vingts mètres du
chemin de Lassy à Senlis.
Quoique sa découverte ne date que du mois d'avril der-
nier, cette station, qui n'a pu être explorée que sur une
(1) Voir la Rente arc/icohf/ùjue oi les Rnllotins de la Société
d'Anthropologie de Paris.
(2) Voir les Bulletins de la Société d^-inlfnnpotofjie de Paris,
aunée 1876, et U». Bulletin de la Société de Scnlis,
XLIY* SESSION, A SENLIS. 149
{vartie de son éten lue, a fourni déjà des centaines de silex,
lionl la plupart sont cacbalounés et sur lesquels le travail
lie riiumme est caractérisé par des inarques de percussion,
«les retouches, et la trace laissée par des éclats enlevés.
Parmi les pièces recueillies jusqu'à ce jour se trouvent
(le? ciseaux, des grattoirs, des perçoirs, des nucléus et des
percuteurs ou broyeurs de formes variées; une espèce de
racioir, des fragments de hachettes polies, deux flèches
transversales et une flèche barbelée.
La flèche barbelée est mince, elle est très-fioement tra-
vaillée et très-bien conservée. Sa longueur est de 35 mil-
Iimèlres, elle a 22 millimètres de largeur à sa base, et son
pédoncule a 5 millimètres de diamètre.
Deux des percuteurs sont remarquables, l'un par sa
petitesse, l'autre par sn forme aplatie. Le premier, qui est
profondément cachalonné, est de la grosseur d'une noix
ordinaire, dt'»barrassée de son bnai; il est entièrement
percuté sur toutes ses faces. Le second est rond; il a une
•le ses faces un peu bombée, et l'autre plate. Sa partie
bombée et son pourtour sont seuls percutés; mais le
pourtour l'est d'une manière telle qu'il est impossible de
prendre celte pièce pour une moitié de percuteur.
Le silex est étranger au sol; il parait provenir du
domaine boisé de Chantilly.
Avant de quitter la tribune, M. M illescamps demande
à communiquer une nouvelle note de M. Hahn, en réponse
à la 4*^ question du programme, ainsi conçue :
Des objets de l'âge du bronze. — Détermi-
ner le lieu des découvertes et signaler
les ateliers de fondeurs.
180 GONGBÈâ ARGHÉOLOGIOUB DS FEAUGE.
Age du bronze. — Cachette de fondeur à
Luzarches (Seine-et-Oise).
Je m'étais proposé de faire une communication sur les
études préhistoriques du canton de Luzarches (Seine-et-
Oise), situé au sud et limitrophe de l'arrondissement de
Senlis (Oise). Je l'aurais appuyée d'une carte indiquant
les stations, sépultures, monuments et découvertes diverses
faites dans ce canton.
Les découvertes, en effet, me paraissent intéressantes.
Elles permettent de suivre l'homme, dès les premières
périodes, dans son incessant travail de perfectionne-
ment, luttant avec intelligence contre les nombreuses
difficultés de la vie matérielle. Pour dompter la ma-
tière et pourvoir à ses besoins, il eut d'abord ses mains,
engin délicat, trop faible et tout à fait insuffisant; puis la
pierre qu'après l'avoir taillée il polit avec une grande
perfection, ainsi que le prouve les haches, pointes
de flèche et de lances, instrumenta divers trouvés dans
notre contrée; et, enfin, le bronze. En outre, il pétrit la
terre et la façonna; mais il reconnut plus tard que la
matière terreuse pétrie pouvait acquérir encore plus de
dureté et de résistance : il apprit à la consolider, à la
fondre, en quelque sorte, comme la matière métallique.
Les objets que j'ai recueillis et les observations que j'ai
faites m'autorisaient à exposer la marche croissante suivie
par la civilisation dans notre contrée et à établir une
parité du développement social, mais non pour cela à créer
un synchronisme des temps, car en constatant une époque
(pierre, bronze, fer), on ne peut l'étendre à toute l'es-
XLIT* SESSION, A SENLIS. i5i
pêce humaine, puisque, aujourd'hui même, à côté de
nos splendeurs européennes, nous voyons des peuplades
qui en sont encore à leur âge de la pierre. Il ne se serait
agi, pour moi, que d'établir un synchronisme de civilisa-
tion et non de date. Mais j'ai craint que les matériaux
que je possède fussent encore incomplets pour me livrer à
une étude aussi détaillée et aussi approfondie. Je me bor-
neraii donc, dans cette simple note, à vous entretenir, un
court instant, d'une cachette de fondeur de l'âge de
bronze.
Pour arriver à l'âge du bronze, l'évolution a demandé
un temps considérable, et cependant la période du bronze
étant moins connue que celle de la pierre, les savants
engagent à étudier cet âge, à ne négliger aucun détail,
lors même qu'il paraîtrait des plus puérils. 11 convient
donc de multiplier les recherches et de réunir toutes les
découvertes isolées pour arriver à établir des généralités.
C'est cette pensée qui m'a guidé.
Il y a plus de vingt ans, en défrichant une partie boi-
sée, au territoire de Luzarches, près de la limite de la
Picardie (terrain qui a pu faire partie du pays des Silva^
nectes) [i), au lieu dit le bois de Lanoue, on avait trouvé
différents objets auxquels les ouvriers bûcherons n'atta-
chèrent aucune importance : ces objets, en bronze, disait-
on, étaient passés de main en main pour arriver à celles
d'un marchand colporteur, qui les dispersa. Il n'en restait
plus qu'un vague souvenir, lorsque, il y a quelques
années , en faisant un drainage , on a trouvé au même
I) Nous étions compris dans le vaste réseau forestier qae
Plioe et Ptolémée ont désigné sous le nom de forêt des Silva-
Dectes, et dont les bois de Chantilly, Coye, Luzarches, sont les
derniers vestiges.
152 CONGRÈS ARGnÉOLOGTQUE DE FRANXE.
point, à environ cent mètres à rouest, dans une terre en
culture, un amas de vieux bronze enfoui à qtiatrc-viugts
centimètres de profondeur, pesant huit kilogrammes cin-
quante grammes : c'était li^, œrtainement, une cachede
de fondeur de Tdge du bronze.
En effet, ce n'est pas ici un atelier complet de fondeur
qu'on a enterré en pleine activité, par suite d'une inva-
sion ou d'un fait de force majeure. Je pense que, dans une
tribu qui habitait cet emplacement, tin homme (peut-être
initié au travail de la fonte) recueill.tit tous les instruments
usés, brisés ou mal venus (car j'ai des morceaux avec la
bavure de la fonte), les entassait pour les passer au creu-
set, lorsqu'il en avait une quantité suffisante pour les
fondre à nouveau. Comme il ne pouvait serrer sa provi-
sion de débris, il était néees^airement obii^^é di; les cacher
en terre, à mesure qu'il faisait sa récolte (pour les sous-
traire h la cupidité), puis il n.? se serait plus sotivcnu de
remplacement qui les recelait. «»t cet amas s'est conservé
jusqu'à nos jours, pour se r/véler fortuitement. J'ai pu,
de suite, recueillir la masse aL^irlounTée, et, en la décom-
posant, je n'y ai trouvé que de- débris, sauf deux haches
d'une facture rudimenlaire, dite à t;ilon, tine c.ipsule, un
grattoir ^fondu à l'iiiMt^tiiuî d'iîii sil«»x taillé .et unefoulo
do fragments d'iuslruments /hvits. .iiù mpagnés deculols
de bronze. Sai.s doute, ees nbj. îs Si»nt les similaires de
ceux décrits dans les ouvriires ilrs hes^^r. lîe Hun. Madsen,
\Vorsaa\ etc.: mais il es; iniéres-an: p urnous de trouver
aux ctMitins des SiKauoi tes e; des IVirisn, une a^rirlomcra-
titni de piives. d.ms -îi s .:'::.;; r.s i:i :>. ut.iMes, pour
servir v'.Vlemenîs sirieuv .1 !':>:, :.t^ i.» riu-lusirie de
*vlte é|v^juo. i> ui s.ii:. r. »>! \r.. ;: ,:c\* liaimenls:
mais, comme av.v un tr.uiv.:,: V ^, ; i .iW^- Cuvier a
pu nwiistri-.în^ .i.*s esi\» s j r". .i> ■ : .:ipi;is. U science
_v?-i.> dune cachette de Fondeur llœarchcs)
A$e du Bronze
I.e^tvidc
■■•■ '■"■•■■■■ ij A»..» /./■■/*•. ....v *
.,..,. «,,-.^.« ., il »..,.■.■/,„■.,,.„,,.,, f„.ji.
XLIY* SESSION, A SENLIS. 153
a marché à pas de géant), de môme, nous, dans cotte col-
loclioa triiuvée en bloc (eu comparant avec des objets
similaires), nous possédons une révélatiou complète de
rage de bronze, pour notre localil^, et elle doit en fixer
irmocablement et irrécusablemont l'histoire (I).
Ces objets ont été enfouis dans un trou pratiqué dans
le ?ol et comblé de suite, car le sol est parfaitement homo-
gène, et il indique qu'il n'y a pas eu de terre rapportée :
le terrain est un sable gras, à base d'argile jaunâtre, avec
quelques veines d'argile bleue. Je puis donc répéter que
c'oït là une nouvelle série d'objots en bronze que l'on
désigne sous le nom de fonderie ou de cachette de fondeur,
bien que Ton n'ait recueilli dans ces stations que des
^^•jols usés ou brisés, et jamais (ou par hasard) des pièces
P" voie tle fabrication ou des moules. Ces objets portent
?éfiérajenient les traces du moulage dos bavures du bronze
•'*'r les parties latérales devaient disparaître ensuite par le
û^^rtolage), et, malgré leur état fragmentaire, ils peuvent
'ïoijs donner une idée a?sez exacte de la nature du travail,
"*- la civilisation et des mœurs do ces temps reculés. A cet
♦•nc^t , je donne ci - après la nomenclature des pièces
recueillies :
Huches à bords droits et talon (dont deux entières et
1*11 nzo fragments), 17 pièces.
Huches à ailerons : simples fragments, 3
A reporter 20
^ ' I Nous avons d'^jfi, avec M. Milloscariifis, «h'^couvort un cime-
■'^re (lo la pierre pclie et un ciineliore inérovinj^icn. M. Miilos-
^^ïnps , (le son coté, a fouille deiix inoniinnMils mrgalithi'i'ies.
'*' 3u>^i couplai»'» (les stations j>n''liiîrl(iriqm's, romaines et gallo-
^^♦niaînos : la série se complète i)Our notre contiée.
iS4 CONGRÈS ARGHÉOLOGIQUB DE FRANGE.
Report 20pii
Lances : divers fragments dont deux pointes, 5
Épées : menus fragments de lances (plu-
sieurs avec stries), 30
Poignard : un petit fragment de soie ou
âme de la poignée,
Grattoir ou racloir : en assez bon état,
Fourreaux ou talons de lances : fragments (dont
quelques-uns à nervures], iO
Capsule bombée : avec bossette au centre
(base ou talon de lance?).
Faucille : un fragment présumé de serpe
ou de faucille,
Vase : fragment mince, martelé, supposé
d'un vase ou d'une coupe.
Anneau : fragment d'un anneau, soit de
suspension ou autre usage,
Douille : fraiçments d'une forte douille, sans
détermination,
Tige cylindrique : courts fragments.
Tige octogonale : courts fragments.
Tige octogonale : fragments de forme cou-
cave, sans détermination. iO
Scories et morceaux indéterminables, culots, 40
Total. 125 pi
Pour l'intelligence de cette désignation sommaire
dessiné quelques-uns de ces objets :
Figure l'^ — Uaclie dite a rebord droit et à taloi
de face et de pro61).
Figure 2*. — ilacbe dite à rebord droit et à talon j
XlSf SESSION, A 8ENU8. iSS
k partie du tranchant est à côtes : des fragments en ont
plnsieun).
Figure 3*. — Fragment de tige octogonale.
Figure 4*. — Bout de lance avec renflement.
Figure 5*. — Capsule ou virole à aileron circulaire (la
partie cylindrique percée de deux trous).
Figure 6*. — Fragment de lame d'épée (ayant quatre
^i€8 de chaque côte des méplats).
Figure 7*. — Fragmeut d'un fourreau losange.
Figure 8*. — Grattoir ou racloir (vu de face et de profil
<lu c6lé du tranchant).
Figure 9*. — Talon de fourreau se terminant en rond.
(Toutes ces pièces sont de grandeur naturelle).
L'espace me manque pour continuer la description
d'autres objets, ne voulant pas, d'ailleurs, abuser de l'at-
^Dtioo du Congrès. Je me propose (à Toccasion) de faire
^yser ce métal pour en connaître la composition exacte
et rechercher à quelle période il peut appartenir ou être
^ioiilaire, car tout porte à croire que ces instruments ont
^té fabriqués dans le pays : il y a des pièces coulées et
<iautres martelées, ayant même la surface extérieure
polie.
Quel que soit le peu d'attrait que peut offrir isolément
l'examen de ces objets, le véritable intérêt réside dans
leur ensemble et dans les circonstances de leur découverte;
c'est pourquoi j'ai pensé qu'il importait d'appeler l'atten-
tion des savants archéologues sur ce simple fait, d'autant
plus que, pour notre contrée, c'est un nouveau jalon planté
pour nous guider dans la voie archéologique. Jusqu'à ces
derniers temps, en effet, on n'a abordé ce sujet qu'armé
^ textes ou documents historiques, moyen insuffisant,
puisqu'il s'agit de faits préhistoriques; il faut donc mettre
^cà\é les citations et avoir recours aux données pure*
156 CO.XGRÈS ABCHÉOLOGTQrE ]•£ FEA5CE.
ment archéologique?, c'est-à-dirt» étU'Hor seulement les
débris iiiissés pir les premières générati-^ns, en s'aidantde
la traiition soumise à l'observation, suivant laméthole
lies sciences naturelles.
Je termine eu ajoutant que cette découverte caractérise,
avec ufts f«»uiiles antérieures et postérieures, le long et
œntinuel séjnur de l'homme dans nos contrées : ces
vestiges ininterr-'icpus, précisent, avec la plus grande
autheuticité, une série continue depuis les temps préhis-
toriques jusqu'aux temps conîemp«"'rains.
Il est de i 'intérêt de la science de faire connaître ces
faits particuliers : ils peuvent »vlairer les personnes qui.
en pratiquant des r?:»nilb^ ou en remuant des terres,
trouvent des objets, à leur? yeux insignifiants ^sans
valeur intrinsèque . mais qui p-nivent avi-ir une impor-
tance au p:M::t -le vi.e arciic-!*'^'qr*e, en donnant aux
savants des élémonts pour apprécier l'existence et les
manières d'éîre •]»•? pei:j»l .d-s priniiîives, pir Tinspieclion
de la forme et de Li iiaîr.:e «i.s «:'b'ets trouvés : c'est là,
m
assurvjmeu?. un lésulta: u'.ile. mC-ni': p<>i!r l'histoire géné-
rale de l.i France.
M. de Ciix de Saiiit-Aym r.r •.■iiî:^. i:r.iqi:e, à l'occasion
des que^tiou^ îeux, *,: is vt -.latie ; I' Une carîe des sta-
t::as p.i!i:sîros L^? er.v-r. i:r ùo S'-r.îis dressée par
M. Viue*. :'2' r.n Ui-:!.- ir-: iivrr:::.-^ î- ::t il est l'auteur
sur les i:î- iic:ii-'!i*> ni»'ci :t!.". -v.e? k\-' b vûlée do l'Oise et
notamment sur !\i!!Je d-,- V.i-.xr'aî l ; o' une note sur
t'^T-r :V '' O'^t'. •■ '.r A c C: \ jîr» Sr'.:-Avm-^ur. P^ris.
ïyr "X. IST-i K\T.v.t î- [i .'?;-. f r/./ r\roj^h^ie, H74.
cra!:d in-v. :}o li.:
XL1V^ SESSION, A SENLIS. 157
uneépéede bronze trouvée aux environs de Senlis (4).
M. Uayaux du Tilly, au sujet de la première partie de
la \î' question (ancienneté et importance des
voies romaines dans les Gaules ] lit un travail
destiné à accompagner la carte «les voies romaines, pré-
sentée par lui au Congrès géographique, en 1875 (2).
11 dépose ensuite sur le bureau une note de M. Har-
(lûuin, conseiller à la cour d appel de Douai, sur le séjour
de Grotius au château de lialaguy, en 1623, et sur la
réception faite à Senlis, par Louis XIII, à Tauteur du
Droit de la paix et de la guerre, alors ambassadeur de
Suède près ce prince (3).
Hugo de Groot (Grotius) à Balagny et
à Senlis (1623-1635).
Quelque étranger au programme du Congrès que
puisse paraître le souvenir qu'il s'agit d'évoriuer, et qui
n'a pas même le mérite d*étre inédit, ce souvenir, néan-
moins, ne saurait être absolument inopportun. En même
temps qu'il a pris place dans l'histoire de la ville où
la Société française d'Archéologie et les membres du
Congrès réunis sous ses auspices, reçoivent l'accueil le
[1,1 Musée (irch('nlofjique, t. II.
[i- Carte de In Gaule ancienne, indiquant rancienneté
et liniportance relatires df^s voies rojnninfs d\rprès les
ifinêraires d'.intonin et la taf)lr de Pcuthif/er, par Ilayaux
du Tilly. Paris, Ahel Pilon (Inipr. I.aroiissi'). ^'<7.■). in-8°.
(i; Voir a c^ propos le travail lu à la Sociolc hislorique de
Couipiegne, par M. de Marsy, sur lo Traité de 1G3o.
158 G0N6RÂ3 ARGHÉOLOOIQUE DE FRANGE. .
plas hospitalier, il ramène l'attention sur l'œu^
taie et sur l'un des incidents de la vie du pub
plus célèbre de son époque. Presque tous les autn
aussi nombreux que divers, de ce publiciste, ren
reste essentiellement dans le domaine des étu
8*agit d'encourager. Disciple de Juste-Lipse, Gmtîi
plus tendre adolescence, était passé maître en ling
Il préludait par la critique et l'édition de textes o
difficiles entre tous, aux prodiges d'une érud
fait de littérature sacrée ou profane, avec laquelle
lisa qu'à peine celle des Vossius, des Casaubon,
maise et de ses autres contemporains les plus illu!
travaux d'historien national et de légiste eussent <
sufB par eux-mêmes à jeter un vif éclat sur s
comme à honorer sa patrie. Il ne devait, hélas I y i
d'autre rémunération de ses labeurs, de ses ser
ses hautes vertus civiques et de sa gloire, que l'ot
le plus implacable, et que les rigueurs de l'es
l'évasion miraculeuse qui avait mis fin à une •
décrétée perpétuelle par des juges improvisés ie\
aveugles instruments des vengeances d'un parti |
Rappeler ici qu'il s'appelait Hugues Cornets d
ce n'est pas, sous prétexte de scrupules en fait
tude biographique, le destituer du bénéfice du
Grotius, devenu classique longtemps avant i64
est demeuré tel.
Prononcer ce nom, c'était d'ailleurs citer d'c
livre qu'il rappelle et dont la notoriété n'est pas
à savoir : le traité, si justement fameux, intit
droit de la paix et de la guerre.
De l'auteur et de l'ouvrage, Voltaire a dit
part : « Grotius m'a souvent ennuyé, mais il
sa\ant. o Ne serait-on pas tenté de penser qu«
XUY* SESSION, A SENLIS. i59
Ion, maîoU lettrés plus ou moins légistes, ou, si on le
préllre, certains légistes plus ou moins lettrés, à corn*
oeuœr par les plus empressés à rajeunir l'éloge du livre
etàbruyamment se rendre autant d'échos de cet éloge,
se sont assez volontiers résignés à ne laisser qu'à Voltaire
le soin et Tennui d*une préalable lecture?
A peine est -il besoin maintenant d'ajouter que les
auteurs des biographies les plus connues, à la rédaction
desquelles la publication de la correspondance à la fois si
^lumineuse et si intéressante à tous égards de Grotius
devint, en dernier lieu, d'un si grand secours, se sont fait
uo devoir de rappeler, en interrogeant cette correspon-
danee, que le tant célèbre traité fut commencé à Balagny.
Avant de reproduire à ce sujet quelques détails, il ne
sera pas hors de propos de noter que, dès i617, le frère
aioé de Grotius avait séjourné à Senlis. Il était venu s'y
lamiliariser avec l'étude et l'usage de noire langue, à
des conditions et dans dès circonstances qui paraissent
n'avoir pas été jusqu'à présent autrement précisées. Un
bit hors de contestation c'est que ce fut de Senlis que Guil-
laume Grotius s'achemina vers la faculté de droit d'Or-
léans. Il s'y distingua et y conquit avec éclat grades et
diplômes, et préluda ainsi dignement à sa longue et méri-
toire carrière de savant jurisconsulte et de professeur à
l'université de Leyde.
Les causes du séjour d'Hugues Grotius à Balagny, puis
à Senlis, en 16â3, et de sa réapparition dans la même
ville, en i635, sont tout autrement mémorables et con-
nues. Parmi les souvenirs de sa carrière si longue et
si douloureusement glorieuse de proscrit il n'en fut
pière qui reparurent aussi fréquemment sous sa plume
ou sur ses lèvres, dans les épanchements de la famille et
et de l'amitié.
G:
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. . 1. Y M?SJ le
:. : u:-.rji-jo eu
[■^ liur.juv, au'il
XLIY* SESSION, A SENUS. iOI
commença le grand ouvrage qui, seul, aurait sufQ pour
rendre son nom immortel... H avait avec lui sa famille et
quelques amis. Les plus illustres savants venaient quel-
quefois lui rendre visite, entre autres Saumaise et Rigaut.
llavait tous les livres qu'il pouvait désirer. François de
Tbou, fils du président qui avait hérité de la bibliothèque
de son père, une des plus belles de ce temps-là, lui laissait
l'entière disposition des livres. Grotius qui savaitquele
président de Mesme était très-zélé catholique, eut l'atten-
tion de régler sa conduite de manière que le président
n'eût point à regretter le plaisir qu'il lui avait fait de
lui prêter sa maison.» Grotius prend soin, en effet, dans
^ correspondance, de rappeler que tous exercices religieux
par des ministres du culte réformé fureut suspendus, et
que le service à table demeura sévèrement conforme aux
prescriptions de l'église orthodoxe. 11 passa le mois d'oc-
tobre de la même année dans Senlis même.
Douze ans après, l'auteur du Traité du droit de la paix
ex de la guerre, à l'apogée de la renommée européenne
de publiciste sans rival, reparaissait à Senlis. Le proscrit
était devenu l'ambassadeur en Franco de la Suède, alors
sous le gouvernement de Christine et du célèbre chance-
lier Oxenstierna. a Ce fut le duc de Mercœur qui condui-
« sit, le 6 mars, Grotius à la cour... Le nouvel ambassa-
« deur fut très-content de la réception qui lui fut faite. La
• garde du roi était sous les armes. Louis XIII parla beau-
« coup à Grotius, et avec tant de bouté, qu'il en conjectura
• qu'ils finiraient agrêablcmoutlosail'aircs qui lui étaient
« cuniiées. Sa Majesté, ajuuto le bio^^^raphe, qui se borne du
< reste à continuer l'analyse de la currospuuduucc de Gro-
< tius, lui fit comprcndn: pur son air gracieux et par ses
< diicours qu*on ne puuvuit envoyer eu France aucun
I uiniitre qui lui fit autant de plaisir. 11 le lit couvrir et
XUV* SESSION. il
163 CONGRÈS ARCBÉOLOGIOCE DB FRANCE.
e il redoubla ses politesses, lorsque Grotius lui présenta
« son fils Corneille, n
Quelque modernes que soient les souvenirs que je Tiens
d'évoquer, et quelque étrangers qu'ils puissent dès lors
paraître aux travaux du Congrès, peut-être n'y seront-ik
pas absolument déplacés.
L'hospitalité qui accueillit Grotius à Balagny et dans
Seniis. fut un touchant et mémorable hommage à l'infor-
tune et an génie. Elle n'honora pas moins la France et
Louis XIII que l'illustre prciscrit lui-même. Dans la ville
où il recueillit un aussi éclatant témoignage de sympathie,
une rémunération aussi proviicntiellement glorieuse de
ses labeurs, de son savoir et de la vie pure et sans tache
qu*il y associa, siège une assemblée non moins hospita-
lièrement accueillie, au sein de laquelle tout respect est
acqui? d*avance au nom et à la mémoire de l'érudit, du
philologue par excellence et de Thistorien des Provinces-
Unies.
Enfin M. de Marsy communique un travail de M. le
colonel Ccaistant d'Yanviile sur Guillaume d>Ircuis et dom
Pierre Coustaut. travail des- i né à servir de réponse à une
partie de la 50"" question :
Donner la biographie des plus célèbres
antiquaires et érudits nés dans le dépar-
tement de l'Oise.
Dom Pierre Constant et Guillaume
d'Ercuis.
Paniii le-î êruvlits nés lians le déparlement de l'Oise, il
e:i est ua doai les biographes ont \>cïi parlé, malgré Péten-
XLIY* SESSION, A SENLIS. 163
due de son savoir et de ses mérites, peut-être à cause de
la oatore même de ses travaux, exclusivement consacrés
i liscolastique; et cependant il remplissait, suivant nous,
toutes les conditions qui font les vrais savants. Mais, dans
notre siècle si agité et parfois si futile, le goût des
recherches et des études sérieuses s'est répandu partout.
Une sorte de décentralisation intellectuelle, dont cette réu-
nion est une des manifestations, s'est produite sur tous les
points de la France ; elle a cherché à faire revivre le passé
pour éclairer l'avenir, tendant ainsi à prouver à tous que
le travail a toujours été une loi de l'humanité, que la lutte
doit avoir ses défaites comme ses victoires, que la déses-
pérance n'est pas un acte viril, ne peut être le fait d'une
nation, qui, malgré de violentes convulsions, de fréquents
^ profonds bouleversements, a produit, à toutes les
époques, des enfants dont elle a le droit de se montrer
fièie,ie dirais même orgueilleuse. De grand» génies, des
individualités brillantes ont occupé les premiers plans,
accaparé les suffrages et les critiques; ils ont conduit,
dirigé la nation dans les conseils, dans le» sciences, dans
In arts ; mais ces éclatants météores, ces phares lumineux
qui ont guidé les générations à travers les âges, ne sont
que les résultantes du labeur général, occulte, modeste,
incessant de l'universalité de nos ancêtres. Et ces infati-
gables travailleurs, ces intrépides pionniers, ces incon-
^ents édificaleurs de la gloire nationale..., la postérité
les découvre un jour, et bien longtemps après que leur
souvenir a passé, ils se trouvent vengés de cette sorte
d'oubli, de cette espèce d'injustice de leurs contemporains
parles recherches de leurs petits neveux, les publications
nltérieures des sociétés savantes.
Il serait cependant injuste de dire que celui dont je
veux vous entretenir, ait été complètement oublié par les
164 CONGRÈS ARCHEOLOGIQUE DE FRANCE.
biographes. Mais comme on est toujours enclin à la par^
tialité dans sa propre cause, je tiens, avant de tous le
nommer, à ne le présenter qu'avec ce que j'oserai appeler
de sérieuses références.
Deux hommes éminents de notre époque, l'un membre
. du Sacré-Collége, l'autre haut dignitaire de l'instmction
publique, m'ont exprimé en termes à peu près identiques
leur opinion sur dom Pierre Constant, l'enfant de Com-
piègne, où il naquit le 30 avril 1654, l'élève du collège
des Jésuites de sa ville natale, le novice de Saint-Reroi de
Reims, entré à dix-sept ans dans la Congrégation de
Saint-Maur et devenu profès en i67i, le disciple de
dom François Lami à Saint-Médard de Soiseons, où il
étudia la philosophie en 1673, le zélateur de SaintrPha-
ron en 1679, le prieur de Nogent-sous-Coucy, de 1693
à 4696, rhôte successif à l^aris de l'abbaye des Blancs-
Manteaux, qui recueillit une partie de ses manuscrits, et
de celle de Saint-Gcrmain-des-Prés, dont il mourut le
doven en 17il.
Le savant r^rdinal Pitra. que j eus l'honneur de voir à
Rorno eu 48('^ et auprès duquel le nom seul de dom Cous-
tAUt mo serxii d'iniroiiucMûn. résumait son opinion sur
lui on disant qur àôxn Piorrf avait été peut-être. Après
dom «loan Mahilinn. Thumnir le plus remarquable de la
Oi«'^nffro.eAtii>n àc Saint-Maur. C'est à peu près la même
opinion qnr jViis la flattousr saMsiaclion de recueillir de
la KMirhr mrmr «l'un anr.ien ministre de l'instruction
publique. M. ùiraud.
AprîS lYnoihV- liii jucommî <lr œ? deux doctes person*
im>:<^s, \a i^Aiisi . iMinnn î'.iii di; nu palais, parait enten-
dtir: 4>i 4*11 (!r)îitrv <ii .'nuinicrjiiiDii luts ouvrages de dom
IV «liMislMîil. sur h>!4Tii<»l> niii nt'ia yirononcé des jupi'S
i*nin|>4M4Mit«> l«'is i\iu : (loin inî^iii. *ii«m Th. Blampin, né
XUY* SESSION, ▲ SENUS. 4(i5
^ %yoD, Baiilet, né à la Neuville-en-Hes, du Pin, dom
«Mopiaot, dom Philippe Lecerf, dom Edmond Martène,
dom Clémencet, Le Nain de Tillemont, il me reste bien
peu de chose à dire du modeste, pieux et érudit bénédic-
tiu, en Faveur duquel je viens briguer par vos suChrages,
ce que, si sa modestie le pouvait souffrir, je serais tenté
d'appeler un regain de renommée.
Dom Mopinot a, de sou style élégant et pur, écrit
t éloge de dom Constant, dans le Journal des Savants
janvier i7i21; mais la mort est venue trop tôt pour qu'il
pût avoir, je ne dirai pas une page, mais quelques-unes
de ees lignes sympatliiquemeni convaincues, éloquem-
ment émues et chaudement lumineuses qu'a si longue-
Tuent semées dans le magnifique recueil entrepris à la
gloire des ordres monastiques le grand écrivain catholique,
nilustre auteur des Moines d'Occident, auquel j'avais cru
^oir adresser le modeste résultat de mes recherches.
C'est auprès de vous. Messieurs, que je viens chercher et
qoe j'espère trouver l'oubli de ce stérile regret.
Je vais donc essayer de rappeler en peu de mots
fuelques-uns des traits principaux d'une existence de
tnvail et de piété en disant ce que furent son amour de
l'étude, son érudition, son orthod(»xie, son abnégation, sa
modestie, sa charité, son désintéressement, son austérité,
sa foi.
San amour de tétude. — Dès son enfance dom Cous-
tant s^ fait remarquer par sou zèle et sou application à
Compiègne, à Reims, à Soissons; el dom Tassin nous dit
que dès son noviciat il mérita d'être proposé pour modèle
à tous ses camarades. A Heims il s'attache à dom
Fr. Lami, et fait tout pour aller le retrouver à Soissons.
où œlui-ci avait été envoyé pour professer la philosophie.
Il parvient à se rapprocher de ce maître qui affectionnait
106 COMGRÈS ARGUÉOLOGIQUJS DIS FRANGE.
autant son disciple qu'il en était aimé. Mais la réunion ne
devait pas durer longtemps ; dom Lami est envoyé à Paris,
rélève tenle encore de suivre son professeur, mais, soumis
à la règle, il renonce à cet ardent désir et semble chercher
une compensation à son sacrifice par un redoublement de
travail et d'assiduité. Enfin, tout jeune encore, il entra
dans cette Congrégation de Saint-Maur qui compta près-
qu'autant de savants que de membres. Ses travaux disent
le reste.
Son érudition. — Voyons comment elle a été appréciée.
Dom Blampin, nommé prieur de Saint-Remi de Reims,
est obligé d'abandonner le recueil des œuvres de saint
Augustin, et c'est dom Couslant qu'il demande de faire
venir pour le remplacer. Il est d'abord chargé des tables
du troisième volume des Œuvres et bientôt après de la
besogne délicate de discerner les sermons véritables de
ceux qui avaient été supposés. Et il s'acquitte, dit dom
Tassin, de cette difficile besogne avec tant de promptitude
et de succès, que ce travail d'un commençant aurait pu
passer pour le chef-d'œuvre d'un talent consommé. C'est
à propos de cette publication que Baillet dit de dom Cons-
tant qu'il avait une industrie particulière pour recon-
naître non-seulement les pièces supposées, mais encore
les fourrures et les gloses. Il savait, du reste, au dire de
dom Mopinot, rechercher les vérités jusque dans les
moindres faits.
Plus tard dom Mabilloii le fait désigner pour cette édi-
tion de saint Hilaire, dont dom Ph. Lecerf a écrit qu'on
la regardait comme une des plus exactes, des plus com-
plètes et des plus parfaites qui soit sortie de la plume des
Bénédictins.
Le Nain de Tiiiemont, qui avait entrepris les mémoires
pour servir ù l'histoire ecclésiastique, demanda par son
XLIV* SESSION, A SKNUS. 107
tesUmeot que dom Coustant fût chargé de leur conti-
Doalioa, prouvant ainsi l'estime qu'il avait pour son
talent.
Ed 1705 et en 1715, il publia en faveur de lu Diploma-
tique de dom Mabillon une première et une deuxième réfu-
Ution des attaques dû Père Germon, jésuite. La seconde
réplique resta sans réponse, et on a pu croire, dit dom
Ph. Lecerf, que le Père Germon avait cédé à dom Pierre
UD« victoire qu'il avait o?é disputer à dom Mabillon lui-
même.
La modération cependant était le caractère spécial de sa
critique et se faisait voir particulièrement, suivant dom
Vopiuot, dans lesendroitsoù il employait le plus de forme
coolre ses adversaires.
Une lettre de dom Simon Baugis nous apprend qu'il
(iemanda que dom Coustant revit le saint Grégoire, mais
Hlen fut momentanément chargé, il ne termina cepen-
dant pas ce travail.
.Nous voyons ensuite dom Alartènc le consulter sur un
traité d'Hugues de Saint-Victor, et, peu de temps aprèt^,
•■•a lui confie la surveillance d'une nouvelle édition du
Bréviaire.
Lorsque dom Coustant eut achevé les Tables dos
ou\r.ige& supp«>sés de saint Augustin, un lui propos<i suc-
>e»$i\ement de travailler à une nouvelle édition d'un dos
Pênes de l'Église, pui;? à une bibliothèque bénédictine, o{
^utin à nu recueil dos lettres des papes, ouvrage inunen^^e
•{u a près de longues hés-itutions il iinit par accepter a\ec
U pensée que ce devait elle, rumme nuus l'upprend une
irttre de lui, VJIistoire de i'/ùjlise faite et appuyée sur des
Uits authentiques; et, comme le dit dom Mopinnl, le
•!e?ir de rendre ;iervice à l'Kglise lui appl.init les dillicul-
'a. Ce tut vers la lin de 1701 qu'il comnicnç;i à rassem-
UîH (lONURÈS AHCUÉOLOGlOrE DE FIUNGE.
blor les éléments de ce remarquable travail, car, daos
iiiio lettre datée de Home, le 15 septembre 1701, doni
Guillaume Laiiarre lui dit avoir communiqué à plu-
sieurs prsdunes son projet qui a été fort goûté; et dans
unr autre lettre, do dom Constant à dom Martène, du
li février 1703, il dit que son projet est encore incertain,
« qu'il n*a enatreque le dessein d'en amasser autant qu'il
{HMirra afin dVn faire dans la suite ce qui pourrait être le
plus avautagreux pour le bien public. • On ne doit du
rt^i^to |Kis s attendre à le voir aller vite, surtout dans les
siMf^ ^^nlUS^: car. dit^îL < j'aime mieux avancer moins
p^nir prt'n^in' toutes les iiiesur^^ possibles afin de donner
3^ tVuvratn^ toute la perfection dont je suis capable. »
I Vpttrv' v^^licaco:^r au paiv Innoceot XIII. faite en col-
UK^mtîou A\tvdom Mopico\«?:ait, audir^dedomTassin,
J\uw purvC;* ç*? srutv et«f«:K>? 'i'.ftie des plus beaux temps
vie U Uî^uî:^-
IV;tr A:vy ,:r:'r .^-^ :vc>e-in«îîn»;£::5 on ne peut mieor
*,«»r^.' <v.,* .V ; vr i yrs«:i-,v Ijlum i'^^se c-.MiTelle édition
,^ .■>^■•^•*•/ .'S. "j>. -V ;-' t"* j •*vrr:z*-»*, parG- B.6.
>.-.».v-v *'.«''* tx'A- • ^»f•:■^?e^ :rr.'ri»?< :?: ."«rains retran-
^ ■< ' • '»v -.r» -î "sf ■>■!'' . j. eciii::»!. «Cimer dom
v,^..A.l ' i vi .-vt. liiNi' :ii^ H ■ ;:rî!r:i^C7iB d "après
•■ <v< ; ^ ^ -î-i i-ri«f f»f< Li€t.*^ , mais
. .» -x-v.'.! -.x- • i\ t: -i; Ti^fii -f fil 2*?«îiir»nî les
■ •.^■•t«>i *o l 'v ■.■■■■• ^x. » • *^îiili»^ i\' LiT^f rïîBSt$^âd~
» ». •*v-.'.. - T-.* ■ • ,1 >^ i!:niir>|H ••£ T'»*!I T»!* fes
• \'K»»K> i^ xi':^ •■ ..«^ .. ;*^ :.î!:*i»fS ifiSsi^OMlt
I ■
«
xmr* SESSION, a senlis. 469
sition 011 de l'erreur qui les avait fait admettre; sa finesse
e(8on discernement pour juger les variantes d'un texte;
sa sévérité dans l'examen des calculs chronologiques;
cette science, grâce à laquelle il avait toujours pour ainsi
dire tous la raaîn et tout prêts les faits se rapportant à
l'histoire, aux rites, aux doctrines et aux lois de l'Église.
Grke, dis-je, à ces qualités et à beaucoup d'autres qu'il
wnit trop long d'énumérer ici, il composa un ouvrage
qui est un modèle et un type parfait. Bien peu d'hommes
pourraient concevoir et entreprendre une œuvre semblable.
Quant à l'exécuter et à la conduire à bonne fin, je ne sais
si personne autre que dom Goustaot en eût été capable. »
Dans un autre endroit, Schœnemann reproduit la
même pensée, qui fut aussi émise devant moi par
Mgr San Marsano, bibliothécaire du Vatican, lors«]u'il
ne montra les dix cartons contenant les matériaux pré-
parés des 2* et 3* volumes, conservés dans la Bibliothèque
poDiificale, où ils ont été déposés par le cardinal Fesch :
■ La masse imposante des fondements qu'il a posés s'op-
pose à ce qu'un autre tente d'achever son entreprise. »
Le travail consciencieux de dora Coustant, sa persévé-
rance infatigable, a dit de nos jours M. Brainne, ren-
daient sa critique calme, sûre et judicieuse.
San orthodoxie, — Nous en citerons seulement deux ou
trois preuves : d'abord le décret de la cour de Rome, en
date du 2 juin 1700, condamnait six ouvrages publiés
contre l'édition de saint Augustin; plus tard, l'assenti-
ment également donné par la cour de Rome à la publica-
tion des Décrètales; l'ordre donné par le Suint-Père, de
communiquer à cette intention tous les manuscrits du
Vatican; et enfin une constatation toute récente.
Lors des premiers dissentiments entre le Piémont et les
Ktats de l'Église^ plusieurs étrangers vinrent au Vatican
170 CONGRÈS ARGIIÉOLOGIQUE PB FRANGE.
demander communication des manuscrits non publiés de
Décrétaleê de dom Goustant, comptant y trouver, pensa
t-ou, la justification de certaines hardiesses, des poinb
d'appuis pour certaines attaques. Les recherches fureu
stériles et n'eurent pas de conséquences connues. Ga
personnages étrangers avaient-ils donc cru pouvoir fondai
quelque espérance sur la connaissance d'une lettre de don
Constant au cardinal Muffei , qui l'avait complimenta
sur ses rérutations en faveur de la Diptomaiique de don
Mabillon, dans laquelle se trouve le passage suivant :
« Si les lettres ne sont pas ici dans une entière décadence,
on aurait sujet de le craindre de la manière dont on eu
use avec ceux qui s\ appliquent, il y a un certain parti
qui règne et qui ne leur laisse pas la liberté nécessaire.
Vous savez mieux que moi que la république des lettrée
demande une certaine lil>erté honnête, sans quoi elle m
peut subsister. Les uns se plaignent de la partialité ûei
journalistes, les autres des examinateurs. » C'était bieu
mal connaître les sentiments de dom Constant.
Son abnégation , sa modestie. — Nous en trouvons une
première preuve bion remarquable dans la conduite
du jeune iMèvo de phiiosophio do Suint-Médard, deman-
dant instammont à suivre son maître, dom Fr. Lami, et
suppliant ensuite le prieur de ne pas le préféreir ik doux de
ses condisciples inserits avant lui.
Lors do la diVision do dom lilampin, qui s'op|K>sa è
ri m pression des Tables des sermons sup|Hisé8 de saini
Augustin, atin do no pas grossir louvragi', il s'empressu
de défôror à cette suppression, bien quo^ dom Tassin k
nuMitionne, eos Tables lui eussent coûté l^oaucoup de
peines et de scuus. Tt>utel\us, un travail aussi im|H>rtant
ne devait pas ètn* t^'rilu,et dom Mnpiuft rap))olle qu'elles
lurent publiivsplus tard. lors«]u'à la s<dlicitation de Mgr k
XIVT SESSION, A SENL18. 47!
Tellier, archevêque de Reims, dom Blampin l'eût mis à
même de faire paraître une Vie de saini Augustin et un
index de tous ses ouvrages. La dernière feuille de cette édi-
tion était à peine tirée que dom Coustaut, nommé prieur
de Nogent-8ous*Coucy, s'empressait de partir, heureux de
trouTer cette occasion d'être dispensé des éloges dus à
l'éditeur et d'éviter les applaudissements du public.
Enfin, la preuve la plus éclatante de cette abnégation
eetsans contredit sa soumission à l'ordre du chapitre, qui
le nommait prieur. Il avait tout fait pour se soustraire à
oel honneur, remontrances, prières, larmes même; aussi
ivecquel empressement ne sollicita-l-il pas sou départ à
il fin du triennat, dans une lettre datée de minuit, afin
de donner à entendre que le poids de ses fonctions lui
enlevait le repos, et pour débarrasser, écrivait-il, la con-
grégation d'un si pitoyable prieur.
Sa défiance de lui-même. — Malgré le succès de ses
premiers travaux sur saint Augustin et sur saint Hilaire,
nous le voyons, à la mort de Le Nain de Tillemont, refuser
d'entreprendre, malgré la demande de ce savant à son lit
de mort, la continuation des mémoires pour servir à
VHiitoire ecclésiastique, parce qu'il croit ce travail au-des-
sus de ses forces.
Quelque temps après, il n'ose pas non plus entreprendre
de travailler à une bibliothèque bénédictine.
Cette défiance de lui-même devait cependant avoir un
tenue; toutefois il hésita longtemps avant de se décider à
entreprendre le grand travail des Décrétâtes, mais de tous
eûtes on insista auprès de lui, et, nous dit dom Mopinot,
HH\ humilité et sa soumission lui firent fermer les veux
^'ur les difficultés.
Sa chanté, son désintéressement. — Sa charilê pour se>
frcre^t, et surtout pour les pauvres, était sans limite. Afin
47â CONGRÈS AHCHÉOLOGIQUE DE PRAIICE.
de les soulager, il vendait, avec l'autorisation du Père
général, les exemplaires qui lui revenaient de ses impres-
sions et leur en distribuait l'argent. Au moment de sa
nomination de prieur, il ne demanda qu'un seul exem-
plaire du Saint Augustin, qu'il emporta et laissa à son
monastère. Mais, dit un de ses biographes, s'il aimait les
pauvres, il aimait encore plus la pauvreté, et la pratiquait
en tout.
Son austérité, sa foi, — Dom Goustant, qui était encore
plus remarquable par sa piété, sa religion, son sèle pour
l'observance religieuse que par son érudition, la justesse
de son discernement, l'exactitude de ses travaux, la finesse
et la nouveauté de ses aperçus, ne travaillait que pour se
sanctifler, et en recherchant l'esprit des Pères de l'Église
pour l'intelligence de leurs écrits, il prenait leurs maximes
pour règle de sa conduite. Tel était le jugement porté sur
lui par le continuateur de la bibliothèque de M. du Pin,
et, dit un écrivain de nos jours, il est resté comme un
modèle du vrai Bénédictin. La prière et le travail furent
SOS seules occupations. Le temps de la prière et du recueil-
lement était puur lui, comme il le disait lui-même, un
temps de récréation et de repos. Dès son noviciat, il s'était
toUemcnl liabiliu* i\ $u()portor les rigueurs des saisons,
que les plus grands froids ne lui tirent jamais interrompre
ses études. 11 ne se chaull'u jamais, même pendant l'hiver
si rigoureux de 1709.
Chorchait-il à imiter ainsi de loin les premiers Pères
du déport? rit n'ôtail-ce pas aussi par esprit de mortifica-
tion et en souvenir de ees chrétiens d'un autre Âge, qui,
la croix sur la poitrine et le bourdon à la main, travers
saient «i pied rKuro]H' et TAsie Mineure pour aller s'age-
nouiller sur le tomk\ui du Sauveur, que chaque année il
ne panuuirait jamais t|u a pied la dislance qui séparait de
XUY* SESSION, A SENLIS. 173
Compiëgae son abbaye de Saint-Germain-des-Prés. Encore
ne consacrait-il à cette excursion que cinq ou six jours, et
c'était le seul repos qu'il s'accordât.
Du reste, les travaux les plus humbles et les plus rebu-
tants, les choses les plus viles étaient ce que, par esprit
il'humilité, il ambitionnait le plus.
Souvent malade, il ne voulait jamais employer d'autres
remèdes que la patience. Le travail l'épuisait lentement,
mais il continua jusqu'aux derniers moments à suivre la
règle dans toute sa rigueur; et quels que fussent ses tra-
vaux et ses souffrances, il assistait jour et nuit aux offices
du chœur, où il arrivait toujours un des premiers. Enfin,
lors de sa maladie dernière, pour ne pas interrompre la
publication des Déerétales, il voulut cacher ses souffrances
et il y parvint pendant un mois. Au bout de ce temps, il
dut s'avouer vaincu et fut contraint d'entrer à l'infirme-
rie. Dès lors son sacrifice était fait, et il se remit tout entier
à l'ordre de Dieu, cherchant à imiter la courageuse éner-
gie et la résignation chrétienne de la mort de dom Mabil-
lon, qu'il nous a si complètement retracée dans sa belle
lettre du 9 janvier 1708 à dom Martène, et ambitionnant
sans doute aussi les mérites de ses souffrances, a Car, dit-il
dans cette lettre, ou a sujet d'adorer les jugements de
Dieu, qui semble en avoir voulu faire unmartyrl > La
fièvre acheva son œuvre, et, le 18 octobre 1721 , sur les
onze heures du soir, dom Pierre Constant mourait à
l'abbaye de Saint-Germain-des-Prés, rendant, suivant la
grande expression de dom Tassin, sa belle âme à Dieu,
sans agonie, sans frayeur, sans convulsion, entouré de
l'affection de ses frères et des regrets de tous.
Voici, Messieurs, quel était le vertueux érudit que je
désirais faire revivre un instant parmi vous : tel était
l'écrivain, le moine, le chrétien I Mais permettez-moi
MA CONGRÈS aRGHÉOLOOIQUE DE FRANGE.
maintenant de vous dire quel il était selon le monde : il
était fils d'un avocat en parlement, Raoult Coustant, né
aussi à Compiognc, et de Loyse Loysel, gens d'honnête
famille et de grande piété, nous dit dom Mopinot. Qu'il
me soit permis d'ajouter que la famille de sa mère est
peut-être une de celles qui ont jeté sur toute cette contrée le
plus grand éclat comme savoir et comme érudition, celle
d'un savant jurisconsulte, de l'illustre auteur des /rMliVtcrM
coutumières, j'ai nommé Antoine Loysel, né à Beauvais.
Il est à remarquer que Dom Pierre Coustant ne résida
jamais dans l'antique abbaye royale de fa ville natale,
qui appartenait cependant à l'ordre de Saint-Benoit; aiais
s'il ne fit pas partie, de l'abbaye de Saint-Corneille, sa
famille y compta des représentants presque à chaque géné-
ration ; dom Jean Coustant, dom Louis Coustant, et enfin
dom François Coustant, qui en fut sous-prieur, étaient
ses neveux ou petits-neveux.
L'exemple de sa haute piété devait aussi lui survivre,
et l'une de ses petites- nièces, M'^* Coustant de Jouy, en
épousant un frère de l'évoque de Mcnde, Mgr Brulley de
la Brunière, eut l'honneur de devenir la mère de Tabbé
Paul-Maxime de la Hruni^rc, prêtre des missions étran-
gères et coadjutcur de Mgr Vérollcs, évéque de Columby,
en Mantchourie, qui, évéque nommé de.Triuita, périt
pour la foi sur les bords de l'Amour, en 4845.
Une autre de ses petites-nièces fut la mère d'un autre
érudit de ce département, bien connu ù Senlis, M. Edouard
Poulletier de Vcrneuil , dont les hautes connaissances,
comme géologue et paléontologiste, sont aussi présentes à
lu mémoire de plusieurs d'entre nous que son caractère
atrabic et sa généreuse bienfaisance.
Je viens. Messieurs, de vous faire envisager dans la
XLIT* SESSION, A SENM8. W'ï
postérité ce que l'on pouvait, en employant une expres-
sion un peu mystique, appeler les rayonnements de la
sainteté du pieux Bénédictin. Maintenant me serait-il per-
mis de remonter le courant des âges et de rechercher si,
dans son passé, dom Coustant n'aurait pas eu de nobles
exemples, dont il aurait, lui aussi, subi la sainte et mys-
térieuse influence?
Certaines traditions de famille éclaircies et appuyées
par des découvertes importantes, permettent de penser
que dom Pierre a eu d'illustres ancêtres, dor.t la charité,
les vertus et la religion ont laissé quelques traces.
D'après les documents fournis par les pièces d'un dos-
sier des Archives Nationales (Fonds Sainte-Geneviève,
Dotf îer Ercuis), ce serait dans les anciens seigneurs d'Er-
cuis (Arquis,Erques, Arquetum, Erquetum, localité située
entre Neuilly-en-Thelle, Gires-lès-Melloet Saint-Leu] qu'il
faudrait chercher les origines de la famille de dom Cous-
tant. Mais sans aborder la discussion de ces probabilités
généalogiques, il est permis de signaler l'existence d'un
membre de cette famille d'Ercuis (de Erqueto) (I), et il
m'a semblé juste en tout cas de faire figurer parmi les érn-
dits de ce département le précepteur d'un roi de France.
tiuiliaume d'Ercuis, clerc, familier et pi-écepteur du
il) Il ne faut pas confondre cette l'ami Ile d'Ercuis [fie Erqueto)
avec eelled'Erquery [de Erquerinco)^ du nom d'une localité située
â peu de distance de la première, et qui a donné un porte-ori-
flanime de France, Raoul d'Erquery^ dont le père, non cité par
le P. Anselme et sans doute ignoré par lui, pourrait bien être le
Ânsoidus de Erqueriaco, m iles , v i va n l e u t â Â 3 . a 1 n si que le
constate une charte du Fou is Sa i 11 te-Gt^ncv love. Le grand-père de
Raoul, Simon, vendit, en IfOi, suivant une diarU* du Carlulaire
iilanr Je Saint- IK*nys, la moitié des forfaitiiros et amendes qu'il
a\ait aux lieux de Cires (les Milio) et de Tillct.
470 CONGES ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
roi Philippe le Bel, a quem litterarum scientiam edocuit
et instruxit, » comme il le rappelle dans son testament et
comme le dit le roi lui-même dans une donation de IS97,
est un personnage historiquement inconnu, simple sup-
pléant sans doute de l'illustre Gilles Ck>lonna, < le docteur
très-fondé, d mais dont il est intéressant de foire revivre
le nom dans ce pays, qui était le sien, comme il fut celui
de Guérin de Senlis, de Vincent de Beauvais, de Guil-
laume de Trie, tous précepteurs des rois de France, tant
à cause de la haute position qu'il a occupée que de sa
haute piété, des nombreuses fondations et donations foites
par lui dans cette contrée et ailleurs, et dont nous ont en
partie conservé l'énumération et sou testament du samedi
après la fête de saint Benoit (13 juillet) 4314, et le vidi-
mus de TOfficial de Paris du 29 juin 1329.
FilsdeGuiilaumed'Ërcuis,écuyer,mortavant mai 1303,
et frère de Jean d'Ërcuis, écuyer, valet du roi, on le trouve
dans les chartes du dossier d'Ercuis, qualifié, en 1290, de
clerc du roi, chanoine de Laon; en 1293, de chanoine de
Noyon et Senlis; en 1296, de chanoine de Reims; en 1297,
de précepteur du roi et fondateur de la chapelle d'£rcuis;
en 1302, d'archidiacre de Thiérache.
La date de sa mort n'est pas plus connue que celle de sa
naissance, mais elle doit être placéeentre le 13 juillet 1313,
époque à laquelle, déjà retenu chez lui par les infirmités
et la maladie, il recevait de Tabbé de Sainte-Geneviève
l'acceptation de sa donation en pure aumône, et le 16 jan-
vier 1316, date d'un amortissement, fait et donné, aussi
en faveur de l'abbaye de Sainte-Geneviève, par Louis, fils
aîné du comte de Clermont et chamberier de France, des
biens et héritages donnés par feu messire Guillaume
d*£rcuis, fondateur de plusieurs chapelles en la paroisse
d'Ercuis, pour la desserte desdites chapelles.
XLIV* SESSION, A SENLIS. 177
Comme Dous l'avons déjà dit, il fonda plusieurs cha-
pelles dans le diocèse de Beauvais et notamment celle
d'Ercuis, piur rétablissement de laquelle il fit des trans-
actions avec des parents dès 1290. En 1297, il en acqué-
rait l'emplacement de sa sœur Jeanne et de son beau-frère
Amoul d'Estrées- Saint- Denys; à différentes époques, il
obtenait pour elle du roi et de Robert, comte de Glermont,
fils de saint Louis, des terres, des redevances, des privi-
lèges, le titre de chapelle royale; enfin, par une bulle, en
date du 8' jour des kalendes de juin de la 2' année du
poDtiGcat de Clément V, il obtenait du pape le bref d'ins-
titution de deux chapellenies perpétuelles dans sa chapelle
d'Ercuis, avec droii de présentation des chapelains pour
loi et 868 héritiers.
Les fondations diverses qu'il institua, et les legs nom-
Iveux qu'il fit par son testament, prouvent d'une manière
ioooQtestable la pureté de ses sentiments, la sainteté de sa
vie, l'ardeur de sa charité et son attachement à l'Église,
n commença l'énuméralion de ses dernières volontés par
l'aquittemeat de quelques dettes qu'il spécifie. Puis il
entre dans les détails les plus circonstanciés sur tout ce
1Qio)nstitue l'établissement, l'entretien et la dotation de
il chapelle d'Ercuis, et lorsque ce legs, qui fait sa princi-
pale préoccupation, est bien dûment et avant tout assuré,
il s'efforce de laisser un souvenir à tous ceux qu'il a con-
nus, qui lui ont rendu service, qu'il a aimés^ qui lui sont
attachés par les liens du sang ou de la reconnaissance, à
ses filleuls, aux malades, aux lépreux, aux pauvres, aux
ialfrïques de toutes les «églises et de toutes les paroisses
doul il était dignitaire, à ses serviteurs, aux serviteurs des
pauvres, il pense aux moindres détails et attribue une
certaine s<jmme à ses parents ot aux pauvres pour les
indemniser de leurs frais de déplacement le jour de son
XLIV* SESSION. iâ
178 CONGRÈS ARGHÉOLOOIQUE DE FRANGE.
inhumation, s'il meurt à Ercuis; et s'il meurt au loin, il
prescrit de donner aux pauvres la même somme; il pres-
crit aussi de leur faire, l'année suivante, une distribution
de vêtements au jour anniversaire de son décès. Il rappelle
qu'il a fondé la chapelle d'Ercuis pour la prospérité du
culte et pour le salut des âmes de lui-même, de ses père
et mère, du roi et de la reine, du père et de la mère du
roi, de leurs ancêtres, de tous ses bienfaiteurs et prédéces-
seurs. Il fonde partout de nombreuses messes à son inten-
tion, à celle de ses parents, de ses bienfaiteurs, de ses
amis.
Tels sont les renseignements que j'avais à donner sur
le personnage, dont je crois avoir de nos jours un des
premiers signalé l'existence.
La chapelle royale n'existe plus; cependant on croit
encore reconnaître l'un de ses murs dans le bas-côté droit
de l'église d'Ercuis, à l'entrée, du côté de la place.
M. Graves, dans ses excellentes monographies, nous
apprend que la chapelle royale devint un prieuré de
l'ordre de Saint-Augustin, sous le vocable de saint Louis
et dépendant de Sainte-Geneviève de Paris. Le siège du
prieuré, ajoutc-t-il, était dans une ferme voisine de
l'église^ qui est aujourd'hui sous le vocable de saint
Nicolas.
Mais dans cette église, qui n'est que l'ancienne chapelle
royale agrandie, sur ce mur qui a vu s'agenouiller devant
lui tant de générations, ne serait-il pas digne de la haute
inspiration qui guide vos travaux, de ce culte de l'histoire
qui vous réunit, de cette reconnaissance pour tout ce qui
a éclairé et servi notre France <jui vous anime, ne serait-il
pas opportun, en momoire de celte réunion, Messieurs,
de ressusciter à six siècles de distance le pieux et érudit
fondateur, le généreux donateur, et de rappeler son sou-
XUY* SESSION, A SENUS. .479
veniraux géoératioos futures par une inscription relatant
kstilres de Guillaume d'Ercuis, la partie de son testa-
ment ayant trait à la fondation de la chapelle royale, les
00018 de ceux qui l'ont aidé dans sa pieuse entreprise.
baos cet ordre d'idée, voici le texte de l'inscription que
je soumets à votre appréciation :
PIM MKMOALE.
Venerabilis et discret! magistri, Dobilis domini Guillelmi de
Erquelo, sereDîssimi pVÎDcipis domini Francorum régis Phi-
li|ipi IV eleriei, familiaris et praeceptoris, archidiaconi de The-
resca, ac ecclesiarum Remeosis, Noviomeosis , Silvanectensis,
Beat» Mari» deMellotoet altagii suide Mercherio super Suppam
•anoooid, ac hujuscapellae de Erqueto fundatoris et benefactoris.
HaDC capellam iostiluit et fuadavit ac etiam construxit
in villa de Erqaeto, in loco ubi exlitit oriundus, in honorem
beatissime gloriose virginis Marias genitricis Dei, ac beati
Ludovici et omnium sanctorum, ac divini cuUus aug-
meotatiooem, pro remédie etsaliUe animarum ipsius
lestatoris, dtîfunctorumque Guillelmi et Hersendis parentum
ejusdem, necnon régis Philippi, quem litterarum scientiam
edocuit et instruxit, regine Jolianne uxoris quondam
fjosdem. ac régis Philippi genitoris ipsius, qui decessit
apud Perpigoiacum, el regine Vsabellis genitricis sue, ac
aotecessorum suorum omniumque benefactorum et
praedeoessorum dicti testatoris. Anuo Domini circiter noce.
rExlractum ex Testamento in Nalionalibus Archivis servato.)
Adjuvantibus pratfalo serenissimo rege, domino Roberto, Cla-
rMiuotense comité, Guillelmo domino de Erquelo, armigero, et
Hertende, lesUtoris parenlibus, Johanne de Erquelo, armigero,
legis valeto, et Maria de Pralellis, ejusdem uxore, Johanna de
Eiqueto, et Anialdo de Stralis, armigero, sponsis; Ysabella de
ISO CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
Erqueto et N. de Mesnillio, sponsis, fratribussuis; ac coosaogui-
neis suis, Juliano de Ërqiieto, et Qlio suo, dicto THuissier de
BoaumoDt; ac Theobaldo de Erqueto, dicto CoDstant, ol Hodierne,
uxore eju^dem; ac Rogerio Constant, arinigero, Theobaldi 61io,
et Petrouilla de Hamello, uxore ejusdem; ac Guillelmo de
Erqueto, dicto Foucaud ; ac cacteris.
Tous les noms qui sont énumérés ci-dessus sont ceux
des divers personnages avec lesquels Guillaume d'Ercuis
fit des transactions pour l'érection et la construction de la
chapelle d'Ercuis, et qui ont ainsi ^ croyons-nous, à des
titres divers, mérité d'être signalés à côté de lui au souve-
nir de la postérité.
A vous seuls maintenant. Messieurs, de décider si les
vertus et les talents de dom Pierre Constant et de Guil-
laume d'Ercuis méritaient de les évoquer devant cette
docte assemblée et d'occuper aussi longtemps son attention.
La séance est levée à onze heures.
Rapport de M. B. Ledain sur une excur-
sion à Chantilly, à Saint-Leu-d'Esserent
et à Montataire.
L'après-midi du mardi ^ mai a été consacrée par le
Congrès archéologique à la visite de Chantilly et de Saiut-
Leu. L'entrée du magnifique domaine de Chantilly avait
été libéralement ouverte par Mgr le duc d'Aumale. Intro-
duits et guidés par l'intendant qui s'est mis avec la meil-
xinr* SESSION, a senus. 181
leure grAoe à leur disposition, les membres du Ck)ngrès
ont parcouru à loisir le parc et le château. Tout a été dit
sur Chantilly. Ceux qui n'ont pas eu la satisfaction de
Tadmirerpar eux-mêmes en connaissent tout au moins la
description et la célébrité. Le parc immense est percé,
tantôt de larges allées se coupant magistralement à angles
droits, tantôt de sentiers sinueux enlaçant les bosquets et
le? pièces d'eau. Un grand canal ou plutôt une rivière, la
Nonnette, le traverse en ligne droite sur une notable por-
tion. Un ruisseau plus modeste le sillonne ailleurs à
Tombre des arbres séculaires. On arrive à travers ces
charmants paysages qui participent à la fois de la gran-
deur majestueuse de Versailles et des fantaisies rustiques
de Trianon jusqu'à la terrasse du château. De ce point,
1 œil jouit d'une perspective admirable. D'une part, une
immense pelouse s'étend au bas d'un escalier monumen-
tal; de Tautre, on aperçoit le vaste champ de course et les
ftuperbes' écuries dont la réputation est universelle. En
arrière s'élève un long bâtiment construit au dernier
siècle, à l'occasion de la naissance de l'infortuné duc
d'Enghien. En face, quoique un peu trop dominé par la
terrasse se dresse la résidence illustrée par les Montmo-
rency et les Condé. Mais elle est loin d'avoir conservé son
intégrité et son ancienne splendeur. Pour comprendre ce
que fut ce château, il faut recourir aux gravures que nous
ont laissées les deux derniers siècles. On y remarque une
vieille forteresse du moyen âge, remaniée dans la suite,
entourée d'eau et se reliant par un pont à une nouvelle
construction du xvi* siècle, œuvre du connétable de Mont-
morency dont la glorieuse image, coulée en bronze, se
voyait jadis sur la terrasse. Le château du connétable a seul
^happé au vent destructeur des révolutions, luais le duc
4*Aumale, protecteur et amateur éclairé des lettres et de^^
I8i CONGRÈS ARGUÉOLOGIOne DE FRANCK.
arts, fait activement relever les portions renversées.
Grâce à ses soins, Chantilly aura bientôt recouvré sa
splendeur presque royale. Les appartements et galeries du
château du xvi* siècle sont ornés de boiseries et de déco-
rations style Louis XV, d'un goût très-délicat. On y
remarque aussi une importante série de tableaux repré-
sentant les conquêtes de Louis XIV et les brillantes vic-
toires du grand Condé. Il est inutile d'insister sur les
écuries, les remises et le manège de Chantilly, construits
en 1719 par Louis de Bourbon, septième prince de Gondé.
On en connaît suffisamment le luxe et les proportions
vraiment gigantesques.
Les membres du Congrès ont trouvé à SaintrLeu, situé
non loin de là, un monument d'une nature et d'un aspect
bien différents mais dont l'intérêt n'est pas moindre. Il y
avait là un sujet d'étude purement archéologique qu'il
était impossible de négliger. L'église de Saint-Leu, ancien
prieuré, couronnée de trois clochers, présente de' loin une
élégance et une noblesse qui attirent de suite invincible-
ment le regard. Lorsqu'on est au pied du monument on
n'éprouve point de désillusion, car ou reconnaît prompte-
inent qu'on est en face d'une église du style de transition
du xii*^ siècle, d'une rare élégance et presque vierge de
toute retouche ou addition subséquentes. La porte de la
façade, placée entre deux tours dont une seule, celle de
droite, a été achevée, s'ouvre sous trois archivoltes de
forme ogivale, décorées chacune de deux boudins en zig-
zags, aux angles opposés l'un à l'autre. Après avoir tra-
versé un porche, on pénètre dans l'intérieur divisé en
trois nefs. Deux colonnes romanes très-curieuses^ cou-
ronnées de leurs chapiteaux sculptés, d'un style tout diffé-
rent et supportant encore des naissances d'arceaux sont
demeurées engagées dans la muraille intérieure, à droite
XLlV SESSION, A S£NLIS. 483
et k «^«tuche de la porte. Cela démontre l'existence d'une
église antérieure du xi* siècle, beaucoup plus étroite. La
rose percée dans le pignon est encore dans Taxe de cette
église primitive dont il n'y a que cette trace. La nef cen-
trale de l'église actuelle, du xii* siècle, est large et haute.
Lu triforium assez étroit circule de chaque côté dans la
muraille et se prolonge autour du chœur; ses petits arceaux
et ses légères colonnettes forment une décoration très-
harmonieuse. La claire-voie jette une lumière abondante
dans les parties supérieures. Les voûtes sont sillonnées
alternativement dans chaque travée de six et de quatre
nervures. Peut-être pourrait-on ne les faire remonter
qu'au commencement du xiii* siècle. Les nefs latérales
forment un déambulatoire autour du chœur, quatre absi-
dioles peu profondes sont percées dans le chevet. Les
fenêtres de deux d'entre elles ont été remaniées au
xiv* siècle.
L'église Saint-Leu présente un caractère particulier.
Elle n'a pas de transsept. Deux tours carrées placées de
chaque côté, aux points que devraient occuper les trans-
fcpts, ne lui ôtent rien de sa beauté intérieure et relèvent
notablement son aspect extérieur. Mais la tour de la façade
est ce qu'il y a de plus élégant aussi bien que le porche
supérieur avec lequel elle communique par le premier
étage. Ce porche, éclairé par des baies romanes s*ouvrant
«ur la façade au-dessus de la porte, est recouvert de voûtes
remarquables. Les nervures sont ornées de boudins en
zig-zags semblables à ceux de la porte, et quatre tètes
humaines décorent leur point de jonction. La tour,
au-dessus des voûtes de l'église, a deux étages éclairés sur
chaque lace par deux l'enétres romanes. Une belle flèche
«octogone, imbriquée, la surmonte. Sur chaque angle de
i l'octogone on remarque deux colonnettes qui le flanquent
I8i CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
jusqu'au quart de la hauteur environ et en suivant ëuii
inclinaison, quoiqu'elles en soient en partie détachées et
qu'elles n'y tiennent que par le sommet et par la base.
On ne s'explique pas «facilement l'utilité de ces colon-
nettes. La tour semble avoir été primitivement ouverte à
sa base, ainsi que l'indiqueraient les arceaux pratiqués
sur chaque face.
Des contre-forts et des arcs-boutants bien proportionnés
maintiennent vigoureusement les voûtes. Quelques-uns
sont doubles, mais ce sont des additions. N'oublions pas
en terminant de mentionner l'élégante corniche ornée de
pointes de diamant qui décore tout le pourtour de l'édiUce.
M. Selmersheim, architecte chargé de la restauration de
l'église de Saint- Leu, a guidé avec la plus grande complai-
sance MM. les membres du Congrès dans la visite du
monument. L'habileté et le respect de l'œuvre de ses
devanciers avec lesquels il a exécuté les travaux méritent
les plus grands éloges. La Société française d'archéologie
n'est pas habituée à rencontrer partout de pareils restau-
rateurs.
L'excursion s'est terminée par une rapide course à Mon-
tatairc, où, en Tabsence du propriétaire, M. le baron de
Condé, il a été néanmoins possible de visiter le château.
Là le Congrès a pu admirer quelques parties du moyen
âge et surtout une cheminée du temps de Louis XIII qui
figure dans les gravures d'Abraham Bosse, Les vierges
sagts et les vierges folles.
XLIV* SESSION, A SENUS. 185
l" SÉANCE DU MERCREDI 30 MAI.
Présidence de M. Ledain.
•
Siégeât au bureau MM. G. Yallier, Chartier et Léon
Palustre.
Les ouvrages suivants sont déposés sur le bureau du
Congrès : U Armoriai des Landes , précédé des cahiers du
Tiers Éiat, etc., par M. le baron de Cauna. — Notice sur
le» vitraux du sanctuaire de la cathédrale de Senlis, par
^. Tabbé Laurent. — Médailles romaines inédites, par
M. Gustave Vallier. — Une médaille de Tétricus et de
Probus, par le même. — Médaille de J. Truchon, par le
même. — Médaille de Vaucanson, par le même. — Lettres
inédites de J.-J. Rousseau, par le çoiéine. — Documents
Jposr servir à l'histoire de Grenoble, par le même.
La parole est à M. Jacquinot pour la lecture d'une note
relative aux questions préhistoriques.
Les silex taillés de Sauvigny-les-Bois.
[Réponse aux objections faites au Congrès de Budapest,)
L
J'ai présenté au Congrès de Budapest un mémoire sur
les silex taillés de Sauvigny-les-Bois (Nièvre), commune
que j'habite.
186 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
Ces silex se trouvent en abondance à la surface d'une
ancienne alluvion sableuse. Une seule fouille ro*a permis
de constater qu'ils existaient dans toute l'épaisseur du
terrain, qui est de 60 centimètres à i mètre.
J'ai offert la meilleure partie de ma collection au musée
de Saint-Germain, qui a bien voulu l'accueillir, et M. de
Mortillet en a rangé une partie dans les vitrines, sous les
noms d'Acheuléen et de Mousticrien.
De plus*, dans son Tableau archéologique de la Gaule^
ce savant place les silex de Sauvigny, dans l'époque du
Moustier, quaternaire des plateaux.
Je me croyais donc parfaitement autorisée regarder nos
silex comme paléolithiques, et à créer une nouvelle divi-
sion que je regardais comme la réunion de l'Acheuléen et
du Moustierien avec plusieurs types nouveaux, et à
laquelle je donnais le nom Aq Sauvinien.
La lecture de mon mémoire achevée, quel ne fut pas
mon étonnement de voir trois savants, très- versés dans les
études préhistoriques, habitant des contrées éloignées les
unes des autres, venir déclarer avec unanimité que les
silex de Sauvigny appartenaient à la pierre polie, que
c'étaient des ébauches, des rebuts de fabrication, etc. (i).
En présence de cette opinion émise par des hommes
très- compétents en pareille matière, il semblerait que la
détermination des silex de Sauvigny est chose jugée, et
que je n'ai plus qu'à m'incliner.
J'ai pris en grande considération les objections qui
m'ont été faites, je me suis livré à de nouvellles études.
Eh bien ! j'avoue que je n'ai pas été convaincu. Les rai-
(1) Ce mémoire ayant une certaine étendue, j'ai dû, à la lec-
ture, en éliminer une partie pour me renfermer dans les argu-
ments les plus saillants de mon sujet.
XLIV* SESSION, A SENLIS. 187
sons de mes adversaires ne me semblent pas péremptoires.
Elles sont d'ailleurs présentées, en partie, sous une forme
dubitative.
11 importe peu que le type nouveau de Sauvigny soit
paléolithique ou néolithique. Il y a là une question de
principes qui touche aux bases mêmes de la science et
aux questions les plus ardues de Tanthropologie. Le débat
s'agrandit. Voilà pourquoi je viens soumettre au juge-
ment des nombreux savants qui s'occupent de cette ques-
tion quelques arguments nouveaux.
J'ai apporté au Congrès de Budapest une vingtaine
d'échantillons de silex des plus perfectionnés, pouvant
donner une idée de l'ensemble du gisement de Sauvigny.
Je puis affirmer que pas un seul ne ressemblait soit à un
outil, soit à une ébauche de l'époque de la pierre polie.
Four assimiler des choses aussi différentes, il faudrait au
moins qu'il y eût quelque ressemblance, quelque point
de contact; or, il n'y en a pas.
En présence de ce fait, que devient alors la classifica-
tion basée sur l'archéologie, c'est-à-dire sur l'analogie des
formes? Si l'on peut indifféremment ranger tous les types
dans une seule et même époque, par cette raison qu'ils se
trouvent à la surface du sol, et qu'ils portent des traces
ferrugineuses, il me semble qu'il n'y aurait plus que
confusion.
Je respecte infiniment la décision de nos savants adver-
saires. Je crois que si nous différons d'opinion, la faute
n'en est pas à eux, mais à l'état peu avancé et encore cou-
vert d'obscurité de certaines parties de la science, entre
autres de la filiation des âges de la pierre.
488 GONGhÉS ARCHÉOLOGIQUE DB VRANCB.
H.
Ayant d'aller plus loin, il me semble qu'il est néces^
saire de s'entendre sur ce qu'on appelle l'époque de I^
pierre polie, et à bien déBnir quels sont ses caractères dit'-'
tincts et constants. Gela, je pense, nous aidera à jeter*
quelque lumière dans ces ténèbres.
Une des régions qui offrent de la manière la plus corn--
plète toutes les phases et toutes les formes de la pierre
polie, est sans contredit le Danemarck et la Scandinavie.
Là, la pierre polie règne sans conteste; .les collections sont
considérables, l'industrie de la taille du silex a atteint sou
maximum de perfection. On ne trouve dans ces pays que
de la pierre polie pure. Le paléoljthique y est inconnu.
Rien qui ressemble au Saint-Acheul ou au Moustier, à
l'exception do «luclqucs silex de formes particulières, qu'on
trouve dans les Kjoekken'tnœddings, sur lesquels je revien-
drai plus bas.
Or pourquoi ne trouve-t-on pas là des ébauches gros-
sières, des éclats affoctuiU des formes paléolithiques, ainsi
que rannoncent pour la France, l'Angleterre et la Bel-
gique, mes honorables contradicteurs? Pourquoi ces diffé-
reu('0« dans les giseiueiits do ces derniers pays, et ceux du
Danemarck et de lu Scandinavie? Pourquoi ici^les formes
invariables de IVpoque néolithique, et ailleurs un mélange
de toutes les formes et de toutes les époques?
Je no me iK^rnerai pas à citer les contrées du nord de
TEuroiK'. Partout il en est de même. En Suisse, on a
découvert des habitations lacustres de cette même époque.
Ijù nombre des armes et des outils v est considérable.
Y a-t-il là des si^écimens qu'on puisse rapprocher du paléo-
XUY* SESSION, ▲ SfcNtlS. 189
lithjque? Nullement. Les palatUtes fournissent des haches
polies, des lames, des flèches, etc., différant très-peu de
celles du nord, et sans aller plus loin, je crois pouvoir
lire que d'un bout de la Suisse à Tautre, les instruments
<le la pierre polie sont identiques et ne ressemblent en
rieii à l'industrie paléolithique.
Je citerai encore comme gisement néolithique étendu,
les nombreuses grottes de la Champagne, explorées par
V. de Baye au nombre d'environ cent cinquante, et qui
OQt fourni à ce zélé archéologue une collection des plus
oombreuses. Contiennent-elles des instruments de f(*rmes
paléolithiques? M. l'abbé Bordé nous affirme que non.
J'ai visité la curieuse collection de M. le docteur Loy-
'nau, recueillie au camp de Chassey. Dans ce vaste ate-
lier, les objets ont tous le cachet de la pierre polie. Il n'y
a ps de confusion possible.
Je pourrais citer bien d'autres exemples, mais il est
inutile de passer en revue tous les lieux qui fournissent
exclusivement des spécimens de la pierre polie, tels, par
exemple, les dolmens et quelques cavernes. Tous nous
burairaient le même résultat.
La forme des outils et des armes, telles que les lances
et les flèches, barbelées et à ailerons, le polissage des
Ittcbes, ne sont pas les seuls caractères qui distinguent
lepoque néolithique. 11 y en a d'autres non moins cer-
taius. C'est d'abord la faune, qui ne présente plus de ves-
tiges d'animaux éteints, mais se compose des animaux
domestiques de nos jours.
C'est ensuite la présence de nombreuses poteries, puis
des restes de tissus, de graines, de céréales, annonçant un
peuple agriculteur, eu même temps que guerrier et
chasseur.
11 me parait donc évident que l'époque néolithique est
iOO CONGRÈS ARGH£OL06IOUK DE FRANGE.
•
parfaitement tranchée et distincte dans toutes les contrées
où elle a été reconnue. Les nombreuses collections de
l'Europe, y compris celle de Saint»Germain, en font foi.
Il n*y a dans toutes, à part de légères différences dans les
formes ou la nature des roches, que des formes identiques,
et on n'y a placé aucun de ces silex à formes paléoli-
thiques qui, suivant nos contradicteurs, devraient se rap-
porter à la pierre polie.
III.
J'arrive maintenant à certains ateliers ou stations ches
lesquels les types sont mélangés. On y trouve à la fois du
paléolithique, puis des époques intermédiaires ou de tran-
sition, et enfin du néolithique. C'est là sans doute ce qui
a causé l'erreur de mes savants contradicteurs. Us ont pris
pour la règle ce qui n'était que l'exception.
Au Grand-Pressigny, gisement paléolithique bien dis-
tinct du Saint-Acheul et du Moustier, on trouve, indé-
pendamment des types spéciaux à ce gisement, des objets
néolithiques en assez grand nombre.
A l'atelier du cap Blanc-Nez (Pas-de-Calais), exploré et
décrit par M. Lejeunc (i), on trouve des haches de Saint-
Acheul, parmi un grand nombre de produits néolithiques.
Tout récemment (2), M. de Mortillet signalait à la
Société d'Anthropologie un atelier situé à la Roche-au-
Diable, près de Caen, et découvert par M. C. Costard, qui
contient, au milieu d'un grand nombre de types néoli-
thiques, des haches acheuléennes a parfaitement caracté-
(i) Voyez Congrès de Bruxelles.
[t) Bulletin de la Société d'Anthropologie, 4876.
XIIY* SESSION, A SENLIS. i9l
risées par leur forme, et tranchant très-nettement avec les
autres instruments par leur patine, qui est profonde (1) d.
Il me serait facile d'ajouter à ces quelques exemples,
qui ne sont certainement pas les plus saillants, une foule
d'autres ateliers bien connus et qui présentent les mêmes
particularités. Cela démontre que les habitants primitifs,
trouvant tout à la fois un lieu convenable d'habitation, en
même temps que des silex abondants, y ont séjourné un
long espace de temps. La taille des silex s'y est peu à peu
modifiée, soit par les progrès naturels, soit par des impor-
tations du dehors, de sorte que tous les âges de la pierre
y sont représentés.
J'appellerai ces gisements ateliers mixtes ou de transi-
tion. Le nombre jusqu'ici en est déjà assez grand. Tantôt
c'est le paléolithique, d'autres fois le néolithique ou des
types intermédiaires qui dominent.
IV.
Je vais maintenant répondre aux objections du savant
conservateur du musée de Bruxelles.
Je me bornerai à parler ici du célèbre atelier de Spiennes,
dont les silex taillés de formes particulières ont exercé la
sagacité des archéologues.
Ces silex se trouvent en grande abondance à la surface
d'un sol sableux quaternaire. Ils offrent des traces de
rouille causées par le frottement des instruments aratoires.
11 y a des ébauches et des éclats de toute sorte; mais dans
(I) Je n'admets pas ce dernier caractère, et je crois que la
patine peut être aussi profonde sur un instrument néolithique
que sur un oulil pAéolilique.
192 CONGRÈS ARGIl£OLOaiQU£ D£ FRANGE.
le nombre se trouvent des instruments à peu près termi-
nés et ayant leurs formes définitives; or ils ne ressemblent
pas à ceux de la pierre polie; ils ont plutôt l'apparence
paléolithique, sans être pour cela identiques à ceux de
Saint-Acheul ou du Mousticr.
Une des particularités les plus saillantes de Spieanes,
ce sont des puits assez profonds, creusés dans le quater-
naire, pour arriver aux bancs de silex do la craie, dont les
hommes d'alors fabriquaient leurs outils. Cela seul montre
que cet atelier est postérieur à l'époque paléolithique'.
Ou a trouvé dans ces puits des pics et autres débris en
bois de cerf, puis un crâne de sanglier et des os de lièvre,
peut-être encore d'autres restes d'animaux sauvages, mais
pas de vestiges d'animaux domestiques.
Je ne crois pas que parmi les silex on ait trouvé des
pointes de flèches.
Les poteries manquent également.
En résumé, formes paléolithiques, — pas de flèches, pas
de vestiges d'animaux domestiques, pas de poteries, pas
de haches polies, à part peut-être quelques rares et insi-
gnifiantes exceptions. Au musée de Bruxelles, il y a bien
deux mille échantillons de pics et de haches de Spiennes,
j'y ai eu vain cherché une hache polie.
D'après tous ces caractères, il me semble ressortir avec
évidence que Spiennes présente un type particulier qui
me parait caractériser une époque postérieure au quater-
naire, mais antérieure à la pierre polie. C'est un type
intermédiaire ou de transition.
Examinons maintenant les types analogues trouvés en
Anglolerro, auxquels M. Franks fait allusion, et dont il a
parlé au Congrès de Bruxelles J .
J Voyo/ (\))ujns de /irujfiies. •
ZUT* SESSION, A SENUS. 193
Dyapeu d'années, M. le colonel Lane Fox a fait une
communication au Congrès de Bristol, sur les fouilles du
camp de Cissbury, dans le comté de Sussex (â). a 11 en
■ résulte que ce lieu présente la plus grande analogie avec
• Tatelier de Spiennes. Comme dans ce dernier endroit, il
■ y ade nombreux puits, pratiqués pour extraire le silex de
• la craie, et pour en fabriquer des outils de (ormes paléoli-
f tliiques, analogues à ceux de Spiennes. Les ossements
i trouvés étaient ceux du cervus elaphus, bos longifrons,
i capra hircus, equus (Sp...?) et sus scrofa. d On n'y a pas
trouvé de débris de poteries.
En 1870, Canon Green^el examina une série de deux
ttot cinquante-quatre puits près Brandon dans le Norfolk.
Ils ont été creusés avec des pics en corne de cerf, dont on
a recueilli soixante-dix-neuf exemplaires^ et avec des ins-
truments en silex également retrouvés dans Tintérieur; il
n'a été rencontré aucune trace de pierre polie, aucune
poterie.
En6n il y a deux ans, M. Tyndall, de Brighton, ouvrit
OD puits à Cissbury; il y trouva les restes très-abondants
d*un grand bos primigcnius, et aussi ceux du sanglier
et autres animaux sauvages, a Ainsi, ajoute-t-il, se trou-
< verait appuyée l'opinion qui place les monuments de
< Cissbury à une période plus ancienne que les temps néo-
fl lilhiques. »
Aux stations de Spiennes, de Cissbury, de Brandon, etc.,
on doit joindre les kjockken-mocddings du Danemark, si
bien étudiés au Congrès de Copenhague par M. Worsaë.
Là, en effet, dans ces immenses amas de rejets de cuisine,
qui ont demandé des siècles pour se produire, on ne trouve
pas de débris d'animaux domestiques, si ce n'est le chien,
i. Vo>-ez, Matériaux, 1876, p. 17 et suivantes.
XUV* SESSION. 13
494 CONGRÈS ARGHiOLOOIOUB Dt nUlfCS.
mais des animaux sauvages, tels que Turus, Tursu^
arctos, le sus scrofa, etc.
On n'y trouve pas de poteries.
Il existe quelques traces de la pierre polie dans de#
amas que l'on regarde comme appartenant à la fin de la
première période qui a coïncidé avec le commencement da
la suivante. Ainsi s'explique la présence de quelques
pierres polies, mais il y a des amas considérables, comme
celui de Meilgaard, qui n'en ont pas donné une seule.
La difiérence est complète avec le mobilier des dol-
mens. Les armes et outils, de formes spéciales, sont asses
bien taillés> il y a aussi de longs éclats ou couteaux mag-
daléniens (I).
M. Worsafi attribue les kjoekken-moeddings à l'époque
de la fin de Tàge du renne, et je crois que cette opinion ne
trouve pas aujourd'hui de contradicteurs.
Ainsi pour la Belgique, l'Angleterre et leDanemaric,
voilà un type intermédiairo qui me semble bien établi, et
qu'on rapporte à tort à l'époque de la pierre polie. En
France il existe également; n'en trouvons-nous pas la
preuve dans ces silex d'une a grande variété de formes,
c et d*un travail grossier » dont parle M. l'abbé Bordé, et qui
semblent appartenir à une autre époque? « Néanmoins,
a ajoute-t-il, bien qu'ils fassent défaut, dans les grottes
« néolithiques, il faut les rattacher à la pierre polie dont ils
f constituent, il est vrai, une série qui n'a pas son type
€ dans les classifications admises (S). •
Ainsi voilà un type nouveau, forcément rappoijé à la
pierre polie, pourquoi? Il n'y a pour cela que des raisons
contraires. Si ces instruments sont de Tépoque de la
(1) Voir Congrhde Copenhague.
(ti Congres de Hudaf)e$t.
XUY* SESSION, A SENLIS. 195
pierre polie, il doit nécessairement s'en trouver quelques
échantillons dans les cent cinquante grottes néolithiques
de la Champagne, mais il ne s'en trouve pas. Ne vau-
drait-il pas mieux alors, colliger avec soin ces instruments
grossiers, les étudier, 'les comparer et arriver ainsi à assi-
gner leur véritable place dans la série de la pierre taillée.
Oa peut donc regarder ces silex comme postquatemaires
ou intermédiaires à l'âge du renne et de la pierre polie, et
en y regardant de plus près on ne tardera pas à y joindre
la plupart de ces silex à l'aspect paléolithique qu'on trouve
dans les ateliers mixtes.
D'après tout ce qui précède, ne paraitra-t-il pas évi-
dent qu'un type nouveau se dégage de la foule de ces
gisements de silex, qu'on n'avait pu jusqu'ici classer, soit
dans le paléolithique, soit dans lenéolitique, et qui encom-
braient les abords de la science.
Ce type pour lequel je proposerai le nom de paléoli-
ihique secondaire, paraît en effet tenir à l'industrie primi-
tive par les formes de la taille des silex, mais déjà des pro-
grès ont été faits, la série des armes et instruments peu
nombreuse dans les premiers temps, s'est considérable-
ment accrue, de nouvelles formes, répondant à de nouveaux
besoins, ont été créées. De là les outils variés, destinés sans
doute à travailler le bois, la corne, etc.
Les hommes Sont toujours pécheurs et chasseurs, rien
ne dénote encore les commencements de l'agriculture et la
domestication des animaux, si ce n'est le chien dans cer-
taines régions.
Nul doute que beaucoup d'archéologues ne dirigent
maintenant leurs études vers ce point jusqu'ici méconau
de la science, et bientôt, j'espère, de nouvelles observations
fourniront de nouveaux renseignements sur cette phase
de l'humanité et de la civilisation. -
196 GONGliS ABCHÉOLOGIOUB DB nLANGB.
V.
Il y a quelques années l'idée d'un hiatus, d'une lacune,
entre les époques du renne et de la pierre polie, fut émise,
je crois, par MM. Cartailhac et de Mortillet; des discus-
sions animées s'en suivirent, et à la suite de l'une d'elles,
qui eut lieu à la société d'Anthropologie en avril 1874.
M. de Mortillet résumait ainsi la question (!].
« Entre l'époque paléolithique ou des cavernes, et
« l'époque néolithique ou de la pierre polie, il existe un
c hiatus. Mais cet hiatus n'est qu'une simple lacune dans
€ nos connaissances. Il ne représente pas une véritable
€ lacune dans le temps et dans l'industrie. Certainement
« l'époque paléolithique a dû se rattacher et se souder à
c l'époque néolithique, mais nous n'avons pas encore
c reconnu, pas encore découvert le point de contact. Entre
« les deux époques, il n'y a pas eu une période ou l'Europe
«était inhabitable, seulement les restes de l'époque de
a transition ou de passage n'ont pas encore été trouvés et
c reconnus. C'est ce qui constitue l'hiatus que nous
c constatons. »
Ces paroles me paraissent aujourd'hui plus que jamais
l'expression exacte de la vérité. Si, en effet, aux diverses
stations que je viens de citer, qui ne sont pas quater-
naires, mais bien évidemment antérieures à la pierre
polie, on ajoute les divers ateliers mixtes, et les cavernes
où se trouvent tout à la fois du paléolithique, du néoli-
thique et des types intermédiaires, n'arrivera-t-on pas à
cette conclusion que la lacune est en partie comblée, et
qu'un coin du voile est soulevé? ^
(I) BulUtin de la Société anthropologique.
XLIY* SESSION, A SENLIS. i97
Ainsi l'âge de la pierre polie, bien établi, bien homo-
gène, sera dégagé de cette foule de stations douteuses, qui
jetaient la confusion dans les déterminations. Une transi-
tion sera établie entre les deux époques du renne et néoli-
thique; et on pourra peut-être arriver à démontrer la suc-
cession et révolution progressive de la taille de la pierre,
saus qu'il soit besoin pour cela de faire intervenir des
populations nouvelles.
Il devient donc nécessaire dans la classification des âges
delà pierre, de faire la part de ces types intermédiaires,
et eu les réunissant dans les collections, leurs caractères
spécifiques et leurs analogies apparaîtront bientôt d'une
mioière évidente.
Je dirai eu terminant quelques mots sur la station de
Sauvigny. Depuis le Congrès de Budapest, j'ai continué
mes recherches, et une partie de Thiver a été consacré à cet
objet. Au lieu de trouver des silex seulement dans un
espace restreint, j'en ai rencontré dans une grande partie
de la commune, c'est-à-dire dans un rayon de plusieurs
kilomètres, à la surface du terrain alluvial. Seulement,
sur un point, l'abondance des silex, des éclats, des
ébauches, me donna l'idée d'un atelier. Ainsi il se pour-
rait qu'à câté d'un paléolithique bien manifeste, il y eût un
de ces gisements postquaternaires dont je m'efforcerai de
séparer les types.
Sauvigny serait donc un gisement mixte. L'homme y
aurait longtemps séjourné, car indépendamment des types
que j'ai cites, on y trouve encore quelques instruments de
la pierre polie, si reconnaissables , puis des tumulus de
r&ge du bronze ou du fer, et enfin des vestiges gaulois et
gallo-romains.
198 CONGRÈS ARGHÉ0L06I0UE DE FRANGE.
M. le président, après avoir remercié M. Jacquinot de sa
savante communication, donne la parole à M. Margry :
Note relative à deux emplacements gallo-
romains, situés au lieu dit Rigalot, dans
la forêt de Chantilly.
Permettez-moi de signaler à l'attention du Congrès,
deux emplacements situés dans la forêt de Chantilly, lieu
dit le Rigalot, où j'ai trouvé des restes de constructions,
que je crois gallo-romains. Ces débris sont bien mutilés;
néanmoins Tun d'eux me parait mériter un examen
sérieux.
A six kilomètres de Senlis, la route forestière de TAr-
hre-à-Fougère, traverse la route actuelle de Senlis à Creil,
ot pénètre à droite dans le Rigalot. Suivons cette route,
avec la carte do la forêt de Halatte, dressée par de la Vigne
on 4713: elle rencontre, à soixante -douze mètres de
la barrière, notre premier emplacement; cent mètres plus
loin, elle traverse le chemin du Bac, qui conduisait les
Romains vers l'Oise; ot cinq cent soixante mètres plus
haut, elle roncontro le chemin di*s Huguenots qui jetait
un court onihrnnchomont sur notre second emplacement,
ap|>olé le Prêche D^tmly,
Notre savant oonfrùn\ M. Kahhé Caudol, a longuement
raconté tous les vieux souvenirs dont est peuplée cette
région fon^slièro; jo n*y reviendrai pas, me bornant à étu-
dier doux pt>ints soulomont do oot ensemble intéressant.
Je dois îi roblijroanco hahituollo de notre confrère,
M. Moinot, un rn^quis ot une oarto <]ui rendront ma tâche
plus facile.
XLIT* SESSION, A SENLIS. iW
Aspect général.
Lorsque je découvris le premier emplacement, je sui-
nis la route de l'Arbre-à- Fougère; je me trouvai en face
d'un monticule qui mesure environ douze cent soixante
mèlKS carrés de superficie, et deux ou trois mètres d'alti-
tude. Sur ce plateau se développent des plates-formes,
légèrement convexes à leur sommet; elles se relient et se
soudent entre elles, sous des angles à peu près droits, de
manière à former trois enceintes contiguës : les deux prc-
mjèies sont des parallélogrammes inégaux, à l'intérieur
dechacQa desquels on distingue une dépression, sorte de
cour, dont le plafond est inférieur de deux mètres, au
nmmet des plates-formes. Les talus descendent par une
double pente, de chaque côté des crêtes, jusqu'au niveau
des cours, ou jusqu'à celui de la forêt.
Une troisième enceinte demi-circulaire se déploie en
laee des deux autres. La plate-forme qui l'entourait n'est
eoDsenrée qu'en partie, mais son relief peut encore être
indiqué. Ces trois enceintes formaient dans le princip»)
00 ouvrage homogène, que la route fractionne aujour-
lliui, après avoir fortement contribué à le ruiner. La
ciéiede la plate-forme qui borde cette route était couronnée
fi un large mur, dont les restes trop mutila fixèrent de
Mili mon attention. J'espérais, en descendant le long doses
pirois, trouver un indice révélateur des fonctions qu'il
remplissait dans ces constructions, et dans les décombres
que j'allais remuer, les débris caractéristiques qui accom-
pagnent d'ordinaire les ruines d'une habitation, mais la
pioche ne rencontra que Tépais blocage que je décrirai
ci-dessous.
Toutefois je recueillis, au fond des deux tranchées, des
200 CONÇUES ÀRCHÉOL06IOUE DE FRANGE.
fragments de tuiles à rebord, de poterie et un silex taillé :
ces indices, quoique de mince valeur en eux-mêmes,
m'encouragèrent à poursuivre mes recherches, et après
avoir sondé tous les sommets et toutes les pentes, non
sans lutter contre les taillis et autres obstacles, je pus me
faire une idée assez complète de cette étrange construc-
tion. Je vais essayer d'en décrire les détails à l'aide du
croquis ci-joint.
Première enceinte,
La plate-forme A s'étend sur une longueur de trente-
neuf mètres; elle sert de base commune aux trois
enceintes; elle n'est intacte que dans la moitié de son
étendue; sa crête mesure deux mètres de large; ses talus
ont une pente de quarante-cinq degrés et une largeur de
deux ou trois mètres.
Le tout est fortement consolidé par un blocage dont la
structure fait la principale attraction de ces ruines : il est
composé de couches superposées, chacune sous un angle
différent; elles commencent au ras du sol, par une seule
épaisseur, et s'étagent ensuite jusqu'à la créCe, qui est
formée de dix ou douze assises.
Parmi les matériaux employés, le grès gris est de beau-
coup le plus abondant, et Ton sait combien cette roche est
rebelle à une taille minutieuse; leur forme affecte celle
de toutes les figures géométriques : cubes, cônes, carrés,
triangles, sphères, etc.; leur dimension n'est pas moins
variée; elle comprend tous les cubes depuis un jusqu'à
vingt centimètres. En un mot chaque pièce acceptée par
l'ouvrier dans sa forme primitive, était appareillée par
lui, pour s'adapter exactement à la place qu'il lui des*
tinait.
emcr.t èallo - rcrr.^.ir: a.: l;ru d\\
A dans la f'orèl de i,':.a:;ul!v
é,A//.- ./- c-.ï'j:; /-...
lUy SESSION, A SENLIS. 201
Les échantillons que je soumeUt au Congrès parleront
plu8 clairement qu'une plus longue description. Généra-
lenient les plus gros matériaux se trouvent dans les
couches inférieures; tous sont liés avec un mortier de
terre; mais on rencontre de tous côtés, un assez grand
nombre de débris de ciment, dont quelques-uns gardent
encore la forme des pierres qu'ils enserraient, et une telle
quantité de ces petites pierres appareillées, qu'il est pro-
bable que la partie supérieure était revêtue d'une sorte de
'xiosaîque rustique, à base de ciment.
La crête de cette plate-forme est couronnée par un mur
^e un mètre vingt centimètres de largeur; malheureusc-
i^ent il n'en subsiste que deux assises parallèles, de grès
^pareilles; et encore son relief n'est-il pas également appa-
rent sur la longueur de cinq mètres que je lui attribue.
L'assise inférieure repose sur la terre même et n'a pas
d^autres fondations; elle est encastrée dans l'épaisseur du
l>locage dont les couches accumulées lui servent de sou-
tien. Clôture ou rempart, ce mur couronuait-il toutes les
pîates-formes? Je ne sais, mais je n'ai trouvé jusqu'ici
*^ucun autre vestige qui autorise môme une hypothèse.
lia plate-forme B est construite de la même manière et
^vecles mêmes matériaux. J'en ai mis au jour une large
section, et j'ai pu constater que le blocage accuse trois
otages ou gradins successifs pendant son ascension jus-
qu'au niveau de la crête. Les hachures qui, sur le croquis,
^présentent les talus, ont pour but de traduire cette dis-
position.
La plate-forme C est plus large que la précédente, soit
six mètres environ, auxquels il faut ajouter deux ou trois
iQètres de talus intérieur et autant de talus extérieur.
La plate-forme D, qui constitue le quatrième côté de ce
parallélogramme est semblable à la précédente.
203 CONGRES ARGHÉOLOGIOUB DB FEANGB.
Mais toutes deux présentent sur leur surface des aoci-
dentH singuliers. Celle-là une dépression, celle-ci une
butte, dont la destination n'est pas Tacile à préciser.
Le blocage n'est interrompu nulle part; ce qui prouve
que ces dispositions feraient partie des constructions pri-
mitives. J'ai trouvé là des tuiles à rebord, et je crois que
si l'enceinte était habitée, les logis devaient être placés
sur ces deux larges plates-formes.
Seconde enceinte.
La seconde enceinte, délimitée par les plates-formes
D et A prolongées, E, F, offre moins d'intérêt; les reliefs
sont moins accusés, et les blocages en partie détruits; mais
ils existaient primitivement; nous en avons pour preuves,
les pierres semées sur les talus, et l'empierrement de F
prolongé en G, visible encore au delà de la route.
Troisième enceinte.
La troisième enceinte fait face aux deux précédentes,
ayant avec elles une base commune. Sa forme est demi-
circulaire. Sa plate-forme G borde l'extrémité du mame-
lon, et allait probablement se souder en A avec. la pre-
mière enceinte. Je n'ai pas figuré tout sondévekppemeut,
parce que ses reliefs sont trop effacés; mais ce qu'on en
aperçoit encore autorise cette restitution.
Et maintenant je dois conclure.
Quel est l'àgc de ces constructions, et à quelle civilisa-
tion les rattacher, gallo-romaine, mérovingienne ou
moderne? Je ne sais si je me fais illusion, mais il me
semble que tout m'autorise à les attribuer à la période
XLIY* SESSION, A SENUS. â03
gaUo-romaine. Et d'abord les débris trouvés sont assez
ligniScatiGs, soit par la place qu'ils occupaient dans un
sol non renaué, sous un blocage intact; soit par les types
bien connus avec lesquels on peut les identifier. Ces objets
mi : plusieurs fragments de tuiles à rebord ; un débris
'leTanse d'un grand vase en terre rouge; plusieurs par-
celles de poterie légère ; de nombreux morceaux de
dment de deux sortes différentes, l'un semblable au Port-
laod actuel, de couleur grise, et dure comme le grès;
l'autre composé de chaux et de sable; et un silex taillé,
saos caractère précis, ébauche de grattoir peut-être. Or
ces objets se rapportent à des types gallo-romains bien
connus.
En second lieu, j'invoquerai comme une preuve non
moins plausible, la symétrie du plan, la rectitude des
ligne», l'appareil si soigné appliqué à tous ces grès si
réfractaires à la taille; la perfection relative de ce blocage
dout les parties les plus délicates ont été détruites. J'ai
pensé que cette patience et cette habileté n'avait pu être
ainsi prodiguées à un ouvrage perdu au milieu des forêts,
que par ces mains gallo-romaines, qui marquaient de leur
empreinte leurs travaux même les plus rustiques.
Enfin est-il possible d'expliquer quelle pouvait être la
destination de ces ouvrages, leur raison d'être au milieu
de ces solitudes? Je ne voudrais pas répondre à cette der-
nière question par des hypothèses téméraires ; mais il est
incontestable que nous nous trouvons ici en face de pré-
somptions sérieuses. Autour de nous le sol de la forêt est
tourmenté d'une façon singulière; buttes, dépressions,
moellons errants, fossés, arrêtent de tous côtés le regard;
le chemin gallo-romain de Senlis à Creil passe à nos
pieds ; toute la région est peuplée de vieux souvenirs :
lieux dits, chemins, fontaines, fosses, la buiie des fnoris,
204 G0N6RÂS AKGHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
et le Prêche Démoly dont il sera question ci-après, et ce
Barrum de Rcboreto^ dont le site est encore ignoré mais
dont le nom plane sur toute la contrée. Or, toutes ces
preuves de l'activité humaine dans ces parages que Ton
aurait pu croire déserts, ne nous autorisent-ils pas à affir-
mer, que sur ces ruines, les Gallo-Romains avaient élevé
un poste fortifié, un barrum, pour commander les débou-
chés de cette grande forêt de Halatte, qui se terminait près
delà.
J'aurais voulu pouvoir faire un pas de plus, et identifier
de suite notre barrvm avec celui de Roboreto lui-même.
Notre collègue, M. de Caix, si compétent en ces matières,
m-a demandé, à la fin de cette lecture quelles raisons
m'empêchaient de le faire. Deux surtout, lui ai-je répondu,
me retiennent jusqu'à plus ample informé : l'absence de
preuves immédiates d'abord, et ensuite l'éloignement du
chemin de la barre Rouvroy : ce nom significatif indique
une destination si précise, qu'il ne peut être négligé. Je
crois donc prudent de chercher d'abord sur son parcours
qui, entre autres indices, laisse sur sa droite un tronçon
d'aqueduc gallo-romain, une rigole que je désire suivre à
travers le Rigalot. Peut-être ces nouvelles études me
ramèneront-elles à la solution pour laquelle notre confrère
a formulé ce vœu bienveillant. Ce serait en effet un hon-
neur pour notre emplacement de représenter un tel sou-
venir et profit pour notre histoire locale.
Si donc le Congrès juge la question assez intéressante,
je lui demanderai d'obtenir de Mgr le ducd'Aumale l'au-
torisation nécessaire et de m'accorder un léger crédit pour
continuer les recherches.
XUV* SESSION, A SENLI8. 205
Second emplacement.
Je n'ai que peu de chose à dire du second emplace-
ment.
De la Vigne le désigne sous le nom du Prêche Démoly,
De la Vallée de Pont et de celle de Saint-Leu, les adeptes
de la nouvelle doctrine, pouvaient se rendre à ce temple
mystérieux, par le chemin des Huguenots qui le desser-
tit au moyen d'un court embranchement. Cet asile a été
détruit, brûlé peut-être comme un hérétique qu'il était;
et c'est sans doute pour que le sol lui-même qui avait
porté le temple et son pourpris, expiât son forfait par une
deitioation pieuse, que le bouquet de bois qui l'abritait
lut détaché de la forêt du roi et donné à l'église d'Au-
mont. Quoi qu'il en soit les fondations ont été arrachées,
ks meilleures pierres enlevées; mais en remuant les
décombres amoncelés, j'ai recueilli d'assez nombreux
fragments de tuiles à rebord. On peut donc supposer que
ks Huguenots ont profité d'une ancienne construction
encore existante, ou qu'ils en ont relevé les ruines.
Les constructions formaient deux parallélogrammes
inégaux : le plus grand mesurait 10"50, l'autre 5*50
environ de largeur, de l'ouest à l'est, sur une longueur
commune de 9 mètres à peu près. En dehors de ces deux
enceintes, à quelques mètres vers le nord, ou aperçoit les
vestiges de quelques dépendances. Les mêmes causes ont
arrêté ici mes recherches, il conviendrait peut-être de les
reprendre, car partout où apparaît la tuile romaine, nous
devons sans hésiter porter la pioche; le temps emporte
chaque jour ces débris contemporains de nos origines,
notre devise nous fait un devoir d'en conserver au looins
le souvenir.
206 CONGRÈS ARGHÉOLOOIOUE DS FRANGE.
La parole est ensuite donnée à M. Hayaux du Tilly,
par la lecture d'un mémoire sur la douzième question :
Rechercher remplacement de Litanobrlga
et de Bratuspantium.
Bratuspantium.
Bratuspantium et Litanobriga, situés sur le territoire
des Bellovaques, figurent dans le très-petit nombre des
villes mentionnées, soit dans les commentaires de César,
soit dans les itinéraires d'Anton in et de la Table, dont
l'idendité n'a pas encore été bien exactement déterminée.
Cette obscurité, qui peut à la rigueur se comprendre pour
Litanobriga, ne s'explique pas aussi facilement à l'égard
de Bratuspantium, qui était un oppidum considérable, et
la capitale d'un état puissant.
Plusieurs auteurs ont cherché à faire la lumière sur
cette question; malgré de nombreuses dissertations la
solution reste encore à trouver.
La variété de celles qui ont été proposées montre à quel
degré les divergences ont existé.
Ainsi Bratuspantium est identifié : avec Beau vais, par
Cluvier, Scaglicr, Sanson, Clarke, Oudendorp, de Valois,
Loysel, Simon, Hermant et Walcknaôr;
Breteuil-Vendcuil-Caply par Louvet, Mabillon, Bo-
naroi, d'Anville, Cambry, d'Allonville, Mouret, Graves
Woillez, l'abbé Dévie et l'abbé Barraud;
Montdidier, par le chanoine de Lamorlière et Grégoire
d'Essigny;
Gratupance ou Grattepanchc, par Ferrot d'Ablancourt;
XUy* SBSSION, A SBNUS. M?
GmndviUien, par Bovelle ;
Beaamoiit-siir-Oise, par Vigenère;
QarmoDt en Beaavoisin, par qudques autres.
D'autres auteurs enfin n'ont pas craint de faire un long
et inexplicable voyage pour identifier le Bratuspantium
des Bellovaqoes avec Bagacum des Nerviens.
De ces huit solutions, quelle est la bonne?
C'est ce que je vais rechercher, et j'espère arriver à n'en
pas proposer une neuvième.
Je n'entrerai pas dans le détail des opinions produites
par dMcan des auteurs que je viens de nommer, à l'appui
de leurs thèses respectives.
Las partisans de l'identification avec Beauvais, s'ap-
puient, il but bien le dire, sur des considérations qui
sont loin d'être sans valeur. Ainsi ils invoquent le chan-
gement de nom imposé à la ville capitale du peuple vaincu,
et pour eur, Bratuspantium est devenu Cœsaromagus,
après la conquête, et plus tari, a pris le nom du peuple
pour devenir Bellovacum,
Une autre considération, à défaut de preuve contraire,
ne leur permet pas d'admettre que l'oppidum, c'est-à-dire
la capitale des Bellovaques, ait pu être placé à leur fron-
tière du Nord, et n'ait pas été situé au cœur même du
pays.
Les auteurs qui admettent Breteuil ont d'abord cru voir
une analogie de nom entre Bratuspantium et Breteuil,
puis ont trouvé l'identification complète avec un lieu dit :
BroÊuspaHce^ situé piès de Breteuil, à Vendeuil-Caply.
Cette identification est devenue, pour eux, d'autant plus
indiscutable, qu'on a découvert précisément auprès de
Bratuspance, les traces d'un ancien établissement romain,
ainsi que des armes, des médailles et des objets divers
dont l'origine romaine n'a fait doute pour personne
206 GONGRÂS ARGHÂOLOaiOUB DB FRANCE.
D'Anville, qui s'était d'abord prononce formeUement en
faveur.de Beauvais, a modiSô son opinion et a transporté
Bratuspantium à Breteuil-Vondeuil-Caply, après un
mémoire lu par Bonami, à TAcadémie des Inscriptions et
Belles-Lettres. Bonami venait de signaler les découvertes
faites à Vendeuil, ainsi que le lieu dit : Bratuspance, et il
nd lui en a pas fallu davantage pour faire ridentiflcation
qu'il ne pouvait pas expliquer autrement.
Graves, dont personne ne contestera la compétence et
le savoir, pour tout ce qui se rattache aux recherches
archéologiques sur le département de TOise, conteste
l'existence du lieu dit Bratuspance, et ne reconnaît à
Vendeuil -Caply que les vestiges d'une station romaine
qui avait sa raison d'être, sans qu'il soit le moins du
monde nécessaire de l'identifier au Bratuspantium.
D'Essigny et le chanoine Lamorlière ont adopté Mont-
didier sans produire de bien bonnes raisons à l'appui de
leur opinion.
Pcrrot d'Ablancourt a cru voir une analogie sufHsante
dans le nom de Gratupance ou Grattepanche, et a iden-
tifié cette localité avec Bratuspantium, sans s'apercevoir
qu'il transportait chez les Anibrani l'oppidum des Bello-
vaques.
Mais il serait vraiment bien dificile de justifier les iden*
tifications avec Grandvilliers, Clermont, Beaumontet sur-
tout avec Bavay. Aussi ne m'étendrai-jepas plus loin sur
ces propositions par trop fantaisistes.
A défaut de témoignages précis et indiscutables, étudions
les faits et les événements, dont la déduction logique nous
conduira à une solution qui sera bien près de la certitude.
Mais pour arriver à ce résultat, il est nécessaire d'expo-
ser brièvement les faits qui seront le point de départ et la
base de la discussion.
XLIT* SESSION, A SENLIS. 209
Céttr, s'avançant pour combattre la coalition des peuples
de b B«'Igique réunis devant Bibrax, s'informe prudem-
ment des forces qu'il aura à combattre. Les Rémois lui en
Ibol une énumération complète, et signalent en premier
lieu les Bellovaques comme étant les plus nombreux, les
plus braTes et les plus puissants, capables de lever une
armée de cen/ mi7/e hommes^ et, en réalité, en ayant appelé
fixante mille sous les armes. Ils signalent aussi les Ner-
TJeDS parmi les plus nombreux et les plus sauvages, ayant
amené cinquante mille hommes.
Ce dénombrement, qu'on accepte généralement sans
observations, était-il sincère et surtout exact? Il est permis
d'en douter, et ce doute est tout naturel, si on étudie la
conduite et l'intéiét des Rémois.
Non-seulement les Rémois n'entrent pas dans la coali-
tion des peuples de la Belgique, qui tentent de s'opposer
à l'invasion des armées romaines; mais, oubliant tout
sentiment de patriotisme, ils se font les instruments
dociles de César, et lui viennent volontairement en aide
contre leurs voisins par tous les moyens en leur pouvoir.
Peut-on dire que les Rémois codaient à la nécessité, ou
même à la peur? Cette supposition, qui pourrait être une
excuse, est inadmissible en présence de l'exagération inten-
tionnelle de leur langage.
En grossissant, outre mesure, les forces des Bellovaques,
des Suessions et des Nerviens, c'était naturellement dési-
gner ces peuples aux premiers coups des Romains, et, par
fuite, c'était amoindrir ou môme anéantir, par le bras de
lùésar et sans danger pour eux-mêmes, des peuples
voisins dont la puissance leur portait ombrage.
Ces trois peuples limitrophes des Rémois sont les pre-
miers signalés, et il est à remarquer qu'eux seuls sont
l'objet d'une mention spéciale, destinée à accentuer davan-
XUV* SESSION. 14
SiO GONORÈS ARGHÉOLOOIQUE DB FAANGB.
tage les poinU où il faudrait agir le plus énergique -
ment.
Il est même curieux de constater que, pris d'une sorte
de remords à l'égard des Suessions, les Rémois cherchent
à atténuer, par avance, les rigueurs qui pourront frapper
ces voisins à l'issue de la guerre. Cette commisération,
qui s'explique par de nombreuses relations d'origine, de
lois et de parenté, fait ressortir plus nettement la baioe
implacable que les Rémois portaient aux Bellovaques et
aux Nerviens, dont ils craignaient la puissance. Les con-
séquences de l'exagération de certains contingents, assu-
raut aux Rémois la satisraction de leurs rancunes, il deve*
nait inutile d3 grossir les contingents des Veliocasses, des
Calétes, des Morini et des autres peuples de la coalition
avec lesquels ils n'entretenaient aucune relation, et dont,
à cause de leur éloignement, ils n'avaient aucune entre-
prise à redouter.
Pour être convaincu que tel a été le calcul des Rémois,
et que leur exagération des forces des Suessions, et surtout
des Bellovaques et des Nerviens, avait un but intéressé et
ne reposait sur aucun fondement, il sufQt de reconnaître:
Que la densité de la population était à peu près la mémo
dans l'étendue d'une môme province, surtout chei des
peuples limitrophes;
Que les Bellovaques, notamment, ne Csisaieut point
exception aux autres peuples Belges, pour l'appel et la
levée de leurs contingents;
Que, dès lors, on peut évaluer assez exactement l'im-
portance relative des contingents, d'après l'étendue res-
pective des territoires;
Que, s'il est vrai que certaines circonstances acci-
deotelies ont pu modifier ces règles générales, on ne
s'écartera guère de la vérité eu comparant l'état ancien
XLIV* SESSION, A SENUS. 211
des pays occupés par les différents peuples des Gaules,
atec ce que nous voyous de nos jours;
Qu'en appliquant au pays actuel les limites des anciens
peuples, on doit trouver entre ceux-ci une proportion
relative de population analogue à celle que nous pouvons
observer maintenant.
De ce qui précède on peut conclure : que, si on admet
1
pour exactes les indications des Rémois, les Bellovaques
pouvant lever cent mille hommes et en fournissant
KÛiante mille, devaient avoir quarante mille hommes en
réserve et avaient un territoire dix fois plus étendu
que celui des Ambiani, des Calétes, des Veliocasses et des
Veromandisi, qui ne lèvent que dix mille hommes, et près
de sept fois plus considérable que celui des Atrebates, qui
(«t un contingent de quinze mille hommes.
Or, cette différence dans retendue des territoires n'existe
pas, et, par suite, on peut dire que des différences ana-
logues dans Timportance de la population n'existent pas
davantage.
Que si, dans cette seconde campagne, rien ne dit que
les contingents ont été fournis dans la proportion relative
de la population de chaque nation, nous trouvons cette
proportion rigoureusement établie lors de la septième
campagne, quand les États de la Gaule déterminent les
oootingenis que chaque peuple devra envoyer sous les
ordres de Vercingétorix.
Dans cette répartition officielle, voulant éviter la con-
fusion-et le désordre, en n'appelant rigoureusement que
tous les hommes capables de porter les armes, comme le
désirait Vercingétorix, l'assemblée des États décide qu'on
deoundera seulement à chaque peuple un certain
nombre d'hommes, au prorata de sa population. Cette
lois l'appel s'adresse à tous les peuples au nom du salut
212 CONGRÈS ARGUÉOLOGIQUB DE FRANGE.
de la patrie commune. C'est une injonction à tous, qui
acquiert l'importance d'un document authentique, où
chacun est taxé en raison de ses ressources.
Il est juste de dire, pourtant, que ce document parait
avoir déterminé le contingent de chaque peuple en raison
directe de l'intérAt que chacun d'eux pouvait prendre à la
guerre.
' Ainsi, les nations les plus rapprochées du théâtre des
événements qui allaient s'accomplir, sont taxées à un
contingent plus élevé que les peuples qui s'en trouvaient
plus éloignés. Mais la répartition des contingenta d'une
même région parait faite régulièrement en proportion de
la population, de l'étendue et des forces de chaque pays;
de telle sorte que cette répartition peut être invoquée
sérieusement pour contrôler certains récits empreints
d'une exagération par trop manifeste.
Pendant que les contingents des Senones, des Sequani,
des Bituriges, des Authons, den Ruthènes et des Car-
nutes, étaient portés d'ofTice à douze mille hommes cha-
cun, ceux des Bellovaques et des Lemovices «on/ fixétt à
dix mille hommes, et ceux des Fictones, des Turones, des
Purisii et des Helvii descendent à huit mille. Les propor-
tions des contingents sont ici maintenues dans celle des
limites de chacun.
Strabon (1), plaçant les Bcllovaques au premier rang
des Belges, et les Suassions au second, dit qu'ils sont si
nombreux qu'on a pu lever chez eux jusqu'à trente mille
hommes en état de porter les armes.
Il y a loin, comme on le voit, des exagérations inté-
ressées du dénombrement des Bernois, et de la réalité
attestée par un fait ol'licicl et par Strabon, dont l'impar-
(r) Liv. IV, p. U5, 1.51.
XLIV* SESSION, A SEMLIS. 213
tjalité ne saurait être mise en doute. Les Rémois eux-
mêmes font ressortir cette exagération en réduisant à
soixante mille hommes le contingent réel des Bellovaques,
et restent encore fort au-dessus de la vérité.
En appliquant sur le terrain les limites les plus larges
des Bellovaques, elles comprendraient acluellement une
population totale d'environ quatre cent cinquante mille
habitants.
Si on admet, ce qui est incontestable, que la population
actuelle a une densité beaucoup plus considérable qu'au
tempe des Romains, on ne sera certainement pas taxé
d'exagération en supputant à raison de trois pour un,
tiers on trouverait que les quatre cent cinquante mille
habitants d'aujourd'hui en feraient supposer cent cin-
quante mille chez les Bellovaques (i).
Les femmes représentant la moitié de la population, il
serait resté soixante-quinze mille individus seulement,
dont un tiers ou la moitié, tout au plus, eût été capable
de porter les armes.
Le contingent des Bellovaques, ramené à ces propor-
tions, peut être admis sans difficultés, d'autant mieux
qu'il est en rapport avec ceux des autres peuples, eu égard
aux limites des territoires de chacun.
S'il faut encore une nouvelle preuve de l'exagération
volontaire des Rémois, les commentaires eux-mêmes se
chargeront de nous la donner.
I: Valentin Smith évalue la superficie totale de la Gaule
inosalpine 4 six cent cinquante-sept mille kilomètres carrés, et
a populalioD à six millions quatre-vingt-huit mille habitants.
Li population actuelle des mêmes territoires dépassant quarante-
f^pt oiillioDS d'habitants, la proportion serait donc de six et
demi i un.
214 CONGRÈS ARGHÉOLOGIQUE DB FRANGE.
Les Bellovaques pouvaient, disaient-ils, lever cent mille
hommes^ el n'en avaient réellement fourni que soixante
mille, il semble que quarante mille hommes ont dû rester
pour garder et défendre le pays pendant l'absence de
l'armée, mise en déroute sur les bords de l'Aisne. Et
cependant César n'éprouve aucune résistance et ne ren-
contre dans Bratuspantium, l'oppidum des Bellovaques,
que des vieillards, des femmes et des enfants.
N'est-ce pas là un témoignage manifeste de l'exagération
intéressée des Rémois?
La première conséquence de cette exagération ne se fait
pas attendre.
César, dans le but de diviser les forces de l'armée gau-
loise, donne ordre à Divitiacus de faire, à la léte des
Éduens, une diversion contre les Bellovaques ; d'envahir
et de ravager leur territoire.
Divitiacus, traversant le pays des Suessions, et arrivant
sans obstacle à la frontière des Bellovaques, nous montre
aussi que sur sa route le pays était complètement
dépourvu de ses défenseurs. Sur les bords de l'Aisne, les
événements s'étaient accomplis avec une telle rapidité que
César, de son côté, arrivait devant Bratuspantium, où
Divitiacus venait le rejoindre, après avoir congédié les
Ëdueus, dont les services devenaient inutiles.
César et Divitiacus ont suivi deux routes distinctes
l>our accomplir le but différent de la mission que cha-
cun d'eux s'était imposée; et il est plus que vraisem-
blable que les plans et les instructions avaient été concertés
à l'avance.
Divitiacus, chargé de faire une diversion contre les
Bellovaques, devait inquiéter en même temps les A mbiaui,
engagés également dans la coalition des peuples Belges, et
il demeure certain qu*il a dû longer, au nord, la fron-
XLIY' SESSION, A SENLI3. 215
tière des Bellovaqucs, pour être à portée de menacer à la
foisBratuspantium et Samarobriva.
S'il est venu rejoindre César à Bratuspantium, c'est évi-
demment qu'il se trouvait à une assez grande distance de
c*»lte ville.
La mission de Divitiacus 8*est donc bornée à une simple
diversioa inoifensive.
César, dont les mouvements rapides ne laissaient pas à
ses ennemis le temps de 8e reconnaître, voulant anéantir
leur puissance, marche directement sur Noviodunum
(Soissons), puis sur Bratuspantium, déjà menacé par
Divitiacus. Voulant frapper un coup décisif, il a dû suivre
la route la plus directe pour pénétrer rapidement au cœur
(lu pays, et étoufiFér immédiatement toute tentative de
résistance.
L'exposé de ces faits m'a paru nécessaire pour faciliter
l'intelligence de la discussion qui va suivre, et pour don-
ner créance aux conjectures que je serai forcé de faire,
comme tous ceux qui ont abordé cette question.
L'exagération des Rémois, après deux mille ans, s'im-
posant encore à nous par le seul fait de la relation des
Commentaires, qu'on accepte sans discussion, est Tune des
causes les plus réelles qui ont empêché la lumière de se
faire complètement dans l'appréciation de la puissance des
Bellovaques. Sans contester le récit de César, il doit être
permis d'en écarter les indications exagérées introduites à
dessein par des intéressés, et de ne prendre de ce récit
que ce qui est conforme à la réalité des faits.
Les faits étant ainsi bien établis dans leur ordre naturel
et chronologique, étudions-les dans leurs relations avec
Bratuspantium, c'est-à-dire avec la question qui nous
occupe.
Les Bellovaques ayant quitté leur territoire pour se por-
246 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
ter à la rencontre de César, sur le& bords de l'Aisne, il
était naturel qu'ils missent en lieu sûr leurs vieillards,
leurs femmes et leurs enfants; et il tombe sous le sens
que ce devait être dans la ville la plus forte et la plus
importante, c'est-à-dire dans la capitale, aussi loin que
possible des atteintes de l'ennemi.
Le choix d'une autre ville, vers le Nord, eût été inex-
plicable, surtout si on se rappelle que, dès le début de la
campagne, Divitiacus avait reçu l'ordre d'envahir le terri-
toire des Bellovaques et qu'après la déroute de l'Aisne, il
menaçait déjà leur frontière.
Les Bellovaques figurent au premier rang des peuples
belges ligués contre César. Ils sont signalés comme les
plus vaillants, les plus nombreux et les plus influents.
Aussi César juge-t-il nécessaire de diriger contre eux sa
première attaque, et envoie«t-il, à cet effet, Divitiacus
faire une diversion sur la frontière.
Lui-même, peu de temps après, aussitôt après sa vic-
toire de TAisne, prend les Bellovaques comme objectif
principal, et veut, en les attaquant au cœur de leur pays,
frapper un grand coup capable de les anéantir et de
décourager les autres peuples <le la ligue. Cette conduite
était en quelque sorte tracée d'avance.
En effet. César savait que le? hommes capables de porter
les armes et de lui résister étaient absents, puisqu'il venait
de les mettre en déroute sur les bords de l'Aisne. Il savait
donc qu*il tn>uverait un pays sans défense, et qu'il n'y
rencontrerait que les vieillards, les femmes et les entants.
Sa marche rapide devait lui assurer, sans combat, la sou-
mission du pays, et 1 efiet moral de cette soumission devait
étrv d'autant plus oiuisi iérable aux yeux des autres confé-
dérés, que Us Bellovaques élaicit, et se sentaient si puis-
sauts, que, uou-seuloment ils avaient réclamé le comman-
X1.IY* SESSI0I<1, A SENLIS. 217
dément de Tarmée, mais que, bien plus, ils voulaient faire
)a guerre aux Romains pour leur propre compte.
Nous venons de dire, et nous avons montré que les Bel-
lovaques devaient être, et étaient réellement les adver-
saires les plus redoutables des Romains, et se trouvaient
naturellement les premiers exposés à leurs attaques.
Si la conduite de César était si logiquement indiquée,
on admettra, sans peine, que celle des Bellovaques était
tout aussi naturellement tracée. Quelle était leur situa-
tion?
En quittant leur pays pour aller au loin combattre les
liions de César, et en laissant leurs vieillards, leurs
enfants et leurs trésors abandonnés sans défense, ils ont
dû nécessairement se préoccuper de les mettre en sécurité
contre toutes les éventualités des attaques de Tennemi.
Le sentiment de la conservation, l'instinct, si on veut, a
dû les porter naturellement à faire choix d'un lieu, le plus
éloigné possible de l'ennemi, de quelque côté qu'il pût
venir, et le plus en état de résister. Si, d'une part, pour
la distance, on ne peut concevoir ce lieu ailleurs qu'au
centre du territoire, d'autre part, il est logi4]ue de pen-
ser que la protection des faibles et la sécurité de tous
devaient se trouver, plus qu'ailleurs, dans la capitale ,
où étaient concentrées toutes les forces vives du pays.
Par cette double considération de sécurité provenant des
distances et de la foi ce de la place. Beau vais, et Beau vais
seul, nous parait répondre à la préoccupation des Bello-
vaques, partant en guerre loin de chez eux.
Nous allons plus loin, et nous disons qu'en dehors des
raisons naturelles dont nous venons de parler, le plus
«impie bon sens aurait empêché les Bellovaques de cher-
cher cette sécurité à l'extrémité de leur territoire, et vers
la frontière nord, moins qu'ailleurs, parce que cette fron-
318 CONGRÈS ARGHÉOLOOIQUE DE PRANGB.
tière confinant aux Ambiani était et devait être nécessai-
rement menacée on même temps que la leur, les Ambiani
faisant, comme eux, partie de la ligue, et leur pays étant
également privé de ses défenseurs.
Cette considération vient s'ajouter aux premières pour
établir que le lieu de refuge dos Rellovaques n'était pas,
et ne pouvait pas être sur leur frontière du nord, et que
cet asile n'était et' ne pouvait être que dans la capitale, au
cœur même du pays.
Mais si la démonstration n'était pas suffisamment faite.
César, lui-même, se chargerait de l'achever aussi claire-
ment que possible.
En effet, dès qu'il apprend que Divitiacus, qui l'avait
précédé, s'approche de la frontière des Bellovaques:— Çuorf
Divitiacum atqu^ jSduos finibus Bellovacorum apprùpin"
quart cognoverant, — lui-même envahit le pays avec son
armée, — exercitumque in Beltovacos duxU^ -* alors il
campe sous les murs de Braiuspaniiumy où Divitiacus vient
le rejoindre après avoir licencié les Éduens. Pour com-
prendre le texte latin, on est bien forcé de reconnaître que
Divitiacus devait être à une certaine distance de César; or
ce dernier était devant Bratuspantium, ubi Bellovùci se
suaque cantulissent. Ce déplacement de Divitiacus indique
donc nécessairement que Bratuspantium était asses éloi-
gné de la frontière nord où il se trouvait, et alors la capi-
tale, c'est-à-dire l'oppidum Bratuspantium^ se trouve
implicitement indiqué à Bèauvais.
A ceux qui placent Bratuspantium à Breteuil, c'est-à-
dire à la frontière nord, nous demandons comment ils
expliquent le texte signalant le déplacement de Divitiacus,
qui se trouvait lui-même à cette frontière. Dans ce cas, il
n'aurait pas eu à se déranger, puisque César serait venu à
lui.
XLIV* SESSION, A 8ENL1S. t19
Mais, nous dira-t-on peut-être, le texte ne détermine
pas la frontière menacée par Divitiacus; ce dernier venant
de Reims pouvait menacer la frontière de Test aussi bien
que la frontière du nord, ou tout autre point du territoire
des Beliovaques. Le bon sens se chargera de la réponse.
Les Belges seuls s'étaient ligués contre les Romains. *
Les Metdi, les Vadicasses^ les Siivanectet, les Parisii,
les Camttiei n'avaient point pris part à la lutte. 11 y avait
d'autant moins de raison de les traverser pour envahir le '
pays des Beliovaques, que leurs soldats gardaient leurs
foyers, qu'ils étaient à l'abri derrière l'Oise, dont ils pou-
vaient facilement défendre les passages, qu'une agression
des Romains pouvait entraîner toutes ces nations dans la
lutte, et que, d'ailleurs, c'eût été allonger inutilement la
route et n'atteindre qu'une partie du but que se proposait
César.
Divitiacus ne pouvait donc pas menacer la frontière
au snd; encore moins celle de l'ouest, vers les Velio-
casses.
A quoi lui eùt-il servi d'inquiéter la frontière de l'est?
Il n'eût (ait sur ce point qu'une diversion^ sans portée,
entre les Suessions et les Beliovaques.
En eCTet, la démonstration contre les Suessions était au
moim inutile, parce que ce pays était déjà envahi par les
légions romaines, et que César le tenait en quelque sorte
$ous sa main et sous sa domination; et d'ailleurs cette
frontière était elle-même protégée par l'Oise, et bien éloi-
gnée de Brûtuêpantivm, qu'on place cette ville à Beauvais
ou à Breteuil.
Nous croyons avoir démontré, avec évidence, que Divi-
tiacus n'a pu menacer que la frontière du nord.
Dès lors, sa position entre Samarobri va et la capitale des
Beliovaques se trouve si naturellement et si forcément
220 GONGhÉS ARGUÉOLOOIQUE DE PBANGB.
indiquée vers Breteuil, que nous ne croyons pas devoir
insister davantage.
Si donc Divitiacus menaçant la frontière nord, et se
trouvant près de Breteuil, est allé rejoindre César devant
Bratuspantium , c'est évidemment que cette ville était
éloignée de Dreteuii et de la frontière, et alors on est forcé-
ment*ramené à Beauvais.
Faut-il enfin chercher, non pas de plus graves pré-
somptions, mais des certitudes absolues? nous les trou-
verons cette fois dans les faits stratégiques et maté-
riels.
Nul ne contestera que les voies romaines n'aient été
établies avant tout pour faciliter la circulation des troupes
sur tous les points des territoires occupés. Les nécessi-
tés stratégiques dominant toutes autres considérations,
les routes ont été conduites là où elles étaient utiles
pour assurer la conservation de la conquête, c'est-à-dire
sur les points les plus importants comme positions mili-
taires, sur les villes fortifiées, et principalement sur les
capitales des peuples soumis. Ce fait est si évident, qu'il
se démontre de lui-même. Aussi vo\ons-nous certaines
villes capitales devenir le centre de rayonnement de nom-
breuses routes stratégiques. Hoims et Beauvais, notam-
ment, en furent dotées plus libéralement qu'aucune
autre des cités de la Belgique. Quoiqu'en définitive les
routes de ces deux groupes aient eu la même fonction,
il est aisé de comprendre que César a voulu atteindre
deux buts difi*érents. Si Reims, pays ami et allié,
était son point de départ, sa véritable base d'opérations,
Beauvais était la capitale d'un peuple aussi puissant
que brave et inquiet, dont l'influence était considérable
parmi les peuples belges, ligués contre les Romains. A ce
titre, et par sa situation, c'était, en quelque sorte, la
XUY* SESSION, A SENLIS. 224
dé de la résistance; c'était en tout cas un centre d'ac-
tion redoutable qu'il importait de surveiller et de con-
tenir.
Les nombreuses voies romaines qui aboutissent à Beau-
vais dans toutes les directions, sont pour nous la preuve
la plus manifeste de Timpurtance de cette ville, comme
position militaire et stratégique. Nulle autre, chez les
Bellovaques, ne réunit au même degré ces témoignages
irrécusables, qui ont pu augmenter sans doute, mais qui
ont surtout constaté l'importance de Beauvais, antérieu-
rement à la conquête.
Quand les Romains reconnaissent de la sorte Tim-
portance de la capitale des Bellovaques, faisant de sa
possession une questioji essentielle, n'est-il pas évident
que César ne pouvait la passer sous silence dans ses Com-
meotaires, pour citer une autro ville qui n'avait et ne
pouvait pas offrir la même sécurité aux uns, la même
importance aux autres? Aussi ne pouvons-nous voir dans
Braiuipantivm une autre ville que la capitale des Bello-
vaques, c'est-à-dire Beauvais.
Les Bellovaques quittant leur pays, et forcés d'aban-
donner leurs femmes, leurs vieillards et leurs enfants, ont
dû nécessairement les enfermer dans la ville qui leur
offrait le plus de sécurité. Quand «ihez un peuple aussi
puissant. César ne cite qu'une seule ville dans laquelle se
Hknt retirés les vieillards et les femmes, et devant laquelle
il campe avec son armée, c'est lu preuve que cette ville
est à la fois la cité la plus centrale et la plus forte du
pays, et que c'est le point sur lequel ses coups auront le
plus de retentissement, et les résultats les plus considé-
rables.
La ville de Breteuil est-elle donc dans les mêmes con-
ditions que Beauvais, quant à la situation topographiqpe.
339 CONGRÈS ABGHÉOLOOIQUE DB FRANGE.
aux considérations stratégiques et aux voies militaires?
Nullement.
Breteuil, situé sur la frontière nord, ne saurait répondre
suffisamment aux conditions de sécurité que devaient,
avant tout, rechercher les Bellovaques pour protéger ce
qu'ils avaient de plus cher.
Cette ville, située entre les deux voies d'Amiens à Beau-
vais, et d'Amiens à l'Oise, par Gatenoy et Saint-Martin-
Longueau, près de Pont-Saint-Maxeuce, était une simple
station militaire, un catirum hibernale, mais n'était nul-
lement un centre de rayonnement d'un grand nombre de
chemins. Ce fait suffit pour démontrer qu'au temps de
César, Breteuil n'offrait ni la sécurité, ni l'importance que
les Bellovaques devaient rechercher avant tout, et que ce
u*cst point la ville sur laquelle César a mardié pour
atteindre son ennemi. Dès lors il faut chercher ^ra/iiipan-
tium ailleurs qu'à Breteuil, et nous ne trouvons cette
ville qu'à Beauvais.
Les Ikllovaques, en s'enfermant dans BraiutpamiitÊM
dé^gnaiout« {lir ce fait même, à César, la ville la plus
forte et la plu$ riche de leur pays, puisque là se trouvaient
lours armes et leurs ti^^r&« avec leurs femmes et leurs
oufaul;^. Ils lui moutraieut le point où il pouvait les frap-
|>0T au civur.
Oè^r comprenait que la possession de la principale
ville dc$^ lWlKnjiqu<$« c'est-ÀMlire de BrahisptnUiym, le
nnidrai; lu^îuv du (v*y$, Aius^i en ât-il le centre de nom-
hr>^u$«e« rvmtc^ qui nyonu^i^uK plus lud sur tout le pays.
Or« or$ xv^uii(^ n\>mhKUâes ^ ^trouvent aujourd'hui
lUN^i^uH'Ut autour <àe TaïKieuDe capitale des Bellova*{ues,
4epui$ ('jn^tn^iMjnL^, c{ 4u;ou^i'hut Beauvais. Forte nous
«rt J^\iK ^ IK \v>&r jaifê Arwhii^mùM que la ville de
XUT* SESSIUW, ▲ 8ENU8r S13
Ici nous devons faire deux remarques qui ne sont peut-
être pas sans valeur.
Si Braiu^HMiium était à Breteuil, comment expliquer
qu'on n'ait pas donné à la ville soumise le nom du vain-
queur, CMiaramaguê, et qu'on ait, au contraire, donné ce
nom à Beaavais?
On doit se demander naturellement quel était le nom de
Bcauvais, qui a été remplacé par celui de Csesaromagus.
Cet ancien nom était certainement connu, puisque c'était
celui d'un peuple puissant, et les dénominations posté-
rieares Cxiarmnaguê et Bellovacum témoignent que cette
ville n'avait point cessé d'être la capitale des Bellovaques;
cet ancien nom, remplacé par celui de César, n'était et ne
pouvait être que celui de BraiusparUiutn cité dans les
commentaires.
Et, d'ailleurs, si ^ro/us/Mn/tum- Breteuil avait pu être
la capitale des Bellovaques, assiégée et prise par César,
00 serait en droit de s'étonner qu'elle n'eût pas reçu un
nouveau nom, conformément à l'usage, et il faudrait
chercher dans l'histoire Tépoque et les circonstances où
cette ville aurait perdu son rang et ses prérogatives de
capitale pour les voir transférés à Beauvais.
11 serait inutile de tenter une pareille recherche, et il
but voir dans Bratuspantium, Cœsaromagus, Bellovacum
et Beautfaii, une seule et même ville, qui était, avant
comme après la conquête, la capitale des Bellovaques.
Si les Bellovaques avaient enfermé leurs vieillards,
leurs femmes et leurs trésors à ^ra/115/xin/ium-Breteuil,
c'est-à-dire sur leur frontière et à la merci d'un coup de
main, surtout quand les hommes valides étaient absents,
il faut avouer qu'ils auraient été bien imprudents.
Dans ce cas, Divitiacus ne se serait pas contenté de
menacer la frontière, il se serait rendu maître d'une
3Si CONGRÈS ARCI1ÉOLOGIOU£ DE FR1NG£.
ville sans défense, comme César le fit un peu plus tard.
Cette hypothèse est donc inadmissible.
César, entrant par une marche rapide sur les terres des
Bellovaques, alors que les fuyards n'avaient pas encore
eu le temps de rentrer dans leurs foyers, assurait la sou-
mission du pays, et, en attaquant l'ennemi dans sa plus
forte retraite, il atteignait à la fois les vieillards, les
femmes, les enfants, les trésors, les armes, en an mot,
toutes les forces du pays. C'était sa tactique habituelle.
Cette retruite ne pouvait donc être qu'au cœur du pays,
et ce qui le prouve, c'est que Divitiacus quitte la fron-
tière où il était en observation, pour venir vers César,
campé devant Bratuspantium. Donc Divitiacus et César
étaient à une assez grande distance l'un de Tautre. Si
Bratuspantium avait été à Breteuil, c'est-à-dire à la fron-
tière, Divitiacus n'aurait pas eu à se déplacer pour aller
vers César, plaider en faveur des Bellovaques.
Le texte latin ne s'expliquerait pas dans l'hypothèse
qui placerait Bratuspantium à Breteuil. Il se comprend,
au contraire, tout naturellement si Bratuspantium est à
Beauvuis.
Il sultit eutin d'observer ce qui se passe chez celui qui
90 défend, et chez oolui qui attaque. Le premier choisit la
retraite lu plus forte et lu plus sûre, autant que possible
à lubri des etiorts de IVnnemi. C*est ordinairement la
capitale qui n'uuit ct^oiuiditions au premier chef.
Le second, nu contraire, (Kir la rapidité de sa marche
et la vigueur de ses attaques, cherche à frapper son
eunonù au cirur, et c'est dans sa capitale qu'on lui porte
les coui^ les plus retloutubles, |virce que lÀ sont concen-
triVs les fon*i*s vixes du i^-iys.
Ainsi de\au-ii en iHrealor^, amune de nos jours, où un
(H^uple subil geutvaleuieut le s<^rt de sa capitale.
XLIV* SESSION, A SKM.fS. ii.%
Pour nous, le texte des Commentaires ù la main, nous
trouvons dans Bratuspanlium la capitale des Bellovaques,
c'est-à-dire Beauvais, au cœur du pays, et non fireteuil,
situé sur la frontière.
La remise de six cents otages et des armes de la cité
lâsuraienty il est vrai, la pacification du territoire.
Mais César, pouvant effacer jusqu'au nom d'un peuple,
Gt preuve de modération et se borna à changer le nom de
la ville soumise.
En agissant de la sorte, il n'obéissait point à un vain
ientiment d'araour-propre, ses vues étaient plus élevées.
U laissait après lui un témoignage permanent de sa clé-
mence et de sa force, afin d'inspirer aux autres peuples le
respect et la crainte des armes romaines, en leur montrant
ce qu'il pouvait en coûter, même aux plus forts, de
prendre les armes contre lui. Plus l'exemple était haut,
plus il devait lui être profitable.
U tombe, dès lors, sous le sens commun, que ce chan-
gement de nom n'a pu être, et n'a été réellement imposé
qu'à la ville vaincue, en qui se personnifiait la défaite du
peuple entier, et Bratuspantium est devenu Cxsaro-
Personne n'admettra, d'ailleurs, que César ait eu la
pensée de conserver le nom de Bratuspantium à la ville
qui représentait la puissance de ses ennemis vaincus, et
qu'il ait pu aller chercher au loin une ville inconnue et
sans importance, pour lui donner son nom : ce serait
une puérilité.
Or nous savons que le nom de Cxsaromagus n'a été
connu que depuis César; que plus tard il a été remplacé
par celui de Beiiovacum, et que ces deux noms se sont
appliqués, successivement, à la ville de Beauvais.
Nous pouvons donc rigoureusement conclure que Bra--
XUV* SESSION. 45
S26 CONGRÈS ARGHÉOLOGIOXIE DE FRANGE.
iuspantium et Beauvais n'ont fait et ne font qu'une seule
même ville.
Ces changements de noms sont fréquents dans Thistoire
et sont dus à des causes dififérentes variant à Tinfini,
mais se rapportant cependant le plus généralement à des
faits historiques où locaux qu'il serait hors do propos
d'étudier ici.
Essayons maintenant de rechercher les raisons qui ont
pu porter quelques auteurs à placer la ville de Bratuspûn-
iium à Breteuil-Vendeuil-Caply. On invoque :
L'existence sur ce point d'un lieu dit, portant le nom
de Bratuspance ;
Des restes de constructions et des monnaies, bijoux,
vases, etc., en nombre infini, qui enrichissent aujourd'hui
de nombreuses collections.
Nous dirons peu de choses touchant les noms de Bra*
iuspantium et de Bratuspance.
Graves conteste même l'existence du lieu dit Bratus-
pance, et son opinion, faisant autorité en celte matière,
fait tomber l'argument qui s'appuie sur une analogie de
noms.
L'étymologie est certainement la même, et, selon toute
vraisemblance, il ne faut pas chercher dans Bratuspantium
autre chose qu'un nom formé de deux mots celtiques
donnant Tidée de faits analogues existant dans diverses
localités.
Ces noms portant en eux-mêmes leur signification,
existent dans toutes les langues et ont dû exister chei les
Celtes et les Gaulois comme ils existaient chez les Romains.
On pourrait voir une semblable analogie entre Bibrax et
Dibracte.
L'avancement des études archéologiques nous fera sans
doute encore connaître d'autres localités du nom de Bra-
XLIV' SESSION, A SENLIS. '±^1
Impaniiumt et, alors, la question qui nous occupe sera
singulièrement simplifiée. Je laisse à d'autres à faire ces
études philologiques.
Mais nous étudierons la vraisemblance de la seconde
hypothèse qui s'appuie sur des découvertes d'antiquités,
et nous verrons s'il est possible d'attribuer à ces décou-
vertes réelles la signification qu'on leur a donnée jus-
qu'ici.
César, après avoir reçu les otages, et s'être fait livrer
toutes les armes des Bellovaques, marche contre les
Ambiani, qui, à son approche, se rendent à merci (4).
Ce passage, concis et énergique, nous montre que les
Ambiani, instruits du sort que les Suessions et les Bello-
vaques venaient de subir, n'ont pas jugé à propos d'at-
tendre l'arrivée du vainqueur, dans Samarobriva, leur
Capitale, et qu'ils sont venus au-devant de lui au moment
où César allait envahir leur territoire.
C'est à leur frontière du midi qu'en apportant leurs
otages et leur rançon, ils ont donné à César des gages de
soumission qui ont permis à ce dernier de marcher en
sécurité contre les Nerviens.
L'abondance et la yariété des découvertes faites à Ven-
deuil-Caply, semblent désigner cette localité comme
ayant été l'emplacement où s*est faite la soumission des
Ambiani.
Cet événement n'a été qu'un fait isolé et ne suffirait
peut-être pas à expliquer l'importance des constructions
trouvées dans cette localité.
Mais, si nous nous rappelons que César, pendant ses
campagnes des Gaules, a, plusieurs fois, envoyé ses
•A] (Jui se suaque omala, sine morS dediderunt. Comm.
Liv. III.
^28 CONGRÈS ARGHÉOLOGIOUE DE PRANGB.
légions en quartiers d*hiver dans la Belgique, nous
recoQnattrons que Vendeuil-Caply, sur la limite des Bello-
vaques et des Ambiani, était précisément un de ces quar-
tiers d'hiver, casirum stativum hiemale, où séjourna Gras-
sus, et nous aurons une explication toute naturelle du
problème.
Constructions, armes, bijoux, médailles, poteries, etc.,
en un mot, toutes les découvertes faites jusqu'à ce jour,
nous montreront Vendeuil-Caply comme une station
purement romaine.
D'autre part les restes de l'époque romaine sont si nom-
. breux et si variés, à Beauvais, qu'on est forcé de reconnaître
dans cette ville l'emplacement d'une ancienne station
romaine très-considérable.
Tout d'abord les anciens murs de la cité formant un
parallélogramme irrégulier, s'étendant au sud -ouest sûr
250 mètres de longueur; au sud-est sur 360 mètres; au
nord-est sur 260 mètres et au nord-ouest sur 400 mètres
et enfermant une superficie de 10 hectares 40 ares, déter-
minant l'emplacement du castellum.
Le castellum peut donc, sans efforts, être considérécomme
['oppidum Bratuspaniium des Commentaires, et cette iden-
tification est confirmée par les nombreuses découvertes
faites à l'intérieur et hors de la cité, et surtout par les
voies stratégiques qui rayonnent dans toutes les direc-
tions.
Si on passe en revue les inscriptions, les débris de
colonnes, les bas-reliefs, les sépultures, de nombreuses
médailles d'Auguste, Néron, Vespasien, Trajan, Hadrien,
Antonin-le-Fieux, Commode, Posthume, Dioclétien, Lici-
nius, Luciile, Marc-Aurèle, Crispine, Faustine jeune,
Macrinius, Balbiniis, Tétricus. etc., les vases en terre et
en bronze, les armes, les bijoux, les mosaïques, les restes
XLIY* SESSION, A SENL18. 2i9
d'no bypocausle, d'un temple consacré à Bacchus et
d'autres monuments, tout atteste que l'ancien emplace-
ment de la ville de fieauvais avait une importance consi-
dérable, et que rien n'empêche d'y reconnaître Voppidum
Broiuipantium de César.
Les découvertes faites à Vendeuil-Caply ont une autre
oripne, et s'expliquent parfaitement d'une autre manière,
sans qu'il soit besoin de faire intervenir Voppidum Bra-
tuipoHtium des Commentaires.
La rapidité du récit témoigne encore que César n'a Gait
■
que toucher les Ambiani pour se diriger, sans rétard,
contre les Nerviens; et la situation de Vendeuil-Caply se
piéte mieux qu'aucune autre à l'explication de cette
marche précipitée. Cette situation rend surtout invrai-
ionblable la marche par Samarobriva, qui aurait allongé,
iaos oécessité, un parcours que César tenait au contraire
à abréger le plus possible.
Depuis la construction des routes, le casirum hiemate
de Vendeuil-Caply était devenu une station militaire,
une fÊntiaiio pour les légions circulant sur les voies
romaines :
D'Amiens à l'Oise, par Saint-Just et Catenoy;
De Beauvais à Paillart.
En outre, cette station se trouvait à proximité de la
maie voie d'Amiens à Beauvais, par Corraeille; et sa
situation, aux confins des Bellovaques et des Ambiani, lui
doonait une importance exceptionnelle.
Tous ces faits justifient pleinement, ce me semble,
qu'il ne faut voir à Vendeuil-Caply qu'une station pure-
ment romaine, et qu'on fait violence aux faits et aux
«iTénemeuts ou cherchant à donner à cette localité une ori-
iTiue gauloise par sou identification avec Bratuspantium.
La commission de la carte des Gaules a fait acte de trop
230 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
grande modestie, en évitant de se prononcer sur rempla-
cement de Bratuspantium, et en acceptant, sans discus-
sion, la dissertation de M. l'abbé Dévie, qui identifie cet
oppidum avec Vendeuil-Caply. La commission, mieux
que tout autre, aurait pu faire la lumière complète sur
cette question.
Elle ne Ta pas tenté.
Je l'essaie. Puissé-je avoir réussi!
Puissé-je avoir démontré péremptoirement :
i® Que depuis dix-neuf siècles on a accordé, à tort, un
crédit sans contrôle au récit des Rémois, par cela seul que
ce récit est relaté dans les Gomhientaires;
2® Que les Rémois avaient un intérêt majeur à exagé-
rer la puissance de voisins (les Bellovaques et les Nerviens)
dont ils pouvaient avoir à craindre les entreprises, afin de
faire anéantir par César et sans danger pour eux-mêmes,
la puissance de ces voisins redoutés;
3® Que César, vainqueur, n'avait aucun intérêt à recti-
fier la déclaration des Rémois;
4*^ Que les Bellovaques n'ont jamais été en état de lever
cent mille hommes capables de porter les armes;
5° Que Bratuspantiumy leur oppidum, doit être iden-
tifié avec Caesaromagus, Bellovacum et Beauvais;
6** Que cette identification est prouvée par la situation
topographique de Beauvais, au centre du pays ; par les
restes des anciens murs, aussi bien que par les décou-
vertes nombreuses qui ont été faites dans la ville, de mon-
naies, armes, bijoux, poteries, etc., attestant l'importance
de cette station à l'époque romaine;
7** Que cette identification résulte surtout de la com-
vergence d'un grand nombre de voies, rayonnant dans
toutes les directions, et attestant que cette station était
alors, comme elle est restée depuis, un point stratégique
XLIT^ SESSION, A SENLIS. â3l
de première importance, qui assurait la soumission d'un
peuple toujours prêt à prendre les armes.
8* Que l'oppidum Bratuspantium des Commentaires ne
saurait être identifié avec Vendeuil-Gaply, sous le pré-
leite qu'on aurait signalé dans cette localité un lieu dit
Braiuipanee, dont l'existence réelle est même contestée
par Graves, c'est-à-dire par le savant le plus compé-
tent sur cette question ;
9^ Que cette identification serait combattue par la
situation topographique et à la frontière de Vendeuil-
Caply;
10" Enfin qu'elle ne saurait résulter davantage des nom-
breuses découvertes romaines faites dans cette dernière
localité, parce qu'il y avait là un caslrum stativum hiber-
^M/eexpliquant naturellement la présence des objets décou-
"^crts, sans qu'il soit nécessaire d'en faire, contre toute
x'^aison et toute évidence, Yoppidum Bratuspantium meu-
Uonné par César.
Cette étude contenant quelques appréciations nouvelles
«ur un récit et des faits admis sans conteste depuis dix-
^^uf siècles, sera peut-être considérée comme sacrilège
par ceux qui n'admettent pas qu'on puisse toucher à
i arche sainte, ni même la regarder en lace ; mais peut-
^Ire aussi aura-t-elle la bonne forlune d'obtenir Tappro-
bation de ceux qui pensent que la discussion peut aborder
tous les sujets, et que nul argument ne doit être écarté
sans examen.
Mes conclusions sont-elles suffisamment justifiées?
U ne m'appartient pas d'en juger.
La lecture du précédent mémoire duune lieu à un
Change d'observations entre sou auteur et MM. Ledain
232 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRATICE.
et Palustre; puis la parole est donnée à M. l'abbé Caudel*^
sur la 16** question :
Rechercher le lieu de la bataille de César
contre les Nerviens.
Bataille de César contre les Nerviens
au passage de la Sambre.
i"" EXPOSÉ DU SUJET.
Le sujet que nous abordons dans cette étude est un des
moins connus en ce qui concerne les gestes de Jules César
dans le nord de la Gaule. Les étincelants et immortels cha-
pitres du deuxième livre ne touchent qu'à l'action pro-
prement dite et nous laissent sur les faits qui Tont précé-
dée dans une assez grande incertitude. Nous savons
seulement que César , après avoir marché contre les
Ambiens, venait de recevoir leur soumission, qui ne se
fit pas attendre, et qu'il s'occupa immédiatement de trou-
ver les Nerviens pour les attaquer. Après tant de reddi-
tions, il semblait chercher des adversaires dignes de se
mesurer avec Sa Grandeur, il les trouva. Sa rencontre
avec eux sur les bords de la Sambre présente certaine-
ment un des épisodes les plus émouvants et les plus dra-
matiques de toute sa campagne dans le nord de la Gaule;
il s'est plu à le raconter longuement. Tout d'abord, il
nous donne une grande idée de ses adversaires; ils ne
permettent aucun accès chez eux au commerce étranger;
ils rejettent l'usage du vin cl des autres superfluités
propres à énerver les i\mes et à aflaiblir les courages;
sauvages et intrépides, ils reprochent aux autres Gaulois
XLIT* SB88I0N, A SkNLlS. 233
de B'étre donnés aux Romains et d'avoir abjuré les
intiques vertus de leurs pères; ils n'enverront aucun
député, et n'accepteront aucune condition. Voilà donc les
adversaires; ils sont venus du Hainaut, du Brabant, de la
Flandre se réunir aux Atrébates et aux Yéromanduens
(ceux d'Arras et de Saint-Quentin) ; ils ont peu de cavalerie,
ils en négligent l'usage, mais en compensation leur infan-
terie est de premier ordre et fait toute leur force; ils sont
là soixante mille hommes armés; le reste de la nation,
Tieillards, femmes et enfants sont restés en arrière, abrités
et cachés dans les marais avec le gros des bagages. Les
Nerviens occupent, sur la rive droite de la Sambre,
kB collines environnantes; couvertes de bois, ces collines
dérobent leur présence et leur actioû à l'ennemi, ils
n'en . laisseront apercevoir que ce qu'ils voudront; ils
sont à deux cents pas de la rivière qui mesure, en cet
endroit, une profondeur de trois pieds. Leur front de
bataille parait s'être développé sur un espace de deux
kilomètres; des espions sont venus les prévenir de l'arri-
vée des Romains et de Tordre de leur marche; ceux-ci
viennent du pays des Ambiens. Chaque légion devant
tfriver séparée des autres par ses bagages, les Belges vont
i'eObrcer de les battre ainsi Tune après l'autre à la faveur
de cet isolement.
â"" LES ITINÉRAIRES.
Ici se présente naturellement la question des itinéraires.
Une certaine opinion peut-être un peu exclusive, fait par-
tir César de Vermand, ou d'Augusta Veromauduorum,
^qui revient, ou à peu près, au même, et le fait arriver
^ur le plateau de Catillon-sur-Sunihrc, en s'appuyant sur
^'Oise, dont il eurveillc et coiuiuaudc tous les abords
comme le rempart, qui, naturellement, doit à la ibis pro-
234 CONGRÈS AROUÉOLOGigUK D& FRANCE.
léger et «ouvrir sa marche. Une autre opinion le fait arri
ver directement de Monididier, qui pourrait bien éti
Bratuspantium , par Péronne, forteresse gauloise qu'
laisse à gauche, Gatelet, le Catelet, Maretz , Saint-Souple
Mazinghem ; c'est en effet le trajet le plus court et oeli
qui explique le mieux cette marche rapide de trois jours
travers les frontières des Nerviens et dans le payn (
Somme qu'il quitte pour courir à d'autres ennemis.
Enfin, une troisième opinion le fait remonter enta
plus au nord, en plein pays nervien, et aller présenter
bataille à Hautmont. Cette opinion est sans doute la moii
probable et la moins autorisée; il n'est pas possible qi
César ait pu faire en trois jours cette longue route, et c
n'explique pus qu'il ait été tout d'abord se jeter au mili<
de ses ennemis, car cet itinéraire le fait marcher en plei
pays belge. Nous savons bien qu'on peut faire la mén
objection à la première opinion qui fait traverser à Céa
une partie du pays des Véroinauduens, ses ennemis égal
ment; mais cette marche a au moins l'avantage d'ét
couverte à gauche par un pays allié, et de s'appuyer
droite sur l'Oise, dont il est facile d*assurer le coun
d'autant plus que ce qu'on peut appeler l'armée active d
Véromanduens est allé se joindre aux confédérés (
l'autre côté de la Sambre.
Appelé ù discuter sur les lieux les deux derniers tracé
nous avouons, Messieurs, qu'il est difficile de se prononce]
c'est donc avec une grande sincérité que nous allons disci
ter celui qui nous a paru le plus admissible, sans aucu
parti pris d'ailleurs contre l'autre; nous serions très-hei
reux qu'une discussion s'élevAt sur ce point, et que I
Société des Antiquaires du Picardie relevât le gant qi
nous lui jetons, non pas pour la provoquer à un du
d'honneur, ni même d 'amour-propre, mais aux lutU
XUV 6BSS10N, A SKNUS. 335
pcifiqueset frateraelles d'où naisseot toujours la lumière
dios les choses, et Testime dans les personnes.
On ne sera donc pas étonné qu'appartenant à l'Oise,
nous nous arrêtions de préférence aux lieux qui nous
sont plus connus, plus familiers, et d'une exploration
plus facile.
Nous pensons donc que César, quittant le pays de Péronne
oa de Montdidier, où il vient de recevoir la reddition des
Ambiens, se dirige droit sur Yermand ou Auguste Yeroman-
daonim, pour s'appuyer là sur un point solide, et faire de
cetoppide, à la fois, un point d'observation, un lieu de ravi-
taillement et d'équipement, et même de refuge en cas de
défaite, à l'abri de toute entreprise hostile. Ses trois jours
de marche à travers le pays nervien commenceraient à son
départ de Yermand, et sa marche s'appuyant sur la rive
(boite de l'Oise, de manière à serrer le plus près possible
kpays ennemi, expliquerait facilement cette expression.
« Per eorum fines ». De Péronne à Yermand il aurait
soÎTi la route actuelle de Péronne à Saint-Quentin, passant
à Estrées- en -Chaussée. Mais dira-t-on, pourquoi ce
détour? nous répondrons, c'est une affaire de quelques
lieues, mais qui donne à César Timmense avantage de
s'appuyer sur une grande rivière et d'en profiter pour ses
ooDTois, selon la tactique romaine, avantage que l'autre
parcours ne lui procurait pas. Pour peu qu'il se rende
QUitredes hauteurs qui dominent la rivière, et qu'il
oiettesa première ligne d'avant-garde à l'abri d'une sur-
prise des Nerviens, surprise qui sera de plus en plus pos-
sible à mesure qu'il s'avancera vers la Sambre, il peut
Qurther en sûreté. Cet itinéraire avait l'avantage d'être
court et sûr à la fuis. Pour qui connaît le pays il est facile
de comprendre qu'en s'attachaut à l'Oise, sa marche sur les
hauteurs de la rive droite était parfaitement couverte, et
236 GONoaÈs archéologique de frange.
qu'il avait encore la ressource du delta que forme cette
rivière jusqu'à Guise pour y opérer le passage de ses éclai-
reurs, de ses bestiaux, et même de quelques troupes par
les gués de Macquigny et de Yadencourt. Voici donc l'iti-
néraire que nous proposons : De Vermand ou d'Augusia
Veromanduorum à Marcy,
Césaravait faitdeVermand un camp stationnaire ;cirs/rtim
s/a/ivtim. Au-dessousde l'oppide, le camp avait prii les vastes
proportions d'un établissement destiné à réunir aux disposi-
tions militaires toutes celles qui sont nécessaires à un séjour
prolongé et surtout à la concentration de toutes les forces
actives qui pourraient être mises en œuvre par le général.
Vermand était donc un établissement de premier ordre,
une véritable ville plutôt qu'un camp. Les monuments
trouvés en ce lieu attestent d'ailleurs Tépoque et l'intérêt
de sa création. Le camp permanent de Vermand, ana-
logue par son assiette et par son étendue à celui de Namp-
cel, près Noyon, Netnetocenna, suivant l'opinion d'un
savant des plus sagaces, Tabbé Lebeuf, était alors entouré
de peuples soumis tels que les Suessions, les Bellovaques
et les Ambiens ; César était donc là chez lui, bien que
l'ennemi ne fût pas loin.
L'enceinte de Vermand comprenait dans sa vaste éten-
due : Villa Schalarum, Villecholles ; Villévéque , villa
Vehitulorum et Marteville, Martis villa.
On nous pardonnera celte petite digression d'arrêt sur
Vermand : nous avons voulu attacher Tœil du lecteur sur
ce point, car il est comme le centre de toutes les opéra-
tions militaires qui vont nous occuper.
Nous supposons donc que César, parti de Vermand,
passe par Marcy. qui est sa première étape dans le chemin
que nous allons parcourir. C'est là seulement, en effet,
qu'on trouve les premières traces de son passage. A Marcy
XUT* SESSION, A SENLIS. 337
il a existé, au temps de César, une chaussée dont il est
probable qu'après de Douvelles études on retrouvera les
traces, mais dont on ne possède aujourd'hui rien de plus
qu'an faible tronçon. Nous trouvons dans l'historien Dora
Grenier, p. 492, édition in-4**, publiée par la Société des
Antiquaires de Picardie : a M. l'abbé Peitavy pense que
1*00 peut ajouter à la chaussée de Saint-Quentin à Thé-
rouanne, une seconde branche dont l'abbé Bélay n'a
point parlé et qui conduisait à Guise. Partant de Saint-
Quentin, elle traversait le territoire d'Harly, en passant
près d'une croix qui est nommée dans un titre de l'an 1322
ea laveur de la trésorerie de la collégiale de Saint-Quen-
tin: la Cmix BeaurCauchie.
• A la sortie de Marcy , il y en a un très-grand et très-beau
morceau, large, bombé et gravelé comme les anciennes
voies; mais elle n'est pas continue ainsi jusqu'à Guise. »
Cette dernière assertion n'est pas exacte, car on a trouvé
te traces de cette- voie se dirigeant vers Guise, à Macqui-
goy, où elle franchissait l'Oise à gué pour passer sur la
nve gauche. Ce fragment de voie de Macquigny à Guise
PMsail à la ferme de Gouvron et à celle de la Motte. César
a dû s'en servir pour effectuer le passage de ses troupes
fu'il destinait ou à occuper les différents points d'obser-
ution de ce côté de l'Oise, comme Croix et les hauteurs
<lominant le gué de Vadencourt, ou pour aller par Verly
et Ribeauville surveiller la partie du pays de Sambre où
^ ae devait pas conduire le gros de ses légions.
Cette route de César côtoyant l'Oise s'étendrait donc
^ Harcy à Beruot, de Bernot à Hautcviile et de Uau-
teville au gué de Macquigny, ou par Noyai, Loug-
^lup et Vadencourt, en suivant la rive droite de la
rivière.
Voilà donc deux directions indiquées et probables:
238 G0.N6RÉS ARCnÉOLOOlQUE DE FRANGE.
Tune côtoyant l'Oise, rive droite, de Marcy à Yadencourt, et
Tautre, suivant les hauteurs de la rive gauche de Marcy à
Guise par le gué de Macquigny.
Il en est une troisième que César a pu suivre pour
envelopper complètement tous les abords de l'Oise, et
servir aussi largement- que possible ses approvisionne-
ments; c*est la route qui s*étendrait de Auguita Verùnum-
duorutn à Bernoville, Aisonville et le pays d'Étaves, Sta-
hula; c'est ce qu'on pourrait appeler le chemin d'en haut,
rive droite; celui qui le rapproche le plus directement du
point d'attaque.
Ce fut à Étaves, aujourd'hui l'une des communes du
canton Je Bohaiu que César plaça l'hébergement qui
portait encore au xii* siècle le nom àeStabula, les ÉiaUa,
d'après un acte de donation faite à l'abbaye voisine d'Hom-
blières par un seigneur nommé Robert d'Étaves et qui se
désignait par Bobertus de Stabulis. Étaves se trouve flan-
qué de deux hameaux, Bosquiaux et £pinoy, £aêcum et
Epinetum. C'est assez dire que ces parages couverts de
forêts à une grande distance étaient également favorables
à la pâture des bestiaux ou à la protection des animaux
malades ou en gésine.
César ne dut pas négliger cet avantage ; il n'existe main-
tenant sur l'emplacement d*Ëtaves aucune construction ro-
maine, mais en remuant le sol on y a souvent trouvé des me-
nues pièces de monnaie romaine de l'époque de la conquête.
Pareilles trouvailles ont été faites au-dessus du terri-
toire d'Étaves à Bouguincamp, camp à bestiaux. Boum
Campus, A l'est de ce hameau, situé à douze cents mètres
dans la direction d'Étaves, on a rencontré une fosse ayant
vingt-cinq mètres de diamètre, nommé le Rond-de-Bou-
guincamp. Au sud est une enceinte d'assez grande dimen-
sion s'étendant vers Étaves.
XLIT* SESSION, A SENLIS. 33Çl
Cette enceinte est fermée par uu murgier fait de moel-
lons do craie, dont une grande partie subsiste encore
aujourd'hui, le reste est dégradé. Ce murgier dominait
l'enclos en plusieurs points; chaque matin les bouviers
ouvraient la porte de l'enceinte, et les animaux pressés
par l'appétit s'élançaient vers la forêt, qui s'étendait
devant eux. La portion destinée au pâturage était entou-
rée de haies ou de perches placées horizontalement ; ce
mode de fermeture est encore presque le seul usité dans
le pays.
Cest probablement par Bernoville, Aisonville, Étaves
(IM César arriva sur le lieu des opérations définitives.
Pour envelopper la rive gauche d(f la Sambre un peu plus
haat, il dut s'assurer le parcours de Grougis à Mennevret,
de Mennevret à Ribeauville, et de ce dernier point à
Muinghien. Cet enveloppement s'étendrait donc pour
être complet et donner une juste idée du front de bataille
du côté des Romains; de Catillon sur Sambre à Mazinghien,
ikoDtdù tenir toutes ces hauteurs dont la plus dominante
en Catillon. C'est là que César établit son camp, comme
l'atteste encore la forme étrange qu'a conservé le village
eclael; il semblerait que le camp romain s'est converti
tout doucement à des nouveaux usages, en Classant à de
noQTeaux maîtres, mais qu'il a conservé sa conformation
romaine; il figure exactement un camp : grande ruc^
transversale, dans le sens parallèle à la rivière à laquelle
lotissent de chaque côté, par lignes droites, dix et
Dtéme douze petites rues, qui représentent les différents
<|uartiers formés par les cohortes en campement.
iKîpuis notre visite, nous avons appris qu'un lieu voi-
sin du champ de bataille, Bazuei (Basilica), avait été à
l'époque romaine le siège d'un établissement romain
i^ec murs, escaliers souterrains; nous y reconnaissons le
240 COxNGRÂS ARCnÊOLOOIQUE PE FRANCE.
séjour du chef militaire, qui séjourna sur remplacement
même des opérations. Cet établissement était destiné à
prémunir Tarmée romaine contre un retour offensif de la
part des Nervions.
Par où César avait-il abordé définitivement les hau-
teurs de Catillon? Il est bien difficile d'éclaircir ce point;
ce fut à travers un pays très-embarrassé de baies et de
terrains marécageux comme il est encore en grande partie,
probablement par la vallée Mul&tre, où les bétes de trait
seulement pouvaient circuler, et par tous les points qu'il
trouva praticables , en développant une assez grande ligne
de troupes et d'expédients, qu'il arriva, comme il put, au
plateau de Catillon, où* il fixa son camp. Quelques-uns
ont prétendu qu'il avait accédé à la Sambre par les terri-
toires de Yassigny, de Ribeauville et de Ribeaueourt, d'où
l'on arrive en quelques instants à Mazinghien , lieu pro-
bable de la bataille.
Nous pensons, d'après un examen très-détaillé des lieux,
que les gros de l'armée dut déboucher plus haut sur la
gauche, entre la Louvière et Catillon, et que c'est dans
les plaines qui s'étendent entre ces deux localités, en s'in-
clinant doucement vers la Sambre, qu^il faut placer l'ac-
tion. Le lien du passage et par conséquent le vrai théâtre
de cette lutte formidable seraient au point qui sépare la
^ butte de Catillon du moulin de Briques (lises Brige), ce
qui n'empêcherait pas que l'action complète n'ait été
engagée sur une étendue de deux kilomètres au moins
sur les deux bords : de Catillon à la Louvière et même à
Mazinghien, du côté des Romains; de Bois-l'Abbaye, le
Moulin à la grande route actuelle de Landrecies, du côté
des Nerviens.
Du reste, il est temps de laisser parler César :
« £n arrivant près de l'ennemi, César avait, selon son
XLIT* SESSION, A SENLIS. 241
usage, rapproché les six légions et placé tous les
bagages sur les derrières de l'armée ; les deux légiom
DouTellement levées fermaient la marche et gardaient
les convois. Nos cavaliers passèrent le fleuve avec les
frondeurs et les archers, et engagèrent un combat avec
la cavalerie des ennemis. Ceux-ci cédaient d'abord, se
retiraient dans le bois, puis revenaient à la charge ; mais
les nôtres ne les poursuivaient point au delà de l'espace
qui était découvert. Cependant les six légions qui étaient
arrivées les premières tracèrent l'enceinte du camp et
se mirent à le fortifier. Dès que les ennemis cachés
dans le bois aperçurent les premiers bagages (c'était le
moment qu'ils avaient fixé pour l'attaque), ils sortirent
dans l'ordre où ils s'étaient rangés, s'élancèrent avec
toutes leurs troupes, tombèrent sur notre cavalerie
qu'ils n'eurent pas de peine à renverser, et coururent
vers le fleuve avec une si incroyable vitesse, qu'ils seni-
UaJent être au même instant dans le bois, au milieu
de la rivière et sur nos bras. On les vit avec la même
promptitude attaquer notre colline, notre camp et les
travailleurs occupés à le retrancher. 0
C'est là ce qu'on pourrait appeler la première action;
lie n'avait pas été favorable aux Romains. On a reproché
vec raison à César de s'être laissé surprendre, ayant
tant de cavalerie et de troupes légères. Il est vrai que
» cavalerie et ses troupes légères avaient passé la Sambre,
uuis du lieu où il était, il s'apercevait qu'elles étaient
«irrétées à cent cinquante toises de lui, à la lisière de la
for^: il devait donc, ou tenir une partie de ses troupes
^us les armes, ou attendre que ses coureurs eussent
traversé la furet et éclairé le pays. Ces réflexions sont de
.Napoléiin. Les Commentaires continuent : « César avait
« tuut à (aire à la fois; il fallait déployer l'étendard qui
XUV* SESSION. 10
242 CONGRES ARGHÉOLOGIQUE DE FR^GE.
a donnait le signal de courir aux annes, faire sonner
a les trompettes, rappeler les soldats occupés aux tra-
« vaux du camp et rassembler ceux qui s'étaient écartés
a pour ramasser des fascioes, ranger l'armée en bataille,
« haranguer les troupes et donner le mot d'ordre : le
a peu de temps et la présence de l'ennemi victorieux
« l'empêchaient de tout faire. Deux choses pourvurent à
« cet embarras : Texpérience et l'habileté des soldats qui,
« instruits ipar tant de combats , n'étaient pas moins
c capables de se tracer eux-mêmes leur conduite que de
a l'apprendre des autres; et ensuite près de chaque légion
c la présence des lieutenants à qui César avait défendu de
« s'éloigner avant que les travaux du camp fussent ache-
c vés. Chacun d'eux pressé par l'ennemi n'attendait point
c les ordres de César et prenait sur lui de faire ce qu'il
« jugeait convenable.
c Après avoir pourvu au plus nécessaire, Géear courut
« haranguer les troupes que le hasard lui présentait et
« arriva à la dixième légion. Pour toute harangue il lui dit
« de se rappeler son ancienne valeur, de ne point se trou-
a hier, de soutenir avec fermeté le choc de ses ennemis,
c Comme ceux-ci étaient à portée du trait, il donna le
a signal du combat et se porta plus loin pour faire les
fit mêmes exhortations ; l'action était déjà engagée. L'at-
a taque avait été si brusque et l'ennemi si ardent à com-
« battre, qu'on n'eut pas le temps de revêtir les insignes
« des grades, ni de mettre les casques, ni d'ôter aux bou-
« cliers leurs enveloppes. Chacun revenant des travaux,
a se plaça au hasard sous les premières enseignes qu'il
a aperçut pour ne point perdre de temps à chercher les
a siennes.
et Dans cette nécessité pressante, l'armée s'était rangée
c selon la nature du terrain et la pente de la colline
XLIY* SESSION, A SENUS. 2i3
< plutôt que de suivre les règles de l'art militaire. Les
4 iéfoons se défendaient chacune de son côté, séparées les
« unes des autres par ces haies épaisses qui, comme nous
«l'avons dit, interceptaient la vue; on ne pouvait ni
f envoyer des renforts où il en fallait, ni pourvoir à
tœqui était nécessaire sur chaque point, ni conserver
« l'unité du commandement. Cette confusion produisit
« des accidents et des fortunes diverses, i
Nous sommes au moment le plus émouvant et le plus
terrible de cette lutte formidable. La neuvième et la
dixième légion forment l'aile gauche romaine, elles ont
m lace d'elles les Atrébates; la onzième et la huitième
looten face des Yeromanduens; à l'aile droite sont la
domième et la septième, à peu de distance l'une de l'autre.
Tous les Merviens, conduits en colonne serrée par Boduo-
gnat, leur chef, se portent sur ce point : les uns enve-
loppent nos légions par le flanc laissé à découvert par la
marche en avant de la douzième et de la septième légion ;
lei autres gagnent la partie la plus élevée du camp. Lais-
sons encore parler César.
« En ce moment, notre infanterie et notre cavalerie
légère, qui avaient été repoussées ensemble par le pre-
mier choc des ennemis, les rencontrèrent de front en
revenant au camp et s'enfuirent d'un autre côté. Les
valets de l'armée, qui, de la porte Décumane et du
haut de la colline avaient vu les nôtres traverser le
Qeuve en vainqueurs, étaient sortis pour piller, lors-
qu'en se retournant ils aperçurent l'ennemi dans notre
camp; ils prirent précipitamment la fuite. En même
temps, on entendait les cris des conducteurs de bagages
qui, tout effrayés, couraient de côté et d'autre. A ce
spectacle, les cavaliers de Trêves, si renommés chez les
iiaulois pour leur valeur, et que leur cité avait envoyés
244 CONGRÈS AROHÉOL0610UE DE VRANGE.
« à César comme auxiliaires, voyant notre camp rempli
c d'ennemis, nos légions pressées et presque enveloppées,
c les valets, les cavaliers, les frondeurs, les Numides
9 dispersés, fuyant de toutes parts, crurent que tout était
a perdu, reprirent la route de leur pays et publièrent la
« défaite entière des Romains, la prise de leur camp et de
« leurs bagages.
« César, après avoir exhorté la dixième légion, se
a porte à l'aile droite; il trouva les troupes vivement
« pressées, toutes les enseignes rassemblées au même
« endroit, les soldats de la douzième légion entassés,
« s'embarrassent l'un l'autre pour combattre : tous les
c centurions de la quatrième cohorte avaient péri; le porte-
« enseigne était mort, le drapeau perdu, tous les enseignes
a des autres cohortes étaient blessés ou tués; de ce nombre
c le principal, F. Sexticius Baculus, d'une bravoure
c remarquable, couvert de tant de blessures qu'il ne pou-
a vait se soutenir; le reste était découragé, i
César convient lui-même que les choses étaient pour
les Romains dans le plus mauvais état, et cependant
l'ennemi arrivait toujours par masses pressées, toute l'ar-
mée romaine est entreprise. C'est alors que César arra-
chant à un soldat de l 'arrière-garde son bouclier, se porte
en avant, app^^lic les centurions par leurs noms, exhorte
tous les soldats-, fait porter les enseignes en avant, et
desserrer les rangs pour qu'on puisse plus facilement se
servir de Tépêe. Son arrivée rend l'espoir aux soldats et
relève leur coura(;c. Cliacun veut, sous les yeux du géné-
ral, faire preuve de zèle dans cette extrémité, et l'on par-
vient à ralentir un peu l'impétuosité de l'ennemi.
a César remarquant que la septième légion, placée
f prî»8 de li\, était aussi sern'Hî de près, avertit les tri-
a buns militaires de rapprocher peu à peu les deux
XLIY* SESSION, A SENLIS. 245
« légions , afin qu'elles puissent unir leurs forces. De
t cette manière, elles se prêtaient un mutuel secours, et,
I ne craignant plus d'être enveloppées, elles commencèrent
• à montrer plus d'audace et de courage. Cependant les
I deux légions d'arrière-garde, qui escortaient le bagage,
• accoururent à la nouvelle du combat et se montrèrent
t aux ennemis sur le haut de la colline. De son côté
I T. Labiénus, qui avait forcé leur camp et qui décou-
• vrait de la hauteur ce qui se passait dans le nôtre,
• eofoie la dixième légion pour nous secourir; celle-ci
• comprenant, par la fuite des cavaliers et des valets, que
t le camp, les légions et le général étaient en péril, pré-
t dpita sa marche, i
Cette arrivée de la fameuse dixième légion changea tel-
lement la face des choses que ceux mêmes des Romains dont
les blessures avaient épuisé les forces, s'appuyant sur
leurs boucliers, recommençaient le combat. L'ennemi,
frappé de terreur par ce retour soudain, a^mmence à
hésiter et à reculer; mais, dans son dernier espoir, il
déploie encore un courage admirable; debout sur les
r;idaTres amoncelés des siens, il combat jusqu'au der-
nier. «Il n'y avait plus à s*étonner, dit le vainqueur lui-
■ même, que des hommes si intrépides eussent osé tra-
■ verser une large rivière, gravir des bords escarpés et
■ combattre dans une position désavantageuse, difticultés
< qu'avait aplanies la grandeur de leur courage, i
Après cette bataille, ajoute encore César, où la race des
Nerviens fut presque entièrement anéantie, les vieillards
enfoyèrent des députés. « Rappelant les malheurs de
• leur pays, ils dirent que le nombre de leurs sénateurs
^ se trouvait réduit de six cents à trois seulement, et que
« 'le soixante mille hommes en état de porter les armes,
« cinq cents à peine étaient debout. »
246 CONGRÈS ARGHÉOLOGIOtm DE FRANGE.
César voulut user de clémence envers ces infortunés ; ''
pourvut soigneusement à leur conservation, leur reodi'
leur territoire et leurs villes, et enjoignit aux peuple^
voisins de ne se permettre envers eux et de ne souSirif'
qu'il leur lût l'ait aucun outrage, ni aucun mal; de là il
marcha vers Namur pour soumettre les Atuatiquos.
Telle est, Messieurs, dans sa simplicité grandiose, cette
formidable lutte. Ce n'est pas sans une profonde émotion
«lue nous en avons visité le théâtre et cherché la trace sur
les bords solitaires et tristes de la Sambre. Nous pouvions
nous tromper sur l'endroit précis de telle ou telle péri-
pétie de la bataille qui a dû s'étendre asseï loin, comme
nous l'avons dit, mais à coup sûr, nous foulions le
sol sacré où ces héros tombés, qui sont nos pères, ont
combattu leur dernier combat pour rindépendance de la
patrie.
Eu l'absence de M. Autliyme Saint-Paul, qui s'est
excusé de ne i)ouvoir assister à la séance^ M. Palustre
donne lecture du mémoire suivant.
Questiom ââ et 33.
Quelles sont les églises les plus anciennes
de l'arrondissement de SenUs? en con-
nalt-on d'antérieures à l'an mil? — Étudier
les principaux monuments religieux de
la contrée. Faire connaître les anciennes
abbayes. A quel style particulier peut-on
rattacher le plus grand nombre de ces
édifices?
(les (|ucl(|ues lignes ne |>ouvent se imrer du nom de
XLTf SB8BI0N, A 8ENLI8. 347
mémoire. Encore moins prétendraient -elles être une
réponse aux deux importantes questions dont les églises
de l'arrondissement de Senlis sont l'objet. J'appelle ces
questions importantes; elles le sont, en effet, dans un pays
où l'architecture religieuse a été si florissante et où son
bistoire offre tant d'intérêt. Aussi appartient-il à ceux-là
ttob qui vivent au milieu des productions laissées dans
la contrée par notre art national le plus pur, de les recenser
i leur aise et de porter sur elles un dernier jugement.
Simple voyageur, je ne puis que faire part d'observations
penonnelles, capables peut-être d'aider à une appréciation
définitive de l'art religieux des environs de Senlis, mais
insuffisantes pour en donner une connaissance détaillée.
Je ne crois pas qu'il existe dans Tarrondissement de
Senlis une seule église antérieure à Tan mil. Durant la
période mérovingienne, il a dû se construire dans le Nord
de la France bien peu d'églises en pierre; l'invasion
fraoqae y étouffa, plus que dans le Midi, les traditions
romaines et y réduisit presque à néant l'art de la maçon-
nerie. Sous les Carlovingiens, les environs de Paris furent
ou négligés pour Aix-la-Chapelle et les résidences de
l'Aquitaine, ou habités par des princes impuissants qui
ne surent mêuie pas maintenir l'art monumental dans
l'état où l'avait placé Gharlemagne. Sous les trois pre-
miers Capétiens, l'anarchie qui régna dans le domaine
royal ne permit guère à l'architecture de prendre quelque
essor; enfin si, malgré toutes ces causes, il se construisit
dans le Valois quelques églises en pierre avant le
XI' siècle, le mouvement presque subit qui s'opéra au
m' les fit toutes disparaître i>our leur substituer des
t'dîfiœs plus élégants, plus ornés, plus conformes au
(Toùt nouveau qui se formait dans l'Ile-de-France. On ne
248 CONGRÈS ARGUBOLOOIOUE DE FRANGE.
laissa guère debout que quelques nefs depuis peu coM^'
struites dans le style roman, et cela dans les églises d^
médiocre importance que les ressources d'une petite
paroisse ou d'un monastère pauvre ne permettaient pas
de reconstruire complètement. Ces nets ne me paraissent
[tas antérieures à la fm du xi" siècle; si elles étaient par
exemple du ix** ou du x^ siècle, on y trouverait probable-
mont le petit appareil qu'on rencontre dans certaines
églises du Beauvoisis rattachées à l'époque carloviugieuuc
et dont une, la Uasse-OEuvre, ne daterait que de Tépisco-
pat d'Hervé (98r)-998). Quoi qu'il eu soit, l'art roman se
trouve rarement pur dans l'arrondissement de Sentis. Le
spécimen le plus important est la nef de Morienval» avec
ses trois clochers. Cette nef est par malheur dans un état
de délabrement qui, malgré des réparations exécutées
au XV et au xvii** siècles, menace d'amener sous peu de
temps une ruine complète. Les murs des bas-côtés, sur-
tout celui du nord, penchent au dehors de la façon la
plus inquiétante. Le portail occidental a disparu, mais il
y a, à l'intérieur, des chapiteaux massifs et pauvrement
sculptés qui rappellent de la façon la plus évidente la
première moitié ou h milieu du xi* siècle. On peut voir
<leux chapiteuur plus grossiers encore dans la sacristie de
la cathédrale de Soulis : co sont les restes de la basilique
commencée par l'un des deux Odon qui tinrent le siège
deSenlis, l'un vt^rs 990, l'autre de 1008 à 4070 envi-
ron (i). Nous croyons que c'est au premier Odon qu'il
faut attribuer ces chapiteaux. Les trois clochers de l'église
de Morienval sont à l'extérieur les parties les plus remar-
(l;()do liane erclesiam fundavit, vcl siih tinem seculi x,
v'm-A 090, (|uo primils Odo vivnbat, vol circa 1068, f|uotlorebat
Odo siTinidus [Gallia christiana).
XLIY* SESSION, A SENLIS. â49
quabies du monument. Us sont disposés comme Tétaient
ceux de Saint-Germain*des-Pré8 de Paris et de la grande
basilique de Saint-fienoit-sur-Loire : le plus gros au
milieu de la façade occidentale, les deux autres des deux
i^tés Je l'entrée du chœur. La tour occidentale, à Moricn-
>al, a perdu, au xV sik;le, sou dernier étage et son cou-
rounement pyramidal; mais les clochers orientaux con-
^T\ehi leur toiture primitive obtuse en pierre à quatre
I>JiD5, d*uoe forme bien éloignée encore des flèches élé-
•niQtes dont le type parait avoir pris naissance au milieu
<lu xii"" siècle.
La nef de Téglise Saint-Denis, à Crépy-en-Valois, méri-
terait d'être signalée comme aussi ancienne au moins que
celle de Morienval, si des restaurations trop radicales ne lui
avaient fait perdre, il y a quelques années, presque toute
authenticité. Cette triple net n*avait point encore de
colonnes dans ses piliers; elle appartenait à un type se
rapprochant assez de Notre-Dame de Melun.
Parmi les églises, moins importautes que celles de
Morienval et de Crépy, qui, dans l'arrondissement de
Senlis, offrent le type du style roman secondaire, grossier
et incomplet, en usage dans le Valois et ses environs
au XI' siècle et dans la première moitié du xn"", nous
devons signaler, pour les avoir visitées nous-môme :
L'église de Rhuis, près de Vcrberie, tout entière, avec
un portail assez simple, à deux colonnettes, un clocher
avec toit obtus en pierre, et des piliers dépourvus de
colonnes; les Envirom de Paris illustrés, de M. Joanne
page 310 de la o" édition), en douncnt une vue assez fidèle ;
L'église de Sarron, près P(jnl-Sainte-Maxence, en
majeure partie, d'un style égnlcment tort simple;
La nrf île l'église de Villers-Saint-Srpulcre, pW's de
<>cil, jusqu'à la naissance des arcs longitudinaux; le
S50 CONGRÈS ARCUÉOLOGIQUE DE FBANGB.
I)eau portail roman, avec colonnes massives et
voltos, ornées de moulures géométriques, est aussi anl
rieur au xii* ^i^clc; ce portail est le plus complet de
du xr si^clc qui existent dans Tarrondissement deSenlis^*
Quelques parties de Saint-Gervais-de-Pontpoint, sur l V
route do Punt-Sainto-Maxcnce à Verberie, notamment l S
clocher, counonné, comme ceux de Morienval et de Rhuis^
IMir un toit obtus en pierre ;
Li nef de l'église de IMailly, en majeure partie ;
Le portail, Tort mutilé, de l'église de Cuvergnon, et l€3
rimnir de Téglise «le Hargny, près de Betz;
l^e clocher de Nogoul-les-Vierges, près de Creil, remar —
(|uablti par ses colonnettos ornéeb sur toute leur hauteur'*
do dessins gravés ;
Lo )H)rtail et le cUxlicr do Saint-Vaast-de-Longmont,
sur uu coteau, dominant lo lK)urg de Verberie. Ces deux
fragments anbt^dogiquos sont fort curieux, le clocher,
|vir SOS ci^lonnottos gravéos do divers dessins sur toute
leur hAUtour, lo portail, |^r son quadruple rang de
ligxags dont la nninion forme d'énormes pointes de dia-
mant dt'^oondant jusqu\ui $<U« s;m$ imiH^toni culonnettes.
loi nous siMunu's |vut-<Mro dans la première moitié du
\u* siè\*lo vt au i\MnmoutHMnonl do la {nVriodo de transi-
tion.
U\ ouiA^ïx^ so pr\^$<ni;o uuo qui^Uon touto locale. Que
jvUîkT *io IWjîx* »lo SamsVuuYiît *io Snihs, que les docu-
uu'uts *vn:s» o^v|iu'îuu:on: *iolVîulu< ol cinnmcntés |iar
M. laMv M,ij:»\f\ assr.iv.îî r,o '.iuwis avo;r été rocon-
>ln.Uo ou mônu* rt*nî.uîuv »i«ru s N.i toudaiiou |^r Anne
*îo U«x<îo ^vi \r >u\ ■«•^' S.i;;;:«\ ..uy;;: lio S^nilis ivmpreu«l
\u;o ui'i v.iuquo vio qu;ivî\* ;ra\<v>, a\«v xoùti^ non vos ou
ivîwuu\^ sur *>*;i\x\s s3iu> ui*r\i;r(.>> ;;a :niu$^pt voùto do
uuhuo, o; un vKvur s*u> Al^uio^ a\w ucrvuiv$. Les
XLIY* SESSION, A SENLI8. S5i
fenêtres sont toutes en plein cintre. Sur un des côtés de la
nef (à gauche), on trouve des traces d'arcs en ogive. Il est
râcbeux qu'on ne puisse être assuré de l'authenticité des
voûtes. Si l'église était réellement aujourd'hui ce que l'a
laissée le règne de Henri 1*% ce qu'il serait tout au moins
uussi difficile d'établir que de révoquer en doute, il fau-
drait en conclure deux points très-graves, parce qu'ils
sont totalement opposés aux données fournies jusqu'ici par
les principaux édifices dits de transition : on devrait
d'abord reculer l'apparition de l'ogive dans le nord jus-
«pi'au milieu du xi* siècle, et reconnaître ensuite que l'arc
briiê s'est montré plus tôt que la nervure, alors que
l'église de Poissy, celle de Saint-Loup-de-Nuud et beau-
coup d'autres monuments nous montrent les architectes
de l'époque de transition cherchant, même avec la ner-
vure, à se passer le plus possible de Togive. Nous ne
saurions trop engager ceux de nos confrères qui adoptent
l'authenticité de l'église Saint-Vincent et qui ont à leur
disposition et les documents et le moyen d'étudier patiem-
ment et en détail l'édifice, à voir jusqu'à quel point on
pourrait défendre par ce même édifice le système de la
naissance du style ogival en plein xi* siècle, système
inauguré dans le département de la Manche à propos de
la cathédrale de Coutances et continué naguère, non loin
de Seulis, en prenant pour appui la basilique de Saint-
Genner. En attendant, nous nous renfermons dans un
argument pareil à ceux qui ont été énoncés dans les cir-
constances que nous venons de rappeler : pourquoi, si le
style ogival a été créé dans le Valois vers 4060, p«)urquoî
vovons-nous commencer seulement sous Louis le Jeune,
\ers 4440 ou 4450, le mouvement artistique auquel sont
dues les principales églises de la contrée?
i52 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
Les documents écrits, en effet, assignent à cette der
nière époque la construction de la cathédrale de Sentis e
celle de Téglisa Saint-Frambourg, en faisant parfaitemen
comprendre ((ue ces réédifications avaient pour principaler
cause la vétusté ou plutôt le style vieilli des bâtisses qu*ou
allait remplacer : « Kcclesia SancUi^ Marim Silvanectensis,
« inedià corrucns vetustate, innovatur a fundamentis, et
« usque udco insigne cœperuut opus, quod sine charitatc
a iidelium Christi et clccmosyuis nunquam poterit cou-
i( summari : etenim tcnuissima; estsubstantisnetangustis
a arctata fiuibus, et ob hoc nccessc habet ad vestra confu-
a gère subsidia : unde mandamus vobis omnibus, atque
a prccamur , ut pro honore Dei et B. Virginis, cujus est
« occlesia, portitores prœsentium cum sanctuaris et reli-
0 quiis ountcs et iideliter laborantcs, honoriPice suscipiatis,
o et in ecclesiis parochiaiibus rccipi cum litteris nostris
a sigillatis, et a presbyteris honorari pnecipiatis. » Ainsi
s*exprimait le roi de France en 1155, lorsqu'il recomman-
dait à ses sujets les quêteurs envoyés par l'évéqueThibaud.
Vingt-deux ans plus tard, voyant grandir sous leurs yeux
la cathédrale que Ton avait voulu mettre au goût perfec-
tionné de TépoquCf et jetant un regard sur leur collégiale,
los chanoines ch; Snint-Fraïuhourg, ù leur tour, s'aper-
roivent ijue celle-ci est de structure surannée, ressemble à
une masure à côté du l»ol édifice ogival qui s*élève, et,
comme maints architectes de notre temps, ils accusent ces
murs condamnés do branler «le vieillesse. Ils s'adressent,
eux aussi, à Louis Vif, (jui venait assez souvent au palais
royal de Sentis, et n*osant sans doute lui ilemander
une lettre circulaire et des quêtes à travers les diocèses,
ce qui, pour un simple chapitre, n*eùt pas été sans dif-
fienlté, ils obtiennent de lui une exposition solennelle
de leurs reliques, une grande ostension. Le document
XUy*" SESSION, A SENUS. 253
latin qai rapporte ces faits mérite d'être cité, du moins en
majeure partie, car il fait mieux voir que certaines théories
sans base inaugurées dans notre siècle ce qu'était la construo
lioQ d'une église au commencement de la période ogivale :
• In nomine sanctae et individuse Trinitatis, amen. Ego
Eitroinus Dei voluntate decanus, Hilduinus thesaura-
rius, Odo cantor; et totus pariter clerus S. Frambaldi
Silvanectensis. Quoniam expedit ecclesiasticis maxime
penonis diligere decorem domus Dei, nos videntes
ecclesiam nostram vetustatis quodam senio acclinantem,
et structurae veteris ignobilitatem despicabilem , in
Dumini confidentes subsidio , renovandi causa et
aropliandi, ausum sumpsimus de thesauro SS. Reli-
quiarum, tantum a domino Rege perceptà licentiâ
revelandi eas. Dominus quidem noster et ccclesis
patronus superlaudavit propositum et coustituit
diem idus maii, quo, posthabitis aliis uegotiis, desti-
navit venire; ... sed et tanti seininarii ostensionem
generaliter cuicumque praecepit intérim denuntiari...
Anno itaque dominiez incarnat. MGLXXVII , die
préfixa, cum domino Rege aifuerunt episcopi, dom-
nus Henricus episcopus Silvanectensis, domnus Simon
Meldensis, et cum bis et magnatibus viris et populo
copioso, dominus Rex reliquias extra civitatem dévote
et cum magnà reverentià deportans, usque ad locum
eminentem secutus est : uhi, divina proviJentià ordi-
nante, sermouem fccit domnus Petrus presbytcr cardi-
malis titulo S. Chrysogoni et scdis apostolicT legalus,
qui auctoritate beatorun apostolorum Pétri et Pauli
et S. R. E. atque episcoporuni qui adrraiit, con^re-
gato populo et omnibus iunovatiunem occlesi.r juvan-
tibus induisit vota transgressa, peccata oblita, et
poenitentiarum partem septimam. Scd et postca archie-
254 CONGRÈS àrghéolooique de frange.
a piscopus RemensisWillelmus, scdis apostolicao legatus,
« nobiscum indulgentius agens, quintam partem pœni-
a tentiarum dimisit. o {restimomum autheniieum^ dans
D. Bouquet : Collection des historiens des Gaules, t. XIV»
p. 484. )
Après (OUI, le diocèse de Senlis fut bien loin de demeu-
rer en arrière dès le moment où commença à poindre le
style ogival. Comme je Tai dit ailleurs, la « transition
active » s'est opérée dans la région comprise entre
Paris, Senlis, Pontoise, Poissy et Étampes lA travers
les monuments histoînques, l'* partie, p. li). Dès que fut
bâtie Téglise de Saint-Denis, on construisit Notre-Dame
de Senlis, dont l'architecture est plutôt en avance qu'en
retard sur son époque. Aussitôt s'élèvent dans les cam-
pagnes une foule d'églises, vraiment sœurs de celles de la
banlieue parisienne. J'ai vu un certain nombre de ces
monuments, mais trop rapidement peut-être pour pou-
voir déterminer ce qui les distingue de leurs voisines
contemporaines. Il ne faudrait d'ailleurs pas s'étonner si
un diocèse dont la circulaire de Louis VII constate les
étroites limites et où Ton comptait à peine, au xvu* siècle,
soixante-douze paroisses, n*a pas pu devenir le siège d'une
école particulière. 11 m'a paru participer à la fois de l'école
française et de l'école picarde. A la première il emprunte
la sobriété des détails, à la seconde l'ordonnance de ses clo-
chers, dont chaque face présente, au dernier étage du
moins, deux fenêtres géminées, tandis que les environs de
la capitale préfèrent deux baies simples. Encore la dispo-
sition picarde, générale dans le Beauvaisis, le Soissonnais,
le Noyonuais et le Laonnois, n'exclut-elle pas aux alentours
de Senlis et à Senlis même la disposition parisienne; c*est
donc surtout à Técole française (ju'oa pourrait rattacher
plus grande partie du Valois. Quelques portes m'ont offert
XUY* SESSION, A SENUS. 255
uo Ganetèie qui m'a paru propre au diocèse de Senlis.
Les portes latérales de la façade, à Notre-Dame, ont leurs
ogives très-surhaussées et par suite un tympan fort haut.
J*en ai vu de semblables notamment, à Fosses et à Fon-
teDay-lès-Louvres, aux environs de Luzarcbes. A Fontenay,
le tympan intéresse par une décoration originale rap-
peliDt de la manière la plus frappante les tympans percés
d'aititures des petites portes de Notre-Dame de Senlis.
Noas venons de dire que l'arrondissement de Senlis
possède un grand nombre d'églises appartenant, soit à
Tépoque de transition, soit à celle du style ogival rudi-
oentaire. Elles y forment la majorité, mais peu sont
exemptes de remaniements. Avant de les passer en revue
pir ordre d'importance, dégageons de ces édifices ce qui est
eooore purement roman : les clochers. Dans les pays d'Oise
comme dans tout le reste des environs de Paris, comme
eo Champagne, en Bourgogne, en Angoumois et en bien
d'autres contrées de la France, on voit s'élever sur des
ogives et des nervures des tours dont toutes les arcades
sooten plein cintre. Ains^ en est-il à Rully, à Saint-Ëvre.
mont de Greil, à Ghamant, Acy-en-Multien , Foulangues,
Saint-Leu-d'Esserent, etc. La tour île Rully mérite une
mention à part, car elle s'écarte du type des clochers pari-
siens ou picards pour se rapprocher de celui des clochers
normands : les ouvertures y sont au nombre de trois sur
chaque face, et chaque groupe est flanqué de deux arcades
couvrant les angles; par une autre singularité, ces arcades
aveugles offrent des impostes ornées qui courent a l'in-
trados d'une colonnelte à l'autre et forment tympans,
lieux autres clochers, ceux de Saiut-Gervais de Poutpoint
et de Nogent-les-Vierges, s'écartent aussi du type de l'Oise
par les triples ouvertures de leurs étages supérieurs, mais
sans se rapprocher d'un système étranger à la région.
360 CONCUŒS ARGHÉOLOGigUE DE FRANXE.
Deux clucherB sont octogonaux : ceux d'Acy (à l'étage
supérieur fieulcmcnt) et de Foulangues; les fenêtres y sonC
à une seule baie sur chacun des huit pans. Ce type de tour
octogonale est une exception dans le département do l'Oise^
mais non une rareté : nous Tavons retrouvé, liors de
l'urrondisseuient de Senlis, dans la charmante tour de
Cumbronne-lôs-Clormont, à Tracy-le-Val,dun8 le canton de
Ribécourt,àl3ouconvillersetàLierville,prè$deChaumont-
en-Vexin. Tous les clochers de Tarrondissement de Senlis
dont il vient d*étre parlé n'ont absolument rien d'ogival.
A Saintinos, près Verberic, nous avons observé une
tour ctuitrale dont les arcades géminées ont leurs cintres
d'oncadrtunont on ogive et les baies secondaires en plein
cintrt\ Lo cas nVst pas commun : deux ogives dans un
ploin cintrt) ou doux pleins cintres dans une ogive se
n>trttuvoraicnt uvtv assex do (Hîine dans la région picarde,
où los doux loruios d*urc ne s'unissent presque jamais
dans lo uu^mo niombro d*an*hitocture.
Nous voudrions aussi dégager de Tépoque ogivale cer-
taine égli^os où, malgré logive et même la nervure, on
t^nlvo dans los uiou!urt^« dans U's colonnes ou dans
quolquos dispositions gouôrales, dos formes qui rappellent
|Mr l^»p onam^ soii lo \r suVlo, Si»il les premiers rudi-
uu nts do la irausuioii. Ko oluour do I ogiise de Morieuval
monto v^ ivl oj;aiNi d oirx^ cito tout lo promier : la nervure
ot lojiixo axaioat oîo lorl |vu pratiquées lorsqu'il fut
«vusiiuii. ot |H*uî-<':r\\ ou pluio; s<*lon toute prt>babilitê,
i\\<t ii^ quo los habi'..iu:sda Nalois vitvnU |vur b première
toi> ^Vs< »;ormos ùw^iuU à\în u.^u\ol ^ri do kvàtir. Évidem*
uii-n; î'c^rvhu.vii* xlo ^viu^ a:vv..îo ko xvnuAtssaiit ivis trop
b;ou luîuu^:i^' %t> i*i\\'> *;o >;:.:. :ur\-, c^, opérant sur
uu i;\S jvîi; «*>jv.i*\ «. iv*r *va>i\;;.ïUi; a\*v |ieu de dan-
ois, ù iîvu\4 oiuvAv i.* iu*>\o:\ iv* M' m«aitcx^r timide et
XLIY' SB8SI0N, A SENLIS. 257
mabdioit. Le bas-côté tournant, qui comprend quatre
tnvées et présente par conséquent un pilier sur l'axe, est
Idiemeot étroit que deux personnes auraient quelque
peine à le parcourir de front; les nervures n'y sont qu'un
énorme boudin portant gauchement sur les chapiteaux
peu préparés à cette surcharge; on sent à peine des ogives
iva les arcs qui ouvrent sur le sanctuaire; enfin, la
^te supérieure et tout l'étage qui la supportait ont dû
être lefaits au xm* et au xv* siècles , par suite de vices
Qotables de construction. Tel a été, du reste, le sort de
tontes les églises de transition accompagnées d'un déam-
iKilatoire, si Ton excepte Saint-Martin-des-Ghamps , à
Paris. Toutes ont, peu après leur achèvement, vu renou-
veler les voûtes et les fenêtres de l'abside centrale : Saint-
Louis de Poissy, Saint-Maclou de Pontoise, Saint-Denis,
^t-Étienne de Sens, etc. Après Morienval, nous avons à
nous souvenir de la collégiale Saint-Évremond de Creil,
déjà beaucoup plus avancée, malgré une certaine ressem-
blance de style avec la nef de Saint-Étienne de Bauvais ;
de la nef de l'église d'Acy, où les nervures à profil roman
retombent sur des colonnes également romanes; de l'église
de Béthisy-Saint-Pierre, qui a pris la nervure en repous-
sant l'ogive ; du porche de l'église de Saint-Leu-d'£sse-
rent avec son clocher.
Enfin nous devons classer comme romanes, malgré les
ogives, les églises qui présentent de petites fenêtres laté-
rales chevauchant sur les piliers, comme on en voit à
Plailly, à Pontpoint et à l'église ruinée de Ghamplieu.
Notre-Dame de Senlis vient au premier rang parmi les
Àlifices qui appartiennent franchement au règne de l'ar-
chitecture gothique. C'est une <les moins remarquées de
nos cathédrales du nord, et pour deux causes : d'abord
|iaroc qu'elle a été observée fort superiicicllcment, ensuite
XLIV* SESSION. 17
958 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
parce qu'elle est sans mérite aux yeux de nos contempo-
rains, trop portés à dédaigner un édifice qui n*a pas un
caratère d'unité suffisant. La cathédrale de Heaux par-
tage cet oubli relatif, et pour les mêmes causes; et pour-
tant il n'est pas beaucoup d'édifices où l'histoire de l'art
puisse être étudiée avec plus de fruit que dans ces deux
basiliques. Notre-Dame de Senlis a déjà subi les résultats
de cette indifiérence; elle a été pitoyablement restaurée en
quelques-unes de ses parties les plus importantes, sous le
gouvernement de Juillet. Telle qu'elle nous reste néan-
moins, elle est très-précieuse et mériterait une monogra-
phie que de longtemps encore, nous le craignons, on ne
croira devoir lui accorder.
Commencée en ii55 ou 4456, après le retour des quê-
teurs recommandés par la lettre de Louis VII plus haut
reproduite, elle fut terminée en 4483, sauf les flèches, et
consacrée seulement en 4194. Elle se ressentit toujours du
peu d'étendue du diocèse; les ressources furent asseï res-
treintes, malgré les largesses du roi. On s'était attendu à
ce modeste résultat et il n'y eut point de surprise; les
plans avaient été dispost^s selon toute prudence : sans
dimensions exagérées dans l'ensemble, sans luxe dans les
détails. Aussi Notre-Dame de Senlis fut-elle la première
terminée de toutes les cathédrales gothiques. Au jour de sa
dédicace elle comprenait : une façade d'assez pauvre
ordonnance, sans rose, sans galerie, avec statues au por-
tail seulement et deux clochers couronnés de toitures pro-
visoires; quatorze travées de nef et de chœur, dont dix
formaient cinq compartiments de voûtes sexpartites, et
dont la quatrième était percée au sud d'une porte latérale
à colonnettes; un rond-point avec cinq chapelles formant
à peine le demi-cercle. Les travées, malgré leur nombre de
quatorze pour la partie droite, dominaient une longueur
XLTV* SBSSION, A SENLIS. 359
ma médiocre, car elles avaient une portée moyenne de
quatre à cinq mètres seulement. Sur les bas -côtés
régnaient des tribunes, car on n'était pas encore disposé à
8icri6er cet étage durant le règne de Louis VII; mais, par
économie, on avait supprimé les doubles baies donnant
w la nef centrale : ce sont des ouvertures simples; seules
oelhe de la travée précédant l'abside sont partagées par
une eolonne. Les fenêtres des bas-côtés étaient petites et en
plein dntre, celles des tribunes plus petites encore, et
sans moolnres ni ornements. La grande voûte était fort
ba«e et aurait pu, à la rigueur, se passer d'arcs-boutants.
Point de clocher de pierre à l'entrée du chœur, ce qui eût
été contraire, du reste, à l'usage de Técole parisienne :
celle-ci, lorsqu'il y avait deux tours sur la façade, n'en
tûléra presque jamais une troisième au centre de l'église,
pendant les nr, xiii* et xrv* siècles; on y suppléait par
des pyramides en plomb. Enfin on renonça au transsept,
et c'était le sacrifice le plus pénible, le sacrifice sur lequel
im chercha à revenir le plus tôt possible. La cathédrale de
Senlis possède actuellement ses deux bras de croix; on a
cru longtemps que cet état nouveau de l'église ne remon-
tait pas au delà du xvi* siècle; au moindre examen de
l'édifice, il devient évidrat que les croisillons furent com-
mencés quarante ou cinquante ans au plus après l'achè-
vement des travaux de construction. Visitant Notre-Dame
de Senlis en 1875, nous fûmes vivement préoccupé de la
piésenoe de chapiteaux et de colonnes du xni* siècle dans
les tribunes du transsept. Comme nous ne découvrions pas
ailleurs, dans la nef transversale, les caractères du xiii' siècle,
nous avions conclu, mais sans grande conviction, que ces
colonnes provenaient de la partie de la nef qu'il avait fallu
défoncer pour bâtir les croisillons, partie remaniée elle-
mémey pensions-nous, vers le règne de Louis VIII ou de
260 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE BE FRANGE.
Louis IX. Mais un examen que nous avons renoayeléavec
M. fiouet, dont le talent analytique est bien connu de
tous les archéologues, nous conduisit Tun et l'autre, le
jour de la clôture du Congrès de 4877, à une conclusion
bien différente, qui se trouva répondre exactement à des
remarques faites par M. Palustre quelques jours aupara-
vant. Nous ne fûmes pas longtemps à nous apercevoir
que, par suite de la disposition des travées, peu propre à
l'addition d'un transsept, dont les quatre principaux
piliers doivent former un rectangle à peu près équibtéral,
on fut amené, au commencement du xm* siècle, à suppri-
mer de chaque côté, au milieu de l'église, trois piliers et
à avancer ceux de la première travée du chœur de
manière à élargir cette travée et à trouver un carré pour
la travée précédente, devenue la croisée. Les piles orien-
tales de cette croisée sont bien évidemment postérieures
aux constructions du xii* siècle, de même que les arcs
longitudinaux et ceux des tribunes dans la première tra-
vée du chœur, arcs qui retombent sur des colonnes fort
différentes de style : presque romanes encore contre les
piliers séparant la première travée du chœur de la
seconde, franchement gothiques contre les piliers de la
croisée, bien que les tailloirs soient encore carrés. L'addi-
tion d'un transsept à Notre-Dame de Senlis au prix de si
coûteux remaniements montre deux choses : d'abord que
rien n'avait été fait en vue de la construction future ou
possible d'une nef transversale lors de la pose des fonde-
ments de la basilique, car les travées avaient toutes une
portée si restreinte que deux ne suffisaient pas à donner
en plan un carré parfait, ce qui, pourtant, est le cas ordi-
naire avec des voûtes sexpartites; ensuite qu'il se pré-
senta, aussitôt l'église achevée, des ressources abondantes
et inattendues, grâce à des circonstances qu'il serait inté-
XUY* SESSION, A SENLIS. 26i
nssant de connaître. Peut-être trouverait-on là la main
de laint Louis. Ces ressources permirent en outre de con-
tinuer jusqu'au sommet l'un des clochers de la façade,
que nous croyons postérieur au transsept. On pourrait se
demander, en voyant le peu de traces qu'il reste du
un* siècle dans les croisillons, si ceux-ci ont été réellement
terminés à cette époque, et si, à un moment donné, ils
n'auraient pas été abandonnés pour le grand clocher.
Vous ne pourrions le croire. On ne va pas remanier un
cdifiœ de fond en comble, et sans nécessité matérielle,
pour laisser tout aussitôt une ruine. L'inachèvement du
tnnsfiept eût d'ailleurs compromis la solidité du chœur et
de la nef; si nous ne voyons guère aujourd'hui dans les
croisillons que le ciseau du xvi* siècle, c'est probablement
qu'ils eurent surtout à souffrir des dégâts causés dans la
Wilique par l'incendie des combles et la chute partielle
des voûtes, en 1502.
Le grand clocher de Senlis est au point de vue artis-
tique, le morceau capital de la cathédrale; c'est aussi une
des œuvres les plus originales du règne de saint Louis.
Le clocher de Senlis est bien ime conception à part, pure,
croyoDs-nouSy d'influences extérieures, bien qu'on en ait
vooiu faire la dernière expression d'un type né à Bran-
t^, près de Périgueux, en pleine période romane, per-
ectioané dans le Limousin, sur les bords de la Loire, à
Vendôme, puis à Chartres, d'où il se serait transporté,
derenu gothique, sur les bords de la Nonctte. La flèche de
Votie-Dame de Senlis, ni dans son ensemble, ni dans ses
détails, ne rappelle aucune autre construction ; la sil-
hfiuette en est unique; au point de vue esthétique elle est
peut-être défectueuse, car la hauteur dos lucarnes, prise
tiitalcment aux dépens de la flèche, rend celle-ci trop
courte pour l'œil ; néanmoins il y a tant de mouvement
S62 CONGRÈS ARGHÉOLOGIQUB DE F&ANGE.
dans cette silhouette qu'elle ne nous a jamais paru tfop
choquante. Si Ton veut jouir du clocher de Senlis dam
tout ce que don aspect présente de pittoresque, ce n*6i^
point à son pied qu'il faut se placer ou dans les rues voi
sines; on doit, à l'époque de l'année où la verdure est l
plus luxuriante, demander à pénétrer dans le jardin di
château, et de là isoler la tour du reste de l'église et l
regarder seule à travers le feuillage des arbres. Le spec
tacle est alors merveilleux. L'art ogival n'est, en quelqu
sorte, que la moitié de lui-môme lorsqu'il embellit ne
villes; il est issu d'un sentiment exquis de la nature, i
c'est uniquement au milieu d'une belle nature qu'
semble vivre de sa pleine vie.' Aussi est-ce par la natui
que le goût de ce style nous est revenu ; c'est dans 1(
ruines perdues dans les solitudes que nous avons appris
Taimer, ce sont les écrivains les plus épris des beautés (
la création qui, les premiers, se sont mis à le chanter.
Le clocher de Senlis, d'une hauteur totale de soixant
dix-huit mètres, comprend, au-dessus de l'étage carré i
beffroi , un tambour octogonal très-élancé, flanqué <
clochetons à jour dont les pyramides s'inclinent sur 1
côtés obliques, et une flèche portant huit grandes lucarne
Le tambour est éclairé, sur chacune des quatre fac
libres, par une longue fenêtre à colonnettes; sur les côt
obliques, les fenêtres sont beaucoup moins hautes
donnent sur les clochetons. Les lucarnes sont égaleme
percées de longues fenêtres; la crête de la toiture, q
recouvre chacune d'elles, s'abaisse rapidement vers
grande flèche alla d'envahir le moins possible sur la ha
teur de celle-ci, qui, sans cela, eût paru n'être qu'un ri(
culc pyraniidion. 11 y a dans tout cela une recherche
TefTot dont les artistes de la fin du xiii" siècle comme
<;aient déjà à n'être plus capables. Eu outre, malgré
XLIY* SESSION, A SEMUS. 263
ricbesse des ornements géométriques semés aux pignons
<les lucarnes, et les percements à jour pratiqués dans la
flèche, il ne nous est pas possible de porter la date du
clocher à une période postérieure à 1^40, car on y trouve
, des corniches en denticules qui cessèrent tout à fait d'être
pratiquées après cette époque.
La flèche de Senlis est probablement la tête de toute une
famille de clochers qui s'est répandue sur la plus grande
partie du diocèse de Soissons. Tandis que, dans Tlle-de-
France et le Beauvaisis, presque toutes les anciennes
flèches remontent au xii* siècle ou reproduisent d'assez
prés cette période, dans le Valois et le Soissonnais, les
pyramides ne datent généralement que des xiii% xiv*, xv"
et XTi* siècles; M. Woillez en cite même une, des plus
belles, de i600, à Montagny-Sainte-Félicité. J'ai vu cette
<ieraière, j'en ai observé quelques autres, et il m'a paru
souvent diJCGicile d'en marquer l'époque exacte, si peu
elleit modiCent le type primitif, qui, en abrégeant celui •
de la cathédrale, trop compliqué, le rappelle suffisamment
et ne peut avoir d'autre point de départ que lui.
il est donc resté au diocèse, si l'on veut à l'arrondisse-
ment de Senlis, uue particularité as^ez importante durant
toute l'ère ogivale. C'est peut-être là que les architectes
ont Dimmencé â percer leurs flèches de jours et à eu acci-
denter les arêtes par des crochets. Si ces perfectionue-
ments appartiennent aux constructeurs du Valois, ceux-ci
n'en ont du moins pas abusé, et ils u'out jamais appa-
reillé leurs pyramides comme des claires- voies de fenêtres,
ainsi que l'ont fait les Normauds et surtout les Alle-
mands.
Le clocher de Senlis eut à soulfrir, eu 1502, d'un œup
de foudre qui détermiuu eu même temps i'iucendie de
tuut le grand œmbie et la destruction partielle de la mai-
2M CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
tresse voûte. Les réparations commencées presque aussitôt
ne paraissent avoir rien changé au caractère de ce clocher ;
mais elles amenèrent le remaniement total des murs
latéraux de l'église, la reconstruction du transsept et des
grandes voûtes. La cathédrale de Senlis se trouve ainsi
habillée à la flamboyante; mais nous devons à ce renou-
vellement deux splendides façades latérales qui peuvent
compter parmi ce que le règne de François I*' a produit
de plus remarquable. Ce prince contribua largement à la
dépense, de même que pour les cathédrales de Beauvais et
de Sens, et il est à observer que, malgré cette interven-
tion du principal promoteur de la Renaissance, tout est
purement gothique dans les parties des trois cathédrales
sus-nommées appartenant au xvi* siècle. Il faut aussi
rendre au constructeur des croisillons de Notre-Dame de
Senlis ce bon témoignage qu'il respecta les dispositions
anciennes et laissa circuler des tribunes au premier étage;
ces tribunes sont à coup sûr les seules qui existent d*une
date postérieure au xiv« siècle. Elles communiquent, d'un
côté à l'autre de chaque croisillon, par deux passages
ménagés au-dessus des portails latéraux, l'un à l'extérieur,
l'autre à l'intérieur.
Dans notre siècle, la cathédrale de Senlis a subi aussi
quelques changements. Les statues de la porte principale
ont changé de caractère par suite d'une restauration faite
en dépit des principes iconographiques; on ne peut plus
se reconnaître aujourd'hui au milieu de cette incohérence;
il faudrait une longue étude pour reconstituer l'état pri-
mitif et l'expliquer; nous savons que M. Palustre vient
de reutreprendrc sur des bases solides et en donnera très-
prochainement le résultat. A l'extrémité opposée de
l'église, au chevet, une chapelle absidale a été défoncée
pour faire place à une autre chapelle plus grande, qu'on
XLIT* SESSION, A SENUS. 265
pourrait croire întérieuremeDt du xiii* siècle, mais qui,
extérieurement, trahit son origine moderne par les
grandes dimensions de l'appareil.
Les quatre chapelles primitives qui restent ne sont pas
la partie la moins intéressante de la cathédrale de Senlis.
Très-peu profondes, elles présentent, au midi, trois divi-
sions, au nord deux seulement; cette différence semble
leoir à la position des chapelles par rapport aux remparts
romaiDS, qui touchaient à l'abside de la cathédrale et
avec lesquels diverses communications ont été établies.
U y aurait encore beaucoup à dire sur la cathédrale de
^nlis; ne prétendant pas écrire une monographie, nous
devons nous arrêter et consacrer quelques mots à deux
édifices qui méritent à côté de Notre-Dame une place
booorable. L'un est tout voisin de la basilique dont il est
loin d'égaler les dimensions et l'intérêt archéologique, mais
qu'il surpasse en unité et dont l'aspect est relativement
plus majestueux. C'est cette même église Saint-Frambourg
dont nous avons relaté plus haut la réédification. Les res-
sources procurées par l'ostension des reliques et par les
indulgences furent assez abondantes pour permettre d'éle-
ver d'un seul jet ce beau vaisseau sans bas-cêté ni trans-
sept, qui rappelle, avec moins d'élégance, mais avec plus
de grandeur, les saintes chapelles des xiii* et xrv* siècles.
La façade était percée d'une porte assez étroite, selon le
type qui semble particulier aux environs de Senlis, sur-
montée d'une rose immense qui a dû être murée peu
après sa construction. Quatre compartiments de voûtes
sexpartites forment à l'intérieur huit belles travées, que
suivent une neuvième travée et l'abside. Les corniches
«c»nt formées de feuilles entabli^s, qu'on ne voit pas appa-
raître avant ii80, et qui furent rares jusqu'au xiii* siècle.
Les fenêtres, sans meneaux, sont larges et bien propor-
S66 CONGRÈS A&GHÉOLOOIQUE DE FRANGE.
tionnées. Les contre-forts s'amortissent par un long glacis.
Saint-Frambourg est un type qui mérite d'être chaude-
ment recommandé pour les constructions nouvelles; ce
modèle, heureusement, nous restera longtemps encore,
grâce à la protection de l'État et aux excellentes disposi-
tions de son propriétaire, M. Puissant, qui veille intelli-
gemment à sa conservation.
L'autre monument est l'église de Saint-Leu-d'Esserent,
déjà visitée par plusieurs membres du Congrès de 1866,
et qui a été encore l'objet d'un pèlerinage pour le Congrès
de 1877. Il y a là, comme à Notre-Dame de Senlis, trois
nefs et rond-point à chapelles absidales, mais point de
croisillons. Le porche parait remonter, avec la tour qui
le flanque, adroite, à 1150 environ; mais le reste doit
être postérieur d'un demi-siècle. On ne voit plus de tri-
bunes qu'au-dessus du rond-point; à la nef c'est un trifo-
rium à larges arcades et plus profond que ne le sont géné-
ralement ceux du xiir siècle. Les chapelles, peu profondes
et à deux divisions, ressemblent à celles qui flanquent à
gauche l'abside de la cathédrale de Senlis : ce type de
chapelles, inauguré à Saint-Maciou dePontoiseou à Saint-
Denis, prévalut jusqu'à la fin du xii*" siècle dans les pre-
miers ronds-points gothiques. La chapelle de l'axe, àSaint-
Leu, avait un premier étage donnant sur les tribunes de
l'abside; les fenêtres de ce premier étage chevauchent sur
celles de l'élage inférieur, car il y a ici trois divisions
au lieu de deux. L'église de Saint*Leu-d'Esserent devait
avoir quatre clochers ; ceux qui ont été construits s'élèvent,
l'un à côté du porche, à droite^ avec sa flèche en pierre,
les deux autres entre le chœur et l'abside, avec leurs toits
à double égout. La flèche de la façade, de la fin du
xu" siècle sans doute, montre dans les colonnettes à jour
dont ses arrêtes sont flanquées jusqu'à mi-hauteur, une
XUT* SESSION, A SENUS. 267
iM premières tentatives faites pour ménager une transi-
lioa entre le plein des pyramides et le vide de l'espace.
Si It Révolution n'avait pas amené tant de destructions
aux environs de Senlis, nous trouverions encore dans
Saint-Thomas de Crépy un type important du style ogival
rudimentaire, plus avancé que les trois premiers. Il n'en
reste que la façade, de style ogival primitif, et une belle
U>ur avec sa flèche ajourée. L'église abbatiale de Chaâlis
trouverait aussi sa place à côté de Saint-Thomas; cette
église était surtout curieuse par ses croisillons formant
<ki absides à cinq pans.
Nous devons au moins mentionner quelques parties
importantes des églises de Creil, de Mello, de Saint- Yaast-
Us-Mello, de Ghamant, de Séry, de Roberval, de Néry, etc.
Betuooup de clochers remontent à la fin du xii* siècle;
quelques flèches sont de la même époque, notamment
eeiles de Saint- Vaast-de-Longmont et de Béthisy-Saint-
HarUn.
Dès le milieu du xiii* siècle, après la construction du
clocher de Senlis, il ne se produisit plus guère d'œuvres
originales dans l'arrondissement de Senlis; mais nous
citerons :
Pour le xui* siècle, les églises de Montataire, de Cires-
lès-Meilo, de Montépilloy; la chapelle dite de l'abbé, à
Ghaàlis.
Pour les XY* et xvi* siècles, Saint-Pierre de Senlis et
les mines de l'abbaye de la Victoire, avec fragments du
lui* siècle; les églises de Fresnoy-la-Rivière, de Lieu-
Restauré, du Mesnil-Saint-Denis, de Boran, de Montagny-
Sainte-Félicité.
Nous ne connaissons aucune partie importante d'église
remontant bien authentiquement au xiv* siècle; mais
parmi les flèches élevées depuis le xiii' siècle jusqu'à la
368 CONGRÈS ARGHÉOLOGIQUS DE FRANGE.
fin du xyVj suivant le type inauguré à Senlis, rio^^
devons signaler celles de Plailly, de Boran, de CreiU
Chamant, de Béthisy-Saint-Martin, de Fresnoy-le-Lu^*'
de Saint-Pierre de Senlis, de Saint-Thomas de Cr^P^
d'Eve, de Montagny-Sainte-Félicité, de Néry et d'Acy-^^'
Multien, ces deux dernières, dépourvues de crochets bt^ ^
que percées à jour.
La Renaissance n'a guère produit aux environs de Sei^ ^
lis; le style ogival y avait pris de fortes racines et on i^
voit s'appliquer aux églises jusqu'à la fin du xvi* siècle ^
Les églises d'architecture gothique flamboyante n'y soU^
pas rares; mais peu sont en entier du xv* ou du
xvi° siècle; il y eut alors des restaurations plutôt que àes
constructions à nouveau. On peut cependant citer de ce
style une des tours de Saint-Pierre de Senlis; c'est par
elle que nous terminerons cette revue beaucoup trop som-
maire, nous le regrettons vivement, des monuments
religieux de Senlis et de ses environs.
2* SÉAiNCE DU 30 MAI.
PRÉSIDENCE DE M. ODENT, MAIRE DE SENUS.
Siègent au bureau MM. Vernois et Palustre.
La séance est ouverte à trois heures et demie.
Le procès-verbal de la dernière séance est lu et adopte.
La i>arole est ensuite donnée à M. de Laurièrc pour la
lecture d'un mémoire de M. Tabbé Van Drivai, d'Arras,
em^téché de se rendre au Congrès.
xinr* SESSION, a senus. S69
De la terminologie archéologique.
Si je doone à ces quelques notes un nom un peu sonore,
c'est qu'à vrai dire je n'en trouve point d'autre pour
exprimer d'une manière générale une pensée que je vais
bien vite spécialiser.
11 s'agit d'ailleurs d'une chose qui a une importance
réelle, à plusieurs points de vue. Si les mots sont nets,
clairs, bien définis; s'ils s'appliquent parfaitement à un
objet bien étudié et sur lequel on a des idées claires, alors
les mots servent merveilleusement à faire comprendre les
choses, ils portent la lumière et la satisfaction dans Tes-
pHt. S'il en est autrement, tout devient vague, nébuleux,
ce n'est plus de la science, car la science suppose connais-
sance, notion certaine, vue claire et distincte.
Il est donc très-important d'avoir, en archéologie
comme en toute autre matière, un vocabulaire technique
bien correct, sérieusement motivé, si l'on veut maintenir
A cette science fort digne et fort utile le rang auquel elle a
droit.
Or, en est-il ainsi de quelques-uns des termes souvent
employés aujourd'hui? c'est ce que je veux examiner ici
en toute liberté comme sans parti pris.
Les mots que j'ai en ce moment en vue, et dont je viens
positivement contester la justesse, sont les termes que
Toici : préhistorique, âge de pierre, âge de bronze, âge de
fer, avec diverses subdivisions.
Le mot préhistorique fait naturellement penser au mot
historique : de là à celui que l'on nomme le Père de l'his.
toirc, il n'y a qu'un pas. J*ai donc eu l'idée de voir si, par
hasard, Hérodote ne parlerait pas de ces objets dits an té-
270 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
rieurs à l'histoire, et j'ai relu tout mon Hérodote, afin de
ne laisser passer aucun document et de donner d'une
façon absolument authentique ceux que j'y trouverais, en
conservant d'ailleurs leur caractère propre et leur vrai
sens au milieu de ce qui les précède et de ce qui les suit.
Or, voici que, dès le premier de ces neuf livres aux-
quels les Grecs reconnaissants donnèrent les noms des
Muses, dès le livre de Clio, je trouve tout un enseigne-
ment qui n'est pas sans valeur. Hérodote parle des Massa-
gètes, et il s'exprime comme il suit :
« Les Massagètes... emploient à toutes sortes d'usages
a l'or et le cuivre. Ils se servent de cuivre pour les piques,
a les pointes des flèches et les vagares (haches à deux tran-
a chants), et réservent l'or pour orner les casques, les bau-
a driers et les larges ceintures qu'ils portent sous les ais-
a selles. Les plastrons dont est garni le poitrail de leurs
.a chevaux sont aussi de cuivre : quant aux brides, aux
a mors et aux bossettes, ils les embellissent avec de l'or,
a Le fer et l'argent ne sont point en usage parmi eux,
a et on n'en trouve point dans leur pays; mais l'or et le
a cuivre y sont abondants. »
(Hérodote, Clio ou livre !•', ccxv.)
Voilà donc un peuple qui, du premier coup, serait
arrivé à l'âge de cuivre, sans compter l'âge d'or (dont on
ne parle plus); en revanche il n'aurait jamais connu l'âge
de fer (ni l'âge d'argent). On aurait bien vraiment tort de
s'étonner de cette anomalie, si Hérodote, avec son bon sens
exquis, ne venait nous apprendre que s'ils ne se servaient
ni de fer ni d'argent, c'est qu'ils n'en avaient pas ! La rai-
son est péremptoire, et nous soupçonnons dès maintenant
que, à toute époque et un peu en tout pays, les
hommes, même les plus habiles, n'ont pu faire lisage que
de ce qu'ils avaient. Mais poursuivons.
ZLIT* SESSION, A SBNLI8. 27i
Au iifre d'Eaterpe (livre second), nous trouvons plu-
sieurs passages fort intéressants.
Pariant des mille usages des Égyptiens, il cite, entre
autres, le suivant :
m Ils (les Égyptiens) twivent dans des coupes d'airain,
« qu'ils ont soin de nettoyer tous les jours.»
Hérodote, Euterpe ou livre 11, xxxvii.
Et plus loin, en décrivant avec les plus grands détails
le mode qu'ils suivaient dans les embaumements, il donne
œ renseignement très-curieux :
« Ds font ensuite une incision dans le flanc avec une
« pierre d'Ethiopie tranchante; ils tirent par cette ouver-
• ture les intestins... »
(Hérodote, description de l'embaumement.
Euterpe ou livre 11, lxzxti.)
(^'est Hérodote qui dit ce qu'il a vu : Voici donc les
Égyptiens qui se trouvent être en même temps à l'âge
d'iirain et à l'âge de pierre, vers le vi* siècle avant
<ié8ii8-Christ. Si nous trouvons fort extraordinaire (dans
les idées actuelles) la simultanéité de ces deux âges, nous
pourrons nous consoler en constatant que ceci est parfai-
tement historique et pas du tout préhistorique.
Mais nous n'en sommes pas quittes avec le livre à'Eu-
terpe.
C'est là encore que nous trouvons le passage suivant :
Après avoir dit ce qu'il en coûta pour les oignons et aulx
donnés aux ouvriers qui travaillèrent a la grande pyra-
mide, Hérodote ajoute : « Combien doit-il en avoir coûté
c pour les outils de fer, pour le reste de la nourri-
« ture, etc.? pour tailler les pierres, etc. etc.?»
(Hérodote, Euterpe ou livre H, cxxv.)
Voilà donc le fer employé, — et comment aurait-on pu
s'en passer? — employé, dis-je, à la grande pyramide, c'est-
972 CONGRÈS ARGHÉOLOGIQU£ DE FRANGE.
à-dire sous la quatrième dynastie, ce qui nous reporte
fort loin et est en outre parfaitement historique. La pyra-
mide est là, en effet, et c'est bien un monument histo-
rique au premier chef.
Dans ce même livre, eu et glu, Hérodote raconte que,
seul des douze rois, Psammétichus, n'ayant point de coupe
d'or, fit une libation avec son casque et fut exilé à cause
de cela, en vertu de la prédiction d'un oracle. Cependant,
en exécution d'une autre prédiction d'oracle, des hommes,
revêtus d'armes en airain (chose inconnue en Egypte), des
Ioniens et des Cariens, des hommes d'airain abordent en
Egypte : il réclame leur aide et avec eux il soumet toute
l'Egypte à la domination.
(Hérodote, Euterpe, gli et cui.)
Ainsi, nous sommes en présence d'hommes qui ont de
l'airain, ou plutôt des armes d'airain, et d'autres qui
n'emploient pas ce métal aux mêmes usages. Faut-il en
conclure qu'il y a là un âge d'airain et que là il n'y en a
pas? nullement. Les Ioniens et les Grecs, en général, se
servirent de ces sortes d'armes, comme nos ancêtres, les
Gaulois, et les autres avaient d'autres habitudes, voilà tout
ce que la logique peut tirer de ces faits. Elle cesserait
d'être la logique si elle voulait aller plus loin.
Dans Thalie^ ou livre IH®, Hérodote nous parle de
divers peuples, entre autres des Arabes, a II n'y a point, dit-
a il, de peuples plus religieux observateurs des serments.
0 Voici les cérémonies qu'ils observent d cet égard. Lors-
a qu'ils veulent engager leur foi, il faut qu*il y ait un tiers,
a un médiateur. Ce médiateur, debout entre les deux con-
a tractants, tient une pierre aiguë et tranchante, avec
a laquelle il leur fait à tous deux une incision à la paume
a de la main, près des grands doigts. Il prend ensuite un
(c petit morceau de l'habit de chacun, le trempe dans leur
XUY* SESSION, A SENLIS. 273
t ttDg, 6t ea frotte sept pierres qui sont à côté d'eux, en
i ÎDToqoant Baochus et Uranie. Cette cérémonie achevée,
« celui qui a engagé la foi donne à l'étranger, ou au
« citoyen si c'est avec un citoyen qu'il traite, ses amis
* pour garants, et ceux-ci pensent eux-mêmes qu'il est de
• l'équité de respecter la foi des serments. »
• (Hérodote, Thalie, viii.)
Que voir dans ce passage, sinon un rite religieux dans
kquel on se sert d'un couteau de pierre, à un âge parfai-
toueot historique et à une date connue puisqu'elle est
cootemporaine d'Hérodote?
Le même auteur, dans le même livre (Tkaliêy xii) raconte
œ qui suit : c J'ai vu sur le champ de bataille (entre les
Perses et les Égyptiens) une chose fort surprenante, que
les habitants de ce canton m'ont fait remarquer. Les osse-
ments de ceux qui périrent à cette journée sont encore
dispersés, mais séparément : de sorte que vous voyez
d'un côté ceux des Perses, et de l'autre ceux des Égyp-
tiens, aux mêmes endroits où ils étaient tombés dès
les commencements. Les têtes des Perses sont si tendres,
qu'on peut les percer en les frappant seulement avec
UD caillou ; celles des Égyptiens sont au contraire si
dures, qu*à peine peut-on les briser à coup de pierres.
Ils m'en dirent la raison , et n'eurent pas de peine à
me persuader. Les Égyptiens, me dirent- ils, com-
mencent dès leur bas-âge à se raser la tête ; leur chkne
se durcit par ce moyen au soleil, et ils ne deviennent
point chauves. On voit, en effet, beaucoup moins
ii*hommes chauves en Egypte que dans tous les autres
pays. Les Perses, au contraire, ont le crâne faible, parce
qae dès leur leur plus tendre jeunesse, ils vivent à
l'ombre, et qu'ils ont toujours la tête couverte d'une
tiare. J'ai vu de telles choses; et aussi j'ai remarqué
XUV* 1188105. 18
274 CONGRÈS ARGUÉOLOGIQUË DE FRANCE.
(c à Paprômis quelque chose de semblable à j'égard iB^
a ossements de ceux qui furent défaits avec Achéménè^'r
a fils de Darius, par Inaros, roi de Lybie. •
Cette citation n'a qu'un rapport indirect au sujet qu^
nous traitons, mais elle répond si bien à d'autres préoccu^
pations actuelles, que nous avons cru utile de l'insérer ici.
Au livre de Thalie nous trouvons encore les Éthiopiens
et leur or. Des chaînes d'or attachent les prisonniers et le
cuivre est pour ces peuples le plus précieux des métaux,
parce qu'il est rare chez eux [Thalie^ xxiii). Il se ren-
contre d'ailleurs des détails précieux sur des colonnes de
verre et sur des objets naturels et artificiels employés par
eux avec une industrie qui prouve que la civilisation n'est
pas née d'hier.
Au livre de Melpamène, lxxi , il est question du pays
des Scythes et des tombeaux des rois. Nous ne dirons pas
ici tout ce qu'ils renferment, mais nous citerons les
coupes d'or, en faisant remarquer, avec Hérodote, que ces
peuples ne connaissent ni l'argent ni le cuivre.
Je pourrais citer encore bien des passages où il est
question d'armes de diverses sortes, de cuirasses de lio, de
casques déjoue tissu, de bandes de fer, de grandes épées, etc.
On peut voir, entre autres endroits, Polymnie^ xxxix. Con-
tentons-nous de rappeler ici le dénombrement de l'armée
de Xerxès, au même livre. Au milieu de la description
d'armes de toutes sortes, comprenant toutes les formes
possibles et tous les métaux, description très-longue et fort
curieuse, nous trouvons ce ({ui a rapport aux Éthiopiens
et qui porte ce qui suit :
a Les Éthiopiens, vêtus de peaux de léopards et de lions,
a avaient des arcs de branches de palmier de quatre coudées
(( de long au moins, et de longues flèches de canne à l'extré-
0 mité desquelles était, au lieu de fer, une pierre pointue
XLïV SESSION, A SENLIS. ^275
a dont ils se servent aussi pour graver leurs cachets.
c Outre cela, ils portaient des javelots armés de cornes de
« chevreuil pointues et travaillées comme un fer de lance,
• des massues pleines de nœuds.
(Hérodote, Polymnie 'ou livre Vil, lxix, dans le
dénombrement de Tarmée de Xerxès.)
Si Ton veut bien lire dans l'original cette longue énu-
mération de peuples, de costumes, d'armures, on y trou-
vera, en même temps, du fer, des tiares, des tuniques,
des cuirasses, des javelots, des flèches de canne, des
mitres, de l'airain, des casques, des boucliers^ des poi-
gnards, des massues hérissées de nœuds de fer, du lin,
des bonnets foulés, des haches, du coton, des peaux, des
arcs, des flèches de pierre, des javelots durcis au feu, des
cornes d'airain, du bois, du cuir, et jusqu'à des lazzos ou
lacs. Il n'y a, en vérité, rien de nouveau sous le soleil.
On peut voir cette énumération extrêmement pittoresque
dans Polymnie, depuis le chapitre lvi^ jusqu'au chapitre g.
le défilé dure sept jours et sept nuits : il se fait à coup de
fouetl...
Nous trouverons, si Hérodote ne suffit pas, d'autres
témoignages dans Pausanias, dans Ammien-Marcellin,
daDs Tacite, dans Lucrèce. Nous saurons par eux que si
les Sarmates mettent des pointes d'os au bout de leurs
lances, c'est parce qu'ils n'ont pas de fer. Les Huns en
font tout autant, et pour les mêmes raisons d'autres
peuples agissent de même. Go n'est jamais un progrès
l)ien grand dans la civilisation qui causent les différences
d'usage, c'est l'abondance ou la rareté des matières pre-
mières.
Pline, de son côté, au milieu de bien d'autres détails,
nous donne la notion suivante sur les haches polies, fort
connues de son temps.
270 CONGRÈS ARGHÉOLOOIQUB DE FRANGE.
a Sotacus et alia duo gênera fecit cerauniae, nigpras ru«-^
t bentisque, ac similes eas esse securibus : ex his, qus^
c nigrsB sint et rotundse, sacras esse, urbes per illa^
c ezpugnari et classes, easque betulos vocari : qus vero
a loDgœ suât, ceraunias.Taciunt et aliam raram admo-
a dum, et magorum studiis expetitam, quoniam non
« aliubi inveniatur, quam in loco fulmine icto. d
(Plinii, Naturalis historix, lib. XXXVII, u.)
Au reste, nous retrouvons les armes de pierre jusques
dans les temps modernes.
Écoutous plutôt ce détail de la bataille d'Hastings :
t Pedites itaque Normannorum propius accedeotes pro-
« vocant Anglos, missilibus in eos vulnera dirigunt
« atque necem. Uli contra fortiter quo quisque valet
« ingenio resistunt. Jactantcuspides ac diversorum gene-
t rum tela, sœvissimasquasque secures, et lignis imposita
% Saxa... 0 p. 201 , Gesta Guilielmi Ducis Normannofiim et
Régie Ànglorum, commencement de la bataille d'Hastings,
récit de Guillaume de Poitiers, historien contemporain.
Dans HiitorisB Nomannorum Scriptores antigui, par André
Duchesne, Paris, 4019, in-iblio. Seule édition de tjuiU
laume de Poitiers, d'après VHistoire littéraire de la
France, tome \\\\*.
Ou voudra bien remarquer que je n'ai point cité la
Bible, qui cependant foisonne de renseignements à ce
sujet. Facilement j'aurais pu commenter le texte de la
Genèse où il est parlé d'ouvriers très-habiles en tous'
métaux, dès la quatrième génération à partir d'Adam.
J'aurais pu montriT l'usage de la pierre à usage de cou-
teau longtemps après l'ustige des métaux travaillés de la
manière la plus artistique^ piir exemple les couteaux de
pierre de Josué et les merveilles de l'arche d'alliance et du
tabernacle, où l'on constate le travail au repoussé, le tra-
XUY* SBSS10N, A SENLIS. 277
ml cisdé et cent autres choses artistiques. Ceci se trouvera
ea détail dans un ouvrage que j'ai en ce moment en pré-
paration et qui aura pour titre : LKrt dam la Bible.
Dès maintenant je ne poserai qu'une conclusion et je
pense qu'on ne la trouvera pas exagérée.
Il est bon, il est utile de chercher partout les traces et
les monuments de l'industrie de l'hoiume; mais en même
temps il est sage, il est scientifique de ne pas généraliser
trop vite, de ne pas appeler, par exemple, préhistorique
ce qui est parfaitement connu dans l'histoire, et de ne
pas créer des catégories successives ou âges , là où il
y a simplement des faits accidentels , causés par des cir-
constances locales, 6t souvent ayant une existence simul-
tanée.
Après quelques observations échangées entre divers
membres du Congrès, M. l'abbé Vattier a la parole sur
la 45* question du programme, ainsi conçue :
Faire connaître rhistoire des compagnies
d'archers et d'arquebusiers; donner les
somoms des diverses compagnies et en
eiq>liquer l'origine.
Les archers, arbalétriers et arcpxebusiers,
à Senlis.
L'histoire de nos compagnies actuelles d'archers et d'ar-
iMlétriers ne serait que d'un intérêt assez modéré, car ce
5<jQt simplement des réunions dont le but est une distrac-
tion honnête, en même temps qu'un exercice d'a<lresse.
C'est là leur histoire depuis la révolution et même long-
278 CONGRÈS ABCHÉOLOGIQUE DE FRANCS.
tempe avant. L'arc, en effet, et Tarbalète sont derenas des
armes d'amusement depuis qu'ils ont perdu leur valeur
au point de vue militaire. Mais quand même la poudre
ne serait pas venue détrôner le carrelet et le vireton, ces
compagnies armées eussent perdu leur raison d'être dans
l'état actuel de l'Europe. Depuis la création des armées
permanentes, depuis que tout homme valide doit à sou
pays la dette du sang, ces milices locales n'ont plus de
valeur. Il n'en fut pas toujours ainsi, et si nous remon-
tons de quelques siècles en arrière, nous verrons les com-
pagnies franches, comme on les appelait, jouer un rôle
beaucoup plus important. Elles sont un appoint considé-
rable pour les armées royales, et en même temps la plus
sûre garnison de la cité. L'arc, au moyen ûge, était trop
dédaigné dans notre pays, et il fallut les sinistres déCsûtes
de Crécy, Poitiers, Azincourt, où les archers Anglais
eurent raison des puissants chevaliers, pour faire sentir
aux chefs de la nation la valeur et l'importance de cette
arme.
Les chevaliers équipés de toute pièce étaient sans doute
l'élite de l'armée, mais ils étaient forcément en nombre
restreint et les nombreux bataillons d'archers et d'arbalé-
triers arrivaient facilement à rendre inutile leur incontes-
table bravoure: et puis il fallait compter avec un habile
tireur qui pouvait choisir dans la visière le trou par lequel
son vireton irait tuer, à cent pas, le plus brave chevalier.
La France, au lieu d'emprunter des archers mercenaires
aux Génois ou aux Allemands fit entrer, pour une plus
grande partie, le peuple et la bourgeoisie dans ses armées;
elle eut moins de mépris pour cette ribaudaille et, en
maintes occasions, elle eut à se louer de ces nouveaux auxi-
liaires. Et si de celte première organisation naquirent do
gmves abus, parce que le peuple sentant sa force, réagit
XLiy SESSION^ A SENLIS. 270
violemment à certaines époques contre Toppression trop
criante, et fit sentir à la noblesse trop hautaine la pesan-
teur de son bras, du moins, elle contribua aussi largement
'à ragrandissement et à la gloire du pays en môme temps
qu*à sa défense.
L'histoire complète de ces compagnies se divise néces-
sairement en deux périodes bien distinctes : la période
luilitaire, et la période d'amusement militaire, si on peut
la désigner ainsi, la première se prolongeant d'ailleurs
&S8ez loin dans la seconde par la substitution de l'ar-
quebuse, du fusil, de la couleuvrine même, car il y eut
i^ compagnies de couleuvriniers, à l'arc et à l'arba-
lète.
Ce serait certes une histoire intéressante, et que j'aime-
rais à développer dans tous ses détails, mais les renseignc-
loents me font défaut pour presque toutes ces compagnies,
^ le Congrès n'a d'ailleurs que peu d'instants à m'accor-
der. Je me suis donc contenté de réunir quelques rensei-
gneueots sur Seulis, et je crains encore de fatiguer votre
attention.
Je trouve pour la première fois les arbalétriers signalés
>iSenlis, le 5 juillet id83. Ce n'est pas évidemment l'ori-
gioe de leur établissement, car à Compiègne ils commen-
cèrent à s organiser en 1358, pour la défense de Charles V;
à Cbàlons-sur-ldarue aussi, et les lettres patentes des arba-
létriers de Paris sont du 9 août 13r>9.
Le 5 juillet donc, lecture est donnée à l'assemblée du
peuple d'un mandement du roi, demandant qu'on lui
envoie le plus possible d'arbalétriers et canoniers, garnis
(farbaiètefi canons et poudre à canon, à i'éroune, pour le
4 août suivant.
En 1380. Charles VI, qui vient d*épouser Isabcau de
Bavière, conçoit le dessein de faire une descente en Angle-
I
3S0 CX)NGR£S ARGHÉOLOGIOUB ]»B FEANGB.
terre. Il envoie donc à ses baillis et lieutenants Tordre ^^
lever un corps d'arbalétriers.
Les habitants de Senlis convoqués en la ville par trjf
royal ei à son de cloche^ entendent lecture du mandemeii ^
royal. Usdécident'd'abord qu'ils équiperont deux hommes ?
puis quelques jours après, ils consentent à en armer six^
avec deux varlets. Ces hommes reçoivent chacun, pour Is.
solde d'un mois, 7 livres et 8 sous parisis. Gilles Picait
les conduit à Lille, et le chevalier Tristan du Bois les
enrôle au nom du roi. Sur son observation, la ville leur
envoie un second mois de solde. Le peuple, consulté sur
les moyens de couvrir cette dépense, décide qu'on etieiZ/era
deux mois de forteresse. C'est Timpôt militaire qui est
ordinairement levé en pareil cas. L^pédition pourtant
resta à l'état de projet, et l'armée fut dispersée.
En i4l4, demande nouvelle au nom du roi. Hélas I il
n'était guère en état de mener un siège, mais les régents
usent encore de Tauiorité de son nom et demandent la
plus grant foison de gens darmes de trait et de manouvriers
qui pourront servir avec canons, manticaulz {\], pics, pieds
de chèvre et autres abillements pour guerre se aucuns en
avoit iceile ville, le plus hastivement que faire pourront.
Ils demandent en outre un recensement des archers et
arbalétriers de la ville. Mais l'assemblée se contente de
s'excuser sur l'impossibilité où elle est de nen fournir.
Le 48 février 1419, la ville, pour veiller à sa propre
défense, fait mettre deux arbalètes chaque soir à la dispo-
sition des sergents qui commandent aux portes.
Le 3 déceuibre Uîi, Henri VI d'Angleterre, étant
ili Sans doute nianlelets, mantelletum , sorte de psrapet
IK^rlatif, en usa^e tlans les sièges pour s'approcher plus facile-
ment de. la ville assiégée.
XUT* SESSION, A SENUS. %l
maître de Paris, le capitaine de Senlis demande de l'artil-
lerie. On lui octroie le gros canon de cuivre de la ville
avec pierres et poudre, mais on réserve le beuglere (?) de
la ville et un petit beugle ou beuglire qui vient de Chàlis.
11 avait été amené de la forteresse en 1449 avec six petits
canons, lors de la démolition de ce fort devenu un nid de
brigands et de pillards.
En 1423, la ville entretint vingt-huib archers et arbalé-
triers devant Compiègne.
Et ainsi, suivant les circonstances, ou à raison des
charges qui pèsent sur elle, notre cité accorde ou refuse
les hommes armés que trop souvent on. lui demande pen-
dant cette triste période de notre histoire. Évidemment
elle dût fournir son contingent pour soutenir Charles VII,
à mesure qu'il repoussait l'usurpateur anglais, surtout
lorsque l'béroine d'Orléans, Jeanne d'Arc, livra bataille
dans la plaine de Montépilloy. Senlis était restée une des
dernières fidèle au roi de France, et il fallut qu'un traité en
forme concédât au monarque anglais l'autorité suprême
dans notre pays pour qu'elle consentit à lui ouvrir ses
portes.
Charles V[I comprit tout l'avantage qu'il pourrait tirer
d'une armée composée de l'élite du peuple et de la bour-
geoisie et par ordonnance datée de Montils-lès-Tours,
en 1448, il organisa un corps de vingt-trois mille francs-
vchers (1). Chaque homme de ce corps devait être choisi
(1) « Assemblée au commandement de noble homme M. Gilles
de Saint-Simon, bailli et capitaine de Senlis... Cent personnes
présentes.
» A esté présenté unes lettres du roy données aux IVlontils lès
Tours le SH avril 4448, par lesquelles il mande que Ton mette
sur chacune paroisse de son royaulme un archer fourni de
282 G0N6R£S ARCHÉOLOGIQUE DB FRANGE^
parmi soixante jeunes gens des mieux faits; chaque vil-
lage devait en fournir un, et ils étaient toujours prêts à
marcher. Ils devaient s'exercer tous les dimanches.
En i466, le roi ordonne à Pierre Aubert, bailli de
Melun de faire lever un corps de quatre mille archiers
dans la région. Sentis doit fournir, outre ceux qui sont
maintenant équipés, quarante-deux francs-archiers, munis
ie jaques, salades^ espées, dague, arc et trousse, arbalestre
ou voulge, et gantelets. Pour arriver à compléter le nombre
voulu, on procède, à un recensement de la population
virile. Il faut que chaque village fournisse un frane-archier
ou arbalétrier par cinquante feux et l'équipe d'armes
et habillements, et feront serment lesdits archiers, de bien
et loyaument servir le roi et non autre. Ou reconnaît à
cette clause le cauteleux Louis XL Le bon roi était dans
l'embarras; il avait mécontenté un peu tout le monde, et
beaucoup certains adversaires, et il fallait aviser. Charles
le Téméraire, François II de Bretagne, le duc de Berry,
le duc de Bourbon, blâmaient ses actes ou s'insurgeaient
contre son autorité et lui déclaraient la guerre; la ligue
du bien public ralliait de nombreux adhérents. Il fallait
donc à l'astucieux monarque joindre à des troupes nom-
breuses toute la souplesse de son génie retors, et une
grande rapidité d'actions. Et pourtant, le mandement
signé le 19 janvier 4465, n'est pas encore exécuté dix
mois plus tard, le 6 novembre 4466. Nous sommes loin
de la rapidité de mobilisation actuelle, et l'adversaire aussi
salade, dague, espée, arc, traits, jaque ou hugue de brigandine
qui seront appelés les francs-archers, francs, quittes et exempts
de toutes les tailles et autres charges et tant du fait et entre-
tenemeot de gens darmes, de guet, garde porte, que de toutes
•otres subventions... excepté du fait des aides ordonnées pour
!■ guefre et de la gabelle du sel . .. »
XUT* 9BS8I0N, A SENUS. 283
put prendre son temps. Encore, les historiens font-ils
remarquer que le roi, grâce à son activité réussit à faire
face à tous ses ennemis à la fois. Cependant il réduisit ce
corps d'armée à seize mille hommes, et trouvant qu'ils ne
lui rendaient pas tous les services qu'il attendait d'eux, il
cassa les compagnies en 1480.
Malgré cette suppression^ il y avait encore, ditCarlier,
'es francs-archers dans le Valois, en i500. Mais le service
du roi n'empêchait pas la ville de veiller à sa propre
sûreté, et e)\e avait sa garde bourgeoise armée de sallades,
^gandines, basions à feu, arbalestres, etc. etc. Un dénom-
brement par quartier, fait en i5i2, donne un total de
oeuf cent quatre-vingt-trois hommes armés. Elle en
comptait bien moins soixante-dix ans plus tard, lorsqu'elle
se défendit si énergiquement contre les entreprises des
ligueurs.
Le premier guet comprenait 42 hommes;
Le guet du Marché, 104;
Le guet de la place aux Obérons, i78 ;
Le guet du Chastel, 75;
Le guet de Saint-Vincent, iOl ;
Le guet de Bellon, 189 ;
Le guet de Vitet, 106;
Le guet de Villemétrie, 40 ;
La Bretonnière, 63 ;
Villevert, 41 .
Fait et conclu en l'hôtel de ville le 30 avril après
Piques. Chacun des dessus nommés aura les armures et
basions à feu à eux ordonnés en dedans le jour de la l'cn-
lecûte prochain venant.
Senlis fournit encore des francs-archers à Fran<,"ois I''
eu 1521 et i523. Mais les armes à feu prenaient chaque
jour une importance plus grande, et rendaient de plus
284 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
en plus inutiles ces armes démodées, qu'on appelait Tare
ou l'arbalète, et désormais elles ne devaient plus servir
qu'à l'amusement du peuple. On leur substitua petit à
petit l'arquebuse, et beaucoup de compagnies d*archers
laissèrent leurs arcs pour prendre le fusil à arquebuse. De
nouvelles compagnies s'établirent, les privilèges des archers
leur furent aussi accordés, et le peuple continua ainsi à
défendre son roi et son pays.
Tout le monde sait l'histoire de la Ligue à Sentis, Tap-
pui que reçurent les ligueurs du célèbre Guillaume Rose,
et d'une grande partie du clergé séculier senlisien. On
sait aussi que, grâce à l'énergie intelligente de quelques
habitants, la ville fut enlevée aux ligueurs, et rendue aux
royalistes que vint commander le sire de Thoré-Montmo-
rency, fils du connétable de Montmorency. Mais ce qui
est peut -être moins connu, c'est la part que prit à la
défense de la ville la compagnie des fusiliers royalistes,
qui dura jusqu'à la Révolution.
Le récit de leurs exploits fut, à leur requête, copié sur
les registres de la compagnie plus d'un siècle et demi
après, en 1753, et si vous le permettez, je vous en donne-
rai un résumé aussi bref que possible.
a 1589. Extrait du registre des enrollements faits des
a bourgeois de bonne volonté fidels au roy et au soutien
a de la patrie pendant le temps de la calamité et guerre
a civile, si fort oppressée en la ville de Senlis sous le
a règne de Henry [II, dontladitte compagnie sourdement
a a procurée l'entrée dans laditte ville de Senlis à M' de
o Thoré pour en prendre le gouvernement. »
M. de Thoré reçut, le 25 avril 4589, les avances de
quarante-huit bourgeois de Senlis qui s'engageaient à
défendre la ville pour le roi. Il leur fit distribuer des
armes ei ustancilles de guerre, et nomma leurs officiers.
xny^ SESSION, a seklis. 285
Lui-même avait le titre de colonel commandant. M. de
Senerpont fut nommé capitaine cinquantenier, M. Fonte-
m lieutenant, MM. Vioste et du Thiel dizainiers. Les
ligueurs commençaient à porter des troupes dans les fau-
bourgs, et M. de Thoré confia la garde des remparts aux
royalistes, depuis le bastion du Mcntauban, jusqu'à^la
tour la plus proche de la porte de Paris. C'était Tendroit
le plus Caible. Le reste était gardé par les troupes amenées
ptr le seigneur d'Ognon, et d'autres encore. Depuis le
M atril jusqu'au 30, les fusiliers restèrent sur le rempart
^ tra?aillèrent, aidés de leurs femmes, à le mettre en état
<k défense. Us établirent de petites batteries et firent tout
ce qu'ils purent pour organiser la résistance. Mais le
(limaoche, le duc d'Aumale commença le feu contre les
tours de la Fosse aux Anes, près de la porte de Creil, et
kl4 mai elles étaient ruinées. Les royalistes et les cuiras-
siers soutinrent alors l'attaque sur la brèche. Le H mai
b bataille s'engagea devant entre les troupes royalistes
commandées par Longueville et Lanoue, et les ligueurs
1q duc d'Aumale. Sur leur demande, les fusiliers roya-
listes sortirent au nombre de quarante, par la porte de
l^tfis, sous la conduite de leurs officiers. La bataille finis-
<ut et le duc d'Aumale fuyait vers Paris. Les fusiliers,
^duits par Vioste et du Thiel, suivirent le chemin des
f'^miomSy qui conduit à i'ontarmé. Là ils prirent avec eux
dix-sept habitants du village, auxquels vinrent se joindre
les volontaires de la Chapelle, Orry, Survilliers, Mongré-
•
'*D< Coye, Chantilly, Avilly et Saiut-Liénard, conduits
Pv le gentilhomme de Comelle. Les villageois arrivaient
<l6 toute part..On se mit alors par différents chemins ù la
poursuite des fuyards, et la déroute des ennemis fut com-
plète. Deux canons tombèrent eutre les mains des roya-
listes, qui les firent conduire au ch&teau de Chantilly sous
286 CONGRÈS ARGHÉOLOGigUE DE FRANCE.
bonne garde, et poursuivirent les fuyards jusqu'à la port<^
Montmartre et prirent une troisième pièce de canon appelé^*^
culvrine ou couleuvrine, avec laquelle iU tirèrent dans le^
rues de Paris. Ils se retirèrent enfin dans le château d^
Vincennes, chargés de butin qu'ils ramenèrent le lende^ —
main à Sentis.
Ils furent reçus à la porte Saint-Lazarre par M. Aef
Thorô avec l'état-major, quatre tambours, une trompetU»
et un hautbois. Après les compliments qu'ils avaient bien
mérités, ils rentrèrent dans la ville et le butin fut distri-
bué entre ceux de la ville et de la campagne. Il y avait eu
deux morts et un blessé.
Le roi reconnaissant envoya par le duc de Montmorency,
maréchal de France, une somme d'argent aux bourgeois
de Senlis. On en employa une partie ù leur procurer un
uniforme. Il se composait d'un habit de drap bleu avec
parements rouges et boutons jaunes, et doublure rouge,
d'une chemisette et d'un caleçon rouges avec bas blancs.
Le chapeau portait les armes de l'arsenal. Ils furent pom-
peusement passés en revue le 47 juillet, et M. de Thoré
leur remit un drapeau d'azur avec les armes du roi enve-
loppées de lis, et portant cette inscription : Ils ont soti/e-
nus la gloire du roy a perte de leur sang et conservés la
pureté des lys. C'était l'occasion de chanter le vieux
refrain :
Ils faict beau veoir ces homes darmes...
Quatre bourgeois qui avaient demandé à entrer dans la
compagnie, se virent refusés parce que leur fidélité au roi
ne paraissait pas assez sincère. On remplaça seulement
les morts et les blessés. Fuis ils furent organisés pour
monter la garde aux remparts toutes les nuits. Un nommé
XUV* SESSION, A SENLIS. 287
iacqoes le Maine, qui avait été surpris démolissant les
réparations faites à la brèche, fut saisi, jugé et condamné
à huit jours de prison.
Au mois d'août 1589, la garde royaliste reçut une
solde de 150 francs par mois pour dix hommes, et cette
ârUde, à la demande de la compagnie, fut donnée aux
plus pauvres. M. de Thoré y ajouta 50 livres, et le tout
fut partagé entre les dix-huit gardes.
La compagnie des arbalétriers, dont le jeu avait été
niioé lors de la première attaque du duc d'Aumale, fut
invitée à se fusionner avec la compagnie royaliste et à chan-
ger les armes contre des fusils à larquebuse. Cette trans-
bnnation fut acceptée dans l'assemblée du i6 sep-
tembre 4590. Les statuts furent modifiés et les anciens
privilèges du roi du papegault rétablis en leur faveur.
Le duc de Montmorency vint, le 28 septembre, féliciter
Ia compagnie qui, sous la conduite de son état-major,
dia «u-devant de lui jusque dans la plaine de Saint-
Liénard.
Hais si nos compagnies guerrières savaient verser leur
8Ug pour la patrie, elles aimaient aussi à prendre part à
ses joies, et leur présence faisait l'ornement des solennités
publiques. Écoutez, Jacques Métbelet, lieutenant général
<le la prévôté de Senlis et roi de Tarquebuse vous raconter
leotrée du Dauphin à Senlis en 1531. Les autorités vont
au-devant de lui jusqu'à l'Hôtel-Dieu des Marais, escor-
^de la compagnie de l'arquebuse et « M. le lieutenant
* général (c'était Métbelet en personne), fist la révérence
« a Mgr le Dauphin et ù MMgrs ses frères, leur fist une
* oraison fort honncste laquelle ils prinrent et eurent
* Tort agréable... Ru entrant dans laquelle ville feust
" tirée toute lartillerie estant en la porte de Paris,
« laquelle il faisoit bon oir et dura demi-heure et plus,
288 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
« au dedans de laquelle ville et sur laditte porte de Parr
« estoient joueurs de saquebutes, hautbois, rebects et aul
a instruments qui jouaient fort mélodieusement et les
a soit bon oir, aussi au carfour de la porte au pain y avoi^
a un eschaffault ou estoient aultres joueurs dinstrument — ^
a comme flûtes, doulzaines, rebects et tabours quil faisoi ^
a pereillement bon oyr et au beffroy de laditte ville ^
a avoient joueurs de tabours de guerre, trompettes, fifres^
« et si furent tirés illec plusieurs coups de harquejMises s-
a croq qui donnoient fort bon son et par bon ordre, et
« sonnoit en cet instant l'horloge et les appeaulx dioelle
« estant au beffroy qui faisoient un tel et si grand bruit
« quon nen pouvoit oyr, dont mondit S' le Dauphin et
« Mgrs ses frères furent fort joyeux. »
Les fêtes qui suivirent le traité d'Âix-la-Chapelle, signé
en 17i8 eurent encore bien plus d'éclat, et se prolongèrent
|)endant plus de huit jours.
La paix fut publiée le 23 février 1749 par toute* la ville
à sept reprises : Les officiers, chevaliers et cadets de l'ar-
quebuse, au nombre de cinquante-deux, commandés par
le sieur Turquet, prirent part à la marche triomphale. Le
capitaine ouvrait la marche, puis les arquebusiers tous
habillés en uuiforme rouge montés sur des chevaux
bien harnachés, ayant trompettes et hautbois à leur tète
et allant par quatre de hauteur. Après eux venaient les
fusiliers à pied, marchant aussi par quatre de hauteur,
au nombre de quarante, commandés par le sieur Heluis,
bourgeois, tous en uniforme bleu, proprement habillés et
précédés Je tambours. Puis les corps de ville avec quatre
tamlM)urs, les quatre petits ofticiers porte-casaques, le
hérault d'armes seul, en cotte d'armes, monté sur une
haquenée blanche, les deux premiers échevins, M. le
Maire au milieu, les deux autres échevins, et le contrôleur
XUY* SESSION, ▲ SBNUS. S!89
du grefle, tous à cheval, bien équipés, avec des cocardes
i^uneet rouge; ensuite venait une compagnie bourgeoise
lu nombre de trente ou quarante, marchant aussi à pied
par quatre de front ; les officiers et cavaliers de la maré-
chaonte de Senlis et de Louvres, commandés par
)i. Caron, lieutenant de robe courte et précédés d'un
trompette, fermaient la marche. Ils firent successivement
leurs publications au Port au Pain, à la Halle au Blé, au
Carrefour des Singes, à la Présentation, au Carrefour de
It Porte du Château, à la place aux Charofn, et à la
plicede Creil. Ils revinrent ensuite à l'hôtel de ville où
kl officiers présentèrent leurs civilités à M. le Major, à
H. Caron, etc. La foule était grande, les rues bordées de
carieuz, les fenêtres garnies, les carrefours encombrés, et
c'était partout des cris de joie^ des acclamations, des vivt le
^1 bien convaincus.
A quatre heures, MM. les arquebusiers, fusiliers,
l^rgeois, vont chercher Messeigneurs de la ville pour
les conduire à la cathédrale entendre le Te Deutn qui
ttt chanté en musique, avec décharges d'artillerie pen^
'aot le Te Deum et le Domine Salvum. A la sortie,
décharge générale de fusils et d'arquebuses en l'honneur
de Messeigneurs du présidial, de la maréchaussée et de
l'élection.
A sept heures, Messeigneurs du Chapitre de Notre-
Dame, illuminent leurs uï^isons, et fout tirer un feu d'ar-
tifiœ sur la place du Cloître.
A huit heures, MM. les échevins vont à l'hôtel de ville
iilumiDé avec terrines, lampions, torches, et on tire un
feu d'artifice sur la place, à la grande satis^ faction du
peuple; la ville tout entière est illuminée, et les feux de
joie durent toute la nuit.
Le lendemain. Te Deum dans l'église des Cordcliers,
ILIV* SESSION. 19
i90 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
décharge des compagnies, à qui M. le Major offre une
collation, puis feu d'artiRce et illumination.
Enfin, le 2 mars, les arquebusiers font chanter le Te
Deum, puis, le soir, décharge générale et feu d'artifice.
Voilà, si je ne me trompe, une fête populaire et un vrai
enthousiasme.
Mais passons à l'histoire des jeux d'arc ou d'arbalète.
Nous avons vu la ville de Senlis appelée dès le xiy* siècle
à fournir des archers et arbalétriers pour le service du
roi. Mais on ne s'improvise pas archer du jour au lende-
main, et pour devenir un Guillaume Tell il faut s'être
longtemps exercé. Il est donc hors de doute que depuis
longtemps il existait des compagnies de tireurs plus ou
moins bien organisées dans nos régions. MM. Henri Martin
et Paul Lacroix, dans leur Histoire de Soissons, disentque
cette formation de milices populaires fut toute spontanée,
et qu'elle fut provoquée par les excès des Brabançons,
Routiers, Tard- Venus et autres brigands de grand chemin
qui portèrent le ravage dans les campagnes.
Quoi qu'il eu soit, Charles V comprit le parti qu'il
pouvait tirer de ces armes et, comme nous l'avons dit, il
favorisa beaucoup la création des compagnies d'archers.
Le 19 juillet 13t)9 il rendait une ordonnance en leur
faveur, mandait à ses gouverneurs de faire le recensement
de compagnies existantes, et d'engager les jeunes gens à
s'exercer au tir.
Les Picards prirent goût à cet exercice et y devinrent
bientôt plus habiles que les Anglais, à tel point que dès
l'an 1384, Charles VI songeait à modérer cette ardeur,
de crainte de voir le peuple s'apercevoir de la puissance
qu'il pouvait prendre par ce moyen.
Le Soissonnais et le Valois comptèrent de nombreuses
compagnies, et Carlier va jusqu*à dire que cette région a
XLIY* SESSION, ▲ SENLiS. 391
M comme le berceau du jeu d'arc, a à cause, dit-il, de la
proximité des reliques de saint Sébastien, déposées à Saint-
Médanlde Soissons. Encore aujourd'hui, ajoute-t-il, l'abbé
de Saiot-Uédard passe pour être le président né, et comme
l'ordoonateur général des compagnies de l'arc établies
dus tout le royaume, d Je lui laisse la responsabilité de
Mmattertion.
Les compagnies de Tare et de l'arbalète de Sentis
iviient QD règlement sévère. Le règlement de l'arbalète a
M conservé par Afforty. Après une première réforme
cnlMB (i), il fut remanié sérieusement en 1538 sous la
(I) Voici quelques extraits de ce règlement : • Frère, tu jures
pv la foy et serment de ton corps, sur le sel, sur le pain et le
^i et sur Tarbalcstre, laquelle arbalestre flgure la croix de
'Voitre-Seigncur Jésus-Christ, là où il recul mort et passion pour
Ifannuiin lîgnaige, en la manière qui sensuit :
• Cest ascavoir par leslrief de larb.ilcslrc est flgurec la cou-
rofloe d'espines qui fut mise sur le chef de Nostre-Seignenr; par
les lieurcs dudit estrief en signe des liens dont il fut lié... par
/arc 00 dit comment Noslre-Seigneur fut estcndu en labre de la
croix, par la noix, le cœur, par la vire, la lance, par la clef, la
Jesserre que fist Longin de la lance , droit au cœur de Nostre-
^seigneur.
c Item, tu jures et promets de obéir et porter honneur au roy,
tappilaioe, connestable et chevaliers...
> Tu ne jureras Dieu soubs la peine de ung denier. Tu ne diras
sur homme ou sur femme mot qui soit deshouneste...
• Tu joueras bien et plaisamment sans faire noise ne mo-
querie...
• Quand tu banderas ton arbalestre, tu la dois bander bien
doulceneot, sans muser ne ça no li...
> En fréquentant ledict jeu, lu ne nommeras le diable en
aucune manière... ■
102 CONGRÈS ARGHéOLOGIQUS DK FEÀRGS.
royauté de Jacques Métholet, lieutenant général de la
prévôté de Senlis.
Car vous le savez, Messieurs, le chef de ces compagnies
prenait le titre de roi aussi bien que le roi des rilMtuds, le
roi des merciers, etc. etc. Le roi était nommé pour un an,
et ce titre revenait de droit à celui qui montrait le plus
d'adresse, et faisait les quatre plus beaux coups au jour
du concours. Il prenait même le titre d'empereur s'il
méritait deux années de suite la royauté. Celui qui abat-
tait lejay ou papegay était proclamé connétable.
« Premièrement, dit le règlement, de 1539, il est cou-
a tume de faire tous les ans un roy le jour de la Trinité-
a Notre-Seigneur. Il est aussi coutume de faire un con-
« nestable, et se fait le premier jour de may, et se lait
a ainsy. Celui qui abat le gay celui jour, est connestable
« pour icelle année, o On invitait souvent un personnage
influent de la ville le jour du concours pour tirer le
coup du seigneur.
Le roi payait ce jour-là, aux chevaliers^ un jambon, et
le connétable une fraise de veau ; ils en devaient autant
au jour de la Trinité, mais pendant l'année, ils ne
payaient rien de ce qu'on buvait après le jeu. A ces privi-
lèges, les rois ajoutèrent l'exemption de taxe pour tous les
chevaliers. Ainsi Henri IV, en 1597, accorde aux chevaliers
de Tarquebuse la franchise de tous droits pour la quantité
de vingt muids de vin, et même l'exemption de toutes
tailles, subsides et impôts pour le roi pendant l'année de
sa royauté. Louis XIII et Louis XIV confirmèrent ces pri-
vilèges, et ce dernier ajouta l'exemption du logement des
gens de guerre jusquà concurrence de dix livres.
Il y avait à Senlis deux jeux d'arc. Le premier et le
plus ancien était établi à la porte de Meaux, où il existe
encore aujourd'hui. Le second obtint de s'installer dans
XUY' SESSION, A SBNUS. 203
le ibné da rempart, sous le MÔntauban, près de la Fusse-
sMfAneSy et de clore un espace de soixante-quinze pas de
lon^ sur trente-cinq de large, afîn d'être à Tabri des
visites ennuyeuses des enfants et des animaux. La permis-
sion fut octroyée par Loys de Saint-Simon, bailli de Senlis.
Eq 1696, nouvelle supplique au gouverneur et aux
êchevios, et permission de s'établir dans le petit fossé de
laportede Creil.
Les arquebusiers avaient leur jeu à la porte Bellon. En
I6f)9, ils obtinrent l'autorisation de le transporter aussi à
U Fone-aux-Anes.
En i6ff, ils nommaient Jean Bourdereul, sieur de
Beauté, leur capitaine perpétuel, et ils obtenaient des
lettres du roi leur accordant certains privilèges, comme
l'aBhnchissemeAt de toutes tailles ou subsides.
Mais lorsque le capitaine présenta ses lettres au Bailfi,
pour les soumettre à son approbation, celui-ci, M. de
Bofdevilie, renvoya la requête aux échevins. Les éche-
vio8 déclarèrent que rétablissement d'un capitaine per-
pétuel était chose de grande conséquence et préjudi-
dable à la ville. Sur ces graves observations, la compagnie
renonça à son projet, déclara son élection non avenue, et
se contenta d'un capitaine annuel. Les arbalétriers qui se
disposaient h suivre le même exemple, y renoncèrent
roloDtiers, et nommèrent capitaine comme leurs voisins
ttlai qui, au concoure, faisait les quatre meilleurs coups
de ponton. Il jouissait des exemptions et privilèges accor-
dés par le roi.
Ces sociétés avaient leurs solennités extraordinaires.
Elles invitèrent un certain nombre de sociétés voisines à
venir disputer les prix d'adresse, et c'était l'occasion de
fîtes magnifiques, qui mettaient toute la ville et les envi-
roDS en grande liesse.
394 CONGRÈS AECHÉOLOGIQUE DB FBANGE.
En 4665, MM. les arbalôtWcrs avaient reçu à Conipiè<i^
le bouquet provincial. Ils devaient le rendre en 1667. Il*
réclament donc à la ville une partie des bâtiments annexa
à leur jeu, afin de pouvoir recevoir convenablement l^^
compagnies de la province. Cinquante ans auparavan ^i
Creil avait eu sa grande réunion des comparantes d'af
quebusiers, et le récit de cette mémorable journée fi^
écrit et imprimé la même année à Paris.
Un compte rendu complet de la grande fête de Com^-^
piègne, en 17^, a été publié la mémo année à Soissons^^
chez Courtois, ot reproduit dans le Guetteur du Beau^-^
vaisis, il y a quelques années.
MM. les chevaliers de Tarquebuse royale de Compiègne, y
est-il dit, ayant obtenu par leur générosité et leur magni-
ficence le bouquet du prix général rendu ci-devant à
Maux, ne cherchèrent depuis qu'une occasion favorable de
se signaler de nouveau, par la convocation d'une asKembléc
générale chez eux, de tous les chevaliers des arquebuses
des principales provinces de France.
Cinquante-six compagnies acceptèrent l'invitation, et
quarante-sept furent fidèles au rendez-vous. Nous y trou-
vons rappoités les noms do chacune de ces compagnies,
que le programme nous demande d'expliquer. Parmi ces
surnoms, il en est qui portent avec eux leur explication.
Les Dormeurs, de Compiègne,'par exemple; les Soupiers,
de Pont; les Glorieux, de Laon; les Mangeurs de sougte
chaude, de Hozoy-en-Brie ; les Friands, de Noyon, etc. etc. ;
ne sont-ils pas une allusion au tempérament ou aux
habitudes de ceux qui sont ainsi désignés? D'autres sont
de simples calenilmurs, comme les Gens de vertus, du
pays de ce nom; les Coqs, de Dormans...; d'autres rap*
pellent évidemment quelque trait de caractère ou quelque
anecilute oubliée. Ouoiques-uns, Beauvais [les Chieurs]^
XLrV* SESSION, A SLNLIS. 395
Cripy (lêÊ Cœktms)^ et surtout Guignes (la Putain)^
témoignent de la liberté de langage de nos bons ancêtres,
mais la pruderie actuelle de notre langue n'autorise pas
à les prononcer en public, surtout quand on n'a pas,
comme Camhronne, l'excuse d'une violente émotion (f).
Les compagnies étaient souvent précédées d'un individu
fui servait d'emblème partout Ainsi les arquebusiers de
I^ont-Sainte-Mazenoe se faisaient précéder d'un homme
portant marmite et cuiller à pot, ceux de Compiègne,
dL^un homme faisant le dormeur. Senlis portait sur
son drapeau un gueux chargé d'une besace, avec la
*levige : Florescet sartif innumeralibus, « lY fleurira par
^innomtrMet racommodages. o
Citons encore quelques compagnies présentes à Com-
piègoe : Château-Thierry, /)u hovt, nul ne s'y frotte;
Corbeil, le$ Pesches; Estampes, les Sables; Chauny, les
^nges; Braine, les Corbeaux; Goulommiers, les Mangeurs
de dagourmiaux; Senlis, les Bczaciers; Saint-Quentin
k$ Canonf'ers; Mantes, l*:s Chiens; A visse, les Buoeut^;
Pootoîse, les Usuriers; Meaux, les Chats; La Ferté-au-
Col, la Poupée; Montdidier, les Promeneurs; Lagny,
Combien vaut l'orge; Saint-Denis, la Bannière de France;
Rethel, les Mangeurs de gaudichon*; Vailly, les Veaux;
Héxières, la Pueelle; Reims, les Mangeurs de ftaind'épief;
Nogent-sur-Seinc, les Vivants; la Ferté-Milon, les Pic-
mards; Provins, les Consuves; Ucaumont, les Chaudron-
sien; Charleville, les Brûleurs de noir; Fismes, les
Ftminis; Soissons, les Beyeurs; Fère-en-Tardenois, les
(\) Boileau disait bien avant cette époque :
E^ lalio dam les mots brave l*honnè(elé.
Mais le lecteur français veut èlre respecté.
396 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
Brûleurs de fer; Mculan , lei Hiboux; Sainte-Ménéhoulii
les Verriers; ChàloDS, les Brimballeurs, ou Maraudeu^
11 y a évidemiDHnt dans ce nombre beaucoup de surootiM
qui viennent d'allusion à quelque circonstance dont ^
souvenir peut être conservé dans le pays, mais qu'il n'B^^
pas toujours facile de deviner, et d'autres qui ne sont qa^^
de naïfs calembours.
La plupart de ces compagnies portaient un unifo^I^^
brillant, et le défilé fut vraiment splendide. Les iSftt^^
durèrent huit jours, et c'était à qui mettrait le plus d'em ^^
pressement et de générosité pour recevoir ces nombreu?^
visiteurs.
c Pendant la parade, MM. les chevaliers trouvèrent suf
c la place un rafraichissemeot composé d'échaudés,
c biscuits, jambon de Mayence, langues et excellent via
a de Champagne.
« MM. du régiment de la calotte eurent aussi l'honneur
a de rafraîchir à la porte de leur hôtel, MM. les cheva-
a liers et ceux qui les suivaient... » (I).
L'almanach historique de la ville et du diocèse de
Senlis, pour l'an 1788, nous donne la composition de
chacune des compagnies armées encore organisées à cette
époque dans notre ville.
Les arbalétriers-arquebusiers étaient au nombre de qua-
torze, dont deux chanoines. Le capitaine roi était Lederc
Duport, avocat, procureur du roi de la maréchaussée.
La compagnie de larquebuse royale avait cinq officiers
et deux officiers honoraires. MM. Leblanc, rui, et Turquet,
empereur* vingt et un chevaliers, parmi lesquels je lis le
nom de Billion, et cinq chevaliers honoraires.
I ReUtioQ de ce qoi s*e«t (4»ê aa prix gênënl de Tarque-
buse. rendu a Ci>ai(*:egQe le li septembre 1729.
XU?* SESSION, k SENUS. 207
Les royaliâiei fuiiliers de la compagnie du gouverne-
ment, sous le commandement de Mgr le duc de Gesvres,
gouverneur de l'Isie-de-France, et de M. Fomiès de Ber-
trundy, commissaire des guerres, comptait dix officiers,
iuinse grenadiers et dix-sept fusiliers.
Le jeu d*are, sous la grande maîtrise de Son Éminence
&fgr François Joachim de Pierre de Bernis, cardinal-
uxhevéque d'AIbi, abbé commandataire de Saint-Médard
^^ Soissons, avait un état-major composé de cinq officiers,
commandant neuf chevaliers.
Je ne prolongerai pas davantage ces détails qui ne
^^raient pas bien variés, et qui déjà ont pu fatiguer votre
attention. J'arrive en 1789. La compagnie des arque-
busiers de Sentis, encore bien organisée, eut à inscrire
^08 ses annales, à cette époque, un épisode bien triste,
^ien terrible même, et qui s'appelle encore aujourd'hui
^Alieniai Billon, C'est par quoi je terminerai.
Billon, horloger à Senlis, était en même temps quelque
peu usurier et ce fut la cause de son crime et de sa mort,
car les règlements de la compagnie exigeaient comme
première condition, en acceptant dans ses rangs un nouvel
arquebusier, une sévère honnêteté (1). Billon avait prêté
à un nommé Levasseur, aubergiste à Senlis, et comme
lui arquebusier, une somme de S,000 livres tournois, dont
il exigeait un intérêt excessif, 10 pour iOO. Levasseur se
âcha, et dénonça l'horloger au capitaine de la compa-
gnie, M. Delorme, chevalier de Saint-I^uis. Après une
délibération à laquelle prirent part M. Delorme, capitaine,
MM. Leblanc, Caron, Pigeau et Préville, le célèbre comé-
(1)4* Aulcun ne doit venir et requérir a être reçeu pour le
serinent faire et a ce ne doit estre rcccu sil nest de bonne vie
el bonneste, conversation bien saine et renommée...
%I8 GONO&ÈS AHGHÉOU>OI0UB DK PBAMGE.
dien, membre du comité permanent, et presque tous
membres de la société, on décida que Billon serait tïï^^
du contrôle. On lui signifia la décision de ses pairs, ^^^
rentrée du jeu lui fut fermée. Il alla demander une ezpl^ '
catiou au capitaine, homme énergique, ancien olBcier qi^ '
avait conservé de l'état militaire une franchisa sévèra.
observations peu courtoises de Billon l'irritèrent et il le fi
jeter à la porte par ses gens. L'horloger, furieux, jura d
se venger, et il tint parole (i).
a Le 13 décembre 1789 (2), jour indiqué pour la béné-
diction des drapeaux de la garde nationale, tous les corps
avaient été invités et s'étaient assemblés à ThAtel de ville,
d'où ils devaient se rendre à la cathédrale dans Tordre
suivant :
c l^" Un détachement de la cavalerie nationale, précédé
de son trompette ;
a 2° La compagnie de l'arquebuse ;
a 3* La compagnie de fusiliers royalistes avec les offi-
ciers municipaux, les membres du conseil général, les
hoquetons et les valets de ville ;
« 4° L'élat-major de la garde nationale ;
a .V Le drapeau et le guidon, avec un détachement de
cinquante hommes, pris dans tous les corps armés ;
a 6"* Les compagnies d'élite, et les compagnies du centre
<le la garde nationale, au nombre de sept ;
c !• Enfin, le cortège était fermé par le reste de la
cavalerie nationale.
(I) On trouva dans ses papiers, ce distique éloquent :
Tant que Sentis durera,
1-e Rillon on se souviendra.
'!• Rrcitsd'nnrieujr r/iasseur, |>ar Joseph Ijivallée.
XLIV* SESSION, A SkNLIS. SW
« Il s'avançait lentement en remontant la vieille rue do
Paris, quand, à la hauteur de la maison de Billon, on
entendit un coup de fusil. La première pensée fut d'attri-
buer cette explosion à quelque arme partie au repos; mais
on ne put rester longtemps dans l'erreur. Cambronne,
tambour de l'arquebuse, tombait frappé d'une balle
au-dessus de l'œil; au même instant M. Leblanc, 61s du
député, à l'assemblée nationale, et l'un des chevaliers de
Tarquebuse, recevait une balle dans le bras gauche et des
chevrotines dans la poitrine. M. Delorme, capitaine de
Tarquebuse et chevalier de Saint-Loui?, accourait pour
voir d'où venait le tumulte, lorsqu'il fut frappé de trois
balles dans la poitrine. Il put encore faire une dizaine de
pas, et mourut au bout de quelques minutes. C'était lui
que Billon haïssait le plus. »
L'assassin continuait toujours ses décharges. On s'élança
alors pour pénétrer dans son logis et mettre fin à cet
horrible massacre, mais les mesures de Billon étaient bien
prises. U continua à tirer sur les assaillants en battant en
retraite jusque dans son grenier, et en s'abritant successi-
vement derrière les obstacles qu'il avait préparés. M. de la
Bruyère allait le saisir dans son dernier refuge lorsque la
maison sauta, avec un bruit terrible, ensevelissant sous
^débris tous les braves qui étaient venus pour arrêter ce
sauvage meurtrier.
L'explosion fut si terrible, que soixante six maisons
voisines furent ébranlées et que le ciel du second étage
des carrières, situées sous la maison de Billon, fut forcé.
* A deux pas de sa dernière victime (4), dit M. A. Jan-
vier, respirait encore Billon; quelques chasseurs le décou-
(•) liécits Picards, par A. Janvier, Amiens, 1869.
300 OONORiJ AEGHÉOLOOIQUB DE nULMGI.
vrant, lui écrasèrent, dans leur indignation, la tète
leurs crosses de fusil.
c Vingt-cinq morts, quarante et un blessés, tel était ^
lugubre bilan de la vengeance de Thorloger de Sa&lii.
c Le cadavre de Billon , porté à la geâle, fui lapidé ^
route par la population exaspérée; le lendeniain, 14 d^
cembre, sur l'information faite par le procureur du roi ar
bailliage de Seolis, il fut condamné à être porté, dans ui
tombereau, aux fourches patibulaires, ses misérables
livrés aux oiseaux du ciel ou à la voracité des bétes fauves,^
sa maison rasée et le sel semé sur son emplacement. C*est^
nous le croyons, le dernier exemple, en France, des pro-
cès faits aux cadavres, s
Ajoutons que la mère de Billon offrit sa fortune pour
venir en aide aux victimes de cet horrible attentat, et que
de nombreuses et larges offrandes vinrent témoigner do
l'intérêt que chacuu portait à tous ceux qui eurent k souf-
frir en cette triste circonstance. Mgr de Roquelaure donna
i,000 livres et tous les couvents de la ville rivalisèrent de
générosité.
L'assemblée nationale *elle- même en fut informée et
il y fut bien constaté que ce crime, attribué d'abord à
une cause politique n'était que le résultat d'une sauvage
vengeance.
M. le Président remercie M. l'abbé Vattier, de son inté-
ressante lecture, qui jette un nouveau jour sur une des
pi us anciennes institutions du vieux Senlis. Puis M. René de
Maricourt est appelé à donner quelques renseignements
complémentaires sur la carte préhistorique du dépar-
tement de l'Oise, présentée à la première séance.
XUY* 8B88ION, A BUfLU. 301
Motas pour la carte préhistorique du dé-
partament de l'Oise, présentée par R. de
M arioourt et R. Guérin, et dressée d'après
leum recherches personnelles et les ou-
vrages et renseignements de MM. Graves,
Woillezf Baudon, Ponthieux, Louchez,
yinet, Gaudel, de Caix de Saint-Ajrmour,
Plessier, Thibaut, Margry, Guillemot,
Fautrat, etc. etc.
ARRONDISSEMENT DE BEAUVAIS.
Canton d^Auneuil.
Frocourt. Découvertes paliolithiquet (type
acheuléen].
St4jennaia-la«Poterie. Silex et haches néulithiques dans
le bois de la commune.
Hont-Saint-Adrien. Silex néolith.
Oiu-eQ-Bray. Id. Id. sépultures.
Canton de Beauvais.
Beauvais. Gisement paléolithique (types
acheuléen et moustiérien), sta-
tion néolithiqueau Mont-Saint-
Jean.
Allonne. Découvertes paléolithiques.
St-Martin-le-Nœud. Silex, haches néolith. (Musée de
Beauvais).
302 GONQRiS ARGIIÉOLOOIOUK DE fElNGE.
Goincourt. Gisement paléolithique trë8-iiD[
tant k Montguillain, alluv
(type moustiérieo, d'après IL
Mortillet), travaux et expk
tioQ du docteur Baudon,
M. FonthieuXf etc.
Idem, station néolithique.
Canton de Chaumoni.
Boubiers.
Menhir dit Pierre-Frite.
Boury.
DoLMKN, cromlech, deux menhi
silex taillés, haches, dolu
détruit?...
Liancourt-St-Picrre.
•
Silex taillés (néolith.).
La Villetertre.
A Baint-Cyr-sur-CharSy menhi
Serans.
Silex taillés (aéolilh.).
Montjavoult.
Tumulus et silex (néolith.).
Vaudancourt.
Menhir dit Pierre-Tournai
«
haches néolithiques (Musée
Beauvais).
Trie-Ie-Chî\tcau.
Dolmen exploré et décrit.
Délincourt.
Menhir brisé.
Canton de Condtay-Saint-Germer.
Sérifontainc.
St-Pierre-ès-Champs.
St-Aubin-en-Brav.
5:>ainl-Gcrmcr.
Découvertes paléolithique et si
néolithiques.
Silex taillés (néolithiques), hacl
polios.
Haches néolithiques (Musée
Beauvais).
Station nè>lithique.
XUY* SESSION, A SENLIS. 303
Canton de Forment.
Boutayant-U-Grange. Sépultures néolithiques?
Canton de GrandvUliert.
Pas de découvertes préhistoriques signalées.
Canton de Marseille,
m
le. Haches (néolith.).
Milly. ïd. Id.
Canton de Méru.
Montherlant. Menhirs détruits.
l'ouilly-en-Vexin. Menhir détruit. Haches et silex
néolith.
Canton de Vivilliers.
Bailleoi-sur-Thérain. Haches, silex et poteries (néolith.).
Bronies.
"n^onne.
Silex et grès travaillés (néolith.).
Livenine.
Sépulture néolithique^
'"'^ttsereux.
Ossuaire et haches silex (néolith.).
Bresles.
Découvertes paléolithiques^ néoli-
thiques, bronze, cité palustre?
Canton de Noailles.
Hermès. Ossuaire, haches néolith . , bronxe.
304 GONORiS AEGHÉOLOOIQUE DE F&ARGI.
MoDtreuil-s.-Thérain. Tombelle?
Villiers-St-Sépulcre. Dolmen dit Pierre-auz-Fée8,b
silex, jade (ntolith.).
Abbecourt. Ossuaire et haches avec po
(néolith.). Dolmen.
Canton de Songeons.
Hanvoille.
Haches néolithiques (Musé
Beau vais).
Escames.
Sépulture néolithique?
Loueuse.
Idî
Wambez.
Dolmen détruit.
ARRONDISSEMENT DE CLERMONT.
Canton de BreteuiL
Rouvroy-lez-Merle. Tumulus?
Choiay-la- Victoire. Haches en silex (uéolith.).
La Hérelle. Idem, station.
Mesnil-Saint-Firmin. Id. Id.
Beauvoir. Id.
Bouvillers. Découvertes paléolithiques.
Yendeuil-Gaply. Haches (néolith.], dont un
jaspe vert, poteries.
Canton de Clermont.
Avrechy. Près de Bixancourt station (i
thique).
Breuil-le-Sec. Silex (néolith.).
XLIT* S£SSIO:f, A S£NLIS.
305
CaniuH de Crèvecœur.
Pas de découvertes.
CanOm de Maignelay.
Uéry.
Sl-Nartin-au-Bois.
Couroelle-Epayelles.
Uoranvilliers.
Coivrel.
Haches nombreuses (néolilh.)*
Idem.
Idem, station (uéolith.].
Idem.
Idem, station (néolitb.).
Puii8-la.Vallée,
Canton de Froissy.
Haches (néolithiques) Musée de
Beauvais.
Canton de Liancourt.
8«cy-le.Pelit.
IWntel.
^t*Martin-Longueau .
Brenouille.
Catenoy.
Sacy-le-Grand.
Qnqueux.
l^Ajeux.
XLIV* SESSION,
Tumulus détruit?
Station (néolith.)*
Silex (néolith.), bronze.
Menhir ou bloc naturel?
Station, atelier, camp, tumulus
(Ouvrage de M. Ponthieux).
Silex, bronze, poteries, traces de
cité palustre, d'après le docteur
Baudon.
Haches et silex taillés (néolith.),
bronze.
Silex et bronze.
20
306
G05GliS AtCHiOLOGIOirS M FEASCB.
Canton de Smê-JÊOi'en'CkÊmnée,
Saint-Jost.
Brome et silex.
CmUan de Hmnf.
Bury.
Mouy.
HeiUe.
Hondainville.
Neoilly-s.-Cllennont
Saint-Félix.
Ansacq.
Découvertes néolithiques, hadie
en jaspe Tert.
Atelier du camp Barbet, trMes de
de cité palustre (Ou▼^^e da
docteur Baudon}.
Station néolithique.
Découvertes néolith., brome.
Idem.
Station inéolithiqoe).
Idem.
Coivrel.
Domfront.
Dompierre.
Perrière.
Blaignelay.
Moyenneville.
Montigny.
WacquemoulÎD.
Cuignières.
A ajouter :
Gisement palêolitAiqMe, alluvio^'
Idem.
Idem.
Idem.
Idem.
idem.
Idem.
Idem.
Idem à la suriaoe du sol.
Stations néolàkiques.
LeFiétoy.
lUT* SSSSION, A SKNUS.
307
Godenvillerd.
Monlgeraîo.
Tricot.
U Ployron.
FoorniTal.
Gaones.
ileiniUur-Bulles.
Rateoel.
Atelier.
ARRONDISSEMENT DE GOMPIÈGNE.
Altkhy.
Courtieux.
Haute-Pontainc.
Cuise-Lamothe.
Bilry.
Pierrefonds.
Retbondes.
Autrèche.
St-Pierre-lè8-Bitry.
Troely-Breuil.
Canton cfAtiichy.
Cromlech et silex (néolith.).
DOLMBN.
Haches, silex (néolith.).
Cromlech, silex (néolith.), menhir.
Menhir.
Découvertes (néolithiques), bronze.
Torques et autres bronzes.
Menhir.
Ossuaire préhistorique?
Menhir et cromlech.
Gompiègnc.
Clairoix.
Jaux.
Venette.
Canton de Compiègne.
Fcrél, quelques découvertes />â//a-
lithiques (type acheuléen), men-
hir.
Dolmen, silex (néolith.), poteries.
Ossuaire?
Haches, silex (néolith.).
308 CONGRÈS ARGHÉOLOOIOITB DB FRANGE.
Vieux-Moulin, St-Pierre-
en-Chastre. Silex (néolith.)» broûie, fer.
Canton d'EstréesSaini-Denis.
Francières.
Saint-Remy.
Hennevilliers.
Atelier ou station importa.--^
(néolithique).
Haches et silex (néolith.).
Id. Id.
Canton de Guiscard.
Grisolles.
Tombelle?
Beaugies.
Id.?
Guiscard.
Id. (plusieurs)?
Maucourt.
Id.f
(Il est difficile d'affirmer que
ces monuments sont préhisto-
riques. )
Berlancourt.
Silex (néolith.).
Chelles.
Id.
Villeselve.
Id. et haches.
Canton de Latsigny,
Gury.
Découvertes (néolithiques).
Roye-sur-Matz.
Menhir.
Lagny.
Tombelle.
Candor.
Id.et haches (néolith.).
Canton de Noyon,
Mondescourt.
Tombelle ?
XUV* SESSIOli, A 8KNU8.
309
P<uitoise.
Tombelle t
Babœuf.
Tumulus, ossements, poteries.
Gnndni.
Tombelle ?
Porqoérioourt.
Menhir ou bloc naturel ?
Villiere-sur-Coudun.
Dolmen
Ville.
Menhir et silex (néolith.).
^lency.
Tombelle ?
Apilly.
Deux Menhirs.
Bpetigny.
Menhir, station (néolith.).
Caisne.
Menhir.
Cut8.
Tombelles.
Canian de Ribécourt.
f^mprex.
TboaroUe.
IheslinoDurt.
Station (néolith.), bronxe.
Tombelle et station (néolith.).
Station (néolith.).
Canton de Jtesions.
Coudun.
Goumay.
Lataule.
Belloy.
Station (néolith.].
Bronze.
Station (néolith.).
Excavations circulaires?
ARRONDISSEMENT DE SENLIS.
Canton de Betx.
Neurchelles.
Rouvres.
Piécy-à-Mont.
Silex (néolith.).
Id.
Menhir phallique et légendaire.
310
CONOBiS ARCBÉOLOOIOUB DB FKANCE.
Rosoy.
Menhir.
Cuvergnon.
Menhir et station (néolith.).
Autheuil-en-Valois.
Station (néolith.) et découvcrtefl^
paléolithiques.
Thury-en-Valois.
Id.
Brégy.
Découvertes pûléolithiques.
Acq-en-Multien.
Silex (néolith.).
Boullare.
Id. et grès travaillés (néolith.).
BeU.
Station (néolith.).
Mareuil-8ur-0urcq.
Id.
Marolles.
Id. et découvertes paliolithique$.
Villeneuve - sous -
Atelier (néolith.) et découvertes
Thury.
paléoliihique$.
Canton de Creil.
Précy-sur-Oisc.
Station (néolith.) et gisement
paléolithique.
Montataire.
Découvertes (néolith.) et bronze.
May sel.
Station (néolith.).
Tiverny.
Id.
Gouvieuz.
Station importante (camp), bronie.
Mello.
Bronze.
Nogenl-les- Vierges.
Grotte sépulcrale (silez), (néolith.)
et.bronze.
Cramoisy.
Station (néolith.).
Creil.
PaléolithiQue (alluvionl, station
(néolith.) très-importante.
Canton de Crépy-en- Valm.
Crépy.
Dans les bois, blocs pouvant être
considérés comme des menhirs.
ZUT* SESSION, A SENU8. ,
311
OntNiy.
Menhir, grotte sépulcrale, silex
(néolith.) et découverte paléoli-
thique contestable.
Onnoy.VUlien.
Menhir.
Trumilly.
M.
Attge^Sl-Vinoent.
Découvertes, silex (néolith.).
Béthisy-St-Piene.
Id.
Glaigoa.
Sépulture (néolith.).
Serf-Magoeml.
Grotte sépulcrale.
CanUm de NanieuiL
EnDanoiiTÎlle.
Menhir détruit.
Borat.
Menhir debout et tombelle
détruite.
Canton de Pont.
Brasseuse.
Découverte^ silex (néolith.).
Rohenral.
Tumulus, station (néolith.).
Verberie.
Station (néolith.).
Rhaîs.
Menhirs détruits et station
(néolith.).
Villeneuve.
Haches (néolith.].
Verueuil.
Bronze, poteries, fer, tumulus
(Musée de Senlis).
Poulpoint.
DoLMBif, bronze.
Fleurines.
Menhir, bronze.
St-Vaafl-de-LoDgmont. Bronze.
Reray . Haches (néoli th . ) .
312
GONORÈS ARGHÉOLOGIQUB DB FBARCK.
Canton de Sentis.
Thiers.
Découvertes, bronze et hacbe^
(néolith.).
Barberie.
Stations et silex, épars (néolith.)^
Sentis.
Silex (néolith.), épars, cromlech et
menhirs dans la forêt.
Monl-rÉvéque.
•
Silex nombreux (néolith. )et décou-
verte paléolithique (Musée de
Senlis et nos col'ectiohs).
Montépilloy.
Silex et haches (néolith.), bronze.
Ruily, près Bray.
Atelier (néolith.) et bronze, fer.
Chaînant.
Dolmen, silex (néolith.).
Ognon.
Silex, haches néolith. (nos collec-
tions).
La séance est levée à cinq heures et demie.
JEUDI 31 MAI.
Excursion à Compiègne.
L'excursion faite à Compiègne, occupera une place
toute particulière dans les vieilles annales et les plus
brillants souvenirs du Congrès. La Société historique de
cette ville lui tendait avec la plus courtoise amabilité une
main confraternelle, et c'était pour lui, ainsi que pour la
XifY^ SESSION, A SENLIS. 313
Société rrançaîf« d'Archéologie, un sujet d'allraction plus
pnisMot encore que les magnificenoes artistiques et monu*
luenlalGS de la noble cité.
Aussi environ soixante membres du Congrès, fidèles au
reudcï-vous, arrivaient le malin h la gare de Compiègnc».
"ù ils étaient reçus par M. Bottier, présidcut de la Société
historique; M. le comte de Marsy, le sympathique cl
«léîoué secrétaire de cette compagnie, MM. de Roucy, du
LaCi Sorel, etc., empressés à se constituer les guides obli-
jreiotsdu Congrès (1).
Sous leur direction on a immédiatement visité, dans
uo ordre parfait, une première série des monuments,
lii léte du pont où fut prise Jeanne d'Arc, la grosse
tuurditcde Charles h Chauve, les magnifiques salles sou-
lerraines de l'Hôtel-Dieu, les anciennes maisons de bois et
les anciens hôtels les plus curieux de l:i ville, Téglisc
Saiul-Autoine, l'ancienne église de Saint-Pierre et les
cloîtres de l'abbaye de Saint- Corneille. Pour clore cette pre-
■
mière partie de la journée, le cortège, augmenté d'un cer-
tain nombre de confrères arrivés de difierents points par
d'autres trains, se réunissait à onze heures et demie autour
d'un déjeuner réconfortant, à l'hôtel de la Cloche, sous la
bienveillante présidence de M. Bottier, qui a complimenté
le Congrès dans les termes suivants :
Messieurs,
c La ville de Compiègne est fière de vous posséder dans
SCS murs. Mais il appartenait surtout à la Société histo-
(I; N'oublions pas de dire ((lie, ^lÂoe à une altoiilion délicate,
rtia|iM* membre, enanivant» se trouvait m possession d'un ancien
plan de Oimpiègue, qui le nicttait à même de se faire immédiate-
314 CONGRÈS AEGHÉOLOGIQUB DB PEAHGB.
rique, à cause des liens de confraternité qui nous unisMD
de vous souhaiter la bienvenue, et de vous exprimer to!
ses remerctments. 11 m'est bien agréable d'être Tinta
prête de ses sentiments, et de vous dire qu'elle n'est pi
moins charmée qu'honoréô de votre excursion à Gon
piègne.
a Le bassin de l'Oise que vous parcoures dans vd
XLIV* session, offre un immense intérêt au point de vi
historique et archéologique. C'est à la fois le berceau de
féodalité et du style ogival. C'est là que, depuis le cou
ment une idée de l'état de la ville, il y a on siècle et demi. (
plan était renferme dans un carton portant d*un côté :
La Société historique de Compiègne au Congre» jireké
logique de France. Jeudi 34 mai 4877.
De l'autre, on lisait :
ITINÉRAIRE.
Tète du pont où a été prise Jeanne d'Arc.
Grosse tour dite de Charles-le-Chauve.
Hôtel-Dieu. (Salles souterraines et chapelle).
Anciennes maisons de bois.
Église Saint-Antoine.
Hôtel des Rais; Cour le Roi.
Cloîtres de l'abbaye de Saint-Corneille.
Déjeuner à onze heures et demie, à Thôtel de fa Cloche.
Église Saint- Jacques.
Promenades au Parc, à TExposition, etc.
Rendez-vous au Palais, à deux heures et demie.
Musées Kmer et Gallo-romain, Galerie Ide tableaux, Gran*
appartements.
Porte de TArsenal.
Hôtel de ville. — Musée Vivenel.
XUY* SESSION, A 8ENU8. 315
mcDcement do notre antique monarchie ont séjourné nos
rois; c'est là aussi que le moyen âge se fait remarquer
par un plus grand nombre de monuments militaires ou
civib, et que les églises gothi([ues s'illustrent par un
canctère, par un cachet de pureté et de grâce qui ne se
reocontrent peut-être pas ailleurs.
■ Ces temples d'un style si hardi, si nerveux, si sévère,
ii majestueux, quoique en même temps si svelte, si élancé,
$i aérien, et qui ne s'en harmonise pas moins bien avec des
proportions souvent gigantesques, il n'y a qu'un sentiment
<iui puisse en expliquer la conception et l'exécution, qui
puisse expliquer la conception et l'exécution de ces mer-
veilles, c'est le sentiment religieux, c'est l'inspiration
divine, c'est l'enthousiasme chrétien.
i A Compiègne, en particulier, votre attention se fixera
notamment sur les restes de l'abbaye de Saint -Corneille,
fondée en 876 par Charles le Chauve; sur la grande tour
dépendant d'un palais bâti sous le règne du même
monarque; sur l'Hôtel-Dieu, qui est l'œuvre de la cha-
rité de saint Louis; sur l'hôtel de ville, qui date de la
tin du XV* siècle; enfin, sur les musées de la ville et du
château.
■ Que j'éprouve le besoin, à l'occasion de cette grande
réunion, de vous dire combien nous devons nous estimer
heureux d'avoir l'instinct, le goût, l'atlraclioni le culte
des choses de l'antiquité I Au-dessus des régions nuageuses,
trop souvent, hélas I grosses d'orages, où l'âme saturée de
fieU enfiévrée, haletante d'ambition ou d'orgueil, cft en
proie au chancre qui la dévore, j'aperçois notre but, notre
objectif, notre perspective, notre horizon. Vous surtout,
Messieurs, les princes de la science archéologique, dans la
sphère sereine où vous êtes placé, mieux que personne,
TOUS pouvez me comprendre.
310 CONGRÈS ARGHÉOLOOIOUB DE FRANGE.
a L'archéologie, c'est de l'histoire, car, à chaque décoU'
verte, correspond souvent un fait historique; c'est deThiâ^
toire vivante, la plus sûre, car des choses qui ne meurerJ ^
pas, sont marquées à son éternelle empreinte; c'est 1^
meilleure, car clic no s'appuie pas seulement sur la tra^-'
dition orale, qui n'est que le reflet de la mémoire de^
hommes; elle ne s'appuie pas seulement sur des faits acci^
dentels, passagers, sur des événements plus ou moius
fugitifs dont le tcmp^ emporte la trace; mais elle est tou-
jours là; elle s'incarne dans le hronze, dans le fer, dans le
bois, dans le marbre, dans la pierre, dans la terre, par*
tout, enfin, dans ce qui a vécu.
a il en découle ceci, c'est qu'elle est le plussolidevéhicule
de la saine, de la vraie, de la bonne tradition, l'auxiliaire
le plus utile de l'histoire proprement dite qu'elle explique,
qu'elle commente, qu'elle rectifie, qu'elle complète, alors
qu'elle ne la remplace pas. L'histoire, aussi, lui rend
d'importants, de nombreux services; et très-souvent elles
se prêtent un mutuel appui : — sur ce terrain, elles sont
Rœurs jumelles; elles se donnent la main. L'archéologie a
sans doute dos obscurités qui sont parfois des pro-
bl(>inos difficiles à résoiulrc, des mystères môme inson-
dables, — combien, en clfet, il y a à deviner, à fouiller, à
creuser, à exhumer, à évoquer I Puis, vient l'heure de
catégoriser, d'individualiser, de biographiser, si l'on peut
s'exprimer de la sorte, chacun de ces fragments, chacun
de ces objets, tantôt éparpillés, tantôt confondus pèle-
mêle dans la poussière des siècles. 11 ne s'agit donc
pas seulement, à furce de veilles, d'investigations, d'élu*
cubrations, de patience, de ressusciter le passé, de faire
sortir la vie de ce qui semblait être le néant, de rendre
lu vie à tous ces débris; mais il faut, de plus, la mettre
à sa place en leur appropriant la physionomie distinc-
XLIV* SESSION, A S£NU3. 317
tite qui les caractérise , en leur donnant comme une
âme et une voix; il faut de plus, classer la lumière à
travers toutes ces ténèbres, pardonnez-moi la hardiesse
^ pareils termes.
■Quoiqu'il en soit, même dans les situations les plus dif-
ficiles, les plus complexes, les plus souterraines, par les
déductions de la science approfondie, par des rapproche-
ments rationnels, par des combinaisons logiques, sérieuses
gai n'empruntent rien à l'aventure, par d'ingénieuses
comparaisons, par des efforts presque surhumains de
Te^prit et de la volonté, on parvient souvent à s'élever au-
dessus des hypothèses, au-dessus des conjectures, et jus-
qu'au niveau de la pure vérité.
flC'est ainsi, par l'accomplissement de cette tAchear due,
immense, incommensurable, qu'on arrive à reconstituer
toute l'antiquité.
« N'est-ce pas le cas de rappeler ici les services multiples,
variés, éclatants rendus par le Congrès archéologique qui
a sauvé tant de monuments du vandalisme, de la pioche
des démolisseurs et qui a empêché d'en déshonorer tant
d'autres?
«Enfin, sans parler ici de la géologie et de l'anthropologie,
Tarchéologie, dans son domaine inépuisable, a aussi les
liens les plus intimes, les affinités les plus profondes avec
l'ethnographie, cette science si vaste, si belle qui embrasse
la vie physique et morijle des peuples. A vrai dire, elle en
est sous plus d'un aspect le principe générateur, la clef et
le pivot.
« Que de richesses, que de trésors accumulés dans les
œuvres des.archéologues ! Quel héritage pour la postérité!
On ne vit pas seulement avec ses contomp(»roins, dans c
cercle étroit du présent; on vit surtout des actes du passé;
de la pensée, des sentiments, de l'inspiration, des souve-
318 GOKGEÈS ÀRGHÉOLOOIOUB DB FRANCE.
airs qu'ils provoqueut ou qui s'y rattacheat. C'est là to^^
à la fois, la force et le charme de l'humanité; la irie, p^^
là, est décuplée.
ff Ils sont donc bien dignes d'admiration, de respect et d^
reconnaissance, les hommes illustres qui se sont dévoués
à la science archéologique, qui en ont fait la noble passion f
l'honneur et la gloire de leurs études.
ff Dans des genres qui diflèrent un peu entre eux,
quoique dans le même ordre d'idées , qui ne se souvieat
des noms, de Vaillant, de d'Agincourt, tous deux enfants
deBeauvais, de Lebeut, deBonamy, de Montfaucon, de
Gaylus , de l'abbé Barthélémy, de Millin , de Lenoir, de
Quatremère de Quincy, de Du Sommerard, et surtout
d'Arcisse de Caumont, dont Torganisation fut toute archéo-
logique, tant l'amour de l'antiquité était natif en lui;
de Caumont qui, par son esprit d'étonnante initiative
et de vulgarisation qui rayonoe dans toute la France, par
l'héroïsme de ses incessants labeurs qui ont usé sa vie, par
des écrits admirables, a donné une si vigoureuse, une
si féconde impulsion à celte grande branche des connais-
sances humaines. Combien doit être vénérée et bénie la
mémoire de mon immortel compatriote! Heureusement,
Messieurs, il se trouve, parmi vous, des imitateurs et des
continuateurs de Caumont, qui sont aussi animés d'un
zèle ardent, et qui, eux aussi, ont le feu sacré du génie
archéologique.
« Permettez -moi, en finissant, de former un vœu et d'ex-
primer un des plus vifs désirs de la Société historique de
Compiègne, c'est de voir, d'ici à une époque peu éloignée,
le Congrès archéologique tenir ses assises daqs notre ville.
— Elle sera heureuse d'avoir à enregistrer cet honneur et
d'en garder le souvenir dans ses annales.
« Permettez-moi, aussi, de porter un toast au Congrès,
ZLIV* SESSION, A SKNLIS. 319
tt ginénl, et, en particulier, de boire à la santé de
M. Léon Palustre, qui en est le si savant et si digne
'ineteor. >
Après cette allocution qui a été, à plusieurs reprises,
interrompue par des marques d'approbation de tous les
membres du Congrès, et dont la fin a été accueillie par
ém applaudissements et des acclamations unanimes,
M. Palustre, au nom de la Société française d'Archéologie,
I remercié la Société historique de Compiègne de son
sympathique et brillant accueil, ot l'un des convives s'est
bit aussi Tinterprète de la gratitude générale en portant
un toast aux dames qui, par leur gracieuse présence, ajou-
taient un charme de plus à la réunion.
Une promenade dans le parc du château et à l'Exposi-
tion organisée pendant le Concours régional , a précédé le
rendei-vous donné à deux heures et demie au musée Kmer,
installé au rei*de-chaussée du palais. Le musée Kmer ou
cambodgien, reflet d'une civilisation asiatique disparue,
est unique en Europe par l'étrangeté de ses monuments,
produits d'un art qui, tout en conservant son caractère
spécial, ofire parfois des réminiscences de l'art assyrien,
de l'art romain , et de vagues préludes de la Renaissance.
Ç*a été une rare bonne fortune pour les hôtes qu'il rece-
vait, de le parcourir sous l'attachante direction de M. de
Harsy, dont les explications ont fait regretter qu'un
plus long examen n'ait pu être consacré à cette collection.
Si les richesses du musée Kmer se composent d'objets
éminemment exotiques, la salle supérieure contient, en
revanche, un musée gallo-romain qui, entre autres mérites,
a celui d'être éminemment local. Là, on se trouvait
en plein domaine de M. de Houcy, le perspicace fouilleur
de Champlieu et de ses environs, et nul mieux que lui ne
320 CONGRÈS ARCUÉOLOGIOUB DE FRANGE.
pouvait faire connallre, comme il Ta fait, les produits à^
ses explorations qu'on avait sous les youx.
La visite des grands appartements du château , décorés
d'objets d'art d'une époque plus récente, céramique de
Sèvres, tableaux de l'école Française, splendides tapisserieSy
a été comme un intermède habilement ménagé entre le
musée archéologique du palais et le musée Vivenel,
établi dans l'hôtel de ville, le bijou des monuments de
Compiègne, rendu par M. Laflblye, à la pureté et ù l'élé-
gance de ses premières lignes architecturales.
Le musée, dont est lière à si juste titre la ville de
Compiègne, a été formé pur l'un de ses citoyens, passionne
pour l'amour des arts et de l'antiquité, Antoine Vivenel,
qui le donna à sa ville natale en 1843.
0 Cette collection, dit un éminent publiciste dans un
remarquable aperçu sur la ville de Compiègne, est une
encyclopédie abrégée de tous les arts, dans tous les temps
et chez tous les peuples. Sculpture, peinture, céramique,
verrerie, ameublement, panoplie, serrurerie, bijouterie,
orfèvrerie, émaux, curiosités égyptiennes, imloues, chi-
noises, japonaises, médailles, glyptique, il n'y a pas une
création du génie humain qui ne soit glorieusement
représentée au musée de Compiègne. »
La courtoisie de MM. les menibres de la Commission
qui veille à la garde de ces richesses et qui a M. de Marsy
pour secrétaire, est trop traditionnelle pour qu'il soit
besoin de dire avec quelle grâce, quelle aimable érudition
ils ont fait au Congrès les honneurs du lieu, tant dans la
magnifique salle des objets du moyen âge et de la Itenais.
sance, que dans la salle des antiquités. C'est dans cette
dernière, où un punch avait été servi par les soins de
MM. du Comité historique, que Ton a attendu le moment
du départ, fixé à six heure?, et qui mettait fin à cette
Porte de l'arsenal de Compiègae.
iD'iprèi un deuin eumerrt aui ArebiTef munklpiln.]
ZUV* SESSION, A SBNLIS. 321
îoarnée, dont chacun emportait le plus précieux souve-
nir, en témoignant sa gratitude pour ceux qui l'avaient
^DrgmiBée.
Hôtel de ville de Compiègne.
Par M. le comte de Marsy.
SOMMAIRE ANALYTIQUE
^- lotroductioD. ^ S. Sources du traYail. — Première maison
<k ville et donation de Jean Loutrel. — 4. Emplacement. ^
5. Aspect géuéral. — 6. Construction du nouveau bâtiment.
Hao^ dnrée des travaux. — 7. Fondations, caves. — 8. Maté-
riinx. — 9. Maçonnerie. — 40. Charpente. — Extérieur:
H. Porte. — 4Î. Décoration de la façade. — 43. Couver-
tore, comble. — 44. Beffroi. — 46. Lion du beffroi. —
46. Horloge.— 47. Cloche.— 48. Appeaux.— 19. Picantins.—
Intérieur: ÎO. Kscalier. — îl. Distributions successives.—
îl Antichambres. — 23. Salle d'Assemblées. — 24 Chambre
do Conseil. — 25. Premier étage. — 26. Ècritoire. —
27. Archives. — 28. Arsenal.— 29. Cuisine.— 30. Dépenses. —
Bâtiment de ia Justice consulaire: 34. Acquisitions. —
32. Construction et décoration, intérieur, cabinet. — 33. Porte
de l'arsenal. Bâtiment neuf de la Caisse d'épargne. —
U. Bâtiment de la rue des Pâtissiers. École de Dessin.
i . Introduction,
Lors^iue, quittant Paris, ou se dirige vers le Nord, Thô-
XLIY* SESSION. 21
323 GONORÀS ARGHÉOLOOIQUE D£ FRANGB.
tel de ville de Compiègne inaugure brillamment la série
des édifices construits au xv* et au xvi* siècle par les
municipalités dans les principales villes de la Picardie et
des Flandres (1). Ce monument a été décrit déjà avec soin
par M. Verdier, qui en avait entrepris la restauration (2),
mais nous avons pensé que l'histoire de sa construction et
des modifications qu'il a subies pourrait offrir un certain
intérêt, et c'est ce que nous allons essayer de retracer dans
ces notes.
2. Sources du travail.
M. de L'Épinois^ qui a rédigé l'inventaire sommaire des
archives de Compiègne, disait dans un travail qu'il a pu-
blié à cesujet (3)qu*en compulsant les registres des comptes
municipaux, il serait possible d'établir presque exacte-
ment le chiffre de ce qu'avait coûté la construction de notre
hôtel de ville. C'est ce que nous aurions désiré faire; mais
après avoir relevé toutes les mentions que nous fournissent
les comptes, nous avons reconnu que trop souvent les dé-
penses relatives aux travaux de l'hôtel de ville se trou-
(h) L'hôtel de ville de Noyon date de 4 485 et la grande galerie
de 4523 seulement, celui de Saint-Qucutin de 1509. Il est &
remarquer qu'aucun des historiens ou des voyageurs des deux
derniers siècles n'a consacre même une ligne à la description de
l'hôtel de ville de Compiègne.
(%) Verdieretl'altois, .-ire ht lecture ci vile et domestique, t. r»".
M. Larfolyc, qui a oxéciité la seconde restauration, doit pro-
chainement publier ses dessins avec une courte notice descrip-
tive (Lib. Morel).
(3) Bibliothèque de l'École des Charles, t. XXV, p. Ul,
1863-64.
XLIY* SESSION, A SENLIS. 323
niflot confondues avec celles qui concernent les remparts,
kl portes, les chaussées et les autres bâtiments munici-
piu (I); aussi avons-nous renoncé à ce projet et nous
bonerons-nous à donner un certain nombre de mentions
pennettanl de fixer la valeur des différents matériaux et
le lalâire des ouvriers appelés à prendre part à cette con-
UroctioD.
3 Première maiton de ville et donation de Jean Loutrel.
Jusqu'à la fin du xiv* siècle, nous ne pouvons indiquer
exactement quels furent le lieu de réunion des gouverneurs
iUouniés chargés de l'administration de la ville, et ie
<iépôt des archives et du matériel de guerre delà cité. Nous
iommes autorisé toutefois à supposer que ce local, s'il
existait, ne devait pas être brillant, car en 1397, un bour-
geois, nommé Jean Loutrel ou Loutre^ légua à la ville
qu'il habitait deux maisons situées sur la place au Blé et
les affecta au service de la ville. Ces deux maisons occu-
paient l'emplacement du bâtiment principal de Thôtel de
[<i Que n*avoDS-DOus aussi les petits feuillets de papier, veut
tt rendus par le receveur et qui contenaient eu détail les
■emoires qu'il ne (ait que résumer, ainsi que les mande-
neots motivés des gouverneurs? nous trouverions là de précieux
Koseigoements sur les travaux exécutés à notre hôtel de ville;
grice i eux, nous pourrions reconstituer exactement le devis et
le oioDlant des dépenses, tandis (|u'il nous est impossible d'es-
sayer un semblable travail, quand nous trouvons dans le même
article du compte, du bois pour les feux de joie, des pierres pour
les lotisses, des cailloux pour les routes, des pourboires aux
soooeurs, des dîners aux (gouverneurs et un à-compte i uo tail-
leur d'images.
32i CONGRÈS ARGHÉOLOOIQUE D£ FEANGB.
ville actuel. On les connaissait sous les noms de la grande
et de la petite, cette dernière est désignée comme située
lez-là Cloche.
La ville fut reconnaissante à Jean Loutrel de la donation
qui lui était faite et elle fit célébrer chaque année un
obit en son honneur à Téglise Saint-Jacques; nous trou-
vons, dès 1427, de nombreuses mentions des sommes payées
à cet effet, sommes qui s'élèvent en général à 42 sous
parisis par an (1).
Ces maisons n'étaient pas pour la ville d'une utilité in-
dispensable, sans doute à cause de leur mauvais aména-
gement; aussi, après avoir réservé ce qui était nécessaire
pour mettre les archives et conserver les poudres et l'artil-
lerie, les attourués louaient-ils le surplus. Cet état de
choses dura ainsi pendant la plus grande partie du xv"
siècle [^), De fréquentes réparations furent faites aux
bâtiments légués par Jean Loutrel.
Kn 1464, par exemple, on consolida les chapiteaux avec
du plomb neuf, de Testai n d'Angleterre et de la poix de
Bordeaux (CG. 22).
(1) ce. 13, ce. 36 f« 63. Archives de Compiègne. Afin d'évi-
viter des répétitions, nous donnerons seulement les lettres de
l'inventaire et les folios des registres.
(t) « Dans les premières années de la donation de Loutrel, les
attournés paraissent cependant s'être réunis dans l'hostel com-
mun, ainsi qu'on l'appelait. Nous trouvons en effet difTêrentes
dépenses se rapportant à des acquisitions relatives à son ameu-
blement. En 1408, a une nale contenant de long XIIII piez et
de lé sept piez, pour metire en la Chambre de la ville, dessoubz
le comptoir. » (CC. 8.) En 1440, un tapis de Hongrie, « pour
trois aulnes de drap vert achetez d'un marchant tongrois, |)our
mettre sur la table et comptoir de la (^haïuhre de la ville, au
prix de 10 s;>i!S par aulne > iCIC. 18. d'après TËpinois )
,»
ZUT* SESSION, A SENLI8. 3)5
Un iooendie aliumé eu mars 1466 par mèche f^n détrui-
sit Qoe partie, malgré les secours apportés par des ouvriers
qui réussirent à l'éteindre et furent gratifiés pour ce mo-
tif d'an don de 54 sous (1). Les réparations faites à la suite
de cet événement s'élevèrent à 72 livres (2).
Mais, en 1499, les choses étaient arrivées à un point
td qu'il fallut songer à une réédification complète; dans
une assemblée tenue au mois de janvier, on décida qu'il
était nécessaire de reconstruire l'édifice, attendu que les
OMnbles, qui étaient depuis longtemps sur étais, fondaient,
ûisi que le mur et le pignon de la chambre de derrière
sur le jardin.
Le bâtiment qui fut alors construit est celui que nous
ToyoDs aujourd'hui et qui n'a subi depuis cette époque que
des modifications qui n'ont pas altéré sensiblement le
caractère primitif de son architecture*
On commença par démolir le grand corps sur rempla-
cement duquel devait s'élever le nouveau bâtiment. Les
nutériaux furent mis à part, soit pour être utilisés à la
nouvelle construction, soit pour être vendus.
Le 9 août 1505, le receveur donne mandement de
Mivres parisis aux plâtriers qui ont o découvert et mis à
point au jardin de la ville, toute la thuille du grand corps
d'ostel d'icelle ville, ensemble des maisons où demeuroient
Yvon HoUet dit le Breton, et feu Jehan Laudigeois (3). »
Peu de jours avant on avait vendu à Jehan Carrière le
jeune, marchant mercier, le bois de Tuu dos combles de
l'ostel de ville, pour laquelle a vcndicionct délivrance à luy
(OMss. Léré, d'après Charmolue.
2! Id.
(3) ce. 76, P» 422 V. le prix de 8 livres avait été fixé par un
Barché.
326 CONGRÈS ARGHÉOLOOIQUE DE FRÂKGB.
Caitte, comme au plus offrant et dernier enchérisseur, le
tiers jour du mois d'avril 1505, par Monsieur le lieute-
nant de Monseigneur le bailly de Senlis, ■ il payait 4 livres
parisis (i).
Les deux maisons dont nous venons de voir démolir la
toiture étaient louées par la ville, la première dite la petite
maison de l'hôtel de ville, moyennant 60 sous parisis à
Yvon Holiet, povre homme, et la seconde à Jehan Bucquet,
clerc de l'hôtel de ville, moyennant quatre livres parisis;
mais les gouverneurs leur accordèrent la remise de ces
sommes « en considération de ce que l'on a desmoly ledit
hostel et la petite maison d (2).
4. Emplacement.
L'hôtel de ville était compris dans un tour (3) auquel il
donna son nom. Ce tour, qui comprenait non -seulement
l'hôtel de ville, mais cucore quelques habitations particu-
lières, avait les limites qu'il conserve aujourd'hui et étai
compris entre la place de rHôlel-ile-Villeet les rues actuelles —
de la Surveillance, Saint-Jacques et lîes Pâtissiers.
La place de rHôuldc-Ville portait alors le nom de plad
du Marché au Ble. qu'elle n'a quitté qu'en 1749; la ruede\
Pâtmiers était qualitiée de rue de la Meuse et la rue de /(
Surteillance était alors n.e de l' Image i).
L*hôtol de viP.o avait une porte donnant dans l'im
;i'CC. 76. f-^Ti.
vl (T.. 76. f* «50 V. et IM.
(."^ On di^ii:njt]i ^ Compiecoe, sous le Dom de tour, chaqu
p&lé ou iloi do maisons.
(4^ .\ul>Pf lioque. Rvef, hôtels et quartiers de Compiègn
I. 1^ du Bulletin de U SvVieic historique.
ZLIY* SESSION, A SENUS. 327
deTanenal ou de l'ancienne prison, appelée alors me
M9ulgard{i).
La place qui se trouvait devant Thôtei de ville était pavée :
«A Laurent Holet, paveur, demeurant audit Gompien-
foeaesté paiée la somme de 72 sols 4 deniers parisis pour
ti quantité de 31 toises de pavement qu'il a faites au devant
<k l'o8tel de ladite ville et de la maison de Pol Dambrine,
qQ'estoit pris de 2 sols 4 deniers parisis la toise, n
U y avait devant l'hôtel de ville un puits que nous
^ODs mentionné dès 1514, époque où on emploie des
pierm cpour sa perfection (2 j. » En 1521, Jehan Richier,
nuçoD, reçoit 40 sols parisis pour avoir fait les marches
<lecepuiU(3).
Il existait encore dans les premières années de ce siècle.
Ploi tard, il fut remplacé par une pompe dont le corps fut
placé contre le mur de l'hôtel de ville, à l'endroit occupé
actoellement par la porte d'entrée (4).
5. Aspect général,
La seule partie visible de l'hôtel de ville est la façade. Elle
(t) II. Aubrelicqae rappelle nielle Mangard, mais le passage
on Doos trouvoDS écrit Maulgard nous permet de rectifier celte
iectore. Dans sa notice sur les anciens quartiers de Corn-
fiègne, M. Z. Rendu l'indique comme ayant porté aussi le nom de
ne Margotte.
lijCC. 36, 1544-1bl7, f» 117.
(3) ce. 37, A» 477 {27 février loîO. V. S).
:4) Cette pompe est figurée sur les dessins de Thôtol de ville
eiKotésdc 1830 & 18o0 environ, et notamment sur la remar-
quable aquarelle de M. Langlois (1841), donnée depuis peu au
Masée Vivenel.
328 GONGBÈS ARGHÉOLOOIQUB DB FaANGB.
06 compose : i ** d'un rez-de-chaussée, percé de quatre feoèU
carrées, à angles émoussés, avec moulures prismaliqi>
et frontons à feuillages. L*une des fenêtres était ouvei
au-dessus de la porte d'entrée (1); 2^ d'un étage percé
quatre fenêtres de même forme que celles du rex-d
chaussée, mais plus ornées, séparées par des niches à è
délicatement sculptés, et au-dessus duquel régnent u
double corniche de feuillages et une balustrade à joi
avec moulures flamboyantes. De petites ouvertures méi
gées au-dessus de ces fenêtres donnent du jour, à un éU
bas, désigné par plusieurs architectes sous le nom
mezzanino. Au devant du comble, couvert en ardoîi
éclairé par deux grandes fenêtres en pierre surmont
d'ornements à jour, et percé à sa partie supérieure
petites lucarnes garnies en plomb, se détache le beff
central, surmonté d'un toit pointu et accompagné d'échf
gruttes ou tourelles également couvertes en ardoise.
Aux deux extrémités de la façade se trouvent des to
relies octogones (2).
(1) Cette dis[)osillon a ct(S modifiée lors de la restauration
M. Verdier. Dans une descripiion pittoresque de l'hôtel de v
publiée dans l'Artiste, en 1809, M. Charles Beauriu insiste
rimportance que rarcliitecte avait dû attacher à Tirrégulai
de la façade, à la porte mise de côté, à la différence de larg
des entre-deux des fenêtres. Il cherche à y attacher une \{
symbo1i<iue; nous croyons simplement «(uc le constructeur s'
d'abord préoccupé de remplir son but, qu'une fois son plan î\
il a donne du jour aux pièces qui en avaient besoin , et al
seulement, le décorateur a placé ses niches, ses guirlandes
iQ& ornements dans les endroits restés libres sur la façade.
(2) Nous ne possédons pas de dessins anciens de Thôtel
ville. La preiaiëre vue que nous en connaissons est celle qa
XUY* SESSION, A SENUS. 3S9
La façade de l'hôtel de ville a U mètres de largeur, et
été exécutée vers 4780 et qui figure dans le Voyage pittoresque
de la France, de Née et de Laborde.
Nous citerons ensuite :
4. Dessins grossiers, exécutée par Léré de 1815 à 4830, bons
à consulter seulement pour établir l'état du monument à cette
époque.
2. Vue dessinée par Rauch et gravée par Schrœder, pour
V Histoire des environs de Paris, de Dulaure.
3. Lithographie de Leradde, pour V Album du Nouvelliste
de Compiègne, 1839.
4. Lithographie de Deroy, pour Compiègne et ses environs,
d'Ewig.
5. Giavure sur bois, d*après un dessin de Desmarest. Maga^
sin pittoresque de 4841 , p. 230.
6. Aquarelle, par Langlois (4841), aujourd'hui au Musée
Vivenel.
7. Lithographie de Viilemin , pour le Voyage dans l'an-
cienne France, du baron Taylor.
Une page du texte de cet ouvrage est encadrée dans une litho-
graphie de Blanchard, donnant la vue du beffroi et celle de la
porto de l'Arsenal.
8. Gravure sur cuivre, par Oury (vers 1845), planche dont
l^criginal est au Musée Vivenel.
9. Vue gravée par Pencl, d'après les dessins de M. Vcrdier,
dâos y Architecture civile et domestique,
10. Gravure sur acier, par M"™" Clément et A.-F. Lemaître,
pour V Histoire du palais de Compiègne, de Pellassy de
Ï'0asle(l860).
44. Dessins de M. Lafullye, exécutés pour la commission des
^<>ouments historiques et publiés dans V Encyclopédie d'Archi-
f^eure (1877), à la librairie Morel.
^ou8 n'indiquons pas en outre quelques dessins sans impor-
UDce figuraut dans des publications illustrées et qui ne sont que
^^ reproductions des types ci-dessus.
330 CONGRÈS ARGHÉOLOOIOITE DE FRANGE.
le beffnti, avaut la dernière restauratioa , avait une hau-
teur de 47™30 (I).
Le bâtiment de l'hôtel de ville de Compiègne s'écarte
en deux points du plan généralement adopté pour la cons-
truction des hôtels de ville dans le nord, non-seulement
de la France, mais de l'Europe. Il n*a pas de portique per-
mettant aux bourgeois de se réunir et de traiter soit des
afiaires municipales, soit de leurs propres intérêts; de
plus, le balcon, du haut duquel les officiers municipaux
avaient l'habitude de parler au peuple ou de faire faire des
proclamations, n'existe qu'à Tétat rudimentaire et consiste
seulement dans une petite saillie pratiquée à la galerie du
comble.
6. Construction du nouveau bâtimeni, plan, durée
det travaux.
Le style employé dans la décoration est celui de la der-
nière époque gothique, avec déjà certains des caractères
qui distinguent les monuments de la Renaissance.
Pendant longtemps, nous avions cru, ainsi que M. de
rÉpioois, que le nom de rarchitccte de l'hôtel de ville
de Compiègne resterait inconnu, lorsque nous avons trouvé
le passage suivant dans le compte des octrois de 141>9
à 1505. (CC, 70, 1^94.)
t A Pierre Navyer, dit de Meaulx, masson et maistre
des œuvres sur le fait de la massonnerie, audit Com-
piengne, a esté paie par ledit recepveur pour ses gaiges et
pension d'un demy-an, escheu au jour saint Jehan-Bap-
tiste mil cinq cens et cinq, à cause d'avoir veu, visitté et
regardé les ouvrai ges de massonnerie, qui s'estoyent faictes
(4) Woillcz, Répertoire archéologique de l'Oise, p. 4t4.
XUT* 8KSSI0N, A SENLIS. 334
aodiet Compiengne, durant ledit demy-an ; comme par
mindement desdits gouverneurs, le xxiii* jour de juing
1505, signé dudit Navyer, cy a esté payé trente sols
pirisis. »
Et dans le même compte, à propos de Tachât de cent
Mixante-quinze tonneaux de pierre pour la réédification
<kriiôtel de ville, fait le 6 mars 1605, on voit qu'ils ont
M • mesurés par Pierre Navyer, dit de Meaubc, maistre
ouvres dudit Gompiengne. (làid, f° 1 12.) d
Enfin, à un autre endroit, on voit Pierre de Meaulx,
commis, avec plusieurs autres experts, pour examiner la
question de mitoyenneté d'un mur de la maison de Pol
I^imbryne, touchant à l'hôtel de ville.
Ne sommes-nous pas autorisé à supposer que ce maître
ès-œuvres, dont nous ne voyons l'existence qu'à cette
seole date, peut être l'auteur du plan et le conducteur des
travaux, en un mot l'architecte de notre hôtel de ville?
Peut-être nous objectera-t-on la modicité du traitement
fui lui est alloué; mais qu'il nous soit permis de faire
remarquer qu'il est en rapport avec le chiffre des gouver-
neurs et des principaux officiers de la ville, et dont les
plus élevés n'atteignaient que dix livres.
De ce que Pierre Navyer ne figure plus sur les comptes
suivants, peut-être pourrait-on inférer qu'il a quitté Com-
piègne, ou cessé ses fouctions du moment où les travaux
de maçonnerie ont été très-avancés; et nous voyons par les
quantités de pierres apportées au commencement de 1505
et par les sommes payées aux maçons pendant la première
moitié de cette année, que les travaux du gros œuvre
devaient être presque achevés avant l'automne de 1505(1).
M) Il nous semble utile de rappeler ici les noms des ofGciers
maDJcipaux de Gompiëgne qui se sont occupés de la constructioa
332 CONGRÈS ARGHÉOLOOIQUE D£ FAAMCB.
Ces travaux furent exécutés par un grand nombre d*ou*
vriers de divers corps d'état, qui paraissent avoir travaillé
en quelque sorte isolément. Nous trouvons pourtant, pour
la maçonnerie, deux entrepreneurs, Hutin Damery et
Enguerrand Blondin, auxquels on doit, croyons-nous,
attribuer la plus grande partie de ces travaux.
De fréquents paiements leur sont faits pour des sommes
assez importantes (1). Au mois de juin 1505, Hutin
Damery reçoit « une somme de deux cents douze livres
parisis sur et tantement du marché et ouvraiges de mas-
sonnerie qu'il est tenu faire en l'ostel de la ditte ville,
comme par quatre mandemens donnés desdits gouver-
neurs, les 12 mars 1504 (1505), 6 et U avril, et 23 juin
1505 (2); et le 13 octobre 1511, il est payé à Enguerrand
Blondin la somme de cent solz parisis sur et tantement
des ouvraiges de maçonnerie qu'il a faits et fait encores à
l'hostel de la ville et sans préjudice d'iceulx répéter sur
et des agrandissements de Thôtel de ville, en attendant qu'un
jour une inscription placée dans Tune des salles de cet édiûce
consacre leur souvenir, ainsi qu*on Ta déjà demandé à plusieurs
reprises. Lorsque les travaux furent décidés en 1499, les trois
gouverneurs attournés étaient : Nicolle de Hênaut, Adrien Cliar-
molue et Pierre Morei. En 1505, Laurent le Tondeur, Jehan
Champion et Nicolle de Pronnay; de 1505 à 4508, Florent Mur-
lot, Jehan de la Vie et Jehan Champion; et de 1508 à 1511,
Laurent le Tondeur, Jehan Champion et Robert de Pronnay.
Lors de la construction du bâtiment de la Justice consulaire,
de 1653 à 1650, c'étaient René Potier, Louis Charpentier et
Henry Sergent. Enfin , les travaux de restauration et les addi-
tions faites depuis 1854 l'ont été sous les mairies de MM. Arache-
quesne, Fioquel, Aubrelicque et Lcveaux.
(1)CC. 35, fo'llî, 114, etc.
(î) ce. 76, foi 12 v.
ILIV* SESSION, A SENLIS. 333
la matiiiçons que Ton dit estre desdits ouvraiges (\). »
DiDs un compte précédent, il reçoit U sois parisis
« pour ses peines et sallaires d'avoir, par plusieurs
^ diràses fois, receu et tosé les pierres de Tostel de la
tille (S). >
Bien que les travaux aient encore continué pendant
plosieus années, au milieu de l'été de 1511, la construo-
tioo était achevée et on procédait à la réception des tra-
nnx.
« A Jehan Champion (receveur) la somme de six livres
'il sols parisis, qui, par ordonnance des gouverneurs, a
esté baillée, c'est ascavoir : 6 livres parisis à Guillaume
Cardon, maistre des œuvres en la ville de Beauvais, sur
le lait de maçonnerie, pour ses .peines d'estre venu de
ladite ville de Beauvais, en ceste ville, au mandement
deidits gouverneurs pour veoir et visiter l'ouvrage de
l*hostel de la ditte ville; et les autres dix solz parisis à
Jehan Massé, maçon, demourant en ceste ville, pour ses
peines d'avoir assisté avecques ledict Cardon à faire laditte
Visitation et rapport des mallefaçons, comme par mande-
ment donné desdits gouverneurs, le IG d'aoust 1511 (3).
Une vue cavalière de Compiègne plusieurs fois repro-
duite (4), et que l'on fait généralement remonter à 1509,
représente l'hôtel de ville achevé.
En novembre 1512, on régalait de vin les charpentiers
qui avaient élevé le faite du comble et on distribuait des
(<) ce. 35, 1^103.
'21 ce. 34, f»88, 4505-I50S.
3 ce. 35, f* 78.
(il Compiègne historique et monumental, (>ar Lambert de
Bailyliier; Histoire du palais, par Pellassy de l^OusIe, et Jeanne
334 G056EK8 AmCHéOLOGIOUE Bl VRAKCB.
oublies aux petits enfants, «afBn d'enestre mémoratif !..
Aussi, dès le 17 janvier 1513, on voit que les asflem-
blées des notables se tiennent de nouveau dans rhôlel de
ville (2).
La maison de Pierre Loutrel était entourée d'un certain
nombre de constructions, dont plusieurs ont continué à
subsister jusqu'à nos jours. En faisant les travaux néces-
saires pour la démolition et la construction du nouvel
hôtel de ville, les ouvriers causèrent à plusieurs d'impor-
tants dégâts, et nous voyons la ville indemniser leurs
propriétaires; c'est ainsi qu'elle paie à Huguet Fontaine
42 sols parisis pour amener le bois nécessaire à refaire
« les maisons Pierre Tborillon et Simon Monstier, qui
ont été démolies eu partie, en desmolissant Tostel de la
ville (3). » Ce Simon Moustier, valet servant la ville, dont
on trouve fréquemment le nom dans les comptes, reçoit
ailleurs une indemnité de 4 livres 10 parisis, « pour le
récompenser des louages de maison qu'il lui a convenu
louer pour demourcr l'espace de quinze mois entiers, à
cause que sa maison a esté en partye desmolie en faisant
les fondemens du mur de l'hostel de la ville (4). b
Une autre difficulté fut soulevée par Pol Dambryne,
sergent à cheval de la ville, au sujet de la mitoyenneté du
qui séparait sa maison de Thôtei de ville.
d'Arc, par Wallon (Ed. Didot). L'original appartient à M. le
vicomte de Saint-Maurice.
(1) ce. 35, f« U4.
(2; ce. 3o, fo 74. Les bàliments qui étaient restés de TaucieD
hôlel de ville, à l'exceplion de quelques-uns, tels que la cuisine,
furent démolis de juin à décembre 4514.
(3) ce. 34, f" 429. 1505-1508.
(4) ce. 34, f» 434 V. 4505-4508.
XUV* SESSION, A SENUS. 335
cA Pierre de Meaulx, Jehan iMassé, massons, Jehan
Raoquet, Jehan Rainesson, charpentiers, MahietDiée et
Pierre Vignereuz, plastriers et couvreurs de thuille, tous
csgards, jurez audit Compiengne, sur le fait desdits mes-
tiers, a esté paie, par ledit recepveur, la somme de vingt-
quitre solz parisis pour leurs salières d'avoir veu et visité
le mur devant l'ostel de la ville et la maison de Fol Dam-
bryne, assavoir, se il doit estre moictoyen ou non, parce
que ledit Pol veuilloit dire tout icelluy mur estre à sien
et non moictoyen... (Mandement du iâ mai 1505, CC. 76,
^ 1S3.) >
Un seul accident parait avoir eu lieu pendant la durée
des travaux, et encore ne fut-il pas mortel. La ville fait
payer à Jehan Porcher, charpentier, a la somme de vingt
loh parisis qui donnez luy ont esté pour luy ayder à
tivre et soy faire guérir de la chutte, qui, par fortune
luy est advenue du grant comble de l'hostel de ladite
tille (i).>
7. Fondationt, caves.
Les fondations de Thôtel de ville furent exécutées en
pierre de Margny, ainsi que les comptes nous en four-
nissent de nombreuses preuves. Par exemple :
« A Coliuet Sobier et Jehan Froissant, aussy carriers,
demeurans audit Compiengne, a esté paie par ledit recep-
veur la somme de cent douze solz parisiz à eulx deube
pour la quantité de quatre cens piez de pierres qu*ilz ont
esté tirer en la carrière de Margny, pour employer en la
0)CC. 35, ^93.
336 GONOEiS ▲aCHÉOLOOIOUB DE FRANGE.
fondacioQ de la tour et montée quy fut fait oudit hostel
de la ville, quy est au pris de xxviii solz parisis le cent. ^
(Mandement du 7 mars 4504 (1505) (i).
Il existait sous l'hôtel de ville des caves importanteSf
dont plusieurs sont aujourd'hui bouchées. Léré raconte
qu'en 4824, lors du percement d'un puits, on en décou^
vrit une à laquelle on arrivait par un reste d'escalier bou'
ché, dont la descente avait six pieds de largeur. Elle con^
sistait en une galerie voûtée de neuf pieds de haut sur
huit de larges, et se continuait pendant près de soixante
pieds. Comme beaucoup des caves de Compiègne, cette
galerie creusée dans la craie avait été abandonnée et n'était
point terminée par un mur.
Au xnr siècle, l'une des caves de l'hôtel de ville avait
son entrée sur la place; elle était fermée par une porte
pourrie, que Ton fut obligé de remplacer (DD).
Nous trouvons en i5i 3 et 1514 la mention des travaux
suivants : a A Jehan Massé, maçon, a esté pAyé la somme
de 18 livres 8 solz parisis pour son sallaire d'avoir des-
raolly la monthée plate de la cave de l'hostel de la ville,
et y avoir fait ung mur de six pieds et ung quart d'es-
paisseur, sur la haulteur de deux toizes, avecques une
arche qui conlrcboutte contre la grosse tour d'icelle hostel
et pour avoir aussi fait les pas de la monthée de la cave y
estant de présent (i) et plus au même, 12 livres parisis
faisant la parpaye de âO livres parisis à luy deue pour
avoir remply de maçonnerie la porte de l'hostel de la ditte
ville gictant sur le marché au blé; remply à masse le des-
soubz de l'allée d'icelle porte parce que la monthée étoit
mal fondée, aussy fait une croix d'augive au-des80ubz,
(<)CC. 76, f«n2, v.
(«)CC. 35. ^5H-<5U. f»n6.
XUY* SESSION, ▲ SENLIS. 337
et une hoisfierie pour venir d'icelle monthée à la diite
ilée(l).
8. Matériaux.
Les pierres employées à la construction provinrent soit
fa carrières de Saint-Leu et de la Joye, soit de celles du
Moot Saint-Mard. Elles arrivaient par la rivière, et la
ville payait séparément leur transport à des charretiers
OQ htrottiers.
Les fournisseurs furent surtout Jehan Martin, dit Des-
iou»^nt-Leu, carrier à Saint-Leu, Pierre Fillion, Lau-
Rotet CoUin des Prés, carriers des monts Saint-Mard;
Jeui Brouet, marchand carrier à Montataire-lès-Saint-Leu ;
Colinet Sohier et Jehan Froissard, à Margny-lès-Com-
piègne. Mais ces deux derniers n'ont guère fourni que de
Ubiocquailie, tandis que les autres livraieot des pierres
doubles, des pierres d'appareil et du parpain.
Les premiers marchés furent passés au mois d'octobre
15M, avec Jehan Martin, dit Dessous-Saint-Leu.
On le fit venir à Compiègne, et les gouverneurs le trai-
ttreat à leurs frais. On fit chez Wallerain Martin, une
dépense de 16 sous parisis, en marchandant avec lui, « de
liner à la ville cent tonneaulx de pierre pour commencer
^ employer aux repparacions et rediffication de l'ostel de
^ (i). »
Dès le 6 mars 1505, Jehan Soubz-Saint-Leu avait
envoyé non-seulement ses cent tonneaux, mais soixante-
foinie autres, et il recevait un à-compte de 50 livres sur
l-CC 35, f"n9 V.
•,t ce. 73, f» ICI V. Mandement du i octobre 1504.
XUV* SESSION. ii
338 CONGRÈS ÀRCHÉOLOOIQUB DE FEAMCE.
les 88 livres 40 soU parisis qui lui étaient dues pour
première livraison (i), qui était déjà rendue devant 1'
de ville, par les soins du voiturier Jehan Dargent, qi
3 du inétue mois s'était fait payer ses frais de transpoi
Voici quelques exemples des prix :
A Colin Tison, carlier de la Joye, 100 soli parisis t
cinq quarterons de pierres appelées parpains par luy li'
au pris de 4 livres parisis le cent (3) •.
A Pierre Carluys, carlier à Berneuil, A livres!
parisis a pour cent et demy quarteron de pierres de
et parpains de la Joye d .
A Jean Martin, dit Dessoubz-Sainct-Leu, 73 livres
sis a pour la quantité de cent quarante-six tonneai
pierre de Sainct-Leu, qu'il a vendu et livré sur le p
Compiengne, au pris de 10 solz parisis le tonneau
«A Jehan Barré, massou, 58 solz parisis pour sept gi
pierres de Saiut-Leu, contenant quatre tonneaux, (|
vendu et livré à la dicte ville, y compris le chi
d'icelles fait au-devant dudit hostel, etc.... (!S). »
A Q)Iinct Suhior et Jehan Froissart, iOG solz ]
pour 380 pieds de pierre tirés de Margny, depuis le
qu'au 20 mars 1503 (G).
A Jehan Aubin, carrier à Retondes, 45 solz 5 d
parisis pour soixante-dix pieds un quart de pierre <i
appareil , au prix de 0 deniers maille parisis 1<
(22 mars 1505).
{<)CC. 76, fo ni.
(2) ce. 76, f>»4i7.
i3) ce. 34, 1" 104 V.
(4) ce. 34, f" % Y.
(î>) 0\ 34. f" 108.
(6) ce. 76. f»113 V.
XUT* SESSION, A SENLIS. 339
Audit Jehan Aubin, 74 solz parisis et 2 mines de blé
k Testimation de 12 solz parisis ou 6 solz par mine, pour
n pieds de pierres d'appareil, avec soixante-six pierres
^bles et soixante pieds de grand pavé; le tout du Mont
Siint-Mard. U avril 1505 (1).
Qoant au transport, la ville paye 16 sols parisis à Jos-
fiin, pour amener de la rivière devant l'hôtel de ville
lept quarterons de pierres et parpains; à Pierre Poisson,
Viols parisis pour le transport, depuis le port, d'un cent
fc pierres doubles, y compris le salaire des manouvriers
qui ont aidé à les charger.
9. Maçonnerie.
Noos avons vu plus haut le maçon Emmanuel Blondin
chargé d'une partie des travaux de maçonnerie et les
exécutant ou les faisant exécuter à la journée pour le
compte de la ville. Mais d'autres furent entrepris à forfait.
Cttt ainsi que Hutin Dannery, marchand demeurant à
Compiègne, que nous avons déjà cité, touche une somme
^ 346 livres sur ce qui lui est dû a cause du marché qu'il
^bit avec la ville, h lui baillé au rabais (par devant le
''tilli de Senlis) pour l'exécution de divers travaux et
notamment de deux entre-fents de pierre de taille (i).
10. Charpente.
U bois nécessaire à la charpente fut pris dans la forêt
H'CC. 76, P»ll3v.
Il) œ. Si, f» 89 et 89 V.
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XLIV SESSION, A SBNLIS. 3ii
d« ville; iœulx chargé sur les charriols et engins, avec
^ides; et les aulcunes, mises et assises audit hostel (I). »
EXTÉRIEUR;
11. Porte.
La porte de l'hôtel de ville était autrefois placée à gau-
che de la tour, à l'endroit où se trouve aujourd'hui la
boétre du vestibule. C'est, lors delà restauration exécutée
par M. Verdier en 1854, que ce changement a été fait,
changement d'autant plus regrettable, qu'il parait avoir
contribué à diminuer la solidité de la tour.
La première mention relative à la porte primitive de
lliôtei do ville, se trouve dans le compte de 1505-1508.
« A Pierre Drosmard, paintre et verrier, demourant à
Compiengne, 12 solz parisis pour avoir par luy faict le
pourtraict de la grande porte de Tostel de la ville,
etc. (2). »
Qu'est-ce que ce pourtraict de la porte? IV.pure sans
doute destinée au menuisier.
Celte porte exécutée par Simon Gouy, menuisier, lui
fut payée 4 livres parisis, par mandat du i^'mars I5i7 (3);
quelques mois après et touche également le prix de la
woonde porte de l'hôtel de ville (4).
(0 ce. 34, f» U8.
(îiOC. 35. M 37 V.
(3) ce. 37, f» <88 v.
(4) ce. 37, f> 189, 18 février 1318. Cette seconde porte devait
se trouver daos la salle d'assemblée et donner sur la cour.
342 CONGHÉS AHGHÉOLOGIOUK DE FRANCE.
« La serrure, et deux clefs, pour attachier à l'huis et
graut porte, » fut payée i4 sols parisis à Denis des Gno-
cbes (i).
12. Décoration delà façade. Statuei.. Bas-reliefs.
Au centre de la façade, au premier étage, se trou^^^^
•
une vaste niche destinée à recevoir une grande conipo^^'
tion; six autres niches, destinées à recevoir desstatuesv ^
trouvaient, les unes entre les fenêtres, les autres plus ha ^^
à droite et à gauche do la niche principale. Ces niches ^
composaient de supports décorés de figures sculptées, det^'
personnages déroulant des phylactères, et de dais rich^
ment ornés de motifs dans le style flamboyant. Plus ba^
presqu'au pied de la tour, avaient été réservés deux autr^
cadres destinés à recevoir des écussons.
Les comptes nous fournissent les noms des sculpteurs-»
auteurs de ces compositions, et l'indication des principaujc
sujets traités : « A Nicolas d'Estrées, tailleur d'ymages a
esté payé la somme de i9 livres i sols parisis |>our la façon
de six yniages qu*il a faictes et taillées, pour mectre au
devant de rostcl de la ville, comme TAnuonciatiou, le roy
Charilcmainc et uultres saiucts à plain desclarez eu six
mandements (:2]. »
La niche principale de la façade, entourée d'un enca-
drement gothique découpé à jour, fut remplie par le sujtft
représentant V Annonciation. Il se composait de deux pér-
il) ce. 37, f» 206.
[i] ce. 34, 1505-4508, ^ 8t). On trouve aussi les mômes
indications dans le compte C(]l. 77. Compte des dons et octrois,
qui semble n'être qu'un compte parlirulier et en quelque sorte
provisoire.
XUT* SESSION, A SBNLIS. 343
sonnages, la Vierge et l'ange, séparés p^^r un pot de lis. Ce
sujet devait être traité d'une manière analogue à la repré-
sentation qui a été rétablie sur le mur du donjon du châ-
teau de Pierrefonds, du côté du pont-levis.
L'auteur de cette composition était, comme nous venons
de le voir, Nicolas d*Estrées. Le pot de lis qui séparait la
Tierge et l'ange fut exécuté par Anthoine le Caron, qua-
lifié également de tailleur d'images, et qui fut chargé de
sculpter lee armes de la ville sur la façade : « A Anthoine
Je Caron, tailleur d'y mages, 64 sols parisis pour avoir
entretaillé et faict les armes de la ville, ensemble ung pot
ci lits pour mettre au devant de l'ymage Notre Dame au
paom de devant dudit hostel de la ville (i). »
Les six statues qui garnissaient les niches ne nous sont
qu'imparfaitement connues. Nous avons déjà, dans la
note qui précède, l'indication d'une Charlemagne.
L'Empereur était représenté l'épée à la main, car nous
iroyons le receveur réclamer a huict solz parisis pour une
espée mise au poing Cbarlemaine (2) ».
Quant aux autres, nous trouvons dans le procès-verbal
de 4793, qu'outre celle-ci le directoire fit enlever les sta-
tues de saint Louis^ de saint Denis évêque, d'un autre
eoéque^ ainsi que la sainte Vierge et Vange, Cet autre
évèque est le cardinal d'Ailly, que plusieurs témoignages
de la fin du siècle dernier nous signalent comme ayant
figuré parmi les personnages illustres représentés à la
façade de notre bétel de ville.
M. Vatou et après lui M. Pellassy de l'OusIe, rem-
placent l'effigie du cardinal par celle de saint Célestin.
(1) ce. 34, f« 90.
(^)OC. 34, f<* 420. On voit qu'on donna 4 sols parisis aux
maçons qui levèrent ladite image (id).
344 GONGKÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
Nous avons dit ailleurs (i) comment nous pensions que
cette conrusion avait pu s'établir dans le peuple, Pierre
d'Ailly ayant été le bienfaiteur du couvent des Célestint
de Saint-Picrre-en-Chastres et quelque cicérone ayant été
amené à confondre Tinstitution et son bienfaiteur (i).
Plusieurs des socles de ces statues ont été exécutés par
Enguerran Blondin, maçon, que nous considérons comme
l'un des principaux entrepreneurs de l'hôtel de ville. Le
compte de 1505-1508 porte a qu'il lui a été payé une fois,
7 livres 4 sols parisis pour ses peines et sallaires d'avoir
fait et taillé deux chappitoaulx avec l'amortissement pour
asseoir deux ymages au paont de devant de i'oetel de
ville (3) p.
Quant aux deux niches du rez-de-chaussée, dans les-
quelles on remari] uait encore des traces de peinture et de
dorure, nous ne trouvons pas d'indications précises. Toute-
fois, nous serions porté à croire que l'une d'elles portait
les arm«» de la ville exécutées par Anthoine le Garon et
l'autre les armes du roi, exécutées par Martin Le Roy.
(f A Martin Le Roy, tailleur d'y mages a esté payé la
somme de 56 sols parisis pour ses peines et sallaires
d'avoir taillé les armes du Roy nostre Sire pour mettre
au devant de Tostel de la ville (4). »
Lors de la restauration exécutée au commencement de
Louis XIV, à l'époque de la construction du nouveau
pavillon, la ville décida de faire des réparations à la façade
(1) De V ancienne décoration de V hôtel de ville de Corn-
piègne. Revue de Fart chrétien. 1874.
(2) Pierre d'Âillv est aussi Tauteur d*une vie de saint Pierre
Côlcstin, publiée par les lk)llandisto$.
(3) ce. :U, <SOî;-1508, fo8H.
(4) ce. 34, (*î»0.
XLIY* SESSION, A SENL18. 345
de l'hôtel de ville déjà fort dégradée. Le groupe de TAn-
Dondalion était abimé, deux des six statues placées
dus les niches avaient disparu et on saisit cette occasion
pour remplacer le motif principal de cette décoration.
L'ange et la vierge furent enlevés et reposés dans les
niches vides, et un sculpteur de talent, Gilles Guérin,
nsçut la mission de reproduire les traits de Louis XIV, qui
iTiit aidé la ville par ses libéralités à faire l'acquisition
d» floaisons delà rue de la Heuze et avait contribué aux
dépenses nécessitées pour la construction du .nouveau
Utimeot.
Dans l'assemblée tenue le 9 juin 1653 (1), on avait
donné pouvoir aux attournés chargés de faire réparer les
ruptures du pan du mur de l'hôtel de ville faisant face
tu marché au blé, « de laisser des bossages de pierre de
taille, à la ruine qui est au-dessous de la tour du beffroi,
pour, sur lesdits bossages, estre fait la figure du roy. »
Cette figure devait être exécutée en bronze, et le choix
des sculpteurs et maçons, ainsi que le prix en étaient
laissés aux gouverneurs attournés (3).
Les exigences du sculpteur parurent-elles exagérées à
la ville? toujours est-il que Ton se borna à faire faire en
pierre, par Guérin, une statue équestre du roi, qui fut
bnmsée. Le souverain y était représenté en costume de
guerre, avec le bâton de commandement à la main. Le
fond de la niche fut peint en imitation de marbre noir.
Guérin reçut pour ce travail une somme de 1,^0 livres.
A droite et à gauche de la niche furent sculptées des
<!• Gilles Guérin, né en 1609 et mort en 1678; voir sur cet
artiste un article étendu dans le Dictionnaire de Inographie
et d'histoire, de Jal.
li) DD. 16.
346 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRAIfCE.
armoiries du roi et de la reine, armoiries qui fureat mar
telées en i79â, lorsque la statue fut détruite.
Une plaque de marbre noir placée au-dessous de h
niche fut posée par Gérard Le Sourd, maçon, qui y grav)
les deux vers suivants (1).
Non satis est tacito regem sub corde taeri
Spectaadum exhibuil qui latet intus amor.
Addo 4655.
Bien que la lecture des documents qui précèdent n
puisse laisser de doute sur le roi représenté, qui ne peu
être autre que Louis XIV; la plupart des écrivains qui on
parlé de la façade de notre hôtel de ville l'indiquent comm
étant Louis XIII. S'il eût été question de Louis XIII, oi
verrait le terme de feu roi, ou quelque autre phrase, tandi
qu'il n'est question que du roi, sans autre désignation
Louis XIV, du reste, a paru, dans sa jeunesse, affection
ner Gompiègne; il y resta assez longtemps pendant 1
Fronde, et cette ville, dit Gharpentier, avait été, apri
Paris, la première honorée de sa royale présence (2).
Après la Révolution, la niche, restée vide, fut rempli
par le cadran de l'horloge, puis, lorsque le cadran fc
reporté dans le cadre couronné situé à la base du beffro:
on songea à la rendre à son ancienne destination. TouU
fois on pensa qu'il était plus à propos d'évoquer dan
cette circonstance le souvenir du prince régnant au momer
où l'hôtel de ville avait été construit. M. Jacquemart h
chargé d'exécuter en haut-relief la statue équestre d
Louis XII.
(t) Il reçut pour ce travail et divers autres la somme d
70 livres.
{t) Séjour roï/ai, 4647, p. 51.
XL1Y* SESSION, ▲ SENLIS. 347
Cette compoeitioQ , admirée à une de nos expositions,
fut exécutée en bronze (i) et placée eu 1869.
Voici eu quels termes un des rédacteurs du Journal de$
l^ébatf, M. Charles Clément, appréciait cette œuvre d'art.
« Le Louis XII, par M. Jacquemart, est une statue équestre
«Q bronze; mais comme elle est destinée à être placée
contre uu édiGce, elle a été appliquée contre un fond. I^e
i^oi, bien eu selle, tient la main appuyée sur la cuisse; le
<^orps est tourné vers la droite, entraîné qu'il est par la
tête qui regarde du même côté. L'attitude est ferme et
^îen trouvée; la tête énergique, très-fine, bien modelée, a
u.ne expression concentrée, réfléciiie, exprimée avec fon:e
^t clarté. Le cheval est bien d'aplomb et d'un dessin cor-
X'ect et vivant; on sent qu'il marcherait d'un pas plus
s^pide, s'il n'était retenu par la main du roi. Cet ouvrage
important est l'un des meilleurs de l'exposition. »
La façade était flanquée à ses deux extrémités de tou-
relles octogones. Ces tourelles faisaient en quelque sorte
partie obligatoire des hôtels de ville construits au xvi^ siècle,
et H. Viollet-le-Duc fait remarquer qu'il en existait même
à l'hôtel de ville de Paris, terminé sculementsous Henri iV.
Ces tourelles qui communiquent avec le mczzanino étaient
couvcrles en ardoises (i), peintes et dorées.
■ A Galloys Bignet, marchant plombier, demourant à
Riquebore (3), a esté payé la somme de 38 livres 14 solz
B deniers obolle parisis, pour la quantité de onze cens de
plomb ouvré et par luy mis en œuvre, pour employer aux
deux toumels de l'hostel de la ditte ville, qui est au pris
'1) Elle fut foDdue dans les ateliers de M. Victor Thiébault.
•S-> Voir plus bas la fourniture d^ardoiscs faite à cette occasion
par BrulÎD.
•3i Riqoebourg, caolon de Ressens.
348 CONGRÈS ARGHÉOLOOIQUB DE FRANCE.
do ODze deniers tournois la livre; desduict le viel plot
luy l>aillé, qui veuoit des bacuUes et verges du pont<
porte de Pierrefons, qui a esté employé par l'ardoixic
comble dudit hostel. » (Mandement du H octobre 11
et « à Pierre Dromart, painctre, la somme de 4 1
8 solz parisis pour painctures d'estofles par luy liailU
livrées à paindre et dorer les deux tournelles de VI
de la ditte ville. En ce comprins l'or qu'il y a fallu
ce faire. » (4 novembre 151i.)
1 3. Couverture, comble.
Le comble fut fait avec des poutres provenant de k
et couvert avec des ardoises, fournies par divers
chands et par plusieurs chefs d'établissements reli
des environs (i).
a A Simon Fournier, tonnellier, la somme de soii
quatorze solz, quatre deniers parisis, ung denier toui
pour troys milliers de lattes par luy vendues et livi
la ditte ville, pour servir à couvrir d'ardoize le comi
l'hostel de ville et pour la voicture desdits troys
lieis (2).
« A frère Estienne de Ueniy, prieur de Boucqu
a esté payé la somme de trente-six solz parisis po
quantité de demy millier d ardoizes par lui vend
(1) VeDaient-ils de faire démolir certaines parties de
couvents, ou à la suite des guerres avaient-ils été forces de
pour la réparation de leurs églises, venir des quantités tro|
sidérables d'ardoises, dont ils cherchaient à se défaire?
(2) ce. 35, fo Uî V. (Mandement du I décembre <;H2).
(3) PrèsJaux (Oise).
XLIT* SESSION, A SENLIS. 349
lifrée à la ditte ville pour fournir à la couverture de
llKisteldeladilteville(i)».
t Au dit BruliOf ardoizier, a esté payé la somme de
ttaft quatre soii parisis, faisant la parpaye de trente-quatre
livres, pour la quantité de dix-sept verges de couvertures
d'ardoiies qu'il a fait aux comble et tournelles de Thostel
de ville, ainsi qu'il appert par le rapport fait par Jehan
Thorillon, mesureur juré, auquel rapport ce présent man*
dément est attaché.» (14 mars i5ii.)
« Audit receveur a esté ordonné reprendre des deniers
«le sa dicte reœpte, la somme de soixante-six livres treize
soli, neuf deniers parisis, pourplusieursparties de plomb,
^veoques douze milliers d'ardoizes acbeptées à la requeste
des gouverneurs pour fournir à la couverture de l'hostel
de la ditte ville, etc. (2). »
Enfin, comme nous l'avons dit, par un mandement du
16 novembre 1512, les gouverneurs ordonnent de payera
Thomas Baquet, charpentier, « la somme de vingt-quatre
solz parisis, pour le vin à lui donné et à ses compai-
gnoDS, en levant le faiste du comble de l'hostel de la ville,
eomprins les oublyes qu'il fallu gecter et donner aux
petits enffans, affin d'en estre mémoratif (3). »
La couverture et le comble furent toujours pour la ville
on sujet de grosses dépenses et chaque année, nous trou-
vons des marchés ou des mémoires se rapportant à leur
réparation.
Lesderniersaménagements faits à l'hôtel de villeen 1778,
pour y établir le logement de l'intendant achevèrent de
les dégrader, et en 1793, on s'occupa des réparations qu'il
(4) GC. 35, f^ 137 (Mandement do 4 9 août 4513).
{%) ce. 35, f» 40«.
(3) ce. 35, f^ 444.
350 CONGRÈS ARCnÉOLOGIQUE DE FRANGE.
paraissait urgent de faire au comble^ menacé d'une ruine
•
prochaine et dont la chute pouvaient entraîner des acci-
dents fâcheux. La ville commit trois experts^ Anthoii^^'
Thomas Bussac, son architecte, Lay et Mouton, tousde^^
entrepreneurs, afin d'examiner les travaux à faire et & ^
établir les devis.
Ils attribuèrent le mauvais état du comble, outre ^
ancienneté, au fardeau des cloisons qui se trouvaient ^
dessous et qui toutes étaient rattachées aux pou^^
du grenier, et décidèrent qu'il était nécessaire de démc^
la toiture et de réduire les deux pignons à la hauter ^
du rampant du comble, de manière à les ramener à u^
hauteur de vingt-cinq pieds d'élévation au-dessus d^
plates -formes posées sur l'entablement. Cette dépensa
qui fut exécutée presque immédiatement, fut évaluée
i 5,624 livres, et réduite à 42,642, par suite de l'offre fait
par les entrepreneurs de reprendre les matériaux poui
t,982 livres (i).
Là ne se sont pas arrêtées les mutilations subies pa
notre monument et en même temps que les dessins, remon
tant à quarante ans, nous montrent des ouvertures percée
à tort et à travers dans la façade, des fenêtres carrées, ave
encadrements ù moulures grecques et contrevents, non
voyons qu'un architecte vandale avait remplacé une de
lucarnes de pierre par une autre en charpente, de styli
mesquin, et qu'on avait enjolivé le comble de plusieur
tuyaux de cheminée de brique, de hauteurs inégales
Nous réserverons pour un autre paragraphe ce qu«
nous savons de la cheminée de la grande salle et des sculp
tures qui la décoraient. Seulement, nous dirons ici qu
les cheminées de l'hôtel de ville furent exécutées ei
(1) Archives. Notes diverses.
XUT* SESSION, A SBNUS. ^1
briques, et qu'on en a amené à cette intention quatre voi-
tui«deGlairoix(l).
14. Beffroi.
Dans tous les hôtels de ville, le beffroi est toujours une
des parties importantes. Il jouait, en quelque sorte, un
fôIe dans la vie municipale, renfermait la cloche qui,
le matin, éveillait les habitants, le soir, sonnait le couvre-
feu et dans toutes les occasions solennelles appelait les
bourgeois à se réunir. La charte de commune octroyée
^vx Compiégnois, par Louis Vil, en il 53, frappe d'une
amende de douze sous, les gens de la commune qui ne se
rtendront pas à l'appel de la cloche (2).
C'est au beffroi, que se tient le guetteur, chargé de
signaler les incendies, et de regarder dans la campagne
si rien ne vient menacer la cité, si quelque corps d*armée
enoemi, quelque groupe de partisans, ne vient pas tenter
par un coup de main de s'emparer de la ville (3).
C'est au beffroi encore que la ville place le plus souvent
l'horloge destinée à indiquer l'heure, à une époque où
(1) Nous IrouvoQS une cheminée daas la chambre Jehan Buc-
qoet, i riiôtel de ville (1505-1 508) Peut-être est-ce la cheminée
qui ce trouvait dans la chambre du guetteur, au beffroi, et qui
fat démolie au xvui* siècle.
(2.1 A la Buile de contestalions entre la ville et Tabbaye de
Saint-Corneille, des lettres de Charles IV réglèrent dans quelles
circonstances la ville pourrait sentier la cloche de son beffroi
(1317, Ordonnaneei des rois de France, t. IX, page 5U).
(3) La place de gardien du beffroi avait une certaine importance
etcelui qui la possédait, était pourvu par des lettres de Louis XUI,
il*aoAt 4 6i5,dn titre de religieux lai de l'abbaye de Saint-Corneille.
352 GONORÈJ ARGUÉOLOOIOUB DE FRANGE.
. leur prix élevé rend fort rares les horloges portatives (1).
Le beffroi construit en pierre s'élève au centre de la
façade, et forme une tour massive et carrée, décorée d'or-
nements de forme gothique, surmontée d'une flèche en
ardoise et accompagnée de tourelles aux toits aigus.
Quatre lucarnes garnies de plomb éclairent la partie supé-
rieure du beffroi. Sur le devant, se montrent sous un
auvent, les picantifu, frappant de leur marteau les
appeaux fixés à la poutrelle, sur laquelle ils reposent. Au
sommet de la flèche, une girouette se dresse, issant d*une
gerbe de fleurs et remplaçant le lion qui, autrefois, cou-
ronnait le beffroi.
Maintenant que nous avons en quelques lignes décrit
le beffroi de Compiègne, nous reviendrons en détail sur
chacune de ses parties et sur leur construction.
Presque dès l'origine, la construction de la tour sembla
faire craindre pour la solidité de l'édifice et on prit des
mesures pour empêcher que le poids de cette masse de
pierre portant sur l'escalier à vib, n'apportât, ainsi que
cela a eu lieu depuis, quelque désordre dans l'économie
du monument.
Danslecomptedei5i1-i5i4, on voit a que l'on employa
vingt grandes pierres de troys pieds pour reffaire la pille,
contre la tour de Thostel de la ditte ville (2). •
La couverture en ardoise, est reni))Oursée au receveur
(1) Dès 4S6U, la ville possédait ud beffroi, dont Tétage infé-
rieur servant de prison (Inr, des actes du Parlement, i. l***.
Qo 4081). Ce beffroi était en face de Ttiôtel de ville; en 4408,
il menaçait ruine el ou en enlevait la cloche, pour la porter à
l'hôtel de ville: il fut démoli entre iiii et 4450 (MSS. de Bic-
quilley, page 04. Compte de 4408-1410. CC. 8).
{i) Payées huit livres, trois solz,sept deniers parisis. CC 35 P> 4 04 .
XLIT* SESSION, A SENUS. 353
de Pronnay, pour la somme de soixante-douze livres,
treiie solz, cent onie deniers tournois (4).
La tour et ses lucarnes, ainsi que les tourelles qui la
flanquaient^ étaient décorées d'ornements en plomb tra-
Tiillé, peint et doré.
Ainsi, on paie à Martin Bignet, plombier, à Compiègne,
trois cens douze livres, dix-neuf deniers tournois, c pour
trois mille sept cens soixante-quatorze livres de plomb
ouvré, au prix de onze deniers la livre, tant à la grosse
tour et deux petittes tours admorties, que aux quatre
lucarnes d'ioelle tour, par lui livré et ouvré selon le mar-
ché à luy faict (3). »
c An receveur de Pronnay, on rembourse cinquante-une
livres, dix-sept solz, neuf deniers tournois, pour plusieurs
parties par lui baillées pour dorer l'ouvraige de la grosse
tour (3). »
c Enfin, à Pierre Dromart, paintre, on donne vingt-
quatre livres tournois, pour avoir paint et doré la plom-
berie des quatre lucarnes de la grosse tour de Tostel de la
ville, avoir nellé le comble de l'bostel, (ait les feullaiges,
lyonset fleurs de liz, et autres ouvraiges de son mestier,
par luy iaictes à la ditte grosse tour de l'bostel de la
ville (4). »
Ce n'est qu'en 1530, que ces travaux sont définitivement
achevés, lorsque Tborloge et les picantins sont placés à la
tour. En 4531 (29 juillet), on fait l'acquisition de c huit
cents de fin or, avecques quatre cent livres de plomb
pour dorer et employer à Tacbèvement de la couverture
i<) ce. 36, 1514-4517, f» 454.
Il) ce. 36, 4544-1517, f^ U8.
i3» Œ. 36, f» 154.
i4. a:. 36, f* 149 V.
XUV* SESSION. 23
35i GONGRÈS ARGHÉOLOaiOUÉ DE FEANGB.
des combles et poteaulx où sont mis les appeaux de l'hor-
loge de rhostel de ville et autres ouvraiges qui reste à dorer
audit hostel. » De plus, le i2 septembre, on fait peindre
et dorer a la plommerie au-dessus des trois appeaulx de
Torloge, etc. «.
45. Lion du beffroi.-
La grosse tour de Thôtel de ville était surmontée d'an
lion. Ce lion n'était sans doute point un lion découpé et
servant de girouette, mais une représentation massive,
comme celle qui a existé au sommet du befilroi d'Arra8(i).
Il avait été exécuté par un plombier de Paris, Martin
Bignet, auquel fut payée la somme de six livres, seite solz
parisis, a pour uug lyon de plomb doré d'or, vendu et
livré à laditte ville, mis sur la grosse tour de l'hostel
d'icelle ville. » (Mandement du i*' janvier 4517, CC. 37,
^M8.)
Au même moment le receveur réclame, dans un
compte général, le remboursement de la somme avancée
par lui pour les q sallaires d'amener, le lyon mis sur la
tour de Paris, à (lonipicngne (Id. (^ 3ii)».
Le lion avait disparu au xviii* siècle; il fut remplacé
par une grossière ^rirouetto, simulant un drapeau et dans
lequel, sous la Restauration, on avait découpé à jour trois
fleurs de lys.
Les derniers tnivaux de 4814 Ion fait remplacer par
(I) On a placé au mujkv d'Arras l'ancien lion hors de service
et ou Ta riMUplacô par un nouveau du même stvle. Ce liou, de
prtVs do deux mètres de hauteur, porte une bannière, qui sert de
gin)uette.
XUY* SESSION, A SENL1S. 3«^»5
une élégante bannière, découpée à jour, et ifôant d'une
gerbe de fleurs.
16. Horloge.
Dens le comble, à la naissance du beffroi, était placée
l'borloge dont le cadran extérieur donnait l'heure aux
passants.
La ville possédait une horloge dès les premières années
du T%* siècle; mais ce ne fut qu'en 1520 que cette horloge
fat mise à l'hôtel de ville. Jusqu'à cette époque, elle avait
été pUoée sur la tour de l'église Saint-Jacques, où nous
la voyons mentionnée depuis 4 436 (I). Dès ce moment, la
ville chargeait un serrurier, nommé Bochard, d'en pren-
dre soin, et lui donnait quarante sous parisis par an
poar ce service; un siècle plus tard, de 1517 à 162i, le
conducteur de l'horloge reçoit un traitement de quatre
livras (GG. 37). En 1550, ce traitement s'élève à huit livres
(CC. 43).
La foudreétant tombée en 1516, sur le clocher de Saint-
Jacques, y fit de grands dégâts et rompit l'horloge, nous
apprend D. Gillisson.
A la suite de cet accident, en 15â0, on fit une grosse
réparation à cette horloge, réparation évaluée à 7 livres
n sous parisis -(S). Elle fut alors transportée à Thôtel de
ville et on y adapta la petite cloche de Thôtel de ville.
Colin Racquet, charpentier, fit a ung befroy, à pendre
(l/BB. 48 (L*ÉpiD0is).
(S) En Ut7, la ville avail proposa à l'abbé de Sain t-Coroei lie
de placer son horloge sur la tour do Saint-Michel, propriété de
Tabbaye. mais celui-ci refusa (Mss. Léré).
356 GONGRÈS ARGHÉOLOaiOUE DE FRANGE.
la petite cloche et ung planchief qui reçoit le contrepoiz
de Torloge » ; il fit aussi o un planchier de bois au-dessouhi
de l'orloge, une caige de bois ou dit orloge, etc., moyen-
nant 5 livres 16 sous parisis (i)». Le registre auquel
j'emprunte ces mentions porte aussi une dépense de
19 livres 40 sous parisis pour a les estoffes qu'il a fallu
avoir pour paindre et dorer le cadran de Torloge d'icelle
ville(GG. 37, lblio228)(2)».
Mais la vieille horloge, qui avait déjà plus d'un siècle,
avait fait son temps et malgré ses réparations, il fallut
songer à la remplacer. Au commencement de i530,
« Pierre Garnot, serrurier et aorlogeur, s'engage à faire
une aorloge neufve pour servir à la grosse cloche de
l'hostel de la ville. (BB. i8). i
On fond des cloches pour servir d'appeaux, on fait
exécuter lespicantins auxquels nous consacrerons un para*
graphe spécial et la nouvelle horloge installée au bas
du beffroi va annoncer l'heure aux habitants pendant près
de trois cents ans (3). Toutefois, ce ne fut pas sans récla-
mer d'assez fréquentes réparations que nous nous abstien-
drons de noter, à l'exception des deux suivantes. Du 5
octobre 1657. a Mandement à Robert de Vaux, horloger,
de la somme de 0 livres tournois, pour avoir réparé l'hor-
logodc cette ville, à laquelle il a fait deux grands ressortz,
. . . comme aussi pour avoir fait un cul de marteau et un
piton au ressort, qui fait sonner VAve Maria aux heures
(I) ce. 37, K U6.
(«)CC. :n, f" VJi et 193. V. \l\ti).
(3} C'est t'ii ^H\\) ^culement qu'une nouvello horloge cnroro
en mouveiiHMil, la roniplaç^i. l/ancieuno horlot^e, dont Lôrô
(lonni^U; dessin diuis sos manuscrits, était enrore conservée, il v
a |MMi iranncos, dans les combles de Thôtel de ville.
xinr* SESSION, a senlis. 357
de midy, miouict, six heures du matin et du soir, d
Du 30 août 1660, au même... 12 livres tournois, a pour
aToir Gûct tout à neuf la roue, la verge et l'estoille qui
servent à faire aller l'esguille du quadrin de l'horloge de
Tbostel commun de cette ville (4). d
Ce cadran fut, à dater de la Révolution, placé dans la
niche occupée précédemment par la statue de Louis XIV.
Depuis la restauration de M. Verdier, il a été replacé au-
deuus et rendu transparent.
i7. Cloche.
Le beffroi renferme la cloche municipale, celle au son
de laquelle les habitants étaient tenus d'accourir aux
termes mêmes de la charte de commune. Cette cloche en
broQxe et de grandes dimensions existait depuis deux
»Ue8 lors de la reconstruction de l'hôtel de ville.
Bl. Voiliez en a donné le dessin et la description dans la
ttnue des Sociétés savantes (^). Elle porte une légende
en une ligue et quelques mots, légende qui forme huit
phrases ri niées, que nous donnons ici, en tenant compte
toutefois des corrections faites à cette lecture, par M. de
Gailhermy :
f Bancloke : sui : moi : tist : on : faire :
Au tems : Poukart : Harel : le Maire :
lan : m : ccc : et : m : de kl :
Maistres : fu Gills : de : Bliki .
ILet.Guiliiauines : de : Croisills :
Ci tient-à cleus : et a kevilles*.
A mon son la vile s'arme i
Pour : la nécessite : commune :
.1) Mandements 1656-1660, f» U v. et it v.
si) 4870. T. 11, p. 443.
Xcc:§ a» s&T^ics »$ vc iciit f lÎKPri 1& cloche qui
su» âGQ2e r4io» i 2'isôea hlijd 3e Tîlle, pevi 4e Van Z
ajprê La •i^ic^îi:^ -5* Mas. Loatic^.
S:c5 ]fè T^zz.'i îi L:«i< H. li Tille, qui s'eCait ih^
imfCfSéjt à de frbToecjes rep?ses. pour sÉbs£ûre ii
frmiKjes des a^cn^ «en tréscr i^^yal. et qui aTÛt pi]
dhtt'ses Kiiii*ï5 d* I .ÎC<» eî •ie iMO tÎTTes* fut invil
en 1477. k fc-cmir u: nx, à titre 4e prêC nue sofiiiz==
de dnq cents ecus d'or. Dins llmpo^bilitê où ils ^0
troaraien: ie sttisfiiie à cène nourelle demande. i^S
aUùomés cherchèren: par tous les nwyens en lenr poi^K
voir à sè céer des ressources, e: sc*nrèient à mettre leiK^
cloche en eage. peat-étre même à la Tendre î . Mais cras
moyen qui. d'ailleurs, eût été insufiBsanU ne réossf C
même pas. et le anôamés insc^Tables et rendus respon-
sables des dettes de la Tille, furent emprisonnés et les
droits de ge6le payés pour eux mis à la charge de la
tUIc 2 .
Une fois le nouTeau Leffncâ instruit, on s'occupe d'y
placer rancienne cic^he ; le leceveur se Ûit rembourser,
dans le oc*mpte de 1514*1517, la sc>mme Je tt sous payée
1 Deux commissaires. eoToyes par la ville, se reodireot à
Pans et dcmaodereDt a constituer sur ce gage uoe rente de
80 fr?n<:s. Mais les marthanis refusen^Dt el offrireut seulement
d'acheter la cloche si ou l'amenait à Paris, au prix de S livres
tounjois le cent pesant Mss. de Lérè\
2 32 sols parisis furent, en juin 1 481 . payés pour ce motif à
Jean Langlois, geôlier Mss. de Lére . Ce n'est point la seule
fois que les gouverneurs attoumés se soient laissé emprisonner
plot6t que de payer des taxes qu'ils considéraieiit comme leur
étaoi indûment réclamées -voir compte de 1551. CC. 43,
^30l^
XUY* SESSION, A SSNU8. 359
ptr lui c à Colin Raquet et autres ses compaignons qui
loi ivoyent aidé à tirer et monter la grosse cloche à la
tour de l'ostel de la ville (4). » Une autre somme de
32 80118 est aussi payée à Raquet c pour ses peines et sai-
llira d'avoir mis la cloche de l'hostel de ville et repen-
due (3). » Laurens Morlière, serrurier, touche 6 livres
1 80U 7 deniers tournois, « pour Touvraige par luy livré
à pendre la grosse cloche (3). n
18. Appeaux,
Outre la grosse cloche qui était fixée et que l'on faisait
résonner, soit en secouant le battant qui se trouvait à
l'intérieur, soit à l'aide d'un marteau frappant dessus ,
il y avait au beffroi une autre cloche servant à sonner
l'angelus (4), et trois petites cloches ou appeaux, fixées
nir un poteau et qui, frappées par les picantins, servaient
à sonner l'heure et la demie (5).
Ces trois appeaux, qui existent encore, furent fondus
b 3 août 4.^30, à la ville même, moyennant six francs, a II
y entra 379 livres de métal, vendues Ai livres 46 sous 4
deniers, et 8 livres d'étain du prix de U sous (6). »
c Le premier de ces appeaux, haut de treize pouces six
lignes, et d'un diamètre de dix-sept pouces six lignes,
Il ce. 36, f»iî3 V.
>ii ce. 37, fo 488 (Mandement du 6 novembre 1517;.
(3) ce. 37, f<^ toi V. 45«7-4o2î.
(4) Cette petite cloche mobile, décrite par Lérc, ne portait
Marne inscription.
■5) Depuis 1819, ils sonnent aussi le quart.
(6) BB. 1 8 (L'Épinois).
360 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
porte rinscription suivante sur deux lignes : f en août
V" XXX Pii BAYDET L. PVRVISSBL et 8. LE. PLAT, AT
TOURNÉS f . Le second, de mêmes dimensions ou à peu
près, porte : Pour servir à t horloge nouvelle de Vhoniel de
ville; et le troisième, un peu plus petit, n'a pas d'inscrip-
tion (i).»
49. Picantim.
Les trois personnages sculptés, armés de marteaux,
qui frappent sur les appeaux, ont reçu le nom àepicaniins.
Ils furent exécutés en même temps que les appeaux.
En septembre 4531, on paya les ouvriers «pour avoir
paint et doré la plommerie, au-dessus de trois appeaulx
de l'orloge de l'hostel de la ville ; ensemble, avoir paint et
doré les trois personnages qui frappent sur lesdits
appeaulx (2). i
Ces trois figures, hautes d'un mètre cinquante environ,
furent dorées et argentées de nouveau en 4598, par Dela-
chère, maître peintre, moyennant 8 livres parisis. Celui-
ci peignit en même temps, une grande armoirie impériale,
celles de la ville, du Dauphin et un chappeau de triomphe,
deux armoiries de la ville et deux gargouilles (3).
Après un siècle d'existence, et malgré cette réparation,
(DMss. de Léré.
(t)BB. 48.
(3) Tous ces préparatifs furent faits sans doute au moment où
Henri IV avait décidé que la ratification du traité de Vervins
aurait liou à Compiègne. Plus tard, lo roi, craignant l'encom-
breuient, choisit Paris, mais les ambassadeurs vinrent cependant
à Ciompiègno, où ils séjournèrent.
XUY* SESSION, A 8EMUS. 361
ks picantiDS étaient hors de service ; aussi, en 4629, enfit-
00 exécuter de neufs, qui, cette fois, furent en cuivre et
coûtèrent i5 livres, a Ces trois statues d'hommes en forme
de Kuisses et lansquenets armez, servant d'apeaux, d furent
peintes, dorées et argentées, par Charles Védye, moyen-
nant 9 livres (4).
Eo 4768, les suisses cédèrent la place à trois jolies
femmes vêtues à la grecque a et portant sur le front, une
étoile, un croissant et un soleil. » Ces figures sont cellesqui
sont restées jusqu'en 4875 (â) et qui ont été remplacées de
nouveau par trois lansquenets, hardiment exécutés en bois
et portant les costumes du temps de François I*^
INTÉRIEUR.
20. Escalier.
L'ancien escalier était en pierre à vis et occupait exac-
tement la place de celui que nous voyons aujourd'hui et
qui a été refait en 1874. C'était lors de l'arrangement de
lldtel de ville pour le logement de l'intendant que cet
ocalier de pierre avait été démoli et remplacé par un
ocalier à jour, en bois, avec rampe à barreaux de fer.
Nous trouvons dans les comptes de l'époque de la cons-
truction le prix de chacune des marches fixé de huit à
doue sols parisis, livrées sur le port de Compiègne et
veoaot de Saint-Leu (3). On employa, pour les maintenir,
une grande quantité de fer, ainsi que nous l'indique la
mention suivante : a A Colin CorbauU, serruzicr, dcmou-
'I) L'Ëpinois, op. cit, p. 155.
\t) Elles sont actuellement au Musée Vivenel.
.;3} ce. 34. 4505-4508, fo 96 v. et fo 88. CC. 76, f* t13.
363 G0NGRÂ8 ARGHiOLOOIOUB DE FRUIGI.
rant à Ciompiengne a esté paiée la somme de onie 1
dix sols parisis pour cinq cent soixante et onse livn
fer ouvré par lui baillé et livré pour les aflEûres de 1
ville, mesmement pour les marches de la montée i
qui se faict à l'ostel de la ville (4). »
Lors des derniers travaux de restauration de l*hdt
ville, reeoalier de bois a été démoli et remplacé de
veau par une vis en pierre qui compte 59 marches et
la partie supérieure a été élégamment voûtée et décor
sculptures dans les motifs desquelles ont été reprod
les armes de Compiègne, celles de France et le poro-
emblème de Louis XIL
En faisant les fondations de la nouvelle vis, on a ti
prosqu'à ras de terre, un fragment de bas-relief r
sentant deux personnages dont Tun recueille
une cuiller les excréments de l'autre. Ce fragment
était sans doute encastré dans le mur intérieur de 1
lier (S), est aujourd'hui au Musée Vivenel.
SI. Distributions successives.
Nous sommes, pour ce qui concerne la disposition
rituire du bâtiment principal, réduit à des conject
Nous savons seulement qu'il y avait une grande i
^n Œ. 3V. r;o5-ir>08, P» lit v. On fut un ceruîn tei
oxôfuter cet escalier et dans Thiver do 1506, on dut prendr
priviulions pour emi^hor les eaux et la gelée; Pierre Oi
iHuivreur dWleulle revut 48 sols parisis |>our atoir couverl
Uni Ile le inmiltle de la monUv n vis et fourni la matière
re \àm\ r.c. :u, I'» las v.
..t) On sait i\\\\\ y a dansTesiNilierde Thôtel de ville de ^
une ie|m'sontaUon obstine du uH^ine genre.
XUY* SESSION, ▲ SENU8. 363
A'te la salle d'assemblée, la salle du conseil et Tescri-
loire.
Des restes de cheminées, reconnus fmr M. Lafollye, le
hng du mur du logement actuel du concierge, permettent
fc croire que la grande salle, qui parait avoir été au rez-
de-chaussée, occupait tout le derrière de l'édifice prenant
jour sur la cour par cinq fenêtres. Sur le devant, devait
se trouver une antichambre, communiquant avec cette
idle et avec l'escalier, et à droite sur la rue, la chambre
h conseil et Yéeriîmre prenant jour par les deux fenê-
tres qui donnent sur la place, du côté du bétiment^e la
jastioe consulaire.
En 4660, nous voyons qu'il y avait à Thôtel de ville, la
^roiirfe $aUe et la chambra du comeil. Les vitres des croi-
^ de ces deux pièces, ainsi que celles 'du cabinet situé
dans le bâtiment neuf, furent brisées, lors des réjouis-
sances faites pour le mariage du roi et la publication de la
paix avec l'Espagne, par la grande afOuencc du peuple,
qui entra alors à l'hôtel de ville (i).
Ent740, nous trouvons au rez-de-chaussée: 4® le bureau;
!* la salle d'assemblée; 3* le passage du rez de chaussée; et
4' la chambre du conseil.
Au premier étage, au-dessus du bureau, une chambre
tenant à l'escalier de la tour qui monte au beSW>i, une
grande chambre au-dessus de la salle d'assemblée, une
chambre au-dessus du passage, et une troisième au-des-
lus de la chambre du conseil, chambre qui tenait à l'audi-
toire des Consuls (2).
Au scamd étage, des chambres et un grenier.
(I) Maodeuients, tH septembre 1660, {** 45.
(1) J'établis celte division d'après les rensei(:nciiici)ti» tournis
en 1740 par un devis de réparations.
364 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
Lorsqu'en 1778, l'iatendaDt de Paris, Berthier, s'em-
para des étages supérieurs de l'iiôtel de ville pour s'y io^
taller pendant ses séjours à Gompiègne, il y eut, au
premier étage, un salon, un cabinet, une chambre pour
lui, Ht des appartements pour sa femme. L'étage supérieur,
sous le comble, était occupé par son secrétaire et ses
domestiques (i).
Aujourd'hui le rez-de-chaussée est occupé par une
grande salle, où se tiennent les audiences de la justice de
paix, salle qui occupe une partie de l'emplacement de
l'ancienne salle d'assemblée, un cabinet sur la rue, pour
le juge de paix; et, à droite d'un passage allant dans la
cour, le logement du concierge.
Au premier étage, une salle d'attente ; à droite, la salle
des mariages et celle des commissions; à gauche, le cabi-
net du maire, la salle du conseil et un passage conduisant
aux bureaux du bâtiment neuf. La salle des commissions
communique avec la galerie du Musée Vivenel par un
escalier de quelques marches.
Le second étage renferme la bibliothèque comprenant
une grande galerie sûr la cour, une salle de lecture et
une salle de réserve, donnant toutes deux sur la rue.
Au-dessus, est le comble, dans lequel se trouvent une
chambre pour l'horloge, et le grenier.
2:2. Antichambre.
L'antichambre était décorée de peintures. Une lettre à
Vauteur de l'Almanach de Compiegne de 1788, nous parle
(1^ Renseignements donnes par Lérc, d'après l'entrepreoeur
Mouton.
ZUT* SESSION, A SENLIS. 365
des portraits très-bien tirés d'Henri lY, de Louis Xf [I et de
LoaisXlV, du Dauphin, du duc de Bourgogne du duc
dVomières et de Télecteur de Bavière (i).
Ce portrait de Louis Xlll, ainsi qu'un autre d'Anne
d'Autriche avaient été exécutés en 4635, par maitre Jehan
Hérission, peintre, qui avait reçu 140 livres tournois pour
leur exécution et pour divers travaux de peinture faits
^mtries tableaux qui étaient dans la grande salle, où
01 portraits se trouvaient alors également placés (S) .
Ces tableaux et d'autres qui décoraient l'hôtel de ville
fioRDt enlevés en août 4792 et détruits pour la plupart
par les soins du Directoire du district deCompiègne (3).
23. Grande salle ou salle d'assemblée (4).
A la fin du siècle dernier, la grande salle d'assemblée
^t décorée des blasons des gouverneurs, qui y étaient
placée c en mémoire de leur réception et bons services qu'ils
OQt rendus à ladite ville sous les temps de leur gouverue-
.1) Affiehes de Compiègne de Bertrand.
i2i BB. 35, (^ 43.
3) Tous les emblèmes de la royauté que Ion lit alors dispa-
nltre ne furent pas cependant (iétrults; car nous trouvons, par
exemple mentionné dans le proccs-verbal un tableau représeu-
Uq( Louis XVI vénérant les reliques de saint Marconi, tableau
<|oi est encore conservé à l'église Saint-Jacques.
■4': L«^ assemblées lUi la ville se composaient ordinairement
deilouze ootahles, le plus souvent anciens gouverneurs attournés.
lu {KMivaient, lors(]u*ils le jugeaient à pn»pos. et dans des cir-
conslances extraordinaires, appeler à leurs déliliéralions un cer-
tain nombre de notables.
366 GONGBÂS AacnÉOLOGIQUE DB FRANCE.
ment (1) ». Ces blasons étaient accompagnés d'une courte
légende rappelant les dates principales de la vie de chacun
des gouverneurs. Le cahier que nous avons sous les yeux
en indique vingt-neuf; le dernier est Mathieu-Paul-Louis,
vicomte de Montmorency -Laval, nommé capitaine en
1766. C'est en 1629, que l'on avait commencé à décorer
cette salle avec des tableaux armoriés. Charles Védye,
peintre compiégnois, dont le nom est souvent cité pour ses
travaux décoratifs, avait été chargé d'exécuter a huict ta-
bleaux où sont les armes de huict des anciens capitaines
et gouverneurs de la ville, à raison de six livres pour cha-
cun tableau qui sont dans la grande salle de l'hostei com-
mun (â) ». Plus tard, il en fit encore dix aux mêmes
conditions (3).
On remarquait, dans la grande salle, un tableau repré-
sentant l'entrée de Louis XII dans Compiègne en 1498.
Ce tableau, cité par Charpentier (4) nous montre, dit-il,
une partie des magniticences que les habitants firent à son
entrée. La description de Compiègne de 1765 le mentionne
encore ; mais il avait disparu eu 1792, lorsque les autres
furent enlevés. Il y avait encore, mais nous ne savons au
juste si c'était dans la grande salle, un tableau de
moyenne grandeur représentant le cardinal d'Ailly,
agenouillé devant la Vierge qui tenait entre ses bras
l'enfant Jésus (5).
(4) Mss. de Boullé. Bibliothèque de l'auteur.
(2) DD. D'après TÉpinois.
(3) Manuscrits de M. de Crouy.
(4j Séjour Royal, p. 42.
(5) Ce tableau mentiouDé daus la lettre à l'auteur de VAlma-
nach est du nombre de ceux qui furent enlevés par le district
en 1792.
XUT* SESSION, A SENtlS. Ml
e premier étage était soutenu au-dessus de la salle
«emblée par quatre grosses poutres, dont en 1740,
e était rompue, el les trois autres pliées de plus de
ai pouces.
La cheminée de la grande, salle, qui se trouvait sans
Mte, ainsi que nous l'avons dit, contre le mur de la
aine d'épargne était décorée d'un écu de France, sculpté
ptr Nicolas d'Estrées et qui lui avait été payé quarante
sois (1). Cet écu était supporté pardeux angeset fut redoré
a4S96.
U. Chambre du Conseil (i).
La chambre du conseil située sur la place, au rez-de
chaïuiée, fut réparée et remeublée en 1629. On fit alors
peindre le plancher et les fenêtres, moyennant quarante-
trois livres; on la décora d'armoiries et on mit en cou-
leur les ventauz des croisées, travail exécuté par Baptiste
CaodvUIers, peintre, auquel fut confié en outre le soin
<le ff faire et livrer seize aulnes et demie de thoille peinte
OQ sont représentées diverses chasses et paysages. Le tout
tu prix de soixante livres ». On se procura aussi neuf
pinneaux de verre de Lorraine pour mettre aux fenêtres.
Les toiles peintes, fournies par Caudvillers, ne parais-
sent pas avoir eu grand succès, car lors de la venue du
ni, la même année, la ville les remplaça par une tapis-
serie du prix de deux cents livres (3).
J)CC. 3i, ro89, 1505-1508.
(i) Le conseil se composait des trois gouverneiirs attourDi^s,
èlQs coDJoiDleineDt pour trois ai>s ; le procureur de la ville et
le reeeveur aiiisUient i ses délibêraiioDs.
(S) DD. SS, d'après TËpiDois.
368 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
25. Premier étage.
Nous ne savons trop à quel usage pouvaient servir les
pièces qui s*y trouvaient; en tous cas leur utilité n'était
pas considérable, à eu juger par l'état de dégradation dans
lequel on les laissait. Un procès-veri>al de 1740 dit que
dans la troisième chambre du premier, au-dessus de la
chambre du conseil, les baies des croisées de la façade don-
nant sur la place, étaient tout à jour, n'ayant aucun
châssis ni contrevent, ce qui fait que les pluies qui y sont
conduites par les vents pourrissent complètement le
plancher (Art 3].
^. Eeriictre,
Il est encore d*autnes pièces dont nous ne connaissons
pas remplacement. Telle est « Tescriptoire », comme on
rappelle. Cette pièce parai: avoir pris jour sur la cour, et
nous voyous qu elle ètai: planchéiée et garnie de bancs et
do tablei^. Tn passa^ de compte semblerait laisser croire
qu'il y avait doux pièces pv^rtaat cette désignation. Tune
situoo dans io KAnmt^: pr;ac.paK et l'autre subsistant
d,ius uno do$ doiviiviAu.\>> de rôncien h6lel de ville, dans
i,i ivur.
iT. Ar^'hiref.
Ijfs arv'h:\r< ouïon: 35^>."^s»«!S dans une chambre spéciale,
.s ,n ,^*'hf:A î*r, I.hU ur. .v.ffrv jour mettre les pièces les
XUT* SISSION, A SENLIS. 369
plus importantes (i). Lors de la reprise de la ville sur les
Bovguignons en 1422, une partie des archives avait été
dispersée; aussi voyons-nous en 1557, la ville, afin d'éviter
an semblable malheur, faire retirer de l'hôtel de ville les
«Chartres, tiltres, comptes, cartulaires et autres enseigne-
nMQts, pour les envoyer par la rivière en lieu sûr (2) » .
28. Arsenal.
C'est à l'hôtel de ville, dans les vieux bâtiments, donnant
sorlarue Haulgard, que la ville conservait ses équipages
de guerre. Dès la fin du xv* siècle, la ville de Compiègne
poesédait une artillerie qu'elle entretenait avec grand soin.
Nous trouvons de fréquentes réparations faites à sa
grosse bombarde dans les premières années du xvi* siècle.
Uq inventaire de la même époque nous donne le relevé
des armes qu'elle possédait. Plus tard, cette artillerie
tiogmenta, soit par des dons, soit par des acquisitions.
Louis XIV voulut à plusieurs reprises déposséder les Gom-
P%Qoi8 de leurs canons, mais ils ne se laissèrent pas
^ volontiers et réussirent à en conserver au moins une
pirtie.
Aujourd'hui encore, on voit au Musée Vivenel deux
pièces en cuivre, portant les armoiries de la ville et la
dite de 1579 (3).
Ce fut là que, pendant longtemps, on conserva les pou-
<lres de la ville.
(«)CC. 35, P»4i« V.
A ce. 43. Voir notre travail : La ville de Compiègne à
^^poque de la bataille de Saint^Quentin,
l3) Jusqu'à la suppression de la garde nationale, en 1871, la
XUV* SESSION. 24
370 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
Lors des travaux de constructioa, on en jQt rompre
rhuis, afin de s'assurer de leur état (1).
En 1551, on les plaça au grenier (BB. 21], et plus tard,
dit M. de TÉpinois, Louis XIII, lorqu'il vint à Gompiègne
en 1619, les fit porter à la tour de Soissons (CC. 63).
29. Cuisine.
Les gouverneurs attoumés donnaient assez firéquem-
ment des repas dans l'hôtel de ville, soit lors du passage
de grands personnages, soit quand des fonctionnaires, tels
que le maître des eaux et forêts, le lieutenant du bailli ou
autres, venaient procéder à certaines opérations profitables
à la ville. Ils faisaient alors exécuter le repas par des
maîtres d'hôtel ou pâtissiers (2). Aussi trouve-t-on, dès
l'origine, l'indication d'une cuisine dans l'hôtel de ville.
Elle n'était probablement pas dans le bâtiment princi-
pal, mais dans les constructions anciennes, et sans doute
peu considérables, qui se trouvaient derrière, dans la cour.
En 1520, on paie vingt sous à Gérard Gourtoys, menui-
sier, pour avoir fait un porche à la cuisine de l'hôtel de
ville (3). A la fin d'avril 1505, on avait aussi fait faire un
four neuf dans l'hôtel de ville (4).
ville de Compiègne a continué à avoir une compagnie d'ar-
tillerie.
En 1550, la ville avait un canonnier, Jacques de Ravenei.qui
recevait un traitement de cent sous par an. (CC. 43).
(\) i 505-1508. CC. 34, f° i38.
(2) Nous avons réuni de nombreux renseignements à ce
sujet dans le travail communiqué à la Société historique de
Compiègne, sur les fêtes et cérémonies.
(3)CC. 37, fo i90, i 3 juin 4 520.
(4) CC. 76, fo422l v.
XLIY' SESSION, A SËiNUS. 371
30. Dépenses,
Uoe question reste à se poser, comment la ville a-t-elle
pu subvenir à la dépense de cette construction?
Ld ville de Gompiègue possédait à cette époque des
icvenus de diverses natures qui, sans être considérables,
suffisaient à faire face aux dépenses ordinaires : rentes,
gages des officiers, présents aux grands personnages, et
'Surtout travaux de voirie et réparations des fortifications
et des édifices publics. Les revenus varient, du reste,
beaucoup; et tandis que dans certaines années ils ne s'élè-
vent pas au-delà de mille livres, dans d'autres, ils vont
juaqu'à deux mille. Mais, comme la plupart d'entre eux
correspondaient à des dépenses fixes, ils ne pouvaient suf-
fire à fournir aux frais de construction de l'hôtel de ville.
Les attoumés trouvèrent une nouvelle ressource dans
l'octroi qu'ils obtinrent du roi, d'une somme de deux
cous par chaque minot de sel, vendu au grenier à sel de
Gompiègne.
Cette faveur renouveléeàplusieurs reprises, produisit une
première fois, pour la période de six ans, de 1499 à 1505,
une somme de 1,681 livres, et pour celle de 1505 à 1511,
ia somme de 2,100 livres. Cette dernière fut employée
presque exclusivement aux travaux de Thôtcl de ville, et
UQ compte spécial nous montre l'emploi de ces fonds fait
par le receveur (1).
Nous avons vu, de plus, que le bois avait été fourni
gratuitement par le maître des eaux et forêts et que la
ville n'avait eu qu'à faire les frais d'abattage et de trans-
port à Compiègne.
\) ce. 76 cl ce. 77.
372 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
BATIMENT DE LA JUSTICE CONSULAIRE.
31. Acquisitions.
En 1587, la ville avait déjà acheté une maison située
rue de la Heuze (1).
En 1624, un incendie allumé à Thôtei Saint-Georges,
par les gens de la suite du roi qui y étaient logés, se
communiqua à Tun des bâtiments élevés dans la cour de
rhôtel de ville et Ton fut obligé de l'abattre et de le recon-
struire à neuf.
De nouvelles craintes d'incendie s'étant manifestées
en 1653, par suite du voisinage des maisons contiguSs
à l'hôtel de ville, l'administration municipale résolut
de faire Tacquisition de trois maisons -qm formaient
l'angle de la place au blé et de la rue de la Heuie. Elle
avait formé le grojet de les remplacer par une construc-
tion nouvelle destinée à recevoir la juridiction consulaire
et la Table-Dieu (2).
Plusieurs réunions eurent lieu à cet effet ; dans la pre-
mière, tenue le 9 juin 1653, on décida l'acquisition des
maisons Blandin, Bourguignon et Martin (3).
(1) DD. 42, acte passé devant Antoine Cocquio.
(2) La Table-Dieu, sorte de bureau de bienfaisance, établi
pour les deux paroisses et administré par des gouverneurs élus
par rassemblée des notables.
(3) La première fut payée 700 livres et 60 livres d'épiogles;
la troisième appartenant à plusieurs propriétaires t ,200 livres,
plus certaines exemptions de tailles ; le prix de la seconde ne-
nous est pas connu.
Voici le texte d'une des délibérations prises à cette occasioD =
XLIV* SESSION, À SENLIS. 373
les gouverneurs furent autorisés à appeler devant eux
'tt propriétaires et à traiter à t'amiable. Ce qui eut lieu,
«t le 16 juin, une nouvelle assemblée décida qu'aussitôt
ies acquisitions faites, on construirait, sur remplacement
de ces maisons, un bâtiment de mêmes hauteur et symé-
trie que l'hôtel de la Cloche ; bâtiment dans lequel serait
pris, par le bas, une chambre pour le bureau des pauvres,
K I>a loDdy 16*jourde juin 1653, au bureau de Thostel coin-
nao de la ville de Compiègne, où étaient Maistres René Potier,
cooseilleresluen Télcction dudit Compiègne, Louis Charpentier,
limicié es loix, conseiller et advocat du roy en ladite élection, et
Henry Sergent, marchand, gouverneurs attourncs.
• Sur la plainte et remonstrance à nous faitte par plusieurs et
diverses fois que l'hostel de laditte ville avait cy devant couru
grand risque d^estre bruslé par les maisons voisines apparte-
BMtft i Gilles Blandin, maistre Jean Bourguignon et la veuve
^ Martin, à cause que les cheminées des dites maisons sont
joingnantes le grand comble dudit hostel de ville et qu'il
ÎBporte à la décoration de la ville, ambellissement dudit hostel
de ville et au bien des pauvres et à Thouneur de la commu-
i^té des marchands d'avoir des lieux propres et convenables
poar y trailter des affaires des pauvres et rendre la justice con-
wbire.
• A esté résolu que les propriétaires desdittes maisons seront
*udez audit hostel de ville pour sçavoir d*eulx s'ils ont la
volonté et Tintenliou d'accomoder la ville pour la vente des-
dittes maisons et ensuite lesdits sieurs gouverneurs pourront
traiUer i composer avec eulx i telles sommes qu'ils adviscront
booestre.
• La veuve Martin appelée devant les attourncs consent à la
vente moyennant six cent livres et de plus rengagement pris
pir les altourDÔs de Tabonner aux tailles pour trente livres et
(Je l'exempter des logements do gens de guerre, garnisons et
contributions (Archives de Compiègne, DD. 37).
374 CONGRÈS ARGHÉOLOOIQUE DE FRANGE.
avec un cabinet pour accompagner la chambre du conseil
(située dans le bâtiment principal) et au-dessus un^
chambre pour les consuls ; quant au troisième étage e*^
au grenier qui le surmontait, ils devaient servir à resser^'
rer les grains de la Table-Dieu.
32. Conêtruction et décoratianê.
Ce bâtiment fut élevé ainsi qu'il avait été projeté, et il a
continué de servir aux bureaux de la mairie jusqu'en
1869, où il a été démoli et remplacé par celui que nous
voyons actuellement (1). C/était une construction en
pierre, avec trois fenêtres de façade à chaque étage. Celle
du milieu, au premier, était remplacée par une statue en
ronde-bosse représentant la justice, figure exécutée par
Gilles Guérin, sculpteur du roi. Cet artiste reçut de la
ville une somme de cinq cents livres, tant pour l'exécution
de cette figure, que pour l'épitaphe de M** de Crevant de
Brigueil placée à Saint-Corneille. Un maçon, du nom de
Gérard le Sourd, fut chargé de placer au-dessous une
table de marbre avec le mot sculpté Justifia (2).
Les comptes de la ville nous donnent le prix de con-
struction du bâtiment de la justice consulaire. Le
15 octobre 4655, une somme de 6,800 livres fut payée à
l£nnnanuel Camay, maçon, pour avoir démoli les trois
petites maisons et les avoir remplacées par une construc-
(1) Voir sur la démolition do cette construction un article
hnmourislique de M. Charles Beaurin, dans Y Echo de VCHse à\\
U août 4869.
(2) Voir la gravure do cpltc slatntî dans V Histoire du Palais
df Compiègne, de Pcllassy de l'Ousle, p. 4 44.
. XUT* SESSION, A SBNLIS. 375
lion nenve en maçonnerie ; la charpente, adjugée au
nblis le 15 juin 1654, fut exécutée moyennant i,OiS
livres par Jean Gay ; et divers travaux de menuiserie,
planchers, portes, fenêtres, etc., s'élevèrent à 210 livres.
33. Intérieur. Cabinet.
La seule pièce de ce bâtiment, sur l'intérieur de laquelle
nous ayons quelques renseignements, est le cabinet de la
tlkmbredu eanseil.
Au xm* siècle, nous voyons souvent cette pièce men-
tionnée dans les comptes de la ville et on consacre des
sommes assez importantes à sa décoration et à son ameu-
bkment. Elle était située au rez-de-chaussée du bâtiment
de la justice consulaire et touchait à la chambre du
eoQieil.
Ooi la tendit de tapisseries de Beau vais (1), on plaça au
milieu, une grande table de noyer, brisée, couverte d'un
tipis de Modène (2), et autour six tabourets de bois de
II) Mandement du 8 janvier 4657, à Gilles Chamiolue, rece-
Teor de la ville, de retenir par ses mains des deniers de sa
recette, la somme de 198 livres tournois, à cause de pareille
somme par luy tirée et desboursée par les ordres de MM. les
gOQvemeurs attournez en Tachapt de soixante-six aulnes cou-
nntes de tapisseries, manufacture de fasson de la ville de
Beaavais, rendues en cette ville de Compiëgno .... Mandements
1656-1660, f» 5.
\t) A Fleury Haqueville. marchand tapissier demeurant en
cfttf ville de Cc*mpiègue, de la somme de 59 livres S sous
toarnois. pour une grande table de bois de noier, brisée, garnie
de ses ferrures, avec un tapis de tapisserie de Modën?, comme
aossy pour avoir cousu les lez et bordures de la tapisserie de
376 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
chAne, couverts de moquette et garnis de franges (i
Deux grands fauteuils de chêne, garnis et couverts <l
trippe de couleur rouge et violette, servaient en outre 3
sièges aux anciens gouverneurs (2).
33. Porte de l'Arsenal. Bâtiment de la Caisse d'épargne
Du côté droit, l'hôtel de ville est resté jusqu'à c«
dernières années séparé de la porte de l'Arsenal par un<
propriété privée, le café de la Cloche. Celle-ci fut enfic
acquise en 1867 et fut remplacée par un bâtiment con-
struit dans le style du commencement du xyii*,mais don
on doit regretter les mesquines proportions et l'écrase-
ment. Cette construction fut faite, d'après les conseils di
M. Viollet-le-Duc, afin de dégager la tourelle d'angle d<
l'hôtel de ville et dans ce but, le bâtiment fut élevé ei
retraite. Le rez-de-chaussée de ce bâtiment est affecté ai
service de la Caisse d'épargne (3), et le premier étag)
renferme une partie du Musée Vivenel.
Beauvais estant dans le cabinet de la chambre du conseil de \
dittc ville, pourquoy faire, il a fourny la toille et autres chose
nécessaires Cid. f^ 9).
(1) Au même .... quarante-huit livres sept solz tournois, pou
avoir fourny et livré six tabourelz <le bois de chesne, couvert
de mouquette avec frange, servans de sièges à la chambre d
conseil (id. f^ tH v.).
it) Au même .... 49 livres 7 solz tournois, pour deux grande
formes de bois de chesne, garnies et couvertes de trippe d
couleur rouge et viollet, avec mullelz, pour servir de sièges
MM. les anciens gouverneurs attoumez es assemblées qui s
tiendront à Hiostel de la ditte ville id. î^ i\ w, 7 juillet 1660,
,3) L'administration de la Oisse d'épargne a concouru dan
une certaine limite à la dépense de cette coDstnictioD.
XLIT* SESSION, A SENUS. 377
Presque en môme temps (i869) la porte de l'arsenal,
élevée fOUS le règne de Lous XIII, et dont Tétat de dégra-
dation ne permettait pas la réparation, était réédifiée dans
le style primitif de sa construction, mais avec quelques
modifications dans le détail de la décoration, modifi-
cations dont on peut juger par un dessin ancien conservé
aux archives de la ville et qui n*a pas été connu de Tarchi-
tficte chargé de diriger cette restauration (1).
La prison, qui avait été construite à la fin du siècle
dernier sur les dépendances de l'hôtel de ville (2), a été
déplacée et le bâtiment situé au fond de l'impasse est
aujourd'hui affecté au logement des agents de police.
34. Bâtiment de la rue des Pâtissiers. Ecole de dessin.
A la même époque, on a construit sur la rue des
Pâtissiers un nouveau bâtiment qui se relie à la construc-
tion exécutée au fond de la cour en 18i9, et qui renferme
au rez-de-chaussée les remises des pompes et le bûcher;
an premier, la galerie de tableaux du Musée Vivenel,et au
(6Gond étage, l'école municipale de dessin.
Le nouveau bâtiment de la rue des Pâtissiers commu-
ai Voir pour les représentations de cette porte : 4* dessin
i la plune du commencement du siècle dernier représentant la
porte de larsenal dans son état primitif, reproduit dans ce
tnvail (Archives de la ville de Compiègne, DO.); S® lithog.
dans le voyage de Taylor cite plus haut ; 3* gravure sur Itois
dans VHistoire du Palais de Compiègne, de Pellassy de
rOasIe, p. H 8.
Il) Ces dépendances avaient été accaparées au xvm* siècle
par le gouverneur qui y avait établi des remises et des écuries,
et la ville eut plus lard des difliculiês sérieuses à vaincre pour
w les faire restituer (DD.).
378 CONGRÈS àrghéologioub de frange.
nique avec les bureaux de l'hôtel de ville. Il comprend, ai
rez-de-chaussée, un vaste hangar et un calorifère; ai
premier, une galerie faisant partie du Musée Vivenel, e
renfermant principalement des antiquités romaines et d
collections géologiques.
SÉANCE DR VENDREDI i" JUIN 1877.
PRÉSIDSNGE DE M. LÉON PALUSTRE.
Siègent au bureau : MM. Deschamps de Pas et le baron
de Cauna.
M. J. de Laurière donne lecture de la note suivante au
nom de M. Durand :
Notre-Dame de la Victoire, près Senlls.
On voit encore près de Senlis quelques fragments de
rabhayc de Notre-Dame de la Victoire, fondée par Philippe
Auguste, en mémoire de la Victoire de Bouvines.
La piété reconnaissante de nos pères avait fait de cette
abbaye un lieu de pèlerinage, ainsi que le prouve une
pièce assez rare, dont voici la description.
C'est une assez bonne gravure du xvii* siècle, repré-
sentant dans une niche ornée de lampes et d'ex-voio.
une statue de la sainte Vierge, en pied, tenant de la main
droite une branche de lis, et portant usa gauche TEnfant
Jésus. Les tètes sont couronnées. Il est facile de voir que
le dessinateur ne s'est pas piqué d'exactitude; toutefois on
XUV* SESSION, A SENLIS. 379
distingue encore dans son œuvre la copie d'une statue du
.\IT* siècle.
En haut de la gravure on lit :
NoMire-Dame de la Victoire ^ pèlerinage
proche de SetUis.
Au bas sont gravées ces inscriptions :
A très haolt et paissant prince Lovis de Valois, duc d'An-
goolesme, colonel gnâl de la cavalerie légère de France et
estr^re gou«» et lieutenant gîîâl pour le Roy en Provence.
Je rends Philippe Auguste et Louis glorieux
Parce qu'ils me dévoient céder toutte leur gloire
Et D*ont voulu sortir du champ victorieux
Qu'affîn de m'imputer l'honneur de leur victoire.
A Paris, chez N. Regnesson, rue Saint-Jacques-au-
Chameau, avec prix.
Hauteur 0"42, largeur 0»29.
Louis -Emmanuel de Valois, petit -fils naturel de
QiarleslX, est mort en 1653.
Cette épreuve fait partie de la collection de M. Durand.
M. Margry présente sur le nom et les origines d'Amiens,
l'analyse d'un travail de feu Labourt, travail qu'il a
trouvé dans les papiers de ce savant, dont le dépouillement
lui a été confié par le frère de celui-ci.
MM. Palustre et de Marsy font remarquer que les idées
omises dans ce travail, qui remonte à plus de trente ans,
Qesont plus à la hauteur des découvertes philologiques
actuelles ; M. de Marsy ajoute qu'il pense que ce fragment
atléjà figuré soit dans V Essai sur les villes de Picardie y
mi dans le travail sur la Picardie colonisée par les
Indous, connu seulement par les analyses des rapporteurs
de différents concours.
380 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
M. E. Dupuis donne, au nom de M. Alexandre Hahn^
lecture d'un travail sur la topographie des environs d^
Sculis à diverses époques.
Carte comparative du pays senlicien aux
temps anciens et de nos Jours^
Parmi les questions à Tordre du jour des travaux du
Congrès, je lis au 7* paragraphe ces mots : a Dresser une
a carte comparative du pays aux temps anciens et de nos
a jours. D Ce sujet est trop vaste et en dehors de mes
études pour que je puisse avoir seulement l'idée de
l'aborder; mais, comme habitant d'un canton deSeine-et-
Oise, limitrophe de l'arrondissement de Sentis, je me
permets de venir apporter ma très-petite pierre à l'édiflce,
en soumettant une esquisse, pour nos localités, des lignes
de démarcation des anciens diocèses ecclésiastiques et
administratifs de Paris, de Senlis, de Beauvais et de
Meaux, en montrant graphiquement les diverses variations
qu'elles ont subies.
En remontant à l'origine des temps de la Gaule, nous
ne pouvons déterminer positivement les circonscriptions
des peuplades ou tribus préhistoriques; les pays occupés
par des peuplades isolées et distinctes n'avaient point de
limites, et de vastes marches restaient entre les centres
des tribus. — Depuis, la population devenant plus dense,
on a défriché; les Gaulois, maîtres dans l'art de cultiver
les terres, commencèrent à se cantonner et à fixer des
limites à leur sol par de^ frontières naturelles, comme
les forôts, les chaînes de montagnes, les cours d'eau...
Aussi, aux temps devenus historiques, on peut arriver à
XUV« SESSION, A SENLI8. 381
une détermination estimative des pays et obtenir une
solution plus ou moins satisfaisante.
A l'époque de la conquête par les Romains, armé de
textes et de documents, on peut arriver à une fixation
plus certaine. Pour ce qui est de notre sujet, Jules César
et Hirtius ne disent rien des Silvancctes, mais peu après
Ptolémée et Pline en font mention.
Les divisions topographiques de Tempire romain éta-
blirent des limites à nos localités, seulement nous voyons
qu'on a méconnu la démarcation si naturelle du cours de
rOise, et compris dans le Beauvaisis, une bande de
terrain en établissant une limite arbitraire au milieu de
la forêt célèbre : Cotia Sylva (dont le nom altéré plus
tard devient forêt de Cuise), depuis Rhuis jusqu'à La
Morlage, se continuant jusqu'à TIsle-Adam, avec TFpte
pour limite au sud-ouest. — Cette nouvelle délimitation
coïncide avec la formation du Silvanecte dont le territoire
se terminait aux vallées baignées par la Thève et la
Thérouonne.
Lors de l'établissement du christianisme, les apôtres se
r^^dirent : saint Rieul vers Senlis, saint Lucien vers
Beauvais, saint Denis vers Paris (ces villes devinrent
chef-lieu d'un diocèse ecclésiastique), et ils suivirent pour
leurs excursions évangéliques à peu près les espaces
(^fermés par les diocèses romains.
L'invasiou des Barbares remit tout en question : il
D'y avait plus de limites stables : les rois mérovingiens
se partagèrent sans cesse les contrées ; les carlovingiens
De purent empêcher l'établissement de la féodalité, qui se
continua sous les capétiens.
Au moyen âge, les limites ont subi diverses modifi-
cations. Pour nous, nous voyons, le diocèse de Senlis, ou
plutôt le Seulicien, s'étendre jusqu'à l'Isieux et au midi
38â GONORÈS ARGH£OLO610U£ DB VRANGB.
vers Dammartin ; car au xii* siècle, Goye était du diocè»^
de Senlis, et Pierre, évèque de ce lieu, en fit, Tan 113^^
donation au prieuré de Saint-NicoIas-d'Acy, et en 1180 -
Henri, alors évèque, confirma une fondation faite ^S
Ghaumontel. Au xv* siècle, la ligne séparative des diocèse^^
de Paris et de Senlis fut reportée au delà de Coye ; un^^
croix, dont la base existe encore au nord des marais à€=^
ce dernier lieu, portait le nom de la Croix-des-Trois —
Évéchés et indiquait le point d'interception des diocèses d(
Paris, Senlis et Beauvais. Depuis ce temps, Coye a ét^
toujours compris au Pouillé et indiqué de la pleine col-
lation de l'évèque de Paris (1).
Enfin la Révolution de 1789 apporta un nouveau
changement par l'institution des départements, et la cir-
conscription moderne du canton de Luzarches, maillon
territorial du département de Seine-et-Oise, fait la limite
de ce département, avec celui de l'Oise, section de l'arron-
dissement de Senlis : cette délimitation ne repose plus que
sur une ligne arbitrairement tracée, no résultant pas de
la nature des sols ou des accidents de terrain, comme les
(4) Je ne puis m'clendre davantage en cette simple note ; je
ne parlerai donc point do l'ancienne division administrative
de la généralité de Paris, qui ne se conformait pas avec la
division ecclésiastique. On comprenait dans l'élection de Paris
tout noire canton, sauf six communes do rétectico de Senlis,
dont cinq : Àsnières-sar'OUe, NoUy-sur-Oise, Saint-Martin-
du-Tertre ^ Seugtj et Via r mes, du diocèse de Beauvais,
doyenné de Bcauuionl-sur-Oise , ancien Chambliuis ( payus
Cameiiocensis), cl une: SurrUliers, du diocès«) de Se.ulis .
doyenné de Mortefonlainc, ancien Servois (payus Silvanec-
tensis). — Jo devais donner i'hislori()ue de ces communes,
mais œ serait dépasser les termes de ma communication.
xinr* SESSION, a senlis. 383
iodennes démarcations locales qui étaient moulées sur
les limites géographiques du pays.
Ces divers changements sont consignés sur la carte
ci-jointe : la ligne jaune indique la division sous la
période romaine ; la ligne bleue, la division au temps de
la féodalité ; la ligne verte, la division en diocèses de
l'aDcien régime ; et la ligne rouge, la division par dépar-
tements.
M. Dupuis présente ensuite la liste des monnaies décou-
vertes dans les fouilles des arènes de Senlis, depuis
plusieurs années.
Nota sur les monnaies découvertes dans
les touilles des arènes de Senlis.
On a rencontré dans les arènes un grand nombre de
nxmnaies qui ne sont pas toutes venues à notre connais-
noce. Le Comité archéologique de Senlis a pu en recueillir
^ : 31 sont trop frustes ou en trop mauvais état de
conservation pour être déterminées. Les 237 autres se
classent ainsi :
4 gauloises, dont une des Senones sans la légende ArHA ;
une des Catalaunes (guerrier armé de la lance ^t tenant
un torques) et deux indéterminées ;
49 du haut empire et des empereurs jusqu'à Gallien;
De Gallien à Tetricus, la suite est plus considérable :
18 GoUien.
5 Salonine.
27 Postume.
93 Victorin.
384 CONGRÈS ARGHÂOLOOIQUE DE FRANCK.
12 Claude le Gothique.
2 Quintillus.
46 Tetricus.
Soit 133 frappées de Pan 250 à Tan 273.
A partir de Tetricus, nous n'en avoDS plus que 49,
eucore Constantiu I*' seul en a 31, en y comprenant 1<
pièces à la louve et celles à la légende Constantinopolis»^
Nous signalerons l'absence des monnaies, si commune^
pourtant dans le pays, de Dioclétien, de Maximien Her —
eu le et de la plupart de leurs successeurs.
Mentionnons, pour compté, la trouvaille de deur^
monnaies carlovingiennes de Charles le Chauve, qui nous -a
apprennent qu'au ix** siècle les arènes n'étaient pas encore
comblées, mais nous expliquent l'état de délabrement dans
lequel elles devaient se trouver à cette époque, où elles
servaient de carrière à la population de Senlis.
Enfin la partie supérieure du terrain a donné quelques
monnaies duxvi'' siècle, ce qui n'a rien d'étonnant, puis-
que ce fut sur l'emplacement des arènes que, lors du siège
de i589, les Ligueurs établirent une batterie de trois pièces
de canon pour battre eu brèche les murailles de la ville.
M. Hayaux du Tilly demande à faire, au sujet des
arènes, quelques observations sur les conclusions du rap-
port de M. de Caix de Saint-Aymour, relativement au
puits que la Société française a fait fouiller.
On a parlé de l'eau qui s'y trouvait et de la possibilité
de la présence d'une source; la constitution géologique du
plateau des arènes rend inadmissible cette hypothèse; le
fond du puits est de beaucoup au-dessus du niveau de la
rivière; des puits voisins ont une profondeur beaucoup
plus considérable. Le puits des arènes ne peut être qu'un
puisart, destiné à recevoir les eaux pluviales. Cette dcsti-
ZUV* SESSION, A SENUS. 385
Ditioo est du reste conforme à celle que paraissent pré-
fleoter les puits qui existent dans d'autres cirques et
fhéAtm. '
M. Hayaux du Tilly pense aussi qu'il y a lieu de consi-
dérer oomme exagéré le chififre de 12,000 spectateurs que
M. Vatio indiquait comme pouvant tenir dans les arènes
de Senlis.
H. Boec déclare qu'il ne veut pas rouvrir la discussion
sur cette question en demandant la parole, et qu'il traitera
oei divers points dans la conférence qu'il compte donner
dimanche prochain sur les arènes ; mais dès à présent il
ne peut accepter les bases sur lesquelles M. Hayaux du
Tilly s'appuie pour fixer le chififre des spectateurs.
M. l'abbé Vattier fait observer qu'il y a eu autrefois de
Teiu à la fontaine des arènes, en assez grande quantité
pour former un ruisseau susceptible d'être curé, ainsi que
le constate une note d'Alforty se rapportant à la date de
«SK.
M.rabbé Vattier lit le mémoire suivant sur la 30* ques-
tion:
Histoire des diverses bibliothèques de
Senlis.
Bibliothèques de Senlis (1).
Notre ville de Senlis possède actuellement deux grandes
Kbiiothèques, la bibliothèque de l'hôtel de ville et celle
(I) Je dois la plupart des renseignemcnls conteDUS dans cette
Dole, à la complaisance bien conoue do M. Caltru, bibliothé-
caire de la ville et secréUire de la mairie.
XLlV SESSION. i5
380 CONGRÈS ARGUÉOLOOIOUB DE FRANCE.
dite du Chapitre, quoiqu'il n'y ait plus de chapitre
Senlis. D'où viennent ceé deux collections et quelle c
leur valeur; voilà, si je ne me trompe, les deux questioi
que peuvent se poser nos savants visiteurs. Je vais «ssay
d'y répondre brièvement.
Quant à l'origine, elle est bien variée, mais elle est
môme à peu près pour ces deux bibliothèques. A la siaist
époque de la Révolution, quand nos prétentieux gouve
nants s'imaginèrent pouvoir supprimer Dieu par e
décret et la religion en supprimant ses ministres, ils vol
rent en même temps la confiscation de tous les biei
appartenant aux églises ou aux ordres religieux. Pan
les biens meubles se trouvaient des livres en asseï gran<
quantité, les couvents étant nombreux à Senlis et dans 1
environs, et on concentra au district, comme on disi
dans le jargon de l'époque, les bibliothèques des hu
curés de la ville, réunis en communauté, des Chapitres i
Notre-Dame, de Saint-Rambert, de Saint-Frambourg, à
Carmes, des Capucins, des Cordeliers, des Augustins •
Saint-Vincent, des Frères de la Charité, des moines *
Saint-Maurice, du grand Séminaire et des religieuses de
Présentation. On y ajouta les bibliothèques de la Victoii
de Châlis, de Saint-Nicolas d'Acy et de Saint-Leu d'Ëss
rent; voila, je crois, à peu près toute la partie religieus
Il y avait aussi dans le voisinage, à Eve, près Dammartii
un président de la Chambre des Comptes, qui se nommi
Barbier du Metz de Hosnay, et qui possédait une belle
riche bibliothèque; elle fut également transportée au di
trict, pendant que son propriétaire gagnait la frontiè
l>our échapi)er à la prison, et peut-être à la mort. L'adni
nislrati(»n du district eut été sans doute assez embarras»
(le cet auias do vieux bouquins, si en môme temps le pr
voyant gouvernemeut n'avait confisqué les immeuble
XLIV* SESSION, A SENLIS. 387
L'évéque de Sentis, Mgr de Roquelaure, ayant jugé pru-
dent d'aller exercer eo Belgique son ministère pontifical,
en mettant sa tête à Tabri du couteau inventé par le bon
docteur Guiilotin, son palais épiscopal, où nous sommes
actodlement réunis, fut mis à la disposition du distrid
cofflme bien national, le généreux sacrifice des députés du
dergé n*ayant sans doute pas paru assez complet à leurs
uoiables collègues. C'était un M amas de livres, mais
foi ne fut guère remué jusqu'en 1808. A cette époque,
riDcien évéché était possédé par M. Fauvel, que tous ces
liîres gênaient beaucoup. M. de Rosnay, ou du moins
quelqu'un de ses héritiers, avait réclamé la bibliothèque
ooofisquée. Le directeur des domaines, qui payait alors au
lieur Fauvel la location du local occupé par les livres, et
qui ne voyait pas sans doute quel profit il tirerait de tout
cela, consentit à la restitution, moyennant paiement de
tous les frais de loyer passés. Or Théritage s'était singuliè-
lement amaigri dans cette triste période, et celui qui avait
réclamé se garda bien d'accepter la condition posée. Le
3 décembre 1808, le sous-préfet de Senlis, proposait à la
municipalité de vendre la bibliothèque de Rosnay, puisque
kl héritiers refusaient de la reprendre aux conditions qu'on
leur offirait, ou tout au moins de la transporter dans un
autre local rendu également libre par la confiscation,
faocicn hôpital de la Charité. Il y avait là, disait M. le
baron de Saint-Henry, sous-préfet, de vastes chambres où
on pouvait ranger les livres et les préserver des ravages
du temps et de la rapacité des passants. C'était d'ailleurs
Tordre du préfet, M. Belderhuscli, que le directeur des
domaines avait sommé de prendre un parti au plus tôt
pour éviter une dépense inutile. I^ conseil inuniciiml
était en outre invité à voter une somme de 300 francs
pour frais de translation, et une somme de riOO francs
388 CONGRÈS ARGHÉOLOOIQUC DE FRANGE.
qui pourrait être allouée en partie à quelque homiE^
intelligeot et instruit réduit par les événements à E ^
pauvreté, et qui serait heureux de trouver dans les foncr-
tions de bibliothécaire un honnête moyen de gagner s^
vie. La ville aurait ainsi une bibliothèque ouverte ail
public, qui pourrait en profiter pour s'instruire et s'amu^
ser.
Cependant les négociations se prolongent, le directeur
des domaines réclame la vente, ne voulant payer le loyer
passé ni futur, et le propriétaire réclame le prix de la
location.
Enfin, le 22 décembre, le préfet autorise la ville :
i"" à transporter les livres à la Charité ;
2* à faire les frais de ce transport ;
3"* à prendre sur ses revenus 200 francs pour le loyer
de la bibliothèque.
M. Boitel, adjoint, que nous retrouverons plus tard
sous-préfet, oBte son cheval et sa voiture pour le trans-
port.
Le 15 mai 1808, on commença à emballer les livres,
et, le 23 mai, M. Boitel se présente pour commencer à le
emporter. Mais il trouve à la porte le propriétaire qui lui
déclare s'opposer à la sortie des livres avant qu'on ne
Tait payé. Le sieur Boitel, adjoint et commissaire délégué
du conseil, lui signifie l'arrêté du préfet, et lui explique
les moyens indiqués pour couvrir la dépense. Il faut
seulement le temps de remplir les formalités nécessaires.
Le propriétaire no veut pas de formalités, et comme
Maistre Piètre Pathelin, il répète : t Ca, argent. »
L'adjoint, embarrassé, va demander des ordres au sous-
préfct qui lui donne l'autorisation de prendre avec lui un
maréchal des logis et deux gendarmes pour que force
reste ù la loi. Cette nouvelle visite n'effraie nullement le
XUY' SESSION, A SENLIS. 38<J
piopriétaîre. « Je n'ai pas peur des geDdarmes, dit-il,
et je vais précisément leur demander de protéger le bon
droit qui est de mon côté, et de me prêter main-forte
pour conserver la garantie de ma location. »
Menace d'envoyer chercher un serrurier, mais le pro-
priétaire persiste. Le serrurier arrive, mais par surcroit
de précaution, le sieur Boitel est allé chercher à la
sous-préfecture l'arrêté du préfet ; et au vu de cette pièce
officielle, les portes s'ouvrent, et les livres quittent enfin
ce logement pour s'installer à la Charité. Ce n'était pour-
tant qu'un amas confus de livres de tout format, de toute
langue, représentant assez le rudis indigestaque moles, du
poète. Il y manquait l'ordre, qui est la vie d'une biblio-
thèque.
Le conseil municipal, reconnaissant un peu la valeur
de ce dépôt qui semblait devenir sa propriété, se décida à
appeler un libraire à qui serait confiée la mission de
mettre en ordre tous ces livres.
On s'adresse au sieur Denné, libraire à Paris. H envoie
un ancien libraire,nomméGaudefroy,et un jeune homme
du nom de Leroux qui tiest pas encore établi. Quelque
temps après Denné écrit au maire de Senlis une lettre
qui nous a fait ouvrir de grands yeux. En voici le résumé:
Il n'a pu vendre les quatre livres d'office ni les tablettes
de bois ! vous entendez. Messieurs, les tablettes de bois !
Il ne s'agit pas évidemment de vulgaires planches de
bibliothèque, il eût plutôt fallu en acheter qu'en vendre,
et ces tablettes de bois sont pour moi ces curieuses et
rares tablettes de bois enduit de cire que vous avez été
admirer à l'hôtel de ville, qui sont maintenant sous clef,
et qu'on ne peut voir qu'en montrant patte blanche.
Quant aux livres d'office, ce sont ces précieux volumes
manuscrits, enrichis de miniatures, que le possesseur
390 CONGRÈS ARGHÉOLOGIOITE DE FRANGE.
actuel nous offrait récemment de mettre à notre dis^^^
8ilion, moyennant la modique somme de 4,000 francs, ^
je ne me trompe. Ce brave M. Denné n'avait pu 1 ^^^
vendre : les riches, dit-il, ne sont pas à Paris, les chcp=^- "
de l'armée sont à la guerre, et la bibliothèque nationalZ^^
n'a pas d'argent. Hélas ! il y a peu d'années le conseil ^^^^
Fabrique a su trouver des acheteurs.
Le 8 novembre 1809, Denné demande un envoi d^V^
livres. Il peut actuellement les installer, et plus tard il ei: -^
serait peut-être embarrassé. Il réclame le lendemain ua^K^^
ou deux voitures de livres de rebut, mis au papier; il 1
a promis, et ne peut tenir sa promesse, ce qui le met d
mauvaise humeur. Il consent à les acheter généreusemen
24 francs le quintal, pour les in-folio, 16 firancs pour I
in-4*, 12 francs pour les in-8*, et 10 francs pour les^^^
in-12. Or, parmi les livres de rebut, en 1835, M. Ledri^ ^^"^
ramassait dans la salle basse, sur le pavé, un certain ^^
nombre d'ouvrages de grande valeur, pour lesquels \S^ "
réclamait une place dans l'armoire, à la bibliothèque^^ ^^
afin do les mettre à l'abri des bibliophiles indiscrets ^ *
Quant aux livros classés, il les prendra au prix d'esti-^ * ^'
ination de CiauJcfrvw. A cette lettre pressante est joint^-^ ^
la (Htito note :
A iiaudeti\>y, il e:>t dCi 18 francs par jour; soit au--^ ^"
total : 1,110 francs ;
A l.o^nl\, il est dû li t'rano? par jour; soit au totale *
l,UU fram-s.
IVur ivApior de rebut nou livrée il réclame une petit^^-
iiuleiuuite Je ^U) traucs; s<ût vingt quintaux d'in-8*«- "
ivur se;^ voyais l\>i francs, pour le transport des quat
lure^dV^lîse li îViiîc^, l^**^ain> paie à Denné 907 francs
\Uudefrv»), outn? uu Kvmpte, reçoit pour i06 bmncs di
XUV ÏBSSION, A SBKLIS, 391
U • cIahA deux biblîothèquea, l'une k la Charité,
l'utn dans le pavillon du Chapitre, derrière k catbé-
iaU.
Lm demandes exagéra des libraîreE furent uu peu
réduites.
Il y aT&il à la Charité, eu 1810, 9,^37 volumes, dont
TMin-f, 1,139 ia-4', 3,159 in-8*, 5,309 in-12.
Outre ceux qu'emportait Gaudefroy, ou en avait vendu
■ KM. les «bbés Juéry et Brisard pour 366 francs, et à un
likaire pour 710 francs. Avant le transport à la Charité
00 estimait le tout à euviion 13,000 volumes, il y avait
lion comme aujourd'hui des ^os qui aimaient à lire,
oaqui aimaient les images, et d'autres qui éprouvaicEit le
knoin de fournir du papier aux épiciers, et combien de
conets ne peut-on pas tirer d'un bel in-folio? Un certain
nombre de volumes s'en étaient allés ainsi avec les pas-
aati,et H. Ledruenrachetaplusd'ua chez les revendeurs
de&«)lisel d'ailleurs.
Cependant, en 1819, le ministre écrit au préfet pour
'tutnder un catalogue de la bibliothèque de la ville en
liiim temps que de celle de Crépy. U sait qu'il y a eu
des dilapidations, il rappelle donc que tes bibliothèques
UioDt pas aux villes, mais à la disposition duministt^re;
■I nut un catalogue raisonné et dans le plus brcT délai ;
(ion ne lui obéit pas, il fera apposer les scellés, et au
^in transporter te tout à Reauvais.- Le bibliothécaire
ftiit alors un ancien hospitalier, Frère Reniy, qui était
vieux et intirme, et à qui on allouait le traitement de
bibliothécaire pour l'aider à vivre, mais qui n'était nul-
loomt en état de dresser un catalogue. Le ministre
«pendant ne recevant pas de réponse envoie une nouvelle
sommation. Cette (bis, M. le maire répond en proposant
de mettre en vente la bibliothèque. Le ministre charge
H
392 CONOhÂS ARGHÉOUMJlOnS DE FAAKGI.
le préfet de lui adresser un blâme énergique auquel J^
m'associe de tout cœur, et le menace de nouveau de bi^"^
transporter les livres à Beau vais si on ne lui envoie
de catalogue. M. le maire répond alors au conseiller de
fecture, M. dTlbée, que ces réclamations sont superflues S
il a causé d'ailleurs avec le préfet et lui a exposé que 1^
bibliothécaire est vieux, aveugle, et qu'il cherche quel^ —
qu'un pour le remplacer. Or, en 1820, un jeune prêtre^
M. l'abbé Decaye, venait d'être nommé par Mgr l'Évèqui
d'Amiens curé de Saint-Léonard. Il était venu fiiire uni
visite à sa nouvelle paroisse, mais ne la trouvant pas sans
doute à son goût, il était venu fixer sa résidence à Senlis
se contentant de faire quelques apparitions à Saint-
Léonard, et bientôt, il obtenait le titre de vicaire di
Notre-Dame. M. le maire lui offrit les fonctions de bîblii
thécaire, qu'il accepta avec empressement, et bientôt oi
put envoyer un commencement de catalogue an ministre-
Peu de temps après, en I8i3, la bibliothèque de 1^^ ^
Charité fut transportée à l'hôtel de ville, oii elle était untfr:^^^^
peu mieux garantie contre le pillage, et mise en ordre par^-^
M. Ledru qui ivntinua avec un lèle ardent le catalogue^^ ^^
et le classement des ouvrages, obtint du conseil la vente^^ ^^
do volunus doiun'illôs qui. d'ailleurs, appartenaient à
anivn!^^ dont on (x^ssedait des exemplaires complets, afin
dVn acheter do plu> utiles.
iVpunidaut M. J.o Kc^snay nls u'avjit pas absolnment.
ivn\MKV à rentrvr en 'jwssession .!e I.i bibliothèque pater-
nel le, e; :: r\vI.miA au iri.rv .:e >enlis la restitution des
hvivs vv:l^.$^ut^ ^v;iiAu: >. r. cuî:j:n:ion. On lui répondit
jiK^rs v;;:e *a ".o: a\a:: b^*:: .:;\,ie li rv^utuac^n des biens-
i :u :u^ ',: N-^^s^ .î a :: s ,vr: a. " ^^^ ,v :: i . *^ ,^ r.s. Q Aial aux meubles.
el*^ uV:: ivi*U:: ivji<. OVu. : ^:: A*;:br» Ifâ5. A uni
iK*v^v"e v:e:-.u:!.vj' oc '.■,:. rsrivcl.: rar un* lettre motivée^^
XUT* SESSION, A SENUS. 393
ÛDSÎ : A la rentrée des émigrés on avait offert aux héri-
tes de Rosnay de leur rendre les livres venant de leur
ftre, ils avaient refusé do les recevoir, parce qu'aucun
l'euz ne voulait se déclarer héritier de peur des créan-
ciers; la ville maintenant était en possession depuis plus
it trente ans, et ne consentait plus à rendre. D'ailleurs,
fhéritier 4^mandant avant tout un catalogue, c'était sans
Amte pour vendre les livres; il s'agissait donc simplement
firgent, et en ce cas, la ville si elle était dépossédée,
ImaDdait à avoir la préférence sur tout autre acquéreur.
U question en même temps était soumise au ministre.
Eo dkiy le gouvernement nomma une commission pour
étudier Taffoire, et, en 4827, la demande du sieur de
Rosnay fut déclarée inadmissible.
H me resterait mainteaant. Messieurs, à vous faire
ttoDtitre un peu ces deux belles bibliothèques où se
troDîent des ouvrages de grande valeur, et sur chaque
knnche des connaissances humaines. C'est ainsi qu'à la
Kbiiothèquo du Chapitre on trouve, pour l'Écriture
Unie, avec une magnifique bible polyglotte eu dix
^umes grand in-r*, de nombreux commentaires en latin
^ en français ; pour la théologie, les œuvres de presque
loui les grands théologiens, comme Albert le Grand,
lint Thomas, Duns Scot, Suarez et bien d'autres, une
collection presque complète des Pères <recs et latins; pour
l'histoire avec Baronius, Salica» Noël Alexandre, plusieurs
grandes histoires, et de nombreuses histoires particu-
lières, les collections de documents nouveaux publiés
pirles PP. Sirmond, Martène, Durand, Labbe, etc., trois
eollections des conciles généraux, de nombreux ouvrages
de droit civil et ecclésiastique, une magnifique collection
de classiques latins et grecs venant de l'abbaye Saint-
Viaoent, etc.
384 CONGRÈS ABCBÉOLMIOUE DE nARCB.
Je pourrais vous faire aussi oe qu'on pourrait ap
l'histoire anecdotique de certains ouvrages, vous dU
reliures et les fers remarquables, vous citer des remaj
piquantes comme celle-ci, par exemple, que je cueilli
une histoire des papes, depuis saint Pierre joi
Benoit XIII, sans nom d'auteur : c M. Bruis est ai
de cet impertinent ouvrage. Il a beau dire qu'il
catholique-romain, il est plutôt calviniste, et qoi
chose de plus. C'est un libelle scandaleux, une f
violente pour saper les fondements de la religion i
détruire les dogmes, c'est une compilation des
méchants livres ; c'est, en un mot, un tissu de (auM
de mauvaises plaisanteries et de saletés grossières,
signé Froy. o La signature depuis avait été prui
ment cachée sous un pain à cacheter et un morceai
papier.
Je pourrais, si je n'étais pas prêtre, profiter de
occasion pour montrer de quelle manière tous œs
vents étaient des nids de paresse et des repaires d*i
rance et j'aurais beau jeu. Mais il n'y a point, parmi
qui m'ccoutent, de ces détracteurs acharnés du clergi
me débattrais donc dans le vide, et j'aurais l'air de ph
ma propre cause.
Je n'abuse donc pas davantage de votre patiente al
tion et je vous renvoie pour vous édifier sur la beau
la valeur de quelques-uns de nos ouvragres, aux vitJ
que voici et qui en contiennent à mon gré de trop i
échantillons.
M. de Marsy communique, à propos de la 3t* que:
(carreaux émaillés), huit planches tirées de l'album dei
par M. Emmanuel Woillez et appartenant aujourd'h
la Société historique de Compiègne. Ces dessins re
XUY* SEâSIOK, A SENUS. 395
duisent des carrelages provenant de l'abbaye de Breteuil,
et du prieuré Je Saint-Nicolas de Merles près Beau vais. Il
signale, en outre, un carrelage émaillé de l'abbaye d'Ours-
camps, reproduit dans l'histoire de M. Peigné-Delacour.
M. l'abbé Mûller annonce qu'il a recueilli les dessins de
tous les carreaux émaillés qui existaient dans la cathédrale
deNoyon et qu'il les meta la disposition du Congrès. Le
musée du comité archéologique de Senlis renferme égale-
ment un asseï grand nombre de carreaux provenant des
anciens édifices de Senlis et des environs, et M. l'abbé
Vattier ofEre de reproduire ceux qui présenteraient des
trpes nouineaux.
H. de Caix de Saint- Aymour prend la parole sur la
17* question et entretient le Congrès du temple romain
lécoovertdans la forêt d'Halatte, et des nombreux ex-voto
m pierre qui y ont été recueillis et qui sont aujourd'hui
déposés au musée de Senlis.
En attendant la grande publication que M. de Caix de
Siint-Aymour a l'intention de faire sur ce temple et qui
iBra accompagnée de dessins de M. Vinet, nous renver-
rons à la note qu'il a lue à la réunion des Sociétés savantes
à la Sorbonne en i874, et qui a été publiée à cette
^ue (1).
H. l'abbé Caudel a la parole sur la ii* question.
Paire connaître le tracé des voies romaines;
leur ancienneté et leur importance.
(Il Noie sur un temple romain découvert dans la forêt
d'Halatte (département de TOise)... Par Amédée de Caix de
Saint-Aymour. Paris, lib. Reinnwald, 1874, in-tft, 35 pages.—
Plasieurs dessins des ex-roto ont été publiés dans le Magasin
Pittoresque de 1 875.
396 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
Études sur les principales Toies romaines
et gallo-romaines partant de Senlis.
I.
GRANDE VOIE MILITAIRE DE 80I880H8 A BBAUTAI8
. PAR SENLIS.
Que Senlis ait été SOUS la domination romaine, un des
centreâ importants du nord de la Gaule, ce fait n'est plus
contestable.
Depuis longtemps, les recherches et les préoccupations
du Comité de Senlis tendent à l'établir, et la découverte
(le nos arènes lui donne un éclatant témoignage.
Je viens aujourd'hui vous parler des voies romaines qui
aboutissaient à la ville de Sylvanectes, ou qui en sillon-
naient les abords; elles sont nombreuses, puisqu'on peut,
sans aucun doute, on compter jusqu'à dix dans un péri-
mètre d'une lieue; elles sont importantes, puisqu'elles se
rattachent on grande partie au grand réseau qui traver-
sait le nurd de la (la'ilo Belgique, de l'est à l'ouest, et qui
mettait Home en rapport avec l'Océan par Lyon.
L'étude de nos belles voies en attestant la grandeur
antique de notre cité, prouvera que nous n'avons pas élevé
trop haut nos prétentions patriotiques, en revendiquant
pour Senlis la gloire d'avoir été un centre très-florissant
de la Gaule Romaine du nord pendant la période d'occu-
pation.
M. Peigné-Pelacour, après avoiresquissé à grands traits
le tracé des principales voies romaines et du pays des
XUT* SESSION, A SENLI8. 397
Syhanectes, terminait par ces mots : a La liste qu'a donnée
M. Graves, dans l'annuaire du département, des routes
uideones tracées dans la partie de la Picardie qui consti-
tuait l'ancien diocèse de Senlis, pourra être modifiée à la
suite de recherches spéciales, pour lesquelles j'ai la bonne
promesse du concours des amis des études historiques qui
composent le Comité de Senlis (i). »
C'est cette pensée de notre vénérable confrère qui m'a
guidé; c'est sous la haute protection de son mérite que
j*ai mis tout d'abord ce long^ travail, j'ai besoin de cet appui.
Messieurs, et de toute votre bienveillance; ma tâche est
pénible et surtout délicate, puisque depuis longtemps, sur
cette matière, bien des opinions étaient fixées et parais-
saient incontestables.
Je précise la spécialité de cette étude en la renfermant
dans un périmètre de 20 à 30 kilomètres autour du point
central qui sera Senlis.
1* Voie romaine de Soissqns à Beauvais, passant par
Senlis et Lithanobriga,
Elle est désignée, dans le pays, sous le nom de Chaussée-
l^runehaut, et compose un fragment important d'une
des plus grandes voies militaires qui partaient de Lyon
pour sillonner la Gaule en tous sens. Destinée à relier
Rome à l'océan Atlantique par le nord de la Gaule, qu'elle
traverse de l'est à l'ouest, elle allait de Lyon à Autun,
La carte des voies antiques de l'Oise, par M Graves, a été
publiée dans le Butielin monumentai, t. VI ; elle pourra être
('^QSQliée et servira de canevas à ceux qui continueront celte
étude.
398 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRAlfCB.
d'Autun à Auxerre, d'Auxerre àTroyes, de Troyesà Chà-
Ions, de ChàloDS à Reims, de Reims à Soissons, de Soii-
sons à Seulis, de Sentis à Beauvais, de Be&uvais à Amieo»
et d'Amiens à Boulog^ne-sur-Mer.
Elle fut construite par Agrippa, gendre d'Auguste; c'eit
elle dont parle Strabon a ad Oceanum et Bellovaooi et
Ambianos », elle portait le nom de Via Cenurea; c'est ddi
voie solennelle de première classe. Gomma Strabon na dit
point par quel endroit elle entrait dans la Belgique, Be^
gier a cru pouvoir suppléer à son silence par l'itinéraire
connu sous le nom d'Antonin, qui ne dill&re de celui que
nous venons dMndiqucr qu'en un point, mais sur lequel
il donne lui-même l'éclaircissement le plus satisbisant; il
arrête la voie militaire à Soissons et la (ait pasaer par
Noyon, pour aller tout droit à Amiens. Cette voie existe,
eu effet, et elle est incontestablement le plus court chemin
de Reims à l'Océan; mais elle laissait le pays des Sylva-
nectes et celui des Bcllovaques, très-remuants et à moitié
pacifiés, sans communication avec la métropole. D'ailleurs
Noyon n'avait pas d'importance sérieuse: le chemin direct
de Soissons à Amiens n'a donc qu'une raison d'être, c'était
d'abréger la route : il ne faut donc le considérer que
comme un embranchement de la grande voie, comme en
en rencontre tant dans son parcours. Du reste, Bergier
lui-même dit que cette partie n'avait été faite que pour
abréger (per compendium).
Le fragment qui va nous (occuper est ainsi jalonné dans
l'itinéraire d'Antonin.
De Soissons à Senlis (Auguslomagus), de Senlis à
Lithanobriga, de Lilhanobriga à Beauvais (Casaromagus),
da Beauvais à Cormcil (Curmiliacum),* et de Cormcil à
Amiens (Samarobriva).
Ce fragment s'étend aux environs de Senlis, depuis
^*
XLIT* SBSSIOK, A 8BIIL1S. 39U
■'«■droitoù la route entre dans l'ancien diocèse jusqu'u
LJtluaobriga, point stationnaire qui parait avoir sépara le
pifS des Sylvanecteâ de celui des Bellovaques.
On comprend de suite que, pour indiquer BÙremeat h
tneéde la voie de SoissoDâ à Beauvais, il importe de déter-
Dioer l'emplacement de Lithanobriga, puisqu'elle était
DiestatioD intermédiaire entre Senlia et Beauvais; trois
opinions soot en présence : Lilliâucbriga, situé, selon l'iti-
î^* Déraire d'Antonîn, à dix-huit lieues gauloises de Beauvais
et à quatre leulement de Sentis, a été indiquée et recher-
cMs tuccesBiTement sur le parcours de l'Oise, qui va de
Pont-Sainte-Maience à Boran ; comme briga signiTie un
pont, UD passage dans un lieu marécageux et qu'il faut,
dans tous les ctiS, traverser l'Oise pour aller de Senlis h
BaauTOS, c'est là le point qu'il Tallait déterminer. Carlier
le place à Poat-Sainte-Haxeuce , d'Anville à Creil, dom
Gieoier veut voir Lithanobriga dans le village du Lys, et
fait passer la voie de Soissoiis à Beauvais par Boran, où
il existe, en effet, une voie romaine allant dD>it sur Beau-
vais.
Nous n'avons pas ici à discuter l'emplacement de
Lithanobriga; sans prendre parti pour aucune opinion,
nous indiquerons les différentes directions que peut
prendre la voie à partir de Sealis. Ses rami&calious
très-nombreuses noua permettent de Eatisfaire aux trois
hypothèses, sans nous forcer d'eu embrasser une seule.
Nous devons dire cependant que l'opinion la plus natu-
relle, la plus conTormc aux indications des distances et ii
la direction de la voie est celle qui place la Halion de
Lithanobriga dans les environs de Itorun ; le tracé direct
et non interrompu de la voie de Soissous nous y conduit,
en effet, et c'est précisément la siicplicicité de cette direc-
tion qui o déterminé Dom Garnier ù placer Lithanobriga
r
400 GON0R£S ÂRGHÉOLOOIQUE DE FEANGE.
au bout de cette voie. Cette opinion n'est peut-être pas
tant à dédaigner; c'est aller chercher Beauvais un peu
loin, mais les Romains n'y regardaient pas ; leurs voies
servent avant tout leur politique, et pour peu qu'ils aient
eu quelque intérêt à protéger de ce côté du pays des
Sylvanectes, où du reste leur séjour est parfaitement éta-
bli, on comprend qu'ils n'aient pas hésité à s'y créer un
passage.
L'opinion de Garlier, qui fait passer la voie à Poni-
Sainte-Maxence, est peut-être la moins autorisée; il est
vrai que deux voies romaines se dirigent de Senlis vers ce
point, qui a été certainement occupé par les Romains ;
mais ce n'est pas une raison pour vouloir que ce lieu
d'occupation ait porté le nom de Lithanobriga, que rien
du reste ne justifie, et qu'il est impossible d'admettre si
Ton veut tenir compte des distances indiquées.
i® Partie de la voie de Soiuons à Senlis.
Il n'existe aucun doute sur la direction de cette partie,
signalée de tout temps par les auteurs, et dont le tracé est
visible dans sa longueur entière. Venant de Pierrefonds-
par-Champlieu et Héthisy-Saint-Martin, elle entre, à Néry,
dans l'ancien diocèse de Senlis, sépare ensuite le terri-
toire dH! Kully et de Haray, passe au-dessus de Bray et de
Barhery, de Tautre côté de la vallée d'Onette; en face de
BarLtery, elle Tait un léger coude, franchit le marais au
moulin du Thierry, puis vient reprendre sa ligne droite
|M)ur la suivre jusqu'A Senlis. De là jusqu'à Balagny, la
voie vient d'être détruite ; on lui a substitué un chemin
ordinaire en cailloutis établi pour la communication des
communes de Chamant et Balagny, avec la fabri<iue de
XLIT* SESSION, A SENLIS. 40i
sucre de Barbery ; elle n'était forméti généralement dans
eetie partie, que de pierrailles plus ou moins grosses, et
dUpoeées d'une manière assez peu régulière ; on a trouvé
ua certain nombre de squelettes dans le fond même de la
chaussée.
Après avoir laissé Balagny, la route vient droit sur
Senlis. Eïle présente, dans cette partie de son parcours,
une très-belle largeur et une élévation presque continue
de deux mètres au-dessus des champs voisins; à la croix
de Balagny, elle rencontre un chemin gaulois se diri-
geant vers Barbery, via BarharicBy c'est le plus vieux du
pays, il côtoie la voie romaine sur une distance de deux
cents mètres au moins.
J*ai noté cette particularité à chaque fois que je l'ai
rencontrée; elle peut être l'objet de remarques intéres-
santes pour ceux de nous qui s'occupent de voies ; les
petites voies, étroites, enfoncées et solides, que l'on
retrouve souvent cAtoyant les grandes voies romaines,
sont-elles toujours comme on l'a prétendu de simples
foesés? N'ont-elles pas été bien souvent plutôt des voies
conservées par les anciens habitants, les voies des
vaincus ?
A son arrivée à la cité des Sylvanectes, qu'elle laissait
à trois ou quatre cents mètres au sud-est, la voie pré-
sente dans sa construction le travail presque complet des
voies solennelles. En creusant les voies de manœuvre de
la gare du chemin de fer, ou a mis à découvert un trt^
beau dallage composé de pierres carrées, bien taillées et
portant un mètre environ de côté ; ce dallage, qu'on peut
voir encore, faisait le fond du chemin dans une étendue
de quatre mètres environ de large, nous ne l'avions pas
retrouvé dans le défoncement de la voie à six kilomètres
plus haut.
XUV* SBSSION. 96
402 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
Après avoir traversé le chemin de fer, qu'elle coupe
presque à angles droits, la voie descend vers Saint-
Étienne, passe au gué du Moulin, suit le contour du
bastion en formant le chemin actuel, pour arriver à la
Croix-Spèrc(i], c'est en cet endroit qu'elle se détachait pour
former un magnifique fragment se dirigeant vers la cité,
cette partie détachée de la voie se voit encore aujourd'hui;
c'est au moins notre opinion. A la Croix-Spère elle suivait
tout droit le long du petit cours d'eau qui, a quelques
(1 ) C'est qu'eD effet en Gaule comme od Ta soavèot constaté, la
construction des voies romaines a été beaucoup plus simple
qu'on ne Ta généralement pensé, celles du nord de la France
présentent très-rarement le slatumen et le rudus, c'est-à-dire
la première base de pierres volumineuses posées à plat sur une
couche de mortier, el un second ht en maçonnerie de moellons
cassés et de chaux, tantôt un cailloulis de plus ou moins
d'épaisseur remplace les deux couches ; tantôt un amoncelle-
ment de terre battue tient lieu de statumcn ; un lit de calcaire
grossier ou silicieux remplace le rudus, une couche de craie où
de calcaire désagrégée remplace le nucleus. Les matériaux
employés pour la construction des voies sont presque toujours
en rapport avec les ressources des pays qu'elles parcourent. On
peut dire néanmoins, qu'en général, et ceci est surtout vrai pour
la voie de Soissons, une première couche composée d'énormes
pierres, quelquefois de pierres moyennes plus ou moins bien
rangées, fait le fond do la voie. Cette première couche es>i
recouverte de terre haltue, sur laquelle repose une espèce de
nucleus composé, tantôt do cailloux, de petites pierres agrégées
entre elles par un mortier ; au-dessus une deruière couche de
silex, de cailloux ou de pierres dures, selon les lieux, formait
la suuuua criista, cVst-à-dire la couche extérieure et dernière,
bien souvent mémo elle parait ^\ confondre avec le nucleus.
D'autres voies, enfin, ne présentent comme fond qu'un fort
XLiT* SESSION, A SENLIS. 403
pas de là, va se jeter dans la Nonnette, derrière Saint-
Vinoeût ; elle traversait cette rivière au gué de la Poterne,
et de là remontait vers la cité par la rue du Pcrrier, le
jardin de la sous-préfecture, probablement la rue Sainte-
Geneviève et TApport-au-Pain où elle franchissait le mur
romain.
Revenons à notre tracé; que nous venons d'indiquer,
après la bifurcation, la voie Romaine traversait le marais
sur an fort remblai, puis tournait à droite dans la direction
de la rue, dite aujourd'hui des Jardiniers; arrivée au
milieu à peu près de cette rue, elle la quitte pour se diriger
à gauche, en suivant les murs du jardin de M. Cruel, vers
les fours à chaux.
Ici, Messieurs, se présentent deux hypothèses desquelles
dépend la solution du problème de Lithanobriga. Nous
sommes arrivés derrière la nouvelle caserne, autrefois
ferme de M. Leduc, en cet endroit le chemin se fiburque,
c'est-à-dire, qu'un fragment s'en détache pour tourner à
droite, le long des murs de la caserne, traverser la route
Neuve et revenir reprendre sa direction naturelle en face
de la caserne pour courir, entre les propriétés de M»" Pio-
query et de H.Vaniékaut, longeant le mur de Saint-Lazare,
jusqu'à l'Hôtel-Dieu-des-Marais, et se diriger de là, droit
vers Chantilly, par les champs de Saint-Nicolas, de Saint-
Léonard, d'Avilly, comme nous allons l'établir.
enipîerreraeot, uae espèce de blocage posé sur une assise de
lerraio solide : de sorte «^u'il est bien didlcije ici d*assignor des
règles Gxcs à ces coDslruclions ; rcxanieu des voies viendrait
dénienlir, à chaque iD^taul, des théories qui voudraient èlre
trop absolues ou trop générales, c'est en Itulie, et surtout dans
les grandes voies qui partaient du mille d'or du forum romain,
qu'il faut rechercher l'application de la théorie de Vitruve.
404 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
Dans l'autre hypothèse, la chaussée contiaiiaot sa ligne,
viendrait passer au puits de Saint*Lazare, en face l'bô-
pital, se confondrait un moment avec la grande route,
puis la quittant pour former le chemin de Reims vien-
drait passer au coin de la forêt, et former sous le nom
de Chaussée -Brunehaut, la route du Mont-de-Pô et de
Morancy, par le Layon-d'Âuteuil, la vieille rouie, le
carrefour du Petit-Ck)uvent, etc., jusqu'à l'Oise. Là nous
trouvons sur la rive gauche, au Corceiay, l'emplacement
de Litbanobriga en face de Morancy, selon l'opinion de
MM. Millescamps et Hann, opinion établie par le rapport
fait à la Sorbonne par M. de Caix de Saint-Aymour en
1873, rapport qui avait pour objet de terminer la ques-
tion, en conciliant l'opinion de M. Caudel qui avait placé
Lithanobrigd au camp de Gouvieux, avec celle de MM. Mil-
lescamps et Hann, qui, adoptant le tracé de M. Caudel
jusqu'au Mont- Pô, le dirigeait de là droit vers Morancy,
et de Morancy à Beau vais par Crouy et .Sainte-Geneviève.
Jusqu'à cette époque cette seconde hypothèse triomphait
malgré les observations de la Commission de Topogra*
phie qui la contestaient par la raison des distances. Une
autre opinion a paru depuis vouloir s'établir, ou plutôt
le comité semble vouloir revenir à la première hypothèse
de M. Caudel qui plaçait Litbanobriga au camp de
Gouvieux.
La découverte récente d'un très-beau fragment de voie
romaine, signalé dans le parc de Sylvie, par M. Gouver-
neur, et faisant suite au chemin de Gouvieux étudié par
M. Caudel à partir d'Avilly jusqu'à la pelouse dans la
direction du camp; cette découverte, dis-je, peut, eu effet,
faire entrer la question dans une nouvelle phase. Cette petite
digression sur Lithaoobriga nous amène naturellement à
indiquer rapidement le tracé du chemin de Gouvieux,
ZUV^ SBSSION, A SENU3. M5
comme se rattachant par Toute -Voie à la grande voie
militaire et conduisant à l'emplacement supposé de Litha-
nobriga.
2* Pariie de la voie. Chemin de Setilis à Gouviêux.
Que œ chemin soit ou ne soit pas la prolongation de la
Chaussée-Brunehaut, de Soissons à Beauvais, voici son
ptrcoars, on appréciera.
Il prend derrière Saint-Lazare à THôtel-Dieu-des-
Narais, au coin du mur de la propriété de l'hospice,
incline à droite, et va courir derrière Saint-Nicolas,
Courteuil, Saint-Léonard, Âvilly ; il est dans ce parcours,
conservé et forme une belle voie droite et gazonnée entre
deux rangées d'ormes ou de peupliers ; il côtoie constam-
ment le marais et ne présente qu'une seule interruption ;
i un kilomètre environ de son point de départ de Senlis,
il a été défoncé par des travaux de plantation et il est
interrompu sur ce point par un petit bois, mais on le
retrouve bientôt dans le Val-Profond, derrière Saint-
Léonard ; de ce point jusqu'à Avilly, la voie ne présente
aucun aspect remarquable ; elle s'arrête au jeu d'Arc de
ce village, complètement défoncée par les travaux de
plantation du domaine de Chantilly. Elle a dû traverser
le parc; on vient, en effet, d*y retrouver un très-long
fragment de voie parfaitement indiqué et conservé, et qui
fait suite au parcours jusque-là counu. iNous sommes ici
dans la direction rectiligne du camp, la voie traversait la
grande pelouse en inclinant vers le côlé droit où soiU
maintenant bâties les petites écuries, et les maisons qui
forment la grande rue ; elle traversait la route actuelle de
Paris, les voies de manœuvre du chemin de fer à droite
406 CONGRÈS ARCnÉOLOGIQUE DE FRANGE.
de la gare ; puis franchissant la nouvelle route de Gou-
vieux, un peu au-dessous du pont, elle courait vers le
village de la Chaussée, par un chemin maintenant réduit
à l'état de sentier, côtoyait le marais jusqu'au bout, et là
après avoir traversé la Nonnette, montait vers le village,
qu'elle- suivait en contournant le camp, pour arriver au
bord de l'Oise, au lieu dit Toute -Voie, Ma-via^ où
l'aspect qu'elle présente sur le bord de la rivière est vrai-
ment saisissant. Elle traversait l'Oise en face de l'Ile, à
gué probablement pour aller ensuite par la grande rue de
Villers-Saint-Leu prendre sa direction vers Beauvais, par
Ully-Saint-Georges; ce tracé maintenant à l'étude recti-
fierait notre premier travail sur ce sujet, nous le croyons
d'une haute importance et appelé à jeter un grand jour
sur la question de Lithanobriga; dans tous les cas, il
resterait acquis que MM. Millescamps et Hann, ont décou-
vert sur le bord de l'Oise, en face de Morancy, un empla-
cement romain de premier intérêt, bien qu'on en ait
contesté l'importance dans des discussions récentes; si cet
emplacement n'est pas Lithanobriga, il était certainement
un port de passage et de péage et suppose l'existence
d'une voie qui n'existe plus mais qui du Mont-Pô ou des
environs devrait v conduire.
H
CHEMIN ROMAIN £T GALLO-ROMAIN DE SENLIS A BEAUVAIS
PAR CUEIL.
Chemin du Beauvaisis.
En sortant de Senlis par la Portc-Saiut-Kicul, et en
laissant à droite la grande Chaussée-dc-Pont-Point, pour
XHY* SESSION, A 8ENUS. 407
pnîodre à gauche le Cheiiiin- Creux qui passe au pied de
h Croix et descend vers la vallée de l'Onette, on suit
iaocien chemin de Senlisà Creil. Ce chemin, qui porte
aujourd'hui le nom de Chemiu-d'Aumont, est l'ancienne
voie qui allait de Senlis à Beauvais en passant par le
vkuM de Credulium (Creil), son existence est justifiée par
un grand nombre de témoignages.
Un titre de l'évéché de Senlis, de Tannée 1236, nomme
Vadum Credulii, gué de Creil, le pont où cette voie fran-
chissait la petite rivière de l'Onette. Une transaction du
mois d'août 1234, entre la commune et le prieuré de
Saint-Nicolas d'Acy, à l'occasion d'un vivier, dit qu'il
était situé près de la Chaussée-de-Creil, Calceiam de
Crtdulio,
Une charte de Philippe Auguste, concernant les pâtures
fie Saint-Nicolas-d'Acy, est encore plus explicite. Il y est
dit que les bourgeois de Senlis ont trois arpents de prés
touchant à la Chaussée qui va vers Creil : Attingenies
Cûleieœ,\quœ dirigiiur versus Credulium. Dans un autre
titre du prieuré de Saint-Nicolas-d'Arcy, il est question
de trois arpents de prés sis auprès de la Chaussée-de-
Cnul : Justa caiciam de CredvUo, Le vieux chemin de
Creil est d'ailleurs indiqué comme une chaussée par la
tradition locale; il passait au gué appelé aujourd'hui gué
du Moulin-d'Aumont, et franchissait le marais sur une
jetée de cent à cent cinquante mètres. Arrivés au bas de
la côte nous laissons à droite un chemin de Paisson, qui
n'est pas sans intérêt, dit le chemin des Vaches; plus loin,
toujours à droite nous laissons également le vieux chemin
d'Aumont, lequel reçoit un peu plus haut, et sur sa droite
aussi, un autre vieux chemin qui est le chemin du Tom-
beraye, conduisant à ce lieu dit, célèbre dans la contrée.
Revenons au chemin de Creil : après avoir franchi le
408 CONGRÈS ARGHÉOLOGIQUE DE FRANCS.
Val-au-Tru, il tournait brusquement à droite pour pren*
dre sa direction défînitive vers Greil, sous le nom de
chemin des Carrières. Â partir de ce point jusqu'au
chemin dit des Poissonniers, son parcours est facile à
suivre; ce fragment représente la partie vraiment intéres-
sante de la voie du côté de Senlis. Large, verdoyante,
fortement empierrée et d'un bel aspect romain qui frap-
pait tout d'abord, elle ne présente plus aujourd'hui qu'un
chemin vulgaire, couvert du tuf des carrières voisines
qu'il sert à exploiter. Du chemin des Poissonniers au
pied de la butte d'Aumont, elle n'est plus indiquée que
par un sentier solide et large de deux mètres, appelé
encore aujourd'hui du nom significatif d'Ancien-Chemin-
de-Creil, il passait non loin de l'église d'Aumont, c'est à
ce point qu'il tournait brusquement à gauche, sans doute
pour éviter la montagne, et reprenait au pied de la butte,
sa direction vers Malassise ; il porte là le nom de CAemin-
du-Bac, il coupe d'abord la roule Bourbon, la route des
Suisses où il disparaît, puis la route de l'Arbre-à-
Fougèrc.
Nous sommes ici à un des endroits les plus intéres-
sants de toute cette partie de la forêt. Je viens d'en faire
l'exploration en compagnie de M. Amédée Margry, à
qui je dois les renseignements les plus précieux et les
plus incontestables pour la rectification du tracé qui
nous occupe et la découverte d'autres chemins d'un
très-grand intérêt au point de vue de la viabilité du
moyen âge et de l'histoire locale.
Avant d'arriver à la route des Suisses, détournez-vous
un peu sur la gauche, vous découvrirez là, un lieu dit
Homain, qui a subi une singulière destinée, c'est l'Ancien-
Préche; puis au point de jonction du chemin de l'Arbre-
à-Fougèrc, et du Chemin-du-Bac, d'autres ruines d'un
ZLIT* SB88ION, A SENLIS. 409
iolMt tout à Tait nouveau et original. Après avoir tra-
wsé la rouie de l'Arbre-à-Fougère, le chemin presque
fffiMé 86 dirige droit vers le lieu dit : la Butte-des-Morts,
lertre magnifique présentant une motte circulaire, d'un
déreloppement de vingt mètres au moins de diamètre,
sur une hauteur de trois ou quatre au centre ; nous pen-
sons qu*il serait très-intéressant de faire une fouille en
cet endroit qui porte aussi le nom de la Téte-dc-Mort, ce
doit être une sépulture selon toute apparence. Du pied de
la butte, le chemin incline vers la droite: il est, au sortir
de la forêt tout à fait détruit; il faut franchir deux ou
trois cents mètres pour le retrouver au coin du nouveau
verger que M. Frémy vient de planter à la lisière de la
Ibrét, le long du chemin de Verneuil. Avant d'arriver ù
lialassise, le chemin se iiburque; le fragment qui se
dirige vers la ferme C3t le chemin du Beauvaisis ; l'autre
est celui du camp de Catenoy, il se dirige sur Verneuil
et parait beaucoup mieux conservé que l'autre.
Selon les indications savantes que nous avons reçues de
II. le docteur Boursier de Creil, ce chemin aurait eu pour
objet de mettre la capitale des Sylvanectes en communi-
cation avec le camp de Catenoy, en passant par Verneuil,
où il traversait l'Oise, Villers, Saint-Paul qu'il laissait à
gauche pour s'engager dans le ravin du Renard, fran-
chir les hauteurs qui dominent l'Oise de ce côté, et de là
pointer droit sur le camp. M. Boursier nous a montré
sur le passage de cette voie, un peu en avant de Verneuil,
sur le bord de l'Oise, qu'il domine en escarpement, de
ir^beauz restes d'un camp retranché gaulois, occupé
par les Romains, comme l'attestent les débris qui couvrent
le sol.
Revenons au chemin du Beauvaisis. De Malassise,
la voie se dirige eu droite ligne vers Creil, où elle entre
410 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DB FRANCE.
par lo chemin dit le Haut-des-TufIcs : elle est presque
effacée dans la plaine; chaque année, entamée, et creusée
par le sillon de la charrue, elle reparaît obstinément, et
l'œil la suit encore facilement à la trace des vieilles herbes
qui repoussent sans cesse et que les soins de la culture
no peut extirper complètement. Arrivé au haut des
Tuffes, elle descend vers l'Oise formant un encaissement
profond et malsain, entre <leux escarpements de rochers
sous lesquels habite une grande partie de la population
pauvre du pays.
Arrivée au has de la côte, elle traverse toute la partie
dnnto de la ville de Greil, et vient aboutir à la rivière on
passant entre les ateliers de M. Vachette qu'elle côtoie à
droite, et Thabitation qu'elle laisse à gauche. C'est là
qu'elle franchissait l'Oise pour passer du pays des Sylva-
ncctes dans celui des Hellovaques; elle se continue au delà
du pont sous le nom de chemin du Beauvaisis. Ici se pré-
sente encore une rectification de notre premier tracé; le
savant M. Ilouhigant, par un sentiment qui s'explique
trop bien, avait absolument voulu faire passer le chemin
dans son parc; nous nous sommes égarés sur ses pas;
c'est de Tautro coté do la route, qu'il fallait suivre la voie
et rogard*'r comme point de repère, ce qui, du reste, est
presque toujours la meilleure méthode; le l)eau clocher et
la charmante éj^^lise de Nogent- les- Vierges. Le chemin du
lieauvaisis y conduit directement; après avoir franchi la
ligne du chemin de fer de Creil à Saint-Quentin, en
approchant de Nogent, il s'appelle lo Chemin-des- Vierges;
il aborde le village un peu en avant de l'église, au carre-
four où S(ï trouve la fontaine et le calvaire; il tourne û
gaurhe, forme sur quelques cents mètres la grande rue
du village, puis, inclinant h droite, sous le nom de
rue de Uoyaumunt, se dirige vers le hameau de Saussy«
XLIY* SESSION, A SKNLIS. 411
eoanmt duquel on en retrouve un magnifique tronçon.
Mouf avons constaté dans un jardin de la rue de Royau-
moDtde nombreux restes d'occupation romaine. A partir
do hameau de Sauasy, la voie fait une courbe rentrante
vers la gauche, traverse le chemin de fer et la route de
Creil à Clermont, et va franchir la montagne de Laigne-
fille, après s'être dégagée de la cavée où elle s'enfonce et
disparaît avant d'arriver sur la hauteur. Là elle devient
an chemin vert qui, laissant à sa droite Téglise de Laigne-
fille, court vers celle de Rousseloy. A partir de ce point,
elle prend direction vers Beauvais, et nous n'avons plus
qu'à indiquer ses points de station; de Rousseloy à Bury,
elle passe au-dessus du village sans y pénétrer; nous
avons trouvé là de nombreux débris de construction
romaine: de Bury à Angy qu'elle traverse dans toute
sa longueur, et d'Angy à Saint-Félix. Nous franchissons
là la fameuse plaine des Mille-Pas, qui aurait été témoin
de la défaite suprême de Corréus. Nous arrivons à Hermès,
puis à Bailleiil-sur-Therain; nous passons sous le Mont-
César, magnifique camp d'occupation, d'où le vainqueur
surveillait sa conquête; enfin laissant à droite le Mont-
Bourguillemont, qui parait aussi avoir été occupé au
moins par un poste avancé romain, nous abordons
Tberdonne et la capitale des Bellovaques. Nous pensons
qu'A partir de Tberdonne, la route moderne s'est assise
sur l'ancienne voie; elle n'a pas dû passer ni plus haut,
ni plus bas.
Tel est, autant au moins que nous avons pu le cons-
tater, par une observation faite à pied, le tracé vraiment
intéressant du chemin romain qui reliait les capitales des
deux peuples qui sont nos premiers ancêtres historiques.
J'ai parcouru cette dernière partie avec M. le comte
de Lucay, qui, je dois le dire, m'en a fait gracieusement
412 GONaRÉS ARGBÉOLOOIQUE DB FRANGE.
et savamment les honneurs ; elle demanderait une étude
de détails qui serait du plus émouvant intérêt, elle vien-
dra en son jour; nous n'avons voulu que jalonner le
chemin sur Beauvais sans toucher au domaine de nos
confrères du chef-lieu, qui finiront bien, nous l'espérons,
par prendre la main que nous leur tendons par-dessus le
Mont-César, ,vieux témoin de leurs malheurs, mais aussi
de leur gloire.
Voie de Paris dam te Nord de ta Gaule
passant par Sentis.
Je vais vous parler d'un chemin qui est certainement
chez nous le plus vieux représentant de la Gaule libns et
de la Gaule romaine ; le seul, sans doute, qui, dans les
temps les plus reculés de notre histoire, mettait en com-
munication le centre de la Gaule avec toute la partie du
nord. Ce vieux chemin portait au moyen âge et dans les
temps modernes le nom de Chemin-de- Flandre, au moins
sur une partie de son parcours; c'ist-à-dire de Seniis à
l'Oise et au delà. Pour être plus dans le vrai et pour
donner à cette étude une portée plus intéressante, nous
devrions appeler ce chemin ; la grande voie de Paris dans
le nord de la Gaule,
11 est difficile de le classer : il n'est ni romain, ni
gallo-romain, ni gaulois; il n*est pas non plus une
voierie du moyen âge ; il est à la fois tout cela, et pré-
sente tous les aspects selon les lieux, les modifications
qu'il a dû subir, et l'état de conservation dans lequel le
temps l'a laissé. N'étes-vous pas ému, Messieurs, d'un
singulier respect, quand vous vous sentez sur la trace de
tous vos ancêtres; quand vous vous dites : sur ce chemin
XLIY* SESSION, A SENLIS. 413
apaisé certainement tout ce que la vieille France a eu
cba nous de grands hommes; il a porté toutes nos gloires
et toutes nos grandeurs, toutes nos conquêtes et aussi
toutes nos servitudes et toutes nos misères. Les vieux
Gaulois ont creusé ce sentier dans le sol vierge de la
patrie, et puis le Romain Ta agrandi et solidifié pour y
bire passer son orgueil et sa tyrannie. Le flot tumultueux
et écrasant des bart>ares Ta creusé à nouveau et marqué
d'une ineffaçable empreinte. Puis est venue la Gaule chré-
tienne, alors les chemins de guerre sont devenus les
paisibles et fleurissants sentiers qui conduisaient aux
monastères et aux grandes abbayes, ou qui reliaient entre
elles les forteresses des grands seigneurs. Les croisades
ont passé par là; la dernière trace de grandeur et de
gloire qu'ils conservent, est celle du pied des pèlerins de
Terre-Sainte. Puis, quand s'ouvrent les grands réseaux
de routes postales et royales, ces chemins rentrent dans
leur solitude ; l'herbe les envahit, la fleur des champs s'y
épanouit en paix, quand ils ne sont pas devenus des voies
banales de service champêtre ; mais dans cet abandon
même, ils conservent quelque chose de particulier, d'an-
den, qu'on n'a pas vu ailleurs, et qui semble dire à
l'archéologue : regarde-moi bien, je suis un vieux témoin
de quelque chose.
Si vous me le permettez, nous allons pour remonter
tout à fait à l'origine de notre chemin, franchir la limite
de notre département et partir de Paris, sur notre chemin
du nord. Nous passons à Saint-Denis, où sont couchés
dans leur éternel repos ceux de nos rois que la Révo-
lution n'a pas pu égorger à nouveau ; de Saint-Denis le
chemin nous porte à Gonesse, à Goussaiuville, puis à
Louvres, oii nous retrouvons la route uationaie, qui date
d'un siècle environ et qui va nous servir jusqu'à Senlis
414 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
et même au delà, à appuyer notre tracé. Car je vous ferai
observer que nôtre voie marche généralement en dehors
de la grande route moderne qu'on appelle aussi la
route de Flandre ou à certains endroits la route du
nord.
Quelquefois, mais rarement, elle se confond avec elle,
comme entre Pontarmé et Sentis ; mais cette confusion
des deux routes l'une dans l'autre, n'est que le résultat
d'un hasard qu'on a mis à profit pour épargner la
dépense.
•A partir de Goussain ville, nous pouvons cheminer sur
notre voie, nous sommes presque chez nous : c'est ce que
nous avons fait en compagnie de MM. Dupuis et Margry,
nos honorés collègues, qui nous ont beaucoup aidé à
reconnaître celte partie éloignée de la vieille route. Arrivé
au fond du marais qui sépai;^ .Goussainville de Louvres,
le chemin se dirige vers la Grange-des-Noues, qui conserve
encore de beaux restes d'un ancien prieuré. Puis il s'efface
complètement sur un parcours de trois cents mètres
environ, pour reprendre au-dessus d'une petite vallée, où
il a semblé se perdre, et se diriger tout droit vers Louvres,
en passant devant l'ancien manoir en ruine des seigneurs
d'Orvillc : ruines pleines de tristesses qu'on ne peut s'em-
pêcher de saluer ; restes d'un grand nom dont l'histoire a
conservé à peine quelque trace.
Nous arrivons à Louvres, et après avoir salué en passant
son charmant clocher du xiir siècle avec ses belles et
fortes assises du xu% nous remontons la côte pour prendre
la direction de Marly-la-Ville. 11 faudrait nous arrêter à
Louvres ; nous y retrouverions les souvenirs de Saint-
Louis et de la Heine-Blanche et nous nous y égayerions
avec les douces et naïves légendes du moyen âge; mais
Louvres ne nous appartient pas, il faut passer. Nous voici
XLTV* SESSION, A SENLIS. ^15
au haut de la côte qui regarde Marly,sous nos pas s'ouvre
DO encaissement ri^gulier bordé de pommiers, qui descend
jusqu'au chemin de fer d*oii on l'aperçoit très-bien. Cet
encaissement formait l'ancien chemin qu'on a rendu à la
culture, il faut franchir la voie ferrée pour retrouver
notre chemin, il est là, de l'autre côté, creusé, défoncé,
généralement impraticable, mais sinueux, bordé de vieux
baissons, capricieux, original, et s'en allant solitaire et
abandonné à travers la plaine vers le clocher de Marly,
tandis que la route neuve, propre, coquette, fréquentée et
macadamisée va le rejoindre à l'entrée du village.
Nous traversons le village de Marly, et après avoir
franchi la vallée et laissé Fosses à gauche, nous nous
dirigeons vers le village de la Chapelle. Je viens de
nommer Fosses : il y passe une autre route qu'il ne faut
pas confondre avec la nôtre et dont nous nous occuperons
plus tard ; elle venait aussi de Paris, car il est raconté
dans les chansons de Gestes de Gariu le Loherain qu'un
chevalier étant parti de Paris et passant par Senlis s'arrêta
à Fosses pour y coucher. Ce petit village pour le dire en
passant, ne manque pas d'une certaine célébrité ; il doit
son nom, suivant l'abbé Lebœuf, à la sépulture des guer-
riers tués dans un combat mémorable, en 715, et qui ne
peut être qu'une bataille livrée par Charles-Martel, lors
de son avènement à la mairie du palais ; c'était un lieu
déjà habité à cette époque, car on dit dans la même
chanson de Gestes de Garin le Loherain ; les gloutons
^^arrasinsl étendaient do trois côtés leurs ravages; après
la destruction de Reims, ils étaient entrés dans Soissons.
Plus de cent mille paycns cuviruuiiaiciit Troyes : cent
mille autres étaient aux portes de l*aris, c'est alors que
Fosses fut ruiné.
Après avoir franchi la {Mitite vallée de l'Izieux, nous
416 CONGRÂS ARGHÉOLOGIQUB DB FRANCS.
traversons la route de grande communication n* 16, qui
va au chemin de fer, et nous remontons la côte dans un
ravin, devenu tout à fait impraticable; c'est cependant
notre chemin, il se dirige de là à travers la plaine déserte
sur le village de la Ghapelle-en-Serval, qu*il atteint apiè!
avoir traversé le chemin de fer de Paris à Chantilly, un
peu au-dessus de la station d'Orry-la- Ville. Il ne présenta
rien de particulier dans cette partie de son parcours.
Encaissé, onduleux, suivant les déclivités et les acci-
dents du terrain, il a tout à fait l'aspect d'un chemii
gaulois, et ne parait pas avoir subi dans ces parages d^
grandes transformations. Après avoir traversé le chemii
de fer, il reprend l'aspect d'un chemin ordinaire ; jusqu'ai
village de la Chapelle, il n'est vraiment reconnaisaabh
que par sa direction qui est tout à fait rectiligne avec k
flèche de la cathédrale de Senlis. Du reste, cette directioi
rectiligne est saisissante, surtout depuis Marly-la- Ville
Il ne faudrait pas la chercher à Louvres, où la route a Ai
faire une déviation d'un kilomètre au moins, pour um
raison qu'il est bien difficile d'apprécier aujourd'hui, i
moins qu'on n'admette l'opinion de quelques savants, qu
prétendent que le chemin ne passait pas dans Louvres.
mais le laissait à droite. Ces déviations ne sont pa^
rares dans les chemins de celte époque.
Le chemin ne passe pas dans le village de la Chapelle ;
il le laisse sur la droite pour venir s'abattre sur la grandi
route actuelle, à l'entrée du village du cété de Senlis, ai
lieu dit le Vieux-Château, Arrétons-nous-y un moment;
au point de bil'urcation des deux grandes routes de Chan-
tilly et de Senlis, se trouve uu champ ; il se présente eu
sommet d'angle formant la jonction des deux niutes avant
leur entrée dans le village, lùilrez-y : vous y Irouverex,
môme sans chercher, une quantité innombrable de débrie
ZUV* SESSION, ▲ SSNUS. 417
de lailtt romaines, de {ragmenU de poterie de toutes
nrtes, des restes de couvre-joints, de ciment, de pa-
vage, etc. Vous êtes sur une villa romaine : eu creusant le
ttl pour construire des caves dans les maisons voisines,
oa a trouvé une grande quantité de médailles, et des
iBites dA constructions. Quel nom portait cet emplaoe-
(lient ? c'est ce qu'il est bien difficile de déterminer :
était-ce le PoLiUuuHAuriacum, d'où serait venu le nom
d'Orry-larVille? La distance de ce village au lieu dont
nous parlons ne nous permet guère de le penser. Cepen-
dant nous mettons ce nom eu avant avec notre savant
collègue, M. Dupuis, mais sous toute réserve.
Avançons : sur un espace de trois cents mètres, nous
iommes sur la grande route actuelle ; elle se confond ici
avec la route romaine.
Puis elle l'abandonne, pour former une courbe assez
douoe qui conduit à Pontarmé, tandis que la vieille voie
«lit inflexiblement son tracé à travers champs ; il est
bcile de l'y suivre ; elle se dessine gracieusement en dos
d'éne sur la surEsce plane du sol jusqu'au village de
Pontarmé. Elle ne le traverse pas, mais le longeant à
gauche derrière les maisons, elle vient contourner le fossé
de l'ancien chÂteau encore debout, mais derrière, en se
rapprochant de la grande route actuelle, avec laquelle elle
vient se confondre pour ne plus la quitter jusqu'à Senlis,
au lieu dit le Rompu, à cause du coude que forme eu cet
endroit la rencontre des deux chemins.
Le Rompu est à rentrée de la forôt après le village, au-
dessus de la ferme de M. Dupuis; à |)artir de ce point,
Dous n'avons qu'à suivre la roule. La vieille voie et la
nouvelle se sont fondues Tune dans l'autre : c'est le seul
point du long tracé que nous parcourons où se rencontre
cette particularité, au moins sur une si longue étendue;
XLIV* SESSION. 37
418 CONOBÈS AROHiOLOOIQUB DB FRANGE.
mais il faut remarquer qu'à partir de la Chapelle ou
mieux du Palatium-Auriacum, la voie, de gauloise, est
devenue romaine ; et c'est avec son tracé romain qu'elle
traverse toute la ville de Sentis en formant la vieille rue
de Paris; et c'est encore avec son tracé romain qu'elle en
sort par la porte Saint-Riéul, actuellement rue de Ville-
vert, pour aller former la chaussée de Pontpoint. Elle
sort de Senlis, disons-nous, par la porte Saint-Rieul,
formant la grande rue de Villevert que nous suivons
jusqu'à la côte, au-dessus du moulin de Saint-Rieul, sur
le bord de TAunette ou Oiiette; c'est là qu'elle se bifurque
pour former du côté gauche la grande chauMée de
Pontpoint et de l'autre le chemin vert de Chamant, qui
conduisait à l'oppide deBalniacura(Balagny-sur-Onette).
Cet embranchement constituait sur le plateau la naissance
d'un réseau de petites routes qui conduisait au Temple-
d'Honnus, une des belles découvertes du Comité. Reve-
nons à la chaussée de Pontpoint; nous la prenons au
bas de la côte du Poteau, côté nord-est de la ville, dont
nous franchissons la hauteur en la suivant. Arrivée sur
le plateau de Chamant, elle côtoie les champs de courses
de M. Joachim Lefèvre , passe derrière son château ,
coupe le chemin des Poissonniers, et entre dans la forêt.
Nous sommes à deux kilomètres de la ville; on a déjà
pu, dans cette courte distance, constater toute la beauté
de la voie romaine, les caractères en sont incontestables :
empierrement puissant, talus de deux mètres d'élé-
vation, solidité, majesté, rien n'y manque. — Ce n'est
pas la grande voie militaire de Soissons à Senlis, mais
c'est au moins, après celle-ci, la plus belle du pays des
Sylvanectes. — Voici ses étapes : elle passe au carre-
four Saint-Prie^t, à celui des lUancs-Sablons, lieu célèbre
dans la contrée par les nombreux restes de l'antiquité
XUV* SESSION, A SBNLIS. 419
romaine qu'on y retrouve ; et arrivée à la Croix-Saint-
Ricnl, là, elle incline un peu à gauche laissant à droite
k grand chemin forestier qui cooduitau Monl-Pagnolte;
es suivant la direction de la voie qui est ici très*facile à
neoaaaitre, on arrive au carrefour de la Futaie, après
avoir passé en face de Saint-Christophe, qu'on aperçoit à
gauche, dominant la forêt de ses cimes verdoyantes et des
restes vénérables de son vieux prieuré.
C'est là qu'il faudrait laisser un moment la voie
romaine pour s'engager dans les rampes sauvages et
pitloraques du Mont-Pagnotte , où tant de surprises
charmantefl nous attendent: ruines, enceintes, mame-
lons, etc. etc., mais ce n'est pas le moment de nous y
distraire, passons, en attendant le bonheur d'y revenir.
Du carrefour de la Futaie, la voie se dirige vers celui
de la Groix-du-Grand-Mattre ; elle a été fort dégradée et
boulevenée dans cette partie, où elle n'existe plus guère
qu'à certains endroits. Nous en diroos autant de son
paieoura; à partir de la Croix-du-Grand-Mattre, au
canebnr Étérodite, elle se dirige vers l'Oise en passant
devant la maison du garde, et, laissant à gauche le Mont-
Callipet, elle descend, en formant un ravin qu'il est dilfi-
cila de parcourir, vers l'Abbaye-du-Moncel, longeant
cette propriété, et celle de M. de Yerneuil, sur un chemin
de trois ou quatre mètres de largeur jusqu'à TOise.
Nous sommes convaincu, après un examen minutieux
des lieux, que c'est à cet endroit qu'il faut chercher le
passage de la voie, et non pas au lieu dit le Joncquoy,
comme on l'a prétendu. Si des vestiges de roule ont été
troavés dans les marais de Chevrières, ils appartiennent à
un antre tracé; nous avons en vain cherché au delà de
l'Oise la continuation de la voie, elle aura été détruite par
les inondations, par la culture et par les travaux du
490 CONGRÈS iIRGHÉOLOOfQIJE DB FRANGE.
chemin de fer. Des ouvriers nous ont afBrmé avoir trouvé
aux environs du passage à niveau de la route de Pont à
Estrées-Saint-Denis des Tragmeots de poterie, d'armures
et d'autres objets antiques; ce point de la question restera
longtemps indécis, nous pencherions à croire que la voie
passait à l'église de Sarron et franchissait l'Oise dans ces
parages, pour se diriger de là vers le nord. Une étude
approfondie des passages romains si nombreux de l'autre
côté de l'Oise, mais qu'on ne peut que difflcilement
constater, parce que le terrain a subi de grandes transfor-
mations par suite des inondations, une étude, dis-je, de ces
passages, qu'il faut faire converger vers Baxicourt et Saint-
Martin-Longudux, pourra seule jeter quelque jour sur ce
point bien osbcur.
La séance est levée à 4 i heures.
Excursion à Chaalis et à Ermenonville.
A une heure, le Ck)ngrès partait pour Cbaalis.
L'abbaye de Chaalis fut fondée par Charles le ik)n,
comte de Flandre, en 1136. Les ruines pittoresques qui
restent encore de son église, du xiir siècle, attestent l'im-
portance de cet ancien édifice. Le château, où le Congrès
a été gracieusement reçu au nom de M*"* la barrnne de
Vatry, occupe une partie des bâtiments de l'abbaye qui
avait été réédifiée au xviir siècle. L'intérieur, avec sou
grand air, sou élégance du meilleur aloi et ses collections
de curioeités les plus variées, reflète de toutes parts le goût
et l'habitude des plaisirs que donne la culture des choses
de l'intelligence. — Une chapelle du xm« siècle, échappée»
XLlV' SESSION, A SëNLIS. 421
aux démolilioDS révolulionnaircs, est or d ce de peintures
de l*école italienne avenlureusetnent attribuées nu Prima-
trioe. Cette chapelle est, en ce moment, entre les mains de
M. Balze l'objet d'une habile restauration dont les amis
des arts ne sauraient que féliciter M°^* de Yatry, qui en a
pris l'initiative.
La visite de Chaalisa été suivie de celle d'Ermenonville^
où M. le comte de Girardin était venu pour recevoir le
Congrès. Les célèbres parcs d'Ermenonville ont joué un
rôle considérable dans la pacifique révolution qui s'est
accomplie en France, au siècle dernier, dans l'art de com-
poser les poysageSf en opposition à la manière solennelle
de Le Ndtre. Ils devinrent par les soins de leur possesseur
et créateur, le marquis de Girardin, le triomphe de l'école
de y EmbeUmemeni de la nature, à l'époque où le fameux
philosophe qui mourut dans cette retraite hospitalière
avait mis la nature à la mode. — Une promenade à tra-
vers ces sites, aujourd'hui grandement déchus de leurs
ornements artificiels, mais qui n'ont rien perdu de leurs
beautés naturelles, ne pouvait mieux terminer cette inté-
ressante demi-journée.
Sir John Henry Parker et ses projections
de vues photographiques.
Dans la soirée, pour se reposer de ses fatigues, le Congrès
avait la bonne fortune d'exécuter,- dans la salle même des
séances, une excursion d'un autre genre, et bien plus loin-
taine encore, sous la conduite de Téminent archéologue
^glais, sir John Parker.
422 CONGRÈS ARGHÉOLOGIQUE Dfi FilANC£.
Les travaux auxquels, depuis de longues aûnées, se livre
M. Parker, à Rome et sur d'autres points de l'Italie, sont
trop connus pour qu'il soit nécessaire de les rappeler ici.
Non-seulement M. Parker fouille et décrit les antiquités
de Rome, en les éclairant de nouveaux aperçus, mais
encore il se voue , tant à Rome que dans son propre pays,
à l'enseignement archéologique des monuments de la ville
éternelle, en employant pour le vulgariser tous les moyens
que la science moderne met à sa disposition. Parmi ces
moyens, l'un des plus propres à frapper les yeux et à faire
pénétrer dans l'esprit les démonstrations verbales, consiste
dans l'emploi de projections de vues photographiques par
la lumière artificielle. Le passage en France de M. Parker,
revenant de Rome, coïncidait avec la tenue du Congrès, et
le savant archéologue a bien voulu se rendre à Senlis pour
nous offrir une séance de ces projections, avec un choix de
sa riche collection de vues d'Italie.
Aussi une afQuence inaccoutumée s'était-elle empressée
d*envahir la salle. Grâce à cette exhibition, les nombreux
assistants, qui avaient déjà visité Rome, ont pu renouveler
connaissance avec ses monuments qu'ils ont retrouvés, les
uns conformes à leurs anciens souvenirs, les autres tels
que les font apparaître les nouvelles fouilles dont ils sont
aujourd'hui l'objet.
Mais, pour commencer par le commencement, M. Par-
ker, en manière de prolégomènes, est entré dans quelques
considérations générales et techniques sur les constructions
romaines, et a fait passer sous les^eux des assistants une
série de vues représentant les détails les plus caractéristi-
([ues de ces constructions à diverses périodes ; d'abord les
grands appareils eu blocs de travertin que l'on voit dans
les murs de l'époque des rois sur le mont Palatin, à Tangle
sud-ouest de la Homa Quadrata de Romulus, puis au
.XMV dKSSION, A SEMIS. 423
luur de Scrviiis Tiilliiis découvert sur l*Aveiitiu et plu^
réccmiDeiit sur l'Ksquillin, ensuite des Iraginents du Tabu-
Urium et du Forum d'Auguste. Les murs de Voies et de
Fiésole ont montré aussi l'analogie des plus anciennes
constructions de Rome avec celles des Étrusques qui les
avaient précédées.
On connaissait déjà les observations laites par M. Par-
ker sur l'épaisseur des briques dans les constructions, aux
différents siècles de l'empire. Cette épaisseur croit avec les
Mfcles dans des rapports que M. Parker a formulés. Ainsi
au I" sîcïcie une zone d'un pied romain, O'^SS environ, con-
tieut de neuf à dix épaisseurs de briques; au ir siècle, cette
même zone n'en contient que sept ou huit; au m* siècle,
cinq ou six, et au iy* quatre. Des vues de l'aqueduc de
Néron, de la villa d'Hadrien à Tivoli, du rempart d'Au-
rélien, du cirque de Maxence, sont venues confirmer ces
observations.
Mais nous avons hAte d'arriver au Forum, ce grand
œotru d'attraction pour les archéologues.
Des vues, d'après Duperrac et Deseiue, nous l'uut montré
tel qu'on le voyait aux xvii" et wiii* siècles, alors que ses
;Tandes colonnes seules, émergeaient à moitié du sol
exhaussé par l'amoucellement des poussières séculaires,
iiimme des mâtures de grands navires naufragés qui s'é-
lèvent au-dessus des Ilots après la tempête.
Ce n'est que sous l'administration française, en 1810,
t(ue des fouilles sérieuses ont été commencées. Elles s'oc-
cupèrent particulièrement de déblayer les monuments
:»itué8 au bas du Capitole. Ces fouilles furtMit continuées,
mais avec lenteur, sous les papes Pic VIII, (irôgoirc \VI
i:t Pic LV. Les voyageurs, qui s*cn rup|M»rtent à leurs
anciens souvenirs , se rappellent lasi^vt pitloiesiiuc vi
•lélabré du l4ini|H>-Vaccino, situé entre la colonne de IMuf-
•i^ GUNGRKS AROHÉOLOOIQUK UE FRANCE.
cas, le temple d'Antonin et Paustine et l'église Sainte-
Marie-Libératrice. Aujourd'hui le Caropo - Vaccinb eit
déblayé sur une profondeur de huit on dix mètres, et te
sol antique du Forum avec ses dallages, ses voies pavées,
a revu la lumière.
Un large passage pour la circulation a été ménagé 1^
long des maisons qui faisaient face au Campo- Vaccina
jusqu'à la hauteur du t6mple d'Antonin et Faustine. Ce
passage s'arrête là , devant la colonnade du temple et se
continue, en le contournant, par la rue qui longe son
flanc occidental. Le soubassement de l'édifice est entière-
ment dégagé sur sa façade. La limite des fouilles, pour le
moment, suit une ligne légèrement courbe vers Test, qui
part de l'angle sud-est du temple et vient passer devant
l'église Sainte-Marie-Libératrice, pour aboutir à la rue de
la Consolation, en englobant les trois belles colonnes corin-
thiennes du temple des Dioscures, et l'area de la Basilici
Julia. A droite du temple des Dioscures un soubassemem
circulaire indique l'emplacement du temple de Vesta, faus-
sèment identifié, jusqu'à ce jour, par des archéologues,
tantôt avec le temple circulaire de la place Sainte-Marie
in Cosmedin, tantôt avec Tédifice transformé en l'église d(
Saint-Théodore, près du Vélabre. Derrière ce tempie, sui
la limite actuelle des foniHes s'élevaient les habitations de^
Vestales, dont les bases sont à fleur de terre.
Près de là, entre le tempie des Dioscures et celui d'An-
tonin et Faustine, surgit le soubassement du temple de
ilules César, édifié par Auguste et précédé de sa tribune er
forme d'exèdre Sa face était tournée vers le capitole, cl
au devant se dressait la statue équestre de Domitien, don!
on voit maintenant le piédestal qui est venu ave«î les ves-
tiges précédents révéler de précieux jalon:* pour la topo-
graphie du Forum.
XLlV SESSION, A 6£NLIS. iâT
mure, les uns elliptiques, les autres droits, en long et en
tnven. Les chambres, les espaces compris entre ces murs
5oot si étroits, si serrés, qu*on s'explique difficilement leur
destinatiop. Comment, en effet, concilier tout cet encom-
brement de murailles avec Pusage des espaces régulière-
ment aménagés, qui existent sous les grands amphithéâtres
pour le jeu des machines, pour les exercices préparatoires
des gladiateurs. On peut se rendre un compte exact de ces
sortes de dispositions, en examinant les amphithéâtres de
Fouxioles et de Capoue, ob Ton voit encore dans un état
presque parfait de conservation, les ouvertures pratiquées
de distance en distance dans le sol de l'arène, et correspon-
dant, en dessous, à des chambres spacieuses. Grâce aussi
aux vues de ces derniers amphithéâtres , produites jiar
ï. Parker, ses auditeurs ont pu se rendre compte de ces
sortes d'aménagements. Cependant au Cotisée, au milieu
de ces substructions dans le sens du grand axe, existait un
large passage pour le dégagement des parties latérales. On
y voit encore de longues poutres de bois, reliées par des
pièces transversales, et qui semblent avoir été destinées à
former un plan incliné pour la manœuvre des machines.
Quoi qu'il en soit de la forme et de la destination de ces
constructions retrouvées sous le Cotisée, elles sont le résul-
tat d'une modification apportée au premier établissement
de Tarène, destinée, dans le principe, à des jeux nautiques,
il des chasses et à des joutes de bétes féroces. Une série de
fortes consoles en saillie est visible vers le milieu du mur
qui soutient le podium et portait un balcon affecté au
«enrice de ces sortes de spectacles. Plus tard, l'arène, chan-
geant de destination, fut exhaussée sur les murs que nous
voyons aujourd'hui. Le mur elliptique, le plus rapproché
du podium, vers la tète de Taxe longitudinal, est appuyé
sur le podium mémo et englobe pour l'annuler, la prc-
i28 CONOUËS ARCnK0L061ÛU£ DE FllANCE.
mièrc des consoles dont nous parlions tout 'à rheure.Toti^
ces murs sont bâtis d'une façon irrégulière et parfois gro^'
sière. Là des briques, ici des blocs de travertin. Cepeo ^
dant M. Parker a émis l'opinion, développée dans soi^
ouvrage sur le Cotisée (i], que quelques parties en bri^
ques de ces constructions subarénaires , loin d'être posté-
rieures à l'établissement du Colyséc, lui sont au contraire
antérieures, et proviennent d'édifices bâtis du temps do
Néron, dans un des lacs situés dans ses jardins, sur l'em-
placement où plus tard le Colisée fut édifié.
Mais faut-il dire que, depuis ce nouvel état de choses
que M. Parker a fait passer sous les yeux de son auditoire,
une transformation regrettable et imprévue en a changé
l'aspect. Les fouilles ont dû être suspendues par suite de
Tenvahissement des eaux souterraines arrivant par les
anciens canaux établis pour le service de l'amphithéâtre,
sans que les entrepreneurs des fouilles aient pu s'en rendre
maîtres. Les excavations faites à grands frais sont conver-
ties, sur une profondeur d'environ 3 mètres, en une marc
d'eau croupissante, qui peut bien rappeler, si on veut, les
eaux du lac de Néron , mais qui est loin assurément do
produire le r<^sultat qu'attendait Tarchéologie dans cette
délicate entreprise. Espérons cependant que la construc-
tion d*un égout collt'cteur, ou pour mieux dire d'une
cioaca maximo, vers le sud et au-dessous du Palatin, dans
la direction du Tibre, parviendra à donner une dérivation
efficace à ces eaux malencontreuses et à remettre à soc les
mystérieuses substructions de l'amphithéâtre.
I^s amis do la vieille Home connaissent le charme tou-
jours irrésistible des excursions dans sa campagne, où les
grandes ruines et les majestueux horizons offrent des sujets
il' The Cofosseuni al Home, by John Henri Parker.
XUY* SESSION, A SENLIS. 4S9
d'étude et des aspects toujours nouveaux. Les longues
lignes d'aqueducs, les tombeaux de la voie Appienne et de
la voie Latine, ainsi que les autres monuments funéraires
dispersés en dedans et en dehors de l'enceinte de la ville
ont été longuement décrits dans les dernières publications
de M. Parker (1), et ça été une bonne fortune pour le
Congrès d'en voir passer sous ses yeux l'attachant résumé,
exposé par H. Parker lui-même.
Parmi les cent tableaux qu'il nous a montrés et expli-
qués, il nous a donné aussi quelques vues des Catac«)mbes
chrétiennes, qui viennent également d'être étudiées par
lui dans son plus récent ouvrage (â). Mais déjà tous les
archéologues connaissaient les immenses services qu'a
rendus à la science M. Parker en entreprenant la repro-
duction par la photographie des peintures et autres détails
de la Rome souterraine. Cette série de vues, exécutées à la
lumière du magnésium, constitue un recueil de docu-
ments de la première importance. Il suffit, pour en faire
rettortir toute l'utilité, de rappeler deux photographies
du même objet, l'une faite sur un dessin, et l'autre
sur l'original même. On a pu constater quelle était la
différence, en faveur de cette dernière au point de vue de
l'exactitude.
La Siociété française d'Archéologie est heureuse de saisir
l'occasion que lui oifre le Congrès de Sentis de rendre
(4) The Aqueduetê of ancient Rome, traced from their
sources to their tnouths,,. by John Henry Parker, 4876. Oxford
James Parker and London John Murray.
Tombe in and ntar Rome. Sculpture among the Grecks
and Romans, mythology in funereal sculpture, and early
Christian sculpture, by John Henry Parker, 4877.
(î) The Catacombs of Rome, by John Henry Parker, 4877.
43fi cos€ii3 àMCMiowQwai pm nui3Kcs.
on DoiiTd hommage aa zèle édairè, ma déioMBieiit inli-
UgeMe que déploie M. Parker pour le déveioppeneol te
études archéologiques. Nous aToos au» à ont de le
reoiercier du bienveillanc et haut iutéfél qu'il a téiBoigné
au Congrès eu lui procurant celte mnoe doat tous les
assistants garderont le meilleur souvenir.
JiTLEa wm IjàUiitaK.
SAMEDI S JUIN
Excursion à caïampliea, Pierreioiids
et MorienvBl.
A dnq heures et demie du matin, le samedi S juin, un
cortège de cinq voitures emportait, sur la route de B^hisy,
cinquante-six membres du Congrès, parmi lesquels on
groupe nombreux de dames, habituées des séances et des
courses précédentes, avait bien voulu de nouveau prendre
place.
La première balte a eu lieu à RuUy, en l'honneur de
son église , qui , avec son curieux clocher et son chœur
roman, présente à l'intérieur force remaniements des xiii*
et xiT^ siècles. Rully mérite une mention particulière, à
laquelle les savantes discussions de MM. les abbés de Meis-
sas et Mûller, donnaient un à-propos de circonstance; car
c'est à Rully, racontent les légendes de la vie de saint Rieul,
que l'apôtre des Silvanectes, préchant un jour, fut inter-
rompu par les coassements des grenouilles d'une mare
voisine, auxquelles il imposa silence.
XLIY* SESSION, A SENLIS. 431
Un peu plus loin , à Huleux, uq manoir de la Renais-
^Dce, devenu une ferme, singulièrement empreint d'un
caractère italien, est digne d'une étude sérieuse. Par le
calme et la simplicité de sa façade, la savante harmonie de
«es proportions, il rappelle les meilleurs palais de l'école
de Bramante , et nul n'a regretté l'arrêt qu'on lui a con-
sacré.
A l'heure officielle du programme on arrivait à Bétbisy-
Saint-Pierre, situé dans la fraîche et pittoresque vallée de
i'Autone. La halte réglementaire a permis de visiter
l'église, formée d'une nef romane à bas-côtés, soudée à un
•-hœur du xiii* siècle, d'explorer l'éminence qui s'élève au
e^Dtre du village et porte encore quelques restes de l'an-
<^ien château construit au commencement du xi* siècle,
de parcourir avec son obligeant propriétaire, M. le comte
«le La Vaulx , le château de Douge^ entouré de beaux
ombrages, qui conserve encore des parties du xiv* siècle et
Une jolie chapelle ornée de vitraux du xvi*. Ajoutons que
le déjeuner obligatoire, qu'on a trouvé préparé à l'hôtel du
Soleil-d'Or, était digne de tout point de ce titre brillant.
Un trajet moitié en voiture, moitié à pied, en suivant
la chaussée de Brunehaut, nous a conduits à Champlieu,
où Ton a pu examiner le théâtre , les restes du temple et
des bains romains avec le meilleur des guides, puisque
M. de Roucy était là, complétant les explications qu'il avait
ONumenoées deux jours auparavant au musée de Com-
pile sur les fouilles de ces monuments.
Qui ne connaît, au moins par les gravures et les des-
criptions, la belle église de Saint-Jean-aux-Bois? Une route
k travers une des plus belles parties de la forêt de Ci)m-
piègne, nous a amenés à celte petite abbatiale, élégant
épanouissement de l'art ogival des premières années du
xm" siècle, que tous voulaient voir ou revoir. Enfin, a
432 CONGaSS âlfiHKOiOfilOro 1»E faaxcc
trois heures vingt miiiuteB, on arrivait daas le large et
pittoresque bassin de Pieneioads, dominé par les impo-
santes silhouttes de son château.
Cette ancienoe demeure des ducs d'Orléans, édifiée
d'abord de 1390 à UIO, ruinée sous Louis Xlll, a été,
comme chacun sait, restaurée, pour ne pas dire recon-
struite, par M. Viollet-le-Duc, qui a &it revivre dans cette
œuvre capitale, l'un des plus grandiofes spérimifis de
l'architecture militaire du xiv* siède.
Disons que la visite du monument a été CKÎliiée grâce
à des ordres spéciaux donnés par l'éminent architecte, et
que si, (aute de temps, elle n'a pu être aussi complète que
l'exigerait le splendide édifice, auquel cependant la cri-
tique peut ïà&ï trouver quelques détaib à reprendre, elle
n'en a pas moins été du plus puissant attrait.
De Pierrefonds à Grépy, le trajet comportait une halte à
Morienval, où s'élevait jusqu'au milieu du x^ns^ siècle
une célèbre abbaye, fondée par Dagobert I*'. L'intéressante
église qui en est restée date de la fin du xi* siècle, et les
curieuses chapelles rayonuantes autour du bas^sôté du
sanctuaire sont peut-être les plus aociennes que l'on con-
naisse à cette place en France. Un clocher du commence-
ment du Xii* siècle s'élève sur la façade et deux tours sur
les deux cétés du chœur. Des remaniements considérables
ont modifié l'intérieur de réditiçe. Mais on ne saurait
qu'être pénibleinent affecté de l'état de dégradation que
présente Texlérieur des murs soutenus par de nombreux
étais. Espérons quen sa qualité de monument historique,
l'église de Morienval ne tardera pas à recevoir la restaura-
tion, ou pour mieux dire la consolidation dont elle éprouve
le plus urgent besoin.
Une heure après avoir quitté Morienval, les voitures
arrivaient devant la gare de Grépy en même temps que le
XUY* SESSION, A SJSNUS. 433
tnin qu'on a pris à sept heures quarante minutes pour
reotrer à Senlis, où chacun est revenu sous le charme de
tant de souvenirs, auxquels se joignait le sentiment d'une
cordiale gratitude pour MM. de Gaix de Saint-Aymour et
Dupais, les habiles organisateurs de cette magnifique
joarnée.
DIMANCHE 3 JUIN , SÉANCb! DE CLOTURE.
PRiSIDSNGE DE M. LÉON PALUSTRE.
Siègent au bureau MM. Descbamps de Pas, le comte du
Mmoir^ le marquis de Schedoni et Ant. de Villefosse.
Après l'exécution d'un brillant morceau de musique la
ptrok est donnée à M. Hayaux du Tilly sur la treizième
question :
Quelle est la véritable signification à donner
aux mots mamio et muiatio dans les itiné-
raires?
•
M. Hayaux du Tilly étudie la question de savoir quel
ms vrai il faut donner aux mots mutatio et manùo des
itinéraires.
Il démontre que c'est à tort qu'on donne d'une manière
géotoilc aux mots muiatio et mansio la signification de
rtiaiê de poste ou de couchée pour les voyageurs.
S'il est vrai que cette signification est exacte en ce qui
oonocrne la circulation des voyageurs sur les routes, le
XLIV SESSION. 28
iU CFfUtlfil
d acicat pas iJR aatR <koBr f«e :
V
Miîs oe «Ds n^ ped être applîfM ^'a« «mœ spécul
étt f«lcs . <'cst-»-4îre à «a sorice csoatÎBfCSt d nooo*
La wrafiffret Is ■■■riiPf Htaéexar tes tocs mili-
taÎRi. araîent été éuKks poor te sernee spédil et prin-
cipal des tn>ope« ci dan§ ce cas te sms ml dire :
Motatîo (Un . nunsio Àmilîtam .
Les wuiatkmtt et tes acaïaMaes wmbimm étaient pmqu^
loogoois dfftinftrs des tafafioff et des aHasiaaei afiec-
lées an seirîoe des postes.
Tandis que ces demièies élatent Umjmttn plirfw sur* ^^
paitoofs direct et immédiat des rontes, tes
et tes WÊomsHmes militum oorrespoodanles étaiont
ratement situées sur des hauteurs ou dans des
tîoos &dtes à défendre, et parfois â plustenrs milk^ ^
distance.
Quelquefois les mittationes et les manskmes miUtmfi^^
confondaient avec les mutatûmes et les moasioRes viaior^^^ ^ '
les
mais cette colucidence se présentait seulement dan» ^
cimUUe$, dans \tsoppida ou dans quelques autres locaV^ ^
importantes, c'esl-à-dire là où les ressources et tes apg^^^^'
visionnements de toute nature se trouvaient constamir^^^'^
et en abondance, et pouvaient se concilier avec la sécim^'^
des troupes.
Chaque mutatio et chaque mansio étaient le siège 3-^^^^
mandpium où se faisaient et se conservaient les apprc^^'
•ionnements divers nécessaires aux armées et aux vo^^'
fenrs.
CVst là qu'on trouvait également les chevaux de pœ*^'
tes bêtes de somme et de trait , ainsi que les Yéhicules ^^
*s
XUY* SESSION, A SENLIS. 435
toutes sortes destinés aux divers services d'approvisionne-
ooent des stations et nu service des voyageurs.
Chaque mandpium était placé sous la direction d'un
mêneepi. Us étaient divisés en plusieurs classes selon leur
importanoR.
La surveillance et le contrôle des mancipia ainsi que la
police des routes étaient faits par des agents spéciaux appelés
ofentet in reius, et qui ne relevaient que de l'empereur ou
do préfet du prétoire, qui se trouvaient toujours ainsi au
eoorant de ce qui se passait sur tous les points de l'em-
fin.
Le service des postes était si peu public que nul ne pou-
^t y recourir sans une autorisation expresse de Tempe-
reur ou du préfet du- prétoire.
Ce permis de circuler n'était accordé qu'aux magistrats,
(énéraux et officiers d'un grade élevé, et déterminait rigou-
Wi9ment le nombre de chevaux , de véhicules et de bètes
de tomme dont chacun aurait le droit de se servir, selon
l'importance de sa dignité.
Comme on le voit, le service des postes était compléte-
nient secondaire et accessoire par rapport au service gêné-
ni et principal du mouvement des troupes.
Si on a pu voir avec raison dans les mots mu/o/io (equo-
nuû), un relai de poste, mansio (viatorum), une hôtellerie
M lien de repos pour les voyageurs, on a eu grand tort de
gteéraliser ce sens restreint et d'en faire un non-sens en
l'appliquant aux mouvements des troupes, car, dans ce
os, il convient de traduire mutaiio (loci) par le simple gite
d'étape, monrio (militum) par le repos ou séjour après trois
ou quatre jours de marche.
Déjà, en 1866, la Société française d'Archéologie qui se
réunissait pour la première fois à Senlis, s'était occupée du
43(î GONiiHÈS AUCIIÊOLOGIUUK DE FRANCE.
chàleau de celte ville (1), mais plusieurs points impor-
tants restaient encore à éclaircir. (jnkc à M. Bouet, ua
nouveau pas en avant vient (Fùtre fait, ainsi qu'on pourra
le reconnaître par la note suivante.
Le château de Senlis.
A Senlis, comme généralement partout ailleurs, l'an-
cien poste romain destiné à maintenir en respect les Sil-
vanectes fut, dans la suite, changé en forteresse, puis
devint la cité même où nous nous trouvons. L'eoceiute
existe encore, ilanquéc de ses tours, en partie détruites, il
est vrai. Qucltiues-unes cependant se présentent encore
dans un certain état de conservation qui permet do se
rendre compte de l'aspect primitif de l'ensemble, car toutes
les tours étaient billies sur le même modèle.
La seule ditl'érence ({ue nous ayons remarquée est un
peu plus dVtrnemcntatiuii ù une porte qui conduit de la
tour voisine du Loj^is du Kt)i ( qui semble avoir remplace
If logcinout du gouverneur romain) au chemin de ronde
qui suivait renciûnte on traversant chaque tour.
Nous avons fait le dessin d'une de ces tours, du côté de
l'intérieur; elle est vue des jardins qui occupent main-
tenant en partie les restes d'une ancienne abbaye.
Un autre dessin reproduit la tour de rËvéché, vue de
l'extérieur, et un troisième une construction en grand
appareil qui semble être l'ancien castrum romain. \jcs
(li ro/j///T.v ./rr/iêo/ofjique d" France, WWW session.
U()0, pa<;rs :io-io.
438 CONGRÈS ARGHÉ0L06I0UE DE FRANGE.
bâtiments qui le masquent et les broussailles qui en
obstruent les abords expliquent comment cette curieuse
partie du Logis du Roi semble avoir jusqu'ici échappé à
l'étude.
I.
TOUR DE l'ÉVÉCHÉ.
Une des tours les mieux conservées est celle oontn
laquelle vient s'appuyer l'évéché, dans la grande nlla
duquel se sont tenues les séances du Congrèi 61 êxnA tal
fenêtres en style de la Renaissance s'aperçoÎTOOt dam lij
dessin.
La face principale a subi de nombreuses modifli
Comme au Mans, il semble que cette tour a été
mais le côté que montre le dessin est intact juiqii*u
met, saufquelques ouvertures qui ont été bouchéea et]
placées par d'autres plus modernes.
Les ressemblances entre les murs de Senlis et ceox
Mans, maintenant presqu'entièrement détruits, lODt
nombreuses; cependant les chaînes de briques eontM;^^
moins grand nombre à Seiilis, et ne se composent ifm di
deux rangs. De plus au Mans, les tours sont comat lu
courtines, construites en petites pierres cubiques. A SpUl
on a employé un appareil dans lequel une pierre euUqiie
alterne avec une pierre plus large. Ces pierres, ainsi que
celles des archivoltes, portent les traces des ooups de
hachette qui les ont façonnées, et qui, inclinés alternati-
vement dans les deux sens, reproduisent en petit la figure
des arêtes de poisson.
La base de toutes les tours parait pleine.
XtlV SKïïlO». A S^LIS.
440 CONGRÈS ARCIIÉOLOG10U£ DE FHANGE.
II.
TOUU DU CHATEAU, VUE INTÉRIEURE.
Dans ce doâsin je n'ai point tenu compte d'une con-
struction moderne servant d'escalier, qui donne mainte-
nant accès à une grande salle gothique, dont le gable se
pose sur la courtine et vient s'appuyer contre la tour
romaine. Cette salle contient une belle charpente et une
vaste cheminée dont on voit le tuyau dans le dessin ; elle
est éclairée sur le rempart par une haute fenêtre à double
croisillon, et sur son flanc septentrional on voit encore
deux arcades bouchées appartenant à la grande salle du
bâtiment connu sous le nom de Logis-du-Roi.
En même temps probablement que l'on bâtissait cette
salle, on faisait subir à la tour de nombreuses modifica-
tions. Ainsi, pour la convertir en chapelle, une grande
fenêtre ogivale fut ouverte à la place qu'avait dû occuper
une des fenêtres romaines latérales. Un gable fut élevé, et
une fenêtre h deux baies ouverte à l'étage supérieur, du
côté de l'intérieur, près d*une ouverture romaine qui
semble avoir servi de porte. Kt, en cifet, on ne voit pas quel
accès devait présenter l'étage supérieur de ces tours, ai on
n'y montait pas de l'intérieur de la place au moyen d'une
échelle. Au-dessous de cette porte on en perça aussi une
autre donnant accès de l'intérieur de la place. La conatruc-
tion romaine decette tour est, du reste, bien conservée dans
la portion que montre le dessin.
442 GONCaÈS ABGHÉOLOGIOra DE FRAMCS.
m.
LE GASTRUV.
• Toutes les constructions que nous a^ons examinées jus-
qu'ici sont en petit appareil et semblent appartenir aux
bas temps de la domination romaine. Nous nous tron-
çons maintenant devant un édifice construit en pierres de
grand appareil et qui doit remonter à une époque plus
ancienne.
Il ne reste'plus de cet édifice que son soubassement, 8u^
monté d'un couronnement plus moderne. Sa forme semble
avoir été celle d'un parallélogramme défendu par trois
tours carrées sur chaque face ; l'espace entre les tours a été
plus tard relié par des arcs portant un parapet au-dessous
desquels on voit des ouvertures rappelant les assommoirs
qui surmontent quelquefois les portes des châteaux du
moyen âge.
Une entaille a été faite à une époque assez récente à la
tour du milieu et une ouverture pratiquée dans la cour-
tine ; nous avons, dans le dessin, rétabli cette partie d'après
des preuves certaines. Malgré les constructions et les brous-
sailles qui cachent le côté représenté, et que nous avons
dû faire disparaître dans notre dessin , nous pouvons en
garantir l'exactitude. Des deux autres côtés, l'un est mas-
qué par des maisons, Tautre est enfoui sous des remblais;
ils doivent, ce semble, avoir eu, au moins celui qui longe
la rua, une disposition semblable.
Après la communication de cette note et des beaux des-
riiiB qui l'accompagnent, la parole est donnée à M. Bosc,
•or les Arènes de Senlis.
XL\y* SESSION, A SENLIS. -443
Ck>nf érence sur les amphithéâtres en géné-
ral et sur les arènes de Senlis en parti-
culier (1).
On a bien voulu me demander de faire une conférence
sur las arènes de Senlis, mais pris au dépourvu et sans
documents, je me serais trouvé fort embarrassé sans l'obli-
geance de M. de Laurière qui a mis à ma disposition de
nombreuses photographies des amphithéâtres romains.
C'est à l'aide de celles-ci que je vais essayer d'établir une
corrélation entre les anciens amphithéâtres et celui de
Senlis.
Disons d'abord que les amphithéâtres sont de deux
sortes : ceux qui, émergeant du sol, ont deux ou trois étages,
comme les arènes de Nîmes, d'Arles et le Colisée, ou bien
ceux qui sont creusés dans le sol. Dans ce dernier cas, le
mur qui soutient les gradins supérieurs et celui du podium
tonnent alors toute leur architecture. Il n'existe point d'ar-
cides, point d'entablement ni aucune autre décoration
vchitecturale extérieure.
Étudions le premier type ; on peut le reconstituer ainsi.
Les gradins partent à {""SO ou i°*60 au-dessus du sol de
Ttrène ; ils sont divisés en plusieurs zones horizontales,
(ieoz ou. trois ordinairement. Ces divisions séparées entre
(Iles par un large palier se nomment précinctions; dans
chacune d'elles, les gradins sont ordinairement en nombre
impair.
La première précinction comprend ordinairement sept
nngs de gradins. Elle était réservée aux sénateurs et aux
[I) Résamé par le comte de Man^y, secrétaire général.
4U GONGRÂS ARCniOLOGIQUE DE PRANOB.
autres autorités civiles; à gauche était la loge destinée aux
empereurs ou aux proconsuls dans les provinces. ^
La deuxième, renfermant un nombre beaucoup plus
considérable de gradins, onze ou treize, était abandonnée
aux soldats et au peuple. La troisième, enfin, était affectée
aux esclaves et aux femmes. Les places de cette division
étaient souvent abritées par une sorte de portique, couvert
en pierre comme le reste du monument, ou bien en char-
pente.
Un ensemble de dispositions remarquables, ménagées
dans la construction permettait aux spectateurs d'accéder
rapidement aux précintions et de la débarrasser de même.
Au rez-de-chaussée c'était un vaste couloir circulaire dans
lequel débouchaient les escaliers et les vomitoires. Dans
les étages supérieurs, la même disposition existait égale-
ment, mais dans des proportions de plus en plus restreintes
au fur et à mesure qu'on s'élevait.
Aux plates - formes supérieures les vomitoires débou-
chaient entre les gradins et sur les paliers des précintions
par de petites portes, symétriquement placées. L'espace
compris entre deux rangées de portes se nommait cuneuSf
parce qu'il affectait la forme d'un coin ou trapèze. L'en-
semble des gradins s'étageant de bas en haut, formait une
immense cuve qu'on nommait cavea; elle était circon-
scrite dans sa partie basse par le mur du podium; le fond
de la cavea, c'était l'arène elle-même, c'est-à-dire le sol
sur lequel se donnaient les spectacles.
Arrivés à ce point de notre description , nous devons
maintenant vous parler de la canalisation des eaux. C'est
une étude qui n'a été faite jusqu'à présent par aucun
auteur. Nous la poursuivrons à l'aide de l'amphithéâtre de
Nîmes, car de tous les amphithéâtres que nous avons
visités en France, en Italie ou en Afrique, c'est le seul
XUY* SESSION, A SENLIS. 445
assez complet pour nous renseigner complètement. — Sup-
posons un violent orage éclatant sur un amphithéâtre, voici
ce qui se passait. Les gradins étaient légèrement en pente,
l'eau 8*écoulait donc de la partie supérieure de la cavea à
la partie inférieure; mais à chaque précintion elle s'arrê-
tait sur les paliers qui, de distance en distance, étaient
percés de petites ouvertures au pied du gradin qui joignait
immédiatement le palier. Ces ouvertures absorbaient Teau
et la dirigeaient, par de petites canalisations, dans des
tuyaux de descente qui étaient pratiqués dans les piliers
massifs de maçonnerie qui supportaient les arcades des
couloirs. Le trop plein des eaux de la cavea s'écoulait
jusqu'au mur du podium, et de là se répandait dans
l'arène qui possédait, au bas du mur du podium, un
canal circulaire ^couvert, nommé euripe, lequel avait, de
distance en distance,' des ouvertures grillées permettant
d'absorber les eaux pluviales. Une fois dans le canal de
leuripe, les eaux s'écoulaient dans un égout placé en con-
tre-bas du sol de l'arène; c'est ce même égout qui recevait
les eaux des conduites pratiquées dans les piliers massifs
de maçonnerie supportant les arcades. Quand on donnait
desnaumachics dans les amphithéâtres, comme nous allons
le voir bientôt ; les eaux débouchaient dans l'arène, dont
les ouvertures de l'euripe étaient hermétiquement formées;
pour vider le vaste bassin compris entre les murs du
podium, on ouvrait les bouches de l'euripe ou une énorme
bouche ou regard, pratiqué au-dessus de l'égout princi-
pal ou égout collecteur.
Ou donnait dans les amphithéâtres des combats de gla-
diateurs et dianimaux , et rarement des naumachies. Ils
servaient aussi pour des représentations équestres analo-
gues à celles que l'on donne dans nos cirques, surtout des
simulacres de bataille; c'est ce qui explique les substruc-
-416 CONGRÈS ARGHÉOLOOIOUA BB FRANGE.
tions que possèdent beaucoup d^amphitbéàtres, tel que 1^
Ck>li8ée; mais où ces substructions sont le plus considéra^
blés, c'est à l'ampbitbéàtre de Pounoles que j'ai visita
encore cette année au mois de janvier.
Comment cbassait-on les animaux dans rtrène? Par da^
couloirs étroits, dans lesquels ils étaient forcés d'avancer -s
sans pouvoir se retourner. Un bestiaire armé d*un triden '^
de fer poussait l'animal jusque dans l'arène. On l'avait faiart
sortir de sa loge {career) et on l^avait attiré dans ce couloir
étroit en lui faisant sentir un appât quelconque suspendue
dans le couloir; une fois l'animal engagé dans ce couloir^
les bestiaires, armés de leur trident, le poussaient en
avant.
Dans le rez-de-chaussée des amphithéâtres, il existait de
petites loges pour les acteurs, les bestiaires et les gladia-
teurs; on y accédait, soit par les vomitoires du res-de-
chaussée, soit par le grand couloir de cet étage. Dans ces
loges, les acteurs se grimaient ou se costumaient, les lut-
teurs et les gladiateurs se frottaient d'huile pour assouplir
leur peau et leurs membres. De chaque côté des princi-
pales portes, celles qui se trouvaient dans le grand axe
de l'ellipse, il y avait également des loges plus grandes
qui remplissaient l'office de ce que nous nommons dans
nos théâtres modernes foyers des artistes. C'est dans ces
loges que les acteurs, les gladiateurs, les bestiaires atten-
daient le signal des représentations ou des combats. Dans
les grands amphithéâtres il existait également des portes
dans le petit axe de Tellipse. Les portes du grand axe se
nommaient Tune porta sanamvaria, et Tautre porta mor-
tualis ou libitinerms; les gladiateurs bien ^portants ren-
traient dans leurs loges par la première porte; par la
seconde, au contraire, on faisait sortir ceux qui avaient été
tués en combattant. Dans les arènes de Senlis les portes
XUY* SBSaiON, A SBNU8. 447
du petit axe sont remplacées par deux cellœ, Tune à droite,
Tantie à gauche; c'est un exemple très-rare, mais non
unique, car les arènes de Lutèce possédaient également, au
moins du cAté fouillé, une cella pareille.
Parlons maintenant des naumachies; certains archéo-
logues prétendent qu'on n'a jamais donné ce genre de
spectacle, d'autres qu'on en donnait fort souvent. Nous ne
pouTons être aussi absolu dans un sens ou dans Tautre; il
s'agit de s'entendre et de distinguer. Évidemment, dans
les pays privés d'eau il n'y avait pas moyen de créer ces
beisins artificiels. Dans les autres, on établissait une cana-
lisation, qui, à l'aide d'un va-et-vient, permettait d'ame-
ner et de retirer les eaux.
Les naumachies ne semblaient pas offrir une distraction
suffisante, et ne pouvaient donner l'aspect d'un vrai com-
bat naval, aussi furent-elles abandonnées au ii* ou au
m* siècle, et les amphithéâtres ne servirent plus que pour
des combats.
On ne retrouve des représentations de naumachies que
sor les médailles d'Auguste; après ce prince, il n'en est
pins fait mention.
Si nous abordons maintenant la construction des amphi-
théâtres, nous voyons que jusqu'au i*' siècle, ils ne sont
exclusivement construits qu'en charpente. Plus tard, on
employa de la pierre et même du marbre à leur construc-
tion et en proportion considérable. Aussi ne pouvaient-ils
être édifiés que si de riches carrières d'une exploitation
bcik se trouvaient à proximité de l'emplacement choisi.
Da reste, les matériaux employés à ces immenses travaux
lont si considérables que leurs ruines, bien qu'exploitées
depuis le moyen âge et presque jusque dans ces dernières
innées, leurs ruines, disons-nous, exploitées pendant tant
de siècles, ont fourni des matériaux à un grand nombre
4lâ CajSùkès aslcréûum;iijuk de frxnce.
d'édifices el île mais«'*ns: et malgré celle déTa$lalîoa et oe
gaspillage, ce qui nous re>te des aniphith^tKS niio^
nous eu impose encore par sa graude masse et les énonnes »
déhris de matériaux qui y sont accumulés.
Les dimensions et les qualités des pierres employées
varient, comme de raison, suivant les localités.
Dans les beaux amphithéâtres, les assises ont I mMitde
hauteur sur ^"'50, 3 et jusqu'à A mètres de largeur. DiU
les amphithéâtres secondaires, les appareils sont de moin-
dre dimension, quelquefois même, comme à Senlis, pir
exemple, les coustructcui^ n*ont employé que du moelloo
sinillé, c'està-dirc les matériaux les plus petits après U
brique. L'amphithéâtre d*El-Djem était en marbre blanc;
celui de Pola, en Istrie, avait ses gradins également en
marbre.
Quant à l'appareil, il était de tous genres; il était réti-
culé, en épi, en mocllun smillé, piqué, etc., suivant l^
localités. On faisait plus ou moins bien les choses. A Poii>'
péï, ramphilhéâtre est en petit appareil ; il en est de méio^
dans l'un des ainpliidiéàlres les plus considérables, celiB*
de Kl-i)jcm, en Tunisie, dont hs dimensions sont presque
égales à celles du Coliscc et de l'amphithéiltre deCapoue^
Les Homuins ne roclieMhuieut point l'économie dan^
leurs constructions, mais ils ne la fuyaient point; ccr-'
taines parties de leurs aniphithéatros peuvent en témoigner.
Ainsi, dans bien des cas, au lieu d'arcades, ils employaient
des plates- bandes fi>nnées seulement de deux ou trois blocs
de pierre ou claveaux; cela se voit à l'amphithéâtre de
Pola, dont nous venons de parler ; souvent même la plate-
bande elle-Hiéme était remplacée par un simple linteau
de pierre de i mètres à i"oO de lungueur, sur 0*70 de
largeur. Dans ce cas, iri'-normos cnrlvaux on pierre dimi-
nuaient la |>t>rtée du linteau. Cet agencement peut se voir
XLIY' SESSION, A SKNLIS. 449
encore aujourd'hui au couloir du deuxième étage de l'am-
phithéâtre de Nimes, où plusieurs linteaux s'étaut rompus
sous une forte charge, on a été obligé d'en relier les mor-
ceaux par des liens et des étriers en fer.
La décoration extérieure des amphithéâtres était simple
et grandiose; elle consistait en un ou deux rangs d'arcades,
quelquefois trois, superposées. Chaque étage avait un ordre
différent d'architecture, lesquels dans les amphithéâtres
élevés étaient couronnas d'un attique, qui correspondait, à
l'intérieur, à la mmma cavea, ou gradins supérieurs.
Les spectateurs, dans ces vastes édifices, étaient protégés
des rayons ardents du soleil par une grande tente, ou vcla-
rium, qui a fourni matière à de longues discussions. Ce
velarium était-il posé verticalement où horizontalement?
couvrait-il totalement ou partiellement la surface supé-
rieure de la cavea? ^ toutes ces questions nous rép<ui-
«Irons affirmativement. Eu effet, il existait dans les petits
amphithéâtres des velaria horizontaux ; dans d'autres ils
étaient posés verticalement sur des mâts (ma/t), du côté
du soleil, et au fur et à mesure que celui-ci tournait, des
marins faisaient avancer le velarium vertical, qui proje-
tait une grande ombre sur la cavea et abritait ainsi les
spectateurs contre les ardeurs du soleil.
Dans les grands amphithéâtres, à Pouzzoles, à Capoue, h
liome, le velarium ne couvrait pas, ne pouvait pas couvrir
totilementla cavea; cela se comprend, car une aussi vaste
iorfaoe de toile aurait donné trop du prise au vent. Ce ne
défait être probablement qu'une large bande circulaire
recouvrant seulement la summa cavea. Le musée de Naples
poHède une peinture enlevée sur un mur de Pompéï, et
sur laquelle on voit représenté un velarium horizontal
pofé au sommet des mœnia couronnant la dernière pré-
rJDction.
XLIV SESSION. iV)
450 CONGRÈS ARGUÉOLOGIOUE DE FRANGE.
Presque tout ce que nous venons de dire des amphi-
théâtres peut s'appliquer aux théâtres dont les dispositions
sont identiques, parce que ceux-ci ne sont que la moitié
des amphithéâtres.
Nous allons enfin étudier les arènes de Senlis, qui ont
beaucoup d'analogie avec celles de Lutèce. Nous les avons
visitées de nouveau ce matin avec M. Vernois, Tauteurde
leur découverte, le pater arenarum, comme on Ta sur-
nommé. Les deux amphithéâtres sont creusés dans la terre;
ils possèdent l'un et l'autre des cellules identiques placées à
l'extrémité du petit axe et ayant leurs portes d'entrée dans
le mur du podium.
Les fouilles de Lutèce ont permis de fixer la date de leur
construction au m" siècle, et je crois que l'on doit assi-
gner la même date à celle dos arènes de Senlis.
Dans les unes et dans les autres nous voyons deux portes
d'entrée. A Senlis on retrouve les cellas; à Lutèce, l'une
est visible et l'autre est probablement enfouie dans la par-
tie du terrain appartenant à un couvent. Malheureuse-
ment, on a dû abandonner ces fouilles si intéressantes p^r
suite de la guerre survenue en 4870.
Combien Tamphithéâlre de Lutèce comprenait- il <!•*
places? C'est une question qu'il a été difficile de trancher,
d'autant qu'on ne connaît pas son diamètre extérieur. A
Senlis, on peut évaluer de 9 à iO,()00 le nombre des spec-
tateurs. Un des membres du Congrès a prétendu que les
arènes de Senlis n'ont pu contenir-! ou 5,000 spectateurs.
Il s'appuie sur ce que la population de la cité gallo-
romaine ne devait compter que ce nombre d'habitants. H
s'appuie aussi sur un calcul erroné du nombre des gra-
dins.
En réponse à ces affirmations, je dirai, en premier lieu,
que les amphithéâtres n'étaient pas faits seulement en vue
XUY* SESSION, ▲ SENUS. tôi
le ne contenir que la population d'une ville, mais bien celle
le toute une contrée. Ensuite, pour calculer le nombre de
ftlacef, il faudrait multiplier le périmètre des gradins par
p inradin du milieu de la cavea; or, dans l'espèce, deux
léments font défaut pour établir ce calcul :
1* La hauteur des arènes ; ^ la longueur du gradin et
lu palier de la précinction ; si toutefois les arènes de Sen-
is en possédaient une, ce que je suis disposé à croire.
Parlons maintenant du puits : sa position dans l'arène
i fort intrigué les membres du Congrès. J'avoue, Mes-
ieurs, que dans les très-nombreux amphithéâtres que j'ai
'isités, je n'ai vu dans aucun un puits pareillement placé.
Quelle était sa destination? Fournissait-il de l'eau, ou
»ien servait-il à dessécher le sol de l'arène. Un de nos col-
ègues du Congrès a cru pouvoir trancher la question; il
i dit que ce puits ne pouvait être qu'un puisard, puisqu'il
le pouvait fournir de l'eau, à cause de la nature du ter-
lin où il se trouvait; et la preuve, a-t-il ajouté, c'est qu'au-
oard'hui encore il n'en possède pas. Je ne saurais être
lussi afflrmatif, et je répoudrai : Si nous sommes en face
l'un puisard pour drainer le terrain, d'un puits de dessè-
chement, il est bien large; en effet, ce genre de puits n'a
guère, ordinairement, que 1 mètre ài^'IOde diamètre, et
le outre mesure 2 mètres.
Je croirais plutôt que c'est un puits ordinaire. On a beau
objecter qu'il est creusé dans des couches calcaires, ceci ne
pnmve rieo, car la moindre fissure, le moindre filon ter-
reux traversant la couche calcaire peut fournir une ou
plusieurs source^ capables d'alimenter un puits. Si celui-
ci ne pos;ȏde pas actuellement de feau, cela ne prouve
rien encore, puisque le forage d'un puits voisin plus pro-
fond que celui des arènes a pu dessécher ce dernier. Du
reste, il ne faut piis s*(''tonner qu'un puits comblé depuis
452 CONGRÈS ARGHéOLOaiOUE DE FRANCK.
tant de siècles ait vu tarir la source qui Falimentait.
Aussi, Messieurs, je crois qu'il est prudent de réserver
provisoirement cette question ; malgré cela, il est plus pro-
bable que nous avons un puits ordinaire, car on avait
l)esoin d'eau dans un amphithéâtre, soit pour donner à
boire aux chevaux, aux animaux, soit pour laver les bles-
sures des gladiateurs et autres usages. A l'amphithéâtre
de Nîmes il existe un puits , mais il est tout près des car-
cères, c'est-à-dire dans une tout autre position que celui
de Senlis.
Les colonnes. — Celles que nous retrouvons sur l'arène
sont de diamètres différents, O^'ÔO à O'^iO. Si ces colonnes
étaient en plus grand nombre et si elles étaient d'un plus
petit module, je dirais que l'amphithéâtre devait être cou-
ronné d'un portique, mais les éléments de ce portique nous
manquent; en effet, jusqu'ici on n'a retrouvé aucune trace
d'entablement. Aussi chercherons-nous â placer les colonnes
ailleurs. Les grandes ont dû servir à la décoration des
portes d'entrée et supporter un fronton, quatre à chaque
porte; les petites à la décoration d'une loge réservée aux
autorités, à l'édicule du proconsul. Il reste encore un point
à éclaircir, celui d'une énorme pierre relancée dans le mur,
près du puits; on veut la comprendre dans la construc-
tion primitive : je ne suis pas aussi affirmatif et n'oserais
dire qu'elle date de l'origine du monument.
On a voulu conclure de la présence du charbon qu'on y
incinérait les morts : je ne vois là qu'une réserve pour
enfermer la provision de charbon d'un habitant dont la
«
maison était construite sur le sol des arènes. La grande
loge n'est dans aucun axe , cependant elle se trouve tout
près de la porte principale où les gladiateurs pouvaient
venir recevoir les récompenses des mains des proconsuls.
Voici tout ce que m'a suggéré la vue des arènes de Sen-
.UIV** SKbSIOA, A SJ&NL1S. 453
ijs; il reste bieu des points à éclaircir dont je suis le pre-
mier à demander l'explication.
M. Palustre, après s'être tait Tinterprètc des sentiments
Ot* rassemblée, en remerciant M. Bosc de l'intéressante
conférence qu'il vient de faire, prononce à son tour le dis-
cours suivant :
« Mesdames, Messieurs,
« De même que le voyageur, après un long chemin
|iarcouru, aime à repasser dans son esprit les lieux qu'il a
visités, les circx>nstauceâ diverses, les incidents agréables
oti fâcheux qui ont signalé sa course, il m'eût été doux de
jeter un coup d'tvi) en arrière, de résumer les discussions
qui nous ont tenus attentifs depuis huit jours, d'en faire
de nouveau passer sous vos yeux les points les plus sail-
lants, de vous rappeler les souvenirs que graveni dans noi^
CŒurs le sympathique accueil fait au Congrès par la noble
cité de Senlis, enfin de supputer les résultats qu'ont retiré
Ici études archéologiques de nos travaux et de nos entre-
tiens.
• Mais le temps presse, et d'ailleurs nous nous serions
lait un reproche d'enlever le moindre instant à la brillante
conférence que vous venez d'entendre et qui ne sera |>as
uu des souvenirs les moins agréables du Congrès. A cette
uccasiou, permettez-moi, Messieurs, de remercier la Société
centrale des Architectes qui, chaque année, veut bien nous
envoyer l'un de ses membres les plus éminents : M. Hévoil
Tau passé, M. Bosc aujourd'hui. Les choix ne pouvaient
itre meilleurs.
« Je ne saurais, cependant, garder un silence complet.
454 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE 1»£ FRAACK.
et VOUS m'en voudriez certainement si je négligeais de vous
signaler tout au moins les travaux qui ont le pluscaptÎTé
votre attention et le mieux mérité vos su&rages.
« Dans les sciences préhistoriques, vous avez surtout
remarqué ceux de MM. Millescamps, Habn et de Marioourt
qui, dans des études serrées et débarrassées de tous détails
inutiles, nous ont révélé d'intéressantes découvertes et
montré où en sont, sur ce point, dans la région de Senlis.
les différentes questions mises à Tordre du jour.
« Pour tout ce qui a rapport à la domination romaine,
les développements ont été plus considérables, mais nui
ne se plaindra d'avoir à diverses reprises entendu MM. Clau-
del et Hayaux du Tilly , non plus que M. de Caix de Saiut-
Aymour, dont le nom demeurera attaché à la découverte
du temple de Ualatte et figurera bientôt, nous Tespérons,
en tête d'une belle monographie de ces restes importants.
« Mais, de toutes les discussions, la plus vive et la plus
émouvante, si je puis m'exprimer ainsi , a été celle qu'a
soulevé l'apostolat de saint Rieul. Disons-le, toutefois.»
MM. deMeissas et Muller, en désaccord sur des points de
détail, semblent au fond partager les mêmes idées, et l'opi-^
nion d'après laquelle le pagus silvanecienm aurait été évan—
gélisé au T' siècle, n'a pas trouvé dans cette enceinte d
sérieux défenseurs.
a Le moyen âge a été négligé, je l'aivu avec peine, et sau
UD mémoirede M. AnthymeSalnt-Paul, mémoire qui, uou
y comptons bien, sera étendu et complété par son auteur —
nous n'avons rien à vous signaler. El à ce propos, per — "
mettez-moi d'adresser un reproche, non pas aux membr«*r ^
présents du Congrès qui, tous, ont rempli leur devoir, mai ^
à ceux qui, après avoir fait de brillantes promesses, avo» ^
posé d'importantes questions et se les être réservées, n'or"^'
donné aucun signe de vie depuis huit jours. C'est aiu ^
XLlV si£:)S10N, A SENLIS. 4o5
«]u'a été presque mis en oubli un des poiuts principaux,
et surtout le côté le plus original de l'archéologie du ter-
ritoire de Senlis, territoire où les monuments du xi*" au
y\V siècle sont si nombreux , si variés et si charmants de
«tyle, pays qui ne saurait être négligé sans que dans l'his-
toire iponumentale ne se montrât une vaste lacune. C'est
encore à mon grand regret que nous avons manqué d'une
étude relative aux tablettes de cire qui, à elles seules, sut-
tiraient pour attirer les yeux du monde savant sur la
bibliothèque de Senlis, non plus qu'aux questions d'art
religieux qu'il est plus important que jamais de résoudre
aujourd*liui. Cette absence a jeté un certain désordre dans
U(»s discussions et t'ait que le compte rendu du Congrès, à
>on tour, sera loin d'être complet.
a J'ai parlé de la bibliothèque, Messieurs; cet établissc-
luent a trouvé dans M. l'abbé Vattier un historien érudit
«lui a su, non-seulement intéresser ses auditeurs, mais
encore les captiver par le charme de ses récits. Le môme
auteur a étudié les compagnies d'archers et d'arquebusiers
de Senlis, et son mémoire bien conçu, plein de dévelop-
iwments utiles, mérite tous les éloges qu'il a déjà reçus.
Dans cette nomenclature nous ne devons pas oublier
MM. Margry et Dupuis; le premier, qui nous a fourni de
• urieuses notes sur les maisons de Senlis, le second, un
mémoire sur l'ancienne géographie de la région, et une
note sur les monnaies trouvées dans les arènes.
m Les excursions que no.us avons laites compteront cer-
tainement parmi les épisodes les plus agréables et les plus
fructueux du Congrès. Tous ceux qui y ont pris part se
leliciteront des notions qu'ils y ont acquises, et n'oublie-
ront jamais l'amabilité avec laquelle toutes les porter leur
<iul été ouvertes, à Chantilly, à Chaalis, à Ermenonville.
J'ai dit toutes; je ferai une exception, car à Saint-Leu-
456 CONORÈS ARGHÊOLOOIOUK DK FRANCK.
(l'Esserent, vous savez que nous avons en vain attendu 'à
i*entrée d'un cloitre que sa propriétaire eût dû tenir à bon*
neur de vous montrer. Il est vrai que nous avons trouva
une large compensation dans la manière dont M. Selmer^
sheim nous a introduits dans toutes les parties de l'inté^
ressante église dont il a commencé la restauration.
« Gomment oublier la magnifique réception faite à Gom ^
piègne par la Société historique, la charmante courtoisie
de son président, M. Bottier, qui a souhaité la bienvenue
au Congrès en des termes dont chacun retiendra le sou —
venir. Comment surtout ne pas rappeler, avec un senti —
ment bien voisin de l'admiration, l'habileté administra —
tive, pour ainsi cijre, grâce à laquelle M. de Mamy a sir
ménager au Congrès la possibilité de tout voir en un
espace de temps fort restreint, et néanmoins sauA précipi-
tation et sans fatigue. Sous ce rapport, l'excursion de Gom-
piègne peut être donnée pour modèle. Notre inspecteur de
l'Oise y a montré qu'en lui l'organisateur intelligent se
joint au profond érudit. Il est de stricte justice de rendre
le même témoignage à M. de Caix de Saint-Aymour, dont
les calculs exacts ont permis hier au Congrès de visiter, de
Senlis à Pierrefonds et de Pierrefonds à Crépy, une dc:"
régions archéologiques les plus curieuses de la France.
0 M. Parker a, lui aussi, sa bonne part dans nos souve-
nirs de gratitude. Explorateur infatigable des monuments
de l'antiquité, il a su choisir les plus remarquables et eu
a fait passer la figure sous les yeux d'une nombreuse
assemblée. Cette séance comptera parmi les plus mémo-
rables de la session.
« Le Congrès doit également les plus chaleureux remer-
ciements à M. Vatin qui, dans les fonctions de trésorier,
nous a rendus les plus grands services.
Enfin, et c'est pour nous un devoir particulièrement
XLIV* SESSION, A SKNUS. 457
agréable à remplir, nous exprimons toute notre recon-
naissance à la ville de Senlis pour l'accueil sympathique
et empressé fait aux membres du Congrès. Cette reconnais-
sance doit s'appliquer avant tout à la Société musicale que
nous venons d'entendre à nouveau , au digne maire de
Senlis, M. Odent, toujours prêt à nous être agréable,
tufsi bien chez lui qu'au siège de l'administration qu'il
dirige. Nous devons enfin remercier les dames qui ont bien
voulu nous accompagner dans nos excursions, malgré
les fatigues qu'elles auraient pu craindre, si l'habileté
des organisateurs n'avait su presque toujours les leur
éviter.
« Merci encore aux personnes qui, par les tableaux dont
files ont bien voulu se séparer quelques jours, par l'envoi
de livres ou de curiosités , ont créé autour de nous une
sorte d'exposition rétrospective du plus grand intérêt à
visiter.
« Qu'il nous soit permis, enfin, d'exprimer au Comité
archéologique de Senlis nos sentiments les plus sympa-
thiques et de le remercier avec la plus vive effusion , soit
pour le rôle dominant qu'il a su garder dans le Congres,
«oit pour le talent déployé par so^ membres, et notamment
par MM. Vemois et Deshayes, dans la décoration de la salle
où nous avons tenu nos assises. »
M. de Marsy, secrétaire ^:énéral, prtH:lamc ensuite les
uoms des lauréats.
458 COiMGHÈS AHCHÈOLO(>lUU£ DE FUANCE.
Médailles décernées par la Société fran-
çaise d'Archéologie , dans sa séance di:^
3 Juin 1877. à Senlis :
1" Grandes médailles d'argent à l'eftigie d'Arcisse de£
Cauinont, données par M">" de Caumont, à :
M. Frédéric Moreau , pour ses fouilles de Caranda et la^
publication de son album;
M. P'élix Vernois, pour la découverte des arènes de
Senlis.
i^ Médailles d'argent:
A MM. Albert de Houcy, |M)ur ses découvertes dans la
Ibrét de Compiègne ;
M. Laffolye, architecte, pour la restauration de riiôtel
de ville de Compiègne ;
M. Boufflet (abbé), pour son intelligente restauration de
Téglise Saint-Samson, de Clermont;
M. Gustave Vallier, pour ses publications sur la numis-
niHtique du Dauphiné;
M. Hdouard Pleury, pour la publication du premier
volume de ses Monuments et antiquités de l'Aisne,
.f* Médaille de bronze :
M. Ravaud, instituteur^ pour Touilles arcliéologiqutii'
dans lu Creuse.
M. le Président, en remettant aux lauréats présents leurs
médailles, signale rapidement les travaux ou les publica-
tions qui ont motivé les décisions du conseil.
M. Vernois, dans quelques paroles émues, remercie la
XLIV* SESSION, A SENLIS. 459
Société de la récompense dout elle a couronné les efforts
lait?, non par lui seul, mais par tout le Comité, sur lequel
il tient à reporter le mérite de la découverte et de la con-
servation des arènes, et rappelle qu'il a été puissamment
aidé dans sa tâche, par feu le président Vatin et par
M. Puissant; il termine en annonçant son intention de
remettre au musée du Comité archéologique Ta médaille
qui vient de lui être décernée , afin qu'elle soit toujours
ooDiervée par ses collègues et qu'elle puisse à la fois leur
rappeler leurs travaux et les encourager dans l'avenir à
marcher courageusement dans la voie qu'ils suivent.
M. le Président, après avoir annoncé que le prochain
Congrès se tiendra au Mans et à Laval , prononce la clô-
ture de la quarante-quatrième session et lève la séance.
LUNDI, 4 JUIN.
Excursion à Mello, Mouchy et Beauvais.
Bien que le Congres lût ofliciellement clos, son pro-
gramme cependant n'était pas encore épuisé, car il est
•iésormais d'usage qu'une excursion supplémentaire soit
organisée au loin le lendemain delà clôture. Colle de cette
année avait pour but la ville de Beauvais, avec halte aux
deux châteaux de Mello et de Mouchv.
Les excursionnistes arrivaient donc le lundi matin, au
nombre de soixante, à la station de Cires-lès-Mello. Là,
M. l'abbé Manuel, curé de cette paroisse, voulait bien lei^
4bU CUNGRKd AaCU£OLOGlUU£ D£ FRaNOË.
recevoir puur les conduire au château de Melio «lui, du
milieu de ses parcs grandioses, domine le ravissant pant>^
rama de la vallée du Thérain.
La collection d'objets de tous les arts du moyeu âge, dt5
la Renaissance et des temps modernes réunis dans ceiU^
riche habitation aux grandes allures, jouit, à juste titre^
d'une renommée universelle; elle fournit un noble
exemple du libéral emploi d'une grande fortune mise au
service des goûts les plus délicats et les plus élevés, et
c'est avec la plus aimable bienveillance que M. Tabbc
Manuel, en l'absence de MM. Seillières, les maities du
lieu, en a fait les honneurs aux membres du Congrès,
heureux et reconnaissants d'avoir pu admirer toutes ces
merveilles.
Quelques instants après, toutes les i)ortcs du château de
Muiichy étaient gracieusement ouvertes aux membres de
l'excursion, charmés de l'aimable hospitalité qu'ils rcte-
vaient, au nom et en l'absence de M. le duc de Mouchy,
dans cette splendidc résidence. La visite du château, qui
date de la Renaissance et offre un imposant mélange de con-
structions postérieures, Texanien des objets qu'il rcnfei me
rappelant des souvenirs historiques, sa riche bibliothèque,
les promenades sous les vastes ombrages du parc et des
jardins, ont rapidement l'ait passer les heures qui ont pré-
cédé celle du départ. Mais avant de quitter le parc, disons
(|uc les amateurs d'archéologie antique ont eu la bonne
fortune de rencontrer dans ses allées trois monuments de
provenance romaine, dignes d'un très-haut intérêt. Ce
sont trois sarcophages de marbre blanc, à facei ornées de
représentations mythologiques et symboliques. L'un d'eux
surtout, d'un style plus correct et plus simple que les
deux autres, attire l'attention par la nature de ses sujets.
Ils représentent aux deux extrémités les Dioscures, et au
XLIV* SESSION, A SENLIS. 4t>1
oPDtre un guerrier nu, debout, appuyé sur une lance et
armé d'un bouclier ; près de lui une femme vêtue, éga-
lement debout, lui pose la main sur la poitrine. Malheu-
reusement les têtes de ces deux personnages ont disparu.
La femme étant entièrement vétuc, il n'est guère permis
«le Yoir dans ce groupe Vénus et Mars. Ne serait-ce pas
plalAt une de ces scènes de réunion dans le séjour de la
ieiidté élyséenne récemment expliquées par des savants
des plus autorisés (I)? Quoi qu'il en soit, aujourd'hui
que les questions relatives à ces sortes de groupes sont
pour ainsi dire à l'ordre du jour dans la haute archéo-
logie, il peut être à propos de signaler l'existence de ce
monument moins connu que certains autres portant des
sujets analogues.
A huit heures dix minutes du soir, le Congrès diminué
de quelques-uns de ses membres qui avaient dû prendre
une autre direction, arrivait à Beauvais où il avait le plai-
sir d'être reçu par M. Armand Hendu, i'érudit archiviste
lie rOise, qui avait préparé l'intéressante journée du len-
demain.
C'est sous sa direction et celle de M. Alexandre Dela-
herche qu'a été effectuée, ce jour-là, la visite des monu-
ments de la ville, manufacture de tapisserie, musée de la
Société archéologique, restes des anciens murs romains,
Basse-Œuvre, église Saint-Élienne, cathédrale, bannière
de Jeanne Hachette à l'hôtel de ville, sans oublier les
collections de M. Delaherche. Il faudrait un long volume
pour décrire cotte dernière réunion d'objets de céramique,
ligillographie, ferronnerie, sculptures, miniatures, orfè-
vrerie, peintures, ivoires, verrerie, émaux, dessins, gra-
;i) V. Lex monuments de Myrrhine ei les fnts-reHefs funé-
raires des Crées en générai, par Félix Ravaisson, 187H.
\Ct^ CONGRÈS AHGHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
vures, etc.; qu'il nous suffise de dire que toutes les pièce
sout de premier choix et ont été recueillies pur réniioeia
collectionneur qui a bien voulu présider lui-même à Is
visite qu'on a faite de ses trésors. C'est aussi à sa compé-
tence bien connue en matière d'art, qu'on a dû les érudites
(explications données à Saint-Étienne sur les magniQqua
vitraux de cette église, tous dominés par le saisissant écla
de la verrière qui représente l'Arbre de Jessé, incompa-
rable et radieux chef-d'œuvre d'un art éminemment fran*
■
cais. .
EXTRAIT
n'UNE
NOTICE SUR LÉVIGNEN
SElGlfEUlklE DES FRANGS-PIEFS DU YALOfS, QUI RELEVAIENT
l»U DONJON DE LÉYI6NEN OU DE LA TOUR OCTOGONE DITE
ANCIENNEMENT LA GROSSE TOUR CARRÉE.
J'arrive à la seigneurie des Fraocs-Fiefs (1j, qui a son
^îége dans la tour du donjon, ou tour octogone.
Ce qui caractérise cette seigneurie c'est qu'elle se coni-
tmsA de biens appartenant à la couronne ou aux comtes et
Uucs de Valois, qui étaient apanages du Valois et des
Kraocs-Fiefs du Valois; tandis que la seigneurie de Saint-
lilaise est une propriété particulière, la plus importante,
il est vrai, de celles qui appartenaient à des personnes de
«qualité, depuis Gauthier d'Aunay et Gillette de Clary, qui
oui donné, en Idl^i, au comte de Valois, ce qu'ils avaient
à liévignen et à Gondreville, jusqu'au xvi' siècle, où Gar-
.1) D'après le manuscrit de M. le président Minet, sur le
Valois, les Francs-Fiefs sont ainsi appeh'^ parce qu'en entrant
«Uds Tapanage du fils de Raoul II, comte de Sentis et de Crépy,
ils ont été affranchis de la mouvance immédiate du Valois et ne
rf levèrent plus que du donjon et de la tour octogone de l>vignen.
464 nONORKS ARCHÉOLOOrQUE DE VRANXE.
lier dit de Lévigncn qu'il comptait plusieurs habitations
sei^çneariates.
Les biens dits Franc8*Fiefs du Valois, dont une partie
était connue au xr siècle sous le nom de friches des Goni-
bries, ayant été donnés à Thibaut de Nanteuil, en I09U,
pour être tenus en pairage, de son frère, Raoul H, cointt*
de Crépy et de Sentis, ont dû subir le sort du Valois, lors
de la cession de ce comté à la couronne, par la comtess»
F^léonore, d'un côté, et par le seigneur du donjon do
Crépy, Philippe de Nanteuii, de l'autre.
Donc, vers 1ii8, les Francs-Fiefs du Valois et leur don-
jon de Lévignen ont dû retourner à la couronne pour être
ensuite donnés ou vendus suivant le bon plaisir des roi»
ou des comtes et ducs de Valois.
Les Francs-Fiefs du Valois restent cependant plus d'un
sit^cle après cette cession dans la famille de Nanteuii. O
n'est qu'après 1300, c'est-à-dire après le mariage d'Alix
(h: Nanteuii avec Pierre de Pacy, qu'ils commencent à en
être détachés et à former une seigneurie distincte de celle
de Lévignen, connue sous le nom de seigneurie du Don-
jon, tandis que celle de Lévignen continuant à demeurer
dans la maison de Pacy, finit par s'en séparer pour former
la seigneurie de Saint-Blaisc.
Le premier seigneur de la maison de Pacy que j'ai vu
dans les actes d*hommage sous le nom de seigneur des
Francs-Fiefs est Pierre de Pacy , fils cadet de Pierre et
d'Alix, qui reçoit hommage en 1323, comme seigneur des
Francs-Fiefs de Pierre de Chamblv.
Ft le premier nom étranger à cette famille que jetrouvt»
aux actes d'hommage rendus aux seigneurs des Francs-
Fiefs est celui de Guerrin de Lorris, en 1388. Cela prouve
qu'à cette époque la famille de Pacy ne possède plus que
la seigneurie de Lévignen ou de SaintrBlaise.
■nt De
XLIV*^ SESSION, A SENLIS. ÀGit
Fin lilO, les francs- fiefs sont vendus par Charles
•l'nriéans, duc de Valois, qui «nvait besoin d'argent pour
««nicfaeler des prisons d'Angleterre; et ief( Fuselier, sei-
gneurs de Néry et de Séry, ses hommes de confiance et
uiiopagnons de captivité, viennent eu France négocier un
''Qiprunt au nom de leur maître.
C'est sans doute par l'entremise d'Etienne le Fuzelier,
«loyen de la collégiale de Saint-Thomas-de-Crépy, et plus
Urd propriétaire à Lévignen, que le donjon de Lévignen
fut vendu le 30 décembre 1440, à Rodolphe de Billard,
vicomte d'Orival pour 1270 écus d'or soleil. Jeanne de
Billard (1), veuve de Colas de Blois et fille de Rodolphe,
veurfit liï donjon à Jean Gorgias, seigneur de Brégy, dont
le descendant Michel Nicolas acheta des commissaires du
nij d'autres dépendances de Lévignen. Cette famille a
gardé le donjon jusqu'en tOIO.
La vente de 1440 ne peut être considérée que comme
une concession de droits royaux et utiles, et non comme
une aliénation véritable, car, en 1668, le 17 janvier, une
\ Teatence du maître des requêtes ordonne que, malgré la
vente du 30 décembre 1440, les fiefs du Donjon et de la
Folie-de-Lévignen seront réunis à la couronne.
Appel de cette nentence de la part du seigneur de Lévi-
gnen, prétendant que les francs-fiefs lui ont été garantin
par une clause spéciale contre tout retour à la couronne;
en conséquence, maintien de ce seigneur dans la jouis-
sance des fruits de sa seigneurie des francs-fiefs, en date
de 1707.
Nouvelle défense, en 1760, de percevoir lesdits fruits; en
revanche, concession au sieur Lallemant, comte de Lévi-
yl) ManascritdeM. Minet; voir mas notes z\'ec plus de di*tai(s
Mir les familles Blois et Gorgias.
XllV< SESSION. ')0
f
•i66 CONGRÈS ARCHÊOL06IOCJK DE FRANCE.
gnen, de divers titres honorifiques à titre d'inféodation du
donjon et de la Folie et autres droits utiles, tant que le
domaine sera dans l'apanage du duc d'Orléans.
C'est donc comme concessionnaire du roi ou du duc de
Valois que les seigneurs de Lévignen possèdent le fief du
donjon, et c'est comme tels qu'ils leur rendent hommage,
Jean Gorgias, à Crépy, en 4484, à Louis XII; le comte
Lallemant en 4739, la présidente Legendre en 1770.
C'est des commissaires du roi que Michel Gorgias, dit
M. Minet, acheta, en 1543, pour 3S0 livres, la mairie de
Lévignen , la haute, basse et moyenne justice, plusieurs
cens et rentes que le roi y avait.
Par ses dispositions testamentaires, la reine Blanche,
femme de Philippe de Valois, donna un fief de Lévignen
aux chartreux de Bourgfontaine.
Il n'est pas difficile de connaître les biens dits francs-fiefs
ou au moins la plus grande partie.
Il suffit pour cela de jeter un coup d'œil sur les noms
des personnes et des fiefs mentionnés aux actes de foi et
hommage. M. Grave dit que les Gombrics relèvent du don-
jon de Lévignen, et il appelle les Gombries tout le quar-
tier de friches compris entre Houville, Lévignen, Bouil-
lancy et Villers-Saint-Genesl.
L'histoire du Valois mentionne, en outre, comme rele-
vant du donjon, la partie d'Acy, dite le bas Acy.
Conformément à ces données, nous trouvons, dans les
actes de foi et hommage, les noms de Rouhault d'Acy,
de Grouches, de Bouillancy, des IJrsins, de Villers-Suint-
<]enest, tous propriétaires pur indivis des francs-fieb. Nous
y voyons aussi les l'Orfèvre- l'Huillier d'Ermenonville
alliés ù la famille des Ursins.
L'abbaye du Parc-aux-Dames , qui est de fondation
royale et dotée par les comtes de Valois , a sa place aussi
XU^" SESSION, A SENLIS. 467
<iang lu seigneurie des francs-nefs. Le dernier proprié-
idire des francs-fiefs est le comte Lalleinatit, qui ies avait
Ji^fuis, le il août 4713, de Catherine Brunet, marquise
•ie Viilaroeaux, veuve de Charles de Mornav.
(Juelie a pu être la destination primitive des francs-fiels
lu Valois? il n'y a pas de difficulté pour la partie des
fraocs-fiefs situés à Villers-Saint-Genest, ils ont été don-
nés comme alleu ou terre libre, par Gauthier, comte de
ijépy, à un de ses chevaliers, en 890, après avoir été
•x)Dcédés auparavant aux habitants de Villers, qui devaient
pour cela, au comte de Valois, une redevance qu'ils ont
ti.ujours continué à payer et qui consistait en 39 muids
«i*: blé et une mine d'avoine.
Pour œ qui est du reste des francs-fiefs , ils ont pu ser-
vir à anoblir leurs premiers possesseurs, car c'est l'origine
•{u on leurattribue communément, d'avoir servi à combler
'0:$ vides faits dans la noblesse française par les Croisades.
^ C'est ainsi que Pierre l'Orfèvre est anobli au xiii* siècle,
i ivec des biens situés aux environs de Crépy ( I).
I .Mais l'anoblissement par francs-fiefs a été abolie par
Heuri III en 1575.
.4 partir de cette é|K)que , les francs-tiefs du Valois ne
peuvent plus être considérés que comme des biens sur les-
quels ia couronne renonce c\ percevoir les fruits ou droits
utiles, qu'elle abandonne à ceux qu'elle veut favoriser, s'en
ivservant seulement le relief .'2).
I) Histoire jiu l'alois^ supplément.
t Cette défiaitioD est ronrurme à celle du traité des maisons
.-useraines et de leurs droiLs publiés en Hollande en 1532 ; la
\oici telle quVlte m*a été transmise par M. te dur de Bedl'urt,
ijf* la Société fraovaise de N'umismatique : • Les IraDcs-fiefs
MiDt des tiefs relevant dirortenient do la l'ourunui* di^ Kiaiirr,
46M CONGRÈS ARCHÉOL06IOUK DE FRANGE.
C'est ainsi que las francs-fiefs sont compris dans l'acte
par lequel Louis XIV confirme, en 4723, les habitanis de
Presles dans la jouissance de leurs exemptions et fram-
fiefs et autres droits^ et défend aux chambres du trésor
des domaines et des franes' fiefs de les troubler.
L'unique alleu, aujourd'hui debout, c'est celui qui a ét^
donné, en MO, par Othon I*' à Grimaldus, qui avait con-
quis Monaco sur les Sarrasins.
Un des derniers seigneurs de Lévignen obtint l'érection
de son domaine en comté en 1733 ; c'est à partir de cette
époque, dit Carlier, que Lévignen fut une des premières
terres du Valois.
J*ai dit ailleurs que les possessions de la famille Lalle-
mant s'étendaient dans les pays limitrophes de Lévignen,
Ormoy-le-Davien, Maquelence Betz, et qu'après la familli!
Lallemant, le comté de Lévignen a été possédé par
M** Legendre, veuve de M. Gaspard Legendre, premier
président de la chambre des comptes, et après celle-ci par
la princesse de Monaco, aïeule de Charles UI, prince sou-
verain de Monaco, actuellement régnant.
donnés en reconnaissance d'un service important, et exempts
de toute redevance aux seigneurs, ducs, comtes. Il est â croire,
ajoate l'auteur, que les titulaires des francs-liefs étaient astreints
de fournir un certain nombre d'hommes d'armes qui entraient
dans la formation des gens d'armes de la maison royale ; de plus,
ils devaient, chaque année, venir faire hommage d'obéissanr«»
pour le ûef qu'ils avaient reçu <1o la libéralité du roi. «
XLIV* bbSSlON, A SfiNLIS. 409
TABLEAU
l'Es ACTES DB FOI ST BOIIMAOB RENDUS AUX SEIGNEURS DU
D05J0N DE LEYIGNEN OU DE LA TOUR OCTOGONE, DITE
HANS LES TITRES LA GROSSE TOUR CARRÉE.
•
La Folie {Foleya), lieu ombragé (Tarireê,
Ce fief est situé à Lévignen, au lieu dit Hangards.
1379. Foi et hommage rendus au roi par Urbin de Saint-
bhise, pour ce fief.
I5i7. Jeau de Gorgias est seigneur de ce fief et veut y
construire un moulin à vent.
1761. Concession, par le duc d'Orléans à la famille Lai-
iemant, à titre d'inféodation, du fief de la Folie, annexe
du donjon et de plusieurs droits utiles et honorifiques.
G^Q^y* " Trumilly,
1791. Pierre de Grouches, seigneur des francs-fiefs,
reçoit horomage d'Edouard de Largny, pour ce fief.
IG03. L'abbesse du Parc-aux-Dames et Ignace Rouault,
>eigneur8 par indivis des frnncs-fiefs, reçoivent hommage
de Thibaud de Beaurain, pour Gigny, et en 1700, ils sai-
sissent ce fief pour cause de droits non payés.
170.%. L'abltesse du Parc, M"' de Médavv de Grancev et
tlliristine de lorraine, marquise d*Acy, reçoivent hom-
mage de M. d*Autant, pour Gigny.
I7âi. Louise de Clinchamp, femme de Jérôme Richer,
rond hommage pour le même fief.
470 CONGRÈS AHUUÉOLOGIOUE )»E VAANOfi.
1
Hé^ à Bouillancy.
1388. Hommage de Philippe de Néry à Guérin de b)^'
ris, aveu et dénombremeDt de ce fief.
1540. Saisie de ce fief par Valontine rHuillier,dan)^'
d'Ermenonville.
1548. M. rOrfévre reçoit hommage pour ce ficf.
Adon ou des Grandes- Dîmes, à Lévignen (1).
Ce fief doit vraisemblablement son nom au prieure
d'Adon, près Longpont, fondé par Alix de Nanleuil et
Pierre de Pacy, au xiii* siècle, et doté, vers la même
époque de 100 sols de rente, par Gautier de Nanteuil, dit
Gautier do Fresnoy et Lévignen.
1399. Legs de ce fief par Jehan Leflamment à la collé-
giale de Saint-Thomas de Crépy.
1447. Abandon de ce fief par les chanoines à Henri
l'Huillier et Isabelle , sa femme, à condition que les cha-
noines prendront annuellement, avant tous autres, trois
setiers de grain, dont deux tiers de blé, et un tiers d'avoine
sur les revenus dudit fief.
De 1455 à 1763. Baux de la ferme des Chanoines et du
droit de dîmes sur le fief d'Adon et de Fay.
1486. Dénombrement du fief d'Adon donné au seigneur
de Lévignen par le chapitre collégial de Crépy.
(1 j C'est par erreur (|iiti ce iicfest piacô dans la catégorie ties
fraiics-fiefs, je l'ai rangé ailleurs dans la seigneurie de Saint-
Biaise, ik laquelle il appartenait.
\UT SESSION, A SEiNLIS. 471
La Cour, située à Ifanteuii'leS'Meaux,
i3â3. Hommage de Pierre de Pacy, seigneur des francs-
Hefs, par Pierre de Chambly.
1536. Christophe des Ursins, seigneur de Villers-Saint-
l'ienest, saisit ce fief, pour cause de droits non payés et de
•ievoirs non rendus.
1607. Josias de Montmorency et sa femme, Marie de
(trouchcs, reçoivent hommage comme seigneur des francs-
fiers, pour le fief de la Cour, qui, bien qu'appartenant à
J«an de Maxancourt, seigneur de Péroy, est mouvant du
donjon.
1745. Hommage rendu à M. l'Allemant par Boula de
Dourlan.
Grimancourtf à MorienvaL
f.'Kill. Aveu et dénombrement de oi (iet donné par
<»eorge8 de Villers-Saint-Genest à Valentinc THuillier,
veuve de Bertrand TOrtévre, comme tutrice de leurs
enfants, seigneurs des francs-fiefs.
1548. Aveu et dénombrement pour le même fief par
Aimé de Villers, gentilhomme du roi.
46Î6. Robert de Grouches Potier, comte de Tresnies et
Pierre de Garges, seigneur d'Ormoy-Villers, propriétaires
pîir indivis des francs-fiefs, saisissent 3(> arpents de terre
a Grimancourt, faute d'hommage rendu.
1694. Assignati<m par labbesse du Parc à M. de
Laroche Lambert, pour la moitié de cette seigneurie, [H>ur
cause de droits non payés.
472 CONOIŒS ARGUÉOLOGIQUb DE FRANCK. .
4716. Oronce de Laroche-Lambert, maire de Grépy,
rend hommage pour le même fier.
Buy, ÉUncouri et auireê fiefêj à MùrientaL
•
1399. Guérin de Lorris, seigneur des francs-fiefs, reçoit
le cens d'un fief sis à Morienval , consistant en iO livres
tournois, 3 poules.
1399. Hommage au même par Léger Hubert, pour un
fief de Morienval.
4560. Christophe des Ursins, seigpeur des francs-fiefs,
reçoit hommage de Michel deLignières, pour Buy et Élin-
court.
4599. Marie de Grouches, François Paillard et Louise
de Mornay, seigneurs par indivis des francs-fiefs, reçoivent
hommage de François d'Aage, pour Élincourt.
4693. L'abbesse du Parc et Louis Rouault, abbé de
Fenestranges, propriétaires par indivis des francs-fiefs,
reçoivent aveu et dénombrement de Tabbesse de Morien-
val, pour Buy et Élincourt.
4747. Aveu et hommage à M. l'AIlemant, par Tabbessi
de Morienval, pour les fiefs de Buy et Élincourt. Cet honi
mage est signé par les sœurs de Serens, Angélique d(
TEscouet, d'Acy.
La Truie [Truilla^ lieu humide), à Lévignen,
\M\, Consentement donné aux chanoines de la collé
gialedcCrépy, par Bertrand l'Orfèvre et sa femme Valen
tine THuiliier, seigneur d'Ermenonville et des francs
fiei's, pour garder le tief la Truie, mouvant du donjon.
XtlV*" SESSION, A SENLIS. 473
44. Aveu et hommage par le chapitre collégial de
y pour ce tief.
32. Hommage des chanoines de Saint-Thomas à Ghar-
Trois- Dames pour le même fief.
Villers-Sûint'Genesi.
il. Jean dé Garges rend hommage à Ju vénal des
is pour sa seigneurie de Villers, qui relève du Châtel
êvignen ; Henri de Garges rend hommage pour le
e fief.
19. Le comte d*Estrées, seigneur de Villers, rend
nage à M. l'Allemant pour sa seigneurie.
VOIE ROMAINE DE SENUS A MEAM
Ou conçoit à première vue qu'il a dû exister à Tépoquc
de la conquête romaine une voie ayant pour objet de relier
le pays des Sylvanectes à celui des Meldiens. Cette voie,
d'ailleurs difficile à suivre à travers les grandes forêts qui
séparaient les deux tribus, avait été plutôt devinée par les
savants que connue, plutôt entrevue que suivie. £lleest
comprise dans la route de Senlis à Troyes, sur la carte de
Peutinger. Carlier rapporte que de son temps (1764) on
n'en connaissait plus les traces, mais qu'elle avait dû
côtoyer le Valois.
Je n'ose pas dire, Messieurs, que je vous apporte le tracé
do la voie de Senlis à Meaux; le temps et les hommes en
ont détruit une trop grande partie; mais je puis vous pro-
mettre, grâce aux magnifiques tronçons qui nous en res-
tent, de vous remettre sur sa direction perdue et de vous
conduire, sinon pus ù pas, au moins par enjambées dans
le pays des Meldiens.
« Nous n'avons pu rencontrer, dit M. Graves, jusqu'à ce
moment de témoignage matériel du tracé de cette route
entre Ermenonville et Senlis. b Cette partie du tracé est
en effet la plus difficile à explorer, à cause de la forêt, et
nous ne craignons pasd'atfirmer que les explorateurs de la
voie romaine n'ont rien trouvé, parce que, à partir des
environs de Senlis, ils ont pris une fausse direction. La
XUV*" SESSION, A SBNUS. 475
voie ne passait pas à Ermenonville. Mais n'anticipons
point. Voici le tracé tel qu'il nous est apparu après des
recherches très-laborieuses, longtemps poursuivies, quel-
quefois égarées, souvent reprises, et que nous ne donnons
pas encore, Messieurs, pour le dernier mot de la question. La
carte de Peutinger fixe à seize lieues la longueur du par-
cours de la voie entre Senlis et Meaux ; c'est à peu près la
mesure que donne le métré exact exécuté entre ces deux
stations, 36,600 mètres, avec un faible excédant de
300 mètres.
La voie sortait de Senlis par la porte Saint-Vincent
uu de l'ancien faubourg Vitel ; elle traversait successive-
ment la Nonnette et son affluent, probablement la pre-
mière sur un pont et le second à gué, puis formait sur le
marais la grande jetée qui existe encore et qui nous con-
duit jusqu'à la hauteur du terrain ferme qui domine tout
ce côté de la ville. Arrivée à ce point, au-dessus de la
Bîgûe , en face de la porte de Meaux , la voie s'élevait en
droite ligne dans la direction deVi]lemétrie,oii il est facile
encore de la suivre. Elle formait , il n'y a que quelques
années encore, un très-beau chemin vert; ce chemin,
depuis quelque temps, a été changé jusqu'en face de Vil-
lemétrie en un cailloutis moHerne.
A l'endroit dit les Quatre-Chemins, on pourrait facile-
ment prendre une fausse direction et s'égarer dans la
forêt à de vaincs recherches.
C'est le côté gauche de la bifurcation qu'il faut suivre ,
celui qui conduit derrière le parc de la Victoire. I^ voie
est ici représentée par un large chemin un peu défoncé,
mais encore assez sec : en sondant à quelques centimètres,
on sent partout la présence de la pierre qui en fait le fond.
Au bout du mur du parc de la Victoire , au carrefour des
Tilleuls, au lieu de suivre tout droit, on incline à gauche
47ë CONGRÈS AHUUËOLOGIOUK DE FRANCE.
et on prend , presque à travers bois , un sentier peu îré^
quenté maintenant et embarrassé de fourrés, qui conduit
au chemin des Sergents; ce sentier est la voie romaine;
c'est même en le parcourant qu'on rencontre sur le côté
gauche les dernières assises d'un petit mur romain qui a
dû appartenir à une construction du temps. Ce point delà
voie est celui qui présente le plus de difficultés, et c*est
probablement là que les recherches se sont égarées.
Aux diflérents points où les nouvelles routes forestières
ont été tracées, la voie se trouve entamée, et il est facile
d'en constater l'empierrement puissant et solide. C'est à
l'aide de ces tranchées, plusieurs lois reproduites, que nous
avons pu sûrement suivre le tracé do la voie que nous
aurions certainement perdu dans l'épaisseur de la forêt et
surtout à travers les accidents de terrain qu'elle présente
sur ce point. I^ voie présente ici une largeur de 40 mètres,
avec un renflement de I mètre environ vers le milieu ; ce
renilement mesure généralement la profondeur de l'em-
pierrement dans les endroits où nous avons pu le con-
stater. Il est formé de ces pierres calcaires qui font le fond
de toutes les voies que nous avons examinées. Le grès
cependant domine dans cette partie de la forêt. On y trouve
en effet fréquemment des «iépressions profondes de terrain
causées par Textraction qu'on en a faite. Il est remarquable
(luon n'en trouve pas, ou presque pas, dans la construc-
tion des routes romaines. Le grès étant facilement friable,
no présentait sans doute pas assez de consistance, et aurait
pu, à un moment, compromettre la solidité du fond. Les
Homains, en tout, visaient au solide; ils semblaient, dans
leurs constructions, défier le tempsetseséléments, et, dans
la conquête des choses comme dans celle des hommes, rien
ne leur coûtait pour asseoir et assurer^ leur domination.
La voie s'avance en ligne droile, coupée successive-
XLlV SESSION, A SENLIS. 477
uieot par la longue route et la route de la plaine, pour
atteindre le chemin des Bruyères avec lequel elle se con-
food sur un parcours de â à 3 kilomètres environ. Cette
partie est facile à reconnaître par sa solidité et Taspect
général qu'elle présente à l'œil.
Après avoir traversé la route de Senlis à Meaux, le che-
min d^ Bruyères nous porte derrière Borest. A 300 mètres
à peu près de la maison du garde, nous nous trouvons en
présence d'une tranchée qui n*est autre que le chemin
romain. Franchisses-en les débris et vous le retrouverez
au-dessus, magniûque, bien établi, couvrant 14 mètres
d'étendue en largeur, mais malheureusement bien court,
puisque son parcours n'a pas plus de 400 mètres. Tel
qu'il est, il présente un grand intérêt, puisque, sans ce
témoin, nous siurions perdu complètement le tracé et nous
serions tombé dans l'erreur jusque-là accréditée qui le
conduisait par Ermenonville. Disons, en passant, qu'un
chemin de Meaux se dirigeait en effet de Senlis à Erme-
nonville, par la forêt, et se confondait avec la voie romaine
au sortir de Senlis , jusque derrière la Victoire; mais ce
chemin est relativement moderne, et remonterait tout au
plus au x¥* siècle. Notre voie passait donc derrière Borest,
à i kilomètre à peu près de la rive gauche de la Nonettc,
dans la forêt.
C'est un peu avant d'arriver à la sablière, qui Ta
détruite, qu'elle reçoit un vieux chemin venant de Borest
qui se confond avec elle. Ce chemin, d'un aspect encore
vénérable et solide, malgré l'action du temps, venait de
Montépilloy, traversait le viens de Borestum et faisait ainsi
la jonction, avec la voie de Meaux, des routes qui abou-
tissaient du pays Pontois à Montépilloy, soit par Barliery
ou par Raray, etc., ou peut-être servait-il tout simple-
ment à établir une communication de ce côté entre la
478 CONGRÈS AROUKOLOOIOUIS bK VEANCE.
voie romaine de Meaux et le camp fortifié de Moatépillov,
poste d'observation élevé sur toute la contrée environnante
par la vigilance du vainqueur.
Ceci dit en passant, revenons à notre tracé. Nous sommes
toujours, selon les cartes modernes, sur le chemin des
Bruyères, mais nous devons le quitter pour incliner un
peu à droite et nous diriger sur la Ghapelle-Chaalis. Le
chemin de la Besace représenterait-il l'ancien tracé? c'est
ce qu'il est bien difficile de constater; la voie eet tellement
bouleversée dans cette région qu'il est impossible d'en
retrouver la trace : il nous faut aller dans celte incerti-
tude jusqu'au lieu dit la Ghapelle-Cbaalis. Là, tous les
iloutes sont levés, nous sommes bien certainement sur
une terre romaine, puisque nos pieds eu foulent de toutes
parts les nombreux débris. En effet, avant de vous engager
dans la route droite et élevée qui conduit à Chaaiis, entrai
dans l'enclos d'où elle semble sortir, vous y trouverei une
véritable jonchée de tuiles romaines, de briques, de frag-
ments de poterie de toute nature et de toutes couleurs, se
détachant au moment dos pluies, sur le fond noir du sol.
Ici, qu'on nous (fermette encore une observation. La carte
de M. Hi^thoré en main« la route des Bruyères nous con-
duit |mr la n>uto do Fontaine à Tabbaye de Chaaiis, vers
laquolle ollo lucliuo \^aT uno courbe douce, mais un
|)ou allongiV, il faut lavouer. hans un premier travail
où nous chorchions avoi' grande |>eiue à déterminer le
tr<uv «W la voie romaine, nous avons indiqué ce tracé.
IVuUUnc otions-nous dans le vrai, il ne diffère du trncê
vors la C«ha|H>llo que |Kir la loutnieur de la courbe, et
uVt.iiont l«^ intén's^nts débris dont nous venons de parler
o( qui nous ont $0\luit« nous u*hô5itonon$ pas à le main-
toiiir ivnuno lo plus naturt'lloniont indiqué.
i> \iou\ chômai do Kontaiiio .1 Clualis, rt^faît à la foomi
XLIV" SESSION, A SENLIS. 470
moderne, est un chemin plein d'intérêt, il n'est autre que
la dernière partie du beau Chemin-Vert, à l'aspect si gran-
diose et on peut dire si royal, qui, de Senlis par Montlé-
véque, conduisait les rois de France à l'abbaye de Chaaiis ;
il est connu dans tout le pays sous le nom de Chemin-du-
Roi. Vous l'apercevrez à gauche, en quittant Moutlévèjue,
par la route d'Ermenonville, à deux kilomètres à peu près
du village. Dans deux endroits de son parcours il présente
des restes de constructions romaines ; notamment à
•'lOO mètres environ de la route d'Ermenonville, où les
débris sont nombreux, mais grossiers.
A quelque tracé qu*on s'attache, en quittant le chemin
des Bruyères, nous arrivons devant la grille de l'abbaye
de Chaaiis. Nous contournons les étangs et nous entrons
dans le bois de Perthe, pour passer au poteau de Perthe
vl courir vers Montagny-Sainte-Félicité, dont, au sortir
de la Torét, nous apercevons le magnifique clocher
so profilant majestueusement sur le fond du ciel et
ambiant nous indiquer la route que nous devons
suivre pour arriver sans difficulté désormais à la capi-
tale des Meldiens. La voie romaine passe en effet
d .Montagny, où elle arrive sous le nom de Chemin-de-
l'Entrée (probablement l'Estrées]. C'est aux abords du vil-
lage, ou elle ne pénètre pas, qu'elle reçoit le chemin de
Font à Meaux par Baron ; vieux chemin aussi, d'un inté-
rêt secondaire, si un le compare à celui qui nous occupe,
mais bien digne d'occuper l'attention de l'archéoloirue. II
tîst gallo-romain dans presque toute retendue île son par-
<*our8. Il se détachait de la grande chaussée du nord, dite
chaussée de Pontpoint, au carrefour du (irand-Maitre, et
venait par Villers-Saint-Frambourg, où il est très-bien
connu. Ognon, Harbery, Montépilloy, Baron et Monta-
gny, se rattacher à la voie de Senlis à Meaux. Mais j'aurai
iKO «:oNr;RKs AiiciiKoi.or.ioiJE de prancr.
occaBion, MesBieurs, «le vous ruraener sur ce fragment inté*
resnaiit de nos cliemins de Test dans un travail qui , en dehors
des grandes lignes, les enveloppera toutes dans un coinroim
intérêt. Notre route laisse donc à sa gauche le village de
Montagny-Sainte-Félicité, et se dirige vers le Plessis-Bel-
levillo, ou formant la route actuelle; elle ne présente, au
point do vue archéologique, d'autre intérêt entre les deux
villages, que son tracé qui n'a pas été changé. Elle laisse
à droite le village du IMessis en passant devant le Jeu-
d'Arc actuel. Elle va droit vers Saint-Patbus, dont elle
forme la grande rue. Nous avions avancé d'abord qu'elle
passait h Saint-Soupplets, c'e«t une erreur: de récentes
investigations, faites à pied et sur les lieux, nous ont donné
le tracé vrai et incontestable de la voie jusqu'à Meaux. La
voie, en quittant Saint-Pathus, laibseà gauche les villages
d'Oiftsery, do Porfry ot vient paîiser entre les villages de
Saint-Soupplets et do Gesvres-le-Chapitre, à une distance
.de deux kilomètres du premier et d'un kilomètre du
8e<u>nd. 1)0 là nous arrivons au-dessus de Barey, ou nous
retombons sur la nouvelle route ferrée que nous sui-
vons sur un parrours de r>00 mMres et que nous laissons
courir h droite vers Meaux, pour suivre vers Chambry
notre voio, (|ui présente au-dessus de ce village, sous le
rapport do la viabilité antique, le plus sérieux intérêt.
Mais vous vous aiH'nuîvex, Miniisiours, que nous sommes,
passés sur Seiuo-et-Marne, et que cet intérêt nous devient
étranger. J'ai voulu, malgn^ tout, vous conduire jusqu'à
laoapitalo dosMoldienssur cette MW voie qui nous appar-
tient en grande partie.
he (Uiambry nous arrivons à Urégy que nous laissons à
drtùte, et des<xMidant les hauteurs qui dominent la valbV
lie la Marne, nous arrivons sur le lH>rd du canal de POurcq.
Nous avons la ville sous uits piinls et en face de nous; mais
XLIY* SESSION, A SENUS. «481
poor l'atteindre il faudra remonter et venir retrouver la
gnode route moderne. La Marne, du temps des Romains,
passait au pied de ces hauteurs; elle a été détournée depuis;
maintenant le canal la remplace. Les Romains franchis-
siient-ils la rivière sur un pont ou à guet C'est ce qu'il
est bien difficile d'affirmer aujourd'hui. Entre le canal et
bâbords de la ville, il ne reste plus trace de voie romaine ;
elle nous conduirait au pied du mur de la cité romaine
qui existe encore au-dessous de l'oratoire de Bossuet,
édifié sur le mur romain. Singulier contraste des choses
humaines ! Cette g^ndeur sacrée , chrétienne et moderne
dressée sur cette ruine, grande aussi, mais qu'on ne salue
plus, tandis qu'on ne passe pas sans émotion sous les ifs
séculaires où le grand évéque méditait ses immortelles
oraisons.
L. Caudel.
XUV* SESSION. 3t
mm *
5-17 AOUT 1877.
EXCURSION ARCHÉOLOGIQUE
DANS LE DÉPARTEMENT DU LOT
COMPTE RENDU GÉNÉRAL.
Précédés par l'Angleterre dans le mouvement de trop
juste retour qui nous ramena, il y a un demi-siècle, vers
DOS antiquités nationales, nous nous étions laissés devan-
cer aussi par cette active voisine sur le terrain des ezcur-
slooe. C'était un tort que nous nous étions donné. Si le
congrès a ses avantages, la course offre aussi les siens.
Pendant quinze ou vingt jours, quinze, vingt ou trente
personnes fouillent tous les recoins d'une région de cette
belle France, si splendide de nature, si riche d'histoire,
d'irt et de curiosités. Le pays debout les regarde; il s'ad-
joint à leurs pas, il apprend d'eux le respect de ses vieilles
églises, de ses vieux châteaux, de ses vieux trésors, de tous
ses vieux débris. Mille observations jaillissent sur les formes
d'art particulières à la contrée, sur la parenté ou la diffé-
rence de ces formes en regard de celles qu'ont adoptées
d'autres régions, sur les trop nombreuses inexactitudes de
la plume ou du crayon dans leurs divers travaux sur nos
chers moaumeots. Puis on recrute des adeptes, on imprime
une impulsion, on donne des conseils; bref, on se retire
avec la conscience d'avoir servi la cause pour laquelle
notre Société reçut le jour.
L'excursion archéologique du Lot avait été laborieuse-
484 CONGRÈS ARGHÉOLOGIOUE PE FRAIUGE.
ment préparée, soit par le jeune inspecteur de ce départe-
ment, M. de Fontenilles, soit par son vaillant confrère,
M. E. Castagne. Le nombre des excursionnistes n'a pas été
des plu$ considérables; mais du moins Texcursiop a'est-elle
faite dans les [meilleures conditions de temps et d'intérêt.
Le rendez-vous en était fixé à Figeac.
Cette curieuse ville, bâtie dans un Talion fertile, sur la
rive droite du Celé, possède une église monumentale,
Saint-Sauveur, qui, avec une salle capitulaire transfor-
mée en chapelle, constitue le seul reste debout d'une
ancienne abbaye de Bénédictins. Plusieurs époques ont là,
comme presque partout, travaillé à l'édifice. Les parties
basses sont du xii* siècle; le triforium qui règne au-dessus
du bas-côté méridional appartient au xiii*; le xrv^, le xv*,
par endroits, revendiquent le clerestory du sud et les cha-
pelles de la nef; le xvn* enfin a refait les grandes voûtes,
le dôme ou lanterne, une partie des fenêtres supérieures
et le grand hémicycle absidal, qui n'a pas précisémenJ
gagné à cette réfection. On admirait autrefois sur la façade
d'ouest un magnifique portail roman malheureusement
disparu. Disparu est aussi le baptistère qui s'élevait ù
médiocre distance, et dont les énormes chapiteaux latins
parsèment çà et là le pavé de l'église. Heureusement, h
cuve baptismale, du xiir siècle, nous est conservée; etnou
loin de la chapelle qui l'abrite, nous avons pu déchiffre!
en son entier une inscription romane, jusqu'ici, parait-il
imparfaitement reproduite par tous les historiens :
V IM lOVS. AP : HOC ALTARE CORSECRAT l E i • A OROi (CRALOO UTVR
CERSE EPO : IR MORORE SCE : lARIE T (et} SCI : «CMAa T S I ■ : EeTTAC
T tlLASIl (I)
(111-^4 des ides rf'arri/, cet autel a été consacré par l
seif^neur Gérald. éréque de Cahors, en f /tanneur de saint
.xijV session, a senms. i8.S
fie omis est un devoir bien doux, en parlant de l'église
'ieFigeac, de proclamer le nom du prêtre qui l'a remplie
de ses œuvres, M. l'abbé Massabie. A force de zèle et de
''ODstanoe, cet intrépide pasteur a restauré de pied en cap
limagniâque construction. Heureuse de l'en féliciter sur
place, la Société ne l'est pas moins de livrer aujourd'hui
mn nom et son exemple à tous les hommes de bonne
vt)lonté.
Notre-Dame du Puy oifrc une large nef, contournée de
toas côtés par un collatéral et terminée par des absidiolcs
qui servent de chapelles. On y voit un beau retable de la
fin du XTii* siècle. Le collège, qui est voisin, présente une
nlk peinte dont les tableaux variés mériteraient des visi-
teurs : elle est restée jusqu'à présent à peu près inconnue.
Il n*en est pas de même du palais de justice, beau monu-
ment du XIY* siècle, qui, avec plusieurs autres construc-
tions civiles datant de cet âge ou du siècle précédent, a
vivement frappé notre attention. La vieille maison de la
Marie, ei de saint Michel^ et de sainte Marie Égyptienne^
et de saint Biaise.
Aa lieu de rette ioterprétation si simple et qu'autorise seule
b lecture de l'inscription, voici celle de Champollion, nalurelle-
ii»eot suivie par tous ceux qui , après lui , se sont occupés de
l'bistoire de Figeac :
1 1 1 1 lOVS FC : HOC ALTIRC CON-
SlCRATm FVIT AONO GERALDO
CATVRCCIICE m : IN HONOflE
STI lAMI ET ST1 ■ICHACUS
■ .E:e:P:T:A:e:C:7:M: tlASN.
//// idus februarii (au lieu iVapritis) hoc attare consecra-
lum fuit n domino Ceratdo caturcence episcopo in honore
fOHctK Mari» et :iancti MichaetLs. Missa ejus celehretur per
tntnm anni circuium exceptd 7 (ferid) beati BlasiiH!
486 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
rue Hort-Abbadial (Horti abbatialiê) est en particulier l'un
des beaux spécimens de l'art de bâtir qu'on puisse présen'
ter sous le règne de Philippe-Auguste.
Nous pouvons nous dispenser de mentionner les ponts,
anciens pourtant, et la halle, d'un aspect éminemment
pittoresque, mais les aiguilles réclament un nouvenir.
M. Palustre a déterminé la destination probable de ces
curieux édifices, dont deux seulement sur quatre sont
encore debout. Placés aux quatre points cardinaux de la
vallée de Figeac, ils indiquaient sans doute, comme des
bras levés, les limites de « la sauvetat accordée à l'antique
abbaye par un puissant bienfaiteur à nous inconnu, m
Ceint de trois côtés par le Lot, et dominant une riche
vallée, où le pays des Ruthènes vient, à deux pas de l'Au-
vergne, s'enlacer au Quercy, le plateau de Capdenac ne
serait pas sans convoiter le titre glorieux d'Uxellodunum.
La convoitise est ancienne, et 'ChampoUion, l'illustre
Figeaçois, a beaucoup fait pour la servir. Nous éprouvons
le regret de ne pouvoir lui donner même satisfaction; mais
nul du moins parmi nous ne se fait faute d'admirer ce
site merveilleux, que couronnent si bien sa ligne de vieux
murs et son donjon relié au château de Suliy,
Assier, visité le lendemain, avait donné à Capdenac un
gouverneur dont on y voit les armes. C'est le seul lien qui
relie cette ville gothique à la bourgade pierreuse où la
Renaissance a laissé deux œuvres si intéressantes, l'église
et le château. Nous les visitons en la compagnie et avec la
brochure de M. le baron de Rivières (1).
Dans l'église, élégante, élancée, dominée au nord par
une haute tour, on rencontre d'abord le tombeau du fon-
dateur :
(I) L'église et le château d'Assier, souvenirsde voyage, 1869.
XLIY* SESSION, A SENLIS. 487
CY.DORT.C
ELVI.QVI.NE
VT.IAMAIS.P
ROPOS.DE.REPO
SER.EN.LA.VIE
MORTELLE.LES
LONGS.TRAVAV
LX.LVY.ONT.DONN
E.REPOS.CAR.PAR.
SES.FAICTZ.SA.VIE.EST.
IMMORTELE.
Il est là, couché dans Tattitude du sommeil, vêtu d'une
riche robe fourrée, la tète coiffée d'uue toque, la poitrine
décorée du collier de Saint-Michel. Il s'appelait Galiot de
ijeoouillac; François I*', son roi, l'avait pour grand-
mtllre de son artillerie. Vous voyez au dehors, sur une
longue firise qui enlace l'église presque sur tous les piints,
fei bits et gestes racontés par le ciseau. On assiste aux
batailles et aux prises de ville; on compte à satiété les
épées, les cuirasses, les casques, les couleuvrines, les bou-
lets, tout l'attirail enfin des guerres de son temps. On
Mirpreod ses amours dans cette mystérieuse devise : ikme
FOETVNE (i), qui se retrouve partout, surtout dans son
château; on constate la date où, retiré dans cette somp-
tueuse résidence, il mit la main à la maison de Dieu (L'an
mil cinq eeni et quarantième y le xxi^ d'avril)\ puis, ren-
trant au dedans, on aperçoit la date de sa tin, 4549, et
l'aTis moral qui complète si bien la prédication muette
du tombeau :
MEMENTO.MORI.RESPICE.FINEM
Je ne veux pas m'attarder au château, construi t vers 1 53î>,
(I) J'aime fort une.
488 CONGKÈS A.HCHÉ0L06IQUE DE FRANCE.
sur un plan carré, autour d'une cour intérieure, cantonu^
de grosses tours, orné avec tout le luxe de la Renaiseano^*
Il n'offre pas en général la finesse de sculpture que nous
aurons à louer bientôt au château de Montai. C*est, du
reste, une malheureuse ruine, ouverte à tous les vent»,
et dont la partie occidentale est à peu près la seule qui
soit restée debout.
Roc-Amadour nous attend là-bas^ avec son site unique,
ses splendeurs religieuses et sa couronne monumentale,
tout imprégnée du parfum de sept siècles. L'ancienne
collégiale de Saint-Sauveur, si intéressante par set deux
hauts piliers, ses absidioles, («on plan original ; la dupdla
refaite de la très-sainte Vierge; le plateau Saint-Midiel,
devant le tombeau de saint Amadour et sous la flreaqm
romane si bien conservée de T Annonciation; TantigiM
petite chapelle des archives; l'église-crypte de Sâiol*
Amadour; les oratoires de l'est; le palais inachevé dii
évèques de Tulle; les inscriptions semées sur dÎTemi
façades; enfin le vieux trésor, captivent tour à toor «C
longuement les excursionnistes du Lot. Naturellemenl, le
Bulletin monumeniat reviendra sur plusieurs de ces
richesses : nous nous bornons à les saluer aujourd'hui
|>our continuer notre parcours.
Le touriste qui, de Hoc- Amadour s'est rendu comme
nous à Saiut-Céré par la route de Gramat, a dû se sentir
vivement frappé, en abordant cette petite ville, par la
majestueuse physionomie des tours de Saint-Laurent. Elles
couronnent, comme deux obélisques de granit sur xiua
pyramide de verdure, le sommet d'un cône entièrement
rev<^tu de vignobles. La plus grosse est du \iy siècle;
lautre, bardée de contre-forts, de la fin du xiii*. La ter-
rasse elliptique qui les sup|X)rtc présente des traces d'une
ôpoijuc plus reculée.
Bgieiweirijuvee au Puy d Isj
I
I
f
i
«
«
I
XUY* SESSION, A SEMLIS. iS\)
Abrité, lui, au contraire, dans la vallée de la Dave, le
chAteau de Montai semble jaloux de cacher ses richesses.
Il n'a pour le côté de la route que des tours assez com-
munes, et c'est sur la face opposée, au midi, que s'épa-
nouit sa délicieuse façade de la Renaissance. 11 fut construit
vers 1î>3i par une noble veuve, Jeanne de Balzac, aussi
dévouée à la mémoire de Robert, sou père, qu'à celle
•l'Amalric de Montai, son mari. Malheureusement, elle ne
put finir son œuvre; mais, eu dépit des ravages du temps,
le manoir inachevé demeura une merN'cille. Quelle vie
dans ces portraits -médaillons qui se détachent de la
Kxiaraille! quelle grâce dans ces arabesques! quel fini de
détails dans ces escaliers! On y oublie les fatigues d'une
longue pérégrination à travers l'immense plateau des
tsarines, visité le matin, et vraiment curieux, du reste,
l^ les débris d'oppidum, découverts, analysés et offerts à
nos yeux par M. Castagne.
(Ustelnau domine de sa masse imposante une vallée
défiant la description. Cultivée comme un jardin, baignée
<le trois rivières qui se réunissent sous les tours du chA-
teau, jalonnée de clochers, cernée de pentes quelquefois
abruptes, plus souvent débordées de vignobles, elle attache
sur elle des regards qui, dans cette résidence féodale, lui
sacrifieraient tout. Il ne faut rien moins qu'une petite
ondée pour nous obliger à pénétrer de la première enceinte
dans la seconde, et à visiter successivement le vieux bâti-
ment du XII* siècle, la chapelle du xiv', les restes de la galerie
du XYii*« les quelques appartements conservés, et enfin le
donjon. Puis vient la remarquable église collégiale, bâtie
dius le XV' siècle par Jean de Caylus-Castelnau, évèque
et comte de Cahors. Nous saluons, en redescendant, Notre-
Dame de Félines et sa pierre tumulaire: puis la petite ville
de breteuoux, liastide de la fin du xiii* siècle, et, enfin par
490 C0M6HÈÔ AAGHKOLOGIQUB DK FRANCE.
une routo plantée d'arbres, déroulée comme dans un par-
terre, nous courons vers un autre département, celui de
la Corrèze, qui nous réserve sa belle église de Saint-Pierre
de Beaulieu.
Vraiment oui, belle église, et beau portail, et beau tré-
sor ! Un édifice de deux cent vingt-cinq pieds de long, en
croix latine, porté sur douze piliers, divisé en trois nefs,
avec un déambulatoire, une couronne absidale, des cha-
pelles de transsept, des galeries, deux clochers, deux tou-
relles d'angle : voilà pour l'ensemble. Le portail , peroé
dans le flanc méridional de la nef, et datant, comme
l'église, de l'époque de transition, est un drame où riea
ne manque, ni l'intérêt historique, ni la partie morale, ni
le sceau rare et précieux de l'unité. Les bas-reliefs infé-
rieurs retracent les luttes de la Xevvà; la grande page du
tympan représente le Jugement dernier. Des monstres
déroulés au linteau et d*une physionomie absolument
particulière, complètent, avec un groupe symbolique jeté
dans un angle extérieur, l'intérêt puissant de ce porche
trop peu connu, plus ancien que celui dcMoissac, qui s'en
est inspiré, et dont il faut regretter que la voûte ait été
déinolic. Quant au trésor, je n'en rap|>ellerdi que Tobjet
principal : cette Vierge en lames d'argent, du xii* siècle,
rehaussée de filigranes, d'intailles, d'un camée antique,
qui constitue Tuu des plus rares produits de l'orfèvrerie
française au moyen âge (I j.
(4) Je me permets de signaler, pour plus amples détails, la
Notice historique et archéologique sur Casteinau de Rrete-
noux et V église de Saint-Pierre de Beaulieu et son portail
sculpté, du signataire de ces lignes. Les deux brochures sont
en vente, au prix d'un franc rliacuue, chez Taoteur, au petit
séminaire de Servières \Corrè7.cj.
XLIV SESSION, A SENLiS. 491
Visite faite, en face de l'église, d'une maison décorée de
sculptures et d'une admirable cheminée du commence-
ment du XYi* siècle, les excursionnistes du Lot ne se dou-
taient guère, en quittant Beaulieu, que le même jour les
venrait encore devant un autre moustier, un autre portail,
Qoe autre splendide cheminée. C'est ce qui arriva pour-
taot. Le petit bourg de Carennac , si gentiment assis au
bord de la Dordogne, en face d'Ilots verdoyants qui
eotr'ouvrent leur rideau pour nous laisser voir le plus
M horixon, nous offrait toutes ces richesses et bien
d'autres encore.
C'était un prieuré clunisien dont Fénelon a possédé le
titre. Son église de l'éjioque romane, si j'en excepte le
anctuaire vo&té en ogives, le saint sépulcre, les quatre
diapelles latérales, la fresque de l'une d'elles, le haut du
clocher, qui accusent sufGsamment la période flamboyante,
eit précédée d'un narthex, ouvert à l'ouest par le grand
portail. Ce portail n'offre guère qu'un sujet d'étude, le
tympan; et ce tympan est d'une donnée assez commune :
Jésus-Christ dans sa gloire, au milieu du tétramorphc, de
âes douze apôtres et d'auges adorateurs. Mais la sculpture
est très-fine, et l'ajourement délicat, soit de l'auréole, soit
des treize trônes, a quelque chose qui rappelle la ciselure
des châsses de ce temps.
Dans le bâtiment claustral, encore conservé, nous avons
vu un cloître daté de m ttti(c| iiii s tlii (tiH4), et d'une archi-
tecture très-soignée, malheureusement dévasté par la
Révolution. La cheminée, du même temps, est restée dans
un état de conservation irréprochable; et quelle perle ico-
nographique que cette représentation si pittoresque du
pauvre Lazare, demandant l'aumône au riche attablé, et
mourant ensuite entre les mains des anges, qui emportent
«in âme dans la gloire céleste, tandis qu'un |)eu plus loin
493 CONGRES ARGBÉOLOGIQCTE DE PRANCE.
le mauvais riche expire sous la griffe des diables, acharnés
à torturer son âme qu'ils plongent dans l'enfer!
.le ne rappelle que pour mémoire le château de l'Abbé,
construit au commencement du xvi* siècle et embelli par
l'oncle du grand Fénelon, évéque de Sarlat, dont on y
voit encore le portrait. Il faut se hâter vers le Puy-d'Isso-
lud, où nous attend M. Castagne.
Prononcer ces deux noms, c'est rappeler le savant
mémoire lu au congrès de Toulouse en 1875, et que con-
naissent tous les membres de la Société française d'Arcbéo-
logie. L'auteur a vu dans le Puy-d'Issolud <c cette grande
place forte d'Uxellodunum, si connue par la résistance
héroïque, mais malheureusement vaine, qu'offrit à Tancée
romaine, commandée en personne par César, un très-petit
nombre de combattants retranchés derrière ses remparts. ■
A l'opinion de M. Castagne se range, avec Napoléon III,
presque toute l'école archéologique de ce temps. Dire que
toutes les difficultés sont par lui résolues, ce serait aller
un peu trop loin; mais lorsque, à sa suite, on a, comme
nous l'avons fait, sillonné pendant plusieurs heures con-
sécutives ce plateau, dont la vue s'égare dans un des pays
les plus beaux de la France; lorsqu'on a reconnu toutes
ces traces de fortification, constaté l'intégral escarpement
(lu site, visité surtout la galerie souterraine qui courut
chercher les veines de la source et la détourna subitement,
on descend de la montagne avec cette impression que dif-
ficilement un oppidum quelconque du Quercy offrirait
tant d'indices concluants, et par le fait nous n'avons pu
ou trouver de (mreils ailleurs (i).
1^ \ote de M. C VaUier sur un tiers de soi mérovingien
Mmrf d ( jrtlodunHw. Pendant que nos confrères, sous la
itinduito de M i.;istagoe. prcoiiraient remplacement d'Uxellodn-
XUT*" SESSlOiN, A SENLIS. \9[\
A Martel, grande église, d'un jet hardi, conservant peu
(le son architecture primitive (la romane ;, et devanl
presque toutes ses lignes, comme ses vitraux, à la seconde
moitié de l'époque ogivale. L'hôtel de ville est fort inté-
ressant, et la maison dite de Henri Court-Mantei conserve
à uotre histoire un important souvenir.
Si, de la voie ferrée au Puy-d'[ss4>lud, vous gagnez
jamais Martel, en toute liberté d'équipage, suivez, je vous
le conseille, la délicieuse route des rochers de Mirandoi;
puis, en vous transportant à Souillac, n'oubliez pas, au
lom, j'allai dans une chaumière eximiner une pièce d'or (voir le
ileisio) que le propriétaire avait ramassée dans son champ. Il se
trouva que c'était un tiers de sol mérovingien. Je m'empressai
(l*en prendre une bonne empreinte, et je vous en adresse un
dessin fort exact. D'après les recherches que j'ai faites dans la
Kerue numismatique, j'ai tout lieu de penser et de croire que
tttte pièce est complètement inédite, car dans les tables qui ont
été publiées des noms de localités ou de monétaires, je n*ai pu
trouver ceux indiqués par notre petite monnaie, dont voici la
description :
B AMHOI^AITSO.
Tète diadêmée à droite.
HwerS VIVBDOMAHIVL FI.
Croix pattée sur un globe.
Deux noms nouveaux : celui du monétaire Barrocaitto et
relui do firedùmariul , localité dont il est bon de soumettre
le nom à l'examen de ceux qui s'occupent do la numismatique
oiérovingienne à un point de vue général, et en particulier k la
science de M. de Ponton d'Amécourt, président de la Société
française de Numismatique. i^sTi^inii d'une lettre de M. (l. Val-
lier.i
494 CONGRÈS ARGHÉOL0610UB DE FEANCC.
village du Pigeon, une motte féodale (d'antres disent u^
tumulus gaulois, parfaitement conservée.
Ensevelie dans une vallée profonde, sur les bords d'un^
rivière qui ne se fait ici sa place qu'en déchirant le plateau,
l'ancienne ablntiale de Souillac est la première des deux
églises du Lot où nous saisissons l'influence de Saint-
Front de Périgueux. Sa large nef à coupoles ne laisse pas
d'être suivie d'un transsept où brille, comme dans l'ab-
side, le pur style roman. Fort curieux est un pilier du
grand portail, qu'a dessioé M. VioUet-le-Dnc; mais plut
intéressant encore est le tympan, où l'artiste, sortant des
données ordinaires, a figuré une légende dont il sera parié
plus tard.
Nous gravissons la côte ardue qui nous met, à son terme,
devant les horizons lointains et toujours fuyants de Gour-
don. Avant d'arriver dans celte ville, qui se distinguée
dix lieues de distance par sa terrasse et ses clochers , nous
rencontrons dans un pli de vallée la remarquable église
du Vigan. Encore une merveille monastique! Grande
façade, plan unique, ogives élancées. Le xiv* siècle, à son
aurore, a fait cette remarquable construction, comme il a
fait, vers son milieu, la belle église de Saint-Pierre de
Gourdon. Avait-il aussi construit le château fort qui
Tavoisinait autrefois et dont il n'est resté que l'imposante
assiette? Nous n'avons pu le savoir; mais on lui doit ce
qui reste encore de la maison dite des Templiers, et peut-
être cette cuve baptismale de l'église des Capucins, qui
me fait songer à un oubli : je n'ai pas mentionné les
fonds, eu marbre, d'Altillac, près Heaulieu, dont les lions
de support trahissent une époque fort ancienne et qui
pourrait bien remonter jusqu'au x*" siècle.
Ne parlons, à propos de Salviac, ni de certain restau-
rant, ni de certaine restauration; mais louons l'église et
XUV SESSION, A SENLIS. 495
ngrettons que les vitraux ne nous offrent partout, si je
ne souviens bien, que des amalgames de fragments, des
.^eènes incomplètes. A cette bourgade se rattache le souve-
nir de Jean XXII.
Nous voici enfin dans la vallée du Lot, sous ce gaillard
château de Mercués, que nous visiterons, dans cette ville
même de Cahors, qui doit être le dernier centre de nos
courses. Nous en sortons, à peine arrivés, pour aller étu-
dier le plateau de Murcens, vieil oppidum gaulois, qui
domina jadis le point de départ d'un immense aqueduc,
destiné à porter à Cahors les fraîches eaux de la fontaine
Polémie et du ruisseau voisin. Nous aimons à suivre les
traces de cette construction vraiment romaine le long des
mchers qui commandent le village de Vers, et surtout à
Laroque-des-Arcs, ainsi nommée à cause des arcades gigan-
tesques qui faisaient autrefois dans oe lieu le digne pen-
dant du fameux pont du Gard.
De l'autre côté de Cahors, près Luzech, est un autre
oppidum où se portent nos investigations, rimpemal. Des
(bailles opérées sous nos yeux permettent à chaque excur-
sionniste d'emporter un souvenir des vieux murs construits
par nos pères. La question d'Uxellodunum donne lieu, dans
le bourg, à un dernier débat, à la suite duquel est gravi
le promontoire rocheux qui domine Luzech (i). C'est d
;i ) Les partisans de Luzech font grand cas d'un texte d'I^rose,
oii il est dit : Duabusque partibus per abrupia iatera non
parro flumine cingebatur. Mais comment , leur répondrons-
nous, un seul cours d'eau, qui ferait presque le tour d*un massif
M le ceindrait-il que de deux côtés? Orose a donc voulu expri-
mer que sur deux parties latérales du mont coulait une rivière,
ce qui ne veut pas dire que ce soit la même. Ajoutons que les
■oCs non parro flumine ne signifient pas ririère comidé'
490 GONGRKS ARGHÉOLOOIQU£ DE PHANGE.
peine si l'un d'entre nous peut représenter ses confrère *
Notre-Dame des îles, but de pèlerinage qu'il fautseul^'
ment rappeler, non moins que le joli sanctuaire de NolT^'
Dame de Velles, près Veres, et la petit chapelle de Notr^
Dame des Neiges, près Gourdon.
Après un mot donné à Duravel, à sa crypte, à son tom^
beau mérovingien, à sa pile romaine, est-il besoin d'in-
sister beaucoup sur nos visites de Cahors? Cette ville est
œnnue du monde archéologique; et néanmoins c'est une
joie pour notre plume de revenir sur son pont de Valeu-
rahle, comme l'ont traduit MM. Creuly et A. Jacobs, mais bien
cours d*eau qui n'est ni grand ni petit, expression non appli-
cable au Lot, large de plus de ceot mètres autour de la pres-
qu'île de Luzech.
En second lieu . Hirtius fait remarquer qu'Uxelloduoum était
situé sur uu roc esi^rpé que des troupes ne pourraient gravir,
quand même il ne serait pas défendu. Ce n'est pas le cas de
Luzech, au moins du côté de la Pistoule. De plus, croit-on que
si Vttppidum eût élô entouré des eaux du Lot, le secrétaire de
César n'aurait pas mentionné cette grande rivière comme tenant
la meilleure place au nombre des obstacles que les assiégeante
devaient surmonter?
Enfui on ne s'explique pas, à Luzecli, la construction des
trois camps placés sur des lieux élevés et réunis par la ligne
de contravallation dont parlent les Commentaires, Le Lot . il
nous semble, suffisait bien à lui tout seul pour opposer un obs-
tacle à la sortie des bagages des assiégés, et («aninius eiU pu st*
contenter d'en surveiller les bords.
Quant à i'étymologie de la Pistoule, qui signifierait pierre de
l'effusion de sang {\9ii^\% tullii), nous craignons fort qu'elle n'ait
fié faite |>our le besoin de la cause. Dans tous les cas, la décou-
verte ne nous semble pas assez, importante pour que deux per-
sonnes sérieuses, comme nous en avons été témoin , s'en disputent
la paternité.
TRÉSOR
DE ROCAMADOURllOT
Croix processic
.onnale on st^en'
Xll' sied'
j„. „ <» </r y/i-J'"'
Jx- Mi , *:r /4SÔ :
'Ut la lApJriti^-Hn/,-
3,1 OOVTlBOVTf «KItSSIEVI|S<>l«S<
\ ci£iNOi»ES«ov cHwrrREno-™
DAME = DE"R0OMM.lI)OïH«
MOVMoEMCT aREEDIFt» FN«C
UROÏSE'ORFEBRE «»£+
-' fane pi -tel
Trésor de Rocamadour: Croix en argent , 2* face.
n jir uns cr» (faMtaMib.
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TRÉSOR DE ROCAMADOUR
CUSTODE EN CUIVRE ÉMAILLE (XIY^SIÈCLEI.
3
■
ï
%airbcU :v:tis\'..:r..: â'-i les
i
XLU* SESSION, A SBNUS. 497
,o& l'esprit s'oublie si bien dans le plein moyen âge;
sur ses remparts, qui datent, c&mme le pont, du xiv* siècle ;
sur son vieux palais de Jean XXd, assez voisin d'un châ-
teau royal, son contemporain, qu'on a malheureusement
converti en prison. Nous revoyons la maison Valette, avec
ses jolis détails; la très-curieuse église de Saint-Urcise,
doDt un admirable chapiteau de l'époque ogivale retient
longtemps notre attention; l'ancien palais de justice, où
glt un marbre tumulaire du iv* siècle, décoré de chrismes
^t de roses d'un6 merveilleuse conservation; les restes du
^^uvent des Jacobins, par delà le Font-Neuf, sur la rive
SBuche du Lot; le musée, jeune encore, mais de belle
^^pérance; et enfin et surtout l'intéressante cathédrale.
I>eux vastes coupoles couvrant à elles seules une nef de
plus de cent vingt pieds; une abside gothique du xiv* siècle
portée sur des bases romanes; une façade du môme temps,
'^'offrant malheureusement rien de la grandeur de lignes
4Ui caractérisait à cette époque nos façades du nord ; un
'^agaifique portail roman déplacé au xiV siècle, jeté de
^'entrée de l'ouest sur le flanc nord de la nef, où l'indifTé-
^Dce publique l'avait enseveli; enfin, sur le flanc méri-
dional, un cloître d'une délicatesse hors ligne : telle est, à
Quelques détails près, la cathédrale de Cahors. Nous y
^Tons vu les ouvriers à l'œuvre , et nous devons dores et
déjà nos félicitations publiques à M. Calmon, notre con-
frère, qui a si intelligemment ravivé la délicate ornemen-
tation picturale du xrv** siècle.
Il faudrait mentionner le presbytère (de la Renaissance),
Il salle capitulaire, convertie en chapelle, la sacristie, ses
précieuses guipures, sa crosse, ses plaques de gants; il
faudrait parler de l'intéressant parcours fait, après la sépa-
ration, par les derniers excursionnistes sur la rive du Lot,
m amont de Vers, et sur celle du Gelé jusqu au cœur de
XLIV* SESSION. .'i2
498 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE D£ FRANGE.
Figeac : Saint-Géry et ses rocs des Anglais; Sainl-Cirq-la-
Popie et son très-vieux château ; Marcillac et sa curieuse
église; Espagnac et ses tombeaux inconnus... Mais com-
ment tout dire quand, en vérité, l'attente est partout
dépassée et que partout se présentent des sujets d'étude?
J'ai déjà bieu longtemps retenu mon lecteur... Peut-être
cependant aurai-je droit à l'indulgence si j'ai pu con*
vaincre chacun de mes confrères de l'intérêt de telles
excursions, si j'ai pu surtout lui en donner le goût.
J.-B. POULBRiiaB,
lo»p«ctear de la CorrèM.
LETTRE A M. JULES DE LADRIÈRE
SUR
LES AIGUILLES DE FIGEAC
Mo^ CHER Confrère et Ami,
Au mois de mai dernier, j'allais partir pour un assez
l^csDg voyage dans le midi de la France, lorsque je reçus
^-Rne aimable lettre de vous. En réponse à l'appel que
J ^avais fait à votre vieille expérience de toutes les curiosités
^le notre sol, vous vouliez bien m'indiquer quelques
'vonuments plus particulièrement intéressants à visiter,
^^t par le mérite réel de leur exécution, soit par leur
^lestination bizarre et inexpliquée jusqu'à ce jour. Parmi
c«s derniers vous mettiez en première ligne les célèbres
aiguilles de Figeac. c Ces étranges obélisques, me disiez-
« vous, ont-ils véritablement été élevés en commémoration
« du miracle qui décida Pépin à choisir sur les bords du
t Celé l'emplacement d'un grand monastère? ou bien
« ne faut-il voir en eux autre chose que des fanaux des-
« tinés à guider pendant la nuit les pieux pèlerins vers
« la grande église du Sauveur ?» La netteté de votre
esprit se refusait à l'une et l'autre solution, et le problème
se présentait de nouveau à vos yeux, hérissé des mêmes
difficultés.
Vous le savez déjà, je ne pus accomplir en entier mon
programme. Retenu à Toulouse plus longtemps que je ne
500 CONGRÈS ARGMÉOLOGIQUE DE FEANGB.
me Tétais proposé, eatraiaé à Albi par le désir de visiter
la splendide cathédrale de Sainte-Cécile, je me trouvai
dans l'impossibilité de donner même quelques heures ù
Figeac. Je traversai rapidement la riante vallée au fond
de laquelle la ville s'est groupée autour du monastère
carlovingien, et je cherchai en vain du regard lespetits
monuments qu'il m'eût été si agréable seulement d'aper-
cevoir. ^
Cette déception toutefois ne parvint pas à me décou-
rager et je ne désespérai point de satisfaire tôt ou tani
votre curiosité. Un voyage à Figeac était-il, en effet, bien
nécessaire pour arriver à deviner cette piquante énigme,
et n'avais-je pas épars dans ma bibliothèque les éléments
d'une explication que j'avais voulu aller chercher si loin?
Le compte-rendu de la XXXIl* session du Congrès archéo-
4
logique, tenue à Cahors en 4865, ne me présentait-il pas
un dessin, que j'avais tout lieu de croire exact, de l'un de
ces petits monuments; et ne savais-je pas d'autre part que
ces bizarres édicules n'étaient plus aujourd'hui qu'au
nombre de deux, l'un au midi et l'autre au couchant de la
vieille cité monastique? Aussi, sans m'adonner à aucune
recherche particulière qui m'eût peut-être éloigné du but
si vivement souhaité, je poursuivis tranquillement mes
travaux ordinaires, attentif néanmoins à tout ce qui pour-
rait, de près ou de loin, m aider à pénétrer un secret si
bien gardé.
Tout dernièrement en étudiant les origines de la royale
abbaye de Fontevrault, je fus frappé du passage suivant
d'une bulle du pape français Calixte II, donnée à Mar-
moutier en Hi9, en faveur de la pieuse fondation de
Robert d'Arbrissel, et que je transcris textuellement tel
que le donne le Gallia christiania (t. H, p. 1315) : —
n Eà insuper immunitate prœfatum C(Knobium ex aposto-
XLIV SESSION, A SENLIS. oOl
• lies sedis benignitate dooavimus : ut omne illud spa-
• tium quod cruces in cireuitu, ex prxeepio nostro dispo^
• sùxeomprehendunt, exteriusquietumdeinctpsinvMatum
« çtte/>eniianea/; quatenus quicumque hominum in eu
« aut occident, aut laeserit, vel prsedam fecerit, vel grave
• aliquod forisfactum comroiserit, donec sattsfaciat, reus
« sacrilegii habeatur. » Les croix dont parle le souverain
pontife et qui furent dressées par son ordre en des endroits
déterminés ont depuis longtemps disparu, et il nous serait
difficile à notre époque de fixer leur emplacement. Qu*il
nous suffise de savoir qu'une vaste étendue de terrain
autour du puissant monastère était considérée comme un
immense espace consacré, qu'il n'était pas permis de
souiller par le meurtre et la rapine san»se rendre cou-
pable de sacrilège. Et croyez bien que les religieuses de
FoDtevrault n'étaient pas seules à jouir du privilège d'une
looc sanctifiée autour de leur sainte habitation. Je trouve
pirmi les pièces justificatives de la belle histoire du Berry
de M. Louis Raynal (t. I, p.iT8), une charte (ie l'abbaye de
SaJDt-Sulpice, tirée des archives du Cher, où il est ques-
tion d'une semblable concession. Il s'agit de la petite
église de Meunet, au sud d'issoudun, sur la route de La
Châtre, et il est dit que le privilège octroyé s'étendra h,
on jet de flèche du monument. A cet effet un archer sera
successivement placé devant la façade, derrière le chevet
et sur les deux côtés de l'édifice, et une croix sera élevée à
l'endroit même où la flèche viendra à tomber : — a Cou-
■ ventum fecerunt... de ecclesia quœ dicitur de Molnet...
*« ut adsisteret aliquis ex parte S. Sulpitii ctii/i forti
■ àalisia o capite ejuadem ncclesix ei infra et a iatere
« dextro et sinistro, et mitteret sagi^am et ubi deveniret
« sagitta ibi figeretur crux, ob siguum illius ecclesisp
« salvationis. »
502 CONGRÈS ARGHÉOL06IOUE «DE FRANCE.
Ce territoire privilégié reçut dans le moyen âge une
appellation bien significative; il fut désigné sous le nom
de Mlvamentum, mot que le Roman de la Bote traduit par
celui iesalvance, et nos vienx troubadours provençaux
par celui de sauvetat. a Stabli e dwia saubetat^ m dit un
litre de 1080 cité par Raynouard dans son Dictionnaire
de la langue romane. Primitivement salvamentum était
synonyme de tutellcy immunité, protection ; mais peu à
peu ce mot fut pris dans un sens concret, et signifia toute
étendue de terrain placée sous une sauvegarde particu-
lière. Envisagé sous cet aspect nouveau, Ducange le défi-
nit ainsi : Prœdium ipsum quod salvatur vel proiegi
tur; et il cite à l'appui un extrait du Gallia chriitiama
(t. IV, col 437, insl.) : «Dédit quoque salvamentum quod
ipso monte est in circuitu ejusdem ecclesi». » Ici nous
sommes en Bourgogne, et le signataire de la charte est
Hugues, comte de Ghàlon-sur- Saône, qui vivait vers
Tan 980.
Mais, me direz-vous, cette sauvetat dont vous parlez, en
quoi diffère-t-elle des lieux d'asile ordinaires? En quoi!
mais par retendue, par les conditions qui la gouvernent.
Les lieux d'asile furent établis par l'autorité ecclésiastique,
par les évoques réunis en concile, et les limites qui leur
furent assignées ont toujours été on ne peut plus res-
treintes, c Les églises, disent les Pères assemblés en concile
a à l'abbaye de Saint-Gilles, en iOiS, jouiront de ce pri-
« vilége que personne ne pourra rien enlever dans les
(( trente pas de circuit, ni faire du mal à un innocent ou
(( à un coupable, à moins que le malfaiteur n'ait causé
c( du mal dans cet espace. » En général, le mur qui ser-
vait à enclore le cimetière au milieu duquel s^élevait la
maison de prière, délimitait aussi les pieux refuges
offerts à tous les faibles et à tous les persécutés.
XLIY* SESSION, A SENLIS. 503
Bien autre était la sauvetat. Nullement resserrée dans
des bornes étroites et irrévocablement fixées, elle englobait
parfois dans son sein d'immenses espaces dont l'étendue
n'était déterminée que par la générosité des donateurs. Si
la sauvetat de Tréget, en face de Bordeaux, sur la rive
droite de la Garonne, présentait à peine une surface de
i9,000 mètres carrés, celle de Mimizan dans les Landes
n'avait pas moins de deux kilomètres dans sa plus petite
largeur. Constituées par de riches seigneurs, comtes ou
ducs, ces sauvetats ravonnaieut autour des riches mona-
stèreSf comme parfois des pauvres prieurés, et elles main-
tenaient autour des paisibles habitants des cloîtres la paix
et la tranquillité. Terres libres par nature, véritables
alleux, elles ne reconnaissaient d'autre pouvoir que celui
de l'abbé et de ses moines; l'avoué même du monastère
n'avait sur elles aucun droit. En dehors de ces privilèges
spéciaux qui affectaienc la nature du sol au point de vue
(éodal, les sauvetats jouissaient encore de toutes les im-
munités accordées aux lieux d'asile, a NuUus ibi » dit la
charte de sauvetat octroyée par le duc d'Aquitaine, Guy-
Geofiroy, à l'abbaye de la Grande -Sauve, récemment
fondée par saint Gérard, c quemquam insectari, non
f caedere, non aliquid toUere nullamve injuriam omnino
f inferre praesumat, sed totum hoc allodium sit quasi una
c ecclesia, unum miseris asilum, oppressis refugium, ut
fl quicumque in eo fuerit, ab omui prorsus carnali ini-
« mico securus sit {Hist, de la Grande-Sauve y t. T,
fl Preuves, p. i9i).» Nous avons donc ici l'exemple d'un
alleu considéré tout entier comme une église, comme
l'asile des malheureux, le refuge des opprimés, où une
fois retiré on n'avait plus à craindre aucun ennemi.
Je crois avoir assez fait connaître la nature de ces privi-
lèges que lespapes eux-mêmes, nous en avons un exemple
iîOi CONGRÈS ARGHÉOL06IOUË DE FRANCK.
à Fontevrault, confirmaient parfois de leur puissante
autorité. Les aiguilles de Figeac ne nous offrent plus dès
lors une énigme insoluble, et leur signification se
découvre pleine de netteté à nos yeux. Elles remplissent
un rôle analogue à celui des croix indiquées dans la bulle
du pape Calixte II, ainsi que dans la charte de Saint-Sul-
pice do Bourges en faveur de l'église de Meunet, et elles
témoignent de l'existence d'une antique sauvetat dans la
vallée du Gelé, dont les preuves écrites ne sont point par-
venues jusqu'à nous. Au reste, les petits obélisques,
objets de cette discussion, ne se présentent pas uniquement
autour de Figeac, et Mimizan a aussi conservé les hautes
bornes de son ancien territoire franc. La forme elle-même
de ces monuments si discutés me semble parfaitement eu
rapport avec l'opinion que nous venons d'émettre à leur
sujet. Si réellement ils eussent joué le rôle de fanaux
destinés à diriger les pèlerins pendant la nuit, la lumière
eût été placée au centre d'un lanternon, au sommet de U
pyramide, et non à la portée de la main, pas même au
quart de la hauteur totale. La célèbre basilique de Saint-
Denis était un lieu de pèlerinage bien autrement fréquente,
que le monastère fondé par Pépin dans «ine vallée du
Quercy; et cependant que lisons-nous dans Guillebert do
Metz: 0 Entre Paris et Saint-Denis est la place du Lendit; et
sur la rue sont plusieurs grans et notables croix entaillies
de pierres, grans y mages ; et sont sur le chemin en manière
de Monjoies pour adrechier la voie (Description de Paris
tous Charles VI), n II n'est nullement ici question d'éclai-
rer la marche des voyageurs pendant la nuit, et d'ailleurs
les planches du maréchal d'Uxelles, si élégamment repro-
«luites dans Paris et ses Historiens aux X/V* et XV* siècles^
par Le Roux de Lincy, se refusent à une semblable inter-
prétation. Les aiguilles de Figeac n'ont donc jamais servi
XLIY* SESSION A SBNLIS. a05
à f adrechier la voie, » suivant l'expressioo du vieux
chroniqueur, ni la nuit ni le jour; mais elles ont eu
pour unique destination de délimiter la sauvetat accordée
à l'antique abbaye par un puissant bienfaiteur à nous
inconnu»
Maintenant, mon cher ami, suis-je parvenu à faire
péuétrer dans votre esprit mes propres convictions? je ne
sais; toujours est-il que vous pouvez, je crois, me rendre
la justice que si mon opinion n'est pas vraie, elle est au
moins vraisemblable. Le hasard seul m'a fourni les pre-
miers éléments d'une solution, que d'activés recherches
sont venues presque aussitôt appuyer. J'ai quelque temps
caressé intérieurement une idée qui ne me semblait pas
n mauvaise, puis je me suis efforcé de développer les
arguments que je pouvais faire valoir en sa faveur. Tout
ce bagage, je vous l'adresse : puisso-t-il ne pas vous
paraître trop léger (1)!
Léon Palustre.
Il) Bien que cette lettre ait été écrite il y a huit ans, nons
avons cru pouvoir la reproduire ici, car la vue des monuments
f» question n'a fait que nons confirmer pleinement dans notre
première opinion.
MÉMOIRE
SUR
LE CAMP DES GÉSARINES
PRÈS DE LA VILLE DE SAINT -CÊRÉ
(lot)
Au 8ud-ouc8t de la jolie petite ville de Saint-Céré et au
raidi du bourg de Saint-Jean-Lespinasse, il existe sur les
hauteurs qui bordent la riante vallée de la Bave, les
ruines d'un ancien camp appelé les Cisarines. Ce nom
que Ton retrouve dans de très-anciens actes, a été con-
servé par la tradition locale à trois sortes de caps ou pro-
montoires rocheux et au plateau qui les relie.
Les trois rochers qui forment les points saillants de cet
antique campement, sont connus dans le pays sous les
noms, celui du milieu et de beaucoup le plus important,
de Roc du Cayla, celui de droite,' de Roc du Caussenity et
celui de gauche, de Roc du Sirieys,
Ces trois promontoires sont séparés entre eux par des
vallées étroites et profondes dans le fond desquelles cou-
lent des ruisseaux alimentés par des sources abondantes.
Les petits plateaux qui les couronnent sont délimités par
une ceinture de rochers à pic ayant une élévation qui
varie entre cinq et vingt mètres; du cAté du sud, qui est
XLIY^ SESSION, A SENLIS. 507
le seul accessible, ils se rattachent par de larges isthmes
au grand plateau désigné sous le nom de Causse.
Ainsi que l'indique le plan topographique qui accom-
pagne ce mémoire, divers travaux de défense remontant à
des époques différentes, sevoient encore sur l'emplacement
des Césarines. Ceux qui occupent les extrémités des
rochers du Gayla et du Sirieys n'ont pas reçu de noms
particuliers; ils sont désignés sous les noms de ruines du
Cûyla et de ruines du Sirieys; les autres sont connus dans
l'idiome du pays séparément sous les noms de Co/, du latin
eoUis, et de collés [colles) lorsqu'on désigne l'ensemble.
Ces indications sommaires sur la topographie et sur la
nature du lieu qui nous occupe étant connues, en pré-
sence des nombreux restes de construction presque
informes que le temps n*a pas encore entièrements détruits
etsur lesquels l'histoirejet la tradition ne fournissent que de
très-vagues données, il ne faut pas s'étonner si, poussé par
un sentiment de légitime curiosité, l'homme soucieux de
la vie de ses pères et du passé de son pays, se demande ce
qa'était autrefois cette position remarquable à tant de
titres? Quels ont été sa destination et le rôle qu'elle a jouée
dans le passé? Quelle est la nature, le caractère des
ouvrages qu'on y a élevés? De quels peuples sont-ils
l'œuvre et à quelle époque ont-ils été édifiés?
A ces divers points de vue, l'étude du camp des Césa-
rines soulève une double question d'histoire et d'archéo-
logie, qui sollicite, à la fois, l'attention de l'antiquaire et
celle de l'historien. Pour nous habitants, du Quercy, elle
présente tout Tintérét qu'off^ la solution d'une question
d'histoire locale.
0U8 UONURÈS ARCHÉOUMIODE UE FRANUE.
§J.
l/importance du camp des Césarines et rintérét histo-
rique qui s'y rattache, n'ont point échappé aux chroni-
queurs, aux historiens et aux archéologues qui nous ont
précédé dans la voie des recherches et des investigations
auxquelles nous nous livrons. Tous ont signalé ou décrit
ce curieux et antique campement, qui, pendant de longs
siècles, a servi d'asile et de refuge aux populations de la
contrée.
Malleville, sieur de Gaials, qui écrivait vers la tin du
XTP siècle, dans ses Esbats sur le pays du Qunreyf —
chronique manuscrite et inédite, — après avoir parlé des
anciennes villes des Cadurkes, ajoute : « Une semblable
ville et place forte eurent aussi nos anciens Quercynois,
une ou deux dans la vallée de Saint-Céré, au derrière de
Saint-Médard, sçavoir, deux langues de rocher ceintes de
profondes vallées de trois costés, tranchées d'un bon fossé
et d'une forte muraille, qui, d*une vallée à l'autre, cou-
pait l'avenue qui y estait seule du costé du Causse regar-
dant le midi. Le nom de Presque, qui signifie, comme
on sçayt, antique^Wx reste comme les Fip/era d'Allemagne
tant chantés par Tacite, d
Malleville a donc considéré le camp des Césarines comme
uue place forte des Cadurkes, que les Romains auraient
occupée après la conquête de la Gaule et la compare aux
Vetera Castra des Germains.
Cet auteur, qui a dû voir de près les retranchements
des Césarinet;, dans ses nombreuses courses à travers le
Quercy, au lieu de les décrire et de nous les faire oon-
uaitre dans l'état où ils étaient de son temps, se borne
XUT' SESSION, A SKNLIS. 509
à Dous apprendre qu'ils étaient semblables à la muraille
qui entourait Gergovie, dont il définit ainsi la construc-
tion : c Le haut de la montagne était revêtu en son som-
met de petits rochers jetés tumultuairement à la main ,
la uns sur les autres, jusqu'à la hauteur de six pieds. »
Après Malleville, le savant abbé de Faulhiac, auteur
de la fin du xtii* siècle, dans ses Annales du Quercy, —
OQvrage manuscrit et inédit aussi, — comprend les Gésa-
rines au nombre des places fortes des Cadurkes. a On
fMt encore, dit*il, une manière de campement, près Saint-
Céré, dans un endroit qu'on appelle les Gésarines, à dix
milles d'Uxellodunum (Puy-d*Issolu), qui pouvait bien
être le camp des Romains ou des Gaulois, dont il est parlé
dans les Commentaires à l'occasion du siège d'Uxello-
duttum. »
L'abbé de Faulhiac ne fait aucune mention des ouvrages
de fortification qui protégeaient le camp , qu'il croit, à
tort, avoir été occupé par les Gaulois ou par les Romains
à l'époque du siège d'Uxellodunum.
M. Delpon, à son tour, a consacré dans sa Statistique
iu Lot (tome I*'), un long article aux Gésarines, qu'il a
classées parmi les retranchements anciens, au même titre
que Puy-d*fssolUy Murcens, etc. Il a décrit Irès-minutieu-
lement, non-seulement la position du camp, mais encore
les travaux de défense dont les ruines existent encore.
Désireux de se rendre un compte exact de la nature des
ouvrages que la main de l'homme y a élevés, il ne se con-
tenta pas d'en donner une appréciation basée sur un
examen des lieux, il fit pratiquer des fouilles assez
étendues.
A l'époque à laquelle écrivait M. Delpon, il y a de cela
un demi*siècle, la science archéologique était à peine
créée; il n'est donc pas surprenant qu'il ait commis de
510 GOUGliS AlCHÉOUWIOn Bl FEAHCB.
grav» erreors sur les caractèreset Tattribotioii te moiB-
méats auxquels il a consacré de patientes et
études. C'est ainsi qu'après avoir (ait mettre à nu k
ment extérieur des tours et du rempart qui fiorment
partie sud du plateau du Cayla, M. Delpon crut
naître dans ces ouvrages des constructions romaine!^
tandis que dans l'état actuel des connaissances sur
caractères qui distinguent les constructions des àïBénmê^
âges, une simple vue des lieux suffît pour pouvoi
affirmer hautement que ces ouvrages ne sont point Tceu^
des vainqueurs de la (îaule.
La découverte, aux pieds des basticms du Cayla, d^
fragments d'amphores et d'autres poteries, d'une poignée
d'épée* revêtue de lames de cuivre et terminée, dit-on^
par un bec d'aigle, de médailles romaines, compléta l'er^
reur dans laquelle est tombée M. Delpon. De son temps, j
on était dans la croyance que la présence de briques, de m
poteries ou de monnaies romaines, en un lieu quelconque, i
était une preuve certaine de l'occupation de ce peuple. ^
. c Le nom de Césarines que porte le camp depuis les temps ^
les plus reculés, ajoute M. Delpon, en lait attribuer li ^
construction à César, et il est probable que c'est là qu'il ^^
établit quelques légions pour s'assurer de l'obéissance des ^i.
Cadurci et des Lemovices, dont les frontières étaient peu ^
éloignées de ce lieu. » ^
C'est encore là une supposition toute gratuite que rien ^
ne justifie. ^
a Dans la partie du plateau du Cayla enfermée par cette ^
enceinte de constructions, dit le même auteur, il existe <
deux grottes qui ont chacune deux issues, une sur le pla-
teau et l'autre aux pieds desrochers élevés ici de 30 mètres.
On croit qu'elles communiquent par des galeries natu-
relles avec un long souterrain parcouru par le ruisseau du
XUY' SESSION, A SENUS. 511
Cayla, et que c'était par ces cavités, sans doute, que les
troupes s'approvisionnaient d'eau. »
L'une de ces prétendues grottes est tout simplement
une faille entièrement inaccessible, qui en partant de la
base du rocher, s'ouvre à pic sur le plateau à plus de
10 mètres en contre-bas. Cette cavité a été produite par
une dislocation de terrain qu'a amenée un cataclysme
géologique, dont les traces sont encore manifestes.
L'autre cavité, qualifiée de grotte, n'est non plus qu'une
fisBore à ciel ouvert, qui prend son origine au niveau du
plateau et s'incline, en pente douce, jusqu'au pied des
escarpements. Elle ne se prolonge pas plus que la précé-
dente au delà de cette limite.
Il ne saurait y avoir, quoi qu'on en ait dit, aucune
relation entre ces prétendues grottes et le conduit sou-
terrain que suit le ruisseau de Mandine. En effet, le grand
ressaut rocheux et escarpé qui sert d'assiette aux Gésa-
rines, appartient à la formation des calcaires jurassiques
oolithiques, tandis que le sol du mamelon sur lequel
reposent les escarpements est de nature liasique. Or, on
sait que les cavernes qui existent dans une de ces forma-
tions ne se poursuivent jamais à travers l'autre.
H. Delpon parlant du mur qu'on nomme la Col en
[Mfois et non Lalcol, construit à cheval sur l'isthme du
Gayla, dit : a Le mur est bâti avec des blocs de la même
dimension que le précédent (les ruines du Cayla) et avec
du ciment de la même qualité; mais la pierre employée
ici, atteinte par la gelée, s'est divisée en petits fragments,
eequi a fait ébouler les deux tiers du mur en hauteur;
aussi la partie qui reste est entièrement couverte de
décombres. Ce n'est qu'en faisant faire une large tranchée
qu'on a pu connaître son épaisseur et la manière dont les
matériaux étaient primitivement disposés. Kn calculant la
512 CONGRÈS AaCHÂOLOGKQUE D£ FRANGE.
masse de décombres et en Tajoulant aux 3 mètres de j
qui existent encore, on trouve qu'il devait avoir iO ml
de hauteur quand il fut construit. »
M. Delpon porte la largeur de ce mur à 3 mètres e^
qu'il était précédé d'un fossé de 9 mètres de ,
geur. ,
Les fouilles que nous avons fait pratiquer, nousj
fourni la preuve certaine, ainsi que nous le dirons I
tôt, qu'on n'aperçoit aucune trace de ciment dans la
struction de ce mur; que ses dimensions sont
différentes de celles indiquées par M. Delpon et qu'i
a point de fossé pour en défendre l'approche.
M. Delpon n'a pas cherché à se rendre compte
nature des Collés du Caussenit et de Benne. Il dit
ment de ces retranchements qu'ils sont formés
amoncellement de pierres, que leur hauteur
6 mètres, et leur épaisseur à la base de 8.
En 1837, un magistrat plein de zèle pour nos ani
tés locales, M. Calvet, conseiller à la cour d'appel d'
qu'une mort prématurée a ravi à la science, lit de
velles recherches aux Césarines. Ses investigations
lèrent, comme celles que M. Delpon avait con
M. l'abbé Paramelie, sur les ruines du rocher du
qui avaient paru ù tous devoir receler les secrets de
gine et de la destination des Césarines. Ces fouilles
l'autorité supérieure avait facilité les moyens d'ex
confirmèrent, en les complétant, les découvertes pré
ment faites par M. labbé Paramelie; elles mirent a
un pavé fait avec des briques à rebords, de nom
monnaies romaines en bronze du haut et surtout
empire, des aiguilles ou poinçons en os et en bron
pesons de fuseaux en terre et en plomb, une bague
lière en bronze, des bouts de flèche en fer et uneq
la Col du Cayla.
\oo :__; ^
XLIY' SESSION, A B£NLI8. 5i3
considérable de poteries de toute sorte, principalement
d*amphores.
Nous retenons 9pécialement, comme étant très-impor-
tantes à notre point de vue, les constatations suivantes
faites par M. Calvet, sur lesquelles nous reviendrons.
«A3 mètres, dit-il, en avant du fossé qui défendait les
approches des tours et du rempart du Cayla, on avait fait
une sorte de retranchement consistant en de gros blocs de
pierres brutes, séparés entre eux par des espaces inégaux.
r^les blocs formaient comme une auréole couronnant
rliaque tour. • Et plus loin, il ajoute : « Les bords du pla-
teau étaient garnis sur tous les points d'une grande quan-
ti té d'énormes blocs calcaires destinés, sans doute, à être
Toulés sur les assaillants qui auraient tenté de gravir
^es retranchements du rocher. •
f Plusieurs de ces blocs sont en place sur l'extrémité
de la corniche; ils sont en équilibre sur de petites pierres
et menacent de leur chute la vallée qu'ils dominent. •
H. Calvet fit également opérer dans la Col du Cayla
des sondages qui démontrèrent que, contrairement à ce
qu'avait affirmé M. Delpon, le parement du mur qui
existe sur ce point était bâti à pierre sèche et non avec
du ciment.
M. le baron Chaudruc de Crazannes, ancien membre
correspondant de l'Académie des inscriptions et belles-
lettres, inspecteur des monuments historiques, dont le
nom et les travaux sont connus des antiquaires, a été le
dernier et, sans contredit, le plus autorisé des archéolo-
gues qui ont porté leur attention sur lesCésarines. Il nous
a laissé une très-intéres:'aute dissertation sur ce camp,
qu'il parait avoir visité et examiné avec toute la sagacité
pénétrante de son esprit investigateur.
M. de Cidzannes a partagé, à la vérité, les erreurs de
* XUV* SESSION. 33
514 CONGRES ÂRGHéOLOGI0U£ DE FRANGB.
ses devanciers sur les soi-disant ouvrages des Romains,
mais il a émis sur les Césarines de très-judicieuses vues
que nos recherches ont corroborées. Le premier, il a consi-
déré la Col du Cayla comme devant être un retranche-
ment gaulois, antérieur à la conquête romaine.
§ u.
Après avoir rappelé ce que nous apprennent sur les
Césarines les divers travaux manuscrits ou imprimés à
notre connaissance qui en parlent, nous allons rendre
compte des fouilles que nous y avons fait exécuter et que
nous avons surveillées et dirigées nous-méme.
Les résultats qu'elles ont produits sont des plus con-
cluants. Aussi avons-nous tout lieu de croire qu'elles
auront enfin fait la lumière sur les questions que soulève
depuis des siècles le camp des Césarines.
Disons, tout d'ahord, quelques mots sur des retranche-
ments antiques et des lieux très-anciennement habités
assez nombreux dans la contrée occupée par les Cadurci.
Ces quelques mots sont nécessaires pour en faire la dis-
tinction qui découlent de nos recherches.
Les Gaulois, au temps de leur indépendance, avons-
nous dit dans un mémoire sur les ouvrages de forti-
fication des oppida gaulois de Murcens, d'Uxellodunum
et de rimpernal, possédaient des lieux de refuge, des
places fortes, des villes, appelées oppida par les Romains,
que protégeaient contre toute attaque et toute surprise des
ouvrages habilement conçus.
Ces oppida, bien plus nombreux qu'on le pense,
n'avaient souvent ni la même origine, ni la même desti-
nation. L'étude que nous avons faite de ceux qui existent
XLIT° SESSION, A SENLIS. 515
^1^08 le Quercy, nous a conduit à cette conclusion que,
^oi?ant leur importance et le caractère des ouvrages de
^Wfimse qui leur sont propres, on doit les diviser en deux
légories. Cette division répond, du reste, à ce que César
«us apprend des places fortes qui ont joué un rôle si
important dans la conquête de la Gaule.
Un certain nombre de ces oppida étaient des lieux per-
^manents d'habitation, des villes dans le sens absolu du
ot, bâties, ornées et fortifiées à la manière des Gaulois;
autres se réduisaient à des camps retranchés, vides en
'^«mps de paix et occupés, en temps de guerre ou à Tap-
iproche des ennemis, par les populations disséminées dans
&«8 campagnes, qui s'y retiraient et y transportaient tous
l^eurs biens.
Dans le Lot, les camps retranchés, comme les oppida
l^prement dits, sont situés dans des lieux d'un difficile
âcoès; ils occupent des sortes de promontoires munis d'es-
carpements ou de pentes abruptes et sont généralement
«Qtourés de profondes dépressions de terrain, excepté du
cdté de Pisthme qui les rattache au reste de la montagne ;
mais ils offrent ceci de particulier qu'ils sont défendus
par des ouvrages militaires bien moins importants que les
▼rais oppida : des fossés, des levées en pierre ou en terre,
des murailles sans interposition de cadres de bois, sont
les seules fortifications dont les fouilles nous ont révélé
la pratique.
Parmi les oppida-villes, qui constituaient Taggloméra-
tion la plus considérable chez les Gaulois, sur le sol
desquels on retrouve les emplacements et les vestiges de
ces habitations toutes rustiques, rondes ou ovales qui,
selon Vitruve et Strabon, composaient la demeure de
ce peuplé, nous classons Murcens, Puy-d'Issolu et
rimpernal.
\
516 GONOaÈS ARGHÉOLOOIOUB DE FRANGE.
Dans les camps retranchés ou oppida de circonslanc^^
ou d'occasion, abandonnés alors que nulle agitation n'étail
à craindre et servant d'asile dans les moments de danger,
nous comprenons les Césarines qui font le sujet de
mémoire, les camps de Goronzac sur le ruisseau de Verâ,
de Saint-Ci rq sur l'Alzou et du Roc sur la Dordogne,
camps que nous nous proposons d'étudier et de décrire.
§in.
Nous l'avons dit, au début de ce travail, ' le lieu qu'où
désigne sous le nom de camp des Césarines comprend la
partie supérieure des trois promontoires que relie le pla-
teau appelé le Causse. Ces trois promontoires sont connus
dans le pays sous les noms de Roc du Cayla, du Sirieys
et du Gaussenit. Ils sont bordés sur tout le pourtour de
la partie saillante de hautes falaises. De profondes cou-
pures de terrain les séparent et les isolent sur trois côtés.
Les plateaux spacieux qui les couronnent ne sont abor-
dables que du côlé de Tisthme. Leur orientation, comme
leur pente générale, est du sud au nord.
Occupons nous, tout d'abord, du plateau du Cayla qui
est à la fois le plus vaste, le plus important et le plus
intéressant. Son altitude moyenne est de 295 mètres; il
domine de i45 mètres la vallée de la Bave; la superficie
circonscrite [tar la Col et les escarpements est de vingt hec-
tares environ. Son niveau correspond, à peu de chose près,
à celui des deux autres promontoires. Disposée eu forme
de petite colline, la Col tire son nom de la configuration
extérieure que présente, dans son état actuel, l'amoncel-
lement de décombres qui recouvi'ent l'antique rempart;
elle affecte eu plan une graude courbe convexe, comman-
XLIT* SESSION, A SKNL18. 517
àèe par la nature du lieu, et, eu même temps, trës-lavo-
nblemcnt disposée pour la défense.
De toutes les constructions qui ont été élevées aux
Gésarines, la Col du Cayla, est la plus considérable et
Il pins curieuse à étudier, car elle est certainement la plus
aocienoe.
Nous avons rapporté les opinions qui ont été émises sur
les Césarines par les auteurs qui s'en sont occupés; nous
avons fait connaître spécialement leurs appréciations con-
tradictoires sur lu nature, la forme et les dimensions de
Il Col du Cayla, d'après les fouilles incomplètes ou mal
dirigées qui y ont été effectuées.
Avous-nous été plus heureux que les éminents con-
frères qui nous ont précédé dans cette voie? Sommes-
nous parvenu à détermin»^r l'époque à laquelle remontent
ees fortifications, leur origine, leur destination, les carac-
tères essentiels qui les distinguent des autres ouvrages
de défense dont on voit les ruines aux Césarines? On en
jugera bientôt.
Une large et profonde tranchée a été ouverte, en notre
|irésenoe, au point A qui, d*après l'état des lieux, nous a
paru le plus propice pour atteindre le but de nos recher-
ches. Après avoir déblayé, sur une lougueur de 3 mètres,
les décombres qui recouvrent la muraille du côté du
cimp, nous avons rencontré un mur de i"70 d'élévation,
à parement incliné au quart de sa hauteur, bÂli avec des
pierres plates de moyenne dimension, non travaillées,
irrangées à la main avec soin et posées sans ciment. Ce
mor est couronné par une terrasse en plate-forme hori-
lontalede l"80 de largeur. Cette plate-forme dégagée des
déeombres qui l'obstruaient, les travailleurs se sont trouvés
bientôt en présence d'un second mur haut de l"50, à face
inclinée comme le premier, surmonté d'une autre plate-
XUY* SESSION, A SENU8. 5i9
muraille dans sa forme et ses dimensions primitives.
Ainsi que l'indique le dessin, cette construction repose
60 entier sur le rocher; elle n'était précédée d'aucun fossé.
Le remplissage intérieur, comme dans toutes les construc-
tions de ce genre, se compose de pierres, terre et pierrailles
jetées péle-méle dans le vide laissé par les murs des pare-
ments. Les pierres de face sont seules posées à la main,
mais elles n'ont subi, préalablement à leur mise en
œuvre, aucune préparation, aucune sorte d'épannelage.
D'après la restitution que nous avons faite de cette
muraille, restitution que l'état des parties conservées nous
t rendue facile, elle avait primitivement sur le point où a
été foite la fouille A, une largeur à la base de i2"50, de
4 mètres au sommet, et une hauteur sur l'axe de 7 mètres.
Ce n'est cependant pas en cet endroit qu'elle atteignait son
maximum de hauteur; une centaine de mètres plus à
gauche, elle avait deux ou trois mètres de plus en élé-
fation.
La différence d'épaisseur entre la base et le sommet
était rachetée au moyen de retraites ou plates-formes
qui formaient autant de chemins couverts sur lesquels les
assiégés pouvaient se ranger et circuler ou se mettre à
l'abri des traits des assiégeants. Ces ingénieuses disposi-
tions dont nous avons constaté l'existence dans la muraille
de Murcens, nous les considérons comme une règle et une
tradition suivies dans les constructions militaires des
Gaulois, et elles sont un des traits caractéristiques des ou-
vrages de défense qui sont l'œuvre de ce peuple.
La longueur de la muraille du Cayla est de 580 mètres
mesurés entre les escarpements; sa section moyenne est
de 52 mètres carrés; son volume n'est pas moindre de
30,000 mètres cubes. En plan, elle ne présente intérieu-
rement ni extérieurement aucun angle rentrant ou sail-
520 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
lant, qui dénote des dispositions ayant rapport à U
défense, comme les bastions et les courtines de nos fortifia
cations modernes.
Les fouilles n'ont fait découvrir aucun objet d'art, 3.
peine si nous avons trouvé quelques débris de pote^
ries. Nous avons recueilli seulement, au milieu des ébou^
lements supérieurs, presque au sommet de la muraille e€>
sur la face extérieure, une prodigieuse quantité de cail"
loux de rivière, ronds ou ovoïdes, de trois à quatre
centimètres de diamètre, qui ont, bien certainement,
servi de cailloux de fronde.
Il n'y a pas le moindre doute que la muraille, dont les
remarquables restes ont été exhumés, ne soit une con-
struction gauloise : elle offre au plus haut degré la facture .
propre aux ouvrages de ce genre ique nous connaissons
d'eux. Il est, en effet, de toute évidence que son mode de
construction, quoique plus primitif, est en tout sem-
blable à celui des murailles avec assises de bois de Mur-
cens et de l'Impernal ; ce sont les mêmes formes, les
mêmes dispositions et les mêmes pratiques. Mais nous
estimons que la muraille des Césarines ost antérieure de
plusieurs siècles à celle de Murcens. L'introduction des
cadres de charpente dans ces sortes d'ouvrages pour résis-
ter aux efforts du bélier, ne remonte pas, avons-nous dit
ailleurs, à plus d'un siècle avant ]iotre ère.
Les escarpements du Cayla ne sont pas partout inacces-
sibles ; sur certains points, ils laissent subsister des vides
assez faciles à franchir; aussi les Gaulois avaient-ils, à leur
manière, garni les bords du plateau d'un grand nombre
de blocs de pierres brutes, dont plusieurs cubaient plus
d'un mètre. Ces blocs, qui ne constituaient ni une bar-
rière ni un mur, avaient été placés là pour pouvoir être
lancés dans un moment d'attaque ou de lutte sur les
XUT' SE8SJON9 A SBNUS. 521
niants qui.' auraient tenté de gravir les pentes. Pla-
neurs de ces blocs, en équilibre sur des pierres de petites
dimensions, sont encore en place sur Textrémité de la cor-
niche, d'autres, et c'est le plus grand nombre, oui été
ROfersés et roulés dans les versants où on les distingue
bellement. M. Calvet, avant nous, a signalé ces gros
Uocs de pierre qui étaient plus nombreux de K>n temps
qu'aujourd'hui. Nous les avons représentés en rouge sur
le plan, tels qu'ils étaient primitivement, d'après les
indications que nous avons recueillies sur les lieux.
Dans un travail que nous avons publié sur le Puy-d'ls-
K)Iq, nous avons constaté qu'aux abords de la fontaine,
dont les eaux furent captées dans une galerie souterraine,
irant l'exécution des fouilles importantes qui ont eu lieu
lor ce point, le sol était couvert d'un g^nd nombre de
kiocs de roche calcaire, identiques à ceux du Cayla, que
les Gaulois avaient lancés du haut des escarpements sur
les ouvrages d'attaque des Romains. Ainsi l'usage de
muuir les extrémités des pentes, même inaccessibles, de
Uocs de roche qu'on pouvait, au besoin, projeter sur les
miégeants, était un des moyens de défense employés par
les Cadurkes concurremment avec les murailles. <Je
Dioyeu de défense parait, du reste, avoir été générale-
flKDt usité en Gaule jusqu'au temps de la conquête
romaine. César rapporte dans ses Commentaire»^ que sur
les murailles de l'oppidum des Nerviens citadelle de
.Namur;, qu'il assiégea, se trouvaieut, en grand nombre,
fc gros quartiers de pierre. Le même auteur nous fait con-
iiltre aussi que les défendeurs d'Avaricum empêchaient
les Romains d'approcher des murailles en leur lançant de
pones pierres.
L'eitrémité nord du plateau du Cayla, bordée de hautes
Utiles qui ressemblent à une muraille cydopéenne,
XLIT' SESSION, A SINUS. 5t3
(iBt de camps, de villes et de monuments de toute sorte,
ans que ce conquérant ait eu le moindre droit de leur
donner son nom.
C'est à tort que l'abbé do Faulhiac a placé aux Césarines
le camp où Drapés fut défait par les Romains. Cette posi-
tion ne saurait nullement convenir à la situation du camp
gaulois telle que Tindiquent les Commentaires de César.
Il y est, en efiét, formellement dit que les Gaulois, selon
leur habitude, étaient campés dans la plaine, le long de
Il rivière. Or, les Césarines occupent une hauteur relati-
Tement asseï élevée.
§v.
Les positions naturellement fortifiées ou faciles à
détendre, ont été recherchées, dans tous les temps, pour
eo iaire des asiles sûrs. Au commencement du moyen
âge, comme on l'avait fait précédemment, et comme cela
ae pratiqua' durant cette longue période, on choisit de
préKrence, pour y établir des campements ou des forte-
reiHS, les parties saillantes des montagnes coupées de
Ttllées profondes et garnies d'escarpements.
Les plateaux des Césarines répondant à ces conditions
importantes de la défense, furent occupés de bonne heure
psr une population en quête d'un de ces lieux si recher-
chés. La muraille gauloise, quoique en boo état à cette
époque, n'était plus suffisante pour résister efficacement
ï la puissance des engins de guerre en usage alors. C'est
pourquoi, sur l'emplacement des ouvrages gaulois qui
fermaient la partie extrême du Cayla, on éleva trois tours
reliées par un rempart de 2 mètres d'épaisseur, solide-
ment bâti, qui en garnissait les intervalles. A ces ouvrages,
524 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
dont le but était de rendre inexpugnable la partie infé-
rieure du plateau, ne se rattachaient ni château, ni autres
constructions propres à Thabitalion, d'où on doit con^
dure que cette forteresse n'était qu'un lieu d*asile
temporaire.
Les parements des maçonneries soit des tours, soit des
remparts, sont exécutas en petit appareil de forme toute
rustique , qui rappelle la manière de construire des
Romains; mais ces ouvrages accusent une époque où l'art
était en pleine décadence : les moellons sont à peine
ébauchés, le mortier qui les lie n'a aucune consistance.
Le mode de construction de cette forteresse est identique
à celui du château appelé les Temples, qui occupe le point
culminant du Puv-d'lssolu. Or, une charte du roi Raoul,
de 925, nous apprend que ce château avait été bâti par ses
prédécesseurs pour arrêter les courses des Normands qui
dévastaient le Limousin, le Périgord ei le Quercy.
Toutes ces circonstances et la position des Césarines à
peu de distance de la Dordogne, nous portent à croire que
les fortifications du Cayla, comme celles du Puy-d'lssolu,
ont été construites pour résister aux attaques des pirates
du Nord et qu'elles sont, par conséquent antérieures au
X* siècle.
Les nombreuses monnaies romaines, du bas empire
surtout, qu'on a Irouvi^e^ dans les substructions, sont une
nouvelle preuve que ces ouvrages appartiennent au haut
moyen âge. On sait, en effet, que l'immense quantité de
petits bronzes frappés par les empereurs romains eut cours
dans la Gaule, comme monnaie de compte, jusqu'aux ix*
et X* siècles.
Un peu en avant des ruines du Cayla, il existe les traces
bien apparentes d'un fossé qu'on avait commencé de creu-
ser dans le roc pour défendre l'approche de la forteresse.
XLIV* SESSION, A SENLI8. 525
Gs fotté, que nous avons tout lieu de croire cootemporain
de ees ruines, est représenté sur le plan par un double
Ifiit rouge accompagné de pointillés.
Lorsqu'on compare la vétusté des blocs de rocher qui
composent la ligne des pierres dressées à ceux provenant
du creusement du fossé, dont nous connaissons la date à
nu ou deux siècles près, on est amené à reconnaître que
lei pierres dressées doivent remonter à la plus haute anti*
foité.
Les constructions qui défendaient l'extrémité nord du
rocher du Sirieys, figurées au plan, présentent les mêmes
caractères que celles que nous venons de décrire et sont
évidemment de la même époque. Elles ont été érigées à la
même occasion et dans le même but.
§VL
La Col de Benne , qui joint l'extrémité de la courbe
de Mandine aux escarpemeuts au pied desquels se perd le
ruisseau deMarot, occupe le versant oriental d'une dépres-
siofl de terrain assez prononcée et ferme du côté du cou-
chant le plateau du Causse. Elle constitue un ouvrage de
défense avancé, destiné à mettre à l'abri d*un coup de
main la population et les troupeaux qui campaient sur le
plateau.
Comme la plupart des retrangements du moyen âge
celte Col consistait en un rempart, sans maçonnerie,
brmé d'un amoncellement de pierres rapportées, mêlées
de terre, jetées là sans ordre et sans arrangement inté-
rieur. Les matériaux composant la surface des talus, qui
s'inclinent sous un angle de 54 degrés, étaient seuls die-
]
s ^
0
6S6 GONoais AncHÉOLObiouE de frange.
foèéè à la main afin de faire disparaître les aspérités qui
auraient permis d'eo g^vir les pentes.
La coupe B fait connaître la forme et les dispositions
de ce retranchement. Son état actuel est figuré en noir et
son état primitif en rouge, d'après les indications foar- \0
nies par les fouilles.
Sur quelques points, notamment du oAté du gouffre de
Benne, le retranchement avait des proportions considé-
rables. Ses dimensions moyennes étaient «de 14 mètres
de largeur à la base, de 4 mètres au sommet, sur une
hauteur de 4 mètres au milieu. Il n'avait pas moins de
940 mètres de longueur.
Les collés au retranchement du Caussenit, tant celu m>
qui a été terminé, que celui qui n'a reçu qu'un commen —
cément d'exécution, sont en tout semblables à l'ouvrag
avancé de Benne et ont la même origine (Voir 1
coupe G).
Les trois collés des Césarines ont toutes, dans leur éta.
actuel en forme de petites collines, un aspect identique
qui ferait croire au premier abord qu'elles ne diffèrent pa:
de construction et qu'elles remontent à la même époque
Mais si, au lieu de baser ses appréciations sur un simpl
examen de visu, on les étudie avec le secours de la pioche
on acquiert bientôt la certitude que ves travaux de castra
métatiou appartiennent à des époques différentes qu
séparent de longs siècles, et qu'ils ne sont pas l'œuvre
d'un même peuple.
Aussi, si nous avons pu affirmer, en toute assurance^
que la grande muraille du Gayla est gauloise, nous n'hé--
sitons pas non plus à déclarer que les retranchements
de Benue et du Gaussenit sont des ouvrages du haut
moyen âge et qu'ils datent de la même époque que
les fortifications en maçonnerie du Cayla et du Sirieys.
XUY* SESSION, ▲ SINUS. 537
Las espaces de terrain, dont les retranchements de Benne
H au Caussenit dérendent l'approche, ont été habités dans
Jai temps les plus reculés, ainsi que l'attestent de nom-
keuz monuments funéraires. Les hauteun du Causse
renEermeni plusieurs dolmens, dont quelques-uns ont des
propcMTtions considérables. Le plateau du CaussAiit est,
pour ainsi dire, couvert de tumulus et de dolmens; on
dirait une ^aste nécropole.
Presque tous ces monuments ont été fouillés il y a une
^arantaine d'années.
Les conclusipns particulières à tirer de ce qui précède,
en ce qui concerne le camp des Césarines, sont celles-ci :
{•que le camp est d'origine gauloise; que cette position
t été primitivement un oppidum occupé en temps de
guerre et vide en temps de paix; que cet oppidum ou
camp retranché ne comprenait que le plateau du rocher du
Csyla; qu'il était défendu par la grande muraille de la
Col du Gayla d'abord, ensuite par les ouvrages de la
Monde enceinte que marquent les pierres dressées et en
troisième lieu par les gros blocs de rochen rangés sur
la eorniche; 2* qu'à une époque relativement plus
récente, cette position remarquable a été habitée par une
population nombreuse qui en a grandement élargi les
limites primitives; que les fortifications du Cayla et du
Sirieys, ainsi que les retranchements de Benne et du
Caussenit, ont été élevés à cette époque; que cette der-
nière occupation, de même que les ouvrages de défense
qui s'y rattachent, paraissent être antérieure au x* siècle.
A un point de vue plus général, des recherehes aux-
quelles nous nous sommes Hvré sur les travaux de défense
élevés par les Gaulois dans le département du Lot, des
528 CONGRÈS ▲ft'^HÂOLOGIQini DB VRANCB.
découvertes et des constatations qui ea ont été la consé-
quence, nous croyons être' autorisé à eo déduire cette
autre conclusion, que ces ouvrages nous lévèleQt trois
époques distinctes, marquées chacune par un progrès
accompli dans l'art des fortilications chei ce peuple. La
première époque comprend ces travaux tout à fait primitifs
consistant en un simple fossé ou en un de ces murs rus-
tiques qui en ceignaient les premières stations humaines,
dont on voit de nombreux restes sur les points culminants
de nos plateaux calcaires. La seconde embrasse le temps
pendant lequel on édifia des remparts dans le genre de
celui des Césarines. La troisième enfin est caractérisée par
ces belles et solides murailles avec interposition de cadres
de charpente que César a décrites dans ses CommtiUairts,
et dont nous avons retrouvé les restes intéressants à llu^
cens et à l'impernal.
Cahors, 15 octobre i877.
E. Gastaoné,
Ancien tgent-Toyer d*aiTonditMinenl, ofBder
d'Actdémie, membre corresponéanl de b
Commiision de It topographie des Givlei)
membre de U Société française d^Ardiéo-
logie, etc. etc.
SODILLAC. LE VIGAN ET GOURDON
Samedi 44 et dimanche 4 S août.
Nous arrivons à Souillac le samedi , bien après le cou*
cher du soleil, en long retard sur ritioéraire fixé par le
pRigramme. La longue visite de VUxellodunum du Puy*
l'Issolud, précédée d'une balte réconfortante et imprévue
à Saint-Denis, était la cause de cette infraction à notre
exactitude accoutumée; car l'exactitude doit être aussi la
politesse des excursionnistes.
Il y avait quatre-vingt-dix ans, moins deux mois et
ieux jours, qu'un voyageur anglais d'un nom illustre,
Arthur Young, qui parcourut, à cbeval, la France en tous
KDS, pour l'étudier au point de vue agronomique, mettait
pied à terre à Souillac. Par égard pour les maîtres et mal-
tresses d'hôtel du lieu, contre lesquels nous n'avons pas de
grieb sérieux, nous ne rapporterons pas la boutade humou-
ristique, pittoresque et repoussante, par laquelle ce délicat
observateur a noté son séjour dans cette ville, tout en van-
tant la beauté de son site et les avantages de son fertile
territoire. Nous préférons renvoyer le lecteur au passage en
question (i ), en constatant un progrès relatif dans les détails
(4| Foyage en France pendant les années 4787-SS, par
Arthur Young. Traduction par Lesage, 4860. Tome I*% p. 30.
XUV* SESSION. 34
530 OOlfGliS AWCaiOUûQiQUE M fEASGB.
elhoographiques qui saulemeot rindignalîoa de notre
auteur.
No«s BODiiiies donc privés de bt belle vw qu'oire, à
leur arrivée, aux voyageurs moins attardés la posîtioo de
Souillac aux bords de la petite rivière la Boièie, dans U
magniBque plaine de la Dordogne. Mais pour nous dédom-
mager de ce mécompte, à peine débarqués, nous nous
empressons de répondre à la courtoisie de MIL les membres
du Cerde de la Ville, qui avaient bien voulu oous dépê-
cher, le matin même, à Saint-Denis, deux ambassadeurs,
pour nous convier à nous réunir, le soir, dans leurs salons
hospitaliers. La réception que nous avons tnmvée à ce
rendex-vous était on ne peut plus cordiale el dhhle. Que
ces messieurs en reçoivent ici tous nos lemeicienieiits.
Le sujet d'attraction de Souillac, pour les archéologues,
est, comme chacun sait, son église, dédiée à la Mtee de
Dieu, ancienne abbatiale d*un monastère de Bénédictins,
qui, au xvii* siècle, embrassa la congrégation de Saint-
Maur. Une vague tradition fait honneur de la CMidatioa
de ce monastère à saint Éloy, évéque de Noyon, reconnu
comme fondateur incontesté de l'abbaye de Solignac, en
Limousin. Toutefois, le monastère de Souillac aurait été
restauré sous Louis le Pieux, en S06. Le Galliû ckristiana
rapporte cette origine d'après Jean de Vidal, historien des
évéques de Cahors. L'abbé de Fouillac et Dominici, histi)-
riens du Quercy. au xrii* siècle, ont répété celte tradi-
tion , qui n a jamais été appuyée sur aucune preuve
sérieuse.
Mais le Gaiiia ckrisi4ana ajoute qu'il est plus probable
que l'abbaye de Souillac aurait été fondée par Gérault de
Saint-Céré, abbé d'Aurillac, vers 96i, en raison de ce que
le domaine de Souillac, qui faisait partie de la viguerie
de Gazillac, fut donné par Frotard, vicomte de Turenne^
XLIY^ SESSION, A SENUS. 531
eo 930, au monastère d'Aurillac, et que l'abbé Gérault de
Saint-Céré imprima un développement fort considérable
au gouvernement de son abbaye. M. Longnon , dans sa
récente publication du Pnuillé du diocèse de Cahors,
signale la charte de cette donation , rapportée par Justel
aux pièces justificatives de V Histoire généalogique de la
flufsen de Turenne (i645], et donnée depuis par le Gallia
ckriiiiana. Cette charte, comme le fait observer M. Lon-
gnon, est en pleine contradiction avec l'assertion de l'his-
torien des évéques de Cahors.
Les grands dictionnaires historiques et géographiques
ie Corneille, de Lamartinière, de Moreri, avaient déjà
reproduit ces deux origines. Le Dictionnaire de la Gaule
i% l'abbé d'Expilly, qui rapporte également les notices des
^ux précédents, ajoute : c C^est une des belles maisons
de Tordre de Saint-Benoit. L'église est faite en coupe et
n'est pas bien claire, t
Voilà, certes, une description architectonique à laquelle
ou ne s'attendait guère, et si nous en citons la seconde
pvtie, c'est que nous espérons qu'elle nous servira d'ex-
cuse auprès du lecteur pour les inexactitudes que nous
poQrrions avoir commises en examinant certaines parties
<ie l'édifice. Coupe est ici pour coupole. Ces deux mots,
pour les architectes classiques, étaient synonymes. Cela est
optique dans le Dictionnaire d'architecture , de Quatre-
mère de Quincy^ oix il est longuement parlé des coupoles
nïmaines et byzantines, italiennes et françaises, anciennes
et modernes, sans qu'il y ait le moindre mot sur les cou-
poles de Saint-Front de Périgueux et sur leurs dérivées,
^nt l'auteur parait avoir complètement igooré l'exis-
teaee.
Du reste, les observations que nous venons de rapporter
QoQt rien de plus imprévu que l'opinion de Cathala
532 GORORÂS ▲RGHÉOL06I0UE DE FRANCE.
Coture, qui dit dans son Histoire du Querey, 1. 1, ch. ti (i),
que les coupoles de Cabors soutun ouvrage des Romaios.
Un peu plus tard, les coupoles de Souillac oui été attri-
buées au Yii* siècle par M. Chaudruc de Crazannes, comme
on peut le voir dans le premier numéro de la première
année, i834, du Bulletin nunmmeniai, entièrement con-
sacré à une revue des principaux monuments du départe-
ment du Lot par cet archéologue du Quercy.
Il était temps que^l'éminent et regretté Félix de Ver-
neilh vint dissiper ces ténèbres, et mettre en lumière dans
son magnifique ouvrage, V Architecture àjfxantine 'en
France 9 l'origine des monuments à coupoles de TAqui-
toine, qui forment cette famille arcbitectonique dont
Saint-Front de Périgueux est le point de départ, et qui
compte Souillac pour l'un de ses membres les plus imper,
tants, ainsi que la cathédrale de Cahors et l'église de Soli-
goac, dont nous citions le nom tout à l'heure.
Mais quelle que soit l'époque de la fondation de l'abbaye
de Souillac, l'église actuelle n'a rien à nous offrir qui se
rapporte à ces temps obscurs. C'est un édifice qui nous met
en présence du xii' siècle. 11 n'est abordable que par le
côté nord ou par le chœur, situé à Test. Les autres côtés
sont coutigus à des terrains ou à des bâtiments , qui pro-
viennent de rancienoe abbaye et appartiennent aujour-
d'hui à radministration des tabacs. Sur la façade, à l'ouest,
est appliquée une tour carrée sans caractère qui formait
porche au rez-de-chaussée. Ce porche aujourd'hui contient
la sacristie, et tout le reste de la tour n'appartient plus en
propriété à l'église. Eu somme, l'extérieur de l'édifice est
d'une grande simplicité, ajoutons même passablement
maussade. Ce n'est pas le même parti pris d'ornementa-
(0 Cité par Calvet.
XLI7* SESSION, A SENU8. 533
tioD qu'à Solignac, où l'on trouve sur les murs deux
éliges d'arcatures trilobées portées sur des pilastres ou des
consoles sculptées. Ici, à la nef, c'est un mur uni, divisé
en deux travées par un gros pilier carré, qui n'a d*autre
fooctîoD que de faire résistance à la poussée des grands
arcs intérieurs.
Chaque travée est percée de deux fenêtres cintrées,
munies de deux pieds-droits qui se prolongent aussi en
archivoltes et dont les angles sont évidés en demi-ronds.
Le second, seul, de ces demi-ronds est garni d'un tore
qui forme colonnette. Une petite porte sans caractère a
éié ouverte au bas de la première travée. Une autre porte
eit aussi pratiquée dans le mur ouest du transsept nord,
Maire par des fenêtres cintrées, ouvertes dans le haut des
murs. Des piliers sont appliqués aux contre-forts sur les
iDglesdu transsept. A l'est, apparaissent les absidioles du
diœur et du transsept, qui constituent, à l'extérieur, la
partie la plus mouvementée et la plus intéressante de
l'édifice.
Trois absidioles, dont une centrale et deux latérales, se
détachent sur le pourtour du chœur et sur chaque mur
oriental du transsept. Cependant l'absidiole du transsept
iud est entièrement cachée par les constructions voisines,
anciennes dépendances de l'abbaye, qui défigurent l'église
sur tout le côté sud.
La région absidale de l'édiflce a été considérablement
restaurée par la Commission des monuments historiques.
L'absidiole latérale nord a même été entièrement rétablie,
car auparavant elle n'était qu'indiquée par les arrache-
Dentfl de ses murs. On peut se rendre compte de cet j§tat
en examinant, à défaut d'autres, le dessin de cette église
donnée par le baron Taylor, dans son Voyag< piiîore$que
U la France, tom. II.
Tootaca ihffîiifllw moêA
9tule teoUxe eenlnk. L'akâlkk àm
tranaepU portent, à leus ngks.
pitfiBT Mii» oai fftutfffgfffitf les
goqhaffiTgnfifnt à moalures, ^»rt 4e
tour 4a dMBar. Tontebû, la
dkORir soot dépoormei àt ces
Le mur anoodi da diœar qui s'fliic ai
akââiola, d'un e&t mÊtt loorl, ctf percé faae no^
de six teoétm dntrées avec aidiiiolle ifrtiagnUire,
Att-deiHtt, dicole une cnrairhe aithstr, ci« cb retraite,
s'élèfe un drmier étage de courauienMBt pcraé amu de
feDètres dotrée^ qui édaîreot la galerie dei coHAIes.
La tour qui domine rintertranaept, à moitié CÊfdbée
par la diarpenle, semble allendre qu'une irilauTitîoo
intelligente la rétabliae dans son ancien état et lui rende
l'aspect imposant qo*en retirerait Pédifiee. Mais il est à
croire qu'elle gardera enccwe longtemps le petit tourilloo
coiffé d'une toiture conique, qui émerge au sommet et qui
figure dans la Tue de l'abbaye que donne le Mammtticum
GaUicanmm,
Mais pénétrons à l'intérieur on se trouve oonceotré
tout l'intérêt du moDument. Uo plan en croix latine, des
voûtes byzantines avec coupoles sur pendenti&« une orne-
mentation romane, comme à Angouléme, comme à Soii-
gnac, tel est l'aspect caracti^ristique sous lequel se présente,
de prime-abord, l'église de Souillac.
La longueur intérieure de la nef mesure 55 mètres,
sa largeur 14 mètres, et l'axe longitunal du transsept
33 mètres.
La simplicité de la nef, beaucoup moios ricbe qu'à
Solignac est rachetée par une certaine élégance, une heu-
XL\y SESSION, A SENLIS. 535
leuse harmonie de proportions, qui reposant et char-
ment la vue du visiteur. La net' proprement dite ,
comprend deux travées séparées par les gros piliers carrés,
qui supportent les grands arcs des voûtes. Sur les murs
latéraus, à chaque travée, sont appliqués deux piliers
carrés plus petits, qui portent trois arcatures en tiers-
point. Les chapiteaux de ces piliers consistent, pour les
trois premiers, du côté nord, en deux ou trois moulures
chargées d'une légère baguette, et pour les autres en un
simple demi-rond.
Les arcatures portées sur ces piliers ne remplissent pas
seulement Toffice de décoration; elles servent aussi à
porter la galerie de circulation, qui règne le long de la
nef en pénétrant les gros piliers.
Les deux fenêtres que nous avons déjà signalées à l'ex-
térieur, apparaissent à chaque travée, au nord et au sud,
dans le mur qui s'élève au-dessus de cette galerie. Au
nord les quatre fenêtres sont semblables. Leur embrasure
est précédée de deux archivoltes et pieds-droits, dont les
uigles antérieurs sont creusés en demi-ronds. Une forte
nervure, formant colonnette avec chapiteau, garnit le
second de ces demi-ronds et se prolonge dans son cintre.
Ub quatre fenêtres du sud sont aussi décorées de deux
archivoltes et de deux pieds-droits dont le premier, seul, est
Mdé en demi-cercle. Le second e^t rectaugulaire et contient
également une nervure à chapiteau qui forme colonnette.
Au-dessus des fenêtres s'étendent les grands arcs appli-
qués aux murs latéraux et appuyés sur les gros piliers
delà nef. Ils déterminent, avec les grands arcsdoubleaux
jetés sur la nef, le carré dont les angles sont rachetés
par des pendentifs ou triangles concaves, pour établir la
1^ circulaire des coupoles qui couvrent les travées de la
oef. Notons que tous ces grands arcs sont en ogive, comme
536 GONGRiS ÂlGHiOLOGIOUB DE FBANGB.
on les voit aussi à Solignac, eomme oot les voyait à Saint-
FroDt de Périgueux, avant sa reconstruction actuelle.
Une corniche, portée sur une série de consoles -d'un
effet très-décoratif, couronne cette base circulaire sur
laquelle règne, entre la corniche et la naissance des cou-
poles, une plate-forme large de plus d'un mètre. Une baie
pratiquée au nord et au sud, au bas de la coupole, donne
accès à cette plate-forme. Le diamètre des coupoles mesure
de iO à il mètres et leur forme intérieure est celle d'une
calotte sphéroîdale un peu surbaissée.
M. Viollet-le-Duc signale une modification apportée
dans la construction des coupoles de Souillac, depuis la
construction de celles de Saint -Front de Périgueux.
a A Saint-Front, dit-il, les arcs-doubleauz sont peu épais
et leurs faces sont verticales; les pendentifs ne commen-
cent à prendre leur ci)urbure que sur l'extrados de ces
arcs. Bientôt cependant les constructeurs pensèrent, non
sans raison, que ces arcs-doubleaux, supportant une charge
énorme, il était nécessaire de donner à leurs claveaux
plus de queue; mais pour ne pas élever démesurément les
pendentifs ou pour ne pas leur donner une trop forte
inclinaison, ils firent participer les claveaux de ces ans-
doubleaiix au premier sphéroïde. Puis, embarrassés de
savoir comment arranger les sommiers des deux arcs-dou-
bleaux sur Tangle saillant de la pile, ils voulurent les
dégager l'un de l'autre le plus tôt possible ; à cet effet, ils
abaissèrent les centres de ces arcs-doubleaux au-dessous
du niveau de leur naissance, et inclinèrent ainsi leur
courbe dès les sommiers. Dans l'église de Souillac les
architectes ont déjà adopté ces modifications. » ( Diction-
naire d'archit., mot coupole.)
Rappelons que la cathédrale d'Angouléme, grand monu-
ment à coupoles de la même fanaille et dont la construc-
XLlV SESSION, A SBNLIS. 537
tion remonte à 1130, montre aussi cette même particula-
rité; la courbure des pendentifs participe des faces latérales
des grands arcs.
A Souillac, la coupole centrale, à l'intersection dutrans-
sept, portée également sur pendentifs, et plus surélevée
que celle de la nef, présente une forme légèrement ovoïde.
Les quatre grands arcs qui la supportent, appuyés sur les
quatre piliers du centre, sont tous aigus, et les deux du
côté du transsept sont renforcés d'un sous-arc, qui repose
sur des colonnes appliquées aux piliers. Les transsepts
aoot voûtés en berceau et leurs murs au nord, au sud et
à Touest, sont ornés de deux arcatures retombant sur des
piliers d'angle et un pilier central.
Près du grand pilier, situé au nord du chœur, se trouve
la porte de l'escalier qui conduit au-dessus des coupoles.
Dans l'état actuel leur extrados sert d'appui à la charpente ;
il est formé d'un épais blocage, cimenté à la chaux, sans
aucune trace de revêtement de pierres taillées. 11 est difHcile
d'admettre que ces coupoles aient été destinées à être appa-
feutes, sans charpente. Cependant le tambour de la coupole
centrale est appareillé avec soin et a toujours dû être visible.
Nous avens déjà vu qu'une absidiole centrale à cinq
côtés, et deux absidioles latérales, éclairées chacune par
une fenêtre, s'ouvrent sur le chœur. Les absidioles du
transsept, également pentagonales, s'ouvrent sur chaque
^ par un arc aigu porté sur colonnes engagées. Les
deux absidioles latérales du chœur sont séparées de l'absi-
diole centrale par une travée courbe, flanquée de deux
colonnes, et percée d'une fenêtre cintrée eous l'arcature
<)ue portent ces colonnes. Entre ces absides latérales et les
piliers qui portent le grand arc du chœur s'étend une
travée droite, divisée par des colonnes en deux arcatures
itroiteB et ogivales.
La fhv
inétedi
lam de ctear la nafée 4c
sn»4^sp»itoàr
DUH tMte cette partie et Yi
Boe omeaKStatioB daaa le ftyle
hewenieiiieBt aiec la nudité
Aimi, Ici dtapiteanx
4a eeatre pfféKnteDt
ruigs de feoilles plates, mt d'
griHbiM alliootés. Aax gnmd»
do transsept ce foot <Jes jfiiilluyi cl ds fimili. Doas k
eiMeor, panai les plos candénstiqaes, ôloas onix su
l'oa ¥oic deoz penonnages Iwanes, acaoapïs^cahcéspii
des hoceaaz; on hoaune entre deoz lions ^Hl tient psi
la gueule; des oiseaox de proie attaqués par des cofembes;
un personnage no, deboot, domptant des umosIrs ailés,
et enfin, près de l'absidiole de ganclie, an cba^tsau
représeotant ane Annonciation et ane femme qui file.
Les murs do chœur imt reçu dans ces derniers temps
des peintures murales, qui sont moins en désaccord avec
l'architecture que celles qui ont eu la prétention d'omei
ses voûtes et Ja coupole ceo traie. Hélas! d'où vienneni
donc, à la Toûte du chœor, tous ces personnages assem-
blés en demi-cercle, assis sur ces sièges et sous ces daii
gothiques fleuris comme en plein x?* siècle? Et à la cou-
pole centrale, que font tout ces personnages aériens, égarés
sous un ciel jaune, à travers des nuages roses? Touti
cette décoration, purement fantaisiste, d'un style théâtral,
^rait à la rigueur excusable si l'édifice qu'elle défîgun
nVtait pas mis sous la protectionque devrait lui assurer ss
qualité de monument historique. Cette protection, si ell(
XLiY* SESSION, A 8ENUS. 539
o'est illusoire, comme on serait ici eD droit de le deroan-
<!er, oe s'étendrait-elle donc qu'à l'architecture, à la slruc*
(ure du monument, sans se préoccuper des dangers que
peuvent faire courir à ces surfaces des décorations laissées
à l'arbitraire d'initiatives inintelligentes? L'intervention
de la Commission officielle sera-t-elle donc indispensable
pour statuer sur une simple réparation, ou sur une modi-
fication justifiées par un besoin réel, pendant qu'il sera
loisible à une autorité locale, ou à une individualité parti-
culière, d'altérer la physionomie caractéristique de l'édifice
par l'application d'un décor extravagant, sous prétexte
qu'il n'atteindra pas en elles-mêmes les formes architec-
turales? Si telle est la doctrine, ou conviendra au moins
qu'elle peut paraître étrange.
Quoique la sculpture décorative ait été traitée dans
l'église de Souillac, surtout dans la nef, avec une grande
sobriété, elle n'en a pas moins produit une œuvre isolée
éminemment remarquable et originale, sur le mur de
l'ouest, à l'intérieur, au-dessus et à côté de la porte
principale.
Une grande arcature en ogive occupe le milieu de ce mur
et repose sur deux piliers qui lui sont appliqués. Dans la
partie inférieure de l'arcature s'ouvre la porte ogivale
flanquée de deux pilastres.
Sur celui de droite se détache en relief la figure en pied
du prophète Isaïe, dont le nom isaus est écrit au-dessus
(le sa tète en caractères du xii' siècle. Le visage, le mouve-
ment des jambes, le geste des bras, les draperies agitées,
la barbe ondoyante divisée en longues mèches, tout carac-
térisé le type consacré du prophète. Il tient à la main une
banderole sur laquelle on aperçoit quelques traces illi-
sibles/l'une inscription. Isaîe a prophétisé la naissance du
Christ qui sera conçu et enfanté d*unt vierge, et ce fait
S40 GONORÈS ÂRGHÉOLOGIOUB DE PRÂNCB.
explique la présence de ce prophète à l'entrée d'une église
consacrée à la Vierge Marie.
Sur l'autre pilastre, à gauche, un autre personnage,
velu d'une robe, d'une physionomie plus calme que le
précédent, a été pris pour Jérémie, pour satisfaire sans
doute au besoin de donner à Isale un pendant symétrique
choisi parmi les prophètes. Mais de même que l'artiste a
mis le nom d'Isale, près de ce dernier, il a pris soin aussi
de graver celui de osbp auprès de son autre personnage.
C'est donc, non pas un prophète, mais un patriarche, le
patriarche Joseph, loué comme tel par l'auteur de l'Ecclé-
siastique, que l'artiste a figuré en pendant à Isale. Peut-
être aussi a-t-il voulu, par ce choix, exprimer une allusion
au futur Joseph, l'époux mystique de la Vierge, la
patronne de l'église (1).
Dans la partie supérieure de l'arcature, au-desaus de
l'arc ogival de la porte, s'étale un sujet d'une compli-
cation animée, encadré dans le haut par un arc surbaissé
à moulures, et sur les deux côtés par deux personnages
assis sur des trônes. Dans celui de droite on reconnaît
saint Pierre. De la main droite il tient la clef sur sa poi-
trine, et de l'autre un livre appuyé sur ses genoux. Ses
pieds nus reposent sur des oiseaux à tètes monstrueuses.
(1) Dans^ l'esprit du sculpteur, interprète à son époque de
croyances reposant sur des textes (|ue l'érudition et la critique
ecclésiastiques n'avaient pas encore nxonnus comme apocryphes,
le patriarche Joseph pouvait aussi se trouver là, à l'entrée de
l'église dédiée à la Mère de Dieu, au même litre que le pro-
phète Isaïe, en raison de la prophétie que Joseph, dans le tes-
tament des douze Patriarches, fait de la sainte Vierge, qui sera,
dit-il, de la tribu de Juda et de Lévi et qui donnera naissance à
l'Agneau de Dieu. Dom Calmet. DM. de la Bible.
XLIF* SESSION, À SENUS. 541
LeseooDd personnage a été pris pour saint Paul (I); mais
il tient de la main droite une crosse qui n'est pas l'attri-
but habituel de cet apôtre, et de l'autre main un livre
appuyé sur i;es genoux. Ses pieds ne sont pas nus, comme
le sont ordinairement ceux des apôtres. Le haut de son
eorps est vêtu d'une sorte de robe collante et boutonnée,
ressemblant à une soutane. Selon toute apparence, ce per-
sonnage est l'évoque ou l'abbé fondateur du monastère.
Lorsque les visiteurs arrivent en présence de ce bas-
relief, ils sont d'autant plus déconcertés qu'ils s'attendent
à trouver, comme le leur ont appris V Architecture bytan-
tme (% et une notice de M. le baron Jules de Verneilh (3),
un jugement dernier traité d'une façon inusitée et présidé
par saint Pierre et saint Panl.
Elle serait bien inusitée, en effet, cette représentation
du jugement dernier, si c'en était une, car il n'y aurait
ni Christ pour juger, ni élus, ni damnés.
Vers le centre de la composition, un personnage est
couché; il sommeille, et parait avoir la vision figurée
dans les deux groupes qui se trouvent au-dessous de lui.
A droite, le démon à tête humaine et hideuse, le milieu
du corps tout velu, est aux prises avec un personnage
qu'à son costume on peut prendre pour celui qui est cou-
ché au-dessus, ils soutiennent une lutte vigiiureuse dont
le sujet est une colonne torse, placée entre eux deux, et
qui supporte un édifice formé d'une nef et d'une tour.
Le démon cherche à renverser et à arracher la colonne des
mains de l'autre personnage. Celui-ci la serre étroitement
(4) Baron Taylor. — f^oy. pitt, de Vancienne France,
(t) Vyérehitecfure by%aniine en France^ par Félix de Ver-
Bâlh, p. t63.
{Z)Buii€tin Monumeniai, IS65, p. 590.
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* «Btre de k fionifienuoi. u: nmcmn»^.- n»
«t pnal. iToi- i;. vwiiii Uf ti^A-
pMpeE qui er trouvfn. aitMhHmiui- di Ik*
4B peut fffwidrt' piiur nriui mn n»> < •'•*
Ik IMDieOBCDt UBi lUltt VlfiriiLiritiiri il«ttf
lorte. piacset cuiri i>u\ rfru^ .
iomit d uiftt lie. t'i i! U"' '"*••
Cl *i arraciici ii« loiiuàii. •«<•
. LeiUt-c Ui mT!*« /■iri.iti'Mi*-"
W'rr. df I nnrtfnnt f'tii,^.
lie:. ^ 5^t
5ii GONGRÀS ARGHÉ0L0OIQ1TB DE FRANGE.
dans 866 bras et l'esprit du mal essaie en même temps de
le frapper avec une arme en forme de coutelas.
A gauche de ce groupe, le démon et l'homme à la robe
sont encore en présence. Ce dernier est assis et regarde
froidement le diable, qui est debout et fait comme un
mouvement en arrière, à la vue d'un philactère ou d'un
volumen que lui présente le saint homme. Évidemment
le diable en est pour ses frais dans son entreprise téné-
breuse et la victoire reste au défenseur de la bonne cause.
Peut-on voir dans cette scène un de ces faits légendaires
si fréquents, vers le xii* siècle, dans l'histoire des fonda-
tions de certaines églises et d'autres édifices, où un pacte
conclu entre le diable et le fondateur joue le Me princi-
pal, sauf plus tard au fondateur à mystifier en bonne
forme l'esprit du mal par une pieuse fraude!
C'est par une interprétation de ce genre que l'un de
nos confrères, M. G. Vallier, propose d'expliquer ce
drame démonographique. Assurément, il est sur la voie,
s'il n'arrive exactement au but. Sans chercher à pénétrer
jusqu'au fond le sens caché de cette imagerie de pierre,
contentons-nous d'y voir le souvenir d'un fait relatif à la
fondation de l'église ou du monastère, entravée par des obs-
tacles que suscite Tesprlt infernal, et que surmontent Téner-
gie et Thabileté du pieux fondateur, assisté par la milice
céleste figurée sous forme d'anges, dans le haut du tableau.
L'interprétation, qui a vu un jugement dernier dans
cette composition, en a retrouvé la suite sur le pilier situé
à droite de la porte. Mais est-il possible de voir la moindre
corrélation entre le sujet que nous venons d'examiner et les
sculptures qui couvrent les trois faces Je ce pilier, complète-
ment séparé du sujet précédent? Nous ne le pensons pas.
Les angles du*pilier sont bordés d'un tore, disposé en
séries de segments <x>ncaves. Sur la face antérieure se déve-
XLIV SESSION, A SENLIS. 543
ioppe, à travers un profond fouillis, un péle-méle savam-
ment enchevêtré, de griffons, d*oiseaux monstrueux, de
ckiens, des truies, de tètes d'hommes qui s'enlacent, se
croisent et se mordent comme dans un affireur cauchemar.
Sur le côté droit, un groupe de deux personnages est
répété trois fois dans la hauteur du pilier. Ces deux per*
tonnages, dont l'un porte une figure juvénile, sont vêtus
tous les deux d*une robe, ou plutôt d'une sorte de jupon
àplib légers. Ils s'étreignent mutuellement dans une lutte
acharnée, où, tantôt l'un, tantôt l'autre, semble être le
plus fort. Il est très-vraisemblable que cette scène, comme
lu reste l'interprète le Voyage pittoresque de Cancienne
Fmee, représente la lutte de Jacob contre l'ange, sur les
bords do torrent de Jabok. « Et il parut en même temps
on homme qui lutta contre lui jusqu'au matin. •
[Genèse xxxii, 2i.) Ainsi. la lutte fut longue, et c'est ce
qo'a voulu exprimer l'artiste en la répétant trois fois dans
trois phases différentes» quoique pou variées.
Un sujet biblique couvre aussi l'autre face du pilier,
la eôté de la porte. C'est le sacrifice d'Abraham figuré en
trois xones. En bas, le bûcher est allumé et près de lui
m enfant couché semble attiser le feu, pendant qu'il est
retenu par le bras d'un corps invisible. Au-dessus Abra-
ham, armé du glaive, s'apprête à immoler Isaac, et,
dana le haut, apparaissent TAnge et l'Agneau tradition-
nels, placés verticalement.
Le pilier situé à gauche de la porte n'a reçu de sculp-
tures, dans sa partie supérieure, que sur une hauteur d'en-
viion 0*30. On y voit aussi, comme sur la face de
Taotre pilier, un commencement de pêle-mêle d'animaux
m<»utrueux.
Quoi qu'il en soit du vrai sens et de la moralité de ces
compositions, leur ensemble, par leur originalité et la
MA CONGRÈS ARGUÉOLOOIOUS DE FRANGE,
verve de leur exécution, forme une page de la sculpture
du XII* siècle des plus digues de l'étude des archéologues.
Quant à l'influence artistique qui aurait inspiré la com-
position du pilier, avec ces enlacements hybrides et ses
fouillis de monstres, n'est-ce pas aller la chercher trop
loin que de la faire venir des Hindous et des Scandinaves,
comme l'a fait l'éminent auteur du Dktifmnûire ramtmé
d'architecture î L'école de sculpture qui avait, au xu* siècle,
son centre à Toulouse et qui a produit l'admirable portai!
de Moissac, doit revendiquer les bas-reliefs de Souillac
pour l'un de ses rayonnements les plus caractéristiques.
Des rapports do parenté intime entre Souillac et Moissac
qui, du reste, dépendaient du môme diocèse, ne sauraient
être méconnus. Les démons de Souillac et ceux du porche
de Moissac, ont un air de famille significatif. Les deux
prophètes Isaïe, à l'une et à l'autre église, présentent une
analogie de traits et d'attitudes qui indiquent la même
origine, et les lions enlacés du trumeau de Moissac rap*
lent singulièrement l'amalgame des monstres de Souillac.
Ghe.rchorons-iious à établir l'époque de construction du
monument quo nous venons d'examiner. Nous n'avons
quo lo caractère do sou architecture pour nous guider. La
motiit\catiou do structure signalée œmme à la cathédrale
d*Augi>uU^uio, dans la pariici)>ation des faces latérales des
grands ari^s à la c^uicavité di^s |Knidoutifs, rornementdlion
di*s chapiteaux du chvvur cl dos transsepts, certaines formes
ogivales aocomi>agnant les formes romanes, tout ne nous
|H'rmot-il |wisdo re|H>rtor rô\titico à la uuùtié du xn* siècle?
Avant do quitter IVgliso do Souill.ic, jetons encore un
Cimp d umI dVtts«nnblo sur S4ni uUoriour et admirons toute
riu: uuHuo do SOS Jis|v^mUous, nef, chivur et transsepts.
No nMhw-t<llo (VAS dans toute sa plouilude le type idéal
du plan liturgique ^^''laluo {varie développement descéré-
XLIY* SESSION, A SENUS. 845
nonies du culte? Par une exception fort rare aujourd'hui^
fautel moderne est presque à sa vraie place, presque au
centre, à l'intersection de la nef et du transsept, sous la
grande coupole qui lui sert de ciborium ; de là, il est vu de
toas les points ; il commande à toutes les parties de l'édifice
ijuiaété bâti pour lui. Il est là, conforme à la prescription
do JRational de Guillaume Durand, qui veut que l'autel
mt placé dans Téglise, comme le cœur dans le corps de
l'homme.
Nous avons cependant entendu dire que cet autel était
oièDacé d'être déplacé, sous prétexte qu'il cachait le
|«étre officiant à la vue des fidèles rangés au fond du sànc^
toaire. Pourquoi aussi avoir établi à grands frais un
Intel à gradins, à surélévation encombrante, et qui n'est
pu plus, là, à sa place, que les peintures soi-disant
pthiques qui sont à la voûte du chœur? Si l'on eût mis
nu autel du xii* siècle, à table unie, en rapport avec l'ar-
éiCecture, l'inconvénient dont on se plaint ne se produi-
ait pas et tout serait pour le mieux.
Les bâtiments de l'ancienne abbaye, comme nous
l'ivons déjà dit, dépendent aujourd'hui de l'administra-
tion des tabacs. Ils datent en grande partie de la recon-
itruetion du xviii* siècle et l'escalier principal, seul, pré-
Mte quelque intérêt.
M. Albert Lenoir, dans son Architecture monastique,
faîtressorti r la particulari té qu'offrait la forme de la première
aiceinte de l'abbaye de Souillac dont il donne un ancien
pian sans eu indiquer l'origine. Elle était circulaire, comme
k représente la vue du Monasticum GaUicanum. « Ces
fNtnes symboliques étaient rares et avaient pour but de
appeler l'éternité, comme celles de quelques cimetières
dltalîe qui sont enceints par un cercle. Le monastère
d'Abington, en Angleterre, était aussi circulaire à l'origine,
XUY* SESSION. 35
546 GONGBiS 'ARGHÉOLOGIQUE DB FRANGE.
et par une raison analogue, l'abbaye de Gentula, fondée
sousCharleinagne, était construite sur une forme triangu-
laire en l'honneur de la sainte Trinité. » (Arehitecture
monastique, 1. 1, p. 50.)
La route de Souillac à Gourdon est longue, et il fallait
dans la journée remplir nos devoirs envers cette dernière
ville, sans manquer un arrêt au Vigan. Donc à dix heures
du matin, le 9, s'exécutait le départ de Souillac dans
l'ordre accoutumé.
Le Vigan est un gros bourg agréablement situé dans
une belle vallée, et son église doit réclamer la visite de tout
archéologue qui passe de ce côté. M. le curé a bien voulu
nous en faire les honneurs avec la meilleure grâce. Cette
église est une ancienne collégiale reconstruite depuis l'ori-
gine de son chapitre. Le Vigan, au ix' siècle, se nom-
mait Carbanacum et possédait déjà un petit monastère
(Gellula), dans lequel sainte Charité était ensevelie;
c mais non suivant son mérite (non sub ordine prout
decebat venerari). « C'est du moins ce que constate un acte
datant de 892 à 896, et relatif à la dotation de cette église,
par Gausbert, évéque de Cahors.
a Sous le pontificat de Grégoire VII (i073-t08o),
l'évéque de Cahors, Gérard II, donna l'église de Carban-
nac qui s'appelait déjà le Vigan aux clercs de l'abbaye de
Saint-Sernin de Toulouse, afin qu'ils y vécussent selon
les règles de saint Augustin et de saint Jérôme. Ce même
Gérard, ou son successeur du même nom, érigea le Vigan
en doyenné (i). » En H43, Pierre, archevêque de Bourges,
confirma le chapitre du Vigan dans la possession des
églises de Gourdon, de Saint-Hilaire, de Masclatet de
Saint*Étienne de Genouilhac. En 1309, Raymond II Pau-
(4) LongpoD. Fouillé du diocèse de Cahors.
XUy* SESSION, A SENLIS. 547
chelle, évéque de Cahors, ordonna qu'après la mort de
Raymond de Salvières, prieur du Vigan, les évoques de
Cahors seraient seuls prieurs de cette église (i).
C'est à la suite de cette décision que l'église actuelle
aura sans doute été rebâtie. Son style du moins permet de
le supposer.
Le monument se présente sous l'aspect imposant d'une
haute nef enserrée par de puissants contre-forts, et percée
de fenêtres où le xiv* siècle se montre vigoureusement
accusé. L'intérieur offre un plan d'une forme inusitée,
mais cependant d'un heureux effet, qui semble donner
ane élégante profondeur à Tédifice. D'abord c'est une nef
unique, formée de trois travées à voûtes élancées, por-
tées sur nervures; puis un transsept. Mais la troisième
travée, vers le milieu de ses murs latéraux, va en s'éva-
sant pour se joindre au transsept. Trois absides parallèles,
à fond polygonal, juxtaposées à l'est, font face à la lar-
geur de cette travée. Deux piliers s'élèvent pour soutenir
les voûtes, à droite et à gauche de l'axe central de la nef,
sur l'alignement du mur occidental du transsept et sur
celui des côtés parallèles de l'abside centrale. Deux autres
absides, moins profondes qus les précédentes, occupent
les extrémités orientales de chaque bras du transsept. Le
[1) « Provide ergo volumus, statuimus et etiani oriiioamus de
communi conseusu pr»dicto auctoritate nostra. et poteslate nobis
tradita, quod de ca)lero noo sit ibi Prier, sed domino Raimundo
deSalviaco Prière, qui nunc estcedente et deceilente, nos simus
el es>e debeamus Abbas, et Pra^latus superior et immediatus
looo Prions qui ounc est el successores nostri qui pro tempore
fuerÎDt Episcopi Cadurcenses eo ipso quod erunt Episcopi ipso
lado siot, et de jure reputentur Abbates in ipsa Ecclesia post
mortem vel decessum dicti Prioris. » Séries et Acta episcopo'
mm Ccuiurcensium,,, auctore Guillelmo de La Croix.
548 GONGRiS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
plan ci-joint, relevé à la hâte, par notre confrère M. Nodet,
fera mieux comprendre que tout essai de description
la disposition de l'édifice et Tagencement de ses voûtes.
L'ensemble de l'église, comme nous l'avons dit, se rap-
porte au xiY* siècle, cependant la première travée vers
l'ouest parait avoir été ajoutée ou considérablement
remaniée au xv*.
Nous ne pouvons qu'indiquer, dans notre trop courte
visite à cette intéressante église, l'importance des magni-
fiques vitraux qu'elle a conservés. Espérons qu'ils seront,
pour quelques-uns de nos collègues du Lot, le sujet d'une
étude spéciale qui ajoutera une nouvelle page à l'histoire
des richesses artistiques, quelquefois trop méconnues de
cette région de la France.
M. le curé du Vigan possède plusieurs poteries romaines,
trouvées dans le pays, témoignage de l'ancienne origine
de cette localité. Il a bien voulu nous les montrer, en
permettant à M. Nodet d'en prendre des dessins, et c'est
par un court examen de ces objets que nous avons ter-
miné notre halte au Vigan.
Une heure après nous arrivions à Gourdon.
Comme Tétymologie celtique de ce nom l'indique (Cor,
Dun,\e mont des corbeaux), cette ville s'élève sur unehau-
teur et se trouve dominée par son église depuis la démo-
lition de son ancien château qui occupait la partie la plus
culminante du coteau.
Rues étroites et tortueuses, tel est l'aspect de la ville
haute. Car il y a la haute et la basse ville. Quelques restes
des anciens remparts sont encore apparents autour de la
ville haute. A l'entrée de la rue principale qui remonte
celle dernière, près de l'ancienne porte, on remarque
une petite chapelle qu[ n'a rien de monumental. Nous
n'en parlerions pas si elle n'occupait l'emplacement de
ZLIY* SESSION, A SENlJS. 549
l'ancieD grenier où les consuls de Gourdon tenaient le sel
€D dépôt, pour le vendre aux habitants de la ville, qui^
par un privilège spécial^ étaient exempts de cet impôt;
iU n'avaient seulement qu'à en payer le prix de revient.
D'ailleurs, les consuls et habitants, soit dit à propos de
cette exemption, paraissent avoir joui de plusieurs privi-
lèges fortaccomodants, que leur octroyait, dès le xiii* siècle,
la charte communale de cette ville : a Nous accordons, y
est-il m, aux consuls et aux habitants que ceux qui vien-
dront aux marchés de ladite ville, qui se tiennent ordinai-
rement le jeudi, ne puissent y être arrêtés pour dettes
fiscales ou autres, ni les denrées qu'ils apportent être
prises ni saisies depuis l'heure de midi du mercredi jus-
qu'à la même heure du vendredi suivant (i). b
Cette rue conduit vers l'église Saint-Pierre. D'anciennes
maisons, depuis le xiu^ siècle jusqu'au xvr, apparaissent
des deux côtés, presque à chaque pas, et présentent d'in-
ressants détails caractéristiques de ces époques. Citons
surtout une maison du xiii' siècln dont les portes et fenê-
tres du rez-de-chaussée ont été refaites à la Renaissance.
L'église Saint-Pierre se présente avec une façade flan-
quée de deux tours carrées. L'ensemble ne manque pas
d'une certaine grandeur, rehaussée par un aspect mili-
taire, car la façade entre les deux tours qui la dominent,
est surmontée d'un* mur crénelé reposant sur des mâchi-
coulis. En bas un portail à voussures ogivales est percé
entre les deux tours, et au-dessus, dans le cintre, s'épa-
nouit une belle rose accompagnée d'oculi à quatre lobes,
au fond d'un cercle de voussures. Les colonnettes du por-
tail, avec leurs chapiteaux à deux rangs de feuilles, les
profils de leurs bases et des autres détails, tout caractérise
(I) A. Malte-Brun, La France illustrée.
550 CONGBiS AECnÉOLOOIQUE DB TftAKCB.
uDe construction du ziv* siècle, moins œpendant It
partie fortifiée, qui date de la fin du zy*. Les feuillages
font les principaux frais de l'ornementation du portail
traitée avec élégance. Cependant le pilier formant contre-
fort, appliqué à Tangle gauche de la tour du sud, porte
un chapiteau à personnages exécuté auec beaucoup de
finesse. C'est l'histoire d'Adam et d'Eve, placée là en évi-
dence, comme un enseignement perpétuel. D*abord, la
tentation au pied de l'arbre chargé du fruit défendu, l'ex-
pulsion du Paradis après la désobéissance, et la condamna-
tion au travail de nos premiers pères, figurée par Eve qui
file la laine et Adam qui laboure la terre.
Une nef d'une ampleur harmonieuse, terminée par une
abside à sept pans, forme l'intérieur de l'édifice. Une
légère déviation vers le nord est visible dans son axe. Trois
travées, plus une quatrième qui se prolonge sous les ,
tours, composent cette nef. Sur la dernière travée, avant
l'abside, s'ouvrent deux chapelles carrées qui forment
transsept. Deux autres chapelles, comprises entre les con>
tre-forts, s'ouvrent également sur le côté nord de la nef
ot une cinquième sur le côté sud, dans la deuxième
travée.
De longues fenêtres à lancettes éclairent l'abside. Celle
du fond est partagée par deux meneaux et les autres par
un seul. Les colonnettes élancées portent des chapiteaux
caractérisés par les deux rangs de crochets du xiv* siècle.
Deux roses sont ajourées au-dessus des deux chapelles qui
précèdent labside. Les voûtes croisées sur nervures, pré-
sentent à leurs clefs, dans la nef. les symboles des Évan-
g^listes et dans Tabside VAgnus iPti, Comme souve-
nir de Tancienne splendeur de Têdifice, les fenêtres ont
ci>aserYé de magnitiques fragments de vitraux du xiv^siècle.
A Textèrieur de Tahside^ de puissants contre-forts con-
XUT* SESSION, A SENUS. 551
trebuttent les angles des murs. On en retrouve aussi de
semblables aux angles des chapelles latérales qui forment
trannepts : mais là, la construction de ces chapelles pos-
térieures à la nef, a donné lieu à une particularité de
reprise qu'il faut signaler.
Sur le mur et au bas de l'abside un premier contre-fort
était appliqué; un second a été ajouté en retraite sur ce
premier ; mais, de plus, il a été prolongé pour former le
mur du fond oriental de la chapelle, et la fenêtre dont il
fft psroé se trouve prise, moitié dans la maçonnerie même
du contre-fort, et moitié dans son prolongement.
En somme l'église de Saint-Pierre de Gourdon est un
édifice d'une importance et d'un intérêt qui justifient son
classement parmi les monuments historiques. La Statii-
tique de Deipont, dépourvue de détails descriptifs à son
endroit, nous donne i304 pour date de sa fondation et
1415 pour celle de son achèvement. Le style, les détails
de construction s'accordent généralement avec ces époques.
Le même ouvrage indique aussi les dimensions suivantes:
longueur de la nef 4i"'30, largeur il™60, hauteur des
tours 34 ou 35 mètres.
Gourdon possède encore deux autres églises. L'une est
celle des anciens Cordeliers et se compose d'une seule nef
à quatre travées, terminée par une abside polygonale. Les
nervures des voûtes retombent sur des colonnes tronquées,
appliquées aux murs. A la première travée, la clef de
▼oûte porte au centre une main bénissante et dans la bor-
dure circulaire la date de MCCLXXXVIL Deux chapelles
carrées s'ouvrent sur le côté nord dans les deux premières
travées. Mais tout cela n'ofi're qu'un intérêt fort médiocre.
Cependant les visiteurs sont amplement dédommagés par
on objet d'un véritable intérêt et qui parait dater du
xnT siècle ou du commencement du xv*. C'est une très-
553 GONGRiS ▲RGHÉOLO0IOUB D8 FRANGE.
curieuse cuve baptismale en pierre et circulaire. Elle est
divisée sur son pourtour en arcatures trilobées qui abri-
tent les douze apôtres présidés, au milieu, par le Chriat
assis, ayant saint Pierre à sa droite. Le diamètre de la cuve
est do l"'â5 et sa hauteur de O""??. Malheureusement l'état
de conservation du monument n'est pas parfait. Mais tel
qu'il est, il a droit aux égards les plus sérieux pour être
protégé contre de nouvelles dégradations, et il se recom-
mande au crayon des archéologues et des dessinateurs
qui résident ou qui passent à Gourdon.
Nous ne parlerons de la troisième église, dédiée à aaint
Siméon, que pour signaler sa belle chaire en bois, ornée
de sculptures irès-fouillées dans le style du xtii* siècle.
Elle a pour support un Hercule, vêtu de la peau du lion,
que l'on ne s'attendait guère à trouver en pareille fonc-
tion. Le grand panneau qui s'élève derrière la chaire
représente saint François recevant les stigmates, et sur le
panneau central de la chaire même on voit le Christ ensei-
gnant, accompagné de l'inscription Spiriius super me,,. A
sa droite se tiennent deux saints et à sa gauche un per-
sonnage, la main appuyée sur une croix, avec un chapeau
posé par terre. Dans les pendentifs placés sous ces pan-
neaux sont figurés les Ëvangélistes moins saint Jean.
Dans le vallon qui s'étend au-dessous de la ville, au
milieu d'un site pittoresque, s'élève l'ancien sanctuaire 46
Notre-Dame des Neiges, qui de tout temps a été danlFll
pays, l'objet d'une grande vénération. C'est au chapftla
du Vigan, en iOiO, qu'est due la reconstruction delà
chapelle actuelle qui en a remplacé une plus petite et
insuffisante pour l'affluence des pèlerins. Cejiendant l'édi-
fice est d'une grande simplicité et n'a pas été achevé. Il
est de forme rectangulaire. La porte de la façade est flan-
quée de deux colonnes ioniques qui soutiennent un fron-
l
ZLIT* SESSION, A SENUS. 553
|tak arrondi chargé d'un écusson sans armes. La tour qui
devait l'accompagner est remplacée par une charpente
I disgracieuse qui soutient un modeste campanile. Sur le
linteau de la porte, on lit Tinscription suivante, où se
tmuve résumée, dans une rédaction qui ne brille pas pré-
ôiément par la clarté, l'histoire de ce sanctuaire :
D. 0. M. V. Q. M.
S.
^ACSUULUM JÀM A MULTI8 S^GULIS SIBI DIGATUM PALAM
'ASSEaVlT Y1R60 DEIPARA, INSOLITOQUE IfUMINB VRJK-
^UTIA ET GOLLATIS IN CLIENTES SUPPLICES BENEFIGIIS
^fiBEM SIBI 6RATAM PROMULGaYIT ILLUSTRA VIT. AUXÉRE
FIDEM HIRAGULA. ET GUM DEYOJISSlMiE PLEBIS PIETAS
CATERVATIM AlCURIT UT DONET ET P&TAT, YENERABILB
^^APITULUM VIGANENSE H ANC CONSTRUl PIISSIME GURAVIT
^DEM 8AGRAM, ANTIQUUM SAGKARIUM UOG AMPUORE
GONGLUSIT. PRIMORDIA EQUIDEM UTRIUSQUE PARVA 8ED
OtriD 0MNIP0TENTI3 MATRI NON FACILE. OMNIA POTEST
'KR FILIUM GREDE ET ORA. ANNO REPARATiB SALUTI8
MlKaCLVI.
* JHeu Taut-Puissant et Très- Grand et à la Vierge Marie
Salut.
« Mtinctuaire a été depuis de longs siècles dédié à la sainte
Vierge, la mè*e de Dieu Va affirmé publiquement elle*
^éme. Et par une influence inaccoutumée, par sa pré^
^^nce et par dis bienfaits sans nombre accordés aux
I^'^es des pèlerins, elle a fait connaître que cette
^^meure lui était agréable et Va rendue célèbre. Les
'''^^cclei accrurent la confiance. Et comme la dévotion
554 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANCE.
amenait ici en foule le peuple fidèle pour donner et pour
demander, le vénérable chapitre du Vigan, pousié par
sa piété, a fait construire cette chapelle. Jl a eu soin de
renfermer l'antique sanctuaire dans celui-ci bâti sur dn
proportions plus vastes, proportions de l'un ei de tatitre
bien modestes, il est vrai, mais qu'y a-t-il de difficile a
la mère du Tout- Puissant? Par son fils elle peut tout,'
Croyez et priez.
Van de grâce 1646.
Au-dessus d'une porte latérale un bas-relief représente
une scène à quatre personnages, dont un homme et trois
femmes. Nous savons que l'on croit voir communément
dans ce bas-relief le miracle de Notre-Dame des Neiges
arrivé au iv* siècle à Rome, sous le pape Libère, sur
l'emplacement où s'élève la basilique Libérienne, plus
connue sous le nom de Sainte-Marie-Majeure. Dans celte
interprétation a le pape Libère est au milieu du tableau
ayant à sa gauche son porte-croix. A sa droite la matrone
Patricia lit au Souverain Pontife, en présence de son
époux, la donation qu'ils font d*un commun accord de
tous leurs biens à la sainte Vierge ». Article anonyme du
journal Le Gourdonnais du 4 août 1877.
Malheureusement il nous a été impossible de recon-
naître dans le bas-relief en question le sujet que nous
venons de rapporter, malgré tout le désir que nous aurions
eu de retrouver, dans Thuroble sanctuaire du Quercy,
le souvenir d'un rapport quelconque avec la grande
basilique de l'Esquilin à Rome. Ces quatre personnages
nous ont paru représenter trois femmes et un hommei
autant que peuvent nous servir nos souvenirs et nos notes
prises sur place. La première de ces femmes placée à
droite semble recevoir les deux autres qui viennent à elle?
XLIY* SESSION, A SENLIS. 555
pendant que la seconde lui offre un objet semblable à un
livre ou à une couronne. Il s'agit, sans doute, d'un fait
relatif à la fondation du sanctuaire.
La chapelle de Notre-Dame des Neiges possédait autre-
fois un trésor digne de la vogue dont jouissait ce lieu de
pèlerinage. En quoi consiste-til aujourd'hui? Nous ne
saurions le préciser. L'heure avancée de la soirée nous
obligeait à raccourcir notre visite. Cependant nous avons
pu examiner avant de partir un intéressant reliquaire du
XY* siècle. Cette pièce d'orfèvrerie se compose d'un
prisme en cristal à six faces, garnies en haut et en
bas d'une plaque en vermeil trilobée. Le tout est sur-
monté d'un cône allongé, terminé par une boule qui
porte la croix. Le pied, fort élégant, est muni de trois
godrons et couvert, comme les armatures des six faces, de
dessins finement gravés.
Jules de Laupierb.
LE PONT DE VALENTRÉ
A CAHORS
NOTICE HISTORIQUE ET ARCHÉOLOGIQUE
A la fin du xiii' siècle, les habitants de Cahors fran-
chissaient la rivière du Lot, qui entoure presque entiè-
rement la ville, au moyen de deux ponts. Le premier, bâti
au sud de la ville sous le règne d'Auguste, était muni de
tours (1) et communiquait avec plusieurs routes impor-
tantes (2). On l'appelait le Pont>Vieux. Le second, situé à
(\) Ce pont était défendu par trois tours. Celle du milieu
appartenait au chapitre qui y percevait un droit de péage; elle
figure dans son sceau qui portait un pont à trois tours d'un côté
et la lapidation de saint Etienne (patron de la cathédrale] de
l'autre.
(2) Trois grandes voies romaines traversaient le Lot à Taide
de ce pont. C'étaient :
« 1° La grande route de Cahors à Toulouse que rejoignait à
Casteinau-Moniralier la route de Cahors à Moissac.
« S° La grande voie de Cahors à Rodez qui se bifurquait i
Beauregard avec la voie de Rodez à Toulouse.
c 3<> La grande voie de Cahors à Âgen. •
(E. Castagne, Notice sur les voies romaines du départe-
tnent du Lot. 1877.)
XUY* SESSION, A SBNUS. 557
qui s'achevait par les soins des consuls allait du
Btttlier au faubourg de Cabessut. C'était le Pont-
Ce fat à cette époque que l'évéque Barthélémy de RufiFy
t^Qt le projet de bâtir un troisième pont à l'ouest de
ùkùRj au port de Valenlré a qui était déjà un des lieux
bplas firéquentés de la ville (2). » Les revenus de l'évô-
àk de Gahors ne pouvant suffire à d'aussi grandes
Mpnses, l'évéque implora l'assistance du Souverain
tatife. c 11 lui communiqua, rapporte Dominicy (3),
kfaaein qu'il avait de construire le pont de Valentré et,
fnr l'ayder dans cette entreprise, le pape (Alexandre IV]
ladMioa SOO marcs d'argent à prendre sur les usuriers,
{■otorqaaient au-dessus de vingt pour cent (4). b
Ouhala-Goture prétend que « cette somme n'étant pas
Mifée suffisante pour les frais de cette grande entreprise,
hrtMlemy fit frapper de la monnaie dont l'aloi était
Le Pdot-Vieax n'existe plus. Le service de la navigation du
Il oéoessilait la démolition des trois arches encore subsistantes ;
I mU, il avait été remplacé, des 1835, par un nouveau pont,
frfé le pont de Saint-Georges, du faubourg qu'il dessert.
(I) La construction de ce pont dura trente-deux ans (4S51-
83) et les dépenses s'élevèrent à la somme de S5,000 sols
K Archives originales, 30 mai 4S87. »
Bibliothèque communale de Cahors. Manuscrits.
;t) Histoire du Quercy du xii'' au wif siècle, par M. l'abbé
Ival, prébendier au chapitre de Cahors. Bibliothèque commu-
• de Cahors. Manuscrits.
3) Histoire du Pais de Quercy, par Marc-Antoine Domi-
;y. Bibliothèque du Grand-Séminaire de Cahors. Manuscrits.
[i) « Par une bulle datée des ides de janvier 4261, le Sou-
rtîD Pontife consentit à faire l'abandon en faveur de la corn-
558 GONonis iRCHiOLoaiQUB sb frange.
plus bas qu'à l'ordinaire (i). I^e peuple en murmura mi
révoque, sur la prière des consuls, remit la monnaie à
l'ancien taux. In lege dit la chronique (2). b
L'évoque Barthélémy ne parvint pas à réaliser celt«
magnifique conception (3); les évéques ses successeurs [A)
semblaient môme l'avoir oubliée, quand Raymond Pan-
chelli fut élu évéque de Cahors (5). Sous son épiscopat et
près de trente ans après la mort de Barthélémy de RufTy i
les consuls de Cahors exécutèrent le projet de ce graad
prélat; o j'apprends d'un viel mémoire, rapporte Domi-
nicy (6), que du temps de ce Raymond feut repris le
dessein qu'avoit formé Barthélémy de Ruffy, son devaa-
cier, de bastir un pont de pierre au port de Valeniré, »
En effet, le dernier jour du mois d'avril de Tannée 1306,
les consuls de Cahors, assemblés dans la maison com-
mune, résolurent pour le bien de la communauté et
l'utilité générale de bâtir un pont de pierre au port de
Valentré. Il est stipulé dans cet acte, que les consuls
auront la garde perpétuelle de ce pont qui sera construit
mune de Cahors, d'une somme de deux cents marcs d*argeat, à
prélever sur le produit des restitutions secrètes en fait d'usure,
vol et autres biens mal acquis. »
(Raphai^ Férié, Histoire du Çuercy, tome IL)
(4) La valeur de ces pièces étaient de 8 deniers. On lit sur
les unes KPISCOPVS CADVRCENSIS. Sur les autres : CIVITAS
CADVUCIS.
(t) Histoire politique, ecclésiastique et littéraire du
Çuercy^ par Cathala-Coture. avocat au parlement, tome I^'.
{:\) Barthcleaiy de lliiffy mourut le 9 septembre 4 J73.
(4) Raymond de Corail et Sicard de Monlaigu.
(o) Évèque de Cahors de l.iOO à 43IS. « Guillaume delà
Croix. Séries et .-icta Episcoporum Cadurcensium, ■
(6) .M. -A. Dominicy, loco cifUto.
XLIY* SESSION, ▲ SENLIS. 559
10 leur nom (1). Les deux ann/^s qui s'écoulèrent entre
h décision des consuls et le commencement des travaux
furent, sans doute, consacrées à rechercher d'habiles
oavriers et à rassembler les matériaux nécessaires. Ces pré-
puatib terminés, «en 1308, maître G. de Sabanac(2), doc-
teur ès-lois, et le lundi avant la fête de saint Jean-Baptiste
(17 juin), fut commencé le pont de Vaientré et ledit
ultre G. de Sabanac posa la première pierre dudit
poot (3). B
Les revenus de la commune, si considérables qu'ils
fusent, devinrent bientôt insuffisants pour couvrir les
dépenses que nécessitait cette importante construction (4).
Les consuls sollicitèrent des secours des rois de France
qui déjà leur avaient accordé certains droits lorsqu'ils
Utissaient le Pont-Neuf. Le roi intervint pour la première
(1) Extrait du Livre cousulaire appelé Te Igitur, folio 70.
Bibliothèque commuDale de Cahors. Manuscrits. Voyez les
pièces justificatives, n» 4 .
(2) Il était qualifié de premier consul.
(3) Te Igitur, folio 5i. Voyez les pièces justificatives, u^ IL
(i) Les deux cent marcs d'argont accordés par le pape, en
admettant qu*ils aient été prélevés, ne furent pas employés à la
construction du monument qui fait l'objet de cette étude : « On
a cru que ce secours prélevé sur l'usure avait puissamment
eooiribué i la construction du joli pont de Vaientré, d'où naquit
QD jour cette croyance ridicule que le diable l'avait construit...
« ... Cest là une opinion erronée : la chose est évidente,
attendu que, dansMa bulle en question accordée en 1^61, par
Alexandre IV, il est formellement dit que le pont à la construc-
tion duquel est destinée la somme précitée pst déjà commencé
(gui construilur). Or les premiers fondements du pont de
Vaientré ne furent jetés par les consuls que plus tard en 1308. »
M. Raphaël Périé, Histoire du Quercy^ vol. II«.
560 CONGRÈS ARCnÉOLOOIOUS DE FRANGE.
fois en 1309. Aucun chemin convenable ne reliait la vill
au pont de Yalentré, l'ouverture en étant devenue indis--
pensable, le roi, sur la prière dès consuls, ordonna à son
sénéchal de Périgord et de Quercy d'examiner oett»
affaire et d'accorder aux consuls ce qu'il jugerait oonve*
nable(l).
En 1313, le roi Phihppe IV mande àJehand'Arreblaje,
son sénéchal de Périgord et de Quercy, de vjeiller à oeqoe
les droits de barres (i) qu'il accorde aux consuls Boieot
intégralement payés par tous ceux qui y sont sujets (3).
En transmettant cette ordonnance à Estienne Lascou, aoo
lieutenant, et k Pierre Duval, bailli royal de la séné*
chaussée de Cahors, Jehan d'Arreblaye leur recommandf
(\) Archives originales. Bibl. corani. de Cahors. BiaouscriU.
Voyez pièces justiticatives, u» 3.
(2) Droit de barres. C'était le droit qu*avaient les consuls de
mettre des barrières aux portes de la ville, aGn de faire payer
UD6 re.levaDce rôglôe suivant la nature où la quantité des deii-
rées où des marchandises apportées.
Vers la tin du xiv« siècle on distinguait à Cahors : c Le portai
des Morouls, lo portai Garrcl, le portai Alban, lo portai Ser-
resta, la porte Saint-Miohoi. portos du Pont-Neuf, barry desSon-
birous, dovatit la porte Saint-Michel, barry dél Portal-Garrel,
barry de Mal-Alias, porte Neuve (Mal-Plays), barry de Piolac,
barry de Lafon, barry de Labarre. » Emile Oufour, avocat. Notes
sur Cahors.
(3) Archives originales. Voyez piiVes juslilicativcs, n® 4.
M. Lafoste ajoute : « Le roi accorda à la ville de Cahors la
permission de lever, pour la construction du pont de Valentré
un droit sur le bli^, le vin et autres denrées, appartenant même
au clergé, qui entreront en ville. •
((lUillaume I^acoste, Histoire du Çuerctj, tome IV. Bibliolh.
comm. de (Jihors. Manuscrits.)
my de Roux
e de Cahors
50 à 1873
Hugue Geraldi
Evêque de CaKors
Je 1312 à 1317.
Sioard de Monlaigu
EvéquB de Cahors
de 1293 à 1300,
XUY' SESSION, A SENUS. 5Ci
de veiller avec le plus grand soin à ce que les volontés du
roi soient exécutées promptement. Ce droit de barres Tut
confirmé à différentes époques par les rois de France,
notamment en idl4(i) par le roi Philippe lY, sur la
demande du malheureux évéque Hugues Geraldi , et
renouvelé pour trois ans, par lettres du roi Philippe V,
datées du il juin i3iO (S). Avant l'expiration de ce délai,
les consuls s'adressèrent encore au roi de France qui, le
25 janvier 1323, confirma et renouvela pour trois ans, à
partir de la fête de la Purification de la bienheureuse
Marie (S février), les droits accordés par les rois ses prédé-
cesseurs. Charles lY exige que les personnes préposées à la
perception de cet impôt, dont le produit sera exclusive-
ment affecté ù la continuation des travaux du pont de
Valentré, soient d'une probité reconnue et qu'elles
rendent un compte exact de leur gestion, de façon à ce que
les consuls ne soient pas lésés dans leurs droits (3).
Quoiqu'on ne sache pas exactement ce que rapportaient
CCS droits de barres, il est permis de croire qu'ils ne suf-
fisaient pas à couvrir entièrement les frais de construc-
tion, et, sans doute, les consuls devaient consacrer à ces
grands travaux une grande partie des revenus de la com-
mune (4).
(4) Archives originales. Bibl. comm. de Cahots. Voyez pièces
justificatives, d* 5.
(2) Archives originales. Voyez pièces justificatives, d«* 6.
Afin d*éviter la fraude, on devra confier la perception de
cette taxe à deux ou trois hommes probes qui surveilleront
remploi de l'argent.
(3) Archives originales. Bibl. comm. de Cahors. Manuscrits.
Voyez pièces justificatives, n* 7.
(i) La commune do Cahors était prospère à cette époque,
puisqu'on 4367 les revenus de la ville ^'élevaient à 4,433 livres,
xuv^ nsBioir. 36
562 CONGRÈS AUGHÉOLOGIOUB PB FR^CE.
Les droits de terres accordés par le roi Charles le Bel
en 4323 allaient bientôt expirer ; Pierre Marin, Guillaume
d'Angolesme, Donadieu et Lastier qui dirigeaient alors
les affaires de la commune, préoccupés d'assurer la conti-
nuation des travaux, résolurent d'envoyer l'un d'eux à la
cour solliciter la prorogation de cette taxe, et le dénier
jour du mois de mai 1328, Pierre Marin, consul de
Cahors partit pour Taris, a Son voyage dura quarante-âx
jours, il dépensa, pour sa nourriture et celle de son valet
et de son cheval, dix-sept livres cinq sols tournois. Les
lettres de barres qu'il obtint pour quatre ans, lui coûtèrent
douze livres onze sous pour le sceau ; le louage du cheval
pendant les quarante-six jours coûta six livres dix-huit
sous; il eut sept sous six deniers pour la chaussure de
son valet (i). » La mission du consul de Cahors fut cou-
ronnée de succès, car le roi Philippe VI de Valois renou-
vela pour quatre ans les droits de barres. Comme tou-
somme considérable pour ce temps, où la quarte de blé se ven-
dait de 0 à 7 sous et le vin de H à 1 6 sous la barrique (220 litres
environ). Il est vrai de dire que dès 1370 la t disette fut telle,
que les recettes du cliapilre, qui s'étaient élevées, en 4 345 et les
années suivantes, à 2,657 livres d'argent, 4 267 setiers de blé et
6,530 setiers de vin, ne furent plus en 1370 et 1374 que de
407 livres, 150 setiers de hlê, 758 setiers de vin. »
Archives originales, n» 4 23. Bibliothèque communale de
Cahors. Manuscrits.
« En 4 373 et 1387, les consuls de Cahors ne purent payer la
rente qu'ils faisaient à Tévèque, rente qui n'était pourtant que
de 100 livres. »
(Emile Dufour, avocat. La covimune de Cahors au moyen
âge, page 459.)
(4) Chroniques de M. l'abbé de Foulhac. Bibl. comm. de
Cahors. Manuscrits:
XLIY" SESSION, A SENUS. 563
jouis, ce péage devra être perçu par des hommes honnêtes
qai rendront tous les ans un compte sévère de leur ges-
tion (1). Dès son retour, les Cadurciens, reconnaissant le
grand service que venait de leur rendre le consul, lui
donnèrent de très-brillantes fêtes et lui offrirent une robe
d'honneur valant 10 livres (2).
La guerre de Cent Ans, qui venait d'éclater, laissa peu
de repos aux habitants du Quercy, et malgré les trêves,
les consuls de Cahors se trouvant aii milieu d'un pays
envahi, à la tête d'une ville pouvant être assiégée d'un
moment à l'autre, se virent dans la nécessité de réparer
les anciennes fortifications, d'en construire de nouvelles,
de rassembler et armer la milice et de confectionner des
machines de guerre de toute espèce. C'est sans doute à
l'état de construction déjà avancé du pont de Yalentré,
qui en faisait un poste militaire important, que Ton doit
attribuer le soin que prirent les consuls d'en bâter l'achè-
vement; car il est certain qu'à cette époque troublée, oh
la misère était générale en Quercy, tous lesefforts des habi-
tantsdeCahorsdurent se concentrer sur les ouvrages intéres-
sant directement la défense de la cité. Malgré la gravité des
événements, la modicité des revenus communaux ne per-
mettait pas d'employer à ces travaux im grand nombre
d'ouvriers; aussi doit-on penser que le pont de Yalentré
ne put être terminé que dans la seconde moitié du
.xiY^ siècle, quoique les écrivains anciens qui ont laissé
des mémoires sur le Quercy diffèrent d'opinions sur cette
date. Ainsi on lit dans les chroniques manuscrites de
(4) Archives originales. Bibl. comm. de Cahors. Manuscrits.
Voyez pièces justiûcatives, u» 8.
(2) Les dépenses de ces fêtes sont évaluées à cinquante-six
livres.
564 CONGRÈS ARGHÉ0L06IQl]£ DE FRANGE.
M. l'abbé de Foulhac , qu*il n'était pas encore terminé
en 1378, tandis que Guy de Malleville (i) rapporte que la
« construction du pont de Yalentré ne dura que quarante-
sept ans, D ce qui ne nous amènerait qu'en 4355. Toute-
fois il est permis de croire que les ouvriers ne tardèrent
pas à y mettre la dernière main, car selon M. l'abbé de
Foulhac, en 4385, la cloche du monastère de Saint-
Etienne de Gramat , qui était au faubourg Saint-Georges,
fut transportée dans l'une des tours du pont de Yalentré
pour servir à appeler les soldats.
On ne sait si les consuls percevaient un droit de péage
au pont de Yalentré. Lorsqu'il n'y avait en cet endroit,
pour franchir la rivière du Lot, que le bac de Sainte-
Croix [Sancta Croz]^ il était perçu un denier pour la
charge de vendange (2), ainsi que pour la charge de vin,
un denier pour chaque tète de gros bétail, etc. Cette taxe
dut cesser, sans doute, avec la disparition du bac, du
moins rien ne prouve qu'elle ait été perçue (3) depuis.
(1) Guy de Maleville, sieur de Gazais. Esbats sur le Païs
de Quercy. Bibl. comm. de Cahors. Manuscrits.
(2) Voyez pièces justificatives, n*» 9.
(3) « Pour chaque pipe de vin qui entrera en la dite ville de
Caors sera payé outre l'ancien droit de souchet (Voyez pièces
jusliticatives, n^ iO), dix sols, cy. X s.
u Sans préjudice toutefois de l'ancien privilège des habitants
dudit Caors, soit pour le vin nécessaire pour la provision desdits
habitants ou autre vin provenant de leur crû, en la juridic-
tion et taillable de ladite ville, dont ils jouiront sans rien payer
pour le présent émolument.
u Pour chaque charge d'huile d'olive, sept sols, six de-
niers, cy. VII s. VI d.
u Pour chaque charge d'huile de noix, deux sols et six de-
niers, cy. II s. VI d.
XLÎV» SESSION, A SENLIS. 565
Lepontde Valentré, d^une longueur totale de 170 mètres,
franchit la rivière du Lot, à l'ouest de la ville de Cahors,
sur une largeur de 127 mètres environ. 11 se compose
de huit arches en tiers-point, dont six principales, qui ont
chacune 16°>50 de largeur à la naissance de la voûte ogi-
vale. Les deux arches plus petites, situées auxdeux extré-
mités du tahlier, ont : a la première, en entrant dans la
ville, » 6 mètres, et la dernière 12 mètres de largeur. Dans
la description de ce pont, nous irons toujours de Touest à
Test, c'est-à-dire que nous prendrons la route suivie par
un étranger cherchant à entrer dans la ville de Cahors par
le pont de Valentré.
Les huit arches de ce pont construit en dos d'âne
sont nécessairement d'inégale élévation. La première
mesure 10°*4^ de hauteur totale, dont 6"23 du sol à la
naissance de la voûte et S'^OS de la naissance de la voûte
à la clef. Elle supporte le tablier du pont qui, en cet
endroit acquiert 1°*15 d'épaisseur; ce qui le porte à H"33
au-dessus du sol (i). Le parapet* du pont mesure en outre
0*95 de hauteur. Postérieurement, cet arc en tiers-point
a été renforcé par un autre en plein cintre, comme on le
voit dans la planche ci-jointe.
La deuxième arche a 13™85, de hauteur totale, 5'»15
du niveau ordinaire des eaux à la naissance de la
€ Pour chaque bœuf ou vache, deux sols, cy. TI s.
<* Pour chacun pourceau ou pied fourchu que les forains
entreront dans la ville ou faux bourg, un sol, cy. I s. »
Droits dus à la ville sur les entrées des denrées et marchan-
dises par eau et par terre. Affiche imprimée à Caors, chez
François Richard, imprimeur, 1742. — Extrait des Archives do
l'hAlel de ville de Cahors.
(1) Je donne le nom de tablier à la partie de maçonnerie
comprise entre l'extrémité de fogive et la naissance du parapet.
566 CONGRÈS ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
voûte, et 8'°70 de cette naissance à la clef; au-dessus
de cette voûte le tablier mesure 2"05. La troisième a
également S'^IO de la naissance de la voûte à la clef,
et id'^QO de hauteur totale au-dessus du niveau ordi-
naire des eaux, épaisseur du tablier i™90. La qua-
trième a 9 mètres de la naissance de la voûte à la clef et
ii^'OS de hauteur totale; épaisseur du tablier ^'"dS. La
cinquième mesure S^IO de la naissance de la voûte à la
clef et li'^lS de hauteur totale au-dessus de l'eau; le
tablier a ^"'SO d'épaisseur. La sixième mesure également
S^TO de la naissance de la voûte à la clef et 1 3™70 de
hauteur totale au-dessus de Teau ; le tablier n'a plus que
l°*d3 d'épaisseur. La septième, comme la quatrième, a
9 mètres de la naissance de la voûte à la clef, mais elle ne
mesure que 11^90 de hauteur totale; épaisseur du tablier
1™75. La hauteur totale de la huitième n'est que de 6"70,
le sol affleurant la naissance de la voûte.
Les deux piles extrêmes et la pile centrale portent cha-
cune une tour bâtie sur un plan différent.
La première et la dernière sont presque carrées, tandis
que la médiane est léjçèreraent barlongue. La première de
ces tours mesure ^O^Go de hauteur, du niveau de l'eau à
la base de la flèche, sur 7™40 de profondeur et 7"'48 Je
largeur (1).
La deuxième mesure ^0 mètres de hauteur sur G"!?
de largeur, ot 7'"86 de profondeur. Outre la différence
que l'on remarque entre cette tour et les deux autres,
il faut observer que la saillie qu'elle forme en aval est
de 0"90 à l'ouest et de 1 mètre à l'est.
La troisième tour mesure 39™o0 de hauteur, depuis le
sol jusqu'au faite du toit, sur 7"75 de largeur et 7"'80 de
(I) La largeur csl le côté qui fait face au tablier du pont.
XLiy" SESSION, A SENLI8. 567
profondeur. EnfiD, le petit corps de garde qui termine le
pont de Valentré du côté de la ville, mesure i8"*55 de
hauteur, sur S^SO de largeur et 6"i6 de profondeur.
Le pont est d'inégale largeur. Ainsi, à l'entrée de la
première tour, le tablier mesure 5™80 et 3™85 dans
l'intérieur de la tour; plus loin, au-dessus de la troisième
ogive, il a 5™30. De là, jusqu'à l'entrée de la tour centrale,
le pont va en s'élargissent jusqu'à 5°38; sous la tour
il ne mesure que 3"58. A partir de cet endroit,
il conserve toujours 5"20 de largeur. Sous la dernière
tour il se rétrécit et n'a plus que 3™92, il s'élargit de
nouveau et atteint sa plus grande dimension, 6^26, dans
l'espace compris entre cette dernière tour et le corps de
garde, dans l'intérieur duquel il mesure encore 4°*20;
à la sortie du corps-de-garde la voie carrossable reprend
la largeur de S'^âO. Le parapet du pont subit également
quelques modifications dans son épaisseur; à l'entrée de
la première tour il a O'^AO d'épaisseur et ne mesure plus
que 0'"32 à la troisième ; mais partout il a une hauteur
égale, 0-^95.
Quand on voulait entrer dans la ville de Cahors par le
pont de Valentré, on se heurtait d'abord contre un châ-
telet (voir la planche ci-contre) qui donnait accès à
angle droit sur le pont; cet obstacle franchi, on arri-
vait à la première tour fermée à l'ouest par une porte
ogivale de 3"8i de largeur, et à l'est par une herse se
levant du premier étage. En outre, cette tour était défen-
due par quatre mâchicoulis et quatre créneaux répandus
sur toutes ses faces. Les quatre mâchicoulis sont formés par
de petits arcs plein-cintre ; chacun de ces arcs est supporté
par une console composée de quatre assises de pierre
posées eu encorbellement, le tout surmonté d'un coffre
de maçonnerie de 2 mètres de hauteur sur 6 mètres de
568 CONGRES ARCHÉOLOGIQUE DE FRANGE.
largeur et terminé en glacis, de façon à permettre le tir
plongeant des créûeaux. Ces mâchicoulis s'ouvrant dans
Tétage supérieur de la tour sont séparés dans leur hauteur
pur des languettes de maçonnerie, qui les rendent ainsi
indépendants les uns des autres. Cette tour, où l'on compte
trois étages, porte sur ses faces nord, ouest et sud, des trous
d'arbaiétières percées dans sa hauteur et partant des pre-
mier et deuxième étages. A l'est, l'intérieur est éclairé
par des ouvertures géminées, surmontées d'arcs de
décharge. Du côté de la ville, un escalier de 9"! 8 de base
sur 7°03 de hauteur et i mètre de largeur partant du
tablier du pont, donne accès dans le premier étage. Uoe
ouverture carrée, de 0™80 environ de côté, pouvant servir
d'assommoir, s'ouvrait à l'intérieur de la tour, dans l'es-
pace compris entre les deux portes. La tour centrale,
fermée à l'ouest par une porte ogivale de 3°*50 environ
de largeur, et à l'est, par une herse, était munie dans sa
partie supérieure de quatre créneaux ouverts sur ses diffé-
rentes faces; le premier et le second étages sont éclairés
par quatre fenêtres chacun. Un escalier de 7"33 de hau-
teur, construit sur l'un des avant-becs et s'ouvrant sur la
partie du tablier comprise entre deux portes de cette tour,
dessert le premier étage. Il est inutile de décrire le système
de défense de la troisième tour, qui est absolument sem-
blable à celui de la première. L'accès de cette troisième tour
était diftici le et compliqué, puisqu'on ne pouvait y pénétrer
sans passer par le corps-de-garde, dernière défense de ce
pont fortifié si habilement. Ce corps de garde, dont
les inurs ont sans doute été abaissés, était également
fermé par deux portes moins larges que les pré-
cédentes; en outre, il possédait une herse intérieure, se
hissant dans le premier étage, où, comme dans les deux
(ours précédentes s'ouvrait aussi un assommoir. On
XUV SESSION, A SBNLIS. 569
pénètre dans le premier étage au moyen d'un escalier de
4*80 de hauteur, qui prend naissance sur le tablier du
pont et dont la partie supérieure est supportée par un arc
ogival de i'^ÂO de hauteur, sur ^"'SO à sa base. Du corps-de-
garde, on monte dans la troisième tour au moyen d'un esca-
lier de 7"^80 de hauteur, supporté par un arc-boutant ogi-
val de A'^W de hauteur, sur G^'dO d'ouverture. Le corp«-de-
garde franchi, on pénétrait sans obstacles jusqu'à la grande
enceinte fortifiée qui entourait complètement Cahors.
Les cinq piles du pont de Yaleutré reposant dans l'eau
sont flanquées, en amont, d'avant-becs aigus formant un
triangle de 6 mètres de base environ sur 7 mètres de côté;
ils correspondent à des gares d'évitement de 6 mètres de
largeur sur 1 mètre de profondeur situées en aval.
A 5 mètres environ au-dessus du niveau ordinaire de la
rivière du Lot, quatre de ses avant-becs sont percés de
larges baies destinées, sans doute, ainsi que les trous de
boulins que l'ou voit au-dessouîi et à la naissapce de
l'ogive des arches, à supporter des échafaudages lors de
sa construction. Le motif de leur conservation doit sans
doute être attribuée aux réparations incessantes que néc^
sitent les nombreuses crues du Lot.
Comme beaucoup de monuments de cette époque, le
pont de Yalentré a subi malheureusement de nombreuses
dégradations. Le châtelet a été détruit (i), les crêtes créne-
lles des parapets ont disparu depuis longtemps; au
nord, les mâchicoulis et le coffre de maçonnerie qu'ils
supportaient ont été détruits ; mais tel qu'il est, ce pont
reste encore pour les archéologues un intéressant sujet
d'étude (2). Il est construit en pierre calcaire du pays de très-
(1) Sur son emplacement on a construit un burean d'octroi.
(2) En 4867, M. Pavars, agent-voyer en chef du département
570 G05GftiS ABCHÉOUO&IOUS I>B WKÀXCE.
bonne qualité; l'appareil de belle dimension est posé avec
le plus grand soin sur un épais lit de bon mortier; enfin,
les claveaux des arches sont extradossés, ce qui est certai-
nement une condition d'élasticité et de solidité. Tel qu'il
était à la fin du xtv* siècle, il devait présenter au point
de vue militaire un système de défense assez complet; car,
malgré le petit nombre de soldats qui le gardaient (1), aa
milieu de guerres si nombreuses à cette époque, l'histoire
ne mentionne aucune attaque dirigée de ce côté de la
ville de Cahors, que protégeait si bien le beau pont
de Valentré.
Dans le remarquable article que lui a consacré M. Viol-
let-le-Duc '2;, il s'est glissé quelques erreurs qu'il importe
de ne pas laisser subsister. Quoi qu^l en dise, le pont de
Valentré ne possède pas et n'a jamais possédé d'avant-
becs en aval, mais bien en amont seulement, comme on
l'a vu plus haut. Le savant architecte semble encore opérer
une copfusion avec le Pont-Neuf, a qui a des avant-becs en
amont et en aval », quand il affirme qu'il a été construit
du Lot, fit réparer ce p:nt avec uo soin et un talent qu'on ne
saurait trop louer.
(1) « Guillaume de la Fou, capitaine d'une compagnie bour-
geoise..., avait sous son conimandeuieut la compagnie d'Arnaud
Delpecli, à l'exception de vingt hommes d'armes, que ce der-
nier tenait au pont de Valentré, dont on lui avait confié la
garde. » Disposition des différents postes de Caliors établie depuis
n70.
Lacoste, Histoire du Quercij. Manuscrit.
L'an H 10, on fit réparer le dehors du Pont-Neuf et du pont
de Valentré, pour le mettre en état de défense, les gardes
furent doublées.
[1t) Viollet-le-Duc, Dictionnaire raisonné iCArchitecturc
française du xi® au wi*' siècle, tome VU.
XLIY* SESSION, A SENLIS. 571
en 1^1 (1). Enfin, il ne s'est jamais appelé le pont
de la Galendre.
Tel est le remarquable monument que la Société fran^
çaise d'Archéologie a visité plusieurs fois. D'abord
eu 1865, à l'occasion du Congrès de Cahors, sous la pré-
sidence de M. de Caumont; ensuite, en 1877, sous la
direction de M. Léon Palustre, lors de notre excursion
archéologique dans le département du Lot.
Après avoir fait l'histoire du pont de Valentré, j'avais
le devoir de rechercher le nom de l'architecte qui l'avait
conçu et édifié. J'avoue avec tristesse l'insuccès de mes
recherches, si longues et si consciencieuses qu'elles aient
été. Certains annalistes du Quercy Je considèrent comme
a un bourgeois de Caors ; » j'ignore la source de ce ren-
seignement, mais, s'il est exact, combien devons-nous
regretter de ne pouvoir tirer de l'oubli où il est si injuste-
ment tombé, le nom d'un concitoyen d'un si grand mérite!
G. de Maleville, steur de Cazals, dans ses Esbats sur le
Pais de Quercy j rapporte que ce a maistre maçon » s'ap-
pelait Yalandré; c'est malheureusement une erreur, car
tout le moude sait que ce nom servait autrefois à désigner
cette partie de la rive gauche du Lot, qui s'étend depuis
la fontaine des Chartreux jusqu'au lac de Cabazac. [1 est
difficile, du reste, de trouver l'étymologie du mot Yalentré;
dans le patois du pays on appelle ce pont : lou pount dé
Volondré ou Bolondré (2).
(1)M. Didron range aussi le pont de Yalentré parmi les monu-
ments du XIII* siècle.
(t) « Si on demande rétimologie du vocable (Yalentré), bien
loin de Temprumpler comme quelques uns de nos jaseurs
d'un cardinal de ce nom, qui n'a jamais existé, nous Tattribu-
rious bien pluslôt à la situation qui met son entrée au bout du
575K O09G1ÊS ABGHÉOLOCIOUE ^ FRASCK.
Le nom de cet habile architecte sera peot-éCie toojoiin
inconnu, cà moins qu'on heureux hasard ne £t^se déooo-
▼rir cette première pierre 'du pont) où son nom est gravé
arec celui du roi, de Véwéque et des consuls fl;. •
Après sa mort, les Cadurdens lui âerèreat on magni-
fique mausolée dans l'église !2 1 des Cordriiers. L'inscrip-
tion gravée rappelait les éminents services qu'il aTÛt
rendus à ses compatriotes. Malheureusement ce mausolée
périt, incendié par les huguenots de Henri de Navarre,
lorsqu'en 15^ ils s'emparèrent de Cahors. La perte de
ce monastère (3) fut cause que le nom de cet habile et
savant 0 Cadurcien » ne nous est point parvenu, aucun
écrivain de notre pays n'ayant eu le soin de recueillir
rinscription gravée sur le tombeau. Et cependant, c pen-
dant plusieurs siècles, dit M. Lacoste (Au ce pont passa
pour un des plus beaux de ce genre qu'il y ait en
France; de nos jours même et quoique l'architecture soit
portée à sa perfection, on ne peut s'empêcher d'en admi-
vallon occidental (0(1 il y avait un port) qui conduit à la ville.
Intra f^aiium. » M. l'abbé Salvat. Loc. cit.
(4) M. Kaphaël-Périé, Histoire de Quercy.
[î) « L'épitapbe de l'architecte qui construisit le pont de
Valentré se voyait jadis au cioistre des Cordeliers avant
qu'il ne feut ruisné par les Huguenots. » M. A. Dominicy.
Loc. cit.
(3) L'église du couvent des Cordeliers qui occupait remplace-
ment actuel du réfectoire du Ivcée de Cahors renfermait deux
sarcophages (disparus aujourd'hui) ; celui du bienheureuxChris-
tophore ou Chiislophe, compagnon de saint François, qui avait
fondé le couvent de Cahors, on 4216, et celui de l'architecte du
pont de Valentré.
(4) M. G. Lacoste. Histoire du Querctj, Bibl. comm. de
Cahors. Manuscrit du commencement du xix* siècle.
XLIY* SESSION, A SENLIS. 573
rer la hauteur, la grandeur de ses arches, rélévation et
l'aplomb de ses trois tours. »
Je ne saurais terminer cette étude sans rapporter la
légende, qui est inséparable du pont de Valentré, où
comme dans beaucoup de récits de cette époque, qui sont
parvenus jusqu'à nous, le diable joue un grand rôle.
Quoiqu'on me l'ait racontée bien des fois, je préfère la
transcrire ici telle que la donne M. Gluck, dans son
Album historique du Lot.
a Suivant la légende populaire, l'architecte du pont de
Valentréy désespéré de la lenteur des travaux, engagea
son âme au diable par un contrat, dans lequel il fut sti-
pulé que le prince des ténèbres l'aiderait de tous ses
moyens et le servirait fidèlement sans jamais se lasser,
quelques ordres qu'on pût lui donner. L'âme de l'archi-
tecte devait échapjper adx griffes de Satan si ce dernier,
rebuté par une cause quelconque, refusait de prêter son
concours à l'œuvre projetée. Le démon accepta et dans les
premiers jours qui suivirent la ratification du traité^ les
constructions avancèrent avec une rapidité effrayante
pour l'ordonnateur des travaux. Le roi des enfers avait été
chargé d'apporter de bien loin aux maçons les pierres et
le mortier, mais il était ailé et les matériaux provenant
d'un premier voyage n'étaient pas encore épuisés, qu'une
nouvelle fournée venait en augmenter le nombre. L'ar-
chitecte ne pouvant utiliser tous ces matériaux eut recours
à l'expédient suivant :
« Prends ce crible, dit-il, à Satan, laisse-le tel qu'il est
0 sans y faire les moindres changements et emploie-le
tt pour puiser dans la rivière l'eau que tu porteras aux
a maçons chargés de faire le mortier, d
a Le diable se mordit les lèvres de dépit et plongea le
crihle dans la rivière, mais les fissures étaient si larges,
574r' G0NGRÈ6 AEGHéOLOOIOUB DB FRANGE.
que malgré la vitesse de son vol, il ne restait plus une
goutte d'eau lorsqu'il arrivait auprès des ouvriers. Aprèi
quelques essais plus infructueux les uns que les autres,
il jeta, comme dit le proverbe, le manche après la cognée
et s'en alla tout penaud trouver Tarchitecte.
« Tu as vaincu, lui dit-il, mais je te jouerai un tour
« de ma façon pour que tu ne te vantes pas d'avoir eu
a ma collaboration gratuite. »
« En effet, quand on fut sur le point d'achever la tour
centrale, l'angle nord-ouest, dans le voisinage du toit,
s'écorna au grand ébahissement des maçons. On le répara;
le lendemain cette même pierre manqua ; cette fois, ce fut
Satan qui lassa les ouvriers, et il les lassa si bien, que
cette pierre manque encore. »
PIÈCES JUSTIFICATIVES
PONT DR BALLANDRES.
N" I.
Notum sit cunclis bas présentes lilteras visiiris et audiUiris
quod nos consules civitatis ('.;ilurci pro nobis et successoribus
noslris et pro tota coin m uni la te seu univcrsitale noslra Calur-
censi et habita plena delibcratione et ilillgonti oonsilio ac
traclatu cum probis viris ronsiliariis nostris et de noslro con-
siiio generali et etiam cum pluribiis aliis bonis viris sapienlibu^
etdiscrelis proptcr communem et evidentem nostram ac lolius
universitalis Caturci utiliiatcm volumus et eoncedimus et sia-
tuimus et ordinamus quod pons lapideus liât noniine noslro cl
universitalis noslra? Caturci in porta nostro de l'atlantre
super tlumen Olli et meliori ioco quo fieri potcrit et aniificari
propre diclum portum salvo tamen super dicte ponte in omoi-
XLIY' SESSION, A SENLIS. 575
bus jore nostro et etiam relento nobis et consulatni Dostro et
oniversitati Catarci domino et custodia perpetuo dicti pootis. Id
cojus rei fidem et tèstimonium oos Consules clvitalis Catnrci
sigillain oostrum litteris presentibus curavimus apponendum.
Actum et datum Caturci in domo nostra communi consulatus
die ultima mensis aprilis annodominicae incarnationis miliesimo
triceDlessimo sexto. Transcriptum est.
(Extrait du livre consulaire appelé Te Igitur, manuscrit sur
parchemin, conservé à la bibliothèque communale de Cahors. —
Telgitur, folio 70.)
L'an M CGC viii mestre G. de Sabannac senhor en legs e lo
dilus davan san Johan Bapiista foret comensat lo pont de Valan-
tre e lo dig mestre G. Sabanac pauset la preumiera peyra del
dig pont.
(Extrait du Te Igitur, folio 54.)
. N» 3.
Philippus dei gracia Francorum rex senescallo Petragoriscensi
H Caturcensi, vel ejus locum tenenti salutem. Ex parte consul
!iTitatis Caturci nobis extitit supplicationem quod cumad utilita-
;ein rei publics qnemdam pontem indicta civitas supra flumen
3lti in portu de yalentre construerat de novo juxta quœ non
nnt itinera quaB de dicto ponte ad dictam civitatem accomodus
liaberi possitaccessus, eisdem consulibus supplicantibus deoppor-
toDO remedio providere vellenius, quare mandamus vobis qua-
teoos supra praemissis dictes consules audiatis et eisdem vocatis
(pii fuerint evocandi quod fuerit rationabile concedatis. Actum
Parisis die décima sexta octobris anno Domini miliesimo treren-
tenmo nono.
(Extrait de livres appelés Archives oHffinales; copies manu-
acrites sur parchemin, conservées à la Bibliothèque communale
de Cahors. - Arch. orig., folio S99.)
5* l.
CMmtti qsod c&a BM pn «poe ptsôs qû et mo%o
îMea lasiagiBA Mifse ad catmm tempos per alâs Msins
cnnf r ri— i maasIIî Bocatares de nû et bbëis ^ne ad die-
taai dviiatca (arioat adpoctah pra eo qa*d Tîaa d Uada
bojos Modi a pentML^ ecdesiasticis et clehds asscnmt se
ittàmàme passagiuA hvjcs modi sol^ere recssani iajosle, qaare
maniaAos toUs qQi>>i s ^ocatis, ei Torandis Tobîs constiteht ita
es&e dietos iiiefcau>rtts «ie ^iots bladis quat ad dicUm driuiem
secundaa o;<aginia taduot dicio tempore duraDt« adportah a
qoiiMtsc&mqoe ruia ei biada ip6a emenct passagium pnedicuim
jnxla cooce&sèoois bosux teacrem perâolvant compeilaUs prinu
raUooe. Apad MoateiDargi d.e trifesinu jaBoahi anao domini
mijlftaoïo trecestesiiDo uodediDO. (^rum auctohute Litieianim
regianim predicurum vûbts et vestrum caiiibei et insolidum
coaunittimus et des4ricte perdpieodo maDdamus quateotis cou-
teoU indiclis litteris regiis ïoco Dostro faciatis complere exequa-
mus diiigeater juita formam dictarum litterarum regiarum
ioveoent esse facta ea zû statum piistioom reducatis seu redaci
faciatis t'orma dictaruai litterarum regiarum în omnibus obser*
vata damus autem teoore preseotium in maudatis omnibus dicti
domini nustri régis et nostris subdtlis ut în praemissis et prae-
missa tangentibus nobis pétant efticacîter et intendant. Datum
XUY* SESSION, ▲ 88NLI8. 577
Gaturci die veneris inte festam Magdalenae anno domiai mille-
WM> treoeoteûmo decimo terUo.
(Archives originiles, folio 304-301.)
N» B.
Pfailippas Dei gratia Francise rex dilecto*fllio Geraldo Epis-
eopo SuessioD. salât, et dilect. Yobis tenore presentiom commit-
timos et mandamas qnod super incurobentibus operibas pontis qui
étnoxo coDStruitur apudCadurcam, in porta vocato Falentre
ac dispensatione passagii, quod pro hujus modi opère faciendo
bomiDibus ejusdem civitatis concessimus vocatis vocandis, vos
pleoios informantes, si dicti passagii emolumentam in dictum
qHis applicatum ftiisset légitime repentis, et qnod adhoc ipse
poDS gratia nostra indigeat pleniori ipsum passagium pro hojus
Bodî opère complendo more consueto ad tempus quod ad hoc
soffîcere videretis, ex parte nostra per litteras vestras dicti
hominibus concedatis. Datum Parisiis t aug. anno Domini 4344.
(Extrait [des Séries et Âcta EpiscoporumCaduroensiumqnot-
<[oot hactenus summa cura inveniri potuerunt. — Auctore
Goillelmo de la Croix, cadurcensi, in Cadurcensium curia
patrono.)
Cadurci apud Johannem DaWy ii.dc.xxvi. folio 491.
N« 6.
Philippus Dei gratia FranciaB et Navarras rex universis pré-
sentes litteras inspecturis salutem. Notum facimus quod nos con-
sulibus et universitati Caturcensi pro subsidio et ad opus
ûdiricae pontU de porta Falentre propre civitatem Catur-
censem supra flumen oui passagium sive barragium concedimus
de gratia speciali exigendum et levandum in dicto loco prout
ibidem antea consuetum est levari, ab instante festo Purifica-
tionis beat» MariaB Virginia usque ad très annos exacte termine
secaturos dantes presentibus in mandatis seneacalio nostro
XUY* 8BSSI0N. 3T
578 CONGRÈS AEGHÉOLOOIQÏÏE DS FRANGE.
Gadurcensi et Petragoricensi quod ipse duos vel très dicti loei
depatet el constituât probos viros quod provenieos ex dicto bar-
ragio emolumentum recipiant et proirideant ne in alios qnod in
predlctos USU8 quos modo libet convertatur et de hoc eidem
senescallo compotum et rationem reddere teneantur in cujus rei
testimonium presentibus litteris nostrum fecimusapponi sigillum.
Datom Pontis undecima die junii anno domini miUesimo trecen-
tesimo vigesimo per nos Jullioti.
(Archives originales, folio 288.)
No 7.
Charolns Dei gratia Navarrise rex universis ad qaos présentes
litterae pervenehnt saluteni, notum facimus quod cum sicut
ascertione precepimus Me digna passagia seu barragia conoessa
hactenus consulibus et villas Catnrci pro constructione pontis
de Valentré construetioni hajus modi plene non suj^tunt nos
consnles et villa eadem per triennium ab instante festo purifica-
tionis beatœ Maria in antea continue sequuntur exigendiet
levandi sicut mihi consuevit exigi et levari praedicti pontis
constructione concedimus de gratia speciaii mandamus senes-
challo PetragorisceDsi vel ejus locum tenenti ut duos vel très
viros idoneos de dicta villa eligat et deputet qui hujus modi
barragium seu passagium levant et exigant Gdeliter qua3 et
intègre convertantin constructione predicta bis quod vel saltem
semel quolibet anno sicut eidem senescallo expedire videbilur
de receptis et missis hujus modi reddant compotum et legiti-
mam rationem ei supra hiis idem senescallus ab eisdem deputatus
exig^t juramentum audiat que compotum tractationem illorum
qui barragia seu passagia hactenus concessa pro constructione
hujus modi levantur ex reliquo plenarie convertetur facial
celeriter in constructione predicta absque eo quod in osus alios
convertantur in cujus rei testimonium litteris presentibas nos-
trum fecimus apponi sigillum. Datum Tolosae vigesima quinta
die januarii anno Domini millésime trecentesimo vigesimo tertio.
(Archives originales, folio 300.)
XLIY* SBSSION, A 8SNLI8. 519
N« 8.
Philippns Dei gratii Francorum rex anivereis présentes litte*
ras inspecturis saintem; audita relatione geiitium nostrornm
senescailiae Pelragoricensis et Calnrcensis supra etMente neoit-
sitate perficiendi pontem de Falentré seu Gaturcam incoba-
tum supra flumen OIti a parte dacatus Âquitaniae notum facimus
quod civitatis consules et babitatores Caturcenses in nostra
recommandatione et favore habeutes dictique pootis perfection
nem nostram modicam affectantes passagium sive barragiom in
eadem civitate bine a quatuor auDos proximo et continue vea-
turos exigendum et levandum siciil ibidem consuevit aliu exigi
et elevari pro dictae pontis constructione concedimus de nostra
gratia speciali mandantes senescailo Petragoricensiet Caturcenai
vel ejus iocum tenenti ut duos vel très viros idoneos exsolvendo
de dicta civitate etigat et députât qui bujus modi passagium aeu
barragium lèvent et exigant per eorum juramenta ad sancta
Dei Evangelia praestita Gdeliter et intègre in construotionem
dicti ponti convocant voiumus autetn quo din alios usus quam
ad opus dicti ponlis convertantur levata per ipsos et de eisdem
leva lis senescailo predicto vei ejus Iocum tenenti presentibus
aliquibus probis viris in talibus expertis ratione légitima reddere
annis singulis teneantur in cujus rei testimonium presentibus
litteris nostum fecimus apponi sigillum. Datum Meldis 46 junii
anno Domini millesimo trecentesimo vigesimo octavo per
Dominum regem ad Ducatum Âquitanensem et Domini Mattei
servandi Daniel.
( Arcbives originales, folio 300.)
N» 9.
DEL PORT DE BALANTRB.
Conoguda causa sia atolz aquels que aqoest escrig veiran ni
auziran que aisso es lo devers qne bom leva e deu penre e levar
580 GONGBiS ARGHiOLOOIQUI Dl FRANGE.
per pontonalge el port de Valdntre leqaals port ab toisM arri-
badore et del cossols et del co88olat de Caorts et de totas aotru
gens que passe el dig port leva jiom per pontonatge 4 deaier
de la saamada de la vendemia que al dig port pasura e al
gai de sauta Croz e de la saamada de vi 4 denier e de lot eioi-
tada que a terra on tral port de Valantre leva hom per poato-
natge e de tôt Tan 4 deniers per cascnna denainda e de Ut
hom estrancb que an a pe meulha e de tôt bom que mené bes-
tia 4 denier e de gros bestiar 4 denier de cascona bestia e de
porcs e de menut bestiar de quatre 4 denier e si nonia mu un
ados paga mealtba e de quatre cars o deseadas de Teodeoiia
que passaran el dig port 4 denier et de tôt vendemia e de vi que
passaran el dig port ni del gai de Santa Croz a eusus tro a /o
fon de Falentre deuhom pagar lo pontonatge a la dintrada de
la nan e de las terras doutra Valantre deu bom pagarlosideaien
cascun an la Saut Miquel per pontonatge e de tôt lao e de
totas las autras causas e las gens estrancbu devo pagar eo la uo
quant passaran e nulbs bom no deu far passatge de vi ni de
vindemia ni dautra causa per ou cago
. . . {Illiiible) in en autra maniera perqoe
le passatges ol pontonatge valgue meubs.
(Extrait du Te Igiiur, folio 54).
N* 10.
Droit de Soucbet, Souquet, Soccage :
« Afin dû pourvoir aux réparations nécessitées par la guerre
les Consuls étaient autorisés à prélever un droit sur le vin
vendu en détail. — Tous les habitants devront être soumis à cet
usage ainsi que les Clers, les Prêtres et autres gens d'Églises;
mais ce droit sera payé par les acheteurs non parles vendeurs.
Ce droit de Soucbet fut renouvelé à plusieurs époques notao
ment par le Prince Noir en 1363, 4368, 4369.
(Archives originales. — Passim.)
I
ZLIY* SESSION, A S&5LIS. 581
Il ne faut pas croire que le Çont de Valentré, qui n'a
que trois tours , ait jamais été représenté sur le sceau
des Consuls. Le sceau de la ville de Cahors offre cinq
tours depuis 4201; il fut laissé aux consuls après un
grand procès, terminé par une transaction en 1351, en
conséquence de l'acte de pariage de 1 306, par lequel le Roi
et Térèque de Cahors leur abandonnèrent le sceau com-
mun qu'on leur contestait auparavant. Il présente cinq
tours sur un pont pour faire voir que les Consuls sont
maîtres des murs et des ponts de la ville pour les fortifier
et les garder. Ce sceau se trouve dans l'acte de la con-
fédération des villes et principales communautés du
Quercy conclue à Roc-Amadour, pour chasser les rou-
tiers qui ravageaient le pays à la suite de la guerre des
Anglais.
Paul de Fonténilles,
Officier d'académie, ia^pectenr de U Société
françaiie d' Archéolofie , membre de la
Société des étidei dv Lot, eie.
L'ÉGLISE
XT
LE PORTAIL DE BEAULIBU
(COEEÈZl)
VÈausE.
Vi^\$ù paroissiale, autrefois abbatiale, de Saint-Pierre
At Beaulieu, en Limousin, est incontestablement Tun des
tMiâoKi n^maïquahles du centre sud de la France. On n a
pas de données positives sur la date de sa construction;
mais, à défaut de ivnseignements historiques précis , le
style du monument no saurait permettre aucune incerli-
tudo : arvhitectunL\ sculpture, écriture même, tout y accuse
dVnsomble le xii^ siècle, tout y dénote la période de tran-
sitùvn vl\
LV^hse de Beaulieu est une croix latine de deux cents
puvls de lon^, parfaitement pr\>|K>rtionnée. Son abside
pn^$i^nte la déviation obsier\>^ dans tant d*autres églises et
yV \\ \k>)lei I^Dac, ma. raù, de rarckiiecture, t. V,
|v 174. note 5; lA^tOel, .Viimce/ eirm, eTarckêai. nationale,
XLIT* 8B8SION, A SINUS. 583
qui, dans celle-ci comme dans un grand nombre, se pro-
dait du côté du midi. Douze piliers , symboles des douie
apôtres, et quatre colonnes cylindriques, emblèmes des
quatre évangélistes , portent la masse de ses voûtes à cin-
quante pieds et plus au-dessus du pavé. Ils divisent le
vaisseau en trois neb inégales , dont les deux plus basses
contournent le sanctuaire. Tous ces supports reposent sur
des plinthes. Les piliers, assez lourds, ont aussi un aspect
assez original. Le noyau carré qui les forme n'est appa-
rent qu'au point central de l'édifice, sous le dôme ou lan-
terne, supporté par les quatre plus gros : il y est cantonné
ie pilastres, rehaussés eux-mêmes de demi-colonnes; mais
dans la nef, aussi bien qu'à l'entrée du sanctuaire, le
noyau disparait tout entier sous ce cantonnement. L'aspect
général est celui du losange.
Les pilastres adossés aux murailles correspondent de
forme à ceux qui revêtent les piliers, et au dehors la plu-
part des contre-forts qui les appuient leur sont aussi sem-
blables. On reconnaît dans ce détail l'influence de l'école
auvergnate; mais ce qui est spécial peut-être à l'église de
Beaulieu et aux quelques sanctuaires voisins qui s'en sont
inspirés ; ce qui, dans tous les cas, est rare et a frappé
l'attention des excursionnistes du Lot, c'est la forme assez
variée des bases de toutes les colonnes : elles n'ont rien
qui rappelle l'antique, sans qu'on puisse leur refuser
le mérife de la simplicité , de la grâce et du bon goût.
On en jugera par le dessin de quelques-unes d'entre
elle». Des chapiteaux , par contre, rien à dire : ils sont en
général trè^nus et très-modestes, comme dans un bon
nombre des églises du Centre. Quelques-uns, pourtant,
sont ornés de feuillages, et trois ou quatre offrent la forme
humaine; mais le ciseau n'y a pas excellé.
Les archivoltes, dans Taxe de la nef comme sur les côtés.
584 CONGRÈS ÂRGHÉOLOGIOUE DE FRANCE.
sont tantôt cintrées, tantôt et plus souvent légèrement bri-
sées. Le cintre, selon l'habitude, domine dans les fenètra
et ne se laisse vaincre qu'aux jours les moins anciens.
Quant aux voûtes, une moitié de celles de la grande
nef s'est malheureusement affaissée en 1808. Un lambris-
sage blanchi déguise aujourd'hui la blessure, sans par-
venir à la dissimuler. Comme celles qui nous restent, ces
voûtes appartenaient au système roman : en berceau dans
les grandes lignes, en cul-de-four dans les hémicycles, ea
arêtes, sans nervures, dans les collatéraux. Seules, une
travée du bas^té septentrional et la partie du transsept
qui lui correspond sont voûtées dans le style compliqué de
la dernière période ogivale. Il y a là la trace d'une restau-
ration dont la date précise, les auteurs, comme les causes,
sont restés inconnus. Elle s'étend, pour le croisillon, jus-
qu'aux murailles , qui furent reprises aux deux tiers. Un
large contre-fort angulaire et des ouvertures ogivales bien
différentes de la plupart des autres, trahissent, aussi bien
que les voûtes, le fait et l'époque de ce remaniement.
Au-dessus des collatéraux régnent des galeries obscures
dont la voûte en quart de cercle fait arc-boutant à la nef
centrale et au grand hémycicle absidal. C'est là que, au
dire d'un ancien sacristain , se serait un instant réfugié
rinfortuné maréchal Ney, en 4815 : son fils en fit la visite
vers 1862. Ces galeries prennent jour sur la nef par des
arcades géminées en plein cintre, soutenues elles-mêmes
par des colonnes géminées.
En suivant la ligne des collatéraux dans leur inflexion
autour du sanctuaire, on accède aux chapelles du chevet,
qui sont au nombre de trois, toutes en hémicycle. La plus
haute est, suivant l'usage constant, consacrée à la Vierge:
les deux autres ont changé de titulaires. Deux autres cha-
pelles s'ouvrent encore dans le mur oriental de la croisées
XUT* SESSION, A 8BNU8. 585
Sur l*autel de celle du nord, l'abbé recevait autrefois les
vœux de ses religieux (I) et les serments de fidélité des
grands vassaux et officiers du monastère (2) ; devant celle
du midi, qui était consacrée aux patrons de la ville et dont
on avait fait le siège d'une chapellenie très«importante,
faisant ou à peu près fonction de paroisse pour la ville
murée, se passait, chaque lendemain de Noël , une céré-
monie assez curieuse, mais dont l'observation ne parait
pas avoir beaucoup duré. Quarante prud'hommes y pré-
sentaient au supérieur de l'abbaye douze sujets, parmi
lesquels celui-ci devait élire les quatre consuls de la petite
cité. Ou en remarque aujourd'hui le retable, non moins
que celui de Notre-Dame, deux œuvres de menuiserie déli-
cate, dont les sculptures ne sont pas sans intérêt. Dom
Claude Bénaud, prieur claustral, fit faire le premier,
en 1676, et dom Charles Poirier, le second, en i678. La
balustrade du sanctuaire et la sacristie furent l'œuvre d'un
autre prieur, Antoine Glapasson (1692). Amand Vaslet fit
à son tour rouvrir, en l'élargissant , le portail d'ouest,
muré par les huguenots et encombré de constructions
parasites, dont son prédécesseur, dom Joseph Mallevergne
avait dû, eu 1717, faire l'acquisition. Comme souvenir de
sa restauration, c achevée le 11 juin 4724, • Amand Vas-
let laissa sur la façade la couronne d'épines que l'on y voit
encore et qui est, comme on sait , l'attribut spécial de la
congrégation de Saint-Maur.
Les prieurs de cette congrégation rendirent à TÉglise des
services sans prix. Lors de la prise de possession du puis-
(I) Amand Vaslet, Abrégé de rkist, de tabbafft Saint-
PifrrtHte'Beaulieu, manuscrit.
{t) Cariulaire de l'abbatje de Beauiieu, chartes czai,
CICVI.
586 G0N0RÈ3 AEGHÉOLOGIOITB DB niANGS.
sant abbé qui en fut l'introducteur (I) , le pauTre tem^
était comme les lieux réguliers, et depuis la Réforme, dam
un a état pitoyable, • à c faire compassion. » c A peine y
avait-il trois autels en état de dire la sainte messe (sic): il
fallait en dépouiller un pour garnir l'autre* La sacristie
était derrière le grand autel , auquel on montait par huit
marches. » On n'avait plus de cloches, plus d'omemeotif
plus de linge,' plus de livres. Tout était donc à (aire, etcei
hommes dévoués firent énormément. Pardonnons-leur ea
conséquence les regrets que nous laissent ici et là quel-
ques-unes de leurs restaurations : leurs retables, sansh8^
monie avec l'église, ont de plus l'inconvénient d'en obstmer
les jours , et le symbolisme qui s'attachait peut-ètie an
nombre des fenêtres, en demeure ébréché. Mais il estasseï
ordinaire de n'avoir pas en ce bas monde tout ce qu'on y
souhaite. L'époque moderne où travaillaient ces hommes
avait perdu les secrets de l'art du moyen âge, et jusqu'à la
notion de ce pieux symbolisme qui en fut un des carac-
tères les plus auii^ustes et les plus attachants.
Nous n'avons rien dit des beautés extérieures de l'abside,
malheureusement dérobée au public et resserrée par un
pâté de maisons, dont la disparition serait bien souhai-
table. C/est, de toute Téglise, la partie la mieux conservée,
et nul aspect , à coup sûr, n'offre à la fois plus de grâce,
de richesse, de mouvement et d'harmonie. On songe, en
la considérant, aux beaux chevets d'Issoire, de Paray-le-
Monial, de Saint-Sernin de Toulouse, etc. Nous n'avons
pas non plus parlé des tours à cloches. Au centre de la
croisée s'élève une coupole romane, à huit pans inégaux,
dominant le pavé de l'église de soixante-six à soixante-dix
(1) Emmanuel Théodose de la Tour d'Auvergne, depuis car-
dinal de Bouillon (1659).
xmr* SESSION, a senus. 587
pieds. Cette coupole est surmontée d'une première tour
octogone, régulière, élégante même, mais de trop peu
d'élévation. Deux tourelles, couronnées de lanternons et
disposées aux deux points d'intersection de l'abside et du
transsept, servent de cage aux escaliers qu'on fit pour y
conduire. Sur la porte de celle du nord, signalons en pas-
sant une heureuse sculpture : deux lions se nourrissant de
l'arbre de vie , qui transfigure la faiblesse humaine et la
rand invincible aux séductions du monde comme à la rage
des enfers.
Le clocher qui s*élève en saillie sur le côté droit de la
bçade occidentale , a le tort de s'y trouver seul , d'appar-
tenir, comme cette façade, à une autre époque que le gros
de l'église , et de ne présenter qu'une assez médiocre con-
struction. C'est un clocher donjon. On y pénètre de Tinté*
rieur de la nef par un escalier en spirale qui se perd à la
hauteur des combles et qu'on dut faire, en construisant
Tédifice, pour accéder proprement à cet endroit. Il fut plus
tard englobé dans la tour. L'entrée extérieure est une petite
porte ogivale suspendue à plusieurs mètres au-dessus du
soi. L'aborder aujourd'hui n'est plus chose difficile, grâce
à des degrés en pierre d'une date assez récente ; mais on ne
latteignait autrefois qu'au moyen d'une échelle, et c'est
encore le moyen à prendre pour se hisser à l'étage plus
haut. A partir de ce point la tour est tout d'une pièce et
D*offre d'interruption que celle du beffroi. Les jours, accou-
plés sur chacune des faces, sont sans éèan comme sans
ornementation; le toit pyramidal qui couronne l'ensemble
n'a pas an plus grand prix.
Reste la façade, dont un triplet sur deux, ofihre plus de
mérite. On y voit des fenêtres étroites, courtes, mais d'une
ogive bien accusée, et s'encadrant de chaque côté de la
muraille, d'une élé^te voussure à triple archivolte,
588 CONGRÈS ÂRGHÉOLOGIOUB DB PEAUGS.
rehaussée de tores et de colonnettes dont les chapiteaux
sont à crochets. Nous jugerions cette façade, aussi bien que
sa tour, du milieu du xiii* siècle.
De nombreuses reliques enrichissaient autrefois l'égliie
de Beaulieu : plusieurs ont disparu. Disparus sont aussi
de précieux reliquaires, parmi lesquels la châsse des patrons
de la ville. Le trésor de l'antique abbaye n'en reste pis
moins encore intéressant. Il sera l'objet d'une prochaine
note au Bulletin montmiailâ/. L'auteur n'aura garde d'ou-
blier la grande crosse eucharistique qui, sur cette Groniière
du Limousin, faisait pendant aux crosses, limousines
aussi, d'Auriac et de Saint- Yrieix-la- Perche. Pour le
moment, toute notre attention doit se porter sur le portail
sculpté de la vieille abbatiale, véritable ornement a de cette
belle église, • orgueil de la petite ville et monument pr^
cieux, sinon même typique, d'une école de sculpture qui
ne demande qu'à se faire connaître pour prendre sans
tarder le rang qui lui est dû. Aussi le lecteur qui a pu nous
trouver concis dans les pages qui précèdent , voudra-t-il
nous accorder, pour celles qui nous restent, la bveur
nécessaire d'appuyer un peu plus.
IL
LE PORTAIL.
Le portail que nous entreprenons de décrire, est ouvert
daus le mur méridional de la nef et correspond à la
deuxième travée. Il présente, voussures comprises, une
largeur d'environ huit mètres sur une hauteur de neuf
mètres ou à peu près. En avant s'étendent deux murs en
retour ou éperons, qui soutenaient autrefois la voûte d'un
porche. La face intérieure en est divisée en deux compar-
ZLnr* 8SS8I0N, A SSNLI8. 589
timenU par une arcade géminée, retombant sur trois
colonnes en marbre que supporte un soubassement. Toute
cette enceinte, qui n'en semble plus une, est décorée de
aculptures. Voyonsquel en est le sujet.
L'artiste, ee nous semble, veut nous représenter la
gnerre du Mal contre le Bien, et le triomphe du Bien sur
le liai. Soit ! le dessein est beau et l'entreprise morale :
prenons donc le livre des Écritures, et, à la suite du scul-
pteur, allons nous édifier.
Arrêtons-nous au porche et portons-nous à gauche. Le
porche précède l'entrée ; la gauche est le côté le moins
noble : c'est au porche, c'est à gauche que l'artiste a dû
commencer.
Un seul tableau remplit les deux compartiments. Il est
tiré de l'ancien Testament, et c'est un des sujets les plus
diers à nos pères : DanieL dans la fosse aux lions. Par lui
nous seront représentés les temps antérieurs à Jésus-Christ .
d la première phase de la lutte, celle de l'homme contre
l'homme ou de la chair contre la chair.
Daniel dans la fosse aux lions.
Deux colonnettes romanes, couronnées de gracieuses
tourelles, supportent un cintre surbaissé que décore, dans
toute sa longueur, une riche galerie. Sous cette arcade
triomphale apparaît le prophète assis au milieu des lions
et tenant eu main le volumen à demi roulé. Son nom,
inaperçu de l'abbé Texier, se lit en deux lignes sur le
fond du tableau :
DAN
lEL (1).
(4) Nous trouverons d'autres inscriptions à Téperon droit. Les
caractères des unes et des autres appartiennent nettement i la
S90 GONORÈS ARGHÉOLOOIQUI DS nULKGt.
Par une exception assez rare, le saint prophète eit
nimbé et nu-pieds : c'est qu'à travers la personne, l'artiste
Toyait le type ; sous les trai^ de Daniel lui apparaissaitla
Vertu persécutée. Les lions, nombreux, ont des attitudes
diverses : les uns sont couchés aux pieds de la victime;
d'autres lèvent sur elle un regard qui semble attendri; il
en est un qui lui sert d'escabeau.
Dans l'arc du compartiment voisin se dessioent deux
pavillons entourés d'un cercle de murailles. L'une des
trois arcatures qui figurent cette enceinte de forme claus-
trale, est totalement remplie par un visage humain gros-
sièrement ébauché.
Les édicules nous sembleraient représenter le Ciel, ^
souvenir de la sainte cité décrite par saint Jean au vingt*
unième chapitre de son Apocalypse. Quant au vis^P
humain, nous y verrions une personnification de la P^
vidence, l'œil ouvert sur les tribulations du juste p^^
lui envoyer force et secours : Cum ipso sum in trib^^'
tione (!]. Ces mots d*un psaume dont une moitié du porche
est, comme on verra, rindubitable commentaire, aut^
riseraieut déjà notre interprétation. Mais elle s'affer^'
jusqu'à l'évidence à la lecture de certains autres pas8B.g*
des psaumes, et du dixième en particulier, dont saint J^^
Chrysostome fait application au sujet qui nous occupe*
a Je mets ma confiance au Seigneur.
cf Comment donc dites-vous à mon âme : Sauve-toi ^ ^
la montagne comme le passereau ?...
manière romane, et quelques-uns à celle du xn^ siècle : S-
exemple, les E ronds et le D du mot déjà cité, qui a la for^
d'un 0 sommé d'un trait horizontal à gauche. Voir TE3Ci^
Manuel d'épigraphie, p. 67, <56, pi. i, xi, etc.
(1)P#. xc, 45.
ZUY* SESSION, A SBNLI8. 591
c Du haut du ciel où il a fixé sa demeure, ou est le
palais de sa sainteté (i), le Seigneur a les yeux sur le
pauvre :
c II fera pleuvoir ses lacets sur les pécheurs... •
Voyez, en eSet, tout au bas du bienheureux séjour, cet
ange aux grandes ailes qui se courbe sur les lions pour
enchaîner leur férocité. C'est l'histoire après la prophétie,
a Mon Dieu, nous raconte le généreux athlète, a envoyé
c son ange, et l'ange a fermé la gueule des lions, et les
a lions ne m'ont point fait de mal (2)... s
Il ne faudrait plus que le contraste : le contraste y sera.
Aux pieds de Tange libérateur, on distingue à grand'peine
un corps humain renversé sans vie. Peut-être n'est-ce que
le cadavre d'un criminel vulgaire, placé là pour mettre
en relief la délivrance du prophète. Mais rien n'empêche
d'y voir le corps d'une autre victime de la tyrannie, et de
tirer du spectacle toute la leçon qu'il peut contenir. L'in-
fortuné, sans doute, attendait tout de l'homme, et l'homme
l'a jeté à la dent des lions : Daniel, lui, n'a espéré que de
son Dieu, et son Dieu l'arrache à la dent des monstres.
NuUa lœsio inventa est in eo, quia credidit Deo suo (3).
Sicut entm/ observe saint Jean Chrysostome, sicut enim
maledictus est qui sperat in homine (4), ita beatus est qui
sperat in Domino (5).
Un dernier accessoire résume et généralise le tableau.
Au-dessus de l'arcade, sous laquelle est assis le prophète,
se traîne un reptile à tête de bouc, a figure coustumiè-
(4) Traduit d'après l'hébreu.
(t) Dan,,y\, J2.
(3) Dan., vi, 23. — //c6., xi, 33. — Ps. Lvi.
(4) Jer,, XVII, 5.
(5) In Dan.
592 GONORAS ▲RGHÉOLOaiOUl m rAAKGS.
rement agréable au diable » , dit un vieil auteur da
XYi* siècle (1). Sur ses tortueux anneaux marche un petit
corps humain, dont les mutilations du temps n*ont épar-
gné que les membres inférieurs. Or, chacun sait que k
moyen âge représentait les âmes sous la forme de petits
corps humains. On devine le reste. Ce reptile est c l'aspic
et le basilic • do l'Écriture ; ce petit corps eat Tàme du
juste c foulant aux pieds • sous cet emblème impur, tout
le venin des suppôts de Satan : Super aspidem H baiilù'
cum ambulabis (2).
Demandons maintenant à l'éperon droit l'autre partie
du verset.
La (entatitm de Notre-Seigneur.
Ici l'Ëvangile se déploie, le drame s'élève et la leçoo
s'étend. Nous n'avons pas toujours à lutter confie des
persécuteurs de chair et de sang comme nous ; maii nous
avons toujours à combattre ces esprits de malice répandus
dans Tair, que saint Paul api)elle les vraies puissances de
ce siècle (3). C'est la lutte de tespfit contre Cesprit : nouvel
aspect d'une guerre de plus en plus formidable, et parles
ennemis qu'elle nous oppose, et par les intérêts qu'elle
met en jeu; car, a il faut craindre non les ennemis qui
tuent le corps, mais ceux qui perdent Tàme (4). » Voici donc
que, pour animer notre vaillance, Taugusts Chef de la
(I) DoDiN rAngcvin, Démonomanie ou Traite des sorciers,
Paris, lîiSI.
{t)Ps. xc, 13.
i3) iiphes., VI, 44.
{i)Matt/i., X, Î8.
I
de
Corréze }
vj Crosse eucharislique
'.f à réalise de Beaulieu : r.mràj--.
XLIY* SESSION, A 8BNL1S. 593
, dté sainte vient combattre en personne avec le prince
même de la cité maudite : Jésus avec Satan. En se déva-
loppant, l'idée veut s'accentuer, et le cadre s'élargit : nous
aurons trois tableaux au lieu d'un.
C'est le premier des trois qu'indique notre titre.
En face du Fils de Dieu, debout, vêtu de la tunique et du
manteau, décoré du nimbe crucifère, se dresse de son
mieux le tyran des enfers. Dépouillé de toutes ses splen-
deurs, il nous apparaît nu comme un ver déterre, n'ayant
autour des reins que le vuile exigé de la pudeur. Une
toque informe s'appesantit comme un éteignoir sur son
front découronné. Ne cherchons dans son affreux visage
aucun des traits qui constituent la face de l'homme, ou
même le museau de la bête : c'est un type sans nom. Ses
membres mal cousus portent écrits les vices qu'il sème sur
ses pas. Il a du bouc le poil fétide, du coq les insolents
ergots, du chien hargneux la queue écourtée, de l'animal
immonde le ventre rebondi. Et sur tout ce grotesque et
monstrueux mélange^ suprême dérision ! le sculpteur a
déployé les grandes et nobles ailes de l'antique Lucifer...
Entre Jésus et le tentateur s'élève, bâti sur le roc, un
édifice flanqué dans sa partie supérieure d'un double croi-
sillon : c'est le temple de Jérusalem. Sur le mur de la
tour, le doigt de Satan indique les' deux inscriptions qui
suivent :
SI FILI' DEI ES
DIC VT LAPI
DESI STI PA
NES FIANT.
Si FILI' DEI ES
MITE {sic) TE
DEORSVM (1).
(I) 3faUh., IV, 3, 6.
XUV* SESSION. 38
594 CONGRÈS ARGHÉOLOOIOUB DB FRANGE.
Dans le haut du bas-relief apparaissent deux autres
personnages, dont le buste a disparu, en laissant un bout
d*aile. Ce sont des anges, intervenus dans cette lutte solen-
nelle pour en compléter la physionomie. Par eux sont
représentées ces phalanges invisibles que s'opposent les
deux cités sur le champ de nos combats. Celui qui domine
Satan, nu et décharné comme son bourreau, du doigt,
lui aussi, désigne à Notre-Seigneur l'inscription tentatrice,
tandis que, noblement vêtu comme son prince, l'ange de
lumière lui montre au ciel la volonté qu'il s'edt obligé
d'accomplir.
Quelle fut la réponse de Notre-Soigueur, tout chrétien
le sait. Le divin maître vainquit par la parole, comme
Daniel avait triomphé par le silence ; car avec les combats
doivent changer les armes. Si l'homme vous soufflette,
« tendez la joue (i); » si le démon vous tente, c résistez
fortement (â) ; d mais que l'esprit soit le même : In fide I
Nous avons médité le silence du prophète, rappelons*nous
la parole du Verbe : leur victoire à tous deux fut le
triomphe de la foi. C'est le mot de l'Apôtre : Justus ex
fide vivit (3).
La mise. en fuite des démons.
Dans le compartiment voisin, un personnage nimbé,
nu-pieds, vôtu comme le Christ du précédent tableau,
impose sa volonté à deux monstres. Leur exiguïté, leur
nudité, leur laideur, trahissent encore des démons, ou si
l'on veut des possédés. Ce bas-relief a souflert. La léte du
(\) Matth. V, 39.
(2) / Pet, V, 9.
(3) llehr. x, 38.
XLIY" SS8ST0N, A SBNLIS. S95
principal personnage n'a gardé aucun de ses traits ; son
nimbe usé a perdu tout caractèi^ ; et toutefois hésiterons-
nous à dire : c'est Lui ? Oui, c'est Lui, poursuivant son
triomphe sur l'enfer, en en chassant devant lui les téné-
breuses légions. La tête du plus apparent de ces démons
révèle une horrible souffrance. Dans son obéissance forcée,
il se retourne à demi vers le Maître, et sa bouche, hideu-
sement béante, semble exhaler ce cri : « Jésus, Fils de
t Dieu, qu'y a-t-il de commun entre vous et. nous? Étes-
f vous venu ici pour nous tourmenter avant le temps ? •
Car nous pensons que l'imagier nous retrace la scène
racontée au huitième chapitre de saint Matthieu (v. S8,
29, 34). Les édicules dont est semé le bas-relief nous
représenteraient ou les tombeaux, monumentis, d'où sor-
taient les possédés, ou, ce qui est moins probable, la cité
voisine des Géraséniens.
Les combats sont rudes ; mais la victoire nous rend
maîtres des forces de Tenfer : c'est la leçon cachée dans ce
deuxième tableau.
Le Christ triomphant.
Le sculpteur nous en a ménagé un troisième à l'angle
extérieur de l'éperon. C'est ce Christ triomphant que l'on
voit au porche de plusieurs cathédrales, mais qui ne sau-
rait être nliUe part mieux placé qu'ici, où tout le prépare
et l'attend. Avec bonheur l'œil se repose sur ce calme vain-
queur. Ce n'est pas encore le redoutable triomphateur que
nous verrons assis sur les nuées du ciel, pour y pronon-
cer l'étemelle gloire des vainqueurs, l'irrémédiable dam-
nation des vaincus. C'est Jésus, notre frère, debout encore
sur les chemins de la vie, tenté comme nous, pour nous
K96 GONGRiS ^RGHÉOLOGIOUB DE F1LLNGB.
apprendre à vaincre comme lui, et nous appliquant les
grâces de son triomphe, comme il nous a donné l'exemple
de ses luttes : Ideo tentaius ett ChrUiui, ne vincatur a
tentatore chrt$iianui{{). Sa tête est ornée du nimbe cruci-
fère ; sa droite bénit à la manière latine, c'est-à-dire les trois
premiers doigts ouverts, les deux autres fermés. Un de ses
pieds foule le crâne d'un lion dressé sur ses pattes infé-
rieures, et l'autre le corps replié d'un dragon. C'est ici que
nous attendait la seconde moitié du texte sacré : c Con-
culcabis leonem et draconem : vous foulerez aux pieds le
lion et le dragon. » Elle abat toutes les palmes aux pieds
du Christ, centre et âme de la composition, c Le lion, dit
V saint Augustin, représente les persécutions ouvertes ; le
« dragon, les assauts ténébreux. » Or, Jésus-Christ a ter-
rassé le lion dans la personne de ses membres ; car il était
avec Jérémie dans le lac profond, avec les enfants dans la
fournaise, avec Daniel dans la fosse aux lions (2) : il vient
par lui-même de triompher du dragon.
Dans une série de petits retraits en orle s'étagent des
anges, dont les dégradations du temps ne permettent plus
d'assigner le rôle individuel, si tant est qu'ils en eussent.
Un seul, sculpté sur le plein de la muraille, y balance
Tcncensoir. L(\ présence de ces purs esprits, cortège triom-
phal du nis de Dieu, traduit, sans aucun doute, le verset
final du récit de la tentation : Ecce angeli accesserutu, et
ministrabarU et.
Nos lecteurs le voient : jusqu'ici les tableaux sont clairs,
suivis, concordants; la pierre mc^mc parle : toute méprise
semble impossible, du moins sur le fond des sujets. On s'est
mépris cependant quelquefois, ou l'on n*a pas compris.
(1) Aug. In ps, xc, Serm. 1, t,
(3)Bos8uet, Èlév, sur les wnjst,, xxiv» semaine, n« élév.
XLiy SESSION, A SENLI8. 597
Hais ce n'est pas ici le lieu de s'occuper de ces erreurs :
poursuivons plutôt notre tâche et réparons une omission.
Marie (?)
En face du Christ victorieux, et toujours à l'angle exté-
rieur, mais de l'éperon gauche , s'élevait jadis une autre
statue triomphale. II n'en reste plus que la trace. A peine
dislingue-t-on les pieds, qui reposent sur deux lions. Un
ançe est assis dans un encadrement qui dominait la tête
et faisait face à l'ange à l'encensoir, de l'éperon droit.
Quelle était cette image? Celle du prophète Daniel? C'est
possible. Il semble toutefois que l'artiste avait déjà sulB-
samment insisté sur l'idée de son triomphe. On pourrait
même trouver quelque hardiesse à représenter ainsi sur
un seuil d'église, le démon sous ses pieds, les anges sur sa
tête, un saint de Tancienne loi partageant, quasi de pair
avec un Dieu triomphant, les hommages et la confiance
des fidèles. Nous hasarderons timidement une autre con-
jccture. Cette image serait celle de Marie. Sans nous arrê-
ter à quelques vagues indices que pourrait offrir ou la
pierre ou l'histoire , com'ment concevoir que le siècle de
saint Bernard n'eût pas marqué dans ce poëme sculpté,
dans ce chant de triomphe , la place de sa reine bien-
aimée? L'image de Marie faisait si bien sur le seuil de
cette porte , en face de ce fils adoré dont tous les mérites
reposent en sa main, avec ce piédestal que lui avait fait
l'artiste, et qu'expliquent de concert et le tableau voisin et
l'application que lui en fait TÉglise : f Mùii Deut miteri"
cordiam suam et veritatem svam : animom meam eripuit de
medio catulorvm leonvm : Le Seigneur a envoyé sa misé-
ricorde et sa vérité : il a arraché mon âme du milieu des
598 CONGRÈS ARGHÉOLOGIOUB DB FRANGE.
lionceaux (i) I D En péoétrant sous ce porche déjà si pieux,
le chrétien du moyen âge avait ainsi le double bonheur de
saluer et d'invoquer à la fois son Père et sa Mère des cieux.
Son œil, qui se portait de Tun à l'autre, découvrait sans
cesse de nouvelles harmonies. Tandis qu'à sa droite res-
plendissaient Jésus et TËvangile, à sa gauche s'élevaient
Marie et Tancien Testament, aurores l'une et l'autre du
Soleil de justice et de la nouvelle loi.
Passons au portail.
L'Égli
tse.
Dans le simple cadre d'une voussure à trois archivoltes
concentriques, ornées chacune d'un tore et d'une colon-
nette de support, s'épanouit notre portail. Un pilier sym-
bolique le partage en deux baies. Les deux montants sont
ornés en tableau de trois colonnettes inégales, portées sur
des lionceaux aplatis qui les mordent avec fureur. Sur le
plein des jambages se dressent les deux statues de saint
Pierre et de saint Paul, patrons do la vieille abbatiale et
piliers de la sainte ÈgUse de Dieu. Ils ont le nimbe des saints
et le pied nu des apôtres. Vicaire du Christ, Pierre lève
comme le Maître sa droite bénissante sur le troupeau qui
se presse au saint parvis, et de l'autre main, serre contre
son cœur sa mystérieuse clef. Le docteur des nations est
armé du livre de la science : ce ne fut que plus tard qu'on
lui donna pour secoml attribut l'épée de son martyre.
Le trumeau, superbe monolithe de neuf pieds, est orné,
sur ses deux angles extérieurs, de colonnettes brisées en
feston, d'un effet pittoresque et gracieux. Il offre sur le
(0 Ancien offertoire de l'Imm. Conception. — Ps. lvi, 5.
ZUr" SESSION, A SBNUS/ 509
devant un personnage plus grand que nature, revêtu d'une
de ces ridies tuniques dont Tépoque romane avait emprunté
le modèle aux sculpteurs bysantins. Ses pieds, chaussés
du cothurne oriental, foulent les queues de deux lions qui
fuient à la renverse en se croisant en sautoir. Leurs tètes,
dissimulées derrière les colonnes, en mordent la base avec
le même acharnement que les lionceaux des pieds-droits.
Quant au prophète, — car c'est un prophète, — il sou»
tient de ses longs et maigres bras le pesant tailloir sous
lequel plie son dos. Les faces latérales présentent, avec
quelque différence de l'un à l'autre, deux groupes origi-
naux que l'on retrouve parmi les sculptures de Chartres
et sur les vitraux de Bourges. Des personnages assis en
supportent d'autres qui, à leur tour,' supportent le tailloir.
Ce sont, disent les auteurs, « les grands prophètes por-
tant les évangélistee. » Tel est pour notre portail le senti-
ment exprès de l'abbé Texier.
Nous avons ainsi devant nous l'image de l'Église ensei-
gnante , de celle des anciens jours comme de celle des
temps nouveaux, dans ces vénérables figures de prophètes,
d'évangélistes et d'apôtres, que préside Pierre, l'homme
des cleGs. Us sont là , ces hommes divins , ils sont là près
des portes, et c'est bien leur place à eux dont l'enseignement
et l'autorité nous ouvrent et l'église et le ciel. Sur leurs
corps exténués , sur leurs bras amaigris , repose la page
triomphale où nous contemplons l'étemelle gloire du
Christ et de ses saints. N'est-ce pas, en effet, de leurs luttes
sans trêve, de leurs labeurs sans repos, de l'effusion sans
relâche de leur parole, de leur ministère et de leur sang,
que s'étend le triomphe du Christ et que se peuple sa bien-
heureuse cour? Des lions fuient sous leurs pieds et mor-
dent en se retournant le poids sacré qui les écrase. Ce sont
les idolâtries, les apostasies, les hérésies, les schismes, les
600 CONGRÈS A.RGHÉOL06IOUB Dl FBANGB.
persécutions, ces mille formes du lion infernal qui fuient
battues pour assaillir encore, toujours acharnées, mais
toujours vaincues
U Péché.
Nous venons de voir le triomphe du bien , même sur
cette terre : contemplons, môme dès ce monde , le châti-
ment du mal.
Ici, le symbole vient interrompre l'histoire et jeter Tio-
térét de ses énigmes parmi les clairs tableaux que nous
sommes à parcourir. C'est de toute description la partie
scabreuse, et l'on y fait mille faux pas. Hais, guidé par
les maîtres et précautionné d'une étude sévère, nous espé-
rons ne rien dire que de plausible ou de sûr.
Il est deux péchés dont l'Apôtre défend jusqu'au nom
dans une assemblée chrétienne : Omni» immunditia oui
avarilia, nec tiominetur in vMs (i). Aussi le catéchiste
mural en a-t-il jeté hors du parvis l'effrayante représen-
tation : foris canes (2) ! Sortons donc absolument du porche,
et une fois encore portons-nous à gauche. Si c'est, comme
nous l'avons vu, le côté le moins noble, c*est aussi le côté
du mal.
Dans un angle oublié que forme, avec l'éperon gauche,
une grande maison accolée à l'église, se cache un groupe
mutilé, noirci, et presque dévoré par le temps. C'est le
fumeux groupe de Vhomme à Vescarcelle et de la femme
aux repiiles : deux sujets fréquemment reproduits sur les
monuments chrétiens du xir siècle pour la i>€rsonnirica-
tion de l'avarice et de la luxure. On les trouve sur les
(1) Eph. V, 3.
(2) .-//wc. xxu, 15.
XMY* SESSION, A SENLIS. 601
points les plus divers; mais au portail de Beaulieu, comme
à celui de Moissac, ils ont revêtu leur forme ignominieuse,
osons dire la plus repoussante.
C'est l'A^YARiCfi qu'on nous présente d'abord. Elle nous
apparaît dans une de ses victimes, un homme debout, vôtu
d'une robe traînante , qui serre d'une main fébrile son
escarcelle gonflée, La tète a disparu et c'est dommage; mais
devant ce buste aiFaissé qui n'en devinerait la sordide
physionomie? Du reste, on distingue encore, retombant
sur sa poitrine, les jambes velues du démon de l'avarice,
que nos pères ont pu voir afTourché sur son dos.
La LUXUEE s'impose à notre attention sous des formes
que notre plume se voit contrainte de voiler. Ce n'est pas
seulement la femme aux reptiles que nous avons devant
nous, comme à l'un des chapiteaux de Saint-Martin de
Brive : c'est de plus la femme au crapaud , c'est-à-dire la
victime du vice impur dans son indescriptible ignominie.
Passons.
L'avarice et la luxure étaient les deux vices sur lesquels
s'acharnait le plus, au moyen âge, Tàpre ciseau du sculp-
teur chrétien. Mais là ne se bornent pas les faiblesses de
l'homme, et le tympan nous réserve d'autres représenta-
tions. L'humiliation se modifiera sans s'adoucir. De la
forme humaine le vice va passer sous des formes bestiales
et nous apparaître au bord dies feux qui l'attendent; ravalé
au-dessous de ces flammes vengeresses, moins hideuses
que lui, et humilié sous le pied du juge terrible à qui ses
ennemis doivent servir de marchepied.
Le tympan se partage en trois zones d'inégale hauteur.
La plus élevée retrace l'imposante scène du jugement der-
nier; la seconde représente l'enfer: nous attachons à la
troisième le sens symbolique qua nous venons de déter-
miner.
Le freBier aind ^ s
à Sicile, «it «B fisKàBàm^ leeroiaciativ
raviFe uiiuuiie «s tutean wpi w
wafoÈ^ Somwûft fnxmaiàaÙBmi aâidefvsliîoeîOi
Mt fcBlrpmr : 4e k cccîmc Elle « piumie îd wm
èemT £k» : la kaine. fvî ca est f¥^itaie I « et h rixe.
fvcBcsl kré5«bii. Étefioos «■ iaïUI cette qéitÎBii
oeîsiBak catre tnUes , coauae le icam^ift à koa 4reit
rdbbé Teôer. D^iAeH . poar ez^eiaer h kûeu h féme
ée Rftâe ae pecrait être BÛecx ckcne. Cett ceOe fK
vei^êdl c l'aaîSfne sepeot. » ^oaal sa kaîae « bowcâie»
ppar^isÎTiît k Fik de la feame et qoaai elle Boas per-
èah : c>!t das? le repeile ^ae 4c4t fiAcax secret es
■■refas têpêtecgses et 4b icaîas moe^eis. Le ic^e est à
rmûsaon. Janaîs ii hilae ii*a beii^ d^im Cm plos ««ahie
fvf s^sr «e raÂèe ^ laire &?al hmaain faî se ërssme an
zsiL}^ i^ tibéeiï. L? rsçTLri *?î éîrîaî : c'est TeBirt de
Il zp'ri'i , rec: - rz^ t^t? les srrs? -^rierelîe^irs, elîe kîir
5»:^:15; If Sîi if "i i^rrrif; f^ iî «a lirr^^ fcurtbce.
^ri*^ nr *-i, sîîrllfr.: rïtr.ir !f« îriits îr^teroeb de la
ra^iisir:^ f: îf li cijz^în::*- E:i£n . :*5 iecx ittîaillecrç
q^ >:r:fr: i^ 1ad!!5 f;: inrc:: prTir s? tr«r !i langue eî
<e hirtr? i n: -Tî? if T:Tt£r>»<. reiifeiî! luss: Mrfiiîesif!!:
q»^ p:t55:K£ Tiz:!-;* if r?.$ ct:î^i1!«?- «n dense temps
OÊiihWL
XLiy* SESSION, ▲ SBNUS. 603
quils justifient le mot de l'Écriture: «La haine enfante la
dispute : odium suscitât rixas (1). »
Entre ce dragon et le pourceau, reste un quadrupède
chargé de sept mamelles et armé de sept têtes, cinq sur le
devant et deux à l'extrémité de la queue. Dernier symbole.
A notre avis, celui de TonouËiL, ou de la superbe, a prin*
cipe de tout péché : initium omnis peccati superbia (2). »
D'autres diront peut-être de l'oisiveté, mère de tous les
vices. Libre à chacun.
De nos cinq interprétations, les deux premières sont
consacrées ; la seconde est usuelle; les deux autres n'ont
de valeur que celle que nous leur donnons. Mais il sera
bon peut-être de remarquer que les trois vices symbolisés,
selon nous, au portail: haine, gourmandise et orgueil,
sont précisément ceux dont le prophète Daniel faillit être
la victime et dont le diable tenta Notre- Seigneur. Ainsi
opposés, le triomphe de la vertu et la honte du vice s'ac-
centuent mutuellement.
Mais il est temps de les contempler sur leur dernier
théâtre. Déjà commence à s'arrondir le cercle harmonieux
des voussures. En haut les cœurs! C'est l'éternité que nous
entrevoyons.
Le jugement dernier.
Au centre de l'imposant tableau qui remplit la zone
supérieure du tympan, as3is sur un trône dont quatre
colonnes soutiennent les appuis, le souverain juge des
vivants et des morts ouvre ses bras au monde entier. Sa
taille dépasse de beaucoup les proportions de tout ce qui
(1) Prov. X, U.
(2) Ecdi, X, 43.
604 CONGRÈS AEGHÉOL06IOUE DB FRANCK.
l'entoure : nous sommes au sein d'une période où la gran-
deur morale se traduit par les proportions physiques. Il est
vêtu d'une robe retombant, à la manière de l'époque, en
plis nombreux sur ses pieds nus. Elle est serrée autour des
reins par une ceinture dont une extrémité, soigneusement
déployée, s'étale entre les genoux. Le bras et le côté droit
sont nus : l'artiste a craint de gêner le mouvement terrible
de cette droite vengeresse. La tète est sévère et barbue. Ce
n'est plus ce jeune et doux visage qui souriait aux pre-
miers chrétiens dans l'horreur de leurs cryptes sanglantes.
Les temps sont devenus mauvais, et le Christ a vieilli : le
bon pasteur est devenu le juge inexorable. Ses cheveux,
partagés au milieu de la tôte, selon le type traditionnel,
descendent derrière les oreilles et bouclent à la hauteur
du cou. Le nimbe, large et saillant, est timbré de la croix.
Des ondulations qu'on remarque sous les pieds du Christ
et des apôtres, des nuages qu'on aperçoit sous la voussure,
indiquent que la scène se passe dans le ciel.
Aux pieds du grand juge, deux anges debout sonnent
de la trompette; deux autres nu-dessus portent la triom-
phante croix : croix de forme grecque et fichée, comme la
plupart des croix de l'époque. A sa richesse, à ses propor-
tions, à la place qui lui est faite, on reconnaît le trophée
du Christ. A côlé de ce signe glorieux, deux autres anges,
sortant de la nue, portent, l'un, les clous du crucifié,
l'autre, la couronne du grand roi.
Cependant, de chaque côté de Notre- Seigneur, déjà
trône dans la nue le sénat des douze apôtres : judex apos-
iolorum senatus. Les uns tiennent en main le livre de la
science, les autres le rouleau. Point d'attribut personnel, si
ce n'est aux mains de saint Pierre, qui porte ici deux clefs.
Il est à la droite du Maître; à gauche, à côté de ce cœur
dont il connaît les battements, on distingue le visage
ZLIY* SESSION, A SENLIS. 605
imberbe du disciple vierge et bien-aimé. Les apôtres, dans
la joie de leur triomphe, s'entretiennent deux à deux.
L'espace n'ayant pas permis de les disposer tous de front,
il en est quatre dans les angles, soit au-dessus, soit au-
dessous de la ligne de leurs frères. Nous devons signaler à
l'une des extrémités de cette ligne un treizième person-
nage acculé sous l'arceau. Il est assis sur un trône comme
les apôtres, mais il se distingue par Texigulté de ses pro-
portions et l'absence du nimbe; il est vrai qu'à ce double
égard sa position expliquerait tout. Mais, de plus, la tète
est couverte, et c'est un signe d'infériorité; et la main
droite pend le long du siège , sans livre ni attribut quel-
conque, au moins que nous ayons pu distinguer. Quel
serait ce mystérieux personnage? Probablement Isaïe, qui,
seul entre les saints de l'ancienne loi, a le privilège de la
nudité des pieds, et qui figure quelquefois dans les tableaux
du dernier jugement.
Mais voici que sous les pieds de l'auguste sénat, les
morts, éveillés par le fracas des trompettes, sortent en foule
des tombeaux. Plusieurs, encore à demi couchés dans leurs
cercueils de pierre, en soulèvent lentement les couvercles
épais (i). Les autres se préparent à paraître au redoutable
tribunal. Rien ne parait indiquer que ceux de droite soient
plus fortunés que ceux de gauche. Ici , dirons-nous avec
l'abbé Texier^ a les bous ne sont pas séparés des méchants
dans le sens de la largeur, mais dans la hauteur. » Ceux
de gauche s'entretiennent des apprêts de leur jugement:
(t) Remarquons, en passant, la forme de ces cercueils, qni
est bien celle de Tépoque romane : un sarcophage rectangulaire,
porté sur deux dés et fermé d'un couvercle imbrique , à double
versant. Voir Arthur Murcier: De iasépuit.chréi, en France ^
du XI* au xvi« siècle.
606 CONGRÈS A.RGHÉOLOOI01IB DB FRANGE. *
V
Quidsum nunc dicturusf a Ceux de droite, — en ce moment
nous parlons , bien entendu , de la droite et de la gauche
de Notre-Seigoeur, — le regard fixé sur le terrible appareil,
semblent absorbés dans cette muette contemplation : < Ils
viendront, dit l'Écriture, pleins de terreur au souvenir de
leurs offenses, et leurs iniquités se soulèveront contre eux
pour les accuser. Au même moment les justes s'élèveront
avec une grande hardiesse contre ceux qui les auront acca-
blés et dépouillés du fruit de leurs travaux. Et à cette vue
les méchants entreront dans le trouble d'une horrible
frayeur, et pâliront de surprise en voyant tout à coup et
contre leur attente les justes sauvés. Ils diront en eux-
mêmes, touchés de regret et jetant des soupirs dans le ser-
rement de leur cœur : Ce sont ceux-là qui ont été autrefois
l'objet de nos railleries et de nos outrages. Insensés que
nous étions! leur vie nous paraissait une folie et leur mort
un opprobre, et les voici élevés au rang des enfants de Dieu,
et leur partage est avec les saints. Nous nous sommes donc
trompés: ergo erravimvs! » Aveux tardib ! regrets super-
flus! Le temps n'est plus où les larmes eflEaçaient tout,
a Le Très-Haut a cuirassé son cœur de justice et couvert
sa tète d'irréformables arrêts. Et tandis que les justes vont
vivre éternellement au sein de leur Dieu , devenu leur
récompense, le Roi de Majesté va dans le zèle de sa gloire
armer la créature pour la vengeance de sa cause et le châ-
timent de ses ennemis (1). » Déjà l'enfer entr'ouvre ses
abîmes : le monde est jugé.
L'Enfer.
C'est, avons-nous dit, entre la grande page du juge-
(0 Sap. n-, ÎO; v, 16-19.
XLiy* SESSION, A SBNLI8. 607
ment et les emblèmes du linteau que se déroule la repré-
sentation de l'enfer. Les hommes du xii* siècle Tavaient
ainsi jeté, comme un éternel abîme entre Dieu et le mal.
A ceux de* notre temps étaient réservées la tristesse et la
honte d'entendre identifier deux termes si ennemis.
Aussi large queie portail, cette partie de la composition
compte à peine deux pieds de haut. C'est une frise sem-
blable au bandeau symbolique que nous avons analysé. Y
répandre des formes humaines, risquer dans un espace si
resserré toute une galerie de personnages, ne pouvait être,
ce semble, qu'une faute de goût. Le sculpteur avait mieux
à CBÛre : il a mieux fait.
Représentons-nous sur une mer de feu, allant et venant
dans tous les sens, les monstres les plus divers. Ce sont
des formes animales et des quadrupèdes pour la plupart.
A la bonne heure! le plan hoiizontal, qui est celui de la
bête, permettra d'heureuses proportions.
Voici d'abord comme une tête de gorgone, d'où semble
vomi ce monde infernal. A lui seul, ce premier monstre
suffirait à fixer le sens du tableau. On sait, en efTet, qu'il
était assez ordinaire, au moyen âge, de représenter l'enfer
par quelque énorme gueule béante, d*où sortaient tantôt
des démons, tantôt des tourbillons de feu. Ce qui doit en
sortir ici, ce sont a ces bétes furieuses » et pour la plu-
part « d'une espèce inconnue i> que rêvait l'éloquent
auteur du livre de la Sagesse (i). L'horrible gueule
s'ouvre toute grande, — dilatavit infemui animam suam,
et opérait asiuum absque ullo termino (2), — et de son ric-
tus épouvantable sort un lion, qui saisit au bas- ventre
un malheureux damné, a Chacun sera puni par où il
(4)5ap. ix,49.
[t)Is. V, 43.
608 GONORiS ARGHÉOLOOIQUE DB FRANCS.
aura péché (i) : il est à présumer que ce mi&érable s'est
perdu dans les plaisirs de la chair. Renversé sur son dos,
il se cramponne au pied d'un quadrupède à tète de vau-
tour, qui se retourne, l'œil farouche, et d'un pli de sa
queue le suffoque et Tentraine.
Du côté opposé accourt un autre monstre, ailé comme
le précédent, et dont la queue fleurie laisse voir une tête
qui dévore le bras d'un second réprouvé. Survient à l'ins-
tant un quatrième quadupède qui lui brise le crâne.
Châtiment des coupables pensées de Vesprit/ Les ailes de
ce dernier, au lieu de partir de l'omoplate, s'élèvent en
perpendiculaire de ses jambes de devant. Sa queue,
comme celle du voisin, se termine par une tète animale,
tenant en sa gueule une fleur d'où s'échappent des ser-
pents. On aperçoit enfin, couché à l'extrémité de la frise,
nous ne savons quel autre monstre qui vomit en l'air des
bandelettes entortillées.
Toute cette zone est d'une pensée neuve et d'un travail
merveilleux. La planche jointe à ces pages en fera ressor-
tir les mérites : nouâ n*y insistons pas.
Résumé.
C'en est donc fait do l'arène du monde et du mélange
des deux cités! Combats, victoires, défuites, tout est jugé,
récompensé, puni. Il n'est plus que deux éternités, l'une
de gloire pour les vainqueurs, l'autre d'opprobre pour les
vaincus. Au chrélit*n de se recueillir dans Tauslèro solen-
nité du spectacle et de chercher à sa lumière le fruit
(4) Sap. XI, 17.
XUY* SESSION, A . 8BNU8. 609
de tant d'enseignements. Pour nous, notre description
est finie. •
Et tel est, dirons -nous en terminant, tel est le
porche de Beaulieu, œuvre vraiment monumentale,
autant et plus encore par le caractère de l'idée que par
les dimensions du cadre, vaste sans doute, mais sans
être des plus étendus. Ne dirait-on pas, devancé sur
la pierre, un de ces mystères qui ravissaient plus tard
l'œil croyant des aïeux? La lutte du Bien contre le
Mal, le triomphe et les récompenses du premier. Top*:
probre et les châtiments du second : voilà le drame. La
Cité sainte avec Jésus, son roi; Marie, sa reine; losanges,
ses gardiens; les apôtres, les évangélistes et les prophètes,
ses pères et pasteurs; — la cité maudite avec Satan, son
chef, et le triste cortège de ses mauvais anges et de ses
noirs suppôts : tels en sont les acteurs. La terre, le ciel et
repfer servent tour à tour de théâtre : le temps et l'éter-
nité se partagent l'action. Nous avons ainsi toute la des-
tinée de l'homme et de l'Église présentée aux méditations
du chrétien sous le jour le plus moral, dans la forme la
plus attachante, à travers des tableaux dont l'heureux
choix devait flatter l'homme d'étude, autant que sourire à
l'homme des champs. /
S'il faut le dire, plus d'un portail cité, prôné, visité,
n'a pas à nos yeux le mérite du porche dont nous nous
occupons. On n'y trouverait ni cette largeur, ni ce carac**
tère moral, ni surtout cette unité. Le détail peut n'être
pas neuf, l'idée mère peut même se retrouver ailleurs;
mais le tour de la pensée, mais l'ordonnance des maté-
riaux sont le mérite de l'artiste, et ce qui manque,
croyons-nous, ce qui manque seul à notre porche inconnu,
c'est d'être plus visité.
La maîtresse page ne perdrait pas à être comparée; les
XLIV* SESSION. 39
610 CONGRÈS ▲aCHÉOLOGIQUE DE FaANGE.
monstres bizarres qui décorent les deux zones inférieures
du tympan, sont une création d'une beauté rcnoarquable.
Dans l'originalité des formes, l'aisance des allures, Téner-
gie des contours, tout homme impartial saluera, nous en
sommes sûr, la touche d'un habile et vigoureux ciseau.
Mais là n'est pas, du reste, le titre qui recommande
le plus le portail de Beaulieu : il partage, avec ceux de
Cahors et de Moissac, l'honneur d'une trilogie monu-
mentale à la gloire d'une école centrale d'architecture et
de sculpture, vaguementxiélimitée peut-être par M. ViolleU
le-Duc (1), mais précisée, circonscrite et dénommée par
M. A. Saint-Paul dans le premier de ses intéressants
Annuaires, celui de 1877 (i). Nous renvoyons à celle
œuvre d'un homme autorisé, n'osant pas pour le moment
aborder le développement d'une thèse qui demanderait à
elle seule un article spécial. Il nous suf6ra de regretter,
avec notre excellent ami, que le cours des temps, et peut-
être la main des hommes, aient ravagé les belles sculptures
de ce porche. Grâces à Dieu I le portail n'a que médiocre-
ment souffert ; mais les faces latérales, si nécessaires à la
pleine intelligence de l'œuvre, sont fortemeutendommagées.
Notre plume a signalé de nombreuses dégradations. 11 eu
est une qui devait lui échapper : c'est l'oblitération générale
de ces bas-reliefs dont l'herbe des vieux murs souille déjil
les recoins. La démolition de la voûte et plus encore la
position de ces sculptures à portée de la main, ont lente-
ment amené cette dégradation. Serait-il bien coûteux de
relever celte voûte, de reprendre ces tableaux, de rendre
enQn au monument son aspect et sa fraîcheur d'autrefois?
Nous avons appelé sur cette belle œuvre et sur l'église
(i) Dict. raisonné, vni, 4:H.
(«) Pag. 406-408.
XLIY* SESSION, A SENLIS. 611
qu'elle décore la sollicitude des hommes spécialement
voués à la garde de nos monuments. Nous sommes heureux
de pouvoir dire à la Société française que cet appel est
entendu, et que la Commission des monuments historiques
se livre à l'étudo d'une restauration de l'église de Beaulicu.
L'abbé J.-B. Poclbrièrb,
Inspecteur de U Société françaiie d'Arcliéologie
poar le département de la Corrèxe.
TABLE DES MATIÈRES
Liste des membres de la Société française d'Archéologie i
Comptes du trésorier xli&
Programme de la XLIV* session du Congrès archéo-
logique de Frauce 4
Liste alphabétique des souscripteurs 6
Séance d'ouverture du 28 mai 4877. — Extrait du
discours de M. de Loogpérier-Grimoard 43
Discours de M. Léon Palustre 45
Topographie préhistorique d'une partie de Tarrondisse-
ment deSenlis, par M. le comtedeMaricourt. . . S2
Les monuments mégalithiques de Thimécourt , près
Luzarehes (Seine-et-Oise), constructions contempo-
raines de Tàge de la pierre taillée, par M. Milles-
camps 43
A quelle époque faut-il faire remonter la prédication du
christianisme dans le Pogus sUvaneclensis, par
M. Tabbé Eugène Muller 46
Les Arènes de Senlis, par M. de Caix de Saint- Aymour. 69
Séance du mardi 29 mai 1877. — Ëvaugélisation des
Gaules. — Prédication du christianisme dans le Pagus
stjtcanectensis, par M. Tabbéde Meissas. ... 78
Réplique de M. Tabbé MQller 430
Le cimetière du Compan, près Luzarehes, sépultures de
Tftge de la pierre polie, par M. Hahn 44S
614 TABLE.
Station de la fin de Tàge de la pierre polie, à Thimé-
court, par M. Vieille * . . . 1V8
Age du bronze. — Cachette de fondeur à Luzarches,
par M. Hahn 450
Hugo de Groot (Grotius) à Ralagny et à Senlis (1623-
4635), par M. Hardouin 457
Dom Pierre Coustant et Guillaume d'Ercuis, par M. le
colonel Coustant d'Yanville 462
Rapport de M. B. Ledain sur une excursion à Chantilly,
à Saint-Leu-d*Esserent et à Monlataire .... 480
Première séance du mercredi 30 mai, — Les silex
taillés de Sauvigny-les-Bois (Nièvre), par M. le doc-
teur Jacquinot 485
Note relative à deux emplacements gallo-romains, situés
au lieu dit Rigalot, dans la forêt de Chantilly, par
M. Margry 498
Bratuspantium, par M. Hayaux du Tilly 206
Bataille de César contre les Nerviens au passage de la
Sambre, par M. l'abbé Caudel 232
L'architecture religieuse dans le diocèse de Senlis du v**
au xvr siMe, par M. A. Saint-Paul îifi
Deuxième séance du 30 mai. — De la terminologie
archéologique, par M. l'abbé Van Drivai .... 2G9
Les archers, arbalétriers et anjuebusiers à Senlis, par
M. l'abbé Valtier 277
Notes pour la carte préhistorique du département de
l'Oise, par M. le comte de Maricourt 301
'hudi 31 mai. — Excursion à Compiôgne. . . . 312
Hôtel de ville de Compiégnc, par M. le comte de Marsy. 3il
Séance du vendredi 4" Juin. — Notre-Danio-de-la-
Victoire, près Senlis, par M. Paul Durand ... 378
Carte comparative du pays scnlicien, aux temps anciens
et de nos jours, par M. Hahn 380
TABLE. 615
Note sur les nionnaies découvertes dans les fouilles des
arènes de Sentis, par M. Dupnis 381
Les bibliothèques de Senlis, par M. Tabbé Vattier . . 385
Études sur les principales voies romaines et gallo-ro-
maines partant de Senlis^ par M. Tabbé Caudel . . 396
Excursion ^ Chaalis et à Ermenonville 420
Sir Henri Parker et ses projections de vues photogra-
phiques, par M. Jules de Laurière 421
Samedi 2 Juin, — Excursion à Champlieu, Pierre-
fonds et Morienval 430
Dimanche 3 juin, séance de clôture. — Quelle est
la véritable signification à donner aux mots mansio
et mutaiio dans les itinéraires, par M. Hayaux du
Tilly 433
Le château de Sentis, par M. Bouet 436
Conférence sur les amphithéâtres en général et sur les
arènes de Senlis en particulier, par M. Ernest Bosc. 443
Discours de M. Léon Palustre 453
Distribution des médailles 458
Lundi i juin. — Excursion â Mello, Mouchy et Beau-
vais 469
Extrait d'une notice sur Lévignen, par M. Tabbé Gros. 463
Voie romaine de Senlis â Meaux, par M. l'abbé Caudel. 447
EXCURSION ARCHÉOLOGIQUE DANS LE DÉPARTEMENT
DU LOT.
Compte -rendu général 483
Les aiguilles de Pigeac, par M. Léon Palustre ... 499
Mémoire sur le camp des Césarines, près de la ville de
Saint-Céré, par M. Castagne ........ 506
Souillac, Le Vigan et Gourdon, par M. de Laurière. . 529
GIG TABLE.
Lo pont (le Valontré à Cahors. — Nolice historique et
archéologi«|ue, par M. Paulde Fontenillcs. ... 556
L'église et le portail de Beaulieu, par M. l'abbé Poul-
brière 5SI
TABLE METHODIQUE
ARCHÉOLOGIE.
I
TEUPS PaÊUlSTORIQUES.
Topographie préhistorique d'une partie de l'arrondisse-
roonl (le Senlis, par M. le comte de Maricourt . . ii
Les monuments inôgalilliiquos do Thimêcourl, près
Lnzarches (Seine-ct-Oise) , construction conlenipo-
raines de l'Age de la pierre taillée, par M. Millcs-
oamps 43
Le ciuK'lière de Compan, près Luzarches, sépultures do
Tàge de la pierre polie, par M. Ilalin 442
Station delà lin de l'ùge de la pierre poiie à Thimécourt.
par M. Vieille 448
Age du bronze, cachette de fondeur à Luzarches, par
M. Hahn 450
Les silex taillés de Sauvigny-iès-Buis, par M. le docteur
Jacquinot 185
Notes pour !a carte préhistorique du département de
rOise, par M. le comte de Maricourt 304
TABLE. 617
II
ÉPOQUE AOKAINB.
•
Les arènes de Senlis, par M. de Caix de Sainl-Aymour. 69
Note relative à deux emplacements gallo-romains, situés
an lieu dit Rigalot, dans la forêt de Qiantilly, par
M. Margry 198
Bratuspantium, par M. Hayaux du Tilly 106
Bataille de César contre les Nerviens au passage de la
Sambre, par M. Tabbé Caudel . 232
Ëtudes sur les principales voies romaines et gallo-ro-
maines partant de Senlis, par M. Tabbé Caudel . . 396
Quelle est la véritable signification à donner aux mots
mansio et mutatio dans les itinéraires, par M. Hayaux
du Tilly , 433
Le château de Senlis (ancien castrum), par M. Booet . 436
Voie romaine de Senlis à Meaux, par M. Tabbé Caudel. 474
Conférence sur les amphithéâtres en général et sur les
arènes de Senlis en particulier, par M. Em. Bosc. . 443
Mémoire sur le camp des Césarines, près la ville de
Saint-Céré (Lot), par M. Castagne S06
III
MOTBN AGB.
L'architecture religieuse dans le diocèse de Senlis, du
y an xvi« siècle, par M; A. Saint-Paul .... 246
Hôtel de ville de Compiègne, par M. le comte de Marsy. 321
Notre-Dame-de-la-Victoire, près Senlis, par M. Paul
Durand 378
Le château de Senlis, par M. Bouet * 436
Les aiguilles de Figeac, par M. Léon Palustre ... 490
Souillac, Le Vigan et Gourdon (Lot), par M. de Lau-
rière 529
618 TABLE.
Le pont de Valentré à Cahors. — Notice historique et
archéologique, par M. Paul de Fontenillcs. ... 556
L'église et le portail de Beaulicu (Corrèze),par M. Tabbc
Poalbrière 581
NUMISMATIQUE.
Note sur les monnaies découvertes daus les fouilles des
arènes de Senlis, par M. E. Dupui 383
HISTOIRE.
A quelle époque faut-il faire remonter la prédication
du christianisme dans le Pagus sUvaneciensis^ par
M. Fabbé Eug. MUUer? 40
Ëvangélisation des Gaules. — Prédication du christia-
nisme dans le Pagus silvanectensis, par M. Tabbé
de Meissas 78
Hugo de Groot (Crrotius) à Balagny et à Senlis (1623-
1635),parM. Hardouin 157
Dom Pierre Constant et Guillaume d*Ercuis, par M. le
colonel Constant d'Yanvillc ««îi
Les archers, arbaictriers et arquebusiers à Senlis, par
M. Tabbé Vallier 277
Les bibliothèques de Senlis, par M. l'abbc Vatlior . . M")
Extrait d'une notice sur Lôvigncn. — Les francs-ficfs
du Valois, par M. l'abbé Gros 463
MÉLANGES.
Rapport de M. Ledain sur une excursion à Chantilly, à
Sainl-Leu-d'Essercnt et à Montataire . . . *. . <80
De la terminologie archéologique, par M. l'abbé Van
Drivai î69
Excursion à Compiègne 31 î
TABLE. 619
Carie comparative du pays seDlicien aux tempâ anciens
et de nos jours, par M. Hahn 380
Excursion à Chaaiis et à Ermeuonvilie itO
Sir Henry i^arker et ses projections de vues photogra-
phiques, par M. Jules de Lauriërc 424
Excursion à Cliamplieu, Pierrefonds et Morienval . . 430
Excursion à Melio, Moucliy et Beauvais 459
Compte-rendu général d'une excursion archéologique
dans le département du Lot 483
i
LISTK DES GRAVURES
L Sépulture néolithique du Compan (Luzarches). Age de
la pierre polie 442
2. Découverte d*une cachette de fondeur (Luzarches).
Age du bronze 452
3. Emplacement gallo-romain au lieu dit Rigalot, dans
la forêt de Chanlillv 200
4. Porte de Tarsenal do Compiègno d'après un dessin
conservé aux archives municipales 321
3. Tour de révôché, à Senlis 437
6. Tour du château de Senlis, vue intérieure. . . . 439
7. Le castrum de Senlis 441
8. Sceau de la commune de Figeac. — Id. de l'abhaye
de Saint-Sauveur de Figeac. — Médaille de pèleri-
nage reproduisant le sceau do Notre-Dame de Roca-
madour. — Monnaie mérovingienne trouvée au Puy
d'Issolud 488
6t0 TABLE.
9. Trésor de Rocamadoor. -^ Croix processioDDale
(XII* siècle) 496
10. Id. — Revers de la croix précédeote. ... 496
44. Custode en cuivre émaillé (xiv« siècle). ... 496
11. Id. -— Monstrance en argent (xv« siècle). ... 496
43. Reliquaire émaillé (xiii» siècle) 496
44 Plan du camp des Césarines (Lot) 51 1
45. Plan de l'église de Vigan (Lot). — Vase trouvé au
Vigan 544
46. Plan de C^hors d'après Tass\n 560
47. Armoiries de divers cvèques de Cahors. . . . 560
48. Élévation géométrale du pont de Valenlré, à
(Cahors 560
49. Portail méridional de Féglisc de Beaulieu (0)rrèze). 592
20. Bases de colonnes à l'église de Beaulieu. . . . :\9i
24. Crosse eucharistique à l'église do Beaulieu. . . 592
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