Skip to main content

Full text of "Séances générales tenues à ... en ... par la Société française pour la conservation des monuments historiques"

See other formats


Google 


This  is  a  digital  copy  of  a  book  thaï  was  prcscrvod  for  générations  on  library  shelves  before  it  was  carefully  scanned  by  Google  as  part  of  a  project 

to  make  the  world's  bocks  discoverablc  online. 

It  has  survived  long  enough  for  the  copyright  to  expire  and  the  book  to  enter  the  public  domain.  A  public  domain  book  is  one  that  was  never  subject 

to  copyright  or  whose  légal  copyright  term  has  expired.  Whether  a  book  is  in  the  public  domain  may  vary  country  to  country.  Public  domain  books 

are  our  gateways  to  the  past,  representing  a  wealth  of  history,  culture  and  knowledge  that's  often  difficult  to  discover. 

Marks,  notations  and  other  maiginalia  présent  in  the  original  volume  will  appear  in  this  file  -  a  reminder  of  this  book's  long  journcy  from  the 

publisher  to  a  library  and  finally  to  you. 

Usage  guidelines 

Google  is  proud  to  partner  with  libraries  to  digitize  public  domain  materials  and  make  them  widely  accessible.  Public  domain  books  belong  to  the 
public  and  we  are  merely  their  custodians.  Nevertheless,  this  work  is  expensive,  so  in  order  to  keep  providing  this  resource,  we  hâve  taken  steps  to 
prcvcnt  abuse  by  commercial  parties,  including  placing  lechnical  restrictions  on  automated  querying. 
We  also  ask  that  you: 

+  Make  non-commercial  use  of  the  files  We  designed  Google  Book  Search  for  use  by  individuals,  and  we  request  that  you  use  thèse  files  for 
Personal,  non-commercial  purposes. 

+  Refrain  fivm  automated  querying  Do  nol  send  automated  queries  of  any  sort  to  Google's  System:  If  you  are  conducting  research  on  machine 
translation,  optical  character  récognition  or  other  areas  where  access  to  a  laige  amount  of  text  is  helpful,  please  contact  us.  We  encourage  the 
use  of  public  domain  materials  for  thèse  purposes  and  may  be  able  to  help. 

+  Maintain  attributionTht  GoogX'S  "watermark"  you  see  on  each  file  is essential  for  informingpcoplcabout  this  project  and  helping  them  find 
additional  materials  through  Google  Book  Search.  Please  do  not  remove  it. 

+  Keep  it  légal  Whatever  your  use,  remember  that  you  are  lesponsible  for  ensuring  that  what  you  are  doing  is  légal.  Do  not  assume  that  just 
because  we  believe  a  book  is  in  the  public  domain  for  users  in  the  United  States,  that  the  work  is  also  in  the  public  domain  for  users  in  other 
countiies.  Whether  a  book  is  still  in  copyright  varies  from  country  to  country,  and  we  can'l  offer  guidance  on  whether  any  spécifie  use  of 
any  spécifie  book  is  allowed.  Please  do  not  assume  that  a  book's  appearance  in  Google  Book  Search  means  it  can  be  used  in  any  manner 
anywhere  in  the  world.  Copyright  infringement  liabili^  can  be  quite  severe. 

About  Google  Book  Search 

Google's  mission  is  to  organize  the  world's  information  and  to  make  it  universally  accessible  and  useful.   Google  Book  Search  helps  rcaders 
discover  the  world's  books  while  helping  authors  and  publishers  reach  new  audiences.  You  can  search  through  the  full  icxi  of  ihis  book  on  the  web 

at|http: //books.  google  .com/l 


Google 


A  propos  de  ce  livre 

Ceci  est  une  copie  numérique  d'un  ouvrage  conservé  depuis  des  générations  dans  les  rayonnages  d'une  bibliothèque  avant  d'être  numérisé  avec 

précaution  par  Google  dans  le  cadre  d'un  projet  visant  à  permettre  aux  internautes  de  découvrir  l'ensemble  du  patrimoine  littéraire  mondial  en 

ligne. 

Ce  livre  étant  relativement  ancien,  il  n'est  plus  protégé  par  la  loi  sur  les  droits  d'auteur  et  appartient  à  présent  au  domaine  public.  L'expression 

"appartenir  au  domaine  public"  signifie  que  le  livre  en  question  n'a  jamais  été  soumis  aux  droits  d'auteur  ou  que  ses  droits  légaux  sont  arrivés  à 

expiration.  Les  conditions  requises  pour  qu'un  livre  tombe  dans  le  domaine  public  peuvent  varier  d'un  pays  à  l'autre.  Les  livres  libres  de  droit  sont 

autant  de  liens  avec  le  passé.  Ils  sont  les  témoins  de  la  richesse  de  notre  histoire,  de  notre  patrimoine  culturel  et  de  la  connaissance  humaine  et  sont 

trop  souvent  difficilement  accessibles  au  public. 

Les  notes  de  bas  de  page  et  autres  annotations  en  maige  du  texte  présentes  dans  le  volume  original  sont  reprises  dans  ce  fichier,  comme  un  souvenir 

du  long  chemin  parcouru  par  l'ouvrage  depuis  la  maison  d'édition  en  passant  par  la  bibliothèque  pour  finalement  se  retrouver  entre  vos  mains. 

Consignes  d'utilisation 

Google  est  fier  de  travailler  en  partenariat  avec  des  bibliothèques  à  la  numérisation  des  ouvrages  apparienani  au  domaine  public  et  de  les  rendre 
ainsi  accessibles  à  tous.  Ces  livres  sont  en  effet  la  propriété  de  tous  et  de  toutes  et  nous  sommes  tout  simplement  les  gardiens  de  ce  patrimoine. 
Il  s'agit  toutefois  d'un  projet  coûteux.  Par  conséquent  et  en  vue  de  poursuivre  la  diffusion  de  ces  ressources  inépuisables,  nous  avons  pris  les 
dispositions  nécessaires  afin  de  prévenir  les  éventuels  abus  auxquels  pourraient  se  livrer  des  sites  marchands  tiers,  notamment  en  instaurant  des 
contraintes  techniques  relatives  aux  requêtes  automatisées. 
Nous  vous  demandons  également  de: 

+  Ne  pas  utiliser  les  fichiers  à  des  fins  commerciales  Nous  avons  conçu  le  programme  Google  Recherche  de  Livres  à  l'usage  des  particuliers. 
Nous  vous  demandons  donc  d'utiliser  uniquement  ces  fichiers  à  des  fins  personnelles.  Ils  ne  sauraient  en  effet  être  employés  dans  un 
quelconque  but  commercial. 

+  Ne  pas  procéder  à  des  requêtes  automatisées  N'envoyez  aucune  requête  automatisée  quelle  qu'elle  soit  au  système  Google.  Si  vous  effectuez 
des  recherches  concernant  les  logiciels  de  traduction,  la  reconnaissance  optique  de  caractères  ou  tout  autre  domaine  nécessitant  de  disposer 
d'importantes  quantités  de  texte,  n'hésitez  pas  à  nous  contacter  Nous  encourageons  pour  la  réalisation  de  ce  type  de  travaux  l'utilisation  des 
ouvrages  et  documents  appartenant  au  domaine  public  et  serions  heureux  de  vous  être  utile. 

+  Ne  pas  supprimer  l'attribution  Le  filigrane  Google  contenu  dans  chaque  fichier  est  indispensable  pour  informer  les  internautes  de  notre  projet 
et  leur  permettre  d'accéder  à  davantage  de  documents  par  l'intermédiaire  du  Programme  Google  Recherche  de  Livres.  Ne  le  supprimez  en 
aucun  cas. 

+  Rester  dans  la  légalité  Quelle  que  soit  l'utilisation  que  vous  comptez  faire  des  fichiers,  n'oubliez  pas  qu'il  est  de  votre  responsabilité  de 
veiller  à  respecter  la  loi.  Si  un  ouvrage  appartient  au  domaine  public  américain,  n'en  déduisez  pas  pour  autant  qu'il  en  va  de  même  dans 
les  autres  pays.  La  durée  légale  des  droits  d'auteur  d'un  livre  varie  d'un  pays  à  l'autre.  Nous  ne  sommes  donc  pas  en  mesure  de  répertorier 
les  ouvrages  dont  l'utilisation  est  autorisée  et  ceux  dont  elle  ne  l'est  pas.  Ne  croyez  pas  que  le  simple  fait  d'afficher  un  livre  sur  Google 
Recherche  de  Livres  signifie  que  celui-ci  peut  être  utilisé  de  quelque  façon  que  ce  soit  dans  le  monde  entier.  La  condamnation  à  laquelle  vous 
vous  exposeriez  en  cas  de  violation  des  droits  d'auteur  peut  être  sévère. 

A  propos  du  service  Google  Recherche  de  Livres 

En  favorisant  la  recherche  et  l'accès  à  un  nombre  croissant  de  livres  disponibles  dans  de  nombreuses  langues,  dont  le  français,  Google  souhaite 
contribuer  à  promouvoir  la  diversité  culturelle  grâce  à  Google  Recherche  de  Livres.  En  effet,  le  Programme  Google  Recherche  de  Livres  permet 
aux  internautes  de  découvrir  le  patrimoine  littéraire  mondial,  tout  en  aidant  les  auteurs  et  les  éditeurs  à  élargir  leur  public.  Vous  pouvez  effectuer 
des  recherches  en  ligne  dans  le  texte  intégral  de  cet  ouvrage  à  l'adressefhttp:  //book  s  .google .  coïrïl 


ANFORD  uN.vEHs,t.  uBH-vB.Es    STANFOR[ 


IIVERSITY     UBRAmtâ        SrANFORDUNIVERSr 


STANFORD     UNtVERSlTY    LIBRARIEE 


LIBRARiES     STANFORD 


■  UNIVERSITY 


ORD    UNIVERSITY  LIBRARIES         STANFORD    UNIV 


ANFORD    UNIVERSITÏ   LIBRARIES     STANFORl 


■IVERSITY 


LIBRARIES    -    STANFORD 


UNIVERS!' 


5RARIES       STANFORD   UNIVERSITY  LIBRARIE! 


LIBRARIES       STANFORD     UNIVERSITY    LIBRii 


SIANhUKO  UNIVERSI  I  Y     LtBKAUltS    -    Sf/» 


liVERSITV    LIBRARIES         STANFORD    UNIVEHSI 


JFQRD     UNlVtRSIT-ï    LIBRARIES    .    STANFORD 


RSITY    UBRARIES   -    STANFORD    UNIVERSITY 


'lES  STANFORD    UNIVERSITY    LIBRARIES 


STANFORD    university   ubrarie; 


FORD  UNIVERSITY 


LIBRARIES 


STANFORD     UNIVERS 


r''     LIBRARIES         STANFORD    UNIVEI 


iO     UNJVERSITV    LIBRARIES        STANFORD 


SITY    LIBRARIES    .    STANFORD    UNIVERSIT 


£S  STANFORD    UNIVERSITY    LIBRARIES 


^lES        STANFORD     UNIVERSITY    LlBHARi 


...FORD    UNIVERSITY    LIBRARIES    .    3TAN 


SÉANCES    GÉNÉRALES 


TCM'ES 

A     SENLIS 


EXCURSION     ARCHÉOLOGIQUE 

DANS  LE  DÉPAITEMENT  DC  LOT 


■  ^^B 


\MmM 


CONGRÈS 

ARCHÉOLOGIQUE 

DE     FRANGE 


XLIV  SESSION 


>^B 


SÉANCES  GÉNÉRALES 

TENUES 

A    SENLIS 
PAR  LA  SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D'ARCHÉOLOGIE 

nm  U  COiSERf  ATM»  n  U  OESCMPTIOII  des  ■OiOKITS 


EXCURSION    ARCHÉOLOGIQUE 

PAIYS  LE  DÉPA&TEMENT  DU  LOT 


DERACHE,  —    CHAMPION,    LIBRAIRES 

TOURS 
PAUL    BOUSEEEZ,    IMPHIMEUE 

1878 


LISTE  GÉNÉRALE 


DES  MIHIRX8  DE  U  SOCIÉTÉ  FRàlÇAlSE  D'iRGIÉOLMIE 


Par  ordre  Géographique  et  Alphabétique  (\), 


Bureau  Central 

MM.Lgon  palustre,  directeur,  rampe  de  h  Tranchée,  61,  à 
Tours. 

le  comte  db  MELLET,  directeur  honoraire,  au  château  de 
Chaltrait  (Marne). 

l'abbé  LE  PETIT,  cbaDoine  houoraire  de  Reims  et  de  Bayeux, 
doyen  de  Ti  II  y-su  r-Seu  Iles,  secrétaire  général, 

Db  LAl'RlfeRE,  secrétaire  général  adjoint,  15,  rue  dos 
Saints-Pèrts,  à  Paris. 

De  BEAI  repaire,  conseiller  à  la  Cour  d'appel,  secrétaire- 
adjoint^  à  Caèn. 

B(JUET,  conservateur  du  musée  et  archiviste,  rue  de  l'Aca- 
démie. 6,  à  Caen. 

L.  GAUGAIN,  trésorier,  rue  Singer,  18,  à  Caen. 


I.  0«i  lie  MM.  le»  Membm  île  U  Société  dont  les  noms  seraient  omit  tar 
rvtir  liftc,  et  oc«x  qoi  taraient  à  indiquer  des  rectifications  poar  leur*  noms, 
fcahit-ftov  liomicile.  sont  priés  d'adresser  leurs  réclamations  à  M.  le  Directear 
•le  U  SKiété,  o«  a  M«  G.%r<:m,  trésorier  rue  Singer,  18,  à  Caen. 

XUV*  SBSSIOIf.  A 


Il  LISTE  BES  MEMBRES 


Comité  permanent. 

ë 

MM.LéoN  PALUSTRE,  président. 

DB  LA  MARIOUZE,  rice'présfdenf . 

CAMPION,  secrétaire. 

i;abbé  Le  PETIT. 

DE  LAUHIËHE. 

DE  BËAUREPAIRE. 

GAUGAIN. 

DE  FONTETTE. 

Julien  TRAVERS. 

Comte  DU  MANOIR. 

VILLERS. 

L'abbé  LBFOURNIER. 

DR  BRÉCOURT. 

BOUET. 

DE  FORMIGNY  DE  LA  LONDE. 

LE  FÈRON  DE  LONGCAMP. 


Inspecteurs  divisionnaires. 

l'e  division. 

Nord,  Pas-de-Calais  et  Somme. 

Inspecteur:  M.  DESCHAMPS  de  PAS,  correspondant  de  l'Ini 
ingénieur  des  ponts  et  chaussées  en  retraite,  à  Sainl-Omer. 

%^  dlirlsloii. 

Seine,  Seine-et-Oise,  Seine-et-Marne,  Aisne  et  Oise. 

Inspecteur  :  M.  EGGER,  membre  de  l'Institut,  rue  Madame 
à  Paris. 


DE   LA   SOCIETE  FRANÇAISE  D  ARCHEOLOGIE.  III 


S«  division. 

Calvados,  Manche,  Eure  et  Seine-Inférieure. 

iHxpecteur  :  M.  db  BEAUREPAIHE,  conseiller  à  la  Cour  d'appel 
de  Caen. 

•f«  division. 

Ille-et-Vilaine,  Côtes-du-Nord,  Finistère,  Morbihan 

et  Loire-Inlérieure. 

* 
Inspecteur  :  U.  AUDREN  db  KERDREL,  vice- président  du  Sénat, 

411  château  de  Saint-Uhel,  près  ferlent. 

&<-  division. 

Sarthe,  Mayenne,  Maine-et-Loire  et  Indre-ct-Loirc. 

Impecteur  :  M.  le  comte  de  MAILLV,  ancv.Mi  pair  île  France,  au 
'lialeau  de  la  Roche- de- Vaux,  près  le  M^ns. 

••  division. 

Eure-et-Loir,  Loiret  et  Loir-et-Cher. 
Ivpecieur  : 

t«  division. 

Cher,  Indre,  Nièvre  et  Allier. 
inspecteur  :  M.  Tabbé  LENOIR,  cure  de  Chàlillon-sur-hidie. 


IT  JUSTE  BES  MKlIBtR^ 

Vendée,  Deax-Sèvres,Vienne,  Charente  et  Chareate-lnférieui 
hupeeteur  :  M.  l'jbbé  AUBER,  cliaooine  titulaire,  à  Poitiers. 


Haute-Vienne,  Creuse,  Gorrèze  et  [lordogne. 

Inspecteur  :  }i.  Tabbé  ARBELLOT,  chanoine  titulaire,  1 1 ,  vieu\ 
de  la  Corderie,  à  Limoges. 


Gironde,   Landes,  Lot-et-Garonne,  Gers, 
Hautes  et  Basses-Pyrénées. 

Inspecteur  : 

11*  MvlBioii. 

Tarn-et-Garonne,  Tarn,  Lot  et  Aveyron. 

Inspecteur  :  M.  le  comte  db  TOULOUSE-LAUTREC,  au  chàte 
de  Saint-Sauveur,  près  Lavaur. 

Haute-Garonne,  Aude,  Pyrénées-Orientales  et  Ariége. 

luMpecteur  :  M.  db  BONNEPOY,  à  Castelnaudary  et  à  Touloui 
3,  rue  Durant! . 

13«  division. 

Hérault,  Gard,  Ardèche  et  Lozère. 
Inspecteur  :  M.  A.  RICARD,  à  Montpellier. 


Dfi  LA  SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D'ARCnÉOLOGlR.  V 

14*  dlirisloii« 

Bouches-du-Rhône,  Vaucluse,  Var,  Basses-Alpes, 
Alpes-Maritimes  et  Corse. 

impecfeur  :  M.    de   BERLUC-PERUSSIS,   à    Porchères,    près 

Foriali|uier. 

1S«  dlYUion.  ^  I 

Rhône,  Ain,  Savoie,  Haute-Savoie,  Isère,  Drôme 

et  Hautes-Alpes. 

Inspecteur  :  M.  MARTIN-DAUSSIGNY,  directeur  des  musées  de 
ia  ville,  à  Lyon.  , 

■•«  division. 

Puy-de-Dôme,  Cantal,  Haute-Loire  et  Loire. 

inspecteur  :  M.  J.-B.  BOUILLET,  à  Clermont-Ferrand. 

19*  division. 

Côle-d'Or,  Yonne  et  Saôue-el-Loire. 
Inspecteur  :  M.  BULLIOT,  à  Autuu. 

19*  division. 

Doubs,  Jura  et  Haute-Saône. 

Inspecteur  :  M.  Eo.  CLERC,   président  honoraire  à   la  Cour 
d'appel  de  Besançon. 

i9«  division. 

Meuse,  Meurthe-et-Moselle,  Vosges  et  territoire  de  Bell'ort. 
hupecieur  : 


VI  UST£  DES  M£MBfi£S  VE  lA  SOCIÉTÉ. 


Marne,  Ardennes,  Aube  et  Haute-Marne. 

Inspecteur  :  M.  le  comte  db  MELLET,  aa  chàleau  de  Chai 
près  d*Ëpenjay. 

Algérie. 

Inspecteur  :  M.  CIIERBONNEÂU,  correspoDdaot  de  Tlos 
inspecteur  des  écoles  musalmanes  d'easeignement  supérieur,  à  A 


LISTE  GÉNÉRALE  DES  MEMBRES 

1/aslérisqiie  (*)  désigne  les  membres  de  la  Société  abonnés 
au  Bulletin  monumental  (i). 


(Lei  MU  des  nembres  do  Conseil  sont  désigics  par  le  caractère  italiqoe. 


Ain. 

Inspecteur:  M. 
Maitix  (l'abbéN  cur^*  de  Foissiat,  canton  de  Montrevel,  près  Bourg 


AisTie. 

Inspecteur  :  '  M. 

'BioT.NET  (de),  ancien   président  du  Soissons. 

tribonal  civil,  à  Saint-Quentin.  Piettf.,  juge  de  paix,  k  Craonne. 

'f>tHo\  (lahbé),    vicaire,  à    Saint-  Thkvenart    (l'abbé),   chanuino  hono- 

Quentin.  raire,  archiprêtre  de  Laon. 

DcRsr.juge  honoraire,  à  Laon.  Willot,  secrétaire  de  la  Société   Ar- 

^LFïRt  (Ed.),  à  Vorges,  près  Laon.  chéologique  de  Soissons,    à   Namp- 

1^  CUrr  de  la  Prairie  (Jules),  prési-  celle-la-Cour,  par  Vervins. 

<i^t  (le  la  Société  Archéologique,  h 


1/ Le  i^uZ/ffm  monumen(a/,  qui  a  conquis,  depuis  45  ans,  un  rang  si  distin- 
J>Jé  parmi  les  publications  archéologiques  de  la  France  et  de  Tétranger,  parait  de 
Ml  semaines  en  six  semaines,  illustré  d'un  grand  nombre  de  ligures.  Pour  le  rece- 
voir, les  membres  doivent  o/ou/er  irs/r.  «  leur  rotisation  annuelle^  pour  la 
f^raiice,  et  1 S  /r.  pour  l'étranger. 


VIII 


LISTE  DES  MEMBRES 


.^llior. 


Inspecteur  :  M.  Albert  de  Bcrf.s,  k  Moulins. 


Baillcal-  (Jh.),  médecin,  h  Pierrelllte- 
sur>Loire. 

*  BcRSS  (Albert  de),  à  Moulins. 
BotxiiARD,  aTocat,  id. 

*  CoTfXY  (Mgr  de),  protonolaiFe  aposto- 
lique, k  Moulins. 

*  Dadolk  (E.)i  architecte,  à  Moulins. 
Dksrosiers  (l'abbé),  curé  de  Bourbon- 

l'Archambault. 

*  Drevx-Brézé  (Mgr  de),  évëque  de 
Moulins. 

*  EsMONOT,  architecte  du  département, 

k  Moulins. 


"  ËsTOiLE  (le  comte  de  T),  k  Moulins 
La  Couture  (Ernest),  k  Franchesse,  | 

.  Bourbon-1'A  rchambaul  t. 
CorTtniER  (Lucien),  architecte,  k  Vie! 
Mbillbcrat  des  Prurbacx  (Louis) 
Moulins. 

*  Mélim  (l'abbé),  k  Moulins. 
MiUNOT  (D.-M.),  k  Chantelle. 

*  QuRYROi,  directeur  du  musée,  k  M^ 

lins. 
'Salvert-Bbllenaves  (de),k  Bellena^ 

*  Saulnier  (Maurice),  k  Moulins. 
TixiBR  (Victor),  k  Saint-Pont. 


Alposs   (BusKOs). 


InspeeCeur  :  M. 


Berluc-Perrussis  (de),  k  Porchères, 

près  Forcalquier. 
Carboxel  (l'abbé),  k  Nioielles,  près 

Forcalquier. 
HoDOCL  (l'abbé),  curé  de  Mane,  près 

Forcalquier. 
Macrel  (Victrice-Pierre),  paléographe, 

k  Sisteron. 
Pardigom  (Emile),  employé  des  ponts 


et  chaussées,  k  Sisteron. 
Rasirai'd  (Pabbé),  k  VilleneuTe-I 

Voix. 
RiPKRT-MoNCLAR  (marquîsde),  chat 

d'Allemagne,  prôs  Riez. 
Tardiei'    (Gustave),    pharmacien 

l""  classe,  k  Sisteron. 
Terrasson  (l'abbo),  curé  de   Fon 

quier. 


Alpos   (H.auto*«). 


GciLDERT  (Mgr),  évoque  de  Gap. 
Templier  (l'abbé),  chanoine  honoraire. 


Inspecteur  :  M. 

aumùnier  de  Técole  normale,  k  C 


m:   LA   SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D* ARCHÉOLOGIE. 


IX 


Alpos->Iax*itiiiios. 


Inspecteur  :  M.  Brux,  irchilecte,  à  Nice. 


Bmsst  (Emile) f  oolaire,  k  Tourelles- 

de-Vente. 
'Buxc  (Edmond) f  a  Vence. 
Hro,  architecte,  rue  Saiut  Etienne,  à 

Nice. 
*  Cavalucs  (Denys),  à  Grasse. 
'CiAMBicM  DE  RosEMOïiT  (de),  avcuoe 

lie  la  Gare,  S6,  à  Nice. 
Gazax,  colonel  d'artillerie,  à  Antibes. 


IfouciNS  DE  Roquefort,  docteur  en 

médecine,  a  Antibes. 
Randon  (Philippe),  architecte,  à  Nice. 
Rastoix  -  Brévoxd,  8,  ruti   des  Pon> 

chettes,  k  Nice. 
Sardou  (Antoine-Léandre),  trésorier  de 

la  Société  des  lettres,  sciences  et  arts, 

à  Nice.  I 


ArilèoUo. 


Inspecteur  :  M.  Ollier  de  Marichard. 


BaïuT  (Odilon),  au  château  de  Sépio- 

w(,  près  les  Vans. 
<asH)3i  (Et.  de),  à  Vidalon-lès-Annonay. 
HutARD  (l'abbé),  curé  de  Mêlas,  par 


leTheil. 
*  Mariciiard (Jules  Ollierde),  a  Vallon. 
Montravet  (le  comte   Louis    de),  à 

Joyeuse. 


-Vraoniios. 


Inspecteur  :  •  M.  C«h:ty,  architecte,  a  Sedan. 


C-HDi^Y,  ingénieur  des  ponts  et  chaus- 
«^.  3  H^lhel. 


•  CoiTY,  arcliilecte,  à  Sedan. 


A  tI  «»«<». 

Inspecteur  :  M.  Jules  dk  L\ii0Nnf:&,  à  Pamiers. 

LwioMiM  (Jules.dc;,  a  Pamiers.  Vii»u.  (rabb6\  curédeNuIre-Dame-de 

îi'  niiuit>  (labl»*'*).  professeur  an  pelil  Camou,  h  Camnu,  par  Mirepoix. 

^^tniaaire,  à  Pamiers. 


XLIV*   SESSION. 


B. 


XII 


L1ST£  DES  MEMBRES 


Oalvctaos. 


Inspecteur  :  *  M.  Bouet. 


ArvRAY,  architecte  de  la  ville,  à  Caen. 
Ha/.im  (Raoul),  à  Condé-sur-Noireau. 
Bazin  (Alphonse),  courtier  de  navires, 

à  Caen. 
Beaucourt  (\e  coinle  de,,  au  château 

de  Moraiuville,  par  Blangy. 
'  BBAtJOi'R,  iioliirc  honoraire,  k  Caen. 

*  Bbaurepaire  (de),  conseillera  la  Cour 

d'appel,  à  Caen. 

Blangy  (vicomte  Auguste  de),  au  châ- 
teau de  Juvigny,  par  Tiliy- sur  • 
Seul  les. 

BoissiM  (Elisée,,  au  château  de  Lon- 
«raye. 

BoMMECiiosK  (de),  k  Monceaux. 

BoscAiN,  graveur,  ii  Caen. 

*  Boi'ET,  Id. 

Brécoirt  (de) ,  ancien  ofncier  de  ma- 
rine, h  Caen. 
'Brioubville  (le  marquis  de) ,kGuéron. 

*  Campiofi,  avocat,  secrétaire  général 

de  la  mairie,  à  Caen. 
C\»trl,  agent-voyer  chef  en  retraite,  à 
Baycui. 

*  Cal'Momt  (M-«  de),  à  Caen. 
Ca/.i?«,  propriétaire,  il  Vire. 

CiiATEL  (Victor),  k  Valcongrain,  par 
Aunay. 

CoRNL-LiER  (le  maniuis  de),  k  Fontaine- 
Henry.  • 

*  Cr»8Y  DE  JocoviLLB  (le  marquis  de),  k 

la  Cambe. 
Dalger  (le  baron),  propriétaire,  au 

château  d'Esquay-sur-Seulles. 
Delavmay,  Architecte,  k  Bayeux. 
DEAiiAYbs,  architecte,  k  Caen. 
Doi'ETii.,  k  Vire. 
Doi'cET,  banquier,  k  Bayeui. 


DuDutRG,  juge  booon 

civil,  k  Falaise. 
Du  Ferrage,  propriéli 

*  Du  Manoir  (le  comte 
Di!  MksoiK  (Thibault) 

*  Dupray- l.amahirit 

Cour  d'ap]K!l,  k  Cae 
ËMACLT  (Ovide),  mail 

BayeuY. 
Emgerahd,  avocat,   r 

Caen. 
Farcy  (Paul  de),  k  Ba 
Fëdérique  (Charles-A 

Vire. 

*  Klanhin,  membre  di 
ail  chitcau  de  Kallp 
l'Èvùqup. 

Floi^hkt,  correspond! 
au  château  de  Fo 
d'AnjouSaint-Hon< 

*  Fonte Ue  (le  baron 
ancien  député,  a  Mr 

*  Formign\i  de  la  Lo 
ForyrEs  (l'abbé),  cur 

par  Evrecy. 
Fonmier  (l'abbé),  cui 
par  May-sur-Orne. 

*  Gaigaim,  rue  Singei 
'Gkrard  (le  baron  He 

par  Bayeux. 

*  GuERBT  fA.),  avocat, 
GrKRMER,  peintre,  k 
GrF.RMER  (rabbé  Lé< 

Thospice  Saint  Lou 

*  (;Mi76erM  Georges), 
Gi'iLi.ARn,   coniervatf 

peinture,  id. 

*  IIandjéri  (le  prince 


DE   LA  SOCIETE   FRA^iCAlSE  d'aRGHEOLOGIE. 


XI 


Bo  u.oties-d.u.-JE11idTie. 


Inspecteur:  M.  de  Payak-Dumodun.  comeillerf  à  Aii. 


litTVEUCMT  (le  docteur),  villa  Doria, 
boilevard  Cbavet,  à  Maneille. 

ItauiAT,  sciUpleor,  à  AU. 

luMiAAo,  archivikle  du  département, 

àManeille. 
BuTOGUo  (Louis),  a  Arles. 
B11AU051  (Honoré),  à  Arles. 
BoioLAaDT  (Oscar),  68,  rue  Monlgraiid, 

à  Marseille. 
Caima?!,  notaire,  à  Tarascon. 
*  Cl.ur  cHonoré),  président  de  la  (^m- 

■ission  archéologique,  à  Arles. 
Curpiui  (Félix^,  l'*"  avocat  général,  à 

Ail. 
Ecale  cflfmmaDale  de  Saint-Rem  y. 
E!>(CEULUiDT   (docteur  Emile),  cours 

Pierre-Pnget,  18,  à  Mtrseille.     - 
Passi?(  (Emile),  avocat,  a  Arles. 
'  Gaitieii- Descottes,  notaire,  à  Arles. 
Gactiui  Descottls  (Marc),  à  Arles. 
'Gti.«iDA  (Gonxague),  archilectc,  II,  rue 

Barberont,  à  Marseille. 
H»iT  (Théodore),  rédacteur  du  Petit- 

MarseillttiSy  .57,  boulevard  National, 

a  Marseille. 
(niLUBEBT  (Fabbé),  curé-doyen,  aui 

Martigues. 
'HtAiT^    conservateur  du  musée,  à 

Arles. 
KoTBi:'^,  45,  rue  Saint-Basile,  à  Mar- 

ifille. 
'LiLiTJkLD,  bibliothécaire  de  la  ville, 

a  MarKille. 
'  Mi*niiAL-BFR!«ARD,  conseiller  général, 

maire  île  Saint-Remy. 


MoNGRs    (Jules),    négociant,  rue  La- 

fayette,  2,  à  Marseille. 
MoREL  (l'abbé),  curé  de  Saint^Barthé- 
'    lemy,  près  Marseille. 
Marim  de  Carranrais  (François  de). 

Cours  Pierre-Pnget,  I,  à  Marseille. 
Meyer  (Georges),  mécanicien,  attaché 

au  bassin  de  radoub,  a  Marseille. 
Municipalité  de  Saint-Remy.'' 
NoDET(Gh.),7,  boulevard  Dugommier, 

à  Marseille. 
Payan-Domoi'li.^  (de),  conseiller  a  la 

Cour  d'appel,  à  Aii. 
pE?iO!f,  directeur  du  musée  Borély,  à 

Marseille. 
Poi-G!iBT  (Fabbé),  8,  rue  Rougier,  à 

Marseille. 
Retbacd-Tre.'<ovibr,  rue  des  Prêtres, 

a  Arles. 
RoLLA.^D  (Fabbé),  aumônier  du  collège 

Bourbon,  à  Aix. 
Roman,  photographe,  k  Arles. 
Sabatier,  fondeur,  rue  des  Orfèvres,  8>, 

à  Aix. 
Salles,  ingénieur  des  ponlH  et  chaus- 
sées, a  Arles. 
Saporta  (le  comte  de),  à  Aix. 
Sardou  (Jean -Baptiste),  archiviste,  rue 

Cannebièrc,  14,  li  Marseille. 
Sai'm  (Auguste),  ancien  bibliothécaire 

de  Strasbourg ,  II,  rue  de  FObé - 

litque,  à  Marseille. 
Setmard  (A.),  conseiller  honoraire,  ii 

Aix. 
'-Véran,  architecte,  à  Arles. 


XII 


L1ST£  DES  MEMBRES 


Oalvctaos. 


Inspecteur  :  *  M.  Bouet. 


AiviAY,  aixbilecte  de  la  ville,  à  Caen. 
Ha7.i?(  (Raoul),  à  Condé-sor-Noireau. 
Ba:tn  (Alphonse),  coortier  de  navircf , 

k  Caen. 
Bbaocourt  (le  comte  dei,  au  château 

de  Morainville,  par  Blaogy. 

*  Bbauoi'K,  notaire  honoraire,  k  Caen. 

*  Bkacrepaikk  (de),  couielller  à  la  Cour 
d'appel,  à  Caen. 

Bla.ngy  (vicomte  AuBOste  de),  au  châ- 
teau de  Juviguy,  par  Tilly  •  sur- 
Seullei. 

Boisan  (Èliséei,  au  château  de  Lon- 
graye. 

Bo?iMECHOSK  (de),  à  Monceaux. 

BoscAiM,  graveur,  a  Caen. 

*  BocET,  id. 

BaÉcoi'nT  (de) ,  ancien  orflcier  de  ma- 
rine, à  Caen. 
* Briqubville  (le  marquis  de) ,k  Guéron. 

*  Campion^  avocat,  secrétaire  général 

do  la  mairie,  à  Caen. 

Castel,  agent-voyer  cher  en  retraite,  à 
Bayeui. 

'  Cacmo.oit  (M-«  de),  k  Caen. 

Ca7Jm,  propriétaire,  k  Vire. 

Chatel  (Victor),  k  Valoongrain,  par 
Aunay. 

CoRNt'LiBR  (le  marquis  de),  k  Fontaine- 
Henry.  • 

'  CrssT  DB  JuœviLLB  (le  marquis  de),  k 
la  Cambe. 

Dauger  lie  baron),  propriétaire,  au 
château  d'Esquay-sur-Seulles. 

Dblaunay,  architecte,  k  Rayeux. 

Desiiates,  architecte,  k  Caen. 

DoLÊTiL,  k  Vire. 

Doucet,  banquier,  k  Bayeux. 


DuDotRG,  juge  honoraire  au  tribunal  , 

civil,  k  Falaise. 
De  Ferrage,  propriétaiic,  à  Caen. 

*  Du  Manoir  (le  comte),  mairede  Jnayc. 
Dr  Maxoir  (Thibault),  k  Juaye. 

*  Dupray-iMmakérie,  conseiller  k  la 

Cour  d*appcl,  k  Caen. 
Émaclt  (Ovide),  maire  de  Blay,  prè» 

Bayeui. 
E'fGERAHD,  avocat,   rue    Pémagnic,  a 

Caen. 
FARtnr  (Paul  de),  k  Bayeux. 
F^DÉRiQUE  (Charles-Antoine),  avocat,  a 

Vire. 

*  Flamdim,  membre  du  Conseil  général, 
au  château  de  Rallcvillc,  près  Pont- 
rÉvéque. 

Floqukt,  correspondant  de  rinstitui, 
au  château  de  Formcnlin,  et  roc 
d'AnjouSaint-Honoré.  52,  k  Paris. 

*  Fontette  (le  baron  Emmanuel  de\ 
ancien  député,  k  Monts. 

*  Formigny  de  la  Londe  (de»,  a  Caen. 
Foi\»rEî»  (rabbé),curé  de  Trois-Monts, 

par  Evrecy. 
Fonmter  (l'abbé),  curé  de  Clinchamps, 
par  May-sur-Orne. 

*  6Ari;Ai!<f,  rne  Singer,  18.  k  Caen. 
*Gi:r.\rd  (le  baron  Henri),  k  Rarbcville, 

par  Bayeux. 

*  GuÈRBT  ^A.),  avocat,  k  Vire. 
GiLRMER,  peintre,  k  Vire. 
Gi'F.nMF.R  (Kabbé  I>on),  aumùnier  ilo 

rhospice  Saint-Louis,  k  Vire. 

*  Ctuilbert  (Georges),  banquier  à  Caeii. 
GiiLLARO,   conservateur  du  musée  de 

l>eintiire,  id. 

*  IIamdjkri  (le  prince),  au  ch&teau  de 


DE   LA  SOCIÉTÉ  FRAIfÇAlSË    D'ARCHÉOLOGIE. 


XIH 


Vaterbe. 

'HiicocRT  (le  duc  d»),  i  ThoryHir- 
conrl. 

'HoTiEB,  conseiller  géDénl,  h  Cteii. 

Hcc(nn  (Mgr),  évoque  de  Bayeai  et 

Ltsieai. 
JicQDiEiitScnlpteqr-décoriteur,  à  Caeii. 
Ugetay  frabt>é\  chanoine  titulairef 

i  Bayeax. 
*  La  Mario  vze  de  Fréearin  (de),  an- 

tm  direrleur  des  domaines,  à  Caen. 
Laiottk,  arcbilecte,  a  Caeu. 
U  Pom  (Augustiu  de),  roule  de  Pont- 

rÉfèqve,  à  Liaieui. 
UBlaxc,  imprimeur-libraire,  h  Caen. 

U  FïïMos  DK  Loxcc\iip,  docteur  en 

drail,  à  Caen. 
'LcFFitoY,  propriétaire,  id. 
U  Gori\  (Kabbé),  curé  d'Aulhie,  par 

(^«en. 
U  GiK  (Louis) ,  maire  de  Lilleau , 

près  Bayeux. 
'U  Petit  «rabbé),  curé  doyen  deîilly- 

Mr-Senlles. 
LÉTtvT.  propriétaire,  ii  Caen. 
'LiDfjiAftD,  propriétaire,  id. 
'but  il'abbé).  cuié  de  Saint-Martin- 

de  Bienfaiie,  par  Orbec. 
VitociaiT  de  Rochkkort  (L(H)uce|,  a 

Vier^ille. 
VoLi\M.  l'It*).  a  Kayptu. 
Ho^TMiaai.feY  (le  comte  de),  a  Fcrva- 

qaes. 
Vo«EL  (l'abbé),  vicaire  à  la  calliédrale 

à*  Lifieui. 
'  <Hj%t..  maire  d'Ellon.  rue  Écho,  a 


Daycui. 

*  Fannier,  avocat,  à  Lisieux. 

*  PiKRRES  (de) ,  membre  du  Conseil 
général,  à  Louvières. 

Picot  (l'abbé),  supérieur  des  Mission- 
naires de  la  Délivrande,  près  Caen. 

Rampax  (Léonard  de),  à  Ecrammevllle 

RiocLT  DE  Nkvtillk  (le  vicomte  Louis 
de),  a  Livarot. 

Rdault  dc  Plcssis- Vaidikrk,  conseiller 
k  la  Cour  d'appel,  a  Caen. 

Saint-Jkan,  membre  du  Conseil  géné- 
ral, à  Brelteville-le-Rabet,  par  Lan- 
l*annerie. 

Saint-Rémy  (de\  à  Caen. 

Salles  (Emile),  noUire,  à  Trévières. 

Senot  de  Lalosidc,  il  Parrouru-l'Eclin. 

Tavic:<y,  il  Bayeux. 

TiRARD  (J.),  h  Condé-sur-Noireau. 

*  TissoT,  coosenrateur  de  la  Biblio- 
thèque, à  Liftieux. 

TousTAiN  (le  vicomte  Henri  de),  ancien 
oHIcier  de  marine,  au  château  de 
Yaux-sur-Aure. 

*  7Varerf,  ancien  professeur  a  la  Fa- 

culté des  lettres,  secrétaire  perpétuel 

de  TAcadémic  de  t'aen. 
Travers  (E.),  ancien  conseiller  de  pré- 

fecliiif,  à  Caen. 
Vk>c;eon  (rabbé),  curé  de  Luc-sur-Mer. 
Xu.w  (II»"!!!  i  de",  insprcicnr  do»  forAls 

en   retraite,   à  la    Petile-Lande-de- 

Cerqueux,  par  Orbec-en-Auge. 
niUrs  (G.\  à  Bayeux. 
Voi5i?j  (l'abbé),  curé  do  Canthy. 
VvoRY,  sculpteur,  il  Hayenx. 


CTaii  tu  I. 


insprcleuT  :  M.  AinEi>i.>,  archiviste,  à  Aurillac. 


AtvM\,  archiviste,  rue  de  la  Gare,  à        Cn\i.YET  m:  Rih.hrmuntkin   'Adolphe 
Aanllac.  de),  maire  de  Cheyiade,  près  Murât. 


XVI 


LISTE  DES  MEMBRES 


Od  tes-d  u.-Wor  tl . 


Inspecteur  :  M.  Gaultiks  or  Mottav. 


•  CiADLTlER  Df   MoTTAY.  k   Plérïll,    p|■^S 

Saint- Hrieuc. 
Hrrmot,  sculpteur,  à  Laniiioii. 
Kbkanflkcu  (le  comte  dc),  au  château 

<|p  Queieuec,  par  Miir-dc-RrclaQne. 


Ub  Mari^chal  (l'abbé), 
par  Bourbriac. 

PisoT  (rabbé),profes»c 
Saint- Charles,  k  S.ai 


Oroiijso. 


Intpecteur  :  M.  Georges  Callier. 


'  Callier  (Georges),  au  château  de 
Villepréaux,  près  Saint  Vaulry. 

Chaussât  (le  docteur},  k  Ahun-Ies- 
Mine». 


CorsTiN  DK  Masnada 
Henri  de),auchàteai 
Bénéfent. 

Sapim  (rabbé),  curt^  d( 


I>oriiou:iio* 


Inspecteur  :  M.  A.  de  Roomejocx,  k  Périgueux. 


*  Arzac  de  la  Douzk  (le  comte  Ulrich 

d'),  à   Borie- Petit,    commune  de 
Cbampsevinel. 

*  BoRGt'KT  (M*«  du),  au  château  dt* 
Portboutout,  par  Ribérac. 

Fayolli;  (le  marquis  de),  au  château  de 
Fayolle,  par  Tocane-Salnt-Apre. 

*  Gkrard  (Gaston  de),  à  Sarlal. 


GOYF.NÊCUB  (l'abbé),  ci 

parMussidan. 
Mo!<TARDY  (Gaston  de), 

NeuTÎc,  arr.  Je  Péri) 
'  KuiMEJOUx  (Anatole 

de  Rossignol,  par  B( 
Vasseur  (Charles),  à 

de-Belv««»,  arr.  de  Si 


OoubM, 


Inspecteur  :  M. 


*C.\STAM  (A.),  consert  a  leur  de  la  biblio- 
thèque publique,  à  Besançon. 
*  Clerc  (Edouard),  président  honoraire 


à  la  Cour  d'appel,  k 
Pai'li!«if.r  (Mgr),  archi 
çen. 


DE   LA   SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D* ARCHÉOLOGIE. 


XVII 


SntiTtAiT  (le  comte  de),    trésorier-       *  ViiLLEmn-,  contenrateor  ilo  mutée, 
r«Tf«r  général,  à  Besançon.  rue  Stint-Jesn,  41,  à  llesançon. 


nx^me. 


inspecteur:  *  M.  Valli:«ti!<,  jo0e,  à  Montélimar. 


Ni<.rc5  iAlpItoMe),  à  Romans. 
PwTMTX  (d«),  k  Romans. 
Smuimarqvit  de),  k  Vatenee. 


*  VALLEimx  (Ludovic),  juge  d'instruc- 
tion, h  Montélimar. 


Iî2ai*o. 


Inspecteur  :  M. 


luji  (l'abbé  Emile  de  la),  curé  de 

Stiat-Oucn -du -Tilleul. 
tHiiUL-llARETTE,  peintre-vcrricr,  à 

ETreii. 
Fit  le  vicomte  du),  b  Verueuil. 
GcauBo  (E.),  avoué,  h  Louviere. 
LuR  (^»iaiir,s  a  Saint  I>ger4ie-R6tes, 

ff«»  Bemay. 
Ukx^,  architecte,  b  Louviers. 
U  liiMJiKc  LB  NocMiT  (le  vice'amiral 

kr«o  Clément  de),  sénateur,  au  ctià- 

ban  de  Cracouville,  près  Èvreui. 
LoBEun  d'abbé),  chanoine  titulaire, 

aEvmn. 
U  BtjO!!»,  eatreproMur  de  bâtiments. 


h  Gisors. 
L018CL,  ancien  maître  de  poste,  b  la 

Rivière-Thibouville. 
Ii\i80>s  {comte  Robert  des),  maire  de 

Caumont,  par  la  Bouille. 
IfÉRY  (Paul),  à  ÉvreuT. 
'  Posée  (l'abbé),  curé  de  Bournainville. 
Prétavoinb,  maire  de  Louviers. 
*  Qi-i:s\LL  Tabbé),  curé  de  Claville. 
QcBViLLT  1  Henry),  k  Beaumesnil. 
RusTOLVN  ^le  comte  de),  a  ÊvreuT. 
ScBiOLLKK,  au  château  de  Biiy,  prés 

Veroon. 
Société  libre  de  l'Eure. 


ISoLPo-^et-X^ol  r. 


inspeetevr  :  *  M.  Charles  d'ALViiARs,  à  Dreui. 


'  ALviMiRE  (Ch.  é\  k  Dreai. 
'Owrmmd  Paul),  k  Chartres. 
*  loBJiT»  Orchid isle.  k  Chartres. 
Mmriumre  de,>,aU,kNofent-le-Rotrou. 


*  SAiïrr-LACiftR  (<!«>),  ancien  maire  de 

Chartres. 

•  TtLLOT  I  Henri ^  a  Drent. 


XLIV*  SESSION. 


G. 


XVI 


LISTE  DES  MEMBRES 


Odtes-dix-M'or  a . 


Inspeeleur  :  M.  Gaqltiei  di*  Mottay. 


'GADLTiEt  nr  Mottay.  k  Plériii,  près 

Saint- Brieuc. 
Hkknot,  scttipteur,  à  Lannion. 
Keranflech  (le  comte  de),  au  château 

lie  Qucieuec,  par  Miir-tlc-BretaQue. 


Lb  MaaiU»ial  d'abbé),  curé  «le  Magoar, 

par  Bourbriac. 
Pi:«OT  (l'abbé), professeur  à  rinstitution 

Saint-Charles,  à  i^ainl-Brieur. 


Croii«o. 


Intpecleur  :  M.  Georges  C allier. 


*  Caixier  (Georges),  au  château  de 
Villepréaux,  près  SaintVaolry. 

CiiAOftSAT  (le  docteur),  â  Ahuii-Ies- 
Miiies. 


CoitSTiN  DE  liASNADAOD  (le  Hiarquis 
Henri  de),  au  château  de  Sexerat,  par 
Bénéfent. 

Sapim  (l'abbé),  curé  de  Geulloux. 


r>oi*iiou;  no. 


Inspecteur  :  M.  A.  de  Roomejoox,  à  Périgueux. 


*  Arzac  de  la  Douze  (le  comte  Ulrich 

d'),  à   Borie- Petit,    commune  de 
Champterinel. 

*  BuRGUET  (M*«  du),  au   château  de 
Portboutout,  par  Ribérac. 

Payolle  (le  marquis  de),  au  château  de 
Fayolle,  par  Tocane-Saint-Apre. 

*  Gérard  (Gasloii  de),  à  Sarlal. 


GoYENÊCHB  (l'abbé),  curé  de  Bourgnac, 

parMussidan. 
MoNTARDY  (Gaston  de),  a  Douxillac,  par 

Neuvic,  arr.  Je  Périgueux. 
*  RoiMEJOCX  (Anatole  de),  au  château 

de  Rossignol,  par  Bordas. 
Vassecr  (Charles),  k  Saint-Germain- 

de-Belvès,  arr.  deSarlat. 


r>oui>M. 

Inspecteur  :  M. 

*  Castam  (A.),  conserva  leur  de  la  biblio-  à  la  Cour  d'appel,  â  Besançon. 

thèque  publique,  à  Besançon.  PÀrLl?iiER  (Mgr),  archevêque  de  Besan- 

'  Clerc  (Edouard),  président  honoraire  çon. 


DE  LA   SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D*ARCHÉ0L06IE. 


XVII 


SorLTRAiT  (le  comte  de),    trésorier-       '  Vlilleret,  conservateur  do  musée, 
payeur  général,  à  Besançon.  rue  Saint-Jean,  II,  fa  Besançon. 


i>x*ôiii.e. 


Inspecteur  :  *  M.  Valletitin,  juge,  à  Montélimar. 


NcccEs  (Alphonse),  à  Romans. 
PMmorx  (du),  à  Romans. 
SiETÉs  (marquis  de),  à  Valence. 


*  Vallentin  (Ludovic),  juge  d'instruc- 
tion, h  Montélimar. 


E:ai*o. 


Inspecteur  :  M. 


Balu  (l'abbé  Emile  de  la),  curé  de 
Saiot-Ooen-du-Tilleul. 

DruAHCL-yARETTE,  |)eintre-verrier ,  à 
Eîreax. 

Fit  lie  vicomte  du),  il  Vemeuil. 

CciLLARD  (E.).  avoué,  k  Louvicrs. 

LâiB. Casimir),  a  Saint  L^gcr-tle-Rôtes, 
I>ré<  B<»rnay. 

Lalcx,  architecte,  à  Louviers. 

La  R<»>cièke  le  Nocrry  lie  vice-amiral 
baron  Clément  de),  sénateur,  an  châ- 
teau de  Cracouville,  près  Évreui. 

Lekccrifa  (l'abbé),  chanoine  titulaire, 
a  Èvreux. 

Lb  Blo?(D,  entrepreneur  de  bâtiments. 


à  Gisors. 
L018EL,  ancien  maître  de  poste,  h  la 

Riviëre-Thibouville. 
li\i80NS  (comte  Robert  des),  maire  de 

Caumont,  par  la  Bouille. 
Méry  (Paul),  à  Évreux. 
*  Purée  (l'abbé),  curé  do  Bouruainville. 
Prétavoine,  maire  de  Louviers. 
'  (^l'ESMiL  Tabbé),  curé  de  Claville. 
Qt'EviLLT  (Henry),  k  Beaumesnil. 
RosTOLi?(  (le  comte  de),  à  Évreux. 
ScHiCKLER,  au  château  de  Bixy,  près 

Vemon. 
Société  libre  de  l'Eure. 


E:ui*o->et-I^oi  r. 


Jnspectevr  :  '  M.  Charles  d'ALviHARE,  •  Dreoi. 


'  ALTtVARE  'Ch.  d*  .  a  Dreux. 

•  Durand   Paul  ,  a  Chartres. 

*  Uua,tjf  archi^i^le,  a  Chartres. 
Mttritsure  tle  ,  ûls,a  Nogenl-le-RoIroo. 


*  SAirr-LArMER    d*  ,  an<im  maire  de 

Charlm. 
'  lïÀÀjn    H«^ri  ,  a  Ilreut. 


.XLIV*  SESSION. 


C> 


XVIII 


LIST£  DES  MEMBRES 


B^lnlstèi*e. 


Impeeteur:  M.  Paul  du  Ghatellibr. 


*  Blois  (le  Ticomte  A.  de),  à  Qoimper. 

*  Do  Ghatbllibr  ,  membre  corretpon- 
diDt  de  rinstitut  de  France,  au  châ- 
teau de  Kernui,  près  Pont-l'Abbé. 

Du  Ghatbluer  (Paul),  id. 


*  Hallégcex,  à  Gtiàteauliu. 
LsvAiïiviLLB,  ancien  préfet,  k  Bénodet, 

prèi  Fouesuant. 
Madec  (Pierre-Marie),  professeur  an 

petit  séminaire  de  Pont-Croii. 


oard. 


Intpeetewr:  *  M.  Pabbé  Gabbiso,  supérieur  du  grand  séminaire,  à  Nîmes. 


Alëgre    (Léon),     bibliothécaire,    à 
Bagnols. 

*  Brugcier-Rocrb   (Louis),   au  Pont- 

Saint-Esprit. 

*  Ddramd  (rabbé),  ficaire  à  Saint-Bau- 

dile,  à  Nîmes. 

*  Gareiso  (l'abbé),  supérieur  du  grand 


séminaire,  à  Nlme». 

*  Lavillb  (Pabbé  de),  chanoine,  à  Uiès. 

Revoil  (H.),  architecte  des  monuments 
historiques,  à  Ntmes. 

ViLLEPBRDRix  (Louis  de),  au  Pont- 
Saint-Esprit. 


Oax*on.n.o  (flaixto). 


Intpeetewr:  M.  de  Saint-Simon,  rue  Tolosane,  à  Toulouse. 


Barrt,  ancien  professeur  à  la  faculté 

des  lettres,  à  Toulouse. 
BiGOUEN  (le  comte),  trésorier-payeur 

général,  k  Toulouse. 

*  Bernard  (Bertrand),  peintre-décora- 
teur, à  Bagnères-de-Luchon. 

•  Cartailuac  (Emile),  directeur  des 
MatériaiuB  pour  tervir  à  P histoire 
primitive  de  Vhomme^  5,  rue  de  la 
Chaîne,  à  Toulouse. 

Glausade  (de),  président  de  la  Société 
archéologique  du  Midi,  rue  Mage,  à 


Toulouse. 

Crazanne  (de),  sous-intendant  mili- 
taire, *2*2,  rue  Ninau,  à  Toulouse. 

Faure  de  la  Ferriére,  rue  des  Fleurs, 
à  Toulouse. 

*  Gantier  (A.),  au  château  de  Picayne, 
près  Galères. 

Geze  (Louis),  hôtel  d'Assézat,  à  Tou- 
louse. 

GouRDON  (Maurice),  a  Bagnères-de- 
Lucboii . 

Héron,  I  bis,  rue  Eliot,  à  Toulouse. 


DE  LA  SOCIÉTÉ   FRANÇAISE  d'aRCHÉOLOGIE. 


XIX 


Uyiolus  (vicomte  de),  5,  roe  Tolo- 
Moe,  à  Toulouse. 

IfiLAFOssE  (Louit  de) ,  cbàteaa  des 
TareoDcs,  près  Villefranche. 

MtKTEL  (Ptalin),  a  Castelmaurou. 

*  MAtTtRÉ  (le  docteur),  médecin  mili- 
liire,  allées  Lafayette,  39,  à  Toa- 
loote. 

MoiEi^  arocat,  à  Sainf-Gaudeiis. 

Paca."!,  6,  allées  Saint-Étieuoe,  à  Tou- 
louse. 


PoTTiBR  (Raymond),  37,  me  Boalbonne, 
à  Toulouse. 

*  Saint-Simon  (de^,  rue  Tolosane,  6.  à 
Toulouse. 

Sévérac  (Henri  de),  à  Toulouse. 

*  SoLAGES   (le  comte   Paul   de),  me 
Ninau,  19,  à  Toulouse. 

Trutat    (Eugène),    conservateur    du 
muséum,  à  Toulouse. 

*  ViREDERT  (Gaston),  4,  me  Fourbas- 

tard,  k  Toulouse. 


Oers. 


ln$peetevr:  M. 


*  Laveic!I£  (Adrien),  à  Castillon   de       Mellis  (Max),à  Fleurancc. 
Bail,  par  Yle-Fexensae. 


Olronde; 

Inspecteur  :  M. 


'ArzAc  DE  LA  Marti  MIE  (d'),  proprié- 
taire, k  Pnjols,  par  Castillon-sur- 
Dordogne. 

'  Ck^glegnier  (le  comte  Alexis  de),  me 
da  Plessis,  5,  à  Bordeaux. 

Cin*T  DE  LA  Ville  (Mgr),  Camérier  de 
S^.,  doyen  de  la  Faculté  de  Théolo- 
ei^^  10,  rue  de  la  Concorde,  id. 

CotBiM  (l'abbé),  curé  de  Roaillaii,  par 
Langon. 

*Dls  Cordes  (Georges),  au  chfttoao  de 
Malfard,  par  Saint-Denis-de-Piles. 

DicIlbct-Lafargue  ,  179,  boolevard 
Candéran,  à  Bordeaux. 


Jabouin,  sculpteur,  me  Bonafonx,  I. 

Marocessac  (le  baron  Henri  de),  rue 
de  CheTerus,  36,  id. 

Méredieu  (de),  atoué,  me  Castillon,  9, 
id. 

PiGANKAr.secrélaire  delà  Société  archéo- 
logique de  la  Gironde,  17,  coursd'Al- 
bret,  id. 

f^illeneuve  (Hélion  de),  sous-inspecteur 
des  forets,  10*2,  cours  d'Alsace-Lor- 
raine, id. 

•  "Villers  (de),  trésorier-payeur,  à  Bor- 
deaux. 


Méx^ault. 

Intpecteur  :  M. 

Usit4T,  architecte- inspecteur  des  tra-       AzaIs  (Roger),  rue  Clappier,  3,  k Mont- 
^»ni  diocésains,  rue  Boussairolles,  a  pellier. 

Moalpcllier.  Balestrier  (Jules  de),  k  Lansargues. 


XXI 1 


LISTE  DES  MEMBRES 


Isèro. 


Inspectevr  :  *  M.  Leblanc,  bibliothécaire  et  conienratear  do  m» 


BiKOT  (Ernc&t),  «rcbitectf,  court  Ro- 

nietttns,  h  Vienne. 
Rryb  (docteur  de),  place  Saint«Mau- 

rioe,  k  Vienne. 
Daudru»-,  graveur,  à  Vienne. 
David  (Auguste),  docteur- médeclD,  à 


MoretteL  prêt  la  Tou 

*  Garifx,  conservateur 
thèque,  à  Grenoble. 

*  Leblanc,  à  Vienne. 

*  V ALLIER  (Gustave),  plai 

à  Grenoble. 


•Iu.i*u. 

Inspectevr  :  *  M.  Cabtan  ,  correspondant  de  Tlnstltut ,  consen 
bibliothèque  publique  de  Besançon. 


T^atiaos. 


Inspecteur:  M.  le  baron  ns  Cauma.  ii  Saint-Sever. 


B<»icHER  (Henri  du),  à  Dai. 

*  Cai  NA  (baron  de),  à  Saint-Sever. 

*  LouiT  DE  Mon  VAL  (de),  h  Dai. 


•  PoNSB  (l*abbé),  curé  « 
Mugron. 


I  ^<>  1  r-o  t-O  11  <>  r . 


Inspectevr  :  '  M.  le  marquis  de  Virraye,  à  Cour-Chevc 


Arcy  (comte  d*),  à  Celetles,  près  Blois. 

Bon.\RD  DE  LA  JAC0Pitf^.RK  (Anatole  de) , 
su  chàlcao  de  Saint-Ouen,  près  Ven- 
dôme. 

l>Ki.ACNE  (Jules),  avoué  licencié,  ii  Ru- 
niurantin. 

HAii;<»r  (rabbé\  curé  de  Fontaine  en 


Sologne,  pjr  Bracieui 
Lai'nay,  prorestcur  au  < 

dôme. 
•  Le  Nail  (Ernosl),  pcin 
Maricourt  (le  baron  de; 

Thiéraie,  parleGaul 
Nadaillac  (marquis  de 


I)£  LA  SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  d'aRGHÉOLOGIE. 


XXI 


ff 


r. 
^  •te- 


indre. 


U 


lupeeuur:  *  M.  le  docteur  Fauconneau-Dufrbsnb,  à'Chàtcauroux. 


fiiLtcBET  (rabbé),  •amônier  du  lycée, 

jj. 

DiiGrso^,  juge,  •  Ghàteauroux. 
Oijfi^aunTi  (l'abbé),  k  Ghàteauroux. 
'Fircti.i.xciu-DcFBESXE  (le  docteur),  à 
Cbâtetaroox. 
Gnuiao,  ancien  agent-Toyer,  id. 

*  Jisnx  (Joies),  à  Buzaoçais. 

*  La  VfLuciLLE  (de),  k  Dangi,  par 


Reuilly. 

*  Le  Noir,  curé  de  ChAtillon,  chanoine 
honoraire. 

Lenseigne  ,    conducteur  des  ponts  et 

chaussées,  à  Argenton. 
RouEDE,  receveur  des  domaines,  k  Ghà- 

tillon. 

*  F'oifin  (l'abbé),  curé   de  Douadic 
(canton  du  Blanc). 


I  n  d.i*o-o  t-HiO  i  r  e . 


Inspecteur:  M.  Gh,  de  Grandhaison,  archiviste,  k  Tours. 


'  BiE5COCRT  (le  marquis  de),  k  Azay-le- 

Ridean. 
BocscRKZ,  imprimeur,  k  Tours. 
BuiTf  >?i-l>i  BRBciL.  k  la  Grouatière,  près 

U  Graod-Pressigny. 

*  Bct  orcT.  k  Fonlenay.  près  Bléré. 
'  CflATH;>Y  (F^lix  ile),  k  Ghinon. 
Collet  (Mgr),  archevêque  de  Tours. 
D»r>z  (Félix\  k  Ghinon. 

DnLA5D  f  Tabbé).  aumônier  de  l'hospice, 
id. 

*  GiBACDET  (docteur),  k  Tours. 

'  CrmméwuUion  (de),  archiviste  d'Indre- 
et-Loire. 
'Caérm,  architecle,  k  Tours. 

*  HitMo^i,  architecte,  k  Tours. 
'JAcnoc,  k  la  Hoberdiërc,  près  Na- 

iHles. 


Lachoix  de  Si^xiLHEs,  incieu  receveur 
des  flnances,  a  Loches. 

*  Lapercbe,  k  Saint-Gyr,  près  Tours. 

'  LoBiN  (Léopold),  peintre-verrier,  k 
Tours. 

*  Micuelle  (Paul),  à  Tours. 

*  Palistre  (Léon),  k  Tours. 
Petit-Tiiol'ars  (G.  du  ,  au  château  du 

Petit-Thouars,  près  Candes. 
RoRiTi  (rabbé\  curé  de  Saint-Ours,  a 
Loches. 

*  Saint-Georoks  (le  comte  de) ,  au 
ch&teau  de  la  Brèche,  près  Tlle  Bou- 
chard. 

*  Salhon  de  Maisonroi'gk,  k  Tours. 

*  Sarcé  (de),  au  ch&tcau  de  Hodbert, 
Sailli-Christophe. 

Sonnay  (de),  k  Gravant. 


XXI 1 


LISTE   DES  MEMBRES 


Iaèx*o. 


Inspectevr  :*  M.  Lt.BLAJiCy  bibliolhécairc  et  coiisenratear  du  musée,  à  Vienne. 


BizoT  (Erne&t),  archileete,  cours  Ro- 
mesUng,  k  Vienne. 

Brte  (docteur  de),  place  Saint-Mau- 
rice, à  Vienne. 

Dardelbt,  graveur,  à  Vienne. 

David  (Auguste),  docteur- médecin,  a 


Morestel,  près  la  Tour-du-Pin. 

*  Gariel,  conservateur  de  la  biblio- 
thèque, à  Grenoble. 

*  Leblanc,  à  Vienne. 

*  Vallier  (Gostave),  place  Saint- André, 

k  Grenoble. 


«Iu.ru. 

Inspecteur  :  *  M.  Gastan  ,  correspondant  de  l'Institut ,  consenrateur  de  la 

bibliothèque  publique  de  Besançon. 


Ijandes. 


Irupecteur:  M.  le  baron  m  Gac:(a,  k  Saint-Sever. 


Boucher  (Henri  du),  k  Dax. 

*  Cauma  (baron  de),  k  Saint-Sever. 

*  LoBiT  DE  MoMVAL  (dc),  k  Dax. 


*  Po?iSE  irabbé),  curé  de  Nerbis,  près 
Mugron. 


X^olr-ot-Clior. 


Inspectevr  :  *  M.  le  marquis  de  Vibraye,  k  Cour-Cheverny. 


Arcy  (comte  d*),  k  Cclettes,  près  Blois. 

RunARn  DE  LA  Jacopièrk  (Anatole  de) , 
au  cliâleau  de  Saint-Ouen,  près  Ven- 
dôme. 

Delaune  (Jules),  avoué  licencié,  k  Ru- 
niorantin. 

llAKior  (l'abbé),  curé  de  Fontaine  en 


Sologne,  par  Bracieux. 

Lai'nay,  professeur  au  collège  de  Ven- 
dôme. 

*  Le  Nail  (Ernest),  peiotre,  k  Blots. 

Maricourt  (le  baron  de),  au  cbAteau  de 
Thiéraie,  par  le  Gault. 

Nadaillac  (marquis  de),  k  Vendôme. 


DB  LA  SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D'ARCHëOLOGIE. 


XXV 


*abbél,  oiré  de  Daravel,  ptr 

>f<qBe. 

,  k  LeatillAc,  près  Figeic. 

s  (A.)»  profetMar  an  collège 

•e. 

ÉiMpw),  •  Caliort. 

Liu(Paol  de\  k  Cahora. 

JU  vJcAB  de),  k  Cahdri . 

Crabbë),  asBteierdo  collège 

kc. 

(loitpli),aCahon. 


Mabti!!,  avocat,  k  Boissor,  près  Luiecb. 
Mauit  (Pabbè),  cbaaoine  k  Cabort. 
Massabie  (l'abbè),  corè  de  Notre-Dame 

da  Puy,  à  Figeac. 
MoiRLUON  (Lucien),  k  Auloire,  prêt 

Saint-Cèrè. 
MoBAT  (Gabriel),  k  Auier. 
MoBAT  (Victor),  k  Ansier. 
Po.iTiÉ  (Francis),  avocat,  k  Cahors. 
RoissY  (de),  k  (khori. 


XLiO  t-o  t-O  a  r  o  n.  n.  o  • 


IngpteUwr  :  '  M.  Tbolix,  à  Agen. 


KMiLAfrOMiB  (de),  k  Agen.      "^  Tholix,  iarcbiviste,  boulevard  Sca- 
imàtmir),  k  Fanel.  liger,  a  Agen. 

n  (rabbè),  c«rè  de  Devilhac. 


inspecteur:  M.  Hoisskl,  député. 

trchivttte,  a  Sfende.  Polce  ^rabliè),  vicaire  général,  iJ. 

:,  i«féaie«r  des  pooU  et  cbans-       *  Roussel  (le  docteur),  id. 


\raln 


t-i^oiro. 


tnêpecleur:  *  M.  Godabd*Fai:ltbieb,  à  Angers. 


âr,  f  rasd  vicaire,  me  du  Fan- 
StiatSaHMOB,  18,  k  Angers. 
■  <r«bbè),  oirè  de  Gombrée. 
y  «^1,  cwMelller  k  la  Cour 
d'à  •fer*,  me  Tolney,  1.1. 
jtmi*  de),  rue  du  Parvis-Saint- 
e,  g,  •  Asfers. 
Iffrl,  èvéqoe  d^Augers. 

.TLIV*  SESSION. 


*  Galbubebt  (le  comte  de\  au  château 
de  Parpacé.  près  Baugé. 

*  Ggdabd-Fai'ltbibb,  conservateur  du 

musée  Saint-Jean,  a  Angers. 

*  Joly-Lbiermf,  architecte  diocésain,  k 

Saumur. 
L\iB  (Charles),  château  de  Blou,  près 
Iwonguè. 

D. 


XXVI 


LISTE  DES  MEMBRES 


Lambert  (•Iné),  préiideot  du  tribuDil 
de  commerce  et  de  la  chimbre  oon- 
sulUtiTe  des  irU  et  minufieturei,  k 
Siumur. 

Mayaod  (Albert),  k  Saumur. 

Parrot  (A.),  rue  de  Chàtetu-Gontier, 


30,  t  Angers. 

QUATRSRARBES  (U  COmtCf 

RoFFAY,  architecte,  k  Sto 
Tardif,  chanoine,  lecrétai 
k  Augeri. 


>fanolie. 


Inspecteur  :  M,  ^v&nwLT^  k  Coutancen. 


Railliincourt  (Guitafe  de),  receveur 

particulier  det  finances,  k  Mortain. 
De8PLA?i0iiEs,  k  Sainte-Croii  de  Saint- 

Lô. 
DuDOUTT    (Guslave),    percepteur,    k 

Bricquebec. 
Laine,  k  Avranches. 
Le  Beuf,  k  Cherbourg. 
Le  Creps,  propriétaire,  k  Saint-L6. 
Le  Mesle  (l'abbé),  curé  de  Savigny, 

près  Saint-Hilaire-dtt-HarcouOt. 
*  LsMi'ET  (Léon),  k  Coutances. 


Mot'Lix,  maire  de  Mortai 
Onfroy  DE  Tract,  pem 
vray. 

*  Pontgiraod  (le  comte  < 
château  de  Fontenay, 
bourg. 

*  Qu£?iAULT,  ancien  tous-| 

tances. 
Rou<;£  (le  comte  de),  ai 
Saint-SymphorieD,par  : 
du-Harcouêt. 


Marno. 


Inspecteur  :  *  M.  Givelrt,  rue  de  la  Grue,  12,  k  Reims 


Barbât  de  Bignicourt  ,   château    de 
Bignicourt,  près  Pargny  surSauU. 
'  Bayi  (Joseph  de),  k  Baye. 

*  Bibliothèque  de  la  ville  de  Beims. 

*  Bordé  (l'abbé) ,  au  château  de  Baye. 
CovNiiAYi,  k  Suippcs. 

De!<is  (Auguste),  k  Ghâlons-sur-Marne. 

Dooi'iMiLLi ,  membre  de  l'Académie , 
14,  rue  Talleyrand,  k  Reims. 

'  FouRDRiuNitR,  receveur  des  contribu- 
tions indirtctes,  k  Suippes. 

*  GiVFXiT,  membre  de  l'Académie,  rue 

delà  Grue,  IS,k  Reims. 


Godard  (Isidore),  k  Épen 
GooLET  (François- And  ré), 
Reims. 

*  Jot'RON  (Léon),  k  AviM. 
Laumois,  percepteur,  k  Re 

*  Le  Comte  (Frédéric),  a  ( 
LoRiNST,  a  Vitry-le-Fratt« 
Mairfjii'  (G.)i  23,  rue  de 

Reims. 

*  MsLLET  (le  comte  de),  di 

raire,  au  château  de  Ch 
MoiGMOM  (Ernest),  conseil 
ture,  k  Cbâions. 


DE  LA   SOCIÉTÉ  FEANGAISE  B* ARCHÉOLOGIE.  XXYII 


iitcptflir,  nw  de  TAutre' 

èCliàl0iis. 

4oelc«r>,  •  Vitry-le-Fran- 

ifasle),  •  Chàlom. 
literie,  à  Cbàloos. 
iaîlc),  k  Cbàloos. 
4a  Ciolire,  4,  à  Reimi. 


SiMoif ,  nie  de  l'Unifenité,  9,  à  Reims. 
SiiiO!f  (C.),clier  d^esctdront  d'arlillerie 
en  retraite,  k  Fismet. 

*  Société  d'Agriculture  de  la  Marne,  à 
ChAlons. 

*  Varjukr,  professeur  au  collège  d'Éper- 

nay. 

*  Vix-Rara,  à  Afiie. 


Max* ne  (flauto). 


Impeeieur  :  M. 


,  a  Saint-Dîner, 
é  de),  château  de  Dinte- 


fillCf  par  Chàleaufillain. 


MayeniiOt 


intpecUMT  :  *  M.  Le  Fizkliir,  à  Laval. 


I.,  à  Jablains. 

(Louis.,  rue  de  TÉf^hé, 

r  (M**  la  marquise  de\ 

de  Craoo. 

ué,  a  llayenuc. 

%t  (Cb.i,  à  Laval. 

lis),  arcbilecle,  à  Laval. 


Lautouii,  procureur  de  la  République, 
,  a  Laval. 
*  Le  Fi7.elif.ii,  vice- président  du  cunseil 

de  préfecture,  rue  de  Bel  •  Air,  à 

Laval. 
PatonoMME   (l'abbé),    aumônier    de 

l'bospice  Saint-Louis,  à  Laval. 


Meux*tlio-ot-MoMOllo. 


Imgpecltur  :  M.  Himbuit,  arcbitecte. 


«  Guerrier  de),  corres-  Cbarles  III,  30  bis,  à  Nancy, 

rimlilul.  à  Nancy.  JAinifus,  avocat,  rue  Poissonnerie,  iO, 

iciea) ,    arcbitecte ,    rue  à  Nancy. 


.XXYlll 


LISTE   DES   MEMbUES 


Mouso. 


Inspecleur:  M.  Lik:(ARd,  secrétaire  de  la  Société  PhiloDiathlqi 

RuvicNiER  (Ariiiand),  k  Verdun.  ^     Dames,  près  Montm^ 

Enard  (l'abbé),  caré  de  Koeur,  par  *  LiÉ>iARD«  secrétaire 

Sampigny.  Philomatbique,  k  Vi 

Hamniom,  aumônier  du  lycée,  k  Rar-le>  Morbi.  (l'abbé),  curé  d 


Duc. 
*  Laulocette,  peintre,  à  Juvigny-les- 


Petitot^Bellatoini,  i 


Morbllian. 


Intpeeleur:  M. 


At:DREM  UËiKiRDRCL,  V ice- président  du  Sénat,  au  chkieau  de 
Lorient. 


Nièvre. 


Impecteur  :  *  M.  le  comte  G.  de  Soultrait. 


*  Hérom  db  Villlfos»!:,  archiviste  du 

département,  k  Nevers. 
Jacqvinot  (le  docteur),  à  Sauvigny-les- 

Bois. 
Lespinassi:  (René  de>,  au  château  de 


Luanges,  par  Uray. 
*  SoiLTRAiT  (le  comte 

château    de  Toury* 

Dômes. 
ViOLLRT  (l'abbé),  arch 


Nord. 


Inspecteur  :  M.  le  comte  de  («ailaimcoi  rt,  lOâ,  rue  Roya 


B<)!ivARLET  (A.),  consul  de  Danemark, 
6,  rue  Nationale,  a  Dunkerque. 

Brassard,  archiviste,  k  Douai. 

Oaïist  (Victor),  professeur  k  l'Univer- 
sité libre,  k  Lilk. 


Cai'lai!scoi'Rt  (le  comi 
Lille. 

CoRTTL  (l'abbé),  mem 
m  le  d'Archéologie  f 
de  Wyider,  par  Ber 


DE  LA  SOCIÉTÉ   PAANGAISE  B  ARCHEOLOGIE. 


XXVII 


'Mwtl,  percepteur ,  rue  de  rAatre' 

Moide,  S^  à  ChÉloDS. 
Vorcn  (le  docteur),  a  Vitry-le-Fran- 

(•il. 

*Xic4isi  (Aogute),  k  Ghàlons. 
NftCL,  irchitecle,  k  Ghàlons. 

PuMcx  (Emile),  k  Ghàlons. 
KoiOT,  me  da  Glollre,  4,  à  Reims. 


Siiio:<,  nie  de  l'UniTenité,  9,  à  Rein». 
Siiio!<  (G.), chef  d'escadrons  d'artillerie 
en  retraite,  à  Fismes. 

*  Société  d'Agriculture  de  la  Marne,  à 
Ghàlons. 

*  Varnisr,  professeur  au  collège  d'Éper- 

nay. 

*  Vix-Baba,  à  Afixe. 


>lapiie  (Haute). 


Impecieur  :  M. 


Màicn  cPolj,  à  Saint-Dixier.  ville,  par  Chàteauvillain. 

j      locct  (Hervé  de),  château  de  Dinte- 


Mayenixo. 


Inspecteur  :  *  M.  Le  Fizilier,  a  Laval. 


ÏAaat  cHeari),  i  Jublains. 

^WTWMEBi  (Louis),  rue  de  l'Èvèché, 
«  Util. 

•Cbamfauîiit  (M—  )a  marquise  de), 

«a  duteao  de  Crion. 
«JitMir.  avoué,  à  Mayenue. 
I>r„WDtLiîcxÉ(Ch.),àUval. 
GiMiu  (Unis),  architecte,  à  Uval. 


Lautour,  procureur  de  la  République, 
.  à  Laval. 
*  Le  Fixelif.r,  vice-présideut  du  cunxeil 

de  prérecture,  rue  de  Bel  -  Air,  à 

Laval. 
PrIdbomhe    (l'abbé),    aumônier    de 

l'hospice  Saint-Louis,  à  Laval. 


Meurtno-ot-Mosollc. 


Intpecteur  :  M.  Himblrt,  architecte. 


^*«»tt  iVaron  Guerrier  de),  corres- 
^F«a^l  Je  l'Institut,  k  Nancy. 

CUdea),  architecte,    rue 


Charles  111,  30  bis,  à  Nancy. 
Jambois,  avocat,  rue  Poissonnerie,  *20, 
à  Nancy. 


f  _. 


XXVlll 


LISTE   DES   MEMbUES 


Mou  se. 

Intpecieur:  M.  Lie.'iard,  secrétaire  de  la  Société  Philomathiqoe ,  à  Verdan. 

RuviGNiEB  (Armand),  k  VerduD.  ^     Dames,  près  Montroédy. 

£:<iARD  (l'abbé),  caré  de  Koeur,  par       *  Liénard,  secrétaire  de    la   Société 


Sampigny. 


Philomatbique,  k  Verdun. 


HAN?iio?i,  aumônier  du  lycée,  h  Rar-le-       Morel  (l'abbé),  curé  de  Sampigny. 


Duc. 
*  Lallooetti:,  peintre,  à  JuTigny-les- 


Petitot^Bellavoini,  à  Verdun. 


Morblliaxi. 


Irupecleur:  M. 


AuDREN  deIKerdrel,  vice-présîdent  du  Sénat,  au  château  de  Saiot-Ubel,  près 
Lorient. 


Nièvre. 


Inspecteur  :  *  M.  le  comte  G.  de  Soultrait. 


*  Hérom  de  Villefosse,  archiviste  du 

départeàient,  à  Nevers. 
Jacqvi?(Ot  (le  docteur),  a  Sauvigny-les- 

Bois. 
Lespinasse  (René  de),  au  chAteau  de 


Luanges,  par  Urxy. 
*  Soi'LTRAiT  (le  comte  Georges  de),  an 

chftteau    de  Toury-sur-Abron,  par 

Dômes. 
ViOLLET  (l'abbé),  archipr.  de  Cosne. 


Nord, 


inspecteur  :  M.  le  comte  de  Cmlaiscoirt,  10-2,  rue  Royale,  à  Lille. 


BoNVARLET  (A.)t  consul  de  Danemark, 
6,  rue  Nationale,  à  Dunkerque. 

Brassard,  archiviste,  à  Douai. 

Camet  (Victor),  professeur  h  l'Univer- 
sité libre,  à  Lill<^. 


GAiLAiNCOt'RT  (le comte  Anatole  de),  à 
Lille. 

CoRTTL  (l'abbé),  membre  de  l'Acadé- 
mie d'Archéologie  de  Belgique,  oiré 
de  Wylder,  par  Bergues. 


U.  ZJk  ifninDS:  HlhO^AHl  O  JhUOHWliMMI. 


vvtv 


hncMii 


9^  kH.  4  liiir. 
1k\MHK  »iBM<ijl>rp  1>K»mn»Mmv  «  ihiNwiN. 

VuJiis  tl^feMon^  xJN^ifi^  (WMNtitlx  ¥A. 


Oise. 


Irnspeciem-  :  M.  le  comte  di  IIaiist,  i  Conpiéfiie. 


ktUÈLt  («Ik  d*),  à  Ch•Dlill^ 

*  Cajx  we  Sakt-Atiiocii  fA.  de),  con- 

•eîller  féoénl,  •  Senlit. 
Cktujsb  3*T™oi>^)i  *3,  me  des  Dô- 

■Him,  à  Compiègoe. 
0m>«if,  préfideot  honor.,  à  BeaoTais. 
Dcpcis  (Em.)i  k  PooUrmé,  par  la  Gha- 

pelle-eo-3erTal. 
FiAsa-DirrF  (Boberl),  h  Chantilly. 
Urrtf.'x  (LndoTic),  direclear  de  la  fa  • 


brique  de  Tllrtui  |»eliiti,  I  Meinth 

Saint-Kirmln. 
L«coT(rabbé),rur^  de  Malitt*ANt(ttitv» 

k  Complégnn. 
Manuri.  (l'abbA) ,  curé  de  (UfN-liMi'Melto. 
Maricoirt  (comte  de),  k  VlHemélrlei 

prèi  Seolli. 
Maricourt  (Mil*  Clotllde  de),  Id. 
M ARicocRT  M"*  Lttcte  dei  Id. 
Mar»t  (le  eomle  d#),  k  <>>tiipl«t|fi4«. 


Ortie. 


tu^teti 


Unm  M  Ls  ^y/fif  JC,  t^Nitel^arf  «  Ak*vM», 


BABaaFr(dei.aB 
aEHay. 


c«H««    de    Trio. 


0«i 


IU1 


r 


XXXI 1 


LISTE  DBS  MEMBRES 


Saône-et-1LiOlre. 


Inspecteur  :  M.  de  Surigny,  k  Màcon. 


Bathaolt  (Henri)',  secrétaire   de   U 

Société  archéologique  f  à  Ghàlon- 

sur- Saône. 
Bi'GfiioT  (rabt>é),  aumônier  militaire, 

missionnaire  apostolique,  id. 
*  BuLLioT,   président  de    la   Société 

Édnenne,  à  Autan. 
'  Canal  de  Chizy  (Marcel',  à  Préty, 


par  Tournus. 
Chevriir  (Jules)«  à  Cli 
FoNTENAT  (Harold  de)  i 

graphe,  k  Autun. 
Lacroix  père,  pharmac 
*  pAiLLOux  (le  docteur), 

Ambreuil,  arr»  de  Gh 
SuRiGNT  (de>,  a  Màcon. 


^arttie. 


InspeeUvr  :  M.  Huchir,  membre  non  résidant  du  Comité  des  trav 


*  Alms  (l'abbé),    chanoine    titulaire, 

rue  de  Ballon,  15,  au  Mans. 
Bertrand  (A.),  rue  de  Flore,  au  Mans. 
Boit:nRT  (Paul),  architecte,  rue  d*Hau- 

teville,  19,  au  Mans. 
BocRGUK.No:^,  ingénieurarehitecte,  au 

Mans. 
Blottière,  sculpteur,  id. 
Ceuir  (Aletandre),  avenue  de  Paris, 

31,  au  Mans. 
Chardon,  ancien  élève  de  l'école  des 

Chartes,  au  Mans. 

*  CuARLEH  (l'abbé  R.),  k  Ik  Kerté-Ber- 

nard. 

*  CiiEVREAi:  (l'abbé),  vicaire  général, 

au  Mans. 

CosNARD,  avocat,  S.1,  rue  du  Bourg- 
d'Anguy,  au  Mans. 

*  CiMOMT  (le  comte  Charles  de),  au  chà> 

teau  de  l'Hôpiteau,  par  Sillé-le-Gui|. 
laume. 


Deslais  (l'abbé),  curé 
rue  du  Mouton,  14,  a 

*  Dunois  (Gaston),  arcb 
phe,  33,  rue  de  Ballo 

*  EsxAVLT  (l'abbé  Gu 
Ballon,  39,  au  Mans. 

Ètoc  de  Ma7.y,  mèdeci 

aliénés,  id. 
ËviiLLARh  (l'abbé  He 

au  petit  séminaire  d' 
Gatffikr  (A.  de),  15,  r 

au  Mans. 
GoMDERT,  architecte,  i 
HucheTy  lue  de  la  Mai 

*  LKnRi'  (l'abbé),  pro 

séminaire  de  Précigi 
Le  Pelletier,  doct.-m 
LiVET    (l'abbé),   chan 

curé  du  Pré,  rue  N. 
'  Mailly  (le  comte  de) 

France,  au  château 


BB  Ik  SOCIÉTÉ  FRÀNÇAISB   d'ARGHÉOLOGIE.        XXlin 


rèileMam. 

(^Elbexjck  (Samael),  •«  chl- 
tÏMléoii,  ptr  T«ffé. 
IHrGubiii»  membre  ds  Coiueil 
k  MMtbiiof ,  près  Ballon. 
irred\  S4,  HMde  !•  Minette^ 

■ 

(Fabbéi,  chanoine  titulaire, 
Cëàtenni  31,  id. 
iBMs  (Tlcomletae  de),  ehà- 
la  Bodie,  prêt  Vaat. 

iin,attMani. 


RuiLLÉ  (Georget),  loas-inipectevr  4li 
forèta,  me  AoTray,  au  Mans. 

*  SAiïTr-PATSiNB  (le  comte  de),  k  Saint- 

Paterne. 

*  SiMCBci,  me  du  Quartier-de-Cata- 
lerie,  37,  an  liant. 

*  RoDict ,  architecte    an   Mans .   me 

CaoTin,  8. 
Soyez,  architecte,  me  aai  Lièvret,  an 
Mans. 

*  To!i:(iLLiui,  k  la  Flèche. 


Iiupeeieur  :  M. 


^lère    de  racole   des 
krlB,  h  Albertville. 
(FranfoU),  secrétaire  de  la 
d'histoire  et  d'ar- 


chéologie, k  Chambéry. 
*  TuniNAZ  (Mgr),  évèqve  de  Tarenltise, 
à  llotttiers.       « 


Savoie  (Haute). 


Impeeteur  :  N. 


înMpecleur  :  *  11.  Daicel,  asi  Gobelins,  k  Paris. 


(Aimé  d*),  dircclear  de  VAr- 
Mpèeial  de  Framce,  bonloTard 
n,  U,  a  Nenillysor*Seine. 
(le  cemmandenr),  me  d*An- 
rt-Hoooré,  9,  id. 
architecte  attaché  sut  bâti- 
ivils,  15,  me  Charles  T,  id. 
t  ▼lciomtede),fW,  me  lliromé- 

lUY*  SESSION. 


Barthélémy  (Anatole  de),  me  d'Anjoa- 
Saint-Honoré,  9,  id. 

Barthélémy  (le  comte  Édooard  de), 
rttederUuiversilé.  80.  id. 

BAL-DicocRT(Théodule  de),  juge  an  tri- 
bunal civil,  boulevard  Saint-Michel, 
id. 

*  Beat;!  (Stéphane),  avocat,  me  Mal- 
her,  »,  id. 

B. 


ZXXIT 


USTB  DIS  XBMBMBS 


IttcHU,  fraftvr  ea  nédtUlM,  15, 

qmi  dt  Coati,  id. 
Blacas  (te  CMito  SUDklu  d«),  ine  de 

VareoMS,  5:1,  M. 
BocHi!!,  rue  de  Profwee,  58,  id. 
BomiBviL  (de),  rue  Stiat-GiiiUauiiie, 

Si,  id. 

*  Bo.ivoi:loir  (le  comte  Aagvite  de), 

rae  de  l*UniTeraité,  15,  id. 
Bosc,  architecte.  S,  rue  Ségaier,  Id. 

BOOLAY    DB    LA    MlL'RTBK   (Alfred\   23, 

me  de  rUoÎTersité,  id. 
BauYÊii,  curé  de  Saint-liartin,  id. 
BiXAiLLi  (GaitaTe),  mode  Parii,  SI8, 

id. 
Capklli,  rue  Garreaa,  S.  id. 
'Cbakoo!!  (Em.),  architecte,  7,  me  Ma* 

lesherbei,  id. 

*  Chéri-Lcmoimc-IIontigxt,  75»  me  de 

la  Tour,  k  Pauj. 

*CLAt-8&B  ^Guitafe),  9,  rue  de  MuriUo 
(ParC'Slonceaux).  id. 

CoLLARD^H.),l>ouleTard  de  Strasbourg, 
39,  id. 

Go^(TADEs  (marquis  de),  15,  rue  Louis- 
le-Grand,  id. 

Casi'zoT,  uéQociaot,  33S,  rue  Saiot- 
Honoré,  id. 

Damibns,  statuaire,  rae  du  Cherche- 
Midi.  55,  id. 

*  Darcel,  directeur  de  la  manufacture 

des  Gobelins,  id. 
DELO?cGUciL,graYeur,rne  Royale- Saint- 
Honorét  8,  id. 

*  Dks  Cars  (le  duc),  rue  de  Greoclle- 
Saiol*Germain,  79,  id. 

DiUARD  (Georges),  rue  Neuve- des-Pelits- 
Champ«,  97,  id. 

IHIK>^(T  (A**) ,  professeur  de  belles- 
lettres,  avenue  de  Neuilly,  |46  bis. 

DcRBAU  (A.),  rue  de  la  Tour-d'An- 
Yergoe,  10,  id. 

BiTAaiPBa  (le  comte  Théodore  d'),  bou- 
levard HaussmauB,  56. 


^Bggbk,  menbra  i 
Madame,  48,  td. 

Grellbt  (Aleiaiidn 
80,  parc  Saiat-Mai 

Hatacx  do  Tillt,  18 
à  Paria. 

*  JoAM!fB,  me  de  Vaai 

*  La  PEaaitBB  (le  coi 
Peuthièvre,  id. 

LAHBBar  (Fabien),  ai 
leur  des  travaai 
Monsieur*  le-Prinof 

Laffolyb  (A.)  archilf 
sierdam,  id. 

Lami  (SUalsIas),  » 
Pauy. 

*  La  Trihocilui  (do 
rennes,  89,  id. 

LaoriBre  (Jnlee  de), 

Pères,  18,  id. 
LauriBrb  (Ferdiaaad 

parte,  id. 
Lb  Bla!it  (Edmond), 

stitut,  rae  Lerovi, 
Le  Cordier,  ingéniet 

Petit-Parc.  87,  id. 
Letsuil,  09,  rue  Richi 
LiEsviLLE  (de) ,  aui 

Ganthey,  i8,  id. 
LiuKT,  architecte,  ra< 

10,  id. 
*MAGtiiBL  (René),  40,  i 
MARons  (Léon),  ingéi 

8,  id. 
'MEi8SA8  0'abbéde),ai 

pice  Greffulhe,  78,  i 

Levallois. 
Mb'igy,  ingénieur  dti 

Madame,  k  Paris. 
MiNORCT  (E.),  rue  Mer 
*  MiRBPoix  (le  duc  de 

niinique-Saint-Gei 

MoNTKERRAND  (Ch.  de) 

Unances,  40,  rue  du 


M  tk  SOGIÉI^  fltAIfÇAISB    D'ARGHÉOLOGIB.  ZXXT 


,  f  ne  llarie>Lo«ite,  id. 
m  ui  Falcojoébe,  17,  r«e  Pon- 
itet'GcMrycSf  lu. 
Ubmi\  MBBMiidaBt  d'artll- 
retitHe,  100,  rut  des  Fesil- 

MMi««bécalre  à  r<co1e  des 

kffi^li. 

Bvri),  «leva  d«  Técoto  det 

kfli»  f«ai  d«  la  Méf inerie, 


da),  rae  do  Regard, 


M  LannÉaB,  attaché  a«  ml- 
dca  ■■aocat,  n,  me  Gay- 


■b),  aBcicB  kiblioUiéeaire  de 
ie  Brfaat,  qaai  dca  Graadt 
aa,5,  id. 

■Mal,  BeaBbre  de  Flnaiilot, 
tWfvrtité,  n. 
Chartei),  16,  me  da  Roi-de- 
d. 

K  (le  Branpiif  Armand  de), 
iUe,  m,  id. 

ft^ABÉcociT  (le  Tieoaile  de), 
rCnhertilé,  It,  id. 
n-RrSA!iB  (Placide),  orférre, 
«lta.15,  id. 
|(aéral,dîrecteord«  féaie,id. 


RoTt«-(k>LLARD    (Paal),  46,  me  dea 

Écoles. 
RoTa]  (le  Ticomte  Emett  de),  11,  plaea 

Vendôme,  id. 
'Sai^tt-Pacl   (P.-L.  de),  atocat,  mt 

d'Affnetseau,  I,  id. 

*  SAt!<T-PACL(Anthyme^,  roe  Monge,  71. 

*  SAUia  (de),  rédacteur  en  chef  de  la 

France  iUuttrit,  40,  me  de  la  Fon- 
taine, k  Attteoil. 
Saladin  (Henri),  me  de  Seine,  IS,  Id. 

StMOïi  (F.-X.),  négociant,  bouletard 
d'Enfer,  17,  id. 

SiLTtSTVB  (le  haroB  Frani  dt),  me  d« 
Pré-aox-Clercs,  5,  id. 

Thiollbt  ,  patMge  Sainte-Marie,  8,  Id. 

*  Yaulocé  (Franiz  de) ,  me  da  Gentil, 
6,  id. 

*  Vacx  (baron  de),  me  de  Tooraon,  4. 
Vacx  (René  de),  me  de  Touruon,  11. 
YicNACx  (Eugène  de),  34,  me  des 

Francs- Roorgeois,  id. 

'TiLLKrossB  (Antoine  Héron  de),  atta- 
ché k  la  coosertation  des  Antiques, 
an  LooTre. 

A^tnceii/,  me  Legendre,  94.  aox  Rati- 
gnolles. 

'YoccB  (le  comte  Melchior  de),  ambas- 
sadear  k  Vienne,  me  Fsbert,  1. 


.*  'LéoneeiNt  Glaxtillc,  directenrde  TAssociation  normande, 

k  Rooeo. 


Ot  CMita  dO,  rue  de  Foole- 
,k  Rom». 

B  la  Scbbb,  io«s-inspacte«i 
to,  rue  de  FHdtai-do-Ville, 

y  père,  rue  de  la  (Hialne, 

lecle.id. 

y  ila,  architecte,  boslerard 


BeauToisine,  S5,  id. 

RACOtT  (Paul),  1,  place  de  la  Motte,id. 

'Rba CREPA ihe  (de),  archifiste  de  la  pré- 

fectare,meChasselière,Sbis>  Roneo. 

Reozeville,  rédacteur  en  chef  du  Jour- 
nal de  Rouen t  me  du  Bac,  4i,  id. 

*  RoMET ,  sculpteur,  rampe  Rouvreuil, 
86,  id. 


zxxnr 


U8TE  DBS  MEMBRES 


i,  frtTtar  eo  médiilles,  15, 

qnai  dt  Cooti,  id. 
Blacas  (te  CMito  SUnltUt  de),  rue  de 

Vareooes,  5i,  id. 
Bocm^t  rue  de  Profence,  58,  id. 
BomuciL  (de),  rue  Stint-Guilleume, 

Si,  id. 

*  Bo!IVOoloir  (le  comte  Augofte  de), 

rae  de  rUnifersité,  15,  id. 
Bosc,  arcliilecte,  S,  rue  Séguier,  id. 
BoOLAY  *DB  LA  Meurthk  (Alfred^  23, 

me  de  rUoitertité,  id. 
Bkutêie,  curé  de  Saiot-Mirlin,  id. 
BuCAiLLi  (GusUTe),  rue  de  Paris,  SI 8, 

id. 
Capelu,  rue  Garreaa,  S,  id. 
'Cbardox  (Em.),  architecte,  7,  me  Ma- 

letlierbeB,  id. 

*  CHiBi-LEiioiïiE-MoNTiGifT,  75»  me  de 

la  Toor,  k  Paaay. 
'Claussb  (Giulave),  9,  rue  de  Murillo 

(Parc-Monceaui).  id. 
Collard  (H.>,l)Ottlerard  de  Strasi>ourg, 

S9,  id. 
CoxTADBS  (marquis  de),  15,  rue  Louis- 

le-Grand,  id. 
Crbuzot,  uégociaot,  33S,  me   Saiot- 

Honoré,  id. 
Damibms,  statuaire,  rue  du  Glierclie- 

Midi,  55,  id. 

*  Darcel,  directeur  de  la  manufacture 

des  Gobelins,  id. 
Delo.icceil,  graYeur,rue  Royale- Saint' 
Honoré,  8,  id. 

*  Des  Cars  (le  duc),  rue  de  Grenelle- 
Saint-Germain,  79,  id. 

DiGARD  (Georges),  rue  Neure-  des-Petits- 
Ctiamptf,  97,  id. 

DopoNT  (A^*) ,  professeur  de  belles- 
lettres,  avenue  de  Neuilly,  446  bis. 

DcRBAL'  (A.),  rue  de  la  Tour-d'An- 
Tergne,  10,  id. 

Estampes  (le  comte  Tliéodore  d*),  bou- 
levard Hauumann,  56. 


*  Egger  ,  membre  da  l'Institut,  iw 
Madame,  48,  id. 

Grellbt  (Aleiandre),  rtcbm  d«  FBil, 
80,  parc  Saint-Maur  (près  Paris). 

Hataux  do  Tillt,  18,  rae  de  f«lsbowi^ 
k  Paris. 

*  Joamne,  me  de  Vaagirard,  M,  bis,  Id. 

*  La  Perrière  (le  comte  de),  •,  mt  dt 
Peuth lèvre,  id. 

Lambert  (Fabien), architecte,  iMspec- 

teur  des  travaui  de  la  lille,  me 

Monsieur- le-Prince,  48,  id. 
Laffolts  (A.)  architecte, SI,  raed'Afli* 

sterdam,  id. 
Lami  (Stanislas),  97,  rae    DanC,  h 

Passy. 

*  La  Trihouilui  (duc  de),  rae  de  Yr- 
rennes,  69,  Id. 

LauriBre  (Jules  de),  rae  des  SrIqIr» 

Pères,  18,  id. 
Lauriêre  (Ferdinaiidde),  47,  rae  Beat- 

parte,  id. 
Lb  Blasit  (Edmond),  membre  de  11e- 

stitut,  me  Leroui,  7,  id. 
Le  Cordier,  ingénieur  clril,  rae  Ém 

Petit-Parc,  67,  id. 
Letbcil,  99,  rae  Richelieu,  id. 
LiESviLLE  (de) ,  aux  Batifoolles,  rae     ^ 

Gauthey,  28,  id.  ^ 

Liget,  architecte,  rue  de  Belledkaae» 

10,  id.  ' 

*  Magimbl  (René),  40,  me  de  Berlin,  Id.     ^ 
Marquis  (Léon),  Ingénieur,  rue  LlRBé, 

8,  id. 

*  Meissas  O'abbé  de), au  mônier  de  IIms* 

pice  Greffulhe,  76,  rue  de  VilUers,  h     '^ 

Levallois. 
Mexgt,  ingénieur  des  minet,  5S,  rae 

Madame,  k  Paris.  ^ 

MiïiORET  (E.),  rue  Marillo,  6,  Id.  ^ 

*  MiRBPOix  (le  duc  de),  rae  Saint-Df»    ^ 

minique-Saint- Germain,  lOi,  II*    * 
Montferrand  (Gh.de),  inspecteur  ém 
linances,  40,  rue  du  Bac,  id.  ^ 


DE  LA  SOCIÉTÉ  FRANÇAISE    D'ARGHÉOLOGIE. 

(Paul),  46,  rue  des 


Mouuoif,  9  rae  Marie^Looite,  id. 

* Mnmi  DE  LA  PALCoifitiE,  i7,  me  Fon- 

teiBe-8«iDt-6eorfet,  id. 
*lfowiT  (Robert),  commaDdiot  d'arlil- 

loie  CB  retraite»  100,  me  des  Fenil- 

heUMt,  id. 
*Mncn.  bibliothécaire  k  l'école  des 

Bcaai-Arfs,  Id. 
'KouT  (Béori),  élève  de  Técole  des 

Beau- Arts,  qsai  de  la  Méginerie, 

»,id. 
RiccaT  00  comte  de),  me  da  Regard, 

S,id. 
FiUâB»  Bc  LabitiAre,  attaché  an  mi- 

aisière  dea  flnaocei,  8S,  rue  Gay- 

Lanae,  id. 
FâBM  (Loaia),  ancieo  bibliothécaire  de 

la  vflic  de  Rriint,  qnal  dea  Grands 

iagwliiM ,  5,  id. 
hw  (Fa«llB),  membre  de  rinsiilat, 

raeiarUBiTersilé,  tt. 
huior  (Charlet),  M,  me  da  Roi-de« 

fidle,  id. 
'Hbrbic  (le  marquis  ArmaoJ  de), 

faedeUlle,€7,id. 
*  fovres  D'AHfcocaT  (le  Tioomte  de), 

m  4e  FUaiTertité,  18,  id. 
hoBiiifirE-RcsAïn»  (Placide),  orféTre, 

rmCaMctle.  45,  id. 
''ttfaaT,géBéral,directeorda  génie,id. 


ROTBB-COLLARD 

0 

Ecoles. 
RoTsHla  vicomte  Ernest  de),  1t,  place 

Vendôme,  id. 
*Sai!it-Paul   (P.-L.  de),  avocat,  rae 

d'Agaesseau,  i,  id. 
*SAi:<T-PAUL(Anthyme),  roe  Monge,  71. 
'Salies  (de),  rédacteur  en  chef  de  la 

France  illvitrét,  40,  rue  de  la  Fon> 

taine,  k  Antenil. 

Saladin  (Henri),  rae  de  Seine,  4S,  Id. 
Simon  (F.-X.)»   négociant,  boulevard 

d'Enfer,  S7,  id. 
SiLVESTRB  (le  baron  Prani  de\  rae  d« 

Pré-aox-Glercs,  5,  id. 
Thiollbt,  passage  Saiofe-Marle,  8,  id. 

*  Vaclogé  (Prantx  de) ,  rae  do  Gentil, 
g,  id. 

*  Vaux  (baron  de),  rae  de  Touraon,  4. 
Vaux  (René  de),  rue  de  Touruon,  IS. 
YiGNAux  (Eugène  de),  34,  rue   des 

Francs*  Bourgeois,  id. 

*TiLLRF08SB  (Antoine  Héron  de),  atta- 
ché è  la  conservation  des  Antiques, 
au  Louvre. 

yincentt  rue  Legendre,  94.  aux  Bâti- 
gnolles. 

'YoGVÉ  (le  comte  Melchior  de),  ambas- 
sadeur è  Vienne,  rue  Fabert,  2. 


0ei  XI  e-Izxf 6r  i  e  u  re  • 

:  'Léonce DÉ  Glaxville,  directeur  de  l'Association  normande, 

è  Rouen. 


Qê  coBBte  d'),  rue  de  Fonte- 
adk,  31,  à  Rooeo. 

BB  la  Sebbb,  sous-inspecteui 
rue  de  l'Hdtel-de-Ville, 
B,àBewB. 

i/rtUiemof  père,  nie  de  la  Ghalne, 
lkaT«Ulec1e,ld. 

Ills,  architecte,  boulevard 


Beauvoisine,  35,  id. 
Baudrv  (Paul),  3,  place  de  la  Motte.id. 
'Beai'repaire  (de),  archiviste  de  la  pré- 

fecture.rueGhasselière,Sbi8,k  Rouen. 
Beozeville,  rédacteur  en  chef  du  Jovr- 

nal  de  Rouent  rue  du  Bac,  43,  id. 
*  Bo!fET ,  sculpteur,  rampe  Bouvreuil, 

56,  id. 


xxxTin 


LI8TB  DES  MEMBRES 


*  Uhnval^  chiDoiiM  tiluUire,  id. 
BaMiGjrr  (d'),  à  Péronne. 

*  Payuliiet  (Gaston  de) ,  chàleao  de 
RaincheTal,  près  Amiens. 

Janyibr  (A.)  ancien  président  des  Anti- 

qvairet  de  Picardie,  à  Amiens. 
MAsaOR,  48,  rae  Saint*Denis,  à  Amiens. 


Mathan  (le  baron  Bdfi 
nant  colonel  en  reiraii 
Noyon,  k  Amiens. 

*  Mbmnschbt,  conseiller 
pel,  à  Amiens. 

MoacAN  (le  baron  Thomi 
laire,  id. 


Intpecteur:  M.  Rossignol,  à  Monlans,  près  GallUe. 


▲■AGON  (le  roarqnis  Charles  d'i,  an 

château  de  Salies,  k  Albi. 
Bonnet  (Henri),  recefeur  des  Domaines, 

è  Rabutens. 
BnoGcilsi  (Aof  oste),  cnré  de  Milhars, 

par  Gaillao. 
Casals,  coré   de  Saint -François,  à 

Lifaar. 
*  CoMBCTTES  ne  Lcc  (le  comte  Loab 

de),  k  Rabastens. 
"  CoHBCTTES-LABOimEUC  (Louis  de),  an 

chàteao  de  Labourelie,  près  Gaillac. 
PALGCiâBE  (le  baron  de),  k  Rabast«ns. 
GooTTEs-LAGikATB  (le  bsron   de),    an 

chàteto  de  Lsgrare,  près  GailUr. 
Gmbllet-Balgcerie.  Juge  d'instruction, 

k  Lafaur. 
Madbon  (Henri  de),  k  Cadalen.^ 
Mazas  (Etienne),  k  LaTsur. 
MiaiAu  (Vabbé),  curé  de  la  Madeleine, 

k  Albi. 
O'Btbnb  (Edward\  au  château  de  Saint- 


Géry,  près  Rabastens. 
0*Btrnb  (Henri),  id. 
Petbonnet  (A.) ,  pharn 

tens. 

*  Riviêrei  (le  baron  E4 
château  de  Ririères,  p 

Rossignol  (Élie-Anloim 
près  Gaillao. 

*  SoLAGES  (le  marquis  d 
de  la  Verrerie  do  Bl 
maux. 

*  Thomnac -Villeneuve 

Gtillac. 

*  TODLOUSE-LAlJTBRC(leC« 

de),  directeur  de  Vint 

f  inces,  au  château  de  i 

près  Laraur. 
Vetbiac  (Auguste),  k  Ca; 
VmÊs(T.  de,  k  Vifiès^l 
Voisins  •  Lavebniêbb  (J 

Saint-Georges,  près  L 
Tf  EBSEN  (le  baron  Jean  i 


Xarn-et-Oaronne. 

intpeettwr  :  *  M.  l'abbé  Pottirb,  président  de  la  Société  arehl 

k  Montauban. 


Abnocx  bb  Bbossabb  (d').  k  la  Crow,       Bbun  (Victor),  directeur 
près  SaiBi  Porquier.  Montauban. 


DX  LA  SOClÉTi  FRANÇAISE  d' ARCHÉOLOGIE.       XZXTI 


Intpectew  :  M.  le  ? icomle  db  Bomxicil,  k  Melvn,  et  à  Piris, 

rue  Siint-GuilUoniei  39. 


lonniL  (ficomfe  de),  à  Melnn. 
'Ekitiui  {\e  comte),  à  Chepois,  per 
bChàlelet 


*Thibrcbu!<  (l'abbé),  curé  de  Saint- 
Augottin,  près  Coulommien. 


Inaptetêwr  :  "  M.  db  Diosi,  à  Monlfort-rAmiary. 


iaâCBf  (l'abbé),  coré  d«  Yétbcil . 
'ïhn  (Adelphe  de),    k    Moutfort 

FABany. 
GnoT  (Jeiepb).  tu  château  de  Donrdan. 
HMBB-LBraiB,  k  Monirort-rAmaury. 
LâOBir-LAfei»  (Heary),  aTeoue  de  la 


Reine,  108,  k  Venaillet. 
Marti?i  (L.),  rue  de  rOccident,  18,  k 

Yenailles. 
llESMiL'DrRAND   (le  baron  de), 

Saint- Honoré,  40,  k  Yersailkfl. 


Sèvres  (Deux)* 


impêcleur  ;  *  M.  Ledaim,  k  PoitierB. 


DiTo,  aocicD  député  au  Corps  légis- 

hlir,  k  Niort. 
UfOMB  (Henri),  id. 
PuiJtuj  (Ifédéric  de),  directeur  du 


Crédit  induilriel,  k  Niort. 
Piet-Lataudrib,  rue  Yvert,  k  Niort. 
Rocoi]ET,k  YilIe-des-Eaux,  prèi  Cbixé. 
'  Société  de  Statistique,  k  Niort. 


Sommo* 


Intpeeleur:  M.  Menmechet,  conseiller  k  la  cour  d'Amient. 


iiTOT  (Émeric),  capitaine  au  149*  ré- 
lîacat    d'infanterie     de   ligne,   k 


ibimil  (Yictor  de),  k  Montdidier. 


*  RoN^AULT  d'Hoi'et  (H.  de),  château 
d'Haines,  près  Morcuil,  et  k  Paris, 
19,  rue  Jacob. 

Delfortrie,  fils,  architecte,  k  Amiens. 


lV(3» 


kU 


titl 


^.  m 


Or 
«ielî 


ér  SaaI-FraacMi,  k        Bocwa^^at. 


■r  Lkc  > 


Cailtoc 
liT« 


i 
(fc  tarai 
ér  Lafravc,  fn»  Gûlbr. 


*TM»:«3(AC>Tusvrt¥  fHari  éH«  k 


f7aftié.cw#4cb 


OVfKVB  :  Utnri^ ,  Mckàlna  et  Suai- 


*  TovLM9C-L%rTaBq.1r4 
éet.éirtcftnr  «le 
«ÎBccs,  ••  cliàlna  et  SsMt-SMnnr, 

Ti^ts  T.  4c  ,  à  Tivks^prèi  CHtics. 
Toisns  >  LàTim-iiEu     Imfli  ée),  h 

S>i»t  Cw  i<>y  pris  L«T««r. 
Ttebs»  'le  Unm  àtmm  r.s  à  Gûllac 


iMpcrfcar .-  *  M.  Tabbé  Pornau  pr4»ideat  de  U  SMÎélé 

k  VeataetaB. 


»E  Baosa^is  i4^.  ë  la  Cnae, 


|Vicl»r\ 


«il 


DE  LA  SOCIÉTÉ  FEANCAI8E  D'aECHÉOLOGIÉ.  XU 


Imptetevr  :  M. 
liPcrdisaM),  à  Robéoourt,  par  VrécooH. 


Impeeteur  :  M. 

iT>To!r(tiaB  (le  doc  de),  ao  IUvi!i,  notaire,  k  Villien-Sairil-Be- 

la  d*A«ey-l«-Prane.  nolt. 

.prétidcnl  do  Iribonal  chil,  Rocciu  0*«bbé),  curé  de  Saiot-Eo- 

s.  tèbe,  à  Aoxerre. 

■.  iitbif Ule  do  déptiiemenl,  à  *  Toxxellier,  greffler  en  chef  do  tri- 

ne.  bonal  citil,  k  Sent. 


Province  d.*AlBor. 

ntJic,  correspondant  de  Tint-  mânes  d*enscigiioinent  sopéricor,  k 

iaapcdeor  des  écoles  mosol-  Alger. 

*  TaÉMAOx,  k  Tipaza. 


Provlnoo  d.o  Oon«taii.tl no. 

Impeeteur  :  M. 

M  M,  capitaine  ao  S«  cbas-  indigènes,  k  Tebessa. 

,  cbef  do  boreao  des  affaires       Dclapako  (l'abbé),  coré  de  Tebessa. 


Alaiaoo-rjorraino. 

impeeteur  :  M.  l*abbé  STiAim.k  Strasbourg. 

Isrit,  k  Gocbwiller.  Gi-bbof.r  (rabl>é  V.),  coré  de  Saint- 

,  ordiilerl^,  k  Mets.  Georges,  k  Ilagoenao. 

xLnr  SESSION.  p. 


XL 


U8TE  DBS  MEMBRES 


Vondéo. 


Impecteur:  M. 


BAROSt  ancien  dépoté,  k  Fonteniy. 
BAODikT  (I*ibbé  F.)i  coréda  Bernard. 
DEL1B05,  notaire,  à  Saiut-Gilles-tar- 

Vie. 
PiLLOx  (Benjamin),  à   Saint-Cyr  en 


Talmondaii. 
GcÉtix  (l'abbé),  cvré-doyen,  à  Saini- 

Fulgent. 
RocuEBBO!<E  (OcUre  de),  k  Pontenay. 
Tressât  (Vabbé  du),  chanoine  k  Lnçon. 


Viexme. 


Intpeetewr  :  M.  Alfred  RiCBAio,  arehitiile,  k  Poitiers. 


*  AOBIR  (rabbé),  chanoine  titolaire,  k 

Poitiers. 

*  BARBiEBns  Mo?iTACLT(Mgr),  k  Maris, 

par  Jaolnay. 
*BBRTÉ(lepère),id. 
Dklayeau  (Camille),  an  château  d'Éter- 

nes,  prèi  Loadun. 
La  Brosse  (le  comte  de),  k  Poitiers. 
*La  Croix  (R.  P.  Camille  de),  me  de 

l'Indostrie,  k  Poitiers. 
La  Tocrette  (Gilles  de),  propriétaire, 

k  Loudan. 


La  Tocrette  (Léon  de),  k  Londan. 

Le  CoiNTRE-DtTO!iT,  k  Poitlors. 

'  Leda»  (B.),  id. 

Rêdel^  archiviste  honoraire  dn  dépar- 
tement, id. 

*OvDi:<  (Hilaire),  roe  de  l'Éperon,  k 
Poitiers. 

Richard  (Alfred),  archiviste  da  dépai^ 
tement,  id. 

ToucHois  (Aognste),  rue  Saint-Denis, 
k  Poitiers. 


Vienne  (IRaixto). 


Inspecteur  :  M. 


'Arbelot  (rabbé),  chanoine  honoraire, 
11,  rue  de  la  Corderie,k  Limoges. 

Bocdet  (Victor),  boulevard  du  Mar- 
ché-aux-Cbevkui,  16,  h  Limoges. 

FoRGERO!«T  (André),  k  Chalus. 


Maobla!<c  (de),  k  Saint- Junien. 

*  Société  archéologique  dn  Limousin. 

Ta!<deao  db  Marsac  (rabbé),  chanoine 

honoraire,  rue  porte  de  Toumy,  lit 

k  Limoges. 


DE  LA  SOCIÉTÉ  FEANÇAISS  D' ARCHÉOLOGIE.  XU 


VoseeSi 


Intptetevr  :  M. 


Piuna  (Ferdinand),  k  Robécoart,  pir  Yrécourt. 


Yonne. 


Intpeelevr  :  H. 


CuiaoTr-TointnRB  (le  doc  de),  m 

chètetn  d*Anqr-l<!-Frane. 
UUier,  président  do  tribanil  civil, 

à  Sens. 
(hiatUtn,  arcliif isle  do  déparlemenl,  k 

Anierre. 


Ravin,  noUire,  à  Yillien-Sainl-Re- 

noit. 
RoGViBR  0*ibbé),  curé  de  Saint-Eo' 

sèbe,  k  Auxerre. 
*  ToNNELLiER,  grefOef  en  cher  do  Iri' 

banal  citil,  k  Sens. 


Province  d.* Alger. 


CmioTfïiRAii,  correspondant  de  l'InS' 
tilat,  inspecteur  des  écoles  mosol- 


nianes  d'enscifnoinent  sopéricor,  k 
Alger. 
*  Tbémaox,  k  Tipaza. 


Province  d.o  Oonatantino. 

Inspecteur  :  M. 

BofaoM)!!  (de),  capitaine  ao  3*  cbas-  indigènes,  k  Tebessa. 

•«un,  chef  do  boreao  des  affaires       Delapard  (Kabbé),  co ré  de  Tebessa. 


A.lsaco-Xjorraine. 


Inspecteur  :  M.  Fabbé  Stracb,  k  Strasbourg. 


Fm  (Henri),  kGucbwiller. 
^oxms,  architecte,  k  MeU. 

XLIT*  SESSION. 


GuERDER  (l'obbé  V.)}  curé  de  Saint- 
Georges,  k  Haguenau. 

P. 


XLIV 


LISTE   DES  MEMBRES 


MEMBRES    ÉTRANGJ 


Ar^I^BMAOT^Ii: 


AoESWOLD,  préiideut  de  la  régence,  à 

TrèTei. 
AuTEMBs  (le  biron  d'),  directeur  du 

muiée  germiulquc,  à  Nuremberg. 
Baeiir,  profeiteur  do  l'UnUenité  de 

Heidelberg. 
Batui  (A.  de),  conienralcur  des  monu- 

meolt  historiques,  k  Cêrlsruhe. 
Brikckb!!  (de) ,   conseiller  d'État,    à 

Brunswick. 
Dectopf  (le  comte),  k  Gœttingen. 
FiRMEMiCH  (Jean-Mathieu),  homme  ile 

lettres,  à  Berlin. 
Flobencoi'RT  (de),  directeur  du  musée 

d'antiquités,  à  Trères. 
FoRSTER,   de  plusieurs   académies,  k 

Munich. 
FcRSTEMDERG-STAMnEiM  (le  comtc  de), 

k  Apollinarisberg ,  près  Cologne. 
Gergins,  secrétaire  de  la  Société  ar- 
chéologique, k  Mayence. 
Hcun,  membre  du  Conseil  supérieur 

des  bâtiments,  k  Carlsruhe. 
K0ED6IR,  membre  de  plusieurs  rociétés 

sarantes,  k  Cologne. 
KiRCHorER  (Théodbre),  k  Stuttgard. 
Kriig  oEHocnFELDE!ii,ai(]e  de  camp  du 

grand- duc,  k  Baden-Baden. 
Ki'GLER,  professeur  k  l'Académie  de 

Berlin. 
KOLL,  prof,  k  l'Académie  de  Berlin. 
LixDiMstuiiiDT,  consertiteur  du  musée 

de  Mayence. 


Lb?iuart  (F.),  sculpteur 
LsuTscn   (Charles-Ch 

WeUlar. 
Marccs  (GustRTe),  llbn 
Mayemfiscii  (le  baron  é 

de  S.  M.  le  roi  de  Pn 

le  prince  de  llohensol 

gcn,  k  Sigmaringen. 
Mayer  (F.),  k  Francfor 
Messmer,  professeur,  c 

musée,  k  Munich. 
Mo:<E*,  directeur  des 

raies  du  graud-duch 

Carlsruhe. 
MosLKR  (Charles),  prol 

demie  de  Dusscldorf. 
Miller  (le  docteur  Ch 

gard. 
NAiiUYS(le  comte),  mem 

sociétés  savantes,  k  \S 
Not'E  (le  comte  Arsène 

droit,  k  Malmédy. 
Olfers    (d'),  directeui 

musées,  k  Berlin. 
PiPERS,  professeur  de 

directeur  du    musée 

chrétienne,  k  Berlin. 
Reicue?(sper(;er,  conse 

de  cassation,  tice-p 

chambre  des  député 

Berlin. 
Rlidbr,  professeur  k  1' 

nique  de  Bamberg. 


D£  UL  SOCIÉTÉ  FAAMÇAISE  d'ARCHÉOLOGIE.  XLllI 


31.  MirooiT  (Albert),  à  MatiBnyï  par 

HaiD  (Somme). 
Si.  TiiLLijrr  (Yictor-Julet-Françoii),  k 

BoiIofoe-tor-Mer. 
83.  Pact&at  di  la  GcArikièie,  me  dei 

Aitns,  ta  Mans. 
Si.UGcmLijuceaa  tribunal  d'Arrst. 
35.  Sus  (Georges),  k  Arrat. 
3ft.  (^i;RTiLLOLEa(de),  à  CoartiloUet, 

ptr  Alençou. 
37.  Tbesvacx  dc  Fraval,  rue  du  Lycée, 

à  Uval. 
38.Moai9i  DELA  BeacluèR£  (Louis),  à  la 

Dnijoterie,par  Entrammes  (MayeDue). 

39.  VifHKAT  (de),  au  Rocher,  prèa 
Uni. 

40.  BocLAXCl,  à  Arru. 


4^.  Giron  (Gaston),  au  Puy  (Haute- 
Loire). 

4a.  Marchessod  (Léon),  au  Puy. 

43.  Brive  (Albert  de),  ancien  conaeiller 
de  préfecture,  au  Puy. 

ik,  Hedde,  banquier,  au  Puy. 

45.  Sagnier  (Alphonse),  juge  suppléant, 
k  Atignon. 

46.  Bardaman  (Nicolas),  peintre déco- 
'   rateur,  à  Avignon. 

47.  CuREL-SiLVESTRB  (FéUi),  à  CaTail- 
lon. 

48.  Eysseric  ,  ancien  magistrat ,  à 
Sisteron. 

49.  BoiRC» ,  inspecteur  des  écoles ,  à 
Sisteron. 

50.  IsNARD,  archiviste,  à  Digne. 

51.  GcGUEUUjà  Saint-Florent  (Corse). 


Total  des  Membres  français  à  la  date  du  10  juillet  1878  : 


MILLE  SOIXANTE  ET  QUINZE. 


XLVI 


LISTE  DES  MEMBRES 


Société  ircbéolooiquo  du  comté  de  STCAST-MiimAU   llli 

Kent,  à  Cintorbéry.  House*Bith. 

Stvart-M£mteah  (Cb.)i  à  Entry-HiU-  Yam  der  Vtnu,  doc 

Hoofc-Bitli.  Jeriey. 


AUXniOHES 


CzOERXtG  (le  baron  de),  président  de  !• 
Commistion  impériale  pour  la  con- 
senration  des  monuments,  k  Vienne. 

FoRSTER,  professeur  d'arcbitecture,  k 


l'académie  des  Betoi 
WiESEKFBLD,  prorosseu 
à  Praiiue. 


8.  M.  LE  ROI  DES  BELGES,  à  Bruxelles. 


Altim,  prércl  bonoraire  des  études,  à 

Liège. 
Amdriks  (l'abbé  J.   0.)i  cbanoino,  h 

Bruges. 
BETnD:<E  (Mgr),  chanoine,  professeur 

d'archc'ologie  au  grand  séminaire,  k 

Bruges. 
*Bloiime  (Arthur),  juge,  k  Tcrmonde. 
Brctbnxe  (Justin),  architecte,  k  Tour- 

nay. 
BuRDt'RE  (le  chcT.  Léon  de),  de  1* Aca- 
démie archéologique,  k  Anvers. 
BcsscuKR  (Edmond  dei,  de  l'Académie 

royale,  k  Gand. 
Casterman,  colonel  du  génie,  k  Bru- 

lellcs. 
Cramen  (Victor),  industriel,  rue  de  la 

Bienfaisance,  3,  Bruxelles. 
CoppiBTTERs  (le  docteur),  k  Ypres. 
Delvi(;?ie  (A.),  professeur  d'archéologie 

au  séminaire  de  Malines. 
Devilliers    (Léopold) ,  président  du 

Cercle  archéologique,  k  Mons. 
DiEGKRU.H,  archiviste,  k  Ypres. 
Dogm£e  de  Villers,  k  Liège. 


DoGNËB  (Eugène),  id. 
Durlet  (P.),  k  Anvers. 
FADRY-RoMirs,  docleo 

des  Célestins,  k  Liégi 
Francard  (A.),  avocat, 
Oelluand  de  Merten  ( 

maîiste,  k  Bruxelles. 
Genard  (P.),conserTat« 

k  Anvers. 
GuiLERY,  professeur,  it 

dOmic,  k  Bruxelles. 
IIagemams,  membre  de 

représentants,  k  Brui 
IIamiiam,  négociant,  k  > 
Uaulteville  (de) ,  lit 

xelles. 
IIe?irard  (Paul)t  k  Brv 
Honr  (le  baron  Ludo 

en  droit,  rue  Marie 

Bruxelles. 
IIUGtET  (rabbé),  k  Tou 
Ji'STE  (Théodore),  cons< 

séc  d^antiquilés,  k  ! 
Kervym  nE  Letenhovi 

cien  ministre,  k  Bru 


DE  LA  SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D 'ARCHÉOLOGIE. 


XLV 


SirtiiL-SoiiiAixB  (le   btron  de),  k 

Praocfort. 
ScBiiA?!,  proressear  ao  Collège  royil 

de  Trères. 
SoLv^sif  conseiller  k  la  Coor  de  cas- 

ttlion  de  Berlin. 
Stielfiied  (le  baron  de),  grand'miKro 

dn cérémonies  do  palais,  k  Berlin. 
Staipc  (de),  préaidenl  du  tribunal  de 

Maoïler. 
SdCLTE  (l'abbé),  doyen  deFrekendorfl; 

diocèw  de  Munster. 


Urucrs,  professeur,  directeur  do  mu- 
sée d'antiquités,  k  Bonn. 

WsTTBR,  membre  de  plosieurs  acadé- 
mies, k  Mayence. 

WrrMAMN,  directeur  do  la  Société  ar- 
chéologique, k  Mayence. 

Wallebstbim  (le  prince),  ancien  mi- 
nistre, k  Munich. 

Willem,  directeur  de  la  Société  Trao- 
çaise,  k  Sinsbcim. 

Zestebma!!!!,  professeur,  k  Leipsig. 


AlHOtjE2XI3RIiE3 


BiaroiT  (Sa  Grâce  le  duc  de),  Brighton- 

Sqaire,k  Londres, 
teviia  (le  colonel),  juge  de  paii  du 

CMDtéde  Kent,  k  Rochester. 
kxiiifM**;,  k  Rochester. 
BoLD  (Ed.),  capitaine  de  la  marine 

royale,  k  Soutbampton. 
Bioini  (le  docteur  W.  H  ),  k  Londres. 
Bnuxs,  architecte,  k  Londres. 
BiUE  (Peler),  membre  de  Tlnstilut 

des  architectes,  à  Londres. 
diÊMVii iGeorges-Edward),  k  Londres. 
Coi  (lieut-col.  C),  k  Fordvrich,  près 

(^nlorbéry. 
Coi  (M-«),kForawich,id. 
Dktit,  trchitecte,  k  Londres. 
Di^usTON,  secrétaire  de  l'Institut  des 

ircbitecles,  à  Londres. 
DirtaT  (John-Henri),  k  Norw icb. 
FiA^&s  (Auguste  W.),  directeur  de  la 

Société  des  Antiquaires,  à  Londres. 
FiiEii^t,  antiqotire,  k  Londres. 
FiT()iits  Katherine),  k  Plashet,  près 

Sinifort. 
OKA>T(Mer},  éYéqoe  de  South\\aith,  à 

Londres. 
iuiaii'ir  Walter),  baronnet,  membre 


de  la  Société  archéologique  du  comté 

de  Kent,  k  Sandwich. 
KcocKER  (Edward),  esq.,  ancien  maire 

deDoorres.k  Castel-Hill. 
MiLLiGAU  (le  Rév.H.M.M.  A.),  membro 

delà  Société  archéologique  du  comté 

de  Kent,  k  Sutlon-Valence. 
Mayer    (Joseph),  k  Bebington,  près 

Liverpool. 
Ogylvy  |G.),  esq..  Muséum  Strcci,  41, 

k  Londres. 
Pagn,  ancien  maire  de  Douvres. 
Parkers  fJohn  Henry),  Ashmolean  mu- 
séum, à  Oxford. 
RiDEL  (sir  W.-B.),  baronnet,  membre 

de  la  Société  archéologique  du  comté 

de  Kent. 
RoAcn-SMiTH,  membre  de  la  Société 

des  Antiquaires,  k  Strood,  près  de 

Rochester. 
RoDSON  (Edward]",   architecte,  k  Dur- 

ham. 
RussEL  (lord  Ch.),  ^  Londres. 
Stirlimg  (sir  Walter),  baronnet,  nicm* 

bre  de  la  Société  archéologique  du 

comté  de  Keiit,  k  Tunbridge-Wcls. 
Syone  (Rér.  Canon.)*  membre  de  la 


fe.  r 


t  I.  LI  ICt  :©  ÎÎLi^.  1  Fï-EEfljS. 


JPEIT- 


'lllll«    . 


«tiiinaw  « 


\ae    1 


::uj     ij"raii«.'if   t  Ti«r- 


imie   Brâeituvptrn;.  i  j  i-  -«^^ 
Ta. JE»  ""L-i»r     iiu'&ir-t!,  "-k   à    a 


^ISL^iT   F..  * 

T  ^HT^îhiMicrSk  tti 

«^'i^-j-   ii--i!«M«r  ihaiArr  it  r  Jet- 
^-LsaL-xs^  iitr?i.'.*r?  h*  ja  âdffl^rc  <iei 

.j    'if      ireni»f«r.  a 


DK  U   SOCIÉTÉ   FRANÇAISE  p'ARCnÉOLOGIE. 


VLIX 


Jouisse: 


(de^,  consemtcor  Jes  ir- 

Zmrich. 

■r  protcftUnI,  k  Genèf  c. 

),Beoibredo  omseild^Étal, 

hGeoèfe. 
inttoiatute,  k  Genèf  c. 


Keulkr  (le  doctcor),  «ecrétaire  de  la 

Société  archéologique,  k  Zurich. 
ScAKicBUt    profesaeur    det    scieucct 

auxiliaires  historiques,  k  l'Unitersilé 

de  Fribourg. 
Sbarpes  (Edmond),  architecte  anglais, 

k  Génère. 


ri*  SESSION. 


c„ 


I 


mm   DES    RECETTES    ET    DES   DÉPENSES 

DE    L'ANNÉE    IS77 

RENDU      PAR     LE     TRESORIER, 

iUETÉ    PAR     LE     COMITÉ     PEIMANENT     DE     LA     SOCIÉTÉ  , 
DANS  SA  SÉANCE  DU  i8  JUIN  1878. 


RECETTES. 

EuMut  do  compte  de  1976 I,l3â  II 

iMlenrrÉUt i,000    • 

>me  lénée  par  M.  de  CanrooDt 730    • 

AMrtistcuicat  de  hait  colitalioi» 800    « 

SieicriplkMi  de  M"*  de  Cemnoot  pour  U  retUoration  du 

■■■■■lit  eoaméflBoralif  àe  la  bataille  du  Val  des  Dunes.  .  iOO  • 
SiUe  dct  fotes  émU  par  le  Conteil  général  de  TOise  et  le 

•^•«Mil  ■••ieipal  de  Sentit iOO    • 

Salie  des  cotisationt  de  1876  et  cotisations  de  Tannée  1877, 

'•caiMéesa«90jninf878 9,990    > 

Total. 15,099  ff 


DÉPENSES. 

Frai»  de  rec««f  rêiBent  des  cotisations  par  la  {hmIo,  par  les 

ia^aim  et  par  les  membres  correspondants 307  SO 

Frais  de  rrtoar  de  traites  non  payées 96  10 

de»  lillMfraphies  du  compte-rendu  du  Congrès  d'Arles.  1,790    • 

de  rimprcssion  et  de  TeuToi  de  ce  compte-rendu.     .    .  S,0I9  10 

ë  Cmb 191  90 

.•i  reporter 7.S64  30 


LU  COMPTE  RENDU  PAR   LIS  TRÉSORIER. 

Repott 

Impressions  et  frais  divers  k  Senlis 

Frais  de  la  conférence  de  M.  Parker,  ao  Coogrèa  de  Seolii.    . 

Port  de  lettres,  de  caisses,  de  livres  et  affranchissements  divers. 

Achat  et  Gravure  de  médailles  et  jetons 

Travauv  de  menuiserie  k  It  bibliothè<iuc  de  la  Société.     .    . 

Excursions  archéologiques  dans  le  nord,  le  centre  et  le  midi 
de  la  France 

Frais  généraux  d'administration  et  traitement  d'employés.    . 

Loyer  d'appartements,  à  Cacn  et  à  Tours,  pour  le  dép^t  des 
livret  de  la  Société 

Traitement  des  concierges  et  fournitures 

Payé  k  valoir  sur  l'impression  du  Compte  rendu  de  Senlis.  ' . 


ALLOCATIO.NS  SOLDÉES. 


Membres  chargés  de  Ir  sur- 
veillance et  de  la  direction 
des  travaux. 

M.  Palustre. 


MM.  Castagne  et  de  Fo:«- 

TEXILLRS. 

M.  DU  Caix. 
M.  l'abdé  Lafirrière. 
M.  l'addé  Coffixkt. 
M.  DE  Bbrluc-Piri'ssis. 

M*«    la    vicomtesse    de 

QrATREDARBKS. 

M.  Bernard. 

M^  LE  MARQUIS  DE  RoCUAM- 

BEAU. 
M.  DE  BniXOlRT. 


M.  DE  Mar(;|}erit. 


Plaque  en  marbre  avec  inscription, 
k  l'église  de  CravanI,  apparie- 
nant  k  la  Société 

Fouilles  des  opplda  gaulois  du  Lot. 

Fouilles  dans  les  arènes  de  Senlis. 
Fouilles  de  l'aqueduc  de  Saintes. 
Réparations  k  l'église  de  Lhullre.  • 
Réparations  k  la  maison  natale  do 

Gassendi 

Fouilles    sur    l'emplacement     du 

théâtre  romain  de  Ganncs.  .  . 
Restauration     des     peintures    de 

Cazeaux 

Restauration  du  château  de  Lâvar- 

din 

Restauration  du  monument  comme- 

moratif  de  la  bataille  du  Val  des 

Dunes 

Réparations  k  l'église  de  Viervillc. 

.4  reporter.    ,    .    . 


.# 


COIIFTB  ABKDU  TAR  LE  TRÉSORIER  LUI 

Report I4,G88  15 

ILUVcton.                   RéptratioBt   k    réglise  de  Saint- 
Pierre  de  Tooqaet iOO    ■ 

t.  M  Rawaïi.  Réparations  k  réglised'EngrenTille, 

propriété  de  la  Société. ....  100    • 

Smicriftion  à  la  SlatiâUquê  Monumentale  da  déparlemciit 

itOitr 3S  50 

SttKriptien  à  la  Société  des  archives  photoffraphiqacs.    .    .  i5    • 

TuTAL 15,045  05 

BAUNXE. 

Reortlct. 15,09-2  II 

15,015  05 

ExCÉOA!(T.    ...  4640 


Caci,le«j«iallf7«. 


Le  Trésorier  y 


L.  Gaugaix. 


ALLOCATIU^S   A   SOLDUI. 


ckvfés  do  h  wu- 
ft  dahdNracliMi 

•1. 


I.  Iftri^nai-llocai:.  SobTentiuu  i>oar  la  conservation  des 

peintures  do  xv«  siècle  dans  le 
lofis  derOEoTreda  Saint-Esprit. 

U I.  P.  Lona  m  Goua- 
xi,cnt«KGosHCE».      Béporations  k  Téglisede  Conqoes. 


là    • 
200    . 


LIV  COMPTE  RENDU   FAH  LE  TRÉSORIER. 

M.  PAOGÊRB'DriioiiiiG.  SouKriptioii  h  l'albom  de  Baplette. 

M.  VaUre-Maiiti!(.  Foulllct  sur  le  Monl-Cavetu.    .    . 

M.  LR  vicoMTi:  DE  Grillk.     Coniolidatioli  d'aiie   travée  de   la 

chapelle  du  château  des  Bau«. 

M.  A.  Véran.  Rélablittement  dMnscriptioot  dans 

regllse  de  Taratcoo 

M.  Anthyme  Saixt-Paol.     Souscripliou  à  la  carte  archéolo- 

Siqae  de  France 

M.  diCaix.  Réparations   k   réglise   de   Sainl> 

Prambourg,  à  Sentit 

M.  Vi.NCKNT-OiRAXD.  FouiUct  à  Fcan 

M.  Palustre.  Restauration  de  la  chipe  de  Saint- 

Mexme 

M.Bir:<ard.  Conservation  de  sculptures,  h  Saint- 
Bertrand  de  Cominges 

M.  Caluer.  Consolidation  de  TégUsc  de  Malval. 

M.  Léon  AttoRE.  Restauration  de  la  crypte  d'Uzèt.    . 

M.  Nicolas.  Fouilles  dans   le  département  de 

Vaucluse 

M.  ut  marquis  de  Rocuam-  Consolidation  du  château  de  Lavar- 
BSAU.  din  

M.  Cartailii Ac.  Fouilles  de  dolmens,  dans  le  dépar- 

tement de  la  Haute-Garonne.  .    , 

M.  Dk  Salies.  Souscription  k  l'histoire  de  Troo. 

M.  Jadart.  Plaque    commémorative  de    Dom 

Mabillon 

M.  Le  FisLLiEn.  Somme  à  la  disposition  de  l'inspecteur 

do  la  Mayenne 

.M.  Palustrk.  Somme  à  la  disposition  de  M.  le 

Directeur  de  la  Société.    .    .    . 


Ln  TréiorUr^ 

L.  Gaixiaim. 


AVIS    IMPORTANT. 

Sur  la  demande  do  plusieurs  membres  de  la  Société,  la  qv 

• 

lion  de  ramorlisscmcnt  des  coUsalions  a  été  mise  à  Tordre 
jour  et  résolue  affirmativement  dans  la  séance  administrative 
25  août  4876.  Après  avis  de  M.  le  trésorier,  cet  amortissemt 
a  été  ensuite  fixé  à  CENT  FRANCS,  En  conséquence,  t( 
les  membres  qui  voudront  se  libérer  définitivement  envers 
Société,  pourront,  dès  ce  jour,  verser  la  somme  indiquée  cnl 
les  mains  de  M.  L.  Gaugain,  48,  rue  Singer,  à  Caen. 


CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE 


DE  FRANGE 


XLIV«    SESSION 

TENUE    A    SENLIS 

EN   MAI   1877 


Programme . 

4.  Des  études  préhistoriques  dans  la  région  du  nord  de  la 
FriDce  et  particulièrement  dans  Tarrondissemcnt  de  Senlis.  — 
Sur  quels  points  ont  été  reconnus  des  stations  ou  des  ateliers  des 
difTérentes  époques  de  la  pierre?  Quelle  a  été  la  conséquence 
de  semblables  découvertes  au  point  de  vue  des  connaissances 
arcbéologiques  et  ethnographiques? 

S.  Déterminer  les  rapports  qui  existent  entre  les  monuments 
loégalitbiques  de  Tancien  pays  des  Silvanectes  et  ceux  du  reste 
de  la  France  ;  refaire  la  carte  des  dolmens,  menhirs,  etc. 

3.  Quelle  conclusion  faut-il  tirer  de  la  présence  d'instruments 
eo  matière  tendre,  tels  que  calcaire,  grès,  etc.,  dans  les  stations 
préhistoriques? —  Existe-t-il  dans  la  région  des  stations  lacus- 
tres ou  palustres? 

4.  Des  objets  de  Tâge  du  bronze.  —  Déterminer  le  lieu  des 
découvertes  et  signaler  les  ateliers  de  fondeurs? 

5.  Des  mardelles.  --  En  existe-t-il  dans  la  région? 

6.  De  quelles  études  ont  été  l'objet  les  tombelles  ou  tumulus 
signalés  jusqu'ici?  —  Connaît-on  des  oppides  antérieurs  à 
l'époque  romaine? 

XLIV*  SESSION.  1 


1 


2        CONGRÈS  ARGUÉOLOOIQUE  b£  FRANGE. 

7.  Topographie  générale  des  environs  de  Senlis  à  !'( 
romaine  et  antérieurement.  —  Quelle  étail  rélenduc  de 
rains  couverts  d  eau  et  do  forùts?  Préciser  leur  emplaceu 
dresser  une  carte  comparative  du  pays  aux  teni]»  ancicni 
nos  jours. 

s.  Trouve-t-on  dans  la  région  des  monuments  de  la 
indépendante? 

9.  Numismatique  gauloise  du  Pagus  silvanectensis.—Q 
conclusions  peut-on  tirer  des  trouvailles  de  monnaies  faitt 
qu'à  ce  jour? 

40.  Numismatique  mérovingienne.  —  Trouvailles,  > 
taires,  etc. 

H.  Ucchercher  l'origine  des  Silvanecles.* —  Senlis csl-i 
lancien  Autjustomagus;  quelles  conclusions  tirer  du  ne 
RatomnrjHs  appliiiué  par  Ploléniée  à  Augustomagui 
QuVtail-cc  que  le  Pag  us  rosson  tenais  et  a-t-il  quelques 
ports  avec  le  Pagus  silvanectenmf  —  Étudier  la  siguific 
do  l'expression  Siiranecfes  lîberi, 

M,    Faire  connaître    le  tracé  des   voies  roroaineSi 
ancienneté  et  leur  importance  comparatives.  —    Reciie) 
remplâcemont    do   Litannbrign    et    de   Braluspantiun 
avait-il  dans  les  Gaules  des  voies  antérieurement  à  roccapi 
romaine?  A  quel  caractère  peut-on  les  reconnaître? 

43.  Quelle  est  la  véritable  signification  à  donner  aux 
mansio  \iimHtatio  dans  les  Itinéraires? 

4  4.  Des  Lêtes.  —  Quel  a  été  leur  rôle  à  Senlis? 

45.  Étudier  les  divers  lieux-dits  qui  paraissent  remon 
l'époque  romaine  ? 

4C.  Des  cumps  romains.  —  Uechenlu^r  le  lieu  de  la  ba 
de  <2ésar  conlre.  les  Hello\a«|ue.^, 

47.  Étudier  les  monuments  de  l'époque  romaine  :  Arèn 
théâtre  de  Cliamplimi,  temple  d.:  la  i'urét  d'IIalatle,  muraill 
l'ancienne  cité  de  Senlis,  etc.  —  J]st-il  po.ssildo  de  faire  i 
ces  dernières  constructions  du  ix*  siècle? 

IN.  Signaler  les  villas  {^iillo-romaines  et  les  emplaceu 
sur  lesfpiels  on  trouve  de^>  traee>  de  roceupatiun  romaine. 


XLIV*   SESSION,    A   SEXLIS.  3 

19.  Existe-l-il  des  traces  tranciens  palais  mérovingiens?  — 
Rechercher  la  localité  où  se  Irouvait  le  Palafiiun  vernum, — 
A*t-OD  trouvé  (les  emplacements  destinés  à  la  chasse  à  la 
haie? 

20.  Des  différents  systèmes  de  sépnlluic.en  usage  durant  lan- 
liquilp.  —  L'étude  de  ces  sépultures  peut-elle  jeter  quelque 
lumiërn  sur  les  invasions  germaniques  dans  nos  contrées?  — 
Retrouve-t-on  des  sépultures  en  forme  de  puits? 

21.  A  quelle  époque  faut-il  faire  remonter  la  prédication  du 
«brisliauisme  dans  le  Par/ us  silvanectensis  ? 

il.  Quelles  sont  les  églises  les  plus  anciennes  de  l'arron- 
fament  deSenlis?— En  connaît-on  d'antérieures  à  Tan  1000? 

23.  Étudier  les  principaux  monuments  religieux  de  la  con- 
trée. —  Faire  connaître  les  anciennes  abbayes.  —  A  quel  style 
particulier  [teut-on  rattacher  le  plus  grand  nombre  de  ces 
ôdiûces  ? 

24.  Inventaire  descriptif  et  cri(i(nie  des  trésors  d'églises.  — 
Signaler  les  anciennes  Nerrières  et  tous  objets  mobihers  remar- 
quables, encore  dans  leur  place  primitive  ou  gardés  actuellement 
dans  les  musées  et  collectioiiS  particulières. 

ï).  De  l'utilité  des  études  iconographiques.  —  Dans  quel 
sens  doivent  être  conçus  les  ou\rages  qui  Irailent  de  ces  ma- 
lières  ? 

20.  De  rimagerle  dite  reli|iiou<o.  —  Ui'tornies  à  opérer  dans 
ie  sens  de  la  véritable  intori>rctation  du  symbolisme. 

27.  De  la  nécessité  de  publier  ww  code  d'instructions  relatives 
aux  objets  mobiliers  des  églises. 

25.  Dresser  d'après  les  Charles  et  les  di[)lôme5  la  liste  des 
anciennes  villes  cpii'Cupaîos  do  la  l'iauco. —  fHudier  la  varia- 
•i'Jîj  des  limilos  assigiu'es  aux  diorèses  st.-us  loa  Mérovingiens  et 
rocliArcher,  particurunrnuMil  «i.ui  •  la  ii'vi-"»  '-''i  iiord-esl,  (|uels 
•'taien!  les  supérieurs  d'abbasc  j«rai.-siUil  dc<  juivil/'ges  de  l'épis- 

ii).  Nuiuismaticpie  du  moyen  âge  ;  Dos  iiii:miaies  frappées 
dans  le  déparleiaont  de  l'Oise.  —  SlalliuirtiM/.ie  :  Étudier  les 
anciens  poids  et  mesures;    indiquer  les  monuments  de  ce  genre 


4  G056li3  AftCHÉOLOGIQUS  DE  FIAKCB. 

qui  ezîslent  encore  el  les  ntlacher  aux  diven  syslèmet  ooosU- 
lés  dans  les  provinces  voisines.  —  Sîgîllognphîe  :  Déetire  les 
sceaux  des  anciens  comt^  de  Seolis,  des  seigneurs,  évèqoes, 
abbés,  boorgeois,  corporaiioos,  eic.  En  dresser  le  calalogne  ek 
signaler  particolièremenK  ceax  qui  manquent  dans  la  collection 
des  ardiives  nationales. 

30.  Collections  pobliqaes  et  privées  du  département  de  FOise; 
signaler  leur  importance  et  ètodler  les  pnncipaoxoltjeîs  qu'elles 
lenfennent.  —  Faire  lliisloire  des  diverses  bibliothèques  de 
Sentis  :  ville,  diapitre.  etc.  Ëtuiier  les  ubiettes  de  cire  conser- 
vées à  la  bibliothèque  de  Sentis. 

3t.  Retrouve4>on  des  carrelages  èmaiUés  dans  les  églises  et 
châteaux  de  la  lésion  ? 

32.  Signaler  les  monuments  les  plus  curieux,  au  point  de  vue 
général,  parmi  ceux  qui  ne  sont  pas  classes;  indiquer  les  meil- 
leores  mesures  i  [irendre  pour  leur  conservation. 

33.  Ëpigraphîe.  —  In«cripi:oDS  anU^aes.  pienes  tombales, 
ckches.  etc.  Donner  le  rei-ueil  des  inscriptions  du  moyen  âge, 
toît  en  lanme  latine,  s*:-!!  en  langue  vu  les  ire. 

\o(a  :  Uae  oedaille  d'ar^eot  sera  décernée  à  l'auteur  du 
meillecr  travail  épîp-aphjqae, 

3i.  ArcLi'jKture  mi  :Laire.  —  Décrire  les  châteaux  de  Monté- 
pilty.  ôe  Ver.  e*^. 

35.  lrci:*.ec::re  c:\;>  el  doTesiiqTie.  —  Anciennes  habila- 
L^€tt  «-CLfur-iltt  :■-  :•>:.. r^ es: !5e<:  'if-r?  consircctenrs  et  prin- 

3*.  A  rar':>r;»c.:-e  io-:-"a  rfp.r:e:!esciiesqceron  trouve 
liur.i^l  i.:  n*  :-£^  niiKLS  ,2f  la  ^il.e  Je  S-Llis?  QaeWe  était  leur 
ùesiiai::'-  :r;i*:-;c': 

37.  EU-:.re  g*s  ïDîierses  n:e>  »îe  Seaiis.  —  Topographie 
ÏJSLzrj-'*  ti  *r:it*c'.:c::-e;  e25-  iiies.  vîeu\  manoirs,  hôtek 

'>.  Paks  *:  ;irlsi  ErraeDc-nii.le  M: rief.caine.  Chantilly, 

î*.  Sry.-jr  i^iiis  i  SrLi-S  e:  a-:r^5  Iccil::'-?  voisines:  actes 
i'aâatc  asàtrU  :l.*Lis^  oni  r^côos. 


I 


XLtY*   SESSION,   A  SENLIS.  5 

iO.  Histoire  et  descriptioD  de  Thôtel  de  ville  de  Compiè- 

4f .  Êtade  générale  des  lieux-dits  rappelant  des  monuments 
danoyee  âge. 

4!.  lostitatîoDs  administratives,  financières ,  judiciaires  et 
cxdésiastiqoes  avant  1789. 

^\  Rechercher  les  origines  et  suivre  le  développement 
à€  TiDstitntion  dn  notariat  dans  Tarrondissement  de  Sentis. 
--  ladiquer  Favantage  qu*il  serait  possible  de  retirer,  au 
p«Dl  de  vue  historique,  de  Tétude  des  registres  des  anciens 
loUires. 

14.  Proverbes  et  chants  populaires.  —  Donner  les  contes  et 
Irgeades  répandus  dans  la  contrée;  faire  connaître  les  mœurs  et 
•u^  particuliers. 
45.  Faire  connaître  Thistoire  des  compagnies  d'archers  et 
d'iiquebcûers;  donner  les  surnoms  des  diverses  compagnies  et 
neipliquer  l'origine. 

16.  T  a-t-ii  eu  dans  le  département  de  l*Oise  des  trouvères, 
fa  aéoestrels?  Signaler  leurs  œuvres  imprimées  ou  manus- 
oites. 

47.  Dresser  le  catalogue  des  auteurs  antérieurs  au  xvii*  siècle. 
-  Étudier  leur  vie  el  leurs  mœurs  au  point  de  vue  hibliogrn- 
phîqoe,  httéraire  et  philologique. 

4S.  £xiste-t-il  d'anciens  textes  en  langue  vulgaire?  Faire 
dans  l'étode  du  dialecte  parlé  autrefois  et  de  nos  jours  la  part 
de  riofloeoce  picarde  et  de  l'influence  française;  dresser  le  ca- 
lilefoe  des  mots  patois  encore  employés  dans  le  pays  et  signaler 
pirticaUèrement  ceux  qui  n'existent  pas  dans  les  dictionnaires 
et  MM.  Uttré  et  Gorhlet. 

19.  Étudier  les  sources  auxquelles  on  peut  rattacher  les  diver- 
ict  dénominations  territoriales. 

50.  Donner  la  biographie  des  plus  célèbres  antiquaires  et  éru- 
diis  nés  dans  le  département  de  l'Oise.  —  Faire  connaître  le 
axvement  des  études  archéologiques  depuis  vingt  ans  dans  la 
■èoie  région. 

51.  Topographie  archéologique.  —Bibliographie archéologique. 


6         CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

—  Dresser  le  catalogue  de  tous  les  travaux  publiés  sur  les  a 
quitcs  (le  rarrondissement  de  Senlis. 

Des  excursions  seront   faites   à  lieauvais,   Compièt 
C/iampiieu,  Pierre  fonds  et  Morienvat. 


Liste  des  adhérents  au  Congrès 
archéologique  de  Senlis  (1) 

1.  Alep^o,  proî)riélairo  i\  Senlis. 

*2.  Aniolot  (coinlc;.  nie.  Sa'nl-noînin'mtuv  '>i,  à  Paris. 

3.  Auhrelicque,  sônalenr.  maire  do  Ccmipièguo. 

4.  Auxy  (le  comte  AllMMir  »!*},  à  Mous  (lielgiiiue). 
;>.  Halze,ihâfeau  de  Clifialis  ;Ois<'\ 

«).  lîaudiard,  prt^idcnt  du  Tribunal  de  Senlis. 

7.  Baudon,  nitMlofin.  à  Mouy  ;(.)ispj. 

5.  Baudoin  (Henri',  iG,  l»oul«'v;inl  Haussmann,  à  Paris. 
*.).  Belfort  'de),  .'i-î,  rue  d.»  I  Univi'i>.ite,  à  Paiis. 

10.  Benoist,  notain*,  fj  Senlis. 

11.  Beruier,  capitaine  en  rclniiUî,  à  Senlis. 

12.  Bot,e,  arcliiteele,  ,\,  rue  S«'»"^'uier,  à  Paris. 

4  J.  Boucher,  inspecteur  di^  rensci^njunent  primaire,  à  Sen 

1  i.  Boulanj^er,  receveur  de.'?  domaines,  à  Senlis. 

1  ">.  Boulanger,  fabricant  de  Ciirreaux  m.)sui<iues,à  Auneuil  (C 

4  0.  Bouy,  chimible,  à  Senlis. 

47.  Bottier,  jugiî  suppliant,  à  (!<Mnj)iègne. 

18.  Boudin  (l'abb:''),  cure  de  Saint-Firmin  Oise 


(l;  Dans  (oUo  Ii^t^'  im*  Hijineiit  pas  les  niotnî>io>  ili-  la  Sociék^  frai 
<rAri'iu^olo|;ii>,  au  iioiubic  de  l20iK*uviroii,  «|iii  fuiit  ili>  «Jiuit  parlic  de 
les  concrH. 


XUV*  SESSION,    A   SENLIS.  7 

49.  Bourgeois  (rabbé),  aumônier  de  la  Pitié,  1,  rue  Lacepède, 
à  Paris. 

20.  Boursier,  docteur-médecin,  à  Creil  (Oise). 

21.  Cador  (Auguste),  architecte,  membre   et  fondateur  de  la 

Société  palcontologique  et  archéologique  de  Charleroi,  et 

membre    correspondant    de    la  commission    royale    des 

monuments,  à  Cbarleroi  (Belgique), 
îl  Camara  (Martial  de  la), professeur  d'architecture, à  Valladohd 

(Espagne). 
llCapelle(M°»«},  àSenlis. 

U  Caudel  (Fabbé),  curé  de  Montlévôque,  près  Sentis. 
1).  Chantérac  (marquis  de),  47,  rue  Bellechasse,à  Paris. 
26.  Challan  de  Belval .  médecin-major  des  hôpitaux  militaires,  à 

Sentis. 
Vi.  Chairnin,  avoué,  à  Sentis. 
%  Chanbard  (l'abbé),  curé  de  Creil  (Oise). 
Î9.  Chalenay,  conseiller  général  (Oise). 
ÎO.  Clavé  (Jules), administrateur  du  Domaine,  à  Chantilly  (Oise). 
31.  Cochet  (l'abbé),  curé  de  Brégy  (Oise). 
31  Commission  historique  du  Nord  (Lille). 
33.  Comié  (baron  de),  château  de  Montataire  (Oise). 
■<4.  Constant  dTan ville, lieutenant-colonel  de  cavalerie, membre 

de  plusieurs  sociétés  savantes,  20,  rue  de  la   Fcrme-des- 

Malhnrins,  à  Paris. 
3j.  CoQdret,  notaire,  à  Compiègne. 
36.  Daudin,  à  Boissy,  près  Chaumont  (Oise). 
3'.  Debray,  5,  rue  du  Plat,  à  Lille. 

38.  Decroos  (Pierre),  avocat,  membre  de  la  Société  des  anti- 
quaires  de   la    Morinie,  1.3,   rue  Saint-Pry,  à   Béthune 

'Pas-de-Calais). 
30.  Deladreue  (l'abbé),  curé  à  Saint-Paul  (Oise). 
iO.  Delaporte,  avoué,  à  Scnlis. 
^1.  Deshais,  propriétaire,  à  Senlis. 
*•.  Desmarelz,  28,  rue  de  Condé,  à  Paris. 
<3.  Di'sjardins.  agrégé  à  la  faculté  de  droit,  30,  rue  de  Condé. 

à  Paris. 


8        GON&RÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

44.  Delaville-Leroulx,  40,  rue  de  Lisbonne,  à  Paris. 

45.  Détaille,  libraire,  40,  rae  des  Beâux-Arts,  à  Paris. 

46.  Dufourmantelle,  archiviste-paléographe,  23,  rue  de  Rocroy, 

à  Paris. 

47.  Dunkin,  à  Dartfort  (Angleterre). 

*  48.  Dupuis  (Ernest],  vice-président  du  Comité  archéologique  de 
Senlis,  à  Pontarmé  (Oise). 

49.  Dulilleul,  conseiller  général,  à  Elincourt-Sainte-Marguerite 

(Oise). 

50.  Dupont,  conseiller  général,  à  Beauvais  (Oise). 

5t.  Dumaine,  vérificateur  de  l'Enregistrement  et  des  Domaines, 

à  Sentis. 
5S.  Eclancher,  directeur   de  Tusine  de  Saint-Leu  d'Esserent 

(Oise). 

53.  Fautrat,  sous-inspecteur  des  Forêts,  à  Senlis. 

54.  Felizon,  notaire,  à  Senlis. 

55.  Flammermont,  23,  rue  Malesherbes,  à  Paris. 

56.  Fleury,  secrétaire  général  delà  Société  académique  de  Laon. 

57.  Fontaine,  notaire  honoraire,  à  Senlis. 

58.  Fraser-Duff  (Thomas),  à  Chantilly. 

59.  Fraser-Duff  (Robert),  à  Chantilly. 

60.  Francart,  avocat,  docteur  en  sciences  politiques  et  adminis- 

tratives, à  Mons  (Belgique). 

61.  Fremy,  juge  suppléant,  à  Senlis 

6i.  Frossard,  4  4,  rue  de  Boulogne,  à  Paris. 

63.  Galle,  propriétaire,  à  Creil. 

64.  Gosselin,   inspecteur  général  des   Ponts  et  Chaussées,  à 

Senlis. 

65.  Grésy,  propriétaire,  à  Senlis. 

66.  Groos,  curé  de  Lévignen,  canton  de  Betz  (Oise). 

67.  Guibourg,  ancien  sous- préfet,  à  Senlis. 

68.  Guibourg  (Robert),  à  Haraucourt  (Ârdennes). 

69.  Harlé,  conseiller  général  au  Marais, commune  de  Chevrières 

(Oise). 

70.  Hayaux  du  Tiily,  à  Saint-Léonard,  près  Senlis. 

71.  Haye  (François  de  la),  juge  à  Senlis. 


XLIV*  SESSION,    A   SENLIS.  9 

71  HahD  (Alexandre], officier  d'Académie,  membre  de  plusieurs 

sociétés  savantes,  à  Lûzarchés  (Seine-et-Oise). 
73.  Hnrard,  architecte,  6,  rue  d'Assas,  à  Paris. 
7i.  Herbet  (Désiré),  propriétaire,  à  Senlis. 

75.  Héron,  i,  rue  Clémence-Isaure,  à  Toulouse. 

76.  Jaquinot,docteur  en  médecine,  à  Sauvigny-les-Dois  (Niëtre). 

77.  Janvier,  président  de  la  Société  des  Antiquaires  de  Picardie, 

i  Amiens. 

78.  Jobey,  notaire,  à  Crépy-en-Valois  (Oise). 

79.  Joussemont  (vicomte  de),  à  Cavillon  (Somme). 

80.  Junot  (M"«  Blanche),  à  Senlis  (Oise). 
8<.  Laurièrc  (Ferdinand de),  à  Paris. 

81  Lagache,  conseiller  général  du  canton  de  Gourcelles-Epayelles 
(Oise). 

83.  Laurent  (fabbé),  curé  de  Senlis. 

84.  Lambertye  (comte  de),  à  Compiègne. 

85.  Lac  (du),  juge  suppléant,  à  Compiègne. 

86.  Lamî.  27,  rue  Duret,  à  Paris.  ^ 

87.  La  Perche,  receveur  des  Finances,  à  Senlis. 

88.  La  Perche  (Stanislas),  chùteau  de  Saint-Sulpice  (Oise). 

89.  Lebrun  (l'abbé),  à  S«nlis. 

90.  Lefranc  (rabbé),  curé  de  Bonneuil,  près  Breteuil  (Oise). 

91.  Legoix,  spcrêlaire  général  de  l'Êvèché,  à  Beauvais. 
91  Lcmaire,  14,  rue  de  Provence,  à  Paris. 

93.  Lion,  conducteur  des  Ponts  et  Chaussées,  ^1,  rue  Lauriston, 

à  Paris. 

94.  Longpérier  (A.  de),  membre  de  l'Institut,  à  Paris. 

95.  Lonîîp^rier-Grimoard  (comte  de) ,  président  du  comité  archéo- 

logique de  Senlis. 

96.  Lucay  (comte   de),  château  de   Saint-Aignan ,   par  Mouy 

(Oise). 

97.  Madden,  rue  Saint-Louis,  6,  à  Versailles. 

^H.  Manuel   (l'abbé) ,   curé  de   Cires-lès-Mello ,   missionnaire 
apostolique. 

99.  Maricourt  (comte  du  Mesnil  de),  à  Villcmétrie,  près  Senlis. 

100.  Margry  (Âmédée),  à  Senlis. 


10  CONGRÈS  ARCUEO  LOGIQUE  DE  FRANCE. 

101.  Martin,  ctiltivatear  à  Ermenonville,  près  Sentis. 
402.  Marsaux  (rabbê),  à  Sentis. 

103.  Mazière.  notaire,  h  Ritiécourt  (Oise). 

104.  Méresse,  arcliilecle  à  Corapiêgne. 

105.  Méteil  Jabhé},  vicaire,  à  Sentis. 

106.  Meyer,  manufacturier,  à  Ourscamps  fOiseV 

107.  Micliel,  à  Compiègne. 

408.  Millet,  docteur  en  mé'\ecine,  à  Nantenit-le-Haadoio  (Oise). 

109.  Millescamps,  10.  boulevard  Mateslierbes,  à  Paiis. 

410.  Minière  ^t'abbô).  vicaire  générât,  à  Beauvais. 

4  M .  ilillot,  docteur  en  médecine,  à  Beauvais. 

112.  Moinct,  géomètre,  à  Sentis. 

109.  Moison,  conseiller  général,  à  Mouy  Oise). 

44  4.  Monsile  Cercle  archéologique  de).  Belgique. 

115.  Montaiglon  (de),  professeur  à  TÉcole  des  Cliartes,  9,  place 
des  Vosges,  à  Paris. 

1 16.  Monturier  l'abbéV  curé  de  Pontarmé  ^Oise). 

4 17.  Moquei  »'Constaut".  cultivateur,  à  Brégy  (Oise). 

418.  Morgan  (Thomas),  trésorier  du  British  arclieological  Asso- 
ciation, Palace  Road,  Streatham-Hill,  LondoD. 

IIM  Moreau,  docteur  en  médecine.  37.  rue  de  l*Universilé,  i 
Paris. 

120.  Morel.  nolairo,  à  Sonlis. 

121.  Morilh>n.  9.  ruo  Maiir-I.ouise,  à  Paris. 

122.  Mouchy  l'ijc  d-?   châîoau  de  Mouchy  (Oise). 
!2.3.  Muller  rabb»'  .  vii^aire,  à  Senlis. 

124.  Noché.  filj,  né.-'0'*ianl.  à  S'^nlis. 

l2o.  Olive,  iiiLvniour,  2,  rue  Mosnier,à  Paris. 
426.  Panckoucko,  château  d'Aiimont,  près  Sentis. 
4317.  Parseval,  château  de  Chevilly   Loiret). 

125.  Payen  iHImiouî  ,  notaire,  à  Pont-Sainte-Maxencc  (Oise). 

129.  Payen,  Qjl:iir»  h):i'>raire,  à  Ponl-Saintc-Maxence  (Oise). 

130.  Pelletier,  c  rnseiilor  général,  à  Onsembray  (Oise). 
431 .  Pcrriur  ;ra*»î).*  ,  secrotaiic  de  l'archevêché,  à  Rouen. 

132.  Picard,    «oiisi'iller   gruéral   de   TOise,  ù   Gerësme,   près 
Crépy  (Oise',. 


•  ILIV"    SESSION,    A   SENLIS.  H 

133.  Picl-Lataiidric,  1,  rueMarigny,  à  Paris. 

13i.  Pierret,  à  Eve,  par  Plcssis-Belleville  (Oise). 

135.  Pielte,  juge  de  paix,  à  Craonne  (Aisne). 

436.  Plé    (Jusl),  conseiller  général  du  canton   de  Marseille 

(Oise). 
^37.  Plessier,  conducteur  des  Ponls  et  Chaussées,  à  Maignelay 

(Oise). 
138.  Pommeret  des  Varennes,  à  Étampes  (Seine-el-Oise). 
439.  Prévost,  conseiller  général  du  canton  de  Chaumont  (Oise). 
UO.  Puissant,  ingénieur  civil,  à  Scnlis. 
Ul.  Rauch,  docteur-médecin,  à  Oberbronn  (Alsace). 
Ul  Rend»,  architecte,  à  Conipiègne. 
U3.  Rihan  (M°»«),  à  Scnlis. 
Ui.  Rheins,  gérant  du  Con^^ulat  de  Franco,  à  Tiflis. 
Uo.  Robert  (rabbé),  vicain;  de  Sainte -Agathe- de -Longuyon 

(Moiirlhe-el-Mosclle). 
146.  Roberval    Me),  château    de  Robcrval,   par    Pont-Sainte- 

Mâxencc  (Oise). 
U7.  Roland,  cultivateur,  à  Barberie,  près  Sentis. 
U8.  Roucy  (de),  président  du  tribunal,  à  Gompiègne. 
Ii9.  Rongé  (de),  capitaine  au  G*  cuirassiers,  cbàleau  de  Dinte- 

ville,  par  Chàtcau-Villain  (lîautc-Marno>. 
Ia>.  Ruugô  (llorvé  de),  cliàloau   do    Diiitevillo,  j^ar   Chàteau- 

Villaiu  (llaule-Marne). 
451.  Saladin  (Henri),  an'hitecte,  1.?,  rue  «îe  Souw.,  à  Paris. 
<*>2.  ScheJoiii  (man|uisde),  121,  boulevard  ITaussmann.à  Paris. 
'■"'3.  Séneniaud  (Edmond),  arcbivisie  des  Ardennes,  à  Mézières. 
loi.  S^^re-Dcpoin,  anrion    maire   de  P«mtoiso,  à    Ncuilly-sur- 

Seine. 
<'"»o.  Serrin  (Henri.,  maire  de  NeuilIv-en-Tliellc  (Oise). 
t'»0.  Sorel,  juge,  à  Conipiègne. 

l->7.  Sylva  (da),  architecte  du  roi,  à  Lisbonne  (Portugal), 
loii.  Thomas,  à  Cires-lès-Mello  (Oise). 
16).  Tuiirly-Godin,  conseiller  général,  à  L.ilandclk'  (Oise), 
l'd.  Ti.'nleli\n>s  (rabbé),  curé  de  Cliamant,  près  Senlis. 
161  Vachelle  (l'abbé),  curé  d'Ormoy-Villcrs  (Oise). 


12       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  PRiNGB. 

■ 

163.  Vaillantjt,  ru»  Tour-Notre-Dame,  k  Boologne-sor-Bi 

46i.  Vantroys,  avoué,  à  Senlis. 

465.  Warn  (Jules  de),  à  Senlis. 

i66.  Watin,  à  CoUimance,  par  Betz  (Oise). 

466.  Valin,  à  Senlis. 

468.  Vatller  (rabbé),  curé  de  Saint-Léonard,  près  Senlis. 

469.  Vernois,  à  Senlis. 

470.  Vion,  32,  rue  Louis-le-Grand,  à  Paris. 


XLTV*  SESSION,  ▲  SBNUS.  43 


SÉAiNCE  D'OUVERTURE,   DU   28  MAI  1877. 

PlÉSlDENGB  HE  MONSEIGNEUR  LE  DUC   d'AuMÀLE. 

Bien  avant  Theure  fixée  pour  la  séance,  une  foule 
''élite  eavahissait  la  salle  synodale  de  Tancien  évéché, 
<^  avec  goût  pour  la  circonstance.  On  remarquait  sur- 
Wot  dus  l'assistance,  un  grand  nombre  de  dames,  qui 
tniat,  comme  toujours,  tenu  à  honneur  de  prouver  par 
Inr  présence  l'intérêt  qu'elles  portent  à  toutes  les  choses 
<e  l'esprit. 

A  deux  heures  et  demie  précises,  Mgr  le  duc  d'Aumale 

pend  place  au  fauteuil  de  la  présidence,  ayant  à  sa 

bà\B  Mgr   Gignoux,    évéque  de  Beauvais,   Noyon  et 

Salis,  et  à  sa  gauche  H.  le  Préfet  de  l'Oise.  M.  Adrien 

le LoDgpérier,  membre  de  l'Institut,  M.  Léon  Palustre, 

linelear  de  la  Société  française  d'Archéologie,  M.  Odent, 

aaire  de  Senlis,  et  H.  le  comte  de  Longpérier-Grimoard, 

K^sident  du  Comité  archéologique,  siègent  également  au 

koreau. 

Après  un  brillant  morceau  exécuté  par  la  Société  mu- 
ùie,  la  parole  est  donnée  à  M.  le  comte  de  Longpérier- 
Grimoard.  Nous  détachons  de  son  discours  le  passage 
nivaDt  : 

•  En  choisissant  notre  ville  pour  y  établir  le  quartier 
ifaêral  de  tos  explorations  archéologiques.  Messieurs, 
luu  doute  TOUS  nous  aves  causé  un  plaisir  extrême  que 
voai  partagerex,  j'espère  ;  mais  vous  vous  êtes  une  fois 
de  plus,  montrés  les  dignes  successeurs  de  M.  de  Caumont, 


i4  CONGRÈS  ARCUÉOLOGIOUE  DE  FRANCE. 

qui  s'était  bien  prumis,  —  p'est  à  nous  que  devait  demeu- 
rer l'avantage,  —  de  renouveler  sa  visite  ici,  regardant 
comme  une  simple  reconnaissance  sou  apparition  à  Senlis, 
qu'il  ne  quittait,  disait-il  gracieusement,  le  i"août  1866, 
qu'en  emportant  l'espoir  d'y  revenir  pour  un  temps  plus 
long. 

a  Avec  la  sagacité  qui  lui  faisait  envisager  si  vite  et  si 
justement  toute  chose,  Messieurs,  votre  illustre  fondateur 
avait  compris  que,  sur  cet  espace  de  terre  si  riche  en  sou- 
venirs, à  l'intérieur  aussi  bion  ([u'à  l'extérienr  de  la  cité 
sylvanectienne,  il  y  a  lieu  de  s'arrêter. 

a  C'est  ce  que  nul  n'ignore  actuellement,  surtout  ceux 
qui  pensent,  suivant  Cicéron,  que  l'antiquité  est  la 
source  où  nous  puisons  de  quoi  arroser  nos  petits  jar- 
dins :  «  Fontes  quibus  hortuios  nostros  irrigamus  d. 

«  Que  n'oiVro  pas,  en  eflet,  aux  érudits,  ce  sol  géné- 
reux? 

«  Les  ouvriers  de  la  dernière  heure,  dans  l'ordre  de 
présence,  au  chantier  de  la  science,  ceux  qui  s'occupent 
spécialement  dos  comuiencemonls  de  l'existence  humaine, 
pourront  parcourir  de  vastes  champs  couverts  do  nom- 
breux spécimens  do  l'-'iLte  de  pierre. 

«  Avançant  dan?  la  vie  du  monde,  l'intérêt  s'accroîtra 
h  la  vue  des  curieux  in^tru monts  laissés  par  ces  couches 
relativement  nouvelles  des  tenip?  préhistoriques,  que  nos 
pères  regardaient  comme  reiuv?< entant  la  race  autochtone 
de  leur  pairie,  et  los  anlhrcipul.'iristes  srront  satisfaits. 

«  L'épnqiic  <].!  l'nci'ui):il.'«ui  romaine  ro  révélera  d'abord 
par  ses  belles  et  largo?  voios,  dont  plusieurs  tracés  sem- 
blent pourtant  encore  à  Tôtudo;  puis  viendront  de  très- 
importants  monuments,  à  la  léle  de&jjuels  se  placent  tout 
naturellement  les  arènes. 

«  La  visite  que  vr.us  ieroz  aux  autres  édifices,  qu'ils 


XLIV*  SESSION,    Â  SENLIS.  15 

soient  debout  ou  en  ruines,  qu'ils  se  trouvent  en  sous-sol, 
comme  ces  cryptes  remarquables  par  leur  ornementation, 
qu'envieraient  bien  des  églises,  ou  qu'ils  s'élancent  dans 
les  airs,  comme  les  flèches  si  élégantes  de  nos  cathédrales, 
celte  visite,  dis-je,  réveillera  chez  vous,  Messieurs,  en  en 
imprimant  de  nouveaux,  d'inefiaçables  souvenirs. 

c  L'admiration  sera  réelle  quand  vous  contemplerez 
aussi  ces  beaux  paysages  qu'offrent  certains  parcs  de  la 
contrée  et  que  la  main  des  artistes  les  plus  habiles  n'au- 
rait pu  créer  sans  le  concours  du  grand  architecte  de 
l'univers. 

c  Enfin,  vous  verrez  encore  assez  de  types  de  nos  mon- 
naies particulières  pour  vous  rappeler  l'existence  des  ate- 
liers de  fabrication  qui  appartenaient,  je  crois,  à  la  Gaule- 
Belgique. 

«  Hais,  mieux  que  personnne,  Messieurs,  vous  con- 
naissez les  éléments  d'attraction  qui  expliquent  bien  la 
préférence  accordée,  cette  année,  à  la  ville  de  Senlis.  Con- 
tinuer l'énumération  de  ce  que  vous  aurez  à  voir  serait 
donc  perdre  un  temps  précieux;  d'ailleurs,  nous  avons 
hàle  d'assister  à  vos  intéressantes  discussions  et  de  recuciU 
lir  toutes  vos  paroles.  » 

M.  Léon  Palustre  s'exprime  ensuite  en  ces  termes  : 

MESSEIGtEURS, 

Messieurs, 

On  ne  saurait  se  dissimuler  qu'il  est  toujours  dange- 
reux de  reparaître  devant  les  mômes  personnes  dans 
un  état  d'infériorité  à  ce  qu'on  était  tout  d'abord.  Aussi, 
n'est-il  aucun  d'entre  vous  qui  ne  se  rond  compte  du 
sentiment    d'hésitation   bien   légitime  que   nous  avons 


16       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  I^B  FRANCE. 

éprouvé,  lorsque  nous  nous  sommes  vus  en  présence  d'une 
proposition  on  ne  peut  plus  gracieuse,  il  est  vrai,  mais, 
enfin,  qui  avait  pour  conséquence  de  nous  ramener  dans 
une  région  déjà  visitée,  il  y  a  moins  de  onze  ans.  Or, 
depuis  cette  époque,  la  mort  semble  avoir  pris  à  tâche  de 
frapper  les  meilleurs  d'entre  nous;  que  dis-je?  elle  n'a 
même  pas  épargné  l'illustre  fondateur  de  la  science  ar- 
chéologique en  France,  le  savant  renommé  auquel  notre 
existence  était  si  intimement  liée  qu'aux  yeux  de  bien  des 
gens  nous  ne  paraissions  pas  pouvoir  sans  lui  vivre  long- 
temps. Cependant,  dans  la  situation  qui  nous  était  faite 
par  une  perte  aussi  sensible  qu'imprévue,  notre  rdle 
n'était-il  pas  tracé  d'avance?  Tailler  dans  le  marbre 
l'image  d'un  maître  vénéré  ne  suffisait  pas,  il  fallait 
encore  perpétuer  les  œuvres  dont  il  avait  péniblement 
jeté  les  bases  et  qui,  grâce  à  ses  efforts,  avaient  acquis  un 
développement  inespéré.  C'était,  croyons-nous,  en  effet, 
la  meilleure  manière  de  recounaitre  les  services  rendus, 
de  montrer  qu'en  créant  de  toutes  pièces  une  institution 
sans  analogue  dans  notre  pays,  Arcisse  de  Caumont  n'a- 
vait,en  quelquesorte,  fait  que  répondre  à  un  besoin  général, 
et  nous  ne  doutons  pas  que  si,  de  son  vivant,  il  avait 
eu  à  choisir  entre  la  statue  de  Baveux  et  l'existence  assu- 
rée  de  la  Société  française  d'Archéologie,  toutes  ses  préfé- 
rences ne  se  fassent  tournées  de  ce  dernier  côté. 

Mais,  parle  fait  mcuic  de  notre  organisation,  nous  som- 
mes obligés  de  paraître  chaque  année  sur  un  nouveau 
théâtre,  et,  naturellement,  entre  les  offres  qui  nous  sont 
faites,  celles  qui  ont  le  plus  de  chance  de  donner  de  bons 
résultats  l'emportent  dans  nos  conseils.  A  ce  point  de  vue 
la  ville  de  Seulis  devait  d'autant  plus  facilement  réunir 
les  suffrages  que  le  passé  dans  la  circonstance  était  un  sûr 
garant  de  l'avenir.  Et  puis  ne  savions-nous  pas  que  les 


XLIV*   SESSION,    A  SEXLIS.  i7 

éludes  archéologiques  toujours  vivaces  parmi  vous  s'étaient 
encore  ranimées,  en  un  certain  sens,  sous  riniluence 
d'une  importance  découverte  qui,  dès  Toriginc,  a  grand«>- 
ment  attiré  l'attention  du  monde  savant.  Désormais  l'ar- 
gument que  l'on  tirait  d'une  dénouiination  mal  comprise, 
pour  justiiier  les  attaques  d'un  écrivain  du  moyen  âge 
contre  votre  cité,  ne  saurait  plus  être  invoqué  et  tout 
porte  à  croire  que  Ton  a  trop  longtemps  accepté  la  lettre 
dan  mot,  évidemment  pris  dans  un  sens  figuré.  D'ailleurs, 
le  débat  auquel  nous  faisons  allusion,  déjà  vieux  de  cinq 
sièdes,  ne  manque  pas  d'enseignement,  et  nous  pouvons 
eooore  répéter  avec  Jean  de  Jandun  dans  sa  réponse  au 
bkiâteur  : 

t  Être  à  Sentis,  c'est  être  dans  de  l)elies  demeures  ter- 
mces  des  murs  les  plus  furts,  non  d'un  fragile  plâtre, 
mais  des  pierres  les  plus  dures  et  les  plus  belles,  disposées 
iiec  une  industrieuse  habileté.  Dans  ces  maisons,  les  caves, 
entourées  de  solides  constructions  de  pierres,  grâce  au 
degré  de  leur  fraîcheur,  refroidissent  tellement  les  vins 
liins  la  saison  d*été  que  la  gorge  et  l'estomac  des  buveur< 
en  ressentent  une  volupté  suprême. 

«  Être  à  Sentis,  c'est  encore  être  sur  une  gracieuse  col- 
line d'une  médiocre  élévation,  en  sorte  que  les  pavés  de 
il  ville  ne  sont  presque  point  souillés  de  taches  de  bouo, 
maïf  sont  tout  à  fait  unis,  propres  et  nets.  Le  souffle  mu- 
ûtre  des  vents  non-seulement  purifie  lair  des  vapeurs 
malfaines,  s'il  y  en  avait,  mais  apporte  les  parfums  com- 
^^  deâj^lantes  des  forêts  et  des  lierl>es  des  prés  (1  .  •• 

Nous  ne  poursuivrons  pas  plus  loin  re  pané^^yriquc 
|.i  a\ait  pour  but  de  démontrer  que  le  ^êjuur  do  Seulis 

<:  Iniiif  des  Louanyes  de  Piirfs,  par  .lt>an  de  Jaihlnti. 
è'  i^iLe.  J  7-îl. 

XLIV*    SESSION.  '2 


18        CONGRÈS  ARGHÉOLOGIOnS  DE  FRANGE. 

pouvait,  sans  trop  do  désavantage,  ^trc  comparé  à 
do  Paris.  Mais  il  est  bon  de  constater  en  passant  qu'i 
des  charmes  de  la  nature  se  rencontraient  dans  vos 
toutes  les  ressources  de  l'esprit.  Le  palais  de  vos  évé 
celai-Ià  nu>nio  011  nous  siép^cons'à  cette  heure,  ïihi 
ment  ouvert  aux  persécutés  de  la  montagne  Sainte-( 
viève,  fut  i\  Toccasion  témoin  de  plus  d'une  discu 
hardie  dont  l'histoire  a  conservé  le  piquant  souv 
Aussi,  dans  un  autre  ordre  d'idées,  n'avez-vous  eu 
suivre  les  traditions  d'indépendance   qui  vous  et 
données  par  vos  devanciers,  et  personne,  aseurémen 
saurait  se  plaindre  que  deux  d'entre  vous  aient  rele^ 
gant  qui  vous  était  jeté  pur  un  maître,  relativement 
vieille  enceinte  de  votre  cité  (1). 

Mais  vous  avez  fiiit  mieux  encore,  et  revenant,  sa; 
être  sollicités,  sur  vos  premicVes  études,  avec  la  bonn 
la  plus  pari'uite,  vous  avez  reconnu  vos  erreurs  et  subst 
une  théorie  inattaquable  à  quelques  aperçus  légèren 
hasardés  (â).  Il  n'est  pas  jusqu'aux  questions  brûlati 
de  temps  en  temps  remises  au  jour  dans  chaque  ^ 
épiscopale,  ({ui  ne  vous  trouvent  inébranlables  dan 
voie  de  la  vérité  et  tout  naturellement  on  serait  tcnt 
croire  que  vous  avez  pris  pour  devise  cette  parole  d 
célèbre  auteur  de  l'antiquité  :  Ne  quid  falsi  audeat 
quid  veri  non  audeat  historiu  (.'(). 

Je  viens  tie  parler  de  riiisloin».  Messieurs;  n'avoz-^ 
pas  été  les  premiers  à  niiaitrer  de  quelle  ressource 
pouvait  être  dans  l'étude  d'une  science  qui  semblait 

(1)  lierherctifs  sur  la  date  de  renceinte  de  Senlis, 
MM.  Flammeniioiit  et  Diipuis. 
(ï)  Ltffmnint/fe  de  Senh's,  par  J.  Flnnuiierinont. 
i.ïi  C.ii'éron./^tf  Orat.'ii.  \'\. 


XIIY*"  SESSION,   A  SENLIS.  i9 

i&eurer  ea  dehors  de  son  action  (1  ),  devançant  ainsi  une 
tendance  qui,  nous  aimons  à  le  constater^  s'accentue  de 
plus  en  plus  chaque  jour. 

Après  cela,  il  n'est  pas  étonnant  que  les  plus  flatteuses 
récompenses  vous  aient  été  accordées  récemment,  et  tout 
le  monde,  croyez-le  bien,  a  ratifié  la  décision  qui  plaçait 
le  Cinnùé  archéologique  de  Sentis  parmi  les  Sociétés  de 
province  dont  le  sort  est  enviable  à  tous  égards. 

Quoi  qu'il  en  soit,  il  ne  manquerait  pas  encore  de  gens 
qai,  méconnaissant  les  principes  certains  et  indiscutables 
nr  lesquels  se  règle  la  science  que  nous  cultivons,  croi- 
ront iaîre  œuvre  de  sagessse  en  méprisant  ce  qu'ils  ne 
comprennent  point.  Parce  que  dans  les  difl*érents  genres 
d'études,  nos  recherches  sont  véritablement  sans  limites 
et  que  nousnenous  bornons  pas  à  examiner  quelques  types 
d'une  remarquable  perfection,  ils  nous  accuseront  de  per- 
dre notre  temps  à  mettre  en  lumière  ce  qui  ne  méritait 
pu  un  tel  honneur,  tandis  que,  à  leur  exemple,  sans 
doute,  il  serait  bien  plus  profitable  de  se  retrancher  uni- 
quement dans  le  culte  du  beau.  Mais  qui  ne  sait  que  la 
méthode  historique  a  toujours  été  la  meilleure,  quand  il 
s'est  agi  d'approfondir  les  œuvres  de  l'antiquité?  Dans  les 
arts  comme  dans  les  lettres,  il  faut  remonter  aux  origines 
si  l'ont  veut  bien  se  rendre  compte  du  merveilleux  épa- 
nouissement qui  s'est  manifesté  à  un  moment  donné,  et 
Phidias  ne  se  comprend  pas  plus  sans  les  Eginèles  que  les 
écrivains  du  siècle  d'Auguste  sans  le  poëme  de  Lucrèce  et 
les  fragments  d'Ennius. 

\\  résulte  de  là.  Messieurs,  que  les  œuvres  parfaites 
sont,  quoi  qu'on  en  dise,  loin  de  présenter  les  plus  solides 
éléments  d'instruction.  L*erreur  et  ses  effets  ont  une  bien 

1/  Voir  les  travaux  de  M.  Millcscainps  sur  Caranda. 


20  CONGRÈS  ARGHÉOLOGIOUE  DE  FRANGE. 

autre  influence,  et  leur  commerce  seul  a  lavanta 
nous  initier  au  développeinenl  régulier  des  arts,  (1( 
dévoiler  certains  procédés  qui,  mieux  compris,  n'e 
pas  manqué  d'assurer  le  succès. 

Mais,  de  ce  que  nous  préconisons  les  roonumei 
passé,  quelle  que  soit  d'ailleurs  leur  valeur  esthétiq 
ce  que  nous  eu  recommandons  Tétude  approfondie, 
s'ensuit  aucunement,  comme  on  voudrait  à  tort  1( 
croire,  que  nous  sommes  partisans  de  leur  rcprod 
minutieuse  et  inintelligente.  Le  conseil  qu'Horace  d 
aux  écrivains  de  son  temps  est  applicable  aux  artii 
toutes  les  époques  : 

Scribendi  recte  sapere  est  et  principium  et  fotis 
Il  faut  savoir  discerner  ce  qui  est  véritablement 
ble,  de  ce  qui  ne  doit  être  qu'un  sujet  d'inspiratio 
chaque  siècle  amène  avec  soi  des  idées  particulier 
il  faut  tenir  compte  dans  une  certaine  mesure,  si 
veut  risquer,  en  faisant  fausse  route,  de  perdre  tout 
d'action. 

J'aurais  fmi.  Messieurs,  s'il  ne  me  restait  encore 
voir  à  remplir  et  le  plus  agréable,  en  vérité.  Le 
archéologique  qui  a  pris  Tinitiative  du  Congrès  et 
bilenieiit  préparé,  la  ville  de  Senlis  qui  nous  < 
gracieusement  l'hospitalité  et  a  décoré  cette  salle  t 
goût  que  vous  ne  manquerez  pas  d'apprécier,  le  d 
ment  de  l'Oise  cniiu  qui  est  venu  (técuniairemcut 
aide,  ne  sont  pas  seuls,  en  effet,  à  mériter  ici  n< 

(1)  Sa])€re  est  ici  pris  dans  toute  retendue  de  son  s 
losophique  ,  il  signillit  \o  di^coriienicnt  du  vrai  et  du  ft 
beau  et  de  sou  contraire.  Or,  <liins  les  arts  eomme 
lettres,  on  ne  saurait  aller  à  iVncontre,  de  ce  que  la  rais 
goût  pn*conisent. 


XLIV*  SESSION,   A  SENLIS.  3f 

sincères  remerciements.  Dans  le  témoignage  de  notre  gra- 
titude nous  ne  devons  pas  oublier  le  prince  ami  des  lettres 
(t  des  arts,  qui  a  su  dérober  quelques  heures  à  ses  graves 
•<cupatiou3  pour  venir  encourager  par  sa  présence  nos 
modestes  travaux.  Sans  doute,  il  s'est  souvenu  qu'avant 
délire  rhistoire  des  Condés  dans  un  style  qui  rappelle 
yè^M\ue  du  plus  grand  d'entre  eux,  il  avait  pris  part  à 
la  lutte,  longtemps  engagée  autour  d'une  localité  de  la 
Bourgogne  que  l'on  voulait  déposséder  de  sa  gloire  pas- 
sée, en  lui  cherchant  ailleurs  des  équivalents  affaiblis. 
Sioous  n'avons  pas  ici  des  questions  â  traiter  d'une  im- 
portance aussi  générale  que  l'emplacement  d'Alcsia,  il  ne 
manquera  pas  dans  notre  programme  de  sujets  d'études 
propres  à  intéresser  les  esprits  les  plus  élevés;  c'est  l'es- 
{•oirque  nous  caressons  tout  au  moins. 

M.  le  Président  donne  alors  lecture  des  tniis  premières 
■{ustious  du  programme  ainsi  conçues  : 


1.  Des  études  préhistoriques  dans  la  région 
du  nord  de  la  France  et  particulièrement 
dans  l'arrondissement  de  Senlis.  —  Sur 
quels  points  ont  été  reconnus  des  stations 
on  des  ateliers  des  différentes  époques  de 
la  pierre?  —  Quelle  a  été  la  conséquence 
de  semblables  découvertes  au  point  de 
▼ne  des  connaissances  archéologiques  et 
ethnographicpies  ? 

2.  Déterminer  les  rapports  qui  existent 
entre  les  monuments  mégalithiques  de 
l'ancien  pays  des  Silvanectes  et  ceux  du 
reste  de  la  France  ;  refaire  la  carte  des 
dolmens,  menhirs,  etc. 


22        CONGRÈS  AKGHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

3.  Quelle  conclusion  faut-il  tirer  de  la  pré- 
sence d'instruments  en  matière  tendre, 
tels  que  calcaire,  grès,  etc.,  dans  les  sta- 
tions préhistoriques?  —  Eziste-t-il  dans 
la  région  des  stations  lacustres  ou  palus- 
tres? 

La  parole  est  à  M.  le  comte  de  Maricourt  : 


Topographie  préhistorique  d'une  partie 
de  l'arrondissement  de  Senlis. 


Messieurs, 

Avant  de  vous  donner  un  texte  explicatif  destiné  à  ser- 
vir de  commentaire  à  la  carte  préhistorique  du  déparle- 
ment que  j'ai  l'honneur  de  présenter  au  Congrès,  je  dois 
rappeler  les  travaux  antérieurs  qui  ont  facilité  l'achève- 
ment du  mien. 

Le  nom  de  M.  Raoul  Guérin,  mon  collègue  à  la  Société 
d'anthropologie  de  Paris  et  membre  de  notre  Comité 
locaU  devait  figurer  sur  la  carte.  11  avait  déjà  présenté 
celle  de  l'Oise  de  petit  format  et  avec  des  indications 
incomplètes,  il  est  vrai,  mais  c'était  acquérir  un  droit 
inamtestable  à  la  priorité. 

11  avait,  comme  je  Tai  fait  depuis,  compulsé  les  écrits 
do  M.  Graves  qui,  avec  le  répertoire  de  M.  W'oillez,  con- 
tiennent des  renseignements  alk^udants  et  précieux,  mais 
recueillis  à  une  époque  où  Ton  confondait  les  dates  des 
monuments  mégalithiques,  et  où  les  recherches  préhisto- 


XUV  SESSION,   A  SENLIS.  33 

rjques  n'étaient  pas  en  vogue,  si  bien  que  ces  renseigne- 
ments doivent  être  sévèrement  contrôlés. 

Les  ouvrages  de  M.  le  docteur  Baudon  (de  Mouy],  Pon- 
thieux  (de  Beauvais),  ont  été  également  consultés,  et  je  dois 
ajouter  que  ces  messieurs  ont  mis  une  complaisance  par- 
faite à  me  fournir  les  indications  demandées.  Il  faut  en 
dire  autant  du  docteur  £.  Robert  de  Précy,  dont  il  m'est 
difficile  de  partager  les  opinions,  mais  à  l'obligeance  du- 
quel je  me  plais  à  rendre  justice;  de  M.  Plessier  (de  Mai- 
goelay),  auquel  je  dois  la  connaissance  de  nombreuses 
stations  ignorées  jusqu'à  présent  dans  le  canton  de  Betz 
et  rarrondissement  de  Clermont;  de  M.  le  comte  de 
Narsy,  de  notre  collègue  M.  Guillemot,  etc.  etc.  Enfin, 
pour  ne  pas  trop  nous  oublier  nous-mêmes,  ajoutons  que 
notre  regretté  collègue,  M.  Louchez,  MM.  deCaix  de  Saint- 
Aymour,  Tabbé  Caudel,  Vinet,  Fautrat,  ^çrgry,  etc., 
ont  largement  contribué  à  l'exploration  dR  cantons  de 
Sentis  et  Grcil  au  point  de  vue  préhistorique. 

J'ai  adopté  dans  le  travail  la  méthode  de  M.  de  Mor- 
tiilet,et,  pour  la  partie  matérielle  de  la  carte,  les  signes  et 
couleurs  que,  comme  rapporteurs  d'une  commission  pré- 
bistorique  internationale,  lui  et  M.  Chantre  ont  proposés. 
Il  est  nécessaire  de  rappeler  sommairement  en  quoi 
consiste  cette  méthode,  parce  que  plusieurs  de  nos  col- 
iques l'ignorant  ou  la  repoussant,  on  s'expose  à  des 
tâtonnements  et  à  des  erreurs,  faute  de  s'entendre  sur  la 
valeur  exacte  des  mots  employés. 

Tout  d'abord  on  a  divisé  les  temps  dits  préhistoriques 
en  deux  grandes  époques;  les  temps  géologiques  et  les 
temps  modernes.  Les  temps  géologiques,  en  tenagt 
compte  à  la  fois  des  modifications  de  terrains  par  stratifica- 
tions, érosions  ou  alluvions,  de  la  flore  et  faune,  animaux 
et  plantes  disparus  ou  émigrés,  et  enfin  des  produits  de 


24        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

l'iodustrie  humaine  pendant  toute  la  période  géologique, 
comprendraient  en  remontant  de  bas  en  haut. 

.  i°  Les  pierres  taillées  des  terrains  tertiaires  dont  nous 
n'aurons  pas  à  faire  mention,  puisque  rexistence  de 
l'homme  à  cette  époque  ne  parait  pas  Suffisamment  dé- 
montrée à  tous  (quoiqu'elle  soit  incontestable  suivant  moi), 
et  que  notre  département,  jusqu'à  présent^  n'en  a  pré- 
senté aucune  trace. 

Dans  les  terrains  quaternaires  se  trouvent  : 

2°  Les  instruments  appelés  haches  deSaint-Acheul,  trop 
connus  pour  que  nous  en  fassions  la  description  :  dans 
l'exposition  de  la  salle  du  Conférés,  M.  de  Caix  a  fait  figu- 
rer quelques-uns  des  plus  beaux  spécimens  connus  de 
cette  époque.  Type  de  Saint-Acheul  ou  acheuiéen. 

3°  Type  du  Moustier  ou  moustiérien ;  les  haches  amyg- 
daloïdes  de  Saint-Acheul,  se  transforment  en  pointe  et  ne 
se  taillent  que  sur  une  seule  face. 

A^  Solutréen,  —  Pointes  en  losange  plus  ou  moins 
allongé,  très-soigneusement  taillées  sur  les  deux  faces; 
grattoirs  longs. 

5*"  De  la  madeleine  ou  magdelénien.  —  Lames,  grat^ 
toirs  longs,  emploi  de  l'os  et  du  bois  de  cervidés,  sculp- 
ture sur  os.  Ici  s'arrêtent  les  temps  géologiques,  désignés 
au  point  de  vue  de  l'industrie  par  les  noms  de  archéo- 
paléolithiques ou  époque  de  la  pierre  taillée. 

Je  dirai  tout  à  l'heure  pourquoi  je  repousse  cette  der- 
nière appellation. 

Arrivent  les  temps  modernes,  géologiqueraent  parlant, 
ou  néolithiques,  au  point  de  vue  de  l'industrie. 
•  6°  Période  dite  de  Robenhausen,  ou  de  la  pierre  polie. 
Je  serai  amené  à  rejeter  cette  qualification  de  même  que 
la  précédente  comme  cause  de  surcharge  et  d'erreurs  dans 
la  désignation  des  outils. 


XUY*  SESSION,   A  SENLIS.  25 

Un  peu  plus  haut  dans  la  série  industrielle  arrive  le 
bronze  divisé  lui-même  en  deux  époques,  puis  les  âges  du 
fer,  et  ici  le  root  préhistorique  s'efface.  Gomme  nous  ne 
nous  occupons  que  de  la  pierre,  il  est  inutile  de  mention- 
oer  les  subdivisions  adoptées. 

J'ai  essayé,  dans  la  petite  exposition  dont  je  parlais  tout 
à  l'heure  et  qui  est  destinée  à  décorer  la  salle  du  Congrès, 
de  rassembler  ces  types  caractéristiques  des  diverses 
époques,  de  faç')n  à  présenter,  pour  ainsi  dire,  une  page 
préhistorique.  Disons  de  suite  que  la  méthode  de  M.  de 
Hortillet  que  je  viens  de  résumer  a  provoqué  beaucoup 
d'objections,  dont  quelques-unes  sont  très-légitimes;  par 
exemple  :  les  divisions  si  nettes  sur  le  tableau  le  sont-elles 
dans  la  nature?  Est-il  probable  que  l'humanité  tout  en- 
tière et  tout  d'un  coup  ait  délaissé  l'usage  des  haches 
acbeuléennes  pour  adopter  les  outils  moustiériens?  que 
tous  les  hommes  se  soient  mis  à  vivre  dans  les  cavernes 
et  à  sculpter  les  os  à  un  moment  donné,  etc.,  etc.? 

Faisons  observer  que  cette  classification  s'applique  spé- 
cialement à  nos  régions,  qu'elle  a  un  sens  restreint  et 
relatif  et  fournit  aux  recherches  françaises  un  cadre  tout 
fait  où  peuvent  se  loger  les  découvertes  nationales.  On  n'a 
jamais  prétendu  que  les  hommes  aient  vécu  en  troglodytes 
dans  les  pays  où  il  n'y  avait  pas  de  cavernes.  Je  ne  pense 
pas  que  l'on   ait  voulu  dire  quB  M.  de  Mortillet,  lui- 
même,  ait  prétendu  que  l'on  ait  passé  d'un  type  à  l'autre 
sans  transition  et  simultanément  partout.  Nous  admet- 
tons parfaitement  qu'il  y  a  eu  contemporanéité,  entre 
l'emploi  d'outils  différents,  suivant  l'état  plus  ou  moins 
avancé  de  civilisation  sur  tel  ou  tel  point,  ou  suivant  les 
différences  de  vie  imposées  par  les  différences  de  climat  et 
de  stations;  que,  par  exemple,  dans  le  Périgord,  on  chas- 
sait le  renne  et  l'on  s'abritait  sous  des  cavernes,  tandis 


^^  CONGRÈS  aRCHÉOLOGIOCE  DE  FRANCE. 

que  nos  prédécesseurs  pouvaient  pécher  aux  bords  de- 
rOise  et  peut-éire  commençaient  à  s'essayer  à  Tagricul- 
lure.  On  a  ici  mém»?  reproduit  ciTtaines  objections  adres- 
«•'ts  à  M.  'le  Mortillet.  à  savoir  celle  de  M.  d'Acy.  à  pro- 
j-K"^s  lie  la  fiiniiltinLMtê  des  tyj^es  acheuléen  et  moustiérien 
d:ins  lo?  alluvions  anciennes,  fait  que  nous  signalons 
a'.îssi  dans  L^  trisemeiit  de  Monttruiilain  (îoinconrt^.  Mais 
■  -n  a  në^liî^t''  do  repro.hiire  la  réponse  de  M.  de  Mortillet, 
.]ui  explique  cette  anomalie  apj.arente.  de  manière  à  sa- 
tisfaire les  contradi'.teurs. 

G'îume  nous  ne  voulons  faire  ici  que  de  la  démonstra- 
î:on  oî  v.on  de  la  polémique,  nous  n'insisterons  pas  et 
u irons  que  la  classification  propc^sce  n'est  qu'un  système 
].1;îs  lU  moins  liypoihôiique,  transitoire  et  relatif  si  l'on 
veut,  ir.ais  système  qui  vise  autaiit  que  possible  au  vrai, 
satisûiî  Tesprit  par  s*'n  extrême  clarté  et  lui  impose  sous 
sa  forme  sMiûptique  une  ci"«m préhension  rapide.  Nous 
r  ro\  oîi  s  do\  i  '  :  r  I  c  ropro.i  n  ire  a  u  t  aMca  u . 


TI.Mr>  (il-.01.(HiKa  K>   Archcoh'thiquef  . 

TFRTIAIRES 

S;uï^  rc]Mosrn!;u:;>  iia;i>  l'u-Sr. 

^I  K    iKNAWitS 
\\y,'  »»i'.  s  .:.  II.  «l'-isliqui^s 

M.  n  h.'itiM        I\-.îi:i   :..    ii\  >.,:  iinc  sc\i!e  laœ. 
".  i«i(M'.  n  (  4>  .i4M.\  '.>p(>  manquent  dans 

\t»î..I  il.' Ml.  M  le  <îeriarti;mc-nt. 


XLIT''  SESSION,    A  SENUS.  37 

TEMPS  MODERNES  [Néolithiques]. 

RobenhauMen  (1).  Polissage  de  certains  outils.  Monuments 

mégalithiques. 

Fer.  bronze,  et  leurs  subdivisions. 

Les  expressions  archéolithique  et  néolithique  ont  )M)ur 

synonymes  :  âge  de  la  pierre  taillée  et  âge  de  la  pierre 

fw/if.  Je  demande  la  suppression  de  ces  deux  désignations 

fvœ  qu'elles  font  double  emploi    d'abord    et    ensuite 

qu'elles  sont  la  cause  d'erreurs  regrettables.  En  effet,  à 

TépDque  néolithique  on  ne  polissait  pas  tous  les  outils,  les 

hiches  seules  et  quelques  ciseaux  sont  polis,  mais  les 

haches  taillées  quelquefois  grossièrement,  souvent  avec 

QDSoin  extrême,  sont  à  la  même  époque  aussi  fréquentes 

{ue  les  haches  polies  ;  certains  amateurs  s'en  tenant  au 

pied  de  la  lettre  et  trompés  par  la  différence  du  travail, 

ont  très-souvent  rapporté  à  des  époques  difTércntcs  lès 

pruiuits  d'une  même  industrie. 

Vous  savez,  Messieurs,  qu'on  a  signalé  entre  les  derniers 
temps  géologiques  et  le  début  des  temps  modernes,  entre 
l'arcbéolithique  et  le  néolithique  un  brusque  hiatus;  rien 
ne  relie  l'industrie  des  sauvages  troglodytes  à  celle  des 
peuples  qui  polissent  la  hache  et  bâtissent  les  dolmens. 
Or.  M.  le  docteur  Jacquinot,  de  Sauvigny,  près  Nevers, 
oous  apprend  qu'il  a  trouvé  le  type  intermédiaire;  le  fossé 
lenit  comblé  par  les  silex  de  Sauvigny,  et  nous  aurions 
i  intercaler  entre  archéo  et  néolithique  le  type  de  transi- 

I'  Je  proposerais  aussi  la  suppression  de  ce  terme  étranger; 
puisque  le  néolithique  n'est  pas  subdivisé,  il  n'y  a  pas  de  confu- 
uoQ  poKible. 


M 

...  .  .^K.         >  .A   S—  •      'a 


•   • 


n.::-::"   i-ti  :!?îi:*:3«? 
:  -  lkZ'   itfrf  rri^- 

-     :  —  :"I5  bu-fii  «joa- 
-s      jrf  :•?  biches 

:    i'i'j  z.  '^Ti^  roi 
T-       ."^-'à-?  :£!  ::•*  peut 

I  i  '»:*  ;.•■  l.r«  <«:«îent 
•*-.  '    "izi  «.  IV»: •:  «♦>n 

-i   :   -*<":: Cî   ii  rr:- 
_  f-  :     :in?  aotr»? 


»    .  i     - 


t  ? 


« 


r  -  ••  ■•    -  ?.i  -.-X-r.-*-:!  •'t  le 


XLIV*  SESSION,   A  SENLTS.  29 

carte,  jetons-y  un  coup  d'œil  d'ensemble  avant  d*abordcr 
le  point  spécial  de  ce  petit  travail.  Reprenant  notre  classi- 
fication, constatons,  dans  les  temps  géologiques,  l'absence 
de  tout  travail  humain  connu  aux  temps  tertiaires.  Dans 
le  quaternaire,  tous  les  signes  teintés  en  jaune  indiquent 
des  gisements  acheuléens  et  moustiérens.  Les  deux  types 
suivants  n'ont  pas  de  représentants  chez  nous.  Ces  gise- 
ments sont  de  deux  sortes  :  dans  des  alluvions  ou  à  fleur 
de  terre.  Dans  le  premier  cas,  les  pièces  acheuléennes 
peuvent  être  mêlées  à  celles  du  moustier,  mais  c'est  la 
prédominance  du  type  qui  date  le  gisement;  voilà  pour- 
quoi Montguillain  est  rangé  dans  le  Moustiérien,  quoi- 
qu'il s'y  trouve  des  haches  acheuléennes.  11  peut  aussi  y 
avoir  eu  débordements  tumultueux  roulant  et  mêlant  les 
pièces.  Dans  le  second  cas,  c'est-à-dire  celui  des  trouvailles 
quaternaires  à  fleur  du  sol^  rien  de  plus  simple  :  les  allu- 
vions ont  respecté  certaines  hauteurs  occupées  par  les 
hommes  des  époques  primitives  et  leurs  outils  sont  restés 
surplace,  mêlés  plus  tard  aux  débris  d'industries  plus 
récentes,  ce  qui  a  fait  croire  à  tort  à  la  contemporanéité 
des  pièces. 

Vous  voyez  .que  la  période  archéolithique  est  assez  ré- 
pandue dans  notre  département  et  sur  diflérents  points  de 
l'arrondissement  de  Senlis,  vers  Betz  et  Nanteuil. 

Si  nous  passons  à  l'époque  néolithique,  nous  constate- 
rons une  dizaine  de  dolmens,  beaucoup  de  menhirs, 
quelques  grottes  sépulcrales,  des  tumuli  et  enfin  un 
nombre  considérable  de  stations  néolithiques,  quelques- 
unes  formant  atelier;  nous  nous  en  tiendrons  là,  les 
époques  du  bronze  et  du  fer  devant  faire  l'objet  d'études 
spéciales  qui  comprendraient  les  cités  palustres  dont  nous 
pouvons  soupçonner  l'existence. 

L'énumération  de  tous  ces  monuments  par  circonscrip- 


.'10  0O^ùRl:^  ARCHÉOLûGIvl'K  !•£  F&A.\C£. 

tions  aJniinistntives  ferait  fastidieuse*  et  je  dois  me  con- 
tenter eu  rcftrei^uaut  le  i.adre  de  déiacher  pour  ainsi  dire 
un  luûreeau  du  texte  explicatif  destiné  à  faire  comprendre 
uotre  carte. 

Nous  allou?  4!u.iier  une  partie  de  notre  arrondissement 
au  piâui  de  vue  prv hisî«"'n»iue . 

Eu  piisaul  u  pu'Uite  d'un  compas  sur  Montépilloy  et 
dècnvam  une  circi-aicience  avt-c  un  ravon  d'environ  huit 
kilùmêtres.  nous  délimitons  une  région  qui  a  fourni  à 
M.  Tablée  Caudtl  et  à  moi  les  éléments  de  collections  assez 
riches  et  interesoùntes  dans  c^  quelles  ont  de  tout  à  fait 
lival. 

ùcx'kciquemen:.  cette  galeiic.  s'il  mest  permis  de 
mVxpnustr  a:asi,  iecoujtiecans  u  cùrte.  se  compose  d'un 
Ij.;  vie  •,i..^:rv  *::v'îSit:,  lose  du  lerraîa  du  Valois,  tra- 
\tr«  i^^z  u:.c  iviiiùc  ie  ihàtius  dipuis  Aufer-Saint-Vin- 
.x:::  ;->4u.i  V...v^^-^.l:li;-F^â•^'^.  .:r^.  eî  dans  lequel 
tii-rr^-r:-:.  ..-^i::!  its  :.rï,  ie  M. i.t-Ôjraj'U,  Montépilloy, 
K.z.r:^^,  :.r::-t:ï  u  '.i  iust  ir^  *;rv;^  de  Beauchamp.  et  cou- 
:.--•??  i-  i^.u.re  là:;:f::e  iiivycii  qui  forme  ie  territoire 
--M-1:.T-;  iji-:rvî  .:-:nf:;:es  vtr?  Yvilâers  et  Saint- 
•-:.T.î;.:ir.  ^z.\zl.:  ^  .^-:  sj-aïuif:  jlû  cypse.  Les  forêts 
:.«:  zzL..L.\:z  -.:  ...zlx  n.irf  ... iii^vis  en  :ra^*an!  la  cir- 
..l:-.:^:..-.  >.-^'.  i.,7  .•:  ,::-?  it  bai-.iuiiii».  auquel  on  doit 
.c  îii.t  :-  ?..  Lr.i  :  .:.<  ;:i--.ti  -..-.vr..:2s  dans  cette 
:-*.-:*  ^ -.  :  .Ml:.:  ....  v.   {±y  ,  K.::t:v^,  153'^;  elle 

\t        ■     •     .  -•  -        1\"-  -  i  «i  ■  •  •     .^^     VI» 

~>  ■»-.•■-.  ~  .  ..    I -.' •  .    .    ». ~     .*!    ^"I  ..  ..?   t  .■J>k.*4    U7    vHI      • 

L-  :-. -.-;  ::i-.-.rî'.T  l^i^  .-«?  :«:;.ws  r;v  crts  de  Nonette 


■»    .    «*.... 


i    V^--"'  -•••■-    —  '  ■--  i  .t.--  :  .i::jL..-:j:.îa:i±euieenne 


XUV**  SESSION,    A  SENLTS.  31 

lait  étant  isolé  et  le  transport  de  cet  objet  ayant  pu  être 
accidentel,  nous  nous  contentons  de  le  mentionner,  sans 
Toaloir  en  tirer  de  conséquences. 

2"  Monuments.  —  Dans  l'âge  néolithique,  le  seul  dont 
nous  ayons  désormais  à  nous  occuper,  plusieurs  grands 
monuments  :  le  dolmen  de  Ghamant,  fouillé  et  étudié 
d  une  façon  sérieuse  il  y  a  plusieurs  années,  le  menhir 
de  Borest  fort  connu  et  bien  décrit,  celui  du  Mont-Cornon, 
deux  autres  près  Châalis  et  Ermenonville  détruits,  ceux 
de  la  forêt  de  Halatte,  et  une  rangée  de  pierres  levées,  en 
partie  détruites,  que  M.  Margry  nous  a  signalée  et  que 
ouus  avons  visitée  avec  lui.  Tous  ces  monuments  méga- 
lithiques, considérés  isolément,  pour  rester  fidèles  à  notre 
délimitation  rigoureuse,  font  cependant  parlie  de  groupes 
et  lignes  que  Ton  peut  retrouver  en  voyant  l'ensemble  de 
la  carte.  En  parlant  de  lignes,  je  ne  fais  nullement  allu- 
«on  au  système  du  savant  conservateur  de  Saint-Germain, 
qui,  dans  une  série  d'articles  réunis  en  un  volume,  sous 
le  titre  de  :  Archéologie  celtique  et  gauloise,  veut  prouver 
l'existence  d'un  peuple  spécial  bâtissant  des  dolmens  et 
laissant  sur  son  parcours  les  traces  de  son  industrie.  Je 
me  rangerais  plus  volontiers  parmi  les  adeptes  de  M.  de 
Mortillet,  dont  l'opinion  peut  se  résumer  ainsi  :  Il  n*y  a 
pas  eu  un  peuple  ou  une  race  des  dolmens,  pas  plus  qu'il 
n'y  a  eu  une  race  ou  un  peuple  boudhique,  chrétien  ou 
musulman,  mais  il  y  a  eu  un  ensemble  de  peuples  ou  races 
qui,  sous  les  intluences  d'un  dogme  commun,  ont  eu  un 
culte,  des  rites  et  des  pratiques  religieuses  semblables. 
Or,  ce  dogme  et  ce  culte  reposent  sur  la  croyance  à 
l'autre  vie,  par  conséquent  à  Texistcuce  de  l'âme  comme 
principe,  principe  sans  doute  plus  matériel  que  nous  ne 
pouvons  l'admettre,  mais  principe  survivant  à  Tenveloppe 
a»rporelle. 


.'ii  CONGRÈS  ARCIIÉOLOGIOUE   DE  FRANGE. 

Les  trous  ménagés  dans  le  vestibule  dolménique, 
armes  brisées  ou  non  et  placées  près  du  défunt  sont 
témoignages  de  ce  spiritualisme  ou  mieux  fétichisme 
mitif.  Le  trou  favorise  les  allées  et  venues  de  ràmeeni 
attirée  par  les  liens  terrestres.  Les  armes,  comme  ailh 
les  chevaux,  femmes  et  esclaves  immolés  sur  la  tombe 
guerrier  lui  feront  cortège  dans  le  séjour  mystérieux  o 
va  entrer. 

Suivant  certaines  croyances  encore  en  vigueur  c 
des  peuples  africains  et  océaniens,  l'objet  fabriqué  devi 
un  être  et  possède,  s'il  est  possible  de  le  dire,  un  sou 
vital  ;  le  briser  c'est  affranchir  son  âme,  créée  par  r« 
vricr  qui  l'a  faite,  et  lui  permettre  de  rejoindre  son  posi 
sour.  Ainsi,  d'après  plusieurs  auteurs,  s'expliquerait 
fréquence  des  haches  de  pierre  intentionnellement  b 
secs  que  rcnrenncnt  les  sépultures  néolithiques;  ceci  te 
tcfois  n'est  qu'une  supposition  que  la  présence  de  bea 
coup  d'instrumculs  d'une  conservation  parfaite  vii 
contrebalancer. 

Notre  dcilinen  de  Chaniant  avec  ceux  de  Trie-le-Chàte 
et  de  Conflans-Suinlc-Hunorine  [transporté  dans  les  fo» 
du  Muséc-Saint-(îcrniain)  et  de  la  Pierre  Turquaise 
un  des  spécimens  ptirfaits  de  la  sépulture  néolithique. 

A  côté  des  dulniens  et  comme  témoignages  d'une  méj 
civilisation,  indiquons  les  grottes  sépulcrales  représentt 
chez  nous  pur  Urrouy,  Séry-Magneval  et  Nogeut-h 
Vierges;  je  rappelle  aussi  lu  sépulture  de  daignes,  et 
diôe  et  décrite  par  M.  Calland. 

Ici  S4Î  place  un  modo  d'inhuniatiun  que  nous  u'avo 
pas  rencontré  encore  dans  le  pays;  je  veux  parler  des  pu 
funéraires  dont  j'ai  l'ait  la  description  l'année  dernière 
parlant  dos  roiiillos  que  j'avais  visitées  dans  h^s  nécropol 
do  Itologno.  Toutoi'ois,  ces  puits  ayant  été  signalés  s 


XLIV*  SESSION,   A  SENL1S.  33 

différents  points  de  la  France,  et  étant  assez  difficiles  à 
recoonaltre  puisque  rien  n'indique  leur  présence  à  la  sur- 
lace  du  sol,  il  pourrait  se  faire  que  nous  en  possédions 
sans  le  savoir  dans  notre  région. . 

Les  menhirs,  pierres  levées,  pierres  branlantes,  pierres 
à  légendes  sont  assez  fréquents  dans  notre  arrondissement^ 
la  présence  de  gros  blocs  de  grès  indigène  rendant  facile 
l'érection  de  monuments  semblables.  Celui  de  la  Pierre- 
qui-Come  (d'Halatte)  et  celui  de  Borest,  situé  sur  la  route 
même,  sont  les  plus  connus  de  nous.  M.  Graves  affirme 
qu'en  bce  du  dernier  se  trouvait  une  sépulture  cou- 
^rte  d'un  tumulus,  fouillée  et  détruite  il  y  a  plusieurs 
aimées. 

On  a  considéré  ces  pierres  comme  des  limites  de  terri- 
toire, des  signaux  funéraires,  des  monuments  commémo- 
ratib;  dans  certaines  régions  ils  ont  été  longtemps  l'objet 
d'un  culte  superstitieux  que  les  ecclésiastiques  du  pays 
avaient  beaucoup  de  peine  à  combattre. 

Je  ne  puis  m'empécher  de  me  rappeler  ce  passage  du 
Iteutéronome  et  ce  précepte  de  Moïse  aux  Hébreux  après 
avoiiitraversé  le  Jourdain. 

i  Vous  bâtirez  au  Seigneur  votre  Dieu  un  autel  de 
pierres  que  le  fer  n'aura  pas  touchées. 

«  De  pierres  informes  et  non  polies,  et  vous  offrirez 
sar  cet  autel  des  holocaustes  au  Seigneur  votre  Dieu.  » 

Cette  citation  ne  veut  pas  dire  qu'il  .y  ait  la  moindre 
relation  de  parenté  et  de  religion  entre  les  Sémites  et  nos 
prédécesseurs  néolithiques;  elle  serait  d'ailleurs  de  nature 
à  induire  en  erieur,  le  mot  d'autel  rappelant  la  formH 
des  dolmens  couverts  de  pierres  plates  qui,  longtemps,  les 
ont  fait  confondre  avec  des  autels  druidiques.  ^ 

Je  voulais  seulement  sigualcr  une  analogie  et  l'idée 
religieuse  qui,  aux  époques  et  dans  les  temps  les  plus 

XLIV*  SESSION.  3 


;U  r.0NG1lÈâ  AKCnÂOLOOIODE   PB   FRANCK. 

oloi^ué»  Icâ  uns  des  autres,  s'attache  à  la  pierre  itrut 
Dans  uu  des  derniers  numéros  des  Matériaux 
rkisioire  primitive  de  rhomtne,  uu  auteur  signale 
les  Pyrénées  plusieurs  groupes  très-intéressants  de  p 
levées  qui,  encore  à  présent,  sont  le  théâtre  de  pral 
hiiarres  :  il  y  en  a  de  forme  phallique  qui  assun 
fécondité  des  femmes. 

Je  puis«  sans  trop  sortir  du  sujet,  mentionner  u 

intéressant  pour  nous.  M.  Plessier,  de  Maignela^ 

j*ai  déjà  cité,  a  trcuvé  dans  notre  arrondissement,  « 

de  Betx,  dans  un  gisement  néolithique,  uu  sile3 

dit  intentionnellement  taillé  en  phallus.  N'ayant 

Vobjet  je  uVu  puis  rien  dire,  mais  il  est  fâcheux  q 

u  ait  pas  attaché  plus  d'importance  à  cette  déco 

Pareil  objet  rapproché  des  dolmens,  menhirs,  prati( 

trê\miiation ,  chirurgie,  amulettes,  etc.  etc. ,aug 

rait  les  notions  que  Ton  peut  avoir  sur  les  couti 

KT\»yauces  des  iHîuples  néolithiques. 

Les  monuments,  ci-dessus  mentionnés,  dolmenf 

louverles,  gnutes  sépulcrales,  menhirs,  etc.  et 

diquout    Uivessairement   la  présence  de    peupla 

l'iouui^,  mais  no  précisent  pas  topographiquement 

do  leur  habitation.   En   effet,   tandis  que  les  p 

wurs  des  teuips  géologiques,  trojçloilylcs,   chass 

ivmu\  Ole.  etc.,  abandonnaient  liîiirs  morts  sur  j 

uu^uio  le»  mangaient  y%  nos  honuiu-i^  de  la  périw 

llnquo  ont  ap^n^rté  un  soin  particulier  h  la  sépul 

\\)  l''on  m'a  fait  obser\-er  que  ceiio  pn-sniplion  di 

leur  avait  |u>ur  but  iréviler  toute  re|»nVi»lalion  idolàl 

\i^  i'ai  ouleiuhi  aninner  ce  lait,  qui  parut  è^ayor  u 

do  ra»iliioiro,.iKir  M.  Pigoriin,  dans  iin»MouloitM!ce  ù 
mai  IMIG. 


XL1V*  SESSION.   A  SENLIS.  3.% 

leurs,  comme  le  prouvent  les  mobiliers  funéraires  et  Par- 
diitecture  des  dolmens  ;  mais  il  faut  remarquer  que  ces 
moDQQients  sont  souvent  placés  sur  de  hauts  plateaux, 
ibrt arides,  impropres  par  conséquent  à  l'habitation,  d'où 
l'on  doit  conclure  que,  par  suite  d'un  sentiment  decrainte 
^U|ier8tîtieu5e,  de  répugnance,  peut-être,  tout  en  rendant 
un  culte  aux  défunts,  les  néolithiques  les  éloignaient  de 
kun  villages,  et  transportaient,  comme  nous  le  faisons 
nuiotenant,  leurs  cimetières  loin  des  habitations. 

Je  n'ai  pas  voulu  parler  des  lumuli  que  renferme  notre 
dicoDBcription,  car  ou  il  n'ont  pas  été  fouillés  ou  ils  l'ont 
W  X  une  époque  où  V%n  confondait  toutes  les  dates.  C'est 
<ioocintenlionnellement  et  jusqu'à  plus  ample  informa- 
lion  que  je  les  passe  sous  silence. 

Quittant  les  généralités  pour  me  rapprocher  de  l'objet 
^ial  de  ce  petit  mémoire,  j'al)ordc  la  description  des 
silex  travaillés  qui,  trouvés  dans  le  rayon  indiqué  forment 
la  base  de  la  collection  de  M.  l'abbé  Caudcl  et  de  la 
mienne. 

3*  Ateliers  et  stations  néolithiques.  —  A  première  viio, 
Jaos  la  région  circonscrite  que  nous  avons  indiquée,  rien 
ne  parait  se  prêter  à  l'habitation  néolithique.  Absence  de 
çraods  cours  d'eau  et  de  positions  défendables,  aucune  de 
«s  éminences  formant  cap  et  promontoires,  comme  Can- 
neviile  et  le  camp  de  César  au  bord  de  TOise,  et  plusieurs 
stations  que  j'ai  signalées  le  long  «le  la  Seine  dans  Seine- 
et-Marne  (I).  Cependant  les  traces  de  l'industrie  abondent 
iur  le  sol. 

Il  faut  observer  que  ces  plaines,  transformées  par  les 
<)^fri«Thements  et  une  longue  et  savante  culture,  ont  ^'tê 


I)  Sauf  un  petit  promontoire  doniiiinul  rAunolle,  près  de 
Brav.  $ur  le  territoire  de  Dailio rie. 


30  CONGRÈS  ARGIIÉOLOOIQUE  DE  FRANGE. 

des  forêts  marécageuses  ou  rhommc  pouvait  subvenir  aui 
besoins  de  son  existence  par  la  chasse  et  la  pêche.  Notre 
petite  vallée  de  Nonette,  avant  que  le  cours  d*cau  fût  arti- 
ficiellement exhaussé,  était  un  large  marais;  les  vallQnne- 
ments  pouvaient  aussi  former  de  petits  étangs  qui  conte- 
naient assez  d'eau  pour  les  nécessités  des  tribus  habitant 
sur  les  légères  éminenccs  voisines. 

On  remarque,  en  parcourant  les  champs,  l'abondaDce 
et  la  dissémination  des  silex  taillés;  indépendamment  des 
travaux  de  culture  qui  ont  dii  disperser  les  objets,  cette 
dissémination  doit  s'expliquer  par  cglle  de  la  population 
elle-même.  L'imagination  se  représente  facilement  des 
huttes  ou  abris  groupés  de  ci  et  de  là  au  milieu  de  grandes 
forêts  suivant  la  fantaisie  ou  les  besoins  des  familles, 
comme  on  peut  encore  le  voir  dans  les  landes  du  Bor- 
deaux. 

Le  nombre  relativement  considérable  d'outils  et  armes 
que  l'on  rencontre  en  se  promenant  et  que  la  charrile  met 
à  nu  ne  doit  pas  non  plus  faire  conclure  que  la  popula- 
tion fut  très-donsc.  Certains  outils  étaient  de  fabrication 
facile,  comme  ceux  connus  sous  le  nom  de  grattoirs  où  les 
éclats  formant  lames  devaient  être  taillés  rapidement  et 
abandonnés  sur  place  après  avoir  été  utilisés  :  de  là  leur 
fréquence. 

Ajoutons  que  beaucoup  de  générations  ont  dû  se  servir 
de  pierres,  et  qu'il  y  aurait  eu,  suivant  moi,  une  période 
de  splendeur  et  de  décadence  dans  les  Ages  néolithiques. 

D'après  des  preuves  directes  fournies  par  Bray-sur- 
Aunette  et  des  inductions  tirées  de  certains  passages  de 
Grégoire  de  Tours,  je  disais  que,  longtemps  après  l'in- 
vention et  l'usage  des  métaux,  et  même  après  la  conquête 
romaine,  certains  indigènes,  dans  nos  »mtrées,  conti- 
nuaient à  employer  le  silex,  mais  le  taillaient  plus  mal 


XLIV*  SBSSION,  A  SENLIS.  37 

que  leurs  ancêtres  et  n'hésitaient  pas  à  briser  de  belles 
haches  polies  pour  en  faire  des  percuteurs. 

J'ajouterai  un  nouvel  argument  eu  faveur  de  la  per- 
sistance probable  de  la  pierre  à  travers  les  civilisations 
plus  récentes.  C'est  en  recherchant  les  traces  des  anciens 
chemins  gallo-romains  ou  gaulois  romanisés  que  notre 
collègue,  l'abbé  Caudel,  qui  s'est  fait  une  haute  spécialité 
ilansce  genre,  rencontre  des  silex  taillés. 

Est-ce  un  simple  hasard  qui  les  groupe  sur  les  passages 
fréquentés  à  une  époque  relativement  moderne? 

Si  disséminés  que  soient  nos  objets,  on  Iss  rencontre 
accumulés  en  plus  grand  nombre  sur  certains  points,  et 
priucipalemeut  sur  le  territoire  de  Bray-sur-Aunette, 
hameau  de  Rully,  qui  semble  avoir  été  un  lieu  de  fabri- 
catioo,  une  station-atelier,  comme  l'indiquent  de  nombreux 
débets,  des  ébauches  et  l'emploi  des  matières  locales. 

Voici  le  moment  de  parler  des  substances  utilisées  pour 
Uconfection  des  armes  et  outils,  et  en  même  temps  de 
répondre  à  la  troisième  question  du  programme,  ainsi 
formulée  : 

Quelle  conclusion  faut- il  tirer  de  ta  présence  d'ins- 
trumenl»  en  pierre  tendre,  tels  que  calcaire,  grès,  etc.? 

Elle  provoque  certaines  observations  que  je  me  permets 
de  vous  soumettre.  Tout  d'abord  elle  suppose  la  présence 
•le  ces  instruments,  qui  est  réelle,  mais  qui  a  été  long- 
temps niée  et  l'était  encore  récemment  par  un  cminent 
archéologue,  M.  Fleury,  lequel  aftirmait  que,  trompés 
par  certaines  analogies  de  forme,  des  archéologues  avaient 
^u  à  tort  dans  les  blocs  calcaires  naturels  des  outils 
facr^nnés  Je  lui  montrai  la  hache  que  possède  notre 
MiiT"^;.  et  il  reconnut  immédiatement  le  travail  humain, 
«ij'iiifaiit  que  cette  pièce  eiiununchéc  au  IniuI  trun  hàUm 
^'Hiiait  le  hfiyaii  destine  à  retourner  la  terre  pour  y  con- 


38  OONGRÊS  ARCIIÉOLOGIUUE  DE  FBAI«CE. 

fier  le  grain.  Ces  instrumente  auraient  donc  servi  &  Tagri 
culture  primitive;  ils  sont  rares,  car  le  bois  et  les  corm 
d'animaux  semblent  avoir  servi  plus  spécialement  ù  a 
usage. 

Quant  au  grcs  qualifié  de  pierre  tendre  dans  le  prc 
gramme,  je  le  vois  chez  nous  destiné  au  polissage  d 
silex  et  parfois  utilisé  pour  faire  de  gros  et  vilains  gral 
toirs;  il  se  prête  moins  facilement  que  le  silex  à  la  taili 
régulière,  mais  forme  des  haches  que  Ton  peut  polir.  Nou 
en  possédons  plusieurs  échantillons. 

S'il  s'agit  de  tirer  une  conclusion  de  ce  fait,  je  ne  sai 
trop  que  dire,  si  ce  n'est  que  le  grès  provenant  de  sable 
quartzeux  agglutinés  par  un  ciment  siliceux  et  offraii 
une  texture  aigre  et  cassante  pouvait  cependant  fourni 
des  outils  très-durs,  et  comme  il  est  plus  répandu  sur  cei 
tains  points  de  notre  sol  que  le  silex,  nos  prédécesseur 
l'employaient  quand  ils  l'avaient  sous  la  main.  Le  proverb 
dit  que  faute  de  grives  on  prend  des  merles;  j'avoue  n 
pas  avoir  très-bien  saisi  le  sens  de  la  question. 

A  ces  faits,  iM.  Woillez  en  ajoute  un  qui  mérite  coniir 
mation.  Il  dit  (]ue  dans  la  foi^t  de  Compiègne  on  a  trouv 
dos  haches  façonnées  avec  de  l'argile.  Crs  outils  n'auraien 
été  que  des  simulacres  dont  l 'emploi  possible  m'échapix 
complètement,  à  moins  (|uo  l'on  n'y  retrouve  quelque 
symbole  religieux. 

Le  chapitre  des  matières  tendres  épuisé,  revenons  aus 
substances  qui  entrent  le  plus  fréquemment  dans  nos 
ustensiles  de  Hrav  et  liiMix  circon voisins  : 

m 

1°  Le  silex  local  répandu  sur  le  soK  celui  que  Ion  em- 
ploie pour  macadamiser  nos  routes,  vi  ({ui,  sous  forme  de 
cailloux  plus  uu  moins  rouUV,  provient  d'alluvions  qua- 
tcrnaiiTs  et  se  reliront re  à  (loyr  rt  dall^  les  sablirrcs;  il 
se  revêt  souvent  de  patine  blanche 


XUV*  SKSSION,   A  SEiNLIS.  39 

2"  Le  silex  également  local  abondant  û  Montépilloy, 
présentant  l'aspect  du  grès  à  grains  serrés;  uniformé- 
meut  gris  et  terne,  il  se  polit  sans  prendre  aucune  patine. 

3*  Le  silex  strié  de  bandes  irrégulières  bleuâtres,  silex 
d*eau  douce  se  prêtant  moins  bien  que  l'autre  à  la  taille. 

4*  Le  silex  jaune  et  caverneux,  qui  se  rapprocherait  du 
sikx  meulière. 

5'  Le  silex  pyromaque,  translucide  sur  les  bords,  à  cas- 
sure concholdale,  de  couleur  variant  du  noirâtre  au 
blond.  Comme  il  se  trcuve  principalement  en  cordons  de 
gn«  rognons  dans  les  bancs  supérieurs  de  la  craie;  il  a 
bllu  que  nos  néolithiques  allassent  le  chercher  à  une  cer- 
taine distance  ou  se  le  fissent  apporter  en  échange  d'autres 
objets. 

6*  Une  hache  trouvée  à  Raray  avait  tout  à  fait  l'aspect 
du  marbre,  et  comme  tous  les  objet  rencontrés  étaient  en 
substance  à  base  siliceuse,  ce  fait  de  l'emploi  du  calcaire 
sous  forme  marmoréenne  chez  nous  nie  semblait  étrange. 
Soumis  à  un  examen  attentif,  celui-ci  a  été  reconnu  être 
en  quart!  vert,  de  même  que  plusieurs  petites  haches. 

D'autres  sont  en  roche  amphiboleuse,  eu  jadéite,  etc. 

Eu  un  mot,  les  substances  provenant  de  terrains  primi- 
tifs ne  se  rencontrant  qu'assez  loin  de  notre  région,  il  y  a 
U  une  preuve  de  colportage.  J'en  rencoutrc  une  autre 
dans  la  trouvaille  par  luoi  faite  d'une  pointe  de  poig^iard 
c'est  ainsi  que  Ton  désigne  ces  objets)  en  silex  du  Preï^- 
signy(i). 

Désignation  des  instruments. 
J'ai  trop  abusé  de  votre  patience  i>cndant  les  années 

I    M.  Cliablaiug  tils,  en  su  qualilô  du  lllilltTaUlgl^tc,  a  liieii 
«•lulo  examiner  cesdi^ersvs  pièces  et  eu  déterminer  la  nature. 


40       CONGRÂS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

précédentes  pour  ne  pas  vous  faire  grâce  aujourd'hui  del 
longue  énumération  d'objets  recueillis  sur  notre  sol.  C 
sont  toujours  les  haches  polies  ou  non,  grandes  et  petitei 
plates  et  globuleuses,  les  grattoirs,  lames,  percuteurs  ^ 
pointes,  enfin  l'outillage  néolithique  connu,  qui  forinen 
rensemble  de  nos  collections.  Je  veux  seulement  attira' 
votre  attention  sur  quelques  objets  d'un  intérêt  spécial. 

Les  nucléi  sont  généralement  massifs  et  présente^ 
rarement  ces  longues  faces  régulières  résultant  de  Tabla- 
tion  des  lames  qui  se  voient  sur  les  nucléi  du  Pressigny 
et  de  Preslong,  mais  plusieurs  ont  une  configuration 
spéciale  qui  semble  intentionnelle;  les  pièces  détachées 
du  bloc  primitif  donnent  à  celui-ci  l'apparence  d'un  som- 
met de  pyramide,  et  cette  forme  souvent  répétée  noua  fait 
croire  à  un  parti  pris.  A  quoi  pouvaient  servir  pareils 
objets?  C'est  dans  le  silex  gris  et  terne  (|ue  j'ai  essayé  de 
décrire  et  que  Ton  rencontre  principalementà  Montépilloy 
qu'ils  sont  taillés. 

Plusieurs  de  nos  grattoirs  sont  assez  curieux  en  ce 
qu'ils  présentent  une  t'oraie  très-allongée,  comme  celle 
du  grattoir  des  cavernes;  co  sont  des  lames  dont  le  bout 
est  retaillé  en  grattoirs. 

Nos  percuteurs  sont  généralement  massifs;  mais  au 
contraire  quelques-uns  d'entre  eux,  petits  et  anguleux, 
utilisés  dans  leurs  parties  les  plus  saillantes,  semblent 
avoir  sisrvi  à  la  confection  de  pièces  délicates. 

J'ai  des  ciseaux  de  grande  dimension  avec  un  tranchant 
admirablement  poli. 

Quelques  haches  d*unc  diuiension  minuscule,  peuvent 
être  considérées  comme  objets  votifs  ou  amulettes;  j'y 
verrais  volontiers  des  petits  eisiraux  on  rabots  emmanchés 
dans  une  gaine  du  l'aron  à  ne  présenter  que  le  tranchant. 

Je  vous  lais  ^rXœ  dv  nos  pcrçoirs  et  pointes  de  llèchc, 


XITI*  SESSION,   A  8BNU8.  il 

quoique  beaucoup  d'entre  eux  soient  d'une  grande  per- 
Cectioa,  car  ces  types  sont  fort  connus;  mais  j'appellerai 
votre  attention  sur  deux  ou  trois  scies  à  encoches,  plu- 
sieurs pièces  soigneusement  retaillées  sur  toutes  les  faces 
et  formant  un  outil  en  forme  de  fuseau  ou  cigare; 
d'autres,  de  petite  dimension,  ont  pu  être  des  engins  de 
pécbe;  certains  silex  nous  offrent  une  concavité  semi- 
circulaire  de  dimensions  variables  qui  devait  servir  à  per- 
fectionner les  bois  de  flèche  ou  les  menus  outils  en  os, 
comme  épingles  et  aiguilles.  Absence  de  flèches  à  tran- 
dttot  transversal  (I).  Beaucoup  d'objets  dont  je  vous 
épargne  la  description  échappent  au  cadre  des  classifica- 
tions connues. 

Indépendamment  de  la  diversité  des  matières  employées, 
liya  une  grande  difiérence  dans  la  main-d'œuvre;  les 
triTailIeurs  semblent  avoir  appartenu  à  plusieurs  écoles. 
Beaucoup  d'outils  sont  taillés  avec  une  rare  perfection; 
d'autres,  d'aspect  grossier,  de  grande  dimension,  semblent 
être  le  résultat  d'un  travail  hâté  et  dédaigneux.  Si  nous 
nous  trouvions  sur  le  terrain  d'alluvion  superficielle  que 
décrit  M.  Jacquinot,  je  serais  disposé,  eu  comparant,  ces 
dernières  pièces  à  celles  qu'il  décrit  dans  sa  brochure,  à 
les  ranger  dans  le  type  de  transition  sauvinien  qu'il  pro- 
pose; je  les  mettrais  à  côté  d'outils  du  mcîme  genre  par 
moi  trouvés  dans  les  alluvions  de  la  Seine.  Ici  l'assimila- 
tion nous  est  interdite  par  la  nature  du  sol,  et  j'y  vois 
tout  au  contraire  l'ouvrage  maladroit  des  derniers  ouvriers 
de  la  pierre,  après  l'introduction  du  métal. 

On  remarquera  peut-être  que  dans  Ténumératiou  des 

t/  Cette  anîmiation  est  trop  absolue;  nous  avuns  Iruis  un 
luairc  échantillons  de  ce  ly|N!,  mais  leur  (!imeni>ion  et  leur  raclure. 
(MMirraieot  les  faire  rentrer  dans  la  caléguric  des  petits  ciseaux. 


4:2  COA'GRÈà  ARCHÉOLOGIQUE  HE  FEAliCE. 

iiulils,  je  n*ai  pas  mentionné  le  polissoir  qui  a  dû  joLi^i* 
un  si  grand  rôle  dans  la  fabrication  des  pièces  en  silex  ii>' 
dijrène.  Jo  n?  parle  pas  des  autres  qui  peuvent  être  du^ 
à  rimpi^rtation.  L'absence  de  polissoir  connu  dans  notre 
région  est  cause  de  ce  silence  :  je  sais  bien  que  quelques 
fragments  de  grès  présentant  des  traces  d'usure  peuvent 
avoir  servi  au  polissage,  et  sont  désignés  sous  le  nom 
de  polissoir?  à  main.  Mais  je  crois  qu'il  fout  ne  les  oonsi- 
dên^r  que  comme  la  pierre  à  aiguiser  du  repasseur  qui 
piiraohève  Tcruvre  commencée  par  la  meule.  Ces  instni- 
ments  seuls,  sans  polissoir  lixe.  devaient  occasionner  à 
l'ouvrior  une  besogne  fastidieuse,  rebutante,  exigeant  une 
patience  t^t  un  déploiement  de  force  extraordinaires.  J'ai 
vu  en  prcsontant  à  la  meule  quelques  silex,  avec  quelle 
ténacité  e:  quelle  vigueur  il  fallait  appuyer  pour  obtenir 
un  resuhat  toujours  assez  leni.  J'en  cctudus  donc  à  la  pré- 
senct"  pr.-hable.  dans  notre  rayon  ou  enviions,  de  polissoirs 
::xes,  fn^s  blocs  de  grès  avec  cuvette  et  rainures  profondes^ 
comme  celui  de  Sâint-Germain.  ou  ceux  que  Ton  peut 
voir  dans  le  Vend^Nmois  scus  le  nom  de  pierres  cochées. 
La  culture  a  i>u  îes  enfc-r-ir  ou  les  briser. 

I!  ne  :r.f  reste  qu'un  ■.îtr.îier  ms>:  à  dire.  La  vue  des  pièces 
•le  cc«5  .^::v:t:>:îs  eût  abrt-fé  no::>e  nomenclatuie,  car  un 
. . -p  :'  ■ .'.  fait  mieux  saisir  !es  ch-^ses  que  les  descriptions 
lt<  r'.-s  iLin-t'euses:  iiitis  îe  transport  d*uiie  collection 
L'-e^t  T.is  i:«.  Au>*.  -t.is-'e  vrier  ceux  d'entre  vous 
:-.  v-u^ii:  :  en  <*.::\re  :.05  ttudcs  tt  qui  désireraient  de 
:._?  i:i.:.5S  rr::5c:*2tu:^::t5  d^  ^eu:r  les  cherther  à  notre 


^1  -tii.-;  ..II-..::...  -..à:  .j.  .->.:  i>:  .:u  ui^sn.'ine  suivant. 
:-  M.  M.  .-:<*:i:;  :■?.  u:::i:':o-  i-,  ^^  >x;€:t'  d'antropol^ie 


XLIV*  SESSION,    A  SENLiS.  43 


Les  monuxnents  mégalithiques  de  Thimé- 
court,  près  Luzarches  (Seine-et-Oise] , 
constructions  contemporaines  de  l'âge  de 
la  pierre  taillée. 

De  longues  et  palientes  recherches,  entreprises  sur  de 
bibles  indices  et  poursuivies  pendant  les  années  4875  et 
1876,  m'ont  permis  d'exhumer  deux  monuments  d'une 
haute  antiquité  qui,  n'ayant  laissé  que  des  traces  à  peu 
près  imperceptibles  à  la  surface  du  sol,  étaient  demeurés 
jusqu'à  ce  jour  complètement  ignoréx. 

Ces  deux  monuments  distincts  quoique  contigus  sont 
situés  sur  le  territoire  de  Thiraécourt,  hameau  dépendant 
de  Lcxarches  (Seioe-et-Oise);  ils  occupent  un  point  élevé, 
à  l'altitude  de  105  mètres  environ,  sur  le  versant  sud  de  la 
petite  vallée  de  l'Isieux.  Tout  autour  s'étend  une  lande  à 
peuprès  stérile,  dont  le  sol  est'saluré  de  pierres  calcaires 
et  de  débris  de  carrière.  Le  sous-sol,   qui  appartient  à 
l'étage  inférieur  du  terrain  tertiaire,  est  formé,  suivant 
les  pïaces,  de  marnes  fragmentaires  et  de  calcaire  gros- 
sier. C'est  dans  ce  terrain  dur  et  pierreux  que  les  instru- 
ments primitib  Je  quelque  tribu  de  l'ùge  de  la  pierre 
taiilée  ont  paisiblement  creusé  une  vaste  et  profonde 
excavation  que  nos  outils  modernes  n'ont  pas  rouverte 
sans  difficulté. 

lie  premier  de  ces  monuments,  apparent  en  trois  points 

seulement,  était  composé  de  sept  grès,  de  grandes  dimen- 

fions,  placés  les  uns  près  des  autres  à  plat  ou   légèrement 

luclinés  et  reposant  sur  leur  (dus  large  surface. 

Le  second  monument,  complètement  enfoui  et  formé 


44       CONGRÈS  ARGHÉOLOGIOUE  DE  FRANGE. 

de  huit  grès,  dont  sept  dressés  et  maintenus  par  des  cales 
dans  la  position  verticale,  était  de  moindre  importance, 
couvrait  un  espace  plus  restreint  et  semblait  être  un 
appendice  de  l'autre.  On  pourrait  y  voir  un  essai  grossier 
de  dolmen,  bien  que  la  disposition  des  monolithes  soit 
aussi  peu  régulière  que  possible  etque  leur  juxtaposition 
presque  complète  ne  laisse  aucune  place  libre  pour  la 
chambre  qui  constitue  l'intérieur  du  dolmen  propre- 
ment dit. 

Quant  aux  grès  du  premier  monument,  la  situatton 
dans  laquelle  ils  ont  été  trouvés^  ne  semble  pas  indiquer 
qu'ils  aient  jamais  reçu  une  disposition  architectonique 
quelconque.  Cependant  il  est  incontestable  que  tous  ces 
monolithes,  étrangers  au  sol,  ont  été  apportés  et  placés  là 
par  la  main  de  l'homme. 

Deux  tranchées,  l'une,  à  peu  près  ovale,  mesurant 
9  mètres  sur  le  grand  axe  et  7  sur  le  petit;  l'autre,  car- 
rée, présentant  un  côte  de  4*50,  avaient  été  creusées  à  la 
profondeur  moyenne  de  4  mètres,  dans  le  sol  mentionné 
plus  haut  qui  recouvre  un  banc  de  calcaire.  Pour  com- 
bler cette  double  excavation,  les  constructeurs  des  monu- 
ments mégalithiques  dont  il  s'agit  avaient  été  chercher,  à 
une  assez  grande  distance,  une  argile  grasse,  humide, 
compacte.  Dans  cette  espèce  de  ciment  naturel  ils  avaient 
jeté  une  quantité  considérable  de  fragments  de  grès,  de 
différentes  dimensions,  lesquels,  mélangés  à  l'argile,  con- 
stituaient un  blocage  d'une  grande  résistance.  C'est  sur 
Tépais  massif  de  cette  maçonnerie  primitive  que  repo- 
saient les  blocs  de  grès  qui  formaient  la  partie  extérieure 
des  monuments. 

Après  IVnlôvLMiiOiit  d-^  c<'s  gK»s,  «jui  opposaient  un  obs- 
t  ••:1e  insurmontable  à  une  fouille  sérieuse,  on  trouva  sur 
l'^us   les  iHiiuts  du  massif  d'argile  et  de   pierres,   des 


XLIV*  SESSION,    A    SENLIS.  Aiï 

tnœs  de  foyer,  des  débris  de  charbon  de  bois,  un  grand 
nombre  de  silex,le8  uns  bruts,  les  autres  taillés. 

Parmi  les  silex,  dominent  les  éclats;  on  distingue  quel- 
ques couteaux;  on  n'a  rencontré  ni  perçoirs,  ni  racloirs, 
DÏ  grattoirs. 

Enfin,  le  trait  nouveau,  inattendu,  caractéristique  de 
eette  fouille  c'est  que,  contrairement  à  toutes  les  prévi- 
HûDs,  elle   n  a   offert  aucun    objet   appartenant   à    la 
(Mode  de  la  pierre  polie.  La  pierre  taillée  y  règne  exclu- 
sivement, elle  est  même  représentée  par  les  deux  types 
les  plus  anciens  que  l'on  connaisse  jusqu'ici  :  le  type  de 
Sntd'Ackeul  et  le  type  du  Mouslier.  La  hache  de  Saint- 
Acheul  se  présente  sur  tous  les  points,  à  toute  profon- 
deur, associée  aux  pointes  du  Moustier;  évidemment  ces 
deux  instruments  ont  dû  être  concurremment  employés 
par  les  constructeurs,  quels  qu'ils  soient,  des  monuments 
daus  l'intérieur  desquels  ils  ont  été  soit  intentionnelle- 
Dwot  jetés,    soit  involontairement  abandonnés.   Aucun 
doute  ne  peut  s'élever  sur  la  parfaite  authenticité   des 
monuments  mégalithiques  de  Thimécourt,  sur  la  com- 
plète intégrité  de  leur  intérieur,  sur  l'impossibilité  maté- 
rielle d'un  remaniement  dans  le  milieu  qui  renfermait  les 
objets  qu'on  y  a  découverts. 

Deux  faits,  aussi  nouveaux  qu'importants  pour  l'archéo- 
iûgie  préhistorique,  se  dégagent  doue  pour  la  première 
^^Mis  de  ces  fouilles  : 

I*  La  concomitance  du  type  de  Saint-Acheul  et  du 
type  du  Moustier  rencontrés  ensemble  dans  des  conditions 
uïdiscutables  d'authenticité. 

î*  L'existence  de  monuments  mégalithiques  remon- 
■iQt  à  la  période  de  la  pierre  taillée,  alors  que  dans 
!ou«  ceux  connus  jusqu'à  ce  jour,  on  n'a  jamais  constaté 
]ue  la  présence  de  la  pierre  poue. 


4()  t;ONGRÈS  AECHÉOIOGIQUE  DE  PBANGE. 

Otie  lecUire  tcnuinéc,  el  après  un  nouvel  intermède  de 
lu  Société  musicale,  M.  Tabbé  Eugène  MûUer,  premier 
vicaire  de  Notre-Dame  de  Senlis,  est  invitée  répondre  à  la 
!il*  question  ainsi  conçue  : 


A  quelle  époque  iautril  faire  remonter  la 
prédication  du  christianisme  dans  le  Pa- 
gus  silvanectensis  7 

t'.etto  question,  Mes^sieurs.  à  mon  humble  avis,  ne  sera 
JAuiais  tranoluv  uvtv  une  certitude  rigoureuse;  les  on- 
Kuus  de  h\  pluivirt  de  nos  églises,  dès  qu'on  sort  de  la 
substaïuv  du  fait  p^mr  envisager  le  détail,  se  refusent 
*i  \à  clairtf  vue.  Voici  cependant  quelques  conclusions 
briNviv»,  que  votre  érudition.  j*espèr«,  voudra  bien  accepter. 

FiKMiKKK  lO.Navsiox.  —  .Vi» /Kry$ OM/  reçu  dis  le  pre- 

fHtirr  itrt-.V  i^u^ltfujfi  cla^iés  du  christianisme.  —  Si  la 
iinssioii  yt'iie^rtt.V ,  oî'îioielle  du  nord  de  la  Gaule  ne 
siAU\  d\ipés  tvaiuvup.  que  du  m*  siècle,  néanmoins 
qihlquç-  >v«LiA:  ohre:::?a  I  .  jvnîu  ddus  les  stations  de 
iluiuplie»,  lU*  ii'.»u\ieu\,  i-:?  C*?sdfomagus ,  quelque 
l'Jivvtuiui  iiî.viîii;..  ^;,:ei4Le  prvdLCJLieur  isolé  dut  porter 
:-.*  ii.'Lu  i.i  Chri>:  ju>».'^ue  iaus  :îos  f^:r^:5.  emlter  chex  les 
iliu.-.'îj '-'ur  5c':î'.:v^ei::  vt  .:e  rimiuortaiité  par  le  récit 
.>.-?  fVrst\ -•..,•->,  ox'.wr.vr  .e<  [•j^rr'j'.'iioU'?  «le  Dieu  quand 
">|.'  :i  :  i.;\  K.'L'Jsi  !!>  :e.:rs   \oies  luer^eilleuses.   el 


XUV*  SBSSIOX,   A  SENLIS.  M 

réaliser  1«  prophélie  :  «  In  omnem  terram  exivit  sonus 
ctrm  (f  )•  »  C'est  le  sens  de  beaucoup  de  textes  des 
Pim  (91,  la  pensée  des  hagiographes  les  plus  aulori- 
iéi  (3),  et  une  vérité,  permettez-moi  cette  expression,  de 
haute  convenance  divine. 

Dnxmu  CONCLUSION.  —  Y  a-t-il  eu  dès  le  premier 
mie  une  mission  officielle  dans  nos  pays?  —  Saint  Clé- 
DeDt(en91)  (i),  pour  préciser,  a-t-il  envoyé  à  nos  pères 
niât  Denis  et  ses  compagnons  (ses  compagnons,  d'après 
certains),  saint  Lucien,  saint  Rieui?... 

Vous  savez  mieux  que  moi  qu'il  existe  ici,  armées  l'une 
contre  l'autre,  des  sévérités  légitimes  de  la  critique  et  aussi 
trop  souvent  des  traits  du  persiflage,  deux  écoles  con- 
traires, Tune  qui  s'intitule  fièrement  école  historique^ 
l'autre  qui  est  appelée  légendaire.  Les  partisans  de  l'école 
haionquef  les  abbés,  pour  ne  citer  que  des  savants  de  ma 
robe,  les  abbés  Eugène  Bernard,  Chevalier  (de  Tours],  etc., 
$*appuyant  sur  un  texte  célèbre  de  Grégoire  de  Tours 

■  Il  Fs. xviii, 5. 

\t\  Saint  Justin,  Hégésippe,  Arnobe,  Laclance,  Eusëbe,  Tcr- 
toliieD,  etc. 

(3>  c  Probabiliter  saeculo  primo  Evangelium  per  universum 
ccbein  propagalur.  »  Boll.  XXV.  cet.  —Voir  M.  Paulin  Paris 
HUL  Oit.  de  la  France),  Doro  Cbamart,  rabt>é  Cas.  Chevalier, 
ée  Tours,  etc. 

i4}  Je  u'îgoore  pas  qu'il  existe  sur  saint  Clément  deux 
mléfiies  de  chronologie,  que  le  catalogue  des  écrivains  ccclé- 
iiaitîqacs  attribué  &  saint  JérAme  distinguait  déjà  :  •  Clemens, 
Uflsetsi  plerique  Romanonim  secundum  post  Pelrum  aposlolum 
(Kiinit  fuisse  (système  latinl,  quartus  |m)sI  Pelrum  Itomaî  épis- 
rt»piis  [fuit].  •  Il  n*csi  point  de  mon  sujet  do  poser  leur  valeur  on 
df  les  coDcilier. 


48       OONORËâ  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

(Hitt.  Franc,  lih.  I,  cap.  xxviii),  sur  nne  étude  plu 
rigoureuse  des  sources  premières,  sur  une  notion  pli 
exacte  du  ix*  siècle,  sur  la  rareté  des  monuments  épigrs 
phiques,  sur  les  lacunes  des  catalogues  épiscopaux,  el( 
tiennent  qu'un  orgueil  mal  entendu  de  clocher  a  altéré  I 
légende  de  nos  saints,  qu'ils  sont^  venus  seulement  ai 
m*  siècle,  que  le  nom  de  saint  Clément  est  une  interpo 
lation^  que  saint  Denis  de  Paris  est  autre  que  saint  Deuy 
d'Athènes,  etc. 

Les  champions  de  l'école  légendaire,  eux,  opposant  tan 
bien  que  mal  les  contradictions  du  Père  de  notre  histoire 
nationale,  le  respect  de  ce  qu'ils  nomment  Tancienne  tra- 
dition, les  légendaires  et  les  diptyques  de  nos  églises,  etc., 
persistent  à  afTirmer  que  nos  origines  chrétiennes  remon- 
tent aux  débuts  même  de  TËvangile,  que  saint  Denis, 
saint  Lucien,  saint  Rieul,  voire  môme  saint  Firmin  (1) 
ont  visité  notre  sol  dès  le  i*'  siècle,  que  saint  Clément  est 
l'inspirateur  de  leur  mission,  que  saint  Denis  de  Paris  est 
le  saint  Dcnys  d'IIêliopolis  et  de  l'Aréopage,  etc.  a  Non 
tiostrum  est  tantas  componere  liles.n  La  sagesse  de  l'Église, 
on  le  sait,  ne  réclame  de  nous,  en  ces.  questions,  qui  ne 
sont  que  de  chronologie,  que  cette  convenance  de  formes  et 
celte  humble  réserve  (2)  dont  ne  se  départent  jamais  les 
véritables  savants. 

TROisiÈiTE  CONCLUSION.  —  Pour  Ce  qui  regarde  saint 
Denis  en  particulier,  le  coniesscrai-je?  je  ne  vois  au- 
cune raison  probante  de  lixer  au  T'  siècle  sa  mission 
ù  Lutëce. 


(1)  Sic  M.  Th.  Salinon. 

Il)  VoirBt'iiotl  XIV  «  De  Scrvoriiin  Dei  bealilicalioDe  et  rano- 
iiitaliniie  •,  lit».  IV,  pars  II,  c^p.  47. 


XLIV*  SESSION,   A  SENLIS.  iO 

Inutile  de  faire  observer  de  nouveau  :  I**  que  la  question 
de  saint  Denis  est  double  :  Saint  Denis  de  Paris  doit-il 
être  confondu  avec  saint  Denys  TAréopagite?  Saint  Denis 
de  Paris,  qu'il  soit  l'Aréopagite  ou  non,  a-t-il  été  envoyé 
par  saint  Clément  (I)? 

i*  Que  ce  problème  historique,  qui  a  tellement  irrité 
les  esprits  depuis  Hilduin  jusqu'à  nos  jours,  que  Ton  a 
pa  l'appeler  la  guerre  aréopagitique,  est  abandonné  par 
Rome  aux  jugements  libres  des  hagiographes. 

Tout  en  confessant  que  le  nom  de  saint  Cléitient  se 
rencontre  dans  presque  tous  les  manuscrits  des  actes  dits 
ÊMikeniifuei  de  saint  Denis,  que  Domitien  apparaît  dans 
les  Acia  fabuloia^  que  la  doctrine  de  Taréopagitisme  est 
antérieure  à  Hilduin,  je  comprends  que  plus  d'un  hagio- 
graphe  se  tienne  ici  dans  une  situation  de  défiance.  La 
formule  ■  tradenie  $aneio  Clémente  Pétri  apostoli  succès- 
iorei  n'a-t-elle  point  été  substituée  à  l'expression  plus 
dubitative  c  asuccessoribus  apostolorum  d,  sous  l'influence 
de  la  lettre  apocryphe  de  saint  Clément  à  saint  Jac- 
ques (2?  La  chronologie  :  a  ut  Domitianus...  eum  ad  se 
mpalatium  suum  venirejusserity  d  laquelle  est  une  addi- 
tion aux  actes  de  première  main,  n'est-elle  point  une  con- 
cession à  un  système  (3)?  L'aréopagitismc,  lequel  semble 

.I.Sic  Bède,  Florus,  etc.  —  c  Quos  referunt  a  Clémente 
Hp>  io  Galliam  mi&sos.  •  Rabau  Maur.  —  Saint  Adon  établit  une 
£:»tiDctiou  entre  saint  Denys  de  raréopage  et  saint  Denis  de 
Pïrîs,  et  fait  venir  ce  dernier  au  ui*  siècle. 

.2  Cinq  mss.  de  première  valeur  de  la  vie  de  sainte  Gene- 
virTe,qne  Ton  attribue  au  plus  tard  au  début  du  vi*  siècle,  ne 
rrafpfment  point  la  phrase  Incidcutc  sur  saint  Clément,  que 
1 00  «irprend  dao^  les  autres  mss.  de  ce  iibellus. 

J  Suidas,  Michel  Syncelle,  etc.,  fout  mourir  saint  Denis  sous 
Trajaa-Adrien. 

XUV*  SESSION.  i 


50        G0N6KÈS  ARGHÉOLOGIOUE  DE  FRANGE. 

à  peu  près  iuconnu  en  France  avant  le  ix*  siècle, 
n*e8t-il  point  une  conséquence  nécessaire  des  admirations 
qu'excitèrent,  avec  raison,  les  aréopagitiquesî  La  co-so- 
ciété  de  saint  Denis  avec  des  saints  du  m*  siècle,  saint 
Crépin  et  saint  Crépiuieu,  n*augmente-t-elle  point  les 
obscurités  de  cette  question  (i)? 

(\)  Les  Pères  dn  deuxième  concile  de  Soissons  en  866,  dans 
le  privilège  du  monastère  de  Solignac,  disent  que  saint  Êloi  avait 
fondé  vers  631,  un  monastère  en  rbonneur  des  apètres  Pierre 
et  Paul,  des  martyrs  saint  Denis  et  ses  compagnons  Crêjdn 
et  Crépinien.  •  Innotuit  synode,  qualiler  vir  venerabilis  atqoe 
beatissimus  Eligius  Viromandensis  ecclesiae  episcopos  oœoobioin 
ipsum  in  Limovicino  rure  \)uod  Sollemniacus  vocatur  in  hoDore 
omnipotentis  Dex  et  veneralione  beatorum  apostolomm  Pétri  et 
Pauli  ac  martyrum  Dionysii  et  sociorom  ejus  Crispini  et  Crispi- 
niani » 

Ce  document  (Société  de  saint  Denys,  saint  Crépin  et  saint 
i'.répinien).  gagne  en  importance  si  l'on  tient  compte  de  ces 
deux  faits  : 

\a)  Le  notaire  qui  a  rédigé  le  diplôme  :  «  Innotuit  •  se  rap- 
porte non  pas  à  Topiniou  des  Pères  du  synode,  ce  qu'une  criti- 
que rigoureuse  pourrait  appeler  un  sentiment  noaveaa»  mais  i 
la  pensée  de  saint  Ëloi. 

v^  Co  privilo^e  de  Solignac  est  souscrit  par  Hincmar  qui 
contredit  |»ar  res^v^t  de  rantit]uitô  sa  doctrine  personnelle,  en 
assivîant  saint  Denis  qu'il  croit  être  TAréopagite  i  saint  Crépin 
et  à  saint  Crt^piuion. 

Hilduin  avait  sou(\vunè  que  ses  adversaires  lui  objecteraient: 
«  \i\\\à  otiain  passiones  di>ersi«rum  sanolorum  martyrum  sab 
vanis  in^vralonlMis  intoritvîoruiu  conlineanl  eosdem  cum  hoc 
sauotis^iimo  \ir\>  vDïonysio  bas  [^r*es  adiisse.  » 

-  Opinu»  \|ua*  l>ion\sium  Siivulo  m»  missiim  statuit  longe  ve- 
ri>uiul)or  ao  prv^peniodum  etiani  ivrla  pronunciatnr.  »  Boll., 
S  \îi.  do  S.  |)iou\su^. 


XLIV  SESSION,    A  SENLIS.  51 

OUATRiÈME  CONCLUSION.  —  Saint  Lucien,  Tapôtre  du 
Beauvaisis,  soulève  la  même  querelle  de  dates.  Voici^ 
pour  toucher  seulement  la  question,  les  principaux  argu- 
ments que  les  deux  écoles  contraires  peuvent  mettre  en 
ligne  : 


I. 


L'opinion  que  saint  Lucien  est  venu  au  i"  siècle, 
ihvoque  en  sa  faveur  : 

i^  L'autorité  d'Odon,  évéque  de  Beauvais,  car  je  trouve 
à  peu  près  nulles  (i)  les  raisons  pour  lesquelles  on  veut 
retirer  à  ce  grand  homme  le  panégyrique  qui  a  traversé 
les  siècles  à  l'abri  de  son  nom  ; 

(4)11  importe  de  remarquer  qu*il  existe  deux  principales  ver- 
libiude  la  passion  de  saint  Lucien  :  4oUn  sermon  (A)  que  tout 
conseille  d'attribuer  à  un  moine  beauvaisin  de  la  fin  du  vni<' 
siècle.  S^Un  panégyrique  (B)  que  nous  croyons  devoir,  nonobstant 
les  objections  de  dom  Cellier,  du  chanoine  Delettre  et  de  l'abbé 
Sabatier,  laissera  Odon,  évêque  de  Sauvais (860^81).  Ces  deux 
versions,  si  on  les  étudie  parallèlement ,  offrent  certaines  diffé- 
rences de  récit,  qu'il  importe  de  signaler  et  qui  témoignent  de 
deux  écoles  historiques  opposées.  Par  exemple  : 

La  version  (A)  associe  à  la  même  mission  saint  Lucien,  saint 
Quentin  et  saint  Denys,  place  leur  martyre  sous  Julien  :  c  Cum 
Julianus  impiissimus  Caesar  décréta  principum  accepisset,  erat 
enim  lune  persecutio  generalis  >,  dit  de  saint  Lucien  que  a  a 
Beato  Dyonisio  presbyterii  sumpsil  offîcium,  etc.,  etc. 

La  version  (B)  biffe  le  nom  de  saint  Quentin,  ajoute  au  texte 
primitif  un  long  épisode  sur  saint  Denis,  son  voyage  à  Rome,  sa 
rencontre  avec  saint  Clément,  etc.,  alfirme  que  saint  Denis 
conféra  à  saint  Lucien  la  dignité  épiscopale,  place  leur  martyre 
sous  Domitien  et  Fescennin  Sisinnius,  etc.  etc. 


52       CONGRÈS  ARGHÂOLOGIOUE  DE  FRANGE. 

2*"  L'affirmation  des  Acta  fabulosa  de  saint  Denis  et  des 
hagiographes  grecs  Métrodore,  Méthode  et  Métaphraste 
qui  les  ont  copiés; 

3®  La  co-société  de  saint  Lucien  avec  des  saints  que  l'on 
veut  rattacher  au  i^'  siècle,  saints  Chrysole,  Eugènei 
Marcel,  Piat,  Rieul,  Yon  ; 

V  La  chronique  de  Luitprand^  évéque  de  Tolède,  chro- 
nique, oserai-je  le  dire?  peu  digne  de  l'attention  sérieuse 
des  savants  ; 

5""  Le  sentiment  de  Vincent  de  Beauvais.  Inutile  de 
faire  ici  le  procès  au  Miroir  historial  du  crédule  Jacobin. 
Le  dominicain  Melchior  Cano,  parlant  Je  Vincent  de 
Beauvais  et  d'Antonin  de  Florence,  ne  dit-il  pas  :  ^Apud 
criticos  graves  atque  severos  auctoritate  carent  (i)  ?  • 

6®  Le  nouveau  martyrologe  romain  de  Baronius  (qui 
supposait  deux  saints  Lucien)  (2),  et  le  propre  du  diocèse 
de  Beauvais. 


(0  l)e  locis  Ibeologicis,  lib.  XI,  cap.  vi. 

(t)  Cette  dualité  de  saint  Lucien  est  acceptée  par  les  abbés 
Corblet  et  Sabatier.  Louvet  avait  déjà  indiqué  cette  façon  de  se 
tirer  d'embarras  a  qui  a  donné  lieu  à  plusieurs,  pensant  conci- 
lier les  auteurs,  do  dire,  qu'il  y  a  deux  martyrs  en  Bauvaisis. 
dénommés  du  nom  de  saint  Lucian,  dont  le  premier  estoit  con- 
temporanée  à  saint  Denis  qui  souffrit  la  mort  sous  Domitian; 
l'autre  estoit  conipaguon  de  saint  Quentin,  de  saint  Crespin  et 
de  saint  Crespi nia n  que  Ton  dit  avoir  souffert  le  martyre  sous 
Dioclêtian  i.  [Histoire  de  la  ville  et  cité  de  Beauvais, 
MDCXIII.) 


HLIY*  SESSION,    A  SENLIS.  53 


II. 


Une  opinion  contraire  fait  venir  saint  Lucien  au 
in*  siècle.  Les  tenants  de  cette  vieille  thèse  objectent  : 

I*  Des  raisons  négatives,  comme  la  ressemblance  qui 
«uste  entre  Métrodore  et  Odon  (i),  le  peu  de  fonds  qu'il 
but  faire  des  sources  grecques,  etc. 

2*  L'autorité,  plus  grande  à  mon  avis  que  celle  d'Odon, 
Taotorité  du  moine  anonyme,  lequel  associe  à  saint  Lu- 
cieo  6t'à  saint  Denis  saint  Quentin,  parle  de  Julien 
César,  etc. 

3*  Le  mutisme  des  Actes  authentiques  de  saint  Denis 
sur  saint  Clément,  Domitien  et  saint  Lucien. 

4^  La  oo-société  de  saint  Lucien  avec  des  saints  qu'il 
faut  rattacher  au  iti«  siècle,  sainte  Benoite  d'Origny,  Cré- 
pin  et  Grépinien,  Fuscien  et  Victoric,  Quentin  (2),  etc. 

(Il  «  La  vie  de  saint  Lucien,  par  Odon  fulescrite  vroy  sembla- 
biement  sur  la  vie  de  saint  Denys,  par  Métliodius  (Métrodore), 
ao  temps  d*Anastase  et  de  Méthodiiis,  qui  est  droictemenl  le 

t^mps  où  les  Grecs  firent  beaucoup  de  fourbes  en  Occident 

Sar  ceue  opinion  que  saint  Denys  est  rArcopagite,  on  pourroit 
bien  avoir  fait  ou  corrigé  quelques  martyrologes  et  anciennes 
Mes  de  nos  saints...  «(Loisel  :  Mémoires  des  Eveschés  et  Etes- 
pies  de  Beaurais,  MDCVIL  pag.  76  et  77.) 

\i)  Tous  les  mfs.  de  saint  Queniin  lui  donnent  pour  compa- 
snoQ  saint  Lucien  de  Beauvais.  Celte  co-société  est  un  fait  qu*on 
M  pent  nier  sans  taxer  d'erreur  tous  les  monuments  hagiogra- 
phi<|ues.  Donc,  ou  bien  il  y  a  deux  saints  Lucien,  ce  qui  n'est 
•|u  une  hypothèse  imaginée  p(»ur  le  besoin  de  la  c^uso  ;  ou  bien 
^4uit  Lucien  n'est  |>as  le  compagnon  de  salut  Denys;  ou  bien 
Mioi  Quentin,  saint  Lucien,  saint  Denis  sont  venus  au  iii^  siècle. 
Il  y  a  longtemps  que  le  problème  est  ainsi  |»os<\  Le  \  i  jan- 


5i  COSGUIS  ABCHÉOLOGIQUE  DE  FEA5CB. 

5*  Le  sentiment  de  saint  Ouen.  de  Sigebert  '1),  de  saint 
Hélinand,  moine  de  Froidmont,  etc.  etc.,  lesquels  disent 
de  saint  Lucien  :  Coliega  $amcti  Quiniini. 

6"  Le  silence  que  gardent  les  plus  anciens  martyro- 
loges. Tantiphonaire  du  Mont  Renaud,  etc.,  sur  la  oonfra- 
temité  de  saint  Lucien  avec  saint  Denys  TAréopagite  (i), 
etc.  etc. 

Quoi  qu'il  en  soit  de  ce  secret  hagiographique,  dont 
probablement  nous  ne  saurons  qu'au  ciel  le  dernier  mot,  — 
«  de  Dionysio  et  Luciano,  »  disent  les  BoUandistes,  •  illud 

vier  903,  Raimbert,  êvèque  de  Novod.  présidait  •  à  une  tamu- 
latîon  des  s4iDts  martyrs  Quentin  et  Victoric  et  da  cooresseor 
Cassien  >  dans  l'église  de  Saint-Qoeotin.  Or.  le  discours  qui  nous 
a  été  conservé  sur  cet  évéDemeot.  •  dans  un  très-aDcieo  registre 
de  cette  coll^iale.  ^  rapporte  que  de  Roaie  «^  on  envoya  soos 
I^ixktien  et  Maximien.  Quentin.  Lucien.  Crépin,  CrépiDleo, 
Fuscien.  Viclorio.  Rnfin.  Valère.  Marcel.  Eugène.  Pial,  Rienli; 
ii  ajoute  :  la  plupart  des  éi'rivains  tiennent  que  saint  Denys  rAréo- 
paçite  arriva  ave. ces  saints  missionnaires:  mais  la  chronologie 
re[«ousse  ce  sentiment  (temporom  séries  refellit;  et  la  raison  de 
la  vérité  ne  permet  pas  qu*on  le  croie  nec  ratio  veritatis  credi 
sinit  .  En  effet .  ce  précieux  confesseur  du  Seigneur  a  atteint 
ia  (lalme  du  mart\Teau  temps  de  Domitien;  les  autres,  ao  con- 
traire. KDt  entres  dans  les  Gaules  à  l'époque  de  Dioclétien  et 
deMaximien.  Saint  Quentin  lixa  son  séjour  i  Amiens.  Le  bien- 
heureux Lucien  gagna  Beau  vais.  etc.  etc.  •  Hemerœus.  Augusta 
Viromanduorum  vindicata.) 

(  Sigebert  ratontant.sous  la  datede  1074.  la  fête  de  la  déd\- 
rii?<r  de  rëzlise  abbatiale  de  Saint-Quentin,  prés  Bean^ais.  dit  : 
•  Hic  er£o  sanctorum  sonorutn  Qnintini  et  Luciani  corpora 
^ibi  oSviaoi  faria  suui.  » 

(i  ÏJA  martyrologes  de  Florns.  de  Raban.  etc..  se  sont  inspi- 
ra avw  peu  de  critique  des  deux  >ies  de  saint  Lucien. 


XLIY^  SESSION,   A  SEMLIS.  55 

unieum  nvnc  siatuimus^  non  liquere^i>  — que  saint  Lucien, 
évéque  de  Beauvais,  nous  obtienne  d'imiter  les  ardeurs  de 
son  zèle  ! 

CINQUIÈME  CONCLUSION.  —  Reste  saint  Rieul,  dont  les 
mérites  sont  le  plus  sûr  palladium  de  notre  vieille  cité, 
dont  la  mort  sans  violence  attestait  déjà,  disent  les  anti- 
ques traditions,  la  douceur  qui  fait  le  caractère  particulier 
de  ses  habitants.  Vous  devinez  que  les  interrogations  que 
l'histoire  pose  à  propos  de  saint  Deais  et  de  saint  Lucien, 
elle  les  répète  ici  nécessairement.  Quand  saint  Rieul  a-t-il 
évangelisé  le  Pagus  silvanectensis?  M.  l'abbé  Blond,  dans 
une  notice  qui  témoigne  en  peu  de  pages  d'une  grande 
érudition  et  d'un  jugement  très-sûr,  M.  l'abbé  Blond  a  déjà 
posé  le  problème,   indiqué  les  règles  de  critique  qu'il 
importe  de  suivre  pour   l'éclairer,  pesé   la  valeur  des 
documents  hagiographiques  qui  le  contiennent  et  con- 
damné à  bon  droit  les   excès    de    certaines   méthodes. 
Son  Mémoire  sur  la  date  de  r  apostolat  de  S,  Rieul  {\)^  bien 
qu'il  soit  peut-être  trop  respectueux  pour  la  légende,  ne  va 
pas  cependant  jusqu'à  lui  donner  une  valeur  chronolo- 
gique incontestable.  Je  crois  devoir,  en  cela,  imiter  cet 
excellent  guide. 


I. 


L'opinion  qui  attache  saint  Rieul  à  une  mission  du 
I"  siècle^  allègue  :  les  anciennes  vies  manuscrites  de 
saint  Rieul,  les  liturgies  anciennes  de  Senlis,  d'Arles  et 
de  Saint-Denis,  les  diptyques  d'Arles  et  surtout  l'argu- 
ment (le  prescription. 

1}  Extrait  du  Courrier  de  l'Oise,  Mars  4863. 


56       G0N6EÂS  ARGHÉOLOGIOUE  DB  FRANGE. 

Anciennes  vies  maniucriies  de  saini  JtieuL 

Les  vies  de  saint  Rieui  sont  au  nombre  de  trois  : 

Une  première  vie,  que  la  critique  la  plus  autorisée  attri- 
boe  au  ix*  siècle,  d'après  les  manuscrits  de  Saint-Ouen. 
(BoUand.  XXX,  martii.)  L'on  pourra  voir  dans  lemémoire 
de  l'abbé  Blond,  une  analyse  de  ce  document  hagiogra- 
phique et  de  ceux  qui  suivent. 

Une  deuxième  vie,  du  x*  siècle,  d'après  les  manuscrits 
plus  ou  moins  complets  de  Saint-Cîermain-des-Prés,  de 
Ch&lis  (4),  de  Longpont,  deRougeval,  d'Utrecht,  etc.  etc. 
(Bolland.  ibid.).  C'est  la  vie  que  Gui,  abbé  de  Saint- 
Denys  (â),  Vincent  de  Bt^uvais,  et  autres  ont  reproduite 
et  analysée. 

Une  troisième  vie,  d'après  un  manuscrit  d'Arles,  du 
milieu  du  xir  siècle. 

a  On  regrette,  dit  Carlier,  une  ancienne  vie  authen- 
tique de  saint  Hieul,  dont  on  n'a  que  des  fragments,  par 
exemple.  aOppida,  rura,  casaSy  vicos,  caitella  pera- 
grans,  •  et  dont  le  manuscrit  de  Saint-Omer  dit  :  a  ut  qui- 
dam metrocanorius  in  suo  pompavii  pcemate.  » 

Ces  légendes  sont  d'accord  à  placer  l'épiscopat  de  saint 
Rieul  à  la  fin  du  V^  siècle  ou  au  début  du  il''  à  l'abri  du 
pape  sainl  Clément  et  de  saint  Denis.  Quelle  est  leur  auto- 
rité chronologique?  L'ancienne  liturgie  senlisienne,  le  cré- 

(4)  AfTorly.  (fiibliothèque  municipale  de  Senlis).  IV,  438 
«  Vita  sancti  Regxdi  episcopi  Silraneciensis  ex  manuscripto 
CarolHoci  desumpta.  »  Elle  roronience  par  ces  mots  :  t  Postsa- 
cratissimnm  Dominica;  ascensionis  venerandumque  Iriumphum, 
ciim  ad  doclarandam  rhrisliaiiir  rcll^ionis  |K'rdiversas  terrariim 
parlos  saiirli  Aposloli  dispiTsi  ruisMMil...  »  ot  Unit  par  le  miracle 
u|)éréeii  la  personne  de  Judith,  (ille  de(!lharles  le  Chauve. 

12]  49.')6  et  Jaulnay,  Histoire  des  èvêques  de  Senlis,  p.  373. 


IWf*  SESSION,   ▲  SENLIS.  57 

dale  Jaulnay  (I),  lé  nouveau  bréviaire  du  diocèse  la  recon- 
naisseot.  Elle  trouve  au  contraire  des  hostilités  impi- 
toyables dans  Carlier,  Deslions,  Afforty  (2),  etc.  etc. 
ff  Les  légendes,  dit  Carlier,  rapportées  dans  la  collection 
des  BoUandistes,  sont  des  romans  faits  à  plaisir  par  des 
écrivains  mercenaires  pour  être  débitées  pendant  la  fête 
de  la  dédicace  de  l'église  bâtie  à  Senlis  en  l'honneur  de 
saint  Rieul  par  un  effet  de  la  piété  du  roy  Robert.  »  N*est- 
ce  point  excessif? 

Pour  éclairer  votre  jugement,  Messieurs,  voici  quelques 
traits  de  la  légende  de  Saint-Rieul,.  traduits  mot  à  mot, 
du  manuscrit  de  Saint-Ouen  :  a  Saint  Rieul,  associé  à  la 
compagnie  des  vénérables  collègues  Denys,  Rustique  et 
Eleuthère  et  autres,  dont  le  très-saint  successeur  du  bien- 
heureux Pierre,  Clément,  embrassant  volontiers  et  joyeu- 
sement rhonorable  union,  etc..  (Rien  d'Arles).  En 
semant  avec  fidélité  la  semence  de  la  divine  parole,  etc.. 
Par  quoi  il  arriva.  Dieu  guidant,  que  le  très  évéque  Rieul 
s'était  hâté  vers  les  murs  des  Silvanectes...  C'est  pourquoi 

(1)  DeslyoDs,  parlant  de  l'ouvrage  de  Jaulnay,  porte  ce  juge- 
ment :  t  Quae  vero  pro  historici  niunere  contra  eum  su  m  die- 
turus,  dicta  velim  absque  ullo  prejudicio  in  alias  hominis 
virtutes,  pielatem  scilicet,  religionem  vitxque  omnino  eccle- 
sîastics  modestiam.  Vir  erat  inter  nos  simplex  et  rectus  ac 
limens  Deum.  Sed  si  laudandi  mores  quos  habuil  optimos  et 
proprios,  exarandi  sunt  potius  errores  quos  passus  est  et  fura- 
tus  aliènes.  »  (Deslyons,  première  préface,  apud  Aff.  5704). 

(2)  ÂfTorty,  après  avoir  copié  cette  phrase  du  t^  tome  des 
Réflexions  sur  les  règles  et  l'usage  de  la  critique^  p.  1 06  :  «  On 
a  banni  du  bréviaire  de  Paris  plusieurs  compositions  où  il  y 
avait  des  choses  fausses  ou  choquantes,  ou  supposées,  ou  alté- 
n^,  >  ajoute  :  «  On  peut  mettre  de  ce  nombre  l'histoire  de  saint 
Rieole.  >  Âfi.,  III,  3^5.  > 


58  CONGRÈS  ARGHÈOLOGIQUB  DK  FEAIfCE. 

le  bienheureux  aréopagiie  Denys,  d'abord  couronné  pa: 
le  très-invincible  apôtre  Paul  de  l'infule  blanche  du  pon 
tificat,  puis  destiné  par  saint  Clément  aux  Gaules,  rési- 
dant  à  Paris,  dirigeant  volontiers  le  saint  et  glorieu} 
Rieul,  décoré  du  même  honneur  du  souverain  présulatai 
castrum  de  Senlis,  envoya  par  contre  (vero)  Lucien  et  sa 
compagnons,  Lucien,  embelli  de  l'ordre  sacerdotal  à  Beau< 
vais...  Le  peuple  de  Beauvais...  supplia.. •  Rieul  d'élevei 
son  athlète  à  l'autorité  épiscopale...  Rieul  n'hésita  pas  â 
aller  (vers  saint  Lucien)  d'un  pas  rapide...  Le  susdit 
Lucien  avec  Lucius  s'appliquait  à  mener  dans  le  servia 
de  Dieu  (les  Bellovaques).  »  Saint  Lucien  était  mort  dans 
une  (sédition  de  grands).  Rieul  l'apprend  à  ville  Canaan 
(Canneville,  près  de  l'Oise).  Ajoutez,  si  vous  voulez,  que 
saint  Rieul  avait  été  baptisé  par  saint  Jean  l'Évangéliste, 
détail  que  Demonchy  et  Jaulnay  ont  recueilli  certes  avec 
joie  après  le  manuscrit  de  saint  Germain  des  Prés,  Vin- 
cent de  Beauvais  et  un  martyrologe  bénédictin  de  Saint- 
Nicolas,  près  Senlis,  dont  Afforty  rapporte  :  a  Extrait  d'un 
livre  ancien,  relié  en  parchemin  sur  ais  de  bois  où  se 
trouve  au  haut  de  la  première  page  d'une  écriture  mo- 
derne :  a  Martyrologium  regulœ  S^^  Benedicii  et  necro- 
logium  quœ  leyebaniur  quotidie  post  primam  in  capUulo 
S**  Nîcolai.  9  Au  martyologe  se  trouve  :  «  IX*  Kal. 
maii,  apud  Silvaneciis  urbem,  depositio  S^^  litguli,  ditei" 
puli  5*'  Johannis  Evangelistx  qui  cum  Dianyiio  in  GallioM 
i^eniens  predicie  urbis  ordinatus  Fpiscopus,  in  eodem  loeo 
plurimis  virtutum  signis  venerandus  usgue  hodie  refulgei 
(Atr.  X,  573).  »  Complétez  cclto  série  d'additions  et  de 
fourrures,  vous  arriverez  à  lu  vie  do  saint  Rieul  que  le 
bon  Jaulnay  a  si  amoureusement  traduite  (voir  Vincent 
de  Beauvais],  embellie  et  commentée,  et  dont  voici  les 
chapitres  :  ch.  I.  Saint  Rieul ,  né  «  en  la  ville  d'Ar- 


XUY*  SESSION,   A  8ENLIS.  59 

giYe,  située  près  d'Athènes,  bien  qu'aucuns  tiennent 
qa'il  était  natif  Hycène,  près  d'Argive  »  courut  en  Judée 
«Dtendre  saint  Jean  l'Évangéliste,  reçut  de  ses  mains  le 
baptême,  revint  dans  son  pays  où,  trouvant  ses  parents 
morts,  il  vendit  ses  biens.  —  Ch.  II.  Saint  Rieul,  re- 
toarnant  vers  saint  Jean,  est  consacré  au  Seigneur  par 
la  tonsure  cléricale,  et  recueille  de  la  bouche  de  son 
maître  l'affirmation  prophétique  qu'il  ne  mourrait  point 
martyr.  —  Gh.  lU.  Saint  Rieul  avait  quarante -deux 
ans  lors  de  l'exil  du  grand  disciple  à  Pathmos.  — 
Ch.  lY.  Saint  Rieul  visite  saint  Denys  à  Athènes. 
Tous  deux  avec  Rustique  et  Éleuthère  se  rendent  à 
Ephèse  pour  saluer  Jean  qui  vient  de  retrouver  sa 
liberté ,  puis  à  Rome  où  saint  Clément  occupe  le 
siège  de  Pierre.  —  Ch.  V.  Saint  Rieul  est  ordonné 
prêtre  par  saint  Clément,  réunit  les  membres  de  la 
Mission  Gauloise,  reçoit  pour  chef  saint  Denys  et  est 
consacré  évéque  par  le  même  saint  Clément,  qui  transmet 
à  Denys  Rieul  et  la  puissance  que  lui-même  a  reçue  du 
Christ.  —  Ch.  VI.  Saint-Rieul  est  laissé  à  Arles  par  saint 
Denys,  qui  lui  demande  d'aller,  sitôt  sa  mort,  au  lieu  de 
son  martyre  et  de  là  à  Sentis.  Temple  de  Mars  renversé 
par  saint  Denys.  (Vincent  de  Beauvais).  Mort  de  saint 
Denys  en  119.  —  Ch.  VII.  Missions  de  saint  Saturnin, 
de  saint  Eugène,  de  saint  Martial.  —  Ch.  VIII.  Saint  Rieul 
aune  vision  du  martyre  de  saint  Denys.  —  Ch.  IX.  Saint 
Rieul,  laissant  à  Arles  saint  Félix  ou  Félicissime,  va  à 
Paris  où  la  sédition  n'est  pas  encore  calmée,  loge  chez 
Catulla  qu'il  convertit,  voit  le  pays  débarrassé  des  fureurs 
de  c  Fe$senniu8ii,  qui  court  à  Rome  à  la  première  nou- 
velle de  la  mort  de  l'empereur,  est  o  nonce  »  ou  plutôt 
«deuxième  évêque  de  Paris  »  ,  dédie  la  chapelle  Saint- 
ûôiys  l'Estrées,  consacre  Mallon  (Mellon]  à  sa  place  et 


60  GONGABS  ARGHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

gagne  Senlis  par  Louvres  (Lavitra.  Vincent  de  Beauv.)  — 
Ch.  X.  Saint  Rieul  à  Louvres  :  statue  de  Mercure  ren- 
versée, église  bâtie  sous  le  vocable  de  la  Trinité  et  de  Notre- 
Dame.  —  Senlis  :  Gilice  ou  Calice  (Callicie.  Vincebt  de 
Beauv.)  parente  de  Catulle,  reçoit  saint  Rieul;  âne  d'Ana- 
tolius  d'Arles.  —  Ch.  XI,  XII,  XIII.  Prodiges  à  Senlis: 
Délivrance  des  prisonniers,  conversion  du  préfet  Quinti- 
lien  et  de  tout  le  peuple;  bapténae  public;  cimetière; 
église  bâtie,  etc..  —  Ch.  XIV.  Fontaine  miraculeuse  for- 
mée de  ses  larmes.  —  Ch.  XV.  Saint  Rieul  arrive  trop 
tard  pour  sacrer  saint  Lucien.  —  Ch.  XVÏ.  Grenouilles 
de  Rully  (à  Vicus  Juliacus,  Vincent  de  Heauv.)  Saint  Rieul 
meurt  le  23  avril  161,  cinquante  et  un  ans  après  saint 
Jean,  quarante  après  saint  Denys.  Il  avait  cent  neuf  ans. 
Sépulture  brillante  en  sa  cathédrale,  «  à  l'Orient  de  U 
ville,  »  dit  Vincent  de  Beauv.,  dans  l'église  des  Saints- 
Apôtres  Pierre  et  Paul.  Est-il  nécessaire  de  faire  remar- 
quer combien  de  ces  traits  de  la  vie  de  saint  Rieul  sup- 
portent difficilement  une  critique  un  peu  sévère? 

V  Saint  Rieul  m)  à  Argive  ou  à  Mycènes!  Le  nom  de 
saint  Rieul  ne  trahit  guère  une  origine  hellénique.  J^ 
suis  porté  à  croire  qu'il  exista  une  certaine  mode  de  faire 
venir  de  Grèce  nos  premiers  missionnaires.  Voir  légende^ 
des  SS.  Autonin,  Sanctin,  Nicaise  (né  à  Athènes),  etc.  clr. 

2°  Ses  relations  avec  saint  Jean  ne  sont-elles  point  nue 
des  manifestations  de  cet  amour  de  clocher  qui  voulait 
illustrer  chaque  patron,  en  imaginant  entre  lui  et  quel* 
ques  héros  de  Tévangiie  des  liens  d'intimité  (I)? 

3°  Saint  Rieul,  selon  la  légende,  vint  avec  saint 
Denys,  saint  Eugène  (Marcel)  et  autres,  que  saint  Clément 
envoya  dans  nos  pays.  Pour  saint  Denys,  l'on  saitlesopi- 

(1)  Mission  aj)ostolique;  —  baptême  donné  par  saint  Pierrp; 


XLlV  SESSION,   A  SENUS.  61 

lions   diverses  qui  séparent  et  sépareront  toujours  les 

hag:iograph^s.  Pour  saint  Eugène  (Marcel]  qui,  d'après  les 

manuscrits,  la  chronique  plus  que  singulière  de  Flavius- 

Dexter,  le  diptychon  Toletanum  de  Jérôme  de  la  Hi- 

gnera,  etc.,  fut  évéque  d'Arles,  de  Toulouse,  de  Tolède, 

panégyriste  de  saint  Denys,  son  maître,  et  martyr  à 

Deuil,  dans  le  Parisis,  qui  ne  sait  combien  sa  légende 

s'est  inspirée  comme  beaucoup  d'autres,  de  la  légende  de 

ttint  Denys.  —  a  Les  autres  »  quels  sont-ils? 

4*  a  Quos  Clemens  amplectens,  etc.  »  dont  l'idée  et 
quelquefois  le  mot  à  mot  se  rencontrent  dans  les  passions 
ie saint  Denys,  de  saint  Lucien,  de  saint  Julien,  etc.  etc.. 
ne  sent- il  pas  l'influence  de  l'épître  supposée  de  saint 
Jacques  à  saint  Clément,  laquelle,  avec  les  fausses  décré* 
taies,  fut  une  des  grandes  duperies  du  ix''  siècle? 

5*  L'expression  a  divini  verbi  semina  »  décèle  pareille- 
ment une  imitation  évidente  des  vies  de  saint  Denys. 

6*  L'épisode  très- étendu  de  saint  Denys  l'Aréopagite, 
%e  de  saint  Paul,  évéque  d'Athènes,  visiteur  de  saint 
Clément,  etc.,  n'est-il  point  une  addition  faite  sous  l'in- 
âueuce  des  opinions  aréopagitiques. 

7' La  parenté  de  Gallicia  avec  Gatulla  me  trouve  un  peu 
iocrédule. 

8*  Certaines  légendes  de  saint  Rieul  amoindrissent  saint 
Lucien  au  profit  de  l'apôtre  de  Senlis.  Saint  Lucien, 
qui  ne  parait  aucunement  dans  les  gestes  de  saint  Rieul 
que  Vincent  de  Beauvais  nous  a  conservés,  est  intro- 
duit en  d'autres  versions  comme  un  disciple  subalterne. 
9*  Pourquoi  la  légende  de  saint  Rieul  parle-t-elle  simul- 
tanément d'un  Lucianus  et  d'un  Lucius?  L'hypothèse  très- 

-  bâton  ressuscitant  de  saint  Pierre  entre  les  mains  de  saint 
^ront,  de  saint  Euchaire,  de  saint  Martial,  etc. 


tu  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIOrS  VE  FRANCE. 


II. 


Une  seconde  opinion  amène  saint  Rieul  dans  le  pays 
de  Seniis  à  la  fin  du  m*  siècie  ou  même  au  début  du 
IT*.  Sic  Deslyons  dont  je  n*ai  point  l'intention ,  Dieu 
m'en  garde!  de  me  constituer  le  champion,  qui  fait 
de  saint  Rieul  l'un  des  douie  prédicateurs  de  la  Gaule- 
Belgique;  Tabbé  du  RueU  un  chanoine  de  Seniis,  auteur 
de  remarques  sur  les  évéques  de  Sentis  (Aff.  X  5728),  le 
chantre  Rouyer  (1766),  le  bréviaire  que  M.  de  Roque- 
laure  édita  en  1176,  etc.^  qui  placent  sa  mort  en  280; 
Broisse  qui  préfère  la  date  de  290;  Carlier,  et  à  sa  suite 
M.  Vatin,  qui  reculent  ce  bienheureux  trépas  jusqu'en  295. 
Selon  ces  derniers,  saint  Rieul  aurait  vécu  sous  quelqu'un 
des  successeurs  de  Maximilien  Hercule  -;305)  ;  à  quelle 
époque  précise?  «  On  ne  saurait  le  dire.  »  Le  martyrologe 
d'Csuard  se  contente  de  cette  indication  très -générale: 
«  Apud  castnim  Silvanectensium  depositio  sancti  R^:uli 
qui  et  confessoris.  •  «  Les  empereurs*  »  dit  Carlier,  cité 
par  Afforty,  t.  XI,  page  22,  «  qui  succédèrent  à  Maxi- 
mien  Hercule  confièrent  le  gouvernement  des  Gaules  à 
des  préfets  moins  animés  amtre  les  chrétiens  que  Rictio- 
vare.  Saint  RieuK  qui  vécut  sous  ces  empereurs,  profita 
de  leurs  sentiments  pacifiques,  etc..  •  M.  Graves  fixe  le 
«  dies  natalis  •  de  saint  Rieul  à  Tan  312. 

Voici  les  raisons  négatives  et  positives  que  l'on  allègue 
en  ia\eur  de  cette  chronologie. 

1*  Le  peu  de  crédit  des  légendes  que  j*ai  indiquées  et 
dont  la  source  première  semble  à  Deslyons  ^i  ,  le  Gélestin 

«    Arrortv  X.  57U. 


XLIY'  SESSION,   À  SENLIS.  G5 

d'Irlande,  dont  il  est  parlé  dans  le  maanscrit  d'Arles. 
•  Les  partisans  de  ces  dernières  opinions,  o  disent  les  Bol* 
landistes,  a  traitent  à  peu  près  les  légendes  de  saint  Rieul 
comme  de  pieux  romans,  n 

^  Le  silence  sur  ce  point,  de  certaines  sources  hagio- 
graphiques importantes.  Le  martyrologe  de  saint  Etienne 
d'Âuxerre  annonce  seulement  :  a  Saint  Rieul,  évoque  de 
SeDhs  B  ;  le  martyrologe  d'Arras  :  a  Depositio  S.  Reguli, 
episcopi  et  confessoris  a  ;  les  manuscrits  de  S.  Martin  de 
Toumay  et  de  Lessies  :  o  Silvanectis  depositio  S.  Reguli 
episcopi  et  confessoris  (i)  o;  Bède  et  Adon  :  a  Apud  cas- 
trum  Silvanectense  depositio  S.  Reguli  ejusdem  urbis 
episcopi  »  ou  d  Apud  castrum...  episcopi  et  confessoris 
primi  civitatis  ipsius  »,  ou  a  In  Francia  civitate  Silva* 
nectisS.  Reguli  episcopi  et  confessoris  d,  ou  autres  for- 
mules semblables. 

Les  éditions  les  plus  pures  d'Usuard  ne  sont  pas  plus 
explicites  :  a  Kalendas  aprilis  apud  castrum  silvaneclen- 
sium  depositio  S.  Reguli  episcopi  et  confessoris.  d  —  Le 
martyrologe  de  Senlis,  lequel  fait  mention  de  la  mort  de 
saint  Rieul  n'en  marque  ni  le  jour,  ni  l'année;  on  y  lit 
seulement:  a  Beati  Reguli, peractaprsedicatione,sanctitate 
etmiraculis  clarus...inipso  territorio  sanctoquievit  fine.» 
Nota. — Il  faut,  pour  être  exact,  avouer  qu'un  martyro- 
loge ancien  de  saint  Rieul  contenait  :  a  IX'^  Calendas  maii 
apud  Silvanecti  civitatem  depositio  sanctissimi  Reguli 
episcopi  et  confessoris  quem  S.  Glemens  pontifîcâlis  ordinis 
gratia  consecratum  cum  beato  Dionysio  direxit  in  Gallias 
peractaque  prœdicatione  in  ipso  territorio  sancto  quievit 
fine  j>,  ce  qui  sent  l'interpolation. 
3*  Les  contradictions  que  cette  chronologie  rencontre 

(1)  Voir  Aff.  IV,  4920,  etc. 

XLIV*  SESSION.  5 


60       CONGRÈS  ABCHÉOLOOIQUE  DE  FRANCE. 

dans  plus  d'un  monument  important,  comme  les  vies 
des  saints  Fuscien,  Yictoric  et  Gentien,  telles  qu'elles  sont 
rapportées  par  du  Bosquet,  par  les  anciens  lectionnaires  de 
Senlis,  etc.  (AfF.  X,  5725),  —  comme  les  actes  de  saint 
Quentin,  etc.,  lesquels  font  de  saint  Rieul  un  confempo- 
rain  a  de  cette  bande  de  martyrs  divers  qui  est  venue 
sous  Dioclétien  sanctifier  notre  sol  ».  (Boll.) 

4^  Le  soupçon  d'une  confusion  entre  deux  Rieul,  Tan, 
évéque  d'Arles;  l'autre,  évéque  de  Senlis.  Notre  saint 
Rieul  fut-il  évéque  d'Arles?  la  légende  de  saint  Tau- 
rin (I)  Taffirme  ;  le  nouveau  martyrologe  romain  le  dit  ; 
la  vie  de  saint  Rieul,  d'après  les  manuscrits  de  saint  Ouen 
et  les  matyrologes  supra  indiqués  se  taisent  sur  ce  point. 

t>  a  La  liberté ,  t  dit  Carlier,  a  avec  laquelle  saint 
Rieul  a  exercé  son  zèle,  confirme  déplus  en  plus  le  senti- 
ment qui  le  fait  vivre  après  les  persécutions  de  Dioclétien 
et  de  Maximien.  On  peut  croire  qu'il  a  rempli  sa  mission 
sous  Constance  Chlore.  »  Qu'on  lise  plutôt  ces  détails  de 
sa  légende  dans  Vincent  de  Beauvais,  lequel,  dit  Des- 
lyons  (2) ,  est  d'accord  mot  à  mot,  avec  les  légendes  de 
Notre-Dame  de  Senlis  :  a  Saint  Rieuiarrive  à  Senlis.  L'âne 
d'Anatolius  marque  le  sol  du  signe  de  la  croix.  Conver- 
sion de  beaucoup  de  ceux  qui  étaient  là.  Colère  des  prêtres 


(4)  La  légende  de  saint  Taurin  (M  août),  rapporte  entre  autres 
choses  que  sainl  Denis  étant  à  Arles,  y  laissa  saint  Rieul  et  envoya 
Taurin  à  Ëvreux;  que  l'apôtre  de  Paris  mourut  âgé  de  90  ans, 
sur  les  derniers  jours  de  Domiticn;  que  saint  Taurin  opéra  des 
miracles  sans  nombre;  qu'il  convertit  le  préfet  Licinius,  etc. 

D'après  des  traditions  locales,  S.  Taurin  aurait  été  envoyé 
par  saint  Pierre  ;  d'après  le  martyrologe  romain,  consacré  par 
saint  Clément. 

(2)  AffortyX,5716. 


JLIY*  SESSION,   A  SENUS.  67 

Aei  idoles.  Quiotilien  excité  par  eux.  Prison.  Délivrance. 

Apparition  à  Quiutilicn.  Quintilien  et  toute  la  ville  béuis- 

loit  le  Christ.  Jeûne  de  trois  joues.  Dédicace  en  église  d'un 

temple  païen.  Autel  de  la  Vierge.  Bapléme  du  peuple  (1). 

iCam  autem  ordinatis  ecclesiasticis  rébus,  ecclesiis  con- 

gruLS  in  locis  per  vicos  sdificatis  et  pastorali  soUicitu- 

jine  parochiam  ex  more  peragraret  ut  si  in  officiis  divi- 

oiset  ecclesiasticis  cultibus  aliquid  negligentius  fieret, 

fidelis  Christi  cultor  cognosceret,  coutigit  ut  quadam  die 

advicum  Juliacum...  non  modicam  christicolœ  plebis 

iovcnerit  multitudinem...  catbedram  pontifîcalem  extra 

eodoiam  sub  dio  parari  pnecepit...  »  Suit  le  miracle  des 

gRoouilles. 

11  est  important  de  remarquer  qu'il  est  arrivé  plus 
d'une  fois  que  des  panégyristes  maladroits  ont  donné  à 
ia  actes  très-anciens  une  tournure  plus  moderne  et  que, 
ptr  conséquent,  une  critique  très-prudente  ne  doit  pas 
engérer  la  valeur  de  tel  ou  tel  détail  de  mœurs. 

8*  Les  partisans  de  l'école  qui  fait  venir  saint  Rieul  au 
01*  siècle,  mettent  encore  en  ligne  le  catalogue  très-court 
des  premiers  évéques  de  l'église  de  Senlis.  Voici  ce  cata- 
logue, d'après  une  liste  manuscrite  que  Ton  rencontre 
lor  la  marge  d'un  sacramentaire  de  saint  Grégoire,  acheté 
far  l'évéque  Hadebert,  entre  871-897  (2). 

Regulus,  Jogundus, 

NiCKXCS,  Protritus, 

IIahsuetus,  Modestus, 

Vetustus,  Levangius. 
Takitus, 

I   AlfoTty,  X,  5744. 

<î  Sditt  Antiqua  et  xelecta  ecclesix  Sylianectensis  monu- 
■ma,  etc.,  par  Jean.  Deslyons,  Alforly,  X,  5707. 


68  CONGRÈS  ▲EGIIKOLOQIQUIS  DE  FEAKCfi. 

qui  fut  au  premier  concile  d'Orléans  en  S06-507 
plutôt  511.  Cette  brièveté  de  catalogue  est  un  arf(umc 
de  peu  de  valeur.  Le  catalogue  est-il  complet  ?  rien  ne 
démontre.  Si  après  le  tu*  siècle  les  noms  d'Alo,  de  sai 
Amand,  de  Gontbcrt  et  d'Yves  P'  sont  omis,  semil 
extraordinaire  que  l'on  eût  fait  quelque  oubli  pour  i 
temps  plus  reculés?  Puis  le  catalogue  fAt-il  complet, 
pourrait -on,  sans  manquer  aux  règles  d'une  critiq 
sérieuse,  supposer  des  vacances,  des  évèques  régio 
naires?... 

Cette  seconde  opinion,  qui  est  la  nôtre,  a-t-elle  le  dn 
de  s*a[iirmor  avec  un  caractère  d'invincibilité  tel  qu'el 
puisse  taxer  d'erreur  très-certaine  le  sentiment  adverse? 
crois  pour  ma  part  qu'il  serait  excessif  de  l'affirmer. 

Bref,  prédications  isolées  dans  le  nord  de  la  Gaule,  d 
le  i*'  siècle  ;  œntrovcrse  entre  les  hagiographes  sur  cet 
question  :  Y  a-t-il  eu  dès  cette  époque  ane  mission  ofl 
ciellc  générale  dans  nos  pays?  Aucune  raison  probante  i 
fixer  au  T'  siècle  IVpiscopat  de  saint  Denis  de  Paris,  i 
de  le  confondre  avec  s;iint  Deuys  TAréopagite;  de  gravi 
raisons  d*amonor  saint  Lucien  dans  le  Beauvaisis  a 
nr  sitVio.  \Au\M  que  do  lattachor  à  la  mission  Clémentini 
aucune  oontianoo  soriouso  à  prêter  aux  circonstances  c 
ohriMiologie  et  aux  traits  de  mœurs  que  l'on  renconti 
dans  la  vie  de  s^iint  Uieul.  a  In  dubiis  libcrtas.  » 

M.  laMv  de  Meissas.  aumônier  de  l'hôpital  Greffulhe, 
Tans,  deiuand*'  la  j^arolo  e;  fait  des  nfeerves  sur  les  opi 
nu^n*  e\\^niu<vs  |v^v  M.  Muiler.  Il  annonce  qu'il  se  pro 
jv\!«,^  de  lui  i>i^|v\i»lix^  *ians  une  privhaiuo  séance. 

M.  le  r«\s\,ïeni  .vv,;ne  a^îe  J^  M,  do  Meissas  de  ses  ré 


XLIY*  SESSION,   A  SENUS.  69 

f,  et  loi  répond  qu'il  est  inscrit  pour  traiter  dans  une 
piDchaiiie  séance  la  21*  question  du  Congrès. 

Enfin,  H.  de  Gaiz  de  Saint-Aymour,  secrétaire  général 
la  Congrès,  lit  une  note  sur  les  Arèues  de  Senlis.  Cette 
note  est  aintfi  conçue  : 

Arènes  de  Senlis. 

Dans  la  dernière  séance  de  son  Conseil  d'administra- 
tion, la  Société  française  d'Archéologie  voulut  bien  voter 
DM  petite  somme  pour  faire  procéder  à  la  fouille  d'une 
pirtie  de  nos  Arènes,  qui  préoccupait  à  juste  titre  les  ar- 
diéologues  :  je  veux  parler  du  puits  qui  se  trouve  du  côté 
de  la  principale  entrée,  à  deux  mètres  seulement  du 
podium.  Ces  fouilles  viennent  d'être  terminées,  et  je  suis 
chargé  par  notre  savant  directeur  de  vous  en  rendre  un 
eoopte  sommaire.  Il  a  même  désiré,  Messieurs,  que  je 
profite  de  la  circonstance  pour  rappeler  en  quelques  mots 
U découverte  et  donner  une  courte  description  du  monu- 
ment que  nous  devons  aller  visiter  au  sortir  de  cette 
iéaoœ,  et  qui  d'ailleurs,  par  sa  construction  aussi  bien 
foe  par  U  rareté  de  ces  cirques  dans  le  nord  de  la  Gaule, 
eit  une  des  grandes  attractions  archéologiques  de  notre 
petite  cité  senlisienne.  Je  me  suis  rendu  au  désir  de 
fiance  dans  non  sans  émotion,  mais  avee  une  pleine  con- 
H.  Palustre,  votre  bienveillante  attention. 


I. 


Tout  le  monde  sait  ici,  Messieurs,  mai^  il  est  bon  de 
ienppelor  de  nouveau  publiquement,  que  la  découverte 
•ies  Arènes  de  Senlis  est  due  à  l'initiative  d'un  honorable 


70      CONGRÈS  ARCUÉOLOGIÛUE  DE  FRANGE. 

habitant  de  Senlis,  M.  Félix  Vernois  qui,  guidé  par  son 
flair  de  chercheur  curieux  et  par  son  désir  d'augmenter 
les  illustrations  de  sa  ville  natale,  fut  mis  dur  leurs  traces 
en  iSM. 

Rapprochant  le  nom  d'une  ancienne  fontaine,  la  fon- 
des Reines,  appelée  dans  des  titres  du  moyen  âge  fom 
arenarum,  d'une  dépression  circulaire  du  sol  qui  existait 
dans  un  plateau  en  terrasse  situé  au-dessus  de  ladite  fon- 
taine, il  eut  l'audace  de  braver  le  scepticisme  et  les  mo- 
queries et  de  faire  donner  les  premiers  coups  de  pioche 
dans  ce  sol  qui  recelait  le  plus  important  des  monuments 
antiques  de  notre  ville. 

Les  débuts  furent  heureux,  car  deux  jours  de  recherches 
le  mirent  sur  la  trace  du  podium,  et  les  rieurs  se  tour- 
nèrent bientôt  du  côté  de  celui  que  l'on  appela  dès  lors, 
dans  notre  Comité  archéologique,  l'inventeur,  ou  plus  fami- 
lièrement, le  père  des  Arènes.  Je  ne  rappellerai  pas  ici, 
bien  que  ce  soit  de  Thistoire  ancienne,  et  parce  que  ces 
souvenirs  sont  hors  de  propos,  les  difficultés  financières  et 
autres  à  travers  lesquelles  le  Comité  archéologique  de  Sen- 
lis dut  passer  pour  arriver  à  mettre  nos  Arènes  dans  l'état 
où  elles  se  trouvent  aujourd'hui.  Mon  devoir  se  borne 
uniquement  à  vous  donner  une  description  sommaire  des 
monuments,  et  je  commence  sans  autre  précaution  oratoire. 

Les  Arènes  de  Senlis  forment  un  cercle  elliptique  de 
7!)  mètres  dans  son  plus  grand  axe  et  de  68  dans  son 
plus  petit.  Quand  on  se  place  au  milieu,  sur  Téminence 
de  terre  que  l'état  de  nos  ressources  n'a  pas  encore  permis 
d'enlever,  on  aperçoit  tout  d*abord  du  côté  de  la  ville  une 
grande  entrée  qu'il  n'a  pas  encore  été  possible  de  déblayer 
entièrement,  et  de  chaque  côté  de  laquelle  se  trouvent 
des  espèces  de  loges  servant  probablement  de  déga- 
gement. 


XLIY*   SESSION,  A  SENLIS.  71 

En  iaoe  de  celte  entrée,  vers  la  ville,  se  trouve  une 
autre  issue  vers  la  campagne,  de  même  largeur  que  la 
précédente,  bordée  également  de  deux  loges  carrées,  com- 
muniquant d'un  côté  avec  l'entrée,  de  l'autre  avec  l'arène 
(lle-méme.  Cette  entrée  est  d'une  construction  tout  à  fait 
semblable  à  la  précédente;  elle  en  diffère  seulement  en  ce 
que  eeile-ci,  celle  qui  se  dirige  vers  la  ville,  porte  dans  sa 
muraille  des  traces  de  voûte  qui,  par  leur  direction  ascen- 
dante, indiquent  qu'on  avait  à  faire  en  cet  endroit  à  une 
rampe  rachetant,  sans  doute,  la  différence  de  niveau  entre 
le  fond  des  Arènes  etleplat.eau  sur  lequel  est  situé  la  ville. 
Des  fouilles  ultérieures,  lorsqu'il  sera  possible  de  les  con- 
tinuer, éclaireront,  du  reste^  ce  point  complètement. 

Dans  l'autre  axe  de  l'arène  se  trouvent  deux  particula- 
rités que  nous  devons  noter  ici  et  qui  en  sont  peut-être  les 
parties  les  plus  intéressantes.  Ce  sont  deux  petites  cellœ 
Btuées  en  face  l'une  de  l'autre  et  faisant  le  pendant  des 
deux  entrées.  Ces  deux  cellœ  ont  une  porte  sur  le  podium 
qui  ouvre  directement  sur  l'arène.   L'une,  celle  qui  se 
trouve  du   côté  de  la  route  de  Chantilly,  ne  présente 
rien  de  particulier  dans  sa  construction  ;  l'autre,  au  con- 
traire, offre  dans  ses  parois  plusieurs  niches  où  l'on  a 
Toulu  voir  des  emplacements  destinés  à  recevoir  des  statues 
de  divinités,  ce  qui  a  valu  à  cette  construction  le  nom  de 
9ateUMm,  qu'on  lui  dunne  généralement  à  Scnlis.  Sans 
vouloir  entrer  ici  dans  une  discussion  qui  ne  serait  pas  à  sa 
{•lace,  —  puisque  mon  rôle  doit  se  borner  uniquement  à 
TOUS  donner  quelques  indications  préparatoires  à  la  visite 
que  nous  ferons  tout  a  l'heure,  —  nous  pouvons  dire  que, 
selon  nous,   ce  prétendu  sacellum  ne  serait  autre  chose 
qu'une  loge  où  les  gladiateurs  venaient  se  préparer  à  la 
lutte,  et  les  soi-disant  niches  à  statues  pieuses,  de  simples 
armoires  destinées  à  recevoir  sans  doute  les  onguents, 


73  CONGRÈS  ARGIIÉOLOGIOUE  DE  FRANGE. 

huiles  et  autres  essences  dont  ils  s'oignaient  lecorpsaTu 
de  descendre  dans  Tarène. 

Si  nous  quittons  maintenant  le  sol  de  l'arène  propn 
ment  dite  pour  monter  sur  les  gradins  de  l'amphithéâb 
lui-môme,  nous  constatons  que  cet  amphithéâtre  éta 
desservi  seulement,  outre  ses  deux  portes  d'entrée,  pa 
deux  petites  portes,  ou  vomitoires,  accompagnés  de  dea 
corridors  qui  ne  dépassaient  pas  quelques  mètres,  de  cba 
que  côté  dudit  vomitorium.  Ces  deux  dégagements  secoo 
daires  se  trouvaient  précisément  au-dessus  des  deux  petite 
loges  dont  nous  venons  de  parler,  et  la  présence  des  rest^ 
de  gradins  en  pierre  unis  à  une  construction  peut-étr 
plus  soignée,  indiquent  que  les  sièges  des  personnages  le 
plus  importants  de  la  cité  romaine  des  Sylvanectes  8< 
trouvaient  précisément  au-dessus  du  prétendu  saccllum 

Vous  voyez  par  cette  description  très-somraaire,  Mes- 
sieurs,  que  nos  Arènes  de  Scnlis  étaient  très-pauvres  de 
construction  et  qu'elles  répondaient  parfaitement  à  ce  que 
nous  appellerions  aujourd'hui  un  thé&tre  de  province. 
Bien  qu'on  ait  trouvé  la  trace  d'une  grille  ou  palissade 
qui  devait  couronner  le  podium,  peu  élevé,  du  reste,  on  a 
peine  àcroire  qu'on  ait  pu  donner  dans  ce  cirque  des  combats 
de  hôtes  féroces.  11  est  beaucoup  plus  probable  que  les  létes 
germains  qui  tenaient  garnison  à  Senlis  à  l'époque  où 
l'on  i)eut  faire  remonter  leur  construction,  faisaient  seuls, 
avec  quelques  troupes  de  gladiateurs  de  passage,  les  frais 
des  représentations  auxquelles  ils  conviaient  sans  doute  les 
habitants  paisibles  de  la  cité.  Peut-être  même  ne  serait-il 
pas  trop  téméraire  d'affirmer  que  ces  Arènes  furent  faites 
pour  le  délassement  de  ces  soldats  germains  romanisés,  à 
l'exemple  de  ce  qui  se  fit  a  Champlieu,  que  nous  verrons 
samedi  prochain,  et  ailleurs. 
Ce  qui  prouve  plus  que  tout  le  reste  que  nos  Arènes  de 


XUT'  SESSION,   A  SENLI8.  73 

Seolis  sont  un  monument  établi  au  meilleur  marché  pos- 
sible, c'estlafaçondontonaprocédé  pour  leur  construction. 
Une  s'agit  pas  ici,  en  effet.  Messieurs,  d'un  amphitéâtre 
bâti  à  grands  frais  au-dessus  du  sol,  comme  ceux  que  nous 
admirons  à  Rome  et  dans  les  pays  classiques  du  monde 
romain;  à  Senlis,  on  a  assis  les  Arènes  le  long  d'une  pe- 
tite colline,  on  a  commencé  par  entailler  la  pente  de  façon 
à  établir  l'amphithéâtre  d'un  côté  sur  la  dépression  du 
terrain;  puis  les  terres  mêmes  qui  provenaient  de  cette 
espèce  de  déblaiement  ont  servi  à  former  de  Tautre  côté 
un  remblai  sur  lequel  on  a  construit  le  reste  des  gradins. 
11  y  avait  ainsi  à  la  fois  économie  de  transport  et  écono- 
mie de  matériaux.  Nous  signalons  tout  spécialement  à 
votre  attention  cette  particularitéde  construction  très-rare, 
puisque,  dit-on,  elle  est  unique  en  Gaule,  sauf  à  Trêves, 
et  qu'il  faut  aller  en  Italie  et  en  Asie  Mineure  pour  trouver 
des  analogues.  On  a  voulu  voir  dans  ce  fait  une  preuve 
d'antiquité  et  une  sorte  de  fantaisie  archaïque;  nous 
croyons  qu'il  faut  y  voir  seulement  la  nécessité  de  faire  à 
bon  marché  et  par  de  petits  moyens.  En  archéologie 
comme  en  toutes  choses,  les  explications  les  plus  simples 
sont  presque  toujours  les  meilleures. 

Comment  étaient  placées  les  personnes  qui  assistaient 
aux  représentations  données  dans  les  Arènes?  J'ai  dit  plus 
baut  qu'on  avait  trouvé  au-dessus  du  sacelium  quelques 
gradins  en  pierre  dont  un,  mémo,  contenait  un  graffiteou 
inscription  à  la  pointe.  C'était  là,  sans  doute,  que  se  pla- 
çaient, avec  les  officiers  de  la  garnison,  les  magistrats  de 
la  petite  cité.  Quant  au  peuple,  il  s'asseyait  soit  sur  le  gazon 
qui  tapissait  les  pentes,  soit,  si  l'on  veut  lui  prêter  cet  excès 
de  luxe,  dans  des  tribunes  en  bois  qui  pouvaient  être  éta- 
blies sur  les  gradins  en  terre  de  Tamphitéàtre.  Ces  tri- 
bunes existaient  certainement  dans  plusieurs  parties  au 


74        CONGRÈS  AKCHÉOLOGIOUE  D£  FRANCE. 

looins  du  cirque  et  Ton  peut  expliquer  ainsi  le  grand 
nombre  de  tuiles  romaiues  que  Ton  a  rencontrées  partout 
dans  les  fouilles.  Si  ces  tribunes  réservées  existaient,  elles 
étaient,  comme  on  le  sait  pour  d'autres  amphithéâtres, 
destinées  aux  femmes,  ce  qui  prouverait,  en  passant,  que 
le  respect  des  dames  n*est  pas  nouveau  dans  notre  vieille 
ville  de  Senlis.  Ces  tribunes  ont  d&  être  détruites  par  un 
incendie  dont  on  a  trouvé  partout  des  traces  nombreuses. 

A  quelle  époque  remontent  nos  Arènes?  Je  ne  tirerai 
aucun  argument  de  leur  construction.  Vous  les  verrez 
tout  à  l'heure,  Messieurs,  qui  avez  bien  voulu  venir 
assister  de  tous  les  points  de  la  France  à  ces  assises  scien- 
tifiques, et  c'est  à  vous  de  nous  dicter  une  opinion  sur  ce 
point.  Nous  ne  pouvons  que  vous  fournir  des  éléments 
d'appréciation  en  vous  difant  que  les  médailles  qu'on  a 
trouvées  dans  nos  fouilles  vont  de  César  à  Gratien,  mort 
en  383.  Les  plus  nombreuses  sont  celles  des  empereurs 
gaulois  Posthume  et  Tétricus  II,  sous  lesquels  la  Gaule 
jouit  d'une  grande  prospérité;  il  semble  donc  que  l'on 
doit  faire  remonter  la  construction  des  Arènes  au  moins 
au  m°  siècle.  C'est,  du  reste,  l'opinion  de  presque  tous  les 
savants  qui  les  ont  vues  jusqu'ici;  à  vous,  Mesieuis,  de 
vous  prononcer  en  dernier  ressort. 

Je  ne  vous  parlerai  pas,  Messieurs,  des  objets  que  nous 
avons  rencontrés  dans  les  Arènes.  Ces  objets  sont  nom- 
breux, et  si  nous  ne  pouvons  citer  avec  orgueil  quelques- 
unes  de  ces  œuvres  d'art  qui  auraient  été  l'honneur  et 
l'illustration  de  notre  jeune  musée,  nous  pouvons  du 
moins  vous  faire  voir  dans  nos  vitrines  un  cachet  d'ocu- 
liste, lapis  primus  sylvanectensis,  étudié  par  notre  savant 
confrère,  M.  Adrien  de  Longpérier,  et  beaucoup  d'autres 
menues  antiquités  qui  ont  été  signalées  déjà  dans  nos  bul- 
letins, et  que  n  oubliera  pas  la  monographie  qui  se  fera 


xtnr*  SESSION,  a  senlis.  75 

certainement  un  jour  de  notre  amphithéâtre,  lorsque  l'état 
l*a?ancement  des  travaux  des  fouilles  permettra  d'en- 
tieprendre  cette  étude  générale.  Je  n'insiste  pas  sur  ces 
oli)et8,  puisque  vous  pouvez  les  voir  dans  notre  petit 
Musée. 


II. 


Mais  je  dois  vous  parler  un  peu  plus  Içnguement,  Hes- 
neurs  les  Membres  de  la  Société  française,  du  puits  de  nos 
Arènes  et  des  objets  qui  y  ont  été  retrouvés,  puisque  c'est 
àTotre  libéralité  que  nous  avons  dû  la  possibilité  de  fouil- 
ler ce  puits.  Précédemment  on  avait  seulement  mis  au 
jour  la  margelle,  composée  de  débris  sculptés  évidem- 
ment d'origine  romaine,  et  l'orifice  jusqu'à  un  banc  de 
aillasse  superficielle  d'une  épaisseur  de  0"Gd  centimètres. 

Les  fouilles,  commencées  lundi  dernier  21  mai,  ont  dé- 
gagé entièrement  le  puits  jusqu'à  une  profondeur  de5*dO 
to-dessous  du  banc  de  caillasse,  soit  de  1^3i  au-dessous 
an  bord  de  la  margelle  de  pierres  de  taille,  qui  a  elle- 
même  une  profondeur  de  i*09.  Jusqu'à  ce  niveau  de  7*34, 
le  puits  se  continue  régulièrement  avec  un  grand  dia- 
mètrede  2*i7  et  un  petit  diamètre  de  ^^^Oi.  C'est  assez  vous 
dire  que  sa  forme  est  elliptique.  Puis  tout  à  coup,  nous 
avons  constaté  la  présence  d'un  retrait  d'environ  0"35 
centimètres,  profond  de  0">37,  réduisant  le  grand  dia- 
mètre à  i"40  et  le  petit  à  i"22.  Au  fond  de  cette  petite 
excavation,  le  banc  de  la  pierre,  percée  d'un  petit  trou  de 
mine  de  0*20  à  0*25  centimètres,  probablement  destiné 
adonner  issue  à  l'eau  qui  devait  sourdre  du  fond. 

Ainsi  donc.  Messieurs,  ce  puits,  dont  la  construction 

FTéoccupait  depuis  si  longtemps  tous  ceux  qui  venaient 


76        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

visiter  nos  Arènes,  et  où  l'on  avait  voulu  voir  tour  à  tour 
et  selon  la  fantaisie  de  chacun,  l'entrée  d'un  sous-sol  de 
l'amphithéâtre,  l'ouverture  d'une  carrière  antique,  Té- 
gout  de  l'arène  ou  un  passage  souterrain  communi- 
quant extérieurement,  n'était  autre  chose  qu'un  vulgaire 
puits  creusé  postérieurement  à  l'abandon  des  Arènes  pour 
fournir  de  l'eau  dans  un  but  impossible  à  déterminer 
d'une  manière  certaine.  Le  niveau  auquel  nous  sommes 
arrivés  est,  en  effet,  à  peu  près  celui  des  puits  voisins 
encore  en  service,  et  si  l'on  tient  compte  de  la  baisse 
très  -  sensible  des  eaux  dans  notre  localité,  il  est  certain 
que  le  puits  des  Arènes  devait,  à  l'époque  où  il  a  été 
construit,  en  donner  en  abondance. 

Ce  puits  enlevé  à  la  pointe,  est,  en  effet,  de  construc* 
tion  très -ancienne.  On  suppose  que  les  Arènes  ont  été 
comblées  au  plus  tard  au  xv'  siècle,  lors  de  la  construction 
de  nos  secondes  fortifications,  et  dans  tous  les  cas,  il  est 
certain  qu'une  batterie  était  établie  sur  leur  emplacement 
lors  du  siège  de  la  ville,  en  1589. 

La  nature  des  objets  trouvés  dans  le  puits  ne  laisse 
d'ailleurs  aucun  doute  sur  son  uncienneté.  Il  était  litté- 
ralement rempli  de  débris  r<)mains  provenant  des  Arènes, 
débris  dont  plusieurs,  par  leur  importance,  nous  don- 
neutla  preuve  que  lorsqu'ils  y  ont  été  jetés,  l'amphithéâtre, 
quoique  abandonné,  contenait  encore  des  ruines  très-inté- 
ressantes dont  les  restes  furent  plus  tard  dispersés  et  uti- 
lisés sans  doute  dans  des  constructions,  comme  c'est 
toujours  l'usage  en  pareil  cas.  Parmi  ces  objets,  je  citerai 
des  restes  de  marches  d'escalier  en  pierre  dure  usée  par 
un  frottement  séculaire,  de  beaux  fragments  de  colonDes 
dont  le  diamètre  varie  de  O'iO  à  0">50  centimètres  et  la 
hauteur  de  OKiO  à  0»90  centimètres;  dos  bases,  des  cha- 
piteaux, des  fragments  du  bahut  du  [mdium,  etc. 


XLIV*  SESSION,   A  SENUS.  77 

Parmi  les  objets  mobiliers,  je  citerai,  outre  des  ceu- 
taioes  de  tuiles  et  de  aombreux  morceaux  de  fer  parmi 
lesquels  des  restes  de  fourches  et  de  scellements  de  porte, 
des  meules  aucienoes  (une  de  ces  meules  a  été  retrouvée 
intacte,  la  meule  tournante  encore  posée  sur  la  meule  dor- 
mante), quelques  poteries  brisées,  etc.  Mais  je  dois  surtout 
attirer  votre  attention  sur  une  une  tuile  portant  en  belles 
apitales  la  fin  d'un  nom  de  potier  (M]ATRONIS,  et  quel- 
ques fragaients  d'ustensiles  en  bronze,  une  sorte  de  petit 
vase  à  onguent  en  forme  de  coquetier,  les  débris  d'une 
espèce  de  cassolette  en  bronze  et  deux  fragments  qui  ont 
pu  faire  partie  de  deux  lampes.  Tels  sont,  Messieurs,  les 
modestes  résultats  de  la  fouille  du  puits  des  Arènes  qui, 
grtoeà  vous,  a  enfin  livré  son  secret  et  ne  sera  plus  dans 
notre  monument  comme  un  mystérieux  inconnu.  Le 
résulut  est  presque  négatif,  mais  les  résultats  négatifs  ont 
ausi  leur  prix  en  archéologie. 

J'ai  fini,  Messieurs;  puisse  la  visite  que  vous  allez 
faire  aux  Arènes  de  Senlis,  en  attirant  de  nouveau  sur 
cet  important  monument  l'attention  du  monde  savant  et 
des  administrations  compétentes,  devenir  le  signal  du 
prompt  achèvement  de  nos  fouilles  et  de  la  mise  au  jour 
complète  d'un  amphithéâtre  qui,  depuis  la  destruction 
it  celui  de  Paris  en  1870,  est  non-seulement  le  plus 
voisin  de  la  capitale,  mais  encore  le  seul  existant  en 
France  au  nord  de  la  Loire  ! 

Avant  que  la  séance  soit  levée,  M.  Palustre  soumet  aux 
membresdu  bureau  et  à  rassemblée  les  plans  exécutés  il  y 
quelques  années  par  M.  Moinet,  des  restes  du  vieux  châ- 
teau et  des  remparts  romains  de  la  cité. 


La  séance  est  levée  à  quatre  heures. 


78  C05GRiS  ÂRCaÉOLOGIOCB  DB  njJICB. 


SÉANCE  DU  MARDI  29  MAI  I8T7. 

PRÉ51DE.NCB  DE  M.   PÂLUSTBB. 

La  séance  est  ouverle  à  sept  heures  et  demie  du  mitio* 
Siègent  au  bureau  MM.  A.  Janvier,  président  de  laSociéli 
des  Antiquaires  de  Picardie,  et  Bélisaire  Ledain,  anckl^ 
président  des  Antiquaires  de  TOuest.  La  parole  est  à 
M.  l'abbé  de  Meissas,  docteur  en  théologie. 

Évangélisation  des  Gaules.  —  Prédication 
du  Christianisme  dans  le  Pagus  Sylva- 
nectensis. 

Le  problème  qui  Tait  l'objet  de  ce  mémoire  se  rattacha 
par  tant  de  points  à  la  question  générale  de  l'évangélisa- 
tion  des  Gaules,  qu'il  est  impossible  de  l'en  isoler.  Ne  vous 
étonnez  donc  pas  si  je  consacre  à  cette  question  une  grande 
partie  de  ma  lecture.  Vous  verrez,  je  l'espère,  que  c'est 
encore  là  le  chemin  le  plus  sûr  pour  arriver  à  la  solution 
du  cas  spécial  qui  nous  est  proposé. 

Saint  Régulus,  vulgairement  nommé  saint  Rieul,  à 
qui  l'on  rapporte  la  fondation  de  l'église  de  Senlîs,  fit 
certainement  partie  d'une  pléiade  de  missionnaires  qui 
répandirent  la  lumière  de  TÉvangile  dans  tout  le  nord- 
ouest  de  Id  Gaule.  Mais  quelle  fut  Tépoque  de  leur  mis- 
sion? Les  uns  disent  la  fm  du  i*'  siècle,  les  autres 
la  seconde  moitié  du  iir,  et  chacun  s'attache  à  l'une 
de  ces  deux  opinions  selon  les  idées  qu'il  adopte  sur  la 
manière  dont  le  christianisme  se  répandit  primitivement 
dans  les  Gaules. 


JUy*  SESSION,  A  8ENLIS.  79 

Eo  dTet,  deux  écoles  se  trouvent  ici  en  présence. 

La  première,  qui  revendique  le  nom  d'école  tradition- 
xuliste,  et  que  ses  adversaires  appellent  l'école  légendaire, 
ratache  la  fondation  de  presque  toutes  les  églises  de  nos 
oootrées  à  saint  Pierre  ou  à  saint  Clément  (t).  Tant  par 
eux-mêmes  que  par  une  foule  d'envoyés,  dont  la  plupart 
seraient  des  personnages  mentionnés  soit  dans  les  Évan- 
gila  soit  dans  le  livre  des  Actes,  ces  deux  évéques  de 
Some  auraient  complété  dès  les  temps  apostoliques  la 
conquête  spirituelle  d'un  pays  pour  lequel  la  providence 
divine  avait  manifesté  déjà  la  prédilection  la  plus  tendre 
en  (lisant  aborder  à  ses  rives  Marie-Madeleine,  Marthe  et 
laare,  les  amis  de  Jésus  à  Béthanie. 

La  seeonde  école  s'intitule  école  historique;  ses  adver- 
•ûes  l'accusent  d'être  anti-traditionnalisto.  D'après  ses 
ptrtisanSj  le  christianisme  ne  pénétra  d'abord  que  dans 

|li  Les  églises  auxquelles  on  prête  ainsi  une  origine  aposto- 
lique sont  : 

Oioi  la  Gaule  Narbonnaise  :  Marseille,  Arles,  Aix,  Tarascon, 
Fvvjus.  Oap,  Vienne,  Narbonne,  Avignon,  Orange ,  Saint-Paul- 
Tnis-Chàteaux,  Toulouse,  Bèziers,  Apt,  Lodèvc,  Saint-Papoul ; 

Ou»  la  Gaule  Lyonnaise  :  Besançon,  Annecy,  Sens,  Paris, 
Hem,  Orléans,  Troyes,  Rouen,  Baveux,  Évreux,  Séez,  Auxerre, 
Nerers,  Tours,  le  Mans,  Angers,  Rennes,  Nantes; 

Ou»  la  Gaule  Aquitaine  :  Limoges,  Bordeaux,  Agcn,  Poitiers, 
Aogoulènie,  Mende,  Rodez,  Caliors,  Saintes,  Périgueux,  Auch, 
loorges.  Germond-Fcrrand,  Le  Puy,  La  Limagne,  Autun; 

OiDs  la  Gaule  Belgique  :  Trêves,  Strasbourg,  Metz,  Toul, 
Verdna,  Cambrai,  Tournay,  Arras,  Reims,  Soissons,  Cli&lons, 
Beannîs,  Senlis,  Amiens  ; 

Sans  compter  que  saint  Pierre  et  saint  Philippe  auraient 
evangélisé  ia  Gaule  méridionale;  saint  Paul,  le  Roussillon,  et 
taint  Lqc,  FArmorique. 


80       CONGRÈS  ARGUÊOLOGIOUS  DB  VRASGB. 

la  Narboonaise,  seule  partie  de  la  Gaule  àt%k  devenue,  un 
siècle  après  César,  assez  romaine  pour  offrir  à  l'Évangile 
un  terrain  préparé  pour  le  recevoir.  Vienne,  Arles,  Nar- 
bonne,  auraient  été  d'abord  conquises  à  Jésus-Christ;  puis 
des  missionnaires  se  seraient  peu  à  peu  avancés  vers  Lyon, 
Besançon,  Toulouse,  Autun,  Bordeaux  vi)v  villes  que 
Strabon  présente  comme  les  plus  considérables  des  Gaules 
à  la  fin  du  i*'  siècle  de  notre  ère.  L'an  loâ,  une  mission 
grecque  aurait  établi  soa  centre  a  Lyon,  et  grâce  à  ses 
efforts,  le  christianisme,  franchissant  les  bornes  de  la  Nar^ 
bonnaise,  aurait  remonté  la  vallée  du  Rhône  jusqu'à 
Langres  et  à  Dijon  i.2j.  Puis  il  y  aurait  eu  un  arrêt  causé 
par  les  persécutions  de  Marc-Aurèle  et  de  Septime-Sévère, 
et  ce  serait  seulement  vers  le  milieu  Ju  ui*  siècle  que 
l'œuvre  de  Tévangélisation  des  Gaules  fut  reprise  avec 
assez  de  succès  pour  qu'il  se  trouvât  des  ^lises  sur  presque 
tous  les  points  au  commencement  du  iv*  siècle  (3). 

J'ai  fait  une  étude  assez  approfondie  des  arguments  des 
deux  écoles;  la  vérité  m*a  semblé  du  côté  de  la  seconde,  et 
je  ne  crois  pas  que  réglise  de  Senlis,  plus  qu'aucune  autre 

[\j  AÎQsi  s'explique  l'existence  d'églises  sur  les  bords  de  la 
Garoooe  dès  le  ir  siècle.  V.  Hieron.,  ép.  un,  ad  TÂeodoram, 

yS  De  là  les  premiers  martyrs  de  la  Gaule  sous  la  persécution 
de  Marc-Aurè!e.  vers  177  ^V.  Sulpice  Sévère,  livre  II),  et  la 
possibilité  pour  saiot  Irénée  de  réunir  à  Lyoo.  eo  480,  no  pre- 
mier concile  bientôt  sui\i  d'un  second. 

3  Nous  entendons  ici  par  église  une  chrétienté  permanente, 
gouvernée  ^^r  un  êvèque  «  lequel  est  remplacé  quand  il  fait 
défaut.  Qu'antérieurement  à  ces  églises,  qui  seules  ont  ooe  his- 
toire, il  ait  pu  y  avoir  des  chrétiens  épars  dans  la  Belgique  et 
ailleurs,  nous  ne  le  nions  pas.  On  verra  même  dans  notre  appen- 
dice que  nous  produisons  un  texte  de  saint  Paschase  Radbert  en 
favenr  de  ce  sentiment. 


XUV*  SESSION,  A  SENLI8.  81 

de  nos  églises  du  Noril,  puisse  justifier  la  prétention  de 
Tvfflonter  aux  temps  apostoliques.  Sans  viser  à  instruire 
ici  personne,  je  présente  humblement  mes  réflexions. 
QiuDd  vous  m'aurez  entendu,  Messieurs,  si  quelqu'un 
d'entre  vous  prend  la  peine  de  me  réfuter,  nul  ne  s'esti- 
nien  plus  heureux  que  moi  de  mettre  à  profit  les  lumières 
nouvelles  qu'il  produira  sans  doute. 

1"  PARTIE. 

UAXBSI  DES  ARGUMENTS  DE  L'ÉGOLE  LÉGENDAIRE. 

En  attendant  les  arguments  imprévus,  je  commencerai 
pu  dire  quelques  mots  des  documents  invoqués  jusiju'à 
«jour  en  faveur  des  prétentions  apostoliques  de  la  plu- 
part de  nos  églises.  Ils  sont  de  deux  sortes  :  P  des  textes 
''auteurs  connus;  'i*  des  légendes. 


I. 


LES  AUTEURS  CONNUS. 

En  lait  d'auteurs,  on  cite  Tertullicn,  S.  Irénée,  Eusëbe, 
Lactanœ,  et  la  lettre  des  sept  évéqucs  à  Uadegoude.  Vi  yons 
leurs  textes  : 


§  I.  —  Tertullien. 

Le  prêtre  de  Carthage  place,  dit-on,  au  rang  des  peuples 
qai  croyaient  au  Christ  dès  son  époque  les  diverses  nations 
^  la  Gaule,  Galliarum  diversœ  naiionef. 

Le  passage  auquel  on  fait  allusion  se  trouve  au  cha- 
pitre vu  du  Traiié  contre  les  Juifs.  Les  trois  mots  :  GaU 
Imm  diverisenationes  s'y  trouvent,  eu  elfet,  mais  ils  n'y 

XUV*  SESSION.  6 


8i  CONGRÈS  AHCUKOLÛtilOCE  DE  FEA>'C£. 

ont  pas  à  beaucoup  près,  croyous-nous,  la  portée  qu*oi 
leur  attribue.  Vous  allez  eu  juger.  Messieurs. 

Le  véhément  Africain,  entraîné  par  un  de  œs  mouve- 
ments qui  lui  sonl  habituels  et  dans  lesquels  il  ne  prétend 
certes  pas  donner  à  ses  paroles  la  précision  de  celles  d'un 
historien,  presse  les  Juifs  à  l'ai  Je  des  interrogations  sui- 
vantes : 

In  quem  enim  alium  univers»  génies  credideruni,  nisi  in 
Chrislum  qui  jam  venitf  Cui  enim  et  alix  génies  credide» 
runt,  Parthi,  Medi,  Etamitœ;  ei  qui  inhalniant  Mesopota- 
miam,  Phrygiam,  Cappadociam;  ei  incalenies  Ponium,  ei 
Asiam,  ei  Pamphyliam  ;  immorantes  jEgyptum  et  regionem 
Africx  quœ  est  irons  Cyrenem  inhabiianiest  Rwnani  et 
incolx;  iunc  ei  in  Hierusalem  Judxi,  et  cœierx  génies;  ut 
jam  Geiulorum  varidaies,  et  Maurorum  mutti  fines;  His- 
paniarum  omnes  iermini  ei  Galliarum  divers»  naiiones,  et 
Britannorum  inaccessa  liomanis  Inca,  Chrisioverosubdita; 
ei  Sarmaiorum ,  ei  Dacorum ,  ei  Germanorum  et  Seytka" 
rum;  et  abditarum  mullarum  geniium;  et  provinciarum  et 
insularum  muUarum  nobis  ignoiarum ,  et  quœ  enumerare 
minime  possumusF  In  quibus  omnibus  locis  Christi  nomen^ 
qui  jam  venii,  régnai. 

J'ai  cité  in  extenso  pour  quo  chacun  de  vous,  Messieurs^ 
puisse  juger  du  Ion  do  celte  page  de  Tertullien,  en  appré» 
cier  l'enflure,  et  reconnaitre  le  danger  qu'il  y  aurait  à  en 
prendre  au  pied  de  la  lettre  toutes  les  expressions.  Alors 
même  que  Galliarum  diversa*  nationes  signifierait  l'en- 
semble des  peuplades  diverses,  au  nombre  d'environ 
quatre-vingts,  que  Ton  pouvait  compter  dans  la  Gaule,  ces 
paroles  n'auraient  pas  plus  à  mes  yeux  le  caractère  d'un 
témoignage  historique  sérieux  et  précis  que  leurs  voisines  : 
Univers»  génies  crediderunt,  ou  bien  :  Hispaniarum  omnes 
iermini. 


XUY*  â£;>SIOiN,  A  SKNUS.  H3 

Mais  il  y  a  plus.  Galliarum  dîversœ  nationes  veut  dire 
iussi  bien  diver$ei  nation»  des  Gaules  que  les  diverses 
Mtkm$deâ  Gaules,  et  il  eût  suffi  que  des  quatre- vingts, 
trois  ou  quatre  eussent  reçu  l'Évangile  pour  permettre  à 
TerluUien  de  s'exprimer  comme  il  Ta  fait,  même  en  lui 
iuppc«aDt  une  précision  rigoureuse,  dont  il  ne  se  piquait 
cotainement  pas. 

§  11.  —  Saint  Irinée. 

L'èvéque  de  Lyon,  dans  le  premier  de  ses  cinq  livres 
eoQtre  les  hérésies,  cite  les  Celtes  (KAroe)  au  nombre  des 
psaples  chef  lesquels  on  trouve  des  églises  professant  cette 
unité  de  foi  qu'il  invoque  contre  les  dissidents  (i).  Quel- 
ques-uns prétendent  que  par  le  mot  Kc^roe,  saint  Irénée 
eotend  les  peuples  compris  entre  la  Garonne  et  la  Seine; 
mais,  malgré  la  dénomination  de  Gaule  celtique  donnée  à 
cette  partie  de  notre  territoire,  cette  assertion  ne  parait  pas 
iondée.  Le  mot  Celtes  avait  une  acception  beaucoup  plus 
vaste  :  les  Cimmériens  de  la  Tauride,  les  Scordisques  et 
les  Taurins  des  rives  du  Danube,  les  Boïens  de  la  forêt 
Hercynienne,  les  Cimbres  du  Jutland,  étaient  des  Celtes. 
Et  quand  on  fit  du  nom  générique  de  tant  de  populations 
éparses  dans  l'Europe  centrale  et  occidentale  un  synonyme 
<leGalls  ou  Gaéls  ((ra//i),  pour  désigner  l'ensemble  des 
habitants  de  la  Gaule,  c'était  déjà  dans  un  sens  très-res- 
treiut.  Nous  croyons  que  c'est  dans  ce  sens  qu'il  faut 
entendre  saint  Irénée. 

Il    JLmi    evTi   al  i»   riooaviac;  é<$ovocvxe    *Exx^y;9t9Cc   x^e; 
ti7iTrrjis9cy,  i  £ÛL«ic  ira^aoc^îôag'tv  o-/ri  cv  tscï;   I'Itî^îscc;,  'dvtc 
b  Ikùntçi   ovri  xarà  rdcç   xvscTOÀdèç,   ovrc  cv  \î'fj7rT»,  ovTt  îv 
ArC-jq,  ovrc  «î  xorà  ftwa  roO  xo^uov  iSpucvoci.   (Contra  ha 
ma,  Ub.  I,  cap.  S. 


■yjSièJS  AlSLIOIt^lTZ  3Ï  njJBQL. 


*2i*c;:  ¥zz-zr.is^  r  fciJ^rr?  ro*.    aisff  m»  ripi.e 

fctciflf  ^  ciicfir  :•: -r  "t  Gei>  ^la  îam*  qrd  Aënrne  à 

£it  f:::i:'--:  fcf-cîXrmx. .  ît  f-r-ir-^isr.  îti»  If  oc4:»Der:  des 


5  m.  -  Tuèéif. 
Au  iLiz.'jre  ii:t  î^  ilnq-Lj^-^JT  '.im  5e  dco  htstoire, 

uiL^  :i  Gi^ilr.  %>-%^u  ''*"2:rva  Çt-Ji^  ^xml  u  G^Um. 
Ccs  ÎTrrf*.  i.:-::i.  r.T  :»f-ït-:  c^rr  qoe  à»  év^éques. 
D'ib»:ri  li  lî.rsc  u^ffcn.:^^-  ::r:  ::.'^:ifc:T-: puis. quand 
<icli  ïcrs::.  zSiz.  ::;-:! ire?  :-M  t  ivi::  ik-rs  ea  Gauk 
d'au**r«s  r-sr^q-if   "i;  .-îr  L.  î:  Ly:::.  Jiiiâ  pc:^'*Diie  ne 

:i  L:  r-f  5.:-?  1:<  ^.:.^:i*5c-^^  ir  r».zj;:.ra.  prinos  bons 
•e:  ".ijerii,'^.  :.  CsV  ivi  :  r^&s  U2  :■:.::  if  Tfrre  «i  reculé  où 
^i  'T*L\zyizL  il  vri:  l'.e «  i:>ù".  r.i5  r^fi^icrf .  Ce  qui  prouve. 


XUV*  SESSION,   À  SfNUS.  85 

Pour  nous,  nous  constaterious  seulement  ici  clicz  Lac- 
tanoe,  s'il  était  vraiment  Tauteur  de  ce  traité  (i),  soit  une 
iguorauce  profonde  de  l'état  réel  du  monde,  soit  un  parti 
pris  d'exagération;  et,  dans  un  cas  aussi  bien  que  dans 
l'autre,  nous  ne  saurions  tirer  de  son  texte  aucun  proGt 
pour  l'histoire. 

§  V.  —  La  lettre  des  sept  évéques  à  Radegonde  (2). 

On  y  lit,  à  propos  de  la  mission  de  saint  Martin  dans 
kl  Gaules  : 

AafMe  cum  ipeo  catholicœ  religionis  exorlu  cxpissent 
Gellieanit  in  finibui  venerandœ  fidei  printordia  respirare, 
HMuead  paucorwn  notitiam  tum  ineffabilia  perveniisent 
Trmiiatii  dominicx  sacramenta... 

Mais,  pour  citer  ce  passage  à  Tappui  d'une  prétendue 
cnogélisation  générale  des  Gaules  dès  les  temps  aposto- 
liques, on  supprime  la  seconde  proposition,  do  laquelle 
il  ressort  trop  clairement  que  les  eirorls  des  premiers 
apôtres  de  nos  contrées  n'ont  eu  que  des  résultats  très- 
limités;  puis,  dans  la  partie  conservée,  on  traduit  Galii- 
cmù  m  fimbus  par  dans  les  pays  de  la  Gaule ,  de  façon 
à  bire  ententlre  qu'au  témoignage  des  sept  évéques,  la 
religion  avait  pénétré  au  cœur  de  la  Gaule,  tandis  qu'ils 
disent  seulement  qu'elle  avait  franchi  ses  frontières. 

Pour  nous,  Messieurs,  nous  ne  saurions  trouver  aux 
<lenz  propositions  que  nous  avons  citées  intégralement 
d'autre  sens  que  celui-ci  : 

Le  christianisme  pénétra  dans  les  Gaules  dès  ses  débuts 


•  i  I  La  diose  est  fort  douteuse.  Voir  Dom  Ccillier,  Bibliothèque 
eu  ttuieurM  sacrés,  tome  III. 
(t)  Candi.  GalL,  1,  I,  p.  348.  —  Gregor.  Turon.,  1.  IX. 


80  CO.NGRÈS  ARCaÉOLOGIQUe  DE  FRANCE. 

(personne  ne  le  nie)^  mais  la  prédication  n'y  oblint 
d'abord  que  de  faibles  résultats  [c'est  précisément  ce  que 
soutient  l'école  bistorique\ 

Il  y  a  plus.  Qu'au  lieu  de  se  borner  à  cette  citation,  on 
prenne  dans  son  ensemble  la  page  à  laquelle  elle  appar- 
tient, on  verra  que  d'après  les  vénérables  auteurs  de  la 
lettre,  la  divine  Providence  amena  en  Gaule  saint  Martin, 
né  de  race  étrangère,  précisément  pour  donner  à  la  Gaule 
ce  qui  lui  manquait  encore  au  iv*  siècle,  même  après  des 
efforts  qui  remontaient  aux  temps  apostoliques,  et  ne  pas 
la  laisser  en  retard  sur  le  reste  du  monde  :  Ne  quid  kk 
minu$  acqmireretj  quam  in  oràis  circula,  prœdieamtiha 
aposiolà,  cbtinertt. 

Voilà  pourtant.  Messieurs,  en  dehors  des  légendes,  les 
seules  autorités  qu'on  ait  pu  invoquer^  du  moins  à  notre 
connaissance,  çn  faveur  de  l'opinion  qui  veut  faire  péné- 
trer le  christianisme  dans  la  Gaule  entière  dès  la  lin  du 
i*'  siècle  ou  le  commencement  du  ir. 

Arrivons  maintenant  aux  légendes,  et  voyons  ce  qu'il 
ep  faut  penser. 


II. 


LES  LEGEin)E5. 

Ici  les  documents  abondent,  mais  je  cherche  en  vain 
les  garanties  qui  seules  peuvent  fonder  la  certitude  histo- 
rique. 

En  voulez- vous  un  échantillon?  Ouvrons  l'immense 
collection  des  Boliandistes,  où  sont  rapportées  à  l'article 
de  chaque  saint,  non  toutes  les  légendes  recueillies  sur  son 
compte,  mais  celles  que  les  pieux  et  savants  rédacteurs  ont 
jugées  le  moins  indignes  d'être  prises  en  considération. 


XLIV^   SESSION,   A  SGNLIS.  87 

A  la  date  du  90  mars,  nous  en  trouvons  deux  pour  saint 
Wjrulus.  La  première  ost  celle  que  les  Bollandistes  croient 
li  plus  ancienne  et  la  plus  véridique  (antiquior  et  since* 
fw).  Ed  voici  la  très-fidèle  analyse  : 

Régulus,  Grec  de  naissance,  arrive  à  Rome  poussé  par 
lamour  des  saints  apôtres  Pierre  et  Paul ,  et  s'y  trouve 
associé  à  un  collège  de  missionnaires  dont  saint  Denys  est 
le  persounage  principal.  Clément  qui,  là  comme  dans  la 
plupart  des  pièces  analogues,  semble  être  le  successeur 
immédiat  de  saint  Pierre,  bien  que  Rome  ait  eu  deux 
évéquet  intermédiaires,  les  envoie  en  Gaule.  Ils  viennent 
tout  d'abord  à  Paris,  ville  dont,  suivant  le  narrateur,  le 
ïéjour  était  alors  recherché  à  cause  de  l'agrément  de  ses 
pilais  royaux,  aussi  bien  que  de  ses  fruits  et  de  ses  vignes. 
Pertenere.,,  ad  vrbem  Parisiacûm,.,  primiîuSy  qvœ  tune 
tmporii  ex  Regum  palatiis  et  frvgum  copiis  atque  vineis 
akiTtmis  amstnior  colebatur.  Là  les  missionnaires  se  par- 
tagent le  pays  :  la  cité  des  Sylvanectes  échoit  à  Régulus. 
A  peine  à  l'œuvre,  le  nouvel  apôtre  voit  les  foules  se 
presser  sur  ses  pas,  avides  de  sa  parole.  Conversions  nom- 
breuses. Affluence  de  malades  et  d'infirmes  :  à  l'un  Régu^ 
lus  rend  la  vue,  à  un  autre  l'ouïe,  à  un  troisième  l'usage 
de  ses  jambes,  etc.  etc. 

Suit  un  portrait  du  personnage.  Il  est  beau,  doué  de 
toutes  les  vertus,  savant  avec  cela,  et  passé  maître  [péri- 
tittimus  doctor)  en  langues  grecque  et  latine.  C*était  bien 
le  cas  de  noter  qu'il  parlait  aussi  la  langue  des  Silva- 
oectes*  d'ajouter  à  la  liste  des  miracles  opiircs  en  sa  faveur 
U  connaissance  infuse  qu'il  on  avait  reçue,  ou  à  celles  do 
ses  vertus  la  longue  et  patiente  étude  qu'il  en  avait  dû 
(îiire  avant  de  pouvoir  se  mettre  à  prêcher.  Mais  sur  ce 
point,  silence  complet. 
Cependant  Lucien,  celui  de  ses  compagnons  à  qui 


88       CONGRÈS  ÀRGHÉOLOGTQnE  DE  FRANGE. 

Beauvais  était  échu  en  partage,  vient  d'y  être  martyrisé. 
Régulus,  appelé  par  le  troupeau  veuf  de  son  pasteur,  se 
hâte  d'accourir.  Dès  son  arrivée,  il  rend  la  vue  à  un 
aveugle,  en  mémoire  de  quoi  le  peuple  construit  aussitôt 
une  église.  Puis  il  se  met  à  parcourir  le  pays,  préchant, 
baptisant,  oignant  les  populations  du  saint  chrême,  dédiant 
les  églises  qui  s'élèvent  de  toutes  parts. 

Un  jour,  à  Kully,  l'afiluence  du  peuple  est  telle  que  le 
vaisseau  pourtant  vaste  {amplae  parietei)  de  l'église  ne 
peut  le  contenir.  Régulus  fait  alors  transporter  sa  chaire 
en  plein  vent,  sur  le  bord  d'un  étang.  Mais  son  discours 
se  prolonge  tellement  que  le  soir  arrive,  et  les  grenouilles 
l'interrompent  par  leurs  coassements.  Alors  il  leur 
ordonne  de  se  taire  toutes,  à  Texception  d'une  seule;  il 
est  immédiatement  obéi. 

Là-dessus,  l'auteur  ajoute  que  Régulus  a  opéré  encore 
tant  d'autres  merveilles,  que  jamais  personne  ne  pourra 
tout  raconter,  et  qu'il  mourut  le  3  des  calendes  d'avril, 
sous  le  règne  de  Notre-Seigneur  Jésus-Christ,  indication 
très-pieuse,  assurément,  mais  qui  n'aurait  rien  perdu  de 
sa  portée  au  point  de  vue  de  l'édification,  si  elle  avait  été 
jointe  à  quelque  chose  de  plus  précis  dans  l'ordre  chrono- 
logique. 

Eh  bien.  Messieurs,  qu'en  dites-vous?  Cette  pièce  vous 
semble-t-elle  offrir  les  caractères  d'un  document  histo- 
rique ? 

Pour  nous,  il  nous  est  difficile  d'accorder  la  moindre 
confiance  à  un  auteur  qui  parle  de  Paris  sous  Domitien 
ou  Nerva,  comme  à  peine  on  aurait  pu  commencer  à  le 
faire  au  temps  de  Constance  Chlore  ou  de  Julien;  qui 
parait  croire  que  dès  la  fin  du  i"  siècle,  Tusage  du  latin  ou 
du  grec  était  répandu  dans  toute  laGaule;  qui  certainement 
ignore  quelles  difficultés  saint  Irénée  éprouvait  encore  à 


XL1T*   SS8S10N,   A  SERLIS.  89 

(aire  comprendre,  non  pas  des  contemporains  de  saint 
CUinent,  mais  de  leurs  petits-fils,  dans  une  ville,  non  pas 
fwrdue  comme  la  cité  des  Sylvanectes  derrière  les  bois  et 
les  marais  de  la  Gaule  celtique,  mais  située  en  pleine 
>arbonnaise,  pourvue  d'un  athénée  avec  des  chaires,  des 
«coles,  et  pleine  de  Grecs  et  de  Romains;  un  auteur  qui,  à 
part  cette  vague  et  défectueuse  indication  de  saint  Clé- 
ment successeur  de  saint  Pierre,  sorte  de  lieu  commun 
dont  remploi  se  retrouve  dans  cent  pièces  analogues,  ne 
peut  préciser  aucune  date;  qui,  dans  tout  le  cours  d'un 
très-long  récit,  n'a  pas  un  trait,  pas  un  mot  qui  révèle 
quelque  idée  ni  des  croyances,  ni  des  mœurs,  ni  de  l'état 
social,  ni  de  rien  de  ce  qui  pouvait,  soit  faciliter  la  mis- 
sion de  Régulus,  soit  lui  faire  obstacle;  qui  ne  sait  qu'en- 
tasser miracle  sur  miracle,  ayant  soin  de  nous  avertir 
qu'il  en  omet  une  foule,  parce  qu'il  y  en  a  tant  que  per- 
sonne ne  pourrait  tout  raconter;  qui  présente  les  régions 
de  Sentis  et  de  Beauvais  comme  envahies  par  l'Évangile 
et  définitivement  conquises  à  Jésus -Christ  dès  le  temps 
de  leurs  premiers  apôtres. 

Quoi!  voilà  des  populations  entières  converties  à  coups 
de  miracles  (et  de  fait  il  n'y  avait  guère  alors  d'autre 
moyen  de  les  convertir),  dos  églises  bâties  partout,  un 
nombre  de  fidèles  pour  qui  leurs  vastes  vaisseaux  sont 
déjà  trop  étroits.  Fort  bien!  une  chrétienté  pareille  ne  va 
pas  sans  doute  rentrer  tout  à  coup  dans  le  néant  d'où  elle 
vient  de  sortir  si  merveilleusement,  et  nous  allons  la  voir 
se  conserver,  sinon  s'étendre,  puisqu'elle  ne  parait  avoir 
plus  rien  à  gagner,  sous  les  successeurs  de  Régulus. 
L'histoire  dira  ses  luttes  héroïques  sous  les  persécuteurs 
qui,  pendant  deux  siècles  encore,  ne  laisseront  guère  de 
lepos  à  l'Église;  elle  comptera  ses  martyrs,  elle  attestera 
du  moins  qu'il  y  en  a  trop  pour  les  compter. 


90  GONGRÈS  ARCIIÉOLOOIQUE  DE  FRANCE. 

Au  lieu  de  cela,  rien,  Messieurs,  rien  absolument  jif  ^ 
qu'au  Yi"  siècle,  excepté  sept  noms  (i)  qu'on  prêtée^  ^ 
représenter  la  suite  des  pontifes  entre  saint  Régulus  ^ 
saint  Lévangius,  évoque  de  Senlis,  le  premier  dont  o^ 
sache  quelque  chose,  et  qui  mourut  en  513. 

Ainsi,  neuf  pontifes  auraient  rempli  un  intervalle  d^ 
de  quatre  cent  vingt  ans  environ,  c'est-à-dire  qu'ils  au- 
raient gouverné  en  moyenne  l'église  de  Senlis  chacun 
pendant  plus  de  quarante-six  ans! 

Mais,  dit-on,  il  y  a  eu  des  interruptions  du  sacerdoce 
causées  par  les  persécutions. 

Comment!  au  sein  d'un  peuple  gagné  en  masse  à 
l'Évangile  par  tant  de  miracles  que  personne  ne  pour- 
rait les  raconter  tous,  voilà  que  la  religion  dépérit  bientôt 
au  point  que  nul  ne  se  trouve  plus  pour  porter  le  fardeau 
do  l'épiscopat!  Et  ce  retour  aux  ténèbres  dont  elle  avait 
été  si  merveilleusement  tirée,  laisse  si  peu  de  traces 
dans  les  souvenirs  de  la  population,  que  pas  un  seul 
des  successeurs  immédiats  de  saint  Régulus  n'est  seule- 
ment honoré  comme  martyr! 

D'ailleurs,  le  renouvellement  rendu  nécessaire  par  cet 
anéantissement  de  tous  les  fruits  d'un  premier  apostolat, 
quand,  comment,  par  qui  a-t-il  été  opéré?  Il  n'y  en  a 
pas  trace.  Messieurs,  en  sorte  que,  pour  accorder  créance 
à  l'auteur  de  notre  légende,  il  faudrait,  entre  autres  énor- 
mités,  admettre  absolument  celle-ci,  que  nul  souvenir  ne 
se  serait  conservé  d'une  seconde  évangélisation  dont 
l'effet  dure  encore,  tandis  qu'on  aurait  des  détails  précis 


(1)  Ces  noms  sont,  (rapr6s  le;;  ailleurs  de  la  Gaiiia  Chri^ 
«//rrna  ;  Niccnus,  Mansuolus,  Ventislus,  Tanitus,  Jocundos, 
Protatus,  Âlodestus. 


XLTV*  8B8STOIf,   A  SEITLIS.  9t 

'I  rirooostaDciés  au   sujet  d'une  première  dont  tout  le 

lit  se  serait  rapid^ent  perdu  I 

Et  puis,  comment  admettre  Texistence  d'une  tradition 

remontant  à  saint  Clément,  laquelle  aurait  traversé  au 

xr  et  au  in*  siècles  huit  des  grandes  persécutions,  au  y* 

Ws  formidables  invasions  qui  renouvelèrent  la  face  de  la 

Gaule,  et  n'aurait  rien  gardé  de  ces  terribles  secousses, 

tandis  qu'elle  conservait  avec  tant  de  soin  l'histoire  des 

grenoailles  de  Rully? 

Pourtant,  Messieurs,  ce  n'est  pas  un  auteur,  c'est  cent 
parmi  les  légendaires  qui  rattachent  nos  fondateurs  d'é- 
glises à  saint  Pierre  ou  à  saint  Clément.  Il  semble  qu'à  un 
moment  donné,  probablement  après  les  invasions  du 
T*fiècle,  les  souvenirs  aient  perdu  leur  précision,  et  que 
bns  une  ignorance  à  peu  près  générale,  la  passion  du 
merreillleux  jointe  à  je  ne  sais  quel  amour-propre  de 
docher,  peut-être,  hélas  !  à  des  motifs  moins  nobles,  ait 
tût  éclore  de  toutes  parts  ces  récits  dans  lesquels  on  reliait 
on  saint  au  premier  pape  ou  à  celui  qu'on  croyait  son 
nioesseur  immédiat,  comme  on  lui  faisait  anéantir  des 
dngons,  guérir  des  malades,  ressusciter  les  morts,  ou 
porter  sa  tète  dans  ses  mains  après  son  martyre.  Tout 
cela  rehaussait  le  mérite  du  personnage,  et  profitait  à 
l'église  ou  au  monastère. 

Eh  bien,  s'il  faut  vous  dire,  Messieurs,  toute  ma  pensée 
SOT  les  invraisemblances,  pour  ne  pas  dire  les  impossibi- 
lités entassées  dans  de  pareils  documents,  je  n'en  vois  pas 
de  plus  signalée,  de  plus  flagrante,  que  la  date  assignée 
par  eux  à  la  diffusion  du  christianisme  dans  le  centre  et  le 
nord  de  la  Gaule. 

Ces  parties  n'étaient  pas,  en  effet,  avant  l'an  100,  péné- 
trées par  la  civilisation  romaine,  comme  Tétait  déjà  la 
Narbonnaise;  les  voies  ne  s'y  trouvaient  pas  encore  pré- 


9i  CON'.RÈS  ARCUÈiItLoGIOrK  !«  FIAXGE. 

parées  et  par  le  tliscrëdit  des  dieux  officiels  et  par  la  diffu- 
sion dos  idées  monothéistes,  double  effet  du  temps  et  du 
prosélytisme  judaïque,  dont  la  Narbonnaise  était  redevable 
à  ses  centres  commerciaux.  Bien  autre  était  la  résistanoe 
offerte  à  la  foi  nouvelle  par  le  druidisme,  encore  pleine- 
ment florissant  dans  la  Breta^e,  le  centre  et  le  nord, 
par  les  cultes  germains  qui  avaient  pénétré  TAlsaoe  et  la 
Bourgogne,  par  rattachement  profond  des  Gaulois  à  leurs 
croyances  et  à  leurs  mœurs  traditionnelles,  par  les  habi- 
tudes de  vie  solitaire,  égoïste,  indépendante,  dans  les- 
quelles chaque  peuplade  était  rentrée  depuis  Teffort  com- 
mun contre  César. 

Un  siècle  et  demi  ou  deux  siècles  plus  tard,  l'Aquitaine, 
la  Celtique,  la  Belgique,  étaient  percées  dans  toutes  les 
directions  de  voies  telles  que  les  Romains  les  faisaient, 
vérifiant  à  la  lettre  dans  leur  construction  la  parole  de 
l'Ëvangile  :  c  Tuutc  vallée  sera  comblée,  toute  coUiue 
sera  abaissée  (1).  »  Des  cités  importantes,  cités  toutes 
romaines,  avaient  surgi  sur  divers  points  de  leur  par- 
cours, là  où  il  n'y  avait  auparavant  que  des  habitations 
éparses,  tout  au  plus  une  enceinte  grossièrement  fortiQée. 
Les  cent  peu[)lus  de  la  Gaule  se  trouvaient  enserrés  dans 
les  liens  d'une  organisation  qui  les  forçait  à  des  rapports 
multiples,  soit  entre  eux,  soit  avec  les  Romains.  Le  chan- 
gement (lu  droit  public,  le  renversement  du  pouvoir  des 
druides,  l'abolition  des  sacrifices  humains,  avaient  pro- 
gressivement modifié  Tétat  dos  esprits.  L'usage  de  la 
langue  de  Rome,  la  connaissance  de  sa  littérature,  avaient 
fait  davantage  encore.  Enfin,  le  mélange  des  dieux  de 
rKinpire  avec  ceux  do  la  Gaule  avait  ébranlé  déjà  des 
convictions  séculaires,  les  vieilles  croyances  se  détacliaient 

(I)  Saint  Luc,  c.  ni,  v.  5. 


XUY*  SESSION,   A  SENLIS.  93 

de  l'âme  du  peuple;  le  besoin  d'une  autre  foi  se  faisait 
sentir,  en  même  temps  que  l'habitude  du  changement 
en  matière  religieuse  prédisposait  les  oreilles  à  recevoir 
sans  trop  de  surprise  la  première  annonce  de  la  bonne 
nouvelle. 

Il  me  parait  impossible,  Messieurs,  quand  on  compare 
les  deux  époques,  de  ne  pas  être  frappé  du  terrain  tout 
différent  qu'elles  offraient  pour  la  prédication  de  l'Évan- 
gile. Assurément  la  difSculté  devait  être  grande  pour  les 
missionnaires,  même  après  l'an  250  (la  lutte  qui  se  pro- 
longea durant  quatre  siècles  encore  dans  nos  contrées 
entre  le  paganisme  et  le  christianisme,  ne  peut  laisser 
un  doute  à  cet  égard);  mais,  bien  que  difficile,  leur 
oeuvre  parait  alors  possible.  Il  n'en  est  pas  de  même  un 
ûècle  et  demi  ou  deux  siècles  plus  lot. 

Ah!  sans  doute,  Dieu  pouvait  envoyer  chez  nous 
ses  missionnaires  dès  les  temps  apostoliques,  comme  il 
pouvait  leur  faire  guérir  des  malades,  ressusciter  des 
morts,  même  anéantir  des  dragons,  quand  il  eût  dû  créer 
des  dragons  tout  exprès  pour  cela.  Nous  ne  repoussons  pas 
de  pareils  faits  en  eux-mêmes;  mais,  pour  les  admettre, 
nous  demandons  des  preuves.  Nous  en  demandons  sur- 
tout pour  celui  de  tous  qui  en  a  le  plus  besoin,  parce 
qu'il  est  de  tous  le  plus  invraisemblable,  le  fait  de  l'évan- 
gélisation  de  la  Gaule  antérieurement  à  cette  préparation 
providentielle  qui  précéda  TÉvangile  dans  tout  le  reste 
de  l'Empire. 

Où  sont  les  témoins?  Nous  n'en  connaissons  pas  un 
seul,  et  l'on  ne  produit  rien,  que  des  récits  anonymes. 

La  date  de  ces  récits  peut-elle  au  moins  être  fixée?  \tï 
des  efforts  inouïs  ont  été  faits  par  des  hommes  aussi 
pleins  d'érudition  que  de  zèle,  pour  démontrer  que  dès 
le  Yi*  siècle,  même  dès  le  V  siècle,  on  rapportait  aux 


94  CONOaÈS  AaCUÉOLOGIOUK  DK  FEADiGE. 

temps  apostoliques  la  mission  d'ua  saint  Martial  à  LimO' 
ges,  d*un  saint  Clément  à  Metz,  d'un  saint  Denys  à  Paii 

ou  d'un  saint  Rieul  à  Seulis. 

Admettons  qu'on  ait  réussi.  Qu'aura- 1- on  prouvé 
Souticndra-t-on  que,  par  un  étonnant  contraste  avec  k 
siècles  présents,  tout  ce  qui  s'écrivait  alors  était  vrai? 

Dira-t-on  que  ces  antiques  parchemins  ne  sont  que  di 
témoins  de  la  tradition?  que  leur  témoignage  est  celui  c 
la  foi  publique  des  églises  qu'ils  concernent?  On  l'affirmi 

je  le  sais;  mais  on  ne  l'a  jamais  prouvé,  du  moins 
ma  connaissance,  tandis  que  les  arguments  de  Técole  hii 
torique  en  faveur  de  l'affirmation  contraire  me  paraisse] 
décisifs. 

Que  plus  tard,  et  grâce  à  un  concours  de  circonstano 
que  je  ne  veux  pas  examiner,  on  ait  pu  croire  à  cet 
prétendue  tradition,  j'en  tombe  d'accord;  mais  c'e 
d'une  manière  absolument  subreptice  qu'elle  s'est  intn 
duitc  jusque  dans  la  liturgie.  Ni  les  Eusèbe,  ni  les  Jérômi 
ni  les  Grégoire  de  Tours,  ni  les  Sulpice  Sévère,  ni  u 
seul  des  personnages  savants  et  saints  qui  ont  traité,  di 
le  vr,  le  v%  et  même  le  iV  siècle,  la  question  de  nos  or 
giucs,  n*a  cru  que  révangélisalion  complète  des  GauL 
datAt  des  temps  apostoliques.  Quant  à  ces  pièces  an< 
nymosoù  se  reflète  une  pareille  opinion,  si  elles  cxistaiei 
dt^jÀ  ilo  leurs  temps,  une  chose  parait  claire,  c'est  qu'i 
les  tonaiont  dans  le  plus  profond  mépris. 

Iri«  Mcssioiirs.  j'arrive  à  la  partie  principale  de  cet 
i^tudo.  .rai  nunitro  pourquoi  les  arguments  de  l'éco 
h^^iiMidairt'  1)0  uio  sonihlont  pa^  valables;  il  me  reste 
vouïi  diiv  pour%|uoi  Tocolo  hiétoiique  base  à  mes  yeux  s 
alliiiuations  sur  los  puMvcs  le*  plus  sérieuses. 


XUV*  SESSION,  A  SEMLIS.  95 

II*  PARTIE. 

DKS  ARGUMENTS  DE  l'ÉGOLE  ilISTOElOUS. 

L'école  hi;?torique  appuie  ses  affirmations  sur  deux 
sortes  de  documents  :  1**  les  historiens;  i2°  Tépigraphie. 

I. 

LES  HISTORIENS. 

En  fuit  d'historiens,  nous  citerons  principalement  saint 
Grégoire  de  Tours,  Sulpice  Sévère,  saint  Jérôme,  Eusèbe, 
dont  les  témoignages  sont  positifs.  Nous  mentionnerons 
«unité  quelques  autres  auteurs  dont  le  silence  nous 
semble  d'un  poids  considérable. 

§  I.  —  Saini  Grégoire  de  Tours. 

Voici,  Messieurs,  non  plus  un  anonyme  sans  autorité, 
mais  un  auteur,  que  ses  antécédents,  ses  relations,  sa 
haute  situation,  la  noblesse  de  son  caractère,  l'époque  à 
laquelle  il  écrivit,  recommandent  entre  tous.  Né  en  5U, 
d'une  Ikniille  illustre,  au  pays  des  Arvernes,  petit- neveu 
de  saibt  Dizier,  évAque  de  Lyon,  neveu  de  saint  Gall,  évé- 
•{ue  de  Clermont,  élevé  par  eux  et  par  saint  Avit,  archi- 
diacre et  successeur  de  saint  Gall,  Grégoire  devint  évéque 
de  Tours,  et  gouverna  vingt  et  un  ans  cette  église.  11  avait 
beaucoup  voyagé  dans  la  Gaule.  Ses  nombreux  écrits 
'êmoignent  de  l'élévation  de  son  esprit  non  moins  que  de 
irieudue  de  ses  connaissances,  et  quelques  défauts  qu'on 
puisse  leur  icprocher,  personne  n'osera  nier  qu'ils  éma- 
oeot  d'un  homme  curieux  de  s'instruire  et  d'instruire 


i  ■ 


96  CONGRÈS  ARGUÂOLOOIOUK  DB  ffEANGB. 

les  autres.  Sil  y  eut  au  vi''  siècle  un  personnage  informé 
des  circonslances  qui  avaient    accompagné   Tévangéli- 
sation  de  notre  pays,  certes  ce  fut  celui-là.  N'eu8:$ioDS- 
nous  de  lui  que  des  écrits  sans  aucun  rapport  direct  avec 
la  question,  nous  devrions  encore  les  étudier  avec  le  soin 
le  plus  assidu,  et  noter  au  nombre  de  nos  renseignements 
les  plus  précieux  le  moindre  membre  de  phrase  dans  le* 
quel  nous  croirions  trouver  quelque  reflet  de  la  pensée  de 
Grégoire  sur  les  origines  de  nos  églises.  Eh  bien,  Mes- 
sieurs, cet  homme  a  consacré  précisément  ses  veilles  et 
son  savoir  à  celle  de  toutes  les  études  qui  pouvait  avoir 
avec  l'évangélisation  des  Gaules  le  rapport  le  plus  direct: 
il  nous  a  légué  une  histoire  des  Francs. 

Certes,  si  tant  d'églises  avaient  été  fondées  chez  nous 
dès  les  temps  apostolique?,  si  la  fleur  des  personnages 
dont  il  est  fait  mention  dans  l'Évangile  ou  dans  les  Actes 
des  Apôtres  se  fût  partagé  les  cantons  de  la  Gaule  poui 
les  conquérir  presque  tous  à  Jésus-Christ,  si  nos  pères 
avaient  eu  pour  premiers  instituteurs  de  leur  foi,  non- 
seulement  Lazare  et  ses  sœurs,  mais  saint  Pierre,  saint 
Paul,  saint  Luc  et  saint  Philippe,  Joseph  d'Arimathie, 
Nathanaël,  Zachée,  Simon  te  lépreux,  Denys  l'Aréopagite, 
Sergius  Paulus,  Trophime,  Crescent,  Lin,  Clément,  plus 
douze  ou  quinze  des  soixante-douze  disciples,  sans 
compter  l'hôte  de  la  Sainte  Famille  en  Egypte,  son  servi- 
teur à  Nazareth,  l'aveuglc-né,  l'enfant  béni  par  Notre-Sei- 
gneur,  le  flls  du  Cyrénéen,  l'homme  de  la  dernière  Gène, 
un  domestique  du  cénacle,  et  d'autres  peut-être  que  d'autres 
légendes  font  venir  dans  nos  contrées;  si  la  plupart  d'entre 
eux  les  eussent  arrosées  de  leur  sang,  Grégoire  Taurait- 
il  ignoré?  Le  sachant,  l'aurait-il  passé  sous  silence,  alon 
que,  commençant  son  histoire  par  un  résumé  des  événe- 
ments ecclésiastiques  qui  précèdent  l'arrivée  des  Francs 


XLIV*  SESSION,   A  SENLIS.  97 

au-delà  du  Rhin,  il  parle  explicitement  de  NéFon,  de  Do- 
mitien,  de  Trajan,  les  trois  premiers  persécuteurs?  Au  lieu 
décela,  silence  complet  jusqu'à  Marc-Aurèle  (161-180.) 

Arrivé  à  cet  empereur,  Thistorien  des  Francs  men- 
tionne les  martyrs  de  saint  Justin  et  de  saint  Polycarpe. 
Puis  il  ajoute  :  a  Dans  les  Gaules  surtout,  un  grand 
nombre  de  martyrs  ont  remporté  pour  le  nom  de  Jésus- 
Christ  la  couronne  céleste;  on  conserve  encore  fidèlement 
parmi  nous  la  relation  de  leurs  souffrances.  Au  nombre  de 
ces  Taillants  soldats  fut  Pothin,  premier  évéque  de  Lyon, 
qui,  plein  de  jours,  expira  dans  les  supplices.  Son  succes- 
seur, le  bienheureux  Irénée,  que  saint  Polycarpe  avait 
envoyé  à  Lyon,  convertit,  par  ses  prédications,  presque 
toute  la  ville  au  christianisme.  Dans  une  nouvelle  persé- 
cution, la  cinquième,  ordonnée  par  Sévère,  le  démon  se 
senrit  de  ce  tyran  pour  déclarer  à  la  religion  du  Christ 
une  guerre  si  cruelle  que  Ton  vit  égorger  une  multitude 
innombrable  de  fidèles,  et  des  fleuves  de  sang  inonder  les 
places  publiques  (1).  d 

Notons  avec  soin  ces  expressions  :  «On  conserve  encore 
fidèlement  parmi  nous  la  relation  de  leurs  souffrances,  )> 
Quorum  passionum  historiœ  apud  nos  fideliter  retinentur . 
Elles  ne  sont  pas  d'un  homme  à  qui  les  documents  font 
défaut. 

Après  cela,  il  faut  aller  jusqu'à  la  persécution  de  Decius 
pour  trouver  une  nouvelle  mention  des  Gaules,  dans  le 
passage  suivant,  objet  de  tant  de  controverses  :  «  Sous 
l'empereur  Decius  la  guerre  fut  déclarée  de  nouveau  au 
christianisme,  et  l'on  fit  de  ses  fidèles  un  tel  carnage  que 
les  martyrs  ne  sauraient  se  compter.  En  co  temps-là,  sept 
hommes  qui  avaient  reçu  la  consécration  épiscopale  furent 

.1)  IJLstoire  des  Francs,  liv.  ï,  cli.  xxvi. 

XUV«  SESSION.  7 


98       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

envoyés  dans  la  Gaule  pour  y  prêcher,  comme  on  l'ap- 
prend par  les  actes  du  saint  martyr  Saturnin.  Nous  y 
lisons  en  effet  que  sous  le  consulat  de  Deciuset  de  Gratus, 
ainsi  qu'on  en  conserve  un  souvenir  fidèle,  la  ville  de 
Toulouse  reçut  son  premier  évêque,  saint  Saturnin.  Voici 
les  noms  de  ceux  qui  vinrent  dans  notre  pays  :  à  Tours, 
l'évoque  Gatien;  à  Arles,  l'évéque  Trophime;  à  Nar- 
bonne,  l'évéque  Paul  ;  à  Toulouse,  l'évéque  Saturnin  ; 
chez  les  Parisiens,  Tévéque  Denys;  chez  les  Arvernes, 
l'évéque  Seréraoiue  ;  à  Limoges,  l'évéque  Martial.  » 

Ici,  Messieurs,  git  le  point  capital  du  débat.  Tout  a  été 
dit  pour  infirmer  l'autorité  d'un  passage  si  net  et  si  pré- 
cis. Voyons  à  quoi  tant  d'efforts  ont  abouti. 

Premièrement,  on  accuse  saint  Grégoire  de  citer  inexac^ 
tement  les  actes  de  saint  Saturnin.  Et  pourquoi?  parce 
que,  en  1793,  deux  érudits  espagnols,  Ménabrea  et  Ma- 
cédo,  découvrirent  à  Florence,  dans  la  bibliothèque 
Riccardi,  une  copie  des  actes  de  saint  Saturnin  qui,  au  lieu 
de  la  mention  du  consulat  de  Oecius  et  de  Gratus,  si  con- 
forme à  l'usage  antique,  porte  cette  autre  mention,  aussi 
vague  que  peu  usitée,  croyons-nous,  dans  les  documents 
des  premiers  siècles  :  sous  Claude,  successeur  de  Caligula. 
Mais  ce  manuscrit  que  les  prétentions  les  plus  exagérées 
ne  sauraient  faire  remonter  au-delà  du  x®  siècle,  parait 
seul  de  son  espèce.  Surius,  qui  édita  le  premier  les  actes 
de  saint  Saturnin,  en  1570,  y  avait  lu  la  même  leçon  que 
saint  Grégoire  de  Tours,  et  Dom  Ruinard,  qui,  pour  les 
insérer  dans  son  excellente  collection  des  Acta  Sincera, 
prit  la  peine  de  les  collationner  avec  de  nombreux  ma- 
nuscrits (i),  dont  il  donne  avec  soin  les  variantes,  n'en  a 

(1)  L'un  de  ces  manuscrits,  appartenant  h  i'abbaye  de  Saint- 
Maur-des-Fossés,  remontait  au  commencement  du  ix*  siècle;  par 


XIIV*  SESSION,   A   SBNUS.  99 

point  connu  d'autres.  C'est  donc  bien  évidemment  l'au- 
teur du  manuscrit  de  Florence  qui  a  mal  copié,  et  non 
saint  Grégoire  qui  a  mal  cité. 

Secondement,  on  rapproche  le  chapitre  xxyiii  de  saint 
Grégoire  des  actes  de  saint  Ursin,  tels  qu'on  les  trouve  à 
la  bibliothèque  nationale  (Manuscrit  de  saint  Germain, 
fonds  de  M.  de  Harlay,  numéro  369).  Or,  dans  ces  actes, 
on  retrouve  les  sept  mêmes  noms  d'évéques  missionnaires, 
sauf  celui  de  saint  Martial,  dont  la  place  est  raturée,  et 
saint  Ursin  est  désigné  comme  leur  compagnon,  en  quoi 
le  récit  s'accorde  avec  celui  de  VHUtoire  des  Francs.  Mais 
en  même  temps  l'apôtre  de  Bourges  est  donné  comme 
l'un  des  soixante-dix  {sic)  disciples  du  Seigneur,  envoyé 
par  les  apôtres.  On  en  conclut  que  les  sept  vinrent  aussi 
dès  les  temps  apostoliques,  et  saint  Grégoire  est  démenti. 

Mais,  Messieurs,  n'est-ce  pas  procéder  bien  lestement? 
Avant  d'opposer  au  témoignage  de  l'évéque  de  Tours, 
corroboré  par  celui  de  Sulpice  Sévère,  par  celui  de  saint 
Jérôme,  par  celui  d'Ëusèbe,  et  par  tant  d'autres  preuves, 
ainsi  que  nous  vous  le  ferons  voir,  un  autre  témoignage, 
avant  surtout  de  déclarer  ce  dernier  prépondérant,  ne 
conviendrait- il  pas  de  savoir  au  moins  de  qui  il  émane? 
Or,  Tauteur  aussi  bien  que  la  date  des  prétendus  actes  de 
saint  Ursin,  sont  inconnus. 

Cette  pièce  a-t-elle  au  moins  les  allures  d'un  document 
sérieux  (1)?  Qu'il  nous  suffise,  Messieurs,  de  remarquer 

conséquent  ii  était  de  beaucoup  plus  ancien  que  celui  de  la 
bibliothèque  Riccardi. 

(0  Ceux  de  nos  lecteurs  qui  ne  pourraient  se  reporter  au 
maouscrit  de  la  bibliothèque  nationale,  retrouveront  le  texte 
dans  l'ouvrage  de  M.  Faillon,  Monuments  incdiis...  t.  II, 
p.  425  et  suivantes. 


100      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

qu'après  avoir  constaté  le  succès  très-restreînt  des  prédi- 
cations d'Ursin,  en  quoi  il  est  d'accord  avec  Grégoire  de 
Tours,  l'auteur  parle  d'une  multitude  innombrable  de 
fidèles  gagnés  par  lui,  en  quoi  il  contredit  son  propre 
récit,  non  moins  que  la  vraisemblance  et  i'bistoire 
sérieuse;  qu'il  fait  de  Léocadius  un  gouverneur  général  de 
la  Bourgogne  et  de  l'Aquitaine,  tandis  que  Grégoire  de 
Tours,  qui  descendait  de  Léocadius  et  qui  parle  de  lui 
très-explicitement,  n'eu  fait  qu'un  sénateur. 

Et  parce  que,  soit  ignorance,  soit  flatterie,  un  pareil 
écrivain  accole  la  date  des  temps  apostoliques  aux  quelques 
vérités  historiques  qui  subsistent  dans  son  récit,  voici 
qu'un  savant,  un  saint,  un  homme  à  qui  sa  situation, 
son  caractère  ne  permettaient  pas  de  rester  étranger  à  la 
question,  un  homme  plus  à  même  que  personne  d'être 
renseigné,  Grégoire  de  Tours,  en  un  mot,  est  démenti  ! 
Et  avec  lui  Sulpice-Sévère,  saint  Jérôme  et  Eusèbe, 
sans  parler  des  autres!  En  vérité,  Messieurs,  si  de  pareils 
procédés  de  critique  devaient  prévaloir,  que  nul  d*entre 
nous  ne  travaille  plus  à  écrire  l'histoire  des  événements 
même  qu'il  a  le  mieux  connus.  Loyauté,  savoir,  talent, 
labeur,  rien  n'y  ferait.  Si  dans  quatre  ou  cinq  cents  ans 
le  premier  venu  s'avisait  d'écrire  des  choses  en  désaccord 
avec  nos  affirmations,  des  gens  se  trouveraient  quelques 
générations  plus  tard  pour  exhumer  sa  prose  de  la  pous- 
sière, et  tout  fiers  de  leur  belle  trouvaille,  proclameraient 
que  nous  avons  menti. 

En  troisième  lieu,  on  a  tenté  de  mettre  saint  Grégoire 
eu  contradiction  avec  lui-mômc.  Et  comment?  Parce  qu'il 
dit  de  saint  Ursin  (Gloire  des  confesseurs,  ch.  clxxx)  et 
de  saint  Saturnin  (Gloire  dos  martyrs,  ch.  cxLviii)  qu'ils 
furent  ordonnés  par  les  disciples  des  apôtres,  ab  aposiolth 
rum  dtscijjults.  Mais  rien  n'est  plus  vague  que  celte  exprès- 


XLIV  SESSION,   ▲  SENLIS.  104 

sioD,  et  les  règles  de  la  saine  critique  ne  permettent  pas 
de  l'interpréter  autrement  qu'à  l'aide  des  passages  simi- 
laires du  même  auteur.  Qu'on  se  serve  des  chapitres  xxviii 
et  XXIX  de  VBistoire  des  Francs  pour  élucider  le  texte  de 
la  Gloire  des  Martyrs  et  celui  de  la  Gloire  des  ConfeS' 
mnrs,  et  l'on  verra  que  saint  Grégoire  n'a  pu  vouloir  par- 
ler à  propos  des  saints  Ursin  et  Saturnin  des  disciples 
mmédiats  des  apôtres. 

Autre  contradiction  prétendue.  Dans  la  Gloire  des  Mar- 
tyrs  (ch.  LVi),  l'évéque  de  Tours  dit  de  saint  Eutrope, 
évéque  de  Saintes  :  A  beato  Clémente  episcopo  fertur  di- 
nctvs  m  Gallias  (i).  Mais  ce  n'est  là  qu'un  on-dit,  fertur: 
on  rapporte,  il  y  a  des  gens  qui  disent.  Pour  qu'il  y  eût 
contradiction,  il  faudrait  que  Grégoire  niât  ailleurs  que 
l'éloignement  des  temps,  la  perturbation  jetée  dans  les 
souvenirs  par  les  terribles  invasions  du  y*  siècle,  le  défaut 
général  d'études,  eussent  produit  dès  son  époque  dans 
plus  d'un  cerveau  les  confusions  les  plus  étranges  entre 
les  origines  de  telle  église  particulière  et  celles  du  chris- 
tianisme lui-même.  Or,  il  n'a  nié  nulle  part  l'existence 
des  récits  auxquels  cette  confusiou  donnait  lieu,  et  s'il 
survint  à  cet  égard  quelques  changements  dans  son  esprit, 
c'est  qu'à  l'époque  où  il  écrivit  la  Gloire  des  Martyrs,  il 
pouvait  supposer  encore  que  l'opinion  de  ceux  qui  fai- 
saient remonter  l'église  de  Saintes  aux  temps  apostoliques 
n'était  pas  absolument  indigne  d'une  mention,  tandis  que 

(I)  Les  auteurs  de  la  Gallia  christiana  ne  relèvent  pas  de 
date  certaine  dans  l'histoire  de  Téglise  de  Saintes  avant  Tan  51 1. 
Celle  année-là,  Pierre  !*••,  son  cinquième  évêque,  assiste  au 
concile  d'Orléans.  Y  a-l-il  quelque  apparence  que  cinq  évoques 
aient  rempli  plus  de  quatre  siècles?  Voyez  à  ce  sujet  ce  que 
Doas  disons  p.  A  01  pour  l'église  de  Sentis. 


102      CONGRÈS  AECHÉOLOGIODS  DE  FRANCE. 

plus  mûr  et  préparé  par  des  études  spéciales  à  ionBù" 
îoire  dei  Franci,  il  ne  crut  pas  devoir  faire  à  de  pareille^ 
idées  rhonneur  d'en  parler  seulement* 

Quatrième  objection.  Grégoire,  dit-on,  est  en  contra-- 
diction  avec  des  écrivains  antérieurs.  Mais  lesquels?  Oa 
cite  Irénée,  Eusèbc,  Lactance,  et  les  sept  évéques  dans 
l'épitro  à  Uadegonde  (1).  Vous  les  avez  entendus,  Mes- 
HJours,  et  vous  savez  quelle  différence  existe  entre  ce  qu'on 
prétend  leur  faire  dire  et  ce  qu'ils  ont  dit.  De  plus,  vous 
verrez  tout  à  l'heure  combien  il  s'accorde  avec  Sulpiœ 
Sévère,  saint  Jérôme  et  Rusèbe,  sans  parler  des  autres  (9). 

(Cinquième  et  dernière  objection.  Grégoire,  dit-on,  s'est 
trompé  |)Our  Trophime  d'Arles  et  Paul  de  Narbonne. 

Il  y  a  là,  on  effet,  un  point  obscur,  car  il  parait  acquis 
h  l'histoire  que  les  églises  d'Arles  et  de  Narbonne  avaient 
été  fondées  antérieurement  à  l'an  3^0  par  deux  person- 
nagtw  nommés  rospectivement  Trophime  et  Paul.  Mais 
l'historien  dos  Knmcs  ne  dit  pas  que  ceux  dont  il  parle 
fussent  los  tiuidateurs.  Tout  ce  qu'on  peut  conclure  de  la 
mnnièrr  do  s*oxprimor«  c'est  que  vers  950  les  sièges 
dWrloii  ot  do  NarlHunio  so  tn^uvaiont  vacants  et  que  deux 
dos  ;(opt  évé(|uos  missionnaires  en  prirent  possession. 
Ouaut  ;^  la  sinulittido  dos  noms,  no  sVxpliquerait-elle  pas 
par  uno  praliquo  dont  on  tnnivo  d*autres  exemples,  pra- 
fii|«o  qui  a  fitii  pur  pn^valoir  sur  lo  siéfc  de  Rome,  où 
ollo  f^t  on*vn^  on  xuuour,  lo  choix  d'un  nouveau  nom 
\M\T  los  Mouvoauv  oxôqut^ .'  H  s<T.u;  tout  naturol  que  ceux 
qui  Nouinout  nv\;oUhr  Thonîaco  lU  s  s;ùuts  fondateurs  des 
OjjhM^*  dWrIos  i\  s\c  NarlsMiuo,  aionî  voulu  t^re  appelés 
lAMumo  ou\. 


XLIT*  SESSION,   A  S£NUS.  403 

Qui  U0U8  dit  aussi  que  dans  les  sept  il  n'y  en  eut  pas 
tout  simplement  deux  qui  portaient  les  noms  des  deux 
foodateurs,  et  que  cette  coïncidence  ne  fut  pas  le  motif 
qui  fit  choisir  pour  l'un  l'évéché  de  Narbonne,  pour 
l'autre  celui  d'Arles? 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  correspondance  de  saint  Cyprien 
{Ep.  ui,  ad  AntanianuTn)  nous  apprend  qu'il  y  avait  en 
Gaule,  au  milieu  du  m*  siècle,  un  évéque  du  nom  de 
Trophime.  Un  peu  plus  tard^  la  même  correspondance 
Ep.  LXTli,  ad  StepAanum)  nous  montre  Marcien  évéque 
f  Arles.  Admettons  que  Trophime  soit  précisément  le  pré- 
décesseur de  Marcien,  et  voilà  Grégoire  de  Tours  justifié. 

Mais,  Messieurs,  l'historien  des  Francs  n'a  pas  besoin 
de  justification.  C'est  à  ceux  qui  l'attaquent  de  prouver 
qu'il  s'est  trompé;  or,  s'ils  affirment,  nous  ne  voyons 
pas  qu'ils  prouvent. 

Enfin,  trouvât-on  dans  son  texte  une  erreur  portant 
sur  un  ou  deux  noms,  et  fût-on  en  mesure  d'établir  que 
oette  erreur  est  imputable  à  l'auteur  lui-même  et  non  à 
»8  copistes,  que  son  autorité  u*en  diminuerait  pas  à  nos 
yeux.  Qu'est-ce,  en  effet,  qu'un  nom  d'homme,  un  nom 
de  ville,  dans  la  question  générale  qui  nous  occupe  ?  Un 
détail,  important  peut-être,  mais  rien  qu'un  détail.  Nous 
admettrions  sins  grande  dilTicuUé  que  saint  Grégoire  ait 
pu  glisser  daus  sou  récit,  soit  par  iDadvertancc,  soit  môme 
4  raison  de  l'inexactitude  de  quelque  renseigucment  par- 
tiel, un  nom  pour  un  autre.  Mais  de  là  à  admettre  qu'il 
fe  suit  trompé  de  deux  siècles  au  sujet  des  origines  du 
christianisme  dans  les  Gaules  et  des  origines  de  sa  propre 
église,  il  y  a  des  abîmes. 


104      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

§  II.  —  Sulpice  Sévère. 

Nous  avons  d'ailleurs,  Messieurs,  pour  contrôler  Gré- 
goire de  Tours  un  autre  histcrien,  Gaulois  comme  lui,  et 
qui  l'emporte,  sinon  par  la  gravité  du  caractère  et  la  con- 
science comme  narrateur,  au  moins  par  un6  antériorité 
de  deux  siècles,  jointe  à  un  talent  littéraire  de  beaucoup 
supérieur. 

Né  vers  363,  dans  l'Aquitaine,  d'un  iamille  riche  et 
noble,  voué  dans  son  âge  mûr  à  la  pauvreté  chétienne,  à 
la  prière  et  à  l'étude,  attaché  pendant  des  années  à  saint 
Martin,  Sulpice  Sévère,  qui  entre  autres  travaux  nous  a 
laissé  une  vie  de  ce  grand  pontife,  savait  mieux  que  per- 
sonnne  dans  quel  état  religieux  la  Gaule  se  trouvait  de 
son  temps.  Les  lumières  ne  lui  manquaient  pas  touchant 
les  efforts  qu'avaient  pu  faire  les  devanciers  du  saint 
évêqne  de  Tours  dans  nos  diverses  provinces,  contre  ce 
paganisme  dont  il  constatait  autour  de  lui  la  résistance 
encore  si  formidable.  Si  son  principal  ouvrage  n'est  pas, 
comme  celui  de  Grégoire  de  Tours  une  histoire  particu- 
culière  de  la  Gaule,  c'est  une  histoire  de  l'Église  jus- 
qu'à l'an  400. 

Malgré  ce  caractère  générai  et  la  forme  abrégée  de  la 
narration,  ce  livre,  Messieurs,  doit  évidemment  oflïir 
dans  le  peu  qu'il  dira  relativement  à  notre  pays^  le  reflet 
(le  la  pensée  des  hommes  pieux,  savants  et  bien  informés 
du  iv*  siècle. 

Eh  bien  !  ouvrons  YHistoire  sacrée.  Au  livre  !!•,  le  Sal- 
luste  chrétien  passe  en  revue  les  empereurs  et  signale 
ceux  qui  ont  persécuté  TÊglise  :  Néron,  Domitieu,  Tra- 
jan,  Adrien.  Pas  un  mot  des  Gaules  à  leur  sujet.  Enfin 
il  arrive  à  Murc-Aurèks  et,  parlant  de  sa  persécution,  il 


XLIY*  SESSION,   A  SEMUS.  i05 

ajoute  :  Ac  htm  primum  irUra  Gallias  martyria  visOf 
«rms  iran$  Alpes  Dei  religione  suitcepta. 

Voilà  qui  est  clair  et  formel  :  pas  de  martyrs  chez  nous 
iTint  la  persécution  de  Marc-Aurèle  (i).  Vous  vous  sou- 
vena  qoe  Grégoire  de  Tours  n'en  signale  pas  non  plus 
auparavant,  et  qu'il  commence  d*en  signaler  alors.  Mais 
il  n'explique  pas  son  silence;  Sulpice  Sévère  ne  laisse 
aocune  place  au  doute.  Et  s'il  prenait  fantaisie  à  quel- 
qu'un d'ajouter  pour  la  Gaule  au  privilège  d'être  devenue 
miraculeusement  chrétienne  dès  les  temps  apostoliques 
edui  d'avoir  échappé  non  moins  miraculeusement  à  la 
puissance  des  Néron,  des  Domitien,  des  Trajan,  des 
Adrien,  voici  que  l'auteur  de  VHùtoire  sacrée  explique 
lui  tout  au  contraire,  et  de  la  façon  la  plus  naturelle  du 
oiondey  le  manque  de  martyrs  par  le  manque  de  chré- 
tiens :  Serius  irans  Alpes  Dei  religione  suscepta. 

Quand  il  arrive  à  Dioclétien  et  Maximien,  sans  rien 
dire  de  spécial  à  la  Gaule,  le  Salluste  chrétien  parle  en 
homme  qui  n'ignore  pas  quel  trihut  de  sang  elle  a  payé 
dans  leur  persécution.  Omnis  fere  orlns  martyrum  eruore 
infeetus,  nous  dit-il  ;  et  il  signale  les  actes  qu'on  en  con- 
serve :  Extant  enim  mandaiœ  litteris  prxclar»  ejus  tem- 
pons  martyrvm  passitmes,  qva$  connectandas  fwn  putavi, 
nemodum  operis  excederem. 

Sans  doute,  Messieurs,  il  est  profondément  regrettable 
que  Sulpice  Sévère  ne  donne  pas  ici  des  noms  propres,  au 
moins  pour  nos  provinces.  Vous  y  auriez  vu,  sinon  celui 
de  saint  Régulas,  puisqu'il  ne  fut  pas  martyr,  au  moins 
ceux  de  ses  compagnons.  Mais  loin  de  reprocher  à  notre 
auteur  cette  stricte  fidélité  à  son  plan,  nous  nous  réjouis- 

\j  Ceci  ne  doit  peut-èlre  sViitendro  que  de  la  |»ersccution 
officieltetneut  organisée. 


iW  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  PE  FRANCE. 

sons  d'y  trouver  la  marque  d'un  esprit  d'autant  plus 
digne  de  notre  confiance  qu'il  est  plus  ferme  et  mieux 
ordonné. 

Telles  qu'elles  sont,  d'ailleurs^  ses  paroles  nous  Boat 
infiniment  précieuses.  Elles  suffisent  pour  justifier  un 
triage  des  actes  qui  nous  sont  parvenus  de  certains  saints, 
martyrs  comme  saint  Denys  de  Paris,  ou  compagnons 
avérés  de  martyrs  comme  saint  Rieul  de  Senlis. 

Parmi  ces  documents,  les  uns  rapportent  l'histoire  de 
ces  personnages  aux  temps  apostoliques,  les  autres  i  It 
fin  du  m*  siècle.  Nous  rejetons  les  premiers  comme 
inconciliables  avec  VHistoire  sacrée,  les  autres  pouvant 
rentrer  dans  la  catégorie  de  ceux  dont  Sulpice  Sévère  re- 
connaissait l'authenticité,  sont  par  là  même  admissibles. 


§  ni.  —  Saint  Jérôme. 

Vers  le  moment  où  naissait  Sulpice  Sévère,  saint 
Jérôme,  plus  âgé  que  lui  d  environ  un  tiers  de  siècle, 
consacrait  deux  années  à  parcourir  la  Gaule  dans  tous  les 
sens.  Il  séjournait  chez  ses  divers  peuples,  étudiant  leurs 
mœurs,  compulsant  les  bibliothèques,  interrogeant  les 
liommcs  de  qui  la  science  et  lasatressc  lui  faisaient  espérer 
des  lumières  nouvelles.  A  chacune  de  ses  haltes,  il  recueil- 
lait les  souvenirs  locaux  transmis  par  la  tradition,  il  con- 
versait avoclos  vieillards,  de  qui  la  jeunesse  avait  traversé, 
déjà  virile,  la  persécution  de  Maximien  et  Dioclctien. 

Ces  considérations,  jointes  à  ce  que  tout  le  monde  sait 
du  caractère  de  saint  Jérôme,  nous  disent  assez  de  quel 
poids  est  son  témoignage  dans  la  question  de  nos  origines. 
Eh  bien!  qu'on  ouvre  la  (hronique  (TEusèbe  qui,  vous 
n<>  rignorez  pas,  MesKieurs,  ne  nous  est  parvenue  que  tra- 


XUy*  SESSION,   A  SENLIS.  i07 

dttite  par  saint  Jérôme,  et  qu'on  lise  d'abord  la  préface  du 
Inducteur.  Il  la  termine  en  nous  avertissant  expressé- 
nent  que  depuis  la  prise  de  Troie  jusqu'à  la  vingtième 
auiée  de  Constantin,  il  a  ajouté  de  nombreux  détails. 

Certes,  avec  un  pareil  système  de  traduction,  il  ne  se 
lut  pas  gêné,  en  ce  qui  concerne  les  origines  de  TËglise 
gtilicane,  pour  suppléer  le  silence  ou  corriger  les  erreurs 
d'Eusèbe,  d'après  les  connaissances  étendues  qu'il  avait 
SOT  la  matière.  C'est  donc  bien  le  témoignage  de  saint 
Jérôme  que  nous  donne  ici  la  Chronique. 

Or  jusqu'à  Marc-Aurèle,  comme  Y  Histoire  des  Francs 
de  Grégoire  de  Tours,  comme  Y  Histoire  sacrée  de  Sulpice 
Sérèie,  la  Chronique  se  tait  sur  la  Gaule.  C'est  seulement 
4  l'an  169  que  nous  y  lisons  :  a  Dans  If^s  Gaules  un 
grand  nombre  de  chrétiens  sont  glorieusement  mis  à 
mort  pour  le  nom  du  Christ,  et  aujourd'hui  on  conserve 
eocore  la  relation  de  leurs  combats  héroïques.  » 

§  IV.  —  Eusèbe. 

Aux  témoignages  de  saint  Grégoire  de  Tours,  de 
Sulpice  Sévère,  de  saint  Jérôme,  nous  sommes  en  droit 
«i'ajouter  celui  d'Eusèbe. 

L'évéque  de  Césarce,  qui  écrivait  au  commencement  du 
n*  siècle,  n'était  pas  Gaulois  comme  les  deux  premiers;  il 
o*y  a  même  aucune  apparence  qu'il  ait  jamais  visité  la 
Gaule,  comme  saint  Jérôme;  malgré  cela,  si  l'évangélisa- 
tion  de  notre  pays  s'était  opérée  dès  les  temps  aposto- 
liques* si  les  personnages  que  la  légende  fait  affluer  chez 
uous  avec  une  mission  reçue  soit  de  saint  Pierre,  soit  de 
saittt  Clément,  y  étaient  eliectivement  venus  et  y  avaient 
f'jndv  tant  d'églises,  il  n'eût  pu  l'ignorer  :  le  sachant,  il 


108       CONGRÈS  AECHÉOLOGIOUE  DE  FRANGE. 

l'aurait  écrit.  Or,  ni  dans  son  Histoire  Eceléstoiiiquei  où 
pourtant  il  consacre  à  la  Gauledes  chapitres  entiers,  ni  dan» 
sa  Chronique,  à  laquelle  saint  Jérôme  ne  nous  dit  pas  qu'il 
ait  rien  retranché,  nous  ne  trouvons  rien  de  semblable. 

Eusèbe,  comme  les  autres  historiens  sérieux  des  pre- 
miers siècles,  n'a  rien  trouvé  chez  nous  qui  méritât  noe 
mention  avant  Marc-Aurèle.  Sulpice  Sévère  nous  en  a  dit 
la  raison. 

§  V.  —  Saint  Justin,  saint  Irénée,  saint  Clément  d'Alexan- 
drie, Tertullien,  Origène,  saint  Cyprien,  Amobe,  Lac- 
tance,  saint  Hilaire  de  Poitiers, 

Pour  en  finir.  Messieurs,  avec  cette  catégorie  d'auteurs, 
penncttcz-moi  d'ajouter  une  remarque.  Rien  que  dans  les 
quatre  prcmicrssiècles,oulreceux  déjà  cités,  nous  trouvons 
au  moins  onze  écrivains  ecclésiastiques  qui  ont  beau- 
coup écrit,  et  desquels  nous  avons  presque  toutes  les 
œuvres.  Tous  furent  des  hommes  d'une  érudition  assez 
vaste  pour  ne  pas  pouvoir  ignorer  la  merveilleuse  histoire  do 
révaugélisatiou  de  la  Guule,  au  cas  où  cette  histoire,  telle 
({uc  la  raconte  aujourd'hui  l'école  légendaire,  se  fût 
trouvée  vraie;  à\\n  génie  tels  qu'ils  n'eussent  pus  man- 
qué de  saisir  le  parti  qu'ils  en  pouvaient  tirer. 

Eh  bien!  on  peut  lire  en  entier  saint  Justin,  saint 
Irénée,  saint  Clément  d'Alexandrie,  Tertullien,  Origène, 
saint  Cyprien,  Arnobe,  Lactance,  saint  Hilaire  de  Poitiers; 
on  n'y  trouvera  rien,  absolument  rien,  qui  puisse  favo- 
riser les  prétentions  do  l'école  légendaire  (i). 

(1)  Voir  page  M  rt  suivantes  la  discussion  des  textes  de 
saint  Irônce,  d*^  Tertullien  et  <lo  Lactance,  invoqués  par  cette 
école. 


XUy*  8I8SI0II,  A  8ENLIS.  i09 

C'en  est  asses,  je  crois,  sur  cet  article.  Sans  revenir  sur 
t  lettre  des  sept  évéques  à  Radegonde  qui  pourtant,  vous 
Taves  vu,  abonde  dans  notre  sens;  sans  entrerdans  la  dis- 
CQMîon  des  actes  de  saint  Saturnin  et  de  quelques  autres 
iocaments  du  même  genre  qui  nous  sont  absolument 
Imnbles,  nous  sommes  en  droit  de  conclure,  si  je  ne  me 
tXMnpe,  que  Tétude  des  écrits  vraiment  historiques  de 
DOS  premiers  siècles  ne  permet  en  aucune  façon  d'ad- 
mettre que  le  christianisme  se  soit  répandu  chez  nous  dès 
la  temps  apostoliques. 


H. 


l'épigràphie. 

Quelque  solide  que  paraisse  déjà  cette  conclusion,  elle 
le  trouve  pourtant  confirmée  encore  par  l'étude  de  l'épi- 
gràphie. 

S'il  y  avait  eu  au  ii*"  et  au  m"  siècle  des  Églises  dans 
la  Gaule  entière,  surtout  des  Églises  aussi  nombreuses  et 
aosii  florissantes  que  les  peignent  en  général  ces  mêmes 
documents  qui  rattachent  invariablement  leur  origyie  à 
saint  Pierre  ou  à  saint  Clément,  elles  auraient  laissé 
quelques  monuments.  Or  notre  sol  a  été  fouillé  du  midi 
aa  nord  et  de  l'orient  à  l'occident  d'une  manière  à  peu 
près  égale;  mais  nulle  part,  en  dehors  de  la  vallée  du 
Rhdne  ou  du  littoral  de  la  Méditerranée,  on  n'a  trouvé 
ni  un  tombeau,  ni  une  inscription  chrétienne,  antérieure 
au  rv*  siècle.  Cependant,  si  les  prétentions  de  l'école 
légendaire  étaient  fondées,  ce  n'est  pas  un  monument 
ÎRilé,  ce  sont  de  vastes  cimetières  que  l'on  devrait  mettre 
au  jour,  car  il  nous  paraîtrait  incroyable  que  les  chré- 


440      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIOUK  DE  FRANGE. 

tiens  n'eussent  pas  profité  dans  les  Gaules  comme  en  Italie 
delà  facilité  que  la  loi  romaine  leur  laissait  d'avoir  des 
lieux  de  sépulture  spéciaux  (1). 

Vous  connaissez  tous.  Messieurs,  l'excellent  ouvrage 
publié  il  y  a  quelques  années  par  M.  E.  Le  Blant  sous  ce 
titre  :  Inscriptions  chrétiennes  de  la  Gaule.  Le  savant 
auteur  s'était  proposé,  en  restituant  à  chaque  contrée  les 
inscriptions  fouirnies  par  elle,  de  constater,  comme  il  le 
dit  lui-même,  la  marche,  les  progrès  de  la  foi  (2).  Or 
qu'cst-il  arrivé?  Les  données  de  i'épigprapbie  ont  absolu- 
ment confirmé  les  témoignages  de  l'histoire,  contraire- 
ment à  ces  prétendues  traditions  locales  qui  servent  de 
fondement  aux  théories  de  l'école  légendaire.  Mais  lais- 
sons ici  la  parole  à  M.  Vitet  (3)  :  a  II  n'est  guère  de  diocèse, 
disait-il  eu  parlant  de  la  France,  qui  n'ait  la  prétention 
d'avoir  reçu  lu  semence  divine  presque  au  premier 
moment  de  sa  propagation,  et  de  l'avoir  reçue  sinon  de 
saint  Pierre  et  de  suint  Paul,  au  moins  de  leurs  premiers 
disciples.  U'où  il  suit  que  cet  heureux  sol  gaulois  serait 
devenu  chrétiou,  non-sculcmeut  dès  la  première  heure, 
mais  À  i>eu  pri's  partout  en  même  temps.  Kn  regard  de 
ces  traditions,  fi  vous  interrogez  l'histoire  proprement 
dite  et  SOS  n'prêsoiitunts.los  plus  anciens,  les  plus  voisins 

\\)  Nou»  vernuis  uu  |»eu  plus  loin,  page  413,  qu'une  des 
vie:»  legoudairt's  do  >aiut  He^ulus  lui  attribue  letablissemeot 
d'un  cuut'tièro  chrt'tiou  ù  U  {*oxw  Ue  S^ulis.  L'emplacement  est 
doM^uo  d'uno  ifXs^\>\\  A>^t^t  pr<\'iM'  |K>ur  qu'on  ait  chance  de  le 
i^tr\ui\or.sit>  jidau>ivnojis>t'rtiou\)aolque  chose  d'historique, 
t^tto  its^horv'.he  >or4it  d:^uo  do  tous  le:>  soins  du  cooiité  local, 
et  l'on  ivmpreiui  ilo  \\\w[W  un^s^rtunoe  il  serait  de  constater 
l'o(H^i|ue  A  t4v|uollo  ivuL'iitotii  U'>  M'pultures  les  plus  aDciennes. 

^.n  .'v'te'H*!^  Urs  vV.Mi'*:>.  uur>  tSiO»  p.  lio. 


XUy*  SESSION,   A  SENUS.  ili 

de  l'époque  en  litige,  Sulpice  Sévère,  par  exemple,  ou 
bieo  encore  Grégoire  de  Tours,  ils  vous  répondront  que  la 
ibi  De  s'est  introduite  dans  les  Gaules  que  très-tardive- 
oeot;  qu'elle  h  suivi  d'abord  le  littoral  de  la  Méditerra- 
née, puis  remonté  la  vallée  du  Rhône  et  pénétré  au 
œntre  et  vers  le  nord,  mais  avec  des  fortunes  très-diverses 
et  des  progrès  très-inégaux.  Voilà  deux  versions  en  pré- 
leooe.  A  laquelle  Tépigraphie  donnera- t-el le   raison? 
Quelle  8oit  en   droit  d'intervenir,  personne,  ce  nous 
semble,  ne  peut  le  contester. 

«  Les  monuments  antiques  trouvés  jusqu'à  ce  jour, 
d'où  nous  sont-ils  venus?  De  terrassements,  d'excavations 
que  l'exploitation  de  la  propriété  privée,  les  travaux 
d'utilité  publique,  les  besoins  de  la  vie  sociale,  en  un 
mot,  rendent  sans  cesse  nécessaires,  dans  une  mesure  à 
peu  près  égale,  sur  tous  les  points  du  territoire.  Si  donc,  de 
province  à  province,  la  différence  est  grande  en  ce  genre 
de  richesse,  cette  différence  signifie  quelque  chose.  Les 
découvertes  ont  dû  se  multiplier  là  surtout  où  la  terre 
avait  gardé  des  monuments  en  plus  graud  nombre,  et  les 
lieux  qui  n'en  ont  point  fourni,  assurément  en  avaient 
peu  reçu.  L'épigraphie,  sur  ces  questions,  est  donc  fondée 
à  rendre  des  arrêts  à  peu  près  souverains.  Or,  que  dit-elle 
ici?  Que  dans  la  Narbonnaise,  dans  la  Viennoise,  dans  la 
première  Lyonnaise,  les  monuments  chrétiens  sont  infini- 
laeDt  plus  nombreux  et  plus  anciens  que  dans  les  pro- 
vinces du  centre,  du  nord  et  môme  du  sud-ouest.  Les 
données  de  l'épigraphie  concordent  donc  exactement  avec 
celles  de  l'histoire,  et  opposent  un  démenti  formel  aux 
prétentions  des  traditions  locales.  » 

Telle  est.  Messieurs,  la  conclusion  de  M.  Vitet,  telle  est 
celle  de  M.  Edmond  Le  Hlant;  jusqu'à  preuve  du  con- 
iTiire*  elle  est  aussi  la  nôtre. 


iiS  CONGRÈS  JLROHÉOLOOI0U£  D£  FRANCE. 


III*  PARTIE. 

ÉPOQUE  DE  U.  MISSION  DE  SAINT  RÉ6ULU8. 

Maintenant  que  nous  avons  déblayé  le  terrain,  nous 
pouvons  revenir  à  saint  Réguius  pour  ne  plus  le  quitter. 
Déjà  les  considérations  précédentes  nous  donnent  lieu  de 
penser  qu'il  n'a  pu  se.  trouver  dans  le  Pagus  sytvanec' 
ienêis,  je  ne  dis  pas  quelque  chrétien  isolé,  mais  un  fon- 
dateur d'église,  avant  le  m*  siècle.  Cependant  comme 
nous  voyons  vers  l'an  250  l'Évangile  arriver  avec  saint 
Denys  chez  les  Parisiens,  il  y  a  toute  apparence  que 
leurs  voisins  les  Sylvanectes  ne  le  reçurent  pas  beaucoup 
plus  tard.  C'est  en  eifet  ce  qu'établit  l'étude  des  docu- 
ments qui  nous  sont  parvenus  sur  saint  Réguius. 

Ces  documents.  Messieurs,  sont  de  deux  sortes.  Les  uns 
le  font  venir  avant  la  fin  du  i"  siècle,  les  autres  rejettent 
sa  mission  vers  la  fin  du  iir.  Mais  les  premiers  n*ont 
aucune  valeur,  ainsi  que  nous  allons  le  montrer. 


I. 


Déjà,  Messieurs,  dans  la  première  partie  de  cette  étude 
nous  avons  examiné  l'une  des  deux  pièces  publiées  par 
loH  H()llan(listt>s,  sous  le  titre  de  Vies  de  saint  Hégutus; 
vous  nvox  vu  (v  ({u'il  on  faut  penser. 

Passouit  à  riLiialysi^  dtî  la  seconde. 

li(V}(ulus,  ^rer  <l(*  naissance  comme  dans  la  première, 
est  Imptist*  par  saint  J(*an  l'Évaiigéliste;  il  distribue  ses 
lueiis  aux  pauvres,  el  euirc  dans  les  ordres.  Son  premier 


JLiy  SESSION,   A  SENLIS.  113 

lUltK  ayant  été  relégué  à  Pathmos,  il  s'attache  à  saint 
Deo?8  l'aréopagite,  et  vient  avec  lui  à  Rome,  où  saint 
Clément  leur  fait  Taccueil  le  plus  honorable. 

L'auteur,  qui  n'écrivait  pas  avant  le  ix'  siècle,  puisqu'il 
raconte  la  guérison  d'une  fille  de  Charles  le  Chauve  au 
tombeau  de  son  saint,  n'en  rapporte  pas  moins  les  propres 
termes  d'un  fort  beau  discours  du  successeur  de  saint 
Pierre,  à  la  suite  duquel  saint  Denis,  sacré  évéque,  est 
envoyé  en  Gaule.  Il  arrive  à  Arles  avec  Régulus.   Le 
peapie  de  cette  ville  se  convertit  en  masse  avec  une  faci- 
lité merveilleuse,  si  bien  que  l'Aréopagite,  ne  voyant  plus 
là  qu'une  besogne  de  seconde  importance,  celle  de  gou- 
verner une  église  toute  fondée,  la  laisse  à  Régulus,  et 
part  pour  Paris  avec  deux  autres  compagnons.  Rustique 
et  Ëkathère. 

Mais  un  jour,  Régulus,  disant  sa  messe,  voit  sur  la 
aoiz  de  l'autel  trois  colombes  portant  sur  leurs  poitrines 
en  caractères  de  sang  les  noms  de  Denys,  Rustique  et 
Êleuthère.  Comprenant  que  ces  trois  saints  ont  reçu  la 
couronne  du  martyre,  il  laisse  Téglise  d'Arles  à  Félicifi- 
iime,  évéque  envoyé  en  mission  dans  les  Gaules  par  saint 
Gément  qui  se  trouve  là  tout  à  point,  et  vient  à  Paris 
où  une  chrétienne  nommée  Catulla  lui  donne  l'hospi- 
Ulité. 

U  est  chez  elle  depuis  trois  jours,  quand  Fescennius,  le 

magistrat  auteur  du  martyre  de  saint  Denys  et  de  ses 

compagnons,  apprenant  la  mort  de  Domitien  son  maître, 

en  éprouve  un  tel  trouble  qu'il  quitte  son  poste  et  re- 

MQToe  à  Rome  (eonfusus  Romam  rediit,.  Ce  détail  nous 

apprend  que,  d'après  l'auteur,  nous  sommes  à  la  fin  de 

l'an  96,  Domitien  ayant  été  tué  le  18  septembre  de  cette 

^née-là. 

(Cependant  Régulus  signale  sa  présence  par  des  oeuvres 

XUV*  SESSION.  8 


114       CONGRES  ARGHÉOLOGIQCE  DE  FRANGE. 

miraculeuses.  En  un  lieu  nommé  Villa  Lavira,  il  trouve 
une  foule  d'adorateurs  devant  uue  statue  de  Mercure. 
D'un  signe  de  croix,  il  renverse  l'idole  ;  le  peuple  émer- 
veillé s'empresse  de  recevoir  le  baptême. 

Bientôt  la  renommée  du  thaumaturge  arrive  jusqu'à 
Senlis,  où  une  matrone  du  nom  de  Gallicia,  d'ailleurs 
cousine  de  Catulla,  a  un  fils  possédé  du  démon.  Régulus, 
imploré  par  elle,  arrive  monté  sur  un  âne.  A  son  premier 
commandement,  le  diable  sort  de  Tenfant  sous  la  forme 
d'une  chauve-souris,  et  va  se  loger  dans  l'âne.  Celui-ci 
fait  aussitôt  un  signe  de  croix  avec  sou  sabot,  ce  qui  met 
définitivement  le  diable  eu  fuite.  L'auteur  prend  soin  de 
nous  avertir  ici  que  le  pontife  n'avait  pas  dressé  sa  mon- 
ture à  ce  genre  d'exercice. 

Après  un  événement  si  merveilleux,  le  saint  fait  un 
discours  dont  l'auteur  ne  manque  pas  de  connaître  le 
texte,  comme  il  a  connu  celui  du  discours  de  saint 
Clément.  Après  quoi  il  baptise  le  fils  de  Gallicia  avec 
une  grande  foule  de  peuple,  cum  maxifna  populi  muiti- 
tudine. 

Les  prêtres  des  idoles,  qui  voient  ce  succès  avec  un 
déplaisir  extrême,  vont  se  plaindre  au  préfet  Quintilien. 
Celui-ci  les  console  eu  leur  ordonnant  de  préparer  pour  le 
lendemain  un  grand  sacrifice,  auquel  il  se  propose  de  faire 
participer  Régulus.  Pendant  ce  temps-là,  le  Pontife  achève 
sa  journée  en  ouvrant,  par  le  simple  contact  de  son  bâton 
pastoral,  la  porte  delà  prison  pour  délivrer  quelques  chré- 
tiens qu'on  y  a  enfermés. 

La  nuit  suivante,  saint  Denys  et  ses  compagnons 
martyrs,  apparaissent  à  Quintilien.  Sa  femme,  aver- 
tie de  cette  vision,  lui  conseille  de  bien  traiter  Régulus. 
Mais  le  jour  ne  revient  que  pour  aggraver  la  colère 
(les  prêtres  des  idoles.  En  efiet,  comme  ils  venaient  de  se 


XUY*  SESSION,  A  SENUS.  il5 

cooibrmer  aux  instnictions  données  la  veille  par  le  préfet, 
i'évéque  est  entré  dans  leur  temple,  et  sa  seule  présence  a 
reoiersé  toutes  les  idoles,  qui  sont  maintenant  en  pous- 
sière. 

Aussi  Quintilien  se  voit-il  forcé  d'abord  d*écouter  les 
ffé&nes,  qui  demandent  que  Régulus  soit  brûlé  vif.  Mais 
b  notables  (majores  populi)  intercèdent  en  sa  faveur. 
Eofin  Régulus  survient  en  personne  et  prend  à  son  tour 
Il  parole.  Son  discours  amène  au  baptême  le  préfet  (que 
l'iateur  appelle  en  cet  endroit-là  comte,  cornes)^  sa  famme, 
les  prêtres  des  idoles  et  tout  le  peuple. 

R^ulus  ayant  achevés!  heureusement  d'établir  l'Église 
iie  Senlis,  n'a  plus  qu'à  la  gouverner.  Aussi  le  voyons- 
nous  procéder  tout  d'abord  au  choix  d'un  emplacement 
pour  un  cimetière  chrétien  (i). 

Après  cette  narration  qui  tient  deux  chapitres,  l'auteur 
en  consacre  un  troisième  à  trois  miracles  principaux  qu'il 
a  précédemment  omis. 

Le  premier  est  le  jaillissement  d'une  fontaine  en  un 
lieu  où  le  peuple  manquait  d'eau. 

Les  deux  autres  sont  la  guérison  de  l'aveugle  de  Beau- 
Tais,  l'histoire  des  grenouilles  de  Ruily,  tous  deux  racontés 
déjà  par  l'auteur  du  manuscrit  de  Saint-Omer  (2j.  Mais 
il  V  a  des  différences. 

Avant  la  guérison  de  l'aveugle,  le  second  narrateur  fait 

(I  \  Les  iodicatioDs  dooDées  à  ce  sujet  par  Tauleur  me  pa- 
nuseat  importantes.  Le  lieu  était  extra  portam  ciritatis, 
M  pfurima  exercebantur  negotia.  Erant  enim  ihi  deorum 
simuiaera,  sacerdotum  tnensx  sacri/icii  victimas  renden- 
timm .  atque  dirersi  tormeuti  f/enera  quibus  sacrificare 
Mofenies  yrnriter  afficiebantur.  Voyez  la  noie  1  «le  la  p.  HO. 

4,  Voyez  p.  88. 


116  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  PRANGB. 

partir  Régulus  pour  Beauvais  où  il  devait  sacrer  Lucien 
que  Denys  avait  seulement  ordonné  prêtre  ;  il  apprend 
en  chemin  le  martyre  de  celui  qu'il  comptait  rejoindre. 
Le  premier  le  faisait  partir  seulement  sur  la  réception  de 
cette  nouvelle. 

Quant  à  l'histoire  des  grenouilles,  le  second  narrateuf 
ajoute  à  ce  que  vous  avez  appris  du  premier  un  détail 
curieux.  L'ordre  du  saint  aurait  été  donné  aux  gre- 
nouilles non-seulement  pour  celles  qui  le  reçurent,  mais 
pour  leur  postérité.  Aussi  le  biographe  assure-t-il  que 
de  sou  temps  elles  s'y  conformaient  encore;  c'est  sans 
doute  pour  cela  qu'il  ne  nomme  pas,  comme  le  premier, 
l'endroit  où  le  miracle  avait  eu  lieu. 

La  mort  du  saint  évéquo  est  mentionnée,  comme  dans 
le  manuscrit  de  saint  Omer,  à  la  suite  de  ce  dernier 
récit.  L'auteur  donne  à  sou  épiscopat  une  durée  de  qua- 
rante ans. 

Vient  ensuite  un  quatrième  chapitre  consacré  aux 
miracles  opérés  près  du  tombeau  du  saint.  Nous  ne 
voyons  rien  à  y  relever,  sinon  cette  particularité  que  l'un 
de  ces  miracles  n'ayant  pu  avoir  lieu  qu'au  ix*  siècle, 
ainsi  qu'on  l'a  déjà  remarqué,  la  composition  de  l'ouvrage 
ne  saurait  être  antérieure  à  cette  épo(iue. 

Si  maintenant,  iMessieurs,  l'on  compare  cette  pièce  à 
celle  qui  nous  a  servi  de  type  lorsque  nous  avons  traité 
de  la  question  des  légendes  eu  général  (1)  ;  il  semble  dif- 
ficile de  ne  pas  se  ranger  à  l'avis  des  Bollandistes.  Les 
deux  se  ressemblent,  mais  la  première  parait  plus 
ancienne,  moins  chargée  de  fables,  aniiquior  et  sinceriar. 
J'inclinerais  fort  à  croire  que  l'auteur  de  la  seconde  avait 
sous  les  yeux  la  première,  et  qu'il  la  seulement  habillée 

(4)  Voyez  p.  87. 


XUY*  SESSION,   A  SBNUS.  H  7 

à  sa  mAOière,  en  y  faisant  certaines  additions  dont  voici 
ks  principales  : 

i«  La  mention  de  saint  Jean  comme  premier  maître  de 
aint  Régulus  ; 

3*  Les  deux  on  trois  discours  placés  dans  la  bouche  de 
les  personnages  ; 

3*  La  conversion  d'Arles  par  saint  Denys,  et  Tépisco- 
pit  de  saint  Régulus  dans  cette  ville  avant  sa  venue  à 
Puis; 

4*  Les  relations  du  saint  évéque  avec  les  matrones  Ca- 
tollietGallicia; 

5*  Plusieurs  miracles,  ou  circonstances  ajoutées  à  des 
oiFKles  du  premier  récit  pour  les  rendre  plus  merveil- 
leux encore; 

0*  L'instantanéité  de  la  conversion  du  peuple  de 
Sentis; 

7*  La  fondation  d'un  cimetière  chrétien  à  la  porte  de 
cette  ville  ; 

S*  Une  précision  plus  grande  dans  les  dates. 

Ce  dernier  trait,  Messieurs,  pourrait  au  premier  abord 
sembler  favorable  aux  prétentions  de  l'école  légendaire, 
ialheureusement ,  si  le  côté  chronologique  du  récit  se 
rouve  traité  d'une  façon  plus  complète  en  apparence, 
I  en  est  de  même  du  côté  merveilleux;  aussi  bien  que 
les  faits  qui  jiourraient  passer  pour  historiques.  Or, 
lumnd  un  auteur  produit  ou  enjolive  des  anecdotes  comme 
selles  du  diable-ohauve-souris,  de  l'âne,  des  grenouilles, 
|uand  il  ne  fait  passer  son  héros  par  l'évéché  d'Arles 
|u'â  la  condition  de  faire  de  saint  Denys  l'Aréopagite  le 
;»remier  évéque  de  cette  ville,  et  d'un  certain  Félicis^ime 
inconnu  aux  dyptiques  d'Arles,  le  troisième  évéque  de  la 
ooéiDe  église,  on  peut  affirmer  sans  crainte  que  chez  lui 
ks  détails  accusent,  non  des  renseignements  plus  com- 


118       C05GBÈS  AIGHÉOLOGIOUE  DE  F1A5€S. 

piets,  mais  une  bameur  plus  lantaisiste  et  un  mépris  plus 
grand  de  la  vérité. 

Sans  doute*  il  peut  y  avoir,  perdues  dans  les  erreurs  de 
sa  narration,  des  choses  historiques.  Ainsi  le  lieo  qui  rat- 
tache saint  Régulus  à  saint  Denys«  premier  évéque  de 
Paris,  nous  parait  très-admissible  ;  il  se  peut  eneore  que 
saint  Régulus  ait  vraiment  occupé  le  siège  d'Arles  avant 
avant  celui  de  Senlis  (1^  ;  et  ainsi  de  plusieurs  autres  cir- 
constances. Mais  si  ces  circonstances  sont,  dès  maintenant 
ou  plus  tard*  considérées  comme  acquises  à  l'histoire,  c'est 
t^u'en  elles-mêmes  elles  n*ont  rien  qui  répugne,  c'est  de 
plus  qu'on  aura  rencontré  pour  les  établir  quelques  preu- 
ves étrangères  aux  singuliers  documents  que  nous  possé- 
dons sous  le  titre  de  Vies  de  5.  Régulus. 

Il  en  est  tout  autrement  de  l'époque  à  laquelle  leurs 
auteurs  rapportent  l'existence  et  la  mission  de  l'apôtre  de 
Senlis.  D'une  part,  nous  avons  vu  dqà  combien  U  est 
invraisemblable  qu'elle  remonte  à  la  fin  du  i*'  siècle  ; 
de  l'autre,  si  le  vrai  peut  quelquefois  n'être  pas  vrai- 
semblable, il  faut  au  moins,  pour  être  admis  comme 
vrai,  qu'il  soit  prouvé,  et  les  preuves  ici  font  absolument 
défaut. 

t  La  liste  des  preoiters  «^vèqaes  J'Aries  est  donnée  d'une 
manièie  tres-iiilTerente|>ar  lesaaWors  de  U  Gaifia  CÂristiana 
et  par  les  d>pt:qaes  qu'a  publies  Dom  Mabilkm  Analccta.  1,  lU, 
p.  4v>:i.  édition  tie  1690  .  Oa  trouva  d'un  oite  des  Mies  de  pon- 
tites.  alUnt  jusqu'au  nombre  de  se|'C  entre  CoocorUos  ei  Eros.. 
dout  il  n  y  a  (sis  trace  do  L'autre.  Maigre  ceU.  il  se  trouve  de 
jvir:  et  d*au;re  un  K«:ulu>  :  de  fart  et  d'autre,  il  succède  âTro- 
ph:mo  e:  u:u  à  Deny^.  Duos  les  dxptiques  il  a  pour  soccessenr 
imme^.iiat  ManQu>  rendis  que  U  O-rMia  CAristiama  met  entre 
eu\  Martiauus  et  Yiour  :  mars  ni  dacs  une  liste  ni  dans  Taotre  il 
n'esc  question  de  Fel.otssiaHf . 


ZLIY*  SESSION,  ▲  SBNLIS.  119 

Mais  si  elles  manquent  pour  le  i*'  siècle,  elles  abon- 
dent pour  le  III*.  Les  Bollandistes  en  avaient  déjà  fait  la 
lemirque  ;  nous  n'avons  guère  qu'à  les  suivre  dans  cette 
dernière  partie  de  notre  étude. 


Il 


Les  savants  auteurs  qui  nous  servent  ici  de  guide,  rap- 
portent à  l'empire  de  Dioclétien  la  mission  de  saint  Régu- 
las. Us  citent  à  l'appui  de  leur  opinion  les  actes  des  saints 
Quentin  et  Lucien,  des  saints  Fuscicn  el  Victor,  des  saints 
Crépin  et  Crépinien,  de  saint  Piaton  et  des  saints  RuGn  et 
Vtière. 

rious  passerons  en  revue  ces  divers  documents. 

§  I.  —  Aetez  des  saints  Quentin  et  Lucien. 

Claude  Héméré,  chanoine  de  Saint-Quentin,  a  publié 
eo  1613,  sous  le  titre  :  Augusta  Viromanduorum  vindicata 
etillustrota,  etc.,  une  histoire  de  son  Église,  dans  laquelle 
il  a  transcrit  un  très-ancien  manuscrit  qu'on  y  conservait. 
Nous  y  lisons  ce  qui  suit  : 

>  Au  temps  des  empereurs  Dioclétien  et  Maximien, 
beaucoup  de  chrétiens  souffraient  une  très-grave  persécu- 
tion... A  cette  époque,  le  bienheureux  Quentin  et  le  très- 
sainl  Lucien  partirent  de  Rome,  et  le  Seigneur  les  amena 
dans  les  Gaules.  On  rapporte  aussi,  et  leurs  actes  l'at- 
testent, qu'avet:  eux  arrivèrent  pareillement  les  saints 
Crépin  et  Crépinien,  Rufin,  Valère,  Marcel,  Eugène, 
Victor,  Fuscien,  Piuton  et  Régulus  (I).  » 

(1)  Temporibus  Diocietiani  et  Maximiani  imperatorum 


120  CONGRÈS  AJIGHÉOLOOIQUE  HE  FRANGE. 

Les  actes  de  saint  Quentin,  tels  que  les  donne  le  char- 
treux Surius  (1),  nous  montrent  également  saint  Quentin 
arrivant  avec  saint  Lucien  à  Amiens,  où  ils  se  séparent. 
Us  concordent  donc  avec  la  tradition  constatée  par  le 
manuscrit  de  l'église  de  Saint-Quentin,  tradition  qui  nous 
montre  douze  personnages,  au  nombre  desquels  on  compte 
saint  Régulus ,  arrivés  de  Rome  dans  les  Gaules  à  la 
même  époque,  et  plusieurs  d*entre  eux  martyrs  sous  Dio- 
ctétien et  Maximien. 

Quant  à  l'époque,  elle  ne  saurait  faire  l'objet  d'un 
doute,  car  nous  la  retrouverons  indiquée  de  la  façon  la 
plus  formelle  pour  tous  ceux  de  ces  douze  sur  lesquels 
nous  avons  des  données  tant  soit  peu  précises. 

§  II.  —  Actes  des  saints  Cripin  et  Crépinien. 

m 

Ces  actes  racontent  d'abord  la  venue  dans  les  Gaules  de 
Quentin,  Lucien  et  Eugène,  trois  des  douze,  au  temps  de 
Maximien  et  Dioctétien  ;  Crépin  et  Crépinien  les  auraient 

muiti  christianorum  gravissimam  persecutionem  patie^ 
hantur,  Hac  itaque  tenipestate,  beatissimus  Quintinu*  et 
sanctissimus  Lucianus  Homa  egressi.  Domino  ducente^  in 
Gallias  venerunt,  Fertur  etiam,  sed  et  libeiii  eorum  cer^ 
taminum  testantar,  cumeis  SS.  CrispinMtnetCrispianum, 
Ruffinum,  Valerium,  Marcelium,  Eugenium,  Fictoricum^ 
Fuscinianum ,  Piatonem  atque  Regulum  pariter  adre^ 
fUsse. 

il)  Surius  a  publir  û  Cologne,  des  1570.  une  collection  inti- 
luléo  :  y  Ha  sanctorum  ab  Aloysio  Upomano  olim  cons- 
criptiv.  Ce  recueil  esl  encore  aujourd'hui  précieux  i  consulter, 
surtout  pour  la  partie  de  l*année  <|ui  manque  aux  Bollandistes. 
(/est  le  cas  (wur  Miint  Quentin,  dont  la  fête  tombe  le  31  octobre. 


XLfT*  8B88I0N,   A  8BNU8.  121 

suWis.  Quoiqu'ils  ne  disent  rien  des  sept  autres,  l'Église 
de  Soissons  a  toujours  regardé  ces  saints  fondateurs 
comme  ayant  eu,  non  pas  seulement  trois,  mais  bien  dix 
associés. 

Dans  le  bréviaire  de  cette  église,  édité  sous  l'épiscopat 
de  Charles  Bourlon  (1656-1685),  se  trouve  un  office  des 
saints  Crépin  et  Crépinien,  dont  bien  des  parties,  entre 
autres  les  antiennes  qui  sont  prises  à  peu  près  textuelle- 
ment dans  les  actes,  accusent  une  rédaction  beaucoup  plus 
ancienne.  La  leçon  IV  de  Matines  commence  ainsi  : 

c  Crépin  et  Crépinien,  frères,  nobles  romains,  ani- 
més d'un  désir  ardent  de  propager  la  religion  chrétienne, 
vinrent  de  Rome  dans  les  Gaules  avec  dix  compa- 
gnons (I),  sous  l'empire  de  Dioctétien  et  Maximien.  » 

Dans  un  autre  bréviaire,  celui  d'Osnabruck  (Hanovre), 
édité  à  Cologne  en  1652, par  ordre  de  Tévéque  François- 
Guillaume,  on  trouve  au  25  octobre  un  office  double  des 
mêmes  saints  martyrs.  La  IV*  leçon  de  Matines,  tirée 
presque  textuellement  de  Surius,  ainsi  que  les  suivantes, 
débute  en  ces  termes  : 

«  Sous  l'empire  de  Dioctétien  et  Maximien,  qui  s'u- 
nirent dans  leur  impiété  pour  persécuter  l^glise  du 
Christ,  les  bienheureux  Quentin,  Lucien,  Rufin,  Valère 
et  Eugène,  nés  à  Rome  de  familles  illustres,  se  transpor- 
tèrent dans  les  Gaules  pour  y  annoncer  le  Christ,  et  ayant 
consommé  le  cours  de  leur  saint  labeur  par  un  heureux 
martyre,  ils  s'en  allèrent  vers  le  Christ.  Crépin  et  Crépi- 

'1;  Crispinus  el  CrUpinianus  fratres,  nobiles  Romani, 
Mocteiiano  et  Maximiano  imperatorihus ,  propagandx 
TtliginniM  Chrhtianx  studio  cum  decem  sociis  Roma  in 
CaUUu  profecii,aliis  aiio  ex  conrento  euntibus,  Suessionem 


iS2      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DK  FRANCE. 

nien,  leur»  pareils  par  la  foi,  la  piété  et  la  Daiasanoe,  les 
ayant  suivis,  vinrent  à  Soi88ons(i).  » 


§  IIL  —  Actes  des  saints  fiufin  et  Valère. 

Marlot,  dans  son  Histoire  de  l'Église  de  Reims,  au  cb*' 
pitre  XX,  cite  un  vieux  manuscrit  rémois,  dans  lequel  ^^ 
Ht  : 

«  Lorsque  Quentin,   Lucien,  Valèrc  et  Ruiin,  a*^ 
d'autres,  quittant  Rome,  leur  patrie,  furent  Arrivés  d^^ 
les  Gaules,  et  qu'ils  eurent  choisi  les  endroits  où    ^ 
devaient  prêcher,  Rufin  et  Valère  vinrent  dans  l'antic)*^ 
ville  de  Reims,  métropole  de  la  Gaule  (2).  » 

Bien  que  l'époque  ne  soit  pas  ici  autrement  indiqué^  ^ 
on  no  saurait  douter  que  ce  nc^soit  la  même  que  noiJ^ 
avons  constatée  pour  les  saints  précédents. 

En  effet,  les  actes  des  saints  Rufin  et  Valère,  tels  qu'ils 
sont  donnés  par  les  Bollandistes,  au  i4  juin,  rapportent 

(1)  Sub  Diocietiano  et  Maximiaiw  imper atortbus,  qui 
una  animi  impietat"  C/tristi  ecclesiam  oppitgnandam  sus- 
cepere,  beaii  viri  (Juinthuis,  Lucianus,  Hufinus,  f^aierius 
et  Euyenius,  Roiniv  claris  orti  natalihus,  in  Galiias  Chris- 
tum  annundaiuri  sese  contulerunt  :  feiicique  martyrio 
sancti  taboris  cursum  consummantes,  ad  Christum  corn- 
migra r un t,  I-Jos  secuti  pari  fidei  derotivne  et  generis 
spfendore   Cris  pi  nus   et  Crispinianus   Suessionetn    rené- 

runt. 

(t)  Cum  Quinfinus,  Luc/anu,s,  Valerius  et  Rufitius,  cum 
aliis,  Roma  jjatria  relicta,  in  OaiHas  pervenissent,  elegis- 
xentque  sibi  toca  f/uibus  prxdicarcnt,  liufinus  et  yaieriu* 
antiquam  urbem  liemorum  Catlix  m€troj)olim  venerunt. 


XL1Y*  SESSION,   A  SENLIS.  IS3 

leur  martyre  à  Rictiovarus,  sous  Dioclétien  et  Maxi- 
mien. 

Nous  lisons  également  dans  la  passion  des  mêmes 
saints,  composée  par  saint  Paschase  Radbert,  d'après  un 
manuscrit  que  de  son  temps,  c'est-à-dire  au  ix*  siècle,  on 
regardait  comme  fort  ancien  : 

t  En  ce  temps-là  (il  s'agit  de  la  persécution  de  Dioclé- 
tien), des  hommes  émineots  par  la  constance  de  leur  foi 
et  la  sainteté  de  leurs  mœurs,  Quentin,  Victor,  Fuscien, 
Rufin  et  Valère,  partirent  de  Rome,  et,  prêchant  la  parole 
de  vie  aux  peuples  de  la  seconde  Belgique,  encore  retenus 
par  la  superstition  des  Gentils,  les  appelaient  du  joug  des 
démons  à  la  liberté  du  Christ  (1).  » 

§  IV.  —  Actes  de  saint  Piatan. 

Le  martyre  de  saint  Piaton  est  aussi  rapporté  par  ses 
Actes  au  temps  de  Dioclétien.  On  y  voit  que  ce  saint 
avitété  ordonné  prêtre  par  saint  Denys  et  envoyé  par  lui 
à  Tournai.  Un  discours  placé  dans  sa  bouche  au  moment 
de  son  supplice,  lui  fait  rendre  grâce  à  Dieu  de  ce  qu'il 
va  partager  le  sort  des  bienheureux  martyrs  Denys, 
Quentin,  Lucien,  Crépin,  Crépinien  et  autres  nom- 
breux (2). 

§  V.  —  Actes  des  saints  Fuscien  et  Victor. 
Daus  les  Actes  de  ces  deux  saints,  publiés  par  Bos- 

(<)  V.  l'Appendice. 

[f\  V.  les  Bollandistes,  au  l*»*  octobre. 


124      CONGRÈS  ARGHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

quet  (1),  puis  par  les  Bollandistes,  d'après  de  très-anciens 
manuscrits,  on  lit  qu'ils  étaient  venus  de  Rome  en  com- 
pagnie des  saints  Quentin  et  Lucien,  Crépin  et  Crépinien, 
Piaton  et  Régulus,  Marcel  et  Eugène,  Rufin  et  Valère.  Un 
peu  plus  loin,  l'auteur  raconte  incidemment  l'arrivée 
de  Régulus  à  Senlis,  ses  •  prédications,  la  conversion  des 
habitants,  etc. 

Vous  le  voyez.  Messieurs,  Taccord  entre  ces  diverses 
pièces  est  aussi  parfait  qu'on  peut  le  désirer  : 

V  Toutes  nous  disent  que  sous  Dioclétien  et  Maximien, 
un  certain  nombre  de  missionnaires  romains  se  parta- 
gèrent diverses  villes  de  la  Gaule-Belgique  (2)  ; 

2®  Le  nombre  des  missionnaires  est  plusieurs  fois  fixé  à 
douze,  jamais  à  un  autre  chiffre  ; 

3®  Les  quelques  noms  cités  dans  chaque  document  sont 
parmi  les  douze  que  donnent  au  complet  les  actes  des 
saints  Fuscien  et  Victor,  aussi  bien  que  les  actes  des  saints 
Quentin  et  Lucien  (3)  ; 

4""  Saint  Régulus,  apôtre  de  Senlis,  est  l'un  des  douze. 

Cet  accord.  Messieurs,  joiut  à  une  vraisemblance  qui 
manque  de  toutes  parts  aux  narrations  des  légendaires, 
me  parait  absolument  décisif;  et,  tant  qu'un  fait  ou  un 
argument  inattendu  ne  sera  pas  venu  renverser  l'écha- 

(4)  Ecclesiœ  galUcanx  historiaruin,  liber  1,  Paris,  4633, 
in-8». 

(2)  Reims,  Soissons,  Aiuicns,  Tournai,  Saint-Quentin,  Senlis, 
Beauvais,  Pontoise. 

(3)  Certains  dôfenseurs  do  rôcolo  lê^'cndaire  ont  avancé  que 
les  noms  des  douzo  ne  sont  pas  les  nièuios  dans  tons  les  (*.ocu- 
menls.  Il  eût  p(Mit-êlr«  élô  pins  exari  do.  dire  (|ue  pour  n-haus- 
sor  la  gloire  de  rortains  sainis,  connue  saint  Euvcro,  on  a  cher- 
cha à  les  rattachera  cette  pléiade,  tjnoiqirils  n'en  aient  pas  fait 
partie. 


XUY*   SESSION,  ▲  SKNUS.  125 

biidage  de  preuves  que  j'ai  essayé  d'élever,  je  propose 
aa  CoDgrès  de  conclure  avec  les  Bollandistes  que  le  chrîs- 
tiiQisiDe  n'a  pas  été  prêché  dans  le  Pagus  Sylvanectensis 
iTint  la  fin  du  m*  siècle. 


APPENDICE. 

Parmi  les  auteurs  que  nous  avons  cités,  il  en  est 
an  sur  lequel  nous  croyons  particulièrement  intéres- 
sant de  donner  quelques  renseignements  complémen- 
taires. 

Né  dans  un  diocèse  de  la  seconde  Belgique,  celui  de 
Soissons,  Paschase  Radbert  était,  vers  le  milieu  du 
n*  siècle,  abbé  de  Gorbie,  dans  un  autre  diocèse  de  la 
même  province,  celui  d'Amiens.  Saint  et  savant  à  la  fois, 
il  est  vraisemblable  qu'il  connut  l'histoire  ecclésiastique 
de  son  pays  aussi  bien  qu'on  la  pouvait  connaître  de  son 
temps.  Notre  impartialité  nous  fait  un  devoir  de  revenir 
sur  son  témoignage. 

Les  habitants  de  Basoche,  dans  le  Soissonnais,  lui 
ayant  apporté  un  manuscrit  fort  ancien  et  mal  rédigé,  qui 
racontait  l'histoire  des  saints  Rufin  et  Valère,  le  prièrent 
d'en  tirer  parti  pour  leur  donner  sur  le  même  sujet  quelque 
chose  de  meilleur.  Nous  devons  à  cette  heureuse  circon- 
stance l'opuscule  intitulé  :  Passio  SS.  Bu  fini  et  Valerii^ 
qui  termine  le  volume  des  œuvres  de  saint  Paschase, 
édité  par  le  P.  Sirmond,  en  iGi8.  Ce  n'est  pas,  comme 
on  pourrait  le  penser,  une  simple  trauscription,  ni  même 
une  traduction  en  latin  correct  et  élégant  du  manuscrit 
de  Basoche;  c'est  une  oeuvre  propre,  pour  la  composition 
de  laquelle,  la  rédaction  le  prouve,  saint  Paschase  ne 


iS6       CONGRÈS  ARGHÉOLOOIOUS  DE  FRANGE. 

8*68t  pa8  interdit  de  puiser  à  d'autres  sources  que  la  prin- 
cipale. 

Le  récit  débute  par  un  tableau  magnifique  de  la  diffu- 
sion du  christianisme  dans  les  trois  premiers  siècles. 
Bientôt  Tautcur  arrive  à  la  persécution  de  Dioclétien, 
dont  la  description  précède  immédiatement  le  passage 
suivant  : 

0  En  ce  temps-là  (on  peut  aussi  traduire  :  dans  cette 
tempête)  (i),  des  hommes  considérables,  aussi  illustres  par 
la  constance  de  leur  foi  que  par  la  sainteté  de  leurs  mœurs, 
Quentin,  Victor  et  Fuscien,  Rufin  et  Valère,  Crépin  et 
Crépinien,  avec  d'autres  qui  étaient  leurs  compagaons, 
originaires  de  Homo,  préchant  la  parole  de  vie  aux 
peuples  do  la  seconde  Belgique,  les  appelaient  du  joug 
des  démons  à  la  lil>erté  du  Christ.  » 

Il  s*agit  bien  ici  de  la  mission  des  doute,  à  laquelle  se 
rattache  certainement  saint  Régulus.  L'auteur,  il  est  vrai, 
ne  rappelle  pas  le  nombre,  mais  les  sept  noms  qu'il  inu- 
mère  ne  laissent  aucuue  place  au  doute  (2).  Il  continue  : 

«  Ces  hommes  admirables  par  leur  doctrine,  illustres 
(Hir  leurs  vertus,  illuminaiout  les  Gaules  comme  des  astres 
rayonnants.  Ou  priHend  qu'ils  avaient  franchi  les  fron- 
tièrt's  dos  Gaulos  avtv  le  bienheureux  Denys,  que  le  bien- 
houmux  Clément,  (Kmtife  romain,  avait  envoyé  pour 
ranimer  les  iwurs  gluciS^  dos  Gentils  par  la  chaleur  de  la 
foi  :  mais  cola  uVst  ivi$i\uiciliablo  avec  la  chronologie (3). 
Kn  oiToU  saint  IVnys  n\nit  la  ixnironne  du  martyre  sous 


yl  H%tc  tfmfHr;ft*Vf,  Si  nous  :^upprimon$  le  lexie  latio,  c'est 
à  04UsoUo  s»  loii^uour ,  on  lo  tr\m\oruit4u:i^  le$  œuvres  de  saint 
r«s<iu><»  RAdlvrl   *M«u>os  |Mr  lo  IV  S  rmond.  on  1618.  in-fol. 

il   \o\o«p  \ik 


XLIY*  SESSION,   A  SENLIS.  137 

Domitioi  César,   la  seconde  année  de  son  empire (1); 
tiodis  que  ceux-ci  arrivèrent  à  la  gloire  immortelle  sous 
les  augustes  Dioctétien  et  Maximien.  Cet  espace  de  temps 
ne  contient  pas  moins  de  deux  cent  dix  ans...  Ce  qu'il  y  a 
de  plus  vraisemblable,  c'est  que  Denys  éclaira  les  Belges 
quand  ils  étaient  encore  pleinement  plongés  dans  la  nuit 
du  paganisme,  et  commença  d'écarter  de  leurs  âmes  les 
téoèbres  de  l'infidélité.  Pour  ceux-ci,  comme  la  clarté  de 
la  lumière  avait  déjà  dissipé  les  ombres  nocturnes,  sans 
les  amener  pourtant  au  plein  jour  Je  la  foi,  ils  appa- 
mrait  semblables  aux  rayons  éclatants  du  soleil  de  vérité, 
et  portant  avec  eux  la  parfaite  lumière  de  la  foi,  ils  chas- 
sèrent pleinement  la  nuit  du  paganisme...  Au  temps  donc 
où  une  cruelle  barbarie  ensanglantait  sur  les  autels  des 
démons  les  mains  qui  leur  rendaient  un  culte  plutôt  impie 
que  religieux...,  où  aucune  lueur  de  vérité  n'éclairait 
encore  les  cœurs  ténébreux  des  Gaulois,  la  divine  miséri- 
corde eut  enfin  pitié  d'eux,  et  pour  dissiper  les  ténèbres 
de  la  mort,  elle  donna  à  des  hérauts  de  la  grâce  nouvelle 
la  mission  d'arracher  la  Belgique  à  l'erreur  pour  lui  faire 
commencer  de  voir  la  vraie  lumière  de  la  foi,  et  depuis 
lors  avançant  journellement  dans  la  voie  du  salut,  jus- 
qu'au temps  des  susdits  Quentin,  Rufin  et  Valère,  elle 
leoCenuait,  quoique  ornée  d'églises  du  Christ,  des  adora- 
teurs des  démons,  o 

Nous  avons  fait  dans  cette  page  un  certain  nombre  de 
coupures  pour  ne  pas  allonger  la  citation  outre  mesure  ; 
mais  nous  avons  conservé  avec  le  plus  grand  soin,  outre 
les  passages  décisifs  dans  leur  intégrité,  la  physionomie 
de  reusemble.  Elle  prouve  que  saint  Paschasc  Radbert, 

'l)r;e<t-â-direon  l'an  Hi  (\t\  l'cre  chrelienne.  Il  va  sans  dire 
<)ueui»u>  taisons  ici  nos  réserves. 


128  GONORÉS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

tout  ea  rattachant  la  miseion  dont  faisait  partie  saint 
Régulas,  à  l'époque^que  nous  lui  avons  assignée,  ne 
croyait  pas  qu'elle  eût  travaillé  sur  un  terrain  neuf.  Son 
opinion  (i)  à  cet  égard  se  résumerait  en  deux  propositions 
principales  : 

i®  Il  y  aurait  eu  dès  les  temps  apostoliques  une  pre- 
mière évangélisation  de  la  Gaule-Belgique; 

2®  Saint  Denys  eu  aurait  été  le  principal  auteur. 

Examen  de  la  première  proposition.  —  La  première 
de  ces  deux  propositions  ne  nous  parait  pas  inadmissible. 
En  eflet,  les  arguments  développés  dans  le  cours  de  ce 
mémoire  démontrent  seulement  que  la  Gaule  n'a  pas  été 
conquise  à  Jésus-Christ  dans  son  entier  dès  les  temps  aposto- 
liques, et  qu'en  général  la  succession  régulière  des  évèques, 
à  partir  des  personnages  qu'on  s'accorde  à  regarder  comme 
les  fondateurs  de  nos  Églises,  ne  remonte  pas  au-delà  de 
la  Qn  du  m''  siècle  ;  mais  ils  laissent  le  champ  libre  aux 
suppositions  pour  les  temps  antérieurs.  Le  christianisme 
portait  en  lui-même  une  force  d'expansion  prodigieuse, 
et  les  obstacles  présentés  par  l'état  des  pays  au  premier 
siècle  de  notre  ère,  tout  en  s'opposant  à  sa  conversion  en 
masse,  n'ont  pu  empêcher  que  des  adeptes  de  la  nouvelle 
foi  y  pénétrassent^  môme  qu'ils  y  fissent  quelques  prosé- 
lytes. Les  textes  de  Grégoire  de  Tours,  de  Sulpice  Sévère, 
de  saint  Jérôme,  d'Eusèbe,  le  silence  de  tant  d'autres 
écrivains,  inconciliables  avec  les  prétentions  de  l'école 
légendaire,  ne  sont  pas  contraires  à  cette  hypothèse.  Nos 
remarquesmémc  surl'épigraphie,  incompatibles  avec  l'exis- 
tence de  chrétientés  nombreuses  qui  auraient  eu  certaine- 

i4)  Hcinarquez  qiio  cette  opinion  est  très-peu  aflirmative.  Le 
saint  abbé  de  ('.orbie  la  propose  seulement  comme  lui  parais- 
sant vraisembiable. 


XLIV*  SESSION,   A  SKNLIS.  129 

uieot  des  cimetières  spéciaux  avec  un  mode  de  sépulture 
caneténstique,  s'accorderaient  très-bieu  avec  l'existence 
de  chrétiens  peu  nombreux  et  dont  les  tombes  auraient, 
été  mêlées  avec  celles  des  païens,  sans  que  rien  les  en 
distinguât.  Or,   quand  saint   Paschase   parle  d'églises 
fondées  dans  la  Belgique  dès  le  i""  siècle,  il  est  évident 
qu'il  n'entend  par  là  que  des  réunions  de  chrétiens  bien 
peu  nombreuses  et  peu  florissantes,  puisque  de  son  propre 
aveu,  après  plus  de  deux  siècles  d'existence,  elles  s'éten- 
dirent tout  à  coup,  non  par  leurs  propres  ressources  et  les 
efforts  du  clergé  indigène,  si  tant  est  qu'elles  eussent  un 
clergé,  mais  seulement  grâce  à  une  mission  envoyée  de 
Rome  ;  puisque  l'histoire  sérieuse  prouve  qu'elles  n'atti- 
lèrant  pas  l'attention  des  persécuteurs  ;  puisqu'elles  n'ont 
laissé  aucun  monument;    puisqu'enfin  les  personnages 
auxquels  les  siècles  suivants  se  sont  accordés  à  attribuer  la 
fondation  de  ces  églises  ne  sont  venus,  nous  l'avons 
démontré  et  Paschase  en  convient  (excepté  pour  saint 
Uenys),  qu'à  la  fin  du  m"  siècle. 

ExAifEN  DE  ul  seconde  PROPOSITION.  —  Quant  à  l'opi- 
nion du  saint  abbé  de  Corbie  sur  la  mission  de  saint 
iienys  au  i^  siècle,  et  son  martyre  eu  l'an  8i  de  notre 
en,  nous  la  croyons  absolument  fausse  ;  mais  son  erreur 
s'explique  par  les  considérations  suivantes: 

Ce  qu'il  dit  lui-même  de  la  façon  dont  il  fut  amené  à 
écrire  la  Passion  des  saints  Rufiu  et  Valère,  montre  qu'à 
cette  époque  il  était  abbé  de  Corbie,  ce  qui  place  la  com- 
t^jsition  de  l'ouvrage  entre  8-44,  année  de  son  élection,  et 
H5I.  année  où  il  donna  sa  démission.  Mais  à  ce  moment- 
il.  le  monde  ecclésiastique,  et  surtout  le  monde  bénédic- 
Mi.  venait  d'être  saisi  par  Hilduin,  abbé  de  Saint-Denys- 
>:'ii-Krd:ice,  de  la  question  <lo  ruri'u(iagitisinc. 
Lu  lettre  dans  laquell*^  ÏAm'i^  lu  l)ôli(»niiairc  demandait 

XLIV"   SESSION.  \) 


130       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

■ 

à  Hilduin  un  recueil  des  actes  du  premier  évéque  de 
Paris,  la  réponse  de  Pabbé  au  monarque,  et  l'épitre  adres- 
sée par  lui  à  tous  les  catholiques  pour  confirmer  son  sys- 
tème, parurent  de  836  à  838.  Paschase,  encore  simple 
moine,  eut  certainement  connaissance  de  tous  ces  docu- 
ments. De  plus,  il  est  extrêmement  probable  que  des  rela- 
tions personnelles  s'étaient  produites  entre  lui  et  Hilduin. 
Tous  deux  étaient  bénédictins,  et  l'abbaye  de  Saint-Médard 
de  Soissons,  pays  natal  de  Paschase,  avait  été  donnée  à 
Hilduin  avec  plusieurs  autres  par  la  libéralité  royale. 
Enfin,  si  l'on  tient  compte  de  la  profonde  humilité  qui  fut 
un  des  traits  saillants  du  caractère  de  Paschase,  si  l'on  se 
rappelle  qu'Hilduin  était  de  famille  noble,  tandis  que  lui- 
même  était  un  pauvre  enfant  trouvé  à  qui  la  charité 
chrétienne  avait  seule  permis  de  vivre  et  de  s'instruire , 
qu'Hilduin  était  prêtre  tandis  que  lui-même  voulut  tou- 
jours rester  simple  diacie,  que  la  position  d'Hilduin  près 
du  monarque,  dont  il  était  archichapelain,  aussi  bien  que 
dans  Tordre  de  saint  Benoit,  dont  il  détenait  trois  riches 
et  puissantes  abbayes,  devait  lui  sembler  bien  supérieure 
à  la  sienne,  on  admettra  sans  peine  que  l'autorité  de  l'abl^é 
de  Saint-Denys  dut  en  imposer  considérablement  a  celui 
de  Gorbie.  Ce  dernier,  sans  doute,  était  peu  disposé  à  con- 
trecarrer une  opinion  que  le  premier  s'attachait  avec  la 
passion  la  plus  acerbe  à  faire  prévaloir.  Peut-être  même 
s'y  rangea-t-il  avec  une  confiance  aveugle,  qui  annulerait 
sur  ce  point  l'autorité  de  son  témoignage. 


Discussion.  —  M.  l'abbé  Mùller  ilemande  la  parole  ot 
s'exprime  ainsi  au  sujet  du  travail  dn  M.  de  Meissas  : 

Liiliscussion,  (]u*un(»  nîiicontn»  lorluitea  >oulov<'>eonlro 
M.    Vixhhô  de  Moissas  et   niiii,   préseiilo  parmi  d'autres 


XLIV  SESSION,    A  SENLIS.  131 

aspects  originaux  celui-ci  :  Nous  sommes  d'accord  sur  ce 
poÎDt  (l'hagiographie  que  saint  Rieul  est  venu  dans  le 
Pagus  Sylvanectensis  vers  la  fin  du  iii*"  siècle,  mais/xir/a- 
gi's  sur  la  valeur  démonstrative  des  arguments  qui  servent 
de  hase  à  ce  sentiment,  M.  de  Mcissas  leur  conférant  haut 
la  main  une  force  de  certitude  absolument  irrésistible, 
moi  leur  refusant  un  brevet  semblable  d'évidence.  M.  de 
Heissas  est-il  trop  autoritaire?  Suis-je  trop  mou  dans  mes 
conclusions?  Subjudicc  lii  est.  A  vous,  Messieurs,  aux 
critiques  sérieux  qui  pèsent  la  valeur  des  documents,  dis- 
cutent le  sens  exact  des  textes,  reconnaissent  le  côté  encore 
obscur  des  opinions,  respectent  les  découvertes  de  l'ave- 
nir..., aux  critiques  consciencieux  seuls  de  décider. 

Vous  comprendrez  que  je  n'ai  point  l'intention  de  suivre 
dans  ses  détails  l'étude  de  M.  de  Meissas  ;  voici  en  résumé 
les  réserves  que  je  ferais,  s'il  m'était  permis,  sur  ce  tra- 
vail qui  se  distingue  plus  par  la  forme  de  l'affirmation 
que  par  la  nouveauté  des  arguments  (i). 


I 


C'est  une  faute  de  raisonnement  que  nous  commettons 
tous  plus  ou  moins,  mais  que  la  critique  historique  doit 
éviter  scrupuleusement  que  de  torturer  les  faits  à  la  façon 
de  Procruste  pour  les  asservir  à  des  Ibcories  préconçues. 
M.  de  Meissas  s'est-il  suffisamment  n)is  en  garde  contre 
cet  écueil?...  Quelques  exemples  : 

f  Un  texte  de  TertuUien  :  a  Les  diverses  nations  des 
Gaules  adorent  le  Christ   »   est  gênant!    a  Galliarum 

I    Voir  MM.  Taillar,  i'ahbe  Chevalier,  de  Tuurs.  r.tl»lK>  Eugène 
BeiUrtrtl.  lie  Paris,  etc. 


132      GONORÈS  ARGHÉOLOOIQUE  DE  FRANGE. 

divereœ  nationes  et  Britannorum  inaccessa  Romanis  loca 
Christo  vero  subacta.  »  (Âdv.  Juds^s,  cap.  vu.)  Faut-il, 
pour  diminuer  son  autorité,  alléguer  ce  que  l'on  nomme 
«  l'enflure  hyperbolique  de  l'Africain  »,  ergoter  sur  le 
sens  du  mot  diversx,  qui  pourrait,  ditK)n  (je  le  nie),  se 
traduire  par  a  diverses*»  au  lieu  de  a  les  diverses  d  ? 

2®  Sulpice  Sévère  qui,  pour  avoir  uni  dans  son  histoire 
la  gravité  du  fonds  à  Télégance  du  style,  a  mérité,  comme 
le  répète  avec  raison  M.  de  Meissas  après  l'abbé  Chevalier, 
le  surnom  de  Salluste  chrétien,  Sulpice  Sévère  nous  a 
laissé  un  texte  célèbre. 

Parlant  de  la  persécution  que  Marc-Aurèle  excita  à 
Lyon  en  177,  il  dit  :  «  Sub  Aurelio  deinde,  Antonini 
filio,  persecutio  quiata  agitata  actum  primura  intra  Gai- 
lias  martyria  visa,  scrius  trans  Alpes  Dei  religione  sus- 
cepta  (1).  »  (Hist.  sacr.,  lib.  Il,  cap.  32.)  A-t-on  le  droit 
de  conclure  en  dehors  et  au  delà  de  ces  affirmations  :  (a) 
Avant  177,  Ton  ne  vit  point  en  Gaule  de  martyres  comme 
ceux  de  Lyouy  c'est-à-dire  exécutés  sur  une  vaste  propor- 
tion ?  —  (b)  La  religion  du  Christ  ne  fut  accceptée  au 
delà  des  Alpes  par  les  masses  qu'assez  tard.  —  (c)  Cet 
assez  tard  doit  ôtre  placé  avant  l'année  177,  puisque  les 
hécatombes  chrétiennes  dont  il  est  parlé  supposent  un 
certain  temps  pour  former  les  victimes?...  Que  l'on  me 
permette  de  citer  parmi  d'autres  témoignages,  ceux  d'O- 
rose,  d'Eusèbe  et  de  saint  Jérôme  :  a  Persecutiones  Chrù- 
tianorum^  dit  Orose  (vu,  15.),  quarta  post  Neronem  vice, 
in  Asia  et  in  G  allia  graves  prœcepto  ejus  extiterunt  mul  tique 
sanctorum  martyrio  coronati  sunt,  u  Dans  les  Gaules,  » 
c'est  Eusèbe  qui  s'exprime  ainsi  en  sa  chronique  à  Tannée 
169,   «  dans  les  Gaules,  un  grand  nombre  de  chrétiens 

^1)  Voir  sur  ce  texte  riililu;  Chevalier,  th*  Tours,  \).  31. 


XLIV  SESSION,   A  S£NUS.  133 

sont  glorieusement  mis  à  mort  pour  le  uom  du  Christ,  cl 
aujourd'hui  l'on  conserve  encore  la  relation  de  leurs  com- 
bats héroïques.  »  Saint  Jérôme,  qui  a  séjourné  longtemps 
en  Gaule  et  vécu  en  relation  intime  avec  les  hommes  les 
plus  saints  et  les  plus  savants  de  la  Gaule,  raconte  à  Théo- 
dore /Ep.  un)  la  fondation,  vers  la  6n  du  ii*  siècle,  de 
plusieurs  Ëgiiees  dans  TAquitaine  et  sur  les  bords  de  la 
Garonne. 

d^  Tout  le  monde  connaît  le  fameux  passage  de  Gré- 
goire de  Tours  :  «  Hujus  [Decii]  tempore  (entre  249  et 
iSljseptem  viri  [ou  episcopi]  ordinati  ad  prasdicandum 
in  Gallias  missi  sunt,  etc.  etc.  (Hist.  lib.  I,  cap.  zxx, 
al.  xxvni.) 

Certes,  j'aime  mieux  voir  Grégoire  de  Tours  avec 
les  yeux  de  dom  Ruinart  qu'avec  la  critique  sèche  de 
Kries;  pourtant  n'est-ce  point  agir  avec  trop  de  sans  façon 
que  d'oublier  les  controverses  peut-être  insolubles  que  ce 
texte  a  soulevées  et  par  suite  la  prudence  que  tout  con- 
seille eu  ces  sentiers. 

(a^  Qui  ne  sait  les  réserves  que  font  sur  les  affirmations 
de  Grégoire  de  Tours  Barouius,  qui  parle  a  de  auctoris 
âiniplicitate )> ,  Papebrock  (Boli.  junii,  t.  IV),  Cantu. 
Guizot,  Quicherat,  qui  le  qualifie  de  a  légendaire  », 
etc.  etc.? 

h.  Les  actes  de  saint  Saturnin,  qui  sont  l'une  des 
sources  historiques  que  Grégoire  de  Tours  a  confondues 
dans  le  passage  supra  indiqué,  ont-ils  une  autorité  incon- 
testable (1). 

■  IMI  S4>fnble  que  si  (îrégoire  de  Tours  a  pris  la  date  a  sub 
Dfeio  •  aux  actes  de  saint  Saturnin,  en  revanche  il  a  emprunté 
les  noms  des  sept  évèques  aux  actes  de  saint  Ursin,  lestjuels  les 
rattacbeot  à  une  mission  apiistolique. 


134      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

(c)  La  version  a  SubDecio,  etc.  »,  n'est-elle  point  con- 
tredite par  les  manuscrits  de  Florence?  Des  critiques 
graves,  entre  autres  dom  Chamard,  estiment  que  le  texte 
de  la  légende  de  saint  Saturnin  est  très-authentique  dans 
sa  substance,  mais  renferme  des  interpolations,  par 
exemple  la  phrase  a  ante  annos  L,  etc.  » 

(d)  La  chronologie  de  l'histoire  des  Francs  n'est^lle 
point  abandonnée  et  condamnée  dans  les  Traités  de  la 
Gloire  des  Confesseurs  (cap.  lxxx)  et  de  la  Gloire  den  Mar- 
tyrs (Lib.  L,  cap.  48-56)  où  Grégoire  de  Tours  Tait  ordon- 
ner saint  Ursin  de  Bourges  et  saint  Saturnin  de  Toulouse 
par  les  disciples  des  Apôtres? 

(e)  La  mission  des  sept  évêques  n'est-elle  point  battue  en 
brèche  par  plus  d'un  document  qui  donne  des  nomK,  des 
dates  différentes?  Sic  les  actes  de  saint  Ursin,  les  actes  de 
saint  Saturnin,  le  pape  Sozime  en  417  et  les  évéques  de 
la  Provence  qui  reconnaissaient  qu'Arles  avait  reçu  son 
premier  évéque  de  saint  Pierre... 

£t  puis  quand  Grégoire  de  Tours  oilrirait  une  autorité 
historique  et  un  texte  inattaquables,  résulterait-il  du  pas- 
sage que  nous  étudions  qu'il  n\  aurait  point  eu  de  mar- 
tyrs, de  hérauts  de  la  foi,  d*Ëglises  constituées  avant  la 
mission  des  sept  ?  Dom  Huinart  trouve  cette  conclusion 
excessive:  a  Quelques-uns,))  dit-il,  «pensent  que  Ton 
peut  conclure  des  écrits  de  Grégoire  de  Tours  qu'il  existait 
de  son  temps  en  Gaule  une  double  tradition  sur  les  pre- 
miers Apôtres  de  l'Église  gallicane,  les  uns  s'efforçant  de 
ramener  leur  mission  à  l'époque  des  Apôtres  eux-mêmes, 
les  autres  la  fixant  au  temps  de  Dèce  ou  de  Marc-Aarèle. 
Ils  vont  jusqu'à  reprocher  à  Grégoire  de  Tours  de  n'être 
pas  d'accord  avec  lui-même  sur  ce  point,  de  patronner  le 
premier  sentiment  dans  son  livre  des  Miracles,  le  second 
dans  son  Histoire.  Mais  c'est  se  tromper  que  de  croire  que 


XUV*"  S£&>ION,   A  SKNLIS.  i35 

Grégoire,  lorsqu'il  parle  des  martyrs  de  Lyon  ou  des  sept 
êréques,  venus  à  son  avis  sous  Dèce,  nie  par  là  qu'il  y 
ait  eu  en  Gaule  avant  eux  des  martyrs  ou  d'autres  hérauts 
de  h  parole  divine  (I).  x> 

4*  Les  sept  évéques  de  la  Gaule  semblent  à  certaine 

école  sortir  des  limites  de  l'utile  dans  cet  endroit  de  leur 

lettre  à  $ainte  Radegonde  :  a  Itaque  cum  ipso  catholicœ 

leligioois  exortu  ceepissent  Gallicanis  in  finibus  veneran- 

dsfidei  primordia  respirare,  etc.  (Grég.  Tur.,  Hist. 

Fraoc,  lib.  IX,  cap.  39.)  —  Peut-on,  sans  offenser  dans 

sa  substance  le  contexte,  proposer  comme  tenable  cette 

traduction  :  a  Sur  les  confins  de  la  Gaule  »  au  lieu  de 

■  Dans  le  territoire  de  la  Gaule  o.  Que  dit  ce  texte  pris 

dans  son  entier?  Le  voici,  (a)  Il  y  eut  dès  le  début  même 

de  la  religion  chrétienne  une  première  initiation  de  nos 

pays  à  la  foi.  (b)  Cette  foi  était  seulement  une  lueur  faible 

qui  n'éclairait  qu'un    petit   nombre  d'intelligences:... 

tfRespirareet  adh'ucad  paucorum  notitiam  tune  ineffabilia 

pervenissent  Trinitatis  Dominical  sacramenta,  etc.  »  (c)  Il 

était  réservé  à  l'intluence  monastique  de  saint  Martin  et  de 

ses  disciples  de  généraliser  la  connaissance  de  l'Ëvangile. 

.V  Ailleurs  le  nom  de  saint  Trophime  d'Arles  apparaît 
avec  le  prestige  de  l'antériorité  d'origine  chrétienne.  On 
M  tire  sans  façon  d'embarras  en  répétant  à  la  suite  de 
Uufraisse,  de  l'abbé  Chevalier,  etc.,  qu'il  y  eut  deux  Tro- 
phime. C'est  possible,  comme  il  est  possible  qu*il  exista 
deux  saint  Denys  de  Paris,  deux  saint  Lucien  de  Beau  vais, 
deux  Ursin  de  Bourges.  Mais  pourquoi  affirmer  une  dua- 
lité qui  mérite  tout  au  plus  d'être  indiquée  comme  un 

(Il  Doiii  Ruinart,  préface  aux  œuvres  de  saint  Grégoire  de 
Tours,  lil.  De  primordiis  lidei  in  Galliis.  —  Voir  SirmomJ, 
iib.  L  cap.  16-2S. 


i'M)  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRAKfCE. 

moyen  de  concilier  Grégoire  de  Tours  et  la  lettre  des 
évoques  de  Provence  à  saint  Léon  ? 

Bref,  il  me  serait  indifférent,  même  agréable,  que  Ter- 
tullien,  Sulpice  Sévère,  les  sept  évéques  des  Gaules  et 
Grégoire  de  Tours  aient  dit  exactement  ce  qu'on  veut  leur 
faire  dire;  mais  je  tiens  qu'il  ne  faut  jamais  dénaturer  un 
texte  ou  exagérer  l'autorité  d'une  source  dans  l'intérêt 
d'une  thèse,  si  vraie  qu'elle  puisse  être.  Comme  M.  de 
Meissas,  j'ai  trouvé  aussi  exacte  que  belle  cette  expression 
d'un  hagiographe  :  a  La  vérité  est  la  sainteté  de  l'his- 
toire I  B  Mais  je  crains  que  la  vérité  ne  perde  autant  et 
plus  aux  partis  pris  de  certains  théoriciens  qu'aux  admi- 
rations, naKves  si  vous  le  voulez,  des  anciens. 


11 


M.  de  Meissas  a-t-il  pour  nos  légendes  un  reipect  suffi- 
sant ?  Je  conviendrai  avec  mon  spirituel  contradicteur  que 
parfois  les  légendes  contiennent  des  détails  indignes  de 
l'attention  des  historiens^  que  la  passion  du  merveilleux 
les  a  chargées  de  chapitres  de  prodiges,  que  l'admiration 
(>our  le  héros  sacré  a  immolé  la  vérité  aux  hyperboles  de 
la  louange*  que  t  Tamour  ambitieux  de  quelques-uns 
pour  leurs  Églises  < T  iv  a  poussé  des  écrivains  à  reculer 
leur  antiquité*  que  dos  motifs  moins  nobles  ont  pu  cor- 
n^mpre  leur  sincérité  pn?mièro,  etc.  etc.  Voir  les  appré- 
ciations do  Sulpioo  Sévèro,  do  Guibert  de  Nogent  (2),  des 

.1  •«  Vmbiluxsns  o><l  <)UAn«1o.|uo  pm^  sinciilis  fcclesiis  suis 
-  <pi<^niti;tUm  9m«^r  mMI.  \\\  ivt  —  Voir  los  munies. 
\Mi  «si       IV  «MUMio  «wWunim  Ganianim.  » 

i   IV  s4inoUMiim  |M«:nonbiis.  !tb.  I .  wày.  m. 


XLIY*   SESSION,    A   SENUS.  i37 

Pères  du  Concile  de  Latran,  de  Baronius,  des  Bollandistes 
ViedesamtYon)^  de  Monseigneur  Freppel  (saint  Irénée), 
à^U,  l'abbé  Chevalier,  etc.  etc.  Mais  autre  chose  est  de 
balayera  la  (prosse,  à  la  suite  des  Baillet,  des  Godescard  et 
des  hagiographes  de  l'école  naturaliste  ;  autre  chose  de 
séparer  le  respectable  du  mauvais  avec  la  dignité  d'une 
critique  chrétienne  à  la  suite  des  dom  Ruinart  et  des  Bol- 
landistes. Voici  quelques  règles  auxquelles,  pour  ma  part, 
je  voudrais  obéir  dans  l'emploi  des  légendes: 

1*  Leur  mesurer  l'estime  selon  leur  source  :  autobio- 
graphes,—  témoins  oculaires,  —  contemporains  ou  pres- 
que contemporains,  —  panégyristes  se  servant  de  docu- 
meots  authentiques,  —  ouï-dire. 

2*  Leur  accorder  volontiers  et  premièrement  créance  ; 
tf  Quoique  les  actes  de  seconde  main,  »  dit  dom  Ruinart, 
■  n'atteignent  point  à  la  pureté  des  actes  de  première 
ûri^e  et  fourmillent  presque  toujours  de  fautes,  je  ne 
crois  pas  qu'il  faille  les  rejeter  absolument.  » 

3*  Leur  laisser  pieusement  leur  côté  du  merveilleux, 
toutes  les  fois  que  ce  merveilleux  n'est  ni  indigne  de  Dieu, 
ni  contredit  par  des  faits  certains,  ni  ajouté  à  la  simplicité 
d'une  légende  primitive  dans  un  intérêt  vulgaire.  Il  n'est 
pas  de  foi  sans  doute  que  saint  Denis,  saint  Lucien  et 
autres  bienheureux  aient  porté  leur  tête  en  leur  main, 
que  saint  Rieul  ait  imposé  silence  aux  grenouilles  de 
Rully,  etc. 

L'on  trouvera  dans  les  Bollandistes  plus  d'une  façon 
légitime  d'interpréter  ces  détails  de  nos  légendes  :  traduc- 
tion en  une  forme  sensible  d'une  intercession  céleste, 
influence  d'une  représentation  matérielle,  style  inétapho- 
rii|ue...  Mais  je  ne  tfache  pas  que  le  lait  soit  impossible  et 
«i*>i\r  être  nié  absolument  départi  pris.  La  science  hagio- 
jrdphiquc  ne  pourrait  que  perdre  à  celte  façon  brutale  de 


i38  CONGRÈS  AROHÉOLOtilQUE  D£  VRANGE. 

procéder,  comme  la  poésie  des  légendes,  Tari  et  le  reste^ 
Si  je  montre  à  m'exprimer  de  la  sorte  quelque  simplicité, 
je  m'estime  on  assez  noble  compagnie  avec  saint  Augustin, 
les  Bollandistes,  Mabillon,  de  Montalembert  et  une  foule 
de  génies  chrétiens. 


111 


M.  de  Meissas,  lorsque  M.  l'abbé  Vattier  et  moi,  lui 
objections  Tactique  tradition  de  l'Église  de  Senlis  sur  la 
date  de  l'apostolat  de  saint  Rieul,  me  parut  traiter  cette 
tradition  comme  une  hypothèse  qui  doit  tomber  d'elle- 
même,  si  elle  ne  peut  présenter  en  sa  faveur  des  raisons 
positives.  Je  trouve  cette  façon  d'argumenter  inexacte. 
La  tradition,  à  mon  avis,  demeure  a  mole  sua  stat», 
dans  la  plénitude  de  sa  force  avec  un  certain  droit  au 
respect,  tant  qu'elle  n'est  point  convaincue  d'erreur  par 
des  faits  certains,  ni  ébranlée  par  des  objections  graves. 
N'a-t-elle  point  le  bénéfice  de  la  possession,  le  droit  au 
soleil  de  l'histoire,  d'une  aflirroation  qui  a  traversé  les 
siècles,  la  réputation  présumée  d'avoir  eu  pour  principe 
un  auteur  respectable?  Ce  fertur,  ce  fama  est,  lorsqu'il  a 
attaché  le  souvenir  de  tel  détail  touchant  ou  miraculeux 
à  quelque  héros  chrétien,  inspiré  des  œuvres  d'art,  des 
pèlerinages...,  fixé  son  existence  orale  dans  des  monu- 
ments hagiographiques,  pris  sa  place  dans  la  liturgie, 
obtenu  sans  contradiction  la  créance  de  nombreuses  géné- 
rations, doit  être  traité  avec  égards.  Tout  le  conseille, 
l'estime  pour  le  bon  sons  et  la  religion  de  nos  pères,  la 
crainte  des  découvertes  que  l'avenir  ménage  peut-être,  le 
caractère  de  haute  réserve  qui  convient  au  véritable  savoir 
et  la  conduite  elle-même  de  l'Église  qui,  dans  certains 


XLIV*  SESSION,   A  SENLIS.  139 

cas, se D)DteQte  de  cette  tradition,  a  La  critique,»   dit 
l'abbé  Chevalier,  «  est  un  art  difficile.  » 

On  lisait  par  exemple,  dans  des  listes  du  xiii*  siècle 
«l'érèques  de  Noyon  le  nom  d'un  Alomer,  prédécesseur, 
dlsait-oo,  feriur,  fama  est,  de  saint  Médard  ;  où  les  cha- 
ooioes  d'alors  Tavaient-ils  rencontré?...  Je  l'ai  retrouvé 
par  hasard  dans  les  litanies  carlovingiennes  d'un  manus- 
crit du  «•  siècle  (I)  :  Sancte  Ailumre,  ora  p'O  nobis.  Et 
pour  mettre  ma  pensée  à  l'abri  d'une  haute  autorité^ 
M.Edmond  Blant,  dont  on  recueille  si  volontiers  le  bel 
argument  tiré  de  l'épi^phie  (2),  a  écrit  avec  la  même 
sûreté  de  jugement  cette  phrase,  dont  on  oublie  aussi 
volontiers  U  grand  sens  :  a  L'élude  nous  habitue  chaque 
jour  davantag  e  à  compter  sérieusement  avec  les  tradi- 
tions.» 


(I:  Aolipbooaire  du  Mont-ReDaud. 

[i]  Paisqoe  j'ai  parlé  de  l'épigraphie,  certes  je  re(.oonais  que 
les  ioscriptioos  sont  uoe  source  hagiographique  doot  il  faut 
leoif  compte  aussi  bien  que  des  traditions  et  des  légendes. 
Vais  pour  user  de  crt  élément  nouveau  de  savoir  avec  la  sage 
rnerve  et  la  prudence  dont  M.  Edmond  Le  Blant  nous  donne  le 
précepte  H  Texemple,  je  ferai  obser\'er  bur  le  Pagus  Silvanec- 
leosis  : 

I*  Que  le  témoignage  de  Tépigraphie  ne  me  paraît  pas  encore 
avoir  été  recherché  suftisamment,  puisque  l'on  n'a  point  ou 
presque  point  exploré  les  cimetières  anciens  d'Avilly,  de  Chan- 
tilly, de  Montataire,  de  Saint-Nicolas... 

t*  Que  la  nature  mèiuc  des  matériaux  qui  ont  dû  servir  les 
préservait  mal  de  la  destruction. 

3*  Que  des  découvertes  toutes  n'ceiilcs,  par  exemple  celle  du 
tfDiple  païen  de  Ilatatte  Taite  par  MM.  Fauiras  et  raldiéCaudel, 
fi  cimtuiuée  |>ar  M.  de  Caix.  nous  indiquent  que  notre  pays  ne 
teiele  point  tout  de  suite  ses  secrets. 


UO  CONGRÈS  ARGHÉOLOGlgUE  DE  FRANGE. 

Je  ne  m'arrôterai  point  à  des  escarmouches  de  détail^ 
par  exemple  :  le  chiffre  de  douze  missionnaires  venus  au^ 
m"  siècle  évangéiiser  le  Nord  de  la  Gaule,  est-il  démontré  '^ 
historiquement?  L'on  s'appuie  pour  l'affirmer  sur  les 
actes  des  saints  martyrs  Fuscien,  Victoric  et  Gentien  (1), 
et  sur  une  lettre  des  Pères  du  concile  de  Paris  (825)  à 
Eugène  [l,  inspirée  des  actes  précédents.  Sic  les  abbés 
Pocquet,  Chevalier  de  Tours,  de  Meissas,  etc.  Mais  les 
actes  des  saints  martyrs  Fuscien,  Victoric  et  Gentien  ne 
sont  pas  d'accord  avec  les  noms  des  missionnaires;  mais 
les  Pères  du  concile  de  Paris  placent  leur  mifision  sous 
saint  Clément  :  «  S.  Dionysius...  qui  a  sancto  Clémente... 
in  Gallias  cum  duodenario  numéro  primus  praedicator 
directus  est  ;  »  mais  les  saints  que  l'on  veut  rattacher  à 
cette  mission  des  douze,  ont  dans  leurs  légendes  un 
nombre  très-variable  de  compagnons...  (2). 

Bref,  je  le  répète,  dussé-je  passer  pour  hésitant  dans 
mes  opinions  et  peu  net  dans  mes  résultats,  je  ne  crois 
pas  [et  c'est  à  mon  grand  regret)  pouvoir  donner  à  mes 
sentiments  sur  la  date  de  l'évangélisatiou  de  nos  pays  et 
de  la  mission  de  saint  Denis,  de  saint  Lucien,  de  saint 
Uieul....'  une  i'orniule  plus  précise.  Ce  n'est  pas  une  ques- 
tion de  piété  ;  ce  n'est  pas  même  au  pied  de  la  lettre  une 
question  d'hagiographie;  c'est  une  question  de  philoso- 
phie :  de  prémisses,  qui  ne  m 'apparaissent  pas  absolu- 
ment certaines,  ai -je  le  droit  de  tirer  des  conclusions 
certaines?  Certes,  j'ai  dans  ce  système  de  prudence,  de 
réserve,  d'hésitatiun,  si  l'on  veut  (le  mot  n'est  pas  humi- 
liant), des  maîtres  qui  ne  sont  point  à  dédaigner.  C'est 
par  exemple  du  Bosquet,  u  homme,  n  disent  les  Bollan- 

I   Cilies«|ui»Me.  Jc/tt  s(iï}r/<fnim  Uelgiiy  l.  I,p.  K^\. 
2)  Voir  M.  (*.h.  Saliuoii.  Vie  de  saint  Firmin^\\,  H9. 


XLrV*  SESSION,    A  SENLIS.  i41 

distn,  «illustre  par  sa  science,  o  qui,  levant  des  doutes  sur 
les  premiers  évéques  de  la  Gaule,  s'exprime  ainsi  :  (Boll., 
t.  m  martii,  22  mart.,  pag.  370)  :  a  Pour  ce  qui  est  des 
premiers    hérauts   de    l'Évangile  dans    la     Gaule,   les 
hagiographes    ne    sont  point  d'accord  ni  dans  les  listes 
qu'ils  en  donneut,  ni  dans   le  temps  qu'ils  assignent  à 
leur  mission,    car  la  plupart  tiennent  que  les  apôtres 
Pierre  et  Paul  ou  leurs  disciples  sont  les  premiers  Ton- 
datears  des  Églises  des    Gaules;  d'autres   attribuent  à 
saint  Clément  et  aux   pontifes  romains,  qui  leur    ont 
immédiatement  succédé,  l'envoi  des  premiers    évéques 
des  Gaules;  d'autres    retardent  jusqu'au  second  siècle 
soit  vers  l'an  170,  le  lever   en   nos  pays  de  la  lumière 
évaugélique.   Ces  questions   sont  tellement  obscures  que 
l'oQ  ne  saurait  affirmer  aucune    de    ces  opinions  avec 
une  êbsolue    certitude.  Les  défenseurs  de   la  première 
opinion  n'ont  été  amenés  que  par  un  amour  longtemps 
endormi    de    l'antiquité  à  rapprocher    les    débuts    de 
l'Église    gallicane    des    origines   de     l'Église    univer- 
selle, etc.  etc.  » 

Poursuivons  la  vérité:  soyons  assurés  qu'elle  ne  perd 
nullement  à  être  connue  dans  sa  totalité;  mais  n'affir- 
nions  de  ses  traits  sacrés,  quand  elle  veut  demeurer  encore 
•iazis  la  pénombre,  que  la  quantité  qu'elle-même  consent  à 
d^uvrir  à  nos  regards. 


M.  l'abbé  de  Meis$as,  à  son  tour,  demande  la  parole  et 
répond  en  ces  ternies  au  précédent  orateur  : 

«Il  n'est  pas  possible  d'outrepasser  la  portée  de>  textes  de 
TiTlullien  et  de  Lictance  toxle  qui  n'i'st  pas  do  Lictance, 
•  «luine  j»'  l'ai  déjà  déiiioiilré..  Il  y  a  toujours  di»  IVxa^'é- 
rdtiiiu  dans  IVrtullitai,  «.'t  on  ne  peut  pas  1<*  prendre  à  la 


142  C05GRÈS  ARCHÉOLOGIOCE  I>£  FRA5Œ. 

lettre,  surfout  quand  on  voit  avec  quelle  sévérité  il  a^ 
jugé  par  plusieurs  de  ses  contemporains  et  notammeû^ 
par  saint  Jérôme. 

«  Quant  aux  l<^gendes,  je  ne  nie  pas  qu*on  ne  puisse  1 
trouver  quelque  chose  de  vrai  à  défaut  de  documenl^^ 
mais  si  ces  histoires  sont  édifiantes,  elles  ne  me  semble^^ 
pas  appuyées  sur  des  preuves  assex  sérieuses  ;  nous  dévoie 
appliquer  à  la  critique  historique  les  mêmes  règles  qu  ^ 
cellesexig^es  pour  la  doctrine  chrétienne.  Quant  à  la  ques^^ 
tion  de  Trophime,  saint  Grégoire  n*est  pas  le  seul  hîsliH^ 
rien  que  je  puisse  invoquer,  et  son  témoignage  est  con- 
forme à  ceux  de  Sulpice   Sévère,   de  saint  Jérôme  et 
d'Eusèbe.  n 

M.  l'abbé  Mîjller  termine  en  disant  qu'il  accepterait 
bien  volontiers  que  saint  Uieul  soit  venu  au  m*  siècle, 
niai"  il  estime  que  son  honorable  adversaire  s'est  servi, 
d'arguments  négatifs  contre  des  traditions,  il  maintient 
la  forme  de  réserve  avec  laquelle  il  a  dû  conclure  la 
veille. 

M.  le  président  déclare  la  discussion  sur  la  21*  question 
entièrement  close  cl  donne  la  parole  à  M.  Millescamps, 
qui  lit  au  nom  de  M.  Hahn  une  note  sur  le  cimetière  de 
Gompan. 


Le  cimetière  du  Compan,  près  Luzarchest 
sépultures  de  Tâge  de  la  pierre^polie. 

Sur  le  môme  territoire  de  Luzarchcs  et  dans  la  vallée 
de  risieux  é;^altMucnt,  m.iis  à  raltiludc  de  60  mètres  seu- 
hîiiiciit,  cVsl-à-(iir(î  à  un  point  luMucoup  plus  bas  que  les 
moriunicnts  mégalithiques  de  Tljiiuécourt  et  à  moins  de 


XLIT*  SESSION,   A  SbNLIS.  143 

deux  kilomètres  de  distance  de  ces  derniers,  a  été  décou- 
vert un  véritable  cimetière  de  Tâgc  de  la  pierre  polie.  Le 
lieu-dit  où  il  se  trouve,  déjà  désigné  dans  un  titre  de 
l'aDoée  i1G3,  a  toujours  été  connu  sous  le  nom  de 
Gompan. 

Signalé  dès  Tannée  1854  par  M.  Hahn,  de  Luzarches, 
Àiatlention  de  M.  Serres  alors  professeur  d'anthropologie 
iQ  Muséum  d'histoire  naturelle  de  Paris,  Tossuaire  du 
^pan  fut,  à  cette  époque ,  Tobjet  d'une  exploration 
iu»i  rapide  que  superficielle.  M.  Serres  se  borna  à 
Kcueillir  quelques  crânes  et  un  petit  nombre  d'ossements 
<|ui  furent  transportés  au  Muséum.  Le  reste  fut  complé- 
teioent  négligé.  Reprises  en  4801,  suspendues  pendant 
huit  années  et  terminées  en  4873,  par  MM.  Ilahn  et  Mii- 
Ic^mps,  les  fouilles  ont  [)ermis  de  déterminer  Tàge 
excluiivement  néolithique  des  sépultures. 

Ce  cimetière  préhistorique,    orienté  de  1  ouest  ci  Test, 
i'éteodail  sur  une  longueur  de    44  mètres  et  une  lar- 
geur de  S^GO;  le  sol  n'avait  été  creusé  qu'à  la  profondeur 
de  1*40.  Quatre  grès  de  grandes  dimensions  avaient  été 
piaoéfl  sur  divers  points  de  la  fosse.  L'un,  trouvé  debout 
et  à  fleur  du  soL  semblait  fermer  l'extrémité  nord-ouest; 
un  autre  était  renversé  le  long  de  la  paroi  nord  ;  un  troi- 
^iéIne•  aplani  en  forme  de  table,  délimitait  l'extrémité 
«ud-est;  le  dernier  était  entièrement  en  dehors.  La  dis- 
tance à  laquelle  ces  quatre  grès  se  trouvaient  les  uns  des 
autres  ne  permet  d'établir  aucune  relation  outre  eux  ;  il 
ne  semble  pas  qu'ils  aient  été  disposes  dans  un  ordre  régu- 
lier; rien  n'indique  les  vestif^es  d'une  allée  couverte  ou 
même  d'un  dolmen.  Il  n'y  avait  non  ]>ius  auiMine  trace 
d^  murs  élevés  soit  pour  maintenir  les  lerns.  soit  pour 
établir  di>s  cloisons  iiitéri«Mir<s.  Li>  trait   p.irtir(ilii*r  do  la 
M'pult  jrc  était  un  diilla<jri-  posé  dans  le  fond  avec  le  plus 


ii4  CONGRKi  ARCIIÉOLOGIOUE  D£    FRANGE. 

(çraiid  soin  et  niaintcDu  de  niveau  malgré  la  déclivité  du 
terrain.  Il  consistait  en  pierres  calcaires  plates,  habilement 
juxtaposées,  présentant  les  dimensions  moyennes  sui- 
vantes :  lonfçucur,  O^GO;  largeur,  0^45;  épaisseur, 
0"()rî.  r/ost  sur  ces  du! les  que  reposaient  les  corps  d'une 
centaine  d'individus  des  deux  sexes  et  de  tout  âge. 
Aucun  n*a  été  retrouvé  dans  la  position  horizontale  ;  tous 
étaient  plus  ou  moins  affaissés,  écrasés,  le  crâne  et  les 
membres  supérieurs  retournés,  aplatis  sur  les  inférieurs, 
eu  qui  dénote  évidemment  un  mode  particulier  d'inhu- 
mation, celui  que  caractérise  l'attitude  repliée  ou  accrou- 
pie donnée  au  mort. 

U'ri  corps  ainsi  placés  avaient  été  recouverts  de  terre, 
puis  d'une  osptVo  de  plafond  en  pieri'es  généralement 
plates,  formant  une  sorte  de  second  dallage  très-inégal  et 
Ik'auooup  moins  régulier  que  celui  du  fond.  Au  dessus 
s'étendait  uno  cmu'lio  do  terre  brûlée  contenant  des  par- 
cellos  kW  cliarbiui,  indices  de  foyers,  et  un  grand  nombre 
d'éclats  de  silov  hrutsot  taillés. 

l.os  iustru monts  divois  eu  os  et  eu  pierre,  qui  ont  été 
rocueiths,  so  trouvatont  dis:>ominés  sur  tous  les  poiuts  de 
la  iosso et  piuuipalomout  dans  Tintervalle  compris  entre 
li's  di*u\  dalLi^os.  I)  tant  noter  i-eiH^ndant  qu'une  partie 
dos  pu\vs  los  l'ius  mtoivssautts  était  groupée  dans  Tes- 
|vciiv  d'un  uu^tro  oarrw  ù  lexlrt^milé  sud-est  de  la  sépul* 
tmv.  iVtio  soMo  do  ^aoboUo  r^ntormait  notamment  trois 
baotu*s  (stt)os«  viuaiiv  .vuu\ui\,  irvus  (vîntes  de  tléches  de 
u*uiu>  kli\ii>o>,  qoA.iv  :vî:uv:i>  iU  <»s,  uu  grattoir  et 
dou\  (vii:>  K.>oai;\  v .i  >..o\.  Nv*w>  douuons  le  uom  de 
viv.iii  a  viii  ^s...  .^.i  ».:.,•'.;:  -,  ::  >  .-.A  vie  forme  triaugu- 
;i  iv.  .:»■-.,  .1  A.-.-  ,'*.  .a:...-.  ;\-.  !•  >^-:i::  li^'.  o'.  Quelques 
i,x  •.. .  ^v:.'>  ^.•.  .  .  -  .•  ...  .>.v',v  iv  ;:-auchet  uue 
-u  .',■.-.■. ,    ,' .1  ■  .V.  .•  *'.'.  i  :  f.  :  ■  A  •4'.*  *•/  «ni  irunsvenalp 


Sépulture  néolUhique  du  CorripRn  (i.uzarri  ;,sy 

'^'ot\  ^^^  '^^   la- Pierre 


Ûà-Ae  iroÉUTer-saie  /. 


Wure     I  /bmt.-    Jt    iinci-  ■ 

2  foiat,-   Je    l.,n,e 

3  Ciîoiu-  fdi-Bivnmi 
+  teinU  de   fie,^  . 

5  ^/h.    disque 

6  Feei,  disette  fa  scAJsie-  eoùaile  m  az/rain  siiùxitê. 
Cra/ideilr  aa/ure/ie.. 


XLIV'   SESSION,    A  SENLIS.  145 

mais  nous  uc  peusous  pas    que  cette   attribution  soit 
justiûce. 

La  poterie  ne  nous  a  offert  que  des  fragments  informes 
de  vases  de  cette  terre  grossière  et  mal  cuite  qui  est  parti- 
culière à  la  céramique  des  dolmens. 

Il  ne  sera  peut-être  pas  inutile  de  noter  en  passant 
quelques  spécimens  d'instruments  en  matière  tendre.  Ces 
pièces,  faites  en  calcaire,  présentent  ordinairement  la 
forme  de  haches;  elles  sont  rares  au  Compan.  Nous  les 
avons  recueillies  à  titre  de  curiosités  :  quelle  était  la  des- 
tination ou  la  signification  attachée  à  ces  simulacres?  C'est 
un  point  bien  obscur  sur  lequel  nous  ne  nous  hasarderons 
pas  à  jeter  le  moindre  rayon  de  lumière. 

Citons,  en  terminant,  parmi  les  L^ijets  les  plus  intéres- 
sants, une  belle  pointe  de  lance  en  silex,  finement  retaillée 
sur  l'une  de  ses  faces  (fig.  i);  cette  arme,  longue  de 
185  inillimèlres,  était  brisée  en  trois  morceaux,  qui  ont 
été  successivement  retrouvés.  Une  pièce  également  peu 
commune,  c'est  un  disque  en  schiste  coticule  percé  de 
lieux  trous  et  présentant  la  forme  d'un  hausse-col.  Des 
di^i]ues  analogues  ont  été  rencontrés  à  Mizy  (Marne],  à 
Chaflaud  ;  Vienne),  à  Mcudon,  à  Argcnteuil  et  à  Vauréal 
■  Seine-et-Oisc),  mais  partout  à  l'état  d'unité.  Le  Compan 
seul,  à  notre  connaissance,  en  a  livre  deux  (fig,  5  et  6), 
dont  l'un  ramassé  sur  les  débris  d'un  squelette  de 
femme  (fig.  G).  C'était,  selon  toute  apparence,  un  orne- 
iiH-nt  ou  une  amulette  destinés  à  être  portés  au  cou. 

Nous  donnons  la  roproduclion,  en  grandeur  naturelle, 
de  six  des  principaux  obji'.ts  exhumés  du  Compan  : 
quatre  de  ces  objets  ont  été  mentionnés  ci-dessus;  les 
deux  autres  sont  une  seconde  pointe  de  lance  (fig.  2)  et 
nue  pointe  de  firchc  (fig.  -i). 

Ou  voit,  par  cette  courte  énumération,  que  le  mobilier 

XLIV"  SESSION.  10 


146  G0N6RÂS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

•  \\\ 

funéraire  des  sépultures  de  la  pierre  polie  a  été  recua^  ^ 
presque  en  entier  au  Compan. 

L'état  dans  lequel  a  été  retrouvé  ce  qui  subsistait  ^ 
l'ensemble  de  ce  cimetière  préhistorique,  ne  permet  f^ 
de  savoir  s*il  était  recouvert  d'un  monument  még^'' 
thique  dont  auraient  fait  partie  les  quatre  grès  enfo^^ 
dans  le  sol.  Le  dallage  sur  lequel  avaient  été  placés  M^^ 
corps,  était  la  seule  partie  absolument  intacte;  le  re^ 
avait  été,  depuis  des  siècles  déjà,  plus  ou  moins  atteint  ^ 
bouleversé  par  la  charrue. 

Ce  qui  est  certain,  c*est  qu'aucune  trace  de  métal  n^^ 
été  vue  dans  les  fouilles,  et  que  le  cimetière  du  Compa^ 
appartient  incontestablement  à  la  période  purement  néo^ 
lithique. 


Discussion.  —  M.  Jouron  rappelle  qu'il  a  vu  dans  la 
collection  de  Daye  une  flèche  à  tranchant  transversal  fixée 
dans  une  vertèbre,  et  que  Tusage  de  cette  arme  est  aujour- 
d'hui parfaitement  déterioiné. 

M.  Millescamps  répond  que  cet  exemple  n'a  pas  la  portée 
qu'on  lui  attribue,  et  s'appuyant  sur  le  témoignage  de 
MM.  de  Mortiliet  et  Leguay,  il  considère  cet  instrument 
comme  un  ciseau  uu  un  tranchet. 

M.  Ed.  Fleury  croit  qu*il  faut  y  voir  un  de  ces  outils 
usuels  primitifs  qui  recevaient  plusieurs  destinations  à 
la  fois. 

M.  de  Maricourt  demande  à  M.  Millescamps  de  vouloir 
préciser  le  sens  de  la  première  partie  de  la  question  3^  : 
Quelh  conclusion  faut-il  tirer  de  la  présence  d'imtruments 
en  matière  tendre,  tels  que  calcaire,  grès,  etc.,  dans  les 
stations  préhistoriques  ? 

M.  Millescamps  reprend  le  passage  qu'il  vient  de  lire 


XLIY'  SESSION,   Â  SENLIS.  U7 

la  communication  de  M.  Hahn  ;  il  n'a  pas,  ajoutc- 
t-il,  d'opinion  faite  sur  la  signification  de  ces  simu- 
lacres. 

H.  de  Caix  de  Saint-Âymour  signale  une  hache  en 
calcaire  tendre  trouvée  en  Champagne  et  appartenant  à 
M.  de  Lavaulx. 

M.  Edouard  Fleury  parle  à  cette  occasion  des  agglomé- 
rations siliceuses  naturelles  qui  offrent  l'aspect  de  ces 
simulacres.  Ces  rognons  cali:aires  se  trouvent,  dans  le 
département  de  l'Aisne,  par  gisements  énormes,  et  notam- 
ment à  Sablonnière,  dont  le  cimetière  a  été  exploré  par 
MM.  Moreau.  Là  des  tombes  mérovingiennes  présentent 
ces  simulacres  rangés  de  la  même  manière  que  des  vases 
dans  d'autres  sépultures.  Un  assez  grand  nombre  de  ces 
tombes  nous  les  montrent  entre  les  jambes  du  mort,  et 
nul  doute  que  ces  pierres  n'aient  frappé  l'attention  des 
hommes  de  cette  époque,  qui  devaient  y  prêter  le  même 
culte  superstitieux  que  naguère  encore  on  attachait  aux 
pifrres  de  tonnerre.  Quelquefois  ces  pierres  ont  été  travail- 
lées légèrement,  et  on  a  cherché  à  leur  donner  la  forme 
de  croix  grossières. 

M.  Ed.  Fleury,  revenant  sur  la  question  de  l'époque  de 
l'introduction  du  christianisme  dans  le  Nord,  dit  qu'il  ne 
faudrait  pas  conclure  de  l'absence  de  monuments  épigra- 
phiques  chrétiens,  que  le  christianisme  n*y  a  été  introduit 
fu'à  une  époque  postérieure.  Il  espère  pouvoir,  dans  la 
'  prochaine  partie  de  sou  livre  (1),  établir  par  l'identité  du 
style  et  de  l'ornementation  Texistence  de  monuments 
chrétiens  à  une  époque  où  on  n'a  pas  cru  devoir  en 
admettre  jusqu'à  ce  jour  la  présence. 

(1)  Antiquités  et  monuments  du  département  de  V Aisne, 
1"*  partie,  seule  parue. 


448  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

M.  Millescamps  a  de  nouveau  la  parole  pour  la  lecture 
d'une  note  adressée  par  M.  Vieille  : 


Station  de  la  fin  de  l'âge  de  la  pierre  polie 

à  Thimécourt. 


A  environ  seize  kilomètres  au  sud-ouest  de  Seulis,  dans 
le  département  de  Seiue-ct-Oise,  près  du  département  de 
l'Oise  et  de  l'arrondissement  de  Scnlis,  sur  la  commune 
de  Luzarches,  à  cinq  cents  mètres  au  nord-est  du  hameau 
de  Thimécourt,  existe  un  de  ces  endroits  où  Ton  trouve 
sur  le  sol  des  silex  travaillés,  et  que  l'on  appelle  :  a  Station 
de  l'Âge  de  pierre,  d 

Cette  station  est  située  à  l'extrémité  ouest  du  plateau 
sur  lequel  ont  été  déjà  di^couverts  le  cimetière  mérovin- 
gien fouilléen  i874-lH75parMM.  MillcscdmpsetHahu(f), 
et  les  monuments  mégalîthiquos  exhumés  en  1875-i87G 
par  M.  Millescamps  (-2).  Elle  est  à  rallilude  de  iOi  mètres 
environ  et  s'éleiid  sur  plus  d*iin  hectare  de  terre  en 
culture,  au  lieu  dît  «  la  Uif^Mlle  »,  on  lace  du  chemin  du 
Noyer  à  la  Drouarde,  à  coiit  ciuquaiitu  mètres  de  la  voie 
de  Beaumont  à  Survilliers,  et  à  quatre-vingts  mètres  du 
chemin  de  Lassy  à  Senlis. 

Quoique  sa  découverte  ne  date  que  du  mois  d'avril  der- 
nier, cette  station,  qui  n'a  pu  être  explorée  que  sur  une 

(1)  Voir  la  Rente  arc/icohf/ùjue  oi  les  Rnllotins  de  la  Société 
d'Anthropologie  de  Paris. 

(2)  Voir  les  Bulletins  de  la  Société  d^-inlfnnpotofjie de  Paris, 
aunée  1876,  et  U».  Bulletin  de  la  Société  de  Scnlis, 


XLIY*  SESSION,   A  SENLIS.  149 

{vartie  de  son  éten  lue,  a  fourni  déjà  des  centaines  de  silex, 
lionl  la  plupart  sont  cacbalounés  et  sur  lesquels  le  travail 
lie  riiumme  est  caractérisé  par  des  inarques  de  percussion, 
«les  retouches,  et  la  trace  laissée  par  des  éclats  enlevés. 

Parmi  les  pièces  recueillies  jusqu'à  ce  jour  se  trouvent 
(le?  ciseaux,  des  grattoirs,  des  perçoirs,  des  nucléus  et  des 
percuteurs  ou  broyeurs  de  formes  variées;  une  espèce  de 
racioir,  des  fragments  de  hachettes  polies,  deux  flèches 
transversales  et  une  flèche  barbelée. 

La  flèche  barbelée  est  mince,  elle  est  très-fioement  tra- 
vaillée et  très-bien  conservée.  Sa  longueur  est  de  35  mil- 
Iimèlres,  elle  a  22  millimètres  de  largeur  à  sa  base,  et  son 
pédoncule  a  5  millimètres  de  diamètre. 

Deux  des  percuteurs  sont  remarquables,  l'un  par  sa 

petitesse,  l'autre  par  sn  forme  aplatie.  Le  premier,  qui  est 

profondément  cachalonné,  est  de  la  grosseur  d'une  noix 

ordinaire,  dt'»barrassée  de  son  bnai;  il  est  entièrement 

percuté  sur  toutes  ses  faces.  Le  second  est  rond;  il  a  une 

•le  ses  faces  un  peu  bombée,  et  l'autre  plate.  Sa  partie 

bombée  et   son   pourtour  sont   seuls  percutés;   mais  le 

pourtour  l'est  d'une  manière  telle  qu'il  est  impossible  de 

prendre  celte  pièce  pour  une  moitié  de  percuteur. 

Le  silex  est  étranger  au  sol;  il  parait  provenir  du 
domaine  boisé  de  Chantilly. 

Avant  de  quitter  la  tribune,  M.  M illescamps  demande 
à  communiquer  une  nouvelle  note  de  M.  Hahn,  en  réponse 
à  la  4*^  question  du  programme,  ainsi  conçue  : 

Des  objets  de  l'âge  du  bronze.  —  Détermi- 
ner le  lieu  des  découvertes  et  signaler 
les  ateliers  de  fondeurs. 


180       GONGBÈâ  ARGHÉOLOGIOUB  DS  FEAUGE. 


Age  du  bronze.  —  Cachette  de  fondeur  à 
Luzarches  (Seine-et-Oise). 

Je  m'étais  proposé  de  faire  une  communication  sur  les 
études  préhistoriques  du  canton  de  Luzarches  (Seine-et- 
Oise),  situé  au  sud  et  limitrophe  de  l'arrondissement  de 
Senlis  (Oise).  Je  l'aurais  appuyée  d'une  carte  indiquant 
les  stations,  sépultures,  monuments  et  découvertes  diverses 
faites  dans  ce  canton. 

Les  découvertes,  en  effet,  me  paraissent  intéressantes. 
Elles  permettent  de  suivre  l'homme,  dès  les  premières 
périodes,  dans  son  incessant  travail  de  perfectionne- 
ment, luttant  avec  intelligence  contre  les  nombreuses 
difficultés  de  la  vie  matérielle.  Pour  dompter  la  ma- 
tière et  pourvoir  à  ses  besoins,  il  eut  d'abord  ses  mains, 
engin  délicat,  trop  faible  et  tout  à  fait  insuffisant;  puis  la 
pierre  qu'après  l'avoir  taillée  il  polit  avec  une  grande 
perfection,  ainsi  que  le  prouve  les  haches,  pointes 
de  flèche  et  de  lances,  instrumenta  divers  trouvés  dans 
notre  contrée;  et,  enfin,  le  bronze.  En  outre,  il  pétrit  la 
terre  et  la  façonna;  mais  il  reconnut  plus  tard  que  la 
matière  terreuse  pétrie  pouvait  acquérir  encore  plus  de 
dureté  et  de  résistance  :  il  apprit  à  la  consolider,  à  la 
fondre,  en  quelque  sorte,  comme  la  matière  métallique. 

Les  objets  que  j'ai  recueillis  et  les  observations  que  j'ai 
faites  m'autorisaient  à  exposer  la  marche  croissante  suivie 
par  la  civilisation  dans  notre  contrée  et  à  établir  une 
parité  du  développement  social,  mais  non  pour  cela  à  créer 
un  synchronisme  des  temps,  car  en  constatant  une  époque 
(pierre,  bronze,  fer),  on  ne  peut  l'étendre  à  toute  l'es- 


XLIT*   SESSION,  A  SENLIS.  i5i 

pêce  humaine,  puisque,  aujourd'hui  même,  à  côté  de 
nos  splendeurs  européennes,  nous  voyons  des  peuplades 
qui  en  sont  encore  à  leur  âge  de  la  pierre.  Il  ne  se  serait 
agi,  pour  moi,  que  d'établir  un  synchronisme  de  civilisa- 
tion et  non  de  date.  Mais  j'ai  craint  que  les  matériaux 
que  je  possède  fussent  encore  incomplets  pour  me  livrer  à 
une  étude  aussi  détaillée  et  aussi  approfondie.  Je  me  bor- 
neraii  donc,  dans  cette  simple  note,  à  vous  entretenir,  un 
court  instant,  d'une  cachette  de  fondeur  de  l'âge  de 
bronze. 

Pour  arriver  à  l'âge  du  bronze,  l'évolution  a  demandé 
un  temps  considérable,  et  cependant  la  période  du  bronze 
étant  moins  connue  que  celle  de  la  pierre,  les  savants 
engagent  à  étudier  cet  âge,  à  ne  négliger  aucun  détail, 
lors  même  qu'il  paraîtrait  des  plus  puérils.  11  convient 
donc  de  multiplier  les  recherches  et  de  réunir  toutes  les 
découvertes  isolées  pour  arriver  à  établir  des  généralités. 
C'est  cette  pensée  qui  m'a  guidé. 

Il  y  a  plus  de  vingt  ans,  en  défrichant  une  partie  boi- 
sée, au  territoire  de  Luzarches,  près  de  la  limite  de  la 
Picardie  (terrain  qui  a  pu  faire  partie  du  pays  des  Silva^ 
nectes)  [i),  au  lieu  dit  le  bois  de  Lanoue,  on  avait  trouvé 
différents  objets  auxquels  les  ouvriers  bûcherons  n'atta- 
chèrent aucune  importance  :  ces  objets,  en  bronze,  disait- 
on,  étaient  passés  de  main  en  main  pour  arriver  à  celles 
d'un  marchand  colporteur,  qui  les  dispersa.  Il  n'en  restait 
plus  qu'un  vague  souvenir,  lorsque,  il  y  a  quelques 
années ,  en  faisant  un  drainage ,  on  a  trouvé  au  même 

I)  Nous  étions  compris  dans  le  vaste  réseau  forestier  qae 
Plioe  et  Ptolémée  ont  désigné  sous  le  nom  de  forêt  des  Silva- 
Dectes,  et  dont  les  bois  de  Chantilly,  Coye,  Luzarches,  sont  les 
derniers  vestiges. 


152  CONGRÈS   ARGnÉOLOGTQUE  DE  FRANXE. 

point,  à  environ  cent  mètres  à  rouest,  dans  une  terre  en 
culture,  un  amas  de  vieux  bronze  enfoui  à  qtiatrc-viugts 
centimètres  de  profondeur,  pesant  huit  kilogrammes  cin- 
quante grammes  :  c'était  li^,  œrtainement,  une  cachede 
de  fondeur  de  Tdge  du  bronze. 

En  effet,  ce  n'est  pas  ici  un  atelier  complet  de  fondeur 
qu'on  a  enterré  en  pleine  activité,  par  suite  d'une  inva- 
sion ou  d'un  fait  de  force  majeure.  Je  pense  que,  dans  une 
tribu  qui  habitait  cet  emplacement,  tin  homme  (peut-être 
initié  au  travail  de  la  fonte)  recueill.tit  tous  les  instruments 
usés,  brisés  ou  mal  venus  (car  j'ai  des  morceaux  avec  la 
bavure  de  la  fonte),  les  entassait  pour  les  passer  au  creu- 
set, lorsqu'il  en  avait  une  quantité  suffisante  pour  les 
fondre  à  nouveau.  Comme  il  ne  pouvait  serrer  sa  provi- 
sion de  débris,  il  était  néees^airement  obii^^é  di;  les  cacher 
en  terre,  à  mesure  qu'il  faisait  sa  récolte  (pour  les  sous- 
traire h  la  cupidité),  puis  il  n.?  se  serait  plus  sotivcnu  de 
remplacement  qui  les  recelait.  «»t  cet  amas  s'est  conservé 
jusqu'à  nos  jours,  pour  se  r/véler  fortuitement.  J'ai  pu, 
de  suite,  recueillir  la  masse  aL^irlounTée,  et,  en  la  décom- 
posant,  je  n'y  ai  trouvé  que  de-  débris,  sauf  deux  haches 
d'une  facture  rudimenlaire,  dite  à  t;ilon,  tine  c.ipsule,  un 
grattoir  ^fondu  à  l'iiiMt^tiiuî  d'iîii  sil«»x  taillé  .et  unefoulo 
do  fragments  d'iuslruments  /hvits.  .iiù  mpagnés  deculols 
de  bronze.  Sai.s  doute,  ees  nbj.  îs  Si»nt  les  similaires  de 
ceux  décrits  dans  les  ouvriires  ilrs  hes^^r.  lîe  Hun.  Madsen, 
\Vorsaa\  etc.:  mais  il  es;  iniéres-an:  p  urnous  de  trouver 
aux  ctMitins  des  SiKauoi  tes  e;  des  IVirisn,  une  a^rirlomcra- 
titni  de  piives.  d.ms  -îi  s  .:'::.;;  r.s  i:i  :>.  ut.iMes,  pour 
servir  v'.Vlemenîs  sirieuv  .1  !':>:,  :.t^  i.»  riu-lusirie  de 
*vlte  é|v^juo.  i>  ui  s.ii:.  r.  »>!  \r..  ;:  ,:c\*  liaimenls: 
mais,  comme  av.v  un  tr.uiv.:,:  V  ^,  ;  i  .iW^-  Cuvier  a 
pu  nwiistri-.în^  .i.*s  esi\»   s  j   r".  .i>    ■  :  .:ipi;is.  U  science 


_v?-i.>  dune  cachette  de  Fondeur    llœarchcs) 
A$e  du  Bronze 


I.e^tvidc 


■■•■  '■"■•■■■■  ij  A»..» /./■■/*•.  ....v  * 

.,..,.  «,,-.^.«  ., il  »..,.■.■/,„■.,,.„,,.,,  f„.ji. 


XLIY*  SESSION,   A  SENLIS.  153 

a  marché  à  pas  de  géant),  de  môme,  nous,  dans  cotte  col- 
loclioa  triiuvée  en  bloc  (eu  comparant  avec  des  objets 
similaires),  nous  possédons  une  révélatiou  complète  de 
rage  de  bronze,  pour  notre  localil^,  et  elle  doit  en  fixer 
irmocablement  et  irrécusablemont  l'histoire  (I). 

Ces  objets  ont  été  enfouis  dans  un  trou  pratiqué  dans 
le  ?ol  et  comblé  de  suite,  car  le  sol  est  parfaitement  homo- 
gène, et  il  indique  qu'il  n'y  a  pas  eu  de  terre  rapportée  : 
le  terrain  est  un  sable  gras,  à  base  d'argile  jaunâtre,  avec 
quelques  veines  d'argile  bleue.  Je  puis  donc  répéter  que 
c'oït  là  une  nouvelle  série  d'objots  en  bronze  que  l'on 
désigne  sous  le  nom  de  fonderie  ou  de  cachette  de  fondeur, 
bien  que  Ton  n'ait  recueilli  dans  ces   stations  que  des 
^^•jols  usés  ou  brisés,  et  jamais  (ou  par  hasard)  des  pièces 
P"  voie  tle  fabrication  ou  des  moules.  Ces  objets  portent 
?éfiérajenient  les  traces  du  moulage  dos  bavures  du  bronze 
•'*'r  les  parties  latérales  devaient  disparaître  ensuite  par  le 
û^^rtolage),  et,  malgré  leur  état  fragmentaire,  ils  peuvent 
'ïoijs  donner  une  idée  a?sez  exacte  de  la  nature  du  travail, 
"*-  la  civilisation  et  des  mœurs  do  ces  temps  reculés.  A  cet 
♦•nc^t ,   je  donne  ci  -  après   la  nomenclature    des   pièces 
recueillies  : 

Huches  à  bords  droits  et  talon  (dont  deux  entières  et 
1*11  nzo  fragments),  17  pièces. 

Huches  à  ailerons  :  simples  fragments,  3 


A  reporter 20 

^  '  I  Nous  avons  d'^jfi,  avec  M.  Milloscariifis,  «h'^couvort  un  cime- 
■'^re  (lo  la  pierre  pclie  et  un  ciineliore  inérovinj^icn.  M.  Miilos- 
^^ïnps  ,  (le  son  coté,  a  fouille  deiix  inoniinnMils  mrgalithi'i'ies. 

'*'  3u>^i  couplai»'»  (les  stations  j>n''liiîrl(iriqm's,  romaines  et  gallo- 
^^♦niaînos  :  la  série  se  complète  i)Our  notre  contiée. 


iS4      CONGRÈS  ARGHÉOLOGIQUB  DE  FRANGE. 

Report 20pii 

Lances  :  divers  fragments  dont  deux  pointes,      5 

Épées  :  menus  fragments  de  lances  (plu- 
sieurs avec  stries),  30 

Poignard  :  un  petit  fragment  de  soie  ou 
âme  de  la  poignée, 

Grattoir  ou  racloir  :  en  assez  bon  état, 
Fourreaux  ou  talons  de  lances  :  fragments  (dont 

quelques-uns  à  nervures],  iO 

Capsule  bombée  :  avec  bossette  au  centre 
(base  ou  talon  de  lance?). 

Faucille  :  un  fragment  présumé  de  serpe 
ou  de  faucille, 

Vase  :  fragment  mince,  martelé,  supposé 
d'un  vase  ou  d'une  coupe. 

Anneau  :  fragment  d'un  anneau,  soit  de 
suspension  ou  autre  usage, 

Douille  :  fraiçments  d'une  forte  douille,  sans 
détermination, 

Tige  cylindrique  :  courts  fragments. 

Tige  octogonale  :  courts  fragments. 

Tige  octogonale  :  fragments  de  forme  cou- 
cave,  sans  détermination.  iO 

Scories  et  morceaux  indéterminables,  culots,    40 


Total.  125  pi 

Pour  l'intelligence  de  cette  désignation  sommaire 
dessiné  quelques-uns  de  ces  objets  : 

Figure  l'^  —  Uaclie  dite  a  rebord  droit  et  à  taloi 
de  face  et  de  pro61). 

Figure  2*.  —  ilacbe  dite  à  rebord  droit  et  à  talon  j 


XlSf  SESSION,   A  8ENU8.  iSS 

k  partie  du  tranchant  est  à  côtes  :  des  fragments  en  ont 
plnsieun). 

Figure  3*.  —  Fragment  de  tige  octogonale. 

Figure  4*.  —  Bout  de  lance  avec  renflement. 

Figure  5*.  —  Capsule  ou  virole  à  aileron  circulaire  (la 
partie  cylindrique  percée  de  deux  trous). 

Figure  6*.  —  Fragment  de  lame  d'épée  (ayant  quatre 
^i€8  de  chaque  côte  des  méplats). 

Figure  7*.  —  Fragmeut  d'un  fourreau  losange. 

Figure  8*.  —  Grattoir  ou  racloir  (vu  de  face  et  de  profil 
<lu  c6lé  du  tranchant). 

Figure  9*.  —  Talon  de  fourreau  se  terminant  en  rond. 

(Toutes  ces  pièces  sont  de  grandeur  naturelle). 

L'espace  me  manque  pour  continuer  la  description 
d'autres  objets,  ne  voulant  pas,  d'ailleurs,  abuser  de  l'at- 
^Dtioo  du  Congrès.  Je  me  propose  (à  Toccasion)  de  faire 
^yser  ce  métal  pour  en  connaître  la  composition  exacte 
et  rechercher  à  quelle  période  il  peut  appartenir  ou  être 
^ioiilaire,  car  tout  porte  à  croire  que  ces  instruments  ont 
^té  fabriqués  dans  le  pays  :  il  y  a  des  pièces  coulées  et 
<iautres  martelées,  ayant  même  la  surface  extérieure 
polie. 

Quel  que  soit  le  peu  d'attrait  que  peut  offrir  isolément 
l'examen  de  ces  objets,  le  véritable  intérêt  réside  dans 
leur  ensemble  et  dans  les  circonstances  de  leur  découverte; 
c'est  pourquoi  j'ai  pensé  qu'il  importait  d'appeler  l'atten- 
tion des  savants  archéologues  sur  ce  simple  fait,  d'autant 
plus  que,  pour  notre  contrée,  c'est  un  nouveau  jalon  planté 
pour  nous  guider  dans  la  voie  archéologique.  Jusqu'à  ces 
derniers  temps,  en  effet,  on  n'a  abordé  ce  sujet  qu'armé 
^  textes  ou  documents  historiques,  moyen  insuffisant, 
puisqu'il  s'agit  de  faits  préhistoriques;  il  faut  donc  mettre 
^cà\é  les  citations  et  avoir  recours  aux  données  pure* 


156  CO.XGRÈS  ABCHÉOLOGTQrE  ]•£  FEA5CE. 

ment  archéologique?,  c'est-à-dirt»  étU'Hor  seulement  les 
débris  iiiissés  pir  les  premières  générati-^ns,  en  s'aidantde 
la  traiition  soumise  à  l'observation,  suivant  laméthole 
lies  sciences  naturelles. 

Je  termine  eu  ajoutant  que  cette  découverte  caractérise, 
avec  ufts  f«»uiiles  antérieures  et  postérieures,  le  long  et 
œntinuel  séjnur  de  l'homme  dans  nos  contrées  :  ces 
vestiges  ininterr-'icpus,  précisent,  avec  la  plus  grande 
autheuticité,  une  série  continue  depuis  les  temps  préhis- 
toriques jusqu'aux  temps  conîemp«"'rains. 

Il  est  de  i 'intérêt  de  la  science  de  faire  connaître  ces 
faits  particuliers  :  ils  peuvent  »vlairer  les  personnes  qui. 
en  pratiquant  des  r?:»nilb^  ou  en  remuant  des  terres, 
trouvent  des  objets,  à  leur?  yeux  insignifiants  ^sans 
valeur  intrinsèque  .  mais  qui  p-nivent  avi-ir  une  impor- 
tance au  p:M::t  -le  vi.e  arciic-!*'^'qr*e,  en  donnant  aux 
savants  des  élémonts  pour  apprécier  l'existence  et  les 
manières  d'éîre  •]»•?  pei:j»l  .d-s  priniiîives,  pir  Tinspieclion 
de  la  forme  et  de  Li  iiaîr.:e  «i.s  «:'b'ets  trouvés  :  c'est  là, 

m 

assurvjmeu?.  un  lésulta:  u'.ile.  mC-ni':  p<>i!r  l'histoire  géné- 
rale de  l.i  France. 

M.  de  Ciix  de  Saiiit-Aym  r.r  •.■iiî:^.  i:r.iqi:e,  à  l'occasion 
des  que^tiou^  îeux,  *,:  is  vt  -.latie  ;  I'  Une  carîe  des  sta- 
t::as  p.i!i:sîros  L^?  er.v-r.  i:r  ùo  S'-r.îis  dressée  par 
M.  Viue*.  :'2'  r.n  Ui-:!.- ir-:  iivrr:::.-^  î- ::t  il  est  l'auteur 
sur  les  i:î-  iic:ii-'!i*>  ni»'ci  :t!.". -v.e?  k\-'  b  vûlée  do  l'Oise  et 
notamment  sur  !\i!!Je  d-,-  V.i-.xr'aî    l  ;  o'  une  note  sur 

t'^T-r  :V  '' O'^t'.  •■  '.r  A  c  C:  \  jîr»  Sr'.:-Avm-^ur.  P^ris. 
ïyr  "X.  IST-i  K\T.v.t  î-  [i  .'?;-. f  r/./  r\roj^h^ie,  H74. 
cra!:d  in-v.  :}o  li.: 


XL1V^  SESSION,   A   SENLIS.  157 

uneépéede  bronze  trouvée  aux  environs  de  Senlis  (4). 

M.  Uayaux  du  Tilly,  au  sujet  de  la  première  partie  de 
la  \î'  question  (ancienneté  et  importance  des 
voies  romaines  dans  les  Gaules  ]  lit  un  travail 
destiné  à  accompagner  la  carte  «les  voies  romaines,  pré- 
sentée par  lui  au  Congrès  géographique,  en  1875  (2). 

11  dépose  ensuite  sur  le  bureau  une  note  de  M.  Har- 
(lûuin,  conseiller  à  la  cour  d  appel  de  Douai,  sur  le  séjour 
de  Grotius  au  château  de  lialaguy,  en  1623,  et  sur  la 
réception  faite  à  Senlis,  par  Louis  XIII,  à  Tauteur  du 
Droit  de  la  paix  et  de  la  guerre,  alors  ambassadeur  de 
Suède  près  ce  prince  (3). 


Hugo  de    Groot   (Grotius)    à    Balagny   et 
à   Senlis   (1623-1635). 

Quelque  étranger  au  programme  du  Congrès  que 
puisse  paraître  le  souvenir  qu'il  s'agit  d'évoriuer,  et  qui 
n'a  pas  même  le  mérite  d*étre  inédit,  ce  souvenir,  néan- 
moins, ne  saurait  être  absolument  inopportun.  En  même 
temps  qu'il  a  pris  place  dans  l'histoire  de  la  ville  où 
la  Société  française  d'Archéologie  et  les  membres  du 
Congrès  réunis  sous  ses  auspices,  reçoivent  l'accueil   le 

[1,1  Musée  (irch('nlofjique,  t.  II. 

[i-  Carte  de  In  Gaule  ancienne,  indiquant  rancienneté 
et  liniportance  relatires  df^s  voies  rojnninfs  d\rprès  les 
ifinêraires  d'.intonin  et  la  taf)lr  de  Pcuthif/er,  par  Ilayaux 
du  Tilly.  Paris,  Ahel  Pilon  (Inipr.  I.aroiissi').  ^'<7.■).  in-8°. 

(i;  Voir  a  c^  propos  le  travail  lu  à  la  Sociolc  hislorique  de 
Couipiegne,  par  M.  de  Marsy,  sur  lo  Traité  de  1G3o. 


158      G0N6RÂ3  ARGHÉOLOOIQUE  DE  FRANGE.  . 

plas  hospitalier,  il  ramène  l'attention  sur  l'œu^ 

taie  et  sur  l'un  des  incidents  de  la  vie  du  pub 

plus  célèbre  de  son  époque.  Presque  tous  les  autn 

aussi  nombreux  que  divers,  de  ce  publiciste,  ren 

reste  essentiellement  dans  le  domaine  des  étu 

8*agit  d'encourager.  Disciple  de  Juste-Lipse,  Gmtîi 

plus  tendre  adolescence,  était  passé  maître  en  ling 

Il  préludait  par  la  critique  et  l'édition  de  textes  o 

difficiles   entre  tous,  aux  prodiges  d'une  érud 

fait  de  littérature  sacrée  ou  profane,  avec  laquelle 

lisa  qu'à  peine  celle  des  Vossius,  des  Casaubon, 

maise  et  de  ses  autres  contemporains  les  plus  illu! 

travaux  d'historien  national  et  de  légiste  eussent  < 

sufB  par  eux-mêmes  à  jeter  un  vif  éclat  sur  s 

comme  à  honorer  sa  patrie.  Il  ne  devait,  hélas  I  y  i 

d'autre  rémunération  de  ses  labeurs,  de  ses  ser 

ses  hautes  vertus  civiques  et  de  sa  gloire,  que  l'ot 

le  plus  implacable,  et  que  les  rigueurs  de  l'es 

l'évasion  miraculeuse  qui  avait  mis  fin  à  une  • 

décrétée  perpétuelle  par  des  juges  improvisés  ie\ 

aveugles  instruments  des  vengeances  d'un  parti  | 

Rappeler  ici  qu'il  s'appelait  Hugues   Cornets  d 

ce  n'est  pas,  sous  prétexte  de  scrupules  en  fait 

tude  biographique,  le  destituer  du  bénéfice  du 

Grotius,  devenu  classique  longtemps  avant  i64 

est  demeuré  tel. 

Prononcer  ce  nom,  c'était  d'ailleurs  citer  d'c 
livre  qu'il  rappelle  et  dont  la  notoriété  n'est  pas 
à  savoir  :  le  traité,  si  justement  fameux,  intit 
droit  de  la  paix  et  de  la  guerre. 

De  l'auteur  et  de  l'ouvrage,  Voltaire  a  dit 
part  :  «  Grotius  m'a  souvent  ennuyé,  mais  il 
sa\ant.  o  Ne  serait-on  pas  tenté  de  penser  qu« 


XUY*  SESSION,   A  SENLIS.  i59 

Ion,  maîoU  lettrés  plus  ou  moins  légistes,  ou,  si  on  le 
préllre,  certains  légistes  plus  ou  moins  lettrés,  à  corn* 
oeuœr  par  les  plus  empressés  à  rajeunir  l'éloge  du  livre 
etàbruyamment  se  rendre  autant  d'échos  de  cet  éloge, 
se  sont  assez  volontiers  résignés  à  ne  laisser  qu'à  Voltaire 
le  soin  et  Tennui  d*une  préalable  lecture? 

A  peine  est -il  besoin  maintenant  d'ajouter  que  les 
auteurs  des  biographies  les  plus  connues,  à  la  rédaction 
desquelles  la  publication  de  la  correspondance  à  la  fois  si 
^lumineuse  et  si  intéressante  à  tous  égards  de  Grotius 
devint,  en  dernier  lieu,  d'un  si  grand  secours,  se  sont  fait 
uo  devoir  de  rappeler,  en  interrogeant  cette  correspon- 
danee,  que  le  tant  célèbre  traité  fut  commencé  à  Balagny. 

Avant  de  reproduire  à  ce  sujet  quelques  détails,  il  ne 
sera  pas  hors  de  propos  de  noter  que,  dès  i617,  le  frère 
aioé  de  Grotius  avait  séjourné  à  Senlis.  Il  était  venu  s'y 
lamiliariser  avec  l'étude  et  l'usage  de  noire  langue,  à 
des  conditions  et  dans  dès  circonstances  qui  paraissent 
n'avoir  pas  été  jusqu'à  présent  autrement  précisées.  Un 
bit  hors  de  contestation  c'est  que  ce  fut  de  Senlis  que  Guil- 
laume Grotius  s'achemina  vers  la  faculté  de  droit  d'Or- 
léans. Il  s'y  distingua  et  y  conquit  avec  éclat  grades  et 
diplômes,  et  préluda  ainsi  dignement  à  sa  longue  et  méri- 
toire carrière  de  savant  jurisconsulte  et  de  professeur  à 
l'université  de  Leyde. 

Les  causes  du  séjour  d'Hugues  Grotius  à  Balagny,  puis 
à  Senlis,  en  16â3,  et  de  sa  réapparition  dans  la  même 
ville,  en  i635,  sont  tout  autrement  mémorables  et  con- 
nues. Parmi  les  souvenirs  de  sa  carrière  si  longue  et 
si  douloureusement  glorieuse  de  proscrit  il  n'en  fut 
pière  qui  reparurent  aussi  fréquemment  sous  sa  plume 
ou  sur  ses  lèvres,  dans  les  épanchements  de  la  famille  et 
et  de  l'amitié. 


G: 


Ai.:.:...     ..-l.Tï    IL    îlAî^li. 


_  t  i'. 


21 -r:*:  ^-  T.i-.r  ;: 
ï ,,  i   I i 


A.i 


o  m  r-i -■■■■■■ 


A.*  .  «    .  . 


1     ^  .*  .  •  *'• 


T.* 


l: 


• .  • 


•  ".  »  ; . 


:  :::  if^  -i  r>r.\:r^  et 

m  -  «.ï  ^»~  v-C  ma.TkC 

..  .:•     ~-..\    ..>«'.?.    iru» 

-     .?".  *..  r-:  £L:.re  que 


.,r;. .  ■;   ■ 


..   .  A:....:.: 


i . , .  «  1  « 


:  >  Piriï 


»    »    -  *  >  •  . 


"  ■_ 

.  i.   -r 

2 

-  w^ 

zTy 

ei 

îi 

L    m.~ 

llV-rl.. 

<«  h  A  « 

.£• 

'iu 

r^.  ■ 


Ai:  :.  ...:: 


V  -         -  -      . 


.    M  V.. 


î. 


■  *«•-.*  . 


i'>. 


.     .    1.    Y    M?SJ  le 

:.  :    u:-.rji-jo  eu 
[■^  liur.juv,  au'il 


XLIY*  SESSION,   A  SENUS.  iOI 

commença  le  grand  ouvrage  qui,  seul,  aurait  sufQ  pour 
rendre  son  nom  immortel...  H  avait  avec  lui  sa  famille  et 
quelques  amis.  Les  plus  illustres  savants  venaient  quel- 
quefois lui  rendre  visite,  entre  autres  Saumaise  et  Rigaut. 
llavait  tous  les  livres  qu'il  pouvait  désirer.  François  de 
Tbou,  fils  du  président  qui  avait  hérité  de  la  bibliothèque 
de  son  père,  une  des  plus  belles  de  ce  temps-là,  lui  laissait 
l'entière  disposition  des  livres.  Grotius  qui  savaitquele 
président  de  Mesme  était  très-zélé  catholique,  eut  l'atten- 
tion de  régler  sa  conduite  de  manière  que  le  président 
n'eût  point  à  regretter  le  plaisir  qu'il  lui  avait  fait  de 
lui  prêter  sa  maison.»  Grotius  prend  soin,  en  effet,  dans 
^  correspondance,  de  rappeler  que  tous  exercices  religieux 
par  des  ministres  du  culte  réformé  fureut  suspendus,  et 
que  le  service  à  table  demeura  sévèrement  conforme  aux 
prescriptions  de  l'église  orthodoxe.  11  passa  le  mois  d'oc- 
tobre de  la  même  année  dans  Senlis  même. 

Douze  ans  après,  l'auteur  du  Traité  du  droit  de  la  paix 
ex  de  la  guerre,  à  l'apogée  de  la  renommée  européenne 
de  publiciste  sans  rival,  reparaissait  à  Senlis.  Le  proscrit 
était  devenu  l'ambassadeur  en  Franco  de  la  Suède,  alors 
sous  le  gouvernement  de  Christine  et  du  célèbre  chance- 
lier Oxenstierna.  a  Ce  fut  le  duc  de  Mercœur  qui  condui- 
«  sit,  le  6  mars,  Grotius  à  la  cour...  Le  nouvel  ambassa- 
«  deur  fut  très-content  de  la  réception  qui  lui  fut  faite.  La 

•  garde  du  roi  était  sous  les  armes.  Louis  XIII  parla  beau- 
«  coup  à  Grotius,  et  avec  tant  de  bouté,  qu'il  en  conjectura 

•  qu'ils  finiraient  agrêablcmoutlosail'aircs  qui  lui  étaient 
«  cuniiées.  Sa  Majesté,  ajuuto  le  bio^^^raphe,  qui  se  borne  du 

<  reste  à  continuer  l'analyse  de  la  currospuuduucc  de  Gro- 

<  tius,  lui  fit  comprcndn:  pur  son  air  gracieux  et  par  ses 

<  diicours  qu*on  ne  puuvuit  envoyer  eu   France  aucun 
I  uiniitre  qui  lui  fit  autant  de  plaisir.  11  le  lit  couvrir  et 

XUV*  SESSION.  il 


163       CONGRÈS  ARCBÉOLOGIOCE  DB  FRANCE. 

e  il  redoubla  ses  politesses,  lorsque  Grotius  lui  présenta 
«  son  fils  Corneille,  n 

Quelque  modernes  que  soient  les  souvenirs  que  je  Tiens 
d'évoquer,  et  quelque  étrangers  qu'ils  puissent  dès  lors 
paraître  aux  travaux  du  Congrès,  peut-être  n'y  seront-ik 
pas  absolument  déplacés. 

L'hospitalité  qui  accueillit  Grotius  à  Balagny  et  dans 
Seniis.  fut  un  touchant  et  mémorable  hommage  à  l'infor- 
tune et  an  génie.  Elle  n'honora  pas  moins  la  France  et 
Louis  XIII  que  l'illustre  prciscrit  lui-même.  Dans  la  ville 
où  il  recueillit  un  aussi  éclatant  témoignage  de  sympathie, 
une  rémunération  aussi  proviicntiellement  glorieuse  de 
ses  labeurs,  de  son  savoir  et  de  la  vie  pure  et  sans  tache 
qu*il  y  associa,  siège  une  assemblée  non  moins  hospita- 
lièrement  accueillie,  au  sein  de  laquelle  tout  respect  est 
acqui?  d*avance  au  nom  et  à  la  mémoire  de  l'érudit,  du 
philologue  par  excellence  et  de  Thistorien  des  Provinces- 
Unies. 

Enfin  M.  de  Marsy  communique  un  travail  de  M.  le 
colonel  Ccaistant  d'Yanviile  sur  Guillaume  d>Ircuis  et  dom 
Pierre  Coustaut.  travail  des- i né  à  servir  de  réponse  à  une 
partie  de  la  50""  question  : 

Donner  la  biographie  des  plus  célèbres 
antiquaires  et  érudits  nés  dans  le  dépar- 
tement de  l'Oise. 


Dom  Pierre  Constant  et  Guillaume 

d'Ercuis. 

Paniii  le-î  êruvlits  nés  lians  le  déparlement  de  l'Oise,  il 
e:i  est  ua  doai  les  biographes  ont  \>cïi  parlé,  malgré  Péten- 


XLIY*  SESSION,   A  SENLIS.  163 

due  de  son  savoir  et  de  ses  mérites,  peut-être  à  cause  de 
la  oatore  même  de  ses  travaux,  exclusivement  consacrés 
i  liscolastique;  et  cependant  il  remplissait,  suivant  nous, 
toutes  les  conditions  qui  font  les  vrais  savants.  Mais,  dans 
notre  siècle  si  agité  et  parfois  si  futile,  le  goût  des 
recherches  et  des  études  sérieuses  s'est  répandu  partout. 
Une  sorte  de  décentralisation  intellectuelle,  dont  cette  réu- 
nion est  une  des  manifestations,  s'est  produite  sur  tous  les 
points  de  la  France  ;  elle  a  cherché  à  faire  revivre  le  passé 
pour  éclairer  l'avenir,  tendant  ainsi  à  prouver  à  tous  que 
le  travail  a  toujours  été  une  loi  de  l'humanité,  que  la  lutte 
doit  avoir  ses  défaites  comme  ses  victoires,  que  la  déses- 
pérance  n'est  pas  un  acte  viril,  ne  peut  être  le  fait  d'une 
nation,  qui,  malgré  de  violentes  convulsions,  de  fréquents 
^  profonds  bouleversements,  a  produit,   à  toutes  les 
époques,  des  enfants  dont  elle  a  le  droit  de  se  montrer 
fièie,ie  dirais  même  orgueilleuse.  De  grand»  génies,  des 
individualités  brillantes  ont  occupé  les  premiers  plans, 
accaparé  les  suffrages  et  les  critiques;  ils  ont  conduit, 
dirigé  la  nation  dans  les  conseils,  dans  le»  sciences,  dans 
In  arts  ;  mais  ces  éclatants  météores,  ces  phares  lumineux 
qui  ont  guidé  les  générations  à  travers  les  âges,  ne  sont 
que  les  résultantes  du  labeur  général,  occulte,  modeste, 
incessant  de  l'universalité  de  nos  ancêtres.  Et  ces  infati- 
gables travailleurs,  ces  intrépides  pionniers,  ces  incon- 
^ents  édificaleurs  de  la  gloire  nationale...,  la  postérité 
les  découvre  un  jour,  et  bien  longtemps  après  que  leur 
souvenir  a  passé,  ils  se   trouvent  vengés  de  cette  sorte 
d'oubli,  de  cette  espèce  d'injustice  de  leurs  contemporains 
parles  recherches  de  leurs  petits  neveux,  les  publications 
nltérieures  des  sociétés  savantes. 

Il  serait  cependant  injuste  de  dire  que  celui  dont  je 
veux  vous  entretenir,  ait  été  complètement  oublié  par  les 


164      CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

biographes.  Mais  comme  on  est  toujours  enclin  à  la  par^ 
tialité  dans  sa  propre  cause,  je  tiens,  avant  de  tous  le 
nommer,  à  ne  le  présenter  qu'avec  ce  que  j'oserai  appeler 
de  sérieuses  références. 

Deux  hommes  éminents  de  notre  époque,  l'un  membre 
.  du  Sacré-Collége,  l'autre  haut  dignitaire  de  l'instmction 
publique,  m'ont  exprimé  en  termes  à  peu  près  identiques 
leur  opinion  sur  dom  Pierre  Constant,  l'enfant  de  Com- 
piègne,  où  il  naquit  le  30  avril  1654,  l'élève  du  collège 
des  Jésuites  de  sa  ville  natale,  le  novice  de  Saint-Reroi  de 
Reims,  entré  à  dix-sept  ans  dans  la  Congrégation  de 
Saint-Maur  et  devenu  profès  en  i67i,  le  disciple  de 
dom  François  Lami  à  Saint-Médard  de  Soiseons,  où  il 
étudia  la  philosophie  en  1673,  le  zélateur  de  SaintrPha- 
ron  en  1679,  le  prieur  de  Nogent-sous-Coucy,  de  1693 
à  4696,  rhôte  successif  à  l^aris  de  l'abbaye  des  Blancs- 
Manteaux,  qui  recueillit  une  partie  de  ses  manuscrits,  et 
de  celle  de  Saint-Gcrmain-des-Prés,  dont  il  mourut  le 
doven  en  17il. 

Le  savant  r^rdinal  Pitra.  que  j  eus  l'honneur  de  voir  à 
Rorno  eu  48('^  et  auprès  duquel  le  nom  seul  de  dom  Cous- 
tAUt  mo  serxii  d'iniroiiucMûn.  résumait  son  opinion  sur 
lui  on  disant  qur  àôxn  Piorrf  avait  été  peut-être.  Après 
dom  «loan  Mahilinn.  Thumnir  le  plus  remarquable  de  la 
Oi«'^nffro.eAtii>n  àc  Saint-Maur.  C'est  à  peu  près  la  même 
opinion  qnr  jViis  la  flattousr  saMsiaclion  de  recueillir  de 
la  KMirhr  mrmr  «l'un  anr.ien  ministre  de  l'instruction 
publique.  M.  ùiraud. 

AprîS  lYnoihV-  liii  jucommî  <lr  œ?  deux  doctes  person* 
im>:<^s,  \a  i^Aiisi .  iMinnn  î'.iii  di;  nu  palais,  parait  enten- 
dtir:  4>i  4*11  (!r)îitrv  <ii  .'nuinicrjiiiDii  luts  ouvrages  de  dom 
IV  «liMislMîil.  sur  h>!4Tii<»l>  niii  nt'ia  yirononcé  des  jupi'S 
i*nin|>4M4Mit«>  l«'is  i\iu  :  (loin  inî^iii.  *ii«m  Th.  Blampin,  né 


XUY*  SESSION,   ▲  SENUS.  4(i5 

^  %yoD,  Baiilet,  né  à  la  Neuville-en-Hes,  du  Pin,  dom 
«Mopiaot,  dom  Philippe  Lecerf,  dom  Edmond  Martène, 
dom  Clémencet,  Le  Nain  de  Tillemont,  il  me  reste  bien 
peu  de  chose  à  dire  du  modeste,  pieux  et  érudit  bénédic- 
tiu,  en  Faveur  duquel  je  viens  briguer  par  vos  suChrages, 
ce  que,  si  sa  modestie  le  pouvait  souffrir,  je  serais  tenté 
d'appeler  un  regain  de  renommée. 

Dom   Mopinot  a,  de  sou  style  élégant  et  pur,  écrit 

t  éloge  de  dom  Constant,  dans  le  Journal  des  Savants 

janvier  i7i21;  mais  la  mort  est  venue  trop  tôt  pour  qu'il 

pût  avoir,  je  ne  dirai  pas  une  page,  mais  quelques-unes 

de  ees  lignes  sympatliiquemeni  convaincues,  éloquem- 

ment  émues  et  chaudement  lumineuses  qu'a  si  longue- 

Tuent  semées  dans  le  magnifique  recueil  entrepris  à  la 

gloire  des  ordres  monastiques  le  grand  écrivain  catholique, 

nilustre  auteur  des  Moines  d'Occident,  auquel  j'avais  cru 

^oir  adresser  le  modeste  résultat  de  mes  recherches. 

C'est  auprès  de  vous.  Messieurs,  que  je  viens  chercher  et 

qoe  j'espère  trouver  l'oubli  de  ce  stérile  regret. 

Je  vais  donc  essayer  de  rappeler  en  peu  de  mots 
fuelques-uns  des  traits  principaux  d'une  existence  de 
tnvail  et  de  piété  en  disant  ce  que  furent  son  amour  de 
l'étude,  son  érudition,  son  orthod(»xie,  son  abnégation,  sa 
modestie,  sa  charité,  son  désintéressement,  son  austérité, 
sa  foi. 

San  amour  de  tétude.  —  Dès  son  enfance  dom  Cous- 
tant  s^  fait  remarquer  par  sou  zèle  et  sou  application  à 
Compiègne,  à  Reims,  à  Soissons;  el  dom  Tassin  nous  dit 
que  dès  son  noviciat  il  mérita  d'être  proposé  pour  modèle 
à  tous  ses  camarades.  A  Heims  il  s'attache  à  dom 
Fr.  Lami,  et  fait  tout  pour  aller  le  retrouver  à  Soissons. 
où  œlui-ci  avait  été  envoyé  pour  professer  la  philosophie. 
Il  parvient  à  se  rapprocher  de  ce  maître  qui  affectionnait 


106  COMGRÈS  ARGUÉOLOGIQUJS  DIS  FRANGE. 

autant  son  disciple  qu'il  en  était  aimé.  Mais  la  réunion  ne 
devait  pas  durer  longtemps  ;  dom  Lami  est  envoyé  à  Paris, 
rélève  tenle  encore  de  suivre  son  professeur,  mais,  soumis 
à  la  règle,  il  renonce  à  cet  ardent  désir  et  semble  chercher 
une  compensation  à  son  sacrifice  par  un  redoublement  de 
travail  et  d'assiduité.  Enfin,  tout  jeune  encore,  il  entra 
dans  cette  Congrégation  de  Saint-Maur  qui  compta  près- 
qu'autant  de  savants  que  de  membres.  Ses  travaux  disent 
le  reste. 

Son  érudition.  —  Voyons  comment  elle  a  été  appréciée. 
Dom  Blampin,  nommé  prieur  de  Saint-Remi  de  Reims, 
est  obligé  d'abandonner  le  recueil  des  œuvres  de  saint 
Augustin,  et  c'est  dom  Couslant  qu'il  demande  de  faire 
venir  pour  le  remplacer.  Il  est  d'abord  chargé  des  tables 
du  troisième  volume  des  Œuvres  et  bientôt  après  de  la 
besogne  délicate  de  discerner  les  sermons  véritables  de 
ceux  qui  avaient  été  supposés.  Et  il  s'acquitte,  dit  dom 
Tassin,  de  cette  difficile  besogne  avec  tant  de  promptitude 
et  de  succès,  que  ce  travail  d'un  commençant  aurait  pu 
passer  pour  le  chef-d'œuvre  d'un  talent  consommé.  C'est 
à  propos  de  cette  publication  que  Baillet  dit  de  dom  Cons- 
tant qu'il  avait  une  industrie  particulière  pour  recon- 
naître non-seulement  les  pièces  supposées,  mais  encore 
les  fourrures  et  les  gloses.  Il  savait,  du  reste,  au  dire  de 
dom  Mopinot,  rechercher  les  vérités  jusque  dans  les 
moindres  faits. 

Plus  tard  dom  Mabilloii  le  fait  désigner  pour  cette  édi- 
tion de  saint  Hilaire,  dont  dom  Ph.  Lecerf  a  écrit  qu'on 
la  regardait  comme  une  des  plus  exactes,  des  plus  com- 
plètes et  des  plus  parfaites  qui  soit  sortie  de  la  plume  des 
Bénédictins. 

Le  Nain  de  Tiiiemont,  qui  avait  entrepris  les  mémoires 
pour  servir  ù  l'histoire  ecclésiastique,  demanda  par  son 


XLIV*  SESSION,   A  SKNUS.  107 

tesUmeot  que  dom  Coustant  fût  chargé  de  leur  conti- 
Doalioa,  prouvant  ainsi  l'estime  qu'il  avait  pour  son 
talent. 

Ed  1705  et  en  1715,  il  publia  en  faveur  de  lu  Diploma- 
tique de  dom  Mabillon  une  première  et  une  deuxième  réfu- 
Ution  des  attaques  dû  Père  Germon,  jésuite.  La  seconde 
réplique  resta  sans  réponse,  et  on  a  pu  croire,  dit  dom 
Ph.  Lecerf,  que  le  Père  Germon  avait  cédé  à  dom  Pierre 
UD«  victoire  qu'il  avait  o?é  disputer  à  dom  Mabillon  lui- 
même. 

La  modération  cependant  était  le  caractère  spécial  de  sa 
critique  et  se  faisait  voir  particulièrement,  suivant  dom 
Vopiuot,  dans  lesendroitsoù  il  employait  le  plus  de  forme 
coolre  ses  adversaires. 

Une  lettre  de  dom  Simon  Baugis  nous  apprend  qu'il 
(iemanda  que  dom  Coustant  revit  le  saint  Grégoire,  mais 
Hlen  fut  momentanément  chargé,  il  ne  termina  cepen- 
dant pas  ce  travail. 

.Nous  voyons  ensuite  dom  Alartènc  le  consulter  sur  un 
traité  d'Hugues  de  Saint-Victor,  et,  peu  de  temps  aprèt^, 
•■•a  lui  confie  la  surveillance  d'une  nouvelle  édition  du 
Bréviaire. 

Lorsque  dom  Coustant  eut  achevé  les  Tables  dos 
ou\r.ige&  supp«>sés  de  saint  Augustin,  un  lui  propos<i  suc- 
>e»$i\ement  de  travailler  à  une  nouvelle  édition  d'un  dos 
Pênes  de  l'Église,  pui;?  à  une  bibliothèque  bénédictine,  o{ 
^utin  à  nu  recueil  dos  lettres  des  papes,  ouvrage  inunen^^e 
•{u  a  près  de  longues  hés-itutions  il  iinit  par  accepter  a\ec 
U  pensée  que  ce  devait  elle,  rumme  nuus  l'upprend  une 
irttre  de  lui,  VJIistoire  de  i'/ùjlise  faite  et  appuyée  sur  des 
Uits  authentiques;  et,  comme  le  dit  dom  Mopinnl,  le 
•!e?ir  de  rendre  ;iervice  à  l'Kglise  lui  appl.init  les  dillicul- 
'a.  Ce  tut  vers  la  lin  de  1701  qu'il  comnicnç;i  à  rassem- 


UîH  (lONURÈS  AHCUÉOLOGlOrE  DE  FIUNGE. 

blor  les  éléments  de  ce  remarquable  travail,  car,  daos 
iiiio  lettre  datée  de  Home,  le  15  septembre  1701,  doni 
Guillaume  Laiiarre  lui  dit  avoir  communiqué  à  plu- 
sieurs prsdunes  son  projet  qui  a  été  fort  goûté;  et  dans 
unr  autre  lettre,  do  dom  Constant  à  dom  Martène,  du 
li  février  1703,  il  dit  que  son  projet  est  encore  incertain, 
«  qu'il  n*a  enatreque  le  dessein  d'en  amasser  autant  qu'il 
{HMirra  afin  dVn  faire  dans  la  suite  ce  qui  pourrait  être  le 
plus  avautagreux  pour  le  bien  public.  •  On  ne  doit  du 
rt^i^to  |Kis  s  attendre  à  le  voir  aller  vite,  surtout  dans  les 
siMf^  ^^nlUS^:  car.  dit^îL  <  j'aime  mieux  avancer  moins 
p^nir  prt'n^in'  toutes  les  iiiesur^^  possibles  afin  de  donner 
3^  tVuvratn^  toute  la  perfection  dont  je  suis  capable.  » 

I  Vpttrv'  v^^licaco:^r  au  paiv  Innoceot  XIII.  faite  en  col- 
UK^mtîou  A\tvdom  Mopico\«?:ait,  audir^dedomTassin, 
J\uw  purvC;*  ç*?  srutv  et«f«:K>?  'i'.ftie  des  plus  beaux  temps 
vie  U  Uî^uî:^- 

IV;tr  A:vy  ,:r:'r  .^-^  :vc>e-in«îîn»;£::5  on  ne  peut  mieor 

*,«»r^.'  <v.,*  .V  ;  vr   i  yrs«:i-,v  Ijlum  i'^^se  c-.MiTelle  édition 

,^  .■>^■•^•*•/  .'S.  "j>.  -V  ;-'  t"*  j  •*vrr:z*-»*,  parG- B.6. 

>.-.».v-v  *'.«''*    tx'A-  •  ^»f•:■^?e^  :rr.'ri»?<  :?:  ."«rains  retran- 

^  ■<       '  •  '»v        -.r»     -î   "sf  ■>■!'' .  j.  eciii::»!.  «Cimer  dom 
v,^..A.l  '    i  vi    .-vt.  liiNi'       :ii^  H  ■  ;:rî!r:i^C7iB d "après 
•■    <v<  ;    ^  ^  -î-i  i-ri«f   f»f<  Li€t.*^  ,   mais 

.   .»  -x-v.'.!  -.x-  •    i\  t:  -i;    Ti^fii  -f  fil  2*?«îiir»nî  les 

■  •.^■•t«>i      *o        l 'v      ■.■■■■•    ^x.      »    •  *^îiili»^  i\'    LiT^f    rïîBSt$^âd~ 

»  ».       •*v-.'..     -       T-.*     ■  •      ,1  >^     i!:niir>|H   ••£    T'»*!I    T»!*  fes 

•  \'K»»K>  i^  xi':^     •■  ..«^     ..  ;*^    :.î!:*i»fS   ifiSsi^OMlt 


I  ■ 


« 


xmr*  SESSION,  a  senlis.  469 

sition  011  de  l'erreur  qui  les  avait  fait  admettre;  sa  finesse 
e(8on  discernement  pour  juger  les  variantes  d'un  texte; 
sa  sévérité  dans  l'examen  des  calculs  chronologiques; 
cette  science,  grâce  à  laquelle  il  avait  toujours  pour  ainsi 
dire  tous  la  raaîn  et  tout  prêts  les  faits  se  rapportant  à 
l'histoire,  aux  rites,  aux  doctrines  et  aux  lois  de  l'Église. 
Grke,  dis-je,  à  ces  qualités  et  à  beaucoup  d'autres  qu'il 
wnit  trop  long  d'énumérer  ici,  il  composa  un  ouvrage 
qui  est  un  modèle  et  un  type  parfait.  Bien  peu  d'hommes 
pourraient  concevoir  et  entreprendre  une  œuvre  semblable. 
Quant  à  l'exécuter  et  à  la  conduire  à  bonne  fin,  je  ne  sais 
si  personne  autre  que  dom  Goustaot  en  eût  été  capable.  » 
Dans  un  autre  endroit,  Schœnemann  reproduit  la 
même  pensée,  qui  fut  aussi  émise  devant  moi  par 
Mgr  San  Marsano,  bibliothécaire  du  Vatican,  lors«]u'il 
ne  montra  les  dix  cartons  contenant  les  matériaux  pré- 
parés des  2*  et  3*  volumes,  conservés  dans  la  Bibliothèque 
poDiificale,  où  ils  ont  été  déposés  par  le  cardinal  Fesch  : 
■  La  masse  imposante  des  fondements  qu'il  a  posés  s'op- 
pose à  ce  qu'un  autre  tente  d'achever  son  entreprise.  » 

Le  travail  consciencieux  de  dora  Coustant,  sa  persévé- 
rance infatigable,  a  dit  de  nos  jours  M.  Brainne,  ren- 
daient sa  critique  calme,  sûre  et  judicieuse. 

San  orthodoxie,  —  Nous  en  citerons  seulement  deux  ou 
trois  preuves  :  d'abord  le  décret  de  la  cour  de  Rome,  en 
date  du  2  juin  1700,  condamnait  six  ouvrages  publiés 
contre  l'édition  de  saint  Augustin;  plus  tard,  l'assenti- 
ment également  donné  par  la  cour  de  Rome  à  la  publica- 
tion des  Décrètales;  l'ordre  donné  par  le  Suint-Père,  de 
communiquer  à  cette  intention  tous  les  manuscrits  du 
Vatican;  et  enfin  une  constatation  toute  récente. 

Lors  des  premiers  dissentiments  entre  le  Piémont  et  les 
Ktats  de  l'Église^  plusieurs  étrangers  vinrent  au  Vatican 


170  CONGRÈS  ARGIIÉOLOGIQUE  PB  FRANGE. 

demander  communication  des  manuscrits  non  publiés  de 
Décrétaleê  de  dom  Goustant,  comptant  y  trouver,  pensa 
t-ou,  la  justification  de  certaines  hardiesses,  des  poinb 
d'appuis  pour  certaines  attaques.  Les  recherches  fureu 
stériles  et  n'eurent  pas  de  conséquences  connues.  Ga 
personnages  étrangers  avaient-ils  donc  cru  pouvoir  fondai 
quelque  espérance  sur  la  connaissance  d'une  lettre  de  don 
Constant  au  cardinal  Muffei ,  qui  l'avait  complimenta 
sur  ses  rérutations  en  faveur  de  la  Diptomaiique  de  don 
Mabillon,  dans  laquelle  se  trouve  le  passage  suivant  : 
«  Si  les  lettres  ne  sont  pas  ici  dans  une  entière  décadence, 
on  aurait  sujet  de  le  craindre  de  la  manière  dont  on  eu 
use  avec  ceux  qui  s\  appliquent,  il  y  a  un  certain  parti 
qui  règne  et  qui  ne  leur  laisse  pas  la  liberté  nécessaire. 
Vous  savez  mieux  que  moi  que  la  république  des  lettrée 
demande  une  certaine  lil>erté  honnête,  sans  quoi  elle  m 
peut  subsister.  Les  uns  se  plaignent  de  la  partialité  ûei 
journalistes,  les  autres  des  examinateurs.  »  C'était  bieu 
mal  connaître  les  sentiments  de  dom  Constant. 

Son  abnégation ,  sa  modestie.  —  Nous  en  trouvons  une 
première  preuve  bion  remarquable  dans  la  conduite 
du  jeune  iMèvo  de  phiiosophio  do  Suint-Médard,  deman- 
dant instammont  à  suivre  son  maître,  dom  Fr.  Lami,  et 
suppliant  ensuite  le  prieur  de  ne  pas  le  préféreir ik doux  de 
ses  condisciples  inserits  avant  lui. 

Lors  do  la  diVision  do  dom  lilampin,  qui  s'op|K>sa  è 
ri  m  pression  des  Tables  des  sermons  sup|Hisé8  de  saini 
Augustin,  atin  do  no  pas  grossir  louvragi',  il  s'empressu 
de  défôror  à  cette  suppression,  bien  quo^  dom  Tassin  k 
nuMitionne,  eos  Tables  lui  eussent  coûté  l^oaucoup  de 
peines  et  de  scuus.  Tt>utel\us,  un  travail  aussi  im|H>rtant 
ne  devait  pas  ètn*  t^'rilu,et  dom  Mnpiuft  rap))olle  qu'elles 
lurent  publiivsplus  tard.  lors«]u'à  la  s<dlicitation  de  Mgr  k 


XIVT  SESSION,   A  SENL18.  47! 

Tellier,  archevêque  de  Reims,  dom  Blampin  l'eût  mis  à 
même  de  faire  paraître  une  Vie  de  saini  Augustin  et  un 
index  de  tous  ses  ouvrages.  La  dernière  feuille  de  cette  édi- 
tion était  à  peine  tirée  que  dom  Coustaut,  nommé  prieur 
de  Nogent-8ous*Coucy,  s'empressait  de  partir,  heureux  de 
trouTer  cette  occasion  d'être  dispensé  des  éloges  dus  à 
l'éditeur  et  d'éviter  les  applaudissements  du  public. 

Enfin,  la  preuve  la  plus  éclatante  de  cette  abnégation 
eetsans  contredit  sa  soumission  à  l'ordre  du  chapitre,  qui 
le  nommait  prieur.  Il  avait  tout  fait  pour  se  soustraire  à 
oel honneur,  remontrances,  prières,  larmes  même;  aussi 
ivecquel  empressement  ne  sollicita-l-il  pas  sou  départ  à 
il  fin  du  triennat,  dans  une  lettre  datée  de  minuit,  afin 
de  donner  à  entendre  que  le  poids  de  ses  fonctions  lui 
enlevait  le  repos,  et  pour  débarrasser,  écrivait-il,  la  con- 
grégation d'un  si  pitoyable  prieur. 

Sa  défiance  de  lui-même.  —  Malgré  le  succès  de  ses 
premiers  travaux  sur  saint  Augustin  et  sur  saint  Hilaire, 
nous  le  voyons,  à  la  mort  de  Le  Nain  de  Tillemont,  refuser 
d'entreprendre,  malgré  la  demande  de  ce  savant  à  son  lit 
de  mort,  la  continuation  des  mémoires  pour  servir  à 
VHiitoire  ecclésiastique,  parce  qu'il  croit  ce  travail  au-des- 
sus de  ses  forces. 

Quelque  temps  après,  il  n'ose  pas  non  plus  entreprendre 
de  travailler  à  une  bibliothèque  bénédictine. 

Cette  défiance  de  lui-même  devait  cependant  avoir  un 
tenue;  toutefois  il  hésita  longtemps  avant  de  se  décider  à 
entreprendre  le  grand  travail  des  Décrétâtes,  mais  de  tous 
eûtes  on  insista  auprès  de  lui,  et,  nous  dit  dom  Mopinot, 
HH\  humilité  et  sa  soumission  lui  firent  fermer  les  veux 
^'ur  les  difficultés. 

Sa  chanté,  son  désintéressement.  —  Sa  charilê  pour  se> 
frcre^t,  et  surtout  pour  les  pauvres,  était  sans  limite.  Afin 


47â  CONGRÈS  AHCHÉOLOGIQUE  DE  PRAIICE. 

de  les  soulager,  il  vendait,  avec  l'autorisation  du  Père 
général,  les  exemplaires  qui  lui  revenaient  de  ses  impres- 
sions et  leur  en  distribuait  l'argent.  Au  moment  de  sa 
nomination  de  prieur,  il  ne  demanda  qu'un  seul  exem- 
plaire du  Saint  Augustin,  qu'il  emporta  et  laissa  à  son 
monastère.  Mais,  dit  un  de  ses  biographes,  s'il  aimait  les 
pauvres,  il  aimait  encore  plus  la  pauvreté,  et  la  pratiquait 
en  tout. 

Son  austérité,  sa  foi,  —  Dom  Goustant,  qui  était  encore 
plus  remarquable  par  sa  piété,  sa  religion,  son  sèle  pour 
l'observance  religieuse  que  par  son  érudition,  la  justesse 
de  son  discernement,  l'exactitude  de  ses  travaux,  la  finesse 
et  la  nouveauté  de  ses  aperçus,  ne  travaillait  que  pour  se 
sanctifler,  et  en  recherchant  l'esprit  des  Pères  de  l'Église 
pour  l'intelligence  de  leurs  écrits,  il  prenait  leurs  maximes 
pour  règle  de  sa  conduite.  Tel  était  le  jugement  porté  sur 
lui  par  le  continuateur  de  la  bibliothèque  de  M.  du  Pin, 
et,  dit  un  écrivain  de  nos  jours,  il  est  resté  comme  un 
modèle  du  vrai  Bénédictin.  La  prière  et  le  travail  furent 
SOS  seules  occupations.  Le  temps  de  la  prière  et  du  recueil- 
lement était  puur  lui,  comme  il  le  disait  lui-même,  un 
temps  de  récréation  et  de  repos.  Dès  son  noviciat,  il  s'était 
toUemcnl  liabiliu*  i\  $u()portor  les  rigueurs  des  saisons, 
que  les  plus  grands  froids  ne  lui  tirent  jamais  interrompre 
ses  études.  11  ne  se  chaull'u  jamais,  même  pendant  l'hiver 
si  rigoureux  de  1709. 

Chorchait-il  à  imiter  ainsi  de  loin  les  premiers  Pères 
du  déport?  rit  n'ôtail-ce  pas  aussi  par  esprit  de  mortifica- 
tion et  en  souvenir  de  ees  chrétiens  d'un  autre  Âge,  qui, 
la  croix  sur  la  poitrine  et  le  bourdon  à  la  main,  travers 
saient  «i  pied  rKuro]H'  et  TAsie  Mineure  pour  aller  s'age- 
nouiller sur  le  tomk\ui  du  Sauveur,  que  chaque  année  il 
ne  panuuirait  jamais  t|u  a  pied  la  dislance  qui  séparait  de 


XUY*  SESSION,    A  SENLIS.  173 

Compiëgae  son  abbaye  de  Saint-Germain-des-Prés.  Encore 
ne  consacrait-il  à  cette  excursion  que  cinq  ou  six  jours,  et 
c'était  le  seul  repos  qu'il  s'accordât. 

Du  reste,  les  travaux  les  plus  humbles  et  les  plus  rebu- 
tants, les  choses  les  plus  viles  étaient  ce  que,  par  esprit 
il'humilité,  il  ambitionnait  le  plus. 

Souvent  malade,  il  ne  voulait  jamais  employer  d'autres 
remèdes  que  la  patience.  Le  travail  l'épuisait  lentement, 
mais  il  continua  jusqu'aux  derniers  moments  à  suivre  la 
règle  dans  toute  sa  rigueur;  et  quels  que  fussent  ses  tra- 
vaux et  ses  souffrances,  il  assistait  jour  et  nuit  aux  offices 
du  chœur,  où  il  arrivait  toujours  un  des  premiers.  Enfin, 
lors  de  sa  maladie  dernière,  pour  ne  pas  interrompre  la 
publication  des  Déerétales,  il  voulut  cacher  ses  souffrances 
et  il  y  parvint  pendant  un  mois.  Au  bout  de  ce  temps,  il 
dut  s'avouer  vaincu  et  fut  contraint  d'entrer  à  l'infirme- 
rie. Dès  lors  son  sacrifice  était  fait,  et  il  se  remit  tout  entier 
à  l'ordre  de  Dieu,  cherchant  à  imiter  la  courageuse  éner- 
gie et  la  résignation  chrétienne  de  la  mort  de  dom  Mabil- 
lon,  qu'il  nous  a  si  complètement  retracée  dans  sa  belle 
lettre  du  9  janvier  1708  à  dom  Martène,  et  ambitionnant 
sans  doute  aussi  les  mérites  de  ses  souffrances,  a  Car,  dit-il 
dans  cette  lettre,  ou  a  sujet  d'adorer  les  jugements  de 
Dieu,  qui  semble  en  avoir  voulu  faire  unmartyrl  >  La 
fièvre  acheva  son  œuvre,  et,  le  18  octobre  1721 ,  sur  les 
onze  heures  du  soir,  dom  Pierre  Constant  mourait  à 
l'abbaye  de  Saint-Germain-des-Prés,  rendant,  suivant  la 
grande  expression  de  dom  Tassin,  sa  belle  âme  à  Dieu, 
sans  agonie,  sans  frayeur,  sans  convulsion,  entouré  de 
l'affection  de  ses  frères  et  des  regrets  de  tous. 

Voici,  Messieurs,  quel  était  le  vertueux  érudit  que  je 
désirais  faire  revivre  un  instant  parmi  vous  :  tel  était 
l'écrivain,  le  moine,  le  chrétien I  Mais  permettez-moi 


MA  CONGRÈS  aRGHÉOLOOIQUE  DE  FRANGE. 

maintenant  de  vous  dire  quel  il  était  selon  le  monde  :  il 
était  fils  d'un  avocat  en  parlement,  Raoult  Coustant,  né 
aussi  à  Compiognc,  et  de  Loyse  Loysel,  gens  d'honnête 
famille  et  de  grande  piété,  nous  dit  dom  Mopinot.  Qu'il 
me  soit  permis  d'ajouter  que  la  famille  de  sa  mère  est 
peut-être  une  de  celles  qui  ont  jeté  sur  toute  cette  contrée  le 
plus  grand  éclat  comme  savoir  et  comme  érudition,  celle 
d'un  savant  jurisconsulte,  de  l'illustre  auteur  des /rMliVtcrM 
coutumières,  j'ai  nommé  Antoine  Loysel,  né  à  Beauvais. 

Il  est  à  remarquer  que  Dom  Pierre  Coustant  ne  résida 
jamais  dans  l'antique  abbaye  royale  de  fa  ville  natale, 
qui  appartenait  cependant  à  l'ordre  de  Saint-Benoit;  aiais 
s'il  ne  fit  pas  partie,  de  l'abbaye  de  Saint-Corneille,  sa 
famille  y  compta  des  représentants  presque  à  chaque  géné- 
ration ;  dom  Jean  Coustant,  dom  Louis  Coustant,  et  enfin 
dom  François  Coustant,  qui  en  fut  sous-prieur,  étaient 
ses  neveux  ou  petits-neveux. 

L'exemple  de  sa  haute  piété  devait  aussi  lui  survivre, 
et  l'une  de  ses  petites- nièces,  M'^*  Coustant  de  Jouy,  en 
épousant  un  frère  de  l'évoque  de  Mcnde,  Mgr  Brulley  de 
la  Brunière,  eut  l'honneur  de  devenir  la  mère  de  Tabbé 
Paul-Maxime  de  la  Hruni^rc,  prêtre  des  missions  étran- 
gères et  coadjutcur  de  Mgr  Vérollcs,  évéque  de  Columby, 
en  Mantchourie,  qui,  évéque  nommé  de.Triuita,  périt 
pour  la  foi  sur  les  bords  de  l'Amour,  en  4845. 

Une  autre  de  ses  petites-nièces  fut  la  mère  d'un  autre 
érudit  de  ce  département,  bien  connu  ù  Senlis,  M.  Edouard 
Poulletier  de  Vcrneuil ,  dont  les  hautes  connaissances, 
comme  géologue  et  paléontologiste,  sont  aussi  présentes  à 
lu  mémoire  de  plusieurs  d'entre  nous  que  son  caractère 
atrabic  et  sa  généreuse  bienfaisance. 

Je  viens.  Messieurs,  de  vous  faire  envisager  dans  la 


XLIT*  SESSION,    A   SENM8.  W'ï 

postérité  ce  que  l'on  pouvait,  en  employant  une  expres- 
sion un  peu  mystique,  appeler  les  rayonnements  de  la 
sainteté  du  pieux  Bénédictin.  Maintenant  me  serait-il  per- 
mis de  remonter  le  courant  des  âges  et  de  rechercher  si, 
dans  son  passé,  dom  Coustant  n'aurait  pas  eu  de  nobles 
exemples,  dont  il  aurait,  lui  aussi,  subi  la  sainte  et  mys- 
térieuse influence? 

Certaines  traditions  de  famille  éclaircies  et  appuyées 
par  des  découvertes  importantes,  permettent  de  penser 
que  dom  Pierre  a  eu  d'illustres  ancêtres,  dor.t  la  charité, 
les  vertus  et  la  religion  ont  laissé  quelques  traces. 

D'après  les  documents  fournis  par  les  pièces  d'un  dos- 
sier des  Archives  Nationales  (Fonds  Sainte-Geneviève, 
Dotf  îer  Ercuis),  ce  serait  dans  les  anciens  seigneurs  d'Er- 
cuis  (Arquis,Erques,  Arquetum,  Erquetum,  localité  située 
entre  Neuilly-en-Thelle,  Gires-lès-Melloet  Saint-Leu]  qu'il 
faudrait  chercher  les  origines  de  la  famille  de  dom  Cous- 
tant. Mais  sans  aborder  la  discussion  de  ces  probabilités 
généalogiques,  il  est  permis  de  signaler  l'existence  d'un 
membre  de  cette  famille  d'Ercuis  (de  Erqueto)  (I),  et  il 
m'a  semblé  juste  en  tout  cas  de  faire  figurer  parmi  les  érn- 
dits  de  ce  département  le  précepteur  d'un  roi  de  France. 

tiuiliaume  d'Ercuis,  clerc,  familier  et  pi-écepteur  du 

il)  Il  ne  faut  pas  confondre  cette  l'ami  Ile  d'Ercuis  [fie  Erqueto) 
avec  eelled'Erquery  [de  Erquerinco)^  du  nom  d'une  localité  située 
â  peu  de  distance  de  la  première,  et  qui  a  donné  un  porte-ori- 
flanime  de  France,  Raoul  d'Erquery^  dont  le  père,  non  cité  par 
le  P.  Anselme  et  sans  doute  ignoré  par  lui,  pourrait  bien  être  le 
Ânsoidus  de  Erqueriaco,  m iles ,  v i va n l  e u  t  â  Â 3 .  a  1  n si  que  le 
constate  une  charte  du  Fou  is  Sa i 11 te-Gt^ncv love.  Le  grand-père  de 
Raoul,  Simon,  vendit,  en  IfOi,  suivant  une  diarU*  du  Carlulaire 
iilanr  Je  Saint- IK*nys,  la  moitié  des  forfaitiiros  et  amendes  qu'il 
a\ait  aux  lieux  de  Cires  (les  Milio)  et  de  Tillct. 


470      CONGES  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

roi  Philippe  le  Bel,  a  quem  litterarum  scientiam  edocuit 
et  instruxit,  »  comme  il  le  rappelle  dans  son  testament  et 
comme  le  dit  le  roi  lui-même  dans  une  donation  de  IS97, 
est  un  personnage  historiquement  inconnu,  simple  sup- 
pléant sans  doute  de  l'illustre  Gilles  Ck>lonna,  <  le  docteur 
très-fondé,  d  mais  dont  il  est  intéressant  de  foire  revivre 
le  nom  dans  ce  pays,  qui  était  le  sien,  comme  il  fut  celui 
de  Guérin  de  Senlis,  de  Vincent  de  Beauvais,  de  Guil- 
laume de  Trie,  tous  précepteurs  des  rois  de  France,  tant 
à  cause  de  la  haute  position  qu'il  a  occupée  que  de  sa 
haute  piété,  des  nombreuses  fondations  et  donations  foites 
par  lui  dans  cette  contrée  et  ailleurs,  et  dont  nous  ont  en 
partie  conservé  l'énumération  et  sou  testament  du  samedi 
après  la  fête  de  saint  Benoit  (13  juillet)  4314,  et  le  vidi- 
mus  de  TOfficial  de  Paris  du  29  juin  1329. 

FilsdeGuiilaumed'Ërcuis,écuyer,mortavant  mai  1303, 
et  frère  de  Jean  d'Ërcuis,  écuyer,  valet  du  roi,  on  le  trouve 
dans  les  chartes  du  dossier  d'Ercuis,  qualifié,  en  1290,  de 
clerc  du  roi,  chanoine  de  Laon;  en  1293,  de  chanoine  de 
Noyon  et  Senlis;  en  1296,  de  chanoine  de  Reims;  en  1297, 
de  précepteur  du  roi  et  fondateur  de  la  chapelle  d'£rcuis; 
en  1302,  d'archidiacre  de  Thiérache. 

La  date  de  sa  mort  n'est  pas  plus  connue  que  celle  de  sa 
naissance,  mais  elle  doit  être  placéeentre  le  13  juillet  1313, 
époque  à  laquelle,  déjà  retenu  chez  lui  par  les  infirmités 
et  la  maladie,  il  recevait  de  Tabbé  de  Sainte-Geneviève 
l'acceptation  de  sa  donation  en  pure  aumône,  et  le  16  jan- 
vier 1316,  date  d'un  amortissement,  fait  et  donné,  aussi 
en  faveur  de  l'abbaye  de  Sainte-Geneviève,  par  Louis,  fils 
aîné  du  comte  de  Clermont  et  chamberier  de  France,  des 
biens  et  héritages  donnés  par  feu  messire  Guillaume 
d*£rcuis,  fondateur  de  plusieurs  chapelles  en  la  paroisse 
d'Ercuis,  pour  la  desserte  desdites  chapelles. 


XLIV*   SESSION,    A   SENLIS.  177 

Comme  Dous  l'avons  déjà  dit,  il  fonda  plusieurs  cha- 
pelles dans  le  diocèse  de  Beauvais  et  notamment  celle 
d'Ercuis,  piur  rétablissement  de  laquelle  il  fit  des  trans- 
actions avec  des  parents  dès  1290.  En  1297,  il  en  acqué- 
rait l'emplacement  de  sa  sœur  Jeanne  et  de  son  beau-frère 
Amoul  d'Estrées- Saint- Denys;  à  différentes  époques,  il 
obtenait  pour  elle  du  roi  et  de  Robert,  comte  de  Glermont, 
fils  de  saint  Louis,  des  terres,  des  redevances,  des  privi- 
lèges, le  titre  de  chapelle  royale;  enfin,  par  une  bulle,  en 
date  du  8'  jour  des  kalendes  de  juin  de  la  2'  année  du 
poDtiGcat  de  Clément  V,  il  obtenait  du  pape  le  bref  d'ins- 
titution de  deux  chapellenies  perpétuelles  dans  sa  chapelle 
d'Ercuis,  avec  droii  de  présentation  des  chapelains  pour 
loi  et  868  héritiers. 

Les  fondations  diverses  qu'il  institua,  et  les  legs  nom- 
Iveux  qu'il  fit  par  son  testament,  prouvent  d'une  manière 
ioooQtestable  la  pureté  de  ses  sentiments,  la  sainteté  de  sa 
vie,  l'ardeur  de  sa  charité  et  son  attachement  à  l'Église, 
n  commença  l'énuméralion  de  ses  dernières  volontés  par 
l'aquittemeat  de  quelques  dettes  qu'il  spécifie.  Puis  il 
entre  dans  les  détails  les  plus  circonstanciés  sur  tout  ce 
1Qio)nstitue  l'établissement,  l'entretien  et  la  dotation  de 
il  chapelle  d'Ercuis,  et  lorsque  ce  legs,  qui  fait  sa  princi- 
pale préoccupation,  est  bien  dûment  et  avant  tout  assuré, 
il  s'efforce  de  laisser  un  souvenir  à  tous  ceux  qu'il  a  con- 
nus, qui  lui  ont  rendu  service,  qu'il  a  aimés^  qui  lui  sont 
attachés  par  les  liens  du  sang  ou  de  la  reconnaissance,  à 
ses  filleuls,  aux  malades,  aux  lépreux,  aux  pauvres,  aux 
ialfrïques  de  toutes  les  «églises  et  de  toutes  les  paroisses 
doul  il  était  dignitaire,  à  ses  serviteurs,  aux  serviteurs  des 
pauvres,  il  pense  aux  moindres  détails  et  attribue  une 
certaine  s<jmme  à  ses  parents  ot  aux  pauvres  pour  les 
indemniser  de  leurs  frais  de  déplacement  le  jour  de  son 

XLIV*  SESSION.  iâ 


178      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIQUE  DE  FRANGE. 

inhumation,  s'il  meurt  à  Ercuis;  et  s'il  meurt  au  loin,  il 
prescrit  de  donner  aux  pauvres  la  même  somme;  il  pres- 
crit aussi  de  leur  faire,  l'année  suivante,  une  distribution 
de  vêtements  au  jour  anniversaire  de  son  décès.  Il  rappelle 
qu'il  a  fondé  la  chapelle  d'Ercuis  pour  la  prospérité  du 
culte  et  pour  le  salut  des  âmes  de  lui-même,  de  ses  père 
et  mère,  du  roi  et  de  la  reine,  du  père  et  de  la  mère  du 
roi,  de  leurs  ancêtres,  de  tous  ses  bienfaiteurs  et  prédéces- 
seurs. Il  fonde  partout  de  nombreuses  messes  à  son  inten- 
tion, à  celle  de  ses  parents,  de  ses  bienfaiteurs,  de  ses 
amis. 

Tels  sont  les  renseignements  que  j'avais  à  donner  sur 
le  personnage,  dont  je  crois  avoir  de  nos  jours  un  des 
premiers  signalé  l'existence. 

La  chapelle  royale  n'existe  plus;  cependant  on  croit 
encore  reconnaître  l'un  de  ses  murs  dans  le  bas-côté  droit 
de  l'église  d'Ercuis,  à  l'entrée,  du  côté  de  la  place. 
M.  Graves,  dans  ses  excellentes  monographies,  nous 
apprend  que  la  chapelle  royale  devint  un  prieuré  de 
l'ordre  de  Saint-Augustin,  sous  le  vocable  de  saint  Louis 
et  dépendant  de  Sainte-Geneviève  de  Paris.  Le  siège  du 
prieuré,  ajoutc-t-il,  était  dans  une  ferme  voisine  de 
l'église^  qui  est  aujourd'hui  sous  le  vocable  de  saint 
Nicolas. 

Mais  dans  cette  église,  qui  n'est  que  l'ancienne  chapelle 
royale  agrandie,  sur  ce  mur  qui  a  vu  s'agenouiller  devant 
lui  tant  de  générations,  ne  serait-il  pas  digne  de  la  haute 
inspiration  qui  guide  vos  travaux,  de  ce  culte  de  l'histoire 
qui  vous  réunit,  de  cette  reconnaissance  pour  tout  ce  qui 
a  éclairé  et  servi  notre  France  <jui  vous  anime,  ne  serait-il 
pas  opportun,  en  momoire  de  celte  réunion,  Messieurs, 
de  ressusciter  à  six  siècles  de  distance  le  pieux  et  érudit 
fondateur,  le  généreux  donateur,  et  de  rappeler  son  sou- 


XUY*  SESSION,   A  SENUS.  .479 

veniraux  géoératioos  futures  par  une  inscription  relatant 
kstilres  de  Guillaume  d'Ercuis,  la  partie  de  son  testa- 
ment ayant  trait  à  la  fondation  de  la  chapelle  royale,  les 
00018  de  ceux  qui  l'ont  aidé  dans  sa  pieuse  entreprise. 

baos  cet  ordre  d'idée,  voici  le  texte  de  l'inscription  que 
je  soumets  à  votre  appréciation  : 

PIM  MKMOALE. 

Venerabilis  et  discret!  magistri,  Dobilis  domini  Guillelmi  de 
Erquelo,  sereDîssimi  pVÎDcipis  domini  Francorum  régis  Phi- 
li|ipi  IV  eleriei,  familiaris  et  praeceptoris,  archidiaconi  de  The- 
resca,  ac  ecclesiarum  Remeosis,  Noviomeosis ,  Silvanectensis, 
Beat» Mari»  deMellotoet  altagii  suide  Mercherio  super  Suppam 
•anoooid,  ac  hujuscapellae  de  Erqueto  fundatoris  et  benefactoris. 

HaDC  capellam  iostiluit  et  fuadavit  ac  etiam  construxit 
in  villa  de  Erqaeto,  in  loco  ubi  exlitit  oriundus,  in  honorem 
beatissime  gloriose  virginis  Marias  genitricis  Dei,  ac  beati 
Ludovici  et  omnium  sanctorum,  ac  divini  cuUus  aug- 
meotatiooem,  pro  remédie  etsaliUe  animarum  ipsius 
lestatoris,  dtîfunctorumque  Guillelmi  et  Hersendis  parentum 
ejusdem,  necnon  régis  Philippi,  quem  litterarum  scientiam 
edocuit  et  instruxit,  regine  Jolianne  uxoris  quondam 
fjosdem.  ac  régis  Philippi  genitoris  ipsius,  qui  decessit 
apud  Perpigoiacum,  el  regine  Vsabellis  genitricis  sue,  ac 
aotecessorum  suorum  omniumque  benefactorum  et 
praedeoessorum  dicti  testatoris.  Anuo  Domini  circiter  noce. 

rExlractum  ex  Testamento  in  Nalionalibus  Archivis  servato.) 

Adjuvantibus  pratfalo  serenissimo  rege,  domino  Roberto,  Cla- 
rMiuotense  comité,  Guillelmo  domino  de  Erquelo,  armigero,  et 
Hertende,  lesUtoris  parenlibus,  Johanne  de  Erquelo,  armigero, 
legis  valeto,  et  Maria  de  Pralellis,  ejusdem  uxore,  Johanna  de 
Eiqueto,  et  Anialdo  de  Stralis,  armigero,  sponsis;  Ysabella  de 


ISO      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

Erqueto  et  N.  de  Mesnillio,  sponsis,  fratribussuis;  ac  coosaogui- 
neis  suis,  Juliano  de  Ërqiieto,  et  Qlio  suo,  dicto  THuissier  de 
BoaumoDt;  ac  Theobaldo  de  Erqueto,  dicto  CoDstant,  ol  Hodierne, 
uxore  eju^dem;  ac  Rogerio  Constant,  arinigero,  Theobaldi  61io, 
et  Petrouilla  de  Hamello,  uxore  ejusdem;  ac  Guillelmo  de 
Erqueto,  dicto  Foucaud  ;  ac  cacteris. 

Tous  les  noms  qui  sont  énumérés  ci-dessus  sont  ceux 
des  divers  personnages  avec  lesquels  Guillaume  d'Ercuis 
fit  des  transactions  pour  l'érection  et  la  construction  de  la 
chapelle  d'Ercuis,  et  qui  ont  ainsi ^  croyons-nous,  à  des 
titres  divers,  mérité  d'être  signalés  à  côté  de  lui  au  souve- 
nir de  la  postérité. 

A  vous  seuls  maintenant.  Messieurs,  de  décider  si  les 
vertus  et  les  talents  de  dom  Pierre  Constant  et  de  Guil- 
laume d'Ercuis  méritaient  de  les  évoquer  devant  cette 
docte  assemblée  et  d'occuper  aussi  longtemps  son  attention. 

La  séance  est  levée  à  onze  heures. 


Rapport  de  M.  B.  Ledain  sur  une  excur- 
sion à  Chantilly,  à  Saint-Leu-d'Esserent 
et  à  Montataire. 

L'après-midi  du  mardi  ^  mai  a  été  consacrée  par  le 
Congrès  archéologique  à  la  visite  de  Chantilly  et  de  Saiut- 
Leu.  L'entrée  du  magnifique  domaine  de  Chantilly  avait 
été  libéralement  ouverte  par  Mgr  le  duc  d'Aumale.  Intro- 
duits et  guidés  par  l'intendant  qui  s'est  mis  avec  la  meil- 


xinr*  SESSION,  a  senus.  181 

leure  grAoe  à  leur  disposition,  les  membres  du  Ck)ngrès 
ont  parcouru  à  loisir  le  parc  et  le  château.  Tout  a  été  dit 
sur  Chantilly.  Ceux  qui  n'ont  pas  eu  la  satisfaction  de 
Tadmirerpar  eux-mêmes  en  connaissent  tout  au  moins  la 
description  et  la  célébrité.  Le  parc  immense  est  percé, 
tantôt  de  larges  allées  se  coupant  magistralement  à  angles 
droits,  tantôt  de  sentiers  sinueux  enlaçant  les  bosquets  et 
le?  pièces  d'eau.  Un  grand  canal  ou  plutôt  une  rivière,  la 
Nonnette,  le  traverse  en  ligne  droite  sur  une  notable  por- 
tion. Un  ruisseau  plus  modeste  le  sillonne  ailleurs  à 
Tombre  des  arbres  séculaires.  On  arrive  à  travers  ces 
charmants  paysages  qui  participent  à  la  fois  de  la  gran- 
deur majestueuse  de  Versailles  et  des  fantaisies  rustiques 
de  Trianon  jusqu'à  la  terrasse  du  château.  De  ce  point, 
1  œil  jouit  d'une  perspective  admirable.  D'une  part,  une 
immense  pelouse  s'étend  au  bas  d'un  escalier  monumen- 
tal; de  Tautre,  on  aperçoit  le  vaste  champ  de  course  et  les 
ftuperbes'  écuries  dont  la  réputation  est  universelle.  En 
arrière  s'élève  un  long  bâtiment  construit  au  dernier 
siècle,   à  l'occasion  de  la  naissance  de  l'infortuné  duc 
d'Enghien.  En  face,  quoique  un  peu  trop  dominé  par  la 
terrasse  se  dresse  la  résidence  illustrée  par  les  Montmo- 
rency et  les  Condé.  Mais  elle  est  loin  d'avoir  conservé  son 
intégrité  et  son  ancienne  splendeur.  Pour  comprendre  ce 
que  fut  ce  château,  il  faut  recourir  aux  gravures  que  nous 
ont  laissées  les  deux  derniers  siècles.  On  y  remarque  une 
vieille  forteresse  du  moyen  âge,  remaniée  dans  la  suite, 
entourée  d'eau  et  se  reliant  par  un  pont  à  une  nouvelle 
construction  du  xvi*  siècle,  œuvre  du  connétable  de  Mont- 
morency dont  la  glorieuse  image,  coulée  en  bronze,  se 
voyait  jadis  sur  la  terrasse.  Le  château  du  connétable  a  seul 
^happé  au  vent  destructeur  des  révolutions,  luais  le  duc 
4*Aumale,  protecteur  et  amateur  éclairé  des  lettres  et  de^^ 


I8i       CONGRÈS  ARGUÉOLOGIOne  DE  FRANCK. 

arts,  fait  activement  relever  les  portions  renversées. 
Grâce  à  ses  soins,  Chantilly  aura  bientôt  recouvré  sa 
splendeur  presque  royale.  Les  appartements  et  galeries  du 
château  du  xvi*  siècle  sont  ornés  de  boiseries  et  de  déco- 
rations style  Louis  XV,  d'un  goût  très-délicat.  On  y 
remarque  aussi  une  importante  série  de  tableaux  repré- 
sentant les  conquêtes  de  Louis  XIV  et  les  brillantes  vic- 
toires du  grand  Condé.  Il  est  inutile  d'insister  sur  les 
écuries,  les  remises  et  le  manège  de  Chantilly,  construits 
en  1719  par  Louis  de  Bourbon,  septième  prince  de  Gondé. 
On  en  connaît  suffisamment  le  luxe  et  les  proportions 
vraiment  gigantesques. 

Les  membres  du  Congrès  ont  trouvé  à  SaintrLeu,  situé 
non  loin  de  là,  un  monument  d'une  nature  et  d'un  aspect 
bien  différents  mais  dont  l'intérêt  n'est  pas  moindre.  Il  y 
avait  là  un  sujet  d'étude  purement  archéologique  qu'il 
était  impossible  de  négliger.  L'église  de  Saint-Leu,  ancien 
prieuré,  couronnée  de  trois  clochers,  présente  de' loin  une 
élégance  et  une  noblesse  qui  attirent  de  suite  invincible- 
ment le  regard.  Lorsqu'on  est  au  pied  du  monument  on 
n'éprouve  point  de  désillusion,  car  ou  reconnaît  prompte- 
inent  qu'on  est  en  face  d'une  église  du  style  de  transition 
du  xii*^  siècle,  d'une  rare  élégance  et  presque  vierge  de 
toute  retouche  ou  addition  subséquentes.  La  porte  de  la 
façade,  placée  entre  deux  tours  dont  une  seule,  celle  de 
droite,  a  été  achevée,  s'ouvre  sous  trois  archivoltes  de 
forme  ogivale,  décorées  chacune  de  deux  boudins  en  zig- 
zags, aux  angles  opposés  l'un  à  l'autre.  Après  avoir  tra- 
versé un  porche,  on  pénètre  dans  l'intérieur  divisé  en 
trois  nefs.  Deux  colonnes  romanes  très-curieuses^  cou- 
ronnées de  leurs  chapiteaux  sculptés,  d'un  style  tout  diffé- 
rent et  supportant  encore  des  naissances  d'arceaux  sont 
demeurées  engagées  dans  la  muraille  intérieure,  à  droite 


XLlV   SESSION,   A   S£NLIS.  483 

et  k  «^«tuche  de  la  porte.  Cela  démontre  l'existence  d'une 
église  antérieure  du  xi*  siècle,  beaucoup  plus  étroite.  La 
rose  percée  dans  le  pignon  est  encore  dans  Taxe  de  cette 
église  primitive  dont  il  n'y  a  que  cette  trace.  La  nef  cen- 
trale de  l'église  actuelle,  du  xii*  siècle,  est  large  et  haute. 
Lu  triforium  assez  étroit  circule  de  chaque  côté  dans  la 
muraille  et  se  prolonge  autour  du  chœur;  ses  petits  arceaux 
et  ses  légères  colonnettes  forment  une  décoration  très- 
harmonieuse.  La  claire-voie  jette  une  lumière  abondante 
dans  les  parties  supérieures.  Les  voûtes  sont  sillonnées 
alternativement  dans  chaque  travée  de  six  et  de  quatre 
nervures.  Peut-être  pourrait-on  ne  les  faire  remonter 
qu'au  commencement  du  xiii*  siècle.  Les  nefs  latérales 
forment  un  déambulatoire  autour  du  chœur,  quatre  absi- 
dioles  peu  profondes  sont  percées  dans  le  chevet.  Les 
fenêtres  de  deux  d'entre  elles  ont  été  remaniées  au 
xiv*  siècle. 

L'église  Saint-Leu  présente  un  caractère  particulier. 

Elle  n'a  pas  de  transsept.  Deux  tours  carrées  placées  de 

chaque  côté,  aux  points  que  devraient  occuper  les  trans- 

fcpts,  ne  lui  ôtent  rien  de  sa  beauté  intérieure  et  relèvent 

notablement  son  aspect  extérieur.  Mais  la  tour  de  la  façade 

est  ce  qu'il  y  a  de  plus  élégant  aussi  bien  que  le  porche 

supérieur  avec  lequel  elle  communique  par  le  premier 

étage.  Ce  porche,  éclairé  par  des  baies  romanes  s*ouvrant 

«ur  la  façade  au-dessus  de  la  porte,  est  recouvert  de  voûtes 

remarquables.  Les  nervures  sont  ornées  de  boudins  en 

zig-zags  semblables  à  ceux  de  la  porte,  et  quatre  tètes 

humaines   décorent   leur  point  de  jonction.   La  tour, 

au-dessus  des  voûtes  de  l'église,  a  deux  étages  éclairés  sur 

chaque  lace  par  deux  l'enétres  romanes.  Une  belle  flèche 

«octogone,  imbriquée,  la  surmonte.  Sur  chaque  angle  de 

i       l'octogone  on  remarque  deux  colonnettes  qui  le  flanquent 


I8i       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

jusqu'au  quart  de  la  hauteur  environ  et  en  suivant  ëuii 
inclinaison,  quoiqu'elles  en  soient  en  partie  détachées  et 
qu'elles  n'y  tiennent  que  par  le  sommet  et  par  la  base. 
On  ne  s'explique  pas  «facilement  l'utilité  de  ces  colon- 
nettes.  La  tour  semble  avoir  été  primitivement  ouverte  à 
sa  base,  ainsi  que  l'indiqueraient  les  arceaux  pratiqués 
sur  chaque  face. 

Des  contre-forts  et  des  arcs-boutants  bien  proportionnés 
maintiennent  vigoureusement  les  voûtes.  Quelques-uns 
sont  doubles,  mais  ce  sont  des  additions.  N'oublions  pas 
en  terminant  de  mentionner  l'élégante  corniche  ornée  de 
pointes  de  diamant  qui  décore  tout  le  pourtour  de  l'édiUce. 

M.  Selmersheim,  architecte  chargé  de  la  restauration  de 
l'église  de  Saint- Leu,  a  guidé  avec  la  plus  grande  complai- 
sance MM.  les  membres  du  Congrès  dans  la  visite  du 
monument.  L'habileté  et  le  respect  de  l'œuvre  de  ses 
devanciers  avec  lesquels  il  a  exécuté  les  travaux  méritent 
les  plus  grands  éloges.  La  Société  française  d'archéologie 
n'est  pas  habituée  à  rencontrer  partout  de  pareils  restau- 
rateurs. 

L'excursion  s'est  terminée  par  une  rapide  course  à  Mon- 
tatairc,  où,  en  Tabsence  du  propriétaire,  M.  le  baron  de 
Condé,  il  a  été  néanmoins  possible  de  visiter  le  château. 
Là  le  Congrès  a  pu  admirer  quelques  parties  du  moyen 
âge  et  surtout  une  cheminée  du  temps  de  Louis  XIII  qui 
figure  dans  les  gravures  d'Abraham  Bosse,  Les  vierges 
sagts  et  les  vierges  folles. 


XLIV*  SESSION,    A  SENUS.  185 


l"  SÉANCE  DU  MERCREDI  30  MAI. 
Présidence  de  M.  Ledain. 

• 

Siégeât  au  bureau  MM.  G.  Yallier,  Chartier  et  Léon 
Palustre. 

Les  ouvrages  suivants  sont  déposés  sur  le  bureau  du 
Congrès  :  U Armoriai  des  Landes ,  précédé  des  cahiers  du 
Tiers  Éiat,  etc.,  par  M.  le  baron  de  Cauna.  —  Notice  sur 
le»  vitraux  du  sanctuaire  de  la  cathédrale  de  Senlis,  par 
^.  Tabbé  Laurent.  —  Médailles  romaines  inédites,  par 
M.  Gustave  Vallier.  —  Une  médaille  de  Tétricus  et  de 
Probus,  par  le  même.  —  Médaille  de  J.  Truchon,  par  le 
même.  —  Médaille  de  Vaucanson,  par  le  même.  —  Lettres 
inédites  de  J.-J.  Rousseau,  par  le  çoiéine.  —  Documents 
Jposr  servir  à  l'histoire  de  Grenoble,  par  le  même. 

La  parole  est  à  M.  Jacquinot  pour  la  lecture  d'une  note 
relative  aux  questions  préhistoriques. 


Les  silex  taillés  de  Sauvigny-les-Bois. 

[Réponse  aux  objections  faites  au  Congrès  de  Budapest,) 

L 

J'ai  présenté  au  Congrès  de  Budapest  un  mémoire  sur 
les  silex  taillés  de  Sauvigny-les-Bois  (Nièvre),  commune 
que  j'habite. 


186      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Ces  silex  se  trouvent  en  abondance  à  la  surface  d'une 
ancienne  alluvion  sableuse.  Une  seule  fouille  ro*a  permis 
de  constater  qu'ils  existaient  dans  toute  l'épaisseur  du 
terrain,  qui  est  de  60  centimètres  à  i  mètre. 

J'ai  offert  la  meilleure  partie  de  ma  collection  au  musée 
de  Saint-Germain,  qui  a  bien  voulu  l'accueillir,  et  M.  de 
Mortillet  en  a  rangé  une  partie  dans  les  vitrines,  sous  les 
noms  d'Acheuléen  et  de  Mousticrien. 

De  plus*,  dans  son  Tableau  archéologique  de  la  Gaule^ 
ce  savant  place  les  silex  de  Sauvigny,  dans  l'époque  du 
Moustier,  quaternaire  des  plateaux. 

Je  me  croyais  donc  parfaitement  autorisée  regarder  nos 
silex  comme  paléolithiques,  et  à  créer  une  nouvelle  divi- 
sion que  je  regardais  comme  la  réunion  de  l'Acheuléen  et 
du  Moustierien  avec  plusieurs  types  nouveaux,  et  à 
laquelle  je  donnais  le  nom  Aq  Sauvinien. 

La  lecture  de  mon  mémoire  achevée,  quel  ne  fut  pas 
mon  étonnement  de  voir  trois  savants,  très- versés  dans  les 
études  préhistoriques,  habitant  des  contrées  éloignées  les 
unes  des  autres,  venir  déclarer  avec  unanimité  que  les 
silex  de  Sauvigny  appartenaient  à  la  pierre  polie,  que 
c'étaient  des  ébauches,  des  rebuts  de  fabrication,  etc.  (i). 

En  présence  de  cette  opinion  émise  par  des  hommes 
très- compétents  en  pareille  matière,  il  semblerait  que  la 
détermination  des  silex  de  Sauvigny  est  chose  jugée,  et 
que  je  n'ai  plus  qu'à  m'incliner. 

J'ai  pris  en  grande  considération  les  objections  qui 
m'ont  été  faites,  je  me  suis  livré  à  de  nouvellles  études. 
Eh  bien  !  j'avoue  que  je  n'ai  pas  été  convaincu.  Les  rai- 

(1)  Ce  mémoire  ayant  une  certaine  étendue,  j'ai  dû,  à  la  lec- 
ture, en  éliminer  une  partie  pour  me  renfermer  dans  les  argu- 
ments les  plus  saillants  de  mon  sujet. 


XLIV*  SESSION,   A  SENLIS.  187 

sons  de  mes  adversaires  ne  me  semblent  pas  péremptoires. 
Elles  sont  d'ailleurs  présentées,  en  partie,  sous  une  forme 
dubitative. 

11  importe  peu  que  le  type  nouveau  de  Sauvigny  soit 
paléolithique  ou  néolithique.  Il  y  a  là  une  question  de 
principes  qui  touche  aux  bases  mêmes  de  la  science  et 
aux  questions  les  plus  ardues  de  Tanthropologie.  Le  débat 
s'agrandit.  Voilà  pourquoi  je  viens  soumettre  au  juge- 
ment des  nombreux  savants  qui  s'occupent  de  cette  ques- 
tion quelques  arguments  nouveaux. 

J'ai  apporté  au  Congrès  de  Budapest  une  vingtaine 
d'échantillons  de  silex  des  plus  perfectionnés,  pouvant 
donner  une  idée  de  l'ensemble  du  gisement  de  Sauvigny. 
Je  puis  affirmer  que  pas  un  seul  ne  ressemblait  soit  à  un 
outil,  soit  à  une  ébauche  de  l'époque  de  la  pierre  polie. 
Four  assimiler  des  choses  aussi  différentes,  il  faudrait  au 
moins  qu'il  y  eût  quelque  ressemblance,  quelque  point 
de  contact;  or,  il  n'y  en  a  pas. 

En  présence  de  ce  fait,  que  devient  alors  la  classifica- 
tion basée  sur  l'archéologie,  c'est-à-dire  sur  l'analogie  des 
formes?  Si  l'on  peut  indifféremment  ranger  tous  les  types 
dans  une  seule  et  même  époque,  par  cette  raison  qu'ils  se 
trouvent  à  la  surface  du  sol,  et  qu'ils  portent  des  traces 
ferrugineuses,  il  me  semble  qu'il  n'y  aurait  plus  que 
confusion. 

Je  respecte  infiniment  la  décision  de  nos  savants  adver- 
saires. Je  crois  que  si  nous  différons  d'opinion,  la  faute 
n'en  est  pas  à  eux,  mais  à  l'état  peu  avancé  et  encore  cou- 
vert d'obscurité  de  certaines  parties  de  la  science,  entre 
autres  de  la  filiation  des  âges  de  la  pierre. 


488      GONGhÉS  ARCHÉOLOGIQUE  DB  VRANCB. 


H. 


Ayant  d'aller  plus  loin,  il  me  semble  qu'il  est  néces^ 
saire  de  s'entendre  sur  ce  qu'on  appelle  l'époque  de  I^ 
pierre  polie,  et  à  bien  déBnir  quels  sont  ses  caractères  dit'-' 
tincts  et  constants.  Gela,  je  pense,  nous  aidera  à  jeter* 
quelque  lumière  dans  ces  ténèbres. 

Une  des  régions  qui  offrent  de  la  manière  la  plus  corn-- 
plète  toutes  les  phases  et  toutes  les  formes  de  la  pierre 
polie,  est  sans  contredit  le  Danemarck  et  la  Scandinavie. 
Là,  la  pierre  polie  règne  sans  conteste;  .les collections  sont 
considérables,  l'industrie  de  la  taille  du  silex  a  atteint  sou 
maximum  de  perfection.  On  ne  trouve  dans  ces  pays  que 
de  la  pierre  polie  pure.  Le  paléoljthique  y  est  inconnu. 
Rien  qui  ressemble  au  Saint-Acheul  ou  au  Moustier,  à 
l'exception  do  «luclqucs  silex  de  formes  particulières,  qu'on 
trouve  dans  les  Kjoekken'tnœddings,  sur  lesquels  je  revien- 
drai plus  bas. 

Or  pourquoi  ne  trouve-t-on  pas  là  des  ébauches  gros- 
sières, des  éclats  affoctuiU  des  formes  paléolithiques,  ainsi 
que  rannoncent  pour  la  France,  l'Angleterre  et  la  Bel- 
gique, mes  honorables  contradicteurs?  Pourquoi  ces  diffé- 
reu('0«  dans  les  giseiueiits  do  ces  derniers  pays,  et  ceux  du 
Danemarck  et  de  lu  Scandinavie?  Pourquoi  ici^les  formes 
invariables  de  IVpoque  néolithique,  et  ailleurs  un  mélange 
de  toutes  les  formes  et  de  toutes  les  époques? 

Je  no  me  iK^rnerai  pas  à  citer  les  contrées  du  nord  de 
TEuroiK'.  Partout  il  en  est  de  même.  En  Suisse,  on  a 
découvert  des  habitations  lacustres  de  cette  même  époque. 
Ijù  nombre  des  armes  et  des  outils  v  est  considérable. 
Y  a-t-il  là  des  si^écimens  qu'on  puisse  rapprocher  du  paléo- 


XUY*  SESSION,    ▲  SfcNtlS.  189 

lithjque?  Nullement.  Les  palatUtes  fournissent  des  haches 
polies,  des  lames,  des  flèches,  etc.,  différant  très-peu  de 
celles  du  nord,  et  sans  aller  plus  loin,  je  crois  pouvoir 
lire  que  d'un  bout  de  la  Suisse  à  Tautre,  les  instruments 
<le  la  pierre  polie  sont  identiques  et  ne  ressemblent  en 
rieii  à  l'industrie  paléolithique. 

Je  citerai  encore  comme  gisement  néolithique  étendu, 
les  nombreuses  grottes  de  la  Champagne,  explorées  par 
V.  de  Baye  au  nombre  d'environ  cent  cinquante,  et  qui 
OQt  fourni  à  ce  zélé  archéologue  une  collection  des  plus 
oombreuses.  Contiennent-elles  des  instruments  de  f(*rmes 
paléolithiques?  M.  l'abbé  Bordé  nous  affirme  que  non. 

J'ai  visité  la  curieuse  collection  de  M.  le  docteur  Loy- 
'nau,  recueillie  au  camp  de  Chassey.  Dans  ce  vaste  ate- 
lier, les  objets  ont  tous  le  cachet  de  la  pierre  polie.  Il  n'y 
a  ps  de  confusion  possible. 

Je  pourrais  citer  bien  d'autres  exemples,  mais  il  est 
inutile  de  passer  en  revue  tous  les  lieux  qui  fournissent 
exclusivement  des  spécimens  de  la  pierre  polie,  tels,  par 
exemple,  les  dolmens  et  quelques  cavernes.  Tous  nous 
burairaient  le  même  résultat. 

La  forme  des  outils  et  des  armes,  telles  que  les  lances 
et  les  flèches,  barbelées  et  à  ailerons,  le  polissage  des 
Ittcbes,  ne  sont  pas  les  seuls  caractères  qui  distinguent 
lepoque  néolithique.  11  y  en  a  d'autres  non  moins  cer- 
taius.  C'est  d'abord  la  faune,  qui  ne  présente  plus  de  ves- 
tiges d'animaux  éteints,  mais  se  compose  des  animaux 
domestiques  de  nos  jours. 

C'est  ensuite  la  présence  de  nombreuses  poteries,  puis 
des  restes  de  tissus,  de  graines,  de  céréales,  annonçant  un 
peuple  agriculteur,  eu  même  temps  que  guerrier  et 
chasseur. 

11  me  parait  donc  évident  que  l'époque  néolithique  est 


iOO      CONGRÈS  ARGH£OL06IOUK  DE  FRANGE. 

• 

parfaitement  tranchée  et  distincte  dans  toutes  les  contrées 
où  elle  a  été  reconnue.  Les  nombreuses  collections  de 
l'Europe,  y  compris  celle  de  Saint»Germain,  en  font  foi. 
Il  n*y  a  dans  toutes,  à  part  de  légères  différences  dans  les 
formes  ou  la  nature  des  roches,  que  des  formes  identiques, 
et  on  n'y  a  placé  aucun  de  ces  silex  à  formes  paléoli- 
thiques qui,  suivant  nos  contradicteurs,  devraient  se  rap- 
porter à  la  pierre  polie. 


III. 


J'arrive  maintenant  à  certains  ateliers  ou  stations  ches 
lesquels  les  types  sont  mélangés.  On  y  trouve  à  la  fois  du 
paléolithique,  puis  des  époques  intermédiaires  ou  de  tran- 
sition, et  enfin  du  néolithique.  C'est  là  sans  doute  ce  qui 
a  causé  l'erreur  de  mes  savants  contradicteurs.  Us  ont  pris 
pour  la  règle  ce  qui  n'était  que  l'exception. 

Au  Grand-Pressigny,  gisement  paléolithique  bien  dis- 
tinct du  Saint-Acheul  et  du  Moustier,  on  trouve,  indé- 
pendamment des  types  spéciaux  à  ce  gisement,  des  objets 
néolithiques  en  assez  grand  nombre. 

A  l'atelier  du  cap  Blanc-Nez  (Pas-de-Calais),  exploré  et 
décrit  par  M.  Lejeunc  (i),  on  trouve  des  haches  de  Saint- 
Acheul,  parmi  un  grand  nombre  de  produits  néolithiques. 

Tout  récemment  (2),  M.  de  Mortillet  signalait  à  la 
Société  d'Anthropologie  un  atelier  situé  à  la  Roche-au- 
Diable,  près  de  Caen,  et  découvert  par  M.  C.  Costard,  qui 
contient,  au  milieu  d'un  grand  nombre  de  types  néoli- 
thiques, des  haches  acheuléennes  a  parfaitement  caracté- 

(i)  Voyez  Congrès  de  Bruxelles. 

[t)  Bulletin  de  la  Société  d'Anthropologie,  4876. 


XIIY*  SESSION,   A  SENLIS.  i9l 

risées  par  leur  forme,  et  tranchant  très-nettement  avec  les 
autres  instruments  par  leur  patine,  qui  est  profonde  (1)  d. 

Il  me  serait  facile  d'ajouter  à  ces  quelques  exemples, 
qui  ne  sont  certainement  pas  les  plus  saillants,  une  foule 
d'autres  ateliers  bien  connus  et  qui  présentent  les  mêmes 
particularités.  Cela  démontre  que  les  habitants  primitifs, 
trouvant  tout  à  la  fois  un  lieu  convenable  d'habitation,  en 
même  temps  que  des  silex  abondants,  y  ont  séjourné  un 
long  espace  de  temps.  La  taille  des  silex  s'y  est  peu  à  peu 
modifiée,  soit  par  les  progrès  naturels,  soit  par  des  impor- 
tations du  dehors,  de  sorte  que  tous  les  âges  de  la  pierre 
y  sont  représentés. 

J'appellerai  ces  gisements  ateliers  mixtes  ou  de  transi- 
tion. Le  nombre  jusqu'ici  en  est  déjà  assez  grand.  Tantôt 
c'est  le  paléolithique,  d'autres  fois  le  néolithique  ou  des 
types  intermédiaires  qui  dominent. 


IV. 


Je  vais  maintenant  répondre  aux  objections  du  savant 
conservateur  du  musée  de  Bruxelles. 

Je  me  bornerai  à  parler  ici  du  célèbre  atelier  de  Spiennes, 
dont  les  silex  taillés  de  formes  particulières  ont  exercé  la 
sagacité  des  archéologues. 

Ces  silex  se  trouvent  en  grande  abondance  à  la  surface 
d'un  sol  sableux  quaternaire.  Ils  offrent  des  traces  de 
rouille  causées  par  le  frottement  des  instruments  aratoires. 
11  y  a  des  ébauches  et  des  éclats  de  toute  sorte;  mais  dans 

(I)  Je  n'admets  pas  ce  dernier  caractère,  et  je  crois  que  la 
patine  peut  être  aussi  profonde  sur  un  instrument  néolithique 
que  sur  un  oulil  pAéolilique. 


192  CONGRÈS  ARGIl£OLOaiQU£  D£  FRANGE. 

le  nombre  se  trouvent  des  instruments  à  peu  près  termi- 
nés et  ayant  leurs  formes  définitives;  or  ils  ne  ressemblent 
pas  à  ceux  de  la  pierre  polie;  ils  ont  plutôt  l'apparence 
paléolithique,  sans  être  pour  cela  identiques  à  ceux  de 
Saint-Acheul  ou  du  Mousticr. 

Une  des  particularités  les  plus  saillantes  de  Spieanes, 
ce  sont  des  puits  assez  profonds,  creusés  dans  le  quater- 
naire, pour  arriver  aux  bancs  de  silex  do  la  craie,  dont  les 
hommes  d'alors  fabriquaient  leurs  outils.  Cela  seul  montre 
que  cet  atelier  est  postérieur  à  l'époque  paléolithique'. 

Ou  a  trouvé  dans  ces  puits  des  pics  et  autres  débris  en 
bois  de  cerf,  puis  un  crâne  de  sanglier  et  des  os  de  lièvre, 
peut-être  encore  d'autres  restes  d'animaux  sauvages,  mais 
pas  de  vestiges  d'animaux  domestiques. 

Je  ne  crois  pas  que  parmi  les  silex  on  ait  trouvé  des 
pointes  de  flèches. 

Les  poteries  manquent  également. 

En  résumé,  formes  paléolithiques,  —  pas  de  flèches,  pas 
de  vestiges  d'animaux  domestiques,  pas  de  poteries,  pas 
de  haches  polies,  à  part  peut-être  quelques  rares  et  insi- 
gnifiantes exceptions.  Au  musée  de  Bruxelles,  il  y  a  bien 
deux  mille  échantillons  de  pics  et  de  haches  de  Spiennes, 
j'y  ai  eu  vain  cherché  une  hache  polie. 

D'après  tous  ces  caractères,  il  me  semble  ressortir  avec 
évidence  que  Spiennes  présente  un  type  particulier  qui 
me  parait  caractériser  une  époque  postérieure  au  quater- 
naire, mais  antérieure  à  la  pierre  polie.  C'est  un  type 
intermédiaire  ou  de  transition. 

Examinons  maintenant  les  types  analogues  trouvés  en 
Anglolerro,  auxquels  M.  Franks  fait  allusion,  et  dont  il  a 
parlé  au  Congrès  de  Bruxelles  J  . 

J    Voyo/  (\))ujns  de  /irujfiies.  • 


ZUT*  SESSION,  A  SENUS.  193 

Dyapeu  d'années,  M.  le  colonel  Lane  Fox  a  fait  une 
communication  au  Congrès  de  Bristol,  sur  les  fouilles  du 
camp  de  Cissbury,  dans  le  comté  de  Sussex  (â).  a  11  en 

■  résulte  que  ce  lieu  présente  la  plus  grande  analogie  avec 

•  Tatelier  de  Spiennes.  Comme  dans  ce  dernier  endroit,  il 

■  y ade  nombreux  puits,  pratiqués  pour  extraire  le  silex  de 

•  la  craie,  et  pour  en  fabriquer  des  outils  de  (ormes  paléoli- 
f  tliiques,  analogues  à  ceux  de  Spiennes.  Les  ossements 
i  trouvés  étaient  ceux  du  cervus  elaphus,  bos  longifrons, 
i  capra  hircus,  equus  (Sp...?)  et  sus  scrofa.  d  On  n'y  a  pas 
trouvé  de  débris  de  poteries. 

En  1870,  Canon  Green^el  examina  une  série  de  deux 
ttot  cinquante-quatre  puits  près  Brandon  dans  le  Norfolk. 
Ils  ont  été  creusés  avec  des  pics  en  corne  de  cerf,  dont  on 
a  recueilli  soixante-dix-neuf  exemplaires^  et  avec  des  ins- 
truments en  silex  également  retrouvés  dans  Tintérieur;  il 
n'a  été  rencontré  aucune  trace  de  pierre  polie,  aucune 
poterie. 

En6n  il  y  a  deux  ans,  M.  Tyndall,  de  Brighton,  ouvrit 
OD  puits  à  Cissbury;  il  y  trouva  les  restes  très-abondants 
d*un  grand  bos  primigcnius,  et  aussi  ceux  du  sanglier 
et  autres  animaux  sauvages,  a  Ainsi,  ajoute-t-il,  se  trou- 

<  verait  appuyée  l'opinion  qui  place  les  monuments  de 

<  Cissbury  à  une  période  plus  ancienne  que  les  temps  néo- 
fl  lilhiques.  » 

Aux  stations  de  Spiennes,  de  Cissbury,  de  Brandon,  etc., 
on  doit  joindre  les  kjockken-mocddings  du  Danemark,  si 
bien  étudiés  au  Congrès  de  Copenhague  par  M.  Worsaë. 
Là,  en  effet,  dans  ces  immenses  amas  de  rejets  de  cuisine, 
qui  ont  demandé  des  siècles  pour  se  produire,  on  ne  trouve 
pas  de  débris  d'animaux  domestiques,  si  ce  n'est  le  chien, 

i.  Vo>-ez,  Matériaux,  1876,  p.  17  et  suivantes. 

XUV*  SESSION.  13 


494  CONGRÈS  ARGHiOLOOIOUB  Dt  nUlfCS. 

mais  des  animaux  sauvages,  tels  que  Turus,  Tursu^ 
arctos,  le  sus  scrofa,  etc. 

On  n'y  trouve  pas  de  poteries. 

Il  existe  quelques  traces  de  la  pierre  polie  dans  de# 
amas  que  l'on  regarde  comme  appartenant  à  la  fin  de  la 
première  période  qui  a  coïncidé  avec  le  commencement  da 
la  suivante.  Ainsi  s'explique  la  présence  de  quelques 
pierres  polies,  mais  il  y  a  des  amas  considérables,  comme 
celui  de  Meilgaard,  qui  n'en  ont  pas  donné  une  seule. 

La  difiérence  est  complète  avec  le  mobilier  des  dol- 
mens. Les  armes  et  outils,  de  formes  spéciales,  sont  asses 
bien  taillés>  il  y  a  aussi  de  longs  éclats  ou  couteaux  mag- 
daléniens (I). 

M.  Worsafi  attribue  les  kjoekken-moeddings  à  l'époque 
de  la  fin  de  Tàge  du  renne,  et  je  crois  que  cette  opinion  ne 
trouve  pas  aujourd'hui  de  contradicteurs. 

Ainsi  pour  la  Belgique,  l'Angleterre  et  leDanemaric, 
voilà  un  type  intermédiairo  qui  me  semble  bien  établi,  et 
qu'on  rapporte  à  tort  à  l'époque  de  la  pierre  polie.  En 
France  il  existe  également;  n'en  trouvons-nous  pas  la 
preuve  dans  ces  silex  d'une  a  grande  variété  de  formes, 
c  et  d*un  travail  grossier  »  dont  parle  M.  l'abbé  Bordé,  et  qui 
semblent  appartenir  à  une  autre  époque?  «  Néanmoins, 
a  ajoute-t-il,  bien  qu'ils  fassent  défaut,  dans  les  grottes 
«  néolithiques,  il  faut  les  rattacher  à  la  pierre  polie  dont  ils 
f  constituent,  il  est  vrai,  une  série  qui  n'a  pas  son  type 
€  dans  les  classifications  admises  (S).  • 

Ainsi  voilà  un  type  nouveau,  forcément  rappoijé  à  la 
pierre  polie,  pourquoi?  Il  n'y  a  pour  cela  que  des  raisons 
contraires.  Si  ces  instruments  sont  de   Tépoque  de  la 


(1)  Voir  Congrhde  Copenhague. 
(ti  Congres  de  Hudaf)e$t. 


XUY*  SESSION,    A  SENLIS.  195 

pierre  polie,  il  doit  nécessairement  s'en  trouver  quelques 
échantillons  dans  les  cent  cinquante  grottes  néolithiques 
de  la  Champagne,  mais  il  ne  s'en  trouve  pas.  Ne  vau- 
drait-il pas  mieux  alors,  colliger  avec  soin  ces  instruments 
grossiers,  les  étudier, 'les  comparer  et  arriver  ainsi  à  assi- 
gner leur  véritable  place  dans  la  série  de  la  pierre  taillée. 

Oa  peut  donc  regarder  ces  silex  comme  postquatemaires 
ou  intermédiaires  à  l'âge  du  renne  et  de  la  pierre  polie,  et 
en  y  regardant  de  plus  près  on  ne  tardera  pas  à  y  joindre 
la  plupart  de  ces  silex  à  l'aspect  paléolithique  qu'on  trouve 
dans  les  ateliers  mixtes. 

D'après  tout  ce  qui  précède,  ne  paraitra-t-il  pas  évi- 
dent qu'un  type  nouveau  se  dégage  de  la  foule  de  ces 
gisements  de  silex,  qu'on  n'avait  pu  jusqu'ici  classer,  soit 
dans  le  paléolithique,  soit  dans  lenéolitique,  et  qui  encom- 
braient les  abords  de  la  science. 

Ce  type  pour  lequel  je  proposerai  le  nom  de  paléoli- 
ihique  secondaire,  paraît  en  effet  tenir  à  l'industrie  primi- 
tive par  les  formes  de  la  taille  des  silex,  mais  déjà  des  pro- 
grès ont  été  faits,  la  série  des  armes  et  instruments  peu 
nombreuse  dans  les  premiers  temps,  s'est  considérable- 
ment accrue,  de  nouvelles  formes,  répondant  à  de  nouveaux 
besoins,  ont  été  créées.  De  là  les  outils  variés,  destinés  sans 
doute  à  travailler  le  bois,  la  corne,  etc. 

Les  hommes  Sont  toujours  pécheurs  et  chasseurs,  rien 
ne  dénote  encore  les  commencements  de  l'agriculture  et  la 
domestication  des  animaux,  si  ce  n'est  le  chien  dans  cer- 
taines régions. 

Nul  doute  que  beaucoup  d'archéologues  ne  dirigent 

maintenant  leurs  études  vers  ce  point  jusqu'ici  méconau 

de  la  science,  et  bientôt,  j'espère,  de  nouvelles  observations 

fourniront  de  nouveaux  renseignements  sur  cette  phase 

de  l'humanité  et  de  la  civilisation.  - 


196  GONGliS  ABCHÉOLOGIOUB  DB  nLANGB. 


V. 


Il  y  a  quelques  années  l'idée  d'un  hiatus,  d'une  lacune, 
entre  les  époques  du  renne  et  de  la  pierre  polie,  fut  émise, 
je  crois,  par  MM.  Cartailhac  et  de  Mortillet;  des  discus- 
sions animées  s'en  suivirent,  et  à  la  suite  de  l'une  d'elles, 
qui  eut  lieu  à  la  société  d'Anthropologie  en  avril  1874. 
M.  de  Mortillet  résumait  ainsi  la  question  (!]. 

«  Entre  l'époque  paléolithique  ou  des  cavernes,  et 
«  l'époque  néolithique  ou  de  la  pierre  polie,  il  existe  un 
c  hiatus.  Mais  cet  hiatus  n'est  qu'une  simple  lacune  dans 
€  nos  connaissances.  Il  ne  représente  pas  une  véritable 
€  lacune  dans  le  temps  et  dans  l'industrie.  Certainement 
«  l'époque  paléolithique  a  dû  se  rattacher  et  se  souder  à 
c  l'époque  néolithique,  mais  nous  n'avons  pas  encore 
c  reconnu,  pas  encore  découvert  le  point  de  contact.  Entre 
«  les  deux  époques,  il  n'y  a  pas  eu  une  période  ou  l'Europe 
«était  inhabitable,  seulement  les  restes  de  l'époque  de 
a  transition  ou  de  passage  n'ont  pas  encore  été  trouvés  et 
c  reconnus.  C'est  ce  qui  constitue  l'hiatus  que  nous 
c  constatons.  » 

Ces  paroles  me  paraissent  aujourd'hui  plus  que  jamais 
l'expression  exacte  de  la  vérité.  Si,  en  effet,  aux  diverses 
stations  que  je  viens  de  citer,  qui  ne  sont  pas  quater- 
naires, mais  bien  évidemment  antérieures  à  la  pierre 
polie,  on  ajoute  les  divers  ateliers  mixtes,  et  les  cavernes 
où  se  trouvent  tout  à  la  fois  du  paléolithique,  du  néoli- 
thique et  des  types  intermédiaires,  n'arrivera-t-on  pas  à 
cette  conclusion  que  la  lacune  est  en  partie  comblée,  et 
qu'un  coin  du  voile  est  soulevé?  ^ 


(I)  BulUtin  de  la  Société  anthropologique. 


XLIY*  SESSION,    A  SENLIS.  i97 

Ainsi  l'âge  de  la  pierre  polie,  bien  établi,  bien  homo- 
gène, sera  dégagé  de  cette  foule  de  stations  douteuses,  qui 
jetaient  la  confusion  dans  les  déterminations.  Une  transi- 
tion sera  établie  entre  les  deux  époques  du  renne  et  néoli- 
thique; et  on  pourra  peut-être  arriver  à  démontrer  la  suc- 
cession et  révolution  progressive  de  la  taille  de  la  pierre, 
saus  qu'il  soit  besoin  pour  cela  de  faire  intervenir  des 
populations  nouvelles. 

Il  devient  donc  nécessaire  dans  la  classification  des  âges 
delà  pierre,  de  faire  la  part  de  ces  types  intermédiaires, 
et  eu  les  réunissant  dans  les  collections,  leurs  caractères 
spécifiques  et  leurs  analogies  apparaîtront  bientôt  d'une 
mioière  évidente. 

Je  dirai  eu  terminant  quelques  mots  sur  la  station  de 
Sauvigny.  Depuis  le  Congrès  de  Budapest,  j'ai  continué 
mes  recherches,  et  une  partie  de  Thiver  a  été  consacré  à  cet 
objet.  Au  lieu  de  trouver  des  silex  seulement  dans  un 
espace  restreint,  j'en  ai  rencontré  dans  une  grande  partie 
de  la  commune,  c'est-à-dire  dans  un  rayon  de  plusieurs 
kilomètres,  à  la  surface  du  terrain  alluvial.  Seulement, 
sur  un  point,   l'abondance  des  silex,  des  éclats,  des 
ébauches,  me  donna  l'idée  d'un  atelier.  Ainsi  il  se  pour- 
rait qu'à  câté  d'un  paléolithique  bien  manifeste,  il  y  eût  un 
de  ces  gisements  postquaternaires  dont  je  m'efforcerai  de 
séparer  les  types. 

Sauvigny  serait  donc  un  gisement  mixte.  L'homme  y 
aurait  longtemps  séjourné,  car  indépendamment  des  types 
que  j'ai  cites,  on  y  trouve  encore  quelques  instruments  de 
la  pierre  polie,  si  reconnaissables ,  puis  des  tumulus  de 
r&ge  du  bronze  ou  du  fer,  et  enfin  des  vestiges  gaulois  et 
gallo-romains. 


198      CONGRÈS  ARGHÉ0L06I0UE  DE  FRANGE. 

M.  le  président,  après  avoir  remercié  M.  Jacquinot  de  sa 
savante  communication,  donne  la  parole  à  M.  Margry  : 


Note  relative  à  deux  emplacements  gallo- 
romains,  situés  au  lieu  dit  Rigalot,  dans 
la  forêt  de  Chantilly. 

Permettez-moi  de  signaler  à  l'attention  du  Congrès, 
deux  emplacements  situés  dans  la  forêt  de  Chantilly,  lieu 
dit  le  Rigalot,  où  j'ai  trouvé  des  restes  de  constructions, 
que  je  crois  gallo-romains.  Ces  débris  sont  bien  mutilés; 
néanmoins  Tun  d'eux  me  parait  mériter  un  examen 
sérieux. 

A  six  kilomètres  de  Senlis,  la  route  forestière  de  TAr- 
hre-à-Fougère,  traverse  la  route  actuelle  de  Senlis  à  Creil, 
ot  pénètre  à  droite  dans  le  Rigalot.  Suivons  cette  route, 
avec  la  carte  do  la  forêt  de  Halatte,  dressée  par  de  la  Vigne 
on  4713:  elle  rencontre,  à  soixante -douze  mètres  de 
la  barrière,  notre  premier  emplacement;  cent  mètres  plus 
loin,  elle  traverse  le  chemin  du  Bac,  qui  conduisait  les 
Romains  vers  l'Oise;  ot  cinq  cent  soixante  mètres  plus 
haut,  elle  roncontro  le  chemin  di*s  Huguenots  qui  jetait 
un  court  onihrnnchomont  sur  notre  second  emplacement, 
ap|>olé  le  Prêche  D^tmly, 

Notre  savant  oonfrùn\  M.  Kahhé  Caudol,  a  longuement 
raconté  tous  les  vieux  souvenirs  dont  est  peuplée  cette 
région  fon^slièro;  jo  n*y  reviendrai  pas,  me  bornant  à  étu- 
dier doux  pt>ints  soulomont  do  oot  ensemble  intéressant. 

Je  dois  îi  roblijroanco  hahituollo  de  notre  confrère, 
M.  Moinot,  un  rn^quis  ot  une  oarto  <]ui  rendront  ma  tâche 
plus  facile. 


XLIT*  SESSION,   A  SENLIS.  iW 

Aspect  général. 

Lorsque  je  découvris  le  premier  emplacement,  je  sui- 
nis  la  route  de  l'Arbre-à- Fougère;  je  me  trouvai  en  face 
d'un  monticule  qui  mesure  environ  douze  cent  soixante 
mèlKS  carrés  de  superficie,  et  deux  ou  trois  mètres  d'alti- 
tude. Sur  ce  plateau  se  développent  des  plates-formes, 
légèrement  convexes  à  leur  sommet;  elles  se  relient  et  se 
soudent  entre  elles,  sous  des  angles  à  peu  près  droits,  de 
manière  à  former  trois  enceintes  contiguës  :  les  deux  prc- 
mjèies  sont  des  parallélogrammes  inégaux,  à  l'intérieur 
dechacQa  desquels  on  distingue  une  dépression,  sorte  de 
cour,  dont  le  plafond  est  inférieur  de  deux  mètres,  au 
nmmet  des  plates-formes.  Les  talus  descendent  par  une 
double  pente,  de  chaque  côté  des  crêtes,  jusqu'au  niveau 
des  cours,  ou  jusqu'à  celui  de  la  forêt. 

Une  troisième  enceinte  demi-circulaire  se  déploie  en 
laee  des  deux  autres.  La  plate-forme  qui  l'entourait  n'est 
eoDsenrée  qu'en  partie,  mais  son  relief  peut  encore  être 
indiqué.  Ces  trois  enceintes  formaient  dans  le  princip») 
00  ouvrage  homogène,  que  la  route  fractionne  aujour- 
lliui,  après  avoir  fortement  contribué  à  le  ruiner.  La 
ciéiede  la  plate-forme  qui  borde  cette  route  était  couronnée 
fi  un  large  mur,  dont  les  restes  trop  mutila  fixèrent  de 
Mili  mon  attention.  J'espérais,  en  descendant  le  long  doses 
pirois,  trouver  un  indice  révélateur  des  fonctions  qu'il 
remplissait  dans  ces  constructions,  et  dans  les  décombres 
que  j'allais  remuer,  les  débris  caractéristiques  qui  accom- 
pagnent d'ordinaire  les  ruines  d'une  habitation,  mais  la 
pioche  ne  rencontra  que  Tépais  blocage  que  je  décrirai 
ci-dessous. 
Toutefois  je  recueillis,  au  fond  des  deux  tranchées,  des 


200  CONÇUES  ÀRCHÉOL06IOUE  DE  FRANGE. 

fragments  de  tuiles  à  rebord,  de  poterie  et  un  silex  taillé  : 
ces  indices,  quoique  de  mince  valeur  en  eux-mêmes, 
m'encouragèrent  à  poursuivre  mes  recherches,  et  après 
avoir  sondé  tous  les  sommets  et  toutes  les  pentes,  non 
sans  lutter  contre  les  taillis  et  autres  obstacles,  je  pus  me 
faire  une  idée  assez  complète  de  cette  étrange  construc- 
tion. Je  vais  essayer  d'en  décrire  les  détails  à  l'aide  du 
croquis  ci-joint. 

Première  enceinte, 

La  plate-forme  A  s'étend  sur  une  longueur  de  trente- 
neuf  mètres;  elle  sert  de  base  commune  aux  trois 
enceintes;  elle  n'est  intacte  que  dans  la  moitié  de  son 
étendue;  sa  crête  mesure  deux  mètres  de  large;  ses  talus 
ont  une  pente  de  quarante-cinq  degrés  et  une  largeur  de 
deux  ou  trois  mètres. 

Le  tout  est  fortement  consolidé  par  un  blocage  dont  la 
structure  fait  la  principale  attraction  de  ces  ruines  :  il  est 
composé  de  couches  superposées,  chacune  sous  un  angle 
différent;  elles  commencent  au  ras  du  sol,  par  une  seule 
épaisseur,  et  s'étagent  ensuite  jusqu'à  la  créCe,  qui  est 
formée  de  dix  ou  douze  assises. 

Parmi  les  matériaux  employés,  le  grès  gris  est  de  beau- 
coup le  plus  abondant,  et  Ton  sait  combien  cette  roche  est 
rebelle  à  une  taille  minutieuse;  leur  forme  affecte  celle 
de  toutes  les  figures  géométriques  :  cubes,  cônes,  carrés, 
triangles,  sphères,  etc.;  leur  dimension  n'est  pas  moins 
variée;  elle  comprend  tous  les  cubes  depuis  un  jusqu'à 
vingt  centimètres.  En  un  mot  chaque  pièce  acceptée  par 
l'ouvrier  dans  sa  forme  primitive,  était  appareillée  par 
lui,  pour  s'adapter  exactement  à  la  place  qu'il  lui  des* 
tinait. 


emcr.t     èallo  -  rcrr.^.ir:     a.:    l;ru     d\\ 
A    dans     la    f'orèl     de    i,':.a:;ul!v 


é,A//.-  ./-    c-.ï'j:;  /-... 


lUy  SESSION,   A  SENLIS.  201 

Les  échantillons  que  je  soumeUt  au  Congrès  parleront 
plu8  clairement  qu'une  plus  longue  description.  Généra- 
lenient  les  plus  gros  matériaux  se  trouvent  dans  les 
couches  inférieures;  tous  sont  liés  avec  un  mortier  de 
terre;  mais  on  rencontre  de  tous  côtés,  un  assez  grand 
nombre  de  débris  de  ciment,  dont  quelques-uns  gardent 
encore  la  forme  des  pierres  qu'ils  enserraient,  et  une  telle 
quantité  de  ces  petites  pierres  appareillées,  qu'il  est  pro- 
bable que  la  partie  supérieure  était  revêtue  d'une  sorte  de 
'xiosaîque  rustique,  à  base  de  ciment. 

La  crête  de  cette  plate-forme  est  couronnée  par  un  mur 
^e  un  mètre  vingt  centimètres  de  largeur;  malheureusc- 
i^ent  il  n'en  subsiste  que  deux  assises  parallèles,  de  grès 
^pareilles;  et  encore  son  relief  n'est-il  pas  également  appa- 
rent sur  la  longueur  de  cinq  mètres  que  je  lui  attribue. 
L'assise  inférieure  repose  sur  la  terre  même  et  n'a  pas 
d^autres  fondations;  elle  est  encastrée  dans  l'épaisseur  du 
l>locage  dont  les  couches  accumulées  lui  servent  de  sou- 
tien. Clôture  ou  rempart,  ce  mur  couronuait-il  toutes  les 
pîates-formes?  Je  ne  sais,  mais  je  n'ai  trouvé  jusqu'ici 
*^ucun  autre  vestige  qui  autorise  môme  une  hypothèse. 

lia  plate-forme  B  est  construite  de  la  même  manière  et 
^vecles  mêmes  matériaux.  J'en  ai  mis  au  jour  une  large 
section,  et  j'ai  pu  constater  que  le  blocage  accuse  trois 
otages  ou  gradins  successifs  pendant  son  ascension  jus- 
qu'au niveau  de  la  crête.  Les  hachures  qui,  sur  le  croquis, 
^présentent  les  talus,  ont  pour  but  de  traduire  cette  dis- 
position. 

La  plate-forme  C  est  plus  large  que  la  précédente,  soit 
six  mètres  environ,  auxquels  il  faut  ajouter  deux  ou  trois 
iQètres  de  talus  intérieur  et  autant  de  talus  extérieur. 

La  plate-forme  D,  qui  constitue  le  quatrième  côté  de  ce 
parallélogramme  est  semblable  à  la  précédente. 


203      CONGRES  ARGHÉOLOGIOUB  DB  FEANGB. 

Mais  toutes  deux  présentent  sur  leur  surface  des  aoci- 
dentH  singuliers.  Celle-là  une  dépression,  celle-ci  une 
butte,  dont  la  destination  n'est  pas  Tacile  à  préciser. 

Le  blocage  n'est  interrompu  nulle  part;  ce  qui  prouve 
que  ces  dispositions  feraient  partie  des  constructions  pri- 
mitives. J'ai  trouvé  là  des  tuiles  à  rebord,  et  je  crois  que 
si  l'enceinte  était  habitée,  les  logis  devaient  être  placés 
sur  ces  deux  larges  plates-formes. 

Seconde  enceinte. 

La  seconde  enceinte,  délimitée  par  les  plates-formes 
D  et  A  prolongées,  E,  F,  offre  moins  d'intérêt;  les  reliefs 
sont  moins  accusés,  et  les  blocages  en  partie  détruits;  mais 
ils  existaient  primitivement;  nous  en  avons  pour  preuves, 
les  pierres  semées  sur  les  talus,  et  l'empierrement  de  F 
prolongé  en  G,  visible  encore  au  delà  de  la  route. 

Troisième  enceinte. 

La  troisième  enceinte  fait  face  aux  deux  précédentes, 
ayant  avec  elles  une  base  commune.  Sa  forme  est  demi- 
circulaire.  Sa  plate-forme  G  borde  l'extrémité  du  mame- 
lon, et  allait  probablement  se  souder  en  A  avec. la  pre- 
mière enceinte.  Je  n'ai  pas  figuré  tout  sondévekppemeut, 
parce  que  ses  reliefs  sont  trop  effacés;  mais  ce  qu'on  en 
aperçoit  encore  autorise  cette  restitution. 

Et  maintenant  je  dois  conclure. 

Quel  est  l'àgc  de  ces  constructions,  et  à  quelle  civilisa- 
tion les  rattacher,  gallo-romaine,  mérovingienne  ou 
moderne?  Je  ne  sais  si  je  me  fais  illusion,  mais  il  me 
semble  que  tout  m'autorise  à  les  attribuer  à  la  période 


XLIY*   SESSION,   A  SENUS.  â03 

gaUo-romaine.  Et  d'abord  les  débris  trouvés  sont  assez 
ligniScatiGs,  soit  par  la  place  qu'ils  occupaient  dans  un 
sol  non  renaué,  sous  un  blocage  intact;  soit  par  les  types 
bien  connus  avec  lesquels  on  peut  les  identifier.  Ces  objets 
mi  :  plusieurs  fragments  de  tuiles  à  rebord  ;  un  débris 
'leTanse  d'un  grand  vase  en  terre  rouge;  plusieurs  par- 
celles de  poterie  légère  ;  de    nombreux    morceaux   de 
dment  de  deux  sortes  différentes,  l'un  semblable  au  Port- 
laod  actuel,  de  couleur  grise,  et  dure  comme  le  grès; 
l'autre  composé  de  chaux  et  de  sable;  et  un  silex  taillé, 
saos  caractère  précis,  ébauche  de  grattoir  peut-être.  Or 
ces  objets  se  rapportent  à  des  types  gallo-romains  bien 
connus. 

En  second  lieu,  j'invoquerai  comme  une  preuve  non 
moins  plausible,  la  symétrie  du  plan,  la  rectitude  des 
ligne»,  l'appareil  si  soigné  appliqué  à  tous  ces  grès  si 
réfractaires  à  la  taille;  la  perfection  relative  de  ce  blocage 
dout  les  parties  les  plus  délicates  ont  été  détruites.  J'ai 
pensé  que  cette  patience  et  cette  habileté  n'avait  pu  être 
ainsi  prodiguées  à  un  ouvrage  perdu  au  milieu  des  forêts, 
que  par  ces  mains  gallo-romaines,  qui  marquaient  de  leur 
empreinte  leurs  travaux  même  les  plus  rustiques. 

Enfin  est-il  possible  d'expliquer  quelle  pouvait  être  la 
destination  de  ces  ouvrages,  leur  raison  d'être  au  milieu 
de  ces  solitudes?  Je  ne  voudrais  pas  répondre  à  cette  der- 
nière question  par  des  hypothèses  téméraires  ;  mais  il  est 
incontestable  que  nous  nous  trouvons  ici  en  face  de  pré- 
somptions sérieuses.  Autour  de  nous  le  sol  de  la  forêt  est 
tourmenté  d'une  façon  singulière;  buttes,  dépressions, 
moellons  errants,  fossés,  arrêtent  de  tous  côtés  le  regard; 
le  chemin  gallo-romain  de  Senlis  à  Creil  passe  à  nos 
pieds  ;  toute  la  région  est  peuplée  de  vieux  souvenirs  : 
lieux  dits,  chemins,  fontaines,  fosses,  la  buiie  des  fnoris, 


204      G0N6RÂS  AKGHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

et  le  Prêche  Démoly  dont  il  sera  question  ci-après,  et  ce 
Barrum  de  Rcboreto^  dont  le  site  est  encore  ignoré  mais 
dont  le  nom  plane  sur  toute  la  contrée.  Or,  toutes  ces 
preuves  de  l'activité  humaine  dans  ces  parages  que  Ton 
aurait  pu  croire  déserts,  ne  nous  autorisent-ils  pas  à  affir- 
mer, que  sur  ces  ruines,  les  Gallo-Romains  avaient  élevé 
un  poste  fortifié,  un  barrum,  pour  commander  les  débou- 
chés de  cette  grande  forêt  de  Halatte,  qui  se  terminait  près 
delà. 

J'aurais  voulu  pouvoir  faire  un  pas  de  plus,  et  identifier 
de  suite  notre  barrvm  avec  celui  de  Roboreto  lui-même. 
Notre  collègue,  M.  de  Caix,  si  compétent  en  ces  matières, 
m-a  demandé,  à  la  fin  de  cette  lecture  quelles  raisons 
m'empêchaient  de  le  faire.  Deux  surtout,  lui  ai-je  répondu, 
me  retiennent  jusqu'à  plus  ample  informé  :  l'absence  de 
preuves  immédiates  d'abord,  et  ensuite  l'éloignement  du 
chemin  de  la  barre  Rouvroy  :  ce  nom  significatif  indique 
une  destination  si  précise,  qu'il  ne  peut  être  négligé.  Je 
crois  donc  prudent  de  chercher  d'abord  sur  son  parcours 
qui,  entre  autres  indices,  laisse  sur  sa  droite  un  tronçon 
d'aqueduc  gallo-romain,  une  rigole  que  je  désire  suivre  à 
travers  le  Rigalot.  Peut-être  ces  nouvelles  études  me 
ramèneront-elles  à  la  solution  pour  laquelle  notre  confrère 
a  formulé  ce  vœu  bienveillant.  Ce  serait  en  effet  un  hon- 
neur pour  notre  emplacement  de  représenter  un  tel  sou- 
venir et  profit  pour  notre  histoire  locale. 

Si  donc  le  Congrès  juge  la  question  assez  intéressante, 
je  lui  demanderai  d'obtenir  de  Mgr  le  ducd'Aumale  l'au- 
torisation nécessaire  et  de  m'accorder  un  léger  crédit  pour 
continuer  les  recherches. 


XUV*  SESSION,   A  SENLI8.  205 

Second  emplacement. 

Je  n'ai  que  peu  de  chose  à  dire  du  second  emplace- 
ment. 

De  la  Vigne  le  désigne  sous  le  nom  du  Prêche  Démoly, 
De  la  Vallée  de  Pont  et  de  celle  de  Saint-Leu,  les  adeptes 
de  la  nouvelle  doctrine,  pouvaient  se  rendre  à  ce  temple 
mystérieux,  par  le  chemin  des  Huguenots  qui  le  desser- 
tit au  moyen  d'un  court  embranchement.  Cet  asile  a  été 
détruit,  brûlé  peut-être  comme  un  hérétique  qu'il  était; 
et  c'est  sans  doute  pour  que  le  sol  lui-même  qui  avait 
porté  le  temple  et  son  pourpris,  expiât  son  forfait  par  une 
deitioation  pieuse,  que  le  bouquet  de  bois  qui  l'abritait 
lut  détaché  de  la  forêt  du  roi  et  donné  à  l'église  d'Au- 
mont.  Quoi  qu'il  en  soit  les  fondations  ont  été  arrachées, 
ks  meilleures  pierres  enlevées;  mais  en  remuant  les 
décombres  amoncelés,  j'ai  recueilli  d'assez  nombreux 
fragments  de  tuiles  à  rebord.  On  peut  donc  supposer  que 
ks  Huguenots  ont  profité  d'une  ancienne  construction 
encore  existante,  ou  qu'ils  en  ont  relevé  les  ruines. 

Les  constructions  formaient  deux  parallélogrammes 
inégaux  :  le  plus  grand  mesurait  10"50,  l'autre  5*50 
environ  de  largeur,  de  l'ouest  à  l'est,  sur  une  longueur 
commune  de  9  mètres  à  peu  près.  En  dehors  de  ces  deux 
enceintes,  à  quelques  mètres  vers  le  nord,  ou  aperçoit  les 
vestiges  de  quelques  dépendances.  Les  mêmes  causes  ont 
arrêté  ici  mes  recherches,  il  conviendrait  peut-être  de  les 
reprendre,  car  partout  où  apparaît  la  tuile  romaine,  nous 
devons  sans  hésiter  porter  la  pioche;  le  temps  emporte 
chaque  jour  ces  débris  contemporains  de  nos  origines, 
notre  devise  nous  fait  un  devoir  d'en  conserver  au  looins 
le  souvenir. 


206      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIOUE  DS  FRANGE. 

La  parole  est  ensuite  donnée  à  M.  Hayaux  du  Tilly, 
par  la  lecture  d'un  mémoire  sur  la  douzième  question  : 
Rechercher  remplacement  de  Litanobrlga 
et  de  Bratuspantium. 


Bratuspantium. 


Bratuspantium  et  Litanobriga,  situés  sur  le  territoire 
des  Bellovaques,  figurent  dans  le  très-petit  nombre  des 
villes  mentionnées,  soit  dans  les  commentaires  de  César, 
soit  dans  les  itinéraires  d'Anton  in  et  de  la  Table,  dont 
l'idendité  n'a  pas  encore  été  bien  exactement  déterminée. 
Cette  obscurité,  qui  peut  à  la  rigueur  se  comprendre  pour 
Litanobriga,  ne  s'explique  pas  aussi  facilement  à  l'égard 
de  Bratuspantium,  qui  était  un  oppidum  considérable,  et 
la  capitale  d'un  état  puissant. 

Plusieurs  auteurs  ont  cherché  à  faire  la  lumière  sur 
cette  question;  malgré  de  nombreuses  dissertations  la 
solution  reste  encore  à  trouver. 

La  variété  de  celles  qui  ont  été  proposées  montre  à  quel 
degré  les  divergences  ont  existé. 

Ainsi  Bratuspantium  est  identifié  :  avec  Beau  vais,  par 
Cluvier,  Scaglicr,  Sanson,  Clarke,  Oudendorp,  de  Valois, 
Loysel,  Simon,  Hermant  et  Walcknaôr; 

Breteuil-Vendcuil-Caply  par  Louvet,  Mabillon,  Bo- 
naroi,  d'Anville,  Cambry,  d'Allonville,  Mouret,  Graves 
Woillez,  l'abbé  Dévie  et  l'abbé  Barraud; 

Montdidier,  par  le  chanoine  de  Lamorlière  et  Grégoire 
d'Essigny; 

Gratupance  ou  Grattepanchc,  par  Ferrot  d'Ablancourt; 


XUy*  SBSSION,  A  SBNUS.  M? 

GmndviUien,  par  Bovelle  ; 

Beaamoiit-siir-Oise,  par  Vigenère; 

QarmoDt  en  Beaavoisin,  par  qudques  autres. 

D'autres  auteurs  enfin  n'ont  pas  craint  de  faire  un  long 
et  inexplicable  voyage  pour  identifier  le  Bratuspantium 
des  Bellovaqoes  avec  Bagacum  des  Nerviens. 

De  ces  huit  solutions,  quelle  est  la  bonne? 

C'est  ce  que  je  vais  rechercher,  et  j'espère  arriver  à  n'en 
pas  proposer  une  neuvième. 

Je  n'entrerai  pas  dans  le  détail  des  opinions  produites 
par  dMcan  des  auteurs  que  je  viens  de  nommer,  à  l'appui 
de  leurs  thèses  respectives. 

Las  partisans  de  l'identification  avec  Beauvais,  s'ap- 
puient, il  but  bien  le  dire,  sur  des  considérations  qui 
sont  loin  d'être  sans  valeur.  Ainsi  ils  invoquent  le  chan- 
gement de  nom  imposé  à  la  ville  capitale  du  peuple  vaincu, 
et  pour  eur,  Bratuspantium  est  devenu  Cœsaromagus, 
après  la  conquête,  et  plus  tari,  a  pris  le  nom  du  peuple 
pour  devenir  Bellovacum, 

Une  autre  considération,  à  défaut  de  preuve  contraire, 
ne  leur  permet  pas  d'admettre  que  l'oppidum,  c'est-à-dire 
la  capitale  des  Bellovaques,  ait  pu  être  placé  à  leur  fron- 
tière du  Nord,  et  n'ait  pas  été  situé  au  cœur  même  du 
pays. 

Les  auteurs  qui  admettent  Breteuil  ont  d'abord  cru  voir 
une  analogie  de  nom  entre  Bratuspantium  et  Breteuil, 
puis  ont  trouvé  l'identification  complète  avec  un  lieu  dit  : 
BroÊuspaHce^  situé  piès  de  Breteuil,  à  Vendeuil-Caply. 
Cette  identification  est  devenue,  pour  eux,  d'autant  plus 
indiscutable,  qu'on  a  découvert  précisément  auprès  de 
Bratuspance,  les  traces  d'un  ancien  établissement  romain, 
ainsi  que  des  armes,  des  médailles  et  des  objets  divers 
dont  l'origine  romaine  n'a  fait  doute  pour  personne 


206  GONGRÂS  ARGHÂOLOaiOUB  DB  FRANCE. 

D'Anville,  qui  s'était  d'abord  prononce  formeUement  en 
faveur.de  Beauvais,  a  modiSô  son  opinion  et  a  transporté 
Bratuspantium  à  Breteuil-Vondeuil-Caply,  après  un 
mémoire  lu  par  Bonami,  à  TAcadémie  des  Inscriptions  et 
Belles-Lettres.  Bonami  venait  de  signaler  les  découvertes 
faites  à  Vendeuil,  ainsi  que  le  lieu  dit  :  Bratuspance,  et  il 
nd  lui  en  a  pas  fallu  davantage  pour  faire  ridentiflcation 
qu'il  ne  pouvait  pas  expliquer  autrement. 

Graves,  dont  personne  ne  contestera  la  compétence  et 
le  savoir,  pour  tout  ce  qui  se  rattache  aux  recherches 
archéologiques  sur  le  département  de  TOise,  conteste 
l'existence  du  lieu  dit  Bratuspance,  et  ne  reconnaît  à 
Vendeuil -Caply  que  les  vestiges  d'une  station  romaine 
qui  avait  sa  raison  d'être,  sans  qu'il  soit  le  moins  du 
monde  nécessaire  de  l'identifier  au  Bratuspantium. 

D'Essigny  et  le  chanoine  Lamorlière  ont  adopté  Mont- 
didier  sans  produire  de  bien  bonnes  raisons  à  l'appui  de 
leur  opinion. 

Pcrrot  d'Ablancourt  a  cru  voir  une  analogie  sufHsante 
dans  le  nom  de  Gratupance  ou  Grattepanche,  et  a  iden- 
tifié cette  localité  avec  Bratuspantium,  sans  s'apercevoir 
qu'il  transportait  chez  les  Anibrani  l'oppidum  des  Bello- 
vaques. 

Mais  il  serait  vraiment  bien  dificile  de  justifier  les  iden* 
tifications  avec  Grandvilliers,  Clermont,  Beaumontet  sur- 
tout avec  Bavay.  Aussi  ne  m'étendrai-jepas  plus  loin  sur 
ces  propositions  par  trop  fantaisistes. 

A  défaut  de  témoignages  précis  et  indiscutables,  étudions 
les  faits  et  les  événements,  dont  la  déduction  logique  nous 
conduira  à  une  solution  qui  sera  bien  près  de  la  certitude. 

Mais  pour  arriver  à  ce  résultat,  il  est  nécessaire  d'expo- 
ser brièvement  les  faits  qui  seront  le  point  de  départ  et  la 
base  de  la  discussion. 


XLIT*  SESSION,   A  SENLIS.  209 

Céttr,  s'avançant  pour  combattre  la  coalition  des  peuples 
de  b  B«'Igique  réunis  devant  Bibrax,  s'informe  prudem- 
ment des  forces  qu'il  aura  à  combattre.  Les  Rémois  lui  en 
Ibol  une  énumération  complète,  et  signalent  en  premier 
lieu  les  Bellovaques  comme  étant  les  plus  nombreux,  les 
plus  braTes  et  les  plus  puissants,  capables  de  lever  une 
armée  de  cen/ mi7/e  hommes^  et,  en  réalité,  en  ayant  appelé 
fixante  mille  sous  les  armes.  Ils  signalent  aussi  les  Ner- 
TJeDS  parmi  les  plus  nombreux  et  les  plus  sauvages,  ayant 
amené  cinquante  mille  hommes. 

Ce  dénombrement,  qu'on  accepte  généralement  sans 
observations,  était-il  sincère  et  surtout  exact?  Il  est  permis 
d'en  douter,  et  ce  doute  est  tout  naturel,  si  on  étudie  la 
conduite  et  l'intéiét  des  Rémois. 

Non-seulement  les  Rémois  n'entrent  pas  dans  la  coali- 
tion des  peuples  de  la  Belgique,  qui  tentent  de  s'opposer 
à  l'invasion  des  armées  romaines;  mais,  oubliant  tout 
sentiment  de  patriotisme,  ils  se  font  les  instruments 
dociles  de  César,  et  lui  viennent  volontairement  en  aide 
contre  leurs  voisins  par  tous  les  moyens  en  leur  pouvoir. 

Peut-on  dire  que  les  Rémois  codaient  à  la  nécessité,  ou 
même  à  la  peur?  Cette  supposition,  qui  pourrait  être  une 
excuse,  est  inadmissible  en  présence  de  l'exagération  inten- 
tionnelle de  leur  langage. 

En  grossissant,  outre  mesure,  les  forces  des  Bellovaques, 
des  Suessions  et  des  Nerviens,  c'était  naturellement  dési- 
gner ces  peuples  aux  premiers  coups  des  Romains,  et,  par 
fuite,  c'était  amoindrir  ou  môme  anéantir,  par  le  bras  de 
lùésar  et  sans  danger  pour  eux-mêmes,  des  peuples 
voisins  dont  la  puissance  leur  portait  ombrage. 

Ces  trois  peuples  limitrophes  des  Rémois  sont  les  pre- 
miers signalés,  et  il  est  à  remarquer  qu'eux  seuls  sont 
l'objet  d'une  mention  spéciale,  destinée  à  accentuer  davan- 

XUV*  SESSION.  14 


SiO      GONORÈS  ARGHÉOLOOIQUE  DB  FAANGB. 

tage  les  poinU  où  il  faudrait  agir  le  plus  énergique - 
ment. 

Il  est  même  curieux  de  constater  que,  pris  d'une  sorte 
de  remords  à  l'égard  des  Suessions,  les  Rémois  cherchent 
à  atténuer,  par  avance,  les  rigueurs  qui  pourront  frapper 
ces  voisins  à  l'issue  de  la  guerre.  Cette  commisération, 
qui  s'explique  par  de  nombreuses  relations  d'origine,  de 
lois  et  de  parenté,  fait  ressortir  plus  nettement  la  baioe 
implacable  que  les  Rémois  portaient  aux  Bellovaques  et 
aux  Nerviens,  dont  ils  craignaient  la  puissance.  Les  con- 
séquences de  l'exagération  de  certains  contingents,  assu- 
raut  aux  Rémois  la  satisraction  de  leurs  rancunes,  il  deve* 
nait  inutile  d3  grossir  les  contingents  des  Veliocasses,  des 
Calétes,  des  Morini  et  des  autres  peuples  de  la  coalition 
avec  lesquels  ils  n'entretenaient  aucune  relation,  et  dont, 
à  cause  de  leur  éloignement,  ils  n'avaient  aucune  entre- 
prise à  redouter. 

Pour  être  convaincu  que  tel  a  été  le  calcul  des  Rémois, 
et  que  leur  exagération  des  forces  des  Suessions,  et  surtout 
des  Bellovaques  et  des  Nerviens,  avait  un  but  intéressé  et 
ne  reposait  sur  aucun  fondement,  il  sufQt  de  reconnaître: 

Que  la  densité  de  la  population  était  à  peu  près  la  mémo 
dans  l'étendue  d'une  môme  province,  surtout  chei  des 
peuples  limitrophes; 

Que  les  Bellovaques,  notamment,  ne  Csisaieut  point 
exception  aux  autres  peuples  Belges,  pour  l'appel  et  la 
levée  de  leurs  contingents; 

Que,  dès  lors,  on  peut  évaluer  assez  exactement  l'im- 
portance relative  des  contingents,  d'après  l'étendue  res- 
pective des  territoires; 

Que,  s'il  est  vrai  que  certaines  circonstances  acci- 
deotelies  ont  pu  modifier  ces  règles  générales,  on  ne 
s'écartera  guère  de  la  vérité  eu  comparant  l'état  ancien 


XLIV*  SESSION,   A  SENUS.  211 

des  pays  occupés  par  les  différents  peuples  des  Gaules, 
atec  ce  que  nous  voyous  de  nos  jours; 

Qu'en  appliquant  au  pays  actuel  les  limites  des  anciens 
peuples,  on  doit  trouver  entre  ceux-ci  une  proportion 
relative  de  population  analogue  à  celle  que  nous  pouvons 
observer  maintenant. 

De  ce  qui  précède  on  peut  conclure  :  que,  si  on  admet 

1 

pour  exactes  les  indications  des  Rémois,  les  Bellovaques 
pouvant  lever  cent  mille  hommes  et  en  fournissant 
KÛiante  mille,  devaient  avoir  quarante  mille  hommes  en 
réserve  et  avaient  un  territoire  dix  fois  plus  étendu 
que  celui  des  Ambiani,  des  Calétes,  des  Veliocasses  et  des 
Veromandisi,  qui  ne  lèvent  que  dix  mille  hommes,  et  près 
de  sept  fois  plus  considérable  que  celui  des  Atrebates,  qui 
(«t  un  contingent  de  quinze  mille  hommes. 

Or,  cette  différence  dans  retendue  des  territoires  n'existe 
pas,  et,  par  suite,  on  peut  dire  que  des  différences  ana- 
logues dans  Timportance  de  la  population  n'existent  pas 
davantage. 

Que  si,  dans  cette  seconde  campagne,  rien  ne  dit  que 
les  contingents  ont  été  fournis  dans  la  proportion  relative 
de  la  population  de  chaque  nation,  nous  trouvons  cette 
proportion  rigoureusement  établie  lors  de  la  septième 
campagne,  quand  les  États  de  la  Gaule  déterminent  les 
oootingenis  que  chaque  peuple  devra  envoyer  sous  les 
ordres  de  Vercingétorix. 

Dans  cette  répartition  officielle,  voulant  éviter  la  con- 
fusion-et  le  désordre,  en  n'appelant  rigoureusement  que 
tous  les  hommes  capables  de  porter  les  armes,  comme  le 
désirait  Vercingétorix,  l'assemblée  des  États  décide  qu'on 
deoundera  seulement  à  chaque  peuple  un  certain 
nombre  d'hommes,  au  prorata  de  sa  population.  Cette 
lois  l'appel  s'adresse  à  tous  les  peuples  au  nom  du  salut 


212     CONGRÈS  ARGUÉOLOGIQUB  DE  FRANGE. 

de  la  patrie  commune.  C'est  une  injonction  à  tous,  qui 
acquiert  l'importance  d'un  document  authentique,  où 
chacun  est  taxé  en  raison  de  ses  ressources. 

Il  est  juste  de  dire,  pourtant,  que  ce  document  parait 
avoir  déterminé  le  contingent  de  chaque  peuple  en  raison 
directe  de  l'intérAt  que  chacun  d'eux  pouvait  prendre  à  la 
guerre. 

'  Ainsi,  les  nations  les  plus  rapprochées  du  théâtre  des 
événements  qui  allaient  s'accomplir,  sont  taxées  à  un 
contingent  plus  élevé  que  les  peuples  qui  s'en  trouvaient 
plus  éloignés.  Mais  la  répartition  des  contingenta  d'une 
même  région  parait  faite  régulièrement  en  proportion  de 
la  population,  de  l'étendue  et  des  forces  de  chaque  pays; 
de  telle  sorte  que  cette  répartition  peut  être  invoquée 
sérieusement  pour  contrôler  certains  récits  empreints 
d'une  exagération  par  trop  manifeste. 

Pendant  que  les  contingents  des  Senones,  des  Sequani, 
des  Bituriges,  des  Authons,  den  Ruthènes  et  des  Car- 
nutes,  étaient  portés  d'ofTice  à  douze  mille  hommes  cha- 
cun, ceux  des  Bellovaques  et  des  Lemovices  «on/  fixétt  à 
dix  mille  hommes,  et  ceux  des  Fictones,  des  Turones,  des 
Purisii  et  des  Helvii  descendent  à  huit  mille.  Les  propor- 
tions des  contingents  sont  ici  maintenues  dans  celle  des 
limites  de  chacun. 

Strabon  (1),  plaçant  les  Bcllovaques  au  premier  rang 
des  Belges,  et  les  Suassions  au  second,  dit  qu'ils  sont  si 
nombreux  qu'on  a  pu  lever  chez  eux  jusqu'à  trente  mille 
hommes  en  état  de  porter  les  armes. 

Il  y  a  loin,  comme  on  le  voit,  des  exagérations  inté- 
ressées du  dénombrement  des  Bernois,  et  de  la  réalité 
attestée  par  un  fait  ol'licicl  et  par  Strabon,  dont  l'impar- 

(r)  Liv.  IV,  p.  U5,  1.51. 


XLIV*  SESSION,   A  SEMLIS.  213 

tjalité  ne  saurait  être  mise  en  doute.  Les  Rémois  eux- 
mêmes  font  ressortir  cette  exagération  en  réduisant  à 
soixante  mille  hommes  le  contingent  réel  des  Bellovaques, 
et  restent  encore  fort  au-dessus  de  la  vérité. 

En  appliquant  sur  le  terrain  les  limites  les  plus  larges 
des  Bellovaques,  elles  comprendraient  acluellement  une 
population  totale  d'environ  quatre  cent  cinquante  mille 
habitants. 

Si  on  admet,  ce  qui  est  incontestable,  que  la  population 
actuelle  a  une  densité  beaucoup  plus  considérable  qu'au 
tempe  des  Romains,  on  ne  sera  certainement  pas  taxé 
d'exagération  en  supputant  à  raison  de  trois  pour  un, 
tiers  on  trouverait  que  les  quatre  cent  cinquante  mille 
habitants  d'aujourd'hui  en  feraient  supposer  cent  cin- 
quante mille  chez  les  Bellovaques  (i). 

Les  femmes  représentant  la  moitié  de  la  population,  il 
serait  resté  soixante-quinze  mille  individus  seulement, 
dont  un  tiers  ou  la  moitié,  tout  au  plus,  eût  été  capable 
de  porter  les  armes. 

Le  contingent  des  Bellovaques,  ramené  à  ces  propor- 
tions, peut  être  admis  sans  difficultés,  d'autant  mieux 
qu'il  est  en  rapport  avec  ceux  des  autres  peuples,  eu  égard 
aux  limites  des  territoires  de  chacun. 

S'il  faut  encore  une  nouvelle  preuve  de  l'exagération 
volontaire  des  Rémois,  les  commentaires  eux-mêmes  se 
chargeront  de  nous  la  donner. 

I:  Valentin  Smith  évalue  la  superficie  totale  de  la  Gaule 
inosalpine  4  six  cent  cinquante-sept  mille  kilomètres  carrés,  et 
a  populalioD  à  six  millions  quatre-vingt-huit  mille  habitants. 
Li  population  actuelle  des  mêmes  territoires  dépassant  quarante- 
f^pt  oiillioDS  d'habitants,  la  proportion  serait  donc  de  six  et 
demi  i  un. 


214      CONGRÈS  ARGHÉOLOGIQUE  DB  FRANGE. 

Les  Bellovaques  pouvaient,  disaient-ils,  lever  cent  mille 
hommes^  el  n'en  avaient  réellement  fourni  que  soixante 
mille,  il  semble  que  quarante  mille  hommes  ont  dû  rester 
pour  garder  et  défendre  le  pays  pendant  l'absence  de 
l'armée,  mise  en  déroute  sur  les  bords  de  l'Aisne.  Et 
cependant  César  n'éprouve  aucune  résistance  et  ne  ren- 
contre dans  Bratuspantium,  l'oppidum  des  Bellovaques, 
que  des  vieillards,  des  femmes  et  des  enfants. 

N'est-ce  pas  là  un  témoignage  manifeste  de  l'exagération 
intéressée  des  Rémois? 

La  première  conséquence  de  cette  exagération  ne  se  fait 
pas  attendre. 

César,  dans  le  but  de  diviser  les  forces  de  l'armée  gau- 
loise, donne  ordre  à  Divitiacus  de  faire,  à  la  léte  des 
Éduens,  une  diversion  contre  les  Bellovaques  ;  d'envahir 
et  de  ravager  leur  territoire. 

Divitiacus,  traversant  le  pays  des  Suessions,  et  arrivant 
sans  obstacle  à  la  frontière  des  Bellovaques,  nous  montre 
aussi  que  sur  sa  route  le  pays  était  complètement 
dépourvu  de  ses  défenseurs.  Sur  les  bords  de  l'Aisne,  les 
événements  s'étaient  accomplis  avec  une  telle  rapidité  que 
César,  de  son  côté,  arrivait  devant  Bratuspantium,  où 
Divitiacus  venait  le  rejoindre,  après  avoir  congédié  les 
Ëdueus,  dont  les  services  devenaient  inutiles. 

César  et  Divitiacus  ont  suivi  deux  routes  distinctes 
l>our  accomplir  le  but  différent  de  la  mission  que  cha- 
cun d'eux  s'était  imposée;  et  il  est  plus  que  vraisem- 
blable que  les  plans  et  les  instructions  avaient  été  concertés 
à  l'avance. 

Divitiacus,  chargé  de  faire  une  diversion  contre  les 
Bellovaques,  devait  inquiéter  en  même  temps  les  A mbiaui, 
engagés  également  dans  la  coalition  des  peuples  Belges,  et 
il  demeure  certain  qu*il  a  dû  longer,  au  nord,  la  fron- 


XLIY'  SESSION,   A  SENLI3.  215 

tière  des  Bellovaqucs,  pour  être  à  portée  de  menacer  à  la 
foisBratuspantium  et  Samarobriva. 

S'il  est  venu  rejoindre  César  à  Bratuspantium,  c'est  évi- 
demment qu'il  se  trouvait  à  une  assez  grande  distance  de 
c*»lte  ville. 

La  mission  de  Divitiacus  8*est  donc  bornée  à  une  simple 
diversioa  inoifensive. 

César,  dont  les  mouvements  rapides  ne  laissaient  pas  à 
ses  ennemis  le  temps  de  8e  reconnaître,  voulant  anéantir 
leur  puissance,  marche  directement  sur  Noviodunum 
(Soissons),  puis  sur  Bratuspantium,  déjà  menacé  par 
Divitiacus.  Voulant  frapper  un  coup  décisif,  il  a  dû  suivre 
la  route  la  plus  directe  pour  pénétrer  rapidement  au  cœur 
(lu  pays,  et  étoufiFér  immédiatement  toute  tentative  de 
résistance. 

L'exposé  de  ces  faits  m'a  paru  nécessaire  pour  faciliter 
l'intelligence  de  la  discussion  qui  va  suivre,  et  pour  don- 
ner créance  aux  conjectures  que  je  serai  forcé  de  faire, 
comme  tous  ceux  qui  ont  abordé  cette  question. 

L'exagération  des  Rémois,  après  deux  mille  ans,  s'im- 
posant  encore  à  nous  par  le  seul  fait  de  la  relation  des 
Commentaires,  qu'on  accepte  sans  discussion,  est  Tune  des 
causes  les  plus  réelles  qui  ont  empêché  la  lumière  de  se 
faire  complètement  dans  l'appréciation  de  la  puissance  des 
Bellovaques.  Sans  contester  le  récit  de  César,  il  doit  être 
permis  d'en  écarter  les  indications  exagérées  introduites  à 
dessein  par  des  intéressés,  et  de  ne  prendre  de  ce  récit 
que  ce  qui  est  conforme  à  la  réalité  des  faits. 

Les  faits  étant  ainsi  bien  établis  dans  leur  ordre  naturel 
et  chronologique,  étudions-les  dans  leurs  relations  avec 
Bratuspantium,  c'est-à-dire  avec  la  question  qui  nous 
occupe. 

Les  Bellovaques  ayant  quitté  leur  territoire  pour  se  por- 


246       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

ter  à  la  rencontre  de  César,  sur  le&  bords  de  l'Aisne,  il 
était  naturel  qu'ils  missent  en  lieu  sûr  leurs  vieillards, 
leurs  femmes  et  leurs  enfants;  et  il  tombe  sous  le  sens 
que  ce  devait  être  dans  la  ville  la  plus  forte  et  la  plus 
importante,  c'est-à-dire  dans  la  capitale,  aussi  loin  que 
possible  des  atteintes  de  l'ennemi. 

Le  choix  d'une  autre  ville,  vers  le  Nord,  eût  été  inex- 
plicable, surtout  si  on  se  rappelle  que,  dès  le  début  de  la 
campagne,  Divitiacus  avait  reçu  l'ordre  d'envahir  le  terri- 
toire des  Bellovaques  et  qu'après  la  déroute  de  l'Aisne,  il 
menaçait  déjà  leur  frontière. 

Les  Bellovaques  figurent  au  premier  rang  des  peuples 
belges  ligués  contre  César.  Ils  sont  signalés  comme  les 
plus  vaillants,  les  plus  nombreux  et  les  plus  influents. 
Aussi  César  juge-t-il  nécessaire  de  diriger  contre  eux  sa 
première  attaque,  et  envoie«t-il,  à  cet  effet,  Divitiacus 
faire  une  diversion  sur  la  frontière. 

Lui-même,  peu  de  temps  après,  aussitôt  après  sa  vic- 
toire de  TAisne,  prend  les  Bellovaques  comme  objectif 
principal,  et  veut,  en  les  attaquant  au  cœur  de  leur  pays, 
frapper  un  grand  coup  capable  de  les  anéantir  et  de 
décourager  les  autres  peuples  <le  la  ligue.  Cette  conduite 
était  en  quelque  sorte  tracée  d'avance. 

En  effet.  César  savait  que  le?  hommes  capables  de  porter 
les  armes  et  de  lui  résister  étaient  absents,  puisqu'il  venait 
de  les  mettre  en  déroute  sur  les  bords  de  l'Aisne.  Il  savait 
donc  qu*il  tn>uverait  un  pays  sans  défense,  et  qu'il  n'y 
rencontrerait  que  les  vieillards,  les  femmes  et  les  entants. 
Sa  marche  rapide  devait  lui  assurer,  sans  combat,  la  sou- 
mission du  pays,  et  1  efiet  moral  de  cette  soumission  devait 
étrv  d'autant  plus  oiuisi  iérable  aux  yeux  des  autres  confé- 
dérés, que  Us  Bellovaques  élaicit,  et  se  sentaient  si  puis- 
sauts,  que,  uou-seuloment  ils  avaient  réclamé  le  comman- 


X1.IY*  SESSI0I<1,   A  SENLIS.  217 

dément  de  Tarmée,  mais  que,  bien  plus,  ils  voulaient  faire 
)a  guerre  aux  Romains  pour  leur  propre  compte. 

Nous  venons  de  dire,  et  nous  avons  montré  que  les  Bel- 
lovaques  devaient  être,  et  étaient  réellement  les  adver- 
saires les  plus  redoutables  des  Romains,  et  se  trouvaient 
naturellement  les  premiers  exposés  à  leurs  attaques. 

Si  la  conduite  de  César  était  si  logiquement  indiquée, 
on  admettra,  sans  peine,  que  celle  des  Bellovaques  était 
tout  aussi  naturellement  tracée.  Quelle  était  leur  situa- 
tion? 

En  quittant  leur  pays  pour  aller  au  loin  combattre  les 
liions  de  César,  et  en  laissant  leurs  vieillards,  leurs 
enfants  et  leurs  trésors  abandonnés  sans  défense,  ils  ont 
dû  nécessairement  se  préoccuper  de  les  mettre  en  sécurité 
contre  toutes  les  éventualités  des  attaques  de  Tennemi. 
Le  sentiment  de  la  conservation,  l'instinct,  si  on  veut,  a 
dû  les  porter  naturellement  à  faire  choix  d'un  lieu,  le  plus 
éloigné  possible  de  l'ennemi,  de  quelque  côté  qu'il  pût 
venir,  et  le  plus  en  état  de  résister.  Si,  d'une  part,  pour 
la  distance,  on  ne  peut  concevoir  ce  lieu  ailleurs  qu'au 
centre  du  territoire,  d'autre  part,  il  est  logi4]ue  de  pen- 
ser que  la  protection  des  faibles  et  la  sécurité  de  tous 
devaient  se  trouver,  plus  qu'ailleurs,  dans  la  capitale , 
où  étaient  concentrées  toutes  les  forces  vives  du  pays. 

Par  cette  double  considération  de  sécurité  provenant  des 
distances  et  de  la  foi  ce  de  la  place.  Beau  vais,  et  Beau  vais 
seul,  nous  parait  répondre  à  la  préoccupation  des  Bello- 
vaques, partant  en  guerre  loin  de  chez  eux. 

Nous  allons  plus  loin,  et  nous  disons  qu'en  dehors  des 
raisons  naturelles  dont  nous  venons  de  parler,  le  plus 
«impie  bon  sens  aurait  empêché  les  Bellovaques  de  cher- 
cher cette  sécurité  à  l'extrémité  de  leur  territoire,  et  vers 
la  frontière  nord,  moins  qu'ailleurs,  parce  que  cette  fron- 


318      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIQUE  DE  PRANGB. 

tière  confinant  aux  Ambiani  était  et  devait  être  nécessai- 
rement menacée  on  même  temps  que  la  leur,  les  Ambiani 
faisant,  comme  eux,  partie  de  la  ligue,  et  leur  pays  étant 
également  privé  de  ses  défenseurs. 

Cette  considération  vient  s'ajouter  aux  premières  pour 
établir  que  le  lieu  de  refuge  dos  Rellovaques  n'était  pas, 
et  ne  pouvait  pas  être  sur  leur  frontière  du  nord,  et  que 
cet  asile  n'était  et' ne  pouvait  être  que  dans  la  capitale,  au 
cœur  même  du  pays. 

Mais  si  la  démonstration  n'était  pas  suffisamment  faite. 
César,  lui-même,  se  chargerait  de  l'achever  aussi  claire- 
ment que  possible. 

En  effet,  dès  qu'il  apprend  que  Divitiacus,  qui  l'avait 
précédé,  s'approche  de  la  frontière  des  Bellovaques:— Çuorf 
Divitiacum  atqu^  jSduos  finibus  Bellovacorum  apprùpin" 
quart  cognoverant,  —  lui-même  envahit  le  pays  avec  son 
armée,  —  exercitumque  in  Beltovacos  duxU^  -*  alors  il 
campe  sous  les  murs  de  Braiuspaniiumy  où  Divitiacus  vient 
le  rejoindre  après  avoir  licencié  les  Éduens.  Pour  com- 
prendre le  texte  latin,  on  est  bien  forcé  de  reconnaître  que 
Divitiacus  devait  être  à  une  certaine  distance  de  César;  or 
ce  dernier  était  devant  Bratuspantium,  ubi  Bellovùci  se 
suaque  cantulissent.  Ce  déplacement  de  Divitiacus  indique 
donc  nécessairement  que  Bratuspantium  était  asses  éloi- 
gné de  la  frontière  nord  où  il  se  trouvait,  et  alors  la  capi- 
tale, c'est-à-dire  l'oppidum  Bratuspantium^  se  trouve 
implicitement  indiqué  à  Bèauvais. 

A  ceux  qui  placent  Bratuspantium  à  Breteuil,  c'est-à- 
dire  à  la  frontière  nord,  nous  demandons  comment  ils 
expliquent  le  texte  signalant  le  déplacement  de  Divitiacus, 
qui  se  trouvait  lui-même  à  cette  frontière.  Dans  ce  cas,  il 
n'aurait  pas  eu  à  se  déranger,  puisque  César  serait  venu  à 
lui. 


XLIV*  SESSION,   A  8ENL1S.  t19 

Mais,  nous  dira-t-on  peut-être,  le  texte  ne  détermine 
pas  la  frontière  menacée  par  Divitiacus;  ce  dernier  venant 
de  Reims  pouvait  menacer  la  frontière  de  Test  aussi  bien 
que  la  frontière  du  nord,  ou  tout  autre  point  du  territoire 
des  Beliovaques.  Le  bon  sens  se  chargera  de  la  réponse. 

Les  Belges  seuls  s'étaient  ligués  contre  les  Romains.  * 

Les  Metdi,  les  Vadicasses^  les  Siivanectet,  les  Parisii, 
les  Camttiei  n'avaient  point  pris  part  à  la  lutte.  11  y  avait 
d'autant  moins  de  raison  de  les  traverser  pour  envahir  le  ' 
pays  des  Beliovaques,  que  leurs  soldats  gardaient  leurs 
foyers,  qu'ils  étaient  à  l'abri  derrière  l'Oise,  dont  ils  pou- 
vaient facilement  défendre  les  passages,  qu'une  agression 
des  Romains  pouvait  entraîner  toutes  ces  nations  dans  la 
lutte,  et  que,  d'ailleurs,  c'eût  été  allonger  inutilement  la 
route  et  n'atteindre  qu'une  partie  du  but  que  se  proposait 
César. 

Divitiacus  ne  pouvait  donc  pas  menacer  la  frontière 
au  snd;  encore  moins  celle  de  l'ouest,  vers  les  Velio- 
casses. 

A  quoi  lui  eùt-il  servi  d'inquiéter  la  frontière  de  l'est? 
Il  n'eût  (ait  sur  ce  point  qu'une  diversion^  sans  portée, 
entre  les  Suessions  et  les  Beliovaques. 

En  eCTet,  la  démonstration  contre  les  Suessions  était  au 
moim  inutile,  parce  que  ce  pays  était  déjà  envahi  par  les 
légions  romaines,  et  que  César  le  tenait  en  quelque  sorte 
$ous  sa  main  et  sous  sa  domination;  et  d'ailleurs  cette 
frontière  était  elle-même  protégée  par  l'Oise,  et  bien  éloi- 
gnée de  Brûtuêpantivm,  qu'on  place  cette  ville  à  Beauvais 
ou  à  Breteuil. 

Nous  croyons  avoir  démontré,  avec  évidence,  que  Divi- 
tiacus n'a  pu  menacer  que  la  frontière  du  nord. 

Dès  lors,  sa  position  entre  Samarobri  va  et  la  capitale  des 
Beliovaques  se  trouve  si  naturellement  et  si  forcément 


220  GONGhÉS  ARGUÉOLOOIQUE  DE  PBANGB. 

indiquée  vers  Breteuil,  que  nous  ne  croyons  pas  devoir 
insister  davantage. 

Si  donc  Divitiacus  menaçant  la  frontière  nord,  et  se 
trouvant  près  de  Breteuil,  est  allé  rejoindre  César  devant 
Bratuspantium ,  c'est  évidemment  que  cette  ville  était 
éloignée  de  Dreteuii  et  de  la  frontière,  et  alors  on  est  forcé- 
ment*ramené  à  Beauvais. 

Faut-il  enfin  chercher,  non  pas  de  plus  graves  pré- 
somptions, mais  des  certitudes  absolues?  nous  les  trou- 
verons cette  fois  dans  les  faits  stratégiques  et  maté- 
riels. 

Nul  ne  contestera  que  les  voies  romaines  n'aient  été 
établies  avant  tout  pour  faciliter  la  circulation  des  troupes 
sur  tous  les  points  des  territoires  occupés.  Les  nécessi- 
tés stratégiques  dominant  toutes  autres  considérations, 
les  routes  ont  été  conduites  là  où  elles  étaient  utiles 
pour  assurer  la  conservation  de  la  conquête,  c'est-à-dire 
sur  les  points  les  plus  importants  comme  positions  mili- 
taires, sur  les  villes  fortifiées,  et  principalement  sur  les 
capitales  des  peuples  soumis.  Ce  fait  est  si  évident,  qu'il 
se  démontre  de  lui-même.  Aussi  vo\ons-nous  certaines 
villes  capitales  devenir  le  centre  de  rayonnement  de  nom- 
breuses routes  stratégiques.  Hoims  et  Beauvais,  notam- 
ment, en  furent  dotées  plus  libéralement  qu'aucune 
autre  des  cités  de  la  Belgique.  Quoiqu'en  définitive  les 
routes  de  ces  deux  groupes  aient  eu  la  même  fonction, 
il  est  aisé  de  comprendre  que  César  a  voulu  atteindre 
deux  buts  difi*érents.  Si  Reims,  pays  ami  et  allié, 
était  son  point  de  départ,  sa  véritable  base  d'opérations, 
Beauvais  était  la  capitale  d'un  peuple  aussi  puissant 
que  brave  et  inquiet,  dont  l'influence  était  considérable 
parmi  les  peuples  belges,  ligués  contre  les  Romains.  A  ce 
titre,  et  par  sa  situation,  c'était,  en  quelque  sorte,  la 


XUY*  SESSION,   A   SENLIS.  224 

dé  de  la  résistance;  c'était  en  tout  cas  un  centre  d'ac- 
tion redoutable  qu'il  importait  de  surveiller  et  de  con- 
tenir. 

Les  nombreuses  voies  romaines  qui  aboutissent  à  Beau- 
vais  dans  toutes  les  directions,  sont  pour  nous  la  preuve 
la  plus  manifeste  de  Timpurtance  de  cette  ville,  comme 
position  militaire  et  stratégique.  Nulle  autre,  chez  les 
Bellovaques,  ne  réunit  au  même  degré  ces  témoignages 
irrécusables,  qui  ont  pu  augmenter  sans  doute,  mais  qui 
ont  surtout  constaté  l'importance  de  Beauvais,  antérieu- 
rement à  la  conquête. 

Quand  les  Romains  reconnaissent  de  la  sorte  Tim- 
portance  de  la  capitale  des  Bellovaques,  faisant  de  sa 
possession  une  questioji  essentielle,  n'est-il  pas  évident 
que  César  ne  pouvait  la  passer  sous  silence  dans  ses  Com- 
meotaires,  pour  citer  une  autro  ville  qui  n'avait  et  ne 
pouvait  pas  offrir  la  même  sécurité  aux  uns,  la  même 
importance  aux  autres?  Aussi  ne  pouvons-nous  voir  dans 
Braiuipantivm  une  autre  ville  que  la  capitale  des  Bello- 
vaques, c'est-à-dire  Beauvais. 

Les  Bellovaques  quittant  leur  pays,  et  forcés  d'aban- 
donner leurs  femmes,  leurs  vieillards  et  leurs  enfants,  ont 
dû  nécessairement  les  enfermer  dans  la  ville  qui  leur 
offrait  le  plus  de  sécurité.  Quand  «ihez  un  peuple  aussi 
puissant.  César  ne  cite  qu'une  seule  ville  dans  laquelle  se 
Hknt  retirés  les  vieillards  et  les  femmes,  et  devant  laquelle 
il  campe  avec  son  armée,  c'est  lu  preuve  que  cette  ville 
est  à  la  fois  la  cité  la  plus  centrale  et  la  plus  forte  du 
pays,  et  que  c'est  le  point  sur  lequel  ses  coups  auront  le 
plus  de  retentissement,  et  les  résultats  les  plus  considé- 
rables. 

La  ville  de  Breteuil  est-elle  donc  dans  les  mêmes  con- 
ditions que  Beauvais,  quant  à  la  situation  topographiqpe. 


339      CONGRÈS  ABGHÉOLOOIQUE  DB  FRANGE. 

aux  considérations  stratégiques  et  aux  voies  militaires? 

Nullement. 

Breteuil,  situé  sur  la  frontière  nord,  ne  saurait  répondre 
suffisamment  aux  conditions  de  sécurité  que  devaient, 
avant  tout,  rechercher  les  Bellovaques  pour  protéger  ce 
qu'ils  avaient  de  plus  cher. 

Cette  ville,  située  entre  les  deux  voies  d'Amiens  à  Beau- 
vais,  et  d'Amiens  à  l'Oise,  par  Gatenoy  et  Saint-Martin- 
Longueau,  près  de  Pont-Saint-Maxeuce,  était  une  simple 
station  militaire,  un  catirum  hibernale,  mais  n'était  nul- 
lement un  centre  de  rayonnement  d'un  grand  nombre  de 
chemins.  Ce  fait  suffit  pour  démontrer  qu'au  temps  de 
César,  Breteuil  n'offrait  ni  la  sécurité,  ni  l'importance  que 
les  Bellovaques  devaient  rechercher  avant  tout,  et  que  ce 
u*cst  point  la  ville  sur  laquelle  César  a  mardié  pour 
atteindre  son  ennemi.  Dès  lors  il  faut  chercher  ^ra/iiipan- 
tium  ailleurs  qu'à  Breteuil,  et  nous  ne  trouvons  cette 
ville  qu'à  Beauvais. 

Les  Ikllovaques,  en  s'enfermant  dans  BraiutpamiitÊM 
dé^gnaiout«  {lir  ce  fait  même,  à  César,  la  ville  la  plus 
forte  et  la  plu$  riche  de  leur  pays,  puisque  là  se  trouvaient 
lours  armes  et  leurs  ti^^r&«  avec  leurs  femmes  et  leurs 
oufaul;^.  Ils  lui  moutraieut  le  point  où  il  pouvait  les  frap- 
|>0T  au  civur. 

Oè^r  comprenait  que  la  possession  de  la  principale 
ville  dc$^  lWlKnjiqu<$«  c'est-ÀMlire  de  BrahisptnUiym,  le 
nnidrai;  lu^îuv  du  (v*y$,  Aius^i  en  ât-il  le  centre  de  nom- 
hr>^u$«e«  rvmtc^  qui  nyonu^i^uK  plus  lud  sur  tout  le  pays. 
Or«  or$  xv^uii(^  n\>mhKUâes  ^  ^trouvent  aujourd'hui 
lUN^i^uH'Ut  autour  <àe  TaïKieuDe  capitale  des  Bellova*{ues, 
4epui$  ('jn^tn^iMjnL^,  c{  4u;ou^i'hut  Beauvais.  Forte  nous 
«rt  J^\iK  ^  IK  \v>&r  jaifê  Arwhii^mùM  que  la  ville  de 


XUT*  SESSIUW,   ▲  8ENU8r  S13 

Ici  nous  devons  faire  deux  remarques  qui  ne  sont  peut- 
être  pas  sans  valeur. 

Si  Braiu^HMiium  était  à  Breteuil,  comment  expliquer 
qu'on  n'ait  pas  donné  à  la  ville  soumise  le  nom  du  vain- 
queur, CMiaramaguê,  et  qu'on  ait,  au  contraire,  donné  ce 
nom  à  Beaavais? 

On  doit  se  demander  naturellement  quel  était  le  nom  de 
Bcauvais,  qui  a  été  remplacé  par  celui  de  Csesaromagus. 
Cet  ancien  nom  était  certainement  connu,  puisque  c'était 
celui  d'un  peuple  puissant,  et  les  dénominations  posté- 
rieares  Cxiarmnaguê  et  Bellovacum  témoignent  que  cette 
ville  n'avait  point  cessé  d'être  la  capitale  des  Bellovaques; 
cet  ancien  nom,  remplacé  par  celui  de  César,  n'était  et  ne 
pouvait  être  que  celui  de  BraiusparUiutn  cité  dans  les 
commentaires. 

Et,  d'ailleurs,  si  ^ro/us/Mn/tum- Breteuil  avait  pu  être 
la  capitale  des  Bellovaques,  assiégée  et  prise  par  César, 
00  serait  en  droit  de  s'étonner  qu'elle  n'eût  pas  reçu  un 
nouveau  nom,  conformément  à  l'usage,  et  il  faudrait 
chercher  dans  l'histoire  Tépoque  et  les  circonstances  où 
cette  ville  aurait  perdu  son  rang  et  ses  prérogatives  de 
capitale  pour  les  voir  transférés  à  Beauvais. 

11  serait  inutile  de  tenter  une  pareille  recherche,  et  il 
but  voir  dans  Bratuspantium,  Cœsaromagus,  Bellovacum 
et  Beautfaii,  une  seule  et  même  ville,  qui  était,  avant 
comme  après  la  conquête,  la  capitale  des  Bellovaques. 

Si  les  Bellovaques  avaient  enfermé  leurs  vieillards, 
leurs  femmes  et  leurs  trésors  à  ^ra/115/xin/ium-Breteuil, 
c'est-à-dire  sur  leur  frontière  et  à  la  merci  d'un  coup  de 
main,  surtout  quand  les  hommes  valides  étaient  absents, 
il  faut  avouer  qu'ils  auraient  été  bien  imprudents. 

Dans  ce  cas,  Divitiacus  ne  se  serait  pas  contenté  de 
menacer  la  frontière,  il  se  serait  rendu  maître  d'une 


3Si  CONGRÈS  ARCI1ÉOLOGIOU£  DE  FR1NG£. 

ville  sans  défense,  comme  César  le  fit  un  peu  plus  tard. 

Cette  hypothèse  est  donc  inadmissible. 

César,  entrant  par  une  marche  rapide  sur  les  terres  des 
Bellovaques,  alors  que  les  fuyards  n'avaient  pas  encore 
eu  le  temps  de  rentrer  dans  leurs  foyers,  assurait  la  sou- 
mission du  pays,  et,  en  attaquant  l'ennemi  dans  sa  plus 
forte  retraite,  il  atteignait  à  la  fois  les  vieillards,  les 
femmes,  les  enfants,  les  trésors,  les  armes,  en  an  mot, 
toutes  les  forces  du  pays.  C'était  sa  tactique  habituelle. 
Cette  retruite  ne  pouvait  donc  être  qu'au  cœur  du  pays, 
et  ce  qui  le  prouve,  c'est  que  Divitiacus  quitte  la  fron- 
tière où  il  était  en  observation,  pour  venir  vers  César, 
campé  devant  Bratuspantium.  Donc  Divitiacus  et  César 
étaient  à  une  assez  grande  distance  l'un  de  Tautre.  Si 
Bratuspantium  avait  été  à  Breteuil,  c'est-à-dire  à  la  fron- 
tière, Divitiacus  n'aurait  pas  eu  à  se  déplacer  pour  aller 
vers  César,  plaider  en  faveur  des  Bellovaques. 

Le  texte  latin  ne  s'expliquerait  pas  dans  l'hypothèse 
qui  placerait  Bratuspantium  à  Breteuil.  Il  se  comprend, 
au  contraire,  tout  naturellement  si  Bratuspantium  est  à 
Beauvuis. 

Il  sultit  eutin  d'observer  ce  qui  se  passe  chez  celui  qui 
90  défend,  et  chez  oolui  qui  attaque.  Le  premier  choisit  la 
retraite  lu  plus  forte  et  lu  plus  sûre,  autant  que  possible 
à  lubri  des  etiorts  de  IVnnemi.  C*est  ordinairement  la 
capitale  qui  n'uuit  ct^oiuiditions  au  premier  chef. 

Le  second,  nu  contraire,  (Kir  la  rapidité  de  sa  marche 
et  la  vigueur  de  ses  attaques,  cherche  à  frapper  son 
eunonù  au  cirur,  et  c'est  dans  sa  capitale  qu'on  lui  porte 
les  coui^  les  plus  retloutubles,  |virce  que  lÀ  sont  concen- 
triVs  les  fon*i*s  vixes  du  i^-iys. 

Ainsi  de\au-ii  en  iHrealor^,  amune  de  nos  jours,  où  un 
(H^uple  subil  geutvaleuieut  le  s<^rt  de  sa  capitale. 


XLIV*  SESSION,    A   SKM.fS.  ii.% 

Pour  nous,  le  texte  des  Commentaires  ù  la  main,  nous 
trouvons  dans  Bratuspanlium  la  capitale  des  Bellovaques, 
c'est-à-dire  Beauvais,  au  cœur  du  pays,  et  non  fireteuil, 
situé  sur  la  frontière. 

La  remise  de  six  cents  otages  et  des  armes  de  la  cité 
lâsuraienty  il  est  vrai,  la  pacification  du  territoire. 

Mais  César,  pouvant  effacer  jusqu'au  nom  d'un  peuple, 
Gt  preuve  de  modération  et  se  borna  à  changer  le  nom  de 
la  ville  soumise. 

En  agissant  de  la  sorte,  il  n'obéissait  point  à  un  vain 
ientiment  d'araour-propre,  ses  vues  étaient  plus  élevées. 
U  laissait  après  lui  un  témoignage  permanent  de  sa  clé- 
mence et  de  sa  force,  afin  d'inspirer  aux  autres  peuples  le 
respect  et  la  crainte  des  armes  romaines,  en  leur  montrant 
ce  qu'il  pouvait  en  coûter,  même  aux  plus  forts,  de 
prendre  les  armes  contre  lui.  Plus  l'exemple  était  haut, 
plus  il  devait  lui  être  profitable. 

U  tombe,  dès  lors,  sous  le  sens  commun,  que  ce  chan- 
gement de  nom  n'a  pu  être,  et  n'a  été  réellement  imposé 
qu'à  la  ville  vaincue,  en  qui  se  personnifiait  la  défaite  du 
peuple  entier,  et   Bratuspantium  est  devenu  Cxsaro- 

Personne  n'admettra,  d'ailleurs,  que  César  ait  eu  la 
pensée  de  conserver  le  nom  de  Bratuspantium  à  la  ville 
qui  représentait  la  puissance  de  ses  ennemis  vaincus,  et 
qu'il  ait  pu  aller  chercher  au  loin  une  ville  inconnue  et 
sans  importance,  pour  lui  donner  son  nom  :  ce  serait 
une  puérilité. 

Or  nous  savons  que  le  nom  de  Cxsaromagus  n'a  été 
connu  que  depuis  César;  que  plus  tard  il  a  été  remplacé 
par  celui  de  Beiiovacum,  et  que  ces  deux  noms  se  sont 
appliqués,  successivement,  à  la  ville  de  Beauvais. 

Nous  pouvons  donc  rigoureusement  conclure  que  Bra-- 

XUV*  SESSION.  45 


S26  CONGRÈS  ARGHÉOLOGIOXIE  DE  FRANGE. 

iuspantium  et  Beauvais  n'ont  fait  et  ne  font  qu'une  seule 
même  ville. 

Ces  changements  de  noms  sont  fréquents  dans  Thistoire 
et  sont  dus  à  des  causes  dififérentes  variant  à  Tinfini, 
mais  se  rapportant  cependant  le  plus  généralement  à  des 
faits  historiques  où  locaux  qu'il  serait  hors  do  propos 
d'étudier  ici. 

Essayons  maintenant  de  rechercher  les  raisons  qui  ont 
pu  porter  quelques  auteurs  à  placer  la  ville  de  Bratuspûn- 
iium  à  Breteuil-Vendeuil-Caply.  On  invoque  : 

L'existence  sur  ce  point  d'un  lieu  dit,  portant  le  nom 
de  Bratuspance  ; 

Des  restes  de  constructions  et  des  monnaies,  bijoux, 
vases,  etc.,  en  nombre  infini,  qui  enrichissent  aujourd'hui 
de  nombreuses  collections. 

Nous  dirons  peu  de  choses  touchant  les  noms  de  Bra* 
iuspantium  et  de  Bratuspance. 

Graves  conteste  même  l'existence  du  lieu  dit  Bratus- 
pance, et  son  opinion,  faisant  autorité  en  celte  matière, 
fait  tomber  l'argument  qui  s'appuie  sur  une  analogie  de 
noms. 

L'étymologie  est  certainement  la  même,  et,  selon  toute 
vraisemblance,  il  ne  faut  pas  chercher  dans  Bratuspantium 
autre  chose  qu'un  nom  formé  de  deux  mots  celtiques 
donnant  Tidée  de  faits  analogues  existant  dans  diverses 
localités. 

Ces  noms  portant  en  eux-mêmes  leur  signification, 
existent  dans  toutes  les  langues  et  ont  dû  exister  chei  les 
Celtes  et  les  Gaulois  comme  ils  existaient  chez  les  Romains. 
On  pourrait  voir  une  semblable  analogie  entre  Bibrax  et 
Dibracte. 

L'avancement  des  études  archéologiques  nous  fera  sans 
doute  encore  connaître  d'autres  localités  du  nom  de  Bra- 


XLIV'  SESSION,   A  SENLIS.  '±^1 

Impaniiumt  et,  alors,  la  question  qui  nous  occupe  sera 
singulièrement  simplifiée.  Je  laisse  à  d'autres  à  faire  ces 
études  philologiques. 

Mais  nous  étudierons  la  vraisemblance  de  la  seconde 
hypothèse  qui  s'appuie  sur  des  découvertes  d'antiquités, 
et  nous  verrons  s'il  est  possible  d'attribuer  à  ces  décou- 
vertes réelles  la  signification  qu'on  leur  a  donnée  jus- 
qu'ici. 

César,  après  avoir  reçu  les  otages,  et  s'être  fait  livrer 
toutes  les  armes  des  Bellovaques,  marche  contre  les 
Ambiani,  qui,  à  son  approche,  se  rendent  à  merci  (4). 
Ce  passage,  concis  et  énergique,  nous  montre  que  les 
Ambiani,  instruits  du  sort  que  les  Suessions  et  les  Bello- 
vaques venaient  de  subir,  n'ont  pas  jugé  à  propos  d'at- 
tendre l'arrivée  du  vainqueur,  dans  Samarobriva,  leur 
Capitale,  et  qu'ils  sont  venus  au-devant  de  lui  au  moment 
où  César  allait  envahir  leur  territoire. 

C'est  à  leur  frontière  du  midi  qu'en  apportant  leurs 
otages  et  leur  rançon,  ils  ont  donné  à  César  des  gages  de 
soumission  qui  ont  permis  à  ce  dernier  de  marcher  en 
sécurité  contre  les  Nerviens. 

L'abondance  et  la  yariété  des  découvertes  faites  à  Ven- 
deuil-Caply,  semblent  désigner  cette  localité  comme 
ayant  été  l'emplacement  où  s*est  faite  la  soumission  des 
Ambiani. 

Cet  événement  n'a  été  qu'un  fait  isolé  et  ne  suffirait 
peut-être  pas  à  expliquer  l'importance  des  constructions 
trouvées  dans  cette  localité. 

Mais,  si  nous  nous  rappelons  que  César,  pendant  ses 
campagnes  des  Gaules,  a,  plusieurs  fois,   envoyé  ses 

•A]  (Jui  se  suaque  omala,  sine  morS  dediderunt.  Comm. 
Liv.  III. 


^28      CONGRÈS  ARGHÉOLOGIOUE  DE  PRANGB. 

légions  en  quartiers  d*hiver  dans  la  Belgique,  nous 
recoQnattrons  que  Vendeuil-Caply,  sur  la  limite  des  Bello- 
vaques  et  des  Ambiani,  était  précisément  un  de  ces  quar- 
tiers d'hiver,  casirum  stativum  hiemale,  où  séjourna  Gras- 
sus,  et  nous  aurons  une  explication  toute  naturelle  du 
problème. 

Constructions,  armes,  bijoux,  médailles,  poteries,  etc., 
en  un  mot,  toutes  les  découvertes  faites  jusqu'à  ce  jour, 
nous  montreront  Vendeuil-Caply  comme  une  station 
purement  romaine. 

D'autre  part  les  restes  de  l'époque  romaine  sont  si  nom- 
.  breux  et  si  variés,  à  Beauvais,  qu'on  est  forcé  de  reconnaître 
dans  cette  ville  l'emplacement  d'une  ancienne  station 
romaine  très-considérable. 

Tout  d'abord  les  anciens  murs  de  la  cité  formant  un 
parallélogramme  irrégulier,  s'étendant  au  sud -ouest  sûr 
250  mètres  de  longueur;  au  sud-est  sur  360  mètres;  au 
nord-est  sur  260  mètres  et  au  nord-ouest  sur  400  mètres 
et  enfermant  une  superficie  de  10  hectares  40  ares,  déter- 
minant l'emplacement  du  castellum. 

Le  castellum  peut  donc,  sans  efforts,  être  considérécomme 
['oppidum  Bratuspaniium  des  Commentaires,  et  cette  iden- 
tification est  confirmée  par  les  nombreuses  découvertes 
faites  à  l'intérieur  et  hors  de  la  cité,  et  surtout  par  les 
voies  stratégiques  qui  rayonnent  dans  toutes  les  direc- 
tions. 

Si  on  passe  en  revue  les  inscriptions,  les  débris  de 
colonnes,  les  bas-reliefs,  les  sépultures,  de  nombreuses 
médailles  d'Auguste,  Néron,  Vespasien,  Trajan,  Hadrien, 
Antonin-le-Fieux,  Commode,  Posthume,  Dioclétien,  Lici- 
nius,  Luciile,  Marc-Aurèle,  Crispine,  Faustine  jeune, 
Macrinius,  Balbiniis,  Tétricus.  etc.,  les  vases  en  terre  et 
en  bronze,  les  armes,  les  bijoux,  les  mosaïques,  les  restes 


XLIY*  SESSION,   A   SENL18.  2i9 

d'no  bypocausle,  d'un  temple  consacré  à  Bacchus  et 
d'autres  monuments,  tout  atteste  que  l'ancien  emplace- 
ment de  la  ville  de  fieauvais  avait  une  importance  consi- 
dérable, et  que  rien  n'empêche  d'y  reconnaître  Voppidum 
Broiuipantium  de  César. 

Les  découvertes  faites  à  Vendeuil-Caply  ont  une  autre 
oripne,  et  s'expliquent  parfaitement  d'une  autre  manière, 
sans  qu'il  soit  besoin  de  faire  intervenir  Voppidum  Bra- 
tuipoHtium  des  Commentaires. 

La  rapidité  du  récit  témoigne  encore  que  César  n'a  Gait 

■ 

que  toucher  les  Ambiani  pour  se  diriger,  sans  rétard, 
contre  les  Nerviens;  et  la  situation  de  Vendeuil-Caply  se 
piéte  mieux  qu'aucune  autre  à  l'explication  de  cette 
marche  précipitée.  Cette  situation  rend  surtout  invrai- 
ionblable  la  marche  par  Samarobriva,  qui  aurait  allongé, 
iaos  oécessité,  un  parcours  que  César  tenait  au  contraire 
à  abréger  le  plus  possible. 

Depuis  la  construction  des  routes,  le  casirum  hiemate 
de  Vendeuil-Caply  était  devenu  une  station  militaire, 
une  fÊntiaiio  pour  les  légions  circulant  sur  les  voies 
romaines  : 

D'Amiens  à  l'Oise,  par  Saint-Just  et  Catenoy; 

De  Beauvais  à  Paillart. 

En  outre,  cette  station  se  trouvait  à  proximité  de  la 
maie  voie  d'Amiens  à  Beauvais,  par  Corraeille;  et  sa 
situation,  aux  confins  des  Bellovaques  et  des  Ambiani,  lui 
doonait  une  importance  exceptionnelle. 

Tous  ces  faits  justifient  pleinement,  ce  me  semble, 
qu'il  ne  faut  voir  à  Vendeuil-Caply  qu'une  station  pure- 
ment romaine,  et  qu'on  fait  violence  aux  faits  et  aux 
«iTénemeuts  ou  cherchant  à  donner  à  cette  localité  une  ori- 
iTiue  gauloise  par  sou  identification  avec  Bratuspantium. 

La  commission  de  la  carte  des  Gaules  a  fait  acte  de  trop 


230  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

grande  modestie,  en  évitant  de  se  prononcer  sur  rempla- 
cement de  Bratuspantium,  et  en  acceptant,  sans  discus- 
sion, la  dissertation  de  M.  l'abbé  Dévie,  qui  identifie  cet 
oppidum  avec  Vendeuil-Caply.  La  commission,  mieux 
que  tout  autre,  aurait  pu  faire  la  lumière  complète  sur 
cette  question. 

Elle  ne  Ta  pas  tenté. 

Je  l'essaie.  Puissé-je  avoir  réussi! 

Puissé-je  avoir  démontré  péremptoirement  : 

i®  Que  depuis  dix-neuf  siècles  on  a  accordé,  à  tort,  un 
crédit  sans  contrôle  au  récit  des  Rémois,  par  cela  seul  que 
ce  récit  est  relaté  dans  les  Gomhientaires; 

2®  Que  les  Rémois  avaient  un  intérêt  majeur  à  exagé- 
rer la  puissance  de  voisins  (les  Bellovaques  et  les  Nerviens) 
dont  ils  pouvaient  avoir  à  craindre  les  entreprises,  afin  de 
faire  anéantir  par  César  et  sans  danger  pour  eux-mêmes, 
la  puissance  de  ces  voisins  redoutés; 

3®  Que  César,  vainqueur,  n'avait  aucun  intérêt  à  recti- 
fier la  déclaration  des  Rémois; 

4*^  Que  les  Bellovaques  n'ont  jamais  été  en  état  de  lever 
cent  mille  hommes  capables  de  porter  les  armes; 

5°  Que  Bratuspantiumy  leur  oppidum,  doit  être  iden- 
tifié avec  Caesaromagus,  Bellovacum  et  Beauvais; 

6**  Que  cette  identification  est  prouvée  par  la  situation 
topographique  de  Beauvais,  au  centre  du  pays  ;  par  les 
restes  des  anciens  murs,  aussi  bien  que  par  les  décou- 
vertes nombreuses  qui  ont  été  faites  dans  la  ville,  de  mon- 
naies, armes,  bijoux,  poteries,  etc.,  attestant  l'importance 
de  cette  station  à  l'époque  romaine; 

7**  Que  cette  identification  résulte  surtout  de  la  com- 
vergence  d'un  grand  nombre  de  voies,  rayonnant  dans 
toutes  les  directions,  et  attestant  que  cette  station  était 
alors,  comme  elle  est  restée  depuis,  un  point  stratégique 


XLIT^  SESSION,   A  SENLIS.  â3l 

de  première  importance,  qui  assurait  la  soumission  d'un 
peuple  toujours  prêt  à  prendre  les  armes. 

8*  Que  l'oppidum  Bratuspantium  des  Commentaires  ne 
saurait  être  identifié  avec  Vendeuil-Gaply,  sous  le  pré- 
leite  qu'on  aurait  signalé  dans  cette  localité  un  lieu  dit 
Braiuipanee,  dont  l'existence  réelle  est  même  contestée 
par  Graves,  c'est-à-dire  par  le  savant  le  plus  compé- 
tent sur  cette  question  ; 

9^  Que  cette  identification  serait  combattue  par  la 
situation  topographique  et  à  la  frontière  de  Vendeuil- 
Caply; 

10"  Enfin  qu'elle  ne  saurait  résulter  davantage  des  nom- 
breuses découvertes  romaines  faites  dans  cette  dernière 
localité,  parce  qu'il  y  avait  là  un  caslrum  stativum  hiber- 
^M/eexpliquant  naturellement  la  présence  des  objets  décou- 
"^crts,  sans  qu'il  soit  nécessaire  d'en  faire,  contre  toute 
x'^aison  et  toute  évidence,  Yoppidum  Bratuspantium  meu- 
Uonné  par  César. 

Cette  étude  contenant  quelques  appréciations  nouvelles 
«ur  un  récit  et  des  faits  admis  sans  conteste  depuis  dix- 
^^uf  siècles,  sera  peut-être  considérée  comme  sacrilège 
par  ceux  qui   n'admettent  pas  qu'on  puisse  toucher  à 
i  arche  sainte,  ni  même  la  regarder  en  lace  ;  mais  peut- 
^Ire  aussi  aura-t-elle  la  bonne  forlune  d'obtenir  Tappro- 
bation  de  ceux  qui  pensent  que  la  discussion  peut  aborder 
tous  les  sujets,  et  que  nul  argument  ne  doit  être  écarté 
sans  examen. 
Mes  conclusions  sont-elles  suffisamment  justifiées? 
U  ne  m'appartient  pas  d'en  juger. 


La  lecture  du   précédent   mémoire  duune  lieu  à  un 
Change  d'observations  entre  sou  auteur  et  MM.  Ledain 


232  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRATICE. 

et  Palustre;  puis  la  parole  est  donnée  à  M.  l'abbé  Caudel*^ 
sur  la  16**  question  : 

Rechercher  le  lieu  de  la  bataille  de  César 

contre  les  Nerviens. 


Bataille  de  César  contre  les  Nerviens 
au  passage  de  la  Sambre. 

i""  EXPOSÉ  DU  SUJET. 

Le  sujet  que  nous  abordons  dans  cette  étude  est  un  des 
moins  connus  en  ce  qui  concerne  les  gestes  de  Jules  César 
dans  le  nord  de  la  Gaule.  Les  étincelants  et  immortels  cha- 
pitres du  deuxième  livre  ne  touchent  qu'à  l'action  pro- 
prement dite  et  nous  laissent  sur  les  faits  qui  Tont  précé- 
dée dans  une  assez  grande  incertitude.  Nous  savons 
seulement  que  César ,  après  avoir  marché  contre  les 
Ambiens,  venait  de  recevoir  leur  soumission,  qui  ne  se 
fit  pas  attendre,  et  qu'il  s'occupa  immédiatement  de  trou- 
ver les  Nerviens  pour  les  attaquer.  Après  tant  de  reddi- 
tions, il  semblait  chercher  des  adversaires  dignes  de  se 
mesurer  avec  Sa  Grandeur,  il  les  trouva.  Sa  rencontre 
avec  eux  sur  les  bords  de  la  Sambre  présente  certaine- 
ment un  des  épisodes  les  plus  émouvants  et  les  plus  dra- 
matiques de  toute  sa  campagne  dans  le  nord  de  la  Gaule; 
il  s'est  plu  à  le  raconter  longuement.  Tout  d'abord,  il 
nous  donne  une  grande  idée  de  ses  adversaires;  ils  ne 
permettent  aucun  accès  chez  eux  au  commerce  étranger; 
ils  rejettent  l'usage  du  vin  cl  des  autres  superfluités 
propres  à  énerver  les  i\mes  et  à  aflaiblir  les  courages; 
sauvages  et  intrépides,  ils  reprochent  aux  autres  Gaulois 


XLIT*  SB88I0N,  A  SkNLlS.  233 

de  B'étre  donnés  aux  Romains  et   d'avoir   abjuré  les 
intiques  vertus  de  leurs  pères;  ils  n'enverront  aucun 
député,  et  n'accepteront  aucune  condition.  Voilà  donc  les 
adversaires;  ils  sont  venus  du  Hainaut,  du  Brabant,  de  la 
Flandre  se  réunir  aux  Atrébates  et  aux  Yéromanduens 
(ceux  d'Arras  et  de  Saint-Quentin)  ;  ils  ont  peu  de  cavalerie, 
ils  en  négligent  l'usage,  mais  en  compensation  leur  infan- 
terie est  de  premier  ordre  et  fait  toute  leur  force;  ils  sont 
là  soixante  mille  hommes  armés;  le  reste  de  la  nation, 
Tieillards,  femmes  et  enfants  sont  restés  en  arrière,  abrités 
et  cachés  dans  les  marais  avec  le  gros  des  bagages.  Les 
Nerviens  occupent,  sur  la  rive  droite  de  la  Sambre, 
kB  collines  environnantes;  couvertes  de  bois,  ces  collines 
dérobent  leur  présence  et  leur  actioû  à  l'ennemi,  ils 
n'en .  laisseront  apercevoir  que  ce  qu'ils  voudront;  ils 
sont  à  deux  cents  pas  de  la  rivière  qui  mesure,  en  cet 
endroit,  une  profondeur  de  trois  pieds.  Leur  front  de 
bataille  parait  s'être  développé  sur  un  espace  de  deux 
kilomètres;  des  espions  sont  venus  les  prévenir  de  l'arri- 
vée des  Romains  et  de  Tordre  de  leur  marche;  ceux-ci 
viennent  du  pays  des  Ambiens.  Chaque  légion  devant 
tfriver  séparée  des  autres  par  ses  bagages,  les  Belges  vont 
i'eObrcer  de  les  battre  ainsi  Tune  après  l'autre  à  la  faveur 
de  cet  isolement. 

â""   LES  ITINÉRAIRES. 

Ici  se  présente  naturellement  la  question  des  itinéraires. 
Une  certaine  opinion  peut-être  un  peu  exclusive,  fait  par- 
tir César  de  Vermand,  ou  d'Augusta  Veromauduorum, 
^qui  revient,  ou  à  peu  près,  au  même,  et  le  fait  arriver 
^ur  le  plateau  de  Catillon-sur-Sunihrc,  en  s'appuyant  sur 
^'Oise,  dont  il  eurveillc  et  coiuiuaudc  tous  les  abords 
comme  le  rempart,  qui,  naturellement,  doit  à  la  ibis  pro- 


234       CONGRÈS  AROUÉOLOGigUK  D&  FRANCE. 

léger  et  «ouvrir  sa  marche.  Une  autre  opinion  le  fait  arri 
ver  directement  de  Monididier,  qui  pourrait  bien  éti 
Bratuspantium ,  par  Péronne,  forteresse  gauloise  qu' 
laisse  à  gauche,  Gatelet,  le  Catelet,  Maretz ,  Saint-Souple 
Mazinghem  ;  c'est  en  effet  le  trajet  le  plus  court  et  oeli 
qui  explique  le  mieux  cette  marche  rapide  de  trois  jours 
travers  les  frontières  des  Nerviens  et  dans  le  payn  ( 
Somme  qu'il  quitte  pour  courir  à  d'autres  ennemis. 

Enfin,  une  troisième  opinion  le  fait  remonter  enta 
plus  au  nord,  en  plein  pays  nervien,  et  aller  présenter 
bataille  à  Hautmont.  Cette  opinion  est  sans  doute  la  moii 
probable  et  la  moins  autorisée;  il  n'est  pas  possible  qi 
César  ait  pu  faire  en  trois  jours  cette  longue  route,  et  c 
n'explique  pus  qu'il  ait  été  tout  d'abord  se  jeter  au  mili< 
de  ses  ennemis,  car  cet  itinéraire  le  fait  marcher  en  plei 
pays  belge.  Nous  savons  bien  qu'on  peut  faire  la  mén 
objection  à  la  première  opinion  qui  fait  traverser  à  Céa 
une  partie  du  pays  des  Véroinauduens,  ses  ennemis  égal 
ment;  mais  cette  marche  a  au  moins  l'avantage  d'ét 
couverte  à  gauche  par  un  pays  allié,  et  de  s'appuyer 
droite  sur  l'Oise,  dont  il  est  facile  d*assurer  le  coun 
d'autant  plus  que  ce  qu'on  peut  appeler  l'armée  active  d 
Véromanduens  est  allé  se  joindre  aux  confédérés  ( 
l'autre  côté  de  la  Sambre. 

Appelé  ù  discuter  sur  les  lieux  les  deux  derniers  tracé 
nous  avouons,  Messieurs,  qu'il  est  difficile  de  se  prononce] 
c'est  donc  avec  une  grande  sincérité  que  nous  allons  disci 
ter  celui  qui  nous  a  paru  le  plus  admissible,  sans  aucu 
parti  pris  d'ailleurs  contre  l'autre;  nous  serions  très-hei 
reux  qu'une  discussion  s'élevAt  sur  ce  point,  et  que  I 
Société  des  Antiquaires  du  Picardie  relevât  le  gant  qi 
nous  lui  jetons,  non  pas  pour  la  provoquer  à  un  du 
d'honneur,  ni   même  d 'amour-propre,  mais  aux  lutU 


XUV  6BSS10N,   A  SKNUS.  335 

pcifiqueset  frateraelles  d'où  naisseot  toujours  la  lumière 
dios  les  choses,  et  Testime  dans  les  personnes. 

On  ne  sera  donc  pas  étonné  qu'appartenant  à  l'Oise, 
nous  nous  arrêtions  de  préférence  aux  lieux  qui  nous 
sont  plus  connus,  plus  familiers,  et  d'une  exploration 
plus  facile. 

Nous  pensons  donc  que  César,  quittant  le  pays  de  Péronne 
oa  de  Montdidier,  où  il  vient  de  recevoir  la  reddition  des 
Ambiens,  se  dirige  droit  sur  Yermand  ou  Auguste  Yeroman- 
daonim,  pour  s'appuyer  là  sur  un  point  solide,  et  faire  de 
cetoppide,  à  la  fois,  un  point  d'observation,  un  lieu  de  ravi- 
taillement et  d'équipement,  et  même  de  refuge  en  cas  de 
défaite,  à  l'abri  de  toute  entreprise  hostile.  Ses  trois  jours 
de  marche  à  travers  le  pays  nervien  commenceraient  à  son 
départ  de  Yermand,  et  sa  marche  s'appuyant  sur  la  rive 
(boite  de  l'Oise,  de  manière  à  serrer  le  plus  près  possible 
kpays  ennemi,  expliquerait  facilement  cette  expression. 
«  Per  eorum  fines  ».  De  Péronne  à  Yermand  il  aurait 
soÎTi  la  route  actuelle  de  Péronne  à  Saint-Quentin,  passant 
à  Estrées- en -Chaussée.  Mais  dira-t-on,  pourquoi  ce 
détour?  nous  répondrons,  c'est  une  affaire  de  quelques 
lieues,  mais  qui  donne  à  César  Timmense  avantage  de 
s'appuyer  sur  une  grande  rivière  et  d'en  profiter  pour  ses 
ooDTois,  selon  la  tactique  romaine,  avantage  que  l'autre 
parcours  ne  lui  procurait  pas.  Pour  peu  qu'il  se  rende 
QUitredes  hauteurs  qui  dominent  la  rivière,  et  qu'il 
oiettesa  première  ligne  d'avant-garde  à  l'abri  d'une  sur- 
prise des  Nerviens,  surprise  qui  sera  de  plus  en  plus  pos- 
sible à  mesure  qu'il  s'avancera  vers  la  Sambre,  il  peut 
Qurther  en  sûreté.  Cet  itinéraire  avait  l'avantage  d'être 
court  et  sûr  à  la  fuis.  Pour  qui  connaît  le  pays  il  est  facile 
de  comprendre  qu'en  s'attachaut  à  l'Oise,  sa  marche  sur  les 
hauteurs  de  la  rive  droite  était  parfaitement  couverte,  et 


236  GONoaÈs  archéologique  de  frange. 

qu'il  avait  encore  la  ressource  du  delta  que  forme  cette 
rivière  jusqu'à  Guise  pour  y  opérer  le  passage  de  ses  éclai- 
reurs,  de  ses  bestiaux,  et  même  de  quelques  troupes  par 
les  gués  de  Macquigny  et  de  Yadencourt.  Voici  donc  l'iti- 
néraire que  nous  proposons  :  De  Vermand  ou  d'Augusia 
Veromanduorum  à  Marcy, 

Césaravait  faitdeVermand  un  camp  stationnaire ;cirs/rtim 
s/a/ivtim.  Au-dessousde  l'oppide,  le  camp  avait  prii  les  vastes 
proportions  d'un  établissement  destiné  à  réunir  aux  disposi- 
tions militaires  toutes  celles  qui  sont  nécessaires  à  un  séjour 
prolongé  et  surtout  à  la  concentration  de  toutes  les  forces 
actives  qui  pourraient  être  mises  en  œuvre  par  le  général. 

Vermand  était  donc  un  établissement  de  premier  ordre, 
une  véritable  ville  plutôt  qu'un  camp.  Les  monuments 
trouvés  en  ce  lieu  attestent  d'ailleurs  Tépoque  et  l'intérêt 
de  sa  création.  Le  camp  permanent  de  Vermand,  ana- 
logue par  son  assiette  et  par  son  étendue  à  celui  de  Namp- 
cel,  près  Noyon,  Netnetocenna,  suivant  l'opinion  d'un 
savant  des  plus  sagaces,  Tabbé  Lebeuf,  était  alors  entouré 
de  peuples  soumis  tels  que  les  Suessions,  les  Bellovaques 
et  les  Ambiens  ;  César  était  donc  là  chez  lui,  bien  que 
l'ennemi  ne  fût  pas  loin. 

L'enceinte  de  Vermand  comprenait  dans  sa  vaste  éten- 
due :  Villa  Schalarum,  Villecholles  ;  Villévéque ,  villa 
Vehitulorum  et  Marteville,  Martis  villa. 

On  nous  pardonnera  celte  petite  digression  d'arrêt  sur 
Vermand  :  nous  avons  voulu  attacher  Tœil  du  lecteur  sur 
ce  point,  car  il  est  comme  le  centre  de  toutes  les  opéra- 
tions militaires  qui  vont  nous  occuper. 

Nous  supposons  donc  que  César,  parti  de  Vermand, 
passe  par  Marcy.  qui  est  sa  première  étape  dans  le  chemin 
que  nous  allons  parcourir.  C'est  là  seulement,  en  effet, 
qu'on  trouve  les  premières  traces  de  son  passage.  A  Marcy 


XUT*  SESSION,   A  SENLIS.  337 

il  a  existé,  au  temps  de  César,  une  chaussée  dont  il  est 
probable  qu'après  de  Douvelles  études  on  retrouvera  les 
traces,  mais  dont  on  ne  possède  aujourd'hui  rien  de  plus 
qu'an  faible  tronçon.  Nous  trouvons  dans  l'historien  Dora 
Grenier,  p.  492,  édition  in-4**,  publiée  par  la  Société  des 
Antiquaires  de  Picardie  :  a  M.  l'abbé  Peitavy  pense  que 
1*00  peut  ajouter  à  la  chaussée  de  Saint-Quentin  à  Thé- 
rouanne,   une  seconde  branche  dont  l'abbé  Bélay  n'a 
point  parlé  et  qui  conduisait  à  Guise.  Partant  de  Saint- 
Quentin,  elle  traversait  le  territoire  d'Harly,  en  passant 
près  d'une  croix  qui  est  nommée  dans  un  titre  de  l'an  1322 
ea  laveur  de  la  trésorerie  de  la  collégiale  de  Saint-Quen- 
tin: la  Cmix  BeaurCauchie. 

•  A  la  sortie  de  Marcy ,  il  y  en  a  un  très-grand  et  très-beau 
morceau,  large,  bombé  et  gravelé  comme  les  anciennes 
voies;  mais  elle  n'est  pas  continue  ainsi  jusqu'à  Guise.  » 
Cette  dernière  assertion  n'est  pas  exacte,  car  on  a  trouvé 
te  traces  de  cette- voie  se  dirigeant  vers  Guise,  à  Macqui- 
goy,  où  elle  franchissait  l'Oise  à  gué  pour  passer  sur  la 
nve  gauche.  Ce  fragment  de  voie  de  Macquigny  à  Guise 
PMsail  à  la  ferme  de  Gouvron  et  à  celle  de  la  Motte.  César 
a  dû  s'en  servir  pour  effectuer  le  passage  de  ses  troupes 
fu'il  destinait  ou  à  occuper  les  différents  points  d'obser- 
ution  de  ce  côté  de  l'Oise,  comme  Croix  et  les  hauteurs 
<lominant  le  gué  de  Vadencourt,  ou  pour  aller  par  Verly 
et  Ribeauville  surveiller  la  partie  du  pays  de  Sambre  où 
^  ae  devait  pas  conduire  le  gros  de  ses  légions. 

Cette  route  de  César  côtoyant  l'Oise  s'étendrait  donc 
^  Harcy  à  Beruot,  de  Bernot  à  Hautcviile  et  de  Uau- 
teville  au  gué  de  Macquigny,  ou  par  Noyai,  Loug- 
^lup  et  Vadencourt,  en  suivant  la  rive  droite  de  la 
rivière. 
Voilà  donc  deux  directions  indiquées  et  probables: 


238  G0.N6RÉS  ARCnÉOLOOlQUE  DE  FRANGE. 

Tune  côtoyant  l'Oise,  rive  droite,  de  Marcy  à  Yadencourt,  et 
Tautre,  suivant  les  hauteurs  de  la  rive  gauche  de  Marcy  à 
Guise  par  le  gué  de  Macquigny. 

Il  en  est  une  troisième  que  César  a  pu  suivre  pour 
envelopper  complètement  tous  les  abords  de  l'Oise,  et 
servir  aussi  largement-  que  possible  ses  approvisionne- 
ments; c*est  la  route  qui  s*étendrait  de  Auguita  Verùnum- 
duorutn  à  Bernoville,  Aisonville  et  le  pays  d'Étaves,  Sta- 
hula;  c'est  ce  qu'on  pourrait  appeler  le  chemin  d'en  haut, 
rive  droite;  celui  qui  le  rapproche  le  plus  directement  du 
point  d'attaque. 

Ce  fut  à  Étaves,  aujourd'hui  l'une  des  communes  du 
canton  Je  Bohaiu  que  César  plaça  l'hébergement  qui 
portait  encore  au  xii*  siècle  le  nom  àeStabula,  les  ÉiaUa, 
d'après  un  acte  de  donation  faite  à  l'abbaye  voisine  d'Hom- 
blières  par  un  seigneur  nommé  Robert  d'Étaves  et  qui  se 
désignait  par  Bobertus  de  Stabulis.  Étaves  se  trouve  flan- 
qué de  deux  hameaux,  Bosquiaux  et  £pinoy,  £aêcum  et 
Epinetum.  C'est  assez  dire  que  ces  parages  couverts  de 
forêts  à  une  grande  distance  étaient  également  favorables 
à  la  pâture  des  bestiaux  ou  à  la  protection  des  animaux 
malades  ou  en  gésine. 

César  ne  dut  pas  négliger  cet  avantage  ;  il  n'existe  main- 
tenant sur  l'emplacement  d*Ëtaves  aucune  construction  ro- 
maine, mais  en  remuant  le  sol  on  y  a  souvent  trouvé  des  me- 
nues pièces  de  monnaie  romaine  de  l'époque  de  la  conquête. 

Pareilles  trouvailles  ont  été  faites  au-dessus  du  terri- 
toire d'Étaves  à  Bouguincamp,  camp  à  bestiaux.  Boum 
Campus,  A  l'est  de  ce  hameau,  situé  à  douze  cents  mètres 
dans  la  direction  d'Étaves,  on  a  rencontré  une  fosse  ayant 
vingt-cinq  mètres  de  diamètre,  nommé  le  Rond-de-Bou- 
guincamp.  Au  sud  est  une  enceinte  d'assez  grande  dimen- 
sion s'étendant  vers  Étaves. 


XLIT*  SESSION,   A  SENLIS.  33Çl 

Cette  enceinte  est  fermée  par  uu  murgier  fait  de  moel- 
lons do  craie,  dont  une  grande  partie  subsiste  encore 
aujourd'hui,  le  reste  est  dégradé.  Ce  murgier  dominait 
l'enclos  en  plusieurs  points;  chaque  matin  les  bouviers 
ouvraient  la  porte  de  l'enceinte,  et  les  animaux  pressés 
par  l'appétit  s'élançaient  vers  la  forêt,  qui  s'étendait 
devant  eux.  La  portion  destinée  au  pâturage  était  entou- 
rée de  haies  ou  de  perches  placées  horizontalement  ;  ce 
mode  de  fermeture  est  encore  presque  le  seul  usité  dans 
le  pays. 

Cest  probablement  par  Bernoville,  Aisonville,  Étaves 
(IM  César  arriva  sur  le  lieu  des  opérations  définitives. 
Pour  envelopper  la  rive  gauche  d(f  la  Sambre  un  peu  plus 
haat,  il  dut  s'assurer  le  parcours  de  Grougis  à  Mennevret, 
de  Mennevret  à  Ribeauville,  et  de  ce  dernier  point  à 
Muinghien.  Cet  enveloppement  s'étendrait  donc  pour 
être  complet  et  donner  une  juste  idée  du  front  de  bataille 
du  côté  des  Romains;  de  Catillon  sur  Sambre  à  Mazinghien, 
ikoDtdù  tenir  toutes  ces  hauteurs  dont  la  plus  dominante 
en  Catillon.  C'est  là  que  César  établit  son  camp,  comme 
l'atteste  encore  la  forme  étrange  qu'a  conservé  le  village 
eclael;  il  semblerait  que  le  camp  romain  s'est  converti 
tout  doucement  à  des  nouveaux  usages,  en  Classant  à  de 
noQTeaux  maîtres,  mais  qu'il  a  conservé  sa  conformation 
romaine;  il  figure  exactement  un  camp  :  grande  ruc^ 
transversale,  dans  le  sens  parallèle  à  la  rivière  à  laquelle 
lotissent  de  chaque  côté,  par  lignes  droites,  dix  et 
Dtéme  douze  petites  rues,  qui  représentent  les  différents 
<|uartiers  formés  par  les  cohortes  en  campement. 

iKîpuis  notre  visite,  nous  avons  appris  qu'un  lieu  voi- 
sin du  champ  de  bataille,  Bazuei  (Basilica),  avait  été  à 
l'époque  romaine  le  siège  d'un  établissement  romain 
i^ec  murs,  escaliers  souterrains;  nous  y  reconnaissons  le 


240  COxNGRÂS  ARCnÊOLOOIQUE  PE  FRANCE. 

séjour  du  chef  militaire,  qui  séjourna  sur  remplacement 
même  des  opérations.  Cet  établissement  était  destiné  à 
prémunir  Tarmée  romaine  contre  un  retour  offensif  de  la 
part  des  Nervions. 

Par  où  César  avait-il  abordé  définitivement  les  hau- 
teurs de  Catillon?  Il  est  bien  difficile  d'éclaircir  ce  point; 
ce  fut  à  travers  un  pays  très-embarrassé  de  baies  et  de 
terrains  marécageux  comme  il  est  encore  en  grande  partie, 
probablement  par  la  vallée  Mul&tre,  où  les  bétes  de  trait 
seulement  pouvaient  circuler,  et  par  tous  les  points  qu'il 
trouva  praticables ,  en  développant  une  assez  grande  ligne 
de  troupes  et  d'expédients,  qu'il  arriva,  comme  il  put,  au 
plateau  de  Catillon,  où*  il  fixa  son  camp.  Quelques-uns 
ont  prétendu  qu'il  avait  accédé  à  la  Sambre  par  les  terri- 
toires de  Yassigny,  de  Ribeauville  et  de  Ribeaueourt,  d'où 
l'on  arrive  en  quelques  instants  à  Mazinghien ,  lieu  pro- 
bable de  la  bataille. 

Nous  pensons,  d'après  un  examen  très-détaillé  des  lieux, 
que  les  gros  de  l'armée  dut  déboucher  plus  haut  sur  la 
gauche,  entre  la  Louvière  et  Catillon,  et  que  c'est  dans 
les  plaines  qui  s'étendent  entre  ces  deux  localités,  en  s'in- 
clinant  doucement  vers  la  Sambre,  qu^il  faut  placer  l'ac- 
tion. Le  lien  du  passage  et  par  conséquent  le  vrai  théâtre 
de  cette  lutte  formidable  seraient  au  point  qui  sépare  la 
^  butte  de  Catillon  du  moulin  de  Briques  (lises  Brige),  ce 
qui  n'empêcherait  pas  que  l'action  complète  n'ait  été 
engagée  sur  une  étendue  de  deux  kilomètres  au  moins 
sur  les  deux  bords  :  de  Catillon  à  la  Louvière  et  même  à 
Mazinghien,  du  côté  des  Romains;  de  Bois-l'Abbaye,  le 
Moulin  à  la  grande  route  actuelle  de  Landrecies,  du  côté 
des  Nerviens. 

Du  reste,  il  est  temps  de  laisser  parler  César  : 

«  £n  arrivant  près  de  l'ennemi,  César  avait,  selon  son 


XLIT*  SESSION,    A  SENLIS.  241 

usage,  rapproché  les  six  légions  et  placé  tous  les 
bagages  sur  les  derrières  de  l'armée  ;  les  deux  légiom 
DouTellement  levées  fermaient  la  marche  et  gardaient 
les  convois.  Nos  cavaliers  passèrent  le  fleuve  avec  les 
frondeurs  et  les  archers,  et  engagèrent  un  combat  avec 
la  cavalerie  des  ennemis.  Ceux-ci  cédaient  d'abord,  se 
retiraient  dans  le  bois,  puis  revenaient  à  la  charge  ;  mais 
les  nôtres  ne  les  poursuivaient  point  au  delà  de  l'espace 
qui  était  découvert.  Cependant  les  six  légions  qui  étaient 
arrivées  les  premières  tracèrent  l'enceinte  du  camp  et 
se  mirent  à  le  fortifier.  Dès  que  les  ennemis  cachés 
dans  le  bois  aperçurent  les  premiers  bagages  (c'était  le 
moment  qu'ils  avaient  fixé  pour  l'attaque),  ils  sortirent 
dans  l'ordre  où  ils  s'étaient  rangés,  s'élancèrent  avec 
toutes  leurs  troupes,  tombèrent  sur  notre  cavalerie 
qu'ils  n'eurent  pas  de  peine  à  renverser,  et  coururent 
vers  le  fleuve  avec  une  si  incroyable  vitesse,  qu'ils  seni- 
UaJent  être  au  même  instant  dans  le  bois,  au  milieu 
de  la  rivière  et  sur  nos  bras.  On  les  vit  avec  la  même 
promptitude  attaquer  notre  colline,  notre  camp  et  les 
travailleurs  occupés  à  le  retrancher.  0 
C'est  là  ce  qu'on  pourrait  appeler  la  première  action; 
lie  n'avait  pas  été  favorable  aux  Romains.  On  a  reproché 
vec  raison  à  César  de  s'être  laissé  surprendre,  ayant 
tant  de  cavalerie  et  de  troupes  légères.  Il  est  vrai  que 
»  cavalerie  et  ses  troupes  légères  avaient  passé  la  Sambre, 
uuis  du  lieu  où  il  était,  il  s'apercevait  qu'elles  étaient 
«irrétées  à  cent  cinquante  toises  de  lui,  à  la  lisière  de  la 
for^:  il  devait  donc,  ou  tenir  une  partie  de  ses  troupes 
^us  les  armes,  ou  attendre  que  ses  coureurs  eussent 
traversé  la  furet  et  éclairé  le  pays.  Ces  réflexions  sont  de 
.Napoléiin.  Les  Commentaires  continuent  :  «  César  avait 
«  tuut  à  (aire  à  la  fois;  il  fallait  déployer  l'étendard  qui 

XUV*  SESSION.  10 


242  CONGRES  ARGHÉOLOGIQUE  DE   FR^GE. 

a  donnait  le  signal  de  courir  aux  annes,  faire  sonner 
a  les  trompettes,  rappeler  les  soldats  occupés  aux  tra- 
«  vaux  du  camp  et  rassembler  ceux  qui  s'étaient  écartés 
a  pour  ramasser  des  fascioes,  ranger  l'armée  en  bataille, 
«  haranguer  les  troupes  et  donner  le  mot  d'ordre  :  le 
a  peu  de  temps  et  la  présence  de  l'ennemi  victorieux 
«  l'empêchaient  de  tout  faire.  Deux  choses  pourvurent  à 
«  cet  embarras  :  Texpérience  et  l'habileté  des  soldats  qui, 
«  instruits  ipar  tant  de  combats ,  n'étaient  pas  moins 
c  capables  de  se  tracer  eux-mêmes  leur  conduite  que  de 
a  l'apprendre  des  autres;  et  ensuite  près  de  chaque  légion 
c  la  présence  des  lieutenants  à  qui  César  avait  défendu  de 
«  s'éloigner  avant  que  les  travaux  du  camp  fussent  ache- 
c  vés.  Chacun  d'eux  pressé  par  l'ennemi  n'attendait  point 
c  les  ordres  de  César  et  prenait  sur  lui  de  faire  ce  qu'il 
«  jugeait  convenable. 

c  Après  avoir  pourvu  au  plus  nécessaire,  Géear  courut 
«  haranguer  les  troupes  que  le  hasard  lui  présentait  et 
«  arriva  à  la  dixième  légion.  Pour  toute  harangue  il  lui  dit 
«  de  se  rappeler  son  ancienne  valeur,  de  ne  point  se  trou- 
a  hier,  de  soutenir  avec  fermeté  le  choc  de  ses  ennemis, 
c  Comme  ceux-ci  étaient  à  portée  du  trait,  il  donna  le 
a  signal  du  combat  et  se  porta  plus  loin  pour  faire  les 
fit  mêmes  exhortations  ;  l'action  était  déjà  engagée.  L'at- 
a  taque  avait  été  si  brusque  et  l'ennemi  si  ardent  à  com- 
«  battre,  qu'on  n'eut  pas  le  temps  de  revêtir  les  insignes 
«  des  grades,  ni  de  mettre  les  casques,  ni  d'ôter  aux  bou- 
«  cliers  leurs  enveloppes.  Chacun  revenant  des  travaux, 
a  se  plaça  au  hasard  sous  les  premières  enseignes  qu'il 
a  aperçut  pour  ne  point  perdre  de  temps  à  chercher  les 
a  siennes. 

et  Dans  cette  nécessité  pressante,  l'armée  s'était  rangée 
c  selon  la  nature  du  terrain  et  la  pente  de  la  colline 


XLIY*  SESSION,   A  SENUS.  2i3 

<  plutôt  que  de  suivre  les  règles  de  l'art  militaire.  Les 
4  iéfoons  se  défendaient  chacune  de  son  côté,  séparées  les 
«  unes  des  autres  par  ces  haies  épaisses  qui,  comme  nous 
«l'avons  dit,  interceptaient  la  vue;  on  ne  pouvait  ni 
f  envoyer  des  renforts  où  il  en  fallait,  ni  pourvoir  à 
tœqui  était  nécessaire  sur  chaque  point,  ni  conserver 
«  l'unité  du  commandement.  Cette  confusion  produisit 
«  des  accidents  et  des  fortunes  diverses,  i 

Nous  sommes  au  moment  le  plus  émouvant  et  le  plus 
terrible  de  cette  lutte  formidable.  La  neuvième  et  la 
dixième  légion  forment  l'aile  gauche  romaine,  elles  ont 
m  lace  d'elles  les  Atrébates;  la  onzième  et  la  huitième 
looten  face  des  Yeromanduens;  à  l'aile  droite  sont  la 
domième  et  la  septième,  à  peu  de  distance  l'une  de  l'autre. 
Tous  les  Merviens,  conduits  en  colonne  serrée  par  Boduo- 
gnat,  leur  chef,  se  portent  sur  ce  point  :  les  uns  enve- 
loppent nos  légions  par  le  flanc  laissé  à  découvert  par  la 
marche  en  avant  de  la  douzième  et  de  la  septième  légion  ; 
lei  autres  gagnent  la  partie  la  plus  élevée  du  camp.  Lais- 
sons encore  parler  César. 
«  En  ce  moment,  notre  infanterie  et  notre  cavalerie 
légère,  qui  avaient  été  repoussées  ensemble  par  le  pre- 
mier choc  des  ennemis,  les  rencontrèrent  de  front  en 
revenant  au  camp  et  s'enfuirent  d'un  autre  côté.  Les 
valets  de  l'armée,  qui,  de  la  porte  Décumane  et  du 
haut  de  la  colline  avaient  vu  les  nôtres  traverser  le 
Qeuve  en  vainqueurs,  étaient  sortis  pour  piller,  lors- 
qu'en  se  retournant  ils  aperçurent  l'ennemi  dans  notre 
camp;  ils  prirent  précipitamment  la  fuite.  En  même 
temps,  on  entendait  les  cris  des  conducteurs  de  bagages 
qui,  tout  effrayés,  couraient  de  côté  et  d'autre.  A  ce 
spectacle,  les  cavaliers  de  Trêves,  si  renommés  chez  les 
iiaulois  pour  leur  valeur,  et  que  leur  cité  avait  envoyés 


244  CONGRÈS  AROHÉOL0610UE  DE  VRANGE. 

«  à  César  comme  auxiliaires,  voyant  notre  camp  rempli 
c  d'ennemis,  nos  légions  pressées  et  presque  enveloppées, 
c  les  valets,  les  cavaliers,  les  frondeurs,  les  Numides 
9  dispersés,  fuyant  de  toutes  parts,  crurent  que  tout  était 
a  perdu,  reprirent  la  route  de  leur  pays  et  publièrent  la 
«  défaite  entière  des  Romains,  la  prise  de  leur  camp  et  de 
«  leurs  bagages. 

«  César,  après  avoir  exhorté  la  dixième  légion,  se 
a  porte  à  l'aile  droite;  il  trouva  les  troupes  vivement 
«  pressées,  toutes  les  enseignes  rassemblées  au  même 
«  endroit,  les  soldats  de  la  douzième  légion  entassés, 
«  s'embarrassent  l'un  l'autre  pour  combattre  :  tous  les 
c  centurions  de  la  quatrième  cohorte  avaient  péri;  le  porte- 
«  enseigne  était  mort,  le  drapeau  perdu,  tous  les  enseignes 
a  des  autres  cohortes  étaient  blessés  ou  tués;  de  ce  nombre 
c  le  principal,  F.  Sexticius  Baculus,  d'une  bravoure 
c  remarquable,  couvert  de  tant  de  blessures  qu'il  ne  pou- 
a  vait  se  soutenir;  le  reste  était  découragé,  i 

César  convient  lui-même  que  les  choses  étaient  pour 
les  Romains  dans  le  plus  mauvais  état,  et  cependant 
l'ennemi  arrivait  toujours  par  masses  pressées,  toute  l'ar- 
mée romaine  est  entreprise.  C'est  alors  que  César  arra- 
chant à  un  soldat  de  l 'arrière-garde  son  bouclier,  se  porte 
en  avant,  app^^lic  les  centurions  par  leurs  noms,  exhorte 
tous  les  soldats-,  fait  porter  les  enseignes  en  avant,  et 
desserrer  les  rangs  pour  qu'on  puisse  plus  facilement  se 
servir  de  Tépêe.  Son  arrivée  rend  l'espoir  aux  soldats  et 
relève  leur  coura(;c.  Cliacun  veut,  sous  les  yeux  du  géné- 
ral, faire  preuve  de  zèle  dans  cette  extrémité,  et  l'on  par- 
vient à  ralentir  un  peu  l'impétuosité  de  l'ennemi. 

a  César  remarquant  que  la  septième  légion,  placée 
f  prî»8  de  li\,  était  aussi  sern'Hî  de  près,  avertit  les  tri- 
a  buns  militaires  de  rapprocher   peu  à  peu  les   deux 


XLIY*  SESSION,  A  SENLIS.  245 

«  légions ,  afin  qu'elles  puissent  unir  leurs  forces.  De 
t  cette  manière,  elles  se  prêtaient  un  mutuel  secours,  et, 
I  ne  craignant  plus  d'être  enveloppées,  elles  commencèrent 

•  à  montrer  plus  d'audace  et  de  courage.  Cependant  les 
I  deux  légions  d'arrière-garde,  qui  escortaient  le  bagage, 

•  accoururent  à  la  nouvelle  du  combat  et  se  montrèrent 
t  aux  ennemis  sur  le  haut  de  la  colline.  De  son  côté 
I  T.  Labiénus,  qui  avait  forcé  leur  camp  et  qui  décou- 

•  vrait  de  la  hauteur  ce  qui  se  passait  dans  le  nôtre, 

•  eofoie  la  dixième  légion  pour  nous  secourir;  celle-ci 

•  comprenant,  par  la  fuite  des  cavaliers  et  des  valets,  que 
t  le  camp,  les  légions  et  le  général  étaient  en  péril,  pré- 
t  dpita  sa  marche,  i 

Cette  arrivée  de  la  fameuse  dixième  légion  changea  tel- 
lement la  face  des  choses  que  ceux  mêmes  des  Romains  dont 
les  blessures  avaient  épuisé  les  forces,  s'appuyant  sur 
leurs  boucliers,  recommençaient  le  combat.  L'ennemi, 
frappé  de  terreur  par  ce  retour  soudain,  a^mmence  à 
hésiter  et  à  reculer;  mais,  dans  son  dernier  espoir,  il 
déploie  encore  un  courage  admirable;  debout  sur  les 
r;idaTres  amoncelés  des  siens,  il  combat  jusqu'au  der- 
nier. «Il  n'y  avait  plus  à  s*étonner,  dit  le  vainqueur  lui- 

■  même,  que  des  hommes  si  intrépides  eussent  osé  tra- 

■  verser  une  large  rivière,  gravir  des  bords  escarpés  et 

■  combattre  dans  une  position  désavantageuse,  difticultés 
<  qu'avait  aplanies  la  grandeur  de  leur  courage,  i 

Après  cette  bataille,  ajoute  encore  César,  où  la  race  des 
Nerviens  fut  presque  entièrement  anéantie,  les  vieillards 
enfoyèrent  des  députés.    «  Rappelant  les  malheurs  de 

•  leur  pays,  ils  dirent  que  le  nombre  de  leurs  sénateurs 
^  se  trouvait  réduit  de  six  cents  à  trois  seulement,  et  que 
«  'le  soixante  mille  hommes  en  état  de  porter  les  armes, 
«  cinq  cents  à  peine  étaient  debout.  » 


246      CONGRÈS  ARGHÉOLOGIOtm  DE  FRANGE. 

César  voulut  user  de  clémence  envers  ces  infortunés  ;  '' 
pourvut  soigneusement  à  leur  conservation,  leur  reodi' 
leur  territoire  et  leurs  villes,  et  enjoignit  aux  peuple^ 
voisins  de  ne  se  permettre  envers  eux  et  de  ne  souSirif' 
qu'il  leur  lût  l'ait  aucun  outrage,  ni  aucun  mal;  de  là  il 
marcha  vers  Namur  pour  soumettre  les  Atuatiquos. 

Telle  est,  Messieurs,  dans  sa  simplicité  grandiose,  cette 
formidable  lutte.  Ce  n'est  pas  sans  une  profonde  émotion 
«lue  nous  en  avons  visité  le  théâtre  et  cherché  la  trace  sur 
les  bords  solitaires  et  tristes  de  la  Sambre.  Nous  pouvions 
nous  tromper  sur  l'endroit  précis  de  telle  ou  telle  péri- 
pétie de  la  bataille  qui  a  dû  s'étendre  asseï  loin,  comme 
nous  l'avons  dit,  mais  à  coup  sûr,  nous  foulions  le 
sol  sacré  où  ces  héros  tombés,  qui  sont  nos  pères,  ont 
combattu  leur  dernier  combat  pour  rindépendance  de  la 
patrie. 

Eu  l'absence  de  M.  Autliyme  Saint-Paul,  qui  s'est 
excusé  de  ne  i)ouvoir  assister  à  la  séance^  M.  Palustre 
donne  lecture  du  mémoire  suivant. 


Questiom  ââ  et  33. 

Quelles  sont  les  églises  les  plus  anciennes 
de  l'arrondissement  de  SenUs?  en  con- 
nalt-on  d'antérieures  à  l'an  mil?  —  Étudier 
les  principaux  monuments  religieux  de 
la  contrée.  Faire  connaître  les  anciennes 
abbayes.  A  quel  style  particulier  peut-on 
rattacher  le  plus  grand  nombre  de  ces 
édifices? 

(les  (|ucl(|ues  lignes  ne  |>ouvent  se  imrer  du  nom  de 


XLTf  SB8BI0N,  A  8ENLI8.  347 

mémoire.  Encore  moins  prétendraient -elles  être  une 
réponse  aux  deux  importantes  questions  dont  les  églises 
de  l'arrondissement  de  Senlis  sont  l'objet.  J'appelle  ces 
questions  importantes;  elles  le  sont,  en  effet,  dans  un  pays 
où  l'architecture  religieuse  a  été  si  florissante  et  où  son 
bistoire  offre  tant  d'intérêt.  Aussi  appartient-il  à  ceux-là 
ttob  qui  vivent  au  milieu  des  productions  laissées  dans 
la  contrée  par  notre  art  national  le  plus  pur,  de  les  recenser 
i  leur  aise  et  de  porter  sur  elles  un  dernier  jugement. 
Simple  voyageur,  je  ne  puis  que  faire  part  d'observations 
penonnelles,  capables  peut-être  d'aider  à  une  appréciation 
définitive  de  l'art  religieux  des  environs  de  Senlis,  mais 
insuffisantes  pour  en  donner  une  connaissance  détaillée. 

Je  ne  crois  pas  qu'il  existe  dans  Tarrondissement  de 
Senlis  une  seule  église  antérieure  à  Tan  mil.  Durant  la 
période  mérovingienne,  il  a  dû  se  construire  dans  le  Nord 
de  la  France  bien  peu  d'églises  en  pierre;  l'invasion 
fraoqae  y  étouffa,  plus  que  dans  le  Midi,  les  traditions 
romaines  et  y  réduisit  presque  à  néant  l'art  de  la  maçon- 
nerie. Sous  les  Carlovingiens,  les  environs  de  Paris  furent 
ou  négligés  pour  Aix-la-Chapelle  et  les  résidences  de 
l'Aquitaine,  ou  habités  par  des  princes  impuissants  qui 
ne  surent  mêuie  pas  maintenir  l'art  monumental  dans 
l'état  où  l'avait  placé  Gharlemagne.  Sous  les  trois  pre- 
miers Capétiens,  l'anarchie  qui  régna  dans  le  domaine 
royal  ne  permit  guère  à  l'architecture  de  prendre  quelque 
essor;  enfin  si,  malgré  toutes  ces  causes,  il  se  construisit 
dans    le   Valois   quelques   églises   en   pierre   avant   le 
XI'  siècle,  le  mouvement  presque  subit  qui  s'opéra  au 
m'  les  fit  toutes  disparaître  i>our  leur  substituer  des 
t'dîfiœs  plus  élégants,  plus  ornés,  plus  conformes  au 
(Toùt  nouveau  qui  se  formait  dans  l'Ile-de-France.  On  ne 


248       CONGRÈS  ARGUBOLOOIOUE  DE  FRANGE. 

laissa  guère  debout  que  quelques  nefs  depuis  peu  coM^' 
struites  dans  le  style  roman,  et  cela  dans  les  églises  d^ 
médiocre  importance  que  les  ressources  d'une  petite 
paroisse  ou  d'un  monastère  pauvre  ne  permettaient  pas 
de  reconstruire  complètement.  Ces  nets  ne  me  paraissent 
[tas  antérieures  à  la  fm  du  xi"  siècle;  si  elles  étaient  par 
exemple  du  ix**  ou  du  x^  siècle,  on  y  trouverait  probable- 
mont  le  petit  appareil  qu'on  rencontre  dans  certaines 
églises  du  Beauvoisis  rattachées  à  l'époque  carloviugieuuc 
et  dont  une,  la  Uasse-OEuvre,  ne  daterait  que  de  Tépisco- 
pat  d'Hervé  (98r)-998).  Quoi  qu'il  eu  soit,  l'art  roman  se 
trouve  rarement  pur  dans  l'arrondissement  de  Sentis.  Le 
spécimen  le  plus  important  est  la  nef  de  Morienval»  avec 
ses  trois  clochers.  Cette  nef  est  par  malheur  dans  un  état 
de  délabrement  qui,  malgré  des  réparations  exécutées 
au  XV  et  au  xvii**  siècles,  menace  d'amener  sous  peu  de 
temps  une  ruine  complète.  Les  murs  des  bas-côtés,  sur- 
tout celui  du  nord,  penchent  au  dehors  de  la  façon  la 
plus  inquiétante.  Le  portail  occidental  a  disparu,  mais  il 
y  a,  à  l'intérieur,  des  chapiteaux  massifs  et  pauvrement 
sculptés  qui  rappellent  de  la  façon  la  plus  évidente  la 
première  moitié  ou  h  milieu  du  xi*  siècle.  On  peut  voir 
<leux  chapiteuur  plus  grossiers  encore  dans  la  sacristie  de 
la  cathédrale  de  Soulis  :  co  sont  les  restes  de  la  basilique 
commencée  par  l'un  des  deux  Odon  qui  tinrent  le  siège 
deSenlis,  l'un  vt^rs  990,  l'autre  de  1008  à  4070  envi- 
ron  (i).  Nous  croyons  que  c'est  au  premier  Odon  qu'il 
faut  attribuer  ces  chapiteaux.  Les  trois  clochers  de  l'église 
de  Morienval  sont  à  l'extérieur  les  parties  les  plus  remar- 

(l;()do  liane  erclesiam  fundavit,  vcl  siih  tinem  seculi  x, 
v'm-A  090,  (|uo  primils  Odo  vivnbat,  vol  circa  1068,  f|uotlorebat 
Odo  siTinidus  [Gallia  christiana). 


XLIY*  SESSION,  A  SENLIS.  â49 

quabies  du  monument.  Us  sont  disposés  comme  Tétaient 
ceux  de  Saint-Germain*des-Pré8  de  Paris  et  de  la  grande 
basilique  de  Saint-fienoit-sur-Loire  :  le  plus  gros  au 
milieu  de  la  façade  occidentale,  les  deux  autres  des  deux 
i^tés  Je  l'entrée  du  chœur.  La  tour  occidentale,  à  Moricn- 
>al,  a  perdu,  au  xV  sik;le,  sou  dernier  étage  et  son  cou- 
rounement  pyramidal;  mais  les  clochers  orientaux  con- 
^T\ehi  leur  toiture  primitive  obtuse  en  pierre  à  quatre 
I>JiD5,  d*uoe  forme  bien  éloignée  encore  des  flèches  élé- 
•niQtes  dont  le  type  parait  avoir  pris  naissance  au  milieu 
<lu  xii""  siècle. 

La  nef  de  Téglise  Saint-Denis,  à  Crépy-en-Valois,  méri- 
terait d'être  signalée  comme  aussi  ancienne  au  moins  que 
celle  de  Morienval,  si  des  restaurations  trop  radicales  ne  lui 
avaient  fait  perdre,  il  y  a  quelques  années,  presque  toute 
authenticité.  Cette  triple  net  n*avait  point  encore  de 
colonnes  dans  ses  piliers;  elle  appartenait  à  un  type  se 
rapprochant  assez  de  Notre-Dame  de  Melun. 

Parmi  les  églises,  moins  importautes  que  celles  de 
Morienval  et  de  Crépy,  qui,  dans  l'arrondissement  de 
Senlis,  offrent  le  type  du  style  roman  secondaire,  grossier 
et  incomplet,  en  usage  dans  le  Valois  et  ses  environs 
au  XI'  siècle  et  dans  la  première  moitié  du  xn"",  nous 
devons  signaler,  pour  les  avoir  visitées  nous-môme  : 

L'église  de  Rhuis,  près  de  Vcrberie,  tout  entière,  avec 
un  portail  assez  simple,  à  deux  colonnettes,  un  clocher 
avec  toit  obtus  en  pierre,  et  des  piliers  dépourvus  de 
colonnes;  les  Envirom  de  Paris  illustrés,  de  M.  Joanne 
page  310  de  la  o"  édition),  en  douncnt  une  vue  assez  fidèle  ; 
L'église  de  Sarron,  près  P(jnl-Sainte-Maxence,  en 
majeure  partie,  d'un  style  égnlcment  tort  simple; 

La  nrf  île  l'église  de  Villers-Saint-Srpulcre,  pW's  de 
<>cil,  jusqu'à  la  naissance  des  arcs   longitudinaux;   le 


S50      CONGRÈS  ARCUÉOLOGIQUE  DE  FBANGB. 

I)eau  portail  roman,  avec  colonnes  massives  et 
voltos,  ornées  de  moulures  géométriques,  est  aussi  anl 
rieur  au  xii*  ^i^clc;  ce  portail  est  le  plus  complet  de 
du  xr  si^clc  qui  existent  dans  Tarrondissement  deSenlis^* 

Quelques  parties  de  Saint-Gervais-de-Pontpoint,  sur  l  V 
route  do  Punt-Sainto-Maxcnce  à  Verberie,  notamment  l  S 
clocher,  counonné,  comme  ceux  de  Morienval  et  de  Rhuis^ 
IMir  un  toit  obtus  en  pierre  ; 

Li  nef  de  l'église  de  IMailly,  en  majeure  partie  ; 

Le  portail,  Tort  mutilé,  de  l'église  de  Cuvergnon,  et  l€3 
rimnir  de  Téglise  «le  Hargny,  près  de  Betz; 

l^e  clocher  de  Nogoul-les-Vierges,  près  de  Creil,  remar — 
(|uablti  par  ses  colonnettos  ornéeb  sur  toute  leur  hauteur'* 
do  dessins  gravés  ; 

Lo  )H)rtail  et  le  cUxlicr  do  Saint-Vaast-de-Longmont, 
sur  uu  coteau,  dominant  lo  lK)urg  de  Verberie.  Ces  deux 
fragments  anbt^dogiquos  sont  fort  curieux,  le  clocher, 
|vir  SOS  ci^lonnottos  gravéos  do  divers  dessins  sur  toute 
leur  hAUtour,  lo  portail,  |^r  son  quadruple  rang  de 
ligxags  dont  la  nninion  forme  d'énormes  pointes  de  dia- 
mant dt'^oondant  jusqu\ui  $<U«  s;m$  imiH^toni  culonnettes. 
loi  nous  siMunu's  |vut-<Mro  dans  la  première  moitié  du 
\u*  siè\*lo  vt  au  i\MnmoutHMnonl  do  la  {nVriodo  de  transi- 
tion. 

U\  ouiA^ïx^  so  pr\^$<ni;o  uuo  qui^Uon  touto  locale.  Que 
jvUîkT  *io  IWjîx*  »lo  SamsVuuYiît  *io  Snihs,  que  les  docu- 
uu'uts  *vn:s»  o^v|iu'îuu:on:  *iolVîulu<  ol  cinnmcntés  |iar 
M.  laMv  M,ij:»\f\  assr.iv.îî  r,o  '.iuwis  avo;r  été  rocon- 
>ln.Uo  ou  mônu*  rt*nî.uîuv  »i«ru  s  N.i  toudaiiou  |^r  Anne 
*îo  U«x<îo  ^vi  \r  >u\  ■«•^'  S.i;;;:«\  ..uy;;:  lio  S^nilis  ivmpreu«l 
\u;o  ui'i  v.iuquo  vio  qu;ivî\*  ;ra\<v>,  a\«v  xoùti^  non  vos  ou 
ivîwuu\^  sur  *>*;i\x\s  s3iu>  ui*r\i;r(.>>  ;;a  :niu$^pt  voùto  do 
uuhuo,  o;  un  vKvur  s*u>  Al^uio^  a\w  ucrvuiv$.   Les 


XLIY*   SESSION,   A  SENLI8.  S5i 

fenêtres  sont  toutes  en  plein  cintre.  Sur  un  des  côtés  de  la 
nef  (à  gauche),  on  trouve  des  traces  d'arcs  en  ogive.  Il  est 
râcbeux  qu'on  ne  puisse  être  assuré  de  l'authenticité  des 
voûtes.  Si  l'église  était  réellement  aujourd'hui  ce  que  l'a 
laissée  le  règne  de  Henri  1*%  ce  qu'il  serait  tout  au  moins 
uussi  difficile  d'établir  que  de  révoquer  en  doute,  il  fau- 
drait en  conclure  deux  points  très-graves,  parce  qu'ils 
sont  totalement  opposés  aux  données  fournies  jusqu'ici  par 
les  principaux  édifices  dits  de  transition  :  on  devrait 
d'abord  reculer  l'apparition  de  l'ogive  dans  le  nord  jus- 
«pi'au  milieu  du  xi*  siècle,  et  reconnaître  ensuite  que  l'arc 
briiê  s'est  montré  plus  tôt  que  la  nervure,  alors  que 
l'église  de  Poissy,  celle  de  Saint-Loup-de-Nuud  et  beau- 
coup d'autres  monuments  nous  montrent  les  architectes 
de  l'époque  de  transition  cherchant,  même  avec  la  ner- 
vure, à  se  passer  le  plus  possible  de  Togive.  Nous  ne 
saurions  trop  engager  ceux  de  nos  confrères  qui  adoptent 
l'authenticité  de  l'église  Saint-Vincent  et  qui  ont  à  leur 
disposition  et  les  documents  et  le  moyen  d'étudier  patiem- 
ment et  en  détail  l'édifice,  à  voir  jusqu'à  quel  point  on 
pourrait  défendre  par  ce  même  édifice  le  système  de  la 
naissance  du  style  ogival  en  plein  xi*  siècle,  système 
inauguré  dans  le  département  de  la  Manche  à  propos  de 
la  cathédrale  de  Coutances  et  continué  naguère,  non  loin 
de  Seulis,  en  prenant  pour  appui  la  basilique  de  Saint- 
Genner.  En  attendant,  nous  nous  renfermons  dans  un 
argument  pareil  à  ceux  qui  ont  été  énoncés  dans  les  cir- 
constances que  nous  venons  de  rappeler  :  pourquoi,  si  le 
style  ogival  a  été  créé  dans  le  Valois  vers  4060,  p«)urquoî 
vovons-nous  commencer  seulement  sous  Louis  le  Jeune, 
\ers  4440  ou  4450,  le  mouvement  artistique  auquel  sont 
dues  les  principales  églises  de  la  contrée? 


i52      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Les  documents  écrits,  en  effet,  assignent  à  cette  der 
nière  époque  la  construction  de  la  cathédrale  de  Sentis  e 
celle  de  Téglisa  Saint-Frambourg,  en  faisant  parfaitemen 
comprendre  ((ue  ces  réédifications  avaient  pour  principaler 
cause  la  vétusté  ou  plutôt  le  style  vieilli  des  bâtisses  qu*ou 
allait  remplacer  :  «  Kcclesia  SancUi^  Marim  Silvanectensis, 
«  inedià  corrucns  vetustate,  innovatur  a  fundamentis,  et 
«  usque  udco  insigne  cœperuut  opus,  quod  sine  charitatc 
a  iidelium  Christi  et  clccmosyuis  nunquam  poterit  cou- 
i(  summari  :  etenim  tcnuissima;  estsubstantisnetangustis 
a  arctata  fiuibus,  et  ob  hoc  nccessc  habet  ad  vestra  confu- 
a  gère  subsidia  :  unde  mandamus  vobis  omnibus,  atque 
a  prccamur ,  ut  pro  honore  Dei  et  B.  Virginis,  cujus  est 
«  occlesia,  portitores  prœsentium  cum  sanctuaris  et  reli- 
0  quiis  ountcs  et  iideliter  laborantcs,  honoriPice  suscipiatis, 
o  et  in  ecclesiis  parochiaiibus  rccipi  cum  litteris  nostris 
a  sigillatis,  et  a  presbyteris  honorari  pnecipiatis. »  Ainsi 
s*exprimait  le  roi  de  France  en  1155,  lorsqu'il  recomman- 
dait à  ses  sujets  les  quêteurs  envoyés  par  l'évéqueThibaud. 
Vingt-deux  ans  plus  tard,  voyant  grandir  sous  leurs  yeux 
la  cathédrale  que  Ton  avait  voulu  mettre  au  goût  perfec- 
tionné de  TépoquCf  et  jetant  un  regard  sur  leur  collégiale, 
los  chanoines  ch;  Snint-Fraïuhourg,  ù  leur  tour,  s'aper- 
roivent  ijue  celle-ci  est  de  structure  surannée,  ressemble  à 
une  masure  à  côté  du  l»ol  édifice  ogival  qui  s*élève,  et, 
comme  maints  architectes  de  notre  temps,  ils  accusent  ces 
murs  condamnés  do  branler  «le  vieillesse.  Ils  s'adressent, 
eux  aussi,  à  Louis  Vif,  (jui  venait  assez  souvent  au  palais 
royal  de  Sentis,  et   n*osant   sans  doute    lui   ilemander 
une  lettre  circulaire  et  des  quêtes  à  travers  les  diocèses, 
ce  qui,  pour  un  simple  chapitre,  n*eùt  pas  été  sans  dif- 
fienlté,  ils  obtiennent  de  lui  une  exposition   solennelle 
de  leurs   reliques,  une  grande  ostension.  Le  document 


XUy*"  SESSION,    A  SENUS.  253 

latin  qai  rapporte  ces  faits  mérite  d'être  cité,  du  moins  en 
majeure  partie,  car  il  fait  mieux  voir  que  certaines  théories 
sans  base  inaugurées  dans  notre  siècle  ce  qu'était  la  construo 
lioQ  d'une  église  au  commencement  de  la  période  ogivale  : 
•  In  nomine  sanctae  et  individuse  Trinitatis,  amen.  Ego 
Eitroinus  Dei  voluntate  decanus,  Hilduinus  thesaura- 
rius,  Odo  cantor;  et  totus  pariter  clerus  S.  Frambaldi 
Silvanectensis.  Quoniam  expedit  ecclesiasticis  maxime 
penonis  diligere  decorem  domus  Dei,  nos  videntes 
ecclesiam  nostram  vetustatis  quodam  senio  acclinantem, 
et  structurae  veteris  ignobilitatem  despicabilem ,  in 
Dumini  confidentes  subsidio ,  renovandi  causa  et 
aropliandi,  ausum  sumpsimus  de  thesauro  SS.  Reli- 
quiarum,  tantum  a  domino  Rege  perceptà  licentiâ 
revelandi   eas.    Dominus  quidem   noster  et   ccclesis 

patronus  superlaudavit  propositum et   coustituit 

diem  idus  maii,  quo,  posthabitis  aliis  uegotiis,  desti- 
navit  venire;  ...  sed  et  tanti  seininarii  ostensionem 
generaliter  cuicumque  praecepit  intérim  denuntiari... 
Anno  itaque  dominiez  incarnat.  MGLXXVII ,  die 
préfixa,  cum  domino  Rege  aifuerunt  episcopi,  dom- 
nus  Henricus  episcopus  Silvanectensis,  domnus  Simon 
Meldensis,  et  cum  bis  et  magnatibus  viris  et  populo 
copioso,  dominus  Rex  reliquias  extra  civitatem  dévote 
et  cum  magnà  reverentià  deportans,  usque  ad  locum 
eminentem  secutus  est  :  uhi,  divina  proviJentià  ordi- 
nante,  sermouem  fccit  domnus  Petrus  presbytcr  cardi- 
malis  titulo  S.  Chrysogoni  et  scdis  apostolicT  legalus, 
qui  auctoritate  beatorun  apostolorum  Pétri  et  Pauli 
et  S.  R.  E.  atque  episcoporuni  qui  adrraiit,  con^re- 
gato  populo  et  omnibus  iunovatiunem  occlesi.r  juvan- 
tibus  induisit  vota  transgressa,  peccata  oblita,  et 
poenitentiarum  partem  septimam.  Scd  et  postca  archie- 


254  CONGRÈS  àrghéolooique  de  frange. 

a  piscopus  RemensisWillelmus,  scdis  apostolicao  legatus, 
«  nobiscum  indulgentius  agens,  quintam  partem  pœni- 
a  tentiarum  dimisit.  o  {restimomum  autheniieum^  dans 
D.  Bouquet  :  Collection  des  historiens  des  Gaules,  t.  XIV» 
p.  484.  ) 

Après  (OUI,  le  diocèse  de  Senlis  fut  bien  loin  de  demeu- 
rer en  arrière  dès  le  moment  où  commença  à  poindre  le 
style  ogival.  Comme  je  Tai  dit  ailleurs,  la  «  transition 
active  »  s'est  opérée  dans  la  région  comprise  entre 
Paris,  Senlis,  Pontoise,  Poissy  et  Étampes  lA  travers 
les  monuments  histoînques,  l'*  partie,  p.  li).  Dès  que  fut 
bâtie  Téglise  de  Saint-Denis,  on  construisit  Notre-Dame 
de  Senlis,  dont  l'architecture  est  plutôt  en  avance  qu'en 
retard  sur  son  époque.  Aussitôt  s'élèvent  dans  les  cam- 
pagnes une  foule  d'églises,  vraiment  sœurs  de  celles  de  la 
banlieue  parisienne.  J'ai  vu  un  certain  nombre  de  ces 
monuments,  mais  trop  rapidement  peut-être  pour  pou- 
voir déterminer  ce  qui  les  distingue  de  leurs  voisines 
contemporaines.  Il  ne  faudrait  d'ailleurs  pas  s'étonner  si 
un  diocèse  dont  la  circulaire  de  Louis  VII  constate  les 
étroites  limites  et  où  Ton  comptait  à  peine,  au  xvu*  siècle, 
soixante-douze  paroisses,  n*a  pas  pu  devenir  le  siège  d'une 
école  particulière.  11  m'a  paru  participer  à  la  fois  de  l'école 
française  et  de  l'école  picarde.  A  la  première  il  emprunte 
la  sobriété  des  détails,  à  la  seconde  l'ordonnance  de  ses  clo- 
chers, dont  chaque  face  présente,  au  dernier  étage  du 
moins,  deux  fenêtres  géminées,  tandis  que  les  environs  de 
la  capitale  préfèrent  deux  baies  simples.  Encore  la  dispo- 
sition picarde,  générale  dans  le  Beauvaisis,  le  Soissonnais, 
le  Noyonuais  et  le  Laonnois,  n'exclut-elle  pas  aux  alentours 
de  Senlis  et  à  Senlis  même  la  disposition  parisienne;  c*est 
donc  surtout  à  Técole  française  (ju'oa  pourrait  rattacher 
plus  grande  partie  du  Valois.  Quelques  portes  m'ont  offert 


XUY*  SESSION,    A  SENUS.  255 

uo  Ganetèie  qui  m'a  paru  propre  au  diocèse  de  Senlis. 
Les  portes  latérales  de  la  façade,  à  Notre-Dame,  ont  leurs 
ogives  très-surhaussées  et  par  suite  un  tympan  fort  haut. 
J*en  ai  vu  de  semblables  notamment,  à  Fosses  et  à  Fon- 
teDay-lès-Louvres,  aux  environs  de  Luzarcbes.  A  Fontenay, 
le  tympan  intéresse  par  une  décoration  originale  rap- 
peliDt  de  la  manière  la  plus  frappante  les  tympans  percés 
d'aititures  des  petites  portes  de  Notre-Dame  de  Senlis. 

Noas  venons  de  dire  que  l'arrondissement  de  Senlis 
possède  un  grand  nombre  d'églises  appartenant,  soit  à 
Tépoque  de  transition,  soit  à  celle  du  style  ogival  rudi- 
oentaire.  Elles  y  forment  la  majorité,  mais  peu  sont 
exemptes  de  remaniements.  Avant  de  les  passer  en  revue 
pir  ordre  d'importance,  dégageons  de  ces  édifices  ce  qui  est 
eooore  purement  roman  :  les  clochers.  Dans  les  pays  d'Oise 
comme  dans  tout  le  reste  des  environs  de  Paris,  comme 
eo  Champagne,  en  Bourgogne,  en  Angoumois  et  en  bien 
d'autres  contrées  de  la  France,  on  voit  s'élever  sur  des 
ogives  et  des  nervures  des  tours  dont  toutes  les  arcades 
sooten  plein  cintre.  Ains^  en  est-il  à  Rully,  à  Saint-Ëvre. 
mont  de  Greil,  à  Ghamant,  Acy-en-Multien ,  Foulangues, 
Saint-Leu-d'Esserent,  etc.  La  tour  île  Rully  mérite  une 
mention  à  part,  car  elle  s'écarte  du  type  des  clochers  pari- 
siens  ou  picards  pour  se  rapprocher  de  celui  des  clochers 
normands  :  les  ouvertures  y  sont  au  nombre  de  trois  sur 
chaque  face,  et  chaque  groupe  est  flanqué  de  deux  arcades 
couvrant  les  angles;  par  une  autre  singularité,  ces  arcades 
aveugles  offrent  des  impostes  ornées  qui  courent  a  l'in- 
trados d'une  colonnelte  à  l'autre   et  forment  tympans, 
lieux  autres  clochers,  ceux  de  Saiut-Gervais  de  Poutpoint 
et  de  Nogent-les-Vierges,  s'écartent  aussi  du  type  de  l'Oise 
par  les  triples  ouvertures  de  leurs  étages  supérieurs,  mais 
sans  se  rapprocher  d'un  système  étranger  à  la  région. 


360  CONCUŒS  ARGHÉOLOGigUE  DE  FRANXE. 

Deux  clucherB  sont  octogonaux  :  ceux  d'Acy  (à  l'étage 
supérieur  fieulcmcnt)  et  de  Foulangues;  les  fenêtres  y  sonC 
à  une  seule  baie  sur  chacun  des  huit  pans.  Ce  type  de  tour 
octogonale  est  une  exception  dans  le  département  do  l'Oise^ 
mais  non  une  rareté  :  nous  Tavons  retrouvé,  liors  de 
l'urrondisseuient  de  Senlis,  dans  la  charmante  tour  de 
Cumbronne-lôs-Clormont,  à  Tracy-le-Val,dun8  le  canton  de 
Ribécourt,àl3ouconvillersetàLierville,prè$deChaumont- 
en-Vexin.  Tous  les  clochers  de  Tarrondissement  de  Senlis 
dont  il  vient  d*étre  parlé  n'ont  absolument  rien  d'ogival. 

A  Saintinos,  près  Verberic,  nous  avons  observé  une 
tour  ctuitrale  dont  les  arcades  géminées  ont  leurs  cintres 
d'oncadrtunont  on  ogive  et  les  baies  secondaires  en  plein 
cintrt\  Lo  cas  nVst  pas  commun  :  deux  ogives  dans  un 
ploin  cintrt)  ou  doux  pleins  cintres  dans  une  ogive  se 
n>trttuvoraicnt  uvtv  assex  do  (Hîine  dans  la  région  picarde, 
où  los  doux  loruios  d*urc  ne  s'unissent  presque  jamais 
dans  lo  uu^mo  niombro  d*an*hitocture. 

Nous  voudrions  aussi  dégager  de  Tépoque  ogivale  cer- 
taine égli^os  où,  malgré  logive  et  même  la  nervure,  on 
t^nlvo  dans  los  uiou!urt^«  dans  U's  colonnes  ou  dans 
quolquos  dispositions  gouôrales,  dos  formes  qui  rappellent 
|Mr  l^»p  onam^  soii  lo  \r  suVlo,  Si»il  les  premiers  rudi- 
uu  nts  do  la  irausuioii.  Ko  oluour  do  I  ogiise  de  Morieuval 
monto  v^  ivl  oj;aiNi  d  oirx^  cito  tout  lo  promier  :  la  nervure 
ot  lojiixo  axaioat  oîo  lorl  |vu  pratiquées  lorsqu'il  fut 
«vusiiuii.  ot  |H*uî-<':r\\  ou  pluio;  s<*lon  toute  prt>babilitê, 
i\\<t  ii^  quo  los  habi'..iu:sda  Nalois  vitvnU  |vur  b  première 
toi>  ^Vs<  »;ormos  ùw^iuU  à\în  u.^u\ol  ^ri  do  kvàtir.  Évidem* 
uii-n;  î'c^rvhu.vii*  xlo  ^viu^  a:vv..îo  ko  xvnuAtssaiit  ivis  trop 
b;ou  luîuu^:i^'  %t>  i*i\\'>  *;o  >;:.:.  :ur\-,  c^,  opérant  sur 
uu  i;\S  jvîi;  «*>jv.i*\  «.  iv*r  *va>i\;;.ïUi;  a\*v  |ieu  de  dan- 
ois, ù  iîvu\4  oiuvAv  i.*  iu*>\o:\  iv*  M'  m«aitcx^r  timide  et 


XLIY'  SB8SI0N,   A  SENLIS.  257 

mabdioit.  Le  bas-côté  tournant,  qui  comprend  quatre 
tnvées  et  présente  par  conséquent  un  pilier  sur  l'axe,  est 
Idiemeot  étroit  que  deux  personnes  auraient  quelque 
peine  à  le  parcourir  de  front;  les  nervures  n'y  sont  qu'un 
énorme  boudin  portant  gauchement  sur  les  chapiteaux 
peu  préparés  à  cette  surcharge;  on  sent  à  peine  des  ogives 
iva  les  arcs  qui  ouvrent  sur  le  sanctuaire;  enfin,  la 
^te  supérieure  et  tout  l'étage  qui  la  supportait  ont  dû 
être  lefaits  au  xm*  et  au  xv*  siècles ,  par  suite  de  vices 
Qotables  de  construction.  Tel  a  été,  du  reste,  le  sort  de 
tontes  les  églises  de  transition  accompagnées  d'un  déam- 
iKilatoire,  si   Ton  excepte  Saint-Martin-des-Ghamps ,  à 
Paris.  Toutes  ont,  peu  après  leur  achèvement,  vu  renou- 
veler les  voûtes  et  les  fenêtres  de  l'abside  centrale  :  Saint- 
Louis  de  Poissy,  Saint-Maclou  de  Pontoise,  Saint-Denis, 
^t-Étienne  de  Sens,  etc.  Après  Morienval,  nous  avons  à 
nous  souvenir  de  la  collégiale  Saint-Évremond  de  Creil, 
déjà  beaucoup  plus  avancée,  malgré  une  certaine  ressem- 
blance de  style  avec  la  nef  de  Saint-Étienne  de  Bauvais  ; 
de  la  nef  de  l'église  d'Acy,  où  les  nervures  à  profil  roman 
retombent  sur  des  colonnes  également  romanes;  de  l'église 
de  Béthisy-Saint-Pierre,  qui  a  pris  la  nervure  en  repous- 
sant l'ogive  ;  du  porche  de  l'église  de  Saint-Leu-d'£sse- 
rent  avec  son  clocher. 

Enfin  nous  devons  classer  comme  romanes,  malgré  les 
ogives,  les  églises  qui  présentent  de  petites  fenêtres  laté- 
rales chevauchant  sur  les  piliers,  comme  on  en  voit  à 
Plailly,  à  Pontpoint  et  à  l'église  ruinée  de  Ghamplieu. 

Notre-Dame  de  Senlis  vient  au  premier  rang  parmi  les 
Àlifices  qui  appartiennent  franchement  au  règne  de  l'ar- 
chitecture gothique.  C'est  une  <les  moins  remarquées  de 
nos  cathédrales  du  nord,  et  pour  deux  causes  :  d'abord 
|iaroc  qu'elle  a  été  observée  fort  superiicicllcment,  ensuite 

XLIV*  SESSION.  17 


958      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

parce  qu'elle  est  sans  mérite  aux  yeux  de  nos  contempo- 
rains,  trop  portés  à  dédaigner  un  édifice  qui  n*a  pas  un 
caratère  d'unité  suffisant.  La  cathédrale  de  Heaux  par- 
tage cet  oubli  relatif,  et  pour  les  mêmes  causes;  et  pour- 
tant il  n'est  pas  beaucoup  d'édifices  où  l'histoire  de  l'art 
puisse  être  étudiée  avec  plus  de  fruit  que  dans  ces  deux 
basiliques.  Notre-Dame  de  Senlis  a  déjà  subi  les  résultats 
de  cette  indifiérence;  elle  a  été  pitoyablement  restaurée  en 
quelques-unes  de  ses  parties  les  plus  importantes,  sous  le 
gouvernement  de  Juillet.  Telle  qu'elle  nous  reste  néan- 
moins, elle  est  très-précieuse  et  mériterait  une  monogra- 
phie que  de  longtemps  encore,  nous  le  craignons,  on  ne 
croira  devoir  lui  accorder. 

Commencée  en  ii55  ou  4456,  après  le  retour  des  quê- 
teurs recommandés  par  la  lettre  de  Louis  VII  plus  haut 
reproduite,  elle  fut  terminée  en  4483,  sauf  les  flèches,  et 
consacrée  seulement  en  4194.  Elle  se  ressentit  toujours  du 
peu  d'étendue  du  diocèse;  les  ressources  furent  asseï  res- 
treintes, malgré  les  largesses  du  roi.  On  s'était  attendu  à 
ce  modeste  résultat  et  il  n'y  eut  point  de  surprise;  les 
plans  avaient  été  dispost^s  selon  toute  prudence  :  sans 
dimensions  exagérées  dans  l'ensemble,  sans  luxe  dans  les 
détails.  Aussi  Notre-Dame  de  Senlis  fut-elle  la  première 
terminée  de  toutes  les  cathédrales  gothiques.  Au  jour  de  sa 
dédicace  elle  comprenait  :  une  façade  d'assez  pauvre 
ordonnance,  sans  rose,  sans  galerie,  avec  statues  au  por- 
tail seulement  et  deux  clochers  couronnés  de  toitures  pro- 
visoires; quatorze  travées  de  nef  et  de  chœur,  dont  dix 
formaient  cinq  compartiments  de  voûtes  sexpartites,  et 
dont  la  quatrième  était  percée  au  sud  d'une  porte  latérale 
à  colonnettes;  un  rond-point  avec  cinq  chapelles  formant 
à  peine  le  demi-cercle.  Les  travées,  malgré  leur  nombre  de 
quatorze  pour  la  partie  droite,  dominaient  une  longueur 


XLTV*  SBSSION,   A  SENLIS.  359 

ma  médiocre,  car  elles  avaient  une  portée  moyenne  de 
quatre  à  cinq  mètres  seulement.  Sur  les  bas -côtés 
régnaient  des  tribunes,  car  on  n'était  pas  encore  disposé  à 
8icri6er  cet  étage  durant  le  règne  de  Louis  VII;  mais,  par 
économie,  on  avait  supprimé  les  doubles  baies  donnant 
w  la  nef  centrale  :  ce  sont  des  ouvertures  simples;  seules 
oelhe  de  la  travée  précédant  l'abside  sont  partagées  par 
une  eolonne.  Les  fenêtres  des  bas-côtés  étaient  petites  et  en 
plein  dntre,  celles  des  tribunes  plus  petites  encore,  et 
sans  moolnres  ni  ornements.  La  grande  voûte  était  fort 
ba«e  et  aurait  pu,  à  la  rigueur,  se  passer  d'arcs-boutants. 
Point  de  clocher  de  pierre  à  l'entrée  du  chœur,  ce  qui  eût 
été  contraire,  du  reste,  à  l'usage  de  Técole  parisienne  : 
celle-ci,  lorsqu'il  y  avait  deux  tours  sur  la  façade,  n'en 
tûléra  presque  jamais  une  troisième  au  centre  de  l'église, 
pendant  les  nr,  xiii*  et  xrv*  siècles;  on  y  suppléait  par 
des  pyramides  en  plomb.  Enfin  on  renonça  au  transsept, 
et  c'était  le  sacrifice  le  plus  pénible,  le  sacrifice  sur  lequel 
im  chercha  à  revenir  le  plus  tôt  possible.  La  cathédrale  de 
Senlis  possède  actuellement  ses  deux  bras  de  croix;  on  a 
cru  longtemps  que  cet  état  nouveau  de  l'église  ne  remon- 
tait pas  au  delà  du  xvi*  siècle;  au  moindre  examen  de 
l'édifice,  il  devient  évidrat  que  les  croisillons  furent  com- 
mencés quarante  ou  cinquante  ans  au  plus  après  l'achè- 
vement des  travaux  de  construction.  Visitant  Notre-Dame 
de  Senlis  en  1875,  nous  fûmes  vivement  préoccupé  de  la 
piésenoe  de  chapiteaux  et  de  colonnes  du  xni*  siècle  dans 
les  tribunes  du  transsept.  Comme  nous  ne  découvrions  pas 
ailleurs,  dans  la  nef  transversale,  les  caractères  du  xiii'  siècle, 
nous  avions  conclu,  mais  sans  grande  conviction,  que  ces 
colonnes  provenaient  de  la  partie  de  la  nef  qu'il  avait  fallu 
défoncer  pour  bâtir  les  croisillons,  partie  remaniée  elle- 
mémey  pensions-nous,  vers  le  règne  de  Louis  VIII  ou  de 


260      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  BE  FRANGE. 

Louis  IX.  Mais  un  examen  que  nous  avons  renoayeléavec 
M.  fiouet,  dont  le  talent  analytique  est  bien  connu  de 
tous  les  archéologues,  nous  conduisit  Tun  et  l'autre,  le 
jour  de  la  clôture  du  Congrès  de  4877,  à  une  conclusion 
bien  différente,  qui  se  trouva  répondre  exactement  à  des 
remarques  faites  par  M.  Palustre  quelques  jours  aupara- 
vant. Nous  ne  fûmes  pas  longtemps  à  nous  apercevoir 
que,  par  suite  de  la  disposition  des  travées,  peu  propre  à 
l'addition  d'un  transsept,  dont  les  quatre  principaux 
piliers  doivent  former  un  rectangle  à  peu  près  équibtéral, 
on  fut  amené,  au  commencement  du  xm*  siècle,  à  suppri- 
mer de  chaque  côté,  au  milieu  de  l'église,  trois  piliers  et 
à  avancer  ceux  de  la  première  travée  du  chœur  de 
manière  à  élargir  cette  travée  et  à  trouver  un  carré  pour 
la  travée  précédente,  devenue  la  croisée.  Les  piles  orien- 
tales de  cette  croisée  sont  bien  évidemment  postérieures 
aux  constructions  du  xii*  siècle,  de  même  que  les  arcs 
longitudinaux  et  ceux  des  tribunes  dans  la  première  tra- 
vée du  chœur,  arcs  qui  retombent  sur  des  colonnes  fort 
différentes  de  style  :  presque  romanes  encore  contre  les 
piliers  séparant  la  première  travée  du  chœur  de  la 
seconde,  franchement  gothiques  contre  les  piliers  de  la 
croisée,  bien  que  les  tailloirs  soient  encore  carrés.  L'addi- 
tion d'un  transsept  à  Notre-Dame  de  Senlis  au  prix  de  si 
coûteux  remaniements  montre  deux  choses  :  d'abord  que 
rien  n'avait  été  fait  en  vue  de  la  construction  future  ou 
possible  d'une  nef  transversale  lors  de  la  pose  des  fonde- 
ments de  la  basilique,  car  les  travées  avaient  toutes  une 
portée  si  restreinte  que  deux  ne  suffisaient  pas  à  donner 
en  plan  un  carré  parfait,  ce  qui,  pourtant,  est  le  cas  ordi- 
naire avec  des  voûtes  sexpartites;  ensuite  qu'il  se  pré- 
senta, aussitôt  l'église  achevée,  des  ressources  abondantes 
et  inattendues,  grâce  à  des  circonstances  qu'il  serait  inté- 


XUY*  SESSION,   A  SENLIS.  26i 

nssant  de  connaître.  Peut-être  trouverait-on  là  la  main 
de  laint  Louis.  Ces  ressources  permirent  en  outre  de  con- 
tinuer jusqu'au  sommet  l'un  des  clochers  de  la  façade, 
que  nous  croyons  postérieur  au  transsept.  On  pourrait  se 
demander,  en  voyant  le  peu  de  traces  qu'il  reste  du 
un*  siècle  dans  les  croisillons,  si  ceux-ci  ont  été  réellement 
terminés  à  cette  époque,  et  si,  à  un  moment  donné,  ils 
n'auraient  pas  été  abandonnés  pour  le  grand  clocher. 
Vous  ne  pourrions  le  croire.  On  ne  va  pas  remanier  un 
cdifiœ  de  fond  en  comble,  et  sans  nécessité  matérielle, 
pour  laisser  tout  aussitôt  une  ruine.  L'inachèvement  du 
tnnsfiept  eût  d'ailleurs  compromis  la  solidité  du  chœur  et 
de  la  nef;  si  nous  ne  voyons  guère  aujourd'hui  dans  les 
croisillons  que  le  ciseau  du  xvi*  siècle,  c'est  probablement 
qu'ils  eurent  surtout  à  souffrir  des  dégâts  causés  dans  la 
Wilique  par  l'incendie  des  combles  et  la  chute  partielle 
des  voûtes,  en  1502. 

Le  grand  clocher  de  Senlis  est  au  point  de  vue  artis- 
tique, le  morceau  capital  de  la  cathédrale;  c'est  aussi  une 
des  œuvres  les  plus  originales  du  règne  de  saint  Louis. 
Le  clocher  de  Senlis  est  bien  ime  conception  à  part,  pure, 
croyoDs-nouSy  d'influences  extérieures,  bien  qu'on  en  ait 
vooiu  faire  la  dernière  expression  d'un  type  né  à  Bran- 
t^,  près  de  Périgueux,  en  pleine  période  romane,  per- 
ectioané  dans  le  Limousin,  sur  les  bords  de  la  Loire,  à 
Vendôme,  puis  à  Chartres,  d'où  il  se  serait  transporté, 
derenu  gothique,  sur  les  bords  de  la  Nonctte.  La  flèche  de 
Votie-Dame  de  Senlis,  ni  dans  son  ensemble,  ni  dans  ses 
détails,  ne  rappelle  aucune  autre  construction  ;  la  sil- 
hfiuette  en  est  unique;  au  point  de  vue  esthétique  elle  est 
peut-être  défectueuse,  car  la  hauteur  dos  lucarnes,  prise 
tiitalcment  aux  dépens  de  la  flèche,  rend  celle-ci  trop 
courte  pour  l'œil  ;  néanmoins  il  y  a  tant  de  mouvement 


S62      CONGRÈS  ARGHÉOLOGIQUB  DE  F&ANGE. 

dans  cette  silhouette  qu'elle  ne  nous  a  jamais  paru  tfop 
choquante.  Si  Ton  veut  jouir  du  clocher  de  Senlis  dam 
tout  ce  que  don  aspect  présente  de  pittoresque,  ce  n*6i^ 
point  à  son  pied  qu'il  faut  se  placer  ou  dans  les  rues  voi 
sines;  on  doit,  à  l'époque  de  l'année  où  la  verdure  est  l 
plus  luxuriante,  demander  à  pénétrer  dans  le  jardin  di 
château,  et  de  là  isoler  la  tour  du  reste  de  l'église  et  l 
regarder  seule  à  travers  le  feuillage  des  arbres.  Le  spec 
tacle  est  alors  merveilleux.  L'art  ogival  n'est,  en  quelqu 
sorte,  que  la  moitié  de  lui-môme  lorsqu'il  embellit  ne 
villes;  il  est  issu  d'un  sentiment  exquis  de  la  nature,  i 
c'est  uniquement  au  milieu  d'une  belle  nature  qu' 
semble  vivre  de  sa  pleine  vie.'  Aussi  est-ce  par  la  natui 
que  le  goût  de  ce  style  nous  est  revenu  ;  c'est  dans  1( 
ruines  perdues  dans  les  solitudes  que  nous  avons  appris 
Taimer,  ce  sont  les  écrivains  les  plus  épris  des  beautés  ( 
la  création  qui,  les  premiers,  se  sont  mis  à  le  chanter. 

Le  clocher  de  Senlis,  d'une  hauteur  totale  de  soixant 
dix-huit  mètres,  comprend,  au-dessus  de  l'étage  carré  i 
beffroi ,  un  tambour  octogonal  très-élancé,  flanqué  < 
clochetons  à  jour  dont  les  pyramides  s'inclinent  sur  1 
côtés  obliques,  et  une  flèche  portant  huit  grandes  lucarne 
Le  tambour  est  éclairé,  sur  chacune  des  quatre  fac 
libres,  par  une  longue  fenêtre  à  colonnettes;  sur  les  côt 
obliques,  les  fenêtres  sont  beaucoup  moins  hautes 
donnent  sur  les  clochetons.  Les  lucarnes  sont  égaleme 
percées  de  longues  fenêtres;  la  crête  de  la  toiture,  q 
recouvre  chacune  d'elles,  s'abaisse  rapidement  vers 
grande  flèche  alla  d'envahir  le  moins  possible  sur  la  ha 
teur  de  celle-ci,  qui,  sans  cela,  eût  paru  n'être  qu'un  ri( 
culc  pyraniidion.  11  y  a  dans  tout  cela  une  recherche 
TefTot  dont  les  artistes  de  la  fin  du  xiii"  siècle  comme 
<;aient  déjà  à  n'être  plus  capables.  Eu  outre,  malgré 


XLIY*  SESSION,  A  SEMUS.  263 

ricbesse  des  ornements  géométriques  semés  aux  pignons 
<les  lucarnes,  et  les  percements  à  jour  pratiqués  dans  la 
flèche,  il  ne  nous  est  pas  possible  de  porter  la  date  du 
clocher  à  une  période  postérieure  à  1^40,  car  on  y  trouve 
,  des  corniches  en  denticules  qui  cessèrent  tout  à  fait  d'être 
pratiquées  après  cette  époque. 

La  flèche  de  Senlis  est  probablement  la  tête  de  toute  une 
famille  de  clochers  qui  s'est  répandue  sur  la  plus  grande 
partie  du  diocèse  de  Soissons.  Tandis  que,  dans  Tlle-de- 
France  et  le  Beauvaisis,  presque  toutes  les  anciennes 
flèches  remontent  au  xii*  siècle  ou  reproduisent  d'assez 
prés  cette  période,  dans  le  Valois  et  le  Soissonnais,  les 
pyramides  ne  datent  généralement  que  des  xiii%  xiv*,  xv" 
et XTi* siècles;  M.  Woillez  en  cite  même  une,  des  plus 
belles,  de  i600,  à  Montagny-Sainte-Félicité.  J'ai  vu  cette 
<ieraière,  j'en  ai  observé  quelques  autres,  et  il  m'a  paru 
souvent  diJCGicile  d'en  marquer  l'époque  exacte,  si  peu 
elleit  modiCent  le  type  primitif,  qui,  en  abrégeant  celui  • 
de  la  cathédrale,  trop  compliqué,  le  rappelle  suffisamment 
et  ne  peut  avoir  d'autre  point  de  départ  que  lui. 

il  est  donc  resté  au  diocèse,  si  l'on  veut  à  l'arrondisse- 
ment de  Senlis,  uue  particularité  as^ez  importante  durant 
toute  l'ère  ogivale.  C'est  peut-être  là  que  les  architectes 
ont  Dimmencé  â  percer  leurs  flèches  de  jours  et  à  eu  acci- 
denter les  arêtes  par  des  crochets.  Si  ces  perfectionue- 
ments  appartiennent  aux  constructeurs  du  Valois,  ceux-ci 
n'en  ont  du  moins  pas  abusé,  et  ils  u'out  jamais  appa- 
reillé leurs  pyramides  comme  des  claires- voies  de  fenêtres, 
ainsi  que  l'ont  fait  les  Normauds  et  surtout  les  Alle- 
mands. 

Le  clocher  de  Senlis  eut  à  soulfrir,  eu  1502,  d'un  œup 
de  foudre  qui  détermiuu  eu  même  temps  i'iucendie  de 
tuut  le  grand  œmbie  et  la  destruction  partielle  de  la  mai- 


2M  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

tresse  voûte.  Les  réparations  commencées  presque  aussitôt 
ne  paraissent  avoir  rien  changé  au  caractère  de  ce  clocher  ; 
mais  elles  amenèrent  le  remaniement  total  des  murs 
latéraux  de  l'église,  la  reconstruction  du  transsept  et  des 
grandes  voûtes.  La  cathédrale  de  Senlis  se  trouve  ainsi 
habillée  à  la  flamboyante;  mais  nous  devons  à  ce  renou- 
vellement deux  splendides  façades  latérales  qui  peuvent 
compter  parmi  ce  que  le  règne  de  François  I*'  a  produit 
de  plus  remarquable.  Ce  prince  contribua  largement  à  la 
dépense,  de  même  que  pour  les  cathédrales  de  Beauvais  et 
de  Sens,  et  il  est  à  observer  que,  malgré  cette  interven- 
tion du  principal  promoteur  de  la  Renaissance,  tout  est 
purement  gothique  dans  les  parties  des  trois  cathédrales 
sus-nommées  appartenant  au  xvi*  siècle.  Il  faut  aussi 
rendre  au  constructeur  des  croisillons  de  Notre-Dame  de 
Senlis  ce  bon  témoignage  qu'il  respecta  les  dispositions 
anciennes  et  laissa  circuler  des  tribunes  au  premier  étage; 
ces  tribunes  sont  à  coup  sûr  les  seules  qui  existent  d*une 
date  postérieure  au  xiv«  siècle.  Elles  communiquent,  d'un 
côté  à  l'autre  de  chaque  croisillon,  par  deux  passages 
ménagés  au-dessus  des  portails  latéraux,  l'un  à  l'extérieur, 
l'autre  à  l'intérieur. 

Dans  notre  siècle,  la  cathédrale  de  Senlis  a  subi  aussi 
quelques  changements.  Les  statues  de  la  porte  principale 
ont  changé  de  caractère  par  suite  d'une  restauration  faite 
en  dépit  des  principes  iconographiques;  on  ne  peut  plus 
se  reconnaître  aujourd'hui  au  milieu  de  cette  incohérence; 
il  faudrait  une  longue  étude  pour  reconstituer  l'état  pri- 
mitif et  l'expliquer;  nous  savons  que  M.  Palustre  vient 
de  reutreprendrc  sur  des  bases  solides  et  en  donnera  très- 
prochainement  le  résultat.  A  l'extrémité  opposée  de 
l'église,  au  chevet,  une  chapelle  absidale  a  été  défoncée 
pour  faire  place  à  une  autre  chapelle  plus  grande,  qu'on 


XLIT*  SESSION,  A  SENUS.  265 

pourrait  croire  întérieuremeDt  du  xiii*  siècle,  mais  qui, 
extérieurement,  trahit  son  origine  moderne  par  les 
grandes  dimensions  de  l'appareil. 

Les  quatre  chapelles  primitives  qui  restent  ne  sont  pas 
la  partie  la  moins  intéressante  de  la  cathédrale  de  Senlis. 
Très-peu  profondes,  elles  présentent,  au  midi,  trois  divi- 
sions, au  nord  deux  seulement;  cette  différence  semble 
leoir  à  la  position  des  chapelles  par  rapport  aux  remparts 
romaiDS,  qui  touchaient  à  l'abside  de  la  cathédrale  et 
avec  lesquels  diverses  communications  ont  été  établies. 

U  y  aurait  encore  beaucoup  à  dire  sur  la  cathédrale  de 
^nlis;  ne  prétendant  pas  écrire  une  monographie,  nous 
devons  nous  arrêter  et  consacrer  quelques  mots  à  deux 
édifices  qui  méritent  à  côté  de  Notre-Dame  une  place 
booorable.  L'un  est  tout  voisin  de  la  basilique  dont  il  est 
loin  d'égaler  les  dimensions  et  l'intérêt  archéologique,  mais 
qu'il  surpasse  en  unité  et  dont  l'aspect  est  relativement 
plus  majestueux.  C'est  cette  même  église  Saint-Frambourg 
dont  nous  avons  relaté  plus  haut  la  réédification.  Les  res- 
sources procurées  par  l'ostension  des  reliques  et  par  les 
indulgences  furent  assez  abondantes  pour  permettre  d'éle- 
ver d'un  seul  jet  ce  beau  vaisseau  sans  bas-cêté  ni  trans- 
sept,  qui  rappelle,  avec  moins  d'élégance,  mais  avec  plus 
de  grandeur,  les  saintes  chapelles  des  xiii*  et  xrv*  siècles. 
La  façade  était  percée  d'une  porte  assez  étroite,  selon  le 
type  qui  semble  particulier  aux  environs  de  Senlis,  sur- 
montée d'une  rose  immense  qui  a  dû  être  murée  peu 
après  sa  construction.  Quatre  compartiments  de  voûtes 
sexpartites  forment  à  l'intérieur  huit  belles  travées,  que 
suivent  une  neuvième  travée  et  l'abside.  Les  corniches 
«c»nt  formées  de  feuilles  entabli^s,  qu'on  ne  voit  pas  appa- 
raître avant  ii80,  et  qui  furent  rares  jusqu'au  xiii*  siècle. 
Les  fenêtres,  sans  meneaux,  sont  larges  et  bien  propor- 


S66      CONGRÈS  A&GHÉOLOOIQUE  DE  FRANGE. 

tionnées.  Les  contre-forts  s'amortissent  par  un  long  glacis. 
Saint-Frambourg  est  un  type  qui  mérite  d'être  chaude- 
ment recommandé  pour  les  constructions  nouvelles;  ce 
modèle,  heureusement,  nous  restera  longtemps  encore, 
grâce  à  la  protection  de  l'État  et  aux  excellentes  disposi- 
tions de  son  propriétaire,  M.  Puissant,  qui  veille  intelli- 
gemment à  sa  conservation. 

L'autre  monument  est  l'église  de  Saint-Leu-d'Esserent, 
déjà  visitée  par  plusieurs  membres  du  Congrès  de  1866, 
et  qui  a  été  encore  l'objet  d'un  pèlerinage  pour  le  Congrès 
de  1877.  Il  y  a  là,  comme  à  Notre-Dame  de  Senlis,  trois 
nefs  et  rond-point  à  chapelles  absidales,  mais  point  de 
croisillons.  Le  porche  parait  remonter,  avec  la  tour  qui 
le  flanque,  adroite,  à  1150  environ;  mais  le  reste  doit 
être  postérieur  d'un  demi-siècle.  On  ne  voit  plus  de  tri- 
bunes qu'au-dessus  du  rond-point;  à  la  nef  c'est  un  trifo- 
rium  à  larges  arcades  et  plus  profond  que  ne  le  sont  géné- 
ralement ceux  du  xiir  siècle.  Les  chapelles,  peu  profondes 
et  à  deux  divisions,  ressemblent  à  celles  qui  flanquent  à 
gauche  l'abside  de  la  cathédrale  de  Senlis  :  ce  type  de 
chapelles,  inauguré  à  Saint-Maciou  dePontoiseou  à  Saint- 
Denis,  prévalut  jusqu'à  la  fin  du  xii*"  siècle  dans  les  pre- 
miers ronds-points  gothiques.  La  chapelle  de  l'axe,  àSaint- 
Leu,  avait  un  premier  étage  donnant  sur  les  tribunes  de 
l'abside;  les  fenêtres  de  ce  premier  étage  chevauchent  sur 
celles  de  l'élage  inférieur,  car  il  y  a  ici  trois  divisions 
au  lieu  de  deux.  L'église  de  Saint*Leu-d'Esserent  devait 
avoir  quatre  clochers  ;  ceux  qui  ont  été  construits  s'élèvent, 
l'un  à  côté  du  porche,  à  droite^  avec  sa  flèche  en  pierre, 
les  deux  autres  entre  le  chœur  et  l'abside,  avec  leurs  toits 
à  double  égout.  La  flèche  de  la  façade,  de  la  fin  du 
xu"  siècle  sans  doute,  montre  dans  les  colonnettes  à  jour 
dont  ses  arrêtes  sont  flanquées  jusqu'à  mi-hauteur,  une 


XUT*  SESSION,  A  SENUS.  267 

iM  premières  tentatives  faites  pour  ménager  une  transi- 
lioa  entre  le  plein  des  pyramides  et  le  vide  de  l'espace. 

Si  It  Révolution  n'avait  pas  amené  tant  de  destructions 
aux  environs  de  Senlis,  nous  trouverions  encore  dans 
Saint-Thomas  de  Crépy  un  type  important  du  style  ogival 
rudimentaire,  plus  avancé  que  les  trois  premiers.  Il  n'en 
reste  que  la  façade,  de  style  ogival  primitif,  et  une  belle 
U>ur  avec  sa  flèche  ajourée.  L'église  abbatiale  de  Chaâlis 
trouverait  aussi  sa  place  à  côté  de  Saint-Thomas;  cette 
église  était  surtout  curieuse  par  ses  croisillons  formant 
<ki  absides  à  cinq  pans. 

Nous  devons  au  moins  mentionner  quelques  parties 
importantes  des  églises  de  Creil,  de  Mello,  de  Saint- Yaast- 
Us-Mello,  de  Ghamant,  de  Séry,  de  Roberval,  de  Néry,  etc. 
Betuooup  de  clochers  remontent  à  la  fin  du  xii*  siècle; 
quelques  flèches  sont  de  la  même  époque,  notamment 
eeiles  de  Saint- Vaast-de-Longmont  et  de  Béthisy-Saint- 
HarUn. 

Dès  le  milieu  du  xiii*  siècle,  après  la  construction  du 
clocher  de  Senlis,  il  ne  se  produisit  plus  guère  d'œuvres 
originales  dans  l'arrondissement  de  Senlis;  mais  nous 
citerons  : 

Pour  le  xui*  siècle,  les  églises  de  Montataire,  de  Cires- 
lès-Meilo,  de  Montépilloy;  la  chapelle  dite  de  l'abbé,  à 
Ghaàlis. 

Pour  les  XY*  et  xvi*  siècles,  Saint-Pierre  de  Senlis  et 
les  mines  de  l'abbaye  de  la  Victoire,  avec  fragments  du 
lui*  siècle;  les  églises  de  Fresnoy-la-Rivière,  de  Lieu- 
Restauré,  du  Mesnil-Saint-Denis,  de  Boran,  de  Montagny- 
Sainte-Félicité. 

Nous  ne  connaissons  aucune  partie  importante  d'église 
remontant  bien  authentiquement  au  xiv*  siècle;  mais 
parmi  les  flèches  élevées  depuis  le  xiii'  siècle  jusqu'à  la 


368      CONGRÈS  ARGHÉOLOGIQUS  DE  FRANGE. 

fin  du  xyVj  suivant  le  type  inauguré  à  Senlis,  rio^^ 
devons  signaler  celles  de  Plailly,  de  Boran,  de  CreiU 
Chamant,  de  Béthisy-Saint-Martin,  de  Fresnoy-le-Lu^*' 
de  Saint-Pierre  de  Senlis,  de  Saint-Thomas  de  Cr^P^ 
d'Eve,  de  Montagny-Sainte-Félicité,  de  Néry  et  d'Acy-^^' 
Multien,  ces  deux  dernières,  dépourvues  de  crochets  bt^  ^ 
que  percées  à  jour. 

La  Renaissance  n'a  guère  produit  aux  environs  de  Sei^  ^ 
lis;  le  style  ogival  y  avait  pris  de  fortes  racines  et  on    i^ 
voit  s'appliquer  aux  églises  jusqu'à  la  fin  du  xvi*  siècle ^ 
Les  églises  d'architecture  gothique  flamboyante  n'y  soU^ 
pas  rares;  mais  peu  sont  en  entier   du   xv*   ou   du 
xvi°  siècle;  il  y  eut  alors  des  restaurations  plutôt  que  àes 
constructions  à  nouveau.  On  peut  cependant  citer  de  ce 
style  une  des  tours  de  Saint-Pierre  de  Senlis;  c'est  par 
elle  que  nous  terminerons  cette  revue  beaucoup  trop  som- 
maire, nous  le  regrettons  vivement,  des  monuments 
religieux  de  Senlis  et  de  ses  environs. 


2*  SÉAiNCE  DU  30  MAI. 

PRÉSIDENCE  DE  M.   ODENT,   MAIRE  DE  SENUS. 

Siègent  au  bureau  MM.  Vernois  et  Palustre. 

La  séance  est  ouverte  à  trois  heures  et  demie. 

Le  procès-verbal  de  la  dernière  séance  est  lu  et  adopte. 

La  i>arole  est  ensuite  donnée  à  M.  de  Laurièrc  pour  la 
lecture  d'un  mémoire  de  M.  Tabbé  Van  Drivai,  d'Arras, 
em^téché  de  se  rendre  au  Congrès. 


xinr*  SESSION,  a  senus.  S69 


De  la  terminologie  archéologique. 

Si  je  doone  à  ces  quelques  notes  un  nom  un  peu  sonore, 
c'est  qu'à  vrai  dire  je  n'en  trouve  point  d'autre  pour 
exprimer  d'une  manière  générale  une  pensée  que  je  vais 
bien  vite  spécialiser. 

11  s'agit  d'ailleurs  d'une  chose  qui  a  une  importance 
réelle,  à  plusieurs  points  de  vue.  Si  les  mots  sont  nets, 
clairs,  bien  définis;  s'ils  s'appliquent  parfaitement  à  un 
objet  bien  étudié  et  sur  lequel  on  a  des  idées  claires,  alors 
les  mots  servent  merveilleusement  à  faire  comprendre  les 
choses,  ils  portent  la  lumière  et  la  satisfaction  dans  Tes- 
pHt.  S'il  en  est  autrement,  tout  devient  vague,  nébuleux, 
ce  n'est  plus  de  la  science,  car  la  science  suppose  connais- 
sance, notion  certaine,  vue  claire  et  distincte. 

Il  est  donc  très-important  d'avoir,  en  archéologie 
comme  en  toute  autre  matière,  un  vocabulaire  technique 
bien  correct,  sérieusement  motivé,  si  l'on  veut  maintenir 
A  cette  science  fort  digne  et  fort  utile  le  rang  auquel  elle  a 
droit. 

Or,  en  est-il  ainsi  de  quelques-uns  des  termes  souvent 
employés  aujourd'hui?  c'est  ce  que  je  veux  examiner  ici 
en  toute  liberté  comme  sans  parti  pris. 

Les  mots  que  j'ai  en  ce  moment  en  vue,  et  dont  je  viens 
positivement  contester  la  justesse,  sont  les  termes  que 
Toici  :  préhistorique,  âge  de  pierre,  âge  de  bronze,  âge  de 
fer,  avec  diverses  subdivisions. 

Le  mot  préhistorique  fait  naturellement  penser  au  mot 
historique  :  de  là  à  celui  que  l'on  nomme  le  Père  de  l'his. 
toirc,  il  n'y  a  qu'un  pas.  J*ai  donc  eu  l'idée  de  voir  si,  par 
hasard,  Hérodote  ne  parlerait  pas  de  ces  objets  dits  an  té- 


270      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

rieurs  à  l'histoire,  et  j'ai  relu  tout  mon  Hérodote,  afin  de 
ne  laisser  passer  aucun  document  et  de  donner  d'une 
façon  absolument  authentique  ceux  que  j'y  trouverais,  en 
conservant  d'ailleurs  leur  caractère  propre  et  leur  vrai 
sens  au  milieu  de  ce  qui  les  précède  et  de  ce  qui  les  suit. 

Or,  voici  que,  dès  le  premier  de  ces  neuf  livres  aux- 
quels les  Grecs  reconnaissants  donnèrent  les  noms  des 
Muses,  dès  le  livre  de  Clio,  je  trouve  tout  un  enseigne- 
ment qui  n'est  pas  sans  valeur.  Hérodote  parle  des  Massa- 
gètes,  et  il  s'exprime  comme  il  suit  : 

«  Les  Massagètes...  emploient  à  toutes  sortes  d'usages 
a  l'or  et  le  cuivre.  Ils  se  servent  de  cuivre  pour  les  piques, 
a  les  pointes  des  flèches  et  les  vagares  (haches  à  deux  tran- 
a  chants),  et  réservent  l'or  pour  orner  les  casques,  les  bau- 
a  driers  et  les  larges  ceintures  qu'ils  portent  sous  les  ais- 
a  selles.  Les  plastrons  dont  est  garni  le  poitrail  de  leurs 
.a  chevaux  sont  aussi  de  cuivre  :  quant  aux  brides,  aux 
a  mors  et  aux  bossettes,  ils  les  embellissent  avec  de  l'or, 
a  Le  fer  et  l'argent  ne  sont  point  en  usage  parmi  eux, 
a  et  on  n'en  trouve  point  dans  leur  pays;  mais  l'or  et  le 
a  cuivre  y  sont  abondants.  » 

(Hérodote,  Clio  ou  livre  !•',  ccxv.) 

Voilà  donc  un  peuple  qui,  du  premier  coup,  serait 
arrivé  à  l'âge  de  cuivre,  sans  compter  l'âge  d'or  (dont  on 
ne  parle  plus);  en  revanche  il  n'aurait  jamais  connu  l'âge 
de  fer  (ni  l'âge  d'argent).  On  aurait  bien  vraiment  tort  de 
s'étonner  de  cette  anomalie,  si  Hérodote,  avec  son  bon  sens 
exquis,  ne  venait  nous  apprendre  que  s'ils  ne  se  servaient 
ni  de  fer  ni  d'argent,  c'est  qu'ils  n'en  avaient  pas  !  La  rai- 
son est  péremptoire,  et  nous  soupçonnons  dès  maintenant 
que,  à  toute  époque  et  un  peu  en  tout  pays,  les 
hommes,  même  les  plus  habiles,  n'ont  pu  faire  lisage  que 
de  ce  qu'ils  avaient.  Mais  poursuivons. 


ZLIT*  SESSION,   A  SBNLI8.  27i 

Au  iifre  d'Eaterpe  (livre  second),  nous  trouvons  plu- 
sieurs passages  fort  intéressants. 

Pariant  des  mille  usages  des  Égyptiens,  il  cite,  entre 
autres,  le  suivant  : 

m  Ils  (les  Égyptiens)  twivent  dans  des  coupes  d'airain, 
«  qu'ils  ont  soin  de  nettoyer  tous  les  jours.» 

Hérodote,  Euterpe  ou  livre  11,  xxxvii. 
Et  plus  loin,  en  décrivant  avec  les  plus  grands  détails 
le  mode  qu'ils  suivaient  dans  les  embaumements,  il  donne 
œ  renseignement  très-curieux  : 

«  Ds  font  ensuite  une  incision  dans  le  flanc  avec  une 
«  pierre  d'Ethiopie  tranchante;  ils  tirent  par  cette  ouver- 
•  ture  les  intestins...  » 

(Hérodote,  description  de  l'embaumement. 
Euterpe  ou  livre  11,  lxzxti.) 
(^'est  Hérodote  qui  dit  ce  qu'il  a  vu  :  Voici  donc  les 
Égyptiens  qui  se  trouvent  être  en  même  temps  à  l'âge 
d'iirain  et  à  l'âge  de  pierre,  vers  le  vi*  siècle  avant 
<ié8ii8-Christ.  Si  nous  trouvons  fort  extraordinaire  (dans 
les  idées  actuelles)  la  simultanéité  de  ces  deux  âges,  nous 
pourrons  nous  consoler  en  constatant  que  ceci  est  parfai- 
tement historique  et  pas  du  tout  préhistorique. 

Mais  nous  n'en  sommes  pas  quittes  avec  le  livre  à'Eu- 
terpe. 
C'est  là  encore  que  nous  trouvons  le  passage  suivant  : 
Après  avoir  dit  ce  qu'il  en  coûta  pour  les  oignons  et  aulx 
donnés  aux  ouvriers  qui  travaillèrent  a  la  grande  pyra- 
mide, Hérodote  ajoute  :  «  Combien  doit-il  en  avoir  coûté 
c  pour  les  outils  de  fer,  pour  le  reste  de  la  nourri- 
«  ture,  etc.?  pour  tailler  les  pierres,  etc.  etc.?» 

(Hérodote,  Euterpe  ou  livre  H,  cxxv.) 
Voilà  donc  le  fer  employé,  —  et  comment  aurait-on  pu 
s'en  passer? — employé,  dis-je,  à  la  grande  pyramide,  c'est- 


972      CONGRÈS  ARGHÉOLOGIQU£  DE  FRANGE. 

à-dire  sous  la  quatrième  dynastie,  ce  qui  nous  reporte 
fort  loin  et  est  en  outre  parfaitement  historique.  La  pyra- 
mide est  là,  en  effet,  et  c'est  bien  un  monument  histo- 
rique au  premier  chef. 

Dans  ce  même  livre,  eu  et  glu,  Hérodote  raconte  que, 
seul  des  douze  rois,  Psammétichus,  n'ayant  point  de  coupe 
d'or,  fit  une  libation  avec  son  casque  et  fut  exilé  à  cause 
de  cela,  en  vertu  de  la  prédiction  d'un  oracle.  Cependant, 
en  exécution  d'une  autre  prédiction  d'oracle,  des  hommes, 
revêtus  d'armes  en  airain  (chose  inconnue  en  Egypte),  des 
Ioniens  et  des  Cariens,  des  hommes  d'airain  abordent  en 
Egypte  :  il  réclame  leur  aide  et  avec  eux  il  soumet  toute 
l'Egypte  à  la  domination. 

(Hérodote,  Euterpe,  gli  et  cui.) 

Ainsi,  nous  sommes  en  présence  d'hommes  qui  ont  de 
l'airain,  ou  plutôt  des  armes  d'airain,  et  d'autres  qui 
n'emploient  pas  ce  métal  aux  mêmes  usages.  Faut-il  en 
conclure  qu'il  y  a  là  un  âge  d'airain  et  que  là  il  n'y  en  a 
pas?  nullement.  Les  Ioniens  et  les  Grecs,  en  général,  se 
servirent  de  ces  sortes  d'armes,  comme  nos  ancêtres,  les 
Gaulois,  et  les  autres  avaient  d'autres  habitudes,  voilà  tout 
ce  que  la  logique  peut  tirer  de  ces  faits.  Elle  cesserait 
d'être  la  logique  si  elle  voulait  aller  plus  loin. 

Dans  Thalie^  ou  livre  IH®,  Hérodote  nous  parle  de 
divers  peuples,  entre  autres  des  Arabes,  a  II  n'y  a  point,  dit- 
a  il,  de  peuples  plus  religieux  observateurs  des  serments. 
0  Voici  les  cérémonies  qu'ils  observent  d  cet  égard.  Lors- 
a  qu'ils  veulent  engager  leur  foi,  il  faut  qu*il  y  ait  un  tiers, 
a  un  médiateur.  Ce  médiateur,  debout  entre  les  deux  con- 
a  tractants,  tient  une  pierre  aiguë  et  tranchante,  avec 
a  laquelle  il  leur  fait  à  tous  deux  une  incision  à  la  paume 
a  de  la  main,  près  des  grands  doigts.  Il  prend  ensuite  un 
(c  petit  morceau  de  l'habit  de  chacun,  le  trempe  dans  leur 


XUY*  SESSION,    A   SENLIS.  273 

t  ttDg,  6t  ea  frotte  sept  pierres  qui  sont  à  côté  d'eux,  en 
i  ÎDToqoant  Baochus  et  Uranie.  Cette  cérémonie  achevée, 
«  celui  qui  a  engagé  la  foi  donne  à  l'étranger,  ou  au 
«  citoyen  si  c'est  avec  un  citoyen  qu'il  traite,  ses  amis 

*  pour  garants,  et  ceux-ci  pensent  eux-mêmes  qu'il  est  de 

•  l'équité  de  respecter  la  foi  des  serments.  » 

•  (Hérodote,  Thalie,  viii.) 
Que  voir  dans  ce  passage,  sinon  un  rite  religieux  dans 

kquel  on  se  sert  d'un  couteau  de  pierre,  à  un  âge  parfai- 

toueot  historique  et  à  une  date  connue  puisqu'elle  est 

cootemporaine  d'Hérodote? 
Le  même  auteur,  dans  le  même  livre  (Tkaliêy  xii)  raconte 

œ  qui  suit  :  c  J'ai  vu  sur  le  champ  de  bataille  (entre  les 
Perses  et  les  Égyptiens)  une  chose  fort  surprenante,  que 
les  habitants  de  ce  canton  m'ont  fait  remarquer.  Les  osse- 
ments de  ceux  qui  périrent  à  cette  journée  sont  encore 
dispersés,  mais  séparément  :  de  sorte  que  vous  voyez 
d'un  côté  ceux  des  Perses,  et  de  l'autre  ceux  des  Égyp- 
tiens, aux  mêmes  endroits  où  ils  étaient  tombés  dès 
les  commencements.  Les  têtes  des  Perses  sont  si  tendres, 
qu'on  peut  les  percer  en  les  frappant  seulement  avec 
UD  caillou  ;  celles  des  Égyptiens  sont  au  contraire  si 
dures,  qu*à  peine  peut-on  les  briser  à  coup  de  pierres. 
Ils  m'en  dirent  la  raison ,  et  n'eurent  pas  de  peine  à 
me  persuader.  Les  Égyptiens,  me  dirent- ils,  com- 
mencent dès  leur  bas-âge  à  se  raser  la  tête  ;  leur  chkne 
se  durcit  par  ce  moyen  au  soleil,  et  ils  ne  deviennent 
point  chauves.  On  voit,  en  effet,  beaucoup  moins 
ii*hommes  chauves  en  Egypte  que  dans  tous  les  autres 
pays.  Les  Perses,  au  contraire,  ont  le  crâne  faible,  parce 
qae  dès  leur  leur  plus  tendre  jeunesse,  ils  vivent  à 
l'ombre,  et  qu'ils  ont  toujours  la  tête  couverte  d'une 
tiare.  J'ai  vu  de  telles  choses;  et  aussi  j'ai  remarqué 

XUV*  1188105.  18 


274       CONGRÈS  ARGUÉOLOGIQUË  DE  FRANCE. 

(c  à  Paprômis  quelque  chose  de  semblable  à  j'égard  iB^ 
a  ossements  de  ceux  qui  furent  défaits  avec  Achéménè^'r 
a  fils  de  Darius,  par  Inaros,  roi  de  Lybie.  • 

Cette  citation  n'a  qu'un  rapport  indirect  au  sujet  qu^ 
nous  traitons,  mais  elle  répond  si  bien  à  d'autres  préoccu^ 
pations  actuelles,  que  nous  avons  cru  utile  de  l'insérer  ici. 

Au  livre  de  Thalie  nous  trouvons  encore  les  Éthiopiens 
et  leur  or.  Des  chaînes  d'or  attachent  les  prisonniers  et  le 
cuivre  est  pour  ces  peuples  le  plus  précieux  des  métaux, 
parce  qu'il  est  rare  chez  eux  [Thalie^  xxiii).  Il  se  ren- 
contre d'ailleurs  des  détails  précieux  sur  des  colonnes  de 
verre  et  sur  des  objets  naturels  et  artificiels  employés  par 
eux  avec  une  industrie  qui  prouve  que  la  civilisation  n'est 
pas  née  d'hier. 

Au  livre  de  Melpamène,  lxxi  ,  il  est  question  du  pays 
des  Scythes  et  des  tombeaux  des  rois.  Nous  ne  dirons  pas 
ici  tout  ce  qu'ils  renferment,  mais  nous  citerons  les 
coupes  d'or,  en  faisant  remarquer,  avec  Hérodote,  que  ces 
peuples  ne  connaissent  ni  l'argent  ni  le  cuivre. 

Je  pourrais  citer  encore  bien  des  passages  où  il  est 
question  d'armes  de  diverses  sortes,  de  cuirasses  de  lio,  de 
casques  déjoue  tissu, de  bandes  de  fer,  de  grandes  épées,  etc. 
On  peut  voir,  entre  autres  endroits,  Polymnie^  xxxix.  Con- 
tentons-nous de  rappeler  ici  le  dénombrement  de  l'armée 
de  Xerxès,  au  même  livre.  Au  milieu  de  la  description 
d'armes  de  toutes  sortes,  comprenant  toutes  les  formes 
possibles  et  tous  les  métaux,  description  très-longue  et  fort 
curieuse,  nous  trouvons  ce  ({ui  a  rapport  aux  Éthiopiens 
et  qui  porte  ce  qui  suit  : 

a  Les  Éthiopiens,  vêtus  de  peaux  de  léopards  et  de  lions, 
a  avaient  des  arcs  de  branches  de  palmier  de  quatre  coudées 
((  de  long  au  moins,  et  de  longues  flèches  de  canne  à  l'extré- 
0  mité  desquelles  était,  au  lieu  de  fer,  une  pierre  pointue 


XLïV   SESSION,    A   SENLIS.  ^275 

a  dont  ils  se  servent  aussi  pour  graver  leurs  cachets. 
c  Outre  cela,  ils  portaient  des  javelots  armés  de  cornes  de 
«  chevreuil  pointues  et  travaillées  comme  un  fer  de  lance, 
•  des  massues  pleines  de  nœuds. 

(Hérodote,  Polymnie 'ou  livre  Vil,  lxix,  dans  le 
dénombrement  de  Tarmée  de  Xerxès.) 
Si  Ton  veut  bien  lire  dans  l'original  cette  longue  énu- 
mération  de  peuples,  de  costumes,  d'armures,  on  y  trou- 
vera, en  même  temps,  du  fer,  des  tiares,  des  tuniques, 
des  cuirasses,  des  javelots,  des  flèches  de  canne,  des 
mitres,  de  l'airain,  des  casques,  des  boucliers^  des  poi- 
gnards, des  massues  hérissées  de  nœuds  de  fer,  du  lin, 
des  bonnets  foulés,  des  haches,  du  coton,  des  peaux,  des 
arcs,  des  flèches  de  pierre,  des  javelots  durcis  au  feu,  des 
cornes  d'airain,  du  bois,  du  cuir,  et  jusqu'à  des  lazzos  ou 
lacs.  Il  n'y  a,  en  vérité,  rien  de  nouveau  sous  le  soleil. 
On  peut  voir  cette  énumération  extrêmement  pittoresque 
dans  Polymnie,  depuis  le  chapitre  lvi^  jusqu'au  chapitre  g. 
le  défilé  dure  sept  jours  et  sept  nuits  :  il  se  fait  à  coup  de 
fouetl... 

Nous  trouverons,  si  Hérodote  ne  suffit  pas,  d'autres 
témoignages  dans  Pausanias,  dans  Ammien-Marcellin, 
daDs  Tacite,  dans  Lucrèce.  Nous  saurons  par  eux  que  si 
les  Sarmates  mettent  des  pointes  d'os  au  bout  de  leurs 
lances,  c'est  parce  qu'ils  n'ont  pas  de  fer.  Les  Huns  en 
font  tout  autant,  et  pour  les  mêmes  raisons  d'autres 
peuples  agissent  de  même.  Go  n'est  jamais  un  progrès 
l)ien  grand  dans  la  civilisation  qui  causent  les  différences 
d'usage,  c'est  l'abondance  ou  la  rareté  des  matières  pre- 
mières. 

Pline,  de  son  côté,  au  milieu  de  bien  d'autres  détails, 
nous  donne  la  notion  suivante  sur  les  haches  polies,  fort 
connues  de  son  temps. 


270      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIQUB  DE  FRANGE. 

a  Sotacus  et  alia  duo  gênera  fecit  cerauniae,  nigpras  ru«-^ 
t  bentisque,  ac  similes  eas  esse  securibus  :  ex  his,  qus^ 
c  nigrsB  sint  et  rotundse,  sacras  esse,  urbes  per  illa^ 
c  ezpugnari  et  classes,  easque  betulos  vocari  :  qus  vero 
a  loDgœ  suât,  ceraunias.Taciunt  et  aliam  raram  admo- 
a  dum,  et  magorum  studiis  expetitam,  quoniam  non 
«  aliubi  inveniatur,  quam  in  loco  fulmine  icto.  d 
(Plinii,  Naturalis  historix,  lib.  XXXVII,  u.) 
Au  reste,  nous  retrouvons  les  armes  de  pierre  jusques 
dans  les  temps  modernes. 
Écoutous  plutôt  ce  détail  de  la  bataille  d'Hastings  : 
t  Pedites  itaque  Normannorum  propius  accedeotes  pro- 
«  vocant  Anglos,   missilibus    in    eos  vulnera  dirigunt 
«  atque  necem.  Uli  contra  fortiter  quo  quisque  valet 
«  ingenio  resistunt.  Jactantcuspides  ac  diversorum  gene- 
t  rum  tela,  sœvissimasquasque  secures,  et  lignis  imposita 
%  Saxa...  0  p.  201 ,  Gesta  Guilielmi  Ducis  Normannofiim  et 
Régie  Ànglorum,  commencement  de  la  bataille  d'Hastings, 
récit  de  Guillaume  de  Poitiers,  historien  contemporain. 
Dans  HiitorisB  Nomannorum  Scriptores  antigui,  par  André 
Duchesne,  Paris,  4019,  in-iblio.  Seule  édition  de  tjuiU 
laume  de   Poitiers,    d'après    VHistoire  littéraire  de  la 
France,  tome  \\\\*. 

Ou  voudra  bien  remarquer  que  je  n'ai  point  cité  la 
Bible,  qui  cependant  foisonne  de  renseignements  à  ce 
sujet.  Facilement  j'aurais  pu  commenter  le  texte  de  la 
Genèse  où  il  est  parlé  d'ouvriers  très-habiles  en  tous' 
métaux,  dès  la  quatrième  génération  à  partir  d'Adam. 
J'aurais  pu  montriT  l'usage  de  la  pierre  à  usage  de  cou- 
teau longtemps  après  l'ustige  des  métaux  travaillés  de  la 
manière  la  plus  artistique^  piir  exemple  les  couteaux  de 
pierre  de  Josué  et  les  merveilles  de  l'arche  d'alliance  et  du 
tabernacle,  où  l'on  constate  le  travail  au  repoussé,  le  tra- 


XUY*  SBSS10N,  A  SENLIS.  277 

ml  cisdé  et  cent  autres  choses  artistiques.  Ceci  se  trouvera 
ea  détail  dans  un  ouvrage  que  j'ai  en  ce  moment  en  pré- 
paration et  qui  aura  pour  titre  :  LKrt  dam  la  Bible. 

Dès  maintenant  je  ne  poserai  qu'une  conclusion  et  je 
pense  qu'on  ne  la  trouvera  pas  exagérée. 

Il  est  bon,  il  est  utile  de  chercher  partout  les  traces  et 
les  monuments  de  l'industrie  de  l'hoiume;  mais  en  même 
temps  il  est  sage,  il  est  scientifique  de  ne  pas  généraliser 
trop  vite,  de  ne  pas  appeler,  par  exemple,  préhistorique 
ce  qui  est  parfaitement  connu  dans  l'histoire,  et  de  ne 
pas  créer  des  catégories  successives  ou  âges ,   là  où  il 
y  a  simplement  des  faits  accidentels ,  causés  par  des  cir- 
constances locales,  6t  souvent  ayant  une  existence  simul- 
tanée. 

Après  quelques  observations  échangées  entre  divers 
membres  du  Congrès,  M.  l'abbé  Vattier  a  la  parole  sur 
la  45*  question  du  programme,  ainsi  conçue  : 

Faire  connaître  rhistoire  des  compagnies 
d'archers  et  d'arquebusiers;  donner  les 
somoms  des  diverses  compagnies  et  en 
eiq>liquer  l'origine. 


Les  archers,  arbalétriers  et  arcpxebusiers, 

à  Senlis. 

L'histoire  de  nos  compagnies  actuelles  d'archers  et  d'ar- 
iMlétriers  ne  serait  que  d'un  intérêt  assez  modéré,  car  ce 
5<jQt  simplement  des  réunions  dont  le  but  est  une  distrac- 
tion honnête,  en  même  temps  qu'un  exercice  d'a<lresse. 
C'est  là  leur  histoire  depuis  la  révolution  et  même  long- 


278      CONGRÈS  ABCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCS. 

tempe  avant.  L'arc,  en  effet,  et  Tarbalète  sont  derenas  des 
armes  d'amusement  depuis  qu'ils  ont  perdu  leur  valeur 
au  point  de  vue  militaire.  Mais  quand  même  la  poudre 
ne  serait  pas  venue  détrôner  le  carrelet  et  le  vireton,  ces 
compagnies  armées  eussent  perdu  leur  raison  d'être  dans 
l'état  actuel  de  l'Europe.  Depuis  la  création  des  armées 
permanentes,  depuis  que  tout  homme  valide  doit  à  sou 
pays  la  dette  du  sang,  ces  milices  locales  n'ont  plus  de 
valeur.  Il  n'en  fut  pas  toujours  ainsi,  et  si  nous  remon- 
tons de  quelques  siècles  en  arrière,  nous  verrons  les  com- 
pagnies franches,  comme  on  les  appelait,  jouer  un  rôle 
beaucoup  plus  important.  Elles  sont  un  appoint  considé- 
rable pour  les  armées  royales,  et  en  même  temps  la  plus 
sûre  garnison  de  la  cité.  L'arc,  au  moyen  ûge,  était  trop 
dédaigné  dans  notre  pays,  et  il  fallut  les  sinistres  déCsûtes 
de  Crécy,  Poitiers,  Azincourt,  où  les  archers  Anglais 
eurent  raison  des  puissants  chevaliers,  pour  faire  sentir 
aux  chefs  de  la  nation  la  valeur  et  l'importance  de  cette 
arme. 

Les  chevaliers  équipés  de  toute  pièce  étaient  sans  doute 
l'élite  de  l'armée,  mais  ils  étaient  forcément  en  nombre 
restreint  et  les  nombreux  bataillons  d'archers  et  d'arbalé- 
triers arrivaient  facilement  à  rendre  inutile  leur  incontes- 
table bravoure:  et  puis  il  fallait  compter  avec  un  habile 
tireur  qui  pouvait  choisir  dans  la  visière  le  trou  par  lequel 
son  vireton  irait  tuer,  à  cent  pas,  le  plus  brave  chevalier. 

La  France,  au  lieu  d'emprunter  des  archers  mercenaires 
aux  Génois  ou  aux  Allemands  fit  entrer,  pour  une  plus 
grande  partie,  le  peuple  et  la  bourgeoisie  dans  ses  armées; 
elle  eut  moins  de  mépris  pour  cette  ribaudaille  et,  en 
maintes  occasions,  elle  eut  à  se  louer  de  ces  nouveaux  auxi- 
liaires. Et  si  de  celte  première  organisation  naquirent  do 
gmves  abus,  parce  que  le  peuple  sentant  sa  force,  réagit 


XLiy  SESSION^   A  SENLIS.  270 

violemment  à  certaines  époques  contre  Toppression  trop 
criante,  et  fit  sentir  à  la  noblesse  trop  hautaine  la  pesan- 
teur de  son  bras,  du  moins,  elle  contribua  aussi  largement 
'à  ragrandissement  et  à  la  gloire  du  pays  en  môme  temps 
qu*à  sa  défense. 

L'histoire  complète  de  ces  compagnies  se  divise  néces- 
sairement en  deux  périodes  bien  distinctes  :  la  période 
luilitaire,  et  la  période  d'amusement  militaire,  si  on  peut 
la  désigner  ainsi,  la  première  se  prolongeant  d'ailleurs 
&S8ez  loin  dans  la  seconde  par  la  substitution  de  l'ar- 
quebuse, du  fusil,  de  la  couleuvrine  même,  car  il  y  eut 
i^  compagnies  de  couleuvriniers,  à  l'arc  et  à  l'arba- 
lète. 

Ce  serait  certes  une  histoire  intéressante,  et  que  j'aime- 
rais à  développer  dans  tous  ses  détails,  mais  les  renseignc- 
loents  me  font  défaut  pour  presque  toutes  ces  compagnies, 
^  le  Congrès  n'a  d'ailleurs  que  peu  d'instants  à  m'accor- 
der.  Je  me  suis  donc  contenté  de  réunir  quelques  rensei- 
gneueots  sur  Seulis,  et  je  crains  encore  de  fatiguer  votre 
attention. 

Je  trouve  pour  la  première  fois  les  arbalétriers  signalés 
>iSenlis,  le  5  juillet  id83.  Ce  n'est  pas  évidemment  l'ori- 
gioe  de  leur  établissement,  car  à  Compiègne  ils  commen- 
cèrent à  s  organiser  en  1358,  pour  la  défense  de  Charles  V; 
à  Cbàlons-sur-ldarue  aussi,  et  les  lettres  patentes  des  arba- 
létriers de  Paris  sont  du  9  août  13r>9. 

Le  5  juillet  donc,  lecture  est  donnée  à  l'assemblée  du 
peuple  d'un  mandement  du  roi,  demandant  qu'on  lui 
envoie  le  plus  possible  d'arbalétriers  et  canoniers,  garnis 
(farbaiètefi  canons  et  poudre  à  canon,  à  i'éroune,  pour  le 
4  août  suivant. 

En  1380.  Charles  VI,  qui  vient  d*épouser  Isabcau  de 
Bavière,  conçoit  le  dessein  de  faire  une  descente  en  Angle- 


I 


3S0  CX)NGR£S  ARGHÉOLOGIOUB  ]»B  FEANGB. 

terre.  Il  envoie  donc  à  ses  baillis  et  lieutenants  Tordre  ^^ 
lever  un  corps  d'arbalétriers. 

Les  habitants  de  Senlis  convoqués  en  la  ville  par  trjf 
royal  ei  à  son  de  cloche^  entendent  lecture  du  mandemeii  ^ 
royal.  Usdécident'd'abord  qu'ils  équiperont  deux  hommes  ? 
puis  quelques  jours  après,  ils  consentent  à  en  armer  six^ 
avec  deux  varlets.  Ces  hommes  reçoivent  chacun,  pour  Is. 
solde  d'un  mois,  7  livres  et  8  sous  parisis.  Gilles  Picait 
les  conduit  à  Lille,  et  le  chevalier  Tristan  du  Bois  les 
enrôle  au  nom  du  roi.  Sur  son  observation,  la  ville  leur 
envoie  un  second  mois  de  solde.  Le  peuple,  consulté  sur 
les  moyens  de  couvrir  cette  dépense,  décide  qu'on  etieiZ/era 
deux  mois  de  forteresse.  C'est  Timpôt  militaire  qui  est 
ordinairement  levé  en  pareil  cas.  L^pédition  pourtant 
resta  à  l'état  de  projet,  et  l'armée  fut  dispersée. 

En  i4l4,  demande  nouvelle  au  nom  du  roi.  Hélas I  il 
n'était  guère  en  état  de  mener  un  siège,  mais  les  régents 
usent  encore  de  Tauiorité  de  son  nom  et  demandent  la 
plus  grant  foison  de  gens  darmes  de  trait  et  de  manouvriers 
qui  pourront  servir  avec  canons,  manticaulz  {\],  pics,  pieds 
de  chèvre  et  autres  abillements  pour  guerre  se  aucuns  en 
avoit  iceile  ville,  le  plus  hastivement  que  faire  pourront. 
Ils  demandent  en  outre  un  recensement  des  archers  et 
arbalétriers  de  la  ville.  Mais  l'assemblée  se  contente  de 
s'excuser  sur  l'impossibilité  où  elle  est  de  nen  fournir. 

Le  48  février  1419,  la  ville,  pour  veiller  à  sa  propre 
défense,  fait  mettre  deux  arbalètes  chaque  soir  à  la  dispo- 
sition des  sergents  qui  commandent  aux  portes. 

Le  3  déceuibre  Uîi,  Henri  VI  d'Angleterre,  étant 

ili  Sans  doute  nianlelets,  mantelletum ,  sorte  de  psrapet 
IK^rlatif,  en  usa^e  tlans  les  sièges  pour  s'approcher  plus  facile- 
ment de.  la  ville  assiégée. 


XUT*  SESSION,   A  SENUS.  %l 

maître  de  Paris,  le  capitaine  de  Senlis  demande  de  l'artil- 
lerie. On  lui  octroie  le  gros  canon  de  cuivre  de  la  ville 
avec  pierres  et  poudre,  mais  on  réserve  le  beuglere  (?)  de 
la  ville  et  un  petit  beugle  ou  beuglire  qui  vient  de  Chàlis. 
11  avait  été  amené  de  la  forteresse  en  1449  avec  six  petits 
canons,  lors  de  la  démolition  de  ce  fort  devenu  un  nid  de 
brigands  et  de  pillards. 

En  1423,  la  ville  entretint  vingt-huib archers  et  arbalé- 
triers devant  Compiègne. 

Et  ainsi,  suivant  les  circonstances,  ou  à  raison  des 
charges  qui  pèsent  sur  elle,  notre  cité  accorde  ou  refuse 
les  hommes  armés  que  trop  souvent  on. lui  demande  pen- 
dant cette  triste  période  de  notre  histoire.  Évidemment 
elle  dût  fournir  son  contingent  pour  soutenir  Charles  VII, 
à  mesure  qu'il  repoussait  l'usurpateur  anglais,  surtout 
lorsque  l'béroine  d'Orléans,  Jeanne  d'Arc,  livra  bataille 
dans  la  plaine  de  Montépilloy.  Senlis  était  restée  une  des 
dernières  fidèle  au  roi  de  France,  et  il  fallut  qu'un  traité  en 
forme  concédât  au  monarque  anglais  l'autorité  suprême 
dans  notre  pays  pour  qu'elle  consentit  à  lui  ouvrir  ses 
portes. 

Charles  V[I  comprit  tout  l'avantage  qu'il  pourrait  tirer 
d'une  armée  composée  de  l'élite  du  peuple  et  de  la  bour- 
geoisie et  par  ordonnance  datée  de  Montils-lès-Tours, 
en  1448,  il  organisa  un  corps  de  vingt-trois  mille  francs- 
vchers  (1).  Chaque  homme  de  ce  corps  devait  être  choisi 

(1)  «  Assemblée  au  commandement  de  noble  homme  M.  Gilles 
de  Saint-Simon,  bailli  et  capitaine  de  Senlis...  Cent  personnes 
présentes. 

»  A  esté  présenté  unes  lettres  du  roy  données  aux  IVlontils  lès 
Tours  le  SH  avril  4448,  par  lesquelles  il  mande  que  Ton  mette 
sur  chacune  paroisse  de  son  royaulme  un   archer  fourni   de 


282      G0N6R£S  ARCHÉOLOGIQUE  DB  FRANGE^ 

parmi  soixante  jeunes  gens  des  mieux  faits;  chaque  vil- 
lage devait  en  fournir  un,  et  ils  étaient  toujours  prêts  à 
marcher.  Ils  devaient  s'exercer  tous  les  dimanches. 

En  i466,  le  roi  ordonne  à  Pierre  Aubert,  bailli  de 
Melun  de  faire  lever  un  corps  de  quatre  mille  archiers 
dans  la  région.  Sentis  doit  fournir,  outre  ceux  qui  sont 
maintenant  équipés,  quarante-deux  francs-archiers,  munis 
ie  jaques,  salades^  espées,  dague,  arc  et  trousse,  arbalestre 
ou  voulge,  et  gantelets.  Pour  arriver  à  compléter  le  nombre 
voulu,  on  procède,  à  un  recensement  de  la  population 
virile.  Il  faut  que  chaque  village  fournisse  un  frane-archier 
ou  arbalétrier  par  cinquante  feux  et  l'équipe  d'armes 
et  habillements,  et  feront  serment  lesdits  archiers,  de  bien 
et  loyaument  servir  le  roi  et  non  autre.  Ou  reconnaît  à 
cette  clause  le  cauteleux  Louis  XL  Le  bon  roi  était  dans 
l'embarras;  il  avait  mécontenté  un  peu  tout  le  monde,  et 
beaucoup  certains  adversaires,  et  il  fallait  aviser.  Charles 
le  Téméraire,  François  II  de  Bretagne,  le  duc  de  Berry, 
le  duc  de  Bourbon,  blâmaient  ses  actes  ou  s'insurgeaient 
contre  son  autorité  et  lui  déclaraient  la  guerre;  la  ligue 
du  bien  public  ralliait  de  nombreux  adhérents.  Il  fallait 
donc  à  l'astucieux  monarque  joindre  à  des  troupes  nom- 
breuses toute  la  souplesse  de  son  génie  retors,  et  une 
grande  rapidité  d'actions.  Et  pourtant,  le  mandement 
signé  le  19  janvier  4465,  n'est  pas  encore  exécuté  dix 
mois  plus  tard,  le  6  novembre  4466.  Nous  sommes  loin 
de  la  rapidité  de  mobilisation  actuelle,  et  l'adversaire  aussi 

salade,  dague,  espée,  arc,  traits,  jaque  ou  hugue  de  brigandine 
qui  seront  appelés  les  francs-archers,  francs,  quittes  et  exempts 
de  toutes  les  tailles  et  autres  charges  et  tant  du  fait  et  entre- 
tenemeot  de  gens  darmes,  de  guet,  garde  porte,  que  de  toutes 
•otres  subventions...  excepté  du  fait  des  aides  ordonnées  pour 
!■  guefre  et  de  la  gabelle  du  sel . ..  » 


XUT*  9BS8I0N,   A  SENUS.  283 

put  prendre  son  temps.  Encore,  les  historiens  font-ils 
remarquer  que  le  roi,  grâce  à  son  activité  réussit  à  faire 
face  à  tous  ses  ennemis  à  la  fois.  Cependant  il  réduisit  ce 
corps  d'armée  à  seize  mille  hommes,  et  trouvant  qu'ils  ne 
lui  rendaient  pas  tous  les  services  qu'il  attendait  d'eux,  il 
cassa  les  compagnies  en  1480. 

Malgré  cette  suppression^  il  y  avait  encore,  ditCarlier, 
'es  francs-archers  dans  le  Valois,  en  i500.  Mais  le  service 
du  roi  n'empêchait  pas  la  ville  de  veiller  à  sa  propre 
sûreté,  et  e)\e  avait  sa  garde  bourgeoise  armée  de  sallades, 
^gandines,  basions  à  feu,  arbalestres,  etc.  etc.  Un  dénom- 
brement par  quartier,  fait  en  i5i2,  donne  un  total  de 
oeuf  cent  quatre-vingt-trois  hommes  armés.  Elle  en 
comptait  bien  moins  soixante-dix  ans  plus  tard,  lorsqu'elle 
se  défendit  si  énergiquement  contre  les  entreprises  des 
ligueurs. 

Le  premier  guet  comprenait  42  hommes; 

Le  guet  du  Marché,  104; 

Le  guet  de  la  place  aux  Obérons,  i78  ; 

Le  guet  du  Chastel,  75; 

Le  guet  de  Saint-Vincent,  iOl  ; 

Le  guet  de  Bellon,  189  ; 

Le  guet  de  Vitet,  106; 

Le  guet  de  Villemétrie,  40  ; 

La  Bretonnière,  63  ; 

Villevert,  41 . 

Fait  et  conclu  en  l'hôtel  de  ville  le  30  avril  après 
Piques.  Chacun  des  dessus  nommés  aura  les  armures  et 
basions  à  feu  à  eux  ordonnés  en  dedans  le  jour  de  la  l'cn- 
lecûte  prochain  venant. 

Senlis  fournit  encore  des  francs-archers  à  Fran<,"ois  I'' 
eu  1521  et  i523.  Mais  les  armes  à  feu  prenaient  chaque 
jour  une  importance  plus  grande,  et  rendaient  de  plus 


284      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

en  plus  inutiles  ces  armes  démodées,  qu'on  appelait  Tare 
ou  l'arbalète,  et  désormais  elles  ne  devaient  plus  servir 
qu'à  l'amusement  du  peuple.  On  leur  substitua  petit  à 
petit  l'arquebuse,  et  beaucoup  de  compagnies  d*archers 
laissèrent  leurs  arcs  pour  prendre  le  fusil  à  arquebuse.  De 
nouvelles  compagnies  s'établirent,  les  privilèges  des  archers 
leur  furent  aussi  accordés,  et  le  peuple  continua  ainsi  à 
défendre  son  roi  et  son  pays. 

Tout  le  monde  sait  l'histoire  de  la  Ligue  à  Sentis,  Tap- 
pui  que  reçurent  les  ligueurs  du  célèbre  Guillaume  Rose, 
et  d'une  grande  partie  du  clergé  séculier  senlisien.  On 
sait  aussi  que,  grâce  à  l'énergie  intelligente  de  quelques 
habitants,  la  ville  fut  enlevée  aux  ligueurs,  et  rendue  aux 
royalistes  que  vint  commander  le  sire  de  Thoré-Montmo- 
rency,  fils  du  connétable  de  Montmorency.  Mais  ce  qui 
est  peut -être  moins  connu,  c'est  la  part  que  prit  à  la 
défense  de  la  ville  la  compagnie  des  fusiliers  royalistes, 
qui  dura  jusqu'à  la  Révolution. 

Le  récit  de  leurs  exploits  fut,  à  leur  requête,  copié  sur 
les  registres  de  la  compagnie  plus  d'un  siècle  et  demi 
après,  en  1753,  et  si  vous  le  permettez,  je  vous  en  donne- 
rai un  résumé  aussi  bref  que  possible. 

a  1589.  Extrait  du  registre  des  enrollements  faits  des 
a  bourgeois  de  bonne  volonté  fidels  au  roy  et  au  soutien 
a  de  la  patrie  pendant  le  temps  de  la  calamité  et  guerre 
a  civile,  si  fort  oppressée  en  la  ville  de  Senlis  sous  le 
a  règne  de  Henry  [II,  dontladitte  compagnie  sourdement 
a  a  procurée  l'entrée  dans  laditte  ville  de  Senlis  à  M'  de 
o  Thoré  pour  en  prendre  le  gouvernement.  » 

M.  de  Thoré  reçut,  le  25  avril  4589,  les  avances  de 
quarante-huit  bourgeois  de  Senlis  qui  s'engageaient  à 
défendre  la  ville  pour  le  roi.  Il  leur  fit  distribuer  des 
armes  ei  ustancilles  de  guerre,  et  nomma  leurs  officiers. 


xny^  SESSION,  a  seklis.  285 

Lui-même  avait  le  titre  de  colonel  commandant.  M.  de 
Senerpont  fut  nommé  capitaine  cinquantenier,  M.  Fonte- 
m  lieutenant,  MM.  Vioste  et  du  Thiel  dizainiers.  Les 
ligueurs  commençaient  à  porter  des  troupes  dans  les  fau- 
bourgs, et  M.  de  Thoré  confia  la  garde  des  remparts  aux 
royalistes,  depuis  le  bastion  du  Mcntauban,  jusqu'à^la 
tour  la  plus  proche  de  la  porte  de  Paris.  C'était  Tendroit 
le  plus  Caible.  Le  reste  était  gardé  par  les  troupes  amenées 
ptr  le  seigneur  d'Ognon,  et  d'autres  encore.  Depuis  le 
M  atril  jusqu'au  30,  les  fusiliers  restèrent  sur  le  rempart 
^  tra?aillèrent,  aidés  de  leurs  femmes,  à  le  mettre  en  état 
<k  défense.  Us  établirent  de  petites  batteries  et  firent  tout 
ce  qu'ils  purent  pour  organiser  la  résistance.  Mais  le 
(limaoche,  le  duc  d'Aumale  commença  le  feu  contre  les 
tours  de  la  Fosse  aux  Anes,  près  de  la  porte  de  Creil,  et 
kl4  mai  elles  étaient  ruinées.  Les  royalistes  et  les  cuiras- 
siers soutinrent  alors  l'attaque  sur  la  brèche.  Le  H  mai 
b  bataille  s'engagea  devant  entre  les  troupes  royalistes 
commandées  par  Longueville  et  Lanoue,  et  les  ligueurs 
1q  duc  d'Aumale.  Sur  leur  demande,  les  fusiliers  roya- 
listes sortirent  au  nombre  de  quarante,  par  la  porte  de 
l^tfis,  sous  la  conduite  de  leurs  officiers.  La  bataille  finis- 
<ut  et  le  duc  d'Aumale  fuyait  vers  Paris.  Les  fusiliers, 
^duits  par  Vioste  et  du  Thiel,  suivirent  le  chemin  des 
f'^miomSy  qui  conduit  à  i'ontarmé.  Là  ils  prirent  avec  eux 
dix-sept  habitants  du  village,  auxquels  vinrent  se  joindre 
les  volontaires  de  la  Chapelle,  Orry,  Survilliers,  Mongré- 

• 

'*D<  Coye,  Chantilly,  Avilly  et  Saiut-Liénard,  conduits 
Pv  le  gentilhomme  de  Comelle.  Les  villageois  arrivaient 
<l6  toute  part..On  se  mit  alors  par  différents  chemins  ù  la 
poursuite  des  fuyards,  et  la  déroute  des  ennemis  fut  com- 
plète. Deux  canons  tombèrent  eutre  les  mains  des  roya- 
listes, qui  les  firent  conduire  au  ch&teau  de  Chantilly  sous 


286        CONGRÈS  ARGHÉOLOGigUE  DE  FRANCE. 

bonne  garde,  et  poursuivirent  les  fuyards  jusqu'à  la  port<^ 
Montmartre  et  prirent  une  troisième  pièce  de  canon  appelé^*^ 
culvrine  ou  couleuvrine,  avec  laquelle  iU  tirèrent  dans  le^ 
rues  de  Paris.  Ils  se  retirèrent  enfin  dans  le  château  d^ 
Vincennes,  chargés  de  butin  qu'ils  ramenèrent  le  lende^ — 
main  à  Sentis. 

Ils  furent  reçus  à  la  porte  Saint-Lazarre  par  M.  Aef 
Thorô  avec  l'état-major,  quatre  tambours,  une  trompetU» 
et  un  hautbois.  Après  les  compliments  qu'ils  avaient  bien 
mérités,  ils  rentrèrent  dans  la  ville  et  le  butin  fut  distri- 
bué entre  ceux  de  la  ville  et  de  la  campagne.  Il  y  avait  eu 
deux  morts  et  un  blessé. 

Le  roi  reconnaissant  envoya  par  le  duc  de  Montmorency, 
maréchal  de  France,  une  somme  d'argent  aux  bourgeois 
de  Senlis.  On  en  employa  une  partie  ù  leur  procurer  un 
uniforme.  Il  se  composait  d'un  habit  de  drap  bleu  avec 
parements  rouges  et  boutons  jaunes,  et  doublure  rouge, 
d'une  chemisette  et  d'un  caleçon  rouges  avec  bas  blancs. 
Le  chapeau  portait  les  armes  de  l'arsenal.  Ils  furent  pom- 
peusement passés  en  revue  le  47  juillet,  et  M.  de  Thoré 
leur  remit  un  drapeau  d'azur  avec  les  armes  du  roi  enve- 
loppées de  lis,  et  portant  cette  inscription  :  Ils  ont  soti/e- 
nus  la  gloire  du  roy  a  perte  de  leur  sang  et  conservés  la 
pureté  des  lys.  C'était  l'occasion  de  chanter  le  vieux 
refrain  : 

Ils  faict  beau  veoir  ces  homes  darmes... 

Quatre  bourgeois  qui  avaient  demandé  à  entrer  dans  la 
compagnie,  se  virent  refusés  parce  que  leur  fidélité  au  roi 
ne  paraissait  pas  assez  sincère.  On  remplaça  seulement 
les  morts  et  les  blessés.  Fuis  ils  furent  organisés  pour 
monter  la  garde  aux  remparts  toutes  les  nuits.  Un  nommé 


XUV*  SESSION,   A   SENLIS.  287 

iacqoes  le  Maine,  qui  avait  été  surpris  démolissant  les 
réparations  faites  à  la  brèche,  fut  saisi,  jugé  et  condamné 
à  huit  jours  de  prison. 

Au  mois  d'août  1589,  la  garde  royaliste  reçut  une 

solde  de  150  francs  par  mois  pour  dix  hommes,  et  cette 

ârUde,  à  la  demande  de  la  compagnie,  fut  donnée  aux 

plus  pauvres.  M.  de  Thoré  y  ajouta  50  livres,  et  le  tout 

fut  partagé  entre  les  dix-huit  gardes. 

La  compagnie  des  arbalétriers,  dont  le  jeu  avait  été 
niioé  lors  de  la  première  attaque  du  duc  d'Aumale,  fut 
invitée  à  se  fusionner  avec  la  compagnie  royaliste  et  à  chan- 
ger les  armes  contre  des  fusils  à  larquebuse.  Cette  trans- 
bnnation  fut  acceptée  dans  l'assemblée  du  i6  sep- 
tembre 4590.  Les  statuts  furent  modifiés  et  les  anciens 
privilèges  du  roi  du  papegault  rétablis  en  leur  faveur. 

Le  duc  de  Montmorency  vint,  le  28  septembre,  féliciter 
Ia  compagnie  qui,  sous  la  conduite  de  son  état-major, 
dia  «u-devant  de  lui  jusque  dans  la  plaine  de  Saint- 
Liénard. 

Hais  si  nos  compagnies  guerrières  savaient  verser  leur 
8Ug  pour  la  patrie,  elles  aimaient  aussi  à  prendre  part  à 
ses  joies,  et  leur  présence  faisait  l'ornement  des  solennités 
publiques.  Écoutez,  Jacques  Métbelet,  lieutenant  général 
<le  la  prévôté  de  Senlis  et  roi  de  Tarquebuse  vous  raconter 
leotrée  du  Dauphin  à  Senlis  en  1531.  Les  autorités  vont 
au-devant  de  lui  jusqu'à  l'Hôtel-Dieu  des  Marais,  escor- 
^de  la  compagnie  de  l'arquebuse  et  «  M.  le  lieutenant 

*  général  (c'était  Métbelet  en  personne),  fist  la  révérence 
«  a  Mgr  le  Dauphin  et  ù  MMgrs  ses  frères,  leur  fist  une 

*  oraison  fort  honncste  laquelle  ils  prinrent  et  eurent 

*  Tort  agréable...  Ru  entrant  dans  laquelle  ville  feust 
"  tirée  toute  lartillerie  estant  en  la  porte  de  Paris, 
«  laquelle  il  faisoit  bon  oir  et  dura  demi-heure  et  plus, 


288      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

«  au  dedans  de  laquelle  ville  et  sur  laditte  porte  de  Parr 
«  estoient  joueurs  de  saquebutes,  hautbois,  rebects  et  aul 
a  instruments  qui  jouaient  fort  mélodieusement  et  les 
a  soit  bon  oir,  aussi  au  carfour  de  la  porte  au  pain  y  avoi^ 
a  un  eschaffault  ou  estoient  aultres  joueurs  dinstrument — ^ 
a  comme  flûtes,  doulzaines,  rebects  et  tabours  quil  faisoi   ^ 
a  pereillement  bon  oyr  et  au  beffroy  de  laditte  ville  ^ 
a  avoient  joueurs  de  tabours  de  guerre,  trompettes,  fifres^ 
«  et  si  furent  tirés  illec  plusieurs  coups  de  harquejMises  s- 
a  croq  qui  donnoient  fort  bon  son  et  par  bon  ordre,  et 
«  sonnoit  en  cet  instant  l'horloge  et  les  appeaulx  dioelle 
«  estant  au  beffroy  qui  faisoient  un  tel  et  si  grand  bruit 
«  quon  nen  pouvoit  oyr,  dont  mondit  S' le  Dauphin  et 
«  Mgrs  ses  frères  furent  fort  joyeux.  » 

Les  fêtes  qui  suivirent  le  traité  d'Âix-la-Chapelle,  signé 
en  17i8  eurent  encore  bien  plus  d'éclat,  et  se  prolongèrent 
|)endant  plus  de  huit  jours. 

La  paix  fut  publiée  le  23  février  1749  par  toute* la  ville 
à  sept  reprises  :  Les  officiers,  chevaliers  et  cadets  de  l'ar- 
quebuse, au  nombre  de  cinquante-deux,  commandés  par 
le  sieur  Turquet,  prirent  part  à  la  marche  triomphale.  Le 
capitaine  ouvrait  la  marche,  puis  les  arquebusiers  tous 
habillés  en  uuiforme  rouge  montés  sur  des  chevaux 
bien  harnachés,  ayant  trompettes  et  hautbois  à  leur  tète 
et  allant  par  quatre  de  hauteur.  Après  eux  venaient  les 
fusiliers  à  pied,  marchant  aussi  par  quatre  de  hauteur, 
au  nombre  de  quarante,  commandés  par  le  sieur  Heluis, 
bourgeois,  tous  en  uniforme  bleu,  proprement  habillés  et 
précédés  Je  tambours.  Puis  les  corps  de  ville  avec  quatre 
tamlM)urs,  les  quatre  petits  ofticiers  porte-casaques,  le 
hérault  d'armes  seul,  en  cotte  d'armes,  monté  sur  une 
haquenée  blanche,  les  deux  premiers  échevins,  M.  le 
Maire  au  milieu,  les  deux  autres  échevins,  et  le  contrôleur 


XUY*  SESSION,   ▲    SBNUS.  S!89 

du  grefle,  tous  à  cheval,  bien  équipés,  avec  des  cocardes 

i^uneet  rouge;  ensuite  venait  une  compagnie  bourgeoise 

lu  nombre  de  trente  ou  quarante,  marchant  aussi  à  pied 

par  quatre  de  front  ;  les  officiers  et  cavaliers  de  la  maré- 

chaonte   de  Senlis   et   de  Louvres,   commandés   par 

)i.  Caron,  lieutenant  de  robe  courte  et  précédés  d'un 

trompette,  fermaient  la  marche.  Ils  firent  successivement 

leurs  publications  au  Port  au  Pain,  à  la  Halle  au  Blé,  au 

Carrefour  des  Singes,  à  la  Présentation,  au  Carrefour  de 

It  Porte  du  Château,  à  la  place  aux  Charofn,  et  à  la 

plicede  Creil.  Ils  revinrent  ensuite  à  l'hôtel  de  ville  où 

kl  officiers  présentèrent  leurs  civilités  à  M.  le  Major,  à 

H.  Caron,  etc.  La  foule  était  grande,  les  rues  bordées  de 

carieuz,  les  fenêtres  garnies,  les  carrefours  encombrés,  et 

c'était  partout  des  cris  de  joie^  des  acclamations,  des  vivt  le 

^1  bien  convaincus. 

A  quatre  heures,  MM.  les  arquebusiers,  fusiliers, 
l^rgeois,  vont  chercher  Messeigneurs  de  la  ville  pour 
les  conduire  à  la  cathédrale  entendre  le  Te  Deutn  qui 
ttt  chanté  en  musique,  avec  décharges  d'artillerie  pen^ 
'aot  le  Te  Deum  et  le  Domine  Salvum.  A  la  sortie, 
décharge  générale  de  fusils  et  d'arquebuses  en  l'honneur 
de  Messeigneurs  du  présidial,  de  la  maréchaussée  et  de 
l'élection. 

A  sept  heures,  Messeigneurs  du  Chapitre  de  Notre- 
Dame,  illuminent  leurs  uï^isons,  et  fout  tirer  un  feu  d'ar- 
tifiœ  sur  la  place  du  Cloître. 

A  huit  heures,  MM.  les  échevins  vont  à  l'hôtel  de  ville 
iilumiDé  avec  terrines,  lampions,  torches,  et  on  tire  un 
feu  d'artifice  sur  la  place,  à  la  grande  satis^ faction  du 
peuple;  la  ville  tout  entière  est  illuminée,  et  les  feux  de 
joie  durent  toute  la  nuit. 

Le  lendemain.  Te  Deum  dans  l'église  des  Cordcliers, 

ILIV*  SESSION.  19 


i90      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

décharge  des  compagnies,  à  qui  M.  le  Major  offre  une 
collation,  puis  feu  d'artiRce  et  illumination. 

Enfin,  le  2  mars,  les  arquebusiers  font  chanter  le  Te 
Deum,  puis,  le  soir,  décharge  générale  et  feu  d'artifice. 
Voilà,  si  je  ne  me  trompe,  une  fête  populaire  et  un  vrai 
enthousiasme. 

Mais  passons  à  l'histoire  des  jeux  d'arc  ou  d'arbalète. 

Nous  avons  vu  la  ville  de  Senlis  appelée  dès  le  xiy*  siècle 
à  fournir  des  archers  et  arbalétriers  pour  le  service  du 
roi.  Mais  on  ne  s'improvise  pas  archer  du  jour  au  lende- 
main, et  pour  devenir  un  Guillaume  Tell  il  faut  s'être 
longtemps  exercé.  Il  est  donc  hors  de  doute  que  depuis 
longtemps  il  existait  des  compagnies  de  tireurs  plus  ou 
moins  bien  organisées  dans  nos  régions.  MM.  Henri  Martin 
et  Paul  Lacroix,  dans  leur  Histoire  de  Soissons,  disentque 
cette  formation  de  milices  populaires  fut  toute  spontanée, 
et  qu'elle  fut  provoquée  par  les  excès  des  Brabançons, 
Routiers,  Tard- Venus  et  autres  brigands  de  grand  chemin 
qui  portèrent  le  ravage  dans  les  campagnes. 

Quoi  qu'il  eu  soit,  Charles  V  comprit  le  parti  qu'il 
pouvait  tirer  de  ces  armes  et,  comme  nous  l'avons  dit,  il 
favorisa  beaucoup  la  création  des  compagnies  d'archers. 
Le  19  juillet  13t)9  il  rendait  une  ordonnance  en  leur 
faveur,  mandait  à  ses  gouverneurs  de  faire  le  recensement 
de  compagnies  existantes,  et  d'engager  les  jeunes  gens  à 
s'exercer  au  tir. 

Les  Picards  prirent  goût  à  cet  exercice  et  y  devinrent 
bientôt  plus  habiles  que  les  Anglais,  à  tel  point  que  dès 
l'an  1384,  Charles  VI  songeait  à  modérer  cette  ardeur, 
de  crainte  de  voir  le  peuple  s'apercevoir  de  la  puissance 
qu'il  pouvait  prendre  par  ce  moyen. 

Le  Soissonnais  et  le  Valois  comptèrent  de  nombreuses 
compagnies,  et  Carlier  va  jusqu*à  dire  que  cette  région  a 


XLIY*  SESSION,   ▲  SENLiS.  391 

M  comme  le  berceau  du  jeu  d'arc,  a  à  cause,  dit-il,  de  la 
proximité  des  reliques  de  saint  Sébastien,  déposées  à  Saint- 
Médanlde  Soissons.  Encore  aujourd'hui,  ajoute-t-il,  l'abbé 
de  Saiot-Uédard  passe  pour  être  le  président  né,  et  comme 
l'ordoonateur  général  des  compagnies  de  l'arc  établies 
dus  tout  le  royaume,  d  Je  lui  laisse  la  responsabilité  de 
Mmattertion. 

Les  compagnies  de  Tare  et  de  l'arbalète  de  Sentis 
iviient  QD  règlement  sévère.  Le  règlement  de  l'arbalète  a 
M  conservé  par  Afforty.  Après  une  première  réforme 
cnlMB  (i),  il  fut  remanié  sérieusement  en  1538  sous  la 


(I)  Voici  quelques  extraits  de  ce  règlement  :  •  Frère,  tu  jures 
pv  la  foy  et  serment  de  ton  corps,  sur  le  sel,  sur  le  pain  et  le 
^i  et  sur  Tarbalcstre,  laquelle  arbalestre  flgure  la  croix  de 
'Voitre-Seigncur  Jésus-Christ,  là  où  il  recul  mort  et  passion  pour 
Ifannuiin  lîgnaige,  en  la  manière  qui  sensuit  : 

•  Cest  ascavoir  par  leslrief  de  larb.ilcslrc  est  flgurec  la  cou- 
rofloe  d'espines  qui  fut  mise  sur  le  chef  de  Nostre-Seignenr;  par 
les  lieurcs  dudit  estrief  en  signe  des  liens  dont  il  fut  lié...  par 
/arc  00  dit  comment  Noslre-Seigneur  fut  estcndu  en  labre  de  la 
croix,  par  la  noix,  le  cœur,  par  la  vire,  la  lance,  par  la  clef,  la 
Jesserre  que  fist  Longin  de  la  lance ,  droit  au  cœur  de  Nostre- 
^seigneur. 

c  Item,  tu  jures  et  promets  de  obéir  et  porter  honneur  au  roy, 
tappilaioe,  connestable  et  chevaliers... 

>  Tu  ne  jureras  Dieu  soubs  la  peine  de  ung  denier.  Tu  ne  diras 
sur  homme  ou  sur  femme  mot  qui  soit  deshouneste... 

•  Tu  joueras  bien  et  plaisamment  sans  faire  noise  ne  mo- 
querie... 

•  Quand  tu  banderas  ton  arbalestre,  tu  la  dois  bander  bien 
doulceneot,  sans  muser  ne  ça  no  li... 

>  En  fréquentant  ledict  jeu,  lu  ne  nommeras  le  diable  en 
aucune  manière...  ■ 


102      CONGRÈS  ARGHéOLOGIQUS  DK  FEÀRGS. 

royauté  de  Jacques  Métholet,  lieutenant  général  de  la 
prévôté  de  Senlis. 

Car  vous  le  savez,  Messieurs,  le  chef  de  ces  compagnies 
prenait  le  titre  de  roi  aussi  bien  que  le  roi  des  rilMtuds,  le 
roi  des  merciers,  etc.  etc.  Le  roi  était  nommé  pour  un  an, 
et  ce  titre  revenait  de  droit  à  celui  qui  montrait  le  plus 
d'adresse,  et  faisait  les  quatre  plus  beaux  coups  au  jour 
du  concours.  Il  prenait  même  le  titre  d'empereur  s'il 
méritait  deux  années  de  suite  la  royauté.  Celui  qui  abat- 
tait lejay  ou  papegay  était  proclamé  connétable. 

«  Premièrement,  dit  le  règlement,  de  1539,  il  est  cou- 
a  tume  de  faire  tous  les  ans  un  roy  le  jour  de  la  Trinité- 
a  Notre-Seigneur.  Il  est  aussi  coutume  de  faire  un  con- 
«  nestable,  et  se  fait  le  premier  jour  de  may,  et  se  lait 
a  ainsy.  Celui  qui  abat  le  gay  celui  jour,  est  connestable 
«  pour  icelle  année,  o  On  invitait  souvent  un  personnage 
influent  de  la  ville  le  jour  du  concours  pour  tirer  le 
coup  du  seigneur. 

Le  roi  payait  ce  jour-là,  aux  chevaliers^  un  jambon,  et 
le  connétable  une  fraise  de  veau  ;  ils  en  devaient  autant 
au  jour  de  la  Trinité,  mais  pendant  l'année,  ils  ne 
payaient  rien  de  ce  qu'on  buvait  après  le  jeu.  A  ces  privi- 
lèges, les  rois  ajoutèrent  l'exemption  de  taxe  pour  tous  les 
chevaliers.  Ainsi  Henri  IV,  en  1597,  accorde  aux  chevaliers 
de  Tarquebuse  la  franchise  de  tous  droits  pour  la  quantité 
de  vingt  muids  de  vin,  et  même  l'exemption  de  toutes 
tailles,  subsides  et  impôts  pour  le  roi  pendant  l'année  de 
sa  royauté.  Louis  XIII  et  Louis  XIV  confirmèrent  ces  pri- 
vilèges, et  ce  dernier  ajouta  l'exemption  du  logement  des 
gens  de  guerre  jusquà  concurrence  de  dix  livres. 

Il  y  avait  à  Senlis  deux  jeux  d'arc.  Le  premier  et  le 
plus  ancien  était  établi  à  la  porte  de  Meaux,  où  il  existe 
encore  aujourd'hui.  Le  second  obtint  de  s'installer  dans 


XUY'  SESSION,   A  SBNUS.  203 

le  ibné  da  rempart,  sous  le  MÔntauban,  près  de  la  Fusse- 
sMfAneSy  et  de  clore  un  espace  de  soixante-quinze  pas  de 
lon^  sur  trente-cinq  de  large,  afîn  d'être  à  Tabri  des 
visites  ennuyeuses  des  enfants  et  des  animaux.  La  permis- 
sion fut  octroyée  par  Loys  de  Saint-Simon,  bailli  de  Senlis. 
Eq  1696,  nouvelle  supplique  au  gouverneur  et  aux 
êchevios,  et  permission  de  s'établir  dans  le  petit  fossé  de 
laportede  Creil. 

Les  arquebusiers  avaient  leur  jeu  à  la  porte  Bellon.  En 
I6f)9,  ils  obtinrent  l'autorisation  de  le  transporter  aussi  à 
U  Fone-aux-Anes. 

En  i6ff,  ils  nommaient  Jean  Bourdereul,  sieur  de 
Beauté,  leur  capitaine  perpétuel,  et  ils  obtenaient  des 
lettres  du  roi  leur  accordant  certains  privilèges,  comme 
l'aBhnchissemeAt  de  toutes  tailles  ou  subsides. 

Mais  lorsque  le  capitaine  présenta  ses  lettres  au  Bailfi, 
pour  les  soumettre  à  son  approbation,  celui-ci,   M.   de 
Bofdevilie,    renvoya  la  requête  aux  échevins.  Les  éche- 
vio8  déclarèrent  que  rétablissement  d'un  capitaine  per- 
pétuel  était   chose  de  grande  conséquence  et  préjudi- 
dable  à  la  ville.  Sur  ces  graves  observations,  la  compagnie 
renonça  à  son  projet,  déclara  son  élection  non  avenue,  et 
se  contenta  d'un  capitaine  annuel.  Les  arbalétriers  qui  se 
disposaient  h  suivre  le  même  exemple,  y  renoncèrent 
roloDtiers,  et  nommèrent  capitaine  comme  leurs  voisins 
ttlai  qui,  au  concoure,  faisait  les  quatre  meilleurs  coups 
de  ponton.  Il  jouissait  des  exemptions  et  privilèges  accor- 
dés par  le  roi. 

Ces  sociétés  avaient  leurs  solennités  extraordinaires. 
Elles  invitèrent  un  certain  nombre  de  sociétés  voisines  à 
venir  disputer  les  prix  d'adresse,  et  c'était  l'occasion  de 
fîtes  magnifiques,  qui  mettaient  toute  la  ville  et  les  envi- 
roDS  en  grande  liesse. 


394      CONGRÈS  AECHÉOLOGIQUE  DB  FBANGE. 

En  4665,  MM.  les  arbalôtWcrs  avaient  reçu  à  Conipiè<i^ 
le  bouquet  provincial.  Ils  devaient  le  rendre  en  1667.  Il* 
réclament  donc  à  la  ville  une  partie  des  bâtiments  annexa 
à  leur  jeu,  afin  de  pouvoir  recevoir  convenablement  l^^ 
compagnies  de  la  province.  Cinquante  ans  auparavan  ^i 
Creil  avait  eu  sa  grande  réunion  des  comparantes  d'af 
quebusiers,  et  le  récit  de  cette  mémorable  journée  fi^ 
écrit  et  imprimé  la  même  année  à  Paris. 

Un  compte  rendu  complet  de  la  grande  fête  de  Com^-^ 
piègne,  en  17^,  a  été  publié  la  mémo  année  à  Soissons^^ 
chez  Courtois,  ot  reproduit  dans  le  Guetteur  du  Beau^-^ 
vaisis,  il  y  a  quelques  années. 

MM.  les  chevaliers  de  Tarquebuse  royale  de  Compiègne,  y 
est-il  dit,  ayant  obtenu  par  leur  générosité  et  leur  magni- 
ficence le  bouquet  du  prix  général  rendu  ci-devant  à 
Maux,  ne  cherchèrent  depuis  qu'une  occasion  favorable  de 
se  signaler  de  nouveau,  par  la  convocation  d'une asKembléc 
générale  chez  eux,  de  tous  les  chevaliers  des  arquebuses 
des  principales  provinces  de  France. 

Cinquante-six  compagnies  acceptèrent  l'invitation,  et 
quarante-sept  furent  fidèles  au  rendez-vous.  Nous  y  trou- 
vons rappoités  les  noms  do  chacune  de  ces  compagnies, 
que  le  programme  nous  demande  d'expliquer.  Parmi  ces 
surnoms,  il  en  est  qui  portent  avec  eux  leur  explication. 
Les  Dormeurs,  de  Compiègne,'par  exemple;  les  Soupiers, 
de  Pont;  les  Glorieux,  de  Laon;  les  Mangeurs  de  sougte 
chaude,  de  Hozoy-en-Brie  ;  les  Friands,  de  Noyon,  etc.  etc.  ; 
ne  sont-ils  pas  une  allusion  au  tempérament  ou  aux 
habitudes  de  ceux  qui  sont  ainsi  désignés?  D'autres  sont 
de  simples  calenilmurs,  comme  les  Gens  de  vertus,  du 
pays  de  ce  nom;  les  Coqs,  de  Dormans...;  d'autres  rap* 
pellent  évidemment  quelque  trait  de  caractère  ou  quelque 
anecilute  oubliée.  Ouoiques-uns,  Beauvais  [les  Chieurs]^ 


XLrV*  SESSION,  A  SLNLIS.  395 

Cripy  (lêÊ  Cœktms)^  et  surtout  Guignes  (la  Putain)^ 
témoignent  de  la  liberté  de  langage  de  nos  bons  ancêtres, 
mais  la  pruderie  actuelle  de  notre  langue  n'autorise  pas 
à  les  prononcer  en  public,  surtout  quand  on  n'a  pas, 
comme  Camhronne,  l'excuse  d'une  violente  émotion  (f). 
Les  compagnies  étaient  souvent  précédées  d'un  individu 
fui  servait  d'emblème  partout  Ainsi  les  arquebusiers  de 
I^ont-Sainte-Mazenoe  se  faisaient  précéder  d'un  homme 
portant  marmite  et  cuiller  à  pot,  ceux  de  Compiègne, 
dL^un  homme  faisant  le  dormeur.  Senlis  portait  sur 
son  drapeau  un  gueux  chargé  d'une  besace,  avec  la 
*levige  :  Florescet  sartif  innumeralibus,  «  lY  fleurira  par 
^innomtrMet  racommodages.  o 

Citons  encore  quelques  compagnies  présentes  à  Com- 
piègoe  :  Château-Thierry,  /)u  hovt,  nul  ne  s'y  frotte; 
Corbeil,  le$  Pesches;  Estampes,  les  Sables;  Chauny,  les 
^nges;  Braine,  les  Corbeaux;  Goulommiers,  les  Mangeurs 
de  dagourmiaux;  Senlis,  les  Bczaciers;  Saint-Quentin 
k$  Canonf'ers;  Mantes,  l*:s  Chiens;  A  visse,  les  Buoeut^; 
Pootoîse,  les  Usuriers;  Meaux,  les  Chats;  La  Ferté-au- 
Col,  la  Poupée;  Montdidier,  les  Promeneurs;  Lagny, 
Combien  vaut  l'orge;  Saint-Denis,  la  Bannière  de  France; 
Rethel,  les  Mangeurs  de  gaudichon*;  Vailly,  les  Veaux; 
Héxières,  la  Pueelle;  Reims,  les  Mangeurs  de  ftaind'épief; 
Nogent-sur-Seinc,  les  Vivants;  la  Ferté-Milon,  les  Pic- 
mards;  Provins,  les  Consuves;  Ucaumont,  les  Chaudron- 
sien;  Charleville,  les  Brûleurs  de  noir;  Fismes,  les 
Ftminis;  Soissons,  les  Beyeurs;  Fère-en-Tardenois,   les 

(\)  Boileau  disait  bien  avant  cette  époque  : 

E^  lalio  dam  les  mots  brave  l*honnè(elé. 
Mais  le  lecteur  français  veut  èlre  respecté. 


396      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

Brûleurs  de  fer;  Mculan ,  lei  Hiboux;  Sainte-Ménéhoulii 
les  Verriers;  ChàloDS,  les  Brimballeurs,  ou  Maraudeu^ 
11  y  a  évidemiDHnt  dans  ce  nombre  beaucoup  de  surootiM 
qui  viennent  d'allusion  à  quelque  circonstance  dont   ^ 
souvenir  peut  être  conservé  dans  le  pays,  mais  qu'il  n'B^^ 
pas  toujours  facile  de  deviner,  et  d'autres  qui  ne  sont  qa^^ 
de  naïfs  calembours. 

La  plupart  de  ces  compagnies  portaient  un  unifo^I^^ 
brillant,  et  le  défilé  fut  vraiment  splendide.  Les  iSftt^^ 
durèrent  huit  jours,  et  c'était  à  qui  mettrait  le  plus  d'em  ^^ 
pressement  et  de  générosité  pour  recevoir  ces  nombreu?^ 
visiteurs. 

c  Pendant  la  parade,  MM.  les  chevaliers  trouvèrent  suf 
c  la  place   un    rafraichissemeot    composé   d'échaudés, 
c  biscuits,  jambon  de  Mayence,  langues  et  excellent  via 
a  de  Champagne. 

«  MM.  du  régiment  de  la  calotte  eurent  aussi  l'honneur 
a  de  rafraîchir  à  la  porte  de  leur  hôtel,  MM.  les  cheva- 
a  liers  et  ceux  qui  les  suivaient...  »  (I). 

L'almanach  historique  de  la  ville  et  du  diocèse  de 
Senlis,  pour  l'an  1788,  nous  donne  la  composition  de 
chacune  des  compagnies  armées  encore  organisées  à  cette 
époque  dans  notre  ville. 

Les  arbalétriers-arquebusiers  étaient  au  nombre  de  qua- 
torze, dont  deux  chanoines.  Le  capitaine  roi  était  Lederc 
Duport,  avocat,  procureur  du  roi  de  la  maréchaussée. 

La  compagnie  de  larquebuse  royale  avait  cinq  officiers 
et  deux  officiers  honoraires.  MM.  Leblanc,  rui,  et  Turquet, 
empereur*  vingt  et  un  chevaliers,  parmi  lesquels  je  lis  le 
nom  de  Billion,  et  cinq  chevaliers  honoraires. 

I  ReUtioQ  de  ce  qoi  s*e«t  (4»ê  aa  prix  gênënl  de  Tarque- 
buse.  rendu  a  Ci>ai(*:egQe  le  li  septembre  1729. 


XU?*  SESSION,   k  SENUS.  207 

Les  royaliâiei  fuiiliers  de  la  compagnie  du  gouverne- 
ment, sous  le  commandement  de  Mgr  le  duc  de  Gesvres, 
gouverneur  de  l'Isie-de-France,  et  de  M.  Fomiès  de  Ber- 
trundy,  commissaire  des  guerres,  comptait  dix  officiers, 
iuinse  grenadiers  et  dix-sept  fusiliers. 

Le  jeu  d*are,  sous  la  grande  maîtrise  de  Son  Éminence 
&fgr  François  Joachim  de  Pierre  de  Bernis,  cardinal- 
uxhevéque  d'AIbi,  abbé  commandataire  de  Saint-Médard 
^^  Soissons,  avait  un  état-major  composé  de  cinq  officiers, 
commandant  neuf  chevaliers. 

Je  ne  prolongerai  pas  davantage  ces  détails  qui  ne 
^^raient  pas  bien  variés,  et  qui  déjà  ont  pu  fatiguer  votre 
attention.  J'arrive  en  1789.  La  compagnie  des  arque- 
busiers de  Sentis,  encore  bien  organisée,  eut  à  inscrire 
^08  ses  annales,  à  cette  époque,  un  épisode  bien  triste, 
^ien  terrible  même,  et  qui  s'appelle  encore  aujourd'hui 
^Alieniai  Billon,  C'est  par  quoi  je  terminerai. 

Billon,  horloger  à  Senlis,  était  en  même  temps  quelque 
peu  usurier  et  ce  fut  la  cause  de  son  crime  et  de  sa  mort, 
car  les  règlements  de  la  compagnie  exigeaient  comme 
première  condition,  en  acceptant  dans  ses  rangs  un  nouvel 
arquebusier,  une  sévère  honnêteté  (1).  Billon  avait  prêté 
à  un  nommé  Levasseur,  aubergiste  à  Senlis,  et  comme 
lui  arquebusier,  une  somme  de  S,000  livres  tournois,  dont 
il  exigeait  un  intérêt  excessif,  10  pour  iOO.  Levasseur  se 
âcha,  et  dénonça  l'horloger  au  capitaine  de  la  compa- 
gnie, M.  Delorme,  chevalier  de  Saint-I^uis.  Après  une 
délibération  à  laquelle  prirent  part  M.  Delorme,  capitaine, 
MM.  Leblanc,  Caron,  Pigeau  et  Préville,  le  célèbre  comé- 

(1)4*  Aulcun  ne  doit  venir  et  requérir  a  être  reçeu  pour  le 
serinent  faire  et  a  ce  ne  doit  estre  rcccu  sil  nest  de  bonne  vie 
el  bonneste,  conversation  bien  saine  et  renommée... 


%I8  GONO&ÈS  AHGHÉOU>OI0UB  DK  PBAMGE. 

dien,  membre  du  comité  permanent,  et  presque  tous 
membres  de  la  société,  on  décida  que  Billon  serait  tïï^^ 
du  contrôle.  On  lui  signifia  la  décision  de  ses  pairs,  ^^^ 
rentrée  du  jeu  lui  fut  fermée.  Il  alla  demander  une  ezpl^  ' 
catiou  au  capitaine,  homme  énergique,  ancien  olBcier  qi^  ' 
avait  conservé  de  l'état  militaire  une  franchisa  sévèra. 
observations  peu  courtoises  de  Billon  l'irritèrent  et  il  le  fi 
jeter  à  la  porte  par  ses  gens.  L'horloger,  furieux,  jura  d 
se  venger,  et  il  tint  parole  (i). 

a  Le  13  décembre  1789  (2),  jour  indiqué  pour  la  béné- 
diction des  drapeaux  de  la  garde  nationale,  tous  les  corps 
avaient  été  invités  et  s'étaient  assemblés  à  ThAtel  de  ville, 
d'où  ils  devaient  se  rendre  à  la  cathédrale  dans  Tordre 
suivant  : 

c  l^"  Un  détachement  de  la  cavalerie  nationale,  précédé 
de  son  trompette  ; 

a  2°  La  compagnie  de  l'arquebuse  ; 

a  3*  La  compagnie  de  fusiliers  royalistes  avec  les  offi- 
ciers municipaux,  les  membres  du  conseil  général,  les 
hoquetons  et  les  valets  de  ville  ; 

«  4°  L'élat-major  de  la  garde  nationale  ; 

a  .V  Le  drapeau  et  le  guidon,  avec  un  détachement  de 
cinquante  hommes,  pris  dans  tous  les  corps  armés  ; 

a  6"*  Les  compagnies  d'élite,  et  les  compagnies  du  centre 
<le  la  garde  nationale,  au  nombre  de  sept  ; 

c  !•  Enfin,  le  cortège  était  fermé  par  le  reste  de  la 
cavalerie  nationale. 

(I)  On  trouva  dans  ses  papiers,  ce  distique  éloquent  : 

Tant  que  Sentis  durera, 
1-e  Rillon  on  se  souviendra. 

'!•  Rrcitsd'nnrieujr  r/iasseur,  |>ar  Joseph  Ijivallée. 


XLIV*  SESSION,   A  SkNLIS.  SW 

«  Il  s'avançait  lentement  en  remontant  la  vieille  rue  do 
Paris,  quand,  à  la  hauteur  de  la  maison  de  Billon,  on 
entendit  un  coup  de  fusil.  La  première  pensée  fut  d'attri- 
buer cette  explosion  à  quelque  arme  partie  au  repos;  mais 
on  ne  put  rester  longtemps  dans  l'erreur.  Cambronne, 
tambour   de  l'arquebuse,    tombait  frappé   d'une   balle 
au-dessus  de  l'œil;  au  même  instant  M.  Leblanc,  61s  du 
député,  à  l'assemblée  nationale,  et  l'un  des  chevaliers  de 
Tarquebuse,  recevait  une  balle  dans  le  bras  gauche  et  des 
chevrotines  dans  la  poitrine.  M.  Delorme,  capitaine  de 
Tarquebuse  et  chevalier  de  Saint-Loui?,  accourait  pour 
voir  d'où  venait  le  tumulte,  lorsqu'il  fut  frappé  de  trois 
balles  dans  la  poitrine.  Il  put  encore  faire  une  dizaine  de 
pas,  et  mourut  au  bout  de  quelques  minutes.  C'était  lui 
que  Billon  haïssait  le  plus.  » 

L'assassin  continuait  toujours  ses  décharges.  On  s'élança 
alors  pour  pénétrer  dans  son  logis  et  mettre  fin  à  cet 
horrible  massacre,  mais  les  mesures  de  Billon  étaient  bien 
prises.  U  continua  à  tirer  sur  les  assaillants  en  battant  en 
retraite  jusque  dans  son  grenier,  et  en  s'abritant  successi- 
vement derrière  les  obstacles  qu'il  avait  préparés.  M.  de  la 
Bruyère  allait  le  saisir  dans  son  dernier  refuge  lorsque  la 
maison  sauta,  avec  un  bruit  terrible,  ensevelissant  sous 
^débris  tous  les  braves  qui  étaient  venus  pour  arrêter  ce 
sauvage  meurtrier. 

L'explosion  fut  si  terrible,  que  soixante  six  maisons 

voisines  furent  ébranlées  et  que  le  ciel  du  second  étage 

des  carrières,  situées  sous  la  maison  de  Billon,  fut  forcé. 

*  A  deux  pas  de  sa  dernière  victime  (4),  dit  M.  A.  Jan- 

vier, respirait  encore  Billon;  quelques  chasseurs  le  décou- 

(•)  liécits  Picards,  par  A.  Janvier,  Amiens,  1869. 


300  OONORiJ  AEGHÉOLOOIQUB  DE  nULMGI. 


vrant,  lui  écrasèrent,  dans  leur  indignation,  la  tète 
leurs  crosses  de  fusil. 

c  Vingt-cinq  morts,  quarante  et  un  blessés,  tel  était     ^ 
lugubre  bilan  de  la  vengeance  de  Thorloger  de  Sa&lii. 

c  Le  cadavre  de  Billon ,  porté  à  la  geâle,  fui  lapidé  ^ 
route  par  la  population  exaspérée;  le  lendeniain,  14  d^ 
cembre,  sur  l'information  faite  par  le  procureur  du  roi  ar 
bailliage  de  Seolis,  il  fut  condamné  à  être  porté,  dans  ui 
tombereau,  aux  fourches  patibulaires,  ses  misérables 
livrés  aux  oiseaux  du  ciel  ou  à  la  voracité  des  bétes  fauves,^ 
sa  maison  rasée  et  le  sel  semé  sur  son  emplacement.  C*est^ 
nous  le  croyons,  le  dernier  exemple,  en  France,  des  pro- 
cès faits  aux  cadavres,  s 

Ajoutons  que  la  mère  de  Billon  offrit  sa  fortune  pour 
venir  en  aide  aux  victimes  de  cet  horrible  attentat,  et  que 
de  nombreuses  et  larges  offrandes  vinrent  témoigner  do 
l'intérêt  que  chacuu  portait  à  tous  ceux  qui  eurent  k  souf- 
frir en  cette  triste  circonstance.  Mgr  de  Roquelaure  donna 
i,000  livres  et  tous  les  couvents  de  la  ville  rivalisèrent  de 
générosité. 

L'assemblée  nationale  *elle- même  en  fut  informée  et 
il  y  fut  bien  constaté  que  ce  crime,  attribué  d'abord  à 
une  cause  politique  n'était  que  le  résultat  d'une  sauvage 
vengeance. 


M.  le  Président  remercie  M.  l'abbé  Vattier,  de  son  inté- 
ressante lecture,  qui  jette  un  nouveau  jour  sur  une  des 
pi  us  anciennes  institutions  du  vieux  Senlis.  Puis  M.  René  de 
Maricourt  est  appelé  à  donner  quelques  renseignements 
complémentaires  sur  la  carte  préhistorique  du  dépar- 
tement de  l'Oise,  présentée  à  la  première  séance. 


XUY*  8B88ION,  A  BUfLU.  301 


Motas  pour  la  carte  préhistorique  du  dé- 
partament  de  l'Oise,  présentée  par  R.  de 
M arioourt  et  R.  Guérin,  et  dressée  d'après 
leum  recherches  personnelles  et  les  ou- 
vrages et  renseignements  de  MM.  Graves, 
Woillezf  Baudon,  Ponthieux,  Louchez, 
yinet,  Gaudel,  de  Caix  de  Saint-Ajrmour, 
Plessier,  Thibaut,  Margry,  Guillemot, 
Fautrat,  etc.  etc. 

ARRONDISSEMENT  DE  BEAUVAIS. 

Canton  d^Auneuil. 

Frocourt.  Découvertes  paliolithiquet    (type 

acheuléen]. 
St4jennaia-la«Poterie.  Silex  et  haches  néulithiques  dans 

le  bois  de  la  commune. 
Hont-Saint-Adrien.       Silex  néolith. 
Oiu-eQ-Bray.  Id.      Id.      sépultures. 

Canton  de  Beauvais. 

Beauvais.  Gisement     paléolithique     (types 

acheuléen  et  moustiérien),  sta- 
tion néolithiqueau  Mont-Saint- 
Jean. 

Allonne.  Découvertes  paléolithiques. 

St-Martin-le-Nœud.       Silex,  haches  néolith.  (Musée  de 

Beauvais). 


302  GONQRiS  ARGIIÉOLOOIOUK  DE  fElNGE. 

Goincourt.  Gisement  paléolithique  trë8-iiD[ 

tant  k  Montguillain,  alluv 
(type  moustiérieo,  d'après  IL 
Mortillet),  travaux  et  expk 
tioQ  du  docteur  Baudon, 
M.  FonthieuXf  etc. 
Idem,  station  néolithique. 

Canton  de  Chaumoni. 


Boubiers. 

Menhir  dit  Pierre-Frite. 

Boury. 

DoLMKN,  cromlech,  deux  menhi 

silex  taillés,  haches,  dolu 

détruit?... 

Liancourt-St-Picrre. 

• 

Silex  taillés  (néolith.). 

La  Villetertre. 

A  Baint-Cyr-sur-CharSy  menhi 

Serans. 

Silex  taillés  (aéolilh.). 

Montjavoult. 

Tumulus  et  silex  (néolith.). 

Vaudancourt. 

Menhir    dit     Pierre-Tournai 

« 

haches  néolithiques   (Musée 

Beauvais). 

Trie-Ie-Chî\tcau. 

Dolmen  exploré  et  décrit. 

Délincourt. 

Menhir  brisé. 

Canton  de  Condtay-Saint-Germer. 


Sérifontainc. 


St-Pierre-ès-Champs. 


St-Aubin-en-Brav. 


5:>ainl-Gcrmcr. 


Découvertes  paléolithique  et  si 

néolithiques. 
Silex  taillés  (néolithiques),  hacl 

polios. 
Haches   néolithiques  (Musée 

Beauvais). 
Station  nè>lithique. 


XUY*  SESSION,   A  SENLIS.  303 

Canton  de  Forment. 
Boutayant-U-Grange.    Sépultures  néolithiques? 

Canton  de  GrandvUliert. 
Pas  de  découvertes  préhistoriques  signalées. 

Canton  de  Marseille, 

m 

le.  Haches  (néolith.). 

Milly.  ïd.  Id. 

Canton  de  Méru. 

Montherlant.  Menhirs  détruits. 

l'ouilly-en-Vexin.         Menhir  détruit.  Haches  et  silex 

néolith. 

Canton  de  Vivilliers. 
Bailleoi-sur-Thérain.    Haches,  silex  et  poteries  (néolith.). 


Bronies. 

"n^onne. 

Silex  et  grès  travaillés  (néolith.). 

Livenine. 

Sépulture  néolithique^ 

'"'^ttsereux. 

Ossuaire  et  haches  silex  (néolith.). 

Bresles. 

Découvertes  paléolithiques^  néoli- 

thiques, bronze,  cité  palustre? 

Canton  de  Noailles. 

Hermès.  Ossuaire,  haches  néolith . ,  bronxe. 


304      GONORiS  AEGHÉOLOOIQUE  DE  F&ARGI. 

MoDtreuil-s.-Thérain.    Tombelle? 
Villiers-St-Sépulcre.       Dolmen  dit  Pierre-auz-Fée8,b 

silex,  jade  (ntolith.). 
Abbecourt.  Ossuaire  et  haches  avec  po 

(néolith.).  Dolmen. 

Canton  de  Songeons. 


Hanvoille. 

Haches   néolithiques   (Musé 

Beau  vais). 

Escames. 

Sépulture  néolithique? 

Loueuse. 

Idî 

Wambez. 

Dolmen  détruit. 

ARRONDISSEMENT  DE  CLERMONT. 

Canton  de  BreteuiL 

Rouvroy-lez-Merle.  Tumulus? 

Choiay-la- Victoire.  Haches  en  silex  (uéolith.). 

La  Hérelle.  Idem,  station. 

Mesnil-Saint-Firmin.  Id.       Id. 

Beauvoir.  Id. 

Bouvillers.  Découvertes  paléolithiques. 

Yendeuil-Gaply.  Haches  (néolith.],   dont  un 

jaspe  vert,  poteries. 

Canton  de  Clermont. 

Avrechy.  Près  de  Bixancourt  station  (i 

thique). 
Breuil-le-Sec.  Silex  (néolith.). 


XLIT*  S£SSIO:f,  A  S£NLIS. 


305 


CaniuH  de  Crèvecœur. 


Pas  de  découvertes. 


CanOm  de  Maignelay. 


Uéry. 

Sl-Nartin-au-Bois. 
Couroelle-Epayelles. 
Uoranvilliers. 
Coivrel. 


Haches  nombreuses  (néolilh.)* 

Idem. 

Idem,  station  (uéolith.]. 

Idem. 

Idem,  station  (néolitb.). 


Puii8-la.Vallée, 


Canton  de  Froissy. 

Haches  (néolithiques)   Musée  de 
Beauvais. 


Canton  de  Liancourt. 


8«cy-le.Pelit. 
IWntel. 

^t*Martin-Longueau . 
Brenouille. 
Catenoy. 

Sacy-le-Grand. 


Qnqueux. 
l^Ajeux. 

XLIV*  SESSION, 


Tumulus  détruit? 
Station  (néolith.)* 
Silex  (néolith.),  bronze. 
Menhir  ou  bloc  naturel? 
Station,  atelier,  camp,   tumulus 

(Ouvrage  de  M.  Ponthieux). 
Silex,  bronze,  poteries,  traces  de 

cité  palustre,  d'après  le  docteur 

Baudon. 
Haches  et  silex  taillés  (néolith.), 

bronze. 
Silex  et  bronze. 

20 


306 


G05GliS  AtCHiOLOGIOirS  M  FEASCB. 


Canton  de  Smê-JÊOi'en'CkÊmnée, 


Saint-Jost. 


Brome  et  silex. 


CmUan  de  Hmnf. 


Bury. 
Mouy. 


HeiUe. 

Hondainville. 

Neoilly-s.-Cllennont 

Saint-Félix. 

Ansacq. 


Découvertes  néolithiques,  hadie 

en  jaspe  Tert. 
Atelier  du  camp  Barbet,  trMes  de 

de  cité  palustre  (Ou▼^^e  da 

docteur  Baudon}. 
Station  néolithique. 
Découvertes  néolith.,  brome. 
Idem. 

Station  inéolithiqoe). 
Idem. 


Coivrel. 

Domfront. 

Dompierre. 

Perrière. 

Blaignelay. 

Moyenneville. 

Montigny. 

WacquemoulÎD. 

Cuignières. 


A  ajouter  : 

Gisement  palêolitAiqMe,  alluvio^' 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem. 

idem. 

Idem. 

Idem. 

Idem  à  la  suriaoe  du  sol. 


Stations  néolàkiques. 


LeFiétoy. 


lUT*  SSSSION,   A  SKNUS. 


307 


Godenvillerd. 

Monlgeraîo. 

Tricot. 

U  Ployron. 

FoorniTal. 

Gaones. 

ileiniUur-Bulles. 

Rateoel. 


Atelier. 


ARRONDISSEMENT  DE  GOMPIÈGNE. 


Altkhy. 

Courtieux. 

Haute-Pontainc. 

Cuise-Lamothe. 

Bilry. 

Pierrefonds. 

Retbondes. 

Autrèche. 

St-Pierre-lè8-Bitry. 

Troely-Breuil. 


Canton  cfAtiichy. 

Cromlech  et  silex  (néolith.). 

DOLMBN. 

Haches,  silex  (néolith.). 

Cromlech, silex  (néolith.),  menhir. 

Menhir. 

Découvertes  (néolithiques),  bronze. 

Torques  et  autres  bronzes. 

Menhir. 

Ossuaire  préhistorique? 

Menhir  et  cromlech. 


Gompiègnc. 


Clairoix. 

Jaux. 

Venette. 


Canton  de  Compiègne. 

Fcrél,  quelques  découvertes />â//a- 
lithiques  (type  acheuléen),  men- 
hir. 

Dolmen,  silex  (néolith.),  poteries. 

Ossuaire? 

Haches,  silex  (néolith.). 


308  CONGRÈS  ARGHÉOLOOIOITB  DB  FRANGE. 

Vieux-Moulin,  St-Pierre- 
en-Chastre.  Silex  (néolith.)»  broûie,  fer. 


Canton  d'EstréesSaini-Denis. 


Francières. 


Saint-Remy. 
Hennevilliers. 


Atelier    ou     station    importa.--^ 

(néolithique). 
Haches  et  silex  (néolith.). 
Id.  Id. 


Canton  de  Guiscard. 


Grisolles. 

Tombelle? 

Beaugies. 

Id.? 

Guiscard. 

Id.  (plusieurs)? 

Maucourt. 

Id.f 

(Il  est  difficile  d'affirmer  que 

ces   monuments   sont    préhisto- 

riques. ) 

Berlancourt. 

Silex  (néolith.). 

Chelles. 

Id. 

Villeselve. 

Id.  et  haches. 

Canton  de  Latsigny, 


Gury. 

Découvertes  (néolithiques). 

Roye-sur-Matz. 

Menhir. 

Lagny. 

Tombelle. 

Candor. 

Id.et  haches  (néolith.). 

Canton  de  Noyon, 

Mondescourt. 

Tombelle  ? 

XUV*  SESSIOli,  A  8KNU8. 


309 


P<uitoise. 

Tombelle  t 

Babœuf. 

Tumulus,  ossements,  poteries. 

Gnndni. 

Tombelle  ? 

Porqoérioourt. 

Menhir  ou  bloc  naturel  ? 

Villiere-sur-Coudun. 

Dolmen 

Ville. 

Menhir  et  silex  (néolith.). 

^lency. 

Tombelle  ? 

Apilly. 

Deux  Menhirs. 

Bpetigny. 

Menhir,  station  (néolith.). 

Caisne. 

Menhir. 

Cut8. 

Tombelles. 

Canian  de  Ribécourt. 


f^mprex. 

TboaroUe. 

IheslinoDurt. 

Station  (néolith.),  bronxe. 
Tombelle  et  station  (néolith.). 
Station  (néolith.). 

Canton  de  Jtesions. 

Coudun. 
Goumay. 
Lataule. 
Belloy. 

Station  (néolith.]. 

Bronze. 

Station  (néolith.). 

Excavations  circulaires? 

ARRONDISSEMENT  DE  SENLIS. 


Canton  de  Betx. 


Neurchelles. 

Rouvres. 

Piécy-à-Mont. 


Silex  (néolith.). 

Id. 
Menhir  phallique  et  légendaire. 


310 


CONOBiS  ARCBÉOLOOIOUB  DB  FKANCE. 


Rosoy. 

Menhir. 

Cuvergnon. 

Menhir  et  station  (néolith.). 

Autheuil-en-Valois. 

Station  (néolith.)  et  découvcrtefl^ 

paléolithiques. 

Thury-en-Valois. 

Id. 

Brégy. 

Découvertes  pûléolithiques. 

Acq-en-Multien. 

Silex  (néolith.). 

Boullare. 

Id.  et  grès  travaillés  (néolith.). 

BeU. 

Station  (néolith.). 

Mareuil-8ur-0urcq. 

Id. 

Marolles. 

Id.  et  découvertes  paliolithique$. 

Villeneuve  -  sous  - 

Atelier   (néolith.)  et  découvertes 

Thury. 

paléoliihique$. 

Canton  de  Creil. 

Précy-sur-Oisc. 

Station     (néolith.)   et   gisement 

paléolithique. 

Montataire. 

Découvertes  (néolith.)  et  bronze. 

May  sel. 

Station  (néolith.). 

Tiverny. 

Id. 

Gouvieuz. 

Station  importante  (camp),  bronie. 

Mello. 

Bronze. 

Nogenl-les- Vierges. 

Grotte  sépulcrale  (silez),  (néolith.) 

et.bronze. 

Cramoisy. 

Station  (néolith.). 

Creil. 

PaléolithiQue   (alluvionl,    station 

(néolith.)  très-importante. 


Canton  de  Crépy-en-  Valm. 


Crépy. 


Dans  les  bois,  blocs  pouvant  être 
considérés  comme  des  menhirs. 


ZUT*  SESSION,  A  SENU8.      , 


311 


OntNiy. 

Menhir,  grotte  sépulcrale,    silex 

(néolith.)  et  découverte  paléoli- 

thique contestable. 

Onnoy.VUlien. 

Menhir. 

Trumilly. 

M. 

Attge^Sl-Vinoent. 

Découvertes,  silex  (néolith.). 

Béthisy-St-Piene. 

Id. 

Glaigoa. 

Sépulture  (néolith.). 

Serf-Magoeml. 

Grotte  sépulcrale. 

CanUm  de  NanieuiL 

EnDanoiiTÎlle. 

Menhir  détruit. 

Borat. 

Menhir     debout     et     tombelle 

détruite. 

Canton  de  Pont. 

Brasseuse. 

Découverte^  silex  (néolith.). 

Rohenral. 

Tumulus,  station  (néolith.). 

Verberie. 

Station  (néolith.). 

Rhaîs. 

Menhirs     détruits     et     station 

(néolith.). 

Villeneuve. 

Haches  (néolith.]. 

Verueuil. 

Bronze,  poteries,  fer,   tumulus 

(Musée  de  Senlis). 

Poulpoint. 

DoLMBif,  bronze. 

Fleurines. 

Menhir,  bronze. 

St-Vaafl-de-LoDgmont.  Bronze. 

Reray .  Haches  (néoli  th .  ) . 


312 


GONORÈS  ARGHÉOLOGIQUB  DB  FBARCK. 


Canton  de  Sentis. 


Thiers. 

Découvertes,    bronze   et    hacbe^ 

(néolith.). 

Barberie. 

Stations  et  silex,  épars  (néolith.)^ 

Sentis. 

Silex  (néolith.),  épars,  cromlech  et 

menhirs  dans  la  forêt. 

Monl-rÉvéque. 

• 

Silex  nombreux  (néolith. )et  décou- 

verte paléolithique    (Musée  de 

Senlis  et  nos  col'ectiohs). 

Montépilloy. 

Silex  et  haches  (néolith.),  bronze. 

Ruily,  près  Bray. 

Atelier  (néolith.)  et  bronze,  fer. 

Chaînant. 

Dolmen,  silex  (néolith.). 

Ognon. 

Silex,  haches  néolith.  (nos  collec- 

tions). 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 


JEUDI  31  MAI. 


Excursion  à  Compiègne. 


L'excursion  faite  à  Compiègne,  occupera  une  place 
toute  particulière  dans  les  vieilles  annales  et  les  plus 
brillants  souvenirs  du  Congrès.  La  Société  historique  de 
cette  ville  lui  tendait  avec  la  plus  courtoise  amabilité  une 
main  confraternelle,  et  c'était  pour  lui,  ainsi  que  pour  la 


XifY^  SESSION,   A   SENLIS.  313 

Société  rrançaîf«  d'Archéologie,  un  sujet  d'allraction  plus 
pnisMot  encore  que  les  magnificenoes  artistiques  et  monu* 
luenlalGS  de  la  noble  cité. 

Aussi  environ  soixante  membres  du  Congrès,  fidèles  au 
reudcï-vous,  arrivaient  le  malin  h  la  gare  de  Compiègnc». 
"ù  ils  étaient  reçus  par  M.  Bottier,  présidcut  de  la  Société 
historique;  M.  le  comte  de  Marsy,  le  sympathique  cl 
«léîoué  secrétaire  de  cette  compagnie,  MM.  de  Roucy,  du 
LaCi  Sorel,  etc.,  empressés  à  se  constituer  les  guides  obli- 
jreiotsdu  Congrès  (1). 

Sous  leur  direction  on  a  immédiatement  visité,  dans 
uo  ordre  parfait,  une  première  série  des  monuments, 
lii  léte  du  pont  où  fut  prise  Jeanne  d'Arc,  la  grosse 
tuurditcde  Charles  h  Chauve,  les  magnifiques  salles  sou- 
lerraines  de  l'Hôtel-Dieu,  les  anciennes  maisons  de  bois  et 
les  anciens  hôtels  les  plus  curieux  de  l:i  ville,  Téglisc 
Saiul-Autoine,  l'ancienne  église  de  Saint-Pierre  et  les 
cloîtres  de  l'abbaye  de  Saint- Corneille.  Pour  clore  cette  pre- 

■ 

mière  partie  de  la  journée,  le  cortège,  augmenté  d'un  cer- 
tain nombre  de  confrères  arrivés  de  difierents  points  par 
d'autres  trains,  se  réunissait  à  onze  heures  et  demie  autour 
d'un  déjeuner  réconfortant,  à  l'hôtel  de  la  Cloche,  sous  la 
bienveillante  présidence  de  M.  Bottier,  qui  a  complimenté 
le  Congrès  dans  les  termes  suivants  : 

Messieurs, 

c  La  ville  de  Compiègne  est  fière  de  vous  posséder  dans 
SCS  murs.  Mais  il  appartenait  surtout  à  la  Société  histo- 

(I;  N'oublions  pas  de  dire  ((lie,  ^lÂoe  à  une  altoiilion  délicate, 
rtia|iM*  membre,  enanivant»  se  trouvait  m  possession  d'un  ancien 
plan  de  Oimpiègue,  qui  le  nicttait  à  même  de  se  faire  immédiate- 


314      CONGRÈS  AEGHÉOLOGIQUB  DB  PEAHGB. 

rique,  à  cause  des  liens  de  confraternité  qui  nous  unisMD 
de  vous  souhaiter  la  bienvenue,  et  de  vous  exprimer  to! 
ses  remerctments.  11  m'est  bien  agréable  d'être  Tinta 
prête  de  ses  sentiments,  et  de  vous  dire  qu'elle  n'est  pi 
moins  charmée  qu'honoréô  de  votre  excursion  à  Gon 
piègne. 

a  Le  bassin  de  l'Oise  que  vous  parcoures  dans  vd 
XLIV*  session,  offre  un  immense  intérêt  au  point  de  vi 
historique  et  archéologique.  C'est  à  la  fois  le  berceau  de 
féodalité  et  du  style  ogival.  C'est  là  que,  depuis  le  cou 


ment  une  idée  de  l'état  de  la  ville,  il  y  a  on  siècle  et  demi.  ( 
plan  était  renferme  dans  un  carton  portant  d*un  côté  : 

La  Société  historique  de  Compiègne  au  Congre»  jireké 
logique  de  France.  Jeudi  34  mai  4877. 

De  l'autre,  on  lisait  : 

ITINÉRAIRE. 

Tète  du  pont  où  a  été  prise  Jeanne  d'Arc. 
Grosse  tour  dite  de  Charles-le-Chauve. 
Hôtel-Dieu.  (Salles  souterraines  et  chapelle). 
Anciennes  maisons  de  bois. 
Église  Saint-Antoine. 
Hôtel  des  Rais;  Cour  le  Roi. 
Cloîtres  de  l'abbaye  de  Saint-Corneille. 
Déjeuner  à  onze  heures  et  demie,  à  Thôtel  de  fa  Cloche. 
Église  Saint- Jacques. 
Promenades  au  Parc,  à  TExposition,  etc. 
Rendez-vous  au  Palais,  à  deux  heures  et  demie. 
Musées  Kmer  et  Gallo-romain,  Galerie  Ide  tableaux,  Gran* 
appartements. 
Porte  de  TArsenal. 
Hôtel  de  ville.  —  Musée  Vivenel. 


XUY*  SESSION,   A  8ENU8.  315 

mcDcement  do  notre  antique  monarchie  ont  séjourné  nos 
rois;  c'est  là  aussi  que  le  moyen  âge  se  fait  remarquer 
par  un  plus  grand  nombre  de  monuments  militaires  ou 
civib,  et  que  les  églises  gothi([ues  s'illustrent  par  un 
canctère,  par  un  cachet  de  pureté  et  de  grâce  qui  ne  se 
reocontrent  peut-être  pas  ailleurs. 

■  Ces  temples  d'un  style  si  hardi,  si  nerveux,  si  sévère, 
ii  majestueux,  quoique  en  même  temps  si  svelte,  si  élancé, 
$i  aérien,  et  qui  ne  s'en  harmonise  pas  moins  bien  avec  des 
proportions  souvent  gigantesques,  il  n'y  a  qu'un  sentiment 
<iui  puisse  en  expliquer  la  conception  et  l'exécution,  qui 
puisse  expliquer  la  conception  et  l'exécution  de  ces  mer- 
veilles, c'est  le  sentiment  religieux,  c'est  l'inspiration 
divine,  c'est  l'enthousiasme  chrétien. 

i  A  Compiègne,  en  particulier,  votre  attention  se  fixera 
notamment  sur  les  restes  de  l'abbaye  de  Saint -Corneille, 
fondée  en  876  par  Charles  le  Chauve;  sur  la  grande  tour 
dépendant  d'un  palais  bâti  sous  le  règne  du  même 
monarque;  sur  l'Hôtel-Dieu,  qui  est  l'œuvre  de  la  cha- 
rité de  saint  Louis;  sur  l'hôtel  de  ville,  qui  date  de  la 
tin  du  XV*  siècle;  enfin,  sur  les  musées  de  la  ville  et  du 
château. 

■  Que  j'éprouve  le  besoin,  à  l'occasion  de  cette  grande 
réunion,  de  vous  dire  combien  nous  devons  nous  estimer 
heureux  d'avoir  l'instinct,  le  goût,  l'atlraclioni  le  culte 
des  choses  de  l'antiquité  I  Au-dessus  des  régions  nuageuses, 
trop  souvent,  hélas I  grosses  d'orages,  où  l'âme  saturée  de 
fieU  enfiévrée,  haletante  d'ambition  ou  d'orgueil,  cft  en 
proie  au  chancre  qui  la  dévore,  j'aperçois  notre  but,  notre 
objectif,  notre  perspective,  notre  horizon.  Vous  surtout, 
Messieurs,  les  princes  de  la  science  archéologique,  dans  la 
sphère  sereine  où  vous  êtes  placé,  mieux  que  personne, 
TOUS  pouvez  me  comprendre. 


310       CONGRÈS  ARGHÉOLOOIOUB  DE  FRANGE. 

a  L'archéologie,  c'est  de  l'histoire,  car,  à  chaque  décoU' 
verte,  correspond  souvent  un  fait  historique;  c'est  deThiâ^ 
toire  vivante,  la  plus  sûre,  car  des  choses  qui  ne  meurerJ  ^ 
pas,  sont  marquées  à  son  éternelle  empreinte;  c'est  1^ 
meilleure,  car  clic  no  s'appuie  pas  seulement  sur  la  tra^-' 
dition  orale,  qui  n'est  que  le  reflet  de  la  mémoire  de^ 
hommes;  elle  ne  s'appuie  pas  seulement  sur  des  faits  acci^ 
dentels,  passagers,  sur  des  événements  plus  ou  moius 
fugitifs  dont  le  tcmp^  emporte  la  trace;  mais  elle  est  tou- 
jours là;  elle  s'incarne  dans  le  hronze,  dans  le  fer,  dans  le 
bois,  dans  le  marbre,  dans  la  pierre,  dans  la  terre,  par* 
tout,  enfin,  dans  ce  qui  a  vécu. 

a  il  en  découle  ceci,  c'est  qu'elle  est  le  plussolidevéhicule 
de  la  saine,  de  la  vraie,  de  la  bonne  tradition,  l'auxiliaire 
le  plus  utile  de  l'histoire  proprement  dite  qu'elle  explique, 
qu'elle  commente,  qu'elle  rectifie,  qu'elle  complète,  alors 
qu'elle  ne  la  remplace  pas.  L'histoire,  aussi,  lui  rend 
d'importants,  de  nombreux  services;  et  très-souvent  elles 
se  prêtent  un  mutuel  appui  :  —  sur  ce  terrain,  elles  sont 
Rœurs  jumelles;  elles  se  donnent  la  main.  L'archéologie  a 
sans  doute  dos  obscurités  qui  sont  parfois  des  pro- 
bl(>inos  difficiles  à  résoiulrc,  des  mystères  môme  inson- 
dables, —  combien,  en  clfet,  il  y  a  à  deviner,  à  fouiller,  à 
creuser,  à  exhumer,  à  évoquer  I  Puis,  vient  l'heure  de 
catégoriser,  d'individualiser,  de  biographiser,  si  l'on  peut 
s'exprimer  de  la  sorte,  chacun  de  ces  fragments,  chacun 
de  ces  objets,  tantôt  éparpillés,  tantôt  confondus  pèle- 
mêle  dans  la  poussière  des  siècles.  11  ne  s'agit  donc 
pas  seulement,  à  furce  de  veilles,  d'investigations,  d'élu* 
cubrations,  de  patience,  de  ressusciter  le  passé,  de  faire 
sortir  la  vie  de  ce  qui  semblait  être  le  néant,  de  rendre 
lu  vie  à  tous  ces  débris;  mais  il  faut,  de  plus,  la  mettre 
à  sa  place  en  leur  appropriant  la  physionomie  distinc- 


XLIV*  SESSION,   A  S£NU3.  317 

tite  qui  les  caractérise ,  en  leur  donnant  comme  une 
âme  et  une  voix;  il  faut  de  plus,  classer  la  lumière  à 
travers  toutes  ces  ténèbres,  pardonnez-moi  la  hardiesse 
^  pareils  termes. 

■Quoiqu'il  en  soit,  même  dans  les  situations  les  plus  dif- 
ficiles, les  plus  complexes,  les  plus  souterraines,  par  les 
déductions  de  la  science  approfondie,  par  des  rapproche- 
ments rationnels,  par  des  combinaisons  logiques,  sérieuses 
gai  n'empruntent  rien  à  l'aventure,  par  d'ingénieuses 
comparaisons,  par  des  efforts  presque  surhumains  de 
Te^prit  et  de  la  volonté,  on  parvient  souvent  à  s'élever  au- 
dessus  des  hypothèses,  au-dessus  des  conjectures,  et  jus- 
qu'au niveau  de  la  pure  vérité. 

flC'est  ainsi,  par  l'accomplissement  de  cette  tAchear  due, 
immense,  incommensurable,  qu'on  arrive  à  reconstituer 
toute  l'antiquité. 

«  N'est-ce  pas  le  cas  de  rappeler  ici  les  services  multiples, 
variés,  éclatants  rendus  par  le  Congrès  archéologique  qui 
a  sauvé  tant  de  monuments  du  vandalisme,  de  la  pioche 
des  démolisseurs  et  qui  a  empêché  d'en  déshonorer  tant 
d'autres? 

«Enfin,  sans  parler  ici  de  la  géologie  et  de  l'anthropologie, 
Tarchéologie,  dans  son  domaine  inépuisable,  a  aussi  les 
liens  les  plus  intimes,  les  affinités  les  plus  profondes  avec 
l'ethnographie,  cette  science  si  vaste,  si  belle  qui  embrasse 
la  vie  physique  et  morijle  des  peuples.  A  vrai  dire,  elle  en 
est  sous  plus  d'un  aspect  le  principe  générateur,  la  clef  et 
le  pivot. 

«  Que  de  richesses,  que  de  trésors  accumulés  dans  les 
œuvres  des.archéologues !  Quel  héritage  pour  la  postérité! 
On  ne  vit  pas  seulement  avec  ses  contomp(»roins,  dans  c 
cercle  étroit  du  présent;  on  vit  surtout  des  actes  du  passé; 
de  la  pensée,  des  sentiments,  de  l'inspiration,  des  souve- 


318      GOKGEÈS  ÀRGHÉOLOOIOUB  DB  FRANCE. 

airs  qu'ils  provoqueut  ou  qui  s'y  rattacheat.  C'est  là  to^^ 
à  la  fois,  la  force  et  le  charme  de  l'humanité;  la  irie,  p^^ 
là,  est  décuplée. 

ff  Ils  sont  donc  bien  dignes  d'admiration,  de  respect  et  d^ 
reconnaissance,  les  hommes  illustres  qui  se  sont  dévoués 
à  la  science  archéologique,  qui  en  ont  fait  la  noble  passion  f 
l'honneur  et  la  gloire  de  leurs  études. 

ff  Dans  des  genres  qui  diflèrent  un  peu  entre  eux, 
quoique  dans  le  même  ordre  d'idées ,  qui  ne  se  souvieat 
des  noms,  de  Vaillant,  de  d'Agincourt,  tous  deux  enfants 
deBeauvais,  de  Lebeut,  deBonamy,  de  Montfaucon,  de 
Gaylus ,  de  l'abbé  Barthélémy,  de  Millin ,  de  Lenoir,  de 
Quatremère  de  Quincy,  de  Du  Sommerard,  et  surtout 
d'Arcisse  de  Caumont,  dont  Torganisation  fut  toute  archéo- 
logique, tant  l'amour  de  l'antiquité  était  natif  en  lui; 
de  Caumont  qui,  par  son  esprit  d'étonnante  initiative 
et  de  vulgarisation  qui  rayonoe  dans  toute  la  France,  par 
l'héroïsme  de  ses  incessants  labeurs  qui  ont  usé  sa  vie,  par 
des  écrits  admirables,  a  donné  une  si  vigoureuse,  une 
si  féconde  impulsion  à  celte  grande  branche  des  connais- 
sances humaines.  Combien  doit  être  vénérée  et  bénie  la 
mémoire  de  mon  immortel  compatriote!  Heureusement, 
Messieurs,  il  se  trouve,  parmi  vous,  des  imitateurs  et  des 
continuateurs  de  Caumont,  qui  sont  aussi  animés  d'un 
zèle  ardent,  et  qui,  eux  aussi,  ont  le  feu  sacré  du  génie 
archéologique. 

«  Permettez -moi,  en  finissant,  de  former  un  vœu  et  d'ex- 
primer un  des  plus  vifs  désirs  de  la  Société  historique  de 
Compiègne,  c'est  de  voir,  d'ici  à  une  époque  peu  éloignée, 
le  Congrès  archéologique  tenir  ses  assises  daqs  notre  ville. 
—  Elle  sera  heureuse  d'avoir  à  enregistrer  cet  honneur  et 
d'en  garder  le  souvenir  dans  ses  annales. 

«  Permettez-moi,  aussi,  de  porter  un  toast  au  Congrès, 


ZLIV*  SESSION,   A  SKNLIS.  319 

tt  ginénl,  et,  en  particulier,  de  boire  à  la  santé  de 
M.  Léon  Palustre,  qui  en  est  le  si  savant  et  si  digne 
'ineteor.  > 

Après  cette  allocution  qui  a  été,  à  plusieurs  reprises, 
interrompue  par  des  marques  d'approbation  de  tous  les 
membres  du  Congrès,  et  dont  la  fin  a  été  accueillie  par 
ém  applaudissements  et  des  acclamations  unanimes, 
M.  Palustre,  au  nom  de  la  Société  française  d'Archéologie, 
I  remercié  la  Société  historique  de  Compiègne  de  son 
sympathique  et  brillant  accueil,  ot  l'un  des  convives  s'est 
bit  aussi  Tinterprète  de  la  gratitude  générale  en  portant 
un  toast  aux  dames  qui,  par  leur  gracieuse  présence,  ajou- 
taient un  charme  de  plus  à  la  réunion. 

Une  promenade  dans  le  parc  du  château  et  à  l'Exposi- 
tion organisée  pendant  le  Concours  régional ,  a  précédé  le 
rendei-vous  donné  à  deux  heures  et  demie  au  musée  Kmer, 
installé  au  rei*de-chaussée  du  palais.  Le  musée  Kmer  ou 
cambodgien,  reflet  d'une  civilisation  asiatique  disparue, 
est  unique  en  Europe  par  l'étrangeté  de  ses  monuments, 
produits  d'un  art  qui,  tout  en  conservant  son  caractère 
spécial,  ofire  parfois  des  réminiscences  de  l'art  assyrien, 
de  l'art  romain ,  et  de  vagues  préludes  de  la  Renaissance. 
Ç*a  été  une  rare  bonne  fortune  pour  les  hôtes  qu'il  rece- 
vait, de  le  parcourir  sous  l'attachante  direction  de  M.  de 
Harsy,  dont  les  explications  ont  fait  regretter  qu'un 
plus  long  examen  n'ait  pu  être  consacré  à  cette  collection. 

Si  les  richesses  du  musée  Kmer  se  composent  d'objets 
éminemment  exotiques,  la  salle  supérieure  contient,  en 
revanche,  un  musée  gallo-romain  qui,  entre  autres  mérites, 
a  celui  d'être  éminemment  local.  Là,  on  se  trouvait 
en  plein  domaine  de  M.  de  Houcy,  le  perspicace  fouilleur 
de  Champlieu  et  de  ses  environs,  et  nul  mieux  que  lui  ne 


320     CONGRÈS  ARCUÉOLOGIOUB  DE  FRANGE. 

pouvait  faire  connallre,  comme  il  Ta  fait,  les  produits  à^ 
ses  explorations  qu'on  avait  sous  les  youx. 

La  visite  des  grands  appartements  du  château ,  décorés 
d'objets  d'art  d'une  époque  plus  récente,  céramique  de 
Sèvres,  tableaux  de  l'école  Française,  splendides  tapisserieSy 
a  été  comme  un  intermède  habilement  ménagé  entre  le 
musée  archéologique  du  palais  et  le  musée  Vivenel, 
établi  dans  l'hôtel  de  ville,  le  bijou  des  monuments  de 
Compiègne,  rendu  par  M.  Laflblye,  à  la  pureté  et  ù  l'élé- 
gance de  ses  premières  lignes  architecturales. 

Le  musée,  dont  est  lière  à  si  juste  titre  la  ville  de 
Compiègne,  a  été  formé  pur  l'un  de  ses  citoyens,  passionne 
pour  l'amour  des  arts  et  de  l'antiquité,  Antoine  Vivenel, 
qui  le  donna  à  sa  ville  natale  en  1843. 

0  Cette  collection,  dit  un  éminent  publiciste  dans  un 
remarquable  aperçu  sur  la  ville  de  Compiègne,  est  une 
encyclopédie  abrégée  de  tous  les  arts,  dans  tous  les  temps 
et  chez  tous  les  peuples.  Sculpture,  peinture,  céramique, 
verrerie,  ameublement,  panoplie,  serrurerie,  bijouterie, 
orfèvrerie,  émaux,  curiosités  égyptiennes,  imloues,  chi- 
noises, japonaises,  médailles,  glyptique,  il  n'y  a  pas  une 
création  du  génie  humain  qui  ne  soit  glorieusement 
représentée  au  musée  de  Compiègne.  » 

La  courtoisie  de  MM.  les  menibres  de  la  Commission 
qui  veille  à  la  garde  de  ces  richesses  et  qui  a  M.  de  Marsy 
pour  secrétaire,  est  trop  traditionnelle  pour  qu'il  soit 
besoin  de  dire  avec  quelle  grâce,  quelle  aimable  érudition 
ils  ont  fait  au  Congrès  les  honneurs  du  lieu,  tant  dans  la 
magnifique  salle  des  objets  du  moyen  âge  et  de  la  Itenais. 
sance,  que  dans  la  salle  des  antiquités.  C'est  dans  cette 
dernière,  où  un  punch  avait  été  servi  par  les  soins  de 
MM.  du  Comité  historique,  que  Ton  a  attendu  le  moment 
du  départ,  fixé  à  six  heure?,  et  qui  mettait  fin  à  cette 


Porte  de  l'arsenal  de  Compiègae. 
iD'iprèi  un   deuin  eumerrt  aui  ArebiTef   munklpiln.] 


ZUV*  SESSION,   A   SBNLIS.  321 

îoarnée,  dont  chacun  emportait  le  plus  précieux  souve- 
nir, en  témoignant  sa  gratitude  pour  ceux  qui  l'avaient 
^DrgmiBée. 


Hôtel  de  ville  de  Compiègne. 

Par  M.  le  comte  de  Marsy. 


SOMMAIRE  ANALYTIQUE 

^-  lotroductioD.  ^  S.  Sources  du  traYail.  —  Première  maison 
<k  ville  et  donation  de  Jean  Loutrel.  —  4.  Emplacement.  ^ 
5.  Aspect  géuéral.  —  6.  Construction  du  nouveau  bâtiment. 
Hao^  dnrée  des  travaux.  —  7.  Fondations,  caves.  —  8.  Maté- 
riinx.  —  9.  Maçonnerie.  —  40.  Charpente.  —  Extérieur: 
H.  Porte.  —  4Î.  Décoration  de  la  façade.  —  43.  Couver- 
tore,  comble.  —  44.  Beffroi.  —  46.  Lion  du  beffroi.  — 
46.  Horloge.— 47.  Cloche.— 48.  Appeaux.—  19.  Picantins.— 
Intérieur:  ÎO.  Kscalier.  —  îl.  Distributions  successives.— 
îl  Antichambres.  —  23.  Salle  d'Assemblées.  —  24  Chambre 
do  Conseil.  —  25.  Premier  étage.  —  26.  Ècritoire.  — 
27.  Archives. —  28.  Arsenal.—  29.  Cuisine.— 30.  Dépenses.  — 
Bâtiment  de  ia  Justice  consulaire:  34.  Acquisitions. — 
32.  Construction  et  décoration,  intérieur,  cabinet.  —  33.  Porte 
de  l'arsenal.  Bâtiment  neuf  de  la  Caisse  d'épargne.  — 
U.  Bâtiment  de  la  rue  des  Pâtissiers.  École  de  Dessin. 

i .  Introduction, 
Lors^iue,  quittant  Paris,  ou  se  dirige  vers  le  Nord,  Thô- 

XLIY*  SESSION.  21 


323      GONORÀS  ARGHÉOLOOIQUE  D£  FRANGB. 

tel  de  ville  de  Compiègne  inaugure  brillamment  la  série 
des  édifices  construits  au  xv*  et  au  xvi*  siècle  par  les 
municipalités  dans  les  principales  villes  de  la  Picardie  et 
des  Flandres  (1).  Ce  monument  a  été  décrit  déjà  avec  soin 
par  M.  Verdier,  qui  en  avait  entrepris  la  restauration  (2), 
mais  nous  avons  pensé  que  l'histoire  de  sa  construction  et 
des  modifications  qu'il  a  subies  pourrait  offrir  un  certain 
intérêt,  et  c'est  ce  que  nous  allons  essayer  de  retracer  dans 
ces  notes. 


2.  Sources  du  travail. 

M.  de  L'Épinois^  qui  a  rédigé  l'inventaire  sommaire  des 
archives  de  Compiègne,  disait  dans  un  travail  qu'il  a  pu- 
blié à  cesujet  (3)qu*en  compulsant  les  registres  des  comptes 
municipaux,  il  serait  possible  d'établir  presque  exacte- 
ment le  chiffre  de  ce  qu'avait  coûté  la  construction  de  notre 
hôtel  de  ville.  C'est  ce  que  nous  aurions  désiré  faire;  mais 
après  avoir  relevé  toutes  les  mentions  que  nous  fournissent 
les  comptes,  nous  avons  reconnu  que  trop  souvent  les  dé- 
penses relatives  aux  travaux  de  l'hôtel  de  ville  se  trou- 

(h)  L'hôtel  de  ville  de  Noyon  date  de  4  485  et  la  grande  galerie 
de  4523  seulement,  celui  de  Saint-Qucutin  de  1509.  Il  est  & 
remarquer  qu'aucun  des  historiens  ou  des  voyageurs  des  deux 
derniers  siècles  n'a  consacre  même  une  ligne  à  la  description  de 
l'hôtel  de  ville  de  Compiègne. 

(%)  Verdieretl'altois,  .-ire  ht  lecture  ci  vile  et  domestique,  t.  r»". 

M.  Larfolyc,  qui  a  oxéciité  la  seconde  restauration,  doit  pro- 
chainement publier  ses  dessins  avec  une  courte  notice  descrip- 
tive (Lib.  Morel). 

(3)  Bibliothèque  de  l'École  des  Charles,  t.  XXV,  p.  Ul, 
1863-64. 


XLIY*   SESSION,   A  SENLIS.  323 

niflot  confondues  avec  celles  qui  concernent  les  remparts, 
kl  portes,  les  chaussées  et  les  autres  bâtiments  munici- 
piu  (I);  aussi  avons-nous  renoncé  à  ce  projet  et  nous 
bonerons-nous  à  donner  un  certain  nombre  de  mentions 
pennettanl  de  fixer  la  valeur  des  différents  matériaux  et 
le  lalâire  des  ouvriers  appelés  à  prendre  part  à  cette  con- 
UroctioD. 

3  Première  maiton  de  ville  et  donation  de  Jean  Loutrel. 

Jusqu'à  la  fin  du  xiv*  siècle,  nous  ne  pouvons  indiquer 
exactement  quels  furent  le  lieu  de  réunion  des  gouverneurs 
iUouniés  chargés  de  l'administration  de  la  ville,  et  ie 
<iépôt  des  archives  et  du  matériel  de  guerre  delà  cité.  Nous 
iommes  autorisé  toutefois  à  supposer  que  ce  local,  s'il 
existait,  ne  devait  pas  être  brillant,  car  en  1397,  un  bour- 
geois, nommé  Jean  Loutrel  ou  Loutre^  légua  à  la  ville 
qu'il  habitait  deux  maisons  situées  sur  la  place  au  Blé  et 
les  affecta  au  service  de  la  ville.  Ces  deux  maisons  occu- 
paient l'emplacement  du  bâtiment  principal  de  Thôtel  de 

[<i  Que  n*avoDS-DOus  aussi  les  petits  feuillets  de  papier,  veut 
tt  rendus  par  le  receveur  et  qui  contenaient  eu  détail  les 
■emoires  qu'il  ne  (ait  que  résumer,  ainsi  que  les  mande- 
neots  motivés  des  gouverneurs?  nous  trouverions  là  de  précieux 
Koseigoements  sur  les  travaux  exécutés  à  notre  hôtel  de  ville; 
grice  i  eux,  nous  pourrions  reconstituer  exactement  le  devis  et 
le  oioDlant  des  dépenses,  tandis  (|u'il  nous  est  impossible  d'es- 
sayer un  semblable  travail,  quand  nous  trouvons  dans  le  même 
article  du  compte,  du  bois  pour  les  feux  de  joie,  des  pierres  pour 
les  lotisses,  des  cailloux  pour  les  routes,  des  pourboires  aux 
soooeurs,  des  dîners  aux  (gouverneurs  et  un  à-compte  i  uo  tail- 
leur d'images. 


32i      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIQUE  D£  FEANGB. 

ville  actuel.  On  les  connaissait  sous  les  noms  de  la  grande 
et  de  la  petite,  cette  dernière  est  désignée  comme  située 
lez-là  Cloche. 

La  ville  fut  reconnaissante  à  Jean  Loutrel  de  la  donation 
qui  lui  était  faite  et  elle  fit  célébrer  chaque  année  un 
obit  en  son  honneur  à  Téglise  Saint-Jacques;  nous  trou- 
vons, dès  1427,  de  nombreuses  mentions  des  sommes  payées 
à  cet  effet,  sommes  qui  s'élèvent  en  général  à  42  sous 
parisis  par  an  (1). 

Ces  maisons  n'étaient  pas  pour  la  ville  d'une  utilité  in- 
dispensable, sans  doute  à  cause  de  leur  mauvais  aména- 
gement; aussi,  après  avoir  réservé  ce  qui  était  nécessaire 
pour  mettre  les  archives  et  conserver  les  poudres  et  l'artil- 
lerie, les  attourués  louaient-ils  le  surplus.  Cet  état  de 
choses  dura  ainsi  pendant  la  plus  grande  partie  du  xv" 
siècle  [^),  De  fréquentes  réparations  furent  faites  aux 
bâtiments  légués  par  Jean  Loutrel. 

Kn  1464,  par  exemple,  on  consolida  les  chapiteaux  avec 
du  plomb  neuf,  de  Testai n  d'Angleterre  et  de  la  poix  de 
Bordeaux  (CG.  22). 

(1)  ce.  13,  ce.  36  f«  63.  Archives  de  Compiègne.  Afin  d'évi- 
viter  des  répétitions,  nous  donnerons  seulement  les  lettres  de 
l'inventaire  et  les  folios  des  registres. 

(t)  «  Dans  les  premières  années  de  la  donation  de  Loutrel,  les 
attournés  paraissent  cependant  s'être  réunis  dans  l'hostel  com- 
mun, ainsi  qu'on  l'appelait.  Nous  trouvons  en  effet  difTêrentes 
dépenses  se  rapportant  à  des  acquisitions  relatives  à  son  ameu- 
blement. En  1408,  a  une  nale  contenant  de  long  XIIII  piez  et 
de  lé  sept  piez,  pour  metire  en  la  Chambre  de  la  ville,  dessoubz 
le  comptoir.  »  (CC.  8.)  En  1440,  un  tapis  de  Hongrie,  «  pour 
trois  aulnes  de  drap  vert  achetez  d'un  marchant  tongrois,  |)our 
mettre  sur  la  table  et  comptoir  de  la  (^haïuhre  de  la  ville,  au 
prix  de  10  s;>i!S  par  aulne    >  iCIC.  18.  d'après  TËpinois  ) 


,» 


ZUT*  SESSION,  A  SENLI8.  3)5 

Un  iooendie  aliumé  eu  mars  1466  par  mèche f^n  détrui- 
sit Qoe  partie,  malgré  les  secours  apportés  par  des  ouvriers 
qui  réussirent  à  l'éteindre  et  furent  gratifiés  pour  ce  mo- 
tif d'an  don  de  54  sous  (1).  Les  réparations  faites  à  la  suite 
de  cet  événement  s'élevèrent  à  72  livres  (2). 

Mais,  en  1499,  les  choses  étaient  arrivées  à  un  point 
td  qu'il  fallut  songer  à  une  réédification  complète;  dans 
une  assemblée  tenue  au  mois  de  janvier,  on  décida  qu'il 
était  nécessaire  de  reconstruire  l'édifice,  attendu  que  les 
OMnbles,  qui  étaient  depuis  longtemps  sur  étais,  fondaient, 
ûisi  que  le  mur  et  le  pignon  de  la  chambre  de  derrière 
sur  le  jardin. 

Le  bâtiment  qui  fut  alors  construit  est  celui  que  nous 
ToyoDs  aujourd'hui  et  qui  n'a  subi  depuis  cette  époque  que 
des  modifications  qui  n'ont  pas  altéré  sensiblement  le 
caractère  primitif  de  son  architecture* 

On  commença  par  démolir  le  grand  corps  sur  rempla- 
cement duquel  devait  s'élever  le  nouveau  bâtiment.  Les 
nutériaux  furent  mis  à  part,  soit  pour  être  utilisés  à  la 
nouvelle  construction,  soit  pour  être  vendus. 

Le  9  août  1505,  le  receveur  donne  mandement  de 
Mivres  parisis  aux  plâtriers  qui  ont  o  découvert  et  mis  à 
point  au  jardin  de  la  ville,  toute  la  thuille  du  grand  corps 
d'ostel  d'icelle  ville,  ensemble  des  maisons  où  demeuroient 
Yvon  HoUet  dit  le  Breton,  et  feu  Jehan  Laudigeois  (3).  » 
Peu  de  jours  avant  on  avait  vendu  à  Jehan  Carrière  le 
jeune,  marchant  mercier,  le  bois  de  Tuu  dos  combles  de 
l'ostel  de  ville,  pour  laquelle  a  vcndicionct  délivrance  à  luy 

(OMss.  Léré,  d'après  Charmolue. 
2!  Id. 

(3)  ce.  76,  P»  422  V.  le  prix  de  8  livres  avait  été  fixé  par  un 
Barché. 


326      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIQUE  DE  FRÂKGB. 

Caitte,  comme  au  plus  offrant  et  dernier  enchérisseur,  le 
tiers  jour  du  mois  d'avril  1505,  par  Monsieur  le  lieute- 
nant de  Monseigneur  le  bailly  de  Senlis,  ■  il  payait  4  livres 
parisis  (i). 

Les  deux  maisons  dont  nous  venons  de  voir  démolir  la 
toiture  étaient  louées  par  la  ville,  la  première  dite  la  petite 
maison  de  l'hôtel  de  ville,  moyennant  60  sous  parisis  à 
Yvon  Holiet,  povre  homme,  et  la  seconde  à  Jehan  Bucquet, 
clerc  de  l'hôtel  de  ville,  moyennant  quatre  livres  parisis; 
mais  les  gouverneurs  leur  accordèrent  la  remise  de  ces 
sommes  «  en  considération  de  ce  que  l'on  a  desmoly  ledit 
hostel  et  la  petite  maison  d  (2). 

4.  Emplacement. 

L'hôtel  de  ville  était  compris  dans  un  tour  (3)  auquel  il 
donna  son  nom.  Ce  tour,  qui  comprenait  non -seulement 
l'hôtel  de  ville,  mais  cucore  quelques  habitations  particu- 
lières, avait  les  limites  qu'il  conserve  aujourd'hui  et  étai 
compris  entre  la  place  de  rHôlel-ile-Villeet  les  rues  actuelles — 
de  la  Surveillance,  Saint-Jacques  et  lîes  Pâtissiers. 

La  place  de  rHôuldc-Ville  portait  alors  le  nom  de  plad 
du  Marché  au  Ble.  qu'elle  n'a  quitté  qu'en  1749;  la  ruede\ 
Pâtmiers  était  qualitiée  de  rue  de  la  Meuse  et  la  rue  de  /( 
Surteillance  était  alors  n.e  de  l' Image   i). 

L*hôtol  de  viP.o  avait  une  porte  donnant  dans  l'im 


;i'CC.  76.  f-^Ti. 

vl  (T..  76.  f*  «50  V.  et  IM. 

(."^  On  di^ii:njt]i  ^  Compiecoe,  sous  le  Dom  de  tour,  chaqu 

p&lé  ou  iloi  do  maisons. 

(4^  .\ul>Pf lioque.  Rvef,  hôtels  et  quartiers  de  Compiègn 
I.  1^  du  Bulletin  de  U  SvVieic  historique. 


ZLIY*  SESSION,   A  SENUS.  327 

deTanenal  ou  de  l'ancienne  prison,  appelée  alors  me 
M9ulgard{i). 

La  place  qui  se  trouvait  devant  Thôtei  de  ville  était  pavée  : 
«A Laurent  Holet,  paveur,  demeurant  audit  Gompien- 
foeaesté  paiée  la  somme  de  72  sols  4  deniers  parisis  pour 
ti  quantité  de  31  toises  de  pavement  qu'il  a  faites  au  devant 
<k  l'o8tel  de  ladite  ville  et  de  la  maison  de  Pol  Dambrine, 
qQ'estoit  pris  de  2  sols  4  deniers  parisis  la  toise,  n 

U  y  avait  devant  l'hôtel  de  ville  un  puits  que  nous 
^ODs  mentionné  dès  1514,  époque  où  on  emploie  des 
pierm  cpour  sa  perfection  (2 j.  »  En  1521,  Jehan  Richier, 
nuçoD,  reçoit  40  sols  parisis  pour  avoir  fait  les  marches 
<lecepuiU(3). 

Il  existait  encore  dans  les  premières  années  de  ce  siècle. 
Ploi  tard,  il  fut  remplacé  par  une  pompe  dont  le  corps  fut 
placé  contre  le  mur  de  l'hôtel  de  ville,  à  l'endroit  occupé 
actoellement  par  la  porte  d'entrée  (4). 

5.  Aspect  général, 
La  seule  partie  visible  de  l'hôtel  de  ville  est  la  façade.  Elle 

(t)  II.  Aubrelicqae  rappelle  nielle  Mangard,  mais  le  passage 
on  Doos  trouvoDS  écrit  Maulgard  nous  permet  de  rectifier  celte 
iectore.  Dans  sa  notice  sur  les  anciens  quartiers  de  Corn- 
fiègne,  M.  Z.  Rendu  l'indique  comme  ayant  porté  aussi  le  nom  de 
ne  Margotte. 

lijCC.  36, 1544-1bl7,  f»  117. 

(3)  ce.  37,  A»  477  {27  février  loîO.  V.  S). 

:4)  Cette  pompe  est  figurée  sur  les  dessins  de  Thôtol  de  ville 
eiKotésdc  1830  &  18o0  environ,  et  notamment  sur  la  remar- 
quable aquarelle  de  M.  Langlois  (1841),  donnée  depuis  peu  au 
Masée  Vivenel. 


328      GONGBÈS  ARGHÉOLOOIQUB  DB  FaANGB. 

06  compose  :  i  **  d'un  rez-de-chaussée,  percé  de  quatre  feoèU 
carrées,  à  angles  émoussés,  avec  moulures  prismaliqi> 
et  frontons  à  feuillages.  L*une  des  fenêtres  était  ouvei 
au-dessus  de  la  porte  d'entrée  (1);  2^  d'un  étage  percé 
quatre  fenêtres  de  même  forme  que  celles  du  rex-d 
chaussée,  mais  plus  ornées,  séparées  par  des  niches  à  è 
délicatement  sculptés,  et  au-dessus  duquel  régnent  u 
double  corniche  de  feuillages  et  une  balustrade  à  joi 
avec  moulures  flamboyantes.  De  petites  ouvertures  méi 
gées  au-dessus  de  ces  fenêtres  donnent  du  jour,  à  un  éU 
bas,  désigné  par  plusieurs  architectes  sous  le  nom 
mezzanino.  Au  devant  du  comble,  couvert  en  ardoîi 
éclairé  par  deux  grandes  fenêtres  en  pierre  surmont 
d'ornements  à  jour,  et  percé  à  sa  partie  supérieure 
petites  lucarnes  garnies  en  plomb,  se  détache  le  beff 
central,  surmonté  d'un  toit  pointu  et  accompagné  d'échf 
gruttes  ou  tourelles  également  couvertes  en  ardoise. 

Aux  deux  extrémités  de  la  façade  se  trouvent  des  to 
relies  octogones  (2). 


(1)  Cette  dis[)osillon  a  ct(S  modifiée  lors  de  la  restauration 
M.  Verdier.  Dans  une  descripiion  pittoresque  de  l'hôtel  de  v 
publiée  dans  l'Artiste,  en  1809,  M.  Charles  Beauriu  insiste 
rimportance  que  rarcliitecte  avait  dû  attacher  à  Tirrégulai 
de  la  façade,  à  la  porte  mise  de  côté,  à  la  différence  de  larg 
des  entre-deux  des  fenêtres.  Il  cherche  à  y  attacher  une  \{ 
symbo1i<iue;  nous  croyons  simplement  «(uc  le  constructeur  s' 
d'abord  préoccupé  de  remplir  son  but,  qu'une  fois  son  plan  î\ 
il  a  donne  du  jour  aux  pièces  qui  en  avaient  besoin ,  et  al 
seulement,  le  décorateur  a  placé  ses  niches,  ses  guirlandes 
iQ&  ornements  dans  les  endroits  restés  libres  sur  la  façade. 

(2)  Nous  ne  possédons  pas  de  dessins  anciens  de  Thôtel 
ville.  La  preiaiëre  vue  que  nous  en  connaissons  est  celle  qa 


XUY*  SESSION,   A  SENUS.  3S9 

La  façade  de  l'hôtel  de  ville  a  U  mètres  de  largeur,  et 

été  exécutée  vers  4780  et  qui  figure  dans  le  Voyage  pittoresque 
de  la  France,  de  Née  et  de  Laborde. 

Nous  citerons  ensuite  : 

4.  Dessins  grossiers,  exécutée  par  Léré  de  1815  à  4830,  bons 
à  consulter  seulement  pour  établir  l'état  du  monument  à  cette 
époque. 

2.  Vue  dessinée  par  Rauch  et  gravée  par  Schrœder,  pour 
V Histoire  des  environs  de  Paris,  de  Dulaure. 

3.  Lithographie  de  Leradde,  pour  V Album  du  Nouvelliste 
de  Compiègne,  1839. 

4.  Lithographie  de  Deroy,  pour  Compiègne  et  ses  environs, 
d'Ewig. 

5.  Giavure  sur  bois,  d*après  un  dessin  de  Desmarest.  Maga^ 
sin  pittoresque  de  4841 ,  p.  230. 

6.  Aquarelle,  par  Langlois  (4841),  aujourd'hui  au  Musée 
Vivenel. 

7.  Lithographie  de  Viilemin ,  pour  le  Voyage  dans  l'an- 
cienne France,  du  baron  Taylor. 

Une  page  du  texte  de  cet  ouvrage  est  encadrée  dans  une  litho- 
graphie de  Blanchard,  donnant  la  vue  du  beffroi  et  celle  de  la 
porto  de  l'Arsenal. 

8.  Gravure  sur  cuivre,  par  Oury  (vers  1845),  planche  dont 
l^criginal  est  au  Musée  Vivenel. 

9.  Vue  gravée  par  Pencl,  d'après  les  dessins  de  M.  Vcrdier, 
dâos  y  Architecture  civile  et  domestique, 

10.  Gravure  sur  acier,  par  M"™"  Clément  et  A.-F.  Lemaître, 
pour  V Histoire  du  palais  de  Compiègne,  de  Pellassy  de 
Ï'0asle(l860). 

44.  Dessins  de  M.  Lafullye,  exécutés  pour  la  commission  des 
^<>ouments  historiques  et  publiés  dans  V Encyclopédie  d'Archi- 
f^eure  (1877),  à  la  librairie  Morel. 

^ou8  n'indiquons  pas  en  outre  quelques  dessins  sans  impor- 
UDce  figuraut  dans  des  publications  illustrées  et  qui  ne  sont  que 
^^  reproductions  des  types  ci-dessus. 


330  CONGRÈS  ARGHÉOLOOIOITE  DE  FRANGE. 

le  beffnti,  avaut  la  dernière  restauratioa ,  avait  une  hau- 
teur de  47™30  (I). 

Le  bâtiment  de  l'hôtel  de  ville  de  Compiègne  s'écarte 
en  deux  points  du  plan  généralement  adopté  pour  la  cons- 
truction des  hôtels  de  ville  dans  le  nord,  non-seulement 
de  la  France,  mais  de  l'Europe.  Il  n*a  pas  de  portique  per- 
mettant aux  bourgeois  de  se  réunir  et  de  traiter  soit  des 
afiaires  municipales,  soit  de  leurs  propres  intérêts;  de 
plus,  le  balcon,  du  haut  duquel  les  officiers  municipaux 
avaient  l'habitude  de  parler  au  peuple  ou  de  faire  faire  des 
proclamations,  n'existe  qu'à  Tétat  rudimentaire  et  consiste 
seulement  dans  une  petite  saillie  pratiquée  à  la  galerie  du 
comble. 

6.  Construction  du  nouveau  bâtimeni,  plan,  durée 

det  travaux. 

Le  style  employé  dans  la  décoration  est  celui  de  la  der- 
nière époque  gothique,  avec  déjà  certains  des  caractères 
qui  distinguent  les  monuments  de  la  Renaissance. 

Pendant  longtemps,  nous  avions  cru,  ainsi  que  M.  de 
rÉpioois,  que  le  nom  de  rarchitccte  de  l'hôtel  de  ville 
de  Compiègne  resterait  inconnu,  lorsque  nous  avons  trouvé 
le  passage  suivant  dans  le  compte  des  octrois  de  141>9 
à  1505.  (CC,  70,  1^94.) 

t  A  Pierre  Navyer,  dit  de  Meaulx,  masson  et  maistre 
des  œuvres  sur  le  fait  de  la  massonnerie,  audit  Com- 
piengne,  a  esté  paie  par  ledit  recepveur  pour  ses  gaiges  et 
pension  d'un  demy-an,  escheu  au  jour  saint  Jehan-Bap- 
tiste mil  cinq  cens  et  cinq,  à  cause  d'avoir  veu,  visitté  et 
regardé  les  ouvrai ges  de  massonnerie,  qui  s'estoyent  faictes 

(4)  Woillcz,  Répertoire  archéologique  de  l'Oise,  p.  4t4. 


XUT*  8KSSI0N,   A  SENLIS.  334 

aodiet  Compiengne,  durant  ledit  demy-an  ;  comme  par 
mindement  desdits  gouverneurs,  le  xxiii*  jour  de  juing 
1505,  signé  dudit  Navyer,  cy  a  esté  payé  trente  sols 
pirisis.  » 

Et  dans  le  même  compte,  à  propos  de  Tachât  de  cent 
Mixante-quinze  tonneaux  de  pierre  pour  la  réédification 
<kriiôtel  de  ville,  fait  le  6  mars  1605,  on  voit  qu'ils  ont 
M  •  mesurés  par  Pierre  Navyer,  dit  de  Meaubc,  maistre 
ouvres  dudit  Gompiengne.  (làid,  f°  1 12.)  d 

Enfin,  à  un  autre  endroit,  on  voit  Pierre  de  Meaulx, 
commis,  avec  plusieurs  autres  experts,  pour  examiner  la 
question  de  mitoyenneté  d'un  mur  de  la  maison  de  Pol 
I^imbryne,  touchant  à  l'hôtel  de  ville. 

Ne  sommes-nous  pas  autorisé  à  supposer  que  ce  maître 
ès-œuvres,  dont  nous  ne  voyons  l'existence  qu'à  cette 
seole  date,  peut  être  l'auteur  du  plan  et  le  conducteur  des 
travaux,  en  un  mot  l'architecte  de  notre  hôtel  de  ville? 

Peut-être  nous  objectera-t-on  la  modicité  du  traitement 
fui  lui  est  alloué;  mais  qu'il  nous  soit  permis  de  faire 
remarquer  qu'il  est  en  rapport  avec  le  chiffre  des  gouver- 
neurs et  des  principaux  officiers  de  la  ville,  et  dont  les 
plus  élevés  n'atteignaient  que  dix  livres. 

De  ce  que  Pierre  Navyer  ne  figure  plus  sur  les  comptes 
suivants,  peut-être  pourrait-on  inférer  qu'il  a  quitté  Com- 
piègne,  ou  cessé  ses  fouctions  du  moment  où  les  travaux 
de  maçonnerie  ont  été  très-avancés;  et  nous  voyons  par  les 
quantités  de  pierres  apportées  au  commencement  de  1505 
et  par  les  sommes  payées  aux  maçons  pendant  la  première 
moitié  de  cette  année,  que  les  travaux  du  gros  œuvre 
devaient  être  presque  achevés  avant  l'automne  de  1505(1). 

M)  Il  nous  semble  utile  de  rappeler  ici  les  noms  des  ofGciers 
maDJcipaux  de  Gompiëgne  qui  se  sont  occupés  de  la  constructioa 


332      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIQUE  D£  FAAMCB. 

Ces  travaux  furent  exécutés  par  un  grand  nombre  d*ou* 
vriers  de  divers  corps  d'état,  qui  paraissent  avoir  travaillé 
en  quelque  sorte  isolément.  Nous  trouvons  pourtant,  pour 
la  maçonnerie,  deux  entrepreneurs,  Hutin  Damery  et 
Enguerrand  Blondin,  auxquels  on  doit,  croyons-nous, 
attribuer  la  plus  grande  partie  de  ces  travaux. 

De  fréquents  paiements  leur  sont  faits  pour  des  sommes 
assez  importantes  (1).  Au  mois  de  juin  1505,  Hutin 
Damery  reçoit  «  une  somme  de  deux  cents  douze  livres 
parisis  sur  et  tantement  du  marché  et  ouvraiges  de  mas- 
sonnerie  qu'il  est  tenu  faire  en  l'ostel  de  la  ditte  ville, 
comme  par  quatre  mandemens  donnés  desdits  gouver- 
neurs, les  12  mars  1504  (1505),  6  et  U  avril,  et  23  juin 
1505  (2);  et  le  13  octobre  1511,  il  est  payé  à  Enguerrand 
Blondin  la  somme  de  cent  solz  parisis  sur  et  tantement 
des  ouvraiges  de  maçonnerie  qu'il  a  faits  et  fait  encores  à 
l'hostel  de  la  ville  et  sans  préjudice  d'iceulx  répéter  sur 

et  des  agrandissements  de  Thôtel  de  ville,  en  attendant  qu'un 
jour  une  inscription  placée  dans  Tune  des  salles  de  cet  édiûce 
consacre  leur  souvenir,  ainsi  qu*on  Ta  déjà  demandé  à  plusieurs 
reprises.  Lorsque  les  travaux  furent  décidés  en  1499,  les  trois 
gouverneurs  attournés  étaient  :  Nicolle  de  Hênaut,  Adrien  Cliar- 
molue  et  Pierre  Morei.  En  1505,  Laurent  le  Tondeur,  Jehan 
Champion  et  Nicolle  de  Pronnay;  de  1505  à  4508,  Florent  Mur- 
lot,  Jehan  de  la  Vie  et  Jehan  Champion;  et  de  1508  à  1511, 
Laurent  le  Tondeur,  Jehan  Champion  et  Robert  de  Pronnay. 

Lors  de  la  construction  du  bâtiment  de  la  Justice  consulaire, 
de  1653  à  1650,  c'étaient  René  Potier,  Louis  Charpentier  et 
Henry  Sergent.  Enfin ,  les  travaux  de  restauration  et  les  addi- 
tions faites  depuis  1854  l'ont  été  sous  les  mairies  de  MM.  Arache- 
quesne,  Fioquel,  Aubrelicque  et  Lcveaux. 

(1)CC.  35,  fo'llî,  114,  etc. 

(î)  ce.  76,  foi  12  v. 


ILIV*  SESSION,   A  SENLIS.  333 

la matiiiçons  que  Ton  dit  estre  desdits  ouvraiges  (\).  » 
DiDs  un  compte  précédent,  il  reçoit  U  sois  parisis 

«  pour  ses  peines  et  sallaires  d'avoir,   par  plusieurs 

^  diràses  fois,  receu  et  tosé  les  pierres  de  Tostel  de  la 

tille  (S).  > 
Bien  que  les  travaux  aient  encore  continué  pendant 

plosieus  années,  au  milieu  de  l'été  de  1511,  la  construo- 

tioo  était  achevée  et  on  procédait  à  la  réception  des  tra- 

nnx. 

«  A  Jehan  Champion  (receveur)  la  somme  de  six  livres 
'il sols  parisis,  qui,  par  ordonnance  des  gouverneurs,  a 
esté  baillée,  c'est  ascavoir  :  6  livres  parisis  à  Guillaume 
Cardon,  maistre  des  œuvres  en  la  ville  de  Beauvais,  sur 
le  lait  de  maçonnerie,  pour  ses  .peines  d'estre  venu  de 
ladite  ville  de  Beauvais,  en  ceste  ville,  au  mandement 
deidits  gouverneurs  pour  veoir  et  visiter  l'ouvrage  de 
l*hostel  de  la  ditte  ville;  et  les  autres  dix  solz  parisis  à 
Jehan  Massé,  maçon,  demourant  en  ceste  ville,  pour  ses 
peines  d'avoir  assisté  avecques  ledict  Cardon  à  faire  laditte 
Visitation  et  rapport  des  mallefaçons,  comme  par  mande- 
ment donné  desdits  gouverneurs,  le  IG  d'aoust  1511  (3). 

Une  vue  cavalière  de  Compiègne  plusieurs  fois  repro- 
duite (4),  et  que  l'on  fait  généralement  remonter  à  1509, 
représente  l'hôtel  de  ville  achevé. 

En  novembre  1512,  on  régalait  de  vin  les  charpentiers 
qui  avaient  élevé  le  faite  du  comble  et  on  distribuait  des 


(<)  ce.  35, 1^103. 
'21  ce.  34,  f»88,  4505-I50S. 
3  ce.  35,  f*  78. 

(il  Compiègne  historique  et  monumental,  (>ar  Lambert  de 
Bailyliier;  Histoire  du  palais,  par  Pellassy  de  l^OusIe,  et  Jeanne 


334      G056EK8  AmCHéOLOGIOUE  Bl  VRAKCB. 

oublies  aux  petits  enfants,  «afBn  d'enestre  mémoratif  !.. 
Aussi,  dès  le  17  janvier  1513,  on  voit  que  les  asflem- 
blées  des  notables  se  tiennent  de  nouveau  dans  rhôlel  de 
ville  (2). 

La  maison  de  Pierre  Loutrel  était  entourée  d'un  certain 
nombre  de  constructions,  dont  plusieurs  ont  continué  à 
subsister  jusqu'à  nos  jours.  En  faisant  les  travaux  néces- 
saires pour  la  démolition  et  la  construction  du  nouvel 
hôtel  de  ville,  les  ouvriers  causèrent  à  plusieurs  d'impor- 
tants dégâts,  et  nous  voyons  la  ville  indemniser  leurs 
propriétaires;  c'est  ainsi  qu'elle  paie  à  Huguet  Fontaine 
42  sols  parisis  pour  amener  le  bois  nécessaire  à  refaire 
«  les  maisons  Pierre  Tborillon  et  Simon  Monstier,  qui 
ont  été  démolies  eu  partie,  en  desmolissant  Tostel  de  la 
ville  (3).  »  Ce  Simon  Moustier,  valet  servant  la  ville,  dont 
on  trouve  fréquemment  le  nom  dans  les  comptes,  reçoit 
ailleurs  une  indemnité  de  4  livres  10  parisis,  «  pour  le 
récompenser  des  louages  de  maison  qu'il  lui  a  convenu 
louer  pour  demourcr  l'espace  de  quinze  mois  entiers,  à 
cause  que  sa  maison  a  esté  en  partye  desmolie  en  faisant 
les  fondemens  du  mur  de  l'hostel  de  la  ville  (4).  b 

Une  autre  difficulté  fut  soulevée  par  Pol  Dambryne, 
sergent  à  cheval  de  la  ville,  au  sujet  de  la  mitoyenneté  du 
qui  séparait  sa  maison  de  Thôtei  de  ville. 

d'Arc,  par  Wallon  (Ed.  Didot).  L'original  appartient  à  M.  le 
vicomte  de  Saint-Maurice. 

(1)  ce.  35,  f«  U4. 

(2;  ce.  3o,  fo  74.  Les  bàliments  qui  étaient  restés  de  TaucieD 
hôlel  de  ville,  à  l'exceplion  de  quelques-uns,  tels  que  la  cuisine, 
furent  démolis  de  juin  à  décembre  4514. 

(3)  ce.  34,  f"  429.  1505-1508. 

(4)  ce.  34,  f»  434  V.  4505-4508. 


XUV*  SESSION,  A  SENUS.  335 

cA  Pierre  de  Meaulx,  Jehan  iMassé,  massons,  Jehan 

Raoquet,  Jehan  Rainesson,  charpentiers,  MahietDiée  et 

Pierre  Vignereuz,  plastriers  et  couvreurs  de  thuille,  tous 

csgards,  jurez  audit  Compiengne,  sur  le  fait  desdits  mes- 

tiers,  a  esté  paie,  par  ledit  recepveur,  la  somme  de  vingt- 

quitre  solz  parisis  pour  leurs  salières  d'avoir  veu  et  visité 

le  mur  devant  l'ostel  de  la  ville  et  la  maison  de  Fol  Dam- 

bryne,  assavoir,  se  il  doit  estre  moictoyen  ou  non,  parce 

que  ledit  Pol  veuilloit  dire  tout  icelluy  mur  estre  à  sien 

et  non  moictoyen...  (Mandement  du  iâ  mai  1505,  CC.  76, 

^  1S3.)  > 

Un  seul  accident  parait  avoir  eu  lieu  pendant  la  durée 
des  travaux,  et  encore  ne  fut-il  pas  mortel.  La  ville  fait 
payer  à  Jehan  Porcher,  charpentier,  a  la  somme  de  vingt 
loh  parisis  qui  donnez  luy  ont  esté  pour  luy  ayder  à 
tivre  et  soy  faire  guérir  de  la  chutte,  qui,  par  fortune 
luy  est  advenue  du  grant  comble  de  l'hostel  de  ladite 
tille  (i).> 


7.  Fondationt,  caves. 

Les  fondations  de  Thôtel  de  ville  furent  exécutées  en 
pierre  de  Margny,  ainsi  que  les  comptes  nous  en  four- 
nissent de  nombreuses  preuves.  Par  exemple  : 

«  A  Coliuet  Sobier  et  Jehan  Froissant,  aussy  carriers, 
demeurans  audit  Compiengne,  a  esté  paie  par  ledit  recep- 
veur la  somme  de  cent  douze  solz  parisiz  à  eulx  deube 
pour  la  quantité  de  quatre  cens  piez  de  pierres  qu*ilz  ont 
esté  tirer  en  la  carrière  de  Margny,  pour  employer  en  la 

0)CC.  35,  ^93. 


336      GONOEiS  ▲aCHÉOLOOIOUB  DE  FRANGE. 

fondacioQ  de  la  tour  et  montée  quy  fut  fait  oudit  hostel 
de  la  ville,  quy  est  au  pris  de  xxviii  solz  parisis  le  cent.  ^ 
(Mandement  du  7  mars  4504  (1505)  (i). 

Il  existait  sous  l'hôtel  de  ville  des  caves  importanteSf 
dont  plusieurs  sont  aujourd'hui  bouchées.  Léré  raconte 
qu'en  4824,  lors  du  percement  d'un  puits,  on  en  décou^ 
vrit  une  à  laquelle  on  arrivait  par  un  reste  d'escalier  bou' 
ché,  dont  la  descente  avait  six  pieds  de  largeur.  Elle  con^ 
sistait  en  une  galerie  voûtée  de  neuf  pieds  de  haut  sur 
huit  de  larges,  et  se  continuait  pendant  près  de  soixante 
pieds.  Comme  beaucoup  des  caves  de  Compiègne,  cette 
galerie  creusée  dans  la  craie  avait  été  abandonnée  et  n'était 
point  terminée  par  un  mur. 

Au  xnr  siècle,  l'une  des  caves  de  l'hôtel  de  ville  avait 
son  entrée  sur  la  place;  elle  était  fermée  par  une  porte 
pourrie,  que  Ton  fut  obligé  de  remplacer  (DD). 

Nous  trouvons  en  i5i  3  et  1514  la  mention  des  travaux 
suivants  :  a  A  Jehan  Massé,  maçon,  a  esté  pAyé  la  somme 
de  18  livres  8  solz  parisis  pour  son  sallaire  d'avoir  des- 
raolly  la  monthée  plate  de  la  cave  de  l'hostel  de  la  ville, 
et  y  avoir  fait  ung  mur  de  six  pieds  et  ung  quart  d'es- 
paisseur,  sur  la  haulteur  de  deux  toizes,  avecques  une 
arche  qui  conlrcboutte  contre  la  grosse  tour  d'icelle  hostel 
et  pour  avoir  aussi  fait  les  pas  de  la  monthée  de  la  cave  y 
estant  de  présent  (i)  et  plus  au  même,  12  livres  parisis 
faisant  la  parpaye  de  âO  livres  parisis  à  luy  deue  pour 
avoir  remply  de  maçonnerie  la  porte  de  l'hostel  de  la  ditte 
ville  gictant  sur  le  marché  au  blé;  remply  à  masse  le  des- 
soubz  de  l'allée  d'icelle  porte  parce  que  la  monthée  étoit 
mal  fondée,  aussy  fait  une  croix  d'augive  au-des80ubz, 

(<)CC.  76,  f«n2,  v. 
(«)CC.  35.  ^5H-<5U.  f»n6. 


XUY*  SESSION,   ▲  SENLIS.  337 

et  une  hoisfierie  pour  venir  d'icelle  monthée  à  la  diite 

ilée(l). 

8.  Matériaux. 

Les  pierres  employées  à  la  construction  provinrent  soit 
fa  carrières  de  Saint-Leu  et  de  la  Joye,  soit  de  celles  du 
Moot  Saint-Mard.  Elles  arrivaient  par  la  rivière,  et  la 
ville  payait  séparément  leur  transport  à  des  charretiers 
OQ  htrottiers. 

Les  fournisseurs  furent  surtout  Jehan  Martin,  dit  Des- 
iou»^nt-Leu,  carrier  à  Saint-Leu,  Pierre  Fillion,  Lau- 
Rotet  CoUin  des  Prés,  carriers  des  monts  Saint-Mard; 
Jeui  Brouet,  marchand  carrier  à  Montataire-lès-Saint-Leu  ; 
Colinet  Sohier  et  Jehan  Froissard,  à  Margny-lès-Com- 
piègne.  Mais  ces  deux  derniers  n'ont  guère  fourni  que  de 
Ubiocquailie,  tandis  que  les  autres  livraieot  des  pierres 
doubles,  des  pierres  d'appareil  et  du  parpain. 

Les  premiers  marchés  furent  passés  au  mois  d'octobre 
15M,  avec  Jehan  Martin,  dit  Dessous-Saint-Leu. 

On  le  fit  venir  à  Compiègne,  et  les  gouverneurs  le  trai- 
ttreat  à  leurs  frais.  On  fit  chez  Wallerain  Martin,  une 
dépense  de  16  sous  parisis,  en  marchandant  avec  lui,  «  de 
liner  à  la  ville  cent  tonneaulx  de  pierre  pour  commencer 
^  employer  aux  repparacions  et  rediffication  de  l'ostel  de 
^  (i).  » 

Dès  le  6  mars  1505,  Jehan  Soubz-Saint-Leu  avait 
envoyé  non-seulement  ses  cent  tonneaux,  mais  soixante- 
foinie  autres,  et  il  recevait  un  à-compte  de  50  livres  sur 

l-CC   35,  f"n9  V. 

•,t  ce.  73,  f»  ICI  V.  Mandement  du  i  octobre  1504. 
XUV*  SESSION.  ii 


338  CONGRÈS  ÀRCHÉOLOOIQUB  DE  FEAMCE. 

les  88  livres  40  soU  parisis  qui  lui  étaient  dues  pour 
première  livraison  (i),  qui  était  déjà  rendue  devant  1' 
de  ville,  par  les  soins  du  voiturier  Jehan  Dargent,  qi 
3  du  inétue  mois  s'était  fait  payer  ses  frais  de  transpoi 

Voici  quelques  exemples  des  prix  : 

A  Colin  Tison,  carlier  de  la  Joye,  100  soli  parisis  t 
cinq  quarterons  de  pierres  appelées  parpains  par  luy  li' 
au  pris  de  4  livres  parisis  le  cent  (3)  •. 

A  Pierre  Carluys,  carlier  à  Berneuil,  A  livres! 
parisis  a  pour  cent  et  demy  quarteron  de  pierres  de 
et  parpains  de  la  Joye  d  . 

A  Jean  Martin,  dit  Dessoubz-Sainct-Leu,  73  livres 
sis  a  pour  la  quantité  de  cent  quarante-six  tonneai 
pierre  de  Sainct-Leu,  qu'il  a  vendu  et  livré  sur  le  p 
Compiengne,  au  pris  de  10  solz  parisis  le  tonneau 

«A  Jehan  Barré,  massou,  58  solz  parisis  pour  sept  gi 
pierres  de  Saiut-Leu,  contenant  quatre  tonneaux,  (| 
vendu  et  livré  à  la  dicte  ville,  y  compris  le  chi 
d'icelles  fait  au-devant  dudit  hostel,  etc....  (!S).  » 

A  Q)Iinct  Suhior  et  Jehan  Froissart,  iOG  solz  ] 
pour  380  pieds  de  pierre  tirés  de  Margny,  depuis  le 
qu'au  20  mars  1503  (G). 

A  Jehan  Aubin,  carrier  à  Retondes,  45  solz  5  d 
parisis  pour  soixante-dix  pieds  un  quart  de  pierre  <i 
appareil ,  au  prix  de  0  deniers  maille  parisis  1< 
(22  mars  1505). 

{<)CC.  76,  fo  ni. 
(2)  ce.  76,  f>»4i7. 
i3)  ce.  34,  1"  104  V. 
(4)  ce.  34,  f"  %  Y. 
(î>)  0\  34.  f"  108. 
(6)  ce.  76.  f»113  V. 


XUT*  SESSION,   A  SENLIS.  339 

Audit  Jehan  Aubin,  74  solz  parisis  et  2  mines  de  blé 
k  Testimation  de  12  solz  parisis  ou  6  solz  par  mine,  pour 
n  pieds  de  pierres  d'appareil,  avec  soixante-six  pierres 
^bles  et  soixante  pieds  de  grand  pavé;  le  tout  du  Mont 
Siint-Mard.  U  avril  1505  (1). 

Qoant  au  transport,  la  ville  paye  16  sols  parisis  à  Jos- 
fiin,  pour  amener  de  la  rivière  devant  l'hôtel  de  ville 
lept  quarterons  de  pierres  et  parpains;  à  Pierre  Poisson, 
Viols  parisis  pour  le  transport,  depuis  le  port,  d'un  cent 
fc pierres  doubles,  y  compris  le  salaire  des  manouvriers 
qui  ont  aidé  à  les  charger. 


9.  Maçonnerie. 

Noos  avons  vu  plus  haut  le  maçon  Emmanuel  Blondin 
chargé  d'une  partie  des  travaux  de  maçonnerie  et  les 
exécutant  ou  les  faisant  exécuter  à  la  journée  pour  le 
compte  de  la  ville.  Mais  d'autres  furent  entrepris  à  forfait. 
Cttt  ainsi  que  Hutin  Dannery,  marchand  demeurant  à 
Compiègne,  que  nous  avons  déjà  cité,  touche  une  somme 
^  346  livres  sur  ce  qui  lui  est  dû  a  cause  du  marché  qu'il 
^bit  avec  la  ville,  h  lui  baillé  au  rabais  (par  devant  le 
''tilli  de  Senlis)  pour  l'exécution  de  divers  travaux  et 
notamment  de  deux  entre-fents  de  pierre  de  taille  (i). 

10.  Charpente. 

U  bois  nécessaire  à  la  charpente  fut  pris  dans  la  forêt 

H'CC.  76,  P»ll3v. 

Il)  œ.  Si,  f»  89  et  89  V. 


•  I 


<• 


>  .*  •- 


.  «ir  :- 


«•*.-• 


.  in:' -d- 

•  r*     '•    *    If 


•    •■' 


.1^. 


I 


«        «     a      a      ( 


•  -•     i    •  • 


^1  .  ». 


•  »»r    II'  •'•••  •     I  •  •  ••  :;    .-•:•*  ■» 

f    ri   'I  «l'f  '    'î        ',  '  •■      '.  -■       y 

•  ;    Il     r  "  •    I    iffil.'    f|  I  »    .    ;    ^  ■ 

I  »  lilli-      il  II-     iiiir-  I  ^'  .1?  ;•.   • 


.t.    V         i     i.    • 


•  ^     •    .. 


•      M        •!<      I      I   II! 

•    I  I      «  ■ 


XLIV  SESSION,   A  SBNLIS.  3ii 

d«  ville;  iœulx  chargé  sur  les  charriols  et  engins,  avec 
^ides;  et  les  aulcunes,  mises  et  assises  audit  hostel  (I).  » 


EXTÉRIEUR; 


11.  Porte. 


La  porte  de  l'hôtel  de  ville  était  autrefois  placée  à  gau- 
che de  la  tour,  à  l'endroit  où  se  trouve  aujourd'hui  la 
boétre  du  vestibule.  C'est,  lors  delà  restauration  exécutée 
par  M.  Verdier  en  1854,  que  ce  changement  a  été  fait, 
changement  d'autant  plus  regrettable,  qu'il  parait  avoir 
contribué  à  diminuer  la  solidité  de  la  tour. 

La  première  mention  relative  à  la  porte  primitive  de 
lliôtei  do  ville,  se  trouve  dans  le  compte  de  1505-1508. 
«  A  Pierre  Drosmard,  paintre  et  verrier,  demourant  à 
Compiengne,  12  solz  parisis  pour  avoir  par  luy  faict  le 
pourtraict  de  la  grande  porte  de  Tostel  de  la  ville, 
etc.  (2).  » 

Qu'est-ce  que  ce  pourtraict  de  la  porte?  IV.pure  sans 
doute  destinée  au  menuisier. 

Celte  porte  exécutée  par  Simon  Gouy,  menuisier,  lui 
fut  payée  4  livres  parisis,  par  mandat  du  i^'mars  I5i7  (3); 
quelques  mois  après  et  touche  également  le  prix  de  la 
woonde  porte  de  l'hôtel  de  ville  (4). 

(0  ce.  34,  f»  U8. 
(îiOC.  35.  M  37  V. 

(3)  ce.  37,  f»  <88  v. 

(4)  ce.  37,  f>  189, 18  février  1318.  Cette  seconde  porte  devait 
se  trouver  daos  la  salle  d'assemblée  et  donner  sur  la  cour. 


342      CONGHÉS  AHGHÉOLOGIOUK  DE  FRANCE. 

«  La  serrure,  et  deux  clefs,  pour  attachier  à  l'huis  et 
graut  porte,  »  fut  payée  i4  sols  parisis  à  Denis  des  Gno- 
cbes  (i). 

12.  Décoration  delà  façade.  Statuei.. Bas-reliefs. 
Au  centre  de  la  façade,  au  premier  étage,  se  trou^^^^ 

• 

une  vaste  niche  destinée  à  recevoir  une  grande  conipo^^' 
tion;  six  autres  niches,  destinées  à  recevoir  desstatuesv  ^ 
trouvaient,  les  unes  entre  les  fenêtres,  les  autres  plus  ha ^^ 
à  droite  et  à  gauche  do  la  niche  principale.  Ces  niches    ^ 
composaient  de  supports  décorés  de  figures  sculptées,  det^' 
personnages  déroulant  des  phylactères,  et  de  dais  rich^ 
ment  ornés  de  motifs  dans  le  style  flamboyant.  Plus  ba^ 
presqu'au  pied  de  la  tour,  avaient  été  réservés  deux  autr^ 
cadres  destinés  à  recevoir  des  écussons. 

Les  comptes  nous  fournissent  les  noms  des  sculpteurs-» 
auteurs  de  ces  compositions,  et  l'indication  des  principaujc 
sujets  traités  :  «  A  Nicolas  d'Estrées,  tailleur  d'ymages  a 
esté  payé  la  somme  de  i9  livres  i  sols  parisis  |>our  la  façon 
de  six  yniages  qu*il  a  faictes  et  taillées,  pour  mectre  au 
devant  de  rostcl  de  la  ville,  comme  TAnuonciatiou,  le  roy 
Charilcmainc  et  uultres  saiucts  à  plain  desclarez  eu  six 
mandements  (:2].  » 

La  niche  principale  de  la  façade,  entourée  d'un  enca- 
drement gothique  découpé  à  jour,  fut  remplie  par  le  sujtft 
représentant  V Annonciation.  Il  se  composait  de  deux  pér- 
il) ce.  37,  f»  206. 

[i]  ce.  34,  1505-4508,  ^  8t).  On  trouve  aussi  les  mômes 
indications  dans  le  compte  C(]l.  77.  Compte  des  dons  et  octrois, 
qui  semble  n'être  qu'un  compte  parlirulier  et  en  quelque  sorte 
provisoire. 


XUT*  SESSION,   A  SBNLIS.  343 

sonnages,  la  Vierge  et  l'ange,  séparés  p^^r  un  pot  de  lis.  Ce 
sujet  devait  être  traité  d'une  manière  analogue  à  la  repré- 
sentation qui  a  été  rétablie  sur  le  mur  du  donjon  du  châ- 
teau de  Pierrefonds,  du  côté  du  pont-levis. 

L'auteur  de  cette  composition  était,  comme  nous  venons 
de  le  voir,  Nicolas  d*Estrées.  Le  pot  de  lis  qui  séparait  la 
Tierge  et  l'ange  fut  exécuté  par  Anthoine  le  Caron,  qua- 
lifié également  de  tailleur  d'images,  et  qui  fut  chargé  de 
sculpter  lee  armes  de  la  ville  sur  la  façade  :  «  A  Anthoine 
Je  Caron,  tailleur  d'y  mages,  64  sols  parisis  pour  avoir 
entretaillé  et  faict  les  armes  de  la  ville,  ensemble  ung  pot 
ci  lits  pour  mettre  au  devant  de  l'ymage  Notre  Dame  au 
paom  de  devant  dudit  hostel  de  la  ville  (i).  » 

Les  six  statues  qui  garnissaient  les  niches  ne  nous  sont 
qu'imparfaitement  connues.  Nous  avons  déjà,  dans  la 
note  qui  précède,  l'indication  d'une  Charlemagne. 

L'Empereur  était  représenté  l'épée  à  la  main,  car  nous 
iroyons  le  receveur  réclamer  a  huict  solz  parisis  pour  une 
espée  mise  au  poing  Cbarlemaine  (2)  ». 

Quant  aux  autres,  nous  trouvons  dans  le  procès-verbal 
de  4793,  qu'outre  celle-ci  le  directoire  fit  enlever  les  sta- 
tues de  saint  Louis^  de  saint  Denis  évêque,  d'un  autre 
eoéque^  ainsi  que  la  sainte  Vierge  et  Vange,  Cet  autre 
évèque  est  le  cardinal  d'Ailly,  que  plusieurs  témoignages 
de  la  fin  du  siècle  dernier  nous  signalent  comme  ayant 
figuré  parmi  les  personnages  illustres  représentés  à  la 
façade  de  notre  bétel  de  ville. 

M.  Vatou  et  après  lui  M.  Pellassy  de  l'OusIe,  rem- 
placent l'effigie  du  cardinal  par  celle  de  saint  Célestin. 

(1)  ce.  34,  f«  90. 

(^)OC.  34,  f<*  420.  On  voit  qu'on  donna  4  sols  parisis  aux 
maçons  qui  levèrent  ladite  image  (id). 


344       GONGKÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

Nous  avons  dit  ailleurs  (i)  comment  nous  pensions  que 
cette  conrusion  avait  pu  s'établir  dans  le  peuple,  Pierre 
d'Ailly  ayant  été  le  bienfaiteur  du  couvent  des  Célestint 
de  Saint-Picrre-en-Chastres  et  quelque  cicérone  ayant  été 
amené  à  confondre  Tinstitution  et  son  bienfaiteur  (i). 

Plusieurs  des  socles  de  ces  statues  ont  été  exécutés  par 
Enguerran  Blondin,  maçon,  que  nous  considérons  comme 
l'un  des  principaux  entrepreneurs  de  l'hôtel  de  ville.  Le 
compte  de  1505-1508  porte  a  qu'il  lui  a  été  payé  une  fois, 
7  livres  4  sols  parisis  pour  ses  peines  et  sallaires  d'avoir 
fait  et  taillé  deux  chappitoaulx  avec  l'amortissement  pour 
asseoir  deux  ymages  au  paont  de  devant  de  i'oetel  de 

ville  (3)  p. 

Quant  aux  deux  niches  du  rez-de-chaussée,  dans  les- 
quelles on  remari] uait  encore  des  traces  de  peinture  et  de 
dorure,  nous  ne  trouvons  pas  d'indications  précises.  Toute- 
fois, nous  serions  porté  à  croire  que  l'une  d'elles  portait 
les  arm«»  de  la  ville  exécutées  par  Anthoine  le  Garon  et 
l'autre  les  armes  du  roi,  exécutées  par  Martin  Le  Roy. 
(f  A  Martin  Le  Roy,  tailleur  d'y  mages  a  esté  payé  la 
somme  de  56  sols  parisis  pour  ses  peines  et  sallaires 
d'avoir  taillé  les  armes  du  Roy  nostre  Sire  pour  mettre 
au  devant  de  Tostel  de  la  ville  (4).  » 

Lors  de  la  restauration  exécutée  au  commencement  de 
Louis  XIV,  à  l'époque  de  la  construction  du  nouveau 
pavillon,  la  ville  décida  de  faire  des  réparations  à  la  façade 

(1)  De  V ancienne  décoration  de  V hôtel  de  ville  de  Corn- 
piègne.  Revue  de  Fart  chrétien.  1874. 

(2)  Pierre  d'Âillv  est  aussi  Tauteur  d*une  vie  de  saint  Pierre 
Côlcstin,  publiée  par  les  lk)llandisto$. 

(3)  ce.  :U,  <SOî;-1508,  fo8H. 

(4)  ce.  34,  (*î»0. 


XLIY*  SESSION,   A  SENL18.  345 

de  l'hôtel  de  ville  déjà  fort  dégradée.  Le  groupe  de  TAn- 
Dondalion  était  abimé,  deux  des  six  statues  placées 
dus  les  niches  avaient  disparu  et  on  saisit  cette  occasion 
pour  remplacer  le  motif  principal  de  cette  décoration. 
L'ange  et  la  vierge  furent  enlevés  et  reposés  dans  les 
niches  vides,  et  un  sculpteur  de  talent,  Gilles  Guérin, 
nsçut  la  mission  de  reproduire  les  traits  de  Louis  XIV,  qui 
iTiit  aidé  la  ville  par  ses  libéralités  à  faire  l'acquisition 
d» floaisons  delà  rue  de  la  Heuze  et  avait  contribué  aux 
dépenses  nécessitées  pour  la  construction  du  .nouveau 
Utimeot. 

Dans  l'assemblée  tenue  le  9  juin  1653  (1),  on  avait 
donné  pouvoir  aux  attournés  chargés  de  faire  réparer  les 
ruptures  du  pan  du  mur  de  l'hôtel  de  ville  faisant  face 
tu  marché  au  blé,  «  de  laisser  des  bossages  de  pierre  de 
taille,  à  la  ruine  qui  est  au-dessous  de  la  tour  du  beffroi, 
pour,  sur  lesdits  bossages,  estre  fait  la  figure  du  roy.  » 
Cette  figure  devait  être  exécutée  en  bronze,  et  le  choix 
des  sculpteurs  et  maçons,  ainsi  que  le  prix  en  étaient 
laissés  aux  gouverneurs  attournés  (3). 

Les  exigences  du  sculpteur  parurent-elles  exagérées  à 
la  ville?  toujours  est-il  que  Ton  se  borna  à  faire  faire  en 
pierre,  par  Guérin,  une  statue  équestre  du  roi,  qui  fut 
bnmsée.  Le  souverain  y  était  représenté  en  costume  de 
guerre,  avec  le  bâton  de  commandement  à  la  main.  Le 
fond  de  la  niche  fut  peint  en  imitation  de  marbre  noir. 
Guérin  reçut  pour  ce  travail  une  somme  de  1,^0  livres. 
A  droite  et  à  gauche  de  la  niche  furent  sculptées  des 

<!•  Gilles  Guérin,  né  en  1609  et  mort  en  1678;  voir  sur  cet 
artiste  un  article  étendu  dans  le  Dictionnaire  de  Inographie 
et  d'histoire,  de  Jal. 

li)  DD.  16. 


346  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRAIfCE. 

armoiries  du  roi  et  de  la  reine,  armoiries  qui  fureat  mar 
telées  en  i79â,  lorsque  la  statue  fut  détruite. 

Une  plaque  de  marbre  noir  placée  au-dessous  de  h 
niche  fut  posée  par  Gérard  Le  Sourd,  maçon,  qui  y  grav) 
les  deux  vers  suivants  (1). 

Non  satis  est  tacito  regem  sub  corde  taeri 
Spectaadum  exhibuil  qui  latet  intus  amor. 
Addo  4655. 

Bien  que  la  lecture  des  documents  qui  précèdent  n 
puisse  laisser  de  doute  sur  le  roi  représenté,  qui  ne  peu 
être  autre  que  Louis  XIV;  la  plupart  des  écrivains  qui  on 
parlé  de  la  façade  de  notre  hôtel  de  ville  l'indiquent  comm 
étant  Louis  XIII.  S'il  eût  été  question  de  Louis  XIII,  oi 
verrait  le  terme  de  feu  roi,  ou  quelque  autre  phrase,  tandi 
qu'il  n'est  question  que  du  roi,  sans  autre  désignation 
Louis  XIV,  du  reste,  a  paru,  dans  sa  jeunesse,  affection 
ner  Gompiègne;  il  y  resta  assez  longtemps  pendant  1 
Fronde,  et  cette  ville,  dit  Gharpentier,  avait  été,  apri 
Paris,  la  première  honorée  de  sa  royale  présence  (2). 

Après  la  Révolution,  la  niche,  restée  vide,  fut  rempli 
par  le  cadran  de  l'horloge,  puis,  lorsque  le  cadran  fc 
reporté  dans  le  cadre  couronné  situé  à  la  base  du  beffro: 
on  songea  à  la  rendre  à  son  ancienne  destination.  TouU 
fois  on  pensa  qu'il  était  plus  à  propos  d'évoquer  dan 
cette  circonstance  le  souvenir  du  prince  régnant  au  momer 
où  l'hôtel  de  ville  avait  été  construit.  M.  Jacquemart  h 
chargé  d'exécuter  en  haut-relief  la  statue  équestre  d 
Louis  XII. 

(t)  Il  reçut  pour  ce  travail  et  divers  autres  la  somme  d 
70  livres. 
{t)  Séjour  roï/ai,  4647,  p.  51. 


XL1Y*  SESSION,   ▲  SENLIS.  347 

Cette  compoeitioQ ,  admirée  à  une  de  nos  expositions, 
fut  exécutée  en  bronze  (i)  et  placée  eu  1869. 

Voici  eu  quels  termes  un  des  rédacteurs  du  Journal  de$ 

l^ébatf,  M.  Charles  Clément,  appréciait  cette  œuvre  d'art. 

«  Le  Louis  XII,  par  M.  Jacquemart,  est  une  statue  équestre 

«Q  bronze;  mais  comme  elle  est  destinée  à  être  placée 

contre  uu  édiGce,  elle  a  été  appliquée  contre  un  fond.  I^e 

i^oi,  bien  eu  selle,  tient  la  main  appuyée  sur  la  cuisse;  le 

<^orps  est  tourné  vers  la  droite,  entraîné  qu'il  est  par  la 

tête  qui  regarde  du  même  côté.  L'attitude  est  ferme  et 

^îen  trouvée;  la  tête  énergique,  très-fine,  bien  modelée,  a 

u.ne  expression  concentrée,  réfléciiie,  exprimée  avec  fon:e 

^t  clarté.  Le  cheval  est  bien  d'aplomb  et  d'un  dessin  cor- 

X'ect  et  vivant;  on  sent  qu'il  marcherait  d'un  pas  plus 

s^pide,  s'il  n'était  retenu  par  la  main  du  roi.  Cet  ouvrage 

important  est  l'un  des  meilleurs  de  l'exposition.  » 

La  façade  était  flanquée  à  ses  deux  extrémités  de  tou- 
relles octogones.  Ces  tourelles  faisaient  en  quelque  sorte 
partie  obligatoire  des  hôtels  de  ville  construits  au  xvi^  siècle, 
et  H.  Viollet-le-Duc  fait  remarquer  qu'il  en  existait  même 
à  l'hôtel  de  ville  de  Paris,  terminé  sculementsous  Henri  iV. 
Ces  tourelles  qui  communiquent  avec  le  mczzanino  étaient 
couvcrles  en  ardoises  (i),  peintes  et  dorées. 

■  A  Galloys  Bignet,  marchant  plombier,  demourant  à 
Riquebore  (3),  a  esté  payé  la  somme  de  38  livres  14  solz 
B  deniers  obolle  parisis,  pour  la  quantité  de  onze  cens  de 
plomb  ouvré  et  par  luy  mis  en  œuvre,  pour  employer  aux 
deux  toumels  de  l'hostel  de  la  ditte  ville,  qui  est  au  pris 

'1)  Elle  fut  foDdue  dans  les  ateliers  de  M.  Victor  Thiébault. 
•S->  Voir  plus  bas  la  fourniture  d^ardoiscs  faite  à  cette  occasion 
par  BrulÎD. 
•3i  Riqoebourg,  caolon  de  Ressens. 


348       CONGRÈS  ARGHÉOLOOIQUB  DE  FRANCE. 

do  ODze  deniers  tournois  la  livre;  desduict  le  viel  plot 
luy  l>aillé,  qui  veuoit  des  bacuUes  et  verges  du  pont< 
porte  de  Pierrefons,  qui  a  esté  employé  par  l'ardoixic 
comble  dudit  hostel.  »  (Mandement  du  H  octobre  11 
et  «  à  Pierre  Dromart,  painctre,  la  somme  de  4  1 
8  solz  parisis  pour  painctures  d'estofles  par  luy  liailU 
livrées  à  paindre  et  dorer  les  deux  tournelles  de  VI 
de  la  ditte  ville.  En  ce  comprins  l'or  qu'il  y  a  fallu 
ce  faire.  »  (4  novembre  151i.) 


1 3.  Couverture,  comble. 

Le  comble  fut  fait  avec  des  poutres  provenant  de  k 
et  couvert  avec  des  ardoises,  fournies  par  divers 
chands  et  par  plusieurs  chefs  d'établissements  reli 
des  environs  (i). 

a  A  Simon  Fournier,  tonnellier,  la  somme  de  soii 
quatorze  solz,  quatre  deniers  parisis,  ung  denier  toui 
pour  troys  milliers  de  lattes  par  luy  vendues  et  livi 
la  ditte  ville,  pour  servir  à  couvrir  d'ardoize  le  comi 
l'hostel  de  ville  et  pour  la  voicture  desdits  troys 
lieis  (2). 

«  A  frère  Estienne  de  Ueniy,  prieur  de  Boucqu 
a  esté  payé  la  somme  de  trente-six  solz  parisis  po 
quantité  de  demy  millier  d  ardoizes  par  lui  vend 

(1)  VeDaient-ils  de  faire  démolir  certaines  parties  de 
couvents,  ou  à  la  suite  des  guerres  avaient-ils  été  forces  de 
pour  la  réparation  de  leurs  églises,  venir  des  quantités  tro| 
sidérables  d'ardoises,  dont  ils  cherchaient  à  se  défaire? 

(2)  ce.  35,  fo  Uî  V.  (Mandement  du  I  décembre  <;H2). 

(3)  PrèsJaux  (Oise). 


XLIT*  SESSION,   A  SENLIS.  349 

lifrée  à  la  ditte  ville  pour  fournir  à  la  couverture  de 
llKisteldeladilteville(i)». 

t  Au  dit  BruliOf  ardoizier,  a  esté  payé  la  somme  de 

ttaft  quatre  soii  parisis,  faisant  la  parpaye  de  trente-quatre 

livres,  pour  la  quantité  de  dix-sept  verges  de  couvertures 

d'ardoiies  qu'il  a  fait  aux  comble  et  tournelles  de  Thostel 

de  ville,  ainsi  qu'il  appert  par  le  rapport  fait  par  Jehan 

Thorillon,  mesureur  juré,  auquel  rapport  ce  présent  man* 

dément  est  attaché.»  (14  mars  i5ii.) 

«  Audit  receveur  a  esté  ordonné  reprendre  des  deniers 
«le  sa  dicte  reœpte,  la  somme  de  soixante-six  livres  treize 
soli,  neuf  deniers  parisis,  pourplusieursparties  de  plomb, 
^veoques  douze  milliers  d'ardoizes  acbeptées  à  la  requeste 
des  gouverneurs  pour  fournir  à  la  couverture  de  l'hostel 
de  la  ditte  ville,  etc.  (2).  » 

Enfin,  comme  nous  l'avons  dit,  par  un  mandement  du 
16  novembre  1512,  les  gouverneurs  ordonnent  de  payera 
Thomas  Baquet,  charpentier,  «  la  somme  de  vingt-quatre 
solz  parisis,  pour  le  vin  à  lui  donné  et  à  ses  compai- 
gnoDS,  en  levant  le  faiste  du  comble  de  l'hostel  de  la  ville, 
eomprins  les  oublyes  qu'il  fallu  gecter  et  donner  aux 
petits  enffans,  affin  d'en  estre  mémoratif  (3).  » 

La  couverture  et  le  comble  furent  toujours  pour  la  ville 
on  sujet  de  grosses  dépenses  et  chaque  année,  nous  trou- 
vons des  marchés  ou  des  mémoires  se  rapportant  à  leur 
réparation. 

Lesderniersaménagements faits  à  l'hôtel  de  villeen  1778, 
pour  y  établir  le  logement  de  l'intendant  achevèrent  de 
les  dégrader,  et  en  1793,  on  s'occupa  des  réparations  qu'il 

(4)  GC.  35,  f^  137  (Mandement  do  4  9  août  4513). 
{%)  ce.  35,  f»  40«. 
(3)  ce.  35,  f^  444. 


350      CONGRÈS  ARCnÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

paraissait  urgent  de  faire  au  comble^  menacé  d'une  ruine 

• 

prochaine  et  dont  la  chute  pouvaient  entraîner  des  acci- 
dents fâcheux.  La  ville  commit  trois  experts^  Anthoii^^' 
Thomas  Bussac,  son  architecte,  Lay  et  Mouton,  tousde^^ 
entrepreneurs,  afin  d'examiner  les  travaux  à  faire  et  &  ^ 
établir  les  devis. 

Ils  attribuèrent  le  mauvais  état  du  comble,  outre  ^ 
ancienneté,  au  fardeau  des  cloisons  qui  se  trouvaient  ^ 
dessous  et  qui  toutes  étaient  rattachées  aux  pou^^ 
du  grenier,  et  décidèrent  qu'il  était  nécessaire  de  démc^ 
la  toiture  et  de  réduire  les  deux  pignons  à  la  hauter  ^ 
du  rampant  du  comble,  de  manière  à  les  ramener  à  u^ 
hauteur  de  vingt-cinq  pieds  d'élévation  au-dessus  d^ 
plates -formes  posées  sur  l'entablement.  Cette  dépensa 
qui  fut  exécutée  presque  immédiatement,  fut  évaluée 
i 5,624  livres,  et  réduite  à  42,642,  par  suite  de  l'offre  fait 
par  les  entrepreneurs  de  reprendre  les  matériaux  poui 
t,982  livres  (i). 

Là  ne  se  sont  pas  arrêtées  les  mutilations  subies  pa 
notre  monument  et  en  même  temps  que  les  dessins,  remon 
tant  à  quarante  ans,  nous  montrent  des  ouvertures  percée 
à  tort  et  à  travers  dans  la  façade,  des  fenêtres  carrées,  ave 
encadrements  ù  moulures  grecques  et  contrevents,  non 
voyons  qu'un  architecte  vandale  avait  remplacé  une  de 
lucarnes  de  pierre  par  une  autre  en  charpente,  de  styli 
mesquin,  et  qu'on  avait  enjolivé  le  comble  de  plusieur 
tuyaux  de  cheminée  de  brique,  de  hauteurs  inégales 

Nous  réserverons  pour  un  autre  paragraphe  ce  qu« 
nous  savons  de  la  cheminée  de  la  grande  salle  et  des  sculp 
tures  qui  la  décoraient.  Seulement,  nous  dirons  ici  qu 
les  cheminées  de    l'hôtel  de  ville  furent  exécutées  ei 

(1)  Archives.  Notes  diverses. 


XUT*  SESSION,  A  SBNUS.  ^1 

briques,  et  qu'on  en  a  amené  à  cette  intention  quatre  voi- 
tui«deGlairoix(l). 

14.  Beffroi. 

Dans  tous  les  hôtels  de  ville,  le  beffroi  est  toujours  une 
des  parties  importantes.  Il  jouait,  en  quelque  sorte,  un 
fôIe  dans  la  vie  municipale,  renfermait  la  cloche  qui, 
le  matin,  éveillait  les  habitants,  le  soir,  sonnait  le  couvre- 
feu  et  dans  toutes  les  occasions  solennelles  appelait  les 
bourgeois  à  se  réunir.  La  charte  de  commune  octroyée 
^vx  Compiégnois,  par  Louis  Vil,  en  il 53,  frappe  d'une 
amende  de  douze  sous,  les  gens  de  la  commune  qui  ne  se 
rtendront  pas  à  l'appel  de  la  cloche  (2). 

C'est  au  beffroi,  que  se  tient  le  guetteur,  chargé  de 

signaler  les  incendies,  et  de  regarder  dans  la  campagne 

si  rien  ne  vient  menacer  la  cité,  si  quelque  corps  d*armée 

enoemi,  quelque  groupe  de  partisans,  ne  vient  pas  tenter 

par  un  coup  de  main  de  s'emparer  de  la  ville  (3). 

C'est  au  beffroi  encore  que  la  ville  place  le  plus  souvent 
l'horloge  destinée  à  indiquer  l'heure,  à  une  époque  où 

(1)  Nous  IrouvoQS  une  cheminée  daas  la  chambre  Jehan  Buc- 
qoet,  i  riiôtel  de  ville  (1505-1 508)  Peut-être  est-ce  la  cheminée 
qui  ce  trouvait  dans  la  chambre  du  guetteur,  au  beffroi,  et  qui 
fat  démolie  au  xvui*  siècle. 

(2.1  A  la  Buile  de  contestalions  entre  la  ville  et  Tabbaye  de 
Saint-Corneille,  des  lettres  de  Charles  IV  réglèrent  dans  quelles 
circonstances  la  ville  pourrait  sentier  la  cloche  de  son  beffroi 
(1317,  Ordonnaneei  des  rois  de  France,  t.  IX,  page  5U). 

(3)  La  place  de  gardien  du  beffroi  avait  une  certaine  importance 
etcelui  qui  la  possédait,  était  pourvu  par  des  lettres  de  Louis  XUI, 
il*aoAt  4  6i5,dn  titre  de  religieux  lai  de  l'abbaye  de  Saint-Corneille. 


352      GONORÈJ  ARGUÉOLOOIOUB  DE  FRANGE. 

.  leur  prix  élevé  rend  fort  rares  les  horloges  portatives  (1). 

Le  beffroi  construit  en  pierre  s'élève  au  centre  de  la 
façade,  et  forme  une  tour  massive  et  carrée,  décorée  d'or- 
nements de  forme  gothique,  surmontée  d'une  flèche  en 
ardoise  et  accompagnée  de  tourelles  aux  toits  aigus. 
Quatre  lucarnes  garnies  de  plomb  éclairent  la  partie  supé- 
rieure du  beffroi.  Sur  le  devant,  se  montrent  sous  un 
auvent,  les  picantifu,  frappant  de  leur  marteau  les 
appeaux  fixés  à  la  poutrelle,  sur  laquelle  ils  reposent.  Au 
sommet  de  la  flèche,  une  girouette  se  dresse,  issant  d*une 
gerbe  de  fleurs  et  remplaçant  le  lion  qui,  autrefois,  cou- 
ronnait le  beffroi. 

Maintenant  que  nous  avons  en  quelques  lignes  décrit 
le  beffroi  de  Compiègne,  nous  reviendrons  en  détail  sur 
chacune  de  ses  parties  et  sur  leur  construction. 

Presque  dès  l'origine,  la  construction  de  la  tour  sembla 
faire  craindre  pour  la  solidité  de  l'édifice  et  on  prit  des 
mesures  pour  empêcher  que  le  poids  de  cette  masse  de 
pierre  portant  sur  l'escalier  à  vib,  n'apportât,  ainsi  que 
cela  a  eu  lieu  depuis,  quelque  désordre  dans  l'économie 
du  monument. 

Danslecomptedei5i1-i5i4,  on  voit  a  que  l'on  employa 
vingt  grandes  pierres  de  troys  pieds  pour  reffaire  la  pille, 
contre  la  tour  de  Thostel  de  la  ditte  ville  (2).  • 

La  couverture  en  ardoise,  est  reni))Oursée  au  receveur 

(1)  Dès  4S6U,  la  ville  possédait  ud  beffroi,  dont  Tétage  infé- 
rieur servant  de  prison  (Inr,  des  actes  du  Parlement,  i.  l***. 
Qo  4081).  Ce  beffroi  était  en  face  de  Ttiôtel  de  ville;  en  4408, 
il  menaçait  ruine  el  ou  en  enlevait  la  cloche,  pour  la  porter  à 
l'hôtel  de  ville:  il  fut  démoli  entre  iiii  et  4450  (MSS.  de  Bic- 
quilley,  page  04.  Compte  de  4408-1410.  CC.  8). 

{i)  Payées  huit  livres,  trois  solz,sept  deniers  parisis.  CC  35  P>  4  04 . 


XLIT*  SESSION,  A  SENUS.  353 

de  Pronnay,  pour  la  somme  de  soixante-douze  livres, 
treiie  solz,  cent  onie  deniers  tournois  (4). 

La  tour  et  ses  lucarnes,  ainsi  que  les  tourelles  qui  la 
flanquaient^  étaient  décorées  d'ornements  en  plomb  tra- 
Tiillé,  peint  et  doré. 

Ainsi,  on  paie  à  Martin  Bignet,  plombier,  à  Compiègne, 
trois  cens  douze  livres,  dix-neuf  deniers  tournois,  c  pour 
trois  mille  sept  cens  soixante-quatorze  livres  de  plomb 
ouvré,  au  prix  de  onze  deniers  la  livre,  tant  à  la  grosse 
tour  et  deux  petittes  tours  admorties,  que  aux  quatre 
lucarnes  d'ioelle  tour,  par  lui  livré  et  ouvré  selon  le  mar- 
ché à  luy  faict  (3).  » 

c  An  receveur  de  Pronnay,  on  rembourse  cinquante-une 
livres,  dix-sept  solz,  neuf  deniers  tournois,  pour  plusieurs 
parties  par  lui  baillées  pour  dorer  l'ouvraige  de  la  grosse 
tour  (3).  » 

c  Enfin,  à  Pierre  Dromart,  paintre,  on  donne  vingt- 
quatre  livres  tournois,  pour  avoir  paint  et  doré  la  plom- 
berie des  quatre  lucarnes  de  la  grosse  tour  de  Tostel  de  la 
ville,  avoir  nellé  le  comble  de  l'bostel,  (ait  les  feullaiges, 
lyonset  fleurs  de  liz,  et  autres  ouvraiges  de  son  mestier, 
par  luy  iaictes  à  la  ditte  grosse  tour  de  l'bostel  de  la 
ville  (4).  » 

Ce  n'est  qu'en  1530,  que  ces  travaux  sont  définitivement 
achevés,  lorsque  Tborloge  et  les  picantins  sont  placés  à  la 
tour.  En  4531  (29  juillet),  on  fait  l'acquisition  de  c  huit 
cents  de  fin  or,  avecques  quatre  cent  livres  de  plomb 
pour  dorer  et  employer  à  Tacbèvement  de  la  couverture 

i<)  ce.  36,  1514-4517,  f»  454. 
Il)  ce.  36,  4544-1517,  f^  U8. 
i3»  Œ.  36,  f»  154. 
i4.  a:.  36,  f*  149  V. 

XUV*  SESSION.  23 


35i  GONGRÈS  ARGHÉOLOaiOUÉ  DE  FEANGB. 

des  combles  et  poteaulx  où  sont  mis  les  appeaux  de  l'hor- 
loge de  rhostel  de  ville  et  autres  ouvraiges  qui  reste  à  dorer 
audit  hostel.  »  De  plus,  le  i2  septembre,  on  fait  peindre 
et  dorer  a  la  plommerie  au-dessus  des  trois  appeaulx  de 
Torloge,  etc.  «. 

45.  Lion  du  beffroi.- 

La  grosse  tour  de  Thôtel  de  ville  était  surmontée  d'an 
lion.  Ce  lion  n'était  sans  doute  point  un  lion  découpé  et 
servant  de  girouette,  mais  une  représentation  massive, 
comme  celle  qui  a  existé  au  sommet  du  befilroi  d'Arra8(i). 

Il  avait  été  exécuté  par  un  plombier  de  Paris,  Martin 
Bignet,  auquel  fut  payée  la  somme  de  six  livres,  seite  solz 
parisis,  a  pour  uug  lyon  de  plomb  doré  d'or,  vendu  et 
livré  à  laditte  ville,  mis  sur  la  grosse  tour  de  l'hostel 
d'icelle  ville.  »  (Mandement  du  i*' janvier  4517,  CC.  37, 
^M8.) 

Au  même  moment  le  receveur  réclame,  dans  un 
compte  général,  le  remboursement  de  la  somme  avancée 
par  lui  pour  les  q  sallaires  d'amener,  le  lyon  mis  sur  la 
tour  de  Paris,  à  (lonipicngne  (Id.  (^  3ii)». 

Le  lion  avait  disparu  au  xviii*  siècle;  il  fut  remplacé 
par  une  grossière  ^rirouetto,  simulant  un  drapeau  et  dans 
lequel,  sous  la  Restauration,  on  avait  découpé  à  jour  trois 
fleurs  de  lys. 

Les  derniers  tnivaux  de  4814  Ion  fait  remplacer  par 

(I)  On  a  placé  au  mujkv  d'Arras  l'ancien  lion  hors  de  service 
et  ou  Ta  riMUplacô  par  un  nouveau  du  même  stvle.  Ce  liou,  de 
prtVs  do  deux  mètres  de  hauteur,  porte  une  bannière,  qui  sert  de 
gin)uette. 


XUY*   SESSION,   A  SENL1S.  3«^»5 

une  élégante  bannière,  découpée  à  jour,  et  ifôant  d'une 
gerbe  de  fleurs. 

16.  Horloge. 

Dens  le  comble,  à  la  naissance  du  beffroi,  était  placée 
l'borloge  dont  le  cadran  extérieur  donnait  l'heure  aux 
passants. 

La  ville  possédait  une  horloge  dès  les  premières  années 
du  T%*  siècle;  mais  ce  ne  fut  qu'en  1520  que  cette  horloge 
fat  mise  à  l'hôtel  de  ville.  Jusqu'à  cette  époque,  elle  avait 
été  pUoée  sur  la  tour  de  l'église  Saint-Jacques,  où  nous 
la  voyons  mentionnée  depuis  4 436  (I).  Dès  ce  moment,  la 
ville  chargeait  un  serrurier,  nommé  Bochard,  d'en  pren- 
dre soin,  et  lui  donnait  quarante  sous  parisis  par  an 
poar  ce  service;  un  siècle  plus  tard,  de  1517  à  162i,  le 
conducteur  de  l'horloge  reçoit  un  traitement  de  quatre 
livras  (GG.  37).  En  1550,  ce  traitement  s'élève  à  huit  livres 
(CC.  43). 

La  foudreétant  tombée  en  1516,  sur  le  clocher  de  Saint- 
Jacques,  y  fit  de  grands  dégâts  et  rompit  l'horloge,  nous 
apprend  D.  Gillisson. 

A  la  suite  de  cet  accident,  en  15â0,  on  fit  une  grosse 
réparation  à  cette  horloge,  réparation  évaluée  à  7  livres 
n  sous  parisis -(S).  Elle  fut  alors  transportée  à  Thôtel  de 
ville  et  on  y  adapta  la  petite  cloche  de  Thôtel  de  ville. 
Colin  Racquet,  charpentier,  fit  a  ung  befroy,   à  pendre 

(l/BB.  48  (L*ÉpiD0is). 

(S)  En  Ut7,  la  ville  avail  proposa  à  l'abbé  de  Sain t-Coroei lie 
de  placer  son  horloge  sur  la  tour  do  Saint-Michel,  propriété  de 
Tabbaye.  mais  celui-ci  refusa  (Mss.  Léré). 


356      GONGRÈS  ARGHÉOLOaiOUE  DE  FRANGE. 

la  petite  cloche  et  ung  planchief  qui  reçoit  le  contrepoiz 
de  Torloge  »  ;  il  fit  aussi  o  un  planchier  de  bois  au-dessouhi 
de  l'orloge,  une  caige  de  bois  ou  dit  orloge,  etc.,  moyen- 
nant 5  livres  16  sous  parisis  (i)».  Le  registre  auquel 
j'emprunte  ces  mentions  porte  aussi  une  dépense  de 
19  livres  40  sous  parisis  pour  a  les  estoffes  qu'il  a  fallu 
avoir  pour  paindre  et  dorer  le  cadran  de  Torloge  d'icelle 
ville(GG.  37,  lblio228)(2)». 

Mais  la  vieille  horloge,  qui  avait  déjà  plus  d'un  siècle, 
avait  fait  son  temps  et  malgré  ses  réparations,  il  fallut 
songer  à  la  remplacer.  Au  commencement  de  i530, 
«  Pierre  Garnot,  serrurier  et  aorlogeur,  s'engage  à  faire 
une  aorloge  neufve  pour  servir  à  la  grosse  cloche  de 
l'hostel  de  la  ville.  (BB.  i8).  i 

On  fond  des  cloches  pour  servir  d'appeaux,  on  fait 
exécuter  lespicantins  auxquels  nous  consacrerons  un  para* 
graphe  spécial  et  la  nouvelle  horloge  installée  au  bas 
du  beffroi  va  annoncer  l'heure  aux  habitants  pendant  près 
de  trois  cents  ans  (3).  Toutefois,  ce  ne  fut  pas  sans  récla- 
mer d'assez  fréquentes  réparations  que  nous  nous  abstien- 
drons de  noter,  à  l'exception  des  deux  suivantes.  Du  5 
octobre  1657.  a  Mandement  à  Robert  de  Vaux,  horloger, 
de  la  somme  de  0  livres  tournois,  pour  avoir  réparé  l'hor- 
logodc cette  ville,  à  laquelle  il  a  fait  deux  grands  ressortz, 
. .  .  comme  aussi  pour  avoir  fait  un  cul  de  marteau  et  un 
piton  au  ressort,  qui  fait  sonner  VAve  Maria  aux  heures 


(I)  ce.  37,  K  U6. 

(«)CC.  :n,  f"  VJi  et  193.  V.  \l\ti). 

(3}  C'est  t'ii  ^H\\)  ^culement  qu'une  nouvello  horloge  cnroro 
en  mouveiiHMil,  la  roniplaç^i.  l/ancieuno  horlot^e,  dont  Lôrô 
(lonni^U;  dessin  diuis  sos  manuscrits,  était  enrore  conservée,  il  v 
a  |MMi  iranncos,  dans  les  combles  de  Thôtel  de  ville. 


xinr*  SESSION,  a  senlis.  357 

de  midy,  miouict,  six  heures  du  matin  et  du  soir,  d 
Du  30  août  1660,  au  même...  12  livres  tournois,  a  pour 
aToir  Gûct  tout  à  neuf  la  roue,  la  verge  et  l'estoille  qui 
servent  à  faire  aller  l'esguille  du  quadrin  de  l'horloge  de 
Tbostel  commun  de  cette  ville  (4).  d 

Ce  cadran  fut,  à  dater  de  la  Révolution,  placé  dans  la 
niche  occupée  précédemment  par  la  statue  de  Louis  XIV. 
Depuis  la  restauration  de  M.  Verdier,  il  a  été  replacé  au- 
deuus  et  rendu  transparent. 

i7.  Cloche. 

Le  beffroi  renferme  la  cloche  municipale,  celle  au  son 
de  laquelle  les  habitants  étaient  tenus  d'accourir  aux 
termes  mêmes  de  la  charte  de  commune.  Cette  cloche  en 
broQxe  et  de  grandes  dimensions  existait  depuis  deux 
»Ue8  lors  de  la  reconstruction  de  l'hôtel  de  ville. 
Bl.  Voiliez  en  a  donné  le  dessin  et  la  description  dans  la 
ttnue  des  Sociétés  savantes  (^).  Elle  porte  une  légende 
en  une  ligue  et  quelques  mots,  légende  qui  forme  huit 
phrases  ri  niées,  que  nous  donnons  ici,  en  tenant  compte 
toutefois  des  corrections  faites  à  cette  lecture,  par  M.  de 
Gailhermy  : 

f  Bancloke  :  sui  :  moi  :  tist  :  on  :  faire  : 

Au  tems  :  Poukart  :  Harel  :  le  Maire  : 

lan  :  m  :  ccc  :  et  :  m  :  de  kl  : 

Maistres  :  fu  Gills  :  de  :  Bliki  . 

ILet.Guiliiauines  :  de  :  Croisills  : 

Ci  tient-à  cleus  :  et  a  kevilles*. 

A  mon  son  la  vile  s'arme  i 
Pour  :  la  nécessite  :  commune  : 

.1)  Mandements  1656-1660,  f»  U  v.  et  it  v. 
si)  4870.  T.  11,  p.  443. 


Xcc:§  a»  s&T^ics  »$  vc  iciit  f  lÎKPri  1&  cloche  qui 
su»  âGQ2e  r4io»  i  2'isôea  hlijd  3e  Tîlle,  pevi  4e  Van  Z 
ajprê  La  •i^ic^îi:^  -5*  Mas.  Loatic^. 

S:c5  ]fè  T^zz.'i  îi  L:«i<  H.  li  Tille,  qui  s'eCait  ih^ 
imfCfSéjt  à  de  frbToecjes  rep?ses.  pour   sÉbs£ûre  ii 
frmiKjes  des  a^cn^  «en  tréscr  i^^yal.  et  qui  aTÛt  pi] 
dhtt'ses  Kiiii*ï5  d*  I  .ÎC<»  eî  •ie  iMO  tÎTTes*  fut  invil 
en  1477.  k  fc-cmir  u:  nx,  à  titre  4e  prêC  nue  sofiiiz== 
de  dnq  cents  ecus  d'or.  Dins  llmpo^bilitê  où   ils  ^0 
troaraien:   ie  sttisfiiie  à  cène  nourelle  demande.   i^S 
aUùomés  cherchèren:  par  tous  les  nwyens  en  lenr  poi^K 
voir  à  sè  céer  des  ressources,  e:  sc*nrèient  à  mettre  leiK^ 
cloche  en  eage.  peat-étre  même  à  la  Tendre   î  .  Mais  cras 
moyen  qui.   d'ailleurs,  eût  été  insufiBsanU    ne  réossf  C 
même  pas.  et  le  anôamés  insc^Tables  et  rendus  respon- 
sables des  dettes  de  la  Tille,  furent  emprisonnés  et  les 
droits  de  ge6le  payés  pour  eux  mis  à  la  charge  de  la 
tUIc  2  . 

Une  fois  le  nouTeau  Leffncâ  instruit,  on  s'occupe  d'y 
placer  rancienne  cic^he  ;  le  leceveur  se  Ûit  rembourser, 
dans  le  oc*mpte  de  1514*1517,  la  sc>mme  Je  tt  sous  payée 

1  Deux  commissaires.  eoToyes  par  la  ville,  se  reodireot  à 
Pans  et  dcmaodereDt  a  constituer  sur  ce  gage  uoe  rente  de 
80  fr?n<:s.  Mais  les  marthanis  refusen^Dt  el  offrireut  seulement 
d'acheter  la  cloche  si  ou  l'amenait  à  Paris,  au  prix  de  S  livres 
tounjois  le  cent  pesant  Mss.  de  Lérè\ 

2  32  sols  parisis  furent,  en  juin  1 481 .  payés  pour  ce  motif  à 
Jean  Langlois,  geôlier  Mss.  de  Lére .  Ce  n'est  point  la  seule 
fois  que  les  gouverneurs  attoumés  se  soient  laissé  emprisonner 
plot6t  que  de  payer  des  taxes  qu'ils  considéraieiit  comme  leur 
étaoi   indûment   réclamées   -voir  compte  de  1551.    CC.   43, 

^30l^ 


XUY*  SESSION,   A  SSNU8.  359 

ptr  lui  c  à  Colin  Raquet  et  autres  ses  compaignons  qui 
loi  ivoyent  aidé  à  tirer  et  monter  la  grosse  cloche  à  la 
tour  de  l'ostel  de  la  ville  (4).  »  Une  autre  somme  de 
32  80118  est  aussi  payée  à  Raquet  c  pour  ses  peines  et  sai- 
llira d'avoir  mis  la  cloche  de  l'hostel  de  ville  et  repen- 
due (3).  »  Laurens  Morlière,  serrurier,  touche  6  livres 
1  80U  7  deniers  tournois,  «  pour  Touvraige  par  luy  livré 
à  pendre  la  grosse  cloche  (3).  n 


18.  Appeaux, 

Outre  la  grosse  cloche  qui  était  fixée  et  que  l'on  faisait 
résonner,  soit  en  secouant  le  battant  qui  se  trouvait  à 
l'intérieur,  soit  à  l'aide  d'un  marteau  frappant  dessus , 
il  y  avait  au  beffroi  une  autre  cloche  servant  à  sonner 
l'angelus  (4),  et  trois  petites  cloches  ou  appeaux,  fixées 
nir  un  poteau  et  qui,  frappées  par  les  picantins,  servaient 
à  sonner  l'heure  et  la  demie  (5). 

Ces  trois  appeaux,  qui  existent  encore,  furent  fondus 
b  3  août  4.^30,  à  la  ville  même,  moyennant  six  francs,  a  II 
y  entra  379  livres  de  métal,  vendues  Ai  livres  46  sous  4 
deniers,  et  8  livres  d'étain  du  prix  de  U  sous  (6).  » 

c  Le  premier  de  ces  appeaux,  haut  de  treize  pouces  six 
lignes,  et  d'un  diamètre  de  dix-sept  pouces  six  lignes, 


Il  ce.  36,  f»iî3  V. 
>ii  ce.  37,  fo  488  (Mandement  du  6  novembre  1517;. 

(3)  ce.  37,  f<^  toi  V.  45«7-4o2î. 

(4)  Cette  petite  cloche  mobile,  décrite  par  Lérc,  ne  portait 
Marne  inscription. 

■5)  Depuis  1819,  ils  sonnent  aussi  le  quart. 
(6)  BB.  1 8  (L'Épinois). 


360      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

porte  rinscription  suivante  sur  deux  lignes  :  f  en  août 

V"    XXX    Pii    BAYDET    L.    PVRVISSBL    et    8.    LE.    PLAT,    AT 

TOURNÉS  f .  Le  second,  de  mêmes  dimensions  ou  à  peu 
près,  porte  :  Pour  servir  à  t  horloge  nouvelle  de  Vhoniel  de 
ville;  et  le  troisième,  un  peu  plus  petit,  n'a  pas  d'inscrip- 
tion (i).» 

49.  Picantim. 

Les  trois  personnages  sculptés,  armés  de  marteaux, 
qui  frappent  sur  les  appeaux,  ont  reçu  le  nom  àepicaniins. 

Ils  furent  exécutés  en  même  temps  que  les  appeaux. 
En  septembre  4531,  on  paya  les  ouvriers  «pour  avoir 
paint  et  doré  la  plommerie,  au-dessus  de  trois  appeaulx 
de  l'orloge  de  l'hostel  de  la  ville  ;  ensemble,  avoir  paint  et 
doré  les  trois  personnages  qui  frappent  sur  lesdits 
appeaulx  (2).  i 

Ces  trois  figures,  hautes  d'un  mètre  cinquante  environ, 
furent  dorées  et  argentées  de  nouveau  en  4598,  par  Dela- 
chère,  maître  peintre,  moyennant  8  livres  parisis.  Celui- 
ci  peignit  en  même  temps,  une  grande  armoirie  impériale, 
celles  de  la  ville,  du  Dauphin  et  un  chappeau  de  triomphe, 
deux  armoiries  de  la  ville  et  deux  gargouilles  (3). 

Après  un  siècle  d'existence,  et  malgré  cette  réparation, 


(DMss.  de  Léré. 

(t)BB.  48. 

(3)  Tous  ces  préparatifs  furent  faits  sans  doute  au  moment  où 
Henri  IV  avait  décidé  que  la  ratification  du  traité  de  Vervins 
aurait  liou  à  Compiègne.  Plus  tard,  lo  roi,  craignant  l'encom- 
breuient,  choisit  Paris,  mais  les  ambassadeurs  vinrent  cependant 
à  Ciompiègno,  où  ils  séjournèrent. 


XUY*  SESSION,   A  8EMUS.  361 

ks  picantiDS  étaient  hors  de  service  ;  aussi,  en  4629,  enfit- 
00  exécuter  de  neufs,  qui,  cette  fois,  furent  en  cuivre  et 
coûtèrent  i5  livres,  a  Ces  trois  statues  d'hommes  en  forme 
de  Kuisses  et  lansquenets  armez,  servant  d'apeaux,  d  furent 
peintes,  dorées  et  argentées,  par  Charles  Védye,  moyen- 
nant 9  livres  (4). 

Eo  4768,  les  suisses  cédèrent  la  place  à  trois  jolies 
femmes  vêtues  à  la  grecque  a  et  portant  sur  le  front,  une 
étoile,  un  croissant  et  un  soleil.  »  Ces  figures  sont  cellesqui 
sont  restées  jusqu'en  4875  (â)  et  qui  ont  été  remplacées  de 
nouveau  par  trois  lansquenets,  hardiment  exécutés  en  bois 
et  portant  les  costumes  du  temps  de  François  I*^ 


INTÉRIEUR. 


20.  Escalier. 


L'ancien  escalier  était  en  pierre  à  vis  et  occupait  exac- 
tement la  place  de  celui  que  nous  voyons  aujourd'hui  et 
qui  a  été  refait  en  1874.  C'était  lors  de  l'arrangement  de 
lldtel  de  ville  pour  le  logement  de  l'intendant  que  cet 
ocalier  de  pierre  avait  été  démoli  et  remplacé  par  un 
ocalier  à  jour,  en  bois,  avec  rampe  à  barreaux  de  fer. 

Nous  trouvons  dans  les  comptes  de  l'époque  de  la  cons- 
truction le  prix  de  chacune  des  marches  fixé  de  huit  à 
doue  sols  parisis,  livrées  sur  le  port  de  Compiègne  et 
veoaot  de  Saint-Leu  (3).  On  employa,  pour  les  maintenir, 
une  grande  quantité  de  fer,  ainsi  que  nous  l'indique  la 
mention  suivante  :  a  A  Colin  CorbauU,  serruzicr,  dcmou- 

'I)  L'Ëpinois,  op.  cit,  p.  155. 

\t)  Elles  sont  actuellement  au  Musée  Vivenel. 

.;3}  ce.  34.  4505-4508,  fo  96  v.  et  fo  88.  CC.  76,  f*  t13. 


363  G0NGRÂ8  ARGHiOLOOIOUB  DE  FRUIGI. 

rant  à  Ciompiengne  a  esté  paiée  la  somme  de  onie  1 
dix  sols  parisis  pour  cinq  cent  soixante  et  onse  livn 
fer  ouvré  par  lui  baillé  et  livré  pour  les  aflEûres  de  1 
ville,  mesmement  pour  les  marches  de  la  montée  i 
qui  se  faict  à  l'ostel  de  la  ville  (4).  » 

Lors  des  derniers  travaux  de  restauration  de  l*hdt 
ville,  reeoalier  de  bois  a  été  démoli  et  remplacé  de 
veau  par  une  vis  en  pierre  qui  compte  59  marches  et 
la  partie  supérieure  a  été  élégamment  voûtée  et  décor 
sculptures  dans  les  motifs  desquelles  ont  été  reprod 
les  armes  de  Compiègne,  celles  de  France  et  le  poro- 
emblème  de  Louis  XIL 

En  faisant  les  fondations  de  la  nouvelle  vis,  on  a  ti 
prosqu'à  ras  de  terre,  un  fragment  de  bas-relief  r 
sentant  deux  personnages  dont  Tun  recueille 
une  cuiller  les  excréments  de  l'autre.  Ce  fragment 
était  sans  doute  encastré  dans  le  mur  intérieur  de  1 
lier  (S),  est  aujourd'hui  au  Musée  Vivenel. 

SI.  Distributions  successives. 

Nous  sommes,  pour  ce  qui  concerne  la  disposition 
rituire  du  bâtiment  principal,  réduit  à  des  conject 
Nous  savons  seulement  qu'il  y  avait  une  grande  i 

^n  Œ.  3V.  r;o5-ir>08,  P»  lit  v.  On  fut  un  ceruîn  tei 
oxôfuter  cet  escalier  et  dans  Thiver  do  1506,  on  dut  prendr 
priviulions  pour  emi^hor  les  eaux  et  la  gelée;  Pierre  Oi 
iHuivreur  dWleulle  revut  48  sols  parisis  |>our  atoir  couverl 
Uni  Ile  le  inmiltle  de  la  monUv  n  vis  et  fourni  la  matière 

re  \àm\  r.c.  :u,  I'»  las  v. 

..t)  On  sait  i\\\\\  y  a  dansTesiNilierde  Thôtel  de  ville  de  ^ 
une  ie|m'sontaUon  obstine  du  uH^ine  genre. 


XUY*  SESSION,   ▲    SENU8.  363 

A'te  la  salle  d'assemblée,  la  salle  du  conseil  et  Tescri- 
loire. 

Des  restes  de  cheminées,  reconnus  fmr  M.  Lafollye,  le 
hng  du  mur  du  logement  actuel  du  concierge,  permettent 
fc croire  que  la  grande  salle,  qui  parait  avoir  été  au  rez- 
de-chaussée,  occupait  tout  le  derrière  de  l'édifice  prenant 
jour  sur  la  cour  par  cinq  fenêtres.  Sur  le  devant,  devait 
se  trouver  une  antichambre,  communiquant  avec  cette 
idle  et  avec  l'escalier,  et  à  droite  sur  la  rue,  la  chambre 
h  conseil  et  Yéeriîmre  prenant  jour  par  les  deux  fenê- 
tres qui  donnent  sur  la  place,  du  côté  du  bétiment^e  la 
jastioe  consulaire. 

En  4660,  nous  voyons  qu'il  y  avait  à  Thôtel  de  ville,  la 
^roiirfe  $aUe  et  la  chambra  du  comeil.  Les  vitres  des  croi- 
^  de  ces  deux  pièces,  ainsi  que  celles  'du  cabinet  situé 
dans  le  bâtiment  neuf,  furent  brisées,  lors  des  réjouis- 
sances faites  pour  le  mariage  du  roi  et  la  publication  de  la 
paix  avec  l'Espagne,  par  la  grande  afOuencc  du  peuple, 
qui  entra  alors  à  l'hôtel  de  ville  (i). 

Ent740,  nous  trouvons  au  rez-de-chaussée:  4®  le  bureau; 
!*  la  salle  d'assemblée;  3*  le  passage  du  rez  de  chaussée;  et 
4'  la  chambre  du  conseil. 

Au  premier  étage,  au-dessus  du  bureau,  une  chambre 
tenant  à  l'escalier  de  la  tour  qui  monte  au  beSW>i,  une 
grande  chambre  au-dessus  de  la  salle  d'assemblée,  une 
chambre  au-dessus  du  passage,  et  une  troisième  au-des- 
lus  de  la  chambre  du  conseil,  chambre  qui  tenait  à  l'audi- 
toire des  Consuls  (2). 

Au  scamd  étage,  des  chambres  et  un  grenier. 

(I)  Maodeuients,  tH  septembre  1660,  {**  45. 
(1)  J'établis  celte  division  d'après  les  rensei(:nciiici)ti»  tournis 
en  1740  par  un  devis  de  réparations. 


364       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Lorsqu'en  1778,  l'iatendaDt  de  Paris,  Berthier,  s'em- 
para des  étages  supérieurs  de  l'iiôtel  de  ville  pour  s'y  io^ 
taller  pendant  ses  séjours  à  Gompiègne,  il  y  eut,  au 
premier  étage,  un  salon,  un  cabinet,  une  chambre  pour 
lui,  Ht  des  appartements  pour  sa  femme.  L'étage  supérieur, 
sous  le  comble,  était  occupé  par  son  secrétaire  et  ses 
domestiques  (i). 

Aujourd'hui    le  rez-de-chaussée   est   occupé  par  une 
grande  salle,  où  se  tiennent  les  audiences  de  la  justice  de 
paix,  salle  qui  occupe  une  partie  de  l'emplacement  de 
l'ancienne  salle  d'assemblée,  un  cabinet  sur  la  rue,  pour 
le  juge  de  paix;  et,  à  droite  d'un  passage  allant  dans  la 
cour,  le  logement  du  concierge. 

Au  premier  étage,  une  salle  d'attente  ;  à  droite,  la  salle 
des  mariages  et  celle  des  commissions;  à  gauche,  le  cabi- 
net du  maire,  la  salle  du  conseil  et  un  passage  conduisant 
aux  bureaux  du  bâtiment  neuf.  La  salle  des  commissions 
communique  avec  la  galerie  du  Musée  Vivenel  par  un 
escalier  de  quelques  marches. 

Le  second  étage  renferme  la  bibliothèque  comprenant 
une  grande  galerie  sûr  la  cour,  une  salle  de  lecture  et 
une  salle  de  réserve,  donnant  toutes  deux  sur  la  rue. 

Au-dessus,  est  le  comble,  dans  lequel  se  trouvent  une 
chambre  pour  l'horloge,  et  le  grenier. 

2:2.  Antichambre. 

L'antichambre  était  décorée  de  peintures.  Une  lettre  à 
Vauteur  de  l'Almanach  de  Compiegne  de  1788,  nous  parle 

(1^  Renseignements  donnes  par  Lérc,  d'après  l'entrepreoeur 
Mouton. 


ZUT*  SESSION,   A  SENLIS.  365 

des  portraits  très-bien  tirés  d'Henri  lY,  de  Louis  Xf  [I  et  de 
LoaisXlV,  du  Dauphin,  du  duc  de  Bourgogne  du  duc 
dVomières  et  de  Télecteur  de  Bavière  (i). 

Ce  portrait  de  Louis  Xlll,  ainsi  qu'un  autre  d'Anne 
d'Autriche  avaient  été  exécutés  en  4635,  par  maitre  Jehan 
Hérission,  peintre,  qui  avait  reçu  140  livres  tournois  pour 
leur  exécution  et  pour  divers  travaux  de  peinture  faits 
^mtries  tableaux  qui  étaient  dans  la  grande  salle,  où 
01  portraits  se  trouvaient  alors  également  placés  (S) . 

Ces  tableaux  et  d'autres  qui  décoraient  l'hôtel  de  ville 
fioRDt  enlevés  en  août  4792  et  détruits  pour  la  plupart 
par  les  soins  du  Directoire  du  district  deCompiègne  (3). 


23.  Grande  salle  ou  salle  d'assemblée  (4). 

A  la  fin  du  siècle  dernier,  la  grande  salle  d'assemblée 
^t  décorée  des  blasons  des  gouverneurs,  qui  y  étaient 
placée  c  en  mémoire  de  leur  réception  et  bons  services  qu'ils 
OQt  rendus  à  ladite  ville  sous  les  temps  de  leur  gouverue- 

.1)  Affiehes  de  Compiègne  de  Bertrand. 

i2i  BB.  35,  (^  43. 

3)  Tous  les  emblèmes  de  la  royauté  que  Ion  lit  alors  dispa- 
nltre  ne  furent  pas  cependant  (iétrults;  car  nous  trouvons,  par 
exemple  mentionné  dans  le  proccs-verbal  un  tableau  représeu- 
Uq(  Louis  XVI  vénérant  les  reliques  de  saint  Marconi,  tableau 
<|oi  est  encore  conservé  à  l'église  Saint-Jacques. 

■4':  L«^  assemblées  lUi  la  ville  se  composaient  ordinairement 
deilouze  ootahles,  le  plus  souvent  anciens  gouverneurs  attournés. 
lu  {KMivaient,  lors(]u*ils  le  jugeaient  à  pn»pos.  et  dans  des  cir- 
conslances  extraordinaires,  appeler  à  leurs  déliliéralions  un  cer- 
tain nombre  de  notables. 


366       GONGBÂS  AacnÉOLOGIQUE  DB  FRANCE. 

ment  (1)  ».  Ces  blasons  étaient  accompagnés  d'une  courte 
légende  rappelant  les  dates  principales  de  la  vie  de  chacun 
des  gouverneurs.  Le  cahier  que  nous  avons  sous  les  yeux 
en  indique  vingt-neuf;  le  dernier  est  Mathieu-Paul-Louis, 
vicomte  de  Montmorency -Laval,  nommé  capitaine  en 
1766.  C'est  en  1629,  que  l'on  avait  commencé  à  décorer 
cette  salle  avec  des  tableaux  armoriés.  Charles  Védye, 
peintre  compiégnois,  dont  le  nom  est  souvent  cité  pour  ses 
travaux  décoratifs,  avait  été  chargé  d'exécuter  a  huict  ta- 
bleaux où  sont  les  armes  de  huict  des  anciens  capitaines 
et  gouverneurs  de  la  ville,  à  raison  de  six  livres  pour  cha- 
cun tableau  qui  sont  dans  la  grande  salle  de  l'hostei  com- 
mun (â)  ».  Plus  tard,  il  en  fit  encore  dix  aux  mêmes 
conditions  (3). 

On  remarquait,  dans  la  grande  salle,  un  tableau  repré- 
sentant l'entrée  de  Louis  XII  dans  Compiègne  en  1498. 
Ce  tableau,  cité  par  Charpentier  (4)  nous  montre,  dit-il, 
une  partie  des  magniticences  que  les  habitants  firent  à  son 
entrée.  La  description  de  Compiègne  de  1765  le  mentionne 
encore  ;  mais  il  avait  disparu  eu  1792,  lorsque  les  autres 
furent  enlevés.  Il  y  avait  encore,  mais  nous  ne  savons  au 
juste  si  c'était  dans  la  grande  salle,  un  tableau  de 
moyenne  grandeur  représentant  le  cardinal  d'Ailly, 
agenouillé  devant  la  Vierge  qui  tenait  entre  ses  bras 
l'enfant  Jésus  (5). 

(4)  Mss.  de  Boullé.  Bibliothèque  de  l'auteur. 

(2)  DD.  D'après  TÉpinois. 

(3)  Manuscrits  de  M.  de  Crouy. 
(4j  Séjour  Royal,  p.  42. 

(5)  Ce  tableau  mentiouDé  daus  la  lettre  à  l'auteur  de  VAlma- 
nach  est  du  nombre  de  ceux  qui  furent  enlevés  par  le  district 
en  1792. 


XUT*  SESSION,   A  SENtlS.  Ml 

e  premier  étage  était  soutenu  au-dessus  de  la  salle 
«emblée  par  quatre  grosses  poutres,  dont  en  1740, 
e  était  rompue,  el  les  trois  autres  pliées  de  plus  de 
ai  pouces. 

La  cheminée  de  la  grande,  salle,  qui  se  trouvait  sans 
Mte,  ainsi  que  nous  l'avons  dit,  contre  le  mur  de  la 
aine  d'épargne  était  décorée  d'un  écu  de  France,  sculpté 
ptr  Nicolas  d'Estrées  et  qui  lui  avait  été  payé  quarante 
sois  (1).  Cet  écu  était  supporté  pardeux  angeset  fut  redoré 
a4S96. 

U.  Chambre  du  Conseil  (i). 

La  chambre  du  conseil  située  sur  la  place,  au  rez-de 
chaïuiée,  fut  réparée  et  remeublée  en  1629.  On  fit  alors 
peindre  le  plancher  et  les  fenêtres,  moyennant  quarante- 
trois  livres;  on  la  décora  d'armoiries  et  on  mit  en  cou- 
leur les  ventauz  des  croisées,  travail  exécuté  par  Baptiste 
CaodvUIers,  peintre,  auquel  fut  confié  en  outre  le  soin 
<le  ff  faire  et  livrer  seize  aulnes  et  demie  de  thoille  peinte 
OQ  sont  représentées  diverses  chasses  et  paysages.  Le  tout 
tu  prix  de  soixante  livres  ».  On  se  procura  aussi  neuf 
pinneaux  de  verre  de  Lorraine  pour  mettre  aux  fenêtres. 

Les  toiles  peintes,  fournies  par  Caudvillers,  ne  parais- 
sent pas  avoir  eu  grand  succès,  car  lors  de  la  venue  du 
ni,  la  même  année,  la  ville  les  remplaça  par  une  tapis- 
serie du  prix  de  deux  cents  livres  (3). 

J)CC.  3i,  ro89,  1505-1508. 

(i)  Le  conseil  se  composait  des  trois  gouverneiirs  attourDi^s, 
èlQs  coDJoiDleineDt  pour  trois  ai>s  ;  le  procureur  de  la  ville  et 
le  reeeveur  aiiisUient  i  ses  délibêraiioDs. 

(S)  DD.  SS,  d'après  TËpiDois. 


368      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 


25.  Premier  étage. 

Nous  ne  savons  trop  à  quel  usage  pouvaient  servir  les 
pièces  qui  s*y  trouvaient;  en  tous  cas  leur  utilité  n'était 
pas  considérable,  à  eu  juger  par  l'état  de  dégradation  dans 
lequel  on  les  laissait.  Un  procès-veri>al  de  1740  dit  que 
dans  la  troisième  chambre  du  premier,  au-dessus  de  la 
chambre  du  conseil,  les  baies  des  croisées  de  la  façade  don- 
nant sur  la  place,  étaient  tout  à  jour,  n'ayant  aucun 
châssis  ni  contrevent,  ce  qui  fait  que  les  pluies  qui  y  sont 
conduites  par  les  vents  pourrissent  complètement  le 
plancher  (Art  3]. 

^.  Eeriictre, 

Il  est  encore  d*autnes  pièces  dont  nous  ne  connaissons 
pas  remplacement.  Telle  est  «  Tescriptoire  »,  comme  on 
rappelle.  Cette  pièce  parai:  avoir  pris  jour  sur  la  cour,  et 
nous  voyous  qu  elle  ètai:  planchéiée  et  garnie  de  bancs  et 
do  tablei^.  Tn  passa^  de  compte  semblerait  laisser  croire 
qu'il  y  avait  doux  pièces  pv^rtaat  cette  désignation.  Tune 
situoo  dans  io  KAnmt^:  pr;ac.paK  et  l'autre  subsistant 
d,ius  uno  do$  doiviiviAu.\>>  de  rôncien  h6lel  de  ville,  dans 
i,i  ivur. 


iT.  Ar^'hiref. 

Ijfs  arv'h:\r<  ouïon:  35^>."^s»«!S  dans  une  chambre  spéciale, 
.s  ,n  ,^*'hf:A  î*r,  I.hU  ur.  .v.ffrv  jour  mettre  les  pièces  les 


XUT*  SISSION,   A  SENLIS.  369 

plus  importantes  (i).  Lors  de  la  reprise  de  la  ville  sur  les 
Bovguignons  en  1422,  une  partie  des  archives  avait  été 
dispersée;  aussi  voyons-nous  en  1557,  la  ville,  afin  d'éviter 
an  semblable  malheur,  faire  retirer  de  l'hôtel  de  ville  les 
«Chartres,  tiltres,  comptes,  cartulaires  et  autres  enseigne- 
nMQts,  pour  les  envoyer  par  la  rivière  en  lieu  sûr  (2)  » . 


28.  Arsenal. 

C'est  à  l'hôtel  de  ville,  dans  les  vieux  bâtiments,  donnant 
sorlarue  Haulgard,  que  la  ville  conservait  ses  équipages 
de  guerre.  Dès  la  fin  du  xv*  siècle,  la  ville  de  Compiègne 
poesédait  une  artillerie  qu'elle  entretenait  avec  grand  soin. 

Nous  trouvons  de  fréquentes  réparations  faites  à  sa 
grosse  bombarde  dans  les  premières  années  du  xvi*  siècle. 
Uq  inventaire  de  la  même  époque  nous  donne  le  relevé 
des  armes  qu'elle  possédait.  Plus  tard,  cette  artillerie 
tiogmenta,  soit  par  des  dons,  soit  par  des  acquisitions. 
Louis  XIV  voulut  à  plusieurs  reprises  déposséder  les  Gom- 
P%Qoi8  de  leurs  canons,  mais  ils  ne  se  laissèrent  pas 
^  volontiers  et  réussirent  à  en  conserver  au  moins  une 
pirtie. 

Aujourd'hui  encore,  on  voit  au  Musée  Vivenel  deux 
pièces  en  cuivre,  portant  les  armoiries  de  la  ville  et  la 
dite  de  1579  (3). 

Ce  fut  là  que,  pendant  longtemps,  on  conserva  les  pou- 
<lres  de  la  ville. 

(«)CC.  35,  P»4i«  V. 

A  ce.  43.  Voir  notre  travail  :  La  ville  de  Compiègne  à 
^^poque  de  la  bataille  de  Saint^Quentin, 
l3)  Jusqu'à  la  suppression  de  la  garde  nationale,  en  1871,  la 

XUV*  SESSION.  24 


370       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

Lors  des  travaux  de  constructioa,  on  en  jQt  rompre 
rhuis,  afin  de  s'assurer  de  leur  état  (1). 

En  1551,  on  les  plaça  au  grenier  (BB.  21],  et  plus  tard, 
dit  M.  de  TÉpinois,  Louis  XIII,  lorqu'il  vint  à  Gompiègne 
en  1619,  les  fit  porter  à  la  tour  de  Soissons  (CC.  63). 

29.  Cuisine. 

Les  gouverneurs  attoumés  donnaient  assez  firéquem- 
ment  des  repas  dans  l'hôtel  de  ville,  soit  lors  du  passage 
de  grands  personnages,  soit  quand  des  fonctionnaires,  tels 
que  le  maître  des  eaux  et  forêts,  le  lieutenant  du  bailli  ou 
autres,  venaient  procéder  à  certaines  opérations  profitables 
à  la  ville.  Ils  faisaient  alors  exécuter  le  repas  par  des 
maîtres  d'hôtel  ou  pâtissiers  (2).  Aussi  trouve-t-on,  dès 
l'origine,  l'indication  d'une  cuisine  dans  l'hôtel  de  ville. 

Elle  n'était  probablement  pas  dans  le  bâtiment  princi- 
pal, mais  dans  les  constructions  anciennes,  et  sans  doute 
peu  considérables,  qui  se  trouvaient  derrière,  dans  la  cour. 
En  1520,  on  paie  vingt  sous  à  Gérard  Gourtoys,  menui- 
sier, pour  avoir  fait  un  porche  à  la  cuisine  de  l'hôtel  de 
ville  (3).  A  la  fin  d'avril  1505,  on  avait  aussi  fait  faire  un 
four  neuf  dans  l'hôtel  de  ville  (4). 

ville  de  Compiègne  a  continué  à  avoir  une  compagnie  d'ar- 
tillerie. 

En  1550,  la  ville  avait  un  canonnier,  Jacques  de  Ravenei.qui 
recevait  un  traitement  de  cent  sous  par  an.  (CC.  43). 

(\)  i 505-1508.  CC.  34,  f°  i38. 

(2)  Nous  avons  réuni  de  nombreux  renseignements  à  ce 
sujet  dans  le  travail  communiqué  à  la  Société  historique  de 
Compiègne,  sur  les  fêtes  et  cérémonies. 

(3)CC.  37,  fo  i90,  i  3  juin  4  520. 

(4)  CC.  76,  fo422l  v. 


XLIY'  SESSION,   A  SËiNUS.  371 

30.  Dépenses, 

Uoe  question  reste  à  se  poser,  comment  la  ville  a-t-elle 
pu  subvenir  à  la  dépense  de  cette  construction? 

Ld  ville  de  Gompiègue  possédait  à  cette  époque  des 
icvenus  de  diverses  natures  qui,  sans  être  considérables, 
suffisaient  à  faire  face  aux  dépenses  ordinaires  :  rentes, 
gages  des  officiers,  présents  aux  grands  personnages,  et 
'Surtout  travaux  de  voirie  et  réparations  des  fortifications 
et  des  édifices  publics.  Les  revenus  varient,   du  reste, 
beaucoup;  et  tandis  que  dans  certaines  années  ils  ne  s'élè- 
vent pas  au-delà  de  mille  livres,  dans  d'autres,  ils  vont 
juaqu'à  deux  mille.  Mais,  comme  la  plupart  d'entre  eux 
correspondaient  à  des  dépenses  fixes,  ils  ne  pouvaient  suf- 
fire à  fournir  aux  frais  de  construction  de  l'hôtel  de  ville. 
Les  attoumés  trouvèrent  une  nouvelle  ressource  dans 
l'octroi  qu'ils  obtinrent  du  roi,  d'une  somme  de  deux 
cous  par  chaque  minot  de  sel,  vendu  au  grenier  à  sel  de 
Gompiègne. 

Cette  faveur  renouveléeàplusieurs  reprises,  produisit  une 
première  fois,  pour  la  période  de  six  ans,  de  1499  à  1505, 
une  somme  de  1,681  livres,  et  pour  celle  de  1505  à  1511, 
ia  somme  de  2,100  livres.  Cette  dernière  fut  employée 
presque  exclusivement  aux  travaux  de  Thôtcl  de  ville,  et 
UQ  compte  spécial  nous  montre  l'emploi  de  ces  fonds  fait 
par  le  receveur  (1). 

Nous  avons  vu,  de  plus,  que  le  bois  avait  été  fourni 
gratuitement  par  le  maître  des  eaux  et  forêts  et  que  la 
ville  n'avait  eu  qu'à  faire  les  frais  d'abattage  et  de  trans- 
port à  Compiègne. 

\)  ce.  76  cl  ce.  77. 


372  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 


BATIMENT  DE  LA  JUSTICE  CONSULAIRE. 

31.  Acquisitions. 

En  1587,  la  ville  avait  déjà  acheté  une  maison  située 
rue  de  la  Heuze  (1). 

En  1624,  un  incendie  allumé  à  Thôtei  Saint-Georges, 
par  les  gens  de  la  suite  du  roi  qui  y  étaient  logés,  se 
communiqua  à  Tun  des  bâtiments  élevés  dans  la  cour  de 
rhôtel  de  ville  et  Ton  fut  obligé  de  l'abattre  et  de  le  recon- 
struire à  neuf. 

De  nouvelles  craintes  d'incendie  s'étant  manifestées 
en  1653,  par  suite  du  voisinage  des  maisons  contiguSs 
à  l'hôtel  de  ville,  l'administration  municipale  résolut 
de  faire  Tacquisition  de  trois  maisons  -qm  formaient 
l'angle  de  la  place  au  blé  et  de  la  rue  de  la  Heuie.  Elle 
avait  formé  le  grojet  de  les  remplacer  par  une  construc- 
tion nouvelle  destinée  à  recevoir  la  juridiction  consulaire 
et  la  Table-Dieu  (2). 

Plusieurs  réunions  eurent  lieu  à  cet  effet  ;  dans  la  pre- 
mière, tenue  le  9  juin  1653,  on  décida  l'acquisition  des 
maisons  Blandin,  Bourguignon  et  Martin  (3). 

(1)  DD.  42,  acte  passé  devant  Antoine  Cocquio. 

(2)  La  Table-Dieu,  sorte  de  bureau  de  bienfaisance,  établi 
pour  les  deux  paroisses  et  administré  par  des  gouverneurs  élus 
par  rassemblée  des  notables. 

(3)  La  première  fut  payée  700  livres  et  60  livres  d'épiogles; 
la  troisième  appartenant  à  plusieurs  propriétaires  t  ,200  livres, 
plus  certaines  exemptions  de  tailles  ;  le  prix  de  la  seconde  ne- 
nous  est  pas  connu. 

Voici  le  texte  d'une  des  délibérations  prises  à  cette  occasioD  = 


XLIV*  SESSION,  À  SENLIS.  373 

les  gouverneurs  furent  autorisés  à  appeler  devant  eux 
'tt  propriétaires  et  à  traiter  à  t'amiable.  Ce  qui  eut  lieu, 
«t  le  16  juin,  une  nouvelle  assemblée  décida  qu'aussitôt 
ies  acquisitions  faites,  on  construirait,  sur  remplacement 
de  ces  maisons,  un  bâtiment  de  mêmes  hauteur  et  symé- 
trie que  l'hôtel  de  la  Cloche  ;  bâtiment  dans  lequel  serait 
pris,  par  le  bas,  une  chambre  pour  le  bureau  des  pauvres, 

K  I>a  loDdy  16*jourde  juin  1653,  au  bureau  de  Thostel  coin- 
nao  de  la  ville  de  Compiègne,  où  étaient  Maistres  René  Potier, 
cooseilleresluen  Télcction  dudit  Compiègne,  Louis  Charpentier, 
limicié  es  loix, conseiller  et  advocat  du  roy  en  ladite  élection,  et 
Henry  Sergent,  marchand,  gouverneurs  attourncs. 

•  Sur  la  plainte  et  remonstrance  à  nous  faitte  par  plusieurs  et 
diverses  fois  que  l'hostel  de  laditte  ville  avait  cy  devant  couru 
grand  risque  d^estre  bruslé  par  les  maisons  voisines  apparte- 
BMtft  i  Gilles  Blandin,  maistre  Jean  Bourguignon  et  la  veuve 
^  Martin,  à  cause  que  les  cheminées  des  dites  maisons  sont 
joingnantes  le  grand  comble  dudit  hostel  de  ville  et  qu'il 
ÎBporte  à  la  décoration  de  la  ville,  ambellissement  dudit  hostel 
de  ville  et  au  bien  des  pauvres  et  à  Thouneur  de  la  commu- 
i^té  des  marchands  d'avoir  des  lieux  propres  et  convenables 
poar  y  trailter  des  affaires  des  pauvres  et  rendre  la  justice  con- 
wbire. 

•  A  esté  résolu  que  les  propriétaires  desdittes  maisons  seront 
*udez  audit  hostel  de  ville  pour  sçavoir  d*eulx  s'ils  ont  la 
volonté  et  Tintenliou  d'accomoder  la  ville  pour  la  vente  des- 
dittes maisons  et  ensuite  lesdits  sieurs  gouverneurs  pourront 
traiUer  i  composer  avec  eulx  i  telles  sommes  qu'ils  adviscront 
booestre. 

•  La  veuve  Martin  appelée  devant  les  attourncs  consent  à  la 
vente  moyennant  six  cent  livres  et  de  plus  rengagement  pris 
pir  les  altourDÔs  de  Tabonner  aux  tailles  pour  trente  livres  et 
(Je  l'exempter  des  logements  do  gens  de  guerre,  garnisons  et 
contributions  (Archives  de  Compiègne,  DD.  37). 


374  CONGRÈS  ARGHÉOLOOIQUE   DE  FRANGE. 

avec  un  cabinet  pour  accompagner  la  chambre  du  conseil 
(située  dans  le  bâtiment  principal)  et  au-dessus  un^ 
chambre  pour  les  consuls  ;  quant  au  troisième  étage  e*^ 
au  grenier  qui  le  surmontait,  ils  devaient  servir  à  resser^' 
rer  les  grains  de  la  Table-Dieu. 

32.  Conêtruction  et  décoratianê. 

Ce  bâtiment  fut  élevé  ainsi  qu'il  avait  été  projeté,  et  il  a 
continué  de  servir  aux  bureaux  de  la  mairie  jusqu'en 
1869,  où  il  a  été  démoli  et  remplacé  par  celui  que  nous 
voyons  actuellement  (1).  C/était  une  construction  en 
pierre,  avec  trois  fenêtres  de  façade  à  chaque  étage.  Celle 
du  milieu,  au  premier,  était  remplacée  par  une  statue  en 
ronde-bosse  représentant  la  justice,  figure  exécutée  par 
Gilles  Guérin,  sculpteur  du  roi.  Cet  artiste  reçut  de  la 
ville  une  somme  de  cinq  cents  livres,  tant  pour  l'exécution 
de  cette  figure,  que  pour  l'épitaphe  de  M**  de  Crevant  de 
Brigueil  placée  à  Saint-Corneille.  Un  maçon,  du  nom  de 
Gérard  le  Sourd,  fut  chargé  de  placer  au-dessous  une 
table  de  marbre  avec  le  mot  sculpté  Justifia  (2). 

Les  comptes  de  la  ville  nous  donnent  le  prix  de  con- 
struction du  bâtiment  de  la  justice  consulaire.  Le 
15  octobre  4655,  une  somme  de  6,800  livres  fut  payée  à 
l£nnnanuel  Camay,  maçon,  pour  avoir  démoli  les  trois 
petites  maisons  et  les  avoir  remplacées  par  une  construc- 

(1)  Voir  sur  la  démolition  do  cette  construction  un  article 
hnmourislique  de  M.  Charles  Beaurin,  dans  Y  Echo  de  VCHse  à\\ 
U  août  4869. 

(2)  Voir  la  gravure  do  cpltc  slatntî  dans  V Histoire  du  Palais 
df  Compiègne,  de  Pcllassy  de  l'Ousle,  p.  4 44. 


.  XUT*  SESSION,  A  SBNLIS.  375 

lion  nenve  en  maçonnerie  ;  la  charpente,  adjugée  au 
nblis  le  15  juin  1654,  fut  exécutée  moyennant  i,OiS 
livres  par  Jean  Gay  ;  et  divers  travaux  de  menuiserie, 
planchers,  portes,  fenêtres,  etc.,  s'élevèrent  à  210  livres. 


33.  Intérieur.  Cabinet. 

La  seule  pièce  de  ce  bâtiment,  sur  l'intérieur  de  laquelle 
nous  ayons  quelques  renseignements,  est  le  cabinet  de  la 
tlkmbredu  eanseil. 

Au  xm*  siècle,  nous  voyons  souvent  cette  pièce  men- 
tionnée dans  les  comptes  de  la  ville  et  on  consacre  des 
sommes  assez  importantes  à  sa  décoration  et  à  son  ameu- 
bkment.  Elle  était  située  au  rez-de-chaussée  du  bâtiment 
de  la  justice  consulaire  et  touchait  à  la  chambre  du 
eoQieil. 

Ooi  la  tendit  de  tapisseries  de  Beau  vais  (1),  on  plaça  au 
milieu,  une  grande  table  de  noyer,  brisée,  couverte  d'un 
tipis  de  Modène  (2),  et  autour  six  tabourets  de  bois  de 

II)  Mandement  du  8  janvier  4657,  à  Gilles  Chamiolue,  rece- 
Teor  de  la  ville,  de  retenir  par  ses  mains  des  deniers  de  sa 
recette,  la  somme  de  198  livres  tournois,  à  cause  de  pareille 
somme  par  luy  tirée  et  desboursée  par  les  ordres  de  MM.  les 
gOQvemeurs  attournez  en  Tachapt  de  soixante-six  aulnes  cou- 
nntes  de  tapisseries,  manufacture  de  fasson  de  la  ville  de 
Beaavais,  rendues  en  cette  ville  de  Compiëgno  ....  Mandements 
1656-1660,  f»  5. 

\t)  A  Fleury  Haqueville.  marchand  tapissier  demeurant  en 
cfttf  ville  de  Cc*mpiègue,  de  la  somme  de  59  livres  S  sous 
toarnois.  pour  une  grande  table  de  bois  de  noier,  brisée,  garnie 
de  ses  ferrures,  avec  un  tapis  de  tapisserie  de  Modën?,  comme 
aossy  pour  avoir  cousu  les  lez  et  bordures  de  la  tapisserie  de 


376       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

chAne,  couverts  de  moquette  et  garnis  de  franges  (i 
Deux  grands  fauteuils  de  chêne,  garnis  et  couverts  <l 
trippe  de  couleur  rouge  et  violette,  servaient  en  outre  3 
sièges  aux  anciens  gouverneurs  (2). 

33.  Porte  de  l'Arsenal.  Bâtiment  de  la  Caisse  d'épargne 

Du  côté  droit,  l'hôtel  de  ville  est  resté  jusqu'à  c« 
dernières  années  séparé  de  la  porte  de  l'Arsenal  par  un< 
propriété  privée,  le  café  de  la  Cloche.  Celle-ci  fut  enfic 
acquise  en  1867  et  fut  remplacée  par  un  bâtiment  con- 
struit dans  le  style  du  commencement  du  xyii*,mais  don 
on  doit  regretter  les  mesquines  proportions  et  l'écrase- 
ment.  Cette  construction  fut  faite,  d'après  les  conseils  di 
M.  Viollet-le-Duc,  afin  de  dégager  la  tourelle  d'angle  d< 
l'hôtel  de  ville  et  dans  ce  but,  le  bâtiment  fut  élevé  ei 
retraite.  Le  rez-de-chaussée  de  ce  bâtiment  est  affecté  ai 
service  de  la  Caisse  d'épargne  (3),  et  le  premier  étag) 
renferme  une  partie  du  Musée  Vivenel. 

Beauvais  estant  dans  le  cabinet  de  la  chambre  du  conseil  de  \ 
dittc  ville,  pourquoy  faire,  il  a  fourny  la  toille  et  autres  chose 
nécessaires  Cid.  f^  9). 

(1)  Au  même  ....  quarante-huit  livres  sept  solz  tournois,  pou 
avoir  fourny  et  livré  six  tabourelz  <le  bois  de  chesne,  couvert 
de  mouquette  avec  frange,  servans  de  sièges  à  la  chambre  d 
conseil  (id.  f^  tH  v.). 

it)  Au  même  ....  49  livres  7  solz  tournois,  pour  deux  grande 
formes  de  bois  de  chesne,  garnies  et  couvertes  de  trippe  d 
couleur  rouge  et  viollet,  avec  mullelz,  pour  servir  de  sièges 
MM.  les  anciens  gouverneurs  attoumez  es  assemblées  qui  s 
tiendront  à  Hiostel  de  la  ditte  ville  id.  î^  i\  w,  7  juillet  1660, 

,3)  L'administration  de  la  Oisse  d'épargne  a  concouru  dan 
une  certaine  limite  à  la  dépense  de  cette  coDstnictioD. 


XLIT*  SESSION,   A  SENUS.  377 

Presque  en  môme  temps  (i869)  la  porte  de  l'arsenal, 
élevée  fOUS  le  règne  de  Lous  XIII,  et  dont  Tétat  de  dégra- 
dation ne  permettait  pas  la  réparation,  était  réédifiée  dans 
le  style  primitif  de  sa  construction,  mais  avec  quelques 
modifications  dans  le  détail  de  la  décoration,  modifi- 
cations dont  on  peut  juger  par  un  dessin  ancien  conservé 
aux  archives  de  la  ville  et  qui  n*a  pas  été  connu  de  Tarchi- 
tficte  chargé  de  diriger  cette  restauration  (1). 

La  prison,  qui  avait  été  construite  à  la  fin  du  siècle 
dernier  sur  les  dépendances  de  l'hôtel  de  ville  (2),  a  été 
déplacée  et  le  bâtiment  situé  au  fond  de  l'impasse  est 
aujourd'hui  affecté  au  logement  des  agents  de  police. 

34.  Bâtiment  de  la  rue  des  Pâtissiers.  Ecole  de  dessin. 

A  la  même  époque,  on  a  construit  sur  la  rue  des 
Pâtissiers  un  nouveau  bâtiment  qui  se  relie  à  la  construc- 
tion exécutée  au  fond  de  la  cour  en  18i9,  et  qui  renferme 
au  rez-de-chaussée  les  remises  des  pompes  et  le  bûcher; 
an  premier,  la  galerie  de  tableaux  du  Musée  Vivenel,et  au 
(6Gond  étage,  l'école  municipale  de  dessin. 
Le  nouveau  bâtiment  de  la  rue  des  Pâtissiers  commu- 
ai Voir  pour  les  représentations  de  cette  porte  :  4*  dessin 
i  la  plune  du  commencement  du  siècle  dernier  représentant  la 
porte  de  larsenal  dans  son  état  primitif,  reproduit  dans  ce 
tnvail  (Archives  de  la  ville  de  Compiègne,  DO.);  S®  lithog. 
dans  le  voyage  de  Taylor  cite  plus  haut  ;  3*  gravure  sur  Itois 
dans  VHistoire  du  Palais  de  Compiègne,  de  Pellassy  de 
rOasIe,  p.  H 8. 

Il)  Ces  dépendances  avaient  été  accaparées  au  xvm*  siècle 
par  le  gouverneur  qui  y  avait  établi  des  remises  et  des  écuries, 
et  la  ville  eut  plus  lard  des  difliculiês  sérieuses  à  vaincre  pour 
w  les  faire  restituer  (DD.). 


378  CONGRÈS  àrghéologioub  de  frange. 

nique  avec  les  bureaux  de  l'hôtel  de  ville.  Il  comprend,  ai 
rez-de-chaussée,  un  vaste  hangar  et  un  calorifère;  ai 
premier,  une  galerie  faisant  partie  du  Musée  Vivenel,  e 
renfermant  principalement  des  antiquités  romaines  et  d 
collections  géologiques. 


SÉANCE  DR  VENDREDI  i"  JUIN  1877. 

PRÉSIDSNGE  DE  M.   LÉON  PALUSTRE. 

Siègent  au  bureau  :  MM.  Deschamps  de  Pas  et  le  baron 
de  Cauna. 

M.  J.  de  Laurière  donne  lecture  de  la  note  suivante  au 
nom  de  M.  Durand  : 


Notre-Dame  de  la  Victoire,  près  Senlls. 

On  voit  encore  près  de  Senlis  quelques  fragments  de 
rabhayc  de  Notre-Dame  de  la  Victoire,  fondée  par  Philippe 
Auguste,  en  mémoire  de  la  Victoire  de  Bouvines. 

La  piété  reconnaissante  de  nos  pères  avait  fait  de  cette 
abbaye  un  lieu  de  pèlerinage,  ainsi  que  le  prouve  une 
pièce  assez  rare,  dont  voici  la  description. 

C'est  une  assez  bonne  gravure  du  xvii*  siècle,  repré- 
sentant dans  une  niche  ornée  de  lampes  et  d'ex-voio. 
une  statue  de  la  sainte  Vierge,  en  pied,  tenant  de  la  main 
droite  une  branche  de  lis,  et  portant  usa  gauche  TEnfant 
Jésus.  Les  tètes  sont  couronnées.  Il  est  facile  de  voir  que 
le  dessinateur  ne  s'est  pas  piqué  d'exactitude;  toutefois  on 


XUV*  SESSION,   A  SENLIS.  379 

distingue  encore  dans  son  œuvre  la  copie  d'une  statue  du 
.\IT*  siècle. 
En  haut  de  la  gravure  on  lit  : 

NoMire-Dame  de  la    Victoire ^  pèlerinage 
proche  de  SetUis. 

Au  bas  sont  gravées  ces  inscriptions  : 

A  très  haolt  et  paissant  prince  Lovis  de  Valois,  duc  d'An- 
goolesme,  colonel  gnâl  de  la  cavalerie  légère  de  France  et 
estr^re  gou«»  et  lieutenant  gîîâl  pour  le  Roy  en  Provence. 

Je  rends  Philippe  Auguste  et  Louis  glorieux 
Parce  qu'ils  me  dévoient  céder  toutte  leur  gloire 
Et  D*ont  voulu  sortir  du  champ  victorieux 
Qu'affîn  de  m'imputer  l'honneur  de  leur  victoire. 

A  Paris,  chez  N.  Regnesson,  rue  Saint-Jacques-au- 
Chameau,  avec  prix. 

Hauteur  0"42,  largeur  0»29. 

Louis -Emmanuel  de  Valois,  petit -fils  naturel  de 
QiarleslX,  est  mort  en  1653. 

Cette  épreuve  fait  partie  de  la  collection  de  M.  Durand. 

M.  Margry  présente  sur  le  nom  et  les  origines  d'Amiens, 
l'analyse  d'un  travail  de  feu  Labourt,  travail  qu'il  a 
trouvé  dans  les  papiers  de  ce  savant,  dont  le  dépouillement 
lui  a  été  confié  par  le  frère  de  celui-ci. 

MM.  Palustre  et  de  Marsy  font  remarquer  que  les  idées 
omises  dans  ce  travail,  qui  remonte  à  plus  de  trente  ans, 
Qesont  plus  à  la  hauteur  des  découvertes  philologiques 
actuelles  ;  M.  de  Marsy  ajoute  qu'il  pense  que  ce  fragment 
atléjà  figuré  soit  dans  V  Essai  sur  les  villes  de  Picardie  y 
mi  dans  le  travail  sur  la  Picardie  colonisée  par  les 
Indous,  connu  seulement  par  les  analyses  des  rapporteurs 
de  différents  concours. 


380  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

M.  E.  Dupuis  donne,  au  nom  de  M.  Alexandre  Hahn^ 
lecture  d'un  travail  sur  la  topographie  des  environs  d^ 
Sculis  à  diverses  époques. 


Carte  comparative  du  pays  senlicien  aux 
temps  anciens  et  de  nos  Jours^ 

Parmi  les  questions  à  Tordre  du  jour  des  travaux  du 
Congrès,  je  lis  au  7*  paragraphe  ces  mots  :  a  Dresser  une 
a  carte  comparative  du  pays  aux  temps  anciens  et  de  nos 
a  jours.  D  Ce  sujet  est  trop  vaste  et  en  dehors  de  mes 
études  pour  que  je  puisse  avoir  seulement  l'idée  de 
l'aborder;  mais,  comme  habitant  d'un  canton  deSeine-et- 
Oise,  limitrophe  de  l'arrondissement  de  Sentis,  je  me 
permets  de  venir  apporter  ma  très-petite  pierre  à  l'édiflce, 
en  soumettant  une  esquisse,  pour  nos  localités,  des  lignes 
de  démarcation  des  anciens  diocèses  ecclésiastiques  et 
administratifs  de  Paris,  de  Senlis,  de  Beauvais  et  de 
Meaux,  en  montrant  graphiquement  les  diverses  variations 
qu'elles  ont  subies. 

En  remontant  à  l'origine  des  temps  de  la  Gaule,  nous 
ne  pouvons  déterminer  positivement  les  circonscriptions 
des  peuplades  ou  tribus  préhistoriques;  les  pays  occupés 
par  des  peuplades  isolées  et  distinctes  n'avaient  point  de 
limites,  et  de  vastes  marches  restaient  entre  les  centres 
des  tribus.  —  Depuis,  la  population  devenant  plus  dense, 
on  a  défriché;  les  Gaulois,  maîtres  dans  l'art  de  cultiver 
les  terres,  commencèrent  à  se  cantonner  et  à  fixer  des 
limites  à  leur  sol  par  de^  frontières  naturelles,  comme 
les  forôts,  les  chaînes  de  montagnes,  les  cours  d'eau... 
Aussi,  aux  temps  devenus  historiques,  on  peut  arriver  à 


XUV«  SESSION,   A  SENLI8.  381 

une  détermination  estimative  des  pays  et  obtenir  une 
solution  plus  ou  moins  satisfaisante. 

A  l'époque  de  la  conquête  par  les  Romains,  armé  de 
textes  et  de  documents,  on  peut  arriver  à  une  fixation 
plus  certaine.  Pour  ce  qui  est  de  notre  sujet,  Jules  César 
et  Hirtius  ne  disent  rien  des  Silvancctes,  mais  peu  après 
Ptolémée  et  Pline  en  font  mention. 

Les  divisions  topographiques  de  Tempire  romain  éta- 
blirent des  limites  à  nos  localités,  seulement  nous  voyons 
qu'on  a  méconnu  la  démarcation  si  naturelle  du  cours  de 
rOise,  et  compris  dans  le  Beauvaisis,  une  bande  de 
terrain  en  établissant  une  limite  arbitraire  au  milieu  de 
la  forêt  célèbre  :  Cotia  Sylva  (dont  le  nom  altéré  plus 
tard  devient  forêt  de  Cuise),  depuis  Rhuis  jusqu'à  La 
Morlage,  se  continuant  jusqu'à  TIsle-Adam,  avec  TFpte 
pour  limite  au  sud-ouest.  —  Cette  nouvelle  délimitation 
coïncide  avec  la  formation  du  Silvanecte  dont  le  territoire 
se  terminait  aux  vallées  baignées  par  la  Thève  et  la 
Thérouonne. 

Lors  de  l'établissement  du  christianisme,  les  apôtres  se 
r^^dirent  :  saint  Rieul  vers  Senlis,  saint  Lucien  vers 
Beauvais,  saint  Denis  vers  Paris  (ces  villes  devinrent 
chef-lieu  d'un  diocèse  ecclésiastique),  et  ils  suivirent  pour 
leurs  excursions  évangéliques  à  peu  près  les  espaces 
(^fermés  par  les  diocèses  romains. 

L'invasiou  des  Barbares  remit  tout  en  question  :  il 
D'y  avait  plus  de  limites  stables  :  les  rois  mérovingiens 
se  partagèrent  sans  cesse  les  contrées  ;  les  carlovingiens 
De  purent  empêcher  l'établissement  de  la  féodalité,  qui  se 
continua  sous  les  capétiens. 

Au  moyen  âge,  les  limites  ont  subi  diverses  modifi- 
cations. Pour  nous,  nous  voyons,  le  diocèse  de  Senlis,  ou 
plutôt  le  Seulicien,  s'étendre  jusqu'à  l'Isieux  et  au  midi 


38â      GONORÈS  ARGH£OLO610U£  DB  VRANGB. 

vers  Dammartin  ;  car  au  xii*  siècle,  Goye  était  du  diocè»^ 
de  Senlis,  et  Pierre,  évèque  de  ce  lieu,  en  fit,  Tan  113^^ 
donation  au  prieuré  de  Saint-NicoIas-d'Acy,  et  en  1180  - 
Henri,  alors  évèque,  confirma  une  fondation  faite  ^S 
Ghaumontel.  Au  xv*  siècle,  la  ligne  séparative  des  diocèse^^ 
de  Paris  et  de  Senlis  fut  reportée  au  delà  de  Coye  ;  un^^ 
croix,  dont  la  base  existe  encore  au  nord  des  marais  à€=^ 
ce  dernier  lieu,  portait  le  nom  de  la  Croix-des-Trois — 
Évéchés  et  indiquait  le  point  d'interception  des  diocèses  d( 
Paris,  Senlis  et  Beauvais.  Depuis  ce  temps,  Coye  a  ét^ 
toujours  compris  au  Pouillé  et  indiqué  de  la  pleine  col- 
lation de  l'évèque  de  Paris  (1). 

Enfin  la  Révolution  de  1789  apporta  un  nouveau 
changement  par  l'institution  des  départements,  et  la  cir- 
conscription moderne  du  canton  de  Luzarches,  maillon 
territorial  du  département  de  Seine-et-Oise,  fait  la  limite 
de  ce  département,  avec  celui  de  l'Oise,  section  de  l'arron- 
dissement de  Senlis  :  cette  délimitation  ne  repose  plus  que 
sur  une  ligne  arbitrairement  tracée,  no  résultant  pas  de 
la  nature  des  sols  ou  des  accidents  de  terrain,  comme  les 


(4)  Je  ne  puis  m'clendre  davantage  en  cette  simple  note  ;  je 
ne  parlerai  donc  point  do  l'ancienne  division  administrative 
de  la  généralité  de  Paris,  qui  ne  se  conformait  pas  avec  la 
division  ecclésiastique.  On  comprenait  dans  l'élection  de  Paris 
tout  noire  canton,  sauf  six  communes  do  rétectico  de  Senlis, 
dont  cinq  :  Àsnières-sar'OUe,  NoUy-sur-Oise,  Saint-Martin- 
du-Tertre ^  Seugtj  et  Via r mes,  du  diocèse  de  Beauvais, 
doyenné  de  Bcauuionl-sur-Oise ,  ancien  Chambliuis  (  payus 
Cameiiocensis),  cl  une:  SurrUliers,  du  diocès«)  de  Se.ulis . 
doyenné  de  Mortefonlainc,  ancien  Servois  (payus  Silvanec- 
tensis).  —  Jo  devais  donner  i'hislori()ue  de  ces  communes, 
mais  œ  serait  dépasser  les  termes  de  ma  communication. 


xinr*  SESSION,  a  senlis.  383 

iodennes  démarcations  locales  qui  étaient  moulées  sur 
les  limites  géographiques  du  pays. 

Ces  divers  changements  sont  consignés  sur  la  carte 
ci-jointe  :  la  ligne  jaune  indique  la  division  sous  la 
période  romaine  ;  la  ligne  bleue,  la  division  au  temps  de 
la  féodalité  ;  la  ligne  verte,  la  division  en  diocèses  de 
l'aDcien  régime  ;  et  la  ligne  rouge,  la  division  par  dépar- 
tements. 

M.  Dupuis  présente  ensuite  la  liste  des  monnaies  décou- 
vertes dans  les  fouilles  des  arènes  de  Senlis,  depuis 
plusieurs  années. 


Nota  sur  les  monnaies  découvertes  dans 
les  touilles  des  arènes  de  Senlis. 

On  a  rencontré  dans  les  arènes  un  grand  nombre  de 
nxmnaies  qui  ne  sont  pas  toutes  venues  à  notre  connais- 
noce.  Le  Comité  archéologique  de  Senlis  a  pu  en  recueillir 
^  :  31  sont  trop  frustes  ou  en  trop  mauvais  état  de 
conservation  pour  être  déterminées.  Les  237  autres  se 
classent  ainsi  : 

4  gauloises,  dont  une  des  Senones  sans  la  légende  ArHA  ; 
une  des  Catalaunes  (guerrier  armé  de  la  lance  ^t  tenant 
un  torques)  et  deux  indéterminées  ; 
49  du  haut  empire  et  des  empereurs  jusqu'à  Gallien; 
De  Gallien  à  Tetricus,  la  suite  est  plus  considérable  : 
18  GoUien. 
5  Salonine. 
27  Postume. 
93  Victorin. 


384      CONGRÈS  ARGHÂOLOOIQUE  DE  FRANCK. 

12  Claude  le  Gothique. 
2  Quintillus. 
46  Tetricus. 

Soit  133  frappées  de  Pan  250  à  Tan  273. 

A  partir  de  Tetricus,  nous  n'en  avoDS  plus  que  49, 
eucore  Constantiu  I*'  seul  en  a  31,  en  y  comprenant  1< 
pièces  à  la  louve  et  celles  à  la  légende  Constantinopolis»^ 

Nous  signalerons  l'absence  des  monnaies,  si  commune^ 
pourtant  dans  le  pays,  de  Dioclétien,  de  Maximien  Her — 
eu  le  et  de  la  plupart  de  leurs  successeurs. 

Mentionnons,  pour  compté,   la   trouvaille   de  deur^ 
monnaies  carlovingiennes  de  Charles  le  Chauve,  qui  nous -a 
apprennent  qu'au  ix**  siècle  les  arènes  n'étaient  pas  encore 
comblées,  mais  nous  expliquent  l'état  de  délabrement  dans 
lequel  elles  devaient  se  trouver  à  cette  époque,  où  elles 
servaient  de  carrière  à  la  population  de  Senlis. 

Enfin  la  partie  supérieure  du  terrain  a  donné  quelques 
monnaies  duxvi''  siècle,  ce  qui  n'a  rien  d'étonnant,  puis- 
que ce  fut  sur  l'emplacement  des  arènes  que,  lors  du  siège 
de  i589,  les  Ligueurs  établirent  une  batterie  de  trois  pièces 
de  canon  pour  battre  eu  brèche  les  murailles   de  la  ville. 

M.  Hayaux  du  Tilly  demande  à  faire,  au  sujet  des 
arènes,  quelques  observations  sur  les  conclusions  du  rap- 
port de  M.  de  Caix  de  Saint-Aymour,  relativement  au 
puits  que  la  Société  française  a  fait  fouiller. 

On  a  parlé  de  l'eau  qui  s'y  trouvait  et  de  la  possibilité 
de  la  présence  d'une  source;  la  constitution  géologique  du 
plateau  des  arènes  rend  inadmissible  cette  hypothèse;  le 
fond  du  puits  est  de  beaucoup  au-dessus  du  niveau  de  la 
rivière;  des  puits  voisins  ont  une  profondeur  beaucoup 
plus  considérable.  Le  puits  des  arènes  ne  peut  être  qu'un 
puisart,  destiné  à  recevoir  les  eaux  pluviales.  Cette  dcsti- 


ZUV*  SESSION,   A  SENUS.  385 

Ditioo  est  du  reste  conforme  à  celle  que  paraissent  pré- 

fleoter  les  puits  qui  existent  dans  d'autres  cirques  et 
fhéAtm.  ' 

M.  Hayaux  du  Tilly  pense  aussi  qu'il  y  a  lieu  de  consi- 
dérer oomme  exagéré  le  chififre  de  12,000  spectateurs  que 
M.  Vatio  indiquait  comme  pouvant  tenir  dans  les  arènes 
de  Senlis. 

H.  Boec  déclare  qu'il  ne  veut  pas  rouvrir  la  discussion 
sur  cette  question  en  demandant  la  parole,  et  qu'il  traitera 
oei  divers  points  dans  la  conférence  qu'il  compte  donner 
dimanche  prochain  sur  les  arènes  ;  mais  dès  à  présent  il 
ne  peut  accepter  les  bases  sur  lesquelles  M.  Hayaux  du 
Tilly  s'appuie  pour  fixer  le  chififre  des  spectateurs. 

M.  l'abbé  Vattier  fait  observer  qu'il  y  a  eu  autrefois  de 
Teiu  à  la  fontaine  des  arènes,  en  assez  grande  quantité 
pour  former  un  ruisseau  susceptible  d'être  curé,  ainsi  que 
le  constate  une  note  d'Alforty  se  rapportant  à  la  date  de 
«SK. 

M.rabbé  Vattier  lit  le  mémoire  suivant  sur  la  30*  ques- 
tion: 

Histoire  des  diverses  bibliothèques  de 
Senlis. 


Bibliothèques  de  Senlis  (1). 

Notre  ville  de  Senlis  possède  actuellement  deux  grandes 
Kbiiothèques,  la  bibliothèque  de  l'hôtel  de  ville  et  celle 

(I)  Je  dois  la  plupart  des  renseignemcnls  conteDUS  dans  cette 
Dole,  à  la  complaisance  bien  conoue  do  M.  Caltru,  bibliothé- 
caire de  la  ville  et  secréUire  de  la  mairie. 

XLlV  SESSION.  i5 


380       CONGRÈS  ARGUÉOLOOIOUB  DE  FRANCE. 

dite  du  Chapitre,  quoiqu'il  n'y  ait  plus  de  chapitre 
Senlis.  D'où  viennent  ceé  deux  collections  et  quelle  c 
leur  valeur;  voilà,  si  je  ne  me  trompe,  les  deux  questioi 
que  peuvent  se  poser  nos  savants  visiteurs.  Je  vais  «ssay 
d'y  répondre  brièvement. 

Quant  à  l'origine,  elle  est  bien  variée,  mais  elle  est 
môme  à  peu  près  pour  ces  deux  bibliothèques.  A  la  siaist 
époque  de  la  Révolution,  quand  nos  prétentieux  gouve 
nants  s'imaginèrent  pouvoir  supprimer  Dieu  par  e 
décret  et  la  religion  en  supprimant  ses  ministres,  ils  vol 
rent  en  même  temps  la  confiscation  de  tous  les  biei 
appartenant  aux  églises  ou  aux  ordres  religieux.  Pan 
les  biens  meubles  se  trouvaient  des  livres  en  asseï  gran< 
quantité,  les  couvents  étant  nombreux  à  Senlis  et  dans  1 
environs,  et  on  concentra  au  district,  comme  on  disi 
dans  le  jargon  de  l'époque,  les  bibliothèques  des  hu 
curés  de  la  ville,  réunis  en  communauté,  des  Chapitres  i 
Notre-Dame,  de  Saint-Rambert,  de  Saint-Frambourg,  à 
Carmes,  des  Capucins,  des  Cordeliers,  des  Augustins  • 
Saint-Vincent,  des  Frères  de  la  Charité,  des  moines  * 
Saint-Maurice,  du  grand  Séminaire  et  des  religieuses  de 
Présentation.  On  y  ajouta  les  bibliothèques  de  la  Victoii 
de  Châlis,  de  Saint-Nicolas  d'Acy  et  de  Saint-Leu  d'Ëss 
rent;  voila,  je  crois,  à  peu  près  toute  la  partie  religieus 
Il  y  avait  aussi  dans  le  voisinage,  à  Eve,  près  Dammartii 
un  président  de  la  Chambre  des  Comptes,  qui  se  nommi 
Barbier  du  Metz  de  Hosnay,  et  qui  possédait  une  belle 
riche  bibliothèque;  elle  fut  également  transportée  au  di 
trict,  pendant  que  son  propriétaire  gagnait  la  frontiè 
l>our  échapi)er  à  la  prison,  et  peut-être  à  la  mort.  L'adni 
nislrati(»n  du  district  eut  été  sans  doute  assez  embarras» 
(le  cet  auias  do  vieux  bouquins,  si  en  môme  temps  le  pr 
voyant  gouvernemeut  n'avait  confisqué  les  immeuble 


XLIV*  SESSION,   A  SENLIS.  387 

L'évéque  de  Sentis,  Mgr  de  Roquelaure,  ayant  jugé  pru- 
dent d'aller  exercer  eo  Belgique  son  ministère  pontifical, 
en  mettant  sa  tête  à  Tabri  du  couteau  inventé  par  le  bon 
docteur  Guiilotin,  son  palais  épiscopal,  où  nous  sommes 
actodlement  réunis,  fut  mis  à  la  disposition  du  distrid 
cofflme  bien  national,  le  généreux  sacrifice  des  députés  du 
dergé  n*ayant  sans  doute  pas  paru  assez  complet  à  leurs 
uoiables  collègues.  C'était  un  M  amas  de  livres,  mais 
foi  ne  fut  guère  remué  jusqu'en  1808.  A  cette  époque, 
riDcien  évéché  était  possédé  par  M.  Fauvel,  que  tous  ces 
liîres  gênaient  beaucoup.  M.  de  Rosnay,  ou  du  moins 
quelqu'un  de  ses  héritiers,  avait  réclamé  la  bibliothèque 
ooofisquée.  Le  directeur  des  domaines,  qui  payait  alors  au 
lieur  Fauvel  la  location  du  local  occupé  par  les  livres,  et 
qui  ne  voyait  pas  sans  doute  quel  profit  il  tirerait  de  tout 
cela,  consentit  à  la  restitution,  moyennant  paiement  de 
tous  les  frais  de  loyer  passés.  Or  Théritage  s'était  singuliè- 
lement  amaigri  dans  cette  triste  période,  et  celui  qui  avait 
réclamé  se  garda  bien  d'accepter  la  condition  posée.  Le 
3 décembre  1808,  le  sous-préfet  de  Senlis,  proposait  à  la 
municipalité  de  vendre  la  bibliothèque  de  Rosnay,  puisque 
kl  héritiers  refusaient  de  la  reprendre  aux  conditions  qu'on 
leur  offirait,  ou  tout  au  moins  de  la  transporter  dans  un 
autre  local  rendu  également  libre  par  la  confiscation, 
faocicn  hôpital  de  la  Charité.  Il  y  avait  là,  disait  M.  le 
baron  de  Saint-Henry,  sous-préfet,  de  vastes  chambres  où 
on  pouvait  ranger  les  livres  et  les  préserver  des  ravages 
du  temps  et  de  la  rapacité  des  passants.  C'était  d'ailleurs 
Tordre  du  préfet,  M.  Belderhuscli,  que  le  directeur  des 
domaines  avait  sommé  de  prendre  un  parti  au  plus  tôt 
pour  éviter  une  dépense  inutile.  I^  conseil  inuniciiml 
était  en  outre  invité  à  voter  une  somme  de  300  francs 
pour  frais  de  translation,  et  une  somme  de  riOO  francs 


388      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIQUC  DE  FRANGE. 

qui  pourrait  être  allouée  en  partie  à  quelque  homiE^ 
intelligeot  et  instruit  réduit  par  les  événements  à  E  ^ 
pauvreté,  et  qui  serait  heureux  de  trouver  dans  les  foncr- 
tions  de  bibliothécaire  un  honnête  moyen  de  gagner  s^ 
vie.  La  ville  aurait  ainsi  une  bibliothèque  ouverte  ail 
public,  qui  pourrait  en  profiter  pour  s'instruire  et  s'amu^ 
ser. 

Cependant  les  négociations  se  prolongent,  le  directeur 
des  domaines  réclame  la  vente,  ne  voulant  payer  le  loyer 
passé  ni  futur,  et  le  propriétaire  réclame  le  prix  de  la 
location. 

Enfin,  le  22  décembre,  le  préfet  autorise  la  ville  : 

i""  à  transporter  les  livres  à  la  Charité  ; 

2*  à  faire  les  frais  de  ce  transport  ; 

3"*  à  prendre  sur  ses  revenus  200  francs  pour  le  loyer 
de  la  bibliothèque. 

M.  Boitel,  adjoint,  que  nous  retrouverons  plus  tard 
sous-préfet,  oBte  son  cheval  et  sa  voiture  pour  le  trans- 
port. 

Le  15  mai  1808,  on  commença  à  emballer  les  livres, 
et,  le  23  mai,  M.  Boitel  se  présente  pour  commencer  à  le 
emporter.  Mais  il  trouve  à  la  porte  le  propriétaire  qui  lui 
déclare  s'opposer  à  la  sortie  des  livres  avant  qu'on  ne 
Tait  payé.  Le  sieur  Boitel,  adjoint  et  commissaire  délégué 
du  conseil,  lui  signifie  l'arrêté  du  préfet,  et  lui  explique 
les  moyens  indiqués  pour  couvrir  la  dépense.  Il  faut 
seulement  le  temps  de  remplir  les  formalités  nécessaires. 
Le  propriétaire  no  veut  pas  de  formalités,  et  comme 
Maistre  Piètre  Pathelin,  il  répète  :  t  Ca,  argent.  » 
L'adjoint,  embarrassé,  va  demander  des  ordres  au  sous- 
préfct  qui  lui  donne  l'autorisation  de  prendre  avec  lui  un 
maréchal  des  logis  et  deux  gendarmes  pour  que  force 
reste  ù  la  loi.  Cette  nouvelle  visite  n'effraie  nullement  le 


XUY'  SESSION,   A  SENLIS.  38<J 

piopriétaîre.  «  Je  n'ai  pas  peur  des  geDdarmes,  dit-il, 
et  je  vais  précisément  leur  demander  de  protéger  le  bon 
droit  qui  est  de  mon  côté,  et  de  me  prêter  main-forte 
pour  conserver  la  garantie  de  ma  location.  » 

Menace  d'envoyer  chercher  un  serrurier,  mais  le  pro- 
priétaire persiste.  Le  serrurier  arrive,  mais  par  surcroit 
de  précaution,  le  sieur  Boitel  est  allé  chercher  à  la 
sous-préfecture  l'arrêté  du  préfet  ;  et  au  vu  de  cette  pièce 
officielle,  les  portes  s'ouvrent,  et  les  livres  quittent  enfin 
ce  logement  pour  s'installer  à  la  Charité.  Ce  n'était  pour- 
tant qu'un  amas  confus  de  livres  de  tout  format,  de  toute 
langue,  représentant  assez  le  rudis  indigestaque  moles,  du 
poète.  Il  y  manquait  l'ordre,  qui  est  la  vie  d'une  biblio- 
thèque. 

Le  conseil  municipal,  reconnaissant  un  peu  la  valeur 
de  ce  dépôt  qui  semblait  devenir  sa  propriété,  se  décida  à 
appeler  un  libraire  à  qui  serait  confiée  la  mission  de 
mettre  en  ordre  tous  ces  livres. 

On  s'adresse  au  sieur  Denné,  libraire  à  Paris.  H  envoie 
un  ancien  libraire,nomméGaudefroy,et  un  jeune  homme 
du  nom  de  Leroux  qui  tiest  pas  encore  établi.  Quelque 
temps  après  Denné  écrit  au  maire  de  Senlis  une  lettre 
qui  nous  a  fait  ouvrir  de  grands  yeux.  En  voici  le  résumé: 
Il  n'a  pu  vendre  les  quatre  livres  d'office  ni  les  tablettes 
de  bois  !  vous  entendez.  Messieurs,  les  tablettes  de  bois  ! 
Il  ne  s'agit  pas  évidemment  de  vulgaires  planches  de 
bibliothèque,  il  eût  plutôt  fallu  en  acheter  qu'en  vendre, 
et  ces  tablettes  de  bois  sont  pour  moi  ces  curieuses  et 
rares  tablettes  de  bois  enduit  de  cire  que  vous  avez  été 
admirer  à  l'hôtel  de  ville,  qui  sont  maintenant  sous  clef, 
et  qu'on  ne  peut  voir  qu'en  montrant  patte  blanche. 
Quant  aux  livres  d'office,  ce  sont  ces  précieux  volumes 
manuscrits,  enrichis  de  miniatures,  que   le  possesseur 


390  CONGRÈS  ARGHÉOLOGIOITE  DE  FRANGE. 

actuel  nous  offrait  récemment  de  mettre  à  notre  dis^^^ 
8ilion,  moyennant  la  modique  somme  de  4,000  francs,       ^ 
je  ne  me    trompe.   Ce  brave   M.  Denné  n'avait  pu  1  ^^^ 
vendre  :  les  riches,  dit-il,  ne  sont  pas  à  Paris,  les  chcp=^-    " 
de  l'armée  sont  à  la  guerre,  et  la  bibliothèque  nationalZ^^ 
n'a  pas  d'argent.  Hélas  !  il  y  a  peu  d'années  le  conseil  ^^^^ 
Fabrique  a  su  trouver  des  acheteurs. 

Le  8  novembre  1809,  Denné  demande  un  envoi  d^V^ 
livres.  Il  peut  actuellement  les  installer,  et  plus  tard  il  ei:  -^ 
serait  peut-être  embarrassé.  Il  réclame  le  lendemain  ua^K^^ 
ou  deux  voitures  de  livres  de  rebut,  mis  au  papier;  il  1 
a  promis,  et  ne  peut  tenir  sa  promesse,  ce  qui  le  met  d 
mauvaise  humeur.  Il  consent  à  les  acheter  généreusemen 
24  francs  le  quintal,  pour  les  in-folio,  16  firancs  pour  I 
in-4*,  12  francs  pour  les  in-8*,  et  10  francs  pour  les^^^ 
in-12.  Or,  parmi  les  livres  de  rebut,  en  1835,  M.  Ledri^  ^^"^ 
ramassait  dans  la  salle  basse,  sur  le  pavé,  un  certain  ^^ 
nombre  d'ouvrages  de  grande  valeur,  pour  lesquels  \S^  " 
réclamait  une  place  dans  l'armoire,  à  la  bibliothèque^^  ^^ 
afin  do  les  mettre  à  l'abri  des  bibliophiles  indiscrets  ^  * 
Quant  aux  livros  classés,  il  les  prendra  au  prix  d'esti-^  *  ^' 
ination  de  CiauJcfrvw.  A  cette  lettre  pressante  est  joint^-^  ^ 
la  (Htito  note  : 

A  iiaudeti\>y,  il  e:>t  dCi  18  francs  par  jour;  soit  au--^  ^" 
total  :  1,110  francs  ; 

A  l.o^nl\,  il  est  dû  li  t'rano?  par  jour;  soit  au  totale         * 
l,UU  fram-s. 

IVur  ivApior  de  rebut  nou  livrée  il  réclame  une  petit^^- 
iiuleiuuite  Je  ^U)  traucs;  s<ût  vingt  quintaux  d'in-8*«-  " 
ivur  se;^  voyais  l\>i  francs,  pour  le  transport  des  quat 
lure^dV^lîse  li  îViiîc^,  l^**^ain>  paie  à  Denné 907  francs 
\Uudefrv»),  outn?  uu  Kvmpte,  reçoit  pour  i06  bmncs  di 


XUV  ÏBSSION,   A  SBKLIS,  391 

U  •  cIahA  deux  biblîothèquea,  l'une  k  la  Charité, 
l'utn  dans  le  pavillon  du  Chapitre,  derrière  k  catbé- 
iaU. 

Lm  demandes  exagéra  des  libraîreE  furent  uu  peu 
réduites. 

Il  y  aT&il  à  la  Charité,  eu  1810,  9,^37  volumes,  dont 
TMin-f,  1,139  ia-4',  3,159  in-8*,  5,309  in-12. 

Outre  ceux  qu'emportait  Gaudefroy,  ou  en  avait  vendu 
■  KM.  les  «bbés  Juéry  et  Brisard  pour  366  francs,  et  à  un 
likaire  pour  710  francs.  Avant  le  transport  à  la  Charité 
00  estimait  le  tout  à  euviion  13,000  volumes,  il  y  avait 
lion  comme  aujourd'hui  des  ^os  qui  aimaient  à  lire, 
oaqui  aimaient  les  images, et  d'autres  qui  éprouvaicEit  le 
knoin  de  fournir  du  papier  aux  épiciers,  et  combien  de 
conets  ne  peut-on  pas  tirer  d'un  bel  in-folio?  Un  certain 
nombre  de  volumes  s'en  étaient  allés  ainsi  avec  les  pas- 
aati,et  H.  Ledruenrachetaplusd'ua  chez  les  revendeurs 
de&«)lisel  d'ailleurs. 

Cependant,  en  1819,  le  ministre  écrit  au  préfet  pour 
'tutnder  un  catalogue  de  la  bibliothèque  de  la  ville  en 
liiim  temps  que  de  celle  de  Crépy.  U  sait  qu'il  y  a  eu 
des  dilapidations,  il  rappelle  donc  que  tes  bibliothèques 
UioDt  pas  aux  villes,  mais  à  la  disposition  duministt^re; 
■I  nut  un  catalogue  raisonné  et  dans  le  plus  brcT  délai  ; 
(ion  ne  lui  obéit  pas,  il  fera  apposer  les  scellés,  et  au 
^in  transporter  te  tout  à  Reauvais.-  Le  bibliothécaire 
ftiit  alors  un  ancien  hospitalier,  Frère  Reniy,  qui  était 
vieux  et  intirme,  et  à  qui  on  allouait  le  traitement  de 
bibliothécaire  pour  l'aider  à  vivre,  mais  qui  n'était  nul- 
loomt  en  état  de  dresser  un  catalogue.  Le  ministre 
«pendant  ne  recevant  pas  de  réponse  envoie  une  nouvelle 
sommation.  Cette  (bis,  M.  le  maire  répond  en  proposant 
de  mettre  en  vente  la  bibliothèque.  Le  ministre  charge 


H 


392      CONOhÂS  ARGHÉOUMJlOnS  DE  FAAKGI. 

le  préfet  de  lui  adresser  un  blâme  énergique  auquel  J^ 
m'associe  de  tout  cœur,  et  le  menace  de  nouveau  de  bi^"^ 
transporter  les  livres  à  Beau  vais  si  on  ne  lui  envoie 
de  catalogue.  M.  le  maire  répond  alors  au  conseiller  de 
fecture,  M.  dTlbée,  que  ces  réclamations  sont  superflues   S 
il  a  causé  d'ailleurs  avec  le  préfet  et  lui  a  exposé  que  1^ 
bibliothécaire  est  vieux,  aveugle,  et  qu'il  cherche  quel^ — 
qu'un  pour  le  remplacer.  Or,  en  1820,  un  jeune  prêtre^ 
M.  l'abbé  Decaye,  venait  d'être  nommé  par  Mgr  l'Évèqui 
d'Amiens  curé  de  Saint-Léonard.  Il  était  venu  fiiire  uni 
visite  à  sa  nouvelle  paroisse,  mais  ne  la  trouvant  pas  sans 
doute  à  son  goût,  il  était  venu  fixer  sa  résidence  à  Senlis 
se  contentant    de    faire   quelques   apparitions  à  Saint- 
Léonard,  et  bientôt,  il  obtenait  le  titre  de  vicaire  di 
Notre-Dame.  M.  le  maire  lui  offrit  les  fonctions  de  bîblii 
thécaire,  qu'il  accepta  avec  empressement,  et  bientôt  oi 
put  envoyer  un  commencement  de  catalogue  an  ministre- 
Peu  de  temps  après,  en  I8i3,  la  bibliothèque  de  1^^  ^ 
Charité  fut  transportée  à  l'hôtel  de  ville,  oii  elle  était  untfr:^^^^ 
peu  mieux  garantie  contre  le  pillage,  et  mise  en  ordre  par^-^ 
M.  Ledru  qui  ivntinua  avec  un  lèle  ardent  le  catalogue^^  ^^ 
et  le  classement  des  ouvrages,  obtint  du  conseil  la  vente^^  ^^ 
do  volunus  doiun'illôs  qui.  d'ailleurs,  appartenaient  à 
anivn!^^  dont  on  (x^ssedait  des  exemplaires  complets,  afin 
dVn  acheter  do  plu>  utiles. 

iVpunidaut  M.  J.o  Kc^snay  nls  u'avjit  pas  absolnment. 
ivn\MKV  à  rentrvr  en  'jwssession  .!e  I.i  bibliothèque  pater- 
nel le,  e;  ::  r\vI.miA  au  iri.rv  .:e  >enlis  la  restitution  des 
hvivs  vv:l^.$^ut^  ^v;iiAu:  >.  r.  cuî:j:n:ion.  On  lui  répondit 
jiK^rs  v;;:e  *a  ".o:  a\a::  b^*::  .:;\,ie  li  rv^utuac^n  des  biens- 
i  :u :u^ ',:  N-^^s^  .î  a :: s  ,vr: a. " ^^^  ,v  ::  i . *^ ,^ r.s.  Q  Aial  aux  meubles. 
el*^  uV::  ivi*U::  ivji<.  OVu.  :  ^::  A*;:br»  Ifâ5.  A  uni 
iK*v^v"e  v:e:-.u:!.vj'  oc  '.■,:.  rsrivcl.:  rar  un*  lettre  motivée^^ 


XUT*  SESSION,   A  SENUS.  393 

ÛDSÎ  :  A  la  rentrée  des  émigrés  on  avait  offert  aux  héri- 
tes de  Rosnay  de  leur  rendre  les  livres  venant  de  leur 
ftre,  ils  avaient  refusé  do  les  recevoir,  parce  qu'aucun 
l'euz  ne  voulait  se  déclarer  héritier  de  peur  des  créan- 
ciers; la  ville  maintenant  était  en  possession  depuis  plus 
it  trente  ans,  et  ne  consentait  plus  à  rendre.  D'ailleurs, 
fhéritier  4^mandant  avant  tout  un  catalogue,  c'était  sans 
Amte  pour  vendre  les  livres;  il  s'agissait  donc  simplement 
firgent,  et  en  ce  cas,  la  ville  si  elle  était  dépossédée, 
ImaDdait  à  avoir  la  préférence  sur  tout  autre  acquéreur. 
U  question  en  même  temps  était  soumise  au  ministre. 
Eo  dkiy  le  gouvernement  nomma  une  commission  pour 
étudier  Taffoire,  et,  en  4827,  la  demande  du  sieur  de 
Rosnay  fut  déclarée  inadmissible. 

H  me  resterait  mainteaant.  Messieurs,  à  vous    faire 
ttoDtitre  un  peu  ces  deux   belles  bibliothèques  où  se 
troDîent  des  ouvrages  de  grande  valeur,  et  sur  chaque 
knnche  des  connaissances  humaines.  C'est  ainsi  qu'à  la 
Kbiiothèquo  du    Chapitre    on    trouve,   pour  l'Écriture 
Unie,   avec  une  magnifique  bible  polyglotte  eu   dix 
^umes  grand  in-r*,  de  nombreux  commentaires  en  latin 
^  en  français  ;  pour  la  théologie,  les  œuvres  de  presque 
loui  les  grands  théologiens,    comme  Albert  le  Grand, 
lint  Thomas,  Duns  Scot,  Suarez  et  bien  d'autres,  une 
collection  presque  complète  des  Pères  <recs  et  latins;  pour 
l'histoire  avec  Baronius,  Salica»  Noël  Alexandre,  plusieurs 
grandes  histoires,  et  de  nombreuses  histoires  particu- 
lières, les  collections  de  documents  nouveaux    publiés 
pirles  PP.  Sirmond,  Martène,  Durand,  Labbe,  etc.,  trois 
eollections  des  conciles  généraux,  de  nombreux  ouvrages 
de  droit  civil  et  ecclésiastique,  une  magnifique  collection 
de  classiques  latins  et  grecs  venant  de  l'abbaye  Saint- 
Viaoent,  etc. 


384  CONGRÈS  ABCBÉOLMIOUE  DE  nARCB. 

Je  pourrais  vous  faire  aussi  oe  qu'on  pourrait  ap 
l'histoire  anecdotique  de  certains  ouvrages,  vous  dU 
reliures  et  les  fers  remarquables,  vous  citer  des  remaj 
piquantes  comme  celle-ci,  par  exemple,  que  je  cueilli 
une  histoire  des  papes,  depuis  saint  Pierre  joi 
Benoit  XIII,  sans  nom  d'auteur  :  c  M.  Bruis  est  ai 
de  cet  impertinent  ouvrage.  Il  a  beau  dire  qu'il 
catholique-romain,  il  est  plutôt  calviniste,  et  qoi 
chose  de  plus.  C'est  un  libelle  scandaleux,  une  f 
violente  pour  saper  les  fondements  de  la  religion  i 
détruire  les  dogmes,  c'est  une  compilation  des 
méchants  livres  ;  c'est,  en  un  mot,  un  tissu  de  (auM 
de  mauvaises  plaisanteries  et  de  saletés  grossières, 
signé  Froy.  o  La  signature  depuis  avait  été  prui 
ment  cachée  sous  un  pain  à  cacheter  et  un  morceai 
papier. 

Je  pourrais,  si  je  n'étais  pas  prêtre,  profiter  de 
occasion  pour  montrer  de  quelle  manière  tous  œs 
vents  étaient  des  nids  de  paresse  et  des  repaires  d*i 
rance  et  j'aurais  beau  jeu.  Mais  il  n'y  a  point,  parmi 
qui  m'ccoutent,  de  ces  détracteurs  acharnés  du  clergi 
me  débattrais  donc  dans  le  vide,  et  j'aurais  l'air  de  ph 
ma  propre  cause. 

Je  n'abuse  donc  pas  davantage  de  votre  patiente  al 
tion  et  je  vous  renvoie  pour  vous  édifier  sur  la  beau 
la  valeur  de  quelques-uns  de  nos  ouvragres,  aux  vitJ 
que  voici  et  qui  en  contiennent  à  mon  gré  de  trop  i 
échantillons. 


M.  de  Marsy  communique,  à  propos  de  la  3t*  que: 
(carreaux  émaillés),  huit  planches  tirées  de  l'album  dei 
par  M.  Emmanuel  Woillez  et  appartenant  aujourd'h 
la  Société  historique  de  Compiègne.  Ces  dessins  re 


XUY*  SEâSIOK,   A  SENUS.  395 

duisent  des  carrelages  provenant  de  l'abbaye  de  Breteuil, 
et  du  prieuré  Je  Saint-Nicolas  de  Merles  près  Beau  vais.  Il 
signale,  en  outre,  un  carrelage  émaillé  de  l'abbaye  d'Ours- 
camps,  reproduit  dans  l'histoire  de  M.  Peigné-Delacour. 
M.  l'abbé  Mûller  annonce  qu'il  a  recueilli  les  dessins  de 
tous  les  carreaux  émaillés  qui  existaient  dans  la  cathédrale 
deNoyon  et  qu'il  les  meta  la  disposition  du  Congrès.  Le 
musée  du  comité  archéologique  de  Senlis  renferme  égale- 
ment un  asseï  grand  nombre  de  carreaux  provenant  des 
anciens  édifices  de  Senlis  et  des  environs,  et  M.  l'abbé 
Vattier  ofEre  de  reproduire  ceux  qui  présenteraient  des 
trpes  nouineaux. 

H.  de  Caix  de  Saint- Aymour  prend  la  parole  sur  la 
17*  question  et  entretient  le  Congrès  du  temple  romain 
lécoovertdans  la  forêt  d'Halatte,  et  des  nombreux  ex-voto 
m  pierre  qui  y  ont  été  recueillis  et  qui  sont  aujourd'hui 
déposés  au  musée  de  Senlis. 

En  attendant  la  grande  publication  que  M.  de  Caix  de 
Siint-Aymour  a  l'intention  de  faire  sur  ce  temple  et  qui 
iBra  accompagnée  de  dessins  de  M.  Vinet,  nous  renver- 
rons à  la  note  qu'il  a  lue  à  la  réunion  des  Sociétés  savantes 
à  la  Sorbonne  en  i874,  et  qui  a  été  publiée  à  cette 
^ue  (1). 
H.  l'abbé  Caudel  a  la  parole  sur  la  ii*  question. 

Paire  connaître  le  tracé  des  voies  romaines; 
leur  ancienneté  et  leur  importance. 

(Il  Noie  sur  un  temple  romain  découvert  dans  la  forêt 
d'Halatte  (département  de  TOise)...  Par  Amédée  de  Caix  de 
Saint-Aymour.  Paris,  lib.  Reinnwald,  1874,  in-tft,  35  pages.— 
Plasieurs  dessins  des  ex-roto  ont  été  publiés  dans  le  Magasin 
Pittoresque  de  1 875. 


396  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 


Études  sur  les  principales  Toies  romaines 
et  gallo-romaines  partant  de  Senlis. 


I. 


GRANDE  VOIE  MILITAIRE  DE  80I880H8  A  BBAUTAI8 

.    PAR  SENLIS. 

Que  Senlis  ait  été  SOUS  la  domination  romaine,  un  des 
centreâ  importants  du  nord  de  la  Gaule,  ce  fait  n'est  plus 
contestable. 

Depuis  longtemps,  les  recherches  et  les  préoccupations 
du  Comité  de  Senlis  tendent  à  l'établir,  et  la  découverte 
(le  nos  arènes  lui  donne  un  éclatant  témoignage. 

Je  viens  aujourd'hui  vous  parler  des  voies  romaines  qui 
aboutissaient  à  la  ville  de  Sylvanectes,  ou  qui  en  sillon- 
naient les  abords;  elles  sont  nombreuses,  puisqu'on  peut, 
sans  aucun  doute,  on  compter  jusqu'à  dix  dans  un  péri- 
mètre d'une  lieue;  elles  sont  importantes,  puisqu'elles  se 
rattachent  on  grande  partie  au  grand  réseau  qui  traver- 
sait le  nurd  de  la  (la'ilo  Belgique,  de  l'est  à  l'ouest,  et  qui 
mettait  Home  en  rapport  avec  l'Océan  par  Lyon. 

L'étude  de  nos  belles  voies  en  attestant  la  grandeur 
antique  de  notre  cité,  prouvera  que  nous  n'avons  pas  élevé 
trop  haut  nos  prétentions  patriotiques,  en  revendiquant 
pour  Senlis  la  gloire  d'avoir  été  un  centre  très-florissant 
de  la  Gaule  Romaine  du  nord  pendant  la  période  d'occu- 
pation. 

M.  Peigné-Pelacour,  après  avoiresquissé  à  grands  traits 
le  tracé  des  principales  voies  romaines  et  du  pays  des 


XUT*   SESSION,    A   SENLI8.  397 

Syhanectes,  terminait  par  ces  mots  :  a  La  liste  qu'a  donnée 
M.  Graves,  dans  l'annuaire  du  département,  des  routes 
uideones  tracées  dans  la  partie  de  la  Picardie  qui  consti- 
tuait l'ancien  diocèse  de  Senlis,  pourra  être  modifiée  à  la 
suite  de  recherches  spéciales,  pour  lesquelles  j'ai  la  bonne 
promesse  du  concours  des  amis  des  études  historiques  qui 
composent  le  Comité  de  Senlis  (i).  » 

C'est  cette  pensée  de  notre  vénérable  confrère  qui  m'a 
guidé;  c'est  sous  la  haute  protection  de  son  mérite  que 
j*ai  mis  tout  d'abord  ce  long^  travail,  j'ai  besoin  de  cet  appui. 
Messieurs,  et  de  toute  votre  bienveillance;  ma  tâche  est 
pénible  et  surtout  délicate,  puisque  depuis  longtemps,  sur 
cette  matière,  bien  des  opinions  étaient  fixées  et  parais- 
saient incontestables. 

Je  précise  la  spécialité  de  cette  étude  en  la  renfermant 
dans  un  périmètre  de  20  à  30  kilomètres  autour  du  point 
central  qui  sera  Senlis. 


1*  Voie  romaine  de  Soissqns  à  Beauvais,  passant  par 

Senlis  et  Lithanobriga, 

Elle  est  désignée,  dans  le  pays,  sous  le  nom  de  Chaussée- 

l^runehaut,   et  compose  un  fragment  important  d'une 

des  plus  grandes  voies  militaires  qui  partaient  de  Lyon 

pour  sillonner  la  Gaule  en   tous  sens.  Destinée  à  relier 

Rome  à  l'océan  Atlantique  par  le  nord  de  la  Gaule,  qu'elle 

traverse  de  l'est  à  l'ouest,  elle  allait  de  Lyon  à  Autun, 


La  carte  des  voies  antiques  de  l'Oise,  par  M  Graves,  a  été 
publiée  dans  le  Butielin  monumentai,  t.  VI  ;  elle  pourra  être 
('^QSQliée  et  servira  de  canevas  à  ceux  qui  continueront  celte 
étude. 


398  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRAlfCB. 

d'Autun  à  Auxerre,  d'Auxerre  àTroyes,  de  Troyesà  Chà- 
Ions,  de  ChàloDS  à  Reims,  de  Reims  à  Soissons,  de  Soii- 
sons  à  Seulis,  de  Sentis  à  Beauvais,  de  Be&uvais  à  Amieo» 
et  d'Amiens  à  Boulog^ne-sur-Mer. 

Elle  fut  construite  par  Agrippa,  gendre  d'Auguste;  c'eit 
elle  dont  parle  Strabon  a  ad  Oceanum  et  Bellovaooi  et 
Ambianos  »,  elle  portait  le  nom  de  Via  Cenurea;  c'est ddi 
voie  solennelle  de  première  classe.  Gomma  Strabon  na  dit 
point  par  quel  endroit  elle  entrait  dans  la  Belgique,  Be^ 
gier  a  cru  pouvoir  suppléer  à  son  silence  par  l'itinéraire 
connu  sous  le  nom  d'Antonin,  qui  ne  dill&re  de  celui  que 
nous  venons  dMndiqucr  qu'en  un  point,  mais  sur  lequel 
il  donne  lui-même  l'éclaircissement  le  plus  satisbisant;  il 
arrête  la  voie  militaire  à  Soissons  et  la  (ait  pasaer  par 
Noyon,  pour  aller  tout  droit  à  Amiens.  Cette  voie  existe, 
eu  effet,  et  elle  est  incontestablement  le  plus  court  chemin 
de  Reims  à  l'Océan;  mais  elle  laissait  le  pays  des  Sylva- 
nectes  et  celui  des  Bcllovaques,  très-remuants  et  à  moitié 
pacifiés,  sans  communication  avec  la  métropole.  D'ailleurs 
Noyon  n'avait  pas  d'importance  sérieuse:  le  chemin  direct 
de  Soissons  à  Amiens  n'a  donc  qu'une  raison  d'être,  c'était 
d'abréger  la  route  :  il  ne  faut  donc  le  considérer  que 
comme  un  embranchement  de  la  grande  voie,  comme  en 
en  rencontre  tant  dans  son  parcours.  Du  reste,  Bergier 
lui-même  dit  que  cette  partie  n'avait  été  faite  que  pour 
abréger  (per  compendium). 

Le  fragment  qui  va  nous  (occuper  est  ainsi  jalonné  dans 
l'itinéraire  d'Antonin. 

De  Soissons  à  Senlis  (Auguslomagus),  de  Senlis  à 
Lithanobriga,  de  Lilhanobriga  à  Beauvais  (Casaromagus), 
da  Beauvais  à  Cormcil  (Curmiliacum),*  et  de  Cormcil  à 
Amiens  (Samarobriva). 

Ce  fragment  s'étend  aux  environs  de  Senlis,  depuis 


^* 


XLIT*  SBSSIOK,    A   8BIIL1S.  39U 

■'«■droitoù  la  route  entre  dans  l'ancien  diocèse  jusqu'u 
LJtluaobriga,  point  stationnaire  qui  parait  avoir  sépara  le 
pifS  des  Sylvanecteâ  de  celui  des  Bellovaques. 

On  comprend  de  suite  que,  pour  indiquer  BÙremeat  h 
tneéde  la  voie  de  SoissoDâ  à  Beauvais,  il  importe  de  déter- 
Dioer  l'emplacement  de  Lithanobriga,  puisqu'elle  était 
DiestatioD  intermédiaire  entre  Senlia  et  Beauvais;  trois 
opinions  soot  en  présence  :  Lilliâucbriga,  situé,  selon  l'iti- 
î^*  Déraire  d'Antonîn,  à  dix-huit  lieues  gauloises  de  Beauvais 

et  à  quatre  leulement  de  Sentis,  a  été  indiquée  et  recher- 
cMs  tuccesBiTement  sur  le  parcours  de  l'Oise,  qui  va  de 
Pont-Sainte-Maience  à  Boran  ;  comme  briga  signiTie  un 
pont,  UD  passage  dans  un  lieu  marécageux  et  qu'il  faut, 
dans  tous  les  ctiS,  traverser  l'Oise  pour  aller  de  Senlis  h 
BaauTOS,  c'est  là  le  point  qu'il  Tallait  déterminer.  Carlier 
le  place  à  Poat-Sainte-Haxeuce ,  d'Anville  à  Creil,  dom 
Gieoier  veut  voir  Lithanobriga  dans  le  village  du  Lys,  et 
fait  passer  la  voie  de  Soissoiis  à  Beauvais  par  Boran,  où 
il  existe,  en  effet,  une  voie  romaine  allant  dD>it  sur  Beau- 
vais. 

Nous  n'avons  pas  ici  à  discuter  l'emplacement  de 
Lithanobriga;  sans  prendre  parti  pour  aucune  opinion, 
nous  indiquerons  les  différentes  directions  que  peut 
prendre  la  voie  à  partir  de  Sealis.  Ses  rami&calious 
très-nombreuses  noua  permettent  de  Eatisfaire  aux  trois 
hypothèses,  sans  nous  forcer  d'eu  embrasser  une  seule. 
Nous  devons  dire  cependant  que  l'opinion  la  plus  natu- 
relle, la  plus  conTormc  aux  indications  des  distances  et  ii 
la  direction  de  la  voie  est  celle  qui  place  la  Halion  de 
Lithanobriga  dans  les  environs  de  Itorun  ;  le  tracé  direct 
et  non  interrompu  de  la  voie  de  Soissous  nous  y  conduit, 
en  effet,  et  c'est  précisément  la  siicplicicité  de  cette  direc- 
tion qui  o  déterminé  Dom  Garnier  ù  placer  Lithanobriga 


r 


400       GON0R£S  ÂRGHÉOLOOIQUE  DE  FEANGE. 

au  bout  de  cette  voie.  Cette  opinion  n'est  peut-être  pas 
tant  à  dédaigner;  c'est  aller  chercher  Beauvais  un  peu 
loin,  mais  les  Romains  n'y  regardaient  pas  ;  leurs  voies 
servent  avant  tout  leur  politique,  et  pour  peu  qu'ils  aient 
eu  quelque  intérêt  à  protéger  de  ce  côté  du  pays  des 
Sylvanectes,  où  du  reste  leur  séjour  est  parfaitement  éta- 
bli, on  comprend  qu'ils  n'aient  pas  hésité  à  s'y  créer  un 
passage. 

L'opinion  de  Garlier,  qui  fait  passer  la  voie  à  Poni- 
Sainte-Maxence,  est  peut-être  la  moins  autorisée;  il  est 
vrai  que  deux  voies  romaines  se  dirigent  de  Senlis  vers  ce 
point,  qui  a  été  certainement  occupé  par  les  Romains  ; 
mais  ce  n'est  pas  une  raison  pour  vouloir  que  ce  lieu 
d'occupation  ait  porté  le  nom  de  Lithanobriga,  que  rien 
du  reste  ne  justifie,  et  qu'il  est  impossible  d'admettre  si 
Ton  veut  tenir  compte  des  distances  indiquées. 


i®  Partie  de  la  voie  de  Soiuons  à  Senlis. 

Il  n'existe  aucun  doute  sur  la  direction  de  cette  partie, 
signalée  de  tout  temps  par  les  auteurs,  et  dont  le  tracé  est 
visible  dans  sa  longueur  entière.  Venant  de  Pierrefonds- 
par-Champlieu  et  Héthisy-Saint-Martin,  elle  entre,  à  Néry, 
dans  l'ancien  diocèse  de  Senlis,  sépare  ensuite  le  terri- 
toire dH!  Kully  et  de  Haray,  passe  au-dessus  de  Bray  et  de 
Barhery,  de  Tautre  côté  de  la  vallée  d'Onette;  en  face  de 
BarLtery,  elle  Tait  un  léger  coude,  franchit  le  marais  au 
moulin  du  Thierry,  puis  vient  reprendre  sa  ligne  droite 
|M)ur  la  suivre  jusqu'A  Senlis.  De  là  jusqu'à  Balagny,  la 
voie  vient  d'être  détruite  ;  on  lui  a  substitué  un  chemin 
ordinaire  en  cailloutis  établi  pour  la  communication  des 
communes  de  Chamant  et  Balagny,  avec  la  fabri<iue  de 


XLIT*  SESSION,  A  SENLIS.  40i 

sucre  de  Barbery  ;  elle  n'était  forméti  généralement  dans 
eetie  partie,  que  de  pierrailles  plus  ou  moins  grosses,  et 
dUpoeées  d'une  manière  assez  peu  régulière  ;  on  a  trouvé 
ua  certain  nombre  de  squelettes  dans  le  fond  même  de  la 
chaussée. 

Après  avoir  laissé  Balagny,  la  route  vient  droit  sur 
Senlis.  Eïle  présente,  dans  cette  partie  de  son  parcours, 
une  très-belle  largeur  et  une  élévation  presque  continue 
de  deux  mètres  au-dessus  des  champs  voisins;  à  la  croix 
de  Balagny,  elle  rencontre  un  chemin  gaulois  se  diri- 
geant vers  Barbery,  via  BarharicBy  c'est  le  plus  vieux  du 
pays,  il  côtoie  la  voie  romaine  sur  une  distance  de  deux 
cents  mètres  au  moins. 

J*ai  noté  cette  particularité  à  chaque  fois  que  je  l'ai 
rencontrée;  elle  peut  être  l'objet  de  remarques  intéres- 
santes pour  ceux  de  nous  qui  s'occupent  de  voies  ;  les 
petites  voies,  étroites,  enfoncées  et  solides,  que  l'on 
retrouve  souvent  cAtoyant  les  grandes  voies  romaines, 
sont-elles  toujours  comme  on  l'a  prétendu  de  simples 
foesés?  N'ont-elles  pas  été  bien  souvent  plutôt  des  voies 
conservées  par  les  anciens  habitants,  les  voies  des 
vaincus  ? 

A  son  arrivée  à  la  cité  des  Sylvanectes,  qu'elle  laissait 
à  trois  ou  quatre  cents  mètres  au  sud-est,  la  voie  pré- 
sente dans  sa  construction  le  travail  presque  complet  des 
voies  solennelles.  En  creusant  les  voies  de  manœuvre  de 
la  gare  du  chemin  de  fer,  ou  a  mis  à  découvert  un  trt^ 
beau  dallage  composé  de  pierres  carrées,  bien  taillées  et 
portant  un  mètre  environ  de  côté  ;  ce  dallage, qu'on  peut 
voir  encore,  faisait  le  fond  du  chemin  dans  une  étendue 
de  quatre  mètres  environ  de  large,  nous  ne  l'avions  pas 
retrouvé  dans  le  défoncement  de  la  voie  à  six  kilomètres 
plus  haut. 

XUV*  SBSSION.  96 


402       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

Après  avoir  traversé  le  chemin  de  fer,  qu'elle  coupe 
presque  à  angles  droits,  la  voie  descend  vers  Saint- 
Étienne,  passe  au  gué  du  Moulin,  suit  le  contour  du 
bastion  en  formant  le  chemin  actuel,  pour  arriver  à  la 
Croix-Spèrc(i],  c'est  en  cet  endroit  qu'elle  se  détachait  pour 
former  un  magnifique  fragment  se  dirigeant  vers  la  cité, 
cette  partie  détachée  de  la  voie  se  voit  encore  aujourd'hui; 
c'est  au  moins  notre  opinion.  A  la  Croix-Spère  elle  suivait 
tout  droit  le  long  du  petit  cours  d'eau  qui,  a  quelques 


(1  )  C'est  qu'eD  effet  en  Gaule  comme  od  Ta  soavèot  constaté,  la 
construction  des  voies  romaines  a  été  beaucoup  plus  simple 
qu'on  ne  Ta  généralement  pensé,  celles  du  nord  de  la  France 
présentent  très-rarement  le  slatumen  et  le  rudus,  c'est-à-dire 
la  première  base  de  pierres  volumineuses  posées  à  plat  sur  une 
couche  de  mortier,  el  un  second  ht  en  maçonnerie  de  moellons 
cassés  et  de  chaux,  tantôt  un  cailloulis  de  plus  ou  moins 
d'épaisseur  remplace  les  deux  couches  ;  tantôt  un  amoncelle- 
ment de  terre  battue  tient  lieu  de  statumcn  ;  un  lit  de  calcaire 
grossier  ou  silicieux  remplace  le  rudus,  une  couche  de  craie  où 
de  calcaire  désagrégée  remplace  le  nucleus.  Les  matériaux 
employés  pour  la  construction  des  voies  sont  presque  toujours 
en  rapport  avec  les  ressources  des  pays  qu'elles  parcourent.  On 
peut  dire  néanmoins,  qu'en  général,  et  ceci  est  surtout  vrai  pour 
la  voie  de  Soissons,  une  première  couche  composée  d'énormes 
pierres,  quelquefois  de  pierres  moyennes  plus  ou  moins  bien 
rangées,  fait  le  fond  do  la  voie.  Cette  première  couche  es>i 
recouverte  de  terre  haltue,  sur  laquelle  repose  une  espèce  de 
nucleus  composé,  tantôt  do  cailloux,  de  petites  pierres  agrégées 
entre  elles  par  un  mortier  ;  au-dessus  une  deruière  couche  de 
silex,  de  cailloux  ou  de  pierres  dures,  selon  les  lieux,  formait 
la  suuuua  criista,  cVst-à-dire  la  couche  extérieure  et  dernière, 
bien  souvent  mémo  elle  parait  ^\  confondre  avec  le  nucleus. 

D'autres  voies,  enfin,  ne  présentent  comme  fond  qu'un  fort 


XLiT*  SESSION,   A  SENLIS.  403 

pas  de  là,  va  se  jeter  dans  la  Nonnette,  derrière  Saint- 
Vinoeût  ;  elle  traversait  cette  rivière  au  gué  de  la  Poterne, 
et  de  là  remontait  vers  la  cité  par  la  rue  du  Pcrrier,  le 
jardin  de  la  sous-préfecture,  probablement  la  rue  Sainte- 
Geneviève  et  TApport-au-Pain  où  elle  franchissait  le  mur 
romain. 

Revenons  à  notre  tracé;  que  nous  venons  d'indiquer, 
après  la  bifurcation,  la  voie  Romaine  traversait  le  marais 
sur  an  fort  remblai,  puis  tournait  à  droite  dans  la  direction 
de  la  rue,  dite  aujourd'hui  des  Jardiniers;  arrivée  au 
milieu  à  peu  près  de  cette  rue,  elle  la  quitte  pour  se  diriger 
à  gauche,  en  suivant  les  murs  du  jardin  de  M.  Cruel,  vers 
les  fours  à  chaux. 

Ici,  Messieurs,  se  présentent  deux  hypothèses  desquelles 
dépend  la  solution  du  problème  de  Lithanobriga.  Nous 
sommes  arrivés  derrière  la  nouvelle  caserne,  autrefois 
ferme  de  M.  Leduc,  en  cet  endroit  le  chemin  se  fiburque, 
c'est-à-dire,  qu'un  fragment  s'en  détache  pour  tourner  à 
droite,  le  long  des  murs  de  la  caserne,  traverser  la  route 
Neuve  et  revenir  reprendre  sa  direction  naturelle  en  face 
de  la  caserne  pour  courir,  entre  les  propriétés  de  M»"  Pio- 
query  et  de  H.Vaniékaut,  longeant  le  mur  de  Saint-Lazare, 
jusqu'à  l'Hôtel-Dieu-des-Marais,  et  se  diriger  de  là,  droit 
vers  Chantilly,  par  les  champs  de  Saint-Nicolas,  de  Saint- 
Léonard,  d'Avilly,  comme  nous  allons  l'établir. 

enipîerreraeot,  uae  espèce  de  blocage  posé  sur  une  assise  de 
lerraio  solide  :  de  sorte  «^u'il  est  bien  didlcije  ici  d*assignor  des 
règles  Gxcs  à  ces  coDslruclions  ;  rcxanieu  des  voies  viendrait 
dénienlir,  à  chaque  iD^taul,  des  théories  qui  voudraient  èlre 
trop  absolues  ou  trop  générales,  c'est  en  Itulie,  et  surtout  dans 
les  grandes  voies  qui  partaient  du  mille  d'or  du  forum  romain, 
qu'il  faut  rechercher  l'application  de  la  théorie  de  Vitruve. 


404  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

Dans  l'autre  hypothèse,  la  chaussée  contiaiiaot  sa  ligne, 
viendrait  passer  au  puits  de  Saint*Lazare,  en  face  l'bô- 
pital,  se  confondrait  un  moment  avec  la  grande  route, 
puis  la  quittant  pour  former  le  chemin  de  Reims  vien- 
drait passer  au  coin  de  la  forêt,  et  former  sous  le  nom 
de  Chaussée -Brunehaut,  la  route  du  Mont-de-Pô  et  de 
Morancy,  par  le  Layon-d'Âuteuil,  la  vieille  rouie,  le 
carrefour  du  Petit-Ck)uvent,  etc.,  jusqu'à  l'Oise.  Là  nous 
trouvons  sur  la  rive  gauche,  au  Corceiay,  l'emplacement 
de  Litbanobriga  en  face  de  Morancy,  selon  l'opinion  de 
MM.  Millescamps  et  Hann,  opinion  établie  par  le  rapport 
fait  à  la  Sorbonne  par  M.  de  Caix  de  Saint-Aymour  en 
1873,  rapport  qui  avait  pour  objet  de  terminer  la  ques- 
tion, en  conciliant  l'opinion  de  M.  Caudel  qui  avait  placé 
Lithanobrigd  au  camp  de  Gouvieux,  avec  celle  de  MM.  Mil- 
lescamps et  Hann,  qui,  adoptant  le  tracé  de  M.  Caudel 
jusqu'au  Mont- Pô,  le  dirigeait  de  là  droit  vers  Morancy, 
et  de  Morancy  à  Beau  vais  par  Crouy  et  .Sainte-Geneviève. 
Jusqu'à  cette  époque  cette  seconde  hypothèse  triomphait 
malgré  les  observations  de  la  Commission  de  Topogra* 
phie  qui  la  contestaient  par  la  raison  des  distances.  Une 
autre  opinion  a  paru  depuis  vouloir  s'établir,  ou  plutôt 
le  comité  semble  vouloir  revenir  à  la  première  hypothèse 
de  M.  Caudel  qui  plaçait  Litbanobriga  au  camp  de 
Gouvieux. 

La  découverte  récente  d'un  très-beau  fragment  de  voie 
romaine,  signalé  dans  le  parc  de  Sylvie,  par  M.  Gouver- 
neur, et  faisant  suite  au  chemin  de  Gouvieux  étudié  par 
M.  Caudel  à  partir  d'Avilly  jusqu'à  la  pelouse  dans  la 
direction  du  camp;  cette  découverte,  dis-je,  peut,  eu  effet, 
faire  entrer  la  question  dans  une  nouvelle  phase.  Cette  petite 
digression  sur  Lithaoobriga  nous  amène  naturellement  à 
indiquer  rapidement  le   tracé  du  chemin  de  Gouvieux, 


ZUV^  SBSSION,  A  SENU3.  M5 

comme  se  rattachant  par  Toute -Voie  à  la  grande  voie 
militaire  et  conduisant  à  l'emplacement  supposé  de  Litha- 
nobriga. 

2*  Pariie  de  la  voie.  Chemin  de  Setilis  à  Gouviêux. 

Que  œ  chemin  soit  ou  ne  soit  pas  la  prolongation  de  la 
Chaussée-Brunehaut,  de  Soissons  à  Beauvais,  voici  son 
ptrcoars,  on  appréciera. 

Il  prend  derrière  Saint-Lazare  à  THôtel-Dieu-des- 
Narais,  au  coin  du  mur  de  la  propriété  de  l'hospice, 
incline  à  droite,  et  va  courir  derrière  Saint-Nicolas, 
Courteuil,  Saint-Léonard,  Âvilly  ;  il  est  dans  ce  parcours, 
conservé  et  forme  une  belle  voie  droite  et  gazonnée  entre 
deux  rangées  d'ormes  ou  de  peupliers  ;  il  côtoie  constam- 
ment le  marais  et  ne  présente  qu'une  seule  interruption  ; 
i  un  kilomètre  environ  de  son  point  de  départ  de  Senlis, 
il  a  été  défoncé  par  des  travaux  de  plantation  et  il  est 
interrompu  sur  ce  point  par  un  petit  bois,  mais  on  le 
retrouve  bientôt  dans  le  Val-Profond,  derrière  Saint- 
Léonard  ;  de  ce  point  jusqu'à  Avilly,  la  voie  ne  présente 
aucun  aspect  remarquable  ;  elle  s'arrête  au  jeu  d'Arc  de 
ce  village,  complètement  défoncée  par  les  travaux  de 
plantation  du  domaine  de  Chantilly.  Elle  a  dû  traverser 
le  parc;  on  vient,  en  effet,  d*y  retrouver  un  très-long 
fragment  de  voie  parfaitement  indiqué  et  conservé,  et  qui 
fait  suite  au  parcours  jusque-là  counu.  iNous  sommes  ici 
dans  la  direction  rectiligne  du  camp,  la  voie  traversait  la 
grande  pelouse  en  inclinant  vers  le  côlé  droit  où  soiU 
maintenant  bâties  les  petites  écuries,  et  les  maisons  qui 
forment  la  grande  rue  ;  elle  traversait  la  route  actuelle  de 
Paris,  les  voies  de  manœuvre  du  chemin  de  fer  à  droite 


406      CONGRÈS  ARCnÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

de  la  gare  ;  puis  franchissant  la  nouvelle  route  de  Gou- 
vieux,  un  peu  au-dessous  du  pont,  elle  courait  vers  le 
village  de  la  Chaussée,  par  un  chemin  maintenant  réduit 
à  l'état  de  sentier,  côtoyait  le  marais  jusqu'au  bout,  et  là 
après  avoir  traversé  la  Nonnette,  montait  vers  le  village, 
qu'elle- suivait  en  contournant  le  camp,  pour  arriver  au 
bord  de  l'Oise,  au  lieu  dit  Toute -Voie,  Ma-via^  où 
l'aspect  qu'elle  présente  sur  le  bord  de  la  rivière  est  vrai- 
ment saisissant.  Elle  traversait  l'Oise  en  face  de  l'Ile,  à 
gué  probablement  pour  aller  ensuite  par  la  grande  rue  de 
Villers-Saint-Leu  prendre  sa  direction  vers  Beauvais,  par 
Ully-Saint-Georges;  ce  tracé  maintenant  à  l'étude  recti- 
fierait notre  premier  travail  sur  ce  sujet,  nous  le  croyons 
d'une  haute  importance  et  appelé  à  jeter  un  grand  jour 
sur  la  question  de  Lithanobriga;  dans  tous  les  cas,  il 
resterait  acquis  que  MM.  Millescamps  et  Hann,  ont  décou- 
vert sur  le  bord  de  l'Oise,  en  face  de  Morancy,  un  empla- 
cement romain  de  premier  intérêt,  bien  qu'on  en  ait 
contesté  l'importance  dans  des  discussions  récentes;  si  cet 
emplacement  n'est  pas  Lithanobriga,  il  était  certainement 
un  port  de  passage  et  de  péage  et  suppose  l'existence 
d'une  voie  qui  n'existe  plus  mais  qui  du  Mont-Pô  ou  des 
environs  devrait  v  conduire. 

H 

CHEMIN    ROMAIN   £T  GALLO-ROMAIN  DE  SENLIS  A  BEAUVAIS 

PAR  CUEIL. 

Chemin  du  Beauvaisis. 

En  sortant  de  Senlis  par  la  Portc-Saiut-Kicul,  et  en 
laissant  à  droite  la  grande  Chaussée-dc-Pont-Point,  pour 


XHY*  SESSION,  A  8ENUS.  407 

pnîodre  à  gauche  le  Cheiiiin- Creux  qui  passe  au  pied  de 
h  Croix  et  descend  vers  la  vallée  de  l'Onette,  on  suit 
iaocien  chemin  de  Senlisà  Creil.  Ce  chemin,  qui  porte 
aujourd'hui  le  nom  de  Chemiu-d'Aumont,  est  l'ancienne 
voie  qui  allait  de  Senlis  à  Beauvais  en  passant  par  le 
vkuM  de  Credulium  (Creil),  son  existence  est  justifiée  par 
un  grand  nombre  de  témoignages. 

Un  titre  de  l'évéché  de  Senlis,  de  Tannée  1236,  nomme 
Vadum  Credulii,  gué  de  Creil,  le  pont  où  cette  voie  fran- 
chissait la  petite  rivière  de  l'Onette.  Une  transaction  du 
mois  d'août  1234,  entre  la  commune  et  le  prieuré  de 
Saint-Nicolas  d'Acy,  à  l'occasion  d'un  vivier,  dit  qu'il 
était  situé  près  de  la  Chaussée-de-Creil,  Calceiam  de 
Crtdulio, 

Une  charte  de  Philippe  Auguste,  concernant  les  pâtures 
fie  Saint-Nicolas-d'Acy,  est  encore  plus  explicite.  Il  y  est 
dit  que  les  bourgeois  de  Senlis  ont  trois  arpents  de  prés 
touchant  à  la  Chaussée  qui  va  vers  Creil  :  Attingenies 
Cûleieœ,\quœ  dirigiiur  versus  Credulium.  Dans  un  autre 
titre  du  prieuré  de  Saint-Nicolas-d'Arcy,  il  est  question 
de  trois  arpents  de  prés  sis  auprès  de  la  Chaussée-de- 
Cnul  :  Justa  caiciam  de  CredvUo,  Le  vieux  chemin  de 
Creil  est  d'ailleurs  indiqué  comme  une  chaussée  par  la 
tradition  locale;  il  passait  au  gué  appelé  aujourd'hui  gué 
du  Moulin-d'Aumont,  et  franchissait  le  marais  sur  une 
jetée  de  cent  à  cent  cinquante  mètres.  Arrivés  au  bas  de 
la  côte  nous  laissons  à  droite  un  chemin  de  Paisson,  qui 
n'est  pas  sans  intérêt,  dit  le  chemin  des  Vaches;  plus  loin, 
toujours  à  droite  nous  laissons  également  le  vieux  chemin 
d'Aumont,  lequel  reçoit  un  peu  plus  haut,  et  sur  sa  droite 
aussi,  un  autre  vieux  chemin  qui  est  le  chemin  du  Tom- 
beraye,  conduisant  à  ce  lieu  dit,  célèbre  dans  la  contrée. 
Revenons  au  chemin  de  Creil  :  après  avoir  franchi  le 


408       CONGRÈS  ARGHÉOLOGIQUE  DE  FRANCS. 

Val-au-Tru,  il  tournait  brusquement  à  droite  pour  pren* 
dre  sa  direction  défînitive  vers  Greil,  sous  le  nom  de 
chemin  des  Carrières.  Â  partir  de  ce  point  jusqu'au 
chemin  dit  des  Poissonniers,  son  parcours  est  facile  à 
suivre;  ce  fragment  représente  la  partie  vraiment  intéres- 
sante de  la  voie  du  côté  de  Senlis.  Large,  verdoyante, 
fortement  empierrée  et  d'un  bel  aspect  romain  qui  frap- 
pait tout  d'abord,  elle  ne  présente  plus  aujourd'hui  qu'un 
chemin  vulgaire,  couvert  du  tuf  des  carrières  voisines 
qu'il  sert  à  exploiter.  Du  chemin  des  Poissonniers  au 
pied  de  la  butte  d'Aumont,  elle  n'est  plus  indiquée  que 
par  un  sentier  solide  et  large  de  deux  mètres,  appelé 
encore  aujourd'hui  du  nom  significatif  d'Ancien-Chemin- 
de-Creil,  il  passait  non  loin  de  l'église  d'Aumont,  c'est  à 
ce  point  qu'il  tournait  brusquement  à  gauche,  sans  doute 
pour  éviter  la  montagne,  et  reprenait  au  pied  de  la  butte, 
sa  direction  vers  Malassise  ;  il  porte  là  le  nom  de  CAemin- 
du-Bac,  il  coupe  d'abord  la  roule  Bourbon,  la  route  des 
Suisses  où  il  disparaît,  puis  la  route  de  l'Arbre-à- 
Fougèrc. 

Nous  sommes  ici  à  un  des  endroits  les  plus  intéres- 
sants de  toute  cette  partie  de  la  forêt.  Je  viens  d'en  faire 
l'exploration  en  compagnie  de  M.  Amédée  Margry,  à 
qui  je  dois  les  renseignements  les  plus  précieux  et  les 
plus  incontestables  pour  la  rectification  du  tracé  qui 
nous  occupe  et  la  découverte  d'autres  chemins  d'un 
très-grand  intérêt  au  point  de  vue  de  la  viabilité  du 
moyen  âge  et  de  l'histoire  locale. 

Avant  d'arriver  à  la  route  des  Suisses,  détournez-vous 
un  peu  sur  la  gauche,  vous  découvrirez  là,  un  lieu  dit 
Homain,  qui  a  subi  une  singulière  destinée,  c'est  l'Ancien- 
Préche;  puis  au  point  de  jonction  du  chemin  de  l'Arbre- 
à-Fougèrc,  et  du  Chemin-du-Bac,  d'autres  ruines  d'un 


ZLIT*  SB88ION,   A   SENLIS.  409 

iolMt  tout  à  Tait  nouveau  et  original.  Après  avoir  tra- 
wsé  la  rouie  de  l'Arbre-à-Fougère,  le  chemin  presque 
fffiMé  86  dirige  droit  vers  le  lieu  dit  :  la  Butte-des-Morts, 
lertre  magnifique  présentant  une  motte  circulaire,  d'un 
déreloppement  de  vingt  mètres  au  moins  de  diamètre, 
sur  une  hauteur  de  trois  ou  quatre  au  centre  ;  nous  pen- 
sons qu*il  serait  très-intéressant  de  faire  une  fouille  en 
cet  endroit  qui  porte  aussi  le  nom  de  la  Téte-dc-Mort,  ce 
doit  être  une  sépulture  selon  toute  apparence.  Du  pied  de 
la  butte,  le  chemin  incline  vers  la  droite:  il  est,  au  sortir 
de  la  forêt  tout  à  fait  détruit;  il  faut  franchir  deux  ou 
trois  cents  mètres  pour  le  retrouver  au  coin  du  nouveau 
verger  que  M.  Frémy  vient  de  planter  à  la  lisière  de  la 
Ibrét,  le  long  du  chemin  de  Verneuil.  Avant  d'arriver  ù 
lialassise,  le  chemin  se  iiburque;  le  fragment  qui  se 
dirige  vers  la  ferme  C3t  le  chemin  du  Beauvaisis  ;  l'autre 
est  celui  du  camp  de  Catenoy,  il  se  dirige  sur  Verneuil 
et  parait  beaucoup  mieux  conservé  que  l'autre. 

Selon  les  indications  savantes  que  nous  avons  reçues  de 
II.  le  docteur  Boursier  de  Creil,  ce  chemin  aurait  eu  pour 
objet  de  mettre  la  capitale  des  Sylvanectes  en  communi- 
cation avec  le  camp  de  Catenoy,  en  passant  par  Verneuil, 
où  il  traversait  l'Oise,  Villers,  Saint-Paul  qu'il  laissait  à 
gauche  pour  s'engager  dans  le  ravin  du  Renard,  fran- 
chir les  hauteurs  qui  dominent  l'Oise  de  ce  côté,  et  de  là 
pointer  droit  sur  le  camp.  M.  Boursier  nous  a  montré 
sur  le  passage  de  cette  voie,  un  peu  en  avant  de  Verneuil, 
sur  le  bord  de  l'Oise,  qu'il  domine  en  escarpement,  de 
ir^beauz  restes  d'un  camp  retranché  gaulois,  occupé 
par  les  Romains,  comme  l'attestent  les  débris  qui  couvrent 
le  sol. 

Revenons  au  chemin  du  Beauvaisis.  De  Malassise, 
la  voie  se  dirige  eu  droite  ligne  vers  Creil,  où  elle  entre 


410  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DB  FRANCE. 

par  lo  chemin  dit  le  Haut-des-TufIcs  :  elle  est  presque 
effacée  dans  la  plaine;  chaque  année,  entamée,  et  creusée 
par  le  sillon  de  la  charrue,  elle  reparaît  obstinément,  et 
l'œil  la  suit  encore  facilement  à  la  trace  des  vieilles  herbes 
qui  repoussent  sans  cesse  et  que  les  soins  de  la  culture 
no   peut   extirper  complètement.   Arrivé  au   haut  des 
Tuffes,  elle  descend  vers  l'Oise  formant  un  encaissement 
profond  et  malsain,  entre  <leux  escarpements  de  rochers 
sous  lesquels  habite  une  grande  partie  de  la  population 
pauvre  du  pays. 

Arrivée  au  has  de  la  côte,  elle  traverse  toute  la  partie 
dnnto  de  la  ville  de  Greil,  et  vient  aboutir  à  la  rivière  on 
passant  entre  les  ateliers  de  M.  Vachette  qu'elle  côtoie  à 
droite,  et  Thabitation  qu'elle  laisse  à  gauche.  C'est  là 
qu'elle  franchissait  l'Oise  pour  passer  du  pays  des  Sylva- 
ncctes  dans  celui  des  Hellovaques;  elle  se  continue  au  delà 
du  pont  sous  le  nom  de  chemin  du  Beauvaisis.  Ici  se  pré- 
sente encore  une  rectification  de  notre  premier  tracé;  le 
savant  M.  Ilouhigant,  par  un  sentiment  qui  s'explique 
trop  bien,  avait  absolument  voulu  faire  passer  le  chemin 
dans  son  parc;  nous  nous  sommes  égarés  sur  ses  pas; 
c'est  de  Tautro  coté  do  la  route,  qu'il  fallait  suivre  la  voie 
et  rogard*'r  comme  point  de  repère,  ce  qui,  du  reste,  est 
presque  toujours  la  meilleure  méthode;  le  l)eau  clocher  et 
la  charmante  éj^^lise  de  Nogent- les- Vierges.  Le  chemin  du 
lieauvaisis  y  conduit  directement;  après  avoir  franchi  la 
ligne  du  chemin  de  fer  de  Creil  à  Saint-Quentin,  en 
approchant  de  Nogent,  il  s'appelle  lo  Chemin-des- Vierges; 
il  aborde  le  village  un  peu  en  avant  de  l'église,  au  carre- 
four où  S(ï  trouve  la  fontaine  et  le  calvaire;  il  tourne  û 
gaurhe,  forme  sur  quelques  cents  mètres  la  grande  rue 
du  village,  puis,  inclinant  h  droite,  sous  le  nom  de 
rue  de  Uoyaumunt,  se  dirige  vers  le  hameau  de  Saussy« 


XLIY*  SESSION,   A  SKNLIS.  411 

eoanmt  duquel  on  en  retrouve  un  magnifique  tronçon. 

Mouf  avons  constaté  dans  un  jardin  de  la  rue  de  Royau- 

moDtde  nombreux  restes  d'occupation  romaine.  A  partir 
do  hameau  de  Sauasy,  la  voie  fait  une  courbe  rentrante 
vers  la  gauche,  traverse  le  chemin  de  fer  et  la  route  de 
Creil  à  Clermont,  et  va  franchir  la  montagne  de  Laigne- 
fille,  après  s'être  dégagée  de  la  cavée  où  elle  s'enfonce  et 
disparaît  avant  d'arriver  sur  la  hauteur.  Là  elle  devient 
an  chemin  vert  qui,  laissant  à  sa  droite  Téglise  de  Laigne- 
fille,  court  vers  celle  de  Rousseloy.  A  partir  de  ce  point, 
elle  prend  direction  vers  Beauvais,  et  nous  n'avons  plus 
qu'à  indiquer  ses  points  de  station;  de  Rousseloy  à  Bury, 
elle  passe  au-dessus  du  village  sans  y  pénétrer;  nous 
avons  trouvé  là  de  nombreux  débris  de  construction 
romaine:  de  Bury  à  Angy  qu'elle  traverse  dans  toute 
sa  longueur,  et  d'Angy  à  Saint-Félix.  Nous  franchissons 
là  la  fameuse  plaine  des  Mille-Pas,  qui  aurait  été  témoin 
de  la  défaite  suprême  de  Corréus.  Nous  arrivons  à  Hermès, 
puis  à  Bailleiil-sur-Therain;  nous  passons  sous  le  Mont- 
César,  magnifique  camp  d'occupation,  d'où  le  vainqueur 
surveillait  sa  conquête;  enfin  laissant  à  droite  le  Mont- 
Bourguillemont,  qui  parait  aussi  avoir  été  occupé  au 
moins  par  un  poste  avancé  romain,  nous  abordons 
Tberdonne  et  la  capitale  des  Bellovaques.  Nous  pensons 
qu'A  partir  de  Tberdonne,  la  route  moderne  s'est  assise 
sur  l'ancienne  voie;  elle  n'a  pas  dû  passer  ni  plus  haut, 
ni  plus  bas. 

Tel  est,  autant  au  moins  que  nous  avons  pu  le  cons- 
tater, par  une  observation  faite  à  pied,  le  tracé  vraiment 
intéressant  du  chemin  romain  qui  reliait  les  capitales  des 
deux  peuples  qui  sont  nos  premiers  ancêtres  historiques. 

J'ai  parcouru  cette  dernière  partie  avec  M.  le  comte 
de  Lucay,  qui,  je  dois  le  dire,  m'en  a  fait  gracieusement 


412      GONaRÉS  ARGBÉOLOOIQUE  DB  FRANGE. 

et  savamment  les  honneurs  ;  elle  demanderait  une  étude 
de  détails  qui  serait  du  plus  émouvant  intérêt,  elle  vien- 
dra en  son  jour;  nous  n'avons  voulu  que  jalonner  le 
chemin  sur  Beauvais  sans  toucher  au  domaine  de  nos 
confrères  du  chef-lieu,  qui  finiront  bien,  nous  l'espérons, 
par  prendre  la  main  que  nous  leur  tendons  par-dessus  le 
Mont-César,  ,vieux  témoin  de  leurs  malheurs,  mais  aussi 
de  leur  gloire. 


Voie  de  Paris  dam  te  Nord  de  ta  Gaule 
passant  par  Sentis. 

Je  vais  vous  parler  d'un  chemin  qui  est  certainement 
chez  nous  le  plus  vieux  représentant  de  la  Gaule  libns  et 
de  la  Gaule  romaine  ;  le  seul,  sans  doute,  qui,  dans  les 
temps  les  plus  reculés  de  notre  histoire,  mettait  en  com- 
munication le  centre  de  la  Gaule  avec  toute  la  partie  du 
nord.  Ce  vieux  chemin  portait  au  moyen  âge  et  dans  les 
temps  modernes  le  nom  de  Chemin-de- Flandre,  au  moins 
sur  une  partie  de  son  parcours;  c'ist-à-dire  de  Seniis  à 
l'Oise  et  au  delà.  Pour  être  plus  dans  le  vrai  et  pour 
donner  à  cette  étude  une  portée  plus  intéressante,  nous 
devrions  appeler  ce  chemin  ;  la  grande  voie  de  Paris  dans 
le  nord  de  la  Gaule, 

11  est  difficile  de  le  classer  :  il  n'est  ni  romain,  ni 
gallo-romain,  ni  gaulois;  il  n*est  pas  non  plus  une 
voierie  du  moyen  âge  ;  il  est  à  la  fois  tout  cela,  et  pré- 
sente tous  les  aspects  selon  les  lieux,  les  modifications 
qu'il  a  dû  subir,  et  l'état  de  conservation  dans  lequel  le 
temps  l'a  laissé.  N'étes-vous  pas  ému,  Messieurs,  d'un 
singulier  respect,  quand  vous  vous  sentez  sur  la  trace  de 
tous  vos  ancêtres;  quand  vous  vous  dites  :  sur  ce  chemin 


XLIY*  SESSION,   A  SENLIS.  413 

apaisé  certainement  tout  ce  que  la  vieille  France  a  eu 
cba  nous  de  grands  hommes;  il  a  porté  toutes  nos  gloires 
et  toutes  nos  grandeurs,  toutes  nos  conquêtes  et  aussi 
toutes  nos  servitudes  et  toutes  nos  misères.  Les  vieux 
Gaulois  ont  creusé  ce  sentier  dans  le  sol  vierge  de  la 
patrie,  et  puis  le  Romain  Ta  agrandi  et  solidifié  pour  y 
bire  passer  son  orgueil  et  sa  tyrannie.  Le  flot  tumultueux 
et  écrasant  des  bart>ares  Ta  creusé  à  nouveau  et  marqué 
d'une  ineffaçable  empreinte.  Puis  est  venue  la  Gaule  chré- 
tienne, alors  les  chemins  de  guerre  sont  devenus  les 
paisibles  et  fleurissants  sentiers  qui  conduisaient  aux 
monastères  et  aux  grandes  abbayes,  ou  qui  reliaient  entre 
elles  les  forteresses  des  grands  seigneurs.  Les  croisades 
ont  passé  par  là;  la  dernière  trace  de  grandeur  et  de 
gloire  qu'ils  conservent,  est  celle  du  pied  des  pèlerins  de 
Terre-Sainte.  Puis,  quand  s'ouvrent  les  grands  réseaux 
de  routes  postales  et  royales,  ces  chemins  rentrent  dans 
leur  solitude  ;  l'herbe  les  envahit,  la  fleur  des  champs  s'y 
épanouit  en  paix,  quand  ils  ne  sont  pas  devenus  des  voies 
banales  de  service  champêtre  ;  mais  dans  cet  abandon 
même,  ils  conservent  quelque  chose  de  particulier,  d'an- 
den,  qu'on  n'a  pas  vu  ailleurs,  et  qui  semble  dire  à 
l'archéologue  :  regarde-moi  bien,  je  suis  un  vieux  témoin 
de  quelque  chose. 

Si  vous  me  le  permettez,  nous  allons  pour  remonter 
tout  à  fait  à  l'origine  de  notre  chemin,  franchir  la  limite 
de  notre  département  et  partir  de  Paris,  sur  notre  chemin 
du  nord.  Nous  passons  à  Saint-Denis,  où  sont  couchés 
dans  leur  éternel  repos  ceux  de  nos  rois  que  la  Révo- 
lution n'a  pas  pu  égorger  à  nouveau  ;  de  Saint-Denis  le 
chemin  nous  porte  à  Gonesse,  à  Goussaiuville,  puis  à 
Louvres,  oii  nous  retrouvons  la  route  uationaie,  qui  date 
d'un  siècle  environ  et  qui  va  nous  servir  jusqu'à  Senlis 


414      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

et  même  au  delà,  à  appuyer  notre  tracé.  Car  je  vous  ferai 
observer  que  nôtre  voie  marche  généralement  en  dehors 
de  la  grande  route  moderne  qu'on  appelle  aussi  la 
route  de  Flandre  ou  à  certains  endroits  la  route  du 
nord. 

Quelquefois,  mais  rarement,  elle  se  confond  avec  elle, 
comme  entre  Pontarmé  et  Sentis  ;  mais  cette  confusion 
des  deux  routes  l'une  dans  l'autre,  n'est  que  le  résultat 
d'un  hasard  qu'on  a  mis  à  profit  pour  épargner  la 
dépense. 

•A  partir  de  Goussain ville,  nous  pouvons  cheminer  sur 
notre  voie,  nous  sommes  presque  chez  nous  :  c'est  ce  que 
nous  avons  fait  en  compagnie  de  MM.  Dupuis  et  Margry, 
nos  honorés  collègues,  qui  nous  ont  beaucoup  aidé  à 
reconnaître  celte  partie  éloignée  de  la  vieille  route.  Arrivé 
au  fond  du  marais  qui  sépai;^  .Goussainville  de  Louvres, 
le  chemin  se  dirige  vers  la  Grange-des-Noues,  qui  conserve 
encore  de  beaux  restes  d'un  ancien  prieuré.  Puis  il  s'efface 
complètement  sur  un  parcours  de  trois  cents  mètres 
environ,  pour  reprendre  au-dessus  d'une  petite  vallée,  où 
il  a  semblé  se  perdre,  et  se  diriger  tout  droit  vers  Louvres, 
en  passant  devant  l'ancien  manoir  en  ruine  des  seigneurs 
d'Orvillc  :  ruines  pleines  de  tristesses  qu'on  ne  peut  s'em- 
pêcher de  saluer  ;  restes  d'un  grand  nom  dont  l'histoire  a 
conservé  à  peine  quelque  trace. 

Nous  arrivons  à  Louvres,  et  après  avoir  salué  en  passant 
son  charmant  clocher  du  xiir  siècle  avec  ses  belles  et 
fortes  assises  du  xu%  nous  remontons  la  côte  pour  prendre 
la  direction  de  Marly-la-Ville.  11  faudrait  nous  arrêter  à 
Louvres  ;  nous  y  retrouverions  les  souvenirs  de  Saint- 
Louis  et  de  la  Heine-Blanche  et  nous  nous  y  égayerions 
avec  les  douces  et  naïves  légendes  du  moyen  âge;  mais 
Louvres  ne  nous  appartient  pas,  il  faut  passer.  Nous  voici 


XLTV*  SESSION,   A   SENLIS.  ^15 

au  haut  de  la  côte  qui  regarde  Marly,sous  nos  pas  s'ouvre 
DO  encaissement  ri^gulier  bordé  de  pommiers,  qui  descend 
jusqu'au  chemin  de  fer  d*oii  on  l'aperçoit  très-bien.  Cet 
encaissement  formait  l'ancien  chemin  qu'on  a  rendu  à  la 
culture,  il  faut  franchir  la  voie  ferrée  pour  retrouver 
notre  chemin,  il  est  là,  de  l'autre  côté,  creusé,  défoncé, 
généralement  impraticable,  mais  sinueux,  bordé  de  vieux 
baissons,  capricieux,  original,  et  s'en  allant  solitaire  et 
abandonné  à  travers  la  plaine  vers  le  clocher  de  Marly, 
tandis  que  la  route  neuve,  propre,  coquette,  fréquentée  et 
macadamisée  va  le  rejoindre  à  l'entrée  du  village. 

Nous  traversons  le  village  de  Marly,  et  après  avoir 
franchi  la  vallée  et  laissé  Fosses  à  gauche,  nous  nous 
dirigeons  vers  le  village  de  la  Chapelle.  Je  viens  de 
nommer  Fosses  :  il  y  passe  une  autre  route  qu'il  ne  faut 
pas  confondre  avec  la  nôtre  et  dont  nous  nous  occuperons 
plus  tard  ;  elle  venait  aussi  de  Paris,  car  il  est  raconté 
dans  les  chansons  de  Gestes  de  Gariu  le  Loherain  qu'un 
chevalier  étant  parti  de  Paris  et  passant  par  Senlis  s'arrêta 
à  Fosses  pour  y  coucher.  Ce  petit  village  pour  le  dire  en 
passant,  ne  manque  pas  d'une  certaine  célébrité  ;  il  doit 
son  nom,  suivant  l'abbé  Lebœuf,  à  la  sépulture  des  guer- 
riers tués  dans  un  combat  mémorable,  en  715,  et  qui  ne 
peut  être  qu'une  bataille  livrée  par  Charles-Martel,  lors 
de  son  avènement  à  la  mairie  du  palais  ;  c'était  un  lieu 
déjà  habité  à  cette  époque,  car  on  dit  dans  la  même 
chanson  de  Gestes  de  Garin  le  Loherain  ;  les  gloutons 
^^arrasinsl  étendaient  do  trois  côtés  leurs  ravages;  après 
la  destruction  de  Reims,  ils  étaient  entrés  dans  Soissons. 
Plus  de  cent  mille  paycns  cuviruuiiaiciit  Troyes  :  cent 
mille  autres  étaient  aux  portes  de  l*aris,  c'est  alors  que 
Fosses  fut  ruiné. 

Après  avoir  franchi  la  {Mitite  vallée  de  l'Izieux,  nous 


416      CONGRÂS  ARGHÉOLOGIQUB  DB  FRANCS. 

traversons  la  route  de  grande  communication  n*  16,  qui 
va  au  chemin  de  fer,  et  nous  remontons  la  côte  dans  un 
ravin,  devenu  tout  à  fait  impraticable;  c'est  cependant 
notre  chemin,  il  se  dirige  de  là  à  travers  la  plaine  déserte 
sur  le  village  de  la  Ghapelle-en-Serval,  qu*il  atteint  apiè! 
avoir  traversé  le  chemin  de  fer  de  Paris  à  Chantilly,  un 
peu  au-dessus  de  la  station  d'Orry-la- Ville.  Il  ne  présenta 
rien  de  particulier  dans  cette  partie  de  son  parcours. 

Encaissé,  onduleux,  suivant  les  déclivités  et  les  acci- 
dents  du  terrain,  il  a  tout  à  fait  l'aspect  d'un  chemii 
gaulois,  et  ne  parait  pas  avoir  subi  dans  ces  parages  d^ 
grandes  transformations.  Après  avoir  traversé  le  chemii 
de  fer,  il  reprend  l'aspect  d'un  chemin  ordinaire  ;  jusqu'ai 
village  de  la  Chapelle,  il  n'est  vraiment  reconnaisaabh 
que  par  sa  direction  qui  est  tout  à  fait  rectiligne  avec  k 
flèche  de  la  cathédrale  de  Senlis.  Du  reste,  cette  directioi 
rectiligne  est  saisissante,  surtout  depuis  Marly-la- Ville 
Il  ne  faudrait  pas  la  chercher  à  Louvres,  où  la  route  a  Ai 
faire  une  déviation  d'un  kilomètre  au  moins,  pour  um 
raison  qu'il  est  bien  difficile  d'apprécier  aujourd'hui,  i 
moins  qu'on  n'admette  l'opinion  de  quelques  savants,  qu 
prétendent  que  le  chemin  ne  passait  pas  dans  Louvres. 
mais  le  laissait  à  droite.  Ces  déviations  ne  sont  pa^ 
rares  dans  les  chemins  de  celte  époque. 

Le  chemin  ne  passe  pas  dans  le  village  de  la  Chapelle  ; 
il  le  laisse  sur  la  droite  pour  venir  s'abattre  sur  la  grandi 
route  actuelle,  à  l'entrée  du  village  du  cété  de  Senlis,  ai 
lieu  dit  le  Vieux-Château,  Arrétons-nous-y  un  moment; 
au  point  de  bil'urcation  des  deux  grandes  routes  de  Chan- 
tilly et  de  Senlis,  se  trouve  uu  champ  ;  il  se  présente  eu 
sommet  d'angle  formant  la  jonction  des  deux  niutes  avant 
leur  entrée  dans  le  village,  lùilrez-y  :  vous  y  Irouverex, 
môme  sans  chercher,  une  quantité  innombrable  de  débrie 


ZUV*  SESSION,   ▲  SSNUS.  417 

de  lailtt  romaines,  de  {ragmenU  de  poterie  de  toutes 
nrtes,  des  restes  de  couvre-joints,  de  ciment,   de  pa- 
vage, etc.  Vous  êtes  sur  une  villa  romaine  :  eu  creusant  le 
ttl  pour  construire  des  caves  dans  les  maisons  voisines, 
oa  a  trouvé  une  grande  quantité  de  médailles,  et  des 
iBites  dA  constructions.  Quel  nom  portait  cet  emplaoe- 
(lient  ?  c'est  ce  qu'il  est  bien  difficile  de  déterminer  : 
était-ce  le  PoLiUuuHAuriacum,  d'où  serait  venu  le  nom 
d'Orry-larVille?  La  distance  de  ce  village  au  lieu  dont 
nous  parlons  ne  nous  permet  guère  de  le  penser.  Cepen- 
dant nous  mettons  ce  nom  eu  avant  avec  notre  savant 
collègue,  M.  Dupuis,  mais  sous  toute  réserve. 

Avançons  :  sur  un  espace  de  trois  cents  mètres,  nous 
iommes  sur  la  grande  route  actuelle  ;  elle  se  confond  ici 
avec  la  route  romaine. 

Puis  elle  l'abandonne,  pour  former  une  courbe  assez 
douoe  qui  conduit  à  Pontarmé,  tandis  que  la  vieille  voie 
«lit  inflexiblement  son  tracé  à  travers  champs  ;  il  est 
bcile  de  l'y  suivre  ;  elle  se  dessine  gracieusement  en  dos 
d'éne  sur  la  surEsce  plane  du  sol  jusqu'au  village  de 
Pontarmé.  Elle  ne  le  traverse  pas,  mais  le  longeant  à 
gauche  derrière  les  maisons,  elle  vient  contourner  le  fossé 
de  l'ancien  chÂteau  encore  debout,  mais  derrière,  en  se 
rapprochant  de  la  grande  route  actuelle,  avec  laquelle  elle 
vient  se  confondre  pour  ne  plus  la  quitter  jusqu'à  Senlis, 
au  lieu  dit  le  Rompu,  à  cause  du  coude  que  forme  eu  cet 
endroit  la  rencontre  des  deux  chemins. 

Le  Rompu  est  à  rentrée  de  la  forôt  après  le  village,  au- 
dessus  de  la  ferme  de  M.  Dupuis;  à  |)artir  de  ce  point, 
Dous  n'avons  qu'à  suivre  la  roule.  La  vieille  voie  et  la 
nouvelle  se  sont  fondues  Tune  dans  l'autre  :  c'est  le  seul 
point  du  long  tracé  que  nous  parcourons  où  se  rencontre 
cette  particularité,  au  moins  sur  une  si  longue  étendue; 

XLIV*  SESSION.  37 


418      CONOBÈS  AROHiOLOOIQUB  DB  FRANGE. 

mais  il  faut  remarquer  qu'à  partir  de  la  Chapelle  ou 
mieux  du  Palatium-Auriacum,  la  voie,  de  gauloise,  est 
devenue  romaine  ;  et  c'est  avec  son  tracé  romain  qu'elle 
traverse  toute  la  ville  de  Sentis  en  formant  la  vieille  rue 
de  Paris;  et  c'est  encore  avec  son  tracé  romain  qu'elle  en 
sort  par  la  porte  Saint-Riéul,  actuellement  rue  de  Ville- 
vert,  pour  aller  former  la  chaussée  de  Pontpoint.  Elle 
sort  de  Senlis,  disons-nous,  par  la  porte  Saint-Rieul, 
formant  la  grande  rue  de  Villevert  que  nous  suivons 
jusqu'à  la  côte,  au-dessus  du  moulin  de  Saint-Rieul,  sur 
le  bord  de  TAunette  ou  Oiiette;  c'est  là  qu'elle  se  bifurque 
pour  former  du  côté  gauche  la  grande  chauMée  de 
Pontpoint  et  de  l'autre  le  chemin  vert  de  Chamant,  qui 
conduisait  à  l'oppide  deBalniacura(Balagny-sur-Onette). 
Cet  embranchement  constituait  sur  le  plateau  la  naissance 
d'un  réseau  de  petites  routes  qui  conduisait  au  Temple- 
d'Honnus,  une  des  belles  découvertes  du  Comité.  Reve- 
nons à  la  chaussée  de  Pontpoint;  nous  la  prenons  au 
bas  de  la  côte  du  Poteau,  côté  nord-est  de  la  ville,  dont 
nous  franchissons  la  hauteur  en  la  suivant.  Arrivée  sur 
le  plateau  de  Chamant,  elle  côtoie  les  champs  de  courses 
de  M.  Joachim  Lefèvre ,  passe  derrière  son  château , 
coupe  le  chemin  des  Poissonniers,  et  entre  dans  la  forêt. 
Nous  sommes  à  deux  kilomètres  de  la  ville;  on  a  déjà 
pu,  dans  cette  courte  distance,  constater  toute  la  beauté 
de  la  voie  romaine,  les  caractères  en  sont  incontestables  : 
empierrement  puissant,  talus  de  deux  mètres  d'élé- 
vation, solidité,  majesté,  rien  n'y  manque.  —  Ce  n'est 
pas  la  grande  voie  militaire  de  Soissons  à  Senlis,  mais 
c'est  au  moins,  après  celle-ci,  la  plus  belle  du  pays  des 
Sylvanectes.  —  Voici  ses  étapes  :  elle  passe  au  carre- 
four Saint-Prie^t,  à  celui  des  lUancs-Sablons,  lieu  célèbre 
dans  la  contrée  par  les  nombreux   restes  de  l'antiquité 


XUV*  SESSION,   A  SBNLIS.  419 

romaine  qu'on  y  retrouve  ;  et  arrivée  à  la  Croix-Saint- 

Ricnl,  là,  elle  incline  un  peu  à  gauche  laissant  à  droite 
k  grand  chemin  forestier  qui  cooduitau  Monl-Pagnolte; 
es  suivant  la  direction  de  la  voie  qui  est  ici  très*facile  à 
neoaaaitre,  on  arrive  au  carrefour  de  la  Futaie,  après 
avoir  passé  en  face  de  Saint-Christophe,  qu'on  aperçoit  à 
gauche,  dominant  la  forêt  de  ses  cimes  verdoyantes  et  des 
restes  vénérables  de  son  vieux  prieuré. 

C'est  là  qu'il  faudrait  laisser  un  moment  la  voie 
romaine  pour  s'engager  dans  les  rampes  sauvages  et 
pitloraques  du  Mont-Pagnotte ,  où  tant  de  surprises 
charmantefl  nous  attendent:  ruines,  enceintes,  mame- 
lons, etc.  etc.,  mais  ce  n'est  pas  le  moment  de  nous  y 
distraire,  passons,  en  attendant  le  bonheur  d'y  revenir. 

Du  carrefour  de  la  Futaie,  la  voie  se  dirige  vers  celui 
de  la  Groix-du-Grand-Mattre ;  elle  a  été  fort  dégradée  et 
boulevenée  dans  cette  partie,  où  elle  n'existe  plus  guère 
qu'à  certains  endroits.  Nous  en  diroos  autant  de  son 
paieoura;  à  partir  de  la  Croix-du-Grand-Mattre,  au 
canebnr  Étérodite,  elle  se  dirige  vers  l'Oise  en  passant 
devant  la  maison  du  garde,  et,  laissant  à  gauche  le  Mont- 
Callipet,  elle  descend,  en  formant  un  ravin  qu'il  est  dilfi- 
cila  de  parcourir,  vers  l'Abbaye-du-Moncel,  longeant 
cette  propriété,  et  celle  de  M.  de  Yerneuil,  sur  un  chemin 
de  trois  ou  quatre  mètres  de  largeur  jusqu'à  TOise. 

Nous  sommes  convaincu,  après  un  examen  minutieux 
des  lieux,  que  c'est  à  cet  endroit  qu'il  faut  chercher  le 
passage  de  la  voie,  et  non  pas  au  lieu  dit  le  Joncquoy, 
comme  on  l'a  prétendu.  Si  des  vestiges  de  roule  ont  été 
troavés  dans  les  marais  de  Chevrières,  ils  appartiennent  à 
un  antre  tracé;  nous  avons  en  vain  cherché  au  delà  de 
l'Oise  la  continuation  de  la  voie,  elle  aura  été  détruite  par 
les  inondations,  par  la  culture  et  par  les  travaux  du 


490  CONGRÈS  iIRGHÉOLOOfQIJE  DB  FRANGE. 

chemin  de  fer.  Des  ouvriers  nous  ont  afBrmé  avoir  trouvé 
aux  environs  du  passage  à  niveau  de  la  route  de  Pont  à 
Estrées-Saint-Denis  des  Tragmeots  de  poterie,  d'armures 
et  d'autres  objets  antiques;  ce  point  de  la  question  restera 
longtemps  indécis,  nous  pencherions  à  croire  que  la  voie 
passait  à  l'église  de  Sarron  et  franchissait  l'Oise  dans  ces 
parages,  pour  se  diriger  de  là  vers  le  nord.  Une  étude 
approfondie  des  passages  romains  si  nombreux  de  l'autre 
côté  de  l'Oise,  mais  qu'on  ne  peut  que  difflcilement 
constater,  parce  que  le  terrain  a  subi  de  grandes  transfor- 
mations par  suite  des  inondations,  une  étude,  dis-je,  de  ces 
passages,  qu'il  faut  faire  converger  vers  Baxicourt  et  Saint- 
Martin-Longudux,  pourra  seule  jeter  quelque  jour  sur  ce 
point  bien  osbcur. 
La  séance  est  levée  à  4  i  heures. 


Excursion  à  Chaalis  et  à  Ermenonville. 

A  une  heure,  le  Ck)ngrès  partait  pour  Cbaalis. 

L'abbaye  de  Chaalis  fut  fondée  par  Charles  le  ik)n, 
comte  de  Flandre,  en  1136.  Les  ruines  pittoresques  qui 
restent  encore  de  son  église,  du  xiir  siècle,  attestent  l'im- 
portance de  cet  ancien  édifice.  Le  château,  où  le  Congrès 
a  été  gracieusement  reçu  au  nom  de  M*"*  la  barrnne  de 
Vatry,  occupe  une  partie  des  bâtiments  de  l'abbaye  qui 
avait  été  réédifiée  au  xviir  siècle.  L'intérieur,  avec  sou 
grand  air,  sou  élégance  du  meilleur  aloi  et  ses  collections 
de  curioeités  les  plus  variées,  reflète  de  toutes  parts  le  goût 
et  l'habitude  des  plaisirs  que  donne  la  culture  des  choses 
de  l'intelligence.  —  Une  chapelle  du  xm«  siècle,  échappée» 


XLlV'   SESSION,   A  SëNLIS.  421 

aux  démolilioDS  révolulionnaircs,  est  or d ce  de  peintures 
de  l*école  italienne  avenlureusetnent  attribuées  nu  Prima- 
trioe.  Cette  chapelle  est,  en  ce  moment,  entre  les  mains  de 
M.  Balze  l'objet  d'une  habile  restauration  dont  les  amis 
des  arts  ne  sauraient  que  féliciter  M°^*  de  Yatry,  qui  en  a 
pris  l'initiative. 

La  visite  de  Chaalisa  été  suivie  de  celle  d'Ermenonville^ 
où  M.  le  comte  de  Girardin  était  venu  pour  recevoir  le 
Congrès.  Les  célèbres  parcs  d'Ermenonville  ont  joué  un 
rôle  considérable  dans  la  pacifique  révolution  qui  s'est 
accomplie  en  France,  au  siècle  dernier,  dans  l'art  de  com- 
poser les  poysageSf  en  opposition  à  la  manière  solennelle 
de  Le  Ndtre.  Ils  devinrent  par  les  soins  de  leur  possesseur 
et  créateur,  le  marquis  de  Girardin,  le  triomphe  de  l'école 
de  y EmbeUmemeni  de  la  nature,  à  l'époque  où  le  fameux 
philosophe  qui  mourut  dans  cette  retraite  hospitalière 
avait  mis  la  nature  à  la  mode.  —  Une  promenade  à  tra- 
vers ces  sites,  aujourd'hui  grandement  déchus  de  leurs 
ornements  artificiels,  mais  qui  n'ont  rien  perdu  de  leurs 
beautés  naturelles,  ne  pouvait  mieux  terminer  cette  inté- 
ressante demi-journée. 


Sir  John  Henry  Parker  et  ses  projections 
de  vues  photographiques. 

Dans  la  soirée,  pour  se  reposer  de  ses  fatigues,  le  Congrès 
avait  la  bonne  fortune  d'exécuter,-  dans  la  salle  même  des 
séances,  une  excursion  d'un  autre  genre,  et  bien  plus  loin- 
taine encore,  sous  la  conduite  de  Téminent  archéologue 
^glais,  sir  John  Parker. 


422  CONGRÈS  ARGHÉOLOGIQUE  Dfi  FilANC£. 

Les  travaux  auxquels,  depuis  de  longues  aûnées,  se  livre 
M.  Parker,  à  Rome  et  sur  d'autres  points  de  l'Italie,  sont 
trop  connus  pour  qu'il  soit  nécessaire  de  les  rappeler  ici. 
Non-seulement  M.  Parker  fouille  et  décrit  les  antiquités 
de  Rome,  en  les  éclairant  de  nouveaux  aperçus,  mais 
encore  il  se  voue ,  tant  à  Rome  que  dans  son  propre  pays, 
à  l'enseignement  archéologique  des  monuments  de  la  ville 
éternelle,  en  employant  pour  le  vulgariser  tous  les  moyens 
que  la  science  moderne  met  à  sa  disposition.  Parmi  ces 
moyens,  l'un  des  plus  propres  à  frapper  les  yeux  et  à  faire 
pénétrer  dans  l'esprit  les  démonstrations  verbales,  consiste 
dans  l'emploi  de  projections  de  vues  photographiques  par 
la  lumière  artificielle.  Le  passage  en  France  de  M.  Parker, 
revenant  de  Rome,  coïncidait  avec  la  tenue  du  Congrès,  et 
le  savant  archéologue  a  bien  voulu  se  rendre  à  Senlis  pour 
nous  offrir  une  séance  de  ces  projections,  avec  un  choix  de 
sa  riche  collection  de  vues  d'Italie. 

Aussi  une  afQuence  inaccoutumée  s'était-elle  empressée 
d*envahir  la  salle.  Grâce  à  cette  exhibition,  les  nombreux 
assistants,  qui  avaient  déjà  visité  Rome,  ont  pu  renouveler 
connaissance  avec  ses  monuments  qu'ils  ont  retrouvés,  les 
uns  conformes  à  leurs  anciens  souvenirs,  les  autres  tels 
que  les  font  apparaître  les  nouvelles  fouilles  dont  ils  sont 
aujourd'hui  l'objet. 

Mais,  pour  commencer  par  le  commencement,  M.  Par- 
ker, en  manière  de  prolégomènes,  est  entré  dans  quelques 
considérations  générales  et  techniques  sur  les  constructions 
romaines,  et  a  fait  passer  sous  les^eux  des  assistants  une 
série  de  vues  représentant  les  détails  les  plus  caractéristi- 
([ues  de  ces  constructions  à  diverses  périodes  ;  d'abord  les 
grands  appareils  eu  blocs  de  travertin  que  l'on  voit  dans 
les  murs  de  l'époque  des  rois  sur  le  mont  Palatin,  à  Tangle 
sud-ouest  de  la  Homa   Quadrata  de  Romulus,  puis  au 


.XMV  dKSSION,    A  SEMIS.  423 

luur  de  Scrviiis  Tiilliiis  découvert  sur  l*Aveiitiu  et  plu^ 
réccmiDeiit  sur  l'Ksquillin,  ensuite  des  Iraginents  du  Tabu- 
Urium  et  du  Forum  d'Auguste.  Les  murs  de  Voies  et  de 
Fiésole  ont  montré  aussi  l'analogie  des  plus  anciennes 
constructions  de  Rome  avec  celles  des  Étrusques  qui  les 
avaient  précédées. 

On  connaissait  déjà  les  observations  laites  par  M.  Par- 
ker sur  l'épaisseur  des  briques  dans  les  constructions,  aux 
différents  siècles  de  l'empire.  Cette  épaisseur  croit  avec  les 
Mfcles  dans  des  rapports  que  M.  Parker  a  formulés.  Ainsi 
au  I"  sîcïcie  une  zone  d'un  pied  romain,  O'^SS  environ,  con- 
tieut  de  neuf  à  dix  épaisseurs  de  briques;  au  ir  siècle,  cette 
même  zone  n'en  contient  que  sept  ou  huit;  au  m*  siècle, 
cinq  ou  six,  et  au  iy*  quatre.  Des  vues  de  l'aqueduc  de 
Néron,  de  la  villa  d'Hadrien  à  Tivoli,  du  rempart  d'Au- 
rélien,  du  cirque  de  Maxence,  sont  venues  confirmer  ces 
observations. 

Mais  nous  avons  hAte  d'arriver  au  Forum,  ce  grand 
œotru  d'attraction  pour  les  archéologues. 

Des  vues,  d'après  Duperrac  et  Deseiue,  nous  l'uut  montré 
tel  qu'on  le  voyait  aux  xvii"  et  wiii*  siècles,  alors  que  ses 
;Tandes  colonnes  seules,  émergeaient  à  moitié  du  sol 
exhaussé  par  l'amoucellement  des  poussières  séculaires, 
iiimme  des  mâtures  de  grands  navires  naufragés  qui  s'é- 
lèvent au-dessus  des  Ilots  après  la  tempête. 

Ce  n'est  que  sous  l'administration  française,  en  1810, 
t(ue  des  fouilles  sérieuses  ont  été  commencées.  Elles  s'oc- 
cupèrent particulièrement  de  déblayer  les  monuments 
:»itué8  au  bas  du  Capitole.  Ces  fouilles  furtMit  continuées, 
mais  avec  lenteur,  sous  les  papes  Pic  VIII,  (irôgoirc  \VI 
i:t  Pic  LV.  Les  voyageurs,  qui  s*cn  rup|M»rtent  à  leurs 
anciens  souvenirs ,  se  rappellent  lasi^vt  pitloiesiiuc  vi 
•lélabré  du  l4ini|H>-Vaccino,  situé  entre  la  colonne  de  IMuf- 


•i^       GUNGRKS  AROHÉOLOOIQUK  UE  FRANCE. 

cas,  le  temple  d'Antonin  et  Paustine  et  l'église  Sainte- 
Marie-Libératrice.   Aujourd'hui  le  Caropo  -  Vaccinb  eit 
déblayé  sur  une  profondeur  de  huit  on  dix  mètres,  et  te 
sol  antique  du  Forum  avec  ses  dallages,  ses  voies  pavées, 
a  revu  la  lumière. 

Un  large  passage  pour  la  circulation  a  été  ménagé  1^ 
long  des  maisons  qui  faisaient  face  au  Campo- Vaccina 
jusqu'à  la  hauteur  du  t6mple  d'Antonin  et  Faustine.  Ce 
passage  s'arrête  là ,  devant  la  colonnade  du  temple  et  se 
continue,  en  le  contournant,  par  la  rue  qui  longe  son 
flanc  occidental.  Le  soubassement  de  l'édifice  est  entière- 
ment dégagé  sur  sa  façade.  La  limite  des  fouilles,  pour  le 
moment,  suit  une  ligne  légèrement  courbe  vers  Test,  qui 
part  de  l'angle  sud-est  du  temple  et  vient  passer  devant 
l'église  Sainte-Marie-Libératrice,  pour  aboutir  à  la  rue  de 
la  Consolation,  en  englobant  les  trois  belles  colonnes  corin- 
thiennes du  temple  des  Dioscures,  et  l'area  de  la  Basilici 
Julia.  A  droite  du  temple  des  Dioscures  un  soubassemem 
circulaire  indique  l'emplacement  du  temple  de  Vesta,  faus- 
sèment  identifié,  jusqu'à  ce  jour,  par  des  archéologues, 
tantôt  avec  le  temple  circulaire  de  la  place  Sainte-Marie 
in  Cosmedin,  tantôt  avec  Tédifice  transformé  en  l'église  d( 
Saint-Théodore,  près  du  Vélabre.  Derrière  ce  tempie,  sui 
la  limite  actuelle  des  foniHes  s'élevaient  les  habitations  de^ 
Vestales,  dont  les  bases  sont  à  fleur  de  terre. 

Près  de  là,  entre  le  tempie  des  Dioscures  et  celui  d'An- 
tonin et  Faustine,  surgit  le  soubassement  du  temple  de 
ilules  César,  édifié  par  Auguste  et  précédé  de  sa  tribune  er 
forme  d'exèdre  Sa  face  était  tournée  vers  le  capitole,  cl 
au  devant  se  dressait  la  statue  équestre  de  Domitien,  don! 
on  voit  maintenant  le  piédestal  qui  est  venu  ave«î  les  ves- 
tiges précédents  révéler  de  précieux  jalon:*  pour  la  topo- 
graphie du  Forum. 


XLlV   SESSION,    A   6£NLIS.  iâT 

mure,  les  uns  elliptiques,  les  autres  droits,  en  long  et  en 
tnven.  Les  chambres,  les  espaces  compris  entre  ces  murs 
5oot  si  étroits,  si  serrés,  qu*on  s'explique  difficilement  leur 
destinatiop.  Comment,  en  effet,  concilier  tout  cet  encom- 
brement de  murailles  avec  Pusage  des  espaces  régulière- 
ment aménagés,  qui  existent  sous  les  grands  amphithéâtres 
pour  le  jeu  des  machines,  pour  les  exercices  préparatoires 
des  gladiateurs.  On  peut  se  rendre  un  compte  exact  de  ces 
sortes  de  dispositions,  en  examinant  les  amphithéâtres  de 
Fouxioles  et  de  Capoue,  ob  Ton  voit  encore  dans  un  état 
presque  parfait  de  conservation,  les  ouvertures  pratiquées 
de  distance  en  distance  dans  le  sol  de  l'arène,  et  correspon- 
dant, en  dessous,  à  des  chambres  spacieuses.  Grâce  aussi 
aux  vues  de  ces  derniers  amphithéâtres ,  produites  jiar 
ï.  Parker,  ses  auditeurs  ont  pu  se  rendre  compte  de  ces 
sortes  d'aménagements.  Cependant  au  Cotisée,  au  milieu 
de  ces  substructions  dans  le  sens  du  grand  axe,  existait  un 
large  passage  pour  le  dégagement  des  parties  latérales.  On 
y  voit  encore  de  longues  poutres  de  bois,  reliées  par  des 
pièces  transversales,  et  qui  semblent  avoir  été  destinées  à 
former  un  plan  incliné  pour  la  manœuvre  des  machines. 
Quoi  qu'il  en  soit  de  la  forme  et  de  la  destination  de  ces 
constructions  retrouvées  sous  le  Cotisée,  elles  sont  le  résul- 
tat d'une  modification  apportée  au  premier  établissement 
de  Tarène,  destinée,  dans  le  principe,  à  des  jeux  nautiques, 
il  des  chasses  et  à  des  joutes  de  bétes  féroces.  Une  série  de 
fortes  consoles  en  saillie  est  visible  vers  le  milieu  du  mur 
qui  soutient  le  podium  et  portait  un  balcon  affecté  au 
«enrice  de  ces  sortes  de  spectacles.  Plus  tard,  l'arène,  chan- 
geant de  destination,  fut  exhaussée  sur  les  murs  que  nous 
voyons  aujourd'hui.  Le  mur  elliptique,  le  plus  rapproché 
du  podium,  vers  la  tète  de  Taxe  longitudinal,  est  appuyé 
sur  le  podium  mémo  et  englobe  pour  l'annuler,  la  prc- 


i28  CONOUËS  ARCnK0L061ÛU£  DE   FllANCE. 

mièrc  des  consoles  dont  nous  parlions  tout 'à  rheure.Toti^ 
ces  murs  sont  bâtis  d'une  façon  irrégulière  et  parfois  gro^' 
sière.  Là  des  briques,  ici  des  blocs  de  travertin.  Cepeo  ^ 
dant  M.  Parker  a  émis  l'opinion,  développée  dans  soi^ 
ouvrage  sur  le  Cotisée  (i],  que  quelques  parties  en  bri^ 
ques  de  ces  constructions  subarénaires ,  loin  d'être  posté- 
rieures à  l'établissement  du  Colyséc,  lui  sont  au  contraire 
antérieures,  et  proviennent  d'édifices  bâtis  du  temps  do 
Néron,  dans  un  des  lacs  situés  dans  ses  jardins,  sur  l'em- 
placement où  plus  tard  le  Colisée  fut  édifié. 

Mais  faut-il  dire  que,  depuis  ce  nouvel  état  de  choses 
que  M.  Parker  a  fait  passer  sous  les  yeux  de  son  auditoire, 
une  transformation  regrettable  et  imprévue  en  a  changé 
l'aspect.  Les  fouilles  ont  dû  être  suspendues  par  suite  de 
Tenvahissement  des  eaux  souterraines  arrivant  par  les 
anciens  canaux  établis  pour  le  service  de  l'amphithéâtre, 
sans  que  les  entrepreneurs  des  fouilles  aient  pu  s'en  rendre 
maîtres.  Les  excavations  faites  à  grands  frais  sont  conver- 
ties, sur  une  profondeur  d'environ  3  mètres,  en  une  marc 
d'eau  croupissante,  qui  peut  bien  rappeler,  si  on  veut,  les 
eaux  du  lac  de  Néron  ,  mais  qui  est  loin  assurément  do 
produire  le  r<^sultat  qu'attendait  Tarchéologie  dans  cette 
délicate  entreprise.  Espérons  cependant  que  la  construc- 
tion d*un  égout  collt'cteur,  ou  pour  mieux  dire  d'une 
cioaca  maximo,  vers  le  sud  et  au-dessous  du  Palatin,  dans 
la  direction  du  Tibre,  parviendra  à  donner  une  dérivation 
efficace  à  ces  eaux  malencontreuses  et  à  remettre  à  soc  les 
mystérieuses  substructions  de  l'amphithéâtre. 

I^s  amis  do  la  vieille  Home  connaissent  le  charme  tou- 
jours irrésistible  des  excursions  dans  sa  campagne,  où  les 
grandes  ruines  et  les  majestueux  horizons  offrent  des  sujets 

il'  The  Cofosseuni  al  Home,  by  John  Henri  Parker. 


XUY*  SESSION,  A  SENLIS.  4S9 

d'étude  et  des  aspects  toujours  nouveaux.  Les  longues 
lignes  d'aqueducs,  les  tombeaux  de  la  voie  Appienne  et  de 
la  voie  Latine,  ainsi  que  les  autres  monuments  funéraires 
dispersés  en  dedans  et  en  dehors  de  l'enceinte  de  la  ville 
ont  été  longuement  décrits  dans  les  dernières  publications 
de  M.  Parker  (1),  et  ça  été  une  bonne  fortune  pour  le 
Congrès  d'en  voir  passer  sous  ses  yeux  l'attachant  résumé, 
exposé  par  H.  Parker  lui-même. 

Parmi  les  cent  tableaux  qu'il  nous  a  montrés  et  expli- 
qués, il  nous  a  donné  aussi  quelques  vues  des  Catac«)mbes 
chrétiennes,  qui  viennent  également  d'être  étudiées  par 
lui  dans  son  plus  récent  ouvrage  (â).  Mais  déjà  tous  les 
archéologues  connaissaient  les  immenses  services  qu'a 
rendus  à  la  science  M.  Parker  en  entreprenant  la  repro- 
duction par  la  photographie  des  peintures  et  autres  détails 
de  la  Rome  souterraine.  Cette  série  de  vues,  exécutées  à  la 
lumière  du  magnésium,  constitue  un  recueil  de  docu- 
ments de  la  première  importance.  Il  suffit,  pour  en  faire 
rettortir  toute  l'utilité,  de  rappeler  deux  photographies 
du  même  objet,  l'une  faite  sur  un  dessin,  et  l'autre 
sur  l'original  même.  On  a  pu  constater  quelle  était  la 
différence,  en  faveur  de  cette  dernière  au  point  de  vue  de 
l'exactitude. 

La  Siociété  française  d'Archéologie  est  heureuse  de  saisir 
l'occasion  que  lui  oifre  le  Congrès  de  Sentis  de  rendre 


(4)  The  Aqueduetê  of  ancient  Rome,  traced  from  their 
sources  to  their  tnouths,,.  by  John  Henry  Parker,  4876.  Oxford 
James  Parker  and  London  John  Murray. 

Tombe  in  and  ntar  Rome.  Sculpture  among  the  Grecks 
and  Romans,  mythology  in  funereal  sculpture,  and  early 
Christian  sculpture,  by  John  Henry  Parker,  4877. 

(î)  The  Catacombs  of  Rome,  by  John  Henry  Parker,  4877. 


43fi  cos€ii3  àMCMiowQwai  pm  nui3Kcs. 

on  DoiiTd  hommage  aa  zèle  édairè,  ma  déioMBieiit  inli- 
UgeMe  que  déploie  M.  Parker  pour  le  déveioppeneol  te 
études  archéologiques.  Nous  aToos  au»  à  ont  de  le 
reoiercier  du  bienveillanc  et  haut  iutéfél  qu'il  a  téiBoigné 
au  Congrès  eu  lui  procurant  celte  mnoe  doat  tous  les 
assistants  garderont  le  meilleur  souvenir. 

JiTLEa  wm  IjàUiitaK. 


SAMEDI  S  JUIN 

Excursion  à  caïampliea,  Pierreioiids 

et  MorienvBl. 

A  dnq  heures  et  demie  du  matin,  le  samedi  S  juin,  un 
cortège  de  cinq  voitures  emportait,  sur  la  route  de  B^hisy, 
cinquante-six  membres  du  Congrès,  parmi  lesquels  on 
groupe  nombreux  de  dames,  habituées  des  séances  et  des 
courses  précédentes,  avait  bien  voulu  de  nouveau  prendre 
place. 

La  première  balte  a  eu  lieu  à  RuUy,  en  l'honneur  de 
son  église ,  qui ,  avec  son  curieux  clocher  et  son  chœur 
roman,  présente  à  l'intérieur  force  remaniements  des  xiii* 
et  xiT^  siècles.  Rully  mérite  une  mention  particulière,  à 
laquelle  les  savantes  discussions  de  MM.  les  abbés  de  Meis- 
sas  et  Mûller,  donnaient  un  à-propos  de  circonstance;  car 
c'est  à  Rully,  racontent  les  légendes  de  la  vie  de  saint  Rieul, 
que  l'apôtre  des  Silvanectes,  préchant  un  jour,  fut  inter- 
rompu par  les  coassements  des  grenouilles  d'une  mare 
voisine,  auxquelles  il  imposa  silence. 


XLIY*   SESSION,   A  SENLIS.  431 

Un  peu  plus  loin ,  à  Huleux,  uq  manoir  de  la  Renais- 
^Dce,  devenu  une  ferme,  singulièrement  empreint  d'un 
caractère  italien,  est  digne  d'une  étude  sérieuse.  Par  le 
calme  et  la  simplicité  de  sa  façade,  la  savante  harmonie  de 
«es  proportions,  il  rappelle  les  meilleurs  palais  de  l'école 
de  Bramante ,  et  nul  n'a  regretté  l'arrêt  qu'on  lui  a  con- 
sacré. 

A  l'heure  officielle  du  programme  on  arrivait  à  Bétbisy- 
Saint-Pierre,  situé  dans  la  fraîche  et  pittoresque  vallée  de 
i'Autone.   La  halte  réglementaire  a  permis  de  visiter 
l'église,  formée  d'une  nef  romane  à  bas-côtés,  soudée  à  un 
•-hœur  du  xiii*  siècle,  d'explorer  l'éminence  qui  s'élève  au 
e^Dtre  du  village  et  porte  encore  quelques  restes  de  l'an- 
<^ien  château  construit  au  commencement  du  xi*  siècle, 
de  parcourir  avec  son  obligeant  propriétaire,  M.  le  comte 
«le  La  Vaulx ,  le  château  de  Douge^  entouré  de  beaux 
ombrages,  qui  conserve  encore  des  parties  du  xiv*  siècle  et 
Une  jolie  chapelle  ornée  de  vitraux  du  xvi*.  Ajoutons  que 
le  déjeuner  obligatoire,  qu'on  a  trouvé  préparé  à  l'hôtel  du 
Soleil-d'Or,  était  digne  de  tout  point  de  ce  titre  brillant. 
Un  trajet  moitié  en  voiture,  moitié  à  pied,  en  suivant 
la  chaussée  de  Brunehaut,  nous  a  conduits  à  Champlieu, 
où  Ton  a  pu  examiner  le  théâtre ,  les  restes  du  temple  et 
des  bains  romains  avec  le  meilleur  des  guides,  puisque 
M.  de  Roucy  était  là,  complétant  les  explications  qu'il  avait 
ONumenoées  deux  jours  auparavant  au  musée  de  Com- 
pile sur  les  fouilles  de  ces  monuments. 

Qui  ne  connaît,  au  moins  par  les  gravures  et  les  des- 
criptions, la  belle  église  de  Saint-Jean-aux-Bois?  Une  route 
k  travers  une  des  plus  belles  parties  de  la  forêt  de  Ci)m- 
piègne,  nous  a  amenés  à  celte  petite  abbatiale,  élégant 
épanouissement  de  l'art  ogival  des  premières  années  du 
xm"  siècle,  que  tous  voulaient  voir  ou  revoir.  Enfin,  a 


432  CONGaSS  âlfiHKOiOfilOro  1»E  faaxcc 

trois  heures  vingt  miiiuteB,  on  arrivait  daas  le  large  et 
pittoresque  bassin  de  Pieneioads,  dominé  par  les  impo- 
santes silhouttes  de  son  château. 

Cette  ancienoe  demeure  des  ducs  d'Orléans,  édifiée 
d'abord  de  1390  à  UIO,  ruinée  sous  Louis  Xlll,  a  été, 
comme  chacun  sait,  restaurée,  pour  ne  pas  dire  recon- 
struite, par  M.  Viollet-le-Duc,  qui  a  &it  revivre  dans  cette 
œuvre  capitale,  l'un  des  plus  grandiofes  spérimifis  de 
l'architecture  militaire  du  xiv*  siède. 

Disons  que  la  visite  du  monument  a  été  CKÎliiée  grâce 
à  des  ordres  spéciaux  donnés  par  l'éminent  architecte,  et 
que  si,  (aute  de  temps,  elle  n'a  pu  être  aussi  complète  que 
l'exigerait  le  splendide  édifice,  auquel  cependant  la  cri- 
tique peut  ïà&ï  trouver  quelques  détaib  à  reprendre,  elle 
n'en  a  pas  moins  été  du  plus  puissant  attrait. 

De  Pierrefonds  à  Grépy,  le  trajet  comportait  une  halte  à 
Morienval,  où  s'élevait  jusqu'au  milieu  du  x^ns^  siècle 
une  célèbre  abbaye,  fondée  par  Dagobert  I*'.  L'intéressante 
église  qui  en  est  restée  date  de  la  fin  du  xi*  siècle,  et  les 
curieuses  chapelles  rayonuantes  autour  du  bas^sôté  du 
sanctuaire  sont  peut-être  les  plus  aociennes  que  l'on  con- 
naisse à  cette  place  en  France.  Un  clocher  du  commence- 
ment du  Xii*  siècle  s'élève  sur  la  façade  et  deux  tours  sur 
les  deux  cétés  du  chœur.  Des  remaniements  considérables 
ont  modifié  l'intérieur  de  réditiçe.  Mais  on  ne  saurait 
qu'être  pénibleinent  affecté  de  l'état  de  dégradation  que 
présente  Texlérieur  des  murs  soutenus  par  de  nombreux 
étais.  Espérons  quen  sa  qualité  de  monument  historique, 
l'église  de  Morienval  ne  tardera  pas  à  recevoir  la  restaura- 
tion, ou  pour  mieux  dire  la  consolidation  dont  elle  éprouve 
le  plus  urgent  besoin. 

Une  heure  après  avoir  quitté  Morienval,  les  voitures 
arrivaient  devant  la  gare  de  Grépy  en  même  temps  que  le 


XUY*  SESSION,   A  SJSNUS.  433 

tnin  qu'on  a  pris  à  sept  heures  quarante  minutes  pour 
reotrer  à  Senlis,  où  chacun  est  revenu  sous  le  charme  de 
tant  de  souvenirs,  auxquels  se  joignait  le  sentiment  d'une 
cordiale  gratitude  pour  MM.  de  Gaix  de  Saint-Aymour  et 
Dupais,  les  habiles  organisateurs  de  cette  magnifique 
joarnée. 


DIMANCHE  3  JUIN ,  SÉANCb!  DE  CLOTURE. 

PRiSIDSNGE  DE  M.   LÉON  PALUSTRE. 

Siègent  au  bureau  MM.  Descbamps  de  Pas,  le  comte  du 
Mmoir^  le  marquis  de  Schedoni  et  Ant.  de  Villefosse. 

Après  l'exécution  d'un  brillant  morceau  de  musique  la 
ptrok  est  donnée  à  M.  Hayaux  du  Tilly  sur  la  treizième 
question  : 

Quelle  est  la  véritable  signification  à  donner 
aux  mots  mamio  et  muiatio  dans  les  itiné- 
raires? 

• 

M.  Hayaux  du  Tilly  étudie  la  question  de  savoir  quel 

ms  vrai  il  faut  donner  aux  mots  mutatio  et  manùo  des 

itinéraires. 

Il  démontre  que  c'est  à  tort  qu'on  donne  d'une  manière 
géotoilc  aux  mots  muiatio  et  mansio  la  signification  de 
rtiaiê  de  poste  ou  de  couchée  pour  les  voyageurs. 

S'il  est  vrai  que  cette  signification  est  exacte  en  ce  qui 
oonocrne  la  circulation  des  voyageurs  sur  les  routes,  le 

XLIV  SESSION.  28 


iU  CFfUtlfil 

d  acicat  pas  iJR  aatR  <koBr  f«e  : 


V 


Miîs  oe  «Ds  n^  ped  être  applîfM  ^'a«  «mœ  spécul 
étt  f«lcs .  <'cst-»-4îre  à  «a  sorice  csoatÎBfCSt  d  nooo* 


La  wrafiffret  Is  ■■■riiPf  Htaéexar  tes  tocs  mili- 
taÎRi.  araîent  été  éuKks  poor  te  sernee  spédil  et  prin- 
cipal des  tn>ope«  ci  dan§  ce  cas  te  sms  ml  dire  : 

Motatîo  (Un  .  nunsio  Àmilîtam  . 

Les  wuiatkmtt  et  tes  acaïaMaes  wmbimm  étaient  pmqu^ 
loogoois  dfftinftrs  des  tafafioff  et  des  aHasiaaei  afiec- 
lées  an  seirîoe  des  postes. 

Tandis  que  ces  demièies  élatent  Umjmttn  plirfw  sur*  ^^ 
paitoofs  direct  et  immédiat  des  rontes,  tes 
et  tes  WÊomsHmes  militum  oorrespoodanles  étaiont 
ratement  situées  sur  des  hauteurs  ou  dans  des 
tîoos  &dtes  à  défendre,  et  parfois  â  plustenrs  milk^       ^ 
distance. 

Quelquefois  les  mittationes  et  les  manskmes  miUtmfi^^ 

confondaient  avec  les  mutatûmes  et  les  moasioRes  viaior^^^  ^  ' 

les 
mais  cette  colucidence  se  présentait  seulement  dan»        ^ 

cimUUe$,  dans  \tsoppida  ou  dans  quelques  autres  locaV^  ^ 

importantes,  c'esl-à-dire  là  où  les  ressources  et  tes  apg^^^^' 

visionnements  de  toute  nature  se  trouvaient  constamir^^^'^ 


et  en  abondance,  et  pouvaient  se  concilier  avec  la  sécim^'^ 
des  troupes. 

Chaque  mutatio  et  chaque  mansio  étaient  le  siège  3-^^^^ 
mandpium  où  se  faisaient  et  se  conservaient  les  apprc^^' 
•ionnements  divers  nécessaires  aux  armées  et  aux  vo^^' 
fenrs. 

CVst  là  qu'on  trouvait  également  les  chevaux  de  pœ*^' 
tes  bêtes  de  somme  et  de  trait ,  ainsi  que  les  Yéhicules  ^^ 


*s 


XUY*  SESSION,   A  SENLIS.  435 

toutes  sortes  destinés  aux  divers  services  d'approvisionne- 
ooent  des  stations  et  nu  service  des  voyageurs. 

Chaque  mandpium  était  placé  sous  la  direction  d'un 
mêneepi.  Us  étaient  divisés  en  plusieurs  classes  selon  leur 
importanoR. 

La  surveillance  et  le  contrôle  des  mancipia  ainsi  que  la 
police  des  routes  étaient  faits  par  des  agents  spéciaux  appelés 
ofentet  in  reius,  et  qui  ne  relevaient  que  de  l'empereur  ou 
do  préfet  du  prétoire,  qui  se  trouvaient  toujours  ainsi  au 
eoorant  de  ce  qui  se  passait  sur  tous  les  points  de  l'em- 
fin. 

Le  service  des  postes  était  si  peu  public  que  nul  ne  pou- 
^t  y  recourir  sans  une  autorisation  expresse  de  Tempe- 
reur  ou  du  préfet  du-  prétoire. 

Ce  permis  de  circuler  n'était  accordé  qu'aux  magistrats, 
(énéraux  et  officiers  d'un  grade  élevé,  et  déterminait  rigou- 
Wi9ment  le  nombre  de  chevaux ,  de  véhicules  et  de  bètes 
de  tomme  dont  chacun  aurait  le  droit  de  se  servir,  selon 
l'importance  de  sa  dignité. 

Comme  on  le  voit,  le  service  des  postes  était  compléte- 
nient  secondaire  et  accessoire  par  rapport  au  service  gêné- 
ni  et  principal  du  mouvement  des  troupes. 

Si  on  a  pu  voir  avec  raison  dans  les  mots  mu/o/io  (equo- 
nuû),  un  relai  de  poste,  mansio  (viatorum),  une  hôtellerie 
M  lien  de  repos  pour  les  voyageurs,  on  a  eu  grand  tort  de 
gteéraliser  ce  sens  restreint  et  d'en  faire  un  non-sens  en 
l'appliquant  aux  mouvements  des  troupes,  car,  dans  ce 
os,  il  convient  de  traduire  mutaiio  (loci)  par  le  simple  gite 
d'étape,  monrio  (militum)  par  le  repos  ou  séjour  après  trois 
ou  quatre  jours  de  marche. 

Déjà,  en  1866,  la  Société  française  d'Archéologie  qui  se 
réunissait  pour  la  première  fois  à  Senlis,  s'était  occupée  du 


43(î  GONiiHÈS  AUCIIÊOLOGIUUK  DE  FRANCE. 

chàleau  de  celte  ville  (1),  mais  plusieurs  points  impor- 
tants restaient  encore  à  éclaircir.  (jnkc  à  M.  Bouet,  ua 
nouveau  pas  en  avant  vient  (Fùtre  fait,  ainsi  qu'on  pourra 
le  reconnaître  par  la  note  suivante. 


Le  château  de  Senlis. 


A  Senlis,  comme  généralement  partout  ailleurs,  l'an- 
cien poste  romain  destiné  à  maintenir  en  respect  les  Sil- 
vanectes  fut,  dans  la  suite,  changé  en  forteresse,  puis 
devint  la  cité  même  où  nous  nous  trouvons.  L'eoceiute 
existe  encore,  ilanquéc  de  ses  tours,  en  partie  détruites,  il 
est  vrai.  Qucltiues-unes  cependant  se  présentent  encore 
dans  un  certain  état  de  conservation  qui  permet  do  se 
rendre  compte  de  l'aspect  primitif  de  l'ensemble,  car  toutes 
les  tours  étaient  billies  sur  le  même  modèle. 

La  seule  ditl'érence  ({ue  nous  ayons  remarquée  est  un 
peu  plus  dVtrnemcntatiuii  ù  une  porte  qui  conduit  de  la 
tour  voisine  du  Loj^is  du  Kt)i  (  qui  semble  avoir  remplace 
If  logcinout  du  gouverneur  romain)  au  chemin  de  ronde 
qui  suivait  renciûnte  on  traversant  chaque  tour. 

Nous  avons  fait  le  dessin  d'une  de  ces  tours,  du  côté  de 
l'intérieur;  elle  est  vue  des  jardins  qui  occupent  main- 
tenant en  partie  les  restes  d'une  ancienne  abbaye. 

Un  autre  dessin  reproduit  la  tour  de  rËvéché,  vue  de 
l'extérieur,  et  un  troisième  une  construction  en  grand 
appareil  qui  semble  être  l'ancien  castrum  romain.  \jcs 

(li  ro/j///T.v  ./rr/iêo/ofjique  d"  France,  WWW  session. 
U()0,  pa<;rs  :io-io. 


438  CONGRÈS  ARGHÉ0L06I0UE  DE  FRANGE. 

bâtiments  qui  le  masquent  et  les  broussailles  qui  en 
obstruent  les  abords  expliquent  comment  cette  curieuse 
partie  du  Logis  du  Roi  semble  avoir  jusqu'ici  échappé  à 
l'étude. 


I. 


TOUR  DE  l'ÉVÉCHÉ. 

Une  des  tours  les  mieux  conservées  est  celle  oontn 
laquelle  vient  s'appuyer  l'évéché,  dans  la  grande  nlla 
duquel  se  sont  tenues  les  séances  du  Congrèi  61  êxnA  tal 
fenêtres  en  style  de  la  Renaissance  s'aperçoÎTOOt  dam  lij 
dessin. 

La  face  principale  a  subi  de  nombreuses  modifli 
Comme  au  Mans,  il  semble  que  cette  tour  a  été 
mais  le  côté  que  montre  le  dessin  est  intact  juiqii*u 
met,  saufquelques  ouvertures  qui  ont  été  bouchéea  et] 
placées  par  d'autres  plus  modernes. 

Les  ressemblances  entre  les  murs  de  Senlis  et  ceox 
Mans,  maintenant  presqu'entièrement  détruits,  lODt 
nombreuses;  cependant  les  chaînes  de  briques  eontM;^^ 
moins  grand  nombre  à  Seiilis,  et  ne  se  composent  ifm  di 
deux  rangs.  De  plus  au  Mans,  les  tours  sont  comat  lu 
courtines,  construites  en  petites  pierres  cubiques.  A  SpUl 
on  a  employé  un  appareil  dans  lequel  une  pierre  euUqiie 
alterne  avec  une  pierre  plus  large.  Ces  pierres,  ainsi  que 
celles  des  archivoltes,  portent  les  traces  des  ooups  de 
hachette  qui  les  ont  façonnées,  et  qui,  inclinés  alternati- 
vement dans  les  deux  sens,  reproduisent  en  petit  la  figure 
des  arêtes  de  poisson. 

La  base  de  toutes  les  tours  parait  pleine. 


XtlV   SKïïlO».    A    S^LIS. 


440  CONGRÈS  ARCIIÉOLOG10U£  DE   FHANGE. 


II. 


TOUU  DU  CHATEAU,   VUE  INTÉRIEURE. 

Dans  ce  doâsin  je  n'ai  point  tenu  compte  d'une  con- 
struction moderne  servant  d'escalier,  qui  donne  mainte- 
nant accès  à  une  grande  salle  gothique,  dont  le  gable  se 
pose  sur  la  courtine  et  vient  s'appuyer  contre  la  tour 
romaine.  Cette  salle  contient  une  belle  charpente  et  une 
vaste  cheminée  dont  on  voit  le  tuyau  dans  le  dessin  ;  elle 
est  éclairée  sur  le  rempart  par  une  haute  fenêtre  à  double 
croisillon,  et  sur  son  flanc  septentrional  on  voit  encore 
deux  arcades  bouchées  appartenant  à  la  grande  salle  du 
bâtiment  connu  sous  le  nom  de  Logis-du-Roi. 

En  même  temps  probablement  que  l'on  bâtissait  cette 
salle,  on  faisait  subir  à  la  tour  de  nombreuses  modifica- 
tions. Ainsi,  pour  la  convertir  en  chapelle,  une  grande 
fenêtre  ogivale  fut  ouverte  à  la  place  qu'avait  dû  occuper 
une  des  fenêtres  romaines  latérales.  Un  gable  fut  élevé,  et 
une  fenêtre  h  deux  baies  ouverte  à  l'étage  supérieur,  du 
côté  de  l'intérieur,  près  d*une  ouverture  romaine  qui 
semble  avoir  servi  de  porte.  Kt,  en  cifet,  on  ne  voit  pas  quel 
accès  devait  présenter  l'étage  supérieur  de  ces  tours,  ai  on 
n'y  montait  pas  de  l'intérieur  de  la  place  au  moyen  d'une 
échelle.  Au-dessous  de  cette  porte  on  en  perça  aussi  une 
autre  donnant  accès  de  l'intérieur  de  la  place.  La  conatruc- 
tion  romaine  decette  tour  est,  du  reste,  bien  conservée  dans 
la  portion  que  montre  le  dessin. 


442  GONCaÈS  ABGHÉOLOGIOra  DE  FRAMCS. 

m. 

LE  GASTRUV. 

•  Toutes  les  constructions  que  nous  a^ons  examinées  jus- 
qu'ici sont  en  petit  appareil  et  semblent  appartenir  aux 
bas  temps  de  la  domination  romaine.  Nous  nous  tron- 
çons maintenant  devant  un  édifice  construit  en  pierres  de 
grand  appareil  et  qui  doit  remonter  à  une  époque  plus 
ancienne. 

Il  ne  reste'plus  de  cet  édifice  que  son  soubassement,  8u^ 
monté  d'un  couronnement  plus  moderne.  Sa  forme  semble 
avoir  été  celle  d'un  parallélogramme  défendu  par  trois 
tours  carrées  sur  chaque  face  ;  l'espace  entre  les  tours  a  été 
plus  tard  relié  par  des  arcs  portant  un  parapet  au-dessous 
desquels  on  voit  des  ouvertures  rappelant  les  assommoirs 
qui  surmontent  quelquefois  les  portes  des  châteaux  du 
moyen  âge. 

Une  entaille  a  été  faite  à  une  époque  assez  récente  à  la 
tour  du  milieu  et  une  ouverture  pratiquée  dans  la  cour- 
tine ;  nous  avons,  dans  le  dessin,  rétabli  cette  partie  d'après 
des  preuves  certaines.  Malgré  les  constructions  et  les  brous- 
sailles qui  cachent  le  côté  représenté,  et  que  nous  avons 
dû  faire  disparaître  dans  notre  dessin  ,  nous  pouvons  en 
garantir  l'exactitude.  Des  deux  autres  côtés,  l'un  est  mas- 
qué par  des  maisons,  Tautre  est  enfoui  sous  des  remblais; 
ils  doivent,  ce  semble,  avoir  eu,  au  moins  celui  qui  longe 
la  rua,  une  disposition  semblable. 

Après  la  communication  de  cette  note  et  des  beaux  des- 
riiiB  qui  l'accompagnent,  la  parole  est  donnée  à  M.  Bosc, 
•or  les  Arènes  de  Senlis. 


XL\y*  SESSION,  A  SENLIS.  -443 


Ck>nf  érence  sur  les  amphithéâtres  en  géné- 
ral et  sur  les  arènes  de  Senlis  en  parti- 
culier (1). 

On  a  bien  voulu  me  demander  de  faire  une  conférence 
sur  las  arènes  de  Senlis,  mais  pris  au  dépourvu  et  sans 
documents,  je  me  serais  trouvé  fort  embarrassé  sans  l'obli- 
geance de  M.  de  Laurière  qui  a  mis  à  ma  disposition  de 
nombreuses  photographies  des  amphithéâtres  romains. 
C'est  à  l'aide  de  celles-ci  que  je  vais  essayer  d'établir  une 
corrélation  entre  les  anciens  amphithéâtres  et  celui  de 
Senlis. 

Disons  d'abord  que  les  amphithéâtres  sont  de  deux 
sortes  :  ceux  qui,  émergeant  du  sol,  ont  deux  ou  trois  étages, 
comme  les  arènes  de  Nîmes,  d'Arles  et  le  Colisée,  ou  bien 
ceux  qui  sont  creusés  dans  le  sol.  Dans  ce  dernier  cas,  le 
mur  qui  soutient  les  gradins  supérieurs  et  celui  du  podium 
tonnent  alors  toute  leur  architecture.  Il  n'existe  point  d'ar- 
cides,  point  d'entablement  ni  aucune  autre  décoration 
vchitecturale  extérieure. 

Étudions  le  premier  type  ;  on  peut  le  reconstituer  ainsi. 
Les  gradins  partent  à  {""SO  ou  i°*60  au-dessus  du  sol  de 
Ttrène  ;  ils  sont  divisés  en  plusieurs  zones  horizontales, 
(ieoz  ou.  trois  ordinairement.  Ces  divisions  séparées  entre 
(Iles  par  un  large  palier  se  nomment  précinctions;  dans 
chacune  d'elles,  les  gradins  sont  ordinairement  en  nombre 
impair. 

La  première  précinction  comprend  ordinairement  sept 
nngs  de  gradins.  Elle  était  réservée  aux  sénateurs  et  aux 

[I)  Résamé  par  le  comte  de  Man^y,  secrétaire  général. 


4U       GONGRÂS  ARCniOLOGIQUE  DE  PRANOB. 

autres  autorités  civiles;  à  gauche  était  la  loge  destinée  aux 
empereurs  ou  aux  proconsuls  dans  les  provinces.  ^ 

La  deuxième,  renfermant  un  nombre  beaucoup  plus 
considérable  de  gradins,  onze  ou  treize,  était  abandonnée 
aux  soldats  et  au  peuple.  La  troisième,  enfin,  était  affectée 
aux  esclaves  et  aux  femmes.  Les  places  de  cette  division 
étaient  souvent  abritées  par  une  sorte  de  portique,  couvert 
en  pierre  comme  le  reste  du  monument,  ou  bien  en  char- 
pente. 

Un  ensemble  de  dispositions  remarquables,  ménagées 
dans  la  construction  permettait  aux  spectateurs  d'accéder 
rapidement  aux  précintions  et  de  la  débarrasser  de  même. 
Au  rez-de-chaussée  c'était  un  vaste  couloir  circulaire  dans 
lequel  débouchaient  les  escaliers  et  les  vomitoires.  Dans 
les  étages  supérieurs,  la  même  disposition  existait  égale- 
ment, mais  dans  des  proportions  de  plus  en  plus  restreintes 
au  fur  et  à  mesure  qu'on  s'élevait. 

Aux  plates  -  formes  supérieures  les  vomitoires  débou- 
chaient entre  les  gradins  et  sur  les  paliers  des  précintions 
par  de  petites  portes,  symétriquement  placées.  L'espace 
compris  entre  deux  rangées  de  portes  se  nommait  cuneuSf 
parce  qu'il  affectait  la  forme  d'un  coin  ou  trapèze.  L'en- 
semble des  gradins  s'étageant  de  bas  en  haut,  formait  une 
immense  cuve  qu'on  nommait  cavea;  elle  était  circon- 
scrite dans  sa  partie  basse  par  le  mur  du  podium;  le  fond 
de  la  cavea,  c'était  l'arène  elle-même,  c'est-à-dire  le  sol 
sur  lequel  se  donnaient  les  spectacles. 

Arrivés  à  ce  point  de  notre  description ,  nous  devons 
maintenant  vous  parler  de  la  canalisation  des  eaux.  C'est 
une  étude  qui  n'a  été  faite  jusqu'à  présent  par  aucun 
auteur.  Nous  la  poursuivrons  à  l'aide  de  l'amphithéâtre  de 
Nîmes,  car  de  tous  les  amphithéâtres  que  nous  avons 
visités  en  France,  en  Italie  ou  en  Afrique,  c'est  le  seul 


XUY*  SESSION,   A    SENLIS.  445 

assez  complet  pour  nous  renseigner  complètement. — Sup- 
posons un  violent  orage  éclatant  sur  un  amphithéâtre,  voici 
ce  qui  se  passait.  Les  gradins  étaient  légèrement  en  pente, 
l'eau  8*écoulait  donc  de  la  partie  supérieure  de  la  cavea  à 
la  partie  inférieure;  mais  à  chaque précintion  elle  s'arrê- 
tait sur  les  paliers  qui,  de  distance  en  distance,  étaient 
percés  de  petites  ouvertures  au  pied  du  gradin  qui  joignait 
immédiatement  le  palier.  Ces  ouvertures  absorbaient  Teau 
et  la  dirigeaient,  par  de  petites  canalisations,  dans  des 
tuyaux  de  descente  qui  étaient  pratiqués  dans  les  piliers 
massifs  de  maçonnerie  qui  supportaient  les  arcades  des 
couloirs.  Le  trop  plein  des  eaux  de  la  cavea  s'écoulait 
jusqu'au  mur  du  podium,   et  de  là  se  répandait    dans 
l'arène  qui  possédait,  au  bas  du  mur  du  podium,  un 
canal  circulaire  ^couvert,  nommé  euripe,  lequel  avait,  de 
distance  en  distance,'  des  ouvertures  grillées  permettant 
d'absorber  les  eaux  pluviales.  Une  fois  dans  le  canal  de 
leuripe,  les  eaux  s'écoulaient  dans  un  égout  placé  en  con- 
tre-bas du  sol  de  l'arène;  c'est  ce  même  égout  qui  recevait 
les  eaux  des  conduites  pratiquées  dans  les  piliers  massifs 
de  maçonnerie  supportant  les  arcades.  Quand  on  donnait 
desnaumachics  dans  les  amphithéâtres,  comme  nous  allons 
le  voir  bientôt  ;  les  eaux  débouchaient  dans  l'arène,  dont 
les  ouvertures  de  l'euripe  étaient  hermétiquement  formées; 
pour  vider  le  vaste  bassin  compris  entre  les  murs  du 
podium,  on  ouvrait  les  bouches  de  l'euripe  ou  une  énorme 
bouche  ou  regard,  pratiqué  au-dessus  de  l'égout  princi- 
pal ou  égout  collecteur. 

Ou  donnait  dans  les  amphithéâtres  des  combats  de  gla- 
diateurs et  dianimaux ,  et  rarement  des  naumachies.  Ils 
servaient  aussi  pour  des  représentations  équestres  analo- 
gues à  celles  que  l'on  donne  dans  nos  cirques,  surtout  des 
simulacres  de  bataille;  c'est  ce  qui  explique  les  substruc- 


-416      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIOUA  BB  FRANGE. 

tions  que  possèdent  beaucoup  d^amphitbéàtres,  tel  que  1^ 
Ck>li8ée;  mais  où  ces  substructions  sont  le  plus  considéra^ 
blés,  c'est  à  l'ampbitbéàtre  de  Pounoles  que  j'ai  visita 
encore  cette  année  au  mois  de  janvier. 

Comment  cbassait-on  les  animaux  dans  rtrène?  Par  da^ 
couloirs  étroits,  dans  lesquels  ils  étaient  forcés  d'avancer  -s 
sans  pouvoir  se  retourner.  Un  bestiaire  armé  d*un  triden  '^ 
de  fer  poussait  l'animal  jusque  dans  l'arène.  On  l'avait  faiart 
sortir  de  sa  loge  {career)  et  on  l^avait  attiré  dans  ce  couloir 
étroit  en  lui  faisant  sentir  un  appât  quelconque  suspendue 
dans  le  couloir;  une  fois  l'animal  engagé  dans  ce  couloir^ 
les  bestiaires,  armés  de  leur  trident,  le  poussaient  en 
avant. 

Dans  le  rez-de-chaussée  des  amphithéâtres,  il  existait  de 
petites  loges  pour  les  acteurs,  les  bestiaires  et  les  gladia- 
teurs; on  y  accédait,  soit  par  les  vomitoires  du  res-de- 
chaussée,  soit  par  le  grand  couloir  de  cet  étage.  Dans  ces 
loges,  les  acteurs  se  grimaient  ou  se  costumaient,  les  lut- 
teurs et  les  gladiateurs  se  frottaient  d'huile  pour  assouplir 
leur  peau  et  leurs  membres.  De  chaque  côté  des  princi- 
pales portes,  celles  qui  se  trouvaient  dans  le  grand  axe 
de  l'ellipse,  il  y  avait  également  des  loges  plus  grandes 
qui  remplissaient  l'office  de  ce  que  nous  nommons  dans 
nos  théâtres  modernes  foyers  des  artistes.  C'est  dans  ces 
loges  que  les  acteurs,  les  gladiateurs,  les  bestiaires  atten- 
daient le  signal  des  représentations  ou  des  combats.  Dans 
les  grands  amphithéâtres  il  existait  également  des  portes 
dans  le  petit  axe  de  Tellipse.  Les  portes  du  grand  axe  se 
nommaient  Tune  porta  sanamvaria,  et  Tautre  porta  mor- 
tualis  ou  libitinerms;  les  gladiateurs  bien  ^portants  ren- 
traient dans  leurs  loges  par  la  première  porte;  par  la 
seconde,  au  contraire,  on  faisait  sortir  ceux  qui  avaient  été 
tués  en  combattant.  Dans  les  arènes  de  Senlis  les  portes 


XUY*  SBSaiON,  A  SBNU8.  447 

du  petit  axe  sont  remplacées  par  deux  cellœ,  Tune  à  droite, 
Tantie  à  gauche;  c'est  un  exemple  très-rare,  mais  non 
unique,  car  les  arènes  de  Lutèce  possédaient  également,  au 
moins  du  cAté  fouillé,  une  cella  pareille. 

Parlons  maintenant  des  naumachies;  certains  archéo- 
logues prétendent  qu'on  n'a  jamais  donné  ce  genre  de 
spectacle,  d'autres  qu'on  en  donnait  fort  souvent.  Nous  ne 
pouTons  être  aussi  absolu  dans  un  sens  ou  dans  Tautre;  il 
s'agit  de  s'entendre  et  de  distinguer.  Évidemment,  dans 
les  pays  privés  d'eau  il  n'y  avait  pas  moyen  de  créer  ces 
beisins  artificiels.  Dans  les  autres,  on  établissait  une  cana- 
lisation, qui,  à  l'aide  d'un  va-et-vient,  permettait  d'ame- 
ner et  de  retirer  les  eaux. 

Les  naumachies  ne  semblaient  pas  offrir  une  distraction 
suffisante,  et  ne  pouvaient  donner  l'aspect  d'un  vrai  com- 
bat naval,  aussi  furent-elles  abandonnées  au  ii*  ou  au 
m*  siècle,  et  les  amphithéâtres  ne  servirent  plus  que  pour 
des  combats. 

On  ne  retrouve  des  représentations  de  naumachies  que 
sor  les  médailles  d'Auguste;  après  ce  prince,  il  n'en  est 
pins  fait  mention. 

Si  nous  abordons  maintenant  la  construction  des  amphi- 
théâtres, nous  voyons  que  jusqu'au  i*'  siècle,  ils  ne  sont 
exclusivement  construits  qu'en  charpente.  Plus  tard,  on 
employa  de  la  pierre  et  même  du  marbre  à  leur  construc- 
tion  et  en  proportion  considérable.  Aussi  ne  pouvaient-ils 
être  édifiés  que  si  de  riches  carrières  d'une  exploitation 
bcik  se  trouvaient  à  proximité  de  l'emplacement  choisi. 
Da  reste,  les  matériaux  employés  à  ces  immenses  travaux 
lont  si  considérables  que  leurs  ruines,  bien  qu'exploitées 
depuis  le  moyen  âge  et  presque  jusque  dans  ces  dernières 
innées,  leurs  ruines,  disons-nous,  exploitées  pendant  tant 
de  siècles,  ont  fourni  des  matériaux  à  un  grand  nombre 


4lâ  CajSùkès  aslcréûum;iijuk  de  frxnce. 

d'édifices  el  île  mais«'*ns:  et  malgré  celle  déTa$lalîoa  et oe 
gaspillage,  ce  qui  nous  re>te  des  aniphith^tKS  niio^ 
nous  eu  impose  encore  par  sa  graude  masse  et  les  énonnes  » 
déhris  de  matériaux  qui  y  sont  accumulés. 

Les  dimensions  et  les  qualités  des  pierres  employées 
varient,  comme  de  raison,  suivant  les  localités. 

Dans  les  beaux  amphithéâtres,  les  assises  ont  I  mMitde 
hauteur  sur  ^"'50,  3  et  jusqu'à  A  mètres  de  largeur.  DiU 
les  amphithéâtres  secondaires,  les  appareils  sont  de  moin- 
dre dimension,  quelquefois  même,  comme  à  Senlis,  pir 
exemple,  les  coustructcui^  n*ont  employé  que  du  moelloo 
sinillé,  c'està-dirc  les  matériaux  les  plus  petits  après  U 
brique.  L'amphithéâtre  d*El-Djem  était  en  marbre  blanc; 
celui  de  Pola,  en  Istrie,  avait  ses  gradins  également  en 
marbre. 

Quant  à  l'appareil,  il  était  de  tous  genres;  il  était  réti- 
culé, en  épi,  en  mocllun  smillé,  piqué,  etc.,  suivant  l^ 
localités.  On  faisait  plus  ou  moins  bien  les  choses.  A  Poii>' 
péï,  ramphilhéâtre  est  en  petit  appareil  ;  il  en  est  de  méio^ 
dans  l'un  des  ainpliidiéàlres  les  plus  considérables,  celiB* 
de  Kl-i)jcm,  en  Tunisie,  dont  hs  dimensions  sont  presque 
égales  à  celles  du  Coliscc  et  de  l'amphithéiltre  deCapoue^ 

Les  Homuins  ne  roclieMhuieut  point  l'économie  dan^ 
leurs  constructions,  mais  ils  ne  la  fuyaient  point;  ccr-' 
taines  parties  de  leurs  aniphithéatros  peuvent  en  témoigner. 
Ainsi,  dans  bien  des  cas,  au  lieu  d'arcades,  ils  employaient 
des  plates- bandes  fi>nnées  seulement  de  deux  ou  trois  blocs 
de  pierre  ou  claveaux;  cela  se  voit  à  l'amphithéâtre  de 
Pola,  dont  nous  venons  de  parler  ;  souvent  même  la  plate- 
bande  elle-Hiéme  était  remplacée  par  un  simple  linteau 
de  pierre  de  i  mètres  à  i"oO  de  lungueur,  sur  0*70  de 
largeur.  Dans  ce  cas,  iri'-normos  cnrlvaux  on  pierre  dimi- 
nuaient la  |>t>rtée  du  linteau.  Cet  agencement  peut  se  voir 


XLIY'   SESSION,   A  SKNLIS.  449 

encore  aujourd'hui  au  couloir  du  deuxième  étage  de  l'am- 
phithéâtre de  Nimes,  où  plusieurs  linteaux  s'étaut  rompus 
sous  une  forte  charge,  on  a  été  obligé  d'en  relier  les  mor- 
ceaux par  des  liens  et  des  étriers  en  fer. 

La  décoration  extérieure  des  amphithéâtres  était  simple 
et  grandiose;  elle  consistait  en  un  ou  deux  rangs  d'arcades, 
quelquefois  trois,  superposées.  Chaque  étage  avait  un  ordre 
différent  d'architecture,  lesquels  dans  les  amphithéâtres 
élevés  étaient  couronnas  d'un  attique,  qui  correspondait,  à 
l'intérieur,  à  la  mmma  cavea,  ou  gradins  supérieurs. 

Les  spectateurs,  dans  ces  vastes  édifices,  étaient  protégés 
des  rayons  ardents  du  soleil  par  une  grande  tente,  ou  vcla- 
rium,  qui  a  fourni  matière  à  de  longues  discussions.  Ce 
velarium  était-il  posé  verticalement  où  horizontalement? 
couvrait-il  totalement  ou  partiellement  la  surface  supé- 
rieure de  la  cavea?  ^  toutes  ces  questions  nous  rép<ui- 
«Irons  affirmativement.  Eu  effet,  il  existait  dans  les  petits 
amphithéâtres  des  velaria  horizontaux  ;  dans  d'autres  ils 
étaient  posés  verticalement  sur  des  mâts  (ma/t),  du  côté 
du  soleil,  et  au  fur  et  à  mesure  que  celui-ci  tournait,  des 
marins  faisaient  avancer  le  velarium  vertical,  qui  proje- 
tait une  grande  ombre  sur  la  cavea  et  abritait  ainsi  les 
spectateurs  contre  les  ardeurs  du  soleil. 

Dans  les  grands  amphithéâtres,  à  Pouzzoles,  à  Capoue,  h 

liome,  le  velarium  ne  couvrait  pas,  ne  pouvait  pas  couvrir 

totilementla  cavea;  cela  se  comprend,  car  une  aussi  vaste 

iorfaoe  de  toile  aurait  donné  trop  du  prise  au  vent.  Ce  ne 

défait  être  probablement  qu'une  large  bande  circulaire 

recouvrant  seulement  la  summa  cavea.  Le  musée  de  Naples 

poHède  une  peinture  enlevée  sur  un  mur  de  Pompéï,  et 

sur  laquelle  on  voit  représenté  un  velarium  horizontal 

pofé  au  sommet  des  mœnia  couronnant  la  dernière  pré- 

rJDction. 

XLIV   SESSION.  iV) 


450  CONGRÈS  ARGUÉOLOGIOUE  DE   FRANGE. 

Presque  tout  ce  que  nous  venons  de  dire  des  amphi- 
théâtres peut  s'appliquer  aux  théâtres  dont  les  dispositions 
sont  identiques,  parce  que  ceux-ci  ne  sont  que  la  moitié 
des  amphithéâtres. 

Nous  allons  enfin  étudier  les  arènes  de  Senlis,  qui  ont 
beaucoup  d'analogie  avec  celles  de  Lutèce.  Nous  les  avons 
visitées  de  nouveau  ce  matin  avec  M.  Vernois,  Tauteurde 
leur  découverte,  le  pater  arenarum,  comme  on  Ta  sur- 
nommé. Les  deux  amphithéâtres  sont  creusés  dans  la  terre; 
ils  possèdent  l'un  et  l'autre  des  cellules  identiques  placées  à 
l'extrémité  du  petit  axe  et  ayant  leurs  portes  d'entrée  dans 
le  mur  du  podium. 

Les  fouilles  de  Lutèce  ont  permis  de  fixer  la  date  de  leur 
construction  au  m"  siècle,  et  je  crois  que  l'on  doit  assi- 
gner la  même  date  à  celle  dos  arènes  de  Senlis. 

Dans  les  unes  et  dans  les  autres  nous  voyons  deux  portes 
d'entrée.  A  Senlis  on  retrouve  les  cellas;  à  Lutèce,  l'une 
est  visible  et  l'autre  est  probablement  enfouie  dans  la  par- 
tie du  terrain  appartenant  à  un  couvent.  Malheureuse- 
ment, on  a  dû  abandonner  ces  fouilles  si  intéressantes  p^r 
suite  de  la  guerre  survenue  en  4870. 

Combien  Tamphithéâlre  de  Lutèce  comprenait- il  <!•* 
places?  C'est  une  question  qu'il  a  été  difficile  de  trancher, 
d'autant  qu'on  ne  connaît  pas  son  diamètre  extérieur.  A 
Senlis,  on  peut  évaluer  de  9  à  iO,()00  le  nombre  des  spec- 
tateurs. Un  des  membres  du  Congrès  a  prétendu  que  les 
arènes  de  Senlis  n'ont  pu  contenir-!  ou  5,000  spectateurs. 
Il  s'appuie  sur  ce  que  la  population  de  la  cité  gallo- 
romaine  ne  devait  compter  que  ce  nombre  d'habitants.  H 
s'appuie  aussi  sur  un  calcul  erroné  du  nombre  des  gra- 
dins. 

En  réponse  à  ces  affirmations,  je  dirai,  en  premier  lieu, 
que  les  amphithéâtres  n'étaient  pas  faits  seulement  en  vue 


XUY*  SESSION,   ▲  SENUS.  tôi 

le  ne  contenir  que  la  population  d'une  ville,  mais  bien  celle 
le  toute  une  contrée.  Ensuite,  pour  calculer  le  nombre  de 
ftlacef,  il  faudrait  multiplier  le  périmètre  des  gradins  par 
p  inradin  du  milieu  de  la  cavea;  or,  dans  l'espèce,  deux 
léments  font  défaut  pour  établir  ce  calcul  : 

1*  La  hauteur  des  arènes  ;  ^  la  longueur  du  gradin  et 
lu  palier  de  la  précinction  ;  si  toutefois  les  arènes  de  Sen- 
is  en  possédaient  une,  ce  que  je  suis  disposé  à  croire. 

Parlons  maintenant  du  puits  :  sa  position  dans  l'arène 
i  fort  intrigué  les  membres  du  Congrès.  J'avoue,  Mes- 
ieurs,  que  dans  les  très-nombreux  amphithéâtres  que  j'ai 
'isités,  je  n'ai  vu  dans  aucun  un  puits  pareillement  placé. 
Quelle  était  sa  destination?  Fournissait-il  de  l'eau,  ou 
»ien  servait-il  à  dessécher  le  sol  de  l'arène.  Un  de  nos  col- 
ègues  du  Congrès  a  cru  pouvoir  trancher  la  question;  il 
i  dit  que  ce  puits  ne  pouvait  être  qu'un  puisard,  puisqu'il 
le  pouvait  fournir  de  l'eau,  à  cause  de  la  nature  du  ter- 
lin  où  il  se  trouvait;  et  la  preuve,  a-t-il  ajouté,  c'est  qu'au- 
oard'hui  encore  il  n'en  possède  pas.  Je  ne  saurais  être 
lussi  afflrmatif,  et  je  répoudrai  :  Si  nous  sommes  en  face 
l'un  puisard  pour  drainer  le  terrain,  d'un  puits  de  dessè- 
chement, il  est  bien  large;  en  effet,  ce  genre  de  puits  n'a 
guère,  ordinairement,  que  1  mètre  ài^'IOde  diamètre,  et 
le  outre  mesure  2  mètres. 

Je  croirais  plutôt  que  c'est  un  puits  ordinaire.  On  a  beau 
objecter  qu'il  est  creusé  dans  des  couches  calcaires,  ceci  ne 
pnmve  rieo,  car  la  moindre  fissure,  le  moindre  filon  ter- 
reux traversant  la  couche  calcaire  peut  fournir  une  ou 
plusieurs  source^  capables  d'alimenter  un  puits.  Si  celui- 
ci  ne  pos;ȏde  pas  actuellement  de  feau,  cela  ne  prouve 
rien  encore,  puisque  le  forage  d'un  puits  voisin  plus  pro- 
fond que  celui  des  arènes  a  pu  dessécher  ce  dernier.  Du 
reste,  il  ne  faut  piis  s*(''tonner  qu'un  puits  comblé  depuis 


452       CONGRÈS  ARGHéOLOaiOUE  DE  FRANCK. 

tant  de  siècles  ait  vu  tarir  la  source  qui  Falimentait. 

Aussi,  Messieurs,  je  crois  qu'il  est  prudent  de  réserver 
provisoirement  cette  question  ;  malgré  cela,  il  est  plus  pro- 
bable que  nous  avons  un  puits  ordinaire,  car  on  avait 
l)esoin  d'eau  dans  un  amphithéâtre,  soit  pour  donner  à 
boire  aux  chevaux,  aux  animaux,  soit  pour  laver  les  bles- 
sures des  gladiateurs  et  autres  usages.  A  l'amphithéâtre 
de  Nîmes  il  existe  un  puits ,  mais  il  est  tout  près  des  car- 
cères,  c'est-à-dire  dans  une  tout  autre  position  que  celui 
de  Senlis. 

Les  colonnes.  —  Celles  que  nous  retrouvons  sur  l'arène 
sont  de  diamètres  différents,  O^'ÔO  à  O'^iO.  Si  ces  colonnes 
étaient  en  plus  grand  nombre  et  si  elles  étaient  d'un  plus 
petit  module,  je  dirais  que  l'amphithéâtre  devait  être  cou- 
ronné d'un  portique,  mais  les  éléments  de  ce  portique  nous 
manquent;  en  effet,  jusqu'ici  on  n'a  retrouvé  aucune  trace 
d'entablement.  Aussi  chercherons-nous  â  placer  les  colonnes 
ailleurs.  Les  grandes  ont  dû  servir  à  la  décoration  des 
portes  d'entrée  et  supporter  un  fronton,  quatre  à  chaque 
porte;  les  petites  à  la  décoration  d'une  loge  réservée  aux 
autorités,  à  l'édicule  du  proconsul.  Il  reste  encore  un  point 
à  éclaircir,  celui  d'une  énorme  pierre  relancée  dans  le  mur, 
près  du  puits;  on  veut  la  comprendre  dans  la  construc- 
tion primitive  :  je  ne  suis  pas  aussi  affirmatif  et  n'oserais 
dire  qu'elle  date  de  l'origine  du  monument. 

On  a  voulu  conclure  de  la  présence  du  charbon  qu'on  y 
incinérait  les  morts  :  je  ne  vois  là  qu'une  réserve  pour 
enfermer  la  provision  de  charbon  d'un  habitant  dont  la 

« 

maison  était  construite  sur  le  sol  des  arènes.  La  grande 
loge  n'est  dans  aucun  axe ,  cependant  elle  se  trouve  tout 
près  de  la  porte  principale  où  les  gladiateurs  pouvaient 
venir  recevoir  les  récompenses  des  mains  des  proconsuls. 
Voici  tout  ce  que  m'a  suggéré  la  vue  des  arènes  de  Sen- 


.UIV**  SKbSIOA,   A  SJ&NL1S.  453 

ijs;  il  reste  bieu  des  points  à  éclaircir  dont  je  suis  le  pre- 
mier à  demander  l'explication. 

M.  Palustre,  après  s'être  tait  Tinterprètc  des  sentiments 
Ot*  rassemblée,  en  remerciant  M.  Bosc  de  l'intéressante 
conférence  qu'il  vient  de  faire,  prononce  à  son  tour  le  dis- 
cours suivant  : 


«  Mesdames,  Messieurs, 

«  De  même  que  le  voyageur,  après  un  long  chemin 
|iarcouru,  aime  à  repasser  dans  son  esprit  les  lieux  qu'il  a 
visités,  les  circx>nstauceâ  diverses,  les  incidents  agréables 
oti  fâcheux  qui  ont  signalé  sa  course,  il  m'eût  été  doux  de 
jeter  un  coup  d'tvi)  en  arrière,  de  résumer  les  discussions 
qui  nous  ont  tenus  attentifs  depuis  huit  jours,  d'en  faire 
de  nouveau  passer  sous  vos  yeux  les  points  les  plus  sail- 
lants, de  vous  rappeler  les  souvenirs  que  graveni  dans  noi^ 
CŒurs  le  sympathique  accueil  fait  au  Congrès  par  la  noble 
cité  de  Senlis,  enfin  de  supputer  les  résultats  qu'ont  retiré 
Ici  études  archéologiques  de  nos  travaux  et  de  nos  entre- 
tiens. 

•  Mais  le  temps  presse,  et  d'ailleurs  nous  nous  serions 
lait  un  reproche  d'enlever  le  moindre  instant  à  la  brillante 
conférence  que  vous  venez  d'entendre  et  qui  ne  sera  |>as 
uu  des  souvenirs  les  moins  agréables  du  Congrès.  A  cette 
uccasiou,  permettez-moi,  Messieurs,  de  remercier  la  Société 
centrale  des  Architectes  qui,  chaque  année,  veut  bien  nous 
envoyer  l'un  de  ses  membres  les  plus  éminents  :  M.  Hévoil 
Tau  passé,  M.  Bosc  aujourd'hui.  Les  choix  ne  pouvaient 
itre  meilleurs. 

«  Je  ne  saurais,  cependant,  garder  un  silence  complet. 


454      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  1»£  FRAACK. 

et  VOUS  m'en  voudriez  certainement  si  je  négligeais  de  vous 
signaler  tout  au  moins  les  travaux  qui  ont  le  pluscaptÎTé 
votre  attention  et  le  mieux  mérité  vos  su&rages. 

«  Dans  les  sciences  préhistoriques,  vous  avez  surtout 
remarqué  ceux  de  MM.  Millescamps,  Habn  et  de  Marioourt 
qui,  dans  des  études  serrées  et  débarrassées  de  tous  détails 
inutiles,  nous  ont  révélé  d'intéressantes  découvertes  et 
montré  où  en  sont,  sur  ce  point,  dans  la  région  de  Senlis. 
les  différentes  questions  mises  à  Tordre  du  jour. 

«  Pour  tout  ce  qui  a  rapport  à  la  domination  romaine, 
les  développements  ont  été  plus  considérables,  mais  nui 
ne  se  plaindra  d'avoir  à  diverses  reprises  entendu  MM.  Clau- 
del et  Hayaux  du  Tilly ,  non  plus  que  M.  de  Caix  de  Saiut- 
Aymour,  dont  le  nom  demeurera  attaché  à  la  découverte 
du  temple  de  Ualatte  et  figurera  bientôt,  nous  Tespérons, 
en  tête  d'une  belle  monographie  de  ces  restes  importants. 

«  Mais,  de  toutes  les  discussions,  la  plus  vive  et  la  plus 
émouvante,  si  je  puis  m'exprimer  ainsi ,  a  été  celle  qu'a 
soulevé  l'apostolat  de  saint  Rieul.  Disons-le,  toutefois.» 
MM.  deMeissas  et  Muller,  en  désaccord  sur  des  points  de 
détail,  semblent  au  fond  partager  les  mêmes  idées,  et  l'opi-^ 
nion  d'après  laquelle  le  pagus  silvanecienm  aurait  été  évan— 
gélisé  au  T'  siècle,  n'a  pas  trouvé  dans  cette  enceinte  d 
sérieux  défenseurs. 

a  Le  moyen  âge  a  été  négligé,  je  l'aivu  avec  peine,  et  sau 
UD  mémoirede  M.  AnthymeSalnt-Paul,  mémoire  qui,  uou 
y  comptons  bien,  sera  étendu  et  complété  par  son  auteur  — 
nous  n'avons  rien  à  vous  signaler.  El  à  ce  propos,  per  — " 
mettez-moi  d'adresser  un  reproche,  non  pas  aux  membr«*r  ^ 
présents  du  Congrès  qui,  tous,  ont  rempli  leur  devoir,  mai  ^ 
à  ceux  qui,  après  avoir  fait  de  brillantes  promesses,  avo»  ^ 
posé  d'importantes  questions  et  se  les  être  réservées,  n'or"^' 
donné  aucun  signe  de  vie  depuis  huit  jours.  C'est  aiu  ^ 


XLlV  si£:)S10N,    A  SENLIS.  4o5 

«]u'a  été  presque  mis  en  oubli  un  des  poiuts  principaux, 
et  surtout  le  côté  le  plus  original  de  l'archéologie  du  ter- 
ritoire de  Senlis,  territoire  où  les  monuments  du  xi*"  au 
y\V  siècle  sont  si  nombreux  ,  si  variés  et  si  charmants  de 
«tyle,  pays  qui  ne  saurait  être  négligé  sans  que  dans  l'his- 
toire iponumentale  ne  se  montrât  une  vaste  lacune.  C'est 
encore  à  mon  grand  regret  que  nous  avons  manqué  d'une 
étude  relative  aux  tablettes  de  cire  qui,  à  elles  seules,  sut- 
tiraient  pour  attirer  les  yeux  du  monde  savant  sur  la 
bibliothèque  de  Senlis,  non  plus  qu'aux  questions  d'art 
religieux  qu'il  est  plus  important  que  jamais  de  résoudre 
aujourd*liui.  Cette  absence  a  jeté  un  certain  désordre  dans 
U(»s  discussions  et  t'ait  que  le  compte  rendu  du  Congrès,  à 
>on  tour,  sera  loin  d'être  complet. 

a  J'ai  parlé  de  la  bibliothèque,  Messieurs;  cet  établissc- 
luent  a  trouvé  dans  M.  l'abbé  Vattier  un  historien  érudit 
«lui  a  su,  non-seulement  intéresser  ses  auditeurs,  mais 
encore  les  captiver  par  le  charme  de  ses  récits.  Le  môme 
auteur  a  étudié  les  compagnies  d'archers  et  d'arquebusiers 
de  Senlis,  et  son  mémoire  bien  conçu,  plein  de  dévelop- 
iwments  utiles,  mérite  tous  les  éloges  qu'il  a  déjà  reçus. 
Dans  cette  nomenclature  nous  ne  devons  pas  oublier 
MM.  Margry  et  Dupuis;  le  premier,  qui  nous  a  fourni  de 
•  urieuses  notes  sur  les  maisons  de  Senlis,  le  second,  un 
mémoire  sur  l'ancienne  géographie  de  la  région,  et  une 
note  sur  les  monnaies  trouvées  dans  les  arènes. 

m  Les  excursions  que  no.us  avons  laites  compteront  cer- 
tainement parmi  les  épisodes  les  plus  agréables  et  les  plus 
fructueux  du  Congrès.  Tous  ceux  qui  y  ont  pris  part  se 
leliciteront  des  notions  qu'ils  y  ont  acquises,  et  n'oublie- 
ront jamais  l'amabilité  avec  laquelle  toutes  les  porter  leur 
<iul  été  ouvertes,  à  Chantilly,  à  Chaalis,  à  Ermenonville. 
J'ai  dit  toutes;  je  ferai  une  exception,  car  à  Saint-Leu- 


456      CONORÈS  ARGHÊOLOOIOUK  DK  FRANCK. 

(l'Esserent,  vous  savez  que  nous  avons  en  vain  attendu  'à 
i*entrée  d'un  cloitre  que  sa  propriétaire  eût  dû  tenir  à  bon* 
neur  de  vous  montrer.  Il  est  vrai  que  nous  avons  trouva 
une  large  compensation  dans  la  manière  dont  M.  Selmer^ 
sheim  nous  a  introduits  dans  toutes  les  parties  de  l'inté^ 
ressante  église  dont  il  a  commencé  la  restauration. 

«  Gomment  oublier  la  magnifique  réception  faite  à  Gom  ^ 
piègne  par  la  Société  historique,  la  charmante  courtoisie 
de  son  président,  M.  Bottier,  qui  a  souhaité  la  bienvenue 
au  Congrès  en  des  termes  dont  chacun  retiendra  le  sou — 
venir.  Comment  surtout  ne  pas  rappeler,  avec  un  senti — 
ment  bien  voisin  de  l'admiration,  l'habileté  administra — 
tive,  pour  ainsi  cijre,  grâce  à  laquelle  M.  de  Mamy  a  sir 
ménager  au  Congrès  la  possibilité  de  tout  voir  en  un 
espace  de  temps  fort  restreint,  et  néanmoins  sauA  précipi- 
tation  et  sans  fatigue.  Sous  ce  rapport,  l'excursion  de  Gom- 
piègne  peut  être  donnée  pour  modèle.  Notre  inspecteur  de 
l'Oise  y  a  montré  qu'en  lui  l'organisateur  intelligent  se 
joint  au  profond  érudit.  Il  est  de  stricte  justice  de  rendre 
le  même  témoignage  à  M.  de  Caix  de  Saint-Aymour,  dont 
les  calculs  exacts  ont  permis  hier  au  Congrès  de  visiter,  de 
Senlis  à  Pierrefonds  et  de  Pierrefonds  à  Crépy,  une  dc:" 
régions  archéologiques  les  plus  curieuses  de  la  France. 

0  M.  Parker  a,  lui  aussi,  sa  bonne  part  dans  nos  souve- 
nirs de  gratitude.  Explorateur  infatigable  des  monuments 
de  l'antiquité,  il  a  su  choisir  les  plus  remarquables  et  eu 
a  fait  passer  la  figure  sous  les  yeux  d'une  nombreuse 
assemblée.  Cette  séance  comptera  parmi  les  plus  mémo- 
rables de  la  session. 

«  Le  Congrès  doit  également  les  plus  chaleureux  remer- 
ciements à  M.  Vatin  qui,  dans  les  fonctions  de  trésorier, 
nous  a  rendus  les  plus  grands  services. 

Enfin,  et  c'est  pour  nous  un  devoir  particulièrement 


XLIV*  SESSION,   A  SKNUS.  457 

agréable  à  remplir,  nous  exprimons  toute  notre  recon- 
naissance à  la  ville  de  Senlis  pour  l'accueil  sympathique 
et  empressé  fait  aux  membres  du  Congrès.  Cette  reconnais- 
sance doit  s'appliquer  avant  tout  à  la  Société  musicale  que 
nous  venons  d'entendre  à  nouveau ,  au  digne  maire  de 
Senlis,  M.  Odent,  toujours  prêt  à  nous  être  agréable, 
tufsi  bien  chez  lui  qu'au  siège  de  l'administration  qu'il 
dirige.  Nous  devons  enfin  remercier  les  dames  qui  ont  bien 
voulu  nous  accompagner  dans  nos  excursions,  malgré 
les  fatigues  qu'elles  auraient  pu  craindre,  si  l'habileté 
des  organisateurs  n'avait  su  presque  toujours  les  leur 
éviter. 

«  Merci  encore  aux  personnes  qui,  par  les  tableaux  dont 
files  ont  bien  voulu  se  séparer  quelques  jours,  par  l'envoi 
de  livres  ou  de  curiosités ,  ont  créé  autour  de  nous  une 
sorte  d'exposition  rétrospective  du  plus  grand  intérêt  à 
visiter. 

«  Qu'il  nous  soit  permis,  enfin,  d'exprimer  au  Comité 
archéologique  de  Senlis  nos  sentiments  les  plus  sympa- 
thiques et  de  le  remercier  avec  la  plus  vive  effusion ,  soit 
pour  le  rôle  dominant  qu'il  a  su  garder  dans  le  Congres, 
«oit  pour  le  talent  déployé  par  so^  membres,  et  notamment 
par  MM.  Vemois  et  Deshayes,  dans  la  décoration  de  la  salle 
où  nous  avons  tenu  nos  assises.  » 


M.  de  Marsy,  secrétaire  ^:énéral,  prtH:lamc  ensuite  les 
uoms  des  lauréats. 


458  COiMGHÈS  AHCHÈOLO(>lUU£   DE   FUANCE. 


Médailles  décernées  par  la  Société  fran- 
çaise d'Archéologie ,  dans  sa  séance  di:^ 
3  Juin  1877.  à  Senlis  : 

1"  Grandes  médailles  d'argent  à  l'eftigie  d'Arcisse  de£ 
Cauinont,  données  par  M">"  de  Caumont,  à  : 

M.  Frédéric  Moreau ,  pour  ses  fouilles  de  Caranda  et  la^ 
publication  de  son  album; 

M.  P'élix  Vernois,  pour  la  découverte  des  arènes  de 
Senlis. 

i^  Médailles  d'argent: 

A  MM.  Albert  de  Houcy,  |M)ur  ses  découvertes  dans  la 
Ibrét  de  Compiègne  ; 

M.  Laffolye,  architecte,  pour  la  restauration  de  riiôtel 
de  ville  de  Compiègne  ; 

M.  Boufflet  (abbé),  pour  son  intelligente  restauration  de 
Téglise  Saint-Samson,  de  Clermont; 

M.  Gustave  Vallier,  pour  ses  publications  sur  la  numis- 
niHtique  du  Dauphiné; 

M.  Hdouard  Pleury,  pour  la  publication  du  premier 
volume  de  ses  Monuments  et  antiquités  de  l'Aisne, 

.f*  Médaille  de  bronze  : 

M.  Ravaud,  instituteur^  pour  Touilles  arcliéologiqutii' 
dans  lu  Creuse. 

M.  le  Président,  en  remettant  aux  lauréats  présents  leurs 
médailles,  signale  rapidement  les  travaux  ou  les  publica- 
tions qui  ont  motivé  les  décisions  du  conseil. 

M.  Vernois,  dans  quelques  paroles  émues,  remercie  la 


XLIV*  SESSION,   A  SENLIS.  459 

Société  de  la  récompense  dout  elle  a  couronné  les  efforts 
lait?,  non  par  lui  seul,  mais  par  tout  le  Comité,  sur  lequel 
il  tient  à  reporter  le  mérite  de  la  découverte  et  de  la  con- 
servation des  arènes,  et  rappelle  qu'il  a  été  puissamment 
aidé  dans  sa  tâche,  par  feu  le  président  Vatin  et  par 
M.  Puissant;  il  termine  en  annonçant  son  intention  de 
remettre  au  musée  du  Comité  archéologique  Ta  médaille 
qui  vient  de  lui  être  décernée ,  afin  qu'elle  soit  toujours 
ooDiervée  par  ses  collègues  et  qu'elle  puisse  à  la  fois  leur 
rappeler  leurs  travaux  et  les  encourager  dans  l'avenir  à 
marcher  courageusement  dans  la  voie  qu'ils  suivent. 

M.  le  Président,  après  avoir  annoncé  que  le  prochain 
Congrès  se  tiendra  au  Mans  et  à  Laval ,  prononce  la  clô- 
ture de  la  quarante-quatrième  session  et  lève  la  séance. 


LUNDI,  4  JUIN. 

Excursion  à  Mello,  Mouchy  et  Beauvais. 

Bien  que  le  Congres  lût  ofliciellement  clos,  son  pro- 
gramme cependant  n'était  pas  encore  épuisé,  car  il  est 
•iésormais  d'usage  qu'une  excursion  supplémentaire  soit 
organisée  au  loin  le  lendemain  delà  clôture.  Colle  de  cette 
année  avait  pour  but  la  ville  de  Beauvais,  avec  halte  aux 
deux  châteaux  de  Mello  et  de  Mouchv. 

Les  excursionnistes  arrivaient  donc  le  lundi  matin,  au 
nombre  de  soixante,  à  la  station  de  Cires-lès-Mello.  Là, 
M.  l'abbé  Manuel,  curé  de  cette  paroisse,  voulait  bien  lei^ 


4bU       CUNGRKd  AaCU£OLOGlUU£  D£  FRaNOË. 

recevoir  puur  les  conduire  au  château  de  Melio  «lui,  du 
milieu  de  ses  parcs  grandioses,  domine  le  ravissant  pant>^ 
rama  de  la  vallée  du  Thérain. 

La  collection  d'objets  de  tous  les  arts  du  moyeu  âge,  dt5 
la  Renaissance  et  des  temps  modernes  réunis  dans  ceiU^ 
riche  habitation  aux  grandes  allures,  jouit,  à  juste  titre^ 
d'une  renommée  universelle;  elle  fournit  un  noble 
exemple  du  libéral  emploi  d'une  grande  fortune  mise  au 
service  des  goûts  les  plus  délicats  et  les  plus  élevés,  et 
c'est  avec  la  plus  aimable  bienveillance  que  M.  Tabbc 
Manuel,  en  l'absence  de  MM.  Seillières,  les  maities  du 
lieu,  en  a  fait  les  honneurs  aux  membres  du  Congrès, 
heureux  et  reconnaissants  d'avoir  pu  admirer  toutes  ces 
merveilles. 

Quelques  instants  après,  toutes  les  i)ortcs  du  château  de 
Muiichy  étaient  gracieusement  ouvertes  aux  membres  de 
l'excursion,  charmés  de  l'aimable  hospitalité  qu'ils  rcte- 
vaient,  au  nom  et  en  l'absence  de  M.  le  duc  de  Mouchy, 
dans  cette  splendidc  résidence.  La  visite  du  château,  qui 
date  de  la  Renaissance  et  offre  un  imposant  mélange  de  con- 
structions postérieures,  Texanien  des  objets  qu'il  rcnfei  me 
rappelant  des  souvenirs  historiques,  sa  riche  bibliothèque, 
les  promenades  sous  les  vastes  ombrages  du  parc  et  des 
jardins,  ont  rapidement  l'ait  passer  les  heures  qui  ont  pré- 
cédé celle  du  départ.  Mais  avant  de  quitter  le  parc,  disons 
(|uc  les  amateurs  d'archéologie  antique  ont  eu  la  bonne 
fortune  de  rencontrer  dans  ses  allées  trois  monuments  de 
provenance  romaine,  dignes  d'un  très-haut  intérêt.  Ce 
sont  trois  sarcophages  de  marbre  blanc,  à  facei  ornées  de 
représentations  mythologiques  et  symboliques.  L'un  d'eux 
surtout,  d'un  style  plus  correct  et  plus  simple  que  les 
deux  autres,  attire  l'attention  par  la  nature  de  ses  sujets. 
Ils  représentent  aux  deux  extrémités  les  Dioscures,  et  au 


XLIV*  SESSION,    A   SENLIS.  4t>1 

oPDtre  un  guerrier  nu,  debout,  appuyé  sur  une  lance  et 
armé  d'un  bouclier  ;  près  de  lui  une  femme  vêtue,  éga- 
lement debout,  lui  pose  la  main  sur  la  poitrine.  Malheu- 
reusement les  têtes  de  ces  deux  personnages  ont  disparu. 
La  femme  étant  entièrement  vétuc,  il  n'est  guère  permis 
«le  Yoir  dans  ce  groupe  Vénus  et  Mars.  Ne  serait-ce  pas 
plalAt  une  de  ces  scènes  de  réunion  dans  le  séjour  de  la 
ieiidté  élyséenne  récemment  expliquées  par  des  savants 
des  plus  autorisés  (I)?  Quoi  qu'il  en  soit,  aujourd'hui 
que  les  questions  relatives  à  ces  sortes  de  groupes  sont 
pour  ainsi  dire  à  l'ordre  du  jour  dans  la  haute  archéo- 
logie, il  peut  être  à  propos  de  signaler  l'existence  de  ce 
monument  moins  connu  que  certains  autres  portant  des 
sujets  analogues. 

A  huit  heures  dix  minutes  du  soir,  le  Congrès  diminué 
de  quelques-uns  de  ses  membres  qui  avaient  dû  prendre 
une  autre  direction,  arrivait  à  Beauvais  où  il  avait  le  plai- 
sir d'être  reçu  par  M.  Armand  Hendu,  i'érudit  archiviste 
lie  rOise,  qui  avait  préparé  l'intéressante  journée  du  len- 
demain. 

C'est  sous  sa  direction  et  celle  de  M.  Alexandre  Dela- 
herche  qu'a  été  effectuée,  ce  jour-là,  la  visite  des  monu- 
ments de  la  ville,  manufacture  de  tapisserie,  musée  de  la 
Société  archéologique,  restes  des  anciens  murs  romains, 
Basse-Œuvre,  église  Saint-Élienne,  cathédrale,  bannière 
de  Jeanne  Hachette  à  l'hôtel  de  ville,  sans  oublier  les 
collections  de  M.  Delaherche.  Il  faudrait  un  long  volume 
pour  décrire  cotte  dernière  réunion  d'objets  de  céramique, 
ligillographie,  ferronnerie,  sculptures,  miniatures,  orfè- 
vrerie, peintures,  ivoires,  verrerie,  émaux,  dessins,  gra- 

;i)  V.  Lex  monuments  de  Myrrhine  ei  les  fnts-reHefs  funé- 
raires des  Crées  en  générai,  par  Félix  Ravaisson,  187H. 


\Ct^  CONGRÈS  AHGHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

vures,  etc.;  qu'il  nous  suffise  de  dire  que  toutes  les  pièce 
sout  de  premier  choix  et  ont  été  recueillies  pur  réniioeia 
collectionneur  qui  a  bien  voulu  présider  lui-même  à  Is 
visite  qu'on  a  faite  de  ses  trésors.  C'est  aussi  à  sa  compé- 
tence bien  connue  en  matière  d'art,  qu'on  a  dû  les  érudites 
(explications  données  à  Saint-Étienne  sur  les  magniQqua 
vitraux  de  cette  église,  tous  dominés  par  le  saisissant  écla 
de  la  verrière  qui  représente  l'Arbre  de  Jessé,  incompa- 
rable et  radieux  chef-d'œuvre  d'un  art  éminemment  fran* 

■ 

cais.   . 


EXTRAIT 


n'UNE 


NOTICE  SUR  LÉVIGNEN 


SElGlfEUlklE  DES  FRANGS-PIEFS  DU  YALOfS,  QUI  RELEVAIENT 
l»U  DONJON  DE  LÉYI6NEN  OU  DE  LA  TOUR  OCTOGONE  DITE 
ANCIENNEMENT  LA   GROSSE  TOUR  CARRÉE. 

J'arrive  à  la  seigneurie  des  Fraocs-Fiefs  (1j,  qui  a  son 
^îége  dans  la  tour  du  donjon,  ou  tour  octogone. 

Ce  qui  caractérise  cette  seigneurie  c'est  qu'elle  se  coni- 
tmsA  de  biens  appartenant  à  la  couronne  ou  aux  comtes  et 
Uucs  de  Valois,  qui  étaient  apanages  du  Valois  et  des 
Kraocs-Fiefs  du  Valois;  tandis  que  la  seigneurie  de  Saint- 
lilaise  est  une  propriété  particulière,  la  plus  importante, 
il  est  vrai,  de  celles  qui  appartenaient  à  des  personnes  de 
«qualité,  depuis  Gauthier  d'Aunay  et  Gillette  de  Clary,  qui 
oui  donné,  en  Idl^i,  au  comte  de  Valois,  ce  qu'ils  avaient 
à  liévignen  et  à  Gondreville,  jusqu'au  xvi'  siècle,  où  Gar- 

.1)  D'après  le  manuscrit  de  M.  le  président  Minet,  sur  le 
Valois,  les  Francs-Fiefs  sont  ainsi  appeh'^  parce  qu'en  entrant 
«Uds  Tapanage  du  fils  de  Raoul  II,  comte  de  Sentis  et  de  Crépy, 
ils  ont  été  affranchis  de  la  mouvance  immédiate  du  Valois  et  ne 
rf  levèrent  plus  que  du  donjon  et  de  la  tour  octogone  de  l>vignen. 


464  nONORKS  ARCHÉOLOOrQUE   DE   VRANXE. 

lier  dit  de  Lévigncn  qu'il  comptait  plusieurs  habitations 
sei^çneariates. 

Les  biens  dits  Franc8*Fiefs  du  Valois,  dont  une  partie 
était  connue  au  xr  siècle  sous  le  nom  de  friches  des  Goni- 
bries,  ayant  été  donnés  à  Thibaut  de  Nanteuil,  en  I09U, 
pour  être  tenus  en  pairage,  de  son  frère,  Raoul  H,  cointt* 
de  Crépy  et  de  Sentis,  ont  dû  subir  le  sort  du  Valois,  lors 
de  la  cession  de  ce  comté  à  la  couronne,  par  la  comtess» 
F^léonore,  d'un  côté,  et  par  le  seigneur  du  donjon  do 
Crépy,  Philippe  de  Nanteuii,  de  l'autre. 

Donc,  vers  1ii8,  les  Francs-Fiefs  du  Valois  et  leur  don- 
jon de  Lévignen  ont  dû  retourner  à  la  couronne  pour  être 
ensuite  donnés  ou  vendus  suivant  le  bon  plaisir  des  roi» 
ou  des  comtes  et  ducs  de  Valois. 

Les  Francs-Fiefs  du  Valois  restent  cependant  plus  d'un 
sit^cle  après  cette  cession  dans  la  famille  de  Nanteuii.  O 
n'est  qu'après  1300,  c'est-à-dire  après  le  mariage  d'Alix 
(h:  Nanteuii  avec  Pierre  de  Pacy,  qu'ils  commencent  à  en 
être  détachés  et  à  former  une  seigneurie  distincte  de  celle 
de  Lévignen,  connue  sous  le  nom  de  seigneurie  du  Don- 
jon, tandis  que  celle  de  Lévignen  continuant  à  demeurer 
dans  la  maison  de  Pacy,  finit  par  s'en  séparer  pour  former 
la  seigneurie  de  Saint-Blaisc. 

Le  premier  seigneur  de  la  maison  de  Pacy  que  j'ai  vu 
dans  les  actes  d*hommage  sous  le  nom  de  seigneur  des 
Francs-Fiefs  est  Pierre  de  Pacy ,  fils  cadet  de  Pierre  et 
d'Alix,  qui  reçoit  hommage  en  1323,  comme  seigneur  des 
Francs-Fiefs  de  Pierre  de  Chamblv. 

Ft  le  premier  nom  étranger  à  cette  famille  que  jetrouvt» 
aux  actes  d'hommage  rendus  aux  seigneurs  des  Francs- 
Fiefs  est  celui  de  Guerrin  de  Lorris,  en  1388.  Cela  prouve 
qu'à  cette  époque  la  famille  de  Pacy  ne  possède  plus  que 
la  seigneurie  de  Lévignen  ou  de  SaintrBlaise. 


■nt  De 


XLIV*^   SESSION,   A  SENLIS.  ÀGit 

Fin  lilO,  les  francs- fiefs  sont  vendus  par  Charles 
•l'nriéans,  duc  de  Valois,  qui  «nvait  besoin  d'argent  pour 
««nicfaeler  des  prisons  d'Angleterre;  et  ief(  Fuselier,  sei- 
gneurs de  Néry  et  de  Séry,  ses  hommes  de  confiance  et 
uiiopagnons  de  captivité,  viennent  eu  France  négocier  un 
''Qiprunt  au  nom  de  leur  maître. 

C'est  sans  doute  par  l'entremise  d'Etienne  le  Fuzelier, 
«loyen  de  la  collégiale  de  Saint-Thomas-de-Crépy,  et  plus 
Urd  propriétaire  à  Lévignen,  que  le  donjon  de  Lévignen 
fut  vendu  le  30  décembre  1440,  à  Rodolphe  de  Billard, 
vicomte  d'Orival  pour  1270  écus  d'or  soleil.  Jeanne  de 
Billard  (1),  veuve  de  Colas  de  Blois  et  fille  de  Rodolphe, 
veurfit  liï  donjon  à  Jean  Gorgias,  seigneur  de  Brégy,  dont 
le  descendant  Michel  Nicolas  acheta  des  commissaires  du 
nij  d'autres  dépendances  de  Lévignen.  Cette  famille  a 
gardé  le  donjon  jusqu'en  tOIO. 

La  vente  de  1440  ne  peut  être  considérée  que  comme 
une  concession  de  droits  royaux  et  utiles,  et  non  comme 
une  aliénation  véritable,  car,  en  1668,  le  17  janvier,  une 
\  Teatence  du  maître  des  requêtes  ordonne  que,  malgré  la 
vente  du  30  décembre  1440,  les  fiefs  du  Donjon  et  de  la 
Folie-de-Lévignen  seront  réunis  à  la  couronne. 

Appel  de  cette  nentence  de  la  part  du  seigneur  de  Lévi- 
gnen, prétendant  que  les  francs-fiefs  lui  ont  été  garantin 
par  une  clause  spéciale  contre  tout  retour  à  la  couronne; 
en  conséquence,  maintien  de  ce  seigneur  dans  la  jouis- 
sance des  fruits  de  sa  seigneurie  des  francs-fiefs,  en  date 
de  1707. 

Nouvelle  défense,  en  1760,  de  percevoir  lesdits  fruits;  en 
revanche,  concession  au  sieur  Lallemant,  comte  de  Lévi- 

yl)  ManascritdeM.  Minet;  voir  mas  notes  z\'ec  plus  de  di*tai(s 
Mir  les  familles  Blois  et  Gorgias. 

XllV<  SESSION.  ')0 


f 


•i66  CONGRÈS  ARCHÊOL06IOCJK  DE  FRANCE. 

gnen,  de  divers  titres  honorifiques  à  titre  d'inféodation  du 
donjon  et  de  la  Folie  et  autres  droits  utiles,  tant  que  le 
domaine  sera  dans  l'apanage  du  duc  d'Orléans. 

C'est  donc  comme  concessionnaire  du  roi  ou  du  duc  de 
Valois  que  les  seigneurs  de  Lévignen  possèdent  le  fief  du 
donjon,  et  c'est  comme  tels  qu'ils  leur  rendent  hommage, 
Jean  Gorgias,  à  Crépy,  en  4484,  à  Louis  XII;  le  comte 
Lallemant  en  4739,  la  présidente  Legendre  en  1770. 

C'est  des  commissaires  du  roi  que  Michel  Gorgias,  dit 
M.  Minet,  acheta,  en  1543,  pour  3S0  livres,  la  mairie  de 
Lévignen ,  la  haute,  basse  et  moyenne  justice,  plusieurs 
cens  et  rentes  que  le  roi  y  avait. 

Par  ses  dispositions  testamentaires,  la  reine  Blanche, 
femme  de  Philippe  de  Valois,  donna  un  fief  de  Lévignen 
aux  chartreux  de  Bourgfontaine. 

Il  n'est  pas  difficile  de  connaître  les  biens  dits  francs-fiefs 
ou  au  moins  la  plus  grande  partie. 

Il  suffit  pour  cela  de  jeter  un  coup  d'œil  sur  les  noms 
des  personnes  et  des  fiefs  mentionnés  aux  actes  de  foi  et 
hommage.  M.  Grave  dit  que  les  Gombrics  relèvent  du  don- 
jon de  Lévignen,  et  il  appelle  les  Gombries  tout  le  quar- 
tier de  friches  compris  entre  Houville,  Lévignen,  Bouil- 
lancy  et  Villers-Saint-Genesl. 

L'histoire  du  Valois  mentionne,  en  outre,  comme  rele- 
vant du  donjon,  la  partie  d'Acy,  dite  le  bas  Acy. 

Conformément  à  ces  données,  nous  trouvons,  dans  les 
actes  de  foi  et  hommage,  les  noms  de  Rouhault  d'Acy, 
de  Grouches,  de  Bouillancy,  des  IJrsins,  de  Villers-Suint- 
<]enest,  tous  propriétaires  pur  indivis  des  francs-fieb.  Nous 
y  voyons  aussi  les  l'Orfèvre- l'Huillier  d'Ermenonville 
alliés  ù  la  famille  des  Ursins. 

L'abbaye  du  Parc-aux-Dames ,  qui  est  de  fondation 
royale  et  dotée  par  les  comtes  de  Valois ,  a  sa  place  aussi 


XU^"  SESSION,    A   SENLIS.  467 

<iang  lu  seigneurie  des  francs-nefs.  Le  dernier  proprié- 
idire  des  francs-fiefs  est  le  comte  Lalleinatit,  qui  ies  avait 
Ji^fuis,  le  il  août  4713,  de  Catherine  Brunet,  marquise 
•ie  Viilaroeaux,  veuve  de  Charles  de  Mornav. 

(Juelie  a  pu  être  la  destination  primitive  des  francs-fiels 
lu  Valois?  il  n'y  a  pas  de  difficulté  pour  la  partie  des 
fraocs-fiefs  situés  à  Villers-Saint-Genest,  ils  ont  été  don- 
nés comme  alleu  ou  terre  libre,  par  Gauthier,  comte  de 
ijépy,  à  un  de  ses  chevaliers,  en  890,  après  avoir  été 
•x)Dcédés  auparavant  aux  habitants  de  Villers,  qui  devaient 
pour  cela,  au  comte  de  Valois,  une  redevance  qu'ils  ont 
ti.ujours  continué  à  payer  et  qui  consistait  en  39  muids 
«i*:  blé  et  une  mine  d'avoine. 

Pour  œ  qui  est  du  reste  des  francs-fiefs ,  ils  ont  pu  ser- 
vir à  anoblir  leurs  premiers  possesseurs,  car  c'est  l'origine 
•{u  on  leurattribue  communément,  d'avoir  servi  à  combler 
'0:$  vides  faits  dans  la  noblesse  française  par  les  Croisades. 
^       C'est  ainsi  que  Pierre  l'Orfèvre  est  anobli  au  xiii*  siècle, 
i       ivec  des  biens  situés  aux  environs  de  Crépy  (  I). 
I  .Mais  l'anoblissement  par  francs-fiefs  a  été  abolie  par 

Heuri  III  en  1575. 

.4  partir  de  cette  é|K)que ,  les  francs-tiefs  du  Valois  ne 
peuvent  plus  être  considérés  que  comme  des  biens  sur  les- 
quels ia  couronne  renonce  c\  percevoir  les  fruits  ou  droits 
utiles,  qu'elle  abandonne  à  ceux  qu'elle  veut  favoriser,  s'en 
ivservant  seulement  le  relief  .'2). 

I)  Histoire  jiu  l'alois^  supplément. 

t  Cette  défiaitioD  est  ronrurme  à  celle  du  traité  des  maisons 
.-useraines  et  de  leurs  droiLs  publiés  en  Hollande  en  1532  ;  la 
\oici  telle  quVlte  m*a  été  transmise  par  M.  te  dur  de  Bedl'urt, 
ijf*  la  Société  fraovaise  de  N'umismatique  :  •  Les  IraDcs-fiefs 
MiDt  des  tiefs  relevant  dirortenient  do  la  l'ourunui*  di^  Kiaiirr, 


46M  CONGRÈS  ARCHÉOL06IOUK   DE  FRANGE. 

C'est  ainsi  que  las  francs-fiefs  sont  compris  dans  l'acte 
par  lequel  Louis  XIV  confirme,  en  4723,  les  habitanis  de 
Presles  dans  la  jouissance  de  leurs  exemptions  et  fram- 
fiefs  et  autres  droits^  et  défend  aux  chambres  du  trésor 
des  domaines  et  des  franes' fiefs  de  les  troubler. 

L'unique  alleu,  aujourd'hui  debout,  c'est  celui  qui  a  ét^ 
donné,  en  MO,  par  Othon  I*'  à  Grimaldus,  qui  avait  con- 
quis Monaco  sur  les  Sarrasins. 

Un  des  derniers  seigneurs  de  Lévignen  obtint  l'érection 
de  son  domaine  en  comté  en  1733  ;  c'est  à  partir  de  cette 
époque,  dit  Carlier,  que  Lévignen  fut  une  des  premières 
terres  du  Valois. 

J*ai  dit  ailleurs  que  les  possessions  de  la  famille  Lalle- 
mant  s'étendaient  dans  les  pays  limitrophes  de  Lévignen, 
Ormoy-le-Davien,  Maquelence  Betz,  et  qu'après  la  familli! 
Lallemant,  le  comté  de  Lévignen  a  été  possédé  par 
M**  Legendre,  veuve  de  M.  Gaspard  Legendre,  premier 
président  de  la  chambre  des  comptes,  et  après  celle-ci  par 
la  princesse  de  Monaco,  aïeule  de  Charles  UI,  prince  sou- 
verain de  Monaco,  actuellement  régnant. 

donnés  en  reconnaissance  d'un  service  important,  et  exempts 
de  toute  redevance  aux  seigneurs,  ducs,  comtes.  Il  est  â  croire, 
ajoate  l'auteur,  que  les  titulaires  des  francs-liefs  étaient  astreints 
de  fournir  un  certain  nombre  d'hommes  d'armes  qui  entraient 
dans  la  formation  des  gens  d'armes  de  la  maison  royale  ;  de  plus, 
ils  devaient,  chaque  année,  venir  faire  hommage  d'obéissanr«» 
pour  le  ûef  qu'ils  avaient  reçu  <1o  la  libéralité  du  roi.  « 


XLIV*  bbSSlON,   A   SfiNLIS.  409 


TABLEAU 

l'Es  ACTES  DB  FOI  ST  BOIIMAOB  RENDUS  AUX  SEIGNEURS  DU 
D05J0N  DE  LEYIGNEN  OU  DE  LA  TOUR  OCTOGONE,  DITE 
HANS  LES  TITRES  LA  GROSSE  TOUR  CARRÉE. 

• 

La  Folie  {Foleya),  lieu  ombragé  (Tarireê, 

Ce  fief  est  situé  à  Lévignen,  au  lieu  dit  Hangards. 

1379.  Foi  et  hommage  rendus  au  roi  par  Urbin  de  Saint- 
bhise,  pour  ce  fief. 

I5i7.  Jeau  de  Gorgias  est  seigneur  de  ce  fief  et  veut  y 
construire  un  moulin  à  vent. 

1761.  Concession,  par  le  duc  d'Orléans  à  la  famille  Lai- 
iemant,  à  titre  d'inféodation,  du  fief  de  la  Folie,  annexe 
du  donjon  et  de  plusieurs  droits  utiles  et  honorifiques. 

G^Q^y*  "  Trumilly, 

1791.  Pierre  de  Grouches,  seigneur  des  francs-fiefs, 
reçoit  horomage  d'Edouard  de  Largny,  pour  ce  fief. 

IG03.  L'abbesse  du  Parc-aux-Dames  et  Ignace  Rouault, 
>eigneur8  par  indivis  des  frnncs-fiefs,  reçoivent  hommage 
de  Thibaud  de  Beaurain,  pour  Gigny,  et  en  1700,  ils  sai- 
sissent ce  fief  pour  cause  de  droits  non  payés. 

170.%.  L'abltesse  du  Parc,  M"'  de  Médavv  de  Grancev  et 
tlliristine  de  lorraine,  marquise  d*Acy,  reçoivent  hom- 
mage de  M.  d*Autant,  pour  Gigny. 

I7âi.  Louise  de  Clinchamp,  femme  de  Jérôme  Richer, 
rond  hommage  pour  le  même  fief. 


470  CONGRÈS  AHUUÉOLOGIOUE  )»E  VAANOfi. 


1 


Hé^  à  Bouillancy. 

1388.  Hommage  de  Philippe  de  Néry  à  Guérin  de  b)^' 
ris,  aveu  et  dénombremeDt  de  ce  fief. 

1540.  Saisie  de  ce  fief  par  Valontine  rHuillier,dan)^' 
d'Ermenonville. 

1548.  M.  rOrfévre  reçoit  hommage  pour  ce  ficf. 


Adon  ou  des  Grandes- Dîmes,  à  Lévignen  (1). 

Ce  fief  doit  vraisemblablement  son  nom  au  prieure 
d'Adon,  près  Longpont,  fondé  par  Alix  de  Nanleuil  et 
Pierre  de  Pacy,  au  xiii*  siècle,  et  doté,  vers  la  même 
époque  de  100  sols  de  rente,  par  Gautier  de  Nanteuil,  dit 
Gautier  do  Fresnoy  et  Lévignen. 

1399.  Legs  de  ce  fief  par  Jehan  Leflamment  à  la  collé- 
giale de  Saint-Thomas  de  Crépy. 

1447.  Abandon  de  ce  fief  par  les  chanoines  à  Henri 
l'Huillier  et  Isabelle ,  sa  femme,  à  condition  que  les  cha- 
noines prendront  annuellement,  avant  tous  autres,  trois 
setiers  de  grain,  dont  deux  tiers  de  blé,  et  un  tiers  d'avoine 
sur  les  revenus  dudit  fief. 

De  1455  à  1763.  Baux  de  la  ferme  des  Chanoines  et  du 
droit  de  dîmes  sur  le  fief  d'Adon  et  de  Fay. 

1486.  Dénombrement  du  fief  d'Adon  donné  au  seigneur 
de  Lévignen  par  le  chapitre  collégial  de  Crépy. 


(1  j  C'est  par  erreur  (|iiti  ce  iicfest  piacô  dans  la  catégorie  ties 
fraiics-fiefs,  je  l'ai  rangé  ailleurs  dans  la  seigneurie  de  Saint- 
Biaise,  ik  laquelle  il  appartenait. 


\UT   SESSION,   A  SEiNLIS.  471 


La  Cour,  située  à  Ifanteuii'leS'Meaux, 

i3â3.  Hommage  de  Pierre  de  Pacy,  seigneur  des  francs- 
Hefs,  par  Pierre  de  Chambly. 

1536.  Christophe  des  Ursins,  seigneur  de  Villers-Saint- 
l'ienest,  saisit  ce  fief,  pour  cause  de  droits  non  payés  et  de 
•ievoirs  non  rendus. 

1607.  Josias  de  Montmorency  et  sa  femme,  Marie  de 
(trouchcs,  reçoivent  hommage  comme  seigneur  des  francs- 
fiers,  pour  le  fief  de  la  Cour,  qui,  bien  qu'appartenant  à 
J«an  de  Maxancourt,  seigneur  de  Péroy,  est  mouvant  du 
donjon. 

1745.  Hommage  rendu  à  M.  l'Allemant  par  Boula  de 
Dourlan. 

Grimancourtf  à  MorienvaL 

f.'Kill.  Aveu  et  dénombrement  de  oi  (iet  donné  par 
<»eorge8  de  Villers-Saint-Genest  à  Valentinc  THuillier, 
veuve  de  Bertrand  TOrtévre,  comme  tutrice  de  leurs 
enfants,  seigneurs  des  francs-fiefs. 

1548.  Aveu  et  dénombrement  pour  le  même  fief  par 
Aimé  de  Villers,  gentilhomme  du  roi. 

46Î6.  Robert  de  Grouches  Potier,  comte  de  Tresnies  et 
Pierre  de  Garges,  seigneur  d'Ormoy-Villers,  propriétaires 
pîir  indivis  des  francs-fiefs,  saisissent  3(>  arpents  de  terre 
a  Grimancourt,  faute  d'hommage  rendu. 

1694.  Assignati<m  par  labbesse  du  Parc  à  M.  de 
Laroche  Lambert,  pour  la  moitié  de  cette  seigneurie,  [H>ur 
cause  de  droits  non  payés. 


472       CONOIŒS  ARGUÉOLOGIQUb  DE  FRANCK.  . 

4716.  Oronce  de  Laroche-Lambert,  maire  de  Grépy, 
rend  hommage  pour  le  même  fier. 


Buy,  ÉUncouri  et  auireê  fiefêj  à  MùrientaL 

• 

1399.  Guérin  de  Lorris,  seigneur  des  francs-fiefs,  reçoit 
le  cens  d'un  fief  sis  à  Morienval ,  consistant  en  iO  livres 
tournois,  3  poules. 

1399.  Hommage  au  même  par  Léger  Hubert,  pour  un 
fief  de  Morienval. 

4560.  Christophe  des  Ursins,  seigpeur  des  francs-fiefs, 
reçoit  hommage  de  Michel  deLignières,  pour  Buy  et  Élin- 
court. 

4599.  Marie  de  Grouches,  François  Paillard  et  Louise 
de  Mornay,  seigneurs  par  indivis  des  francs-fiefs,  reçoivent 
hommage  de  François  d'Aage,  pour  Élincourt. 

4693.  L'abbesse  du  Parc  et  Louis  Rouault,  abbé  de 
Fenestranges,  propriétaires  par  indivis  des  francs-fiefs, 
reçoivent  aveu  et  dénombrement  de  Tabbesse  de  Morien- 
val, pour  Buy  et  Élincourt. 

4747.  Aveu  et  hommage  à  M.  l'AIlemant,  par  Tabbessi 
de  Morienval,  pour  les  fiefs  de  Buy  et  Élincourt.  Cet  honi 
mage  est  signé  par  les  sœurs  de  Serens,  Angélique  d( 
TEscouet,  d'Acy. 


La  Truie  [Truilla^  lieu  humide),  à  Lévignen, 


\M\,  Consentement  donné  aux  chanoines  de  la  collé 
gialedcCrépy,  par  Bertrand  l'Orfèvre  et  sa  femme  Valen 
tine  THuiliier,  seigneur  d'Ermenonville  et  des  francs 
fiei's,  pour  garder  le  tief  la  Truie,  mouvant  du  donjon. 


XtlV*"  SESSION,    A  SENLIS.  473 

44.  Aveu  et  hommage  par  le  chapitre  collégial  de 
y  pour  ce  tief. 

32.  Hommage  des  chanoines  de  Saint-Thomas  à  Ghar- 
Trois- Dames  pour  le  même  fief. 

Villers-Sûint'Genesi. 

il.  Jean  dé  Garges  rend  hommage  à  Ju vénal  des 
is  pour  sa  seigneurie  de  Villers,  qui  relève  du  Châtel 
êvignen  ;  Henri  de  Garges  rend  hommage  pour  le 
e  fief. 

19.  Le  comte  d*Estrées,  seigneur  de  Villers,  rend 
nage  à  M.  l'Allemant  pour  sa  seigneurie. 


VOIE  ROMAINE  DE  SENUS  A  MEAM 


Ou  conçoit  à  première  vue  qu'il  a  dû  exister  à  Tépoquc 
de  la  conquête  romaine  une  voie  ayant  pour  objet  de  relier 
le  pays  des  Sylvanectes  à  celui  des  Meldiens.  Cette  voie, 
d'ailleurs  difficile  à  suivre  à  travers  les  grandes  forêts  qui 
séparaient  les  deux  tribus,  avait  été  plutôt  devinée  par  les 
savants  que  connue,  plutôt  entrevue  que  suivie.  £lleest 
comprise  dans  la  route  de  Senlis  à  Troyes,  sur  la  carte  de 
Peutinger.  Carlier  rapporte  que  de  son  temps  (1764)  on 
n'en  connaissait  plus  les  traces,  mais  qu'elle  avait  dû 
côtoyer  le  Valois. 

Je  n'ose  pas  dire,  Messieurs,  que  je  vous  apporte  le  tracé 
do  la  voie  de  Senlis  à  Meaux;  le  temps  et  les  hommes  en 
ont  détruit  une  trop  grande  partie;  mais  je  puis  vous  pro- 
mettre, grâce  aux  magnifiques  tronçons  qui  nous  en  res- 
tent, de  vous  remettre  sur  sa  direction  perdue  et  de  vous 
conduire,  sinon  pus  ù  pas,  au  moins  par  enjambées  dans 
le  pays  des  Meldiens. 

«  Nous  n'avons  pu  rencontrer,  dit  M.  Graves,  jusqu'à  ce 
moment  de  témoignage  matériel  du  tracé  de  cette  route 
entre  Ermenonville  et  Senlis.  b  Cette  partie  du  tracé  est 
en  effet  la  plus  difficile  à  explorer,  à  cause  de  la  forêt,  et 
nous  ne  craignons  pasd'atfirmer  que  les  explorateurs  de  la 
voie  romaine  n'ont  rien  trouvé,  parce  que,  à  partir  des 
environs  de  Senlis,  ils  ont  pris  une  fausse  direction.  La 


XUV*"  SESSION,   A  SBNUS.  475 

voie  ne  passait  pas  à  Ermenonville.  Mais  n'anticipons 
point.  Voici  le  tracé  tel  qu'il  nous  est  apparu  après  des 
recherches  très-laborieuses,  longtemps  poursuivies,  quel- 
quefois égarées,  souvent  reprises,  et  que  nous  ne  donnons 
pas  encore,  Messieurs,  pour  le  dernier  mot  de  la  question.  La 
carte  de  Peutinger  fixe  à  seize  lieues  la  longueur  du  par- 
cours de  la  voie  entre  Senlis  et  Meaux  ;  c'est  à  peu  près  la 
mesure  que  donne  le  métré  exact  exécuté  entre  ces  deux 
stations,  36,600  mètres,  avec  un  faible  excédant  de 
300  mètres. 

La  voie  sortait  de  Senlis  par  la  porte  Saint-Vincent 
uu  de  l'ancien  faubourg  Vitel  ;  elle  traversait  successive- 
ment la  Nonnette  et  son  affluent,  probablement  la  pre- 
mière sur  un  pont  et  le  second  à  gué,  puis  formait  sur  le 
marais  la  grande  jetée  qui  existe  encore  et  qui  nous  con- 
duit jusqu'à  la  hauteur  du  terrain  ferme  qui  domine  tout 
ce  côté  de  la  ville.  Arrivée  à  ce  point,  au-dessus  de  la 
Bîgûe ,  en  face  de  la  porte  de  Meaux ,  la  voie  s'élevait  en 
droite  ligne  dans  la  direction  deVi]lemétrie,oii  il  est  facile 
encore  de  la  suivre.  Elle  formait ,  il  n'y  a  que  quelques 
années  encore,  un  très-beau  chemin  vert;  ce  chemin, 
depuis  quelque  temps,  a  été  changé  jusqu'en  face  de  Vil- 
lemétrie  en  un  cailloutis  moHerne. 

A  l'endroit  dit  les  Quatre-Chemins,  on  pourrait  facile- 
ment prendre  une  fausse  direction  et  s'égarer  dans  la 
forêt  à  de  vaincs  recherches. 

C'est  le  côté  gauche  de  la  bifurcation  qu'il  faut  suivre , 
celui  qui  conduit  derrière  le  parc  de  la  Victoire.  I^  voie 
est  ici  représentée  par  un  large  chemin  un  peu  défoncé, 
mais  encore  assez  sec  :  en  sondant  à  quelques  centimètres, 
on  sent  partout  la  présence  de  la  pierre  qui  en  fait  le  fond. 
Au  bout  du  mur  du  parc  de  la  Victoire ,  au  carrefour  des 
Tilleuls,  au  lieu  de  suivre  tout  droit,  on  incline  à  gauche 


47ë       CONGRÈS  AHUUËOLOGIOUK  DE  FRANCE. 

et  on  prend ,  presque  à  travers  bois ,  un  sentier  peu  îré^ 
quenté  maintenant  et  embarrassé  de  fourrés,  qui  conduit 
au  chemin  des  Sergents;  ce  sentier  est  la  voie  romaine; 
c'est  même  en  le  parcourant  qu'on  rencontre  sur  le  côté 
gauche  les  dernières  assises  d'un  petit  mur  romain  qui  a 
dû  appartenir  à  une  construction  du  temps.  Ce  point  delà 
voie  est  celui  qui  présente  le  plus  de  difficultés,  et  c*est 
probablement  là  que  les  recherches  se  sont  égarées. 

Aux  diflérents  points  où  les  nouvelles  routes  forestières 
ont  été  tracées,  la  voie  se  trouve  entamée,  et  il  est  facile 
d'en  constater  l'empierrement  puissant  et  solide.  C'est  à 
l'aide  de  ces  tranchées,  plusieurs  lois  reproduites,  que  nous 
avons  pu  sûrement  suivre  le  tracé  do  la  voie  que  nous 
aurions  certainement  perdu  dans  l'épaisseur  de  la  forêt  et 
surtout  à  travers  les  accidents  de  terrain  qu'elle  présente 
sur  ce  point.  I^  voie  présente  ici  une  largeur  de  40  mètres, 
avec  un  renflement  de  I  mètre  environ  vers  le  milieu  ;  ce 
renilement  mesure  généralement  la  profondeur  de  l'em- 
pierrement dans  les  endroits  où  nous  avons  pu  le  con- 
stater.  Il  est  formé  de  ces  pierres  calcaires  qui  font  le  fond 
de  toutes  les  voies  que  nous  avons  examinées.  Le  grès 
cependant  domine  dans  cette  partie  de  la  forêt.  On  y  trouve 
en  effet  fréquemment  des  «iépressions  profondes  de  terrain 
causées  par  Textraction  qu'on  en  a  faite.  Il  est  remarquable 
(luon  n'en  trouve  pas,  ou  presque  pas,  dans  la  construc- 
tion des  routes  romaines.  Le  grès  étant  facilement  friable, 
no  présentait  sans  doute  pas  assez  de  consistance,  et  aurait 
pu,  à  un  moment,  compromettre  la  solidité  du  fond.  Les 
Homains,  en  tout,  visaient  au  solide;  ils  semblaient,  dans 
leurs  constructions,  défier  le  tempsetseséléments,  et,  dans 
la  conquête  des  choses  comme  dans  celle  des  hommes,  rien 
ne  leur  coûtait  pour  asseoir  et  assurer^  leur  domination. 

La  voie  s'avance  en  ligne  droile,   coupée  successive- 


XLlV   SESSION,    A   SENLIS.  477 

uieot  par  la  longue  route  et  la  route  de  la  plaine,  pour 
atteindre  le  chemin  des  Bruyères  avec  lequel  elle  se  con- 
food  sur  un  parcours  de  â  à  3  kilomètres  environ.  Cette 
partie  est  facile  à  reconnaître  par  sa  solidité  et  Taspect 
général  qu'elle  présente  à  l'œil. 

Après  avoir  traversé  la  route  de  Senlis  à  Meaux,  le  che- 
min d^  Bruyères  nous  porte  derrière  Borest.  A  300  mètres 
à  peu  près  de  la  maison  du  garde,  nous  nous  trouvons  en 
présence  d'une  tranchée  qui  n*est  autre  que  le  chemin 
romain.  Franchisses-en  les  débris  et  vous  le  retrouverez 
au-dessus,  magniûque,  bien  établi,  couvrant  14  mètres 
d'étendue  en  largeur,  mais  malheureusement  bien  court, 
puisque  son  parcours  n'a  pas  plus  de  400  mètres.  Tel 
qu'il  est,  il  présente  un  grand  intérêt,  puisque,  sans  ce 
témoin,  nous  siurions  perdu  complètement  le  tracé  et  nous 
serions  tombé  dans  l'erreur  jusque-là  accréditée  qui  le 
conduisait  par  Ermenonville.  Disons,  en  passant,  qu'un 
chemin  de  Meaux  se  dirigeait  en  effet  de  Senlis  à  Erme- 
nonville, par  la  forêt,  et  se  confondait  avec  la  voie  romaine 
au  sortir  de  Senlis ,  jusque  derrière  la  Victoire;  mais  ce 
chemin  est  relativement  moderne,  et  remonterait  tout  au 
plus  au  x¥*  siècle.  Notre  voie  passait  donc  derrière  Borest, 
à  i  kilomètre  à  peu  près  de  la  rive  gauche  de  la  Nonettc, 
dans  la  forêt. 

C'est  un  peu  avant  d'arriver  à  la  sablière,  qui  Ta 
détruite,  qu'elle  reçoit  un  vieux  chemin  venant  de  Borest 
qui  se  confond  avec  elle.  Ce  chemin,  d'un  aspect  encore 
vénérable  et  solide,  malgré  l'action  du  temps,  venait  de 
Montépilloy,  traversait  le  viens  de  Borestum  et  faisait  ainsi 
la  jonction,  avec  la  voie  de  Meaux,  des  routes  qui  abou- 
tissaient du  pays  Pontois  à  Montépilloy,  soit  par  Barliery 
ou  par  Raray,  etc.,  ou  peut-être  servait-il  tout  simple- 
ment à  établir   une  communication  de  ce  côté  entre  la 


478  CONGRÈS  AROUKOLOOIOUIS   bK     VEANCE. 

voie  romaine  de  Meaux  et  le  camp  fortifié  de  Moatépillov, 
poste  d'observation  élevé  sur  toute  la  contrée  environnante 
par  la  vigilance  du  vainqueur. 

Ceci  dit  en  passant,  revenons  à  notre  tracé.  Nous  sommes 
toujours,  selon  les  cartes  modernes,  sur  le  chemin  des 
Bruyères,  mais  nous  devons  le  quitter  pour  incliner  un 
peu  à  droite  et  nous  diriger  sur  la  Ghapelle-Chaalis.  Le 
chemin  de  la  Besace  représenterait-il  l'ancien  tracé?  c'est 
ce  qu'il  est  bien  difficile  de  constater;  la  voie  eet  tellement 
bouleversée  dans  cette  région  qu'il  est  impossible  d'en 
retrouver  la  trace  :  il  nous  faut  aller  dans  celte  incerti- 
tude jusqu'au  lieu  dit  la  Ghapelle-Cbaalis.  Là,  tous  les 
iloutes  sont  levés,  nous  sommes  bien  certainement  sur 
une  terre  romaine,  puisque  nos  pieds  eu  foulent  de  toutes 
parts  les  nombreux  débris.  En  effet,  avant  de  vous  engager 
dans  la  route  droite  et  élevée  qui  conduit  à  Chaaiis,  entrai 
dans  l'enclos  d'où  elle  semble  sortir,  vous  y  trouverei  une 
véritable  jonchée  de  tuiles  romaines,  de  briques,  de  frag- 
ments de  poterie  de  toute  nature  et  de  toutes  couleurs,  se 
détachant  au  moment  dos  pluies,  sur  le  fond  noir  du  sol. 
Ici,  qu'on  nous  (fermette  encore  une  observation.  La  carte 
de  M.  Hi^thoré  en  main«  la  route  des  Bruyères  nous  con- 
duit |mr  la  n>uto  do  Fontaine  à  Tabbaye  de  Chaaiis,  vers 
laquolle  ollo  lucliuo  \^aT  uno  courbe  douce,  mais  un 
|)ou  allongiV,  il  faut  lavouer.  hans  un  premier  travail 
où  nous  chorchions  avoi'  grande  |>eiue  à  déterminer  le 
tr<uv  «W  la  voie  romaine,  nous  avons  indiqué  ce  tracé. 
IVuUUnc  otions-nous  dans  le  vrai,  il  ne  diffère  du  trncê 
vors  la  C«ha|H>llo  que  |Kir  la  loutnieur  de  la  courbe,  et 
uVt.iiont  l«^  intén's^nts  débris  dont  nous  venons  de  parler 
o(  qui  nous  ont  $0\luit«  nous  u*hô5itonon$  pas  à  le  main- 
toiiir  ivnuno  lo  plus  naturt'lloniont  indiqué. 

i>  \iou\  chômai  do  Kontaiiio  .1  Clualis,  rt^faît  à  la  foomi 


XLIV"  SESSION,    A   SENLIS.  470 

moderne,  est  un  chemin  plein  d'intérêt,  il  n'est  autre  que 
la  dernière  partie  du  beau  Chemin-Vert,  à  l'aspect  si  gran- 
diose et  on  peut  dire  si  royal,  qui,  de  Senlis  par  Montlé- 
véque,  conduisait  les  rois  de  France  à  l'abbaye  de  Chaaiis  ; 
il  est  connu  dans  tout  le  pays  sous  le  nom  de  Chemin-du- 
Roi.  Vous  l'apercevrez  à  gauche,  en  quittant  Moutlévèjue, 
par  la  route  d'Ermenonville,  à  deux  kilomètres  à  peu  près 
du  village.  Dans  deux  endroits  de  son  parcours  il  présente 
des  restes  de  constructions  romaines  ;  notamment  à 
•'lOO  mètres  environ  de  la  route  d'Ermenonville,  où  les 
débris  sont  nombreux,  mais  grossiers. 

A  quelque  tracé  qu*on  s'attache,  en  quittant  le  chemin 
des  Bruyères,  nous  arrivons  devant  la  grille  de  l'abbaye 
de  Chaaiis.  Nous  contournons  les  étangs  et  nous  entrons 
dans  le  bois  de  Perthe,  pour  passer  au  poteau  de  Perthe 
vl  courir  vers  Montagny-Sainte-Félicité,  dont,  au  sortir 
de   la    Torét,    nous   apercevons    le    magnifique   clocher 
so  profilant   majestueusement    sur  le  fond  du   ciel   et 
ambiant   nous    indiquer    la    route   que    nous    devons 
suivre  pour  arriver  sans  difficulté  désormais  à  la  capi- 
tale des  Meldiens.    La    voie    romaine    passe    en    effet 
d  .Montagny,  où  elle  arrive  sous  le  nom  de  Chemin-de- 
l'Entrée  (probablement  l'Estrées].  C'est  aux  abords  du  vil- 
lage, ou  elle  ne  pénètre  pas,  qu'elle  reçoit  le  chemin  de 
Font  à  Meaux  par  Baron  ;  vieux  chemin  aussi,  d'un  inté- 
rêt secondaire,  si  un  le  compare  à  celui  qui  nous  occupe, 
mais  bien  digne  d'occuper  l'attention  de  l'archéoloirue.  II 
tîst  gallo-romain  dans  presque  toute  retendue  île  son  par- 
<*our8.  Il  se  détachait  de  la  grande  chaussée  du  nord,  dite 
chaussée  de  Pontpoint,  au  carrefour  du  (irand-Maitre,  et 
venait  par  Villers-Saint-Frambourg,  où  il  est  très-bien 
connu.  Ognon,  Harbery,  Montépilloy,  Baron  et  Monta- 
gny, se  rattacher  à  la  voie  de  Senlis  à  Meaux.  Mais  j'aurai 


iKO  «:oNr;RKs  AiiciiKoi.or.ioiJE  de  prancr. 

occaBion,  MesBieurs,  «le  vous  ruraener  sur  ce  fragment  inté* 
resnaiit  de  nos  cliemins  de  Test  dans  un  travail  qui ,  en  dehors 
des  grandes  lignes,  les  enveloppera  toutes  dans  un  coinroim 
intérêt.  Notre  route  laisse  donc  à  sa  gauche  le  village  de 
Montagny-Sainte-Félicité,  et  se  dirige  vers  le  Plessis-Bel- 
levillo,  ou  formant  la  route  actuelle;  elle  ne  présente,  au 
point  do  vue  archéologique,  d'autre  intérêt  entre  les  deux 
villages,  que  son  tracé  qui  n'a  pas  été  changé.  Elle  laisse 
à  droite  le  village  du  IMessis  en  passant  devant  le  Jeu- 
d'Arc  actuel.  Elle  va  droit  vers  Saint-Patbus,  dont  elle 
forme  la  grande  rue.  Nous  avions  avancé  d'abord  qu'elle 
passait  h  Saint-Soupplets,  c'e«t  une  erreur:  de  récentes 
investigations,  faites  à  pied  et  sur  les  lieux,  nous  ont  donné 
le  tracé  vrai  et  incontestable  de  la  voie  jusqu'à  Meaux.  La 
voie,  en  quittant  Saint-Pathus,  laibseà  gauche  les  villages 
d'Oiftsery,  do  Porfry  ot  vient  paîiser  entre  les  villages  de 
Saint-Soupplets  et  do  Gesvres-le-Chapitre,  à  une  distance 
.de  deux  kilomètres  du  premier  et  d'un  kilomètre  du 
8e<u>nd.  1)0  là  nous  arrivons  au-dessus  de  Barey,  ou  nous 
retombons  sur  la  nouvelle   route   ferrée  que  nous  sui- 
vons sur  un  parrours  de  r>00  mMres  et  que  nous  laissons 
courir  h  droite  vers  Meaux,  pour  suivre  vers  Chambry 
notre  voio,  (|ui  présente  au-dessus  de  ce  village,  sous  le 
rapport  do  la  viabilité  antique,  le  plus  sérieux  intérêt. 

Mais  vous  vous  aiH'nuîvex,  Miniisiours,  que  nous  sommes, 
passés  sur  Seiuo-et-Marne,  et  que  cet  intérêt  nous  devient 
étranger.  J'ai  voulu,  malgn^  tout,  vous  conduire  jusqu'à 
laoapitalo  dosMoldienssur  cette  MW  voie  qui  nous  appar- 
tient en  grande  partie. 

he  (Uiambry  nous  arrivons  à  Urégy  que  nous  laissons  à 
drtùte,  et  des<xMidant  les  hauteurs  qui  dominent  la  valbV 
lie  la  Marne,  nous  arrivons  sur  le  lH>rd  du  canal  de  POurcq. 
Nous  avons  la  ville  sous  uits  piinls  et  en  face  de  nous;  mais 


XLIY*  SESSION,   A  SENUS.  «481 

poor  l'atteindre  il  faudra  remonter  et  venir  retrouver  la 
gnode  route  moderne.  La  Marne,  du  temps  des  Romains, 
passait  au  pied  de  ces  hauteurs;  elle  a  été  détournée  depuis; 
maintenant  le  canal  la  remplace.  Les  Romains  franchis- 
siient-ils  la  rivière  sur  un  pont  ou  à  guet  C'est  ce  qu'il 
est  bien  difficile  d'affirmer  aujourd'hui.  Entre  le  canal  et 
bâbords  de  la  ville,  il  ne  reste  plus  trace  de  voie  romaine  ; 
elle  nous  conduirait  au  pied  du  mur  de  la  cité  romaine 
qui  existe  encore  au-dessous  de  l'oratoire  de  Bossuet, 
édifié  sur  le  mur  romain.  Singulier  contraste  des  choses 
humaines  !  Cette  g^ndeur  sacrée ,  chrétienne  et  moderne 
dressée  sur  cette  ruine,  grande  aussi,  mais  qu'on  ne  salue 
plus,  tandis  qu'on  ne  passe  pas  sans  émotion  sous  les  ifs 
séculaires  où  le  grand  évéque  méditait  ses  immortelles 
oraisons. 

L.  Caudel. 


XUV*  SESSION.  3t 


mm     * 


5-17  AOUT  1877. 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE 


DANS  LE  DÉPARTEMENT  DU  LOT 


COMPTE  RENDU  GÉNÉRAL. 

Précédés  par  l'Angleterre  dans  le  mouvement  de  trop 
juste  retour  qui  nous  ramena,  il  y  a  un  demi-siècle,  vers 
DOS  antiquités  nationales,  nous  nous  étions  laissés  devan- 
cer aussi  par  cette  active  voisine  sur  le  terrain  des  ezcur- 
slooe.  C'était  un  tort  que  nous  nous  étions  donné.  Si  le 
congrès  a  ses  avantages,  la  course  offre  aussi  les  siens. 
Pendant  quinze  ou  vingt  jours,  quinze,  vingt  ou  trente 
personnes  fouillent  tous  les  recoins  d'une  région  de  cette 
belle  France,  si  splendide  de  nature,  si  riche  d'histoire, 
d'irt  et  de  curiosités.  Le  pays  debout  les  regarde;  il  s'ad- 
joint à  leurs  pas,  il  apprend  d'eux  le  respect  de  ses  vieilles 
églises,  de  ses  vieux  châteaux,  de  ses  vieux  trésors,  de  tous 
ses  vieux  débris.  Mille  observations  jaillissent  sur  les  formes 
d'art  particulières  à  la  contrée,  sur  la  parenté  ou  la  diffé- 
rence de  ces  formes  en  regard  de  celles  qu'ont  adoptées 
d'autres  régions,  sur  les  trop  nombreuses  inexactitudes  de 
la  plume  ou  du  crayon  dans  leurs  divers  travaux  sur  nos 
chers  moaumeots.  Puis  on  recrute  des  adeptes,  on  imprime 
une  impulsion,  on  donne  des  conseils;  bref,  on  se  retire 
avec  la  conscience  d'avoir  servi  la  cause  pour  laquelle 
notre  Société  reçut  le  jour. 

L'excursion  archéologique  du  Lot  avait  été  laborieuse- 


484  CONGRÈS  ARGHÉOLOGIOUE  PE   FRAIUGE. 

ment  préparée,  soit  par  le  jeune  inspecteur  de  ce  départe- 
ment, M.  de  Fontenilles,  soit  par  son  vaillant  confrère, 
M.  E.  Castagne.  Le  nombre  des  excursionnistes  n'a  pas  été 
des  plu$  considérables;  mais  du  moins  Texcursiop  a'est-elle 
faite  dans  les  [meilleures  conditions  de  temps  et  d'intérêt. 

Le  rendez-vous  en  était  fixé  à  Figeac. 

Cette  curieuse  ville,  bâtie  dans  un  Talion  fertile,  sur  la 
rive  droite  du  Celé,  possède  une  église  monumentale, 
Saint-Sauveur,  qui,  avec  une  salle  capitulaire  transfor- 
mée en  chapelle,  constitue  le  seul  reste  debout  d'une 
ancienne  abbaye  de  Bénédictins.  Plusieurs  époques  ont  là, 
comme  presque  partout,  travaillé  à  l'édifice.  Les  parties 
basses  sont  du  xii*  siècle;  le  triforium  qui  règne  au-dessus 
du  bas-côté  méridional  appartient  au  xiii*;  le  xrv^,  le  xv*, 
par  endroits,  revendiquent  le  clerestory  du  sud  et  les  cha- 
pelles  de  la  nef;  le  xvn*  enfin  a  refait  les  grandes  voûtes, 
le  dôme  ou  lanterne,  une  partie  des  fenêtres  supérieures 
et  le  grand  hémicycle  absidal,  qui  n'a  pas  précisémenJ 
gagné  à  cette  réfection.  On  admirait  autrefois  sur  la  façade 
d'ouest  un  magnifique  portail  roman  malheureusement 
disparu.  Disparu  est  aussi  le  baptistère  qui  s'élevait  ù 
médiocre  distance,  et  dont  les  énormes  chapiteaux  latins 
parsèment  çà  et  là  le  pavé  de  l'église.  Heureusement,  h 
cuve  baptismale,  du  xiir  siècle,  nous  est  conservée;  etnou 
loin  de  la  chapelle  qui  l'abrite,  nous  avons  pu  déchiffre! 
en  son  entier  une  inscription  romane,  jusqu'ici,  parait-il 
imparfaitement  reproduite  par  tous  les  historiens  : 

V  IM  lOVS.  AP  :  HOC  ALTARE  CORSECRAT  l  E  i    •  A  OROi  (CRALOO  UTVR 
CERSE  EPO  :  IR  MORORE  SCE  :  lARIE  T  (et}  SCI  :  «CMAa  T  S  I  ■  :   EeTTAC 

T  tlLASIl  (I) 

(111-^4  des  ides  rf'arri/,  cet  autel  a  été  consacré  par  l 
seif^neur  Gérald.  éréque  de  Cahors,  en  f /tanneur  de  saint 


.xijV  session,  a  senms.  i8.S 

fie  omis  est  un  devoir  bien  doux,  en  parlant  de  l'église 
'ieFigeac,  de  proclamer  le  nom  du  prêtre  qui  l'a  remplie 
de  ses  œuvres,  M.  l'abbé  Massabie.  A  force  de  zèle  et  de 
''ODstanoe,  cet  intrépide  pasteur  a  restauré  de  pied  en  cap 
limagniâque  construction.  Heureuse  de  l'en  féliciter  sur 
place,  la  Société  ne  l'est  pas  moins  de  livrer  aujourd'hui 
mn  nom  et  son  exemple  à  tous  les  hommes  de  bonne 
vt)lonté. 

Notre-Dame  du  Puy  oifrc  une  large  nef,  contournée  de 
toas  côtés  par  un  collatéral  et  terminée  par  des  absidiolcs 
qui  servent  de  chapelles.  On  y  voit  un  beau  retable  de  la 
fin  du  XTii*  siècle.  Le  collège,  qui  est  voisin,  présente  une 
nlk  peinte  dont  les  tableaux  variés  mériteraient  des  visi- 
teurs :  elle  est  restée  jusqu'à  présent  à  peu  près  inconnue. 
Il  n*en  est  pas  de  même  du  palais  de  justice,  beau  monu- 
ment du  XIY*  siècle,  qui,  avec  plusieurs  autres  construc- 
tions civiles  datant  de  cet  âge  ou  du  siècle  précédent,  a 
vivement  frappé  notre  attention.  La  vieille  maison  de  la 

Marie,  ei  de  saint  Michel^  et  de  sainte  Marie  Égyptienne^ 
et  de  saint  Biaise. 

Aa  lieu  de  rette  ioterprétation  si  simple  et  qu'autorise  seule 
b  lecture  de  l'inscription,  voici  celle  de  Champollion,  nalurelle- 
ii»eot  suivie  par  tous  ceux  qui ,  après  lui ,  se  sont  occupés  de 
l'bistoire  de  Figeac  : 

1 1 1 1  lOVS  FC  :  HOC  ALTIRC  CON- 
SlCRATm  FVIT  AONO  GERALDO 
CATVRCCIICE  m  :  IN  HONOflE 
STI  lAMI  ET  ST1  ■ICHACUS 

■  .E:e:P:T:A:e:C:7:M:  tlASN. 

////  idus  februarii  (au  lieu  iVapritis)  hoc  attare  consecra- 
lum  fuit  n  domino  Ceratdo  caturcence  episcopo  in  honore 
fOHctK  Mari»  et  :iancti  MichaetLs.  Missa  ejus  celehretur  per 
tntnm  anni  circuium  exceptd  7  (ferid)  beati  BlasiiH! 


486      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

rue  Hort-Abbadial  (Horti  abbatialiê)  est  en  particulier  l'un 
des  beaux  spécimens  de  l'art  de  bâtir  qu'on  puisse  présen' 
ter  sous  le  règne  de  Philippe-Auguste. 

Nous  pouvons  nous  dispenser  de  mentionner  les  ponts, 
anciens  pourtant,  et  la  halle,  d'un  aspect  éminemment 
pittoresque,  mais  les  aiguilles  réclament  un  nouvenir. 
M.  Palustre  a  déterminé  la  destination  probable  de  ces 
curieux  édifices,  dont  deux  seulement  sur  quatre  sont 
encore  debout.  Placés  aux  quatre  points  cardinaux  de  la 
vallée  de  Figeac,  ils  indiquaient  sans  doute,  comme  des 
bras  levés,  les  limites  de  «  la  sauvetat  accordée  à  l'antique 
abbaye  par  un  puissant  bienfaiteur  à  nous  inconnu,  m 

Ceint  de  trois  côtés  par  le  Lot,  et  dominant  une  riche 
vallée,  où  le  pays  des  Ruthènes  vient,  à  deux  pas  de  l'Au- 
vergne, s'enlacer  au  Quercy,  le  plateau  de  Capdenac  ne 
serait  pas  sans  convoiter  le  titre  glorieux  d'Uxellodunum. 
La  convoitise  est  ancienne,  et  'ChampoUion,  l'illustre 
Figeaçois,  a  beaucoup  fait  pour  la  servir.  Nous  éprouvons 
le  regret  de  ne  pouvoir  lui  donner  même  satisfaction;  mais 
nul  du  moins  parmi  nous  ne  se  fait  faute  d'admirer  ce 
site  merveilleux,  que  couronnent  si  bien  sa  ligne  de  vieux 
murs  et  son  donjon  relié  au  château  de  Suliy, 

Assier,  visité  le  lendemain,  avait  donné  à  Capdenac  un 
gouverneur  dont  on  y  voit  les  armes.  C'est  le  seul  lien  qui 
relie  cette  ville  gothique  à  la  bourgade  pierreuse  où  la 
Renaissance  a  laissé  deux  œuvres  si  intéressantes,  l'église 
et  le  château.  Nous  les  visitons  en  la  compagnie  et  avec  la 
brochure  de  M.  le  baron  de  Rivières  (1). 

Dans  l'église,  élégante,  élancée,  dominée  au  nord  par 
une  haute  tour,  on  rencontre  d'abord  le  tombeau  du  fon- 
dateur : 

(I)  L'église  et  le  château  d'Assier,  souvenirsde  voyage,  1869. 


XLIY*   SESSION,    A  SENLIS.  487 

CY.DORT.C 
ELVI.QVI.NE 
VT.IAMAIS.P 
ROPOS.DE.REPO 
SER.EN.LA.VIE 
MORTELLE.LES 
LONGS.TRAVAV 
LX.LVY.ONT.DONN 
E.REPOS.CAR.PAR. 
SES.FAICTZ.SA.VIE.EST. 
IMMORTELE. 

Il  est  là,  couché  dans  Tattitude  du  sommeil,  vêtu  d'une 
riche  robe  fourrée,  la  tète  coiffée  d'uue  toque,  la  poitrine 
décorée  du  collier  de  Saint-Michel.  Il  s'appelait  Galiot  de 
ijeoouillac;  François  I*',  son  roi,  l'avait  pour  grand- 
mtllre  de  son  artillerie.  Vous  voyez  au  dehors,  sur  une 
longue  firise  qui  enlace  l'église  presque  sur  tous  les  piints, 
fei  bits  et  gestes  racontés  par  le  ciseau.  On  assiste  aux 
batailles  et  aux  prises  de  ville;  on  compte  à  satiété  les 
épées,  les  cuirasses,  les  casques,  les  couleuvrines,  les  bou- 
lets, tout  l'attirail  enfin  des  guerres  de  son  temps.  On 
Mirpreod  ses  amours  dans  cette  mystérieuse  devise  :  ikme 
FOETVNE  (i),  qui  se  retrouve  partout,  surtout  dans  son 
château;  on  constate  la  date  où,  retiré  dans  cette  somp- 
tueuse résidence,  il  mit  la  main  à  la  maison  de  Dieu  (L'an 
mil  cinq  eeni  et  quarantième  y  le  xxi^  d'avril)\  puis,  ren- 
trant au  dedans,  on  aperçoit  la  date  de  sa  tin,  4549,  et 
l'aTis  moral  qui  complète  si  bien  la  prédication  muette 
du  tombeau  : 

MEMENTO.MORI.RESPICE.FINEM 

Je  ne  veux  pas  m'attarder  au  château,  construi  t  vers  1 53î>, 
(I)  J'aime  fort  une. 


488  CONGKÈS  A.HCHÉ0L06IQUE  DE  FRANCE. 

sur  un  plan  carré,  autour  d'une  cour  intérieure,  cantonu^ 
de  grosses  tours,  orné  avec  tout  le  luxe  de  la  Renaiseano^* 
Il  n'offre  pas  en  général  la  finesse  de  sculpture  que  nous 
aurons  à  louer  bientôt  au  château  de  Montai.  C*est,  du 
reste,  une  malheureuse  ruine,  ouverte  à  tous  les  vent», 
et  dont  la  partie  occidentale  est  à  peu  près  la  seule  qui 
soit  restée  debout. 

Roc-Amadour  nous  attend  là-bas^  avec  son  site  unique, 
ses  splendeurs  religieuses  et  sa  couronne  monumentale, 
tout  imprégnée  du  parfum  de  sept  siècles.  L'ancienne 
collégiale  de  Saint-Sauveur,  si  intéressante  par  set  deux 
hauts  piliers,  ses  absidioles,  («on  plan  original  ;  la  dupdla 
refaite  de  la  très-sainte  Vierge;  le  plateau  Saint-Midiel, 
devant  le  tombeau  de  saint  Amadour  et  sous  la  flreaqm 
romane  si  bien  conservée  de  T Annonciation;  TantigiM 
petite  chapelle  des  archives;  l'église-crypte  de  Sâiol* 
Amadour;  les  oratoires  de  l'est;  le  palais  inachevé  dii 
évèques  de  Tulle;  les  inscriptions  semées  sur  dÎTemi 
façades;  enfin  le  vieux  trésor,  captivent  tour  à  toor  «C 
longuement  les  excursionnistes  du  Lot.  Naturellemenl,  le 
Bulletin  monumeniat  reviendra  sur  plusieurs  de  ces 
richesses  :  nous  nous  bornons  à  les  saluer  aujourd'hui 
|>our  continuer  notre  parcours. 

Le  touriste  qui,  de  Hoc- Amadour  s'est  rendu  comme 
nous  à  Saiut-Céré  par  la  route  de  Gramat,  a  dû  se  sentir 
vivement  frappé,  en  abordant  cette  petite  ville,  par  la 
majestueuse  physionomie  des  tours  de  Saint-Laurent.  Elles 
couronnent,  comme  deux  obélisques  de  granit  sur  xiua 
pyramide  de  verdure,  le  sommet  d'un  cône  entièrement 
rev<^tu  de  vignobles.  La  plus  grosse  est  du  \iy  siècle; 
lautre,  bardée  de  contre-forts,  de  la  fin  du  xiii*.  La  ter- 
rasse elliptique  qui  les  sup|X)rtc  présente  des  traces  d'une 
ôpoijuc  plus  reculée. 


Bgieiweirijuvee  au  Puy  d  Isj 


I 


I 


f 


i 

« 
« 

I 


XUY*  SESSION,   A  SEMLIS.  iS\) 

Abrité,  lui,  au  contraire,  dans  la  vallée  de  la  Dave,  le 
chAteau  de  Montai  semble  jaloux  de  cacher  ses  richesses. 
Il  n'a  pour  le  côté  de  la  route  que  des  tours  assez  com- 
munes,  et  c'est  sur  la  face  opposée,  au  midi,  que  s'épa- 
nouit sa  délicieuse  façade  de  la  Renaissance.  11  fut  construit 
vers  1î>3i  par  une  noble  veuve,  Jeanne  de  Balzac,  aussi 
dévouée  à  la  mémoire  de  Robert,  sou  père,  qu'à  celle 
•l'Amalric  de  Montai,  son  mari.  Malheureusement,  elle  ne 
put  finir  son  œuvre;  mais,  eu  dépit  des  ravages  du  temps, 
le  manoir  inachevé  demeura  une  merN'cille.  Quelle  vie 
dans  ces  portraits -médaillons  qui  se  détachent  de   la 
Kxiaraille!  quelle  grâce  dans  ces  arabesques!  quel  fini  de 
détails  dans  ces  escaliers!  On  y  oublie  les  fatigues  d'une 
longue  pérégrination  à  travers  l'immense  plateau  des 
tsarines,  visité  le  matin,  et  vraiment  curieux,  du  reste, 
l^  les  débris  d'oppidum,  découverts,  analysés  et  offerts  à 
nos  yeux  par  M.  Castagne. 

(Ustelnau  domine  de  sa  masse  imposante  une  vallée 
défiant  la  description.  Cultivée  comme  un  jardin,  baignée 
<le  trois  rivières  qui  se  réunissent  sous  les  tours  du  chA- 
teau, jalonnée  de  clochers,  cernée  de  pentes  quelquefois 
abruptes,  plus  souvent  débordées  de  vignobles,  elle  attache 
sur  elle  des  regards  qui,  dans  cette  résidence  féodale,  lui 
sacrifieraient  tout.  Il  ne  faut  rien  moins  qu'une  petite 
ondée  pour  nous  obliger  à  pénétrer  de  la  première  enceinte 
dans  la  seconde,  et  à  visiter  successivement  le  vieux  bâti- 
ment du  XII*  siècle,  la  chapelle  du  xiv',  les  restes  de  la  galerie 
du  XYii*«  les  quelques  appartements  conservés,  et  enfin  le 
donjon.  Puis  vient  la  remarquable  église  collégiale,  bâtie 
dius  le  XV'  siècle  par  Jean  de  Caylus-Castelnau,  évèque 
et  comte  de  Cahors.  Nous  saluons,  en  redescendant,  Notre- 
Dame  de  Félines  et  sa  pierre  tumulaire:  puis  la  petite  ville 
de  breteuoux,  liastide  de  la  fin  du  xiii*  siècle,  et,  enfin  par 


490       C0M6HÈÔ  AAGHKOLOGIQUB  DK  FRANCE. 

une  routo  plantée  d'arbres,  déroulée  comme  dans  un  par- 
terre, nous  courons  vers  un  autre  département,  celui  de 
la  Corrèze,  qui  nous  réserve  sa  belle  église  de  Saint-Pierre 
de  Beaulieu. 

Vraiment  oui,  belle  église,  et  beau  portail,  et  beau  tré- 
sor !  Un  édifice  de  deux  cent  vingt-cinq  pieds  de  long,  en 
croix  latine,  porté  sur  douze  piliers,  divisé  en  trois  nefs, 
avec  un  déambulatoire,  une  couronne  absidale,  des  cha- 
pelles de  transsept,  des  galeries,  deux  clochers,  deux  tou- 
relles d'angle  :  voilà  pour  l'ensemble.  Le  portail ,  peroé 
dans  le  flanc  méridional  de  la  nef,  et  datant,  comme 
l'église,  de  l'époque  de  transition,  est  un  drame  où  riea 
ne  manque,  ni  l'intérêt  historique,  ni  la  partie  morale,  ni 
le  sceau  rare  et  précieux  de  l'unité.  Les  bas-reliefs  infé- 
rieurs retracent  les  luttes  de  la  Xevvà;  la  grande  page  du 
tympan  représente  le  Jugement  dernier.  Des  monstres 
déroulés  au  linteau  et  d*une  physionomie  absolument 
particulière,  complètent,  avec  un  groupe  symbolique  jeté 
dans  un  angle  extérieur,  l'intérêt  puissant  de  ce  porche 
trop  peu  connu,  plus  ancien  que  celui  dcMoissac,  qui  s'en 
est  inspiré,  et  dont  il  faut  regretter  que  la  voûte  ait  été 
déinolic.  Quant  au  trésor,  je  n'en  rap|>ellerdi  que  Tobjet 
principal  :  cette  Vierge  en  lames  d'argent,  du  xii*  siècle, 
rehaussée  de  filigranes,  d'intailles,  d'un  camée  antique, 
qui  constitue  Tuu  des  plus  rares  produits  de  l'orfèvrerie 
française  au  moyen  âge  (I  j. 

(4)  Je  me  permets  de  signaler,  pour  plus  amples  détails,  la 
Notice  historique  et  archéologique  sur  Casteinau  de  Rrete- 
noux  et  V église  de  Saint-Pierre  de  Beaulieu  et  son  portail 
sculpté,  du  signataire  de  ces  lignes.  Les  deux  brochures  sont 
en  vente,  au  prix  d'un  franc  rliacuue,  chez  Taoteur,  au  petit 
séminaire  de  Servières  \Corrè7.cj. 


XLIV  SESSION,   A  SENLiS.  491 

Visite  faite,  en  face  de  l'église,  d'une  maison  décorée  de 
sculptures  et  d'une  admirable  cheminée  du  commence- 
ment du  XYi*  siècle,  les  excursionnistes  du  Lot  ne  se  dou- 
taient guère,  en  quittant  Beaulieu,  que  le  même  jour  les 
venrait  encore  devant  un  autre  moustier,  un  autre  portail, 
Qoe  autre  splendide  cheminée.  C'est  ce  qui  arriva  pour- 
taot.  Le  petit  bourg  de  Carennac ,  si  gentiment  assis  au 
bord  de  la  Dordogne,  en   face  d'Ilots  verdoyants   qui 
eotr'ouvrent  leur  rideau  pour  nous  laisser  voir  le  plus 
M  horixon,  nous  offrait  toutes   ces  richesses  et  bien 
d'autres  encore. 

C'était  un  prieuré  clunisien  dont  Fénelon  a  possédé  le 
titre.  Son  église  de  l'éjioque  romane,  si  j'en  excepte  le 
anctuaire  vo&té  en  ogives,  le  saint  sépulcre,  les  quatre 
diapelles  latérales,  la  fresque  de  l'une  d'elles,  le  haut  du 
clocher,  qui  accusent  sufGsamment  la  période  flamboyante, 
eit  précédée  d'un  narthex,  ouvert  à  l'ouest  par  le  grand 
portail.  Ce  portail  n'offre  guère  qu'un  sujet  d'étude,  le 
tympan;  et  ce  tympan  est  d'une  donnée  assez  commune  : 
Jésus-Christ  dans  sa  gloire,  au  milieu  du  tétramorphc,  de 
âes  douze  apôtres  et  d'auges  adorateurs.  Mais  la  sculpture 
est  très-fine,  et  l'ajourement  délicat,  soit  de  l'auréole,  soit 
des  treize  trônes,  a  quelque  chose  qui  rappelle  la  ciselure 
des  châsses  de  ce  temps. 

Dans  le  bâtiment  claustral,  encore  conservé,  nous  avons 
vu  un  cloître  daté  de  m  ttti(c|  iiii  s  tlii  (tiH4),  et  d'une  archi- 
tecture très-soignée,  malheureusement  dévasté  par  la 
Révolution.  La  cheminée,  du  même  temps,  est  restée  dans 
un  état  de  conservation  irréprochable;  et  quelle  perle  ico- 
nographique que  cette  représentation  si  pittoresque  du 
pauvre  Lazare,  demandant  l'aumône  au  riche  attablé,  et 
mourant  ensuite  entre  les  mains  des  anges,  qui  emportent 
«in  âme  dans  la  gloire  céleste,  tandis  qu'un  |)eu  plus  loin 


493  CONGRES   ARGBÉOLOGIQCTE  DE   PRANCE. 

le  mauvais  riche  expire  sous  la  griffe  des  diables,  acharnés 
à  torturer  son  âme  qu'ils  plongent  dans  l'enfer! 

.le  ne  rappelle  que  pour  mémoire  le  château  de  l'Abbé, 
construit  au  commencement  du  xvi*  siècle  et  embelli  par 
l'oncle  du  grand  Fénelon,  évéque  de  Sarlat,  dont  on  y 
voit  encore  le  portrait.  Il  faut  se  hâter  vers  le  Puy-d'Isso- 
lud,  où  nous  attend  M.  Castagne. 

Prononcer  ces  deux  noms,  c'est  rappeler  le  savant 
mémoire  lu  au  congrès  de  Toulouse  en  1875,  et  que  con- 
naissent tous  les  membres  de  la  Société  française  d'Arcbéo- 
logie.  L'auteur  a  vu  dans  le  Puy-d'Issolud  <c  cette  grande 
place  forte  d'Uxellodunum,  si  connue  par  la  résistance 
héroïque,  mais  malheureusement  vaine,  qu'offrit  à  Tancée 
romaine,  commandée  en  personne  par  César,  un  très-petit 
nombre  de  combattants  retranchés  derrière  ses  remparts.  ■ 
A  l'opinion  de  M.  Castagne  se  range,  avec  Napoléon  III, 
presque  toute  l'école  archéologique  de  ce  temps.  Dire  que 
toutes  les  difficultés  sont  par  lui  résolues,  ce  serait  aller 
un  peu  trop  loin;  mais  lorsque,  à  sa  suite,  on  a,  comme 
nous  l'avons  fait,  sillonné  pendant  plusieurs  heures  con- 
sécutives ce  plateau,  dont  la  vue  s'égare  dans  un  des  pays 
les  plus  beaux  de  la  France;  lorsqu'on  a  reconnu  toutes 
ces  traces  de  fortification,  constaté  l'intégral  escarpement 
(lu  site,  visité  surtout  la  galerie  souterraine  qui  courut 
chercher  les  veines  de  la  source  et  la  détourna  subitement, 
on  descend  de  la  montagne  avec  cette  impression  que  dif- 
ficilement un  oppidum  quelconque  du  Quercy  offrirait 
tant  d'indices  concluants,  et  par  le  fait  nous  n'avons  pu 
ou  trouver  de  (mreils  ailleurs  (i). 

1^  \ote  de  M.  C  VaUier  sur  un  tiers  de  soi  mérovingien 
Mmrf  d  (  jrtlodunHw.  Pendant  que  nos  confrères,  sous  la 
itinduito  de  M  i.;istagoe.  prcoiiraient  remplacement d'Uxellodn- 


XUT*"  SESSlOiN,   A  SENLIS.  \9[\ 

A  Martel,  grande  église,  d'un  jet  hardi,  conservant  peu 
(le  son  architecture  primitive  (la  romane ;,  et  devanl 
presque  toutes  ses  lignes,  comme  ses  vitraux,  à  la  seconde 
moitié  de  l'époque  ogivale.  L'hôtel  de  ville  est  fort  inté- 
ressant, et  la  maison  dite  de  Henri  Court-Mantei  conserve 

à  uotre  histoire  un  important  souvenir. 
Si,  de  la  voie  ferrée  au  Puy-d'[ss4>lud,  vous  gagnez 

jamais  Martel,  en  toute  liberté  d'équipage,  suivez,  je  vous 

le  conseille,  la  délicieuse  route  des  rochers  de  Mirandoi; 

puis,  en  vous  transportant  à  Souillac,  n'oubliez  pas,  au 

lom,  j'allai  dans  une  chaumière  eximiner  une  pièce  d'or  (voir  le 
ileisio)  que  le  propriétaire  avait  ramassée  dans  son  champ.  Il  se 
trouva  que  c'était  un  tiers  de  sol  mérovingien.  Je  m'empressai 
(l*en  prendre  une  bonne  empreinte,  et  je  vous  en  adresse  un 
dessin  fort  exact.  D'après  les  recherches  que  j'ai  faites  dans  la 
Kerue  numismatique,  j'ai  tout  lieu  de  penser  et  de  croire  que 
tttte  pièce  est  complètement  inédite,  car  dans  les  tables  qui  ont 
été  publiées  des  noms  de  localités  ou  de  monétaires,  je  n*ai  pu 
trouver  ceux  indiqués  par  notre  petite  monnaie,  dont  voici  la 
description  : 

B    AMHOI^AITSO. 

Tète  diadêmée  à  droite. 

HwerS  VIVBDOMAHIVL  FI. 

Croix  pattée  sur  un  globe. 

Deux  noms  nouveaux  :  celui  du  monétaire  Barrocaitto  et 
relui  do  firedùmariul ,  localité  dont  il  est  bon  de  soumettre 
le  nom  à  l'examen  de  ceux  qui  s'occupent  do  la  numismatique 
oiérovingienne  à  un  point  de  vue  général,  et  en  particulier  k  la 
science  de  M.  de  Ponton  d'Amécourt,  président  de  la  Société 
française  de  Numismatique.  i^sTi^inii  d'une  lettre  de  M.  (l.  Val- 
lier.i 


494      CONGRÈS  ARGHÉOL0610UB  DE  FEANCC. 

village  du  Pigeon,  une  motte  féodale  (d'antres  disent u^ 
tumulus  gaulois,  parfaitement  conservée. 

Ensevelie  dans  une  vallée  profonde,  sur  les  bords  d'un^ 
rivière  qui  ne  se  fait  ici  sa  place  qu'en  déchirant  le  plateau, 
l'ancienne  ablntiale  de  Souillac  est  la  première  des  deux 
églises  du  Lot  où  nous  saisissons  l'influence  de  Saint- 
Front  de  Périgueux.  Sa  large  nef  à  coupoles  ne  laisse  pas 
d'être  suivie  d'un  transsept  où  brille,  comme  dans  l'ab- 
side, le  pur  style  roman.  Fort  curieux  est  un  pilier  du 
grand  portail,  qu'a  dessioé  M.  VioUet-le-Dnc;  mais  plut 
intéressant  encore  est  le  tympan,  où  l'artiste,  sortant  des 
données  ordinaires,  a  figuré  une  légende  dont  il  sera  parié 
plus  tard. 

Nous  gravissons  la  côte  ardue  qui  nous  met,  à  son  terme, 
devant  les  horizons  lointains  et  toujours  fuyants  de  Gour- 
don.  Avant  d'arriver  dans  celte  ville,  qui  se  distinguée 
dix  lieues  de  distance  par  sa  terrasse  et  ses  clochers ,  nous 
rencontrons  dans  un  pli  de  vallée  la  remarquable  église 
du  Vigan.  Encore  une  merveille  monastique!  Grande 
façade,  plan  unique,  ogives  élancées.  Le  xiv*  siècle,  à  son 
aurore,  a  fait  cette  remarquable  construction,  comme  il  a 
fait,  vers  son  milieu,  la  belle  église  de  Saint-Pierre  de 
Gourdon.  Avait-il  aussi  construit  le  château  fort  qui 
Tavoisinait  autrefois  et  dont  il  n'est  resté  que  l'imposante 
assiette?  Nous  n'avons  pu  le  savoir;  mais  on  lui  doit  ce 
qui  reste  encore  de  la  maison  dite  des  Templiers,  et  peut- 
être  cette  cuve  baptismale  de  l'église  des  Capucins,  qui 
me  fait  songer  à  un  oubli  :  je  n'ai  pas  mentionné  les 
fonds,  eu  marbre,  d'Altillac,  près  Heaulieu,  dont  les  lions 
de  support  trahissent  une  époque  fort  ancienne  et  qui 
pourrait  bien  remonter  jusqu'au  x*"  siècle. 

Ne  parlons,  à  propos  de  Salviac,  ni  de  certain  restau- 
rant, ni  de  certaine  restauration;  mais  louons  l'église  et 


XUV  SESSION,   A  SENLIS.  495 

ngrettons  que  les  vitraux  ne  nous  offrent  partout,  si  je 
ne  souviens  bien,  que  des  amalgames  de  fragments,  des 
.^eènes  incomplètes.  A  cette  bourgade  se  rattache  le  souve- 
nir de  Jean  XXII. 
Nous  voici  enfin  dans  la  vallée  du  Lot,  sous  ce  gaillard 
château  de  Mercués,  que  nous  visiterons,  dans  cette  ville 
même  de  Cahors,  qui  doit  être  le  dernier  centre  de  nos 
courses.  Nous  en  sortons,  à  peine  arrivés,  pour  aller  étu- 
dier le  plateau  de  Murcens,  vieil  oppidum  gaulois,  qui 
domina  jadis  le  point  de  départ  d'un  immense  aqueduc, 
destiné  à  porter  à  Cahors  les  fraîches  eaux  de  la  fontaine 
Polémie  et  du  ruisseau  voisin.  Nous  aimons  à  suivre  les 
traces  de  cette  construction  vraiment  romaine  le  long  des 
mchers  qui  commandent  le  village  de  Vers,  et  surtout  à 
Laroque-des-Arcs,  ainsi  nommée  à  cause  des  arcades  gigan- 
tesques qui  faisaient  autrefois  dans  oe  lieu  le  digne  pen- 
dant du  fameux  pont  du  Gard. 

De  l'autre  côté  de  Cahors,  près  Luzech,  est  un  autre 
oppidum  où  se  portent  nos  investigations,  rimpemal.  Des 
(bailles  opérées  sous  nos  yeux  permettent  à  chaque  excur- 
sionniste d'emporter  un  souvenir  des  vieux  murs  construits 
par  nos  pères.  La  question  d'Uxellodunum  donne  lieu,  dans 
le  bourg,  à  un  dernier  débat,  à  la  suite  duquel  est  gravi 
le  promontoire  rocheux  qui  domine  Luzech  (i).  C'est  d 

;i  )  Les  partisans  de  Luzech  font  grand  cas  d'un  texte  d'I^rose, 
oii  il  est  dit  :  Duabusque  partibus  per  abrupia  iatera  non 
parro  flumine  cingebatur.  Mais  comment ,  leur  répondrons- 
nous,  un  seul  cours  d'eau,  qui  ferait  presque  le  tour  d*un  massif 
M  le  ceindrait-il  que  de  deux  côtés?  Orose  a  donc  voulu  expri- 
mer que  sur  deux  parties  latérales  du  mont  coulait  une  rivière, 
ce  qui  ne  veut  pas  dire  que  ce  soit  la  même.  Ajoutons  que  les 
■oCs  non  parro  flumine  ne  signifient  pas  ririère  comidé' 


490       GONGRKS  ARGHÉOLOOIQU£  DE  PHANGE. 

peine  si  l'un  d'entre  nous  peut  représenter  ses  confrère  * 
Notre-Dame  des  îles,  but  de  pèlerinage  qu'il  fautseul^' 
ment  rappeler,  non  moins  que  le  joli  sanctuaire  de  NolT^' 
Dame  de  Velles,  près  Veres,  et  la  petit  chapelle  de  Notr^ 
Dame  des  Neiges,  près  Gourdon. 

Après  un  mot  donné  à  Duravel,  à  sa  crypte,  à  son  tom^ 
beau  mérovingien,  à  sa  pile  romaine,  est-il  besoin  d'in- 
sister beaucoup  sur  nos  visites  de  Cahors?  Cette  ville  est 
œnnue  du  monde  archéologique;  et  néanmoins  c'est  une 
joie  pour  notre  plume  de  revenir  sur  son  pont  de  Valeu- 

rahle,  comme  l'ont  traduit  MM.  Creuly  et  A.  Jacobs,  mais  bien 
cours  d*eau  qui  n'est  ni  grand  ni  petit,  expression  non  appli- 
cable au  Lot,  large  de  plus  de  ceot  mètres  autour  de  la  pres- 
qu'île de  Luzech. 

En  second  lieu .  Hirtius  fait  remarquer  qu'Uxelloduoum  était 
situé  sur  uu  roc  esi^rpé  que  des  troupes  ne  pourraient  gravir, 
quand  même  il  ne  serait  pas  défendu.  Ce  n'est  pas  le  cas  de 
Luzech,  au  moins  du  côté  de  la  Pistoule.  De  plus,  croit-on  que 
si  Vttppidum  eût  élô  entouré  des  eaux  du  Lot,  le  secrétaire  de 
César  n'aurait  pas  mentionné  cette  grande  rivière  comme  tenant 
la  meilleure  place  au  nombre  des  obstacles  que  les  assiégeante 
devaient  surmonter? 

Enfui  on  ne  s'explique  pas,  à  Luzecli,  la  construction  des 
trois  camps  placés  sur  des  lieux  élevés  et  réunis  par  la  ligne 
de  contravallation  dont  parlent  les  Commentaires,  Le  Lot .  il 
nous  semble,  suffisait  bien  à  lui  tout  seul  pour  opposer  un  obs- 
tacle à  la  sortie  des  bagages  des  assiégés,  et  («aninius  eiU  pu  st* 
contenter  d'en  surveiller  les  bords. 

Quant  à  i'étymologie  de  la  Pistoule,  qui  signifierait  pierre  de 
l'effusion  de  sang  {\9ii^\%  tullii),  nous  craignons  fort  qu'elle  n'ait 
fié  faite  |>our  le  besoin  de  la  cause.  Dans  tous  les  cas,  la  décou- 
verte ne  nous  semble  pas  assez,  importante  pour  que  deux  per- 
sonnes sérieuses,  comme  nous  en  avons  été  témoin ,  s'en  disputent 
la  paternité. 


TRÉSOR 


DE   ROCAMADOURllOT 


Croix  processic 


.onnale  on  st^en' 


Xll'  sied' 


j„.  „  <»  </r  y/i-J'"' 


Jx-  Mi ,  *:r  /4SÔ  : 

'Ut  la  lApJriti^-Hn/,- 


3,1  OOVTlBOVTf    «KItSSIEVI|S<>l«S< 

\  ci£iNOi»ES«ov  cHwrrREno-™ 

DAME  =  DE"R0OMM.lI)OïH« 
MOVMoEMCT  aREEDIFt»  FN«C 

UROÏSE'ORFEBRE  «»£+ 


-'  fane  pi  -tel 

Trésor  de  Rocamadour:   Croix  en  argent ,  2*  face. 


n  jir  uns  cr»  (faMtaMib. 


\ 

i 


TRÉSOR    DE    ROCAMADOUR 

CUSTODE  EN  CUIVRE  ÉMAILLE    (XIY^SIÈCLEI. 


3 


■ 

ï 


%airbcU  :v:tis\'..:r..:  â'-i  les 


i 


XLU*  SESSION,   A  SBNUS.  497 

,o&  l'esprit  s'oublie  si  bien  dans  le  plein  moyen  âge; 
sur  ses  remparts,  qui  datent,  c&mme  le  pont,  du  xiv*  siècle  ; 
sur  son  vieux  palais  de  Jean  XXd,  assez  voisin  d'un  châ- 
teau royal,  son  contemporain,  qu'on  a  malheureusement 
converti  en  prison.  Nous  revoyons  la  maison  Valette,  avec 
ses  jolis  détails;  la  très-curieuse  église  de  Saint-Urcise, 
doDt  un  admirable  chapiteau  de  l'époque  ogivale  retient 
longtemps  notre  attention;  l'ancien  palais  de  justice,  où 
glt  un  marbre  tumulaire  du  iv*  siècle,  décoré  de  chrismes 
^t  de  roses  d'un6  merveilleuse  conservation;  les  restes  du 
^^uvent  des  Jacobins,  par  delà  le  Font-Neuf,  sur  la  rive 
SBuche  du  Lot;  le  musée,  jeune  encore,  mais  de  belle 
^^pérance;  et  enfin  et  surtout  l'intéressante  cathédrale. 

I>eux  vastes  coupoles  couvrant  à  elles  seules  une  nef  de 
plus  de  cent  vingt  pieds;  une  abside  gothique  du  xiv*  siècle 
portée  sur  des  bases  romanes;  une  façade  du  môme  temps, 
'^'offrant  malheureusement  rien  de  la  grandeur  de  lignes 
4Ui  caractérisait  à  cette  époque  nos  façades  du  nord  ;  un 
'^agaifique  portail  roman  déplacé  au  xiV  siècle,  jeté  de 
^'entrée  de  l'ouest  sur  le  flanc  nord  de  la  nef,  où  l'indifTé- 
^Dce  publique  l'avait  enseveli;  enfin,  sur  le  flanc  méri- 
dional, un  cloître  d'une  délicatesse  hors  ligne  :  telle  est,  à 
Quelques  détails  près,  la  cathédrale  de  Cahors.  Nous  y 
^Tons  vu  les  ouvriers  à  l'œuvre ,  et  nous  devons  dores  et 
déjà  nos  félicitations  publiques  à  M.  Calmon,  notre  con- 
frère, qui  a  si  intelligemment  ravivé  la  délicate  ornemen- 
tation picturale  du  xrv**  siècle. 

Il  faudrait  mentionner  le  presbytère  (de  la  Renaissance), 
Il  salle  capitulaire,  convertie  en  chapelle,  la  sacristie,  ses 
précieuses  guipures,  sa  crosse,  ses  plaques  de  gants;  il 
faudrait  parler  de  l'intéressant  parcours  fait,  après  la  sépa- 
ration, par  les  derniers  excursionnistes  sur  la  rive  du  Lot, 
m  amont  de  Vers,  et  sur  celle  du  Gelé  jusqu  au  cœur  de 

XLIV*  SESSION.  .'i2 


498      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  D£  FRANGE. 

Figeac  :  Saint-Géry  et  ses  rocs  des  Anglais;  Sainl-Cirq-la- 
Popie  et  son  très-vieux  château  ;  Marcillac  et  sa  curieuse 
église;  Espagnac  et  ses  tombeaux  inconnus...  Mais  com- 
ment tout  dire  quand,  en  vérité,  l'attente  est  partout 
dépassée  et  que  partout  se  présentent  des  sujets  d'étude? 
J'ai  déjà  bieu  longtemps  retenu  mon  lecteur...  Peut-être 
cependant  aurai-je  droit  à  l'indulgence  si  j'ai  pu  con* 
vaincre  chacun  de  mes  confrères  de  l'intérêt  de  telles 
excursions,  si  j'ai  pu  surtout  lui  en  donner  le  goût. 

J.-B.  POULBRiiaB, 
lo»p«ctear  de  la  CorrèM. 


LETTRE  A  M.  JULES  DE  LADRIÈRE 


SUR 


LES   AIGUILLES   DE    FIGEAC 


Mo^  CHER  Confrère  et  Ami, 

Au  mois  de  mai  dernier,  j'allais  partir  pour  un  assez 

l^csDg  voyage  dans  le  midi  de  la  France,  lorsque  je  reçus 

^-Rne  aimable  lettre  de  vous.  En  réponse  à  l'appel  que 

J  ^avais  fait  à  votre  vieille  expérience  de  toutes  les  curiosités 

^le  notre  sol,  vous  vouliez  bien  m'indiquer   quelques 

'vonuments  plus  particulièrement  intéressants  à  visiter, 

^^t  par  le  mérite  réel  de  leur  exécution,  soit  par  leur 

^lestination  bizarre  et  inexpliquée  jusqu'à  ce  jour.  Parmi 

c«s  derniers  vous  mettiez  en  première  ligne  les  célèbres 

aiguilles  de  Figeac.  c  Ces  étranges  obélisques,  me  disiez- 

«  vous,  ont-ils  véritablement  été  élevés  en  commémoration 

«  du  miracle  qui  décida  Pépin  à  choisir  sur  les  bords  du 

t  Celé  l'emplacement  d'un  grand  monastère?  ou  bien 

«  ne  faut-il  voir  en  eux  autre  chose  que  des  fanaux  des- 

«  tinés  à  guider  pendant  la  nuit  les  pieux  pèlerins  vers 

«  la  grande  église  du  Sauveur  ?»  La  netteté  de  votre 

esprit  se  refusait  à  l'une  et  l'autre  solution,  et  le  problème 

se  présentait  de  nouveau  à  vos  yeux,  hérissé  des  mêmes 

difficultés. 

Vous  le  savez  déjà,  je  ne  pus  accomplir  en  entier  mon 
programme.  Retenu  à  Toulouse  plus  longtemps  que  je  ne 


500       CONGRÈS  ARGMÉOLOGIQUE  DE  FEANGB. 

me  Tétais  proposé,  eatraiaé  à  Albi  par  le  désir  de  visiter 
la  splendide  cathédrale  de  Sainte-Cécile,  je  me  trouvai 
dans  l'impossibilité  de  donner  même  quelques  heures  ù 
Figeac.  Je  traversai  rapidement  la  riante  vallée  au  fond 
de  laquelle  la  ville  s'est  groupée  autour  du  monastère 
carlovingien,  et  je  cherchai  en  vain  du  regard  lespetits 
monuments  qu'il  m'eût  été  si  agréable  seulement  d'aper- 
cevoir. ^ 

Cette  déception  toutefois  ne  parvint  pas  à  me  décou- 
rager et  je  ne  désespérai  point  de  satisfaire  tôt  ou  tani 
votre  curiosité.  Un  voyage  à  Figeac  était-il,  en  effet,  bien 
nécessaire  pour  arriver  à  deviner  cette  piquante  énigme, 
et  n'avais-je  pas  épars  dans  ma  bibliothèque  les  éléments 
d'une  explication  que  j'avais  voulu  aller  chercher  si  loin? 
Le  compte-rendu  de  la  XXXIl*  session  du  Congrès  archéo- 

4 

logique,  tenue  à  Cahors  en  4865,  ne  me  présentait-il  pas 
un  dessin,  que  j'avais  tout  lieu  de  croire  exact,  de  l'un  de 
ces  petits  monuments;  et  ne  savais-je  pas  d'autre  part  que 
ces  bizarres  édicules  n'étaient  plus  aujourd'hui  qu'au 
nombre  de  deux,  l'un  au  midi  et  l'autre  au  couchant  de  la 
vieille  cité  monastique?  Aussi,  sans  m'adonner  à  aucune 
recherche  particulière  qui  m'eût  peut-être  éloigné  du  but 
si  vivement  souhaité,  je  poursuivis  tranquillement  mes 
travaux  ordinaires,  attentif  néanmoins  à  tout  ce  qui  pour- 
rait, de  près  ou  de  loin,  m  aider  à  pénétrer  un  secret  si 
bien  gardé. 

Tout  dernièrement  en  étudiant  les  origines  de  la  royale 
abbaye  de  Fontevrault,  je  fus  frappé  du  passage  suivant 
d'une  bulle  du  pape  français  Calixte  II,  donnée  à  Mar- 
moutier  en  Hi9,  en  faveur  de  la  pieuse  fondation  de 
Robert  d'Arbrissel,  et  que  je  transcris  textuellement  tel 
que  le  donne  le  Gallia  christiania  (t.  H,  p.  1315)  :  — 
n  Eà  insuper  immunitate  prœfatum  C(Knobium  ex  aposto- 


XLIV  SESSION,    A   SENLIS.  oOl 

•  lies  sedis  benignitate  dooavimus  :  ut  omne  illud  spa- 

•  tium  quod  cruces  in  cireuitu,  ex  prxeepio  nostro  dispo^ 

•  sùxeomprehendunt,  exteriusquietumdeinctpsinvMatum 
«  çtte/>eniianea/;  quatenus  quicumque  hominum  in  eu 
«  aut  occident,  aut  laeserit,  vel  prsedam  fecerit,  vel  grave 

•  aliquod  forisfactum  comroiserit,  donec  sattsfaciat,  reus 
«  sacrilegii  habeatur.  »  Les  croix  dont  parle  le  souverain 
pontife  et  qui  furent  dressées  par  son  ordre  en  des  endroits 
déterminés  ont  depuis  longtemps  disparu,  et  il  nous  serait 
difficile  à  notre  époque  de  fixer  leur  emplacement.  Qu*il 
nous  suffise  de  savoir  qu'une  vaste  étendue  de  terrain 
autour  du  puissant  monastère  était  considérée  comme  un 
immense  espace  consacré,  qu'il  n'était  pas  permis  de 
souiller  par  le  meurtre  et  la  rapine  san»se  rendre  cou- 
pable de  sacrilège.  Et  croyez  bien  que  les  religieuses  de 
FoDtevrault  n'étaient  pas  seules  à  jouir  du  privilège  d'une 
looc  sanctifiée  autour  de  leur  sainte  habitation.  Je  trouve 
pirmi  les  pièces  justificatives  de  la  belle  histoire  du  Berry 
de  M.  Louis  Raynal  (t.  I,  p.iT8),  une  charte  (ie  l'abbaye  de 
SaJDt-Sulpice,  tirée  des  archives  du  Cher,  où  il  est  ques- 
tion d'une  semblable  concession.  Il  s'agit  de  la  petite 
église  de  Meunet,  au  sud  d'issoudun,  sur  la  route  de  La 
Châtre,  et  il  est  dit  que  le  privilège  octroyé  s'étendra  h, 
on  jet  de  flèche  du  monument.  A  cet  effet  un  archer  sera 
successivement  placé  devant  la  façade,  derrière  le  chevet 
et  sur  les  deux  côtés  de  l'édifice,  et  une  croix  sera  élevée  à 
l'endroit  même  où  la  flèche  viendra  à  tomber  :  —  a  Cou- 

■  ventum  fecerunt...  de  ecclesia  quœ  dicitur  de  Molnet... 
*«  ut  adsisteret  aliquis  ex    parte   S.  Sulpitii  ctii/i  forti 

■  àalisia  o  capite  ejuadem  ncclesix  ei  infra  et  a  iatere 
«  dextro  et  sinistro,  et  mitteret  sagi^am  et  ubi  deveniret 
«  sagitta  ibi  figeretur  crux,  ob  siguum  illius  ecclesisp 
«  salvationis.  » 


502       CONGRÈS  ARGHÉOL06IOUE  «DE  FRANCE. 

Ce  territoire  privilégié  reçut  dans  le  moyen  âge  une 
appellation  bien  significative;  il  fut  désigné  sous  le  nom 
de  Mlvamentum,  mot  que  le  Roman  de  la  Bote  traduit  par 
celui  iesalvance,  et  nos  vienx  troubadours  provençaux 
par  celui  de  sauvetat.  a  Stabli  e  dwia  saubetat^  m  dit  un 
litre  de  1080  cité  par  Raynouard  dans  son  Dictionnaire 
de  la  langue  romane.  Primitivement  salvamentum  était 
synonyme  de  tutellcy  immunité,  protection  ;  mais  peu  à 
peu  ce  mot  fut  pris  dans  un  sens  concret,  et  signifia  toute 
étendue  de  terrain  placée  sous  une  sauvegarde  particu- 
lière. Envisagé  sous  cet  aspect  nouveau,  Ducange  le  défi- 
nit ainsi  :  Prœdium  ipsum  quod  salvatur  vel  proiegi 
tur;  et  il  cite  à  l'appui  un  extrait  du  Gallia  chriitiama 
(t.  IV,  col  437,  insl.)  :  «Dédit  quoque  salvamentum  quod 
ipso  monte  est  in  circuitu  ejusdem  ecclesi».  »  Ici  nous 
sommes  en  Bourgogne,  et  le  signataire  de  la  charte  est 
Hugues,  comte  de  Ghàlon-sur- Saône,  qui  vivait  vers 
Tan  980. 

Mais,  me  direz-vous,  cette  sauvetat  dont  vous  parlez,  en 
quoi  diffère-t-elle  des  lieux  d'asile  ordinaires?  En  quoi! 
mais  par  retendue,  par  les  conditions  qui  la  gouvernent. 
Les  lieux  d'asile  furent  établis  par  l'autorité  ecclésiastique, 
par  les  évoques  réunis  en  concile,  et  les  limites  qui  leur 
furent  assignées  ont  toujours  été  on  ne  peut  plus  res- 
treintes, c  Les  églises,  disent  les  Pères  assemblés  en  concile 
a  à  l'abbaye  de  Saint-Gilles,  en  iOiS,  jouiront  de  ce  pri- 
«  vilége  que  personne  ne  pourra  rien  enlever  dans  les 
((  trente  pas  de  circuit,  ni  faire  du  mal  à  un  innocent  ou 
((  à  un  coupable,  à  moins  que  le  malfaiteur  n'ait  causé 
c(  du  mal  dans  cet  espace.  »  En  général,  le  mur  qui  ser- 
vait à  enclore  le  cimetière  au  milieu  duquel  s^élevait  la 
maison  de  prière,  délimitait  aussi  les  pieux  refuges 
offerts  à  tous  les  faibles  et  à  tous  les  persécutés. 


XLIY*   SESSION,   A  SENLIS.  503 

Bien  autre  était  la  sauvetat.  Nullement  resserrée  dans 
des  bornes  étroites  et  irrévocablement  fixées,  elle  englobait 
parfois  dans  son  sein  d'immenses  espaces  dont  l'étendue 
n'était  déterminée  que  par  la  générosité  des  donateurs.  Si 
la  sauvetat  de  Tréget,  en  face  de  Bordeaux,  sur  la  rive 
droite  de  la  Garonne,  présentait  à  peine  une  surface  de 
i9,000  mètres  carrés,  celle  de  Mimizan  dans  les  Landes 
n'avait  pas  moins  de  deux  kilomètres  dans  sa  plus  petite 
largeur.  Constituées  par  de  riches  seigneurs,  comtes  ou 
ducs,  ces  sauvetats  ravonnaieut  autour  des  riches  mona- 
stèreSf  comme  parfois  des  pauvres  prieurés,  et  elles  main- 
tenaient autour  des  paisibles  habitants  des  cloîtres  la  paix 
et  la  tranquillité.  Terres  libres  par  nature,  véritables 
alleux,  elles  ne  reconnaissaient  d'autre  pouvoir  que  celui 
de  l'abbé  et  de  ses  moines;  l'avoué  même  du  monastère 
n'avait  sur  elles  aucun  droit.  En  dehors  de  ces  privilèges 
spéciaux  qui  affectaienc  la  nature  du  sol  au  point  de  vue 
(éodal,  les  sauvetats  jouissaient  encore  de  toutes  les  im- 
munités accordées  aux  lieux  d'asile,  a  NuUus  ibi  »  dit  la 
charte  de  sauvetat  octroyée  par  le  duc  d'Aquitaine,  Guy- 
Geofiroy,  à  l'abbaye  de  la  Grande -Sauve,  récemment 
fondée  par  saint  Gérard,  c  quemquam  insectari,  non 
f  caedere,  non  aliquid  toUere  nullamve  injuriam  omnino 
f  inferre  praesumat,  sed  totum  hoc  allodium  sit  quasi  una 
c  ecclesia,  unum  miseris  asilum,  oppressis  refugium,  ut 
fl  quicumque  in  eo  fuerit,  ab  omui  prorsus  carnali  ini- 
«  mico  securus  sit  {Hist,  de  la  Grande-Sauve  y  t.  T, 
fl  Preuves,  p.  i9i).»  Nous  avons  donc  ici  l'exemple  d'un 
alleu  considéré  tout  entier  comme  une  église,  comme 
l'asile  des  malheureux,  le  refuge  des  opprimés,  où  une 
fois  retiré  on  n'avait  plus  à  craindre  aucun  ennemi. 

Je  crois  avoir  assez  fait  connaître  la  nature  de  ces  privi- 
lèges que  lespapes eux-mêmes,  nous  en  avons  un  exemple 


iîOi  CONGRÈS   ARGHÉOL06IOUË   DE   FRANCK. 

à  Fontevrault,  confirmaient  parfois  de  leur  puissante 
autorité.  Les  aiguilles  de  Figeac  ne  nous  offrent  plus  dès 
lors  une  énigme  insoluble,  et  leur  signification  se 
découvre  pleine  de  netteté  à  nos  yeux.  Elles  remplissent 
un  rôle  analogue  à  celui  des  croix  indiquées  dans  la  bulle 
du  pape  Calixte  II,  ainsi  que  dans  la  charte  de  Saint-Sul- 
pice  do  Bourges  en  faveur  de  l'église  de  Meunet,  et  elles 
témoignent  de  l'existence  d'une  antique  sauvetat  dans  la 
vallée  du  Gelé,  dont  les  preuves  écrites  ne  sont  point  par- 
venues jusqu'à  nous.  Au  reste,  les  petits  obélisques, 
objets  de  cette  discussion,  ne  se  présentent  pas  uniquement 
autour  de  Figeac,  et  Mimizan  a  aussi  conservé  les  hautes 
bornes  de  son  ancien  territoire  franc.  La  forme  elle-même 
de  ces  monuments  si  discutés  me  semble  parfaitement  eu 
rapport  avec  l'opinion  que  nous  venons  d'émettre  à  leur 
sujet.  Si  réellement  ils  eussent  joué  le  rôle  de  fanaux 
destinés  à  diriger  les  pèlerins  pendant  la  nuit,  la  lumière 
eût  été  placée  au  centre  d'un  lanternon,  au  sommet  de  U 
pyramide,  et  non  à  la  portée  de  la  main,  pas  même  au 
quart  de  la  hauteur  totale.  La  célèbre  basilique  de  Saint- 
Denis  était  un  lieu  de  pèlerinage  bien  autrement  fréquente, 
que  le  monastère  fondé  par  Pépin  dans  «ine  vallée  du 
Quercy;  et  cependant  que  lisons-nous  dans  Guillebert  do 
Metz:  0  Entre  Paris  et  Saint-Denis  est  la  place  du  Lendit;  et 
sur  la  rue  sont  plusieurs  grans  et  notables  croix  entaillies 
de  pierres,  grans  y  mages  ;  et  sont  sur  le  chemin  en  manière 
de  Monjoies  pour  adrechier  la  voie  (Description  de  Paris 
tous  Charles  VI),  n  II  n'est  nullement  ici  question  d'éclai- 
rer la  marche  des  voyageurs  pendant  la  nuit,  et  d'ailleurs 
les  planches  du  maréchal  d'Uxelles,  si  élégamment  repro- 
«luites  dans  Paris  et  ses  Historiens  aux X/V*  et  XV*  siècles^ 
par  Le  Roux  de  Lincy,  se  refusent  à  une  semblable  inter- 
prétation. Les  aiguilles  de  Figeac  n'ont  donc  jamais  servi 


XLIY*  SESSION   A  SBNLIS.  a05 

à  f  adrechier  la  voie,  »  suivant  l'expressioo  du  vieux 
chroniqueur,  ni  la  nuit  ni  le  jour;  mais  elles  ont  eu 
pour  unique  destination  de  délimiter  la  sauvetat  accordée 
à  l'antique  abbaye  par  un  puissant  bienfaiteur  à  nous 
inconnu» 

Maintenant,  mon  cher  ami,  suis-je  parvenu  à  faire 
péuétrer  dans  votre  esprit  mes  propres  convictions?  je  ne 
sais;  toujours  est-il  que  vous  pouvez,  je  crois,  me  rendre 
la  justice  que  si  mon  opinion  n'est  pas  vraie,  elle  est  au 
moins  vraisemblable.  Le  hasard  seul  m'a  fourni  les  pre- 
miers éléments  d'une  solution,  que  d'activés  recherches 
sont  venues  presque  aussitôt  appuyer.  J'ai  quelque  temps 
caressé  intérieurement  une  idée  qui  ne  me  semblait  pas 
n  mauvaise,  puis  je  me  suis  efforcé  de  développer  les 
arguments  que  je  pouvais  faire  valoir  en  sa  faveur.  Tout 
ce  bagage,  je  vous  l'adresse  :  puisso-t-il  ne  pas  vous 
paraître  trop  léger  (1)! 

Léon  Palustre. 

Il)  Bien  que  cette  lettre  ait  été  écrite  il  y  a  huit  ans,  nons 
avons  cru  pouvoir  la  reproduire  ici,  car  la  vue  des  monuments 
f»  question  n'a  fait  que  nons  confirmer  pleinement  dans  notre 
première  opinion. 


MÉMOIRE 


SUR 


LE   CAMP   DES  GÉSARINES 


PRÈS  DE  LA  VILLE  DE  SAINT -CÊRÉ 


(lot) 


Au  8ud-ouc8t  de  la  jolie  petite  ville  de  Saint-Céré  et  au 
raidi  du  bourg  de  Saint-Jean-Lespinasse,  il  existe  sur  les 
hauteurs  qui  bordent  la  riante  vallée  de  la  Bave,  les 
ruines  d'un  ancien  camp  appelé  les  Cisarines.  Ce  nom 
que  Ton  retrouve  dans  de  très-anciens  actes,  a  été  con- 
servé par  la  tradition  locale  à  trois  sortes  de  caps  ou  pro- 
montoires rocheux  et  au  plateau  qui  les  relie. 

Les  trois  rochers  qui  forment  les  points  saillants  de  cet 
antique  campement,  sont  connus  dans  le  pays  sous  les 
noms,  celui  du  milieu  et  de  beaucoup  le  plus  important, 
de  Roc  du  Cayla,  celui  de  droite,'  de  Roc  du  Caussenity  et 
celui  de  gauche,  de  Roc  du  Sirieys, 

Ces  trois  promontoires  sont  séparés  entre  eux  par  des 
vallées  étroites  et  profondes  dans  le  fond  desquelles  cou- 
lent des  ruisseaux  alimentés  par  des  sources  abondantes. 
Les  petits  plateaux  qui  les  couronnent  sont  délimités  par 
une  ceinture  de  rochers  à  pic  ayant  une  élévation  qui 
varie  entre  cinq  et  vingt  mètres;  du  cAté  du  sud,  qui  est 


XLIY^  SESSION,   A  SENLIS.  507 

le  seul  accessible,  ils  se  rattachent  par  de  larges  isthmes 
au  grand  plateau  désigné  sous  le  nom  de  Causse. 

Ainsi  que  l'indique  le  plan  topographique  qui  accom- 
pagne ce  mémoire,  divers  travaux  de  défense  remontant  à 
des  époques  différentes,  sevoient  encore  sur  l'emplacement 
des  Césarines.  Ceux  qui  occupent  les  extrémités  des 
rochers  du  Gayla  et  du  Sirieys  n'ont  pas  reçu  de  noms 
particuliers;  ils  sont  désignés  sous  les  noms  de  ruines  du 
Cûyla  et  de  ruines  du  Sirieys;  les  autres  sont  connus  dans 
l'idiome  du  pays  séparément  sous  les  noms  de  Co/,  du  latin 
eoUis,  et  de  collés  [colles)  lorsqu'on  désigne  l'ensemble. 

Ces  indications  sommaires  sur  la  topographie  et  sur  la 
nature  du  lieu  qui  nous  occupe  étant  connues,  en  pré- 
sence des  nombreux  restes  de  construction  presque 
informes  que  le  temps  n*a  pas  encore  entièrements  détruits 
etsur  lesquels  l'histoirejet  la  tradition  ne  fournissent  que  de 
très-vagues  données,  il  ne  faut  pas  s'étonner  si,  poussé  par 
un  sentiment  de  légitime  curiosité,  l'homme  soucieux  de 
la  vie  de  ses  pères  et  du  passé  de  son  pays,  se  demande  ce 
qa'était  autrefois  cette  position  remarquable  à  tant  de 
titres?  Quels  ont  été  sa  destination  et  le  rôle  qu'elle  a  jouée 
dans  le  passé?  Quelle  est  la  nature,  le  caractère  des 
ouvrages  qu'on  y  a  élevés?  De  quels  peuples  sont-ils 
l'œuvre  et  à  quelle  époque  ont-ils  été  édifiés? 

A  ces  divers  points  de  vue,  l'étude  du  camp  des  Césa- 
rines soulève  une  double  question  d'histoire  et  d'archéo- 
logie, qui  sollicite,  à  la  fois,  l'attention  de  l'antiquaire  et 
celle  de  l'historien.  Pour  nous  habitants,  du  Quercy,  elle 
présente  tout  Tintérét  qu'off^  la  solution  d'une  question 
d'histoire  locale. 


0U8        UONURÈS  ARCHÉOUMIODE  UE  FRANUE. 


§J. 


l/importance  du  camp  des  Césarines  et  rintérét  histo- 
rique qui  s'y  rattache,  n'ont  point  échappé  aux  chroni- 
queurs, aux  historiens  et  aux  archéologues  qui  nous  ont 
précédé  dans  la  voie  des  recherches  et  des  investigations 
auxquelles  nous  nous  livrons.  Tous  ont  signalé  ou  décrit 
ce  curieux  et  antique  campement,  qui,  pendant  de  longs 
siècles,  a  servi  d'asile  et  de  refuge  aux  populations  de  la 
contrée. 

Malleville,  sieur  de  Gaials,  qui  écrivait  vers  la  tin  du 
XTP  siècle,  dans  ses  Esbats  sur  le  pays  du  Qunreyf  — 
chronique  manuscrite  et  inédite,  —  après  avoir  parlé  des 
anciennes  villes  des  Cadurkes,  ajoute  :  «  Une  semblable 
ville  et  place  forte  eurent  aussi  nos  anciens  Quercynois, 
une  ou  deux  dans  la  vallée  de  Saint-Céré,  au  derrière  de 
Saint-Médard,  sçavoir,  deux  langues  de  rocher  ceintes  de 
profondes  vallées  de  trois  costés,  tranchées  d'un  bon  fossé 
et  d'une  forte  muraille,  qui,  d*une  vallée  à  l'autre,  cou- 
pait l'avenue  qui  y  estait  seule  du  costé  du  Causse  regar- 
dant le  midi.  Le  nom  de  Presque,  qui  signifie,  comme 
on  sçayt,  antique^Wx  reste  comme  les  Fip/era d'Allemagne 
tant  chantés  par  Tacite,  d 

Malleville  a  donc  considéré  le  camp  des  Césarines  comme 
uue  place  forte  des  Cadurkes,  que  les  Romains  auraient 
occupée  après  la  conquête  de  la  Gaule  et  la  compare  aux 
Vetera  Castra  des  Germains. 

Cet  auteur,  qui  a  dû  voir  de  près  les  retranchements 
des  Césarinet;,  dans  ses  nombreuses  courses  à  travers  le 
Quercy,  au  lieu  de  les  décrire  et  de  nous  les  faire  oon- 
uaitre  dans  l'état  où  ils  étaient  de  son  temps,  se  borne 


XUT'  SESSION,   A    SKNLIS.  509 

à  Dous  apprendre  qu'ils  étaient  semblables  à  la  muraille 
qui  entourait  Gergovie,  dont  il  définit  ainsi  la  construc- 
tion :  c  Le  haut  de  la  montagne  était  revêtu  en  son  som- 
met de  petits  rochers  jetés  tumultuairement  à  la  main  , 
la  uns  sur  les  autres,  jusqu'à  la  hauteur  de  six  pieds.  » 

Après  Malleville,  le  savant  abbé  de  Faulhiac,  auteur 
de  la  fin  du  xtii*  siècle,  dans  ses  Annales  du  Quercy,  — 
OQvrage  manuscrit  et  inédit  aussi,  —  comprend  les  Gésa- 
rines  au  nombre  des  places  fortes  des  Cadurkes.  a  On 
fMt  encore,  dit*il,  une  manière  de  campement,  près  Saint- 
Céré,  dans  un  endroit  qu'on  appelle  les  Gésarines,  à  dix 
milles  d'Uxellodunum  (Puy-d*Issolu),  qui  pouvait  bien 
être  le  camp  des  Romains  ou  des  Gaulois,  dont  il  est  parlé 
dans  les  Commentaires  à  l'occasion  du  siège  d'Uxello- 
duttum.  » 

L'abbé  de  Faulhiac  ne  fait  aucune  mention  des  ouvrages 
de  fortification  qui  protégeaient  le  camp ,  qu'il  croit,  à 
tort,  avoir  été  occupé  par  les  Gaulois  ou  par  les  Romains 
à  l'époque  du  siège  d'Uxellodunum. 

M.  Delpon,  à  son  tour,  a  consacré  dans  sa  Statistique 
iu  Lot  (tome  I*'),  un  long  article  aux  Gésarines,  qu'il  a 
classées  parmi  les  retranchements  anciens,  au  même  titre 
que  Puy-d*fssolUy  Murcens,  etc.  Il  a  décrit  Irès-minutieu- 
lement,  non-seulement  la  position  du  camp,  mais  encore 
les  travaux  de  défense  dont  les  ruines  existent  encore. 
Désireux  de  se  rendre  un  compte  exact  de  la  nature  des 
ouvrages  que  la  main  de  l'homme  y  a  élevés,  il  ne  se  con- 
tenta pas  d'en  donner  une  appréciation  basée  sur  un 
examen  des  lieux,  il  fit  pratiquer  des  fouilles  assez 
étendues. 

A  l'époque  à  laquelle  écrivait  M.  Delpon,  il  y  a  de  cela 
un  demi*siècle,  la  science  archéologique  était  à  peine 
créée;  il  n'est  donc  pas  surprenant  qu'il  ait  commis  de 


510       GOUGliS  AlCHÉOUWIOn  Bl  FEAHCB. 

grav»  erreors  sur  les  caractèreset  Tattribotioii  te  moiB- 
méats  auxquels  il  a  consacré  de  patientes  et 
études.  C'est  ainsi  qu'après  avoir  (ait  mettre  à  nu  k 
ment  extérieur  des  tours  et  du  rempart  qui  fiorment 
partie  sud  du  plateau  du  Cayla,  M.  Delpon  crut 
naître  dans   ces  ouvrages  des  constructions  romaine!^ 
tandis  que  dans  l'état  actuel  des  connaissances  sur 
caractères  qui  distinguent  les  constructions  des  àïBénmê^ 
âges,   une  simple   vue  des  lieux  suffît  pour   pouvoi 
affirmer  hautement  que  ces  ouvrages  ne  sont  point  Tceu^ 
des  vainqueurs  de  la  (îaule. 

La  découverte,  aux  pieds  des  basticms  du  Cayla,  d^ 
fragments  d'amphores  et  d'autres  poteries,  d'une  poignée 
d'épée*  revêtue  de  lames  de  cuivre  et  terminée,  dit-on^ 
par  un  bec  d'aigle,  de  médailles  romaines,  compléta  l'er^ 
reur  dans  laquelle  est  tombée  M.  Delpon.  De  son  temps,   j 
on  était  dans  la  croyance  que  la  présence  de  briques,  de  m 
poteries  ou  de  monnaies  romaines,  en  un  lieu  quelconque,  i 
était  une  preuve  certaine  de  l'occupation  de  ce  peuple.  ^ 
.    c  Le  nom  de  Césarines  que  porte  le  camp  depuis  les  temps  ^ 
les  plus  reculés,  ajoute  M.  Delpon,  en  lait  attribuer  li  ^ 
construction  à  César,  et  il  est  probable  que  c'est  là  qu'il  ^^ 
établit  quelques  légions  pour  s'assurer  de  l'obéissance  des  ^i. 
Cadurci  et  des  Lemovices,  dont  les  frontières  étaient  peu   ^ 
éloignées  de  ce  lieu.  »  ^ 

C'est  encore  là  une  supposition  toute  gratuite  que  rien    ^ 
ne  justifie.  ^ 

a  Dans  la  partie  du  plateau  du  Cayla  enfermée  par  cette  ^ 
enceinte  de  constructions,  dit  le  même  auteur,  il  existe  < 
deux  grottes  qui  ont  chacune  deux  issues,  une  sur  le  pla- 
teau et  l'autre  aux  pieds  desrochers  élevés  ici  de  30  mètres. 
On  croit  qu'elles  communiquent  par  des  galeries  natu- 
relles avec  un  long  souterrain  parcouru  par  le  ruisseau  du 


XUY'  SESSION,   A  SENUS.  511 

Cayla,  et  que  c'était  par  ces  cavités,  sans  doute,  que  les 
troupes  s'approvisionnaient  d'eau.  » 

L'une  de  ces  prétendues  grottes  est  tout  simplement 
une  faille  entièrement  inaccessible,  qui  en  partant  de  la 
base  du  rocher,  s'ouvre  à  pic  sur  le  plateau  à  plus  de 
10  mètres  en  contre-bas.  Cette  cavité  a  été  produite  par 
une  dislocation  de  terrain  qu'a  amenée  un  cataclysme 
géologique,  dont  les  traces  sont  encore  manifestes. 

L'autre  cavité,  qualifiée  de  grotte,  n'est  non  plus  qu'une 
fisBore  à  ciel  ouvert,  qui  prend  son  origine  au  niveau  du 
plateau  et  s'incline,  en  pente  douce,  jusqu'au  pied  des 
escarpements.  Elle  ne  se  prolonge  pas  plus  que  la  précé- 
dente au  delà  de  cette  limite. 

Il  ne  saurait  y  avoir,  quoi  qu'on  en  ait  dit,  aucune 
relation  entre  ces  prétendues  grottes  et  le  conduit  sou- 
terrain que  suit  le  ruisseau  de  Mandine.  En  effet,  le  grand 
ressaut  rocheux  et  escarpé  qui  sert  d'assiette  aux  Gésa- 
rines,  appartient  à  la  formation  des  calcaires  jurassiques 
oolithiques,  tandis  que  le  sol  du  mamelon  sur  lequel 
reposent  les  escarpements  est  de  nature  liasique.  Or,  on 
sait  que  les  cavernes  qui  existent  dans  une  de  ces  forma- 
tions ne  se  poursuivent  jamais  à  travers  l'autre. 

H.  Delpon  parlant  du  mur  qu'on  nomme  la  Col  en 
[Mfois  et  non  Lalcol,  construit  à  cheval  sur  l'isthme  du 
Gayla,  dit  :  a  Le  mur  est  bâti  avec  des  blocs  de  la  même 
dimension  que  le  précédent  (les  ruines  du  Cayla)  et  avec 
du  ciment  de  la  même  qualité;  mais  la  pierre  employée 
ici,  atteinte  par  la  gelée,  s'est  divisée  en  petits  fragments, 
eequi  a  fait  ébouler  les  deux  tiers  du  mur  en  hauteur; 
aussi  la  partie  qui  reste  est  entièrement  couverte  de 
décombres.  Ce  n'est  qu'en  faisant  faire  une  large  tranchée 
qu'on  a  pu  connaître  son  épaisseur  et  la  manière  dont  les 
matériaux  étaient  primitivement  disposés.  Kn  calculant  la 


512       CONGRÈS  AaCHÂOLOGKQUE  D£  FRANGE. 

masse  de  décombres  et  en  Tajoulant  aux  3  mètres  de  j 
qui  existent  encore,  on  trouve  qu'il  devait  avoir  iO  ml 
de  hauteur  quand  il  fut  construit.  » 

M.  Delpon  porte  la  largeur  de  ce  mur  à  3  mètres  e^ 
qu'il  était  précédé  d'un  fossé  de  9  mètres  de  , 
geur.  , 

Les  fouilles  que  nous  avons  fait  pratiquer,  nousj 
fourni  la  preuve  certaine,  ainsi  que  nous  le  dirons  I 
tôt,  qu'on  n'aperçoit  aucune  trace  de  ciment  dans  la 
struction  de  ce  mur;  que  ses  dimensions  sont 
différentes  de  celles  indiquées  par  M.  Delpon  et  qu'i 
a  point  de  fossé  pour  en  défendre  l'approche. 

M.  Delpon  n'a  pas  cherché  à  se  rendre  compte 
nature  des  Collés  du  Caussenit  et  de  Benne.  Il  dit 
ment  de  ces  retranchements  qu'ils  sont  formés 
amoncellement   de  pierres,  que    leur    hauteur 
6  mètres,  et  leur  épaisseur  à  la  base  de  8. 

En  1837,  un  magistrat  plein  de  zèle  pour  nos  ani 
tés  locales,  M.  Calvet,  conseiller  à  la  cour  d'appel  d' 
qu'une  mort  prématurée  a  ravi  à  la  science,  lit  de 
velles  recherches  aux  Césarines.  Ses  investigations 
lèrent,  comme  celles  que  M.   Delpon  avait  con 
M.  l'abbé  Paramelie,  sur  les  ruines  du  rocher  du 
qui  avaient  paru  ù  tous  devoir  receler  les  secrets  de 
gine  et  de  la  destination  des  Césarines.  Ces  fouilles 
l'autorité  supérieure  avait  facilité  les  moyens  d'ex 
confirmèrent,  en  les  complétant,  les  découvertes  pré 
ment  faites  par  M.  labbé  Paramelie;  elles  mirent  a 
un  pavé  fait  avec  des  briques  à  rebords,  de  nom 
monnaies  romaines  en  bronze  du  haut  et  surtout 
empire,  des  aiguilles  ou  poinçons  en  os  et  en  bron 
pesons  de  fuseaux  en  terre  et  en  plomb,  une  bague 
lière  en  bronze,  des  bouts  de  flèche  en  fer  et  uneq 


la  Col  du  Cayla. 


\oo      :__;    ^ 


XLIY'   SESSION,   A  B£NLI8.  5i3 

considérable  de  poteries  de  toute  sorte,  principalement 
d*amphores. 

Nous  retenons  9pécialement,  comme  étant  très-impor- 
tantes à  notre  point  de  vue,  les  constatations  suivantes 
faites  par  M.  Calvet,  sur  lesquelles  nous  reviendrons. 
«A3  mètres,  dit-il,  en  avant  du  fossé  qui  défendait  les 
approches  des  tours  et  du  rempart  du  Cayla,  on  avait  fait 
une  sorte  de  retranchement  consistant  en  de  gros  blocs  de 
pierres  brutes,  séparés  entre  eux  par  des  espaces  inégaux. 
r^les  blocs  formaient  comme  une  auréole  couronnant 
rliaque  tour.  •  Et  plus  loin,  il  ajoute  :  «  Les  bords  du  pla- 
teau étaient  garnis  sur  tous  les  points  d'une  grande  quan- 
ti té  d'énormes  blocs  calcaires  destinés,  sans  doute,  à  être 
Toulés  sur  les  assaillants  qui  auraient  tenté  de  gravir 
^es  retranchements  du  rocher.  • 

f  Plusieurs  de  ces  blocs  sont  en  place  sur  l'extrémité 
de  la  corniche;  ils  sont  en  équilibre  sur  de  petites  pierres 
et  menacent  de  leur  chute  la  vallée  qu'ils  dominent.  • 

H.  Calvet  fit  également  opérer  dans  la  Col  du  Cayla 
des  sondages  qui  démontrèrent  que,  contrairement  à  ce 
qu'avait  affirmé  M.  Delpon,  le  parement  du  mur  qui 
existe  sur  ce  point  était  bâti  à  pierre  sèche  et  non  avec 
du  ciment. 

M.  le  baron  Chaudruc  de  Crazannes,  ancien  membre 
correspondant  de  l'Académie  des  inscriptions  et  belles- 
lettres,  inspecteur  des  monuments  historiques,  dont  le 
nom  et  les  travaux  sont  connus  des  antiquaires,  a  été  le 
dernier  et,  sans  contredit,  le  plus  autorisé  des  archéolo- 
gues qui  ont  porté  leur  attention  sur  lesCésarines.  Il  nous 
a  laissé  une  très-intéres:'aute  dissertation  sur  ce  camp, 
qu'il  parait  avoir  visité  et  examiné  avec  toute  la  sagacité 
pénétrante  de  son  esprit  investigateur. 
M.  de  Cidzannes  a  partagé,  à  la  vérité,  les  erreurs  de 

*       XUV*  SESSION.  33 


514  CONGRES  ÂRGHéOLOGI0U£  DE  FRANGB. 

ses  devanciers  sur  les  soi-disant  ouvrages  des  Romains, 
mais  il  a  émis  sur  les  Césarines  de  très-judicieuses  vues 
que  nos  recherches  ont  corroborées.  Le  premier,  il  a  consi- 
déré la  Col  du  Cayla  comme  devant  être  un  retranche- 
ment gaulois,  antérieur  à  la  conquête  romaine. 


§  u. 


Après  avoir  rappelé  ce  que  nous  apprennent  sur  les 
Césarines  les  divers  travaux  manuscrits  ou  imprimés  à 
notre  connaissance  qui  en  parlent,  nous  allons  rendre 
compte  des  fouilles  que  nous  y  avons  fait  exécuter  et  que 
nous  avons  surveillées  et  dirigées  nous-méme. 

Les  résultats  qu'elles  ont  produits  sont  des  plus  con- 
cluants. Aussi  avons-nous  tout  lieu  de  croire  qu'elles 
auront  enfin  fait  la  lumière  sur  les  questions  que  soulève 
depuis  des  siècles  le  camp  des  Césarines. 

Disons,  tout  d'ahord,  quelques  mots  sur  des  retranche- 
ments antiques  et  des  lieux  très-anciennement  habités 
assez  nombreux  dans  la  contrée  occupée  par  les  Cadurci. 
Ces  quelques  mots  sont  nécessaires  pour  en  faire  la  dis- 
tinction qui  découlent  de  nos  recherches. 

Les  Gaulois,  au  temps  de  leur  indépendance,  avons- 
nous  dit  dans  un  mémoire  sur  les  ouvrages  de  forti- 
fication des  oppida  gaulois  de  Murcens,  d'Uxellodunum 
et  de  rimpernal,  possédaient  des  lieux  de  refuge,  des 
places  fortes,  des  villes,  appelées  oppida  par  les  Romains, 
que  protégeaient  contre  toute  attaque  et  toute  surprise  des 
ouvrages  habilement  conçus. 

Ces  oppida,  bien  plus  nombreux  qu'on  le  pense, 
n'avaient  souvent  ni  la  même  origine,  ni  la  même  desti- 
nation. L'étude  que  nous  avons  faite  de  ceux  qui  existent 


XLIT°  SESSION,   A   SENLIS.  515 

^1^08  le  Quercy,  nous  a  conduit  à  cette  conclusion  que, 

^oi?ant  leur  importance  et  le  caractère  des  ouvrages  de 

^Wfimse  qui  leur  sont  propres,  on  doit  les  diviser  en  deux 

légories.  Cette  division  répond,  du  reste,  à  ce  que  César 

«us  apprend  des  places  fortes  qui  ont  joué  un  rôle  si 

important  dans  la  conquête  de  la  Gaule. 

Un  certain  nombre  de  ces  oppida  étaient  des  lieux  per- 
^manents  d'habitation,  des  villes  dans  le  sens  absolu  du 
ot,  bâties,  ornées  et  fortifiées  à  la  manière  des  Gaulois; 
autres  se  réduisaient  à  des  camps  retranchés,  vides  en 
'^«mps  de  paix  et  occupés,  en  temps  de  guerre  ou  à  Tap- 
iproche  des  ennemis,  par  les  populations  disséminées  dans 
&«8  campagnes,  qui  s'y  retiraient  et  y  transportaient  tous 
l^eurs  biens. 

Dans  le  Lot,  les  camps  retranchés,  comme  les  oppida 
l^prement  dits,  sont  situés  dans  des  lieux  d'un  difficile 
âcoès;  ils  occupent  des  sortes  de  promontoires  munis  d'es- 
carpements ou  de  pentes  abruptes  et  sont  généralement 
«Qtourés  de  profondes  dépressions  de  terrain,  excepté  du 
cdté  de  Pisthme  qui  les  rattache  au  reste  de  la  montagne  ; 
mais  ils  offrent  ceci  de  particulier  qu'ils  sont  défendus 
par  des  ouvrages  militaires  bien  moins  importants  que  les 
▼rais  oppida  :  des  fossés,  des  levées  en  pierre  ou  en  terre, 
des  murailles  sans  interposition  de  cadres  de  bois,  sont 
les  seules  fortifications  dont  les  fouilles  nous  ont  révélé 
la  pratique. 

Parmi  les  oppida-villes,  qui  constituaient  Taggloméra- 
tion  la  plus  considérable  chez  les  Gaulois,  sur  le  sol 
desquels  on  retrouve  les  emplacements  et  les  vestiges  de 
ces  habitations  toutes  rustiques,  rondes  ou  ovales  qui, 
selon  Vitruve  et  Strabon,  composaient  la  demeure  de 
ce  peuplé,  nous  classons  Murcens,  Puy-d'Issolu  et 
rimpernal. 


\ 


516       GONOaÈS  ARGHÉOLOOIOUB  DE  FRANGE. 

Dans  les  camps  retranchés  ou  oppida  de  circonslanc^^ 
ou  d'occasion,  abandonnés  alors  que  nulle  agitation  n'étail 
à  craindre  et  servant  d'asile  dans  les  moments  de  danger, 
nous  comprenons  les  Césarines  qui  font  le  sujet  de 
mémoire,  les  camps  de  Goronzac  sur  le  ruisseau  de  Verâ, 
de  Saint-Ci rq  sur  l'Alzou  et  du  Roc  sur  la  Dordogne, 
camps  que  nous  nous  proposons  d'étudier  et  de  décrire. 


§in. 


Nous  l'avons  dit,  au  début  de  ce  travail,  '  le  lieu  qu'où 
désigne  sous  le  nom  de  camp  des  Césarines  comprend  la 
partie  supérieure  des  trois  promontoires  que  relie  le  pla- 
teau appelé  le  Causse.  Ces  trois  promontoires  sont  connus 
dans  le  pays  sous  les  noms  de  Roc  du  Cayla,  du  Sirieys 
et  du  Gaussenit.  Ils  sont  bordés  sur  tout  le  pourtour  de 
la  partie  saillante  de  hautes  falaises.  De  profondes  cou- 
pures de  terrain  les  séparent  et  les  isolent  sur  trois  côtés. 
Les  plateaux  spacieux  qui  les  couronnent  ne  sont  abor- 
dables que  du  côlé  de  Tisthme.  Leur  orientation,  comme 
leur  pente  générale,  est  du  sud  au  nord. 

Occupons  nous,  tout  d'abord,  du  plateau  du  Cayla  qui 
est  à  la  fois  le  plus  vaste,  le  plus  important  et  le  plus 
intéressant.  Son  altitude  moyenne  est  de  295  mètres;  il 
domine  de  i45  mètres  la  vallée  de  la  Bave;  la  superficie 
circonscrite  [tar  la  Col  et  les  escarpements  est  de  vingt  hec- 
tares environ.  Son  niveau  correspond,  à  peu  de  chose  près, 
à  celui  des  deux  autres  promontoires.  Disposée  eu  forme 
de  petite  colline,  la  Col  tire  son  nom  de  la  configuration 
extérieure  que  présente,  dans  son  état  actuel,  l'amoncel- 
lement de  décombres  qui  recouvi'ent  l'antique  rempart; 
elle  affecte  eu  plan  une  graude  courbe  convexe,  comman- 


XLIT*  SESSION,   A  SKNL18.  517 

àèe  par  la  nature  du  lieu,  et,  eu  même  temps,  trës-lavo- 
nblemcnt  disposée  pour  la  défense. 

De  toutes  les  constructions  qui  ont  été  élevées  aux 
Gésarines,  la  Col  du  Cayla,  est  la  plus  considérable  et 
Il  pins  curieuse  à  étudier,  car  elle  est  certainement  la  plus 
aocienoe. 

Nous  avons  rapporté  les  opinions  qui  ont  été  émises  sur 
les  Césarines  par  les  auteurs  qui  s'en  sont  occupés;  nous 
avons  fait  connaître  spécialement  leurs  appréciations  con- 
tradictoires sur  lu  nature,  la  forme  et  les  dimensions  de 
Il  Col  du  Cayla,  d'après  les  fouilles  incomplètes  ou  mal 
dirigées  qui  y  ont  été  effectuées. 

Avous-nous  été  plus  heureux  que  les  éminents  con- 
frères qui  nous  ont  précédé  dans  cette  voie?  Sommes- 
nous  parvenu  à  détermin»^r  l'époque  à  laquelle  remontent 
ees  fortifications,  leur  origine,  leur  destination,  les  carac- 
tères essentiels  qui  les  distinguent  des  autres  ouvrages 
de  défense  dont  on  voit  les  ruines  aux  Césarines?  On  en 
jugera  bientôt. 

Une  large  et  profonde  tranchée  a  été  ouverte,  en  notre 
|irésenoe,  au  point  A  qui,  d*après  l'état  des  lieux,  nous  a 
paru  le  plus  propice  pour  atteindre  le  but  de  nos  recher- 
ches. Après  avoir  déblayé,  sur  une  lougueur  de  3  mètres, 
les  décombres  qui  recouvrent  la  muraille  du  côté  du 
cimp,  nous  avons  rencontré  un  mur  de  i"70  d'élévation, 
à  parement  incliné  au  quart  de  sa  hauteur,  bÂli  avec  des 
pierres  plates  de  moyenne  dimension,  non  travaillées, 
irrangées  à  la  main  avec  soin  et  posées  sans  ciment.  Ce 
mor  est  couronné  par  une  terrasse  en  plate-forme  hori- 
lontalede  l"80  de  largeur.  Cette  plate-forme  dégagée  des 
déeombres  qui  l'obstruaient,  les  travailleurs  se  sont  trouvés 
bientôt  en  présence  d'un  second  mur  haut  de  l"50,  à  face 
inclinée  comme  le  premier,  surmonté  d'une  autre  plate- 


XUY*   SESSION,    A  SENU8.  5i9 

muraille  dans  sa  forme  et  ses  dimensions  primitives. 

Ainsi  que  l'indique  le  dessin,  cette  construction  repose 
60  entier  sur  le  rocher;  elle  n'était  précédée  d'aucun  fossé. 
Le  remplissage  intérieur,  comme  dans  toutes  les  construc- 
tions de  ce  genre,  se  compose  de  pierres,  terre  et  pierrailles 
jetées  péle-méle  dans  le  vide  laissé  par  les  murs  des  pare- 
ments. Les  pierres  de  face  sont  seules  posées  à  la  main, 
mais  elles  n'ont  subi,  préalablement  à  leur  mise  en 
œuvre,  aucune  préparation,  aucune  sorte  d'épannelage. 

D'après  la  restitution  que  nous  avons  faite  de  cette 
muraille,  restitution  que  l'état  des  parties  conservées  nous 
t  rendue  facile,  elle  avait  primitivement  sur  le  point  où  a 
été  foite  la  fouille  A,  une  largeur  à  la  base  de  i2"50,  de 
4  mètres  au  sommet,  et  une  hauteur  sur  l'axe  de  7  mètres. 
Ce  n'est  cependant  pas  en  cet  endroit  qu'elle  atteignait  son 
maximum  de  hauteur;  une  centaine  de  mètres  plus  à 
gauche,  elle  avait  deux  ou  trois  mètres  de  plus  en  élé- 
fation. 

La  différence  d'épaisseur  entre  la  base  et  le  sommet 
était  rachetée  au  moyen  de  retraites  ou  plates-formes 
qui  formaient  autant  de  chemins  couverts  sur  lesquels  les 
assiégés  pouvaient  se  ranger  et  circuler  ou  se  mettre  à 
l'abri  des  traits  des  assiégeants.  Ces  ingénieuses  disposi- 
tions dont  nous  avons  constaté  l'existence  dans  la  muraille 
de  Murcens,  nous  les  considérons  comme  une  règle  et  une 
tradition  suivies  dans  les  constructions  militaires  des 
Gaulois,  et  elles  sont  un  des  traits  caractéristiques  des  ou- 
vrages de  défense  qui  sont  l'œuvre  de  ce  peuple. 

La  longueur  de  la  muraille  du  Cayla  est  de  580  mètres 
mesurés  entre  les  escarpements;  sa  section  moyenne  est 
de  52  mètres  carrés;  son  volume  n'est  pas  moindre  de 
30,000  mètres  cubes.  En  plan,  elle  ne  présente  intérieu- 
rement ni  extérieurement  aucun  angle  rentrant  ou  sail- 


520       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

lant,  qui  dénote  des  dispositions  ayant  rapport  à  U 
défense,  comme  les  bastions  et  les  courtines  de  nos  fortifia 
cations  modernes. 

Les  fouilles  n'ont  fait  découvrir  aucun  objet  d'art,  3. 
peine  si  nous  avons  trouvé  quelques  débris  de  pote^ 
ries.  Nous  avons  recueilli  seulement,  au  milieu  des  ébou^ 
lements  supérieurs,  presque  au  sommet  de  la  muraille  e€> 
sur  la  face  extérieure,  une  prodigieuse  quantité  de  cail" 
loux  de  rivière,  ronds  ou  ovoïdes,  de  trois  à  quatre 
centimètres  de  diamètre,  qui  ont,  bien  certainement, 
servi  de  cailloux  de  fronde. 

Il  n'y  a  pas  le  moindre  doute  que  la  muraille,  dont  les 
remarquables  restes  ont  été  exhumés,  ne  soit  une  con- 
struction gauloise  :  elle  offre  au  plus  haut  degré  la  facture  . 
propre  aux  ouvrages  de  ce  genre  ique  nous  connaissons 
d'eux.  Il  est,  en  effet,  de  toute  évidence  que  son  mode  de 
construction,  quoique  plus  primitif,  est  en  tout  sem- 
blable à  celui  des  murailles  avec  assises  de  bois  de  Mur- 
cens  et  de  l'Impernal  ;  ce  sont  les  mêmes  formes,  les 
mêmes  dispositions  et  les  mêmes  pratiques.  Mais  nous 
estimons  que  la  muraille  des  Césarines  ost  antérieure  de 
plusieurs  siècles  à  celle  de  Murcens.  L'introduction  des 
cadres  de  charpente  dans  ces  sortes  d'ouvrages  pour  résis- 
ter aux  efforts  du  bélier,  ne  remonte  pas,  avons-nous  dit 
ailleurs,  à  plus  d'un  siècle  avant  ]iotre  ère. 

Les  escarpements  du  Cayla  ne  sont  pas  partout  inacces- 
sibles ;  sur  certains  points,  ils  laissent  subsister  des  vides 
assez  faciles  à  franchir;  aussi  les  Gaulois  avaient-ils,  à  leur 
manière,  garni  les  bords  du  plateau  d'un  grand  nombre 
de  blocs  de  pierres  brutes,  dont  plusieurs  cubaient  plus 
d'un  mètre.  Ces  blocs,  qui  ne  constituaient  ni  une  bar- 
rière ni  un  mur,  avaient  été  placés  là  pour  pouvoir  être 
lancés  dans   un  moment  d'attaque  ou  de  lutte  sur  les 


XUT'  SE8SJON9   A  SBNUS.  521 

niants  qui.'  auraient  tenté  de  gravir  les  pentes.  Pla- 
neurs de  ces  blocs,  en  équilibre  sur  des  pierres  de  petites 
dimensions,  sont  encore  en  place  sur  Textrémité  de  la  cor- 
niche, d'autres,  et  c'est  le  plus  grand  nombre,  oui  été 
ROfersés  et  roulés  dans  les  versants  où  on  les  distingue 
bellement.  M.  Calvet,  avant  nous,  a  signalé  ces  gros 
Uocs  de  pierre  qui  étaient  plus  nombreux  de  K>n  temps 
qu'aujourd'hui.  Nous  les  avons  représentés  en  rouge  sur 
le  plan,  tels  qu'ils  étaient  primitivement,  d'après  les 
indications  que  nous  avons  recueillies  sur  les  lieux. 

Dans  un  travail  que  nous  avons  publié  sur  le  Puy-d'ls- 
K)Iq,  nous  avons  constaté  qu'aux  abords  de  la  fontaine, 
dont  les  eaux  furent  captées  dans  une  galerie  souterraine, 
irant  l'exécution  des  fouilles  importantes  qui  ont  eu  lieu 
lor  ce  point,  le  sol  était  couvert  d'un  g^nd  nombre  de 
kiocs  de  roche  calcaire,  identiques  à  ceux  du  Cayla,  que 
les  Gaulois  avaient  lancés  du  haut  des  escarpements  sur 
les  ouvrages  d'attaque  des  Romains.  Ainsi  l'usage  de 
muuir  les  extrémités  des  pentes,  même  inaccessibles,  de 
Uocs  de  roche  qu'on  pouvait,  au  besoin,  projeter  sur  les 
miégeants,  était  un  des  moyens  de  défense  employés  par 
les  Cadurkes  concurremment  avec  les  murailles.  <Je 
Dioyeu  de  défense  parait,  du  reste,  avoir  été  générale- 
flKDt  usité  en  Gaule  jusqu'au  temps  de  la  conquête 
romaine.  César  rapporte  dans  ses  Commentaire»^  que  sur 
les  murailles  de  l'oppidum  des  Nerviens  citadelle  de 
.Namur;,  qu'il  assiégea,  se  trouvaieut,  en  grand  nombre, 
fc  gros  quartiers  de  pierre.  Le  même  auteur  nous  fait  con- 
iiltre  aussi  que  les  défendeurs  d'Avaricum  empêchaient 
les  Romains  d'approcher  des  murailles  en  leur  lançant  de 
pones  pierres. 

L'eitrémité  nord  du  plateau  du  Cayla,  bordée  de  hautes 
Utiles  qui  ressemblent  à  une  muraille  cydopéenne, 


XLIT'  SESSION,   A   SINUS.  5t3 

(iBt  de  camps,  de  villes  et  de  monuments  de  toute  sorte, 
ans  que  ce  conquérant  ait  eu  le  moindre  droit  de  leur 
donner  son  nom. 

C'est  à  tort  que  l'abbé  do  Faulhiac  a  placé  aux  Césarines 
le  camp  où  Drapés  fut  défait  par  les  Romains.  Cette  posi- 
tion ne  saurait  nullement  convenir  à  la  situation  du  camp 
gaulois  telle  que  Tindiquent  les  Commentaires  de  César. 
Il  y  est,  en  efiét,  formellement  dit  que  les  Gaulois,  selon 
leur  habitude,  étaient  campés  dans  la  plaine,  le  long  de 
Il  rivière.  Or,  les  Césarines  occupent  une  hauteur  relati- 
Tement  asseï  élevée. 


§v. 


Les  positions  naturellement  fortifiées  ou  faciles  à 
détendre,  ont  été  recherchées,  dans  tous  les  temps,  pour 
eo  iaire  des  asiles  sûrs.  Au  commencement  du  moyen 
âge,  comme  on  l'avait  fait  précédemment,  et  comme  cela 
ae  pratiqua'  durant  cette  longue  période,  on  choisit  de 
préKrence,  pour  y  établir  des  campements  ou  des  forte- 
reiHS,  les  parties  saillantes  des  montagnes  coupées  de 
Ttllées  profondes  et  garnies  d'escarpements. 

Les  plateaux  des  Césarines  répondant  à  ces  conditions 
importantes  de  la  défense,  furent  occupés  de  bonne  heure 
psr  une  population  en  quête  d'un  de  ces  lieux  si  recher- 
chés. La  muraille  gauloise,  quoique  en  boo  état  à  cette 
époque,  n'était  plus  suffisante  pour  résister  efficacement 
ï  la  puissance  des  engins  de  guerre  en  usage  alors.  C'est 
pourquoi,  sur  l'emplacement  des  ouvrages  gaulois  qui 
fermaient  la  partie  extrême  du  Cayla,  on  éleva  trois  tours 
reliées  par  un  rempart  de  2  mètres  d'épaisseur,  solide- 
ment bâti,  qui  en  garnissait  les  intervalles.  A  ces  ouvrages, 


524      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

dont  le  but  était  de  rendre  inexpugnable  la  partie  infé- 
rieure du  plateau,  ne  se  rattachaient  ni  château,  ni  autres 
constructions  propres  à  Thabitalion,  d'où  on  doit  con^ 
dure  que  cette  forteresse  n'était  qu'un  lieu  d*asile 
temporaire. 

Les  parements  des  maçonneries  soit  des  tours,  soit  des 
remparts,  sont  exécutas  en  petit  appareil  de  forme  toute 
rustique ,  qui  rappelle  la  manière  de  construire  des 
Romains;  mais  ces  ouvrages  accusent  une  époque  où  l'art 
était  en  pleine  décadence  :  les  moellons  sont  à  peine 
ébauchés,  le  mortier  qui  les  lie  n'a  aucune  consistance. 

Le  mode  de  construction  de  cette  forteresse  est  identique 
à  celui  du  château  appelé  les  Temples,  qui  occupe  le  point 
culminant  du  Puv-d'lssolu.  Or,  une  charte  du  roi  Raoul, 
de  925,  nous  apprend  que  ce  château  avait  été  bâti  par  ses 
prédécesseurs  pour  arrêter  les  courses  des  Normands  qui 
dévastaient  le  Limousin,  le  Périgord  ei  le  Quercy. 

Toutes  ces  circonstances  et  la  position  des  Césarines  à 
peu  de  distance  de  la  Dordogne,  nous  portent  à  croire  que 
les  fortifications  du  Cayla,  comme  celles  du  Puy-d'lssolu, 
ont  été  construites  pour  résister  aux  attaques  des  pirates 
du  Nord  et  qu'elles  sont,  par  conséquent  antérieures  au 
X*  siècle. 

Les  nombreuses  monnaies  romaines,  du  bas  empire 
surtout,  qu'on  a  Irouvi^e^  dans  les  substructions,  sont  une 
nouvelle  preuve  que  ces  ouvrages  appartiennent  au  haut 
moyen  âge.  On  sait,  en  effet,  que  l'immense  quantité  de 
petits  bronzes  frappés  par  les  empereurs  romains  eut  cours 
dans  la  Gaule,  comme  monnaie  de  compte,  jusqu'aux  ix* 
et  X*  siècles. 

Un  peu  en  avant  des  ruines  du  Cayla,  il  existe  les  traces 
bien  apparentes  d'un  fossé  qu'on  avait  commencé  de  creu- 
ser dans  le  roc  pour  défendre  l'approche  de  la  forteresse. 


XLIV*  SESSION,    A  SENLI8.  525 

Gs  fotté,  que  nous  avons  tout  lieu  de  croire  cootemporain 
de  ees  ruines,  est  représenté  sur  le  plan  par  un  double 
Ifiit  rouge  accompagné  de  pointillés. 

Lorsqu'on  compare  la  vétusté  des  blocs  de  rocher  qui 
composent  la  ligne  des  pierres  dressées  à  ceux  provenant 
du  creusement  du  fossé,  dont  nous  connaissons  la  date  à 
nu  ou  deux  siècles  près,  on  est  amené  à  reconnaître  que 
lei  pierres  dressées  doivent  remonter  à  la  plus  haute  anti* 
foité. 

Les  constructions  qui  défendaient  l'extrémité  nord  du 
rocher  du  Sirieys,  figurées  au  plan,  présentent  les  mêmes 
caractères  que  celles  que  nous  venons  de  décrire  et  sont 
évidemment  de  la  même  époque.  Elles  ont  été  érigées  à  la 
même  occasion  et  dans  le  même  but. 


§VL 

La  Col  de  Benne ,  qui  joint  l'extrémité  de  la  courbe 
de  Mandine  aux  escarpemeuts  au  pied  desquels  se  perd  le 
ruisseau  deMarot,  occupe  le  versant  oriental  d'une  dépres- 
siofl  de  terrain  assez  prononcée  et  ferme  du  côté  du  cou- 
chant le  plateau  du  Causse.  Elle  constitue  un  ouvrage  de 
défense  avancé,  destiné  à  mettre  à  l'abri  d*un  coup  de 
main  la  population  et  les  troupeaux  qui  campaient  sur  le 
plateau. 

Comme  la  plupart  des  retrangements  du  moyen  âge 
celte  Col  consistait  en  un  rempart,  sans  maçonnerie, 
brmé  d'un  amoncellement  de  pierres  rapportées,  mêlées 
de  terre,  jetées  là  sans  ordre  et  sans  arrangement  inté- 
rieur. Les  matériaux  composant  la  surface  des  talus,  qui 
s'inclinent  sous  un  angle  de  54  degrés,  étaient  seuls  die- 


] 


s  ^ 


0 


6S6  GONoais  AncHÉOLObiouE  de    frange. 

foèéè  à  la  main  afin  de  faire  disparaître  les  aspérités  qui 
auraient  permis  d'eo  g^vir  les  pentes. 

La  coupe  B  fait  connaître  la  forme  et  les  dispositions 
de  ce  retranchement.  Son  état  actuel  est  figuré  en  noir  et 
son  état  primitif  en  rouge,  d'après  les  indications  foar-      \0 
nies  par  les  fouilles. 

Sur  quelques  points,  notamment  du  oAté  du  gouffre  de 
Benne,  le  retranchement  avait  des  proportions  considé- 
rables. Ses  dimensions  moyennes  étaient  «de  14  mètres 
de  largeur  à  la  base,  de  4  mètres  au  sommet,  sur  une 
hauteur  de  4  mètres  au  milieu.  Il  n'avait  pas  moins  de 
940  mètres  de  longueur. 

Les  collés  au  retranchement  du  Caussenit,  tant  celu  m> 
qui  a  été  terminé,  que  celui  qui  n'a  reçu  qu'un  commen  — 
cément  d'exécution,  sont  en  tout  semblables  à  l'ouvrag 
avancé  de  Benne  et  ont  la   même   origine  (Voir  1 
coupe  G). 

Les  trois  collés  des  Césarines  ont  toutes,  dans  leur  éta. 
actuel  en  forme  de  petites  collines,  un  aspect  identique 
qui  ferait  croire  au  premier  abord  qu'elles  ne  diffèrent  pa: 
de  construction  et  qu'elles  remontent  à  la  même  époque 
Mais  si,  au  lieu  de  baser  ses  appréciations  sur  un  simpl 
examen  de  visu,  on  les  étudie  avec  le  secours  de  la  pioche 
on  acquiert  bientôt  la  certitude  que  ves  travaux  de  castra 
métatiou  appartiennent  à  des  époques  différentes  qu 
séparent  de  longs  siècles,  et  qu'ils  ne  sont  pas  l'œuvre 
d'un  même  peuple. 

Aussi,  si  nous  avons  pu  affirmer,  en  toute  assurance^ 
que  la  grande  muraille  du  Gayla  est  gauloise,  nous  n'hé-- 
sitons  pas  non  plus  à  déclarer  que  les  retranchements 
de  Benue  et  du  Gaussenit  sont  des  ouvrages  du  haut 
moyen  âge  et  qu'ils  datent  de  la  même  époque  que 
les  fortifications  en  maçonnerie  du  Cayla  et  du  Sirieys. 


XUY*  SESSION,  ▲  SINUS.  537 

Las  espaces  de  terrain,  dont  les  retranchements  de  Benne 
H  au  Caussenit  dérendent  l'approche,  ont  été  habités  dans 
Jai  temps  les  plus  reculés,  ainsi  que  l'attestent  de  nom- 
keuz  monuments  funéraires.  Les  hauteun  du  Causse 
renEermeni  plusieurs  dolmens,  dont  quelques-uns  ont  des 
propcMTtions  considérables.  Le  plateau  du  CaussAiit  est, 
pour  ainsi  dire,  couvert  de  tumulus  et  de  dolmens;  on 
dirait  une  ^aste  nécropole. 

Presque  tous  ces  monuments  ont  été  fouillés  il  y  a  une 
^arantaine  d'années. 


Les  conclusipns  particulières  à  tirer  de  ce  qui  précède, 
en  ce  qui  concerne  le  camp  des  Césarines,  sont  celles-ci  : 
{•que  le  camp  est  d'origine  gauloise;  que  cette  position 
t  été  primitivement  un  oppidum  occupé  en  temps  de 
guerre  et  vide  en  temps  de  paix;  que  cet  oppidum  ou 
camp  retranché  ne  comprenait  que  le  plateau  du  rocher  du 
Csyla;  qu'il  était  défendu  par  la  grande  muraille  de  la 
Col  du  Gayla  d'abord,  ensuite  par  les  ouvrages  de  la 
Monde  enceinte  que  marquent  les  pierres  dressées  et  en 
troisième  lieu  par  les  gros  blocs  de  rochen  rangés  sur 
la  eorniche;  2*  qu'à  une  époque  relativement  plus 
récente,  cette  position  remarquable  a  été  habitée  par  une 
population  nombreuse  qui  en  a  grandement  élargi  les 
limites  primitives;  que  les  fortifications  du  Cayla  et  du 
Sirieys,  ainsi  que  les  retranchements  de  Benne  et  du 
Caussenit,  ont  été  élevés  à  cette  époque;  que  cette  der- 
nière occupation,  de  même  que  les  ouvrages  de  défense 
qui  s'y  rattachent,  paraissent  être  antérieure  au  x*  siècle. 

A  un  point  de  vue  plus  général,  des  recherehes  aux- 
quelles nous  nous  sommes  Hvré  sur  les  travaux  de  défense 
élevés  par  les  Gaulois  dans  le  département  du  Lot,  des 


528  CONGRÈS  ▲ft'^HÂOLOGIQini   DB  VRANCB. 

découvertes  et  des  constatations  qui  ea  ont  été  la  consé- 
quence, nous  croyons  être'  autorisé  à  eo  déduire  cette 
autre  conclusion,  que  ces  ouvrages  nous  lévèleQt  trois 
époques  distinctes,  marquées  chacune  par  un  progrès 
accompli  dans  l'art  des  fortilications  chei  ce  peuple.  La 
première  époque  comprend  ces  travaux  tout  à  fait  primitifs 
consistant  en  un  simple  fossé  ou  en  un  de  ces  murs  rus- 
tiques qui  en  ceignaient  les  premières  stations  humaines, 
dont  on  voit  de  nombreux  restes  sur  les  points  culminants 
de  nos  plateaux  calcaires.  La  seconde  embrasse  le  temps 
pendant  lequel  on  édifia  des  remparts  dans  le  genre  de 
celui  des  Césarines.  La  troisième  enfin  est  caractérisée  par 
ces  belles  et  solides  murailles  avec  interposition  de  cadres 
de  charpente  que  César  a  décrites  dans  ses  CommtiUairts, 
et  dont  nous  avons  retrouvé  les  restes  intéressants  à  llu^ 
cens  et  à  l'impernal. 

Cahors,  15  octobre  i877. 

E.  Gastaoné, 

Ancien  tgent-Toyer  d*aiTonditMinenl,  ofBder 
d'Actdémie,  membre  corresponéanl  de  b 
Commiision  de  It  topographie  des  Givlei) 
membre  de  U  Société  française  d^Ardiéo- 
logie,  etc.  etc. 


SODILLAC.  LE  VIGAN  ET  GOURDON 


Samedi  44  et  dimanche  4  S  août. 


Nous  arrivons  à  Souillac  le  samedi ,  bien  après  le  cou* 
cher  du  soleil,  en  long  retard  sur  ritioéraire  fixé  par  le 
pRigramme.  La  longue  visite  de  VUxellodunum  du  Puy* 
l'Issolud,  précédée  d'une  balte  réconfortante  et  imprévue 
à  Saint-Denis,  était  la  cause  de  cette  infraction  à  notre 
exactitude  accoutumée;  car  l'exactitude  doit  être  aussi  la 
politesse  des  excursionnistes. 

Il  y  avait  quatre-vingt-dix  ans,  moins  deux  mois  et 
ieux  jours,  qu'un  voyageur  anglais  d'un  nom  illustre, 
Arthur  Young,  qui  parcourut,  à  cbeval,  la  France  en  tous 
KDS,  pour  l'étudier  au  point  de  vue  agronomique,  mettait 
pied  à  terre  à  Souillac.  Par  égard  pour  les  maîtres  et  mal- 
tresses d'hôtel  du  lieu,  contre  lesquels  nous  n'avons  pas  de 
grieb  sérieux,  nous  ne  rapporterons  pas  la  boutade  humou- 
ristique,  pittoresque  et  repoussante,  par  laquelle  ce  délicat 
observateur  a  noté  son  séjour  dans  cette  ville,  tout  en  van- 
tant la  beauté  de  son  site  et  les  avantages  de  son  fertile 
territoire.  Nous  préférons  renvoyer  le  lecteur  au  passage  en 
question  (i  ),  en  constatant  un  progrès  relatif  dans  les  détails 

(4|  Foyage  en  France  pendant  les  années  4787-SS,  par 
Arthur  Young.  Traduction  par  Lesage,  4860.  Tome  I*%  p.  30. 

XUV*  SESSION.  34 


530  OOlfGliS  AWCaiOUûQiQUE  M  fEASGB. 

elhoographiques  qui  saulemeot  rindignalîoa  de  notre 
auteur. 

No«s  BODiiiies  donc  privés  de  bt  belle  vw  qu'oire,  à 
leur  arrivée,  aux  voyageurs  moins  attardés  la  posîtioo  de 
Souillac  aux  bords  de  la  petite  rivière  la  Boièie,  dans  U 
magniBque  plaine  de  la  Dordogne.  Mais  pour  nous  dédom- 
mager de  ce  mécompte,  à  peine  débarqués,  nous  nous 
empressons  de  répondre  à  la  courtoisie  de  MIL  les  membres 
du  Cerde  de  la  Ville,  qui  avaient  bien  voulu  oous  dépê- 
cher, le  matin  même,  à  Saint-Denis,  deux  ambassadeurs, 
pour  nous  convier  à  nous  réunir,  le  soir,  dans  leurs  salons 
hospitaliers.  La  réception  que  nous  avons  tnmvée  à  ce 
rendex-vous  était  on  ne  peut  plus  cordiale  el  dhhle.  Que 
ces  messieurs  en  reçoivent  ici  tous  nos  lemeicienieiits. 

Le  sujet  d'attraction  de  Souillac,  pour  les  archéologues, 
est,  comme  chacun  sait,  son  église,  dédiée  à  la  Mtee  de 
Dieu,  ancienne  abbatiale  d*un  monastère  de  Bénédictins, 
qui,  au  xvii*  siècle,  embrassa  la  congrégation  de  Saint- 
Maur.  Une  vague  tradition  fait  honneur  de  la  CMidatioa 
de  ce  monastère  à  saint  Éloy,  évéque  de  Noyon,  reconnu 
comme  fondateur  incontesté  de  l'abbaye  de  Solignac,  en 
Limousin.  Toutefois,  le  monastère  de  Souillac  aurait  été 
restauré  sous  Louis  le  Pieux,  en  S06.  Le  Galliû  ckristiana 
rapporte  cette  origine  d'après  Jean  de  Vidal,  historien  des 
évéques  de  Cahors.  L'abbé  de  Fouillac  et  Dominici,  histi)- 
riens  du  Quercy.  au  xrii*  siècle,  ont  répété  celte  tradi- 
tion ,  qui  n  a  jamais  été  appuyée  sur  aucune  preuve 
sérieuse. 

Mais  le  Gaiiia  ckrisi4ana  ajoute  qu'il  est  plus  probable 
que  l'abbaye  de  Souillac  aurait  été  fondée  par  Gérault  de 
Saint-Céré,  abbé  d'Aurillac,  vers  96i,  en  raison  de  ce  que 
le  domaine  de  Souillac,  qui  faisait  partie  de  la  viguerie 
de  Gazillac,  fut  donné  par  Frotard,  vicomte  de  Turenne^ 


XLIY^  SESSION,   A  SENUS.  531 

eo  930,  au  monastère  d'Aurillac,  et  que  l'abbé  Gérault  de 
Saint-Céré  imprima  un  développement  fort  considérable 
au  gouvernement  de  son  abbaye.  M.  Longnon ,  dans  sa 
récente  publication  du  Pnuillé  du  diocèse  de  Cahors, 
signale  la  charte  de  cette  donation ,  rapportée  par  Justel 
aux  pièces  justificatives  de  V Histoire  généalogique  de  la 
flufsen  de  Turenne  (i645],  et  donnée  depuis  par  le  Gallia 
ckriiiiana.  Cette  charte,  comme  le  fait  observer  M.  Lon- 
gnon, est  en  pleine  contradiction  avec  l'assertion  de  l'his- 
torien des  évéques  de  Cahors. 

Les  grands  dictionnaires  historiques  et  géographiques 
ie  Corneille,  de  Lamartinière,  de  Moreri,  avaient  déjà 
reproduit  ces  deux  origines.  Le  Dictionnaire  de  la  Gaule 
i%  l'abbé  d'Expilly,  qui  rapporte  également  les  notices  des 
^ux  précédents,  ajoute  :  c  C^est  une  des  belles  maisons 
de  Tordre  de  Saint-Benoit.  L'église  est  faite  en  coupe  et 
n'est  pas  bien  claire,  t 

Voilà,  certes,  une  description  architectonique  à  laquelle 
ou  ne  s'attendait  guère,  et  si  nous  en  citons  la  seconde 
pvtie,  c'est  que  nous  espérons  qu'elle  nous  servira  d'ex- 
cuse auprès  du  lecteur  pour  les  inexactitudes  que  nous 
poQrrions  avoir  commises  en  examinant  certaines  parties 
<ie  l'édifice.  Coupe  est  ici  pour  coupole.  Ces  deux  mots, 
pour  les  architectes  classiques,  étaient  synonymes.  Cela  est 
optique  dans  le  Dictionnaire  d'architecture ,  de  Quatre- 
mère  de  Quincy^  oix  il  est  longuement  parlé  des  coupoles 
nïmaines  et  byzantines,  italiennes  et  françaises,  anciennes 
et  modernes,  sans  qu'il  y  ait  le  moindre  mot  sur  les  cou- 
poles de  Saint-Front  de  Périgueux  et  sur  leurs  dérivées, 
^nt  l'auteur  parait  avoir  complètement  igooré  l'exis- 
teaee. 

Du  reste,  les  observations  que  nous  venons  de  rapporter 
QoQt  rien  de  plus  imprévu  que  l'opinion   de  Cathala 


532  GORORÂS  ▲RGHÉOL06I0UE  DE  FRANCE. 

Coture,  qui  dit  dans  son  Histoire  du  Querey,  1. 1,  ch.  ti  (i), 
que  les  coupoles  de  Cabors  soutun  ouvrage  des  Romaios. 
Un  peu  plus  tard,  les  coupoles  de  Souillac  oui  été  attri- 
buées au  Yii*  siècle  par  M.  Chaudruc  de  Crazannes,  comme 
on  peut  le  voir  dans  le  premier  numéro  de  la  première 
année,  i834,  du  Bulletin  nunmmeniai,  entièrement  con- 
sacré à  une  revue  des  principaux  monuments  du  départe- 
ment du  Lot  par  cet  archéologue  du  Quercy. 

Il  était  temps  que^l'éminent  et  regretté  Félix  de  Ver- 
neilh  vint  dissiper  ces  ténèbres,  et  mettre  en  lumière  dans 
son  magnifique  ouvrage,  V Architecture  àjfxantine  'en 
France  9  l'origine  des  monuments  à  coupoles  de  TAqui- 
toine,  qui  forment  cette  famille  arcbitectonique  dont 
Saint-Front  de  Périgueux  est  le  point  de  départ,  et  qui 
compte  Souillac  pour  l'un  de  ses  membres  les  plus  imper, 
tants,  ainsi  que  la  cathédrale  de  Cahors  et  l'église  de  Soli- 
goac,  dont  nous  citions  le  nom  tout  à  l'heure. 

Mais  quelle  que  soit  l'époque  de  la  fondation  de  l'abbaye 
de  Souillac,  l'église  actuelle  n'a  rien  à  nous  offrir  qui  se 
rapporte  à  ces  temps  obscurs.  C'est  un  édifice  qui  nous  met 
en  présence  du  xii'  siècle.  11  n'est  abordable  que  par  le 
côté  nord  ou  par  le  chœur,  situé  à  Test.  Les  autres  côtés 
sont  coutigus  à  des  terrains  ou  à  des  bâtiments ,  qui  pro- 
viennent de  rancienoe  abbaye  et  appartiennent  aujour- 
d'hui à  radministration  des  tabacs.  Sur  la  façade,  à  l'ouest, 
est  appliquée  une  tour  carrée  sans  caractère  qui  formait 
porche  au  rez-de-chaussée.  Ce  porche  aujourd'hui  contient 
la  sacristie,  et  tout  le  reste  de  la  tour  n'appartient  plus  en 
propriété  à  l'église.  Eu  somme,  l'extérieur  de  l'édifice  est 
d'une  grande  simplicité,  ajoutons  même  passablement 
maussade.  Ce  n'est  pas  le  même  parti  pris  d'ornementa- 

(0  Cité  par  Calvet. 


XLI7*  SESSION,   A  SENU8.  533 

tioD  qu'à  Solignac,  où  l'on  trouve  sur  les  murs  deux 
éliges  d'arcatures  trilobées  portées  sur  des  pilastres  ou  des 
consoles  sculptées.  Ici,  à  la  nef,  c'est  un  mur  uni,  divisé 
en  deux  travées  par  un  gros  pilier  carré,  qui  n'a  d*autre 
fooctîoD  que  de  faire  résistance  à  la  poussée  des  grands 
arcs  intérieurs. 

Chaque  travée  est  percée  de  deux  fenêtres  cintrées, 
munies  de  deux  pieds-droits  qui  se  prolongent  aussi  en 
archivoltes  et  dont  les  angles  sont  évidés  en  demi-ronds. 
Le  second,  seul,  de  ces  demi-ronds  est  garni  d'un  tore 
qui  forme  colonnette.  Une  petite  porte  sans  caractère  a 
éié  ouverte  au  bas  de  la  première  travée.  Une  autre  porte 
eit  aussi  pratiquée  dans  le  mur  ouest  du  transsept  nord, 
Maire  par  des  fenêtres  cintrées,  ouvertes  dans  le  haut  des 
murs.  Des  piliers  sont  appliqués  aux  contre-forts  sur  les 
iDglesdu  transsept.  A  l'est,  apparaissent  les  absidioles  du 
diœur  et  du  transsept,  qui  constituent,  à  l'extérieur,  la 
partie  la  plus  mouvementée  et  la  plus  intéressante  de 
l'édifice. 

Trois  absidioles,  dont  une  centrale  et  deux  latérales,  se 
détachent  sur  le  pourtour  du  chœur  et  sur  chaque  mur 
oriental  du  transsept.  Cependant  l'absidiole  du  transsept 
iud  est  entièrement  cachée  par  les  constructions  voisines, 
anciennes  dépendances  de  l'abbaye,  qui  défigurent  l'église 
sur  tout  le  côté  sud. 

La  région  absidale  de  l'édiflce  a  été  considérablement 
restaurée  par  la  Commission  des  monuments  historiques. 
L'absidiole  latérale  nord  a  même  été  entièrement  rétablie, 
car  auparavant  elle  n'était  qu'indiquée  par  les  arrache- 
Dentfl  de  ses  murs.  On  peut  se  rendre  compte  de  cet  j§tat 
en  examinant,  à  défaut  d'autres,  le  dessin  de  cette  église 
donnée  par  le  baron  Taylor,  dans  son  Voyag<  piiîore$que 
U  la  France,  tom.  II. 


Tootaca  ihffîiifllw  moêA 
9tule  teoUxe  eenlnk.  L'akâlkk  àm 
tranaepU  portent,  à  leus  ngks. 
pitfiBT  Mii»  oai  fftutfffgfffitf  les 


goqhaffiTgnfifnt  à  moalures,  ^»rt  4e 
tour  4a  dMBar.  Tontebû,  la 
dkORir  soot  dépoormei  àt  ces 

Le  mur  anoodi  da  diœar  qui  s'fliic  ai 
akââiola,  d'un  e&t  mÊtt  loorl,  ctf  percé  faae  no^ 
de  six  teoétm  dntrées  avec  aidiiiolle  ifrtiagnUire, 
Att-deiHtt,  dicole  une  cnrairhe  aithstr,  ci«  cb  retraite, 
s'élèfe  un  drmier  étage  de  courauienMBt  pcraé  amu  de 
feDètres  dotrée^  qui  édaîreot  la  galerie  dei  coHAIes. 

La  tour  qui  domine  rintertranaept,  à  moitié  CÊfdbée 
par  la  diarpenle,  semble  allendre  qu'une  irilauTitîoo 
intelligente  la  rétabliae  dans  son  ancien  état  et  lui  rende 
l'aspect  imposant  qo*en  retirerait  Pédifiee.  Mais  il  est  à 
croire  qu'elle  gardera  enccwe  longtemps  le  petit  tourilloo 
coiffé  d'une  toiture  conique,  qui  émerge  au  sommet  et  qui 
figure  dans  la  Tue  de  l'abbaye  que  donne  le  Mammtticum 
GaUicanmm, 

Mais  pénétrons  à  l'intérieur  on  se  trouve  oonceotré 
tout  l'intérêt  du  moDument.  Uo  plan  en  croix  latine,  des 
voûtes  byzantines  avec  coupoles  sur  pendenti&«  une  orne- 
mentation romane,  comme  à  Angouléme,  comme  à  Soii- 
gnac,  tel  est  l'aspect  caracti^ristique  sous  lequel  se  présente, 
de  prime-abord,  l'église  de  Souillac. 

La  longueur  intérieure  de  la  nef  mesure  55  mètres, 
sa  largeur  14  mètres,  et  l'axe  longitunal  du  transsept 
33  mètres. 

La  simplicité  de  la  nef,  beaucoup  moios  ricbe  qu'à 
Solignac  est  rachetée  par  une  certaine  élégance,  une  heu- 


XL\y   SESSION,   A  SENLIS.  535 

leuse  harmonie  de  proportions,  qui  reposant  et  char- 
ment la  vue  du  visiteur.  La  net'  proprement  dite , 
comprend  deux  travées  séparées  par  les  gros  piliers  carrés, 
qui  supportent  les  grands  arcs  des  voûtes.  Sur  les  murs 
latéraus,  à  chaque  travée,  sont  appliqués  deux  piliers 
carrés  plus  petits,  qui  portent  trois  arcatures  en  tiers- 
point.  Les  chapiteaux  de  ces  piliers  consistent,  pour  les 
trois  premiers,  du  côté  nord,  en  deux  ou  trois  moulures 
chargées  d'une  légère  baguette,  et  pour  les  autres  en  un 
simple  demi-rond. 

Les  arcatures  portées  sur  ces  piliers  ne  remplissent  pas 
seulement  Toffice  de  décoration;  elles  servent  aussi  à 
porter  la  galerie  de  circulation,  qui  règne  le  long  de  la 
nef  en  pénétrant  les  gros  piliers. 

Les  deux  fenêtres  que  nous  avons  déjà  signalées  à  l'ex- 
térieur, apparaissent  à  chaque  travée,  au  nord  et  au  sud, 
dans  le  mur  qui  s'élève  au-dessus  de  cette  galerie.  Au 
nord  les  quatre  fenêtres  sont  semblables.  Leur  embrasure 
est  précédée  de  deux  archivoltes  et  pieds-droits,  dont  les 
uigles  antérieurs  sont  creusés  en  demi-ronds.  Une  forte 
nervure,  formant  colonnette  avec  chapiteau,  garnit  le 
second  de  ces  demi-ronds  et  se  prolonge  dans  son  cintre. 
Ub  quatre  fenêtres  du  sud  sont  aussi  décorées  de  deux 
archivoltes  et  de  deux  pieds-droits  dont  le  premier,  seul,  est 
Mdé  en  demi-cercle.  Le  second  e^t  rectaugulaire  et  contient 
également  une  nervure  à  chapiteau  qui  forme  colonnette. 
Au-dessus  des  fenêtres  s'étendent  les  grands  arcs  appli- 
qués aux  murs  latéraux  et  appuyés  sur  les  gros  piliers 
delà  nef.  Ils  déterminent,  avec  les  grands  arcsdoubleaux 
jetés  sur  la  nef,  le  carré  dont  les  angles  sont  rachetés 
par  des  pendentifs  ou  triangles  concaves,  pour  établir  la 
1^  circulaire  des  coupoles  qui  couvrent  les  travées  de  la 
oef.  Notons  que  tous  ces  grands  arcs  sont  en  ogive,  comme 


536      GONGRiS  ÂlGHiOLOGIOUB  DE  FBANGB. 

on  les  voit  aussi  à  Solignac,  eomme  oot  les  voyait  à  Saint- 
FroDt  de  Périgueux,  avant  sa  reconstruction  actuelle. 

Une  corniche,  portée  sur  une  série  de  consoles  -d'un 
effet  très-décoratif,  couronne  cette  base  circulaire  sur 
laquelle  règne,  entre  la  corniche  et  la  naissance  des  cou- 
poles, une  plate-forme  large  de  plus  d'un  mètre.  Une  baie 
pratiquée  au  nord  et  au  sud,  au  bas  de  la  coupole,  donne 
accès  à  cette  plate-forme.  Le  diamètre  des  coupoles  mesure 
de  iO  à  il  mètres  et  leur  forme  intérieure  est  celle  d'une 
calotte  sphéroîdale  un  peu  surbaissée. 

M.  Viollet-le-Duc  signale  une  modification  apportée 
dans  la  construction  des  coupoles  de  Souillac,  depuis  la 
construction  de  celles  de  Saint -Front  de  Périgueux. 
a  A  Saint-Front,  dit-il,  les  arcs-doubleauz  sont  peu  épais 
et  leurs  faces  sont  verticales;  les  pendentifs  ne  commen- 
cent à  prendre  leur  ci)urbure  que  sur  l'extrados  de  ces 
arcs.  Bientôt  cependant  les  constructeurs  pensèrent,  non 
sans  raison,  que  ces  arcs-doubleaux,  supportant  une  charge 
énorme,  il  était  nécessaire  de  donner  à  leurs  claveaux 
plus  de  queue;  mais  pour  ne  pas  élever  démesurément  les 
pendentifs  ou  pour  ne  pas  leur  donner  une  trop  forte 
inclinaison,  ils  firent  participer  les  claveaux  de  ces  ans- 
doubleaiix  au  premier  sphéroïde.  Puis,  embarrassés  de 
savoir  comment  arranger  les  sommiers  des  deux  arcs-dou- 
bleaux sur  Tangle  saillant  de  la  pile,  ils  voulurent  les 
dégager  l'un  de  l'autre  le  plus  tôt  possible  ;  à  cet  effet,  ils 
abaissèrent  les  centres  de  ces  arcs-doubleaux  au-dessous 
du  niveau  de  leur  naissance,  et  inclinèrent  ainsi  leur 
courbe  dès  les  sommiers.  Dans  l'église  de  Souillac  les 
architectes  ont  déjà  adopté  ces  modifications.  »  (  Diction- 
naire d'archit.,  mot  coupole.) 

Rappelons  que  la  cathédrale  d'Angouléme,  grand  monu- 
ment à  coupoles  de  la  même  fanaille  et  dont  la  construc- 


XLlV  SESSION,  A  SBNLIS.  537 

tion  remonte  à  1130,  montre  aussi  cette  même  particula- 
rité; la  courbure  des  pendentifs  participe  des  faces  latérales 
des  grands  arcs. 

A  Souillac,  la  coupole  centrale,  à  l'intersection  dutrans- 
sept,  portée  également  sur  pendentifs,  et  plus  surélevée 
que  celle  de  la  nef,  présente  une  forme  légèrement  ovoïde. 
Les  quatre  grands  arcs  qui  la  supportent,  appuyés  sur  les 
quatre  piliers  du  centre,  sont  tous  aigus,  et  les  deux  du 
côté  du  transsept  sont  renforcés  d'un  sous-arc,  qui  repose 
sur  des  colonnes  appliquées  aux  piliers.  Les  transsepts 
aoot  voûtés  en  berceau  et  leurs  murs  au  nord,  au  sud  et 
à  Touest,  sont  ornés  de  deux  arcatures  retombant  sur  des 
piliers  d'angle  et  un  pilier  central. 

Près  du  grand  pilier,  situé  au  nord  du  chœur,  se  trouve 
la  porte  de  l'escalier  qui  conduit  au-dessus  des  coupoles. 
Dans  l'état  actuel  leur  extrados  sert  d'appui  à  la  charpente  ; 
il  est  formé  d'un  épais  blocage,  cimenté  à  la  chaux,  sans 
aucune  trace  de  revêtement  de  pierres  taillées.  11  est  difHcile 
d'admettre  que  ces  coupoles  aient  été  destinées  à  être  appa- 
feutes,  sans  charpente.  Cependant  le  tambour  de  la  coupole 
centrale  est  appareillé  avec  soin  et  a  toujours  dû  être  visible. 
Nous  avens  déjà  vu  qu'une  absidiole  centrale  à  cinq 
côtés,  et  deux  absidioles  latérales,  éclairées  chacune  par 
une  fenêtre,  s'ouvrent  sur  le  chœur.  Les  absidioles  du 
transsept,  également  pentagonales,  s'ouvrent  sur  chaque 
^  par  un  arc  aigu  porté  sur  colonnes  engagées.  Les 
deux  absidioles  latérales  du  chœur  sont  séparées  de  l'absi- 
diole  centrale  par  une  travée  courbe,  flanquée  de  deux 
colonnes,  et  percée  d'une  fenêtre  cintrée  eous  l'arcature 
<)ue  portent  ces  colonnes.  Entre  ces  absides  latérales  et  les 
piliers  qui  portent  le  grand  arc  du  chœur  s'étend  une 
travée  droite,  divisée  par  des  colonnes  en  deux  arcatures 
itroiteB  et  ogivales. 


La  fhv 
inétedi 

lam  de  ctear  la  nafée  4c 
sn»4^sp»itoàr 

DUH  tMte  cette  partie  et  Yi 
Boe  omeaKStatioB  daaa  le  ftyle 
hewenieiiieBt  aiec  la  nudité 
Aimi,  Ici  dtapiteanx 
4a  eeatre  pfféKnteDt 
ruigs  de  feoilles  plates,  mt  d' 
griHbiM  alliootés.  Aax  gnmd» 
do  transsept  ce  foot  <Jes  jfiiilluyi  cl  ds  fimili.  Doas  k 
eiMeor,  panai  les  plos  candénstiqaes,  ôloas  onix  su 
l'oa  ¥oic  deoz  penonnages  Iwanes,  acaoapïs^cahcéspii 
des  hoceaaz;  on  hoaune  entre  deoz  lions  ^Hl  tient  psi 
la  gueule;  des  oiseaox  de  proie  attaqués  par  des  cofembes; 
un  personnage  no,  deboot,  domptant  des  umosIrs  ailés, 
et  enfin,  près  de  l'absidiole  de  ganclie,  an  cba^tsau 
représeotant  ane  Annonciation  et  ane  femme  qui  file. 

Les  murs  do  chœur  imt  reçu  dans  ces  derniers  temps 
des  peintures  murales,  qui  sont  moins  en  désaccord  avec 
l'architecture  que  celles  qui  ont  eu  la  prétention  d'omei 
ses  voûtes  et  Ja  coupole  ceo traie.  Hélas!  d'où  vienneni 
donc,  à  la  Toûte  du  chœor,  tous  ces  personnages  assem- 
blés en  demi-cercle,  assis  sur  ces  sièges  et  sous  ces  daii 
gothiques  fleuris  comme  en  plein  x?*  siècle?  Et  à  la  cou- 
pole centrale,  que  font  tout  ces  personnages  aériens,  égarés 
sous  un  ciel  jaune,  à  travers  des  nuages  roses?  Touti 
cette  décoration,  purement  fantaisiste,  d'un  style  théâtral, 
^rait  à  la  rigueur  excusable  si  l'édifice  qu'elle  défîgun 
nVtait  pas  mis  sous  la  protectionque  devrait  lui  assurer  ss 
qualité  de  monument  historique.  Cette  protection,  si  ell( 


XLiY*   SESSION,   A   8ENUS.  539 

o'est  illusoire,  comme  on  serait  ici  eD  droit  de  le  deroan- 
<!er,  oe  s'étendrait-elle  donc  qu'à  l'architecture,  à  la  slruc* 
(ure  du  monument,  sans  se  préoccuper  des  dangers  que 
peuvent  faire  courir  à  ces  surfaces  des  décorations  laissées 
à  l'arbitraire  d'initiatives  inintelligentes?  L'intervention 
de  la  Commission  officielle  sera-t-elle  donc  indispensable 
pour  statuer  sur  une  simple  réparation,  ou  sur  une  modi- 
fication justifiées  par  un  besoin  réel,  pendant  qu'il  sera 
loisible  à  une  autorité  locale,  ou  à  une  individualité  parti- 
culière, d'altérer  la  physionomie  caractéristique  de  l'édifice 
par  l'application  d'un  décor  extravagant,  sous  prétexte 
qu'il  n'atteindra  pas  en  elles-mêmes  les  formes  architec- 
turales? Si  telle  est  la  doctrine,  ou  conviendra  au  moins 
qu'elle  peut  paraître  étrange. 

Quoique  la  sculpture  décorative  ait  été  traitée  dans 
l'église  de  Souillac,  surtout  dans  la  nef,  avec  une  grande 
sobriété,  elle  n'en  a  pas  moins  produit  une  œuvre  isolée 
éminemment  remarquable  et  originale,  sur  le  mur  de 
l'ouest,  à  l'intérieur,  au-dessus  et  à  côté  de  la  porte 
principale. 

Une  grande  arcature  en  ogive  occupe  le  milieu  de  ce  mur 
et  repose  sur  deux  piliers  qui  lui  sont  appliqués.  Dans  la 
partie  inférieure  de  l'arcature  s'ouvre  la  porte  ogivale 
flanquée  de  deux  pilastres. 

Sur  celui  de  droite  se  détache  en  relief  la  figure  en  pied 
du  prophète  Isaïe,  dont  le  nom  isaus  est  écrit  au-dessus 
(le  sa  tète  en  caractères  du  xii'  siècle.  Le  visage,  le  mouve- 
ment des  jambes,  le  geste  des  bras,  les  draperies  agitées, 
la  barbe  ondoyante  divisée  en  longues  mèches,  tout  carac- 
térisé le  type  consacré  du  prophète.  Il  tient  à  la  main  une 
banderole  sur  laquelle  on  aperçoit  quelques  traces  illi- 
sibles/l'une  inscription.  Isaîe  a  prophétisé  la  naissance  du 
Christ  qui  sera  conçu  et  enfanté  d*unt  vierge,  et  ce  fait 


S40      GONORÈS  ÂRGHÉOLOGIOUB  DE   PRÂNCB. 

explique  la  présence  de  ce  prophète  à  l'entrée  d'une  église 
consacrée  à  la  Vierge  Marie. 

Sur  l'autre  pilastre,  à  gauche,  un  autre  personnage, 
velu  d'une  robe,  d'une  physionomie  plus  calme  que  le 
précédent,  a  été  pris  pour  Jérémie,  pour  satisfaire  sans 
doute  au  besoin  de  donner  à  Isale  un  pendant  symétrique 
choisi  parmi  les  prophètes.  Mais  de  même  que  l'artiste  a 
mis  le  nom  d'Isale,  près  de  ce  dernier,  il  a  pris  soin  aussi 
de  graver  celui  de  osbp  auprès  de  son  autre  personnage. 
C'est  donc,  non  pas  un  prophète,  mais  un  patriarche,  le 
patriarche  Joseph,  loué  comme  tel  par  l'auteur  de  l'Ecclé- 
siastique,  que  l'artiste  a  figuré  en  pendant  à  Isale.  Peut- 
être  aussi  a-t-il  voulu,  par  ce  choix,  exprimer  une  allusion 
au  futur  Joseph,  l'époux  mystique  de  la  Vierge,  la 
patronne  de  l'église  (1). 

Dans  la  partie  supérieure  de  l'arcature,  au-desaus  de 
l'arc  ogival  de  la  porte,  s'étale  un  sujet  d'une  compli- 
cation animée,  encadré  dans  le  haut  par  un  arc  surbaissé 
à  moulures,  et  sur  les  deux  côtés  par  deux  personnages 
assis  sur  des  trônes.  Dans  celui  de  droite  on  reconnaît 
saint  Pierre.  De  la  main  droite  il  tient  la  clef  sur  sa  poi- 
trine, et  de  l'autre  un  livre  appuyé  sur  ses  genoux.  Ses 
pieds  nus  reposent  sur  des  oiseaux  à  tètes  monstrueuses. 


(1)  Dans^ l'esprit  du  sculpteur,  interprète  à  son  époque  de 
croyances  reposant  sur  des  textes  (|ue  l'érudition  et  la  critique 
ecclésiastiques  n'avaient  pas  encore  nxonnus  comme  apocryphes, 
le  patriarche  Joseph  pouvait  aussi  se  trouver  là,  à  l'entrée  de 
l'église  dédiée  à  la  Mère  de  Dieu,  au  même  litre  que  le  pro- 
phète Isaïe,  en  raison  de  la  prophétie  que  Joseph,  dans  le  tes- 
tament des  douze  Patriarches,  fait  de  la  sainte  Vierge,  qui  sera, 
dit-il,  de  la  tribu  de  Juda  et  de  Lévi  et  qui  donnera  naissance  à 
l'Agneau  de  Dieu.  Dom  Calmet.  DM.  de  la  Bible. 


XLIF*  SESSION,   À  SENUS.  541 

LeseooDd  personnage  a  été  pris  pour  saint  Paul  (I);  mais 
il  tient  de  la  main  droite  une  crosse  qui  n'est  pas  l'attri- 
but habituel  de  cet  apôtre,  et  de  l'autre  main  un  livre 
appuyé  sur  i;es  genoux.  Ses  pieds  ne  sont  pas  nus,  comme 
le  sont  ordinairement  ceux  des  apôtres.  Le  haut  de  son 
eorps  est  vêtu  d'une  sorte  de  robe  collante  et  boutonnée, 
ressemblant  à  une  soutane.  Selon  toute  apparence,  ce  per- 
sonnage est  l'évoque  ou  l'abbé  fondateur  du  monastère. 

Lorsque  les  visiteurs  arrivent  en  présence  de  ce  bas- 
relief,  ils  sont  d'autant  plus  déconcertés  qu'ils  s'attendent 
à  trouver,  comme  le  leur  ont  appris  V Architecture  bytan- 
tme  (%  et  une  notice  de  M.  le  baron  Jules  de  Verneilh  (3), 
un  jugement  dernier  traité  d'une  façon  inusitée  et  présidé 
par  saint  Pierre  et  saint  Panl. 

Elle  serait  bien  inusitée,  en  effet,  cette  représentation 
du  jugement  dernier,  si  c'en  était  une,  car  il  n'y  aurait 
ni  Christ  pour  juger,  ni  élus,  ni  damnés. 

Vers  le  centre  de  la  composition,  un  personnage  est 
couché;  il  sommeille,  et  parait  avoir  la  vision  figurée 
dans  les  deux  groupes  qui  se  trouvent  au-dessous  de  lui. 
A  droite,  le  démon  à  tête  humaine  et  hideuse,  le  milieu 
du  corps  tout  velu,  est  aux  prises  avec  un  personnage 
qu'à  son  costume  on  peut  prendre  pour  celui  qui  est  cou- 
ché au-dessus,  ils  soutiennent  une  lutte  vigiiureuse  dont 
le  sujet  est  une  colonne  torse,  placée  entre  eux  deux,  et 
qui  supporte  un  édifice  formé  d'une  nef  et  d'une  tour. 
Le  démon  cherche  à  renverser  et  à  arracher  la  colonne  des 
mains  de  l'autre  personnage.  Celui-ci  la  serre  étroitement 

(4)  Baron  Taylor.  —  f^oy.  pitt,  de  Vancienne  France, 
(t)  Vyérehitecfure  by%aniine  en  France^  par  Félix  de  Ver- 
Bâlh,  p.  t63. 
{Z)Buii€tin  Monumeniai,  IS65,  p.  590. 


XllT* 


pnmmage  &  de 


ft-  £..  i-  T^: 


■■{■I  kl  viaitaiiis 
il(ai8ootd*uiaiL 
;  eomme  k 

dernier*  ft)  i- «I -flu^   ae^     es        y'^  uiti.f 
iugv^  ni  -éub.  Al  aimne> 
*  «Btre  de  k  fionifienuoi.    u:    nmcmn»^.-  n» 

«t  pnal.  iToi-   i;.  vwiiii    Uf  ti^A- 
pMpeE  qui  er  trouvfn.  aitMhHmiui-   di    Ik* 

4B  peut  fffwidrt'  piiur  nriui  mn  n»>  <  •'•* 

Ik  IMDieOBCDt  UBi    lUltt    VlfiriiLiritiiri     il«ttf 

lorte.  piacset  cuiri   i>u\  rfru^    . 
iomit  d  uiftt   lie.  t'i  i!  U"'    '"*•• 
Cl  *i  arraciici  ii«  loiiuàii.  •«<• 
.  LeiUt-c  Ui  mT!*«  /■iri.iti'Mi*-" 


W'rr.  df  I  nnrtfnnt   f'tii,^. 

lie:.  ^  5^t 


5ii  GONGRÀS  ARGHÉ0L0OIQ1TB  DE  FRANGE. 

dans  866  bras  et  l'esprit  du  mal  essaie  en  même  temps  de 
le  frapper  avec  une  arme  en  forme  de  coutelas. 

A  gauche  de  ce  groupe,  le  démon  et  l'homme  à  la  robe 
sont  encore  en  présence.  Ce  dernier  est  assis  et  regarde 
froidement  le  diable,  qui  est  debout  et  fait  comme  un 
mouvement  en  arrière,  à  la  vue  d'un  philactère  ou  d'un 
volumen  que  lui  présente  le  saint  homme.  Évidemment 
le  diable  en  est  pour  ses  frais  dans  son  entreprise  téné- 
breuse et  la  victoire  reste  au  défenseur  de  la  bonne  cause. 

Peut-on  voir  dans  cette  scène  un  de  ces  faits  légendaires 
si  fréquents,  vers  le  xii*  siècle,  dans  l'histoire  des  fonda- 
tions de  certaines  églises  et  d'autres  édifices,  où  un  pacte 
conclu  entre  le  diable  et  le  fondateur  joue  le  Me  princi- 
pal, sauf  plus  tard  au  fondateur  à  mystifier  en  bonne 
forme  l'esprit  du  mal  par  une  pieuse  fraude! 

C'est  par  une  interprétation  de  ce  genre  que  l'un  de 
nos  confrères,  M.  G.  Vallier,  propose  d'expliquer  ce 
drame  démonographique.  Assurément,  il  est  sur  la  voie, 
s'il  n'arrive  exactement  au  but.  Sans  chercher  à  pénétrer 
jusqu'au  fond  le  sens  caché  de  cette  imagerie  de  pierre, 
contentons-nous  d'y  voir  le  souvenir  d'un  fait  relatif  à  la 
fondation  de  l'église  ou  du  monastère,  entravée  par  des  obs- 
tacles que  suscite  Tesprlt  infernal,  et  que  surmontent  Téner- 
gie  et  Thabileté  du  pieux  fondateur,  assisté  par  la  milice 
céleste  figurée  sous  forme  d'anges,  dans  le  haut  du  tableau. 

L'interprétation,  qui  a  vu  un  jugement  dernier  dans 
cette  composition,  en  a  retrouvé  la  suite  sur  le  pilier  situé 
à  droite  de  la  porte.  Mais  est-il  possible  de  voir  la  moindre 
corrélation  entre  le  sujet  que  nous  venons  d'examiner  et  les 
sculptures  qui  couvrent  les  trois  faces  Je  ce  pilier,  complète- 
ment séparé  du  sujet  précédent?  Nous  ne  le  pensons  pas. 

Les  angles  du*pilier  sont  bordés  d'un  tore,  disposé  en 
séries  de  segments <x>ncaves.  Sur  la  face  antérieure  se  déve- 


XLIV  SESSION,   A  SENLIS.  543 

ioppe,  à  travers  un  profond  fouillis,  un  péle-méle  savam- 
ment  enchevêtré,  de  griffons,  d*oiseaux  monstrueux,  de 
ckiens,  des  truies,  de  tètes  d'hommes  qui  s'enlacent,  se 
croisent  et  se  mordent  comme  dans  un  affireur  cauchemar. 

Sur  le  côté  droit,  un  groupe  de  deux  personnages  est 
répété  trois  fois  dans  la  hauteur  du  pilier.  Ces  deux  per* 
tonnages,  dont  l'un  porte  une  figure  juvénile,  sont  vêtus 
tous  les  deux  d*une  robe,  ou  plutôt  d'une  sorte  de  jupon 
àplib  légers.  Ils  s'étreignent  mutuellement  dans  une  lutte 
acharnée,  où,  tantôt  l'un,  tantôt  l'autre,  semble  être  le 
plus  fort.  Il  est  très-vraisemblable  que  cette  scène,  comme 
lu  reste  l'interprète  le  Voyage  pittoresque  de  Cancienne 
Fmee,  représente  la  lutte  de  Jacob  contre  l'ange,  sur  les 
bords  do  torrent  de  Jabok.  «  Et  il  parut  en  même  temps 
on  homme  qui  lutta  contre  lui  jusqu'au  matin.  • 
[Genèse  xxxii,  2i.)  Ainsi. la  lutte  fut  longue,  et  c'est  ce 
qo'a  voulu  exprimer  l'artiste  en  la  répétant  trois  fois  dans 
trois  phases  différentes»  quoique  pou  variées. 

Un  sujet  biblique  couvre  aussi  l'autre  face  du  pilier, 
la  eôté  de  la  porte.  C'est  le  sacrifice  d'Abraham  figuré  en 
trois  xones.  En  bas,  le  bûcher  est  allumé  et  près  de  lui 
m  enfant  couché  semble  attiser  le  feu,  pendant  qu'il  est 
retenu  par  le  bras  d'un  corps  invisible.  Au-dessus  Abra- 
ham, armé  du  glaive,  s'apprête  à  immoler  Isaac,  et, 
dana  le  haut,  apparaissent  TAnge  et  l'Agneau  tradition- 
nels, placés  verticalement. 

Le  pilier  situé  à  gauche  de  la  porte  n'a  reçu  de  sculp- 
tures, dans  sa  partie  supérieure,  que  sur  une  hauteur  d'en- 
viion  0*30.  On  y  voit  aussi,  comme  sur  la  face  de 
Taotre  pilier,  un  commencement  de  pêle-mêle  d'animaux 
m<»utrueux. 

Quoi  qu'il  en  soit  du  vrai  sens  et  de  la  moralité  de  ces 
compositions,  leur  ensemble,  par  leur  originalité  et  la 


MA  CONGRÈS  ARGUÉOLOOIOUS  DE  FRANGE, 

verve  de  leur  exécution,  forme  une  page  de  la  sculpture 
du  XII*  siècle  des  plus  digues  de  l'étude  des  archéologues. 

Quant  à  l'influence  artistique  qui  aurait  inspiré  la  com- 
position du  pilier,  avec  ces  enlacements  hybrides  et  ses 
fouillis  de  monstres,  n'est-ce  pas  aller  la  chercher  trop 
loin  que  de  la  faire  venir  des  Hindous  et  des  Scandinaves, 
comme  l'a  fait  l'éminent  auteur  du  Dktifmnûire  ramtmé 
d'architecture  î  L'école  de  sculpture  qui  avait,  au  xu*  siècle, 
son  centre  à  Toulouse  et  qui  a  produit  l'admirable  portai! 
de  Moissac,  doit  revendiquer  les  bas-reliefs  de  Souillac 
pour  l'un  de  ses  rayonnements  les  plus  caractéristiques. 
Des  rapports  do  parenté  intime  entre  Souillac  et  Moissac 
qui,  du  reste,  dépendaient  du  môme  diocèse,  ne  sauraient 
être  méconnus.  Les  démons  de  Souillac  et  ceux  du  porche 
de  Moissac,  ont  un  air  de  famille  significatif.  Les  deux 
prophètes  Isaïe,  à  l'une  et  à  l'autre  église,  présentent  une 
analogie  de  traits  et  d'attitudes  qui  indiquent  la  même 
origine,  et  les  lions  enlacés  du  trumeau  de  Moissac  rap* 
lent  singulièrement  l'amalgame  des  monstres  de  Souillac. 

Ghe.rchorons-iious  à  établir  l'époque  de  construction  du 
monument  quo  nous  venons  d'examiner.  Nous  n'avons 
quo  lo  caractère  do  sou  architecture  pour  nous  guider.  La 
motiit\catiou  do  structure  signalée  œmme  à  la  cathédrale 
d*Augi>uU^uio,  dans  la  pariici)>ation  des  faces  latérales  des 
grands  ari^s  à  la  c^uicavité  di^s  |Knidoutifs,  rornementdlion 
di*s  chapiteaux  du  chvvur  cl  dos  transsepts,  certaines  formes 
ogivales  aocomi>agnant  les  formes  romanes,  tout  ne  nous 
|H'rmot-il  |wisdo  re|H>rtor  rô\titico  à  la  uuùtié  du  xn*  siècle? 

Avant  do  quitter  IVgliso  do  Souill.ic,  jetons  encore  un 
Cimp  d  umI  dVtts«nnblo  sur  S4ni  uUoriour  et  admirons  toute 
riu:  uuHuo  do  SOS  Jis|v^mUous,  nef,  chivur  et  transsepts. 
No  nMhw-t<llo  (VAS  dans  toute  sa  plouilude  le  type  idéal 
du  plan  liturgique  ^^''laluo  {varie  développement  descéré- 


XLIY*  SESSION,   A  SENUS.  845 

nonies  du  culte?  Par  une  exception  fort  rare  aujourd'hui^ 
fautel  moderne  est  presque  à  sa  vraie  place,  presque  au 
centre,  à  l'intersection  de  la  nef  et  du  transsept,  sous  la 
grande  coupole  qui  lui  sert  de  ciborium  ;  de  là,  il  est  vu  de 
toas  les  points  ;  il  commande  à  toutes  les  parties  de  l'édifice 
ijuiaété  bâti  pour  lui.  Il  est  là,  conforme  à  la  prescription 
do  JRational  de  Guillaume  Durand,  qui  veut  que  l'autel 
mt  placé  dans  Téglise,  comme  le  cœur  dans  le  corps  de 
l'homme. 

Nous  avons  cependant  entendu  dire  que  cet  autel  était 
oièDacé  d'être  déplacé,  sous  prétexte  qu'il  cachait  le 
|«étre  officiant  à  la  vue  des  fidèles  rangés  au  fond  du  sànc^ 
toaire.  Pourquoi  aussi  avoir  établi  à  grands  frais  un 
Intel  à  gradins,  à  surélévation  encombrante,  et  qui  n'est 
pu  plus,  là,  à  sa  place,  que  les  peintures  soi-disant 
pthiques  qui  sont  à  la  voûte  du  chœur?  Si  l'on  eût  mis 
nu  autel  du  xii*  siècle,  à  table  unie,  en  rapport  avec  l'ar- 
éiCecture,  l'inconvénient  dont  on  se  plaint  ne  se  produi- 
ait  pas  et  tout  serait  pour  le  mieux. 

Les  bâtiments  de  l'ancienne  abbaye,  comme  nous 
l'ivons  déjà  dit,  dépendent  aujourd'hui  de  l'administra- 
tion des  tabacs.  Ils  datent  en  grande  partie  de  la  recon- 
itruetion  du  xviii*  siècle  et  l'escalier  principal,  seul,  pré- 
Mte  quelque  intérêt. 

M.  Albert  Lenoir,  dans  son  Architecture  monastique, 
faîtressorti  r  la  particulari  té  qu'offrait  la  forme  de  la  première 
aiceinte  de  l'abbaye  de  Souillac  dont  il  donne  un  ancien 
pian  sans  eu  indiquer  l'origine.  Elle  était  circulaire, comme 
k  représente  la  vue  du  Monasticum  GaUicanum.  «  Ces 
fNtnes  symboliques  étaient  rares  et  avaient  pour  but  de 
appeler  l'éternité,  comme  celles  de  quelques  cimetières 
dltalîe  qui  sont  enceints  par  un  cercle.  Le  monastère 
d'Abington,  en  Angleterre,  était  aussi  circulaire  à  l'origine, 

XUY*  SESSION.  35 


546  GONGBiS  'ARGHÉOLOGIQUE  DB  FRANGE. 

et  par  une  raison  analogue,  l'abbaye  de  Gentula,  fondée 
sousCharleinagne,  était  construite  sur  une  forme  triangu- 
laire en  l'honneur  de  la  sainte  Trinité.  »  (Arehitecture 
monastique,  1. 1,  p.  50.) 

La  route  de  Souillac  à  Gourdon  est  longue,  et  il  fallait 
dans  la  journée  remplir  nos  devoirs  envers  cette  dernière 
ville,  sans  manquer  un  arrêt  au  Vigan.  Donc  à  dix  heures 
du  matin,  le  9,  s'exécutait  le  départ  de  Souillac  dans 
l'ordre  accoutumé. 

Le  Vigan  est  un  gros  bourg  agréablement  situé  dans 
une  belle  vallée,  et  son  église  doit  réclamer  la  visite  de  tout 
archéologue  qui  passe  de  ce  côté.  M.  le  curé  a  bien  voulu 
nous  en  faire  les  honneurs  avec  la  meilleure  grâce.  Cette 
église  est  une  ancienne  collégiale  reconstruite  depuis  l'ori- 
gine de  son  chapitre.  Le  Vigan,  au  ix'  siècle,  se  nom- 
mait Carbanacum  et  possédait  déjà  un  petit  monastère 
(Gellula),  dans  lequel  sainte  Charité  était  ensevelie; 
c  mais  non  suivant  son  mérite  (non  sub  ordine  prout 
decebat  venerari).  «  C'est  du  moins  ce  que  constate  un  acte 
datant  de  892  à  896,  et  relatif  à  la  dotation  de  cette  église, 
par  Gausbert,  évéque  de  Cahors. 

a  Sous  le  pontificat  de  Grégoire  VII  (i073-t08o), 
l'évéque  de  Cahors,  Gérard  II,  donna  l'église  de  Carban- 
nac  qui  s'appelait  déjà  le  Vigan  aux  clercs  de  l'abbaye  de 
Saint-Sernin  de  Toulouse,  afin  qu'ils  y  vécussent  selon 
les  règles  de  saint  Augustin  et  de  saint  Jérôme.  Ce  même 
Gérard,  ou  son  successeur  du  même  nom,  érigea  le  Vigan 
en  doyenné  (i).  »  En  H43,  Pierre,  archevêque  de  Bourges, 
confirma  le  chapitre  du  Vigan  dans  la  possession  des 
églises  de  Gourdon,  de  Saint-Hilaire,  de  Masclatet  de 
Saint*Étienne  de  Genouilhac.  En  1309,  Raymond  II  Pau- 

(4)  LongpoD.  Fouillé  du  diocèse  de  Cahors. 


XUy*  SESSION,   A  SENLIS.  547 

chelle,  évéque  de  Cahors,  ordonna  qu'après  la  mort  de 
Raymond  de  Salvières,  prieur  du  Vigan,  les  évoques  de 
Cahors  seraient  seuls  prieurs  de  cette  église  (i). 

C'est  à  la  suite  de  cette  décision  que  l'église  actuelle 
aura  sans  doute  été  rebâtie.  Son  style  du  moins  permet  de 
le  supposer. 

Le  monument  se  présente  sous  l'aspect  imposant  d'une 
haute  nef  enserrée  par  de  puissants  contre-forts,  et  percée 
de  fenêtres  où  le  xiv*  siècle  se  montre  vigoureusement 
accusé.  L'intérieur  offre  un  plan  d'une  forme  inusitée, 
mais  cependant  d'un  heureux  effet,  qui  semble  donner 
ane  élégante  profondeur  à  Tédifice.  D'abord  c'est  une  nef 
unique,  formée  de  trois  travées  à  voûtes  élancées,  por- 
tées sur  nervures;  puis  un  transsept.  Mais  la  troisième 
travée,  vers  le  milieu  de  ses  murs  latéraux,  va  en  s'éva- 
sant  pour  se  joindre  au  transsept.  Trois  absides  parallèles, 
à  fond  polygonal,  juxtaposées  à  l'est,  font  face  à  la  lar- 
geur de  cette  travée.  Deux  piliers  s'élèvent  pour  soutenir 
les  voûtes,  à  droite  et  à  gauche  de  l'axe  central  de  la  nef, 
sur  l'alignement  du  mur  occidental  du  transsept  et  sur 
celui  des  côtés  parallèles  de  l'abside  centrale.  Deux  autres 
absides,  moins  profondes  qus  les  précédentes,  occupent 
les  extrémités  orientales  de  chaque  bras  du  transsept.  Le 

[1)  «  Provide  ergo  volumus,  statuimus  et  etiani  oriiioamus  de 
communi  conseusu  pr»dicto  auctoritate  nostra.  et  poteslate  nobis 
tradita,  quod  de  ca)lero  noo  sit  ibi  Prier,  sed  domino  Raimundo 
deSalviaco  Prière,  qui  nunc  estcedente  et  deceilente,  nos  simus 
el  es>e  debeamus  Abbas,  et  Pra^latus  superior  et  immediatus 
looo  Prions  qui  ounc  est  el  successores  nostri  qui  pro  tempore 
fuerÎDt  Episcopi  Cadurcenses  eo  ipso  quod  erunt  Episcopi  ipso 
lado  siot,  et  de  jure  reputentur  Abbates  in  ipsa  Ecclesia  post 
mortem  vel  decessum  dicti  Prioris.  »  Séries  et  Acta  episcopo' 
mm  Ccuiurcensium,,,  auctore  Guillelmo  de  La  Croix. 


548      GONGRiS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

plan  ci-joint,  relevé  à  la  hâte,  par  notre  confrère  M.  Nodet, 
fera  mieux  comprendre  que  tout  essai  de  description 
la  disposition  de  l'édifice  et  Tagencement  de  ses  voûtes. 

L'ensemble  de  l'église,  comme  nous  l'avons  dit,  se  rap- 
porte au  xiY*  siècle,  cependant  la  première  travée  vers 
l'ouest  parait  avoir  été  ajoutée  ou  considérablement 
remaniée  au  xv*. 

Nous  ne  pouvons  qu'indiquer,  dans  notre  trop  courte 
visite  à  cette  intéressante  église,  l'importance  des  magni- 
fiques vitraux  qu'elle  a  conservés.  Espérons  qu'ils  seront, 
pour  quelques-uns  de  nos  collègues  du  Lot,  le  sujet  d'une 
étude  spéciale  qui  ajoutera  une  nouvelle  page  à  l'histoire 
des  richesses  artistiques,  quelquefois  trop  méconnues  de 
cette  région  de  la  France. 

M.  le  curé  du  Vigan  possède  plusieurs  poteries  romaines, 
trouvées  dans  le  pays,  témoignage  de  l'ancienne  origine 
de  cette  localité.  Il  a  bien  voulu  nous  les  montrer,  en 
permettant  à  M.  Nodet  d'en  prendre  des  dessins,  et  c'est 
par  un  court  examen  de  ces  objets  que  nous  avons  ter- 
miné notre  halte  au  Vigan. 

Une  heure  après  nous  arrivions  à  Gourdon. 

Comme  Tétymologie  celtique  de  ce  nom  l'indique  (Cor, 
Dun,\e  mont  des  corbeaux),  cette  ville  s'élève  sur  unehau- 
teur  et  se  trouve  dominée  par  son  église  depuis  la  démo- 
lition de  son  ancien  château  qui  occupait  la  partie  la  plus 
culminante  du  coteau. 

Rues  étroites  et  tortueuses,  tel  est  l'aspect  de  la  ville 
haute.  Car  il  y  a  la  haute  et  la  basse  ville.  Quelques  restes 
des  anciens  remparts  sont  encore  apparents  autour  de  la 
ville  haute.  A  l'entrée  de  la  rue  principale  qui  remonte 
celle  dernière,  près  de  l'ancienne  porte,  on  remarque 
une  petite  chapelle  qu[  n'a  rien  de  monumental.  Nous 
n'en  parlerions  pas  si  elle  n'occupait  l'emplacement  de 


ZLIY*  SESSION,   A  SENlJS.  549 

l'ancieD  grenier  où  les  consuls  de  Gourdon  tenaient  le  sel 
€D  dépôt,  pour  le  vendre  aux  habitants  de  la  ville,  qui^ 
par  un  privilège  spécial^  étaient  exempts  de  cet  impôt; 
iU  n'avaient  seulement  qu'à  en  payer  le  prix  de  revient. 

D'ailleurs,  les  consuls  et  habitants,  soit  dit  à  propos  de 
cette  exemption,  paraissent  avoir  joui  de  plusieurs  privi- 
lèges fortaccomodants,  que  leur  octroyait,  dès  le  xiii*  siècle, 
la  charte  communale  de  cette  ville  :  a  Nous  accordons,  y 
est-il  m,  aux  consuls  et  aux  habitants  que  ceux  qui  vien- 
dront aux  marchés  de  ladite  ville,  qui  se  tiennent  ordinai- 
rement le  jeudi,  ne  puissent  y  être  arrêtés  pour  dettes 
fiscales  ou  autres,  ni  les  denrées  qu'ils  apportent  être 
prises  ni  saisies  depuis  l'heure  de  midi  du  mercredi  jus- 
qu'à la  même  heure  du  vendredi  suivant  (i).  b 

Cette  rue  conduit  vers  l'église  Saint-Pierre.  D'anciennes 
maisons,  depuis  le  xiu^  siècle  jusqu'au  xvr,  apparaissent 
des  deux  côtés,  presque  à  chaque  pas,  et  présentent  d'in- 
ressants  détails  caractéristiques  de  ces  époques.  Citons 
surtout  une  maison  du  xiii'  siècln  dont  les  portes  et  fenê- 
tres du  rez-de-chaussée  ont  été  refaites  à  la  Renaissance. 

L'église  Saint-Pierre  se  présente  avec  une  façade  flan- 
quée de  deux  tours  carrées.  L'ensemble  ne  manque  pas 
d'une  certaine  grandeur,  rehaussée  par  un  aspect  mili- 
taire, car  la  façade  entre  les  deux  tours  qui  la  dominent, 
est  surmontée  d'un*  mur  crénelé  reposant  sur  des  mâchi- 
coulis. En  bas  un  portail  à  voussures  ogivales  est  percé 
entre  les  deux  tours,  et  au-dessus,  dans  le  cintre,  s'épa- 
nouit une  belle  rose  accompagnée  d'oculi  à  quatre  lobes, 
au  fond  d'un  cercle  de  voussures.  Les  colonnettes  du  por- 
tail, avec  leurs  chapiteaux  à  deux  rangs  de  feuilles,  les 
profils  de  leurs  bases  et  des  autres  détails,  tout  caractérise 

(I)  A.  Malte-Brun,  La  France  illustrée. 


550  CONGBiS  AECnÉOLOOIQUE  DB  TftAKCB. 

uDe  construction  du  ziv*  siècle,  moins  œpendant  It 
partie  fortifiée,  qui  date  de  la  fin  du  zy*.  Les  feuillages 
font  les  principaux  frais  de  l'ornementation  du  portail 
traitée  avec  élégance.  Cependant  le  pilier  formant  contre- 
fort, appliqué  à  Tangle  gauche  de  la  tour  du  sud,  porte 
un  chapiteau  à  personnages  exécuté  auec  beaucoup  de 
finesse.  C'est  l'histoire  d'Adam  et  d'Eve,  placée  là  en  évi- 
dence, comme  un  enseignement  perpétuel.  D*abord,  la 
tentation  au  pied  de  l'arbre  chargé  du  fruit  défendu,  l'ex- 
pulsion du  Paradis  après  la  désobéissance,  et  la  condamna- 
tion au  travail  de  nos  premiers  pères,  figurée  par  Eve  qui 
file  la  laine  et  Adam  qui  laboure  la  terre. 

Une  nef  d'une  ampleur  harmonieuse,  terminée  par  une 
abside  à  sept  pans,  forme  l'intérieur  de  l'édifice.  Une 
légère  déviation  vers  le  nord  est  visible  dans  son  axe.  Trois 
travées,  plus  une  quatrième  qui  se  prolonge  sous  les  , 
tours,  composent  cette  nef.  Sur  la  dernière  travée,  avant 
l'abside,  s'ouvrent  deux  chapelles  carrées  qui  forment 
transsept.  Deux  autres  chapelles,  comprises  entre  les  con> 
tre-forts,  s'ouvrent  également  sur  le  côté  nord  de  la  nef 
ot  une  cinquième  sur  le  côté  sud,  dans  la  deuxième 
travée. 

De  longues  fenêtres  à  lancettes  éclairent  l'abside.  Celle 
du  fond  est  partagée  par  deux  meneaux  et  les  autres  par 
un  seul.  Les  colonnettes  élancées  portent  des  chapiteaux 
caractérisés  par  les  deux  rangs  de  crochets  du  xiv*  siècle. 
Deux  roses  sont  ajourées  au-dessus  des  deux  chapelles  qui 
précèdent  labside.  Les  voûtes  croisées  sur  nervures,  pré- 
sentent à  leurs  clefs,  dans  la  nef.  les  symboles  des  Évan- 
g^listes  et  dans  Tabside  VAgnus  iPti,  Comme  souve- 
nir de  Tancienne  splendeur  de  Têdifice,  les  fenêtres  ont 
ci>aserYé  de  magnitiques  fragments  de  vitraux  du  xiv^siècle. 

A  Textèrieur  de  Tahside^  de  puissants  contre-forts  con- 


XUT*  SESSION,   A  SENUS.  551 

trebuttent  les  angles  des  murs.  On  en  retrouve  aussi  de 
semblables  aux  angles  des  chapelles  latérales  qui  forment 
trannepts  :  mais  là,  la  construction  de  ces  chapelles  pos- 
térieures à  la  nef,  a  donné  lieu  à  une  particularité  de 
reprise  qu'il  faut  signaler. 

Sur  le  mur  et  au  bas  de  l'abside  un  premier  contre-fort 
était  appliqué;  un  second  a  été  ajouté  en  retraite  sur  ce 
premier  ;  mais,  de  plus,  il  a  été  prolongé  pour  former  le 
mur  du  fond  oriental  de  la  chapelle,  et  la  fenêtre  dont  il 
fft  psroé  se  trouve  prise,  moitié  dans  la  maçonnerie  même 
du  contre-fort,  et  moitié  dans  son  prolongement. 

En  somme  l'église  de  Saint-Pierre  de  Gourdon  est  un 

édifice  d'une  importance  et  d'un  intérêt  qui  justifient  son 

classement  parmi  les  monuments  historiques.  La  Statii- 

tique  de  Deipont,  dépourvue  de  détails  descriptifs  à  son 

endroit,  nous  donne  i304  pour  date  de  sa  fondation  et 

1415  pour  celle  de  son  achèvement.  Le  style,  les  détails 

de  construction  s'accordent  généralement  avec  ces  époques. 

Le  même  ouvrage  indique  aussi  les  dimensions  suivantes: 

longueur  de  la  nef  4i"'30,  largeur  il™60,  hauteur  des 

tours  34  ou  35  mètres. 

Gourdon  possède  encore  deux  autres  églises.  L'une  est 
celle  des  anciens  Cordeliers  et  se  compose  d'une  seule  nef 
à  quatre  travées,  terminée  par  une  abside  polygonale.  Les 
nervures  des  voûtes  retombent  sur  des  colonnes  tronquées, 
appliquées  aux  murs.  A  la  première  travée,  la  clef  de 
▼oûte  porte  au  centre  une  main  bénissante  et  dans  la  bor- 
dure circulaire  la  date  de  MCCLXXXVIL  Deux  chapelles 
carrées  s'ouvrent  sur  le  côté  nord  dans  les  deux  premières 
travées.  Mais  tout  cela  n'ofi're  qu'un  intérêt  fort  médiocre. 
Cependant  les  visiteurs  sont  amplement  dédommagés  par 
on  objet  d'un  véritable  intérêt  et  qui  parait  dater  du 
xnT  siècle  ou  du  commencement  du  xv*.  C'est  une  très- 


553      GONGRiS  ▲RGHÉOLO0IOUB  D8  FRANGE. 

curieuse  cuve  baptismale  en  pierre  et  circulaire.  Elle  est 
divisée  sur  son  pourtour  en  arcatures  trilobées  qui  abri- 
tent les  douze  apôtres  présidés,  au  milieu,  par  le  Chriat 
assis,  ayant  saint  Pierre  à  sa  droite.  Le  diamètre  de  la  cuve 
est  do  l"'â5  et  sa  hauteur  de  O""??.  Malheureusement  l'état 
de  conservation  du  monument  n'est  pas  parfait.  Mais  tel 
qu'il  est,  il  a  droit  aux  égards  les  plus  sérieux  pour  être 
protégé  contre  de  nouvelles  dégradations,  et  il  se  recom- 
mande au  crayon  des  archéologues  et  des  dessinateurs 
qui  résident  ou  qui  passent  à  Gourdon. 

Nous  ne  parlerons  de  la  troisième  église,  dédiée  à  aaint 
Siméon,  que  pour  signaler  sa  belle  chaire  en  bois,  ornée 
de  sculptures  irès-fouillées  dans  le  style  du  xtii*  siècle. 
Elle  a  pour  support  un  Hercule,  vêtu  de  la  peau  du  lion, 
que  l'on  ne  s'attendait  guère  à  trouver  en  pareille  fonc- 
tion. Le  grand  panneau  qui  s'élève  derrière  la  chaire 
représente  saint  François  recevant  les  stigmates,  et  sur  le 
panneau  central  de  la  chaire  même  on  voit  le  Christ  ensei- 
gnant, accompagné  de  l'inscription  Spiriius  super  me,,.  A 
sa  droite  se  tiennent  deux  saints  et  à  sa  gauche  un  per- 
sonnage, la  main  appuyée  sur  une  croix,  avec  un  chapeau 
posé  par  terre.  Dans  les  pendentifs  placés  sous  ces  pan- 
neaux sont  figurés  les  Ëvangélistes  moins  saint  Jean. 

Dans  le  vallon  qui  s'étend  au-dessous  de  la  ville,  au 
milieu  d'un  site  pittoresque,  s'élève  l'ancien  sanctuaire  46 
Notre-Dame  des  Neiges,  qui  de  tout  temps  a  été  danlFll 
pays,  l'objet  d'une  grande  vénération.  C'est  au  chapftla 
du  Vigan,  en  iOiO,  qu'est  due  la  reconstruction  delà 
chapelle  actuelle  qui  en  a  remplacé  une  plus  petite  et 
insuffisante  pour  l'affluence  des  pèlerins.  Cejiendant  l'édi- 
fice est  d'une  grande  simplicité  et  n'a  pas  été  achevé.  Il 
est  de  forme  rectangulaire.  La  porte  de  la  façade  est  flan- 
quée de  deux  colonnes  ioniques  qui  soutiennent  un  fron- 


l 


ZLIT*  SESSION,  A  SENUS.  553 

|tak  arrondi  chargé  d'un  écusson  sans  armes.  La  tour  qui 
devait  l'accompagner  est  remplacée  par  une  charpente 
I disgracieuse  qui  soutient  un  modeste  campanile.  Sur  le 
linteau  de  la  porte,  on  lit  Tinscription  suivante,  où  se 
tmuve  résumée,  dans  une  rédaction  qui  ne  brille  pas  pré- 
ôiément  par  la  clarté,  l'histoire  de  ce  sanctuaire  : 

D.  0.  M.  V.  Q.  M. 

S. 

^ACSUULUM    JÀM   A    MULTI8    S^GULIS   SIBI   DIGATUM  PALAM 

'ASSEaVlT    Y1R60   DEIPARA,    INSOLITOQUE     IfUMINB     VRJK- 

^UTIA    ET    GOLLATIS    IN    CLIENTES    SUPPLICES  BENEFIGIIS 

^fiBEM  SIBI   6RATAM  PROMULGaYIT  ILLUSTRA  VIT.   AUXÉRE 

FIDEM    HIRAGULA.    ET    GUM    DEYOJISSlMiE    PLEBIS    PIETAS 

CATERVATIM  AlCURIT  UT  DONET  ET  P&TAT,  YENERABILB 

^^APITULUM  VIGANENSE  H  ANC  CONSTRUl  PIISSIME    GURAVIT 

^DEM    8AGRAM,     ANTIQUUM     SAGKARIUM     UOG     AMPUORE 

GONGLUSIT.    PRIMORDIA    EQUIDEM    UTRIUSQUE    PARVA   8ED 

OtriD    0MNIP0TENTI3    MATRI    NON    FACILE.    OMNIA    POTEST 

'KR   FILIUM   GREDE   ET    ORA.    ANNO    REPARATiB    SALUTI8 

MlKaCLVI. 

*  JHeu  Taut-Puissant  et  Très- Grand  et  à  la  Vierge  Marie 

Salut. 

«  Mtinctuaire  a  été  depuis  de  longs  siècles  dédié  à  la  sainte 

Vierge,  la  mè*e  de  Dieu  Va  affirmé  publiquement  elle* 

^éme.  Et  par  une  influence  inaccoutumée,  par  sa  pré^ 

^^nce  et  par  dis  bienfaits  sans  nombre  accordés  aux 

I^'^es   des  pèlerins,  elle  a  fait  connaître  que  cette 

^^meure  lui  était  agréable  et  Va  rendue  célèbre.  Les 

'''^^cclei  accrurent  la  confiance.  Et  comme  la  dévotion 


554      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

amenait  ici  en  foule  le  peuple  fidèle  pour  donner  et  pour 
demander,  le  vénérable  chapitre  du  Vigan,  pousié  par 
sa  piété,  a  fait  construire  cette  chapelle.  Jl  a  eu  soin  de 
renfermer  l'antique  sanctuaire  dans  celui-ci  bâti  sur  dn 
proportions  plus  vastes,  proportions  de  l'un  ei  de  tatitre 
bien  modestes,  il  est  vrai,  mais  qu'y  a-t-il  de  difficile  a 
la  mère  du  Tout- Puissant?  Par  son  fils  elle  peut  tout,' 
Croyez  et  priez. 

Van  de  grâce  1646. 

Au-dessus  d'une  porte  latérale  un  bas-relief  représente 
une  scène  à  quatre  personnages,  dont  un  homme  et  trois 
femmes.  Nous  savons  que  l'on  croit  voir  communément 
dans  ce  bas-relief  le  miracle  de  Notre-Dame  des  Neiges 
arrivé  au  iv*  siècle  à  Rome,  sous  le  pape  Libère,  sur 
l'emplacement  où  s'élève  la  basilique  Libérienne,  plus 
connue  sous  le  nom  de  Sainte-Marie-Majeure.  Dans  celte 
interprétation  a  le  pape  Libère  est  au  milieu  du  tableau 
ayant  à  sa  gauche  son  porte-croix.  A  sa  droite  la  matrone 
Patricia  lit  au  Souverain  Pontife,  en  présence  de  son 
époux,  la  donation  qu'ils  font  d*un  commun  accord  de 
tous  leurs  biens  à  la  sainte  Vierge  ».  Article  anonyme  du 
journal  Le  Gourdonnais  du  4  août  1877. 

Malheureusement  il  nous  a  été  impossible  de  recon- 
naître dans  le  bas-relief  en  question  le  sujet  que  nous 
venons  de  rapporter,  malgré  tout  le  désir  que  nous  aurions 
eu  de  retrouver,  dans  Thuroble  sanctuaire  du  Quercy, 
le  souvenir  d'un  rapport  quelconque  avec  la  grande 
basilique  de  l'Esquilin  à  Rome.  Ces  quatre  personnages 
nous  ont  paru  représenter  trois  femmes  et  un  hommei 
autant  que  peuvent  nous  servir  nos  souvenirs  et  nos  notes 
prises  sur  place.  La  première  de  ces  femmes  placée  à 
droite  semble  recevoir  les  deux  autres  qui  viennent  à  elle? 


XLIY*  SESSION,    A  SENLIS.  555 

pendant  que  la  seconde  lui  offre  un  objet  semblable  à  un 
livre  ou  à  une  couronne.  Il  s'agit,  sans  doute,  d'un  fait 
relatif  à  la  fondation  du  sanctuaire. 

La  chapelle  de  Notre-Dame  des  Neiges  possédait  autre- 
fois un  trésor  digne  de  la  vogue  dont  jouissait  ce  lieu  de 
pèlerinage.  En  quoi  consiste-til  aujourd'hui?  Nous  ne 
saurions  le  préciser.  L'heure  avancée  de  la  soirée  nous 
obligeait  à  raccourcir  notre  visite.  Cependant  nous  avons 
pu  examiner  avant  de  partir  un  intéressant  reliquaire  du 
XY*  siècle.    Cette  pièce  d'orfèvrerie    se    compose  d'un 
prisme  en  cristal  à  six  faces,    garnies  en   haut  et  en 
bas  d'une  plaque  en  vermeil  trilobée.  Le  tout  est  sur- 
monté d'un   cône  allongé,   terminé  par  une  boule  qui 
porte  la  croix.  Le  pied,  fort  élégant,  est  muni  de  trois 
godrons  et  couvert,  comme  les  armatures  des  six  faces,  de 
dessins  finement  gravés. 

Jules  de  Laupierb. 


LE  PONT  DE  VALENTRÉ 


A   CAHORS 


NOTICE  HISTORIQUE  ET  ARCHÉOLOGIQUE 


A  la  fin  du  xiii'  siècle,  les  habitants  de  Cahors  fran- 
chissaient la  rivière  du  Lot,  qui  entoure  presque  entiè- 
rement la  ville,  au  moyen  de  deux  ponts.  Le  premier,  bâti 
au  sud  de  la  ville  sous  le  règne  d'Auguste,  était  muni  de 
tours  (1)  et  communiquait  avec  plusieurs  routes  impor- 
tantes (2).  On  l'appelait  le  Pont>Vieux.  Le  second,  situé  à 

(\)  Ce  pont  était  défendu  par  trois  tours.  Celle  du  milieu 
appartenait  au  chapitre  qui  y  percevait  un  droit  de  péage;  elle 
figure  dans  son  sceau  qui  portait  un  pont  à  trois  tours  d'un  côté 
et  la  lapidation  de  saint  Etienne  (patron  de  la  cathédrale]  de 
l'autre. 

(2)  Trois  grandes  voies  romaines  traversaient  le  Lot  à  Taide 
de  ce  pont.  C'étaient  : 

«  1°  La  grande  route  de  Cahors  à  Toulouse  que  rejoignait  à 
Casteinau-Moniralier  la  route  de  Cahors  à  Moissac. 

«  S°  La  grande  voie  de  Cahors  à  Rodez  qui  se  bifurquait  i 
Beauregard  avec  la  voie  de  Rodez  à  Toulouse. 

c  3<>  La  grande  voie  de  Cahors  à  Âgen.  • 

(E.  Castagne,  Notice  sur  les  voies  romaines  du  départe- 
tnent  du  Lot.  1877.) 


XUY*  SESSION,   A  SBNUS.  557 

qui  s'achevait  par  les  soins  des  consuls  allait  du 
Btttlier  au  faubourg  de  Cabessut.  C'était  le  Pont- 

Ce  fat  à  cette  époque  que  l'évéque  Barthélémy  de  RufiFy 
t^Qt  le  projet  de  bâtir  un  troisième  pont  à  l'ouest  de 
ùkùRj  au  port  de  Valenlré  a  qui  était  déjà  un  des  lieux 
bplas  firéquentés  de  la  ville  (2).  »  Les  revenus  de  l'évô- 
àk  de  Gahors  ne  pouvant  suffire  à  d'aussi  grandes 
Mpnses,  l'évéque  implora  l'assistance  du  Souverain 
tatife.  c  11  lui  communiqua,  rapporte  Dominicy  (3), 
kfaaein  qu'il  avait  de  construire  le  pont  de  Valentré  et, 
fnr  l'ayder  dans  cette  entreprise,  le  pape  (Alexandre  IV] 
ladMioa  SOO  marcs  d'argent  à  prendre  sur  les  usuriers, 
{■otorqaaient  au-dessus  de  vingt  pour  cent  (4).  b 
Ouhala-Goture  prétend  que  «  cette  somme  n'étant  pas 
Mifée  suffisante  pour  les  frais  de  cette  grande  entreprise, 
hrtMlemy  fit  frapper  de  la  monnaie  dont  l'aloi  était 

Le  Pdot-Vieax  n'existe  plus.  Le  service  de  la  navigation  du 
Il  oéoessilait  la  démolition  des  trois  arches  encore  subsistantes  ; 
I  mU,  il  avait  été  remplacé,  des  1835,  par  un  nouveau  pont, 
frfé  le  pont  de  Saint-Georges,  du  faubourg  qu'il  dessert. 
(I)  La  construction  de  ce  pont  dura  trente-deux  ans  (4S51- 
83)  et  les  dépenses  s'élevèrent  à  la  somme  de  S5,000  sols 


K  Archives  originales,  30  mai  4S87.  » 

Bibliothèque  communale  de  Cahors.  Manuscrits. 

;t)  Histoire  du  Quercy  du  xii'' au  wif  siècle,  par  M.  l'abbé 

Ival,  prébendier  au  chapitre  de  Cahors.  Bibliothèque  commu- 

•  de  Cahors.  Manuscrits. 

3)  Histoire  du  Pais  de  Quercy,  par  Marc-Antoine  Domi- 

;y.  Bibliothèque  du  Grand-Séminaire  de  Cahors.  Manuscrits. 

[i)  «  Par  une  bulle  datée  des  ides  de  janvier  4261,  le  Sou- 

rtîD  Pontife  consentit  à  faire  l'abandon  en  faveur  de  la  corn- 


558  GONonis  iRCHiOLoaiQUB  sb  frange. 

plus  bas  qu'à  l'ordinaire  (i).  I^e  peuple  en  murmura  mi 
révoque,  sur  la  prière  des  consuls,  remit  la  monnaie  à 
l'ancien  taux.  In  lege  dit  la  chronique  (2).  b 

L'évoque  Barthélémy  ne  parvint  pas  à  réaliser  celt« 
magnifique  conception  (3);  les  évéques  ses  successeurs  [A) 
semblaient  môme  l'avoir  oubliée,  quand  Raymond  Pan- 
chelli  fut  élu  évéque  de  Cahors  (5).  Sous  son  épiscopat  et 
près  de  trente  ans  après  la  mort  de  Barthélémy  de  RufTy  i 
les  consuls  de  Cahors  exécutèrent  le  projet  de  ce  graad 
prélat;  o  j'apprends  d'un  viel  mémoire,  rapporte  Domi- 
nicy  (6),  que  du  temps  de  ce  Raymond  feut  repris  le 
dessein  qu'avoit  formé  Barthélémy  de  Ruffy,  son  devaa- 
cier,  de  bastir  un  pont  de  pierre  au  port  de  Valeniré,  » 
En  effet,  le  dernier  jour  du  mois  d'avril  de  Tannée  1306, 
les  consuls  de  Cahors,  assemblés  dans  la  maison  com- 
mune, résolurent  pour  le  bien  de  la  communauté  et 
l'utilité  générale  de  bâtir  un  pont  de  pierre  au  port  de 
Valentré.  Il  est  stipulé  dans  cet  acte,  que  les  consuls 
auront  la  garde  perpétuelle  de  ce  pont  qui  sera  construit 

mune  de  Cahors,  d'une  somme  de  deux  cents  marcs  d*argeat,  à 

prélever  sur  le  produit  des  restitutions  secrètes  en  fait  d'usure, 

vol  et  autres  biens  mal  acquis.  » 
(Raphai^  Férié,  Histoire  du  Çuercy,  tome  IL) 
(4)  La  valeur  de  ces  pièces  étaient  de  8  deniers.  On  lit  sur 

les  unes  KPISCOPVS  CADVRCENSIS.  Sur  les  autres  :  CIVITAS 

CADVUCIS. 

(t)  Histoire  politique,  ecclésiastique  et  littéraire  du 
Çuercy^  par  Cathala-Coture.  avocat  au  parlement,  tome  I^'. 

{:\)  Barthcleaiy  de  lliiffy  mourut  le  9  septembre  4  J73. 

(4)  Raymond  de  Corail  et  Sicard  de  Monlaigu. 

(o)  Évèque  de  Cahors  de  l.iOO  à  43IS.  «  Guillaume  delà 
Croix.  Séries  et  .-icta  Episcoporum  Cadurcensium,  ■ 

(6)  .M. -A.  Dominicy,  loco  cifUto. 


XLIY*  SESSION,   ▲  SENLIS.  559 

10  leur  nom  (1).  Les  deux  ann/^s  qui  s'écoulèrent  entre 
h  décision  des  consuls  et  le  commencement  des  travaux 
furent,  sans  doute,  consacrées  à  rechercher  d'habiles 
oavriers  et  à  rassembler  les  matériaux  nécessaires.  Ces  pré- 
puatib terminés,  «en  1308,  maître  G.  de  Sabanac(2),  doc- 
teur ès-lois,  et  le  lundi  avant  la  fête  de  saint  Jean-Baptiste 
(17  juin),  fut  commencé  le  pont  de  Vaientré  et  ledit 
ultre  G.  de  Sabanac  posa  la  première  pierre  dudit 
poot  (3).  B 

Les  revenus  de  la  commune,  si  considérables  qu'ils 
fusent,  devinrent  bientôt  insuffisants  pour  couvrir  les 
dépenses  que  nécessitait  cette  importante  construction  (4). 
Les  consuls  sollicitèrent  des  secours  des  rois  de  France 
qui  déjà  leur  avaient  accordé  certains  droits  lorsqu'ils 
Utissaient  le  Pont-Neuf.  Le  roi  intervint  pour  la  première 

(1)  Extrait  du  Livre  cousulaire  appelé  Te  Igitur,  folio  70. 
Bibliothèque  commuDale  de  Cahors.  Manuscrits.  Voyez  les 

pièces  justificatives,  n»  4 . 

(2)  Il  était  qualifié  de  premier  consul. 

(3)  Te  Igitur,  folio  5i.  Voyez  les  pièces  justificatives,  u^  IL 
(i)  Les  deux  cent  marcs  d'argont  accordés  par  le  pape,  en 

admettant  qu*ils  aient  été  prélevés,  ne  furent  pas  employés  à  la 
construction  du  monument  qui  fait  l'objet  de  cette  étude  :  «  On 
a  cru  que  ce  secours  prélevé  sur  l'usure  avait  puissamment 
eooiribué  i  la  construction  du  joli  pont  de  Vaientré,  d'où  naquit 
QD  jour  cette  croyance  ridicule  que  le  diable  l'avait  construit... 
«  ...  Cest  là  une  opinion  erronée  :  la  chose  est  évidente, 
attendu  que,  dansMa  bulle  en  question  accordée  en  1^61,  par 
Alexandre  IV,  il  est  formellement  dit  que  le  pont  à  la  construc- 
tion duquel  est  destinée  la  somme  précitée  pst  déjà  commencé 
(gui  construilur).  Or  les  premiers  fondements  du  pont  de 
Vaientré  ne  furent  jetés  par  les  consuls  que  plus  tard  en  1308.  » 
M.  Raphaël  Périé,  Histoire  du  Quercy^  vol.  II«. 


560      CONGRÈS  ARCnÉOLOOIOUS  DE  FRANGE. 

fois  en  1309.  Aucun  chemin  convenable  ne  reliait  la  vill 
au  pont  de  Yalentré,  l'ouverture  en  étant  devenue  indis-- 
pensable,  le  roi,  sur  la  prière  dès  consuls,  ordonna  à  son 
sénéchal  de  Périgord  et  de   Quercy   d'examiner   oett» 
affaire  et  d'accorder  aux  consuls  ce  qu'il  jugerait  oonve* 
nable(l). 

En  1313,  le  roi  Phihppe  IV  mande  àJehand'Arreblaje, 
son  sénéchal  de  Périgord  et  de  Quercy,  de  vjeiller  à  oeqoe 
les  droits  de  barres  (i)  qu'il  accorde  aux  consuls  Boieot 
intégralement  payés  par  tous  ceux  qui  y  sont  sujets  (3). 
En  transmettant  cette  ordonnance  à  Estienne  Lascou,  aoo 
lieutenant,  et  k  Pierre  Duval,  bailli  royal  de  la  séné* 
chaussée  de  Cahors,  Jehan  d'Arreblaye  leur  recommandf 

(\)  Archives  originales.  Bibl.  corani.  de  Cahors.  BiaouscriU. 
Voyez  pièces  justiticatives,  u»  3. 

(2)  Droit  de  barres.  C'était  le  droit  qu*avaient  les  consuls  de 
mettre  des  barrières  aux  portes  de  la  ville,  aGn  de  faire  payer 
UD6  re.levaDce  rôglôe  suivant  la  nature  où  la  quantité  des  deii- 
rées  où  des  marchandises  apportées. 

Vers  la  tin  du  xiv«  siècle  on  distinguait  à  Cahors  :  c  Le  portai 
des  Morouls,  lo  portai  Garrcl,  le  portai  Alban,  lo  portai  Ser- 
resta,  la  porte  Saint-Miohoi.  portos  du  Pont-Neuf,  barry  desSon- 
birous,  dovatit  la  porte  Saint-Michel,  barry  dél  Portal-Garrel, 
barry  de  Mal-Alias,  porte  Neuve  (Mal-Plays),  barry  de  Piolac, 
barry  de  Lafon,  barry  de  Labarre.  »  Emile  Oufour,  avocat.  Notes 
sur  Cahors. 

(3)  Archives  originales.  Voyez  piiVes  juslilicativcs,  n®  4. 

M.  Lafoste  ajoute  :  «  Le  roi  accorda  à  la  ville  de  Cahors  la 
permission  de  lever,  pour  la  construction  du  pont  de  Valentré 
un  droit  sur  le  bli^,  le  vin  et  autres  denrées,  appartenant  même 
au  clergé,  qui  entreront  en  ville.  • 

((lUillaume  I^acoste,  Histoire  du  Çuerctj,  tome  IV.  Bibliolh. 
comm.  de  (Jihors.  Manuscrits.) 


my    de   Roux 

e   de   Cahors 
50     à    1873 


Hugue    Geraldi 

Evêque  de  CaKors 
Je    1312    à    1317. 


Sioard    de    Monlaigu 

EvéquB   de    Cahors 
de    1293    à    1300, 


XUY'  SESSION,  A  SENUS.  5Ci 

de  veiller  avec  le  plus  grand  soin  à  ce  que  les  volontés  du 
roi  soient  exécutées  promptement.  Ce  droit  de  barres  Tut 
confirmé  à  différentes  époques  par  les  rois  de  France, 
notamment  en  idl4(i)  par  le  roi  Philippe  lY,  sur  la 
demande  du  malheureux  évéque  Hugues  Geraldi ,  et 
renouvelé  pour  trois  ans,  par  lettres  du  roi  Philippe  V, 
datées  du  il  juin  i3iO  (S).  Avant  l'expiration  de  ce  délai, 
les  consuls  s'adressèrent  encore  au  roi  de  France  qui,  le 
25  janvier  1323,  confirma  et  renouvela  pour  trois  ans,  à 
partir  de  la  fête  de  la  Purification  de  la  bienheureuse 
Marie  (S  février),  les  droits  accordés  par  les  rois  ses  prédé- 
cesseurs. Charles  lY  exige  que  les  personnes  préposées  à  la 
perception  de  cet  impôt,  dont  le  produit  sera  exclusive- 
ment affecté  ù  la  continuation  des  travaux  du  pont  de 
Valentré,  soient  d'une  probité  reconnue  et  qu'elles 
rendent  un  compte  exact  de  leur  gestion,  de  façon  à  ce  que 
les  consuls  ne  soient  pas  lésés  dans  leurs  droits  (3). 

Quoiqu'on  ne  sache  pas  exactement  ce  que  rapportaient 
CCS  droits  de  barres,  il  est  permis  de  croire  qu'ils  ne  suf- 
fisaient pas  à  couvrir  entièrement  les  frais  de  construc- 
tion, et,  sans  doute,  les  consuls  devaient  consacrer  à  ces 
grands  travaux  une  grande  partie  des  revenus  de  la  com- 
mune (4). 

(4)  Archives  originales.  Bibl.  comm.  de  Cahots.  Voyez  pièces 
justificatives,  d*  5. 

(2)  Archives  originales.  Voyez  pièces  justificatives,  d«*  6. 
Afin  d*éviter  la  fraude,  on  devra  confier  la  perception  de 

cette  taxe  à  deux  ou  trois  hommes  probes  qui  surveilleront 
remploi  de  l'argent. 

(3)  Archives  originales.  Bibl.  comm.  de  Cahors.  Manuscrits. 
Voyez  pièces  justificatives,  n*  7. 

(i)  La  commune  do  Cahors  était  prospère  à  cette  époque, 
puisqu'on  4367  les  revenus  de  la  ville  ^'élevaient  à  4,433  livres, 
xuv^  nsBioir.  36 


562  CONGRÈS  AUGHÉOLOGIOUB  PB  FR^CE. 

Les  droits  de  terres  accordés  par  le  roi  Charles  le  Bel 
en  4323  allaient  bientôt  expirer  ;  Pierre  Marin,  Guillaume 
d'Angolesme,  Donadieu  et  Lastier  qui  dirigeaient  alors 
les  affaires  de  la  commune,  préoccupés  d'assurer  la  conti- 
nuation des  travaux,  résolurent  d'envoyer  l'un  d'eux  à  la 
cour  solliciter  la  prorogation  de  cette  taxe,  et  le  dénier 
jour  du  mois  de  mai  1328,  Pierre  Marin,  consul  de 
Cahors  partit  pour  Taris,  a  Son  voyage  dura  quarante-âx 
jours,  il  dépensa,  pour  sa  nourriture  et  celle  de  son  valet 
et  de  son  cheval,  dix-sept  livres  cinq  sols  tournois.  Les 
lettres  de  barres  qu'il  obtint  pour  quatre  ans,  lui  coûtèrent 
douze  livres  onze  sous  pour  le  sceau  ;  le  louage  du  cheval 
pendant  les  quarante-six  jours  coûta  six  livres  dix-huit 
sous;  il  eut  sept  sous  six  deniers  pour  la  chaussure  de 
son  valet  (i).  »  La  mission  du  consul  de  Cahors  fut  cou- 
ronnée de  succès,  car  le  roi  Philippe  VI  de  Valois  renou- 
vela pour  quatre  ans  les  droits  de  barres.  Comme  tou- 

somme  considérable  pour  ce  temps,  où  la  quarte  de  blé  se  ven- 
dait de  0  à  7  sous  et  le  vin  de  H  à  1 6  sous  la  barrique  (220  litres 
environ).  Il  est  vrai  de  dire  que  dès  1370  la  t  disette  fut  telle, 
que  les  recettes  du  cliapilre,  qui  s'étaient  élevées,  en  4  345  et  les 
années  suivantes,  à  2,657  livres  d'argent,  4  267  setiers  de  blé  et 
6,530  setiers  de  vin,  ne  furent  plus  en  1370  et  1374  que  de 
407  livres,  150  setiers  de  hlê,  758  setiers  de  vin.  » 

Archives  originales,  n»  4  23.  Bibliothèque  communale  de 
Cahors.  Manuscrits. 

«  En  4  373  et  1387,  les  consuls  de  Cahors  ne  purent  payer  la 
rente  qu'ils  faisaient  à  Tévèque,  rente  qui  n'était  pourtant  que 
de  100  livres.  » 

(Emile  Dufour,  avocat.  La  covimune  de  Cahors  au  moyen 
âge,  page  459.) 

(4)  Chroniques  de  M.  l'abbé  de  Foulhac.  Bibl.  comm.  de 
Cahors.  Manuscrits: 


XLIY"  SESSION,   A  SENUS.  563 

jouis,  ce  péage  devra  être  perçu  par  des  hommes  honnêtes 
qai  rendront  tous  les  ans  un  compte  sévère  de  leur  ges- 
tion (1).  Dès  son  retour,  les  Cadurciens,  reconnaissant  le 
grand  service  que  venait  de  leur  rendre  le  consul,  lui 
donnèrent  de  très-brillantes  fêtes  et  lui  offrirent  une  robe 
d'honneur  valant  10  livres  (2). 

La  guerre  de  Cent  Ans,  qui  venait  d'éclater,  laissa  peu 
de  repos  aux  habitants  du  Quercy,  et  malgré  les  trêves, 
les  consuls  de  Cahors  se  trouvant  aii  milieu  d'un  pays 
envahi,  à  la  tête  d'une  ville  pouvant  être  assiégée  d'un 
moment  à  l'autre,  se  virent  dans  la  nécessité  de  réparer 
les  anciennes  fortifications,  d'en  construire  de  nouvelles, 
de  rassembler  et  armer  la  milice  et  de  confectionner  des 
machines  de  guerre  de  toute  espèce.  C'est  sans  doute  à 
l'état  de  construction  déjà  avancé  du  pont  de  Yalentré, 
qui  en  faisait  un  poste  militaire  important,  que  Ton  doit 
attribuer  le  soin  que  prirent  les  consuls  d'en  bâter  l'achè- 
vement; car  il  est  certain  qu'à  cette  époque  troublée,  oh 
la  misère  était  générale  en  Quercy,  tous  lesefforts  des  habi- 
tantsdeCahorsdurent  se  concentrer  sur  les  ouvrages  intéres- 
sant directement  la  défense  de  la  cité.  Malgré  la  gravité  des 
événements,  la  modicité  des  revenus  communaux  ne  per- 
mettait pas  d'employer  à  ces  travaux  im  grand  nombre 
d'ouvriers;  aussi  doit-on  penser  que  le  pont  de  Yalentré 
ne  put  être  terminé  que  dans  la  seconde  moitié  du 
.xiY^  siècle,  quoique  les  écrivains  anciens  qui  ont  laissé 
des  mémoires  sur  le  Quercy  diffèrent  d'opinions  sur  cette 
date.  Ainsi  on  lit  dans  les  chroniques  manuscrites  de 

(4)  Archives  originales.  Bibl.  comm.  de  Cahors.  Manuscrits. 
Voyez  pièces  justiûcatives,  u»  8. 

(2)  Les  dépenses  de  ces  fêtes  sont  évaluées  à  cinquante-six 
livres. 


564  CONGRÈS  ARGHÉ0L06IQl]£  DE  FRANGE. 

M.  l'abbé  de  Foulhac ,  qu*il  n'était  pas  encore  terminé 
en  1378,  tandis  que  Guy  de  Malleville  (i)  rapporte  que  la 
«  construction  du  pont  de  Yalentré  ne  dura  que  quarante- 
sept  ans,  D  ce  qui  ne  nous  amènerait  qu'en  4355.  Toute- 
fois il  est  permis  de  croire  que  les  ouvriers  ne  tardèrent 
pas  à  y  mettre  la  dernière  main,  car  selon  M.  l'abbé  de 
Foulhac,  en  4385,  la  cloche  du  monastère  de  Saint- 
Etienne  de  Gramat ,  qui  était  au  faubourg  Saint-Georges, 
fut  transportée  dans  l'une  des  tours  du  pont  de  Yalentré 
pour  servir  à  appeler  les  soldats. 

On  ne  sait  si  les  consuls  percevaient  un  droit  de  péage 
au  pont  de  Yalentré.  Lorsqu'il  n'y  avait  en  cet  endroit, 
pour  franchir  la  rivière  du  Lot,  que  le  bac  de  Sainte- 
Croix  [Sancta  Croz]^  il  était  perçu  un  denier  pour  la 
charge  de  vendange  (2),  ainsi  que  pour  la  charge  de  vin, 
un  denier  pour  chaque  tète  de  gros  bétail,  etc.  Cette  taxe 
dut  cesser,  sans  doute,  avec  la  disparition  du  bac,  du 
moins  rien  ne  prouve  qu'elle  ait  été  perçue  (3)  depuis. 

(1)  Guy  de  Maleville,  sieur  de  Gazais.  Esbats  sur  le  Païs 
de  Quercy.  Bibl.  comm.  de  Cahors.  Manuscrits. 

(2)  Voyez  pièces  justificatives,  n*»  9. 

(3)  «  Pour  chaque  pipe  de  vin  qui  entrera  en  la  dite  ville  de 
Caors  sera  payé  outre  l'ancien  droit  de  souchet  (Voyez  pièces 
jusliticatives,  n^  iO),  dix  sols,  cy.    X  s. 

u  Sans  préjudice  toutefois  de  l'ancien  privilège  des  habitants 
dudit  Caors,  soit  pour  le  vin  nécessaire  pour  la  provision  desdits 
habitants  ou  autre  vin  provenant  de  leur  crû,  en  la  juridic- 
tion et  taillable  de  ladite  ville,  dont  ils  jouiront  sans  rien  payer 
pour  le  présent  émolument. 

u  Pour  chaque  charge  d'huile  d'olive,  sept  sols,  six  de- 
niers, cy.    VII  s.  VI  d. 

u  Pour  chaque  charge  d'huile  de  noix,  deux  sols  et  six  de- 
niers, cy.    II  s.  VI  d. 


XLÎV»  SESSION,  A  SENLIS.  565 

Lepontde  Valentré,  d^une  longueur  totale  de  170  mètres, 
franchit  la  rivière  du  Lot,  à  l'ouest  de  la  ville  de  Cahors, 
sur  une  largeur  de  127  mètres  environ.  11  se  compose 
de  huit  arches  en  tiers-point,  dont  six  principales,  qui  ont 
chacune  16°>50  de  largeur  à  la  naissance  de  la  voûte  ogi- 
vale. Les  deux  arches  plus  petites,  situées  auxdeux  extré- 
mités du  tahlier,  ont  :  a  la  première,  en  entrant  dans  la 
ville,  »  6  mètres,  et  la  dernière  12  mètres  de  largeur.  Dans 
la  description  de  ce  pont,  nous  irons  toujours  de  Touest  à 
Test,  c'est-à-dire  que  nous  prendrons  la  route  suivie  par 
un  étranger  cherchant  à  entrer  dans  la  ville  de  Cahors  par 
le  pont  de  Valentré. 

Les  huit  arches  de  ce  pont  construit  en  dos  d'âne 
sont  nécessairement  d'inégale  élévation.  La  première 
mesure  10°*4^  de  hauteur  totale,  dont  6"23  du  sol  à  la 
naissance  de  la  voûte  et  S'^OS  de  la  naissance  de  la  voûte 
à  la  clef.  Elle  supporte  le  tablier  du  pont  qui,  en  cet 
endroit  acquiert  1°*15  d'épaisseur;  ce  qui  le  porte  à  H"33 
au-dessus  du  sol  (i).  Le  parapet* du  pont  mesure  en  outre 
0*95  de  hauteur.  Postérieurement,  cet  arc  en  tiers-point 
a  été  renforcé  par  un  autre  en  plein  cintre,  comme  on  le 
voit  dans  la  planche  ci-jointe. 

La  deuxième  arche  a  13™85,  de  hauteur  totale,  5'»15 
du   niveau    ordinaire    des    eaux  à  la  naissance  de   la 

€  Pour  chaque  bœuf  ou  vache,  deux  sols,  cy.  TI  s. 

<*  Pour  chacun  pourceau  ou  pied  fourchu  que  les  forains 
entreront  dans  la  ville  ou  faux  bourg,  un  sol,  cy.    I  s.  » 

Droits  dus  à  la  ville  sur  les  entrées  des  denrées  et  marchan- 
dises par  eau  et  par  terre.  Affiche  imprimée  à  Caors,  chez 
François  Richard,  imprimeur,  1742.  — Extrait  des  Archives  do 
l'hAlel  de  ville  de  Cahors. 

(1)  Je  donne  le  nom  de  tablier  à  la  partie  de  maçonnerie 
comprise  entre  l'extrémité  de  fogive  et  la  naissance  du  parapet. 


566  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

voûte,  et  8'°70  de  cette  naissance  à  la  clef;  au-dessus 
de  cette  voûte  le  tablier  mesure  2"05.  La  troisième  a 
également  S'^IO  de  la  naissance  de  la  voûte  à  la  clef, 
et  id'^QO  de  hauteur  totale  au-dessus  du  niveau  ordi- 
naire des  eaux,  épaisseur  du  tablier  i™90.  La  qua- 
trième a  9  mètres  de  la  naissance  de  la  voûte  à  la  clef  et 
ii^'OS  de  hauteur  totale;  épaisseur  du  tablier  ^'"dS.  La 
cinquième  mesure  S^IO  de  la  naissance  de  la  voûte  à  la 
clef  et  li'^lS  de  hauteur  totale  au-dessus  de  l'eau;  le 
tablier  a  ^"'SO  d'épaisseur.  La  sixième  mesure  également 
S^TO  de  la  naissance  de  la  voûte  à  la  clef  et  1 3™70  de 
hauteur  totale  au-dessus  de  Teau  ;  le  tablier  n'a  plus  que 
l°*d3  d'épaisseur.  La  septième,  comme  la  quatrième,  a 
9  mètres  de  la  naissance  de  la  voûte  à  la  clef,  mais  elle  ne 
mesure  que  11^90  de  hauteur  totale;  épaisseur  du  tablier 
1™75.  La  hauteur  totale  de  la  huitième  n'est  que  de  6"70, 
le  sol  affleurant  la  naissance  de  la  voûte. 

Les  deux  piles  extrêmes  et  la  pile  centrale  portent  cha- 
cune une  tour  bâtie  sur  un  plan  différent. 

La  première  et  la  dernière  sont  presque  carrées,  tandis 
que  la  médiane  est  léjçèreraent  barlongue.  La  première  de 
ces  tours  mesure  ^O^Go  de  hauteur,  du  niveau  de  l'eau  à 
la  base  de  la  flèche,  sur  7™40  de  profondeur  et  7"'48  Je 
largeur  (1). 

La  deuxième  mesure  ^0  mètres  de  hauteur  sur  G"!? 
de  largeur,  ot  7'"86  de  profondeur.  Outre  la  différence 
que  l'on  remarque  entre  cette  tour  et  les  deux  autres, 
il  faut  observer  que  la  saillie  qu'elle  forme  en  aval  est 
de  0"90  à  l'ouest  et  de  1  mètre  à  l'est. 

La  troisième  tour  mesure  39™o0  de  hauteur,  depuis  le 
sol  jusqu'au  faite  du  toit,  sur  7"75  de  largeur  et  7"'80  de 

(I)  La  largeur  csl  le  côté  qui  fait  face  au  tablier  du  pont. 


XLiy"  SESSION,   A  SENLI8.  567 

profondeur.  EnfiD,  le  petit  corps  de  garde  qui  termine  le 
pont  de  Valentré  du  côté  de  la  ville,  mesure  i8"*55  de 
hauteur,  sur  S^SO  de   largeur  et  6"i6  de  profondeur. 

Le  pont  est  d'inégale  largeur.  Ainsi,  à  l'entrée  de  la 
première  tour,  le  tablier  mesure  5™80  et  3™85  dans 
l'intérieur  de  la  tour;  plus  loin,  au-dessus  de  la  troisième 
ogive,  il  a  5™30.  De  là,  jusqu'à  l'entrée  de  la  tour  centrale, 
le  pont  va  en  s'élargissent  jusqu'à  5°38;  sous  la  tour 
il  ne  mesure  que  3"58.  A  partir  de  cet  endroit, 
il  conserve  toujours  5"20  de  largeur.  Sous  la  dernière 
tour  il  se  rétrécit  et  n'a  plus  que  3™92,  il  s'élargit  de 
nouveau  et  atteint  sa  plus  grande  dimension,  6^26,  dans 
l'espace  compris  entre  cette  dernière  tour  et  le  corps  de 
garde,  dans  l'intérieur  duquel  il  mesure  encore  4°*20; 
à  la  sortie  du  corps-de-garde  la  voie  carrossable  reprend 
la  largeur  de  S'^âO.  Le  parapet  du  pont  subit  également 
quelques  modifications  dans  son  épaisseur;  à  l'entrée  de 
la  première  tour  il  a  O'^AO  d'épaisseur  et  ne  mesure  plus 
que  0'"32  à  la  troisième  ;  mais  partout  il  a  une  hauteur 
égale,  0-^95. 

Quand  on  voulait  entrer  dans  la  ville  de  Cahors  par  le 
pont  de  Valentré,  on  se  heurtait  d'abord  contre  un  châ- 
telet  (voir  la  planche  ci-contre)  qui  donnait  accès  à 
angle  droit  sur  le  pont;  cet  obstacle  franchi,  on  arri- 
vait à  la  première  tour  fermée  à  l'ouest  par  une  porte 
ogivale  de  3"8i  de  largeur,  et  à  l'est  par  une  herse  se 
levant  du  premier  étage.  En  outre,  cette  tour  était  défen- 
due par  quatre  mâchicoulis  et  quatre  créneaux  répandus 
sur  toutes  ses  faces.  Les  quatre  mâchicoulis  sont  formés  par 
de  petits  arcs  plein-cintre  ;  chacun  de  ces  arcs  est  supporté 
par  une  console  composée  de  quatre  assises  de  pierre 
posées  eu  encorbellement,  le  tout  surmonté  d'un  coffre 
de  maçonnerie  de  2  mètres  de  hauteur  sur  6  mètres  de 


568  CONGRES  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

largeur  et  terminé  en  glacis,  de  façon  à  permettre  le  tir 
plongeant  des  créûeaux.  Ces  mâchicoulis  s'ouvrant  dans 
Tétage  supérieur  de  la  tour  sont  séparés  dans  leur  hauteur 
pur  des  languettes  de  maçonnerie,  qui  les  rendent  ainsi 
indépendants  les  uns  des  autres.  Cette  tour,  où  l'on  compte 
trois  étages,  porte  sur  ses  faces  nord,  ouest  et  sud,  des  trous 
d'arbaiétières  percées  dans  sa  hauteur  et  partant  des  pre- 
mier et  deuxième  étages.  A  l'est,   l'intérieur  est  éclairé 
par  des    ouvertures    géminées,    surmontées    d'arcs  de 
décharge.  Du  côté  de  la  ville,  un  escalier  de  9"! 8  de  base 
sur  7°03  de  hauteur  et  i  mètre  de  largeur  partant  du 
tablier  du  pont,  donne  accès  dans  le  premier  étage.  Uoe 
ouverture  carrée,  de  0™80  environ  de  côté,  pouvant  servir 
d'assommoir,  s'ouvrait  à  l'intérieur  de  la  tour,  dans  l'es- 
pace compris  entre  les  deux  portes.   La  tour  centrale, 
fermée  à  l'ouest  par  une  porte  ogivale  de  3°*50  environ 
de  largeur,  et  à  l'est,  par  une  herse,  était  munie  dans  sa 
partie  supérieure  de  quatre  créneaux  ouverts  sur  ses  diffé- 
rentes faces;  le  premier  et  le  second  étages  sont  éclairés 
par  quatre  fenêtres  chacun.  Un  escalier  de  7"33  de  hau- 
teur, construit  sur  l'un  des  avant-becs  et  s'ouvrant  sur  la 
partie  du  tablier  comprise  entre  deux  portes  de  cette  tour, 
dessert  le  premier  étage.  Il  est  inutile  de  décrire  le  système 
de  défense  de  la  troisième  tour,  qui  est  absolument  sem- 
blable à  celui  de  la  première.  L'accès  de  cette  troisième  tour 
était  diftici le  et  compliqué,  puisqu'on  ne  pouvait  y  pénétrer 
sans  passer  par  le  corps-de-garde,  dernière  défense  de  ce 
pont    fortifié   si   habilement.    Ce  corps  de  garde,    dont 
les   inurs  ont  sans  doute  été  abaissés,  était  également 
fermé    par    deux    portes    moins    larges    que    les    pré- 
cédentes; en  outre,  il  possédait  une  herse  intérieure,  se 
hissant  dans  le  premier  étage,  où,  comme  dans  les  deux 
(ours    précédentes  s'ouvrait   aussi  un  assommoir.    On 


XUV   SESSION,   A  SBNLIS.  569 

pénètre  dans  le  premier  étage  au  moyen  d'un  escalier  de 
4*80  de  hauteur,  qui  prend  naissance  sur  le  tablier  du 
pont  et  dont  la  partie  supérieure  est  supportée  par  un  arc 
ogival  de  i'^ÂO  de  hauteur,  sur  ^"'SO  à  sa  base.  Du  corps-de- 
garde,  on  monte  dans  la  troisième  tour  au  moyen  d'un  esca- 
lier de  7"^80  de  hauteur,  supporté  par  un  arc-boutant  ogi- 
val de  A'^W  de  hauteur,  sur  G^'dO  d'ouverture.  Le  corp«-de- 
garde  franchi,  on  pénétrait  sans  obstacles  jusqu'à  la  grande 
enceinte  fortifiée  qui  entourait  complètement  Cahors. 

Les  cinq  piles  du  pont  de  Yaleutré  reposant  dans  l'eau 
sont  flanquées,  en  amont,  d'avant-becs  aigus  formant  un 
triangle  de  6  mètres  de  base  environ  sur  7  mètres  de  côté; 
ils  correspondent  à  des  gares  d'évitement  de  6  mètres  de 
largeur  sur  1  mètre  de  profondeur  situées  en  aval. 
A  5  mètres  environ  au-dessus  du  niveau  ordinaire  de  la 
rivière  du  Lot,  quatre  de  ses  avant-becs  sont  percés  de 
larges  baies  destinées,  sans  doute,  ainsi  que  les  trous  de 
boulins  que  l'ou  voit  au-dessouîi  et  à  la  naissapce  de 
l'ogive  des  arches,  à  supporter  des  échafaudages  lors  de 
sa  construction.  Le  motif  de  leur  conservation  doit  sans 
doute  être  attribuée  aux  réparations  incessantes  que  néc^ 
sitent  les  nombreuses  crues  du  Lot. 

Comme  beaucoup  de  monuments  de  cette  époque,  le 
pont  de  Yalentré  a  subi  malheureusement  de  nombreuses 
dégradations.  Le  châtelet  a  été  détruit  (i),  les  crêtes  créne- 
lles des  parapets  ont  disparu  depuis  longtemps;  au 
nord,  les  mâchicoulis  et  le  coffre  de  maçonnerie  qu'ils 
supportaient  ont  été  détruits  ;  mais  tel  qu'il  est,  ce  pont 
reste  encore  pour  les  archéologues  un  intéressant  sujet 
d'étude  (2).  Il  est  construit  en  pierre  calcaire  du  pays  de  très- 

(1)  Sur  son  emplacement  on  a  construit  un  burean  d'octroi. 

(2)  En  4867,  M.  Pavars,  agent-voyer  en  chef  du  département 


570  G05GftiS  ABCHÉOUO&IOUS  I>B  WKÀXCE. 

bonne  qualité;  l'appareil  de  belle  dimension  est  posé  avec 
le  plus  grand  soin  sur  un  épais  lit  de  bon  mortier;  enfin, 
les  claveaux  des  arches  sont  extradossés,  ce  qui  est  certai- 
nement une  condition  d'élasticité  et  de  solidité.  Tel  qu'il 
était  à  la  fin  du  xtv*  siècle,  il  devait  présenter  au  point 
de  vue  militaire  un  système  de  défense  assez  complet;  car, 
malgré  le  petit  nombre  de  soldats  qui  le  gardaient  (1),  aa 
milieu  de  guerres  si  nombreuses  à  cette  époque,  l'histoire 
ne  mentionne  aucune  attaque  dirigée  de  ce  côté  de  la 
ville  de  Cahors,  que  protégeait  si  bien  le  beau  pont 
de  Valentré. 

Dans  le  remarquable  article  que  lui  a  consacré  M.  Viol- 
let-le-Duc  '2;,  il  s'est  glissé  quelques  erreurs  qu'il  importe 
de  ne  pas  laisser  subsister.  Quoi  qu^l  en  dise,  le  pont  de 
Valentré  ne  possède  pas  et  n'a  jamais  possédé  d'avant- 
becs  en  aval,  mais  bien  en  amont  seulement,  comme  on 
l'a  vu  plus  haut.  Le  savant  architecte  semble  encore  opérer 
une  copfusion  avec  le  Pont-Neuf,  a  qui  a  des  avant-becs  en 
amont  et  en  aval  »,  quand  il  affirme  qu'il  a  été  construit 

du  Lot,  fit  réparer  ce  p:nt  avec  uo  soin  et  un  talent  qu'on  ne 
saurait  trop  louer. 

(1)  «  Guillaume  de  la  Fou,  capitaine  d'une  compagnie  bour- 
geoise..., avait  sous  son  conimandeuieut  la  compagnie  d'Arnaud 
Delpecli,  à  l'exception  de  vingt  hommes  d'armes,  que  ce  der- 
nier tenait  au  pont  de  Valentré,  dont  on  lui  avait  confié  la 
garde.  »  Disposition  des  différents  postes  de  Caliors  établie  depuis 
n70. 

Lacoste,  Histoire  du  Quercij.  Manuscrit. 

L'an  H 10,  on  fit  réparer  le  dehors  du  Pont-Neuf  et  du  pont 
de  Valentré,  pour  le  mettre  en  état  de  défense,  les  gardes 
furent  doublées. 

[1t)  Viollet-le-Duc,  Dictionnaire  raisonné  iCArchitecturc 
française  du  xi®  au  wi*'  siècle,  tome  VU. 


XLIY*  SESSION,   A  SENLIS.  571 

en  1^1  (1).  Enfin,  il  ne  s'est  jamais  appelé  le  pont 
de  la  Galendre. 

Tel  est  le  remarquable  monument  que  la  Société  fran^ 
çaise  d'Archéologie  a  visité  plusieurs  fois.  D'abord 
eu  1865,  à  l'occasion  du  Congrès  de  Cahors,  sous  la  pré- 
sidence de  M.  de  Caumont;  ensuite,  en  1877,  sous  la 
direction  de  M.  Léon  Palustre,  lors  de  notre  excursion 
archéologique  dans  le  département  du  Lot. 

Après  avoir  fait  l'histoire  du  pont  de  Valentré,  j'avais 
le  devoir  de  rechercher  le  nom  de  l'architecte  qui  l'avait 
conçu  et  édifié.  J'avoue  avec  tristesse  l'insuccès  de  mes 
recherches,  si  longues  et  si  consciencieuses  qu'elles  aient 
été.  Certains  annalistes  du  Quercy  Je  considèrent  comme 
a  un  bourgeois  de  Caors  ;  »  j'ignore  la  source  de  ce  ren- 
seignement, mais,  s'il  est  exact,  combien  devons-nous 
regretter  de  ne  pouvoir  tirer  de  l'oubli  où  il  est  si  injuste- 
ment tombé,  le  nom  d'un  concitoyen  d'un  si  grand  mérite! 

G.  de  Maleville,  steur  de  Cazals,  dans  ses  Esbats  sur  le 
Pais  de  Quercy j  rapporte  que  ce  a  maistre  maçon  »  s'ap- 
pelait Yalandré;  c'est  malheureusement  une  erreur,  car 
tout  le  moude  sait  que  ce  nom  servait  autrefois  à  désigner 
cette  partie  de  la  rive  gauche  du  Lot,  qui  s'étend  depuis 
la  fontaine  des  Chartreux  jusqu'au  lac  de  Cabazac.  [1  est 
difficile,  du  reste,  de  trouver  l'étymologie  du  mot  Yalentré; 
dans  le  patois  du  pays  on  appelle  ce  pont  :  lou  pount  dé 
Volondré  ou  Bolondré  (2). 

(1)M.  Didron  range  aussi  le  pont  de  Yalentré  parmi  les  monu- 
ments du  XIII*  siècle. 

(t)  «  Si  on  demande  rétimologie  du  vocable  (Yalentré),  bien 
loin  de  Temprumpler  comme  quelques  uns  de  nos  jaseurs 
d'un  cardinal  de  ce  nom,  qui  n'a  jamais  existé,  nous  Tattribu- 
rious  bien  pluslôt  à  la  situation  qui  met  son  entrée  au  bout  du 


575K  O09G1ÊS  ABGHÉOLOCIOUE  ^  FRASCK. 

Le  nom  de  cet  habile  architecte  sera  peot-éCie  toojoiin 
inconnu,  cà  moins  qu'on  heureux  hasard  ne  £t^se  déooo- 
▼rir  cette  première  pierre  'du  pont)  où  son  nom  est  gravé 
arec  celui  du  roi,  de  Véwéque  et  des  consuls  fl;.  • 

Après  sa  mort,  les  Cadurdens  lui  âerèreat  on  magni- 
fique mausolée  dans  l'église  !2 1  des  Cordriiers.  L'inscrip- 
tion gravée  rappelait  les  éminents  services  qu'il  aTÛt 
rendus  à  ses  compatriotes.  Malheureusement  ce  mausolée 
périt,  incendié  par  les  huguenots  de  Henri  de  Navarre, 
lorsqu'en  15^  ils  s'emparèrent  de  Cahors.  La  perte  de 
ce  monastère  (3)  fut  cause  que  le  nom  de  cet  habile  et 
savant  0  Cadurcien  »  ne  nous  est  point  parvenu,  aucun 
écrivain  de  notre  pays  n'ayant  eu  le  soin  de  recueillir 
rinscription  gravée  sur  le  tombeau.  Et  cependant,  c  pen- 
dant plusieurs  siècles,  dit  M.  Lacoste  (Au  ce  pont  passa 
pour  un  des  plus  beaux  de  ce  genre  qu'il  y  ait  en 
France;  de  nos  jours  même  et  quoique  l'architecture  soit 
portée  à  sa  perfection,  on  ne  peut  s'empêcher  d'en  admi- 

vallon  occidental  (0(1  il  y  avait  un  port)  qui  conduit  à  la  ville. 
Intra  f^aiium.  »  M.  l'abbé  Salvat.  Loc.  cit. 

(4)  M.  Kaphaël-Périé,  Histoire  de  Quercy. 

[î)  «  L'épitapbe  de  l'architecte  qui  construisit  le  pont  de 
Valentré  se  voyait  jadis  au  cioistre  des  Cordeliers  avant 
qu'il  ne  feut  ruisné  par  les  Huguenots.  »  M.  A.  Dominicy. 
Loc.  cit. 

(3)  L'église  du  couvent  des  Cordeliers  qui  occupait  remplace- 
ment actuel  du  réfectoire  du  Ivcée  de  Cahors  renfermait  deux 
sarcophages  (disparus  aujourd'hui)  ;  celui  du  bienheureuxChris- 
tophore  ou  Chiislophe,  compagnon  de  saint  François,  qui  avait 
fondé  le  couvent  de  Cahors,  on  4216,  et  celui  de  l'architecte  du 
pont  de  Valentré. 

(4)  M.  G.  Lacoste.  Histoire  du  Querctj,  Bibl.  comm.  de 
Cahors.  Manuscrit  du  commencement  du  xix*  siècle. 


XLIY*  SESSION,   A  SENLIS.  573 

rer  la  hauteur,  la  grandeur  de  ses  arches,  rélévation  et 
l'aplomb  de  ses  trois  tours.  » 

Je  ne  saurais  terminer  cette  étude  sans  rapporter  la 
légende,  qui  est  inséparable  du  pont  de  Valentré,  où 
comme  dans  beaucoup  de  récits  de  cette  époque,  qui  sont 
parvenus  jusqu'à  nous,  le  diable  joue  un  grand  rôle. 
Quoiqu'on  me  l'ait  racontée  bien  des  fois,  je  préfère  la 
transcrire  ici  telle  que  la  donne  M.  Gluck,  dans  son 
Album  historique  du  Lot. 

a  Suivant  la  légende  populaire,  l'architecte  du  pont  de 
Valentréy  désespéré  de  la  lenteur  des  travaux,  engagea 
son  âme  au  diable  par  un  contrat,  dans  lequel  il  fut  sti- 
pulé que  le  prince  des  ténèbres  l'aiderait  de  tous  ses 
moyens  et  le  servirait  fidèlement  sans  jamais  se  lasser, 
quelques  ordres  qu'on  pût  lui  donner.  L'âme  de  l'archi- 
tecte devait  échapjper  adx  griffes  de  Satan  si  ce  dernier, 
rebuté  par  une  cause  quelconque,  refusait  de  prêter  son 
concours  à  l'œuvre  projetée.  Le  démon  accepta  et  dans  les 
premiers  jours  qui  suivirent  la  ratification  du  traité^  les 
constructions  avancèrent  avec  une  rapidité  effrayante 
pour  l'ordonnateur  des  travaux.  Le  roi  des  enfers  avait  été 
chargé  d'apporter  de  bien  loin  aux  maçons  les  pierres  et 
le  mortier,  mais  il  était  ailé  et  les  matériaux  provenant 
d'un  premier  voyage  n'étaient  pas  encore  épuisés,  qu'une 
nouvelle  fournée  venait  en  augmenter  le  nombre.  L'ar- 
chitecte ne  pouvant  utiliser  tous  ces  matériaux  eut  recours 
à  l'expédient  suivant  : 

«  Prends  ce  crible,  dit-il,  à  Satan,  laisse-le  tel  qu'il  est 
0  sans  y  faire  les  moindres  changements  et  emploie-le 
tt  pour  puiser  dans  la  rivière  l'eau  que  tu  porteras  aux 
a  maçons  chargés  de  faire  le  mortier,  d 

a  Le  diable  se  mordit  les  lèvres  de  dépit  et  plongea  le 
crihle  dans  la  rivière,  mais  les  fissures  étaient  si  larges, 


574r'  G0NGRÈ6  AEGHéOLOOIOUB  DB  FRANGE. 

que  malgré  la  vitesse  de  son  vol,  il  ne  restait  plus  une 
goutte  d'eau  lorsqu'il  arrivait  auprès  des  ouvriers.  Aprèi 
quelques  essais  plus  infructueux  les  uns  que  les  autres, 
il  jeta,  comme  dit  le  proverbe,  le  manche  après  la  cognée 
et  s'en  alla  tout  penaud  trouver  Tarchitecte. 

«  Tu  as  vaincu,  lui  dit-il,  mais  je  te  jouerai  un  tour 
«  de  ma  façon  pour  que  tu  ne  te  vantes  pas  d'avoir  eu 
a  ma  collaboration  gratuite.  » 

«  En  effet,  quand  on  fut  sur  le  point  d'achever  la  tour 
centrale,  l'angle  nord-ouest,  dans  le  voisinage  du  toit, 
s'écorna  au  grand  ébahissement  des  maçons.  On  le  répara; 
le  lendemain  cette  même  pierre  manqua  ;  cette  fois,  ce  fut 
Satan  qui  lassa  les  ouvriers,  et  il  les  lassa  si  bien,  que 
cette  pierre  manque  encore.  » 


PIÈCES  JUSTIFICATIVES 

PONT  DR   BALLANDRES. 

N"    I. 

Notum  sit  cunclis  bas  présentes  lilteras  visiiris  et  audiUiris 
quod  nos  consules  civitatis  ('.;ilurci  pro  nobis  et  successoribus 
noslris  et  pro  tota  coin  m  uni  la  te  seu  univcrsitale  noslra  Calur- 
censi  et  habita  plena  delibcratione  et  ilillgonti  oonsilio  ac 
traclatu  cum  probis  viris  ronsiliariis  nostris  et  de  noslro  con- 
siiio  generali  et  etiam  cum  pluribiis  aliis  bonis  viris  sapienlibu^ 
etdiscrelis  proptcr  communem  et  evidentem  nostram  ac  lolius 
universitalis  Caturci  utiliiatcm  volumus  et  eoncedimus  et  sia- 
tuimus  et  ordinamus  quod  pons  lapideus  liât  noniine  noslro  cl 
universitalis  noslra?  Caturci  in  porta  nostro  de  l'atlantre 
super  tlumen  Olli  et  meliori  ioco  quo  fieri  potcrit  et  aniificari 
propre  diclum  portum  salvo  tamen  super  dicte  ponte  in  omoi- 


XLIY'  SESSION,  A  SENLIS.  575 

bus  jore  nostro  et  etiam  relento  nobis  et  consulatni  Dostro  et 
oniversitati  Catarci  domino  et  custodia  perpetuo  dicti  pootis.  Id 
cojus  rei  fidem  et  tèstimonium  oos  Consules  clvitalis  Catnrci 
sigillain  oostrum  litteris  presentibus  curavimus  apponendum. 
Actum  et  datum  Caturci  in  domo  nostra  communi  consulatus 
die  ultima  mensis  aprilis  annodominicae  incarnationis  miliesimo 
triceDlessimo  sexto.  Transcriptum  est. 

(Extrait  du  livre  consulaire  appelé  Te  Igitur,  manuscrit  sur 
parchemin,  conservé  à  la  bibliothèque  communale  de  Cahors.  — 
Telgitur,  folio  70.) 

L'an  M  CGC  viii  mestre  G.  de  Sabannac  senhor  en  legs  e  lo 
dilus  davan  san  Johan  Bapiista  foret  comensat  lo  pont  de  Valan- 
tre  e  lo  dig  mestre  G.  Sabanac  pauset  la  preumiera  peyra  del 
dig  pont. 

(Extrait  du  Te  Igitur,  folio  54.) 

.    N»  3. 

Philippus  dei  gracia  Francorum  rex  senescallo  Petragoriscensi 
H  Caturcensi,  vel  ejus  locum  tenenti  salutem.  Ex  parte  consul 
!iTitatis  Caturci  nobis  extitit  supplicationem  quod  cumad  utilita- 
;ein  rei  publics  qnemdam  pontem  indicta  civitas  supra  flumen 
3lti  in  portu  de  yalentre  construerat  de  novo  juxta  quœ  non 
nnt  itinera  quaB  de  dicto  ponte  ad  dictam  civitatem  accomodus 
liaberi  possitaccessus,  eisdem  consulibus  supplicantibus  deoppor- 
toDO  remedio  providere  vellenius,  quare  mandamus  vobis  qua- 
teoos  supra  praemissis  dictes  consules  audiatis  et  eisdem  vocatis 
(pii  fuerint  evocandi  quod  fuerit  rationabile  concedatis.  Actum 
Parisis  die  décima  sexta  octobris  anno  Domini  miliesimo  treren- 
tenmo  nono. 

(Extrait de  livres  appelés  Archives  oHffinales; copies  manu- 
acrites sur  parchemin,  conservées  à  la  Bibliothèque  communale 
de  Cahors.  -    Arch.  orig.,  folio  S99.) 


5*  l. 


CMmtti  qsod  c&a  BM  pn  «poe  ptsôs  qû  et  mo%o 
îMea  lasiagiBA  Mifse  ad  catmm  tempos  per  alâs  Msins 
cnnf  r  ri— i  maasIIî  Bocatares  de  nû  et  bbëis  ^ne  ad  die- 
taai  dviiatca  (arioat  adpoctah  pra  eo  qa*d  Tîaa  d  Uada 
bojos  Modi  a  pentML^  ecdesiasticis  et  clehds  asscnmt  se 
ittàmàme  passagiuA  hvjcs  modi  sol^ere  recssani  iajosle,  qaare 
maniaAos  toUs  qQi>>i  s  ^ocatis,  ei  Torandis  Tobîs  constiteht  ita 
es&e  dietos  iiiefcau>rtts  «ie  ^iots  bladis  quat  ad  dicUm  driuiem 
secundaa  o;<aginia  taduot  dicio  tempore  duraDt«  adportah  a 
qoiiMtsc&mqoe  ruia  ei  biada  ip6a  emenct  passagium  pnedicuim 
jnxla  cooce&sèoois  bosux  teacrem  perâolvant  compeilaUs  prinu 
raUooe.  Apad  MoateiDargi  d.e  trifesinu  jaBoahi  anao  domini 
mijlftaoïo  trecestesiiDo  uodediDO.  (^rum  auctohute  Litieianim 
regianim  predicurum  vûbts  et  vestrum  caiiibei  et  insolidum 
coaunittimus  et  des4ricte  perdpieodo  maDdamus  quateotis  cou- 
teoU  indiclis  litteris  regiis  ïoco  Dostro  faciatis  complere  exequa- 
mus  diiigeater  juita  formam  dictarum  litterarum  regiarum 
ioveoent  esse  facta  ea  zû  statum  piistioom  reducatis  seu  redaci 
faciatis  t'orma  dictaruai  litterarum  regiarum  în  omnibus  obser* 
vata  damus  autem  teoore  preseotium  in  maudatis  omnibus  dicti 
domini  nustri  régis  et  nostris  subdtlis  ut  în  praemissis  et  prae- 
missa  tangentibus  nobis  pétant  efticacîter  et  intendant.  Datum 


XUY*  SESSION,  ▲  88NLI8.  577 

Gaturci  die  veneris  inte  festam  Magdalenae  anno  domiai  mille- 
WM>  treoeoteûmo  decimo  terUo. 
(Archives  originiles,  folio  304-301.) 

N»  B. 

Pfailippas  Dei  gratia  Francise  rex  dilecto*fllio  Geraldo  Epis- 
eopo  SuessioD.  salât,  et  dilect.  Yobis  tenore  presentiom  commit- 
timos  et  mandamas  qnod  super  incurobentibus  operibas  pontis  qui 
étnoxo  coDStruitur  apudCadurcam,  in  porta  vocato  Falentre 
ac  dispensatione  passagii,  quod  pro  hujus  modi  opère  faciendo 
bomiDibus  ejusdem  civitatis  concessimus  vocatis  vocandis,  vos 
pleoios  informantes,  si  dicti  passagii  emolumentam  in  dictum 
qHis  applicatum  ftiisset  légitime  repentis,  et  qnod  adhoc  ipse 
poDS  gratia  nostra  indigeat  pleniori  ipsum  passagium  pro  hojus 
Bodî  opère  complendo  more  consueto  ad  tempus  quod  ad  hoc 
soffîcere  videretis,  ex  parte  nostra  per  litteras  vestras  dicti 
hominibus  concedatis.  Datum  Parisiis  t  aug.  anno  Domini  4344. 

(Extrait  [des  Séries  et  Âcta  EpiscoporumCaduroensiumqnot- 
<[oot  hactenus  summa  cura  inveniri  potuerunt.  —  Auctore 
Goillelmo  de  la  Croix,  cadurcensi,  in  Cadurcensium  curia 
patrono.) 

Cadurci  apud  Johannem  DaWy  ii.dc.xxvi.  folio  491. 


N«  6. 


Philippus  Dei  gratia  FranciaB  et  Navarras  rex  universis  pré- 
sentes litteras  inspecturis  salutem.  Notum  facimus  quod  nos  con- 
sulibus  et  universitati  Caturcensi  pro  subsidio  et  ad  opus 
ûdiricae  pontU  de  porta  Falentre  propre  civitatem  Catur- 
censem  supra  flumen  oui  passagium  sive  barragium  concedimus 
de  gratia  speciali  exigendum  et  levandum  in  dicto  loco  prout 
ibidem  antea  consuetum  est  levari,  ab  instante  festo  Purifica- 
tionis  beat»  MariaB  Virginia  usque  ad  très  annos  exacte  termine 
secaturos  dantes   presentibus  in  mandatis  seneacalio  nostro 

XUY*  8BSSI0N.  3T 


578  CONGRÈS  AEGHÉOLOOIQÏÏE  DS  FRANGE. 

Gadurcensi  et  Petragoricensi  quod  ipse  duos  vel  très  dicti  loei 
depatet  el  constituât  probos  viros  quod  provenieos  ex  dicto  bar- 
ragio  emolumentum  recipiant  et  proirideant  ne  in  alios  qnod  in 
predlctos  USU8  quos  modo  libet  convertatur  et  de  hoc  eidem 
senescallo  compotum  et  rationem  reddere  teneantur  in  cujus  rei 
testimonium  presentibus  litteris  nostrum  fecimusapponi  sigillum. 
Datom  Pontis  undecima  die  junii  anno  domini  miUesimo  trecen- 
tesimo  vigesimo  per  nos  Jullioti. 
(Archives  originales,  folio  288.) 

No  7. 

Charolns  Dei  gratia  Navarrise  rex  universis  ad  qaos  présentes 
litterae  pervenehnt  saluteni,  notum  facimus  quod  cum  sicut 
ascertione  precepimus  Me  digna  passagia  seu  barragia  conoessa 
hactenus  consulibus  et  villas  Catnrci  pro  constructione  pontis 
de  Valentré  construetioni  hajus  modi  plene  non  suj^tunt  nos 
consnles  et  villa  eadem  per  triennium  ab  instante  festo  purifica- 
tionis  beatœ  Maria  in  antea  continue  sequuntur  exigendiet 
levandi  sicut  mihi  consuevit  exigi  et  levari  praedicti  pontis 
constructione  concedimus  de  gratia  speciaii  mandamus  senes- 
challo  PetragorisceDsi  vel  ejus  locum  tenenti  ut  duos  vel  très 
viros  idoneos  de  dicta  villa  eligat  et  deputet  qui  hujus  modi 
barragium  seu  passagium  levant  et  exigant  Gdeliter  qua3  et 
intègre  convertantin  constructione  predicta  bis  quod  vel  saltem 
semel  quolibet  anno  sicut  eidem  senescallo  expedire  videbilur 
de  receptis  et  missis  hujus  modi  reddant  compotum  et  legiti- 
mam  rationem  ei  supra  hiis  idem  senescallus  ab  eisdem  deputatus 
exig^t  juramentum  audiat  que  compotum  tractationem  illorum 
qui  barragia  seu  passagia  hactenus  concessa  pro  constructione 
hujus  modi  levantur  ex  reliquo  plenarie  convertetur  facial 
celeriter  in  constructione  predicta  absque  eo  quod  in  osus  alios 
convertantur  in  cujus  rei  testimonium  litteris  presentibas  nos- 
trum fecimus  apponi  sigillum.  Datum  Tolosae  vigesima  quinta 
die  januarii  anno  Domini  millésime  trecentesimo  vigesimo  tertio. 

(Archives  originales,  folio  300.) 


XLIY*  SBSSION,  A  8SNLI8.  519 


N«  8. 

Philippns  Dei  gratii  Francorum  rex  anivereis  présentes  litte* 
ras  inspecturis  saintem;  audita  relatione  geiitium  nostrornm 
senescailiae  Pelragoricensis  et  Calnrcensis  supra  etMente  neoit- 
sitate  perficiendi  pontem  de  Falentré  seu  Gaturcam  incoba- 
tum  supra  flumen  OIti  a  parte  dacatus  Âquitaniae  notum  facimus 
quod  civitatis  consules  et  babitatores  Caturcenses  in  nostra 
recommandatione  et  favore  habeutes  dictique  pootis  perfection 
nem  nostram  modicam  affectantes  passagium  sive  barragiom  in 
eadem  civitate  bine  a  quatuor  auDos  proximo  et  continue  vea- 
turos  exigendum  et  levandum  siciil  ibidem  consuevit  aliu  exigi 
et  elevari  pro  dictae  pontis  constructione  concedimus  de  nostra 
gratia  speciali  mandantes  senescailo  Petragoricensiet  Caturcenai 
vel  ejus  iocum  tenenti  ut  duos  vel  très  viros  idoneos  exsolvendo 
de  dicta  civitate  etigat  et  députât  qui  bujus  modi  passagium  aeu 
barragium  lèvent  et  exigant  per  eorum  juramenta  ad  sancta 
Dei  Evangelia  praestita  Gdeliter  et  intègre  in  construotionem 
dicti  ponti  convocant  voiumus  autetn  quo  din  alios  usus  quam 
ad  opus  dicti  ponlis  convertantur  levata  per  ipsos  et  de  eisdem 
leva  lis  senescailo  predicto  vei  ejus  Iocum  tenenti  presentibus 
aliquibus  probis  viris  in  talibus  expertis  ratione  légitima  reddere 
annis  singulis  teneantur  in  cujus  rei  testimonium  presentibus 
litteris  nostum  fecimus  apponi  sigillum.  Datum  Meldis  46  junii 
anno  Domini  millesimo  trecentesimo  vigesimo  octavo  per 
Dominum  regem  ad  Ducatum  Âquitanensem  et  Domini  Mattei 
servandi  Daniel. 

(  Arcbives  originales,  folio  300.) 

N»  9. 

DEL  PORT  DE  BALANTRB. 

Conoguda  causa  sia  atolz  aquels  que  aqoest  escrig  veiran  ni 
auziran  que  aisso  es  lo  devers  qne  bom  leva  e  deu  penre  e  levar 


580      GONGBiS  ARGHiOLOOIQUI  Dl  FRANGE. 

per  pontonalge  el  port  de  Valdntre  leqaals  port  ab  toisM  arri- 
badore  et  del  cossols  et  del  co88olat  de  Caorts  et  de  totas  aotru 
gens  que  passe  el  dig  port  leva  jiom  per  pontonatge  4  deaier 
de  la  saamada  de  la  vendemia  que  al  dig  port  pasura  e  al 
gai  de  sauta  Croz  e  de  la  saamada  de  vi  4  denier  e  de  lot  eioi- 
tada  que  a  terra  on  tral  port  de  Valantre  leva  hom  per  poato- 
natge  e  de  tôt  Tan  4  deniers  per  cascnna  denainda  e  de  Ut 
hom  estrancb  que  an  a  pe  meulha  e  de  tôt  bom  que  mené  bes- 
tia  4  denier  e  de  gros  bestiar  4  denier  de  cascona  bestia  e  de 
porcs  e  de  menut  bestiar  de  quatre  4  denier  e  si  nonia  mu  un 
ados  paga  mealtba  e  de  quatre  cars  o  deseadas  de  Teodeoiia 
que  passaran  el  dig  port  4  denier  et  de  tôt  vendemia  e  de  vi  que 
passaran  el  dig  port  ni  del  gai  de  Santa  Croz  a  eusus  tro  a  /o 
fon  de  Falentre  deuhom  pagar  lo  pontonatge  a  la  dintrada  de 
la  nan  e  de  las  terras  doutra  Valantre  deu  bom  pagarlosideaien 
cascun  an  la  Saut  Miquel  per  pontonatge  e  de  tôt  lao  e  de 
totas  las  autras  causas  e  las  gens  estrancbu  devo  pagar  eo  la  uo 
quant  passaran  e  nulbs  bom  no  deu  far  passatge  de  vi  ni  de 

vindemia  ni  dautra  causa  per  ou  cago 

.    .    .    {Illiiible) in  en  autra  maniera  perqoe 

le  passatges  ol  pontonatge  valgue  meubs. 
(Extrait  du  Te  Igiiur,  folio  54). 

N*  10. 


Droit  de  Soucbet,  Souquet,  Soccage  : 

«  Afin  dû  pourvoir  aux  réparations  nécessitées  par  la  guerre 
les  Consuls  étaient  autorisés  à  prélever  un  droit  sur  le  vin 
vendu  en  détail.  —  Tous  les  habitants  devront  être  soumis  à  cet 
usage  ainsi  que  les  Clers,  les  Prêtres  et  autres  gens  d'Églises; 
mais  ce  droit  sera  payé  par  les  acheteurs  non  parles  vendeurs. 

Ce  droit  de  Soucbet  fut  renouvelé  à  plusieurs  époques  notao 
ment  par  le  Prince  Noir  en  1363,  4368,  4369. 

(Archives  originales.  —  Passim.) 


I 


ZLIY*  SESSION,  A  S&5LIS.  581 

Il  ne  faut  pas  croire  que  le  Çont  de  Valentré,  qui  n'a 
que  trois  tours ,  ait  jamais  été  représenté  sur  le  sceau 
des  Consuls.  Le  sceau  de  la  ville  de  Cahors  offre  cinq 
tours  depuis  4201;  il  fut  laissé  aux  consuls  après  un 
grand  procès,  terminé  par  une  transaction  en  1351,  en 
conséquence  de  l'acte  de  pariage  de  1 306,  par  lequel  le  Roi 
et  Térèque  de  Cahors  leur  abandonnèrent  le  sceau  com- 
mun qu'on  leur  contestait  auparavant.  Il  présente  cinq 
tours  sur  un  pont  pour  faire  voir  que  les  Consuls  sont 
maîtres  des  murs  et  des  ponts  de  la  ville  pour  les  fortifier 
et  les  garder.  Ce  sceau  se  trouve  dans  l'acte  de  la  con- 
fédération des  villes  et  principales  communautés  du 
Quercy  conclue  à  Roc-Amadour,  pour  chasser  les  rou- 
tiers qui  ravageaient  le  pays  à  la  suite  de  la  guerre  des 
Anglais. 

Paul  de  Fonténilles, 

Officier  d'académie,  ia^pectenr  de  U  Société 
françaiie  d' Archéolofie ,  membre  de  la 
Société  des  étidei  dv  Lot,  eie. 


L'ÉGLISE 


XT 


LE  PORTAIL  DE  BEAULIBU 


(COEEÈZl) 


VÈausE. 

Vi^\$ù  paroissiale,  autrefois  abbatiale,  de  Saint-Pierre 
At  Beaulieu,  en  Limousin,  est  incontestablement  Tun  des 
tMiâoKi  n^maïquahles  du  centre  sud  de  la  France.  On  n  a 
pas  de  données  positives  sur  la  date  de  sa  construction; 
mais,  à  défaut  de  ivnseignements  historiques  précis ,  le 
style  du  monument  no  saurait  permettre  aucune  incerli- 
tudo  :  arvhitectunL\  sculpture,  écriture  même,  tout  y  accuse 
dVnsomble  le  xii^  siècle,  tout  y  dénote  la  période  de  tran- 
sitùvn  vl\ 

LV^hse  de  Beaulieu  est  une  croix  latine  de  deux  cents 
puvls  de  lon^,  parfaitement  pr\>|K>rtionnée.  Son  abside 
pn^$i^nte  la  déviation  obsier\>^  dans  tant  d*autres  églises  et 

yV  \\  \k>)lei  I^Dac,  ma.  raù,  de  rarckiiecture,  t.  V, 
|v  174.  note  5;  lA^tOel,  .Viimce/  eirm,  eTarckêai.  nationale, 


XLIT*  8B8SION,  A  SINUS.  583 

qui,  dans  celle-ci  comme  dans  un  grand  nombre,  se  pro- 
dait  du  côté  du  midi.  Douze  piliers ,  symboles  des  douie 
apôtres,  et  quatre  colonnes  cylindriques,  emblèmes  des 
quatre  évangélistes  ,  portent  la  masse  de  ses  voûtes  à  cin- 
quante pieds  et  plus  au-dessus  du  pavé.  Ils  divisent  le 
vaisseau  en  trois  neb  inégales ,  dont  les  deux  plus  basses 
contournent  le  sanctuaire.  Tous  ces  supports  reposent  sur 
des  plinthes.  Les  piliers,  assez  lourds,  ont  aussi  un  aspect 
assez  original.  Le  noyau  carré  qui  les  forme  n'est  appa- 
rent qu'au  point  central  de  l'édifice,  sous  le  dôme  ou  lan- 
terne, supporté  par  les  quatre  plus  gros  :  il  y  est  cantonné 
ie  pilastres,  rehaussés  eux-mêmes  de  demi-colonnes;  mais 
dans  la  nef,  aussi  bien  qu'à  l'entrée  du  sanctuaire,  le 
noyau  disparait  tout  entier  sous  ce  cantonnement.  L'aspect 
général  est  celui  du  losange. 

Les  pilastres  adossés  aux  murailles  correspondent  de 
forme  à  ceux  qui  revêtent  les  piliers,  et  au  dehors  la  plu- 
part des  contre-forts  qui  les  appuient  leur  sont  aussi  sem- 
blables. On  reconnaît  dans  ce  détail  l'influence  de  l'école 
auvergnate;  mais  ce  qui  est  spécial  peut-être  à  l'église  de 
Beaulieu  et  aux  quelques  sanctuaires  voisins  qui  s'en  sont 
inspirés  ;  ce  qui,  dans  tous  les  cas,  est  rare  et  a  frappé 
l'attention  des  excursionnistes  du  Lot,  c'est  la  forme  assez 
variée  des  bases  de  toutes  les  colonnes  :  elles  n'ont  rien 
qui  rappelle  l'antique,  sans  qu'on  puisse  leur  refuser 
le  mérife  de  la  simplicité ,  de  la  grâce  et  du  bon  goût. 
On  en  jugera  par  le  dessin  de  quelques-unes  d'entre 
elle».  Des  chapiteaux ,  par  contre,  rien  à  dire  :  ils  sont  en 
général  trè^nus  et  très-modestes,  comme  dans  un  bon 
nombre  des  églises  du  Centre.  Quelques-uns,  pourtant, 
sont  ornés  de  feuillages,  et  trois  ou  quatre  offrent  la  forme 
humaine;  mais  le  ciseau  n'y  a  pas  excellé. 

Les  archivoltes,  dans  Taxe  de  la  nef  comme  sur  les  côtés. 


584      CONGRÈS  ÂRGHÉOLOGIOUE  DE  FRANCE. 

sont  tantôt  cintrées,  tantôt  et  plus  souvent  légèrement  bri- 
sées. Le  cintre,  selon  l'habitude,  domine  dans  les  fenètra 
et  ne  se  laisse  vaincre  qu'aux  jours  les  moins  anciens. 

Quant  aux  voûtes,  une  moitié  de  celles  de  la  grande 
nef  s'est  malheureusement  affaissée  en  1808.  Un  lambris- 
sage  blanchi  déguise  aujourd'hui  la  blessure,  sans  par- 
venir à  la  dissimuler.  Comme  celles  qui  nous  restent,  ces 
voûtes  appartenaient  au  système  roman  :  en  berceau  dans 
les  grandes  lignes,  en  cul-de-four  dans  les  hémicycles,  ea 
arêtes,  sans  nervures,  dans  les  collatéraux.  Seules,  une 
travée  du  bas^té  septentrional  et  la  partie  du  transsept 
qui  lui  correspond  sont  voûtées  dans  le  style  compliqué  de 
la  dernière  période  ogivale.  Il  y  a  là  la  trace  d'une  restau- 
ration dont  la  date  précise,  les  auteurs,  comme  les  causes, 
sont  restés  inconnus.  Elle  s'étend,  pour  le  croisillon,  jus- 
qu'aux murailles ,  qui  furent  reprises  aux  deux  tiers.  Un 
large  contre-fort  angulaire  et  des  ouvertures  ogivales  bien 
différentes  de  la  plupart  des  autres,  trahissent,  aussi  bien 
que  les  voûtes,  le  fait  et  l'époque  de  ce  remaniement. 

Au-dessus  des  collatéraux  régnent  des  galeries  obscures 
dont  la  voûte  en  quart  de  cercle  fait  arc-boutant  à  la  nef 
centrale  et  au  grand  hémycicle  absidal.  C'est  là  que,  au 
dire  d'un  ancien  sacristain ,  se  serait  un  instant  réfugié 
rinfortuné  maréchal  Ney,  en  4815  :  son  fils  en  fit  la  visite 
vers  1862.  Ces  galeries  prennent  jour  sur  la  nef  par  des 
arcades  géminées  en  plein  cintre,  soutenues  elles-mêmes 
par  des  colonnes  géminées. 

En  suivant  la  ligne  des  collatéraux  dans  leur  inflexion 
autour  du  sanctuaire,  on  accède  aux  chapelles  du  chevet, 
qui  sont  au  nombre  de  trois,  toutes  en  hémicycle.  La  plus 
haute  est,  suivant  l'usage  constant,  consacrée  à  la  Vierge: 
les  deux  autres  ont  changé  de  titulaires.  Deux  autres  cha- 
pelles s'ouvrent  encore  dans  le  mur  oriental  de  la  croisées 


XUT*  SESSION,  A  8BNU8.  585 

Sur  l*autel  de  celle  du  nord,  l'abbé  recevait  autrefois  les 
vœux  de  ses  religieux  (I)  et  les  serments  de  fidélité  des 
grands  vassaux  et  officiers  du  monastère  (2)  ;  devant  celle 
du  midi,  qui  était  consacrée  aux  patrons  de  la  ville  et  dont 
on  avait  fait  le  siège  d'une  chapellenie  très«importante, 
faisant  ou  à  peu  près  fonction  de  paroisse  pour  la  ville 
murée,  se  passait,  chaque  lendemain  de  Noël ,  une  céré- 
monie assez  curieuse,  mais  dont  l'observation  ne  parait 
pas  avoir  beaucoup  duré.  Quarante  prud'hommes  y  pré- 
sentaient au  supérieur  de  l'abbaye  douze  sujets,  parmi 
lesquels  celui-ci  devait  élire  les  quatre  consuls  de  la  petite 
cité.  Ou  en  remarque  aujourd'hui  le  retable,  non  moins 
que  celui  de  Notre-Dame,  deux  œuvres  de  menuiserie  déli- 
cate, dont  les  sculptures  ne  sont  pas  sans  intérêt.  Dom 
Claude  Bénaud,  prieur  claustral,  fit  faire  le  premier, 
en  1676,  et  dom  Charles  Poirier,  le  second,  en  i678.  La 
balustrade  du  sanctuaire  et  la  sacristie  furent  l'œuvre  d'un 
autre  prieur,  Antoine  Glapasson  (1692).  Amand  Vaslet  fit 
à  son  tour  rouvrir,  en  l'élargissant ,  le  portail  d'ouest, 
muré  par  les  huguenots  et  encombré  de  constructions 
parasites,  dont  son  prédécesseur,  dom  Joseph  Mallevergne 
avait  dû,  eu  1717,  faire  l'acquisition.  Comme  souvenir  de 
sa  restauration,  c achevée  le  11  juin  4724,  •  Amand  Vas- 
let laissa  sur  la  façade  la  couronne  d'épines  que  l'on  y  voit 
encore  et  qui  est,  comme  on  sait ,  l'attribut  spécial  de  la 
congrégation  de  Saint-Maur. 

Les  prieurs  de  cette  congrégation  rendirent  à  TÉglise  des 
services  sans  prix.  Lors  de  la  prise  de  possession  du  puis- 

(I)  Amand  Vaslet,  Abrégé  de  rkist,  de  tabbafft  Saint- 
PifrrtHte'Beaulieu,  manuscrit. 
{t)  Cariulaire  de  l'abbatje  de  Beauiieu,  chartes  czai, 

CICVI. 


586  G0N0RÈ3  AEGHÉOLOGIOITB  DB  niANGS. 

sant  abbé  qui  en  fut  l'introducteur  (I) ,  le  pauTre  tem^ 
était  comme  les  lieux  réguliers,  et  depuis  la  Réforme,  dam 
un  a  état  pitoyable,  •  à  c  faire  compassion.  »  c  A  peine  y 
avait-il  trois  autels  en  état  de  dire  la  sainte  messe  (sic):  il 
fallait  en  dépouiller  un  pour  garnir  l'autre*  La  sacristie 
était  derrière  le  grand  autel ,  auquel  on  montait  par  huit 
marches.  »  On  n'avait  plus  de  cloches,  plus  d'omemeotif 
plus  de  linge,' plus  de  livres.  Tout  était  donc  à  (aire,  etcei 
hommes  dévoués  firent  énormément.  Pardonnons-leur ea 
conséquence  les  regrets  que  nous  laissent  ici  et  là  quel- 
ques-unes de  leurs  restaurations  :  leurs  retables,  sansh8^ 
monie  avec  l'église,  ont  de  plus  l'inconvénient  d'en  obstmer 
les  jours ,  et  le  symbolisme  qui  s'attachait  peut-ètie  an 
nombre  des  fenêtres,  en  demeure  ébréché.  Mais  il  estasseï 
ordinaire  de  n'avoir  pas  en  ce  bas  monde  tout  ce  qu'on  y 
souhaite.  L'époque  moderne  où  travaillaient  ces  hommes 
avait  perdu  les  secrets  de  l'art  du  moyen  âge,  et  jusqu'à  la 
notion  de  ce  pieux  symbolisme  qui  en  fut  un  des  carac- 
tères les  plus  auii^ustes  et  les  plus  attachants. 

Nous  n'avons  rien  dit  des  beautés  extérieures  de  l'abside, 
malheureusement  dérobée  au  public  et  resserrée  par  un 
pâté  de  maisons,  dont  la  disparition  serait  bien  souhai- 
table. C/est,  de  toute  Téglise,  la  partie  la  mieux  conservée, 
et  nul  aspect ,  à  coup  sûr,  n'offre  à  la  fois  plus  de  grâce, 
de  richesse,  de  mouvement  et  d'harmonie.  On  songe,  en 
la  considérant,  aux  beaux  chevets  d'Issoire,  de  Paray-le- 
Monial,  de  Saint-Sernin  de  Toulouse,  etc.  Nous  n'avons 
pas  non  plus  parlé  des  tours  à  cloches.  Au  centre  de  la 
croisée  s'élève  une  coupole  romane,  à  huit  pans  inégaux, 
dominant  le  pavé  de  l'église  de  soixante-six  à  soixante-dix 

(1)  Emmanuel  Théodose  de  la  Tour  d'Auvergne,  depuis  car- 
dinal de  Bouillon  (1659). 


xmr*  SESSION,  a  senus.  587 

pieds.  Cette  coupole  est  surmontée  d'une  première  tour 
octogone,  régulière,  élégante  même,  mais  de  trop  peu 
d'élévation.  Deux  tourelles,  couronnées  de  lanternons  et 
disposées  aux  deux  points  d'intersection  de  l'abside  et  du 
transsept,  servent  de  cage  aux  escaliers  qu'on  fit  pour  y 
conduire.  Sur  la  porte  de  celle  du  nord,  signalons  en  pas- 
sant une  heureuse  sculpture  :  deux  lions  se  nourrissant  de 
l'arbre  de  vie ,  qui  transfigure  la  faiblesse  humaine  et  la 
rand  invincible  aux  séductions  du  monde  comme  à  la  rage 
des  enfers. 

Le  clocher  qui  s*élève  en  saillie  sur  le  côté  droit  de  la 
bçade  occidentale ,  a  le  tort  de  s'y  trouver  seul ,  d'appar- 
tenir, comme  cette  façade,  à  une  autre  époque  que  le  gros 
de  l'église ,  et  de  ne  présenter  qu'une  assez  médiocre  con- 
struction. C'est  un  clocher  donjon.  On  y  pénètre  de  Tinté* 
rieur  de  la  nef  par  un  escalier  en  spirale  qui  se  perd  à  la 
hauteur  des  combles  et  qu'on  dut  faire,  en  construisant 
Tédifice,  pour  accéder  proprement  à  cet  endroit.  Il  fut  plus 
tard  englobé  dans  la  tour.  L'entrée  extérieure  est  une  petite 
porte  ogivale  suspendue  à  plusieurs  mètres  au-dessus  du 
soi.  L'aborder  aujourd'hui  n'est  plus  chose  difficile,  grâce 
à  des  degrés  en  pierre  d'une  date  assez  récente  ;  mais  on  ne 
latteignait  autrefois  qu'au  moyen  d'une  échelle,  et  c'est 
encore  le  moyen  à  prendre  pour  se  hisser  à  l'étage  plus 
haut.  A  partir  de  ce  point  la  tour  est  tout  d'une  pièce  et 
D*offre  d'interruption  que  celle  du  beffroi.  Les  jours,  accou- 
plés sur  chacune  des  faces,  sont  sans  éèan  comme  sans 
ornementation;  le  toit  pyramidal  qui  couronne  l'ensemble 
n'a  pas  an  plus  grand  prix. 

Reste  la  façade,  dont  un  triplet  sur  deux,  ofihre  plus  de 
mérite.  On  y  voit  des  fenêtres  étroites,  courtes,  mais  d'une 
ogive  bien  accusée,  et  s'encadrant  de  chaque  côté  de  la 
muraille,  d'une  élé^te  voussure  à  triple  archivolte, 


588      CONGRÈS  ÂRGHÉOLOGIOUB  DB  PEAUGS. 

rehaussée  de  tores  et  de  colonnettes  dont  les  chapiteaux 
sont  à  crochets.  Nous  jugerions  cette  façade,  aussi  bien  que 
sa  tour,  du  milieu  du  xiii*  siècle. 

De  nombreuses  reliques  enrichissaient  autrefois  l'égliie 
de  Beaulieu  :  plusieurs  ont  disparu.  Disparus  sont  aussi 
de  précieux  reliquaires,  parmi  lesquels  la  châsse  des  patrons 
de  la  ville.  Le  trésor  de  l'antique  abbaye  n'en  reste  pis 
moins  encore  intéressant.  Il  sera  l'objet  d'une  prochaine 
note  au  Bulletin  montmiailâ/.  L'auteur  n'aura  garde  d'ou- 
blier la  grande  crosse  eucharistique  qui,  sur  cette  Groniière 
du  Limousin,  faisait  pendant  aux  crosses,  limousines 
aussi,  d'Auriac  et  de  Saint- Yrieix-la- Perche.  Pour  le 
moment,  toute  notre  attention  doit  se  porter  sur  le  portail 
sculpté  de  la  vieille  abbatiale,  véritable  ornement  a  de  cette 
belle  église,  •  orgueil  de  la  petite  ville  et  monument  pr^ 
cieux,  sinon  même  typique,  d'une  école  de  sculpture  qui 
ne  demande  qu'à  se  faire  connaître  pour  prendre  sans 
tarder  le  rang  qui  lui  est  dû.  Aussi  le  lecteur  qui  a  pu  nous 
trouver  concis  dans  les  pages  qui  précèdent ,  voudra-t-il 
nous  accorder,  pour  celles  qui  nous  restent,  la  bveur 
nécessaire  d'appuyer  un  peu  plus. 


IL 


LE  PORTAIL. 

Le  portail  que  nous  entreprenons  de  décrire,  est  ouvert 
daus  le  mur  méridional  de  la  nef  et  correspond  à  la 
deuxième  travée.  Il  présente,  voussures  comprises,  une 
largeur  d'environ  huit  mètres  sur  une  hauteur  de  neuf 
mètres  ou  à  peu  près.  En  avant  s'étendent  deux  murs  en 
retour  ou  éperons,  qui  soutenaient  autrefois  la  voûte  d'un 
porche.  La  face  intérieure  en  est  divisée  en  deux  compar- 


ZLnr*  8SS8I0N,  A  SSNLI8.  589 

timenU  par  une  arcade  géminée,  retombant  sur  trois 
colonnes  en  marbre  que  supporte  un  soubassement.  Toute 
cette  enceinte,  qui  n'en  semble  plus  une,  est  décorée  de 
aculptures.  Voyonsquel  en  est  le  sujet. 

L'artiste,  ee  nous  semble,  veut  nous  représenter  la 
gnerre  du  Mal  contre  le  Bien,  et  le  triomphe  du  Bien  sur 
le  liai.  Soit  !  le  dessein  est  beau  et  l'entreprise  morale  : 
prenons  donc  le  livre  des  Écritures,  et,  à  la  suite  du  scul- 
pteur, allons  nous  édifier. 

Arrêtons-nous  au  porche  et  portons-nous  à  gauche.  Le 
porche  précède  l'entrée  ;  la  gauche  est  le  côté  le  moins 
noble  :  c'est  au  porche,  c'est  à  gauche  que  l'artiste  a  dû 
commencer. 

Un  seul  tableau  remplit  les  deux  compartiments.  Il  est 
tiré  de  l'ancien  Testament,  et  c'est  un  des  sujets  les  plus 
diers  à  nos  pères  :  DanieL  dans  la  fosse  aux  lions.  Par  lui 
nous  seront  représentés  les  temps  antérieurs  à  Jésus-Christ  . 
d  la  première  phase  de  la  lutte,  celle  de  l'homme  contre 
l'homme  ou  de  la  chair  contre  la  chair. 

Daniel  dans  la  fosse  aux  lions. 

Deux  colonnettes  romanes,  couronnées  de  gracieuses 
tourelles,  supportent  un  cintre  surbaissé  que  décore,  dans 
toute  sa  longueur,  une  riche  galerie.  Sous  cette  arcade 
triomphale  apparaît  le  prophète  assis  au  milieu  des  lions 
et  tenant  eu  main  le  volumen  à  demi  roulé.  Son  nom, 
inaperçu  de  l'abbé  Texier,  se  lit  en  deux  lignes  sur  le 
fond  du  tableau  : 

DAN 

lEL  (1). 

(4)  Nous  trouverons  d'autres  inscriptions  à  Téperon  droit.  Les 
caractères  des  unes  et  des  autres  appartiennent  nettement  i  la 


S90  GONORÈS  ARGHÉOLOOIQUI  DS  nULKGt. 

Par  une  exception  assez  rare,  le  saint  prophète  eit 
nimbé  et  nu-pieds  :  c'est  qu'à  travers  la  personne,  l'artiste 
Toyait  le  type  ;  sous  les  trai^  de  Daniel  lui  apparaissaitla 
Vertu  persécutée.  Les  lions,  nombreux,  ont  des  attitudes 
diverses  :  les  uns  sont  couchés  aux  pieds  de  la  victime; 
d'autres  lèvent  sur  elle  un  regard  qui  semble  attendri;  il 
en  est  un  qui  lui  sert  d'escabeau. 

Dans  l'arc  du  compartiment  voisin  se  dessioent  deux 
pavillons  entourés  d'un  cercle  de  murailles.  L'une  des 
trois  arcatures  qui  figurent  cette  enceinte  de  forme  claus- 
trale, est  totalement  remplie  par  un  visage  humain  gros- 
sièrement ébauché. 

Les  édicules  nous  sembleraient  représenter  le  Ciel,  ^ 
souvenir  de  la  sainte  cité  décrite  par  saint  Jean  au  vingt* 
unième  chapitre  de  son  Apocalypse.  Quant  au  vis^P 
humain,  nous  y  verrions  une  personnification  de  la  P^ 
vidence,  l'œil  ouvert  sur  les  tribulations  du  juste  p^^ 
lui  envoyer  force  et  secours  :  Cum  ipso  sum  in  trib^^' 
tione  (!].  Ces  mots  d*un  psaume  dont  une  moitié  du  porche 
est,  comme  on  verra,  rindubitable  commentaire,  aut^ 
riseraieut  déjà  notre  interprétation.  Mais  elle  s'affer^' 
jusqu'à  l'évidence  à  la  lecture  de  certains  autres  pas8B.g* 
des  psaumes,  et  du  dixième  en  particulier,  dont  saint  J^^ 
Chrysostome  fait  application  au  sujet  qui  nous  occupe* 

a  Je  mets  ma  confiance  au  Seigneur. 

cf  Comment  donc  dites-vous  à  mon  âme  :  Sauve-toi  ^  ^ 
la  montagne  comme  le  passereau  ?... 

manière  romane,  et  quelques-uns  à  celle  du  xn^  siècle  :   S- 
exemple,  les  E  ronds  et  le  D  du  mot  déjà  cité,  qui  a  la  for^ 
d'un  0  sommé  d'un  trait  horizontal  à  gauche.  Voir  TE3Ci^ 
Manuel  d'épigraphie,  p.  67,  <56,  pi.  i,  xi,  etc. 
(1)P#.  xc,  45. 


ZUY*  SESSION,  A  SBNLI8.  591 

c  Du  haut  du  ciel  où  il  a  fixé  sa  demeure,  ou  est  le 
palais  de  sa  sainteté  (i),  le  Seigneur  a  les  yeux  sur  le 
pauvre  : 

c  II  fera  pleuvoir  ses  lacets  sur  les  pécheurs...  • 

Voyez,  en  eSet,  tout  au  bas  du  bienheureux  séjour,  cet 
ange  aux  grandes  ailes  qui  se  courbe  sur  les  lions  pour 
enchaîner  leur  férocité.  C'est  l'histoire  après  la  prophétie, 
a  Mon  Dieu,  nous  raconte  le  généreux  athlète,  a  envoyé 
c  son  ange,  et  l'ange  a  fermé  la  gueule  des  lions,  et  les 
a  lions  ne  m'ont  point  fait  de  mal  (2)...  s 

Il  ne  faudrait  plus  que  le  contraste  :  le  contraste  y  sera. 
Aux  pieds  de  Tange  libérateur,  on  distingue  à  grand'peine 
un  corps  humain  renversé  sans  vie.  Peut-être  n'est-ce  que 
le  cadavre  d'un  criminel  vulgaire,  placé  là  pour  mettre 
en  relief  la  délivrance  du  prophète.  Mais  rien  n'empêche 
d'y  voir  le  corps  d'une  autre  victime  de  la  tyrannie,  et  de 
tirer  du  spectacle  toute  la  leçon  qu'il  peut  contenir.  L'in- 
fortuné, sans  doute,  attendait  tout  de  l'homme,  et  l'homme 
l'a  jeté  à  la  dent  des  lions  :  Daniel,  lui,  n'a  espéré  que  de 
son  Dieu,  et  son  Dieu  l'arrache  à  la  dent  des  monstres. 
NuUa  lœsio  inventa  est  in  eo,  quia  credidit  Deo  suo  (3). 
Sicut  entm/ observe  saint  Jean  Chrysostome,  sicut  enim 
maledictus  est  qui  sperat  in  homine  (4),  ita  beatus  est  qui 
sperat  in  Domino  (5). 

Un  dernier  accessoire  résume  et  généralise  le  tableau. 
Au-dessus  de  l'arcade,  sous  laquelle  est  assis  le  prophète, 
se  traîne  un  reptile  à  tête  de  bouc,  a  figure  coustumiè- 

(4)  Traduit  d'après  l'hébreu. 
(t)  Dan,,y\,  J2. 

(3)  Dan.,  vi,  23.  —  //c6.,  xi,  33.  —  Ps.  Lvi. 

(4)  Jer,,  XVII,  5. 

(5)  In  Dan. 


592  GONORAS  ▲RGHÉOLOaiOUl  m  rAAKGS. 

rement  agréable  au  diable  » ,  dit  un  vieil  auteur  da 
XYi*  siècle  (1).  Sur  ses  tortueux  anneaux  marche  un  petit 
corps  humain,  dont  les  mutilations  du  temps  n*ont  épar- 
gné que  les  membres  inférieurs.  Or,  chacun  sait  que  k 
moyen  âge  représentait  les  âmes  sous  la  forme  de  petits 
corps  humains.  On  devine  le  reste.  Ce  reptile  est  c  l'aspic 
et  le  basilic  •  do  l'Écriture  ;  ce  petit  corps  eat  Tàme  du 
juste  c  foulant  aux  pieds  •  sous  cet  emblème  impur,  tout 
le  venin  des  suppôts  de  Satan  :  Super  aspidem  H  baiilù' 
cum  ambulabis  (2). 

Demandons  maintenant  à  l'éperon  droit  l'autre  partie 
du  verset. 


La  (entatitm  de  Notre-Seigneur. 

Ici  l'Ëvangile  se  déploie,  le  drame  s'élève  et  la  leçoo 
s'étend.  Nous  n'avons  pas  toujours  à  lutter  confie  des 
persécuteurs  de  chair  et  de  sang  comme  nous  ;  maii  nous 
avons  toujours  à  combattre  ces  esprits  de  malice  répandus 
dans  Tair,  que  saint  Paul  api)elle  les  vraies  puissances  de 
ce  siècle  (3).  C'est  la  lutte  de  tespfit  contre  Cesprit  :  nouvel 
aspect  d'une  guerre  de  plus  en  plus  formidable,  et  parles 
ennemis  qu'elle  nous  oppose,  et  par  les  intérêts  qu'elle 
met  en  jeu;  car,  a  il  faut  craindre  non  les  ennemis  qui 
tuent  le  corps,  mais  ceux  qui  perdent  Tàme  (4).  »  Voici  donc 
que,  pour  animer  notre  vaillance,  Taugusts  Chef  de  la 

(I)  DoDiN  rAngcvin,  Démonomanie  ou  Traite  des  sorciers, 
Paris,  lîiSI. 
{t)Ps.  xc,  13. 
i3)  iiphes.,  VI,  44. 
{i)Matt/i.,  X,  Î8. 


I 


de 


Corréze  } 


vj  Crosse  eucharislique 

'.f        à  réalise  de  Beaulieu  :  r.mràj--. 


XLIY*  SESSION,  A  8BNL1S.  593 

,  dté  sainte  vient  combattre  en  personne  avec  le  prince 
même  de  la  cité  maudite  :  Jésus  avec  Satan.  En  se  déva- 
loppant,  l'idée  veut  s'accentuer,  et  le  cadre  s'élargit  :  nous 
aurons  trois  tableaux  au  lieu  d'un. 

C'est  le  premier  des  trois  qu'indique  notre  titre. 

En  face  du  Fils  de  Dieu,  debout,  vêtu  de  la  tunique  et  du 
manteau,  décoré  du  nimbe  crucifère,  se  dresse  de  son 
mieux  le  tyran  des  enfers.  Dépouillé  de  toutes  ses  splen- 
deurs, il  nous  apparaît  nu  comme  un  ver  déterre,  n'ayant 
autour  des  reins  que  le  vuile  exigé  de  la  pudeur.  Une 
toque  informe  s'appesantit  comme  un  éteignoir  sur  son 
front  découronné.  Ne  cherchons  dans  son  affreux  visage 
aucun  des  traits  qui  constituent  la  face  de  l'homme,  ou 
même  le  museau  de  la  bête  :  c'est  un  type  sans  nom.  Ses 
membres  mal  cousus  portent  écrits  les  vices  qu'il  sème  sur 
ses  pas.  Il  a  du  bouc  le  poil  fétide,  du  coq  les  insolents 
ergots,  du  chien  hargneux  la  queue  écourtée,  de  l'animal 
immonde  le  ventre  rebondi.  Et  sur  tout  ce  grotesque  et 
monstrueux  mélange^  suprême  dérision  !  le  sculpteur  a 
déployé  les  grandes  et  nobles  ailes  de  l'antique  Lucifer... 

Entre  Jésus  et  le  tentateur  s'élève,  bâti  sur  le  roc,  un 
édifice  flanqué  dans  sa  partie  supérieure  d'un  double  croi- 
sillon :  c'est  le  temple  de  Jérusalem.  Sur  le  mur  de  la 
tour,  le  doigt  de  Satan  indique  les'  deux  inscriptions  qui 
suivent  : 

SI  FILI'  DEI  ES 
DIC  VT  LAPI 
DESI  STI  PA 
NES  FIANT. 

Si  FILI'  DEI  ES 
MITE  {sic)  TE 
DEORSVM  (1). 

(I)  3faUh.,  IV,  3,  6. 

XUV*  SESSION.  38 


594      CONGRÈS  ARGHÉOLOOIOUB  DB  FRANGE. 

Dans  le  haut  du  bas-relief  apparaissent  deux  autres 
personnages,  dont  le  buste  a  disparu,  en  laissant  un  bout 
d*aile.  Ce  sont  des  anges,  intervenus  dans  cette  lutte  solen- 
nelle pour  en  compléter  la  physionomie.  Par  eux  sont 
représentées  ces  phalanges  invisibles  que  s'opposent  les 
deux  cités  sur  le  champ  de  nos  combats.  Celui  qui  domine 
Satan,  nu  et  décharné  comme  son  bourreau,  du  doigt, 
lui  aussi,  désigne  à  Notre-Seigneur  l'inscription  tentatrice, 
tandis  que,  noblement  vêtu  comme  son  prince,  l'ange  de 
lumière  lui  montre  au  ciel  la  volonté  qu'il  s'edt  obligé 
d'accomplir. 

Quelle  fut  la  réponse  de  Notre-Soigueur,  tout  chrétien 
le  sait.  Le  divin  maître  vainquit  par  la  parole,  comme 
Daniel  avait  triomphé  par  le  silence  ;  car  avec  les  combats 
doivent  changer  les  armes.  Si  l'homme  vous  soufflette, 
«  tendez  la  joue  (i);  »  si  le  démon  vous  tente,  c  résistez 
fortement  (â)  ;  d  mais  que  l'esprit  soit  le  même  :  In  fide  I 
Nous  avons  médité  le  silence  du  prophète,  rappelons*nous 
la  parole  du  Verbe  :  leur  victoire  à  tous  deux  fut  le 
triomphe  de  la  foi.  C'est  le  mot  de  l'Apôtre  :  Justus  ex 
fide  vivit  (3). 

La  mise. en  fuite  des  démons. 

Dans  le  compartiment  voisin,  un  personnage  nimbé, 
nu-pieds,  vôtu  comme  le  Christ  du  précédent  tableau, 
impose  sa  volonté  à  deux  monstres.  Leur  exiguïté,  leur 
nudité,  leur  laideur,  trahissent  encore  des  démons,  ou  si 
l'on  veut  des  possédés.  Ce  bas-relief  a  souflert.  La  léte  du 

(\)  Matth.  V,  39. 

(2)  /  Pet,  V,  9. 

(3)  llehr.  x,  38. 


XLIY"  SS8ST0N,  A  SBNLIS.  S95 

principal  personnage  n'a  gardé  aucun  de  ses  traits  ;  son 
nimbe  usé  a  perdu  tout  caractèi^  ;  et  toutefois  hésiterons- 
nous  à  dire  :  c'est  Lui  ?  Oui,  c'est  Lui,  poursuivant  son 
triomphe  sur  l'enfer,  en  en  chassant  devant  lui  les  téné- 
breuses légions.  La  tête  du  plus  apparent  de  ces  démons 
révèle  une  horrible  souffrance.  Dans  son  obéissance  forcée, 
il  se  retourne  à  demi  vers  le  Maître,  et  sa  bouche,  hideu- 
sement béante,  semble  exhaler  ce  cri  :  «  Jésus,  Fils  de 
t  Dieu,  qu'y  a-t-il  de  commun  entre  vous  et. nous?  Étes- 
f  vous  venu  ici  pour  nous  tourmenter  avant  le  temps  ?  • 
Car  nous  pensons  que  l'imagier  nous  retrace  la  scène 
racontée  au  huitième  chapitre  de  saint  Matthieu  (v.  S8, 
29,  34).  Les  édicules  dont  est  semé  le  bas-relief  nous 
représenteraient  ou  les  tombeaux,  monumentis,  d'où  sor- 
taient les  possédés,  ou,  ce  qui  est  moins  probable,  la  cité 
voisine  des  Géraséniens. 

Les  combats  sont  rudes  ;  mais  la  victoire  nous  rend 
maîtres  des  forces  de  Tenfer  :  c'est  la  leçon  cachée  dans  ce 
deuxième  tableau. 


Le  Christ  triomphant. 

Le  sculpteur  nous  en  a  ménagé  un  troisième  à  l'angle 
extérieur  de  l'éperon.  C'est  ce  Christ  triomphant  que  l'on 
voit  au  porche  de  plusieurs  cathédrales,  mais  qui  ne  sau- 
rait être  nliUe  part  mieux  placé  qu'ici,  où  tout  le  prépare 
et  l'attend.  Avec  bonheur  l'œil  se  repose  sur  ce  calme  vain- 
queur. Ce  n'est  pas  encore  le  redoutable  triomphateur  que 
nous  verrons  assis  sur  les  nuées  du  ciel,  pour  y  pronon- 
cer l'étemelle  gloire  des  vainqueurs,  l'irrémédiable  dam- 
nation des  vaincus.  C'est  Jésus,  notre  frère,  debout  encore 
sur  les  chemins  de  la  vie,  tenté  comme  nous,  pour  nous 


K96  GONGRiS  ^RGHÉOLOGIOUB  DE  F1LLNGB. 

apprendre  à  vaincre  comme  lui,  et  nous  appliquant  les 
grâces  de  son  triomphe,  comme  il  nous  a  donné  l'exemple 
de  ses  luttes  :  Ideo  tentaius  ett  ChrUiui,  ne  vincatur  a 
tentatore  chrt$iianui{{).  Sa  tête  est  ornée  du  nimbe  cruci- 
fère ;  sa  droite  bénit  à  la  manière  latine,  c'est-à-dire  les  trois 
premiers  doigts  ouverts,  les  deux  autres  fermés.  Un  de  ses 
pieds  foule  le  crâne  d'un  lion  dressé  sur  ses  pattes  infé- 
rieures, et  l'autre  le  corps  replié  d'un  dragon.  C'est  ici  que 
nous  attendait  la  seconde  moitié  du  texte  sacré  :  c  Con- 
culcabis  leonem  et  draconem  :  vous  foulerez  aux  pieds  le 
lion  et  le  dragon.  »  Elle  abat  toutes  les  palmes  aux  pieds 
du  Christ,  centre  et  âme  de  la  composition,  c  Le  lion,  dit 
V  saint  Augustin,  représente  les  persécutions  ouvertes  ;  le 
«  dragon,  les  assauts  ténébreux.  »  Or,  Jésus-Christ  a  ter- 
rassé le  lion  dans  la  personne  de  ses  membres  ;  car  il  était 
avec  Jérémie  dans  le  lac  profond,  avec  les  enfants  dans  la 
fournaise,  avec  Daniel  dans  la  fosse  aux  lions  (2)  :  il  vient 
par  lui-même  de  triompher  du  dragon. 

Dans  une  série  de  petits  retraits  en  orle  s'étagent  des 
anges,  dont  les  dégradations  du  temps  ne  permettent  plus 
d'assigner  le  rôle  individuel,  si  tant  est  qu'ils  en  eussent. 
Un  seul,  sculpté  sur  le  plein  de  la  muraille,  y  balance 
Tcncensoir.  L(\  présence  de  ces  purs  esprits,  cortège  triom- 
phal du  nis  de  Dieu,  traduit,  sans  aucun  doute,  le  verset 
final  du  récit  de  la  tentation  :  Ecce  angeli  accesserutu,  et 
ministrabarU  et. 

Nos  lecteurs  le  voient  :  jusqu'ici  les  tableaux  sont  clairs, 
suivis,  concordants;  la  pierre  mc^mc  parle  :  toute  méprise 
semble  impossible,  du  moins  sur  le  fond  des  sujets.  On  s'est 
mépris  cependant  quelquefois,  ou  l'on  n*a  pas  compris. 

(1)  Aug.  In  ps,  xc,  Serm.  1,  t, 

(3)Bos8uet,  Èlév,  sur  les  wnjst,,  xxiv»  semaine,  n«  élév. 


XLiy  SESSION,   A  SENLI8.  597 

Hais  ce  n'est  pas  ici  le  lieu  de  s'occuper  de  ces  erreurs  : 
poursuivons  plutôt  notre  tâche  et  réparons  une  omission. 

Marie  (?) 

En  face  du  Christ  victorieux,  et  toujours  à  l'angle  exté- 
rieur, mais  de  l'éperon  gauche ,  s'élevait  jadis  une  autre 
statue  triomphale.  II  n'en  reste  plus  que  la  trace.  A  peine 
dislingue-t-on  les  pieds,  qui  reposent  sur  deux  lions.  Un 
ançe  est  assis  dans  un  encadrement  qui  dominait  la  tête 
et  faisait  face  à  l'ange  à  l'encensoir,  de  l'éperon  droit. 
Quelle  était  cette  image?  Celle  du  prophète  Daniel?  C'est 
possible.  Il  semble  toutefois  que  l'artiste  avait  déjà  sulB- 
samment  insisté  sur  l'idée  de  son  triomphe.  On  pourrait 
même  trouver  quelque  hardiesse  à  représenter  ainsi  sur 
un  seuil  d'église,  le  démon  sous  ses  pieds,  les  anges  sur  sa 
tête,  un  saint  de  Tancienne  loi  partageant,  quasi  de  pair 
avec  un  Dieu  triomphant,  les  hommages  et  la  confiance 
des  fidèles.  Nous  hasarderons  timidement  une  autre  con- 
jccture.  Cette  image  serait  celle  de  Marie.  Sans  nous  arrê- 
ter à  quelques  vagues  indices  que  pourrait  offrir  ou  la 
pierre  ou  l'histoire  ,  com'ment  concevoir  que  le  siècle  de 
saint  Bernard  n'eût  pas  marqué  dans  ce  poëme  sculpté, 
dans  ce  chant  de  triomphe ,  la  place  de  sa  reine  bien- 
aimée?  L'image  de  Marie  faisait  si  bien  sur  le  seuil  de 
cette  porte ,  en  face  de  ce  fils  adoré  dont  tous  les  mérites 
reposent  en  sa  main,  avec  ce  piédestal  que  lui  avait  fait 
l'artiste,  et  qu'expliquent  de  concert  et  le  tableau  voisin  et 
l'application  que  lui  en  fait  TÉglise  :  f  Mùii  Deut  miteri" 
cordiam  suam  et  veritatem  svam  :  animom  meam  eripuit  de 
medio  catulorvm  leonvm  :  Le  Seigneur  a  envoyé  sa  misé- 
ricorde et  sa  vérité  :  il  a  arraché  mon  âme  du  milieu  des 


598      CONGRÈS  ARGHÉOLOGIOUB  DB  FRANGE. 

lionceaux (i) I D  En  péoétrant sous  ce  porche  déjà  si  pieux, 
le  chrétien  du  moyen  âge  avait  ainsi  le  double  bonheur  de 
saluer  et  d'invoquer  à  la  fois  son  Père  et  sa  Mère  des  cieux. 
Son  œil,  qui  se  portait  de  Tun  à  l'autre,  découvrait  sans 
cesse  de  nouvelles  harmonies.  Tandis  qu'à  sa  droite  res- 
plendissaient Jésus  et  TËvangile,  à  sa  gauche  s'élevaient 
Marie  et  Tancien  Testament,  aurores  l'une  et  l'autre  du 
Soleil  de  justice  et  de  la  nouvelle  loi. 
Passons  au  portail. 


L'Égli 


tse. 


Dans  le  simple  cadre  d'une  voussure  à  trois  archivoltes 
concentriques,  ornées  chacune  d'un  tore  et  d'une  colon- 
nette  de  support,  s'épanouit  notre  portail.  Un  pilier  sym- 
bolique le  partage  en  deux  baies.  Les  deux  montants  sont 
ornés  en  tableau  de  trois  colonnettes  inégales,  portées  sur 
des  lionceaux  aplatis  qui  les  mordent  avec  fureur.  Sur  le 
plein  des  jambages  se  dressent  les  deux  statues  de  saint 
Pierre  et  de  saint  Paul,  patrons  do  la  vieille  abbatiale  et 
piliers  de  la  sainte  ÈgUse  de  Dieu.  Ils  ont  le  nimbe  des  saints 
et  le  pied  nu  des  apôtres.  Vicaire  du  Christ,  Pierre  lève 
comme  le  Maître  sa  droite  bénissante  sur  le  troupeau  qui 
se  presse  au  saint  parvis,  et  de  l'autre  main,  serre  contre 
son  cœur  sa  mystérieuse  clef.  Le  docteur  des  nations  est 
armé  du  livre  de  la  science  :  ce  ne  fut  que  plus  tard  qu'on 
lui  donna  pour  secoml  attribut  l'épée  de  son  martyre. 

Le  trumeau,  superbe  monolithe  de  neuf  pieds,  est  orné, 
sur  ses  deux  angles  extérieurs,  de  colonnettes  brisées  en 
feston,  d'un  effet  pittoresque  et  gracieux.  Il  offre  sur  le 

(0  Ancien  offertoire  de  l'Imm.  Conception.  —  Ps.  lvi,  5. 


ZUr"  SESSION,  A  SBNUS/  509 

devant  un  personnage  plus  grand  que  nature,  revêtu  d'une 
de  ces  ridies  tuniques  dont  Tépoque  romane  avait  emprunté 
le  modèle  aux  sculpteurs  bysantins.  Ses  pieds,  chaussés 
du  cothurne  oriental,  foulent  les  queues  de  deux  lions  qui 
fuient  à  la  renverse  en  se  croisant  en  sautoir.  Leurs  tètes, 
dissimulées  derrière  les  colonnes,  en  mordent  la  base  avec 
le  même  acharnement  que  les  lionceaux  des  pieds-droits. 
Quant  au  prophète,  —  car  c'est  un  prophète,  —  il  sou» 
tient  de  ses  longs  et  maigres  bras  le  pesant  tailloir  sous 
lequel  plie  son  dos.  Les  faces  latérales  présentent,  avec 
quelque  différence  de  l'un  à  l'autre,  deux  groupes  origi- 
naux que  l'on  retrouve  parmi  les  sculptures  de  Chartres 
et  sur  les  vitraux  de  Bourges.  Des  personnages  assis  en 
supportent  d'autres  qui,  à  leur  tour,' supportent  le  tailloir. 
Ce  sont,  disent  les  auteurs,  «  les  grands  prophètes  por- 
tant les  évangélistee.  »  Tel  est  pour  notre  portail  le  senti- 
ment exprès  de  l'abbé  Texier. 

Nous  avons  ainsi  devant  nous  l'image  de  l'Église  ensei- 
gnante ,  de  celle  des  anciens  jours  comme  de  celle  des 
temps  nouveaux,  dans  ces  vénérables  figures  de  prophètes, 
d'évangélistes  et  d'apôtres,  que  préside  Pierre,  l'homme 
des  cleGs.  Us  sont  là ,  ces  hommes  divins ,  ils  sont  là  près 
des  portes,  et  c'est  bien  leur  place  à  eux  dont  l'enseignement 
et  l'autorité  nous  ouvrent  et  l'église  et  le  ciel.  Sur  leurs 
corps  exténués ,  sur  leurs  bras  amaigris ,  repose  la  page 
triomphale  où  nous  contemplons  l'étemelle  gloire  du 
Christ  et  de  ses  saints.  N'est-ce  pas,  en  effet,  de  leurs  luttes 
sans  trêve,  de  leurs  labeurs  sans  repos,  de  l'effusion  sans 
relâche  de  leur  parole,  de  leur  ministère  et  de  leur  sang, 
que  s'étend  le  triomphe  du  Christ  et  que  se  peuple  sa  bien- 
heureuse cour?  Des  lions  fuient  sous  leurs  pieds  et  mor- 
dent en  se  retournant  le  poids  sacré  qui  les  écrase.  Ce  sont 
les  idolâtries,  les  apostasies,  les  hérésies,  les  schismes,  les 


600  CONGRÈS  A.RGHÉOL06IOUB  Dl  FBANGB. 

persécutions,  ces  mille  formes  du  lion  infernal  qui  fuient 
battues  pour  assaillir  encore,  toujours  acharnées,  mais 
toujours  vaincues 

U  Péché. 

Nous  venons  de  voir  le  triomphe  du  bien ,  même  sur 
cette  terre  :  contemplons,  môme  dès  ce  monde ,  le  châti- 
ment du  mal. 

Ici,  le  symbole  vient  interrompre  l'histoire  et  jeter  Tio- 

térét  de  ses  énigmes  parmi  les  clairs  tableaux  que  nous 
sommes  à  parcourir.  C'est  de  toute  description  la  partie 
scabreuse,  et  l'on  y  fait  mille  faux  pas.  Hais,  guidé  par 
les  maîtres  et  précautionné  d'une  étude  sévère,  nous  espé- 
rons ne  rien  dire  que  de  plausible  ou  de  sûr. 

Il  est  deux  péchés  dont  l'Apôtre  défend  jusqu'au  nom 
dans  une  assemblée  chrétienne  :  Omni»  immunditia  oui 
avarilia,  nec  tiominetur  in  vMs  (i).  Aussi  le  catéchiste 
mural  en  a-t-il  jeté  hors  du  parvis  l'effrayante  représen- 
tation  :  foris  canes  (2)  !  Sortons  donc  absolument  du  porche, 
et  une  fois  encore  portons-nous  à  gauche.  Si  c'est,  comme 
nous  l'avons  vu,  le  côté  le  moins  noble,  c*est  aussi  le  côté 
du  mal. 

Dans  un  angle  oublié  que  forme,  avec  l'éperon  gauche, 
une  grande  maison  accolée  à  l'église,  se  cache  un  groupe 
mutilé,  noirci,  et  presque  dévoré  par  le  temps.  C'est  le 
fumeux  groupe  de  Vhomme  à  Vescarcelle  et  de  la  femme 
aux  repiiles  :  deux  sujets  fréquemment  reproduits  sur  les 
monuments  chrétiens  du  xir  siècle  pour  la  i>€rsonnirica- 
tion  de  l'avarice  et  de  la  luxure.  On  les  trouve  sur  les 

(1)  Eph.  V,  3. 

(2)  .-//wc.  xxu,  15. 


XMY*  SESSION,   A  SENLIS.  601 

points  les  plus  divers;  mais  au  portail  de  Beaulieu,  comme 
à  celui  de  Moissac,  ils  ont  revêtu  leur  forme  ignominieuse, 
osons  dire  la  plus  repoussante. 

C'est  l'A^YARiCfi  qu'on  nous  présente  d'abord.  Elle  nous 
apparaît  dans  une  de  ses  victimes,  un  homme  debout,  vôtu 
d'une  robe  traînante ,  qui  serre  d'une  main  fébrile  son 
escarcelle  gonflée,  La  tète  a  disparu  et  c'est  dommage;  mais 
devant  ce  buste  aiFaissé  qui  n'en  devinerait  la  sordide 
physionomie?  Du  reste,  on  distingue  encore,  retombant 
sur  sa  poitrine,  les  jambes  velues  du  démon  de  l'avarice, 
que  nos  pères  ont  pu  voir  afTourché  sur  son  dos. 

La  LUXUEE  s'impose  à  notre  attention  sous  des  formes 
que  notre  plume  se  voit  contrainte  de  voiler.  Ce  n'est  pas 
seulement  la  femme  aux  reptiles  que  nous  avons  devant 
nous,  comme  à  l'un  des  chapiteaux  de  Saint-Martin  de 
Brive  :  c'est  de  plus  la  femme  au  crapaud ,  c'est-à-dire  la 
victime  du  vice  impur  dans  son  indescriptible  ignominie. 
Passons. 

L'avarice  et  la  luxure  étaient  les  deux  vices  sur  lesquels 
s'acharnait  le  plus,  au  moyen  âge,  Tàpre  ciseau  du  sculp- 
teur chrétien.  Mais  là  ne  se  bornent  pas  les  faiblesses  de 
l'homme,  et  le  tympan  nous  réserve  d'autres  représenta- 
tions. L'humiliation  se  modifiera  sans  s'adoucir.  De  la 
forme  humaine  le  vice  va  passer  sous  des  formes  bestiales 
et  nous  apparaître  au  bord  dies  feux  qui  l'attendent;  ravalé 
au-dessous  de  ces  flammes  vengeresses,  moins  hideuses 
que  lui,  et  humilié  sous  le  pied  du  juge  terrible  à  qui  ses 
ennemis  doivent  servir  de  marchepied. 

Le  tympan  se  partage  en  trois  zones  d'inégale  hauteur. 
La  plus  élevée  retrace  l'imposante  scène  du  jugement  der- 
nier; la  seconde  représente  l'enfer:  nous  attachons  à  la 
troisième  le  sens  symbolique  qua  nous  venons  de  déter- 
miner. 


Le  freBier  aind  ^  s 
à  Sicile,  «it  «B  fisKàBàm^  leeroiaciativ 

raviFe  uiiuuiie  «s  tutean  wpi  w 

wafoÈ^  Somwûft  fnxmaiàaÙBmi  aâidefvsliîoeîOi 
Mt  fcBlrpmr  :  4e  k  cccîmc  Elle  «  piumie  îd  wm 
èemT  £k»  :  la  kaine.  fvî  ca  est  f¥^itaie  I  «  et  h  rixe. 
fvcBcsl  kré5«bii.  Étefioos  «■  iaïUI  cette  qéitÎBii 
oeîsiBak  catre  tnUes ,  coauae  le  icam^ift  à  koa  4reit 
rdbbé  Teôer.  D^iAeH .  poar  ez^eiaer  h  kûeu  h  féme 
ée  Rftâe  ae  pecrait  être  BÛecx  ckcne.  Cett  ceOe  fK 
vei^êdl  c  l'aaîSfne  sepeot.  »  ^oaal  sa  kaîae  «  bowcâie» 
ppar^isÎTiît  k  Fik  de  la  feame  et  qoaai  elle  Boas  per- 
èah  :  c>!t  das?  le  repeile  ^ae  4c4t  fiAcax  secret  es 
■■refas  têpêtecgses  et  4b  icaîas  moe^eis.  Le  ic^e  est  à 
rmûsaon.  Janaîs  ii  hilae  ii*a  beii^  d^im  Cm  plos  ««ahie 
fvf  s^sr  «e  raÂèe  ^  laire  &?al  hmaain  faî  se  ërssme  an 
zsiL}^  i^  tibéeiï.  L?  rsçTLri  *?î  éîrîaî  :  c'est  TeBirt  de 

Il  zp'ri'i ,  rec:  -  rz^  t^t?  les  srrs?  -^rierelîe^irs,  elîe  kîir 
5»:^:15;  If  Sîi  if  "i  i^rrrif;  f^  iî  «a  lirr^^  fcurtbce. 
^ri*^  nr  *-i,  sîîrllfr.:  rïtr.ir  !f«  îriits  îr^teroeb  de  la 
ra^iisir:^  f:  îf  li  cijz^în::*-  E:i£n .  :*5  iecx  ittîaillecrç 
q^  >:r:fr:  i^  1ad!!5  f;:  inrc::  prTir  s?  tr«r  !i  langue  eî 
<e  hirtr?  i  n: -Tî?  if  T:Tt£r>»<.  reiifeiî!  luss:  Mrfiiîesif!!: 
q»^  p:t55:K£  Tiz:!-;*  if  r?.$  ct:î^i1!«?-  «n  dense  temps 


OÊiihWL 


XLiy*  SESSION,   ▲  SBNUS.  603 

quils  justifient  le  mot  de  l'Écriture:  «La  haine  enfante  la 
dispute  :  odium  suscitât  rixas  (1).  » 

Entre  ce  dragon  et  le  pourceau,  reste  un  quadrupède 
chargé  de  sept  mamelles  et  armé  de  sept  têtes,  cinq  sur  le 
devant  et  deux  à  l'extrémité  de  la  queue.  Dernier  symbole. 
A  notre  avis,  celui  de  TonouËiL,  ou  de  la  superbe,  a  prin* 
cipe  de  tout  péché  :  initium  omnis  peccati  superbia  (2).  » 
D'autres  diront  peut-être  de  l'oisiveté,  mère  de  tous  les 
vices.  Libre  à  chacun. 

De  nos  cinq  interprétations,  les  deux  premières  sont 
consacrées  ;  la  seconde  est  usuelle;  les  deux  autres  n'ont 
de  valeur  que  celle  que  nous  leur  donnons.  Mais  il  sera 
bon  peut-être  de  remarquer  que  les  trois  vices  symbolisés, 
selon  nous,  au  portail:  haine,  gourmandise  et  orgueil, 
sont  précisément  ceux  dont  le  prophète  Daniel  faillit  être 
la  victime  et  dont  le  diable  tenta  Notre- Seigneur.  Ainsi 
opposés,  le  triomphe  de  la  vertu  et  la  honte  du  vice  s'ac- 
centuent mutuellement. 

Mais  il  est  temps  de  les  contempler  sur  leur  dernier 
théâtre.  Déjà  commence  à  s'arrondir  le  cercle  harmonieux 
des  voussures.  En  haut  les  cœurs!  C'est  l'éternité  que  nous 
entrevoyons. 

Le  jugement  dernier. 

Au  centre  de  l'imposant  tableau  qui  remplit  la  zone 
supérieure  du  tympan,  as3is  sur  un  trône  dont  quatre 
colonnes  soutiennent  les  appuis,  le  souverain  juge  des 
vivants  et  des  morts  ouvre  ses  bras  au  monde  entier.  Sa 
taille  dépasse  de  beaucoup  les  proportions  de  tout  ce  qui 

(1)  Prov.  X,  U. 

(2)  Ecdi,  X,  43. 


604      CONGRÈS  AEGHÉOL06IOUE  DB  FRANCK. 

l'entoure  :  nous  sommes  au  sein  d'une  période  où  la  gran- 
deur morale  se  traduit  par  les  proportions  physiques.  Il  est 
vêtu  d'une  robe  retombant,  à  la  manière  de  l'époque,  en 
plis  nombreux  sur  ses  pieds  nus.  Elle  est  serrée  autour  des 
reins  par  une  ceinture  dont  une  extrémité,  soigneusement 
déployée,  s'étale  entre  les  genoux.  Le  bras  et  le  côté  droit 
sont  nus  :  l'artiste  a  craint  de  gêner  le  mouvement  terrible 
de  cette  droite  vengeresse.  La  tète  est  sévère  et  barbue.  Ce 
n'est  plus  ce  jeune  et  doux  visage  qui  souriait  aux  pre- 
miers chrétiens  dans  l'horreur  de  leurs  cryptes  sanglantes. 
Les  temps  sont  devenus  mauvais,  et  le  Christ  a  vieilli  :  le 
bon  pasteur  est  devenu  le  juge  inexorable.  Ses  cheveux, 
partagés  au  milieu  de  la  tôte,  selon  le  type  traditionnel, 
descendent  derrière  les  oreilles  et  bouclent  à  la  hauteur 
du  cou.  Le  nimbe,  large  et  saillant,  est  timbré  de  la  croix. 
Des  ondulations  qu'on  remarque  sous  les  pieds  du  Christ 
et  des  apôtres,  des  nuages  qu'on  aperçoit  sous  la  voussure, 
indiquent  que  la  scène  se  passe  dans  le  ciel. 

Aux  pieds  du  grand  juge,  deux  anges  debout  sonnent 
de  la  trompette;  deux  autres  nu-dessus  portent  la  triom- 
phante croix  :  croix  de  forme  grecque  et  fichée,  comme  la 
plupart  des  croix  de  l'époque.  A  sa  richesse,  à  ses  propor- 
tions, à  la  place  qui  lui  est  faite,  on  reconnaît  le  trophée 
du  Christ.  A  côlé  de  ce  signe  glorieux,  deux  autres  anges, 
sortant  de  la  nue,  portent,  l'un,  les  clous  du  crucifié, 
l'autre,  la  couronne  du  grand  roi. 

Cependant,  de  chaque  côté  de  Notre- Seigneur,  déjà 
trône  dans  la  nue  le  sénat  des  douze  apôtres  :  judex  apos- 
iolorum  senatus.  Les  uns  tiennent  en  main  le  livre  de  la 
science,  les  autres  le  rouleau.  Point  d'attribut  personnel,  si 
ce  n'est  aux  mains  de  saint  Pierre,  qui  porte  ici  deux  clefs. 
Il  est  à  la  droite  du  Maître;  à  gauche,  à  côté  de  ce  cœur 
dont  il  connaît  les  battements,  on  distingue  le  visage 


ZLIY*  SESSION,  A  SENLIS.  605 

imberbe  du  disciple  vierge  et  bien-aimé.  Les  apôtres,  dans 
la  joie  de  leur  triomphe,  s'entretiennent  deux  à  deux. 
L'espace  n'ayant  pas  permis  de  les  disposer  tous  de  front, 
il  en  est  quatre  dans  les  angles,  soit  au-dessus,  soit  au- 
dessous  de  la  ligne  de  leurs  frères.  Nous  devons  signaler  à 
l'une  des  extrémités  de  cette  ligne  un  treizième  person- 
nage acculé  sous  l'arceau.  Il  est  assis  sur  un  trône  comme 
les  apôtres,  mais  il  se  distingue  par  Texigulté  de  ses  pro- 
portions et  l'absence  du  nimbe;  il  est  vrai  qu'à  ce  double 
égard  sa  position  expliquerait  tout.  Mais,  de  plus,  la  tète 
est  couverte,  et  c'est  un  signe  d'infériorité;  et  la  main 
droite  pend  le  long  du  siège ,  sans  livre  ni  attribut  quel- 
conque, au  moins  que  nous  ayons  pu  distinguer.  Quel 
serait  ce  mystérieux  personnage?  Probablement Isaïe,  qui, 
seul  entre  les  saints  de  l'ancienne  loi,  a  le  privilège  de  la 
nudité  des  pieds,  et  qui  figure  quelquefois  dans  les  tableaux 
du  dernier  jugement. 

Mais  voici  que  sous  les  pieds  de  l'auguste  sénat,  les 
morts,  éveillés  par  le  fracas  des  trompettes,  sortent  en  foule 
des  tombeaux.  Plusieurs,  encore  à  demi  couchés  dans  leurs 
cercueils  de  pierre,  en  soulèvent  lentement  les  couvercles 
épais  (i).  Les  autres  se  préparent  à  paraître  au  redoutable 
tribunal.  Rien  ne  parait  indiquer  que  ceux  de  droite  soient 
plus  fortunés  que  ceux  de  gauche.  Ici ,  dirons-nous  avec 
l'abbé  Texier^  a  les  bous  ne  sont  pas  séparés  des  méchants 
dans  le  sens  de  la  largeur,  mais  dans  la  hauteur.  »  Ceux 
de  gauche  s'entretiennent  des  apprêts  de  leur  jugement: 

(t)  Remarquons,  en  passant,  la  forme  de  ces  cercueils,  qni 
est  bien  celle  de  Tépoque  romane  :  un  sarcophage  rectangulaire, 
porté  sur  deux  dés  et  fermé  d'un  couvercle  imbrique ,  à  double 
versant.  Voir  Arthur  Murcier:  De  iasépuit.chréi,  en  France  ^ 
du  XI*  au  xvi«  siècle. 


606  CONGRÈS  A.RGHÉOLOOI01IB  DB  FRANGE.  * 

V 

Quidsum  nunc  dicturusf  a  Ceux  de  droite,  —  en  ce  moment 
nous  parlons ,  bien  entendu ,  de  la  droite  et  de  la  gauche 
de  Notre-Seigoeur,  —  le  regard  fixé  sur  le  terrible  appareil, 
semblent  absorbés  dans  cette  muette  contemplation  :  <  Ils 
viendront,  dit  l'Écriture,  pleins  de  terreur  au  souvenir  de 
leurs  offenses,  et  leurs  iniquités  se  soulèveront  contre  eux 
pour  les  accuser.  Au  même  moment  les  justes  s'élèveront 
avec  une  grande  hardiesse  contre  ceux  qui  les  auront  acca- 
blés et  dépouillés  du  fruit  de  leurs  travaux.  Et  à  cette  vue 
les  méchants  entreront  dans  le  trouble  d'une  horrible 
frayeur,  et  pâliront  de  surprise  en  voyant  tout  à  coup  et 
contre  leur  attente  les  justes  sauvés.  Ils  diront  en  eux- 
mêmes,  touchés  de  regret  et  jetant  des  soupirs  dans  le  ser- 
rement de  leur  cœur  :  Ce  sont  ceux-là  qui  ont  été  autrefois 
l'objet  de  nos  railleries  et  de  nos  outrages.  Insensés  que 
nous  étions!  leur  vie  nous  paraissait  une  folie  et  leur  mort 
un  opprobre,  et  les  voici  élevés  au  rang  des  enfants  de  Dieu, 
et  leur  partage  est  avec  les  saints.  Nous  nous  sommes  donc 
trompés:  ergo  erravimvs!  »  Aveux  tardib  !  regrets  super- 
flus! Le  temps  n'est  plus  où  les  larmes  eflEaçaient  tout, 
a  Le  Très-Haut  a  cuirassé  son  cœur  de  justice  et  couvert 
sa  tète  d'irréformables  arrêts.  Et  tandis  que  les  justes  vont 
vivre  éternellement  au  sein  de  leur  Dieu  ,  devenu  leur 
récompense,  le  Roi  de  Majesté  va  dans  le  zèle  de  sa  gloire 
armer  la  créature  pour  la  vengeance  de  sa  cause  et  le  châ- 
timent de  ses  ennemis  (1).  »  Déjà  l'enfer  entr'ouvre  ses 
abîmes  :  le  monde  est  jugé. 

L'Enfer. 

C'est,  avons-nous  dit,  entre  la  grande  page  du  juge- 

(0  Sap.  n-,  ÎO;  v,  16-19. 


XLiy*  SESSION,  A  SBNLI8.  607 

ment  et  les  emblèmes  du  linteau  que  se  déroule  la  repré- 
sentation de  l'enfer.  Les  hommes  du  xii*  siècle  Tavaient 
ainsi  jeté,  comme  un  éternel  abîme  entre  Dieu  et  le  mal. 
A  ceux  de* notre  temps  étaient  réservées  la  tristesse  et  la 
honte  d'entendre  identifier  deux  termes  si  ennemis. 

Aussi  large  queie  portail,  cette  partie  de  la  composition 
compte  à  peine  deux  pieds  de  haut.  C'est  une  frise  sem- 
blable au  bandeau  symbolique  que  nous  avons  analysé.  Y 
répandre  des  formes  humaines,  risquer  dans  un  espace  si 
resserré  toute  une  galerie  de  personnages,  ne  pouvait  être, 
ce  semble,  qu'une  faute  de  goût.  Le  sculpteur  avait  mieux 
à  CBÛre  :  il  a  mieux  fait. 

Représentons-nous  sur  une  mer  de  feu,  allant  et  venant 
dans  tous  les  sens,  les  monstres  les  plus  divers.  Ce  sont 
des  formes  animales  et  des  quadrupèdes  pour  la  plupart. 
A  la  bonne  heure!  le  plan  hoiizontal,  qui  est  celui  de  la 
bête,  permettra  d'heureuses  proportions. 

Voici  d'abord  comme  une  tête  de  gorgone,  d'où  semble 
vomi  ce  monde  infernal.  A  lui  seul,  ce  premier  monstre 
suffirait  à  fixer  le  sens  du  tableau.  On  sait,  en  efTet,  qu'il 
était  assez  ordinaire,  au  moyen  âge,  de  représenter  l'enfer 
par  quelque  énorme  gueule  béante,  d*où  sortaient  tantôt 
des  démons,  tantôt  des  tourbillons  de  feu.  Ce  qui  doit  en 
sortir  ici,  ce  sont  a  ces  bétes  furieuses  »  et  pour  la  plu- 
part «  d'une  espèce  inconnue  i>  que  rêvait  l'éloquent 
auteur  du  livre  de  la  Sagesse  (i).  L'horrible  gueule 
s'ouvre  toute  grande,  —  dilatavit  infemui  animam  suam, 
et  opérait  asiuum  absque  ullo  termino  (2), —  et  de  son  ric- 
tus épouvantable  sort  un  lion,  qui  saisit  au  bas- ventre 
un  malheureux  damné,  a  Chacun  sera  puni  par  où  il 

(4)5ap.  ix,49. 
[t)Is.  V,  43. 


608       GONORiS  ARGHÉOLOOIQUE  DB  FRANCS. 

aura  péché  (i)  :  il  est  à  présumer  que  ce  mi&érable  s'est 
perdu  dans  les  plaisirs  de  la  chair.  Renversé  sur  son  dos, 
il  se  cramponne  au  pied  d'un  quadrupède  à  tète  de  vau- 
tour, qui  se  retourne,  l'œil  farouche,  et  d'un  pli  de  sa 
queue  le  suffoque  et  Tentraine. 

Du  côté  opposé  accourt  un  autre  monstre,  ailé  comme 
le  précédent,  et  dont  la  queue  fleurie  laisse  voir  une  tête 
qui  dévore  le  bras  d'un  second  réprouvé.  Survient  à  l'ins- 
tant un  quatrième  quadupède  qui  lui  brise  le  crâne. 
Châtiment  des  coupables  pensées  de  Vesprit/  Les  ailes  de 
ce  dernier,  au  lieu  de  partir  de  l'omoplate,  s'élèvent  en 
perpendiculaire  de  ses  jambes  de  devant.  Sa  queue, 
comme  celle  du  voisin,  se  termine  par  une  tète  animale, 
tenant  en  sa  gueule  une  fleur  d'où  s'échappent  des  ser- 
pents. On  aperçoit  enfin,  couché  à  l'extrémité  de  la  frise, 
nous  ne  savons  quel  autre  monstre  qui  vomit  en  l'air  des 
bandelettes  entortillées. 

Toute  cette  zone  est  d'une  pensée  neuve  et  d'un  travail 
merveilleux.  La  planche  jointe  à  ces  pages  en  fera  ressor- 
tir les  mérites  :  nouâ  n*y  insistons  pas. 


Résumé. 


C'en  est  donc  fait  do  l'arène  du  monde  et  du  mélange 
des  deux  cités!  Combats,  victoires,  défuites,  tout  est  jugé, 
récompensé,  puni.  Il  n'est  plus  que  deux  éternités,  l'une 
de  gloire  pour  les  vainqueurs,  l'autre  d'opprobre  pour  les 
vaincus.  Au  chrélit*n  de  se  recueillir  dans  Tauslèro  solen- 
nité du  spectacle  et  de  chercher  à  sa  lumière  le  fruit 

(4)  Sap.  XI,  17. 


XUY*  SESSION,   A  .  8BNU8.  609 

de  tant  d'enseignements.  Pour  nous,  notre  description 
est  finie.  • 

Et  tel  est,  dirons -nous  en  terminant,  tel  est  le 
porche  de  Beaulieu,  œuvre  vraiment  monumentale, 
autant  et  plus  encore  par  le  caractère  de  l'idée  que  par 
les  dimensions  du  cadre,  vaste  sans  doute,  mais  sans 
être  des  plus  étendus.  Ne  dirait-on  pas,  devancé  sur 
la  pierre,  un  de  ces  mystères  qui  ravissaient  plus  tard 
l'œil  croyant  des  aïeux?  La  lutte  du  Bien  contre  le 
Mal,  le  triomphe  et  les  récompenses  du  premier.  Top*: 
probre  et  les  châtiments  du  second  :  voilà  le  drame.  La 
Cité  sainte  avec  Jésus,  son  roi;  Marie,  sa  reine;  losanges, 
ses  gardiens;  les  apôtres,  les  évangélistes  et  les  prophètes, 
ses  pères  et  pasteurs;  —  la  cité  maudite  avec  Satan,  son 
chef,  et  le  triste  cortège  de  ses  mauvais  anges  et  de  ses 
noirs  suppôts  :  tels  en  sont  les  acteurs.  La  terre,  le  ciel  et 
repfer  servent  tour  à  tour  de  théâtre  :  le  temps  et  l'éter- 
nité se  partagent  l'action.  Nous  avons  ainsi  toute  la  des- 
tinée de  l'homme  et  de  l'Église  présentée  aux  méditations 
du  chrétien  sous  le  jour  le  plus  moral,  dans  la  forme  la 
plus  attachante,  à  travers  des  tableaux  dont  l'heureux 
choix  devait  flatter  l'homme  d'étude,  autant  que  sourire  à 
l'homme  des  champs.  / 

S'il  faut  le  dire,  plus  d'un  portail  cité,  prôné,  visité, 
n'a  pas  à  nos  yeux  le  mérite  du  porche  dont  nous  nous 
occupons.  On  n'y  trouverait  ni  cette  largeur,  ni  ce  carac** 
tère  moral,  ni  surtout  cette  unité.  Le  détail  peut  n'être 
pas  neuf,  l'idée  mère  peut  même  se  retrouver  ailleurs; 
mais  le  tour  de  la  pensée,  mais  l'ordonnance  des  maté- 
riaux sont  le  mérite  de  l'artiste,  et  ce  qui  manque, 
croyons-nous,  ce  qui  manque  seul  à  notre  porche  inconnu, 
c'est  d'être  plus  visité. 

La  maîtresse  page  ne  perdrait  pas  à  être  comparée;  les 

XLIV*  SESSION.  39 


610      CONGRÈS  ▲aCHÉOLOGIQUE  DE  FaANGE. 

monstres  bizarres  qui  décorent  les  deux  zones  inférieures 
du  tympan,  sont  une  création  d'une  beauté  rcnoarquable. 
Dans  l'originalité  des  formes,  l'aisance  des  allures,  Téner- 
gie  des  contours,  tout  homme  impartial  saluera,  nous  en 
sommes  sûr,  la  touche  d'un  habile  et  vigoureux  ciseau. 

Mais  là  n'est  pas,  du  reste,  le  titre  qui  recommande 
le  plus  le  portail  de  Beaulieu  :  il  partage,  avec  ceux  de 
Cahors  et  de  Moissac,  l'honneur  d'une  trilogie  monu- 
mentale à  la  gloire  d'une  école  centrale  d'architecture  et 
de  sculpture,  vaguementxiélimitée  peut-être  par  M.  ViolleU 
le-Duc  (1),  mais  précisée,  circonscrite  et  dénommée  par 
M.  A.  Saint-Paul  dans  le  premier  de  ses  intéressants 
Annuaires,  celui  de  1877  (i).  Nous  renvoyons  à  celle 
œuvre  d'un  homme  autorisé,  n'osant  pas  pour  le  moment 
aborder  le  développement  d'une  thèse  qui  demanderait  à 
elle  seule  un  article  spécial.  Il  nous  suf6ra  de  regretter, 
avec  notre  excellent  ami,  que  le  cours  des  temps,  et  peut- 
être  la  main  des  hommes,  aient  ravagé  les  belles  sculptures 
de  ce  porche.  Grâces  à  Dieu  I  le  portail  n'a  que  médiocre- 
ment souffert  ;  mais  les  faces  latérales,  si  nécessaires  à  la 
pleine  intelligence  de  l'œuvre,  sont  fortemeutendommagées. 
Notre  plume  a  signalé  de  nombreuses  dégradations.  11  eu 
est  une  qui  devait  lui  échapper  :  c'est  l'oblitération  générale 
de  ces  bas-reliefs  dont  l'herbe  des  vieux  murs  souille  déjil 
les  recoins.  La  démolition  de  la  voûte  et  plus  encore  la 
position  de  ces  sculptures  à  portée  de  la  main,  ont  lente- 
ment amené  cette  dégradation.  Serait-il  bien  coûteux  de 
relever  celte  voûte,  de  reprendre  ces  tableaux,  de  rendre 
enQn  au  monument  son  aspect  et  sa  fraîcheur  d'autrefois? 

Nous  avons  appelé  sur  cette  belle  œuvre  et  sur  l'église 

(i)  Dict.  raisonné,  vni,  4:H. 
(«)  Pag.  406-408. 


XLIY*  SESSION,  A  SENLIS.  611 

qu'elle  décore  la  sollicitude  des  hommes  spécialement 
voués  à  la  garde  de  nos  monuments.  Nous  sommes  heureux 
de  pouvoir  dire  à  la  Société  française  que  cet  appel  est 
entendu,  et  que  la  Commission  des  monuments  historiques 
se  livre  à  l'étudo  d'une  restauration  de  l'église  de  Beaulicu. 


L'abbé  J.-B.  Poclbrièrb, 

Inspecteur  de  U  Société  françaiie  d'Arcliéologie 
poar  le  département  de  la  Corrèxe. 


TABLE  DES  MATIÈRES 


Liste  des  membres  de  la  Société  française  d'Archéologie  i 

Comptes  du  trésorier xli& 

Programme  de  la  XLIV*  session  du  Congrès  archéo- 
logique de  Frauce 4 

Liste  alphabétique  des  souscripteurs 6 

Séance  d'ouverture  du  28  mai  4877.  —  Extrait  du 
discours  de  M.  de  Loogpérier-Grimoard 43 

Discours  de  M.  Léon  Palustre 45 

Topographie  préhistorique  d'une  partie  de  Tarrondisse- 
ment  deSenlis,  par  M.  le  comtedeMaricourt.     .     .  S2 

Les  monuments  mégalithiques  de  Thimécourt ,  près 
Luzarehes  (Seine-et-Oise),  constructions  contempo- 
raines de  Tàge  de  la  pierre  taillée,  par  M.  Milles- 
camps 43 

A  quelle  époque  faut-il  faire  remonter  la  prédication  du 
christianisme  dans  le  Pogus  sUvaneclensis,  par 
M.  Tabbé  Eugène  Muller 46 

Les  Arènes  de  Senlis,  par  M.  de  Caix  de  Saint- Aymour.         69 

Séance  du  mardi  29  mai  1877. —  Ëvaugélisation  des 
Gaules.  — Prédication  du  christianisme  dans  le  Pagus 
stjtcanectensis,  par  M.  Tabbéde  Meissas.     ...  78 

Réplique  de  M.  Tabbé  MQller 430 

Le  cimetière  du  Compan,  près  Luzarehes,  sépultures  de 
Tftge  de  la  pierre  polie,  par  M.  Hahn 44S 


614  TABLE. 

Station  de  la  fin  de  Tàge  de  la  pierre  polie,  à  Thimé- 

court,  par  M.  Vieille *     .     .     .        1V8 

Age  du  bronze.  —  Cachette  de  fondeur  à  Luzarches, 

par  M.  Hahn 450 

Hugo  de  Groot  (Grotius)  à  Ralagny  et  à  Senlis  (1623- 

4635),  par  M.  Hardouin 457 

Dom  Pierre  Coustant  et  Guillaume  d'Ercuis,  par  M.  le 

colonel  Coustant  d'Yanville 462 

Rapport  de  M.  B.  Ledain  sur  une  excursion  à  Chantilly, 

à  Saint-Leu-d*Esserent  et  à  Monlataire    ....        480 

Première  séance  du  mercredi  30  mai,  —  Les  silex 
taillés  de  Sauvigny-les-Bois  (Nièvre),  par  M.  le  doc- 
teur Jacquinot 485 

Note  relative  à  deux  emplacements  gallo-romains,  situés 
au  lieu  dit  Rigalot,  dans  la  forêt  de  Chantilly,  par 
M.  Margry 498 

Bratuspantium,  par  M.  Hayaux  du  Tilly 206 

Bataille  de  César  contre  les  Nerviens  au  passage  de  la 
Sambre,  par  M.  l'abbé  Caudel 232 

L'architecture  religieuse  dans  le  diocèse  de  Senlis  du  v** 
au  xvr  siMe,  par  M.  A.  Saint-Paul îifi 

Deuxième  séance  du  30  mai.  —  De  la  terminologie 
archéologique,  par  M.  l'abbé  Van  Drivai  ....         2G9 

Les  archers,  arbalétriers  et  anjuebusiers  à  Senlis,  par 
M.  l'abbé  Valtier 277 

Notes  pour  la  carte  préhistorique  du  département  de 
l'Oise,  par  M.  le  comte  de  Maricourt 301 

'hudi  31   mai.  —  Excursion  à  Compiôgne.     .     .     .         312 
Hôtel  de  ville  de  Compiégnc,  par  M.  le  comte  de  Marsy.        3il 

Séance  du  vendredi  4"  Juin.  —  Notre-Danio-de-la- 
Victoire,  près  Senlis,  par  M.  Paul  Durand     ...        378 

Carte  comparative  du  pays  scnlicien,  aux  temps  anciens 
et  de  nos  jours,  par  M.  Hahn 380 


TABLE.  615 

Note  sur  les  nionnaies  découvertes  dans  les  fouilles  des 

arènes  de  Sentis,  par  M.  Dupnis 381 

Les  bibliothèques  de  Senlis,  par  M.  Tabbé  Vattier  .     .        385 
Études  sur  les  principales  voies  romaines  et  gallo-ro- 
maines partant  de  Senlis^  par  M.  Tabbé  Caudel  .     .        396 

Excursion  ^  Chaalis  et  à  Ermenonville 420 

Sir  Henri  Parker  et  ses  projections  de  vues  photogra- 
phiques, par  M.  Jules  de  Laurière 421 

Samedi  2  Juin,  —  Excursion  à  Champlieu,  Pierre- 
fonds  et  Morienval 430 

Dimanche  3  juin,  séance  de  clôture.  —  Quelle  est 
la  véritable  signification  à  donner  aux  mots  mansio 
et  mutaiio  dans  les  itinéraires,  par  M.  Hayaux  du 

Tilly 433 

Le  château  de  Sentis,  par  M.  Bouet 436 

Conférence  sur  les  amphithéâtres  en  général  et  sur  les 
arènes  de  Senlis  en  particulier,  par  M.  Ernest  Bosc.        443 

Discours  de  M.  Léon  Palustre 453 

Distribution  des  médailles 458 

Lundi  i  juin.  —  Excursion  â  Mello,  Mouchy  et  Beau- 

vais 469 

Extrait  d'une  notice  sur  Lévignen,  par  M.  Tabbé  Gros.  463 

Voie  romaine  de  Senlis  â  Meaux,  par  M.  l'abbé  Caudel.  447 


EXCURSION  ARCHÉOLOGIQUE  DANS  LE  DÉPARTEMENT 

DU  LOT. 


Compte -rendu  général 483 

Les  aiguilles  de  Pigeac,  par  M.  Léon  Palustre  ...  499 
Mémoire  sur  le  camp  des  Césarines,  près  de  la  ville  de 

Saint-Céré,  par  M.  Castagne   ........  506 

Souillac,  Le  Vigan  et  Gourdon,  par  M.  de  Laurière.     .  529 


GIG  TABLE. 

Lo  pont  (le  Valontré  à  Cahors.  —  Nolice  historique  et 
archéologi«|ue,  par  M.  Paulde  Fontenillcs.     ...        556 

L'église  et  le  portail  de  Beaulieu,  par  M.  l'abbé  Poul- 
brière 5SI 


TABLE  METHODIQUE 


ARCHÉOLOGIE. 
I 

TEUPS   PaÊUlSTORIQUES. 

Topographie  préhistorique  d'une  partie  de  l'arrondisse- 

roonl  (le  Senlis,  par  M.  le  comte  de  Maricourt     .     .  ii 

Les  monuments  inôgalilliiquos  do  Thimêcourl,  près 
Lnzarches  (Seine-ct-Oise)  ,  construction  conlenipo- 
raines  de  l'Age  de  la  pierre  taillée,  par  M.  Millcs- 
oamps 43 

Le  ciuK'lière  de  Compan,  près  Luzarches,  sépultures  do 
Tàge  de  la  pierre  polie,  par  M.  Ilalin 442 

Station  delà  lin  de  l'ùge  de  la  pierre  poiie  à  Thimécourt. 

par  M.  Vieille 448 

Age  du  bronze,  cachette  de  fondeur  à  Luzarches,  par 
M.  Hahn 450 

Les  silex  taillés  de  Sauvigny-iès-Buis,  par  M.  le  docteur 
Jacquinot 185 

Notes  pour  !a  carte  préhistorique  du  département  de 
rOise,  par  M.  le  comte  de  Maricourt 304 


TABLE.  617 

II 
ÉPOQUE  AOKAINB. 

• 

Les  arènes  de  Senlis,  par  M.  de  Caix  de  Sainl-Aymour.         69 
Note  relative  à  deux  emplacements  gallo-romains,  situés 
an  lieu  dit  Rigalot,  dans  la  forêt  de  Qiantilly,  par 

M.  Margry 198 

Bratuspantium,  par  M.  Hayaux  du  Tilly 106 

Bataille  de  César  contre  les  Nerviens  au  passage  de  la 

Sambre,  par  M.  Tabbé  Caudel .        232 

Ëtudes  sur  les  principales  voies  romaines  et  gallo-ro- 
maines partant  de  Senlis,  par  M.  Tabbé  Caudel    .     .        396 
Quelle  est  la  véritable  signification  à  donner  aux  mots 
mansio  et  mutatio  dans  les  itinéraires,  par  M.  Hayaux 

du  Tilly , 433 

Le  château  de  Senlis  (ancien  castrum),  par  M.  Booet  .  436 
Voie  romaine  de  Senlis  à  Meaux,  par  M.  Tabbé  Caudel.  474 
Conférence  sur  les  amphithéâtres  en  général  et  sur  les 

arènes  de  Senlis  en  particulier,  par  M.  Em.  Bosc.  .        443 
Mémoire  sur  le  camp  des  Césarines,  près  la  ville  de 
Saint-Céré  (Lot),  par  M.  Castagne S06 


III 


MOTBN  AGB. 

L'architecture  religieuse  dans  le  diocèse  de  Senlis,  du 

y  an  xvi«  siècle,  par  M;  A.  Saint-Paul    ....  246 

Hôtel  de  ville  de  Compiègne,  par  M.  le  comte  de  Marsy.  321 
Notre-Dame-de-la-Victoire,  près  Senlis,  par  M.   Paul 

Durand 378 

Le  château  de  Senlis,  par  M.  Bouet *  436 

Les  aiguilles  de  Figeac,  par  M.  Léon  Palustre    ...  490 
Souillac,  Le  Vigan  et  Gourdon  (Lot),  par  M.  de  Lau- 

rière 529 


618  TABLE. 

Le  pont  de  Valentré  à  Cahors.  —  Notice  historique  et 
archéologique,  par  M.  Paul  de  Fontenillcs.     ...        556 

L'église  et  le  portail  de  Beaulicu  (Corrèze),par  M.  Tabbc 
Poalbrière 581 


NUMISMATIQUE. 

Note  sur  les  monnaies  découvertes  daus  les  fouilles  des 
arènes  de  Senlis,  par  M.  E.  Dupui 383 

HISTOIRE. 

A  quelle  époque  faut-il  faire  remonter  la  prédication 
du  christianisme  dans  le  Pagus  sUvaneciensis^  par 
M.  Fabbé  Eug.  MUUer? 40 

Ëvangélisation  des  Gaules.  —  Prédication  du  christia- 
nisme dans  le  Pagus  silvanectensis,  par  M.  Tabbé 
de  Meissas 78 

Hugo  de  Groot  (Crrotius)  à  Balagny  et  à  Senlis  (1623- 
1635),parM.  Hardouin 157 

Dom  Pierre  Constant  et  Guillaume  d*Ercuis,  par  M.  le 
colonel  Constant  d'Yanvillc ««îi 

Les  archers,  arbaictriers  et  arquebusiers  à  Senlis,  par 
M.  Tabbé  Vallier 277 

Les  bibliothèques  de  Senlis,  par  M.  l'abbc  Vatlior  .     .        M") 

Extrait  d'une  notice  sur  Lôvigncn.  —  Les  francs-ficfs 
du  Valois,  par  M.  l'abbé  Gros 463 

MÉLANGES. 

Rapport  de  M.  Ledain  sur  une  excursion  à  Chantilly,  à 
Sainl-Leu-d'Essercnt  et  à  Montataire  .     .     .  *.     .        <80 

De  la  terminologie  archéologique,  par  M.  l'abbé  Van 
Drivai î69 

Excursion  à  Compiègne 31  î 


TABLE.  619 

Carie  comparative  du  pays  seDlicien  aux  tempâ  anciens 

et  de  nos  jours,  par  M.  Hahn 380 

Excursion  à  Chaaiis  et  à  Ermeuonvilie itO 

Sir  Henry  i^arker  et  ses  projections  de  vues  photogra- 

phiques,  par  M.  Jules  de  Lauriërc 424 

Excursion  à  Cliamplieu,  Pierrefonds  et  Morienval    .     .  430 

Excursion  à  Melio,  Moucliy  et  Beauvais 459 

Compte-rendu  général  d'une  excursion  archéologique 

dans  le  département  du  Lot 483 


i 


LISTK  DES  GRAVURES 


L  Sépulture  néolithique  du  Compan  (Luzarches).  Age  de 
la  pierre  polie 442 

2.  Découverte  d*une  cachette  de  fondeur  (Luzarches). 

Age  du  bronze 452 

3.  Emplacement  gallo-romain  au  lieu  dit  Rigalot,  dans 

la  forêt  de  Chanlillv 200 

4.  Porte  de  Tarsenal  do  Compiègno  d'après  un  dessin 
conservé  aux  archives  municipales 321 

3.  Tour  de  révôché,  à  Senlis 437 

6.  Tour  du  château  de  Senlis,  vue  intérieure.  .    .     .        439 

7.  Le  castrum  de  Senlis 441 

8.  Sceau  de  la  commune  de  Figeac.  —  Id.  de  l'abhaye 
de  Saint-Sauveur  de  Figeac.  —  Médaille  de  pèleri- 
nage reproduisant  le  sceau  do  Notre-Dame  de  Roca- 
madour.  —  Monnaie  mérovingienne  trouvée  au  Puy 
d'Issolud 488 


6t0  TABLE. 

9.  Trésor  de  Rocamadoor.  -^  Croix  processioDDale 

(XII*  siècle) 496 

10.  Id.  —  Revers  de  la  croix  précédeote.     ...  496 

44.  Custode  en  cuivre  émaillé  (xiv«  siècle).     ...  496 

11.  Id.  -—  Monstrance  en  argent  (xv«  siècle).  ...  496 

43.  Reliquaire  émaillé  (xiii»  siècle) 496 

44  Plan  du  camp  des  Césarines  (Lot) 51 1 

45.  Plan  de  l'église  de  Vigan  (Lot).  —  Vase  trouvé  au 
Vigan 544 

46.  Plan  de  C^hors  d'après  Tass\n 560 

47.  Armoiries  de  divers  cvèques  de  Cahors.     .     .     .  560 

48.  Élévation    géométrale   du   pont   de  Valenlré,   à 
(Cahors 560 

49.  Portail  méridional  de  Féglisc  de  Beaulieu  (0)rrèze).  592 
20.  Bases  de  colonnes  à  l'église  de  Beaulieu.  .  .  .  :\9i 
24.  Crosse  eucharistique  à  l'église  do  Beaulieu.     .     .  592 


umiuitaii  rAOL  iocssaii,  act  di  irct.  5,  a  tocia. 


ARIES 

STANFORD     UNiVLRSlT 

»  LU 

t     UBRARIES       STANFORD     UN 

H/ER 

i     STANFORD  UNIVERSITY  ^ 

IBRAI- 

3    UNWERSITY   LIBRARIES         STANF, 

FORD  ' 

UNIVERSITY     UBRARIES 

ST/^ 

ERSITY 

LIBRARIES         STANFORC 

'UNI 

\RIES 

STANFORD     UNIVERStrv 

LIBI 

ES    STANFORD  ""'«ha 


RD     UNIVERSITV 


LIBRARIES 


aNFORD    university 


IVERSITY     LIBRARIES         STANFORD   UNI\ 


raries 


STANFORD  OKIVEBSr 

Stanford,  CallTi 


ANFORD  ti 


IVLHSirV