Skip to main content

Full text of "Séances générales tenues à ... en ... par la Société française pour la conservation des monuments historiques"

See other formats


CONGRÈS 

ARCHÉOLOGIQUE 

DE      FRANGE 

XL''  SESSION 


/  r 


SEANCES  GENERALES 

TENUES 

A  CHATEAUROUX  ^ 

EX    1893 

PAR  LA  SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D'ARCHÉOLOGIE 

POUR  LA  CONSERVATION  ET  LA  DESCRIPTION  DES  MONUMENTS 


PARIS 

DERACHE,  —  DIDRON,  —  DUMOULL\,  LIBRAIRES 

TOURS 
JULES    BOUSEREZ,     IMPRIMEUR 

1874 


SÉANCES  GÉNÉRALES 


TENUES 


A   CHATEAUROUX 


CONGRÈS 

ARCHÉOLOGIQUE 

DE      FRANCE 

XL"  SESSION 

SÉANCES  GÉNÉRALES 

TENUES 

A   CHATEAUROUX 

EX     1S93 

PAR  LA  SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D'ARCHÉOLOGIE 

POUR  LA  CONSERVATION  ET  LA  DESCRIPTION  DES  MONUMENTS 


PARIS 

DERAGHE,  —  DIDRON,  —  DUMOULIN,  LIBRAIRES 

TOURS 
JULES    BOUSEREZ,     IMPRIMEUR 

1874 


THE  J.   PAUL   GETTV  CENVER 
LIBRARY 


LISTE  GENERALE 

DES  MEMBRES  DE  LÀ  SOCIÉTÉ  FRANÇAISE  D'ARCHÉOLOGIE 
Par  ordre  Géographique  et  Alphabétique  (1). 


Bureau  central. 

MM.  DE  COUGNY,  directeur  de  la  Société,  au  château  de  la  Grille,  près  Chinon. 
L'abbé  LE  PETIT,  chanoine  honoraire  de  Reims  et  de  Bayeux,  doyen  de 
Tilly-sur-SeulIes,  membre  de  l'Institut  des  provinces,  secrétaire  général. 
DE  LAURIERE,  inspecteur  général,  15,  rue  des  Saints-Pères,  a  Paris. 
DE  BEAUREPAIRE,  conseiller  à  la  Cour  d'appel,  secrétaire  adjoint,  à  Caen. 
DE  CHA VIGNY  (Félix),  secrétaire  adjoint,  à  Chinon. 
BOUET,  inspecteur  des  monuments  du  Calvados,  rue  de  l'Académie,  G, 

à  Caen. 
L.  GAUGAIN,  trésorier  archiviste,  rue  de  la  Marine,  3,  à  Caen. 

Conseil  d'Administration. 

Le  Conseil  se  compose  du  Directeur,  de  quarante  officiers  de  la 
Société  et  de  quarante  membres  ordinaires  résidant  dans  les  diffé- 
rentes parties  de  la  France,  indiqués,  dans  la  Liste  générale,  par 
des  caractères  italiques  (2). 

Les  Ministres,  le  Directeur  général  des  Cultes,  l'Inspecteur  géné- 
ral des  monumenis  historiques,  les  Cardinaux,  Archevêques  et 
Évèques  de  France  font  de  droit  partie  du  Conseil. 

(1)  Ceux  de  MM.  les  Membres  de  la  Société  dont  les  noms  seraient  omis  sur  cette 
liste,  et  ceux  qui  auraient  a  indiquer  des  rectifications  pour  leurs  noms,  qualités 
ou  domicile,  sont  priés  d'adresser  leurs  réclamations  à  M.  le  Secrétaire  général  de 
la  Société,  ou  à  M.  Gal(;ain,  trésorier  archiviste,  rue  de  la  Marine,  3,  à  Caen. 

(2)  Le  nombre  des  membres  ordinaires  actuellement  en  fonctions,  dépassant 
quarante,  devra  être  réduit  à  ce  chiffre  dans  la  prochaine  réunion  du  Conseil 
administratif. 

XL*'  SESSION.  -  A 


LISTE   1»ES   MEMBRES 


LISTE  GENERALE  DES  MEMBRES. 

L'astérisque  (*)  désigne  les  Membres  de  la  Société  abonnés 
au  Bulletin  monumental  (4). 

(Les  noms  des  membres  da  Conseil  sont  désignés  par  le  caractère  italique.) 


l'-e  DIVISION. 
:xorçr>.   r»AS-x>E-CAiL, aïs  ,    som>ie:   et   oise. 

Inspecteur  divisionnaire  :  '  M.  DESCHAMPS  DE  PAS,  ingénieur  des 
ponts  et  chaussées,  à  Saint-Omer. 

Inspecteur:  M.  le  comte  de  CAi'LAiNcotRT,  à  Lille. 

Alart,  banquier,  membre  de  l'Institut  *  Doiai  (la  Société  d'agriculture,  scien- 

des  provinces,  à  Dunkerquc.  ces  et  arts  de). 

BoNVARLET  (A.),consul  de  Danemark,  Godefroy  de  Mesxii.(;laise   (le  niar- 

id.  quis  de),  ancien  sous-préfet,  k  Lille, 

Callaixcourt  (le  comte  Anatole  de),  à  et  à  Paris,  rue  de  Grenelle,  93. 

Lille.  Herv"ïn    (Jean-Philippe),   à    Bergues 

CoRTiL(rabbé),  membre  de  l'Académie  (Nord). 

d'Archéologie  de  Belgique,  curé  de  La   Royère    (de),    notaire   honoraire, 

Vyldcr.  président    de    la    Commission    des 

"CfVELiF.R  (Auguste),  a  Lille.  moëres  françaises,  à  Bergues. 

Delaftf.r  (l'abbé),  curé  doyen  de  Saint-  Lefebre,  secrétaire  général  de  la  So- 

Éloi,  h  Dunkerque.  ciété  d'émulation  de  Cambrai. 

(1)Le  Bulletin  monumental,  qui  a  conquis,  depuis  W  ans,  un  rang  si  distin- 
gué parmi  les  publications  archéologiques  de  la  France  et  de  l'étranger,  parait  de 
si»  semaines  en  six  semaines,  illustré  d'un  grand  nombre  de  figures.  Pour  le  rece- 
voir, les  membres  doivent  ajouter  Itifr.  à  leur  cotisation  annuelle,  pour  la 
France,  et  1  S/;-,  pour  l'étranger. 


DE   LA   SOCIETE    FHANCAISE   D  ARCHEOLOGIE. 


m 


Leroy,  architecte,  à  Lille. 

MiNARD,  conseiller  à  la  Cour  d'appel 
de  Douai. 

Preux,  avocat  général,  à  Douai. 

'Régnier  (Mgr),  archevêque  de  Cam- 
brai. 

■  ScDRii  (l'abbé),  supérieur  du  grand- 


séminaire,  a  Cambrai. 
Vallée  (l'abbé),  vicaire  général,  id. 
Vendegies  (le  comte  Charles  de),  à 

Cambrai. 
Fincent  (Charles),  chef  de  division  à 

la  préfecture,  à  Lille. 


Pas-de-Calais. 


Inspecteur:  M.  l'abbé  Van  Drival,  chanoine  d'Arras. 


■  Alv,  artiste-peintre,  à  Rinxent. 

Cardevaoi^e  (Alphonse  de),  proprié- 
taire, à  Saint-Omer. 

'Desciiamps  de  Pas,  ingénieur  des 
ponts  et  chaussées,  id. 

GiVENCHY  (Charles  de),  id. 

Grebet  (l'abbé  Fran(;ois-Joseph),  curé 
de  Wierre-aux-Bois. 

Ha(;érie  (Amédée  de  Keugny  d'),  au 
château  de  Soseingghem. 

Héricourt  (le  comte  d'),  k  Arras. 

Hays  (E.  du),  au  château  de  Courset. 

Lefebvre  (l'abbé  F.),  à  Halinghem. 

Leoletïe  (Mgr),  évoque  d'Arras. 


Lejeune  (Emile-Ernest),  président  de 
la  Société  Philotechnique,  à  Calais. 

Linas  (le  chevalier  de),  à  Arras. 

Maillard  -  Géneau  (  Antoine  -  Désiré- 
Alexandre),  archéologue,  à  Samer. 

Quandalle  (Cyprien),  receveur  muni- 
cipal, membre  de  plusieurs  Sociétés 
savantes,  à  Montreuil-sur-Mer. 

Richard,  archiviste  du  Pas-de-Calais, 
a  Arras. 

SoL'OL'ET  (Achille),  à  Étaples. 

VA>i  Drival  (l'abbé),  chanoine  titu- 
laire, à  Arras. 


Ssomine. 


Inspecteur  :  '  M.  Mennechet,  conseiller  a  la  Cour  d'Amiens. 


Amyot    (Émeric),   capitaine    au    119'^ 

régiment   d'infanterie   de    ligne,  à 

Amiens. 
BeaevillE  (le  vicomte  de),  a  Montdi- 

dier. 
Delfortrie,  tils,  architecte,  k  Amiens. 
'  Duval,  chanoine  titulaire,  id. 
Ermigny  (d'),  k  Péronne. 
Jourdain  (l'abbé),  chanoine  titulaire, 

id. 


JuMEL,  curé  deQuevauviller  (canton  de 
Mallien-Vidame). 

Mathan  (le  baron  Edgard  de),  lieute- 
nant-colonel en  retraite,  id. 

"Mennechet  (Eugène-Alexandre),  con- 
seiller k  la  cour  d'appel,  a  Amiens. 

Morgan  (le  baron  Thomas  de),  pro- 
l)riétaire,  id. 


IV 


LISTE   DES   MEMBRES 


Oise. 


Inspecteur:  M.  de  Marsy,  à  Compiègne. 


Bareald,  chanoine  titulaire  de  Beau- 
vais. 

Brcslé,  peintre,  à  Senlis. 

Danjou,  président  du  tribunal  civil 
de  Beauvais. 

Latteix  (Ludovic),  directeur  do  la  fa- 
brique de  vitraux  peints,  a  Mesnil- 
Saint-Firmin. 


Lécot  (l'abbé),  directeur  de  la    Foi 

picarde,  vicaire  à  Noyon. 
Marsy   (Arthur  de),  conservateur  du 

musée,  élève  de  lÉcole  des  Chartes, 

à  Compiègne. 
Martin  VAL,    curé    de    Saint-Morain- 

ville. 


2«  DIVISION. 

AIS:iVE    et    .VR,r»ElVT>«rES. 

Inspecteur  divisionnaire  :  '  M.  GOMART,  membre  de  l'Institut  des  provinces, 
à    Saint -Quentin. 

^Visrve. 


Inspecteur  :  '  M.  Le  Proux. 


■Baii.i.am;iiirt  (Gustave  de),  a  Saint- 
Simon. 

CiiAiVENET  (dei,  président  du  tribunal 
civil,  à  Saint-Quentin. 

Dersi,  juge  au  tribunal  civil  de  Laan. 

Desaixs,  à  Saint-Quentin. 

'GoMART,  membre  de  l'Institut  des 
provinces,  a  Saint-Quentin. 

Le  Clerc  de  la  Prairie  (Jules),  prési- 


dent de  la  Société  Archéologique,  a 
Soissons. 

"  Le  Prolx,  a  Saint-Quentin. 

Martin,  membre  du  Conseil  général 
de  l'Aisne,  a  Rozoy-sur-Serre. 

TnÉVENART  (l'abbé),  chanoine  hono- 
raire, archiprétre  de  Laon. 

WiLLOT,  secrétaire  de  la  Société  Ar- 
chéologique de  Soissons. 


Arderxnes. 

Inspecteur:  '  M.  Coity,  architecte,  à  Sedan 
Gi  ii-LAiME  (l'abbé),  curé  de  Buzancy. 


Choisy,  ingénieur  des  ponts  et  chaus- 
sées, à  Réthcl. 


PE   LA   SOCIÉTÉ   FRANÇAISE   d' ARCHÉOLOGIE. 

3e  DIVISION. 

MATtlSTE    et    SEI]VE:-JBT->«A.R,ISrB. 

Inspecteur  divisionnaire:   '  M.  le  comte  de  MELLET,  membre  de 
l'Institut  des  provinces. 


îMtarne. 


Inspecteur:  '  M.  Givelet,  propriétaire,  à  Reims. 


Barré  (l'abbé),  curé  de  Plivot. 
•  Baye  (Joseph  de),  à  Baye. 
"Bordé  (l'abbé),  au  château  de  Baye. 
Chaubry  de  Troucenord  (le  baron  de), 

à  Cougy. 
CosQuiN ,  membre  du  Conseil  général. 
CouNAYE ,  à  Suippes. 
Denis  (Auguste),  à  Chàlons-sur-Marne. 
Dt'PLESSis,  notaire  honoraire,  à  Reims. 
DuQUENELLE,  membre  de  l'Académie, 

id. 
Garinet  (Jules),  conseiller  honoraire 

de  préfecture,  à  Chàlons. 
'Givelet,  membre  de  l'Académie  de 

Reims. 
Godard  (Isidore),  suppléant  du  juge  de 

paix,  à  Épernay. 
Goulet  (François- André),  négociant  à 

Reims. 
Landriot  (Mgr),  archevêque  de  Reims, 
membre  de  l'Institut  des  provinces. 
Lainois,  percepteur,  à  Reims. 


LoisEL,  architecte,  à  Chàlons -sur- 
Marne. 

"Mellet  (le  comte  de),  membre  de 
l'Institut  des  provinces,  au  château 
de  Chaltrait. 

Moignon  (Ernest),  conseiller  de  pré- 
fecture, à  Chàlons. 

*  Morel,  membre  du  conseil  admi- 
nistratif, percepteur,  a  Chàlons. 

"NicAisE  (Auguste),  à  Chàlons. 

PoisEL,  architecte,  à  Chàlons-sur- 
Marne. 

Robert,  propriétaire,  à  Reims. 

Perrier  (Emile),  a  Chàlons. 

Savy  (Camille),  chef  de  division  à  la 
préfecture,  à  Chàlons. 

Savy,  agent  voyer  eu  chef,  membre  de 
l'Institut  des  provinces,  id. 

Simon,  a  Reims. 

ToRTRAT,  architecte,  id. 

•  Varnier  (C),  à  Avize. 

Werlé  (Alfred),  a  Reims. 


Seine- et --Marne. 

Inspecteur:  M.  le  vicomte  de  Bonneiil,  à  Melun,  et  à  Paris, 
rue  Saint-Guillaume,  29. 

BoYER,  a  Jouarre.  Chapuis. 

•Erceville    (le    comte    Gabriel),    à        -Tiercelin  (l'abbé),  vicaire,  à  Jouarre. 


VI 


LISTE   DES   MEMBRES 


4"  DIVISION. 

CAIL.VA.OOS,     >IAIVCHE,     OR.IVE,     EUïtE 

et   SEnvE-nvïT-ÉRiEurtE. 

Inspecteur   divisionnaire:    '  M.  DE    BEAUREPAIRE,    couseiller   a  la 
Cour  d'appel  de  Caen. 

Calvados. 


Inspecteur  :    '  M.    Bolet. 


AciiARD  DE  Vacocnes  (Aniédée),  à 
Bayeux. 

Auberl,  membre  du  Conseil  de  l'Asso- 
ciatiou  normande,  à  Caen. 

AiVHAY,  architecte  de  la  ville,  id. 

Bazin  (Raoul),  à  Coudé-sur-Noircau. 

Bazin  (Alphonse),  courtier  de  navires, 
à  Caen. 

Beal'Colrt  (le  comte  de),  au  châ- 
teau de  Morainville,  au  Mesnil-sur- 
Blangy. 

■  BioArjuLR,  notaire  honoraire,  a  Caen. 
"  Beaikki'aike  (de),  conseiller  à  la  Cour 

d'appel,  k  Caen. 

Bi.a>(;y  (vicomte  Auguste  de),  au  châ- 
teau de  Juvigny. 

BoNNELMrjsE  (de),  a  Monceaux. 

BosCAis,  graveur,  k  Caen. 

■  Bolet,  id. 

Brëcolrt  (de),  ancien  ofticier  de  ma- 
rine, k  Caen. 

'Bhioleville  (le  marquis  de),  a  Gue- 
ron. 

'  Campion,  avocat,  secrétaire  général 
de  la  mairie,  a  Caen. 

Castee,  agent  voyer  chef  en  retraite,  a 
Bayeux. 

*  Caimont  (M""=  de),  a  Caeu, 

Cazin,  propriétaire,  a  Vire. 


Chatel  (Victor),  a  Valcongrain. 
Challiel'  (le  baron  de),  ancien  repré- 
sentant, a  Vire. 
CoRMLiER  (le  marquis  de),  k  Caen. 
*  Clssy  DE  Jl'coville  (le  marquis  de), 

k  la  Cambe. 
Dalger   (le  baron),  propriétaire,  au 

château  d'Esquay-sur-Seulles. 
Delalnay,  architecte,  k  Bayeux. 
Desfrieches  (l'abbé),  curé  d'Ussy. 
Deshayes,  architecte,  k  Caen. 
"DoiESNEL    (A.),    ancien    député,    à 

Bayeux. 
DoiETiL,  k  Vire. 
Dlbolrc;,  juge  honoraire  au  tribunal 

civil,  k  Falaise. 
De  Ferrage,  propriétaire,  k  Caen. 
'Du  Manoir  (le  comte),  maire    de 

Juaye. 
DrpoNT,  sculpteur,  k  Caen. 
•  Dupraij-Lamahérie,  conseiller  a  la 

cour  d'appel,  id. 
Farcy  (Paul  de),  a  Bayeux. 
Ferrand,  préfet  du  Calvados. 
Féueriqle   (Charles-Antoine),   avocat, 

a  Vire. 
Flam)in,  membre  du  Conseil  général, 

a  Pont-rÉvéque. 
Floolet,  correspondant  de   l'Institut, 


DE   LA    SOCIÉTÉ    FRANÇAISE   d'aRCHÉOLOGIE. 


VII 


au    château  de  Fonnentin,  et   rue 

d'Anjou-  Saiut-Houoré.  52,  à  Paris. 
'  Fontette  (le  baron  Emmanuel  de), 

ancien  député,  h  Monts. 
' Formîgny  de  la  Londe  (de),  aCaen. 
Foi'OiF.s  (l'abbé),  curé  de  Trois-Monts. 
FoLRNÈs  (le  marquis  Arthur  de) ,  à 

Veaux-sur-Seulles. 
FoLRNiER  (l'abbé),  curé  deClinchainps. 
'Gaug.mn,  propriétaire,  à  Caen. 
'  Grasdval  (le  marquis  de),  membre 

du  Conseil  général,  à  Saint-Denis- 

de-Maisoncelles. 
GuERMF.R,  peintre,  à  Vire. 
GuERMER  (l'abbé  Léon),  aumônier  des 
hospices,  id. 

*  Guilbert  (Georges),  membre  de  l'As- 

sociation normande,  à  Caen. 
GiiLLARD,  conservateur  du  musée  de 

peinture,  id. 
*Handjéri  (le  prince),  au  château  de 

Manerbe. 
*Harcoirt  (le  duc  d'),  à  Thury-Har- 

court. 

*  Hettier,  conseiller  général,  à  Caen. 
HcGOMN  (Mgr),  évêque  de  Bayeux  et 

Lisieux. 
Laffetaij  (l'abbé),  chanoine  titulaire, 
à  Bayeux. 

*  La'Mariouze  de  Prévarin  (de),  an- 

cien directeur  des  domaines,  a  Caen. 
Lamotte,  architecte,  id. 
La  Porte  (Augustin  de),  à  Lisieux. 
Le  Blanc,  imprimeur-libraire,  à  Caen. 
Le  Coixte  (l'abbé),  curé  de  Cormelles. 
*Le  Ferron  de  Loxgcha.mp,  docteur 

en  droit,  à  Caen. 
Leffroy,  propriétaire,  à  Caen. 
Le  Gouix  (l'abbé),  curé  d'Authie. 
"Le  Petit    (l'abbé),    curé-doyen    de 

Tilly-sur-Seulles. 
Létot,  propriétaire,  à  Caen. 
'LiDEHARD,  propriétaire,  id. 
■  Loir  (l'abbé),  curé  de  Bienfaite. 


MARdiERiT  DE  RocMEFORT  (Léoncede), 

à  Vierville. 
MoxTcoMMERY   (le  comte  de),   a  Fer- 

vaques. 
Morin-Lavallée,  à  Vire. 
Nicolas  (Alexandre),  architecte  de  la 

ville  de  Lisieux. 
'OiLLiAMSON  (le  comte  Gabriel  d'),  au 

château  de  Saint-Germain-Langot. 
'Olive,  maire  d'EUon,  rue  Écho,  à 

Bayeux. 

*  Pannier,  avocat,  à  Lisieux. 
Pal'lmier,  ancien  député  à  Bretteville- 

sur-Laize. 
Pépin,  docteur-médecin,  à  Saint-Pierre- 
sur-Dives. 

*  Pierres  (de),  membre  du  Conseil  gé- 

néral, à  Souvières. 
Picot  (l'abbé),  supérieur  des  Mission- 
naires de  la  Délivrande. 
PoRQiET  (le  docteur),  à  Vire. 
Rioult  DE  Neuville  (le  vicomte  Louis 

de),  a  Livarot. 
RnAVLT  DU  Plessis-Vaidiére,  conseiller 

à  la  Cour  d'appel,  à  Caen. 
Saint-Jean  ,  membre  du  Conseil  géné- 
ral, a  Bretteville-le-Rabet. 
Saint-Remy  (de),  à  Caen. 
Tell()t  (Henri),  rue  des  Croisiers,  à 

Caen. 
Tiennotte,  inspecteur  de  l'Association 

normande,  à  Caen. 
•Tirard  (J.),  à  Condé-sur-Noireau. 

*  TissoT,  conservateur    de  la  Biblio- 

thèque, à  Lisieux. 
ToisTAiN  (le  vicomte  Henri  de),  ancien 
officier  de  marine,  au  château  de 
Vaux-sur-Aure. 

*  Travers,  ancien  professeur  à  la  Fa- 

culté des  lettres,  secrétaire  perpétuel 

de  l'Académie  de  Caen. 
Travers  (  E.),  conseiller  de  préfecture, 

à  Caen. 
Venceon  (l'abbé),  curé  de  Luc. 


VIII 


LISTE   ItES   MEMBRES 


Vic.vN  (llonri  de),  inspecteur  des  fon'ts 
en  retraite,  à  la  Pelile-l.andede- 
Cerquem,  par  Orbec-en-Auue. 


/îV/fCs  (Georges  de),  membre  de  l'In- 

slitut  des  provinces,  a  Hayeux. 
VvoRY,  sculpteur,  a  Bayeux. 


Manche. 


Inspecteur:  *  Mgr  Bravard,  évoque  de  Coutances. 


•  ANNovti.i.F.  (Michel  d'I,  maire,  à  Au- 

derville. 

•  Bravard  (Mgr),  évi^que  de  Coutances 

d'Avranches. 

Deligand,  chanoine,  k  Coutances. 

Hasley  (labbé  Isidore),  curé  coadju- 
teur  d'Hémevez. 

Laink,  président  de  la  Société  archéo- 
logique, a  Avranches. 

"  Lk  Bki  k,  à  Avranches. 

Lk  Carddnnei-  (1  abbé),  archiviste  du 
diocèse,  à  Coutances. 

Lf.  Crf.ps,  propriétaire,  à  Saint-Lô. 

Lk  GuipiLS  (l'abbé),  curé  de  Percy. 

Lf.  Mkslk  (l'abbé),  curé  de  Savigny, 
près  Saint-Hilaire-du-Harcouët. 


Mori.iN,  inspecteur  de  l'Association 
normande,  à  Mortain. 

Onfroy  ueTracy, percepteur,  à  Gavray. 

Pontgidald  (le  comte  César  de),  au 
château  de  Fontenay,  près  Monte- 
bourg. 

'  QiÉNAiLT,  ancien  sous-préfet  de  Cou- 
tances. 

RiGNY  (de),  receveur  des  linances ,  à 
Valognes. 

RoniÉ  (le  comte  de),  au  château  de 
Sainl-Symphorien. 

TocoiF.viLLE  (le  comte  de),  au  château 
de  Nacqueville. 

ViALi.KT,  procureur  de  la  République, 
à  Montmorillon. 


Insperlfiiir:  M.  Léon  df.  La  Sicotiére,  membre  de  l'Assemblée  nationiile, 
a    Alencon. 


Barrerey  (de),  au  château  de  Mati- 
gnon, à  Essay. 

■  lilanrhetirre,  ancien  conducteur  des 
ponts  et  chaussées,  membre  de  l'In- 
stitut des  provinces,  u  Domfront. 

Camvet,  inspecteur  de  l'Association 
normande,  au  château  de  Chamboy. 

Contaoes  (le  comte  de),  membre  du 
Conseil  sénéral,  à  Sainl-.Maurice. 

Fay  (le  vicomte  du),  au  château  de  la 
Guimandiére. 

*L\  Kerhierk  (le  comte  de), au  chuleau 


de  Ronfougeray. 
La  Gakenne  (Je),  secrétaire  général  de 

la  préfecture,  à  Alencon. 
La   Sicotière  (Léon   de),  député   de 

l'Orne,  a  Alençon. 
Latoi  k-Mezeray,  ancien  maire  d'Ar- 
gentan, membre  du  Conseil  général 

de  l'Orne,  a  Argentan. 
Le  Cointre  (Eugène),  a  Alençon. 
Le  Vavasseer  (Gustave),  membre  de 

l'Institut  des  provinces,  à  la  Lande- 

(le-Lougé. 


DE    LA   SOCIÉTÉ   FRANÇAISE   d'aRCIIÉOLOGIE. 


IX 


Mackai-  (le  baron  de),  ancien  (k'pulé 
au  Corps  législatif,  au  chiUeau  de 
Vimer,  par  Vimoutiers. 


Miitii;,  architecte  de  la  ville,  a  Fiers. 
■PAsyrii-H-o'AL'Dii-iKKT  (le  duc),  au 
château  de  Sacy,  près  Argentan. 


Euro. 

Inspecteur:  '  M.  Raymond  Bordeaux,  docteur  en  droit, 
à   Evreux. 


Bardf.t,  docteur-médecin,  îi  Bernay. 

*  BuossEViLLi-;  Cle  niarcjuis  de\  ancien 
député,  au  cliàleau  d'Auifreville-la- 
Canipagne. 

Bourdon  (l'abbé),  curé  de  Saint-Ger- 
main, à  Pont-Audemer. 

'Bordeaux  (Raymond),  docteur  en 
droit,  membre  de  l'Institut  des  pro- 
vinces, à  Evreux. 

Caresme  (l'abbé),  curé  de  Pinterville. 

Dauger  (le  comte),  au  château  de  Men- 
neval. 

DiiiON  (Paul),  propriétaire,  à  Louviers. 

Duhamel-Marette,  peintre- verrier,  à 
Evreux. 

Guillard  (E.),  avoué  à  Louviers. 

Lair  (  Casimir  ) ,  à  Saint-Léger-de- 
Rostes. 

Lalun,  architecte,  à  Louviers. 


La  RoNCiÈRE  le  Noury  (le  baron  Clé- 
ment de),  amiral  au  château  de  Cra- 
couville. 

Le  Blond,  entrepreneur  de  bâtiments, 
à  Gisors. 

Leteuil,  huissier,  à  Breteuil. 

LoiSEL,  ancien  maitre  de  poste,  à  la 
Rivière-Thibouville. 

■  Mali!Ranciie,  greflierdu  tribunal  civil 
de  Bernay. 

Méry  (Paul),  à  Evreux. 

Petit  (Guillaume),  ancien  député,  à 
Louviers. 

Prétavoine,  membre  de  l'Institut  des 
provinces,  maire  de  Louviers. 

QuKViLLY  (Henri),  à  Beaumesnil. 

Rostolan  (le  comte  de),  k  Evreux. 

*ScHiCKLER,  au  château  de  Bizy,  près 
Vernon. 


Seixie-Inférieuro. 

Inspecteur  :  '  M.  Léonce  de  Glanville,  membre  de  l'Institut  des  provinces, 
à  Rouen. 


Argentré  (le  vicomte  d"),  à  Rouen. 

Barbier  de  la  Serre,  sous-inspecteur 
des  forêts,  à  Rouen. 

*  Barthélémy  père,  architecte,  id. 

Barthélémy  fils,  architecte,  id. 

Baudicourt  (Théodule  de),  id. 

Baudry  (Paul),  id. 

Beaurepaire  (de),  archiviste  de  la  pré- 
fecture, à  Rouen. 

XL*  SESSION. 


Bertiie  (le  docteur),  membre  de  l'Asso- 
ciation normande,  rue  Etoupée,  id. 

Belzeville,  rédacteur  eu  chef  du  Jour- 
nal de  Rouen,  id. 

"Bonnet,  sculpteur,  rampe  Bouvreuil, 
id. 

■  BoNNECHOSE  (Mgr  de),  cardinal-arche- 
vêque de  Rouen,  id. 


B 


LISTE   DES   MEMBRES 


BoLRDET  (Désiré),  quai  Videcoq,  u"  3, 

au  Havre. 
Briancuos,  à  Gruehet-le-Valassc. 
CuABOix,  entrepreneur,  à  Rouen. 
Chavknthé,  entrepreneur,  id. 
"  CheiTtaux,  auchàteaudeBoscniesnil, 

prés  Saint-Saéns. 
Cochet  (l'abbé\  conservateur  dn  musée 

d'antiquités,  à  Rouen. 
'Colas  (.l'abbé),   chanoine   titulaire, 

conservateur  du  musée  céranii(|ue, 

id. 
CoMONT  (l'abbé),  curé  de  Saint-Pierre- 

le-Viger. 
CoiRTOs.sE,  architecte,  à  Rouen. 
Cl'sson,  secrétaire  général  de  la  mairie, 

id. 

*  Decorde  (,1'abbé),  curé  de  Notre-Dame 

d'Âliermont. 
Desmarkst  (,L.),  architecte  en  chef  du 

département,  à  Rouen. 
Devalx,  artiste-peintre,  rueThiébault, 

89,  au  Havre. 
'  Dlmoxt  (E.),  employé  aux  docks,  au 

Havre. 
'  Dlranville   (Léon  de),  propriétaire, 

à  Grancourt. 
'  DrvAL,  percepteur  des  contributions 

directes,  à  Lillebonne. 
EsTAixTOT    (le    vicomte    Robert    d'), 

avocat,  a  Rouen. 
pALotKT  (Octave),  filateur,  id. 
Flelry  (Charles),  architecte,  id. 
'Fleury,  arciiilecte  de  la  ville,   au 

Havre. 
GAtcoLRT  (Enimanuol de), jugedcpaiit, 

à  Saint-Saéns. 
GiLLi':s  (P.),  maiiuracluricr,  à  Rouen. 
GiRONcoiRT  (de),  membre  du  Conseil 

général,   à  Varinipré,    près    Ncuf- 

cbàlel. 
'Glanvii.le  (del,  inspecteur  delà  So- 
ciété, à  Rouen. 

*  Granuin  (Gustave -Victor),  président 


de     la    Société    archéologique,     à 

Elbeuf. 
Grimais,  entrepreneur,  à  Rouen. 
GiERouT,  ancien  notaire,  id. 
HojiAis,  avocat,  id. 

La  Lonue  (de),  ancien  officier  de  cava- 
lerie, id. 
Le  Comte  (l'abbé),   professeur  à  la 

Faculté  de  Théologie,  à  Rouen. 
Lefort,  avocat,  id. 
Legendre,  propriétaire,  id. 
Lemire,  avocat,  id. 
Leseigxelr,  filateur,  id. 
Letellier,  photographe,  au  Havre. 
Lisey,  propriétaire,  à  Elbeuf. 
LoRMiER  (Charles),  avocat,  id. 
LoTii  (l'abbé),  prof,  d'éloquence  sacrée 

à  la  Faculté  de  Théologie,  à  Rouen. 
Mabire,  propriétaire,  à  Neufchâtel. 
Margleret  (E.),  courtier  de  commerce, 

à  Rouen. 
MAfDirr,  avocat,  à  Neufchâtel. 
Méralx      (Amédée),      compositeur, 

membre  de  l'Institut  des  provinces,  à 

Rouen. 
Moxtailt  (le  comte  de),  au  château  de 

Nointot,  près  Bolbec. 
Pallier,    ancien     manufacturier,     à 

Rouen. 
Petiteville (de), propriétaire,  à  Rouen. 
Poeyer-Qlertier,  ancien  ministre  des 

finances,  id. 
Provost  (l'abbé),  curé  de  Jumiéges. 
Quenouille    (Léopold),    au   Mesnil- 

Bénard,  près  Saint-Saens. 
Qlesnel  (Henri),  propriétaire,  a  Rouen. 
QuixET    (Edouard),    propriétaire,    à 

Rouen. 
■Roessler,  au  Havre. 
Sarrazin,  à  Rouen. 
Sauvage   (l'abbé  Eugène) ,  professeur 

au  petit  séminaire    du  Mont-aux- 

Malades,  près  Rouen. 


DE    LA   SOCIÉTÉ   FRANÇAISE   d'aRCIIÉOLOGIE. 


XI 


5«  DIVISION. 

SKTTVE.  SEIIVE-BT-OISE,  Y^OIVT^fE.    IjOIRET. 
AUBE,  et  ETjrtE-ET-LOIR. 

Inspecteur  divisionnaire  :  M.  EGGER,  membre  de  l'Institut, 
rue  Madame,  48,  a  Paris. 

Seine. 

Inspecteur:  '  M.  Darœl,  rue  de  la  Chaussée-d'Anlin,  27  his, 
à  Paris. 


•Artik  s- Bertrand  (M""  veuve) ,  rue 
Hautefeuille,  à  Paris. 

•AiBERT  (le  chevalier),  rue  d'Anjou- 
Saint-Honoré,  9  bis,  id. 

'AuBRUN,  arch.,  quai  Bourbon,  19,  id. 

Barthélémy  (Anatole  de),  ancien  sous- 
préfet,  rue  d'Anjou-Saint-Honoré,  9, 
id. 

Barthélémy  (Edouard  de),  maître  des 
requêtes  au  Conseil  d'État,  rue  de 
l'Université,  80,  id. 

•  Blacas  (le  comte  Stanislas  de),  rue  de 
Varennes,  52,  id. 

BocHiN,  rue  de  Provence,  .58,  id. 

BoNXELiL  (de),  rue  Saint-Guillaume, 31, 
id. 

"Box VOULOIR  (le  comte  Auguste  de), 
rue  de  l'Université,  l.*»,  id. 

Bottée  de  Tovlmon,  rue  des  Saints- 
Pères,  7  his,  id. 

Boivenm;  (Aglans),  rue  de  la  Chaise, 
■1%  id. 

Bruyère,  curé  de  Saint-Martin,  id. 

BucAiLLK  (Gustave),  rue  de  Paris,  218, 

id. 
Capelli,  boulevard  Pigalle,  38,  à  Mont- 
martre, id. 
Catlois  (le  docteur),  membre  de  l'In- 
stitut des  provinces,  rue  de  Sèvres,  4, 


a  Paris. 
'Château  (Léon),  directeur  à  l'Institu- 
tion professionnelle  d'Ivry. 
•  CoTTir.NY,  rue  Saint-Jacques,  240. 

CoisDE  (J.-P.),  membre  de  plusieurs 
académies,  id. 

*Courtarvel  (le  marquis  de),  rue 
Saint-Guillaume,  34,  id. 

Damiens,  statuaire,  rue  du  Cherche- 
Midi,  55,  id. 

'  Darcel,  membre  des  Comités  histo- 
riques, rue  de  la  Chaussée-d'Antin, 
27  bis,  id. 

David  (le  baron),  ancien  ministre  plé- 
nipotentiaire, rue  de  l'Oratoire-du- 
Roule,  7,  id. 

Delamare,  rue  Rougemont,  12,  id. 

*  Des  Cars  (le  duc),  rue  de  Grenelle- 
Saint-Gerinain,  79,  id. 

Delongueil, graveur,  rue  Royale-Faint- 
HoDoré,  8,  id. 

Dietricr,  graveur,  rue  des  Mathurins- 
Saint-Jacques,  id. 

•Dion  (Henri  de),  ingénieur,  rue  de 
Moscou,  28,  id. 

Doré  père,  membre  de  l'Institut  des 
provinces,  cité  Doré,  boulevard  de  la 
Gare,  108,  id. 


XII 


LISTE   DES   MEMBRES 


Duxos  (R.),  «venue  de  Wacrani,  :>0.  a 
Paris. 

DiPONT  (A"),  professeur  de  belles- 
leltres,  avenue  de  Neuilly,  116  bis, 
id. 

DiHEAi-  (A.)i  rue  de  la  Tour  d'Au- 
vergne, 10,  id. 

•  Estampes  île  comte  Théodore  d"),  cité 
Clary.  7,  ruo  Neuve-des-Mathurins, 
id. 

Er.GER,  membre  de  l'Institut,  rue 
Madame,  ^8,  id. 

FontainedeResbeco  (le  vicomte  Eugène 
de),  rue  du  Regard,  i-2,  id. 

Geffrov  (Auguste),  orfèvre-émailleur, 
rue  du  Bouloy,  10,  id. 

Godefroy-Mesmlglaise  (le  marquis 
de),  ancien  sous-préfet,  rue  de  Gre- 
nelle-Saint-Germain, 93,  id. 

HcssoN,  propriétaire,  rueMeslay,  18, 
id. 

'  JoANNE,  rue  de  Vaugirard,  20,  id. 

Keller  (Emile),  ancien  député,  rue  de 
Las-Cases,  7,  id. 

Laharthe  (Jules),  membre  de  l'Institut 
des  provinces,  rue  Drouot,  -2,  id. 

Labille  (Aimable),  architecte,  boule- 
vard Poissonnière,  -24,  id. 
Lambert  (Fabien),  architecte,  inspec- 
teur des  travaux  de  la  Ville,  rue 
Monsieur-le-Prince,  iH,  à  Paris. 

■  La  Tbêmki  ille  (le  duc  de),  id. 

Le  Clerc  (Julesi,  avocat,  ruedu  Regard, 

10,  id. 
Lk  Ci-ERi;  (Henri),  aichitecte,  id. 
Le  CoRniKR,  ingénieur  civil,    rue  du 

IVtit-Parc,  67,  id. 

■  Li.  Marivel-Dirocher,  de   l'Institut 

des  provinces,  rue  du  Regard,  6,  id. 
*LiKsvti.i.E  idei,  au\  Ratiguolles,  rue 

Gauthey,  -2i,  id. 
LibibR,  architecte,  rue  Blanche,  60,  id. 
'  LissoN,  peintre-verrier,  id. 
Margierye   (Mgr  de) ,  ancien  évéque 


d'Autun,  rue  de  Sèvres,  9."),  id. 
Marqiis   (Léon),   ingénieur,    rue    du 

Dragon,  10,  id. 
Minoret  (E.),  avocat  à  la  cour  d'appel, 

boulevard  de  Strasbourg,  à  Paris,  et 

a  Cannes  (Alpes-Maritimes). 

•  MiREPoix  (le  duc  de),  rue  Saint-Domi- 

nique-Saint-Germaiu,  102,  à  Paris. 

Mou,,  architecte,  id. 

Montant  (Henri  de),  directeur  du 
Journal  illustré,  rue  Neuve,  5, 
avenue  de  l'Impératrice,  id. 

MoNTLAiR  lie  marquis  de),  membre  de 
l'Institut  des  provinces,  député,  rue 
de  Grenelle-Saint-Germain,  7.">,  id. 

NiGENT  (le  comte  de),  ruedu  Regard, 
5,  id. 

*  OiLLiAMSON  (le  vicomte  d'),  rue  de  la 

Ville-l'Évéque,  29,  à  Paris. 
Paris  (Louis),  ancien  bibliothécaire  de 

la  ville  de  Reims,  rueRambuteau,  2, 

id. 
Paris   (Paulin),   membre  de  l'Institut 

de  France,  place  Royale,  à  Paris. 
'Perroid,  ancien    notaire,   rue    La- 

fayette,  M 3. 
'PoMMEREi    (le  vicomte  Armand  de), 

rue  de  Lille,  67,  id. 
•PoNTOis  DE  PoNTCARHÉ  (le   Hiarquis 

de),  rue  d'Anjou-Saiut-Honoré,  42,  id. 
PosTOs  d'Amëcoirt   (le  vicomte  de), 

rue  d'Enfer,  43,  id. 
PoPELiN  (Claudius),  peintre-émailleur, 

avenue  de  Plaisance,  3,  id. 
Poi ssielgie-Rlsand  (Placide), orfèvre, 

rue  Cassette,  13,  id. 
'  Prévost,  lieutenant-colonel  du  génie, 

à  Vincennes. 
Reboil  (Léopold),  rue  de  Boulogne,  3, 

à  Paris. 
Robert,  de  l'Institut,  directeur  à  VAd- 

ministr.  de  la  guerre,  id. 
Ricuemont  (le  comte  de),  rue  Saint- 
Dominique,  23,  id. 


DK    LA    SOCIÉTli    FRANÇAISE   1)  AUCHÉOLOCilË. 


XMI 


RncKR  i)K  La  Landk  (Ferdinand),  bou- 
levard Saint-Michel,  -27,  id. 

Ro\s  (le  vicomte  Ernest  de),  auditeur 
au  Conseil  d'État,  6,  place  Vendôme, 

id. 
Sacot,  membredeplusieursacadémics, 

rue  et  hôtel  Laflltc,  id. 
•Saint-Pai'l  (P.-L.  de),  avocat,  rue 

d'Aguesseau,  i,  id. 
Salvandy  (le  comte  Paul  de),  député, 

rue  Cassette,  30,  id. 


Tasciikrkai',  directeur  général  de  la 
Hibliotheque  nationale,  id. 

"TnÊNARD  (le  baron),  membre  de  l'In- 
stitut, place  Saint-Sulpice,  id. 

•TiiiAc  (de),  membre  (le  rinstitut  des 
provinces,  rue  Saint-Lazare,  24,  id. 

Tiiioi.LKT,  passage  Sainte-Marie,  8,  id. 

•  Vai  LDci;  (Frantz  de)  rue  du  Centre,  8, 

id. 

•  Voca  K  (le  comte  Melchior  de),  rue  de 

Lille,  90,  id. 


Seine-et-Oiso. 


Inspecteur:  '  M.  dk  Dion,  à  Montfort-l'Amaury. 


Amai  RY  (l'abbé),  curé  de  Vétheil. 

*  Dion  (Adolphe  de),  inspecteur  de  la 

Société,  id. 
GuYOT  (Joseph),  au  château  de  Dour- 

dan. 
Helde-Lépine,  à  Montfort-l'Amaury. 
Martin  (L.),  rue  de  l'Occident,  18,  à 

Versailles. 


Mesml-Dirand    (le   baron  de),    rue 

Saint-Honoré,  10,  à  Versailles. 
PiicoiL,    archiviste -paléographe,    au 

château  de  Villiers,  à  Draveil,  et  à 

Madrid  (Espagne). 
PoLLAiLLiER ,     membre    de   plusieurs 

Sociétés  savantes,  à  Bosny  (Seine-el- 

Oise). 


■Yonne. 

Inspecteur:  '  M.  Cotteal',  juge,  membre  de  l'Institut  des  provinces, 
à  Auxerre. 


'Challe,  sous-directeur  de  l'Institut 
des  provinces,  membre  du  Conseil 
général  de  l'Yonne,  maire  d'Auxerre. 

Clermont-Tonnerre  (le  duc  de),  au 
château  d'Ancy-le-Franc. 

*  CoTTEAU,  juge,  secrétaire  général  de 
l'Institut  des  provinces,  à  Auxerre. 

Havelt-des-Barres  (baron  du),  au 
château  des  Barres,  à  Sainpuits,  par 
Entrains-sur-Nohain. 


Héue  (Auguste),  a  Avallon. 

Laitier,  président  du  tribunal  civil, 
membre  du  Conseil  gén.,  à  Sens. 

Quantin,  archiviste  du  département,  a 
Auxerre. 

Ravin,  notaire  à  Villiers-Saint-Benolt. 

RoGEiER  (l'abbé),  curé  de  Sainl-Eusèbe, 
à  Auxerre. 

•  Tonnelier,  greflier  en  chef  du  tribu- 
nal civil,  il  Sens, 


\1V 


LISTE   DES   MEMBRES 


Loiret. 


Inspecteur:  "  M.  labbé  Des.>oyers,  chanoine,  vicaire  général,  membre  de 
l'Institut  (les  provinces,  à  Orléans. 


■  BorcHF.R  DE  MoLANnoN.  à  Orléans,  et 

a  Heuilly,  par  Ponts-au\-Moines. 
Hrean,  ingénieur  à  Gien. 
BizOMÊRE  (de),  membre  de  l'Institut 

des  provinces,  à  Orléans. 
•  Desnoyers  d'abbé),  chanoine  vicaire 

général,    membre  de  l'Institut    des 

provinces,  id. 

■  DiPANLOUP  (Mgr), de  l'Académie  fran- 

çaise, évéque  d'Orléans. 
Gervaise    Emile-Ambroise),  avoué,  à 

Montargis. 
GiiNEBERT,  ancien  maire,  id. 


Le  Roy,  avoué,  a  Montargis. 

Léorier  (Gaston),  au  château  de  Mon- 
targis. 

Mauciiand,  correspondant  du  ministère 
de  l'Instruction  publique,  prés Briare. 

Mauteliére  (Paul),  juge  au  tribunal 
civil,  à  Pilhiviers. 

Poii.i.AiN,  conducteur  des  ponts  et 
chaussées,  a  Orléans. 

TmiiONNEAV,  notaire,  à  Lorris. 

Thomas,  architecte,  directeur  de  la 
fondatioa  Durzy,  à  Montargis. 


Aube. 


In.iperteur  :  .M.  l'abbé  Coffinet,  clianoine  de  Troyes. 


.\ntessamv  (l'abbé  d'),  aunii'uiier  de 
l'hospice  Saint-Nicolas,  à  Troyes. 

BoNNKMAiN  (l'abbé) ,  cliaiioine  hono- 
raire, curé  de  Nogeiit-sur  Seine. 

CirviMONNOi  (l'abbé),  professeur  de 
rhélori(iup,  au  petit  séminaire  de 
Troyes. 

C.iifftnel  (l'abbé),  chanoine,  ancien 
\ieaire  général  du  diocèse,  à  Troyes. 

■  Fleuii.y-Coisin,  archilecle,  à  Troyes. 

liaijoL  (Amédée  ,  député,  membre  de 
rin>tilul  lies  provinces,  à  Troyes. 

(JREAi  (Jules), manufacturier,  à  Troyes. 

Haiiekt,  ancien  notaire,  id. 

IIehm.y,  docteur-médecin,  id. 


Le  Bri  n  Daliiam;,  membre  de  l'Institut 

dos  provinces,  id. 
'  Lapérouse  (Gustave),  président  de  la 

Société  académique  de  l'Aube,  id. 
Meka,  ingénieur  en  dief  des  Mines,  à 

Troyes. 
RoisARD  il'abbé,  clianoine,  arthiprètre 

de  la  cathédrale,  vicaire  général,  a 

Troyes. 
RoYER  (J.),  archilecle,  aux  Riceys. 
"Vemieivre  (le  comte    Gabriel  de), 

ancien   représentant,   à    Vendeuvre- 

sur-Barse. 
Vermlk  (A.),  propriétaire,  à  Troyes. 


DE   LA.  SOCIÉTÉ   FRANÇAISE   D  ARCHEOLOGIE. 


XV 


E  II  r  e-e  t-H- o  i  r . 


Inspecteur  :  '  M.  Charles  (I'Ai-vimare,  à  Dreux. 


•  Almmare  (Ch.  d'),  a  Dreux. 
'Durand  (Paul),  de  l'Iiistilul  des  pro- 
vinces, a  Chartres. 
Janson  pe  CoiET  (Reni'),  a  Dreux. 
"Merlet,  secrétaire  de  la  Société  ar- 


chéologique d'Eure-et-Loir. 
Morissxire  (de),  secrétaire  du  Comice 

agric,  à  Nogent-le-Rotrou. 
"Sainï-Lal'MER  (de),  ancien  maire  de 

Chartres. 


6«  DIVISION. 

SAFtTHE,  AIAIIVE-ET-LOIR.E!  et  >I.V^irEISr]VE. 

Inspecteur  divisionnaire  :  '  M.  le  comte  de  MAILLY,  ancien  pair  de  France,  au 
château  de  la  Roche-de-Vaux,  près  le  Mans,  et  à  Paris,  rue  de  l'Uuiversité,  53. 


Sartlie. 


Inspecteur:  M.  Hucher,  membre  de  l'Institut  des  provinces. 


"Albin   (l'abbé),  chanoine  honoraire, 

au  Mans. 
BoL'CHET  (Paul),  architecte,  id. 
Blottière,  sculpteur,  id. 
BorvET  (l'abbé),  curé  de  Neuvy. 
Chardon,  ancien  élève  de  l'École  des 

Chartes,  au  Mans. 
'Charles  (Léopold),  antiquaire,  à  la 

Ferté-Bernard. 
Charles  (l'abbé),  professeur  au  sémi- 
naire de  Saiut-Calais. 
*  Chevreau  (l'abbé),  vicaire  général  du 

Mans. 
"Ci'MONT  (le  vicomte  Charles  de),  à 

Sillé-le-Guillaume. 
David  (A. -G.),  architecte,  au  Mans. 
Deslais  (l'abbé),  curé  de  la  Couture, 

id. 
Étoc  de  Mazy,  médecin  de  l'asile  des 

aliénés,  id. 


GoMRERT,  architecte,  id. 

Hl'Cher,  membre  de  l'Institut  des  pro- 
vinces, id. 

Jaffard,  peintre-ornemaniste,  id. 

Joi'ssET  DES  Berries,  jugc  d'instruc- 
tion,  id. 

Ledru  (l'abbé), professeur  au  séminaire 
de  Précigné. 

Le  Pelletier,  doct.-méd.,  au  Mans. 

Livet  (l'abbé),  chanoine  honoraire, 
curé  du  Pré,  id. 

'Mailly  (le  comte  de),  ancien  pair  de 
France,  au  château  de  la  Roche-de- 
Vaux,  près  le  Mans. 

*  Paillard-DlclErê,  membre  du  Con- 
seil général,  au  Mans. 

Persi(;nan  (l'abbé),  chanoine  titulaire, 
id. 

Rousseau,  professeur  de  dessin,  id. 


WI 


LISTE   DES   MEMBRES 


■  Sai>t-Patf.rne  (le  comte  de),  à  Saiiit- 
Paterne. 

'SiNciiKR,  directeur  gént'ral  de  la 
compagnie  d'Assurance  mutuelle  mo- 
bilière, comuiandant  de  l'Ordre  de 
Charles  III,  chevalier  de  la  Légioii- 


d'honueur,  au  Mans. 
HduiKK,  architecte  au  Mans,  rue  aux 

Lièvres. 
ToiBLET  (l'abbé),   à  Mont-Saint-Jean, 

près  de  Sillé-le-Guillaume. 


"Maine-et-IjOire. 


Inspecteur  :  '  M.  Godard-Failtrif.h,  à  Angers. 


Anouilh  DE  Salies  (d'),  rue  Saint-Au- 
bin, à  Angers. 

CiiÉDEAf,  avoué,  à  Saumur. 

Chesneau,  grand  vicaire,  rue  Sàint- 
Evroult,  à  Angers. 

Chevalier  (l'abbé),  curé  de  Louvaincs. 

CoiRTiLLER  (Auguste),  ruB  d'Orléans, 
à  Saumur. 

'  Espinay  (d'),  membre  du  Conseil 
administratir,  conseiller  a  la  Cour 
d'appel  d'Angers,  membre  de  l'Insti- 
tut des  provinces. 

Far<.y  (Louis  de),  rue  du  Parvis-Saint- 
Maurice,  à  Angers. 

Frepcei.  (Mgr),  évéque  d'Angers. 

Garreat  (Alexandre),  à  Saint-Réiny- 
la-Varcnne. 

*  Gai.emhert  (le  comte  de),  au  château 
de  Parpacé,  prèsBaugé. 

■Godaru-Faixtrier,  membre  de  l'In- 
stitut des  provinces,  à  Angers. 


■  Joly-Leterme,  architecte  diocésain,  à 
Saumur. 

Lachése  (Paul),  imprimeur,  à  Angers. 

Lair  (Charles),  château  de  Blou,  près 
Longue. 

Lambert  (aîné),  président  du  tribunal 
de  commerce,  et  de  la  Chambre  con- 
sultative des  arts  et  manufactures,  à 
Saumur. 

Le  Blanc,  inspecteur  de  la  maison  cen- 
trale de  Fontevrault. 

LoLVET,  ancien  ministre,  à  Saumur. 

Mayaid  (Albert),  a  Saumur. 

Parrot  (A.),  de  l'Institut  historique, 
rue  de  Brissac,  a  Angers. 

Qdatrebarbes  (la  comtesse  de),  id. 

Roffay,  architecte,  à  Saumur. 

Saivage,  ancien  juge  de  paix,  à  Angers. 

Tardif,  chanoine-secrétaire  de  l'évêché, 
id. 


>Iayeixxie. 


Inspecteur:  '  M.  Le  Fiselier,  à  Laval. 


Barre  (Henri),  U  Jublains 
Bretonmere  (Louis),  rue  de  l'Kvéché, 

à  Laval. 
'  CiiAMi'Ai.NEY    (M""  la  marquise  de), 

au  château  de  Craon. 
CiiEKKAf,  avoué  à  .Mayenne. 
*  GtAVs  iiEs  TiM  (iiKS,  propr.,  id. 


■  Li:  Fiselier,  secrétaire  de  la  Société 

de  l'industrie,  à  Laval. 
Pointeau   (l'abbé),  vicaire  de  Fouge- 

rolles. 
Prediiomme  (l'abbé),  curédeLouverné. 
Sedaex  (l'abbé),   supérieur  du  grand 

séminaire,  ù  Laval. 


DE    LA   SOCIÉTÉ   FRANÇAISE   p'ARCIIÉOLOflIE.  XVII 


7«  DIVISION. 

T^Oin-KT-CTIER,     CHEn,     IIV OÏ^E-ET-LOIRE , 

iisri>iiE.  iviï<:viiE. 

Inspeclevr  dirisionnaire :  "M  ni;  COUGNY,  au  château  de  la  (irill<-. 
près  Chiiiou. 

TL,olr-et-Clier. 

Tnspertenr:  '  M.  le  marquis  df,  Viuram:,  membre  de  riustitut  des  provinces, 
à  Cour-Cheverny. 

BoDARi)  DE  LA  jACopiKRr,  (Anatole  de),  Laixay,  prof,  au  col.  de  Vendôme. 

au  château  de  Saint-O.ien.  Lf.nail  (Ernest),  architecte  à  Blois. 

Chai:vin,  juge,  à  Blois.  Nkilz  (Stanislas),  à  Courtiras. 

Df.lainf.    (Jules),    avoué   licencié,    h  *  Viiiraye  (le  marquis  de),  membre  de 

Romorantin.  l'Institut    des    provinces,    a    Cour- 

Hait.ou  (l'abbé),  curé  des  Fontaines.  Cheverny. 

Cner. 

Inspecteur:  *M.  l'abbé  Lenoir,  membre  de  l'Institut  dos  provinces, 
à  Chàtillon-sur-Indre. 

*  Bi-iiOT  DE  Kersers,  de  la  Soc.  des  Ant.  chaussées,  ii  Bourges. 

du  Centre,  à  Bourges.  *  Mf.loizes  (Albert  des\  trésorier  de  la 

CoiT.T  (René  de\   à  Couét,  prés  San-  Société  des  Antiquaires  du  Centre,  à 

carre.  Bourges. 

"Lalt.ardière  (Ch.  dc%   substitut,  à  Valois  (Georges^  secrétaire  général  de 

Bourges.  la  préfecture,  id. 
Maréchal,    ingénieur    des    ponts    et 

Iiadre-et- Loire. 

Inspecteur:  '  M.  Léon  Palistre,  a  Tours. 

Avis.se,  imprimeur,  à  Chinon.  Boislève-Desnovfrs,   maire  de  Lan- 

"  BiRNCoiRT  (le  marquis  de\  à  A/ay  le-  geais. 

Rideau.  Boiserez,  imprimeur,  a  Tours. 

XL^  SESSION.  C 


xvni 


LISTE   DES   MEMBRES 


Bill  lOv-DntBKiii..  eoiiseiller  (jéiiéral, 
au  Granil-Pressicny- 

Cii.visKM.vRTiN,  procureur  do  la  Répu- 
blique, à  Loches. 

•CuAVu.NY(  Félix  de),  secrétaire  général 
adjoint,  à  Chiiion. 

Cii.iviiiNY  (Octave  de),  au  château  de 
Chavigny. 

•  Coii;ny   iG.  de) ,    au  château  de  la 

Grille,  près  Chiiion. 

•CoC(;ny  (Hippolyle  de),  propriétaire, 
k  Tours. 

DuBOz  (Félix),  à  Chinoii. 

DiRAND  (l'abbé),  aumônier  de  l'iios- 
pice,  id. 

Gallois,  architecte,  à  Chiiion. 

'  Grandmaison,  archiviste  d'Indre-et- 
Loire,  lueinbre  de  la  Société  archéo- 
logique de  Touraine. 

Gréban  de  PoNToiHNY,  propriétaire,  au 
château  de  Pontourny,près  Chinon. 

•  Guérin  lils,  architecte,  à  Tours. 
'Hardion,  architecte,  à  Tours. 
JiTEAf  (l'abbé),  aumônier  du  lycée,  à 

Tours. 
'Lapercue,  à  Saint -Symphorieii,   à 
Tours. 


Li:(:i.ER<:  f/'ablié),  aumônier  des  Dames 
du  Saint-Esprit,  à  Tours. 

*  Lesèiile,  à  Tours. 

LoBiN  (LéopolJ),  peintre-verrier,  a 
Tours. 

*  Michelle,  à  Tours. 
'NoBiLLEAf,  propriétaire,  id. 

*  Palestre  (Léon),  à  Tours. 

'  PrYsÉ(;iR  (M"""  la  comtesse  de) ,  au 
château  de  Beugny. 

RouiN  (l'abbé),  curé  de  Saint-Ours,   à 
Loches. 
•  RociiEjAOLELEis   (M""»  la  comtesse  de 
la),  au  château  d'Ussé. 

"Saint-Georges  (le  comte  de),  au  châ- 
teau de  la  Brèche,  près  l'Ile-Bou- 
chard. 

Saint-Georges  (Edmond  de),  a  Tours. 

'  Salmun  de  Maisonroege,  à  Tours. 

*  Sarcé  (de) ,  au  château  de  Hodbert- 

Saint-Cliristophe. 
Senilhes  (L.  de),  receveur  i)articulier 

des  finances,  à  Loches. 
Sonnaij  (de),  à  Gravant. 
Thomas  (Gaétan),  inspecteur  des  forêts, 

à  Chinon. 


Intlre. 


Inspecteur  :  '  M,  le  docteur  Faeco>neae  dt  Fresne,  ii  Chàteauroux. 


Baruoix,  conservateur  du  musée,    à 

Chàteauroux. 
Blanciiet  J'abbé",  aumônier  du  Lycée, 

id. 
'CiiARoN  ;ra')bé\curéde  Saint-Marcel, 

canton  d'Argenton. 
Daigeson,  juge,  a  Chàteauroux. 
Damoirette  (.l'abbé),  à  Chàteauroux. 
*  Faeconneae-Defresne  (le  docteur),  à 

Chàteauroux. 
Ferri-Pisam  (le  général),  id. 
Gi'iLLAiiu,  ancien  agenl-voyer,  id. 


■Jasmin  (Jules),  à  Biizaiiçais. 

■  La  Villegille  (de\  à  Dangi. 

"Le  Noir,  curé  de  Chàtillon,  chanoine 
honoraire. 

Roeedde,  receveur  des  domaines,  à 
Chàtillon. 

Lexseigne,  conducteur  des  ponts  et 
chaussées,  à  Argenton. 

' Foisin  (l'abbé),  curé  de  Douadic 
(canton  du  Blanc),  Chàtillon -sur- 
Indre. 


UE    LA    SOCIETE    KUANCAlSh:    D  ARCIlEdlddlE.  XIX 


Inspecteur:  'M.  de  Laicardikre,  substitut,  à  Bourges. 

Chômer  (l'abbé),  curé  de  Marzy.  membre  de  l'Académie  nationale  de 

*  Hêhon  de  Villefosse,  archiviste  du  Lyon  et  de  la  Société  archéologique 

département,  k  Ncvcrs.  de  Nevers,  au  château  de  Toury-sur- 

"SorLTRAiT    (le  comte    Georges  de),  Abron. 

inspecteurdes  mouvements  du  Rhùne,  Violette  (l'abbé),  archipr.  de  Cosne. 


8«  DIVISION. 
r*uir-r>E-r>oM^E,   ma^ute-loire,  loifie 

ot    LOZÈRE. 

Inspecteur  divisionnaire:  '  M.  J.-B.  BOUILLET,  membre  de  l'Institut  des 
provinces,  a  Clermont-Ferrand. 

I*uy-tle-DÔjne. 

Inspecteur  :  "M.  de  Lafaye-l'Hopitae,  a  Clermont. 

*  BouiLLET  (J.-B.),  membre  de  l'IiistiUil  payeur  général,  a  Clermont. 

des  provinces  à  Clermont-Ferrand.  "  Serres  de  Gauzy  (Jules),  k  Clermont- 

CnARDON  DU  Banquet,  id.  Ferrand. 

*  Laf.we-l'Hôpital  (de),  id.  Tardiei:  (Ambroise),  id. 
'Matharel    (vicomte   de),    trésorier- 
Haute- LiOi  re . 

Inspecteur  :  M.  Le  Blanc,  a  Brioude. 

CuANALLiLLES  (le  mar(|uis  de),  au  chà-  "Le  (irésident  de  la  Société  d'agricul- 

leau  de  Chanaleillcs.  (ure,    sciences,    ails,    industrie   et 

Le  Blanc,  conservateur  de  la  Biblio-  commerce  du  Puy. 
Ihcque  de  Brioude. 


W  I.ISTK    11  lis    MKMllIiKS 


Insperlenr  :  M.  le  \  iroiule  m;  Mkmn,  a  Miiiilbiisoii. 

■HiiiM    {Kiiuciio).    iK'Iaire  a   Saiiil-  Mm.ifai  u,  laiiilaiiie  au  86<' léciineiit  de 

Elieniie.  liu'te,  à  Moiitbiison. 

Cii.vMRn.NUiKK  (AuijusIl'),  iloL(eur  l'ii  AIkaix   (le   vicomte  doi,   au  château 

droit,  archiviste  du  doiiarlciiienl,  id.  J'Ecotay. 

DiiUNU  (V.).  à  Alleux,  par  Koon.  'Noli.as,   doctour-niédecin  ,  a  Saiul- 

'GtKARD,  ageiit-voyer  eu  chef,  a  Saint-  Haou-lc  Chàtel. 

Etienne.  Vier  (Louis),  adjoint  au  maire,  a  Saint- 

Gonnard,  secrétaire  de  la  mairie,  à  Etienne. 

Saint-Élieniie,  rue  Saint-Louis,  il.  "  Viry  lOctave  do),  docteur-médecin,  k 

Lk,  Rolx,  ingéuicur  civil,  rue  Sainte-  Roanne. 

Callierine,  à  Saint-Etienne. 

Lozère. 

Inspecteur  :  '  M.  K(ii!i.si;L,  membre  de  l'Assenihlce  nationale. 

Lf.    Franc,    ingénieur    des    ponts    et  l'évédié  de  Mende. 

chaussées,  a  Mende.  '  Rors,si;i,,présidentdelaSociéléd'aBri- 

PoLCK   (l'abbé),    vicaire    général    de  culture,  à  Mende. 


90  DIVISION. 
J  i^L.)fc;-iî:r-  sil.vuve,    cox^it;!»-  ou-jvojmo. 

Insperlenr-  divhionnaire  :  '  .M.  AUDHEN  ue  KERUREL,  député  a  l'Assemblée 
nationale,  membre  de  l'Institut  des  provinces,  à  Rennes. 

lHo-ot-A-ilaino. 

Inspecteur  :  M.  L\N(.i.oi>,  architrclp,  \\  Rennes, 

André,  conseillera  h  Cmi   .l'appel,        'Aiihiin    di    Kirdrii.,    député,     rue 
membre  de  l'Institut  des  provinces,  a  Saint-Sauveur,  .1,  id. 

Rennes. 


Dji  i.A  S(h;iéti<:  1'1ia.n(jaise  i>  archéologie. 


XXI 


Al  BiUN,  aichilcilo,  (|nai  Uouidon,  19, 

■  BnLii.  Di;  Landai,  (le  coiiilo  de),  au 

château  ilo  Laudal. 
Briink  (l'abbé),  chanoine  il  Renues. 
Danjoi'  nr,  i.\  Gakiinm;,  à  Fougères. 
•  GenouiUac  (le  vicomte  de),  au  château 

de  la  Chapelle-Chaussée,  près  et  par 

Bécherel. 


La  Hi(;m,-Vii,i,i;m,i:vio  (de),  ii  Ri'uncs. 
•  l.A  HoRi)i;nir.  (de),  député,  nienilirt^  de 

l'Institut  des  provinces,  a  Vilré. 
'  Laïu/lc  (le  comte  de),  au  château  des 

Tesnières. 
Langi.ius,  architecte,  a  Rennes. 
TniLMorciii;,     membre    de    plusieurs 

académies,  id. 


Côtos-au-TVorcl. 


Inspecteur:  M.  Gkslin  de  Boukgoc.ni;,  à  Saint-Brieuc. 


Gautier   dl   Mottay,    a   Plérin ,  prés 

Saint-Brieuc. 
Gesein  de  Bolrgogne,  de  l'Institut  des 

provinces,  a  Saint- Brienc. 
Hernot,  sculpteur,  à  Laimion. 


Keramlecii  (le  comte  de),  au  château 
de  Quelenec,  par  Mur-de-Bretagne. 

Pinot  (l'abbé) ,  professeur  a  l'Institution 
Saint-Charles,  a  Saint-Brieuc. 


I^^i  nistero. 


[nspectevr  :  *  M.  le  comte  de  Bl(ii,s,  a  Quimper. 


■  Bluis  (le  comte  A.  de),  ancien  député, 
membre  de  l'Institut  des  provinces,  a 
Quimper. 

'  Du  Chatellier,  memt)rc  de  l'Institut 
de  Franco,   au  château  de  Kernuz, 


près  Pont-l'Abbé. 
"Haelêcien,  membre  de  l'Institut  des 

provinces,  à  Clilteaulin. 
'Madec  (Pierre-Marie),  professeur  au 

petit  séminaire  de  Pont-Croix. 


>Ioflt>iliti«- 

Inspecteur:  M.  de  Kerilec,  député  a  l'Assemblée  nationale, 
à  Hennebont. 

Kéridec  (de),  a  Hennebont. 

Loi  re-ln  férié  lire. 

Insperteui-  :    *  M.  Van-Iseghem,  architecte,  à  Nantes. 

'La   T(HR-ui-Pi\-Cha:\ibly   (le   baron        Leiioix,  docteur-médecin,   rue  de   la 
Gabriel  de),  boulevard  Delorme,  -26,  Chalotais,  1,  id. 

à  Nantes. 


XXII  LISTE    DES    MEMBRES 

Le  Macxon    (l'abbé),    chaiidine,    nie  Tili.y  (le  marquis  Henri  de  ,  rue  Tour- 
Royale,  10,  id.  nefort,  id. 
Marionneau,  rue  du  Calvaire,  1,  id.  '  f'an-lseghem  (Henri),  archilecle,  rue 
Orieix,  agent-voyer  en  chef,  id.  Félix,  I,  id. 


10«  DIVISION. 

"VIEIVTVE   et  I>E3UX:  Sl^VnE!*. 

Inspecteur  divisionnaire  :  '  M.  l'abbé  AUBER,  chanoine  (itulaire,  membre 
de  rinstitul  des  provinces,  à  Poitiers. 

Vienne. 

Inspecteur:  M.  Le  Cointre-Dipont. 

'AuBER    (l'abbé),    chanoine  titulaire,  La  Toirette  (Léon  de),  à  Loudun. 

membre  de  l'Institut  des  provinces.  Le  Cointre-Dipont,    propriétaire,  à 

à  Poitiers.  Poitiers. 

•Benye  (le  père),  id.  'Ledain,     conseiller  de  préfecture, 

'CouGNY  (Emile   de),    au   château  de  id. 

Savigny.  Redet.  archiviste  honoraire  du  dépar- 

'GouDON  DE  Lalandi;  (Jules),  a  Mont-  tenient,  membre  de  l'Institut  des  pro- 
morillon, vinces,  id. 

La  Brosse  (le  comte  de),  proi>riclaiie,  Richard  (Alfred),  archiviste  du  dépar- 

à  Poitiers.  temeni,  id. 

La  Tol'rette  (Gilles  de),  propriétaire, 
à  Loudun. 

T>etxx-Sè  vres. 

Inspecteur  :  '  M.  Ledai.n,  conseiller  de  préfecture,  à  Poitiers. 

David,  ancien  député  au  Corps  législa-        Ravan,  trésorier  de  la  Société  de  stalis- 

tif,  à  Niort.  tique,  à  Parthenay. 

Lafosse  (Henri),  id. 


DE    LA    SOCIETE    FFIANCAISE    1)  ARCIIEOIOGIE.  XXIII 


M"»  DIVISION. 


Inspecteur  dirisionnaire :  "M.  l'abbé  LACURIE,  chanoine  honoraire,   ancien 
auniôniei-  du  collège  de  Saintes. 

Cliarente-InférleiïTo. 

Inspecteur:  M.  Brissox,  secrétaire  en  chef  de  la  mairie  de  la  Rochelle. 

Avril  DE  LA  Vergnéi:  (Ernesl\  avocat,  Mraille   (A.^  agenl-voyer  supérieur, 

à  la  Rochelle.  à  Jonsac. 

Clervalx  (Jules  de\  à  Saintes.  Ferson  (l'abbé),  aumônier  du  collège 

'Laclrie  i^l'abbé',  clianoine  honoraire,  de  Roehefort. 

ancienaumonierducoIlégedeSainles.  *  Richard  (rabbé\  Iiydrogéologue,  vie. 

Menlt,  employé  des  douanes,  h  la  Ro-  général  d'Alger,  à  Monllieu. 

chelle.  Thomas  i.Mgrl,  évéque  de  la  Rochelle. 

Vendée. 

Inspecteur  :  M.  Léon  Ballereau,  aichitecte,  a  Luçon. 

"Ballereal'  (Léon),  architecte,  a  Lu-  Giêrin  (l'abbé),  curé-doyen,  à  Saint- 

çon.  Fulgenl. 

Baron,  ancien  député,  à  Fonfenay.  Rociiebruxe  (Octave  de),  à  Fontenay. 

Baldry  (l'abbé  F.),  curé  du  Bernard.  Staiii  d'abbé),  curé  de  Saint-Maurice- 
Collet  (Mgr),  évèque  de  Luçon.  des-Nouhes. 

Delidon,  not.,  à  Saint-Gilles  sur-Vie.  Tressay  (l'abbé  du),  chanoine,  a  Lu- 
FiLLON  (Benjamin),  à  Fonfenay.  çon. 


XXIV  I.ISTK   DES   MEMKIIES 


M"  DIVISION. 
HAtJTIÏÎ-VIEIVîVJE,    COR-Rl^ZE,    CREUSE 

ot  r>OI^r>OG>.'E. 

Insperifiir  dhistonnaire :  '  M.  Jiu;s  DE  VERNEILH,  membre  de 
rinstitul  (ics  provinces,  à  Bordeaux. 

I  laiito-Vicmio. 

Jnspertein-:  '  M.  i'ahhé  Arrf.lot,  chanoine  honoraire,  curf^-archipri^lre, 
a  Roihecliouart. 

'ARitr.LOT  (l'abbé),  chanoine  honoraire,        Mmulanc  (de),  à  Saint-Junien. 

curé-archiprélre,  à  Rocliechouail.  Tandkai'  ok  Marsac  (l'abbé),  chanoine 

FoRCERifN  (André),  à  Chalus.  honoraire,  à  Limoges. 

Cr"oiise. 

Insperleur:  '  M.  le  comte  or.  CrssAC,  membre  de  l'inslitul  des  provinces. 

•Callier  (Georges),  à  Guéref.  Colstin   di:  Masnadalu    (le  marquis 

"Cessac  (Pierre  de),   au  château   Ce  Henri  de),  au  château  de  Sazerat. 

Mouchetard,  près  Guéret.  Latoirf.tte    (de),    ancien  député  au 

Chaussât  (le  docteur),  à  Aubusson.  Corps  législatif. 

'CoRMDET  (le  vicomte  dej, membre  du  Vicier  (Antoine),  notaire  et  maire  à 

Conseil  !;énéral,  à  Crocq.  Valliére. 

Corrôze. 

Inspecteur  :  M.  Octave  nr.  R(1ffi(;nac. 

Massênat  (Élie),  ii  Hrives.  petit  séminaire  de  Servières. 

PoLLRRiËRE    (Tabbé),    professeur    au       Roffignac  (Octave  de),  k  Sourie. 

l>OTHlogne. 

Jns;  ecleur:  .M.  le  vicomte  Alexis  de  Goirgies,  membre  de  l'Institut 
des  provinces,  ii  Lanquais. 

■  Abzac  de  la  Dor/.E  (le  comte  Uliicli        Rolrdeilles  (le  marquis  Hélie  del,  au 
d'),  à  Périgiieux.  château  de  Bourdeilles. 


T)E   LA    SOCIÉTÉ   FRANÇAISE   D  ARCHÉOLOGIE, 
du),    au  château    de 


XXV 


"BURGUET    (M 

Portboutout. 
Galy  (D.-M.),  à  Périgueux. 
GiiRARU  (Gaston  de),  à  Sarlat. 
GoL'RGL'ES   (le  vicomte  Alexis  de),   à 

Laiiquais. 
GoYHENÈcHE   (l'abW),  au  château  de 


Montréal. 
MoNTARDY  (Gaston  de),  à  Douzillac. 
■RouMEJOux  (Anatole de),  à  Périgueux. 
Vassecr  (Charles),  a  Saint-Germain-de 

Belvès. 
Verneilh  (baron  Jules  de),  membre  de 

l'Institut  des  provinces,  à  Puyrazeau. 


13"  DIVISION. 


OIROTVDE,    LATVDES.    CHA.RE1VTE 
et  LOT-ET-GA.R,OT*:iVE. 

Inspecteur  divisionnaire  :  '  M.  le  marquis  de  CASTELNAU-D'ESSENAULT,  de 

l'Institut  des  provinces,  au  château  de  Paillet  (Gironde). 
Inspecteur  divisionnaire  honoraire:  M.Charles  des  MOULINS,  commandeur 

de  l'Ordre  pontifical  de  Saint-Grégoire-le-Grand,  sous-directeur  de  l'Institut 

des  provinces,  à  Bordeaux. 

Olronde. 


Inspecteur:  M.  Trapal'd  de  Golombe,  à  Nérac. 


'  Aizac  de  la  Martime  (d) ,  proprié- 
taire, à  Pujols. 

*Castelnau-d'Essenai'lt  (le  marquis 
Guillaume  de),  au  château  de  Paillet. 

*  Chasteigner  (le  comte  Alexis  de),  rue 
Montbazon,  23,  a  Bordeaux. 

Chasteigner  (Paul  de),  rue  du  Palais- 
Galien,  id. 

CiROT  de  la  Ville  (l'abbé),  chanoine 
honoraire,  professeur  d'écriture  sainte 
à  la  Faculté  de  Théologie,  membre 
de  l'Institut  des  provinces,  id. 

CoRBLx  (l'abbé),  curé  de  Roaillan. 

Des  Moi'lins  (Charles),  sous-directeur 
de  l'Institut  des  provinces,  à  Bor- 
deaux. 

Despaix  (l'abbé  P.),  curé  de  Verteuil. 

Doublet  (l'abbé),  k  Bordeaux. 
XL*"  SESSION. 


'Dlrand    (Charles),    architecte,    rue 

Michel,  16,  id. 
Gères  (le  vicomte  Jules  de),  id. 
*  Jabouin,  sculpteur,  rue  Dauphine,  id. 
Labet  (J.-A.),  conservateur  du  musée 

d'armes,  id. 
Marqi'essac  (le  baron  Henri  de),  rue  de 

Cheverus,  36,  id. 
Menou   (l'abbé),   rue  des  Ayres,  20, 

id. 
Mérediel'  (de),  avoué,  rue  Castillon,  9, 

id. 
Piciiard  père  (de),  cours  d'Albret,  46, 

id. 
Piganeau,  membre  de  la  Commission 

archéologique  de  la  Gironde,  id. 
Ratiieat,  commandant  du  génie,  mem- 
bre de  l'Institut  des  provinces,  id. 
D 


XXvr                                     LISTE    DES  MEMBRES 

Sabattier (l'abbé),  chanoine  honoraire,  '  Villkrs  (de),  trésorier-payeur,  a  Bor- 

doyen  de  la  Faculté  de  Théologie  de  Jeaux. 

Bordeaux,  rue  Saubat,  116,  id.  "  Villikt  (Joseph),  peintre,  route  d'Es- 

Thapaud  de  Colombe  (C),  à  Florac.  pagne,  61,  id. 


Landes. 

Inspecteur:  M.  Auguste  du  Peyrat,  directeur  de  la  Ferme-Ecole  des  Landes, 
à  Beyrie,  près  Mugroii. 

•  LoBiT  DE  MONVAL  (de),  a  Dax.  Tollolset  (le  baron  de),  a  Saint-Sever. 

Peyrat  (Auguste  du),  directeur  delà  'Villeneuve  (Hélion  de),  sous-inspec- 

Ferme-Ecole  des  Landes,  à  Beyrie,  leur  des  forêts,  a  Mont-de-Marsan. 

prèsMugron. 

Cliarente. 

Inspecteur:  "  M.  de  Thiac,  de  l'Institut  des  provinces,  à  Angoulénie. 

Cousseau  (Mgr),  ancien  évèque  d'An-  "  Lauriére  (de),  id. 

goulêine.  Rochebrc.ne  (A.  de),  id. 

Des  Cordes  (Georges),  avocat,  à  Au-  Vallier  (Joseph),  chef  d'escadron  d'ar- 

goulème.  tillerie  eu  retraite,  k  Pontouvre. 

Lambert  (René),  attaché  a  la  direction  Vallier  d'Aijssac  (Médéric),  à  Aussac. 

des  Domaines,  à  Angouléme. 


Lot-et-Garonne. 

Inspecteur  :  '  M.  Tholln,  à  Ageu. 

Boi;RBEROL"SSEDELAFFORE(de),  k  Agen.  neuve-sur- Lot. 

Brcker,  peintre,  id.  Magen  (Adolphe),  secrétaire  perpétuel 

Combes  (l.udomir;,  a  Fumel.  de  la  Société  d'agriculture,  à  Agen. 

Faloere-Dubocrg,  a  Nérac.  'Tuolin,  archiviste,  id. 

La  Borie-Salnt-Sclpice  (de),  a  Ville- 


DE    LA    SOCIETE    Fl'.ANCAlSE   D  ARCHEOLOGIE. 


XXVII 


U"  DIVISION. 


TA-RTV-TBT-OAFIOIVIVJE:.  TART«J^,  IjOT.  A.VEiY^RO]V 
et  OERS. 

Inspecteur    divisionnaire  :    *  M.    le    comte    de    TOULOUSE-LAUTREC,    à 
Rabastens. 


Tarn-et-Oaronxie. 

Inspecteur  :       M.   l'abbé    Pottier,    président    de    la    Société   archéologique, 
a  Montauban. 


ÀRSous  DE  "Brossard  (d'),  à  la  Croze, 
près  Saint  Porquier. 

BoL'RDONXÉ,  de  la  Société  de  lin- 
guistique de  Paris,  à  Valence - 
d'Agen. 

Brun  (Victor),  directeur  du  musée,  à 
Montaubau. 

DuFAVR  iProsper),  à  Larrazet. 

FoRESTiÉ  i,L.-E.),  à  Montauban. 

FouRMENT  (  l'abbé  Pierre  -  Antoine  ) , 
curé  de  Saint-Sauveur,  à  Castel-Sar- 
razin. 

Froment  (l'abbé^,  curé,  à  Varen. 

Garrigues  (l'abbé),  curé  de  Laguépie. 

Layrolles  (le  vicomte  Edmond  de), 
au  château  de  Chambord,  a  Mon- 
tauban. 

LiMAiRAC  (A.  de),  au  château  d'Ardus. 


MoNBRisoN  (Georges  de),  au  château  de 

Saint-Roch. 
MocLENO  (François),  ancien  maire,  a 

Valence-d'Ageii. 
NoNORGLE   (l'abbé),  curé  de    Bruni- 

quel. 
Pagan  (Ferdinand),  ancien  magistrat, 

a  Montpezai. 
'PoTTiER  J'abbé),  ruedel'Ancien-Col- 

lége,  à  Montauban. 
Pradel  (Emile),  a  SaintAntonin. 
Saint-Paul  de  Cardillac  (Amédéede), 

a  Moissac. 
"Sorbiers  de  la  Tourasse  (du),   à 

Valence-d'Agen. 
Taupiac  (Louis),  avocat,  à  Castel-Sar- 

razin. 
Teuliére,  rue  Corail,  à  Montauban. 


Inspecteur  :  '  M.   Rossignol,  a   Montans,   près  Gaillac. 


Aragon   (le  marquis  Charles  d'),  au 

château  de  Salies,  a  Albi. 
Bonnet  (Henri),  receveur  des  Domaines, 

à  Rabastens. 


Canet  (Victor),  professeur  au  collège 
de  Castres,  secrétaire  de  la  Société 
scientifique  et  littéraire,  membre 
de  l'Institut  des  provinces,  à  Castres. 


XXVIII 


LISTE   DES   MEMBRES 


Gazais,  curé  de  Florentiu. 

■  CûMBETTES  Di:    Lic    (Louis    (le)  ,     a 

Rabastens. 
CoisiN  DE    LA   Valliere   (le  vicomte 

Gabriel),  à  Sainl-Siilpice-la-PoiDle. 
Falgierf.s  (Albert  de),  k  Rabasicns. 
Goittes-Lagkave    (le  baron    de),   au 

château  de  Lagrave,  prés  Gaillac. 
Grellet-Balgverie,  juge  d'instruction, 

k  Lavaur. 
Madron  (Heuri  de),  k  Cadalen. 
•  Maire,  ingénieur  civil  a  Lacaune. 
Mazas  (Etienne),  id. 
MiCHAUD  (l'abbé),  curé  de  la  Madeleiue, 

a  Albi. 
0'BvRNE(Ea\vard\  au  château  de  Saint- 

Géry,  a  Rabastens. 
O'Bybne  (Henri),  id. 


•  Rivières  (le  baron  Edmond  de),  au 

château  de  Rivières,  près  Gaillac. 
Rossignol  (Élie- Antoine),  de  Moulans, 

près  Gaillac. 
SAiNT-SALri  (Lud.  de),  a  Lavaur. 
■  SoLAGES  (le  marquis  de),  au  château 

de  la  Verrerie  de  Baye. 

*  ToMAC- Villeneuve    (Henri    de),    a 

Gaillac. 

*Toulouse-Laltrec  (lecomte Raymond 
de),  membre  de  l'Institut  des  pro- 
vinces, a  Rabastens. 

Veyriac  (Auguste),  k  Carmaux. 

ViviÈs  (Timoléon  de),  au  château  de 
Viviès,  k  Castres. 

Voisins-Lavernieres  (Joseph  de),  a 
Saint-Georges,  a  Lavaur. 

Y  verses  (le  baron  .lean  d'),  a  Gaillac. 


Inspecteur  :  '  M.  de  Roi;mejoux. 


Calvet  (Arthur),  a  Figeac. 
Cardaillac  (le  comte  J.  de),  au  chat. 

de  la  Traine. 
Colomb  (Octave  de),  juge  de  iiaix,  a 

Saint-Céré. 
Declaux,  propriétaire,  a  Lentilhac. 
'  Fontenilles  (.Paul  de),  k  Cahors. 


Helyot  (Louis  d'),  a  Cahors. 
Marqlés  (Joseph),  a  Cahors. 
Martin,  avocat,  à  Cahors. 
Malry  (l'abbé  Philippe),   curé-archi- 

prètre  de  la  cathédrale,  id. 
RoissY  (de),  a  Cahors. 


A-veyron. 


Inspecteur  :  M.  l'abbé  Azémar,  curé  de  Lassouts. 


.4libert  (l'abbé\  vicaire  de  la  cathé- 
drale, a  Rodez. 

■  Armagnac-Castanet  (le  vicomte  Ber- 
nard d'),  a  Sainl-Côme. 

AzÊMAR  (l'abbé),  curé  de  Lassouts. 

"BiON  DE  Marlavagse(L.),  propriétaire, 
a  Milhau. 

BoNLOLis,   professeur  de  sciences,  au 


petit  séminaire  de  Saint-Pierre,  k 

Rodez. 
"Cérés  (l'abbé),  k  Rodez. 
GissAC  (le  baron  Joseph  de),  maire,  a 

Creissel. 
TiiÉDENAT,  maire  d'Espalion. 
Valadier,  propriétaire,  k  Rodei. 


DE   LA   SOCIETE   FRANÇAISE   d'aRCHÉOLOGIE.  XXIX 


Inspecteur:  M.  Noulens,  directeur  de  la  Revue  d' Aquitaine. 

NouLENS,  directeur  de  la  Revue  d'Aqui-       Solon,  juge  au  tribunal  civil,  a  Auch. 
taine,  a  Condom. 


45*  DIVISION. 

et    j3^SSES-F»Y3aÉlVÉES. 

Inspecteur  divisionnaire  :   M.  le  vicomte  de  JUILLAC,  à  Toulouse. 

Haute-OaroTxne. 

Inspecteur  .    *  M.  de  Saint-Simon,  rue  Tolosane,  a  Toulouse. 

Bernard  (Bertrand) ,  peintre  décora-  Toulouse. 

leur,  à  Bagnères-de-Luchon.  *  Jlilhac  (le  vicomte  de),  de  la  Société 

Carrière  (l'abbé) ,    président    de   la  archéologique  du  Midi,  rue  Mage,  à 

Société  archéologique  du  midi  de  la  Toulouse. 

France,  à  Toulouse.  Morel,  avocat,  à  Saint-Gaudens. 

Cartais  (Emile),  à  Toulouse.  Puyblsqle  (le  marquis  Albert  de),  à 

*  Cartailhac  (Emile),  à  Toulouse.  Toulouse. 

Cassagnavére  (François),  sculpteur,  a  'Saint-Paul  (Anthyme),  professeur  au 

Mare-Tolosane.  petit  séminaire  de  Polygnan. 

Du  Bourg  (Antoine),  rue  du  Vieux-  *  Saint-Simon  (de),  rue  Tolosane,  6,  à 

Raisin,  31 ,  à  Toulouse.  Toulouse. 

Faure  de  la  Perrière,   avocat,   rue  Trutat    (Eugène),    conservateur   du 

Romiguière,  7,  id.  muséum,  id. 

•Gantier  (A.),  au  château  de  Picayne,  *  Virèrent  (Gaston),  4,   rue  Fourbas- 

près  Cazères.  tard,  id. 
Gaujac  (le  baron  de),  rue  Ninau,  l.'S,  à 

Mantes  -  Fyrénées. 

Inspecteur:  "M.  Dlrand,  architecte,  à  Bayonne. 
•  Agos  (le  baron  d'),  a  Tibiran,  canton  de  Nestier. 


XXX  LISTE   DES   MEMBRES 

Basses -F»>'réTiéos. 

Inspecteur  :  '  iM.  Loipot,  architecte,  a  Pau. 

EsTEvi   I  le  comte  I,  a  Pau.  *  Nadaillac  (le  marquis  de),  préfet  de 

Pau. 

16e   DIVISION. 

A.tjr>E;,  i>yr,é:]V1ï:es-ojfs,ie:ivta.les  et  ariéoe;. 

Inspecteur  divisionnaire:  "M.  de  BONNEFOY,  à  Castelnaudary. 

A.tx<ie. 

Inspecteur  :  M.  Coste  Reboi-lle  des  Fonties,  à  Carcassonne. 

AsTBE  (l'abbé),   chanoine,  à   Carcas-  pagne,  à  Carcassonne. 

sonne.  "  Lafont,  architecte,  à  Narbonne. 

BoN.NEFOY  (de),  à  Castelnaudary.  Lézat  (l'abbé;,  curé-doyen  de  Salles- 

Chef-de-Bien  (le  vicomte  de),  a  Nar-  sur-l'Hers. 

bonne.  MiR  (Achille),  à  Carcassonne. 

Coste  de  Reboilli:  des  Fonties, a  Car-  Zagariga  de  Chef-de-Bien (le  vicomte), 

cassonne.  au  château  de  Bizanel. 
Gaikaid  (Godefroy),  vice-consul  d'Es- 

I»y  ré  nées-Or ierx taies. 

Inspecteur  :  M.  Alart,  a  Perpignan. 

Alart,  archiviste  du  dépiiTlcincnl,  a        Tolra  de  Bornas  (labbe),  a  111e. 
Perpignan.  "Vilar  (Edmond  de),  à  Thuir. 

■  Df.lmas  de  Riras  (Joseph),  à  Céret. 

Ariégo. 

Vidai,  dabbéi,  curé  de  NoIre-Dame-de-Camou,  a  Camou,  par  Mirepoix. 


DE   LA    SOCIÉTÉ    KHANCAISE    It  AHCHKOI.OGIt;. 


XXXI 


M"  DIVISION. 

BOUCIIES-r>U-R,HOIVE  ,    HlinAUX^T.    GARD 
ot  VAXJCLUSE. 

Inspecteur  divisionnaire  :   '  M.  l'abbé  VINAS,  curé  de  Jonquières. 

;Boxi.clxes-axx-rt,liôn.e. 

Inspecteur:  M.  de  Payan  nu  Moulin,  conseiller  k  Aix. 


Andkk  (Constant),  avoué  a  Aix. 
Arnaii)  (Pierre-André-Marius),  ancien 

avoué,  à  Marseille. 
Berriat,  sculpteur,  id. 
BoHV,  avocat,  conseiller  municipal, 

boulevard  Longchamps,  45,  id. 
Clappier    (Félix) ,   docteur    eu    droit, 

substitut,  à  Aix. 
Gilles  (Isidore),  rue  Saint-Savournin, 

48,  à  Marseille. 
GuiLLiBERT  (l'abbé),  secrétaire  de  l'Ar- 

chevôché,  à  Aix. 
GiMLLiBERT  (Henri),  homme  de  lettres, 

chevalier    de     Saint- Grégoire  -  le - 

Grand,  rue  de  Noailles,  -22,  a  Mar- 
seille. 
LiEUTAUD,bibliothécairede  la  ville, id. 
MoNGES    (Jules),    négociant,    rue  La- 

fayelle,  2,  id. 
MoRELi^l'abbé),  vicaire  de  Saint-Victor, 

id. 
MoNTREi'iL,  juge  de  paix,  correspon- 


dant de  l'Institut,  id. 
MoiiTET,  ancien  maire,  k  Arles. 
Payan  uu  Mollin    (de),  conseiller  a  la 

Cour  d'appel,  a  Aix. 
Penon,    conservateur    du    musée    des 

Antiques,  k  Marseille. 
RoLLANU  (l'abbé) ,  aumônier  du  collège, 

id. 
Roman,  photographe,  k  Arles. 
Sabatier,  fondeur,  rue  des  Orfèvres,  8, 

a  Aix. 
Saporïa   (le    comte  de),   membre    de 

l'Institut  des  provinces,  id. 
Sardou  (Jean-Baplisle),  archiviste,  rue 

Cannebière,  14,  k  Marseille. 
Saurel,  vérificateur  des  douanes,  id. 
Second-Cresp,  avocat  a  Marseille. 
Seymard   (A.),   conseiller  k    la    Cour 

d'appel,  a  Aix. 
VoN-KoTHEN,  rue  Saiut-Bazile,  -27,  k 

Marseille. 


Héraiilt. 


Inspecteur  :  '  M.  le  baron  Diraxd  de  Fontmagne,  château  de  Fontmagne, 
par  Castries. 


Agniéres  (Aimé  d'),  membre  de  plu- 
sieurs sociétés  savantes,  rue  Saint- 
Roch,  6,  k  Montpelliei-. 


Besiné  (Henri),  architecte,  rue  Petit- 
Saint-Jean,  id. 


XXXII 


LISTE   DES   MEMBRES 


Bii.NM-t,  conservateur  du  niusi'p ,  à 
Béziers. 

Carenet  (Gaston),  à  Gigean. 

Caroi",  présideot  de  la  Société  archéo- 
logique, id. 

CuAVis,  ancien  ofûcier  supérieur,  à 
Montpellier. 

CoRONE  (l'abbé),  curé  de  Serignan. 

*  DiRAND    DE   FoNTMACNE    (le  barou), 

au    château    de    Fontmagne ,    par 
Castries. 

*  Fabre  jeune  (l'abbé),  à  Poussan. 
Fabrége   (Frédéric) ,   ancien  élève  de 

l'école  des  Chartes,  à  Montpellier. 

GixoivÊs  fl'abbé),  curé-doyen  de  Mon- 
tagnac. 

HoT  (l'abbé),  curé  de  Cabian,  par 
Roujan. 

LiGAGNE  (Louis),  membre  de  plu- 
sieurs sociétés  archéologiques ,  à 
LodèTe. 


Marioge,  médecin-vétérinaire,  rue  de 
Toulouse,  8,  à  Montpellier. 

Martel  (Paulin),  à  Lodève. 

Méjean  (l'abbé),  curé  de  Lacoste,  par 
Clermont. 

■  NoGi'iER  (Louis),  avocat  à  Béziers. 

Pailhes  (l'abbé),  curé  à  Albeilham, 
par  Béziers. 

Revilloit,  professeur  de  littérature 
française  à  la  faculté  des  lettres,  à 
Montpellier. 

'Ricard,  secrétaire  de  la  Société  archéo- 
logique ,  membre  de  l'Institut  des 
provinces,  id. 

RouoiET  (Adolphe),  au  château  de 
Gourges,  prés  Lodève. 

Sanchez,  chef  du  contentieux,  à  Mont- 
pellier. 

Vin  AS  (l'abbé),  membre  de  l'Institut 
des  provinces,  curé  de  Jonquières. 


Gara. 

Inspecteur  :  '  M.  l'abbé  Gareiso,  supérieur  du  séminaire,  à  Nîmes. 

Alégre   (Léon),   bibliothécaire  a  Ba-  Saint-Esprit. 

gnôles.  Gareiso  d'abbé),  supérieur  du  grand 

■  Brigiier-Hoire   (Louis),    au    Pont-  séminaire  de  Nimes. 

Vau-Cluse. 

Inspectevr  :  '  M.  VALERE-Martin  (Joseph-Elz.),   membre  de   l'Institut  de» 
provinces,  à  Cavaillon. 


Barrés,  bibliothécaire  de  la  ville  de 

Carpentras. 
Beri.i  K  DE  Pérlssis  (Léon),  à  Apt. 
CHRE.STIAN  (Heiiril,  directeur  du  musée 

cantonal  du  Saull. 
Delovi:  (Augustini,  conservateur  de  la 

bibliothèque  et  du  musée  Calvet.  à 


Avignon. 

Pougnet  (l'abbé  Joseph),  rue  Corderie, 
6,  id. 

Terris  (l'abbé  Paul),  vicaires  Apt. 

■  Valére-Martin  (Joseph-Elz,), membre 
de  riiislitut  des  provinces,  a  Ca- 
vaillon. 


DE    LA    SOCIETE    FRANÇAISE    It  ARCHEOLOGIE.         XXXIII 

18«  DIVISION. 

At^T»E)=»->I.'VFtITl>rES  et  CORSE. 

Inspecteur  divisionnaire:  '  M.  de  BERLUC  PERUSSIS,   membre   de  l'Instilut 
des  provinces,  a  Apt. 


A'^ar. 


Inspecteur  :    '  M.    Rost.w,    membre  de    l'Institut    des  provinces,    à    Saint- 
Maximin. 

■  AiîDiFi'RET  (le  comte  d'),    trésorier-  Liotard  (l'abbé),  curé  des  Arcs. 

payeur,  à  Toulon.  Ollivier  (l'abbé),  aumônier  militaire 

BoYER,  architecte  à  Hyères.  de  la  place  de  Porquerolles. 

Dupui  (l'abbé),  au  Beausset.  "Rostan,  membre  de  l'Institut  des  pro- 

GiRAi'D   (l'abbé    Magloire),    chanoine  vinces,  à  Saint-Maximin. 

honoraire  de  Fréjuset  d'Ajaccio,offi-  Sigaud-Bresc  (de),  avocat  à  Aups. 

cier  de  l'Instruction  publique,  curé  Tessier    (Octave),    correspondant    du 

de  Saint-Cyr.  ministère,  à  Toulon. 


Hautes- Alpes. 

Inspecteur  :  M.  l'abbé  Sauret,  chanoine  honoraire,  curé-doyen  de  Serres. 

'Goulain,  arcliitecte  diocésain,  à  Gap.        Templier  (l'abbé), chanoine  honoraire, 
Gilbert  (Mgr),  évèque  de  Gap.  aumùnier  de  l'école  normale,  id. 

Hasses-Alpos. 

Inspectera-  :  M.  Allègre,  inspecteur  primaire,  à  Sisteron. 

Allègre,  inspecteur  primaire,  à  Sis-  Rameaux  (l'abbé),  à  Saint-Maime,  par 

teron.  Forcalquier. 

Carbonel  (l'abbé),  h  Niozelles.  Terrasson    (l'abbé),    curé    de    For- 

HonoiL   (l'abbé),  curé  de  Reuesl-des-  lalquier. 

Brousses. 

XL*  SESSION.  E 


XWIV  LISTK    ItES   MEMBRES 

A-lpos-Mari  t  i  nios. 

Inspecteur:  M.  Brin,  architecte,  à  Nice. 

Brin,  architecte,  à  Nice.  Sardou  (Antoine-Léandre),  trésorier  de 

CHEVALirn  (Hippolyte),  architecte,  ave-  la  Société  des  lettres,  sciences  et  arts, 

nue  Delphine,  id.  id. 

Gazan,  colonel  d'artillerie,  à  Antibes.  Tisserand  (l'abbé),  aumônier  du  lycée, 

MoLT.iNS  nt  RoQLLFuRT,  à  Autibes.  id. 
Rastoin-Brémond,  à  Nice. 

Corse. 

Inspecteur  :  M.  Kezierowiz. 

Kezierowiz,  ingénieur  des  ponts  et  chaussées,  à  Ajaccio. 

49«  DIVISION. 

RHOIVE:,     AFIDÉCHE.    AIIV,     r>RO>IE,    IS^RE 
et     SA.  VOIE. 

Inspecteur  divisionnaire  :  '  M.  Martin-Daissicny,  ii  Lyon. 

IVlxône. 

Inspecteur  :  '  M.  le  comte  Georges  de  Soilthait. 

■AvAizE(Amédéed'),  château dePaners,  a  Lyon. 

par  Peneux.  *  Martin-Dalssigny,  conservateur  du 

'Benoist,  architecte,  id.  musée,  id. 

*  Canat  de  Chizij  (Paul),  rue  Jarandc,  "  Savoye  (A.),  architecte,  id. 

id.  Savy  (C.  Vays),  rue  de  Cuire,  19,  à  la 

'  Desjardins,  architecte,  id.  Croix-Rousse,  id. 
JtSTKR  (Louis),  à  la  Banque  de  l'rance. 


UE    LA    SOCIÉTÉ    FRANÇAISE    d'ARCIIÉOLOGIE.  XXXV 

A.r<ièclie. 

Inspecteur  :  '  M.  Ollier-Jules  Dr,  Marichard,  à  Vallon. 

La  Toi  KiûTTr;  (le  marquis  de),  ancien  logue,  à  Vallon. 

députtS  maire- de  Tournon.  Montravel   (le    comte    Louis   de),   a 

•Marichard  (Ollier-Jules  de),  archéo-  Joyeuse. 


A-in.. 

Inspecteur:  'M.  Desjardins,  architecte,  membre  de  l'inslitut  des  provinces, 
a  Lyon    (Rhône). 

JoLiBOis  (l'abbé),  curé  de  Trévoux.  Martin  (l'abbé),  curé  de  Foissiat. 

•MARTiGXYCl'abbé),  chanoine  de  Bellay.        Richard  (Mgr),  évêque  de  Belley. 


Inspecteur:  '  M.  Valkntin,  juge,  à  Moniélimart. 

Nlgiks  (Alphonse),  à  Romans.  PoiuROix  (du),  à  Romans. 

Perrossieh  (l'abbé),  professeur  de  ma-  'VALiiNTiN  iLudovic),juged'instruclion, 

thématiques   au   petit   séminaire,  a  îi  Montélimart. 

Valence. 


Isère. 

Inspecteur  :    *  M.   Le  Blanc,  professeur,  à  Vienne. 

BizOT  (Ernest),  architecte,  a  Vienne.  *Li;  Blanc,  professeur  au  collège  de 

Caillemer,  professeur  à  la  Faculté  de  Vienne. 

droit,  à  Grenoble.  Pailinier  (Mgr),  évéque  de  Grenoble. 

Dardelet,  graveur,  id.  Piciior   (l'abbé),   curé  de  Sermerieu 

DAvm  (Auguste),  docteur-médecin,   a  canton  de  Morestel. 

Morestel.  Qcérancal  (M""  de),  à  Vienne. 

•Gariel,  conservateur  de  la  bibliothé-  Saint-Andéol  (de),  à  Moirans. 

que  publique  de  Grenoble.  VaelieR  (Gustave),  propriétaire,  place 

Jaillet  (l'abbé),  curé  de  Salaize.  Saint-André,  à  GrenotJe. 


XXXVI 


I.13TE   DK?   MEMBRES 


*^avoie. 

Inspecteur  .  M.    VtiiLLOi.  toiilrùleur  des  contributions  directes,    à  Annecy. 


FivtL  (Th.),  architecte,  a  Chanibéry. 

MossiERE  (François),  secrétaire  de  la 
Société  savoisienne  d'histoire  et  d'ar- 
chéologie, à  Chanibéry. 


Vkullot,  contrôle  ir  iiriiicipal  des  con- 
tributions directes,  à  Annecy  iHaulL-- 
Savoie). 


iO»  DIVISION. 

COTE-nOR.    !-5A0XE:-BT-JL.0IR,E,     AI^LIER     et 
HAUTE  ->I A. RIVE. 

Insperteur  divisionnaire:  '  M.  le  comte  de  L'ESTOILE,  à  Moulins  (Allier). 

Côte- d'Or. 

Inspecteur  :  M.  Bacdot,  membre  de  l'Institut  des  provinces. 


Arbai'mont  (Jules  d'),  de  l'Institut  des 
provinces  ,  aux  Argentières ,  près 
Dijon. 

B.MDOT  (Henri),  président  de  la  Com- 
mission archéologique  de  la  Côte- 
d'Or,  à  Dijon. 

Bbetemere  (Edmond  de),  id. 

Cissey  (le  comte  Louis  de),  au  château 
de  Cissey. 


Degré  (Pierre),  architecte,  à  Dijon. 

Détolkbet,  président  du  Comice  agri- 
cole, membre  de  l'Institut  des  pro- 
vinces, à  Dijon. 

DiPARC  (le  comte),  rue  Vannerie,  3,ï,  id. 

GuiLLi;.MOT,  président  honoraire  du  tri- 
bunal civil  de  Beauiie. 

Ligieu-Belair  (le  comte  dei,  a  Uijon. 

Suisse,  architecte  du  département,  id. 


Saôn.e-et-I^oire. 

Inspecttvr  :  M.  de  Sibigny,  membre  de  l'Institut  des  piovincos,  a  Màcon. 


BsTMAiiT    (Henri),    secrétaire  de    la        Bk.mot  (rabbé\  aumônier  militaire, 
Société   archéologique   de   Chalons-  missionnaire  apostolique,  id. 

sur-Saône. 


DE    LA   SOCIÉTÉ    KKAiNOAlSK    d'aUGHÉOLOGIE. 


XXXVIl 


•  BuLLiOT,    iiiésideiit    de    la     Société 

Édueniie,  ii  Autun. 
'  Canat  de  Chizij  (Marcel\  président 

de    la     Société    archéologique ,     à 

ChAloiis-sur-Saône. 
CiiKVRiLR  (Jules),  id. 
EsTERNO  (le  comte  d'),  au  château  de 

Vesore,  près  Autun. 
FoNTENAY(de),  archiviste  paléographe, 

k  Autun. 


Lacroix  père,  pharm.  à  Màcon. 

•  MoTïiN  DE  LA  Falconmere  (Alix),  à 

Charnay. 
NicOT  (Charles),  à  la  Villeneuve,  près 
Cuiscry. 

•  Pailloix  (le  docteur),   membre  de 

l'Institut  des  provinces  ,    maire  de 
Saint-Ambreuil. 

•  SuRKiNY  (de),    membre   de  l'Institut 

des  provinces,  à  Màcon. 


Allier. 


Inspecteur  :  M.  Albert  de  Bvrei,  à  Moulins. 


Arc\  (le  comte  d'),  trésorier-payeur,  à 

Moulins. 
Bailleau  (Jh.),  médecin,  à  Pierrefitte- 

sur-Loire. 
Bletterie     (l'abbé    J.-A.) ,    chanoiue 

honoraire,  curé  de  Saint-Clément. 
Bi:res  (Albert  de),  à  Moulins. 
Bouchard,  avocat,  membre  de  l'Insti- 
tut des  provinces,  id. 
Dadole  (E.),  archiiecte,  à  Moulins. 
Desrosiers  (l'abbé),  curé  de  Bourbon- 

l'Archambault. 
Dreux- Brézé  (Mgr    de),    évêque  de 

Moulins. 
*  EsMONOT,  architecte  du  département, 

id. 


*  EsTOiLE  (le  comte  de  1'),  membre  de 
l'Institut  des  provinces,  id. 

La  CoLTiRE  ^Ernest),  a  Franchesse. 

Le  CouTiRiER,  architecte  a  Vichy. 

Meilleirat  des  Prureaux  (Louis),  id. 

MiGNOT  (D.-M.),  à  Chantclle. 

Monllaur  (le  marquis  Eugène  de),  de 
l'Institut  des  provinces,  à  Chantelle 
et  à  Paris,  rue  de  Grenelle-Saint- 
Germain,  7S. 

Qleroy,  directeur  du  musée,  membre 
de  l'Institut  des  provinces,  a  Mou- 
lins. 

TixiER  (Victor),  membre  de  l'Institut 

des  provinces,  à  Saint-Pons. 


Haiite-lMtame. 


'Gvèrin  (Mgr),  évêque  de  Langres. 


XXWlll  LISTE    Ulià   .MEMBRES 


21«  DIVISION. 


DOUI3S.   JURA    et    HAUTE -SAOIVE. 

Inspecteur  divisionnaire:  'M.    Eu.   CLERC,    piésideiil  de  la   Cour   dappel 
de   ResaïU'on. 


r>ouV)s. 

Inspecteur  :  M.  Victor  Bailll,  architecte,  à  Besançon. 

•  Cast.\n    (A.),    conservateur    de    la        '  Clerc  (Edouard),  président  honoraire 
bibliothèque  publique,  membre  de  à  la  Cour  d'appel,  id. 

riiistilut  des  provinces,  à  Besançon.        'Viilleret,  rue  Saint-Jean,  11,  id. 

•J  lira. 

Inspecteur  :  '  M.  C.vstan,  conservateur  de  la  Bibliothèque  publique  de  Besançon. 

Hante-Saono. 

Inspecle^ir:  '  M.  Jules  de  Biyeh,  a  la  Chaudeau. 

22°  DIVISION. 

MEUSE.        M<>!-*EL,L,Li:  .       MKUIVTHE,        VOSOES  , 
liAirJ-ltllIIV    ot    HAUT-ItlIllV. 

Inspecteur  divisionnaire:  M.  le  colonel  ui.  MORLET,  de  l'Institut 
des  provinces,  a  Nancy. 

>le\xse. 

Inspecteur  :  '  M.  Lienahd,  secrétaire  de  la  Société  IMiilonialiquc,  a  Vcniun. 

I»i  Ml, Miii  (Armand),  membre  de  l'in-  'Lienahd,     secrétaire    de    la    Société 

slltnt  des  provinces,  a  Verdun.  Philoniatique  il  Verdun. 

■  LAi.i.on.ni;,  peintre,  il  Juvigny-les-  '   Morel  (l'abbé),  curé  de  Sampigny. 

l)aines,  près  Moniniédy.  Peieioi-Beelavoine,  à  Verdun. 


\m   LA   SOCIÉTÉ    FUANÇAISK   d'aUCIIÉOI.OGIE.  XXXTX 

iMoselle. 

Inspecteur  :  M.  Auguste  Prost,  à  Melz. 

Dérobe,  architecte  du  département,  a       Fan   der    Slraten    (le    comte    de), 
Melz.  membre  de  l'Institut  des  provinces, 

*  Prost  (Auguste),  id.  id. 

>Ieiartlxe. 

Inspecteur  :  M.  Hlmbert,  architecte. 

DiiMAST  (P.-G.  de),  membre  de  l'Iusti-        Morlet  (colonel  de),  commandeur  de 

tut  de  France,  à  Nancy.  la  Légion  d'honneur,  id. 

HuMBF.RT  (Lucien),  architecte,  id. 

Vosges. 

Inspecteur:  M. 

Bas-Rlain. 

Inspecteur  :   M.  l'abbé   Straub,    directeur  du  collège  Saint-Arbogats, 
a  Strasbourg. 

Faviers  (le    baron    Matthieu    de),    à  Rhiel  (l'abbé  Léon),  curé  de  Venden- 

Kintzheim.  heim. 

Gcerber  (l'abbé  V.),   curé  de  Saint-  Salm,  conservateur  de  la  bibliothèque, 

Georges,  à  Hagueneau.  a  Strasbourg. 

Klotz,  architecte  de  l'OEuvrc  Notre-  Spach  (Louis),  archiviste  eu  chef  du 

Dame,  à  Strasbourg.  département,  id. 

MuRY  (l'abbé  Pantaléon),  sup.  du  petit  Stralb   (l'abbé),  directeur  du   grand 

séminaire  de  Strasbourg.  séminaire,  id. 

Rauch, docteur-médecin,  a  Oberbronu.  Wolf  (Gustave),  avoué,  id. 

II  a  »x  t-PMi  1 11 . 

Inspecteur  :  M.  Poisat  ,  architecte  de  la  ville,  a  Belfort. 
Frey  (Henri),  à  Guebwiller. 


LX  LISTK   DES   MEMBRES 

23»  DIVISION. 

A  L  G  É  R  I  K. 

Inspecteur  divisionnaire  :  M.  CHERBONNEAU,  professeur  d'arabe,  à  Alger. 

Province  d'Alger. 

Trehealx,  à  Cberchell. 

r»i*ovlTice   ae  CoTistantlne. 

Inspecteur  :  '  M.  Roger  ,  conservateur  du  Musée,  à  Philippeville. 

Battandier,   président  de   la  Société       Boissé,  à  Lambessa. 
archéologique  de  Constantine.  Delaparu  (l'abbé),  curé  de  Tebessa. 


•  K    I.\    SCtCirCÏK    l'Il.WCAISK    I»  A IICII  Kdf.OCIK. 


MEMBRES     ÉTRANGERS 


s.  M    LE   KOI  DES  BELGES,  à  Bruxelles. 


AiNswoinii    {\e   général),    à    Monnel 

(Vorkshire). 
ALiii'.Rni.NC.-LiiiJM,  il  Amsierdani. 
Ai.FORT  (le  Rdv.),  doyen  ile  Cantorbéry 

(Angleterre). 
Alvin,  direcleur  de   l'inslruclion  pu- 
blique à  Bruxelles. 
Amahi  (Michel),  sénaleur,  a  Florence. 
Andriks    (l'abbé    J.-O.),    chanoine  à 

Bruges. 
AiKSWOLD,  piésident  de  la  Régence,  à 

Trêves. 
AiTKSSES  (le  baron  d'),  direcleur  de  la 

Sociélé   du    Musée    germanique,  à 

Nuremberg. 


Baehr,  conseiller  aulique,  professeur 
à  l'Université  de  Heidelberg. 

Balksïra  (l'abbé  Séraphin),  professeur 
au  séminaire  à  Come  (Italie). 

Barlifi  (G.-1.^,  professeur  émOrilc  ii 
l'Université  de  Turin. 

Bayer  (A.  de),  conservateur  des  monu- 
ments historiques  du  grand-duché 
de  Bade,  à  Carlsruhe. 

Bayi.i;y  (W.-H.),  a  Londres. 


Hi;nioRD  (Sa  Grâce  le  duc  de),  Brigh- 
ton-square,  id. 

Bi,Tin\n  (Mgr),  chanoine  de  la 
cathédrale,  professeur  d'archéologie 
au  grand  séminaire  de  Bruges. 

Bi.N(;nAM  (le  colonel),  membre  de  la 
Société  archéologique  du  comté  de 
Kent,  juge  de  paix  de  ce  comté,  a 
Bochester  (Angleterre). 

Bi.NGHAM  (M™"),  a  Bochester  (Angle- 
terre). 

BoLD  (Ed.),  capitaine  do  la  marine 
royale,  à  Soulhampton. 

Brinckel;  (de),  conseiller  d'État  a 
Brunswick. 

Brow.n  (le  docteur  William-Henri),  a 
Londres. 

Briyenne  (Justin),  architecte  à  Tour- 
nay. 

BLRnrRE  (le  chevalier  Léon  de),  vice.- 
président  de  l'académie  d'archéolo- 
gie de  Belgique,  membre  de  l'Institut 
des  provinces  de  France,  à  Anvers. 

Bt'RdES,  architecte  h  Londres. 

Bl'Rke  (Peter),  membre  de  l'Institut 
des  architectes,  id, 

BissciiER  (Edmond  de),  membre  de 
l'Académie  royale  de  Belgique,  à 
Gand. 


Castermax  ,     colonel 
Bruxelles. 


du     génie,     a 


XI.    SESSION. 


Mil 


LISTE    HES   MEMBRES 


Aiilciiio  Damv^o  i>i  Castro  (le  coiii- 
iiiaiidour  ablië),  a  Sou/a  (Kloroiice). 

CiiARLLs  ....,  membre  du  Pailemeiil 
d'Aiislelerre. 

Clément  (.Georges-Edward),  à  Londres. 

CONESTABILE    DE     PlHHlGlA     (le    Cûlllle 

de). 

CONONDAC  (de),  conservateur  des  Ar- 
chives, à  Zurich. 

CoppiETERS  (le  docJeur),  à  Ypres. 

CdX,  vice-président  de  la  Société  d'his- 
toire naturelle  du  comté  de  Kent,  à 
Fordwich,  près  Cantorbéry. 

Cox  (M™'!  à  Fordwich,  près  Cantor- 
béry. 

"CzOERNiNG  (le  baron  de),  président 
de  la  Commission  impériale  d'Au- 
triche pour  la  conservation  des  mo- 
numents, il  Vienne. 


■  DiiNAi.sTON  ,   sccrélaiie   <lc   rinslilul 

des  architectes  à  Londres 
Driiry  (John-Henri),   membre   de  la 

Société  des  antiquaires  de  Londres, 

à  Norwich  (Angleterre). 
DiiiY,  pasteur  protestant,  à  Genève. 
Dlmortier,   membre  de   la  Chambre 

des  représentants,  à  Tournay. 
DrRLET  (F.),  à  Anvers. 


EiciiWALn    (d') ,    conseiller    d'État,    à 
Saint-Pétersbourg. 


ÏT- 


"  A.  VON  Decune  VAN  Varick,  à  la 
Haye. 

'Da  SiLVA  (J.),  architecte  du  roi  de 
Portugal,  membre  de  l'Institut  des 
provinces  de  France,  a  Lisbonne. 

Decharme,  ingénieur  en  chef  a  Bo- 
logne (Italie). 

Dectoff  (le  comte),  à  Gothingen. 

Delvigne  (A.),  professeur  d'archéolo- 
gie au  séminaire  archiépiscopal  de 
Malines  (Belgique). 

Devey  (Esq.),  architecte,  à  Londres. 

Devilliers  (Léopold),  président  du 
Cercle  archéologique,  à  Mons. 

DiEGLiticii ,  professeur  à  l'Athénée 
d'Anvers  (Belgique). 

UoGNÊE  DE  ViLLERs,  membre  de  l'In- 
stitut des  provinces,  à  Liège. 

■  DoGNÊE  DE  ViLLEiis  (Eugène),  mem- 
bre de  l'Institut  des  provinces,  id. 


Fabry-Rosshs  ,  docteur  ès-Iettres,  à 
Liège. 

Fazy,  conservateur  du  Musée  d'anti- 
quités, a  Genève. 

FiORF.LLi,  sénateur,  directeur  des  tra- 
vaux de  Pompéï. 

FiRMENicii  (Jean-Mathieu),  homme  de 
lettres,  à  Berlin. 

Florencoirt  (de),  membre  de  plu- 
sieurs Académies,  administrateur  du 
musée  d'anti(iuilés,  a  Trêves. 

FoRSTER,  membre  de  plusieurs  acadé- 
mies, à  Munich. 

FoRSTER,  professeur  d'architecture  à 
l'Académie  des  Beaux -Arts,  à 
Vienne. 

Franks  (Auguste  W. ),  au  British 
Muséum,  à  Londres. 

Free.man,  antiquaire,  à  Londres. 

Fry  (Miss  Katherine),  Plashet  près 
Slialfort  (Angleterre). 

■  Fi  iiSTi..Mi!i;«(;  Stanurim  (le  comte  de), 
il  ApoUinarisberg,  près  Cologne. 


DE    LA    SOCIETE    FRANnA.lSE   1»  ARCHEOLOGIE. 


LXIII 


O 

Gellhand  dk  Mertem  (Louis),  iiumis- 
inatc,  k  Bruxelles. 

Gelvet  (le  comte  de),  à  Eslon,  pics 
Maestricht. 

■  Genard  (P.),  conseivatcur  des  archi- 
ves, membre  de  l'iiislilul  des  pro- 
vinces de  France,  a  Anvers. 

Gergens,  secrOtaire  de  la  Sociélé 
archéologique  de  Maycuce. 

GiLDUEMii'is,  ancien  nt'uociant  a  Rol- 
terdam. 

Glavany  (F.),  chargé  d'affaires  de  la 
Sublime  Porte,  à  Bruxelles. 

GoNELLA,  a  Turin. 

Gosse  lils,  à  Genève  (Suisse). 

Grangacnage,  premier  président  de  la 
cour  d'appel,  à  Liège. 

*  Grant  (.Mgr),  évéi[ue  de  Soutwarlh, 

à  Saint-Georges,  à  Londres. 
Greenslade     (  Révérend     William  ) , 
Stoke-sub-Hambdon  Ilminsler  (An- 
gleterre). 

*  Griolet    (Ernest),    numismatiste,    à 

Genève. 
GuiLERY,  professeur,  membre  de  l'Aca- 
démie, à  Bruxelles. 


Hadji  Cueik  MosiiiN  Kai-  (le  général), 
aide  de  camp  de  S.  M.  J.  le  shah  de 
Perse,  et  conseiller  d'ambassade. 

Hagemans,  membre  de  la  Chambre  des 
représentants,  à  Bruxelles. 

Hamman  (Th.),  nég.  à  Ostende. 

Hartsiiume  (Rév.  C.-A.),  archéologue 
il  Londres. 

Haili.eville  (de),  littérateur,  à 
Bruxelles. 


'  Hennerioie,    arcliilecte,  a  Courtrai, 

(Belgique). 
J.-C.  Hezemians. 
L.-C.  Hezenmans. 
Heurard  (Paul),  à  Bruxelles. 
HoDY  (le  baron  Ludovic  de),  docteur 

en  droit,  rue  Marie-Thérèse,  S'i,   à 

Bruxelles. 
HiGiE-r  (l'abbé),  a  Ath  (Belgique). 
Hixsii,  membre  du  Conseil  supérieur 

des  bâtiments,  à  Carlsruhc. 


J.VMES  (sir  Walter),  baronnet,  membre 
de  la  Société  archéologique  du  comté 
de  Kent,  à  Sandwich  (Angleterre). 

JiST  (Théodore),  conservateur  du  Mu- 
sée d'antiquités,  membre  de  l'Acadé- 
mie royale  de  Belgique,  à  Bruxelles. 


K. 

■  Kellek  (le  docteur),  secrétaire  de  la 

Société  archéologique  de  Zurich. 
Kervy.n     de    Letenhove    (le    baron), 

ancien   ministre  du  roi  des  Belges, 

membre  de  l'Institut  des  provinces 

de  France,  à  Bruxelles. 
Kestelood,  propriétaire,  à  Gand. 
Keysek  (N.  de),  membre  de  l'Académie 

d'archéologie  de  Belgique,  directeur 
.    de  l'école  des  Beaux-Arts  d'Anvers, 

membre  de  l'Institut  des  provinces 

de  France. 
KuEisEK,  membre  de  plusieurs  Sociétés 

savantes,  k  Cologne. 
KiRCiillOEER  (Théodore),  a    Stutigard. 
KuiEG  DE  HocFEEUEN,  aidc-de-cauip  de 


XLIV 


J.ISTE    HES   .MEMUKES 


S.  A.  U.  le  Qi-aiiil-duc  de   Bade,   â 

liadea-Badeii. 
K11.LKR  (Franc.'',  professeur  à  TAcadé- 

inie  de  Berliu. 
KiLL,  id. 
KiucKKK  (Edward),  es»i.,  ancien  maire 

de  Douvres,  membre  de  la  Socidlé 

arcliéoloiîique  du  comté  de  Kent,  à 

Castel-Hiil  (Anclelerre). 


Loi'tz  (le  cumniaiidcur)  ,  ancien 
conservateur  du  Musée  d'antiquités 
de  Parme. 


La  FitNTE  (vicomte  de),  membre  de 
l'Académie  royale  d'histoire  de  Ma- 
drid, à  Madrid. 

Lancia  di  drolo  (le  duc  Frédérico), 
secrétaire  de  l'Académie  des  sciences, 
membre  de  l'Institut  des  provinces 
de  France,  à  Palerme. 

■  Li.NDE.ssciiMim,  conservateur  du  Mu- 
sée de  Mayence. 

Larkino,  secrétaire  de  la  Société  ar- 
chéologique du  comté  de  Kent,    à 

Ryarsh  (Angleterre). 

Laurent  (Mgr),  évéïiue  de  Luxem- 
bourg. 

Leicmans  (le  docteur),  directeur  des 
Musées,  à  Leyde. 

Li;  Grand  de  Rel'landt,  secrétaire  de 
l'Académie  archéologique,  à  Anvers. 

Leniiart  (F.),  sculp.,  à  Cologne. 

"Le  Roi,  professeur  d'archéologie  à 
rUhiversité  de  Liège. 

LosANA  (Mgr),  évé(|iie  de  Bielle,  mem- 
bre de  1  Inslitnt  des  provinces  de 
France. 

Leitscii  (Charles-Chrétien  de),  a  W'etï- 
lar  (Prusse). 

LiciiLTÉ  (l'abbé),  curé  catholique  de 
Christiania  (Norvège). 

LiMELtnE  (Auguste),  conservateui-  iln 
Musée,  a  Namur. 


Cercle  archéologi(iue  (le)  de  la  ville  de 
Muns. 

Marcis  (Gustave),  libraire,  à  Bonn. 

Mavi:m-iscii  (le  baron  de),  chambellan 
de  S.  M.  le  roi  de  Prusse  et  de  S.  A. 
le  prince  de  Hobenzollcrn-Sigmariii- 
gen,  a  Sigmaringen  (Prusse). 

Mayeh  (Joseph),  membre  de  l'Institut 
des  provinces  de  France,  kLiverpool. 

Mayer  (F.),  k  Fraiicfort-sur-Meiu). 

Meester  de  Ravestein  (de),  ministre 
plénipotentiaire,  au  château  de  Ra- 
vestein,  près  Matines  (Belgique). 

Aîenarrêa  (le  comte),  président  du 
conseil  des  ministres  du  roi  d'Italie, 
membre  de  l'Institut  des  provinces,  a 
Florence. 

Messmer  (  le  docteur  )  ,  professeur, 
conservateur  du  Musée,  à  Munich, 
(Bavière). 

Milliga.m  (le  Rev.  H.  M.  M.  A.), 
membre  de  la  Société  archéolo- 
gique du  comté  de  Kent,  a  Sulton 
Valence  (Angleterre.) 

MiNERViNi  (Giuliano),  conservateur  du 
Musée  de  Naples, 

Mouammed-Hassan-Kae  (le  colonel), 
secrétaire  d'ambassade  de  S.  M.  i. 
le  shali  de  Perse. 

MoNE,  directeur  des  archives  générales 
du  grand- duché  de  Bade,  a  Carls- 
ruhe. 

Mdsler  (Charles),  professeur  à  l'Aca- 
démie royale  de  Dusseldorf. 

Miiii;r  (le  docteur  Charles),  a  Stutt- 
gard. 


DE    LA    SOCIETE    FRANÇAISE    D  AUCIIEOLOGIE. 


hXV 


Naul'ys  (le  comte  de),  membre  de  plu- 
sieurs sociétés  savantes,  à  Wies- 
badeii. 

NANMNC.A-UmERDi.iK  ,  archiviste  ,  à 
Kanipeii. 

Nazaiie-Aga,  ciivoyr  de  S.  M.  J.  le 
shah  de  Perse,  et  secrétaire  d'aui- 
bassadc. 

Neykn  (Auguste),  propriétaiie  a 
Luxembourg. 

NicuoLS  (  Johii-Gouth  )  ,  nieuibre  de 
la  Soc.  des  Aiitiq.  de  Londres. 

NiLSOs  (S.),  ancien  professeur  d'his- 
toiie,  à  Luiid  (.Suède). 

Noue  (le  comte  Arsène  de),  docteur  eu 
droit,  à  Malnièdy. 


*  Olfers  (d'),  directeur  général  des 
musées,  a  Berlin. 

Ogvlvy  (G.),  esq.  Museum-Streel,  41, 
à  Londres  (Angleterre). 

O'Kelly  de  Galway  (le  comte  Alph.^, 
rue  Sans-Souci,  .')3,  à  Biuxelies. 

OKi'iiRY  (John-Henri),  membre  de  la 
Société  des  antiquaires  de  Londres, 
à  Norwich,  comté  de  Norfolk  (An- 
gleterre). 

'  Otrei'PE  de  Bolvette  (d'),  président 
de  l'Institut  liégeois,  membre  de 
l'Institut  des  provinces  de  France,  a 
Liège  (.Belgique). 

Oudare,  uégociant  à  Gènes  (Italie). 


Pamzzi   (Antonio),  l'un  des  conserva- 


teurs de  la  bibliothèque  de  Londres. 

Pai;n,  ancien  maire  de  Douvres  (An- 
gleterre). 

*  Farkcrs,  nicnilire  de  la  Société 
architect.  d'Angleterre,  de  l'Institut 
des  provinces  de  Fiance,  a  Oxford. 

Pety  ue  Rusen  (Jules),  a  Grunes,  près 
Marches  (province  de  Luxembourg). 

Pleyté,  conservateur  du  Musée  des 
Antiques,  à  Leyde. 

Fir.ers,  professeur  de  l'Université  et 
directeur  du  musée  d'archéologie 
chrétienne,  à  Berlin. 


Quast  (le  baron),  conservateur  géné- 
ral des  monuments  historiques  de 
Prusse,  membre  étranger  de  l'Insti- 
tut des  provinces  de  France,,  à  Ber- 
lin. 


R!;icnENSi'ERGER,  conseiller  à  la  cour 
de  Cassation,  vice-président  de  la 
Chambre  des  députés  de  Berlin,  à 
Berlin. 

Reichensperger,  conseiller  à  la  Cour 
de  cassation,  id. 

Reider,  professeur  a  l'école  polytech- 
nique de  Bamberg. 

Respileix  (.l'abbé),  chanoine,  doyen 
de  la  cathédrale  de  Tournay. 

■Reusens,  docteur  en  théologie,  biblio- 
thécaire de  l'Université,  à  Louvain 

(Belgique). 

'  RiEOLiM  (.le  docteur),  directeur  du 
Musée  d'antiquités  de  Parme. 


XLVl 


LISTE    DES   MEMBRES 


KioEL  (sir  W.-B.),  baruiiiiel,  membre 
de  la  Sociélé  arclK^oiogiiiue  du  comté 
de  Kent,  à  Londres. 

■  R 100 tN BACH,  architecte  à  Bâle. 
HiPALDA  (le  comte  de),  de  l'Académie 

espagnole  d'arclicologie,  h   Madrid, 

membre  étranger   de   1  Institut   des 

provinces  de  France. 
"  RoACii  Smith,  membre  de  la  Société 

des  Antiquaires,  à  Woods,  près  de 

Rochcstcr. 
RoBSON   (Edward),  architecte  à   Dur- 

ham  (Angleterre). 

■  Roisin  (le  baron  Ferdinand  de),  che- 

valier de  Malte,  à  Touniay. 
RoNSE  (Edmond),  archiviste,  a  l'urnes 
(.Belgique). 

■  Rossi  Je  commandeur  de),  membre 

de  l'institut  des  provinces  de  France, 

à  Rome. 
Roulez,   professeur  a  rL'iiiversité  de 

Gand,  membre  étranger  du  l'institut 

des  provinces. 
RcssEL  (lord  Ch.),  a  Londres. 
Rl'ssel  (Uasting),  id. 


Salinas  (de),  prolésscur  d'archéologie 
a  l'Université  de  Palerme. 

Salsail-Soihaim;  (le  baron  de),  a 
Francfort. 

Savedua  (de),  ingénieur  eu  chef  des 
ponts  et  chaussées,  à  Madrid. 

SoHEMAN,  professeur  au  collège  royal 
de  Trêves. 

ScMENASE  (Charles),  conseiller  a  la 
cour  de  cassation  de  Berlin. 

SciiotTEi.TE  (le  chevalier  dei,  de  l'Aca- 
démie d'archéologie  de  Belgi(iue. 

ScAim-.iiEii  ,  professeur  des  sciences 
auxiliaires  historiiiucs,  k  l'Univer- 
sité de  Fiibourg. 


ScLoi'is  (le  comte),  i)résident  de  l'Aca- 
démie de  Turin. 

ScuL'ERMANs  (H  ),  membre  de  l'Aca- 
démie d'archéologie  de  Belgique , 
conseiller  à  la  Cour  royale  de 
Liège. 

Segrltain,  chef  de  bataillon  du  génie, 
a  Rome. 

ScniLTE  (l'abbé^,  doyen  de  Frekendorf, 
diocèse  de  Munster. 

Sharpes  (Edmond),  architecte  anglais, 
membre  de  l'Institut  des  provinces, 
à  Genève. 

SciiEFi'iELT- Grâce,  à  Know-House, 
comté  de  Kent. 

SiHET  (Ad.),  sous-préfet,  a  Saint-Nico- 
las (Belgique). 

Smoliehen,  membre  de  la  députa- 
tion  permanente  de  la  province 
d'Anvers. 

Sterne\vski(J.),  membre  de  l'Académie 
des  sciences  de  Saint-Pétersbourg. 

SrA.Mi'E  (de),  président  du  tribunal  de 
Munster. 

Stielfried  (le  baron  de),  grand  maître 
des  cérémonies  du  palais,  à  Berlin. 

Stirlixg  (sir  Walter),  baronnet,  mem- 
bre de  la  Société  archéulogi(iue  du 
comté  de  Kent,  a  Tuiibridge-Wcls 
(Angleterre). 

Stone  (Rév.-Can.),  membre  de  la 
Sociélé  archéologique  du  comté  de 
Kent,  à  Cantorbéry  (Angleterre). 

Sti  aht-Menteau  (Ch.),  à  Entry-Hill- 
Housc-Bath  (Anglcleire). 

SnAKT-MENTEAH  lils ,  a  Enliy-Hill- 
Ilouse-Bath  (Angleteri-e). 

Stiers  (Victor de),  à  la  Haye. 


Temi'Esi,   menilire   de   la  Société  des 
antiquaires  de  Londres. 


DE    LA    SOCIKTK    FRANÇAISE  H  AIlCIlEOIOfilE. 


XI.VII 


Ti;\  liiti.NCK,  il  la  Iliiyc. 

Toni's  (Louis),  luembie  coricsiioiidaii 

lie  rAcadémie  il'aicliéolofiic  <Io  lîcl- 

gique,  à  Anvers. 

U 


Zestf.rmann,  professeur,  à  Leipzig. 


Urliciis,  professeur,  directeur  du  Mu- 
scle d'antiquités,  à  Bonn. 


VANnuAME-BERNii.K,  trésorier  de  la 
Société  royale  des  Beaux-Arts  et 
conseiller  principal,  à  Gand. 

■  Vanden-Peerboom  ,  ministre  d'Etat, 
h  Bruxelles. 

Van  der  iiaiche,  rue  de  Courtrai,  S,  a 
Gand  (Belgique). 

Vax  der  Rltte,  chanoine,  curé-doyen 
a  Poperinge  (Belgique). 

Van  uer  Viver,  ii  Jersey  (Angleterre). 

Vax  Limpoel,  de  Niemuster,  membre 
de  la  chambre  des  représentants  et 
ancien  sénateur,  a  Bruxelles. 

'  Veliaminoio-Zerxow  (de),  genlil- 
liomnie  de  la  Chambre  de  l'empereur 
de  Russie,  a  Saint-Pétersbourg. 

Ville  (Emile  de),  chevalier  de  l'ordie 
de  Charles  111,  a  Liège  (Belgique). 


AV 

Wagener,  membre  de  plusieurs  socié- 
tés savantes,  rue  Hareng-Spec,  21, 
a  Gand  (Belgique). 

*  Wallerstein,  (le  prince)  ,  ancien 
minisire  à  Munich. 

"  Weale  (James),  a   Bruges  (Belgique). 

Wetter,  membre  de  plusieurs  aca- 
démies, a  Maycnce. 

WiESEXFELD,  professeur  d'architecture, 
à  Prague  (Bohème). 

Willem  ,  directeur  de  la  Société 
archéologique  de  Sinsheim. 

WniEHAM-MARTix  (Charles) ,  membre 
du  Parlement,  vice-président  de  la 
Société  archéologi([ue  du  comté  de 
Kent,  au  château  de  Leeds,  prés  de 
Maidstone  (Angleterre). 

WiTMANX  ,  directeur  de  la  Société 
archéologique  de  Mayence. 

WoRSAAE  (J.),  inspecteur  général  des 
monuments  du  Danemark,  membre 
de  l'Institut  des  provinces  de  France, 
à  Copenhague. 


Yates,  membre  de  plusieurs  sociétés 
savantes,  k  Londres. 


La  Société  française  d' Archéologie  renouvelle  à  ses  associés  la 
recommandation  qu'elle  letu-  a  faite  antérieurement,  de  faire  tous 
leurs  efforts  your   augmenter  le  nombre  des  membres  de  la 


Xl.Vlir  I.ISTK  IlES  MEMBRES  DE  I.A    SOCIETE, 

Coin pa (/nie:  il  iicsl  pns  «le  momltre  qui  ne  puisse,  dans  sa  circon- 
scription, trouver  clia(|ue  année  deux  ou  trois  nouveaux  associes. 
Quand  on  songe  qu'en  Angleterre  certaines  associations  comptent 
ilix  mille  membres  et  plus,  nous  devons  croire  qu'avec  un  peu  de 
/.èle  nous  pourrions  (piadrupler  le  nombre  des  membres  de  la  Société 
française  d'nrchéohyie. 

Le  Bulletin  monumental,  qui  paraît  de  six  semaines  en  six 
semaines,  avec  de  nombreuses  figures,  sous  la  direction  de  la  Société 
française  d'archéologie,  est  la  plus  ancienne  revue  archéologique 
l'ondée  eu  France.  —  Le  prix  de  l'abonnemenl  est  de  15  francs 
par  an  pour  la  France,  et  18  francs  pour  l'étranger. 


ADDITIONS   ET   RECTIFICATIONS 

A   LA    LISTE    DES   MEMBRES  DE    LA    SOCIÉTÉ 
PAR   ORDRE   ALPHABÉTIQUE 


Bardât  de  Bignicoirt   (Arthur) ,    à 

Reims. 
Barry,  professeur   à    la    Faculté  des 

lettres,  à  Toulouse. 
Begoi'en   (le  comte),  trésorier-payeur 

général,  a  Toulouse. 
Berge   (  Stéphane  ) ,   avocat ,   rue  des 

Saints-Pères,  i,  à  Paris. 
BosREDON  (de),  capitaine  au  3"=  chas- 
seurs d'Afrique,  chef  du  bureau  des 
affaires  indigènes  à  Tebessa  (Algérie). 
Calmon  (Cyprieu),  statuaire  à  Cahors. 
Cardavacque  (de),  à  Arras. 
Celier  (Alexandre),  au  Mans. 
Combette-Labourelie  (Louis  de),  châ- 
teau de  Labourélie  (Tarn). 
CoYON    (  Charles  ) ,    à    Vaudsincourt 

(Marne). 
DiTMESNiL  (Révérend),  juge  de  paix,  à 

Meximieux  (Ain). 
Durand  de  Fontmagne    (François),  à 

Fleurieu  (Rhône). 
Du  Temple  (Alph.),  à  Loudun  (Vienne). 
Engerard  ,  avocat ,    rue  Pémagnie ,  à 

Caen. 
Falgliêre  (le  baron  de),  à  Rabastens 

(Tarn). 
Hannion  (l'abbé),  aumônier  du  lycée, 

à  Bar-le-Duc  (Meuse). 
HuART,  conservateur  du  Musée,  à  Arles. 
Jautrou,   a  la  Hoberdière  (Indre-et- 
Loire). 
JouRON  (Léon),  a  Avise  (Marne). 
Lalonde  (Philibert) ,  à    Brives   (Cor- 
rèze). 

XL*  SESSION. 


Lambert  (René),  attaché  à  la  direction 

des  Domaines,  à  Moulins  (Allier). 
Lavergne  (  Adrien  ) ,   à    Castillon  de 

Bats  (Gers). 
Malafosse  (de),  à  Toulouse. 
Martl'ré  (le  docteur),  médecin  mili- 
taire, a  Toulouse. 
Menjot  d'Ébenne  (Samuel),  au  château 

de  Couléon  (Sarthe). 
Montferrand  (Charles  de),  au  château 

de  Montréal  (Dordogne). 
Perroid,    membre    de    l'Institut  des 
provinces,  rue  Lafayette,  !37,  Paris. 
Petit-Thouars  (G.  du),  au  château  du 

Petit-Thouars  (Indre-et-Loire). 
PoL  Mahuet,  vice -président  du  con- 
seil de  préfecture,  à    Châlons-sur- 
Marne. 
Prêville  (l'abbé  de),  à  Vendôme. 
Rangognes  (de),  archiviste  du  départe- 
ment, à  Angoulême  (Charente). 
Saint-Geniez  (le  marquis  de),  au  châ- 
teau de  l'Hermitage  (Hérault). 
Salverte-Bellenaves    (de),    a    Belle- 

naves  (Allier). 
Mgr  Sebaux,  évêque  d'Angoulême. 
SoLAGES  (le  comte  Paul  de),  à  Tou- 
louse. 
Turge    (  Honoré    de  ) ,    à    Montbrison 

(Tarn-et-Garonne). 
Van  der  Vyner,  docteur-médecin,   à 

Jersey. 
Veuillot  ,  contrôleur    principal    des 
contributions  directes,  à  Lyon. 


COMPTE  DES  RECETTES  ET  DÉPENSES 

DE    L'ANNÉE    1873 

RENDU    PAR    LE    TRÉSORIER 

ARRÊTÉ   PAR   LE   COMITÉ  PERMANENT    DE   LA  SOCIÉTÉ,    DANS 
SA   SÉANCE  DU   11    SEPTEMBRE    1874. 


RECETTES. 


Excédant  du  compte  de  1872 4,351  25 

Rente  sur  l'Etat 2,000  • 

Recette»  de  1873  (1) 10,298  50 

Total 16,849  73 


DEPENSES. 


Frais  de  recouvrement  des  cotisations,  par  la  poste,  par  les 
banquiers  et  par  les  membres  correspondants 

Frais  de  retour  de  traites  non  payées 

Dessins,  gravures  et  lithographies  pour  le  Compte-reudu  du 
Congrès  de  Chàteauroux 

Impressions  à  Caen,  à  Angers,  a  Chiaon  et  à  Chàteauroux.    . 

Payé  à  valoir  sur  l'impression  du  Compte-rendu  du  Congrès 
de  Chàteauroux  (2) 

A  reporter    .    .    .    . 


Ikk 

82 

123 

68 

1,443 

30 

2,308 

83 

2,000 

» 

6,620   65 


(1)  Daof  cette  gomme  sont  comprises  les  cotisations  qui  restaient  k  recouvrer  sur 
l'année  1872,  lors  de  la  reddition  du  compte  de  cette  année.  Les  cotisations  non 
encore  encaissées  sur  l'année  1873,  au  nombre  de  deux  cents  environ,  figureront 
dans  le  compte  de  1874. 

(9)  Il  reste  h  payer  environ  l,80O  fr.  aux  imprimeurs  d'Angers  et  de  Tours 


COMPTE   RENDU   PAR   LE   TRESORIER. 


LI 


Report 

Frais  généraux  de  ce  Congrès  et  d'une  séance  k  Tours.     .    . 

Excursion  archéologique  dans  le  département  de  l'Indre.    . 

Achat  et  gravures  de  médailles 

Affranchissement  par  la  poste  du  Compte-rendu  du  Congrès 
de  Vendôme 

Ports  de  lettres,  de  caisses,  de  livres,  affranchissement  de  cir- 
culaires et  envoi  de  médailles 

Timbre  de  traites  et  timbres  mobiles 

Travaux  de  menuiserie  et  de  serrurerie  au  Musée  de  la 
Société 

Traitement  d'employés  et  frais  généraux   d'administration. 

Location  d'appartements  pour  le  dépôt  des  livres  de  la  Société. 

Traitement  des  concierges  du  pavillon  et  du  musée.    .    .    . 


6,620  65 

613  . 

200  » 

237  70 

691  55 


495 

45 

34 

50 

296 

65 

,000 

» 

150 

» 

59 

> 

ALLOCATIONS. 

Membres  chargés  de  la  sur- 
veillance et  lia  la  direction 
des  travaux. 
M.  Palustre.  Restauration  d'un  retable  a  Nouàtre. 

M.  Al'diot.  Fouilles  à  Saintes 

M.  l'abbé  Cérès.  Fouilles  dans  l'Aveyron 

M.  l'abbé  Chagnôn.        Restauration  de  la  partie  romane  du 

chevet  de  l'église  de  Déols.    .    .    . 

M.  HucHER.  Réparation   a  la   crypte  de  Sillé-le- 

Guillaume 

M.  l'abbé  Decorde.         Réparation  du  portail   de  l'église  de 

Notre-Dame  d'Aliermont 

M.  Allègre.  Réparation  de  la  crypte  d'Uzès..    .    . 

M.  Arthur  Calvet.         Fouilles  à  Bapteste 

C"  DE  Rochambeal.        Travaux  de  consolidation  au  château  de 

Lavardin 

M.  Ledaln.  Fouilles  sur  l'emplacement  de  l'abbaye 

de  Saint-Cyprien,  à  Poitiers.     .    . 

M.  Dauvergne.  Restauration  de  deux  bas-reliefs  dans 

la  chapelle  de  l'hospice  d'Issoudun. 

M.  Delaporte.  Fouilles  archéologiques  a  Lizieux.    . 

M.  Morel.  Fouilles  dans  le  camp  d'Attila.  .    .    . 

M.  Brugl'ier-Rocre.         Réparation  a  la  toiture  du  logis  du 

Pont-Saint-Esprit 

Total 


100  » 

100  » 

100  » 

100  » 

100  » 

100  '. 

200  » 

300  • 

150  • 

100  » 

100  • 

50  » 

100  . 


12,006   50 


LII 


COMPTE   RENDU    PAR   LE   TRESORIER. 


BALANCE. 
Recettes                           .     .    .    . 

1 6,849  7.5 

12,006  .50 

Excédant.    .    . 

/«,843  25 

ita,  le  M  septembre  1874. 

Le  Trésorier, 
L.  Gaigain. 

ALLOCATIONS    A   SOLDER. 

Membres  chargés  de  la  sur- 
Teillance  et  de  la  direction 
det  travaux. 
M.  LE  D' Nou-AS.  Fouilles  à  Saint-Haon-le-Chàtel     .     .  <00 

M.  DE  BoNNEFOY.  Soinmc  à  la  disposition  de  M.  de  Bon- 

iiefoy,  pour  fouilles  à  Amélie-les- 

Baiiis 130 

H.  D'EspiNAT.  Somme  à  la  disposition  de  M.  d'Espi- 

nay 200 

M.  DK  BiRES.  Fouilles    dans     le    département    de 

l'Allier 1.50 

M.  DE  CoLCNY.  Restauration  du  tabernacle  du  baptis- 

tère de  Saint-Mexme  de  Chinon.    .  100 

MM.  l'abbé  Voisin  et!  Réparations  au  fanal  de  Notre-Dame 

Fai  coNNF.Ai-DiFRESNE.  (      d'Estréc 150 

M.  Makionmal'.  Fouilles  dans  la  Loire-Inférieure.     .  100 

M.  l'abbé  Cochet.  Réparations  a  l'église  de  Sainl-Pierre 

de  Touques 200 

M.  Ratmond-Bobdeacx.  Extraction  des  blocs  des  murs  gallo- 
romains  d'Évreui 75 

M.  l'abbé  Lezat.  Réparations  à  l'église  de  Barague.     .  100 

M.  UE  Mabicolrt.  Fouilles  dans  l'église  de  Saint-Gilles 

de  Montoire 50 

M.  DE  Cessac.  Fouilles  à  Gueret 100 

M.  Liénari).  Fouilles  a  Verdun 150 

M.  Vincent-Dcrasd.        Fouilles  à  Feurs 50 

M.  Vallier-  Fouilles    d'uu    tumulus    près    le   lac 

Paladu 60 


COMPTE  RENDU  PAR  LE  TRESORIER.         LUI 

Suite  des  allocations  à  solder. 
M.  HoYER.  Fouilles  dans  les  environs  d'Uyèrcs.  .  JOO     » 

M.  Fauconneau-Dufresnf,  Fouilles  à  Levroux 150     " 

M.  Battandier.  Fouilles  au  tombeau  de  Medracen,  a 

Constantine »       » 

M.  l'abbé  Delapard.       Consolidation  de  l'église  de  Tebessa, 

ancien  temple  de  Minerve.     .    .    .  200     » 

M.  Bruguier-Roure.        Subvention  pour  la  conservattion  des 

peintures  du  xv*  siècle  dans  le  logis 

de  rOEuvre  du  Saint-Esprit.    .    .  42     « 

Somme  votée  pour  l'érection  d'un  Monument  à  la  mémoire 
de  M.  de  Caumout,  sur  une  place  publique  de  Bayeux,  sa 
ville  natale •'•>W0    " 


Le  Trésorier, 

L.  Gaugain. 


DÉCRET 

RECONNAISSANT   LA   SOCIÉTÉ  FRANÇAISE   DAR  CHÉOLOG  lE 
n'UTILITÉ    PUBLIQUE. 

Le  Président  du  conseil,  chef  du  pouvoir  exécutif, 

Sur  le  rapport  du  Ministre  de  l'Instruction  publique,  des 
Cultes  et  des  Beaux-Arts; 

Vu  la  demande  formée  par  la  Société  française  d'Archéologie 
de  Caen ;  • 

Vu  la  délibération  de  la  Société  en  date  du  12  mai  IcSTO  ; 

Vu  son  règlement  constitutif  et  la  liste  de  ses  membres; 

Vu  l'état  de  sa  situation  financière  et  de  ses  publications; 

Le  Conseil  d'État  entendu; 

Arrête  : 

Art.  1«^ 
La  Société  française  d' Archéologie  pour  la  conservation 
des  monuments  historiques,  dont  le  siège  est  à  Caen,  est 
reconnue  comme  établissement  d'utilité  publique. 
Art.  2. 
Les  Statuts  constitutifs  sont  approuvés  tels  qu'ils  sont  annexés 
au  présent  arrêté.  Aucune  modification  n'y  pourra  être  faite 
sans  autorisation. 

Art.  3. 
Le  ministre  de  l'Instruction    publique,  des  Cultes   et   des 
Beaux-Arts,  est  chargé  du  présent  Arrêté. 

Fait  à  Versailles,  le  1 4  août  \  871 . 

Signé  :  A.  Thiers. 
Par  le  Président  du  Conseil,  chef  du  pouvoir  exécutif. 

Le  ininistre  de  r Instruction  publique  et  des  Cultes, 
Signé  :  Jules  Simon. 

Pour  ampliation  : 

Le  Secrétaire  général, 

S. -il.  Taillandier. 


STATUTS  DE   LA    SOCIÉTÉ 


Article  ^". 


Une  société  est  établie  pour  la  conservation  et  la  description 
des  monuments  de  l'Empire  (1),  sous  le  titre  de  Société  fran- 
çaise d'archéologie  pour  la  conservation  et  la  description 
des  monuments  historiques. 

Art.  2, 

La  Société  se  propose  de  faire  le  dénombrement  complet  des 
monuments  français,  de  les  décrire,  de  les  classer  dans  un  ordre 
chronologique  et  de  publier  des  documents  sur  la  statistique 
monumentale  des  départements  dans  un  Bulletin  périodique. 

Elle  fait  tous  ses  efforts  :  'l»  pour  empêcher  la  destruction  des 
anciens  édifices  et  les  dégradations  qui  résultent  de  restaurations 
mal  entendues  ;  2°  pour  obtenir  le  dénombrement  et  la  conser- 
vation des  ebjets  d'antiquité  et  des  pièces  manuscrites  qui  inté- 
ressent l'histoire. 

Art.  3. 

La  Société  fait  près  du  gouvernement  les  démarches  qu'elle 
juge  convenables  pour  arriver  à  ce  but,  et  provoque  la  création 
de  musées  d'antiquités  dans  les  chefs-lieux  de  département. 

Art.  4. 

La  Société  étend  ses  soins  à  toutes  les  parties  de  la  France, 

(1)  Le  dépôt  des  Statuts  au  ministère  de  rinstruction  publique  a  eu  lieu  le 
12  mai  «870. 


LVI  STATUTS   DE   LA  SOCIÉTÉ. 

sans  acception  de  localité  ;  mais  le  chef-lieu  de  l'administration 
qui  la  dirige  est,  quant  à  présent,  lixé  dans  la  ville  de  Caen. 
Sur  une  délibération  prise  dans  une  assemblée  générale  convo- 
quée ad  Itoc,  le  chef-lieu  pourrait  être  transporté  dans  une 
autre  ville. 

Art.  5. 

Chaque  membre  paie  une  cotisation  annuelle  dont  le  minimum 
est  de  dix  francs  et  le  maximum  de  cent  francs.  Le  nombre  des 
membres  est  illimité.  Pour  faire  partie  de  la  Société,  il  faut  avoir 
donné  son  adhésion  aux  statuts,  avoir  déclaré  quel  chiffre  on 
adopte  pour  sa  cotisation  annuelle,  et  avoir  été  nommé  dans  une 
séance  du  conseil. 

Art.  6. 

La  Société  peut,  en  se  conformant  aux  règles  du  droit  com- 
mun, tenir  des  séances  dans  toutes  les  villes  de  l'Empire.  Aucune 
nomination  ne  devra  être  faite  dans  les  séances  tenues  par  la 
Société  hors  du  chef-lieu,  qu'autant  que  le  Comité  permanent 
l'aura  permis  par  une  délibération  formelle.  Aucune  nomination, 
môme  dans  ce  cas,  ne  peut  avoir  lieu  si  la  séance  n'est  présidée 
par  le  directeur  de  la  Société  ou  par  un  dignitaire  désigné  par 
lui  pour  le  remplacer.  Pour  qu'il  y  ait  élection,  les  candidats 
doivent  réunir  l'unanimité  des  suffrages  des  membres  du  conseil 
présents  à  la  réunion. 

Cet  article  est  applicable  à  l'élection  des  inspecteurs  et  mem- 
bres du  conseil. 

Art.  7. 

Les  ministres,  l'inspecteur  général  des  monuments,  nommé 
par  le  gouvernement,  les  membres  du  conseil  supérieur  des 
bâtiments,  ceux  de  la  2«  classe  de  l'Institut,  les  préfets,  les  évéques 
et  les  recteurs  d'académie,  sont  de  droit  membres  de  la  Société. 

Art.  8. 
L'administration  est  confiée  à  un  conseil  administratif  et  à  des 


STATUTS  DE   LA   SOCIÉTÉ.  LVII 

olliciers,   dont  le  règlement  intérieur  dolermine  le  mode  de 
nomination,  ie  nombre  et  les  attributions. 

Art.  9. 

Les  délibérations  dn  ('onsci!  administratif  relatives  à  des 
ac(|uisitions,  aliénations  ou  échanges  d'immeubles  et  à  l'accepta- 
tion de  dons  ou  legs,  sont  soumises  à  l'autorisation  préalable  dn 
gouvernement, 

AuT.  40. 

Le  directeur  représente  la  Société  vis-à-vis  de  l'autorité  pu- 
blique et  des  tiers. 

Art.  11. 

Le  trésorier  en  chef  est  chargé  de  recevoir  les  cotisations  ;  il 
solde  les  dépenses  arrêtées  par  le  conseil,  et  présente  chaque 
année  le  compte  des  recettes  et  dépenses  de  la  Société. 

Art.  12. 

Le  conseil  administratif  se  compose  du  directeur,  de  quarante 
officiers  de  la  Société  dont  la  désignation  est  faite  par  le  règle- 
ment intérieur,  et  de  quarante  membres  ordinaires,  dont  dix  au 
moins  devront  être  pris  parmi  les  membres  résidant  dans  le 
département  du  chef-lieu.  Les  quarante  membres  ordinaires  sont 
renouvelés  tous  les  deux  ans,  et  immédiatement  rééligibles  (1). 

Art.  13. 

Le  conseil  tient  chaque  année  une  session  dans  laquelle  tout 
ce  qui  intéresse  la  Société  est  mis  en  discussion.  On  s'occupe 
principalement,  dans  cette  réunion,  des  mesures  à  prendre  pour 

(1)  Jusqu'à  ce  jour,  tous  les  inspecteurs  de  la  Société  ont  fait  de  droit  partie 
du  conseil  g<^'néral  administratif.  Cet  usage  devra  être  modifié,  pour  se  con- 
former aux  prescriptions  de  l'article  12.  Pour  le  mùme  motif,  le  nombre  des 
membres  ordinaires  du  conseil,  s'élevant  aujourd'hui  a  soixante  environ,  devra 
être  réduit  à  quarante. 

XL^  SESSION.  H 


LVIII  STATUTS   DE   LA  SOCIÉTÉ. 

la  conservation  des  édifices,  des  publications  à  faire  dans  l'année 
(modèles,  circulaires,  etc.)  et  de  l'emploi  des  fonds. 

Cette  session  se  tient  dans  une  ville  désignée  à  l'avance  par  la 
Société  ;  tous  les  archéologues  de  l'Empire  y  sont  convoipiés  par 
une  circulaire.  Le  compte-rendu  de  chaiiue  congrès  est  envoyé  à 
tous  les  membres  de  la  Société. 

Art.  14. 

Le  directeur  et  les  membres  du  conseil  général  résidant  dans 
le  département  du  chef-lieu  forment,  avec  le  secrétaire  et  le  tré- 
sorier en  chef  de  la  Société,  le  comité  permanent,  chargé  de 
l'expédition  des  affaires  courantes.  11  se  réunit  une  fois  par  mois. 
Les  membres  du  conseil  qui,  vu  leur  éloignement,  ne  peuvent 
prendre  part  à  ces  délibérations,  sont  invités  à  exprimer  leur 
opinion  par  écrit. 

Art.  15. 

Outre  le  secrétaire  général  rééligible,  deu.K  membres  du  con- 
seil, désignés  par  le  directeur,  sont  chargés  de  tenir  la  plume 
dans  les  réunions  et  de  remplir  les  fonctions  de  secrétaires 
adjoints. 

Art.  16. 

Le  conseil  nomme  chaque  année  une  commission  de  trois 
membres  au  moins,  qui  font  un  rapport  sur  les  travaux  de  la 
Société. 

Art.  17. 

Un  règlement  intérieur,  arrêté  par  le  conseil  administratif, 
détermine  toutes  les  dispositions  de  détail  destinées  à  assurer 
l'exécution  des  statuts. 

Art.  18. 

En  cas  de  dissolution  de  la  Société,  la  destination  ultérieure 
de  ses  biens  sera  réglée  par  une  délibération  du  conseil  adminis- 
tratif, qui  sera  soumise  à  l'autorisation  du  gouvernement. 


STATUTS   DE   LA   SOCIETE.  LIX 

Les  présents  statuts  ont  été  délibérés  et  adoptés  par  le  Conseil 
d'État,  dans  sa  séance  du  6  août  1870. 

Le  Conseiller  d'État,  secrétaire  général  du  Conseil  d'État, 

De  LANOUE-BILLAULT. 

Certifié  conforme  à  l'original  déposé  aux  archives  du  ministère 
de  rin.>-truction  puMiciue  et  des  cultes  et  annexé  à  l'arrêté  du 
chef  du  pouvoir  exécutif  du  M  août  ISTI. 

Paris,  le  U  septembre  'ISTi. 

Le  Secrétaire  général  du  ministère, 
S.  R.  TAILLANDIER. 


REGLEMENT   INTÉRIEUR 

ARRÊTÉ     PAR     LE     CONSEIL     ADMINISTRATIF     DE     LA     SOCIÉTÉ 
CONFORMÉMENT    A    l'aRTICLE    17   DES    STATUTS. 


AUTICLE   PRÉLIMINAIRE. 

Les  expressions  :  Conseil  administratif.  Conseil  général  et 
Conseil,  ont,  dans  les  termes  des  statuts,  la  même  signification. 

Attributions  du  Directeur. 

Art.  1<"". 

Le  Directeur  est  nommé  par  le  Conseil  administratif  réuni 
au  (.hel-licu  de  la  Société.  Le  vote  par  écrit  est  admis.  Le 
Directeur,  pour  être  nommé,  doit  réunir  les  deux  tiers  des 
suffrages  exprimés.  La  durée  de  ses  fonctions  est  de  cinq  ans; 
il  est  rééligible. 


IX  KEGLEMEM    INTÉRIEUR. 

AUT.    2. 

Il  a  la  tlirt'ction  des  congrès,  le  choix  des  secrétaires  géné- 
raux, l'approbation  des  programmes,  et  l'envoi  des  convocations 
et  autres. 

Art.  3. 
Il  préside  le  Comité  inMinanent,  par  Uii-méme  ou  par  son 
délégué,  lequel  est  pris,  à  son  choix,  parmi  les  ofliciers  de  la 
Société. 

Art.  4. 

Il  a  seul  la  direction  du  Bulletin,  dont  quarante  exemplaires 
sont  mis  à  sa  disposition  pour  échanges  avec  d'autres  revues 
archéologiques  ou  abonnements  gratuits. 

Art.  5. 

Il  est  autorisé  à  l'aire  choix  d'un  membre  de  la  Société  qui, 
sous  le  titre  iVarchivisfe  adjoint,  est  chargé  de  recouvrer  les 
abonnements  des  souscripteurs  étrangers  à  la  Société,  et  de 
surveiller  le  service  matériel  de  la  publication. 

Art.  6. 
Il  est  autorisé  également  à  louer,  au  lieu  où  se  publient  le 
le  Bulletin  et  le  Comple-remlu  des  Congrès,  un  local  pour  le 
service  de  ces  publications. 

Art..  7 

En  cas  de  décès  ou  de  démission,  le  Directeur  sera  rem- 
placé par  1(!  Secrétaire  général,  qui  devra,  dans  un  délai  de 
trois  mois  au  pbis,  provo(pier  une  réunion  du  Conseil  adminis- 
tratif afin  (ju'il  soit  jiouivu  à  la  vacance. 

Attributions  du  Secrétaire  général. 

Art.  R. 

Le  Secrétaire  général  est  nommé  de  la  même  façon  et  par  les 
mêmes  électeurs  que  le  Directeur.  La  durée  de  ses  fonctions  est 
de  cinq  ans;  il  est  rééligible. 


RÈGLEMENT   INTÉRIEUR.  LXI 

Art.  9. 
Il  tient  et  conserve  la  correspondance  adressée  directement 
au  Comité  permanent,  ainsi  que  les  registres  des  délibérations 
de  ce  Comité. 

Art,  10. 
Il  rédige  les  procès-verhaux  des  séances,  et  les  transcrit  après 
qu'ils  ont  été  approuvés;  res  procès-verbaux  sont  signés  par  le 
Président  et  par  lui  ;  il  en  envoie  une  expédition  au  Directeur. 

Art.  14. 
Il  dresse  les  diplômes  qui  sont  signés  par  le  Directeur  et  par 
lui. 

Art.  12. 

Il  est  au  besoin  remplacé  par  l'un  des  secrétaires  adjoints. 

Trésorier. 

Art.  13. 

Le  Trésorier  est  nommé  par  le  Conseil  pour  cinq  ans;  il  est 
rééligible. 

Art.  14. 

En  outre  des  attributions  spécifiées  à  l'art.  11  des  statuts,  le 
Trésorier  perçoit  les  abonnements  au  Bulletin  des  membres  de 
la  Société  française;  il  fournit,  sur  les  fonds  provenant  de  ces 
versements,  ceux  nécessaires  aux  frais  de  publication  du  Bul- 
letin. 

Art.  15. 

Dans  le  cas  où  le  montant  des  deux  sortes  d'abonnements 
serait  insuffisant  à  couvrir  les  frais  de  publication,  le  Trésorier 
devra,  sur  les  autres  ressources  annuelles  de  la  Société,  complé- 
ter la  différence,  le  Bulletin  mentionné  à  l'article  2  des  sta- 
tuts étant  publié  sous  les  auspices  de  la  Société,  dont  il  a  tou- 
jours été,  soit  en  France,  soit  à  l'étranger,  l'organe  officiel  et 
périodique,  comme  il  est  entre  les  membres  de  la  Société  un 
lien  indispensable.  Il  est  arrêté  aussi  que,  si  le  Bulletin  faisait 
des  bénéfices,  la  caisse  de  la  Société  en  profiterait.  Le  Trésorier 


1^X11  RÈGLEMENT   INTÉRIEUR. 

iviid  ses  coiiiples  au  Comité  permanent  et  en  remet  un  double 
au  Directeur. 

Conseil  administratif. 
Art.  16. 
Le  Conseil  administratif  se  compose  :  1°  du  Directeur;  2° De 
quarante  officiers  de  la  Société,  savoir  :  le  Secrétaire  général, 
l'Inspecteur  général,  le  Trésorier,  les  vingt-deux  Inspecteurs 
divisionnaires  et  quinze  Inspecteurs  de  département  nommés 
par  les  vingt-six  officiers  ci-dessus  désignés;  3°  de  quarante 
memlires  ordinaires  {art.  12  des  statuts),  lesquels  sont  nommés 
par  les  quarante  et  un  dignitaires  ci-dessus,  dont  dix  au  moins 
devront  être  pris  parmi  les  membres  résidant  dans  le  départe- 
ment du  cbef-lieu  de  la  Société. 

Comité  permanent. 
Art.  m. 
LeC-omité  permanent  se  compose  comme  il  est  dit  à  l'art.  U 
des  statuts. 

Art.  18. 
La  première  réélection  des  quarante  membres  ordinaires  sera 
faite  pour  la  première  fois  à  la  fin  de  la  quatrième  année,  à 
partir  de  la  présente  délibération  :  ils  pourront  ainsi  concourir, 
un  an  après,  à  la  nomination  du  Directeur  et  des  Lispecteurs. 

Art.  19. 

Le  présent  règlement  intérieur,  réglé  et  arrêté  par  le  Conseil 
administratif,  est  exécutoire  à  partir  de  ce  jour,  6  juin  1874. 

(Suirent  les  sif/natures  des  membres  p7-ésents  à  la  déii- 
héiation.) 

Certifié  conforme  à  l'original. 

G.   UK   COUGNY. 


SÉANCES   GÉNÉRALES 


TENUES 


A    CHATEAUROUX 


EN    1873 


CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE 

DE   FRANGE 


cr55SjA::,K'=> 


XU    SESSION 


TENUE 


A    CHATEAUROUX 

EN    JUIN    4873 


SÉANCE  D'OUVERTURE   DU    10   JUIN 

PRÉSIDENCE  DE   M.   DE   COUGNY, 
Directeur  de  la  Société  française  d'Archéologie. 

La  séance  est  ouverte  à  deux  heures,  dans  la  salle  de  la 
bibliothèque,  à  l'hôtel  de  ville. 

Siègent  au  bureau  :  MM.  d'Haranguier  de  Quincerot, 
archiprètre  de  Châteauroux ;  Matron,  premier  adjoint, 
faisant  fonction  de  maire;  de  Laurière,  inspecteur  général 
de  la  Société  ;  de  Cessac,  inspecteur  du  département  de  la 
Creuse;  Fauconneau-Dufresne,  inspecteur  de  l'Indre. 

M.  Buhot  de  Kersers  est  désigné  comme  secrétaire  de 

la  séance. 

Une  nombreuse  assistance,  composée  de  dames  et  des 

XL"  SESSION.  "* 


2        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

plus  notablfis  habitants  de  Chàteauroux  et  du  départe- 
ment de  l'Indre,  remplit  la  belle  salle  de  la  bibliothèque. 
M.  de  Cougny  prend  la  parole  pour  déclarer  le  Congrès 
ouvert,  et  lit  immédiatement  le  discours  suivant  : 

Mesdames,  Messieurs, 

Sa  Grandeur  Mgr  l'Archevêque  de  Bourges  nous  avait 
fait  espérer  qu'elle  viendrait  présider  cette  séance  d'inau- 
guration du  Congrès  archéologique  de  France  ;  un  em- 
pêchement imprévu  a  mis  obstacle  à  la  réalisation  de  sa 
promesse.  La  lettre  dont  je  vais  avoir  l'honneur  de  vous 
donner  lecture  vous  fera  connaître  le  motif  de  l'absence  si 
regrettée  de  Sa  Grandeur. 

«  Monsieur  le  Directeur, 

«  Je  viens,  à  mon  très-grand  regret,  vous  annoncer 
a  que  je  ne  pourrai  pas  prendre  part  à  la  session  de  la 
a  Société  française  d'Archéologie,  qui  doit  s'ouvrir  à 
0  Chàteauroux  mardi  prochain,  iO  courant.  Le  sacre  de 
a  Mgr  l'évêque  de  Carcassonne,  précédemment  fixé  au 
«  29  mai,  a  été  remis,  par  une  circonstance  indépendante 
0  de  ma  volonté,  au  H  ;  et,  par  suite,  je  devrai  me 
a  trouver  à  Boulogne-sur-Mer  la  veille,  c'est-à-dire 
a  le  10. 

«  Je  regrette  d'autant  plus  ce  contre-temps  entièrement 
«  imprévu  au  moment  où  je  recevais  votre  invitation  que, 
«  outre  le  plaisir  d'assister  aux  développements  des 
«  questions  si  intéressantes  pour  le  Berry,  que  renferme 
«  le  programme,  j'avais  le  désir  de  témoigner  hautement 
a  mes  sympathies  pour  la  Société  si  éminemment  fran- 
«  çaise  que  vous  dirigez,  et  dont  les  résultats  peuvent 


XL"   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  3 

«  être  si  grandement  utiles,  tant  pour  le  réveil  de  la  -vie 
«  provinciale  que  pour  la  décentralisation  de  la  science, 
«  s'il  m'est  permis  de  m'exprimer  ainsi. 

«  Veuillez  donc.  Monsieur  le  Directeur,  recevoir  tous 
«  mes  regrets,  en  même  temps  que  l'assurance  de  ma 
«  considération  la  plus  distinguée. 

(f  G. -A.,  archevêque  de  Bourges.  » 

C'a  été,  je  vous  l'avoue.  Mesdames  et  Messieurs,  une 
vive  satisfaction  pour  moi  de  vous  communiquer  cette 
lettre,  non  pas  tant  à  cause  de  ce  qu'elle  a  de  flatteur 
pour  la  Société  française  d'Archéologie,  que  parce 
que  j'y  vois  un  hommage  à  la  mémoire  si  chère  et  si 
vénérée  de  son  illustre  fondateur,  de  l'homme  éminent 
qui,  durant  cinquante  ans  de  sa  vie,  se  voua  avec  une 
ardeur  infatigable  à  la  propagation  de  l'œuvre  que  nous 
poursuivons  aujourd'hui,  et  dont  il  est  devenu,  hélas  1  le 
martyr. 

Notre  Société,  son  titre  seul  :  Société  française  d" Ar- 
chéologie pour  la  conservation  et  la  description  des 
monuments  historiques ,  suftit  pour  faire  connaître  ce 
qu'elle  est  et  le  but  qu'elle  se  propose. 

Elle  est  française,  parce  qu'elle  étend  ses  ramifications 
sur  tous  les  points  du  territoire  et  parce  qu'elle  se  voue  à 
l'étude  de  tous  nos  monuments  nationaux,  en  quelque 
lieu  et  en  quelque  région  qu'ils  soient  situés,  même  dans 
notre  nouvelle  province  d'Algérie.  Je  pourrais  ajouter  de 
plus  qu'elle  est  internationale,  si  cette  expression  n'avait 
reçu  en  ces  derniers  temps  une  si  triste  acception,  puis- 
qu'elle compte  parmi  ses  membres  la  plupart  des  savants 
de  l'Europe,  et  même  deux  souverains,  LL.  MM.  les  rois 
de  Saxe  et  de  Belgique. 


i        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Nous  conservons  les  monuments,  Messieurs,  ou  plutôt 
nous  cherchons  à  contribuer  à  leur  conservation  en  signa- 
lant leur  valeur  artistique  ou  historique,  ou  bien  encore 
en  mettant  à  la  disposition  des  administrations  publiques 
et  des  particuliers  des  allocations  destinées  à  la  restaura- 
tion ou  à  l'entretien  de  ces  monuments. 

Depuis  la  fondation  de  notre  Société,  c'est-à-dire  depuis 
quarante  ans,  plus  de  100,000  francs  ont  reçu  cette  utile 
allectation.  Ce  seul  chiffre  suffit  pour  faire  apprécier  le 
concours  matériel  qu'une  Société  comme  la  nôtre  peut 
apporter  à  la  conservation  de  nos  anciens  monuments. 

Quant  à  l'étude  de  ces  mêmes  monuments,  second  but 
de  la  Société  française  d'Archéologie,  elle  se  fait  au  moyen 
de  nos  publications  et  en  particulier  du  Bulletin  monu- 
mental, notre  organe  spécial,  et  du  compte  rendu  de  nos 
Congrès  annuels. 

Parmi  les  monuments  du  passé,  Messieurs,  il  n'en  est 
aucun,  notre  programme  est  là  pour  le  démontrer,  qui  ne 
soit  l'objet  de  nos  recherches  et  de  nos  investigations. 
Depuis  l'époque  reculée  où  les  grottes  et  les  cités  lacustres 
servaient  de  refuges  et  de  demeures  à  nos  aïeux,  jusqu'aux 
temps  moins  éloignés  où  ils  abritaient  leur  indépendance 
derrière  les  murs  de  leurs  forteresses  et  de  leurs  cités, 
rien  de  ce  qui  peut  servir  à  faire  connaître  leurs  mœurs 
et  leurs  usages,  ou  à  élucider  les  grandes  questions  d'art, 
de  linguistique,  de  géographie  ou  d'histoire,  rien  de  tout 
cela  n'est  par  nous  négligé  ni  laissé  de  côté. 

Je  viens  de  prononcer  le  mot  d'histoire.  Messieurs. 
Quelle  page  plus  belle  et  plus  glorieuse  que  celle  qui, 
dès  l'aurore  des  temps  historiques,  inaugura  les  annales 
de  vos  ancêtres,  de  nos  ancêtres,  le  grand  et  noble  peuple 
biturige,  à  qui  appartenait  le  privilège  de  donner  des  rois 
à  la  «laule  celtique?  Comment  oublier  ici  le  jour  à  jamais 


XL"   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  5 

mémorable  où ,  par  le  sentiment  du  plus  héroïque 
patriotisme,  ils  livrèrent  aux  flammes  vingt  de  leurs  plus 
opulentes  cités?  sacrifice  inutile, hélas!  à  l'aide  duquel  ils 
espéraient  arrêter  l'envahisseur  étranger.  Aujourd'hui , 
Messieurs,  je  viens  au  nom  de  la  Société  française  d'Ar- 
chéologie réclamer  de  vous  une  œuvre  de  dévouement  d'un 
caractère  tout  opposé,  et  qui  n'exigera  aucun  douloureux 
sacrifice.  Conservez  pieusement,  je  vous  en  conjure,  aimez 
et  protégez  vos  antiques  monuments,  comme  l'on  con- 
serve, comme  l'on  aime,  comme  l'on  protège  les  précieuses 
reliques  de  ses  pères.  Votre  patriotisme  bien  connu  est 
pour  moi  un  sûr  garant  que  notre  appel  sera  entendu. 

Je  ne  veux  pas  terminer  cette  courte  allocution  sans 
remercier  l'administration  municipale  de  cette  ville,  qui 
a  bien  voulu  mettre  à  notre  disposition  la  belle  salle  où 
nous  sommes  aujourd'hui  réunis.  Je  remercie  également 
tous  ceux  qui,  à  un  titre  quelconque,  ont  travaillé  à 
l'organisation  de  ce  Congrès,  et  en  particulier  nos 
deux  secrétaires  généraux,  MM.  Fauconneau-Dufrène  et 
Daiguzon,  et  notre  obligeant  trésorier,  M.  Emile  Damou- 
retle. 

Merci  aussi  à  vous,  Mesdames,  qui,  sans  vous  laisser 
effrayer  par  la  prétendue  aridité  de  nos  discussions 
pacifiques,  avez  bien  voulu  rehausser  par  votre  présence 
l'éclat  de  cette  brillante  solennité. 

Quant  à  vous,  mes  chers  collègues,  que  j'aperçois  en 
si  grand  nombre,  et  qui  êtes  venus  de  points  si  divers 
prendre  part  à  ce  Congrès ,  permettez-moi  de  vous  en 
exprimer  ma  sincère  et  profonde  reconnaissance.  Par 
votre  présence  ici,  vous  exprimez  la  force  et  la  vitalité  de 
notre  Société.  Oui,  je  puis  le  dire  aujourd'hui  avec  bon- 
heur et  en  toute  confiance,  désormais  pour  nous  l'avenir 
est  assuré.  Notre  Société  vivra,  se  maintiendra  et  perpé- 


6         CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

tuera  longtemps  encore  l'œuvre  et  les  traditions  que  nous 
a  laissées  notre  cher  et  illustre  fondateur. 

Ce  discours  est  accueilli  par  l'auditoire  avec  sympathie 
et  applaudissements. 

M.  le  directeur  donne  ensuite  lecture  de  diverses  com- 
munications qui  lui  sont  parvenues  relativement  au  Con- 
grès, notamment  : 

D'une  lettre  de  M.  Cartailhac,  qui  exprime  le  désir  que 
le  Congrès  de  la  Société  française  pour  l'année  i874  soit 
tenu  à  Toulouse.  En  conséquence,  M.  le  directeur  annonce 
dès  aujourd'hui  la  tenue  d'un  Congrès  archéologique  à 
Toulouse  à  une  époque  indéterminée  de  l'année  pro- 
chaine; 

D'une  lettre  de  la  Société  royale  des  Architectes  d'Angle- 
terre exprimant  les  regrets  qu'a  fait  éprouver  à  cette  Société 
la  mort  de  M.  de  Caumont; 

D'une  lettre  de  M.  da  Silva,  architecte  du  roi  de  Portu- 
gal, qui  manifeste  des  sentiments  analogues; 

De  lettres  par  lesquelles  plusieurs  membres  de  la  Société 
française  expriment  leurs  regrets  de  ne  pouvoir  assister  au 
Congrès.  M.  le  général  Ferri-Pisani,  commandant  la  sub- 
division de  Châteauroux,  expose  qu'il  est  retenu  loin  du 
Congrès  par  l'impossibilité  d'obtenir  un  congé  au  moment 
des  conseils  de  révision.  M.  le  marquis  de  Montlaur  et  plu- 
sieurs autres  expriment  de  môme  leurs  regrets. 

M.  le  directeur  donne  ensuite  lecture  d'une  communi- 
cation de  M.  Léon  Allègre,  qui  envoie  les  dessins  de  la 
crypte  d'Uzès  ; 

D'une  lettre  de  M""  la  vicomtesse  du  Soulier,  qui  signale 
à  M.  le  directeur  l'existence  d'antiquités  romaines  à  Vaas, 
dans  le  département  de  la  Sarthe.  M.  le  directeur  se  pro- 
pose défaire  une  excursion  à  Vaas  à  la  suite  du  Congrès. 


XL«   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  7 

M.  le  directeur  lit  une  lettre  de  la  Société  centrale  des 
Architectes  de  France  à  Paris,  qui  délègue  M.  Tarlier, 
architecte,  inspecteur  des  travaux  diocésains  à  Bourges, 
pour  la  représenter  à  la  session  du  Congrès  archéologique 
de  France  séant  à  Châteauroux. 

Après  ces  diverses  communications,  M.  le  président 
donne  la  parole  à  M.  Fauconneau-Dufresne,  qui  lit  un 
précis  rapide  et  intéressant  de  l'histoire  de  Châteauroux. 
Introduction  utile  et  naturelle  aux  travaux  du  Congrès 
sur  les  faits  historiques  de  la  contrée. 

Aperçu  sur  l'histoire  de  Châteauroux  et  sur 
les  lieux  que  devra  visiter  le  Congrès. 

Nous  avons  pensé.  Messieurs,  vous  qui  êtes  pour  la 
plupart  étrangers  à  notre  ville,  et  qui  désirerez  la  visiter, 
que  vous  recevriez  avec  intérêt  un  court  aperçu  sur  son 
histoire  et  sur  les  lieux  qui  méritent  votre  attention. 

Châteauroux  est  une  ville  relativement  récente.  La  pre- 
mière pierre  de  son  château  fut  posée  en  935,  et  il  ne  fut 
habité  qu'en  950.  Il  eut  pour  fondateur  le  prince  Raoul 
de  Déols. 

Mais  si  notre  ville  est  récente,  elle  procède  d'une  localité 
très-ancienne,  qui  date  de  l'ère  chrétienne.  C'est  le  boui^^ 
de  Déols,  qui  n'est  séparé  de  Châteauroux  que  par  la 
rivière  d'Indre.  Vous  y  trouverez  les  vestiges  d'une  riche 
abbaye.  Dans  l'Histoire  de  Déols,  nous  ne  voyons  au 
commencement  que  Léocade,  sénateur  romain,  contempo- 
rain de  saint  Ursin  et  converti  par  lui.  Après  Léocade, 
dont  vous  aurez  à  voir  le  tombeau  (restitué  par  les  soins 
de  xM.  le  curé  Chagnon),  ainsi  que  le  tombeau  de  samt 
Ludre,  fils  de  Léocade,  une  grande  obscurité  règne  sur 


8         CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

nos  contrées.  Au  i\'  siècle  seulement  le  jour  se  fait,  et 
nous  trouvons  Ebbes  le  Noble,  qui  fonda,  en  917,  l'abbaye 
de  Déols  et  presque  en  même  temps  celle  de  Saint-Gildas. 
Dans  notre  faubourg  actuel  de  Saint-Christophe,  vous  pou- 
vez encore  trouver  des  vestiges  de  cette  dernière  abbaye. 
Ces  deux  abbayes  ont  duré  700  ans. 

Raoul,  fils  d'Ebbes  le  Noble,  laissa  son  château  aux  bé- 
nédictins et  s'en  fit  construire  un  autre  sur  un  monticule 
des  bords  de  l'Indre.  C'est  ce  château,  nommé  Château- 
Raoul,  qui  fut  le  commencement  de  notre  ville. 

Huit  princes  de  la  Maison  de  Déols  se  sont  succédé  dans 
ce  château;  cette  illustre  maison  a  duré 241  ans.  Son  vaste 
territoire  s'étendait  du  Cher  à  la  Gartempe. 

Le  dernier  prince  de  Déols  laissa  une  héritière  unique, 
Denise,  dont  le  roi  d'Angleterre,  Henri  II,  s'attribua  la 
tutelle.  Nos  seigneurs  d'alors  qui  prenaient  le  titre  de 
barons  de  Châteauroux,  étaient  complètement  aquitains, 
et  malheureusement  pour  notre  pays,  car  il  devint  le 
théâtre  des  guerres  entre  Philippe-Auguste,  Henri  II  et 
son  fils  Richard  Cœur-de-Lion.  Châteauroux,  en  1187, 
eut  à  soutenir  contre  Philippe-Auguste  un  siège  mémo- 
rable. 

Richard,  en  1189,  maria  Denise  à  Andréde  Chauvigny, 
son  compagnon  d'armes,  et  les  Chauvigny  régnèrent  sur 
la  principauté  pendant  373  ans. 

Le  dernier  des  Chauvigny  étant  mort  sans  enfants,  sa 
succession  fut  partagée  entre  les  familles  de  Maillé  de  La- 
tour-Landry  et  d'Aumont.  La  première  habita  le  Château- 
Raoul,  et  la  seconde  le  château  du  Parc,  sorte  de  maison 
de  plaisance  des  Chauvigny,  où  se  trouve  aujourd'hui  notre 
grande  manufacture  de  draps. 

Les  Maillé  de  Latour-Landry  et  les  d'Aumont,  après  des 
procès  interminables  et  111  ans  de  possession,  vendirent 


XL''   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  0 

leurs  domaines  au  prince  Henri  II  de  Cordé,  dont  la  t'a- 
niille  posséda  la  principauté  pendant  422  ans. 

Elle  la  vendit  en  1735  à  Louis  XV,  lequel  en  fit  présent 
à  la  marquise  de  la  ïoiirnelle,  qui  prit  le  titre  de  duchesse 
de  Chàteauroux;  mais  cette  favorite  du  roi  n'y  vint  jamais, 
et  comme  elle  mourut  sans  enfants,  la  terre  fit  retour  à  la 
couronne. 

Enfin,  un  peu  plus  tard,  la  principauté  de  Chàteauroux 
fit  partie  de  l'apanage  du  comte  d'Artois,  et  à  l'époque 
de  la  révolution,  elle  fut  vendue  en  détail.  —  Telle  est, 
en  quelques  mots,  notre  histoire  politique. 

Vous  aurez  à  visiter,  Messieurs,  le  vieux  Château- Raoul, 
qui,  depuis  son  origine,  a  été  détruit,  incendié  et  rebâti; 
vous  y  constaterez  une  façade,  charmant  spécimen  du  style 
fleuri,  et  qui  offre  les  caractères  de  la  fin  du  xV  siècle; 
nous  vous  conduirons  aussi  au  château  du  Parc,  où  vous 
verrez  la  tour  dans  laquelle  fut  enfermée,  pendant  23  ans, 
la  malheureuse  épouse  du  grand  Condé,  Claire-Clémence 
de  Maillé-Brézé,  nièce  du  cardinal  de  Richelieu. 

Vous  attacherez,  assurément,  un  véritable  intérêt  à 
constater  renceinte  du  Château- Raoul,  qui  nous  présente 
encore  ses  tours,  ses  murailles  et  les  traces  de  ses  fossés, 
ainsi  que  son  ancienne  et  unique  entrée. 

Vous  serez  bien  aises  également,  sans  doute,  que  l'on 
vous  montre  l'enceinte  de  la  ville,  ou  du  moins  ce  qui  en 
reste,  enceinte  qui  parait  être  de  la  fin  du  xv'  siècle  ou  du 
commencement  du  xvI^ 

Toutefois,  cette  enceinte  n'était  certainement  pas  celle 
qui  existait  lorsque  Philippe-Auguste  assiégea  Château- 
roux  237  ans  après  sa  fondation,  ni  même  celle  qui  devait 
exister  en  1356,  année  dans  laquelle  le  prince  de  Galles, 
appelé  le  prince  Noir  à  cause  de  la  couleur  de  ses  armes, 
incendia  la  ville  qui  n'avait  que  406  ans  d'existence.  Nous 


10        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ue  connaissons  aucun  document  relatif  à  ces  autres  en- 
ceintes, et  nous  ne  possédons  aucun  plan  qui  puisse  nous 
faire  connaître  où  se  trouvaient  alors  les  remparts  de  Châ- 
teauroux,  ville  qui  passait  dans  ces  temps-là  pour  une 
place  importante.  Mais,  Messieurs,  si  l'on  examine  avec 
soin  le  grand  plan  de  Châtsauroux  de  1783,  revu  en  1784 
par  le  célèbre  ingénieur  Bouchot,  grand-père  de  notre  gé- 
néral Bertrand,  on  pourra  se  convaincre  qu'il  a  dû  y  avoir 
avant  l'enceinte  aujourd'hui  encore  visible,  deux  autres 
enceintes  fortifiées,  l'une  s'arrêtant  au  carrefour  des  rues 
du  Tripot  et  Bertrand.  La  condensation  des  maisons  en 
ces  deux  endroits  semble  on  être  une  preuve;  la  ville  an- 
cienne se  dirigeait  du  Ghàteau-Raoul  vers  le  nord-est,  et 
formait,  comme  disent  quelques  chroniques,  une  sorte 
d'éperon. 

Outre  les  fortifications,  vous  aurez  à  examiner  celles 
de  la  rue  d'Indre,  qui  devint  à  la  fin  du  xii''  siècle  une 
baronnie  particulière  relevant  des  comtes  de  Blois.  Non- 
seulement  cette  rue,  habitée  uniquement  autrefois  par 
des  drapiers,  était  fermée  à  ses  deux  extrémités,  mais 
elle  avait,  du  c-^'té  de  la  prairie,  un  ciicuit  très-re- 
connaissable  encore  aujourd'hui  par  ses  tours  et  ses 
murailles. 

Ces  souvenirs  des  temps  féodaux  ont  leur  importance  ; 
après  eux,  nous  n'avons  que  peu  de  curiosités  historiques 
à  vous  montrer.  Cependant  tout  mérite  d'être  étudié,  et 
nous  vous  conduirons  à  Y  ancien  couvent  des  Cordcliers, 
fondé  en  1212  par  ( Guillaume  I"  de  Ciiauvigny.  Son 
église  est  aujourd'hui  la  paroisse  principale  de  la  ville,  et 
le  couvent  a  été  converti  en  caserne.  Un  établissement 
qui  a  duré  517  ans,  qui  a  eu  pour  premier  fondateur  le 
bienheureux  Bonnencontre  et  où  a  séjourné  saint  Antoine 
de  Padoue,  ne  peut  pas  mamjucr  d'exciter  votre  curiosité. 


XL^   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  H 

L'ordre  des  franciscains,  qui  l'habitait,  faisait  vœu  de  pau- 
vreté, l'intérêt  ne  sera  donc  pas  dans  le  luxe  des  construc- 
tions ;  mais  dans  les  souvenirs  qu'elles  rappellent. 

Un  autre  couvent,  très-peu  nombreux  et  bien  moins 
ancien,  n'a  pour  ainsi  dire  pas  d'histoire;  son  église,  plus 
célèbre  par  la  tenue  des  élections  du  bailliage  pour  les  états 
généraux  de  1789  que  par  le  séjour  de  quelques  capucins, 
est  devenue  paroissiale  depuis  1808.  Il  vous  suffira  d'y 
donner  un  coup  d'oeil. 

Vous  vous  arrêterez  un  peu  plus  sur  une  autre  église 
du  XV"  siècle,  avec  un  clocher  de  la  renaissance.  Elle  est 
sous  le  vocable  de  Saint- Martial.  Son  clocher,  comme  celui 
de  Déols  forme  le  point  de  mire  de  nos  routes  principales. 
—  A  son  côté  est  l'ancien  petit  hospice  qui  était  destiné  à 
loger  les  pèlerins  qui  se  rendaient  à  Saint- Jacques  de 
Compostelle. 

Mais  nous  vous  demanderons,  Messieurs,  votre  avis  sur 
une  crypte  à  double  nef,  séparée  par  des  colonnes  orne- 
mentées qui  soutiennent  des  arcades  en  ogive.  Nous  n'avons 
aucun  document  sur  cette  ancienne  construction  qui  sert 
aujourd'hui  de  cave  à  un  boulanger.  Les  terrains  du  voi- 
sinage appartenaient  à  l'ordre  du  Temple,  et  l'on  se 
demande  si  cette  crypte  n'était  pas  tout  simplement  une 
cave  des  Templiers  ;  deux  caves  du  même  genre  se  trou- 
vent à  Saint-Marcel  et  à  Vouillon. 

Une  église  existait  dans  l'enceinte  du  Château-Raoul  ; 
elle  n'a  jamais  eu  rien  de  remarquable,  mais  un  souvenir 
s'y  rattache  particulièrement  :  c'est  là  qu'a  été  inhumée  la 
malheureuse  princesse  de  Condé,  dont  j'ai  déjà  dit  un  mot. 

Nous  vous  ferons  visiter  un  vaste  et  beau  local,  qui  a  été 
en  grande  partie  construit  de  1750  à  1760,  par  un  ordre 
enseignant  de  religieuses,  la.  Comji-égation  de  Notre-Dame. 
C'est  aujourd'hui  le  lycée. 


12  CONGRÈS   ARGHÉULOGIOUE    UE   FRA.NGE. 

Nous  VOUS  conduirons  à  un  ancien  prieuré,  celui 
de  Saint-Denis,  qui  «lépendait  de  l'abbaye  de  Déols,  et  qui 
forme  actuellement  le  dépôt  de  mendicité  et  une  sorte 
d'hospice. 

Panni  les  édifices  religieux  modernes,  vous  aurez  à  voir 
l'église  de  Saint-Christophe  et  celle  des  pères  rédempto- 
ristes.  Vous  visiterez  ensuite  notre  église  principale,  que 
construit  en  ce  moment  l'habile  architecte  du  département 
et  dont  on  peut  admirer  déjà  l'élégance  et  la  légèreté.  — 
Vous  ferez  une  excursion  au  château  de  Touvent,  com- 
mune de  Châteauroux,  et  cela  en  vaudra  la  peine.  Vous  y 
trouverez  une  chapelle  romane  délicieuse,  due  à  M.  Ver- 
dier,  architecte  de  Paris.  Les  peintures  sont  de  M.  Denuelle, 
et  les  vitraux  de  M.  Oudinot.  Vous  remarquerez  la  statue 
de  la  Vierge,  qui  a  pour  auteur  un  jeune  artiste  très- 
distingué,  M.  Blanchard.  Le  château  de  Touvent  et  son 
parc  ont  été  l'œuvre  de  la  vie  de  M.  Bertrand-Boislarge, 
frère  du  général  Bertrand.  Vous  trouverez  au  rond-pointdu 
parc  la  statue  du  général,  par  Marochetti. — Si  vous  voulez 
bien.  Messieurs,  tourner  un  instant  vos  regards  sur  le 
fond  de  cette  salle,  vous  apercevrez,  dans  des  vitrines,  des 
cadeaux  faits  à  notre  ville  par  notre  illustre  compatriote  : 
le  sabre  que  portait  le  général  Bonaparte  à  la  bataille 
d'Aboukir,  les  croix  que  porta  pendant  longtemps  l'empe- 
reur sur  son  uniforme,  son  nécessaire  de  campagne  et  le 
manuscrit  de  l'expédition  d'Egypte ,  dicté  au  général 
Bertrand  et  annoté  par  l'empereur  lui-rnèmc. 

Après  notre  bibliothèque,  il  faut  mentionner  les  arc/a"ycs 
de  la  préfecture,  dépôt  précieux,  inestimable  pour  l'ar- 
chéologie. Les  archivistes  qui  s'y  sont  succédé  se  sont 
faits  remarquer  par  leurs  travaux.  L'excellent  M.  Le- 
maigre  a  laissé  le  souvenir  de  son  assiduité  à  classer  les 
manuscrits.   M.  UcspUuKjue  en  a  retiré  les  plus^savants 


XI.''    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  \^ 

mémoires,  et  M.  Hubert,  l'archiviste  actuel,  a  déjà  publié 
un  volume  de  Y  Inventaire  sommaire  de  ces  richesses.  Un 
second  volume  va  paraître;  il  y  en  aura  trois.  Ce  même 
travail  s'e.xécutant  par  toute  la  France,  les  chercheurs  sau- 
ront où  ils  devront  s'adresser  quand  ils  auront  besoin  de 
documents. 

C'est  dans  l'hôtel  de  ville,  Messieurs,  que  vous  tenez 
vos  séances,  et  au  milieu  de  nos  richesses  bibliographiques. 
Cette  salle  contient  iO,000  volumes.  Un  don  de  M.  Bour- 
dillon,  dont  la  iamille  avait  quitté  notre  ville  à  l'époque 
de  la  révocation  de  l'édit  de  Nantes,  nous  a  gratihés  d'ou- 
vrages précieux  qui  forment  tout  le  côté  de  cette  pièce.  A 
son  lit  de  mort,  il  s'est  souvenu  du  berceau  de  sa  famille, 
telle  a  été  son  expression  dans  son  testament,  et,  outre  sa 
bibliothèque,  il  lui  a  légué  deux  maisons  à  Genève,  des 
objets  précieux,  un  missel  dont  la  Bibliothèque  nationale 
a  offert  40,000  francs,  des  valeurs  diverses,  et  une  rente 
pour  les  pompiers,  afin  de  mettre  sous  leur  protection  les 
legs  faits  par  lui  à  notre  ville. 

Vous  considérerez  avec  intérêt  le  buste  de  M.  Bourdillon. 
Ce  travail  remarquable  mérite  d'autant  plus  votre  atten- 
tion que  nous  le  devons  à  un  artiste  amateur,  M.  Emile 
Barbou,  qui  est  le  «conservateur  de  notre  Musée  et  qui  se 
fera  un  plaisir  et  un  devoir  de  vous  le  montrer  et  de  vous 
en  expliquer  les  diverses  parties. 

Je  n'ai  parlé  que  des  choses  qui  frappent  les  yeux  ;  mais 
notre  ville,  comme  toute  autre,  mérite  d'être  étudiée  à  fond. 
11  faudrait  pour  cela  y  séjourner,  l'observer  attentivement, 
recueillir  les  documents  de  toutes  sortes.  Ici,  Messieurs,  je 
n'ai  pour  but  que  de  vous  fournir  quelques  indications 
pour  les  visites  essentielles  que  vous  aurez  à  faire,  et  pour 
lesquelles  vous  nous  trouverez  toujours  prêts  à  vous  servir 
de  guides. 


i\  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

M.  le  Président  donne  ensuite  la  parole  à  M.  de  Beau- 
fort  fils,  qui  lit  le  mémoire  suivant,  à  l'appui  duquel  il 
présente  un  album  de  dessins  très-bien  exécutés  et  du 
plus  haut  intérêt  : 

Messieurs, 

Simple  amateur  des  sciences,  excité  par  l'intérêt  que  je 
porte  à  la  contrée  que  j'habite,  peut-être  un  peu  par  un 
sentiment  d'amour  filial,  j'ai  assumé  une  tâche  difficile 
pour  moi  :  celle  de  vous  rendre  un  compte  sommaire  des 
travaux  archéologiques  de  M.  le  docteur  Elie  de  Beaufort, 
qui  rentrent  dans  le  programme  des  questions  que  vous 
avez  à  traiter. 

Mon  honorable  père  eût  beaucoup  désiré  d'être  collabo- 
rateur direct  ;  mais  son  âge,  l'état  de  sa  santé,  ne  lui  per- 
mettent plus  de  supporter  un  déplacement  pénible  et  trop 
au-dessus  de  ses  forces  :  il  me  prie.de  vous  témoigner  ses 
vifs  regrets. 

M.  Alfred  Jacobs,  membre  de  la  commission  de  la  topo- 
graphie des  Gaules,  et,  par  conséquent,  plus  autorisé  que 
moi,  va  me  servir  d'introducteur  et  m'éviter  une  appré- 
ciation générale  qui  serait  au-dessus  de  mes  forces  : 

«  Dans  l'Indre,  écrit-il  dans  le  Journal  général  de 
a  l'Instruction  publique,  nous  avons  à  mentionner  un 
a  remarquable  travail  de  M.  Elie  de  Beaufort.  Ce  savant 
«  a  recueilli  avec  un  soin  minutieux  les  antiquités,  les  a 
a  représentées  sur  une  carte  bien  faite,  et  a  envoyé  un 
a  relevé  de  la  voie  romaine  qui  traverse  son  arrondis- 
a  sèment,  sur  une  grande  échelle,  d'après  le  cadastre,  et 
a  avec  de  tels  détails  que  l'étude  de  son  mémoire  vaut 
«  presque  l'exploration  .les  lieux;  éloge  que  l'on  ne  sau- 
ce rait  adresser  que  bien  rarement,  môme  aux  meilleurs 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  45 

«  travaux.  Nous  avons  seulement  à  regretter  que  des 
«  recherches  semblables  ne  se  soient  pas  étendues  aux 
«  autres  parties  du  département. 

SOUTERRAINS. 

«  C'est  encore  M.  Elle  de  Beaufort  qui  a  traité  une  des 
«  questions  les  plus  intéressantes  de  l'archéologie  celtique  : 
«  il  s'agit  de  ces  souterrains,  sortes  de  refuge,  dont  la  date 
«  a  été  très-controversée,  que  l'on  retrouve  en  plusieurs 
«  endroits  de  l'Europe  et  de  la  France  et  dont  l'Indre  four- 
ce  nit  de  très-curieux  spécimens  (1)..,  Les  souterrains  exa- 
«  minés  parM.Elie  de  Beaufort  sont  pour  la  plupart  taillés 
8  dans  le  granit  et  dans  le  schiste  :  leur  profondeur  au- 
«  dessous  de  la  surface  du  sol  varie  de  un  à  deux  mètres, 
«  et  ils  consistent  en  cavités  de  grandeur  variable  mais 
toujours  supérieure  en   largeur  et  en  élévation   aux 
galeries  des  couloirs  qui  s'en  détachent  et  dont  les  issues 
y  rentrent  après  quelques  circuits,  tandis  que  les  autres 
aboutissent  à  l'extérieur  et  servent  d'entrées  et  de  sorties. 
La  partie  principale,  qu'on  peut  regarder  comme  le 
corps  du  souterrain,  varie  beaucoup  dans  sa  forme  ;  on 
en  voit  d'elliptiques,  et  ce  sont  les  plus  communes,  de 
circulaires,  de  demi-circulaires,  de  rectangulaires,  etc.: 
les  formes  les  plus  bizarres  y  sont  représentées.  Les 
dimensions  varient  de  deux  à  sept  mètres  pour  la  lon- 
gueur, et  de  un  à  trois  pour  la  largeur.  La  hauteur  est 
toujours  un  peu  au-dessus  de  deux  mètres.  Le  sol  est 
plan  et  la  voûte  dessine  une  courbe  demi-elliptique  et 
jamais  en  plein-cintre.  Le  fait  le  plus  variable  consiste 
dans  le  nombre,  la  direction  et  la  longueur  des  petits 

(1)  Plutôt  la  Creuse  et  la  Haute-Vienne. 


16        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

a  couloirs  qui  s'y  uuvrcut  :  quelquefois  il  y  en  a  un  seul, 
«  d'autres  fois  on  en  compte  jusqu'à  cinq;  plusieurs 
«  d'entre  eux  sont  très-bas,  d'autres  dépassent  un  mètre  ; 
«  la  moyenne  est  de  0,80  centimètres,  et  il  est  extrême- 
«  ment  rare  que  ces  ouvertures  soient  en  ligne  droite. 
«  Dans  ces  souterrains  on  a  trouvé  des  fragments  de  fer 
«  oxvdé,  du  charbon,  des  os  de  mouton,  des  vases  en  terre 
«  rouge,  uneécuelle  de  bois  tourné,  une  assiette  d'étain.  » 
—  J'ajouterai  une  petite  meule  à  moudre  le  grani. 

Lors  de  la  publication  des  Recherches  archéologiques 
des  environs  de  Sanit-Benoit,  dans  le  XIX"  volume  des 
Mémoires  de  la  Société  des  Antiquaires  de  l'Ouest,  cin- 
quante-deux souterrains  ont  été  décrits  et  portés  sur  la 
carte  archéologique  qut  accompagne  le  volume. 

Aujourd'hui  vous  en  trouverez  quatre-vingt-cinq  sur  la 
carte  que  j'ai  l'honneur  de  soumettre  au  Congrès. 

Voici  les  noms  des  nouveaux  inscrits  : 

La  Cuussardière,  commune  de  Mouhet,  canton  de  Saint- 
Benoît  (Indre). 

La  Chirade,  commune  de  Saint-Sulpice-les-Feuilles 
(Haute-Vienne). 

Arnac,  1,  canton  de  Saint-Sulpice-les-Feuilles  (Haute- 
Vienne). 

Arnac,  2,  id. 

Le  I3ost,  commune  d'Arnac. 

Villagrand,  commune  de  Saint-Léger-Magnaseix,  can- 
ton de  Magnac-Laval  (Haute-Vienne). 

Montulat,  \ ,  commune  de  Saint-Sernin-Loubat,  canton 
de  Chàteauponsac  (Haute- Vienne). 

Montulat,  2,  id. 

La  Zaphix,  môme  commune. 

Le  Galateau,  commune  de  Fromental,  canton  de  Des- 
sines (Haute- Vienne). 


\L«  SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  47 

Montautre,  même  commune, 

Biessac,  commune  de  Saint-Pricst-le-Betoux,  canton  de 
Chàteauponsac  (Haute- Vienne). 

Les  Valettes,  commune  de  Dun  (Creuse). 

Le  Carré,  commune  de  Saint-Sébastien,  canton  de  Dun 
(Creuse). 

Chezopion,  commune  de  Bazelat,  canton  de  la  Souter- 
raine (Creuse). 

Lagedumont,  même  commune. 

De  la  Fontfresne,  commune  d'Azerables,  canton  de    la 
Souterraine  (Creuse). 

Les  Champs,  même  commune. 

Pierrefitte,  commune  de  Saint-Germain-Beaupré,  can- 
ton de  la  Souterraine  (Creuse). 

Maisonbrand,  même  commune. 

Forgevieille,  même  commune. 

Le  Boucheron,  1,  commune  de  Saint-Aignan-de-Ver- 
cillac,  canton  de  la  Souterraine  (Creuse). 

Le  Boucheron,  2,  id. 

Chénedière,  même  commune. 

Le  Puyroland,  même  commune. 

Les  Champs,  même  commune. 

La  Rue,  commune  de  Saint-Léger-Bridereix,  canton  de 
la  Souterraine  (Creuse). 

La  Bussière,  même  commune. 

La  Souterraine,  1  (Creuse). 

La  Souterraine,  2,  id. 

La  Pouillade,  commune  de  la  Souterraine  (Creuse). 

Le  Châtelar,  même  commune. 

Château-Renaud,  même  commune. 

La  Croix,  commune  de  Saint-Pierre-de-Fusac,  canton 
du  Grand-Bourg  (Creuse). 

Je  passerai  sous  silence  leur  description.  M.  de  Beau- 
XL"  SESSION.  9 


18       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

fort  pourra  dans  ses  notes  retrouver  les  renseignements 
qu'il  a  pu  se  procurer.  Ils  sont,  en  tout,  semblables  à  ceux 
qu'il  a  décrits. 

Il  vous  suffira,  Messieurs,  de  jeter  les  yeux  sur  la  carte 
pour  vous  rendre  compte  de  leur  agglomération  autour 
d'un  même  centre  et  pour  y  trouver  la  preuve  évidente 
de  l'existence  en  cette  contrée  d'une  peuplade  spéciale, 
qui  avait  des  mœurs  différentes  de  celles  du  voisinage. 

Toutes  ces  excavations  sont  creusées  dans  la  roche  primi- 
tive :  pas  une  n'a  été  rencontrée  dans  les  argiles  calcaires 
(Lias)  et  dans  les  roches  calcaires  qui  avoisinent  le  com- 
mencement du  plateau  granitique  central  du  Limousin  et 
qui  sont  fort  peu  éloignées  de  nos  souterrains. 

Quel  est  leur  âge  approximatif?  Tout  ce  que  l'on  y 
observe  tend  à  les  faire  remonter  à  une  haute  antiquité, 
mais  bien  postérieure  à  celle  de  l'habitation  par  l'homme 
des  grottes  naturelles  dans  lesquelles  on  trouve  les  instru- 
ments de  l'âge  de  pierre  et  les  ossements  d'animaux  dis- 
parus. Dans  nos  souterrains  il  n'a  pas  été  rencontré  de 
ces  restes  des  temps  primitifs.  Le  fer  y  apparaît  :  il  serait 
difficile  de  supposer  qu'ils  ont  été  creusés  à  l'aide  d'instru- 
ments d'un  autre  métal,  à  cause  de  la  dureté  assez  consi- 
dérable des  roches.  Il  est  facile,  en  examinant  leurs  parois 
de  reconnaître  les  coups  parallèles  d'un  instrument  pointu 
analogue  à  ceux  dont  se  servent  les  tailleurs  de  pierres  :  il 
est  facile  de  voir  que  la  même  pointe  a  servi  longtemps, 
et  que  le  cuivre  n'aurait  pas  résisté  de  la  même  manière. 
Tout  au  plus  le  bronze  aurait-il  pu  être  employé,  mais 
nous  ne  Vavons  jamais  trouvé,  et,  moulé  en  forme  de 
pointes,  il  se  serait  bien  vite  cassé  sur  la  roche  assez  dure 
de  certaines  de  nos  excavations. 

Tout  donne  donc  à  penser  qu'elles  ont  été  faites  après 
la  découverte  du  fer  dans  les  Gaules. 


.opecimen        de        souterrain 
du    pays      des     Meurlrets  . 
{Con/ins    de    J'hdre^    de  la.  Creu!?c  et  de  /.r  /P^  Vienne.) 


R 


anntvr^. 


Plan 


Coupe. 


partie    ammlaire . 


J'cheLLr: 


a  ♦  6         6  :3 


9  10-         11 


R'^félccs 


XL"    SESSION,    A   CHATEAUROUX.  10 

Il  est  probable  également  qu'elles  sont  antérieures  à 
l'invasion  romaine;  la  légende  de  Jules  César  à  propog 
du  souterrain  des  Sauvages,  un  texte  de  Tacite  qui  dit,  en 
parlant  des  Germains  :  «  Ils  ont  coutume  d'ouvrir  des 
«  antres  souterrains  qu'ils  couvrent  de  fumier  et  dont  ils 
«  se  font  des  retraites  pour  l'hiver  et  des  magasins  pour 
«  leurs  fruits,  car  de  tels  lieux  adoucissent  la  rigueur  du 
c<  froid  (1)  ;  de  plus,  si  un  ennemi  survient,  il  ravage  le 
«  pays  ouvert;  mais  il  ignore  l'existence  de  tels  refuges, 
«  ou  il  perd  son  temps  à  les  chercher  (2)  :  »  Ce  sont  là, 
dis-je,  des.présomptiong  qui  ne  sont  pas  sans  valeur. 

Ce  que  Tacite  dit  des  souterrains  des  Germains  peut 
s'appliquer  très-certainement  aux  nôtres.  A  quoi  pour- 
raient servir  ces  longs  boyaux  à  peine  capables  de  livrer 
passage  à  un  homme?  Il  est  tout  naturel  de  supposer 
qu'ils  n'étaient  que  des  magasins  destinés  à  préserver  du 
froid,  pendant  l'hiver,  les  principales  denrées  alimen- 
taires. 

L'homme  qui  est  venu  s'établir  dans  la  région  de  nos 
souterrains,  qui  est  celle  des  châtaigniers,  a  dû  se  trouver 
au  milieu  d'immenses  bois  naturels  de  cet  arbre  et  faire 
de  la  châtaigne  sa  nourriture  habituelle.  Il  lui  importait 
donc  de  conserver  le  plus  longtemps  possible  ce  précieux 
aliment  :  pour  cela  il  a  inventé  les  souterrains. 

Cette  opinion.  Messieurs,  n'a  rien  d'illogique,  elle  est 
celle  à  laquelle  s'arrête  le  plus  volontiers  M.  de  Beaufort. 

Qu'en  des  temps  de  guerre,  d'invasion,  le  refuge  des 
châtaignes  soit  devenu  le  refuge  des  hommes,  la  chose  est 

(1)Un  passage  de  Florus  :  Aqxdtani,  calidum  genus,  in 
speluncas  se  recipiehant. 

(2)  Aggerem  cuniciUis  subtrahebant  eo  scientias  quod 
apud  eos  magnx  sunt  ferarix,  atque  omne  genus  cirnicu- 
lorum  notmn  aU/ice  usifatissimum  {César). 


:20        CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

plus  que  probable;  mais  il  ne  se  prêtait  guère  à  une 
habitation  constante,  surtout  à  cause  du  défaut  d'air,  qui 
devait  bien  mal  circuler  dans  des  couloirs  étroits  et  sou- 
vent tortueux. 

Enfin,  des  antres  qui  ont  été  habités  pendant  longtemps 
garderaient  plus  de  traces  de  leurs  habitants  que  celles 
qui  ont  été  trouvées  dans  nos  souterrains. 

Sortons,  Messieurs,  de  ces  lieux  ténébreux,  guère  habi- 
tés aujourd'hui  que  par  la  salamandre  ou  autres  reptiles 
du  même  genre,  pour  nous  élever  au  grand  jour  et  y 
rechercher  les  monuments  de  l'époque  celtique  qu'on  ren- 
contre dans  la  contrée. 

Le  culte  et  le  respect  des  morts  ont  été  chez  tous  les 
peuples  primitifs,  comme  dans  toutes  les  civilisations, 
l'origine  des  monuments  qui  se  sont  le  plus  long- 
temps conservés  et  qui  souvent  sont  arrivés  intacts  jusqu'à 
nous. 


PIERRES    LEVEES. 

Ici  nous  avons  nos  dolmens,  nos  menhirs,  nos  peulvans 
et  nos  tombclles,  comme  ailleurs  nous  trouvons  les  tom- 
beaux des  ancêtres,  les  pyramides  d'Egypte,  etc. 

Tous  les  monuments  celtiques  décrits  par  M.  de  Beau- 
fort  dans  la  première  partie  de  ses  Recherches  n'étaient 
très-certainement  que  des  tombeaux  :  si  les  ossements 
humains  y  ont  fait  souvent  défaut,  on  a  pu  retrouver 
dans  la  terre  qui  les  recouvrait  l'élément  indestructible  de 
l'os,  le  phosphate  terreux  de  chaux,  qui  faisait  défaut  dans 
les  terres  du  voisinage. 

Tous  ces  monuments  de  ma  contrée  subissent  chaque 
jour  les  injures  du  temps  et  surtout  des  hommes  :  si 


XL"   SESSION,    A.   CHATEAUROUX.  21 

plusieurs  ont  disparu  depuis  1850,  j'aurai  peu  d'additions 
à  vous  signaler  sur  la  carte,  seulement  : 


DOLMENS. 

1°  Le  beau  dolmen  des  Vallettes,  dit  Pierrc-Tuberte, 
à  1,800  mètres  S.  S.-O.deDun-le-Palleteau,  à  200  mètres 
avant  d'arriver  au  village  des  Vallettes.  La  table,  contre 
l'ordinaire,  est  formée  de  deux  grosses  pierres  juxta- 
posées. 

2°  Le  dolmen  de  l'Age-Bagnole,  dit  la  pierre  Magne,  à 
environ  200  mètres  du  village  du  même  nom,  commune 
de  Fromental,  canton  de  Bessines  (Haute-Vienne).  Sa 
table  présente  une  longueur  de  A  mètres  sur  1"80  dans 
sa  plus  grande  largeur  et  est  posée  sur  quatre  sup- 
ports. 

3°  Le  dolmen  des  Chirons,  dit  le  Four-des-Fées,  situé  à 
environ  1  kilom.  500  mètres  d'Arnac  (Haute-Vienne)  sur 
le  coteau  gauche  de  la  vallée  de  la  Benaize.  Sa  table  a  été 
renversée.  A  quelques  centaines  de  pas,  sur  le  bord  du 
plateau,  se  trouve  une  pierre  singulière  qui  accuse  un 
travail  des  bommes  et  semble  à  M.  de  Beaufort  avoir  été 
une  idole.  Une  partie  spbérique  de  l^SO  de  diamètre 
horizontal,  sur  un  peu  moins  de  hauteur,  surmonte  une 
sorte  de  col  cylindrique  de  0°50  de  haut  sur  1  mètre  de 
diamètre. 

Cette  pierre  porte  dans  le  pays  le  nom  de  pierre 
Virouaire,  et  à  elle  se  rattachent  encore  des  légendes 
plus  ou  moins  fantastiques  qui  se  transmettent  d'âge  en 
âge. 

Nos  dolmens,  en  y  comprenant  les  trois  que  je  viens  de 
signaler,  sont  au  nombre  de  vingt  et  un. 


:22        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 
PEULVANS. 

Les  peulvans  sont  toujours  au  nombre  de  4. 

MENHIRS. 

Les  menhirs,  décrits  au  nombre  de  six  dans  le  Mémoire 
de  1850,  sont  portés  sur  la  nouvelle  carte  au  nombredeneut. 
Les  nouveaux  ajoutés  sont  :  1°  le  menhir  des  Grands- 
Chezeaux,  dit  la  pierre  du  Berry,  situé  à  environ  \  kilom. 
du  bourg  du  même  nom,  canton  de  Saint-Sulpice-les- 
Feuilles  (Haute-Vienne)  ;  2°  le  menhir  de  la  Jérafie,  à 
1  kilom.  au  sud  de  la  Souterraine  (Creuse);  3°  enfin  celui 
de  l'Age-Bagnolc,  non  loin  du  dolmen  que  nous  avons 
signalé,  commune  de  Fromental,  canton  de  Bessines 
(Haute-Vienne). 

TOMBELLES. 

Nous  n'avons  rien  à  ajouter  aux  trente-deux  tombelles 
déjà  décrites. 

> 

URNES   CINÉRAIRES. 

Ces  sépultures  éparses  ou  accumulées  dans  un  même 
lieu  me  conduisent  naturellement  à  vous  entretenir  des 
urnes  gallo-romaines  trouvées  dans  les  environs  de  Saint" 
Benoit-du-Sault. 

Avec  elles  plus  d'instruments  de  l'âge  de  pierre  comme 
dans  un  certain  nombre  de  tombelles  ;  de  la  cendre  et  de  s 
fragments  osseux  contenus  directement  dans  une  pierre 


XL"   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  23 

creuse  assez  mal  taillée  ou  dans  un  vase  en  verre  inclus 
dans  l'excavation  de  la  pierre,  le  tout  recouvert  d'un 
opercule  à  forme  variable. 

Aucune  inscription  ne  vient  en  faire  supposer  la  date. 

A  côté  des  urnes  déjà  décrites  par  M.  de  Beaufort,  je 
placerai  :  1°  celle  de  Chazelet,  découverte  en  1864,  près 
du  village  de  ce  nom,  canton  de  Saint-Benoît  (Indre).  Les 
cendres  étaient  enfermées  dans  un  vase  de  verre  dont  j'ai 
recueilli  les  fragments,  avec  lesquels  il  a  été  facile  de 
reconstituer  la  figure  ;  2"  celle  de  Chassingrimont,  com- 
mune de  Saint-Civran  ;  3°  celle  du  Mas  de  la  Goutte, 
trouvée  également  près  du  village  de  Chassingrimont  et 
qui  contenait  une  urne  en  verre  de  forme  élégante,  aujour- 
d'hui entre  les  mains  de  M.  le  curé  de  Saint-Civran  ; 
4"  celle  de  Lajon,  commune  de  Mouhet,  qui  contenait  un 
vase  en  verre  à  peu  près  sphérique  ;  5°  l'urne  du  Bois- 
(les-Loges,  commune  de  Saint-Maurice,  canton  de  la  Sou- 
terraine ;  enfin  G°  l'urne  de  Boismandé,  qui  renfermait, 
avec  les  cendres,  des  instruments  en  fer  dont  le  dessin  se 
trouve  à  côté  de  celui  de  l'urne  elle-même,  une  seconde 
urne  placée  à  côté  de  la  première,  et  qui  contenait  un  vase 
en  verre  de  grande  dimension. 

Enfin,  Messieurs,  je  ne  clorai  pas  cette  rapide  nomen- 
clature sans  signaler  à  votre  attention  l'immense  amas 
des  urnes  granitiques  et  sans  vases  de  verre  du  grand 
tumulus  de  Bridiers,  près  de  la  Souterraine,  et,  tout  près 
de  ce  dernier  village,  les  urnes  qui,  à  profusion,  bordent 
les  chemins  de  l'antique  cité  de  Breth,  comme  les  tom- 
beaux des  grandes  voies  de  Rome. 

INSTRUMENTS   EN   PIERRE. 

Après  avoir  recherché  et  décrit  les  tombeaux  des  peu- 


24        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE, 

plades  antiques  qui  nous  ont  précédés,  M.  de  Beaufort  a 
recueilli  les  instruments  les  plus  anciens  qui  ont  pu  leur 
appartenir  :  haches  en  pierres  polies  et  non  polies,  cou- 
teaux, pointes  de  lances,  de  flèches  ;  il  a  pu  rassembler 
une  collection  assez  curieuse  de  ces  instruments  tous 
trouvés  dans  la  contrée,  sur  le  sol  des  terrains  primitifs  ou 
de  la  formation  jurassique  du  Lias. 

Les  pierres  qui  ont  servi  à  leur  confection  existent 
toutes  dans  notre  contrée,  dont  la  position  géologique  est 
spéciale  :  ce  sont  des  pierres  dures  de  la  classe  des  silicides, 
parmi  lesquelles  le  silex  et  le  jaspe  prédominent.  Sur  une 
quarantaine  d'échantillons  il  ne  s'en  trouve  que  deux  en 
schiste  quartzeux  et  un  en  carbonate  de  chaux  ooli- 
tique. 

GROTTE   DE   SAINT-MARCEL. 

Un  grand  nombre  de  couteaux  en  silex  ont  été  trouvés 
le  17  avril  1848  dans  une  grotte  naturelle  située  sur 
les  bords  de  la  Creuse,  non  loin  de  Saint-Marcel,  et 
mélangés  d'ossements  de  mammifères  et  d'oiseaux.  J'ai 
eu  entre  les  mains  une  dent  de  ruminant  provenant  de 
cet  amas,  et  qui  a  dû  appartenir  à  une  variété  de  bœuf 
aujourd'hui  disparue. 


SAINT-MARCEL,    ARGENTOMAGUS. 

La  ville  de  Saint-Marcel,  Messieurs,  l'ancienne  Argcn- 
tomagusme  ramène  en  plein  à  l'époque  de  la  domination 
romaine  dans  les  Gaules  ;  je  ne  séjournerai  pas  longtemps 
dans  cette  antique  cité  que  M.  de  Beaufort  a  peu  explorée. 


XL'   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  S'i 

Après  y  avoir  signalé  les  restes  de  thermes  ou  bains  mis  à 
découvert  lors  des  travaux  du  chemin  de  fer,  je  m'empres- 
serai de  suivre  la  voie  romaine  pour  retourner  sur  les  lieux 
mêmes  de  ses  recherches  ordinaires. 


VOIE    ROMAINE   D  ARGENTON    A    LIMOGES. 

Découverte  et  décrite  par  M.  Élie  de  Beaufort,  cette  voie, 
dont  vous  pourrez  apprécier  le  trajet  sur  la  carte  archéo- 
logique, se  dirigeait,  en  partant  de  Saint-Marcel,  vers  le 
village  de  Fontfurat;  là  elle  se  bifurquait. 

Une  voie  obliquait  vers  l'ouest,  se  dirigeant  vers  les 
villages  du  Colombier  et  du  Plaix,  commune  de  Sacierges, 
de  là  vers  Ghaillac,  Jouac,  Saint-Léger-Magnaseix,  pour 
gagner  Ghâteauponsat  et  enlin  Limoges  (Augustori- 
tum). 

L'autre,  plus  étroite,  continuait  vers  le  sud  dans  la  direc- 
tion de  Gelon,  du  Fay,  pour  se  diriger  du  côté  de  la  Sou- 
terraine, vers  l'antique  Breth,  qui  ne  serait  pour  M.  de 
Beaufort  que  la  ville  de  Prœtorium. 

Deux  voies  partaient  donc  d'Argenton  pour  se  rendre  à 
Limoges.  La  plus  ancienne  semble  être  celle  par  Praeto- 
rium,  la  plus  nouvelle  par  Ghaillac. 

L'époque  de  construction  de  cette  dernière  qui,  en 
s'éloignant  des  vallées  profondes  évite  bien  des  difficultés 
que  le  chemin  de  fer  en  la  suivant  eût  pu  lui-même 
éviter,  l'époque  de  construction  de  cette  voie  vient  d'être 
fixée  par  la  découverte  d'une  borne  milliaire  à  Saint- 
Léger. 


26 


CONGRÈS   AKCUÉOLOGIOUE   1>K   FRANCE. 


MILLIAIRE  DE   SAINT-LÉGER-MAGNASAIX. 

Cette  borne  porte  l'inscription  dont  j'ai  l'honneur  de 
vous  soumettre  la  copie  que  j'ai  relevée  le  premier  : 


M.  Klic  de  Beauiort  Ta  traduite  de  cette  façon  :  «  Impe- 
ratorc  C'œsare  pio  Esuio  Tetrico  pio  :  Aureliano  C  [centum] 
Ce-Ceverico,  L  Leœugex  V  [quinqux),  »  cent  lieues  d'Or- 
léaus,  cinq  de  Cevericum  :  ce  qui  est  exact.  (268-274 
ap.  J.-C.) 

CIIATEAUrONSAC. 


Or  à  cinq  lieues  juste  se  trouvo  Chàteauponsac.  Quel 
était  le  nom  ancien  de  Chàteauponsac  ?  L'inscription 
romaine  qu'on  retrouve  sur  une  pierre  employée  dans 
la  construction  du  pont  semble  l'indiquer  :  cevericum. 


•XL*   SESSION,    A    CIIATEAUROUX. 


27 


«  Les  Cœveinci  élèvent  un  monument  pour  le  salut  de 
l'empereur  César,  du  tîls  et  du  père.  » 

Vous  le  voyez.  Messieurs,  il  est  bien  rare  qu'une 
découverte  n'en  amène  une  autre. 

CAMPS. 

Non  loin  de  la  voie  romaine  se  groupent  une  série  de 
camps  :  Parnac,  Milieux   (commune   de  Chaillac),  de  la 
Brande-du-Beaux  (Beaulieu),  des  Brandes  de  Grand-Fa 
commune  de  Saint-Léger),  de  Martineix  (commune  d'Ar- 
(nac),  de  Malonze  près  la  Souterraine. 

VESTIGES   ROMAINS. 


Si  la  contrée  que  j'explore  a  été  parcourue  par  de  bonnes 
voies  romaines,  elle  a  été  également  habitée  par  les  con- 
quérants latins  qui  ont  laissé  de  nombreuses  traces  de 
leurs  habitations.  Tous  les  vestiges  de  constructions  ont 
été  signalés  et  décrits  par  M.  de  Beautbrt,  et  en  même  temps 


28        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

portés  sur  la  carte.  Le  temps  ne  me  permet  pas  d'entrer 
dans  ces  détails.  J'ai  hâte  d'en  arriver  à  la  ville  de  Breth, 
dont  vous  m'avez  déjà  entendu  prononcer  le  nom. 


LA  VILLE  DE  BRETH  OU  PRvETORIUM. 

Les  vestiges  gallo-romains  de  cette  ville  sont,  sans  con- 
tredit, les  plus  importants  de  la  contrée.  M.  de  Beaulbrt 
en  a  parlé  dans  le  XIX"  volume  des  Mémoires  de  la  Société 
des  Antiquaires  de  l'Ouest,  page  248,  et  dans  le  XXIX'  du 
même  recueil,  page  275  (avec  plan). 

Je  croirais  manquer  à  mon  devoir.  Messieurs,  si  je  ne 
vous  entretenais  pas  quelques  instants  de  ce  lieu  intéres- 
sant, que  M.  de  Beaufort  croit  être  l'emplacement  de  la 
ville  de  Prœtorium,  qu'il  a  été  jusqu'ici  impossible  de 
placer  ailleurs. 

D'après  la  table  Théodosienne,  il  y  avait  dans  l'Aqui- 
taine, entre  les  villes  d'Argentomagus,  Acitodunum  et 
Augustorilum,  une  ville  nommée  Prxtorium ,  ville 
romaine,  communiquant  avec  les  trois  précédentes  par 
trois  voies,  dont  la  longueur  est  donnée  :  pour  Augusto- 
ritum,  quatorze  lieues  gauloises;  Acitodunum,  dix-huit; 
Argentomagus,  vingt-quatre. 

Avec  ces  seules  données  l'emplacement  de  Pnetorium 
paraît  facile  à  déterminer  :  il  ne  s'agit  que  de  résoudre  un 
triangle.  Cependant  d'Anvillc,  l'abbé  Nadaud  et  autres, 
l'ont  vainement  tenté. 

Les  environs  d'Arène,  de  la  Jonchère,  du  Puy-de-Jouër, 
de  Sauviat,  ont  été  tour  à  tour  proposés  ;  laais  le  corps  du 
délit  ou  la  pièce  de  conviction  y  a  toujours  manqué.  Il 
faut  donc  que  quelque  erreur  empêche  de  mettre  le  doigt 
sur  cet  emj)laccmeiit. 


xr,"  SESSION,  A  (;hati!:auhoux.  20 

11  y  a  quinze  ou  dix-huit  ans,  se  trouvant  auprès  de 
Bridiers,  M.  de  Bcaufort  a  pensé  à  Prœtorium  et  s'est 
demandé  si  ce  vaste  terrain,  où  gisait  une  ville  ancienne, 
ne  serait  pas  celui  que  l'on  cherchait  vainement  ailleurs. 

La  tradition  rapportait  que  là  était  la  ville  de  Bré, 
Bret  ou  B^^ed,  nom  qu'elle  tirait  des  nombreuses  fres- 
ques qui  couvraient  ses  murs,  suivant  un  savant  archéo- 
logue dont  le  nom  fait  autorité.  Suivant  un  autre,  ce  nom 
viendrait  du  ce\i\(\\\e  Breith,  qui  signifie  centre  judiciaire. 
Cette  dernière  opinion  est  appuyée  sur  la  présence  de 
pierres  grossièrement  taillées  en  forme  de  sièges  et  placées 
sur  un  monticule  peu  éloigné  de  la  ville,  et  que  M.  Yves 
Fesncau  a  regardé  comme  le  lieu  des  séances.  Cette  ver- 
sion vient  parfaitement  à  l'appui  de  mon  idée  :  Prœtorium 
ne  serait  que  la  traduction  latine  du  celtique  Breith. 

Plus  tard  nous  trouvons  que,  conformément  aux  usages 
des  temps  et  des  lieux,  Praetorium  est  transformé  en 
Bretorium,  puis  Bredorium  et  Brederium,  qui  sont  les 
noms  latins  de  Bridiers,  employés  dans  les  titres  latins 
du  moyen  âge.  Remarquons  également  que  Bret,  Bred  et 
Bré,  ont  dû  en  dériver  selon  l'usage  qui  consiste  à  retran- 
cher les  finales  comme  dans  le  premier  cas  et  à  remplacer 
les  articulations  rudes  par  les  douces  correspondantes. 

Un  espace  de  six  kilomètres  carrés,  placé  dans  l'angle 
de  bifurcation  des  routes  de  Guéret  et  de  Dun,  n'offrant  à 
l'œil  que  des  champs  de  seigle  et  des  taillis  de  châtai- 
gniers, n'est  remarquable  que  par  des  monceaux  de  pierres 
placés  çà  et  là,  entremêlés  de  touffes  abondantes  de  buis. 
Cet  espace  couvre  les  ruines  d'une  ville.  J'ai  nolé  les  buis 
particulièrement,  car  ces  arbustes  chéris  des  Romains 
annoncent  toujours  l'emplacement  de  leurs  constructions 
qui  n'existent  plus. 

Il  serait  trop  long  de  mentionner  avec  détail  les  objets 


30        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

trouvés  dans  ces  ruines,  surtout  depuis  quelques  années, 
par  M.  Yves  Fesneau,  et  qui  ne  laissent  pas  le  moindre 
doute  sur  la  présence  dajs  ces  lieux  d'une  ville  grande  et 
opulente. 

Je  ne  parlerai  pas  des  ustensiles  de  ménage,  des  bijoux, 
des  débris  d'armures,  des  débris  de  marbre  taillé  en  mou- 
lures, des  statuettes  ou  fragments  de  statues,  des  sujets  de 
fresques  :  je  ne  m'arrêterai  qu'aux  urnes  nombreuses  de 
toutes  les  formes,  placées  sur  les  bords  des  chemins  aux 
entrées  de  la  ville  et  accumulées  dans  le  lieu  commun  des 
sépultures.  Ce  champ  des  morts,  d'environ  soixante  ares, 
en  est  encore  rempli.  Je  ne  dois  point  passer  sous  silence 
la  quantité  innombrable  de  médailles  de  tous  les  empe- 
reuis  romains,  et  des  médailles  gauloises,  entre  autres  de 
Vercingétorix. 

On  doit  accorder  une  attention  particulière  à  l'empla- 
cement de  la  citadelle,  dont  les  bases,  en  cônes  tronqués, 
entourées  d'un  très-vaste  fossé,  sont  d'immenses  tombelles 
remplies  de  sépultures,  résultat  inévitable  des  rudes  com- 
bats qui  ont  été  livrés  à  leurs  pieds.  On  peut  voir,  au 
musée  des  Thermes,  à  Paris,  de  magnifiques  opercules 
provenant  de  ces  tumulus.  Sur  ces  mottes,  les  seigneurs 
de  Crozant  établirent  le  siège  de  la  vicomte  de  Bredorium, 
aujourd'hui  Bridiers,  qui  mériterait  un  examen  plein 
d'intérêt,  si  le  temps  le  permettait. 

Nous  avons  donc  sous  les  yeux  l'emplacement  d'une 
ville  romaine,  personne  ne  peut  en  douter.  A  cette  ville 
aboutissaient  les  trois  mêmes  voies  qui  se  rendaient  à  Prœ- 
torium  : 

1°  Celle  d'Argentomagus,  qui  dernièrement  a  été  suivie 
depuis  Saint-Marcel,  son  point  de  départ,  jusqu'à  la 
rivière  d'Abloux,  par  M.  Lcnseigne,  conducteur  des  ponts 
et  chaussées  à  Argenton,  et  qui,  dans  le  reste  de  son  par- 


«5     / 


2 

3^' 

S)          \  - 

*^ 

Xi 

se 

• 

• 

n  ■ 

i-.  - 

en 


o  " 


TJ- 


h3- 


-©\\ 


<         / 


XL"    SESSION,    A    CHATEAIIROUX.  34 

cours,  est  connue  de  tout  le  monde,  depuis  Saint-Aignan- 
de-Fercillac  jusqu'à  Bridiers; 

2"  Celle  d'Acitodunum,  suivie,  depuis  Bridiers  jus- 
qu'auprès du  Grand-Bourg,  par  M.  Yves  Femeau,  et 
bien  caractérisée  par  la  présence  d'urnes  nombreuses  qui 
la  bordent,  suivant  la  coutume  romaine,  à  sa  sortie  de 
Bredorium; 

3°  Celle  d'Augustoritum,  vue  et  connue  de  tous  les 
habitants  de  la  Souterraine.  Cette  dernière,  arrivée  dans 
les  bois  de  Bessac,  où  on  a  recueilli  d'admirables  urnes, 
fournit  sur  la  droite  une  branche  qui  se  dirige  sur 
Limonum,  et  est  la  continuation  de  celle  que  M.  de 
Longuemar  a  signalée  dans  le  département  de  la 
Vienne. 

D'après  la  direction  générale  de  ces  différents  chemins, 
Prœtorium  se  trouve  l'intermédiaire  entre  Argenton  et  le 
nord  d'un  côté,  Limoges  et  le  sud  de  l'autre;  entre  Ahun 
et  le  sud-est  d'un  côté,  Poitiers  et  l'ouest  de  l'autre.  Une 
position  semblable  devait  rendre  cette  ville  une  des  cités 
importantes  du  centre  de  la  Celtique. 

Si  on  ajoute  foi  à  une  tradition,  elle  devait  être  la  capi- 
tale des  Meurtres,  peuple  qui  aurait  occupé  une  grande 
partie  du  département  de  la  Creuse  en  s'étendant  sur  les 
confins  des  départements  voisins. 

Le  grand  nombre  de  souterrains  refuges,  cimiculi,  dont 
le  sol  des  environs  de  Bred  est  criblé,  confirme  en  partie 
cette  tradition  et  donne  l'explication  de  quelques  autres  faits  : 
le  nom  de  iWe^rrawm,  la  Souterraine,  qui  a  remplacé  Pra- 
torium  et  a  été  bâtie  de  ses  matériaux  ;  la  forte  citadelle 
construite  par  César  dans  l'ancienne  ville  pour  maintenir 
dans  l'obéissance  une  population  amie  de  la  liberté,  tou- 
jours préparée  aux  insurrections,  et  que  le  vainqueur  des 
Gaules    ne  put    contenir    qu'en    disséminant   dans   des 


32        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

petits  torts  séparés  la  douzième  légion,  laissée  dans  le 

pays. 

Cest  probablement  aussi  pour  cette  raison  que  plus 
tard  fut  faite  la  grande  voie  d'Argentomagus  à  Augustori- 
tum,  laquelle  contourne  en  partie  le  grand  plateau  pri- 
mitif central  de  la  France,  afin  d'éviter  une  contrée 
granitique  trop  accidentée  et  infestée  continuellement  de 
guérillas  de  brigands  et  remplie  d'embûches.  Cette  voie 
avait  encore  le  grand  avantage  de  traverser  un  pays  où  le 
fer,  le  bois  de  charpente  et  la  chaux  abondaient,  et  d'en 
faire  jouir  les  villes  voisines.  C'est  aussi  pourquoi  on  lui 
donna  quinze  mètres  de  large,  ce  qui  la  rendit  facilement 
carrossable.  Cette  voie  coupe  celle  de  Prœtorium  à  Limo- 
num,  dans  les  environs  de  Saint-Léger-Magnaseix.  (Voyez 
la  carte  des  voies  romaines  ci-jointe.) 

Voilà  bien  des  signalements  qui  conviennent  à  Praeto- 
rium,  dont  le  nom  suit  les  lois  de  la  transformation  latine, 
et  dont  les  communications  annoncent  l'importance 
exigée  par  son  emplacement. 

Mais  voilà  aussi  une  grande  objection  :  la  table  théodo- 
sieune  donne  pour  la  distance  de  Prœtorium  à  Augusto- 
ritum  XÏIII,  à  Acitodunum  XVIII,  et  on  trouve  qu'il  y  a 
de  Bredorium  à  Limoges  XXIIII,  à  Ahun  XXII  et  à 
Argentomagus  XXIIII. 

Une  ville,  placée  entre  trois  autres,  eût-elle  mieux  coupé 
les  distances?  On  est  tenté  de  dire  que,  si  Brœdorium  du 
moyen  âge  n'est  pas  Prœtorium,  il  devrait  rationnelle- 
ment l'être,  malgré  la  table  que  tout  le  monde  sait  four- 
miller de  fautes. 

En  résumé,  dans  toute  la  contrée  que  devait  occuper 
Tantiquo  cité  romaine,  nulles  traces  de  ville,  excepté  à 
Breth,  nulle  part  ailleurs  l'entrecroisement  indispensable 
des  voies  romaines  ;  tout  cela  suffit  pour  faire  tomber  une 


XL''  SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  33 

objection  qui  résulte  do  l'erreur  d'un  copiste  :  dans  la 
distance  de  Prœtoriura  à  Limoges  un  X  a  été  simplement 
oublié. 

J'en  ai  fini,  Messieurs,  d'une  nomenclaturcbien  rapide, 
que  le  temps  et  la  nature  des  choses  ne  me  permettent  pas 
de  rendre  plus  attrayante.  Je  n'ajouterai  plus  qu'un  seul 
mot  :  chaque  jour,  nos  monuments,  attaqués  par  les  agents 
physiques  destructeurs  et  malheureusement,  il  faut  le 
dire,  par  l'action  directe  des  hommes,  disparaissent  pour 
toujours. 

A  vous.  Messieurs,  appartient  la  mission  d'arrêter  cette 
destruction  rapide.  Pour  que  l'État  ou  les  Sociétés  puissent 
se  rendre  facilement  propriétaires  des  monuments  dignes 
d'être  conservés,  il  serait  nécessaire,  selon  moi,  de  faire 
intervenir  le  législateur,  de  façon  qu'à  côté  de  l'expropria- 
tion pour  cause  d'utilité  publique,  nous  ayons  l'expropria- 
tion pour  cause  d'utilité  scientifique. 

D""  Antonin  de  Beaufort. 

Ghaillac  (Indre),  le  9  juin  1873. 

Après  la  lecture  de  ce  mémoire,  qui  complète  les  beaux 
travaux  de  M.  le  docteur  Élie  de  Beaufort  sur  les  anti- 
quités de  Saint-Benoit-du-Sault,  M.  le  président  félicite 
M.  de  Beaufort  de  la  manière  dont  il  a  résumé  et  pré- 
senté les  importantes  découvertes  de  son  père,  et  le  prie 
d'être  auprès  de  lui  l'interprète  des  sentiments  reconnais- 
sants de  la  Société. 

M.  le  président  donne  ensuite  la  parole  à  M.  l'abbé 
Voisin,  curé  de  Douadic,  qui  lit  un  très-savant  mémoire 
sur  lés  antiquités  préhistoriques  de  la  région  orientale  du 
département    de  l'Indre.    Cette  étude,   dont  les  aspects 

XL'=  SESSION.  3 


34-        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  PE  FRANCE. 

nouveaux  et  les  recherches  éruditcs  intéressent  vivement 
l'auclitoire,  contient  la  description  de  nomhreux  monu- 
ments mégalithiques  observés,  décrits  et  dessinés  par  le 
savant  auteur. 


Monuments  celtiques  de  l'arrondissement 
du  Blanc. 


On  possède  fort  peu  de  renseignements  sur  l'origine  ou 
la  destination  des  monuments  celtiques,  et  la  plupart  des 
auteurs  qui  en  ont  traité  sont  d'opinions  bien  diverses 
touchant  ce  difficile  sujet. 

Nous  n'avons  pas,  assurément,  la  prétention  de  faire  la 
lumière  sur  cette  question;  cependant,  nous,  les  derniers 
venus,  en  nous  aidant  des  travaux  des  devanciers,  en 
comparant  surtout  les  usages,  les  coutumes,  les  origines 
des  Celtes  avec  celles  des  peuples  anciens  plus  connus,  il 
semble  que  nous  pourrions  arriver  à  formuler  des  conclu- 
sions qui  ne  devraient  pas  être  éloignées  de  la  vérité. 

C'est  le  résultat  de  ces  comparaisons,  c'est  le  fruit  de 
ces  recherches  que  nous  offrons  aujourd'hui  au  Congrès. 

Mais  la  matière  est  si  complexe,  les  documents  si 
contradictoires  et  si  confus,  que  nous  avons  besoin  d'in- 
voquer pour  ce  travail  la  plus  entière  et  la  plus  extrême 
bienveillance. 

Pour  mettre  quelque  ordre  en  un  pareil  sujet,  nous  éta- 
blirons tout  d'abord  en  principe  que  les  pierres  celti- 
ques ou  druidiques  sont  des  monuments  religieux,  natio- 
naux ou  civils,  et  enfin  funéraires.  Les  développements 
qui  vont  suivre  viendront,  nous  l'espérons,  confirmer 
cette  assertion. 


XI,°   SESSION,    A    CIIATEAUnOUX.  Sri 

Cos  monuments,  produits  d'une  civilisation  encore  bar- 
liaro,  sans  présonlcr  aucune  des  conditions  de  l'art,  olFrent 
cependant  un  système  arrêté,  facile  à  reconnaître  à  ses 
dispositions  g-énéralcs.  Ce  sont  des  fragments  de  rochers, 
des  pierres  brutes,  tantôt  isolées,  tantôt  réunies  en  groupes, 
d'après  des  lois  qui  paraissent  constantes.  Ce  sont  encore 
des  enceintes  de  terre,  des  collines  factices.  Nous  ne  parle- 
rons ici  que  des  premiers,  ou  monuments  de  pierre,  que 
les  savants  appellent  monuments  mégalithiques  ;  nous 
décrirons  ensuite  ceux  de  ces  monuments  qui  se  rencon- 
trent dans  l'arrondissement  du  Blanc  ;  puis  nous  traite- 
rons des  silex  taillés  et  polis,  en  indiquant  en  même 
temps  les  superstitions  qui  se  rattachent  aux  uns  et  aux 
autres  ;  enfin  nous  signalerons,  dans  un  appendice,  les 
monnaies  gauloises  trouvées  dans  le  pays. 


DES   MONUMENTS   DE    PIERRE   EN   GÉNÉRAL. 

Si  nous  trouvons  que  des  peuples,  dififérents  par  le  cli- 
mat, par  l'éloignement,  par  les  lois,  par  les  habitudes,  ont 
élevé  des  monuments  pareils  ,  si  ces  monuments  ont  une 
physionomie  commune,  frappante,  irrécusable,  ne  serons- 
nous  pas  en  droit  de  conclure  qu'ils  sont  le  produit  des 
mêmes  principes  ;  qu'ils  ont  été  érigés  par  des  peuples 
sortis  du  même  berceau,  ou  du  moins  unis  par  les  liens 
d'une  parenté  étroite  ?  C'est  ainsi  que  l'étude  et  la  confron- 
tation des  monuments,  même  les  plus  grossiers,  n'est 
point  un  travail  futile,  mais,  au  contraire,  qui  peut 
conduire  à  des  résultats  précieux  pour  l'historien  et  pour 
le  philosophe. 


30  r.ONT.RÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

Ou  a  lait  déjà  la  comparaison  de  la  religion  hébraïque 
et  de  celle  de  quelques  autres  peuples  de  l'Orient  avec  le 
culte  des  Druides,  et  l'on  est  parvenu  à  en  prouver  l'iden- 
tité dans  les  dogmes  les  plus  essentiels.  En  considérant 
ces  peuples  sous  un  autre  point  de  vue,  nous  arriverons  à 
peu  près  au  même  terme.  Si  l'analogie,  si  l'identité  ont 
quelque  valeur  dans  les  choses  de  la  science,  il  est  certain 
que  dans  l'étude  des  monuments  elles  sont  une  preuve 
convaincante  et  positive.  C'est  pourquoi,  si  les  annales  du 
peuple  hébreu,  si  les  historiens  de  quelques  autres  nations, 
même  moins  anciennes,  nous  font  découvrir  l'origine  et 
la  signification  des  monuments  mégalithiques  élevés  dans 
les  pays  de  l'Orient,  nous  pourrons  attribuer  sans  crainte 
et  la  même  origine  et  la  même  signification  aux  monu- 
ments semblables  trouvés  dans  nos  contrées. 


§    4.   PIERRES   ISOLÉES. 


Ouvrons  d'abord  la  Genèse,  le  plus  ancien  et  le  plus 
précieux  des  livres,  et  voyons  ce  qu'elle  nous  dit  de  ces 
monuments  :  «  Jacob,  pour  retracer  le  souvenir  de  sa 
vision  célèbre  de  l'échelle  miraculeuse,  prit  à  son  réveil 
la  pierre  sur  laquelle  il  reposait  et  l'érigea  comme  un 
monument,  répandant  de  l'huile  à  son  sommet;  il  donna 
le  nom  de  Bethel  à  ce  lieu,  et  il  dit  :  «  Cette  pierre  que 
«  j'ai  dressée  comme  un  monument  sera  la  maison  de 
«  Dieu.  »  [Genèse,  xxviii,  48,  19-22,  et  xxx,  14  et  15.) 

Le  Seigneur  dit  à  Jacob  :  «  Je  suis  le  Dieu  de  Bethel, 
où  vous  avez  oint  la  pierre  dont  vous  m'avez  fait  un  mo- 
nument. »  (Id.,  XXXI,  13.) 

«  Débora,  nourrice  de  Rebccca,  fut  enterrée  sous  un 


XL''    SESSION,    A   CIIATEAUUÛUX.  37 

clièiic,  au  pied  de  Bethel,  et  ce  lieu  fut  nommé  le  Cliènc 
des  Pleurs.  »  [Gen.^  xxxv,  8.) 

Laissons  un  instant  le  texte  sacré,  et  faisons  une  excur- 
sion parmi  les  historiens  profanes.  Nous  allons  retrouver 
avec  étonuement  des  monuments  pareils,  avec  les  mêmes 
noms  pour  les  désigner  et  des  cérémonies  semblables  pour 
les  vénérer. 

Pausanias,  dans  ses  Phociques  (liv.  x),  raconte  qu'au- 
près du  tombeau  de  Néoptolème,  fils  d'Achille,  on  trouve 
une  pierre  sacrée,  nommée  Bœtyle  ;  chaque  jour,  et 
surtout  les  jours  de  fêtes,  on  l'arrose  d'huile,  et  on  la  voile 
de  laine  grasse.  N'est-ce  pas  ainsi  que  Jacob  consacra  la 
pierre  de  Bethel?  Par  une  coïncidence  plus  frappante 
encore,  nous  rencontrons  de  nouveau  le  Bethel  des  Hébreux 
au  miheu  des  peuplades  de  l'Irlande.  Parmi  ces  tribus, 
sous  un  climat  si  différent  à  des  distances  aussi  lointaines, 
certains  monuments  portaient  le  nom  de  Bothal,  qui 
signifie  maison  de  Dieu  !  Un  écrivain  prétend,  en  outre, 
que  ces  monuments  avaient  la  plus  grande  analogie 
avec  le  Bethel  hébraïque.  Cette  identité  parfaite  de 
formes  et  de  noms  n'esl-elle  pas  bien  digne  de  remar- 
que? Et  ne  serait-ce  pas  une  preuve  d'une  grande  force 
en  faveur  de  l'opinion  qui  rattacherait  les  Celtes  au  rameau 
sémitique  ? 

Nous  trouvons  enfin  de  nouveaux  Bœtyles  chez  les 
premiers  Romains.  C'étaient  encore  des  pierres  sacrées, 
remontant  à  une  si  haute  antiquité,  qu'on  les  disait 
tombées  du  ciel.  On  les  entourait  d'un  culte  pieux,  et  la 
plus  célèbre  était  la  grande  pierre  brute  qu'on  adorait 
sous  le  nom  de  Cybèle. 

Dans  la  retraite  des  Dix  mille,  quand  les  soldats  de 
Xénoplion  aperçurent  enfin  la  mer  Noire,  voisine  de  leur 
patrie,  ils  oublièrent  toutes  leurs  fatigues  et  toutes  leurs 


38        CONGRÈS  ARCUÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

infortunes,  et,  comme  signe  et  témoin  de  leur  joie,  ils 
dressèrent  une  grande  pierre. 

Nous  .voyons  déjà,  d'après  ce  qui  vient  d'être  dit,  que 
cette  première  série  des  monuments  mégalithiques  étaient 
autant  de  trophées  des  peuples  primitifs  ;  ils  désignaient 
le  théâtre  de  leurs  victoires  ;  ils  consacraient  la  place  des 
événements  mémorables. 

Ces  grands  piliers  de  pierre,  dressés  debout,  servaient 
aussi  à  marquer  les  distances,  à  fixer  les  limites  des  héri- 
tages et  des  nations.  Et,  alors,  pour  que  ces  bornes  fussent 
respectées,  les  prêtres  les  mettaient  sous  la  garde  du  Ciel, 
du  soleil  qui  voit  tout,  et  ils  leur  donnaient  un  caractère 
sacré  par  des  libations  et  en  les  couronnant  de  fleurs. 

D'après  Ammien  Marcellin,  «  les  Gaulois  indiquaient 
l'espace  qu'ils  nommaient  lieue  par  des  pierres  blanches.» 
Les  premiers  peuples  de  la  Grèce  avaient  la  même  cou- 
tume, et,  d'après  plusieurs  historiens  latins,  les  Romains 
les  imitèrent.  «  Sur  le  littoral  de  l'Egypte,  où  le  sable 
est  sans  cesse  agité  par  les  vents,  les  chemins  eussent  été 
méconnaissables  sans  des  piliers  de  pierre  qui  les  dési- 
gnaient. »  [Voyage  au  Levant,  1718.) 

Chez  les  Hébreux,  de  grandes  colonnes  de  pierre  limi- 
taient les  possessions  de  chaque  individu.  Quand  Laban 
et  Jacob  se  furent  réconciliés,  «  Jacob  prit  une  pierre  qu'il 
dressa  pour  monument  ;  puis  il  dit  à  ses  frères  :  a  Appor- 
«  tez  des  pierres...,  »  et  ils  en  firent  un  lieu  élevé...  Jacob 
le  nomma  en  hébreu  Galaad,  c'est-à-dire  le  monceau  du 
témoignage.  Laban  dit  :  «  Ce  monceau  et  ce  monument 
«  seront  témoins  que  je  ne  passerai  pas  au  delà  pour  aller 
a  à  vous,  et  que  vous  ne  passerez  pas  non  plus  au  delà  dans 
«le  dessein  de  quelque  mal.  »  [Gen.,  xxxi,  i5-47  et  50.) 

Homère  nous  fournit  un  exemple  pareil  :  «  Minerve,  de 
sa  forte  main,  saisit  dans  la  plaine  une  énorme  pierre. 


XL"   SESSION,    A   CIIATEAUUOUX.  39 

que  jadis  les  premiers  hommes  ont  posée  en  ce  lieu,  pour 
marquer  la  limite  d'un  champ  ;  elle  la  lance  et  atteint  à 
la  gorge  le  Dieu  de  la  guerre...  »  [Iliade,  xi.) 

Thésée  sépara  l'Ionie  du  Péloponèse  par  une  de  ces 
bornes  qu'il  érigea  dans  l'isthme  de  Corinthe.  Gyrus  en 
mit  une  sur  les  frontières  de  la  Phrygie  et  de  la  Lydie  ; 
les  Peises  en  lirent  autant  pour  marquer  le  territoire  de 
Magnisie.  (Pausanias,  Plutarque.) 

Virgile,  à  son  tour,  décrivant  un  terme,  nous  montre 
«  un  rocher  énorme,  une  pierre  antique,  couchée  sur  la 
terre,  borne  placée  dans  le  champ  pour  fixer  la  limite  des 
propriétés.  »  [Enéide,  xii.) 

Enfin  qui  ne  se  souvient  de  la  pierre  célèbre  qui  domi- 
nait la  roche  du  Gapitole?  «  Capitolii  immobile  saxum.  » 
[Ibid.,  ix). 

Tous  les  anciens  peuples  du  Nord,  selon  OlausMagnus, 
se  conformaient  à  cette  coutume.  On  la  retrouve  en  effet 
dans  les  lies  Britanniques,  les  Hébrides  et  les  Orcades , 
chez  les  Germains  et  les  Sarmates  ;  elle  était  fréquente 
aussi  en  Italie  et  dans  la  Grèce  (Thucydide,  v  ;  Pausanias, 
VII  et  VIII ;  Diodore  de  Sicile,  v;  Suidas;  Arrien,  v),  en 
Egypte  (Strabon,  xvii  ;  Ammien-Marcellin,  vu  ;  Héro- 
dote, II),  en  Espagne  et  en  Portugal  (Strabon,  Diodore  de 
Sicile),  parmi  les  Gaulois  enfin,  et  chez  tous  les  peuples 
de  l'Asie,  comme  au  milieu  des  nations  de  l'Europe.  De 
là  les  dieux  Termes,  les  Hermès,  bruts  d'abord,  que  les 
Pélasges  plus  tard,  puis  les  Grecs  et  les  Romains,  ornè- 
rent de  sculptures  et  décorèrent  d'une  tète.  (Hérodote,  xii.) 

Ajoutons  enfin  que  les  menhirs  ou  peulvans  ont  servi, 
dans  certaines  circonstances,  aux  cérémonies  d'un  culte, 
et  qu'ils  ont  été  des  symboles  religieux.  En  Phénicie,  on 
adorait  le  soleil  sous  la  figure  d'un  pilier  grossier  ;  les 
Egyptiens,  plus  recherchés  ou  plus  avancés  dans  les  arts, 


10  CONGRÈS   AUGirÉOLOGIQUE   DE   FfixVKCE. 

représentaient  la  même  divinité  par  leurs  obélisques,  et 
le.nom  de  ces  monuments  signifiait  un  rarjon  de  soleil. 
(Pline,  XXXV,  15.) 

L'on  sait  que  le  sabéisme,  ou  l'adoration  des  astres, 
fut  l'erreur  la  plus  commune  chez  les  peuples  de  l'Orient, 
surtout  chez  les  peuples  pasteurs. 

Nous  reviendrons  sur  cette  dernière  attribution  des 
menhirs,  ou  pierres  dressées,  quand  nous  décrirons  les 
monuments  de  pierre  d'un  ordre  différent  ;  nous  montre- 
rons alors  que  les  uns  et  les  autres  ont,  en  ce  point,  des 
caractères  communs. 

Cette  première  série  de  monuments  de  pierres  isolés  a 
reçu  des  archéologues  les  noms  de  menhirs,  pierres  allon- 
gées (1),  et  de  peulvans,  pierres  en  forme  de  pilier  (2). 


§  II.  PIERRES  RÉUNIES  EN  GROUPES. 


Notre  moisson  ne  sera  pas  moins  abondante  touchant 
les  pierres  réunies  en  groupe  :  les  alignements,  les  gal- 
gals  ou  amas  de  pierres  (3),  les  trilithes  ou  lichavens  (4), 
les  dolmens  (5)  et  les  cromlec'hs  (6). 


(1)  Du  celtique  wem,  pluriel  àtmen,  7nean,ou  ?/if/e?i, pierre 
et  hir,  longue. 

(2)  De  peul  ou  ;)ao/,  pilier,  etwf/en,  contracté  ou  ?•«??,  pierre. 

(3)  Du  radical  héhrent^a/,  redoublé,  le  tas  du  tas,  c'est-à-dire 
monceau  de  pierres. 

(4)  Du  breton /ec7<,  lieu  ou  table,  ettnen  ou  ven,  pierre. 

(5)  Du  celtique  dot,  table,  et  moi,  pierre. 

(6)  Du  gallois  cromm,  courbe,  cercle,  et   lec'h   ou  teac'h, 
pierre  plate  sacrée. 


XL"  SESSION,    A   GIIATEAURUUX.  41 


Alignements. 

On  trouve  un  grand  nombre  de  monuments  de  pierres 
réunies  au  nombre  de  douze,  de  sept  et  de  trois.  Voyons 
quel  était  leur  usage  et  leur  signification. 

«  Moïse,  prêt  à  monter  sur  le  Sinaï,  fit  un  sacrifice 
sur  douze  pierres,  emblèmes  des  douze  tribus,  versa  la 
moitié  du  sang  des  victimes  sur  les  pierres,  puis  lut  le 
pacte  d'alliance  entre  Dieu  et  les  Hébreux,  et  répandit  le 
reste  du  sang  sur  le  peuple...  »  [Exode,  xxiv.) 

Quand  les  Israélites  eurent  passé  le  Jourdain,  Josué  fit 
dresser  douze  pierres  dures*  dans  le  lit  du  fleuve,  «afin, 
dit-il,  qu'elles  servent  de'  témoignage  et  de  monument,  et 
quand  dans  l'avenir  vos  enfants  vous  demanderont  ce  que 
veulent  dire  ces  pierres,  vous  leur  répondrez  :  Les  eaux 
du  Jourdain  se  sont  séchées  devant  l'arcbe  d'alliance.,., 
ces  pierres  ont  été  mises  en  ce  lieu  pour  servir  de  monu- 
ment éternel.  »  [Jusué,  v,  3,  6,  7,  9.) 

«  Josué  fit  dresser  encore  douze  pierres  au  lieu  où  il 
campa,  et  qui  s'appela  Galaad.  »  {Ibid.,  v,  20.) 

Ainsi,  chez  les  Hébreux,  les  piliers  de  pierres  servaient 
à  consacrer  le  souvenir  des  faits  remarquables  et  des  trai- 
tés de  paix  ou  d'alliance. 

La  môme  coutume  passa  depuis  chez  les  Romains  et 
dans  la  Grèce.  Romulus  fit  écrire  sur  des  pierres  le  traité 
qu'il  venait  de  faire  avec  les  Véiens.  On  trouvait  des 
colonnes  semblables  dans  la  plaine  d'Olinthe,  dans 
l'Isthme,  dans  l'Attique,  à  Athènes  et  à  Lacédémone. 
(Thucydide,  1.  v.) 

*  Théopompe  remarque  que  les  Corybantes  inventèrent 
les  premiers  cet  usage,  et  Clément  d'Alexandrie  confirme 


•42        CONGRÈS  AUCUÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

ce  fait,  en  disant  que  ces  pierres  étaient  remblèmc  d'une 
union  perpétuelle.  [Stromates,  i.) 

Ces  pierres,  réunies  par  groupes,  servirent  encore  de 
premiers  autels  aux  Hébreux.  iMoïse  dit  au  peuple  : 
«  Lorsque  vous  aurez  passé  le  Jourdain,  vous  dresserez  de 
grandes  pierres  sur  le  mont  Hébal.  Vous  dresserez  là 
aussi  au  Seigneur  votre  Dieu  un  autel  de  pierres  brutes, 
que  le  Ter  n'aura  point  touchées,  de  pierres  brutes  et  non 
polies,  et  vous  offrirez  sur  cet  autel  des  holocaustes  au 
Seigneur  votre  Dieu.  »  {Deutéronome ,  xxvii,  2,  4,  5  et  6.) 

«  Quand  vous  me  dresserez  un  autel  de  pierres,  dit  le 
Seigneur,  vous  ne  le  ferez  point  de  pierres  taillées,  car  il 
serait  souillé  si  vous  eu  approchiez  le  ciseau.  »  [Exode, 
XX,  25.) 

Chez  les  Curetés,  les  Dactyles  ef  les  Pélasges,  «  les  autels 
n'étaient  que  des  pierres  amoncelées  sans  art.  »  [Scholiaste 
d'AppoUonius  de  Rhodes,  1.  V,  4126.) 

Les  Titans  adoraient  le  Soleil  dans  les  bois  sacrés,  et 
près  d'autels  de  pierres  non  façonnées.  (Diodorc  de  Sicile, 
1.  V,  (i6.) 

Les  Argonautes,  après  avoir  construit  leur  navire, 
ramassèrent  des  pierres  sur  le  rivage,  et  en  tirent  un  au- 
tel à  Apollon.  (Pausan.,  Argonot.,  c.  i. 

Chez  certains  peuples,  on  poussait  l'idolâtrie  jusqu'à 
transformer  ces  pierres  en  divinités.  «  Vous  ne  dresserez 
point  de  colonnes  ni  de  monuments,  dit  le  Seigneur,  et 
vous  n'érigerez  point  de  pierres  remarquables  pour  les 
adorer...  Je  détruirai  vos  hauts  lieux.  »  {Lévitic,  xxvi,  30.) 

Douze  pierres,  à  liéliopolis,  représentaient  les  douze 
signes  et  les  mystères  des  éléments.  Dans  la  Laconie, 
auprès  de  Belmina,  on  voyait  sept  colonnes  érigées  en 
l'honneur  des  sept  planètes.  {Acad.  des  Inscriptions  et 
Belles-Lettres,  t.  xv,  p.  '102.)  D'après  Pausanias,  à  peu 


XL"   SESSION,    A    OlIATKAUROUX.  "  43 

de  distance  de  Sparte,  et  en  suivant  le  cliemin  de  l'Arca- 
die,  on  rencontrait  sept  autres  colonnes  semblables  consa- 
crées au  même  culte.  Ailleurs,  le  môme  auteur  dit  que 
toute  la  Grèce  rendait  autrefois  les  honneurs  divins  aux 
idoles  de  pierre  brute.  Il  signale  enfin,  dans  un  dernier 
passage,  trente  autres  pierres  quadrangulaires  regardées 
comme  des  divinités.  (Pausan.,  Achaïq.  vu  et  passim.) 

Gulgals  ou  amas  de  pierres,  et  Cromleclis. 

Ces  deux  termes  ont  une  grande  ressemblance  dans  leur 
signification.  Le  premier,  d'origine  hébraïque,  et  passé 
depuis  dans  la  langue  des  Celtes,  exprime  un  monticule 
de  pierres,  un  tas  disposé  en  rond  ;  il  est  identique  au 
mot  gallois  cairn,  cumulus,  amas  de  pierres,  d'où  carnack; 
le  deuxième  veut  dire  un  cercle  de  pierres.  Il  paraît  hors 
de  doute  que  les  monuments  de  ce  genre  sont  d'origine 
phénicienne,  et  étaient  consacrés  au  Soleil,  de  même  que 
les  monuments  pyramidaux  de  l'Egypte  et  de  l'Inde.  Ils 
servaient  au  culte  du  feu,  et  on  peut  les  ranger  parmi  les 
symboles  de  cette  vie  universelle  qu'on  retrouve  au  fond 
de  toutes  les  religions  de  l'Orient. 

Un  auteur  anglais  a  prouvé  les  relations  qui  existèrent 
entre  les  Phéniciens  et  les  Irlandais,  et  la  conformité  du 
culte  des  deux  nations.  (Th.  Moore,  Hist.  of  Ireland.)  Si 
nous  rapprochons  de  ces  faits  ce  que  l'histoire  nous  rap- 
porte de  saint  Patrick,  l'apôtre  des  Irlandais,  qui  renversa 
dans  l'ancienne  ville  de  Granard  un  autel  consacré  au 
Soleil  ;  si  l'on  ajoute  que  l'on  trouve  dans  la  grotte  de 
Drogheda  un  obélisque  semblable  à  ceux  qu'adoraient  les 
Phéniciens  d'Emesa^  nous  serons  autorisé  à  dire  que  les 
monuments  pareils  trouvés  parmi  lus  Celtes,  avaient  la 


i  i  CONGRÈS   ARCIlÉOLOGlgUE   HE    FllA.NtlE. 

même  destination  que  ceux  de  l'Orient.  (Voy.  Fabcr, 
Mysth'es  cabiriques.)  Ces  considérations  sont  très-impor- 
tantes pour  déterminer  le  sens  de  l'orientation  des  monu- 
ments mégalithiques.  Nous  reviendrons  sur  ce  sujet  à 
l'occasion  des  dolmens. 

Dans  la  Bible,  on  trouve  un  grand  nombre  de  passages 
dans  lesquels  Dieu  tantôt  menace  de  sa  colère  ceux  qui 
offriront  des  sacrifices  sur  les  hauts  lieux,  tantôt  charge 
ses  prophètes  de  détruire  ces  autels  impies.  Les  monta- 
gnes de  Galaad,  qui  s'élèvent  à  l'est  du  Jourdain,  ont 
pris  leur  nom  du  monceau  de  pierres  que  Josué  et  Laban 
y  élevèrent,  et  qui  fut  appelé  le  monceau  du  témoignage. 
Le  nom  même  de  Galilée  indique  que  les  livres  saints  ne 
considéraient  cette  région  que  comme  un  amas  de  monti- 
cules, la  terre  des  Galgals.  {Galuad,  acei^vus  testimonii.  — 
Gulyal  sive  Galgala,  7'ota,  sive  rcvolutio,  acervus  acej'vi, 
vel  revolutio  acervi  —  Galal,  rota.  —  Galilœa,  volubilis 
aut  rota,  etc..  Voy,  Interpretatio  nom.  Hebr.  et  Cliald. 
—  Robert  Estienne,' 1537.) 

On  rencontre  ces  monticules  factices  chez  les  Tar- 
tares,  sous  le  nom  de  Tèpé;  chez  les  Scythes,  sous  celui  de 
Mound.  Dans  les  lies  Baléares,  ces  mêmes  autels  ou 
tumuli  de  pierres  sont  nombreux  ;  on  les  appelle  atalaya, 
tours  ou  lieux  d'observation  ;  ils  sont  en  tout  semblables 
aux  cairns  des  Celtes.  Nulle  part  ces  monuments  ne 
furent  plus  fréquents  qu'en  Italie,  puisque  les  hommes 
qui  peuplèrent  cette  contrée  sortirent  de  la  Celtique,  et 
durent  établir,  dans  les  nouveaux  lieux  de  leur  séjour, 
les  objets  de  leur  culte.  On  retrouve  là  de  nombreux  amas 
de  pierres  consacrés  à  Mercure  sur  le  sommet  des  collines. 
(Isidore,  in  Glosswio.) 

Les  galgals,  les  cromlec'hs  ne  servaient  pas  seulement 
de  lieux  d'assemblée   pour   les  sacrifices,  comme   nous 


XL»   SESSION,   A    CIIATEAUROUX.  i") 

venons  de  le  voir,  d'autels  niôrae  au  besoin  ;  d'après 
Homère,  on  s'y  réunissait  encore  pour  rendre  la  justice 
ou  pour  tenir  des  conseils.  Le  chantre  de  V Iliade  nous 
montre  en  effet  les  vieillards  délibérant  sur  les  destinées 
(les  peuples,  assis  sur  de  larges  pierres  disposées  en  cercle. 
{Iliade,  xxviii,  v.  SOa.) 

11  ne  faudrait  pas  confondre  avec  les  tumuli  celtiques 
quelques  monuments  de  même  forme  qui  datent  seule- 
ment du  moyen  âge.  Ces  derniers  n'ont  ni  le  même  sens, 
ni  la  même  destination.  Les  pèlerins  avaient  l'habitude 
d'entasser  des  pierres  en  certains  lieux,  pour  indiquer  les 
routes  et  marquer  des  stations.  On  appelait  ces  monceaux 
mont-joie,  morts  gaudii.  C'est  ce  que  rapporte  Hugues 
de  Saint-Cher,  pour  la  route  de  Saint-Denis  :  «  Consti- 
tuunt  o.cervuui.  lapidum,  et  ponunt  crnces,  et  dicitur  mens 
gaudii.  »  Et  Del-Rio,  à  propos  de  Saint-Jacques  en  Galice  : 

«  Lapidum  congeries Galli  mont-joyes  vacant.  (Voy. 

Cheruel,  Dict.  des  Inst.  de  la  France.  —  Henri  Martin, 
Hist.  de  France,  ¥  édition,  t.  HI,  p.  277.) 


Trilithes  ou  Lichavens. 

Notre  tâche  s'avance  ;  il  nous  reste  à  montrer  que  les 
trilithes  ou  lichavens  étaient  tantôt  des  espèces  de  trônes, 
tantôt  des  autels  ;  mais  toujours  c'étaient  des  monuments 
sacrés.  Quand  Abimélech  fut  élu  roi,  l'Écriture  sainte 
nous  indique  qu'il  fut  intronisé  sur  une  table  de  pierre. 
Hypsipyle,  reine  de  Lemnos,  avait  coutume  de  s'asseoir 
sur  la  pierre  qui  servait  jadis  de  trône  à  son  père.  (Pau- 
san.,  Argonotic.)  Les  peuples  de  la  Scandinavie  procla- 
maient leur  souverain  «  sur  des  pierres  énormes  surmon- 
tées transversalement  par  une  autre  pierre  prodigieuse, 


M  COXCRÈS  ARCHÉOLOOrOUE  DE  FRANCE. 

placée  par  la  puissance  des  Géants.  »  (Olaus  Mag.,  de 
Gentib.  septentr.)  Chez  les  Germains,  près  d'Upsal,  au 
milieu  de  douze  pierres,  on  voyait  une  autre  pierre  d'une 
dimension  énorme,  sur  laquelle  les  princes  étaient  élevés 
à  leur  couronnement.  (Ibid.,  de  Obeliscis.)  N'est-ce  pas  en 
mémoire  de  cette  cérémonie,  que  les  Francs  élevaient 
leurs  chefs  sur  le  pavois  ? 

Dans  la  Bretagne  armoricaine,  on  est  frappé  du  grand 
nombre  de  pierres  disposées  trois  par  trois.  L'ordre  ter- 
naire était  regardé  comme  mystérieux  par  la  plus  grande 
partie  des  anciens  peuples.  Selon  la  doctrine  indienne, 
celte  forme  exprimait  les  qualités  de  la  puissance  divine, 
«  qui  crée,  conserve  et  détruit.  »  (D'Hancarville,  Recher- 
ches sur  la  Grèce.) 

Dolmens. 

C'est  surtout  sur  la  question  des  dolmens  que  les  opi- 
nions des  auteurs  diffèrent  le  plus.  Pourtant  le  sentiment 
le  plus  commun  est  que  ces  monuments  sont  des  sépul- 
tures. 

Nous  trouvons,  à  peu  de  chose  près,  la  même  forme  et 
la  même  disposition  dans  les  monuments  funéraires  des 
peuples  primitifs. 

Les  anciens  Arabes  entassaient  des  amas  de  pierres  sur 
le  corps  de  leurs  défunts.  [Job,  xxi,  22.)  La  même  coutume 
existait  en  Syrie  et  en  Palestine.  Chez  les  Egyptiens,  la 
fosse  fut  recouverte  d'une  large  pierre  d'abord,  puis 
enfouie  au  sein  des  Pyramides.  On  sait  que  les  monu- 
ments funéraires  des  Hébreux  étaient  tantôt  des  cavernes 
naturelles  ou  taillées  dans  le  roc  [Gen.,  xxiii,  17;  xxxv, 
8;— ^amwe/,  XXXI,  13  ;  —  Itey.,  xxr,  18,  26,  etc.),  tantôt 


X]"  SESSION,  A  r.iiATr.Aunorx.  ïi 

(losiinplcs  excavations  cronsrcs  (mi  pliMiio  I(MT(\  11  n'y  avait 
rien  lie  détormim''.  poiu"  le  lieu  île  la  sépuldire.  mi  voyait 
des  loiubeaux  dans  les  villes  ;  on  en  voyait  dans  les  eam- 
papnes,  sur  les  chemins,  dans  les  jardins,  sur  les  monta- 
gnes. Dans  la'vallée  de  .losajiliat,  auprès  des  tombeaux  do 
Joseph  et  d'Absalon,  osl  \e  cimetière  des  autres  Juifs. 
CJKKpie  tombe  est  couverte  d'une  vaste  pierre  soutenue 
par  de  plus  petites.  {Dict.  archéol.  de  In  Bible,  par  Doni 
Caimet.  —  Archaeologia  Biblica ,  nuct.  Janh,  cap.  x, 
§201.) 

A  rexemple  de  ces  peuples,  les  Celtes  confiaient  leurs 
cadavres  à  la  terre  et  dressaient  à  l'entour  de  lari;es  pierres 
surmontées  d'un  jiloc  jdus  considérable  ;  on  bien  encore, 
pour  imiter  les  j;roltes  sépulcrales,  ([uand  la  conlif^nra- 
tion  du  sol  ne  leur  ollrait  pas  naturellement  ces  derniers 
abris,  ils  formaient  une  chambre  plus  ou  moins  vaste  au 
moyen  de  pierres  superposées,  et  recouvraient  tout  le  mo- 
nument d'un  tumulus  de  terre.  Le  temps,  l'aflliissement 
des  terres,  lavées  par  les  eaux,  pendant  tant  de  siècles, 
ont  mis  à  découvert  les  pierres  du  sépulcre,  et  le  dohnen 
est  apparu  étrange  et  gigantes([ue  à  nos  yeux.  Les  fouilles 
pratiquées  dans  la  plupart  de  ces  chambres  funéraires  ont 
amené  la  découverte  d'ossements,  d'objets  plus  ou  moins 
barbares,  de  haches  et  de  couteaux  en  silex,  dernières  et 
pieuses  offrandes  aux  niànes  du  défunt. 

Des  monuments  absolument  semblables  à  ceux  des 
Celtes  ont  été  remarqués  en  Américiue  (>t  dans  les  îles  de 
rOcéanie.  Comme  ceux  des  Celles,  ces  monuments  ont.  eu 
certainement  la  même  origine  et  ont  été  édiliés  sous  les 
mêmes  impressions,  en  vertu  des  mémos  motifs. 

On  sait  sûrement  aujourd'hui  que  la  race  qui  peu])lo 
ces  contrées  n'est  pas  distincte  de  cellcde  qui  nous  descen- 
dons, et  que,  malgré  les  mers,  elle  a  eu,  comme  la  nôtre, 


4^^  r.oxr.RÈs  arciiéolooiol'E  de  frange. 

le  luèiuG  berceau  et  les  mêmes  croyances  primitives. 
Grâce  aux  courants  marins  et  aux  vents  qui  régnent  à 
certaines  époques  de  l'année,  «  un  tronc  d'arbre,  a  dit  le 
commandant  Maury,  suffirait  à  l'homme  pour  se  rendre 
d'Asie  en  Amérique,  si  cette  arche  primitive  portait  assez 
de  provisions  pour  la  traversée.  »  (Lettre  du  commandant 
Maury  à  M.  Schoolcraft  :  Information  respecting  the  his- 
tory  ofthe  Indians  tribes  oft/te  United  States...)  Un  autre 
chef  non  contesté  du  mouvement  scientifique  moderne, 
l'Anglais  Ch.  Lyell,  ajoute  :  «L'homme,  dès  les  premiers 
et  rudes  débuts  de  son  existence,  a  dû,  indépendamment 
de  sa  volonté,  être  disséminé  par  les  vents  et  les  courants 
sur  la  surface  du  globe,  d'une  manière  analogue  à  celle 
qui,  encore  aujourd'hui,  propage  au  loin  un  grand  nom- 
bre d'espèces  végétales  et  animales.  »  (Gh.  Lyell,  Principles 
ofgeology,  2«  édit.,  t.  II,  p.  125.) 

En  face  de  pareilles  certitudes,  est-il  au  moins  oiseux, 
de  la  part  des  sceptiques,  et  souverainement  illogique,  de 
la  part  des  partisans  de  la  fraternité  humaine,  de  s'épuiser 
en  théories  spécieuses  sur  la  multiplicité  des  berceaux  de 
«  la  race  humaine  !  » 

On  a  dit  que  les  dolmens  et  autres  monuments  de  ce 
genre  ne  pouvaient  pas  être  attribués  aux  Celtes  ;  que 
ceux  de  l'est  de  la  Gaule  avaient  été  élevés  par  des  peu- 
plades conquérantes  d'origine  germanique,  et  ceux  de 
l'ouest  par  des  tribus  venues  du  nord  ;  enfin,  qu'on  ne 
trouvait  aucun  de  ces  monuments  au  centre  de  la  France, 
parce  que  les  Celtes  qui  habitaient  cette  contrée,  purs  de 
tout  mélange  étranger,  n'avaient  pas  adopté  ce  mode  de 
sépulture.  Ces  idées  étranges,  bien  que  formulées  par  des 
savants  de  premier  mérite  et  avec  tout  l'art  que  sait  don- 
ner la  science,  n'ont  pu  être  admises  ou  acceptées.  On  a 
objecté,  avec  raison,   «  que  les  spéculations  étaient  en 


XI."   SESSION,    A   CITATEAUROUX.  4.0 

dehors  de  toutes  les  données  historiques,  qu'on  accommo- 
dait les  observations  d'après  un  système  préconçu,  qu'on 
groupait  arbitrairement  les  monuments,  pour  arriver  à 
des  populations  aborigènes  supposées,  enfin  qu'on  ne  don- 
nait aucun  motif  suffisant  de  cette  distinction.  »  {Bulletin 
monum.,  t.  XXX,  p.  425, 431, 437.  L'argument  principal  : 
qu'il  n'existait  aucun  dolmen  au  centre  de  la  France,  et 
que  la  rive  droite  de  la  Loire  tout  entière  en  était  privée, 
ne  peut  subsister  un  instant.  Le  département  du  Cher  en 
renferme  encore  aujourd'hui  six  bien  déterminés,  sans 
compter  un  plus  grand  nombre  qui  ont  été  détruits; 
vingt-trois  ont  été  signalés  dans  l'Indre  ;  plus  de  trente 
dans  l'Indre-et-Loire,  et  onze  notamment  sur  la  rive 
droite  de  la  Loire  ;  enfin,  la  Société  des  Antiquaires  de 
l'Ouest  en  a  décrit  un  nombre  considérable  dans  la 
Vienne.  [Mém.  de  la  Commiss.  historique  du  Cher,  t.  J, 
p.  63.  —  Statistique  de  l'Indre.  —  Topographie  de  la 
Touraine,  par  M.  Mabille.  —  Bulletin  monum.,  t.  XXX, 
p.  432,  etc.) 

On  a  ajouté  encore  que  les  dolmens  étaient  de  sacrilèges 
autels,  sur  lesquels,  au  milieu  des  cérémonies  du  culte, 
on  sacrifiait  des  victimes  humaines.  On  a  cru  reconnaître 
les  bassins  et  les  rigoles  par  où  s'écoulait  le  sang.  L'ima- 
gination a  dramatisé  ces  affreux  holocaustes  ;  on  a  dépeint 
le  dolmen  s'élevant  au  fond  d'une  forêt  impénétrable,  à 
l'ombre  mystérieuse  des  chênes  séculaires  ;  on  a  représenté 
la  victime  attachée  sur  le  rocher,  le  druide  lui  ouvrant  la 
gorge,  revêtu  de  sa  robe  blanche,  sa  faucille  d'or  à  la 
main,  couronné  de  chêne  ou  de  verveine  (Voy.  Chateau- 
briand, les  Martyrs,  notes.  —  Anquetil,  Hist.  de  France. 
—  Ghéruel,  Bict.  des  institut.,  mœurs...  de  la  France.,  v" 
Gaulois, etc.),  et  les  farouches  adorateurs  de  Tentâtes  cour- 
bés sous  la  pierre  du  sacrifice,  pour  recevoir  sur  leur  front 

XL"  SESSION.  4 


riO  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

le  sang  du   supplicié!....  Ces   scènes  émouvantes  sont 
superbes  au  fond  d'un  paysage;  elles  frappent  les  âmes 
tendres  ;  mais  sont-elles  vraies  dans  la  réalité  ?  Nullement. 
César  et  Tacite  ont  pu  nous  l'affirmer;  mais  c'étaient  des 
ennemis  des  Gaulois.  Ces  historiens,  d'ailleurs,  ont  pu 
être  mal  informés,  et  l'on  sait  certainement  que  le  vain- 
queur de  la  Gaule  a  inséré  avec  complaisance,  dans  ses 
Commentaires  célèbres,  les  plus  noires  calomnies  sur  les 
peuples  qu'il  combattait.  Il  est  impossible  que  les  druides, 
tout  en  restant  dans  les  langes  de  l'idolâtrie,  aient  admis 
un  culte  de  sang.  Sans  doute  l'analogie  de  leur  doctrine 
était  frappante  avec  celle  des  Orphée,  des  Zoroastre,  des 
Egyptiens,  des  Gymnosophistes,  des  Mages,  de  tous  ces 
peuples,  qui,  selon  l'énergique  expression  de  TÉcriture, 
«  sommeillaient  encore  à  l'ombre  de  la  mort;  »  mais  cette 
analogie  démontre  une  même  source,  un  même  foyer  de 
lumière,  une  identité  de  principes  remontant  aux  temps 
les  plus  reculés  et  les  moins  obscurcis  par  les  passions  hu- 
maines, excluant,  par  conséquent,  les  sacrifices  humains. 
A  quelque  époque  qu'on  remonte  chez  les  nations,  même 
les  plus  policées,  en  Grèce,  à  Rome,  on  trouve  l'idolâtrie 
la  plus  grossière  mêlée  aux  pratiques  les  moins  avouables, 
Qu'on  interroge  les  hypogées  de  l'Egypte,  les  cavernes 
sculptées  de  l'Inde,  les  mystères  de  Mithra  et  de  la  reine 
Colylto  (Porphyre,  de  Antro  mjmpharum.  —  Alzog,  Hist. 
univ.  de  l'Église  ;  relig.  des  peuples  de  r Orient.  —  Mélan- 
ges d'archéologie,  par  MM.  Cahier  et  Martin,  t.  IV  ;  les  Mys- 
tères du  syncrétisme  phrygien.  —  Le  Tour  du  monde,  ii.  XIX 
et  XX  ;  Voyage  dans V Inde).,  aussi  bien  que  les  Lupercales 
de  la  Grèce,  et  les  mystères  de  la  bonne  déesse  à  Rome  ! 
En  fut-il  de  même  chez  les  Celtes?  Non,  leur  culte  était 
plus  pur,  toutes  ces  abominations  leur  étaient  inconnues, 
et,  par  les  seules  considérations  d'une  philosophie  élevée, 


XL"    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  Til 

ils  étaient  arrivés  à  la  connaissance  de  l'immortalité  de 
l'àme,  à  la  croyance  en  un  Dieu  unique  ;  et,  seuls,  parmi 
tous  les  gentils,  ils  méritèrent  cet  éloge  de  saint  Jérôme, 
qui  prouve  la  pureté  de  leurs  mœurs  :  «  Sola  G  allia 
monstra  non  ha/mit,  sed  viris  setnper  fortibus  et  eloquen- 
tissimis  abundavit.  »  Ces  idées  peuvent  sembler  étranges  ; 
mais  faut-il  s'arrêter  toujours  aux  pamphlets  de  l'histoire? 

Nous  n'aurions  pas  besoin  de  conclure  ;  tous  les  faits 
que  nous  venons  de  citer  parlent  assez  clairement  d'eux- 
mêmes.  Il  nous  semble  donc  démontré  que  les  monu- 
ments celtiques  ont  une  similitude  parfaite,  quant  à  leur 
origine  et  à  leur  destination,  avec  ceux  des  peuples  primi- 
tifs de  l'Orient.  D'après  ce  que  nous  avons  indiqué  plus 
haut  de  l'origine  sémitique  des  Celtes,  on  comprendra  que 
le  culte  des  astres  représentés  par  le  feu,  leur  plus  fidèle 
image,  dut  facilement  passer  dans  la  vieille  Europe.  Ainsi 
s'expliquerait  cette  règle  à  peu  près  constante  de  l'orien- 
tation vers  l'Est  des  monuments  de  pierre.  C'est  dans  cette 
direction  que  sont  disposés  les  alignements,  les  menhirs 
et  la  face  ouverte  de  la  plupart  des  dolmens.  Cet  usage 
est  général  pour  les  dolmens  des  lies  de  la  Manche  (Cam- 
pion,  Archeological  journal,  t.  I.),  dans  l'Ile  de  Guerne- 
sey,  dans  le  Finistère  et  le  Morbihan.  Cette  règle  est  telle- 
ment générale,  qu'on  a  regardé  comme  une  anomalie 
singulière  sans  explication  possible,  la  disposition  diffé- 
rente des  dolmens  de  la  commune  d'Augan,  arrondisse- 
ment de  Ploërmel.  (  Guide  dans  le  Morbihan,  par  le 
P.  Fouquet,  p.  73.)  Cette  orientation  au  levant,  nous  la 
retrouvons  encore  dans  tout  le  centre  de  la  France,  et, 
sans  sortir  de  notre  Berry,  elle  a  été  remarquée  dans  les 
dolmens  de  Graçay,  de  Mehun-sur-Yèvre  et  d'Allouis, 
département  du  Cher,  aussi  bien  que  dans  ceux  de  l'Indre. 

Nous  avions  donc  raison  de  dire,  en  commençant,  que 


o2        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

les  monuments  de  pierre  des  Celtes,  étaient  consacrés  à  la 
patrie,  à  la  religion,  et  aux  mânes  des  défunts.  Nous  ajou- 
terons, avec  un  celtograplie  distingué,  que  ces  monuments 
ont  précédé  les  autels  de  marbre,  les  statues  précieuses, 
les  édifices  sacrés,  où  s'accumulaient  les  merveilles  de 
l'art  et  de  la  richesse.  «  Aussi  les  temples  de  Pestum  ou 
de  Thésée,  le  Panthéon,  les  pyramides  d'Egypte,  les  sanc- 
tuaires de  l'Abyssinie  et  de  Jupiter- Ammon,  ne  sont  que 
le  perfectionnement  de  nos  dolmens,  de  nos  cromlec'hs, 
de  nos  menhirs,  de  nos  tumuli,  des  termes,  des  hermès  et 
des  hauts  lieux,  ombragés  par  un  chêne  auguste,  sancti- 
fiés par  la  présence  d'un  dieu  qu'on  adorait  la  nuit,  dans 
le  silence,  le  recueillement,  sans  qu'on  puisse  en  tracer 
l'image,  sans  qu'il  fût  permis  d'en  prononcer  le  nom  !  » 
(Cambry.  Monum.  celtiq.,  p.  138.) 


II. 

DESTRUCTION  DES  MONUMENTS  CELTIQUES. 

Dès  la  conquête  des  Gaules  par  les  Romains,  le  culte 
des  druides  et  leurs  monuments  furent  proscrits  par  des 
édits  sévères.  Nous  trouvons  de  nouvelles  traces  de  ces 
rigueurs  dans  les  décrets  de  quelques  conciles  et  les  ordon- 
nances de  nos  rois.  Cependant  la  masse  énorme  de  ces 
monuments,  leur  position  dans  des  lieux  difficiles  et  recu- 
lés, au  sein  des  forêts  les  moins  fréquentées,  un  respect 
religieux  que  le  temps  n'a  pas  encore  effacé,  préservèrent 
d'une  destruction  totale  ceux  que  nous  voyons  avec  éton- 
neiuent  aujourd'hui. 

Un  concile  d'Arles,  en  4r)5,  considère  comme  coupable 
de  sacrilège,  l'évêque  qui  tolère  des  observances  supersti- 


XL"   SESSION,   A   (JllATEAUKOUX.  33 

tieuses  à  l'égard  des  arbres,  des  ion  laines  et  des  rochers, 
et  excommunie  les  séculiers  qui  n'interdisent  pas  ces  per- 
nicieuses coutumes  sur  leurs  propriétés.  (Labbe,  t.  IV, 
col.  1013.) 

Le  second  concile  de  Tours,  en  567,  condamne  ceux 
qui  se  livrent  à  des  pratiques  païennes  :  «  Ad  nescio  quas 
petras,  aut  fontes,  aut  arbores.  »  (Id.,  Ibib.^  col.  1815.) 

Un  concile  de  Nantes  prescrit  de  renverser  les  pierres 
«  auxquelles  on  rend  un  culte  au  sommet  des  collines  et  au 
fond  des  forêts  :  Lapides  quoque  quas  in  ruinosis  tocis  et 
sHvestribus...  venerantur...  funditur  effodiantur.  »  (Id., 
t.  IX,  col.  466.) 

Sulpice  Sévère,  archevêque  de  Bourges,  en  584,  fait 
des  ordonnances  dans  le  même  sens.  (Id.,  t.  IV,  col.  1815, 
notes  de  Sirmond.) 

Les  capitulaires  de  nos  rois  ne  sont  pas  moins  précis. 
Childebert,  en  554,  ordonne  de  détruire  les  idoles  sous 
peine  de  condition  servile  et  de  cent  coups  de  fouet... 
Carloman,  en  742,  et  enfui  Gharlemagne  interdisent  de 
vénérer  les  pierres  et  les  arbres  et  d'offrir  des  sacrifices 
selon  les  prescriptions  anciennes  des  païens.  [CapituL  reg. 
Franc,  t.  I,  col.  235,  713,  991.) 


IIL 

MONUMENTS    CELTIQUES   DE   l' ARRONDISSEMENT   DU   BLANC. 

Il  n'est  pas  étonnant,  devant  ces  rigueurs  et  à  mesure 
que  le  christianisme  se  propagea,  que  le  plus  grand  nom- 
bre des  monuments  des  Celtes  aient  péri.  Il  s'en  trouve 
pourtant  quelques-uns,  dans  notre  vieux  Berry,  qui  ont 
échappé  à  la  destruction.  Dans  l'arrondissement  du  Blanc, 


54        CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

la  Brenne,  en  particulier,  eu  a  conservé  de  remarquables, 
au  sein  de  ses  forêts  profondes,  défendues  par  sa  ceinture 
de  marais  et  d'étangs;  mais  les  plus  nombreux  se  rencon- 
trent sur  les  bords  escarpés  de  l'Anglin,  et  parmi  les 
rochers  jadis  inaccessibles  de  Saint-Benoît-du-Sault.  Là 
encore  d'épaisses  forêts  leur  servaient  de  rempart  et  d'abri. 

Quelques-uns  déjà  ont  été  signalés;  c'est  dans  le  canton 
de  Saint-Benoît-du-Sault  et  près  de  la  ville  de  ce  nom  : 

L'Aire  aux  Martres  et  le  dolmen  de  Montgarneau  ; 

Le  menhir  de  la  Bcruarderie  et  les  dolmens  des  Fro- 
menteaux  et  des  Pierres-Nouilles,  commune  de  Chaillac; 

Le  dolmen  des  Gorces,  commune  de  Parnac. 

De  ceux-là,  je  ne  dirai  rien  ;  dans  de  savantes  études 
sur  les  environs  de  Saint-Benoit,  M.  le  docteur  E.  de 
Beaufort  en  a  fait  une  exacte  description.  Je  me  conten- 
terai de  signaler  : 

Les  menhirs  des  Rendes  et  de  Puy-Morin,  ainsi  que  le 
beau  dolmen  de  Passebonneau  ou  des  Essarts,  commune 
de  la  Châtre-l'Anglin,  canton  de  Saint-Benoît; 

Le  dolmen  de  Chalais,  commune  de  ce  nom,  canton  de 
Bélàbre  ; 

Le  dolmen  dit  la  pierre  de  Saint-Martin,  commune  de 
Saint-Gemme,  canton  de  Mézières-en-Brenne  ; 

Les  trois  menhirs  de  Rouilly,  commune  et  canton  du 
Blanc  ; 

Le  roc  de  la  Grave  ou  de  la  Cave  ;  la  pierre  à  Nom  ;  la 
pierre  du  Sablon,  et,  un  peu  plus  loin,  sur  le  bord  de  la 
Mer-Rouge,  la  pierre  à  la  Fade  ou  à  la  Fée,  commune  de 
bouadic  ; 

Le  dolmen  dit  la  pierre  du  Charnier,  commune  de 
Saint- Ai  gny; 

Enfin  la  pierre  levée  de  Sennevaut,  entourée  d'un 
cromlec'h,  commune  de  Ciron. 


XL''   SESSION,    A    lUIATEAUUOUX.  5o 


I.   MENHIRS. 

1°  Menhirs  de  Bouilli/,  commune  et  canton  du  Blanc. 

Sur  la  rive  gauche  de  la  Creuse,  entre  Ruffec  et  le 
Blanc,  à  5  kilomètres  environ  de  la  ville,  sur  les  terres 
de  la  propriété  de  Rouilly,  on  trouve  deux  beaux  menhirs, 
renversés  aujourd'hui. 

Le  premier  avait  été  planté  à  quelques  pas  du  bord  de 
la  rivière,  dans  un  terrain  d'alluvion.  Tl  mesure  environ 
3  mètres  de  long,  sur  1  mètre  50  de  large,  et  80  centi- 
mètres d'épaisseur. 

A  une  trentaine  de  mètres  en  arrière,  s'élève  le  coteau 
de  Rouilly,  remarquable  par  sa  riche  flore.  Sous  le 
couvert  des  grands  arbres,  au  milieu  d'un  tapis  de  lierres, 
le  sol  est  parsemé  de  magnifiques  primevères,  de  jacinthes 
et  d'anémones  sauvages;  là  aussi,  et  c'est  peut-être  le 
seul  endroit  du  département,  croit  en  massifs  superbes  le 
lis  martagon,  dont  les  belles  fleurs  rougeâtres  tachetées 
d'un  pourpre  foncé,  feraient  l'ornement  des  jardins  les 
plus  soignés.  Tout  près  de  ce  lieu  si  verdoyant  et  si 
pittoresque,  sur  le  terre-plein  du  coteau,  à  quelques  pas 
du  domaine  de  Rouilly,  s'élève  le  deuxième  menhir. 
C'est  le  plus  grand  et  le  plus  remarquable.  Il  a  4  mètres 
riO  de  long,  2  mètres  de  large  et  60  centimètres  d'épais- 
seur. Un  troisième  menhir  a  été  brisé.  Ses  morceaux  qui 
gisent  encore  sur  le  sol  mesurent  environ  3  mètres  de 
longueur.  Ces  blocs  énormes  sont  en  pierre  meulière, 
et  les  seuls  de  cette  espèce  dans  la  contrée.  Leurs  flancs 
offrent  quelques  traces  grossières  d'une  taille  régulière; 
ils  sont  placés    à  peu  près  à  200   mètres   les   uns  des 


56        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

autres,  et  suivant  une  ligne  droite  allant  du  nord  au  sud. 
Il  est  bien  probable  que  ce  sont  là  des  bornes  antiques  ; 
elles  sont  disposées  à  la  limite  des  Bituriges,  d'une  part, 
et  des  Pictaves  et  des  Lémovices  de  l'autre  ;  peut-être 
aussi  étaient-elles  un  peu  en  dehors  des  frontières  de 
notre  province,  et  servaient-elles  à  séparer  les  Pictaves  et 
les  Lémovices,  juste   à  l'endroit  où  finissait    la  tribu 
Lémovice  des  Andecamuleuses.  C'est  en  effet  dans  ce  lieu 
que  tous  les  documents  anciens  placent  les  frontières  du 
Berry,  du  Poitou  et  du  Limousin.  Ajoutons  encore  pour 
plus  de  précision  que  ces  bornes  sont  disposées  exacte- 
ment,  en  partant  de  la  rivière  de  la  Creuse,  dans  la 
direction  du  sud,  figurant  une  ligne  qui  s'en  va  passer 
entre  Bélâbre  d'un  côté,  et  Mauvières  et  Saint-Hilaire  de 
l'autre,  au  point  de  jonction  de  l'ancien  archidiaconé  de 
Déols  et  de  celui  de  Buzançais.  On  sait  que  les  divisions 
ecclésiastiques  nous  donnent  les  renseignements  les  plus 
précieux  sur  la  géographie  ancienne  ;  elles  ont  été  cal- 
quées sur  la  division  des  provinces  romaines,  qui  elles- 
mêmes  n'étaient  que  la  reproduction  des  délimitations  des 
tribus  Gauloises.   Un  exemple  frappant  de    ce  fait    se 
remarque  surtout  sur  la  rive  gauche  de  la  Creuse,  depuis 
Tournon  jusqu'au  Blanc,  et  probablement  jusqu'à  Saint- 
Gaultier  et  Argenton.  Sous  l'empire  romain,  la  bande 
allongée  de  terrain  qui  s'étend  entre  la  Creuse  etl'Anglin 
était  comme  une  sorte  de  marche,  un  territoire  neutre 
entre  les  Bituriges  et  les  Pictaves;  plus  tard  notre  division 
par  provinces  et  diocèses  consacra  cette  disposition  singu- 
lière, de  sorte  que  les  paroisses  de  Néous,  de  Lurais,  de 
Sauzelles,  de  Mérigny,  d'Ingrandes,  de  Saint-Hilaire,  etc., 
ressortissaient  au  temporel  de  la  généralité  de  Bourges, 
et  au  spirituel  du  diocèse  de  Poitiers;  et  nos  paysans,  dont 
la  verve  souvent  ne  manque  pas  de  sel,  disaient  qu'ils 


XL«  SESSION,    A   CllATEAUROUX.  57 

appartenaient  au  bon  Diou  <le  Poitiers  et  au  diable  de 
Bourges. 

2»  Menhirs  de  Douadic,  canton  du  Blanc. 

Trois  pierres  à  peu  près  semblables  à  celles  qui  viennent 
d'être  décrites,  existent  dans  la  commune  de  Douadic.  La 
première  est  située  près  du  domaine  A'Arminié,  dont 
le  nom  tout  breton  signifie  la  pierre  longue  :  ar,  la  ;  men 
ou  min,  pierre  ;  hir,  longue.  Les  habitants  du  pays 
appellent  ce  bloc  la  pierre  à  Nom  ;  mais  ce  nom,  nul  ne 
le  connaît,  et  c'est  bien  heureux,  car  celui  qui  le  saurait 
mourrait  tout  de  suite  !  Une  deuxième  pierre  se  trouve 
auprès  du  domaine  du  Sablon,  et  l'on  en  trouve  une  troi- 
sième à  200  mètres  plus  loin,  près  du  bord  de  la  Mer- 
Rouge,  et  à  côté  du  chemin  qui  conduit  au  Bouchet  ; 
cette  dernière  se  nomme  la  pierre  à  la  Fade  ;  elle  est 
très-mal  famée  dans  le  pays,  et  voici  ce  que  l'on  raconte 
à  son  sujet.  Pendant  une  nuit,  une  fade  ou  fée,  en  puni- 
tion d'un  crime  aujourd'hui  inconnu,  portait  cette  pierre 
dans  son  tablier,  plus  fin  et  plus  délié  que  les  fils  de  la 
Vierge.  Le  bloc  énorme  devait  servir  aux  fondations  du 
donjon  du  Bouchet.  La  tâche  était  rude  sans  doute,  le 
chemin  difficile  et  raboteux  :  la  pauvre  fée  allait  lente- 
ment, si  bien  que  l'aurore  la  surprit  avant  qu'elle  eût 
fini  sa  course  ;  le  chant  du  coq  se  fit  entendre,  le  tablier 
s'effondra,  la  pierre  chut,  et  la  fée  s'évanouit  en  fumée 
légère.  Si  quelqu'un  était  incrédule  à  ce  récit,  qu'il 
vienne  en  Brenne,  et  par  un  beau  jour  d"été,  qu'il  s'ache- 
mine vers  la  forteresse  du  Bouchet.  Sur  le  bord  de  la  Mer- 
Rouge,  il  verra  la  pierre  ;  au  donjon ,  la  place  où 
manque  encore  l'assise  que  portait  la  fée  ;  et  si,  ravi  par 


58  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

le  spectacle  enchanteur  qui,  du  haut  de  la  terrasse  du 
château,  se  déroulera  partout  à  ses  regards,  jusqu'au  tVmd 
de  l'horizon,  il  s'attarde  jusqu'à  la  nuit,  alors  en  revenant 
à  la  lueur  des  étoiles,  quand  il  passera  le  long  des  eaux 
calmes  de  l'immense  étang,  peut-être  verra-t-il  une  petite 
flamme  tremblante  qui  fuira  devant  lui!...  C'est  encore 
la  pauvre  iée,  qui  revient  toute  triste  de  n'avoir  pu  finir 
sa  tâche. 

Ces  trois  pierres  so.it  renversées  sur  le  sol ,  elles 
mesurent  environ  3  à  4  mètres  de  long  sur  80  centimètres 
à  1  mètre  d'épaisseur. 

Il  y  a  quelques  années,  une  quatrième  pierre  se  voyait 
encore  à  l'autre  extrémité  de  la  commune  de  Douadic, 
entre  le  domaine  de  la  Grave  et  la  tuilerie  de  la  Cave, 
tout  près  d'un  vaste  champ  rempli  de  substructions 
gallo-romaines.  Un  paysan  voulut  planter  une  vigne, 
mais  la  pierre  le  gênait.  La  porter  ailleurs,  c'était  impos- 
sible ;  la  briser,  c'était  un  dur  travail.  Notre  homme 
trouva  mieux  :  il  fit  une  large  et  profonde  tranchée  tout 
le  long  de  la  pierre,  puis  s'en  alla  trauquillement  chez 
lui,  et  attendit  ;  la  pluie  vint,  la  terre  se  détrempa,  céda 
sous  le  poids  énorme  du  rocher,  et  celui-ci  roula  tout 
seul  jusqu'au  fond  du  fossé.  Le  paysan  revint  ;  en  deux 
heures  il  remit  la  terre  par-dessus  la  pierre,  et  tout 
fut  fini.  Qu'on  dise,  après  cela,  que  nos  Brenous  ne  sont 
pas  ingénieux  ! 


3"    Menhir   de   lu    (Jhâtre-l'Amjlin,  canton  de 
Saint- Benoit-du-Sault . 

Sur  le  territoire  de  la  Châtre-l'Anglin,  canton  de  Saint- 
Benoît-du-Sault,  un   trouve  deux  menhirs  fort  remar- 


XL'   SESSION,    A   CIIATEAUUOUX.  50 

quables.  L'un,  nomm6  la  Croix  de  Puy-Morin,  est  placé  au 
pied  d'un  énorme  châtaignier,  au  sommet  d'un  coteau,  et 
le  long  d'un  chemin.  Il  a  1"  10  de  haut  et  60  centimètres 
de  large.  La  pierre  est  brute  sur  trois  de  ses  faces,  et  irré- 
gulièrement disposée  en  cône  vers  le  sommet.  Sur  la  face 
antérieure  qui  regarde  le  sud,  on  a  grossièremeût  taillé 
une  croix,  dont  les  traverses  sont  légèrement  arrondies. 
Ce  travail  doit  remonter  à  une  époque  très-reculée,  car  le 
granit,  qui  est  fort  dur,  ofïre  dans  la  partie  taillée,  comme 
dans  le  reste  de  son  pourtour,  à  peu  près  la  même  teinte 
et  les  mêmes  délits. 

A  deux  kilomètres  environ  de  ce  premier  monument, 
on  en  rencontre  un  second,  désigné  sous  le  nom  de  Croix- 
des-Rendes.  C'est  encore  un  bloc  de  granit  blanchâtre, 
haut  de  !■"  40  et  large  de  40  centimètres  à  la  base,  et 
un  peu  plus  étroit  au  sommet:  il  est  élevé  sur  un  socle 
plus  long  que  large,  mesurant  environ  80  centimètres;  il 
se  trouve  adossé  à  un  petit  bois,  au  milieu  d'un  carrefour 
où  aboutissent  six  chemins,  à  la  limite  de  la  Chàtre-l'An- 
glin  et  de  Parnac.  Vers  le  sommet  de  cette  pierre,  ou  a 
gravé  en  entaille  une  petite  croix  d'environ  25  centi- 
mètres de  longueur.  La  façade  seule  de  ce  monument, 
qui  regarde  le  sud-est,  a  été  légèrement  équarrie. 

Tout  près  de  là,  au  fond  d'un  large  ravin,  l'Anglin  se 
précipite  à  grand  bruit  de  cascade  en  cascade,  à  travers  un 
amoncellement  de  vastes  rochers.  Toutes  ces  grandes 
pierres,  d'un  brun  foncé,  ont  les  formes  les  plus  bizarres 
et  sont  entassées  dans  le  plus  magnifique  désordre.  C'est 
bien  là,  certainement,  l'un  des  points  les  plus  sauvages 
et  les  plus  pittoresques  du  Berry. 


60  CONGRÈS   .VRi.:HÉOLOGIQUE   DE   FRANGE. 


1 1.    DOLMENS   ET   CROMLEG  HS 

1°  Dolmen  de  Passebonneau  ou  des  Essarts,  commune  de  la 
Chât7'e-rAnglin,  canton  de  Saint- Benoît- du- S ault. 

A  peu  de  distance  des  menhirs  de  Puy-Morin  et  de  la 
Croix-des-Rendes,  que  nous  avons  décrits  plus  haut,  la 
même  commune  de  la  Chàtre-l'Anglin  otfre  encore  à 
notre  étude  un  grand  et  beau  dolmen.  Ce  monument, 
d'une  conservation  intacte,  est  placé  au  centre  et  au  point 
le  plus  élevé  d'une  vaste  plaine,  couverte  de  genêts,  près 
du  domaine  ou  village  de  Passebonneau.  Il  y  a  peu  d'an- 
nées, il  était  entouré  d'énormes  châtaigniers,  abattus  pour 
faire  place  à  de  maigres  cultures.  La  table,  qui  mesure 
S""  30  dans  sa  plus  grande  largeur,  et  8"  60  de  pourtour, 
se  rapproche  beaucoup  de  la  forme  d'un  cœur.  Elle  est 
fortement  inclinée  du  côté  de  l'est,  où  ses  supports  n'ont 
pas  plus  de  90  centimètres,  tandis  qu'à  l'ouest,  ils  ont 
plus  de  i""  5.').  La  plus  grande  élévation  du  sol  au  som- 
met du  dolmen  est  de  S""  15.  L'un  des  côtés,  exposé  au 
sud-est,  est  marqué  d'une  croix  entaillée,  de  20  centi- 
mètres de  long,  sur  10  de  large. 

Là,  comme  au  menhir  de  Puy-Morin  et  des  Rendes, 
les  premiers  chrétiens  qui  ont  habité  ces  lieux  ont  gravé 
le  signe  de  la  croix,  pour  détouiner,  sans  doute,  ou  arrê- 
ter des  pratiques  superstitieuses.  Les  premiers  évoques  de 
Vannes  ont  agi  de  même  à  l'égard  d'un  grand  nombre  de 
monuments  celtiques  de  la  Bretagne.  A  Carnak,  notam- 
ment, un  menhir  tout  entier  a  été  taillé  en  forme  de 
croix;  sur  un  second,  qu'on  nomme  la  montagne  de  jus- 
tice, on  a  ciselé  une  autre  croix,  rappelant  grossièrement 
la  forme  des  croix  de  Malte. 


XT/    SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  01 

Le  dolmen  de  Passebonneau  était  soutenu  primitive- 
ment par  cinq  piliers,  deux  au  sud,  trois  au  nord,  placés 
de  front  ;  aujourd'hui,  l'un  de  ces  supports  ne  touche 
plus  à  la  table,  soit  que  son  sommet  ait  été  brisé,  ou  qu'il 
se  soit  affaissé.  Ces  supports,  à  peu  près  carrés,  ont  en 
moyenne  65  à  70  centimètres  de  côté  à  la  base  ;  ils  sont 
beaucoup  plus  étroits  au  sommet. 

Tout  ce  monument  est  en  grès  ferrugineux,  d'une  cou- 
leur noirâtre,  et  de  la  plus  grande  dureté.  Sa  surface 
entière  n'a  souffert  en  rien  des  injures  du  temps;  et  le 
grain  de  la  pierre  est  si  compacte  et  si  pressé,  que  ni 
mousses,  ni  lichens  n'ont  pu  y  enfoncer  leurs  racines, 
pourtant  si  tenaces  et  si  pénétrantes. 

La  face  principale  de  ce  dolmen  est  orientée  à  l'est. 


2°  Dolmen  de  Chalais,  canton  de  Bélâbre. 

Un  peu  avant  d'arriver  à  Chalais  par  le  chemin  de 
Bélâbre,  à  l'endroit  où  le  coteau  qui  domine  le  village 
commence  à  s'abaisser  en  pente  rapide  jusqu'au  bord  de 
l'Anglin,  à  droite  et  le  long  d'un  fossé,  on  rencontre  le 
dolmen  dit  de  Chalais.  C'est  un  des  plus  grands  du  pays. 
Sa  table  était  autrefois  à  peu  près  carrée;  aujourd'hui 
l'angle  qui  fait  face  au  nord-ouest  est  brisé.  Les  deux  côtés 
intacts  ont  environ  3"  50  de  longueur,  sur  une  épaisseur 
de  70  centimètres.  Ce  dolmen  était  posé  carrément  et 
d'aplomb  sur  trois  supports,  disposés  au  milieu  de  cha- 
cune des  faces  du  nord,  de  l'ouest  et  du  sud;  le  côté  du 
levant,  comme  toujours,  était  libre  et  dégagé.  Malheureu- 
sement, un  propriétaire,  pour  gagner  quelques  pouces  de 
terrain,  s'est  annexé  le  dolmen,  et,  pour  l'enclaver  dans 
son  champ,  à  fait  creuser  un  large  fossé  le  long  de  la 


02  COXGIIÈS   ARCHÉOLOGIQUE   HE    FR.V.NCE. 

façade  du  nord.  Le  support,  qui  n'avait  plus  d'assiette,  a 
lléchi,  a  glissé,  et  la  table  s'est  renversée.  De  ce  côté,  au- 
jour  l'hui,  elle  repose  sur  le  sol  ;  au  sud,  elle  est  encore 
maintenue  par  le  support  qui  s'est  incliné.  Ce  dernier, 
qui  se  présente  presque  d'angle,  a,  d'une  part,  1"  40 
d'épaisseur,  de  l'autre,  80  centimètres,  et  2"  42  de  hau- 
teur. Du  niveau  du  sol  au  sommet  de  la  table,  on  mesure 
encore  1"  70  d'élévation;  avant  son  accident,  le  dolmen 
devait  avoir  2-"  80. 

Tout  ce  monument  est  en  pierre  siliceuse,  jaune  gris, 
extrêmement  dure.  Le  pays  qui  l'entoure  est  dénudé  et 
olFre  quelques  traces  de  vignes  et  de  mauvaises  cultures  ; 
il  y  a  peu  d'années,  il  était  couvert  de  superbes  chênes, 
qui  rejoignaient  les  grandes  forêts  de  Bélâbre  et  de  la 
Luzeraie.  Avant  la  confection  des  routes  de  Bélâbre  et  de 
Brissac,  et  du  chemin  de  Chalais,  toute  cette  portion  de 
l'Indre  était  impénétrable  et  d'un  sauvage  achevé. 


3°  Dolmen  de  Cou-Bernard,  commune  de  Saint-Aigmj, 
canton  du  Blanc. 

Ce  monument  est  fort  peu  ou  point  du  tout  connu.  J'ai 
été  mis  sur  sa  trace  par  une  indication  de  M.  le  curé  de 
Saint-Ëtienue  du  Blanc,  que  sa  masse  avait  frappé.  Je 
suis  heureux  d'être  le  premier  à  le  signaler.  Il  est  situé 
à  peu.  près  à  mi-chemin  entre  Saint-Aigny  et  le  village 
de  Cou-Bernard,  à  moins  d'un  kilomètre  à  droite  de  la 
route  du  Blanc  à  Poitiers.  Le  beau  chemin  romain  d'Au- 
tuu  à  Bordeaux  en  passe  à  peu  près  à  deux  cents  mètres, 
et  de  là,  par  de  magnifiques  alignements,  va  joindre  le 
village  d'Ingrandes  à  quatre  kilomètres  environ. 

Ce  dolmen  s'élète  sur  la  lisière  d'une  futaie,  tourmen- 


XL*    SESSION,    A    CHATEAU  HOUX.  63 

t6c  et  rabougrie,  dernier  reste  des  vastes  forets,  dont 
d'immenses  amas  de  scories  attestent  l'existence.  Il  est 
placé  vers  le  centre  d'un  grand  plateau  rocailleux,  tout 
couvert  d'énormes  amas  de  pierres,  que  les  gens  du  pays 
appellent  encore  des  chirons,  tout  comme  faisaient  leurs 
ancêtres,  il  y  a  plus  de  2000  ans.  Ingrandes  et  Cliiron, 
deux  mots  conservés  aujourd'hui  dans  le  patois  bas-poite- 
vin, sont  d'origine  celtique,  et  signifient,  le  premier, 
frontières,  fines,  et,  le  second,  amas  ou  tumulus  de  pierre. 
Ce  dernier  terme  répond  parfaitement  au  galgal  que  nous 
avons  décrit  dans  la  première  partie  de  cette  étude,  et  au 
cairn  des  Bretons,  amas  de  pierre  consacré  à  Tentâtes. 
C'est  du  mot  cairn,  sans  doute,  que  les  paysans  de  Saint- 
Aigny  appellent  leur  dolmen  la  pierre  du  Charnier. 

Quoi  qu'il  en  soit,  la  table  de  notre  dolmen  est  une 
pierre  d'un  poids  énorme.  Sa  face  principale,  exposée  au 
levant,  mesure  2  mètres  de  long  ;  ses  côtés  ont  l""  70  ou 
i"  80.  Elle  est  épaisse  en  avant  de  65  centimètres,  en 
arrière  seulement  de  40.  Dans  son  pourtour  et  en  des- 
sous elle  est  à  peu  près  régulière.  Le  dessus  est  raboteux 
et  plus  fruste  ;  il  est  couvert  de  lichens  et  de  mousses 
verdoyantes,  qui  font  un  vigoureux  contraste  avec  le 
ton  chaud  de  la  pierre. 

Cette  masse  pesante  est  inclinée  légèrement  vers  l'ouest 
et  plus  fortement  au  nord.  Là,  les  trois  pierres  qui  la 
supportent  ont  fléchi  et  se  sont  abattues  en  dedans.  Le 
dolmen,  de  ce  côté,  a  encore  90  centimètres  de  hauteur;  au 
sud,  il  a  l"  40  d'élévation,  et  le  seul  pilier  qui  le  soutient 
a  conservé  son  aplomb.  C'est  un  silex  en.  forme  de  cœur 
très-allongé,  large  et  arrondi  par  le  haut,  mince  en  bas. 
Les  paysans  de  Saint- Aigny  attribuent  à  leur  dolmen  une 
origine  diabolique  :  «  C'est  une  fée,  disent-ils,  qui  l'a 
apporté  en  ce  lieu  pendant  la  nuit,  et  l'a  laissé  échapper 


fit  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

au  premier  chant  du  coq.  »  C'est  à  peu  près  la  même 
croyance  que  pour  la  pierre  à  la  Fade  des  bords  de  la  Mer- 
Rouge. 

4°  Dolmen  et  Cromlec'h  de  Sennevaut^  commune  de 
Ciron,  canton  du  Blanc. 

Voici  encore  un  dolmen  complètement  inconnu  ;  je 
revendique  l'honneur  de  le  faire  connaître  le  premier.  A 
peu  près  à  mi-chemin,  entre  Rosnay  et  Giron,  à  la  limite 
de  ces  deux  communes,  le  terrain  s'exhausse  peu  à  peu  en 
pente  très-douce  et  forme  un  vaste  plateau,  borné  à  l'ouest 
par  le  domaine  des  Vouillers,  à  l'est  par  celui  des  Bois, 
et  au  nord  par  Scnnevaut.  C'est  au  sommet  et  au  centre 
de  cette  colline,  d'où  l'on  découvre  un  horizon  de  plus 
de  vingt  kilomètres  tout  à  l'entour,  que  se  trouve  le 
dolmen   de  Sennevaut. 

Si  les  Celtes  faisaient  de  leurs  dolmens  des  points  de 
réunion  pour  de  nombreuses  peuplades,  le  centre  de  leurs 
assemblées  nationales  ou  religieuses,  ce  lieu  était  admira- 
blement choisi.  A  l'ombre  des  grands  chênes,  sous  l'abri 
des  vastes  forêts  qui  couvraient  au  loin  tout  ce  sol,  nul 
regard  indiscret  n'était  à  craindre  ;  ils  pouvaient  eu  sûreté 
dérouler  à  loisir  tous  les  rites  de  leurs  mystérieuses  céré- 
monies. Là,  quelquefois  encore,  sur  des  arbres  contempo- 
rains peut-être  de  ces  temps  reculés,  on  trouve  les  rameaux 
sacrés  du  gui. 

Aujourd'hui  l'aspect  a  changé;  les  vieilles  forêts  ont  été 
défrichées,  de  pauvres  sillons  attristent  le  regard,  et  des 
étangs  fangeux  se  découpent  au  milieu  de  maigres 
taillis.  Pourtant,  au  sommet  du  plateau,  un  grand  chêne 
a  été  épargné;  c'est  à  son  pied  que  se  dresse  le  dolmen. 


.     XL"   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  '     65 

La  pierre  supérieure,  très-irrégulière,  a  3  mètres  de  long 
et  8  mètres  de  tour ,  elle  est  beaucoup  plus  épaisse  à  l'est, 
où  elle  mesure  72  centimètres,  tandis  qu'à  l'ouest  elle 
n'en  a  plus  que  40.  Elle  a  conservé  sa  position  hori- 
zontale, et  son  plan  supérieur  est  à  i"  35  au-dessus  du 
sol.  Trois  supports  la  soutiennent,  irréguliers  aussi  de 
grandeur  et  de  forme  ;  au  lieu  d'être  dressés  debout,  ils 
sont  couchés  sur  leur  côté  le  plus  long;  celui  de  l'ouest  a 
i"  40  de  longueur,  sur  80  centimètres  d'épaisseur;  les 
deux  autres,  placés  au  sud  et  au  nord,  n'ont  guère  que 
32  centimètres  d'épaisseur,  sur  65  centimètres  de  lon- 
gueur. Sous  la  table  du  dolmen  on  voit  quelques  autres 
menus  blocs,  qui  sont  peut-être  des  débris  des  supports  ou 
de  la  table  même. 

Comme  à  Ghalais,  comme  à  Cou-Bernard  et  à  la  Châ- 
tre-l'Anglin,  le  monument  de  Sennevaut  présente  sa  face 
libre  de  support  au  soleil  levant. 

Ce  dolmen  est  le  moins  bien  conservé,  le  plus  dégradé 
de  ceux  qui  viennent  d'être  cités  ;  il  est  en  grès  rougeâtre 
qui  se  délite  à  la  longue  sous  l'intluence  de  la  pluie  et  des 
grands  froids.  Cependant  il  nous  offre  un  intérêt  particu- 
lier :  c'est  qu'il  est  entouré,  dans  un  rayon  de  quatre  à 
huit  mètres,  d'un  cercle  de  huit  autres  pierres.  Ces  der- 
nières ne  sont  placées  régulièrement  ni  entre  elles,  ni  par 
rapport  au  dolmen  central  ;  il  est  à  croire  que  quelques- 
unes  ont  été  arrachées  et  brisées.  Ces  pierres  ne  sont  pas 
non  plus  de  dimensions  égales  ;  elles  varient  entre 
1"  50,  4  mètre  et  50  centimètres  de  longueur  ;  de  plus, 
quelques-unes  ne  font  saillie  au-dessus  du  sol  que  d'en- 
viron 25  à  30  centimètres,  tandis  que  d^autres  sortent  de 
terre  à  plus  de  70  centimètres. 

Le  dolmen  de  Moulins,  près  de  Châteauroux,  et  celui 
d'Allouis',  dans  le  Cher,  sont  les  seuls,  je  pense,  dans  tout 

XL''  SESSION.  5 


66        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

le  Berry,  qui  soient,  comme  celui  de  Sennevaut,  entourés 
d'un  cercle  de  pierres.  J'avais  donc  raison  de  dire  que  ce 
dernier  ofirait  un  grand  intérêt. 

Tous  ces  monuments  de  pierre,  menhirs  ou  dolmens, 
sont  très-mal  vus  et  fort  redoutés  de  nos  paysans  ;  on  les 
regarde  comme  terriblement  entachés  du  soupçon  de  dia- 
blerie. Ils  recouvrent  tous  de  grands  trésors,  et  ne  se  tien- 
nent immobiles  que  pour  les  mieux  garder.  Pendant 
certaines  nuits  pourtant,  celle  de  Noël,  par  exemple,  celui 
qui  ne  craindrait  pas  de  se  mettre  en  sentinelle,  et  de  les 
guetter  d'une  façon  convenable,  ne  manquerait  pas  de  les 
voir  se  soulever  et  se  livrer  à  des  ébats  qui  ne  conviennent 
pas  à  d'honnêtes  pierres.  Mais  il  y  aurait  un  grand  dan- 
ger à  tenter  cette  aventure,  et  le  profit  serait  moindre  que 
le  péril.  Aussi  nos  braves  gens,  qui  tiennent  à  ne  pas  se 
faire  rompre  les  os,  aiment  mieux  croire  tout  simplement 
sur  la  foi  du  passé,  que  d'aller  y  voir.  C'est  moins 
héroïque,  mais  c'est  beaucoup  plus  sûr  ;....  et  nos  pierres 
conservent  toujours  leur  sinistre  renom  !.... 


b°  Dolmen  de  Saint- Martin,  commune  de  Sainte-Gemme, 
canton  de  Mézières-en-Brenne. 

Le  dolmen  qui  nous  reste  à  décrire  jouit  d'une  réputa- 
tion moins  sinistre  ;  il  a  été  sanctifié  par  la  présence  du 
grand  évoque  de  la  Touraine.  On  le  rencontre  à  un  kilo- 
mètre environ  au  sud  du  bourg  de  Sainte-Gemme,  sur  une 
légèie  éminence,  au  milieu  d'une  plaine,  aujourd'hui 
couverte  d'une  forêt  de  jeunes  sapins.  C'est  une  large 
pierre  de  grès,  étrangère  au  sol  du  pays,  qui  mesure  sur 
ses  plus  grandes  faces  3"  75  et  1""  75,  sur  ses  plus  petites 
2""  10  et  2"°  50  environ.  Chacun  de  ses  angles  regarde 


XL"  SESSION,   A   CIIATEAUROUX,  67 

l'un  des  points  cardinaux.  Cette  pierre  n'était  soutenue 
que  par  deux  supports,  à  l'ouest  et  à  l'est.  Le  premier, 
renversé  et  à  demi  enfoui  dans  un  sol  friable  et  peu  solide, 
est  seul  apparent;  le  second  a  disparu  complètement  sous 
le  tassement,  et,  de  ce  côté,  la  pierre  du  dolmen  repose 
sur  la  terre. 

Les  paysans  du  lieu  ont  cette  pierre  en  vénération.  Us 
vous  montrent  sur  la  surface  des  pas  d'hommes,  les  traces 
du  pied  d'un  âne  et  du  bout  d'un  bâton.  Saint  Martin, 
vous  racontent-ils,  a  fait  là  une  station  dans  ses  nombreux 
voyages  ;  après  avoir  tenté  vainement  de  convertir  au 
christianisme  les  habitants  de  la  contrée,  il  a  laissé  l'em- 
preinte de  ses  pieds,  de  ceux  de  son  âne  et  la  marque  de 
son  bâton  sur  cette  pierre,  pour  montrer  que  la  nature 
insensible  était  moins  rebelle  à  l'action  du  Créateur  que  le 
cœur  endurci  des  hommes.  (Je  dois  ces  détails  intéressants 
à  l'obligeance  de  M.  le  curé  de  Sainte-Gemme.) 

Il  existe  encore,  dans  la  même  commune,  une  autre 
pierre,  sorte  de  menhir,  de  forte  dimension;  ce  n'est 
pas  autre  chose,  sans  doute,  qu'une  des  nombreuses  bornes 
qui  limitaient  la  seigneurie  de  Brenne,  et  dont  il  est  fait 
mention  dans  un  acte  du  commencement  du  xiii"  siècle. 


IV. 


MONNAIES   GAULOISES. 

Après  les  grands  monuments  de  pierre,  ou  monuments 
mégalithiques,  qui  remontent  aux  âges  primitifs  de  la 
période  celtique,  nos  ancêtres,  les  Gaulois,  dans  des  temps 
postérieurs,  ont  laissé  bien  peu  de  traces  de  leur  séjour 
dans  l'arrondissement  du  Blanc. 


G8        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Quelques-uues  de  nos  localités  portent  saus  doute  encore 
aujourd'hui  des  noms  qui  remontent  à  ces  peuplades 
guerrières  ;  mais  ces  noms  sont  peu  nombreux,  et  l'étude 
en  est  trop  délicate  pour  que  nous  tentions  de  l'entre- 
prendre. Leurs  chemins,  à  l'époque  de  la  conquête,  ont 
été  utilisés  et  transformés  par  les  ingénieurs  romains.  Il 
nous  reste  seulement  quelques  monnaies  comme  témoins 
de  ces  temps  reculés.  Les  monuments  de  ce  genre  sont 
trop  rares  et  trop  précieux  pour  que  nous  les  négligions 
ici  ;  nous  sommes  donc  heureux  de  signaler  un  petit  tré- 
sor gaulois,  le  seul  qui  se  soit  rencontré  dans  l'arrondis- 
sement du  Blanc. 

Vers  le  milieu  du  mois  d'octobre  de  4872,  vingt-huit 
monnaies  gauloises  ont  été  trouvées  sur  le  territoire  de 
la  commune  d'Ingrandes,  près  le  Blanc.  Le  champ  où 
cette  découverte  a  été  faite  est  situé  à  environ  un  kilo- 
mètre du  bourg,  à  droite  du  chemin  qui  mène  à  Mérigny, 
et  avant  d'arriver  au  castel  de  Plaincourault. 

En  ce  même  endroit,  il  y  a  quelques  années,  dans  les 
travaux  de  nivellement  du  chemin,  on  a  rencontré  plu- 
sieurs tombeaux  en  pierre. 

Suivant  une  tradition  du  pays,  consignée  dans  les 
Esquisses  pittoresques  de  l'Indre  (page  202  de  la  grande 
édition  et  163  de  l'édition  in-12),  une  ville  existait  jadis 
en  ce  lieu.  Il  n'en  reste  plus  de  traces  aujourd'hui;  son 
nom  même  est  perdu. 

Nos  monnaies  étaient  enfouies  enfermées  dans  un  petit 
vase  de  terre.  Elles  furent  amenées  à  la  surface  du  sol  par 
l'action  de  la  charrue,  qui  traçait  un  sillon  profond.  Le  choc 
de  l'instrument  brisa  le  vase,  qui  ne  put  être  reconstitué.  Sa 
pâte,  trop  tendre,  avait  été  amollie  et  décomposée  par  un 
long  séjour  dans  la  terre.  Elle  était  noirâtre  à  l'intérieur, 
et  à  la  surface  couleur  de  rouille.  On  voyait  que  ce  vase 


XL"   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  69 

n'avait  été  que  très-légôrcmcnt  cuit  ;  ses  cassures  étaient 
celluleuses,  irrégulicrcs  et  pleines  de  parcelles  de  silex.  — 
La  Normandie  souterraine,  de  M.  Cochet,  le  Bulletin 
monumental  et  le  Cours  d'archéologie  gallo-romaine,  de 
M.  de  Caumont,  offrent  de  nombreux  exemples  de  poteries 
de  ce  genre.  Tels  étaient  les  premiers  produits  de  la  céra- 
mique chez  les  Gaulois. 

Les  monnaies  ont  eu  un  meilleur  sort  que  le  vase  qui 
les  enfermait.  Elles  sont  sorties  intactes  de  leur  cachette 
séculaire.  Leur  face  est  fortement  bombée,  et  elles  sont 
concaves  du  côté  du  revers.  Les  figures  ont  un  beau  relief 
et  ont  été  nettement  frappées.  Le  dessin  n'est  pas  trop 
barbare  et  indique  une  époque  de  civilisation  déjà  avancée. 

Ces  pièces  de  monnaie  se  rapportent  à  sept  types  diffé- 
rents, dont  voici  la  description  : 

N"  1 .  —  Tète  à  droite,  couverte  d'une  sorte  de  coiffure 
ou  de  casque,  indiqué  par  des  côtes  qui  se  dirigent  du 
sommet  de  la  tête  vers  le  col.  Collier  de  perles  ou  torque. 
Autour  de  la  pièce,  cercle  de  grénetis.  —  i^  Guerrier  à 
cheval,  galopant  à  droite,  tenant  un  bouclier  ovale.  Le 
poitrail  et  la  crinière  du  cheval  ornés  de  perles.  Au-des- 
sous du  cheval,  main  étendue  et  levée.  —  Argent,  poids: 
3  grammes  25  centigrammes. 

Une  pièce  à  ce  type,  trouvée  près  d'Issoudun,  en  1868, 
a  été  décrite  dans  le  Bulletin  des  Antiquaires  du  Centre, 
année  1868.  Bourges. 

N"  2.  —  Tète  à  droite,  cheveux  bouclés  en  quatre 
grosses  mèches  ;  bandeau  sur  le  front  et  collier  uni  au 
au  cou.  Autour,  grénetis.  —  i^  Deux  chevaux  galopant 
l'un  au-dessus  de  l'autre,  à  droite,  avec  perles  dans  la 
crinière.  Au-dessus  du  premier  cheval,  fleuron  à  deux 
pétales  opposés,  avec  un  plus  petit,  droit,  au  milieu.  Au 
centre  de  la  pièce,  un  point.  Au-dessous  du  deuxième 


70        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE, 

cheval,  uue  espèce  de  lyre.  Autour,  grénetis.  Argent; 
poids  :  3  grammes  35  centigrammes. 

Une  pièce  du  même  type  a  été  trouvée  à  Vierzon.  Elle 
est  décrite  dans  le  volume  de  1869  des  Antiquaires  du 
Centre,  p.  301,  n°  7. 

No  3^  —  Tête  à  droite,  couverte  d'un  casque  dont  le 
rebord  simule  des  mèches  de  cheveux  bouclés  ;  l'orbe  est 
couvert  d'imbrications;  une  jugulaire  perlée  s'attache  sous 
l6  menton.  Sur  la  joue,  quatre  perles  disposées  en  croix. 
Au  cou,  un  collier  uni. — i^ Cheval  galopant  à  droite.  Perles 
autour  du  poitrail  et  tout  le  long  de  la  crinière.  Au-des- 
sus, sanglier  ou  porc  accroupi.  Au-dessous,  fleuron  à  trois 
feuilles  attachées  à  un  point  central,  et  se  recourbant  de 
droite  à  gauche  en  forme  de  roue  ;  grénetis.  Argent  ; 
poids  :  3  grammes  15  centigrammes. 

Pièce  de  ce  genre  décrite  dans  le  volume  de  1869  des 
Antiquaires  du  Centre,  p.  302,  n"  13. 

N°  4,  —  Tête  à  gauche,  couverte  d'une  coiffure  à  trois 
grosses  mèches  bouclées,  encadrant  le  front  et  la  joue  ;  par 
derrière,  cinq  à  six  autres  mèches  en  sens  contraire.  Jugu- 
laire perlée,  comme  au  n°  3,  et  collier  uni;  grénetis.  — 
^  Le  même  qu'au  n°  3.  Argent  ;  poids  :  3  grammes 
5  centigrammes. 

N°  5.  —  La  même  tête  qu'au  n"  4  :  grénetis  autour.  — 
i§  Cheval  galopant  à  droite  et  sanglier  ou  porc  au-dessus, 
comme  dans  les  deux  pièces  qui  précèdent;  mais  au-des- 
sous du  cheval,  le  fleuron,  au  lieu  d'être  dirigé  vers  la 
gauche,  est  tourné  à  droite.  Grénetis  autour.  Argent  ; 
poids  :  3  grammes  25  centigrammes. 

N°  6.  —  Tète  à  gauche,  type  du  n°  4.  —  i^  Deux  che- 
vaux à  gauche,  au-dessus  triquètrc  à  angles  recourbés. 
Argent  ;  poids  :  3  grammes  25  centigrammes. 

La  môme  pièce  a  été  trouvée  près  d'Issoudun,  en  1868, 


XL"  SESSION,   A   CIIATEAUROUX.  71 

et  est  reproduite  dans  le  volume  des  Antiquaires  du 
Centre,  de  la  même  année,  pi.  I,  n"  7. 

N"  7.  —  Tète  à  droite,  cheveux  bouclés.  —  f^  Le  même 
qu'au  n"  6.  Argent  ;  poids  :  3  grammes  22  centigrammes. 

Il  ne  sera  pas  inutile  de  rapprocher  de  cette  découverte 
de  monnaies  une  autre  trouvaille,  beaucoup  plus  consi- 
dérable, qui  a  été  faite,  en  1865,  dans  la  commune  d'Ob- 
tcrre,  à  l'extrémité  ouest  du  département  de  l'Indre,  juste 
à  la  limite  du  Berry  et  de  la  Touraine.  Ces  monnaies,  au 
nombre  de  quatre  à  cinq  cents,  dit-on,  ont  été  trouvées 
dans  des  pots  de  terre,  en  un  lieu  appelé  Linnevert.  Le 
propriétaire  de  ce  trésor  a  fait  un  grand  mystère  de  sa 
bonne  fortune,  et  il  ne  montrait  pas  volontiers  ses  mon- 
naies. Cependant  quelques-unes  sont  sorties  de  ses  mains, 
et  celles  que  j'ai  sous  les  yeux,  beaucoup  moins  bien 
conservées  que  celles  d'Ingrandes,  offrent  les  mêmes  types 
et  les  mêmes  symboles.  C'est,  d'abord,  la  figure  repré- 
sentée au  n°  1,  avec  le  cavalier  passant  et  la  main  dressée; 
puis  celle  du  n°  2,  avec  les  deux  chevaux  galopant. 

Comme  à  Ingrandes,  les  monnaies  d'Obterre  n'offrent 
pas  de  traces  de  légendes  ou  d'inscriptions.  Un  savant 
tourangeau ,  qui  en  a  étudié  quelques-unes,  probable- 
ment de  types  autres  que  ceux  que  nous  venons  de 
décrire,  les  attribue  aux  Carnutes  (Orléanais)  et  aux  Pic- 
taves  (Poitevins). 

11  est  certain  que  ces  monnaies  doivent  remonter  à  une 
haute  antiquité  ;  l'absence  de  légendes  autour  des  figures 
en  serait  une  preuve  convaincante.  L'on  sait,  en  effet, 
d'après  le  témoignage  de  César,  que  les  premiers  Gaulois 
employaient  rarement  l'écriture  ;  et  il  est  reconnu  que  les 
inscriptions  monétaires,  presque  toujours  empruntées  à 
l'alphabet  romain,  ne  se  montrèrent  en  Gaule  que  dans 
les  temps  voisins  ou  contemporains  de  la  conquête. 


72        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  UK  FRANCE. 

Le  savant  numismate  Lelewel  (cité  par  M.  Kaynal, 
Histoire  du  Berry,  t.  I,  p.  32)  a  pensé  que  le  cheval  en 
course,  libre  ou  conduit,  était  le  symbole  des  Bituriges 
(habitants  du  Berry),  au  moment  où  ils  avaient  la  prépon- 
dérance sur  toute  la  nation  gauloise.  (Environ  500  ans 
avant  J.-C.) 

Les  Arvernes  (habitants  de  l'Auvergne),  devenus  puis- 
sants à  leur  tour,  empruntèrent  à  nos  pères  leur  em- 
blème national,  en  même  temps  qu'ils  leur  enlevèrent  la 
direction  des  affaires  de  la  Gaule.  (Environ  200  ans  avant 
J.-C.) 

D'autres  pièces,  qui  portent  d'un  côté  ou  le  cheval 
libre,  ou  deux  chevaux  superposés,  et  en  course,  et  de 
l'autre  côté  *  cette  tête  bizarrement  coiffée  de  longues 
mèches  frisées,  sont  encore  attribuées  aux  Bituriges.  On 
pense  que  le  porc  ou  sanglier  aurait  été  le  symbole  de  la 
confédération  Éduenne  (partie  du  Nivernais,  de  l'Autu- 
nois,  etc.,  capitale  Bibracte,  Autun),  et  que  les  Bituriges 
l'auraient  placé  sur  leurs  monnaies  seulement  quand  ils 
entrèrent  dans  cette  confédération.  (Vers  d  50  ans  avant 
J.-C.) —  (Voy.  Raynal,  Histoire  du  Berry,  t.  I,  p.  31.) 

Le  savant  M.  Berry,  qu'il  faut  toujours  citer  quand  il 
s'agit  de  la  numismatique  de  notre  pays,  assure  que  le 
type  qui  offre  une  main  ouverte  sous  le  cheval  appar- 
tient encore  aux  Bituriges. 

Enfui  le  numismate  Lambert  attribue  aussi  aux  mêmes 
peuples  la  pièce  où  l'on  voit  deux  chevaux  galopant  l'un 
au-dessus  de  l'autre,  accompagnés  d'un  triquètre  ou 
triangle  à  coins  recourbés.  (Bulletin  numismatique  de 
M.  do  Kersers,  dans  le  volume  de  1808  des  Antiquaires 
du  Centre.) 

Après  toutes  ces  indications,  nous  sommes  en  droit  de 
conclure  : 


XL"   SESSION,    A    ClIATEAUROUX.  73 

r  Que  les  iiioiuiaies  (ringTaiules  reinnnleiit  à  une 
haute  antiquité;  qu'elles  sont  de  beaucoup  antérieures  à 
la  conquête  de  notre  Berry  par  les  Romains,  c'est-à-dire  à 
l'an  51  avant  J.-C; 

2°  Qu'elles  ont  toutes  appartenu  aux  Bituriges,  nos 
ancêtres,  et  que  parmi  elles  deux  seulement  peuvent  être 
revendiquées  par  les  Avernes  ou  les  Eduens,  conjointe- 
ment avec  les  Bituriges. 

Un  anneau  de  plomb,  de  24  millimètres  de  diamètre  et 
de  7  millimètres  d'épaisseur,  orné  de  huit  fleurons  en 
saillie,  doit,  sans  doute,  être  rangé  aussi  parmi  les  mon- 
naies gauloises.  Il  a  été  trouvé  dans  un  des  villages  de 
Douadic,  au  mois  d'octobre  1872. 


M.  le  Président  donne  ensuite  la  parole  à  M.  Roubet, 
qui  lit  une  poésie  humouristique,  intitulée  :  l'Archéologue 
hagiologue,  dont  les  hues  épigramines  et  la  verve  originale 
ont  plusieurs  fois  amené  le  sourire  aux  lèvres  des  audi- 
teurs, et  provoqué  de  vifs  applaudissements. 


L'Antiquaire  hagiologue. 

Loin  du  bruit  et  de  l'œil  profane, 
Four  rêver  du  temps  qui  n'est  plus, 
Sous  le  lierre,  sous  la  liane, 
J'ai  préparé  mon  loculus  ! 

Il  est  là,  le  cher  sanctuaire  : 
Certain  d'y  puiser  le  bonheur, 
Comme  un  avare,  l'antiquaire 
Y  cache  ses  trésors,  son  cœur. 


74        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Ces  trésors  sont  de  bois,  de  pierre, 
D'ivoire  ou  de  porphyre  !  Aux  yeux 
De  l'art,  qu'importe  la  matière, 
Quand  le  travail  est  précieux  ! 

Bravant  l'éloge  ou  la  critique. 
Il  a  créé,  vrai  paradis  ! 
Un  musée  hagiologique  ; 
Honneur  aux  saints  qu'il  a  choisis. 

C'est  peu  d'avoir  fait  maint  miracle. 
D'être  en  tous  lieux  le  mieux  ieté  ; 
Nul  saint  n'est  admis  au  cénacle 
S'il  n'a  des  ans  la  majesté. 

Sa  voix  tour  à  tour  les  évoque, 
A  l'heure  oîi  tous  bruits  ont  cessé. 
Les  répons  à  ce  soliloque 
Sont  les  échos  du  temps  passé. 

Le  ciel  est  bleu,  la  brise  est  douce, 
Les  fleurs  brillent  autour  de  moi, 
L'oiseau  chante  en  son  nid  de  mousse  ; 
Quel  beau  jour  !....  Césame,  ouvre-toi  ! 

Parmi  cent  trouvailles  antiques. 
Glane  railleuse  des  hasards. 
J'ai  trouvé  mes  saintes  reliques 
Dans  les  catacombes  des  arts. 

Animés  par  la  statuaire, 
J'ai  de  l'érable  et  du  laurier, 
Du  buis,  du  cèdre;  l'antiquaire 
De  tout  bois  chauffe  son  foyer. 


XL°  SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  75 

Sorti  de  l'Auvergne  et  du  hêtre, 
Goulus  de  se  voir  le  premier, 
Saluons  d'abord  saint  Sylvestre  ; 
J'ai  blessé  le  calendrier. 

Près  de  lui,  contraste  étrange, 
Michaël,  le  blond  Chérubin, 
Des  ténèbres  terrasse  l'ange  ; 
Des  cirons  il  est  le  butin. 

Le  Séraphin  plane  et  rayonne, 
Satan  vaincu  grince  des  cris, 
Et  tord,  sous  un  pied  qui  frissonne, 
Son  aile  de  chauve-souris. 

Ce  charmant  saint  Roch  légendaire, 
Un  noir  grenier  me  l 'a  livré  ; 
Il  dormait  sous  un  long  suaire, 
Que  l'araignée  avait  ouvré. 

Au  Ciel  j'adressai  ma  prière. 
J'enlevai  mon  butin  pieux, 
Comme  Énée  emportant  son  père. 
Comme  Auchise  emportant  ses  dieux. 

Qu'il  a  su  trouver  de  souplesse 
En  sculptant  le  bloc  de  noyer, 
Comme  il  a  mis  de  morbidesse 
Sous  ses  coups,  le  maître  imagier  ! 

Sur  un  coursier,  trop  fort  de  taille. 
Se  tient  Maurice,  fier  guerrier  ; 
Contre  lui  le  Temps  qui  bataille 
A  fait  voler  son  étrier  I 


76  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE    DE    FRA^•CE. 

Un  étricr,  ah  !  mais  j'y  pense  ! 
Si  j'en  crois  Polybe  et  Strabon, 
L'étrier  n'est  point  d'ordonnance 


Dans  la  thébaine  légion. 


Dans  Voculus  de  la  fenêtre, 
Un  soir  où  ma  joie  éclata, 
J'ai  déposé  du  divin  Maître 
Une  ùnago  clypeata. 

Une  page  de  la  Genèse 
Reste  en  débris  sur  ce  vitrail, 
L'ouragan  de  quatre-vingt-treize 
A  brisé  le  plomb  et  l'émail. 

Ce  prophète  me  désespère, 
Un  jour  me  dira-t-il  son  nom  ? 
Qu'as-tu  fait  de  ton  phylactère? 

Es-tu  Daniel,  es-tu  Nahum? 

Ce  martyr  au  regard  humide, 
Dont  le  sang  couronne  le  front  : 
C'est  saint  Etienne,  qu'on  lapide.. 
11  est  en  pierre  d'Aprérnont. 

Sous  le  trilobé  d'une  arcade, 
Voici  le  fougueux  saint  Bernard; 
Peut-être  il  prêche  une  croisade 
Contre  les  richesses  do  l'art. 

Cet  ivoire  est  une  merveille  : 
Ce  dyplique  m'a  rendu  fou  : 
«  Sainct  Nicliolas  toche  et  reveille 
a  Tri  fieux  oc) lis  en  ung  tcnou.  » 


XL"    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  77 

Si  bien  sûreiuent  l'on  s'enquête 
Que  m'a  coûté  pareil  trésor  : 
J'ai  dépensé  pour  sa  conquête 
Quatre  mois,  des  soupirs,  de  l'or. 

Quelle  naïve  imagerie  ! 
Une  sainte  Barbe  avec  du  canon  ; 
Un  saint  Hubert  en  vénerie. 
Armé  d'un  gentil  mousqueton. 

Que  j'aime  mes  deux  Madeleines  : 
L'une  est  un  cuivre  et  l'autre  un  bois  ; 
En  répentance,  la  mondaine 
Mouille  de  pleurs  deux  os  en  croix  ! 

Cette  toile,  qui  se  craquelé, 
Nous  offre  le  grand  saint  Éloi, 
Sans  Oculi,  sa  main  martèle 
Un  beau  trône  pour  son  bon  roi. 

J'ai  voulu  que  monsieur  saint  Ladre 
Ici  fût  des  mieux  honorés  ; 
Je  n'ai  point  marchandé  le  cadre  : 
Fond  de  velours  et  coins  dorés. 

Voici  venir  les  trois  rois  Mages  ; 
L'étoile,  vue  en  Orient, 
A  disparu  sous  les  nuages 
Qui  plaquètent  mon  firmament. 

Le  vieux  tableau  n'est  plus  intègre, 
En  plombagine  est  changé  l'or, 
On  ne  sait  plus  quel  est  le  nègre, 
Si  c'est  Gaspard  ou  Melchior. 


78        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

J'ai  voué,  douce  souvenance, 
Aux  produits  de  mon  vieux  Nevers  : 
Bel  émail,  fragile  faïence, 
Point  ils  ne  sont  en  proie  aux  vers. 

Ils  ornent  encor  mes  assiettes, 
Les  saints  que  le  goût  a  bannis  ; 
Sur  deux  plats  bleus  voici  les  têtes 
De  saint  Jean  et  de  saint  Denis. 

Sous  sa  tiare  anachronique, 
Saint  Pierre  siège  en  sedia  ; 
Un  jour,  devant  ma  céramique, 
Champfleury  dit  :  «  Comme  c'est  ça  î  » 

Sur  cet  ancien  cuir  de  Cordoue, 
Nielle  de  fauves  couleurs. 
C'est  saint  Antoine  de  Padoue, 
Patron  vénéré  des  chercheurs. 

Questant  des  secrets  d'un  autre  âge, 
Égaré  dans  la  nuit  des  temps, 
Bien  des  fois,  devant  son  image, 
J'ai  brûlé  la  cire  et  l'encens. 

Bien  des  fois,  décevant  mirage, 
J'ai  cru  trouver  la  vérité  ; 
Le  Padouan  disait  :  Courage 
Invenietis,  guérite  ! 

Ombre  vaine,  terre  promise. 
Quand  tout  fuyait  devant  mes  pas. 
Je  recommençais,  autre  emprise. 
Mes  travaux  chéris,  mais  ingrats. 


XL^   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  79 

Ainsi,  dans  cette  ardeur  jalouse. 
Qui  lui  lait  sonder  l'inconnu, 
L'homme,  comme  un  jour  Lapérouse, 
Part,  vogue et  n'est  point  revenu. 

La  séance  est  levée  à  quatre  heures  et  demie. 


1"    SÉANCE    DU    dl    JUIN    J873. 

PRÉSIDENCE   DE   M.    DE    GESSAC, 
Inspecteur  de  la  Creuse. 

Siègent  au  bureau  :  MM.  de  Beaufort,  Laperche,  Rou- 
bet  et  de  Salies,  M.  de  Roumejoux  secrétaire. 

M.  l'abbé  Voisin  a  la  parole  sur  la  deuxième  question 
du  programme. 

SILEX. 

A  côté  des  dolmens,  des  peulvans,  ces  grands  monu- 
ments de  l'ère  celiique,  on  trouve  encore  fréquemment, 
dans  l'arrondissement  du  Blanc,  et  surtout  en  Brenne, 
d'autres  monuments  du  même  âge,  d'une  importance 
moindre,  infiniment  plus  fragiles  par  leur  forme  ou  leur 
matière,  mais  toujours  intéressants  et  curieux.  Ils  sont 
aussi  les  témoins  d'une  longue  période,  d'années,  sur  les- 
quelles l'histoire  écrite  ne  possède  que  bien  peu  de  don- 
nées et  ne  peut  fournir  que  de  rares  renseignements. 

Je  veux  parler  des  haches  en  silex,  des  couteaux,  des 


80  CONGRÈS  ARCnÉOLOGIQUE   I)E   FRAJVCE. 

pointes  dellèches  ou  de  lances,  simplement  taillés  ou  polis. 
Je  ne  ferai  mention  que  des  objets  qui  sont  en  ma  posses- 
sion ou  que  j'ai  vus  et  touchés.  La  forme  générale  de  ces 
instruments  ne  diffèrent  que  de  bien  peu,  quant  à  l'en- 
semble ;  je  me  contenterai  d'une  indication  sommaire,  en 
signalant  le  lieu  de  la  découverte.  Tous  ont  été  trouvés  à 
Heur  du  sol. 


I.    SILEX   TAILLES. 

1°  Pointes  de  flèches,  couteaux. 

Leur  petite  dimension,  leur  peu  d'épaisseur  et  leur  fra- 
gilité, rendent  ces  instruments  difficiles  à  trouver.  Je  n'ai 
pu  rencontrer,  à  Douadic,  qu'une  seule  pointe  de  flèche. 
Elle  avait  5  centimètres  de  long,  sur  2  et  demi  de  large. 
L'on  m'a  donné,  à  Linge,  une  lame  de  couteau  en  silex 
rougeâtre,  qui  mesure  15  centimètres  de  long,  sur  A  dans 
sa  plus  grande  largeur.  Elle  doit  être  comprise  dans  le 
type  des  silex  du  Grand-Pressigny. 

2°  Haches. 

On  ferait  mieux,  peut-être,  d'appeler  ces  outils  assom- 
moirs ou  casse-têtes  ;  car,  de  tailler  quelque  chose  avec  ces 
arêtes  à  peine  dégrossies,  c'était  bleu  difficile. 

Quoiqu'il  en  soit,  grâce  à  leur  plus  fort  volume,  à  leur 
résistance  plus  grande,  les  haches  de  pierre  taillée  ne  sont 
pas  rares  dans  nos  cantons.  J'en  possède  quatre,  trouvées, 
la  première,  à  Linge,  en  1K69,  22  centimètres  de  long 
sur  8  de  large  ;  la  seconde,  ù  Douadic,  même  année, 
17  centimètres  sur  7  ;  la  troisième,  à  Boussay,  commune 


XL^   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  81 

de  Pouligiiy,  en  1873,  13  centimètres  sur  9  (cette  dernière 
est  en  silex  grisâtre,  c'est  le  type  de  Saint-Acheul)  ;  la 
quatrième,  à  Concremiers,  en  1872,  '20  centimètres  sur  6. 
Une  autre  hache,  à  peu  près  de  même  forme,  a  été  trouvée 
auprès  du  Blanc;  une  dernière  enfin,  rencontrée,  en  1870, 
au  Blanc  même,  à  une  assez  grande  profondeur,  est  un  bi- 
jou véritable  de  forme  et  de  travail.  Elle  est  d'une  régula- 
rité parfaite  et  d'une  longueur  d'environ  20  centimètres 
sur  4  de  large. Ses  tailles  innombrables  et  toutes  pareilles, 
sont  arrondies  en  creux  de  moins  d'un  centimètre  de  dia- 
mètre ;  c'est  un  silex  blanchâtre.  Tous  ces  instruments  ont 
été  obtenus  au  moyen  d'un  clivage  plus  ou  moins  régu- 
lier, qui,  en  dégageant  de  chaque  côté  de  minces  arêtes, 
laisse  au  silex  une  assez  grande  épaisseur.  Ils  remontent 
assurément  à  la  plus  haute  période  de  l'âge  de  pierre.  Je 
finirai  en  ajoutant  qu'à  peu  de  distance  de  la  limite  du 
canton  du  Blanc,  se  trouve  le  Grand-Pressigny,  célèbre 
par  la  découverte  qu'on  y  a  faite,  il  y  a  quelques  années, 
d'un  immense  atelier  de  pierres  taillées. 


II.    SILEX   POLIS. 

Haches ,    Ciseaux. 

Les  pierres  polies  sont  en  bien  plus  grand  nombre  dans 
les  environs  du  Blanc.  Un  magnifique  fragment  de  hache 
en  silex  blanc,  de  7  centimètres  de  large,  a  été  trouvé  à 
Ingrandes,  en  1872.  A  Mérigny,  canton  de  Tournon,  on  a 
découvert  trois  haches  d'une  conservation  parfaite  ;  l'une, 
en  petro-silex  vert,  est  longue  de  20  centimètres,  sur  5  ou 
Ode  large;  à  Douadic,  canton  du  Blanc,  six  fragments 
plus  ou  moins  grands  ;  à  la  Buissonnerie,  Rouilly,  aux 
Ages,  à  Nervault,  près  le  Blanc,  dans  la  ville  même,  une 

XL*  SESSION.  6 


82         CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

douzaine  de  haches  ;  une  autre  à  Gommiers;  trois  au  Bou- 
chet,  commune  de  Rosnay  ;  une  à  Saint -Michel -en- 
Brenne  ;  enfin  trois  à  Concremiers.  L'une  de  ces  dernières, 
en  silex  rougeàtre,  qui  mesure  23  centimètres  sur  7  de 
large,  du  poli  le  plus  tin  et  le  plus  soigné,  était  complète- 
ment intacte  quand  on  l'a  trouvée  ;  mais  un  paysan  n'a 
pu  résister  au  désir  de  l'ébrécher,  pour  s'assurer  de  la  du- 
reté de  la  pierre.  Après  celle  de  Mérigny,  cette  hache  est  la 
plus  belle  de  toutescelles  qui  ont  été  trouvées  dans  ce  pays. 

Tous  les  habitants  de  nos  cantons  ont  vu  de  ces  pierres 
et  les  connaissent;  ils  les  ont  en  grande  vénération.  Pour 
eux  ce  sont  des  coins  de  foudre,  des  pierres  de  tonnerre. 
Us  prétendent  que  celui  qui  en  conserve  quelqu'une  dans 
sa  demeure  est  à  l'abri  de  l'orage  et  ne  peut  être  victime 
de  la  foudre.  N'est-il  pas  bien  étonnant  que  nos  Brenous 
aient  absolument  la  même  croyance  que  les  Grecs  d'autre- 
fois, et  attribuent  à  ces  pierres  la  même  origine  ?  Ces  der- 
niers peuples  les  croyaient  produites  par  le  tonnerre,  et  ils 
représentaient  la  foudre  par  la  réunion  de  deux  de  ces 
pierres,  qu'ils  nommaient  céraunites,  pierres  de  foudre. 
(D'Hancarville,  Recherches  sur  la  Grèce.)  Les  Romains, 
selon  Ennius,  les  appelaient  silices.  Dans  les  iles  Shetland, 
on  trouve  un  assez  grand  nombre  de  haches-  en  granit 
vert  :  le  peuple  les  nomme  traits  de  tonnerre,  et  les  garde 
comme  un  préservatif  contre  la  foudre.  (Walter  Scott,  le 
Pirate,  ch.  xxviii.) 

II  n'est  pas  étonnant  qu'on  trouve  en  Brenne  autant  de 
restes  de  la  domination  des  Celtes.  Ces  peuples,  bien  long- 
temps et  plus  tard  qu'ailleurs,  ont  dû  habiter  cette  contrée 
et  s'v  mettre  à  l'abri  des  invasions.  C'est  un  terme  de  leur 
idiome  qui  a  fourni  son  nom  et  qui  la  désigne  encore 
aujourd'hui.  {Bren,  forêt,  que  la  basse  latinité  a  traduit 
par  Brionia  saltus.  —  Esquisses  pittoresques  de  l Indre. — 


XL*   SESSION,    A   CIIATEATJROUX.  83 

J'aime  mieux  cette  étymoiogio  que  celle  qui  vient  du 
breton  brenn,  sale,  puant,  marécageux,  d'où  le  français 
bréneux,  embréné  et  bran  !  )  Au  lieu  de  ces  grandes 
plaines  nues  et  marécageuses,  de  ces  cinq  cents  étangs 
accunïulés  dans  les  vingt  communes  qui  forment  la 
Brenne,  le  pays  autrefois  était  couvert  de  forêts  magni- 
fiques. Tous  les  textes  anciens  en  font  foi,  depuis  la 
charte,  plus  ou  moins  authentique  de  Dagobert,  en  faveur 
de  Saint-Gyran  et  de  Méobec,  et  partout  l'on  rencontre 
d'immenses  amas  de  scories,  résidus  de  ces  nombreuses 
forges  à  bras  dont  parle  César,  et  qui  ne  pouvaient  être 
alimentées  que  par  des  masses  énormes  de  bois. 

Sur  cette  même  question,  M.  l'abbé  Damourette  lit  un 
rapport  très-intéressant  : 

Existe-t-il  des  cavernes  à    ossements?  — 
Ont-elles  été  explorées? 

De  4822  à  1823,  on  fit  à  Argenton  une  découverte  qui 
intéressa  très-vivement  les  savants,  M.  Guvier  surtout. 

On  trouva  dans  une  niche,  dépôt  de  couche  jurassique, 
des  vertèbres,  des  os  et  des  dents  d'une  grandeur  et  sur- 
tout d'une  forme  telles  qu'on  ne  savait  à  quelle  espèce 
d'animaux  les  rapporter. 

Heureusement  que  cette  découverte  fut  faite  par  des 
hommes  très-distingués  par  leur  savoir  et  leur  désir  de 
recueillir  toutes  les  choses  curieuses  que  l'on  ren- 
contrait, soit  à  Argenton,  soit  dans  les  environs. 

Ces  Messieurs  recueillirent  avec  le  plus  grand  soin  les 
objets  découverts  dans  leurs  fouilles,  et  les  envoyèrent  à 
Cuvier. 

On  sait  que  l'époque  jurassique  et  l'époque  crétacée 


84        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

sont  surtout  remarquables  par  le  prodigieux  développe- 
ment de  la  classe  des  reptiles  sauriens  ou  lézards. 

Or,  après  un  sérieux  examen,  Cuvier  reconnut  qu'avec 
les  vertèbres,  les  dents  et  les  os  qui  lui  avaient  été  envoyés 
d'Argenton,  il  pouvait  reconstituer  des  crocodiles  d'une 
espèce  tout  à  fait  inconnue  jusqu'à  ce  jour. 

La  découverte  dont  j'ai  l'honneur  de  vous  entretenir  est 
mentionnée  dans  un  ouvrage  très-savant ,  qui  a  pour 
titre  :  Dictionnaire  universel  d'histoire  naturelle,  par 
M.  Charles  d'Oràignij,  1844. 

L'auteur  rapporte  que  Cuvier  surnomma  les  crocodiles 
reconstitués  des  crocûdilions  Vollinati,  du  nom  de  l'ama- 
teur éclairé  qui  avait  recueilli  les  os.  En  effet,  il  se  nomme 
M.  Vollinat. 

Ces  couches  jurassiques  ont  été  visitées  par  M.  Bron- 
gniart  en  1830  ou  en  4848,  et  de  nouvelles  découvertes 
ont  été  faites. 

La  couche  n'est  pas  épuisée;  si  jamais  on  continue  les 
fouilles  dans  un  filon  du  terrain  tertiaire,  on  fera  sans 
doute  de  nouvelles  découvertes. 

La  li''  question  est  remise  à  une  séance  suivante,  la  per- 
sonne qui  doit  la  traiter  n'étant  pas  présente. 

M.  l'abbé  Damourette  lit  une  note  sur  les  noms  dérivés 
de  la  langue  celtique. 

Pourrait-on,  d'après  l'étymologie  des  noms 
des  diverses  localités ,  indiquer  celles 
dont  l'origine  remonte  aux  époques  cel- 
tique, gallo-romaine  ou  franke? 

LOCALITÉS   DE    l'ÉPOQUE    CELTIQUE. 

l"  Avarich,   Bourges.    L'étymologie  à'Avarich,    dit 


XL"   SESSION,    A   l'.HATEAUROUX.  85 

M.  (le  liaynal,  paraît  venir  du  radical  av,  eau,  et  de  l'ad- 
jectir  righ  ou  riche  :  la  ville  au  milieu  des  eaux.  L'adjectif 
riche  entrerait  aussi  dans  le  nom  de  Biturix,  Biturigx,  Beto- 
ritjw,  Betorico,  Betoricas,  etc.,  que  Bourges  a  aussi  porté. 
Si  l'on  en  croit  la  grammaire  de  Leus,  le  mot  celtique 
Bitiiriges  devrait  signifier  les  rois  du  monde. 

Les  habitants  de  Bourges  n'ont  pas  oublié  cette  glo- 
rieuse étymologie,  aussi  prirent-ils  pour  devise  un  mot 
fameux  de  Tite-Live  :  Pênes  Bituriges  summa  imperii  fuit. 
(Tite-Live,  chap.  v.) 

^"Argento  mago,  Argentomagus.  La  terminaison  mag  est 
certainement  celtique  et  répondrait  au  mot  latin  mansio. 
3°  Alerta  ou  Aletia.  Ce  lieu  est  certainement  d'origine 
celtique;  il  est  porté  sur  la  table  de  Peutinger.  Mais  que 
signifient  Alerta  ou  Aleria?  M.  de  Raynal  n'ose  pas 
s'aventurer  dans  Texplication  de  ce  mot. 

4°  Chabris,    Carobriva  ou   Briga.    Origine   celtique  ; 
signification  :  pont  du  Cher. 
Nous  avons  une  localité  dans  l'Indre,  nommée  Brives. 
5"Mehun,  Mag  dunum;\es  deux  mots,  dont  Mehun  est 
un  composé,  appartiennent  à  la  langue  celtique. 
6°  Gondé.  Condate,  en  celtique,  signifie  confluent. 
7"  Drevant  vient  certainement  du   mot   celtique   qui 
signifie  chêne,  et  qui  a  donné  naissance  au  mot  druide. 

Dans  notre  département,  sur  la  commune  de  Riva- 
rennes,  dans  un  pays  où  il  y  a  encore  de  belles  futaies,  il 
existe  un  village  nommé  Druders. 

On  prétend  que  ce  village  est  ainsi  nommé  parce  qu'il 
était  autrefois  la  demeure  des  druides.  Si  dans  la  localité 
la  tradition  s'était  bien  conservée,  il  me  semble  que  nous 
ne  devrions  pas  la  dédaigner.  Plus  d'une  fois  le  peuple 
du  Berry  a  donné  des  renseignements  traditionnels  que  la 
science  a  confirmés. 


86       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

8°  Erno  ditnum.  Un  monticule  placé  dans  la  rivière  de 
rArnon.  Le  radical  dunum  est  celtique. 

9°  Issoudun.  Le  mot  dunum  est  connu,  mais  d'où  vient 
Jssol  ?  M.  de  Raynal  n'ose  pas  risquer  une  étymolopie. 

10°  Cloué,  Claudio  magus.  Nom  moitié  celtique,  moitié 
latin.  Mag,  celtique. 

il"»  Tourna  magus.  Je  dirai  volontiers  nom  moitié 
celtique,  moitié  latin,  Turnus.  La  Creuse  fait  un  détour  à 
cet  endroit. 

12"  Deols.  Dol,  celtique  :  vallée.  [Histoire  des  Villes  de 
France,  à  l'article  Ville  de  Dol,  en  Bretagne.) 

13°  Nohant  vient  d'un  mot  celtique  :  prairie  très- 
mouillée. 

\A°  Le  Breuil,  Brolium,  qui  signifie  bois. 

13°  Clion,  Calalonum,  kat,  kad  :  combat.  (Houzé, 
Étude  sur  la  signification  des  noms  de  lieux,  en  France.) 

Grabatton,  Grabattum.  Plus  tard  Lesvoux,  Leprosum. 
D'où  vient  Grabatton  ?  C'est  une  ville  celtique  ;  on  a 
trouvé  tant  de  choses  appartenant  à  l'époque  celtique  dans 
cette  localité,  qu'on  ne  peut  pas  douter  que  ce  lieu  ne  fût 
connu  au  temps  des  Celtes  ;  c'était  un  oppidum. 

Baugenci,  Baugenciacum. 

Buzançais,  Buzentiacum.  (Scriptores  fr.  tora.  IX.) 

Buzençais.  Dominus-Spicilège,  Bvzencdicum^  thesaura- 
rius  [Sulpitius)  Fulconi  cuidam,  nobili  viro  Bituricornm  et 
probissimo,  cum  oppido  Villantrii,  in  matrimonio  con- 
junxit.  Buzenciacus  vero  et  illud  de  Castellione  nepotisuo, 
Roberto,  proprium  sibi  renovavit. 

Cette  note  donne  lieu  aux  observations  suivantes  : 
M.  Hubert,  archiviste  du  département,  pressé  par 
M.  l'abbé  Damourette  de  prendre  part  à  la  discussion, 
s'excuse  trop  modestement,  sous  le  prétexte  qu'il  ne  s'est 


XL»   SESSION,    A   CHATEA.UROUX.  87 

as  occupé  de  cette  question;  cependant  il  croit  qu'il  y  a 
-eu  de  noms  provenant  de  la  langue  celtique.  Ainsi,  à 
ropos  à'Avaricum,  qui  veut  dire  ville  au  milieu  des 
aux,  M.  Hubert  ajoute  que  Biturix  est  aussi  un  nom 
eltique.  Pour  Carobriva,  sur  le  Cher,  M.  de  Cougny  croit 
ue  le  mot  Ker  ou  Kar,  suivant  l'ouvrage  de  M.  Houzé, 
eut  dire  pierre;  mais  M.  l'abbé  Damourette  penche  à 
ffirraer  que  ce  serait  le  nom  celtique  de  Cher,  qui  coule 
)ut  auprès.  Mais  d'où  vient  le  nom  donné  à  cette  rivière  ? 
3pond  M.  le  directeur,  ne  serait-ce  pas  du  mot  celtique 
(ar,  dont  on  aurait  fait  Karus,  Carus?  M.  l'abbé  Voisin, 
u  sujet  de  Douadic,  fait  cette  réflexion  :  que  ce  nom 
ient  de  deux  mots,  qui  signifient  lit  protond,  ruisseau 
u  gouffre.  En  effet,  le  ruisseau  voisin  se  perd  dans  un 
nmense  entonnoir. 
M.  Hubert,  sur  le  nom  de  Plessiacum  (le  Plessis), 
s:pose  au  Congrès  que  pour  lui,  dans  l'Indre,  mot  cel- 
que  lui-même,  presque  tous  les  noms  de  lieux  viennent 
u  celtique  ou  du  romain;  il  n'en  connaît  pas  qu'on 
uisse  attribuer  aux  Francs.  Le  celte  et  le  latin  sont  deux 
ingues  sœurs,  ayant  la  même  origine,  et  c'est  une  cause 
équente  d'erreurs,  puisqu'on  peut  attribuer  à  une 
,ngue  ce  qui  appartient  à  l'autre. 

M.  l'abbé  Voisin  donne  des  détails  très-intéressants  sur 
igrandes,  le  Blanc  et  d'autres  localités  du  département. 


'opographie  et  monuments  gallo-romains 
de  l'arrondissement  du  Blanc. 


On    trouve  fréquemment,   dans  l'arrondissement  du 


88        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Blauc,  de  précieux  restes  de  roccupation  romaine.  Les 
beaux  vers  dans  lesquels  le  poêle  Ausone  a  décrit  avec 
complaisance  les  riches  villas  groupées  au  bord  d'autres 
fleuves  : 

Culmina  villarum  pendentibus  édita  rivis 

s'appliquent  parfaitement  à  notre  Creuse. 

Mais  il  est  un  coin  dédaigné  de  ce  pays,  la  Brenne,  où 
tout  ferait  supposer  que  les  riches  Romains  n'ont  jamais 
pénétré. 

Comment  ces  patriciens  si  délicats,  amateurs  pas- 
sionnés des  beaux  points  de  vue,  des  campagnes  plantu- 
reuses et  ombragées ,  se  seraient-ils  confinés  dans  ces 
immenses  plaines  nues  et  désolées,  empoisonnées  paf  des 
fièvres  redoutables,  au  milieu  des  marécages,  où  l'on  n'en- 
tend que  le  sifflement  du  vent  dans  les  roseaux,  ou  le  cri 
aigu  des  oiseaux  d'eau  ?  Pourtant  il  n'est  pas,  peut-être, 
une  seule  des  communes  de  la  Brenne  qui  ne  contienne  des 
vestiges  d'habitation  romaine.  C'est  que  la  Brenne  ancienne 
n'était  pas  ce  que  l'a  faite  l'industrie  des  modernes. 

Dans  les  premiers  siècles  de  notre  histoire,  les  grands 
seigneurs  de  la  Touraine  y  avaient  des  maisons  de  plai- 
sance. Attirés  par  «ses  forêts  verdoyantes,  pleines  de  gibier 
de  toute  sorte,  ses  riantes  prairies,  ses  eaux  vives  et  cou- 
rantes, »  nos  rois  de  la  première  race  faisaient  de  longs 
séjours  sur  les  rives  de  la  Claise  ;  ils  y  entretenaient  des 
meutes,  et  s'y  livraient  aux  plaisirs  de  la  chasse.  C'est  à 
Saint-Cyran,  et  non  pas  à  Méobec,  que  Dagobert  faisait 
noyer  ses  chiens  trop  vieux,  en  leur  disant  :  «  Il  n'y  a  si 
bonne  compagnie  qui  ne  se  quitte.  »  Attention  touchante 
qui  devait  adoucir  pour  tous  ce  désagréable  moment. 

'i  Est  enim  locus...  ^iberrimus  pascuis  pe<:orum ac  jumcn- 
toriim,  irriguus  decursus  aquarum.  atquc  amenus  venacioni 


XL"   SESSION,    X   CHATEAUROUX.  89 

ferarum.  »  (Charte  de  fondation  de  l'abbaye  de  Saint-Cy- 
raii,  Archives  de  l'Indre.)  —  Ailleurs  on  trouve  ce  même 
lieu  de  Longorct   (Saint-Cyran)  appelé   :  «  Commodum 

locum peramentum  ;  »  —  Méobec  :  «  Locum  cornpen- 

diosum,  etc.  » 

Ces  illustres  personnages  n'étaient  que  les  héritiers  ou 
les  successeurs  des  Romains.  Nous  allons  donc  rencontrer, 
dans  cette  région  surtout,  de  nombreuses  traces  de  l'occu- 
pation gallo-romaine. 

Nous  commencerons  par  rechercher  les  routes  qui  tra- 
versent le  pays;  nous  décrirons  ensuite  les  ruines  des 
villas  ou  des  maisons  de  moindre  importance;  les  monu- 
ments funéraires,  et  enfin  les  monnaies  que  les  conqué- 
rants ont  pu  laisser  dans  notre  arrondissement. 


I. 

VOIES   ROMAINES. 

1"   Voie  de  Bordeaux  à  Autun  (1). 

L'arrondissement    du   Blanc  est   traversé,   de    l'ouest 
à  l'est,  d'ingrandes  à  Argenton,  par  la  voie  de  Bordeaux 

(1)  Voici  le  parcours  et  les  stations  de  cette  route  : 
D'après  V Itinéraire  d'Antonni.       D'après  la  Tabtede  Peutinger. 
De  Aqiiitania  in  Gallias.  —  — 

Iter  à  Bnrdigala  Augustodii- 

niuiiM.P.CCLXXlV.  Bordeaux.  liurdigala. 

Blario  M.  P.  XVIIII      Blaye.  Blaria. 

Tamnum  XVI  Mortagne.  Taïuniun. 

Novïoregum  XII  Royan.  — 


00        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

à  Aiitun.  Ce  chemin  consulaire,  l'un  des  plus  considé- 
rables des  Gaules,  mettait  ainsi  le  Berry,  vers  le  sud- 
ouest,  en  communication  avec  l'Espagne  ;  la  voie  de  Bor- 
deaux avait,  en  effet,  son  prolongement  dans  les  Asturies, 
et  s'arrêtait  à  Astorga,  capitale  de  ce  pays,  que  les  Latins 
avaient  nommée  Asturica  Augusta.  (L'/^meVaîVe  d'Antonin 
mentionne  ainsi  ce  chemin  :  «  De  Hispania  in  Aquita- 
niam.  —  Ab  Asturica  Burdicjalam,  m.  p.  gggcxxi.  »  — 
Voy.  Bergier,  Grand  c/iem.  de  l'Emp.  rorn.  t.  ÏI,  p.  72.) 
Parvenue  à  Argenton,  cette  même  voie  rencontrait  celle 
d'Augustoritum  (Limoges),  et  celle  de  Mediolanum-Cas- 
trum  (Ghàteau-Meillaut),  qui  se  continuait  jusqu'au  bord 
du  Cher,  à  la  cité  de  Cordes,  où  elle  s'embranchait  sur  la 
voie  de  Bourges  à  Aquae-Neri  (Néris),  Cantilia  (Ghantelle) 
et  Augustonemetum  (Clermont). 


Mediolanuni  Santo- 

num  XV. 

Saintes.    . 

Mediolano  sancorum. 

Auncdonnacura  XVI 

Aunay 

Avedonnaco. 

_ 

Briou. 

Brigiosum. 

Rauranum  XX. 

Rom. 

Rarauna. 

Limonuiii. 

Poitiers. 

Lemuno. 

Fines  XXI. 

Ingrandes. 

Fines. 

Argantomago  XXI. 

Argenton. 

Argantoraago. 

—            — 

Ardentes. 

Alerta. 

Ernadorum  XXVII 

St-Ambrois. 

— 

Avariciim  XllI. 

Bourges. 

Avaricum. 

Tinconcium  XX. 

Sancoins. 

Tincollo. 

DecciddaeXXII. 

Décises. 

Degetia. 

Alisincuni  XIV. 

Anisy  St-Honoré. 

— 

Augiistodunum. 

— 

{Itin.  d'Anton.  Édi 

t.  de 

[Table,  de  Peut,  à  la  suite 

Wesseling,   1735,  p. 

460 

des 

Grands  chem.    de 

et  461.) 

l'emp.  rom.,  par  Bergier, 

t.  11 

'.) 

XL»   SESSION,   A   OUATEAUROUX.  Oi 

D'Argenton,  notre  voie  romaine  remontait  par  Alerta 
(Ardentes)  et  Ernotrum  (Arnaise  ouSaint-Ambroix),  jus- 
qu'à Avaricum  (Bourges),  d'où,  en  redescendant  vers  le 
sud-est,  par  Tincontium  (Sancoins),  elle  arrivait  à  Augus- 
todunum  (Autun)  après  avoir  traversé  l'Allier  près  de 
Mornay,  où  l'on  voit  encore  les  restes  d'un  pont  antique, 
et  la  Loire  à  Deciddse  (Decizes).  Entre  l'Allier  et  la  Loire, 
la  voie  de  Bordeaux  à  Autun  rencontrait  celle  de  Lyon  à 
Paris.  Enfin,  par  Bourges,  notre  voie  pouvait  atteindre 
les  bords  de  la  Loire,  au  nord-ouest,  par  la  voie  de  Cas- 
trum-Gordonum  entre  Saint-Satur  et  Saint-Thibault,  et 
rejoindre  le  chemin  de  Paris  entre  les  stations  de  Masava 
(Mesves)  et  Condate  (Cosne).  En  résumé,  la  grande  voie  du 
Blanc  pouvait  donc  facilement  établir  des  relations  entre 
cette  portion  du  Berry  et  l'Aquitaine,  au  sud  ;  Lyon  et 
l'Italie,  au  sud-est;  la  Germanie,  au  nord-est;  la  Bel- 
gique, au  nord  ;  et,  à  l'ouest,  l'Océan  et  tous  les  pays 
qu'il  baigne. 

M.  de  la  Tremblais  a  fait  un  travail  des  plus  intéres- 
sants sur  la  voie  romaine  dans  les  environs  du  Blanc;  il 
l'a  suivie  pas  à  pas,  depuis  les  environs  de  Saint-Gaultier 
jusqu'à  la  limite  du  département  ;  il  n'y  a  rien  à  ajouter 
à  cette  étude  si  complète.  Nous  nous  contenterons  de 
signaler  deux  points  :  la  position  de  la  station  de  Fines, 
sur  laquelle  M.  de  la  Tremblais  ne  s'est  pas  prononcé,  et 
le  parcours  de  la  route  depuis  Saint-Gaultier  jusqu'à 
Saint-Marcel,  que  ce  savant  infatigable  n'a  pu  explorer. 

1°  Il  est  de  tradition  à  Ingrandes  (4),  près  le  Blanc, 
qu'une  ville  antique  aurait  existé  dans  ses  environs. 

Il  est  probable  que  c'est  le  souvenir  de  la  ville  gauloise 

(1)  Esquisses  pitt.  de  l'Indre,  p.  208  de  la  gr.  édit.,  et  163 
de  l'édit.  in-12. 


0-2  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE    HE    FllANCE. 

d'Igorandis  ou  IngorandiSj  ou  de  la  station  romaine  de 
Fines,  qui  se  sera  ainsi  perpétué  d'âge  en  âge. 

La  carte  de  Peutinger  place  Fines  sur  la  roule  de  Bor- 
deaux à  Autun,  à  vingt  lieues  gauloises  de  Lemuno  ou 

Limonum  (Poitiers).  {Tabula   itineraria x\I.    Velseri, 

édita  ;  à  la  fin  de  l'Histoire  des  grands  chemins  de  l'Ernp. 
rom.;  par  Bergier.  —  Bruxelles,  1736.) 

L'Itinéraire  d'An  ton  in  le  met  à  égale  distance  entre 
Limonum  et  Argantomagus  (Argeuton),  c'est-à-dire  à  vingt 
et  une  lieues  gauloises.  (  Vetera  rom.  itineraria.  —  Edit. 
Wesseling,  Amstaeledami,  1735,  p.  460.) 

Les  savants  modernes,  en  se  servant  de  ces  données, 
n'ont  pu  se  mettre  d'accord,  ni  sur  la  position  de  Fines, 
ni  sur  son  identification  actuelle. 

Malte-Brun  confond  Fines  avec  le  Blanc,  malgré  le 
nom  antique,  Oblincum-Cuborum,  de  cette  localité. 
[France  illustrée,  Indre,  p.  12.) 

M.  Raynal,  d'après  d'Anville et  Gassini,  pense  que  Fines 
est  le  bourg  d'Hains  ou  Aingt,  canton  de  la  Trémouillc 
(Vienne).  {Histoire  du  Berry,  t.  I,  p.  97.)  Ces  écrivains 
distingués  n'ont  pas  pris  garde  qu'à  Hains  ou  dans  les 
environs  il  n'y  a  nulle  trace  de  l'occupation  romaine,  ni 
le  moindre  vestige  de  chemin  romain.  Celui  de  Poitiers 
à  Argenton,  dont  on  voudrait  que  Hains  ait  été  une  sta- 
tion, en  est  éloigné  de  six  kilomètres. 

M.  de  la  Tremblais  n'ose  pas  placer  Fines  à  Ingrandes  ; 
il  préfère  les  environs  de  Saint-Savin,  sur  les  bords  de  la 
Gartempe.  sans  donner  d'autres  raisons  pour  motiver  ce 
choix  qu'une  différence  de  quelques  kilomètres. (Zes  Voies 
romaines  dans  les  environs  du  Blanc,  p.  44.) 

Enfin,  un  mémoire,  inséré  dans  les  Bulletins  de  la 
Société  des  Antiquaires  de  l' Ouest ,  aggrave  encore  l'cncnr. 
il  recule   Fines,   au-delà  de  toutes  les  bornes  possibles, 


XL"    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  93 

jusqu'à  Chauvigny,  sur  la  rive  de  la  Vienne.  (X"  série, 
p.  361.) 

Toutes  ces  suppositions  sont  complètement  erronées. 
L'on  cherchait  hien  loin,  à  grand'peine,  et  sous  des  noms 
qui  ne  disaient  rien,  tandis  que  Fines  est  là,  tout  près,  et 
s'oflrant  de  lui-même  aux  investigations  de  la  science, 
conservé  jusqu'à  nous,  sous  sa  forme  celtique  d'Ingrandes  ! 

Encore  aujourd'hui,  dans  le  patois  bas- poitevin. 
Ingrandes  veut  dire  :  «  limite,  frontière.  »  {Bulletin  de 
la  Société  des  Antiquaires  de  U Ouest,  X"  série,  p.  388.) 

N'en  était-ce  pas  assez  pour  mettre  sur  la  voie? 

Les  Romains,  en  prenant  possession  de  notre  pays, 
n'ont  pas,  certainement,  cherché  toujours  à  créer  des 
noms  nouveaux,  pour  désigniîr  les  villes  ou  les  bourgades 
qu'ils  y  rencontraient;  ils  se  sont  contentés,  tout  simple- 
ment, de  traduire  ces  noms  par  des  synonymes  de  leur 
langue,  chaque  fois  que  la  chose  fut  possible.  Quant  à 
ceux  qu'ils  ne  comprenaient  pas,  ou  qui  ne  leur  offraient 
pas  de  sens,  ils  les  ont  acceptés  dans  leur  forme  ethnique, 
ou  les  ont  latinisés  plus  ou  moins  heureusement.  Les 
Commentaires  de  César  sont  pleins  de  ces  exemples.  C'est 
ainsi  que  sur  la  limite  des  Bituriges  et  des  Pictaves,  au 
bord  de  l'Anglin,  les  conquérants  ont  trouvé  un  oppidum, 
une  ville  de  refuge.  Bàtie  pour  défendre  le  passage  de  la 
rivière  et  protéger  la  frontière,  cette  forteresse  s'appelait 
elle-même,  en  raison  de  sa  position,  «  la  Limite,  la  Fron- 
tière :  Igorandis  ou  Ingorandis.»  Les  Romains,  tout  natu- 
rellement, et  avec  ce  grand  bon  sens  qui  les  distinguait, 
l'ont  appelée,  comme  ci-devant  :  «  la  Limite,  la  Fron- 
tière :  Finis.  » 

Sur  la  route  de  Limonum  (Poitiers),  à  Gœsarodunum 
(Tours),  à  la  limite  des  Pictaves  (Poitou)  et  des  Turons 
(Touraine),  ils  ont  trouvé  un  second  Igorandis  ou  Ingo- 


9i  CONGRÈS   ARCHÉOLOfilQUE   DE  FRANCE. 

raudis  :  Frontière,  Limite  (lugrandes-sur-Vienne);  ils  ont 
fait  comme  pour  notre  Ingrandes  :  ils  l'ont  appelée 
Fines,  la  Limite.  [Epvjraphie  du  Poitou.  —  Mém.  de  la 
Soc.  des  Antiq.  de  l'Ouest,  t.  XXVill,  p.  133.) 

Entin,  sur  la  voie  de  Juliomagus,  Angers,  à  Portum 
Namnetum  (Nantes),  un  troisième  Ingrandes,  placé  sur  la 
rive  droite  de  la  Loire,  et  qui  servait  de  limite  entre  les 
Lemovices  Armoricains  (  Vendée,  etc.  )  et  les  Namnètes 
(pays  nantais),  a  reçu,  lui  aussi,  le  nom  de  Fines.  [Con- 
grès archéologique  de  France,  t.  XXVI,  p.  20.) 

De  ces  premiers  faits,  ne  pourrait-on  pas  conclure,  avec 
raison,  que  notre  Ingrandes  actuel  est  bien  le  Fines  de 
y  Itinéraire  d'Antonin  et  de  la  Table  de  Peutinger  ?  — 
Ajoutons  encore  des  preuves  nouvelles. 

L'Itinéraire  et  la  Table  déjà  cités  placent  Fines  à  vingt 
et  une  lieues  gauloises  de  Limonum  et  d'Argantomagus. 
Or,  ces  distances  conviennent  parfaitement  à  Ingrandes 
et  ne  conviennent  qu'à  lui  seul. 

En  effet,  par  la  route  actuelle,  on  compte  d'Ingrandes  à 
Poitiers  51  kilomètres,  et  d'Ingrandes  à  Argenton  49  kilo- 
mètres. —  Nous  ne  voulons  pas  entrer  ici  dans  les  inter- 
minables discussions  qui  se  sont  élevées  au  sujet  de  la 
mesure  exacte  de  la  lieue  gauloise  ;  noils  admettons  le 
terme  le  plus  généralement  reçu,  qui  est  de  2,222  mètres. 
Or,  les  deux  sections  de  la  voie  romaine,  de  chacune  vingt 
et  une  lieues  gauloises,  réduites  d'après  le  système  mé- 
trique, donnent  un  total  de  93  kilomètres  324  mètres  ;  la 
dilférence  avec  la  route  moderne  est  donc  de  6  kilomètres 
et  demi.  Le  parcours  plus  étendu  de  cette  dernière  route 
s'explique  facilement.  En  quittant  Ingrandes  pour  tourner 
la  vallée  profonde  de  l'Anglin,  les  ingénieurs  ont  fait 
décrire  à  cette  route  un  lacet  énorme  en  forme  de  S,  qui 
permet  de  regagner  les  hauteurs  sans  pentes  trop  raides. 


XL'  SESSION,    A   CHATEAUROUX.  95 

Il  en  est  de  même  au  passage  de  lu  Gartempe,  à  Saint- 
Savin  ;  et  enfin,  avant  d'arriver  à  Chauvigny,  la  route 
s'engage  dans  une  série  de  courbes,  d'un  travail  énorme, 
pour  franchir  le  ravin  qui  continue  la  vallée  des  Goths. 
—  C'est  près  de  là  que  furent  massacrés  les  Wisigoths 
échappés  à  la  bataille  de  Vauclades  et  qui  couraient  s'en- 
fermer dans  leur  citadelle  de  Chauvigny  (505).  —  Il  n'est 
pas  étonnant  que  ce  parcours  si  accidenté  de  la  route  soit 
de  quelques  kilomètres  plus  long  que  celui  du  chemin 
romain.  Ce  dernier,  au  contraire,  offre  un  tracé  plus 
savant  et  plus  direct  ;  il  s'allonge  toujours  en  ligne  droite 
sur  le  dos  des  collines,  et  descend  les  pentes  par  une 
déclivité  rendue  facile  par  des  nivellements  et  des  rem- 
blais. 

D'Ingrandes  à  Argenton,  on  rencontre  un  pareil  con- 
traste. La  voie  romaine  traverse  le  Blanc  par  une  ligne 
beaucoup  plus  courte,  auprès  du  barrage  de  la  filature, 
gagne  les  hauteurs  en  suivant  les  rues  du  Gué  et  des 
Alouettes,  franchit  les  ravins  en  ligne  droite  sur  de  hauts 
remblais,  et  ne  s'infléchit  un  peu  que  pour  toucher,  sur 
la  rive  de  la  Creuse,  au  castrum  de  Ruffec  et  au  village 
de  Châtres  (Ciron),  où  les  Romains  ont  dû  avoir  des  éta- 
blissements considérables.  Enfin,  arrivée  au  Cluzeau,  elle 
décrit  une  dernière  courbe,  fort  légère,  pour  franchir  la 
Bouzanne  et  gagner  directement  Saint-Marcel.  La  nou- 
velle route  est  plus  longue  ;  elle  côtoie  presque  toujours  la 
Creuse  et  en  suit  les  nombreuses  sinuosités;  puis,  pour 
arriver  à  Argenton,  elle  passe  par  le  Pont-Chrétien,  lais- 
sant derrière  elle  la  voie  romaine,  se  rapproche  davan- 
tage de  Ghabenet,  et  s'allonge  ainsi  de  plusieurs  kilo- 
mètres. 

Enfin,  vers  1740,  dans  un  cimetière  de  Chauvigny,  on 
trouva  une  borne  milliaire,  indiquant  que,  du  lieu  où 


90        CONGRÈS  ARCUÉOLOC.IUUE  DE   FRANCE. 

elle  était  placée  jusqu'à  Fines,  il  y  avait  onze  lieues  gau- 
loises. Or,  par  la  voie  romaine,  de  Chauvigny  à  lugran- 
des,  il  y  a  juste  cette  distance. 

Il  résulte  de  tous  ces  détails  que  Fines  est  placé  à  égale 
distance  entre  Poitiers  et  Argenton,  par  les  itinéraires 
anciens  ;  que  les  mesures  modernes  donnent  raison  à  ces 
précieux  documents  ;  enfin,  qu'Ingrandes  est  exactement 
dans  les  mêmes  conditions  que  Fines;  d'où  l'on  peut  con- 
clure que  ces  deux  formes  d'un  même  nom  :  ïngrandes, 
Fines,  se  rapportent  bien  véritablement  à  la  même 
localité. 

Les  écrivains  qui  ont  cru  pouvoir  placer  Fines  à  Saint- 
Savin  ou  à  Chauvigny,  en  iaisant  violence  au  texte  de 
ÏJtinéraire  d'Antonin  et  de  la  Table  de  Peutinger,  se  sont 
basés  sur  ce  fait  que  la  configuration  du  sol,  en  ces  deux 
endroits,  se  prêtait  admirablement  à  l'établissement  d'un 
oppidum,  d'un  poste  de  défense.  Cette  raison  n'est  que 
spécieuse  ;  Ingrandes  otfre  tous  les  mêmes  avantages.  La 
forteresse  en  question  eût  été,  là  aussi,  appuyée  sur  des 
coteaux  d'un  difficile  accès,  surtout  vis-à-vis  du  Poitou, 
et  défendue,  sur  son  front  d'attaque,  par  la  rivière  de 
l'Anglin,  large  et  profonde.  Au  moyen  âge,  justement,  on 
a  compris  le  mérite  de  cette  position,  et  c'est,  sans  doute, 
sur  les  ruines  de  l'oppidum  gaulois  ou  du  castrum 
romain  qui  lui  aura  succédé,  qu'on  a  bâti  la  forteresse 
hérissée  de  tours,  dont  nous  voyons  encore  les  restes. 

En  second  lieu,  la  limite  des  Bituriges  et  des  Pictaves 
n'a  jamais  été  ni  la  Vienne  ni  la  Gartempe,  mais  la  petite 
bande  de  terre  qui  s'allonge  entre  la  Creuse  et  l'Anglin. 
Les  Bituriges  n'auraient  jamais  pu  établir  un  oppidum, 
une  ville  de  refuge,  sur  le  territoire  d'une  tribu  voisine  et 
souvent  ennemie.  Ils  ne  pouvaient  créer  un  poste  avancé 
qu'à  l'extrême  limite  de  leur  région,  et  ce  poste  c'est 


XI"  SESSION,    A    CIIATfiAUROUX.  97 

Ingrandes,  Ingorandis  Biturigum.  Les  Romains  ont 
adopté  partout  les  divisions  des  peuplades  gauloises.  Pour 
retrouver  les  limites  exactes  de  ces  différents  peuples,  on 
peut  tirer  un  grand  parti  de  cette  circonstance,  que  nous 
voyons  développée  dans  la  Notice  des  Gaules  et  la  Notice 
des  Dignités  de  l'Empire,  documents  précieux  qui  remon- 
tent au  règne  d'Honorius  (395-425).  [Notifia  Galliar. 
Notifia  Dignitot.  Apud  D.  Bouquet,  t.  I,  p.  122.)  —  Nos 
nationalités  provinciales,  si  fortes  au  siècle  dernier,  des- 
cendent, elles  aussi,  des  nationalités  gauloises  en  ligne 
directe;  elles  en  ont,  la  plupart  du  temps,  gardé  les  noms 
et  les  limites,  il  nous  suffira  donc  pour  savoir  jusqu'oîi 
s'étendait  le  pays  des  Bituriges,  de  connaître  les  frontières 
de  l'ancienne  province  de  Berry.  Or,  Ingrandes  et  les  vil- 
lages des  bords  de  l'Anglin  ont  toujours  fait  partie  de  la 
généralité  de  Bourges. 

Pour  finir,  résumons-nous  en  disant  que  Ingrandes  est 
bien  le  Fines  des  Romains.  Tout  le  prouve  :  son  nom 
actuel;  les  distances  assignées  par  les  documents  anciens  ; 
sa  position  à  la  frontière  du  pays,  où  il  pouvait  servir  de 
forteresse  ou  de  refuge. 

2°  Le  chemin  romain  a  parfaitement  été  étudié  jusqu'à 
ce  jour,  depuis  le  Blanc  jusqu'à  Saint-Gaultier,  nous 
l'avons  dit;  mais  il  n'en  fut  pas  de  même  de  cette  ville  à 
Saint-Marcel,  l'ancien  Argentomagus.  La  voie  traversant, 
dans  l'espace  de  ces  deux  lieues,  plusieurs  collines  cou- 
vertes de  vignes,  avait  complètement  disparu  dans  les 
cultures,  et  il  n'était  pas  facile  d'obtenir  des  propriétaires 
qu'on  fouillât  leurs  terrains.  J'ai  eu  pourtant  cette  bonne 
fortune,  et  M.  J.  du  Cluzeau  a  mis,  avec  la  plus  extrême 
obligeance,  ses  ouvriers  à  ma  disposition,  dans  ses  clos  du 
Cluzeau. 

On  avait  pensé  qu'à  partir  de  Saint-Gaultier,   la  voie 
XL''  SESSION.  7 


98        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

romaine,  s'élevant  à  gauche  sur  les  coteaux,  allait  con- 
tourner le  village  du  Pont  et  se  rapprochait  de  Ghabenet, 
pour  de  là  redescendre  à  Saint-Marcel.  C'était  l'erreur,  et 
on  faisait  ainsi  décrire  à  la  voie  un  parcours  beaucoup 
plus  long.  La  voie  laisse  Saint-Gaultier  sur  la  droite, 
passant  à  200  mètres  environ  des  maisons  des  Fosses,  et 
n'est  autre  chose  que  le  chemin  qui  longe  l'angle  du 
cimetière  et  qu'on  appelle  le  chemin  de  la  Chaussée, 
lequel  continue  jusqu'en  dessous  des  Panduats;  là,  la  voie 
n'est  plus  apparente,  elle  traverse  un  peu  en  biais  le  ravin 
de  Bouzanteuil,  vers  l'angle  formé  par  la  grande  route 
de  Chàteauroux  et  celle  d'Argenton,  et  à  l'endroit  même 
où  est  bâti  le  petit  moulin. 

Au  commencement  de  1870,  en  arrachant  une  souche 
de  peuplier  sur  le  bord  du  ruisseau  de  Bouzanteuil,  on 
tiouva  des  débris  de  murailles  gallo-romaines  parfaite- 
ment caractérisées  ;  c'était  une  chambre  à  peu  près  carrée, 
d'environ  G  mètres  de  côté.  Il  est  probable  que,  touchant 
à  la  voie  romaine,  cette  ruine  ne  pouvait  être  qu'une 
maison,  une  de  ces  stations  où  les  voyageurs  trouvaient 
pour  eux  et  leurs  chevaux  la  nourriture  et  le  repos.  La 
voie  remonte  ensuite  sur  le  coteau  opposé  aux  Panduats, 
s'éloignant  d'environ  200  mètres  de  la  grande  route,  et 
vient  passer  entre  les  deux  villages  de  Neuville,  à  l'extré- 
mité d'un  champ  nommé  les  Levées  (n°  198,  section  I  du 
cadastre  de  la  commune  de  Chassemenil). 

De  Neuville,  elle  vient  en  ligne  droite  sous  la  maison 
du  Bas-Cluzeau,  où  elle  disparait.  Elle  se  dirigeait  ensuite 
vers  le  moulin  de  la  Papeterie,  passait  la  Bouzanne  dans 
un  gué  (ju'ou  rec(Minail  au-dessus  du  barrage  du  moulin; 
grimpait  à  mi-cùte  le  long  du  coteau  qui  fait  face  à  Cou- 
nives,  et  se  dirigeait  en  ligne  droite  jusqu'à  Saint-Marcel. 
C'est  dans  une  vigne,  entre  Neuville  et  le  Cluzeau,  que 


XI."    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  09 

j'ai  fait  exécuter  des  fouilles  pour  retrouver  le  chemin 
romain.  Cette  recherche  était  facile  d'ailleurs,  car  tous  les 
vignerons  que  j'ai  consultés  le  connaissaient  sous  le  nom 
de  chemin  de  César.  On  le  rencontre  à  environ  40  centi- 
mètres de  profondeur,  sous  le  sol  ameubli  de  la  vigne  ;  il 
est  intact,  et  quand  il  fut  déblayé,  il  apparut  avec  ses 
bordures  de  pierres  et  le  sable  durci  de  sa  chaussée.  Les 
ingénieurs  qui  l'ont  construit,  ont  suivi  à  la  lettre  les 
conseils  de  Vitruve. 

Une  coupure  profonde,  en  travers,  a  permis  d'en  recon- 
naître toutes  les  couches.  Sur  un  sol  de  terre  franche  et 
solide,  on  a  placé  d'abord  un  lit  de  grosses  pierres  de -40  à 
50  centimètres  d'épaisseur  :  c'est  le  stratumen  ou  fonda- 
tion ;  puis  une  couche  de  petits  cailloux ,  de  pierres 
brisées  menu,  de  iO  à  15  centimètres  ;  c'est  la  ruderatio  ; 
plus  haut,  une  troisième  couche,  appelée  nucleus,  est  com- 
posée de  gros  sable,  de  tuiles  pilées,  de  débris  de  poteries, 
le  tout  uni  par  un  bain  de  mortier  ;  cette  couche  est 
d'une  telle  dureté,  que  le  pic  s'y  enfonçait  à  grand'peine. 
Enfin  la'quatrième  couche,  ou  summa  crusia,  est  composée 
d'un  lit  de  sable.  De  chaque  côté  sa  chaussée  est  mainte- 
nue par  des  blocs  de  pierres,  posés  de  champ,  et  reposant 
sur  le  sol,  d'une  longueur  variant  entre  20  centimètres  et 
2  mètres,  sur  une  largeur  d'une  trentaine  de  centimètres. 
La  largeur  totale  de  la  route,  à  l'endroit  fouillé,  est  de 
6  mètres  ;  ailleurs  elle  n'a  guère  que  5  mètres,  quelque- 
fois un  peu  moins,  mais  il  est  probable  que  cette  différence 
ne  provient  que  de  l'enlèvement  des  bordures  en  pierre 
de  taille,  qui  n'existent  plus  partout  où  la  voie  est  appa- 
rente. 

Un  monument  précieux  nous  indique  l'époque  de  la 
construction  de  cette  voie.  C'est,  comme  je  l'ai  dit  plus 
haut,  une  borne  railliaire  trouvée  à  Chauvigny  (Vienne). 


iOO       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Cette  pierre  était  enfouie  dans  le  cimetière  et  servait  de 
tombe  ;  on  l'avait  taillée  et  creusée  en  auge,  comme  il  est 
arrivé  à  un  grand  nombre  de  bornes  de  ce  genre,  et 
entre  autres  à  celles  d'Alichamps  (Cher). 

Elle  est  aujourd'hui  déposée  au  musée  de  Poitiers,  et 
l'on  y  lit  ces  mots,  épargnés  par  le  tailleur  de  pierre  du 
moyen  âge. 

LMP.  CAES.  DIV Imperator  Cœsar,  divi  Hadri. 

ANl.  FIL.  DIVIT Ani  filius,  divi  Trajani 

PARTHIG.  NEPO. . .  Parthici  nepos,  divi 

NERVAE.  PRON . .  Nervœ  pronepos,  Titus  M\m& 

HADRIAN.  ANT. .  Adrianus  Antoninus 

AVG.  PIYS.  P.  M.  T.  Augustus  ,    pius  ,    pontifex 

maximus,  tribunitiâ 

IIL  Potestate  IIL  consul  III 

FIN  Jusqu'à  Fines 

XI  (1)  XI  lieucs. 

Or,  d'après  l'Art  de  vérifier  les  dates,  l'empereur 
Antonin  fut  élevé  au  tribunat  et  au  consulat,  pour  la 
troisième  fois,  l'an  de  Rome  893,  et  de  J.-C.  14-0.  C'est 

(1)  Cette  inscriplion  est  donnée  par  M.  de  Longuemar,  dans 
le  tome  28  des  ^ntiq.  de  l'Ouest,  p.  131,  et  indiquée  par  M.  de 
Caumont,  dans  l'archéologie  gallo-romaine,  p.  38.  Ces  deux 
savants  pensent  qu'à  l'avant-dernicre  ligne  il  faut  lire  : 
«  depuis  Fines,  »  ce  qui  n'aurait  aucun  sens,  attendu  que 
d'après  l'Itinéraire  et  la  Table  de  Peutinger,  toutes  les 
distances  sont  indifiuécs  sur  cette  voie,  depuis  le  point  de 
départ,  Bordeaux,  en  marcliant  sur  Autun.  Enlin,  quoi  qu'il  en 
soit,  que  l'on  compte  à  partir  de  Chauvigny  vers  Ingrandes, 
ou  d'Ingrandes  vers  Chauvigny,  la  distance  sera  toujours  la 
même,  XI  1.  g.,  et  nous  serons  toujours  dans  le  vrai. 


XL''    SKSSION,    A    C.IIATKAUROUX.  101 

(loue  11  celle  éi)0([ue  (jue  fut  ('oiislniite  I;i  roule  di'  INiiliers 
à  Arseiiloii. 


■2"   voiK  d'av.uentoa  a  i.imoues. 

Cette  voie  est  indiquée  dans  Y  Itinéraire  d'Antonin  (p.  161 
et  165)  sous  la  rubrique  de  Bordeaux  à  Argenton,  avec 
187  lieues  gauloises  de  parcours,  h' Itinéraire  cominei  une 
erreur  en  signalant  21  lieues  seulement  entre  Argenton 
et  Limoges;  c'est  -il  qui  est  le  chiffre  véritable.  La  voie 
quitte  Argenton  vers  le  milieu  du  faubourg  de  Saint- 
Étienne,  traverse  la  Creuse,  et  marque  son  passage  sur  la 
rive  gauche  par  une  profonde  tranchée  creusée  dans  le 
rocher.  Elle  se  dirige  ensuite  vers  Font-Furat  et,  à  peu  de 
distance  de  ce  domaine,  se  divise  en  deux  branches;  l'une, 
dont  nous  n'avons  pas  à  nous  occuper,  continue  directe- 
ment au  sud,  aussi  vers  Limoges,  par  Celon,  la  Ville- 
franche,  etc.,  elBreth,  probablement  Tancien  Pretorium. 
La  seconde  branche,  qui  traverse  notre  arrondissement, 
fait  une  forte  courbe  vers  le  sud-ouest,  touche  au  Terrier- 
Joli,  laisse  à  droite  la  Boudre,  à  gauche  Montferery  et 
Forges,  près  du  passage  de  la  Sosne,  près  la  Puychallerie, 
sépare  ensuite  les  communes  de  Luzeret  et  de  Sacierges, 
arrive  au  Colombier,  suit  le  chemin  du  Plaix  et  traverse 
l'Abloux  au  moulin  du  Chàtellier.  Après  une  forte  courbe, 
la  voie  passe  entre  Chenier  d'un  côté,  les  Barrols  et  la 
Barre  de  l'autre,  le  Cluzeau,  et  franchit  l'Anglin  au  pied 
du  coteau  de  Chaillac,  où  elle  disparaît.  Ses  traces  rede- 
viennent apparentes  à  quelque  distance,  près  du  village 
de  la  Bissonnière,  auprès  du  Bois-Joli  et  du  domaine  des 
Loges.  Un  peu  plus  loin,  elle  sert  de  limites  aux  com- 
munes de  Chaillac  et  de  Bonneuil,  puis  à  celles  de  Bon- 


102       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

neuil  et  de  Beaulieu,  et  pénètre  dans  le  département  de 
la  Haute-Vienne,  en  traversant  la  Bénaise  au-dessus  de 
Jouac  et  près  du  village  de  Ghez-Palant. 


3°    VOIE  DE   TOURS   AU   BLANC. 

De  Tours  (Cœsarodunùm),  une  route  se  dirigeait  vers 
Port-de-Piles,  sur  la  Creuse,  et  là,  se  divisant  en  deux 
sections,  tendait  d'un  côté  vers  Poitiers  par  Ingrandes-sur- 
Vienne  (Ingorandis),  Antran  (Tnteramnis),  Cenon  (Sanno) 
et  Jaulnai  (Jelnacum);  de  l'autre  vers  le  Blanc,  en  côtoyant 
la  Creuse,  par  la  Haye,  et  à  travers  les  communes 
d'Abilly,  de  la  Guerche,  de  Barrou,  de  Chambon,  de  la 
Roche-Pozay,  Izeure  et  Tournuu.  (Voyez  Topographie  de 
la  Touraine,  par  M.  Mabille,  p.  55-58.)  A  Tournon,  la 
voie  entrait  sur  le  département  de  l'Indre,  passait  proba- 
blement dans  les  jardins  de  l'abbaye  de  Fontgombaud,  où 
l'on  a  trouvé  deux  pierres  à  moudre  le  grain,  des  débris 
de  tuiles  à  rebords,  des  monnaies  romaines  d'or  et  d'ar- 
gent, etc.;  puis  s'élevant  au-dessus  du  village,  sur  le 
sommet  du  coteau,  traversait  le  territoire  de  Pontigny- 
Saiut-Pierre,  à  gauche  de  Bénavent,  de  Mont-la-Chapclle, 
où  de  nombreux  vestiges  d'habitation  se  rencontrent  dans 
les  cultures,  et  venait  se  relier  au  Blanc,  en  bas  de  la  rue 
du  Gué,  à  la  voie  de  Poitiers,  à  l'endroit  où  cette  voie 
traverse  la  Creuse.  On  a  remarqué  sans  doute  les  noms 
significatifs  de  Pouligny  (Pauliniacum),  la  villa,  la  de- 
meure de  Paulin  ;  de  Bénavent ,  qui  correspond  au 
village  d'Avant,  proche  du  Blanc,  sur  la  voie  d'Argcnton, 
l'arrivée,  l'heureuse  arrivée.  C'est  par  ce  chemin  de 
Tours,  qu'après  avoir  été  baptisés  par  saint  Martin,  les 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  103 

saints  patrons  du  Blanc,  saint  iicnitour  et  ses  frères,  sont 
venus  dans  cette  ville  subir  leur  martyre. 

4°  VOIE  d'orléans  a  la  roche-posay. 

A  son  arrivée  à  Chabris  (Gabris),  la  voie  d'Orléans  se 
bifurquait  à  l'est  sur  Bourges ,  et  au  sud-ouest  sur  Vil- 
lantrois  (villa  in  Strata),  Cloué  (Claudiomagus),  et  Estrées 
(Strata-Strada).  Estrées,  dans  les  temps  anciens,  devait 
être  une  station  importante.  Comme  à  Ciron,  sur  la  voie 
de  Poitiers  à  Argenton,  on  trouve,  à  quelques  pas  de  la 
voie,  un  lampadaire,  ou  fanal  des  morts,  élevé  au 
milieu  d'un  vaste  cimetière.  Il  y  a  quelques  années,  au 
pied  du  fanal  d'Estrées ,  un  ouvrier  m'a  montré  un 
crâne,  qu'il  avait  recueilli  quelques  jours  auparavant, 
dans  lequel  était  encore  adhérente  la  lame  d'un  petit 
scramasaxe  en  bronze.  C'était  peut-être  la  tête  d'un  de 
ces  moines  du  couvent  de  Saint-Sauveur  d'Estrées,  dé- 
vasté en  935  par  les  Madgyars.  Ces  barbares  avaient 
envahi  le  Berry  par  cette  antique  voie  toujours  fréquentée. 
{Hist.  du  Berry,  par  Raynal,  tome  I,  p.  336.)  Le  fanal 
d'Estrées,  de  même  que  celui  de  Ciron  est  de  la  fin  du 
XII"  siècle,  mais  il  offre  cette  particularité  curieuse,  que  le 
sommet  de  sa  colonne  est  couvert  par  la  meule  de  dessus 
d'un  treissalithe;  c'est  sur  cette  meule,  qui  fait  rebord  à 
l'extérieur,  qu'est  bâti  le  petit  cône  qui  couronne  l'édifice. 

Vers  les  dernières  maisons  d'Estrées,  la  voie  romaine 
est  bien  conservée  ;  elle  a  encore  ses  bordures,  qui  sont  de 
fortes  et  longues  pierres  dures  ;  elle  mesure  à  peu  près 
4  mètres  de  large. 

Là,  la  voie  se  bifurque  une  seconde  fois  :  la  branche  de 
gauche  s'en  va,  au  sud,  par  Vendœuvres  (Veudita  opéra) 


■lOi  CONGRÈS   ARCIIÉOLOGKJUE   HE   FRANCE. 

elMéobec  (Mille  pecus),  se  relier  vers  le  Cliizeau  à  la  voie 
d'Argenton  ;  la  branche  de  droite,  inclinant  d'abord  au 
sud-ouest,  puis  tout  à  coup  à  l'ouest,  se  dirige  vers 
Subtray  (Sub  strata),  près  de  Mezières  (Maceria);  ensuite 
elle  devait  passer  sur  le  territoire  de  Paulnay,  vers  le 
domaine  de  Saint-Julien,  où  l'an  dernier  on  a  trouvé, 
dans  un  labour,  des  traces  de  sa  chaussée  et  de  grands 
amas  de  briques  et  de  tuiles  à  rebords  ;  puis  au-dessus  de 
Martizay,  où  l'on  rencontre  chaque  jour  des  tombes 
anciennes  et  des  débris  de  murailles  ;  enfin,  pénétrant 
dans  rindre-et-Loire,  elle  aboutit  à  Bossay,  et  de  là  à  la 
Roche-Posay.  (Voy.  Mabille,  loc.  cit.,  59  ;  de  laTramblais, 
id,  n°  VI  ;  Raynal,  Hist.  du  Berry,  I.) 

5°   VOIE   D'ORLÉANS   a  POITIERS   PAR   LE   BLANC. 

En  un  point  que  je  ne  saurais  déterminer,  mais  proba- 
blement tout  près  de  Subtray,  une  dernière  branche  se 
détache  de  la  voie  qui  vient  d'être  indiquée,  et  se  dirige 
sur  le  Blanc,  pour  de  là  communiquer  avec  Poitiers. 
Ce  tronçon  passerait  par  Saint-Michel  et  Saint-Cyran, 
autrefois  Longoretum,  où  le  leude  Flaocad  possédait  une 
maison  et  un  vaste  domaine,  au  milieu  des  grandes  forêts 
de  la  Brenne.  Dagobert  lui-même  avait  un  pied-à-terre  à 
Longoret,  qu'il  donna  à  son  parent  Sigiran,  depuis 
saint  Gyran,  pour  y  fonder  un  monastère.  C'est  ce  lieu 
qui  devint  plus  tard  si  célèbre  dans  les  annales  du  jan- 
sénisme. 

M.  Mabille  fait  remarquer  avec  raison  que  les  habita- 
tions d'aussi  puissants  seigneurs  ne  pouvaient  exister 
qu'à  proximité  des  grandes  voies  de  communication.  Or, 
au  VIII"  siècle,  époque  à  laquelle  a  été  écrite  la  vie  de 


XL"   SESSION,    A   CHATEAU IlOUX.  '105 

saint  Cyran,  il  n'y  en  avait  pas  d'autres,  surtout  dans  les 
pays  comme  la  Brenne,  que  celles  construites  par  les 
Romains.  Il  faut  donc  admettre  que  la  voie  dont  nous 
parlons  passait  près  de  Saint-Gyran  (Voy.  Mabillc,  Topofjr. 
de  la  Touraine,  p.  58.) 

Cette  voie  se  dirigeait  ensuite  sur  la  chaussée  du  grand 
étang  des  Cinq-Bondes,  où  une  fouille  l'a  fait  découvrir, 
il  y  a  quelques  années;  puis  sur  le  territoire  de  Linge, 
près  du  domaine  du  Tertre,  où  l'on  rencontre  chaque 
année  de  nombreuses  tuiles  à  rebords;  puis  sur  la  com- 
mune de  Douadic,  vers  la  Grave,  Brillebault  et  les 
Chizeaux  (Casa,  Casalia),  noms  qui  se  retrouvent  sur  toutes 
les  voies  romaines.  Entre  ces  derniers  villages  et  celui  de 
la  Jarrige,  j'ai  découvert  de  nombreux  restes  de  con- 
structions gallo-romaines  ;  les  murailles  s'étendent  sur 
une  surface  de  plus  d'un  kilomètre  de  long,  sur  4  à 
500  mètres  de  large;  je  reviendrai  sur  ces  ruines.  La 
route  devait  enfin  se  diriger  sur  Beaugi,  Montaigu,  et 
arriver  au  Blanc,  eu  s'embranchant  au-dessus  de  la 
ville,  vers  le  cimetière,  sur  la  voie  de  Poitiers  à  Argen- 
ton. 

Cette  dernière  voie,  aboutissant  d'un  côté  au  Blanc,  sur 
le  chemin  de  Poitiers,  de  l'autre  remontant  par  Estrées  et 
Chabris  vers  Orléans,  établissait  la  ligne  la  plus  directe 
entre  Paris  et  Bordeaux.  Un  fait  qui  ne  manque  pas  de 
piquant,  c'est  que  quand  nos  ingénieurs,  ces  dernières 
années,  ont  fait  leur  tracé  de  chemin  de  fer  entre  Chabris 
et  le  Blanc,  ils  ont  suivi  pas  à  pas,  sans  s'en  douter,  le 
tracé  des  ingénieurs  romains. 


106       COXGRÈS  ARCHEOLOGIOUE  DE  FRANCE. 

II. 

VILLES    ET    HABITATIONS   GALLO-ROMAINES. 

1°   Villa  du  Blanc. 

A  tout  seigneur  tout  honneur!  Il  est  donc  juste  de 
commencer  notre  recherche  des  villes  et  autres  restes  de 
l'occupation  romaine,  dans  l'arrondissement  du  Blanc, 
par  le  chef-lieu. 

Le  nom  du  Blanc  ne  se  trouve  cité  ni  dans  ^Itinéraire 
d'Antonin,  ni  dans  la  Table  de  Peutinger;  pourtant,  dès 
les  premiers  temps  de  la  conquête,  les  Romains  durent 
avoir  en  ce  lieu  un  établissement  considérable.  Le 
passage  de  la  rivière  à  protéger  et  à  défendre,  la  proximité 
de  la  frontière  de  deux  provinces  remuantes  et  souvent 
ennemies,  la  configuration  du  sol,  tout  leur  en  faisait  une 
loi;  enfin  la  multiplicité  et  l'importance  des  voies  qui 
venaient  y  converger,  en  sont  une  preuve. 

Veut-on  nous  permettre  d'exposer  notre  pensée,  tou- 
chant les  raisons  et  l'époque  de  la  fondation  du  Blanc? 
Nous  avons  dit  plus  haut  que  nous  regardions  Ingrandes 
comme  le  poste  avancé,  la  forteresse  de  refuge  des  Bitu- 
riges,  sur  la  frontière  des  Pictaves,  pendant  la  domina- 
tion gauloise  et  au  commencement  de  la  conquête.  Dans 
ce  temps  de  troubles  et  de  combats,  sans  cesse  renaissants, 
les  causes  de  destruction  étaient  fréquentes  ;  la  forteresse 
aura  péri.  Cependant  la  limite  de  la  province  ne  pouvait 
rester  à  découvert;  il  était  important  de  la  mettre  à  l'abri 
d'un  coup  de  main,  d'une  incursion  soudaine;  il  était  non 
moins  sage  de  protéger  tant  de  voies  qui  commandaient 
tout  le  pays.  Ces  motifs  et  bien  d'autres  encore  sans 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  107 

douto,  firent  rechercher  une  position  plus  forte,  un  coteau 
plus  abrupt,  d'un  plus  diiïicile  accès  et  d'une  défense  plus 
assurée.  Ne  pourrait-on  pas  dire,  sans  invraisemblance, 
que  c'est  alors,  probablement,  qu'a  été  bâtie  la  forteresse 
du  Blanc  ? 

Un  fait  qui  peut  sembler  bizarre  à  première  vue,  mais 
pourtant  qui  est  aujourd'hui  incontestable,  c'est  que  les 
Gaulois,  bien  avant  l'occupation  romaine,  et  môme  après 
la  conquête,  se  servaient  pour  écrire  leur  idiome  national 
des  caractères  de  la  langue  grecque,  et  qu'ils  avaient 
emprunté  un  certain  nombre  de  mots  à  cette  langue. 

Ou  trouve  facilement  les  raisons  de  cette  particularité 
dans  les  relations  nombreuses  établies  entre  la  Gaule  et  la 
Grèce,  relations  dont  les  historiens  nous  ont  transmis  le 
souvenir. 

Le  géographe  Strabon  atteste  que  «  les  Rhodiens  fon- 
dèrent des  colonies  dans  les  Gaules  1224  ans  avant  J. -G.  » 
Sans  admettre  une  aussi  haute  antiquité,  ce  témoignage 
ne  nous  est  pas  moins  précieux. 

D'après  Trogue-Pompée,  «  ce  furent  des  Phéniciens,  fon- 
dateurs de  Marseille  (600  avant  J.-C.),  que  les  Gaulois, 
dépouillant  leur  barbarie ,  apprirent  la  politesse  des 
mœurs,  l'art  de  labourer  les  champs,  de  fermer  les  villes 
de  murailles,  de  vivre  avec  les  lois  et  non  avec  les  armes, 
de  tailler  la  vigne  et  de  planter  l'olivier...,  de  sorte  qu'il 
ne  semblait  pas  que  la  Grèce  fût  venue  dans  la  Gaule, 
mais  que  la  Gaule  eût  été  transportée  dans  la  Grèce.  » 

Parmi  les  Gaulois,  les  Bituriges  participèrent  des  pre- 
miers à  cette  régénération.  Il  ne  faut  pas  oublier  que  ce 
fut  Bellovèse,  l'un  des  neveux  d'Ambigat,  roi  des  Bitu- 
riges, et  chef  suprême  de  l'empire  des  Gaules,  qui,  mar- 
chant sur  l'Italie,  détermina  les  Saliens  à  céder  aux 
Phocéens  le  territoire  sur  lequel  ils  bâtirent  Marseille.  Ce 


108  CONGRÈS    AIICHÉOLUGIQUK    J>K    FIIANOE. 

service  établit  entre  Hoiirges  et  la  cité  nouvelle  des  rap- 
)iorts  étroits  J'aniitic  et  de  commerce.  Pendant  de  longues 
années,  les  jeunes  Bituriges  allèrent  se  l'ormer  aux  scien- 
ces parmi  les  Massaliotes,  tandis  que  les  traliquants  des 
deux  nations  venaient  échanger  entre  eux  les  produits  de 
la  Grèce  et  du  Berry. 

On  ne  doit  donc  pas  s'étonner  de  voir  nos  aïeux  adopter 
les  formes  du  langage  de  leurs  maîtres  en  civilisation, 
après  leur  avoir  emprunte  leurs  arts  et  jusqu'à  leurs 
monnaies.  Les  premières  pièces  d'or  ou  d'argent,  en  effet, 
qui  eurent  cours  dans  notre  pays,  dans  ces  temps  reculés, 
sont  une  imitation,  plus  ou  moins  heureuse,  du  type  de 
Philippe,  et  offrent  l'image  dubige  macédonien.  (360-336 
av.  J.-C.) 

Ces  détails  n'étaient  pas  inutiles  pour  montrer  que  nous 
ne  soutenons  pas  un  paradoxe,  et  que  nous  ne  sommes 
pas  loin  de  la  vérité  en  attribuant  à  la  ville  du  Blanc  une 
étymologie  grecque. 

Oblincum,  dont  on  a  fait  Oblinc,  Oblanc,  Oublanc,  puis 
lou  Blanc,  le  Blanc,  ne  serait  que  la  forme  adoucie  et  lati- 
nisée du  mot  grec  oplikon,  qui  lui  est  d'ailleurs  presque 
identique,  et  qui  signifierait  :  la  forteresse,  l'arsenal. 
Les  racines  de  ce  mot  oplon,  objet  d'équipement,  arme, 
surtout  arme  défensive,  et  ta  oplo  le  camp,  la  garnison, 
autorisent  parfaitement  cette  supposition. 

Une  bourgade  peu  étendue,  comme  était  celle  d'Ingran- 
des.  Fines,  peut-être  détruite,  puis  habitée  de  nouveau, 
sans  laisser  beaucoup  de  traces  de  son  existence  antlifue  ; 
il  ne  pouvait  en  être  de  même  d'un  établissement  consi- 
dérable comme  était  le  Blanc  ;  ses  vestiges  devaient  être 
plus  nombreux,  ses  restes  plus  a])parents;  l'événement  l'a 
prouvé.  A  ditlérentes  époques,  en  creusant  des  fondations 
de  maisons,  sur  la  place  du  Blanc,  on  trouva  de  nom- 


XL*   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  d09 

breux  débris  de  tuiles  à  rebords,  quelques  restes  de  mu- 
railles, des  vases  de  formes  diverses,  et  un  objet  grossier, 
qui  ne  pouvait  être  (jue  l'enseigne  d'un  mauvais  lieu. 
Plus  récemment,  dans  les  travaux  de  construction  de  la 
route  de  Blois,  le  long  de  la  voie  d'Argenton,  on  mit  à 
découvert  plusieurs  cercueils  en  plomb  et  en  pierre  ;  des 
vases  en  terre  de  différentes  couleurs,  et  deux  fioles  lacry- 
matoires  en  verre.  (Voy.  M.  de  la  Tremblais,  Esquisses 
pitt.  art.,  le  Blanc. —  Voies  rom.  w"  1.) 

En  1867,  dans  la  ville  haute,  on  rencontra  des  frag- 
ments de  tuiles  romaines,  quelques  fondations,  et  une 
monnaie  d'argent  de  Maximin,  avec  la  Diane  Chasseresse. 
Enfin,  en  1870,  au  mois  de  janvier,  à  l'extrémité  de  la 
ville,  le  long  de  l'ancienne  rue  de  Ruffec,  on  trouva  les 
restes  considérables  d'une  riche  villa. 

Le  site  était  admirablement  choisi  pour  une  belle  instal- 
lation, pour  la  demeure  d'un  riche  patricien.  Les  con- 
structions se  trouvaient  abritées,  au  nord,  par  un  coteau 
élevé,  vigoureusement  ondulé,  autrefois  couvert  de  futaies, 
et  au  sommet  duquel  passe  la  voie  romaine  de  Poitiers  à 
Argenton,  encore  intacte  aujourd'hui.  En  face,  sur  une 
largeur  de  deux  cents  mètres  à  peu  près,  s'étend  une 
prairie  en  pente,  dont  les  eaux  calmes  de  la  Creuse  vien- 
nent baigner  la  rive.  La  voie,  après  avoir  suivi  une  ligne 
régulière  de  l'est  à  l'ouest,  parallèle  à  la  Creuse,  si  on  la 
suit  en  allant  d'Argenton  vers  le  Blanc,  longe  la  ville  au 
nord  et  fait  tout  à  coup  un  brusque  coude  vers  le  sud, 
pénètre  dans  la  ville  par  la  rue  des  Alouettes,  nom  qui 
rappelle  peut-être  la  fameuse  légion  gauloise  de  ce  nom, 
comme  à  Issoudun  et  à  Besançon,  puis  par  celle  du  Gué, 
où  elle  atteint  la  rivière.  C'est  en  tête  du  rectangle  allongé, 
circonscrit  par  la  voie  de  la  Creuse,  que  se  trouvent  les 
murailles  qu'on  vient  de  mettre  au  jour,  et  ces  ruines 


no  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

sont  certainement  celles  d'une  des  premières  maisons  de 
la  vieille  cité.  En  fournissant  des  ouvriers  au  propriétaire 
du  terrain,  j'obtins,  à  grand  peine,  le  droit  de  faire  des 
fouilles  ;  voici  le  résultat  de  ces  recherches. 

On  mit  à  découvert,  du  nord  au  sud,  deux  longues 
murailles  parallèles,  d'environ  40  mètres  de  long,  reliées 
en  deux  endroits  par  des  murailles  transversales,  allant 
de  l'est  à  l'ouest,  et  formant  d'abord  l'appartement  n"  3. 
Dans  l'angle  G,  la  base  des  murs  était  revêtue  d'un  rang 
de  tuiles,  de  45  centimètres  de  hauteur,  sur  35  de  largeur 
posées  de  champ,  côte  à  côte,  scellées  au  moyen  d'une 
couche  épaisse  de  mortier,  et  attachées,  pour  plus  de  soli- 
dité, avec  des  clous  longs  et  minces.  Pour  que  ce  lambris 
fût  plus  régulier,  on  avait  enlevé,  avec  soin,  au  marteau, 
les  rebords  saillants  des  tuiles.  Au-dessus  de  ce  revêtement, 
le  mur  était  enduit  de  mortier  fin,  teinté  en  jaune,  avec 
des  filets  bruns  et  verts .  Le  sol  était  recouvert  de  carreaux 
en  brique,  de  21  centimètres  carrés,  de  couleur  brun 
foncé. 

Un  peu  plus  loin,  au-dessus  d'une  épaisse  couche  de 
béton,  on  remarquait  un  carrelage  en  tuiles  posées  à  plat 
fortement  usées  par  le  frottement  des  pieds.  En  remontant 
au  nord,  à  la  suite  de  l'appartement  n°  3,  on  trouvait  l'ap- 
partement n°  2,  mesurant  7  mètres  de  long,  sur  5  de  large  ; 
son  sol  était  recouvert  d'une  couche  de  béton,  avec  un  en- 
duit de  sable. et  de  chaux  très-fm  et  poli;  les  murs,  sans 
revêtement  de  tuiles,  étaient  teintés  de  rouge.  Un  peu 
plus  haut,  la  salle  n"  1  avait  i  mètre  de  contre-bas  avec 
les  appartements  qui  la  joignaient.  C'était  la  plus  ornée  et 
celle  qui  a  donné  le  plus  de  restes  curieux.  Elle  était  en 
carré  de  5  mètres  sur  chaque  face,  et  terminée,  à  l'une  de 
ses  extrémités,  en  hémicycle  de  2'"10  de  profondeur.  Son 
sol,  dans  toute  son  étendue,  était  noirci  par  la  fumée  et  la 


XL«  SESSION,   A   CHATEAUROUX.  141 

suie,  circonstance  qui  s'explique  parfaitement  par  la  pré- 
sence d'un  hypocauste.  Malheureusement  tout  le  plancher 
supérieur  était  écroulé,  et  il  ne  fut  pas  possible  de  trou- 
ver un  seul  des  supports  en  place.  Dans  le  déblais,  on  en 
rencontra  pourtant  des  débris  nombreux  et  d'une  forte 
dimension,  unis  encore  par  un  mortier  solide  et  résistant. 
Ces  supports  étaient  placés  à  peu  près  à  35  centimètres  les 
uns  des  autres  ;  ils  avaient  65  centimètres  de  hauteur,  et 
étaient  formés  de  carreaux  de  21  centimètres  de  côté, 
placés  carrément  les  uns  au-dessus  des  autres,  avec  un 
joint  très-épais  de  mortier.  Ils  étaient  réunis  entre  eux  et 
recouverts  au  moyen  de  grandes  briques  brunes,  très- 
dures,  de  5  centimètres  d'épaisseur  sur  40  centimètres  de 
côté.  Le  sol  supérieur  était  formé  d'abord  d'une  épaisse 
couche  de  mortier  jaunâtre,  puis  d'une  couche  plus  mince 
légèrement  rosée  et  très-fine,  dans  lesquelles  on  remar- 
quait de  la  poussière  de  tuiles  broyées.  Le  fourneau  de 
l'hypocauste,  placé  en  bas  de  cet  appartement,  à  droite, 
s'ouvrait  en  dehors  dans  une  petite  excavation  murée  ;  il 
était  construit  entièrement  en  briques,  soigneusement 
appareillées,  et  avait  45  centimètres  de  large,  sur  50  de 
hauteur.  11  s'avançait  dans  le  sous-sol,  en  s'élargissant  au 
moyen  de  deux  murettes  en  carreaux  pareils  à  ceux  des 
piliers  de  soutènement. 

Au  milieu  de  la  masse  de  décombres  qui  remplissaient 
cette  salle,  bouleversée  comme  à  plaisir,  on  trouva  de 
nombreux  débris  de  moulures  en  plâtre,  avec  un  noyau 
central  en  mortier  rouge  ou  jaune.  Dans  l'une  d'elles, 
pour  plus  de  solidité  sans  doute,  le  plâtre  était  relié  aux 
deux  mortiers  au  moyen  de  deux  clous  à  larges  têtes  et 
bifurques  à  l'autre  extrémité. 

Peu  de  temps  après  cette  découverte,  je  fis  bondir  un 
archéologue  en  lui  disant  qu'on  avait  trouvé  des  orne- 


•112  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE  DE   FRANCE. 

ineiits  en  plâtre.  Pour  lui,  c'était  une  criminelle  hérésie, 
une  impossibilité.  Rien  n'était  plus  vrai  pourtant.  Je  sais 
bien  que  les  auteurs  latins  sont  très-sobres  de  détails  sur 
le  plâtre  et  son  emploi  en  architecture,  et  que  c'est  à  peine 
si  l'on  trouve  quelques  passages  sur  cette  matière  ;  mais 
enfin  l'on  en  trouve,  et  Gassiodore  appelle  même  gypso- 
plastes  les  ouvriers  qui  moulaient  le  plâtre,  gypsum. 
(Varr.,  Epist.,  XIL,  7.)  —  Juvénal  (II,  4..)  donne  le  nom 
de  gypsum  à  l'objet  moulé  lui-même.  (Voy.  Ant.  Rich., 
ùict.  des  Antiq.  rom.)  Pline  est  plus  explicite  et  moins 
avare  de  détails  ;  il  indique  la  nature  du  plâtre,  sa  prépa- 
ration et  les  usages  auxquels  on  l'employait.  {Hist.  nat. 
36,  c.  24.) 

Les  moulures  trouvées  au  Blanc  sont  donc  bien  en 
plâtre.  Elles  ornaient  sans  doute  un  de  ces  plafonds  à 
compartiments  que  les  Latins  appelaient  camara  ou  caméra 
quand  ils  étaient  faits  de  bois  ou  de  plâtre,  par  opposition 
avec  une  voûte  en  briquetage  ou  en  maçonnerie  :  fornix. 
(Vitruve.  VII,  3.  —  Propert.,  III,  2,  10.  —  Rich.,  Antiq.) 

C'est  dans  l'un  des  angles  de  cet  appartement  qu'on 
mit  à  découvert  le  premier  des  quatre  chapiteaux  dont 
nous  parlerons  plus  tard  ;  on  y  trouva  aussi  la  base  en 
pierre  d'un  petit  piédestal,  destiné  probablement  à  sup- 
porter une  statue. 

A  gauche  des  bâtiments  que  nous  venons  d'indiquer, 
d'autres  constructions  s'étendent  de  l'est  à  l'ouest  sur  une 
longueur  de  plus  de  40  mètres,  avec  une  largeur  de 
14  mètres  à  peu  près,  encore  n'a-t-on  pu  en  déblayer 
qu'une  faible  partie;  tous  les  jours,  dans  les  jardins  adja- 
cents, on  rencontre  des  débris  de  nouvelles  murailles. 

De  la  salle  n"  1,  chauffée  par  l'hypocauste,  on  accède, 
par  une  porte  de  I  mètre  de  long,  dans  de  vastes  couloirs 
qui  environnent  de  tous  côtés  une  autre  salle  n"  4,  de 


PlâTi    de    la    Villa    T^OTname 
Irouvée  au  Blanc 
(Fouilles^   dej37ûoil87J,l 


fourneau  ^idêlHypocausle 


Yvs 


A^iila  PioTuaine    aux    environs  de  Douadic 
20. 


Le  Roc   delà   Grave. 


nM.OmUaiJ.roi.n 


XL"   SESSION,    A    r.IIATEAUHOUX.  113 

5  mètres  sur  chaque  lace,  et  percée  d'une  porte  do  2"'  Oa. 
C'était  là  sans  doute  l'atrium,  la  première  et  la  plus  con- 
sidérable partie  d'une  maison  romaine.  Elle  était  ordinai- 
rement entourée  de  galeries  supportées  par  des  colonnes  ; 
c'est  là  que  se  réunissait  la  famille,  qu'on  recevait  les 
visites,  qu'on  exposait  les  statues  des  ancêtres  et  les 
images  des  dieux  domestiques.  Ce  qui  nous  confirme  dans 
cette  supposition  c'est  que  l'on  a  trouvé  deux  beaux 
chapiteaux  dans  l'un  des  angles  de  cet  appartement. 
Un  quatrième  chapiteau  a  été  découvert  plus  tard 
dans  une  autre  partie  des  ruines.  Ces  quatre  membres 
d'architecture  seraient  la  preuve  que  l'atrium  en  question 
était  de  ceux  qu'on  appelle  tetmstyle,  parce  que  le  toit 
en  était  supporté  par  quatre  colonnes,  une  à  chaque  angle 
de  l'impluvium. 

En  avant  de  cette  salle  n"  4,  se  trouvaient  deux  autres 
appartements;  l'un,  n"  5,  de  4  mètres  de  large,  sur  7  mè- 
tres de  long,  a  son  angle  inférieur,  sur  une  étendue  de 
4  mètres  carrés  et  de  2  mètres  de  profondeur,  tout  rempli 
de  grosses  pierres  perdues,  mobiles,  mélangées  de  cendre 
et  de  charbon.  Le  reste  du  sol  de  l'appartement  était  car- 
relé en  tuiles  ;  l'autre,  plus  à  gauche,  n'a  pu  faire  l'objet 
d'aucune  remarque.  C'est  là  que  se  sont  arrêtées  les 
fouilles  de  1870.  Le  propriétaire,  qui  avait  hâte  de  jouir 
de  son  terrain,  s'est  empressé  de  faire  détruire  toutes  ces 
murailles. 

Au  commencement  de  1873,  un  second  propriétaire,  en 
établissant  un  jardin,  a  retrouvé  le  prolongement  de  notre 
villa,  et  la  suite  des  mêmes  constructions.  Cette  nouvelle 
découverte  n'offre  pas  d'autre  intérêt  qu'une  chambre, 
n»  G,  dans  laquelle  on  a  rencontré  quelques  fragments  de 
mosaïques  détachés  du  sol,  et  composés  de  cubes  de  1  cen- 
timètre de  côté,  noirs,  rouges  et  blancs. 

XL"  SESSION.  8 


il4       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE, 

Il  nous  reste  à  décrire  les  chapiteaux  dont  il  a  été 
question  déjà  :  ils  sont  au  nombre  de  quatre.  Leur  tail- 
loir mesure  Clcenlimèlres  sur  leur  face;  le  fût,  30  centi- 
mètres de  diamètre  ;  du  sommet  du  tailloir  en  bas  de 
l'astragale,  on  compte  M  centimètres.  Une  portion  de 
fût,  de  32  centimètres,  est  adhérente  au  chapiteau.  Les 
moulures  sont  fort  simples  ;  ce  sont  deux  gorges  un  peu 
plates,  séparées  l'une  de  l'autre,  ainsi  que  du  tailloir 
et  de   la  frise,   par  deux  baguettes.  La  gorge  la   plus 


rapprochée  du  tailloir  est  couverte  de  larges  fleu- 
rons, en  demi-cercle;  deux  des  frises  sont  ornées  de  petits 
caissons  en  carré,  taillés  en  creux;  les  deux  autres, 
d'espèces  d'amandes  inclinées  sur  le  côté  ;  deux  des  fûts 
sont  chargés  de  feuillages  imbriqués,  la  pointe  tournée 


XL*   SESSION,    A    CJIATEAUROUX.  M  5 

en  bas,  comme  dans  un  chapilcau  trouvé  à  l'érigucux  et 
figuré  dans  V Archéologie  gallo-romaine  de  M.  de  Gau- 
mont,  p.  88,  et  sur  les  débris  de  la  colonne  de  Champlieu. 
{Cong.  archéolog.  de  France,  1850,  p.  274.)  Dans  les 
autres  fûts ,  les  feuillages  sont  relevés  vers  le  haut , 
comme  sur  les  colonnes  de  la  porte  de  Lyon,  à  Bourges. 
[Arch.  gallo-rom.,  p.  88.) 

Ces  chapiteaux  sont  de  la  même  famille  et  presque  de  la 
même  mesure  que  le  chapiteau  célèbre  de  Neris,  conservé 
au  musée  de  Moulins.  [Bull,  mon.,  t.  XXII,  p.  67,  et 
t.  XXXV,  p.  661.)  Ils  ont  les  mêmes  profils,  à  une  mou- 
lure près,  que  ceux  de  Saincaize,  déposés  au  musée  de 
Nevers.  {Bull,  mon.,  t.  XXXV,  p.  659.)  Nous  cherchions,  il 
y  a  un  instant,  à  quelle  époque  pouvait  bien  remonter  la 
ville  du  Blanc.  Ces  débris  de  colonnes  vont  nous  fournir 
de  précieux  renseignements.  Nous  avons  dit  qu'ils  étaient 
identiques  aux  colonnes  et  aux  chapiteaux  trouvés  à 
Saincaise  en  d861  ;  or  les  ruines  de  Saincaise  recouvraient 
deux  bustes  d'Adrien  (117-d38),  et  de  Marc-Aurèle  (161- 
180)  ;  si  nous  rapprochons  ces  dates  de  l'époque  de  la 
construction  de  la  voie  de  Poitiers  à  Argenton,  que  nous 
a  donnée  la  borne  de  Ghauvigny,  l'année  140,  nous  serons 
autorisé  à  penser  que  la  ville  du  Blanc  était  déjà  floris- 
sante vers  le  milieu  du  ii''  siècle. 


2°  Villa  gallo-romaine  près  de  Douadic. 

A  2  kilomètres  à  peu  près  de  Douadic,  à  gauche  et  près 
du  chemin  de  Lureuil,  s'étend  une  vaste  plaine  nommée 
les  Petits-Cimetières.  De  mémoire  d'homme  ou  d'après  la 
tradition,  jamais  l'on  a  vu  enterrer  personne  en  ce  lieu  ; 
ce  nom  doit  donc  être  ancien.  De  tout  temps,  en  cultivant 


H6  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

la  terre,  on  a  trouvé  dans  ces  champs  de  nombreuses  et 
longues  murailles  ;  les  villages  de  la  Jarrige,  de  Brillebaut, 
les  domaines  de  la  Grave  et  de  la  Cave,  les  ont  exploitées  pour 
leurs  constructions  ou  pour  l'entretien  des  chemins  ;  et 
cependant  encore  aujourd'hui,  au  mois  de  juin,  quand 
le  seigle  ou  le  blé  commencent  à  monter,  on  remarque  de 
vastes  lignes  où  la  plante  est  moins  verte,  moins  vigou- 
reuse et  plus  basse  ;  c'est  là  encore  que  se  trouvent  des 
murailles  ou,  à  peu  de  profondeur  du  sol,  le  pavé  des 
appartements.  Pendant  deux  hivers,  dans  deux  héritages 
laissés  libres  par  les  cultures,  j'ai  tenté  des  fouilles,  et 
de  nombreuses  fondations  ont  été  mises  à  découvert. 
Ce  sont  trois  longues  murailles  de  26  mètres  de  long, 
formant  un  rectangle  de  plus  de  8  mètres  de  large,  et  un 
couloir  de  ^""O.  Deux  nouvelles  murailles  placées  trans- 
versalement dans  l'intérieur,  à  droite,  forment  deux 
autres  couloirs  de  2'"10  et  2"70.  L'angle,  de  ce  même 
côté,  est  flanqué  d'un  appartement  de  4"20  sur  i™40.  Au 
milieu  des  décombres  de  toute  nature,  deux  squelettes 
ont  été  trouvés,  reposant  à  nu  sur  le  sol  même  d'un 
appartement,  recouvert  d'une  couche  de  mortier  blanc,  fin 
et  poli.  Outre  les  débris  de  vases  en  terre  rouge  à  feuillages, 
de  poterie  jaune,  noire,  j'ai  rencontré  deux  vases  entiers, 
noirs,  sur  l'un  desquels  on  a  tracé  à  la  pointe  un  M  ma- 
juscule. JNIes  ouvriers  m'ont  remis  aussi  un  cep  d'esclave, 
ou  grand  anneau  de  fer,  de  7  centimètres  1/2  de  diamètre. 
Sa  face  extérieure  est  munie  d'une  nervure  en  saillie  d'un 
demi-centimètre.  Sur  l'oxyde  qui  recouvre  tout  cet  engin, 
on  remarque  de  légères  stries,  comme  si  un  morceau  de 
bois  l'eût  enveloppé,  et,  en  se  consommant,{yeût  imprimé 
ses  fibres.  La  même  particularité  s'est  rencontrée  sur 
d'autres  anneaux  du  même  genre.  Enhn  l'on  a  trouvé 
encore  deux    grandes    perles  en  verre  émaillé,   l'une 


.\L'     SESSION,    A    CHATEAUUOUX.  iil 

jaune  foncé  el  brun,  l'autre  jaune  pâle  et  bleu;  une  perle 
en  plomb,  une  autre  en  ambre  et  une  dernière  en  verre 


transparent  rose,  avec  des  nervures  blanchâtres.  Des 
perles  de  ce  genre  ont  été  signalées  à  Jublains,  à  Lisieux, 
à  Tourly,  canton  de  Ghaumont,  et  à  Gugny  (Aisne). 
(Voy.  Bull,  monwn.,  t.  XXXII,  p.  619-630,  et  t.  XXVII, 
p.  351  et  374.) 

Dans  beaucoup  d'autres  lieux  de  Douadic,  le  long  du 
ruisseau  du  Suin,  dans  le  bourg  même,  on  rencontre  fré- 
quemment des  débris  de  tuiles,  des  restes  de  murs,  mais 
ces  ruines  ont  été  tellement  bouleversées,  qu'il  n'est 
jamais  possible  de  reconnaître  leur  forme  ou  leur  desti- 
nation primitives. 


3°  Monuments  funéraires. 

Les  monuments  funéraires  de  l'époque  d'incinération 
sont  fort  rares  dans  nos  contrées.  Jusqu'à  ce  moment,  on 
n'a  encore  trouvé  que  deux  puits  à  sépulture  dans  cette 
portion  de  l'Indre  :    le  premier  à  Méobec,    le  second  à 


IIS  CO.NGI'.KS    ARCHÉOLOGIQUE    DE    FllA.NClE. 

Fauliiay.  Tous  deux  ont  été  fort  mal  explorés;  on  y  a 
remarqué  cependant  de  nombreux  restes  de  charbon  et 
d'ossements  calcinés,  des  fragments  d'os  de  gros  animaux, 
et  des  vases  en  terre,  plus  ou  moins  grossiers.  L'un  de 
ceux  qui  proviennent  de  Méobec,  et  que  je  possède,  est  en 
terre  brune,  très-cuite  et  très-dure  ;  il  a  la  forme  d'une 
petite  cruche  avec  une  seule  anse  et  un  appendice  pour 
verser  l'eau,  au  sommet  de  la  panse.  Sa  hauteur  est  de 
46  centimètres,  et  son  diamètre  de 9. 

Les  boites  en  pierre  ne  sont  guère  plus  communes, 
mais  on  en  trouve  un  certain  nombre  aux  environs  de 
Saint-Benoit-du-Saull.  J'en  ai   vu  deux,   à   la  Chàtre- 
l'Anglin  et  à  Prissac.  Ce  sont  de  gros  blocs  cylindriques 
percés  à  leur  sommet  d'un  trou  rond  d'environ  15  centi- 
mètres, destiné  à  recevoir  l'urne  ou  le  vase  contenant  les 
débris  du  bûcher  ;    les  couvercles   manquaient.   M.   le 
docteur  deBeaufort  a  fait  sur  ces  sortes  de  sépultures  un 
travail  savant  et  complet,  inséré  dans  les  Mémoires  des 
Antiquaires  de  l'Ouest,  tome  XIX.  Je  n'aurai  pas  l'impru- 
dence, après  lui,  de  m'arrêter  sur  ce  sujet.  Je  me  conten- 
terai d'ajouter  qu'il  y  a  dix-sept  ans,  j'ai  trouvé  de  nom- 
breuses boîtes  en  tout  pareilles  à  celles-ci,  entre  Saulzay- 
le-Potier  et  Faverdines   (Cher).    Les   couvercles  étaient 
tantôt  une  dalle  plate  arrondie  dans  son  pourtour,  tantôt 
une  pyramide  un  peu  plus  large  que  haute.  Le  monu- 
ment funéraire  le  plus  remarquable  du  département  de 
l'Indre  et  du  Berry,  se  trouve  dans  la  commune  de  Sau- 
zelles,  à  une  lieue  et  demie  à  peu  près  du  Blanc.  Il  est 
placé  au  milieu  du  coteau  abrupt  qui  domine  la  Creuse, 
entre  le  château  de  Rochefort  et   le  moulin  de  Mijeau,  en 
face   du   village   de  Bénavent  et  de  la  voie  romaine  de 
Tours  au  Blanc.   C'est  un  vaste  rocher  dont  on  a  taillé 
perpendiculairement  la  face.  Quatre  pilastres  cannelés, 


XL*"   SESSION,    A    ClIATEAUROUX.  H9 

accostés  vers  lour  tiers  supérieur  de  consoles,  sur  les- 
([uclles  reposent  des  cintres,  aussi  cannelés,  roruicnt  trois 
niches  peu  profondes.  Ciiacune  de  ces  niches  est  occupée 
par  une  statue  en  ronde-hosse,  d'un  fort  relief.  La  pre- 
mière statue,  à  gauche,  couverte  d'une  longue  tunique 
qui  descend  jusqu'aux  pieds,  est  tellement  délitée,  qu'il  est 
impossible  de  lui  donner  la  moindre  attribution.  La 
seconde  représente  un  homme,  nu-tête,  vêtu  d'un  habit 
plus  court,  qui  laisse  les  jambes  à  découvert  ;  il  porte 
dans  ses  bras  un  animal  qui  parait  être  un  chien.  Le  troi- 
sième personnage  est  une  femme.  Ses  cheveux  sont  roulés 
en  large  bourrelet  autour  de  sa  tète  ;  une  longue  robe 
pend  jusqu'à  ses  pieds,  et  de  la  main  droite  elle  tient 
devant  elle  un  vase  en  forme  d'aiguière.  A  côté  d'elle,  une 
petite  stèle  supporte  un  chien  assis. 

Au-dessus  de  ces  trois  niches  règne  une  frise  étroite, 
aussi  cannelée  en  long;  plus  haut  enfin,  un  peu  en 
retraite,  une  inscription  sert  de  couronnement.  Malheu- 
reusement les  lettres,  belles  capitales  romaines,  sont  telle- 
ment rongées  par  le  temps  et  la  mousse,  qu'il  est  bien 
difficile  de  pouvoir  trouver  un  sens  à  ces  lignes.  On  lit 
facilement  pourtant  ces  mots  :  DIS  MANIB...  MONIMEN- 
TVM...  VXORL..,  qui  semblent  indiquer  que  le  monu- 
ment a  été  consacré  aux  dieux  mânes,  et  à  la  mémoire 
d'une  épouse  regrettée.  En  bas  une  large  marche,  ménagée 
dans  la  pierre,  sert  comme  de  base  à  toute  cette  compo- 
sition, qui  mesure  près  de  4  mètres  de  large,  sur  3  mètres 
de  haut.  Ce  rocher  est  encadré  au  milieu  d'un  fouillis  de 
lierres,  de  mousses,  d'arbustes  et  de  verdure,  d'un  effet 
superbe,  et  qui  offrent  un  vigoureux  contraste,  par  leurs 
masses  sombres,   avec  la  teinte  gris  pâle  de  la  pierre. 


I'20  CO.MiUKS   AIUIHÉOI.OGIQUE   HE    FRANCE. 

A"  Nomenclature  des  lieux  oh  il  a  été  trouvé  des  débris 
gallo-romains,  ou  dont  les  noms  se  rapportent  à  l'occu- 
pation romaine. 

Canton  de  Délabre.  —  Lignac  (Liniacura),  la  demeure 
la  villa  de  Linus  ;  Prissac  (Prisciacum),  la  villa  de  Pris- 
cus  ;  Jovard  (Jovis  ara),  débris  de  murailles,  de  tuiles, 
monnaies  romaines. 

Canton  du  Blanc.  —  Le  Blanc  (Oblincum).  Outre  les 
ruines  gallo-romaines  et  des  vases  de  différentes  sortes, 
que  nous  avons  déjà  fait  connaître,  nous    devons  citer 
encore,  le  long  de  la  voie  romaine  de  Poitiers  à  Argen ton, 
les  noms  des  localités  suivantes  :  la  Villerie  (villa  villa- 
ria);  les  Chezeaux  (casa  casalia);  nous  retrouvons  ce  der- 
nier nom  auprès  de  Saint-Gaultier  et  de  Douadic  :  Avant 
(adventus),  l'arrivée;  et  du  côté  opposé  du  Blanc,  sur  le 
chemin  de  Tours  :  Benavent  (bonus  adventus),  l'heureuse 
arrivée.  —  Commune  de  Giron  :  Châtre  (castra  castrum)  ; 
sur  le  domaine  des  Bois,  restes  considérables  de  murailles, 
tuiles   courbes  et  à  rebords,  chaînes  et  soc  de    charrue 
trouvés  en  1865;  Pouligny-Saint-Pierre  (Pauliniacum), 
villa  de  Paulinus.  —  Commune  de  Douadic  :  la  grande 
villa  décrite  précédemment,  ruines  gallo-romaines  dans 
les  jardins  du  bourg,  à  Salvert,  à  la  Varenne  et  au 
Fresne.  —  Commune  de  Rosnay  :   tuiles  à  rebords    et 
murailles  au  Boucher.  —   Commune  d'Ingrandes   :   à 
Beauregard,  vaste  camp  romain  avec  fossés  et  cavalier.  •- 
Commune  de  Ruffcc-lc-Ghàteau  :  près  de  la  voie  de  Poi- 
tiers  à  Argenton,    tumulus;  il  y   avait  là  aussi,    sans 
doute,  un  castrum  antique,  qui  aura  donné  son  nom  au 
chef-lieu  de  la  commune  ;  auprès  du  bourg,  on  remarque 


XL'    SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  121 

dans  le  lit  de  la  Creuse  les  débris  d'un  pont,  que  quel([ues 
antiquaires  font  remonter  jusqu'à  l'occupation  romaine, 
et  qui  aurait  fait,  dans  ce  cas,  communiquer  la  voie  au 
castrum  en  question.  Dans  des  chartes  du  xir  siècle, 
RufTec  est  appelé  Castrum  de  Roffec,  Roffiacum  (castrum). 
CaiNTON  de  Mézières-en-Brenne.  —  Mézières  (maceriœ); 
Subtray  (sub  strata  ou  strada).  —  Commune  d'Azay-le- 
Ferron:  auprès  du  domaine  de  Saint-Julien,  vestiges  de 
la  voie  d'Estrées  à  la  Roche-Posay,  murailles,  amas  de 
tuiles,  débris  de  poteries.  —  Commune  de  Saint-Michel- 
en-Brenne  :  dans  le  bourg,  un  grand  tumulus  ;  quelques 
monnaies  romaines.  —  [Commune  de  Villiers  (villaria 
villa)  :  restes  de  la  voie  romaine  à  la  Roche-Posay. 

Canton  de  Saint-Benoit-du-Sault.  —  Chaillac  (caïa- 
cum),  villa.de  Caius:  la  voie  d'Argenton  à  Limoges  passe 
auprès  de  ce  bourg  ;  non  loin  de  là  se  trouve  le  Cluzeau, 
villa  de  Glausis  ou  Closis,  aussi  le  long  de  la  même  voie, 
la  Chàtre-l'Anglin,  castra. 

Canton  de  Saint-Gaultier.  —  Sur  la  voie  de  Poitiers 
à  Argenton  :  les  Chezeaux  (casalia),  le  Cluzeau,  villa  de 
Clausis;  Ghitray  (citra  viam),  ce  bourg  est  à  quelque 
distance  de  la  voie  ;  vis-à-vis  de  Ghitray,  et  touchant  à  la 
voie  romaine,  un  camp  bien  conservé,  au  Tertre,  où  l'on  a 
trouvé  quelques  monnaies. 

Canton  de  Tournon.  —  Martizay  (martiziacum),  quel- 
ques auteurs  ont  écrit  :  martis  aedes  (?).  Des  poteries  anti- 
ques, des  urnes  en  verre,  des  fragments  de  bronze  et  de 
fer  ont  été  trouvés  près  de  Martizay,  en  4859,  en  un  lieu 
que  la  tradition  locale  appelle  la  Cité  ;  Preuilly-la-Ville, 
villa  de  Pruliaco,  près  du  chemin  romain  de  Tours  au 
Blanc.  Ce  nom  de  Ville,  accolé  à  celui  de  Preuilly,  ne 
peut  signifier  autre  chose  que  villa,  attendu  que  ce  bourg 
ne  se  compose  que  de  cinq  à  six  maisons  ;   monnaies 


122  CONGRÈS    AllCIil-;OLO(iloUK    KE    FIIANCE. 

romaines  d'Auguste  et  d'Aiitonin;  Mérigny  (laariniacum), 
villa  de  Marinus,  niormaics  de  Néron, 


o"  Monnaies  romaines  trouvées  dans  les  environs  du  Blanc. 

\°  Auguste.  29  ans  av.  J.-C.  li  ap.  J.-G.  —  Tête  laurée 
à  droite  ;  légende  rétrograde  se  lisant  de  droite  à  gauche  : 
Divvs  AVGvsTVS.  —  ^  Femme  debout  à  droite  tenant  une 
lyre  ;  de  chaque  côté  imp.-xii  ;  en  bas  :  act.  Argent  ; 
poids  3  gr.  70  cent. 

2°  Tibère.  14-37  av.  J.-C.  —  Tête  laurée  à  droite. 
Légende  rétrograde  :  ti  caesar  divi  avg  f  avgvstys.  — 
î^  Femme  assise  tenant  une  lance  et  un  rameau  d'olivier. 
Légende  rétrograde  :  fax  maxima.  Cette  pièce  est  fourrée, 
et  de  plus  elle  est  creuse.  Elle  est  formée  de  deux  plaques 
de  cuivre  revêtues  de  feuilles  d'argent  soudées  sur  la 
tranche.  Un  trou  en  bas  du  col  de  l'empereur  dévoile  cette 
fourberie.  Poids  :  2  gr.  89  cent.  —  Trouvée  à  Douadic, 
en  1870. 

3°  Néron.  54-68  ap.  J.-C.  —  Tête  laurée  à  droite.  Lé- 
gende :  NERO  CAESAR  AVGVSTVS.  —  ^  Jupilcr  assis  à  gau- 
che tenant  une  lance  et  un  grand  sceptre.  Légende  :  ivppi- 
TEu  cvsTOS.  Magnifique  pièce  en  or;  poids  :  7  gr.  — 
Trouvée  à  Fongombaud,  en  1871. 

4°  Gordien  le  Jeune.  238-244  ap.  J.-C.  —  Tête  cou- 
ronnée à  droite.  Légende  :  iMr.  gordianys  pivs  fel 
AVG.  —  i^  Femme  debout,  tenant  un  bâton  et  une  cou- 
ronne. Légende  :  Laetitia  avg.  Argent  ;  poids  :  5  gr. 
10  cent. 

o"  Constantin  II.  337-340  ap.  J.-C.  —  Tête  diadcméc  à 
droite.  Légende  :  constantinvs  avg.  —  i^  Édifice  carré, 
porte  ouverte,  supportant  (juatrc  tentes;  au-dessus  une 


XI/    SESSION,    A    GIIATEAUROUX.  12'} 

étoile  à  huil.  rais.  Légende  :  yirtvs  avgg;  en  bas  :  aius 
(arelates,  Arles,  où  Constantin  naquit  en  310);  dans  le 
champ,  à  droite  et  à  gauche  ;  s.  v.  Bronze. 

6°  Le  même.  —  Tête  laurée  à  droite,  habit  militaire. 
Légende  ;  constantinvs  pf  avg.  —  i^  Autel  supportant 
un  globe  accompagné  de  trois  étoiles.  Légende  :  beata 
TRANQViLLiTAS  ;  dans  le  champ,  à  droite  et  à  gauche  : 
G.  R.  ;  sur  la  face  de  l'autel  :  vous  xx  ;  en  bas  :  plg. 
Moyen  bronze. 

7°  Le  même.  —  Buste,  tête  laurée  à  droite.  Légende  : 
CONSTANTINVS  ivN  NOB  G.  —  i^  Un  étendard  debout;  de 
chaque  côté  un  soldat  armé.  Légende  :  gloria  exercitvs  ; 
en  bas  :  gonso.  Petit  bronze. 

8°  Magnence.  350-353.  —  Buste,  tête  à  droite  avec  l'ha- 
bit militaire.  Légende  :  dn  magnentivs  p.;  dans  le  champ 
à  gauche  :  a.  —  ^  Dans  un  cercle,  deux  victoires  couron- 
nées, tenant  d'une  main  un  cercle  appuyé  sur  un  support  ; 
dans  le  cercle,   chaque  mot  superposé  :  vot  v  mvlt  x. 

Légende  :  vigtoria  ed vgetga;   en   dessous  :    rpls. 

Moyen  bronze. 

M.  de  Beaufort  cite,  comme  très-importantes,  certaines 
constructions  militaires  romaines,  élevées  entre  l'Indre  et 
la  Haute-Vienne  ;  c'est  une  série  de  tours  très-rapprochées 
qui  sont  toutes  du  même  type,  carrées  de  forme  et  aux 
murailles  épaisses.  A  Mondoy,  où  il  a  fait  des  fouilles,  M. 
de  Beaufort  a  trouvé  un  chapiteau  romain.  Ces  petites 
forteresses  sont  intéressantes  au  point  de  vue  de  la  manière 
dont  les  Romains  défendaient  leurs  voies  dans  les  passages 
difficiles  et  sur  les  limites  des  peuples  conquis,  lorsque, 
ainsi  qu'à  la  station  de  Mondoy,  les  peuplades  étaient 
différentes  de  mœurs  et  de  caractère;  cette  différence 
existe  encore.    Enfui    les   monnaies    qu'on    a  trouvées 


hii  CONGRÈS   AHCHÉOLOGIQUE    1»E    FllANCE. 

dans  ces  tours   ou  aux   environs   portent  le  type  de  la 
Xir  légion. 

La  question  étant  épuisée,  la  séance  est   levée  à  dix 
heures  et  demie. 


^'    SÉANCE    DU     \\    JUIN    1873. 

PRÉSIDENCE     DE     M.     LEDAIN, 
Inspecteur  des  Deux-Scvres. 

La  troisième  séance  du  Congrès  a  été  ouverte  le 
41  juin,   à  deux  heures  trente  minutes  du  soir. 

Siègent  au  bureau  :  MM.  Ravisy,  ingénieur  en  chef  ; 
des  Gouttes,  adjoint,  et  Buhot  de  Kersers. 

M.  l'abbé  Bordé  est  désigné  pour  remplir  les  fonctions 
de  secrétaire. 

Les  procès-verbaux  des  deux  séances  précédentes  sont 
lus  et  approuvés  sans  o])servation. 

M.  Joseph  de  Baye,  sur  l'invitation  de  M.  de  Cougny, 
directeur  de  la  Société,  communique  un  rapport  sur  les 
remarquables  découvertes  préhistoriques  qu'il  a  faites 
dans  le  département  delà  Marne. 

Grottes  de  la  Marne. 

Messieurs, 

Dans  vos  précédentes  réunions,  vous  avez  accueilli  des 
communications  relatives  aux  temps  préhistoriques.  Il 
faut  bien  le  reconnaître,  les  questions  traitées  devant  vous 


XL"   SESSION,    A   GIIATEAUROUX.  125 

et  soumises  à  votre  jugement  ne  rentraient  qu'impar- 
faitement dans  le  cadre  de  vos  occupations.  En  outre,  la 
plupart  des  laits  qui  vous  étaient  signalés,  évidemment 
digues  de  votre  attention,  n'étaient  cependant  pas  nom- 
breux et  se  présentaient  isolés  comme  des  jets  lumineux 
au  milieu  de  l'obscurité. 

J'ai  l'honneur  d'appeler  aujourd'hui  votre  attention 
éclairée  sur  des  monuments  préhistoriques  qui  rentrent 
complètement  dans  le  domaine  de  vos  études.  Il  s'agit  de 
travaux  souterrains  où  l'art  semble  s'essayer,  où  l'on  peut 
en  eflet  constater  les  premiers  elibrts  des  habitants  primi- 
tifs de  la  Champagne.  C'est,  en  un  mot,  de  l'archéologie 
monumentale  préhistorique.  Il  faut  aussi  vous  le  dire,  les 
faits  sont  nombreux,  et  rattachés  de  manière  à  constituer 
un  ensemble,  et  ils  sont  permanents.  Vous  n'êtes  pas,  dans 
cette  circonstance,  réduits  à  former  vos  jugements  sur  les 
observations  isolées  d'un  explorateur  heureux,  qui  a  relevé 
les  faits  en  les  modifiant  pour  les  observer;  mais  vous 
pouvez  étudier  vous-mêmes,  juger  et  concevoir  de  person- 
nelles impressions. 

Dans  un  rayon  de  6  kilomètres  environ,  sur  les  bords 
de  la  vallée  du  Petit-Morin,  département  de  la  Marne, 
j'ai  pu,  par  une  suite  fort  heureuse  de  découvertes, 
explorer  et  examiner  plus  de  soixante-dix  grottes  apparte- 
nant à  l'époque  de  la  pierre  polie;  jamais  l'âge  de  la 
pierre  ne  s'était  si  puissamment  révélé.  Il  ne  s'agit  plus 
d'un  objet  unique,  d'une  grotte  solitaire,  ce  sont  des 
groupes  qui  s'échelonnent  et  se  succèdent  dans  le  pays  ; 
c'est  une  véritable  région  préhistorique.  Les  savants  qui 
sont  venus  la  visiter  ont  été  frappés  d'étonnement  ;  jamais 
il  ne  leur  avait  été  donné  de  rencontrer  des  stations  aussi 
considérables  et  aussi  abondantes.  Ces  puissantes  res- 
sources offertes  aux  savants,  imposaient  l'obligation  de 


I2G       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

signaler  la  grande  portée  de  nos  stalionnements  préhisto- 
riques, aiiu  qu'ils  fussent  des  faits  bien  connus.  Un 
homme  d'une  grande  célébrité  disait  naguère  :  «  C'est 
chez  vous  que  les  savants  iront  étudier  l'intéressante 
question  des  grottes  sépulcrales  de  Tépoque  néolithique.» 

L'importance  numérique  des  grottes  de  la  Marne,  qui 
attestent  un  séjour  prolongé,  permanent,  il  y  a  lieu  de  le 
croire,  n'est  pas  la  raison  principale  qui  signale  ces 
grottes  à  l'attention  des  archéologues.  Ces  hypogées 
affectent  dans  leurs  formes  une  variété  pleine  d'intérêt  ; 
l'art  s'y  révèle  d'une  manière  plus  ou  moins  accentuée, 
mais  toujours  les  entrées,  les  étagères,  les  voûtes,  les 
séparations  ménagées,  accusent  des  efforts  réfléchis,  une 
pensée,  un  plan  arrêté;  ce  n'est  pas  un  trou  informe  et 
sans  dessein. 

Dans  un  certain  nombre  de  grottes,  les  sculptures  qui 
oruent  leur  parois,  tranchent  non-seulement  avec  toute 
l'autorité  d'un  fait  la  question  de  l'art  à  l'époque  de  la 
pierre  polie,  mais  dans  leur  naïve  simplicité,  elles  offrent 
d'intéressants  spécimens  et  inspirent  un  grand  intérêt  à 
l'observateur.  Dans  un  Congrès  composé  de  savants  spé- 
cialement appliqués  aux  études  préhistoriques  ,  tenu 
récemment  à  Bruxelles,  on  a  cru  pouvoir  avancer  cette 
proposition  :  «  que  l'art  avait  subi  une  éclipse  à  l'époque 
de  la  pierre  polie,  où  il  était  absolument  inconnu.  »  Des 
faits,  et  des  faits  multiples,  affirment  nettement  le  con- 
traire. Ces  sculptures  sont  rares,  uniques  même,  mais  elles 
n'en  revêtent  pas  moins  un  caractère  plein  de  significa- 
tion; elles  n'ont  rien  de  commun  avec  celles  deGavr'inis, 
qui  sont  en  creux  et  représentent  à  peu  près  exclusive- 
ment des  haches.  Les  sculptures  des  grottes  de  la  Marne 
sont  en  relief,  et  varient  dans  leurs  sujets.  Elles  repré- 
sentent :  4"  des  haches  dans  leurs  gaines,  et  pourvues 


XL"   SESSION,   A   CHATEAUROUX.  427 

de  manches.  Ces  objets  sont  reproduits  dans  des  formes  et 
des  positions  variées.  Dans  deux  circonstances,  l'artiste  a 
coloré  en  noir  la  partie  qui  représente  le  silex;  2°  un 
instrument  d'un  usage  inconnu,  et  qui  n'a  point  été 
encore  observé;  3"  enfin,  des  sujets  où  la  figure  humaine 
se  dessine  ,  et  qui  paraissent  être  des  divinités  ;  ces 
sujets  sont  évidemment  les  plus  intéressants.  L'étude  et  la 
comparaison  de  ces  sculptures  paraissent  devoir  autoriser 
à  leur  assigner  une  origine  orientale.  La  description  de 
ces  sculptures  m'entraînerait  dans  de  trop  longs  détails  ; 
je  la  réserve  pour  le  Bulletin  monumental.  Je  me  borne 
aujourd'hui  à  mettre  sous  vos  yeux  les  principaux  dessins 
de  ces  sculptures,  et  à  signaler  simplement  à  votre  atten- 
tion les  monuments  préhistoriques  de  la  Marne. 

Ces  grottes,  comme  vous  le  pensez,  n'étaient  pas  vides. 
Elles  recelaient  de  nombreux  objets  en  silex  et  en  os,  qui 
probablement  représentent  l'outillage  complet  de  l'époque. 
Des  ornements  composés  de  coquillages  et  de  dents 
d'animaux  signalent  l'art  sous  un  autre  aspect.  Il  en  est 
de  même  des  divers  grains  de  collier. 

Des  questions  pendantes  depuis  longtemps,  et  résolues 
de  différentes  manières,  ont  trouvé  les  éléments  irrécu- 
sables d'une  vraie  solution  dans  les  faits  toujours  subsis- 
tants que  nous  avons  constatés.  D'abord,  la  question  du 
troglodytisme  à  l'époque  de  la  pierre  polie  est  affirmative- 
ment tranchée  par  les  grottes  elles-mêmes,  dont  le  plus 
grand  nombre  étaient  des  habitations.  L'existence  de  l'art 
à  la  même  époque  est  confirmée  par  les  sculptures, 
comme  nous  l'avons  déjà  remarqué.  L'usage  des  flèches  à 
tranchant  transversal  est  nettement  déterminé,  puisque 
nous  avons  trouvé  une  vertèbre  humaine  percée  d'une  de 
ces  flèches.  D'autres  faits  que  nous  ne  mentionnons  pas 
attestent  ce  même  emploi.  Le  grattoir  en  silex,  échancré 


•128  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

aux  deux  extrémités,  désigné  sous  le  nom  de  grattoir  du 
Graud-Pressigiiy,  se  trouve  classé  dans  l'époque  de  la 
pierre  polie,  par  sa  présence  dans  les  grottes  de  la  Marne. 
Jusqu'à  présent,  il  avait  été  exclusivement  recueilli  à  la 
surface  du  sol,  et  n'avait  pas  de  date. 

Les  monuments  dont  nous  venons  de  nous  entretenir 
ont  été  préservés  de  la  ruine,  car,  suivant  les  conseils  du 
vénérable  et  regretté  fondateur  de  la  Société  française  d'ar- 
chéologie, j'ai  fait  l'acquisition  des  terrains  où  sont  situées 
ces  grottes  et  j'ai  pris  les  mesures  nécessaires  pour  leur 
conservation . 

Eu  i875,  le  Congrès  de  la  Société  se  réunira  à  Chàlons- 
sur-Marne.  Je  suis  heureux  de  l'espérer,  nos  collègues 
réunis  visiteront  ces  rares  monuments  de  l'âge  de  la  pierre 
polie.  C'est  tout  à  la  fois  un  bonheur  et  un  honneur  pour 
moi  de  les  inviter  dès  ce  moment.  Je  leur  promets 
l'accueil  le  plus  empressé  et  la  meilleure  hospitalité.  Je 
me  hâte  d'ajouter  que  je  serai  fort  heureux  de  recevoir 
ceux  de  nos  collègues  qui  désireraient  devancer  l'époque 
du  Congrès. 

Cette  communication  inspire  un  grand  intérêt  au  Con- 
grès, ([ui  honore  le  jeune  et  zélé  archéologue  de  ses 
apjilaudissements  mérités. 

Puis  M.  le  Président  ayant  posé  la  sixième  question  du 
programme  : 

Comment  et  par  suite  de  quelles  circonstances  présu- 
mées l'introduction  du  bronze  a-t-elle  eu  lieu  dans  l'ouest 
de  l'fùirope? 

M.  de  Cessac  a  répondu  à  la  question,  avec  la  supério- 
rité bien  connue  qui  caractérise  ses  travaux;  et  le  Congrès 
a  écouté  avec  un  grand  intérêt  son  exposé  si  complet,  qui 


XL*   SESSION,    A    CIIATEAUROU.V.  12V) 

résume  savammont  le  sujet,  même  dans  ses  aperçus  les 
plus  nouveaux.  Outre  le  mérite  éininenl  d'être  le  fidèle 
écho  de  la  science,  M.  de  Gessac,  par  son  initiative  person- 
nelle, exprime  des  opinions  qui  seront  remarquées  avec 
faveur  dans  sou  mémoire. 


Le  Bronze  dans  l'ouest  de  l'Europe  aux 
temps  préhistoriques. 

L'introduction  du  bronze  dans  l'ouest  de  l'Europe  a  été 
l'objet  de  bien  des  systèmes  divers.  Les  uns  l'ont  fait  venir 
du  Nord,  les  autres  de  l'Orient,  ceux-ci  del'Étrurie,  ceux- 
là  de  l'Egypte.  M.  Desor  demande  qu'on  en  cherche  l'ori- 
gine antérieurement  aux  Phéniciens  et  aux  Carthaginois, 
chez  «  quelque  peu])le  navigateur  et  commerçant  qui 
aurait  trafiqué,  par  les  ports  de  la  Ligurie,  avec  les  peu- 
ples de  l'âge  du  bronze  des  lacs  d'Italie  »  (1).  M.  Alexandre 
Bertrand  termine  sa  remarquable  note  sur  «  deux  mors 
de  cheval,  en  bronze,  »  qu'il  vient  de  publier  dans  le 
numéro  de  mai  de  la  Retme  archéologique,  en  disant  qu'il 
faut  chercher  le  centre  important  qui  fournissait  cet  alliage 
non  en  Italie,  non  en  Grèce,  mais  au  pied  du  Caucase, 
d'où  il  rayonnait  sur  la  presqu'île  Cimbrique  (Jutland) 
par  la  vallée  du  Dnieper;  sur  les  Alpes,  par  la  vallée  du 
Danube,  suivant  des  routes  signalées,  depuis  longtemps, 
par  M.  A.  Maury  (2). 

De  mon  côté,  j'ai  avancé  dans  mon  Coup  d'œil  sur 
l'homme  préhistorique  dans  la  Creuse  ,  présenté  au  Con- 
grès de  la  Sorbonne  en  1870,  que  les  objets  en  bronze, 

(1)  Desor,  Palafites  du  lac  de  Neuchdtel,  p.  124. 

[2.)  Rei'ue  archéologique,  nouvelle  série,  t.  25,  p.  332. 

XL*^   SESSION.  9 


130       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

découverts  en  France,  étaient  le  produit  de  l'industrie 
indigène.  C'est  ce  que  je  voudrais  prouver  aujourd'hui  en 
faisant  connaître  les  circonstances  dans  lesquelles,  à  mon 
avis,  cette  fabrication  prit  naissance. 

Le  bronze  est  un  mélange  de  cuivre  et  d'étain  dont  la 
proportion  normale  est  de  90  de  cuivre  et  de  10  d'étain. 
Avant  d'aller  chercher  le  bronze  hors  de  nos  régions,  voyons 
d'abord  si  la  matière  première  n'y  existe  pas  en  quantité 
notable  et  si  elle  n'a  pas  été  exploitée  à  ces  âges  primitifs. 

Les  mines  de  cuivre  sont  nombreuses  dans  l'ouest  de 
l'Europe.  Seulement,  comme  la  plupart  ont  continué  à 
être  exploitées  jusqu'à  une  époque  relativement  assez 
moderne,  ou  le  sont  encore  de  nos  jours,  il  est  difficile 
d'indiquer  celles  qui  le  furent  aux  temps  préhistoriques. 
Je  me  bornerai  à  citer  les  suivantes  qui  toutes  portent, 
d'après  les  auteurs  (1),  des  signes  indubitables  d'exploita- 
tion romaine  et  même  antérieure. 

Le  cuivre  a  été  exploité,  à  ces  époques  antiques,  à 
Vaudrevanges,  près  Sarrelouis,  où  a  eu  lieu  récemment 
la  belle  découverte  d'objets  de  bronze,  recueillie  par 
M.  Victor  Simon,  de  Metz,  et  acquise  depuis  par  le  musée 
de  Saint-Germain  ;  à  Rozières,  près  Carmeaux  (Tarn)  ;  à 
Baigorry  (Basses-Pyrénées)  ;  au  Coffre  (Ariége)  ;  à  Chessy 
(Rhône);  à  Cabrières  (Hérault);  en  Espagne,  à  la  mon- 
tagne de  Haya  (2)  ;  à  Mélagro  (Asturies),  oh  l'on  a  décou- 
vert des  marteaux  en  quartzite  ;  à  Cerro-Muriano  (près 
Gordoue),  la  plus  antique  exploitation  de  cuivre  d'après 
Gasiano  de  Prado,  car  elle  remonterait,  suivant  lui,  à  la 
fin  de  l'époque  de  la  pierre  et  au  début  de  l'âge  du  bronze. 

(1)  Daubrée,  aperçu  historique  sur  l'exploitation  des 
métaux.  Revue  archéologique,  1868.  Tirage  à  part. 

(2)  Ibid. 


XL*   SESSION,    A   C.IIATEAUROUX.  1 -'H 

De  nombreux  marteaux  en  diorite,  des  ciseaux  et,  des 
manches  en  bois  de  cerf,  ont  été  découverts  dans  les  rési- 
dus de  cette  mine,  encore  si  riches  qu'ils  suffisent  à  ali- 
menter l'exploitation  actuelle  (1);  à  Huelva,  où  un  nombre 
considérable  de  marteaux,  également  en  diorite,  ont  été 
recueillis  (-2)  ;  à  Rio-Tinto  (Andalousie)  ;  en  Portugal,  à 
San-Domingos.  Ces  deux  dernières,  exploitées  par  les  Phé- 
niciens et  les  Carthaginois,  le  sont  encore  par  les  mineurs 
de  nos  jours  ;  en  Angleterre,  dans  le  Gornwall  (3). 

Au  surplus  personne  n'a  songé  à  regarder  le  cuivre 
comme  fourni  par  le  commerce.  Mais  il  n'en  est  pas  ainsi 
de  l'étain,  dont  on  cherche  le  lieu  d'origine  tantôt  au 
nord,  tantôt  au  sud,  et  que  l'on  considère  le  plus  souvent 
comme  le  résultat  du  trafic  des  Phéniciens. 

Cependant  ses  mines  sont  aussi  ûombreuses  que  celles 
de  cuivre  et  les  traces  antiques  d'exploitation  sont  encore 
visibles. 

De  vastes  excavations,  résultant  de  l'extraction  de 
l'élain,  existent,  sur  une  grande  étendue  de  terrain,  à 
Vaury  (Haute-Vienne)  ;  à  Montebras  (Creuse)  ;  à  la  Villeder 
(Morbihan),  à  la  Lizolles  (Allier)  [A). 

D'après  les  ingénieurs  qui  les  ont  étudiés  (5),  les  tra- 
vaux de  Montebras  remonteraient  à  l'époque  gauloise, 

(i)  Matériaux  pour  l'Histoire  primitive  de  V homme, 
2«  année,  p.  10;  Ibid.,  4«  année,  p.  234.  Dans  une  des  mines 
des  Asturies  on  a  découvert  des  haches  de  bronze.  (Daubrée, 
aperçu,  p.  1 .) 

(2)  Jbid.,  8«  année,  p.  30. 

(3)  Daubrée,  Aperrn,  p.  \,  15  et  16. 

(4)  Daubrée,  Ibid.  et  Matériaux,  5*  année,  p.  264. 

(5)  Mallard,  Bull.  soc.  des  Se.  nat.  et  arch.  de  la  Creuse, 
1859,  et  note  sur  les  Gisements  stannifères  du  Limousin  et 
de  la  Marche,  1867;  Daubrée,  opérai — 


i3"2       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

c'est-à-dire  préhistorique.  INI.  Daubrée  a  lait  remarquer 
que  rétamage  fut  découvert,  au  rapport  de  Pline,  par  les 
Bituriges,  et  que  Montrebas,  certainement,  devait  faire 
partie  de  leur  territoire.  M.  le  docteur  Chaussât,  membre 
de  la  Société  française  d'Archéologie,  a  exprimé  l'opinion 
que  la  turquoise  (calaïte  ou  callaïs  de  Pline),  fort  abon- 
dante dans  cette  raine  avait  dû  y  faire  l'objet  de  recherches 
spéciales  (1).  D'un  autre  côté  les  travaux  qui  viennent 
d'être  repris  ont  fourni  deux  monnaies  gauloises  ;  une 
monnaie  de  la  colonie  de  Niines;  plusieurs  meules  de 
moulin  à  bras  ayant  servi  à  la  trituration  du  minerai  ; 
une  grosse  perle  allongée  en  agate  rubauée  ;  des  éclats  de 
silex;  quelques  débris  de  poteries  grossières;  et,  enfin, 
dans  une  ancienne  galerie,  un  squelette  humain  écrasé 
par  la  chute  d'un  rocher,  présentant,  d'après  M.  le  docteur 
Chaussât,  divers  caractères  ostéologiques  que  n'offrent 
plus  les  squelettes  de  nos  jours,  et,  à  côté,  la  pioche  de 
fer  qui  avait  dû  lui  servir. 

A  la  Villeder,  on  a  trouvé  une  hache  en  pierre  polie, 
une  hache  en  bronze,  des  débris  de  tuiles  et  de  poteries, 
des  restes  de  conduits  qui  portaient  l'eau  aux  placers  pour 
le  lavage  des  sables  métallifères  et  des  monticules  de  sco- 
ries parsemées  de  grains  d'étain  (2j. 

Les  travaux  d'exploitation  de  Vaury  et  de  la  Lizolles  (3), 


(1)  Moissenet,  Mémoire  sur  un  nouveau  fluophosphate 
trouvé  dans  le  gite  d'étain  de  Montebras  {Creuse),  1870. 
Callais  safpldrum  imilatur  candidior  et  littoi'oso  mari 
similis,  dit  Pline,  livre  37,  ligne  43,  édition  in-fol.  de  Michaël 
Fezandat,  1543.  Cf.  Damour,  sur  le  callais,  Mat.  Ke  année, 
p.  207. 

(2)  Matériaux,  t^  année,  p.  328;  3^  année,  p.  100. 

(3)  Matériaux,  5^  année,  p.  261 . 


XI  «   SKSSION,    A    CIIATEATJKOIJX.  i:{:{ 

ctuut  i(lenti(itios  ù  ceux  do  iVIdiitehras  et  de  la  Villeder, 
doivent  nécessairetneiit  reinontor  à  la  luèiiic  période. 

Mais  à  ces  gisements  ne  se  bornent  point  les  mines 
d'étain  connues  en  France.  Ou  en  a  signalé  dans  le 
département  de  la  Corrèze  (l),-;  à  Échassières  (Puy-de- 
Dôme  {2).  M.  l'ingénieur  des  mines  Mallard  (3)  regarde 
comme  des  exploitations  de  ce  métal  les  Ibuillcs  anti([ues 
si  nombreuses  de  la  Creuse  et  de  la  Haute-Vienne,  établies 
sur  le  même  système  que  celles  de  Vaury  et  de  Monte- 
bras,  pour  lesquelles  cepe.idant  je  n'oserais  être  aussi 
afiirmatii"  que  lui.  Enfin  les  gites  de  la  Villeder  se  relient 
à  ceux  de  Pénestin  et  de  Pyriac,  dont  la  situation  à  l'em- 
bouchure de  la  Vilaine  et  de  la  Loire,  en  face  des  iles  de 
Noirmoutier,  de  Belle-Ile,  de  Houët,  etc.,  a  lait  dire  à 
M.  l'ingénieur  Simonin  que  là  peut-être  étaient  les  Gassi- 
térides  sur  lesquelles  on  a  tant  discuté  sans  se  mettre 
d'accord  (-4). 

L'Angleterre  possède  les  amas  de  Carclaze,  près  Saint- 
Austell;  du  Mont-Saint-Michel,  dans  la  baie  de  Penzance  ; 
de  Verrhy,  dans  la  même  baie;  de  Treviddenball,  paroisse 
de  Madron  ;  de  Bottalack  et  de  Grills'Buuny,  paroisse  de 
Saint-Just  (5); 

L'Allemagne,  ceux  de  Geyer,  de  Zinnwald,  d'Altem- 
berg,  de  l'Auersherh  (6)  ; 

(1)  Matériaux,  5«  année,  p.  264. 

(2)  Nogiiès,  la  Minéralogie  et  la  Minéralurgie  à  l'exposi- 
tion universelle  de  iS67. 

(3)  A^ote  sur  les  gisemenlx  stannifères  du  Limousin  et  de 
la  Marche. 

(4)  Matériaux,  "2'=  année,  p.  328. 

(5)  Daul)rée,  Mémoires  sur  les  gisements,  etc.,  des  amas 
de  minerai  d'étain,  1841 . 

{Iq]  Daubrée.  Mémoires  sur  les  gisements  des  amas  d'etain. 


134       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

L'Espagne  ceux  de  Zamora,  d'Almeira,  etc.  (i). 

Ces  mines  sont  donc  fort  nombreuses  et  répandues  par- 
tout dans  l'ouest  de  l'Europe. 

Quant  à  leur  mode  d'exploitation,  elle  devait  avoir  lieu 
par  le  procédé  encore  en  usage  eu  Saxe,  à  Geyer,  et  dans 
le  Hartz,  au  Ramelsberg,  où  l'on  allume,  le  long  des 
galeries,  des  morceaux  de  bois  pour  fissurer  la  roche  par 
une  inégalité  de  dilatation  et  de  contraction  et  la  rendre 
ainsi  plus  facile  à  abattre  (2).  Casiano  de  Prado  a  constaté 
l'emploi  de  ce  système  dans  la  mine  de  cuivre  des  Astu- 
ries,  dans  laquelle  l'excavation  avait  lieu  au  moyen  du 
feu  et  d'oulils  de  pierre  et  de  corne  de  cerf.  Les  anciennes 
mines  de  cuivre  de  l'Amérique,  au  lac  Supérieur,  étaient 
exploitées  à  l'aide  du  même  moyen.  Les  instruments  de 
pierre  étaient  enmanchés  avec  des  racines  très-résistantes 
au  lieu  de  l'être  avec  des  cornes  de  cerf,  comme  dans  les 
Asturies  (3).  Ce  système  paraît  donc  avoir  été  général  à 
l'époque  dont  je  parle. 

Les  deux  métaux  qui  entrent  dans  la  composition  du 
bronze  existaient  en  grande  abondance  dans  l'ouest  de 
l'Europe;  ils  y  furent  exploités  aux  âges  préhistoriques; 
il  n'est  donc  pas  besoin  de  faire  venir  de  pays  éloignés 
soit  les  matières  premières,  soit  les  objets  tout  fabriqués. 

Cependant  voici  la  preuve  que  l'étain  n'était  pas  trans- 
porté au  loin  pour  revenir  transformé  en  objets  de  bronze. 
D'après  M.  de  Fellenberg,  cette  supposition  est  combattue 
par  la  composition  si  différente  des  bronzes  des  divers 
peuples  ;  par  les  proportions  si  variables  entre  le  cuivre  et 

(1)  Noguès.  Loc.  cit. 

(2)  Daubrée,  Mémoires  sur  les  gisements  des  amas  d'étain, 
p.  <7,  not. 

(3)  Matériaux,  2»  année,  p.  133. 


XL''    SESSION,    A    CHATEAUKOUX.  lij.*) 

l'étaiii  et  par  les  éléments  accidentels  si  inégaux  qu'on  y 
rencontre  ;  enfin,  par  la  découverte  de  nombreuses  fonde- 
ries qui  prouvent  que  la  fonte  du  bronze  était  une  indus- 
trie indigène  chez  presque  toutes  les  populations  qui  y 
employaient  l'étain  du  commerce  (je  dirai,  pour  l'ouest 
de  l'Europe,  l'étain  indigène)  et  le  cuivre  des  exploitations 
les  plus  rapprochées,  ce  qui  seul  peut  expliquer  la  pré- 
sence dans  les  bronzes  d'éléments  accidentels  si  divers  (1). 

A  ces  preuves,  j'ajouterai  la  forme  spéciale  à  chaque 
région  de  divers  objets  de  bronze,  localisation  surtout  évi- 
dente pour  les  haches,  comme  on  peut  s'en  assurer  par  la 
classification  de  ces  petits  instruments,  publiée  par  la 
Commission  de  la  Topographie  des  Gaules;  et  enfin,  par 
la  découverte  de  moules  d'objets  de  bronze  rencontrés  déjà 
en  bien  des  lieux  {%. 

Maintenant  que  j'ai  démontré,  il  me  semble,  que  tous 
les  éléments  du  bronze  existaient  en  abondance  dans 
l'ouest  de  l'Europe  ;  que  les  mines  qui  les  produisaient 
furent  exploitées  à  l'époque  qui  nous  occupe  ;  que  la  loca- 
lisation de  divers  objets  eu  bronze,  la  découverte  de  moules 
cl  de  ce  que  l'on  a  appelé  des  fonderies  mettaient  hors  de 
doute  la  fabrication  de  cet  alliage  dans  nos  pays,  il  me 
reste  à  faire  connaître  les  circonstances  de  l'introduction 
du  bronze  dans  l'ouest  de  l'Europe  et  l'époque  à  laquelle 
elle  eut  lieu. 

Les  découvertes  des  géologues,  dans  ces  dernières 
années,  ont  mis  hors  de  doute  l'existence  de  l'homme  dans 

(4)  Matériaux,  \^'^  année,  p.  482. 

(2)  Cochet,  Moules  de  haches  et  de  lances  en  bronze,  trou- 
vés près  Honfleur.  Revue  archéologique,  septembre  1867.  Un 
certain  nombre  de  ces  moules  existent  dans  les  divers  musées 
d'Europe. 


i:{()       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

l'ouest  de  l'Europe  avant  la  dernière  grande  révolution  du 
globe  (J),  qui  mit  lin  aux  temps  géologiques  et  donna  à 
notre  continent  sa  forme  et  son  relief  actuels. 

Leurs  observations  nous  ont  également  fait  connaître 
que  cet  homme  n'en  était  encore  qu'à  l'usage  de  la  pierre 
taillée  par  éclat,  —  l'âge  primitif  de  la  pierre,  — lorsqu'il 
disparut,  lui  et  sa  civilisation. 

De  son  côté,  l'histoire  enseigne  que  les  métaux  furent 
découverts  durant  cette  période  géologique  de  l'humanité, 
que  Tubal-Caïn,  le  Vulcain  de  la  mythologie,  forgeait  le 
bronze  et  le  fer. 

On  est  donc  en  droit  de  demander  si  l'homme  qui 
habita  ces  contrées  à  ces  âges  lointains  appartenait  aux 
races  qui  employèrent  les  métaux.  Les  observations  faites 
jusqu'à  ce  jour  sont  unanimes  pour  répondre  que  non,  et 
cependant  la  découverte  dans  des  couches  géologiques 
d'instruments  de  métal,  peut  un  jour  changer  ce  résultat. 
Toutefois,  en  face  de  l'immense  quantité  de  recherches 
faites  jusqu'à  ce  jour,  devant  l'affirmation  de  M.  Lyell  (2), 
que  les  instruments  de  métal  auraient  pu  se  conserver 

(1)  Mortillet,  V Homme  fossile,  iSfiS,  p.  9.  Suivant  iM.  le 
professeur  Hébert,  entre  les  cavernes  de  l'époque  de  la  pierre 
taillée  et  celle  de  la  pierre  polie,  «  se  place  une  lacune  profonde 
réjiondant  à  l'époque  où  se  déposaient  dans  nos  pays,  alors  inha- 
bitables, l'argile  à  cailloux  anguleux  »  qui  recouvre  non-seule- 
ment les  vallées,  mais  encore  les  plateaux.  Ce  dépôt  repose 
indistinctement,  en  allant  de  haut  eu  bas:  1°  sur  une  couche 
limoneuse  qu'il  a  prolondément  ravinée;  et  2°  sur  un  dépôt  de 
cailloux  roulés  qui  a  rempli  le  fond  des  cavernes.  Tout  cet  en- 
semble appartient  à  l'époque  quaternaire.  (Congrès  de  Bruxelles, 
Mat.,  8»  année,  p.  418.) 

(2)  Lubbock,  l'Homme  avant  l'histoire,  p.  .{34  de  la  tra- 
duction française. 


XL*   SESSIOX,    A   ClIATEAUROUX.  137 

(luiis  les  couches  géologi(}ues  si  elles  en  avaient  recelé,  il 
est  permis  de  croire  que  l'homme  des  temps  géologiques 
ne  connut  pas  l'usage  des  métaux,  et  que  toute  l'évolu- 
tion de  sa  civilisation  si  avancée  ou  du  moins  si  artistique 
dans  le  sud  de  la  France  et  peut-être  en  Belgique  s'exerça 
seulement  avec  l'os  et  le  silex  pour  toute  matière 
première. 

MM.  Lartet  et  Christy,  il  est  vrai,  ont  découvert,  dans 
une  grotte  du  raidi  de  la  France,  celle  de  Laugerie,  un 
fragment  de  bronze  tout  à  fait  irrégulier,  ressemblant  à 
ces  fragments  qui  s'échappent  des  creusets  ou  des  moules 
au  moment  des  coulées;  mais  ce  fait  est  unique,  un  mé- 
lange d'objets  de  périodes  diverses  a  pu  s'effectuer  et, 
d'ailleurs,  la  complication  de  composition  de  ce  bronze 
dans  lequel  se  trouve  du  plomb,  du  zinc  et  des  traces  de 
fer,  me  fait  douter  qu'il  ait  jamais  appartenu  à  cet  âge 
primitif  de  l'humanité  dans  nos  contrées  (1). 

Il  en  est  ainsi  du  morceau  de  fer  englobé  dans  une  lave 
quaternaire  des  bords  du  Rhin,  signalé  par  M.  Shaffau- 
sen  au  congrès  de  Copenhague;  car,  ainsi  que  l'a  fait 
observer  M.  Hébert  au  même  congrès,  il  ne  suffit  pas  de 
savoir  que  la  pièce  est  au  musée  de  Bonn,  il  faut  encore 
en  établir  l'authenticité,  car  une  lave  peut  aussi  bien 
venir  du  Vésuve  que  des  bords  du  Rhin  (2). 

Mais  si  l'homme  des  temps  géologiques  ne  connut  pas, 
dans  nos  contrées,  l'usage  des  métaux,  il  n'en  fut  pas  de 
même  de  l'homme  qui  lui  succéda  à  l'époque  moderne; 
cet  homme  appartenait  à  une  civilisation  toute  diflérente. 
L'observation  directe  des  faits  nous  le  montre  pasteur  et 

(1)  Voir  Matériaux,  3e  année,  p.  55,  ce  qui  est  dit  au  sujet 
des  haches  à  douille  carrée  de  Moussaye,  analysées  par  M  Desor. 

(2)  Ibid.,  .")*  année,  p.  520. 


13S  CO\'GRES    AUCIIÉOI.OGIQUE    DE    FRANCE. 

agriculteur;  l'histoire  nous  apprend  qu'il  appartenait  à 
(le?  races  orientales  dont  la  civilisation  était  avancée,  et, 
au  dire  de  M.  Pictet.  de  Genève,  la  philolofïie  démontre 
(ju'il  avait  conservé  le  souvenir  de  l'usage  des  métaux. 
Cependant,  quand  il  arriva  dans  l'ouest  de  l'Europe,  il  en 
était  au  dernier  âge  de  la  pierre,  celui  de  la  pierre  polie. 
Cette  contradiction  apparente  s'explique  facilement. 
Si  les  moyens  de  communication  rendent  de  nos  jours 
les  voyages  faciles  ;  si  l'industrie  fies  contrées  qu'on  par- 
court permet  de  renouveler  les  objets  qui  s'usent  dans  la 
route,  il  n'en  pouvait  être  ainsi  à  l'époque  où  la  première 
migration  eut  lieu  dans  nos  contrées.  Quels  que  fussent 
donc  les  approvisionnements  que  purent  faire  ces  émi- 
grants,  dans  un  aussi  long  trajet  à  travers  des  pays  déserts, 
couverts  de  bois  et  de  marécages,  qni  retardaient  leur 
marche  et  la  rendaient  des  plus  difficiles,  les  outils  de 
métal  durent  s'user  à  la  longue;  les  pays  vierges  qu'ils 
parcouraient  n'en  produisaient  pas  encore  ;  le  commerce 
qui  n'existait  pas  à  cette  époque  ne  pouvait  les  remplacer, 
ils  en  revinrent  donc  fréquemment  (comme  les  premiers 
habitants  de  l'ouest,  aux  époques  géologiques)  à  l'usage 
de  la  pierre.  Mais,  conservant,  autant  que  faire  se  pouvait, 
les  habitudes  de  leur  ancienne  industrie,  de  même  qu'ils 
avaient  polis  leurs  outils  de  métal,  ils  polirent  les  pierres 
dont  ils  fabriquèrent  leurs  nouveaux  instruments. 

Cette  nécessité  de  remplacer  le  métal  qui  disparaissait 
par  la  pierre,  qui  est  partout  sous  la  main,  doit  s'être 
présentée  de  bonne  heure  dans  ce  long  et  pénible  voyage, 
si  les  haches  en  jade  et  en  néphrite  viennent  bien  d'Orient, 
comme  l'affirment  les  minéralogistes  qui  n'ont  pas  encore 
connu  de  gisements  île  ces  roches  en  Occident. 

Mais  aussitôt  que  ces  populations  furent  établies  dans 
leur  nouvelle  patrie,  (ju'elles  s'y  furent  installées,  leur 


XL"    SESSION,    A    i;ilATKAUROUX.  \'M 

première  préoccupation  dut  être  do  rechercher  les  mines 
qui  devaient  leur  permettre  de  remplacer  les  instruments 
qui  leur  faisaient  depuis  si  longtemps  défaut.  Avec  la 
connaissance  première  conservée,  cette  recherche  ne  dut 
pas  être,  relativement,  extrêmement  longue.  Ils  y  exploi- 
tèrent d'abord  le  cuivre  et  le  bronze,  dont  l'alliage,  sans 
autre  opération,  leur  procura  les  divers  objets  dont  le 
besoin  était  le  plus  pressant;  puis  ils  travaillèrent  le  fer, 
dont  le  traitementmétallurgique,  plus  compliqué,  demande 
plus  de  temps  et  de  travail,  mais  qui  donne  des  produits 
plus  perfectionnés.  Ainsi  se  trouverait  expliquée  cette 
étrange  anomalie  de  l'emploi  d'un  alliage  avant  un  métal 
pur,  qui  étonne  tant  les  métallurgistes. 

Je  sens  combien  cette  nouvelle  manière  d'envisager  les 
trois  âges  primitifs  de  l'humanité  dans  notre  Occident  a 
besoin  d'être  appuyée  de  preuves  sérieuses.  Une  de  celles 
qui  pour  moi  seraient  des  plus  convaincantes,  c'est  que 
les  trois  âges  de  la  pierre  polie,  du  bronze  et  du  fer  pri- 
mitif des  antiquaires  danois ,  ne  sont  pas  parfaitement 
tranchés  dans  le  sud-ouest  de  l'Europe,  comme  l'ont  fait 
remarquer,  au  congrès  de  Copenhague,  pour  le  bronze  du 
moins  et  le  fer,  MM.  Desor  et  Alexandre  Bertrand  (i).  En 
effet,  s'il  est  certain  que  l'homme  de  la  pierre  polie  éleva 
des  dolmens,  il  est  certain  aussi  que  ceux  du  nord-est  ne 
renferment  yamaî's  de  métal  ;  que  ceux  du  nord-ouest  en 
présentent  exceptionnellement  ;  enfin  que  ceux  du  sud  en 
montrent />/ms  fréquemment  (2);  et  j'ajouterai  même  que 
ces  derniers  ont  peut-être  offert  des  traces  de  fer  (3).  Or,  si 

(1)  Matériaux,  5«  année,  p.  347. 

(2)  De  Bonsletten,  Eii.un  sur  les  Dolmens,  p.  46. 

(.3j  Dolmen  de  rAveyron,  Matériaux,  p.  140;  Dolmen  de  la 
Corrèze,  Ibict.,  6^  et  7«  années,  p.  406,  etc. 


I  iO  (:ON(atÈS    AllCIlÉOLOGIUUE    1>K    FRANCE. 

iTs  peuples  s'étwidirenl  du  midi  au  nord,  comme  le 
pensent  MM.  Worsaae  et  Desor  (i),  et  vinrent  dans  l'ouest 
de  l'Europe  par  la  vallée  du  Danube  et  les  Alpes,  comme 
le  dit  M.  Alexandre  liertrand,  du  peuple  qui,  suivant  lui, 
apporta  le  bronze,  les  dolmens  du  sud  furent  les  premiers 
qu'ils  élevèrent  en  France.  Ce  ne  serait  que  plus  tard  (jue 
lurent  édifiés  ceux  du  nord-ouest,  puis  ceux  du  nord- 
est  (2).  Aussi  les  derniers  subsistants  des  objets  de  métal, 
apportés  d'Orient,  avaient-ils  disparu,  et  ces  peuples  ne 
purent  y  placer,  avec  les  objets  de  pierre  que  renferment 
tous  les  dolmens,  que  des  haches  et  des  objets  de  parure 
en  pierre,  venant  d'Orient  ;  c'était  encore  des  reliques  du 
pays  d'origine,  un  souvenir  des  péripéties  d'un  long 
voyage.  Une  idée  religieuse  s'attacha  nécessairement  aux 
objets  de  cette  nature,  et  c'est  ainsi  que  s'expliquerait  la 
présence  de  haches  de  pierre  jusque  dans  les  sépultures 
franques,  présence  que  j'ai  signalée  dans  mou  Coup  d'œil 
sur  L'homme  préhisto)ique  dans  la  Creuse. 

Cette  théorie  serait  singulièrement  étayée,  s'il  m'était 
possible  de  montrer  dans  les  objets  de  bronze  ou  de  fer  qui 
nous  restent,  ceux  qui  proviennent  d'Orient.  Mais  ce  tra- 
vail est  au-dessus  de  mes  forces  ;  et,  d'ailleurs,  l'industrie 
de  ces  contrées,  à  cette  époque,  est  peu  connue,  et  il  me 
manquerait,  en  tous  cas,  les  éléments  nécessaires  qui  ne 
se  rencontrent,  en  nombre  suffisant,  que  dans  les  grands 

[\)  Congrès  préliist.  de  Bruxelles.  [Matériaux,  <S*  année, 
{}.  493.) 

(2)  La  seule  raison  que  donne  M.  de  Bonstelten  pour  l'aire 
venir,  par  le  nord,  le  peuple  des  doluiens.  c'est  que  l'âge  de 
la  [lierre,  ayant  m'oessaiicmenl  précédé  celui  du  hronze,  et  les 
dolmens  du  nord-est  ne  contenant  (pie  de  la  pierre,  tandis  <|ue 
ceux  du  sud  renferment  des  ubjets  de  métal,  on  ne  peut  leur 
supposer  d'autre  itinéraire,  [f.oc.  cit.,  p.  46.) 


XL''   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  141 

musées  de  l'Europe.  Je  l'abandonne  donc  à  ceux,  mieux 
placés  que  moi,  qu'une  aptitude  spéciale  et  des  études 
premières  ont  préparés  à  ce  travail.  Je  dirai  seulement  que, 
de  même  que  pour  les  monnaies  gauloises  celles  de  meil- 
leur style  sont  regardées  comme  les  plus  anciennes,  qu'il 
en  est  ainsi  pour  l'éniaillerie  champlevée  de  Limoges,  les 
objets  les  plus  purs  de  forme  sont  ceux  qu'apportèrent 
avec  eux  les  premiers  habitants  de  notre  sol.  Les  premiers 
objets  qu'ils  fabriquèrent  dans  leur  nouvelle  patrie  durent 
rappeler  encore,  d'assez  loin  probablement,  ce  même  style 
et  ces  mêmes  formes  ;  et  ce  ne  fut  que  plus  tard,  lorsque 
l'industrie  fut  régulièrement  établie,  qu'une  influence, 
ou  des  influences  étrangères  purent  se  faire  sentir.  Mais, 
déjà,  il  n'y  avait  plus  d'âge  de  bronze  proprement  dit,  le 
fer  était  partout  en  usage  dans  nos  contrées. 

En  terminant,  j'ajouterai  que  ce  premier  peuple  ne  fut 
évidemment  pas  le  seul  qui  vint  se  fixer  sur  notre  sol. 
L'histoire  nous  montre  une  succession  d'invasions  pareilles 
et  l'antropologie  des  races  diverses  jusque  dans  le  peuple 
des  dolmens  (1).  Ainsi  se  complique  le  problème  que  j'ai 
cherché  à  résoudre  ;  car  tant  que  des  colonies  ne  se  fixè- 
rent pas  à  demeure  sur  le  long  trajet  d'Orient  en  Occident, 
le  même  phénomène  de  la  disparition  des  objets  de  métal 
dut  sans  cesse  se  reproduire;  mais  il  m'était  impossible 
d'en  tenir  compte  dans  l'exposé  qui  précède. 

Il  m'aurait  fallu  de  nombreuses  pages  pour  exposer, 
avec  des  détails  nécessaires,  l'histoire  si  vaste  et  si  com- 
pliquée de  l'introduction  des  métaux  dans  le  sud-ouest  de 
l'Europe  ,  j'en  ai  toutefois  assez  dit  pour  me  croire  auto- 
risé à  conclure  : 

(1)  De  Quatrefarges,  Congrès  préhist.  de  Bruxelles.  {Maté- 
riaux, 8«  année,  p.  494.) 


•142  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

Qu'il  est  à  peu  près  certain  que  l'homme  des  temps 
géologiques  avait  perdu ,  dans  sa  migration  d'Asie  en 
Europe,  l'usage  des  métaux  ; 

Que  ce  premier  habitant  de  notre  sol  disparut,  lui  et  sa 
civilisation,  dans  la  dernière  révolution  du  globe  sans 
laisser  de  représentants  ;  ce  que  prouve,  outre  les  obser- 
vations géologiques,  l'industrie  toute  différente  du  peuple 
qui  lui  succéda,  industrie  toute  d'une  pièce  et  sans  tran- 
sition avec  celle  qui  l'avait  précédée  ; 

Que  l'homme  des  temps  modernes  vit  s'user,  dans  sa 
migration  d'Orient  en  Occident,  les  outils  de  métal  qu'il 
avait  emportés  avec  lui  à  son  départ  de  son  lieu  d'origine, 
et  que,  dans  l'impossibilité  oîi  il  était  de  les  renouveler  par 
le  commerce  qui  ne  pouvait  exister  alors,  ni  d'en  fabri- 
quer de  nouveaux  dans  les  pays  encore  inhabités  qu'il 
traversait,  il  dut  revenir  forcément  à  l'usage  de  la  pierre; 

Qu'une  fois  établi  dans  sa  nouvelle  patrie,  il  s'occupa 
d'y  créer  des  exploitations  de  mines  et  de  fabriquer  les 
outils  et  les  divers  objets  qui  lui  étaient  utiles,  ce  qui  fut 
relativement  assez  facile  avec  le  souvenir  de  l'usage  des 
métaux  qu'il  avait  conservé  et  la  connaissance  de  l'exploi- 
tation et  du  traitement  des  divers  minerais  ; 

Qu'il  dut  forcément  commencer  par  le  bronze  dont  la 
fonte  est  toute  la  préparation,  tandis  que  la  première 
fusion  du  fer  ne  donne  qu'une  matière  cassante,  qui 
nécessite  d'autres  opérations  fort  longues  avant  de  pouvoir 
être  utilisée  ; 

Qu'enfin  ces  divers  âges  eurent  une  durée  qui  fut 
déterminée,  pour  chaque  pays,  par  le  temps  nécessaire  à 
la  découverte  et  à  l'exploitation  des  divers  minerais  ; 
temps  qui,  dans  les  Gaules  en  particulier,  n'a  pu  être  que 
relativement  peu  long,  par  suite  de  la  quantité  assez  con- 
sidérable de  mines  de  cuivre  et  d'étain  que  recèle  son  sol, 


XL*   SESSION,    A   C1IATEA.UR0UX.  \A3 

et  dont  le  plus  grand  nombre,  sinon  toutes,  furent  exploi- 
tées à  cette  époque,  et  par  la  grande  abondance  du  fer  qui 
s'y  trouve  partout,  même  à  la  surface  du  sol. 

La  cinquième  question,  ainsi  conçue  :  Les  pierres 
prismatiques  de  Villedieu  et  de  Ghambon  sont-elles  un 
produit  de  l'industrie  humaine  ou  une  formation  géolo- 
gique? a  été  appelée  par  M.  le  Président. 

M.  de  Cessac  ne  reconnaît  dans  les  échantillons  déposés 
sur  le  bureau  aucune  trace  de  travail  humain  ;  il  ne  voit 
pas  non  plus  à  quel  usage  ces  pierres  auraient  pu  servir. 
M.  Constant  Prévost  a  signalé,  dans  les  environs  de  Paris, 
une  argile  dont  les  fentes  de  retrait  naturelles  ont  divisé 
la  masse  en  prismes  semblables  à  ceux  du  basalte.  C'est  à 
un  phénomène  semblable  que  sont  dus  les  grès  de  Cham- 
bon,  en  forme  de  prismes.  Quant  à  ceux  formés  de  deux 
pyramides  quadrangulaires,  très-surbaissées,  opposées 
par  la  base,  }J.  de  Cessac  trouve  l'explication  de  leur  for- 
mation dans  celle  des  grès  de  Fontainebleau.  Ces  grès, 
à  base  calcaire,  ont  cristallisé  dans  le  système  de  la 
chaux  :  le  rhomboèdre,  ceux  de  charbon  à  base  de  fer  ; 
dans  celui  du  fer ,  l'octaèdre.  Tous  ces  échantillons  sont 
fortement  roulés,  ce  qui  fait  que  leur  cristallisation  est 
un  peu  fruste. 

Ensuite  M.  le  Président  a  ouvert  la  discussion  sur  la 
dixième  question  :  Quels  peuvent  être  l'origine  et  le  but 
des  excavations  désignées  dans  le  pays  sous  le  nom 
de  mardelles?  A-t-on  fait  de  nouvelles  découvertes  à 
ce  sujet  ? 

Dans  rintérêt  des  membres  du  Congrès,  étrangers  au 


14i       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Berry,  M.  Buhot  de  Kersers  rappelle  que  les  mardelles 
sont  des  excavations  de  l'orme  conique,  dont  les  dimensions 
varient  de  i^oO  à  12  mètres  de  profondeur,  et  dont 
quelques-unes  atteignent  80  mètres  de  diamètre  et  plus. 
Elles  contiennent  des  cendres  et  des  restes  d'une  céra- 
mique grossière.  Parmi  les  opinions  variées  qui  ont  été 
formulées  sur  les  mardelles,  M.  Buhot  mentionne  celle 
qui  les  considère  comme  des  habitations. 

M.  Guillard,  ancien  agent-voyer  d'arrondissement,  lit 
un  rapport  sur  la  même  question.  Sa  réponse,  fruit  de 
laborieuses  recherches  ,  méthodiquement  coordonnées , 
sera  une  ressource  précieuse  pour  les  savants  qui  s'appli- 
queront désormais  à  l'étude  de  la  question. 


Des  Marges,  Mardelles  ou  Margelles,  par 
M.  Guillard,  ancien  agent-voyer  d'arron- 
dissement. 

Les  mardelles,  à  de  très-rares  exceptions  près,  sont  de 
grandes  cavités  circulaires,  en  forme  de  cônes  tronqués, 
creusées   de  main   d'homme  ,   à  ciel  ouvert ,    dans   le 

sol  (1). 

(4)  L'étymologie  du  mot  mardelle  esl  ainsi  indiquée  dans  un 
dictionnaire  celtique,  que  M.  le  comte  Leclerc  de  Bony  a 
consulté  à  la  bibliothèque  de  Metz  (Bulletin  de  la  Société 
archéologique  de  la  Moselle,  année  4862)  : 

M  Mary,  marne  (basque);  Merck,  en  bohémien;  Marf/el,en 
flamand;  Mergel,  en  allemand,  marne. 

«  Marya  'gaïlique),  marne.  Dans  les  capitulaires  de  Charles 
le  Chauve,  on  lit  :  MaryUla,  i>our  Murga  ;  de  là  argile. 

«  Marga,  marne  :    Pline  (liv.  17,  chap.  xvi)  nous  a  con- 


XL"   SESSION,    A    CHATEAUnOUX.  ^Al'^ 

M,  de  la  Villcf^illc  ost,  îi  notre  coniiaissauce,  le  pre- 
mier archéologue  qui  ait,  dans  un  mémoire  publié  en 
1838,  appelé  l'attention  d'une  manière  toute  spéciale  sur 
ces  antiques  excavations.  {Mémoire  de  la  Société  des  Anti- 
quaires de  France,  xvi"  volume.)  M.  Raynal,  dans  son 
Histoire  du  Berry,  publiée  en  1844,  et  M.  Grillon- 
Deschapelles,  dans  ses  Esquisses  biographiques^  imprimées 
en  1862,   donnent  quelques  détails  sur  les  mardelles  ; 

serve  ce  mot  gaulois  ;  il  se  trouve  dans  le  gallois  et  le  breton, 
deux  des  plus  abondants  dialectes  de  cette  langue  :  Margilla 
ou  Marga.  » 

Nous  pensons  que  cette  citation  est  erronée  en  partie.  Le 
chapitre  xvi  a  trait  à  la  plantation  des  arbres;  c'est  le  cha- 
pitre IV  qui  se  rapporte  à  la  marne.  Le  titre  est  ainsi  conçu  :  des 

HUIT  ESPÈCES  DE  TERRE  VANTEES  PAR  LES  GAULOIS  ET  LES  GRECS. 

...  Une  autre  méthode  est  usitée  en  Bretagne  et  en  Gaule; 
elle  consiste  à  engraisser  la  terre  avec  la  terre  même.  Cette 
dernière  s'appelle  marne  :  quod  genus  vacant  margam. 

...Toute  marne  veut,  avant  qu'on  la  répande,  un  sol  pré- 
paré pour  le  labour  :  omnisautem  marga  arato  injicienda 
est,  ut  medicamentum  rajnatur...  » 

Ainsi  l'expression  mardelle  dériverait  du  mot  marne  et 
paraîtrait  désigner  des  carrières  d'où  l'on  extrait  ou  d'où  l'on  a 
extrait  de  la  marne.  Cette  supposition  est  on  ne  peut  plus 
inexacte  ;  elle  prouve  que  la  destination  de  ces  excavations  était 
tout  aussi  inconnue  aux  Gaulois  qu'aux  Latins,  que  ces  peuples 
en  ignoraient  l'origine.  C'est  une  circonstance  qu'il  importe  de 
constater. 

D'après  Catherinot,  auteur  d'un  grand  nombre  d'opuscules  sur 
le  Berry,  mardelle  signifierait  rebord.  «  On  voit,  écrit  M.  de  la 
Villegille.  dans  son  mémoire  sur  les  mardelles,  que  Cartherinot 
fait  venir  le  mot  mardelle  de  margtnella,  diminutif  de 
marge,  marginis,  rebord,  et  qu'il  les  considère  comme  des 
fossés  creusés  par  des  soldats  pour  se  mettre  en  embuscade.  » 
M.  de  la  Villegille  réfute  cette  opinion. 

XL^  SESSION.  10 


1  i6  CONGRÈS  ARCHÉOI.OCÎIQUE   HE   FRANCE. 

mais  ces  renseignements  ne  sont,  en  grande  partie,  que 
le  résumé  de  la  notice  de  M.  de  la  Villegille. 

Dans  nos  premières  tournées  sur  l'arrondissement 
d'Issoudun,  nous  fûmes  vivement  impressionné  du  grand 
nombre  de  mardelles,  des  dolmens,  des  tumulus,  des 
traces  de  voies  romaines,  etc.,  qui  y  existaient  encore.  Dès 
1857,  nous  conçûmes  le  projet  de  relever  la  position  de 
tous  ces  monuments  antiques  ou  de  leurs  restes  dans 
l'étendue  de  cette  circonscription.  Les  notices  publiées,  en 
1863  et  en  1865  (1),  dans  l'Annuaire  de  l'Indre,  édité  par 
M.  Salviac,  indiquent  sommairement  notre  but.  C'est  le 
commencement ,  V ébauche  du  travail  que  nous  avons 
entrepris,  tel  qu'il  nous  a  été  permis  de  l'accomplir,  que 
nous  soumettons  au  Congrès  (2). 

L'arrondissement  d'Issoudun  est  divisé  administrative- 
ment  en  quatre  cantons.  Le  canton  d'Issoudun  (sud)  est 
celui  qui  contient  le  plus  de  mardelles,  puis  ensuite  celui 
de  Vatan,  enfin  celui  de  Saint-Christophe;  le  canton 
d'Issoudun  (nord)  en  renferme  le  moins.  Deux  cent 
trente-trois  ont  été  relevées  sur  25  communes,  et  nous 
avons  laissé  de  côté  celles,  en  bien  petit  nombre,  qui  sont 
déformées,  labourées  ou  comblées,  sur  la  nature  desquelles 
des  doutes  peuvent  exister  (3). 

(1)  Nous  ne  parlons  de  ces  notices  que  pour  mémoire  :  elles 
renferment  des  erreurs  énormes.  Dans  celle  de  IcSes,  on  nous 
l'ait  dire,  sur  plusieurs  points,  tout  le  contraire  de  notre 
pensée;  celle  de  1865  a  été  refaite  au  milieu  du  tirage,  quand 
nous  nous  sommes  aperçu  des  fautes  d'impression  inexplicables 
((u'elle  contenait.  Encore  le  second  tirage  en  comprend-il  d'assez 
visibles,  mais  le  sens,  du  moins,  n'en  est  pas  altéré. 

(2)  Les  voies  romaines  de  l'arrondissement  forment  un  mé- 
moire séparé. 

(:})  Le  travail  est  à  compléter  sur  vingt-cin(|  autres  com- 


Plan    de  Mardelle^  a.  o"'  Fâusle  . 

SUD 


■EST     = 


QTJEST, 


¥OPJ). 


Plan    de  Mardelle,  a  o^  Aubm 


-Otrj.; 


sr 


TiîOKD 


Plan    de  Mardelle,  a  S-  Fansle 

SUD. 


EST.  E=i 


=.  OUEST. 


"NORD 


XL«  SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  147 

La  forme  en  est  généralement  ellipliquo,  et  les  dimen- 
sions en  sont  très-variables.  Cependant  dans  le  canton 
d'Issoudun  (nord)  et  dans  celui  d'Issoudun  (sud),  les 
diamètres  en  varient  peu  :  l'inégalité  en  est  la  rare 
exception.  Dans  le  canton  de  Vatan,  l'excentricité  ou  la 
différence  de  longueur  des  deux  axes  s'accroît  sensible- 
ment, c'est-à-dire  que  l'ellipse  s'allonge  ;  dans  le  canton  de 
Saint-Christophe,  cette  courbe  s'accroît  encore,  et  quel- 
quefois le  grand  diamètre  y  surpasse  le  double  du  petit. 

Cette  disposition  a-t-elle  été  intentionnelle  ou  est-elle 
seulement  le  résultat  du  hasard?  Nous  ferons  remarquer" 
que  le  sol  des  deux  cantons  d'Issoudun  est  formé  géologi- 
quement,  dans  la  plus  grande  étendue,  par  le  calcaire 
jurassique,  oolithe  moyenne  (étage  lithographique),  et 
qu'il  est  situé  en  Champagne,  en  pays  découvert,  suivant 
les  termes  de  la  localité;  que  la  partie  principale  du 
canton  de  Vatan  et  tout  le  canton  de  Saint-Christophe  sont 
formés  par  le  terrain  crétacé  (crétacé  inférieur),  et  qu'ils 
sont  situés  en  Boischaut  (I),  pays  couvert.  Sont-ce  là  les 
motifs  de  la  disposition  différente  de  ces  excavations?  A 
quelles  causes,  à  quelles  lois  les  rapporter? 

Le  grand  axe  de  plusieurs  mardelles  surpasse  60  mè- 

munes  pour  embrasser  tout  l'arrondissement  ;  mais,  dans  ces 
communes,  elles  sont  rares;  dans  quelques-unes  même,  d'après 
les  renseignements  que  nous  avons  recueillis  et  que  nous 
avons  tout  lieu  de  croire  exacts,  il  n'en  existerait  pas.  (Voir  les 
observations  du  tableau  ci-après.) 

(I)  Boischaut  (de  Boscas,  basse  latinité).  Partie  boisée  de 
l'Indre,  synonyme  de  Bocage  :  c'est,  au  reste  du  Berry,  ce  que 
le  Bocage  est  à  la  Vendée. 

Champagne, contrée  plate  du  Berry.  On  disait  autrefois  Cham- 
pagne, pour  plaine.  (Extrait  du  Glossaire  du  centre  de  la 
France,  par  M.  le  comte  Jaubert,  2<=  édit.) 


m 


CONGRES  ARCHEOLOGIQUE   HE   FRANCE. 


_—  -C    i)    — 

?^ 

==  —  — 

— 

c:  ^—   Cj 

F— 

ÇA    c  „ 

c  -^ 

■--   H^ 

WJ 

c     ;»'  s. 

=-   o   ~— 

*5 

Z    O 

*"   3 

c  2  S  = 

5^p 

3   _ 

C3    2 

^   . 

Z-c  '= 

-  S 
.2  •» 

lé    re 
gnes, 
par  1 
Il  on 

3 

5  co 

3   t. 

r^ 

ii  — 

.«8  *5      - 

o 

"£S  t'-B 

Si: 

=   S-- 

c  C" 

= 

"s;  '^'^ 

y;  c 

C3 

2  s 

3   ^ 

S- 

âi.2 

m 
eut 
nie 
lève 

O 

2  =  1 

3  o 

seuil 
exis 
de  pa 
ns  ei 

o 

t>. 

u  "  P 

Il  El 

3 

os 

3    t,          o 

p 

s  o  a, 

H      =  «^  s  «J 
I-  5  ~  -  ~  -- 

il      -^"^ 


■UJ   3   0^ 


=  c  ,,   I    = 


w    — 

p-     a; 


—    e-"3 


O 
H 

O    - 


6=0. 
V      - 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  14*.) 

très,  et  même,  dans  quelques-unes,  il  atteint  100  mètres. 
Celles  dont  le  petit  diamètre  approche  de  35  mètres  sont 
nombreuses  ;  il  y  en  a  beaucoup  dont  la  longueur  est  de 
40  à  50  mètres. 

Nous  résumons,  dans  le  tableau  ci-contre,  pour  chaque 
canton,  le  nombre  de  mardelles  et  le  diamètre  moyen  de 
celles  qui  ont  été  relevées. 

La  moyenne  générale  indique  que  le  rapport  entre  les 
deux  axes  est  égal  aux  soixante-dix-sept  centièmes  (0,77). 
Ce  même  rapport  est,  pour  le  canton  d'Issoudun  (sud), 
égal  aux  quatre-vingt  sept  centièmes  (0,87),  tandis  que, 
pour  le  canton  de  Vatan,  il  descend  aux  soixante-douze 
centièmes  (0,72),  et  que,  pour  le  canton  de  Saint-Chris- 
tophe, il  diminue  jusqu'aux  soixante-sept  centièmes 
(0,67).  Mais  ces  chiffres,  bien  que  confirmant  nos  appré- 
ciations, ne  sont  donnés  que  pour  faire  remarquer  les 
différences  principales ,  les  différences  d'ensemble  qui 
existent  entre  une  région  et  une  autre,  sans  qu'ils  puissent 
rendre  l'expression  exacte  des  dimensions  particulières  de 
ces  excavations  sur  chaque  commune. 

La  profondeur  actuelle  en  est  généralement  très-variable. 
La  plupart  sont  comblées  en  partie,  ou  l'aire  en  a  été 
exhaussée  par  les  arbres,  les  plantes  qui  y  poussent 
constamment,  dont  les  débris  forment  une  espèce  de 
terreau,  et  aussi  par  les  terres  des  bords  qui,  à  l'origine, 
ont  dû  y  être  amenées  par  les  eaux.  On  peut  toutefois 
indiquer  une  moyenne  de  1"50  à  4  mètres;  plusieurs 
n'ont  actuellement  que  50  centimètres,  tandis  que  d'autres, 
au  contraire,  ont  jusqu'à  6  mètres  de  profondeur.  Les 
talus  en  sont  différemment  inclinés,  suivant  la  nature  du 
terrain  où  elles  ont  été  creusées.  Les  lignes  qui  en  forment 
le  périmètre  sont  rarement  de  niveau,  c'est-à-dire  qu'elles 
ne  présentent  pas  un  plan  horizontal. 


150       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Généralement  elles  sont  très-saines,  les  eaux  pluviales  y 
séjournent  peu.  Cependant  nous  en  avons  rencontré 
quelques-unes,  principalement  dans  les  bois,  qui  sont 
pleines  d'eau  et  qui  ne  tarissent  que  très  -  rarement, 
circonstance  qui  peut  être  produite  par  les  causes  que  nous 
venons  d'indiquer,  par  de  fortes  couches  d'humus  prove- 
nant des  plantes  ligneuses  que  la  suite  des  siècles  y  a 
accumulées;  mais  de  semblables  mardelles  sont  l'exception. 
D'autres  ont  été  déformées,  soit  qu'on  les  ait  prises  pour 
d'anciennes  carrières  de  moellons,  soit  qu'on  ait  cherché  à 
en  extraire  de  la  marne  ou  de  l'argile.  Nous  en  avons  vu 
plusieurs  en  exploitation. 

La  recherche  de  ces  excavations  est  bien  plus  difficile 
qu'on  ne  pourrait  le  supposer  au  premier  abord.  On  ne  les 
aperçoit  pas  de  loin,  elles  sont  souvent  même  dissimulées 
dans  les  replis  du  terrain,  au  milieu  des  fourrés,  dans  les 
bois.  Il  faut  avoir  recours  à  bien  des  intermédiaires  pour 
obtenir  quelques  renseignements  sérieux.  La  compulsion 
des  matrices  cadastrales,  où  l'on  peut  rencontrer  des 
dénominations  de  lieux  qui  s'y  rapportent,  est  indispen- 
sable. Il  faut  ensuite  parcourir  la  campagne  dans  bien  des 
directions  et  y  revenir  plusieurs  fois,  prendre  des  points 
de  repères,  etc.,  ce  qui  exige  des  déplacements  longs  et 
nombreux  (1). 

Les  mardelles  ne  sont  pas  toujours  isolées  :  elles  sont 
souvent  groupées  les  unes  près  des  autres,  de  manière  à 
former  des  agglomérations  que  l'on  peut,  pour  quelques- 
unes,  comparer  à  nos  petits  villages.   Elles  sont  situées 

(1)  Pour  en  rapporter  la  position  sur  des  cartes,  les  diffi- 
cultés sont  très-grandes.  Les  points  de  repères  exacts  manquent 
le  plus  habituellement  et  des  opérations  trigonomètriques  sont 
indispensables.  Il  faudrait,  pour  se  livrer  à  ces  opérations,  avoir 


XL*'    SESSION,    A   CHATEAUROUX.  15i 

dans  toute  espèce  de  terrains  et  dans  toutes  les  situations, 
eu  égard  à  Tinclinaison  ou  à  la  conformation  du  sol. 
Malgré  cela,  nous  n'en  avons  vu  que  deux  au  fond  de 
petites  vallées,  une  dans  les  bois,  Tautre  en  rase  cam- 
pagne, et  reconnu  aucune  dans  les  vallées  proprement 
dites,  par  conséquent  dans  les  prairies  ou  dans  les  lieux 
bas  et  constamment  humides. 

Dans  quelques  communes  des  cantons  de  Vatan  et  de 
Saint-Christophe,  et  dans  deux  autres  d'Issoudun  (sud), 
nous  en  avons  remarqué  qui  avaient  un  diamètre  de 
15  à  22  mètres,  qui  étaient  situées  près  de  plusieurs 
autres  d'un  diamètre  bien  plus  grand.  Dans  Poulaines,  à 
peu  de  distance  d'une  mardelle  de  40  mètres  de  largeur  et 
de  deux  autres  de  20  mètres,  il  s'en  trouve  deux  petites, 
l'une  de  6  mètres  et  l'autre  de  8  mètres,  dont  le  grand 
axe  correspond  exactement  à  celui  de  la  mardelle  princi- 
pale, disposition  que  nous  n'avons  rencontrée  nulle  part 
ailleurs.  Dans  celles  qui  sont  contiguës,  le  périmètre  est 
habituellement  variable  de  l'une  à  l'autre,  et  nous  ne 
pensons  pas  qu'il  y  ait  aucun  rapport  de  connexité  entre 
elles. 

avec  soi  deux  hommes  au  moins,  porteurs  des  instruments  néces- 
saires. Rien  n'est  impossible  certainement ,  mais  de  semblables 
difficultés  nuisent  beaucoup  à  l'exécution  d'un  travail  dont  la  durée 
ne  peut  se  compter  que  par  des  années.  En  outre,  des  arbres  et 
des  haies  poussent  en  différents  endroits,  sur  les  bords,  sur  les 
talus  et  dans  le  fond  ;  les  ronces  et  les  épines  qui  s'y  enche- 
vêtrent contribuent  à  en  rendre  l'accès  peu  praticable.  Aussi, 
pour  conduire  notre  œuvre  à  bonne  fin,  à  une  fin  pratiqué, 
nous  avons  dû  nous  borner  provisoirement  à  les  rapporter  sur 
les  calques  des  tableaux  d'assemblage  des  communes,  à  l'aide 
de  repères  mesurés  an  pas  pris,  soit  sur  les  chemins,  soit 
sur  des  habitations,  qui  pouvaient  iMio  «Ictcnninés  facilement. 


152       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

11  s'en  trouve  une  dans  la  commune  de  Sainte-Fauste, 
de  80  à  85  mètres  de  longueur,  sur  70  à  75  mètres  de 
largeur,  divisée  en  deux  par  une  banquette  en  terre  qui 
s'élève  à  peu  près  jusqu'au  tiers  de  la  profondeur.  A 
Anjouin,  deux  petites  de  20  à  37  mètres,  sont  réunies 
dans  une  bien  plus  grande  de  80  mètres  de  diamètre 
environ.  Nous  n'indiquons  pas  de  nombre  précis,  comme 
nous  l'avons  fait  remarquer  précédemment  dans  une 
note,  car  nous  attachons  à  ce  mot  une  exactitude  mathé- 
matique qui  n'existe  pas  ici,  exactitude  que  nous  nous 
proposons  d'obtenir  ultérieurement,  au  moins  en  partie, 
par  des  opérations  rigoureuses. 

D'après  les  investigations,  dont  nous  donnerons  plus 
loin  l'analyse,  il  parait  que  les  personnes  qui  s'y  sont 
livrées  se  sont  bornées  à  les  exécuter  dans  la  plate-forme, 
dans  le  cul-de-lampe  de  ces  cavités.  Les  résultats  en  ont 
été  presque  infructueux.  La  raison  en  est  probablement 
qu'à  une  époque  plus  ou  moins  reculée,  depuis  des  siècles 
et  durant  des  siècles  peut-être,  des  recherches  y  auraient 
été  opérées,  pensant  y  découvrir  des  trésors  ou  d'autres 
objets  précieux.  L'on  sait  que  les  mardelles  sont  encore 
pour  la  plupart,  dans  les  campagnes^  le  sujet  de  supersti- 
tions de  différente  nature  ;  qu'ainsi  tout  ce  qui  pouvait  y 
exister  d'intéressant  pour  la  science  et  contribuer  à  en 
révéler  l'antique  destination,  aurait  été  enlevé  et  détruit. 
L'esprit  de  convoitise  et  de  méfiance  des  paysans  est  trop 
connu  pour  que  nous  insistions  sur  ce  point. 

Après  en  avoir  examiné  un  assez  grand  nombre,  nous 
avons  supposé  que  les  parois  primitives  en  étaient  plus 
raides  qu'elles  ne  le  sont  actuellement  ;  que,  par  la  suite 
des  temps,  les  talus  avaient  pris,  peu  à  peu,  aux  dépens 
de  leurs  bords,  l'inclinaison  naturelle  qu'ils  ont  aujour- 
d'hui et  qui  est  inaltérable.  Ces  excavations  alors  auraient 


XL"   SESSIUN,    A    GIIATEAUIIOIJX.  153 

eu,  à  l'origine,  en  couronne,  un  périmètre  un  peu  plus 
petit,  et,  au  plafond,  un  périmètre,  au  contraire,  un  peu 
plus  grand  que  ceux  qui  les  limitent  maintenant.  Nos 
recherches  furent  dirigées  en  conséquence  sous  les  talus, 
pensant  obtenir  de  meilleurs  résultats.  Elles  ont  eu  lieu, 
en  grande  partie,  entre  le  sud  et  le  nord-ouest,  du  côté 
où  le  fond  est  habituellement  à  l'abri  des  vents  pluvieux, 
qui  régnent  si  longtemps  dans  nos  contrées. 

Dans  celles  que  nous  avons  pu  explorer,  nous  avons  con- 
staté, à  50  centimètres  environ  au-dessous  delà  ligne  d'in- 
clinaison de  terres,  la  trace  de  foyers,  dont  les  pierres  rap- 
portées ou  le  roc  même  étaient  calcinés  par  le  feu,  et  trouvé, 
auprès,  de  petits  morceaux  de  charbon  isolés  ou  enveloppés 
de  grumeaux  de  cendres.  Dans  une,  dite  du  Bois-l'Abbé,  à 
sept  ou  huit  cents  mètres  environ  du  bourg  de  Saint-Au- 
bin, nous  avons  rais  à  découvert  deux  foyers,  situés,  l'un 
au  nord,  l'autre  à  l'ouest.  Les  pierres  brutes,  les  gros 
moellons  qui  étaient  disposés  comme  on  les  dispose  encore 
aujourd'hui  dans  les  champs,  pour  supporter  le  bois  ou  les 
broussailles,  étaient  brûlés  sur  une  profondeur  de  3  centi- 
mètres environ  et  noircis  dans  toute  la  largeur.  Une  cou- 
che de  cendre,  d'une  hauteur  moyenne  de  10  centimètres 
au  moins,  était  répandue  à  40  centimètres  au-dessous 
du  fond  actuel,  sur  toute  la  surface.  Il  y  gisait,  pêle-mêle, 
des  os  calcinés  d'animaux,  dont  plusieurs,  les  plus  gros, 
de  3  centimètres  environ  de  diamètre,  étaient  divisés  en 
deux  dans  le  sens  de  la  largeur,  et  dont  les  autres  étaient 
brisés  ou  cassés.  Des  débris  de  poteries  circulaires,  mal 
pétries  à  la  main,  d'une  teinte  gris  jaune,  étaient  près  des 
pierres  de  l'un  des  foyers.  Dans  cette  même  excavation,  à 
1  mètre  environ  au-dessous  de  la  pente  actuelle  desjalus, 
on  a  trouvé  le  squelette  d'un  homme,  que  l'un  des  méde- 
cins d'Issoudun,  qui  a  visité  cette  mardelle  avec  nous,  a 


154       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

pensé  être  âgé  de  quarante  ans  environ.  La  forme  parti- 
culière de  la  sépulture  accusait  une  haute  antiquité.  Le 
corps  reposait  sur  le  terrain  naturel,  qui  paraissait  avoir 
été  aplani  en  cet  endroit.  Au-dessus  des  pieds  et  de  la  tète, 
une  grande  dalle  était  supportée,  à  chaque  bout,  par  des 
pierres  brutes  posées  de  champ  ;  le  reste  du  corps  était 
couvert  <le  petits  moellons  ordinaires,  sans  aucune  symé- 
trie. Nous  n'avions  pas  voulu  toucher  à  ces  ossements, 
principalement  à  ceux  du  crâne,  que  nous  avions  entourés 
de  terre,  avant  que  des  personnes  plus  compétentes  que 
nous  en  pareille  matière  pussent  déterminer  à  quelle  race 
d'hommes  ce  corps  pouvait  appartenir.  Malheureusement, 
des  pâtres  ou  des  laboureurs,  dont  la  curiosité  avait  été 
éveillée,  vinrent,  en  l'absence  des  ouvriers,  découvrir  ces 
restes,  et  enlevèrent  la  tête,  qui  tomba  en  poussière  sous 
leurs  doigts.  Il  n'en  resta  que  l'empreinte  sur  le  sol,  qui, 
quoique  bien  accusée,  ne  put  être  d'aucune  utilité  pour 
le  but  que  nous  cherchions  à  obtenir.  Le  squelette  lut 
recueilli  et  conservé  par  le  docteur  dont  nous  venons  de 
parler.  Dans  une  autre  mardelle,  de  la  même  commune, 
située  dans  le  bois  de  Bommiers,  nous  avons  mis  à  décou- 
vert également  les  pierres  d'un  foyer  artificiel,  du  char- 
bon et  de  la  cendre,  mais  sans  o-ssements. 

L'on  sait  que  l'un  des  traits  caractéristiques  de  ces  sortes 
d'excavations  est  que,  à  de  rares  exceptions,  les  eaux  plu- 
viales s'en  écoulent  avec  rapidité.  On  a  prétendu  qu'alors 
les  couches  retentives  en  avaient  été  enlevées  à  dessein. 
Nous  croyons  que  c'est  une  erreur.  Sur  le  plafond  de  cette 
dernière  mardelle  et  sur  celui  d'une  seconde,  située  en  la 
commune  de  Guilly,  où,  depuis  longtemps,  l'on  extrait  de 
l'argile,  la  terre  grasse  a  été  recouverte  d'une  couche 
de  pierre  concassée  (comme  du  macadam)^  de  50  centi- 
mètres environ  d'épaisseur.  Cet  empierrement  s'étend,  eu 


XL"   SESSION,    A   OllATEAUROUX.  ihl> 

conservant  une  pente  assez  sensible  à  l'œil,  du  foyer,  qui 
est  le  point  le  plus  élevé  du  fond,  jusqu'aux  extrémités 
opposées,  même  sous  les  talus. 

Dans  trois  autres,  situées  commune  de  Sainte-Fauste, 
nous  avons  rencontré  également  de  p^ros  moellons  pour 
foyers,  portant  les  marques  ineffaçables  de  leur  destination. 
L'aire  ou  la  plate-forme  en  a  été  nivelée,  elle  est  de  la 
même  nature  calcaire  que  le  terrain  naturel,  et  de  petites 
pierres  non  cassées,  semblables  à  celles  qui  couvrent  le  sol 
environnant,  paraissent  y  avoir  été  répandues  irréguliè- 
rement sur  une  épaisseur  moyenne  de  10  centimètres. 
Néanmoins  ces  pierres  peuvent,  à  une  époque  reculée, 
avoir  été  amenées  là  par  les  eaux  pluviales  en  les  roulant  sur 
les  talus.  L'empierrement,  dans  tous  les  cas,  n'a  aucun 
rapport  avec  celui  de  la  mardelle  de  Saint-Aubin.  A  qua- 
tre autres  encore,  prises  sur  la  commune  de  la  Champe- 
noise,et  à  deux  situées  sur  la  commune  de  Dun-le-Poëlier, 
l'emplacement  des  foyers  se  remarquait  par  des  pierres 
brûlées,  attenantes  au  sol,  d'une  couleur  rouge  de  brique. 
Deux  ans  après,  la  teinte  rouge,  sur  deux  d'entre  ceux 
que  nous  avons  été  à  même  de  visiter  une  seconde  fois, 
était  complètement  disparue  ;  le  temps  et  la  pluie  avaient 
blanchi  les  pierres,  qui  étaient  feuilletées  et  presque  tour- 
nées en  poussière.  Tous  ces  foyers  existaient  dans  l'espace 
compris  entre  le  sud  et  le  nord-ouest. 

Nous  y  avons  trouvé,  à  la  base  des  talus,  presque  à  la 
surface,  une  pierre  de  fronde  en  caillou  arrondi  par  le 
travail  de  l'homme;  près  de  l'un  des  foyers,  des  morceaux 
ronds  d'un  bâton  en  argile  cuite,  rouge  de  brique,  mesu- 
rant ensemble  40  centimètres  de  longueur,  sur  3  centi- 
mètres de  diaruètre  :  ces  petits  cylindres,  par  l'irrégula- 
rité de  la  surface,  montraient  qu'ils  avaient  été  façonnés 
à  la  main.  Ailleurs,  vers  le  milieu  de  la  plate-forme,  nous 


156       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

avons  rencontré  des  morceaux  d'une  meule  de  moulin  à 

bras,  des  débris  de  poteries  épaisses,  d'une  teinte  jaune  gris, 
grossièrement  fabriquées  et  calcinées  par  le  feu,  et,  pres- 
que à  fleur  de  terre,  une  hache  de  silex,  très-informe, 
provenant  d'un  gros  caillou,  dont  deux  des  faces  sont 
abattues  pour  en  former  les  joues  et  le  tranchant,  ainsi 
que  d'autres  petites  pierres  arrondies  d'une  manière 
incomplète,  qui  nous  ont  paiu  également  avoir  été  très- 
imparfaitement  travaillées  (1). 

Antérieurement  à  nos  explorations,  M.  de  la  Villegille 
a  fait  connaître  que  M.  de  la  Châtre,  ancien  sous-préfet 
d'issoudun,  avait  trouvé,  par  hasard,  au  fond  d'une 
mardelle,  des  morceaux  de  charbon  ;  dans  une  autre 
de  Saint-Pierre-de-Jards,  on  a  rencontré  «des,  briques 
très-épaisses,  comme  il  ne  s'en  fait  plus  dans  le  pays, 
dont  une  partie  avait  des  rebords,  et  une  grande  quantité 
de  vieille  ferraille.  »  Dans  la  mar(je  de  Reuilly,  ce  même 
savant  a  retiré  «  un  fragment  peu  considérable  de  tuile  à 
rebord,  et  un  autre  débris  de  poterie  romaine,  ressemblant 
assez  à  la  base  d'une  amphore.  » 

La  Normandie,  province  où  il  parait  exister  beaucoup 
de  mardelles  «  à  Gharnpobert,'  dans  l'herbage  appelé  les 
Crières,  situé  à  gauche  du  grand  chemin,  en  rétablissant 
une  ancienne  mare  de  forme  circulaire,  M.  de  Colleville  a 
trouvé,  en  1834,   plusieurs  antiquités.  »  «  Elles  ^consis- 

(1)  En  présence  de  ces  indices,  nous  suspendîmes  nos  recher- 
ches pour  étudier,  au  préalable,  quelques  grands  musées  des 
âges  de  pierre,  afin  d'être  plus  à  même  de  recueillir  tout  ce  qui 
pouvait  se  rapporter  à  ces  époques  reculées.  En  1869,  nous 
allions  reprendre  plus  fructueusement  la  tache  que  nous  nous 
étions  imposée,  quand  de  gravt^s  événements,  étrangers  au  tra- 
vail qui  nous  occup,e  nous  forcèrent  de  l'interrompre  définiti- 
vement. 


XL**   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  Mu 

taient,  »  ajouteM.dela  Villcgille,  «en  tuiles  romaines,  en 
fer  oxydé,  en  valves  d'huitres,  en  ossements  de  bœuls,  en 
troncs  d'arbres,  en  un  grand  nombre  de  poteries  de  plu- 
sieurs sortes  et  de  débris  de  vases  en  terre  cuite.»  M.  Arsène 
Maillard,  sous-inspecteur  des  forêts  de  l'arrondissement 
de  Rouen,  dans  une  autre  située  dans  la  forêt  de  Rou- 
mare,  a  extrait  «  un  mors  droit  ou  bridon,  une  lame  de 
couteau  et  une  espèce  de  pioche,  le  tout  en  fer  très- 
oxydé.  » 

Tous  ces  objets  sont  loin  d'avoir  la  même  origine  ;  ils  se 
rapportent  à  des  époques  archéologiques  bien  différentes. 
Pour  chercher  à  découvrir  la  destination  des  mardelles  et 
les  peuples  qui  les  ont  creusées,  il  est  indispensable 
d'avoir  recours  à  d'autres  considérations. 

MM.  Bordier  et  Ed.  Charton,  dans  leur  Histoire  de 
France  d'après  les  monuments,  et  M.  le  baron  de  Bello- 
guet,  dans  son  Ethnogénie  Gauloise,  tranchent  la  ques- 
tion (-l).  Ils  les  attribuent  aux  Gaulois  et  les  considèrent 
comme  l'étage  souterrain  de  leurs  cabanes.  Avant  de 
discuter  cette  opinion,  il  nous  semble  nécessaire  de  tran- 
scrire les  renseignements  que  donnent  ces  historiens  sur 
les  habitations  celtiques. 

«  Les  habitations  gauloises,  disent  les  premiers,  étaient 
ordinairement  placées  sur  la  lisière  des  bois  ou  sur  le  bord 
des  fleuves.  L'extrême  légèreté  de  leurs  constructions 
obligeaient  les  habitants  à  chercher,  de  cette  manière,  un 

(1)  M.  de  Belloguet  cite  dans  son  ouvrage  (§  IX)  deux  mé- 
moires sur  les  mardelles,  que  nous  n'avons  pu  nous  procurer: 
l'un,  de  M.  Mond'heux,  qui  regarde  ces  excavations  comme  des 
réservoirs  d'eau;  l'autre,  de  M.  Lacroix,  qui  réfute  au  moins 
en  partie  cette  opinion,  et  qui  les  considère  comme  ayant 
(t  servi  d'habitations,  étant  recouvertes  d'abris  en  bois.  » 


iriS  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

refuge  contre  l'ardeur  du  soleil,  qu'ils  redoutaient  plus 
que  la  rigueur  du  froid.  Les  maisons,  ordinairement  de 
forme  ronde  et  surmontées  d'un  toit  conique,  étaient  de 
bois,  quelquefois  de  pierres  brutes,  jointes  avec  de  la 
terre  glaise  ;  d'autres  fois,  les  murailles  du  logis  étaient 
faites  de  deux  claies  d'osier,  fixées  à  quelques  centimètres 
l'une  de  l'autre,  et  dans  l'intervalle  desquelles  on  pétris- 
sait de  la  terre  argileuse  et  de  la  paille  hachée.  Pour  les 
familles  du  peuple,  l'édifice  était  une  maison  ronde,  de 
6  à  12  mètres  de  tour  (3  à  4  mètres  de  largeur),  et  cou- 
verte de  chaume  et  de  planchettes  de  bois  réunies  au 
sommet,  comme  sont  encore  les  huttes  que  nos  charbon- 
niers se  construisent  dans  les  bois.  Les  maisons  riches 
pouvaient  avoir  jusqu'à  une  quarantaine  de  mètres  en 
largeur;  souvent  il  n'y  avait  pas  de  fenêtres. 

«  Le  toit  descendant  fort  bas,  on  gagnait  de  la  hauteur 
en  creusant  le  sol  de  l'habitation  jusqu'à  une  certaine 
profondeur,  et  l'on  entrait,  ou  plutôt  l'on  descendait  par 
une  petite  rampe  ménagée  devant  la  porte.  Le  fond  était 
battu,  bien  uni  et  sans  humidité,  la  cavité  étant  toujours 
creusée  sur  un  terrain  perméable,  ou  rendu  tel  par 
quelques  fuites  pratiquées  artificiellement.  Les  grandes 
maisons  étaient  sans  doute  partagées  à  l'intérieur  par  des 
cloisons  formant  divers  appartements.  Dans  quelques- 
unes  de  ces  cavités  qui  existent  encore,  on  remarque,  à 
moitié  delà  hauteur,  une  sorte  de  rebord  intérieur ,  régnant 
tout  autour  du  creux  et  ayant  probablement  servi  à  con- 
struire un  plancher.  En  parlant  de  ces  demeures  si  simples, 
un  célèbre  architecte  romain  disait,  avec  un  dédain  bien 
justifié,  d'ailleurs  :  «  Plusieurs  peuples  ne  construisent 
«  d'édifices  qu'avec  des  branches  d'arbres,  des  roseaux  et 
«  de  la  boue.  C'est  ce  qui  a  lieu  en  Gaule,  en  Espagne  et 
«  dans  les  îles  Britanniques.  » 


XI/   SESSION,    A   r.IlATEAUROUX.  159 

«  Bien  que  dix-huit  siècles  nous  en  séparent,  il  est 
possible  de  voir  encore  aujourd'hui,  sur  notre  sol,  quel- 
ques traces  de  ces  cabanes  rondes  que  les  Gaulois  construi- 
saient. Le  bois,  le  chaume  et  l'argile  ont  sans  doute 
disparu  en  peu  de  temps,  mais  les  excavations  circulaires 
dont  nous  venons  de  parler ,  subsistent  en  plusieurs 
endroits  de  la  France,  de  l'Allemagne  et  de  l'Angleterre, 
surtout  dans  l'intérieur  des  forets.  Dans  le  centre  de  la 
France,  elles  portent  le  nom  de  mardelles  ou  margelles  ; 
le  peuple  les  appelle  fosses  à  loups.  On  en  voit  dans  le 
Berry,  dans  la  Normandie,  dans  les  environs  de  Stras- 
bourg, à  Alaise  (Doubs),  à  Entremont  près  d'Aix. 

«  Il  n'y  avait  pas  d'autres  habitations  que  les  cabanes 
disséminées  dans  les  bois,  dans  les  campagnes,  sur  les 
eaux,  quelquefois  dans  les  grottes  des  montagnes  ou  dans 
les  souterrains,  et  elles  formaient  tout  au  plus  des  bour- 
gades. Les  Gaulois,  avant  la  conquête  romaine,  ne  con- 
struisaient pas  de  monuments  ;  ils  n'avaient  point  de 
villes  (1),  et  Marseille  elle-même,  la  ville  grecque,  n'avait 
encore  du  temps  de  César,  pour  abriter  ses  habitants,  que 
des  maisons  de  bois  et  de  chaume.  » 

Ces  passages  peuvent  également  être  considérés,  quoique 
publiés  bien  antérieurement,  comme  le  résumé  de  la 
partie  du  savant  ouvrage  de  M.  de  Belloguet,  consacrée 
aux  habitations  celtiques,  où  le  texte  des  historiens  de 
l'antiquité  et  les  documents  dûs  aux  archéologues 
modernes  sont  exposés  avec  la  plus  grande  lucidité. 
Néanmoins,  à  cet  égard,  plusieurs  méprises  que  nous  ne 

(1)  C'est,  il  nous  semble,  une  erreur.  César  se  sert  toujours, 
avec  des  acceptions  différentes  ,  des  expressions  :  oppidum, 
viens,  œdificiuni,  correspondant  aux  mots  :  ville,  bourg  et  mai- 
son particulière.  Les  Germains  seuls  n'avaient  pas  de  villes. 


160       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

pouvons  passer  sous  silence,  reproduites  probablement 
d'après  d'autres  ouvrages,  s'y  sont  glissées,  et  pourraient 
peut-être  contribuer  à  faire  adopter  des  idées  qui  nous 
paraissent  erronées.  «  Les  mardelles,  dit-il,  passaient 
pour  avoir  servi  de  demeures  aux  anciennes  populations 
bretonnes  ou  germaniques,  longtemps  avant  que  M.  de 
la  Villegille  les  signalât,  le  premier  parmi  nous,  comme 
des  habitations  celtiques.  »  M.  de  la  Villegille  n'a  émis 
aucune  opinion;  il  parait  incliner,  au  contraire,  vers  ceux 
qui  supposent  que  ces  excavations  avaient  une  destination 
religieuse.  «  Cette  explication  (nous  copions  textuellement 
son  mémoire),  différente  de  toutes  celles  qu'on  a  données 
jusqu'ici,  et  qui  se  présente  avec  un  certain  caractère  de 
vraisemblance,  n'est  pas  appuyée  néanmoins  d'un  assez 
grand  nombre  de  preuves  pour  être  entièrement  satis- 
faisante. »  M.  de  la  Villegille  pense  que  l'on  ne  peut  se 
prononcer  qu'à  la  suite  de  nouvelles  explorations,  de 
nouvelles  recherches. 

Sur  les  mardelles  de  l'Allemagne,  M.  de  Belloguet 
arrive  à  une  conclusion  qui  nous  paraît  peu  admissible  : 
a  Elles  ont  jusqu'à  300  pieds  de  tour  (32  mètres  environ 
de  diamètre)  et  40  pieds  (43  mètres  environ)  d'excavation; 
plusieurs  présentent  les  traces  de  dispositions  prises  pour 
supporter  des  poutres.  Le  tout  était  abrité  par  des  plan- 
chers recouverts  avec  de  la  terre  glaise,  de  la  paille  et  du 
fumier.  »  Nous  ignorons  quelle  forme  et  quelle  inclinai- 
son il  eût  fallu  donner  à  de  semblables  planchers,  pour 
couvrir  et  abriter  des  excavations  aussi  vastes.  Ces  préten- 
tions de  convertir  les  mardelles  en  demeures  gauloises, 
nous  paraissent,  d'ailleurs,  entièrement  gratuites,  et  infir- 
mées complètement  par  les  données  que  nous  possédons. 
Il  suffît,  pour  s'en  convaincre,  de  bien  se  rendre  compte 
de  la  forme,  de  la  disposition  des  habitations  gauloises. 


XL*   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  iC)\ 

bretonnes  et  germaines,  de  se  bien  pénétrer  des  usages 
des  anciens  peuples  de  l'Occident,  Nous  avons,  dans  ce 
but,  cbercbé  à  réunir  les  principaux  détails  que  l'histoire 
nous  en  a  conservés.  Vitruve,  César,  qui  étaient  contem- 
porains, et  Strabon,  qui  vivait  quelque  temps  après, 
donnent  à  cet  égard,  des  renseignements  qui  caractérisent 
suffisamment  leur  manière  de  construire. 

Strabon  (1)  fait  connaître  (t.  Il,  liv.  iv)  que  «  les  Gau- 
lois habitent  des  maisons  vastes,  construites  avec  des 
planches  et  des  claies,  et  terminées  par  un  toit  cintré  et 
couvert  d'un  chaume  épais.  » 

Vitruve  (t.  I,  liv.  ii)  n'est  pas  moins  explicite.  Mais, 
écrivant  sur  l'architecture  en  général,  il  entre  dans  des 
développements  trop  longs  pour  les  reproduire  en  entier. 
Après  avoir  décrit  les  premiers  essais  de  l'homme,  jeté  nu 
au  milieu  des  bois,  il  fait  remarquer  que,  pour  être  à 
«  l'abri  de  la  pluie  et  du  soleil  »,  les  hommes  mirent  en 
terre  des  perches  fourchues,  entrelacées  de  branches,  dont 
les  vides  étaient  remplis  «  avec  de  la  terre  grasse  pour  en 
«  faire  des  murs  »  ;  qu'au-dessus,  ils  posèrent,  en  travers, 
des  pièces  de  bois  recouvertes  «  de  roseaux  et  de  feuilles  », 
enfin  que  plus  tard,  ils  «  fixent  des  combles  qu'ils  cou- 

«  vrirent  de  terre  grasse Tel  fut,  continue-t-il,  l'ori- 

«  gine  des  premières  maisons.  Nous  pouvons  nous  en 
«  convaincre  par  celles  que  nous  voyons  encore  aujour- 
«  d'hui  chez  les  nations  étrangères.  En  Gaule,  en  Espagne, 
«  en  Liisitanie,  en  Aquitaine,  elles  sont  construites  avec 
«  les  mêmes  matériaux  et  recouvertes  de  feuilles  et  de 

(i)  Nous  nous  sommes  servi,  pour  Strabon,  de  la  traduction 
de  M.  Laporte  de  Theil ,  faite  par  ordre  du  gouvernement  impé- 
rial (1809);  pour  les  auteurs  latins,  des  traductions  de  la  collec- 
tion Pauckouke. 

XL"  SESSION.  \i 


462  CONGRÈS  ARCIIKOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

«  bardeaux  de  chêne.  »  Il  parle  ensuite  de  celles  des  Col- 
chidiens  et  des  Phrygiens,  et  ajoute  (|ue  ces  peuples  cou- 
vrent leurs  chaumières  «  avec  des  herbes  des  marais.  »  A 
Marseille,  «  nous  pouvons  remarquer  qu'au  lieu  de  tuiles, 
«  c'est  de  la  terre  pétrie  avec  de  la  paille  qui  recouvre  les 
toits.  »  À  Athènes,  l'Aréopage  «  a  été  conservé  jusqu'à  ce 
«  jour  avec  son  toit  d'argile,  comme  un  modèle  de  l'anti- 
«  quité,  et  dans  le  Capitole  on  peut  regarder  comme  un 
«  souvenir,  comme  un  échantillon  des  mœurs  antiques, 
«  la  chaumière  de  Romulus,  qu'on  a  conservée  avec  sa  cou- 
«  verture  de  chaume,  dans  le  lieu  destiné  aux  choses 
«  sacrées.  » 

César  ne  donne  aucun  détail  particulier  sur  les  habita- 
tions des  Gaulois,  qui  lui  paraissaient,  sans  doute,  assez 
connues,  puisqu'elles  étaient  semblables  à  celles  des  autres 
peuples.  Malgré  cela,  nous  voyons  dans  les  Commentah^es 
(liv.  v,  §  XLiii),  à  l'occasion  du  siège  à'Avaricum,  qu'à  un 
instant  les  habitants  incendièrent  «  les  huttes  des  soldats 
romains  couvertes  en  paille  à  la  manière  des  Gaulois.  » 
Toutes  ces  indications  sont  précises  et  ne  laissent  aucun 
doute  sur  la  nature  de  ces  constructions.  Les  demeures 
rustiques  de  nos  pères  étaient  une  conséquence  de  leur 
religion,  qui,  d'après  M.  Henri  Martin,  empêchait  tout 
développement  de  l'architecture. 

Les  maisons  des  Germains  étaient  peut-être  plus  légères 
ou  plus  simples  que  les  précédentes,  puisque  quelques- 
unes  au  moins  pouvaient  être  démontées  et  chargées  sur 
des  chariots.  Les  mœurs  de  ces  peuples,  d'après  Strabon 
(t.  III,  chap.  m),  étaient,  à  peu  de  chose  près,  les  mêmes 
que  celles  des  Gaulois.  L'émigration  facile  y  est  commune; 
«  elle  vient  de  ce  qu'accoutumés  à  une  vie  i'rugale,  ils  n3 
s'occupent  ni  d'agriculture,  ni  <iu  soin  de  faire  des  pro- 
visions; qu'ils  habitent  de  méchantes  cabanes  et  se  conten- 


XL*    SESSION,    A    CnATE\UROUX.  163 

tent  (le  vivre  au  jour  la  journée.  La  plupart  tirent  leur 
nourriture  de  bestiaux,  à  la  manière  des  peuples  nomades; 
et,  de  même  que  ces  derniers,  ils  chargent,  au  besoin, 
leurs  habitations  sur  des  chariots,  et  vont  s'établir  avec 
leur  bétail  où  bon  leur  semble.  »  Sans  doute,  avec  le 
temps,  ces  habitudes  tendirent  à  se  modifier,  car  nous 
remarquons  dans  César  (liv.  vi,  §  xxii)  que,  dans  le  but 
de  conserver  les  mœurs  primitives,  d'entretenir  le  goût  de 
la  guerre,  d'empêcher  qu'on  ne  «  se  garantisse  de  la  saison 
par  des  habitations  plus  commodes  » ,  de  prévenir  l'amour 
des  richesses,  la  communauté  de  la  terre  était  absolue. 

Tacite,  qui  écrivait  plus  tard,  donne  plus  de  renseigne- 
ments sur  ces  demeures,  qui  paraissent  être  un  peu  plus 
confortables  que  par  le  passé,  bien  qu'étant  toujours  très- 
simples.  Elles  étaient  isolées  les  unes  des  autres  par  un 
espace  de  terrain  assez  grand.  Les  Germains  n'avaient  pas 
de  villes  :  »  ils  ne  font  usage  ni  de  ciment  ni  de  tuiles  ; 
leurs  matériaux  sont  toujours  bruts  ;  rien  n'est  donné  à 
la  décoration  ni  à  l'agrément  ;  quslques  parties  seulement 
sont  enduites  avec  plus  de  soin  d'une  terre  si  pure  et  si 
brillante  qu'on  la  dirait  peinte  et  nuancée  de  couleurs.  » 
Ainsi,  non-seulement  ces  cabanes  étaient  très-pauvres, 
mais  les  Germains  tenaient  à  y  conserver,  par  des  raisons 
politiques,  toute  la  simplicité  primitive. 

La  reproduction  figurée  des  cabanes  des  Gaulois  sur  les 
bas-reliefs  de  la  statue  de  Melpomène,  du  musée  du  Louvre, 
et  de  celles  des  Germains  sur  la  colonne  Antonine,  corro- 
bore les  textes  qui  viennent  d'être  analysés.  Elles  sont,  les 
unes  et  les  autres,  de  forme  ronde,  couvertes  en  dôme; 
des  branches  d'arbres,  de  la  paille  ou  des  roseaux  parais- 
sent en  être  les  seuls  matériaux.  Celles  des  Germains  n'ont 
pas  de  fenêtres,  mais  une  ouverture  est  indiquée  aux 
autres  :  les  premières  paraissent  moins  élevées  que  les 


l()i       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

secondes,  c'est-à-dire  inoins  hautes  relativement  à  leur  lar- 
geur ou  à  leur  diamètre.  Nous  ajouterons  qu'un  spécimen 
de  celles  du  Latium,  telle  que,  très-probablement,  devait 
être  la  chaumière  deRomulus,  est  rapportée  à  l'article  Casa, 
(\\i  Dictionnaire  des  antiquités,  deRich,  traduit  de  l'anglais 
par  M.  Cheruel.  Cette  gravure  est  la  reproduction  d'un 
vase  en  poterie,  conservé  maintenant  parmi  les  antiquités 
du  musée  britannique.  La  cabane  est  ovale,  les  murailles 
en  sont  proportionnellement  assez  basses,  des  pièces  de 
bois  y  figurent  les  montants  et  les  traverses,  une  porte 
large  y  donne  accès  ;  la  couverture,  en  chaume,  est  épaisse 
et  élevée,  elle  est  supportée  par  des  chevrons,  et  a  la 
forme  d'un  dôme  reposant  sur  une  base  elliptique.  Elle  se 
rapporte  ainsi,  comme  on  le  voit,  entièrement  aux  précé- 
dentes. 

Nous  retrouvons  encore  le  même  type  de  construction 
en  usage  dans  les  Iles  Britanniques,  occupées,  comme  on 
le  sait,  par  les  Gaulois  et  les  Kimris.  Phythéas,  de  la  ville 
de  Marseille,  qui  voyageait  dans  le  iv''  siècle  avant  l'ère 
chrétienne,  et  qui,  dans  ses  navigations,  a  parcouru  les 
côtes  de  l'Angleterre  sur  la  Manche  et  sur  la  mer  du  Nord, 
dit  également  (1)  :  «  Les  maisons  des  Bretons  étaient  con- 
struites pour  la  plupart  en  chaume  et  en  bois,  les  pluies 
fréquentes  ne  permettant  pas  qu'ils  eussent  des  aires  à 
ciel  découvert  ;  ils  renfermaient  les  épis   de  blés  qu'ils 

avaient  coupés  dans  des  caves  souterraines l'Ile  était 

très-peuplée,  etc.  »  Strabon  (liv.  iv)  entre  aussi  dans 
quelques  détails  :  «  Les  bois  leur  tiennent  lieu  de  villes. 
Après  avoir  formé  une  vaste  enceinte  d'abatis  d'arbres,  ils 
y  construisent  des  cabanes  pour  leurs  demeures  et  des 
étables  pour  loger  leurs  troupeaux.  »  César  (liv.  v,  §  xii) 

(l)  Foijageurs  nnciens,  l"^""  vol.,  par  M.  Ed.  Charton. 


XL'   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  165 

dit  encore  :  «  L'Ile  est  extrêmement  peuplée.  Les  maisons 
y  sont  très-nombreuses  et  presque  semblables  à  celles  des 
Gaulois  ;  le  bétail  y  est  abondant »  Au  §  xiv,  il  con- 
firme l'analogie  des  mœurs  de  ces  deux  peuples,  analogie 
que  Strabon  (t.  III)  a  déjà  reconnue  avec  les  Germains. 
Doit-on  faire  remarquer  qu'il  ne  saurait  en  être  diffé- 
remment, en  raison  de  leur  origine  commune? 

De  cet  ensemble  de  preuves,  il  résulte  clairement  que, 
pendant  des  siècles,  aussi  loin  que  l'histoire  certaine  peut 
remonter,  tous  ces  anciens  peuples  élevaient  leurs  cabanes 
ou  maisons  de  la  même  manière  :  elles  étaient  circu- 
laires, elles  avaient  généralement  une  charpente  en  forme 
de  dôme;  elles  étaient  couvertes  de  bardeaux  de  paille  ou  de 
jonc,  et  entourées  de  murailles  ou  de  cloisons  d'une  grande 
légèreté.  Aucun  des  historiens  de  l'antiquité  n'indique 
d'étage  souterrain  (1)  ni  de  plate-forme  intérieure  creusée 
dans  le  sol,  ni  de  dimensions,  soit  en  largeur,  soit  en  hau- 

(1)  M.  de  Bellogiiet  prétend,  au  contraire,  et  d'autres  auteurs 
sont  de  son  avis,  que  les  demeures  souterraines  des  Germains 
sont  jiislitiées  par  le  texte  de  Tacite  {De  la  Germanie,  §  xvi), 
et  celles  des  Gaulois  par  le  passage  de  Florus  (liv.  II,  §  m)  con- 
cernant la  guerre  des  Ligures. 

Nous  ne  pensons  pas  que  les  traductions  sur  lesquelles  on 
s'appuie  reproduisent  exactement  le  sens  de  la  pensée  de  ces 
anciens  historiens.  L'importance  de  la  question  justifie,  à  notre 
point  de  vue,  les  développements  dans  lesquels  nous  entrons. 
Tacite  écrit  à  l'égard  des  Germains  :  «  Soient  et  subterraneos 
xpecus  aperire,  eosque  midto  insiiper  flmo  onerant,  suffu- 
ffium  hiemi  et  receptaculum  frugibus.  » 

M.  Nisard  traduit  effectivement  ce  passage  par  le  suivant  : 
«  Ils  (les  Germains)  ont  aussi  coutume  de  se  creuser  des 
demeures  souterraines,  sur  lesquelles  ils  entassent  du  fumier  : 
c'est  un  refuge  contre  l'hiver  et  un  lieu  de  dépôt  pour  les 


160       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

leur.  Nous  ignorons  où  MM.  Bordier,  Gharton  et  de  Bel- 

loguet,  habituellement  si  exacts,  si  précis  dans  leurs  écrits, 

ont  puisé  les  renseignements  qu'ils  donnent  à  cet  égard. 

Les  mardelles  ont  bien  une  forme  circulaire,  elles  ont 

grains.  >  Il  continue  ainsi  la  traduction  de  ce  paragraphe,  dont 
la  fln  semble  contredire  la  première  partie  :  «  La  disposition 
de  ces  lieux  adoucit  l'âpreté  du  froid  et,  si  l'ennemi  vient,  il  ne 
trouve  à  ravager  que  les  choses  (il  est  fait  exclusion  des  per- 
sonnes) qui  sont  à  la  surface,  mais  pour  celles  qui  sont  cachées 
et  enfouies,  ou  il  ne  les  découvre  pas,  ou  elles  le  déroutent  par 
la  nécessité  de  les  chercher.  » 

M.  Panckouke  donne  une  version  différente  :  «  Ils  ont  aussi 
coutume  de  se  creuser  des  demeures  souterraines,  qu'ils  cou- 
vrent de  monceaux  de  fumier  ;  c'est  un  refuge  contre  l'hiver  ; 
c'est  un  lieu  de  dépôt  pour  les  grains.  Le  froid  n'y  peut  péné- 
trer, et  si,  par  hasard,  l'ennemi  survient,  il  ravage  le  pays 
découvert;  mais  ces  provisions  cachées  ou  enfouies  (toute  sup- 
position autre  que  des  choses  est  ainsi  écartée)  ou  sont  inaper- 
çues ou  le  déroutent  par  la  nécessité  de  les  chercher.  » 

L'interprétation  de  ce  passage  semble  reposer  uniquement  sur 
le  sens  du  mot  specus  ;  MM.  Quicherat  et  Daveluy,  dans  leur 
Dictionnai7-e  latin-français,  donnent  pour  équivalent  de  ce 
mot  :  grotte,  antre,  caverne,  gouffre  ,  souterrain;  et,  comme 
exemple,  rendent  l'expression  :  aperire  specus  subterraneos 
par  celle-ci  :  ouvrir  des  galeries  souterraines. 

Nous  pensons  que  cette  dernière  version  qui  se  rapproche 
le  plus  de  celle  de  M.  Panckouke,  est  seule  admissible,  d'au- 
tant plus  que  l'on  sait  que  les  Gaulois  creusaient  aussi  des 
galeries  souterraines,  pour  s'y  réfugier  momentanément,  en 
cas  de  surprise,  ou  pour  y  déposer  leurs  provisions.  M.  de  Beau- 
fort  a  relevé  et  reproduit,  dans  un  ouvrage  spécial,  les  coupes  et 
les  plans  d'un  certain  nombre  de  ces  souterrains,  qui  ont  une 
forme  toute  particulière,  et  qui  sont  encore  assez  communs  dans 
le  canton  de  Saint-Benoît,  arrondissement  du  Blanc.  Il  en  a  été 


XL*   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  1()7 

été  habitées,  mais  il  nous  semble  impossible  d'avancer 
qu'elles  ont  été  creusées  par  les  populations  de  races  gau- 
loises proprement  dites.  Elles  ne  peuvent  se  rapporter 
aux  dispositions  de  leurs  demeures. 

reconnu  aussi  à  Brion,  canton  de  Levroux  (Indre),  et  dans  un 
grand  nombre  de  localités. 

Quant  au  passage  de  Florns,  nous  ne  pensons  pas  qu'il  ait 
le  moindre  rapport an\  ha hifa fions  souterîxiMes Mnhuées  aux 
Ligures  ou  aux  Gaulois.  C'est  toujours  sur  le  sens  d'un  mot 
latin,  (lu  mot  /atebras,  que  s'étayent  les  hypothèses.  Nous  don- 
nerons quatre  versions  des  passages  où  se  trouvent  cette  expres- 
sion ;  pour  abréger  le  discours,  nous  ne  reproduirons  que  le 
dernier  membre  de  la  phrase  de  Florus. 

Traduction  de  M.  Nisard  :  «  Les  Ligures,  retranchés  au  fond 
des  Alpes,  entre  le  Var  et  la  Macra,  et  cachés  au  milieu  des 
buissons  sauvages,  étaient  plus  difficiles  à  trouver  qu'à  vaincre. 
Leurs  retraites  et  la  promptitude  de  leur  fuite  faisaient  la  sûreté 
de  ces  hommes,  race  infatigable  et  agile,  adonnée  plutôt  au 
brigandage  qu'à  la  guerre....;  enfin  Fulvius  consuma  leurs 
repaires  dans  un  vaste  incendie;  Bébius  les  fit  descendre 
dans  la  plaine,  etc.  » 

Voici  la  phrase  latine  qui  correspond  à  ce  dernier  para- 
graphe :  «  tandem  Fulvius  latebras  eorum  ignlbus  sepsit.  » 

La  version  de  M.  Ragon  (collection  Panckouke)  diffère  un 
peu  de  la  précédente  :  «  Les  Ligures,  cachés  au  pied  des 
Alpes....  dans  des  lieux  hérissés  de  buissons  sauvages, 
étaient  plus  difficiles  à  trouver  qu'à  vaincre  ;  race  d'hommes 
agiles  et  infatigables,  peuples  moins  guerriers  que  brigands,  qui 
mettaient  leur  confiance  dans  la  vigueur  de  leur  fuite  et  la 
profondeur  de  leurs  retraites....]  enfin  le  consul  Fulvius 
incendia  leurs  repaires;  Bébius,  etc.  » 

En  voyant  ces  passages,  nous  croirions,  jusqu'à  un  certain 
point,  assister  à  la  lecture  des  Bulletins  de  la  guerre  d'Afri- 
que, sous  le  maréchal  Bugeaud,  où  plusieurs  fois  nos  soldats 


168       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

Si  Ton  peut  supposer  que  quelques-unes  pouvaient  être 
couvertes,  on  ne  saurait  l'admettre  pour  le  plus  grand 
nombre  ;  leurs  vastes  dimensions  s'y  opposent.  Les  cou- 
vertures eu  chaume  que  l'on  remarque  encore  dans  les 
campagnes,  peuvent  servir  de  termes  de  comparaison 
pour  la  disposition  des  toitures  dont  on  pouvait  faire 
usage.  L'inclinaison  des  perches  sur  les  chaumières  de 
nos  paysans,  est,  au  surplus,  une  donnée  de  l'expérience 

incendièrent,  sur  les  montagnes,  les  immenses  fourrés,  les 
repaires  boisés  qui  servaient  de  refuges  aux  Arabes.  Personne 
n'a  compris  qu'il  s'agissait  alors,  pour  ces  peuples,  de  retraites, 
de  demeures  souterraines.  L'analogie  nous  semble  évidente. 

Nous  aurons  encore  recours  au  Dictionnaire  de  MM.  Quicherat 
et  Daveluy,  pour  l'interprétation  du  mot  latebras.  Ces  auteurs 
lui  donnent  pour  signification  :  cachette,  retraite,  refuge,  repaire, 
tannière,  lieu  de  sûreté.  Aucune  de  ces  expressions  n'a  le  sens 
de  demeures  souterraines.  Enfin,  en  ce  qui  a  trait  à  la  con- 
quête de  la  Bretagne  par  les  Romains  (Tacite,  §  xxxui),  Agri- 
cola,  dans  une  harangue,  parle  ainsi  à  ses  soldats  :  «  Quando 
dabittir  hostis,  quando  a  des  ?  Veniunt  e  latebris  suis 
extrusi  :  et  vota  rirtusque  in  aperto.  »  Traduction  de 
M.  Nisard  :  «  Quand  paraîtra  l'ennemi,  quand  viendra  le  jour 
de  la  bataille?  Le  voilà  cet  ennemi  arraché  de  ses  repaires; 
le  champ  est  ouvert  à  votre  ambition,  etc.  »  Version  de 
M.  Pauckouke  :  «  Quand  se  présentera  l'ennemi,  quand  le 
combat?  Ils  viennent  arrachés  à  leurs  repaire-'i  :  vos  vœux 
sont  accomplis,  etc.  »  On  voit  parce  discours,  que  nous  ne  pou- 
vons reproduire  en  entier,  qu'il  ne  s'agit  toujours  que  de  refuges 
situés  sur  des  montagnes,  et  qui  ne  sauraient  avoir  aucune 
similitude  avec  des  demeures  souterraines.  Il  nous  semble 
évident  que  cette  opinion  que  les  Germains,  les  Gaulois  et 
les  Bretons  habitaient  des  endroits  creusés  .sous  terre  n'est 
pas  appuyée  de  textes  assez  précis  pour  pouvoir  l'admettre  et 
qu'elle  doit  être  complètement  abandonnée. 


XL»  SESSION,   A   CHATEAUUOUX.  169 

immédiate  et  doit  remonter  à  l'origine  des  choses.  Dans 
cette  situation,  la  réunion  des  pièces  de  charpente  sur  le 
failage  doit  nécessairement  former  un  angle  droit,  c'est- 
à-dire  que  la  charpente  est  dite  d'équerre,  suivant  le 
langage  des  ouvriers.  La  distance  verticale  entre  la  base 
des  arbalétriers  et  le  sommet  du  toit  est  égale  à  la  moitié 
de  la  largeur  de  l'espace  couvert.  Pour  les  mardelles  qui 
ont  une  étendue  de  40  mètres,  elle  serait  de  20  mètres, 
c'est-à-dire  qu'elle  atteindrait  la  hauteur  actuelle  des  plus 
hautes  maisons  de  Paris.  Sont-ce  là  les  cabanes  indiquées 
par  les  auteurs  anciens,  et  les  constructions  plus  que 
modestes,  toutes  primitives,  dont  ils  nous  ont  laissé  la 
description?  Nous  faisons  abstraction  des  combles  en 
forme  de  dômes,  qui  exigeraient  une  élévation  encore  plus 
grande.  Et  que  serait-ce  si  ces  toitures  devaient  couvrir 
les  mardelles  dont  la  largeur,  le  petit  diamètre  atteint 
souvent  70,  80,  100,  et  même  150  mètres,  ainsi  que 
l'indique  M.  de  Bussy  dans  un  petit  opuscule  publié  dans 
\q  Recueil  de  la  Société  d' Archéologie  et  d'Histoire  de  la  Mo- 
selle, année  1862?  En  nous  bornant  à  100  mètres,  ce 
serait  environ  50  mètres  d'élévation.  De  semblables  char- 
pentes qui ,  seules ,  surpasseraient  les  dimensions  des 
monuments  de  l'antiquité,  eussent  frappé  d'étonnemwit 
les  écrivains  qui  les  observaient,  et  l'impression  en  lut 
restée  dans  leurs  ouvrages.  Ensuite,  est-il  admissible  de 
supposer  qu'elles  pouvaient  surmonter  les  légères  parois 
ou  murailles  d'osier  qui  entouraient  les  demeures  gau- 
loises ou  germaines?  Et  en  admettant  que  la  base  du  toit 
reposât  sur  le  sol,  quelles  buttées  n'eùt-il  pas  fallu  pour 
maintenir  stables  des  masses  de  bois  aussi  considérables? 
Devons-nous  ajouter  qu'il  eût  été  utile  pour  les  établir, 
de  recourir  à  des  combinaisons  d'assemblages  qui,  l'his- 
toire le  prouve,  n'ont  été  que  le  fruit  des  études  particu- 


170       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

lières  des  peuples  les  plus  avancés  en  civilisation,  et 
inconnues  aux  Gaulois,  aux  Bretons  et  aux  Germains  ? 
Est-il  besoin  encore  de  signaler  qu'avec  des  combles  ayant 
communément  20  mètres  d'élévation,  il  eût  été  inutile  de 
chercher  à  «  gagner  de  la  hauteur  en  creusant  le  sol  de 
l'habitation  »  ?  De  plus  amples  développements  sur  ce 
point  nous  sembleraient  plus  que  superflus. 

On  a  vu  que  ces  excavations  ont  été  rendues  étanches  par 
des  moyens  artificiels,  par  des  dispositions  judicieusement 
prises.  Si  elles  étaient  destinées  à  être  couvertes,  pourquoi 
d'aussi  minutieuses  précautions?  de  quelle  utilité  auraient 
été  les  empierrements  que  nous  avons  trouvés  sur  le  fond? 
D'après  les  auteurs  anciens,  les  Celtes  ,  à  l'origine , 
n'avaient  pas  d'autres  meubles  que  des  ais  servant  tout  au 
plus  de  tables  ;  ils  s'asseyaient  sur  des  bottes  de  paille,  et 
couchaient  simplement  sur  la  terre,  sur  des  amas  d'herbes 
ou  sur  des  peaux  d'animaux.  Ce  n'est  que,  plus  tard,  vers 
le  commencement  du  iii*^  siècle  avant  notre  ère,  que 
«  la  physionomie  de  la  grande  Gaule  change  peu  à  peu, 
surtout  dans  les  régions  du  centre  et  du  sud,  »  que  l'in- 
dustrie s'y  développe,  y  prend  une  grande  extension,  et 
que  le  luxe  et  le  faste  s'y  montrent  excessifs.  On  ne  saurait 
dès  lors  supposer  que  les  Gaulois,  qui  cherchaient  à  se  pro- 
curer une  certaine  commodité  en  couvrant  le  sol  de  leurs 
habitations  d'objets  relativement  moelleux  ,  se  fussent 
appliqués  à  y  répandre  des  pierres  anguleuses  uniquement 
(puisque  les  toitures  des  cabanes  garantissaient  de  l'hu- 
midité) pour  s'y  reposer,  même  sur  des  peaux,  au  lieu 
de  se  borner  à  l'aplanir  ou  à  le  niveler.  On. peut  se 
demander  aussi  pour(iuoi  ceux  ([ui  ont  creusé  les  niar- 
delles  ne  se  sont  pas  contentés  d'abriter  leurs  familles 
sous  des  huttes  comme  celles  de  nos  charbonniers  ; 
pourquoi    ils    se    sont    impose    de    si  grandes    diffi- 


XL''   SESSION,    A   CIlATKAUllOUX.  171 

cultes ,  surtout  quand  il  est  presque  prouvé  que  les 
énormes  déblais  qui  en  sont  sortis  ont  été  transportés  au 
loin  (1)?  M.  de  la  Villegille  a  calculé  que  les  terrasse- 
ments s'élèvent,  pour  quelques-unes,  à  11,000'"'' ,  pour 
plusieurs,  il  faudrait  doubler  ces  chifïres  ;  alors  on 
obtient  des  nombres  incroyables.  Afin  d'en  donner  une 
idée  sensible,  nous  ferons  remarquer  qu'un  volume  de 
12,000™''  seulement  équivaut  à  une  chaussée  qui  aurait 
1  mètre  de  hauteur  sur  1  mètre  de  largeur,  et  trois 
lieues  de  longueur!  Pour  un  grand  nombre,  les  déblais 
sont  de  2,000  à,  :J,000™''.  Des  motifs  puissants  peuvent 
seuls  avoir  poussé  ces  peuples  à  s'imposer  de  pareils 
travaux. 

Croit-on  qu'il  serait  actuellement  téméraire  d'émettre 
une  opinion  sur  le  but,  sur  la  destination  des  mardelles  ? 
Les  forêts  de  l'ancienne  Gaule  étaient  peuplées  d'animaux 
sauvages  nombreux,  et  les  faibles  moyens  de  défense  que 
les  hommes  devaient  avoir  alors  pour  s'en  préserver,  les 
obligeaient  à  rendre  leurs  refuges  presque  inattaquables. 
Ces  excavations  n'auraient-elles  pas  eu,  pour  principal 
motif,  un  caractère  défensif?  De  simples  cabanes  dans  les 
bois,  placées  au  niveau  du  terrain,  auraient  exposé  cer- 
tainement, le  jour  comme  la  nuit,  les  habitants  aux 
attaques  des  animaux.  Souvent  les  vieillards,  les  femmes 
et  les  enfants  y  eussent  été  abandonnés  sans  défense. 
L'instinct  de  la  conservation  a,  sans  aucun  doute,  poussé 

(1)  La  nature  du  sol  environnant  le  constate  suffisamment  : 
le  terrain  naturel  y  est  à  la  même  profondeur  qu'ailleurs. 
Si  ces  volumineux  dépôts  avaient  élé  placés  près  ou  à  peu  de 
distance  des  bords ,  la  trace  en  serait  toujours  restée  appré- 
ciable, caries  monuments  en  terre  sont  ceux  qui  se  conservent  le 
mieux. 


172       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

los  peuplades  primitives  à  creuser  des  cavités  dans  les 
pays  de  plaines,  comme  le  même  sentiment  leur  a  fait 
choisir  des  grottes  dans  les  pays  de  montagnes.  Une  palis- 
sade ou  une  enceinte  de  pieux,  placée  au  pourtour,  pou- 
vait en  augmenter  encore  la  sécurité.  Dans  ces  sauts  de 
loups,  comme  les  mardelles  sont  désignées  dans  plusieurs 
localités,  les  personnes  étaient  au  moins  à  l'abri  de  toute 
attaque  immédiate.  Si  les  bétes  féroces  parvenaient  à  s'y 
introduire,  en  s'élançant  au-dessus  des  barrières,  elles  ne 
pouvaient  le  faire  qu'isolées  ou  en  très-petit  nombre  ; 
elles  y  tombaient  brisées,  et  devaient  être  facilement  dé- 
truites. 

De  simples  branches  d'arbres  appuyées  sur  elles- 
mêmes,  en  forme  de  cônes,  ou  simplement  au  long  des 
parois  de  la  terre  eu  eussent  abrité  les  foyers.  En  laissant  à 
ces  huttes  une  largeur  intérieure  de  3  à  4  mètres,  plu- 
sieurs pouvaient  être  placées  dans  la  même  excavation  : 
la  perméabilité  artificielle  de  l'aire  avait,  en  conséquence, 
sa  raison  d'être,  pour  assurer  le  prompt  écoulement  des 
eaux.  Quant  aux  petites  mardelles,  si  peu  profondes 
qu'elles  sont  labourées  depuis  longtemps,  elles  auraient 
pu  être  couvertes  au-dessus  du  sol  et  destinées  à  divers 
usages,  ou  même  au  logement  des  esclaves,  à  la  vie  des- 
quels on  tenait  si  peu  !  Ces  hypothèses,  si  elles  ne  sont 
pas  exactes,  ne  sont  peut-être  pas  invraisemblables;  elles 
nous  semblent,  dans  tous  les  cas,  rendre  compte  de  la 
disposition  et  de  la  situation  des  mardelles. 

En  ce  qui  concerne  les  bourrelets  en  terre  ou  les  ban- 
quettes que  plusieurs  observateurs  ont  dit  avoir  reconnus 
autour  de  plusieurs  mardelles,  ces  rebords  avaient  pour 
but  incontestablement  d'y  prévenir  la  réunion  des 
eaux  pluviales  s'écoulant  des  terrains  riverains  ou  de 
consolider  une  enceinte  défensive  quelconque.  Les  traces 


XL"   SESSION,    A   CIIATEATJROUX.  473 

de  poutres  remarquées  sur  les  parois  de  quelijues-unes 
d'entre  elles,  les  moins  vastes,  sans  doute,  indi(iucraient, 
si  le  fait  est  bien  exact,  qu'elles  ont  été  habitées  à  des 
époques  relativement  plus  modernes,  auxquelles  les  débris 
de  poteries  romaines  et  les  autres  objets  qu'on  y  a  ren- 
contrés pourraient  être  rapportés.  Il  est  même  présu- 
mable  qu'après  la  conquête  des  Gaules,  quand  le  pays  fut 
dévasté  et  la  population  décimée  ,  de  malheureuses 
familles  sont  venues,  au  milieu  des  campagnes  désertes, 
placer  leurs  chaumières  dans  ces  excavations,  soit  pour  se 
cacher,  se  dissimuler,  soit  pour  se  garantir  des  intem- 
péries. Les  traces  de  ce  séjour  doivent  nécessairement  s'y 
rencontrer. 

Une  autre  considération  qui  nous  semble  également 
très-sérieuse  et  qui  pourrait  seule  faire  concevoir  que  ces 
cavités  ne  se  rapportent  pas  aux  périodes  historiques,  a 
trait  à  la  petite  quantité  d'habitants  qu'elles  peuvent  faire 
supposer.  Nous  avons  fait  connaître  que  celles  qui  ont  été 
relevées  sur  la  moitié  des  communes  de  l'arrondissement, 
sont  de  233,  et  que,  sur  l'autre  moitié,  elles  sont  peu 
nombreuses  ;  que ,  sur  plusieurs  communes ,  il  est 
même  certain  qu'il  n'en  existe  pas.  On  peut  évaluer 
néanmoins  ces  dernières  au  tiers  des  autres  et  augmenter 
encore  cette  quantité  d'une  centaine,  pour  celles  qui  sont 
déformées  ou  comblées  que  nous  avons  dû  laisser  de 
côté;  alors  nous  arrivons,  pour  tout  l'arrondissement,  à 
450,  ce  qui  est  incontestablement  un  maximum.  De  tout  le 
département,  c'est  dans  ce  dernier  arrondissement  que 
l'on  en  compte  le  plus  ;  toutefois  elles  sont  assez  multi- 
pliées dans  les  cantons  de  Levroux  et  d'Ardentes,  sur 
l'arrondissement  de  Châteauroux  ;  dans  les  autres  cir- 
conscriptions elles  doivent  y  être  rares,  car  nous  n'en 
avons  jamais  entendu  parler.   Il   en   est  ainsi  dans  les 


174       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

deux  autres  arrondissements  de  la  Châtre  et  du  Blanc. 
Supputant  sur  le  chiffre  de  ioO,  il  est  facile  d'établir  une 
comparaison  avec  le  reste  du  département.  Dans  celui  du 
Cher,  qui  nous  est  limitrophe,  il  doit  s'en  trouver  certai- 
nement, quoiqu'en  petit  nombre  :  en  évaluant  le  tout  à 
1,400  ou  à  1,500,  on  peut  entrevoir  combien  la  popula- 
tion eût  été  peu  élevée  à  l'époque  de  leur  creusement  sur 
l'ancienne  province  du  Berry. 

II  nous  paraît  très-important  de  faire  remarquer  que, 
plus  on  remonte  dans  le  passé  de  la  nation  gauloise,  plus 
on  trouve  peuplé  le  sol  qu'elle  occupe.  L'on  connaît 
l'exubérance  de  cette  population  dans  nos  contrées,  dans 
la  Celtique,  vers  le  xv!*"  et  le  vi*^  siècle  avant  J.-C,  et  les 
émigrations  qui  en  furent  la  conséquence.  Les  hommes 
qui  s'attachèrent  à  Bellovèse  et  à  Sigovèse,  pour  con- 
quérir d'autres  terres  et  s'y  fixer,  s'élevaient  à  300,000 
guerriers,  non  compris  les  femmes  et  les  enfants.  Ils 
sortaient,  en  grande  partie,  de  l'ancienne  confédération 
des  Bituriges  Cubes,  que  circonscrivaient  la  moyenneLoire, 
la  Vienne  et  l'Allier.  Laissant  de  côté  ce  qu'il  peut  y  avoir 
d'incertain  dans  le  dénombrement  de  ces  multitudes,  l'on 
obtiendra  toujours  proportionnellement  une  population 
énorme  pour  celte  province  limitée  seulement  aux  bornes 
tracées  pur  l'administration  romaine.  Elle  ne  serait  nul- 
lement en  rapport  avec  les  mardelles,  si  on  les  supposait 
comme  les  étages  souterrains,  comme  les  vestiges  des 
habitations  celtiques  (1). 

(<!)  Bien  que  nows  établissions  cette  comparaison  à  litre  de 
simple  rapprochement,  nous  croyons  devoir  entrer  clans  quel- 
ques détails  pour  montrer  jusqu'à  quel  point  elle  peut  être 
admissible,  en  prenant  pour  base  la  superficie  du  territoire  et  le 
dénombrement  probable -de  la  population  qui  l'occupait.  Nous 


XL'  SESSION,    A   CllATEAUROUX.  i75 

La  Gaule  renfermait  de  nombreuses  villes  :  elles 
étaient  ouvertes  ou  fortifiées;  il  y  avait,  en  outre,  des  vil- 
lages et  des  maisons  isolées.  Aucun  terrain,  dit  Strabon, 
«  n'est  en  friche,  si  ce  n'est  les  parties  occupées  par  les 

savons  combien  il  faut  être  réservé  dans  de  semblables  ma- 
tières, qu'il  ne  faut  pas  toujours  conclure  du  simple  au 
complexe;  mais  dans  ces  temps  sans  histoire,  les  inductions  à 
tirer  de  faits  à  peu  près  connus  sont  les  seuls  guides  que  l'on 
puisse  invoquer. 

Les  Bituriges  Cubes,  à  l'origine  (ces  développements  sont 
familiersà  toute  personne  qui  a  étudié  un  peu  l'histoire),  parais- 
sent occuper  tout  l'espace  compris  entre  la  moyenne  Loire,  la 
Vienne  (les  collines  du  Limousin?),  le  Puy,  montagne  d'Au- 
vergne, et  l'Allier.  Alors  la  race  gaélique  couvrait  la  terre 
appelée  depuis  les  Gaules  et  les  îles  Britanniques  ;  elle  confinait, 
cependant,  au  sud  à  un  peuple  qui  l'y  avait  précédée,  les  Hèves, 
dont  les  clans  ou  les  tribus  étaient  situés  entre  les  Pyrénées  et 
la  Garonne.  Antérieurement  au  xvi*  siècle  avant  l'ère  chré- 
tienne, les  Gaëls,  trop  resserrés  dans  leurs  limites,  manquant 
de  terres,  se  jettent  sur  les  Hèves,  les  écrasent  ou  les  refoulent 
vers  les  montagnes,  franchissent  le  col  des  basses  Pyrénées,  et 
passent  en  Espagne,  où,  après  des  luttes  acharnées,  ils  finissent 
par  en  conquérir  les  deux  tiers.  C'est  la  première  migration  impor- 
tante que  nous  ayons  à  faire  remarquer. 

Plusieurs  historiens  du  Berry  supposent,  ce  qui  est  plus  que 
probable,  que  les  Bituriges  Cubes  faisaient  partie  decette  expé- 
dition qui  avait  pris  naissance  dans  le  centre  de  la  Gaule, 
dans  la  confédération  la  plus  importante,  celle  des  Celtes,  sous 
le  nom  de  laquelle  on  désignait  aussi  la  race  gauloise  tout 
entière. 

Neuf  cents  ans  environ  après,  au  vi«  siècle,  la  grande  inva- 
sion des  Kimris  dut  modifier  profondément  la  situation  des 
diverses  peuplades  préexistantes.  Toutefois  le  pays  des  Bitu- 
riges paraît  avoir  été  le  moins  éprouvé,  et  la  population  s'y  être 
maintenue  sans  mélange.    Quarante-quatre  ans   plus   tard, 


476       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

«  marais  et  par  les  bois.  Encore  ces  lieux  mêmes  sont-ils 
€  habités,  ce  qui  est  l'efTet  de  la  grande  population,  plutôt 
«  que  de  l'industrie.  »  César,  dans  ses  Commentaires 
(liv.  III,  §  2),  énonce  qu'il  conduisit  le  reste  de  son  armée 

la  terre  se  trouvant  encore  insuffisante,  les  habitants,  trop 
nombreux,  résolurent  de  s'expatrier  et  de  s'établir  ailleurs.  Cet 
abandon  absolu  du  sol  de  leurs  pères  marque  le  second  dépla- 
cement en  masse,  lequel,  chronologiquement,  devrait  être  le 
troisième,  si  l'on  considère  les  Bituriges  qui,  sous  le  nom  de 
Vivisques,  se  fixèrent  vers  la  basse  Garonne,  et  plus  tard  fon- 
dèrent Bordeaux. 

L'on  sait  que  Bellovèse  et  Sigovèse,  sur  le  conseil  de  leur 
oncle  Arabigat,  chef  suprême  de  la  confédération  des  Celtes,  au 
milieu  de  laquelle  les  Bituriges  tenaient  alors  le  premier  rang, 
se  mirent  à  la  tête  de  cette  nouvelle  émigration.  Ils  entraînèrent 
avec  eux  d'autres  peuplades  dépendant  des  Arvernes,  des 
Ambrons,  des  Sennons,  des  Carnutes  et  des  Aulerkes.  Sauf  les 
Sennons  qui  habitaient  au  nord  de  la  Loire,  et  les  Ambarres  qui 
étaient  cantonnés  au  confluent  de  la  Saône,  dans  l'angle  formé 
par  cette  rivière  et  le  Rhône,  et  qui  furent  très-probablement 
pris  en  passant,  toutes  les  autres  tribus  étaient  situées  sur  le 
territoire  de  l'ancien  clan,  du  clan  primitif  des  Bituriges  Cubes. 
A  cette  époque  (vi«  siècle),  cette  dernière  nation,  autrefois  si  puis- 
sante, était  (iécbtie  de  la  position  qu'elle  avait  occupée,  quoique 
politiquement  elle  dominât  les  autres,  puisqu'elle  y  donnait  des 
chefs  ou  rois.  Les  limites  en  deviennent  incertaines,  et  nous  ne 
connaissons  approximativement  que  celles  que  l'administralion 
romaine  lui  assigna  postérieurement,  et  (pii  sont,  à  peu  de 
chose  près,  celles  de  notre  ancien  Berry.  Le  nom  de  Bituriges 
Cubes  lui  resta  néanmoins,  ainsi  que  l'indique  l'inscription  relevée 
sur  l'amphithéâtre  nomachique  de  la  ville  de  Lyon,  à  la  place 
réservée  aux  délégués  de  cette  province. 

Si  nous  connaissions  ,  dans  cette  multitude  d'émigrants, 
évaluée  à  300,000  guerriers,  ce  qui  appartenait  à  chaque  agglo- 
mération particulière,  il  serait  peut-être  facile  d'arriver  à  un 


XL*   SESSION,    A    CIIATEAUROUX'.  477 

«  dans  le  pays  ferlilo  dos  Bituriges,  qui  possédaient  un 
«  vaste  territoire  et  beaucoup  de  places  fortes;  »  enfin  il 
fait  connaître  (liv.  VII,  §  15)  que,  sur  l'avis  de  Vcrcingé- 
torix,  ces  mêmes  peuples  firent  «  brûler,  en  un  jour,  plus 
«  de  vingt  villes.  » 

terme  de  comparaison  assez  exact  pour  la  population  biturige, 
objet  de  ces  réllexions.  Mais,  en  l'absence  de  ces  renseigne- 
ments, nous  avons  chercbé  à  l'obtenir  par  les  inductions  que  peut 
toiirnir  la  superticie  des  territoires  qui  lui  furent  propres 
successivement.  Le  premier,  dont  nous  avons  fait  connaître  plus 
haut  les  limites  naturelles,  est,  aussi  exactement  que  possible, 
(le  4,000,000  d'hectares,  et  c'est  à  peu  près  toute  l'étendue  du  sol 
des  nations  d'où  sortaient  les  compagnons  de  Bellovèse.  Le 
département  de  l'Indre  et  celui  du  Cher,  qui  sont  formés  du 
Berry,  ont  ensemble  une  superficie  d'environ  1 ,401 ,400  hec- 
tares, environ  le  tiers  de  la  première  :  en  supposant  une  égale 
répartition  des  habitants,  le  contingent  approximatif  des  Bitu- 
riges  serait  d'un  peu  plus  de  100,000  guerriers.  Et  lors  même 
que  cette  quantité  serait  réduite  de  moitié,  les  femmes,  les 
enfants,  les  colons,  les  esclaves,  les  familles  entières,  en  un 
mot,  qui  les  suivaient,  et  celles  qui  restaient  au  pays  consti- 
tuaient certainement  un  chiffre  bien  supérieur  à  celui  qui 
représente  la  population  actuelle  (530,000  âmes)  de  ces  deux 
départements. 

En  prenant  seulement  l'arrondissement  d'Issoudun  pour 
point  de  comparaison,  nous  trouvons  le  même  rapport.  La  super- 
ticie en  est  de  11 7,869  hectares,  ou  des  trois  centièmes  environ 
de  l'ancien  territoire  situé  entre  la  Vienne  et  l'Allier.  Le  con- 
tingent, dans  les  émigrants,  serait  de  9,000  hommes,  et,  en  la 
réduisant  de  moitié,  de  4,500  guerriers,  ce  qui  donnerait,  sui- 
vant les  mêmes  considérations,  60,000  habitants. 

Les  familles  gauloises  étaient  toutes  patriarcales;  les  enfants 
y  étaient  en  grand  nombre.  Strabon,  en  parlant  de  la  Belgique, 
qui  était  si  peuplée,  et  en  la  comparant   aux   Helvètes,   aux 

XL*  SESSION.  i2 


178       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Si  les  mardelles  étaient  les  traces  de  ces  anciennes 
cités,  qui,  presque  toutes,  nous  sont  inconnues,  on  devrait, 
à  certains  endroits,  sur  une  vaste  surface  de  terrain,  en 
trouver  réunies  un  grand  nombre  :  elles  nous  en  indique- 
raient l'emplacement.  Loin  delà,  sauf  de  rares  exceptions, 

Arvernes  et  à  leurs  alliés,  ajoute  :  «  Tout  cela  prouve  la  nom- 
breuse population  de  la  Gaule,  et,  comme  je  l'ai  déjà  observé, 
la  fécondité  des  femmes  gauloises  et  la  facilité  avec  laquelle  elles 
élèvent  leurs  enfants.  »  Il  n'y  a  donc  rien  d'exagéré  en  ce  qui 
concerne  notre  appréciation  sur  la  confédération  des  Bituriges. 
La  nation  des  Bellovakes,  moins  étendue  que  le  Berry,  était,  au 
iv  siècle  avant  notre  ère,  encore  plus  considérable  :  elle  pou- 
vait fournir  100,000  guerriers,  et  elle  devait  en  conséquence 
s'élever  à  700,000  ou  800,000  âmes,  y  compris  les  colons  et  les 
esclaves. 

Ainsi,  an  xvi^  comme  au  vi«  siècle  avant  J.-C,  le  nombre 
d'habitants  devait  au  moins  être  aussi  fort  dans  nos  contrées 
qu'il  ne  l'est  aujourd'hui.  Les  mardelles,  au  contraire,  ne  peuvent 
se  rapporter  qu'à  une  population  relativement  très-faible.  Elles 
ne  sauraient,  en  conséquence,  être  considérées  comme  ayant  été 
creusées  aux  époques  historiques,  quelque  lointaines  (pi'on  les 
supposât.  Les  cabanes  élevées  par  les  Gaëls,  les  Kimris,  les 
Bretons,  les  Romains  primitifs,  les  Ibères  et  les  Germains, 
différaient  peu  les  unes  des  autres  et  n'avaient  aucune  analogie 
avec  le  plus  grand  nombre  de  celles  que  peuvent  faire  supposer 
les  mardelles.  (Voir  Strabon,  liv.  IV.  —  Histoire  des  Gaulois, 
par  Amédée  Thierry,  if»  partie.  —  Histoire  de  France,  par 
M.  Henry  Martin,  chap.  i^"",  et  notes  du  -!«■•  volume.  — 
Géographie  ancienne  et  comparée  des  Gaules,  par  M.  le 
baron  Walckenaer.  —  Tableau  des  principales  divisions  poli- 
tiques de  la  Gaule,  dans  l'Histoire  de  France  de  M.  Th. 
Lavallée,  1"  voliune.  —  Histoire  du  Bernj,  de  M.  Raynal, 
chap.  i"""  et  w .— Esquisses l)ioQraj)hi(jues  du  départementde 
V Indre,  par  M.  Grillon-Deschapellcs,  art.  Brennus.) 


XL»  SESSION,    A   ClIATEAUROUX.  i^£ 

on  ne  les  trouve  groupées  que  quelques-unes  ensemble, 
pouvant  représenter  tout  au  plus  de  simples  bourgades 
peu  importantes.  On  ne  saurait  admettre,  après  tous  les 
témoignages  que  nous  avons  rapportés,  que  les  maisons 
des  villes  fussent  construites  autrement  que  celles  des 
campagnes,  et  que  les  mardcUes  eussent  trait  seulement  à 
ces  dernières.  Toutes  les  habitations  des  mêmes  peuples, 
—  ainsi  qu'il  résulte  de  la  nature  des  choses  et,  nous 
devons  ajouter,  des  instincts  de  l'homme,  —  sont  établies 
d'après  des  principes  identiques.  Les  bâtiments  formant 
ce  que  l'on  a  appelé  plus  tard  des  villœ^  qui  étaient 
situés  au  bord  des  eaux  et  au  milieu  des  bois,  où  les  chefs 
de  clientèles,  les  hommes  considérables  se  retiraient  l'été, 
ne  devaient  pas  offrir  de  différences  sensibles  avec  les 
autres  dans  leur  essence.  Ces  demeures  étaient  très- vastes^ 
car  le  riche  Gaulois  emmenait  avec  lui  «  ses  armes,  ses 
«  chevaux,  ses  chars,  ses  écuyers,  »  enfin  tout  l'attirail 
de  la  guerre  qui,  «  au  i^'  et  au  ii''  siècle  avant  J.-C,  dit 
c<  M.  Augustin  Thierry,  au  milieu  des  tourbillons  des 
«  factions  et  des  guerres  intestines,  n'était  rien  moins  que 
«  superflu.  »  Il  est  évident  encore  que,  pour  de  semblables 
aménagements,  les  mardelles  ne  pouvaient  convenir  par 
leurs  dispositions  spéciales  et  toutes  particulières. 

Le  silence  des  historiens  de  l'antiquité  sur  ces  excava- 
tions nous  parait  des  plus  significatifs.  Il  prouve  qu'ils 
n'y  attachaient  aucune  importance,  soit  qu'ils  en  igno- 
rassent la  destination,  soit  qu'ils  les  considérassent  comme 
appartenant  à  un  peuple  inconnu,  n'ayant  aucun  rap- 
port avec  celui  qui  habitait  alors  les  Gaules. 

De  ces  différents  ordres  de  faits,  nous  sommes  conduit 
à  conclure  que  les  mardelles  ne  peuvent,  sous  aucun  rap- 
port, être  considérées  comme  les  restes  des  habitations 
gauloises,  et  qu'en  conséquence  elles  ne  peuvent  êtreattri- 


180       CONGRÈS  ARCnÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

huées  qu'aux  peuplades  des  temps  préhistoriques,  étran- 
gères au  Gaëls  (1). 

La  question  du  dépôt  des  terres  des  déblais  reste  tou- 
jours un  prohlème  non  effleuré  ;  mais  les  ouvrages  diffi- 
cultueux  au  point  de  vue  matériel  paraissent  avoir  été 
l'attribut  des  plus  anciens  peuples,  et  il  serait  tout  aussi 
difficile,  peut-être,  de  rendre  compte  du  motif  de  ces  tra- 

(0  Doit-on  supposer,  par  ce  résumé  qui  peut  paraître  bien 
absolu,  que  nous  croyions  la  question  de  la  destination  des 
mardeiles  complètement  résolue?  Évidemment,  non.  De  nou- 
velles explorations  sont  à  entreprendre.  Nous  pensons  qu'il  fau- 
drait les  diriger  tant  dans  la  plate-forme  que  sur  les  talus;  les 
moindres  objets  qui  sembleraient  travaillés  par  la  main  de 
l'homme  devraient  être  recueillis  avec  soin  pour  chercher  à 
découvrir  l'âge  auquel  ils  peuvent  remonter.  Il  faudrait  encore 
examiner  la  nature  du  fond,  celle  de  l'empierrement  qui  le 
recouvre  et  rechercher  les  causes  qui  y  assure  l'écoulement 
rapide  des  eaux  pluviales.  Enfin  il  serait  très-utile  de  se  rendre 
compte  des  travaux  qui  y  auraient  été  effectués  à  une  époque  plus 
récente  et  des  débris  qui  pourraient  s'y  rapporter.  Quelques 
nivellements  suivant  les  axes  des  plus  importantes  dans  des  ter- 
rains d'une  nature  différente,  et  quelques  coî^pe.ss'étendant  à  une 
dizaine  de  mètres  au  delà  de  leurs  bords  paraîtraient  nécessaires 
pour  bien  déterminer  l'inclinaison  et  l'épaisseur  des  talus,  ainsi 
que  la  configuration  et  la  composition  géologique  du  sous-sol 
environnant. 

Si  nous  avions  un  désir  à  exprimer,  nous  ferions  remarquer, 
que  les  savants  qui  composent  la  Commission  de  la  Carte 
des  Gaules  pourraient  peut-être,  par  la  grande  et  légitime 
influence  qu'ils  possèdent,  prier  radmiuistralion  de  pres- 
crire des  recherches  dans  les  diverses  parties  de  la  F'rance  ;  ils 
parviendraient  raj)idement,  par  les  études  comparatives  qu'ils 
seraient  à  même  de  faire,  à  prouver  la  raison  d'être  de  ces 
antiques  excavations. 


XL*   SESSION,    A   ClIATEAUROUX.  181 

vaux  que  de  celui  (jui  a  dû  occasionner  le  transport,  sou- 
vent très-éloigué,  des  matériaux  des  monuments  mcgali- 
tiques  si  communs  autrefois  dans  certaines  contrées. 

Nous  annexons  à- cet  exposé  une  carte  générale  pré- 
sentant la  disposition  des  mardelles,  des  monuments  méga- 
liliqucs,  dos  tumulus,  etc.,  et  des  voies  romaines  relevées 
sur  l'arrondissement  d'Issoudun.  Le  calque  que  nous 
avions  dressé  sur  la  carte  du  dépôt  de  la  guerre  était  trop 
grand  pour  y  être  joint;  nous  avons  été  obligé  d'en 
réduire  les  dimensions  à  celles  d'une  double  feuille  de 
papier  in-S",  à  l'échelle  de  i  à  200,000.  Il  nous  a  été  en 
conséquence  impossible  de  donner  aux  mardelles  la  posi- 
tion qu'elles  doivent  avoir.  Celles  qui  sont,  sur  le  terrain, 
très-rapprochées,  semblent  ici  tout  aussi  éloignées  que 
celles  qui  ont  entre  elles  une  assez  grande  distance.  Le 
lieu  précis  en  est  donc  complètement  dénaturé;  le  nombre 
seul,  sur  chaque  commune,  en  est  exact.  Nous  complé- 
tons ces  indications,  par  les  plans  et  les  nivellements,  à 
l'échelle  de  0°',002  pour  1  mètre,  de  cinq  mardelles,  de 
celles  où  nous  avons  rencontré  des  foyers  en  pien^es  7'ap- 
portées;  elles  offrent  des  dispositions  diverses,  qui  peuvent 
se  rattacher  aux  différentes  formes  sous  lesquelles  elles  se 
caractérisent  le  plus  généralement. 

M.  Tarlier  demande  si  les  mardelles,  par  leur  nature, 
n'étaient  pas  plutôt  des  réservoirs  d'eau  que  des  habita- 
tions? Et  si  elles  étaient  situées  dans  le  voisinage  des 
cours  d'eau. 

M.  de  Salies  demande  si  la  nature  des  talus,  au  point 
de  vue  stratigraphique,  révèle  un  travail  intentionnel,  ou 
si  le  travail  est  le  résultat  accidentel  des  éboulements.  Le 
fait  ne  semble  pas  avoir  été  complètement  observé. 

M.  de  Baye  déclare  qu'il  a  constaté  dans  la  Marne,  à 


18-2 


CONGRES  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 


a  -4  i  = 

-?  ='o  — 

-   O   >  .o 

■/!  ta  S 

!>  3—  5 

.S  2  =  --5 

?i  S  S  « 


•-  s  '-  i:   .   = 


ù  3  0-5  i 
o  — ^  —2 

S  •«  ■=  t:  -3 

u  3i=-  Z  5 

-    =r-    S  -O  -3 

•5.2  ^  9-  o 

=  -2  =  =  § -p 


.&  «  3  ^y: 


T.  2 -S 


C;    o 


'^  9  Si 


!-         -oS-33''S9îJ 

c      =^ii-3  2  u-^s  a 
3      -.S  2  3  =  c-i:  p  3 


.^  g  C3  ^  =  ~  .«^ 


;2    ^s^s^-^r^^ 

'         oc     -'-         >-■    2    O  3     =.    — 

iS  ^  ^  ^  iZ  a  .'H'^  ~-  ^.    „r 

00    OmaS-r-s;:    3    = 

-  —  S -r  -  m"^  ":S  -    = 


•     3  « 


«■"25 

U  £       - 


C.'U'YS""    3 
"i^  ^  =    1"^  "  3 

9  - — ^  3i  *^  o    "— 


00  c: 


.-  H.—  "3  .•  — 


'—a   . — -ti'i-ras—*  . — , . — ,'^ 

3i-     Ç0t0^3rt33    l-    C^3 


•sduiBQ 


•sninninx 


no 
aSeuSiomni 


•sjiquaj^ 


•snaïuiog 


so}jaAnoD 


<n    & 


J£  ca   S   rx 


i  i  ' 

o     «      ■< 
>    <    t£i 


S  S  ï  5  ^    •  "^ 

!•  5  i  - 

û  >  5  6 


c;   i- 


XL"  SESSION,   A   CHATEAUROUX.  183 

proximité  des  gTottes  qu'il  a  découvertes,  des  foyers  qui 
afrectcnt  des  formes  analogues.  Ainsi  qu'il  le  fait  observer, 
il  serait  important  de  faire  la  comparaison  des  excavations 
remarquées. 

M.  de  Cessac  confirme  le  sentiment  exprimé  par  M.  de 
Baye,  et  déclare  que,  dans  la  Creuse,  des  foyers  en  forme 
d'entonnoirs  de  2  mètres  de  profondeur,  contenant  de  la 
cérami({uc  celtique,  tournée,  mais  mal  cuite,  se  trouvaient 
à  l'ouverture  de  souterrains,  à  une  distance  de  deux  ou 
trois  mètres.  ^ 

M.  Hubert,  archiviste,  pour  répondre  à  une  observation 
qui  tendait  à  démontrer  comme  impossible  l'usage  des 
mardelles  pour  habitations,  fait  un  rapprochement  ethno- 
graphique qui  établit  qu'en  Colombie  de  semblables  exca- 
vations servaient  à  abriter  un  grand  nombre  de  familles. 
Selon  lui,  la  grande  mardelle  serait  un  groupe  d'habita- 
tions, et  non  pas  une  habitation  unique. 

La  douzième  question  du  programme,  relative  aux 
inscriptions  lapidaires,  appartenant  à  ré])oque  gallo-ro- 
maine, est  traitée  par  M.  Buliot  de  Kersers,  avec  un 
soin  éclairé  qui  a  été  remarqué. 


Recueil  des  inscriptions  gallo-romaines,  de 
la  7"  division  archéologique  :  Cher,  Indre, 
Indre-et-Loire,  Loir-et-Cher,  Nièvre. 

Notre  siècle  a  compris,  et  c'est  une  de  ses  gloires,  que 
la  connaissance  de  l'état  social  des  peuples,  de  leurs 
mœurs  et  de  leurs  usages,  était  aussi  nécessaire  et  plus 
efficace  peut-être  que  celles  des  grandes  batailles  et  des 


184  CONGRÈS  ARCIIEOLOGIQUE  DE   FRAisXE. 

grandes  révolutions  apparentes,  pour  bien  comprendre 
l'enchaînement  des  faits  historiques,  en  saisir  la  physio- 
nomie vraie,  en  apprécier  les  enseignements  utiles.  C'est 
ce  sentiment  qui  a  répandu  et  fortifié  partout  le  goût  des 
sciences  archéologiques. 

On  sait,  notamment,  combien  l'étude  attentive  des 
monuments  épigraphiques  amène  chaque  jour  de  préci- 
sion dans  la  connaissance,  de  la  civihsation  gallo-romaine. 
Cette  branche  de  l'archéologie,  puisant  sa  force  dans  des 
monuments  originaux  et  authentiques,  est  une  source 
toujours  nouvelle  et  inaltérée  de  notions  qui  se  complètent 
et  s'éclairent  mutuellement. 

Car,  si  chaque  fragment,  étudié  dans  son  isolement, 
fournit  des  renseignements  précieux,  tous  ceux  qui  ont 
abordé  l'étude  ou  même  la  simple  lecture  des  inscriptions 
savent  que  ces  monuments  sont  bien  souvAit  incomplets 
et  mutilés  ;  d'ailleurs  ils  se  rapportent  à  des  mœurs  et  à 
des  faits  usuels  qui  sont  loin  de  nous  et  peu  connus.  Ce 
n'est  souvent  que  par  leur  rapprochement  avec  des  ana- 
logues, que  ces  fragments  prennent  toute  leur  valeur  et 
atteignent,  en  quelque  sorte,  leur  maximum  de  rende- 
ment scientifique.  Malheureusement  les  grands  recueils 
d'inscriptions  édités  jusqu'à  ce  jour  remontent  à  des  épo- 
ques déjà  éloignées,  et  ne  font  qu'une  part  insignifiante  à 
l'épigraphie  française.  Les  publications  nombreuses  et 
savantes  qui  se  font  sur  tous  les  points  de  la  France, 
demeurent  des  tentatives  isolées  et  difficiles  à  rapprocher 
les  unes  des  autres. 

De  toutes  parts,  on  réclame  un  recueil  complet  des 
inscriptions  gallo-romaines  de  la  France.  Insister  sur 
l'utilité  de  ce  recueil  est  chose  superflue  :  on  peut  dire 
que  tous  nous  en  avons  senti  le  besoin.  Des  travaux 
importants  se  préparent  eu  ce  sens  ;  mais  qui  ne  sait 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  185 

qu'entre  la  préparation  et  l'exécution  de  semblables  pro- 
jets, il  existe  un  abîme  :  cet  abime  qui  trop  souvent  sépare 
l'espérance  de  la  réalité? 

Il  appartenait  à  la  Société  française  d'Archéologie,  qui 
a  rendu  tant  de  services  à  la  science  nationale,  d'aborder 
cette  tâche  et  de  l'aborder  dans  des  conditions  qui  en  assu- 
rassent la  réalisation  immédiate. 

L'esprit  si  net,  si  éminemment  pratique  de  notre  zélé 
et  digne  directeur,  M.  de  Cougny,  ne  pouvait  ajourner 
cette  œuvre,  dont  l'utilité  avait  déjà  été  sentie  et  indiquée 
par  son  savant  prédécesseur,  dont  il  aime  à  suivre  les 
traces,  le  regretté  M.  de  Caumont.  Aussi  n'avons-nous 
pas  été  surpris  lorsque  nous  avons  vu  l'importance  atta- 
chée par  lui  à  l'étude  de  l'épigraphie  romaine,  dans  le 
programme  du  premier  Congrès  qu'il  dirige. 

Nous  n'avons  pas  vu  seulement  dans  son  appel  une 
simple  invitation  à  l'étude  des  monuments  épigraphiques. 
Nous  avons  pensé  que  c'était  moins  une  œuvre  momen- 
tanée, spéciale,  passagère,  que  voulait  provoquer  notre 
honorable  directeur,  qu'un  travail  d'ensemble,  un  cata- 
logue général  des  inscriptions  romaines  sur  toute  la  sur- 
lace de  la  France.  Et  si  le  hasard  a  voulu  que  notre  région 
tut  la  première  à  dresser  son  catalogue,  nous  savons  qu'il 
désire  prendre  successivement  la  même  initiative  dans  les 
diverses  régions  où  la  Société  tiendra  ses  Congrès,  de 
façon  à  ce  qu'après  un  certain  nombre  de  sessions,  les 
catalogues  régionaux  forment  un  ensemble  complet.  Alors 
la  Fj'ance  possédera  et  devra  à  la  Société  française  le  cata- 
logue de  ses  épigraphes. 

C'est  ce  travail  d'ensemble  que  nous  avons  eu  en  vue. 
C'est  lui  dont  nous  essayons  aujourd'hui  de  poser  la  pre- 
mière pierre,  et  c'est  en  ce  sens  que  nous  avons  compris 
la  réponse  à  la  douzième  question  du  programme.  C'est 


186       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

vers  ce  but  que  nous  avons  dirigé  la  marche  du  travail 
que  nous  allons  vous  soumettre,  et  c'est  aussi  parce  qu'il 
y  a  là  un  travail  collectif  plutôt  que  personnel,  qu'il 
importe  d'exposer  au  Congrès  les  vues  qui  y  sont  adoptées. 

D'ailleurs,  une  .lomenclature  aussi  complexe  que  celle- 
ci  ne  peut  espérer  d'être  absolument  complète  ;  et,  mal- 
gré nos  démarches  et  nos  voyages  d'une  extrémité  à 
l'autre  de  la  région,  quelques  monuments  peuvent  nous 
avoir  échappé.  Les  Congrès  sont  des  occasions  singuliè- 
rement favorables  pour  contrôler  les  résultats  obtenus. 
Nous  profitons  de  la  présence  ici  des  savants  représen- 
tants de  toutes  les  parties  de  la  région  pour  leur  présenter 
le  produit  de  nos  recherches.  Nous  comptons  assez  sur 
leur  bienveillance  pour  espérer  d'eux  les  rectifications  et 
les  additions  qui  rendront  ce  travail  plus  digne  de  notre 
grande  Société.  En  y  joignant  les  inscriptions  dont  ils 
peuvent  avoir  une  connaissance  personnelle  et  dont  nous 
leur  réserverons  l'honneur,  ils  en  augmenteront  la  valeur 
et  l'autorité. 

Nous  ne  nous  dissimulons  pas  tout  ce  que  présente  de 
fortuit  la  division  territoriale  que  le  programme  nous 
impose  ;  mais  nous  comprenons  l'utilité  d'une  limite 
géographique,  bien  nette,  imposée  au  catalogue  demandé. 
Il  s'agit  moins,  en  efïet,  aujourd'hui,  de  déterminer  d'une 
façon  définitive  les  conséquences  historiques  que  peuvent 
avoir  les  découvertes  épigraphiques,  que  de  réunir,  de 
mettre  à  la  portée  des  hommes  d'étude,  ces  monuments 
épars,  mis  au  jour  à  des  siècles  de  distance,  rapportés 
dans  les  ouvrages  les  plus  divers  ou  disséminés  dans  des 
collections  éloignées. 

Nous  réduirons  donc  ce  recueil  à  ce  simple  rôle  de  cata- 
logue, le  plus  complet  possible  :  nous  y  indiquerons  sur- 
tout les  lieux  de  découvertes,  les  destinations  actuelles  et 


XL"   SESSION,    A   CIIATKAUROUX.  187 

les  circonstances  propres  à  bien  taire  connaître  les  inscrip- 
tions, leur  âge,  leur  nature,  leurs  caractères.  Nous  nous 
bornerons,  comme  interprétation,  à  donner  celles  déjà 
fournies  ou  qui  nous  paraîtront  les  meilleures  :  quant 
aux  commentaires,  nous  savons  trop  ce  qu'exige  d'espace 
la  moindre  discussion  pour  ne  pas  en  être  aussi  sobre  que 
possible.  D'ailleurs,  si  d'autres  doivent  nous  suivre  dans 
cette  voie,  il  faut  que  nous  la  fassions  large,  et  que  nous 
nous  dégagions  autant  que  possible  de  tout  esprit  de 
système. 

De'  même  nous  nous  astreindrons  à  ne  pas  sortir  des 
limites  géographiques  assignées,  ce  serait  faire  double 
emploi  avec  les  catalogues  ultérieurs,  et  nous  lancer 
d'ailleurs  dans  une  carrière  indéterminée.  Puisque  un 
des  principaux  intérêts  de  ce  travail  lui  viendra  de  ses 
indications  sur  la  provenance  des  inscriptions  décrites, 
c'est  à  elle  que  nous  nous  attacherons  spécialement.  Aussi 
nous  lui  imposerons  la  division  géographique  moderne 
des  départements,  qui  facilitera  les  recherches  et  qui 
d'ailleurs  aura  un  mérite  que  nulle  division  antique  ne 
saurait  espérer,  c'est  d'être  indiscutable  et  précise. 

Pour  chaque  département  nous  donnerons  les  inscrip- 
tions dans  l'ordre  suivant  : 

1°  Les  inscriptions  altariques  ou  votives  ; 

2"  Les  bornes  milliaires  ; 

3"  Les  inscriptions  se  rattachant  à  des  monuments 
publics  ; 

4.°  Les  monuments  funéraires  païens  ; 

5°  Les  inscriptions  chrétiennes  ; 

6°  Les  objets  divers. 


188  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 


DEPARTEMENT  DU  CHER. 

Le  département  du  Cher  qui,  avec  celui  de  l'Indre, 
répond  à  peu  près  à  l'ancien  territoire  des  Bituriges  Cubi, 
faisait  partie  de  la  Gaule  celtique.  Il  fut  compris  dans  la 
province  d'Aquitaine,  probablement  par  Auguste,  et  plus 
tard  sa  capitale  Avaricum  devint  la  capitale  de  l'Aqui- 
taine première. 


Monuments  votifs. 

1.  Inscription  recueillie  par  M.  Raynal  dans  une  cave 
de  l'enceinte  gallo-romaine  : 

PRO  SALVTE 
CAESARVM  ET  PR 
MINERVAE  ET  DIVAE 
DRUSILLAE  SACRUM 
IN  PERPETVViM 
C^GILEIVS  PRIMVS 
lîml  VIR  AVG  CCR  DS  PD 

PRO  SALVTE  CAESARVM  ET  ?opali  Romani  MINER- 
VAE ET  DIVAE  DRVSILLAE  SAGRVM  IN  PERPE- 
TVVM  C.  AGILEIVS  PRIMVS  ^evir  AYGustalis  Curator 
Civium  [{omanorum  \)e  St/a  Pecunia  Dédit.  Pour  le  salut 
des  Césars  et  du  peuple  Romain,  consacré  à  perpétuité  à 
Minerve  et  à  la  divine  hrusille.  C .  Agileius  Primus  Sévir 
aurjustal^  curateur  des  citoyens  romains,  a  donné  de  son 
argent. 


XL'   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  189 

Nous  avions  d'abord  pensé  que  sacrum  avait  là  le 
sens  de  sacrifice,  mais  il  est  plus  conforme  aux  données 
de  l'épigraphie  usuelle  de  voir  là  une  formule  de  consé- 
cration d'un  monument.  Nous  avons  là  un  vestige  des 
honneurs  divins  rendus  à  Drusille,  sœur  et  peut-être 
concubine  de  Caligula;  par  conséquent,  c'est  au  temps 
qui  s'écoula  entre  sa  mort,  en  38  de  J.-C,  et  celle  de  son 
frère,  en  41,  que  cette  inscription  a  dû  être  tracée.  Et 
cette  date  donne  un  très-grand  intérêt  aux  caractères 
épigraphiques  que  nous  allons  signaler. 

Les  lignes  sont  droites,  et  les  lettres  nettement  coupées, 
mais  sans  rigidité.  Plusieurs  des  hastes  et  des  contours,, 
notamment  dans  les  G,  les  G,  les  M  et  les  V,  présentent 
des  flexions  légères,  élégantes  et  variées. 

Nous  remarquerons,  à  la  première  ligne,  le  V  inter- 
calé. 

A  la  deuxième,  V  et  M  liés;  E  et  T  du  mot  et  superposés; 
un  emprunt  est  fait,  sur  le  bandeau  de  droite,  pour  faire 
place  à  l'R  final. 

A  la  troisième  ligne,  les  liaisons  de  V  et  d'A,  d'E  et 
de  T,  enfin  l'E  final  élevé.  • 

A  la  quatrième,  V  et  M  sont  liés  et  plus  petits. 

A  la  sixième  ligne,  la  liaison  de  M  ef  de  V. 

Ainsi,  les  lettres  que  nous  rencontrons  dans  nos  con- 
trées, au  milieu  du  i"  siècle,  sont  minces  de  trait,  à  con- 
tours variés,  et  n'ont  pas  cette  rigidité  que  nous  trouverons 
plus  tard.  Une  inscription  remontant  d'une  façon  certaine 
à  une  date  aussi  élevée,  est,  du  reste,  une  extrême  rareté. 

Nous  devons  à  ce  monument  la  connaissance  d'un  sévir 
augustal,  curateur  ou  censeur  des  citoyens  romains,  et 
portant  le  prœnomen  Caius,  le  gentilice  Agileius  et  le 
cognomen  Primus ,  indices  de  la  qualité  de  citoyen 
romain.  Si  primus  avait  pour  but  d'indiquer  la  primauté 


190       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

du  sévir  augustal,  il  serait,  comme  épithète  rejeté  après  ce 
mot  (1). 

L'inscription  est  gravée  sur  une  plaque  de  pierre  en- 
cadrée d'un  bandeau  avec  filet  intérieur.  Elle  a  0"'M  de 
haut  sur  O^-iSo  de  large.  Actuellement  au  musée  de 
Bourges.  (Publiée  par  M.  Louis  Raynal,  Histoire  du  Berry, 
tome  I,  p.  79.) 

2.  Inscription  donnée  par  La  Thaumassière  et  Cathe- 
rinot ,  d'après  Clavier ,  secrétaire  de  l'Université  de 
Bourges,  en  ses  Notes  sur  Perse,  p.  114,  comme  trouvée 
vers  1 600  à  Maubranches  : 

FLAVIA  GVBA 

FIRMANI  F 

COSOSO  DEO  MARTI  SVO 

HOC  SIGNVM 
DICAVIT  AVGVSTO. 

Cette  inscription  est  rapportée  par  Orelli  (n"  1984), 
comme  indiquant  par  le  mot  Cososus  soit  le  nom  d'une 
divinité  locale,  soit  un  surnom  de  Mars. 

La  lecture  finale  Augusto,  qui  avait  surpris  Scaliger  (2), 
est  peut-être  fautive.  Le  mot  Cuba  semble  bien  une  épi- 
thète locale.  Du  reste  le  monument  ayant  été  détruit  dès 
sa  découverte,  tout  contrôle  est  impossible  et  toute  conjec- 
ture hypothétique.  (La  Thaumassière.  Hist.  de  Berry ^  754. 
—  Catherinot,  Antiquités  romaines  du  Berry,  p.  7.  ^ 
Orelli,  1,984.) 

3.  Nous  donnons,  d'après  de  Caylus,  les  trois  inscrip- 

(1)  Orelli-Henzen,  2.951,  7.1  li,  1.934,  etc. 

(2)  La  Thaumassière,  Hist.  de  Berrij,  p.  7o4. 


XL"    SESSION,    A    CIIATEAUROUX,  191 

lions  suivantes  découvertes  à  Alichamp,  par  M.  Pajonnet, 
prieur  de  cette  localité  au  xviir  siècle  ,  aujourd'hui 
perdues,  et  dont  par  conséquent  tout  contrôle  est  impos- 
sible : 

NVAV 
MONIMEN 
TUGARASSONI 
CARTVIIII  II  VS. 

^YminiAWgustl  MONVMENTVm  GARASSONI CARTV 

[ni  filivs  ou  fil  xotum  sol  vit]. 

Nous  remarquerons  la  négligence,  I  pour  V  dans  moni- 
mentum,  et  les  caractères  indécis  de  la  fin.  (De  Caylus, 
Recueil  d'Antiquités,  tome  III,  p.  376.) 

4.  NV  MI  BVS 
AVGVSTORVM. 
MONMIINTV  DIG 
ONIRONTI  IIIVS 

NVMIniBVS  AVGVSTORVM  MONVMENTVw  DlCawîV 
ONIRONTI  ¥\Lius  Yoturn  ëolvit. 

La  finale  i  de  Onironti  serait-elle  ici  et  dans  l'in- 
scription précédente  la  terminaison  gauloise  du  génitif? 
(De  Caylus,  Recueil  d'Antiquités,  p.  377.) 

5.  NVM  AVG 
VII  NI  X  SVM 
DSP. 

NVMmî  kNGusti  [VENIX  SUM]  De  Smo  Vosuit. 

La  deuxième  ligne  semble  fort  douteuse.  Ces  trois  mo- 
numents sont  du  reste  fort  suspects.  Le  mot  monumentum 
ne  se  trouve  guère  en  épigraphie  qu'avec  le  sens  de  tom- 


492       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

beau,  et  très-rarement  avec  celui  A'antel  ou  de  monument 
votif.  On  peut  y  voir  une  trace  de  falsification  (1). 

G.  M.  Hazé  a  découvert  l'inscription  suivante  à  Drevant, 
en  1834  : 

NVM 
ET  DEO 
I.  CATIVS 
GATUS 
EXVO 
TO  PROS 
ERTS 

V  S. 

Cette  inscription  est  complète  au  haut,  à  gauche  et  au 
bas.  Malgré  la  coupure  apparente  du  mot  voto  à  la  cin- 
quième ligne,  qui  tiendrait  à  la  faire  regarder  aussi 
comme  complète  à  droite,  il  vaut  mieux  supposer  que  la 
partie  droite  a  été  supprimée,  et  que  les  syllabes  vo  et  to 
ont  appartenu  à  deux  mots  différents,  EX  VOfo  recepTo. 
La  lecture  en  devient  plus  facile,  et  on  peut  supposer 
une  restitution  comme  celle-ci  : 

NVMme   [AXQusti]   ET  DEO I.  CATIVS  CATVS... 

EX  V0[T0  RECEP]TO  PRO  S[e  et  li]BERTIS  Yotum 
?)olvit  [LÎbens  yierilo]. 

Les  lettres  douteuses  sont  les  premières  de  la  troisième 
ligne,  I  ou  L;  de  la  quatrième,  G  ou  0  ;  et  de  la  sep- 
tième, I,  E  ou  B.  La  haste  du  T  de  la  septième  ligne 
dépasse  le  dessus  de  la  traverse  de  manière  à  indiquer 
la  liaison  T  L  Les  E  ont  leurs   trois   barres  courtes  et 

(1)  Observation  de  la  comniission  de  Topograpliie  des 
Gaules. 


•    XL"   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  103 

égales  comme  dans  l'écriture  capitale  des  manuscrits. 
Cette  inscription  est  gravée  sur  un  pilastre  portant 
plinthe  au  bas,  et  corniche  à  doucine  au  haut.  Hauteur, 
O""??  ;  largeur,  0"15.  Actuellement  à  Drevant,  incrustée 
dans  un  mur,  au  nord-est  de  l'école  primaire.  [Notices 
pittoresques  du  Berry,  par  Hazé,  pi.  IV,  fig.  H .) 

7.  Sur  une  des  stèles  découvertes  à  Alleau,  commune 
de  Baugy,  en  1850,  représentant  le  buste  d'un  per- 
sonnage imberbe,  enveloppé  de  bandelettes,  on  lit  l'in- 
scription : 

NVM  AVG... 
SABINVS  GNS  SORINI. 

La  fin  de  la  première  ligne  est  douteuse,  ainsi  que  l'N 
de  GNS,  que  MiM.  Berry  et  Dumoutet  ont  lu  II. 

Nous  proposons  la  lecture  :  W^Wnibus  AYGustorum 
SABINVS  Œeius  ou  CESms.  SABINI  [fdius].  Faudrait-il 
voir  dans  le  sigle  GNS  une  abréviation  de  CNOS,  qui 
parait  avoir  été  un  terme  gaulois  de  filiation?  Mais  alors  il 
eût  dû  être  après  le  génitif. 

Toute  cette  lecture  est  fort  douteuse.  Du  reste  les  mo- 
numents d'Allean  semblent  pour  la  plupart  être  du 
III''  siècle;  de  là  peut-être  la  banalité  absolue  de  la  for- 
mule. 

Hauteur  du  monument,  0"75;  largeur,  0"25.  Actuel- 
lement au  musée  de  Bourges.  [Mém.  de  la  Commission 
historique  du  Cher,  tomel,  p.  l-i2  et  pi.  XVIII,  fig.  1.) 

8.  Au  culte  des  Gésars  semble  se  rattacher  une  pierre 
assez  fruste  aujourd'hui ,  encastrée  dans  le  pied-droit 
d'une  barrière  chez  M.  Auclerc,  à  Bruères,  et  déjà  signalée 

XL*  SESSION.  13 


494       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

par  M.  Raynal,  d'après  M.  Méiitnée.  Elle  est  grossière,  et 
la  surface  de  la  pierre  n'a  jamais  été  bien  dressée,  puisque 
la  partie  inférieure  de  l'inscription  est  en  retraite  de  I  à 
2  centimètres  sur  la  partie  supérieure.  Voici  ce  qu'on  en 
peut  déchiffrer  : 

HARA  CAESARI 
PERGENIV  IMPERAÏ 
..MILITIA..  N  AGIE 
..OiMINE  ..  1ER.. 

Et  deux  autres  lignes  confuses,  mal  suivies  et  illisibles 
au-dessous.  On  a  tenté  de  voir  dans  Percenius  une  cor- 
ruption du  nom  de  l'usurpateur  Pescenius  Niger ,  qui 
porta  la  pourpre  pendant  deux  ans  en  Asie  (193-195). 
Nous  croyons  plus  prudent  de  nous  abstenir  jusqu'à  ce 
qu'une  rencontre  analogue  vienne  nous  fournir  l'interpré- 
tation. Hauteur,  U^C?;  largeur,  0"70.  Actuellement  à 
Bruères,  chez  M.  Auclerc,  commune  d'Alichamps.  (Ray- 
nal, I,  p.  80,  note.) 

9.  Nous  regardons  comme  se  rattachant  au  culte  des 
divinités  locales  l'inscription  recueillie  en  1687  dans  les 
fondements  de  l'enceinte  gallo-romaine,  lue  et  contrôlée 
par  Gatherinot  et  La  Thaumassière  ; 

SOLIMARAE 

SAGRVM. 

AEDEM  GVM  SVIS 

ORNAMENTIS 

FIRMANA  G.  OBRIGII  E 

MATER. 

D.         S        D. 

Les  deux  premières  ligues  étaient  en  caractères  plus 


XL**   SESSION,    A    CIIATEAUIIOUX.  195 

grands  que  les  iiutios.  Les  lettres  étaient  peintes  de 
cinabre.  La  lettre  li,  à  la  fin  de  la  cinquième  ligne,  a  été 
lue  F  par  Muratori  et  Orelli,  et  devient  ainsi  l'initiale  du 
mot  flia.  Mater  devient  alors  un  titre  :  mater  sacrorum^ 
titre  de  la  dignité  sacerdotale  dite  matratm  (Orelli,  1,491), 
attachée  au  culte  de  Mithra,  au  commencement  du 
m"  siècle. 

On  pourrait  alors  lire  :  SOLIMARAE  SACRVM,  AEDEM 
CVM  SVIS  ORNAMENTIS  FIRMANA  C.  OBRICII.  Yilia 
MATI^^R  [mcrorum]  De  S?/o  hedit.  Et  traduire  :  Consacré 
à  Solimara.  Firmana,  fille  de  C.  Obricius,  mère  des 
fonctions  sacrées  {?)  a  donné  de  son  argent  l'édifice  avec 
ses  ornements. 

Le  nom  de  Solimara,  attribué  à  une  divinité  locale,  se 
retrouve  dans  plusieurs  localités  de  la  Gaule,  et  son  radi- 
cal est  reproduit  par  plusieurs  monnaies  que  leur  rareté 
dans  le  Berry  ne  permet  pas  d'attribuer  aux  Bituriges. 
Le  nom  Firmana  se  rapproche  de  Firmanus  du  n"  2. 
(La  Thaumassière,  Bist.  de  Berry,  p.  754.  — Catherinot, 
les  Philippes  de  Berry,  p.  1.  —  Raynal,  t.  I,  p.  81.  — 
Muratori,  111,  1.  —  Orelli,  2,050.) 

10.  A  un  culte  local  inconnu  paraît  se  rapporter  la 
belle  et  curieuse  inscription  découverte  par  Hazé  à  Drevant 
en  1834. 

DAAONVS  D 
T  SABINI  DIG 
AL 

Les  caractères  sont  nets  et  appartiennent  à  la  capitale 
rustique,  sans  traits  terminaux;  les  lettres  ont  10  centi- 
mètres de  hauteur.  La  troisième  lettre  de  la  première 


196       CONGRÈS  ARCnÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ligne  et  la  première  de  la  troisième  sont  des  A  sans 
traverse.  Faut-il  y  voir  des  lambda  grecs  ou  des  V  ren- 
versés ? 

L'inscription,  complète  à  gauche,  en  haut  et  en  bas, 
semble  l'être  aussi  à  droite;  cependant  il  ne  serait  pas 
impossible  que  de  ce  côté  elle  eût  subi  une  suppression. 
Peut-on  la  lire  :  DALONVS  De  Testamento  SABINI 
DIGAyl? 

Cette  inscription,  malgré  toutes  ces  obscurités,  est  un 
spécimen  d'un  haut  intérêt,  sinon  historique,  du  moins 
épigraphique. 

Hauteur,  0'"40;  longueur,  0°86.  Actuellement  incrus- 
tée dans  un  mur  au-dessus  de  la  porte  d'entrée  d'une 
maison  attenant  au  bâtiment  où  est  l'inscription,  n°  6, 
à  Drevant.  [Notices  pittoresques  du  Berry,  par  Hazé,  p.  4, 
pi.  IV,  lig.  12.) 

Colonnes  milliaires. 


11.  Une  colonne  milliaire  creusée  en  sarcophage  et 
utilisée  comme  sépulture  fut  découverte  à  Alichamps  par 
M.  Pajonnet,  prieur  de  cette  localité,  et  communiquée  par 
lui  à  de  Cayius,  qui  la  publia.  Elle  est  aujourd'hui 
dressée  sur  un  piédestal  de  quelques  marches  au  centre  de 
la  place  publique  de  Bruères.  Elle  porte  l'inscription  : 

..FELIGI.  AVG  TRIB  P.  COS  III 
P  P  PROCoS  AVAR  LXIIII 
MEDI  XII  NERI  XXV. 

La  partie  supérieure  manque,  et  les  traces  légères  que 
l'on  peut  en  saisir  sont  iusulTisantes  pour  autoriser  une 


XL"    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  197 

lecture.  Les  lettres  que  nous  donnons  sont  bien  fixées. 
L'O  de  Procos,  à  la  deuxième  ligne,  est  petit  et  intercalé 
dans  le  G. 

De  Caylus  a  conclu  des  indications  des  titres  impé- 
riaux, de  l'épithctc  felix,  qui  ne  s'applique  pas  avant 
Commode ,  et  du  troisième  consulat ,  qui  convient  à 
Alexandre  ,;Sévère,  que  c'est  à  ce  prince  (221-335)  que 
devait  être  rapportée  cette  inscription,  et  en  effet  nous 
trouvons  une  formule  semblable,  également  au  datif,  dans 
une  inscription  d'Alexandre  Sévère  (Gruter,  MLXXVIII,  8). 

Nous  pouvons ,  sur  ces  données ,  restituer  ainsi  : 
[mveratori  cAES«n....  Marco  avrelio  severo  alexandro 
pio]  FELIGI  AVGms/o  TRIBtmîVm  Votestate.  COnSuii  tertio 
Vatri  Vatrix  PROGOnSM/î  AVAR/cwm  Lengae  XIIII 
MEDlolanwn  XII.  NERiomugus  Leugœ  XXV.  A  l'empereur 
César...  Marc-Aurèle  Alexandre  Sévère,  pieux,  heureux, 
Auguste,  revêtu  de  la  puissance  tribunitienne,  consul  pour 
la  troisième  fois,  père  de  la  patrie,  proconsul.  Avaricum  à 
quatorze  lieues,  Mediolanum  à  douze,  Néris  à  vingt-cinq. 

Des  distances  indiquées,  celle  d'Avaricum,  à  quatorze 
lieues  gauloises  de  2,222  mètres,  est  exacte  ;  celle  de 
Néris,  à  vingt-cinq,  est  aussi  à  peu  près  satisfaisante  ; 
mais  celle  de  Ghàteaumeillant  concorde  moins  bien,  car 
les  douze  lieues  de  la  borne  sont  insuffisantes.  Faut-il 
pour  cela  contester  à  Ghàteaumeillant  l'attribution  de 
Mediolanum  pour  la  reporter  à  Gulan,  comme  le  propose 
la  Commission  de  Topographie  des  Gaules?  Ce  n'est  point 
ici  le  lieu  d'entrer  dans  ces  discussions,  qui  prouvent  l'inté- 
rêt que  présentent  les  indications  du  milliaire  d'Alichamps. 
Une  triple  indication  sur  une  borne  itinéraire  est,  du 
reste,  une  rareté. 

Hauteur,  1™90;  hauteur  du  fût,  l'"30,  du  dé  inférieur, 
60  centimètres;  largeur   à  la  base,  58  centimètres,  au 


198      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

sommet,  57   centimètres.   Actuellement  à   Bruères.   (De 
Gaylus,  Recueil  d'Antiquités,  page  371  et  pi.  102,  fig.  1.) 

12.  De  Gaylus  a  dessiné  une  autre  borne  également 
trouvée  à  Alichamps,  à  environ  cent  vingt-cinq  pas  de  la 
précédente,  et  dont  il  n'a  pu  déchiffrer  que  la  dernière 
ligne  : 

AVR.  LXIII. 

AVaR/cMm  heugas  XIII.  Ce  railliaire,  aussi  métamor- 
phosé en  bière,  était  évidemment  celui  qui  lui  faisait 
suite  du  côté  d'Avaricum.  Nous  remarquerons,  du  reste, 
que  ces  monuments  ayant  été  dénaturés  et  déplacés  dès 
l'antiquité ,  leurs  déplacements  successifs  aux  époques 
modernes  n'ont  point  d'importance. 

Actuellement  perdu.  (De  Gaylus,  Recueil  d'Antiquités, 
tome  m,  p.  374,  et  pi.  102,  fig.  2.) 

13.  Le  troisième  monument  de  cette  série  est  le  mil- 
liaire  découvert  à  Trouy  au  xviii^  siècle,  et  actuellement 
au  jardin  de  la  Préfecture,  à  Bourges.  Il  présente  une 
partie  cylindrique  et  une  base  cubique,  dont  les  angles 
ont  été  brisés.  Il  a  été  retaillé  et  évidé  pour  être  converti 
en  cercueil.  Voici  ce  qui  reste  de  l'inscription  qui  a  été 
coupée  et  martelée  à  gauche  : 

VS  MAXI 

..FELIX  AVG  P.  M.  TR  P  III 
..P..  GERMANIGVS  MA 
..VERVS  MAXIMVS  NO 
..AES  PRINGEPS 
..VIAS  ET  PONTES  VETVS 
..SAS  RESTITVERVNT 
..XYini  F  L  IIII. 


XL°   SESSION,    A   GHATEAUUOUX.  199 

On  peut  voir  par  l'emplacement  des  angles  du  socle  que 
le  milieu  de  la  face  antérieure  et  de  l'inscription  tombait 
vers  ri  du  mot  felix.  Les  inscriptions  analogues  laissées 
par  Maximin  dans  le  monde  romain  sont  nombreuses.  On 
peut  donc  restituer  et  lire  celle-ci  avec  l'abbé  Bartliélemi, 
qui  la  vit  au  xvni'"  siècle. 

mverator  CAEsar  mius  ivlivs  ver]VS  MAXI 

MINVS  Pivs]FELIX  KNCjustas  Vontifex  Maximus 
[Tliiùunitia  Potestate  tertia 
.  .  .  Pater  Patriœ]  GERMANICVS  MAximus 
ET  G.  IVLIVS]  VERVS  MAXIMVS  NO 
BiLissiMVS  cJAESar  PRINCEPS 
ivvENTUTis]  VI AS  ET  PONTES  VETVS 
TATE  coLLAP]SAS  RESTITVERVNT 
XVIIII  Fines  LIIII. 

L'empereur  César  Caius  Julius  Verus  Maximin,  pieux, 
heureux  Auguste,  souverain  pontife,  revêtu  de  la  puis- 
sance tribunitienne  pour  la  troisième  fois,  père  de  la  patrie , 
germanique,  très-grand,  et  Caius  Julius  Maxime,  très- 
noble  César,  prince  de  la  jeunesse,  ont  réparé  les  voies  et 
les  ponts  tombant  de  vétusté. 

Une  lecture  attentive  nous  a  amené  à  la  substitution  du 
troisième  consulat  de  Maximin  (année  237)  au  second, 
indiqué  par  l'abbé  Barthélemi  (année  236). 

Les  caractères  de  l'inscription  ont  environ  4  centimètres 
de  hauteur;  leur  forme  est  bonne.  A  la  cinquième  ligne, 
une  épaufrure  de  la  pierre  a  nécessité  le  rejet  insolite  du 
mot  juventutis;  à  la  septième  ligne  nous  signalons  la  dé- 
sinence sas  au  lieu  de  sos. 

La  dernière  ligne  est  fort  douteuse  :  l'F  semble  bien 
l'initiale  du  mot  Fines.  Si  on  attribue  cette  appellation  à 


!200       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

la  station  de  Fines,  située  à  61  lieues  gauloises  d'Avari- 
cum,  sur  la  voie  de  Poitiers  à  Bordeaux,  il  faudrait  sup- 
poser notre  borne  sur  cette  voie,  à  sept  lieues  gauloises 
de  Bourges,  vers  Saint-Florent  ou  le  Subdray  ;  mais  il 
peut  indiquer  une  autre  station  du  même  nom,  et  qu'on 
peut  placer  à  quatre  lieues  de  la  borne,  en  lisant  :  Yines 
Leugœ  IIII.  Nous  restons  donc  dans  le  doute. 

La  colonne  a  de  hauteur  l^SS,  la  partie  cylindrique 
■P^e,  et  l'empâtement  inférieur  37  centimètres.  La 
largeur  est  à  la  base  de  67  centimètres,  et  au  sommet 
56  centimètres,  dans  ses  dimensions  les  moins  altérées,  et 
39  sur  le  sens  coupé  et  évidé.  La  matière  est  la  pierre  de 
la  Celle-Bruyère. 

Jardin  de  la  préfecture  du  Cher.  (Raynal,  d'après  Bar- 
thélemi,  tome  I,  p.  96.) 


Inscription  se  rattachant  aux  monuments  publics. 


\A.  Même  origine  que  la  précédente. 

GAVIAE  QVIETAE 

AEMILI  AFRI  U  VIR 
FILIAE 

I  BLAESI 

BIT  GVB. 

OGVS. 

Le  commencement  des  trois  dernières  lignes  manque. 
L'R  final  de  la  deuxième  est  retourné,  pour  donner  à  sa 
haste  la  valeur  de  l'I  du  génitif.  Les  lettres  sont  nettes, 
droites  et  anguleuses,  un  peu  lourdes,  du  W  siècle. 


XL"   SESSION,    A   CHA.TEAUROUX.  201 

Nous  devons  à  M.  Anatole  de  liarlhélemi  et  à  M.  le 
général  Creuly  communication  de  l'opinion  que  cette  in- 
scription aurait  eu  pour  but  d'indiquer  la  place,  à  l'am- 
phithéâtre de  Bourges,  de  Cavia,  qui  était  femme  d'un 
duumvir  de  Bourges  et  fille  d'un  Lucius  Gavius,  dont  le 
nom  se  retrouve  à  Narbonne.  Cette  opinion,  qui  concorde 
avec  la  forme  circulaire  de  la  pierre,  et  qui  parait  des 
mieux  fondées,  entraine  la  lecture: 

GAVIAE  QVIETATAE  AEMILI  AFRI  IT  VIRI  wxom 
FILIAE  Lucii  CAVi  BLAESI  civis  (?)  mTurigum  GYBorum 
LOGVS.  Place  de  Cavia  Quieta,  épouse  d'Emile  Afer, 
duumvir,  fille  de  Lucius  Gavius  Blœsus,  citoyen  des 
Bituriges  Cubi. 

La  table  de  pierre  où  est  gravée  cette  inscription  est 
concave  dans  le  sens  de  la  hauteur,  ce  qui  prouve  qu'elle 
était  incrustée  dans  un  hémicycle.  Elle  a  de  hauteur 
1"'42,  et  de  largeur  1"°05.  Le  tableau  où  est  gravée  l'in- 
scription est  large  de  O^^So.  Actuellement  au  musée  lapi- 
daire de  Bourges. 


Monuments  funéraires  privés. 

15,  A  la  tête  de  cette  série  se  place  la  belle  inscription 
trouvée  dans  les  fondements  des  tours  romaines  de  l'espla- 
nade Saint-Michel,  vers  1853  : 

M  .  .  M.... 
AIITIONF 
MAMERGI  LVPI 
FILIAE 

MeMoriae  AETIONI  MAMERGI  LVPI  FILIAE.   A  la 

mémoire,  à  Aétion,  file  de  Mamercus  Lupus.  Le  nom 


202       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

propre  Aetioni  semble  le  datif  à'Aetio.  Ve  y  est  représenté 
par  le  double  I;  quelques  dessins  faits  lors  de  la  décou- 
verte du  monument,  représentent  le  second  I  comme  plus 
long'  que  le  premier,  ce  qui  pourrait  être  l'indice  d'une 
prononciation  longue. 

Les  lettres  n'ont  pas  la  rigidité  que  l'on  assigne  aux 
époques  reculées.  Leur  tracé,  net  et  profond,  s'évase  à 
l'approche  des  barres  et  des  traverses,  de  manière  à  donner 
une  douceur  singulière  aux  contours  vus  de  près,  et  de 
fins  déliés  joignent  les  lettres  les  unes  aux  autres;  mais 
comme  nous  savons  par  l'inscription  de  Drusille  que  dans 
nos  contrées  l'emploi  de  ces  courbes  remonte  très-haut, 
nous  croyons  que  la  simplicité  des  dispositions,  l'emploi 
archaïque  du  double  I,  l'usage  des  points  triangulaires 
entre  les  mots  accusent  une  grande  antiquité,  probable- 
ment le  i*""  siècle. 

Le  gentil ice  Lupus  a  toute  l'apparence  d'un  eognomen 
ou  surnom.  Nous  remarquerons  ailleurs  la  même  parti- 
cularité. 

Hauteur  de  la  pierre,  0"33  ;  longueur,  O^QS.  Actuel- 
lement au  musée  lapidaire  de  Bourges.  (Publiée  par 
M.  de  Laugardière  dans  VAbnanack  du  Cher.  Pigelet, 
185,  p.  877.) 

46.  D  M. 

M.  ADVITINIO 
FRVENDO  M  PVD 
ADVENTVS  MIL. 
LEG.  XXXV.  V.  P.  F. 
ET  PATAVINIA 
ROMANA  PAT 
RES  P.  FIL.  MEN 
SlVi\]  XL 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  203 

Biis  Manibus,  Marco  ADVITINIO  FRVENDO  Marciis 
P\De7is  ADVENTVS  MILf's  LEGionis  trigesimœ  \lpicV 
\ictricis  Pix  Fidelis  ET  PATAVINIA  ROMANA  PATRES 
Vostierimt  FIL?o  MENSIUM  undecim.  Aux  dieux  mânes, 
à  Mardis  Advitinins ,  leur  espérance ,  Marcus  pudens 
Adventus,  soldat  de  la  trentième  légion  ulpienne,  victo- 
rieuse, pieuse,  fidèle,  et  Patavinia  Romana,  ses  parents, 
ont  élevé  ce  monument  à  leur  fils  âgé  de  onze  mois. 

Cette  inscription  complète  est  gravée  sur  une  stèle  à 
portique  trouvée  rue  des  Armuriers,  n°  6,  à  Bourges,  en 
1868.  Elle  ne  peut  être  antérieure  au  ii""  siècle,  puisque 
c'est  seulement  depuis  Trajan  que  la  trentième  légion 
reçut  le  surnom  d'Ulpienne,  ni  beaucoup  postérieure  au 
commencement  du  iii« ,  puisqu'à  partir  d'Alexandre 
Sévère,  cette  légion  paraît  avoir  ajouté  à  ses  surnoms  ceux 
de  Severiana  et  d'Alexandriana. 

C'est  la  seule  inscription  qui  nous  fasse  connaître  un 
militaire,  et  ce  militaire  porte  le  triple  nom,  comme 
Agileius  du  n"  1.  Les  inscriptions  précédentes  nous  ont 
montré  les  plus  importants  personnages  de  la  cité  n'ayant 
qu'un  nom  double.  Peut-être  le  triple  nom,  jusqu'au 
règne  d'Adrien,  doit-il  être  regardé  comme  l'indice  de 
l'origine  romaine.  Le  surnom  Adventus  passe  au  fils  avec 
la  l'orme  diminutive  Advitinius. 

Signalons  l'épithète  touchante  de  Fruendo ;  le  nom  de 
la  mère  qui  se  retrouve  en  épigraphie  sous  la  forme 
Patabinia,  et  son  cognomen  Romana,  qui  peut  être  aussi 
une  indication  d'origine. 

La  pierre  a  de  hauteur  0'"60,  et  de  largeur  O^bS. 
Actuellement  au  musée  lapidaire.  {Mémoires  de  la  Société 
française  d'Archéologie,  tome  XXXII,  p.  60.  — Gravé, 
Mémoires  de  la  Société  des  Antiquaires  du  Centre,  tome  II.) 


20 i       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

17.  D  M. 

ET  MEMORIAE  IVLIAE  PAVLLINAE 
TENAT  MARTINVS  CONIVGI  AN  L 

Dus  Manibus.  ET  MEMORIAE  IVLIAE  PAVLLINAE 
TENATîMS  MARTINVS  CONIVGI  ANnw  quinquaginta. 
Aux  dieux  mânes  et  à  la  mémoire  de  Julia  Paullina^  son 
épouse,  âgée  de  cinquante  ans,  Tenatius  Martinus. 

Les  deux  premières  lettres  sont  sur  le  fronton  et  les 
deux  autres  lignes  sur  le  bandeau  circulaire  d'une  stèle  à 
à  arcade,  trouvée  en  17<,)4.  dans  les  fondations  du  sémi- 
naire de  Bourges.  (Actuellement  quartier  d'Artillerie,  rue 
Notre-Dame-de-Sales.)  Sous  l'arcade  est  une  statue  de 
femme  en  haut-relief,  brûlant  de  l'encens  sur  un  autel  : 
la  coiffure  de  la  femme  indiquerait  le  ii"  ou  le  m''  siècle  ; 
les  noms  propres  semblent  même  plus  récents. 

La  stèle  a  de  hauteur  i^-45,  et  de  largeur  O-^eO. 
Transportée  lors  de  la  découverte  au  Collège  des 
Jésuites,  à  Paris,  elle  est  actuellement  au  musée  de  Saint- 
Germain-en-Laye,  près  Paris,  dans  le  vestibule  d'entrée, 
n°  11.  [Mém.  de  Trévoux,  année  1704,  p.  14134,  art.  cxxi, 
du  P.  Chamaillard.) 

18.  Le  couvercle  d'une  tombe  en  pierre,  découverte  en 
1854,  dans  les  ruines  du  prieuré  du  Petit-Saint- Martin, 
commune  de  Meneton-Salon,  portait  une  inscription,  qui 
a  été  lue  : 

ATRIANI 

at  van!  fil 
ani)1':garivs 
ferox  cvravit 
ex  testament 

ATRIANI. 


XL*   SESSION,   A    CHATEAUROUX.  2()r> 

Cette  pierre,  remise  par  le  propriétaire,  M.  Théophile 
Pelle,  à  M.  Just-Bernard,  a  été  perdue.  Nous  n'avons  pu 
ni  en  contrôler  la  lecture  ni  en  constater  les  apparences. 
[Répertoire  archéologique  du  diocèse  de  Bourges^  p.  171, 
où  elle  est  indiquée  par  erreur  comme  étant  au  musée  de 
Bourges.) 

49.  DM 

MEMORIAE  iMRÏ 
LITTl  OSSA  VXOR. 

A  la  fin  de  la  deuxième  ligne,  un  trait  coupe  la  seconde 
partie  de  l'M  ;  l'R  a  le  trait  supérieur  prolongé  à  gauche, 
de  manière  à  former  à  la  fois  un  R,  un  I  et  un  T.  Enfin 
ri  final  est  rejeté  sur  le  bandeau  à  droite. 

Bits  Manibus  MEiMORlAE  MARITILITTI  OSSA  VXOR. 
Aux  dieux  mânes,  à  la  mémoire  de  son  mari,  [Littiossa)  son 
épouse. 

Des  traits  profonds  séparent  les  trois  lignes  de  cette  in- 
scription gravée  sous  un  bas-relief  brisé  représentant  la 
partie  inférieure  d'un  buste  d'homme  qui  tient  un  rouleau 
dans  sa  main,  gauche. 

Faut-il  voir  dans  Littiossa  un  nom  singulier  de  femme 
ou  le  décomposer  pour  voir  dans  Litti  le  nom  du  mari  et 
dans  Ossa  celui  de  l'épouse? 

Cette  stèle  et  les  dix  qui  suivent  ont  été  trouvées  près 
de  l'ancien  prieuré  de  Saint- Martin-des-Champs  ou  de 
Brives,  à  Bourges,  en  1864. 

Hauteur,  0'"60  ;  largeur,  0™32.  Actuellement  au  musée 
lapidaire.  (Publiée  par  M.  Boyer,  Bévue  archéologique, 
1865,  p.  392.) 


200  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

20.  D  M  ALVCNAE  (?) 

Dits  Manibus  ALVCNAE  (?)  Aux  dieux  mânes  d'Alucna. 
Cette  épitaphe,  d'uue  lecture  douteuse,  est  gravée  sur  le 
bandeau  supérieur  d'une  petite  stèle  présentant  au  som- 
met un  croissant,  consécration  à  Diane,  ou  Hécate,  la 
déesse  des  Enfers;  au  milieu  un  autel.  Rapprocher  du 
n"  34. 

Hauteur,  0"?>4-;  largeur,  0™30.  Actuellement  au  musée 
lapidaire.  (Dessinée  dans  le  3^  vol.  des  Mémoires  de  la 
Société  des  Antiquaires  du  Centre,  avec  la  lecture  :  IVLA 
LVCNA.) 

21.  DM  ARTIANI... 

On  peut  lire  :  \)iis  Isianibus  ARTIANI,  ou  mieux  :  Dus 
MARTIANI  ^lanibus,  en  supposant  à  la  fin  de  la  ligne  un 
autre  M,  dont  il  n'y  a  plus  que  l'emplacement  épaufré. 
Cette  inscription  est  gravée  sur  le  bandeau  supérieur  d'une 
grande  stèle,  représentant  un  portique  nu,  à  fronton 
triangulaire. 

Hauteur,  i"25  ;  longueur,  O'^M).  Actuellement  au 
musée  lapidaire.  (Publiée  par  M.  Boyer,  Revue  archéolo- 
gique de  18(53,  p.  392,  et  lue  par  lui  :  D  M  AEMILIANI.) 

22.  D  M 
LIDIIRINA. 

Dus  Mane'^ws  LIBERINA.  Aux  dieux  mânes.  Liberina. 
Ces  deux  lignes  sont  inscrites  au  fronton  d'une  stèle  à 
portique  avec  fronton.  La  barre  de  l'L  initiale  de  la  seconde 
ligne  part  du  milieu  de  la  haste  en  s'dbaissant  vers  la 
droite.  Le  double  I  pour  E  se  rencontre  à  toutes  les 


XL«   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  207 

époques.  Cette  inscription  et  les  suivantes  nous  \)iù- 
scntcnt  les  dégénérescences  variées  et  confuses  de  rulplia- 
bet  romain. 

Longueur,  0"'i3;  largeur,  0'"22.  Actuellement  au 
musée  de  lîourges.  (Publiée  par  M.  Diunoutet,  Mémoires 
lus  à  la  Sorbonne  en  18G0.  —  Mém..  de  la  commission 
historique  du  Cher,  2^  volume,  p.  7,  et  pi.  VI.) 

23.  D  M 
DOMNIIA. 

Biis  Maiiibus  DOMNEA.  Arix  dieux  mânes.  Domnea. 

Inscrite  sur  une  stèle  en  parallélogramme  avec  fronton 
et  tableau  indiqués  par  des  refouillements.  Emploi  des 
deux  I  pour  E. 

Hauteur,  0"'42;  largeur,  0^2 1.  [Mémoires  lus  à  la  Sor- 
bonne en  1866.  Dumoutet.  —  Commission  historique  du 
Cher,  t.  II,  p.  7,  pi.  VI.) 

24.  ...  VEXORA  AN  XXV. 

Vexora,  âgée  de  25  ans.  Sur  l'arcade  d'une  stèle  repré- 
sentant une  personne  drapée  portant  un  rouleau  de 
papyrus. 

Longueur,  O^So;  largeur  O^^S.  Actuellement  au  musée 
de  Bourges.  {Com.  hist.  du  Cher,  W  vol.  p.  6  et  pi.  III. 

25.  ...   M 

SASOVNA 

Sur  une  stèle  à  fronton  triangulaire  et  à  portique,  où 
est  représenté  un  modius. 


208        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Hauteur,  0"47  ;  largeur,  OHO.  Actuellemeat  au  musée 
(le  Bourges.  (/</.,  pi.  V  bis.) 

26.  D  .  . 
VENE  .  . 

Sur  la  partie  gauche  du  bandeau  d'une  stèle  dont  la 
partie  droite  manque. 

Hauteur,  0"24;  largeur,  O^SS.  Actuellement  au  nmsée 
de  Bourges,  (/t?.,  p.  8.) 

27.  NER...  MDO  A...  V 

NER...  MDO  Annis  V.  Sur  la  corniche  d'une  stèle  où 
est  représenté  un  enfant  jeune  encore. 

Hauteur,  0^40;  largeur,  0°>63.  Musée  de  Bourges.  {M., 
pi.  Il  bis.  La  stèle  est  dessinée,  mais  l'inscription  n'est 
pas  signalée.) 

28.  LVCAN 

0 
D  M. 

A  Lucain,  aux  dieux  mânes.  Gravée  dans  un  cartouche 
carré  sur  un  petit  cippe  cylindrique  d'un  galbe  élégant. 
Trouvé  dans  les  déblais  du  chemin  de  1er  près  d'Archelet, 
en  4847. 

Hauteur,  0«'o4;  largeur,  0"265.  Musée  de  Bourges. 

29.  FAVSTVLA 

Sur  une  stèle  à  portique  trouvée  dans  les  fondations  du 
pont  d'Auron,  en  4842.  (Lect.  com.  par  M.  A.  de  Barthé- 
lemi.) 


XL"   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  209 

La  première  lettre  est  douteuse  ;  un  estampage  nous  a 
donné  la  barre  de  l'L  inclinée  à  droite,  et  visible  quoique 
fruste.  Au  pied  de  l'A  est  une  sorte  de  trait  vertical,  rap- 
pelant quelques  formes  archaïques  de  cette  lettre  (1). 

Hauteur,  0™70  ;  largeur,  O^ai.  Musée  de  Bourges. 

30.  D  M  ADVMEN 

VS  AN  XII. 

Diis  Manibus  ADVMENVS  ANnfs  duodecim.  Aux  dieux 
mânes.  Adumenus,  douze  ans. 

Sur  la  frise  d'une  stèle.  Hauteur,  0"57;  largeur,  O^aS. 
Musée  de  Bourges. 

31.  MIIMO 
PAVLL 

AU 

MEMOrm  PAVLLAE.  Sépulture  de  Paulla.  Les  L 
affectent  la  même  forme  que  dans  le  n°  22.  Nous  avons  de 
même  l'emploi  des  deux  I  ou  H  pour  E.  La  barre  de  l'H 
est  abaissée  à  droite.  On  sait  qu'aux  époques  de  décadence 
le  mot  memoria  prend  le  sens  pur  et  simple  de  sépulture. 
Nous  rapprocherons  les  deux  L  de  ceux  de  Paullina, 
n°  M. 

Cette  inscription  est  gravée  sur  une  stèle  rectangulaire 
où  sont  dégagées  des  bandes  simulant  un  tableau  et  un 
fronton. 

Hauteur,  0"o7;  largeur,  0"20.  Musée  de  Bourges. 

32.  GARINNIO  (?) 

'\)  Dlct.  des  Antiquités  grecques  et  rom.,  par  Daremherg, 
p.  21o,  fig.  2:}s. 

XL*   SESSION.  14 


510       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

luscrit  sur  le  bandeau  d'une  stèle  à  portique  et  à  fron- 
ton triangulaire. 
Hauteur,  O^Go;  largeur,  O^SS.  Musée  de  Bourges. 

33.  DM 

GALLICO  (?) 

Inscrit  sur  l'archivolte  d'une  stèle  à  arcade. 
Hauteur,  0"'75;  largeur,  0"'37.  Musée  de  Bourges. 

34.  D  M 
FERN  (?) 

m  A. 

Lecture  très-douteuse;  inscrite  dans  le  tableau  refouillé 
d'une  stèle  à  portique  et  à  fronton  triangulaire  tronqué  : 
sur  le  fronton  est  un  croissant  et  au  bas  un  autel;  em- 
blèmes à  rapprocher  du  n°  20. 

Hauteur,  O^SS;  largeur,  O^S^.  Musée  de  Bourges. 

35.  D.  M. 
IIII  ANE. 

Caractères  presque  indéchiffrables,  tracés  au  fond  d'un 
petit  cartouche,  fouillé  dans  une  stèle  à  trois  pointes. 
Hauteur,  O^'â  ;  largeur,  O^Sâ.  Musée  de  Bourges. 

36.  IIIR  PHESII. 

T  COSSI 

Inscrite  dans  le  tableau  d'une  stèle  à  fronton  triangu- 
laire au-dessus  d'une  tète  barbare  vue  de  face. 
Hauteur,  0"80;  largeur,  0"'33.  Musée  de  Bourges. 


XI.''    SESSrOiN,    A    CriATEAUllOUX,  2H 

37.  U  M. 

MO...  M...  SI  AN  XXII. 

Sur  une  stèle  à  arcade,  représentant  le  buste  d'un 
homme  jeune,  trouvée  dans  une  cave,  rue  du  Vieux- 
Poirier,  et  donnée  au  musée  de  Bourges,  en  1873,  par 
son  propriétaire,  M.  Vermeil.  La  partie  inférieure  est 
brisée. 

Les  noms  sont  difficiles  à  restituer  par  suite  de  la  des- 
truction des  lettres.  On  pourrait  lire  :  Dits  Manibua 
MOnuMEN^mw  CASSI  ANms  XXII.  Aux  dieux  mânes. 
Tombeau  de  Cassius,  vingt-deux  ans  (I  ) . 

Hauteur,  O^iS.;  largeur,  O^oS.  Musée  de  Bourges. 

38.  Les  inscriptions  suivantes  se  trouvent  sur  les  stèles 
découvertes  à  AUéan,  près  de  Baugy,  en  1849  et  4850. 
Elles  sont  généralement  fort  confuses.  Elles  ont  déjà  été 
décrites  et  dessinées  par  MM.  Berry  et  Dumoutet,  dans  les 
Mémoires  de  la  commission  historique  du  Cher,  t.  I, 
p.  134  et  suivantes.  Nous  suivrons  l'ordre  indiqué  par 
ces  Messieurs,  et  il  sera  facile  d'y  contrôler  nos  lectures 
sans  autres  indications. 

DIS  MAN  MEM  SILVESTRI. 

ï)iis  MA^ibus  MEMorm  SILVESTRI.  Aux  dieux  mânes. 
Sépulture  de  Silvestre.  Sur  le  bandeau  demi-circulaire  ou 
arcade  d'une  stèle  présentant  le  buste  d'un  personnage 
tenant  des  deux  mains  un  voile  ou  mappa.  M.  Duliége 
[Congrès  archéologique  de  France,  1869,  p.  65)  voit  dans 
ce  personnage  un  éditor  ludorum  se  préparant  à  donner  le 
signal  des  courses  :  il  propose  la  lecture  finale  SILiï 
VESTRI,  mots  qu'il  place  dans  la  bouche  du  mort. 

(1)  Rt'Bliliilidii  (lue  à  MM.  de  Barlliélemi  et  Creuly. 


212       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

39.  m  MA 

GANT 

NAM 
MI 

Inscrite  sur  le  fronton  d'une  haute  stèle  nue. 

40.     DM  MEMORÏA  lALIINE  SVA  VIIONIS  BG  A  XXV. 

Inscrite  sur  le  bandeau  d'une  stèle  à  portique  et  à  fron- 
ton très-bas,  où  se  trouve  un  croissant.  La  stèle  représente 
le  buste  d'une  femme  avec  les  cheveux  en  rouleaux.  La 
lecture  en  est  difficile  et  confuse.  Nous  ne  serions  pas 
éloigné  d'y  voir  la  reproduction  barbare  d'une  formule 
comme  la  suivante.  Dus  Uanibus  MEMORIA  ALENE 
SUAE  VXORIS  BG  (2j  (pour  Bixit  ou  Vixit)  Annis  XXV. 
Aux  dieux  mânes.  A  la  mémoire  d'Ialène,  son  épouse,  gui 
vécut  vingt-cinq  ans.  La  forme  bixit  se  trouve  sur  des 
monuments  chrétiens  (1).  Musée  de  Bourges. 

Ai.  MiyPVLE[D?] 

Peut-être  LVPVLAE. 

Inscrite  sur  le  bandeau  d'une  stèle  à  fronton  représen- 
tant un  personnage  tenant  un  style.  Musée  de  Bourges. 

42.  DIS  MANI 

M  GANDI 

G.  G.  AN  VX. 

Stèle  à  fronton  et  portique,  avec  buste  d'un  personnage 

(1)  SVAVKIONIS  Bituriffis  Cubi;  suaveio,  analogue  par  le 
radical  à  suadiu/enus.  (De  Barthéleini  et  général  Creuly.) 

(2)  Gruter.  MLV.  5.  MLVI.  7.  et  passim. 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  213 

barbu  ;  la  troisième  ligne  est  d'une  lecture  difficile.  Musée 
de  Bourges. 

-43.        D.  MAN.  M.  PRISCINI  ou  MARIISCINI. 

Diis  MkNibus  Mei  PRISCINI  in  MARESGINI.  Stèle  à 
fronton  où  est  une  tcte  radiée  de  face  sur  un  bige  :  le 
soleil?  Nous  avons  un  petit  bronze  de  Probus  qui  a  un 
revers  analogue.  Sur  le  tableau  est  un  homme  tenant  un 
enfant.  Musée  de  Bourges. 

44.  MEMORIA  IMOARDS  DIS  MANIBUS. 

Sur  le  bandeau  demi-circulaire  d'une  stèle  à  portique 
où  étaient  les  figures  d'un  homme  et  d'une  femme.  (Tra- 
vail de  M.  Berry,  p.  438  et  pi.  XII.)  Nous  ignorons  sa 
destinée. 

45.  PRISGVS  SAM  MI. 

Sur  le  fronton  d'une  stèle,  où  est  représenté  le  buste 
d'un  personnage  tenant  une  llûte,  suivant  les  uns,  un 
style  et  un  tableau  à  écrire,  suivant  M.  Duliége,  qui  pro- 
pose la  lecture  ingénieuse,  mais  un  peu  hypothétique  : 
PRISGUS  Scriba  AMmanensis  MUitaris. 

C'est  dans  ce  tombeau  qu'a  été  trouvée  une  bague,  dont 
la  pierre,  gravée  en  creux,  donne  une  tête  de  profil  à 
droite,  portant  un  diadème  analogue  à  celui  des  impéra- 
trices du  iir  siècle.  Cette  indication,  avec  celle  du  n°  43, 
nous  paraît  précieuse  pour  fixer  au  milieu  du  m*  siècle 
l'âge  approximatif  de  ces  sépultures. 

Actuellement  chez  M.  Martinet  de  la  Métairie,  à  Chà- 
teauroux. 


214  CONGRÈS   AKCllÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

46.  ...VILOI... 

47.  IIRI  AUNI 

48.  R  IH 
PIRVII. 

Ces  épigraphes,  de  lecture  douteuse,  sont  sur  des  stèles 
diverses  du  musée  de  Bourges, 

49.  MEO  ALOSIOCO 

Sur  le  chapiteau  du  pilastre  gauche  et  le  fronton  demi- 
circulaire  d'une  petite  stèle,  représentant  le  buste  d'un 
enfant  tenant  de  sa  main  gauche  un  oiseau,  que  de  la 
main  droite  il  invite  à  becqueter.  A  mon  Alosiocus,  for- 
mule aJïectueuse  du  père  ou  de  la  mère.  Musée  de 
Bourges. 

Ici  s'arrête  la  série  des  stèles  épigraphiques  découvertes 
à  Alléan,  plus  intéressantes  pour  leurs  sculptures  que 
pour  leurs  inscriptions,  généralement  confuses  et  presque 
barbares.  Si  l'on  place,  comme  nous  croyons  devoir  le 
faire,  quelques-uns  de  ces  monuments  au  milieu  du 
III*  siècle,  ils  nous  donnent  des  indications  utiles  sur 
l'état  de  l'épigraphie  et  de  la  sculpture  à  cette  époque 
d'une  décadence  déjà  avancée. 

50.  Chez  M"'=  la  i)aronne  Duqucsne,  à  Arnaise  (Cher), 
l'ancien  Ernodurum,  des  fouille.-:,  dirigées  par  M.  Du- 
moutet,  ont  mis  au  jour  plusieurs  stèles  à  inscriptions. 

...VINIOLA. 


XL"    SESSION,    A   CUATEAUROUX.  215 

Sur  une  stèle  à  portique,  d'une  barbarie  extrême, 
représentant  une  femme. 

Hauteur,  l""  10;  largeur,  0"  68.  Actuellement  chez 
M""'  la  baronne  Duquesne,  à  Issoudun. 

(Mémoires  lus  à  la  Sorbonne  en  1866.) 

51.  RI  MANIRII  VMBRA. 

Ombre  de  ...  Manirius,  formule  très-rare.  Sur  le  ban- 
deau d'une  stèle  à  portique  tracé  par  des  bandeaux  et 
surmonté  d'un  fronton  à  deux  ailes.  Hauteur,  O™  59;  lar- 
geur, 0"  65.  Mêmes  destination  et  publication  que  le  pré- 
cédent. 

52.  ...VIRÏI  MEMORÏA. 

Sur  une  stèle,  représentant  un  édicule  à  deux  refouille- 
ments  aveugles.  (Publiée  par  M.  Dumoutet.  Nous  n'avons 
pu  la  retrouver.) 

53.  CALEPA. 

Inscription  verticale  sur  le  tableau  d'une  petite  stèle. 
Hauteur,  0""  62;  largeur,  O""  35.  Actuellement  chez  M"""  la 
baronne  Duquesne.  (Publiée  par  M.  Dumoutet,  avec  la 
lecture  cal  fa.) 

54.  N  G  M 

LEGIT  MIO  MIIIDDIE 

La  première  ligne  sur  le  fronton  et  la  deuxième  sur  la 
frise  d'une  stèle,  représentant  un  personnage  barbare  vu 
(le  face.  Trouvée  près  de  la  butte  d'Archelet  et  encadrée 
dans  le  pignon  d'une  maison  à  l'est  de  la  route  de  Paris. 


216       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

55.  MAS  PII. 

MASPE.  Gravé  à  la  pointe  et  au  trait  en  sortes  de  capi- 
tales rustiques  sur  le  plat  d'un  moellon  brut  au-dessus 
d'une  tète  barbare  vue  de  face.  La  pierre  a  aujourd'hui 
0""  21  de  large,  sur  0"°  20  de  haut.  Sa  hauteur  était  de 
Qm  45  à  O"  50  lorsqu'elle  fut  trouvée  par  M.  deLachaussée 
au  camp  de  César  ou  Vallum  du  château,  près  Bourges, 
en  1856. 

Actuellement  chez  M.  de  Laugardière,  à  qui  nous 
devons  ces  détails. 


Sépultures  chrétiennes. 

56.  HIC  RE 

QVIESGIT 
LVNIDIA. 

Cette  inscription,  dont  les  lignes  sont  séparées  par  des 
traits,  est  en  caractères  romains  très-inégaux  et  altérés; 
La  barre  de  l'A  est  infléchie  au  milieu.  Ici  repose  Lunidia. 
C'est  la  formule  la  plus  simple  et  la  plus  usuelle  des 
sépultures  chrétiennes.  Elle  est  gravée  sur  une  stèle 
mince,  au-dessus  est  une  croix  patléc  dans  un  cercle. 
Toute  la  stèle  est  entourée  d'une  bordure  de  deux  traits 
parallèles. 

Hauteur,  0"  63  ;  largeur,  0""  40.  Trouvée  au  cimetière 
de  Saint-Martin-des-Champs,  à  Bourges.  Actuellement 
au  musée  lapidaire. 

[Revue  archéologique,  1865,  p.  392.  Communication  de 
M.  Boyer.  —  Bulletin  monumental  de  M.  de  Caumont, 
1869,  p.  682.) 


XL"   SESSION,    A   (JIIATEAUROUX.  217 

57.  HIC  RH 

PVIESCIT 
BADAR 
PVS. 

On.  peut  lire  HIC  REQVIESCIT  BADARPVS.  Ici 
repose  Badarpus.  On  trouve  des  altérations  plus  graves 
que  dans  la  précédente  :  à  la  première  ligne,  H  pour  E, 
à  la  deuxième,  l'  pour  Q.  Le  nom  avait  été  lu  par 
M.  Boyer  •  Pudarius,  et  par  M.  de  Caumont  :  Budarpus. 

Comme  la  précédente,  cette  inscription  est  sur  le  bas 
d'une  stèle  plate  et  haute,  encadrée  d'un  double  trait  et 
portant  au  sommet  des  vestiges  de  croix  grecque  pattée, 
tracée  au  trait  et  coupée  par  un  trait  diagonal  de  droite  à 
gauche. 

Hauteur,  0""  80;  largeur,  0™  48.  Actuellement  au  musée 
lapidaire. 

[Revue  archéologique,  p.  392.  M.  Boyer.  —  Bidletin 
monumental,  1869,  p.  682.) 

58.  HIC  ...VIISCIT 
BONE  MEMORIE 
MEROFLIDIS 

HIC  REQVIESCIT  BONAE  MEMORIAE  MEROFLIDIS. 

Ici  repose  Méroflide  de  bonne  mémoire. 

Ce  fragment,  trouvé  au  même  lieu,  nous  présente  la 
forme  requiiscit  pour  requiescit,  des  0  en  losanges,  la 
forme  E  pour  AE  au  génitif.  La  lecture  de  la  dernière 
ligne  est  difficile  et  douteuse.  La  cinquième  lettre  F  a  sa 
barre  supérieure  prolongée  à  gauche  comme  un  T,  la 
huitième  parait  un  delta  grec  mal  formé  et  se  relie  à  l'i 
qui  la  suit. 

On  sait  qu'une  des  femmes  de  Caribert,  roi  de  Paris, 


218  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE    Fl\ANCE. 

(561-567)  se    nommait  Méroflède.   Nous   aurions   donc 
ainsi  une  date  approximative   de  l'emploi  de  ce  nom,  et 
par  conséquent  de  cette  stèle,  vers  la  fm  du  vi'=  siècle. 
Actuellement  au  musée  de  Bourges. 

59.  ...DEPOSIT... 

Rappelons  que  de  Caylus  a  lu,  sur  un  fragment  trouvé 
à  Alichamps,  ce  mot  d'apparence  funéraire  chrétienne. 
[Recueil  d'antiquités,  t.  III,  p.  177.) 

Nous  écartons  de  ce  catalogue  les  belles  et  intéressantes 
inscriptions  trouvées  dans  la  chapelle  de  Saint-Martin- 
des-Champset  au  faubourg  du  château.  Elles  sont  certai- 
nement postérieures  à  la  chute  de  la  domination  romaine 
dans  la  Gaule.  Quelques-unes  semblent  mérovingiennes, 
la  plupart  carlovingiennes.  On  les  trouvera  dans  le  qua- 
trième volume  de  la  Société  des  Antiquaires  du  Centre, 
page  166  et  suivantes. 

De  même,  nous  croyons  inutile  d'y  faire  figurer  quel- 
ques fragments  qui  ne  présentent  que  des  lettres  éparses. 


Fragments  divers. 


60.  MAGVSO. 

Gravé  à  la  pointe  sans  traits  terminaux  sur  un  vase 
romain,  en  poterie  noire,  recueilli  par  M.  Alfred  de 
Lachaussée  dans  les  fouilles  du  champ  de  foire  (cime- 
tière romain  d'Avaricum)  vers  1848. 

On  pourrait  voir  dans  ce  mot  au  datif  la  trace  d'un 
culte  local  rendu  à  la  divinité  Macusus,  assimilée  à  Her- 


XL*   SESSION,    A   CilATEAUROUX.  2i9 

cule.  On  trouve  l'épithète  Herculi  Macusano  dans  d'autres 
inscriptions.  (Orelli,  2,004  et  2,005.) 
Collection  de  la  famille  Lachaussée. 

61.  Sur  un  vase  funéraire  en  terre  noire,  trouvé  aussi 
par  M.  de  Lachaussée,  au  champ  de  foire,  à  la  même 
époque,  on  lit  l'inscription  suivante  autour  du  col  : 

CRONOPIIIIS....  AT  MVLTIS  ANNIS. 

Les  lettres  de  la  première  partie  sont  grasses,  c'est-à- 
dire  épaisses,  formées  de  deux  traits  dont  l'intervalle  est 
rempli  par  des  hachures  transversales.  Les  deux  derniers 
mots  sont  tracés  au  trait  simple. 

La  finale  du  premier  mot  est  très-confuse  ;  une  ébré- 
chure  du  vase  supprime  la  partie  moyenne;  la  syllabe  ai 
semble  bien  la  terminaison  de  vivat  ou  requiescat.  Faut-il 
lire  :  GRONOPILES  vivAT  MVLTIS  ANNIS  :  Que  Crono- 
pile  vive  de  nombreuses  années.  Cette  allusion  à  une  autre 
vie,  cette  formule  a  une  apparence  chrétienne,  et  comme 
l'ustion  est  une  coutume  funéraire  des  premiers  siècles,  on 
pourrait  regarder  ce  vase  comme  un  des  vestiges  les  plus 
reculés  du  christianisme  dans  nos  contrées.  Collection  de 
la  famille  Lachaussée. 

62.  Aux  mêmes  lieux  et  à  la  même  date,  M.  le  baron 
de  Girardot  a  recueilli  un  vase  portant  autour  du  col  une 
inscription  tracée  en  spirale,  déjà  devenue  célèbre  par  les 
commentaires  auxquels  elle  a  donné  lieu.  On  semble 
d'accord  aujourd'hui  pour  la  lire  : 

BVSGILLA  SOSIO  LEGASIT  IN  ALEXIE  MAGALV. 

Quelques  savants  ont  cherche  à  y  trouver  une  phrase 


220       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

latine,  mais  l'opinion  généralement  admise  aujourd'hui 
est  d'y  voir  un  spécimen  de  langue  celtique  ou  gauloise, 
peut-être  même  de  l'idiome  biturige,  et  de  lire  :  Buscilla 
sosio  legasit  in  Alexie  Magalu,  et  de  traduire  par  Buscilla 
(nom  propre)  envoie  ceci  à  Magalu  (nom  propre)  dans 
Alexie  (nom  de  localité). 

Nous  n'avons  pas  ici  la  place  de  résumer,  même  som- 
mairement, les  savantes  discussions  qu'a  motivées  cette 
épigraphe.  Nous  signalerons  seulement,  parmi  les  nom- 
breux mémoires  où  on  les  trouvera,  un  article  de  M.  de 
Longpérier,  Revue  arch.  1849,  t.  VI,  p.  554.; — Éloi  Johan- 
neau,  mèiweRevue^  1850;  —  Lenormant,  1870;  —  Morin, 
Monuments  des  anciens  idiomes  gaulois^  1861,  p.  71;  — 
Frœhner,  Revue  arch.,  1866;  —  Pictet,  ïrf.,1867.  Nouvel 
essai  sur  les  inscriptions  gauloises;  —  DeBelloguet,  Ethno- 
génie  gauloise.  Paris,  1872,  p.  311.  CollectiondeM.de 
Girardot,  à  Nantes. 

63.  A  Chezelles,  commune  de  la  Guerche,  au  milieu 
de  débris  de  sculptures  romaines,  M.  Roubet,  juge  de 
paix,  vice-président  de  la  Société  Nivernaise,  et  membre 
de  la  Société  française  d'Archéologie,  a  recueilli  un  frag- 
ment de  moulure,  sur  le  revers  duquel  étaient  tracés  en 
creux  quelques  sillons  confus,  à  fond  arrondi.  M.  Roubet 
propose  la  lecture  très-douteuse  : 

IDALLVS. 

[Épigraphie  historiale  du  canton  de  la  Guerche,  par 
Louis  Roubet.  Nevers,  1873.)  Collection  de  M.  Roubet,  à  la 
Guerche. 


XL*   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  22i 

64.  FLOR.. 
IVLILI... 
BALINI 
Fï. 

Inscrit  en  quatre  lignes  sur  un  Fragment  de  mosaïque 
venant,  paraît-il ,  d'une  villa  romaine ,  près  d'Herry , 
canton  de  Sancergues  (Renseignements  communiqués  par 
M.  Daniel  Mater).  L'inscription  est  complète  en  haut,  à 
gauche  et  au  bas,  mais  la  partie  droite  est  tronquée. 
Faut-il  restituer  :  FLORianus  IVLI  Ubertus  BALINI 
(forme  connue  pour  Balnei)  ornamentum  FeciT2 

Actuellement  au  musée  de  Bourges. 

65.  DEO  MERGVRIO. 

Inscrit  sur  une  plaque  de  bronze,  trouvée  au  faubourg 
d'Auron  (?)  {Répertoire  archéologique  du  comité  diocésain, 
p.  28.) 

Nous  ne  faisons  pas  figurer  dans  ce  catalogue  le  mot 
BOLETARI,  signalé  par  de  Caylus  comme  estampé  sur 
l'anse  d'un  vase  trouvé  à  Alichamps.  Les  estampages  sur 
poterie,  comme  les  noms  de  potier,  n'ont  pas  une  origine 
certainement  locale,  et  pour  ce  motif  nous  semblent  devoir 
être  éliminés. 

Pour  une  cause  tout  autre,  nous  n'introduisons  pas 
non  plus  ici  les  inscriptions  découvertes  depuis  une 
vingtaine  d'années  au  lieu  de  Villatte,  à  3  kilomètres  sud- 
est  de  Neuvy-sur-Barangeon,  dans  des  ruines  romaines 
importantes.  Ces  monuments  ont  amené  des  discussions 
assez  vives,  mais  MM.  Renier  et  Egger  ayant  affirmé  leur 
fausseté,  comme  présentant  des  caractères  usités  à  plu- 
sieurs siècles  de  distance  et  comme  étant  en  dehors  de 


î>2'2  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

toutes  les  données  usuelles  de  l'épigraphie,  leur  authenti- 
cité a  peu  de  soutiens. 

Depuis,  on  a  trouvé  au  même  lieu  d'énormes  blocs 
de  pierre,  en  grès  très-friable,  portant  des  caractères 
d'apparence  phénicienne  :  mêmes  doutes  que  pour  les 
autres. 

Du  reste,  si  certains  indices  semblent  placer  à  la  fin  du 
xviii"  siècle  la  fabrication  de  ces  graffiti,  ce  problème  n'en 
demeure  pas  moins  trop  complexe  pour  que  nous  tentions 
d'en  exposer  ici  les  données,  et  nous  nous  bornons  à  en 
signaler  l'énigme. 


INDRE. 

Le  département  de  l'Indre,  qui  fait  encore  partie  du 
diocèse  de  Bourges,  était  autrefois  compris  dans  le  pays 
des  Bituriges  Cubi.  11  était  traversé  par  la  grande  voie 
romaine  de  Bordeaux  à  Lyon  par  Poitiers  et  Avaricum,  et 
par  plusieurs  autres. 

Inscriptions  votives. 

1.  Lorsqu'on  déblaya  le  petit  oratoire  situé  au  pied  de 
la  tour  blanche  d'Issouduii,  on  trouva  parmi  les  matériaux 
employés  à  la  construction  de  cet  édifice  plusieurs  pierres 
sculptées  :  une  d'elles  portait  un  fragment  d'inscription 
latine.  Elle  fut  examinée,  dessinée  et  lue  par  M.  Pérémé, 
qui  la  publia  dans  ses  Recherches  historiques  sur  Issoudun. 
Elle  a  disparu  aussitôt  découverte,  de  sorte  que  nous  ne 
la  connaissons  que  par  son  dessin  et  la  lecture  qu'il  en  a 
donnée  : 


XL'"    SESSION,    A    CIIATHAUUOUX.  223 

...M.NE... 
..M.  ET  DE... 

..VSIBVS  C. 
.VNESSIVM.. 
..RVM  GIRC. 
..OKNAMEN.. 
.1  DEDIT  GAL. 

Il  résulte  du  dessin  et  de  la  description  que  la  partie 
droite  et  la  partie  gauche  manquaient.  La  restitution 
nous  semble  extrêmement  difficile  et  périlleuse,  surtout 
en  l'absence  du  monument  original.  La  terminaison 
unes&ium  est-elle  celle  du  mot  exoldunensium  ?  Les  lettres 
cire  indiquent-elles  l'existence  d'un  cirque,  ou  faut-il 
voir  murum  circum  ?  Tout  cela  est  fort  hypothétique. 

Nous  conclurons  seulement  de  l'examen  de  ce  frag- 
ment que  l'irrégularité  des  lignes  et  des  lettres  semble  le 
placer  au  plus  tôt  au  commencement  du  m''  siècle  que 
par  sa  longueur  et  son  importance,  par  le  mot  ornamentis 
qui  s'y  trouve,  par  sa  formule  finale,  il  prouve  qu'en  ce 
lieu  a  existé  un  monument  civil  ou  plutôt  sacré,  objet 
d'une  libéralité  de  la  part  d'un  habitant  se  nommant  pro- 
bablement Gallus.  Ces  indications,  qui  concordent  avec  la 
découverte  d'autres  pierres  sculptées  romaines  dans  le 
voisinage,  ont  un  intérêt  sérieux  pour  le  passé  d'Issoudun 
à  l'époque  romaine.  (Pérémé,  Recherches  archéologiques 
sur  Issoudun,  p.  34.) 

2.  Des  fouilles  faites  par  M.  le  curé  de  Déols,  en  1861, 
ont  découvert  à  gauche  et  au  nord  du  chœur  de  l'église 
paroissiale  de  Déols,  dans  un  caveau  effondré,  des  débris 
de  sarcophages  qui  paraissent  identiques  avec  ceux  déjà 


224-       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

VUS  par  La Thaumassière  en  1867  (l).  Un  de  ces  sarco- 
phages, réduit  à  l'état  de  fragments,  a  été  restitué;  d'autres 
plus  petits  étaient  autour  de  lui. 

Un  de  ces  derniers,  intact,  paraît-il,  portant  un  frag- 
ment d'inscription,  est  encastré  dans  le  mur  du  caveau. 
La  face  apparente,  la  seule  que  nous  ayons  pu  étudier, 
présente  la  partie  inférieure  d'un  cartouche  encadré  d'un 
bandeau  à  filet,  et  où  sont  deux  lignes  d'une  inscription 
en  capitales  romaines.  Les  lettres  de  la  première  ligne  sont 
coupées  par  le  bout  : 

POL  PATERNVS 
SABINI  FIL 

Une  ou  plusieurs  lignes  ont  pu  exister  au-dessus, 
portant  soit  les  lettres  D  M,  soit  une  formule  funéraire.  On 
peut  lire  celles  qui  restent  :  POLlion  ou  FOLlus  PATER- 
NVS SABINI  FILms.  Poilus  Paternus,  fils  de  Sabinus. 

La  seule  lettre  douteuse  est  la  sixième  de  la  première 
ligne;  on  a  pu  la  lire  I,  puisque  la  partie  supérieure 
manque;  il  nous  parait  plus  naturel  d'y  voir  un  T. 

Nous  n'hésitons  pas  à  proposer  la  coupure  abréviative 
après  la  syllabe  Pol,  bien  qu'il  y  manque  le  point  abré- 
viatif  ;  nous  voyons  souvent  des  exemples  de  cet  oubli.  Les 
prénoms  Pollio  et  Poilus  sont  connus  en  épigraphie  gallo- 
romaine  (2). 

(1)  Ce  caveau  fait  face  à  cehii  où  est  le  tombeau  en  marbre 
de  saint  Liidre.  Pour  ce  dernier,  M.  de  Cougny  ayant  constaté 
que  celle  partie  de  l'église,  bâtie  avec  chaînes  de  briques  peut 
remonter  au  vi«  siècle,  on  peut  affirmer  l'identité  de  ce  tom- 
beau avec  celui  qu'a  connu  et  décrit  Grégoire  de  Tours. 

[t)  Inscriptions  anliques  de  Lyon.  Alph.  Boissieu,  p.  19:} 
et  518. 


XL*   SESSION,    A    llllATEAUROU.V.  22.% 

La  forme  ondulée  des  barres  inférieures  des  L  nous 
paraît  indiquer  la  fin  du  i*^""  siècle  ;  le  bon  style  des  formes 
et  la  simplicité  des  dispositions  indiquent  aussi  une  époque 
élevée  :  il  est  évident,  par  la  mutilation  supérieure  de 
la  pierre,  que  l'emploi  comme  cercueil  n'a  pas  été  son 
premier  état,  puisque  le  cartouche  n'est  plus  entier. 

Nous  avons  donc  là  l'utilisation,  pour  la  fabrication 
d'un  cercueil,  d'une  pierre  funéraire  païenne.  C'est  ce 
second  emploi  qui  peut  parfaitement  concorder  avec 
rétablissement  du  christianisme  dans  le  Berry  au 
III*  siècle ,  et  avec  l'inhumation  traditionnelle  de  la 
famille  Léocade  dans  ce  caveau.  Ainsi  tombe  la  discor- 
dance saisissante  à  première  vue  de  ce  fragment  d'in- 
scription funéraire  païenne  d^un  adulte  et  du  i*^""  siècle, 
sur  une  inhumation  d'enfant. 

Hauteur  de  la  pierre,  O^âB  ;  longueur,  O'^SS.  Actuelle- 
ment incrustée  dans  la  paroi  septentrionale  du  caveau 
nord  de  l'église  paroissiale  de  Déols. 

3.  Sur  la  base  d'un  fragment  de  stèle,  trouvé  dans  la 
tranchée  du  chemin  de  fer,  près  de  Saint-Marcel  et  d'Ar- 
genton,  on  voit  les  pieds  d'un  personnage  de  face,  dont  la 
partie  supérieure  manque.  Au-dessus,  sur  un  bandeau, 
entre  deux  traits  horizontaux,  est  l'inscription  : 

BLADAMI  FIL. 

Un  point  triangulaire  existe  avant  fil.  Les  L  ont  la  tra- 
verse inférieure  formée  d'une  sorte  de  point  triangulaire, 
légèrement  relevé  à  droite,  et  de  forme  peu  commune. 
Comme  la  partie  supérieure  manque,  on  est  forcé  d'y 
supposer  le  nom  du  défunt,  dont  nous  n'avons  ici  que  la 
filiation. 

XL^  SESSION.  ■i'^> 


226       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Hauteur,  0"43  ;  largeur,  0'"40.  Actuellement  dans  la 
cour  du  musée  de  Châteauroux. 

4.  M.  l'abbé  Voisin,  curé  de  Douadic,  près  du  Blanc,  a 
communiqué  au  Congrès  de  Châteauroux  la  découverte 
de  l'épigraphe  suivante,  qui  emprunte  un  intérêt  spécial  à 
la  singularité  du  monument  qui  la  porte. 

Sur  la  rive  gauche  de  la  Creuse,  commune  de  Sau- 
zelles,  en  face  du  village  de  Bénavent,  on  voit  encore 
aujourd'hui  un  pan  de  rocher,  taillé  à  pic  sur  une 
longueur  de  >oO  et  une  hauteur  d'environ  3  mètres.  La 
partie  inférieure  de  cette  surface  présente  une  arcature 
formée  de  quatre  pilastres  soutenant  trois  arcades,  sous 
lesquelles  sont  gravés  en  bas-relief  trois  personnages  en 
pied.  Sous  l'arcade  du  milieu,  un  homme  portant  un 
chien;  une  femme  sous  celle  de  droite,  et  une  autre 
femme  sous  celle  de  gauche. 

Au-dessus,  un  tableau,  sorte  de  frise,  qui  parait  avoir 
été  surmonté  d'une  doucine  et  qui  a  environ  1  mètre 
de  long  sur  O'^SO  à  O-^GO  de  hauteur,  porte  des  traces  d'in- 
scription. 

Ces  traces,  relevées  avec  le  plus  grand  soin  par  M.  l'abbé 
Voisin,  ont  donné  la  lecture  suivante  : 

DIS  MANIB 
MONIMENTVM 
.    .    .VSORI... 
.    .    .ET  MEF  (?)... 
.    .  INNFOVETV  (?) 

La  troisième  ligne  est  incomplète;  la  quatrième  et  la 
cinquième  sont  d'une  lecture  extrêmement  douteuse. 

Nous  n'essayerons  pas  une  restitution  qui  serait  fort 
périlleuse,  et  nous  nous  bornerons  à  constater  que  les 


XL«  SESSION,    A   GHATEAUROUX.  227 

premières  lignes  semblent  d'assez  bon  style,  mais  (|ue 
diverses  négligences  paraissent  accuser  une  décadence  déjà 
prononcée. 

Ainsi  la  forme  monimentum  pour  monumentum,  les 
traverses  abaissées  à  droite  de  la  dernière  ligne,  et  qui 
appartiennent  soit  à  des  N  soit  à  des  H,  peut-être  avec  la 
valeur  de  Vêta  grec  et  le  son  e,  semblent  indiquer  le 
111°  siècle.  Il  en  est  de  même  de  la  forme  usori,  qui  nous 
paraît  là  pour  uxori. 

Voir  dans  usori  la  finale  du  datif  Lusori,  et  rapporter 
ainsi  ce  monument  à  un  homonyme  du  saint  Ludre  de  Gré- 
goire de  Tours,  nous  paraît  plus  séduisant  que  fondé  et, 
repoussant  cette  hypothèse  trop  gratuite,  nous  nous  con- 
tenterons devoir  dans  ce  qui  nous  reste  de  cette  inscription 
la  trace  certaine  d'une  inscription  funéraire  païenne,  très- 
probablement  du  commencement  du  iii*^  siècle,  et  nous 
donnant  ainsi  la  date  approximative  des  sculptures  très- 
curieuses  qui  l'accompagnent.  C'est,  croyons-nous,  un 
monument  unique  dans  son  genre  au  centre  de  la  France, 
et  très-rare  partout. 

.^>.  La  Thaumassière  rapporte  (1.  VIÏ,  chap.  xli  de  son 
Histoire  de  Berry)  que  vers  1620,  on  trouva  à  Levroux 
une  lame  de  cuivre  sur  laquelle  se  lisaient  ces  mots  : 

FLAVIA  CVBA  FIRMIANI  FILIA  GOLOSSO  DEO 
MARTI  SVO  HOC  SIGNVM  FEGIT  AVGVSTO. 

On  voit  que  cette  inscription  est  presque  analogue,  sauf 
firmiani  pour  firmani,  et  colosso  pour  cososo,  à  celle 
donnée  aussi  par  La  Thaumassière,  comme  trouvée  à 
Maubranche,  vers  1600.  (Voy.  supra.  Dép.  du  Gher,  n"  2.) 
Cette  dernière  inscription  ayant  été  perdue,  comme  la  pre- 
mière,  leur  similitude  est  si  extraordinaire,  plusieurs 


'228       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

points  de  la  lecture  donnée  si  peu  admissibles  et  si  peu 
contrôlés,  que  nous  nous  abstiendrons  de  toute  réflexion 
sur  ce  monument,  que  nous  ne  donnons  qu'à  titre  d'indi- 
cation, et  qui  ne  nous  paraît  mériter  aucune  confiance. 


INDRE-ET-LOIRE. 

Ce  département,  qui  correspond  à  peu  près  à  l'ancien 
territoire  de  la  cité  des  Turons,  dans  la  Gaule  celtique, 
fut  d'abord  compris  dans  la  deuxième  lyonnaise.  Il  eut 
pour  ville  principale  Tours,  Cœsarodunum ,  qui  prit 
ensuite  le  nom  de  la  cité,  et  devint  capitale  de  la  troi- 
sième lyonnaise,  lorsque  celle-ci  fut  formée  au  iv*  siècle. 


Monuments  votifs. 

4.  Chalmel,  dans  son  Histoire  de  la  Touraine  {\),  rap- 
porte, page  68,  que  plusieurs  inscriptions  auraient  été 
découvertes,  en  1658,  dans  les  fondements  des  murs  de  la 
ville  de  Tours,  qu'on  démolissait  pour  la  construction 
d'un  nouveau  palais  archiépiscopal.  Parmi  ces  inscrip- 
tions, dit-il,  on  remarquait  celle-ci,  écrite  en  grosses 
lettres,  gravées  sur  une  pierre  de  4  pieds  de  long  : 

IMP.  CAESARI  DIVI.  TRAIANI  PARTHICI  FI 
LIO  DIVI.  NERVAE  NEPOTI  TRAIANO 
HADRIAN.  AVG.  PONTIFIGI  ûiAX.  TRIB. 
POT.  GOSS  III  (2). 

(1)  Manie,  Tours,  1828. 

(2)  Probablement  COS. 


XL"  SESSION,   A   GI1A.TEAUR0UX.  229 

mPernfori  CAESAlil  DIVl  TRAIANI  PARTHICl  FILIO 
DIVI  NERVAE  NEPOTI  TRAIANO  HADRIANO  AYgusto 
PONTIFICI  MAXimo  TRmunitia  VOTcstate  GOsSw/i  III. 

A  l'empereur  César  Hadrien  Trajan  Auguste,  fils  du 
divin  Trajan  le  parthique,  petit-fils  du  divin  Nerva,  sou- 
verain poîitife,  revêtu  de  la  puissance  tribunitienne ,  consul 
pour  la  troisième  fois. 

Cette  inscription,  dont  nous  ne  connaissons  pas  les  dis- 
positions, parait  incomplète.  Les  mots  y  sont  au  datif,  et 
ce  régime  indirect  semble  déterminé  par  un  verbe 
exprimé  ou  sous-entendu  et  un  sujet  au  nominatif. 

Elle  ne  porte  qu'une  indication  chronologique,  celle  du 
troisième  consulat  d'Adrien,  qui  dura  de  l'an  119  jusqu'à 
sa  mort  :  c'est  donc  entre  ces  deux  époques  extrêmes 
qu'elle  se  place.  Comme  nous  voyons,  parce  que  ditChal- 
mel,  qu'elle  fut  trouvée  dans  les  fondations  des  murs  de 
l'archevêché,  nous  sommes  porté  à  la  rapprocher  des  deux 
fragments  suivants,  dont  l'apparence  épigraphique  in- 
dique la  même  époque.  Nous  pencherions  même  à  la 
compléter  par  la  pierre  que  nous  allons  décrire  et  qui 
présente  justement  ce  sujet  de  phrase  que  nous  cherchions 
tout  à  l'heure. 

Actuellement  perdue. 

(Ghalmel,  Histoire  de  Touraine.) 

2.  CIVITAS  TV. . . 

LIBERA. 

Fragment  d'inscription  gravé  sur  une  pierre  incrustée 
à  l'envers  dans  les  fondements  du  mur  romain  à  l'arche- 
vêché, et  dont  un  très-bon  moulage  existe  au  musée  de 
Tours.  Les  lettres  paraissent  du  commencement  du 
II"  siècle,  elles  ont  de  hauteur  0"  07.  L'inscription  est 


230       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

complète  à  gauche  et  en  bas,  incomplète  à  droite  et  proba- 
blement au-dessus. 

Il  est  facile  de  lire  :  CIVITAS  TVronorvm  LIBERA.  La 
cité  libre  des  Turons,  et  il  nous  semblerait  tout  naturel  de 
rapprocher  ce  fragment  du  numéro  ci-dessus.  On  aurait 
alors  une  inscription  en  l'honneur  d'Adrien. 

Actuellement  incrustée  dans  le  mur  gallo-romam,  au 
palais  de  l'archevêché,  à  Tours. 

(Ghalmel,  Histoire  de  Touraine,  I,  68.) 

3.  Au  même  lieu  est  l'inscription  suivante  : 

. .  .SI  NEPOTI 
. .  .A  CIVITAS  TV 

. .  .NI  RONOR  LIE 

...VI 
...RA 

Ainsi  qu'on  le  voit,  la  pierre  porte  deux  fragments 
d'inscriptions. 

Le  principal,  celui  de  droite,  est  complet  à  gauche  et  au 
bas,  probablement  aussi  à  droite,  incomplet  par  le  haut. 
Les  caractères,  de  même  hauteur  que  ceux  de  la  précé- 
dente, accusent  aussi  le  ii''  siècle. 

La  première  ligne  est  d'une  lecture  difficile,  le  sommet 
des  lettres  est  altéré.  L'S  du  commencement,  le  T  et  l'I  de 
la  fin  ne  sont  donc  pas  absolument  certains.  On  ne  peut 
s'empêcher  de  penser  à  la  qualification  Nervœ  Nepoti 
usuelle  pour  Adrien  ;  mais  il  est  fort  difficile  de  loger  les 
titres  subséquents  qui  lui  étaient  attribués  d'habitude.  On 
ne  saurait  non  plus  la  reporter  à  Néron,  petit-fils  adoptif 
de  Drusus  Germanicus,  puisqu'il  prenait  le  nom  de 
Germanici  nepos,  et  que  d'ailleurs  l'inscription  ne  paraît 
nullement    du    i"    siècle.    La   fin    impose    une  lecture 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  231 

analogue  à  la  précédente  :  CIVITAS  TIVRONORwm 
LlBera. 

Nous  n'insistons  pas  sur  l'importance,  déjà  signalée  en 
plusieurs  recueils,  de  cette  inscription,  pour  l'histoire  de 
la  ville  de  Tours,  dont  elle  affirme  le  caractère  de  cité 
libre,  dès  le  ii"  siècle. 

A  gauche  de  ce  fragment  est  la  fm  d'une  inscription  en 
quatre  lignes,  incomplète  à  gauche  el  au  bas,  dont  les 
lettres  sont  moins  hautes  et  un  peu  plus  serrées.  Nous 
pouvons  conclure  de  leur  présence  que  cette  pierre  était 
sur  le  parement  d'un  mur  couvert  d'inscriptions,  et  ap- 
partenait à  un  monument  dont  peut-être  les  épigraphes 
ci-dessus  rappelaient  la  construction. 

Actuellement  au  mur  gallo-romain,  au  palais  de  l'ar- 
chevêché de  Tours.  Un  moulage  en  existe  au  musée  (4). 

(Ghalmel,  I^istoire  de  Touraine,  68.) 

i  et  5.  Deux  fragments  épigraphiques,  qui  étaient  dans 
le  jardin  des  Dames  de  la  Purification,  à  Tours,  attenant 
au  bâtiment  inscrit  sous  le  n°  328  du  plan  cadastral, 
encastrés  dans  le  mur  extérieur  qui  enveloppe  les  restes 
de  l'amphithéâtre  romain,  ont  été  découverts  en  février 
1872,  par  M.  Léon  Palustre,  conservateur  du  Musée  de 
Tours,  qui  put  les  faire  transporter  au  musée  de  cette 
ville,  où  ils  sont  aujourd'hui.  Immédiatement  au-dessus 
de  ces  deux  pierres  on  voyait  un  beau  bas-relief,  égale- 
ment encastré  dans  la  muraille,  et  représentant  une 
femme  à  demi  couchée,  appuyée  sur  la  main  droite  et  le 
bras  gauche  étendu,  bas-relief  qui  a  été  également  trans- 
porté au  musée. 

(I)  Malgré  tons  nos  efforts,  nous  n'avons  pu  être  admis  à 
visiter  roriginal  ;  notis  n'en  parlons  donc  que  d'a|)ros  le  moulage. 


232       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Cette  découverte  a  été  l'objet  d'une  excellente  étude  faite 
par  M.  Robert  Mowat,  sur  les  indications  de  M.  Palustre, 
et  insérée  dans  le  Bulletin  monumental  (^"^  série,  1"  fas- 
cicule de  1873,  p.  41).  Les  deux  fragments,  qui  appar- 
tiennent évidemment  à  la  même  inscription,  présentés 
dans  l'ordre  où  ils  doivent  être  lus  et  inverse  de  celui  où 
ils  sont  au  musée,  donnent  le  texte  suivant  : 

. .  .AIVLI  BENIG ICA  DIV 

...MNIBVSORNA ITHOCCI... 

. .  .FILIA  ET  HERES  V.     . .  .MMAVIT 

Un  blanc  qui  reste  après  les  syllabes  mavit  indique 
bien  que  là  est  la  fin  de  l'inscription. 

Voici  la  restitution  savamment  motivée  qu'en  a  faite 
M.  Mowat  : 

Julia  Seve^k  IVLI  BENIGn?  filia  d.  d.  flaminiCk 
DIVa?  Augustœ,  basilicam  cum  oMNIBVS  OBNAmentis  suis 
inchoavlT  :  HOC  CEalcidicum  benigna  FILIA  ET  HERES 
\t  mater  jusserat  pecunia  sua  cowsmMMAVIT. 

Julia  Severa,  fille  de  Julius  Benignus,  par  décret  des 
décurions,  flaminique  de  la  divine  impératrice,  a  commencé 
la  basilique  avec  tous  ses  ornements  :  le  chalcidique  a  été 
achevé  des  deniers  de  Benigna,  fille  et  héritière  de  Julia 
Severa,  conformément  aux  volontés  de  sa  mère. 

Ou  encore  la  variante  :  Julia  .S'eueRA  IVLI  BENIGni 
filia,  in  basillCk  DIVa?,  etc. 

M.  Mowat  pense  que  l'inscription  s'étendait,  sur  une 
longueur  de  8  à  10  mètres,  sur  une  des  faces  du  cbalci- 
dique  dont  elle  rappelle  la  fondation. 

Ce  développement  nous  paraît  un  peu  fort  pour  un  édi- 
fice qui,  comme  le  chalcidique,  n'était  qu'accessoire  et  par 
conséquent  de  dimensions  restreintes. 

Cette  interprétation  a  été  appréciée  dans  la  séance  de 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  233 

l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres  du  1 1  mars 
1873,  comme  fondée  sur  de  judicieuses  inductions.  Nous 
nous  bornerons  donc  à  quelques  observations  sur  l'état 
réel  du  monument. 

La  première  ligne  a  de  hauteur  0"  125  ;  la  seconde, 
O"»  098  ;  la  troisième,  0'"  09. 

A  la  première  ligne,  l'A  primitif  est  précédé  de  l'extré- 
mité d'un  jambage  oblique,  qui  ne  peut  être  que  la  queue 
d'un  R  ;  les  autres  lettres  sont  certaines. 

A  la  deuxième  ligne,  les  deux  dernières  lettres  du 
deuxième  fragment  sont  douteuses.  La  pénultième  peut 
être  un  G  ou  un  G,  peut-être  môme  un  0.  La  dernière 
n'est  saisissable  que  par  la  partie  inférieure  du  premier 
jambage. 

A  la  dernière,  toutes  les  lettres  sont  certaines,  un  peu 
moins  hautes,  ce  qui  indique  peut-être  la  nécessité  de 
serrer  un  texte  trop  long. 

La  forme  des  lettres  indique  le  ii°  siècle  par  leur  net- 
teté rigide. 

En  écartant  ce  qui,  dans  les  inductions  de  M.  Mowat, 
est  évidemment  hypothétique,  on  peut,  ce  nous  semble, 
regarder  comme  établi  par  cette  épigraphe  le  nom  Julius 
Benignus,  du  père  ou  de  l'époux  de  la  fondatrice  ;  la  con- 
struction à  Tours,  au  11^  siècle,  d'un  monument  important, 
détruit  comme  la  plupart  de  ceux  de  la  Gaule  à  la  chute 
de  l'empire  pour  la  construction  des  murs  ;  enfui  l'impor- 
tance du  monument,  attestée  par  le  mot  consummavit, 
qui  semble  bien  indiquer  la  durée  de  l'œuvre  entreprise, 
persistant  peut-être  d'une  génération  à  une  autre. 

La  pierre  est  la  craie  micacée  de  Marnay-sur-Indre 
(commune  de  Lignières). 

Premier  fragment  :  hauteur,   0"  6o  ;  longueur,  l^SO. 

Deuxième  fragment  :  hauteur,  0°>68;  longueur,  0'"87. 


"234       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Actuellement  au  musée  de  la  Société  Archéologique  de 
Touraine,  à  Tours. 

[Bulletin  monumental,  4*  série,  t.  I.  p.  11.  — Journal 
officiel  du  1 1  mars  1873,  p.  1690.) 

6.  Dans  la  rue  de  la  Caserne,  à  Tours,  fut  trouvé,  en 
1870,  un  fragment  de  pierre,  portant  sur  sa  face  l'in- 
scription : 

. .  .OMA.  . . 
. .  .M-  SA.  . . 

VX... 
TARANVI. . . 
COiMATVI. . . 

Cette  inscription  est  complète  au  bas  et  à  gauche  pour 
les  trois  dernières  lignes,  comme  le  prouve  l'arête  intacte 
de  la  pierre;  incomplète  à  droite  et  en  haut.  Les  lettres 
ont  de  hauteur  0""  07. 

Les  lettres  douteuses  sont  l'O  et  l'A  de  la  première 
ligne.  L'M  initial  de  la  seconde,  que  l'on  pourrait  lire 
IVI  ou  NI.  Un  point  triangulaire,  peut-être  abréviatif, 
existe  après  l'M.  Onpourrait  voir  dans  les  dernières  lignes 
des  divinités  locales,  associées  au  culte  de  Jupiter,  et  lire  : 
lovi  Optimo  MAximo  et  ^YMinibus  ^Anctis  VXoviNO, 
TARANVI  COMATVI.  A  Jupiter  très-bon,  très-yrand  et 
aux  divinités  saintes  Uxovinos  Taranos  chevelu.  (Cf.  llen- 
zen,  5920,  5924,  5927,  iiOoo,  2056.)  Uxovinos  et  Tera- 
nos  semblent  avoir  été  des  divinités  locales,  dont  le  culte 
se  retrouve  sur  d'autres  points.  Comatus,  chevelu,  serait 
ime  épithète  intéressante.  La  forme  des  derniers  datifs  est 
digne  de  remarque. 

Les  premières  lignes  pourraient  aussi  se  lire  \)iis  Manî- 


XL'   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  235 

bus...  Mam  SA...  UXoris,  mais  alors  quel  serait  le  sens 
des  deux  dernières  ? 

Sur  le  côté  gauche  de  la  pierre  est  l'inscription  assez 
fruste  : 

. .  .GNI 
...VR 

.  .  .NO  SVO 

...OPOSVIT 

...EMIO. 

Cette  inscription  se  prêterait  volontiers  à  être  regardée 
comme  la  signature  dédicatoire  de  la  précédente.  Les  deux 
premières  lignes  sont  fort  douteuses.  Les  trois  dernières 
sont  certaines  quoique  incomplètes.  Le  mot  posuit  est  for- 
mel. Les  autres  mots  semblent  des  datifs  ou  ablatifs  indi- 
quant des  compliments  circonstanciels. 

Hauteur  de  la  pierre,  8"  70  ;  largeur,  0">  44. 

Actuellement  au  musée  de  Tours. 

Monuments  funéraires. 

7.  DM. 

CL  lANVAR 

AMANS  AMAN 

TI  HAEG  TIBl 

PRO  MERITIS 

DO 

CARATVS. 

Sur  un  cippe  funéraire  en  pierre  dure  de  forme  qua- 
drangulaire.  Trouvée  sous  les  anciennes  murailles  gallo- 
romaines  de  Tours,  dans  l'ancien  jardin  des  Minimes,  lors 
de  la  construction  de  l'hôtel  du  maréchal.  Au  bas  du  cippc 


236  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

est  une  plinthe  surmontée  d'une  doucine.'  Les  lettres  ont 
de  hauteur  0°  05,  et  au  has  0"  04.  Le  second  M  de  la  troi- 
sième ligne  est  lié  avec  l'A  qui  le  suit. 

Dus  Uanibus  CLaudi.r  lANVAR.r  AMANS  AMANTI 
HAEG  TIBI  PRO  MEIUTIS  BOnavit  ou  DOnavi  (?) 
CARATVS.  Aux  dieux  mânes,  à  Claudia  Januara,  Cara- 
tus,  ton  amant,  a  donné  ces  adieux  à  toi,  son  amante,  pour 
tes  vertus. 

Il  y  a  là  une  formule  intéressante  de  regrets  d'un  amant 
à  son  amante,  la  forme  vocative  y  ajoute  quelque  chose  de 
touchant.  La  syllabe  do  est  d'une  interprétation  douteuse; 
nous  la  retrouvons  dans  la  Nièvre  (l).  L'abréviation 
finale  du  mot  Januara  est  digne  de  remarque.  Comme  la 
queue  de  l'R,  au  lieu  de  se  terminer  par  un  délié,  ainsi 
que  dans  les  R  de  la  cinquième  et  de  la  septième  ligne,  est 
tranchée  par  un  trait,  on  pourrait  peut-être  voir  dans  cet 
R  une  liaison  de  l'R,  de  l'A  et  de  l'E.  Nous  ne  pensons 
pas  qu'on  puisse  douter  du  féminin  ;  outre  que  le  nom 
masculin  de  l'amant,  Caratus,  indique  le  sexe  de  la  per- 
sonne aimée,  si  on  eût  voulu  la  forme  masculine  RI,  on 
eût  probablement  retourné  l'R  comme  à  Bourges  (n°  15), 
afin  de  donner  à  la  haste  de  l'R  la  valeur  de  l'I  final. 

Cette  pierre  dure  est  smillée  au  marteauet  les  contours 
en  ont  été  repassés  au  ciseau,  absolument  d'après  le  pro- 
cédé qu'emploient  encore  aujourd'hui  nos  tailleurs  de 
pierre  dure.  Nous  n'avons  jamais  rencontré  cette  taille 
aussi  apparente  à  l'époque  romaine. 

La  partie  droite  de  la  pierre  a  été  brisée. 

Hauteur  de  la  pierre,  1™  35;  largeur  à  la  base,  0"  58 
au  sommet,  0"  -45. 

Actuellement  au  musée  de  Tours. 

(1)  Cf.  Orelli.  —  Ilenzen,  notx,  3,037. 


XL"   SESSION,    A   C.HATKAUROUX.  237 

8.  ...LO... 

GEL... 
RPE. . . 

Fragment  du  ii"  siècle.  La  première  ligne  est  très-dou- 
teuse ;  les  deux  autres  très-incomplètes.  Hauteur,  0"  14  ; 
largeur,  0™  13. 

Actuellement  au  musée  de  Tours. 

9.  NSIS-  E 
lENT 

Fragment  très-incomplet  dans  tous  les  sens,  paraissant 
aussi  du  ii*  siècle.  Hauteur,  On»  15;  largeur,  0""  23. 
Musée  de  Tours. 

10.  CENOMARINO. 

Fragment  barbare,  présentant  à  gauche  un  reste  d'en- 
cadrement. Le  G  initial  est  carré,  l'M  et  l'A  sont  liés  et  la 
traverse  de  l'A  est  infléchie  au  centre  ;  la  traverse  de  l'N 
prend  au  milieu  du  premier  jambage.  Ces  caractères 
indiquent  une  barbarie  absolue,  peut-être  le  v"  ou  le 
vi"  siècle. 

Hauteur,  0""  18  ;  largeur,  O^bS. 

Musée  de  Tours. 


Objets  divers. 

11.  CARTIV. .. 

En  écriture  cursive,  gravée  au  trait  à  la  pointe  sur 
un  vase. 


238       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Musée  de  Tours. 

{Antiquités  de   Pont-du-C lier ,   par  le    docteur  Bour- 
goin,  43.) 

12.  NOBILVS. 

Eu  écriture  cursive,  gravée  au  trait  à  la  pointe  sur  un 
vase. 
Musée  de  Tours. 
(Id.  Ibid.) 


LOIR-ET-CHER. 

Le  département  de  Loir-et-Cher,  situé  aux  confins  des 
Carnutes,  des  Turons  et  des  Bituriges  Cubi,  semble  avoir 
été  formé  de  parcelles  empruntées  à  ces  trois  territoires, 
surtout  de  celui  des  Carnutes.  Deux  grandes  voies  romai- 
nes partant  de  Cœsarodunum le  traversaient:  l'une  suivait 
les  rives  de  la  Loire,  vers  Genabum  ;  l'autre  celles  du 
Cher,  vers  Avaricum. 

1.  Les  deux  principales  inscriptions  que  nous  ayons 
connues  dans  le  département  sont  incrustées,  l'une  au- 
dessus  de  l'autre,  dans  la  paroi  intérieure  du  mur  de  la 
sacristie,  à  la  petite  chapelle  ou  église  dédiée  à  saint 
Lubin,  à  environ  un  kilomètre  à  l'est  de  Suèvres,  ancien- 
nement Sodobria.  Elles  sont  identiques  d'apparence  et  de 
dimension  ;  la  lecture  en  est  fort  peu  différente.  La  pre- 
mière, celle  du  dessus,  est  ainsi  : 

AVGAPOLLINI-  SAC 
COSMIS  LVGANI 
D        S    P-   D 


XL'"    SESSION,    A    CIIATEAUROU.V.  239 

La  finale  de  la  seconde  ligne  est  un  peu  fruste,  ce  ([in 
force  à  douter  si  la  liaste  iinale  est  le  jambage  ascendant 
de  l'N,  comme  l'avait  cru  de  Gaylus;  il  nous  a  paru  trop 
éloigné  vers  la  droite  et  par  conséquent  constituer  un  I, 
indiquant  le  génitif;  un  F  a  même  pu  disparaître  à  la  fin 
de  cette  ligne. 

L'A  et  le  V  de  aug  sont  liés;  les  barres  inférieures 
des  L  sont  légèrement  ondulées  ;  les  lignes  un  peu  irré- 
gulières,  caractères  qui  peuvent  convenir  à  la  fin  du 
I''  siècle. 

La  lecture  qui  s'impose  est  la  suivante  :  AVGusto 
APOLLINI  SAGrMm  GOSMIS  LVCANI  filius  De  Sua 
Vecunia  Dédit. 

Consacré  à  l'auguste  Apollon.  Cosmis,  fils  de  Liicanus, 
de  son  propre  argent  l'a  donné. 

Faut-il  voir  dans  Augusto  une  épithète  d'Apollon,  ce 
qui  est  contraire  à  la  saine  construction  latine  ;  ou  faut-il 
voir,  comme  l'a  fait  de  Gaylus,  dans  Apollon  une  épithète 
de  l'auguste,  qui  se  trouverait  ainsi  à  être  Néron,  auquel 
ce  surnom  est  parfois  attribué?  Duchalais  a  savamment 
combattu  cette  opinion  de  de  Gaylus,  et,  depuis  lors, 
divers  monuments  assez  fréquents,  notamment  dans  le 
pays  des  Garnutes,  sont  venus  confirmer  son  opinion  (I). 
Il  semble  donc  que  nous  avons  là  la  trace  d'un  monument 
ou  d'un  autel  élevé  ou  dédié  à  Apollon. 

Le  nom  est  l'objet  d'une  autre  difficulté.  De  Gaylus, 
n'ayant  qu'une  lecture  insuffisante,  avait  proposé  Lucanus 
au  nominatif,  ce  que  nous  ne  croyons  pas  pouvoir  main- 
tenir. Nous  n'avons  donc  là  qu'un  nom  unique  Cosmis, 
probablement  d'esclave  ou  d'affranchi,  et  dont  la  forme 
grecque  est  digne  de  remarque. 

(1)  Voy.  Bulletin  monumental,  1870,  p.  47  et  62. 


240       CONORÈS  ARCUEOLOUIOUE  DE  FRANCE. 

La  pierre  est,  dit-on,  de  la  pierre  de  Bourré;  mais 
le  fait  nous  a  paru  fort  douteux,  et  nous  la  croyons 
plutôt  sortie   des  nombreuses   carrières    du    voisinage. 

Hauteur  de  la  pierre,  O^SS  ;  longueur,  0'"  61 . 

Actuellement  incrustée  dans  la  sacristie  de  la  chapelle 
de  Saint-Lubin,  à  Suèvres  (Loir-et-Cher). 

(De  Caylus,  Antiquités  romaines,  t.  IV,  p.  374  et  pi. 
CXn.  —  Duchalais,  Mémoires  de  la  Société  Archéologique 
de  l'Orléanais,  1851,  t.  II,  p.  2U.) 

2.  Inscription  presque  identique  à  la  précédente  : 

AVG  APOLLINI  SA 
COSMIS  LVGAN 
FIL    D-  S-  P-  D. 

Même  lecture  que  la  précédente  ;  mêmes  observations  ; 
mêmes  caractères  épigraphiques.  V  A  et  le  V  à' A  VG.  sont 
*  liés;  seulement  ici  l'initiale  FIL  est  rejetée  au  commen- 
cement de  la  troisième  ligne.  Des  points  triangulaires 
séparent  les  quatre  dernières  lettres. 

La  lecture  que  nous  avons  adoptée  pour  l'inscription 
précédente,  établit  une  identité  complète  entre  ces  deux 
monuments,  et  fait  disparaître  les  observations  auxquelles 
avait  donné  lieu  l'opinion  que  celle-ci  était  émanée  d'un 
fils  de  l'auteur  de  la  précédente.  Nous  n'y  pouvons  voir 
qu'un  duplicata  de  l'autre,  peut-être  incrusté  sur  une 
autre  face  du  même  monument. 

Hauteur,  0"  26;  longueur,  0'"60. 

Actuellement  insérée  au  même  lieu  et  immédiatement 
au-dessous  de  l'autre. 

(Publiée  par  les  mêmes  auteurs.) 

3.  M.  le  docteur  Bourgoin  affirme  avoir  lu  jadis,  sur  le 


XL"   SESSION,    A    r.IlATEAUROUX.  2^il 

couvercle    d'un    sarcophage    découvert  à  Meusnes,   les 
lettres  : 

SAÏVR, 

Ce  fragment  d'inscription,  qui  probablement  ne  pouvait 
se  rapporter  qu'à  un  état  antérieur  de  la  pierre,  nous  est 
connu  d'une  façon  trop  vague  pour  que  nous  puissions  en 
faire  l'objet  d'aucune  observation. 

{Mémoires  de  la  Société  des  Sciences  et  Lettres  de  Blois, 
1867,  t.  Vil,  p.  150.) 

Objets  divers  (1). 

4,  Un  vase  en  terre  à  couvercle,  découvert  à  Gievres, 
porte  gravé  à  la  pointe  sur  le  collet  le  graffito  suivant  : 

CATVGANVS 

Comme  les  lettres  sont  cursives  et  peu  régulières,  la 
lecture  n'en  est  pas  absolument  certaine. 

(1)  Nous  ne  pouvons  faire  figurer  dans  ce  catalogue  romain, 
malgré  quelques  savantes  opinions,  la  pierre  qui  se  trouve  in- 
crustée sur  la  porte  méridionale  de  l'église  de  Thésée,  et  que, 
pour  notre  compte,  nous  atlrijjuerions  plutôt  aux  époques 
carlovingiennes  et  peul-ètre  posLérieures.  En  voici  la  lecture 
aussi  précise  que  nous  avons  pu  la  faire  : 

TV  SVME  MARTIU  GEORGI  SV 
CIPE  MVNVS  DE  FIDELIBVS  TVIS 
CONSTVAN...NONIVNII. 

Les  G  sont  enroulés;  à  la  deuxième  ligne,  les  deux  premiers 
S  sont  petits  et  intercalés,  le  D  est  oncial  ;  à  la  troisième,  la 
partie  moyenne  est  fruste  et  douteuse.  Faut-il  lire  :  CONSecra- 
tione  TVA  ...  NONarum  IVNIIV 

XL^  SESSION.  16 


2i2      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Actuellement  au  musée  de  Blois. 
[Mémoire  su?'  les  antiquités  de  la  Sologne  blésoise,  par 
M.  de  la  Saussaye  ;  Blois,  1844.) 

5.  M.  le  docteur  Bourgoin,  de  Sellcs-sur-Cher,  a  trouvé 
dans  les  belles  fouilles  qu'il  a  laites  à  Gievres  (Garobrive, 
Pont-du-Gher)  divers  objets  : 

Un  petit  disque  eu  pierre  noirâtre  ou  serpentine,  sculpté, 
taillé  en  double  biseau  et  percé  au  centre,  sur  lequel  on 
lit  ces  deux  lignes  : 

PIXTONOVIM 
XMORVGIN. 

Nous  n'essayerons  pas  la  lecture  de  cet  objet,  dont  la 
forme  en  grains  de  collier  semble  indiquer  une  amulette 
destinée  à  être  suspendue  peut-être  au  col.  Nous  lui  ver- 
rons, dans  la  Nièvre,  un  analogue  de  forme,  dont  l'épi- 
graphe, très-difîéreute,  n'est  pas  d'une  lecture  plus  facile. 

Actuellement  chez  M.  le  docteur  Bourgoiu,  à  Selles-sur- 
Gher. 

[Mémoires  de  la  Société  des  Sciences  et  Lettres  de  Blois, 
t.  VII,  p.  175.) 

6.  Une  fibule  en  bronze,  en  forme  de  disque  circulaire, 
évidé  au  centre,  sur  laquelle  on  lit  : 

IDORINA  HEXVOTIS  NAGE  DONVMIA. 

M.  Bourgoin  propose  la  lecture  :  lulia  DOMINA  Eabet 
EX  VOTIS  NAra/î  GEnio  DONVxM  lA...  Cette  interpréta- 
tion ingénieuse  et  qui  respecte  la  plus  grande  partie  du 
texte,  nous  parait  donner  encore  beaucoup  à  l'hypothèse. 
Il  faut  plutôt,  croyons-nous,  voir  là  un  mélange  de  latin 
et  de  cet  idiome  local,  dont  les  traces  se  trouvent  sou- 


XL'   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  243 

vent  et  qui  échappe  encore  aux  interprétations  fixes  et 
certaines. 

Chez  M.  le  docteur  Bourgoin. 

(Publié  comme  le  précédent.) 

7.  Un  cachet  d'oculiste  en  stéatite  grise,  trouvé  à  Ville- 
franche,  portant  sur  deux  de  ses  faces  les  inscriptions 
suivantes,  en  deux  lignes  : 

1"  G.  ROM  STEPHANI 
AD  REGENT  CIG. 

20  G.  ROM  STEPHAN 
AD  DIATHESES  TOL. 

L'étiquette  peut  se  lire  :  Cari  ROMawî  STEPHANI  AD 
RECENTES  GIC...  et  indique  un  remède  dont  le  nom 
parait  absent,  fabriqué  par  G.  Romanus  Stephanus,  pour 
une  maladie  à  son  début,  maladie  dont  le  nom  commen- 
çait par  cic  {cicatrices  ou  cœcitates). 

La  seconde  indique  un  remède  pour  enlever  les  affec- 
tions connues  sous  le  nom  de  diathèses;  on  sait  que  les 
mots  grecs  étaient  très-employés  en  pharmacie  romaine. 
Outre  l'avantage  qu'ils  pouvaient  avoir  d'être  compris  des 
adeptes,  ils  avaient  probablement  celui  inappréciable  de 
ne  l'être  pas  des  patients.  La  pharmacie  française  conserve 
le  même  usage. 

Largeur,  0"°  04  ;  longueur,  0°  04  ;  épaisseur,  0""  04. 

(Publiée  comme  la  précédente.) 

Actuellement  chez  M.  le  docteur  Bourgoin,  à  Selles- 
sur-Gher. 

8.  Un  vase  portant  deux  inscriptions  en  caractères  cur- 
sifs,  gravées,  la  première  sur  le  i'oiul,  et  la  seconde   sur 


24-4       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

l'épaule  du  vase,  et  que  nous  lisons  fort  hypothétique- 
ment,  d'après  le  fac-similé  de  l'auteur  : 

!<>  XAWROODIIII  XOVS 

2°  A  MOR  N  X. 

Nous  sommes  là  en  présence  de  monuments  douteux 
de  caractères  et  de  langue;  nous  les  rapprochons  seule- 
ment de  l'inscription  n°  62  du  vase  de  Bourges. 

(Id.  page  177.) 

Actuellement  chez  M.  le  docteur  Bourgoin,  à  Selles- 
sur-Cher. 

(Voyez,  sur  ces  divers  objets,  un  mémoire  de  M.  le  doc- 
teur Bourgoin,  dans  le  Bulletin  de  la  Société  archéolo- 
gique du  Vendomois,  en  1872.) 


NIEVRE. 

Le  département  de  la  Nièvre  paraît  occuper  en  grande 
partie  l'ancien  territoire  des  Éduens,  dont  une  portion, 
celle  entre  la  Loire  et  l'Allier,  était  devenue  la  résidence 
des  Boïens.  La  région  septentrionale  du  département 
doit  avoir  été  empruntée  au  territoire  des  Sénons. 


Inscriptions  altariques. 

1.  En  4492,  fut  trouvée  à  Nevers  l'inscription  sui- 
vante, en  caractères  romains,  et  qu'on  peut  aujourd'hui 
reconnaître  comme  gauloise.  Elle  s'est  perdue  au  com- 
mencement du  siècle  ;  nous  en  donnons  le  texte  tel  qu'il 
a  été  publié  par  l'abbé  Lebœuf. 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  245 

ANDE 
GAMV 
LOS  TOVTI 

SSIGNOS 
lEVRV. 

L'interprétation  en  est  encore  aujourd'iiui  douteuse, 
mais  la  lecture  admise,  comme  la  plus  probable  est  : 
Andecamulos  (nom  propre)  Toutissicnos  (fils  de  Toutissus) 
ieuru  (a  fait).  La  signification  de  cnos  semble  de  plus  en 
plus  certaine,  ainsi  que  celle  de  l'aoriste  ieuru.  Andeca- 
mulos est  un  nom  gaulois  déjà  connu.  (Orelli,  I,  80-4.) 

On  aurait  donc  là  une  formule  dédicatoire  simple, 
mais  intéressante  par  la  rareté  de  ces  monuments  pri- 
mitifs. 

«  La  pierre  qui  existait,  dit  l'abbé  Lebœuf,  dans  les 
anciens  murs,  était  haute  d'un  pied  et  demi,  large  d'un 
pied,  et  ornée  de  moulures  des  quatre  côtés.  Les  caractères 
de  la  première,  de  la  deuxième  et  de  la  cinquième  ligne 
étaient  plus  gros  que  ceux  des  autres  lignes.  On  n'y  voyait 
pas  de  séparation  de  mots.  » 

(Jean  Lebœuf,  Recueil  de  divers  écrits  pour  servir 
d'éclaircissement  à  l'histoire  de  France,  Paris,  1738, 
t.  II,  p.  271.  Bibliothèque  nationale.  —  Manin,  Monu- 
ments des  anciens  idiomes  go.ulois,  p.  40.  —  Belloguet, 
Ethnogénie  gauloise,  'tl^  édition,  p.  272,  etc.,  etc.) 

2.  L'inscription  suivante  a  été  trouvée  au  village  de 
Bouhy,  près  d'Entrains,  en  1853,  sur  une  pierre  creusée 
et  utilisée  comme  sarcophage  : 

AVG.  SACU 
MARTI  BOLV 


24Ô       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

INNO  ET  DvNA 
C.  DOiMlTVIRI 
LIS  DEGVrUO  PRo 
SALVT-  SVA-  ET  IvLi 
THALL[  VIRILLI 
ANI.  FILI.  ET  AVI 
TILLAE  lAVITI  FiL 
VXORIS  VSL.M. 

k\Gusto  SACRum  MARTI  BOLVINNO  ET  DVNA[«71 
C.  DOMmws  VIRILIS  DECVRIO  PRO  SALVTe  SVA  ET 
IVLU"  THALLI  VIRILLIANI  F\Lu  ET  AVITILLAE  lulii 
AVITI  FILe*  VXORIS  \otum  ^olvit  hibens  Meriio. 

Consacré  à  Auguste,  à  Mars  Bolvinnus  et  Dunax.  Caius 
Domitius  Virilis  decurion,  pour  son  salut  et  celui  de  Julius 
Thallus  Virillianus,  son  fils  et  d'Avitilla,  son  épouse,  fille 
de  Julius  Avitus,  a  accompli  ce  vœu  avec  joie  et  justice. 

L'inscription  est  entière  sur  un  autel  en  pierre,  qui 
parait  avoir  porté  au  haut  une  doucine  et  en  bas  une 
plinthe,  enlevées  au  marteau,  lors  de  sa  conversion  en 
sarcophage.  La  pierre  a  de  hauteur  i""  17;  de  largeur  en 
haut,  O-  555,  en  bas,  0""  667. 

Les  lignes  sont  serrées  et  droites  ;  les  lettres,  égales  dans 
chaque  ligne,  sont  assez  maigres;  certain  nombre  de 
lettres  sont  plus  petites,  élevées  ou  abaissées;  des  points 
triangulaires  séparent  plusieurs  des  mots,  surtout  ceux 
abrégés.  Les  L  ont  le  trait  de  la  traverse  inférieure,  non 
pas  vertical,  mais  un  peu  incliné  en  haut  à  droite.  Ces 
divers  caractères  nous  portent  à  placer  cette  inscription 
vers  la  fin  du  i"  siècle  ou  au  commencement  du  ii". 

M.  Morellet,  qui  a  fait  sur  cette  inscription,  lorsqu'elle 
fut  trouvée,  un  beau  commentaire,  voit,  dans  les  mots 
Dolvinno  et  Dunaci,  deux  surnoms  locaux  de  Mars  :  peut- 


XL«   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  247 

être  va-t-il  trop  loin  quand  il  y  voit  une  allusion  au  nom 
du  lieu  de  Bouhy  et  à  sa  situation  sur  une  montagne, 
Dunum.  La  formule  initiale  Augusto  sacrum  devint 
usuelle  et  comme  obligatoire  en  tète  de  la  plupart  des 
monuments  votifs  :  le  Nivernais  paraît  s'être  particuliè- 
rement conformé  à  cet  usage. 

On  remarque  le  triple  nom  du  père,  indice  de  sa  qua- 
lité de  citoyen  romain.  Cette  qualité,  jointe  à  l'aspect  tout 
romain  des  prénoms,  des  gentilices,  des  surnoms,  nous 
font  voir  là  une  famille  étrangère.  Ce  citoyen  était  décu- 
rion,  c'est-à-dire  qu'il  appartenait  à  la  caste  d'honneur, 
Yordo  splendissimus  i\Q  la  cité,  et  en  l'absence  d'indications, 
nous  pouvons  penser  que  cette  cité  était  celle  de  la  métro- 
pole, Sens  ou  Auxerre.  (Voy.  d'Anville,  Verbis  Massava  et 
Autissiodurum.)  Le  fils  a  encore  le  diminutif  qui  indique 
l'impuberté,  Virilianus.  Nous  restituons  après  le  nom  de 
la  fille  un  petit  i  qui  avait  échappé  à  M.  Morellet,  et  qui 
a  son  intérêt  puisqu'il  paraît  l'initiale  du  prénom  Jules 
d'Avitus,  le  père  d'Avitilla  ;  cet  i  ne  figurent  pas  non  plus 
dans  le  texte  donné  par  le  catalogue  du  musée. 

Actuellement  au  musée  de  la  Porte-du-Croux,  à  Nevers, 
n°  21. 

(Rapport  de  M.  Morellet,  Société  Nivernaise,  1835,  t.  I, 
p.  326-336.) 

3.  Inscription  sur  une  autre  pierre  du  même  sarco- 
phage, trouvée  avec  la  précédente  : 

SACR 

MARTI  BOLV 
N  N  L-  GABIN 
VS  SEVERVS 
DONVM  DE 
DIT 


248  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

La  première  ligne  est  tronquée,  et  on  ne  voit  que  le  bas 
des  lettres.  La  fin  de  la  seconde  est  martelée,  en  sorte 
qu'on  ne  sait  s'il  n'y  aurait  pas  un  I  après  le  V. 

On  peut  lire  :  avgms^o  SACRwm  MARTI  BOLViNNo 
L.  GABINVS  SF_:\^RVS  DONVM  DEDIT.  Consacré 
à  Auguste,  à  Mars  Bolvinnus.  L  Gabinus  a  fait  ce 
don. 

Nous  retrouvons  ici  la  même  formule  initiale,  la  même 
divinité  locale  que  précédemment,  mais  sans  l'épithète 
Duna...  Nous  retrouvons  aussi  le  triple  nom,  assez  rare 
dans  l'épigraphie  de  la  région  pour  mériter  remarque.  Le 
catalogue  ne  donne  pas  la  lettre  L  suivie  du  point  abbré- 
viatif  et  qui  a  son  importance.  Nous  signalons  aussi 
l'aspect  étranger  et  romain  du  nom  du  donateur.  La 
bonne  forme  des  lettres,  l'insertion  en  entier  de  la  formule 
donum  dédit,  nous  paraissent  des  preuves  d'arcbaïsme, 
1"  ou  11^  siècle. 

Longueur  de  la  pierre,  0™  69  ;  largeur,  0"  52.  La  pierre 
est  brisée  aux  deux  extrémités. 

Actuellement  au  musée  de  la  Porte- du -Croux,  à 
Nevers,  n°  22. 

[Mémoires  de  la  Soc.  Niv.^  I,  326.  —  Catalogue  du 
musée  du  Croux.) 

4.  A  Mesves,  près  de  Cosne,  en  1865,  fut  trouvée,  par 
M.  l'abbé  Boère,  curé  de  cette  paroisse,  la  magnifique 
inscription  suivante,  sur  une  table  de  pierre  malheureu- 
sement brisée  en  plusieurs  fragments,  qui  ont  été  réunis. 
La  lecture  en  a  été  soumise  à  M.  Rénier.  La  réparation, 
peut-être  trop  habile  de  la  pierre,  en  facilite  aujourd'hui 
la  lecture,  en  même  temps  qu'elle  rend  presque  impos- 
sible tout  contrôle,  car  il  est  très-difficile  de  saisir  les  dis- 
tinctions des  parties  primitives  et  des  parties  restituées  : 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  249 

la  science  de  M.  Rénier  est  du  reste  nne  sûre  garantie  de 
l'excellence  de  la  restitution. 

AVG  SAGR  DEAE  CLVTO.  .  . 
DAE-  ET  VCANIS  MASAVENSIBVS 
MEDIVS  ACER  MEDIANNI.  .  . 
MVRVM  INTER  ARCVS  DVOS  C.  .  . 
SVIS  ORNAiMENTIS  D.  S.  D. 

AYGusto  SACR?mi  DEAE  CLVTOnDAE  ET  VîCANIS 
MASAVENSIBVS  MEDIVS  ACER  MEDh  ANN[  ¥iuus 
MVRVM  INTER  ARCVS  DVOS  Cvm  SVIS  ORNAMENTIS 

De  S?/o  Dédit.  Consacré  à  Auguste,  à  la  déesse  Clutonda  et 
O.UX  dieux  du  bourg  de  Mesves,  Médius  Acer,  fils  de  Mé- 
dius Annus  a  donné  de  son  argent  le  mur  entre  les  deux 
arcs  avec  ses  ornements. 

La  table  de  pierre,  avec  encadrement,  où  est  gravée 
cette  inscription,  a  1"  65  de  longueur;  on  peut  supposer 
qu'il  manque  environ  O"»  30  à  droite  ;  sa  hauteur  est  de 
0"  77.  Les  lignes  sont  bien  droites. 

Les  lettres  de  la  première  ont  de  hauteur  O"  15  ; 

Celles  de  la  seconde,  0'°097  ; 

Celles  de  la  troisième,  0'"090; 

Celles  de  la  quatrième,  0°  095  ; 

Celles  de  la  cinquième,  O'^OO. 

La  forme  régulière  des  lettres  indique  la  meilleure 
époque  épigraphique,  le  commencement  du  ii"  siècle  :  les 
T  dépassent  en  hauteur  les  autres  lettres. 

.Après  la  formule  initiale,  nous  trouvons  un  hommage 
à  une  divinité  topique  dea  Clutonda.  Le  mot  vicanis,  dont 
la  lecture  ne  semble  pas  douteuse,  ne  nous  parait  s'expli- 
quer que  comme  adjectif  épithète  d'un  substantif  diis  ou 
numinibus,  dont  l'élision  s'explique  facilement  par  la  pré- 
sence rapprochée  du   mot  dex,  et  exprimerait  alors  les 


250       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

divinités  du  bourg  de  Mesves.  L'cpithète  Massavensibits 
est  des  plus  intéressantes,  puisqu'elle  fixe  avec  son  ortho- 
graphe la  situation  d'une  station  des  itinéraires  romains, 
Massava.  Nous  lisons  en  deux  mots,  comme  MM.  Rénier 
et  de  Molandon,  Medianni,  dont  on  en  fait  un  seul  dans 
la  traduction  du  Catalogue  ;  en  effet,  il  semble  que  la 
forme  médius  du  gentilice  du  ûls  nous  donne  celui  du 
père.  Le  reste  de  l'inscription  semble  indiquer  qu'il  s'agis- 
sait là  d'une  réparation  plutôt  que  d'une  fondation  d'édi- 
fice, et  véritablement  la  splendeur  de  l'inscription  paraît 
avoir  été  plus  proportionnée  à  la  vanité  du  donateur  qu'à 
l'importance  du  bienfait. 

Actuellement  au  musée  du  Croux,  à  Nevers,  n°  31. 

[Revue  archéologique.  —  Bulletin  monumental,  1870, 
p.  54  et  suiv.,  art.  de  M.  Boucher  de  Molandon.) 

5.  A  Mesves  également,  et  à  la  même  époque,  fut  trou- 
vée l'inscription  suivante  : 

AVG-  SACR. 
MATRl  DEVM 
...GVM  SJGILL 
...ICANI  FIL 
...ILVM  XDSD. 

AVGwsfo  SACRwm  MATRI  DEVM ICANI  FILms 

ILVNIX.  De  Smo  Dédit. 

Le  G  de  la  première  ligne  est  replié  et  non  tranché. 

La  deuxième  ligne  indique  le  culte  de  la  mère  des  dieux, 
la  déesse  Jdea,  qui  se  vulgarisa  dans  le  monde  romain 
avec  celui  de  Mithra  au  commencement  du  m"  siècle,  ce 
qui  nous  donne  la  date  probable  de  cette  inscription, 
qu'autrement  nous  eussions  crue  plus  ancienne. 


XL»   SESSION,   A   CHATEAUROUX.  251 

Nous  n'essayons  pas  do  restituer  la  troisième  ligne,  où 
nous  n'aurions  à  fournir  que  des  hypothèses  gratuites. 

La  quatrième  est  incomplète. 

La  cinquième  nous  paraît  donner  la  finale  du  n^gra  du 
donateur,  de  forme  autochtone  confuse,  comme  nous  en 
trouvons  si  souvent  dans  les  monuments  vulgaires;  les 
trois  lettres  de  la  fin  semblent  d'une  interprétation  non 
douteuse. 

Cette  inscription,  fort  curieuse,  car  elle  est  le  seul  mo- 
nument que  nous  trouvions  du  culte  local  de  cette  divinité, 
demeure  donc  à  l'état  de  problème.  Les  mots  de  la  pre- 
mière ligne  étant  au  milieu,  semblent  indiquer  que  les 
suppressions  de  gauche  sont  peu  importantes  ;  la  partie 
droite  est  complète. 

Longueur  de  la  pierre,  0™  50  ;  hauteur,  0"  41. 

Actuellement  au  musée  du  Groux. 

6.  Dans  le  mur  de  façade  de  l'église  de  Saint-Honoré 
est  placé  un  fragment  de  marbre  blanc,  portant  l'inscrip- 
tion : 

.  .ILVIVS 
.  .AEDEM 
.  .OMNIBVS 
.  .NS  DO 
,  .POSVIT. 

Estampée  par  M.  Charbeuf. 

La  partie  droite  est  complète,  la  partie  gauche  manque. 
A  la  première  ligne,  on  voit  au  commencement  la  lettre 
M  ou  S.  ;  à  la  quatrième,  le  second  jambage  de  l'N  est 
plus  élevé  que  le  premier,  ce  qui  donne  la  syllabe  N  L 

SILVIVS  hanc  AEDEM cum  OMNIBVS  ornamentis 

NIS  hOnatum  (?)  POSVIT. 


552  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANGE. 

Silvius  a  élevé  cet  édifice  .......  avec  tous  ses  orne- 
ments  

Il  nous  paraît  difficile  de  faire  de  nis  do  un  nom  propre 
et  encore  plus  d'y  voir  une  analogie  avec  le  nom  de  la 
station  romaine  Aqux  nisinx. 

Les  ruines  romaines  de  Saint-Honoré,  la  situation, 
semblent  bien  indiquer  là  une  station  thermale,  Aquœ- 
Nisinœ  des  Itinéraires;  mais  l'inscription  nous  parait 
n'avoir  d'autre  portée  que  de  témoigner,  par  sa  matière, 
le  marbre,  une  certaine  richesse  dans  cette  station  ;  de 
plus  elle  nous  donne  un  nom.  Quand  à  la  quatrième  ligne 
elle  nous  paraîtrait  plutôt  un  fragment  incomplet  de  for- 
mule dédicatoire. 

[Mémoires  de  la  Société  Nivernaise ,  2*=  série,  1867,  t.  II, 
p.  297  et  325.  Communication  de  M.  Gharbeuf  ) 

7.  A  Entrains,  dans  la  ville  môme,  en  creusant  les  fon- 
dations d'une  maison,  a  été  trouvée,  en  1873,  une  plaque 
de  cuivre  portant  l'inscription  suivante  : 

AVG  SACR-  DEC) 
BORVONI  ET  CANDI 
DO  AERARI-  SVB  Cv 
RA  LEONIS  ET  MaR 
ClANI  EXVOTO  R 
AERART  DONA 

La  plaque  de  cuivre  a  0"  202°'  de  longueur,  0»  135'° 
de  largeur,  sur  0""  001  d'épaisseur.  Les  lettres  des  cinq 
premières  lignes  ont  0^017  de  hauteur;  celles  de  la  der- 
nière, G""  008. 

Elle  est  percée  de  quatre  trous,  où  sont  encore  les  clous 
destinés  à  la  fixer  à  la  pierre.  Elle  était,  quand  on  l'a 


XL'    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  253 

trouvée,  enveloppée  de  lames  de  cuivre,  qui  l'ont  préservée 
de  toute  détérioration. 

Nous  signalons  à  la  prenaière  ligne  le  point  triangulaire 
après  TR; 

A  la  deuxième,  la  jonction  ET  ; 

A  la  troisième,  le  point  triangulaire  après  I  ; 

A  la  quatrième,  les  jonctions  ET  et  AR  à  la  fin  de  la 

ligne  ; 

A  la  dernière  la  suppression  de   la  terminaison  de 

donaverunt. 

Plusieurs  A  n'ont  point  de  traverse,  les  traits  terminaux 
et  les  barres  ont  des  ondulations,  qui  nous  paraissent 
reporter  celte  plaque  assez  haut,  peut-être  vers  la  fin  du 
I"  siècle,  ce  qui  s'accorderait  avec  l'absence  presque  com- 
plète d'abréviations. 

M.  Rénier,  à  qui  cette  inscription  a  été  communiquée 
par  M.  Ragon,  de  Poitiers,  la  lit  et  la  traduit  : 

ANGusto  SAGRwm  DEO  BORVONI  ET  GANDIDO  AE- 
RARII  SYB  CVRA  LEONIS  ET  MARGIANI  EX  VOTO 
RECEpto  AERARR  IfO^Averunt.  A  Vauguste  dieu  Borvon 
et  à  Candidus;  consacré  par  les  ouvriers  en  bronze  sous 
l'administration  de  Léon  et  de  Marcien,  après  l'accomplis- 
sement d'un  ViKu.  Don  des  ouvriers  en  bronze  ou  en  cuivre. 

Le  savant  épigraphiste  voit  dans  Borvon  et  Gandidus 
des  dieux  topiques.  Le  premier,  très-connu;  le  second, 
apparaissant  pour  la  première  fois.  Les  ouvriers  en  bronze 
prouveraient  l'existence,  non  pas  de  mines  de  cuivre, 
mais  d'ateliers  pour  le  travailler,  ce  qui  n'a  rien  d'anor- 
mal. Léon  et  Marcien  seraient  des  esclaves  ou  des  affran- 
chis, privés  de  noms  de  famille. 

Le  mot  augusto  est  là  regardé  comme  épithète  aux  divi- 
nités locales,  bien  que  placé  au  commencement  de  la 
phrase,  construction  peu  élégante  en  latin,  mais  dont  les 


^54  CONGRES   ARCHEOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

exemples  sont  assez  fréquents,  notamment  sur  les  bords 
de  la  Loire.  (Voy.  supra  insc.  de  Suèves.)  Il  nous  sem- 
blerait plus  simple  de  voir  dans  les  mots  Augusto  sacrum 
une  sorte  de  formule  banale,  qui  se  mettait  en  tète  des 
inscriptions  votives. 

Cette  plaque  de  cuivre  est  actuellement  entre  les  mains 
de  M.  le  maire  d'Entrains,  qui  en  comprend  l'importance 
et  l'a  acquise  pour  la  commune. 

{Journal  officiel  du  8  octobre  1872,  p.  6392.  —  Société 
des  Ant.  de  l'Ouest.) 

8.  10-  MAX,  .  . 
lALLVS  COM.  .  . 
IVLI  CIEFA  (?) 

Trouvée  à  Entrains  et  actuellement  chez  M.  Renault. 
Inscrite  sur  pierre  dans  un  cartouche  encadré  d'un  ban- 
deau avec  filet  intérieur,  malheureusement  brisé  à  droite 
et  en  bas. 

lovi  Optimo  UAXimo  ...  lALLVS  COMmodo  ?  La  der- 
nière ligne,  dont  les  sommets  seuls  sont  lisibles,  est  très- 
douteuse. 

Les  lettres  bien  formées  indiquent  le  ii^  siècle. 

Largeur  de  la  pierre,  O'"  56;  hauteur,  0"  30. 

9.  AS. 
CAPV 
GENI-  F 

Inscrite  en  trois  lignes  sur  une  pierre  plate  trouvée  à 
Entrains.  Le  P  de  la  deuxième  ligne  pourrait  être  un  R. 
L'inscription  parait  complète  dans  son  laconisme,  cepen- 
dant ce  n'est  pas  une  certitude. 

Faut-il  lire  :  kugusto  Sacrum  GARVCENI  Fecit  ? 


XL*    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  255 

Hauteur,  0"  28;  largeur,  O"  25. 
Actuellement  chez  M.  Renault,  à  Entrains. 


10.  AVG.  SAGR. 

I.  0.  M.  IVL  ALEXA 
NDER  V  S  L  M. 

Inscrite  sur  la  face  d'une  pierre  portant  au-dessus  des 
serres  d'aigle. 

Les  barres  des  L  sont  inclinées,  en  bas,  à  droite  ;  l'E  de 
la  deuxième  ligne  a  la  traverse  du  bas  abaissée  à  droite, 
ce  qui  indique  évidemment  la  liaison  de  l'E  et  d'  L  ;  on 
peut  donc  lire  : 

AWGusto  SACrwm  lovi  Optimo  Maximo  WLius  ALE- 
XANDER.  \otum  Qolvit  Libens  Merito. 

Consacré  à  Auguste,  à  Jupiter  très- bon,  très-grand, 
Jules  Alexandre  a  accompli  son  vœu  avec  joie  et  justice. 

L'honneur  de  cette  excellente  et  certaine  lecture  revient 
à  M.  de  Laugardière,  qui  l'avait  communiquée  à  la  Société 
Nivernaise,  IP  série,  t.  IV,  p.  63.  Nous  ignorons  pourquoi 
on  ne  l'a  pas  donnée  dans  le  catalogue  que  cette  société 
vient  de  publier.  L'inscription  parait  du  m'  siècle. 

Longueur,  0™  65  ;  hauteur.  G"  16. 

Actuellement  au  musée  du  Croux,  à  Nevers,  u">  29. 

{Album  du  Nivernais,  pi.  XXIV,  n°  85.  —  Catalogue, 
p.  108.) 


Colonnes  milliaires. 

11.  Nous  plaçons  dans  cette  catégorie,  non  sans  quelque 
hésitation  et  à  titre  de  pure  hypothèse,  le  fragment 
suivant,  que  nous  n'avons  pu  voir  et  qui  nous  est  ainsi 


i>56  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANGE. 

signalé  et  dessiué  par  M.  Roubet,  juge  de  paix  à  la 
Guerche,  vice-président  de  la  Société  Nivernaise. 

«  Dans  les  premiers  jours  de  janvier  1873,  dans  le  sol 
d'une  maison  eu  construction  à  Decise,  on  a  découvert 
quelques  tombeaux  ou  cercueils  de  pierre.  Un  de  ces  sar- 
cophages, que  j'ai  examinés,  offrait,  sur  le  côté  gauche, 
quelques  lettres  tracées  en  ligne  longitudinale.  Le  sarco- 
phage contenait  le  corps  d'un  adulte.  » 

Ce  sarcophage,  qui  est  évidemment  le  second  état  de  la 
pierre,  ne  nous  intéresse  que  par  les  vestiges  d'inscriptions 
qu'il  porte.  Il  résulte  du  dessin  que  nous  avons  sous  les 
yeux  que  cette  bière  a  été  taillée  dans  un  fût  cylindrique, 
dont  la  seule  partie  de  surface  conservée  nous  donne  les 
lettres  : 


.SF. 
.R. 
.IT. 
.T. 
.III. 
.II. 


Le  signe  supérieur  signalé  par  notre  savant  correspon- 
dant nous  paraît  quelque  lettre  mal  formée.  Il  est  évident 
que  ces  vestiges  sont  trop  incomplets  pour  en  tenter  la 
restitution.  Il  est  cependant  naturel  de  voir  là  les  vestiges 
d'une  inscription  itinéraire,  où  les  traits  verticaux  des 
dernières  lignes  seraient  les  chiffres  des  distances.  En 
suivant  cette  hypothèse,  on  pourrait  même  conclure  du 
nombre  des  lignes  qu'il  s'agit  là  de  quelque  inscription 
analogue  à  celles  que  nous  avons  dans  le  Cher  sur  nos 
grandes  voies,  et  que  l'on  trouve  ailleurs  placées  sur  les 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  257 

voies  romaines  à  l'époque  des  restaurations  d'Alexandre 
Sévère  et  de  Maximin. 

La  forme  primitive,  le  lieu  de  découverte,  l'utilisation 
si  usuelle  de  la  colonne  comme  cercueil,  nous  semblent 
corroborer  cette  opinion. 

Cette  pierre  doit  être  transportée  au  musée  du  Croux  ; 
nous  n'avons  pas  su  où  la  trouver  pour  l'examiner  par 
nous-même.  Il  importe  qu'elle  ne  soit  pas  perdue,  puis- 
que c'est  peut-être  le  seul  monument  de  cet  ordre  qu'ait 
le  département  de  la  Nièvre. 


Monuments  funéraires. 


12.  Ce  n'est  qu'à  Entrains,  l'antique  Intaranum,  que 
nous  avons  trouvé  des  stèles  sépulcrales  épigraphiques. 

D  M. 
CAGILONIS 
CAIIANI  FILl 
V  S 

Les  deux  premières  lettres  au-dessus  et  les  trois  der- 
nières lignes  au-dessous  d'un  buste  d'homme,  sous  une 
arcade. 

La  cinquième  lettre  de  la  deuxième  ligne  est  douteuse, 
I  ou  L  ;  la  sixième  aussi,  N  ou  M  ou  NA  liés. 

Ainsi  de  la  troisième  et  quatrième  de  la  troisième  ligne. 
Les  traverses  inférieures  de  i'F  et  de  l'L  de  filius  sont 
inclinées,  ce  qui  nous  semble  l'indice  d'une  époque  assez 
tardive,  iii^  siècle. 

D«s   nanibus  C.    AGILONIS    CALIANI   FILIî,    \oto 

XL^  SESSION.  M 


258       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

?)oluto.  Aux  dieux  mânes  de  Caius  Agilon,  fils  de  Caius 
Anius,  en  accomplissement  de  son  vœu. 

Nous  douuons  cette  lecture  comme  douteuse. 

Hauteur  de  la  pierre,  1"  60. 

Actuellement  posée  transversalement  au-dessus  d'une 
porte  d'écurie,  chez  M.  Goulard,  maire  d'Entrains. 

(Dessinée  en  partie.  Album  du  Nivernais,  pi.  n°  85.) 

13.  D  M  SABINA 
ATTIANI  FILIA 

Gravée  sur  deux  lignes,  sous  un  fronton  à  deux  ailes, 
sur  une  pierre  brisée  à  droite  et  à  gauche,  récemment 
découverte  dans  le  champ  funéraire  qui  s'étend  à  l'ouest 
d'Entrains,  le  long  de  la  route  de  Bouhy,  encastrée  dans 
le  mur  du  four  à  chaux  (!)  de  la  tuilerie  qui  est  dans  ce 
champ. 

Diis  Manibus  SABINA  ATTÏANl  FILIA.  Aux  dieux 
mânes,  Sabine,  fille  d'Attianus. 

Les  caractères  sont  bons;  la  traverse  de  l'L  est  inclinée. 

Hauteur,  O^SS  environ;  longueur,  0"  55  environ. 

14.  D  MARI.  .  . 
GO    GO. . . 

Sur  une  stèle  à  fronton  avec  ailes,  dont  la  partie  droite 
manque.  Le  D  est  sur  le  bandeau  gauche  formant  pilastre, 
la  première  ligne  sur  le  fronton  ;  les  deux  syllabes  de  la 
dernière  ligne  sur  le  tableau  refouillé  de  chaque  côté  du 
vase  à  long  col,  grossièrement  sculpté.  Bien  que  la  partie 
droite  manque,  il  semble,  par  la  place  du  vase,  que  l'in- 
scription est  complète. 

Son  interprétation  nous  semble  des  plus  difficiles; 
serait-ce  une  stèle  avec  formule  banale  et  presque  barbare 


XL^    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  SriO 

d'une  douleur  conjugale?  Faudrait-il  lire  MARITO  co 
QXinjux.  Aux  dieux  mânes,  à  son  mari,  son  épouse,  et 
mettre  la  répétition  de  la  seconde  syllabe  sur  le  compte  4e 
l'ignorance  dulapicide?  Ce  sont  là  hypothèses  pures. 

Hauteur  de  la  pierre,  O™  50  environ  ;  largeur,  0"  40. 

Actuellement  chez  M.  Renault,  à  Entrains. 

{Album  du  Nivernais,  pi.  85.) 

45.  D'autres  cippes  romains  ont  été  trouvés  à  Entrains, 
à  diverses  époques  ;  nous  n'avons  pu  ni  les  retrouver  ni 
en  connaître  la  destination.  Nous  en  donnons  la  descrip- 
tion d'après  les  dessins  de  l'Album  du  Nivernais,  dessins 
dont  la  critique  est  absente,  mais  qui  sont  faits  évidem- 
ment sur  nature. 

D  M. 
MONVMENTVM 
GNATA  ALBI  FILIA 

Dus  Manibus.  MONVMENTVM  GNATA  ALBI  FILIA. 
Aux  dieux  mânes.  Tombeau  de  Gnata,  fille  d'Albus. 
Gnata,  nom  propre  (Voyez  Gruter,  p.  746,  n"  7).  Inscrite 
au-dessus  d'une  stèle  à  niche  refouillée,  où  est  représentée 
une  jeune  femme  tenant  un  enfant. 

{Album  du  Nivernais,  introduction,  p.  xxv.) 

16.  DM 

SAPRONIANVS 
SASERVS. 

Aux  dieux  mânes.  Sapronianus  Saserus. 
Inscrite  sous  une  stèle  où  est  refouillé  un  tableau  carré, 
dans  lequel  est  le  buste  d'un  personnage  imberbe.  (Id.) 


260       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

17.  DM 

AMORI 
.  .  .  TIVS  ou  Yius. 

Deux  dessins  qui  semblent  être  d'un  même  monument 
à  une  échelle  différente  donnent  ces  deux  lectures  d'une 
stèle  où  est  représenté  le  buste  d'un  personnage  im- 
berbe. (Id.) 

18.  D      AMORI      M- 

Sur  le  bandeau  supérieur  d'une  stèle,  représentant  un 
personnage  presque  entier,  tenant  dans  chaque  maiu  une 
boule  ou  un  pain. 

La  lecture  du  nom  propre  de  ces  deux  dernières  stèles 
est  probablement  fautive,  car  on  comprend  difficilement 
la  déclinaison  du  mot.  Du  reste,  comme  ce  sont  évidem- 
ment des  monuments  de  décadence,  toute  faute  est  admis- 
sible. (Id.) 


Objets  divers. 

19.  Nous  trouvons  dans  cette  catégorie  deux  objets  fort 
intéressants,  deux  cachets  d'oculistes. 

L'un  a  été  trouvé  à  Entrains,  c'est  un  disque  carré  en 
stéatite  de  O"  039  carrés,  sur  0"  010  d'épaisseur,  portant 
une  inscription  sur  deux  lignes,  sur  chacune  de  ses  faces  : 

1°  LTEREN  PATERNI 
DIATESSERIM. 

2°  L  TEREN  PÂËRNI 
MELINVM. 


XL"   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  261 

3°  L  TEREN  PATERNI 
DIAILIPIIDVM. 

4°  L  TE;REN  PATERNI 
DIASMYRNEN. 

Ces  inscriptions  ont  été  lues  et  signalées  par  M.  A.  de 
Longperier,  en  1845,  et  interprétées  ainsi  dans  un  article 
du  docteur  Sichel,  inséré  dans  la  Gazette  médicale  de 
Paris,  1845  : 

1°  Lucii  TERENTu  PATERNI  DIATESSERLM.  (Collyre 
Diatesserin  de  Lucius  Terentius  Paternus.) 

2°  Lucii  TERENTî?  PATERNI  MELINVM.  (  Collyre 
Mellinum  de  Lucius,  etc.) 

3°  Lucii  TERENTu  PATERNI  DIALIPIIDVM.  (Collyre 
Dialipedum  de  Lucius,  etc.) 

4°  Lucii  TERENT»  PATERNI  DIAS  MYRNEN.  (Collyre 
de  Myrrhe,  de  Lucius,  etc.) 

Nous  reproduisons  ces  savantes  traductions  sans  les 
commenter,  ce  qui  sortirait  de  notre  étude.  Nous  remar- 
querons, à  la  fin  de  la  troisième,  le  D  formé  d'un  C 
retourné,  précédé  d'un  I. 

Ce  cachet  est  encore  actuellement  chez  M.  Regnault, 
d'Entrains,  où  nous  l'avons  vu. 

{Société  Nivernaise,  18S5,  t.  I",  art.  de  M.  Crosnier, 
p.  363.) 

20.  Autre  cachet  trouvé  près  d'Alluy,  commune  de 
Chàtillon-en-Barois.  C'est  un  disque  rectangulaire  en 
stéalite  grise,  de  0"'052  de  long,  sur  une  largeur  de 
O^OSl,  son  épaisseur  est  de  O^OIS,  gravé  sur  deux  de 
ses  tranches.  La  première  inscription  est  sur  trois  lignes, 
bien  conservées  : 


262       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

1°  L  POMPNICïRINI  ARPAS 
TON  ABREGENT  LIPPIT 
VDIN  EODEN  DIE  EX  OVO. 

La  seconde  n'a  que  deux  lignes  ;  elle  est  altérée  par 
l'usage. 

2°  L  POMP OOS. 

AD  LIPP EX  OVO. 

Les  caractères  sont  nets  et  d'une  bonne  époque.  Le 
savant  abbé  M.  Grosnier  en  a  proposé  la  lecture  sui- 
vante : 

i"  Lucii  POMPomï  NIGRINI  ARPASTON  AD  RECEN- 
Tem  LIPPITVDINem  EODEN  (pour  eodem)  DIE  EX  OVO. 

Arpaston  de  Lucius  Pornponius  Nigrinvs  contre  l'oph- 
thalmie,  à  employer  le  jour  même,  avec  tin  mélange  d'œuf. 

Arpaston  serait  le  nom  grec  du  collyre. 

La  seconde  inscription  serait  analogue,  sauf  le  nom  du 
collyre,  qui  est  incomplet,  et  avec  l'absence  de  l'indication 
de  l'emploi  dès  le  premier  jour.  M.  Grosnier  suppose  que 
cet  usage  plus  long  de  ce  collyre  a  amené  l'emploi  plus 
fréquent  et  par  suite  l'usure  plus  grande  de  cette  face  du 
cachet. 

Toutes  ces  interprétations  nous  semblent  parfaitement 
plausibles. 

Actuellement  au  musée  du  palais  de  justice,  à  Nevers. 

[Mémoires  delà  Soc.  Nw.,  1855,  t.  I",  p.  352  et  368.) 

21.  En  1845,  dans  la  forêt  de  Gonipierre,  près  de  Saint- 
Révérin,  on  trouva  une  petite  pierre  noirâtre,  sorte  de 
schiste,  taillée  en  forme  de  disque,  à  double  bizeau  et 


XL«  SESSION,    A   (illATEAUROUX.  263 

percée  au  milieu  de  part  en  part.  Elle  a  environ  fr  035 
dans  son  plus  grand  diamètre  ;  0"  02  d'épaisseur.  Autour 
de  l'orifice,  qui  est  de  0"  01  de  diamètre,  règne  de  chaque 
côté  une  sorte  de  feston  gravé  en  creux.  Sur  le  pourtour 
se  lit  une  inscription  en  deux  lignes,  séparées  par  deux 
traits  fort  irréguliers.  Les  caractères  romains  sont  très- 
nets,  quoique  assez  irréguliers.  A  la  ligne  supérieure  on 
voit  très-distinctement  : 

MONiGNAT  HAGABI 

et  à  la  seconde  ligne  : 

BVDOVTIONIMON. 

Ges  lignes  sont  extraites  d'un  mémoire  présenté  à  la 
Société  Nivernaise,  dans  la  séance  du  6  octobre  4853,  par 
M.  Gougny.  Nous  ne  suivrons  pas  le  savant  archéologue 
dans  ses  hypothèses,  non  plus  que  les  interprétations  fan- 
taisistes de  M.  Eloi  Johanneau,  qui  semble  s'être  donné 
la  tâche  à  cette  époque  d'aborder  les  questions  les  plus 
difficiles  d'interprétation,  pour  ajouter  à  leur  difficulté 
naturelle  la  confusion  d'une  érudition  dénuée  de  critique. 

Les  monuments  de  ce  genre  n'ont  pas  encore  été, 
croyons-nous,  interprétés  d'une  façon  certaine.  Il  s'y  ren- 
contre probablement  un  ensemble  de  règles  et  de  formules 
volontairement  obscures.  Ge  sont,  peut-être,  en  outre,  des 
vestiges  du  langage  local.  A  tous  ces  titres,  ils  présentent 
un  problème  intéressant,  ils  doivent  être  conservés  avec 
soin,  surtout  lorsque  la  lecture  en  est  certaine,  puisque 
leur  nombre  et  leur  rapprochement  peuvent  résoudre  les 
difficultés. 

{Société  Nivernaise,  1855,  t.  I",  p.  336.) 

22.  Sur  un  vase  en  terre  noire,  de  toute  petite  dimen- 


264  CONGRÈS  ARCHÉOLOtilQUE  DE   FRANCE. 

sion  et  encore  muni  d'un  couvercle,  on  lit  sur  une  zone 
les  quatre  lettres  : 

B.I.B.E. 

séparées  par  de  larges  points  ronds  ou  disques.  Cette  invi- 
tation à  boire  indique  la  destination  de  ce  petit  vase,  et 
prouve  ainsi  l'usage  à  cette  époque  du  gobelet  élégant  en 
terre  fine. 

M.  de  Cougny,  directeur  de  la  Société,  annonce  qu'il 
compte  provoquer  l'établissement  d'un  catalogue  de  ces 
inscriptions  dans  chaque  Congrès  annuel,  pour  la  région 
archéologique  à  laquelle  appartiendra  la  ville  où  aura 
lieu  la  réunion. 

M.  l'abbé  Baudry,  curé  du  Bernard,  et  M.  Léon  Balle- 
reau,  dans  une  lettre  lue  en  séance  par  M.  le  Président, 
expriment  le  regret  de  n'avoir  pu  assister  au  Congrès. 

Enfin,  M.  l'abbé  Vinas  exprime  les  mêmes  sentiments. 
Il  témoigne  en  outre  sa  vive  satisfaction  de  voir  reparaître 
le  Bulletin  monumental,  dont  il  constate  l'heureuse 
rédaction.  Les  membres  du  Congrès  s'associent  à  sa  pen- 
sée. Le  Bulletin  monumental  est,  en  eff'et,  l'organe  vital  et 
essentiel  de  la  Société  française  d'Archéologie;  il  est  digne 
de  tous  les  membres  d'y  collaborer  et  d'en  favoriser  la 
diffusion. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures  et  demie. 


XL®   SESSION,    A    CHATEADROUX.  2G5 


1'''    SÉANCE    DU    42    JUIN    ISIS. 

PRÉSIDENCE     DE     M.     DE   ROUMEJOUX, 
Inspecteur  du  Lot. 

Siég'ent  au  bureau  :  MM.  de  Baye,  Legrand,  Roubet  et 
Rouëdde. 

Le  procès-verbal  de  la  séance  du  41  juin  est  lu  et 
adopté  sans  observation. 

M.  Rouëdde  sij^nale  l'existence,  à  la  Faye  près  Châtillon, 
d'un  atelier  d'instruments  de  silex,  exploité  depuis  long- 
temps pour  l'entretien  des  routes.  Il  présente  divers  échan- 
tillons, assez  peu  remarquables  d'ailleurs,  parce  qu'ils 
ne  sont  que  le  résidu  de  l'exploitation.  Mais  il  fait  con- 
naître l'existence,  sur  le  terrain  même  de  l'atelier,  d'un 
grand  polissoir  de  deux  mètres  cubes,  profondément 
enfoncé  dans  le  sol  et  sillonné  de  plusieurs  rainures.  Il 
mentionne  en  outre  un  dolmen  renversé  et  mutilé,  dont 
la  tablette  a  2"  40  de  largeur;  puis,  non  loin  de  là,  un 
camp  et,  à  Mur,  un  autre  camp,  pris  à  tort  pour  un 
tumulus. 

M.  le  président  donne  lecture  d'une  lettre  de  M.  Teste- 
noire-Lafayette,  adressée  à  M.  de  Cougny,  dans  laquelle 
il  fait  part  au  Congrès  de  Chàteauroux  des  regrets 
unanimes  que  la  mort  de  l'illustre  M.  de  Caumont  a  causés 
à  la  Société  Archéologique  du  Forez. 

La  cinquième  question  du  programme  :  Les  pierres 
prismatiques  de  Chambon  sont-elles  le  produit  de  l'indus- 
trie humaine  ou  une  formation  géologique?  est  mise  à 
l'ordre  du  jour. 


266       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

M.  Godefroi  expose  qu'il  a  trouvé  et  examiné  bien  sou- 
vent des  pierres  pyramidales  de  petit  volume,  disséminées 
à  Villedieu,  à  Chamousseau-du-Puy,  sur  la  rive  gauche 
de  l'Indre,  près  Saunay  et  Sainte-Gemme.  Leur  quantité 
était  innombrable,  car  on  les  exploite  depuis  plus  de 
trente  ans  pour  le  service  des  routes.  Ce  sont  des  pierres 
de  grès  dur,  dont  la  couleur  varie  du  rouge  jusqu'au  noir. 
Elles  affectent  des  formes  diverses,  dont  la  plus  commune 
est  la  forme  pyramidale.  Elles  présentent,  en  effet,  deux 
pyramides  bien  opposées  et  surbaissées  à  sommets  symé- 
triques. M.  Godefroi  s'est  demandé  si  ces  pierres  étaient 
taillées  par  la  maiu  de  l'homme  ;  une  grave  objection, 
tirée  de  la  nature  de  la  pierre  s'élève  contre  l'affirmative. 
Il  est  plus  probable  que  ces  grès  ont  été  transportés  et 
roulés  par  les  eaux,  et  que  leur  forme  est  le  fait  de  la 
nature. 

M.  de  Cessac  ne  reconnaît  dans  les  échantillons  déposés 
sur  le  bureau  aucune  trace  de  travail  humain;  il  ne  voit 
pas  non  plus  à  quel  usage  ces  pierres  auraient  pu  servir. 
M.  Constant  Prévost  a  signalé  dans  les  environs  de  Paris 
une  argile  dont  les  fentes  de  retrait  naturelles  ont  divisé 
la  masse  en  prismes  semblables  à  ceux  du  basalte.  C'est 
à  un  phénomène  semblable  que  sont  dus  les  grès  de 
Chambon  en  forme  de  prismes.  Quant  à  ceux  formés  de 
deux  pyramides  quadrangulaires  très-surbaissées  oppo- 
sées par  la  base,  M.  de  Cessac  trouve  l'explication  de  leur 
formation  dans  celle  des  grès  de  Fontainebleau.  Ces  grès 
à  base  calcaire  ont  cristallisé  dans  le  système  de  la  chaux, 
le  rhomboèdre;  ceux  de  Chambon,  à  base  de  fer,  dans 
celui  du  fer,  l'octaèdre.  Tous  ces  échantillons  sont  forte- 
ment roulés,  ce  qui  fait  que  leur  cristallisation  est  un  peu 
fruste. 


XL*   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  267 

La  neuvième  question,  relative  aux  voies  romaines  du 
Berry,  est  traitée  par  M.  Lenseigne.  Ce  consciencieux  et 
patient  explorateur  donne,  dans  un  mémoire  remarquable, 
la  description  détaillée  des  six  voies  romaines  qui  venaient 
converger  à  Argentomagus,  aujourd'hui  Argenton.  Ses 
indications  sont  précises,  étudiées  sur  place,  la  pioche  à 
la  main,  et  rendues  plus  claires  et  plus  sensibles  par  une 
bonne  carte,  jointe  au  mémoire. 


Rapport  sur  les  voies   romaines  dans  les 
environs  d' Argenton. 


Depuis  plus  de  vingt  ans,  à  mesure  que  le  temps  me 
Fa  permis,  je  me  suis  occupé  à  rechercher  des  voies 
romaines  autour  d'Argenton,  et,  après  bien  des  efforts, 
en  étudiant  le  sol,  je  suis  parvenu  avec  bonheur  à  décou- 
vrir six  voies  principales,  convergeant  sur  l'ancien  Argen- 
tomagus, qui  sont  : 

La  voie  de  Lyon, 

La  voie  de  Bourges, 

La  voie  d'Orléans, 

La  voie  de  Poitiers, 

La  voie  de  Bordeaux, 

Et  la  voie  de  Clermont. 

Sur  les  points  les  mieux  conservés,  j'ai  pu  m'assurer 
du  mode  de  leur  construction  en  tranchant  la  chaussée, 
car  ce  n'est  qu'à  la  chaussée,  c'est-à-dire  à  l'empierrement 
que  la  reconnaissance  peut  être  faite  avec  exactitude  ;  j'ai 
reconnu  qu'il  était  le  même  pour  toutes  ;  qu'il  n'y  avait 
de  différence   que  pour  la   largeur.  Ainsi,  il  sera  facile 


268  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRi\JVCE. 

de  classer  l'importance  de  ces  voies,  par  la  largeur  de  leur 
chaussée  d'empierrement. 

Leurs  tracés  sont  remarquables  par  l'art  et  la  régula- 
rité de  leurs  mouvements  à  traverser  les  plaines,  à  con- 
tourner les  côtes  ou  à  les  franchir.  On  pourrait  croire  à 
une  combinaison  stratégique. 

Il  n'existe  nulle  part  aucune  apparence  de  fossés  pour 
décider  de  la  largeur  totale  de  chaque  voie,  le  temps  les  a 
comblés. 

Toutes  ces  voies  venaient  aboutir  à  peu  près  au  centre 
de  la  ville  romaine,  probablement  sur  une  place,  au  nord 
de  l'amphithéâtre,  dans  les  vignes  du  Palais,  lieu  ainsi 
appelé  à  cause  de  la  présence  du  palais  ou  maison  du 
gouverneur,  que  la  tradition  nous  a  conservé. 

L'ancien  Argentoraagus,  dont  je  vais  parler,  était  une 
ville  ouverte.  Cette  ville  comprenait  un  périmètre  de 
3  kilomètres  500  mètres  de  longueur,  du  sud  au  nord^ 
sur  2  kilomètres  500  mètres,  de  l'est  à  l'ouest,  soit  une 
circonférence  de  9  kilomètres  430  mètres. 

A  en  juger  par  l'abondance  des  débris  de  maçonnerie 
qu'on  retrouve  à  sa  surface,  elle  s'étendait  dans  la  vallée 
de  la  Creuse,  où  sont  Naillac  et  Saint-Étienne  (deux  fau- 
bourgs d'Argenton),  sur  les  collines  des  Mersans  et  des 
Douces,  sur  l'emplacement  de  Saint-Marcel,  et  sur  les 
plaines  plantées  de  vignes  des  Jaugères,  les  Caurattes,  le 
Palais,  les  Champmassons,  Lozelet  et  la  Chicarderie.  L'un 
de  ses  faubourgs  se  prolongeait  de  Naillac  à  Maraux  au 
pied  de  la  tour  à'Heraclius.  Un  autre  se  prolongeait  aussi 
vers  la  Chicarderie,  sur  les  voies  de  Bourges  et  de  Lyon; 
et  un  troisième  dans  les  Jaugères,  sur  la  voie  de  Poi- 
tiers. 

Dans  cette  vaste  étendue  de  terrain  et  parmi  les  décom- 
bres, on  remarque  les  vestiges  : 


Me-, 


snles.) 


CAPvTE 

DES 

yolKS     ROMA/IVES 

dans   les    environs 
d  Argenton, 

dressée  fa.rM-'L enseigne 
Condud^des Thrdt;  el  C/iausseu- 
â  Jrjenlon.  {  Indre  ) 

jx^w  oe/tw  it   joir  i(jMfjo['^  piWJt^  au  Conqr&i 
<.htJièvkHji(/UA-   de    frange  I<-vul  d  CAâteuu/oLu: 


Echelle 

dt     O'^OOâ  poarIKÛomeIre. 


01Z345G389    10  OOO 


JOOOM. 
1 


CHATBE. 


Mediolanum  Caslmm. 

(CHA  TUA  UME/JLLAVT.  ) 


Col 

{La 


JBo/uie. 

J 


LEGENDE. 

-\T        -n  ^reconnuftj  el  apparentes ^ 

Voies  ilomames  \         ■     * 

Jincorapletem-  déterminées 

Hontes  Nâlionalts  d  Depademenkles- 

Rmères  eu  Rui.wcua.t 

VILLES 

Bourgs  a    l}//a^ej 

limite  d  Argenlomagu 


'^!afici.  .  K  S'.Miirh 


CARTE 

yoiKS     nOMAfNES 

ns  les    environs 
d'Argent  on, 

par  W'L  e/isctyae 
Condud'deilhnisti  (^ausseu 
a  ÂTffenlon  <.  Indre  ) 

1idualeifi<jUje  de   France  U/ui  «  fAàltmu 


C3 


XL"   SESSION,    A    r.IlATEAUROUX.  200 

D'un  théâtre  ou  cirque  de  98  mètres  de  diamètre,  pris 
intérieurement,  et  placé  au  mas  des  Douces  ; 

D'un  amphithéâtre  de  104  mètres  de  diamètre,  situé  au 
mas  du  Palais  ; 

D'un  hypocauste  d'une  vaste  étendue,  mis  à  découvert 
à  Saint-Étienne  ; 

Des  canaux  de  fontaines,  mis  à  découvert  dans  les 
vignes  des  Mer  sans  ; 

Des  temples  à  Cérès,  Apollon,  Hercule,  dont  les  tètes 
finement  sculptées  ont  été  trouvées  dans  les  décombres  ; 

Des  maisons  somptueuses  par  la  richesse  des  peintures, 
du  marbre  et  des  mosaïques,  mises  à  découvert  depuis 
quelques  années  ; 

Des  urnes  funéraires  parfaitement  conservées  ; 

D'un  pont  en  pierre  de  taille,  sur  la  Creuse,  entre  Saint- 
Étienne  et  Naillac,  pour  servir  aux  voies  de  Bordeaux  et 
de  Clermont  ; 

D'une  forteresse,  le  boulevard  de  la  ville  romaine,  sur 
l'extrémité  d'une  côte  au  faubourg  Maraux.  On  y  remar- 
que que  la  tour  d'Héracle  a  été  réparée  au  pied  avec 
des  piédestaux  et  des  fûts  de  colonnes,  provenant  de 
palais  ou  de  temples.  Cette  réparation  doit  remonter  à 
l'époque  du  passage  des  Vandales,  alors  que  les  Gallo- 
Romains  démolissaient  leurs  villes  pour  se  mettre  à  l'abri 
de  l'invasion.  On  lisait  encore,  il  y  a  quatre-vingts  ans, 
sur  le  fronton  de  sa  porte  principale  :  Heraclius,  veni,  vici, 
et  au-dessous  se  voyait  un  taureau  sculpté,  symbole  de  la 
force.  Dans  l'intérieur,  maintenant  planté  de  vignes,  le 
vigneron,  avec  son  soc,  découvre  journellement  des  mon- 
naies d'Auguste,  d'Agrippa,  Néron,  Dioclétien Cette 

forteresse  était  reliée  au  faubourg  de  Naillac,  par  une 
voie  passant  derrière  les  maisons  actuelles  de  Chàteauneuf, 
et  allant  correspondre  à  Fontfurat,  avec  les  voies  de  Bor- 


270       CONGRÈS  ARCUÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

deaux  et  de  Clerraonl,  Ces  témoii^aiages  prouvent  assez  de 
son  existence  au  temps  de  l'occupation  des  Romains  et 
qu'elle  était  la  sauvegarde  de  la  ville  ; 

D'un  champ  de  Mars,  très-probablement  dans  la  plaine 
des  Champbons,  en  face  du  cirque. 

A  Naillac,  Saint-Étienne  et  Saint-Marcel,  dans  les 
vignes  et  les  jardins,  on  découvre  de  belles  poteries,  de 
superbes  mosaïques,  de  beaux  marbres,  des  peintures 
murales,  des  pièces  de  monnaie  à  l'effigie  des  empereurs 
et  des  consuls,  des  chapiteaux,  des  corniches,  des  piédes- 
taux, des  fûts  de  colonnes,  des  carreaux  et  des  tuiles  à 
rebords. 

Il  semble  que  l'Italie  ait  apporté  ici  toutes  ses  sciences 
et  tous  ses  arts. 

Placée  au  centre  de  la  Gaule,  cette  ville,  qui  fut  grande 
et  somptueuse,  révélée  par  les  débris  de  ses  magnifiques 
édifices,  et  par  l'importance  de  ses  six  belles  voies,  ne  pou- 
vait pas  être  autre  qu'une  capitale  de  province  où  siégeait 
le  gouverneur,  ou  proconsul,  ayant  son  palais  à  côté  de 
l'amphithéâtre,  ainsi  que  la  tradition  a  conservé  ce  nom  : 
Palais,  dans  le  pays.  C'est  ma  conviction,  et  ce  qui  encore 
la  fortifie,  c'est  que  dans  toutes  les  recherches  faites  au- 
tour de  Bourges,  de  Tours  et  de  Poitiers,  on  n'est  parvenu 
réellement  à  découvrir  que  quatre  voies  pour  Bourges, 
cinq  pour  Tours  et  quatre  pour  Poitiers.  Puis  il  faut 
penser  que  quatre  des  voies  d'Argenton  devaient  être  de 
première  classe  et  entrer  dans  le  grand  réseau  central. 

Cette  simple  explication  étant  faite  sur  la  ville  d'Argen- 
tomagus,  je  vais  parler  du  trajet  des  grandes  voies  qui  y 
aboutissaient  et  qu'on  pourra  suivre  en  consultant  les 
deux  cartes  ci-annexées. 


XL"   SESSlOiN,    A    CIlATliAUROUX.  271 

I,  —  Voie  romaine  d'Argenton  à  Lyon  par  Néris. 

En  l'année  1839,  lorsque  l'administration  des  ponts 
et  chaussées  faisait  construire  la  route  départemen- 
tale n°  3  de  Saint-Gaultier  à  Châteaumeillant,  entre 
Argenton  et  Bouesse,  les  ouvriers,  en  déblayant  le  ter- 
rain, mirent  à  découvert  une  chaussée  d'empierrement 
assez  bien  conservée.  C'était  la  grande  voie  de  communi- 
cation d'Argentomagus  à  Lugdunum  par  Néris,  qui  venait 
de  se  révéler,  voie  que  la  terre  recouvre  depuis  des  siècles, 
et  dont  les  Itinéraires  d'Antonin  font  mention,  ainsi  que 
les  Tables  Théodosiennes. 

Profitant  de  nos  visites  sur  les  chantiers  de  notre  route 
départementale,  nous  avons  reconnu  qu'entre  la  Bour- 
dine  et  l'aqueduc  de  Font-Creux,  au-delà  du  Niellaux, 
sur  une  étendue  de  5,500  mètres,  la  chaussée  romaine 
avait  été  tranchée  sur  quatre  points,  par  suite  de  son 
voisinage  et  de  ses  développements  serpentant  dans  la  voie 
nouvelle.  En  même  temps,  nous  nous  sommes  assuré  de 
son  mode  de  construction  et  nous  en  avons  levé  profil. 

Cette  chaussée  a  une  largeur  de  6  mètres,  et  se  com- 
pose : 

1°  De  deux  rangs  de  bordures  en  calcaire  dur  bien 
alignés,  régnant  l'un  et  l'autre  sur  chaque  bord  et  formant 
l'encaissement  de  l'empierrement. 

2°  D'une  couche  inférieure  ou  première  couche  en 
mâchefer  de  20  centimètres  d'épaisseur. 

3°  Et  d'une  couche  supérieure  ou  seconde  couche  en 
silex  et  calcaire  mélangés,  de  la  grosseur  de  3  à  6  centi- 
mètres de  diamètre. 

L'épaisseur  totale  est  complètement  liaisonnée;  son  fond 


272       CONGRÈS  ARCnÉOLOGIQUE  DE  FRANCE, 

est  réglé  suivant  un  arc  de  cercle  de  5™61  de  corde  et  de 
Il   centimètres  de    flèche. 

Des  sondages  ont  démontré  que  les  épaisseurs  des 
couches  étaient  variables. 

Sur  d'autres  points,  les  deux  couches  composant  l'em- 
pierrement reposent  au  fond  de  l'encaissement  sur  une 
fondation  faite  en  petits  moellons  de  nature  calcaire  et  en 
mâchefer,  rangés  en  forme  de  pavage,  suivant  un  bom- 
bement de  12  centimètres. 

A  quelque  temps  de  là,  nous  reprenions  nos  recherches 
avec  l'intention  bien  arrêtée  de  faire  un  relevé  général  de 
nos  voies  romaines  convergeant  sur  Argenton.  De  nou- 
velles et  précieuses  découvertes  que  nous  venions  encore 
de  faire  étaient  pour  nous  un  encouragement.  Nous  nous 
mîmes  à  l'œuvre,  et  maintenant  nous  sommes  en  mesure 
d'en  donner  les  détails. 

Nous  allons  d'abord  compléter  la  description  commencée 
de  la  voie  romaine  de  Lyon. 

La  grande  voie  romaine  d'Argentomagus  à  Lugdunum 
s'embranche  avec  la  grande  voie  romaine  d'Argentomagus 
à  Avaricum,  dans  le  pacage  de  Lamartine,  situé  entre 
Lamartine  et  la  Bigaillonne,  ayant  appartenu  à  M.  le 
vicomte  Octave  de  Barrai  et  maintenant  à  M.  le  général 
d'Autemarre.  De  cette  bifurcation  les  deux  voies  se  con- 
fondent communément  jusqu'à  Saint-Marcel,  à  peu  de 
distance  du  théâtre  romain,  dans  les  vignes  du  Palais,  sur 
une  longueur  de  2  kilomètres  500  mètres. 

De  Saint-Marcel  jusqu'au  pacage  de  Lamartine,  la 
chaussée  commune  traverse  des  vignes  qui  empêchent  de 
la  bien  reconnaître.  Ce  n'est  qu'au  passage  de  la  rectifi- 
cation de  la  route  nationale  n°  20  de  Paris  à  Toulouse, 
qui  la  coupe  à  63  kilomètres  700  mètres  du  bornage, 
qu'on  retrouve  sa  trace  dans  un  petit  vallon  qu'elle  fran- 


XL*   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  273 

chil  le  long-  du  chemin  étroit  et  creux  du  Lozelet;  puis 
coupée  par  l'ancienne  route  de  Paris,  à  1550  mètres 
de  distance  d'un  ponceau  établi  à  gauche,  elle  monte  sur 
le  plateau  delà  Chicarderie,  qu'elle  prend  à  revers. 

A  140  mètres  au  delà  du  ponceau  qui  vient  d'être 
indiqué,  un  tombeau  en  pierre  a  été  mis  à  découvert 
au  bord  de  la  voie,  en  18G0,  par  le  nommé  Hébert 
Auguste. 

Dans  un  champ  à  droite,  en  deçà  de  la  Chicarderie,  des 
déblais  exécutés  en  1859  mirent  à  découvert  les  débris 
d'un  temple ,  du  milieu  desquels  on  retira  une  tête 
d'Apollon  qui  a  été  donnée  par  M.  Mercier-Génétoux 
au  musée  de  la  ville  de  Châteauroux. 

En  quittant  les  champs  de  la  Chicarderie,  la  voie 
entre  sur  les  terres  de  la  Bigaillonne,  et  après  avoir 
croisé  le  chemin  de  Lamartine  à  Saint-Marcel,  et  traversé 
un  champ  appartenant  à  M.  Mercier-Génétoux,  elle 
pénètre  dans  le  pacage  de  Lamartine,  à  32  mètres  de  dis- 
tance de  l'angle  formé  à  droite  par  la  haie  servant  de  clô- 
ture. C'est  ici,  à  6  mètres  au  delà  de  la  haie,  dans  ce 
pacage  figurant  un  trapèze,  que  se  trouve  la  bifurcation 
des  deux  voies  romaines,  se  dirigeant  l'une  à  gauche 
sur  Bourges,  et  l'autre  à  droite  sur  Lyon. 

La  voie  de  Lyon,  partant  de  son  point  d'embranche- 
ment, sort  du  pacage  au  premier  angle  à  gauche  de  la 
haie  formant  la  clôture  du  fond  ;  puis  développant  une 
courbe  à  droite,  elle  traverse  les  bois  de  Lamartine,  Ver- 
neuil  et  des  Thibauds,  laissant  à  droite  Lamartine  à 
500  mètres,  la  Forêt-Chauve  à  700  mètres,  et  Verneuil  à 
d,000  mètres. 

Dans  ce  parcours,  la  chaussée  est  presque  intacte  ;  elle 
se  croise  dans  le  bois  avec  l'antique  chemin  d'Argenton  à 
Bourges  par  Ardentes,  témoignages  encore  vivants  à  l'égard 

XL''   SESSION.  18 


274       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

de  Voppidum  d'Argenton,  pour  lequel  nous  préparons 
une  notice;  débouche  du  bois  sur  la  route  départementale 
n°  3,  qui  la  coupe  pour  la  première  ibis  au  point  I4''520 
du  bornage  de  cette  route,  presque  en  face  du  domaine  de 
la  Bourdine. 

C'est  à  partir  de  ce  point  que  nous  avons  donné  plus 
haut  un  commencement  de  la  description  de  la  voie  que 
nous  allons  continuer. 

Sortie  du  bois  et  ici  tranchée  par  la  route,  la  chaussée 
romaine  traverse  une  pièce  de  terre  drainée,  forme  une 
courbe  dont  le  sommet  appuie  vers  la  Bourdine,  qu'elle 
laisse  à  droite  à  300  mètres,  puis  se  déroule  en  relief 
très-apparent  dans  la  brande,  en  sinuosités  plus  ou 
moins  allongées  autour  de  la  route  départementale  qui  la 
coupe  une  deuxième  fois,  et  l'occupe  même  sur  une  lon- 
gueur de  210  mètres  à  partir  de  ITi"'!,  se  sépare  d'elle, 
passe  à  gauche  en  franchissant  le  ruisseau  des  Cédelles, 
laissant  les  Cédelles  à  droite  et  la  Jalousie  à  gauche  ;  est 
coupée  obliquement  une  troisième  fois  au  point  16''960  du 
bornage,  dans  sa  sinuosité  allant  de  la  gauche  à  la  droite, 
suit  l'ancien  chemin  d'Argenton  à  la  Châtre  ;  passe  au 
pied  d'uoe  croix  de  la  Rédemption  à  la  croisière  du  chemin 
de  la  Paillauderie,  laissant  la  Paillauderie  à  droite  à  400 
mètres  et  le  Buisson  à  gauche,  à  350  mètres;  elle  franchit 
les  deux  petits  ruisseaux  de  la  Paillauderie  en  traversant 
un  bouquet  de  bois  et  un  champ  où  elle  est  bien  conservée, 
parvient  au  sommet  d'une  brande,  sur  lequel  elle  forme 
une  courbe  développée  à  gauche  à  40  mètres  en 
deçà  de  la  croisière  du  chemin  des  Coudreaux  à  Mali- 
cornay. 

De  ce  point  et  laissant  à  gauche,  les  Coudreaux  à 
500  mètres  et  le  Nielloux  à  400  mètres,  la  voie  descend 
en  ligne  droite  dans  la  brande  do  la  Bouesse,  où  elle  est 


XL*   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  273 

intacte,puis  elle  incline  sensiblement  à  gauche  pour  tourner 
les  côtes  élevées  des  Molles,  des  MoUins  et  de  Montipeneau. 

Dans  ce  trajet  elle  est  coupée  obliquement  une  qua- 
trième fois  par  la  route  départementale  n°  3  au  point 
19''960  du  bornage,  et  près  duquel,  en  fouillant  le  terrain, 
a  été  mis  à  découvert  un  tuyau  fait  en  mortier  de  ciment, 
d'une  ouverture  cylindrique  de  9  centimètres  de  diamètre, 
placé  le  long  du  côté  gauche.  De  là  elle  traverse  ce  qui  reste 
de  brande,  est  ensuite  couverte  par  une  haie  servant  de 
clôture  à  un  champ,  passe  à  98  mètres  de  la  Grande- 
Métairie  de  Bouesse,  qu'elle  laisse  à  gauche,  et  Bouesse  à 
droite;  elle  traverse  des  champs,  des  pacages  et  des 
bouquets  de  bois,  sert  d'emplacement  pour  une  croix  à  la 
croisière  des  chemins  de  Bouesse  à  Fontpart  et  à  la  Ver- 
rerie, sort  d'un  bouquet  de  bois  pour  franchir  un  petit 
vallon  et  se  porter  au  Gâché  ;  un  fossé  ouvert  dans  le  pli 
du  vallon  tranche  la  voie.  On  remarque  au  fond  de  la 
tranchée  des  petits  moellons  arrangés  et  du  mâchefer, 
formant  autrefois  la  couche  de  fondation  de  la  chaussée. 

Du  Gâche,  la  voie  va  directement  aux  Brais.  Là,  à 
gauche,  sur  son  bord  une  maison  appuie  dessus,  de 
A  mètres  de  longueur. 

Des  Brais,  la  voie  romaine  continue  d'être  apparente  ; 
elle  franchit  le  vallon  du  Grézançais,  qui  forme  deux  cours 
d'eau  séparés  par  un  pré,  et  monte  sur  un  plateau  en 
développant  une  courbe  à  droite,  laissant  les  Talbots  à 
gauche  à  430  mètres,  pour  se  diriger  bien  conservée  sur 
les  Grandes-Métairies.  D'abord,  avant  d'arriver  à  ce  point, 
elle  est  coupée  par  le  chemin  vicinal  n'*  31  de  Bouesse  à 
Bussière  d'Aillac,  près  d'un  aqueduc  qu'elle  longe  ainsi 
qu'une  mare,  traverse  des  pièces  de  terre,  suit  le  chemin 
sur  200  mètres,  et  joint  la  première  maison  à  droite  de  la 
Grande-Métairie. 


276       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  BE  FRANCE. 

De  là  la  voie  continué  de  suivre  le  chemin,  et,  toujours 
apparente,  elle  franchit  l'Auzon,  monte  à  la  Prungne, 
parvient  au  milieu  du  village  des  Veaux,  est  coupée  par 
la  route  départementale  n°  8  de  Châteauroux  à  Aigurande, 
à  23''653  du  bornage,  longe  le  Bois-Gros,  dans  lequel  elle 
pénètre,  laissant  Neuvy-Saint-Sépulchre  à  droite. 

Après  le  Bois-Gros,  le  terrain  a  été  travaillé  par  des 
labourages  qui  ne  permettent  plus  de  distinguer  la  voie. 
On  ne  la  retrouve  qu'au  village  de  la  Chaussée,  où  se 
bornent  nos  investigations  ;  mais  de  ce  point  elle  doit  se 
rendre  à  Châteaumeillant,  laissant  la  Châtre  à  gauche. 


II.  —  Voie  romaine  d'Argenton  à  Bourges  et  à  Aiitun. 

Nous  avons  dit  dans  l'article  précédent  que  les  deux 
voies  de  Lyon  et  de  Bourges,  réunies  dans  le  pacage  de 
Lamartine,  venaient  aboutir  à  Saint-Marcel.  Nous  allons 
donc  prendre  cette  dernière  voie  à  son  point  d'embran- 
chement. 

Mais  d'abord  nous  devons  dire  que  sur  tout  son  parcours 
en  général,  ses  alignements  droits  et  courbes  sont  tracés 
avec  art,  suivant  les  inflexions  du  terrain. 

La  largeur  de  la  chaussée  est  de  4  mètres  sur  des  points 
et  de  6  mètres  sur  d'autres. 

Elle  se  compose  de  deux  rangs  de  bordure  en  pierre, 
formant  l'encaissement  comme  celle  de  Lyon  ; 

D'une  couche  de  fondation  en  mâchefer  ou  en  petits 
moellons,  posés  à  la  manière  d'un  pavage  bombé  ; 

D'une  couche  en  pierre,  en  silex  et  en  mâchefer,  repo- 
sant sur  la  fondation  ; 

Du  pacage  de  Lamartine,  la  chaussée  romaine  s'enfonce 


XL'   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  277 

dans  les  bois  de  Nuits  et  des  Gabats,  dans  lesquels  elle  est 
intacte.  Elle  longea  gauche  la  fosse  dite  aux  Cannes,  point 
à  renaarquer,  croise  les  deux  chemins  de  Lamartine 
qu'elle  laisse  à  600  mètres,  et  croise  aussi  les  deux  che- 
mins de  la  liigaillonne  aux  Thibauds,  Entre  ces  deux 
chemins  elle  présente  une  levée  remarquable  de  22  mètres 
de  longueur  sur  70  centimètres  de  hauteur  et  de  G  mètres 
de  largeur. 

A  vingt  mètres  au  delà  du  second  de  ces  chemins, 
on  remar(jue  une  autre  levée,  moins  prononcée  que  la 
première. 

A  cinquante-huit  mètres,  avant  de  croiser  le  chemin 
des  Gabats  aux  Thibauds,  servant  de  limite  aux  communes 
de  Saint-Marcel  et  de  Tendu,  on  rencontre  à  iO  mètres 
50  centimètres,  à  droite  de  la  voie,  un  tumulus  ayant 
la  forme  d'un  cône  tronqué  de  2™  40  de  hauteur  ;  sa 
base  a  de  diamètre  27  mètres,  et  sa  plate-forme  11  mètres. 
Sur  son  sommet  existe  un  vieux  tronc  de  chêne  énorme. 
Continuant  dans  le  bois,  elle  laisse  les  Gabat?  à  gauche, 
à  250  mètres,  et  forme  une  troisième  levée.  A  100  mètres 
plus  loin  on  la  trouve  couverte  par  de  vieux  troncs  de 
chênes.  Coupée  par  l'allée  du  bois  des  Gabats,  elle  passe 
devant  le  rond-point  à  117  mètres,  sort  du  bois,  et  croise 
le  chemin  de  Tendu  aux  Thibauds,  laissant  les  Thibauds 
à  droite  à  300  mètres. 

Traversant  ensuite  des  pièces  de  terre,  la  voie  franchit 
le  ruisseau  des  Gaignerons  et  prend  l'antique  chemin 
gaulois  d'Argenton  à  Bourges,  sur  lequel  elle  a  été  établie. 
Toutefois  elle  sera  souvent  coupée  et  suivie  par  le  chemin 
vicinal  d'Argenton  à  Ardentes  par  Arthon. 

Laissant  les  Piautets  à  gauche  à  400  mètres,  elle 
longe  à  gauche  la  lisière  du  bois  des  Salerons,  tandis 
qu'à  l'opposé,   elle  passe  devant   de  gros   dormarets  ou 


278       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

galets,  attachés  au  terrain,  et  désignés  sous  le  nom  de 
pierres  bures  ;  puis  elle  entre  à  droite  dans  des  champs, 
laissant  à  12  mètres,  à  gauche,  le  chemin  d'Ardentes 
ou  d'Arthon,  coupe  un  petit  communal,  continue  dans  le 
chemin  en  prenant  toute  la  lisière  du  bois  de  la  Chaise, 
laissant  le  village  de  la  Chaise  à  gauche  et  les  Jadrets  à 
droite,  à  200  mètres,  près  duquel  on  remarque  le  goufire 
surprenant  de  ce  village. 

Du  bois  de  la  Chaise,  sa  trace  est  faiblement  visible, 
ainsi  qu'au  droit  du  village  des  Linettes,  qu'elle  laisse 
à  droite  à  300  mètres  ;  mais  dès  qu'elle  a  franchi  le 
ruisseau  des  Linettes,  elle  devient  très-apparente,  passe 
entre  les  Terreaux,  qu'elle  laisse  à  gauche  à  500  mètres, 
et  Larrache  à  droite  à  200  mètres,  point  où  elle  croise 
le  chemin  vicinal  n°  40  de  Telles  à  Mosnay. 

De  ce  point  elle  se  dirige  sur  Patras,  suit  le  chemin 
d'Arthon  ou  d'Ardentes,  qu'elle  quitte  et  reprend  plu- 
sieurs fois  avant  ce  village,  qu'elle  laisse  à  droite  à  400 
mètres  et  l'abbaye  à  400  mètres,  suit  le  chemin  d'Ar- 
dentes ou  d'Arthon,  en  s'inclinant  à  droite  et  laissant  à 
50  mètres  à  gauche  les  ruines  d'un  ancien  four  romain  ; 
franchit  le  ruisseau  d'Hyvernault,  laissant  ce  village  à 
gauche  à  500  mètres,  et  arrive  aux  Pellerins  à  8  mètres 
à  droite  de  la  première  maison. 

A  quarante  mètres  au  delà  des  Pellerins,  la  voie  tourne 
à  gauche  et  monte  à  Bellevue.  Dans  ce  parcours,  et  tou- 
jours remarquable,  elle  traverse  des  pièces  de  terre,  passe 
entre  les  Combes,  qu'elle  laisse  à  gauche  à  400  mètres, 
et  la  Gabette  à  droite  à  300  mètres,  suit  le  chemin  d'Ar- 
dentes ou  d'Arthon,  laisse  à  gauche  l'étang  de  l'Aubépin 
à  200  mètres,  puis  parvient  en  face  de  Bellevue  à  100 
mètres  de  distance  à  gauche. 

Bellevue  est  sur  une  hauteur,  sur  l'emplacement  même 


XL'=    SESSION,    A   CllATEAUROUX.  279 

d'un  camp  romain,  facile  à  reconnaître  aux  talus  relevant 
le  terrain. 

A  cent  cinquante  mètres  après  Bellevue,  la  voie  romaine 
incline  à  droite  et  se  sépare  ici  du  chemin  d'Arthon.  Elle 
se  dirige  au  milieu  des  brandes  et  des  étangs  de  la  Batail- 
lerie,  laissant  la  Bataillerie  à  gauche  à  250  mètres,  en 
passant  sur  la  pointe  du  petit  étang.  De  là,  et  se  tenant 
bien  visible  dans  la  brande,  elle  se  porte  sur  Lavaud, 
laissant  la  Tremblais  à  gauche,  franchit  la  vallée  de  Gré- 
zançay  et  monte  à  Lavaud. 

De  Lavaud,  la  voie  continue  d'être  apparente  au  milieu 
des  terres  et  des  brandes.  Elle  passe  dans  l'étang  dit  du 
domaine  de  l'Étang,  se  présente  devant  Puymoreau,  qu'elle 
laisse  à  gauche  en  contournant  la  côte,  et  descend  à  la 
rivière  de  Rouzame,  pour  la  franchir  au  gué  de  Venay,  à 
quelques  mètres  en  amont  du  moulin. 

Coupée  par  la  route  départementale  n"  8  de  Château- 
roux  à  Aiguerande,  elle  suit  le  cherûin  deCrublier,  passe 
à  gauche  au  pied  du  bâtiment  du  nouveau  Crublier,  lais- 
sant à  droite  le  vieux  Crublier  à  100  mètres  pour  traver- 
ser la  forêt  de  Châteauroux,  laissant  la  Verrerie  à  gauche 
à  330  mètres. 

Dans  la  forêt  de  Châteauroux,  elle  suit  le  chemin  d'Ar- 
dentes (vieux  chemin  gaulois  de  Bourges)  jusqu'à  l'entrée 
d'Ardentes-Saint-Martin,  en  laissant  à  gauche  les  Loges 
d'Ardentes  à  200  mètres  et  à  droite  l'embranchement 
du  chemin  de  Jeu-les-Bois.  Cessant  à  ce  point  de  suivre  le 
chemin,  elle  entre  à  droite  dans  les  jardins,  et  passe  au 
pied  de  l'église  de  Saint-Martin  d'Ardentes,  pour  franchir 
l'Indre.  Ici  se  termine  notre  reconnaissance. 


280       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 


III.  —  Voie  romaine  d' Argentan  à  Orléans. 

Cette  voie  devait  être  la  grande  communication  d'Ar- 
gentomagus  à  Genabum. 

Les  Itinéraires  d'Antonin  et  les  Tables  Théodosiennes 
n'en  disent  rien  ;  c'est  une  lacune  due  évidemment  à  une 
négligence.  Sa  confection,  du  reste,  est  tout  à  fait  sem- 
blable aux  autres  chaussées  romaines  aboutissant  à  Argen- 
ton,  ainsi  que  nous  l'avons  reconnu  en  la  suivant  pied  à 
pied  de  Saint-Marcel  à  Mehun-sur-Indre,  près  Villedieu. 
Cette  voie  reliait  au  village  des  Mersans,  commune  de 
Muret,  une  ville  romaine,  ailleurs  plusieurs  villas  ou  sta- 
tions, dont  les  vestiges  existent  encore  :  témoignages 
irréfragables,  prouvant  aussi  l'origine  romaine  de  la  voie. 
Dans  plusieurs  endroits  de  son  parcours  général,  on 
retrouve  à  la  surface  du  sol  des  portions  de  chaussées 
entières,  faites  suivant  des  alignements  droits  et  des  ali- 
gnements courbes,  tracés  avec  art,  ce  qui  encore  une  fois 
fait  reconnaître  la  main  des  Romains. 

Cette  chaussée,  aux  endroits  les  mieux  conservés,  a  pour 
largeur  A  mètres,  et  se  compose  : 

De  deux  rangs  de  bordures  en  pierre,  un  de  chaque 
côté,  formant  l'encaissement  ; 

D'une  couche  inférieure  en  mâchefer,  servant  de  fonda- 
tions ; 

D'une  couche  supérieure  en  silex  de  calcaire  ou  de 
grès. 

A  son  point  de  départ  de  Saint-Marcel,  la  voie  n'offre 
aucune  trace  dans  le  vignoble  qui  s'étend  de  ce  bourg 
à  Chabenet.  Ce  n'est  qu'à  doux  kilomètres  avant  d'arriver 
à  Pout-Chrétien,  qu'on  commence  à  la  reconnaître  à  la 


XL"    SESSION,    A   CHATEAUROUX.  2SI 

présence  de  quelques  vestiges.  Elle  est  coupée  oblique- 
ment par  la  route  départementale  n'  3,  et  s'en  sépare  au 
point  3''  800  du  bornage,  pour  franchir  la  Bouzanne  au 
droit  de  la  chapelle  de  Pont-Chrétien. 

Ici  on  remarque  les  vestiges  du  pont  romain  ;  la  culée, 
sur  la  rive  droite  de  la  Bauzanne,  présente  encore  3  mètres 
de  hauteur. 

La  chapelle  est  placée  sur  la  voie,  qu'elle  occupe  tout 
entière. 

A  deux  cents  mètres  en  amont  de  l'emplacement  du 
pont,  au  sommet  du  coteau  à  droite  de  la  Bauzanne,  des 
vestiges  d'une  maison  romaine  ont  été  mis  à  découvert 
par  des  carriers  ;  au  milieu  des  décombres  on  a  trouvé 
des  pièces  de  monnaies  romaines,  un  poignard,  des  cen- 
dres, un  four  établi  à  côté,  et  des  tuiles  à  rebords. 

De  la  chapelle  de  Pont-Chrétien,  la  voie  monte  la  côte  à 
droite;  sa  trace  est  peu  visible,  mais  elle  devient  apparente 
au  milieu  des  vignes  et  de  quelques  parcelles  de  terre.  Ses 
bordures  en  pierre  ont  été  arrachées  en  partie  par  les  pro- 
priétaires pour  dresser  leurs  limites  voisines.  Traversant 
toujours  les  terres,  elle  passe  entre  les  Prins,  qu'elle  laisse 
à  droite  à  400  mètres,  et  la  Petite-Chaume  à  gauche 
à  150  mètres,  croise  le  chemin  de  la  Chaume  à  Chasse- 
neuil  et  laisse  les  Nadauds  à  gauche  à  i20  mètres.  Ici,  en 
arrivant  au  droit  des  Nadauds,  la  voie  a  3  mètres  de 
largeur  entre  bordures ,  est  coupée  par  le  chemin  de  Chas- 
seneuil  à  Saint-Gaultier;  elle  laisse  Chasseneuil  à  droite  à 
150  mètres.  Sa  trace  disparaît  en  descendant  dans  la  vallée 
du  Bauzanteuil.  On  la  retrouve  au  passage  de  ce  ruisseau 
à  100  mètres  de  distance  des  Prés,  qu'elle  laisse  à 
gauche.  De  ce  point  elle  se  développe  à  droite,  pour  con- 
tourner en  montant  un  vallon  étroit,  puis  traverse  un  bois 
et  une  pièce  de  terre,  dans  lesquels  elle  est  complètement 


282       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIUUE  DE  FRANCE. 

intacte  eu  face  de  Bois-Certat,  distant  de  400  mètres  à 
gauche. 

A  Bois-Certat,  la  voie,  faisant  un  coude  très-prononcé 
sur  la  gauche,  est  coupée  par  la  route  nationale  n°  151, 
au  point  -46''  5  du  bornage,  auprès  de  la  maison  de  la 
Pensée  à  droite,  et,  toujours  apparente,  elle  traverse  les 
brandes  des  Bois-Communaux  et  des  Moreaux,  en  laissant 
à  droite  Bellechasse  h  80  mètres,  et  le  gros  village  des 
Moreaux  à  250  mètres  ;  puis,  coupée  par  le  chemin 
vicinal  de  Nuret  à  Luans,  elle  traverse  les  brandes 
communales  de  Nuret,  où  elle  est  très-apparente,  lais- 
sant à  droite  la  Crofsée  à  500  mètres,  les  Blins  à 
600  mètres,  la  Soulatrie  à  300  mètres,  et  à  gauche  le 
Malebron  à  600  mètres. 

Au  droit  des  Blins  et  de  la  Soulatrie,  elle  incline  à 
droite,  et,  quittant  les  brandes,  elle  entre  dans  un  bouquet 
de  bois,  forme  une  grande  courbe  à  gauche  avant  d'en- 
trer dans  le  village  des  Mersans,  qu'elle  traverse. 

Aux  Mersans,  sur  une  grande  étendue  des  deux  côtés 
de  la  voie,  nous  avons  reconnu  des  vestiges  considérables 
de  constructions  romaines,  révélant  une  ville  moyenne. 
Qu'elle  était  cette  ville?  Son  nom  est-il  perdu  dans 
l'oubli?  Des  fouilles  soigneusement  faites  pourraient 
permettre  de  le  découvrir. 

Nous  avons  reconnu  aussi  aux  Mersans  que  la  voie 
forme  une  levée  d'une  longueur  de  50  mètres,  sur  une 
hauteur,  de  1"  35,  et  une  largeur,  bordures  comprises, 
de  T"»  70. 

Des  Mersans,  la  voie  suit  le  chemin  jusqu'aux  Bernards, 
passant  entre  Laforêt  et  la  Perchaudrie  à  gauche,  et 
Lamortenerie  à  droite. 

Aux  Bernards,  nous  avons  remarqué  aussi  des  vestiges 
de  maçonneries    romaines,    bien    moins    considérables 


XL«   SESSION,    A   GHATEAUROUX.  "0^3 

qu'aux  Mersans,  mais  assez  étendus  pour  permettre  de 
croire  qu'une  petite  ville,  sinon  une  villa,  existait  là. 

Des  Bernards,  la  voie  traverse  les  terres,  le  bois  Robert, 
croise  le  chemin  de  Chezal-CoUet,  qu'elle  laisse  à  gauche  à 
600  mètres,  franchit  le  ruisseau  et  le  pré  de  Chezeaubois, 
coupée  par  la  route  agricole  de  Neuillay  à  Luant,  à 
50  mètres  au  delà  de  la  borne  kilométrique  n°  22,  laissant 
Neuillay  à  gauche  à  2  kilomètres  ;  longe  le  pré  Gercay  à 
gauche  et  le  Bois-Cocu  à  droite,  suit  un  sentier  en  pas- 
sant devant  l'allée  de  Marchais  à  droite,  et  laissant  à 
gauche  le  Trait-de-Genièvre  à  500  mètres,  puis  croise  les 
chemins  de  Bois-Robert  à  Villedieu,  et  de  Chezal-Collet  à 
la  Tour. 

De  ce  point,  la  voie,  bien  reconnaissable,  suit  le  che- 
min de  Villedieu  jusqu'à  d  50  mètres  delà  ferme  de  la 
Tour  ;  laissant  la  Tour  à  droite,  elle  franchit  la  Glaise  à 
115  mètres  au-dessous  de  la  passerelle  en  bois  ;  laissant  à 
droite,  à  334  mètres,  le  vieux  castel  en  ruine  de  Rancay, 
établi  sur  la  rive  droite  de  la  Glaise,  elle  se  porte  sur  Mont- 
pensé  et  Mehun-sur-Indre,  où  se  termine  notre  recon- 
naissance. 


IV.  —  Voie  romaine  df  Arcjenton  à  Poitiers. 

Nous  avons  eu  occasion  de  relever  cette  voie  sur  l'éten- 
due de  Saint-Marcel  au  Blanc  ;  mais,  comme  M.  de  la 
Tremblais  en  a  fait  la  reconnaissance  à  partir  de  Saint- 
Gaultier  jusqu'à  la  limite  de  l'Indre  au  delà  d'Ingrandes, 
et  en  a  donné  une  description  parfaite  dans  le  compte 
rendu  des  travaux  de  la  Société  du  Berry  (41''  année), 
1864,  nous  nous  bornerons  à  décrire  la  lacune  qu'il  n'a 


284r  CONGRÈS   AlUlHÉOLOGlgUE   DE    KKAISGE. 

pas  étudiée  et  à  indiquer  quelques  points  principaux  vers 
le  Blanc. 

La  largeur  de  la  chaussée  est  de  4  mètres. 

Elle  se  compose  : 

De  deux  rangs  de  bordures  en  pierre  calcaire,  un  de 
chaque  côté,  formant  l'encaissement  ; 

D'une  couche  de  fondation  en  pierre  ou  en  mâchefer, 

Et  d'une  couche  de  quartz  de  mâchefer  et  de  calcaire. 

Cette  voie  de  communication,  à'Argentomagus  à  Limo- 
nuïTt,  devait  prendre  naissance  au  centre  d'Argentomagus, 
au  point  de  rencontre  de  celles  de  Lyon  et  de  Bourges, 
près  de  l'amphithéâtre.  On  la  trouve  d'abord  dans  les 
vignes  du  mas  des  Jauchères,  pour  se  tenir  ensuite  sur  la 
côte,  à  droite  de  la  Creuse. 

Coupée  par  le  chemin  de  fer  d'Orléans  à  Limoges,  elle 
traverse  les  vignes  de  Saint-Martin  et  de  Pont-Chrétien 
d'en  haut,  en  suivant  presque  parallèlement  le  chemin  de 
Cooives  et  du  Pont,  duquel  elle  n'est  séparée  à  gauche 
que  de  2  et  quelquefois  de  12  mètres. 

En  arrivant  au  Pont-Chrétien  d'en  haut,  qu'elle  laisse 
à  droite  à  loO  mètres,  la  voie  se  confond  avec  le  che- 
min sur  80  mètres  environ  de  longueur,  descend  dans 
la  vallée  de  la  Bouzanne,  eu  inclinant  à  droite,  pour 
franchir  celte  rivière  près  du  moulin  du  Cluzeau. 

Ici,  dans  un  champ  d'un  nommé  Dolidier,  Louis,  près 
de  la  voie,  en  déblayant  le  terrain,  on  a  trouvé,  en  1864, 
des  vestiges  de  construction  romaine,  probablement  d'une 
villa. 

Après  le  passage  de  la  Bouzanne,  la  voie  est  coupée  par 
la  route  n"  3,  et  monte  au  Cluzeau.  De  là,  inclinant  à 
gauche,  elle  se  dirige  vers  le  village  de  Neuville,  au  milieu 
duquel  elle  passe;  puis  elle  descend  dans  la  vallée  du 
Bauzanteuil,  traverse  ce  ruissaau  au  point  occupé  par  le 


XI/   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  285 

bâtiment  du  Petit-Moulin.  De  là,  et  après  avoir  été  coupée 
par  la  route  nationale  n°  151,  à  -41'' -480  du  bornage,  elle 
monte  la  côte  du  village  des  Pauduats,  qu'elle  laisse  à 
100  mètres  à  droite,  suit  un  chemin  creux,  est  coupée  de 
nouveau  par  la  route  départementale  n"  11  à  57^430  du 
bornage,  longe  à  droite  le  mur  du  cimetière  de  Saint- 
Gaultier,  pour  se  diriger  sur  les  Chézeaux,  laissant  la  ville 
de  Saint-Gaultier  à  gauche  à  300  mètres. 

Du  village  des  Chézeaux,  la  voie  se  porte  sur  le  domaine 
de  la  Chaussée,  oîi  elle  se  trouve  intacte  en  passant  à 
Terrière  et  laissant  à  gauche  le  camp  romain  établi  au 
sommet  du  Gourde,  duquel  nous  donnerons  plus  tard  une 
description. 

De  là  elle  parvient  à  la  Fosse  et  à  Pellebusan,  où 
M.  Périgny  père  m'a  montré  des  vestiges  de  construction 
romaine. 

De  Pellebusan,  la  voie  se  rend  au  village  de  Scoury, 
qu'elle  traverse,  arrive  à  Ciron,  devant  l'auberge,  passe  au 
village  de  Châtre,  à  la  Roche,  les  Poirières,  les  Levraults 
et  la  Villerie,  dernier  point  de  notre  reconnaissance. 


V.  —  Voie  romaine  d'Argenton  à  Bordeaux  par  Limoges. 

Cette  voie,  l'une  des  plus  belles,  partant  de  l'ancien 
Argentomagus,  était  la  grande  communication  avec  Bor- 
deaux par  Limoges. 

Aux  endroits  où  elle  est  assez  bien  conservée,  j'ai  re- 
connu que  la  chaussée  avait  pour  largeur  6  mètres; 

Qu'elle  se  compose  : 

I»e  deux  rangs  de  bordure  en  pierre,  un  sur  chaque  bord 
formant  l'encaissement  ; 


286       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

D'une  couche  de  fondation  faite  en  petits  moellons 
calcaires  et  en  mâchefer,  rangés  en  forme  d'un  pavage 
bombé,  et  quelquefois  d'une  simple  couche  en  pierre,  en 
mâchefer  et  en  silex. 

Son  épaisseur  totale,  y  compris  la  couche  de  fondationj 
est  deO^eO.' 

De  son  point  de  départ  du  faubourg  Saint-Étienne 
d'Argenton,  la  voie  franchissait  la  Creuse,  sur  un  pont, 
dont  on  remarque  des  vestiges  encore  debout  qui  per- 
mettent d'établir  les  dimensions  de  ce  monument. 

Sa  longueur  était  de  106"-40  entre  les  deux  culées  ;  il  se 
composait  de  cinq  piles,  entre  lesquelles  existaient  six 
débouchés  ou  ouvertures  de  11"90  de  largeur. 

Les  piles  avaient  7"°  d'épaisseur,  5"20  de  largeur,  et 
terminées  en  amont  par  un  avant-bec  de  ^"SO  ;  ce  qui 
donnait  une  longueur  totale  de  O^^oO.  Le  parement  était  en 
pierre  de  taille. 

La  culée  à  droite  est  à  2"  de  distance  au-dessous  du 
moulin  de  Saint-Étienne.  La  culée  à  gauche  sert  de  point 
d'appui  au  moulin  de  Naillac. 

Les  propriétaires  des  moulins  ont  en  partie  enlevé 
la  pierre  de  parement  pour  s'en  servir  dans  les  ma- 
çonneries  de  leurs   usines.   Ce  fait  est  très-regrettable. 

A  la  suite  du  pont,  et  sur  son  prolongement,  existe  la 
tranchée  profondément  pratiquée  dans  le  rocher,  sur  la 
rive  gauche  de  la  Creuse,  si  connue  dans  le  pays  sous  le 
nom  de  Chemin  de  César.  La  voie  gagne  les  hauteurs, 
passe  devant  Larey,  qu'elle  laisse  à  droite  à  200  mètres, 
et  Fontfurat  à  300  mètres. 

C'est  ici,  dans  un  petit  communal  de  Fontfurat,  que 
s'embranche  une  ligne  venant  dans  la  direction  de  l'an- 
cienne forteresse  ruinée  de  la  ville  haute.  Cette  ligne  ou 
annexe,  que  j'ai  eu  l'occasion  d'étudier,  servait  à  relier 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  287 

la  forteresse.  Puis  à  30  mètres  plus  loin,  se  trouve  aussi 
l'einljranchement  de  la  voie  d'Argcutoniagus  à  Gergovia 
par  Ahun,  se  dirigeant  à  gauche. 

De  ce  point  d'embranchement,  la  voie  de  Bordeaux  se 
développe  à  droite  par  une  courbe,  et  se  dirige  bien  con- 
servée à  travers  les  bois  des  Ghaillots,  en  franchissant  le 
ruisseau  de  Secot,  sur  le  Terrier-Joly,  qu'elle  laisse  à 
droite  à  150  mètres.  A  la  sortie  du  bois,  elle  suit  le  che- 
min vicinal  d'Argenton  à  Luzeret,  sur  1  kilomètre,  pour 
se  montrer  belle  et  intacte  en  droite  ligne  dans  les  terres 
de  M.  Delage,  Eugène,  sur  1,500  mètres  de  longueur, 
en  laissant  à  droite  le  domaine  de  la  Métairie-Neuve  à 
200  mètres.  Elle  passe  au  bord  de  l'étang  des  Tailles, 
courbe  à  droite,  se  montre  dans  un  pré  et  dans  un  bois  et 
traverse  la  Sosne  à  500  mètres  au-dessous  de  Montfréry. 
On  remarque  au  fond  de  l'eau  quelques  vestiges  de 
maçonneries,  probablement  du  pont.  Toujours  visible, 
elle  parvient  à  la  Puychallerie,  en  suivant  sur  plus  de 
1  kilomètre  le  chemin  des  Forges  à  la  Boudre,  laissant 
Forges  à  gauche  à  700  mètres,  et  en  traversant  des  terres 
et  des  bois. 

C'est  à  partir  de  la  Puychallerie  que  M.  Élie  de  Beau- 
fort  a  fait  un  relevé  de  la  voie,  qu'il  conduit  sur  une 
partie  du  territoire  de  la  Haute-Vienne,  et  que  M.  de  la 
Tramblais  décrit  dans  son  excellent  mémoire.  Mais  comme 
dans  ses  recherches  M.  de  Beaufort  a  laissé  des  lacunes, 
je  vais  continuer  de  donner  les  points  de  sa  direction. 

De  la  Puychallerie,  qu'elle  laisse  à  gauche  à  500  mètres 
et  la  Boudre  à  droite  à  600  mètres,  cette  belle  voie  con- 
serve sa  trace  dans  les  terres,  la  brande  et  le  chemin 
du  village  du  Colombier,  dont  elle  s'approche,  en  se 
courbant  dans  le  communal,  et  qu'elle  laisse  à  300  mètres 
à  gauche.  Puis,  se  portant  à  droite,  elle  suit  le  chemin 


288       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE, 

allant  aux  Plaix,  en  entrant  quelquefois  dans  les  terres  ; 
côtoie  la  côte  du  Plaix,  où  on  ne  la  reconnaît  plus  qu'à 
quelques  signes;  descend  dans  la  vallée  de  l'Abloux,  croise 
le  chemin  de  Sacierges  à  Lamotte  ;  laissant  Lamotte  à  riOO 
mètres,  elle  franchit  la  rivière  de  l'Abloux  sur  un  point 
où  l'on  distingue  au  fond  du  lit  un  massif  de  béton,  indi- 
quant l'emplacement  du  pont. 

L'Abloux  passé,  la  voie,  traversant  la  forêt  de  Saint-Be- 
noît, se  développe  en  sinuosités  pour  monter  la  côte,  lais- 
sant à  droite  la  loge  du  garde  forestier  à  500  mètres.  Ce 
mouvement  se  continue  dans  les  terres  au  delà  de  la 
forêt.  Dans  ce  parcours,  elle  est  parfaitement  conservée  ; 
puis,  coupée  par  la  route  départementale  n°  dO,  au  point 
47''  338  du  bornage,  elle  traverse  un  pacage,  croise  l'an- 
cien chemin  de  Saint-Benoît  au  Blanc,  près  duquel, 
dans  l'embranchement  d'un  chemin  creux,  on  remar- 
que une  couche  de  cailloux  quartzeux,  encastrés  dans 
le  mâchef(!r,  formant  la  couche  de  fondation.  De  ce 
point,  la  voie  disparaît  pour  reparaître  à  la  croisière  du 
chemin  de  la  Barre  aux  Rallauds  ;  elle  forme  un  lacet 
pour  franchir  le  ruisseau  de  Chénier,  croise,  en  montant 
sur  la  côte  opposée,  les  chemins  de  Chénier  aux  Rallauds 
et  de  Chénier  à  Chaillac,  laissant  à  gauche  les  villages  de 
la  Barre  et  de  Chénier;  arrive  au  sommet,  et  passe  entre 
les  ruines  de  deux  bâtiments  de  construction  romaine, 
distant  l'un  de  l'autre  de  94  mètres  :  celui  du  côté  gauche 
a  13  mètres  de  longueur  sur  iO  mètres  de  largeur,  l'épais- 
seur moyenne  des  murs  est  de  2  mètres;  celui  de  droite  a 
13  mètres  de  longueur  sur  12  mètres  de  largeur,  et  il  est 
placé  à  la  tête  d'un  camp  romain ,  probablement  pour 
servir  de  défense.  La  tuile  à  rebords,  le  ciment,  la  régula- 
rité des  assises  de  la  maçonnerie,  font  reconnaître  que  ce 
sont  des  ouvrages  romains. 


XL^  SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  289 

Le  camp  est  fortement  relranch6  ;  sa  forme  figure  un 
rectangle.  Placé  sur  le  bord  d'une  langue  de  terre  très- 
haute,  il  est  adossé  à  une  vallée  contournante.  Sa  lon- 
gueur est  de  420  mètres ,  sa  largeur  de  200  mèlres.  Ses 
talus  ont  pour  hauteur  moyenne,  prise  verticalement, 
/*«■  50. 

Du  camp  romain,  la  voie  descendait  au  ruisseau  de 
Portefeuille,  qu'elle  franchissait  sur  un  pont.  On  remarque 
encore  sur  la  rive  gauche  le  rocher  taillé  à  pic  qui  servait 
de  culée.  De  là  elle  monte  et  passe  au  milieu  du  village 
du  Gluzeau,  suit  le  chemin,  descend  et  arrive  toujours 
apparente  à  la  rivière  de  l'Anglin,  qu'elle  franchissait 
aussi  sur  un  pont  en  face  de  Ghaillac.  On  remarque  encore 
au  fond  de  la  rivière  de  la  maçonnerie  de  béton.  En  quit- 
tant l'Anglin,  elle  prend  à  revers  la  côte  de  Ghaillac, 
monte  et  parvient  sur  la  hauteur  au  pied  d'une  tour 
détruitejusqu'au  niveau  du  sol,  et  qu'on  pourrait  prendre 
pour  un  puits.  Son  diamètre  intérieur  est  de  2™90,  et  l'épais- 
seur du  mur  de  ceinture  90  centimètres.  Nous  n'avons  pu 
bien  reconnaître  si  cet  ouvrage  d'art  est  de  construction 
romaine.  De  ce  point,  la  voie  continue  sur  la  Bissonnière, 
passe  entre  Bois-Joly,  qu'elle  laisse  à  gauche  à  300  mètres, 
et  les  Gasses  à  droite,  traverse  un  petit  bois,  une  terre 
près  des  Landes,  qu'elle  laisse  à  droite  à  270  mètres; 
coupe  une  brande  dans  laquelle  elle  est  très-remarquable, 
suit  le  chemin  de  Jouac,  passe  auprès  des  Beaux  à  200 
mètres  à  sa  droite  ;  elle  quitte  le  département  de  l'Indre, 
pour  entrer  dans  celui  de  la  Haute-Vienne,  point  où  se 
borne  notre  étude. 


XL^  SESSION.  49 


290      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 


VI,  —  Voie  romaine  d'Argenton  à  Clermont. 


Cette  voie  était  la  grande  communication  d'Argento- 
magus  à  Gergovia  par  Breth  et  Ahun.  Elle  ne  figure  pas 
dans  les  Itinéraires  d'Antonin  ni  dans  les  Tables  Théodo- 
siennes.  Toutefois,  elle  devait  exister  au  temps  de  l'empe- 
reur Théodose- 
Ce  n'est  pas  sans  difficultés  que  je  suis  parvenu  à  la 
découvrir,  non  tout  entière,  mais  par  portions  de  voies, 
indiquant  suffisamment  sa  direction,  tant  les  terrains  ont 
été  bouleversés  à  la  surface. 

Au  domaine  des  Crasseaux,  où  elle  passe,  sa  chaussée  a 
une  largeur  de  3  mètres,  et  se  compose  : 

De  deux  rangs  de  bordures,  formant  l'encaissement  ; 

Et  d'une  couche  unique  de  mâchefer,  de  cailloux  et  de 
grès. 

Dès  sa  bifurcation  à  Fontfurat  dans  la  voie  de  Bordeaux, 
on  remarque  des  coupures  profondes  de  son  passage  dans 
la  roche.  La  voie  alors  se  dirige  sur  les  Crasseaux,  à  tra- 
vers une  brande  et  des  terres,  dans  lesquelles  elle  est  peu 
reconnaissable  ;  puis  passe  dans  la  cour  de  ce  domaine  et 
sous  la  maison  de  M.  Déribère-Maquet. 

En  cet  endroit,  il  y  a  vingt-cinq  ou  trente  ans,  lors  de 
l'exécution  de  quelques  travaux  dans  le  domaine,  on  mit 
à  découvert  de  la  maçonnerie  romaine  et  des  tuiles  à 
rebords.  Était-ce  le  lieu  d'une  villa  ? 

Des  Crasseaux,  elle  continue  dans  le  pré  et  dans  le  bois, 
croise  un  chemin,  et  entre  en  inclinant  à  droite  dans  des 
terres  labourées,  où  on  la  reconnaît  à  une  trentaine  de 
pierres  arrachées  par  le  soc  ;  puis,  inclinant  à  gauche,  elle 


XL"  SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  291 

traverse  l'ancien  chemin  de  Saint-Benoil  à  Argeulon, 
monte  le  plateau  du  Bord  au  milieu  d'une  brande,  dans 
laquelle  elle  se  perd,  puis  reparaît,  est  coupée  par  la  route 
départementale  n°  l  d'Argenton  à  Saint-Benoît,  au  point 
1''  620,  et  passe  à  41  mètres  du  Signal-du-Bord,  qu'elle 
laisse  à  droite. 

Du  Signal,  elle  descend  le  plateau  côte  du  raidi,  pour 
se  porter  sur  Celon.  Dans  ce  trajet,  on  ne  la  reconnaît 
qu'à  des  indices  ;  elle  suit  un  chemin  creux,  croise  aux 
Matherons  l'ancien  chemin  d'Argenton  à  Limoges,  croise 
aussi  l'ancienne  route  de  Paris  à  Toulouse,  incline  à 
droite  pour  descendre  la  côte  de  Celon,  au  milieu  d'une 
futaie.  Coupée  par  la  nouvelle  route  n°  20  de  Paris  à 
Toulouse,  elle  entre  dans  la  prairie  de  Celon,  où  elle  se 
montre  en  relief,  est  coupée  encore  une  fois  par  cette 
même  route  dans  ses  mouvements  tournants  au  pied  de 
la  côte  et  par  le  vieux  chemin  d'Argenton  à  Limoges,  au 
passage  de  la  rivière  de  Sosne,  elle  traverse  un  jardin 
et  passe  sous  la  maison  d'école  de  Celon,  laissant  à 
gauche  le  vieux  chemin  de  Limoges  et  la  route  de  Tou- 
louse. 

De  Celon,  la  voie  va  à  la  Villefranche-sur-l'Abloux. 
Dans  ce  parcours,  elle  traverse  les  jardins  et  les  terres  de 
Celon,  passe  au  milieu  des  bâtiments  du  domaine  des 
Dions,  puis  se  perd  dans  les  champs  cultivés.  On  la  recon- 
naît à  des  indices  au  carrefour  d'un  chemin  allant  à 
Vigoux.  Ici,  elle  entre  dans  un  pacage  à  d70  mètres  de  la 
route  de  Paris  à  Toulouse,  monte  au  Petit-Varenne,  se 
croise  avec  le  vieux  chemin  de  Limoges,  se  confond  dans 
la  route  de  Paris  à  Toulouse  jusqu'à  la  croix  de  la  Jette. 
Là,  elle  entre  dans  une  terre,  longe  la  route  et  la  coupe 
obliquement  au  point  78''  9  du  bornage,  pour  descendre  à 
la  Villefrauche.  N'étant  plus  recounaissable  dans  les  terres 


292       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

remuées,  et  disparaissant  sur  d'autres  points  sous  une 
couche  de  terre,  je  n'ai  pu  m'assurer  de  sa  trace  qu'en 
faisant  des  sondages  et  en  observant  des  parties  de  chemin 
où  Ton  reconnaît  la  croûte  siliceuse. 

A  la  Villefrauche,  la  voie  creuse  profondément  son  pas- 
sage dans  le  rocher  granitique.  Elle  franchissait  proba- 
blement sur  un  pont  la  rivière  de  l'Abloux,  à  cause  de 
son  encaissement  profond,  puis  contournait  la  côte  oppo- 
sée, passant  près  du  moulin  établi  sur  le  cours  d'eau  de 
l'Étang,  à  1  kilomètre  au  delà. 

De  ce  point  jusqu'au  village  du  Quéru,  commune  de 
Sarnac,  mes  recherches  ont  été  sans  profit  ;  je  n'ai  reconnu 
aucun  indice.  Ce  n'est  qu'au  Quéru  que  la  voie  se 
retrouve  ;  elle  traverse  ce  village ,  puis,  coupée  par  le 
chemin  vicinal  n°  20  d'Éguzon  à  Saint-Benoît,  elle  passe 
le  long  d'une  haie  qui  l'occupe  sur  60  mètres  de  longueur, 
et  continue  dans  une  terre  labourée  sous  laquelle  elle  dis- 
paraît bien  conservée,  ainsi  que  je  m'en  suis  assuré  par 
des  sondages. 

Ici  se  borne  notre  reconnaissance,  nos  instants  n'ayant 
pas  permis  de  pousser  plus  avant  ;  mais  la  voie  tend  vers 
Versillac,  pour  se  joindre  à  la  portion  étudiée  par  M.  Élie 
de  Beaufort,  de  Versillac  à  Breth. 

De  Breth,  la  voie  se  dirige  sur  le  Grand -Bourg, 
Ahun  et  Croq.  Cette  partie  de  la  ligne  a  été  étudiée 
par  MM.  le  curé  de  Bellegarde  et  Fesneau  de  la  Souter- 
raine. 

Une  autre  voie,  d'une  chaussée  de  3  mètres  de  largeur, 
que  M.  de  Beaufort  a  reconnue  partant  de  Breth  et  venant 
s'embrancher  à  Monime  dans  la  grande  voie  d'Argenton 
à  Bordeaux,  n'est  simplement  qu'une  annexe  pour  la 
communication  de  Breth  avec  Limoges.  Elle  n'en  desser- 
vait pas  moins  Limoges  et  Argenton  par  Breth.  Monime 


XL"   SESSION,    A    GHATEAUROUX.  293 

est  situé  dans  la  Hautc-Viciinc,  à  9  kilomètres  au  delà  de 
Chàtcau-Ponsat. 

Telles  sont,  Messieurs,  les  indications  que  j'ai  pu 
recueillir  sur  les  voies  romaines  dans  cette  partie  de  noire 
Bas-Bcrry. 

Prévenu  trop  tard  du  jour  de  la  session  du  Congrès 
archéologique,  j'ai  manqué  de  temps  pour  rédiger  ce  rap- 
port, (]ue  j'aurais  voulu  rendre  plus  correct. 

La  société  des  Antiquaires  du  Centre  offre  au  Congrès 
le  quatrième  volume  de  ses  publications. 
La  séance  est  levée  à  iO  heures. 


2==     SÉANCE     DU     12     JUIN     ISIS. 

PRÉSIDENCE     DE     M.    GATTOIS, 
Membre  du  conseil  administratif. 

Siègent  au  bureau  :  MM,  le  comte  du  Manoir,  Bouet, 
inspecteur  du  Calvados,  l'abbé  Voisin,  et  Hubert,  archi- 
viste. 

M.  l'abbé  Blanchet,  aumônier  du  lycée,  remplit  les 
fonctions  de  secrétaire. 

M.  l'abbé  Bordé  donne  lecture  du  procès-verbal  de  la 
séance  précédente.  M.  Hubert,  voulant  constater,  relative- 
ment aux  mardelles,  que  l'homme  peut  se  loger  dans  un 


294       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

espace  restreint,  n'a  pas  entendu  établir  d'analogie  entre 
les  mardelles  et  les  habitations  de  Colombie.  Les  mardelles 
pouvaient  contenir  plusieurs  huttes  ou  abris.  Cette  obser- 
vation faite,  le  procès-verbal  est  adopté. 

M.  Mauduit,  conseiller  d'arrondissement  de  la  Châtre 
et  membre  de  plusieurs  sociétés  savantes,  donne  lecture 
d'un  très-intéressant  travail  sur  l'invasion  romaine  dans 
les  Gaules,  de  l'établissement  du  camp  de  Vercingétorix 
dans  le  Berry,  au  lieu  occupé  par  la  ville  de  la  Châtre. 


De  l'invasion  romaine  et  de  l'établissement 
du  camp  de  Vercingétorix  dans  le  Berry, 
sur  la  colline  où  se  trouve  placée  la  ville 
de  la  Châtre. 

Lorsqu'en  nous  reportant  aux  premiers  documents  de 
l'histoire  de  notre  pays,  nous  nous  trouvons  obligés  de 
les  lire  écrits  par  la  main  de  l'homme  qui  en  fut  le  con- 
quérant, il  est  difficile  de  nous  défendre  d'un  sentiment 
pénible.  Mais  lorsque  ce  vainqueur  lui-même  rend  hom- 
mage au  courage  de  ses  adversaires,  à  leur  génie  et  à  la 
richesse  de  leur  sol,  il  est  difficile  aussi  de  révoquer  en 
doute  ses  assertions. 

Telle  est  la  part  que  fait  à  nos  ancêtres  du  Berry  Jules 
César,  dans  ses  Commentaires  :  «  C'est,  dit-il,  un  peuple 
très-industrieux  et  très-adroit  à  imiter  ce  qu'il  voit  faire  : 
ut  est  summx  genus  solertix,  atque  ad  omnia  imitanda  at- 
que  efficienda,  qux  aliquoque  traduntur  aptissimum,  et 
dont  la  ville  est  la  plus  belle  de  toutes  les  Gaules,  pulcher- 
rimam  totius  urbem  Galliae,  et  le  territoire  le  plus  fertile, 
in  pînguissimo  agro  Biturigum.  »  [De  Bello  Gallico, 
livre  VII,  chap.  22.) 


XL'   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  295 

Avec  une  telle  opinion  sur  les  ressources  et  la  valeur 
d'une  contrée  placée  au  milieu  des  provinces  qu'il  voulait 
envahir,  rien  de  surprenant  que  la  première  pensée  de 
César  ait  été  de  s'en  emparer,  et  de  s'y  établir  pour  en 
faire  le  centre  de  ses  opérations.  C'est  aussi  ce  qui  fut  très- 
bien  compris  par  les  peuplades  qu'il  se  proposait  de  réu- 
nir à  son  joug.  Dans  cette  conviction,  profitant  de  l'ab- 
sence du  général  qui  était  allé  à  Rome  pour  la  convoca- 
tion des  grandes  assemblées,  sachant  qu'il  existait  en 
Italie  de  sérieux  mécontentements  et  que  plusieurs  émeutes 
même  avaient  commencé  à  s'y  produire  au  sujet  de  la 
mort  de  Publius  Claudius,  les  Gaulois  s'assemblent  en 
très-grand  nombre  et,  déplorant  la  situation  faite  à  leur 
pays,  jurent  de  le  rendre  à  son  antique  liberté  ou  de 
mourir  les  armes  à  la  main. 

C'est  à  la  suite  de  l'une  de  ces  réunions,  tenues  dans 
une  épaisse  forêt,  que  les  habitants  de  Chartres  (Garnutes), 
ainsi  qu'ils  s'y  étaient  engagés,  donnant  les  premiers  le 
signal  de  la  révolte,  se  jettent  dans  Orléans  (Genabum),  y 
massacrent  les  citoyens  romains  qui  s'y  trouvent,  et  pillent 
leurs  biens. 

Bientôt  le  bruit  d'un  événement  aussi  considérable  se 
propage  dans  toutes  les  cités  de  la  Gaule  et  parvient  en 
moins  de  trois  heures  dans  la  capitale  de  l'Auvergne, 
bien  qu'elle  fût  à  une  distance  de  soixante-quinze  lieues  ; 
par  suite,  dit  César,  de  la  manière  singulière  dont  les 
Gaulois  avaient  l'habitude  de  publier  les  nouvelles  impor- 
tantes, en  les  transmettant  par  de  grands  cris,  à  travers 
les  villes  et  les  campagnes,  à  ceux  qui  les  entendaient  et 
les  répétaient  aux  plus  proches  (l).  Nam  ubi  major  atque 

(1)  Cette  sorte  de  télégraphie  orale,  employée  comme  moyeu 
de  communications  rapides,  resta  longtemps  en  usage  chez  nos 


"296       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

illustrior  incidit  res,  clamore  per  afjros  regionesque  signi- 
fie ant  ;  hune  alii  deinceps  excipiunt^  et  proximis  tradunt. 
{M.,  livre  VI,  chap.  3.) 

C'est  alors  que  surgit  le  jeune  et  puissant  An^erne 
Vercingétorix,  fils  de  Celtilius,  qui  exhorte  à  prendre  les 
armes  au  nom  de  la  liberté  commune,  rassemble  des 
troupes  dont  il  lui  est  donné  le  commandement,  exige  des 
otages  de  toutes  les  cités,  règle  ce  que  chacune  d'elles  doit 
fabriquer  d'armes,  et  porte  tous  ses  soins  à  former  de  suite 
une  nombreuse  cavalerie;  à  l'activité  la  plus  grande  joi- 
gnant la  plus  grande  sévérité  dans  la  discipline,  il  envoie 
une  partie  de  son  armée  chez  les  Rhutènes,  sous  les  ordres 
de  Luctère,  et  se  rend  lui-même  chez  les  Bituriges  :  Ipse 
in  Bituriges  proficiscitur  [Id.,  livre  VII,  chap.  5),  pour  y 
adjoindre  les  Pictons,  les  Cadurtres,  les  Turons,  les  Au- 
lertres  et  les  Lémovices. 

Informé  en  Italie  de  la  gravité  de  ce  qui  vient  de  se 
passer,  César  se  hâte  de  partir  pour  la  Gaule,  et,  préoccupé 
de  l'importance  de  l'établissement  militaire  que  venait  d'y 
former  Vercingétorix ,  au  centre  même  du  pays  qu'il  vou- 

ancètres  et  dégénéra  en  abus  sous  le  nom  de  huée,  qui  servait 
de  cri  de  ralliement  aux  ouvriers,  particulièrement  à  ceux  des 
vignobles  pour  quitter  leurs  travaux  à  des  heures  indues.  Il  ne 
fallut  rien  moins  qu'un  article  introduit  dans  les  nouvelles 
Coutumes  du  Jierry,  lors  de  leur  révision,  en  1839,  pour  en 
interdire  l'usage.  «  La  huée  est  défendue,  qui  est  un  cri  des 
<'  vignerons  pouradvertir  les  autres  de  l'heure  qu'il  faut  quitter 
t  hesongne,  comme  au  viP  livre  ûeBello  Gallico.  »  (Jean  Mau- 
duit,  Commentaires  des  Coutumes  du  Berry,  livre  xv, 
p.  <oO.)  Toutefois  celte  interdiction  ne  s'ohtint  pas  sans  troubles 
sérieux,  qui  se  produisirent  sur  plusieurs  points  du  départe- 
ment, notamment  à  Saint-Marcel,  ou  il  existait,  comme  aujour- 
d'hui, beaucoup  de  vignobles. 


XL"  SESSION,    A    CHATEAUROUX.  297 

lait  subjuguer,  se  propose,  à  quelque  prix  que  ce  soit,  d'en 
arrêter  la  continuation.  Habitué  à  calculer  autant  sur  les 
faiblesses  humaines  que  sur  la  force  de  ses  armes,  l'habile 
général,  estimant  qu'avant  d'être  le  chef  des  Gaulois, 
Vercingétorix  était  surtout  le  fils  de  l'Auvergne,  se  décide 
à  se  porter  subitement  sur  la  patrie  de  son  adversaire. 
Franchissant  alors  les  Cévennes,  malgré  l'obstacle  de  six 
pieds  de  neige,  il  tombe  à  l'improviste  sur  les  Arvernes, 
en  ayant  soin  d'augmenter  leur  surprise  et  leur  effroi  par 
les  excursions  de  sa  cavalerie,  qu'il  fait  étendre  le  plus 
loin  possible.  Cette  manœuvre  opérée  et  ces  précautions 
prises,  espérant  que  Vercingétorix,  rappelé  par  les  siens, 
ne  manquera  pas  d'accourir,  il  r[uitte  l'Auvergne,  sous 
prétexte  d'aller  chercher  des  renforts  et  de  la  cavalerie,  et, 
après  avoir  remis  le  commandement  des  troupes  à 
un  jeune  lieutenant  du  nom  de  Brutus,  se  rend  en 
toute  diligence  à  Vienne,  pour  y  continuer  ses  opéra- 
tions. 

Ce  qu'avait  prévu  César  arriva.  En  vain  le  chef  gaulois 
fut  sollicité  par  ses  alliés  de  rester  à  son  poste,  d'y  main- 
tenir sa  position  ;  entouré  par  les  Arvernes,  qui  lui  font 
observer  que  la  guerre  étant  maintenant  transportée  dans 
leur  patrie,  il  doit  pouvoir  à  son  salut,  et  ne  pas  la  laisser 
tomber  au  pouvoir  de  l'ennemi,  Vercingétorix  accède  à 
leurs  prières,  lève  le  camp  qu'il  vient  d'établir  chez  les 
Bituriges  et  retourne  en  Auvergne.  Quorum  ille  preci- 
bus  permotus,  castra  ex  Bituricjibus  movet  in  Arvernos 
veî'sus. 

Lors  de  ce  départ,  qui  fut  le  prélude  de  cette  lutte 
suprême,  qui,  par  l'une  de  ces  représailles  et  de  ces  fata- 
lités si  fréquentes  dans  les  jeux  de  la  fortune,  ne  devait 
aboutir  qu'à  une  sanglante  défaite  et  transformer  en  une 
province  romaine  la  nation  qui,   quatre  siècles  aupara- 


298       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

vaut,  conduite  par  Brennus,  s'emparait  pour  la  deuxième 
ibis  de  Rome,  sous  Camille,  et  faisait  trembler  son  fier 
Capitole,  où  ^  trouvait  le  camp  délaissé?  Quelle  avait  été 
la  partie  du  Berry  que  le  chef  gaulois  avait  jugé  la  plus 
convenable  pour  lui  servir  de  lieu  de  défense  et  d'appro- 
visionnements pour  son  armée,  en  lui  permettant  à  la  fois 
de  se  porter  au-devant  de  César,  sans  cesser  de  couvrir 
Clermont,  sa  patrie  ;  double  mission  qui  parait  avoir  été 
la  sienne  ? 

Doit-on  le  rechercher  dans  les  plaines  marécageuses  du 
Cher,  ou  sur  les  plateaux  arides  de  l'Indre,  ou  bien  encore 
du  côté  appelé  le  Bois-Chaud,  sorte  de  Vendée  qui,  cou- 
verte de  bois  et  formée  de  collines  entrecoupées  de  rivières 
et  de  ruisseaux,  présente,  par  elle-même,  sur  un  sol  des 
plus  fertiles,  des  moyens  de  défense  tels  que,  de  l'aveu 
d'Hirtius,  le  continuateur  des  Commentaires  de  César,  elle 
ne  fut  pacifiée  que  longtemps  après  la  prise  de  Bourges, 
et  des  révoltes  successives  qui,  pour  les  éteindre  et  les  sur- 
veiller, nécessitèrent  probablement  l'édilication  des  nom- 
breuses forteresses  gallo-romaines,  que  nous  y  retrouvons 
encore  aujourd'hui,  et  parmi  elles  surtout,  celle  qui  exis- 
tait à  Argenton,  ville  d'où  rayonnaient  toutes  les  voies 
romaines  qui  furent  établies  (1). 

(1)  Il  n'est  pas  indifférent  peut-être  de  donntT  ici  la  descrip- 
lioi)  de  cette  forteresse,  telle  (pie  nous  l'a  dépeinle,  en  1549, 
l'historien  Chauraéom  :  «  La  ville  d'Argenton,  dit-il,  est  assise 
en  Berry,  sur  les  coiifins  et  liniiles  faisant  séparation  dudit 
pays  et  duché  de  Guyenne,  en  lieu  de  malaisée  habitation  pour 
l'assiette  et  situation  d'icelle,  qui  est  sus  le  costé  et  pendant 
d'un  roc  et  droite  montaigne  :  au  fais  et  sommité  de  lacpielle 
est  construict  et  édifié  un  fort  et  ancien  château  cloz  et  cou- 
ronne de  hautes  murailles  hors  d'échelles;  sept  grosses  tours  et 


XL"    SESSION,   A    CHATEAUROUX.  290 

Tout  nous  porte  à  croire  que,  par  cette  situation  et  les 
motifs  que  nous  allons  énumérer,  c'est  bien  en  cflet  cette 
partie  du  Berry  qui  fixa  le  choix  du  chef  de  la  Gaule,  et 
que  la  colline  où  se  trouve  construite  la  ville  de  la  Châtre 
a  dû  être  l'emplacement  de  son  camp. 

trois  petites,  l'une  desquelles,  qui  est  la  plus  grosse  de  toutes, 
est  appelée  la  tour  d'Eracle  :  ayant  son  regard  sur  le  pays,  en 
la(}uelle  est  figurée  et  enicuée  la  stalue  et  efligie  d'un  taureau, 
fort  antique,  alentour  duquel  est  écrit  :  Feni  et  vici;  l'autre  est 
près  et  joignant  ycelle  en  laquelle  y  a  un  puits  profond  à  mer- 
veille, appelé  le  puits  du  Donjon.  Au  milieu  de  la  profondeur 
de  ce  puits,  y  a  un  roc  sur  lequel  on  peut  marcher  cinq  ou  six 
pas,  au  bout  desquels  il  y  a  une  porte  taillée,  fermée  d'un  grand 
quartier  de  tadle,  par  laquelle  on  va  assez  loin  desdites  deux 
tours.  La  tierce  est  plus  hante  que  les  autres;  on  l'appelle  la 
tour  des  Prisons.  Elle  est  faite  à  vive  arête  et  couverte.  Du  côté 
regardant  le  pays  de  Guyanne  il  y  a  trois  autres  grosses  tours, 
dont  l'une  est  assise  sur  le  fait  du  roc,  appelée  la  tour  du  Guest  : 
les  deux  autres  sont  plus  basses,  construites  d'une  même  hau- 
teur que  les  autres,  esquelles  il  y  a  citernes  bien  cymentées  et 
de  forte  conîposition,oii  l'on  fait  réserve  d'eau. 

«  Entre  l'une  desdites  tours  et  celle  où  est  le  puits  Donjon,  il 
y  a  une  autre  belle  tuur  couverte  et  bien  percée,  faite  de  car- 
thellages,  ayant  son  regard  vers  l'occident.  Les  aulres  trois 
petites  ne  sont  de  telle  importance  qu'elles  ne  méritent  être 
décrites. 

«  Anciennement,  et  même  au  temps  de  Jules  César,  la  ville 
d'Argenton  était  où  à  présent  sont  certains  grands  mas  de  vignes 
appelez  le  Palays,  les  murs  saintz  et  le  virdz,  distants  de  la 
ville  d'Argenton  (qui  est  à  présent)  de  deux  traictz  d'arc  ou 
environ,  en  était  de  grande  étendue  et  circuit,  comme  on  peut 
voir  encore  aujourd'hui  par  le  pied  et  fondement  d'icelle  et  des 
grosses  tours  ;  triples  murailles  et  autres  forteresses  à  présent 
ruinées.  Dans  iceux  mas  on   trouve  encore  belles  et  grandes 


300       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Et  d'abord,  à  cette  époque  reculée  qui  se  présente  à 
nous  dans  un  long  passé  de  dix-huit  siècles,  qu'était  et 
que  pouvait  être  la  Châtre  ?  Était-elle  oppidum,  civitas, 
urbs  ou  /ja^i.ç  ?  Quoique  placée  dans  la  contrée  peuplée 
qui  avait  fourni  les  émigrations  de  Bellovèse  et  de  Sigo- 
vèse,  n'étail-clle,  au  milieu  des  vastes  forêts  qui  l'avoisi- 
naient,  et  dont  l'une,  suivant  les  légendes,  contenait  un 
temple  à  Diane  à  Vaucouans  [Vallès  Dianx],  ne  présen- 
tait-elle qu'un  terrain  vague  et  sans  habitations  ?  Nous 

caves  et  fondements  de  maisons  et  autres  bâtiments  anciens  faits 
de  si  bonne  matière  et  composition  qu'il  est  bien  difficile  à  les 
démolir  et  arracher.  On  y  voit  encore  les  ruines  de  plusieurs 
fontaines  artificielles  belles  et  somptueuses,  dont  les  canaux  et 
conduits  sont  de  marbre;  même  il  y  a  des  estuves  faites  d'albâtre, 
avec  grands  piliers  faits  en  forme  de  colonnes  et  plusieurs  effi- 
gies et  statues  de  lyons,  bien  et  excellemment  taillez  après  le 
naturel,  dont  aucuns  tiennent  entre  leurs  griffes  des  têtes  de 
moutons.  En  un  autre  mas  de  vigne,  nommé  le  clos  de  Saint- 
Anastaise,  près  et  casi  joignant  le  circuit  des  murs  ruinés  de 
l'ancienne  ville,  se  sont  trouvés  depuis  deux  ans  en  çà  deux 
monuments  fort  grands  et  magnifiques,  l'un  d'iceux  d'homme  et 
l'autre  de  femme,  et  n'est  année  que  esditz  mas  de  vignes  et 
autres  circonvoisins  ne  se  trouvent  quelques  pièces  et  médailles 
d'or  ou  d'argent,  et  signamment  de  cuivre  et  autres  métaux, 
dont  les  unes  sont  du  temps  des  consuls  et  dictateurs  de  Rome, 
en  la  circonférence  desipielles  on  voit  encore  en  écrit  ces  mots  : 
VRBS  Roma,  cn.  lentvlvs;  ni.  yoLTERivs;L.  hostilivs;  m. 
CATo  ;  PROc.  p.  c.  Les  autres  sont  du  temps  des  empereurs, 
alentour  desquelles  on  peut  encore  lire  :  ivl.  csar.  c.  l  a  v. 

NERO     VIVIT    AVGVSTVS.     DO.MITIANVS    IMP.     GRM.     DIVO    TRAIANO 
ANTHONI  NVS,  PHILLIPVS  AVGVSTVS.  CONCORDIAR. 

«  Es  unes  sont  les  effigies  des  consuls,  es  autres  celles  des 
empereurs,  et  es  autres  la  figure  d'un  taureau,  telle  ([u'on  la  voit 
en  la  tour  d'Eracle,  dont  nous  avons  ci-devant  parlé.  » 


XL*  SESSION,    A   CHATEAUROUX.  301 

inclinons  pour  la  doniière  iiypotlièse,  d'accord  en  cela 
avec  de  très-anciens  auteurs,  qui  nous  apprennent  que, 
profitant  du  délaissement  de  ce  lieu  fortifié,  des  bandes 
armées  s'y  établirent  et  fondèrent  un  petit  bourg-  qui 
pendant  longtemps  devint  un  lieu  de  déprédation  et 
d'effroi  :  «  Entre  les  villes  de  Saint-Chartier  et  de  Sainte- 
Sévère,  il  existe  un  petit  bourg  nommé  la  Châtre,  repaire 
de  voleurs  [spelunca  latronum).  »  Ce  qui  est  certain,  ce 
que  nous  pouvons  affirmer,  c'est  que  le  lieu  où  se  trouve 
assise  cette  localité  est  une  colline  facile  à  défendre,  qu'en- 
tourent deux  rivières  et  que  contourne,  en  la  dominant 
comme  une  muraille  naturelle,  une  enceinte  de  coteaux 
plus  élevés  qu'elle,  qui,  par  les  limites  de  la  rivière  de  la 
Couarde  et  celles  de  Tlndre,  dont  la  jonction  peut  et  a  pu 
être  faite  dans  la  petite  vallée  dite  du  Portail  à  la  Freme- 
lenne,  en  font,  sous  forme  ovoïde,  un  bassin  de  retran- 
chements de  450  hectares  et  propre  à  contenir  une  nom- 
breuse armée.  Ce  que  nous  pouvons  affirmer,  c'est  que 
cette  position  avantageuse,  et  présentant,  par  la  richesse 
du  sol  environnant,  toutes  les  ressources  nécessaires  pour 
la  nourriture  des  hommes  et  des  chevaux,  se  trouvait  à  la 
frontière  du  Berry,  traversée  par  l'ancien  itinéraire  de 
Tours  à  Clerraont  et  celui  d'Argenton  à  Chàteaumeillant. 
Toutes  ces  considérations,  comme  nous  l'avons  dit,  nous 
autorisent  à  penser  qu'elles  ne  furent  pas  sans  influence 
sur  la  décision  de  Vercingétorix,  qu'elles  étaient  même 
suffisantes  pour  le  déterminer,  dans  l'état  naturel  des 
choses  et  en  admettant  qu'il  eût  toute  liberté  dans  le 
choix.  Mais  ce  libre  choix  était-il  lui-même  en  son  pou- 
voir? Bien  loin  de  là,  car,  ainsi  que  le  lieutenant  Luctère, 
qu'il  avait  envoyé  pour  accroître  son  armée  des  peuples 
du  Gévandan,  du  Languedoc,  de  Toulouse  et  de  Narbonne, 
avait  dû  précédemment  s'arrêter  aux  limites  du  voisinage 


302       CONGRÈS  ARCnÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

des  troupes  romaines,  par  la  même  nécessité,  Vercingé- 
torix,  qui,  de  la  gauche  de  la  Châtre,  s'unissait  et  donnait 
la  main  aux  peuples  amis  des  Turons,  des  Piétons  et  des 
Lémovices,  ne  pouvait  pencher  plus  avant  sur  la  droite  de 
cette  localité,  puisqu'il  rencontrait  d'abord  à  peu  de  dis- 
tance le  peuple  hostile  des  Boiens,  dont  il  fut  peu  de  jours 
après  obligé  d'assiéger  la  capitale,  et  ensuite  les  Éduens, 
clients  et  amis  de  César,  qui,  transformant  leur  fleuve  en 
une  sorte  de  chemin  de  fer,  l'employaient  journellement 
aux  transports  de  son  matériel  et  de  son  approvision- 
nement. 

Ainsi  la  situation  des  lieux,  les  circonstances  des  faits, 
obligeaient  logiquement  Vercingétorix  à  prendre  position 
à  l'entrée  du  Berry,  ou  près  du  lieu  où  se  trouve  aujour- 
d'hui la  Châtre,  et  à  s'y  établir  militairement. 

Voyons  si,  à  ces  considérations  morales,  nous  pouvons 
ajouter  des  considérations  d'un  autre  ordre,  en  justifiant 
notre  opinion  par  les  dénominations,  les  légendes,  les 
traditions  et  les  monuments  qui  peuvent  exister. 

Les  dénominations.  —  De  ce  côté  nous  ne  serons  pas 
pris  au  dépourvu,  et  les  noms  de  Vieille- Ville,  de  la 
Croix-More,  des  Mortaix,  de  Vauvet  et  du  Terrier-Mou- 
ron, où  des  fragments  d'armes  gauloises  ont  été  trouvés 
il  y  a  peu  d'années,  sont  autant  d'alliés  dont  nous  pour- 
rions invoquer  le  secours  pour  étayer  notre  édifice.  Toute- 
fois, nous  ne  le  ferons  pas,  en  raison  des  faits  postérieurs 
peut-être  auxquels  ils  pourraient  s'être  appliqués.  Nous 
nous  contenterons  du  nom  même  de  la  Châtre,  le  castra 
dont  les  armes  et  l'écusson  aux  tentes  gauloises,  soutenu 
par  deux  guerriers,  nous  paraît  présenter  une  éloquente 
signification  :  nous  y  joindrons  celle  que  donnent  les 
noms  d'Urmont  et  les  citadelles  qui  dominaient  la  Châtre, 


XL«   SESSION,    A   CTIATEAUROUX.  303 

et  qui,  avec  le  fort  ruiné  du  Magny  et  celui  de  l?riantes, 
dont  les  vestiges  arrêtaient  encore  les  Anglais,  en  i360, 
nous  apparaissent  sur  le  sommet  des  plateaux  où  elles  se 
trouvaient,  comme  ayant  constitué,  sous  forme  quadran- 
gulaire,  autant  de  postes  avancés,  en  dehors  des  lignes  de 
retranchements  établies  par  les  deux  rivières. 

Les  monuments.  —  Sans  parler  d'un  tumulus  près  le 
Magny,  et  des  constructions  souterraines  qui  sillonnent  la 
Châtre,  n'est-ce  pas  un  monument  pour  nous,  cette  appa- 
rition d'un  petit  bourg  guerroyeur,  qui  surgit  à  l'abri  du 
vieux    fort  abandonné  sur  le   rocher,   au  pied    duquel, 
suivant  les  légendes,  se  trouvait  un  temple  à  Gérés,  non 
loin  de  la  magnifique  fontaine  que  nous  avons  vue  détruire 
il  y  a  peu  d'années  ?  N'est-ce  pas  un  monument  pour 
nous,  la  transformation  graduelle  de  ce  petit  bourg  en 
une  petite  cité  que  Louis  Vil,  dans  sa  vengeance  contre 
Ebber  II  de  Déols,  fit  incendier  en  4132,  et  qui  n'avait 
guère  alors  que  dix  hectares  d'étendue,  compris  dans 
l'espace  donné  par  les  rues  Saint-Roch,  Basse-du-Mouhet 
et  Tourtellat  ?  N'est-ce  pas  un  monument  pour  nous,  cette 
nouvelle  extension  que  fit  reculer  la  petite  cité,  en  encla- 
vant dans  ses  murs  la  grande  place  du  marché,  la  place 
et  la  chapelle  Saint-Jean,  le  couvent  des  Carmes,  ce  qui, 
au  dire  de  notre  plus  ancien  historien,  la  rendait  une 
ville  «  bien  close,  environnée  de  fortes  et  puissantes 
«  murailles,  tours  et  fossez  faicts  en  dos  d'asne,  et  troys 
«  beaux  portaux?»  N'est-ce  pas  un  monument  pour  nous, 
cette  situation  d'une  ville  aujourd'hui   de  35  hectares 
d'étendue,  et  qui,  contrairement  à  celles  d'Issoudun,  de 
Châteauroux,  d'Argenton  et  même  de  Saint-Chartier  et  de 
Sainte-Sévère,  dont  les  noms  actuels  ont  été  ^idemment 
substitués  à  des  noms  païens,  se  présente  sans  histoire, 


304       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

sans  raison  d'être  et  sans  autre  origine  que  celle  qui 
paraît  avoir  été  produite  par  un  accident,  dont  son  nom 
même  perpétue  le  souvenir. 

Ainsi  le  récit  de  César,  les  légendes,  les  traditions  et  les 
auteurs  anciens,  l'aspect  des  lieux  et  celui  des  monuments 
qui  s'y  rattachent,  t'ont  que  si,  à  une  époque  aussi  reculée, 
toute  affirmation,  comme  on  l'a  vu  dernièrement  dans 
les  recherches  de  la  situation  d'Alésia,  devient  une  témé- 
rité, on  peut  dire  que  les  présomptions  les  mieux  fondées, 
autorisent  à  lier  l'origine  de  la  Châtre  à  cette  époque 
glorieuse,  où  nos  ancêtres  en  armes  établirent  leur  pre- 
mier camp,  pour  la  défense  de  leur  territoire  et  la  conser- 
vation de  leur  indépendance. 

M.  Guillard  dépose  sur  le  bureau  un  travail  graphique, 
concernant  les  voies  romaines  situées  dans  l'arrondisse- 
ment d'Issoudun.  Ce  tracé  géométrique,  exécuté  d'une 
manière  remarquable,  nécessite  des  explications  qui  sont 
données  de  vive  voix  par  M.  Guillard. 


Des  voies  romaines  situées  sur  l'arrondis- 
sement d'Issoudun  (Indre). 

Nous  ne  reviendrons  pas  sur  les  circonstances  qui  nous 
ont  conduit  à  étudier  ces  anciennes  voies  de  communica- 
tion. Nous  exposerons  sans  aucun  préambule  l'état  dans 
lequel  était  la  question  quand  nous  nous  en  sommes 
occupé  :  les  conclusions  de  notre  rapport  indiquent  celui 
dans  lequel  elle  se  trouve  actuellement  et  les  conséquences 
qui  peuvent  en  découler.  Nous  commencerons  par  la 
partie  nord  de  l'arrondissement,  par  les  grands  chemins 


5 
^ 


•^,'    „B      LOIIi    ET-CHEfl 


'  Marciulle 


MardrJlo) 

AUUt  œuu^. , 

fKnT^    doi   /rw    t.i-UJiJaiiUi 

ÇaTRÎim.mes 

Nola  _  En.  ce  t/Ui 


/<(/  /ioaiUon, 


h'<JuLlt  (/«   /J.  400000  (O^OOl  f^oiu'-éOO"- 


XL*   SESSION,    A    niIATEAUROUX.  nOa 

qui  se  croisaitnit  ù  Clialiris,  sur  la  rivo  gaucho  (\[i  C.\\cv. 

D'yXnville  et  Gaylus,  au  siècle  dernier  ;  M.  de  la  Ville- 
gille,  dans  les  Esquisses  pittoresques  du  département  de 
l'Indre  (environs  de  Valençay)  ;  M.  Raynal,  dans  son 
Histoire  du  Berry  ;  et  M.  de  la  Saussaye,  dans  les  Anti- 
quités de  la  Sologne  blésoise,  ouvrages  publiés  il  y  a 
trente  ans  environ,  ont  indiqué  la  direction  probable  des 
voies  de  Tours  (Cœsarodunum)  à  Bourges  (Avaricum)  ou  à 
Autun  (Augustodunum),  et  d'Orléans  (Genabum)  à  Poi- 
tiers (Limonum),  par  Chabris  (Gabris?  ).  Ces  renseigne- 
ments, quoique  très-vagues  et  erronés  sur  plusieurs  points, 
ont  été  pour  nous  de  précieux  guides. 

Dans  notre  extrême  jeunesse,  il  y  a  bien  quarante  ans, 
un  de  nos  parents  nous  a  entretenu  d'une  ancienne  route 
qui  allait  d'Argenton  (Argentomagus)  à  Orléans,  en  pas- 
sant par  Luant,  près  de8urins,  oîi  il  nous  en  a  montré  les 
traces,  parLevroux,etc.  En  1856,  une  inondation  emporta 
le  pont  de  Bios,  construit  sur  le  ruisseau  de  ce  nom,  com- 
mune de  Sainte-Cécile,  entre  Levroux  et  Cbabris;  une 
médaille  d'Auguste  fut  trouvée  parmi  d'anciens  pilotis, 
près  desquels  ce  pont  était  élevé,  au  fond  d'une  fouille 
profonde  creusée  par  les  eaux.  Cette  circonstance  nous 
remit  en  mémoire  les  précédents  et  en  fut  pour  nous  la 
confirmation.  La  voie  de  Levroux  se  trouvait  en  quelque 
sorte  jalonnée  jusqu'au  Cher. 

Pendant  l'hiver  de  1843-44,  lors  de  la  construction  du 
chemin  de  grande  communication  n°  23,  nous  coupâmes, 
près  de  Levroux  (Gabatum),  ville  importante  à  l'époque 
gallo-romaine,  la  partie  inférieure  d'une  autre  ligne  qui 
paraissait  se  diriger  vers  l'est  ;  l'automne  suivant,  la  base 
de  la  chaussée  [stratumen]  en  fut  mise  à  nu,  à  5kilom.50 
plus  loin,  au  lieu  dit  la  Croix  des  Bunes,  commune  de 
Brion  ;  en   4855,  dix  ans  après,   nous  reconnûmes  la 

XL^  SESSION.  20 


30G       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

rnèinf!  voie,  près  du  doinaiiic  do,  Borderousse,  commune 
de  Lizeray,  à  9  kilomètres  environ  d'Issoudun.  Ces  traces 
nous  démontrèrent  qu'un  grand  chemin  reliait  autrefois 
cette  dernière  localité  à  la  première.  Enfin,  en  1857,  dans 
une  excursion  à  Saint-Ambroix  (Cher),  près  de  l'empla- 
cement de  l'ancienne  cité  A'Ernodurum,  quelques  indices 
nous  firent  supposer  que  la  voie  de  Levroux  à  Issoudun 
devait  se  prolonger  jusque-là  et  y  rejoindre  la  chaussée 
dite  de  César,  route  de  Bourges  à  Poitiers. 

Voilà  les  renseignements  que  nous  possédions  quand 
nous  entreprimes  nos  recherches. 

Nous  ne  discuterons  pas  les  opinions  émises  dans  les 
ouvrages  que  nous  avons  indiqués  :  la  rectification  des 
tracés  existants  résultera  de  notre  exposé.  Nous  ferons 
remarquer  que  toutes  ces  voies  ont  été  relevées  sur 
des  copies  des  plans  cadastraux  ramenés  à  l'échelle  de 
4/20,000' (0,001  pour  20""),  et  les  coupes  transversales  à 
celle  1/50"  (0,001  pour  0,0-2).  Il  est  peut-être  regrettable 
que  ces  documents  ne  puissent  être  reproduits  ainsi  par 
l'impression,  tels  du  reste  que  nous  les  avons  transmis 
successivement  à  la  Commission  de  la  carte  des  Gaules  ; 
nous  serions  dispensé  d'en  donner  des  descriptions  sèches 
et  arides,  qui  ne  peuvent  en  laisser  dans  l'esprit  qu'une 
idée  très-imparfaite.  La  carte  jointe  à  ce  rapport  est  à  une 
échelle  troi)  petite  (0,001  pour  200),  pour  y  suppléer 
suffisamment. 


Ligne  de  Tours  à  Bourges. 

La  voie,  que  le  temps  ne  nniis  a  pas  permis  d'étudier 
au  delà  (lu  lionri:  de  Clialiris.  l'ii  descendant  le  Cher,  part, 


XL*   SESSION,   A    r.IIATEAUnOU.V.  .'{07 

vers  Tost,  (les  (lernières  maisons  (]o,  ccllf)  Idcalilr.  au  iinnl 
du  chemin  d'iutércL  commun  n"  31.  lille  traverse  le  coteau 
de  Chabris,  où  de  nombreux  débris  de  tuiles  romaines  se 
remarquent  encore.  Dans  une  des  fouilles,  nous  avons 
trouvé  un  gros  mur  en  pierres  sèches  de  3  mètres  de 
largeur  en  moyenne,  que  nous  mimes  à  découvert  sur 
30  mètres  de  longueur.  Il  s'arrêtait  à  un  mur  d'une 
épaisseur  ordinaire,  qui  le  coupait  à  angle  droit;  à  l'autre 
bout,  il  était  éboulé  et  devait  se  continuer  plus  loin,  à 
l'origine.  A  quelques  décimètres  de  la  surface,  le  sol  est 
presque  formé  de  tessons  de  poteries  et  de  verreries,  ainsi 
que  d'objets  brisés  de  toute  espèce.  La  première  et  la 
deuxième  sonde  ont  mis  à  nu,  à  0"  25  et  à  0™  40  au-des- 
sous du  niveau  du  terrain,  le  stratumen  ou  la  couche  infé- 
rieure de  la  chaussée.  Elle  est  formée  de  deux  lits  super- 
posés de  grès  vert,  d'une  épaisseur  ensemble  de  0"  45  à 
0""  20,  sur  une  largeur  de  3  mètres,  sans  pierres  de 
bordures,  c'est-à-dire  sans  pierres  placées  de  champ  qui, 
en  plusieurs  endroits,  limitent  la  partie  empierrée.  Le 
stratumen,  à  la  troisième  coupe,  est  à  1  mètre  au-dessous 
du  sol;  la  composition  en  est  la  même  qu'aux  sondes 
précédentes,  mais  l'épaisseur  en  est  de  O"*  25.  Au-dessus 
des  deux  lits  de  moellons,  il  existe  une  couche  de  cailloux 
roulés  ordinaires  de  0""  25  également  d'épaisseur,  de  la 
grosseur  moyenne  d'un  œuf  ;  elle  forme  le  rudus  ou 
seconde  partie  théorique  du  massif.  50  centimètres  de  terre 
végétale  recouvrent  le  tout. 

Le  chemin  d'intérêt  commun  n°  31  en  est  côtoyé  jus- 
qu'au chemin  dit  des  Bizeaux.  La  quatrième  tranchée, 
ouverte  à  1,300  mètres  du  centre  du  bourg,  au  bas  des 
vignes,  à  l'ouest  de  ce  même  chemin,  montre  le  stratumen 
de  5  mètres  de  largeur;  il  est  formé  d'un  seul  lit  de 
pierres  calcaires  poreuses  très-dures  de  ()'"  15  d'épaissour  ; 


308       CONGRÈS  ARCHÉOLOOIOUE  DE  FRANCE. 

des  cailloux,  envehippés  d'uuo  rroùte  calcaire,  un  peu 
plus  gros  que  ceux  qui  viennent  d'être  décrits,  composent 
la  seconde  couche,  qui  a  aus?i  0"  15  d'épaisseur.  La  terre 
végétale  cultivée  a  également  0™io.  La  voie  ensuite 
remonte  plus  au  nord,  traverse  le  chemin  de  la  Touche  à 
Gatine,  à  peu  près  à  égale  distance  de  ces  deux  domaines. 
Lesdéhris  s'y  trouvent  à  l'est  de  ce  chemin,  dans  la  même 
disposition  qu'à  la  sonde  précédente.  La  ligne  redescend 
au  sud,  en  se  rapprochant  de  Glatigny,  communauté  reli- 
gieuse de  l'ordre  de  Fontevrault.  Elle  l'ut  fondée  par  Agnès, 
première  supérieure  du  prieuré  d'Orsan,  sous  le  pontificat 
de  saint  Léger,  archevêque  de  Bourges,  de  1098  à  1 120.  De 
Glatigny,  la  voie  suit  toutes  les  sinuosités  du  Fouzon  et 
longe  ce  cours  d'eau  à  une  très-faible  distance  jusqu'à  la 
Malardière;  avant  d'y  arriver,  elle  traverse  le  village  de 
Coulommiers,  où  existait  un  prieuré  très-ancien  du  res- 
sort d'issoudun,  et  très-richement  doté. 

C'est  entre  Glatigny  et  Coulommiers  que  d'Anville  et, 
après  lui,  M.  Raynal,  supposent  que  cette  ligne  traversait 
le  Fouzon;  sur  leurs  cartes,  elle  en  côtoie  la  rive  gauche, 
en  passant  entre  Dun  et  Bagneux,  et  coupe  de  nouveau 
cette  rivière  à  la  hauteur  de  Graçay  pour  atteindre  Nohant. 
Il  est  vrai  qu'en  face  du  village  de  Villeneuve,  au-dessus 
de  celui  de  Bourdoiseau,  est  un  gué  pavé  de  grosses  pierres 
placées  debout,  qui  porte  le  nom  de  Gué-Perré.  Un  tron- 
çon de  voie,  que  nous  avons  pris  à  l'origine  pour  celle  de 
Bourges,  y  aboutit,  mais  il  traverse  seulement  celle-ci  à 
cet  endroit  ;  il  la  longe  ensuite  irrégulièrement  sur  une 
distance  de  -1,500  mètres,  en  présentant  plusieurs  solutions 
de  continuité.  Il  la  rejoint  plus  bas,  à  la  hauteur  de  Gla- 
tigny. De  l'autre  côté  du  Fouzon,  nous  n'avons  rien 
trouvé.  Etait-ce  un  tracé  primitif,  abandonné  plus  tard, 
ou  ces  tronçons  aboutissaient-ils  à  (pielque  centre  de  popu- 


XL'   SESSION,    A   CHATEAUROIJX.  309 

lation,  dont  il  ne  reste  aujourd'hui  aucune  trace?  Au  sur- 
plus, un  fait  analogue,  d'un  petit  tracé  latéral,  s'est  ren- 
contré près  de  la  même  voie,  de  l'autre  côté  de  la  commune 
d'Anjoin. 

Le  stratumen,  un  peu  à  l'ouest  de  Glatigny,  en  est  pres- 
que à  fleur  du  sol;  il  est  composé  de  deux  rangées  super- 
posées de  pierres  de  grès  vert,  d'une  épaisseur  ensemble 
de  O™  25,  sur  8  mètres  de  largeur.  Les  coupes,  au  nombre 
de  quatre,  laites  jusqu'au  chemin  du  Fouzon  aux  Bizeaux, 
dans  une  étendue  de  i  ,700  mètres,  présentent,  à  0°  30  au- 
dessous  du  sol  aralilo,  la  couche  inférieure  de  la  voie  for- 
mée de  cailloux  de  différentes  dimensions,  depuis  la  gros- 
seur d'un  gros  œufjusqu'à  celle  d'une  noix;  l'épaisseur  en 
est  de  0"  25  et  la  largeur  de  8  mètres.  Une  autre  tranchée 
pratiquée  dans  la  prairie,  à  600  mètres  environ  du  prieuré 
de  Coulommiers,  a  la  même  disposition.  Près  de  ce  vil- 
lage, le  stratumen  se  rapproche  de  la  surface  du  terrain  :  il  a 
7  mètres  de  largeur  et  est  disposé  en  deux  couches  de  pierres 
de  grès  vert  de  0^20  d'épaisseur.  Au  delà  du  village,  sur  un 
kilomètre,  jusqu'au  point  où  le  Fouzon  décrit  une  courbe 
très-accentuée,  la  base  de  la  voie  est  composée  de  pierres 
plates,  de  même  nature  que  les  précédentes,  de  dilférentes 
dimensions  ;  les  plus  grosses  sont  placées  généralement  à 
la  partie  inférieure;  elles  peuvent  avoir  0" 20  de  largeur 
en  moyenne  :  l'empierrement  est  réduit  à  (i  mètres  trans- 
versalement. Dans  un  pâturai,  situé  à  500  mètres  environ 
en  avant  du  village  de  la  Malardière,  le  stj^atumen,  placé 
à  0"'  15  de  profondeur,  offre  la  même  disposition,  quant  à 
la  construction  ;  mais  il  a  9  mètres  de  largeur  et  est  limité, 
à  chaque  extrémité,  par  de  grosses  pierres  calcaires  placées 
de  champ  (bordures). 

De  ce  dernier  village,  la  voie  se  dirige  vers  le  taillis  de 
la  Roche,  en  coupant  la  route   départementale  n"   12,  a 


310       CONGRES  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

peu  de  distance  du  chemin  de  grande  communication 
n"  1.  Les  tranchées  ouvertes,  sur  une  longueur  de  1,500 
mètres,  ont  montré  le  stratumen  h  0™15  au-dessous  de  la 
surface  du  sol,  composé  de  trois  couches  de  pierres  plates 
(grès  vert),  formant  0"°  30  d'épaisseur.  Elles  étaient  entre- 
mêlées, dans  les  joints,  de  pierres  plus  petites  pour  en 
consolider  l'aire.  La  largeur,  limitée  par  les  bordures,  est 
de  8  mètres;  à  l'une  d'elles  cependant  cette  largeur  a  un 
mètre  de  plus,  9  mètres.  Une  autre  pratiquée  un  peu  plus 
loin,  à  l'entrée  des  taillis,  a  absolument  la  même  dispo- 
sition, mais  elle  est  réduite  à  7  mètres  de  longueur,  sans 
être  limitée  par  des  pierres  placées  de  bout.  A  l'autre 
extrémité  du  bois,  deux  coupes  ont  été  faites  sans  pré- 
senter de  modifications.  Le  stratumen  est  à  0^15  au-des- 
sous du  sol  ;  il  a  0"»  15  d'épaisseur  et  8  mètres  de  largeur  ; 
il  est  composé  de  petites  pierres  plates  de  grès,  offrant 
une  surface  très-dure,  mais  sans  bordures.  Du  taillis  de 
la  Roche,  elle  côtoie  le  ruisseau  du  Péry  jusqu'au  chemin 
du  village  du  Pont-des-Places  aux  Ghezeaux,  où  elle  fait 
un  angle  presque  droit  ;  elle  longe,  à  peu  de  distance,  les 
bâtiments  de  ce  village  et  un  petit  camp  romain.  Les 
dimensions  intérieures  sont  de  24  mètres  sur  21  ;  il  est 
entouré  de  parapets  ou  rebords  en  terre,  et  de  fossés  larges 
encore  de  8  mètres.  En  décrivant  plusieurs  courbes,  elle 
atteint  le  bourg  d'Anjoin;  elle  le  traverse  en  passant  au 
pied  de  la  nouvelle  église,  et  en  laissant  les  maisons  un 
peu  à  droite.  Des  taillis  dont  nous  venons  de  parler,  à  la 
sortie  du  bourg,  elle  passe  entre  neuf  petits  monticules  de 
terre,  couverts  de  débris  de  tuiles  romaines.  Dans  l'un 
d'eux,  à  Aujoin,  on  a  découvert  une  certaine  quantité  de 
poteries;  une  aire  circulaire,  très-solidement  établie, 
jointe  aux  autres  débris,  a  fait  présumer  que  cette  con- 
struction était  un  four  de  potier.  Les  autres  buttes  n'ont 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  3H 

point  été  fouillées.  Au  détour  du  chemin  du  Pont-des- 
Places,  nous  n'avons  pu  trouver  que  des  fragments  du 
stratumen;  des  pierres  fichées  dehout  paraissent  en  limi- 
ter la  largeur.  A  1 50  mètres  environ  avant  que  d'arriver 
au  bourg,  nous  avons  rencontré,  par  deux  tranchées,  la 
voie  sur  0"  25  d'épaisseur,  à  O"»  15  au-dessous  du  terrain, 
formé  de  trois  couches  de  grès,  de  6  mètres  de  largeur  : 
d'un  côté  une  pierre  de  bordure  irès-forte  en  limite  la 
pliitc-lorme.  A  partir  d'Anjoin,  elle  se  dirige  sur  l'ancien 
chemin  de  Graçay  à  Villel'ranche,  qu'elle  rejoint  à  l'extré- 
mité de  la  commune  et,  en  même  temps,  du  département; 
elle  le  suit  ensuite  jusqu'à  Graçay.  Dans  les  trois  coupes 
qui  y  ont  été  pratiquées,  le  stratumen  est  à  O^SO  de  pro- 
fondeur ;  il  est  composé  de  deux  couches  de  grès  vert 
superposées,  de  Oi^^O  :  dans  deux  tranchées,  il  a  6  mètres 
de  largeur,  et  dans  l'autre  4"  50  seulement  ;  il  est  arrêté 
de  chaque  côté  par  des  bordures.  Graçay  est  du  départe- 
ment du  Cher  :  nous  avons  pu,  néanmoins,  grâce  à 
l'obligeance  de  son  ancien  maire,  M.  Bretheau,  pour- 
suivre nos  recherches  jusqu'à  Nohant.  La  voie  passe  près 
du  hameau  de  la  Chaussée  et  traverse  la  garenne  du 
bourg  :  sous  le  talus  de  l'un  des  fossés  (côté  de  Graçay), 
nous  l'avons  mise  à  découvert  sur  plusieurs  mètres  de 
largeur. 

Ce  grand  chemin,  dont  le  stratumen  est  partout  enfoncé 
dans  le  sol,  dont  rien  à  la  surface  n'indique  la  direction, 
a  été  trcs-diflicile  à  reconnaître  :  nous  y  sommes  revenus 
à  plusieurs  reprises,  et  nous  n'avons  pu  y  parvenir  qu'a- 
près quatre  ans  de  la  plus  constante  persévérance.  La  base 
n'en  existe  pas  partout;  les  lacunes  et  les  sinuosités 
fréquentes  du  tracé  en  font  souvent  perdre  la  piste.  Les 
points  en  sont  d'autant  plus  difticiles  à  retrouver,  que  la 
partie  nord  du  département  parait  avoir  été  sillonnée,  en 


ai'â       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

tout  sens,  par  des  chemins  antiques  de  même  origine  et  de 
construction  identique.  Plusieurs  parties  pavées,  placées 
latéralement  à  la  voie  principale,  dont  on  ignore  l'origine 
et  le  but,  ont  contribué  encore  à  nous  tromper  et  à  pro- 
longer nos  recherches.  Il  s'est  présenté  des  difficultés 
d'une  autre  nature,  qui  ont  ici  été  assez  facilement  apla- 
nies, mais  qu'ailleurs  il  nous  a  souvent  été  très-difficile  de 
surmonter.  Nous  ne  pouvions  pénétrer  dans  les  propriétés 
privées,  principalement  dans  les  vignes,  sans  occasionner 
des  dommages.  Plusieurs  de  MM.  les  maires  firent  publier, 
sur  nos  instances,  que  les  dégâts  seraient,  le  cas  échéant, 
payés  par  leurs  communes.  Les  précautions  prises  furent 
telles  et  le  préjudice  en  résultant  si  minime,  que  personne 
ne  réclama  d'indemnités. 


Voie  de  Dun  à  Ville  franche. 

A  partir  du  village  de  la  Malardière,  commune  de  Dun- 
le-Poëlier,  indiqué  plus  haut,  un  autre  chemin  traversait 
le  Fouzon,  par  un  gué  perré  ;  il  se  dirigeait,  d'un  côté, 
vers  le  bourg  de  Dun,  et,  de  l'autre,  sur  Villefranche 
(Cher).  Il  parait  s'embrancher  sur  la  voie  pavée  allant  de 
Graçay  à  cette  dernière  localité,  dans  la  commune  d'An- 
join,  à  600  mètres  environ  de  la  limite  de  la  commune  de 
la  Chapelle-Montmarlin.  Il  forme  plusieurs  courbes  pour 
atteindre  la  Malardière,  d'où  il  longe  de  petits  monticules 
couverts  de  tuiles  romaines,  puis  le  village  de  Fleury  ; 
traverse  celui  des  Rousseaux,  passe  à  une  distance  à  peu 
près  égale  des  domaines  des  Besards  et  des  Annets,  ensuite 
près  du  village  de  Sainte-Catherine,  où  se  remarquent 
les  restes   d'une  ancienne   chapelle.  Ces  ruines  étaient 


XL"   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  313 

encombrées  de  fagots  :  cependant,  par  le  peu  que  nous  en 
avons  vu,  nous  pensons  que,  saul"  un  plus  sérieux  exa- 
men, elles  peuvent  remonter  au  xiV  siècle.  La  voie 
rejoint  celle  de  Villcfranche  à  700  mètres  de  là.  Du  côté 
de  Dun,  nos  premières  recherches  ont  été  infructueuses  ; 
toutefois,  si  les  circonstances  nous  l'eussent  permis,  nous 
les  aurions  reprises  d'une  manière  plus  suivie,  car  tout 
espoir  ne  nous  parait  pas  devoir  être  abandonné.  Feu 
M.  Lemaigre,  archiviste  à  Châteauroux,  dont  toutes  les 
personnes  qui  s'occupent  d'antiquités  ont  pu  apprécier  les 
connaissances  sérieuses,  supposait  qu'à  l'époque  gallo- 
romaine,  il  existait  très-certainement  un  petit  établisse- 
ment [mansio  ou  diversorium),  à  peu  de  distance  de  ce 
bourg,  près  d'un  lieu  appelé  Finis  ou  Fines,  où  s'élève 
aujourd'hui  le  château  de  Fins.  C^est  peut-être  à  cette  cir- 
constance qu'est  due  l'erreur  commise  par  d'Anville,  dans 
le  tracé  de  la  voie  de  Bourges,  qu'il  dirige  vers  Dun-le- 
Poëlier. 

Les  tranchées  faites  à  partir  de  la  Malardière,  en  se  diri- 
geant sur  Villefranche,  sont  au  nombre  de  cinq.  La  pre- 
mière, entre  ce  village  et  la  route  départementale  n°  12, 
a  été  ouverte  auprès  de  débris  de  constructions  romaines; 
elle  a  8  mètres  de  largeur.  Les  yderres  du  stratumen  sont 
de  même  nature  que  celles  que  l'on  peut  ramass(!r  à  la 
surface  des  champs  ;  elles  sont  très-fortement  tassées  les 
unes  sur  les  autres  :  les  plus  grosses  sont  à  la  partie  infé- 
rieure, sans  cependant  être  disposées  par  couches  régu- 
lières. La  même  disposition  a  été  remarquée  plusieurs 
fois  dans  la  construction  de  la  voie  de  Bourges.  Cette 
plate- forme  est  recouverte  de  0="  "20  de  terre  végétale.  La 
seconde  sonde  a  été  pratiquée  à  l'entrée  du  village  des 
Kousseaux.  La  base  de  l'empierrement  est  composée 
d'une   seule  couche  de  pierres  plates  de  0"  12  environ 


314       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

d'épaisseur  ;  elle  est  recouverte  de  0"  20  de  terre  végétale; 
sa  largeur  est  de  7  mètres  sans  bordures.  La  troisième 
coupe,  faite  à  l'extrémitc  du  même  village,  a  300  mètres 
environ  de  la  précédente,  a  8  mètres  de  largeur  et  pré- 
sente la  même  composition  que  la  première  ;  la  terre  végé- 
tale la  recouvrant  a  O'^oO  d'épaisseur.  La  quatrième  et  la 
cinquième  sonde,  pratiquées  au  delà  du  hameau  de  Sainte- 
Catherine,  ofl'rent  absolument  la  même  dispositiou  et  les 
mêmes  dimensions  que  la  troisième,  8  mètres  de  largeur 
et  0"'  25  d'épaisseur. 


Voie  de  Gt^açay  vers    Villefranche. 

Eu  la  commune  d'Anjoin  (Indre),  à  700  mètres  environ 
de  la  commune  de  Graçay  (Cher),  s'embranche,  toujours 
sur  la  même  artère,  une  autre  ligne  se  dirigeant  vers 
Villefranche  (Loir-et-Cher).  Elle  prend  naissance  à  la 
hauteur  du  chemin  de  la  Rclandière,  traverse  le  ruisseau 
du  Pery,  à  peu  de  distance  du  chemin  vicinal  d'Anjoin 
aux  Tannières,  traverse  ensuite  ce  dernier  chemin,  celui 
de  la  Maison-Neuve,  passe  près  du  hameau  de  la  Baraque, 
où  le  stratumen  a  été  enlevé  sur  près  de  600  mètres,  pour 
en  construire  les  bâtiments,  et  sort  de  la  commune  pour 
entrer  dans  le  département  de  Loir-et-Cher,  à  210  mètres 
à  droite  de  la  limite  réciproque  de  ce  département  et  de 
celui  de  l'Indre. 

Le  stratumen,  d'après  la  tranchée  ouverte  au  point 
d'embranchement  de  ces  <leux  lignes,  a  6  mètres  de  lar- 
geur sans  bordures.  Il  est  composé  île  dalles  de  grès  irré- 
gulières de  toutes  dimensions  :  les  plus  Ibrtes  sont  dispo- 
sées à  la  partie  inférieure  sur  deux  rangs;  au-dessus  sont  de 
petites  pierres  plates  très-serrées,  le  tout  formant  une  épais- 


XL'   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  315 

seur  de  O™  30.  Elle  est  recouverte  de  O  20  de  terre  végétale. 
Les  cinq  coupes  suivantes,  l'une  laite  à  300  mètres 
plus  loin  que  la  précédente,  la  seconde  à  l'embranche- 
raent  du  chemin  conduisant  au  hameau  de  Rosnay,  la 
troisième  à  1,200  mètres  plus  au  nord,  la  quatrième  à 
220  mètres  au  sud-est  du  ruisseau  du  Pery,  la  cinquième 
près  du  chemin  conduisant  aux  Annets,  ont  une  com- 
position ou  disposition  semblable  à  celle  de  la  première 
sonde.  La  septième  tranchée,  ouverte  à  280  mètres  au-des- 
sus du  chemin  de  Maurepas;  la  huitième,  à  260  mètres 
plus  au  nord,  et  la  neuvième,  à  280  mètres  du  chemin 
de  Sainte-Catherine,  près  de  l'embranchement  de  la  voie 
pavée  se  dirigeant  sur  Dun-le-Poëiier,  par  la  Malardière, 
n'ont  que  6  mètres  de  largeur.  Le  stratumen  est  presque 
à  la  surface  du  terrain  :  la  composition  en  est  semblable 
aux  précédentes;  néanmoins  les  dalles  qui  le  forment 
sont  posées 'moins  régulièrement  et  mélangées  de  pierres 
plus   petites  :  l'épaisseur  est  seulement  de  0'"25  (i). 

(1)  Une  3iitre  ligne  encore  s'embranche  sur  celle  de  Bourges, 
à  1,200  mètres  environ  en  avant  de  Graçay  ;  elle  paraît  se 
diriger  vers  Genouilly  'Cher),  ou  vers  une  grande  redoute 
ancienne,  située  sur  un  point  élevé,  à  1  kilomètre  50  envi- 
ron de  cette  dernière  localité.  L'altitude  de  ce  retranchement 
est,  sur  la  carte  du  dépôt  de  la- guerre,  de  160  mètres  au-dessus 
du  niveau  de  la  mer,  tandis  que  celle  de  Genouilly  n'est  qu'à  la 
cote  140  mètres.  Nous  l'avons  suivie  jusqu'au  delà  du  village 
de  la  Poterie,  sur  800  mètres  de  longueur,  pensant,  à  l'origine, 
qu'elle  se  rapportait  au  tracé  principal  que  nous  cherchions  : 
nous  en  avons  abandonné  l'étude  ensuite. 

C'est  ainsi  que  ces  diflerents  embranchements,  tous  inconnus, 
ontété  mis  successivement  au  jour.  Quaml  la  voie  de  Bourges  a 
été  complètement  déterminée,  nous  avons  pu  reconnaître  les 
autres  et,  dans  certaines  limites,  eu  lixer  la  direction  inobable. 


316  CONGRÈS    ARGIlÉOLOGinUE    1>E    FRANCE. 


Voie  d'Oi^léans  à  Poitiers  pai-  Chabris  et  Estrées. 

Cette  route  part  des  dernières  maisons  de  l'une  des  rues 
de  Chabris  conduisant  anciennement  au  chemin  de 
Valençay  ;  elle  passe  dans  le  parc  et  la  garenne  du  château 
de  la  Rivière;  elle  traverse,  avant  d'y  arriver,  un  champ 
où  plusieurs  tombeaux  en  pierre,  gallo-romains,  ont  été 
trouvés  :  dans  l'un  d'eux  étaient  des  médailles  consulaires 
bien  conservées.  Elle  prend  ensuite  la  rive  droite  du  Fou- 
zou,  longe  le  village  de  la  Jarrige  :  à  500  mètres  en 
avant,  elle  forme  deux  coudes  très-brusques,  sur  une  lon- 
gueur de  160  mètres,  que  rien  aujourd'hui  ne  peut  expli- 
quer ;  elle  suit  la  route  départementale  sur  environ  800 
mètres,  décrit  deux  courbes  assez  sensibles,  puis  atteint  le 
château  delà  Borde,  dont  elle  longe  le  parc  ;  elle  passe  au 
Colombier,  en  face  du  moulin  du  Port,  où  elle  traverse  le 
Fouzon.  Elle  contourne  ensuite,  en  partie,  la  base  d'un 
grand  tumulus  de  sable  très-fin  (sablon),  de  580  mètres  de 
circonférence.  Depuis  de  longues  années,  ce  monticule  sert 
de  carrière  :  des  volumes  considérables  de  sable  en  ont 
été  enlevés.  La  partie  supérieure  est  inclinée  à  l'est  d'une 
manière  assez  prononcée  :  par  la  disposition,  l'on  pourrait 
supposer  qu'à  une  époque  reculée,  la  plate-forme  aurait 
servi  de  cam[)  ou  de  refuge  pour  s'y  défendre.  La  rivière 
devait  passer  autrefois  au  pied  de  ce  tumulus,  car  nous  y 
avons  découvert  des  débris  de  maçonnerie,  indiquant  très- 
certainement  les  restes  d'un  ancien  pont  élevé  à  cet 
endroit.  La  voie  traverse  ensuite  les  terres  de  la  Loge,  en 
laissant  le  bourg  de  Varennes  bien  à  droite,  puis  le  village 
des  Couards.  Elle  décrit  plusieurs  lignes  brisées  pour  se 


XL"   SESSION,    A    CTIATEAimOUX.  317 

jeter  vers  Treiiillot,  et  parvient  à  la  liniile  de  l'arrondis- 
scment  par  deux  grands  aligucmeiils  droits.  Elle  en  sort 
à  peu  de  distance  du  hameau  de  Chaiiihord,  à  32  mètres 
de  la  roule  départementale  n"  9,  sur  la  rive  gauche  d'un 
autre  cours  d'eau,  le  Nahon. 

Des  cinq  tranchées  initiales,  la  première  qui  a  été  laite 
à  1  kilomètre  environ  de  Chabris,  à  la  bilurcation  des 
deux  chemins  allant  dans  les  vignes  ;  la  seconde  dans  le 
parc  de  M.  de  la  Rivière;  la  troisième  et  la  quatrième  en 
avant  de  la  Jarrige,  après  les  deux  courbes  que  nous  avons 
indiquées  plus  haut,  enfin  la  cinquième,  à  240  mètres 
au-dessus  des  maisons  de  ce  village,  ont  chacune  3  mètres 
de  largeur.  Le  stratumen  est  composé  de  deux  rangées  de 
pierres  plates,   entremêlées   de  petites   pierres  pour  en 
consolider  les  joints  et  former  une  aire  très-solide  :  l'épais- 
seur en  varie  de  O""  20  à  O'"  22,  et  il  est  recouvert  de  O"  20 
de  terre  végétale.  La  sixième  coupe,  ouverte  à  200  mètres 
environ  du  château  de  la  Borde,  est  exécutée  comme  les 
précédentes;  mais  elle  a  6  mètres  de  largeur  et  est  limitée 
aux  deux  extrémités  par  de  grosses  pierres  de  bordures, 
en  calcaire  très-dur,  fichées  debout.  La  septième  sonde,  la 
huitième  et  la  neuvième  ont  encore  la  même  composition  : 
elles  sont  formées  de  pierres  calcaires,  superposées  en  deux 
lits,  seulement  les  pierres  de  la  huitième  sont  plus  grosses 
que   les   autres  ;  plusieurs   d'entre   elles   ont  l'épaisseur 
entière  du  stratumen,  0""  20.  Elles  n'ont  toutes  que  3  mè- 
tres de  largeur  et  n'indiquent  qu'une  partie  de  la  voie.  La 
terre  les  recouvre  de  O^^bO.  ^Les  deux  dernières  (8"  et  9') 
ont  été  faites  de  chaque  côté  d'un  massif  de  maçonnerie, 
débris  des  culées  d'un  vieux  pont. 

D'après  les  renseignements  que  nous  avons  recueillis, 
les  restes  de  ce  pont  auraient  été  complètement  démolis 
dix-huit  ans  tout  au  plus  avant  nos  fouilles,  ce  qui  ferait 


318       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

aujourd'hui  ù  peu  près  vingt-sept  ans.  Le  Fouzon,  qui 
décrit  beaucoup  de  sinuosités,  parait  avoir  passé  autrefois 
à  cet  endroit  avant  la  construction  du  luoulin  du  village 
du  Port. 

La  dixième  tranchée,  opérée  à  200  mètres  d'un  chemin 
qui  contourne  en  partie  le  tumulus,  indique  le  stratumen 
formé  de  deux  couches  de  pierre  calcaires,  mélangées  de 
grès,  d'une  épaisseur  ensemble  de  0™  25.  La  plate-forme 
a  3™  50  de  largeur,  sans  bordures.  La  terre  végétale  la 
recouvre  de  0"  20.  Les  onzième,  douzième  et  treizième 
coupes,  pratiquées  entre  les  villages  des  Gouards  et  de 
Trevillot,  ont  montré  la  base  de  l'ancienne  chaussée  com- 
posée de  trois  couches  de  pierres  plates,  superposées  sur 
une  épaisseur  de  0"  25,  et  enchevêtrées  très-solidement. 
Elle  est  à  0"  20  au-dessous  de  la  surface  du  sol.  La  lar- 
geur est  de  3"  75.  A  la  quatorzième  sonde,  faite  à  100 
mètres  au-dessus  de  ce  dernier  village,  le  stratumen  est 
exécuté  en  pierres  calcaires ,  grossièrement  arrondies, 
semblables  aux  pierres  roulantes  naturelles,  que  l'on 
rencontre  dans  les  champs  environnants  ;  elles  sont  de  la 
grosseur  d'un  œuf  à  celle  du  poing,  et  disposées  très-soli- 
dement sur  0"  20  d'épaisseur.  Il  a  3""  50  de  largeur  et  est 
enfoncé  de  0""  20  dans  le  terrain.  A  la  quinzième  tranchée, 
ouverte  à  150  mètres  au-dessous  du  même  hameau  de 
Treuillot,  la  plate-forme  a  5  mètres  de  largeur;  elle  est 
composée  de  pierres  de  différentes  dimensions,  les  unes 
assez  plates,  disposées  à  la  partie  inférieure,  et  les  autres 
plus  ou  moins  arrondies,  placées  au-dessus,  entre  les  pre- 
mières, sans  stratification  régulière.  L'épaisseur  en  est  de 
0"  20,  et  la  couche  de  terre  végétale  a,  au-dessus,  la  même 
épaisseur.  Enfin,  à  la  seizième  coupe,  faite  à  la  limite  de 
l'arrondissement,  sur  la  rive  du  chemin  de  Chambord,  le 
stratumen  n'a  que  2"  50  de  largeur,  sans  bordures  :  il  est 


XL"   SESSION,    A    r.IIATKAUTlOUX.  319 

composé  (le  deux  rangs  suporposés  de  petites  pierres  plaies 
sur  O"!  ri  seulement  d'épaisseur.  La  terre  végétale  le 
recouvre  sur  0""  20.  La  disposition  de  la  chaussée  indique 
que  le  reste  de  la  partie  pavée  a  été  détruit  sur  les  deux 
côtés. 


Voie  d'Orléans  à  Argenton,  par  Chabris  et  Levroux. 

En  partant  de  Chabris,  la  voie  traverse  le  Fouzon,  au 
lieu  dit  le  Port;  elle  longe  la  rive  droite  du  Nahon,  passe 
près  de  Parpeçay  (Patriciacum),  et  traverse  le  ruisseau  du 
Rios-Bordelas  au  village  de  ce  nom.  Un  pont  y  existait 
alors;  il  était  construit  sur  pilotis  :  une  médaille  d'Au- 
guste a  été  trouvée  en  1 85G  parmi  les  débris  qui  en  ont 
été  retirés.  Elle  passe  au  Tranchet,  en  la  commune  de 
Poulaines,  entre  les  villages  d'Espaillat  et  de  Cungis,  aux 
Plessis,  aux  Bruyères,  à  Ghambon,  où  était  une  ancienne 
villa  importante  et  où  l'on  a  découvert  encore,  il  y  a  huit 
ou  dix  ans,  un  balneum  ;  enfin  elle  sort  de  l'arrondisse- 
ment d'Issoudun,  près  du  chemin  de  la  Moinerie  à 
Chambon,  à  droite  du  premier  de  ces  villages. 

A  partir  du  Tranchet,  un  embranchement  à  cette  voie, 
de  100  mètres  de  longueur,  se  dirigeait  vers  le  gros  village 
de  Montry,  placé  sur  le  laite  du  coteau  du  Renon.  Il  tra- 
versait ce  ruisseau  au  lieu  dit  le  gué  du  Laye.  Ce  mot,  on 
le  sait,  a  diverses  acceptions  :  il  peut  signifier  ou  une 
route  tracée  dans  un  bois,  ou  ce  bois  lui-même,  ou  des 
arbres  isolés;  on  ne  saurait  en  conséquence  en  tirer 
aucune  induction  précise  pour  caractériser  le  passage  de 
ce  chemin.  Nous  avons  remarqué,  sur  les  terres  de  ce 
village,  à  plusieurs  endroits,  des  débris  de  tuiles  romaines  ; 


320       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

il  y  existait  peut-être  un  centre  de  population  important, 
car,  suivant  la  tradition  du  pays,  Montry  était  autrefois 
une  ville.  Une  personne  sérieuse  de  la  localité  nous  a 
même  assuré,  à  cette  occasion,  qu'un  habitant  de  Dun-le- 
Pcëlier  possédait  un  acte  très-ancien,  où  ce  village  avait 
cette  qualification.  C'est  une  assertion  que  nous  n'avons 
pas  été  à  même  de  vérifier. 

La  plus  grande  partie  des  pièces  concernant  cette  route 
importante  a  été  perdue  par  nous,  à  la  suite  de  circon- 
stances particulières.  Dix-huit  tranchées  ou  coupes  de  la 
voie  ont  été  pratiquées  entre  le  Fouzon,  au  lieu  dit  le  Port, 
commune  de  Chabris,  et  l'extrémité  de  la  commune  de 
Poulaines.  Le  stratumen  est  généralement  formé  de 
deux  couches  de  grès  vert,  de  petite  dimension  ;  dans  lés 
terres  du  Tranchet,  ces  pierres  ont  de  0"  30  à  0"  40  de 
côté,  et  peuvent  être  assimilées  à  des  dalles  brutes.  La 
largeur  est  de  2"  50  à  4  mètres.  Vers  le  domaine  des 
Bruyères,  de  grosses  pierres  calcaires  composent  la  base 
de  la  voie,  qui  est  limitée  par  des  pierres  plus  fortes  pla- 
cées debout  (bordures).  Au-dessous  du  fort  village  de 
Chambon,  une  couche  de  cailloux  repose  sur  le  stratu- 
men. L'embranchement  sur  Montry  est  composé  de  deux 
couches  de  grès  vert  également. 

Depuis  nos  recherches,  nous  avons  appris  que  cette  voie 
a  été  reconnue  entre  Argenton  et  Luant,  en  se  dirigeant 
vers  Châteauroux ,  et  que  d'autres  tronçons  ont  été 
découverts  sur  la  commune  de  Ghézelles,  arrondissement 
de  Châteauroux,  à  peu  de  distance  de  Levroux.  L'exis- 
tence en  est  donc  constatée  entre  le  Cher,  à  Chabris,  et 
Argenton.  Elle  se  reliait  à  la  voie  indiquée  dans  Y  Itiné- 
raire d'Antonin  allant  à' Argentomagus  à  Augustoritum,  et 
constituait  ainsi  une  seule  et  même  ligne  d'Orléans  à 
Limoges. 


XL''   SESSION,    A   miATEA-UROUX.  321 


Observations  générales  sur  les  voies  de  Bourges,  de 
Poitiers  et  de  Limoges. 

On  remarquera  que  ces  trois  grandes  artères  se  croi- 
saient à  Chabris,  sur  la  rive  gauche  du  Cher,  à  l'opposé  de 
Gièvres](Gabris  ?),  et  que  d'autres  voies,  moins  importantes 
sans  doute,  s'y  embranchaient,  pour  rayonner  dans  toutes 
les  directions.  Nous  regrettons  beaucoup  de  n'avoir  pas 
été  à  même  d'en  terminer  le  relevé  complet  sur  tout  l'ar- 
rondissement d'Issoudun.  Il  reste  à  étudier  le  prolonge- 
ment de  la  voie  d'Autun  à  Tours,  entre  Chabris  et  Selles- 
sur-Cher  (Cellœ-s.-Usitii)  ;  le  point  où  les  deux  autres  voies, 
réunies  en  une  seule,  traversaient  le  Cher,  à  Chabris, 
pour  se  diriger  sur  Orléans  ;  la  direction  vers  Dun-le- 
Poëlier,  et  même  au  delà,  vers  Bagneux,  de  la  ligne  de 
Villefranche,  par  les  villages  de  Fleury  et  de  la  Malar- 
dière;  enfin  la  continuation  du  chemin  de  Montry,  qui  se 
prolongeait  peut-être  jusqu'à  Graçay,  où  passait  la  voie 
de  Bourges. 


Voies  de  Levroux  â.  Issoudun  et  d'Issoudun  à  la  chaus- 
sée de  César  [ligne  de  Bourges  à  Poitiers),  près  de 
Saint- Ambroix,  à  Ernodurum. 

Nous  ne  décrirons  pas  les  parties  que  nous  en  avons 
constatées,  antérieurement  à  1857,  sur  les  communes  de 
Levroux  et  de  Brion,  ces  deux  localités  étant  situées  sur 
Tarrondissement  de  Chàteauroux. 

XL^  SESSION.  21 


322       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

A  la  limite  de  l'arrondissement  d'Issoudun,  le  tracé 
prend  son  origine,  sur  la  route  de  Paris  à  Toulouse,  près 
du  huitième  hectomètre  de  la  borne  n°  i8,  venant  de 
Vatan,  c'est-à-dire  à  -18  kilom.  800  mètres  de  cette  ville. 
Elle  passe  à  480  mètres  à  gauche  des  bâtiments  du 
domaine  de  Metas;  elle  s'étend  dans  les  plaines  de  la 
Champenoise  ;  laisse,  à  440  mètres  à  droite,  le  chemin  de 
Vallière,  et  à  140  mètres  également  à  droite  la  borne 
placée  à  la  limite  des  communes  de  la  Champenoise  et  de 
Saint-Valentin  ;  elle  décrit  ensuite  plusieurs  courbes,  et 
s'éloigne  de  120  mètres  à  gauche  de  l'allée  du  domaine 
des  Pyramides  (le  Nil  à  droite)  ;  elle  coupe  les  deux  che- 
mins qui  sont  à  la  limite  de  Lizeray  et  de  Saint-Valentin, 
contourne  le  domaine  de  Borderousse,  et  suit  presque  en 
entier  le  chemin  deBarillon  à  Issoudun.  A  l'extrémité  de 
cette  dernière  commune,  la  voie  est  en  relief  sur  le  sol  et 
couverte  de  pierres  calcaires  provenant  de  la  culture  des 
vignes  contiguës.  Elle  passe  à  droite  du  Guerriau,  saute 
le  ruisseau  du  même  nom,  et  suit  le  chemin  du  moulin 
de  l'Étang-le-Roy.  Cette  usine  est  construite  sur  la  voie, 
et  on  retrouve  celle-ci  dans  la  prairie,  à  gauche  de  la 
grande  communication  n"  23.  Elle  contourne  le  tlanc  du 
coteau  de  la  Théols,  où  existe  un  chemin  sinueux  ;  traverse 
un  ancien  gué  pavé,  abandonné  depuis  des  siècles,  dont 
les  travaux  de  construction  du  chemin  de  1er  ont  révélé 
l'existence,  et  entre  à  Issoudun  par  la  porte  du  Château. 
Elle  en  sort  par  la  rue  Dardault,  et  se  dirige  vers  l'an- 
cienne  cité  d'Ernodurum. 

Pour  abréger  le  discours  et  prévenir  des  redites  fasti- 
dieuses, nous  résumons  dans  le  tableau  ci-après  le  mode 
de  construction  de  la  voie. 


XL"   SESSION,    A    r.IlATEAUUOUX. 


323 


-^._ 

«   eu 

Cl   3 

s         3 

B     r* 

"en 

o       o 

o  o 

en 

u 

O    O       . 

B    B 

B  a 

Z 

■"         *-'» 

TS      .    o 

oo 

oo 

O 

*^  •- 

ssi 

H 

5    M  'O 

â-2 

-^ 

ei^a 

IJ^ 

e^ 

■c.S  % 

o  o  > 
K  s  <u 

B 
O 

L.  > 

O    "^ 

03 
O 

|.2o 

o  — 

2 

p5e2 

S  oî 

Si.  ^  ^ 

o  "  s 
^^  5 


o  ^        -w 


!  o;  c  ^  . 


"0 .5  2  —  "—  " 

■S  .S  S  -g  S.-  ^ 


^  â^  '-  = 


î  -C'  'O 


S  "â 


■"•-go       3  o  «) 


S3 

eo  g 

E"" 

Pi 

S.i2-= 

^  5  2 

£ilr^<>i 

Sec  £. 

S  ^  « 

C  j;t3 

f^.2i-«.« 

-£   H   « 

o   3   s   -  » 

<^   Π = 

u^  Eo 

—  2     s 

3   3         S 


-E 

•-  3 

o  o 

B    « 

O    O   g 

^eS 

£  =.  <" 
S  ='« 

«  =  o 

s  <u  E 

u    ai  2 

■^■2 

?  P 

o  « 

-aïs 

s    c 

-E 
<!| 

"2  — 


SS 


3   „- 

■«  5  . 
e  E2 
<=■  E  '2 

.  —  -3 
^    3    _ 

-a  ■-  .£ 

C-3  ■- 
O    ^    ^ 


O  3 


324 


CONGRÈS   ARCIlÉOLOfilQUE   DE   FRANCE. 


c  o 

o  o 

d^» 

B     « 

<=  a 

z  « 

~  -^ 

£-" 

c   " 

o    63 

eu 

5.!- 

C    o 

WH 

WH 

•WH 

c,  c  5 


o   — 


œ  O  — 


■Ci  ,1;  ;;:; 

il  'iï 

'—    ^  -Cl 

£   3 


—    ^  «  ~ 


■^  i.  X 

S=  o 

~  =■2 

«"ô 

lî$ 

c  =  :z 

n  ® 

o   3 - 

<j  ~i  t/i 

"7" 

c—  o 

c  o  s 

«J  u  ^ 


o   &-i-  ^ 


£   =   3 

r  oj  3 


i;  e"4j 


es         ~- . 


rt  '^  —   [^  '^  .S  "O 


-a  ce  S^o 


ta     . 

o   °  ~ 

in 

g 

oc 

o 

TS     o     3 

S 

e 

Ë 

o 

o 

o 

■" 

3 

s  es 

II 

o 

«ta 

.   3« 

Cl,  5 

.■5 

"3  i 

^•3 

"3  "-^ 

S  "? 

1   t) 

g—  £? 

Ul     j. 

•>  — 

«   ■  — 

"   S  " 

o    3 

XL"    SESSION,    A   (niATEAUROUX.  325 

La  onzième  coupe,  qui  a  été  pratiquée  dans  le  chemin 
contournant  le  coteau  de  la  Théols,  présente  un  lit  irré- 
gulier de  pierres  calcaires.  Sous  la  pente  du  coteau  ou  des 
talus  (côté  droit),  les  terres  ont  recouvert  l'ancienne 
chaussée;  les  pierres  en  sont  très-fortes,  et  sur  plusieurs 
points  nous  y  avons  remarqué  les  traces  d'un  sillon  assez 
profond,  produit  par  le  passage  prolongé  des  roues  de 
voitures.  Dans  toute  l'étendue  de  cette  voie,  nous  n'avons 
trouve  nulle  part  la  plate-forme  ou  le  stratumen  limité 
par  des  pierres  de  bordures. 


Voie  d'hsoudun  à  Ernodurum,    près  de  Saint- Ambroix. 

Elle  n'est  que  la  continuation  de  la  précédente.  Elle 
part  de  l'extrémité  de  la  rue  Dardault,  suit  le  chemin 
actuel  de  Saint-Ambroix,  passe  au  sommet  de  l'embran- 
chement de  ce  chemin  avec  celui  de  la  Glaudincrie  ou  du 
Puy,  au-dessous  du  domaine  des  Maisons-Neuves,  qu'il 
laisse  à  gauche;  contourne  au  milieu  des  terres  les  coteaux 
par  des  courbes  très -développées;  laisse  à  droite  le 
domaine  du  Petit-May,  et,  par  un  grand  arc,  aboutit  au 
lieu  dit  le  carroir  d'Airain,  sur  la  voie  romaine  de  Bourges  à 
Poitiers,  à  150  mètres  environ  du  cimetière  gallo-romain 
de  la  cité  d'Ernodurum,  et  à  1  kilomètre  50  environ  du 
bourg  actuel  de  Saint-Ambroix,  sur  la  rive  gauche  de 
l'Arnon.  Le  carroir  d'Airain,  d'après  les  renseignements 
que  nous  avons  recueillis,  était,  avant  la  Révolution,  un 
emplacement  très- vaste,  couvert  de  pierres  au  milieu  des- 
quelles poussaient  des  bruyères  et  des  arbustes  sauvages. 
Le  premier  des  bâtiments  (jui  constituent  aujourd'hui  le 
domaine  aurait  été  construit  en  1788   ou   eu  1789.  Le 


326       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

cimetière  se  trouve  entre  le  carroir  et  l'ancienne  ville. 
Près  de  rembranchement  des  deux  voies  est  une  borne 
d'une  forme  particulière.  Elle  est  évidée  à  la  partie  supé- 
rieure, de  manière  à  former  trois  branches  d'une  égale 
épaisseur,  disposées  en  T  :  la  partie  inférieure  du  T  existe 
encore.  Le  jambage  ou  la  nervure  centrale  fait  face  à  l'axe 
de  la  chaussée  de  César  ;  la  partie  gauche  est  dans  la  direc- 
tion d'Issoudun,  et  l'autre  tend  vers  le  chemin  qui  conduit 
à  l'abbaye  de  la  Prée  ou  à  l'ancienne  commune  de  Gouers. 
Cette  borne  a  0""  70  de  hauteur,  0"°  37  de  largeur  et  0">  25 
d'épaisseur;  chaque  ailette  a  0"  13  de  largeur.  Elle  est 
placée  sur  un  lit  de  mortier  rose,  semblable  à  celui  qui  a 
été  employé  dans  les  constructions  d'Ernodurum.  Dans 
ce  ciment,  reposant  sur  le  tuf,  sont  mélangés,  comme 
témoins,  sans  aucun  doute,  des  morceaux  d'ardoises  ordi- 
naires, des  tuileaux,  du  charbon,  et,  ce  qui  est  assez 
étrange,  plusieurs  tessons  de  fonte  de0"15  environ  de 
longueur,  sur  0"  10  de  largeur  moyenne  et  0"  005 
d'épaisseur,  qui  proviennent  des  débris  d'un  vase  ou  d'un 
vaisseau  circulaire  quelconque. 

La  voie  dont  nous  nous  occupons  diffère,  par  sa  con- 
struction, de  toutes  celles  que  nous  avons  relevées.  Le 
tracé  en  est  bien  étudié.  Elle  tourne  les  petits  coteaux 
pour  éviter  les  mouvements  de  terre,  et  tous  les  aligne- 
ments droits  sont  reliés  entre  eux  par  des  courbes  d'un 
grand  rayon.  Elle  figure  en  quelque  sorte  un  lacet  dans 
tout  son  parcours.  L'empierrement  est  régulier.  Il  est 
généralement  composé  d'un  lit  de  pierres  plates,  recouvert 
par  des  pierres  concassées.  L'épaisseur  en  est  de  O^îiO  à 
0"  30.  A  trois  sondes  seulement,  deux  lits  de  grosses 
pierres  existent  seuls.  Des  pierres  calcaires,  plus  fortes 
que  les  autres,  fichées  debout  ou  de  champ,  limitent  par- 
tout la  largeur  de  la  chaussée  ou  stratumen.  Le  terrain  est 


XL"   SESSION,    A   CRATEAUROUX.  327 

calcaire,  et  le  rocher  est  très-rapproché  de  la  surface  du 
sol.  Dans  les  endroits  où  l'empierrement,  par  suite  des 
pentes  adoptées,  ne  pouvait  être  assis  convenablement  au- 
dessus,  le  roc  est  creusé  en  petites  tranchées  pour  l'y  dis- 
poser régulièrement.  La  largeur  de  la  plate-forme  est 
comprise  entre  5™  40  et  6™  40  ;  c'est  une  moyenne  de 
5"'90,  répondant  à  20  pieds  romains  de  0""296  chacun. 

Le   relevé   des  coupes    est    indiqué    dans   le   tableau 
ci-après. 


Observations  sur  une  ligne  présumée  d'issoudun  à  la  voie 
de  Bourges  à  Argentan  ou  à  Poitiers,  vers  le  sud. 

En  1864,  une  personne  ayant  un  caractère  otficiel, 
appartenant  au  monde  savant,  nous  fit  remarquer  que, 
d'après  la  Table  de  Peutinger,  la  distance  de  Bourges  à 
Alerta  (très-vraisemhlableraent  Ardentes-Saint-Vincent) 
serait  de  28  lieues,  tandis  que,  d'après  la  distance  réelle, 
elle  est  de  26  lieues  seulement.  L'existence  d'issoudun  à 
l'époque  gallo-romaine  étant  actuellement  prouvée,  elle 
présumait  qu'une  seconde  voie  pouvait  relier  cette  ville 
au  grand  chemin  de  Bourges  à  Poitiers,  vers  Ardentes. 
Dans  cette  hypothèse,  la  distance  de  28  lieues  correspon- 
drait à  la  ligne  brisée  d'Ernodurum  sur  Alerta,  par  Issou- 
dun  :  ainsi  se  trouveraient  justifiés  et  les  chiffres  de  la  carte 
et  ceux  de  ïltinéraire  d'Antonin.  Nous  devons  ajouter 
qu'en  suivant  cette  direction,  la  rive  gauche  de  la  ïhéols, 
sur  une  étendue  de  12  kilomètres,  on  trouve  les  villages 
de  Villardeau,  de  Villesaujon,  de  la  Villette,  dont  l'éty- 
mologie  dérive  évidemment  du  mot  villa.  Aux  Charme- 
Ions,  à  1  kilomètre  d'issoudun,  ou  a  mis  au  jour,  au  mo- 


328 


CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE 


^'*"" 

c5  r; 

=   = 

CI  ^ 

TO  ci 

aj 

S    S 

È  e 

s  S 

E    S 

z 

=  « 

oo 

o£, 

OO 

g 

*"  .. 

H 

=  iJ 

=  ii 

s  « 

=  .S 

^ 

< 
> 

2  -s;      • 

-2 

-2 

3  -CJ 

3 

2 

ca 

J'    t3J2 

Ë" 

?  >  e' 
.2  o  => 

•1—  c> 

C3 

S-r  •• 

■§.u 

Ci.u 

0.t. 

O 

> 

3    oj 

SES 

«  cTi 

1 

— '  t« 

e!>   p   S 

U 

"  o  i  t. 

s  s 

*.-   l- 

■r;  o 

eg 

t;  o  « 

C3    Crt 

^'g'2> 

l'S 

u 

il 

. 

2=5S 

o—  ,- 

« 

^^~=^ 

«2  - 

'U 

sa.2 

s 

o  ^  r 

-C3 
Cl    „ 

■^ 

««  S  «* 

o 

§  t^.So 

Ë   -o 
■a  ca 

z 

< 

1'=^^ 

..r.-'^ 

u 

o 

O 

eu 

s 
o 
o 

3 
O 

3 
z 

X 

c 

C 

calcaires  concass 
e  noix  à  celle  d'un 
e  bordures  très-foi 
Il  de  la  localité. 

■S  H,— 

C-_-3 
•3   =-.^ 

3 
C" 
p 

5 
g 

o 

2 

o 

ils  de  pierres  plat 
'empierrement   qii 
able  au  précédent. 
ni(:nie  nature  que 

2 
"S 

o 

o  S 
11 

0 

Ë 
0 
a) 

3 
il 

2 

Ô 

c^  s   '^'S 

o 

o 

""  "~3  aj 

o  5 

||| 

£ 

i 

S  o  ?  £ 

.C   0-3 

2 

f 

"T 

« 

■3 

-§    1 

J5 

o 

O 

O 

0 

0 

»! 

3 

E 

e 

E 

s 

s 

O 

O 

o 

O 

0 

0 

\  <^ 

H 

1  '-^ 

Z 

1- 

^^ 

u 

1  2 

^ 

"■ 

■""" 

~ 

~~" 



s. 

II 

1 

o 

S 

(C 

1 

2     3 

s; 

o 

O 

0 

0 

ce 

( 

.2     3 
O 

C 

- 

o 

F 

e 
0 

s 
c 

K. 

V. 

a 

\ 

•3 

■^ 

w 

Ç£ 

H 

o 

o 

0 

0 

Ë 

.«r 

m 

m 

1 

œ 

T 

Ë^ 

S 

B 

\ 

iri 

0 

0 

\ 

\ 

^ 

rt  3    " 

a   ' 

wî      --  ,.-  C) 

, 

« 

3    1    ^ 

—  —   3 

'^^  ^ 

«'5    5^   = 

O 

ô 

■3   2 

o 

o   '  O     . 

■iS-E-- 

i 

•3 
3 

'E 

■3 

_-^  "S 

ai 
P 
es 
o 

Q 

c 

.  3  4;  j, 

•3    "".S 
s   =   3c« 

'"   'i  >-'- 

~   =   3 

■— .—  "3 

|_-3 

•3   O 

3«,  '.•  et  H'  sondes 
sur  une  étendue  de  1! 
la  dernière  à  la  rencc 
avec  la  voie,  d'une 

5 

es 

es 

3 

•3 

3 
û 

"3 

Ë^ 
Cl 

< 

tb  -p 

S. 

"'••  sonde.  Au  bor 
chemin    de  la   Clau 
rie  au  Petit-Tassay 
la  Bruère. 

XI."    SKSSION,    A    CHATEAIIROU.X. 


329 


"■ 

"^ 

^^ 

■^ 

1    ■«    .    a) 

»0  ô 

O  O 

d  d 

f>\  _ 

m  -T 

Cl  — 

co 

e  e 

S  e 

B    B 

Z 

o  o 

oo 

O  O 

M     r'."^    ?! 

c 

•".2      .t! 

-^    «    '-'    03 

H 

é 

a 

s'^  3  s 
u  '  a,  a 

as 

a; 

2 

as 

ES 

C  ta 

■« 

" 

t-,  ^ 

•-  =  »« 

CQ 

Cuu 

Cl. 

a«u 

I-.2  g  s  ^ 

O 

S  fe 

a  fe 

Efe 

WH 

WH 

WH 

o;    Um 

Vï     L- 

O)     1 

—     lO 

, 

13  3 

■S  s 

f   S3 

£Ê 

0) 

a 

a  o 

e-'^ 

^-  co 

Cl.ffl 

Oj   «  .^ 

Ci. 

■o 

3 

u 
■w 

£-3 

0)  s 

£•3  c. 

!! 

3 

3 

O 

se 

o 

5 

0)  — 

-a  s 

3 

«Se 

s 

S 

■3 

'o 

1 

3 

on 
O 

a. 

o 
u 

■S!  « 

3 

jj   o_« 

o  >- 

u 

O 

ci 

O 

c 

2 

o 

"Si  i 

«  o. 

5 

2 

«  i 

3 

.sis 

£.« 
«  r 

.2  si 

à 

2 

s  ^  o 

-   3-= 

11.2 

« 

•3 

S 

'5 

<u 

'A 

ô 

2 

•4: 

S  il 

'"^St3 

ci 

S 

3  t- 
~    O 
C"-" 

«c  S 

B. 

_o 

«2 

S. 

3.- 

s 

o 

ci: 

O) 

£ 

hJ  è 

c 

o.è 

o 

1-'  -CJ  s 

u 

« 

•o 

^.2 

'S. 

S 

a 

%  » 

3 

> 

"E. 

- 

'S. 

/ 

/ 

/ 

c 

aj 

j 

"O 

o 

.JS 

" 

^ 

o 

3 

• 

« 

* 

B 

B 

• 

• 

ce 

U) 

O 

o 

O 

H 

;j 

, 

^^ 

S 

H 

à. 

« 

S 

ce 

1  •« 

a 

5 

3 

1 

if: 

3.» 

o 

oe 

ac 

o 

"O 

CT 

ci 

M 

o 

o 

03 

e 

S 

a 

e 

E 

a 

1 

3 
o 

o 

o 

o 

o 

o 

S 

\ 

13 

H 

E 

o 

o 

o 

o 

O 

o 

ce 

•^ 

r~ 

t~ 

îO 

O 

e 

B 

B 

E 

a^ 

s 

• 

\ 

w 

lO 

«o 

iîî 

ïfî 

\ 

_   ^ 

~ 

, 

«" 

^ 

to    1 

t« 

v^  s  -a 

^ 

5  c 

■^ 

•a 

^^ 

f— > 

g 

£ 

3 

cd 

« 

C 

.; 

5 

O 

■3 

a) 

^^:^ 

S 

3 

■3   OS   !" 

O 
ce 

c 

ç 

u 
C 

T3.S  .«T 

5 
3    . 

o 

c 
o 

T3 

0-3 
ce   3 

<î 
i    3 

?  -'^ 

s 

ce 

O 
O 
3 
u 

^b' 

«  O 
—  O 

il 

IG*   sonde.   Lieu 
Carioir-d'Aiiaiii, 
de  la  voie  de  Boi 
Poitiers. 

•  ^  -3 

d 

5>^ 

3 

—  rt 

si 

c 

«■  .■=  a 

CI 

s   V 

'C 

■3 

■ïH 

C 

CJ 

- 

0-3 

- 

330       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ment  de  nos  investigations,  de  vastes  substructions,  des 
débris  de  poteries  considérables,  et,  formée  par  des  tuiles 
romaines  presque  entières,  une  bière  pleine  d'ossements 
calcinés  par  la  chaux. 

Malgré  ces  présomptions,  les  recherches  que  nous  éten- 
dîmes, pendant  trois  ans,  sur  les  deux  côtés  de  la  rivière, 
furent  sans  résultats  fructueux.  Sauf  quelques  débris 
d'antiquités  gallo-romaines,  qui  démontrent  que  des  villx 
richement  décorées  étaient  élevées  sur  ses  bords ,  nous 
n'avons  rien  obtenu  d'intéressant  pour  la  science.  Des 
vestiges  épars  prouvent  qu'à  Brives  il  devait  exister  un 
centre  de  population  assez  important.  Nous  y  avons  trouvé 
de  nombreux  fragments  de  tuiles  et  un  chapiteau  d'ordre 
corinthien.  A  peu  de  distance  du  centre  du  bourg,  on  a 
trouvé  également,  près  d'une  bière  en  pierre,  à  1"  50 
environ  au-dessous  du  sol,  des  morceaux  de  vases  antiques 
d'une  forme  très-élégante  et  d'une  excessive  légèreté,  ainsi 
qu'un  cadran  solaire  en  pierre,  dont  le  style  seul  était 
brisé.  On  y  rencontre  fréquemment  des  monnaies  romai- 
nes des  différents  empereurs.  Près  de  Brives  est  aussi  un 
camp  romain. 

Sur  la  rive  droite  du  même  cours  d'eau,  les  restes  d'une 
villa  très-vaste  ont  été  découverts  par  nous,  à  1 ,200  mè- 
tres environ  d'Issoudun,  au  lieu  dit  Chapitre.  Les  débris 
de  toute  sorte  qui  y  existaient  prouvent  l'opulence  de  ses 
anciens  habitants.  Une  partie  de  l'hypocauste  était  encore 
entière  ;  quantité  de  morceaux  <le  tuyaux  en  forme  de 
parallélogrammes,  dont  quelques-uns  bien  conservés,  qui 
conduisaient  la  chaleur  dans  les  appartements,  en  ont  été 
exhumés.  De  petits  compartiments  étaient  dallés  en 
carreaux  d'argile  cuite  striés  élégamment.  Les  plus 
remarquables  ont  été  détruits  en  une  nuit  par  des  mains 
inconnues.  Le  torse  d'un  homme,  au-dessus  de  grandeur 


XL*    SESSION,   A   CHATEAUROUX.  331 

naturelle,  d'une  bonne  facture,  gisait  parmi  les  décom- 
bres. Une  médaille  de  Galerie  en  a  été  retirée.  Des  diffi- 
cultés étrangères  à  ce  sujet,  ne  nous  ont  pas  permis  d'en 
suivre  toutes  les  fondations  et  d'en  faire  le  relevé. 

Préoccupé  toujours  cependant  de  notre  but  principal, 
nous  avons  remarqué,  à  la  fin  de  d869,  à  l'embranche- 
ment d'un  petit  chemin  sinueux  situé  entre  les  villages 
des  Dormillons  et  de  Villardeau,  à  0"  30  dans  le  sol,  un 
lit  de  pierres  plates  près  desquelles  étaient  des  pierres  plus 
grosses,  renversées.  Ces  indices  informes  pouvaient  se 
rapporter  à  un  point  de  la  voie  que  nous  cherchions,  et 
nous  allions  dans  cette  prévision  nous  livrer  à  de  nouveaux 
travaux  quand  nous  quittâmes  Issoudun.  Nous  croyons 
devoir  signaler  cette  circonstance,  quelque  problématique 
qu'elle  soit,  pour  ne  rien  laisser  dans  l'inconnu. 


Voie  de  Bourges  à  Poitiers,  par  Argentan, 
dite  chaussée  de  César. 


En  1819,  le  Gouvernement  s'occupa  officiellement  de 
la  recherche  de  nos  antiquités  nationales.  Des  instruc- 
tions, auxquelles  était  joint  un  questionnaire  rédigé  par 
l'Académie  des  Inscriptions  et  Belles-Lettres,  furent  adres- 
sées à  MM.  les  Préfets.  M.  de  Vérigny,  alors  préfet  de 
l'Indre,  fit  relever  le  tracé  de  la  voie  romaine  de  Bourges 
à  Poitiers,  dans  l'étendue  du  département,  par  M.  de 
Limay,  ingénieur  en  chef  des  ponts  et  chaussées.  Les 
mémoires  rédigés  à  l'appui  par  ces  Messieurs  ont  été 
déposés  l'année  suivante  dans  les  archives  de  la  même 
académie.  Cette  voie,  qui  est  encore  presque  en  entier  en 
relief   au-dessus    du  sol,  est   indiquée  sur  la  carte  du 


332       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

dépôt  de  la  guerre.  Le  tracé  en  est  généralement  très- 
régulier;  en  voici  la  direction  : 

Elle  traverse  l'Arnon  à  Saint-Ambroix  ;  elle  passe  au 
carroir  d'Airain,  où  s'embranche  la  voie  d'Issoudun;  elle 
laisse  le  bourg  de  Chouday  à  droite  et  celui  de  Ségry  à 
gauche,  saute  un  des  affluents  de  la  Théols,  près  de  la 
Planche  à  UOuaille  ;  traverse  Brives  à  droite  du  camp 
romain,  laisse  le  bourg  de  Vouillon  à  gauche,  passe  dans 
le  bois  de  Fratis,  et  aboutit  à  Ardentes,  après  avoir  coupé 
les  brandes  de  Blards  et  un  vaste  camp  d'une  disposition 
toute  particulière.  Ce  camp,  établi  au  niveau  du  sol,  pré- 
sente une  partie  plane  d'environ  200  mètres  de  longueur, 
sur  150  mètres  de  largeur,  qui  est  entourée  de  tous  côtés, 
sur  une  étendue  approximative  de  300  à  400  mètres,  d'un 
grand  nombre  de  trous  en  forme  de  cônes  tronqués  ren- 
versés. Ils  ont  2  mètres  environ  de  diamètre  et  O^OO  de 
profondeur  :  quelques-uns  néanmoins  sont  pluî  larges  et 
plus  profonds.  Ils  sont  disposés  en  quinconce,  mais  irré- 
gulièrement, et  la  terre  en  provenant  est  retroussée  sur 
les  bords.  La  voie  de  Bourges,  qui  le  traverse,  le  divise 
en  deux  parties  inégales.  Une  description  plus  détaillée 
en  est  donnée  dans  une  petite  notice  spéciale,  à  laquelle 
un  plan  est  joint.  • 

Dans  la  commune  de  Chouday,  la  voie  a  été  emportée 
et  détruite  par  les  vignerons,  vers  les  années  1853  et 
18n4.  Les  pierres  calcaires  qu'ils  en  ont  extraites  montrent 
qu'elle  avait  à  cet  endroit  un  stratumen  régulier,  limité 
par  des  bordures.  Ailleurs,  aux  points  où  nous  l'avons 
lait  couper,  elle  est  formée  de  béton  composé  de  chaux  et 
de  sable  de  rivière,  contenant  de  petits  cailloux  de  la  gros- 
seur d'une  balle  de  fusil  à  celle  d'un  petit  œuf  de  poule, 
mais  ces  derniers  en  petite  quantité  :  c'est  du  béton  dont 
la  base  est  du  gros    gravier.  L'épaisseur  moyenne  est 


XL*   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  333 

de  0"  45.  Au-dessous  le  sol  paraît  avoir  été  très-rafrcrmi 
artificicllemeut. 

Observations  générales. 

Le  mode  de  construction  des  voies  que  nous  avons  étu- 
diées diffère  peu  l'un  de  l'autre  ;  le  principe  général  en 
est  le  même.  Des  pierres  plates  de  diverses  natures  en 
forment  la  plate -forme  inférieure  ou  stratumen  ;  d'autres 
la  pierres  concassées  de  ditférentcs  grosseurs  en  composent 
seconde  couche  ;  au-dessus  est  la  terre  végétale.  Ce  système 
n'est  pas  invariable  :  en  plusieurs  points  le  stratumen 
théorique  manque,  et  tout  l'empierrement  est  formé  d'un 
mélange  de  petits  matériaux.  Une  largeur  régulière  ne 
semble  pas  avoir  été  une  règle  fixe.  Néanmoins  elle  peut 
avoir  été  de  8  mètres  pour  la  voie  de  Tours  à  Bourges,  et 
de  6  mètres  pour  les  autres  ;  au  moins  ces  dimensions 
existent  dans  les  endroits  où  les  pierres  de  bordures  limitent 
la  chaussée.  Pour  la  belle  voie  d'Issoudun  à  Saint- 
Ambroix,  dont  la  base  est  déterminée  partout,  elle  varie 
d'un  mètre  et  est  comprise  entre  5™  40  et  6"  40.  Toutefois 
la  moyenne  donne  exactement  20  pieds  romains,  comme 
nous  l'avons  indiqué. 

Tous  ces  grands  chemins  suivent  l'inflexion  du  terrain 
sur  lequel  ils  reposent  ;  les  parties  qui  en  restent  sont, 
à  de  rares  exceptions  couvertes  de  0"  15  à  0"  20  de 
terre.  Il  n'y  a  point  de  tranchées  faites  sur  le  sommet 
des  coteaux,  ni  de  remblais  élevés  dans  les  vallées  pour 
en  adoucir  les  pentes.  Sur  le  coteau  seul  de  Chabris,  la 
voie  est  à  0°  50  de  profondeur  ;  mais  les  débris  de  toute 
espèce  qui  sont  amoncelés  sur  l'empierrement  prouvent 
que  la  terre  arable  a  été  exhaussée  par  la  «^.ulture,  etc.,  et 


334      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

qu'autrefois  le  pavemeat  était  plus  rapproché  de  la  sur- 
face du  sol.  Les  coudes  sont  brusques;  nous  n'avons 
remarqué  nulle  part  de  ces  grands  arcs  qui  relient  les 
alignements  droits  entre  eux. 

La  voie  de  Levroux  à  Issoudun  est  la  plus  irrégulière- 
ment construite  à  tous  les  points  de  vue.  Celle  de  Bourges 
à  Tours  est  préférable,  quoique  ayant,  avec  celle-ci,  sur 
certains  points,  une  grande  analogie,  tant  sous  le  rapport 
de  la  direction  que  sous  celui  de  la  composition  de  l'em- 
pierrement. Le  tracé  des  deux  embranchements  de  cette 
dernière  artère  sur  Villefranche  paraît  mieux  étudié  ; 
pourtant  il  serait  indispensable,  avant  de  se  prononcer, 
d'en  poursuivre  le  relevé  sur  une  étendue  plus  grande 
que  celle  qui  se  rapporte  à  l'arrondissement  d'Issoudun, 
Les  pierres  du  stratumen  de  l'un  de  ces  chemins,  celui  de 
Graçay ,  n'est  disposé  qu'en  une  seule  couche  ;  elles 
paraissent,  dans  plusieurs  parties,  avoir  été  déplacées  de 
leur  position  primitive  ;  elles  sont  généralement  plus 
larges,  plus  épaisses  que  les  autres,  et  constituent  de 
véritables  dalles.  Elles  sont  brutes,  irrégulières,  et  ont  été 
disposées  sur  le  terrain  naturel  sans  aucun  travail  prépa- 
ratoire. Le  stratumen  du  chemin  se  dirigeant  vers  Dun 
ne  présente  aucune  disposition  spéciale  et  ne  diffère  pas 
sensiblement  de  celui  de  la  voie  de  Tours. 

La  voie  d'Orléans  ou  de  Ghabris  à  Levroux  et  à  Argen- 
ton  par  Parpeçay,  le  Pont-du-Rios  et  Pou  laines,  est  mieux 
construite  que  les  deux  premières  ;  cependant  elle  l'est 
moins  encore  que  celle  de  Ghabris  vers  le  sud-ouest,  à 
(Poitiers?),  par  Varennes.  La  largeur  de  celle-ci  paraît 
avoir  été  de  6  mètres,  et  une  plate-forme  régulière,  com- 
posée de  deux  couches  de  pierres  plates,  devait  exister 
partout.  Mais  rien  n'approche  de  l'état,  ainsi  que  nous 
l'avons  fait  remarquer,  du  chemin  d'Issoudun  à  Ernodu- 


XL"    SESSION,    A   CHATEAUROUX.  335 

rum.  Il  a  été  construit  dans  un  ordre  d'idées  bien  diffé- 
rent des  préceptes  qui  ont  dirigé  les  constructeurs  des 
lignes  précédentes.  Une  courbe  d'un  grand  développement 
le  reliait  à  celui  de  Bourges  à  Argenton,  dite  chaussée  de 
César,  qui  incontestablement  était  construite  alors.  Le 
cimetière  gallo-romain  situé  à  la  base  du  talus  devait 
être  établi  également.  Sans  la  convenance  d'embrancher 
la  voie  d'Issoudun  en  avant  du  lieu  destiné  aux  sépul- 
tures, une  direction  plus  droite  lui  eût  probablement  été 
donnée  pour  aboutir  à  Ernodurum. 

Comme  conclusion,  nous  signalerons  une  circonstance 
assez  particulière,  c'est  que,  latéralement  à  toutes  ces 
voie?,  soit  à  droite,  soit  à  gauche,  il  existe,  à  une  faible 
distance  un  chemin  qui  a  probablement  été  ouvert  quand 
elles  ont  été  abandonnées  ;  elles  en  sont  même  quelquefois 
traversées.  Ces  chemins  aujourd'hui  sont  généralement  peu 
fréquentés,  abandonnés  ou  labourés  :  dans  ce  dernier  cas 
les  traces  sont  très-visibles  pour  un  œil  un  peu  exercé. 
Dans  les  plaines  couvertes  de  pierrailles  des  communes  de 
la  Champenoise  et  de  Lizeray  on  en  perd  la  piste  ;  on  le 
remarque  pourtant  encore  à  certains  endroits,  et  on  le 
suit  facilement  sur  Saint-Valentin.  Sur  Issoudun,  l'assiette 
n'en  a  pas  été  changée.  Entre  cette  ville  et  Saint-Ambroix, 
le  chemin  qui  serpentait  autour  de  la  voie  était,  il  y  a  peu 
de  temps,  dans  le  plus  mauvais  état,  et  offrait,  en  hiver, 
des  parties  vraiment  infranchissables.  On  se  demande,  par 
exemple,  comment  l'ancienne  chaussée  romaine,  si  solide- 
ment construite,  que  nous  avons  trouvée  presque  intacte 
dans  ses  anciennes  dimensions,  a  pu  être  complètement 
abandonnée,  couverte  de  terre,  pour  suivre  à  côté  une 
ligne  aussi  défectueuse  ? 

Tl  serait  actuellement    très-important  de  chercher  à 
déterminer  l'époque  probable  de  lu  construction  de  ces 


330        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

grandes  routes  dans  notre  Berry,  et  de  connaître  celles  qui 
peuvent  être  attribuées  aux  Gaulois, 

Dans  ses  observations  sur  la  carie  de  Peutinger^ 
M.  Ernest  Desjardins  établit  que  Tasciaca^  Gabris  et  Ava- 
ricum  sont  des  noms  d'origine  gauloise,  et  que  ces  loca- 
lités existaient  avant  le  règne  d'Auguste.  Cette  opinion, 
en  ce  qui  concerne  Chabris,  confirme  celle  de  M.  de  la 
Saussaye,  qui  suppose  que  le  vicus  gaulois  était  sans 
doute  sur  la  rive  gauche  du  Cher,  et  que  les  Romains, 
pour  déplacer  l'esprit  de  localité,  ont  fondé  de  l'autre  côté, 
à  2  kilomètres  plus  loin,  l'établissement  de  Gièvres.  Il 
attribue  aux  conquérants  de  la  Gaule  le  changement  du  g 
en  ch,  du  mot  Gabris,  par  conséquent,  en  celui  de 
Chabris. 

Nous  ignorons  si  ces  trois  villes,  à  l'époque  de  l'indé- 
pendance, étaient  reliées  entre  elles  par  un  chemin  ferré. 
Les  Gaulois  en  avaient  incontestablement,  et  avaient  aussi 
élevé  des  ponts  sur  les  cours  d'eau  qui  en  étaient  traversés^ 
La  réunion  de  ces  preuves  exigerait  des  développements 
qui  nous  entraîneraient  bien  loin,  et  qui  seraient  inutiles 
aux  personnes  qui  connaissent  l'histoire.  Les  considéra- 
tions que  présentent  à  ce  sujet  M.  Raynal,  dans  son 
Histoire  du  Berry,  nous  paraissent  très-exactes.  Les 
anciennes  routes  ont  été,  par  les  Romains,  utilisées  amé- 
liorées et  rectifiées,  pour  être  appropriées  à  leur  système 
de  viabilité.  On  sait  qu'Auguste,  ou  son  ministre  et  son 
gendre  Agrippa,  fit  construire  quatre  grandes  voies,  dont 
la  direction  était  étudiée  pour  traverser  le  plus  de  villes 
possible  ;  que  de  nombreux  rameaux  secondaires  s'en 
détachaient  pour  établir  dans  tout  le  reste  du  pays  de  faciles 
relations.  Bourges,  capitale  de  la  cité  des  Bituriges  et  de 
la  première  Aquitaine,  était  le  point  où  venait  conver- 
ger le  réseau  des  grandes  communications  des  contrées 


XL»   SESSION,    A    CnATEAUROUX.  337 

environnantes.  M.  de  la  Saussaye  suppose  que  la  voie 
d'Autun,  par  Bourges,  Chabris  et  Tours,  fut  une  des  pre- 
mières que  les  Romains  construisirent  dans  nos  contrées. 
Elle  lui  «  parait  remonter,  comme  route  fréquentée,  à  une 
haute  antiquité,  si  l'on  peut  tirer  des  inductions  de 
son  établissement  sur  les  rives  du  Cher  et  du  grand 
nombre  de  médailles  gauloises  que  l'on  rencontre  dans 
tout  son  parcours.  » 

Cette  voie  et  celle  de  Bourges  à  Argenton  sont  seules 
indiquées  sur  la  Carte  de  Pentinger.  Les  principes  de 
construction  qui  ont  été  appliqués  pour  l'une  et  pour 
l'autre  difTèrent  essentiellement.  Le  chemin  de  Bourges 
n'ofîre  aucune  régularité  bien  arrêtée  dans  le  tracé  ni 
dans  l'empierrement  ;  il  paraît  au  moins  avoir  été  exécuté 
à  la  hâte,  avec  les  matières  trouvées  sous  la  main,  sans 
préparation,  sans  études  préalables.  La  seconde  voie,  au 
contraire,  bien  que  n'offrant  pas  partout  l'unité  de  com- 
position, montre  des  dispositions  fixes  et  une  solidité  bien 
supérieure  à  la  première.  Elle  est,  sauf  de  rares  excep- 
tions, dans  l'arrondissement  d'Issoudun  et  même  jusqu'à 
Ardentes,  en  relief  au-dessus  du  sol,  La  facture  des  con- 
structeurs habiles  y  est  reconnue  dans  toute  l'étendue. 
L'établissement  de  ces  deux  artères  ne  paraît  donc  pas  devoir 
être  rapporté  à  la  même  époque.  Les  principes  invariables, 
quoique  subordonnés  aux  ressources  des  localités,  qui 
découlent  de  la  centralisation  romaine  ne  permettent  pas 
de  le  supposer.  Dans  une  même  contrée  on  doit  trouver 
peu  de  différence  entre  les  constructions  de  cette  nature, 
élevées  dans  le  même  temps.  Les  tranchées  pratiquées 
dans  une  autre  voie,  d'Argenton  à  Poitiers,  par  M.  de  la 
Tremblais  [Compte  rendu  de  la  Société  du  Berry,  année 
1864),  le  prouvent  suffisamment.  Quand  Auguste  eut 
achevé  l'organisation   administrative  de  la   Gaule,   des 

XL^  SESSION.  2-2 


338       CONGRÈS  AUCHÉOI.OGIOUE  PE  FRANCE. 

débouchés  furent  iiuniédiatemeut  ouvert?  pour  rattacher 
entre  eux  les  divers  centres  de  population  qu'il  avait  créés 
ou  déterminés.  La  plus  grande  activité  fut  apportée  à 
l'accomplissement  de  cette  œuvre  de  transformation. 

On  connaît  les  moyens  d'action  dont  les  Romains  fai- 
saient usage  dans  ces  travaux,  et  la  rapidité  d'exécution 
qui  devait  en  être  la  consequen.ee.  Rien,  à  ce  qu'il  paraît, 
ne  fut  épargné  pour  y  parvenir.  Auguste,  écrit  Rondelet 
dans  VArt  de  bâtir  (2"  vol.,  livre  IV,  chap.  I"),  employa 
les  légions  à  réparer  les  grands  chemins  déjà  existants  et 
à  en  construire  de  nouveaux.  Il  fit  fondre  les  statues  d'ar- 
gent qui  lui  avaient  été  décernées,  pour  les  employer  à 
ces  travaux,  et  il  imposa  également  des  chemins  à  réparer 
aux  citoyens  éminents  qui  avaient  obtenu  les  honneurs 
du  triomphe.  La  quantité  de  voies  construites  ou  amélio- 
rées sous  son  règne  dut  être  considérable.  Quelques  aniiées 
après,  Tibère  fit  réparer  à  ses  frais  les  routes  de  la  Gaule 
et  de  l'Espagne.  Il  est  incontestable  que  Bourges  n'a  pas 
été  laissé  en  dehors  de  ce  système  de  viabilité,  et  que  les 
voies  qui  en  sortaient  datent  de  cette  époque  ou  y  sont 
antérieures.  Argenton  également  était  une  localité  très- 
importante,  et  cinq  grandes  routes  y  aboutissaient. 

Si  une  origine  gauloise  est  assignée  à  la  voie  de  Tours 
à  Autun  par  Bourges,  celle  de  Levroux  à  Issoudun,  qui 
montre  avec  celle-ci  la  plus  grande  analogie,  quoique  y 
étant  inférieure  par  le  tracé,  devrait  y  être  rapportée  éga- 
lement. Levroux,  autrefois  Gabata,  était  un  oppidum 
considérable.  Le  résultat  fructueux  dés  fouilles  opérées 
par  M.  Lemaigre,  dont  nous  avons  déjà  parlé,  pendant 
une  durée  de  plus  de  soixante  ans,  le  met  hors  de  doute. 
Pour  Issoudun,  nous  n'avons  que  de  faibles  conjectures, 
sans  pouvoir  invoquer  de  documents  sérieux.  L'assertion 
de  Léon  Chaumeau,  qui  énonce,  dans  son  Histoire  du 


XL«   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  339 

Berry,  que  la  ville  et  le  château  furent  brûlés  par  les 
Berruges,  lorsque  Jules  César  mit  son  siège  devant  Ava- 
ricum,  ne  paraîtra  peut-être  pas  une  preuve  suffisante  aux 
archéologues  pour  décider  la  question.  Si,  par  suite  d'étu- 
des comparatives  sur  ces  anciens  chemins,  on  parvient  à 
déterminer  les  périodes  dans  lesquelles  ils  ont  été  établis, 
une  partie  du  voile  qui  couvre  encore  l'origine  de  bien  des 
villes  sera  soulevée.  On  aperçoit  de  quelle  importance  ces 
études  seraient  pour  la  science  archéologique. 

Nous  classerions  la  voie  d'Orban  à  Poitiers  et  d'Orléans 
à  Limoges,  par  Chabris,  à  une  ère  de  transition,  entre 
l'époque  gauloise  et  le  règne  d'Auguste.  La  construction 
rapproche  beaucoup  de  celle  de  Bourges,  quoique  le  tracé 
en  soit  mieux  étudié  et  l'empierrement  généralement  plus 
régulier.  La  médaille  de  cet  empereur  trouvée  dans  les 
fondations  du  pont  du  Rios  serait  un  indice  qui  prouve- 
rait en  faveur  de  notre  opinion.  Quant  à  celle  d'issoudun 
à  Ernodurum,  elle  est  incontestablement  plus  moderne, 
postérieure  à  celle  de  Bourges  à  Argenton.  Si  l'on  en  juge 
par  les  morceaux  d'architecture  qui  ont  été  exhumés  de 
la  rue  du  Château,  il  y  a  une  quinzaine  d'années  (voir 
les  notices  rectifiées  de  V Annuaire  de  l'Indre,  1863  et 
1865),  Issoudun  avait  une  certaine  importance  sous  les 
Romains.  La  voie  d'Ernodurum  pourrait  être  contempo- 
raine des  monuments  auxquels  ils  appartenaient.  Ces 
hypothèses,  quelle  qu'en  soit  la  valeur,  sont  données  par 
nous  sans  esprit  de  système. 

Par  suite  des  désordres  profanes  qui  suivirent  le  règne 
des  Antonins,  sous  lequel  la  Gaule  fut  si  prospère,  et  se 
couvrit  de  monuments  de  toute  espèce,  les  routes  furent 
sans  doute  abandonnées  sans  entretien  pendant  long- 
temps. A  l'époque  où  Mannert  fixe  la  constitution  de  la 
Carte  de  Peutinger,  en  l'an  230,  elles  étaient,  dans  une 


340  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

partie  de  la  province  du  Berry  au  moins,  dans  le  plus 
mauvais  état.  iM.  Raynal  rapporte  une  inscription  trouvée 
à  Trouy,  à  8  kilomètres  de  Bourges,  par  laquelle  on  voit 
que  Maximin,  successeur  d'Alexandre  Sévère,  ordonne, 
vers  l'an  236,  de  réparer  les  voies  et  les  ponts  qui  tombent 
de  vétusté. 

Nous  ajouterons,  en  terminant,  que  nous  n'avons  pas 
eu  d'autre  prétention,  en  nous  livrant  à  ce  long  travail, 
que  de  constater  des  faits  certains.  Nous  pensons  que  les 
quelques  réflexions  qui  terminent  cette  notice  ne  déna- 
turent pas  notre  pensée.  C'est  aux  savants  qui  s'occupent 
de  l'étude  de  nos  antiquités  nationales,  qu'il  appartient  de 
rassembler  toutes  les  données  éparses  recueillies  sur  ce 
sujet,  de  les  grouper  par  contrées,  de  les  discuter,  de  cher- 
cher à  dégager  la  vérité,  et  de  faire  renaître,  s'il  est  pos- 
sible, une  partie  de  la  topographie  de  l'ancienne  Gaule. 

M.  le  Directeur  de  la  Société  Archéologique  félicite 
M.  Gu illard  de  ses  recherches,  et  l'engage  à  rédiger  ses 
notes,  pour  en  former  un  travail  qui  sera  publié  dans  le 
compte  rendu  général.  Il  constate  avec  satisfaction  que  le 
relevé  des  voies  romaines  du  département  est  fait  en 
grande  partie,  et  exprime  le  désir  qu'il  soit  promptement 
achevé. 

La  quinzième  question  du  programme  est  mise  à 
Tordre  du  jour. 

M.  l'abbé  Damourette  se  présente  pour  la  traiter,  et 
examine,  par  de  savantes  recherches,  si  le  sarcophage 
trouvé  récemment  dans  un  des  conditorium  de  l'église  de 
Déols  peut  être  considéré  comme  étant  réellement  le 
tombeau  de  saint  Léocade.  Selon  son  opinion,  partagée 
du  reste  par  le  Congrès,  les  fragments  retrouvés  dans  un 


XL"  SESSION,    A   CHATEAUROUX.  341 

lieu  désigné  par  une  tradition  antique,  par  les  assertions 
obstinées  des  vieux  historiens  et  surtout  par  la  vénération 
du  peuple,  comme  étant  le  lieu  de  sépulture  de  Leocadius 
sont  bien  réellement  les  fragments  du  monument  dans 
lequel  cet  illustre  personnage  fut  inhumé. 

Plusieurs  membres  du  Congrès  examinent  ensuite  à 
quelle  époque  appartiennent  les  sarcophages  des  deux 
conditorium.  Ils  portent  les  caractères  du  m"  siècle,  et 
datent  de  l'époque  qui  suivit  l'incinération.  L'illustre 
M.  de  Rossi,  à  qui  un  dessin  exact  du  sarcophage  de  saint 
Lusor  fut  soumis,  le  plaça  entre  le  m'  et  le  iv**  siècle. 
M.  de  Gougny  déclare  avoir  vu  à  Arles  des  monuments 
similaires,  accusant  le  même  type,  qui  appartiennent  à 
l'époque  précitée.  M.  le  Directeur  donne  aussi  l'explica- 
tion de  deux  chiffres  gravés  à  la  partie  supérieure  du 
sarcophage  de  saint  Lusor.  D'après  lui,  ces  deux  chitïres 
désigneraient  les  dimensions  du  lieu  de  la  sépulture. 

M.  Fauconneau-Dufresne  expose  les  sacrifices  que  M.  le 
curé  de  Déols  s'est  imposés  pour  la  restauration  des 
cryptes  de  son  église.  Il  semble  que  son  zèle  pour  la  reli- 
gion et  l'archéologie  sacrée  méritent  de  la  part  de  la 
Société  une  véritable  reconnaissance.  Le  Congrès  déclare 
s'associer  bien  volontiers  aux  sentiments  exprimés  par 
M.  Fauconneau-Dufresne. 

M.  le  Président  demande  à  M.  de  Laurière,  inspecteur 
général  de  la  Société  française  d'Archéologie,  quelles  ont 
été  ses  observations  sur  les  cryptes  de  Déols  et  sur  leur 
restauration . 

i\I.  de  Laurière  fait  observer  que  ces  cryptes  ne  sont  pas 
des  cryptes  dans  le  vrai  sens  du  mot  ;  ce  sont  seulement 
des  caveaux  rectangulaires  situés  en  dehors  de  l'abside  de 


34-2       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

l'église;  de  sorte  que  l'on  ne  doit  pas  y  chercher  la  dispo- 
sition caractéristique  des  cryptes  destinées  à  recevoir  des 
tombeaux  surmontés  d'un  autel. 

M.  Cattois  fait  part  au  Congrès  des  impressions  qu'il  a 
ressenties  en  visitant  l'église  principale  qui  se  construit  à 
Chàteauroux. 

Il  s'est  demandé  si,  dans  son  état  actuel  d'exécution, 
elle  se  trouvait  conforme  aux  lois  de  l'esthétique  et  de  la 
liturgie  sacrées.  Il  se  prononce  pour  l'aflirmative,  et  il 
ajoute  que  la  galerie  pratiquée  en  encorbellement  dans  les 
deux  bras  du  transept,  ce  qui  lui  paraît  une  heureuse 
innovation,  ne  peut  avoir  de  signification  esthétique  et 
liturgique  qu'autant  qu'on  reviendra  à  l'usage  pratiqué 
par  l'Église  latine,  en  plaçant  l'autel  majeur  au  milieu  de 
l'intertransept.  Ces  galeries  en  encorbellement  auront 
alors  tout  leur  but  d'utilité,  en  contenant  des  assistants 
qui  pourront  voir  toutes  les  cérémonies  du  culte.  Si  la 
coutume  romaine  de  placer  l'autel  au  centre  de  l'église 
n'était  pas  adoptée  dans  cette  circonstance,  cette  belle 
galerie  du  transept  perdrait  alors  toute  sa  valeur  et  toute 
sa  signification. 

M.  Cattois  exprime  le  désir  de  voir  transporter  à  l'inter- 
transept dont  il  vient  de  parler,  le  ciborium  du  xvii''  siècle 
qui  se  trouve  dans  l'église  Saint-André.  Après  avoir 
examiné  ce  monument,  digne  du  plus  grand  intérêt,  s'il 
ne  peut  être  conservé  là  où  il  est,  ou  dans  un  autre  édifice 
qui  répondrait  mieux  à  son  style,  il  aimerait  mieux  subir 
l'inconvénient  de  l'effet  de  disparate  que  produirait  cet 
édicule  dit  classique  dans  un  édifice  gothique,  que  de 
perdre  ce  beau  travail,  qu'il  faut  absolument  consacrer  au 
culte  ;  et,  dût  l'architecte  condamner  cette  translation, 
l'esprit  de  conservation  doit  l'emporter  sur  tous  les  motifs 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  343 

que  l'on  pourrait  suggérer.  Le  ciborium,  ainsi  placé  au 
centre  de  la  nouvelle  église,  annonce,  par  sa  grandeur  et 
sa  beauté,  la  présence  de  l'autel  dans  le  sein  du  temple. 
C'est  bien  son  expression  de  marquer  à  l'intérieur  le  lieu 
de  la  consécration.  Mais  cette  même  présence  de  l'autel  en 
ce  point,  suivant  la  pratique  générale  du  moyen  âge,  doit 
être  indiquée  à  l'extérieur  par  une  éminence  plus  consi- 
dérable que  toute  autre.  Ces  cminences  extérieures,  tours, 
dômes  et  llècbcs,  ne  sont  autre  cliose  ([uc  la  continuation 
du  ciborium  intérieur  et  l'irradiation  au  dehors  du  dogme 
catholique.  Depuis  Constantin  jusqu'à  Gharlemagne,  le 
dais  seul  a  indiqué  à  l'intérieur  le  lieu  destiné  à  la  consé- 
cration. Depuis  Gharlemagne,  le  ciborium  intérieur, 
comme  les  éminences  extérieures  qui  en  sont  le  prolon- 
gement, étaient  chargés  d'annoncer  aux  fidèles  le  dogme 
catholique. 

Du  reste  l'art  n'en  est  pas  moins  blessé  que  l'esthétique 
dans  la  suppression  de  ces  grandes  projections  architectu- 
rales. La  perspective  est  profondément  altérée  dans  la 
forme  adoptée  actuellement  pour  nos  églises.  Il  est  difficile 
de  concevoir  rien  de  plus  pénible,  pour  un  œil  exercé, 
qu'une  église  de  la  dimension  de  celle  qui  s'élève  à  Chà- 
teauroux  dans  de  si  belles  proportions,  sans  une  éminence 
centrale  ({ui  puisse  rompre  la  monotonie  de  ces  longs  et 
vastes  vaisseaux.  C'est,  du  reste,  toute  la  pratique  du 
moyen  âge,  et  il  est  à  désirer,  pour  la  future  cathédrale  de 
Chàteauroux,  que  ce  grand  effet  de  l'art  lui  soit  ajouté, 
de  telle  sorte  que  la  flèche  qui  doit  être  élevée  au  point 
indiqué  surpasse  en  hauteur  les  deux  flèches  projetées 
sur  le  narthex  de  l'église.  A  cette  condition  seule,  l'esthé- 
tique catholique  sera  respectée.  S'il  en  était  autrement, 
l'édifice  n'aurait  plus  qu'une  signification  anticatholique; 
car  il  ne  distinguerait  plus  suffisamment  les  degrés  de 


3ii       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  HE  FRANCE. 

la  hiérarchie,  duiit  Dieu  doit  bien  occuper   le  premier 
rang. 

Telles  sont  les  idées  personnelles  que  M.  Cattois  déve- 
loppe, et  juge  plus  conformes  à  l'esprit  de  l'Église  latine, 
aux  laits  encore  existants  et  à  toute  la  tradition  du 
passé. 

M.  de  Lauriers  présente  un  plan  à  l'échelle  de  1  centi- 
mètre par  mètre  et  plusieurs  photographies  de  la  basilique 
de  Tébessa,  en  Algérie,  qu'il  a  eu  l'occasion  de  visiter 
dans  un  tout  récent  voyage  accompli  avec  M.  de  Ville- 
fosse,  chargé  par  le  ministère  de  l'Instruction  publique 
d'une  mission  archéologique  dans  ce  pays. 

M.  de  Laurière  donne  sur  cette  basilique  les  détails 
suivants  : 


Notice  sur  la  Basilique  de  Tébessa 
(Algérie). 


La  ville  de  Tébessa,  l'ancienne  Théveste,  située  dans  la 
province  de  Gonstantine,  à  15  ou  18  kilomètres  de  la 
frontière  de  Tunisie,  est  certainement  de  toutes  les  villes 
de  l'Algérie  la  plus  intéressante  par  ses  monuments  anti- 
ques, au  point  de  vue  de  leur  ensemble  et  de  leur  état  de 
bonne  conservation. 

Détruite  pendant  les  guerres  des  Vandales,  elle  fut 
réédifiée  par  les  Byzantins  au  vi"  siècle,  dans  des  limites 
bien  plus  restreintes,  de  manière  à  présenter  le  caractère 
d'une  citadelle  plutôt  (juc  celui  d'une  ville  proprement 
dite.  On  l'entoura  alors  d'une  muraille  construite  avec  les 


XL"   SESSION,    A    ClIATEAUROUX.  345 

débris  de  la  promièrc  ville,  et  Tébessa  nous  montre  encore 
aujourd'hui  cette  curieuse  enceinte  byzantine  de  quinze 
tours  carrées,  le  tout  à  peu  près  intact,  comme  en  France 
la  cité  de  Garcassonneet  la  ville  d'Avignon  nous  montrent 
leurs  incomparables  fortifications  du  moyen  âge  dans 
toute  leur  originalité,  sauf  toutefois  les  restaurations  mo- 
dernes dont  elles  ont  été  l'objet. 

Parmi  les  édifices  les  mieux  conservés  que  renferme 
Tébessa,  je  rappellerai  seulement  un  temple  pseudo-périp- 
tère,  qui  passe  pour  avoir  été  consacré  à  Minerve,  converti 
aujourd'hui  en  église  catholique,  et  le  magnifique  arc  de 
triomphe  dédié  à  Garacalla,  disposé  sur  quatre  faces, 
comme  l'arc  de  Janus  Quadrifons  à  Rome.  Il  forme  l'une 
des  portes  de  la  ville,  et  une  seconde  porte,  protégée  par 
des  tours  faisant  partie  de  l'enceinte,  s'appelle  encore 
porte  Salomon,  du  nom  du  général  byzantin,  considéré 
comme  le  second  fondateur  de  la  cité  du  vr  siècle. 

Mais  le  monument  de  Tébessa  sur  lequel  j'aurais  voulu 
attirer  plus  particulièrement  votre  bienveillante  attention, 
se  trouve  situé  à  5  ou  600  mètres  en  dehors  de  son 
enceinte,  dans  la  direction  de  l'arc  de  Garacalla,  et  ne 
consiste  plus  aujourd'hui  qu'en  ruines  imposantes  :  c'est 
son  ancienne  église-basilique,  qui  était  l'une  des  plus 
considérables  de  l'Afrique  chrétienne. 

Ses  murs  ne  subsistent  plus  que  sur  une  hauteur  de  2, 
3  et  4  mètres  ;  mais  ils  n'eu  permettent  pas  moins  de 
reconstituer  en  entier  le  plan  d'ensemble  de  l'édifice. 

La  basilique,  orientée  vers  le  nord-est,  avait  trois  nefs, 
séparées  par  deux  rangs  de  dix  colonnes  de  marbre  mono- 
lithes, à  chapiteaux  corinthiens,  et  adossées  à  un  pilier 
carré,  également  orné  d'un  chapiteau  du  même  ordre. 
Colonnes  et  piliers  reposaient  sur  une  base  taillée  dans  le 
même  bloc,  et  ces  supports  portaient  des  arcs  cintrés  dont 


346  CONGRÈS   ARCIIÉOLOGIQUK    HK   FRANCE. 

les  débris  sont  renversés  sur  le  sol,  pêle-mêle  avec  un 
grand  nombre  de  ces  colonnes. 

La  basilique  n'avait  qu'une  abside  demi-circulaire  allon- 
gée, correspondant  à  la  nef  centrale.  Cette  abside  ne  faisait 
pas  saillie  à  l'extérieur;  elle  était  llanquée  de  deux  salles 
rectangulaires  qui  faisaient  face  aux  deux  nefs  latérales, 
dont  elles  étaient  séparées  par  un  mur,  percé  d'une  porte 
dans  l'axe  de  ces  nefs  latérales.  Ces  salles  communi- 
quaient aussi  avec  l'abside  par  une  porte  sur  chaque  côté. 
Toutes  ces  portes  existent  encore. 

La  longueur  intérieure  de  la  basilique,  dans  l'axe  de  la 
nef  centrale,  mesure  42  mètres,  dont  7°"  75  correspondent 
à  la  profondeur  de  l'abside.  La  nef  centrale  mesure  8""  20 
de  largeur  entre  les  bases  des  colonnes  ;  les  nefs  latérales 
ont  chacune  i-^SO  de  large,  et  la  largeur  totale  intérieure 
de  l'édifice  est  de  20  mètres. 

Le  niveau  de  l'abside  se  trouve  élevé  au-dessus  de  celui 
de  la  nef  d'environ  0"  00.  Un  vide  rectangulaire,  situé  en 
avant  de  l'abside,  au  milieu  de  la  nef  et  bordé  d'un  dal- 
lage en  pierre,  indique  l'ancien  emplacement  de  l'autel. 
Nous  avons  pu  constater  par  des  fouilles  que  l'autel 
était  entouré  d'un  cbancel,  ou  barrière,  à  hauteur  d'appui, 
formé  de  balustrades  en  pierres,  qui  traversait  la  grande 
nef  et  se  continuait  entre  les  derniers  entrecolonnements 
fies  nefs.  La  place  de  ce  cbancel,  qui  déterminait  ainsi  le 
sanctuaire  autour  de  l'autel,  est  encore  indiquée  par  des 
dalles  munies  de  rainures  et  de  trous,  dans  lesquelles  s'a- 
daptaient les  transennse  et  les  petits  piliers  qui  les  main- 
tenaient. Un  grand  nombre  de  ces  piliers  sont  dispersés 
parmi  les  autres  débris  du  monument. 

Au-devant  des  trois  nefs  s'étendait  un  atrium  entouré  de 
portiques,  comme  aux  basiliques  de  Saint-Ambroise,  à 
iMilan,etde  Saint-Clément,   à  Home.  Au  milieu  on  voit 


XL'  SESSION,    A   CUATEAUROUX.  347 

encore  un  bassin  en  pierre,  de  forme  élégante,  qui  ser- 
vait de  fontaine  pour  les  ablutions  des  premiers  chré- 
tiens. 

Un  baptistère  séparé  de  la  basilique,  dont  il  était  le 
complément,  était  contigu  à  l'atrium  et  communiquait 
avec  lui  par  une  porte.  C'était  bien  là  la  disposition 
conforme  aux  anciennes  prescriptions  liturgiques,  qui 
plaçaient  le  baptistère  en  dehors  et  près  de  l'église,  pour 
signifier,  selon  l'expression  de  Guillaume  Durand,  qu'il 
était  la  porte  qui  introduit  l'homme  dans  l'église  de  Dieu. 
La  cuve  baptismale  établie  dans  le  sol  est  encore  visible, 
ainsi  que  le  petit  canal  destiné  à  l'écoulement  de  l'eau 
ayant  servi  au  baptême. 

Tout  le  sol  de  ces  différentes  parties  de  la  basilique, 
nefs,  atrium,  baptistère,  était  pavé  en  mosaïques  repré- 
sentant des  feuillages  et  des  dessins  géométriques,  et  ces 
mosaïques  existent  encore  dans  un  état  presque  complet 
de  conservation. 

Sur  le  côté  sud  de  la  basilique  s'élève  aussi  une 
construction  annexe,  composée  d'abord  de  trois  absides 
rayonnant  autour  d'un  centre  carré,  au  milieu  duquel  se 
trouve  un  vide  rectangulaire,  entouré  d'un  dallage,  et  qui 
devait  être  l'emplacement  d'un  autel.  Le  niveau  de  cette 
seconde  église  est  plus  bas  que  celui  de  la  basilique,  et 
communique  avec  elle  par  un  large  escalier  de  douze 
marches.  Toute  cette  disposition  est  inscrite  dans  une 
enceinte  carrée,  et  l'espace  compris  entre  les  angles  de  cette 
enceinte  et  les  absides  forme  des  salles  rectangulaires 
communiquant  avec  elles  par  des  portes  à  linteau  hori- 
zontal. On  voit  encore  à  l'entrée  de  chacune  des  absides 
les  bases  et  les  tronçons  de  huit  magnifiques  colonnes  de 
marbre  destinées,  sans  doute,  à  porter  les  arcs  sur 
lesquels  s'appuyaient  les  voûtes  des  absides.  L'abside  du 


3i8       CONGRES  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

côté  ouest  est  suivie  d'une  pièce  rectangulaire,  qui  conduit 
elle-même  dans  une  autre  salle  de  même  forme,  mais 
plus  grande.  L'église  aux  trois  absides  et  ces  deux  salles 
étaient  aussi  pavées  en  mosaïques,  et  l'on  remarquait  sur 
ce  sol  des  inscriptions  funéraires  indiquant  des  sépultures 
dont  nous  parlerons  plus  loin. 

La  basilique  se  trouvait  établie  sur  un  terrain  formant 
émiileuce,  et  un  large  escalier  de  dix-huit  marches  conduit 
à  un  parvis  eu  avant  de  l'atrium.  Deux  tours  carrées,  dont 
il  ne  reste  plus  que  la  partie  inférieure,  s'élevaient  sur  les 
côtés  de  l'atrium,  à  l'extérieur,  aux  angles  de  sa  façade. 
Elles  contenaient  au  centre  un  escalier  dont  les  marches 
inférieures  sont  encore  conservées. 

Deux  portiques  soutenus  par  de  belles  colonnes  corin- 
thiennes, de  marbre,  se  trouvaient  aussi  en  retour  des 
deux  côtés  du  grand  escalier  précédant  le  parvis. 

Toutes  ces  constructions  sont  formées  de  pierres  de 
grand  appareil  à  la  manière  antique.  Des  fragments  de 
frises,  d'architraves,  de  pierres  taillées  en  consoles,  sont 
dispersés  de  tous  côtés  sur  le  sol,  et  laissent  voir  des  orne- 
ments d'un  vigoureux  relief,  représentant  des  feuillages, 
des  rosaces,  des  cordons  de  fleurs,  des  guirlandes  de 
raisins  et  d'autres  emblèmes  chrétiens.  Tous  ces  débris, 
avec  la  richesse  des  mosaïques,  attestent  le  luxe  de  décora- 
tion de  ce  vaste  édifice,  dont  la  longueur  totale,  depuis  la 
première  marche  de  son  grand  escalier  jusqu'à  l'extrcmitc 
opposée,  mesurait  80  mètres. 

Mais  ce  qui  ajoute  un  intérêt  du  plus  haut  prix  aux 
ruines  de  la  basilique  deTébessa,  c'est  que  non-seulement 
elles  nous  donnent  un  type  d'une  basilique  complète, 
mais  aussi  un  spécimen  des  plus  rares  et  peut-être  unique 
d'une  église  dépendant  d'un  de  ces  monastères  dont  saint 
Augustin  doit  être  considéré  conmie  le  premier  iondatcur 


XI/   SKSSION,    A    CIIATEAUROUX.  IIW 

en  Afrique,  à  l'imitalion  de  ceux  qu'il  avait  vus  à  Milan 
et  à  Rome,  et  dont  il  parle  dans  son  livre  de  Moribus 
Ecclesiœ  cathoL,  33. 

Vidi  ego  diversoruni  sanctorum  Mediolani 


L'éminent  auteur  de  VAfrica  Christiana ,  Morcelli , 
nous  rappelle  que  ces  monastères,  sous  l'impulsion  donnée 
par  le  grand  évêque  d'Hippone  et  par  son  ami,  saint 
Alypius,  évêque  de  Tagaste,  ne  tardèrent  pas  à  se  multi- 
plier en  Afrique.  Le  passage  suivant,  extrait  du  savant 
ouvrage  Souvenirs  de  l'Église  d'Afrique,  qui  est  en  partie 
traduit  et  résumé  de  l'histoire  de  Morcelli,  suffira  pour 
donner  une  idée  de  l'importance  qu'avaient  déjà  acquise 
ces  établissements  à  cette  époque. 

«  Sous  cette  impulsion,  les  monastères  avaient  déjà 
commencé  à  se  multiplier  dans  l'Afrique,  lorsqu'en  397 
Mascézel,  vainqueur  de  Gildon,  amena  quelques  moines 
de  l'ile  Capraria,  située  en  face  de  Pise.  C'était  à  leur 
abbé,  Eudoxe,  que  saint  Augustin  écrivait  une  de  ses 
lettres,  où  Ton  voit  qu'il  l'estime  comme  un  grand  servi- 
teur de  Dieu.  L'an  400,  saint  Augustin,  pressé  par 
saint  Aurèle,  évêque  de  Carthage,  écrivit  son  livre  sur  le 
travail  des  moines,  à  l'occasion  des  dissentiments  qui 
partageaient  les  moines  de  Carthage,  les  uns  vivant  de  ce 
qu'offraient  les  fidèles,  les  autres  du  travail  de  leurs 
mains.  La  fameuse  controverse  agitée  entre  les  moines 
d'Adrumète  en  427,  à  propos  des  écrits  de  saint  Augustin 
contre  les  Pélasgiens,  fait  bien  voir  que  les  sciences  ecclé- 
siastiques n'étaient  pas  oubliées  dans  les  occupations  des 
monastères.  En  même  temps  des  couvents  de  vierges 
consacrées  à  Dieu  existaient  dans  ces  provinces.  Lorsqu'en 
411,  les  plus  illustres  familles  de  Rome  fuyaient  devant 


350       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

les  Barbares,  Albine  et  Mélaiiie  la  Jeune  s'étaient  retirées 
à  Tagaste,  près  d'Alypius.  Ces  femmes,  illustres  par  leur 
piété  aussi  bien  que  par  leur  naissance,  ne  se  contentèrent 
pas  d'enrichir  les  églises  en  ornements  précieux  ou  même 
en  terres;  elles  bâtirent  aussi  dans  cette  ville  deux  magni- 
fiques monastères,  l'un  pour  80  moines,  l'autre  pour 
130  vierges.  » 

Le  monastère  de  Thevesle,  dont  nous  nous  occupons, 
se  développait  d'abord  sur  un  vaste  emplacement  rectan- 
gulaire, entouré  de  plusieurs  rangs  de  constructions,  et 
situé  au-devant  de  la  basilique,  puis  sur  les  côtés  de  sa 
partie  antérieure.  Dans  l'état  actuel,  le  terrain  n'a  pas  été 
déblayé  sur  ce  premier  emplacement  ;  mais  les  murs  des 
anciennes  constructions  paraissent  à  Heur  de  terre. 

Ces  constructions  formaient  le  pi^esbijterium  ou  mona- 
sterium  clericorum,  suivant  la  disposition  conçue  par 
saint  Augustin,  et  contenaient  les  logements  des  clercs, 
de  l'évéque  et  de  tout  le  personnel  attaché  au  service  de  la 
cathédrale  ;  car,  comme  surcroit  d'intérêt  pour  ce  monu- 
ment, la  basilique  de  Tébessa  était  le  siège  épiscopal  de 
l'ancienne  Theveste   (1),  qui  relevait  de  Carthage,  d'où 

(1)  Parmi  les  évèques  de  Theveste,  Ihistoire  a  conservé  les 
noms  : 

D'Agnppinus,  qui  passe  pour  le  premier  en  date,  en  ioT; 

De  Luciiis,  qui  assista  en  iol  au  concile  deCarlhage,  présidé 
par  saint  Cyprien; 

De  llomuliis,  (pii  assista  aussi  à  un  concile  de  Carlhage, 
en  349  ; 

D'Urbicus,  qui  prit  part  au  synode  de  411; 

De  P^élix,  qui,  en  484,  figure  sur  la  soixante-quinzième  liste 
des  évèques  de  Numidie ,  convoqués  à  Carlhage  par  \e  roi 
vandale  Huneric,  cette  partie  de  la  Numidie  étant  depuis  443 
entrée  dans  le  royaume  vandale. 


XL*    SESSION,    A   CllATKAUIlOUX.  3^)1 

s'étciulail  le  grand  rayonueraent  catholique  dans  le  nord 
de  l'Atrique. 

Cette  église  cathédrale,  ainsi  entourée  de  son  monaste- 
rium  clericorum,  avec  la  résidence  de  son  évèquc,  doit 
être  assimilée,  sous  ce  rapport,  à  la  basilique  cathédrale 
de  Sainte-Perpétue  de  Carthage,  mentionnée  par  son 
contemporain,  l'évèque  historien  Victor  Viteusis,  qui 
nous  apprend  que  cette  cathédrale  contenait  le  logement 
de  son  évéque  et  de  son  clergé  :  ...  Pulso  episcopo, 
cum  clero  venerabili  dicto,  ccclesiam  nomine  Restitutam 
in  qva  semper  episcopi  commanebant ,  suœ  religioni  manci- 
pavit.  (Persec.  Vand.  I.  3.) 

De  plus,  cette  basilique,  accompagnée  de  son  monaste- 
rium  était  entourée  d'une  enceinte  de  défense  qui  venait 
ajouter  au  caractère  religieux  de  l'édifice  celui  d'une  forte- 
resse, et  compléter  encore  Tinlérêt  que  présente  pour 
l'archéologie  l'ensemble  du  monument.  Toutes  les  con- 
structions dont  nous  venons  de  parler  se  trouvaient  enve- 
loppées d'une  épaisse  muraille,  formant  un  quadrilatère 
un  peu  rétréci  vers  l'est,  et  muni  de  plusieurs  tours 
carrées,  avec  cette  particularité,  que  ces  tours,  au  lieu  de 
faire  saillie  à  l'extérieur  de  l'enceinte,  se  trouvaient  au 
contraire  eu  saillie  à  l'intérieur.  L'historien  Procope  nous 
a  transmis  le  souvenir  d'un  couvent  analogue,  qui 
existait  de  son  temps  à  Carthage.  «  Il  y  a  dans  les  murs 
de  Carthage,  sur  le  bord  de  la  mer,  une  église  desservie 
par  ces  hommes  dévoués  au  service  de  Dieu,  que  nous 
appelons  des  moines.  Salomon,  qui  l'avait  fondée  peu  de 
temps  auparavant,  l'avait  environnée  de  murailles,  afin 
que  dans  l'occasion  elle  pût  servir  de  forteresse.  Aréobinde 
se  réfugia  dans  cet  asile,  oi^i  il  avait  envoyé  d'avance  sa 
femme  et  sa  scBur...  »  (Procope,  Bell.  Vand.,  Il,  20. ) 

Le  côté  nord  de  l'enceinte  mesure  environ  185  mètres, 


352       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

et  le  mur  le  plus  court,  fermant  le  quadrilatère  vers  l'est, 
a  81  mètres  de  longueur;  sur  ce  mur,  deux  tours  existent 
encore,  avec  une  élévation  d'environ  12  ou  ITi  mètres.  Un 
portique,  conservé  dans  toute  sa  hauteur,  surmonté  d'un 
grand  arc  cintré,  situé  sur  le  côté  sud  de  l'enceinte,  for- 
mait l'une  des  entrées  de  la  basilique,  et  donnait  accès  sur 
l'emplacement  pavé  en  larges  dalles  qui  s'étend  au-devanl 
du  grand  escalier  de  l'église. 

Nous  avons  dit  que  dans  la  grande  salle  rectangulaire 
située  à  l'ouest  de  la  chapelle  annexe,  composée  de  trois 
absides  rayonnantes,  le  pavé  en  mosaïque  contenait  des 
inscriptions  funéraires  indiquant  des  sépultures.  Deux, 
celles  d'un  prêtre  du  nom  de  Quodvultdeus  et  d'un  jeune 
homme  nommé  Petronius,  comprennent  la  formule  Hic 
requiescit  bone  memorie;  une  troisième  porte  le  nom  d'une 
jeune  enfant,  Marcella,  qui  vécut  3  ans  et  6  mois,  et  une 
quatrième  est  celle  d'un  évêque  du  nom  de  Palladius.  Ces 
inscriptions  ont  été  publiées  dans  Y  Annuaire  de  la  Société 
archéologique  de  Constantine  (vol.  XIV,  1870).  Nous  rap- 
porterons seulement  celle  de  l'évêque  Palladius. 

HIC  IN  PA 
CE  REQVI 
ESGIT  SAN 
CTE  iMEMO 
RE  PALLADI 
VS  EPISCO  VI 
XIT  ANNIS  LU 
EX  QVIBVS 
VIXIT  IN  EPIS 
ANNIS  XII. 

Elle  était  accompagnée  en  tète  d'une  croix  à  quatre 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  3f>3 

branches  égales,  ?ous  laquelle  paraissait,  d'un  côté,  un 
oméga  seul,  sans  Valpha.  Déjà  depuis  quelques  années 
le  tombeau,  formé  de  dalles  enfouies  dans  la  terre  sous 
l'inscription,  avait  été  touillé  latéralement.  Les  ossements 
qu'il  renfermait  ont  été  recueillis  avec  soin  par  M.  le  curé 
de  Tébessa,  pour  être  déposés  dans  son  église  paroissiale. 
Le  corps  était  enveloppé  d'un  suaire  d'un  tissu  extrême- 
ment fin  et  reposait  sur  une  couche  de  feuilles  de  laurier. 
Une  fouille  renouvelée  en  notre  présence  n'a  fait  retrouver 
que  quelques-unes  de  ces  feuilles  desséchées. 

Mais  cette  inscription  funéraire  est  de  la  plus  haute  im- 
portance pour  l'étude  de  la  basilique  de  Tébessa,  car  elle 
se  rapporte  à  un  personnage  dont  l'histoire  a  conservé  le 
nom.  Nous  savons  en  efïel,  par  Morcelli,  que  Palladius 
était  évèque  d'Ydirca,  et  qu'il  mourut  en  revenant,  peregre, 
de  l'assemblée  des  évèques  de  Numidie,  réunis  en  484 
par  le  roi  Huneric,  qui  les  exilasur  leur  refus  d'embrasser 
l'arianisme.  (Morcelli,  I"  vol.,  p.  dQO.)  La  notice  d'où 
Morcelli  a  extrait  ce  fait  indiquerait  même  que  Palladius 
mourut  dans  un  couvent,  ce  qui  est  parfaitement  conforme 
à  la  présence  de  sa  sépulture  retrouvée  dans  la  basilique 
de  Theveste. 

La  présence  de  cette  sépulture  suffirait  pour  constater 
que  l'édifice  dont  nous  nous  occupons  était  déjà  construit 
à  la  fin  du  V  siècle,  et  n'est  pas  une  œuvre  du  vi', 
contemporain  des  remparts  de  la  ville  réédifiée  par  Salo- 
mon.  Car  si,  comme  l'a  prétendu  l'auteur  d'une  notice 
sur  Tébessa  (1),  la  basilique  eût  été  rebâtie  en  même  temps 
que  la  ville,  ne  devrait-elle  pas  présenter  le  mèmecaractère 

{\)  Mémoire  historique  et  archéologîqxie  sur  Tébessa  et 
ses  environs,  par  M.  Moll,  capitaine  du  génie,  (Annuaire  de 
la  Société  arcliéologique  de  Constantine,  l8<)0-6t.^ 

XL=  SESSION.  23 


354       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

de  construction?  Ne  serait-elle  pas  corapo?:ée,  elle  aussi, 
de  matériaux  disparates  provenant  d'anciens  monuments 
comme  les  autres  édifices  du  vi"  siècle ,  tandis  qu'au 
contraire,  sa  construction  en  grand  appareil  formant  des 
assises  régulières,  avec  arêtes  Unes,  révèle  une  œuvre  plus 
soignée  et  toute  homogène. 

On  ne  saurait  admettre  que  la  basilique  et  ses  dépen- 
dances soient  antérieures  à  l'époque  de  saint  Augustin, 
qui  doit  être  considéré  ainsi  que  nous  l'avons  dit  précé- 
demment, comme  le  grand  propagateur  de  ces  sortes  d'éta- 
blissements. Sa  fondation  doit  donc  se  placer  de  la  fm  du 
IV*  siècle  à  la  fin  du  v%  antérieurement  au  moins  à  la 
date  de  AU. 

Toutefois  il  faut  attribuer  à  une  époque  postérieure 
quelques  débris  de  constructions  accessoires,  appuyées  sur 
le  mur  sud  de  la  basilique,  à  la  suite  de  la  chapelle  aux 
trois  absides,  et  formées  de  difïérentes  pierres  ayant  servi 
à  d'anciens  monuments,  parmi  lesquelles  se  trouvent  un 
grand  nombre  de  cippes  portant  des  inscriptions. 

Plusieurs  plans  de  cette  basilique  ont  été  publiés,  avec 
ses  dépendances.  Nous  en  connaissons  au  moins  trois 
dans  l'Annuaire  de  la  Société  archéologique  de  Constan- 
tine,  plus  celui  qui  a  été  donné  dans  V Architectwe  mo- 
nastique de  M.  Albert  Lenoir,  d'après  les  noies  de  M.Léon 
Renier.  Tous  ces  plans  ont  été  faits  à  des  époques  diffé- 
rentes, à  des  moments  où  le  terrain  n'étant  encore  que 
peu  ou  point  déblayé,  il  était  dilficile  de  se  rendre  un 
compte  précis  de  l'état  des  lieux.  Aussi,  non-seulement 
tous  ces  plans  diflèrent  entre  eux  par  plusieurs  détails, 
mais  aucun  d'eux  n'est  complètement  exact.  Ainsi,  sans 
parler  des  erreurs  ou  omissions  relatives  au  nombre  des 
piliers  des  nefs,  à  l'emplacement  de  l'autel,  aux  dispo- 
sitions de  la  chapelle  annexe,  du  baptistère  et  d'autres 


XL°    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  355 

constructions  accessoires,  }ious  signalerons  sur  le  plan 
publié  dans  \' Architecture  monastique ,  avec  le  savant 
article  qui  l'accompagne,  une  série  de  bâtiments  minu- 
tieusement figurés,  appuyés  à  l'extérieur  sur  les  murs 
du  nord  et  de  l'est  de  la  basilique,  bâtiments  que 
l'examen  le  plus  attentif  sur  les  lieux  ne  permet  pas  de 
reconnaître. 

Le  Congres  reçoit  avec  une  vive  sympathie  la  commu- 
nication de  M.  de  Laurière,  et  le  remercie  des  belles  pho- 
tographies qu'il  a  déposées  sur  le  bureau. 

La  W  question  est  ensuite  examinée  :  Existe-t-il  dans 
la  région  des  monuments  ou  portions  de  monuments  reli- 
gieux antérieurs  à  Tan  1000? 

On  signale  une  crypte  dans  l'église  de  Reuilly,  qui 
parait  être  antérieure  à  l'an  1000  ;  mais  cette  crypte 
n'a  pu  être  suffisamment  étudiée  pour  affirmer  d'une 
manière  précise  l'époque  de  sa  construction. 

Le  conditorium  de  Déols,  renfermant  le  sarcophage  de 
Lusor,  est  antérieur  à  l'an  1000.  On  ne  saurait  dire  la 
même  chose  du  conditorium  de  Leocade,  qui  a  été  détruit 
presque  entièrement.  Néanmoins  plusieurs  membres  ont 
remarqué,  dans  la  visite  faite  à  ce  conditorium,  deux  pans 
de  muraille  pouvant  remonter  au  vi''  siècle. 

L'église  de  Chabris  offre  également,  dans  la  chapelle 
de  la  Sainte-Vierge,  deux  murs  latéraux,  dont  une  partie 
est  antérieure  à  l'an  1000. 

On  signale  encore  la  crypte  de  Léré  (Cher),  où  le  corps 
de  saint  Martin,  évêque  de  Tours,  a  reposé  pendant 
sept  ans.  Charles  le  Chauve  donna  aux  chanoines  de  Saint- 
Martin  de  Tours   la   ville  de   Léré,   pour  y  trouver  un 


356       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

refuge  pendant  les  invasions  normandes.  Au  ix''  siècle,  le 
corps  de  saint  Martin  fut  transféré  dans  la  crypte  bâtie  à 
cette  époque. 

M.  l'abbé  Voisin  traite  en  ces  termes  la  16^  question  du 
programme. 

16^  question  :   A-t-on  fait   quelques  découvertes   de 
monnaies  dans  l'arrondissement  de  l'Indre  ? 


Monnaies  du  moyen  âge  et  de  l'ère  mo- 
derne ,  trouvées  dans  l'arrondissement 
du  Blanc. 

Un  assez  grand  nombre  de  monnaies  ont  été  trouvées 
dans  l'arrondissement  du  Blanc.  Nous  avons  déjà  indiqué 
celles  qui  se  rapportent  aux  époques  gauloise  et  gallo- 
romaine.  Nous  allons,  à  présent,  donner  la  liste  des  mon- 
naies du  moyen  âge  et  des  temps  modernes.  Toutefois, 
nous  aurons  soin  de  ne  décrire  que  celles  qui  ont  été  dé- 
couvertes depuis  un  dizaine  d'années,  et  dont  nous  avons 
pu  nous-même  faire  l'étude  et  constater  la  provenance. 

N°  1.  —  Au  mois  de  janvier  1872  on  a  trouvé,  dans 
un  champ  appartenant  à  l'abbaye  de  Fontgombaud,  cin- 
quante-six monnaies  seigneuriales  des  xi%  xir  et  xiii'' 
siècles.  Ces  pièces  étaient  enfouies  profondément  et  recou- 
vertes d'une  pierre.  Les  plus  anciennes  offrent  une  imita- 
tion dégénérée  des  types  carlovingiens. 

En  voici  la  nomenclature  : 

4°  COMES  CENOMANIS.  Au  centre,  dans  un   cercle 


XL*    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  357 

(le  jii^rônetis,  un  raonog-rammc  compose  des  lettres  E.R. 
B.T.S.  i^  Croix  ave»;  alplia  et  oméga,  suspeudiis  à  ses 
branches,  et  deux  points  au-dessus.  Lég.  :  SLGNVM  [»EI 
VlVl.  Denier  d'Herbert  I,  dit  Éveille-Chien,  comte  du 
Mans,  995-1010.  2  exemplaires. 

2°  La  môme,  avec  la  lég.  :  COMES  CENOMANNIS. 
En  raison  de  la  lettre  N  double  du  mot  CENOMANNIS,  on 
pourrait  attribuer  cette  pièce  à  Hubert  H,  le  jeune,  1033- 
lOGO.  2  exemplaires. 

3°  ERVIS  CONS.  Croix,  i^  NIVERSCIS.  Sorte  de  fau- 
cille autour  d'un  lis.  Monogramme  dégénéré.  Denier 
d'Hervé  de  Donzy,  comte  de  Nevers,  1499-1223.  2  exem- 
plaires. 

4°  MAIOLVS  EPSCS.  Tête  de  face  très-barbare,  avec 
la  crosse,  i^  SILVINIACO.  Croix.  Denier  de  l'abbaye  de 
Souvigny,  fondée  en  923,  sous  le]  patronage  de  saint 
Maïeul,  évêque.  3  exemplaires. 

5"  VGO  COMES.  Croix  pattée.  ^  MARCHTE.  Croix 
avec  deux  besans  et  deux  croissants.  Denier  de  Hugues, 
comte  de  la  Marche,  1208-1249.  22  exemplaires. 

6°  LODOtCVS.  Croix.  ^  EGOLISSIME.  Croisette  avec 
croissants  et  annelets.  Anonyme  d'Angoulème.  Ce  denier 
est  antérieur  aux  monnaies  seigneuriales  de  Hugues 
de  Lusignan,  par  conséquent  à  l'an  1208.  5  exemplaires. 

7°  La  même.  Au  ^  EGOLISME.  Variété  nouvelle. 
1  exemplaire. 

8°  PHTLIPVS  REX.  Croix.  ^  SCS  MARTINUS.  Chàtel 
tournois.  Philippe  II  Auguste,  à  saint  Martin  de  Tours, 
1214-1223.  4  exemplaires. 

9°  LVDOVICVS  REX.  Croix.  i<)  TVRONVS  CIVIS.  Chà- 
tel tournois.  Denier  de  saint  Louis,  1226-1270.  9  exem- 
plaires. 

10°  PHILIPVS  REX.  Croix.  SCS  MARTIN VS.  Chàtel 


358  CONGRÈS   ARCHÉOLOr.IOUE  DE   FRANCE 

tournois.  Denier  de  Philippe  IIl  le  Hardi,  ou  de    Phi- 
lippe IV  le  Bel,  1270-1314. 

Ces  monnaies  ont  dû  être  enfouies  dans  les  dernières 
années  du  xiii^  siècle.  Elles  appartiennent  à  des  provinces 
limitrophes  du  Berry,  excepté  celles  du  Maine.  La  pré- 
sence de  ces  dernières  pourtant,  n'a  rien  qui  puisse 
étonner.  L'abbaye  de  Fontgombaud  possédait  un  prieuré 
nommé  Taillau,  paroisse  de  Tassillé,  à  quelques  lieues  du 
Mans,  pour  lequel  elle  soutint  un  procès  en  i26o,  et  dont 
la  sentence  se  trouve  dans  un  manuscrit  déposé  aux 
archives  nationales.  [Hist.  ms.  de  l'abbaye  de  Fontg. 
L.  Z.,  1011.  —  Papier  terrier  de  Taillau  L.  L.,  1012.  ) 

N°  2.  —  Dans  les  premiers  jours  du  mois  d'avril  1872, 
des  travaux  exécutés  dans  les  environs  de  Saint-Beiioît-du- 
Sault  firent  découvrir  une  grande  quantité  de  monnaies 
du  xii^  siècle.  La  majeure  partie  était  au  type  des  princes 
de  Déols,  seigneurs  de  Châteauroux.  En  voici  la  descrip- 
tion : 

1"  RADVLFVS.  Dans  un  cercle  de  grènetis,  croisette 
pattée.  i^  DE  DOLIS.  Dans  un  cercle,  deux  triangles  en- 
lacés formant  une  étoile  à  six  pointes;  au  milieu  de  l'étoile 
un  annelet.  Denier  de  Raoul  VIT,  de  Déols,  1160-1176. 

Le  premier  des  princes  de  Déols  qui  ait  Irappé  des 
monnaies  en  son  nom  fut  Eudes  TAncien  (1012-1037). 
Ce  seigneur  aurait  adopté,  comme  signe  distinctif  de  ses 
monnaies,  une  étoile  évidée  à  cinq  pointes.  L'un  de  ses 
successeurs,  Raoul  VI  le  Vieux  (1096-1135),  modifia  ce 
signe  monétaire  de  Déols;  ce  fut  dès  lors  une  étoile  à  six 
pointes,  ou  plutôt  les  deux  triangles  décrits  plus  haut.  Les 
seigneurs  d'Issoudun,  issus  de  la  maison  de  Déols,  mar- 
quèrent leurs  monnaies  du  même  symbole. 

A  partir  de  Guillaume  P'  de  Chauvigny  (1202-1233), 


XL"   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  369 

l'ctoilc  déoloise  fut  remplacée  par  les  armoiries  de  Chau- 
vifïny  (D'argent  à  Tî  rusées  et  deux  demies  de  gueules,  au 
lamhcl  de  sable  de  0  pendants). 

C'est  dans  la  personne  de  Raoul  VII  que  finit  la  maison 
dos  princes  de  Déols.  Sa  fille  Denise,  en  épousant  André  le 
Boiteux,  seigneur  de  Chauvigny,  en  Poitou  (1189),  devint 
la  tige  des  barons  de  Ghâteauroux.  Ces  derniers  domi- 
nèrent avec  assez  d'éclat  dans  notre  pays  jusqu'en  1490. 

2°  GOSEDVS  COS.  Dans  un  cercle,  croisette  rimflée  au 
bas  des  traverses.  ^  GIEMIS  CA.  Denier  de  Geoffroy  III, 
comte  de  Gien,  H20-il60. 

3"  Pièce  au  même  type,  mais  d'un  tiers  plus  petite  que 
la  précédente.  C'est  l'obole  de  ce  denier,  monnaie  assez 
rare. 

A"  MASILVS  EPSC.  ^  SILVINIACO.  Denier  de 
l'abbaye  de  Souvigny,  sous  le  patronage  de  saint  Maïeul. 

Au  commencement  du  mois  de  décembre  de  la  même 
année,  on  a  trouvé  à  la  Souterraine,  près  de  la  limite  de 
l'Indre,  une  énorme  quantité  de  ces  mêmes  deniers, 
oxydés,  collés  ensemble  par  le  vert-de-gris,  et  formant 
un  bloc  pesant  environ  «  vingt  kilos  ». 

Il  est  probable  que  peu  de  seigneurs,  en  France,  firent 
frapper  autant  de  monnaies  que  les  princes  de  Déols;  et, 
à  défaut  des  monuments  célèbres  qu'ils  nous  ont  laissés, 
ces  monnaies,  à  elles  seules,  suffiraient  à  nous  montrer 
leur  grandeur  et  leur  puissance.  Eu  1856,  dans  un  jardin 
près  de  l'église  de  Déols,  on  trouva  un  si  grand  nombre 
de  pièces  à  leur  type  qu'on  pouvait,  dit-on,  en  remplir  un 
panier  tout  entier.  En  1857,  la  démolition  des  halles 
d'Issoudun  fit  découvrir  plus  de  1,800  de  ces  deniers 
célèbres;  on  en  trouva  encore  dans  la  commune  de  Brion, 
et  enfin,  lors  de  la  construction  du  chemin  de  fer,  au 
hameau  de  la  Gerbe,  à  deux  lieues  de  de  Ghâteauroux,  on 


360        CONGRÈS  ARCUÉOl.OGIOUE  DE  FRANGE. 

rencontra  un  véritable  trésor,  estimé  à  dix-huit  mille 
pièces  de  monnaies,  parmi  lesquelles  se  trouvaient  des 
deniers  des  seigneurs  de  Déols,  de  Châteauroux  et  d'Is- 
soudun.  (Voyez  Travaux  de  la  Soc.  du  Berry,  tome  IV, 
p.  242.) 

N"  3.  —  Dans  un  cercle  de  grènetis,  croix  pattée. 
RTCARDVS  REX.  ^  Dans  le  champ  de  la  pièce  en  trois 
lignes  :  PIC  TAVIE  NSIS.  Richard  Cœur  de  Lion, 
comte  du  Poitou,  avant  H89.  Poids  70  centig.  1  exem- 
plaire, argent;  environs  du  Blanc. 

N°  4.  —  Dans  un  cercle  de  grènetis ,  croix  pattée. 
PHILIPVS  REX.  ^  Chàtel  tournois.  SCS  MARTINVS. 
Denier  de  Philippe-Auguste,  1180-1223;  poids,!  gramme; 
3  exemplaires,  argent.  Le  Blanc. 

N°  5.  —  Dans  un  cercle,  croix  pattée.  TVRONVS  CIVI. 
^  Chàtel  tournois.  SCS  MARTINVS.  Denier  de  saint  Mar- 
tin. 4  exemplaires,  argent.  Poids,  90  centig.  Le  Blanc. 

N°  6.  —  Dans  un  cercle  de  grènetis,  composé  de  douze 
lobes  arrondis  extérieurement,  est  un  léopard  couronné 
passant  à  gauche.  EDVVARDVS  :  DEI  :  GRACIA  :  IN- 
GLIE  :  FRANCIE  :  REX.  ^  Cercle  de  grènetis,  puis 
second  cercle  quadrilobé,  avec  un  angle  aigu,  saillant  à  la 
jonction  des  lobes;  croix  avec  fleurons  au  sommet  des 
bras  et  au  centre  ;  entre  chaque  bras,  un  léopard  couronné 
passant.  XPC  :  VINCIT  :  XPC  :  REGNAT  :  XPC  :  IM- 
PER AT  :  Edouard  III,  roi  d'Angleterre,  1327-1377.  L'en- 
tourage de  cette  pièce  ressemble  absolument  à  celui  des 
grands  aignels  d'or  de  Jean  le  Bon  ;  mais  l'agneau  est 
remplacé  par  le  léopard.  Le  diamètre  de  cette  magnifique 


XL'    SESSION,    A    CFIATEAUROUX.  361 

monnaie  d'or  est  29  millini.;  poids,  A  granri.  0  ccntigr. 
1  exemplaire  trouvé  dans  une  sépulture  à  Saint-Aigny, 
près  le  Blanc,  en  1869. 

N°  7.  —  1°  Buste  à  mi-corps,  en  face.  Tête  couronnée 
J'un  bandeau;  le  corps  est  recouvert  d'un  manteau;  la 
main  gauche  est  étendue,  l'index  en  avant;  la  droite  tient 

une  épée  dressée.   Lég.   :  EDPGEI EGAGLI (?) 

i^  Croix  traversant  la  pièce,  cantonnée  de  2  fleurs  de  lis 
et  de  2  léopards.  Lég.  :  PRI  GPS  AQVI  TAN  [princeps 
Aquitaniœ).  Edouard,  prince  de  Galles,  ou  prince  Noir, 
fils  d'Edouard  III,  d'Angleterre,  1330-1370.  Poids,  75 cent. 
3  exemplaires,  argent. 

L'on  sait  que  le  prince  Noir,  le  vainqueur  de  Poitiers, 
faisait  sa  résidence  en  Aquitaine  et  frappait  monnaie  à 
Bordeaux  vers  1369. 

2"  La  même,  avec  quelques  détails  d'ornementation 
différents.  3  exemplaires  argent. 

N°  8.  —  r  lOHANNES  REX.  Croix  dont  chaque  bran- 
che est  accostée  d'un  point.  Lég.  extérieure  :  SIT  NOMEN 
DOM.,  etc....  i^  TVRONVS  CIVIS,  chatel  fleurdelisé. 

2°  Même  type.  R.  Chatel  à  la  croix,  les  tourelles  tré- 
flées. 

3»  Poillevillain  à  la  couronne.  lOHANNES  REX.  Croix 
à  long  pied.  Lég.  :  SIT  NOMEN  DOM.,  etc.  i^  TVRONVS 
CIVIS.  Chatel  à  la  couronne. 

4"  lO-HAN-NES.  Croix  anglaise.  SIT  NOMEN,  etc. 
i^  TVRONVS  CIVIS.  Chatel  surmonté  d'un  rameau 
feuillu. 

o«  lOHANNES  REX.  Croix  cantonnée  de  2  fleurons. 
SIT  NOMEN,  etc.  f^  FRAN,  entre  2  couronnes  accostées 
de  lis.  Bordure,  12  lis. 


3t)'2  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE    DE   FRANCE. 

Ces  monnaies  de  .loan  le  Bon,  au  nombre  de  300  en- 
viron, ont  été  trouvées  au  mois  de  janvier  1870,  dans  le 
bourg  de  Pouligny-Saint-Picrre,  près  le  Blanc,  Elles 
avaient  été  réunies  dans  un  pot  de  terre,  et  enfouies  dans 
une  crevasse  d'un  vieux  mur.  On  avait  dû  cacher  ce 
trésor  vers  les  années  13.^6  à  1360,  après  la  funeste  ba- 
taille de  Poitiers.  En  ces  temps  de  malheurs,  les  Anglais 
victorieux  et  les  routiers,  malandrins,  tard-venus,  bandes 
composées  des  débris  de  l'armée  vaincue  et  de  déserteurs 
de  toutes  les  nations,  infestaient  les  routes  et  portaient  en 
tous  lieux  le  brigandage  et  la  terreur. 

N°  9.  —  Écu  de  France  couronne.  —  KAROLVS  : 
DEI  :  GRACIA  :  FRANCORVM  :    REX  :  —  rè  Dans  un 

cercle  de  grènetis,  second  cercle  quadrilohé,  dont  chaque 
angle  extérieur  est  occupé  par  une  petite  couronne,  et 
chaque  angle  intérieur  terminé  par  une  fleur  de  lis; 
grande  croix  contrelobée;  au  sommet  de  chaque  bras,  une 
fleur  de  lis  entre  deux  fleurons  ;  au  centre,  fleuron  à  cinq 
pétales.  XPG  —  VINCIT  —  XPC  —  REGNAT.  —  XPC 
—  IMPERAT.  Écu  d'or  de  Charles  V.  1364-1380. 
Diamètre,  28  mill.  1/2;  poids,  3  gr.  80  cent.  1  magni- 
fique exemplaire.  Trouvé  dans  le  cimetière  de  Saint- 
Argny,  en  janvier  1870. 

N"  10.  —  Dans  un  cercle  l'écu  <à  3  fleurs  de  lis.  — 
KAROLVS  :  FRANCORVM  j  REX  ;  -  i"î  Dans  un 
cercle,  croix  pattée  cantonnée  alternativement  de  deux 
couronnes  et  de  deux  fleurs  de  lis.  —  SIT  |  NOME  • 
DNI  :  BENEDICTU  \  —  Charles  V.  —  Poids,  2  gr. 
90  cent.  6  exemplaires,  argent. 

N°H.    —  Dans   un   cercle   trilobé,   l'écu  de   France, 


XL''   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  363 

accompagné  en  haut  et  dans  les  côtés  de  trois  couronnes. 
—  KAROLVS  *  FRANCORVM  *  REX  *  —  i^  Dans  un 
cercle  quadrilobé,  croix  pattée  cantonnée  de  deux  cou- 
ronnes et  de  deux  fleurs  de  lis  alternées.  —  SIT  *  NOMEN  * 
DNT  *  RENEDTCïV  *  —  Charles  V.  —  Poids,  2  gr. 
90  cent.  H  exemplaires,  cuivre  argenté;  près  le  Blanc, 
1869. 

NM2.  —  Dans  un  cercle,  buste  du  roi,  ci  gauche,  d'un 
dessin  barbare;  tête  couronnée,  riche  manteau.— PETRVS: 
DEI  :  GRACIA  :  REX  :  —  i^  Croix  coupant  un  cercle  et 
écartelant  des  armes,  qui  sont  sans  doute  celles  de  Barce- 
lonne;  aux  \  et  A,  annelet  ;  aux2  et  3,  3  besans,  posés 
2^  1.  _  CIVITAS  BARCINONA.  —  Pierre  IV,  roi  d'Ara- 
gon, 1336-1387.  —  Poids,  1  gr  50  cent,  i  bel  exemplaire 
argent.  Près  le  Blanc,  1867. 

N0J3  _  ECU  écartelé,  au  1  et  4  contre-écartelé  de 
Castille  et  de  Léon;  aux  2  et  3  parti  d'Aragon  et  de  Sicile  ; 
en  pointe,  de  Grenade  ;  l'écu  est  couronné.  —  FERNAN- 
DVS  :  ET  :  AELISAB  :  -  r)  6  flèches  liées  ensemble; 
au-dessus,  entrelacs.  -  D  :  G  :  REX  :  ET  :  REGINA  : 
[CAST  :...  10?]  —  Ferdinand  et  Isabelle  d'Espagne 
1479-1504.  Poids,  3  gr.  20  cent.  1  magnifique  exemplaire, 
argent,  trouvé  près  dTngrandes. 

N"    14.  —  Écu  armorié  et  couronné.  —  PHILIP 

^  Dans  un  cercle  quadrilobé,  aux  angles  en  accolade,  les 
armes  écartelées  de  Castille  et  de  Léon.  Lég.  :  illisible.  — 
Philippe  I"  le  Beau  et  Jeanne  la  Folle,  d'Espagne,  1504- 
4506.  —  Poids,  6  gr.  1  exemplaire,  argent.  Trouvé  près 
d'Ingrandes. 


30  i       CONGRÈS  ARCHÉODGIQUE  DE  FRANCE. 

N"  15.  —  Dans  un  cercle  de  grènetis,  écu  counMuiô, 
écartelé,  aux  1  et  i  contre-écartclé  de  Castille  et  de  Léon  ; 
au  2  parti  de  Lorraine  et  de  Navarre  ;  au  3  parti  de...,  en 
pointe  de  Grenade.  Lég.  :  lOANA  —  ET  -  KAROLVS.  - 
i^  Dans  un  cercle  quatrilobé  et  fleuronné  à  chaque  angle, 
une  croix  de  Lorraine.  Lég.:  REGES  —  G,  puis  un  châ- 
teau de  Castille,  et  ensuite  :  HISPANIARVN.  —  Jeanne 
la  Folle  et  son  fils,  premier  du  nom  en  Espagne,  et  Charles- 
Quint  en  Allemagne.  —  Diamètre,  24-  mill.  ;  poids,  3  gr. 
25  cent. 

Cette  belle  pièce  d'or  dut  être  frappée  après  ir)18,  car 
les  Cortès  de  Castille,  réunis  en  iol8  à  Valladolid,  ne 
reconnurent  à  Charles  la  qualité  de  roi,  qu'à  la  condition 
que,  dans  les  actes  publics,  le  nom  de  la  reine  Jeanne,  sa 
mère,  précédât  le  sien. 

N°  16.  —  Buste  du  roi  à  gauche.  —  PHS  •  D  •  G  • 
HISPZ  •  REX  .  DUX  .  GEL  •  (drise)  ,  1563.  ^  DOMI- 
NVS  .  MIHI  •  ADJVTOR  •  accompagnant  l'écu  chargé 
d'armoiries  et  couronné,  posé  sur  une  croix  fleuronnée 
en  sautoir.  —  Philippe  II,  roi  d'Espagne  et  de  Portugal, 
1556-1598.  Poids,  16  gr.  55  cent.  1  exemplaire,  argent. 

N"  17.  —  Écu  chargé  d'armoiries,  sommé  d'une  cou- 
ronne à  3  tleurons,  entouré  d'un  collier  de  la  Toison  d'Or. 
—  ALBERTVS  ET  ELÏSABET  •  D  •  G  •  i^.  Croix 
lleuronnée  en  sautoir,  liée  au  milieu  par  des  lacs  soute- 
nant une  toison  d'or;  entre  les  branches  d'en  haut,  une 
couronne;  dans  le  champ  à  droite  et  à  gauche,  16-00.  — 
Lég.  :  ARCHIDVi.ES  •  AVST  •  DVCES  •  BVRG  ■  ET  • 
BRAB.  —  Albert  et  Elisabeth,  archiducs  d'Autriche,  ducs 
de  Bourgogne  et  de  Brabant.  Diamètre,  25  mil!.;  poids, 
3  gr.  05  cent.  1  bel  exemplaire  d'or. 


XL»   SESSION,   A   CIIATEAUROUX.  30') 

La  présence  de  toutes  ces  monnaies  espagnoles  dans  les 
environs  du  Blanc  n'a  rien  qui  doive  étonner.  L'on  sait 
que  le  Poitou  et  les  contins  du  Berry  lurent  un  des  foyers 
les  plus  persistants  de  la  Ligue.  Presque  tous  les  sei- 
gneurs des  bords  de  la  Creuse  et  de  l'Anglin  étaient  les 
ennemis  acharnés  du  roi.  Cette  résistance  était  soigneuse- 
ment entretenue  avec  l'or  de  l'Espagne.  En  1589,  quatre 
mois  environ  avant  l'assassinat  de  Henri  III,  Henri  IV, 
qui  n'était  encore  que  roi  de  Navarre,  dans  une  campagne 
de  huit  jours  qu'il  fit  en  Bas-Berry,  prit  Argenton  qui 
appartenait  à  la  duchesse  de  Montpensier,  celle  que  l'his- 
toire accuse  d'avoir  armé  la  main  de  Jacques  Clément  ; 
força  le  Blanc  et  dix  ou  douze  châteaux,  et  contraignit  à 
revenir  à  l'obéissance  du  roi  trois  cents  gentilshommes 
ligueurs  (Lettre  de  Henri  IV,  du  28  mars  1589).  Cette 
conquête  ne  fut  pas  de  longue  durée,  car  dès  1591  les 
villes  d'Argenton,  Saint-Marcel,  Saint-Gaultier,  le  Blanc, 
Saint-Benoit  et  Saint-Savin  furent  reprises  par  la  Ligue. 

C'est  pour  cette  Isabelle,  doutnous  venons  de  reproduire 
une  monnaie,  que  Philippe  II  fit  si  longtemps  la  guerre  à 
la  France,  et  prodigua  ses  trésors  et  ses  soldats  contre 
Henri  IV.  C'était  la  seule  créature  peut-être  qu'il  eût 
aimée;  il  lui  destinait  le  trône  de  France.  Mais  voyant 
qu'Henri  IV  avait  enfin  conquis  son  royaume,  et  sentant 
la  vie  lui  échapper,  il  la  fiança  à  l'archiduc  Albert 
d'Autriche,  et  lui  destina  les  Pays-Bas  et  la  Franche- 
Comté,  sous  la  suzeraineté  de  l'Espagne.  Philippe  II  ne 
put  voir  le  mariage  de  sa  fille  bien-aimée,  et  mourut  le 
13  septembre  1598. 

N°  18.  —Buste,  tête  laurée  à  droite.  Lég.:  CAROLVS IX. 
D.  G.  FRANC...  Signe  monétaire,  K.  M.  i^  Écu  de 
France  couronné;  de  chaque  côté  C  couronné.  Lég.  : 


366       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

SIT  NOMEN,  etc.  —  Charles  IX,  ir>GQ-\:ui.  Poids,  8  gr. 
60  ceut.  1  exemplaire  argent. 

N'  19.  -  -  1°  Croix  fleurdelisée.  Lég.:  HENRICVS.  III  : 
D.  G.  FRAN.  ET.  POL.  RX.  1585.  i^  Écu  à  3  llcurs  de 
lis  couronné;  de  chaque  côté  11 -II.  Lég.:  SIT  NOMEN 
DOMINI  BENEDICTViM.  ;  eu  bas  L,  signe  de  la  monnaie 
de  Rayonne.  —  Henri  II,  roi  de  France  et  de  Pologne. 
Poids,  9  gr.  50  centig.  2  exemplaires,  argent. 

2°  Le  même,  au  millésime  de  1582  et  1583.  3  exem- 
plaires, argent. 

N°  20.  —  Le  même.  Buste,  tête  laurée  à  droite.  1576; 
en  bas  F,  signe  de  la  monnaie  de  Poitiers.  3  exemplaires 
argent. 

N°  21.  —  Croix  fleurdelisée.  Lég.:  CAROLVS.  X.  D.G. 
FRANC.  REX.  1591.  i^  Écu  à  3  fleurs  de  lis  couronné.  — 
Lég.:  SIT  NOMEN,  etc.;  en  bas  A,  signe  de  la  monnaie 
de  Paris.  —  Charles  X  (cardinal  de  Bourbon).  Poids,  9  gr. 
50  cent.  4  exemplaires,  argent. 

Cette  pièce  est  datée  de  1591,  tandis  que  Charles  X  est 
mort  en  1590,  dans  sa  prison  de  Fontenay-le-Comte,  en 
Poitou,  où  ses  partisans  le  détenaient  de  peur  de  voir 
s'échapper  leur  influence.  On  trouve  assez  souvent  cette 
pièce,  même  avec  la  date  1.592  et  1593,  dans  les  environs 
du  Blanc,  par  les  mêmes  raisons  qui  ont  été  indiquées  à 
propos  des  monnaies  de  Philippe  II  d'Espagne. 

Dans  le  courant  de  l'année  1867,  entre  lugrandes  et 
Mérigny,  une  bergère  fit  la  découverte  d'un  pot  de  terre 
contenant  une  centaine  de  monnaies.  C'était  assurément 
la  bourse  d'un  ligueur  qui  recevait  de  toutes  mains.  Il  y 
avait  là  des  pièces  de  Sixte-Quint,  d'Urbain  VII  et  de 


XL"   SESSION,    A    CllATEAUROUX.  307 

Grégoire  XIV,  de  Charles  de  Lorraine  et  de  IMiilippe  II 
d'Espagne,  Malheureusement  je  n'ai  pu  acquérir  ces 
monnaies,  qui  ont  été  vendues  à  Poitiers. 

N"  22.  —  Deux  bustes  affrontés;  au-dessus,  une  con- 
ronne  à  o  tleurons;  en  dessous,  la  vache  de  Béarn, 
marque  de  la  monnaie  de  Pau.  Lég.;  HENRICS  II.  D,  G. 
REX.  NAVARRE.  D.  B.  —  i^  Écu  couronné,  écartelé  aux 
1  et  4  de  Navarre,  au  2  de  Béarn,  au  3  de  France.  Lég.  : 
GRATTA.  DEL  SVM.  ID.  QVOD.  SVM.  1537.  —Henri  H 
d'Albret,  roi  de  Navarre,  et  sa  lémnie  Marguerite.  Henri  II 
est  le  grand-père  de  Henri  IV,  roi  de  France  et  de  Navarre. 
Poids,  9  gr.  50  cent.  1  exemplaire,  argent. 

N°  23.  —  1°  Croix  fleuronnée.  Lég.:  —  HENRI  CVS  IIII. 
D.  G.  FRANC.  E.  NAVA.  RX.  1597.  b)  Écu  de  France 
couronné;  de  chaque  côté  IL  IL  Lég.:  SIT  NOMEN,  etc. 
Signe  monétaire  L ,  avec  une  fleur  à  5  pétales.  — 
Henri  IV,  roi  de  France  et  de  Navarre.  1597.  —  Poids, 
9  gr.  50  cent,  l  exemplaire,  argent,  trouvé  à  Belabrc. 

2"  Le  même,  croix  fleurdelisée. — i^  Écu  couronné,  parti 
au  i  de  France;  au  2  coupé  de  Navarre  et  de  Béarn.  Lég.: 
GRATIA.  DEL  SVM.  IN.  QVOD.  SVM.  1602.  -  Henri  IV, 
roi  de  France  et  de  Navarre.  Monnaie  frappée  pour  le 
Béarn.  —  Poids,  9  gr.  50  cent.  1  exemplaire,  argent. 

3°  Le  même.  Lég.:  HENRIGVS,  etc.  1602.  ^  Écu  de 
France.  Lég.:  SIT  NOMEN,  etc.;  en  bas  le  chiffre  9. — 
Poids,  9  gr.  50  cent.  1  exemplaire,  argent. 

4°  —  Le  même.  1603-1604.  -    2  exemplaires,  argent. 

N°24.— l°Tète  laurée  à  droite.  Lég.:  LVD.  \1III.  D.G. 
FR.  ET.  NAV.  REX.  En  dessous,  1653  entre  un  croissant 
et  une  étoile,    i^  Croix  composée  de  L  adossées  et  couron- 


368       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

nées,  cantonnée  de  fleurs  de  lis.  Lég.  :  CHRS  REGN 
VIN'C  IMP.  —  Louis  XIV.  Diamètre,  25  mill.;  poids,  6  gr. 
60  cent.  Magnifique  pièce  d'or.  Le  Blanc. 

2*  ECU  de  France.  Lég.:  LVDOMCVS.  XIIO.  D.  G. 
FRA.  ET.  NAVA.  REX.;  en  dessous  de  l'écu,  entre  les 
lettres  de  la  légende.  D.  G.  X.  —  r  Croix  formée  d'entre- 
lacs et  fieurdelisée.  Lég.  :  CHRISTVS.  REGNAT.  MN- 
CIT.  ET.  LMP.,  puis  une  clochette  et  1646.  —  Louis  XIV. 
Diamètre.  24  mill.  1/2;  poids,  3  gr.  10  cent.  1  exemplaire, 
or.  Le  Blanc. 

3^  Tète  à  droite.  Lég.  :  LVD.  XUIL  D.  G.  FR.  ET 
NA.  REX.  1702.  k  Le  sceptre  et  la  main  de  Justice  en 
sautoir  ;  en  haut  une  couronne:  dans  les  côtés  et  en  bas, 
3  fleurs  de  lis.  Lég.:  DuMINE.  ^ALWM.  G.  puis  une 
étoile,  G.  REGEM.;  en  bas  10.  —  Louis  XIV.  1702.  — 
Poids,  1  gr.  .J.5  cent.  1  exemplaire,  argent.  Trouvé  à 
Rochefort,  commune  de  Sauzelles. 

V  25.  —  Dans  un  losange.  4  fleurs  'de  lis  posées 
1.  2.  1.  Lég.:  BENOVI  :  BENOV  :  BENOM  :  BENOVI  : 
k.  Vaisseau  à  trois  mâts,  pavoisé,  sur  des  ondes  ;  légende 
dans  laquelle  les  mêmes  mots  semblent  revenir  aussi 
quatre  fois,  et  dont  on  ne  voit  guère  le  commencement. 
Lettres  du  xiv*  siècle.  1  exemplaire,  cuivre.  Près  le  Blanc. 

Un  grand  nombre  de  jetons  à  légendes  baroques  et 
vides  de  sens  ont  été  frappés  à  Nuremberg  depuis  le 
XV*  siècle  jusqu'au  milieu  du  xvi*.  Personne  n'a  pu 
jusqu'à  présent,  que  je  sache,  ni  les  expliquer  ni  en  déter- 
miner le  sens.  On  les  rencontre  fréquemment  dans  nos 
provinces,  et  beaucoup  ont  des  types  français.  Notre 
exemplaire  est  sans  doute  une  pièce  de  cette  espèce. 

La  séance  est  levée  à  o  heures  et  demie. 


XL°    SESSION.    A    CIIATEAUROUX.  '.iM 


2'     SÉANCE     DU     12     JUIN     ISIS. 

PRÉSIDENCE  DE  M.  LÉON  PALUSTRE, 
Inspecteur    «le    la    Société    Trançaise    d'Archéologie. 

Siègent  au  bureau  :  MM.  l'abbé  Damourette,  Lenail, 
lo  vicomte  de  Maussabré,  l'abbé  Bordé. 

M.  (le  Laurière  remplit  les  fonctions  de  secrétaire. 

M.  Ledain  lit  le  procès-verbal  de  la  première  séance  du 
12  juin.  Ce  procès- verbal  est  adopté  après  une  légère 
modification  réclamée  par  un  membre  du  Congrès. 

M.  Palustre,  président,  t'ait  connaître  un  article  du 
Messager  d'Indre-et-Loire  rendant  compte  d'une  séance 
de  la  Société  archéologique  de  Touraine^  dans  lequel  les 
membres  de  cette  Société  expriment  les  regrets  que  leur 
inspire  la  mort  de  M.  de  Caumont,  et  rendent  un  hom- 
mage sympathique  à  la  mémoire  de  l'illustre  promoteur 
et  propagateur  des  études  archéologiques  en  France  et  à 
l'étranger. 

M.  de  Salies  donne  lecture  du  compte  rendu  del'exfîursion 
qui  a  été  faite  par  le  Congrès  dans  la  matinée  du  1 1  juin 
pour  visiter  les  restes  de  l'abbaye  et  les  tombeaux  de 
saint  Ludre  et  de  saint  Léocade,  qui  se  trouvent  dans  les 
caveaux  de  l'église  de  Déols. 

XL**  SESSION.  24 


370      CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 


Rapport  sur  l'excursion  faite  à  Déols , 
par  le  Congrès  archéologique,  le  11  juin 
1873. 

Messieurs, 

Dans  toutes  les  agglomérations  d'hommes,  il  y  a  un 
point  qui  en  est  le  centre.  C'est  là  que  se  manifeste,  c'est 
là  que  se  retrempe  la  vie.  C'est  aussi  là  que  sont  déposés 
les  germes  de  l'avenir  social.  Dans  l'antiquité,  ce  centre, 
c'est  le  forum  ;  à  l'époque  franke,  c'est  le  champ  de  Mai  ; 
durant  la  féodalité,  c'est  le  monastère;  plus  tard,  ce  sera 
la  commune. 

Que  le  monastère  ait  été  le  centre  de  la  vie  durant  la 
féodalité,  cela  peut  sembler  un  paradoxe  au  premier 
abord.  Je  ne  crois  pourtant  pas  avoir  à  développer  cette 
thèse  devant  vous,  Messieurs.  Rien  qu'en  reportant  vos 
souvenirs  vers  le  moyen  âge,  les  faits  se  presseront  si 
nombreux,  qu'ils  vous  diront  toute  ma  pensée.  Le  haut 
baron  a  la  toute-puissance,  il  bataille  pour  le  plaisir  de 
batailler,  et  si,  tout  en  agrandissant  ses  comtés  et  res- 
treignant le  morcellement  du  sol,  il  prépare  l'unité  terri- 
toriale, il  est  tout  à  fait  inconscient  de  son  œuvre  et 
n'obéit  qu'à  son  ambition  égoïste  et  jalouse.  De  ce  côté 
n'est  point  la  vie,  car  il  n'y  a  ni  règle  ni  frein. 

La  vie  n'est  pas  non  plus  dans  le  pauvre  peuple,  à  cette 
époque  dont  je  ne  me  ferai  point  le  détracteur  systéma- 
tique, mais  dont  on  ne  peut  méconnaître  les  misères. 
Qu'était-il,  ce  pauvre  peuple,  partagé  entre  le  servage  et 
une  liberté  si  précaire,  que  souvent  il  l'échangeait  volon- 
tairement contre  le  servage  même?  Ici,  nulle  initiative, 


XL»  SESSION,    A   CHATEAUnOUX.  3^1 

nulle  indépendance,  nulle  action  :  ce  n'est  pas  la  vie 
non  plus. 

Mais  entre  ces  deux  extrêmes,  je  dirai  presque  entre  ces 
deux  antagonismes,  il  y  a  un  intermédiaire,  il  y  a  un 
milieu  :  c'est  le  monastère.  Vous  saisissez  ma  pensée, 
Messieurs.  Ce  n'est  pas  au  point  de  vue  religieux  que  je 
me  place  ici,  c'est  au  point  de  vue  purement  humain, 
purement  social,  pour  mieux  dire.  Eh  bien  I  le  monastère 
c'est  la  vie;  car  là  est  la  loi,  là  est  la  règle,  là  est  le  senti- 
ment du  devoir,  là  aussi,  là  surtout,  le  travail  et  la 
pensée. 

Et  voyez  comme  dans  l'œuvre  providentielle  de  Dieu, 
—  car  l'homme  s'agite  et  Dieu  le  m.ène,  —  voyez  comme  le 
bien  peut  sortir  du  mal.  Le  monastère  naîtra  précisément 
des  désordres  du  haut  baron,  de  l'abus  qu'il  aura  fait  de 
sa  puissance,  de  ses  crimes  souvent,  tranchons  le  mot.  Et 
c'est  ainsi  que  cet  homme  qui  n'aime  pas  la  paix,  qui 
méprise  l'agriculture  et  la  science,  qui  foule  ses  vassaux 
et  ne  connaît  pas  de  juge  sur  la  terre,  pose  les  fondements 
de  la  paix,  favorise  le  défrichement  du  sol  avec  les  tra- 
vaux de  l'intelligence,  ouvre  un  asile  contre  l'oppression, 
crée  enfin  une  puissance  respectée  de  tous,  qui  saura 
protester  contre  ses  écarts,  et  répondre  à  ses  excès  par 
l'anathème. 

Et  remarquez-le,  ceci  n'est  pas  le  fait  exceptionnel, 
isolé,  c'est  le  courant  général,  invincible  ;  car  Dieu  ne 
laisse  jamais  les  sociétés  sans  contre-poids  à  leurs  misères. 
Partout  où  il  y  a  un  établissement  féodal,  il  y  a  au 
moins  un  établissement  religieux.  C'est,  dans  la  dissolu- 
tion sociale  causée  par  l'écroulement  du  monde  romain, 
dans  ce  règne  de  la  puissance  brutale  né  de  la  force  des 
choses,  et  qu'on  ne  peut  imputer  à  personne;  c'est,  dans 
la  léthargie  morale  du  moyen  âge,  enfin,  l'étincelle  de  la 


372       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

vie;  que  dis-je!  c'est  la  vie  même,  concentrée  sur  quelques 
points  peut-être  au  début,  mais  déjà  prête  à  se  ré- 
pandre, et  bientôt,  animant  le  corps  social  tout  entier. 

Messieurs,  ce  point  qui  fut  la  vie,  nous  le  retrouvons 
aussi  dans  les  souvenirs  féodaux  de  ce  vieux  sol  qui  donne 
si  sympathiquement  asile  aujourd'hui  à  notre  Société 
française.  L'histoire  nous  l'avait  nommé,  elle  nous  avait 
dit  ses  grandeurs  :  nous  lui  devions  notre  première  visite, 
et,  guidé  par  ce  cœur  élevé  qui  ne  le  trompe  jamais,  notre 
zélé  Directeur  n'a  eu  garde  de  l'oublier. 

C'est  donc  hier  que,  tous  ensemble,  nous  sommes  allés 
reconnaître  ce  point,  en  étudier  les  ruines,  en  évoquer  les 
souvenirs,  et  ce  m'est  un  grand  honneur  d'être  chargé 
d'exprimer  aujourd'hui  les  impressions  de  toutes  sortes 
que  nous  avons  ressenties  en  présence  de  ces  restes  si 
petits,  de  ces  souvenirs  si  grands. 

Je  n'ai  pas  besoin  de  décrire  ici  la  position  de  l'établis- 
sement féodal  qui  succéda  à  la  vieille  ville  gallo-romaine 
de  Déols.  Assis  dans  la  plus  belle  partie  peut-être  d'une 
des  plus  jolies  vallées  du  centre  de  la  France,  il  se  mirait, 
comme  aujourd'hui  ses  restes,  dans  les  eaux  paisibles  de 
l'Indre. 

Quelle  était  son  importance,  quelle  était  la  puissance 
de  ses  hauts  seigneurs  et  leur  origine?  Je  n'ai  pas  à  le 
rechercher  non  plus.  Tout  ce  que  je  dois  dire,  c'est  qu'un 
de  ces  seigneurs,  un  de  ces  princes,  pour  parler  le  langage 
des  chroniques,  Ebbcs  de  Déols,  fils  de  Laune,  vassal  de 
Guillaume  le  Pieux  et  neveu  de  saint  Géronce,  résolut  un 
jour,  de  concert  avec  Hildegarde,  sa  femme,  de  fonder  au 
chef-lieu  de  ses  domaines  une  importante  abbaye  de 
bénédictins.  Ce  fut  en  Tan  917,  et  au  mois  de  septembre, 
si  mes  souvenirs  ne  me  trompent  pas,  que,  dans  ce  but, 
le  pieux  baron  convoqua  une  nombreuse  assemblée  de 


XL"   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  373 

seigneurs  et  de  prélats  dans  la  grande  ville  de  Bourges. 
Et  l'abbaye  fut  fondée. 

A  peine  était-elle  élevée,  ({ue  l'invasion  des  Madgyars 
vint  la  ruiner,  l'incendier  peut-être.  Ebbes  était  mort 
courageusement  en  combattant  l'ennemi.  Raoul,  son  fils 
et  son  successeur,  rétablit  les  bâtiments  du  monastère.  Il 
les  avait  à  peine  terminés,  qu'il  mourut  en  952,  et  son 
fils,  Raoul  II,  dit  le  Chauve,  se  mit  à  reconstruire  entière- 
ment, vers  991,  parait-il,  l'abbaye  si  fraîchement  res- 
taurée par  son  père. 

C'est  à  cette  époque  que,  dans  son  Histoire  du  Berry, 
M.  Raynal  rapporte  l'église  détruite  il  y  a  quelques  années, 
église  qu'il  fait  dédier  une  première  fois  en  1021,  et  qu'il 
suppose  terminée  seulement  au  commencement  du 
xiP  siècle,  lorsque  le  pape  Paschal  II  vint  la  consacrer 
solennellement. 

Tel  est  le  bagage  historique  indispensable  avec  lequel 
nous  nous  acheminons  vers  les  restes  de  l'abbaye  de  Déols. 
Nous  ne  tardons  pas  à  les  découvrir,  bien  réduits,  bien 
caché-,  et  comme  honteux  d'eux-mêmes.  Un  haut  clocher, 
debout  encore,  en  révèle  pourtant  l'existence  de  loin.  Il  est 
là,  comme  un  phare,  pour  éclairer  la  nuit  de  ces  vieux 
temps.  C'est  donc  vers  lui  que  nous  nous  dirigeons. 

Nous  cherchons  tout  d'abord,  dans  cette  grande  tour 
élancée,  quelque  chose  qui  se  rapporte  à  ce  que  nous  a  dit 
M.  Raynal.  Là  devrait  être  représenté,  suivant  l'historien 
du  Berry,  le  x",  le  xi"  et  le  commencement  du  xii''  siècle. 
Mais  du  x^  siècle  nous  cherchons  en  vain  la  trace. 

Le  clocher  de  Déols,  sans  compter  le  soubassement  ou 
rez-de-chaussée,  est  composé  de  quatre  étages,  d'une  orne- 
mentation variée,  d'un  parti  pris  différent,  mais  dans  les- 
quels rien,  absolument  rien,  ne  peut  remonter  si  haut.  Il 
révèle  bien  par-ci  par-là  certaines  inexpériences  de  con- 


374       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

struction  qui  sont  vieilles.  Seules,  cependant,  et  associées 
à  un  appareil,  à  des  joints  et  à  des  mortiers  évidemment 
postérieurs,  elles  ne  sauraient  donner  une  date.  Analysons 
cependant  ce  que  nous  voyons. 

Et  d'abord,  considérons  la  tour  sur  sa  face  dégagée, 
celle  qui  regarde  aujourd'hui,  vers  le  midi,  la  cour  de 
l'établissement  moderne  caché  dans  les  restes  du  vieux 
couvent. 

Le  premier  étage  est  peu  orné.  Reposant  sur  une  base 
nue  et  sans  aucun  caractère  architectonique,  il  présente 
deux  arcs  aveuglés,  plein  cintre,  en  double  plate-bande, 
portés  sur  pilastres.  Une  simple  corniche  coiffe  les 
pilastres  et  reçoit  la  retombée  des  arcs.  Pour  couronner 
cet  étage,  un  jet  d'eau,  peu  saillant,  tout  uni,  garni  toute- 
fois de  grosses  perles  sous  la  saillie. 

Le  second  étage  procède  du  premier  pour  le  partipris 
de  l'ornementation  ;  mais  il  est  déjà  plus  riche  et  plus 
élégant.  Les  deux  arcs  en  plate-bande,  aveuglés  comme 


/./la:/: 


ceux  de  l'étage  inférieur,  en  se  détachant  sur  le  plein  du 


Déois,  pi.  I,  p.  374 


3 


M 

m. 


 


i  .  Elci-alion  du  clocher  de  Dcoh.—  2.  Profil  du  coiironnrmeni  du  clocher 

de  S^-FruiiL  — ,?.  Profil  du  courunnrmenl  du  clocher  dr  l'Abbaye  des  Dames. 

4.  Covronnenient  du  clocher  de  Uranlii'nne. 


imr  A    lit  SuUei. 


Liiftr.  CaUciii,  Teun 


XL"   SESSION,  CHATEAUROUX.  375 

mur,  reposent  sur  trois  colonnes,  dont  celle  du  milieu  est 
à  peu  près  libre,  et  les  deux  autres  engagées  dans  l'angle 
rentrant  formé  par  les  pilastres  qui  renforcent  les  angles 
du  clocher.  Les  chapiteaux  de  ces  colonnes  sont  bien  tra- 
vaillés. Ils  se  rapprochent  beaucoup  de  la  manière  du 
xii"  siècle  :  je  les  crois  toutefois  de  la  fin  du  xi".  D'après 
l'opinion  émise  par  M.  de  Gougny,  celui  de  droite,  que 
reproduit  le  dessin  ci-contre,  pourrait  même  être  un  peu 
plus  ancien.  M.  de  Gougny  croit  reconnaître  qu'il  pro- 
vient d'un  monument  antérieur. 

Ainsi  disposé,  cet  étage,  plus  large  que  haut,  est  cou- 
ronné d'une  corniche  saillante,  soutenue  par  des  modillons 
fort  simples,  et,  aux  angles  du  clocher,  par  une  colonne 
de  toute  la  hauteur  de  l'étage. 

Le  troisième  étage  est  plus  élancé.  Sa  hauteur  excède 
d'un  cinquième  environ  sa  largeur.  Des  deux  côtés,  et 
pour  renforcer  toujours  les  angles  du  clocher,  c'est  la 
continuation  des  pilastres  inférieurs,  mais  complètement 
unis  de  la  baseau  faîte,  et  sans  colonnes  d'angles.  Un  petit 
pilastre  s'élevant  sur  l'aplomb  de  la  colonne  dégagée  de 
l'étage  inférieur,  divise  en  deux  panneaux  l'espace  compris 
entre  les  pilastres  d'angles,  et  soutient  en  même  temps  la 
première  retombée  de  deux  petits  arcs  qui  forment  dans 
chaque  panneau  une  arcature  dont  le  milieu  s'appuie 
sur  une  longue  colonnette.  Cet  étage  aux  proportions 
élégantes  est  couronné  par  une  corniche  dont  la  seule 
partie  qui  domine  l'arcature,  ayant  plus  de  saillie,  est 
garnie  de  modillons. 

Enfin,  le  dernier  étage,  seul  ajouré,  offre  aussi  un  autre 
genre  d'ornementation.  Il  est  percé,  sur  chaque  face,  de 
deux  baies  en  plein  cintre,  ouvertes  au  fond  d'un  ébrase- 
ment  formé  par  un  arc  moulure  en  tore  et  un  arc  en 
plate-bande,  ce  dernier  entouré  d'une  archivolte  saillante, 


376       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUK  DE  FRANCE. 

gracieusement  découpée.  Ces  deux  arcs  s'appuient  sur 
d'élégantes  colonnettes  qui  laissent  un  petit  pilastre  entre 
les  deux  baies,  et  un  autre  vers  chacun  des  angles  du 
clocher,  que  décorent  des  colonnettes  pareilles  à  celles  des 
baies. 

Cet  étage,  plus  large  que  haut,  est  d'un  effet  délicieux. 
Il  est  couronné  par  une  corniche  portée  sur  des  raodillons, 
sinon  plus  saillants,  du  moins  plus  historiés  que  les 
autres. 

L'ensemble  de  ces  quatre  étages,  variés  de  proportions  et 
de  détails,  et  qui,  prenant  plus  d'importance',  sont  aussi 
plus  ornés  à  mesure  qu'ils  s'élèvent,  cet  ensemble  est  des 
plus  heureux.  Les  arcatures  aveuglées,  larges  et  trapues, 
qui  décorent  les  deux  étages  inférieurs,  portent  avec  elles 
le  sentiment  de  la  solidité.  Le  monument  est  bien  assis 
sur  ces  étages  et  le  soubassement  brut  qui  le  précède. 
Mais  au  second,  orné  de  deux  arcs  déjà  plus  allongés, 
succède  le  troisième,  avec  ses  quatre  petits  arcs  et  ses 
longues  colonnettes.  La  tour  s'élance,  elle  devient  plus 
svelte,  plus  légère.  Les  ajours  du  quatrième  la  complè- 
tent, et  désormais  l'harmonie  ne  laisse  rien  à  désirer. 
L'œil  qui  a  suivi  l'ascension  de  ces  lignes  savantes  s'arrête 
un  moment  pour  Touiller  dans  le  vide  des  ajours  et  y 
chercher  l'âme  du  monument,  ce  qui  fut  jadis  sa  raison 
d'être  et  sa  solennelle  voix,  et  bientôt  il  se  porte  plus 
haut,  sur  le  couronnement  de  la  tour,  sur  la  pyramide 
qui  la  termine. 

C'est  en  effet  là,  au  point  de  vue  pittoresque,  une  des 
parties  qui  appelle  le  plus  l'attention.  Mais,  je  dois  me 
hâter  de  le  dire,  au  point  de  vue  archéologique,  son  im- 
portance est  bien  plus  grande  encore.  Pour  en  juger, 
qu'on  se  rappelle  seulement  les  nombreux  et  remar- 
quables passages  se  rapportant  aux  couronnements  pyra- 


XL«   SESSION,    A   OHATEAUROUX.  377 

midaux  des  vieilles  tours  d'églises,  dans  l'article  Clocher, 
l'iiu  des  plus  savants,  l'un  des  plus  judicieux  du  Diction- 
naire d'architecture  de  M.  VioUet-le-Duc. 

Il  est  certain  que,  par  de  semblables  couvertures,  ces 
monuments  se  rattachent  aux  traditions  byzantines. 
M.  Viollet-le-Duc  l'a  parfaitement  établi,  et,  suivant  à 
travers  les  diverses  régions  de  la  France  la  marche  de 
cette  innovation,  dont  il  constate  la  première  application 
dans  le  clocher  de  Saint-Front  de  Périgueux,  il  trace  une 
carte  où  tous  les  premiers  centres  d'influences  sont  rigou- 
reusement fixés,  avec  les  routes  qu'a  suivies  le  mouve- 
ment, et  les  étapes  qu'il  y  a  laissées. 

Rien  de  plus  ingénieux  que  cette  carte,  rien  de  plus 
exact,  même  au  point  de  vue  de  l'ensemble.  Toutefois, 
dans  cette  grande  et  belle  étude,  quelques  faits  particuliers 
me  semblent  devoir  modifier  pour  le  Berry,  et  spéciale- 
ment pour  la  vallée  de  l'Indre  et  Déols,  le  courant  indiqué 
par  M.  Viollet-le-Duc.  Je  peux  me  permettre  de  les  exa- 
miner ici,  sans  manquer  au  respect  que  je  garde  au 
maître  incomparable;  car  lui-même  reconnaît  qu'il  n'a 
pu  atteindre  à  tout.  «  Quelque  soin  que  nous  ayons  pris, 
«  dit-il,  en  eflet,  de  distinguer  les  différents  caractères 
«  des  clochers  qui  couvrent  le  sol  de  la  France  actuelle, 
«  jusqu'au  xii®  siècle,  d'indiquer  les  écoles  diverses,  leurs 
«  croisements  et  les  influences  qu'elles  exercent  les  unes 
«  sur  les  autres,  nous  devons  avouer  que  notre  travail  est 
«  très-sommaire  et  qu'il  nous  a  tallu  laisser  de  côté  des 
«  détails  d'un  intérêt  réel.  »  C'est  un  de  ces  détails  qui 
nous  tombe  ici  sous  la  main,  et  nous  devons  le  relever; 
car  c'est  précisément  le  rôle  des  congrès  d'aller  fouillant 
partout,  pour  contrôler  ou  compléter  par  les  études  par- 
tielles les  grandes  vues  d'ensemble. 

Or  voici  de  quoi  il  s'agit. 


378       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  PE  FRANCE, 

La  carte  de  M.  VioUet-le-Duc,  dont  il  vient  d'être  ques- 
tion, pose,  comme  premier  type  des  clochers  pyramidaux, 
le  clocher  de  Saint-Front  de  Périgueux,  du  commence- 
ment du  XI*  siècle,  et,  considérant  les  courants  dont  ce 
clocher  a  été  le  centre,  le  savant  écrivain  constate  que, 
«  vers  le  nord,  l'influence  de  ce  prototype....  envahit 
«  l'Angoumois,  la  Saintonge,  l'Aunis,  le  Poitou,  descend 
«  la  Vienne,  se  prolonge  au  nord  vers  Loches,  et  remonte 
«  l'Indre  jusqu'à  Chàteauroux  (clocher  de  Déols).  » 

Considérant  après  les  courants  partis  d'un  second  clo- 
cher au  type  occidental,  celui  de  Brantôme  (Dordogne), 
du  XI*  siècle  aussi,  il  constate  que  pour  ce  prototype 
«  une  branche  vigoureuse  pousse  vers  le  nord,  passe  à 
«  Limoges,  se  rencontre  à  Loches  avec  une  des  branches 
«  du  premier  type  (celui  de  Saint-Front),  traverse  la 
«  Loire  à  Saint-Benoit,  et  arrive  jusqu'à  Vendôme  et 
«  Chartres.  » 

Ainsi,  les  nombreux  clochers  pyramidaux  anciens  que 
nous  montre  la  vallée  de  l'Indre,  et  particulièrement  le 
clocher  de  Béols,  qui  nous  occupe,  seraient  nés  du  clocher 
de  Notre-Dame  de  Loches,  élevé  lui-même  sous  la  double 
influence  du  type  byzantin  de  Saint-Front  de  Périgueux 
et  du  type  occidental  de  Brantôme. 

Certes,  nous  sommes  loin  de  méconnaître  l'influence 
des  clochers  de  Saint-Front  et  de  Brantôme;  mais  il  nous 
semble  bien  difficile  de  lui  faire  ici  sa  juste  part;  car 
nous  trouvons  sur  les  bords  mêmes  de  l'Indre,  et  au  com- 
mencement du  XI"  siècle,  c'est-à-dire  au  moment  où  s'éle- 
vaient à  peine  les  deux  types  cités  par  M.  VioUet-le-Duc, 
nous  trouvons  un  monument  particulier  qui  nous  parait 
avoir  inspiré  d'abord  les  constructions  de  cette  région.  Ce 
monument  est,  à  la  vérité,  détruit  aujourd'hui.  Cepen- 
dant, grâce  à  des  textes  précis,   il  nous  est  permis  de 


XL"   SESSION,    A    CHATEAUllOUX.  ^^70 

l'étudier  encore  et  d'en  étudier  aussi  les  premières  imita- 
tions. 

Un  passage  de  la  cosmographie  de  Belleforest  (1)  parle, 
comme  d'un  monument  extrêmement  ancien  et  bâti 
«  avant  même  que  les  Français  vinssent  en  Gaule  »,  d'une 
pyramide  merveilleuse,  «  de  80  pieds  de  haut,  »  qui  s'éle- 
vait de  son  temps  au  centre  du  cloître  de  l'abbaye  de 
Beaulieu.  Cette  date  si  reculée  est  une  de  ces  exagérations 
comme  l'imagination  légère,  et  peut-être  un  peu  aussi 
l'ignorance  de  l'auteur  commingeois,  en  savent  trouver. 
Toutefois  nous  ne  devons  pas  nous  hâter  de  rejeter  pour 
cela  le  récit  de  Belleforest.  Sa  description  mérite  d'être 
lue,  et  si  nous  ne  la  rapportons  pas  ici,  c'est  que  nous 
avons  à  citer  d'autres  autorités  plus  modernes  et  non 
moins  précises. 

Nous  trouvons  en  effet,  dans  les  Mémoires  ms.  de 
D.  Galand,  pou?' servir  à  l'histoire  de  l'abbmje  de  Beaulieu^ 
des  détails  parfaitement  circonstanciés  sur  cette  pyra- 
mide (2). 

«  Elle  est  d'environ  48  toises  de  hauteur,  nous  dit  le 
«  précieux  ms.,  portée  sur  8  petits  piliers,  qui  chacun 
«  soutient  son  angle,  chaque  pierre  travaillée  en  façon 
«  d'ondes  par  le  dehors,  et  par  le  dedans  fort  polies  depuis 
«  la  pointe  jusqu'au-dessus  desdits  piliers,  moins  une 
«  toise  autour  de  la  pyramide,  toute  diversifiée  et  mar- 
«  mousée.  » 

Et  ailleurs  :  «  C'est  un  monument  des  plus  beaux  du 

(-l)  Cosmogr.  I""  vol.,  t.  II,  col.  31.  Édition  de  l'iTO. 

(2)  Pages  127  et  12!)  du  manuscrit.  —  Ces  mémoires  sont 
la  propriété  de  M.  Fleurus  Olivier,  (|ui  a  bien  voulu  nous  auto- 
riser à  leur  faire  quelques  emprunts  pour  notre  Histoire  de 
Foulques  Nerra.  D.  Galand  était  moine  de  Bcauliou. 


380       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

«  royaume,  que  Foulques-Nerra ,  fondateur  de  cette 
«  abbaye,  fit  bâtir  pour  servir  de  couverture  à  un  grand 
a  bassin  porte  sur  huit  piliers....  Le  bassin  est  tout  d'une 
«  pierre  qui  a  de  circonférence  24  pieds  de  roi,  et  2 
«  d^épaisseur.  o 

Voilà  déjà  bien  des  détails,  et  le  texte  de  D.  Galand 
nous  permettrait  d'aller  plus  loin. 

Mais  il  est  un  autre  manuscrit  antérieur  à  celui  de 
D.  Galand,  et  qui  nous  a  laissé  de  la  pyramide  de  Beaulieu 
une  description  plus  nette  encore.  Ce  manuscrit  est  celui 
de  du  Buisson,  conservé  à  la  bibliothèque  Mazarine,  sous 
le  n"  2694  [1);  il  est  peu  connu.  Cependant  nous  l'avons 
trouvé  d'une  si  parfaite  exactitude  dans  tout  ce  qu'il  nous 
a  été  possible  de  contrôler,  que  nous  avons  en  lui  la  plus 
grande  confiance.  Sa  description  de  la  pyramide  de  Beaulieu 
est,  du  reste,  si  bien  circonstanciée,  que  nous  avons  pu 
'reconstituer  exactement  le  monument,  à  l'échelle,  d'après 
ses  indications.  Vous  allez  eu  juger. 

n  Dans  le  pourpris  de  cette  même  abbaye,  dit-il,  se 
«  voit  une  pyramide,  ronde  par  dehors,  ou  cône,  à  écailles 
M  si  bien  jointes,  qu'il  semble  que  ce  ne  soit  qu'une  seule 
«  pierre.  Elle  a  huit  faces  par  dedans,  ayant  trois  ou 
«  quatre  rangs  d'écriture  qui  va  tout  à  l'entour  desdites 
«  faces  et  circuit  intérieur....  Ce  n'est  ni  caractères,  ni 
«  langage  gothique  ou  gaulois,  comme  dit  Duchesne  (2), 
«  mais  escriturc  latine  de  cinq  à  six  cents  ans.  Aussi  la 

(1)  Il  est  intitulé  Voyageai  en  France,  et  la  partie  regardant 
laTouraine  a  été  écrite  en  l(i3."K  Ce  du  Buisson  était  un  gen- 
lilhoninie  attaché  à  M.  do  Guent'gaud.  secnUaire  d'État.  C'est 
tout  ce  que  nous  en  pouvons  dire. 

(2)  Duchesne  parle  de  la  pyramide;  mais  du  Buisson  conlbnd 
ici.  Les  expressions  qu'il  relevé  appartiennent  à  Belleforest. 


Déols,  pi.  Il,  [..  380, 


'-Vf 


v>3 


Echelle 


Pyramide  de  BEAULIEU. 


Dess    rt  aul  par  A-  de  S'tlifs 


Impr  ùuU/and>  ■  T^^un 


XL"   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  381 

«  tradiliou,  ou  mémoire  de  l'alibaye,  porto  (jue  ce  fut  leur 
«  fondateur  Foulques-Nerra  qui  la  bâtit  pour  servir  de 
«  couverture  à  un  bassiu  de  fontaine  pour  l'usage  des 
«  moines,  comme  il  y  en  a  un  semblable,  ([uoicjue  de 
«  moindre  bauteurel  apparence,  à  Saint-Aubin  d'Angers. 
«  Ce  bassin  se  voit  encore  là,  à  demi  rompu,  la  fontaine 
«  étant  tarie,  et  est  de  figure  arrondie,  de  pierre  de  liais 
«  ou  sonnante,  d'une  toise  et  plus  de  diamètre,  et  gravée 
«  par  dehors  de  têtes  tournées  l'une  à  l'autre  et  se  regar- 
«  dant  deux  à  deux,  de  fort  bonne  sculpture.  La  pyramide 
rt  ou  cône  est  portée  sur  huit  piles  composées  de  petites 
«  colonnes  très-longues  et  môme  ayant  les  chapiteaux 
«  fort  gothiques.  11  y  a  donc  huit  entrées  soubs  ladite 
«  pyramide,  qui  sont  huit  arcades  et  ouvertures,  hautes 
«  de  deux  toises  environ  sur  terre,  et  le  solide  de  la  pyra- 
«  mide  du  cône,  au-dessus  de  cela,  porte  dix  à  douze 
«  autres  toises  environ  de  hauteur  (1).  » 

Il  est  impossible  d'être  plus  précis.  Cependant,  pour  la 
restitution  exacte  du  monument,  il  nous  aurait  manqué 
la  mesure  du  diamètre  du  cône,  à  sa  base.  Une  pièce  offi- 
cielle, citée  par  D.  Galand,  est  venue  combler  cette  lacune. 
C'est  un  arrêt  du  conseil,  du  7  novembre  1697,  qui  fait 
défense  aux  religieux  de  Beaulieu  d'abattre  la  pyramide, 
ainsi  que  c'était  leur  intention  à  la  suite  d'un  ouragan 
qui  en  avait  enlevé  la  pointe.  Il  dit  que  le  monument 
«  a  24  ou  25  pieds  de  diamètre  à  la  base,  et  90  de  hau- 
teur » .  Grâce  à  ce  dernier  document,  toutes  les  indications 

(I)  Telle  était  encore  cette  pyramide  en  IG3o.  Après  la  chute 
de  la  pointe  en  1676,  un  arrêt  du  conseil  prescrivit  de  réparer 
«  un  monument  qui  attestait  la  gloire  du  fondateur  de  l'abbaye. 
«  en  même  temps  qu'il  faisait  l'admiration  des  étrangers.  »  Il 
l'ut  pourtant  démoli  en  1720,  à  cause  de  sa  caducité. 


382       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

étaient  complétées,  et  nous  n'avons  eu  qu'à  laisser  mar- 
cher la  règle  et  le  crayon. 

Et  maintenant,  sans  perdre  de  vue  la  description  de  du 
Buisson,  jetons  un  coup  d'oeil  sur  le  croquis  qui  la  résume 
et  la  rend  plus  sensible. 

Que  ce  soit  là  un  monument  inspiré  parles  souvenirs  de 
l'Orient,  qui  le  pourrait  méconnaître?  Cette  vasque,  ce  jet 
d'eau,  ces  colonnes,  cette  pyramide  n'en  ont-ils  pas  le  cachet 
irrécusable?  Et  quelle  parenté  évidente  entre  ce  «  cône  à 
écailles  si  bien  jointes  »  et  le  couronnement  conique  du 
clocher  de  Saint-Front  et  celui  de  l'abbaye  des  Dames,  de 
Saintes!  Seulement  de  cette  parenté  il  nous  est  impos- 
sible de  conclure  ici  que  le  clocher  de  Saint-Front  soit  le 
type  inspirateur  ;  le  contraire  serait  plutôt  la  vérité.  Mais, 
hâtons-nous  de  le  dire,  nous  n'attribuons  pas  une  pareille 
influence  à  la  pyramide  de  Beaulieu.  C'est  assez  qu'elle 
nous  présente  le  type  primordial  des  constructions  simi- 
laires de  la  vallée  de  l'Indre,  et  sous  ce  rapport  nous  ne 
croyons  pas  qu'il  puisse  y  avoir  de  doute. 

C'est  en  eflet  après  son  premier  voyage  en  Orient,  qui 
s'était  accompli  de  1002  à  1003,  des  chartes  contempo- 
raines le  prouvent,  que  Foulques-Nerra  bâtit  l'abbaye  de 
Beaulieu.  L'église  était  élevée  dès  d007,  mais  diverses 
vicissitudes  retardèrent  l'installation  détinitive  des  moines 
jusqu'à  l'an  1012,  où  le  monastère  paraît  avoir  été  com- 
plètement terminé  (1).  La  pyramide  aurait  donc  été 
élevée  dans  les  premières  années  tout  à  fait  du  xi*  siècle, 
c'est-à-dire  avant  la  construction  du  clocher  de  Saint- 
Front,  ou,  tout  au  plus,  au  moment  où  il  se  construisait. 
Cela  dit  tout. 

(1)  Voir  notre  Histoire  de  Foulques-Aerra,  comte  d'Anjou, 
au  mot  Beaulieu,  de  la  table  alphabétique. 


XL*   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  383 

Du  reste,  une  simple  observation,  à  défaut  môme  de 
dates,  conduit  à  une  conclusion  identique.  Si  l'on  qualifie 
de  conique  le  couronnement  du  clocher  de  Saint-Front, 
c'est  évidemment  à  défaut  de  terme  plus  précis  pour  carac- 
tériser sa  forme  bulbeuse.  Ce  couronnement  est  une  calotte 
dont  le  sommet  s'élève  et  va  finir  en  pointe,  de  manière  à 
donner  un  profil  général  assez  semblable  à  celui  de  cette 
moulure  qu'on  nomme  cimaise  ou  talon  renversé.  Il  n'y 
a  donc  là  que  des  lignes  courbes,  et  ce  sont  les  dérivés 
seuls  qui ,  en  affectant  la  véritable  forme  conique  ou 
pyramidale,  nous  montrent  la  ligne  droite.  Dans  la  pyra- 
mide conique  de  Beaulieu,  au  contraire,  règne  aussitôt  le 
système  rectiligne,  sans  l'intervention  du  clocher  de  Bran- 
tôme, qui  n'est  pas  encore  né,  ou  qui  naît  à  peine,  et  qui, 
dans  tous  les  cas,  sera,  lui,  une  véritable  pyramide,  et 
une  pyramide  à  quatre  pans.  On  sent  combien  ces  faits 
sont  caractéristiques  et  quel  jour  ils  jettent  sur  la  question. 

Il  nous  semble  donc  que  c'est  à  Beaulieu  que  les  clochers 
de  la  vallée  de  l'Indre  ont  pris  leur  type,  avant  même  que 
l'intluence  de  Saint-Front  et  de  Brantôme  eût  pénétré 
jusqu'à  eux.  Nous  pourrions  le  démontrer,  croyons-nous, 
en  suivant  pas  à  pas,  dans  cette  vallée,  la  construction  des 
nombreux  clochers  pyramidaux  qui  la  sillonnent,  et  en  la 
datant  pour  chacun  d'eux.  Ce  travail  nous  parait  inutile. 
Il  n'est  personne  ici  qui  ne  le  puisse  faire  en  un  instant 
avec  ses  souvenirs.  Nous  insisterons  cependant  sur  ce 
point,  que,  dès  une  époque  très-ancienne,  tous  les  types 
dérivés  du  type  conique  de  Beaulieu  se  montrent  à  quel- 
ques pas  de  l'abbaye.  A  Beaulieu  même,  dès  la  fin 
du  xi^  siècle,  ou  au  commencement  du  xii°,  on  élève 
pour  l'église  abbatiale  un  clocher  avec  couronnement 
pyramidal  à  huit  pans,  dont  l'intérieur  de  la  pyramide  du 
cloître  fournit  le  type.  Il  est  disposé  selon  le  mode  le  plus 


384       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ordinaire,  de  manière  à  ce  que  quatre  de  ses  pans  corres- 
pondent aux  quatre  laces  de  la  tour.  A  Gormery,  vers  le 
même  temps,  sinon  un  peu  plus  tôt,  s'élève  un  autre  cou- 
ronnement pyramidal  à  huit  pans,  mais  disposés,  ceux-ci, 
d'une  façon  assez  exceptionnelle,  quatre  angles,  et  non 
quatre  pans,  correspondant  aux  faces  de  la  tour,  comme 
au  clocher  de  Saint-Léonard  (Haute- Vienne),  décrit  par 
M.  VioUet-le-Duc. 

A  Loches,  dans  la  collégiale  de  Notre-Dame,  l'imitation 
est  plus  servile,  sous  la  direction  du  prieur  Thomas 
Pactius,  et,  quoiqu'on  ait  gagné  déjà  la  fm  du  xii''  siècle, 
les  couronnements  sont  parfaitement  coniques,  soit  dans 
les  clochers,  soit  dans  les  dubes  qui  semblent  plus  parti- 
culièrement inspirées  par  la  couverture  de  la  fontaine  de 
Beaulieu  (1).  On  voit  en  effet,  par  les  souches  des  maçon- 
neries de  Thomas  Pactius,  conservées  dans  les  recon- 
structions postérieures,  que  ces  pyramides,  rondes  à  l'exté- 
rieur, étaient  à  huit  pans  à  l'intérieur. 

C'est  de  ce  type  rond  que  dérive  la  flèche  de  Déols. 
Seulement  elle  n'est  point  polygonale  en  dedans.  D'après 
M.  Raynal,  cette  flèche  ne  remonterait  pas  au  delà  du 
xiii^  siècle,  le  clocher  étant  tombé  en  1210.  Mais  il   ne 

(1)  Ces  dubes  sont  des  pyramides  creuses,  servant  de  couver- 
ture à  la  nef  de  l'église,  et  jouant  absolument  le  même  rôle  que 
les  coupoles  dans  les  édinces  byzantins.  Du  Buisson,  déjà  cité, 
nous  a  laissé  la  description  de  ce  qu'elles  étaient  encore  de  son 
temps,  et  de  ce  qu'était  aussi  le  couronnement  des  deux 
clochers.  Lo.  tout  formait  c  des  cônes  creux...  ronds  par  dehors 
et  octangles  par  dedans  ».  Ces  cônes  étaient  déjà  fort  dégradés 
lors  du  voyage  de  du  Buisson,  en  1633.  «  Comme  la  pluie  les 
gaste,  dit-il,  les  chanoines  sont  après  à  les  faire  couvrir  d'ar- 
doises. i>  Depuis,  ils  ont  tous  été  refaits,  et  à  huit  pans,  tant  à 
l'extérieur  qu'à  l'inlérieur. 


XT/    SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  38-'') 

nous  est  pas  plus  possible  d'admettre  celte  chute (1  jet  cette 
date  pour  le  clocher  de  Déols  encore  existant,  que  la  pré- 
sence des  restes  du  x"  siècle,  dont  parle  M.  Raynal,  ainsi 
que  nous  le  disions  au  début  de  ce  compte  rendu  (2), 
Nous  avons  vu  à  quelle  époque  se  rattache  la  tour,  et  rien 
ne  nous  porte  à  croire  que  la  flèche  soit  postérieure,  au 
moins  comme  type.  Ces  flèches  rondes  sont  fort  primi- 
tives. On  les  a  abandonnées  pour  les  ilôches  polygonales, 
plus  (aciles  à  construire,  et  nous  ne  voyons  guère  qu'on  y 
soit  revenu.  Si  donc,  par  suite  d'accident,  la  flèche  de 
Déols  a  été  restaurée,  tout  porte  à  croire  que  sa  forme 
primitive  n'a  pas  été  modifiée.  Rien,  dans  l'examen  mi- 
nutieux que  nous  avons  fait  des  maçonneries  (3),  ne  nous 
a  sollicité  à  penser  autrement,  et  nous  la  considérons 
comme  un  des  dérivés  les  plus  prochains  d'un  type 
byzantin  apporté  directement  d'Orient,  par  Foulques- 
Nerra,  dès  les  premiers  jours  du  xr  siècle. 

Cette  affirmation  appellerait  peut-être  des   rapproche- 

(1)  L'église  de  Déols  avait  quatre  clochers, qui  accompagnaient 
le  narlhex,  ainsi  que  nous  le  verrons  bientôt.  La  date  et  le  fait 
cités  par  M.  Raynal  doivent  se  rapporter  à  l'un  des  trois  clochers 
détruits. 

C;2)  Nous  devons  dire  que  dans  la  base  du  clocher  de  Déols,  face 
nord,  nous  avons  retrouvé  à  l'intérieur  un  mur  épais,  dont  le 
mortier,  plein  de  gros  charbons,  et  la  disposition,  pourraient 
bien  remonter  au  x«  siècle.  Ce  mur,  sur  lequel  le  clocher  est  à 
cheval,  semblerait  s'être  dirigé  du  nord  au  midi.  Nous  croyons 
qu'il  est  un  reste  de  l'église  primitive.  Le  clocher  existant  est 
l'intermédiaire  entre  ce  vieux  débris  et  les  ruines  du  plein 
xu^  siècle,  dont  l'église  nous  montre  partout  la  trace. 

(3)  Nous  sommes  retourné  à  Déols  depuis  le  Congres,  et  grâce 
aux  échafaudages  dressés  alors  pour  restaurer  la   tour,  nous 
avons  pu  l'analyser  pierre  à  pierre,  en  dedans  et  eu  dehors. 
XL"   SESSION.  2S 


386       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

meuts  et  des  preuves.  Il  ne  nous  serait  pas  difficile  de  les 
trouver.  Mais  j'ai  déjà  trop  abusé  de  votre  attention, 
Messieurs,  pour  m'engager  dans  ce  côté  un  peu  extrinsèque 
de  la  question  de  Déols.  Il  me  suffira  de  rappeler  que  les 
églises  byzantines  de  l'Asie,  celles  des  Arméniens  surtout, 
et  parmi  celles-ci  l'église  d'Erivau  et  celle  d'Ani,  publiées 
par  M.  Charles  Texier  dans  sou  Voyage  en  Asie ,  pré- 
sentent cette  particularité,  que  les  voijtes  hémisphériques 
des  coupoles  sont  couronnées  à  l'extérieur  de  toits  coniques. 
Quelquefois,  sous  ce  toit  conique,  premier  principe  des 
couronnements  de  clochers  qui  nous  occupent,  ce  n'est 
plus  une  coupole  hémisphérique,  c'est  une  voûte  surélevée, 
un  tronçon  de  cône  qui  prend  immédiatement  naissance 
sur  les  pendentifs,  et  nous  montre  le  premier  principe  de 
nos  pyramides  creuses.  Les  Annales  archéologiques  de 
Didron,  t.  XII,  p.  178,  en  donnent  un  exemple  dans 
l'église  de  Digour.  Enfin,  plusieurs  églises  de  l'Asie  nous 
laissent  voir,  à  côté  des  dômes,  des  clochetons  pyramidaux 
tout  pareils  aux  nôtres,  qui  n'en  sont  évidemment  que  la 
copie. 

Je  ne  suis  donc  pas  allé  trop  loin  dans  ce  que  j'ai  dit  du 
type  importé  par  le  comte  d'Anjou,  et  je  crois  pouvoir 
ajouter  que  plus  cette  question  serait  serrée  de  près,  plus 
vive  serait  la  lumière  projetée  autour  d'elle. 

Mais  il  faut  en  finir  avec  le  clocher  de  Déols  et  tout  ce 
qui  s'y  rapporte.  Si  cette  partie  de-  l'église  du  vieux  mona- 
stère d'Ebbes  est  seule  restée  debout,  les  ruines  qui  l'en- 
tourent méritent  aussi  notre  attention. 

Et  tout  d'abord,  jetons  un  coup  d'oeil  rapide  sur  ces 
débris  un  peu  épars,  et  classons-les.  La  chose  est  aisée  ; 
leur  caractère  est  parfaitement  homogène.  En  eux  rien  ne 
détonne,  rien  ne  fait  (juestion  ;  tout  est  du  plein  xii*"  siècle, 
aussi  pur  qu'il  est  beau.  Malheureusement  ces  quelques 


Déols,  pi.  m,  p.  387. 


Éclielle         t  •  ■  ■ .  i^ ^^- i^j.^ 


Plan  de  l'église  de  DÉOLS 


Huts.  et  aul  par  .1.  dr  Sall< 


XI."    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  387 

détails  restent,  par  rap[)ortà  l'ensemble  de  l'église,  tout  à 
lait  énigmaliques.  Nous  pouvons  reconnaître,  pourtant, 
que  sur  le  narthex  ou  porche,  s'élevait  une  voûte  en 
berceau.  A  l'extrémité  du  narthex,  vers  la  net,  nous 
apercevons  aussi  la  naissance  d'un  arc  ogive  carré,  avec 
rosaces  du  genre  de  celles  qui  ornent  les  arcs  ogives  du 
narthex  de  Loches.  La  parenté  est  évidente. 

Dans  l'ensemble,  rien  n'est  saisissable.  Nous  pouvons 
seulement  constater  que  l'église  n'a  jamais  eu  de  transepts. 
Et  ce  serait  tout,  si  un  vieux  plan  qui  nous  est  communi- 
qué par  M.  TabbéDamourette,  ne  faisait  la  lumière  en  nous 
permettant  de  reconstituer  le  gros  des  anciennes  disposi- 
tions. Nous  donnons  ici  un  croquis  de  ce  plan,  que 
M.  l'abbé  Damourettea  bien  voulu  nous  laisser  copier  (1). 
Il  va  nous  servir  de  guide. 

Inutile  d'insister  sur  ce  qu'était  ce  vaisseau  aux  pro- 
portions si  allongées  et  si  étroites.  L'œil  s'en  peut  rendre 
compte  sans  le  secours  d'un  texte.  Passons  donc  tout  de 
suite  aux  dispositions  exceptionnelles. 

Nous  avons  déjà  dit  que  la  partie  antérieure  de  l'église 
de  l'abbaye  présentait  quatre  clochers.  De  vieux  tableaux, 
aujourd'hui  conservés  dans  l'église  paroissiale  Saint- 
Étienne  de  Déols,  nous  montrent,  en  effet,  ces  quatre  clo- 
chers, plus  deux  autres  placés  sur  les  côtés  nord  et  sud  de 
l'église,  comme  des  transepts.  Notre  plan  nous  laisse  voir 
les  quatre  clochers  A,  B,  C,  D  de  l'entrée  ;  mais  il  ne  nous 
montre  pas  les  deux  clochers  latéraux,  dont  il  ne  reste  plus 
aucune  trace.  Étaient-ils  déjà  détruits  lorsque  le  planaété 
relevé,  à  la  fin  du  siècle  dernier?  N'ont-ils  existé  que  dans 

(1)  Nous  avons  pu  le  contrôler,  depuis  le  Congrès,  parun 
autre  plan,  que  M.  Palustre,  inspecteur  de  la  Société  française,  a 
bien  voulu  nous  communiquer. 


388       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

le  dessin  du  peintre  des  tableaux  de  Saint-Étienne  ?  c'est 
ce  qu'on  ne  saurait  dire  précisément.  Les  quatre  clochers 
de  notre  plan  suffisent,  du  reste,  à  défrayer  notre  curiosité, 
et  ils  cachent  déjà  assez  de  mystères  pour  que  nous  n'en 
cherchions  pas  plus  long. 

Qu'étaient-ce,  en  effet,  que  ces  parties  E  et  F,  qui 
reliaient  entre  eux,  deux  à  deux,  les  clochers  AC,  BD  ?  La 
partie  N  était  le  narthex  que  des  retombées  de  voûtes  et 
des  arrachements  de  murs  encore  attachés  au  clocher  B, 
le  seul  existant,  nous  ont  permis  de  restituer.  Mais  cette 
partie  0,  qu'était-eile?  Doit-on  y  voir  une  cour  à  ciel 
ouvert?  Doit-on  y  voir  un  vestibule  précédant  le  narthex? 
Des  hypothèses  seules  pourraient  répondre  à  ces  questions, 
et  comme  elles  reposeraient  uniquement  sur  l'iraaginative 
de  celui  qui  les  formulerait,  mieux  vaut  s'abstenir. 

Pour  ce  qui  est  des  parties  E  et  F,  nous  avons,  du 
moins  en  F,  quelques  restes  remarquables  qui  nous  per- 
mettent d'émettre  une  opinion.  Nous  voyons,  en  effet, 
sur  ce  point  et  contre  le  clocher,  des  placages  de  deux 
époques,  commencement  et  fin  du  xii''  siècle,  attestant, 
semble-t-il,  pour  ces  deux  dates,  une  disposition  analogue, 
modifiée  seulement,  en  vue  d'une  ornementation  plus 
riche.  Le  rez-de-chaussée  nous  montre  les  arrachements 
d'une  voûte  d'arêtes,  sous  laquelle  on  passait  pour  aller 
dans  le  clocher  B,  et  qui  semble  s'être  ouverte  directement 
sur  la  partie  0,  par  une  disposition  assez  incompréhensible 
aujourd'hui.  Çà  et  là,  quelques  chapiteaux  d'un  travail 
admirable,  des  archivoltes  garnies  de  clous  en  pointe  de 
diamant,  et,  au-dessous  d'une  baie  plein  cintre  qu'il 
envahit  en  partie,  un  arc  en  ogive  tout  uni,  enve- 
loppé d'un  second  arc  semblable,  qui  fait  saillie  sur  lui. 

Au  premier  étage,  il  n'est  plus  question  de  voûte 
d'arête.  Nous  voyons,  contre  le  clocher  B,  les arracliements 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  389 

d'une  voûte  ogivale,  en  berceau,  qui  a  couvert  toute  la 
partie  F.  Vers  0,  contre  l'angle  du  clocher  B,  unecolonne 
engagée,  et  une  petite  colonnelte  en  reculement  sur  elle, 
S)utiennent  la  retombée  d'un  arc  en  double  plate-bande, 
rompu  aujourd'hui,  mais  ouvert  à  une  grande  hauteur 
sur  la  partie  0.  Au  pied  de  ce  pilier  venaient  aboutir  des 
degrés  droits  a,  qu'on  prenait  sous  le  narthex.  Quant  à 
la  destination  de  cette  partie  F,  au  premier  étage,  était-ce 
une  galerie?  était-ce  une  salle  se  prolongeant  dans  le 
clocher  D,  comme  quelques  indices  le  feraient  soup- 
çonner? Impossible  de  le  dire  avec  certitude.  Ce  qu'il  y  a 
de  certain  c'est  qu'un  grand  luxe  d'ornementation  avait 
été  réservé  à  ce  lieu,  quelle  qu'en  pût  être  la  destination. 
Un  panneau  qui  reste  encore  entier  à  l'intérieur,  entre 


B  et  D,  sur  le  mur  du  raidi,  nous  en  laisse  voir   un  spé- 


390  COi\(iUKrf    AlU.llÉOl.OCKjUl':    1>K    FP-ANCI::. 

ciiueu  des  plus  nMiiar-^uahles.  Le  dessin  qu'en  a  l'ait  noire 
collègue,  M.  Le  Nail,  en  peut  donner  une  idée.  On  est 
frappé  surtout  de  l'aspect  riche  et  gracieux  de  ces  deux 
petits  pilastres  carrés,  qui  partent  d'une  console  originale 
pour  orner  les  montants  d'une  baie  fortement  ébrasée.  Ils 
reçoivent  les  retombées  de  trois  archivoltes  d'inégale  ou- 
verture, ([ui  couronnent  cette  baie  ou  l'accompagnent. 
Leur  élégante  disposition  et  la  finesse  des  arabesques  dont 
ils  sont  chargés,  les  feraient  prendre  volontiers  pour  un 
charmant  joyau  de  la  Renaissance.  C'est  pourtant  œuvre 
du  XII*  siècle,  et  des  plus  exquises  comme  des  plus  origi- 
nales qui  se  puissent  voir. 

L'ornementation  de  cette  partie  du  monument,  ne  s'est 
pas,  du  reste,  toute  concentrée  à  l'intérieur.  Cette  même 
baie,  dont  les  ébrasements  sont  si  bien  accompagnés  par 
nos  petits  pilastres,  se  montre  à  l'extérieur  couronnée  d'une 
archivolte  à  voussoirs  découpés  avec  grâce,  et  qui  retombe 
sur  deux  colonueltes  à  chapiteaux  historiés.  L'ensemble 
de  cette  ornementation  est  lui-même  enveloppé  d'un 
grand  arc  plein  cintre,  soutenu  par  deux  colonnes. 

Si  l'on  en  juge  par  l'extérieur  des  ruines,  que  notre 
élévation  du  clocher  laisse  voir  à  sa  gauche,  ce  parti  pris 
aurait  été  répété  dans  un  second  panneau,  vers  le  clo- 
cher D.  Le  contre-fort  demi-cylindrique,  élégiparle  haut, 
au  moyen  d'une  ornementation  très-originale,  et  dont  nous 
donnons  le  dessin  ci-contre,  aurait  séparé  les  deux  pan- 
neaux. La  présence,  à  l'intérieur,  d'une  colonne  engagée 
correspondant  au  contrc-lbrt,  et  (jui  semble  avoir  soutenu 
la  retombée  d'un  arc  doubleau,  favoriserait  cette  opinion. 
Ainsi,  sur  la  partie  0  se  seraient  ouverts  deux  grands 
arcs  ;  ces  deux  arcs  auraient  correspondu  à  deux 
travées  de  voûte  ogivale  en  berceau,  séparées  par  un  arc 
doubleau  carré,  et  cette  même  division,  se  reproduisant  à 


Xl.e   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  391 

l'extérieur,  aurait  engendre   l'ornementation   que    nous 
venons  de  décrire. 


Il  ne  nous  semble  pas  que  cefparti  pris  puisse  être  mis 
en  doute,  et  restituer  pour  le  rez-de-chaussée  comme  pour 
le  premier  étage,  les  deux  travées  tant  intérieures  qu'exté- 
rieun^s,  des  galeries  ou  des  salles  occupant  autrefois  la 
partie  F  du  plan,  nous  paraît  la  chose  la  plus  facile  du 
monde,  les  ruines  donnant  tous  les  éléments  de  cette  res- 
titution. 

Nous  devons  dire  toutefois  que  l'espace  F,  carré  sur  le 
vieux  plan  que  nous  reproduisons,  ne  se  prête  en  aucune 
façon  à  un  pareil  état  de  choses.  Tout  au  plus  la  partie  F 
aurait-elle  été  occupée  par  une  des  travées.  Il  faudrait 
supposer  alors  que  la  seconde  occupait  le  rez-de-chaussée 
et  le  premier  étage  du  clocher  D,  Cela  n'estpas  impossible 
absolument,  mais  c'est  peu  probable.  iNous  croyons  plutôt 
qu'il  y  a  inexactitude  dans  le  plan,  et  que  l'espace  F  doit 
être  doublé  entre  les  clochers  B  et  D,  pour  cadrer  avec  le 
développement  des  salles  ou  des  galeries  que  nous  laissent 
voir  les  ruines.  On  conviendra,  du  reste,  que  ces  quatre 


392  CONGRÈS    Al(CIlÉ01.U(ilnUK    1»E    FUA.NCE. 

clochers  avaient  tout  à  gagner  ù  être  ainsi  séparés  deux  à 
deux  par  un  espace  plus  grand. 

Telles  sont,  Messieurs,  les  observations  que  nous  a 
inspirées  cette  partie  des  ruines  de  Déols.  Elles  méritaient 
d'autant  plus  d'être  consignées  ici,  qu'au  premier  coup 
d'oeil,  rien  n'est  plus  énigmatique  que  ces  ruines,  dont 
l'importance  pourtant,  au  point  de  vue  architectural,  est 
incontestablement  de  premier  ordre. 

Après  cette  étude,  peut-être  y  aurait-il  lieu  de  se  préoc- 
cuper du  nombre  considérable  de  clochers  que  possédait 
l'église  de  Déols,  et  de  la  place  qu'ils  occupaient.  Assez 
commun  dans  les  provinces  de  l'Ouest,  et  surtout  dans  la 
Normandie,  où  on  le  rencontre  dès  l'époque  de  Guillaume 
le  Conquérant ,  ce  luxe  de  tours  ne  pénétra  dans  le 
centre  de  la  France  que  vers  la  fin  du  xii''  siècle.  Encore 
ne  se  développa-t-il  guère  que  dans  le  domaine  royal,  où 
l'on  vit  des  cathédrales  s'élever  avec  sept  et  même  neuf 
clochers.  Mais  au  midi  de  la  Loire,  le  nombre  en  fut  tou- 
jours plus  restreint. 

Nous  sommes  certains  que  l'église  de  l'abbaye  de  Déols 
a  possédé  quatre  clochers  en  avant  de  sa  nef.  En  suppo- 
sant que  les  tableaux  conservés  dans  l'église  Saint-Étienne 
ne  nous  trompent  pas  sur  l'ensemble  des  choses  passées, 
deux  autres  clochers  auraient  accompagné  les  collatéraux, 
près  du  chœur.  Si  l'église  eût  eu  des  transepts,  certaine- 
ment un  septième  clocher  eût  aussi  été  élevé  sur  leur 
rencontre  avec  la  nef,  car  cette  place  fut  une  des  pre- 
mières choisies.  Déjà  en  dOll,  au  retour  de  son  second 
voyage  à  Jérusalem  ,  Foulques  -  Nerra  construisit  sur 
l'intertransepts  de  l'église  abbatiale  de  Beaulieu  un 
clocher  dont  on  voit  encore  la  base  sous  les  combles 
modernes.  Le  comte  d'Anjou  obéissait  ainsi,  et  aux  souve- 
nirs qu'il  rapportait  d'Orient,  et  aux  traditions  normandes 


XI,"    SESSION,    A    OHATEAUROUX.  393 

dont  il  semble,  en  architecture  religieuse  comme  en  archi- 
tecture militaire,  avoir  toujours  tenu  grand  compte.  Mais 
à  quelles  traditions,  à  quel  courant  obéissaient  les  archi- 
tectes de  Déols?  Il  y  aurait  lieu  de  se  le  demander.  Toute- 
fois nous  ne  tenterons  pas  une  réponse  à  cette  question. 
Elle  exige,  ce  nous  semble,  de  patientes  recherches,  et 
nous  nous  contenterons  de  la  recommander  aux  savants 
archéologues  qui  ont  déjà  si  bien  étudié  le  Berry. 

Les  débris  du  reste  de  l'église  de  Déols  offrent  seulement 
([uclques  chapiteaux  à  notre  attention.  Leur  travail  est 
remarquable.  Mais  les  plus  curieux,  c'est  au  musée  de 
Gliàteauroux  que  nous  avons  dû  nous  transporter  pour 
les  voir,  et  c'est  là  aussi  que  notre  collègue,  M.  Bouet, 
en  a  pris  les  croquis  reproduits  par  les  gravures  ci- 
dessous. 

Le  premier  de  ces  chapiteaux  appartenait  à  l'une  des 


394       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  UE  FRANCE. 

colonnes  engagées  qui  soutenaient  les  voûtes.  Il  est  d'un 
très-beau  style,  et  agencé  avec  beaucoup  d'originalité.  Le 
travail  en  est  excellent. 

Le  second  a  coiffé  une  colonne  isolée,  dont  nous  ne 
saurions  déterminer  la  place,  car  notre  plan  ne  montre  par- 
tout que  des  colonnes  engagées.  Ce  chapiteau  représente 
Samson  dans  trois  des  actes  de  sa  vie.  L'une  de  ces  repré- 
sentations est  tellement  mutilée,  que  la  reproduire  eût  été 
folie.  On  saisit  pourtant,  en  y  regardant  de  très-près,  une 
main  armée  d'une  mâchoire  d'animal,  et  l'on  devme  que 
la  sculpture  représentait  Samson  détruisant  l'armée  des 
Philistins  avec  la  mâchoire  d'âne  traditionnelle. 

Les  deux  autres  sujets  figurent  dans  les  deux  dessins  ci- 
contre.  L'un  nous  montre  Samson  enlevant  les  portes  de 


Gaza.  Il  y  aj  du  mouvement  dans  cette  figure,  et  la  pose 


XL*"    SESSION,    A   CHATEAUROUX.  395 

en  est  excellente.  Ce  regard  qne  Sanson  jette  sur  la  ville 
ennemie  en  la  quittant,  est  aussi  plein  d'intention  et  des 
mieux  rendus. 

Le  second  sujet,  c'est  Samson  ébranlant  la  salle  de  fête 


des  Philistins,  et  s'ensevelissant  avec  eux  sous  les  ruines. 
Il  est  aussi  parfaitement  composé. 

Ce  chapiteau  est  tout  à  fait  symbolique.  La  figure  de 
Samson  est  celle  du  Christ.  Si  nous  pouvions  l'avoir 
oublié,  un  passage  de  saint  Ambroise,  se  rapportant  à 
l'enlèvement  des  portes  de  Gaza  nous  le  rappellerait  : 
Sicut  Samson  média  nocle  surgens,  exiit  a  Gaza,  ferens 
portas  urbis;  sic  et  Christus  eadem  hora  snrgens,  infern^ 
claustra  fregit ,  et  rediit  ab  inferis ,  clausoque ,  sicut 
dîctum  est,  sepulchro  prodiit.  Nous  regrettons  que  M.  l'abbé 
Auber  ne  soit  point  ici.  Sa  profonde  science  et  sa  mémoire 


3i)6       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE   FRANCE. 

lui  tburniraient  certainement  quelque  texte  relatif  aux 
deux  autres  sujets.  Nous  ne  pouvons  le  suppléer. 

Quitterons-nous  le  vieux  sol  de  cette  église  sans  dire 
un  mot  de  ce  bâtiment  P,  que  notre  plan  nous  montre 
envahissant  la  nef  principale  et  ne  i:ommuni(|uant  pas 
avec  elle?  C'est  ici,  surtout,  que  les  traditions  sont  néces- 
saires pour  donner  le  mot  du  passé.  Ce  bâtiment  P  était 
une  grande  chapelle,  une  sorte  d'église  à  part,  consacrée 
à  la  Vierge,  On  y  accédait  de  l'extérieur  par  les  degrés 
b,  c,  d,  sans  être  obligé  de  passer  par  le  monastère,  ou 
même  par  la  grande  église.  Ddus  ce  sanctuaire,  célèbre 
autrefois,  figurait  la  statue  miraculeuse  de  Notre-Dame 
de  Déols,  aujourd'hui  déposée  dans  l'église  paroissiale  de 
Saint-Étienne,  et  l'objet  d'un  culte  séculaire.  De  nombreux 
pèlerins  venaient  de  fort  loin  prier  devant  cette  image, 
que  les  pèlerinages  de  notre  époque  n'ont  point  oubliée. 

Comment  ce  sanctuaire,  qui  accuse  la  plus  belle  archi- 
tecture du  xii^  siècle,  est-il  venu  s'enchevêtrer  dans  la 
grande  église,  ou  comment  la  grande  église  est-elle  venue 
l'envelopper  en  partie?  C'est  ce  qu'on  ne  saurait  dire. 
Nous  soupçonnons  fort  quelque  curieuse  et  sainte  légende 
d'être  passée  par  là. 

Des  cloîtres  de  Déols,  qui  se  développaient  au  ujidi  de 
l'église,  il  ne  reste  absolument  rien  que  quelques  colon- 
nettes,  quelques  retombées  d'arcs  et  quelques  arnorces  de 
voûtes,  contre  les  murs  R,  au  levant  du  jardin  T,  qui 
occupe  aujourd'hui  cette  partie  de  l'abbaye.  Encore  n'est- 
il  pas  certain  que  ces  débris  aient  fait  partie  du  cloître. 
Ils  sont,  dans  tous  les  cas,  du  xiii"  siècle,  et  semblent 
se  raccorder  avec  les  restes  d'une  salle  à  deux  nefs,  située 
sur  une  terrasse,  et  qui,  probablement,  était  la  salle  capi- 
tulaire. 

Mais  si  le  cloître  a  disparu,  la  porte  qui,  du  cloître. 


XL*   SESSION,    A   GUATEAUROUX.  397 

donnait  dans  l'église,  existe  encore  au  point  Q,  et  ce  n'est 
pas  une  des  choses  les  moins  remarquables  des  ruines 
de  Déols.  Le  dessin  de  M.  Le  Nail  la  reproduit  fidèle- 
ment. 


HtLdU  ié  a^oî/  pi» 


C'est,  on  le  voit,  un  magnitique  spécimen  du  genre, 
pour  le  XII*  siècle.  Quelle  délicatesse  dans  le  tableau  de 
cette  porte  rectangulaire,  curieuse  à  cette  époque  !  Quelle 


398  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

fermeté  dans  rornementation  de  cette  archivolte  !  Quelle 
originalité,  enfin,  dans  ce  tore  polylobé,  redenté  si  l'on 
veut,  qui  part  de  l'ond  et  enveloppe  le  monument!  Tout 
cela  témoigne  de  cette  recherche  d'applications  nouvelles 
et  variées  qui  préoccupa  si  fort  les  architectes  de  la  fin  du 
XII''  siècle,  à  l'endroit  de  la  composition  des  portes  qu'ils 
voulaient  soustraire  à  la  monotonie  romaine.  La  porte  du 
cloitre  de  Déols  est  certainement  de  cette  époque  par  son 
ornementation.  Nous  devons  noter,  toutefois,  qu'elle 
s'écarte  du  moded'ébrasement  généralement  adopté  alors, 
mode  que  nous  retrouvons  dans  le  portail  de  l'église  de  la 
Souterraine  (Creuse),  accompagné  d'une  suite  de  boudins 
alternativement  unis  et  redentés,  descendant  jusqu'au 
niveau  des  bases  (1).  La  porte  de  la  vieille  collégiale  du 
Dorât  (Haute- Vienne),  appartenant  aujourd'hui  au  sémi- 
naire de  cette  ville,  nous  présente  aussi  un  ébrasement 
redenté  (2).  Mais  ici,  plus  de  tores;  ce  sont  les  arcs  eux- 
mêmes  qui  se  découpent  en  feston,  jusqu'à  leur  retombée 
sur  les  pieds-droits. 

Pour  trouver  des  tores  polylobés  disposés  exactement 
comme  celui  de  Déols,  et  enveloppant  des  portes  à  linteau 
horizontal,  il  faut  voir  l'église  de  Montréal  (Yonne)  (3). 
Le  portail  plein  cintre  de  cette  église  présente  en  effet, 
au  fond  de  sou  ébrasement,  deux  portes  rectangulaires, 
géminées,  et  toutes  deux  accompagnées  d'un  tore  redenté. 
Mais  ici,  l'ornementation,  plus  simple  qu'à  Déols,  quoi- 
que aussi  de  la  fin  du  xii''  siècle,  ne  nous  montre  ni 

(1)  Voir  dans  le  Dict.  d'arch.  de  M.  VioUet-le-Diic,  au  mot 
Porte,  t.  Vil,  1).  408. 

(2)  .-ïnna/es  de  Didron,  t.  XII,  p.  250. 

(3)  lbùl.,i.  XI,  p.  363,  et  dans  le  Dict.  do  M.  ViolIet-le-Diic, 
au  mot  jiorte.  t.  VII.  p.  412,  4i3,  414. 


XL*   SESSION,    A    (JUATEAUROUX.  399 

sculptures  sur  le  tableau  des  portes,  ni  moulures  décou- 
pées en  feuillages  autour  des  boudins. 

C'est  par  l'étude  de  cette  belle  porte  du  cloître  que  se 
terminera  ici,  comme  elle  s'est  terminée  sur  le  terrain, 
l'étude  des  restes  de  Déols.  Rarement,  sur  notre  sol,  près 
d'aussi  grands,  d'aussi  beaux  souvenirs,  se  trouvent  des 
ruines  si  désolées,  si  éparses,  si  énigmatiques.  Et  pourtant 
elles  datent  de  quarante  ans  à  peine.  C'est  qu'à  l'époque 
où  le  marteau  de  la  spéculation  les  a  faites,  commençait 
seulement  le  réveil  des  études  archéologiques.  Aujour- 
d'hui, en  supposant  qu'un  pareil  monument  dût  être 
détruit,  cent  artistes,  cent  écrivains,  s'ils  ne  l'avaient  déjà 
lait,  s'empresseraient  de  relever  toutes  ses  particularités, 
pour  sauver  du  moins  les  souvenirs,  si  rien  autre  chose 
ne  pouvait  être  sauvé. 

Messieurs,  reconnaissons-le,  cette  différence  si  caracté- 
ristique dans  l'esprit  des  temps,  c'est  surtout  au  savant  et 
infatigable  directeur  de  la  Société  française  d'Archéologie, 
à  M.  de  Caumont,  dont  nous  portons  le  deuil  depuis  quel- 
ques jours  à  peine,  qu'elle  est  due.  Que  ce  juste  tribut 
d'hommages  lui  soit  donc  payé,  ici  même,  sur  ces  débris 
dont  le  néant  eût  reculé,  quelques  années  plus  tard, 
devant  son  infatigable  intervention. 

Mais  il  est  temps  de  nous  diriger  vers  d'autres  monu- 
ments qui  gardent  aussi  de  quoi  défrayer  nos  études. 
Nous  prenons  notre  route  vers  l'église  paroissiale  de  Saint- 
Étienne,  et  nous  passons  sous  une  antique  porte  de  ville, 
autrefois  fermée  de  vanteaux  et  de  herses,  aujourd'hui 
béante.  Cette  porte  est  flanquée  de  deux  tours  en  maçon- 
nerie brute,  fort  ancienne.  La  courtine,  dans  laquelle 
s'ouvre  la  porte,  est  en  pierre  de  taille,  avec  une  couronne 
de  mâchicoulis,  de  la  fin  du  xiv''  siècle.  Nous  lui  donnons 
un  coup  d'oMl,  et  nous  suivons  notre  chemin. 


400       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Nous  arrivons  devant  l'église  de  Saint-Étienne.  Rien 
d'extraordinaire  à  l'extérieur  :  une  tour  carrée,  fort  basse 
aujourd'hui,  restée  peut-être  inachevée;  mais,  dans  tous 
les  cas,  portant  le  caractère  irrécusable  du  xvi^  siècle. 

Cette  église  passe  pour  avoir  été  reconstruite  sur  les 
ruines  d'une  église  latine,  primitive.  C'est  l'opinion  sou- 
tenue par  d'éminents  archéologues,  dans  les  Esquisses 
pittoresques  de  l'Indre.  Nous  la  contredirons  d'autant 
moins,  que  le  plan  de  l'église,  ses  cryptes  et  les  appareils 
rustiques  à  chaînage  de  briques,  encore  apparents  à  l'ex- 
térieur du  mur  de  l'abside,  nous  portent  à  nous  y  rallier. 
Toutefois,  ce  n'est  pas  pour  élucider  cette  difficile  ques- 
tion, moins  encore  pour  contrôler  les  travaux  qui  s'en 
sont  occupés,  que  nous  visitons  l'église  de  Saint-Étienne. 
Ce  qui  nous  y  attire,  ce  sont  ses  cryptes  :  l'une,  de  tout 
temps  connue,  celle  qui  renferme  le  magnifique  tombeau 
de  saint  Ludre  {Lusor) ,  et  qu'un  texte  de  Grégoire  de 
Tours  ne  permettait  pas  d'oublier  ;  l'autre,  retrouvée  il  y 
a  douze  ans,  par  M.  l'abbé  Chagnon,  curé  de  Déols,  et 
restaurée  par  lui. 

Ces  deux  cryptes,  formées  d'une  seule  salle  de  3  à  4 
mètres  de  long  environ,  sur  2  mètres  50  à  3  mètres  de  large, 
s'étendaient  du  couchant  au  levant,  hors  de  l'église,  des 
deux  côtés  du  chœur.  Elles  étaient  voûtées  en  berceau, 
ainsi  qu'on  peut  en  juger  par  celle  de  Saint-Ludre,  mais 
ne  présentaient  rien  de  particulier.  Ce  sont  donc  les  mo- 
numents qu'elles  gardèrent  et  qu'elles  gardent  encore 
toutes  deux,  aujourd'hui,  qui  doivent  appeler  surtout 
notre  attention. 

Ce  serait  abuser  de  votre  patience,  Messieurs,  que  de 
décrire  ici  le  tombeau  de  saint  Ludre.  Ce  magnifique 
morceau  romain,  couvert  de  remarquables  sculptures,  a 
été  publié  dans  les  Esquisses  pittoresques  de  l'Indre.  Il  est 


XI.'"    SESSION,    A    CIIATEAUIIOUX.  iOI 

cependant  une  des  piirticularilés  de  ce  tombeau,  dont  je 
dois  dire  un  mot  en  passant.  Sur  une  sorte  de  petite 
borne  se  lisent  les  chiffres  ôniginatiques  X  et  ill.  On  a 
beaucoup  discuté  sur  leur  signitication  et  hasardé  de 
nombreuses  hypothèses.  Notre  savant  Directeur  a  émis 
devant  vous  l'avis  que  ces  chiiïres  indiquent  tout  sim- 
plement, comme  le  faisaient  souvent  des  bornes  placées 
près  des  tombeaux  antiques,  l'étendue  de  terrain  affectée 
au  monument  funéraire.  Cette  étendue  aurait  donc  été, 
pour  le  tombeau  de  saint  Ludre,  de  X  pas  en  longeur  et 
m  pas  en  largeur  :  AREA.  longa.  F.  X.  lata.  P.  lU. 
J'avoue  qu'entre  toutes  les  hypothèses  émises  au  sujet  de 
ces  chiffres,  celle  de  M.  de  Gougny  me  semble  la  plus 
naturelle.  Je  m'y  range  complètement. 

Pour  ce  qui  est  de  la  seconde  crypte,  je  dois  être  plus 
explicite.  Quelques  ruines  marquaient  la  place  de  la 
chapelle  qui  l'avait  surmontée.  La  tradition,  une  tradi- 
tion précise  et  constante,  la  signalait  aussi.  Mais  le  terrain 
qu'elle  occupait,  avec  les  terrains  avoisinants  autour  de 
l'église,  appartenait  à  des  particuliers.  Gomment,  avec 
cet  état  de  choses,  former  le  moindre  projet  ! 

G'est  cependant  ce  qu'avec  un  zèle  persévérant  M.  l'abbé 
Ghagnon  a  osé  faire.  Ses  plans  bien  arrêtés,  il  a  d'abord, 
en  1861,  acheté  les  terrains.  Puis,  en  1862,  mettant  la 
pioche  dans  ce  sol  sacré,  il  découvrait  l'objet  de  ses  pieuses 
recherches. 

Suivant  la  Thaumassière,  vers    1656  ou    1657,  cette 
crypte  avait  été  retrouvée,  mais  ruinée  déjà  et  sans  voûte. . 
On  avait,  du  reste,  à  peine  pris  garde  à  cette  découverte, 
et  le  souvenir  s'en  était  bientôt  effacé,  pour  ne  laisser 
vivre  que  la  vieille  tradition. 

G'est  de  ses  deniers  que  M.  le  curé  de  Déols  avait 
acheté  les  terrains  joignant  le  levant  de  l'église  Saint- 

XL^   SESSION.  26 


402       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Étieune;  ce  iïil  aussi  de  ses  deniers  qu'il  fit  déblayer  la 
crypte  et  recueillit  les  restes  d'un  grand  sarcophage  en 
pierre,  avec  des  cercueils  d'enfants.  Ce  fut  de  ses  deniers, 
enfin,  qu'il  fit  rétablir  la  crypte,  respectant  avec  un  soin 
religieux  tout  ce  qui  restait  des  vieilles  murailles  primi- 
tives. 

C'était  déjà  pousser  bien  loin  le  zèle.  Ce  n'était  point 
assez  pourtant  pour  M.  l'abbé  Chagnon.  Une  ambition  plus 
grande  le  tourmentait  :  celle  de  rétablir  le  tombeau  lui- 
même,  entièrement  brisé,  et  dont  beaucoup  de  parties 
avaient  disparu.  Tl  attendit  longtemps,  faute  d'avoir  sous 
la  main  un  artiste  consciencieux  et  intelligent  qui  pût 
réaliser  sa  pensée.  Il  le  trouva  enfin,  le  saisit  au  vol,  pour 
ainsi  dire,  et  en  juin  1872  était  terminée  cette  œuvre  de 
restauration  minutieuse,  que  les  débris  patiemment  assem- 
blés par  M.  le  curé  de  Déols  montraient  possible,  mais 
qu'une  main  habile  pouvait  seule  réaliser. 

Nous  ne  saurions  trop  louer  ici  la  volonté,  le  dévoue- 
ment et  le  respect  intelligent  des  choses  du  passé,  dont 
M. l'abbé  Chagnon  a  fait  preuve  en  cette  circonstance;  car 
ce  n'est  pas  tout  de  chercher,  il  faut  bien  chercher  ;  ce 
n'est  pas  tout  de  restaurer,  il  faut  bien  restaurer.  Hier 
matin  encore,  nous  examinions  seul,  et  avec  toute  la  sévérité 
possible,  le  sarcophage  restitué,  et  nous  ne  trouvions  que 
des  éloges  à  donner  à  l'artiste,  et  surtout  à  son  guide 
consciencieux  et  intelligent. 

Qu'il  me  soit  donc  permis,  puisque  c'est  à  ma  voix  que 
notre  savant  Directeur  a  confié  ce  rapport,  qu'il  me  soit 
permis  d'appeler  toute  son  attention  sur  M.  l'abbé 
Chagnon,  gardant  l'espérance  que  le  conseil  de  la  Société 
française  saura  faire  mieux  encore  que  de  prodiguer  de 
simples  éloges  à  un  homme  qui  a  surmonté  des  difficultés 
de  toutes  sortes  pour  arriver  à  son  but. 


XL*   SESSION,    A    ('.I1AT1':AUI10UX.  403 

Mais  J3  reviens  au  sarcopliagfî  restitué.  Los  sculptures 
(jui  le  couvrent  sunt  loin  de  présenter  le  haut  intérêt 
artistique  de  celles  du  sarcophage  de  Saint-Ludre.  La  face 
antérieure  est  simplement  garnie  de  plusieurs  rangs  de 
panneaux  unis,  encadrés  d'une  doucine.  Cependant  les 
proportions  élégantes  de  ces  panneaux  et  leur  répétition 
symétri(iue  ne  laissent  pas  de  produire  un  bel  effet, 

l'our  ce  qui  est  de  la  découverte  de  ce  morceau  antique, 
elle  n'avait  pas  été  sans  éveiller  l'attention  des  savants.  Il 
y  avait  là  une  énigme  capable  de  stimuler  les  chercheurs. 
M.  J.  Veillât  a  bientôt  établi  d'une  manière  à  peu  près 
certaine,  en  rapprochant  les  chroniqueurs  et  les  historiens 
du  Berry,  que  ce  sarcophage  a  reçu  le  corps  du  sénateur 
Léocade,  père  de  saint  Ludre. 

Quant  aux  tombeaux  d'enfants  trouvés  sur  le  seuil  de 
la  crypte  de  Saint-Léocade,  ils  sont  sans  sculptures  d'au- 
cune sorte.  L'un  des  deux,  cependant,  porte  une  inscrip- 
tion. Vous  l'avez  entendue  restituer  hier,  dans  un  savant 
travail  sur  l'épigraphie  du  département  de  l'Indre.  Je  n'y 
reviendrai  pas. 

Notre  visite  à  l'église  Saint-Étienne  s'est  terminée, 
après  la  revue  des  cryptes  et  de  leurs  monuments  funéraires, 
par  un  examen  attentif  des  murs  extérieurs.  Ils  n'ont  rien 
présenté  de  particulier  à  notre  attention.  Le  mur  seul  du 
chevet  nous  a  montré  dans  le  bas,  du  côté  méridional,  et 
jusqu'à  2°'50  ou  3  mètres  au-dessus  du  sol,  les  restes  d'un 
petit  appareil  rustique,  avec  quelques  débris  de  chaînages 
formés  de  briques  à  rebords  (1).  Ce  revêtement   paraît 

(1)  Quelques  fonds  avaient  été  votés  par  la  Société,  et  laissés 
à  M.  l'abbé  Cbagnon,  pour  la  restauration  de  ce  revêtement 
fort  délabré.  Nous  avons  trouvé  cette  restauration  terminée  et 
irréprocbabicnient  exécutée  lors(|ue  nous  sommes  retourné  à 
Déols,  en  août  1873,  deux  mois  après  le  Congrès. 


40-i       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

fort  ancien;  mais  il  serait  difficile  do  lui  assigner  une 
date  (i). 

Nous  avons,  après,  repris  notre  route  par  la  vieille  porte 
de  ville  sous  laquelle  nous  étions  déjà  passés.  Revenu 
sur  la  voie  principale,  nous  avons,  avant  d'arriver  au 
pont  de  l'Indre,  obliqué  à  droite,  pour  gagner  la  vieille 
rue  de  Déols,  qui  conduisait  à  l'ancien  pont  bâti  en  aval 
du  pont  actuel.  Quelques  maisons  du  xV'  et  du  xvi"  siècles 
ont  arrêté  nos  regards  un  instant  dans  cette  rue.  Puis,  au 
bout,  presque  sur  le  bord  de  la  rivière,  s'est  présentée  à 
nous  une  des  portes  de  la  cité.  Elle  formait  tète  de  pont, 
et  tout  montre  que  c'était  une  petite  forteresse,  ayant  ses 
flanquements,  et  pouvant  loger  un  poste  respectable.  Son 
aspect,  vu  de  l'autre  côté  de  l'Indre,  est  assez  pittoresque; 
mais  c'est  tout  ce  qui  lui  reste  pour  la  consoler  de  sa 
gloire  passée.  Son  état  de  délabrement  est  complet. 

Ce  dernier  tribut  d'investigation  paye  à  l'antique  cité  de 
Déols,  nous  sommes  rentrés  à  Châteauroux. 

Tel  est.  Messieurs,  le  rapport  que  j'avais  à  faire  au 
Congrès  sur  notre  excursion  du  H  juin.  Vous  me  per- 
mettrez de  le  dire  en  terminant,  nulle  excursion  plus  que 
celle-ci  ne  me  semble  propre  à  préciser  les  hautes  vues  de 
l'archéologie.  En  effet.  Messieurs,  à  côté  d'un  monument, 
un  souvenir,  et  derrière  ce  souvenir,  une  génération  ou 
un  homme,  —  car  un  homme  est  souvent  autant  et  plus 
qu'une  génération,  —  voilà,  d'ensemble,  l'archéologie. 
Dans  ces  conditions,  elle  est  vivante,  fructueuse.  Elle  cesse 
d'être  ce  que  le  vulgaire  la  croit  trop  souvent,  une  science 
froide  et  stérile,  une  science  tournant  facilement  à  la 
manie  ;  elle  cesse  d'être  un  inventaire  ou  un  catalogue, 

(1)  Cet  appareil  a  été  signalé  pour  la  première  fois,  en 
octobre  iuli,  par  M.  de  Cougny. 


XL"   SESSION,    A   rJlATEAUROUX.  405 

pour  élargir  son  domaine,  prendre  son  vol  à  travers  les 
âges,  et  revenir  chargée  d'un  butin  magnifique  pris  à 
toutes  les  gloires  du  passé. 

C'est  ainsi  que  nous  entendons  tous  ici,  Messieurs,  cette 
belle  science.  En  fut-il  jamais,  a  ce  point  de  vue,  déplus  vaste, 
de  plus  poétique,  de  plus  élevée?  De  ses  deux  bras  étendus 
elle  touche  aux  deux  bouts  de  l'humanité.  Elle  ne  courbe 
no?  tètes  sur  quelques  linéaments  imprimés  à  la  pierre, 
au  marbre  ou  à  l'airain  ;  elle  n'asservit  notre  intelligence 
aux  plus  vulgaires  recherches  de  la  matière,  que  pour 
nous  relever  après,  s'emparer  de  notre  àmc,  l'enivrer 
des  plus  pures  émotions,  et  se  faire  pour  elle  le  trait 
d'union  entre  la  poussière  des  tombeaux  et  les  rayonne- 
ments de  l'avenir. 

Ce  compte  rendu,  précédé  de  considérations  générales, 
remarquables  par  l'élévation  des  pensées  qui  y  dominent, 
sur  l'influence  civilisatrice  des  abbayes  au  moyen  âge, 
attire  de  sympathiques  et  nombreux  applaudissements  de 
la  part  de  l'auditoire. 

Après  ces  différentes  lectures,  la  parole  est  donnée  à 
M.  Rouëde  sur  la  10''  question  du  programme,  relative  aux 
dernières  découvertes  numismatiques  faites  dans  le  dépar- 
tement de  l'Indre. 

M.  Rouëde  fait  connaître  qu)  dans  Châtillon-sur-Indre 
et  ses  environs  on  trouve  quelquefois  des  monnaies  de 
l'époque  romaine,  du  moyen  âge  et  des  temps  modernes; 
mais  les  spéculateurs  accaparent  et  dépaysent  ces  décou- 
vertes. Il  a  obtenu  quelques  petits  bronzes,  presque  tous 
du  iir  siècle;  ce  sont  des  Claudius  Tacitus,  Valerianus, 
Aurelianus,  Maximianus,  etc. 

Il  présente  au  Congrès  :  4"  Deux  petites  monnaies  de 


406       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Déols  (Solidi]  ;  d'un  côté  on  lit  Rodolphus,  et  de  l'autre 
de  Dolis.  Elle  remonte  à  l'année  1222  et  plus  tard. 

2°  Denier  carlovingien  de  Louis  P""  le  Débonnaire  ;  il 
porte  d'un  côté  :  H  LYDOVICVS  IMP.  C'est  le  seul 
qui  ait  réuni  la  dignité  impériale  au  titre  de  roi,  de  814 
à  840. 

Au  revers,  en  deux  lignes,  le  mot  METALLVM,  ce  qui 
signifie  :  frappé  à  Melle,  en  Poitou.  Melle  est  traduit 
tantôt  par  Metallum  tantôt  par  Metulum  ou  Metati. 

3°  ECU  d'or  au  soleil  de  Louis  XII,  de  1498  à  1515; 
dans  la  l'ace,  l'écusson  de  France  avec  couronne  à  cinq 
fleurons;  petit  soleil  au-dessus.  L'inscription  est  :  LYDO- 
VICVS DEI  GRATIA  FRANCORVM  REX. 

r!  Une  croix  à  la  Charles  YIII,  avec  rosace  en  cœur. 
Légende  avec  une  couronnelle  X.  P.  I.  :  Christus  régnât, 
vincit,  imperat. 

4°  Un  grand  écu  d'or  de  Charles  VI,  de  1380  à  1422; 
un  écusson  fleurdelisé,  avec  couronne  fleurdelisée;  autour  : 
KAROLVS  DEI  GRATIA  FRANCORVM  REX. 

^  Une  croix  composée  de  feuilles  et  fleurs  de  lis,  avec 
angles  remplis  de  fleurs  de  lis  et  de  couronnelles,  avec  le 
Christus  régnât,  comme  au  n°  3. 

5°  Un  petit  bronze,  d'ime  belle  conservation,  trouvé 
dans  le  gué  du  Tranger,  portant  d'un  côté  une  tête 
casquée,  avec  la  note  :  URRS  ROMA,  et  de  l'autre,  la 
louve  avec  les  deux  jumeaux.  Au-dessous,  l'indication  de 
l'atelier  monétaire  de  Trêves. 

6°  Un  cachet  en  bronze,  trouvé  dans  les  fossés  du  châ- 
teau de  Palluau.  C'est  un  écu  sans  couronne,  portant  un 
léopard  (ou  un  lion)  passant  sur  un  champ  burelé.  Il 
porte  autour  l'indication  qu'il  appartenait  à  Jean  de  la 
Marche. 


XL«  SESSION,    A   CHATEAUROUX.  407 

M.  Palustre,  président  de  la  séance,  signale  la  décou- 
verte faite  au  mois  de  septembre  dernier,  près  d'Ingrandes, 
de  ÎÎ3  pièces  d'argent,  représentant  cinq  types  différents. 
Elles  sont  toutes  anépigraphes,  par  conséquent  antérieures 
aux  pièces  à  légendes,  et  remontent  à  une  très-haute 
antiquité.  Ces  pièces  ont  été  achetées  par  le  musée  de  la 
ville  de  Tours.  M.  Palustre  en  a  donné  une  description 
détaillée  dans  le  n°  2  du  Bulletin  monumental  de  4873. 

M.  l'abbé  Damourettc  a  la  parole  sur  la  18°  question. 


Excursions  de  saint  Martin,  évêque  de 
Tours,  en  Berry.  —  Localités  où  son 
corps  a  reposé  lors  de  sa  translation  de 
Tours  à  Auxerre.  —  Églises  du  Berry 
consacrées  à  ce  saint  en  mémoire  de  ses 
excursions  ou  de  la  translation  de  son 
corps. 

Après  le  triomphe  de  la  religion  dans  l'empire  romain, 
l'idolâtrie  se  réfugia  dans  les  campagnes  ,  d'où  est 
venu  que  le  nom  paganus,  paysan,  est  synonyme  d'ido- 
lâtre. 

La  mission  spéciale  de  saint  Martin,  celle  que  la  Pro- 
vidence divine  lui  avait  assignée,  fut  la  conversion  des 
peuples  des  campagnes,  de  ces  masses  inertes  qui  jusque- 
là  avaient  résisté  aux  efforts  combinés  des  évêques  et  des 
prédicateurs. 

Pour  frapper  ces  esprits  grossiers,  l'apôtre  des  Gaules 
n'employa  pas  les  ressources  que  fournit  l'éloquence 
humaine;  il  s'adressa  à  Dieu,  qui  mit  à  ses  ordres  les 
richesses  de  son  pouvoir  divin.  Si  la  Gaule  devint  chré- 


408       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

tienne,  n'oublions  pas  que  c'est  à  Martin  plus  qu'à 
tout  autre,  à  ses  vertus,  à  sa  sainteté  et  à  ses  miracles, 
que  nous  devons  attribuer  cette  heureuse  transforma- 
tion. 

Au  moment  où  la  voix  du  peuple,  qui  était  bien  réelle- 
ment en  cette  circonstance  la  voix  de  Dieu,  appelait  au 
siège  métropolitain  de  Milan  un  patricien  de  Rome,  le 
gouverneur  civil  de  la  cité,  les  Gaules  présentaient  un 
tout  autre  spectacle  dans  l'élection  d'un  pauvre  moine  de 
Ligugé,  sans  illustration  de  naissance,  sans  aucun  éclat 
extérieur,  ne  devant  sa  réputation  qu'à  l'éclat  de  ses 
miracles. 

Martin  succède,  sur  le  siège  de  Tours,  à  Lidoire,  ce 
saint  èvêque  qui,  pendant  les  trente-trois  années  de  son 
épiscopat,  avait  cultivé  avec  des  peines  infinies  cette  terre 
de  la  Touraine,  que  n'avaient  pu  féconder  les  sueurs  de 
saint  Gatien. 

Enflammé  du  zèle  des  Apôtres,  brûlant  du  lèu  sacré  des 
Martyrs,  le  successeur  de  Lidoire,  doué  d'une  force  sur- 
humaine, entretient  et  développe  la  vie  chrétienne  dans 
son  Église  ;  mais  une  ambition  le  dévore  :  il  veut 
détruire  dans  toute  la  Gaule  le  culte  des  idoles.  Il 
n'entre  pas  dans  notre  plan  de  le  suivre  partout  où 
son  zèle  le  conduit  ;  nous  nous  bornerons  à  ses  excursions 
en  Berry. 

La  première  fois  qu'il  vint  à  Gabatton,  c'était  au  début 
de  son  épiscopat. 

Gabatton  est  une  ville  du  pays  des  Bituriges,  qui  re- 
monte à  l'époque  celtique. 

Les  Romains  y  construisirent  des  villas  somptueuses 
et  des  arènes,  dont  les  débris  sont  encore  visibles.- 

Au  temps  de  saint  Martin,  le  temple  de  Gabatton,  que 
saintSulpice-Sévère  qualifie  A'opulentissimum,  s'élevait  sans 


XL*   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  409 

doute  au  milieu  de  la  cité,  à  l'endroit  même  où  est  aujour- 
d'hui la  magnifique  église  de  Saint-Sylvain. 

Ce  temple  était  très-riche  et  très-fréquenté.  Saint  Martin 
l'apprend,  et  s'y  rend  aussitôt,  résolu  d'abattre  l'asile  de  la 
superstition. 

Les  païens,  en  grand  nombre,  veulent  défendre  leur 
impur  sanctuaire,  et  repoussent  le  Saint  en  l'accablant 
d'outrages.  Une  tradition,  que  le  P.  Labbe  a  pris  soin  de 
conserver,  et  que  l'on  trouve  écrite  dans  sa  bibliothèque 
des  manuscrits ,  raconte  que  les  habitants  de  Gabatton 
avaient  fait  autrefois  un  pareil  accueil  à  l'apôtre  de  notre 
Berry,  saint  Ursin.  Quoi  qu'il  en  soit,  toujours  est-il  que 
la  fureur  du  peuple  est  à  son  comble. 

Que  fait  Martin?  11  a  recours  à  ses  armes  ordinaires,  la 
prière  et  le  jeûne. 

Retiré  dans  un  endroit  solitaire,  probablement  près  du 
tombeau  de  saint  Sylvain,  il  se  prosterne  la  face  contre 
terre,  le  corps  revêtu  d'un  cilice  et  la  tête  couverte  de 
cendres;  il  prie  et  il  jeûne  pendant  trois  jours,  suppliant 
Dieu  d'opérer  par  sa  toute-puissance  ce  que  la  vertu  de 
l'homme  ne  peut  obtenir. 

Tout  à  coup  deux  anges  portant  la  lance  et  le  bouclier 
se  présentent  à  lui,  envoyés  par  le  Seigneur,  disent-ils, 
pour  mettre  en  fuite  cette  multitude  hostile  et  concourir 
avec  lui  à  la  destruction  du  temple. 

Martin,  reprenant  confiance,  revient  dans  la  cité,  et  à  la 
vue  des  idolâtres  de  Gabatton,  sans  qu'aucun  d'eux  s'y 
oppose,  il  fait  détruire  leur  temple,  et  pendant  que  les 
pierres  des  murailles  s'écroulent,  il  réduit  lui-même  en 
poussière  les  autels  et  les  idoles.  Dum  profanam  xdem 
usque  ad  fundamentum  dirueret,  aras  omnes  atque  simn- 
lacra  redùjet  in  pulverem.  (Sulpice-Sévère,  IM  vita  beati 
Martini,  lib.  II.) 


-MO       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

La  foule  mutinée,  reconnaissant  la  puissance  surna- 
turelle qui  avait  dompté  et  contenu  sa  fureur,  n'oppose 
plus  de  résistance  à  la  prédication  de  l'Évangile;  Martin 
triomphe.  Presque  tous  les  habitants  de  Gabatton 
deviennent  chrétiens  :  Omnes  fere  in  Jesum  Dominum 
crediderunt . 

Ce  trait,  un  des  plus  saillants  de  la  vie  de  saint  Martin, 
est  certainement  une  des  pages  les  plus  authentiques  et  les 
plus  belles  de  l'histoire  ecclésiastique  du  Berry.  Qu'il  me 
soit  permis  de  dire  que  l'antique  ville  de  Gabatton  doit  être 
glorieuse  d'avoir  eu  saint  Martin  pour  apôtre. 

Le  zélé  missionnaire  revint  plus  tard  visiter  ses  chers 
néophytes.  En  arrivant  dans  la  ville,  son  premier  soin  est 
d'aller  prier  dans  la  crypte  de  Saint-Sylvain.  Sur  le  seuil 
de  la  crypte  il  rencontre  le  chef  du  municipe,  homme 
riche  et  puissant,  mais  atteint  d'une  affreuse  maladie,  la 
lèpre  ;  il  entre  néanmoins  sans  s'arrêter. 

Le  chef  de  la  cité  le  reconnaît,  et  aussitôt  il  ordonne  à 
ses  serviteurs  d'aller  préparer  un  festin  digne  d'un 
homme  aussi  illustre.  Cependant  il  reste  à  la  porte,  avec 
la  foule  qui  est  accourue  au  bruit  de  l'arrivée  de  celui  qui 
l'avait  engendrée  à  la  foi  de  Jésus-Christ. 

Bientôt  le  thaumaturge,  entouré  de  ses  disciples  du 
monastère  de  Marmoutier,  qui  l'accompagnaient  dans  ses 
courses  évangéliques,  sort  de  la  crypte,  et  à  la  vue  de  tout 
le  peuple,  le  lépreux  se  jette  à  genoux. 

«  Daigne,  je  t'en  supplie,  ô  saint  évèque,  accepter  chez 
moi  l'hospitalité.  La  ville  est  encore  assez  loin,  et  tu  ne 
pourrais  sans  inconvénient  partir  à  cette  heure.  Que  la 
laideur  de  mon  mal  ne  l'empêche  pas  d'accepter  mon  olfre; 
j'ai  dans  ma  villa  des  logeuients  convenables  pour  te 
recevoir. 

—  Sans  doute  c'est  la  volonté  du  Seigneur  que  je  loge 


XL"   SESSION,    A   GHATEAUROUX.  4 H 

chez   toi,    mon  frère,    lui   répondit   Martin.    Conlbrme- 
toi  à  l'usage,  et  donne  le  baiser  de  paix  à  ton  hôte.  » 

Ce  malheureux  désirait  ardemment  toucher  le  saint; 
mais  le  sentiment  de  honte  que  lui  inspirait  son  hor- 
rible mal  l'empêchait  d'avancer.  Alors  le  saint,  que  la 
lèpre  ne  souille  pas,  et  qui,  au  contraire,  guérit  la  lèpre, 
s'approche  de  lui,  et  le  premier  il  lui  donne  le  baiser  de 
la  bienvenue. 

Martin  accompagne  avec  sa  suite  l'hôte  qui  le  conduit  à 
sa  villa,  sans  doute  une  des  plus  somptueuses  de  celles 
dont  on  voit  encore  les  belles  mosaïques  que  les  instru- 
ments des  vignerons  mutilent  et  réduisent  en  fragments 
chaque  jour. 

La  munificence  du  chef  du  raunicipe  n'avait  rien 
épargné  pour  faire  honneur  à  la  pieuse  caravane.  Les 
esclaves  déploient  toute  l'habileté  de  leur  art,  et  tout  le 
zèle  que  commandent  les  ordres  du  maître. 

Le  banquet  terminé,  l'hôte  de  Martin  ne  peut,  au  milieu 
de  cette  fête,  oublier  sa  propre  misère,  qui  l'empêche, 
malgré  sa  haute  position,  d'avoir  de  fréquents  rapports 
avec  ceux  qui  l'entourent;  il  s'approche  du  Saint,  se 
prosterne  de  nouveau  à  ses  pieds,  lui  montre  le  hideux  état 
de  son  corps,  et  le  conjure  de  le  guérir. 

«  Je  suis  ton  débiteur,  lui  répond  Martin  ;  je  prierai  pour 
toi  :  aie  confiance  dans  le  Seigneur,  purifie-toi  de  tes 
fautes,  et  demain,  à  la  messe  solennelle  que  je  célébrerai, 
viens  recevoir  de  ma  bouche  le  baiser  de  paix,  et  de  ma 
main  le  corps  du  Sauveur.  » 

Le  lendemain,  une  immense  multitude  se  rassemble 
devant  le  palais  du  chef  de  la  cité.  Après  avoir  récité 
l'office  des  Matines  avec  ses  clercs,  Martin  sort,  et  se 
rend  à  l'église  pour  y  célébrer  l'auguste  sacrifice  de  la 
messe,  pendant  lequel  le  lépreux  reçoit  le  baiser  de  paix 


412       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

et  la  sainte  communion.  Ce  fut  merveille,  alors,  de  voir 
le  sacrifice  de  l'autel  qui  donne  la  santé,  de  l'âme,  produire 
en  même  temps  le  salut  du  corps  :  celui  qui  s'en  est  ap- 
proché lépreux  et  immonde  s'en  retire  sain  et  purifié. 
A  la  vue  d'un  tel  prodige,  les  habitants  de  Gabatton,  qui, 
depuis  qu'ils  sont  chrétiens,  ont  pour  Martin  les  senti- 
ments de  la  vénération  la  plus  profonde,  exaltent  à  l'envi 
la  gloire  du  Christ  dans  Martin  et  la  puissance  de  Martin 
dans  le  Christ. 

Cette  légende  a  été  recueillie  dans  les  vieux  parchemins 
de  l'insigne  basilique  de  la  collégiale  de  Saint-Sylvain  de 
Levroux,  par  un  auteur  de  notre  temps,  le  Père  Labbe, 
si  renommé  par  son  érudition  et  ses  infatigables  re- 
cherches. 

Une  tapisserie  du  xvi*  siècle,  qui  est  un  des  plus  beaux 
joyaux  du  musée  de  la  ville  de  Montpezat  (  département 
de  Lot-et-Garonne),  contient  quinze  tableaux  de  la  vie  de 
saint  Martin,  sur  cinq  pièces  brodées  à  la  main.  —  Trois 
tableaux  sur  chaque  pièce. 

Le  miracle  de  la  guérison  du  lépreux  du  Berry  est  re- 
présenté sur  la  troisième  pièce  de  la  tapisserie,  neuvième 
tableau  de  la  collection.  Voici  comment  est  rendue  cette 
scène  touchante  ; 

Martin,  assisté  d'un  seul  clerc,  célèbre  le  saint  sacri- 
fice de  la  messe.  Le  lépreux,  à  genoux,  baise  l'instru- 
ment de  paix  que  le  clerc  lui  présente,  et  se  trouve  immé- 
diatement guéri.  Trois  personnes,  qui  viennent  d'entrer 
dans  l'église,  paraissent  s'entretenir  du  miracle. 

On  lit  au  bas  de  cette  représentation  : 

Comme  Martin  chantait  messe. 
Son  hôte  était,  de  lèpre  plein, 
En  baisant  la  paix,  eut  liesse, 
Car  il  fut  guéri  tout  à  plein. 


XL''    SESSION,    A    CIIATHAUHOIJX.  A]',] 

Un  conteur  tourangeau,  Péan  Gàtineau,  (jui  vivait  au 
xir  siècle,  et  qui  nous  a  laissé  une  vie  populaire  de  saint 
Martin  en  rimes,  a  longuement  décrit  toutes  les  cir- 
constances de  la  guérison  du  meseau  (le  lépreux)  dans 
une  tirade  composée  de  quatre-vingt-six  vers.  Nous  ne 
citerons  que  les  quatre  vers  qui  terminent  le  récit,  parce 
qu'ils  sont  une  preuve  sans  réplique  qu'au  xii"  siècle 
on  croyait  que  la  ville  de  Levroux  tirait  son  nom  du  mi- 
racle opéré  par  saint  Martin  de  Tours  en  faveur  de  l'un  de 
ses  detors  (débiteurs). 

Ainsi  rendit  Martin  de  Tors 
Sa  deite  a  i.  de  ses  detors, 
La  ville  en  fut  Levroux  nommée, 
Qui  Grabattotest  apellée  (i). 

Nous  apprenons  du  même  Péan  Gàtineau  que  saint 
Martin  venait  chaque  année  en  pèlerinage  au  tombeau  de 
saint  Silvain. 

Martin  eut  tozjorz  en  usage, 

Qu'il  alout  en  pèlerinage, 

A  Saint-Souain  chaque  seson  (2). 

Que  de  voyages  saint  Martin  n'a-t-il  pas  faits  à  Gabatton, 
puisqu'il  a  vécu,  suivant  quelques  auteurs,  jusqu'à  l'âge 
de  quatre-vingt-dix  ans  ! 

Une  chose,  ce  me  semble,  doit  piquer  la  curiosité  du 
lecteur  :  comment  se  fait-il  que  saint  Martin,  dont  la  vie 
était  vouée  aux  travaux  d'un  apostolat  qui  embrassait  la 

(1)  Fie  de  monseigneur  saint  Martin  de  Tours,  par  Péan 
Gàtineau,  p.  83. 

(2)  Idem.,  p.  79 


414       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Gaule  entière,  ait  interrompu  cliaque  année  ses  occupa- 
tions habituelles  pour  venir  prier  dans  une  petite  crypte 
des  environs  de  Gabatton. 

Nous  espérons  être  en  mesure  de  donner  la  clef  de 
l'énigme  et  de  prouver  que  le  tombeau  déposé  dans  la 
crypte  des  environs  de  Gabatton,  est  celui  du  Zachée  de 
l'Évangile.  Dans  cette  hypothèse,  la  dévotion  de  Martin 
serait  complètement  justifiée;  il  venait  honorer  un  des 
intimes  amis  de  son  divin  Maître. 

Dans  un  de  ses  voyages  de  Tours  à  Gabatton,  Martin 
entra  en  Berry  par  Cloué,  Claudiomachus,  localité  gallo- 
romaine,  sur  les  confins  de  la  Touraine  et  du  Berry,  qui 
avait  alors  une  certaine  importance  (1). 

Il  y  avait  alors  à  Claudiomachus,  dit  Sulpice-Sévère, 
une  église  célèbre  par  la  piété  des  moines  qui  la  desser- 
vaient, et  non  moins  glorieuse  par  la  multitude  de  ses 
vierges  sacrées.  Obligé  d'y  passer  la  nuit,  Martin  choisit 
pour  logement  la  sacristie,  où  il  permit  qu'on  lui  préparât 
un  lit  composé  de  quelques  poignées  de  paille  étendues 
sur  le  pavé.  Dès  le  retour  de  l'aurore,  Martin  quitte  Clau- 
diomachus pour  continuer  son  chemin.  Après  son  départ, 
toutes  les  vierges,  pleines  de  vénération  pour  sa  sainteté, 
se  précipitent  dans  la  sacristie  ;  elles  y  cherchent  les  traces 
de  son  séjour,  les  endroits  où  il  s'est  arrêté,  le  lieu  où  il 
a  reposé  ses  membres  fatigués,  et  y  collent  leurs  lèvres 
avec  un  profond  respect  ;  puis,  se  jetant  à  l'envi  sur  la 
paille  qui  lui  a  servi  de  lit,  elles  la  partagent  entre  elles, 
comme  les  vainqueurs  se  partagent  un  riche  butin. 

Une  d'elles,  ayant  rencontré  quelques  jours  après 
un  homme  que  le  démon  rendait  furieux,  lui  suspend 
au  cou   une    portion  de  la  paille  qui  lui  était  échue, 

(1)  Sulpice-Sévère.  Dialogue  2,  n°  8. 


XI.'"    SESSION,    A    CIIATKAIIKOUX.  Ai't 

et  à  l'iiistiint  iiiènnî  le,  ponsiult'i  (ist  drlivré,  il  est  t^iiiM'i. 
De  Cloué,  Martin  passe  par  Heugnes  ;  c'est  la  voie  la 
plus  courte  pour  se  rendre  à  Gabattou,  L'église  de  lleu- 
gnes  est  placée  sous  le  vocable  de  saint  Martin,  en  mémoire 
de  son  passage. 

De  Heugnes  à  Argy  il  y  a  peu  de  distance  ;  il  parait 
que  les  habitants  d'Argy  eurent  pour  saint  Martin  tant  de 
vénération,  qu'ils  firent  tous  leurs  ellorts  pour  inculquer 
dans  le  cœur  de  leurs  enfants  ces  nobles  sentiments.  Ce 
qu'il  y  a  de  certain,  c'est  que  la  mémoire  du  passage  de 
saint  Martin  à  Argy  est  encore  aussi  Iraiche  aujourd'hui 
qui  si  l'événement  avait  eu  lieu  hier. 

Un  vénérable  prêtre,  M.  Fonjouquet,  curé  d'Argy,  a 
recueilli  avec  le  plus  grand  soin,  comme  des  perles  pré- 
cieuses, tous  les  récits  de  ses  paroissiens  sur  les  cir- 
constances du  passage  du  thaumaturge  des  Gaules  dans 
la  localité  dont  il  est  le  pasteur  depuis  vingt  ans.  Plus 
d'une  fois  il  nous  avait  communiqué  ces  traditions  popu- 
laires. Nous  étions  très-heureux  de  l'entendre;  mais  il 
nous  survenait  de  temps  à  autre  un  soupçon,  un  doute. 
Quel  ne  fut  pas  notre  étonnement  lorsque  le  livre  de 
Péan  Gàtineau,  que  personne  ne  connaissait  avant  qu'il 
fût  édité  par  la  Société  des  Bibliophiles  de  Touraine,  nous 
tomba  entre  les  mains  ! 

Nous  y  lûmes,  consignées  par  écrit  dès  le  xii''  siècle, 
toutes  les  traditions  que  racontent  les  habitants  d'Argy. 
Nous  n'en  citerons  qu'une  seule  :  elle  est  si  curieuse  et 
si  bien  gravée  dans  la  mémoire  de  nos  paysans,  qu'ils  la 
racontent  avec  une  grande  simplicité,  et  sans  oublier  les 
plus  minutieux  détails. 

Martin,  après  avoir  chanté  la  messe  dans  l'église  d'Argy, 
se  met  en  route  pour  Gabatton.  Arrivé  sur  le  bord  d'une 
fontaine,  il  dit  à  Brice,  qui  l'accompagnait,  d'attacher  à 


410  CONGRÈS   ARCHÉOLOGloUE    DE    FUANC.E. 

un  arbre  l'àiie  sur  lequel  il  était  iiionté;  il  voulait  se  re- 
poser et  dormir. 

Brice  exécute  les  ordres  de  son  évéque  ;  puis  il  enfonce 
dans  la  terre,  près  de  la  tête  du  saint,  le  bâton  dont  se 
servait  ce  dernier.  Quant  au  sien,  il  le  place  près  de  ses 
pieds. 

Quel  ne  fut  pas  l'étonnement  de  Martin  lorsque,  à  son 
réveil,  il  vit  les  deux  bâtons  couverts  d'un  épais  feuillage! 
Les  habitants  du  pays  donnèrent  à  ces  deux  arbres  le 
nom  d'arbres  de  Saint-Martin. 

Un  habitant  d'Argy,  ayant  osé  en  couper  une  branche 
pour  en  faire  du  feu,  l'emporta  dans  sa  maison.  Le  soir 
étant  venu,  il  monte  sur  la  bûche  pour  atteindre  la  planche 
sur  laquelle  son  pain  était  placé.  La  bûche  roule  sous  ses 
pieds,  et  il  se  rompt  le  cou. 

Depuis  lors,  les  arbres  de  Saint-Martin  furent  regardés 
comme  des  objets  sacrés,  auxquels  une  main  profane  ne 
devait  pas  toucher. 

La  fontaine  des  environs  d'Argy,  près  de  laquelle  saint 
Martin  s'est  reposé,  porte  encore  aujourd'hui  sou  nom  (l). 

L'église  d'Argy  est  sous  le  vocable  du  saint,  en  mé- 
moire de  son  passage  en  ce  lieu,  et  de  la  grande  vénération 
des  habitants  pour  le  saint  évêque  de  Tours. 

D'Argy,  le  chemin  passe  en  ligne  directe  par  une  localité 
nommée  Saint-Martin-de-Lamps,  dont  l'église  est  dédiée 
au  thaumaturge  des  Gaules,  par  le  même  motif,  suivant 
toute  vraisemblance. 

A  Levroux,  dans  la  basilique,  l'autel  principal  est  sous 
le  vocable  de  saint  Silvain;  mais  dans  un  des  absidioles 
il  y  a  un  autel  dédié  à  saint  Martin. 

(<)  Vie  de  monseigneur  saint  Martin,  par  Péan  Gâtineau; 
soixante-cinq  rimes  sur  Arge,  Argy. 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  417 

Quand  Martin  vint  à  Claudioniuchus,  il  se  rendait  à 
Konie  :  cette  indication  détermine  l'itinéraire  qu'il  a  Huivi, 
itinéraire,  du  reste,  qui  a  laissé  des  traces  encore  subsis- 
tantes. 

De  Gabatton  le  saint  évèque  passa  à  Villegongis,  localité 
placée  sur  la  voie  romaine  de  Gabatton  à  Argentomagus. 

L'église  de  Villegongis  est  sous  le  vocable  de  saint  Mar- 
tin. De  Villegongis,  notre  illustre  voyageur  vint  à  un  lieu 
sans  nom,  situé  au  haut  d'un  monticule,  sur  les  bords  de 
l'Indre. 

Près  de  ce  lieu  existaient  encore,  il  y  a  soixante  ans, 
des  débris  de  pierres  que  le  peuple  nommait  les  Pierres 
Folles. 

C'est  l'endroit  où  Raoul  le  Large,  prince  de  Déols,  bâtit, 
au  X®  siècle,  un  château  auquel  il  a  donné  son  nom  (1). 

Un  acte  authentique  constate  qu'il  y  avait  en  ce  lieu, 
avant  917,  une  église  et  un  monastère  sous  le  vocable  de 
saint  Martin. 

Des  actes,  en  grand  nombre,  font  toi  que  les  seigneurs 
du  château  Raoul  taisaient  hommage,  non  de  leur  fief  ou 
de  leur  château,  mais  seulement  de  leur  donjon,  aux  ar- 
chevêques de  Tours,  successeurs  de  saint  Martin  :  ils 
avaient  droit  d'y  loger,  mais  dans  une  seule  circonstance, 
quand  ils  se  rendaient  à  Rome. 

Du  lieu  où  est  aujourd'hui  le  vieux  castrum  de  Raoul 
le  Large,  Martin  se  rendit  à  Ardentes,  localité  gallo-ro- 
maine, où  l'on  voit  encore  les  débris  de  la  voie  qui 
conduisait  d' Argentomagus  à  Avaricum.  Mais  avant  d'ar- 
river à  Ardentes,  il  traversa  une  vaste  forêt. 

L'église  d'Arthon,  qui  estcontiguë  à  cette  forêt,  est  sous 
le  vocable  de  saint  Martin.  Chose  digne  de  remarque,  le 

(1)  Raoul  le  Large  vivait  de  93.">  à  95^. 

XL"  SESSION.  27 


418       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

culte  de  saint  Sylvain  est  en  honneur  dans  l'église  d'Ar- 
thon  et  dans  une  chapelle  voisine,  où  l'on  va  encore 
aujourd'hui  en  pèlerinage. 

Ne  serait-ce  pas  saint  Martin  qui  aurait  introduit  dans 
cette  localité,  lors  de  son  passage,  le  culte  d'un  saint  si 
aimé  et  si  vénéré  par  lui  ? 

D'Ardentes,  Martin  suit  le  cours  de  l'Indre  et  s'arrête 
en  un  lieu  nommé  Nohant ,  mot  celtique  qui  signifie 
prairies. 

Du  haut  du  monticule  où  est  situé  Nohant,  et  d'où  l'on 
domine  tout  le  pays,  saint  Martin  plane  comme  un  aigle. 

J'aime  à  voir  dans  le  paysage  la  petite  église  de  No- 
hant, décorée  de  vieilles  peintures  murales,  qui  l'ont  fait 
classer  au  nombre  des  monuments  historiques. 

En  quittant  Nohan,  Martin  traverse  un  camp  romain: 
la  Châtre  [Castra]  ;  puis  il  va  droit  à  Lacs,  station  sur  la 
voie  romaine  d'Argentomagus  à  Mediolanum.  A  Lacs 
existait  un  temple  dédié  aux  idoles. 

Nous  avons  visité,  il  y  a  quelques  mois,  Lacs  et  son 
église  romane.  Les  débris  du  vieux  temple  païen  ont  été 
conservés  et  placés  dans  les  murailles  de  l'église  chré- 
tienne. 

Est-ce  Martin  qui  a  détruit  à  Lacs  le  temple  des  idoles  ? 
nous  l'ignorons;  mais  ce  que  nous  savons,  c'est  que  l'église 
est  sous  son  vocable.  Ne  serait-ce  pas  en  mémoire  de  son 
passage  et  de  la  conversion  de  habitants? 

A  Lacs,  Martin  avait  encore  quelques  lieues  à  parcourir 
avant  d'arriver  à  Mediolanum,  où  se  trouvait  l'embran- 
chement de  deux  routes  conduisant,  l'une  à  Clermont, 
l'autre  à  Autun.  Par  l'une  et  l'autre  de  ces  deux  voies  il 
pouvait  gagner  Lu gdunum,  et  deLugdunum  aller  à  Rome. 

Entre  Lacs  et  Mediolanum  se  trouve,  à  moitié  chemin, 
une  localité  qui  porte  le  nom  d'Urciers. 


XL*   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  419 

Saint  Martiu  y  a  passé,  et  l'église  est  sous  son  vocable. 

Nous  pensons  que  saint  Martin  a  traversé  plusieurs  fois 
Mediolanuni. 

C'était  le  chemin  qu'il  a  dû  suivre,  s'il  n'a  pas  fait  de 
fort  longs  détours,  toutes  les  fois  qu'il  est  allé  à  Itume,  à 
Autun  et  à  Clermont. 

A  Mcdiolanum,  les  vieux  titres  font  nriention  d'une  cha- 
pelle érigée  en  dehors  de  la  grande  église  du  prieuré  des 
Bénédictins  de  Déols,  où  saint  Martin  était  honoré. 

De  Claudiomachus  à  Mediolanum,  des  contins  de  la 
Touraine  aux  confins  du  Bourbonnais  et  de  l'Auvergne, 
sur  une  ligne  d'environ  trente  lieues,  Martin  a  traversé 
douze  localités. 

Dans  ces  douze  localités,  les  églises,  ou  au  moins  une 
chapelle,  perpétuent  le  souvenir  de  son  passage.  Ce 
passage  avait  donc  été  un  des  grands  événements  de  ce 
temps-là,  puisqu'on  avait  tenu  à  en  rendre  le  souvenir 
impérissable.  Nous  ferons  remarquer  que  le  principe  admis 
par  les  plus  savants  liturgistes  est  que,  dans  les  premiers 
siècles,  on  n "élevait  des  églises  ou  des  chapelles  en  l'hon- 
neur des  martyrs  et  des  confesseurs  que  dans  les  lieux 
consacrés  par  leur  naissance,  par  leur  habitation,  par  leur 
passage  ou  par  leur  mort. 

Saint  Martin  n'est  pas  né  en  Berry;  il  n'y  est  pas 
mort;  mais  il  a  parcouru  le  pays  des  Biturges,  il  a  marqué 
son  passage  par  la  destruction  des  restes  du  paganisme, 
par  des  miracles  et  par  la  conversion  des  peuples.  Le  Berry 
reconnaissant  lui  a  élevé  des  églises  et  des  chapelles  au 
nombre  d'environ  soixante. 


420  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE    DE   FRANCE. 


LOCALITES   DU  BERRY   OU   LE   CORPS  DE   SAINT   MARTIN 
A  REPOSÉ. 


Saint  Perpetuus,  qui  monta  sur  le  siège  épiscopal  de 
Tours  soixante-quatre  ans  après  la  mort  de  saint  Martin, 
construisit  une  basilique  magnifique,  qui  est  regardée  par 
le  savant  M.  Quicherat  comme  le  plus  riche  et  le  plus 
remarquable  monument  de  l'époque.  Le  A  juillet  473,  le 
corps  de  saint  Martin  fut  transféré  dans  cette  église. 

L'évéque,  avant  de  faire  cette  translation,  avait  réduit 
tous  les  ossements  du  saint  à  la  grosseur  du  corps  d'un 
enfant  ;  il  les  avait  entourés  de  bandelettes  et  placés  dans 
un  vase  d'albâtre,  qui  fut  lui-même  enfermé  dans  un 
coffre  en  forme  de  cercueil,  fait  avec  un  métal  mélangé 
d'or  et  d'argent,  que  les  anciens  appelaient  e/ec^rwm. 

Une  inscription,  qui  ne  nous  a  pas  été  conservée,  attes- 
tait que  la  châsse  où  reposait  le  corps  de  saint  Martin 
remontait  au  temps  de  Perpetuus. 

Un  second  cercueil,  de  laiton,  avait  la  même  forme  et 
datait  de  la  même  époque  ;  mais,  à  la  différence  de  l'autre, 
il  s'ouvrait  par  une  porte  munie  de  quatre  barres  cade- 
nassées. 

Malgré  les  nombreux  déplacements,  motivés  surtout 
par  les  invasions  des  Normands,  le  coffre  d'electrum  de- 
meura intact  pendant  huit  cent  trente  ans.  Nous  avons 
l'acte  authentique  de  l'ouverture  de  cette  châsse,  qui  eut 
lieu  en  présence  de  Philippe  le  Bel. 

Outre  la  châsse  que  nous  venons  de  décrire,  il  y  avait 
encore  dans  l'église  de   Perpetuus   le    sarcophage  dans 


XL»   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  .12 1 

lequel  avait  été  renfermé  d'abord  le  corps  de  saint  Martin  : 
le  grand  artiste  de  la  cour  de  Dagobert,  Éloi,  l'avait  décoré 
et  orné  de  pierreries. 

Sidoine  Apollinaire,  à  la  demande  de  Perpetuus,  com- 
jiosa  une  pièce  en  vers  hexamètres  ou  pentamètres,  qui 
commence  par  ces  mots  : 

Martini  corpus  totis  vcncrabile  terris,  etc.  etc. 

En  effet,  la  dévotion  au  tombeau  de  saint  Martin  était 
si  grande,  qu'on  y  venait  en  pèlerinage  de  tous  les  points 
de  la  terre. 

Un  concile  d'Orléans  n'a  pas  craint  de  dire  :  Galli- 
cana  peregrinatio  ad  corpus  Martini  Turonensis  non  cedit 
Jerosolymitanx  aut  Romanx. 

Ce  corps  si  vénérable  et  si  vénéré  a  reposé  pendant 
plusieurs  années  à  Liraldus  (Leré)  en  Berry,  sur  les 
bords  de  la  Loire,  dans  une  crypte  qui  existe  encore  en 
grande  partie. 

La  crypte  de  Leré  serait,  dit-on,  un  des  rares  monu- 
ments antérieurs  à  l'an  mil,  si  elle  n'a  pas  été  refaite 
entièrement  à  l'époque  de  la  reconstruction  de  l'église 
actuelle.  Nous  ne  connaissons  cette  crypte  que  par  les 
dires  de  ceux  qui  l'ont  visitée;  ce  qu'il  y  a  de  certain, 
c'est  qu'en  856,  les  Normands,  ayant  remonté  la  Loire 
jusqu'à  Orléans,  faisaient  partout  d'affreux  ravages. 

Les  chanoines  de  Saint-Martin  transportèrent  leur  pa- 
tron à  Leré,  villa  que  Charles  le  Chauve  venait  de  leur 
donner  pour  leur  servir  de  lieu  de  refuge  contre  les  inva- 
sions des  Barbares  du  Nord. 

Ces  Barbares  rentrèrent  dans  leur  tantonneraent  à 
l'embouchure  de  la  Loire,  et  les  chanoines  de  Saint- 
Martin,  l'ayant  appris,  quittèrent  Leré,  et  revinrent  avec 


4'22       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

la  châsse  de  l'apôtre  des  Gaules  à  leur  monastère  de 
Tours.  Ils  y  étaient  certainement  en  857,  puisqu'au  prin- 
temps de  cette  année,  des  actes  authentiques  constatent 
qu'ils  étaient  occupés  à  déblayer  les  ruines  de  leur  abbaye 
el  à  en  relever  les  murs. 

De  857  à  862,  les  chanoines  de  Saint-Martin  de  Tours 
jouissent  d'une  tranquillité  relative;  mais  au  commence- 
ment de  862  ils  ont  des  alarmes  et  de  vives  craintes. 
Charles  le  Chauve  étant  venu  à  Tours  pour  célébrer  avec 
eux,  les  fêtes  de  Pâques,  ils  profitent  de  la  présence  du 
roi  pour  lui  faire  renouveler  la  donation  qu'il  leur  avait 
aile  de  la  villa  de  Leré. 

Au  mois  d'août  862,  les  Normands  ravageaient  l'Anjou. 
A  cette  époque,  les  chanoines  avaient  mis  leur  corps  saint 
en  sûreté,  sur  les  bords  de  la  Loire,  à  Leré. 

En  864,  Robert  le  Fort  livra  une  grande  bataille  aux 
Normands;  mais  il  ne  put  les  empêcher  de  remonter  le 
cours  de  la  Loire  l'année  suivante,  et  de  brûler  le 
monastère  de  Fleury-sur-Loire. 

A  la  nouvelle  de  l'incendie  de  l'abbaye  de  Fleury,  située 
dans  le  voisinage  de  Leré,  les  chanoines  de  Tours  s'em- 
pressent de  quitter  cette  résidence,  pour  se  réfugier  à 
Marsat,  dans  les  montagnes  de  l'Auvergne  :  c'était  un 
second  lieu  de  refuge  qu'ils  tenaient  en  réserve,  dans  le 
cas  où  ils  seraient  forcés  de  quitter  Leré. 

En  866,  les  chanoines  de  Tours  se  divisent  en  deux 
bandes  ;  les  uns  restent  à  Marsat,  et  les  autres  reviennent 
à  Leré.  Où  était  le  corps  de  saint  Martin  ?  Très-probable- 
ment à  Leré,  où  l'on  avait  construit  une  crypte  souter- 
raine pour  y  mettre  le  précieux  dépôt  en  sûreté,  non- 
seulement  contre  les  cupides  Normands,  mais  encore 
contre  les  vols  pieux  des  saintes  reliques,  si  fréquents 
dans  ces  siècles  de  foi  et  de  mœurs  barbares. 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  423 

Les  chanoines  n'ayant,  ni  à  Ler6,  ni  à  Marsat,  un  mo- 
nastère assez  spacieux,  et  désirant,  d'autre  part,  s'éloigner 
des  lieux  si  souvent  ravagés  par  l'ennemi,  prièrent  leur 
protecteur,  Charles  le  Chauve,  de  leur  donner  asile  en 
Bourgogne.  Faisant  droit  à  leur  .'demande,  le  roi  leur 
donna  la  Celle  de  Chablis,  près  la  ville  de  Tonnerre,  par 
un  acte  daté  du  27  décembre  867. 

C'est  à  Chablis  que  le  corps  de  saint  Martin  reposera 
jusqu'au  jour  oîi  les  Tourangeaux  iront  l'enlever  à  main 
armée. 

Le  corps  de  saint  Martin  a  donc  traversé  plusieurs  fois 
le  Haut-Berry.  Une  première  fois  il  a  été  porté  de  Tours  à 
Leré,  et  l'année  suivante  de  Leré  à  Tours. 

Une  seconde  fois  il  est  revenu  de  Tours  à  Leré  ;  puis  il 
a  été  transporté  à  Marsat. 

Si  de  Marsat  il  est  revenu  à  Leré,  il  a  traversé  une  troi- 
sième fois  le  Berry. 

Une  quatrième  fois  il  a  dû  repasser  par  le  Berry,  quand 
les  Tourangeaux  l'ont  transporté,  dans  une  marche  triom- 
phale, d'Auxerre  à  Tours. 

Sur  la  ligne  de  Tours  à  Leré  il  y  a  deux  stations  prin- 
cipales où  le  corps  de  saint  Martin  a  dû  séjourner,  Massay 
et  Aubigny. 

A  Massay,  l'abbaye  des  Bénédictins  était  sous  le  vocable 
de  saint  Martin,  sans  doute  en  mémoire  de  la  translation 
de  son  corps  et  du  séjour  qu'y  firent  les  chanoines  de 
Saint-Martin,  si  éprouvés  par  le  malheur,  et  réduits  à 
verser  si  souvent  des  larmes  sur  les  ruines  de  leur  monas- 
tère, pillé  par  les  Normands. 

A  Aubigny,  l'église  collégiale  dépendait  de  l'abbaye  de 
Saint-Martin  de  Tours;  mais  la  question  est  de  savoir  si 
elle  en  dépendait  au  moment  des  invasions  normandes, 
ou  si  elle  fut  donnée  aux  chanoines  de  Tours   après  les 


424       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

invasions,  pour  perpétuer  le  souvenir  du  passage  du  pieux 
cortège,  portant  avec  respect  les  reliques  du  saint. 

Un  respectable  curé  d'Aubigny,  M.  Cantin,  avait  fait 
les  plus  minutieuses  recherches  pour  constater,  à  l'aide 
des  traditions  et  des  monuments  encore  debout,  tous  les 
lieux  de  notre  Berry  où  le  corps  de  saint  Martin  avait 
séjourné.  On  dit  que  son  travail  contenait  de  précieux  ren- 
seignements. Qu'est-il  devenu?  Personne  n'a  pu  me  le 
dire;  je  le  regrette  vivement. 

Ainsi  le  Berry,  qui  avait  acclamé  saint  Martin  pendant 
les  jours  de  sa  vie  mortelle,  l'acclama  encore  après  sa 
mort,  et,  j'oserais  dire,  avec  une  confiance  et  un  enthou- 
siasme d'autant  plus  grands  que  depuis  le  jour  où  l'àme 
de  saint  Martin  est  entrée  dans  le  ciel,  il  a  plu  au  Seigneur 
de  signaler  son  serviteur  à  la  vénération  des  peuples  par 
un  redoublement  de  prodiges  si  grands  et  si  extraordi- 
naires, que  la  France  se  porte  encore  aujourd'hui  en 
masse  à  son  tombeau  pour  honorer  ce  mort  ds  quinze 
siècles. 

La  19*  question  du  programme  :  Caractères  principaux 
des  églises  du  Bas-Berry,  depuis  le  xi"  siècle  jusqu'à  la 
Renaissance,  est  traitée  par  M.  l'abbé  Damourette  dans  un 
intéressant  mémoire  dont  il  donne  lecture. 


Caractères  principaux  des  églises  du  Bas- 
Berry,  depuis  le  XI*^  siècle  jusqu'à  la 
Renaissance. 

Celui  qui  étudie  avec  attention  les  pouillés  du  diocèse 
de  Bourges,  remarque  facilement  que  presque  toutes  les 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  425 

églises  des  prieurés  ou  des  paroisses  du  Bas-Berry  étaient 
sous  la  dépendance  des  abbayes  ou  des  chapitres. 

Aux  XI"  et  XII''  siècles,  les  églises  primitives  tombaient 
de  vétusté;  il  fallait  les  rebâtir.  Les  abbayes  riches  et 
puissantes  alors,  et  les  chapitres  du  diocèse  de  Bourges,  se 
mettant  résolument  à  l'œuvre,  firent  surgir  de  terre, 
jusque  dans  nos  villages  les  plus  humbles,  des  réductions 
en  petit  des  églises  mères.  Il  ne  faudrait  pas  croire  cepen- 
dant que  ces  petits  monuments  reproduisissent  trait  pour 
trait  nos  grandes  églises  abbatiales  ou  collégiales.  L'imi- 
tation se  bornait  souvent  à  adopter  les  méthodes  de  con- 
struire, le  style,  et  quelques  détails  d'ornementation. 

Depuis  longtemps  j'ai  proposé,  pour  cette  série  d'édi- 
fices, un  mode  de  classification  qui  consiste  à  grouper, 
comme  Tont  fait  les  anciens  pouillés,  nos  églises  du  Bas- 
Berry,  d'après  leur  provenance,  sous  les  églises  mères 
dont  elles  dépendaient. 

Ce  système  fut  adopté  par  un  de  nos  archivistes,  M.  Des- 
planques. Plus  j'étudie  la  question,  plus  il  me  semble 
que  ce  mode  de  classification  est  le  meilleur  et  le  plus 
naturel  :  il  relie  la  tige  à  la  souche. 

SÉRIE   DES   ÉGLISES   QUI   ÉTAIENT   SOUS    LA   DÉPENDANCE   DES 
ABBAYES. 

Saint-Cyran-en-Brenne.  —  La  règle  de  Saint-Benoît, 
apportée  dans  le  pays  des  Francs  au  yi''  siècle,  se  répandit 
bientôt  dans  le  Bas-Berry.  Deux  monastères  d'hommes 
furentfondés  en  Brenne  par  saint  Cyran.  SaintCyran,  que 
les  documents  contemporains  nomment  iS/g^îVonrîMS,  appar- 
tenait à  une  noble  famille  du  Berry  ;  il  fut  envoyé  dès  sa 
jeunesse  à  la  cour  du  roi  de  Bourgogne  par  son  père  Sigelaïc, 


1-26  CONGRÈS   AiVCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

qui,  d'après  un  document  apocryphe,  aurait  été  comte  de 
Bourges.  Quoi  qu'il  en  soit,  toujours  est-il  que  le  jeune 
Gyran  fut  confié  à  Flacoat,  maire  du  palais  des  rois  de 
Bourgogne.  Malgré  l'opposition  de  ses  parents,  il  se  fit 
clerc,  et  son  père,  étant  devenu  évèque  de  Tours,  le  choisit 
pour  le  mettre  à  la  tête  de  son  clergé,  en  qualité  d'archi- 
diacre; mais  bientôt  il  fut  jeté  en  prison  comme  fou.  On 
lui  reprochait,  parait-il,  de  compromettre  sou  patrimoine 
par  les  larges  aumônes  qu'il  répandait  dans  le  sein  des 
pauvres. 

Flacoat,  qui  avait  de  grandes  possessions  en  Brenne,  lui 
permit  de  construire  deux  monastères  sur  ses  domaines  : 
l'un  à  Longoretum  (Lonrey),  et  l'autre  à  Méobec. 

Gyran  et  les  disciples  qu'il  avait  attirés  par  l'odeur  de 
ses  vertus,  avaient  un  si  grand  amour  de  la  pauvreté 
évangélique,  qu'ils  ne  voulurent  habiter  que  des  huttes 
faites  avec  des  branches  d'arbres. 

Le  monastère  de  Longoretum  deviendra  plus  tard  la 
trop  fameuse  abbaye  de  Saint-Cyran,  si  connue  comme 
ayant  servi  de  berceau  au  jansénisme.  Le  monastère  de 
Saint-Cyran,  rebâti  en  partie,  existe  encore,  mais  l'église 
a  été  complètement  détruite. 

Les  moines  de  l'abbaye  de  Saint-Gyran  furent-ils,  au 
moyen  âge,  des  artistes  distingués? 

Oui,  si  nous  en  jugeons  par  les  églises  qu'ils  nous  ont 
laissées. 

Je  citerai,  comme  des  échantillons  de  leur  savoir-faire, 
les  églises  de  Ponay,  de  Douadic,  d'Azay-le-Ferron  et  de 
Saint-Michel-en-Brenne. 

Église  de  Ponay.  —  L'église  de  Ponay  est  remarquable 
par  jses  peintures  murales,  et  surtout  par  les  riches 
sculptures  de  la  baie  principale.  (Style  du  xii^  siècle.) 


XL"   SESSION,    A   CHATEAU UOUX.  4.27 

Église  de  Douadic.  —  L'église  de  Douadic  est  une  (illc 
qui  fait  le  plus  grand  honneur  à  sa  mère.  On  rencontre 
dans  son  ensemble,  comme  dans  ses  détails,  les  caractères 
d'un  style  si  simple  et  si  beau  en  même  temps,  ([u'on  peut, 
sans  crainte  de  se  tromper,  la  signaler  aux  architectes 
comme  un  modèle  qu'ils  pourraient  copier  lorsqu'ils  ont 
à  bâtir  une  église  de  petite  dimension.  Elle  date  de  la  fin 
du  xii""  siècle  et  du  commencement  du  xiri". 

La  première  travée,  en  entrant,  est  presque  envahie 
par  les  piliers  qui  soutiennent  la  tour  carrée  du  clocher. 
Le  côté  qui  regarde  la  nef  est  percé  d'une  élégante  ouver- 
ture de  2  mètres  de  largeur.  L'arcade  qui  la  couronne 
repose  sur  des  colonnes  semblables  à  celles  de  la  nef. 

Le  chevet  est  aussi  percé  de  trois  belles  fenêtres  hautes 
et  élancées.  Au-dessus  de  ces  fenêtres  se  déroule  la  scène 
du  Jugement  dernier.  Cette  peinture  murale  est  divisée 
en  deux  parties  :  la  première  représente  les  morts  sortant 
de  leurs  tombeaux.  On  voit  entre  autres  un  prêtre  revêtu 
de  ses  ornements  sacerdotaux  et  un  moine  vêtu  d'un  froc 
gris.  A  genoux  sur  le  bord  de  son  tombeau,  le  religieux 
prie  le  souverain  Juge ,  les  mains  jointes  et  soulevées 
au-dessus  de  sa  tête,  dans  l'attitude  d'un  homme  qui  im- 
plore grâce  et  miséricorde. 

Au-dessus,  sur  un  siège  richement  orné,  les  pieds  posés 
sur  un  escabeau,  Jésus-Christ,  avec  un  air  sévère,  va 
prononcer  la  terrible  sentence;  à  droite  et  à  gauche,  des 
anges  tiennent  en  main  les  instruments  de  la  Passion. 

L'église  de  Douadic  a  le  rare  bonheur  de  n'avoir  jamais 
été  défigurée  par  des  restaurations  inhabiles. 

Azay-le-Ferron.  —  L'église  d'Azay-le-Ferron  est  con- 
struite avec  un  appareil  neaucoup  plus  soigné  que  celui  de 
Douadic. 


i-28       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Les  sculptures  et  les  ornements  des  deux  portes  d'entrée 
accusent  la  date  du  xi'^  siècle;  mais  si  le  visiteur  pénètre 
dans  l'intérieur  de  l'édifice,  il  voit  apparaître  toute  la  riche 
ornementation  du  xiii''  siècle. 

On  a  eu  l'heureuse  idée  de  faire  disparaître  un  retable 
de  mauvais  goût,  du  style  de  la  Renaissance.  Ce  retable  en 
pierre  cachait  aux  regards  une  admirable  abside  à  fenêtres 
élancées  et  à  voûtes  à  nervures. 

Saint-Pierre-de-Méobec.  —  L'abbaye  de  Saint-Pierre  de 
Méobec  est  sœur  de  l'abbaye  de  Lonrey. 

Saint  Cyran,  à  Méobec  comme  à  Lonrey,  ne  construisit 
pour  lui  et  pour  ses  moines  que  de  pauvres  cabanes  ;  mais, 
les  dons  des  pieux  fidèles  affluant  avec  le  temps,  Méobec 
devint  une  abbaye  riche  et  puissante. 

L'église  abbatiale  domine  par  son  élévation  toute  la 
contrée.  Bâtie  d'un  seul  jet,  elle  porte  dans  toutes  ses 
parties  le  cachet  du  style  de  la  fin  du  xii*^  siècle. 

La  nef  a  été  détruite,  en  1560,  par  les  soldats  de  l'armée 
de  Gondé. 

L'abside,  de  forme  circulaire,  fixe  surtout  l'attention  de 
l'archéologue.  Les  murailles  sont  décorées  de  saints  per- 
sonnages peints  à  fresque,  au  milieu  desquels  figure  saint 
Martial,  que  les  moines  de  Méobec  vénéraient  comme 
ayant  évangélisé  l'Aquitaine  et  le  Berry  au  i*''  siècle  de 
l'ère  chrétienne. 

Églises  de  Buzançais.  —  Les  trois  églises  de  la  ville  de 
Buzançais  :  Saint -Etienne,  Habilly  et  Notre-Dame  du 
Verger,  relevaient  de  l'abbaye  de  Méobec. 

Sur  une  ligne  de  plus  de  quinze  lieues,  de  Buzançais 
à  Janvart,  près  Bélàbre,  presque  toutes  les  églises  et 
chapelles  sont  filles  de  cette  église  mère. 


XL'    SESSION,    A    CHATKAUROUX.  429 

Chezellea.  —  Les  églises  de  la  filiation  de  Méobec  ne  me 
paraissent  pas  remarquables  sous  le  rapport  de  l'art.  Je  ferai 
cependant  une  exception  pour  Ghezelles.  L'église  actuelle 
qui  date  du  xiii''  siècle,  a  succédé  à  une  église  du  xii",  qui 
avait  du  mérite,  si  l'on  en  juge  par  les  quatorze  modillons 
qui  sont  placés  au-dessus  de  la  porte  latérale.  Ces  modil- 
lons, provenant  de  l'église  primitive,  représentent  des 
fleurs,  des  figures  d'hommes  et  d'animaux,  d'une  remar- 
quable perfection,  pour  l'époque  à  laquelle  ils  appar- 
tiennent. 

Saint-Genou.  —  Vers  l'an  828,  Wifred,  comte  de 
Bourges,  et  Ode,  sa  femme,  fondèrent  dans  un  de  leurs 
domaines,  à  Estrées,  près  de  la  voie  romaine  qui  conduit 
de  Chabris  à  Poitiers,  un  monastère  pour  les  fils  de  saint 
Benoit  d'Aniane. 

Dodou,  abbé  de  Saint-Savin  en  Poitou,  y  envoya  une 
colonie  de  fervents  religieux. 

Ce  monastère  ayant  été  dévasté  plusieurs  fois  par  les 
Madgyars,  aux  ix*^  et  x*^  siècles,  les  religieux,  contraints 
de  l'abandonner,  se  réfugièrent  à  Saint-Pierre-le-Moutier, 
en  Nivernais.  A  leur  retour,  ne  trouvant  à  Estrées  qu'un 
monceau  de  ruines,  ils  bâtirent  leur  abbaye  sur  un  autre 
emplacement,  près  des  bords  de  l'Indre. 

Une  maladie,  connue  sous  le  nom  de  mal  des  ardents, 
faisant  d'affreux  ravages  en  Berry,  les  pèlerins  se  ren- 
dirent en  foule  pour  vénérer  le  corps  d'un  évêque  de 
Cahors  qui,  ayant  abandonné  son  siège  épiscopal,  était 
venu  terminer  sa  vie  dans  la  solitude,  près  d'une  fon- 
taine où  l'on  montre  encore  l'emplacement  de  la  petite 
cellule  qu'il  habitait.  Il  se  nommait  Genulphus  (saint 
Genou). 

Les  dons  affluèrent  en  si  grande  abondance  à  l'abbaye 


430       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

des  bords  de  l'Indre,  où  son  corps  avait  été  transféré,  qu'on 
fut  bientôt  en  état  d'édifier  une  magnifique  église. 

Cette  église  a  été  étudiée  par  les  archéologues  dans  son 
ensemble  et  dans  ses  détails  avec  la  plus  minutieuse 
attention  ;  l'étude  achevée,  elle  a  été  classée  au  nombre 
des  trente  églises  choisies  comme  les  plus  beaux  types  de 
l'architecture  religieuse  française. 

L'église  de  Saint-Genou  rappelle,  surtout  à  Tintérieur 
le  plan  d'une  basilique  romaine.  Le  transept  porte  les 
traces  d'un  remaniement  qui  parait  dater  du  xiii''  siècle. 
C'est  à  tort  que  l'auteur  de  la  Monographie  de  la.  basilique 
de  Saint -Genou  a  imprimé,  dans  les  Archives  des  monu- 
ments historiques,  que  la  nef  avait  été  détruite  par  les 
huguenots.  Ils  vinrent  à  Saint-Genou,  mais  ils  respec- 
tèrent l'église  de  l'abbaye. 

11  est  certain,  d'après  les  pièces  originales  qui  existent 
encore  en  grand  nombre,  qu'une  partie  de  la  basi- 
lique menaçait  ruine,  et  que  pour  remédier  au  mal, 
on  ne  trouva  d'autre  moyen  que  de  la  démolir.  Quelle 
perte  ! 

Si  mutilé  que  soit  aujourd'hui  cet  ancien  monument, 
il  offre  encore  le  plus  haut  intérêt,  et  il  est  une  des  pro- 
ductions les  plus  originales  de  l'art  chrétien. 

L'intertransept  est  couronné  par  une  voûte  en  forme  de 
coupole,  dont  les  arcs  retombent  sur  de  riches  culs-de- 
lampe  décorés  de  figures  en  pied  représentant  très-proba- 
blement les  chefs  de  l'abbaye  ;  des  absides  demi-circulaires 
terminent  les  trois  nefs. 

On  croit  pouvoir  affirmer  qu'au  lieu  d'autels  il  y  avait 
dans  les  deux  absidioles  latéraux  des  sièges  où  les  prêtres 
se  plaçaient  pour  entendre  les  confessions. 

L'abside  centrale  est  précédée  d'un  chonir  d'une  dispo- 
sition très-remarquable.  Ce  chœur   se  compose  de   cinq 


XL*  SESSION,    A   CHATEAUROUX,  A'.W 

arcades  pleiii-ciufre,  dont  les  arcliivoltes  reposent  sur  de 
grosses  piles,  les  unes  cylindriques  et  les  autres  octogones, 
surmontées  de  chapiteaux  historiés. 

Au-dessus  de  ces  arcades  existe  un  riche  triforium.  Ce 
Irifurium  dénote  une  école  très-avancée,  tant  il  est,  comme 
structure,  à  la  hauteur  des  plus  helles  constructions  de  la 
fin  du  xii^  siècle. 

Les  baies  plein-cintre  qui  donnent  la  lumière  à  l'inté- 
rieur du  vaisseau  sont  flanquées  de  colonnettes  à  chapiteaux 
à  volute. 

La  voûte  du  choeur  est  beaucoup  plus  élevée  que  celle  de 
l'abside  majeure;  une  charmante  arcature  pourtourne  les 
trois  absides. 

Le  monument  n'est  pas  moins  orné  à  l'extérieur  ;  tous 
les  murs  sont  couronnés  d'élégantes  arcatures,  les  baies 
sont  encadrées  de  colonnettes,  et  les  contre-forts  dissi- 
mulés par  de  belles  colonnes  montant  de  fond  jusqu'aux 
corniches. 

Honneur  à  l'abbaye  de  Saint-Genou  !  Elle  nous  a  laissé 
une  preuve  frappante  et  irrécusable  de  sa  science  et  de  son 
entente  de  l'esthétique. 

Les  filles  de  l'abbaye  de  Saint-Genou  sont  au  nombre 
de  quatre  :  la  Celle-sur-Nahon,  Saint-Pierre  de  Lans  (de 
Laude),  Ville-Gouing,  Argy. 

Argy.  —  L'église  paroissiale  d'Argy  avait  été  construite 
dans  l'enceinte  même  du  château  ;  elle  portait  le  cachet  de 
l'église  mère.  Sa  tour  carrée,  surmontée  au  xV  siècle 
d'une  belle  flèche,  se  mariait  avec  grâce  aux  tours  du 
château  d'Argy.  On  jugea  convenable,  il  y  a  quelques 
années,  de  transférer  sur  un  autre  emplacement  la  vieille 
église  du  moyen  âge.  Mais  qu'a-t-on  édifié  pour  la  rem- 
placer? 


432       CONGRÈS  ARGHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Une  église  qui  a  été  construite  avec  une  économie  si 
parcimonieuse,  que  les  ressources  ont  lait  défaut  lorsqu'on 
a  demandé,  au  nom  des  règles  les  plus  vulgaires  de 
l'esthétique,  de  mettre  la  hauteur  de  l'édifice  enharmonie 
avec  sa  longueur. 

Déols.  —  Déols,  hélas!  n'est  plus  qu'une  ruine  impo- 
sante. Des  quatre  tours  carrées,  construites  à  chacun 
des  angles  du  narthex,  il  n'en  reste  plus  qu'une  seule  qui 
se  termine  par  un  cône  en  pierre,  flanquée  de  quatre 
clochetons. 

Pourquoi  faut-il  que  les  huguenots  soient  venus  trois 
fois  mettre  le  siège  devant  Déols  ? 

En  face  de  l'abbaye,  sur  l'autre  rive  de  l'Indre,  on  voit 
encore  les  débris  d'un  fort  où  l'on  avait  pratiqué  des  em- 
brasures. C'est  abrités  derrière  cette  forteresse,  que  les 
assiégeants  lancèrent  sur  Déols  leurs  projectiles.  Bien  que 
l'abbaye  fût  défendue  par  l'élite  de  la  noblesse  du  Bas- 
Berry,  elle  succomba  dans  la  lutte,  et  les  vainqueurs, 
dans  leur  délire,  incendièrent  un  des  plus  beaux  monu- 
ments de  la  France.  Ce  triste  événement  eut  lieu  en 
novembre  1507.  Les  flammes  n'épargnèrent  qu'une  des 
tours  et  la  chapelle  de  Notre -Dame-des-Miracles. 

Cette  chapelle,  adossée  à  la  basilique  du  xii"  siècle, 
offrait  deux  étages  superposés. 

On  accédait  à  la  chapelle  haute  par  un  large  escalier 
extérieur  qui  aboutissait  à  un  palier  sur  lequel  ouvrait 
une  porte  divisée  en  deux  compartiments. 

Sur  la  paroi  de  la  muraille  contre  laquelle  ce  bel 
escalier  était  appuyé,  était  sculptée  en  ronde-bosse  la  figure 
colossale  d'un  guerrier  monté  sur  un  superbe  coursier. 

Était-ce  la  figure  du  fondateur  de  l'abbaye  ou  la  figure 
du  fondateur  de  la  chapelle? 


XI.''   SESSION,    A    CIIATEAUllOUX.  433 

Le  fondateur  de  l'abbaye  est  Ebbes  le  Noble,  vaillaiiL 
guerrier  aussi  pieux  qu'il  était  grand  homme  de  guerre. 
C'est  lui  qui  avait  fait  venir  à  Dt'ols,  en  910,  une  colonie 
de  religieux  de  l'abbaye  de  Cluny.  Il  semble  que  la  statue 
équestre  d'Ebbes  le  Noble  eût  été  mieux  placée  près  de  la 
porte  de  la  grande  église  que  dans  l'escalier  d'une  cha- 
pelle bâtie  après  coup  et  hors  de  l'ouvre.  Aussi  serais-je 
porté  à  croire  que  le  personnage  sculpté  à  l'entrée  de  la 
chapelle  de  Notre-Dame-des-Miracles  était  le  roi  Philippe- 
Auguste.  Il  assiégeait  la  ville  de  Chàteauroux,  lorsqu'il 
accourut  en  toute  hâte  avec  son  chapelain,  l'historien 
Rigord,  pour  être  témoin  d'un  événement  qui  mit  en  émoi 
l'armée  anglaise  et  l'armée  française. 

Un  des  soudards  de  l'armée  du  roi  Richard,  jouant  aux 
dés  et  perdant  l'argent  qu'il  avait  acquis  par  le  vol  et  la 
rapine,  fut  pris  d'un  si  violent  accès  de  fureur,  qu'il 
lança  une  pierre  contre  la  Vierge-Mère,  qui  tenait  sur  ses 
genoux  son  divin  Fils.  La  pierre  atteignit  le  bras  <le 
l'enfant;  il  en  sortit  du  sang  en  abondance.  Cet  événe- 
ment fit  une  sensation  si  profonde  que  les  deux  rois  licen- 
cièrent les  soudards  et  firent  la  paix. 

Philippe- Auguste  aura  voulu  perpétuer  le  souvenir  du 
prodige  en  faisant  bâtir  à  ses  frais,  sur  le  lieu  même  où 
s'était  opéré  le  miracle,  une  chapelle  commémorative.  Ce 
roi,  qui  avait  ordonné  que  sa  statue  équestre  lut  placée 
dans  la  nef  de  la  cathédrale  de  Paris,  aura  voulu  se  faire 
représenter  à  Déols,  en  qualité  de  fondateur  de  la  chapelle 
des  Miracles,  monté  sur  son  cheval  de  bataille.  Quoi  de 
plus  frappant  pour  rappeler  aux  habitants  de  notre  Bas- 
Berry  qu'il  avait  été,  par  ses  exploits  contre  l'Anglais, 
le  libérateur  de  leur  territoire! 

Cette  chapelle,  en  si  grande  vénération  dans  Inulc  la 
contrée,  n'existe  plus  aujourd'hui.  Elle  a  été  démolie  en 

XL^  SESSION.  -^ 


434  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE   FRANCE. 

4832;  il  n'en  reste  que  le  beau  bas-relief  qui  surmontait 
la  porte  d'entrée  de  la  chapelle  basse.  On  peut  voir  dans 
le  jardin  du  bureau  de  Bienfaisance  de  Châteauroux  ce 
remarquable  morceau  de  sculpture. 


Si  l'on  en  croit  M.  Viollet-le-Duc,  ce  juge  si  compétent, 
le  Berry  avait  du  xi*  au  xii'  siècle  des  écoles  de  sculp- 
ture oîi  le  ciseau  était  habilement  tenu  par  les  moines  de 
cette  époque. 


XL"   SESSION,    A    CIIATEAUKOUX.  43H 

Ces  écoles,  à  côté  de  traditions  gallo-romaines  encore 
Irès-puissantes,  admetlaient  certains  éléments  byzantins 
très-purs. 

L'abbaye  de  Déols  était  certainement  un  des  centres 
d'où  rayonnaient  au  loin  ce  rapprochement  entre  l'art 
gallo-romain  corrompu  et  l'art  néo-grec  romain,  importé 
par  les  premières  croisades.  Cette  puissante  abbaye,  en 
ellet,  fut  douée  d'une  telle  fécondité,  que  dans  l'espace  de 
deux  cents  ans  elle  construisit  environ  deux  cents  églises 
et  chapelles  dans  le  diocèse  de  Bourges  et  dans  les  dio- 
cèses étrangers.  Ce  chiffre,  qui  seml)le  exagéré,  est  cepen- 
dant officiellement  constaté  dans  un  acte  authentique  du 
pape  Innocent  IIl,  en  date  de  l'année  1212. 

Nous  ne  prétendons  pas  dire  que  toutes  les  églises  de  la 
filiation  de  Déols  soient  des  chefs-d'œuvre  sous  le  rapport 
de  l'art  ;  nous  ne  les  avons  pas  toutes  étudiées.  Un  travail 
aussi  complet  dépasserait  nos  forces.  Cependant,  en  exa- 
minant avec  attention  celles  qu'il  nous  a  été  donné  de 
voir,  il  nous  a  semblé  qu'elles  étaient  plus  ou  moins  belles, 
suivant  la  richesse  et  l'importance  des  populations  qui 
ont  aidé  les  moines  de  Déols  à  les  bàlir.  Du  reste,  dans  la 
sculpture  d'ornement  de  la  fin  du  xi''  siècle  au  milieu  du 
Xir,  il  y  a  des  preuves  non  douteuses  que  les  débuts  de 
l'école  de  Déols  furent  humbles  et  modestes,  et  qu'elle 
n'arriva  qu'après  bien  des  tâtonnements  à  faire  ces  déli- 
cates sculptures  qui  la  placent  si  haut  dans  l'estime  des 
archéologues. 

Les  deux  églises  les  plus  remarquables  de  la  filiation 
de  Déols  sont  sans  contredit  Saint-Genest  de  Chàteau- 
meillant  et  Saint-Biaise  de  la  Celle-Bruère. 

Châteaumeillant.  —  L'église  de  Chàteaumeillanl  est  en 
forme   de  croix.  Tout  ce  qui  remonte  à  la  construction 


4.3G  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE    T>K    KUANCF. 

première  est  en  plein  cintre,  et  de  style  roman  primilir; 
mais  ce  qui  nous  a  singulièrement  frappé  en  contem- 
plant avec  admiration  cette  grande  église,  ce  fut  de  voir  se 
dérouler  à  nos  yeux  étonnés  sept  absides  ouvrant  toutes 
sur  le  transept. 

La  Celle-Bruère.  —  L'église  de  la  Celle-Bruère  appar- 
tient au  XII"  siècle.  Elle  produit,  par  la  longueur  et  l'har- 
monie de  ses  lignes,  un  grand  effet  d'optique.  Les  bas- 
côtés  sont  couronnés  de  voûtes  en  berceau. 

Nous  avons,  à  quelque  distance  de  Chàteauroux,  quatre 
églises  construites  par  Déols,  qui  méritent  une  attention 
particulière  :  Bommiers,  Saint-Martin  d'Ardentes,  Saint- 
Martin  de  Lans,  Montierchaume. 

Bommiers.  —  L'église  de  Saint-Pierre  de  Bommiers  a 
beaucoup  d'analogie  avec  celle  de  Clion  :  l'une  et  l'autre 
ont  des  voûtes  en  bois  ;  mais  le  transept  et  l'abside  de  ces 
deux  églises  sont  de  la  belle  époque  romane. 

Montierchaume.  —  L'église  de  Montierchaume  est  une 
des  rares  églises  à  date  certaine.  Elle  fut  construite  par 
Leodegarius,  archevêque  de  Bourges,  qui  en  fit  hom- 
mage à  l'abbaye  de  Déols.  L'abside  est  à  pans  coupés  et 
d'un  bon  style  ;  cette  église,  fort  délabrée,  a  été  remise  à 
neuf  et  décorée  de  belles  peintures  à  fresque  qui  font 
l'admiration  des  connaisseurs. 

Le  sujet  principal  représente  le  saint  évèque  à  genoux 
aux  pieds  de  la  Vierge  des  Miracles  de  Déols  et  lui  offrant 
son  église. 

Lans  et  Ardentes.  —  Saint-Martin  de  Lans  et  Saint- 
Martin  d'Ardentes  sont  des  monuments  de  petite  dinien- 


XL*    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  437 

sioii  ;  ruais  les  nefs  sont  voûtées  en  pierre.  Ces  deux 
églises  sont  vraiment  très  -  remarquables  comme  types 
d'églises  rurales. 

Je  signalerai  la  porte  latérale  de  Saint-Martin  d'Ardentes 
et  la  riche  arcature,  en  style  du  xii*  siècle,  qui  décore  le 
pourtour  de  son  abside  semi-circulaire. 

Eglise  de  Saint-Aubin  de  Crevant.  —  L'église  de  Saint- 
Aubin  (le  Grevant  est  bâtie  en  pierres  de  granit  d'une 
teinte  noire  ;  le  porche  qui  précède  l'entrée  principale  est 
surmonté  d'une  tour  carrée  avec  des  arcatures  de  style 
ogival. 

A  gauche  de  la  grande  net"  on  a  construit,  je  ne  sais 
à  quelle  époque,  une  seconde  nef,  très-basse,  du  plus 
mauvais  goût. 

A  droite  est  un  rang  de  chapelles,  dont  l'une,  trans- 
formée en  sacrarium,  est  remarquable  surtout  par  sa  voûte 
à  nervures  prismatiques. 

Eglise  de  Saint- Etienne  de  Chassignoles.  —  L'église 
de  Saint-Étienne  de  Chassignoles  date  de  la  même  époque 
que  celle  de  Crevant  ;  elle  était  sous  la  dépendance  de  la 
même  abbaye. 

Entre  la  tour  carrée  de  Crevant  et  celle  de  Chassignoles 
il  va  une  si  grande  analogie,  qu'on  dirait  que  l'une  et 
l'autre  ont  été  bâties  sur  le  même  plan  et  par  le  même 
moine  architecte;  la  seule  différence,  c'est  que  la  tour  de 
Crevant  est  construite  à  l'entrée,  sur  les  piliers  du  porche, 
tandis  que  la  tour  de  Chassignoles  est  établie  sur  la  travée 
du  choîur. 

Les  moines  de  Notre-Dame  de  Déols,  en  leur  qualité  de 
fondateurs  et  de  patrons,  n'avaient  obligation  de  con. 
struirc  que  le  chœur  et  ses  dépendances,  la  nef  de  l'église 


i38       CONGRKS  AUCMÉOl.OCIOrE  PE  FRANCE. 

restant  à  la  charj^e  des  habitants  de  la  i)aroisse.  Aussi 
quel  contraste  entre  le  cli(i>ur  et  la  nel  !  L'un  est  une 
œuvre  d'art,  l'autre  est  un  pauvre  hangar  avec  de  grands 
murs  sans  aucun  ornement. 

Les  seigneurs  de  la  localité  construisirent  au  xvr  siècle 
deux  vastes  chapelles,  dont  les  arceaux  s'ouvrent  sur  le 
chœur. 

Les  portes  d'entrée  des  deux  chapelles  seigneuriales  sont 
très-remartiuables  par  la  délicatesse  et  la  prol'usion  de  leurs 
ornements  flamboyants. 

Au-dessus  de  la  porte  de  la  chapelle,  qui  est  à  droite, 
l'écusson  porte  des  losanges.  La  maison  de  Chauvigny 
étant  éteinte  à  l'époque  où  la  construction  de  cette  chapelle 
a  eu  lieu,  cet  écusson  doit  appartenir  ou  à  une  branche 
bâtarde,  ou  à  une  branche  apanagée. 

hJglise  de  Saint-Martin  d'Orcennes.  —  Cette  église, 
dans  l'origine,  avait  un  plan  crucial  bien  accusé;  sur  l'un 
des  bras  de  la  croix  on  avait  construit  une  tour  carrée, 
lourde  et  massive. 

Plus  tard,  le  besoin  d'un  plus  grand  espace  se  faisant 
sentir,  les  bras  du  transept  se  sont  allongés  en  forme  de 
nefs  latérales. 

La  voûte  de  la  grande  nef  est  en  berceau  ogival.  Les 
arcs-doubleaux  de  ces  berceaux  sont  d'un  dessin  très- 
incorrect  :  nouvelle  preuve  que  les  habitants  des  paroisses 
étaient  bien  en  arrière,  lors  même  qu'ils  voulaient  imiter 
l'architecture  des  moines.  A  Orcennes,  on  a  certainement 
voulu  construire  les  voûtes  de  la  nef  sur  le  type  des  voûtes 
du  chœur  et  du  transept;  mais  (juclle  différence  entre  les 
unes  et  les  autres! 

Cette  vieille  église  vient  d'être  restaurée  presque  entière- 
ment. Si  certaines  restaurations  laissent  à  désirer,  il  est 


XL"    SKSSION,    A    f.llATKAlIROUX.  iSO 

triste  de  dire  ([u'ellos  ont  été  laites  par  des  hommes  de 
l'art  ;  celles  qui  sont  irréprochables  sont  ducs  à  des 
ouvriers  du  pays  qui  se  sont  inspirés  des  lignes  si  simples 
mais  si  pures  des  constructions  des  moines  du  xii"  siècle. 
L'église  d'Orcennes  se  termine  par  un  chevet  rec- 
tangulaire, ajouré  par  une  grande  fenêtre  du  xvi*  siècle. 

Pouligny.  —  Non  loin  de  Crevant,  une  petite  église 
perdue  au  fond  d'une  campagne  est  consacrée  à  Marie  sous 
le  vocable  de  Notre-Dame  de  Pouligny.  Si  modeste  que 
soit  cette  église,  elle  a  cependant  dans  le  chœur  des 
arcatures  et  à  l'extérieur  des  modillons  sur  lesquels  l'ar- 
tiste s'est  plu  à  sculpter,  sur  une  pierre  assez  rebelle,  des 
fleurs,  des  animaux  et  des  figures  humaines. 

Saint-Martial  de  C hâteauroux .  —  Dirons-nous  un  mot 
de  l'église  Saint-Martial  de  Ghàteauroux?  Ce  n'était,  au 
xn"  siècle,  qu'une  chapelle  bien  humble,  avec  une  voûte 
en  bois  ;  cependant  nous  apercevons  au-dessous  des  cor- 
niches, des  modillons  que  rantiijuaire  admire,  et  dont 
les  figures  fortement  accentuées  dénotent  un  habile  ciseau. 

Nohant-Vicq.  —  Nous  aurions  gardé  sur  l'église  de 
Nohant-Vicq  un  profond  silence,  si  un  hasard  providen- 
tiel n'était  venu,  en  1850,  la  tirer  de  l'oubli  et  de  l'obscu- 
rité. On  a  découvert  à  cette  époque,  sur  les  murs  de  cette 
église,  des  peintures  qui  offrent  un  vaste  champ  à  l'étude 
du  peintre,  de  l'archéologue  et  de  l'hagiographe. 

Les  sujets  représentés  sur  les  murs  de  cette  église  sont 
très-mombreux. 

La  scène  qui  domine  toutes  les  autres  offre  à  nos  regards 
le  Christ   dans  sa  gloire,  environné   des   quatre  Évan- 


iiO       CONGRÈS  AUCHÉOLOGIOUE  PE  FRANXE. 

gélistes,  avec  les  emblèmes  qui  les  distinguent  :  Taigle, 
l'ange,  le  taureau  et  le  bo^uf. 

Il  serait  trop  long  de  décrire  toutes  ces  scènes  bibliques; 
du  reste,  les  plus  intéressantes  ont  été  dessinées  par 
M.  Regnaut-Breon,  artiste  distingué,  par  l'ordre  et  aux 
irais  du  ministère  des  Beaux-Arts. 

Trois  cartons  représentant  les  dessins  de  M.  Régnant 
sont  déposés  sur  le  bureau  du  Congrès.  Reproduits  par 
notre  habile  photographe,  M.  Verdot,  ils  seront  une  des 
curiosités  du  musée  de  notre  ville. 

Sur  notre  demande,  M.  Verdot  a  bien  voulu  faire 
hommage  d'un  exemplaire  de  ces  belles  photographies  au 
comité  historique  et  archéologique  du  diocèse  de 
Bourges.  C'est  un  beau  cadeau ,  dont  nous  sommes 
heureux  de  le  remercier. 

Saint-Gildas.  —  Les  destinées  de  l'abbaye  de  Saint- 
Gildas  ne  peuvent  se  séparer  de  celles  de  l'abbaye  de  Notre- 
Dame  de  Déols. 

A  l'époque  des  invasions  normandes,  les  moines  de 
Ruis,  en  Bretagne,  étaient  venus  demander  à  Ebbes  le 
Noble- refuge  et  protection. 

Ils  apportaient,  avec  leurs  meubles  les  plus  précieux,' 
leurs  corps  saints  et  le  calice  qui,  disaient-ils,  avait  servi 
à  Notre-Seigneur  Jésus-Christ  lorsqu'il  fit  la  Cène. 

Ebbes  le  Noble  leur  accorda  une  gracieuse  hospitalité, 
non  dans  une  forêt,  comme  dit  M.  de  Raynal  dans  son 
Histoire  du  Berry,  mais  au  bourg  de  Déols,  dans  un 
ermitage  entouré  d'un  petit  bois,  dont  l'église  consacrée 
à  Marie  porta  dans  la  suite  le  nom  de  Notre-Dame-la- 
Petite. 

Apres  la  mort  d'Ebbes  le  Noble,  son  fils  Raoul  con- 
struisit en  face  de  son  château  un  monastère  vaste  et 


XL^   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  Wl 

commodfi,  ([ui  fut  le  berceau  d'une  abbaye  qui,  sans 
arriver  à  la  célébrité  de  celle  de  Déols,  vécut  de  la  même 
vie  et  eut  la  même  fin. 

Il  ne  reste  presque  plus  rien  de  l'église  abbatiale  de 
Saint-Gildas  ;  mais  elle  revit  dans  une  de  ses  filles, 
[a  magnifique  église  du  prieuré  Saint-Marcel,  prés 
Argenton. 

Saint-Marcel.  —  A  Saint-Marcel  on  voit  un  exemple 
de  ce  style  mixte  qui,  suivant  M.  VioUet-le-Duc,  com- 
mence à  Gluitcauroux  (c'est-à-dire  à  Déols  et  à  Saint- 
Gildas),  suit  la  route  de  Limoges,  et  s'étend  jusque  dans 
la  Corrèze.  Dans  l'église  de  Saint-Marcel,  le  transept  est 
de  la  fin  du  xii"  siècle.  Il  est  terminé  par  trois  absides 
L'abside  centrale  et  celle  qui  surmonte  la  crypte  où  repo- 
saitle  corps  de  saintMarcel  sont  du  beau  roman  de  transi- 
tion; mais  l'abside  qui  est  à  côté  de  la  tour  du  clocher  est 
en  style  ogival  bienaccusé. 

Parmi  les  autres  églises  qui  dépendaient  autrefois  de 
l'abbaye  de  Saint-Gildas,  je  distinguerai  seulement  une 
église  et  une  chapelle. 

La  Trinité  de  Villedieu.  —  L'église  du  prieuré  de  la 
Trinité,  à  Villedieu,  a  été  défigurée  par  une  restauration 
inhabile  ;  mais  qu'on  lui  rende  sa  physionomie  de  la  fin 
du  xu"  siècle,  et  on  en  fera  un  monument  qui  n'égalera 
pas  en  beauté  sa  sœur  de  Saint-Marcel,  mais  qui  aura 
bien  cependant  son  mérite. 

Si  l'on  en  croit  un  homme  qui  a  mis  au  jour  des  livres 
cités  avec  éloge  par  les  maîtres  de  la  science  archéologique, 
les  deux  absidioles  disposées  à  droite  et  à  gauche  du 
chœur  de  l'église  de  Villedieu  auraient  été  destinées  à 
recevoir  les  cathedra    où  les   prêtres   s'asseyaient   pour 


44.2  CONGHÈà    AUC.HÉOLCGlQUli    HE    l'Il.VNCE. 

entendre  les  confessions.  11  me  semble  que  cette  destina- 
tion, si  conforme  à  la  liturgie  de  ce  temps-là,  est  encore 
plus  marquée  à  Yilledieu  qu'à  Saint-Genou. 

Qui  n'a  pas  remarqué  à  Pont-Chrétien,  sur  les  bords  de 
la  Bouzanne,  une  délicieuse  chapelle?  C'est  un  petit  bijou 
que  nous  ont  légué  les  moines  de  Saiut-Gildas.  Elle 
appartenait  à  onze  propriétaires,  qui  la  possédaient  par 
indivis.  Heureusement  qu'elle  est  tombée  entre  les  mains 
de  M.  le  comte  de  Poix,  (jui  l'a  restaurée  avec  autant 
d'intelligence  que  de  goût. 

Saint-Paterne  d'Issoudum.  —  L'année  qui  suivit  l'arri- 
vée des  moines  de  Ruis,  Raoul  le  Large,  à  la  prière  de 
Laune,  son  oncle,  archidiacre,  et  depuis  archevêque  de 
Bourges,  désira  qu'un  des  corps  saints  apportés  par  les 
Bretons  fût  transféré  à  Issoudun,  dans  une  église  dédiée 
depuis  longtemps  sous  le  vocable  de  saint  Martin.  On  fit 
choix  du  corps  de  saint  Paterne.  Dès  lors  l'église  changea 
de  vocable,  et  ne  fut  i)lus  connue  que  sous  le  nom  du 
saint  dont  elle  reçut  les  précieuses  reliques. 

Lorsque  plus  tard,  pour  mettre  les  reliques  de  saint 
Paterne  en  lieu  sûr,  ou  crut  prudent  de  les  transférer 
dans  le  castrum  d'Issoudun,  l'église  Saint-Paterne  de- 
vint un  simple  prieuré  dépendant  de  l'abbaye  de  Notre- 
Dame. 

Abbaye  de  Notre-Dame  d'Issoudun.  —  L'église  de  l'ab- 
baye des  Bénédictins  de  Notre-Dame  d'Issoudun  a  subsisté 
jusqu'en  1856.  Restaurée  au  xvi''  siècle,  elle  avait  perdu 
en  partie  son  cachet  antique;  mais  au-dessous  de  l'église 
existait,  enfouie  sous  les  décombres,  une  crypte  anti([uc 
dont  on  ne  soupçonnait  pas  l'existence. 

Cette  crypte  fut  mise  à   découvert   ([uand    on  fit  des- 
fouilles    pour  asseoir  les  fondations  du  palais  de  justice. 


XL*    SESSION,    A   CHATEAU  ROUX.  AA3 

Elle  était  placée  sous  le  chœur;  le  corps  de  saint  i'alernc 
y  avait  reposé.  Le  plan  de  cette  crypte,  relevé  avec  soin 
par  M.  Choinard,  architecte,  offrait  une  forme  rectan- 
gulaire ;  la  voûte  en  berceau  était  soutenue  par  (juatrc 
rangs  de  colonnes  ornées  de  chapiteaux,  dont  les  dessins 
ont  été  reproduits  par  M.  Eugène  Royet. 


Un  dessin  n"  1  nous  donne  le  spécimen  d'un  chapiteau 
caractéristique  du  xi"  siècle.  Il  se  compose  de  deux  feuilles 
seulement,  recourbées  en  volute.  Les  autres  chapiteaux 
sont  plus  ornés  et  plus  élégants. 


444       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Dans  le  mur  de  fond  de  la  crypte  on  a  découvert  des 
fragments  de  sculpture  d'un  monument  plus  ancien  ;  ils 
étaient  engagés  dans  la  masse  de  la  construction  comme 
de  simples  matériaux. 

A  quel  siècle  appartenaient-ils?  Nous  l'ignorons.  Qu'il 
nous  soit  permis  de  dire  que  nous  regrettons  très-vive- 
ment la  destruction  d'une  crypte  qu'il  eût  été  si  utile  de 
conserver,  u'eùt-ce  été  que  pour  marquer  les  diverses 
phases  de  l'histoire  de  l'art  dans  le  Bas-Berry  ;  il  eût  été 
très-intéressant  d'avoir  sous  les  yeux  un  monument  qui 
eût  démontré  que  les  arts  étaient  aussi  cultivés  à  Notre- 
Dame  d'Issoudun  qu'à  Notre-Dame  de  Déols  et  à  Saint- 
Gildas  de  Ghàteauroux  ;  ces  trois  abbayes  étaient  sœurs. 

J'entends  dire  autour  de  moi  que  l'église  du  prieuré  de 
Saint-Paterne  était  comme  la  crypte  de  l'église  mère 
dont  elle  dépendait;  une  œuvre  admirable,  que  le  vice- 
amiral  Duquesne  voulait  conserver  au  prix  des  plus  géné- 
reux sacrifices.  Gomment  se  fait-il  qu'elle  soit  tombée  sous 
le  marteau  du  vandalisme  ? 

Heureusement  que  la  veuve  du  vice-amiral  conserve 
avec  soin  les  beaux  chapiteaux  provenant  de  la  démolition 
de  ce  monument. 

Lo.  Champenoise.  —  Nous  ne  possédons  aujourd'hui 
qu'une  seule  relique  complète  de  l'abbaye  de  Notre-Dame 
d'Issoudun  :  c'est  l'église  de  la  Champenoise.  Je  ne 
l'ai  pas  vue  depuis  plusieurs  années,  mais  il  me  semble 
que  je  puis  affirmer  que  l'abside  surtout  est  du  style  de 
la  belle  période  romane,  et  (ju'elle  frappe  les  regards  par 
la  pureté  de  ses  ligues  et  la  gi-andeur  de  ses  proportions. 

Fontgombaut .  —  Un  abbé  de  notre  célèbre  abbaye  de 


XI."-    SESSION,   A.   CHATEAUUOUX.  iio 

Déols,  Adalhcrt,  fut  élu  arclievwjuc  de  Bnur[,^cs  pur  lo 
chapitre  métropolitain. 

Sous  son  pontificat,  vers  d092,  un  de  ses  amis,  Pierre 
de  l'Étoile,  vint  habiter  sur  la  rive  gauche  de  la  Creuse, 
avec  plusieurs  disciples  ,  des  cellules  qu'ils  s'étaient 
creusées  dans  le  roc;  tous  vivaient  en  commun  sous  la 
même  règle. 

L'ermitage  de  Fontgombaut  était  l'image  d'un  monas- 
tère; il  avait  sa  petite  église  en  style  roman,  dédiée  à 
saint  Julien,  évèque  du  Mans,  et  à  saint  Antoine,  pre- 
mier ermite.  Dans  la  crypte,  la  sainte  Vierge  était  honorée 
sous  le  titre  de  Notre-Dame  des  Grottes. 

Au  milieu  des  cellules  on  voit  encore  une  excavation 
taillée  dans  le  rocher,  avec  des  traces  de  scellement  pra- 
tiqué dans  le  tuf.  C'est  là  qu'était  la  salle  du  chapitre. 
Un  baptistère  creusé  dans  le  roc,  une  fontaine  d'eau  lim- 
pide, désignée  sous  le  nom  de  la  Fontaine  de  Gombaut, 
et  une  cuisine  percée  à  la  voûte  d'une  ouverture  circulaire, 
complétaient  la  laure  antique. 

Je  suis  porté  à  croire  qu'une  seconde  crypte,  communi- 
quant par  une  ouverture,  aujourd'hui  bouchée,  avec  la 
chapelle  souterraine  de  la  Vierge  de  la  Grotte,  servait  de 
reclusoir  à  un  des  ermites. 

Parvenu  à  un  âge  avancé,  Pierre  de  l'Étoile  se  déter- 
mina à  transporter  sa  colonie  de  solitaires  sur  la  rive 
droite  du  fleuve. 

Avec  l'aide  des  seigneurs  deBuzançais et deLaTrémouille, 
il  bâtit  un  monastère  et  jeta  les  fondements  d'une  vaste 
église,  avec  collatéral  autour  du  chœur  et  une  tour  carrée 
sur  la  croisée  du  transept. 

La  forme  du  monument  est  celle  d'une  croix  lati  ne  ;  la  nef 
et  le  chœur,  d'une  longueur  de  82  mètres,  sont  divisés  en 
trois  parties,  par  des  rangs  de  piliers  cylindriques. 


440       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Au  pourtour  du  chœur,  les  arcaturesàplein  cintre,  que 
supportent  de  belles  colonnes,  prennent  cette  forme  étroite 
et  surhaussée  qui  réunit  tant  d'originalité  à  tant  de 
grâce. 

Le  portail  de  l'édifice  est  encore  debout,  surmonté  d'une 
grande  baie  et  d'un  pignon.  Ses  sculptures  reproduisent 
ces  échiquetés,  ces  entre-lacs  et  ces  tores  rompus  que  le 
ciseau  byzantin  savait  si  bien  suspendre  aux  courbes  du 
plein  cintre,  pour  en  dissimuler  la  pesanteur. 

Il  va  sans  dire  que  Fontgombaut  est  classé  depuis  long- 
temps au  nombre  des  monuments  historiques  du  départe- 
ment de  rindre. 

Aujourd'hui  que  Déols  est  une  ruine,  et  que  Saint- 
Genou  est  mutilé,  Fontgombaut  serait  l'église  aimée  de 
l'antiquaire,  si  ses  trois  nefs,  dont  les  protestants  ont 
renversé  les  voûtes  et  les  toitures,  étaient  remises  à 
neuf. 

On  irait  voir  Fontgombaut  comme  on  va  voir  Saint- 
Cernin  de  Toulouse ,  l'un  comme  type  de  l'école  du  Berry, 
et  l'autre  comme  type  de  la  grande  école  de  Toulouse. 
Saint-Cernin  est,  sans  contredit,  plus  grandiose  et  plus 
orné;  cependant,  quoique  Fontgombaut  soit  plus  simple 
et  plus  sévère,  il  serait  pour  le  centre  de  la  France  ce  que 
Saint-Cernin  est  pour  le  midi,  la  merveille  et  la  perle  de 
de  la  contrée. 

Qui  donc  rendra  à  la  belle  et  grande  église  du  xii*  siècle 
sa  beauté  et  sa  forme  primitives? 

Les  moines  de  Fontgombaut?  Ils  sont  trop  pauvres  ;  les 
colons  qu'ils  y  élèvent,  et  les  larges  aumônes  qu'ils 
répandent,  absorbent  leurs  ressources. 

11  serait  digne  des  nombreuses  sociétés  archéologiques 
qui  sont  disséminées  sur  tous  les  points  du  territoire 
français,  de  venir  en  aide  à  de  pauvres  moines,  très-méri- 


XL"    SESSION,    A    CII.VTKAUKOUX.  iil 

tants,  qui  ont  déjà  sauvé  d'une  ruine  imminente  de 
notables  parties  de  l'un  des  monuments  les  plus  remar- 
quables de  France  (l). 

L'abbaye  de  Fontgombaut  n'avait  sous  sa  dépendance 
que  trois  paroisses  :  l'une  dans  le  bourg  de  Fontgombaut, 
l'autre  à  Chamussay  (diocèse  de  Tours),  et  la  troisième  à 
Montlivon  (diocèse  du  Mans).  Elle  a  construit  un  grand 
nombre  de  chapelles,  dont  plusieurs  ont  été  dessinées 
par  M.  Voisin,  curé  de  Douadic;  elles  sont  d'un  bon 
style. 

Saint- BenoU-du-Sault.  —  L'antique  prieuré  de  Saint- 
Benoit-du-Sault  était  sous  la  dépendance  de  l'abbaye  de 
Fleury-sur-Loire  ;  cependant  cette  prévôté  avait  le  droit 
d'avoir,  comme  une  abbaye,  des  [prieurés  et  des  églises 
sous  sa  juridiction. 

L'église  de  la  prévôté  existe  encore  :  elle  est  lourde  et 
massive  ;  les  piliers  qui  soutiennent  la  voûte  sont  carrés 
et  sans  aucun  ornement.  Elle  est  du  xii*^  siècle  ;  le  clocher 
est  plus  moderne. 

Du  prévôt  de  Saint -Benoit  dépendaient  les  églises 
d'Azerables,  de  Parnac ,  de  Mouhet,  de  Lachâtre-au- 
Vicomte,  de  Roussines  et  de  Saint-Giles. 

(1)  Ce  que  ne  dit  pas  l'auteur  trop  modeste  de  VÉhide  sur 
Fontgornbaut,  c'est  que  par  son  zèle,  par  son  dévouement,  par 
ses  généreux  sacrifices,  il  a  puissamment  contribué  à  la  conser- 
vation de  ce  précieux  monument.  Ces  détails  n'étaient  point 
parvenus  à  notre  connaissance  à  l'époque  du  Congrès  archéolo- 
gique de  Chàteaiiroux,  sans  quoi  nous  eussions  sollicité  pour 
M.  l'abbé  Damourette  une  médaille  d'honneur  qu'il  a  si  bien 
méritée. 

G.    DE   COUGNT. 


418        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Mouhet.  —  Au  pourtour  de  l'église  deMouhet,  j'ai  sur- 
tout remarqué  un  entablement  soutenu  par  des  modillons 
à  figures  grimaçantes,  vive  représentation  des  vices  les 
plus  hideux. 

Parnac.  —  L'église  de  Parnac,  avec  ses  fenêtres  élan- 
cées et  ses  voûtes  à  nervures,  paraît  appartenir  à  la 
période  du  style  ogival. 

Rovssines.  —  L'église  de  Roussines  est  d'une  date  anté- 
rieure. Nous  ne  devons  pas  oublier  ses  peintures  murales 
représentant  les  sept  péchés  capitaux  :  des  cavaliers  sont 
montés  sur  des  animaux  symboliques;  ils  ont  en  main 
des  phylactères  sur  lesquels  est  écrit  le  vice  que  l'animal 
symbolique  représente. 

Un  moine  se  tient  debout  au  milieu  de  ces  diableries 
sorties  de  l'enfer.  Ce  moine,  si  je  ne  me  trompe,  est  un 
enfant  de  saint  François,  qui  est  assailli  par  sept  cavaliers 
qui  se  précipitent  à  sa  rencontre;  mais  son  attitude  est 
celle  d'un  vainqueur  qui  a  triomphé  de  ses  nombreux  et 
puissants  ennemis. 

Nous  devons  mentionner  un  autre  grand  prieuré  du 
Biis-Berry,  le  prieuré  de  Saint-Martial  de  Rufec  ;  il  avait 
sous  sa  dépendance  deux  églises  :  Saint-Alpinien  de 
Rufec,  et  Saint-Georges  de  Ciron. 

S ai7it- Martial  de  Rufec.  —  Ces  trois  églises  sont  de  la 
môme  époque  et  du  même  style  ;  mais  l'église  de  Saint- 
Martial  est  l'église  mère;  on  le  reconnaît  à  son  grand  air 
de  fierté  et  de  noblesse.  Cet  édifice  a  été  construit  aux 
frais  d'un  fils  du  seigneur  de  Romefort,  qui,  de  moine  de 
Rufec,  en  devint  plus  tard  prieur  et  abbé  de  Saint-Martial 
d(!  Limoges. 


XL*   SESSION,    A    CHATEATIROUX.  44.9 

Rufec  est  une  église  de  la  fin  du  xii*  ou  peut-être  du 
commencement  du  xiii"  siècle,  avec  chevet  rectangulaire 
et  chapelles  semi-circulaires  dans  les  deux  bras  de  la 
croix  ;  les  bas-côtés  de  la  nef  principale  :-ont  très-étroits. 
Ce  qui  nous  a  semblé  une  singularité,  c'est  que  les 
colonnes  qui  soutiennent  la  voiàte  centrale  sont  alternées 
avec  des  piliers  carrés,  assez  légers,  et  que  les  fenêtres 
des  deux  nefs  latérales  sont  disposées  de  telle  sorte  que  les 
fenêtres  du  côté  gauche  ne  sont  jamais  en  face  de  celles  du 
côté  droit. 

L'église  de  Rufec  sert  actuellement  de  magasin  à  four- 
rage; l'acte  de  vente  du  district  du  Blanc  porte  cepen- 
dant qu'elle  sera  réservée  pour  les  besoins  du  culte. 

Comment  n'a-t-on  pas  réclamé  en  temps  utile? 

Des  abbayes  étrangères  au  diocèse  possédaient  dans  le 
Bas-Berry  des  prieurés  et  des  églises.  Nous  ne  devons 
pas  les  passer  sous  silence. 

Reiiilbj.  —  La  grande  abbaye  des  temps  mérovingieas, 
Saint-Denis,  avait  reçu  en  don  dos  raanses  à  Reuilly.  Elb; 
y  avait  fondé  un  prieuré  qui,  suivant  la  Iradition,  rcmnn- 
terait  à  l'époque  de  Dagobert.  Quoi  qu'il  en  soit,  tou- 
jours est-il  qu'il  y  a  sous  l'église  de  Reuilly  une  cryple 
fort  ancienne,  très-probablement  antérieure  à  l'an   1000. 

M.  Cousin,  ancien  instituteur  à  Reuilly,  affirme  que, 
pendant  qu'il  habitait  cette  localité,  on  avait  découvert 
dans  les  caves  d'une  maison  occupée  par  M.  Goubet  une 
longue  galerie  avec  des  arcosoliiim  où  l'on  voyait  encore 
les  tombes  des  anciens  moines  du  prieuré  de  Reuilly. 

L'abbaye  de  Marnaoutier  (diocèse  de  Tours),  si  connue 
dans  notre  contrée,  avait  sous  sa  dépendance  l'église 
d'Aigurande,  aujourd'hui  chef-lieu  de  canton,  et  le 
prieuré  de  Crozon. 

XL»  SESSION.  29 


460  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 


ÉGLISES   ET   PRIEURÉS   DÉPENDANT   DE   L  ABBAYE   DE 
MARMOUTIER  PRÈS   TOURS. 

Prieuré  de  Saint- Germain  de  Crozon.  —  L'église  de 
Saint-Germain  de  Crozon  est  une  des  plus  anciennes  du 
Bas-Eerry.  En  1087,  elle  avait  pour  desservant  un  véné- 
rable prêtre  nommé  Durand.  Ce  prêtre  possédait  en  toute 
propriété  deux  églises  et  deux  moitiés  d'églises. 

Durand  était  riche;  touché  de  la  grâce  de  Dieu,  il  sent 
naître  en  lui  le  vif  désir  de  renoncer  à  tous  les  biens  ter- 
restres. 

L'abbaye  de  Marraoutier  répandait  au  loin  une  grande 
édification  depuis  surtout  qu'elle  s'était  mise  sous  l'auto- 
rité et  la  direction  de  saint  Mayeul,  abbé  de  Cluny. 

Le  prêtre  Durand  le  sait,  et  se  hâte  de  s'y  rendre  ;  arrivé 
à  Marmoutier,  il  se  prosterne  devant  le  Père  abbé,  et  lui 
demande  avec  les  plus  vives  instances  de  vouloir  bien  le 
recevoir  au  nombre  de  ses  moines.  Cette  grâce  obtenue,  il 
se  dépouille  avec  joie  de  tous  ses  biens,  et  constitue  saint 
Martin  son  héritier,  suivant  son  expression. 

La  vieille  église  de  Crozon,  se  ressentant  de  l'époque 
barbare  où  elle  avait  été  construite,  tombait  de  vétusté, 
lorsque  je  la  visitai  pour  la  première  fois,  il  y  a  vingt- 
cinq  ans.  Autant  qu'il  m'en  peut  souvenir,  elle  avait  en 
entier  la  forme  d'un  simple  rectangle  terminé  par  une 
abside  voiîtée  en  cul-de-four.  Depuis  elle  a  été  reconstruite. 

Le  prieuré  de  Notre-Dame  d'Aigurande  appartenait  à 
l'abbaye  de  Marmoutier  par  suite  du  don  qui  lui  avait  été 
fait  par  le  prèfre  Durand  et  par  son  copropriétaire,  dont 
on  ignore  le  nom. 

Suivant  une  antique  tradition,  saint  Martial,  après  avoir 


XL"   SESSION,    A   CIIAÏEAUROUX.  451 

prêché  à  Aigurande  le  saint  Évangile,  y  aurait  laissé  une 
trace  de  son  passage  en  y  consacrant  nn  autel  sous  le 
vocable  de  la  très-sainte  Vierge.  Le  petit  édicule  construit 
par  saint  Martial  aurait  été  détruit  pendant  les  persécu- 
tions; mais  on  aurait  tenu  à  rebâtir  une  seconde  église 
sur  l'emplacement  choisi  par  l'apôtre  de  l'Aquitaine. 

Il  reste  de  cette  seconde  église  des  vestiges  que  l'on  peut 
voir  encore. 

L'église  actuelle  a  la  forme  d'un  parallélogramme  sans 
transept. 

Au  sommet  extérieur  du  chevet  est  disposé  un  mou- 
charaby  percé  de  trois  mâchicoulis,  d'où  l'on  pouvait 
lancer  des  projectiles  sur  ceux  qui  venaient  assaillir  le 
château  d'Aigurande,  dans  l'enceinte  duquel  il  se  trouvait. 

A  l'entrée  s'élève  une  tour  carrée  à  la  base,  et  terminée 
en  hexagone. 

Cette  tour,  dont  les  murs  sont  d'une  épaisseur  con- 
sidérable, a  dû  être  construite  dans  le  but  de  servir 
au  besoin  de  défense;  ce  qui  me  semble  le  prouver, 
c'est  que  cette  tour  était  pleine,  sans  autre  ouverture 
qu'une  petite  baie  qui  date  de  l'époque  de  sa  con- 
struction. 

La  porte  actuelle  est  du  style  du  xvi^  siècle. 

La  vieille  église  de  Paulmery,  construite  dans  le  style 
du  xiV  siècle,  est  tombée  de  vétusté  il  y  a  quelques  années. 
Il  n'en  reste  plus  que  des  débris. 

L'abbaye  de  Saint-Savin  (diocèse  de  Poitiers)  étendait 
sa  juridiction  sur  les  églises  de  Ligiiac  et  de  Pressac.  Le 
prieuré  de  Saint-Marin,  où  l'on  va  encore  en  pèlerinage 
tous  les  vendredis  de  l'année  ,  depuis  la  Pentecôte 
jusqu'à  la  fête  de  saint  Martin,  lui  appartenait  en  propre. 

Prissac.  —  L'église  de  Prissac  est  à  deux  nefs  de  diinon- 


452       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

sioii  à  peu  près  égale.  On  dirait  deux  églises  soudées  l'une 
à  l'autre.  La  tour  du  clocher  de  l'église  de  Prissac  est 
lourde  et  massive;  il  est  vrai  qu'elle  a  été  construite 
bien  des  siècles  avant  la  flèche  si  svelte  et  si  gracieuse 
de  l'église  mère. 

Saint  Gautier  fonda  deux  églises  dans  notre  Berry  : 
Saint-Denis  de  Rivarennes  et  une  église  qui  porte  son 
nom. 

Saint-Gautier.  —  L'église  de  Saint-Gautier  a  des  bas- 
côtés  très-étroits,  un  transept,  une  tour  carrée  sur  la  croi- 
sée, et  se  termine  par  trois  absides  demi-circulaires. 

Cette  église,  commencée  du  vivant  du  saint,  ne  fut 
terminée  qu'après  sa  mort.  Il  est  certain  qu'elle  n*a  pu 
être  placée  sous  son  vocable  avant  4091,  car  c'est  à  cette 
époque  seulement  qu'on  commença  à  rendre  à  saint 
Gautier  un  culte  public  et  autorisé. 

Du  reste,  les  caractères  architectoniques  de  l'église  de 
Saint-Gautier  sont  en  harmonie  avec  cette  date  ;  c'est  un 
édifice  du  xi'=  siècle.  Pour  en  juger,  il  suffit  de  voir  ses 
formes  massives  et  ses  lourds  piliers  carrés,  sans  ornements 
et  sans  grâce. 

Le  prieuré  des  Bénédictins  de  Saint-Jean  d'Aurillac 
(diocèse  de  Saint-Flour)  construisit  jadis  une  église  dans 
l'archiprêtré  d'Argenton  :  c'est  l'église  de  Saint-Denis  de 
Jouhet. 

Jouket.  —  Deux  dessins  de  M.  Regnault-Bréon  sont 
déposés  dans  les  archives  du  musée  des  Beaux-Arts.  L'un 
représente  la  tour  octogone  de  Jouhet,  et  l'autre  le  chevet 
carré  du  chœur,  avec  ses  trois  baies  élancées,  surmontées 
d'un  oculus. 

Les  dessins    de   M.   Regnault  ont   été  reproduits  par 


XL"   SESSION,    A   CUATEAUROUX.  453 

M.  Verdot;  ils  font  partie  de  sa  riche  collection  des 
monuments  les  plus  remarquables  du  département  de 
rindre. 

Disons  un  mot  de  nos  églises  cisterciennes  :  elles 
sont  en  grand  nombre  dans  le  diocèse  de  Bourges. 

Autant  les  églises  bénédictines,  les  abbatiales  surtout, 
sont  ornées  de  riches  sculptures  et  de  belles  peintures, 
autant  les  églises  de  l'ordre  de  Citeaux  sont  graves  et 
sévères.  Saint  Bernard,  qui  était  plutôt  un  ange  qu'un 
homme,  voulait  que  le  moine  cistercien  s'élevât  à  Dieu 
et  aux  idées  contemplatives  sans  le  secours  des  sens 
extérieurs. 

Les  églises  cisterciennes  se  ressentirent  de  l'austérité  de 
sa  vie  et  de  sa  règle.  Toutefois  n'exagérons  rien,  les  belles 
églises  (le  l'ordre  de  Citeaux  présentent  encore  un  grand 
intérêt  au  point  de  vue  de  l'art.  Qu'on  veuille  bien  en 
juger  par  celle  de  l'abbaye  de  Notre-Dame-de-la-Maison- 
Dieu  (Noirlac). 

Notre- Dame-de-la- Maison- Dieu.  —  L'abbatiale  de  la 
Maison-Dieu,  aujourd'hui  séchoir  d'une  fabrique  de  por- 
celaine, est  encore  intacte;  il  semble  que  ce  monument 
n'ait  subi  aucune  des  injures  du  temps.  La  forme  de  cette 
église  est  une  croix  latine  ;  son  chevet  carré  est  éclairé 
par  trois  grandes  baies  en  style  ogival,  percées  dans  le 
pignon  oriental. 

Au-dessus  des  baies,  un  vaste  oculus  versait  le  jour  et  la 
lumière  dans  le  chœur  des  moines. 

Sur  chaque  bras  du  transept  s'ouvrent  deux  chapelles 
carrées. 

La  nef  du  milieu  est  accostée  de  deux  autres  nefs  ; 
les  lignes  et  les  proportions  de  l'abbatiale  sont  si  savam- 
ment agencées,  que,  bien  que  les  murs  soient  nus,  sans 


454  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   PE    FRANCE. 

colonnes  ni  pilastres,    l'ensemble  produit  un  effet  sai- 
sissant. 

Notre-Dame  de  Varennes.  —  Une  petite  église  cister- 
cienne est  encore  cachée  comme  l'humble  violette  sur  les 
bords  d'un  ruisseau,  au  fond  d'une  vallée  sauvage  :  c'est 
l'église  de  Notre-Dame  de  Varennes.  Elle  est  livrée  à  des 
usages  profanes;  toutefois  ceux  à  qui  elle  appartient  ont 
grand  soin  de  ne  pas  détériorer  les  colonnettes,  qui  sou- 
tiennent des  voûtes  à  nervures,  remontant,  selon  toute 
vraisemblance,  au  commencement  du  xiii'^  siècle. 

Une  légende  assez  curieuse  se  rattache  à  la  fondation  de 
cette  abbaye. 

Le  prince  de  Déols  et  Garnier,  seigneur  de  Cluis,  se 
disputaient  entre  eux  le  titre  de  fondateur.  Henri  II,  leur 
suzerain,  intervint  dans  le  débat,  et  un  acte  daté  de 
Chinon  constate  qu'il  fit  arracher  des  fondements  du 
monastère  une  pierre  que  le  prince  de  Déols  y  avait  posée, 
et  qu'il  déclara  que  dorénavant  ce  serait  lui  qui  serait 
considéré  comme  le  fondateur,  le  défenseur  et  le  gardien 
de  l'abbaye  de  Notre-Dame  de  Varennes. 

Dans  notre  étude  nous  avons  vu  apparaître  en  première 
ligne  les  enfants  de  saint  Benoît  et  surtout  les  moines  de 
Déols  affiliés  à  Cluny;  à  la  seconde  place  sont  venus  se 
ranger  les  enfants  de  saint  Bernard.  Il  nous  reste  encore 
à  parler  d'un  ordre  de  femmes  fondé  par  le  bienheureux 
Robert  d'Arbrissel. 

Abbaye  d'Orsan.  —  Robert  d'Arbrissel,  ami  de  Léode- 
gaire,  archevêque  de  Bourges,  et  de  l'ermite  des  bords  de 
la  Creuse,  le  bienheureux  Pierre  de  l'Étoile,  fonda  en 
Berry  le  célèbre  monastère  d'Orsan,  où  il  expira  sur  la 
cendre  et  le  cilice,   entre   les   bras  de  l'archevêque  de 


XL«   SESSION,    A   CIlATEAUaOUX.  455 

Bourges.  Hélas!  il  ne  reste  plus  d'Orsan  que  des  sou- 
venirs. 

Nous  sommes  plus  heureux  dans  le  Bas-Berry;  les 
Fonlevristesy  ont  laissé  trois  monastères:  Longelbnd  près 
Saint-Gauthier,  Jersey  dans  la  commune  de  Moulins,  et 
Glatigny  près  Chabris. 

Jersey.  —  J'ai  visité  plusieurs  fois  Longe  fond  et  Jersey. 
A  Jersey  l'église  subsiste  en  partie  ;  elle  est  du  xii*^  siècle. 
Les  connaisseurs  accordent  un  certain  mérite  à  trois 
retables  en  pierre  qui  décorent  les  autels.  Je  sais  que  le 
propriétaire,  qui  lait  grand  cas  de  ces  retables,  vient  de 
les  faire  restaurer  ;  ils  font  de  l'effet. 

Longefond.  —  L'église  du  prieuré  de  Longefond  est 
enfouie  sous  les  débris  de  ses  voûtes.  Il  serait  facile  de  la 
déblayer  et  de  la  restaurer  ;  elle  conserve  sa  vieille  physio- 
nomie du  xii^  siècle.  Le  site  où  le  monastère  de  Longefond 
fut  construit  est  le  plus  enchanteur  que  je  connaisse  sur 
les  rives  de  la  Creuse. 


2"  SÉRIE.  —  ÉGLISES  COLLÉGIALES. 

1°  Chapitres  réguliers. 

Vers  1080,  sous  le  pontificat  de  Richard  II,  archevêque 
de  Bourges,  plusieurs  chapitres  de  chanoines  réguliers  de 
Saint-Augustin  furent  ibiidés  en  Bcrry,  Miseray,  dans  la 
seigneurie  de  Buzançais,  Plainpied,  à  peu  de  distance  de 
Bourges. 

Le  chapitre  de  Plainpied  était  très-pauvre;  il  dut  bâtir 


456       CONGRÈS  ARCHÉOUM.IQUE  DE  FKANCE. 

l'église  d'Urciers  lor?(ju'il  t''tait  encore  daus  une  grande 
indigence. 

Urciers.  —  Cette  église  était  percée  de  petite»  baies  en 
forme  de  niearlricres  qui  laissaient  ù  peine  entrer  dans 
l'intérieur  la  lumière  et  le  jour;  elle  est  un  des  types  de 
la  gn^ssièreté  et  de  l'ignorance  des  temps  où  la  tradition 
de  l'art  était  com  plétement  perdue.  Le  maitre  de  l'œuvre 
a  cependant  voulu  décorer  l'abside  de  deux  chapiteaux, 
mais  quels  chapipiteaux  !  On  ne  peut  rien  voir  de  plus 
grotesque.  Cette  église  a  été  détruite  pour  faire  place  à 
une  construction  nouvelle. 

Plainpied. — Plus  tard  les  chanoines  dePlainpied  devien- 
dront d'habiles  architectes,  et  la  piété  des  fidèles  leur  four- 
nira les  moyens  de  construire  sur  les  bords  de  l'Arnon  une 
magnifique  église  avec  une  vaste  crypte,  que  M.  Buhotde 
Kersers  a  décrite  avec  amour,  tant  elle  a  plu  à  son  goût 
d'artiste. 

L'église  de  Plainpied  est  de  l'époque  de  la  transition. 

Abbaye  de  Miseray.  —  L'abbaye  de  Miseray,  près  d'Heu- 
gnes,  n'était  dans  l'origine  qu'un  petit  ermitage  situé  au 
milieu  des  bois,  près  d'une  source  d'eau  vive. 

Cet  ermitage,  en  grande  vénération  dans  toute  la 
contrée,  devint  un  collège  de  chanoines  réguliers. 

Si  l'on  en  croit  les  anciens  du  pays  qui  avaient  assisté 
aux  saints  offices  célébrés  avec  une  grande  pompe  et  une 
grande  piété  par  les  chanoines,  l'église  de  Miseray  était 
remarquable  par  la  beauté  de  son  architecture  ;  mais, 
hélas  !  il  n'en  reste  plus  aujourd'hui  que  des  vestiges  en- 
fouis sous  terre. 


XL*    SESSION,    A    CllATKAUKOUX.  i^7 

2°  Chapitres  séculiers. 

Saint-Cyr  d'hsoadun.  —  1°  Le  chapitre  de  Saiul-Cyr 
d'Issouduii  eut  toujours  la  prétention  d'être  de  tbndatiou 
royale. 

A-t-il  élc  fondé,  comme  on  l'a  dit,  par  Charlemagne  ou 
par  Charles  le  Chauve?  Je  l'ignore:  ce  que  je  sais,  c'est 
que  s'il  a  été  fondé  par  les  rois  de  France,  ils  ont  partagé 
cet  honneur  au  moins  dans  une  certaine  mesure  avec  les 
seigneurs  d'Issoudun  :  le  seigneur  Ebrard  Dufour  était 
certainement  investi  du  droit  de  nommer  à  une  des  pré- 
bendes, très-probablement  en  qualité  de  cofondateur, 
puisqu'il  en  dispose  en  faveur  de  son  petit-fils,  nous  avons 
un  acte  authentique  qui  le  prouve. 

A  la  fin  du  xi"  siècle,  le  chapitre  de  Saint-Cyr  avait 
une  juridiction  si  étendue,  que  le  bienheureux  André, 
fondateur  de  Tabbaye  de  Chezal-Benoit,  ayant  un  différend 
à  vider  avec  le  curé  de  Dampierre,  porta  la  cause  au  tri- 
bunal du  doyen  d'Issoudun. 

Ce  tribunal  décida  que  l'abbaye  de  Chezal-Benoit  serait 
libre  de  toute  redevance  envers  le  curé  de  Dampierre,  à  la 
condition  qu'elle  dépendrait  du  chapitre  de  Saint-Cyr. 
L'abbaye  accepta,  et  chaque  année  elle  payait,  à  titre  de 
vassale,  une  rente  de  cinq  sols,  et  offrait  sur  l'aulel  une 
livre  d'encens;  par  contre,  le  chapitre  choisit  les  moines 
de  Chezal-Benoit  pour  desservir  la  paroisse  annexée  à  leur 
collégiale. 

A  l'époque  où  eut  lieu  cet  arrangement,  il  devait  exister 
à  Issouduu  une  grande  église  romane  servant  de  pa- 
roisse, si  l'on  en  juge  par  les  débris  qui  eu  restent. 

Outre  un  petit  portique  pleiu  cintre  qui  devait  servir 
d'entrée  à  une  des  nefs  latérales,  on  voit  encore  à  l'intcr- 


■i58  CONGRÈS    ARCHEOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

section  du  transept  quatre  énormes  piliers  romans,  sur 
lesquels  retombent  des  colonnes  rompues  et  défigurées.  Ces 
quatres  piliers  devaient  soutenir  des  arcatures  sur  les- 
quelle?  était  établie  la  tour  des  cloches.  Ces  débris  ont  de 
grandioses  proportions. 

Cette  église,  brûlée  par  les  Anglais  sous  Charles  VI  et 
relu'ûlée  en  1651  pendant  les  troubles  de  la  Fronde,  n'est 
plus  aujourd'hui  qu'un  cadavre  informe  et  mutilé. 

A  cette  église,  véritable  halle,  est  soudé  un  vaste  chœur 
du  xv«  siècle,  avec  un  collatéral  et  des  chapelles.  Le  chevet 
est  terminé  par  un  grand  pignon,  percé  d'une  fenêtre, 
divisée  par  des  meneaux  dont  le  sommet  est  rempli  par 
des  rosaces  à  quatre  feuilles. 

On  dit  que  la  verrière  à  sujets  coloriés  est  un  des  pre- 
miers essais  de  Maussaise,  dont  le  père  avait  été  organiste 
au  chapitre  de  Saint-Cyr.  Si  c'est  un  essai  de  ce  peintre- 
verrier,  je  l'ignore  ;  mais  ce  que  je  puis  affirmer,  c'est 
cette  verrière,  dans  l'ensemble,  ne  manque  ni  de  gran- 
deur ni  d'effet. 

2°  Le  chapitre  de  Saint-Austrégésile  à  Châtillon-sur- 
Indre. 

Saint  Austrégésile,  vulgairement  nommé  saint  Outrile, 
est  un  de  nos  saints  évêques  mérovingiens;  il  mourut 
en  624. 

Il  est  patron,  dit  M.  l'abbé  Barbier,  chanoine  de  Mé- 
zières-en-Brenne,  de  l'église  collégiale  de  Chàtillon-sur- 
Indre,  fondée  en  964  par  Guy,  qui  avait  donné  à  cette 
église  un  os  de  la  main  du  saint. 

Ce  Guy  ne  nous  est  connu  que  par  le  calendrier  ma- 
nuscrit du  chanoine  :  ce  calendrier  est  à  la  bibliothèque 
du  grand  séminaire  de  Bourges.  Un  savant  archéologue, 
qui  fait  partie  de  notre  Société,  m'a  affirmé  qu'il  y  avait 
dans  les  soubassements  de  la  collégiale  des  parties  d'an- 


Xl.«   SESSION,    A   GH.VTEAUROUX.  ''t'»0 

cienncs  constructions  qui  se  rapporteraient  à  la  date  assi- 
gnée à  la  fondalion  du  chapitre  par  M.  Barbier. 

Sur  les  débris  de  l'église  antérieure  à  l'an  mil,  on 
aurait  élevé,  à  la  fin  du  xii"  siècle,  l'église  actuelle,  lui 
des  plus  beaux  monuments  du  Bas-lierry. 

Nous  laissons  à  des  hommes  plus  compétents  que  nous 
le  soin  d'étudier  la  collégiale  de  ChâtiUon.  Il  y  a  matière 
à  une  monographie  intéressante. 

3"   Chapitre    de    Saint-Jacques    de   Neuvy-Saint-Sé- 

pulcre. 

L'église  de  Neuvy  est  classée,  par  la  commission  des 
monuments  historiques,  au  nombre  des  trente  églises 
dont  le  type  est  le  plus  intéressant,  surtout  au  point  de 
l'histoire  de  l'art  en  France. 

On  m'affirmait,  il  y  a  quelques  jours,  que  M.  le  curé 
de  Neuvy  venait  de  découvrir  une  crypte  qui  remonterait 
à  une  très-haute  antiquité.  Nouveau  monument  à  étu- 
dier. Du  reste,  de  savants  archéologues  affirment  qu'ils 
ont  découvert  dans  l'église  collégiale  des  débris  d'un 
monument  plus  ancien  que  celui  dont  nous  allons  donner 
la  description. 

La  rotonde  de  Neuvy  fut  fondée  vers  l'an  1045,  par 
Geoffroy,  vicomte  de  Bourges,  dans  un  fief  appartenant 
aux  princes  de  Déols. 

Quatre  chroniqueurs  du  temps  ont  pris  soin  de  remar- 
quer que  le  vicomte  avait  fait  bâtir  son  église,  ad  formam 
sancti  Sepulchri  lerosolimitani. 

Cette  église  est  de  forme  circulaire.  Il  existe  aussi  en 
Angleterre  des  églises  de  cette  forme,  et  le  nom  qu'elles 
portentencoreaujourd'hui,  «d'églises  du  Saint-Sépulcre», 
prouvent  que  l'intention  des  fondateurs  de  ces  monuments 
était,  en  Angleterre  comme  en  France,  d'imiter  l'église  du 
Saint-Sépulcre  de  Jérusalem. 


460       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

La  rotonde  de  Neuvy  n'est  malheureusement  pas  isolée 
sur  toutes  ses  laces  :  elle  se  soude  gauchement  à  une  nef 
allongée,  qui  se  termine  par  un  chevet  percé  de  trois  baies 
surmontées  d'une  rosace. 

Les  gros  murs  qui  enveloppent  la  partie  circulaire  sont 
d'une  épaisseur  extraordinaire,  d'ailleurs  assez  mal  bâtis. 
Dis  colonnes  au  nombre  de  onze,  disposées  en  cercle, 
forment  une  espèce  de  cella  avec  un  bas-côté  continu,  re- 
couvert d'une  seule  voûte,  sur  laquelle  règne  une  seconde 
galerie,  dont  le  périmètre  intérieur  est  marqué  par  des 
colonnes  correspondant  à  celles  du  rez-de-chaussée.  On 
monte  à  cette  galerie  par  un  escalier  dont  la  cage  se  pro- 
jette en  dehors  du  mur  extérieur.  Ce  qu'il  y  a  de  singulier, 
c'est  qu'il  a  dû  s'écouler  un  temps  assez  long  entre  la 
construction  du  rez-de-chaussée  et  la  construction  de 
l'étage  supérieur. 

Au  rez-de-chaussée,  une  rudesse  singulière,  une  igno- 
rance absolue  des  règles  de  l'art,  des  pierres  à  peine  dé- 
grossies, des  joints  énormes,  des  profils  barbares,  etc. 

A  l'étage  supérieur,  les  pierres  sont  taillées  et  appa- 
reillées, les  profils  dénotent  un  art  avancé,  et  si  l'on  fait 
attention  au  seul  chapiteau  sculpté  qui  existe  sur  l'une 
des  onze  colonnes,  on  verra  une  grande  dillérence  entre 
ce  chapiteau  et  ceux  du  bas. 

A  l'extérieur,  les  chapiteaux  de  l'étage  supérieur  sont 
ornés  d'oiseaux  et  d'animaux  fantastiques,  finement  trai- 
tés et  dans  le  style  caractéristique  de  l'époque  de  la  transi- 
tion. Il  est  donc  très-facile  de  discerner,  dans  l'édifice  que 
nous  décrivons,  les  constructions  du  xi"  siècle  de  celles 
du  xir. 

La  rotonde  de  Neuvy  ne  fut  jamais  achevée  ;  il  est 
même  difficile  de  savoir  comment  le  maître  de  l'œuvre 
entendait  terminer  son  monument.    11   est  à  croire,  ce- 


XL"   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  4.61 

pendant,  qu'un  cône  tronqué  devait  être  élevé  en  char- 
pente ou  en  maçonnerie  sur  le  cylindre  intérieur,  confor- 
mément à  la  disposition  adoptée  pour  la  couverture  du 
Saint-Sépulcre  de  Jérusalem;  mais  ce  projet  ne  fut  point 
exécuté,  ou  par  défaut  de  ressources,  ou  par  suite  de 
la  difficulté  d'élever  un  cône  sur  le  mince  tambour, 
percé  de  fenêtres,  qui  surmonte  la  galerie  du  premier 
étage. 

Tout  le  monde  sait,  en  Berry,  que  l'église  de  Neuvy 
était  déjà  en  très-grande  vénération  pendant  les  xi*  et  xir 
siècles  ;  mais  à  partir  du  xiii^  elle  attira  encore  un  plus 
grand  concours  de  pieux  fidèles  ;  voici  à  quelle  occasion, 
en  1257,  le  cardinal  Eudes,  l'ami  intime  de  saint  Louis 
et  de  Joinville,  né  à  Chàteauroux  dans  une  échoppe, 
«  voulant  donner  un  nouveau  lustre  à  l'église  de  Neuvy, 
située  non  dans  la  ville,  mais  bien  dans  le  pays  qui  l'avait 
vu  naître  »  (j'use  à  dessein  de  l'expression  dont  se  sert  le 
pieux  cardinal  dans  sa  lettre  qu'il  écrivit  au  chapitre  de 
Neuvy),  envoya  de  Viterhe,  après  son  retour  de  la  croisade 
de  saint  Louis,  où  il  avait  rempli  les  fonctions  de  légat  du 
Pape,  un  fragment  du  tombeau  de  Jésus-Christ  et  trois 
gouttes  du  sang  du  Sauveur,  recueillies  sur  le  Calvaire  et 
conservées  pendant  le  cours  des  siècles  avec  le  même  soin 
et  le  même  respect  que  les  fragments  de  la  vraie  croix.  On 
plaça  ces  reliques  si  précieuses  au  centre  de  la  rotonde, 
dans  un  petit  édicule  construit  à  l'imitation  du  tombeau 
où  avait  reposé  le  corps  du  Sauveur.  Cet  édicule,  où  l'on 
ne  pouvait  entrer  qu'en  se  baissant,  était  fermé  par  une 
porte  de  fer.  Cette  espèce  de  grotte  en  pierre  existait  encore 
en  1806,  époque  à  laquelle  un  curé  de  Neuvy  s'avisa  de  la 
faire  démolir,  sous  prétexte  qu'elle  masquait  l'autel  de  la 
nef  accolée  si  maladroitement  à  la  rotonde. 

Cette  rotonde,  classée  au  nombre  des  monuments  his- 


-4G2       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

toriques,  a  été  restaurée  aux  Irais  de  l'État,  sous  la  direc- 
tion de  M.  de  Mériudol. 

4"  Chapitre  de  Saint-Laurian  deVatan. 

De  l'examen  d'anciens  manuscrits  concernant  la  ville 
de  Vatan,  il  résulte  que  les  comtes  de  Blois  ont  toujours 
eu  le  titre  de  fondateurs  de  la  collégiale  de  Saint-Laurian, 
à  l'exclusion  des  seigneurs  du  lief. 

Quand  le  comté  de  Blois  fut  réuni  à  la  couronne  de 
France,  le  chapitre  fut  autorisé  à  regarder  nos  rois  comme 
ses  patrons  et  ses  protecteurs. 

Les  comtes  de  Blois  n'apparaissant  dans  l'histoire  qu'au 
IX*  siècle,  et  le  chapitre  lui-même  ne  commençant  à  être 
mentionné  dans  les  anciens  actes  qu'au  dixième,  c'est 
assez  dire  que  la  fondation  de  la  collégiale  de  Saint-Lau- 
rian se  place  entre  ces  deux  dates  extrêmes. 

On  croit  que  l'église  actuelle  est  du  xi"  siècle  ;  mais  un 
fait  certain,  c'est  que  la  tour  carrée  du  clocher  date  de 
l'époque  de  la  transition  :  l'archéologue  ne  peut  pas  en 
douter,  puisque  les  baies  sont  en  plein  cintre,  et  que  les 
arcatures  qui  décorent  cette  partie  de  l'édifice  sont  des 
arcs   en  tiers-point. 

L'abside  à  trois  pans  coupés  fut  bâtie,  en  1537,  aux 
frais  d'un  doyen  du  chapitre,  nommé  Dubreuil. 

Des  peintures  murales,  assez  grossières,  représentent 
sur  les  lambris  de  la  voûte  en  bois  les  différentes  scènes 
du  martyre  de  saint  Laurian.  Ces  sujets  historiques  sont 
accolés  aux  armoiries  des  rois  de  France. 

Au-dessus  du  maitre-autel,  le  visiteur  admire  un  cibo- 
rium,  une  sorte  de  dais  ou  de  baldaquin,  soutenu  par 
quatre  colonnes  en  bois  sculpté.  Si  je  ne  me  trompe,  ce 
ciborium  est  une  œuvre  qui  a  une  grande  valeur,  non- 
seulement  comme  objet  rare,  mais  surtout  comme  raqr- 
ceau  de  sculpture. 


XI/'   SESSION,    A    CIIATEAUROUX,  403 

5°  Chapitre  de  Saint-Sylvain  de  Levroux. 

D'après  une  tradition  remontant  au  berceau  du  chris- 
tianisme, le  tombeau  de  saint  Sylvain  de  Levroux  serait 
celui  du  Zachée  de  l'Évangile  :  saint  Martin  avait  tant  de 
dévotion  pour  ce  tombeau  que,  suivant  Péan  Gàtineau, 
il  y  venait  chaque  année  en  pèlerinage. 

Jusqu'au  xiii''  siècle,  le  corps  de  saint  Sylvain  demeura 
dans  la  petite  crypte  oîi  il  avait  été  inhumé,;  mais  à  cette 
époque  l'affluence  des  pèlerins  devint  si  grande  au  tom- 
beau du  saint,  qu'il  fallut  songer  à  transférer  son  corps 
dans  une  crypte  plus  vaste. 

La  nouvelle  crypte  a  trois  absides;  on  y  descend,  de 
l'église  supérieure,  par  deux  escaliers  très-larges;  aujour- 
d'hui elle  est  veuve  de  ses  reliques.  Depuis  que  le  corps  de 
saint  Sylvain  a  été  transféré  à  la  Gelle-Bruère;  il  ne  reste 
à  Levroux  que  son  chef. 

Au-dessus  de  cette  crypte,  l'antiquaire'conteraple,  avec 
un  mélange  de  bonheur  et  d'admiration,  un  monument 
qui  serait  du  plus  bel  effet  s'il  était  restauré  par  une  main 
habile. 

Nous  espérons  que  la  commission  des  monuments  his- 
toriques se  décidera  tôt  ou  tard  à  nous  rendre  dans  toute 
sa  splendeur  une  perle  antique,  que  nos  pères  regardaient 
comme  une  seconde  cathédrale  de  Bourges,  tant  ils  en 
avaient  une  haute  idée. 

L'église  de  Levroux  est  de  l'époque  de  la  transition.  Au 
jugement  d'un  grand  nombre  d'amatenrs  d'antiquités, 
son  abside  est  une  des  plus  belles  choses  que  nous  ayons 
dans  le  Bas-Berry;  pour  moi,  chaque  fois  que  je  la  revois, 
je  ne  puis  me  lasser  de  Tadmirer. 

L^abside  de  l'église  de  Levroux  a  été  très-heureusement 
reproduite,  trait  pour  trait,  dans  l'église  de  Vandœuvres. 

Que  dirons-nous  des  stalles  de  l'église  de  Levroux? 


4G4       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Jusqu'ici  personne  n'en  a  parlé. 

Elles  ont  été  placées  dans  le  chœur  du  chapitre,  au 
temps  où  les  la  Tour  d'Auvergne  étaient  seigneurs  de 
Levroux;  la  preuve,  c'est  que  les  armes  des  la  Tour 
sont  sculptées  sur  la  miséricorde  de  la  stalle  où  se  plaçait 
le  seigneur  du  lieu,  lorsqu'il  assistait  aux  offices  des  cha- 
noines. 

Nous  ne  parlerons  pas  des  obscena  ;  nous  laissons 
à  de  plus  savants  le  soin  de  les  interpréter. 

Los  stalles  de  Levroux  doivent  remonter  à  l'époque  de 
la  Renaissance. 

6°  Chapitre  de  Saint-Germain  de  la  Châtre. 

Un  prince  de  Déols,  Ebbes  II,  qui  vivait  sous  les  rois 
Louis  VI  et  Louis  VII,  fonda  le  chapitre  de  Saint-Germain 
de  la  Châtre.  Ce  pieux  seigneur  mourut  en  1160;  c'est 
lui  sans  doute  qui  fit  construire  la  nef  et  la  tour  carrée 
qui  est  au-dessus  du  porche  de  la  collégiale  de  Saint- 
Germain.  Celte  tour  est  d'un  bon  style;  il  est  fâcheux 
qu'elle  soit  couronnée  par  une  toiture  qui  ne  rappelle  que 
trop  que  le  niveau  égalitaire  de  93  a  passé  par  là. 

Elle  est  basse  et  ressemble  à  une  poivrière. 

Le  chœur  de  l'église  de  la  Châtre,  ajouré,  comnje 
celui  de  l'église  de  Saint-Cyr  d'Issoudun,  par  une  grande 
fenêtre  divisée  par  trois  meneaux,  appartient  à  la  période 
du  style  ogival. 

Les  armoiries  des  Chauvigny,  qui  ont  succédé  aux 
princes  de  Déols,  sont  aux  clefs  des  voûtes  d'arête  du 
chœur  de  la  collégiale  ;  preuve  qu'à  l'exemple  de  leurs 
ancêtres  ils  ont  fourni  les  sommes  nécessaires  pour  bâtir 
ce  chœur,  qui  fait  d'autant  plus  d'effet  qu'il  est  précédé 
de  deux  nefs  et  d'un  rang  de  chapelles  dont  je  ne  veux 
pas  parler  pour  n'en  pas  médire. 

La  belle  verrière  du  chevet,  en  partie  restaurée,  pro- 


XI"    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  -ifi:) 

(luira  un  effet  splcndido  lorsque  sa  restauralion  sera 
complète, 

7°  Chapitre  de  Sainte- Ménéhould  de  Palludello  [Pal- 
Inmi).  —  Sainte  Ménéchilde,  vulgairement  nommée  sainte 
Ménéhould,  vécut  dans  un  ermitage  au  diocèse  de  Chà- 
lons-sur-Marne,  près  de  la  ville  d'Auxuenne,  qui  porte 
aujourd'hui  son  nom. 

En  1238,  un  seigneur  de  Palluau,  qui  l'était  en  même 
temps  de  Montrésor,  voulut  fonder  un  collège  de  cha- 
noines, sous  le  vocable  de  sainte  Ménéchilde,  avant  de  se 
revêtir  des  insignes  de  Jésus  crucifié  et  de  faire  le  voyage 
d'outre  mer  :  Nobilis  vir  miles  volens  sequi  insignia  (Jruci- 
fixi,  iter  faciens  ultra  mare. 

Le  chapitre  qu'il  établit  se  composait  d'un  prieur,  de 
quatre  chanoines  et  de  six  vicaires  ;  il  les  installa  dans 
une  église  romane,  dont  la  nef  subsiste  encore.  Sur  les 
parois  des  murs  on  voit,  de  distance  en  distance,  des 
demi-arcatures. 

Au  xvi"  siècle,  le  chœur  de  la  vieille  église  disparut  pour 
faire  place  à  un  autre  chœur,  terminé  par  une  abside  à 
cinq  pans  coupés. 

L'abside  de  la  collégiale  de  Palluau,  ajourée  par  cinq 
grandes  fenêtres,  divisées  en  plusieurs  compartiments,  et 
qui  se  terminent  à  la  naissance  de  l'arcade  par  des  roses  à 
quatre  feuilles,  est  aussi  belle  dans  son  genre  que  l'abside 
romane  de  Saint-Sylvain  de  Levroux. 

A  la  tin  du  xV  siècle,  le  fief  de  Palluau  devint  la  pro- 
priété des  Tranchelyon,  seigneurs  de  Touraine.  Ce  fut 
l'un  d'eux,  Charles  de  Tranchelyon,  qui  fit  édifier  dans 
la  collégiale  de  madame  Sainte-Ménéhould  la  belle  cha- 
pelle qui  est  à  gauche.  Cette  chapelle  était  fermée  par  de 
belles  boiseries  sculptées  au  chilfre  d'Henri  de  Buade, 
comte  de  Frontenac;  qui  donc  a  eu  la  lâcheuse  idée  de  les  en- 

XL'   SESSION.  30 


■466  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

lever  de  leur  place,  pour  les  suspendre  aux  parois  de  la 
muraille? 

8°  Chapitre  de  Sainte-Marie- Madeleine  de  Mézièi'es- 
en-Brenne.  —  La  fondation  de  la  collégiale  de  Mézières- 
en-Brenne  eut  lieu  en  1339,  par  Alix  de  Brabant,  dame 
de  Mézières-en-Brenne,  d'Arcots-en-Barbant  et  de  l'Isle- 
Savary. 

Cette  pieuse  dame  épousa  Jean  d'Harcourt,  vicomte  de 
Châtellerault. 

Désirant  établir  un  chapitre  pour  faire  célébrer  aux 
heures  de  la  nuit  et  à  chaque  heure  du  jour  l'office  ca- 
nonial, Alix  de  Brabant  s'adressa  au  pape  Benoît  XII,  et 
le  pria  de  lui  accorder  des  bulles  à  cet  effet. 

La  bulle  qui  lui  fut  adressée  porte  que  la  collégiale 
sera  dédiée  à  la  très-sainte  Trinité  et  au  très-saint  Sacre- 
ment de  l'autel,  sous  l'invocation  de  la  sainte  Vierge,  de 
saint  Michel,  des  saints  apôtres  Pierre  et  Paul,  et  de  sainte 
Marie-Madeleine. 

La  collégiale  de  Mézières  porte  le  cachet  de  son  époque. 
La  nef  est  précédée  d'un  porche,  ouvert  d'un  seul  côté. 
Sous  ce  porche,  une  grande  baie,  divisée  en  deux  vanteaux 
par  un  pilier  en  pierre,  comme  aux  portiques  de  Saint- 
Étienne  de  Bourges,  est  surmontée  d'un  tympan,  sur 
lequel  on  voyait  autrefois  un  groupe  de  personnages  en 
relief. 

Ces  fines  et  délicates  sculptures  ont  été  brisées  par  le 
marteau  du  vandalisme  révolutionnaire;  il  n'en  reste 
plus  aujourd'hui  que  des  traces  informes. 


XI."    SKSSION,    A    OHATKAUllOL'X.  4(57 


3«  SÉRIE.  —ÉGLISES  BATIES  PAR  LES  SEIGNEURS 
FÉODAUX. 

I  °  Les  archevêques  de  Bourges  considérés  comme 

FONDATEURS   ET   PATRONS. 

Presque  toutes  les  églises  du  Bas-Berry  ont  été  fondées 
à  l'époque  de  la  grande  puissance  des  ordres  monastiques; 
l'ordre  monastique  le  plus  puissant  et  le  plus  célèbre 
était  sans  contredit  celui  de  Cluny,  ce  vaste  foyer  de  lu- 
mières, qui  jetta  un  si  vif  éclat  que  M.  Violet-le-Duc  a  pu 
dire  avec  raison  :  «  Rayez  Cluny  du  xi^  siècle,  et  l'on  ne 
trouve  plus  guère  que  ténèbres  et  ignorance  grossière.  » 

Cluny,  cette  école  d'où  partaient  des  légions  organisées 
de  moines  qui  bâtissaient  des  églises  et  des  monastères 
de  leurs  propres  mains,  suivant  des  types  déterminés, 
avait  deux  centres  dans  le  Bas-Berry,  l'abbaye  de  Déols  et 
le  grand  prieuré  de  Rufec. 

Nos  archevêques  de  Bourges  avaient  une  prédilection 
particulière  pour  l'abbaye  de  Déols;  ils  en  donnèrent  des 
preuves  en  plus  d'une  circonstance,  puisque  nous  avons 
encore  les  actes  originaux  par  lesquels  ils  font  à  Notre- 
Dame  de  Déols  le  généreux  abandon  des  églises  qu'ils 
faisaient  bâtir  à  leurs  frais. 

Quelquefois,  cependant,  ils  conservèrent,  pour  eux  et 
leurs  successeurs,  certaines  églises  dont  ils  eurent  jusqu'en 
1791,  le  patronage  immédiat.  Ces  églises  sont  au  nombre 
d'environ  cinquante,  dans  un  diocèse  qui  comptait  plus 
de  huit  cents  paroisses.  Elles  sont  de  petite  dimension,  et 
leur  style  n'olTre  rien  de  très-reinarquable. 


•468  CONGRÈS  AUCHÉOLOGIQlE   DE    FHAM'.E. 

Je  fais  cependant  trois  exceptions  : 

1»  Montgivray.  —  A  Montgivray,  église  du  patronage 
immédiat  de  nos  archevêques,  on  voit  encore  aujourd'tiui 
des  chapiteaux  à  figures  bizarres,  mais  très-curieuses  au 
point  de  vue  de  l'art. 

2"  Chabris.  —  Un  de  nos  évéques  mérovingiens,  saint 
Oustrille,  possédait  àChabris,  une  villa  nommée  Estivales. 
Ses  successeurs,  qui  aimaient  à  aller  s'y  reposer  des  fati- 
gues de  leur  laborieux  ministère,  près  du  tombeau  de 
l'illustre  solitaire  saint  Phalier,  bâtirent  successivement 
plusieurs  églises  au-dessus  du  tombeau  de  ce  saint. 

De  l'église  primitive  il  reste  des  fragments  de  sculptures 
et  d'appareils  qui  ont  été  incrustés  dans  l'éditice  du 
XII*  siècle. 

Ces  fragments,  une  des  richesses  artistiques  du  Bas- 
Berry,  sont  d'autant  plus  précieux,  qu'ils  sont  comme  le 
point  de  départ  de  l'histoire  des  arts  dans  notre  pays  (1). 

3°  Sacierges-Saint-Germain.  —  A  Sacierges,  un  pieux 
ermite  s'était  caché  au  milieu  d'une  épaisse  foret,  pour  y 
passer  sa  vie  loin  du  regard  des  hommes. 

Sa  sainteté  éminente  eut  un  si  grand  retentissement 
dans  toute  la  contrée,  qu'il  fut  élu  évéque  de  Bourges 
vers  l'an  830;  il  se  nommait  Aigulphus. 

Ce  saint  évêque  mourut  en  cours  de  visite,  dans  un 
petit  bourg  contigu  à  Sacierges;  pendant  longtemps  son 
corps  a  reposé  dans  ce  village,  qui  porte  aujourd'hui  son 
nom  :  Sainl-Oùt. 


(1)  Voir  le  nicnioire  de  M.  Gaillard  sur  l'église  de  Cliabris, 
lu  à  la  dernière  séance  du  Congrès. 


XL*   SESSION,    A    r.HATEAUnOTiX.  469 

A  l'époquo  romane,  nos  archevêques  bàtinait  une  belle 
église  dans  le  lieu  où  un  de  leurs  saints  prédécesseurs 
avait  mené  une  vie  si  pauvre  qu'il  n'eut  rien  à  offrir 
qu'un  verre  de  lait  de  biche  aux  envoyés  qui  lui  appor- 
tèrent la  nouvelle  qu'il  était  élu  par  le  chapitre  pour 
occuper  le  siège  épiscopal  de  Bourges. 

Il  y  a  deux  remarques  à  faire  sur  l'église  de  Sacierges- 
Saint-Germain  :  la  première,  c'est  que  les  bras  du  tran- 
sept ne  sont  marqués  que  par  un  mur  en  retraite  ;  la  se- 
conde, c'est  qu'à  la  porte  d'entrée  les  chapiteaux  des 
colonnettes  sont  alternativement  de  style  latin  et  de  style 
byzantin.  Le  maître  de  l'œuvre  a  certainement  voulu 
mettre  ainsi  en  regard  les  arts  de  Byzance  et  ceux  de  la 
Rome  antique. 


2°  Les  Templiers  et  leurs  successeurs,  les  chevaliers 
DE  Malte. 

Les  Templiers  et  leurs  successeurs,  les  chevaliers  de 
Malte,  n'ont  rien  laissé  parmi  nous  de  remarquable,  si  ce 
n'est  la  chapelle  de  la  commanderie  de  Plaincourault. 

Plaincourault.  —  L'église  et  le  château  construits  par 
les  Templiers  appartenaient,  avant  la  révolution,  aux 
chevaliers  de  Malte. 

Dans  cette  église  il  y  a  trois  autels  en  pierre,  avec  des 
retables  de  forme  antique,  œuvres  d'art  dont  il  ne  reste 
plus  de  spécimen  dans  le  Bas-Berry. 

L'abside  est  décorée  de  peintures  murales  ;  elles  repré- 
sentent des  scènes  bibliques,  la  création  et  la  chute  de 
l'homme  primitif,  les  châtiments  et  les  peines  qui  lui 
furent  infligés  pour  le  punir  de  sa  désobéissance. 


-iTO  CONGRÈS    ARCIIÉOLOr.IQL'E    DE    FRVNf.E. 

Mais  ce  qu'il  y  a  de  plus  curieux,  ce  sont  doux  pein- 
tures qui  décorent  un  des  côtés  de  la  nef. 

C'est,  d'abord,  un  renard  jouant  d'un  instrument  de 
musique. 

J'ai  fait  le  voyage  exprès,  et  uniquement  dans  le  but 
de  juger  par  moi-même  s'il  était  revêtu  d'une  robe  de 
moine,  comme  on  s'était  plu  à  le  dire. 

Le  renard  est  bien  un  véritable  renard  ;  ce  n'est  pas  un 
moine,  je  puis  l'affirmer. 

Il  fait  danser  les  poules. 

Sur  le  second  plan  on  voit  une  femme  couverte  de 
riches  draperies. 

Le  renard  n'aurait-il  pas  pour  but  de  séduire  la  noble 
châtelaine  et  de  l'enlacer  dans  ses  filets?  je  le  croirais 
volontiers.  Le  second  sujet  est  une  peinture  qui  représente 
saint  Éloi. 

J'ai  comparé  la  peinture  murale  de  l'église  de  Plain- 
courault  avec  celle  que  P.  Arthur  Martin  avait  déjà 
publiée,  d'après  un  vitrail  allemand. 

Dans  la  verrière  allemande,  saint  Éloi  figure  comme 
évêque  et  comme  maréchal  ferrant. 

Comme  évêque,  il  est  revêtu  d'un  chappe  splendide, 
enrichie  des  plus  beaux  ornements. 

Comme  maréchal  ferrant,  il  porte  dans  sa  main  droite 
un  marteau,  et  dans  sa  gauche  une  enclume. 

Un  jeune  enfant  présente  à  saint  Éloi  un  cheval  si 
fougiïeux,  qu'il  faut  le  placer  au  milieu  de  fortes  barrières 
pour  le  contenir;  l'animal  fait  tant  de  sauts  et  de  bonds 
qu'on  ne  peut  le  ferrer  qu'après  lui  avoir  coupé  le  pied. 

La  peinture  du  Berry  est  bien  plus  complète  et  bien 
plus  frappante. 

Saint  Éloi  n'est  pas  vêtu  en  évêque,  mais  en  homme 
de  métier,  qui  se  dispose  à  ferrer  un  cheval. 


XL'    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  471 

Le  cheval  résiste  et  se  cabre;  alors  intervient  un  jeune 
homme.  Ce  jeune  compagnon  trouve  un  moyen  très-ingé- 
nieux pour  terrer  le  cheval.  Il  lui  coupe  le  pied,  le  pose 
sur  l'enclume,  et  il  le  terre  sans  difficulté. 

11  faut  voir  la  figure  ébahie  de  saint  Ëloi,  Il  lève  ses 
regards  vers  le  ciel,  il  tend  ses  bras  vers  le  jeune  homme, 
il  semble  qu'il  veuille  l'embrasser:  on  pense  que  le  jeune 
homme  est  Notre-Scigneur  Jésus-Christ  qui  vient,  en  per- 
sonne, donner  à  Eloi  une  leçon  d'humilité.  Suivant  une 
antique  légende,  Éloi  avait  fait  placer  sur  l'entrée  de  son 
atelier  cette  prétentieuse  enseigne:  Au  maître  des  maîtres. 
Jésus-Christ  tient  à  lui  enseigner  qu'il  y  a,  au  ciel,  un 
maître  plus  grand  que  lui. 

3°  Les  sires  de  Naillac,  seigneurs  de  Gargilesse. 

J'ai  hâte  d'arriver  à  la  description  d'une  des  plus  belles 
églises  des  bords  de  la  Creuse. 

Gargilesse.  —  Cette  église  est  continuellement  visitée 
par  des  touristes  et  des  archéologues  (1).  Elle  est  cachée 
au  fond  d'un  entonnoir  de  collines  rocheuses,  où  l'on 
arrive  aujourd'hui  par  une  route  qui  côtoie  un  précipice. 

La  scène  qui  se  déroule  devant  vous  n'est  plus  aussi 
sauvage  qu'autrefois.  Elle  a  beaucoup  perdu  de  son 
charme,  depuis  qu'on  a  fait  disparaître  les  petits  sentiers 
rocailleux,  qui  n'étaient  accessibles  qu'aux  mulets  et  aux 
piétons. 

C'est  un  petit  chef-d'œuvre  que  l'église  des  sires  de 
Naillac. 

Elle  date  de  l'époque  de  transition.  Elle  n'est  pas  ho- 

(1  )  A  notre  dernier  voyage,  nous  y  avons  rencontré  des  Anglais. 


17-2  CONGRÈS    ARCHÉOLOGIQUE    HE    FRANCE. 

mogèiie  de  style ,  tant  s'en  faut.  A  chaque  pas  que  fait 
l'archéologue,  il  rencontre  le  style  roman  et  le  style  ogival 
.iccolés  l'un  à  l'autre^,  mais  sans  se  marier  ensemble. 

Les  trois  arcatures  qui  décorent  l'extrémité  de  chaque 
bras  du  transept  sont  du  roman  de  la  plus  belle  époque. 
Faites  un  pas,  vous  entrez  dans  les  absidioles  ;  elles  sont 
aussi  décorées  d'arcatures;  mais  le  plein  cintre  a  disparu, 
pour  faire  place  à  l'ogive. 

L'église  de  Notre-Dame-de-Gargilesse  est  à  trois  nefs. 
Les  deux  nefs  latérales,  étroites  à  leur  naissance,  vont 
en  s'élargissant  à  l'entrée  du  chœur,  pour  former  les  deux 
bras  de  la  croix. 

Au  point  d'intersection  s'élève  la  tour  carrée  du  clocher. 
A  l'intérieur,  la  voûte,  qui  repose  sur  les  quatre  piliers  de 
centre,  forme  une  coupole,  avec  une  ouverture  circu- 
laire, ornée  au  sommet  de  feuilles  de  trèfle,  découpées 
avec  grâce. 

L'abside  principale  est  à  cinq  pans;  les  deux  absidioles, 
de  moindre  dimension,  n'en  ont  que  trois. 

Toutes  les  parties  de  l'église,  nefs,  transept  et  absides, 
sont  ajourées  par  des  baies,  dont  les  archivoltes  toriques 
sont  soutenues  par  plusieurs  rangs  de  colonnettes,  décorées 
de  gracieux  chapiteaux. 

Le  maître  de  l'œuvre  a  adopté  pour  la  construction  ilc 
cette  église  un  appareil  en  pierres  de  taille  qui  a  dû  en- 
traîner Hugues  II  de  Naillac  dans  d'immenses  dépenses  : 
toutes  ces  pierres,  venues  de  loin,  ont  été  apportées  à  pied 
d'œuvre,  à  dos  de  mulets.  Si  je  fais  cette  remarque,  c'est 
pour  faire  ressortir  surtout  la  piété  et  la  générosité  de 
celui  qui  n'épargna  rien  pour  élever  au  milieu  de  rochers 
presque  inaccessibles  un  beau  monument  à  l'honneur  et 
à  la  gloire  de  Notre-Dame. 

Si  mes  conjectures  ne  sont  pas  dénuées  de  fondement. 


XL*   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  473 

Hugues  II  ne  fit  qu'exécuter  la  pensée  de  son  père,  qui 
reçut  l'investiture  dulief  de  Gargilesseen  H87,  à  l'époque 
du  siège  de  la  ville  de  Déols  par  Philippe-Auguste,  sans 
doute  eu  récompense  de  sa  valeur  et  de  sa  fidélité  à  la 
cause  iVançaise. 

Hugues  I  de  Naillac  aura  été  témoin,  sans  doute,  du 
miracle  qui  a  rendu  ce  siège  à  jamais  mémorable,  et,  de 
retour  chez  lui,  il  aura  voulu  bâtir  au  chef-lieu  de  son 
fief,  dans  l'enceinte  de  son  château,  une  église  en  mé- 
moire de  ce  grand  événement. 

Son  iils  et  successeur  a  exécuté  sa  pensée,  et,  pour  im- 
planter de  plus  en  plus  dans  le  cœur  de  ses  hommes  de 
Gargilesse  et  du  Pin  la  dévotion  à  Marie,  il  a  appelé, 
pour  desservir  sa  magnifique  église,  les  moines  de  Déols, 
que  j'appellerais  volontiers  les  chevaliers  de  Notre-Dame, 
tant  ils  étaient  dévoués  à  son  culte. 

Je  remarque  dans  l'église  de  Gargilesse  une  chose  qui 
en  fait  dans  notre  pays  un  monument  hors  ligne  :  c'est  le 
grand  nombre  de  ses  sculptures  et  la  finesse  des  détails 
de  son  ornementation.  Je  fais  cependant  une  réserve  pour 
les  figurines  ;  elles  me  paraissent  d'une  facture  médiocre. 
J'ai  compté  dans  l'intérieur  de  l'église  quarante  grands 
chapiteaux,  vingt-quatre  dans  le  chœur  et  la  grande  nef, 
et  seize  dans  les  nefs  latérales.  Il  y  a  en  outre  trente  cha- 
piteaux de  moindre  dimension. 

Ces  trente  chapiteaux  sont  presque  tous  historiés. 
Dans  le  chœur,  ce  sont  vingt-quatre  vieillards  tenant 
tous  en  main  des  instruments  de  musique,  disposés   par 
groupes  de  trois  dans  les  corbeilles  des  chapiteaux;   ils 
habitent  un  palais  richement  décoré. 

La  pensée  de  l'artiste  est  facile  à  saisir  :  le  palais  est  le 
ciel,  les  vieillards  sont  les  grands  Prophètes  et  les 
Apôtres.  Les  uns  et  les  autres   sont  en  face  de  Jésus- 


474       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  HE  FRANCE. 

Christ,    assis    sur    un    trône;    il   bénit;   deux   anges 
l'adorent. 

Près  du  trône  du  Fils  on  aperçoit  la  Mère.  Elle  porte 
en  tête  une  riche  couronne,  et  montre,  de  la  main  et  du 
regard,  les  instruments  de  la  Passion  du  Sauveur  des 
hommes. 

Cette  vieille  peinture  murale  est  grossièrement  res- 
taurée ;  mais  c'est  un  livre  ouvert  où  le  fidèle  peut  lire 
ce  qu'est  Jésus-Christ,  ce  qu'est  Marie,  et  comment  l'un 
et  l'autre  sont  arrivés  à  la  gloire. 

Oportuit  Christum  pati,  et  ita  intrare  in  gloriam  suam. 
Dans  l'abside  principale  est  dressé  l'autel  majeur. 
Comme  l'explique  Durand  de  Mende  dans  son  Rational,  le 
maître-autel  représente  Jésus-Christ  :  donc  à  la  droite  de 
Jésus-Christ,  c'est-à-dire  à  la  place  d'honneur,  est  le  petit 
sanctuaire  de  la  Reine  du  lieu.  Les  chapiteaux  des  colon- 
nettes  représentent  les  difîérents  mystères  de  sa  vie,  à 
commencer  par  celui  de  l'Annonciation. 

A  gauche  de  Jésus-Christ  est  une  autre  petite  chapelle  ; 
elle  était  jadis  dédiée  à  saint  François  d'Assise. 

Toutes  les  sculptures  de  cette  chapelle  sont  symboliques; 
il  nous  a  semblé  qu'elles  figuraient  les  diverses  phases  de 
sa  vie  chrétienne. 

Il  est  beau  de  voir  sur  un  des  chapiteaux  le  soldat 
chrétien  qui  oppose  le  bouclier  de  la  foi  à  un  animal 
furieux  qui  veut  s'élancer  sur  lui. 

Ce  soldai  chrétien  triomphe  de  ses  ennemis,  et  bientôt 
on  le  voit  entrer  en  vainqueur  dans  le  séjour  de  la  gloire. 
Descendons  maintenant  dans  la  vaste  crypte  à  trois  nefs. 
C'est  dans  cette  crypte  que  se  trouve,  en  arrière  du 
maître-autel,  une  statue  de  la  Vierge  aussi  antique  que 
l'église.  Si  on  ne  se  hâte  pas  de  restaurer  cette  statue,  elle 
tombera  bientôt  en  poussière.  Ce  serait  une  grande  perte  : 


XI."    SESSION.    A    GIl.VTEAUROUX.  ♦".') 

à  tous  les  points  de  vue,  l'antiquaire  aime  à  la  considé- 
rer, et  les  pieux  fidèles  se  plaisent  à  prier  devant  une 
image  qui  leur  rappelle  le  souvenir  de  la  foi  et  de  la  piété 
de  leurs  ancêtres. 

A  la  voûte  de  l'abside  principale,  l'artiste  a  peint  un 
sujet  qui  accentue  encore  mieux  que  celui  de  l'abside  de 
l'église  supérieure,  le  but  spécial  que  doit  se  proposer  le 
pèlerin  qui  va  en  dévotion  à  Gargilesse. 

Jésus  et  Marie  déroulent  un  grand  voile  qu'ils  tiennent 
en  main,  et  sur  lequel  sont  étalés  tous  les  instruments  de 
la  Passion  :  la  croix,  la  couronne  d'épines,  les  clous,  le 
marteau,  etc.  etc. 

Est-il  possible  d'exprimer  d'nne  manière  plus  frappante, 
que  le  chemin  qui  conduit  au  ciel  est  la  voie  royale  de  la 
croix? 

Le  champ  est  semé  d'un  chiffre  en  lettres  gothiques 
surmontées  d'une  croix,  que  saint  Bernardin  de  Sienne  et 
son  fidèle  disciple,  Jean  de  Capistran,  ont  mis  en  grand 
honneur  dans  toute  l'Église.  Ce  chiffre,  que  tout  le  monde 
connaît,  signifie  que  :  Jésus  a  sauvé  le  monde  par  la  croix. 
Pouvait-on  donner  au  peuple  un  enseignement  plus  utile? 

Sur  le  grand  mur  qui  fait  face  au  maitre-autel  de  la 
crypte,  on  découvre  encore  des  traces  d'une  peinture  à 
demi  effacée  :  c'est  une  belle  fresque  représentant  Jésus 
mourant  sur  le  Calvaire;  autour  de  Jésus  en  croix, 
des  anges  en  pied  portent  les  instruments  de  la  Passion. 

Nous  ne  dirons  rien  de  l'absidiole  de  gauche,  si  ce  n'est 
que  des  infiltrations  ont  détruit  une  Danse  macabre  qui  y 
était  figurée. 

L'absidiole  de  droite  est  consacré  au  culte  du  saint  le 
plus  populaire  du  moyen  âge. 

On  reconnaît  sans  peine  les  traits  les  plus  saillants  de 
la  vie  de  saint  François  d'Assise.  Je  n'en  citerai  qu'un 


476       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

seul  ;  il  est  représenté  d'une  manière  si  étrange  qu'il  mérite 
attention. 

Jésus  apparut  un  jour  à  François  sur  une  table  en 
pierre  où  le  saint  avait  coutume  de  manger. 

Quand  la  vision  eut  disparu,  saint  François  prit  de 
l'huile,  et  à  l'exemple  de  Jacob  il  consacra  au  Seigneur 
cette  table,  en  prononçant  ces  paroles  :  «  C'est  ici  l'autel 
de  Dieu.  » 

Croirait-on  que  l'artiste  a  costumé  en  pi^être  et  en  pape 
saint  François  d'Assise? 

Sa  tiare  est  sur  l'autel,  ainsi  que  le  vase  d'huile  sainte. 

Outre  la  figure  de  saint  François  d'Assise,  je  vois  deux 
autres  Franciscains.  Le  premier  est  Jean  de  Capistran  ;  il 
porte  une  planchette  sur  laquelle  est  écrit,  non  plus  en 
lettres  gothiques  comme  dans  l'abside  principale,  mais  en 
lettres  du  temps,  le  monogramme  du  Christ. 

La  seconde  figure  est  celle  d'un  évêque  franciscain.  Je 
suis  porté  à  croire  que  cet  évêque  franciscain  est  un  des- 
cendant des  sires  de  Naillac,  et  que  c'est  ce  pieux  person- 
nage qui  a  fait  peindre  sur  les  voûtes  et  les  murs  de  la 
crypte  les  traits  les  plus  saillants  de  la  vie  de  saint  Fran- 
çois d'Assise,  le  patron  de  son  ordre. 

Si  nous  remontons  dans  l'église  supérieure,  nous 
verrons,  près  d'un  des  deux  escaliers,  un  tombeau  sur 
lequel  est  couchée  la  statue  en  relief  de  Guillaume  de 
Naillac  (i). 

Comme  son  père,  Guillaume  se  distingua  par  une 
grande  piété;  il  prit  à  cœur  d'honorer  Marie  dans  ses 
serviteurs,  non-seulement  en  paroles  et  en  sentiments, 
mais  en  œuvres  et  en  libéralités. 

(I)  Ce  tombeau  est  décrit  par  M.  de  Caumont  dans  son 
Bulletin  monumental  et  dans  son  Abécédaire  d'Archéologie. 


XI.'   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  477 

Il  fut  l'insigne  bienfaiteur  de  l'église  de  Gargilesse  et 
des  religieux  qui  la  desservaient. 

Touchés  de  tant  de  bontés,  les  moines  se  déterminèrent 
sans  doute  à  le  faire  inhumer  dans  leur  église.  On  lui 
érigea  un  tombeau  où  sont  représentés  deux  anges,  l'en- 
censoir à  la  main  ;  il  est  le  seul  de  cette  famille  qui  ait  reçu 
cet  honneur. 

Jusqu'ici  nous  n^avons  rien  dit  des  sculptures  de  l'exté- 
rieur de  l'église  de  Gargilesse. 

A  l'extérieur,  tout  est  artistique,  ornements  et  figures. 

Nous  sommes  restés  longtemps  en  admiration  devant 
des  modillons  qui  surmontent  la  porte  latérale. 

Ces  modillons  représentent  d'une  manière  saisissante 
les  sept  péchés  capitaux. 

Bacchus,  avec  son  tonneau,  est  le  symbole  de  l'ivro- 
gnerie; un  bouc,  le  symbole  de  l'impureté;  une  figure  de 
femme,  à  cheveux  hérissés,  inspire  l'horreur  de  la  colère; 
la  gourmandise  est  symbolisée  par  un  homme  qui  ouvre  la 
bouche  d'une  manière  hideuse,  et  qui  mange  avec  l'avidité 
et  la  vérocité  d'un  animal. 

Deux  des  anciens  modillons  ont  été  remplacés,  il  y  a 
quelques  années,  par  des  pierres  qui  ne  sont  que  layées, 
de  sorte  que  les  symboles  des  péchés  capitaux  ne  sont 
plus  au  complet. 

5*  Les  seigneurs  de  Lourdoueix-Saint-Michel. 

Avec  les  Valois  s'ouvre  cette  guerre  implacable  entre 
la  France  et  l'Angleterre  dont  le  Berry  fut  plus  d'une  fois 
le  théâtre.  Nous  pensons  que  ce  fut  pendant  cette  guerre 
de  cent  ans  que  les  seigneurs  de  Lourdoueix  firent  forti- 
fier la  chapelle  de  leur  château. 


478  CONGRÈS  AllCHÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

Cette  chapelle,  qui  sert  aujourd'hui  d'église  paroissiale, 
est  flanquée  de' deux  petites  tourelles,  construites  en  en- 
corbellement, au  milieu  desquelles  est  un  moucharaby. 

Le  moucharaby  et  les  tourelles  sont  percées  de  mâ- 
chicoulis. 

Lourdoueix-Saint-Michel  est  près  de  la  frontière  du  Li- 
mousin, cédée  aux  Anglais  par  le  traité  de  Brétigny;  il 
fallait  se  tenir  sur  la  défensive  :  on  fortifia  jusqu'aux 
églises. 

6°  Charlotte  d'Albret,  au  château  de  la 
Mothe-Feully  (1). 

Charlotte  d'Albret,  sœur  du  roi  de  Navarre,  fut  unie, 
dans  un  but  politique,  à  César  Borgia.  Peu  de  temps 
après  ce  mariage.  César  l'abandonna,  et  Charlotte  ne  le 
revit  jamais. 

S'étant  retirée  au  château  de  la  Mothe-Feully  avec 
l'enfant  dont  César  l'avait  rendue  mère,  elle  y  mourut. 

A  sa  mort,  son  corps  fut  porté  à  Bourges,  où  il  reposa 
dans  l'église  des  Annonciades,  à  côté  de  celui  de  sainte 
Jeanne  de  Valois,  sa  cousine  et  son  amie;  mais  son  cœur 
resta  à  la  Mothe-Feully. 

Sa  fille,  Louise  d'Albret,  lui  fit  élever  uii  tombeau  dans 
la  grande  chapelle  seigneuriale  de  la  petite  église  de  la 
Mothe  :  objet  de  vénération  et  de  respect  pendant  près  de 
trois  siècles,  ce  tombeau  fut  brisé  en  93. 

La  statue  de  Charlotte,  quoique  mutilée,  est  encore 
debout,  adossée  à  un  mur  de  la  sacristie. 

{])  Extrait  de  la  pièce,  qui  se  trouve  dans  le  chartrier  de 
rhnuars,  au  château  de  Serrant  [Maine-et-ï.oire),  pièce  en 


XL»  SESSION,    A   CHATEAUROUX.  47 0 

De  petites  figures  représentant  la  tempérance,  la  force, 
la  justice,  etc.  etc.,  encadrées  dans  des  médaillons  pleins 
de  goût,  gisent  dispersées  çà  et  là  avec  des  fragments  de 
pilastres  couverts  d'arabesques. 

Ce  tombeau,  que  j'ai  souvent  examiné,  était  surmonté 
d'un  édicule  représentant  la  sainte   maison  de  Lorette, 

papier. —  En  1521,  un  marché  fut  passé  entre  Louise  de 
Valentinois,  femme  de  Louis,  seigneur  de  La  Trémoiie,  et 
Martin  Claustre,  tailleur  d'images,  demeurant  à  Blois,  paroisse 
de  Saint-Nicolas,  en  la  manière  qui  suit  : 

1»  Fera  ledit  Claustre  un  tombeau dont  le  soubassement 

sera  de  marbre  noir,   et  les  piliers   à  l'entour  seront  aussi  de 

marbre  noir,  taillés  à  l'antique,  à  candélabres à  l'environ 

duquel  tombeau  sera  mis  les  sept  vertus  qui  seront  d'albâtre, 
dont  y  aura  en  cbaque  côté  trois,  et  au  bout  du  haut,  une  là  où 
sera  une  épitaphe  telle  qu'elle  lui  sera  baillée,   et   au  bout 

d'en  bas  seront  les  armes  de  la  duchesse  de  Valentinois et 

par-dessus  sera  une  tombe  de  marbre  noir sur  laquelle  sera 

le  personnage  de  ladite  duchesse  de  Valentinois,  en  façon  d'une 

dame  gisante lequel  personnage  sera  d'albâtre sous  la 

tête  duquel  personnage  sera  un  carreau  double,  et  aux  pieds 

deux  petits  chiens lequel  tombeau  sera  mis  en  la  chapelle  du 

château  de  la  Molhe-Feully.  étant  en  l'église  paroissiale  dudit 

lieu et  en  outre  fera  ledit  Claustre  une  image  de  Notre- 

Dame-de-Lorette,  avec  la  chapelle,  le  tout  d'albâtre,  qui  aura  le 
tout  ensemble  quatre  pieds  de   hauteur,  et  de  largeur  à  la 

raison pour  lesquels  ouvrages  ladite   dame  a  promis  audit 

Claustre  la  somme  de  cinq  cents  livres  tournois  pour  toute  chose. 

Ce  fait  et  passé  au  chastel  de  Thouars,  le  6  avril  -1 521 . 

2°  La  commission  du  département  de  l'Indre,  instituée  par  le 
Préfet  pour  veiller  à  la  conservation  des  monuments  histori- 
ques, a  demandé,  par  une  délibération  du  9  septembre  1873,  à 
M.  le  ministre  des  Beaux-Arls  de  classer  le  tombeau  de  Char- 
lotte d'Albret  au  nombre  des  monuments  hislonqufs. 


480       CONGRÈS  AUCnÉOLOGIOUE  PE  FRANCE. 

transportée  en  Italie  par  les  anges.  Si  une  main  habile 
pouvait  reconstituer  le  monument  tel  qu'il  était  jadis,  la 
petite  église  de  la  Mothe-FeuUy,  si  dépourvue,  posséde- 
rait une  œuvre  d'art  de  la  Renaissance  qui  lui  ferait  hon- 
neur. 


Les  sires  de  Sully,  seigneurs  de  Vouillon  et  de 
Sainte-Fauste. 


La  Ferté-Sainte-Fauste.  —  Les  sires  de  Sully,  sei- 
gneurs de  la  Ferté-Sainte-Fauste ,  ont  construit  au 
xiv^  siècle  une  chapelle  seigneuriale  dont  l'arc  s'ouvre  sur 
l'église  de  Sainte-Fauste  :  leurs  armoiries  sont  aux  clefs 
des  voûtes. 

Si  la  chapelle  des  sires  de  Sully  n'est  pas  très-remar- 
quable, l'église  de  Sainte-Fauste  l'est  encore  moins, 
quoiqu'elle  soit  très-ancienne  ;  mais  elle  rappelle  un 
grand  souvenir  de  l'histoire  religieuse  de  notre  Berry,  la 
translation  des  reliques  de  sainte  Fauste. 

Les  reliques  de  sainte  Fauste  s'arrêtèrent  dans  un  bourg 
nommé  la  Ferté.  A  partir  de  ce  jour,  le  bourg,  si  honoré 
par  la  présence  du  corps  saint,  prit  le  nom  de  la  Ferté- 
Sainte-Fauste  ;  c'était  sous  le  règne  de  saint  Louis  (1247). 

Les  châsses  où  les  restes  de  la  vierge  martyre  de  Vic- 
Fezensac  (diocèse  d'Auch  )  étaient  déposés  existent 
encore;  elles  sont  actuellement  au  musée  de  Cluny. 

Ces  châsses  avaient  été  profanées  pendant  les  mauvais 
jours  delà  révolution.  Elles  furent  vendues,  comme  objets 
de  peu  de  valeur,  par  un  curé  de  Segry,  qui  n'en  faisait 
pas  plus  de  cas  que  de  vieux  cuivres,  depuis  qu'on  avait 
jeté  au  vent  les  saintes  reliques  qu'elles  renfermaient. 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  481 

Elles  portent  au  luusiie  de  Cluiiy  les  uuint^ros  '2,VJ0I 
et  ^2,902. 

N°  2,901.  —  Grande  châsse  de  sainte  Fausle,  eu  cuivn^ 
gravé,  repoussé,  doré  et  rehaussé  d'émaux  en  taille 
d'épargne,  provenant  du  trésor  de  Segry  ;  travail  hyzantin 
de  Limoges,  du  xii"  siècle. 

N"  2,902.  —  Autre  châsse  du  martyre  de  sainte  Fauste, 
provenant,  comme  la  précédente,  du  trésor  de  l'église  de 
Segry,  et  exécutée  en  cuivre  gravé,  repoussé,  doré  et 
rehaussé  d'émaux  en  taille  d'épargne  ;  ouvrage  de  Li- 
moges, de  la  fin  du  xii''  siècle. 

Un  artiste  du  Berry,  le  fils  de  M.  de  Latremblais,  l'au- 
teur des  Esquisses  pittoresques  du  département  de  l'Indre, 
a  bien  voulu  relever  les  intéressants  dessins  de  ces  deux 
châsses,  qui  sont,  au  jugement  de  connaisseurs  éclairés, 
un  des  plus  beaux  objets  d'art  du  musée  de  Gluny. 

A  un  autre  point  de  vue,  elles  offrent  un  intérêt  plus 
grand  encore  :  c'est  le  seul  monument  qui  nous  reste 
pour  l'aire  connaître  dans  les  plus  affreux  détails  toutes  les 
péripéties  de  la  grande  scène  du  martyre  de  sainte  Fauste. 


8"  Les  seuineurs  de  Mézières-en-Brenne, 
MAISON  d'Anjou. 

Chapelle  de  la  Sainte-  Vierge  à  Mézières-en-Brenne.  — 
Le  Bas-Berry  possède  un  monument  de  la  Renaissance 
d'une  très-grande  valeur  artistique.  C'est  la  chapelle  de 
la  Sainte-Vierge,  dont  les  deux  arcs  s'ouvrent  sur  l'an- 
cienne église  collégiale  de  Sainle-iMadeleine,  à  Mézières- 
en-Brenne. 

Cette  chapelle  a  été  couslruite  par  les  desceiKianls  l);'i- 

XI."  SESSION.  '^1 


■482  CONGRÈS   ARCHÉOLCGIQUE   DE    FRANCE. 

tards  mais  légitimés  des  comtes  d'Anjou  de  la  maison  de 
France,  qui  portaient  le  titre  de  rois  de  Jérusalem  et  de 
Sicile. 

Les  voûtes  des  deux  travées  de  cette  magnilîque  chapelle 
conservent  la  lorme  ogivale,  mais  elles  sont  surbaissées: 
leurs  arceaux  se  ramifient  et  se  terminent  par  de  grands 
pendentifs,  ornés  de  ciselures.  Les  fenêtres  sont  en  plein 
cintre,  sans  meneaux. 

Une  claire-voie,  d'un  beau  travail  en  pierres  ornemen- 
tées, sépare  celte  chapelle  de  la  nef  de  l'église. 

Louis  d'Anjou,  René  d'Anjou  et  Nicolas  d'Anjou,  se 
sont  distingués  par  les  fondations  pieuses  qu'ils  ont  laites 
dans  cette  chapelle. 

Par  son  testament  de  1488,  Louis  ordonne  que,  quand 
la  chapelle  qui  était  en  voie  de  construction  sera  terminée, 
son  corps  y  sera  déposé,  et  que  chaque  jour,  après  Matines, 
un  des  chanoines  célébrera  une  messe  de  Beata  à  l'aulel 
de  la  Sainte-Vierge,  assisté  du  maître  de  la  psallette  et  de 
quatre  enfants  de  chœur. 

Son  petit-fils,  Nicolas  d'Anjou,  voulant  perpétuer  sa 
mémoire  ainsi  que  celle  de  son  père  et  de  son  aïeul,  fit 
fabriquer  de  splendides  verrières  à  Saint-Fargeau,  près 
d'Orléans,  par  deux  artistes  de  grand  mérite. 

J'ai  vu  les  verrières  de  la  cathédrale  d'Auch,  elles  sont 
de  la  même  époque  que  celles  de  la  chapelle  de  la  Sainte- 
Vierge  de  Mézières.  Tout  le  monde  les  admire,  surtout 
pour  les  tons  chauds  de  leurs  couleurs. 

Les  verrières  de  la  Sainte-Chapelle  de  Ghampigny 
sont  regardées  comme  une  des  œuvres  les  plus  parfaites 
que  nous  ail  léguées  l'art  de  la  Renaissance.  Ce  qui  les  dis- 
tingue surtout,  c'est  la  disposition  des  groupes,  la  richesse 
des  costumes,  le  brillant  et  l'éclat  du  coloris.  Que  les 
connaisseurs  veuillent  bien  examiner  avec  attention  les 


XL*    SESSION,    A   CUATEAUROUX.  483 

verrières  de  Mézières,  et  ils  nous  diront  si  Hoyssee  et 
Cliambenoit  de  Saint-Farg-eau  n'étaient  pas  les  dignes 
émules  des  artistes  qui  ont  peint  les  riches  tableaux  sur 
verre  d'Aucli  et  de  Champigny. 


9"  La  Sainte-Chapelle  d'Argenton. 

Il  y  avait  autrefois,  dans  le  diocèse  de  Bourges,  deux 
Saintes-Chapelles  :  la  Sainte-Chapelle  de  Bourges,  complé- 
ment et  dépendance  du  palais  du  duc  Jean,  et  la  Sainte- 
Chapelle  d'Argenton,  qui  était  aussi  un  complément  et 
une  dépendance  du  château  fort  d'Argenton.  Il  est  à  re- 
marquer que  la  Sainte-Chapelle  d'Argenton  fut  construite 
par  une  arrière-petite-fille  du  duc  Jean,  qui  avait  hérité 
de  l'amour  de  ce  prince  pour  les  beaux-arts. 

Cette  princesse  Marie-Louise  de  Berry  et  de  Bourbon- 
Monlpensier  devint,  à  la  mort  de  son  mari,  le  dernier  des 
Chauvigny,  dame  d'Argenton,  de  Gluis,  d'Aigurande  et 
autres  lieux. 

Elle  fit  un  noble  usage  de  sa  fortune  en  faisant  élever 
dans  l'enceinte  de  son  château  d'Argenton  (1504),  un 
monument  qui  lui  fait  le  plus  grand  honneur.  Il  n'est 
pas  aussi  beau  que  le  ravissant  bijou  du  château  de 
Champigny  en  Touraine ,  où  elle  est  représentée  en 
qualité  de  fondatrice,  avec  son  second  mari  le  prince  de 
la  Roche-sur- Yon  ;  cependant,  il  mérite  l'attention  de 
l'archéologue. 

La  Sainte-Chapelle  d'Argenton,  bâtie  sur  le  modèle  de 
celle  de  Bourges  n'a ,  comme  sa  devancière ,  qu'une 
seule  nef  de  proportions  restrefti tes;  mais  l'architecture 
en  est  belle  et  surtout  très-pure. 


484  COiNGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE   FRANCE. 

Trois  belles  fenêtres  ornent  l'abside.  Les  voûtes  sont  à 
nervures  prismatiques. 

Une  des  ciels  porte  les  armoiries  des  Montpensier, 
sculptées  en  relief.  Elles  n'ont  pas  été  mutilées  pendant  la 
révolution. 

On  =ait  que  les  armes  des  Montpensier  sont  l'écu  de  la 
maison  de  France,  avec  un  bâton  péri  de  gueule. 

La  Sainte-Chapelle  d'Argenlon  est  un  monument  d'au- 
tant plus  intéressant  pour  notre  département,  qu'il  est 
unique.  Nous  avons  des  parties  d'églises  appartenant  aux 
xv*^  et  xv!""  siècles;  mais  il  n'y  a  que  la  Sainte-Chapelle 
d'Argenton  qui  présente  un  tout  homogène  et  de  la  même 
époqu}.  Honneur  à  ceux  qui  travaillent,  en  ce  moment,  à 
la  restauration  d'un  monument  qui  est  certainement  un 
des  beaux  fleurons  de  la  couronne  artistique  de  notre 
Berry. 


10°  Les  seigneurs  de  Palluau^ 

Le  château  de  Palluau  rappelle  un  glorieux  souvenir. 
Il  était  occupé  par  les  Anglais,  lorsque  Philippe-Auguste 
planta  lui-même  sur  une  des  tours  l'étendar  i  de  France. 
Ce  château  est  aujourd'hui  en  ruines,  cependant  on  y 
voit  encore  une  porte  du  xvi'"  siècle  très-remarquable  et 
une  antique  chapelle  décorée  de  peintures  murales.  Ces 
peintures  représentent  les  traits  les  plus  saillants  de  la 
vie  de  Notre- Seigneur  Jésus-Christ  et  de  sa  sainte  Mère. 

On  dit  qu'elles  ont  été  laites  par  une  des  châtelaines  du 
vieux  manoir  et  qu'elles  ont  du  mérite. 

La  dix-neuvième  question  posée  par  le  Congrès  archéo- 
logique de  France    était   celle-ci  :  Faire    connaître  les 


XI"    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  iH,") 

caractère?  principaux  des  églises  du  Hcrry,  (Irpui^  le 
xr  siècle  jusqu'à  la  licnaissancc. 

Hélas!  je  me  suis  trouvé  seul  pour  répondre  à  une 
question  aussi  complexe;  je  l'ai  d'autant  plus  regretté, 
que,  sur  beaucoup  de  points,  je  n'avais  que  de  vagues 
souvenirs. 

En  mettant  au  jour  ce  travail,  je  ne  me  suis  proposé 
qu'un  seul  but  :  appeler  l'attention  des  archéologves  sur 
les  églises  de  notre  Bas-Berry.  Nous  avons  des  richesses 
qu'il  serait  bon  do  l'aire  connaître,  au  point  de  vue  de 
l'art  et  de  l'histoire;  espérons  qu'une  société  archéolo- 
gique se  formera  dans  le  département  de  l'Indre,  et  qu'elle 
comblera  les  lacunes  d'un  travail  fait  à  la  hâte. 


La  question  XX  du  programme  sur  le  symbolisme  des 
monuments  religieux  du  Berry  donne  lieu,  de  la  part  de 
M.  l'abbé  Damourette,  à  la  lecture  d'un  mémoire  dans 
lequel  il  étudie  cette  intéressante  question  eu  examinant 
un  grand  nombre  d'églises  du  département  dans  leurs 
moindres  détails. 


Du  symbolisme  dans  les  monuments  reli- 
gieux du  Berry;  quels  sujets  y  trouve- 
t-on  le  plus  souvent  figurés  ? 


Suivant  M.  l'abbé  Auber,  les  églises  qui  consisteraient 
dans  une  simple  nef,  longue  et  étroite,  sans  aucune  indi- 
cation de  retrait  au  sud  et  au  nord,  seraient  en  petit 
nombre  en  France  depuis  le  x"  siècle.  (Tom.  111,  p.  100. 


48<)  (;(t\(;«Ès  archéologique  de  frange. 

Bistoire  du  symbolisme.)   Ellos  sont  assez  communes  en 

Berry . 

Notre  magnifique  cathédrale,  le  plus  beau  monument 
qui  ait  jamais  été  construit  en  Berry,  n'a  pas  la  forme  de 
la  croix  :  c'est  une  basilique  romaine  à  cinq  nefs  paral- 
lèles, sans  transept. 

Nous  n'avons  qu'une  seule  église  de  forme  circulaire, 
c'est  l'église  de  Neuvy-Saint-Sépulcre. 

Dans  nos  églises  bâties  sur  un  plan  basilical,  un  sym- 
bole domine  tous  les  autres,  c'est  celui  de  la  sainte 
Trinité. 

Je  ne  connais  pas  une  seule  église,  bâtie  en  Berry  au 
XI"  ou  XII''  siècle,  qui  n'ait  trois  baies  dans  l'abside.  Évi- 
demment on  a  voulu,  en  adoptant  ce  nombre  symbolique, 
graver  dans  les  esprits  le  dogme  fondamental  de  la  foi 
catholique. 

Ces  traits  caractéristiques  sont  bien  marqués  dans  une 
charmante  église  du  xi''  siècle,  dont  les  dessins  ont  été 
rais  sous  vos  yeux. 

C'est  l'église  de  Saint-Denis  de  Jouhet ,  une  nef 
oblougue,  avec  un  chevet  percé  de  trois  fenêtres,  sur- 
montées d'une  belle  rosace. 

Si  l'église  de  Neuvy,  un  des  soixante  monuments  les 
plus  remarquables  de  France,  comme  types  d'architec- 
ture, fut  bâtie  en  forme  de  rotonde  avec  collatéral  et  étage 
supérieur,  ce  fut,  comme  disent  les  chroniques  du  temps, 
en  imitation  et  en  souvenir  du  Saint-Sépulcre  de  Jéru- 
salem. 

Dans  nos  églises  de  plan  crucial,  on  remarque  la  dé- 
viation de  l'axe  longitudinal  du  nord  au  sud  ;  il  est 
hors  de  doute  que,  par  ce  moyen  ingénieux,  on  a  voulu 
symboliser  l'afl'aissement  de  la  tète  du  Sauveur  rendant 
le  dernier  soupir. 


XL*    SESSION,    A   CHATEAUROUX.  W? 

Le  jugement  dernier,  tel  (lu'il  est  décrit  dans  les  livres 
saints,  est  la  parure  des  façades  de  la  cathédrale  de 
Bourges  et  de  l'église  de  Levroux. 

Je  le  retrouve  peint  sur  les  murs  des  petites  églises,  et, 
en  particulier,  sur  le  chevet  de  la  petite  basilique  de 
Oouadic. 

Dans  les  représentations  du  jugement  dernier,  les  dé- 
mons sont  symbolisés  par  des  figures  d'animaux  hideux. 

Rien  n'est  plus  frappant  que  le  pcscment  des  àuies  ;  il 
se  fait  dans  une  balance.  Souvent  le  démon  fait  les  plus 
grands  efforts  pour  emporter  de  son  côté  le  plateau  de 
la  balance;  mais  les  bons  anges  sont  là,  et  s'opposent 
à  ses  efforts  :  aussi  le  pèsement  se  fait  avec  la  plus  stricte 
justice. 

Quand  le  jugement  est  prononcé  par  le  Juge  des  vivants 
et  des  morts,  les  bons  anges  conduisent  les  élus  dans  le 
ciel,  tandis  que  les  démons,  liant  avec  de  grosses  cordes 
les  damnés,  en  font  un  faisceau  et  les  conduisent  en 
enfer.  Dans  ce  faisceau  il  y  a  des  rois,  des  évéques,  des 
grands  seigneurs,  mêlés  avec  le  populaire.  L'église  pro- 
clamait ainsi  en  face  de  tous  le  dogme  chrétien  de  l'éga- 
lité devant  Dieu. 

Dans  l'église  de  (Jiargilesse,  aux  chapiteaux  des  colonnes 
qui  sont  autour  du  chœur,  on  admire,  sculptés  sur  la 
pierre,  les  vingt-quatre  vieillards  de  l'Apocalypse. 

Des  vingt-quatre  vieillards,  la  moitié  se  compose  du 
collège  apostolique,  l'autre  moitié  des  douze  patriarches, 
pères  des  douze  tribus  d'Israël,  apôtres  de  l'ancienne  loi. 
Cette  union  des  apôtres  et  des  douze  patriarches  est  le 
symbole  de  l'union  parfaite  qui  existe  entre  les  justes  de 
l'ancienne  loi  (la  religion  judaïque)  et  les  justes  do  la  nou- 
velle loi  (la  religion  chrétienne). 

Dans  nos  églises   du   Berry,  Jésus-Christ   glorieux   et 


18S  r.ONCJRES   ARCHEOLOUIQUE    DK    FRANCE. 

Iii(»iiii)liaiit,  a>?is  sur  un  trnno  à  la  droite  (ie  sou  Père, 
e?t  souvent  ii'[iréseuté  dans  les  coquilles  de  l'abside 
centrale,  entouré  des  symboles  des  quatre  évangélistes , 
l'ange,  le  taureau,  le  lion  et  l'aigle  :  tantôt  il  bénit, 
tantôt  il  tient  en  main  le  livre  de  la  loi. 

Habacuc,  conduit  par  un  ange  à  Babylone,  porte  un 
vase  contenap.t  du  pain  à  Daniel,  qu'on  avait  jeté  dans 
une  ibsse.  au  milieu  de  sept  lions  :  magnifique  symbo4e 
de  l'Eucharistie. 

Symboles  dans  les  corbelets  :  Figures  grimaçantes  :  les 
vices  ou  les  démons. 

Symboles  dans  les  chapiteaux  :  Deux  colombes  ;  l'inno- 
cence et  la  simplicité  unies  ensemble. 

Symb'Aes  dans  les  peintures  murales  :  1°  Le  renard,  le 
démon; —  2°  les  péchés  capitaux. 

Six  lions  (trois  de  chaque  côté], ,  sculptés  en  relief,  sous 
les  piédestaux  des  colonnes  de  la  grande  baie  de  l'abba- 
tiale de  Fontgombaut,  rappellent  le  trône  de  Salomon  et 
le  souvenir  des  anciens  abbés  de  Fontgombaut,  qui  eux 
aussi,  à  l'exemple  du  grand  justicier  qu'ils  avaient  pris 
pour  guide,  rendaient  la  justice  inter  leones. 

Symbolisme  des  statues  des  églises  du  Berry. 

Aux  XI"  et  xir  siècles,  la  sainte  Vierge  est  représentée 
assise  sur  une  chayère,  tenant  le  Christ  enfant  sur  ses 
genoux.  La  mère  est  couronnée,  tandis  que  l'enfant  ne 
l'est  pas;  il  bénit,  ou  il  porte  un  livre. 

La  Vierge  de  Déols,  qui  ne  fut  mutilée  qu'en  93  (elle 
avait  échappé  aux  actes  de  vandalisme  des  protestants  j, 
est  une  Vierge  assise,  d'un  très-beau  ty[ie.  Elle  porte  sur  ses 
genoux  l'Enfant  emmaillotté. 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  -iSO 

Dani  la  crypte  de  l'église  de  dargilesse,  on  voit  encore 
aujourd'hui  une  statue  de  la  "Vierge  mère,  qui  est  très- 
remarquable  au  point  de  vue  de  l'histoire  de  l'art. 

Elle  est  assise  ;  l'Entant  divin  est  nimbé  ;  il  bénit  d'une 
main,  et  porte  de  l'autre  un  globe  qui  représente  le  monde. 

Sur  la  console  qui  supporte  le  groupe,  on  admire  deux 
rois,  portant  en  tète  des  couronnes  et,  dans  leurs  mains 
droites,  des  instruments  de  musique  :  ils  tournent  leurs 
regards  avec  amour  vers  Marie  et  Jésus. 

M.  Viollet-le-Duc  croit  que  la  manière  de  représenter  la 
Vierge  assise,  tenant  sur  ses  genoux  l'Enfant  divin,  est 
empruntée  aux  artistes  grecs.  C'est,  dit-il,  une  importation 
byzantine,  due  aux  ivoires  et  peintures  rapportés  d'Orient 
par  les  croisés.  Il  me  semble  que  M.  Viollet-le-Duc  oublie 
que  la  Vierge  mère  assise  sur  un  trône,  portant  entre  ses 
bras  le  divin  Enfant,  est  un  type  que  l'on  trouve  dans  les 
catacombes  de  Rome  :  il  remonte  donc  aux  premiers  siècles 
de  l'ère  chrétienne. 

L'art  grec  représentant,  même  sur  les  monnaies,  la 
Vierge  mère  portant  son  enfant  appuyé  sur  sa  poitrine. 

Les  Latins  la  représentèrent  dans  une  position  plus 
naturelle,  tenant  son  fils  ou  dans  ses  bras,  ou  sur  ses 
genoux.  » 

Il  semble  que  la  Vierge,  tenant  son  enfant  sur  ses 
genoux,  se  dispose  à  nous  le  donner.  C'est  la  pensée  du 
grand  docteur  du  moyen  âge,  qui  n'a  cessé  de  dire,  avec 
une  suave  tendresse,  aux  chrétiens  de  son  siècle,  que  tout 
venait  par  Marie  :  Jésus  et  ses  trésors.  —  Omnia  nos 
habere  voluit  [Deus]  per  Mariam.  (Saint  Bernard.) 

Marie  avait  présenté  Jésus  aux  Mages;  aujourd'hui 
qu'elle  est  dans  la  gloire,  non-seulement  elle  le  présente, 
mais  elle  donne  comme  un  don  (jui  lui  appartient  en 
propre. 


490  COiNGRÈS  ARCHEOLOGIQUE    UE   FRANCE. 

Cette  croyance  catholique  est  affirmée  d'une  manière 
frappante  sur  le  tympan  d'un  des  portiques  latéraux  de 
la  cathédrale  de  Bourges.  Il  porte  le  nom  de  portique  de 
Notre-Dame-de-Gràce. 

Sur  ce  portique  la  Vierge  mère,  assise,  est  représentée 
en  plein  relief. 

Elle  tient  son  fils  sur  ses  genoux.  On  distingue  à  sa 
droite  et  à  sa  gauche  plusieurs  groupes  suppliants, 
qui  viennent  implorer  sa  protection  et  lui  demander  des 
grâces.  Il  est  facile  de  voir,  à  leur  air  de  satisfaction,  que 
la  parole  de  saint  Bernard  est  vraie  :  «  Qu'on  n'a  jamais 
entendu  dire  qu'aucun  de  ceux  qui  ont  eu  recours  à  elle, 
réclamé  son  secours,  imploré  son  assistance,  ait  été  aban- 
donné. » 

A  dater  du  xiii^  siècle,  la  Vierge  n'est  plus  représentée 
assise.  Elle  est  debout,  couronnée  et  triomphante,  tenant 
son  fils  sur  son  bras  gauche. 

L'enfant  lui  présente  une  fleur  ou  un  oiseau. 

C'est  ainsi  que  la  Vierge  est  figurée  dans  l'église  de 
Palluau. 

Le  peuple  appelle  cette  statue  la  Sur-Sainte;  les  Grecs 
auraient  dit  la  Toute-Sainte,  la  Panagia. 

Au  XVI*  siècle,  dans  un  grsl^id  nombre  d'églises  et  de 
chapelles  de  notre  Berry ,  la  Vierge  est  assise  au 
pied  de  la  croix,  tenant  sur  ses  genoux  le  corps  de  son 
fils,  mort  et  couvert  de  plaies.  C'est  un  nouveau  symbole, 
le  symbole  de  la  douleur. 

Vers  le  même  temps  on  plaça  dans  les  églises  du  Berry 
une  image  qui  est  un  symbole  frappant  de  la  sainte 
Trinité. 

Le  Père  est  représenté  assis  sur  un  trône;  il  porte  en 
tête  une  tiare,  comme  le  Souverain  Pontife.  Le  Fils  est 
attaché  à  la  croix  :  ce  crucifix  est  placé  sur  les  genoux 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  4.91 

du  Père  éternel.  Au-dossus  du  groupe  on  voit  le  Sainl- 
Rs])rit,  sous  la  forme  d'une  colombe. 

J'ai  vu  des  groupes  de  cette  espèce  en  plusieurs  églises, 
entre  autres  dans  celle  de  Levroux. 

J'ai  rencontré  aussi  très-souvent  l'image  ou  la  statue 
de  saint  Jean- Baptiste,  avec  l'Agneau  symbolique. 

L'image  de  saint  Christophe  n'est  pas  rare.  Dans  les 
peintures  murales  de  l'église  de  Saint-Cyvran,  canton 
de  Saint-Benoit-du-Sault,  et  de  la  chapelle  de  Marteau  à 
Clion,  le  saint  est  un  vrai  géant,  portant  sur  son  épaule 
l'enfant  Jésus,  et  tenant  en  main  un  bâton,  qui  est  un 
véritable  arbre,  terminé  par  des  feuilles  et  des  fleurs. 

M.  David,  instituteur  à  Clion,  a  bien  voulu  nous  en- 
voyer les  dimensions  du  saint  Christophe  de  la  chapelle 
de  Marteau.  Il  mesure  2  mètres  f)5  centimètres  de  hauteur, 
et  l'enfant  Jésus  dépasse  le  haut  de  la  tète  du  saint  de 
25  centimètres.  Il  est  à  remarquer  que  l'enfant  est  à  che- 
val sur  l'épaule  du  saint,  de  la  même  manière  que  les 
femmes  portent  les  enfants  en  Syrie.  Les  jambes  de  saint 
Christophe  baignent  dans  l'eau  jusqu'aux  genoux;  des 
poissons  nagent  autour  de  lui.  Il  arrive  sur  le  bord,  et 
déjà  il  lève  un  de  ses  genoux  pour  sortir  de  l'eau.  Son 
attitude  courbée  est  celle  d'un  homme  qui  succombe 
sous  le  poids  d'un  lourd  fardeau.  On  aperçoit  l'ermite  sur 
le  bord  de  la  rivière,  tenant  une  lanterne,  d'une  main, 
et  de  l'autre  un  chapelet. 

L'intention  des  artistes  qui  donnaient  à  saint  Chris- 
tophe la  taille  d'un  géant,  n'était  pas  seulement  de 
le  rendre  visible,  même  de  loin,  à  tous  les  regards  ;  on 
voulait  surtout  représenter  la  force  surhumaine  qui  lui 
venait  par  Jésus. 

Il  était  passé  en  proverbe  de  dire  :  Christophorum  vides, 
posteu  tutus  e«s,  tant  on  était  convaincu  qu'il  sulfisail  de 


iO'2  CONGRES    ARCHÉOLOGIQUK    DE    FRA.NOE. 

voir  saint  Christophe  pour  participer  à  la  grâce  de  Dieu 
et  à  la  force  qu'elle  communique  aux  âmes. 

Un  ermite  avait  pris  à  son  service  Christophe,  en  lui 
promettant  un  fort  salaire  s'il  voulait  faire  le  métier  de 
passer  sur  ses  épaules  les  voyageurs  à  travers  les  eaux 
d'un  torrent. 

L'enlant  Jésus,  qu'il  porte  sur  ses  épaules  est,  ou  le 
salaire  qui  lui  fut  promis  par  l'ermite,  ou  plutôt  il  sym- 
bolise les  voyageurs  que  saint  Christophe  a  passés  par 
amour  pour  Jésus-Christ.  Aussi  ce  symbole  si  touchant 
rappelle  cette  parole  du  Sauveur  : 

Ce  que  vous  faites  au  plus  petit  des  miens,  vous  le  faites 
à  moi-même. 

M.  de  Laurière  demande,  à  propos  des  déviations  d'axe 
que  l'on  observe  dans  quelques  églises,  où  ces  déviations 
représenteraient  l'idée  symbolique  de  l'inclinaison  de  la 
tête  du  Sauveur  expirant  sur  la  croix,  si  ces  églises  ont 
été  bâties  d'un  seul  jet,  ou  si  elles  ont  été  construites  par 
reprises  à  différentes  époques  ;  ce  qui  porterait  à  croire 
que  ces  inflexions  d'axe  ne  seraient  que  le  résultat  de 
circonstances  entièrement  étrangères  à  toute  idée  de  sym- 
bolisme. 

M.  l'abbé  Bordé  cite  l'église  de  Chaumont-en-Vexin, 
édifice  dont  la  construction  se  rapporte  à  la  môme  époque, 
et  qui  présente  une  déviation  d'axe  très-sensible,  i».  Le- 
nail  fait  connaître  l'église  de  Saint-Rambert  en  Forez,  qui 
offre  la  même  particularité.  Cependant  M.  Lenail  croit 
que,  dans  un  grand  nombre  d'édifices,  cette  déviation  pro- 
vient de  certaines  difficultés  de  reconstruction  imposées 
par  des  obstacles  d'emplacement  ou  autres  causes  étran- 
gères à  une  idée  de  symbolisme. 

M.  de  Cougny,  rappelant  que  ces  questions  ont  été 
soulevées   dernièrement   dans    le    Bulletin  monumental, 


XL"    SESSION,    A    GHATEAUROUX.  -493 

désirerait  savoir  de  M.  l'abbé  Bordé  si  dans  le  nord  de  la 
Krance,  où  ces  déviations  sont  observées,  elles  sont  «msi- 
dérées  comme  le  résultat  d'une  intention  synil)()li(]U(;. 

M.  l'abbé  Rordé  répond  anirinativement. 

M.  l'abbé  Blanchet,  aumônier  du  lycée  de  Chàteanroux, 
signale  l'église  de  Mehun-sur-Yevre,  dont  l'axe  est  incliné 
d'une  manière  très-sensible  à  partir  du  porche  ;  mais 
il  fait  observer  que  ce  porche  date  d'une  autre  époque  que 
le  reste  de  l'église. 

Sur  la  question  22  du  programme  :  En  vertu  de  quel 
titre  le  donjon  de  Châteauroux  relevait-il  des  archevêques 
de  Tours?  M.  l'abbé  Damourette  présente  les  observations 
suivantes. 

Le  donjon  de  Châteauroux  fut  construit  sur  un  feuduni 
appartenant  incontestablement  aux  princes  de  Déols.  Dans 
l'acte  de  fondation  de  l'abbaye  de  Notre-Dame  de  Déols, 
ces  princes  abandonnent  à  l'abbé  et  à  ses  successeurs  la 
chapelle  de  Saint-Martin  avec  son  cloître.  Toutefois  ils  se 
réservent  la  propriété  du  reste,  puisque  plus  tard  ils  y 
bâtiront  leur  donjon.  Le  feudum  en  question  appartenant 
aux  princes  de  Déols,  ils  ont,  exclusivement  à  tous  autres, 
le  droit  d'en  faire  hommage  à  qui  bon  leur  semble.  Ils  en 
font  hommage  à  saint  Martin  dans  la  personne  de  ses 
successeurs,  les  archevêques  de  Tours. 

Les  archevêques  de  Tours,  ajoute  M.  l'abbé  Damourette, 
avaient  droit  de  séjourner  au  donjon  de  Châteauroux 
lorsqu'ils  allaient  à  Rome,  ainsi  qu'il  résulte  de  l'acte 
d'hommage  rendu  par  Denyze  de  Déols.  Qu'on  veuille 
bien  le  remarquer,  les  archevêques  de  Tours  n'ont  droit 
de  séjourner  au  donjon  de  Châteauroux  que  dans  un  cas 
unique  :  —  lorsqu'ils  vont  à  Rome.  —  N'est-ce  pas  en 
souvenir  de  saint  Martin  séjournaul   dans  le  lieu  où  plus 


494       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQDE  DE  FRANCE. 

tard  sera  bâti  le  casti^um  Rodulphi,  lorsqu'il  se  rendait  de 
Tours  à  Rouie  par  le  pays  des  Bituriges? 

M.  Palustre  émet  sur  cette  questidu  une  opinion  qui 
diffère  de  celle  de  M.  l'abbé  Damourette.  11  pense  que  la 
source  de  la  suzeraineté  exercée  par  les  successeurs  de 
saint  Martin  sur  une  partie  du  diocèse  de  Bourges,  et  sur 
le  donjon  de  Châteauroux  en  particulier,  découle  de  cette 
circonstance,  que  saint  Cyran,  le  célèbre  fondateur  des 
abbayes  de  Méobecq  et  de  Lonrey,  dans  la  Brenne,  était 
fils  d'un  noble  seigneur  nommé  Sigelaïc,  qui,  après  avoir 
joué  un  grand  rôle  politique  et  même  gouverné  le  comté 
de  Bourges,  était  devenu  évèque  de  Tours  ;  de  sorte  que 
l'on  est  autorisé  à  conclure  que  la  mission  civilisatrice  du 
premier  aida  considérablement  à  l'extension  de  l'influence 
du  second.  Du  leste,  cette  opinion  se  trouve  plus  longue- 
ment développée  par  M.  Palustre  dans  l'intéressant  article 
qu'il  a  publié  sur  les  Monuments  de  l'Indre,  dans  le  n"  2 
du  Bulletin  monumental  de  1873. 

La  séance  est  levée  à  10  heures  45  minutes. 

J.  DE  Laurière  , 
Secrétaire  de  la  séance. 


2»    SÉANCE    DU    13    JUIN    1873. 
présidence  de  m.  de  laurière, 

Inspecteur  général  de  la  Société. 

Siègent  au   bureau  :  MM.    Guillard,  Emile   Barboux, 
Gaugaiii  et  Boucheron. 
Secrétaire  M.  de  Bave. 


XL*"    SESSION,    A    ClIATKAUROUX.  495 

M.  l'abbé  Blancliet  fait  la  lecture  du  procès-verbal  de 
la  cinquième  séance. 

M.  Cattois  soumet  une  observation  relative  au  procès- 
verbal,  qui  sera  modiiié  dans  le  sens  de  la  rectification 
indiquée. 

M.  Palustre  communique  au  Congrès  le  résultat  de 
son  examen  du  bréviaire  manuscrit,  appartenant  à  la 
bibliothèque  de  Ghàteauroux.  Il  interprète  plusieurs  des 
miniatures  et  en  signale  l'ornementation  générale,  rem- 
plie d'une  haute  expression.  Il  explique  également  le  sens 
de  la  miniature,  relative  à  l'apparition  de  saint  Michel 
sur  le  mont  Gargan,  en  Apulie. 

M.  Cattois  signale,  dans  le  même  manuscrit,  la  minia- 
ture exprimant  le  dogme  de  la  très-sainte  Trinité.  Il  en 
fait  remarquer  l'heureuse  et  juste  inspiration. 

M.  de  Laurière  constate  la  grande  valeur  artistique  du 
manuscrit  dont  la  ville  de  Ghàteauroux  doit  être  fière,  et 
le  place  au  même  rang  que  le  manuscrit  tant  admiré  de 
Venise. 

Enfin,  M.  Palustre,  considérant  que  le  bréviaire  ne 
contient  que  deux  parties,  propose  d'insérer  une  mention 
dans  un  journal  pour  rechercher  les  deux  autres  parties. 

M.  de  Cougny,  directeur  de  la  Société,  propose  avec 
empressement  le  Bulletin  monumental,  répandu  dans  toute 
l'Europe. 

M.  de  Laurière  lit  la  vingt-cinquième  question,  ainsi 
conçue  :  Architecture  militaire  de  la  région,  depuis  le 
xii^  siècle  jusqu'au  xV. 

En  l'absence  de  l'orateur  qui  devait  traiter  la  question, 
M.  l'abbé  Damourette  donne  verbalement  d'intéressants 
détails  sur  ce  sujet  ;  il  mentionne  l'existence  d'un 
nombre  considérable  de  châteaux  forts  des  xir  et  xiii*  siè- 
cles, destinés  à  la  défense  du  pays.  Il  révèle,  très-utile- 


496       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ment,  l'existence  d'un  état  de  ces  châteaux,  dressé  par 
ordre  de  la  Convention. 

Sur  la  vingt-septième  question  :  Quelle  est  la  signifi- 
cation symbolique  des  sujets  de  chasse  représentés  sur 
le  tombeau  de  saint  Ludre,  dans  la  crypte  de  Déols,  et  sur 
le  tombeau  de  Javarzay,  figuré  dans  V Abécédaire  d' archéo- 
logie religieuse  de  M.  de  Caumont,  p.  268?  M.  Lenail, 
dans  un  mémoire  conçu  et  exprimé  d'une  manière  bril- 
lante, déclare  qu'il  faut  renoncer  à  trouver  une  significa- 
tion symbolique  dans  les  sujets  de  chasse  qui  ornent  les 
tombeaux. 

Ne  vous  semble-t-il  pas.  Messieurs,  que  nous  sommes 
trop  souvent,  dans  nos  études,  aux  prises  avec  des  diffi- 
cultés réelles  pour  qu'il  soit  raisonnable  de  nous  en  créer 
de  nouvelles.  Combien  de  difficultés  n'élevons-nous  pas 
cependant  pour  goûter  la  satisfaction  de  faire  croire  aux 
autres,  sinon  de  croire  nous-mêmes,  que  nous  les  avons 
vaincues. 

La  question  du  symbolisme,  quand  même,  est  en  vérité 
l'une  de  ces  difficultés?  Si  nous  sommes  surpris  de  voir 
des  esprits  intrépides  vouloir  chercher  le  symbolisme 
partout,  nous  sommes,  à  plus  forte  raison,  stupéfaits  de 
les  voir  le  trouver  là  où  il  n'a  jamais  existé. 

A  la  27^  question  posée  par  le  programme,  je  ne  crains 
pas  de  répondre  que  jamais  les  sculpteurs  n'ont  attaché 
une  idée  symbolique  à  la  représentation  des  chasses  sur 
les  tombeaux. 

Ces  sujets  étaient  fréquents  dans  la  sculpture  ro- 
maine, et  les  ouvriers  mal  habiles  des  époques  de  déca- 
dence, ayant  à  décorer  des  surfaces  d'une  certaiifb  dimen- 
sion, ne  trouvaient  rien  de  mieux  que  de  reproduire  les 
sujets  dont  ils  trouvaient  des  exemples  sous  leurs  yeux, 
des  types  qu'ils  avaient  dans  la  main. 


XL"    SESSION',    A    CHATEAUKOUX.  A91 

Nous  trouvons  IVéquiMunioiil  la  preuve  que  les  ouvriers 
(lu  XVI''  siècle  ne  faisaient  pas  autrement;  ils  répétaient 
partout,  en  les  détigurant  trop  souvent,  les  ornements 
qu'ils  avaient  exécutés  d'abord  sous  la  direction  d'un 
niaitre  habile.  Nombre  de  nos  bas  praticiens  l'ont  de  môme 
aujourd'hui. 

Le  tombeau  de  saint  Rémy,  l'antique  Glanum,  est 
décoré  de  sujets  de  chasse  qui  n'ont  d'autre  raison  d'être 
que  celle  que  je  signale. 

Il  est  évident  que  les  sculpteurs  désireux  de  décorer 
richement  le  tombeau  d'une  puissante  famille,  ont  repro- 
duit des  sujets  communs,  sur  lesquels  ils  s'étaient  sou- 
vent exercés. 

Nous  trouvons,  en  effet,  à  Saint-Rémy,  une  bataille  de 
cavalerie  et  le  combat  des  Amazones,  une  chasse  à  côté 
d'un  groupe  de  guerriers  pleurant  sur  un  cadavre. 

Tous  sujets  traités  avec  de  visibles  réminiscences  de 
l'art  grec. 

Si,  à  l'époque  de  Constantin  la  décadence  artistique  en 
était  arrivée  à  ce  point,  il  est  bien  naturel  de  penser  que 
ce  qui  était  déjà  une  habitude  au  iv*  siècle  chez  les  prati- 
ciens encore  habiles,  devint  une  triste  nécessité  pour  les 
sculpteurs  des  époques  suivantes,  a  Quelle  que  soit  l'origine 
des  compositions  de  chasse,  que  l'on  trouve  en  si  grand 
nombre  en  tant  de  lieux,  dit  Prosper  Mérimée,  elles 
paraissent  avoir  été  tellement  à  la  mode  dans  le  bas 
empire,  que  les  sculpteurs  en  faisaient  à  la  pacotille.  » 
Et,  en  parlant  du  tombeau  de  Déols,  il  ajoute  :  «  Il  est 
évident  que  c'est  un  fond  di;  magasin,  et  si  je  puis 
m'exprirner  ainsi,  dont  on  a  fait  usage  probablement 
même  assez  longtemps  après  l'exécution  des  bas-reliefs.  » 

M.  VioUet-le-i^uc,  qui,  négligeant  volontiers  le  sym- 
bolisme, trouve  souvent  la  juste  raison  des  choses,  a  re- 
XL*  SESSION.  32 


498       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

marqué  quelle  est  encore,  dans  l'école  berrichonne  des 
premières  années  du  xii"  siècle,  Tinfluence  romaine,  m- 
fluence  qui  lutte  dans  le  pays  avec  des  traditions  byzan- 
tines, à  une  époque  où  déjà  l'art  grec,  transformé  par  le 
o-énie  indigène,  est  devenu  un  art  vraiment  français  dans 
nie-de-France,  la  Normandie  et  le  Poitou. 

L'influence  romaine  est  évidente,  en  effet,  dans  les 
sculptures  de  la  porte  de  Saint-Ursin  de  Bourges;  aussi 
ne  sommes-nous  point  surpris  de  trouver  dans  le  tympan 
de  cette  porte  un  de  ces  mêmes  sujets  de  chasse,  dont  la 
présence  ici  est  encore  due  à  une  réminiscence  de  l'ou- 
vrier. 

Nous  voyons  au  musée  de  Niort  un  tombeau  du  com- 
mencement du  XII''  siècle,  tombeau  également  décoré  de 
sujets  de  chasse  dans  lesquels,  il  est  vrai,  l'art  romain  n'a 
rien  à  voir  absolument. 

Je  crois  qu'un  ouvrier,  bon  praticien  de  sou  époque,  a 
voulu  reproduire  avec  son  génie  propre  une  de  ces  scènes 
de  chasse  qu'il  avait  pu  voir,  ou  dont  même  il  n'avait 
connu  l'existence  sur  les  tombeaux  que  par  tradition. 

Ceci  est  d'autant  plus  probable  que  ce  sarcophage  est 
une  véritable  exception,  puisque  tous  les  tombeaux  du 
xii^  siècle  ont  un  caractère  religieux,  fort  amoindri  sur 
celui-ci. 

D'autre  part,  nous  ne  connaissons  point  d'autres  mo- 
numents aussi  ornés.  Or,  si  nous  admettions  que  le 
sculpteur  a  eu  en  exécutant  son  travail  une  intention 
cachée,  comment  penser  qu'une  signification  symbolique, 
attachée  à  ces  images,  a  cessé  subitement  d'être  comprise? 

Quelles  subtilités  faudrait-il  inventer  pour  expliquer 
l'effacement  de  cette  idée,  alors  qu'il  est  si  clair  et  si 
simple  de  voir  dans  l'abandon  des  sujets  en  question  une 
raison  de  progrès  dans  l'art  de  la  sculpture  ! 


XI.''    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  490 

Il  me  paraîtrait  pros(iun  invraisernhlahlo  mi-nio  que  ces 
chasses  eussent  été  sculptées  sur  les  toniboaux,  pour  per- 
pétuer la  mémoire  d'un  clias?eur  fameux,  ou  sur  les  portes 
des  églises  et  des  abbayes,  pour  célébrer  les  exploits  d'un 
fondateur  ou  d'un  bienfaiteur. 

Les  chasses  des  tombeaux  de  Déols,  comme  de  Saint- 
Rémy  de  Reims,  d'Arles,  ne  sont  dues  qu'au  défaut  de 
science  et  d'imap^iuation  des  ouvriers  ;  celui  de  Javarsay, 
(ju'à  un  souvenir  tantaisiste. 

L'illustre  abbé  de  Clairvaux  partage  à  ce  sujet  mon  in- 
diflférence  pour  le  symbolisme,  ou,  pour  dire  plus  juste,  il 
m'en  donne  l'exemple. 

Voici  ce  qu'il  écrit,  s'adressant  à  Guillaume,  abbé  de 

Saint-Thierry,    et  s'élevant   contre    les   inutiles   images 

répandues  pn  profusion  par  les  sculpteurs  et  les  peintres  : 

«  Quidfacit  illa  ridicula  monstruositas,  quaedam  difor- 

«  mis  Ibrmositas,  et  formosa  deformitas? 

M  Quidibi  feri  leones?  quid  monstruosi  centauri? 

« Quid  milites  pugnantes?  Quid  venatores  tubi- 

«  cinantes?  » 

Les  chasseurs  qui  sonnent  de  la  trompe!  les  voilà 

repoussés  comme  les  grotesques  et  les  monstres  1 

Saint  Bernard,  sous  les  yeux  duquel  étaient  sculptés 
ces  épisodes  de  chasse,  ignore  qu'ils  aient  une  signilica- 
tion  symbolique,  et  ne  voit  dans  ces  représentations  que 
des  fantaisies  d'ouvriers. 

Je  crois  ne  pouvoir  mieux  faire  que  suivre  le  saint  abbé 
dans  sa  docte  ignorance,  sans  chercbcr  à  découvrir  après 
tant  de  siècles,  dans  des  tableaux  de  chasse,  ce  que  l'in- 
telligence du  plus  clairvoyant  des  contemporains  n'y  a 
jamais  vu  ni  jamais  soupçonné. 

M.  de  Laurière,  président,  appuie  les  conclusions  de 


500  CONGRÈS   ARCIIÉOI.OC.IOUE   DE   FRANCE. 

M.  Lenail  de  l'autorité  de  ?o.>  (.hsorvations  personnelles  : 
il  a  rencontré  en  Afrique  des  tombeaux  ornés  de  sem- 
blables sujets  ;  on  ne  songeait  nullement  à  leur  attribuer 
une  signification  symbolique. 

M.  l'abbé  Damourette  aborde  ensuite  la  vingt-huitième 
question.  11  fait  des  rapprochements  entre  les  monuments 
qui  portent  les  emblèmes  du  soleil  et  de  la  lune,  et  en 
donne  la  signification  dans  les  circonstances  qu'il  men- 
tionne. L'interprétation,  pour  le  cas  spécial,  termine  son 
rapport,  qui  est  annexé  au  présent  procès-verbal. 


Quelle  est  la  signification  des  emblèmes 
du  soleil  et  de  la  lune,  figurés  de  chaque 
côté  de  la  tête  du  défunt,  sur  une  dalle 
tumulaire  du  musée  de  Châteauroux  ? 

Avant  de  répondre  à  la  question,  nous  ferons  connaître 
la  pierre  tumulaire  sur  laquelle  la  figure  d'un  prieur  de 
l'abbaye  des  bénédictins  de  Saint-Gildas  est  gravée  eu 
creux. 

Cette  pierre  est  le  couvercle  d'un  tombeau  ;  sur  cette 
pierre,  on  voit  deux  disques,  emblèmes  du  soleil  et  de  la 
lune.  Le  soleil  est  marqué  d'une  croix,  d'où  s'échappent 
quatre  rayons  lumineux. 

Les  deux  emblèmes  sont  placés  au  haut  de  la  dalle,  de 
chaque  côté  de  la  tète  du  moine,  très-reconnaissable 
à  la  grande  coule  des  bénédictins,  qui  l'enveloppe  tout 
entier. 

A  l'entour  de  la  dalle  tumulaire,  règne  une  inscription 
en  grandes  et  belles  lettres  gothiques,  dont  voici  la  tra- 
duftinn  :  «  lei  repose piiour  du   monastère  de  Saint- 


XL"    SESSION,    A    CUATJiAUUOUX.  SOI 

Gildas  de  Cliàleauroux,  mort  en  l'an  1302,  le  troisi(^me 
jour  avant  les  nones  de  mai.  Qu'il  repose  en  paix  !  « 

L'endroit  où  cette  pierre  tombale  a  été  découverte  est 
à  proximité  du  lieu  où  s'élevait  autrefois  l'église  du  mo- 
nastère. Le  prieur  avait  été  inhumé,  suivant  l'usage,  dans 
la  partie  du  cloître  qui  touchait  à  l'église. 

Cette  tombe  ayant  été  achetée  par  la  Société  du  musée 
de  Chàteauroux,  l'ut  transportée  dans  la  cour  de  l'hôtel  de 
ville,  où  elle  est  malheureusement  exposée,  en  attendant 
un  abri,  aux  nijures  des  saisons. 

Que  signifient  les  emblèmes  sur  lesquels  on  a  appelé 
l'attention  des  membres  du  Congrès  ? 

Avant  tout,  nous  devons  admettre,  comme  un  fait  cer- 
tain, que  les  Égyptiens  plaçaient,  sur  les  sarcophages  où 
ils  déposaient  les  cadavres  de  leurs  morts,  les  emblèmes 
du  soleil  et  de  la  lune;  ils  étaient  dans  l'usage  de  repré- 
senter le  soleil  et  la  lune  par  des  masques  de  figures 
humaines,  de  stature  colossale. 

Le  masque  du  soleil  était  le  symbole  du  dieu  Osiris,  et 
le  masque  de  la  lune  de  la  déesse  Isis.  Par  ces  emblèmes, 
les  Égyptiens  prétendaient  faire  connaître  qu'ils  plaçaient 
leurs  morts  sous  la  protection  de  ces  dieux,  qui  étaient 
pour  eux  ce  qu'étaient  Jupiter  et  Junon  pour  les  Grecs. 

Cet  usage  passa  de  l'Egypte  chez  les  Romains. 

Montfaucon,  dans  son  bel  ouvrage  qui  a  pour  fitre 
Y  Antiquité  expliquée  par  les  monumenis,  nous  donne,  à  la 
page  101  du  tome  V,  un  magnifique  dessin  représentant 
un  sarcophage  antique.  Aux  deux  extrémités  de  la  frise  du 
monument  étaient  deux  tigures  colossales,  dont  il  reste 
encore  celle  de  droite. 

D'après  ce  savant,  ces  deux  ligures  colossales  sont  les 
emblèmes  du  soleil  et  de  la  lune. 

Le  monument  est  romain.  D'autres  antiquaires  ont  vu, 


502  CONGRÈS   ARCHEOLOGUjUE   DE   FKAIN'CE. 

daus  les  musées  de  Uonie,  des  sarcophages  où  les  figures, 
emblèmes  du  soleil  et  de  la  luue,  sont  coiffées  d'un  bonnet 
phrygien.  Je  fais  cette  remarque  parce  que  j'ai  vu  le 
bonnet  phrygien  placé  dans  des  disques,  sur  des  cruci- 
fixions. 

Parmi  les  découvertes  nouvelles  laites  à  Rome,  par 
l'illustre  M.  dcRossi,  au  cimetière  de  Callixte,  se  trouve 
un  fragment  de  sarcophage,  aux  angles  supérieurs  duquel, 
aux  lieu  et  place  des  emblèmes  du  soleil  et  de  la  lune,  on 
fait  hgurer  les  tètes  de  saint  Pierre  et  de  saint  Paul. 

Les  chrétiens  de  l'église  primitive  conservaient  donc, 
comme  ornement  des  tombeaux,  des  figures  aux  angles; 
mais  pour  leur  donner  un  caractère  en  harmonie  avec 
leur  histoire  et  leur  symbole,  ils  devaient  substituer  au 
culte  des  dieux  païens  le  culte  de  leurs  martyrs,  et  pla- 
cer les  sépultures  de  leurs  morts  SoUS  leur  protection. 

Le  moyen  âge  reprit  l'antique  usage  de  placer  les 
emblèmes  du  soleil  et  de  la  lune  sur  les  tombeaux.  La 
pierre  tumulaire  du  musée  de  Chàteauroux  en  est  une 
preuve  sans  réplique.  Il  y  a  plus:  nous  avons  des  preuves 
sans  nombre  que  ces  emblèmes  furent  placés,  comme 
accessoires  du  crucifiement,  dans  les  tableaux,  dans  les 
verrières,  dans  les  bas -reliefs  et  dans  les  mosaïques, 
surtout  depuis  le  xii^  siècle  jusqu'à  la  Renaissance. 

Le  soleil  était  représenté  sous  une  figure  humaine 
radieuse  ;  la  lune,  sous  celle  d'un  croissant  :  c'est  le 
type  ordinaire. 

D'autres  foi?,  ce  sont  deux  demi-figures  humaines, 
coiffées,  l'une  d'un  diadème  royal,  et  l'autre  d'un  crois- 
sant, comme  sur  l'une  des  ampoules  de  Monza. 

On  croit  assez  généralement  que  les  images  du  soleil  et 
de  la  lune  sont  placées  sur  les  crucifix  pour  rappeler 
l'obscurité  simultanée  dont  ces  deux  astres  furent  atteints 


XJ."    SKSSIOiN,    A    CllATEAlIKOUX.  503 

au  iiioment  de  la  luorl  du  Hédouipteur  ;  luais  uuus 
regardons  comuie  plus  probable,  dit  M.  l'abbé  Martiguy 
[Dictionnaire  des  antiquités  chrétiennes,  art.  crucifix), 
qu'on  a  eu  l'intention  d'exprimer  ainsi  les  deux  natures 
en  Jésus-Christ  :  la  divinité  par  le  soleil  qui  brille  de  sa 
propre  lumière,  et  l'humanité  par  la  lune,  corps  opaque 
qui,  ne  brillant  que  d'une  lumière  réfléchie,  est  sujet  à 
diverses  phases  d'éclat  et  d'obscurcissement,  tout  comme 
la  nature  humaine  qui,  unie  dans  la  personne  de  Jésus- 
Christ  à  la  nature  divine,  participe  à  la  splendeur  de 
celle-ci,  sans  être  affranchie  des  défectuosités  de  celle-là. 

Voici  l'explication  des  savants  ;  mais  s'il  m'était  permis 
de  donner  la  mienne,  je  dirais  volontiers  que  les  deux 
astres  ont  été  placés  autour  de  la  tète  de  Jésus-Christ 
mourant  sur  la  croix,  pour  signifier  que  celui  qui  expire 
sur  un  gibet,  comme  un  criminel,  est  cependant  l'auteur 
de  la  nature,  représentée,  dans  ce  grand  drame,  par  les 
deux  plus  beaux  luminaires  de  la  création. 

Que  les  crucifixions  ne  nous   fassent  pas  oublier  les 
dalles  tumulaires  ! 

Que  signifient  donc  les  emblèmes  du  soleil  et  de  la 
lune  par  les  pierres  des  tombeaux  du  moyen  âge? 

Qu'il  me  soit  permis  de  dire  que  l'opinion  que  je  pré- 
fère à  toutes  autres  est  celle  de  ceux  qui  admettent  que 
les  emblèmes  du  soleil  et  de  la  lune  représentent  la  vie 
de  l'homme.  La  lune,  la  vie  terrestre  avec  ses  obscurités  ; 
le  soleil,  la  vie  céleste  avec  ses  clartés  divines;  et  pourquoi 
ne  dirions-nous  pas,  puisqu'il  s'agit  d'expliquer  le  sym- 
bolisme de  ces  emblèmes  gravés  sur  le  sépulcre  d'un  moine, 
que  la  lune  représente  la  vie  que  les  chrétiens  mènent  au 
milieu  du  monde,  vie  pleine  d'illusions,  de  ténèbres  et 
d'obscurités;  et  que  le  soleil,  au  contraire,  ligure  la  \ie. 
parfaite  du  cloitre,  qui,  dans  les  ordres  fervents,  est  illu- 


504       CONGRÈS  ARCHÉOLCGIQUE  DE  FKANCE. 

minée  de  toutes  les  clartés  célestes,  et  inondée  de  grâces 
et  de  bénédictions,  si  bien  symbolisées  par  les  quatre 
rayons  qui  sortent  de  la  croix  de  Jésus-Christ,  que  l'artiste 
a  si  heureusement  placée  sur  le  disque  du  soleil  ? 


M.  Guillard,  ancien  agent  voyer  d'arrondissement, 
communique  le  fruit  de  ses  recherches  pour  compléter  les 
renseignements  recueillis  sur  les  monuments  mégali- 
thiques. Il  signale  un  camp,  près  de  Sassierges,  offrant 
des  dispositions  toutes  particulières,  qu'il  décrit  dans  la 
note  ci-jointe  : 


Note  sur  un  ancien  camp  situé  en  la  com- 
mune de  Sassierges,  au  lieu  dit  Blard. 

On  remarque,  à  quatre  kilomètres  environ  de  la  petite 
ville  d'Ardentes,  sur  les  limites  réciproques  des  cummunes 
de  Mâron,  d'Ardentes  et  de  Sassierges,  s'élendant  princi- 
palement sur  le  territoire  de  cette  dernière  commune,  dans 
lesbrandes  du  village  de  Blard,  une  étendue  de  terrain  de 
quarante-quatre  hectares  environ  de  superficie,  qui  ofire 
une  disposition  toute  particulière  (fig.  1).  Elle  est  couverte 
de  trous  creusés  de  main  d'homme,  sauf  dans  la  partie 
du  milieu,  dont  la  largeur  moyenne  est  de  80  mètres  et 
la  longueur  de  280  mètres.  La  tradition  vivante  du  pays 
y  attribue  un  origine  romaine  et  y  rattache  des  guerres 
très-anciennes. 

Les  trous  sont  disposés  en  quinconces  irréguliers, 
et  ils  ont  la  forme  de  cônes  tronqués  renversés  (fig.  3, 
4  et  5).  Le  diamètre  en  est  de  2  mètres  50  à  3  mètres, 


>t- 


7V?J. 


Plan  du  Camp  df  Biard 


Jloma, 


.SJ&—i 


i'cAe/âe    de.  -1 

I6P00 
ou     ûTOOf  pouj-  /6".\ 


Coupe   a.b. 


KcàeUe     ou   û'ooô /j'^  /."^ÛO 


XL*    SESSION,    A   CHATEAUROUX.  505 

sur  0"  (>()  à  O"  80  do  prolbndeur;  quelques-uns  ont  jus- 
qu'à o  mètres  de  largeur  sur  1  iiiètre  50  de  creux.  Tous 
ont,  en  conséquence,  au  fond,  une  partie  plane  qui  varie 
de  l'un  ù  l'autre.  Us  sont  éloignés,  d'axe  en  axe,  de 
4  mètres  50  à  G  mètres,  laissant  entre  leurs  bords  une  dis- 
lance de  2  à  3  mètres. 

L'échelle  du  plan  que  nous  joignons  à  cet  exposé  est 
trop  petite  (1/8000  ou  0"  001  pour  8  mètres)  pour  re- 
présenter exactement  le  détail  des  choses.  Nous  avons 
reproduit,  pour  qu'on  puisse  en  juger  (tig.  3  et  4.j,  un 
assemblage  de  trous  dans  les  deux  dispositions  extrêmes 
qu'ils  occupent:  celui  qui  offre,  d'un  côté,  la  forme  la 
plus  régulière,  et  de  l'autre,  la  plus  irrégulière. 

La  voie  romaine,  dite  Chaussée  de  César,  de  Bourges  à 
Argenton,par  Brnodu7'um  et  Alerta^  traverse  ces  terrasse- 
raenis,  dans  leur  plus  faible  largeur,  sur  400  mètres 
environ.  Elle  existait  avant  qu'ils  fussent  établis,  car 
elle  est  coupée  par  des  trous  semblables  à  ceux  que 
nous  venons  de  décrire.  Depuis,  un  chemina  été  pratiqué 
au  long  de  cette  voie ,  qu'il  traverse  deux  fois  aux 
points  où  les  petites  excavations  étaient  les  moins  pro- 
fondes. Le  détail  N,  développé  (tig.  2.),  indique  cette 
particularité.  Aux  deux  extrémités,  la  voie  est  en  relief; 
elle  a  3  mètres  de  largeur  en  couronne,  et  les  talu?,  qui 
ont  de  chaque  côté  I  mètre  50  à  la  base,  paraissent  avoir 
été  labourés  comme  les  terres  antiques. 

Le  périmètre  de  ce  camp  pouvait,  autrefois,  être  très- 
régulier;  mais,  depuis  longtemps,  cej-taines  parties  ont 
été  mises  en  culture,  et  il  serait  bien  difticile  d'en  déter- 
miner actuellement  les  limites  exactes.  Les  lignes  ponc- 
tuées, établies  sur  le  plan  général  (fig.  1.),  indiquent 
approximativement  le  contour  de  l'espace  où  l'on  peut 
remarquer,  soit  des  trous  bien  conservés,  soit  remplace- 


506       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ment  de  ceux  qui  y  étaient  ouverts  il  y  a  seulement 
quelques  années.  Dans  le  laillis  de  la  Boiffarderie,  il 
s'en  trouve  également;  mais  le  bois  est  d'une  époque  plus 
récente,  car  les  arbres  s'élèvent  sur  les  bords,  sur  les  talus 
et  dans  le  fond  des  excavations. 

L'altitude  du  terrain  est  une  des  plus  élevées  de  la  cir- 
conscription, et  du  coteau  faiblement  incliné  à  l'ouest,  sur 
lequel  ce  retranchement  est  assis,  on  disting-ue  six  clochers: 
celui  d'Ambrault,  d'Ardentes,  de  Bouimiers,  de  Màrou, 
de  Sassierges  et  de  Saiut-Aout.  D'autres  trous  existent 
ailleurs,  à  une  distance  plus  ou  moins  éloignée,  dans 
ce  qui  était  autrefois  la  brande.  Ils  ne  paraissent  pas 
avoir  été  réliés  aux  premiers  directement.  Étaient-ils 
destinés  à  couvrir  des  postes  avancés,  qui  protégeaient  le 
camp  principal,  ou  étaient-ils  établis  entre  des  obstacles 
naturels,  des  bois  très-touffus,  par  exemple,  pour  accroître 
la  difficulté  des  approches?  Celte  question,  en  raison  de 
l'absence  complète  de  renseignements,  nous  semble  devoir 
rester  sans  réponse. 

L'époque  à  laquelle  ces  travaux  de  défense  peuvent 
remonter,  nous  semble  très-problématique.  Dans  tous  les 
cas,  ils  sont  postérieurs  à  la  voie  romaine,  par  conséquent, 
au  règne  d'Auguste,  sous  lequel  ou  suppose  que  cette  voie 
a  été  construite. 

M.  de  Cougny,  directeur  de  la  Société,  à  l'occasion  de 
la  communication  de  M.  Guillard,  signale  une  semblable 
découverte  faite  dans  la  forêt  de  Ghinou.  Un  mémoire  sur 
ce  sujet  a  été  publié,  cette  année,  dans  le  n°  VI  du  Bulletin 
monumental. 

La  vingt-neuvième  question  est  traitée  par  M.  l'abbé 
Damourette.  Il  détermine  la  signification  des  arbres  sym- 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  5(»7 

boliques,  existant  dans  la  chapelle  de  l'Hôtel-Uieu  d'is- 
soudun. 

Les  arbres  généalogiques. 

Dans  la  chapelle  de  l'hospice  d'issoudun,  on  voit  deux 
arbres  emblématiques,  sculptés  en  gros  relief,  sur  de  larges 
pierres. 

Au  sommet  de  l'un  des  arbres  symboliques,  on  aperçoit 
la  sainte  Vierge  entourée  de  rayons  flamboyants,  et  tenant 
sur  son  bras  gauche  l'Enfant  divin.  Deux  anges  qui  sem- 
blent descendre  du  ciel,  déposent  une  couronne  sur  la  tète 
de  la  Fille  des  rois  de  Juda.  Un  personnage,  couché  au 
pied  de  l'arbre,  contemple,  à  travers  les  âges,  le  mystère 
de  la  Vierge  mère;  ce  personnage  est  Jessé.  L)e  la  racine 
de  Jessé  est  sortie  une  tige,  cette  tige  c'est  la  sainte 
Vierge.  Elle  porte  en  main  la  belle  fleur  qu'elle  a  pro- 
duite :  Jésus-Christ. 

Autour  de  la  Vierge,  sur  les  branches  de  l'arbre,  on 
voit  sept  personnages  à  droite,  et  sept  personnages  à 
gauche;  ce  sont  les  rois  de  la  tribu  de  Juda  ;  il  est  facile 
de  les  reconnaître  à  leurs  sceptres  et  à  leurs  couronnes. 
Un  d'eux  a  une  harpe  en  main;  c'est  incontestablement  le 
saint  roi  David. 

David  est  le  fils  «le  Jessé,  et  la  souche  d'où  les  rois  de 
Juda  sont  sortis;  aussi  est-il  près  de  Jessé,  et  placé  à  la 
tête  de  ses  descendants. 

Un  de  ces  rois  tient  en  main  une  épée;  sa  couronne  est 
tombée  à  terre.  N'est-ce  pas  le  malheureux  Sédécias?  11  a 
vainement  combattu  contre  la  formidable  armée  de  Nabu- 
chodonosor.  Sa  ville  capitale  est  prise;  il  rend  son  épée; 
il  perd  la  couronne.  On  le  conduit  captif  à  Babylone. 


o08       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Sur  le  second  arbre,  il  me  semble  reconnaître,  à  ses 
vêtements  sacrés,  le  grand  prêtre  Aaron.  C'est  le  chef  de 
la  race  sacerdotale,  il  n'est  pas  l'ancêtre  de  Marie,  mais 
cependant  Marie  est  alliée  à  la  famille  Aaron.  On  a  voulu 
rappeler  que  Marie  résumait  en  elle  toutes  les  gloires  de 
la  famille  royale  et  de  la  faunlle  sacerdotale;  les  Pères 
de  l'Église  ne  manquent  pas  de  nous  le  faire  remarquer. 

Moïse  est  facile  à  reconnaître,  aux  Tables  de  la  loi  qu'il 
porte  en  main. 

Les  autres  personnages  paraissent  être  les  prophètes 
et  les  sibylles.  Ce  qui  le  prouve,  c'est  qu'on  voit  au  haut 
de  l'arbre  le  Saint-Esprit  qui  les  a  éclairés  de  ses  lumières 
divines. 

On  reconnaît  les  sibylles  à  leurs  costumes  de  femmes. 

Qu'on  ne  s'étonne  pas  de  voir  les  sibylles  à  côté  des 
prophètes.  Dans  le  chaut  si  grave  de  la  prose  des  morts, 
Malabranca  met  sur  le  même  ligne  David  et  la  sibylle. 
Te&te  David  cum  sibylla. 

La  liturgie  parisienne  de  i73i  avait  remplacé  cette 
phrase  pleine  de  signification  par  ces  mois  :  Crucis  oxpen- 
dens  vexilla.  Mais  l'Église  romaine  vient  de  les  effacer 
avec  autorité  ;  elle  maintient  le  Teste  David  cum  sibylla. 
Elle  croit  qu'il  y  a  des  choses  inspirées  par  le  Saint- 
Esprit,  dans  les  vers  sibyllins. 


M.  l'abbé  Bordé  cité  des  faits  archéologiques  qui  vien- 
nent à  l'appui  des  conclusions  de  M.  l'abbé  Damourette. 

M.  de  Laurière,  président,  à  l'occasion  de  la  question, 
s'étonne  que,  vu  le  grand  nombre  d'arbres  généalo- 
giques de  la  même  époque,  le  cloute  ait  pu  se  produire 
en  Berry  sur  la  signification  des  arbres,  objets  de  la  dis- 
cussion. 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  509 

M.  de  Lauritu'e  signale  on  niitrn  trois  personnages  que 
l'on  remarque  au  pied  de  ces  arbres.  Le  sujet  représente 
une  opération  chirurgicale.  On  voit  le  patient,  et  deux 
autres  personnages,  saint  Cosnie  et  saint  Daniien. 
L'exécution  de  ce  groupe  est  exquise.  Le  Congrès  (ait  des 
vœux  pour  la  conservation  de  ce  monument. 


M.  Fauconneau-Dufresne,  sur  la  trentième  question, 
communique  des  renseignements  considérables  et  détaillés, 
qu'il  a  remis  pour  le  compte  rendu. 

A  quelle  époque  remontent  les  archives 
municipales  des  principales  villes  de  la 
région  ?  En  signaler  les  documents  his- 
toriques les  plus  importants. 

Je  me  bornerai  à  dire  quelques  mots  des  archives 
municipales  du  département  de  l'Indre. 

Nous  avons  d'abord  à  Ghâteauroux  trois  dépôts  impor- 
tants :  4°  les  archives  de  l'hôtel  de  ville  ;  2°  les  archives 
du  palais  de  justice  ;  3°  surtout  les  archives  de  la  préfec- 
ture ou  du  département. 

Je  m'abstiendrai,  vous  le  comprendrez,  de  parler  de  ces 
dernières,  laissant  à  M.  Hubert,  notre  savant  archiviste, 
le  soin  de  vous  entretenir  du  grand  et  précieux  dépôt 
confié  à  ses  soins  et  dont  il  a  publié  récemment  le  premier 
volume  de  V Inventaire  sommaire. 

I.  —  Archives  de  l'hôtel  de  ville. 

Ces  archives  se  divisent  en  deux  parties  :  la  première, 
antérieure  à  1790,  est  la  plus  considérable  et  la  plus  inté- 


o\0  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ressante;  la  seconde   date  de  cette  époque  jusqu'à   nos 
jours. 

1°  Les  archives  antérieures  à  1790  commencent  à  l'an- 
née 1370  ;  on  y  trouve  les  subdivisions  suivantes  : 

Actes  constitutifs  et  politiques  de  la  commune.  —  Tran- 
sactions entre  Guy  de  Chauvigny  et  ses  successeurs  avec 
les  bourgeois ,  manants  et  habitants  de  Chàteauroux. 
Affranchissement  du  cens  envers  diverses  personnes. 
Sentences  rendues  par  divers  fonctionnaires  du  baillage. 
Nominations  de  députés  des  divers  États.  Correspondance 
adressée  aux  maires  et  échevins. 

Administration  communale.  —  Délibérations  relatives 
au  grenier  à  sel.  Règlement  de  la  milice  bourgeoise. 
Projet  du  comte  d'Esseville  sur  la  navigation  de  l'Indre. 

Impôts  et  comptabilité.  —  Confection  des  rôles  de  la 
taille.  Service  funèbre  pour  le  dauphin.  Comptes  relatifs 
à  la  corvée.  Reconnaissances  de  rentes.  Dépenses  muni- 
cipales. Péages.  Revenus  patrimoniaux.  Droits  réunis. 
Dons  gratuits.  Tailles  et  gabelles.  Provisions  diverses. 
Anciens  droits  royaux.  Comptes  de  la  ville.  Manufacture 
royale  de  draps. 

Propriétés  communales. —  Liste  des  corvéables.  Travaux 
sur  les  routes,  places  et  promenades.  Réparation  aux 
églises.  Adjudication  des  lavoirs,  des  pavages,  etc.  Maison 
du  Temple.  Construction  des  pilastres  de  la  porte  Saint- 
Denis.  Traité  relatif  au  collège. 

Affaires   militaires.   —  Transport   de   troupes.   Milice 

bourgeoise.  Tarifs  pour  les  étapes.  Logements  militaires. 

Justice,  procédure  et  police.  —  Procès,  contestations. 

Création  des  garde-vignes,  etc.  Procès  avec  la  comman- 

derie  de  l'Ormiseau.  Procès  divers. 

Culte,  instruction,  assistance  publique. —  Service  Saiut- 
Côme  pour  les  médecins  et  chirurgiens.   Réception  des 


XL"    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  31  1 

aspirants,  etc.  Fabrique  de;  lï'gliso  Sainl-Aiidir.  Église 
d'Arthon.  Fabrique  de  l'église  Saint-Martin.  Collège 
(ancien).  Bureau  de  secours.  Subsistances. 

Etat  civil.  —  Paroisses  Saint-Martin,  Saint-Christophe, 
Saint-André,  Saint-Denis,  Hôtel-Dieu. 

Commerce,  industrie,  agriculture.  —  État  nominatif 
des  employés  de  la  manufacture  royale.  Mercuriales. 

Documents  divers.  —  Rentes,  droits  de  francs-fiefs, 
ordres,  rôles   de  supplément,  etc.  Condamnation  du  roi. 

2"  Archives  depuis  d796.  Cette  partie  des  archives  est 
relative  aux  lois,  aux  actes  administratifs  de  la  préfecture, 
aux  livres  divers,  aux  actes  de  l'administration  munici- 
pale, à  l'état  civil,  à  la  population,  à  la  statistique,  aux 
contributions,  aux  affaires  militaires,  à  la  police,  au  per- 
sonnel, à  la  comptabilité,  aux  biens  communaux  affermés 
ou  livrés  à  la  jouissance  commune,  à  la  voirie,  aux  pièces 
diverses  et  au  mobilier  de  la  mairie. 

Vous  le  voyez.  Messieurs,  ces  archives  municipales 
proprement  dites  contiennent  des  documents  importants 
pour  notre  ville.  Ceux  gui  voudraient  prendre  la  peine  de 
les  dépouiller  complètement  y  trouveraient  les  éléments 
d'un  livre  curieux  et  instructif.  L'histoire  municipale  de 
notre  ville  est  encore  à  faire. 


II.  —  Archives  du  palais  de  justice. 

Toutes  les  archives  ont  entre  elles  des  points  de  con- 
nexion, et  l'on  trouve  dans  celles  du  grefte  de  nos  tribu- 
naux des  pièces  qui  se  rapportent  aux  intérêts  municipaux 
et  politiques.  Vous  allez  en  juger.  Messieurs,  par  l'état 
sommaire  que  je  vais  vous  présenter. 

Ces  archives,   comme   les  archives  municipales,  sont 


5i2       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

divisées  en  deux  parties  prinri pales  :  archiv^^s  avant  1790 
et  archives  depuis  1790. 

1°  Archives  avant  1790.  Justices  seigneuriales  depuis 
1400.  Baillag-e  de  Chàteauroux.  Duché.  Éleclion  de  1600 
à  1790.  Baillage  d'Issoudun,  de  1651  à  1790.  Baillage  de 
Ghâtillon,  de  170.^i  à  1792. 

Marquisat  du  Blanc,  baillage,  élection,  tribunal  de 
district. 

Argenton,  élection,  grenier  à  sel,  district. 

Buzançais,  comté  et  baillage. 

Valençay,  justice  seigneuriale. 

Justices  diverses,  minutes  de  notaires. 

2°  Archives  après  1790.  Tribunal  du  district  de  Chà- 
teauroux, créé  par  la  loi  du  24  août  1790. 

Tribunal  du  département  établi  à  Chàteauroux,  divisé 
en  deux  sections,  créé  par  la  loi  du  5  fructidor  an  III. 

Registres,  tribunal  de  première  instance,  créé  par  la 
loi  du  27  nivôse  an  VIII.  Jugements  civils,  renonciations 
et  acceptations  bénéficiaires. 

Papiers  et  registres  divers,  concernant  principalement 
lu  partie  correctionnelle  et  criminelle.  Procédures  fores- 
tières. Affaires  correctionnelles  jugées  sur  appels.  Procé- 
dures criminelles.  Cour  d'assises.  Arrêts  rendus  en 
matière  criminelle.  Appels.  Jugements  correctionnels. 
Pourvois  en  cassation.  Interdictions.  Casiers.  Papiers 
divers  en  matière  civile,  appartenant  aux  tribunaux  du 
district,  du  département  et  de  première  instance,  qui  se 
sont  succédé  depuis  1790.  Adjudications  et  ordres.  Ordres 
et  distributions.  Référés.  Expropriation  pour  cause  d'uti- 
lité publique.  Rôles.  Droits  de  greffe.  Nominations  de 
fonctionnaires  et  ofliciers  ministériels.  Réquisitoires. 
Délibérations  du  tribunal.  Pièces  annexées  à  l'état  civil. 
Bulletin  des  lois. 


XL"   SESSION,    A    C.lIATKAUltOU.X.  fil.'j 

Ces  archivas  contieniKnit  on  toul  ;{,il  i  [)iècos.  Une  des 
plus  importantes  et  des  plus  curieuses  est  le  procès-verbal 
des  élections  au  bailliag-e  de  Châteaurnnx  pour  les  (^'itats 
généraux  de  1789,  suivi  du  résumé  des  cahiers  des 
pétitions,  plaintes  et  remontrances  du  bailliage  royal  de 
Châteauroux. 

Il  y  a  dans  ces  secondes  archives,  comme  vous  le  voyez, 
Messieurs,  une  source  abondanio  pour  le  travailleur  qui 
voudrait  les  réunir  en  ordre  didactique  avec  celles  de 
notre  municipalité. 

Il  me  reste  à  vous  parler  des  archives  municipales  des 
arrondissements  d'Issoudun,  de  la  Châtre  et  du  Blanc. 


M.  Hubert,  archiviste,  traite  avec  de  savants  développe- 
ments la  même  question. 

Note  de  M.  Hubert. 

Messieurs, 

Pour  achever  de  traiter  la  question  des  archives  muni- 
cipales de  l'Indre,  il  est  utile  déparier  des  nombreux  docu- 
ments conservés  dans  le  dépôt  des  archives  du  départe- 
ment. En  elfet,  ces  papiers  et  parchemins  contiennent 
tous  des  renseignements  plus  ou  moins  précieux  sur  les 
événements  qui  se  sont  passés  dans  les  différentes  com- 
munes de  nos  quatre  arrondissements,  sur  les  hommes  et 
les  familles  qui  les  ont  habitées,  sur  les  monuments  qui 
s'y  trouvaient  ou  s'y  trouvent  encore,  enfin  sur  les  évé- 
nements plus  ou  moins  importants  qui  se  sont  accomplis 
sur  leur  territoire. 

XL*  SESSION.  33 


oH  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

I.  Introduction. 

Division  des  archives  départementales. 

Les  archives  départementales  se  divisent  en  deux 
grandes  sections.  On  appelle  archives  anciennes  celles  qui 
sont  antérieures  à  1790,  et  archives  modernes  celles  qui 
sont  de  dates  plus  récentes. 

Nombre  approximatif  des  documents  déposés  aux 
archives  de  l'Indre. 

En  chiffre  rond,  abstraction  faite  des  registres  et  cahiers 
qui  sont  relativement  peu  nombreux,  le  nombre  des 
pièces  isolées  des  archives  anciennes  de  l'Indre  peut  être 
évalué  à  trois  cent  mille;  celui  des  archives  modernes,  au 
chiffre  énorme  d'un  million  et  demi  à  deux  millions. 

Difficulté  de  leur  mise  en  ordre. 

On  peut  juger  de  la  difficulté  du  dépouillement,  du 
classement  et  de  l'inventaire  d'un  si  grand  nombre  de 
pièces,  si  l'on  réfléchit  au  désordre  ou,  pour  mieux  dire, 
au  véritable  chaos  que  les  déplacements  successifs  ont 
introduit  dans  cet  amas  considérable,  depuis  quatre-vingts 
ans  que  le  dépôt  en  a  été  fait  à  la  préfecture.  Toutefois, 
ce  n'est  pas  tant  le  nombre  que  l'isolement  des  pièces  qui 
grandit  la  difficulté.  En  effet,  dans  cette  bibliothèque  où 
nous  sommes  réunis  actuellement  (1),  il  existe  certaine- 
ment un  nombre  presque  aussi  considérable  de  feuilles  de 
papier  ou  parchemin,  imprimées  ou  manuscrites.  Un 
calcul    approximatif  est  facile  à  faire:  on   compte    ici 

(\j  La  bibliothèque  de  la  mairie  de  Chàteauroux. 


XL"   SESSION,    A    CIIATEAUKOUX.  51  f) 

10,000  volumes  environ  ;  en  supposant  une  moyenne  de 
150  feuillets  par  volume,  c'est-à-dire  300  pages,  cela  fait 
un  million  et  demi  de  feuillets;  or,  nous  n'avons  évalué 
les  pièces  isolées  des  archives  modernes  du  département 
de  l'Indre  qu'à  un  chiffre  placé  entre  un  million  et  demi 
et  deux  millions.  Cependant  le  classement  est  relative- 
ment très-facile,  comme  dans  toute  bibliothèque,  non- 
seulement  parce  que.  les  feuilles  imprimées  ou  manus- 
crites ne  s'y  trouvent  pas  à  l'état  d'isolement,  comme  dans 
un  dépôt  d'archives,  mais  encore  parce  que  la  nature  du 
contenu  de  chaque  réunion  de  feuillets  formant  un 
ouvrage  en  un  ou  plusieurs  volumes  est  parfaitement 
déterminée  et  homogène. 

Dans  un  dépôt  d'archives,  au  contraire,  il  n'en  est  pas 
ainsi.  Les  liasses  renferment  souvent  des  pièces  de  la 
nature  la  plus  diverse;  en  outre,  un  grand  nombre  de 
liasses  ont  été  détachées,  et  les  pièces  qu'elles  contenaient 
mêlées  ensemble. 

Pour  faire  cesser  en  partie  l'encombrement  matériel  qui 
résultait  de  cet  état  de  choses,  on  avait  fait  des  sortes  de 
murs  avec  les  registres  et  les  liasses  qui  n'avaient  pas  été 
détachées  ;  puis,  derrière  cette  sorte  de  retranchement,  on 
avait  jeté  pêle-mêle  tout  ce  qui  encombrait  le  parquet  des 
salles  (1).  Les  registres  et  les  cahiers  sont  plus  faciles  à 

(1)  Pour  ajouter  à  ce  désordre,  le  plafond  s'était  effondré  dans 
une  des  pièces  du  dépôt  ;  le  toit  laissait  passer  la  pluie  à  la 
partie  correspondante,  en  sorte  qu'une  portion  des  documents 
placés  en  cet  endroit  était  endommagée  par  l'humidité.  .le  ne 
parle  pas  des  autres  causes  de  désordre,  comme  les  atteintes 
des  animaux  rongeurs,  les  immondices  accumulées  par  les 
oiseaux  de  nuit,  etc.  D'ailleurs,  il  est  vrai  de  dire  (pie  tel 
était  l'état  des  archives  départementales  et  autres  de  toute  h 
France. 


Kl  G       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

classer,  mais  ils  sont,  comme  je  l'ai  dil  plus  haut,  en 
petit  nombre,  relativement  aux  pièces  détachées. 

Quoique  les  archives  modernes  aient  aussi  leur  impor- 
tance historique  et  archéoloi^ique,  surtout  pour  les  époques 
de  la  Révolution  et  de  l'Empire,  je  ne  parlerai  ici,  dans 
ce  très-court  et  très-rapide  exposé,  que  des  Archives  an- 
ciennes. 

II.  Origine  des  archives  départementales  de  l'Indre. 

Les  archives  départementales  de  l'Indre  proviennent, 
en  très-grande  partie,  de  la  confiscation  dont  furent 
frappés,  à  l'époque  révolutionnaire,  les  divers  établisse- 
ments ecclésiastiques,  tant  réguliers  que  séculiers,  les 
familles  d'émigrés  et  aussi  les  études  de  notaires,  mais 
ces  derniers  seulement  pour  les  pièces  auxquelles  on  don- 
nait la  qualification  d'entachées  de  féodalité. 

Une  faible  partie  provient  du  duché-pairie  de  Châ- 
teauroux. 

III.  Inventaire  sommaire  imprimé. 

Les  personnes  qui  désireraient  connaître  l'étendue  des 
archives  départementales  de  l'Indre,  devront  étudier  le 
!'''■  volume  de  V Inventaire  sommaire  imprimé  des  archives, 
qui  est  depuis  quelque  temps  mis  en  vente  chez  tous  les 
libraires  du  département. 

C'est  un  volume  in-4''  à  deux  colonnes,  de  363  pages. 
Comme  il  existe  une  pagination  pour  chaque  série,  il  est 
bon  d'avertir  que  les  trois  séries  qui  s'y  trouvent,  en  tout 
ou  en  partie,  comptent,  la  première  8  pages  seulement,  la 
deuxième  163,  et  la  troisième  192,  en  tout  363  ])ages.  La 
rédaction  de  la  matière  d'un  autre  volume  est  presque 
achevée;  enfin,  l'ouvrage  se  terminera  par  un  triosième 


XL»  SESSION,    A   CHATEAUROUX.  547 

volume,  contenant  quatre  tables  qui  rendront  les  recherches 
faciles  et  promptes.  Ces  quatre  tables  seront  :  1"  une  table 
(les  divers  fonds,  oii  l'on  verra  d'un  seul  coup  d'œil  toute 
retendue  de  l'ouvrage;  2"  trois  tables,  par  ordre  alpha- 
bétique, pour  les  diverses  matières  contenues  dans  l'In- 
ventaire sommaire,  pour  les  noms  propres  de  personnes  et 
pour  les  noms  propres  de  lieux.  Ces  trois  dernières  tables 
seront  beaucoup  plus  considérables  que  la  première,  et 
l'on  y  trouvera  toutes  les  facilités  que  l'on  peut  désirer 
pour  toutes  sortes  de  recherches.  Ces  trois  tables  indique- 
ront, au  moyen  des  pages  et  des  numéros  de  série,  tous  les 
endroits  de  l'ouvrage  où  il  est  fait  mention  de  la  même 
chose  (institution,  événement,  etc.),  de  la  même  personne 
et  du  même  livre. 

Quoique  très-succinct,  cet  inventarie  suffit  à  faire  con- 
naître les  principaux  documents  et  à  mettre  sur  la  trace 
des  autres. 

Je  ne  ferai  ici  qu'énumérer  les  divers  fonds  dont  se 
composent  les  Archives  départementales,  et  dire  quelques 
mots  sur  les  documents  les  plus  anciens  et  les  plus  remar- 
quables sous  divers  rapports. 

IV.  Chartes. 

Ce  que  nous  avons  assurément  de  plus  important,  ce 
sont  les  chartes  originales.  Avant  d'en  dire  quelques  mots, 
il  ne  sera  pas  inutile  de  donner  la  définition  de  ce  mot, 
d'autant  plus  qu'une  des  grandes  écoles  de  France  porte  le 
titre  d'École  nationale  des  Chartes. 

Le  mot  charte  (l)  bignifie  littéralement  papier.  Il  s'em- 

(1)  Du  latin  cliarta,  papier;  par  extension,  écrit,  livre. 
On  dit  aussi,  mais  moins  fréquemment,  chartre,  du  latin 
cartula,  diminutif  de  carta. 


518       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ploie  en  général  pour  sig-nifier  toutes  espèces  de  vieux 
titres.  C'est  de  cette  signification  que  vient  le  mot  char- 
trier,  qui  sert  à  désigner  l'endroit  où  l'on  conservait  jadis 
les  anciens  papiers  et  parchemins  dans  les  chapitres,  les 
abbayes  et  autres  établissements.  Mais  on  entend  aujour- 
d'hui plus  spécialement  par  charte  les  titres  remarquables 
soit  par  leur  antiquité,  soit  par  leur  importance,  sous  le 
rapport  de  la  diplomatique  ou  de  la  paléographie.  On 
peut  ajouter  que  les  chartes  sont  le  plus  souvent  en  par- 
chemin. 

Les  archives  de  l'Indre  renferment  un  grand  nombre 
de  chartes  dans  le  sens  qui  vient  d'être  expliqué. 

\ .  —  Chartes  du  xi**  siècle. 

Les  plus  anciennes  chartes  originales  (abstraction  faite 
des  copies)  datent  du  xi""  siècle,  c'est-à-dire  du  siècle  qui 
commence  l'an  1001  et  se  termine  à  l'année  1100  inclusi- 
vement. 

Ces  chartes  du  xi''  siècle,  malheureusement,  ne  sont 
pas  nombreuses;  huit  seulement  remontent  à  cette  époque 
reculée. 

La  plus  ancienne  fait  partie  du  fonds  du  chapitre  de 
Saint-Laurien  de  Vatan.  Elle  remonte  à  l'année  1012,  ou 
peut-être  plus  haut.  L'acte  n'étant  pas  daté,  on  ne  peut 
tixer  l'époque  de  sa  confection  que  d'une  manière  approxi- 
mative; il  ne  peut  être  postérieur  à  1012,  parce  que  l'un 
des  signataires  mourut  cette  même  année  1012. 

Les  autres  chartes  du  xi'  siècle,  au  nombre  de  sept,  se 
trouvent  dans  le  fonds  du  prieuré  de  Saint-Germain-de- 
Crozon,  dépendant  de  la  célèbre  abbaye  de  Marmoutier. 

Ces  huit  chartes  si  anciennes  sont  remarquables  par 
'eur  brièveté.  A  cette  époque  reculée,  on  avait  le  secret, 


XL*   SESSION,    A   CIIÀTEAUROUX.  519 

perdu  à  ce  qu'il  parait  de  nos  jours,  de  dire  les  choses  en 
peu  de  mots.  Elles  sont  des  donations  pieuses,  faites  à  des 
ctablisseraents  religieux  par  de  grands  seigneurs  de  cette 
époque.  Je  ne  donnerai  pas  de  détails  sur  leur  contenu, 
ce  qui  m'entraînerait  trop  loin.  L'écriture  en  est  fort  belle 
et  très-lisible,  et  toutes  sont  parfaitement  conservées,  sauf 
la  plus  ancienne,  qui,  ayant  été  pliée  longtemps  et  sans 
doute  très-souvent  dépliée,  est  presque  entièrement  coupée 
dans  les  plis;  en  outre,  le  ])archemin  se  lève  par  écailles  du 
côté  de  la  chair,  où  se  trouve  l'écriture,  le  côté  des  poils  fai- 
sant le  verso. 

Ces  vieux  témoins  d'une  époque  si  éloignée  de  nous 
mériteraient  non-seulement  d'être  conservés  sous  verre, 
mais  encore  d'être  reproduits  à  plusieurs  exemplaires  par 
la  photographie.  De  cette  manière  on  pourrait  en  enri- 
chir les  musées  et  les  bibliothèques  publiques  du  dépar- 
tement. 

2.  —  Chartes  des  xii%  xiii%  xiV  et  xv"  siècles. 

Dans  les  siècles  postérieurs,  les  chartes  des  archives  de 
l'Indre  sont  beaucoup  plus  nombreuses;  on  peut  les  éva- 
luer à  environ  trois  mille,  pour  les  xii%  xiii^  xiv%  xv''  et 
xvi*  siècles  (de  4101  à  1600  inclusivement). 

V.  —  Documents  autres  que  les  chartes. 

Ces  trois  mille  chartes  ne  sont  que  la  partie  la  plus 
minime  des  trois  cent  mille  pièces  diverses  dont  se  com- 
pose le  dépôt  des  archives  départementales  de  l'Indre, 
pour  la  partie  ancienne.  De  ces  documents,  qui  ne  méritent 
pas  le  nom  presque  pompeux  de  charte,  beaucoup  cependant 
ont  une  importance  historique  locale;  d'autres  nous  ini- 


520       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

tient  aux  mœurs  et  aux  usages  des  temps  passés  ;  tous 
s'éclairent  les  uns  par  les  autres,  et  beaucoup,  qui  n'ont 
aucune  importance  par  eux-mêmes,  en  acquièrent  en 
raison  des  éclaircissements  qu'ils  apportent  à  d'autres  plus 
importants.  Outre  les  pièces  isolées,  il  y  a  un  grand 
nombre  de  registres  ou  cahiers  de  divers  formats. 

VI.  —  Divers  fOxNds  des  archives  uÉrARTEMENTALES 
i)E  l'Indre. 

Je  vais  maintenant  énumérer  rapidement  les  ditlérents 
fonds  qui  composent  l'ensemble  des  archives  départemen- 
tales de  l'Indre. 

1.  —  Duché  de  Châteauroux  (un  seul  fonds). 

En  premier  lieu  se  présentent  les  archives  provenant  de 
l'administration  du  duché-pairie  de  Châteauroux,  dont  le 
dernier  duc  fut  le  comte  d'Artois,  le  même  qui  dans  la 
suite,  sous  le  nom  de  Charles  X,  succéda  sur  le  trône  de 
France  à  son  frère  Louis  XVIII. 

Ces  archives  ne  sont  que  de  faibles  épaves  des  nom- 
breux documents  de  toute  nature  qui  existaient  avant 
l'acquisition  du  duché  de  Châteauroux  par  le  roi  Louis  XV, 
en  l'année  1735. 

Peu  après  cette  époque,  nos  archives  locales  furent 
transportées  à  la  Chambre  des  Comptes,  à  Paris,  où  elles 
furent  reçues,  le  jeudi  13  avril  1741,  par  le  minis- 
tère de  Pierre-André  Titon  et  de  Pierre-Thomas  Perrot, 
conseillers,  maîtres  ordinaires  des  comptes,  et  de  trois 
conseillers  auditeurs. 

Le  récolemcnt  des  titres  expédiés  de  Châteauroux  dura 
jusqu'au  30  juin,  c'est-à-dire  deux  mois  et  demi,  ce  qui 
prouve  que  le  nombre  en  était  considérable. 


XL*    SESSION,    A   CRATEAUROUX.  ■>^i 

On  les  déposa  au  deuxième  étage  de  l;i  Cour  des 
Comptes,  dans  la  Chambre  des  fiefs.  Ce  lut  là  que  la 
Révolution  vint  les  prendre  pour  les  disperser  et  les  jeter 
à  tous  les  vents.  Il  ne  reste  de  ce  naulrag-c  que  vingt 
pièces  de  l'abbaye  de  Uéols,  que  l'on  conserve  actuelle- 
ment dans  l'immense  dépôt  des  Archives  nationales,  à 
Paris.  (Voyez  le  Mémoire  sur  les  Archives  de  l'Indre  anté- 
rieures à  1790,  par  M.  Desplanqucs,  dans  les  comptes 
rendus  de  la  Société  du  Berry,  10"  année  (1862-1863), 
pages  145  et  suivantes.)  On  peut  comprendre  toute  l'éten- 
due du  désastre,  en  parcourant  les  cinq  gros  volumes  in- 
tblio  (t),  contenant  l'inventaire  qui  en  avait  été  dressé, 
de  1738  à  1739,  trois  ans  après  l'acquisition  du  duché  de 
Châteauroux  par  Louis  XIV. 

Ce  premier  groupe  de  nos  archives  locales  contient 
80  registres  et  cahiers,  120  pièces  en  parchemin  et 
2,008  pièces  en  papier. 

Outre  les  volumes  consacrés  à  l'inventaire  des  titres  du 
duché,  ces  registres  sont  des  terriers,  des  lièves,  des 
registres  de  recettes  et  dépenses,  et  un  volume  relié  conte- 
nant le  plan  général  de  la  tbrét  de  Châteauroux.  Les 
pièces  isolées  ont  rapport  à  tous  les  actes  de  l'administra- 
tion de  tous  les  biens  du  duché.  Je  ne  puis  entrer  dans  le 
détail,  ce  qui  m'entraînerait  beaucoup  trop  loin  ;  on  trou- 
vera tous  les  développements  désirables  dans  le  premier 

(1)  De  ces  cinq  volumes,  les  arcliivts  do  lliidre  n'en  pos- 
sèdent que  quatre  en  original;  le  premier  est  aux  archives 
nationales,  mais  le  département  de  l'Indre  en  possède  une  Irès- 
belle  copie  de  48(i  feuillets,  l'aile  par  ordre  du  Conseil  général 
moyennant  le  prix  de  500  francs  et  :500  francs  d'indemnité 
accordés  plus  lard  an  copiste.  (Voir  les  délibéralions  du  Conseil 
général  des  années  1867  et  1864.) 


522       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

volume  imprimé  de  l'Inventaire  sommaire,  dont  j'ai  déjà 
parlé.  Je  me  contenterai  de  mentionner  la  plus  ancienne 
pièce,  qui  ne  remonte  pourtant  qu'à  l'année  1423.  C'est 
un  traité  entre  Guy  III  de  Chauvigny,  seigneur  de  Châ- 
teauroux,  et  les  marchands  merciers  du  Berry.  Cet  acte 
établit  deux  Ibires  par  au  à  Chàteauroux,  l'une  le  jour  de 
la  fête  de  saint  Fiacre  (30  août),  et  l'autre  le  jour  de  la 
tête  de  saint  Marceau.  Est-ce  le  même  que  saint  Marcel? 
Il  y  a  plusieurs  saints  Marcel  :  l'un,  martyr  à  Cliàlons-sur- 
Saône  (4  septembre);  un  autre  pape  (16  janvier);  un  troi- 
sième, enfin,  appelé  saint  Marcel  ou  saint  Marceau, 
évèque  de  Paris  (3  novembre)  ;  il  avait  un  autre  jour  de 
tête  pour  la  translation  de  ses  reliques  (26  juillet).  La 
foire  eu  question  était  sans  doute  à  l'une  de  ces  deux  der- 
nières dates. 

Dans  un  autre  document,  ces  deux  foires  sont  indiquées 
aux  fêtes  de  saiut  Fiacre  et  de  saint  Martial.  Comme  saint 
Martial,  premier  évêque  de  Limoges,  était  le  patron  d'une 
paroisse  de  Chàteauroux,  il  est  probable  que  saint  Mar- 
ceau, écrit  saint  Marsault  dans  la  pièce  en  question,  n'est 
autre  que  saint  Martial.  Ce  mot  se  sera  transformé  en 
Marsault,  en  passant  par  les  formes  intermédiaires  :  Mar- 
tiau,  Martiault,  Marsiault.  Dans  ce  cas,  la  foire  de  saint 
Marsault  serait  le  30  juin,  parce  que  la  fête  de  saint 
Martial  se  célèbre  à  cette  date. 

2.  —  Titres  de  familles  (145  fonds). 

Fn  second  lieu  viennent  les  titres  de  familles.  Cette 
partie  de  nos  archives  se  compose  des  papiers  saisis  révo- 
lutionnairement  au  domicile  des  émigrés,  puis  déposés 
aux  chefs-lieux  des  six  districts  (outre  les  chefs-lieux  des 
quatre  arrondissements  actuels,  il  y  avait  Argenton  et 


XL"   SESSION,    A    CIIATEA-UnOUX.  523 

Châtillon),  et  enlin  réunis  au  cher-lieu  du  dcpartement. 
Les  ramilles  dont  les  titres  sont  déposés  aux  archives 
départementales  de  l'Indre  sont  au  noml)ro  de  cent  qua- 
rante-cinq, et  lorment  autant  de  fonds  dilî'érents.  On  en 
trouvera  la  liste  par  ordre  alphabétique  sur  la  couverture 
de  l'Inventaire  imprimé.  Cette  liste  commence  par  la 
famille  d'Aigurande  et  se  termine  par  celle  de  Wissel  de 
Paray. 

Les  documents  qui  les  concernent  sont  au  nombre  de 
71  registres  ou  cahiers,  3,239  pièces  en  parchemin,  et 
20,1-46  pièces  en  papier.  Eu  tout,  29,456  documents  de 
toute  nature.  La  plus  ancienne  pièce  est  en  parchemin, 
elle  fait  partie  des  titres  de  la  famille  de  Lusignan,  sei- 
gneur de  Chassingrimont,  de  Chazelet  et  do  Luzères.  Elle 
porte  la  date  du  jeudi  de  l'Invention  de  la  sainte  Croix, 
i302.  Cette  année-là,  le  3  mai,  jour  où  se  célèbre  cette 
fête,  se  trouvait  un  jeudi.  Ce  document  est  l'acte  de  vente 
d'une  rente  annuelle  d'un  setier  de  grain,  par  moitié 
seigle  et  avoine,  à  la  mesure  de  Gluis  (de  Closis),  con- 
sentie moyennant  quatre  livres  en  monnaie  du  pays 
{monete  patrie),  par  Mathieu  de  Rue  ou  de  la  Rue  [de  Rua), 
à  Eudes  de  Magnac,  seigneur  du  Repaire. 

3.  —  Papiers  des  notaires  (56  fonds). 

J'arrive  maintenant  aux  papiers  des  notaires,  de  Tétude 
desquels  on  avait  prétendu,  à  l'époque  de  la  Révolution, 
retirer  toutes  les  pièces  entachées  de  féodalité.  Les  docu- 
ments provenant  des  anciennes  études  du  département  de 
l'Indre,  et  qui  font  actuellement  partie  des  archives 
départementales,  sont  au  nombre  de  21  registres  et 
cahiers,  UO  pièces  en  parchemin,  et  12,909  pièces  en 
papier.  En  tout,  13,130  documeuls  divers.  Le  plus  ancien 


524       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

porte  la  date  de  14(59,  il  est  en  papier  et  provient  de 
l'étude  de  Godin,  notaire  de  la  chàtellenie  de  Bouesse  et 
Cluis-Dessus.  C'est  un  acte  de  vente  de  quatre  livres 
tournois  de  rente,  consenti  moyennant  vingt  écus  d'or, 
par  Robinet  et  Jacques  Mayet,  de  Cluis-Dessus,  au  proîit 
de  noble  homme  Hélion  de  Barbauçois.  On  voit  par  cette 
citation  que  le  nom  de  baptême  Hélion,  qui  n'est  qu'un 
diminutif  du  nom  du  prophète  Élie,  est  ancien  dans  la 
lamille  de  Barbancois;  il  était  porté  par  le  marquis  de 
Barbançois,  écrivain  politique  et  agronome,  né  au  château 
de  Villegongis,  le  17  août  J760,  mort  le  17  mars  1822. 
11  y  a  bien  une  pièce  plus  ancienne  que  celle  dont  il 
vient  d'être  question,  mais  elle  ne  se  trouve  parmi  les 
papiers  provenant  des  notaires  que  par  suite  d'une  cir- 
constance inconnue.  Elle  est  en  parchemin,  c'est  une  véri- 
table charte  dans  le  sens  expliqué  précédemment;  elle 
concerne  le  prieuré,  ou,  comme  on  l'appelait,  la  prévôté 
de  Saint-Benoit-du-Sault.  Elle  fait  partie  des  papiers  pro- 
venant de  l'étude  de  Pichon,  notaire  à  Saint-Benoit-du- 
Sault  au  xvir  siècle.  Sans  doute  les  religieux  lui  avaient 
confié  cette  charte  pour  une  affaire  les  concernant,  et  elle 
aurait  été  gardée  par  oubli  ou  négligence.  C'est  un  acte  de 
vente  de  onze  boisseaux  de  froment  de  rente,  consenti  en 
129i,  moyennant  soixante-sept  sous,  au  profit  du  prieuré, 
par  Jean  dit  Renier  [dictus  Rcnerii)  (1),  Le  vendeur  jure 
sur  les  saints  Évangiles  qu'il  n'attaquera  ni  ne  laissera 
attaquer  par  personne  la  validité  de  la  vente  qu'il  vient  de 

(1)  Ail  moyen  âge,  dans  les  pièces  latines,  on  mettait  au 
génitif  les  noms  de  famille,  en  sous-entendanl  le  nior  jilins  fils. 
Le  nom  de  hapléme  était  considéré  comme  le  nom  de  celui  dont 
on  parlait,  et  son  nom  île  famille  était  regarde  conune  le  nom  dn 
père  de  la  personne  en  question. 


XL*   SESSION,    A    CIIATKAUHOUX.  SSri 

faire  aux  religieux  de  Saiiit-iierioit,  et  ce  par  tous  les 
moyens  en  son  pouvoir. 

Voici  les  noms  des  localités  et  contrées  où  étaient  situées 
les  études  des  notaires  qui  ont  contribué  à  former  cette 
partie  des  archives  départementales  :  Chàteauroux,  châ- 
tellenie  de  lioucssc  et  Cluis-Dessus,  les  Chézeaux,  Fursac, 
la  Vernelle,  le  Blanc,  comté  de  Lucay-le-Mâle,  Maillac, 
Mehun-sur-Indre,  Neuillay,  Nuret-le-Fcrron,  Saint- 
Benoit-du-Sault,  Saint-Gautier,  Valcncay,  Villegongis,  et 
enfin  Prissac  et  Sassierges  (une  seule  étude  pour  les  deux 
localités). 

4.  —  Documents  provenant  du  clergé  régulier  (58  fonds). 

Il  me  reste  à  parler  des  archives  provenant  du  clergé. 
Voyons  d'abord  le  clergé  régulier,  dont  les  archives  sont 
de  beaucoup  les  plus  considérables  de  toutes  celles  qui 
concourent  à  former  le  dépôt  des  archives  départemen- 
tales de  l'Indre.  Ce  groupe  compte  plus  de  cent  mille 
pièces,  qui  se  répartissent  entre  onze  abbayes,  dont  huit 
d'hommes  et  trois  de  femmes;  vingt-sept  prieurés,  dont 
quatre  de  femmes;  trois  couvents  d'Augustins;  un  cou- 
vent de  Carmes  réformés  ou  déchaussés,  qui  suivaient  la 
réforme  établie  par  sainte  Thérèse;  cinq  couvents  de  Cor- 
deliers;  un  couvent  de  Récollets;  quatre  commanderies 
d'ordres  religieux  militaires  (I);  enfin  six  couvents  de 
femmes,  dont  un  de  religieuses  de   la  congrégation  de 

(1)  D'abord  les  Templiers  ou  chevaliers  de  la  milice  du 
Temple;  puis,  après  la  suppression  de  cet  ordre,  en  1312,  par 
le  pape  Clément  V,  les  frères  Hospitaliers,  appelés  aussi  cheva- 
liers de  Saint-.Tean-de-.Ièrusalem,  ensuite  chevaliers  de  Rhodes, 
et  enfin  chevaliers  de  Malte. 


526       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Notre-Dame  (ordre  de  Saint-Augustin);  trois  d'Ursulines 
et  deux  de  Visitandines. 

5.  —  Documents  provenant  du  clergé  séculier 
(environ  160  fonds). 

Viennent  ensuite  les  archives  du  clergé  séculier.  On 
peut  évaluer  le  nombre  des  documents  appartenant  à  cette 
série  à  environ  65,000  pièces,  qui  proviennent  principa- 
lement des  chapitres  et  des  cures.  Les  chapitres  sont  au 
nombre  de  dix,  dont  voici  les  noms  : 

Notre-Dame  et  Saint-Martin  de  Châteauroux  ; 

Saint-Outrille  de  Chàtillon  ; 

Saint-Germain  de  la  Châtre; 

Saint-Jacques  d'Entraigues  (actuellement  paroisse  de 
Langé); 

Saint-Cyr  d'Issoudun; 

Saint-Sylvain  de  Levroux; 

Sainte-Marie-Madeleine  de  Mézières-en-Brenne; 

Saint-Jacques-le-Majeur  de  Neuvy-Saint-Sépulcre; 

Sainte-Menehoulde  de  Palluau; 

Et  Saint-Lauriau  de  Vatan. 

Les  cures  sont  au  nombre  n'environ  deux  cent  cin- 
quante ;  ce  sont,  à  peu  d'exceptions  près,  les  mêmes  cures 
que  de  nos  jours. 

VII. — Un  MOT   SUR   CINQ   DOCUMENTS   FAISANT   PARTIE 
DES   ARCHIVES  DE    l'InDRE. 

Les  archives  départementales  possèdent  encore  plusieurs 
milliers  de  documents  (registres,  cahiers  et  pièces  isolées) 
qui  n'ont  pas  encore  été  dépouillés. 

S'il  fallait  faire  ressortir  tout  ce  qu'il  y  a  d'important  et 
d'intéressant  dans  ces  masses  de  papiers  et  parchemins,  il 


XL'   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  TiST 

faudrait  y  consacrer  un  volume  qui  ne  laisserait  pas  d'être 
considérable  ;  aussi  je  me  contenterai  d'appeler  l'atten- 
tion sur  cinq  documents  remarquables  à  des  titres  divers. 

\ .  —  L'obituaù'e  des  Cordeliers  de  Châteauroux. 

Je  parlerai  d'abord  de  VObituaire  des  Cordeliers,  en 
raison  de  son  importance  pour  la  ville  de  Châteauroux. 
C'est  un  petit  registre  in-folio,  demi-largeur,  composé  de 
dix-huit  feuillets  en  papier.  Commencé  en  1653,  il  va 
jusqu'en  1782,  et  les  renseignements  qu'on  y  trouve 
remontent  jusqu'en  1214;  l'écriture  en  est  très-serrée.  On 
y  voit  la  date  de  la  mort  des  personnages  les  plus  mar- 
quants de  la  ville,  de  ceux  du  moins  qui  étaient  enterrés 
dans  l'église  du  couvent  des  Cordeliers ,  actuellement 
paroisse  Saint-André.  On  y  trouve  en  outre  toutes  sortes 
de  mentions  relatives  aux  personnages  et  aux  événements 
de  l'époque.  U Inventaire  sommaire  imprimé  consacre 
soixante-douze  lignes  à  ce  document  précieux.  Je  me 
contenterai  donc  d'y  renvoyer  les  personnes  curieuses  de 
notre  histoire  municipale,  elles  le  trouveront  analysé 
dans  la  série  II,  sous  le  n°  577. 

2.  —  Une  minute  de  notaire. 

Je  mentionnerai  en  second  lieu  une  pièce  en  papier  qui 
se  trouve  parmi  les  minutes  de  notaires ,  étude  de 
Briaune,  notaire  à  Châteauroux,  série  E  535  de  l'Inven- 
taire sommaire.  Cette  pièce  a  aussi  rapport  à  la  ville  de 
Châteauroux;  c'est  le  procès-verbal  notarié  d'une  céré- 
monie observée  de  toute  ancienneté  ;  le  mardi  de  la 
Pentecôte,  en  l'honneur  de  «  Monseigneur  »  le  duc  de 
Châteauroux.  La  pièce  relate  la  manière  dont  cette  céré- 


r)28       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

mouie  s'est  passée  le  ^'2  mai  1777,  époque  où  le  comte 
d'Artois,  depuis  Charles  X,  était  duc  de  Chàteauroux. 
Cette  cérémonie  consistait  en  un  pot  de  fleurs  que  les  habi- 
tants de  la  rue  de  l'Indre,  hommes  et  femmes,  venaient 
en  grand  nombre  otfrir  au  duc  de  Chàteauroux.  Les 
coitTures  des  uns  et  des  autres  étaient  ornées  d'un  ail  vert. 
Quelle  était  l'origine  d'un  si  singulier  ornement?  Était-ce 
tout  simplement  une  innocente  malice  des  habitants  envers 
leur  seigneur?  Les  chroniques  sont  muettes  sur  cet 
important  sujet.  Une  fois  arrivée  dans  la  cour  du  château, 
la  veuve  la  plus  nouvellement  remariée  du  quartier 
chantait  une  chanson  en  l'honneur  du  duc  de  Chàteau- 
roux et  lui  présentait  un  pot  de  fleurs  qu'elle  cassait 
aussitôt  ;  puis  l'assemblée  se  retirait  après  avoir  apposé 
sur  la  minute  notariée  un  certain  nombre  de  signatures. 
Je  ne  sais  si  de  temps  en  temps  le  seigneur  recevait  lui- 
même  ces  singuliers  hommages,  mais  en  1777  il  était 
représenté  à  cette  cérémonie  par  messire  Henri  Beugnet, 
intendant  des  «  maisons,  domaines  et  flnances  »  de  Mon- 
seigneur. On  voit,  en  lisant  ce  document  dans  l'original, 
que  déjà  à  cette  époque,  19''  année  avant  la  date  devenue 
si  iàmeuse  de  1789,  l'esprit  d'égalité  commençait  à  fer- 
menter au  milieu  des  masses,  dans  la  ville  alors  pourtant 
bien  petite  de  Chàteauroux  (1).  Ainsi  à  deux  endroits  les 
mots  droits  de  Monseigneur  ont  été  remplacés  par  ceux-ci: 
droits  respectifs.  La  minute  notariée  était  préparée  d'avance, 
et  les  formules  étaient  sans  doute  les   mômes   que   les 

(1)  D'après  M.  Lejosne,  dans  sa  Géngraphie  du  départe- 
went  de  l'Indre,  Chàteauroux  avait,  en  1789,  une  popidalion 
de  8,737  habitants;  et,  d'après  le  Dictionnaire  géographique 
(le  Vosgier,  édilion  de  1803,  cotte  ville  ne  comptait  que  8,040 
babitanls. 


XL*  SESSION,   A  chateauroux.  829 

années  précédentes;  mais  à  la  lecture  faite  par  le  notaire 
devant  ceux  qui  accompagnaient  la  veuve  remariée,  il  se 
sera  élevé  des  réchunations  pour  que  les  droits  du  duc  de 
Châteauroux  ne  soient  pas  les  seuls  mentionnés  et  pour 
que  l'on  y  joignît  aussi  ceux  des  assistants.  De  cette  façon 
la  phrase  :  «  sous  la  réserve  expresse  de  tous  les  droits  de 
monseigneur  »  fut  remplacée  par  celle-ci  :  a  sous  la  réserve 
expresse  des  droits  respectifs  »  ;  et  la  phrase  :  «  toujours 
sans  aucuneuient  préjudicier  aux  droits  et  intérêts  de 
monseigneur  »  fit  place  à  celte  autre  :  «  toujours  sans 
aucunement  préjudicier  aux  droits  et  intérêts  respectifs  ». 

Parmi  les  signatures  apposées  au  bas  de  l'acte,  on  dis- 
tingue les  noms  de  famille  suivants,  qui  existent  encore 
à  Châteauroux  :  Paupelin,  Voilant,  PJchon,  Degalle, 
Grublier  de  Chandaire,  Ameuille,  Sallé-Chollet,  Girard  de 
Vassau,  Bertrand  de  Greuille.  Les  acteurs  de  cette  scène, 
passée  il  y  a  quatre-vingt-seize  ans,  peuvent  être  les 
arrière-grands-pères  et  quelques-uns  les  grands-pères  des 
personnes  qui  portent  leur  nom  de  nos  jours. 

dette  pièce  a  été  publiée  dans  les  comptes  rendus  de 
l'ancienne  Société  du  Berry,  dont  le  siège  était  à  Paris,  et 
dont  l'un  des  secrétaires  généraux  du  Congrès  était  le 
secrétaire.  On  la  trouvera  page  262  du  XI*  volume, 
année  1863-1864,  avec  des  notes  intéressantes  de  M.  delà 
Tremblaye,  ancien  sous-préfet  du  Blanc. 


3.  —  Le  cartulaire  du  chapitre  de  Levroux. 

Après  ces  pièces,  qui  regardent  spécialement  l'histoire 
de  Châteauroux,  je  citerai  le  seul  cartulaire  que  possèdent 
les  archives  de  l'Indre.  Il  fait  partie  du  fonds  du  chapitre 
de  Saint-Sylvain  de  Levroux.  11  n'est  pas  daté;  u)ais  son 

XL*  SESSION.  34 


530       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

écriture  indique  qu'il  remonte  partie  au  xiii'' siècle,  partie 
au  XlV^  C'est  un  registre  in-i"  en  parchemin,  composé 
de  104  feuillets.  Il  serait  trop  long  de  dire,  même 
en  abrégé,  ce  que  l'on  trouve  dans  les  chartes  les  plus 
importantes  dont  il  renferme  la  transcription. 

L'inventaire  imprimé,  qui  lui  consacre  environ  quatre- 
vingts  lignes,  en  donnera  une  idée  suffisante.  M.  Louis 
Raynal,qui  a  beaucoup  puisé  dans  les  archives  de  l'Indre 
pour  son  excellente  Histoire  du  Berry^  a  imprimé,  dans 
les  pièces  justificatives,  trois  chartes  de  ce  précieux  cartu- 
laire. 


4.  —  Uantiphonalre  des  Cordeliers  de  Châteauroux. 

Il  me  reste  encore  deux  documents  à  mentionner,  très- 
curieux  sous  le  rapport  matériel. 

Le  premier  est  un  magnifique  antiphonaire  avec  lettres 
historiées.  Il  porte  la  date  de  loS^J;  il  appartenait  aux 
Cordeliers  de  Châteauroux.  Il  est  d'une  magnifique  écri- 
ture gothique,  aussi  belle  à  la  lin  du  volume  qu'au  com- 
mencement ;  et  pourtant  ce  fut  une  œuvre  de  longue 
haleine  d'écrire  un  pareil  volume,  dont  le  format  est 
grand  in-folio,  et  qui  compte  342  feuillets  eu  parchemin, 
c'est-à-dire  084  pages.  L'auteur  s'est  fait  connaître  dans 
une  partie  du  volume:  il  s'appelait  Geoffroy  Simon;  il 
était  probablement  de  Bourges,  car  il  se  qualifie  scriplor 
bituricus,  ce  qui  veut  dire  écrivain  de  Bourges  ou  au 
moins  du  Berry. 

Dans  cet  énorme  et  très-pesant  in-folio,  on  remarque 
un  assez  grand  nombre  de  lettres  enluminées  de  diverses 
couleurs,  dont  quelques-unes,  très-grandes,  offrent  des 
spécimens  de  beaux  dessins  à  la  plume.  Les  couleurs  sont 


XL"    SESSION,    \    CUATKAUKOUX.  531 

parfaitement  conservées,  entre  autres  le  vermillon,  qui 
surpasse  de  beaucoup,  quant  à  la  beauté  de  la  teinte  et  au 
brillant,  celui  des  livres  qu'on  imprime  de  nos  jours. 

La  reliure  clle-môrae  est  une  curiosité:  elle  est  très- 
ancienne  ;  les  plats,  au  lieu  d'être  en  carton,  sont  formés 
de  deux  planchettes  en  noyer  d'un  seul  morceau;  ils  sont 
recouverts  de  cuir.  Ce  manuscrit  a  de  la  valeur  sous  le 
rapport  de  l'histoire  du  plain-chant.  Je  ferai  remarquer 
encore  que  cet  antiphonaire  est  du  rit  romain,  qui  avait 
été  conservé  par  tous  les  religieux  de  Saint-François 
d'Assises,  de  Sainte-Claire  et  de  Saint-Antoine  de  Padoue. 


5.  —  Rouleau  en  parchemin  de  "IV»  mètres  de  longueur  sur 
ti3  ceiUimèlres  de  largeur. 

Enfin,  je  terminerai  cette  courte  liste  de  documents 
cités  par  la  mention  d'un  rouleau  en  parchemin  d'une 
longueur  peu  ordinaire.  11  fait  partie  de  la  série  E,  n"  33, 
fonds  de  la  famille  du  duc  de  Beauvilliers,  seigneur  de 
liuzançais.  Sur  une  largeur  de  63  centimètres,  il  est  si 
long  que,  déroulé  du  haut  d'un  septième  étage,  il  touche- 
rait et  même  traînerait  à  terre;  ce  qui  n'a  rien  d'exagéré, 
puisqu'il  est  d'une  longueur  de  !25  mètres.  11  a  ainsi  plus 
de  deux  fois  la  longueur  de  la  gr.uule  salle  des  archives, 
(jiii  ne  compte  que  1*2  mètres  d'une  extrémité  à  l'autre. 
11  est  composé  de  quarante-deux  morceaux  du  plus  beau 
parchemin,  collés  les  uns  au  bout  des  autres.  L'écriture 
de  ce  rouleau  est  très-belle  ;  elle  date  du  commencement 
du  XYi"  siècle.  En  effet,  les  actes  qu'il  contient  sont  datés 
de  1502  à  1531.  Sur  chaque  jointure,  à  droite  et  à  gauche, 
on  remarque  la  signature  du  (ùlèbre  Jean  du  Tillel, 
greffier  en  chef  du  Parlement  de  Paris,  qui  s'ac(iuit  beau- 


53^2       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

coup  de  réputation  par  ses  ouvrages,  et  qui  était  frère  de 
Jean  du  Tillet,  évèque  de  Saint-Brieuc,  puis  de  Meaux, 
l'un  des  hommes  les  plus  savants  du  xvi*  siècle  (1).  Je 
renvoie  à  Vlnventaii^e  imprimé  les  personnes  curieuses  de 
savoir  ce  que  contient  ce  rouleau  si  remarquable  par  ses 
dimensions,  par  la  beauté  de  son  écriture  et  aussi  par  la 
signature  répétée  plus  de  quatre-vingts  fois  du  fameux 
du  Tillet. 

S'il  m'était  permis  de  mêler  le  plaisant  au  sérieux,  je 
dirais  qu'un  jour,  il  y  a  bien  de  cela  sept  ou  huit  ans, 
une  personne,  à  qui  je  montrais  le  fameux  parchemin, 
me  demanda,  avec  une  certaine  naïveté  sans  doute,  si 
cette  pièi;e  avait  été  faite  avec  la  dépouille  d'un  seul  mou- 
ton. Or  j'ai  dit  plus  haut  que  ce  document  mesure 
25  mètres  sur  63  centimètres.  Jugez  des  proportions 
phénoménales  de  ce  ruminant,  sa  chair  aurait  pu  rassa- 
sier bien  des  Gargantua  !  Si  quelque  indiscret  me 
demande  le  nom  de  cette  personne,  je  lui  dirai  qu'il 
m'est  impossible  de  satisfaire  sa  curiosité,  plus  ou  moins 
charitable,  par  une  raison  bien  simple,  c'est  que  je  l'ai 
totalement  oublié. 


Archives  municipales  d'Issoudun. 


Les  archives  municipales  d'Issoudun  offrent  un  intérêt 
particulier;  elles  possèdent  en  assez  grand  nombre  des 

(1)  La  charge  de  greffier  en  chef  du  Parlement  était  depuis 
longtemps  dans  la  famille  de  Jean  du  Tillet,  et  sa  postérité  la 
conserva  jusqu'à  Jean-Fiançois  du  Tillet,  qui  y  fut  reçu  en  1689. 
Celte  famille  a  eu  ausbi  plusieurs  conseillers  au  Parlement  et 
maîtres  des  Requêtes.  {Diclùmnaite  hlsloriçue de  Ladvocat.J 


XL*    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  533 

documents  préticux  sous  le  rapport  des  faits  dont  ils  nous 
ont  conservé  le  souvenir  et  sous  celui  de  leur  antiquité. 
Les  privilèges,  en  effet,  les  lettres  patentes  et  les  chartes 
qui  furent  accordés  à  cette  ville,  sous  le  règne  de  vingt 
rois,  remontent  à  l'an  H37.  Malheureusement  les 
sceaux  autrefois  appendus  à  ces  pièces  n'ont  échappé 
qu'en  partie  à  la  destruction;  parmi  ceux  qui  nous  sont 
parvenus,  quelques-uns  sont  on  bon  état  de  con- 
servation; niais  les  autres,  brisés,  ne  conservant  qu'une 
faible  tnce  de  l'empreinte,  ne  sont,  à  dire  vrai,  que 
des  fragments  plus  propres  à  nous  faire  comprendre 
la  perte  que  nous  avons  faite  qu'à  nous  instruire  sur  leur 
origine. 

Les  titres  de  propriété  des  abbayes,  des  cures,  des  com- 
munautés religieuses  ayant  été  saisis  par  l'État  pour  la 
vente  des  biens  nationaux,  ont  été  transportés  au  chef-lieu 
du  département,  où  elles  forment  des  fonds  considérables; 
aussi  n'en  trouve-t-on  que  quelques-uns  épars  çà  et 
là  dans  les  archives  municipales.  Deux  de  ces  pièces 
méritent  une  mention  spéciale  dans  ce  court  aperçu: 

1°  Règne  de  Louis  VIL  —  Permission  accordée  aux 
religieux  de  Notre-Dame  d'Issoudun  de  placer  leur  abbaye 
à  Saint-Denis-lez-Issoudun. 

2°  Règne  de  Philippe  IL  —  Fondation  du  chapitre  de 
Saint-Denis  par  Girauld-la-Fuile,  abbé  de  l'abbaye  de 
Notre-Dame  d'Issoudun. 

L'attachement  de  la  ville  d'Issoudun  aux  rois  de  France, 
les  grands  et  signalés  services  qu'elle  leur  rendit,  notam- 
ment dans  le  siège  qu'elle  soutint  en  1422  contre  les 
Anglais,  plus  tard  contre  les  Ligueurs  et  aussi  sous 
Louis  XIV  dans  la  guerre  de  la  Fronde,  lui  valurent  bon 
nombre  de  privilèges  ;  des  pièces  qui  nous  l'attestent  nous 
citerons  quelques-unes  : 


534        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Lettres  patentes  sur  la  répartition  du  don  de  1,500  1. 
fait  au  roi  Charles  VIll  pour  subvenir  aux  frais  de  la 
guerre,  avec  mention  qu'Issoudun  était  considéré  comme 
une  bonne  ville  non  sujette  aux  tailles. 

Réponse  du  roi  Charles  IX  aux  requêtes  contre  les  pro- 
testants. 

Privilèges  accordés  à  la  ville  de  la  taille  et  du  taillon  par 
les  rois  Louis  XI,  Louis  XII,  François  l",  Henri  III  et 
Henri  IV. 

Rachat  des  enfants  de  François  I".  —  Acte  d'assemblée 
portant  que  la  somme  de  3,000  livres  empruntée 
par  les  habitants  il  dame  de  Valenciennes,  sera  portée 
au  roi  François  t""  pour  le  rachat  de  ses  enfants. 

Siège  de  Saint-Araand.  —  Conduite  de  deux  pièces  de 
vin  au  siège  de  cette  ville. 

Louis  XIV.  —  Patentes  originales  confirmatives  des 
privilèges  en  raison  des  grands  et  signales  services  rendus 
à  l'État  par  les  habitants  d'Issoudun. —  Guerre  contre  les 
Anglais;  incendie  de  la  ville,  en  1651. —  Décharge  pendant 
trois  ans  de  toute  subsistance,  en  raison  de  cet  incendie,  qui 
a  détruit  huit  cents  maisons  et  les  meubles,  grains,  bes- 
tiaux et  marchandises. 

A  côté  de  ces  pièces  qui  nous  montrent  quel  rôle  joua 
Issoudun  dans  l'histoire  du  pays,  il  en  existe  d'autres  d'un 
intérêt  tout  local,  concernant  l'industrie  du  pays  et  les 
changements  opérés  dans  la  ville  aux  différentes  époques; 
elles  méritent  aussi  une  courte  énumération  : 

Pièces-mémoires  et  requêtes  à  l'occasion  des  droits  pré- 
tendus sur  les  vins  bontés,  les  piquettes,  les  visites  jour- 
nalières et  la  marque  des  vins. 

Manufacture  et  draperie.  —  Procès  contre  les  tissiersen 
toile.  —  Louis XIV  homologue  le  règlement  pour  la  manu- 
facture des  draps. 


XL'    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  535 

Ouverture  de  la  Porte-Perdue,  dite  Porte-Neuve.  — 
Plantation  de  la  place  de  Lavcnieràla  Croix-dc-Pierre.  — 
Pavage  de  la  rue  Marnioux.  —  Démolition  de  la  Tour- 
Galeuse. 

Établissement  de  lanternes. 

Enlèvement  des  boues.  —  Entretien  d'un  tombereau. — 
Fondation  de  l'hôpital  des  Incurables. 

La  noblesse  et  la  contirmation  des  anoblis,  — 
M.  Louis  Millet,  lieutenant  au  régiment  de  milice 
du  Berry ,  est  mis  sur  le  rôle  des  privilégiés.  — 
Diverses  familles  sont  maintenues  au  rôle  des  roturiers. 


La  Châtre. 

Les  archives  municipales  de  la  Châtre  ne  peuvent 
rivaliser  en  richesse  avec  celles  de  la  ville  d'Issoudun.  Elles 
se  composent  en  grande  partie  des  registres  des  délibé- 
rations de  la  ville  au  xviii"  siècle,  et  des  actes  de  l'état 
civil,  autrefois  tenus  dans  les  paroisses;  ils  remontent  à 
l'an  1607  et  se  suivent  sans  interruption  jusqu'en  l'an 
1780.  Il  n'est  pas  fait  mention  de  sceaux  dans  l'inventaire 
qui  fut  dressé  en  1H60.  Une  pièce  cependant  se  fait 
remarquer  entre  toutes  comme  la  plus  ancienne  et  la  plus 
importante;  elle  se  compose  de  trois  feuilles  de  parchemin 
cousues  bout  à  bout.  En  voici  l'analyse  ; 

Transaction  passée  en  1-402  entre  Guy  de  Chauvigny  et 
son  fils,  d'une  part,  et  les  communes  de  la  Châtre  et 
Chevé,  par  laquelle  les  habitants  desdites  communes  sont 
exemptés,  moyennant  cinq  cents  écusd'or  etiacontinuifiou 
du  paiement  annuel,  à  Noël,  pour  chaque  chef  de  famille, 
d'une  taille  de  10  sous  et  une  geline,  sauf  des  exceptions 


o36       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

indiquées,  de  payer  les  quêtes  qu'il  avait  coutume  de 
faire,  quand  il  mariait  ses  filles  ou  sœurs,  quand  il  lui 
était  conféré  un  ordre  de  chevalerie,  en  cas  de  voyage 
outre  mer  et  en  cas  qu'il  fût  fait  prisonnier.  Ledit  affran- 
chissement consenti  par  le  sieur  de  Ghauvigny,  tant  en 
son  nom  qu'en  celui  de  son  fils,  pour  lequel  il  se  porte 
fort.  Lettres  de  ratification  à  la  suite.  Copie  de  la  trans- 
action faite  par  les  soins  de  M.  Villemain,  à  qui  elle  a  été 
confiée. 

Il  n'y  a  pas  d'archives  au  Blanc,  à  la  Préfecture.  La 
bibliothèque  des  Augustins  de  cette  ville  a  été  apportée  en 
1792  à  Chàteauroux. 

M.  le  Président  félicite  M.   Hubert,  archiviste,   et   le 

remercie  de  son  intéressante  communication. 

Relativement  à  la  trente  et  unième  question,  M.  de 
Cougny,  directeur  de  la  Société,  communique  au  Congrès 
une  lettre  de  M.  le  docteur  Cachet,  d'Issoudun,  qui,  retenu 
par  une  indisposition,  exprime  ses  regrets  de  n'avoir  pu 
se  rendre  au  Congrès  pour  y  traiter  ce  sujet. 

M.  l'abbé  Damourette  présente,  sur  la  trente-deuxième 
question,  un  mémoire  très-dé veloppé  et  fort  intéressant. 
Le  cœur  et  l'intelligence  de  M.  l'abbé  Damourette  se 
révèlent  puissamment  dans  ce  travail,  qui  a  été  très- 
applaudi. 


Hôtels-Dieu,   Charités,   Léproseries. 


Je  divise  en  deux  catégories  les  établissements  chari- 
tables de  notre  département  :  les  établissements  anciens 


XL*   SESSION,    A    nïIATEAUnOUX.  537 

qui  subsistent  encore  et  les  établissements  anciens   qui 
ne  subsistent  plus. 

Établissements  anciens  qvi  subsistent  encore. 

La  ville  d'Issoudun  en  possède  deux,  qu'elle  veut  réunir 
en  un  seul  :  l'hôtel-Dieu  et  la  maison  des  Incurables, 

La  fondation  de  l'hôtel-Dieu  d'Issoudun  remonte  au 
xnr  siècle.  Je  sais  qu'il  possède  dans  ses  archives  des 
bulles  des  papes  Honorius  III  et  Martin  V.  Je  ne  connais 
pas  la  teneur  de  ces  bulles,  mais  on  m'a  affirmé  qu'elles 
accordent  de?  pardons  et  des  indulgences  aux  personnes 
qui  se  dévouent  au  poulagement  des  souffrances  de  l'hu- 
manité. 

Il  serait  très-curieux  de  déchiffrer  un  vieux  manuscrit 
qui  appartient,  dit-on,  au  xv''  ou  xvi*  siècle.  En  174-6,  un 
prêtre  d'Issoudun  l'a  jugé  si  important  qu'il  s'est  donné 
la  peine  d'en  faire  une  copie.  Ce  prêtre  se  nommait 
M.  l'abbé  Morat. 

Il  est  certain  que  MM.  les  chanoines  du  chapitre  de 
Saint-Cyr  d'Issoudun  ont  gouverné  l'hôtel-Dieu  en  qualité 
d'administrateurs;  ce  droit  leur  ayant  été  contesté  par  les 
échevins  de  la  ville,  ils  furent  maintenus  en  possession 
par  arrêt  du  parlement  de  Paris.  Tout  porte  à  croire  que 
si  les  chanoines  administraient  l'hôtel-Dieu,  c'est  que 
leurs  devanciers  en  étaient  les  fondateurs. 

C'est  dans  la  chapelle  de  cet  hospice  que  se  trouvent  les 
deux  arbres  symboliques  sur  lesquels  la  Société  française 
d'Archéologie  a  appelé  l'attention  du  Congrès  en  leur 
consacrant  une  question  spéciale. 

La  maison  des  Incurables  ne  remonte  qu'au  siècle  de 
Louis  XIV. 


538       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Les  archives  de  cet  établissement  contiennent  les  lettres 
patentes  du  roi  et  des  archevêques  de  Bourges  qui  approu- 
vent la  fondation  ;  le  roi,  pour  ce  qui  concerne  le  tem- 
porel, et  les  archevêques,  en  ce  qui  concerne  le  service 
spirituel  de  cette  maison. 

Un  registre  fait  connaître  toutes  les  fondations  pieuses 
que  les  habitants  d'issoudun  firent  dans  la  chapelle  des 
Incurables  ;  elles  font  le  plus  grand  honneur  à  leur  piété 
charitable. 

J'ai  découvert  dans  le  dossier  des  archives  de  l'Indre 
qui  concernent  le  couvent  de  la  Visitation  d'issoudun  que, 
vers  lOoo,  les  Visitandines  échangèrent  la  maison  exiguë 
où  la  colonie  venue  de  Bourges  s'était  établie,  contre  le 
vaste  enclos  de  la  léproserie  de  Sainte-Madeleine  et  de 
Saint-Lazare,  située  sur  la  route  d'issoudun  à  Bourges. 
«  actuellement  maison  de  M""*  Duquesne  ». 

La  léproserie  était  déserte  à  l'époque  de  l'échange  ; 
l'échange  eut  lieu  moyennant  une  soulte  peu  considé- 
rable. L'alTairc  lut  traitée  entre  le  couvent  de  la  Visitation, 
d'une  part,  et  M.  Giraut,  prieur  de  la  collégiale  de  Saint- 
Cyr,  d'autre  part.  L'acte  porte  que  le  prieur  de  Saint-Cyr 
intervient  en  sa  qualité  d'administrateur  de  la  susdite 
léproserie. 

L'ancien  hospice  des  mendiants,  établi  au  faubourg  des 
Capucins,  fut  supprimé  et  réuni  en  1733  à  la  maison 
des  Incurables;  on  y  réunit  aussi  les  biens  du  chapitre  de 
Saint-Denis  d'issoudun.  Douze  pièces  sur  parchemin 
no  js  font  savoir  en  outre  qu'on  affecta  à  l'hospice  des 
Incurables  d'issoudun  les  revenus  des  aumôneries  de  la 
ville  de  Saint-Gauthier  et  de  Neuvy-Saint-Sépulcre,  du 
bourg  de  Saint-Genou,  des  paroisses  de  Lavernusse,  de 
Laberthenoux  et  de  Rouvres-les-Bois  ;  il  est  à  croire  qu'on 
donna  en  échange  à  ces  diverses  localités  le  droit  de  placer 


XL*"    SESSION,    A    OIIATKAIinOUX.  539 

dans  la  maison  des  Incurables  d'Issoiulun  leurs  malades 
indigents. 

A  quelques  lieues  d'Issoudun,  à  Reuilly,  il  y  avait  aussi 
un  hospice.  Avant  la  Révolution  il  était  desservi  par  les 
religieuses  dites  de  la  Croix.  On  trouve  dans  le  dossier 
relatif  à  cet  établissement  charitable  le  procès-verbal  de 
l'installation  de  ces  religieuses. 

L'hospice  qui  existe  aujourd'hui  à  Chùtcauroux  est  de 
fondation  récente.  M.  Saliquet,  aumônier  de  l'établisse- 
ment, a  consacré  ses  loisirs  à  faire  l'historique  des  diverses 
fondations  qui  ont  permis  de  donner  à  cette  maison  les 
développements  successifs  dont  nous  soinmes  les  heureux 
témoins.  Je  me  bornerai  à  dire  qu'un  édit  de  Louis  XIV 
affecte  à  l'entretien  de  l'hospice  de  Chàteauroux  les  reve- 
nus de  trois  établissements  charitables,  les  maladreries 
d'Ardentes,  de  Saint-Bcnoit-du-Sault  et  de  Ville-Dieu.  Je 
me  plais  à  croire  que  ces  trois  localités  ne  furent  pas 
dépouillées  des  revenus  destinés  à  soulager  leurs  pauvres, 
sans  des  compensations  équivalentes. 


Hospice  de  Buzançais. 

L'époque  de  la  fondation  de  l'hospice  de  Buzançais 
n'est  pas  indiquée  dans  les  pièces  qui  composent  les 
archives  de  cet  établissement. 

L'aumônerie  d'Argy,  dont  la  maison  subsiste  encore, 
avec  une  gracieuse  chapelle,  fut  réunie  à  l'hôpital  de 
Buzançais  :  l'hôpital  de  Saint-Genou  éprouva  le  même 
sort.  Un  arrêt  du  conseil  privé,  qui  porte  la  date  de  1693, 
donne  à  cette  union  des  deux  hospices  la  sanction  de 
l'autorité  royale.  L'hospice  de  Chàtillon-sur-Indre  fut 
aussi  annexé,  en  1710,  à  celui  de  Buzançais  ;  mais,  vingt 


54.0       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

ans  plus  tard,  le  décret  d'union  fut  rapporte,  et  les  choses 
rétablies  sur  l'ancien  pied. 

Un  des  plus  insignes  bieiifaiteurs  de  l'hospice  de 
Buzançaisest  M.  Huarl  de  la  Moranderie. 

Il  est  à  remarquer  que,  outre  l'hospice,  il  y  avait  à 
Buzançais  une  léproserie  sous  le  vocable  de  sainte  Made- 
leine et  de  saint  Lazare.  La  chapelle  de  cette  léproserie 
existe  encore.  En  1700,  un  vicaire  d'une  des  paroisses  de 
la  ville  était  titulaire  du  bénéfice  de  Saint-Lazare. 


Hospice  de  la.  Châtre. 

Nicolas  de  Nicolay,  écrivain  du  xvi''  siècle,  nous  donne, 
au  chapitre  49  de  son  livre  sur  le  Berry,  une  description 
de  la  ville  de  la  Châtre  ;  il  nous  apprend  que,  hors  de  cette 
ville,  ii  y  avait,  près  du  grand  cimetière,  un  hôtel-Dieu, 
dit  de  la  Trinité,  lequel  était  bien  logeable  et  bien  meublé 
pour  recevoir  les  pauvres  malades  ;  et,  au-dedans  du 
faubourg  Saint-Jacques,  une  maladreric  où  se  tenaient 
les  pauvres  lépreux. 

Ce  texte  est  d'autant  plus  précieux,  que  les  archives  de 
l'hospice  de  la  Châtre  ne  contiennent  que  très-peu  de 
pièces  antérieures  à  1790.  Les  pièces  importantes  ont  dû 
disparaître  par  une  cause  qui  nous  est  inconnue;  ce  que 
nous  connaissons  de  plus  intéressant,  c'est  qu'en  178.J, 
les  capucins  de  la  Châtre  firent  abaudon  à  l'hospice  d'une 
grande  partie  de  leur  enclos. 


Bospice  de   Vntan. 
L'époque  de  la  fondation  de  l'hospice  de  Vatan  est 


XL*   SESSION,    A   CllATKAUROU.V.  ^>A\ 

inconnue  ;  la  seule  chose  que  nous  ayons  pu  découvrir, 
c'est  que  les  seigneurs  de  Vatan  prétendaient  être  les 
fondateurs  de  cet  hospice.  Quoi  qu'il  eu  soit  de  celte  pré- 
tention, toujours  est-il  que  l'administrateur  était  nomiué 
par  le  chapitre  de  Saint-Laurian. 

Les  revenus  de  l'hospice  de  Vatan  étaient  peu  considé- 
rables ;  mais  ils  s'élevaient  à  la  somme  de  1,000  à  1,"200 
livres  depuis  que  les  revenus  d'une  maladrerie  suppri- 
mée furent  réunis  à  cet  établissement,  et  qu'un  bienfaiteur 
eût  affecté  des  revenus  suffisants  à  la  fondation  du  lard  : 
on  désignait  sous  ce  nom  une  distribution  de  lard  qui  se 
faisait  chaque  année,  le  mardi  gras,  à  tous  les  pauvres  de 
la  ville  de  Vatan. 


Hospice  du  Blanc, 

Il  existe  dans  la  série  A  des  archives  de  l'hospice  du 
Blanc  une  note  sans  signature,  qui  porte  la  date  de  1791. 
Cette  pièce  affirme  qu'à  cette  époque  l'hospice  du  Blanc 
avait  plus  de  deux  cents  ans  d'existence. 

On  ignore  complètement  comment  et  par  qui  l'hospice 
du  Blanc  a  été  fondé  ;  une  des  rues  de  la  ville  porte  le 
nom  de  Saint-Lazare,  ce  qui  nous  porte  à  croire  qu'il 
existait  au  Blanc,  comme  dans  toutes  les  villes  de  notre 
Bas-Berry,  une  léproserie,  sous  le  vocable  de  sainte  Made- 
leine et  de  saint  Lazare. 

Le  iA  décembre  1816,  l'hospice  du  Blanc  fut  rétabli  ; 
il  est  situé  dans  la  rue  de  Saint-Lazare,  probablement  sur 
l'ancien  emplacement  de  la  léproserie. 

Cet  hospice  est  desservi  par  les  sœurs  de  la  Providence 
de  Saumur. 


54-2       CONGRÈS  ARCHÉOLOUIUUK  l»K  FRANCE. 


Hospice  de  Levroux. 

Les  archives  de  l'hospice  de  Levroux  sont  très-considé- 
rables ;  mais  elles  sont  entassées  pêle-mêle  et  sans  aucun 
ordre.  Grâce  à  l'intervention  de  M.  le  préfet,  il  y  a  tout 
lieu  d'espérer  que  sous  peu  un  inventaire  sera  dressé,  et 
que  les  archives  de  cet  établissement,  richement  doté  par 
ses  fondateurs,  mettront  en  lumière  des  faits  intéressants 
pour  l'histoire  de  la  charité  en  Berry. 

La  seconde  catégorie  des  hospices  et  des  maisons  chari- 
tables de  notre  département  se  compose  des  anciens 
établissements  qui  ont  disparu  dans  la  tourmente  révolu- 
tionnaire de  03.  Sur  cet  article  je  serai  bref;  je  ne  donne- 
rai que  des  indications. 

Il  y  avait  autrefois  dans  la  ville  de  Chàteauroux  deux 
hospices  qui  n'existent  plus  :  l'hôpital  de  Saint-Gildas  et 
celui  de  Saint-Jacques. 

11  reste  encore  de  l'hôpital  de  Saint-Gildas  une  petite 
chapelle,  dont  la  porte  est  d'un  très-bon  style.  Cet  hôpital 
avait  été  fondé  par  Guillaume  P'',  baron  de  Chàteauroux, 
vers  1203  ;  l'hospice  de  Saint-Jacques  avait  été  bâti  en 
face  de  la  porte  latérale  de  l'église  de  Sainl-xMariial.  C'est 
une  consiruction  du  xii"  siècle,  qui  subsiste  encore. 
Nicolas  de  Nicolay  nous  dit  qu'il  était  surtout  destine 
à  donner  le  vivre  et  le  coucher  aux  pèlerins  de  passage  en 
la  ville  de  Chàteauroux. 

Les  bénédictins  de  Déols  avaient  fondé,  sous  le  vocable 
de  saint  Crépin  et  de  saint  Crépinien,  un  hôtel-Dieu  ;  il 
a  subsisté  jusqu'à  la  sécularisation  de  l'abbaye. 

Un  acte   des  archives  du  département  de  l'Indre,   de 


XL"    SESSION,    A    CllATKAL'UUL'X.  :i-4:{ 

1552,  nous  l'ait  coiinaîtio  qu'il  existait   un  hôtel-Dieu, 
fondé   par   les   bénédictins   de    Méobecq  ;  uue   cliapelle, 


dédiée  à  saint  Sulpice  le  Déitonnaire,  un  de  nos  évêques, 
dépendait  de  cet  hôpital;  cette  chapelle  existe  encore,  et. 


5i4  CONGRÈS   AUCIIÉOLCGIQUE   DE    FRANCE. 

chaque  année,  il  s'y  rend  plus  de  dix  mille  pèlerins, 
atteints  de  rhumatismes,  qui  vont  demander  à  Dieu,  par 
l'entremise  du  saint,  un  soulagement  à  leurs  souffrances. 

Palluau  avait  un  hôpital  ;  la  maison  subsiste  encore 
avec  sa  petite  chapelle,  dédiée  à  Notre-Dame  de  Pitié.  Des 
religieuses  y  tiennent  école  ;  mais  il  n'y  a  plus  d'hospice 
pour  les  malades. 

J'ai  vu,  dans  ma  jeunesse,  la  chapelle  de  l'ancien 
hôpital  de  la  ville  de  Saint-Cjciathier.  Gomme  celle  de 
Palluau,  elle  était  sous  le  vocable  de  Notre-Dame  de 
Pitié.  Ou  trouve,  aux  archives  de  l'Indre,  un  dossier  assez 
complet  sur  l'ancien  hôpital  de  Saint-Gaultier  ;  il  était 
administré  par  des  hommes  capables. 

La  maison  de  l'aumônerie  d'Argy  existe  encore;  elle 
appartient  à  M.  le  curé  d'Argy.  Une  chapelle  était  annexée 
à  cet  établissement  charitable. 

Je  crois  pouvoir  affirmer  que  la  chapelle  de  l'aumô- 
nerie du  Lys-Saint-Georges  est  encore  debout.  Un 
prêtre,  pourvu  de  cette  aumônerie,  fut  massacré  à  Neuvy- 
Saint-Sépulcre,  vers  le  milieu  du  xvi^  siècle,  par  une 
bande  de  pillards,  connus  dans  l'histoire  du  Berry  sous 
le  nom  des  Six-Mille-Diables. 

Nicolas  de  Nicolay  nous  fait  connaître,  dans  sa  descrip- 
tion du  Berry,  trois  hôpitaux  qui  ont  disparu  complète- 
ment :  deux  hôpitaux  à  Sainte-Sévère,  et  un  autre  dans 
la  ville  d'Argenton. 

Il  y  avait  autrefois  un  hôpital  à  Mezières,  dans  un  lieu 
nommé  Beauregrird. 

L'aumônerie  de  Brives  dépendait  de  l'abbaye  des  béné- 
dictins de  Notre-Dame  de  Déols.  Un  acte  authentique, 
qui  date  de  iriôl,  attesie  que  l'aumônier  de  l'abbaye  de 
Déols  était  seigneur  de  la  terre  de  Brives,  et  qu'il  était 
tenu  de  faire  l'aumône  au  dit  lieu  de  Brives,  trois  lois  la 


Xi.''    SESSION,    A    CIIAÏEAUUOUX.  545 

semaine,  à  tout  allant  et  venant,  depuis  la  fétc  de  saint 
Michel  jusqu'à  la  fêle  de  saint  Jean-Baptiste.  Nous  savons 
qu'il  existait  une  maladrerio  à  Gargilossc,  ol  une  niala- 
drerie  dans  une  petite  ville  nommée  l'resles. 

La  cliàtelleni'>  de  f'resles,  où  il  y  avait  autrefois  un 
scel  aux  contrats  et  un  petit  hôpital,  a  complètement 
disparu  ;  on  voit  encore  les  ruines  de  la,  ville  de  l'resles, 
près  de  Mers,  sur  les  hords  de  l'Indre. 

Outre  les  hospices,  léproserieà  et  lieux  de  charité  que 
nous  venons  d'énumérer,  il  y  avait  dans  notre  dépar- 
tement plus  de  douze  commanderies  de  l'ordre  de  Malte, 
où  les  malades  et  même  les  fous  étaient  hébergés  et 
soignés. 

L'hospice  que  les  chevaliers  avaient  fondé  pour  soigner 
les  fous  était  à  Beauvais.  près  de  Buzançais. 

Il  est  évident,  par  les  données  que  nous  fournit  l'his- 
toire de  notre  département,  que  nos  révolutions  ont 
singulièrement  amoindri  le  patrimoine  des  pauvres  dans 
notre  centrée. 

Beaucoup  d'établissements  charitables  ont  disparu; 
mais,  grâces  à  Dieu,  le  feu  de  la  charité  n'est  pas  éteint, 
et  nous  avons  tout  lieu  d'espérer  qu'avec  le  temps  on 
restaurera  bien  des  ruines. 

M.  l'abbé  Daniourelte  donne  lecture  de  la  note  suivante 
sur  la  chapelle  de  Saint-Marc,  an  bout  du  pont  qui  est 
à  l'entrée  du  faubourg  de  Saint-Christophe. 


Chapelle  de  Saint-Marc. 

Au  x^  siècle,  des  moines  bretons,  chassés  par  les  inva- 
XL^   SESSION.  35 


546       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

siens  normandes  de  leur  monastère  de  Rhuys,  s'achemi- 
nèrent avec  leurs  corps  saints  vers  le  Berry,  car  en  nul 
autre  lieu  il  n'y  avait  paix,  dit  Lagongue,  et  vinrent 
demander  asile  et  protection  au  prince  de  Déols,  Ebbes-le- 
Noble.  Ce  puissant  seigneur,  aussi  pieux  que  vaillant,  les 
reçut  avec  courtoisie,  et,  après  les  avoir  hébergés  dans  un 
petit  ermitage  dédié  à  sainte  Marie,  qui  était  à  proximité 
de  son  castrum,  il  leur  fit  bâiir  un  grand  monastère 
dans  un  îlot,  sur  le  bord  de  l'Indre.  Plus  tard,  autour  de 
ce  monastère,  des  serfs  viendront  vivre  sous  la  crosse  de 
l'abbé,  et  le  bourg  de  Saint-Gildas,  ayant  droit  de  justice, 
sera  un  des  tiefs  importants  de  la  ville  de  Chàteauroux. 
L'église  de  l'abbaye,  reconstruite  au  xii^  siècle,  fut  dédiée 
au  Sauveur,  sous  l'invocation  de  Saint-Gildas,  par  Vul- 
grin,  archevêque  de  Bourges,  entouré  d'un  grand  nombre 
d'évéques  et  d'abbés,  réunis  alors  à  Chàteauroux  à  l'occa- 
sion d'un  concile  où  présida  Gérard  d'Angoulême,  légat 
du  pape  Honorius  II. 

La  petite  chapelle  du  bord  de  l'eau  ne  fut  construite 
qu'au  xiii^  siècle,  par  Guillaume  I"  de  Chauvigny,  fils 
de  Denyse  de  Déols,  qui,  voulant  marcher  sur  les  traces 
de  sa  mère,  si  piteuse  pour  la  misère,  comme  disent  les 
vieilles  chroniques  du  temps,  voulut  doter  d'un  hôtel- 
Dieu  le  bourg  de  Saint-Gildas. 

Cet  hôtel-Dieu  fut  en  partie  ruiné  par  les  protestants, 
qui  vinrent  plusieurs  fois  incendier  et  piller  les  abbayes 
de  Saint-Gildas  et  de  Notre-Dame  de  Déols. 

Ce  fut  pour  réparer  leurs  désastres,  que  François  de 
Chennevière,  le  dernier  qui  fut  abbé  de  Saint-Gildas,  fit 
restaurer  la  grande  église,  le  logis  abbatial,  et  aussi  la 
petite  chapelle  de  l'hôtel-Dieu.  C'était  un  esprit  éclairé  et 
un  artiste  de  bon  goût,  si  nous  en  jugeons  par  la  porte 
dont   il    décora    la    chapelle    de   sa   maison-Dieu  ;  elle 


XL*    SESSION,    A.    CUATKAUKOUX. 


547 


548       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

est  d'un   style    élégant  ;    nous   en    donnons   le  dessin. 

Cette  porte  fut  mutilée,  à  un  moment  donné,  par  des 
projectiles  dont  on  voit  encore  les  traces  ;  voici  à  (Quelle 
occasion  :  au  temps  de  la  ligue,  Chàleauroux  tenait  pour 
le  roi,  l'dbbaye  de  Saint-Gildas  tenait  pour  la  ligue. 
D'Arquieu  vint  faire  le  siège  de  l'abbaye  ;  mais  elle  était 
défendue  par  Valade,  un  vaillant  capitaine.  Les  assaillants 
furent  repousses.  Désireux  de  réparer  son  échec,  d'Ar- 
quien  revint  à  la  charge  avec  six  pièces  de  canon  et 
douze  cents  hommes  ;  l'abbaye  fut  prise,  le  capitaine 
pendu  avec  quatre  de  ses  hommes,  le  monastère  détruit 
en  grande  partie  ;  mais  la  petite  chapelle  de  l'hôtei- 
Dieu,  dédiée  à  saint  Marc,  resta  debout  comme  un 
témoin  encore  vivant  de  nos  discordes  civiles  ;  elle  acquit 
même  une  espèce  de  célébiité  dans  la  ville  et  dans  les 
environs;  elle  succéda  aux  droits  honorifiques  de  l'an- 
tique église  abbatiale  de  Saint-Gildas. 

Chaque  année,  le  jour  de  l'Ascension,  les  curés  de 
Saint-Denys  et  de  Saint-André,  après  s'être  réunis  au 
faubourg  de  la  Croix-Normand,  dans  la  chapelle  du  Cru- 
cifix, se  rendaient  en  procession,  à  la  tète  de  leurs  parois- 
siens, avec  les  reliques  de  leurs  églises  respectives,  à  la 
chapelle  de  Saint-Marc. 

Cette  procession  était,  suivant  nous,  un  vieil  usage 
féodal,  une  de  ces  processions  si  nombreuses  au  moyen 
âge,  où  les  églises  inférieures  se  faisaient  gloire  et  hon- 
neur d'aller  en  corps,  avec  leurs  croix  et  leurs  bannières, 
rendre  à  l'église  suzeraine  foi  et  hommage  et  lui  porter 
le  tribut  annuel  qui  lui  était  dû  ;  or  les  paroisses  de  Saint- 
Denys  et  de  Saint-André  de  Chàteauroux  étaient  sous  la 
dépendance  féodale  de  l'abbaye  de  Saint-Gildas  ;  les  habi- 
tants de  ces  deux  paroisses  lui  devaient  annuellement  un 
cens,  fixé  en  moyenne  à  deux  livres  par  maisons  et  par 


X].*   SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  549 

feux  :  les  manouvricrs  ne  payjiicnt  que  quelques  deniers. 

Puisque  Tabbayc  de  Saint-Gildus  était,  avec  celui  du 
seigneur,  le  grand  fief  dominant  en  l'étendue  des  paroisses 
de  Saint-Denys  et  de  Saint-André,  «  comme  cela  résulte 
de  l'inventaire  des  titres  du  duché  de  Chàteauroux  dont 
les  archives  départementales  possèdent  un  exemplaire 
en  cinq  volumes  in-fol°,  tome  l[l,  passim,  »  il  était 
conforme  aux  usages  du  temps,  et  même  à  un  droit  sou- 
vent réglé,  en  cas  de  douti\  par  les  bulles  des  papes,  que 
les  curés  de  Saint-Ocnys  et  de  Sainl-André  aillent  en 
corps  à  Sainl-Gildas  rendre  leurs  d.  voirs. 

Aujourd'hui,  la  procession  du  jour  de  l'Ascension,  que 
j'appellerais  volontiers  la  procession  de  l'hommage,  n'a 
plus  sa  raison  d'être;  mais  le  peuple  l'aime  beaucoup,  et, 
ce  qu'il  y  a  de  très-singulier,  c'est  qu'il  y  vient  en  masse 
non-seulement  de  tous  les  quartiers  de  la  ville,  mais 
encore  de  toutes  les  paroisses  environnantes  où  l'abbaye 
de  Saint-Gildas  possédait  les  mêmes  droits  féodaux  que 
dans  b'S  deux  paroisses  de  la  ville. 

Les  processions  ne  pouvant  plus  aujourd'hui  faire  leur 
station  dans  l'église  de  l'abbaye,  qui  n'existe  plus,  ni  à  la 
chapelle  de  Saint-Marc,  livrée  à  des  usiges  profanes, 
entrent  dans  léglise  de  Saint-Christophe.  Le  uiomenl  le 
plus  solennel  de  la  fonction  sacrée  est  quand  les  curés  de 
Saint-André  et  de  Notre-Dame  rendent  leurs  devoirs  et 
offrent  l'encens,  en  présence  d'une  imuiense  foule,  à  leur 
collègue  de  Saint-Christophe,  qui  n'est  pas  et  qui  n'a 
jamais  été  leur  seigneur  suzerain,  mais  qui  reste  dans  le 
faubourg  comme  le  girdien  des  ruines  et  le  représeulaut 
des  vieux  usages. 

Personne  ne  se  présentant  pour  répondre  à  la  trente- 
troisième  question,   M.   l'abbé  Damourelte  signale   les 


SoO  CONGRÈS   AIICHÉOLOGIQUE   DE  PRA\CE. 

guerres  comme  ayant  fait  obstacle  au  développement  des 
arts:  les  guerres  du  protestantisme  surtout.  II  démontre, 
d'un  autre  côté,  que  les  monastères,  qui  construisirent  un 
grand  nombre  d'églises,  favorisèrent  puissamment  les 
arts.  11  attribue  une  pareille  influence  aux  grandes 
familles  du  Berry,  dont  les  libéralités  se  traduisirent  par 
l'érection  de  nombreux  monuments  religieux  et  chari- 
tables. 

Sur  la  seizième  question,  qui  avait  été  ajournée, 
M.  Barboux,  conservateur  du  musée,  donne  lecture  du 
mémoire  suivant  : 


Messieurs, 

Une  voix  plus  autorisée  que  la  mienne  à  tous  égards 
devait  répondre  à  la  question  du  programme,  comprise 
dans  le  n°  16.  En  son  absence,  M.  le  Directeur  me  pria 
d'y  suppléer  et  de  faire  connaître  aux  membres  du 
Congrès  les  monuments  numismatiques  découverts  dans 
le  département  de  l'Indre,  en  même  temps  que  les  échan- 
tillons les  plus  intéressants,  possédés  par  le  musée  de 
Châteauroux.  J'ai  cédé  à  ses  instances,  et  voici  comment 
vous  me  voyez  devant  vous,  Messieurs,  prêt  à  remplir  un 
devoir  imposé  par  les  circonstances,  non  pas  comme  un 
savant,  mais  comme  un  humble  conservateur  qui  va  vous 
parler  des  richesses  confiées  à  ses  soins. 

A  une  époque  que  personne  jusqu'à  présent  n'a  pu, 
je  pense,  déterminer  avec  précision,  les  hommes,  après 
avoir  longtemps  procédé  par  échanges,  sentirent  la  néces- 
sité de  créer  une  valeur  de  convention  qui  pût  équivaloir, 
soit  en  la  multipliant,  soit  en  la  divisant,  à  une  somme 


XL«   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  55i 

dft  travail  accompli,  et  au  moyeu  de  laquelle  on  put 
acquérir  tous  les  objets  dont  on  avait  besoin  et  faciliter 
ainsi  les  transactions.  C'est  cette  valeur  qu'on  a  appelée 
du  nom  générique  de  monnaies,  et  que  nous  allons  suivre 
dans  ses  différentes  transformations. 

Quelques  auteurs  ont  prétendu  qu'à  l'origine  la  mon- 
naie consistait  en  coquillages,  en  os  d'animaux  et  dents 
de  toute  espèce,  qu'on  enlilait  dans  une  lanière  de  cuir  et 
qu'on  portait  au  cou.  D'autres  ont  cru  que  ces  colliers 
n'étaient  autre  chose  que  des  parures,  ou  peut-être  la 
constatation  glorieuse  des  dangers  courus  et  du  courage 
déployé  pour  se  rendre  possesseur  de  ces  objets,  d'autant 
plus  rares  qu'ils  étaient  plus  difficiles  à  acquérir. 

Il  ne  m'appartient  pas  de  trancher  des  questions  aussi 
délicates  ;  mais  il  m'est  permis  de  dire  qu'à  mes  yeux 
ces  deux  opinions  se  concilient  parfaitement.  En  effet, 
vêtus  simplement  de  peaux  de  bétes  brutes,  il  est  tout 
naturel  d'admettre  que  les  hommes  portaient  suspendus 
à  leur  cou  les  objets  les  plus  précieux,  et  que  chacun 
de  ceux-ci  avait  d'autant  plus  de  mérite  qu'il  avait  été 
plus  difficile  à  conquérir  ou  à  inventer.  Ainsi  il  est  pro- 
bable qu'il  fallait  donner  bien  des  dents  de  lapin  pour 
une  dent  de  lion  et  beaucoup  de  coquillages  pour  un  os 
d'ours  sculpté. 

Tout  ceci  rentre  peut-être  dans  le  domaine  de  l'imagi- 
nation ;  mais,  ce  qui  est  réel,  c'est  que  lorsque  les  pre- 
miers métaux  furent  découverts,  on  fit  avec  du  plomb, 
du  bronze  et  du  fer,  des  anneaux  de  différentes  grandeurs, 
les  uns  tout  unis,  les  autres  ornés  de  chatons  ou  arêtes 
plus  ou  moins  nombreux,  selon  la  valeur  qu'on  voulait 
donner  à  la  pièce.  L'adoption  de  cette  forme  prouverait 
qu'à  cette  époque  encore  nos  pères  portaient  leur  fortune 
suspendue  à  leur  cou. 


."5^  CONGRÈS    ARCnÉOl.OGTQUE    PE    FTlAXCE. 

Eiilin  dos  penplos  plus  inj^riMiioux  que  les  autres,  Juifs, 
Grecs  ou  Égyptiens,  inventèrent  la  monnaie  plate, 
marqué  d'un  type  à  l'avers  et  ayant  un  titre  déterminé, 
et  bientôt  cette  nouvelle  forme  se  répandit  de  proche  en 
proche  sur  toute  la  surface  du  monde  connu. 

Notre  pays,  Messieurs,  nous  olTre  des  échantillons  de 
presque,  toutes  ces  transformations,  grâce  aux  recherches 
faites  par  M.  Lemaig:re,  qui,  pendant  soixante  ans,  avec 
une  persévérance  iniatigable,  a  fouillé  la  vieille  ville 
gauloise  de  Gabaton,  appelée  par  les  Romains  Gabatum, 
plus  tard,  au  temps  de  saint  Martin  de  Tours,  Leprosum, 
et  aujourd'hui  Levrouxr 

C'est  sur  cette  colline,  couronnée  par  deux  grosses 
tours,  restes  d'un  château  du  moyen  âge,  et  dans  les 
ruines  d'une  forteresse  élevée  par  les  Romains,  à  la  place 
même  de  la  ville  gauloisn,  et  qu'on  appelait  grosse  tour 
du  Bon-an  ou  de  Don-an,  que  notre  regretté  compatriote 
a  trouvé  une  grande  quantité  d'dbjets  d'un  intérêt  réel 
pour  l'archéologie.  C'est  là,  et  ilans  les  vignes  qui  l'en- 
tourent, (ju'il  a  r.'ciieilli  ces  numnaies  ci'lliiincs  que  nous 
possédons,  ces  rouelles,  ces  anneaux  avec  ou  sans  arêtes, 
les  uns  en  plomb,  les  autres  en  bronze,  dont  faisaient 
usage  les  habitants  de  ces  contrées  dans  leurs  rapports 
commerciaux. 

Je  ne  me  permettrais  pas.  Messieurs,  d'être  aussi  affir- 
matif  sur  ces  monnaies  du  m^nde  prim  til",  si  ces  asser- 
tions n'étaient  appuyées  sur  l'autorité  de  savauts  nuinis- 
mat?5,  tels  que  M.  Lambert,  dans  sou  Essai  sur  les 
nionnaies  ijaulolsc'i  du  I\'o/'d-0'iesl  •  M.  Bayeux,  dans  un 
volume  publié  en  I8i4;  M.  Rouillet,  de  Clermnnt,  en 
1840  ;  M.  le  comte  Hippolyte  de  Widanges,  en  ISGl. 

Malheureusement,  quand  votre  musée  a  pris  naissance, 
il  y  avait  déjà  plus  de  trente  ans  que  toutes  les  richesses 


XV    SESSION,    A    CIlATKAUnOUX.  .^53 

archéologiques,  découvertes  dan?  les  entrailles  de  ce  sol 
fertile,  avaient  été  brisées  par  ignorance,  vendues  par 
cupidité  ou  par  nécessité,  et  dispersées  aux  quatre  points 
cardinaux. 

Sur  ce  même  emplacement,  M.  Lemaigre  a  trouvé 
une  très-grande  quantité  de  monnaies  à  têtes  humaines  ci 
l'avers  et  représentant  au  revers  des  animaux,  tels  que 
bœuf,  sanglier,  loup,  cheval  ail<^,  etc.  Elles  sont  toutes 
sans  inscription,  ce  qui  est  un  témoignage  certain  de  leur 
haute  antiquité.  Il  a  trouvé  également  «  une  pièce  ayant 
au  droit  une  assez  belle  tète  d'Iiomnie  tournée  à  gauche, 
et  au  revers  un  aigle,  ou  autre  oiseau  de  proie,  aux  ailes 
éployées  et  ayant  au-dessous  de  ses  serres  la  légende  ou 
épigraphe  :  vadnaios.  Cette  monnaie  est  celle  d'un  chef 
«  tarnute.  » 

Dans  le  même  lieu  ont  été  rencontrées  deux  autres 
pièces,  dont  l'une  ofTrc  au  droit  une  têle  de  chef  ou  roi,  à 
cheveux  frisés  à  gro?ses  mèches,  tournée  à  gauche,  et  au 
revers  un  cheval,  ayant  au-dessus  de  lui  trois  annelets  et 
sous  ses  pieds  la  légende  ou  inscription  :  abudos.  Cette 
monnaie,  à  en  juger  par  les  bavures  (]ui  y  sont  encore 
adhérentes,  a  élé  coulée  avec  ;ilusieurs  autres  à  la  fois, 
car  on  voit  très-distinctement  la  trace  du  métal  qui  rem- 
plissait l'espace  servant  à  faire  communiquer  entre  eux 
les  vides  du  moule.  Elle  est  très-commune  dans  le  pays, 
et  attribuée  à  un  chef  dt^s  Bitnriges. 

Je  ne  veux  pas  quitter  Lcvroux  sans  vous  parler  d'un 
anneau  cabalistique,  trouvé  encore  par  .M.  Lemaigre  et 
donné  par  lui  à  notre  musée.  Cet  anneau,  dont  M.  do  la 
Tremblais  fait  mention  dans  les  Esquisses  /jitfurearfncs  du 
déjjartenunt  de  i Indre,  a  deux  inscriptions  sur  ses  bords 
extérieurs  et  une  sur  la  face  intérieure.  Nous  n'avons  pu 
les  déchiffrer  entièrement,  mais  nous  sommes  parvenus  à 


554       CONGRÈS  ARCnÉOLOGTQUE  DE  FRANCE. 

lire  ces  trois  phrases  qui  n'offrent  qu'un  sens  Ijien 
limité. 

curet  guttam ,  Gaspar,  Melchior,  Baltasar  ;  On 

eloi,  elos,  adonai  satain  (salan  ?)  (I) ,  honore;  ...,.., 

deo liberaùone et  verbuni  caro  fautun  est. 

Ce  bijou,  aui  parait  avoir  appartenu  à  un  chef  de  la 
religion,  est  en  argent;  mais  il  est  alhé  à  un  métal  qui  le 
rend  aussi  fragile  et  aussi  cassant  que  le  verre.  Il  est,  je 
crois,  d'un  grand  intérêt  pour  notre  musée. 

Nous  possédons  aussi,  de  la  même  provenance,  beau- 
coup de  fibules  gallo-romaines,  des  boucles  de  ceinturon, 
une  poignée  d'épée  et  les  restes  d'un  casque  gaulois  en 
fer  très-mince,  refoulé. 

En  suivant  l'ordre  chronologique,  nous  arrivons  à 
l'époque  de  l'occupation  romaine.  C'est  alors  qu'on  a 
trouvé  et  qu'on  trouve  encore  une  quantité  énorme  de 
monnaies  de  bronze,  d'argent  et  quelques-unes  d'or,  que 
la  pioche  du  vigneron  et  la  charrue  du  laboureur  mettent 
au  jour  un  peu  partout.  Les  Tetricus,  les  Antonins,  les 
Probus,  etc.,  sont  très-communs.  En  or,  nous  avons  un 
Néron. 

Saint-Marcel,  quoique  offrant  une  mine  moins  abon- 
dante, nous  a  fourni  aussi  beaucoup  de  pièces  romaines 
aux  mêmes  effigies  que  celles  de  Levroux. 

A  Argenton,  trente  et  une  pièces  romaines  ont  été  trou- 
vées, en  1848,  dans  la  tranchée  du  chemin  de  fer,  vers  le 
faubourg  Sainl-Étienue. 

Dans  la  commune  de  Pouligny ,  treize  monnaies 
romaines  ont  élé  recueillies  au  lieu  dit  la  Côte-Perdrix. 

A  Saint-Sébastien,  commune  de  Déols,  on  a  rencontré 

(1)Le  moi  salan,  entre  parenthèse,  n'existe  pas  sur  fan- 
neau  ;  c'est  une  traduction. 


XL'  SESSION,   A  cnATBAunoux.  555 

une  pièce  en  argent  de  Salonin,  une  pièce  en  bronze  de 
Tetriciis,  et  un  double  tournois  de  Charles  VIII. 

A  Chezelles,  qui  se  trouvait  sur  la  voie  romaine  d'Ar- 
genlodunum  à  Gabatuni,  et  où  il  existait  une  demeure 
très-importante  et  plus  tard  un  château  élevé  au  moyen 
âge,  ou  a  recueilli  : 

Une  pièce  de  Pierre  le  Cruel,  roi  de  Castille  de  1350  à 
126t>.  PETRUE  GRATIA  REX.  r)  BACEIONA  CIVITAS; 
un  denier  de  Tours  et  trois  monnaies  romaines. 

A  Villenlrois,en  1864,  dans  une  carrière  située  près  de 
la  ferme  d'Orvi lie,  dans  la  cave  aux  Revenants,  on  a  trouvé: 

Trois  deniers  du  Mans;  trois  deniers  du  chapitre  de 
Saint-Martin  de  Tours;  et  trois  deniers  de  Foulques  V, 
comte  d'Anjou  et  du  Maine  (1109).  FULCO  COMES. 
^URBSANDEGAVIS. 

En  4866,  dans  une  vieille  maison  en  démolition,  on  a 
rencontré  un  sac  de  toile,  contenant  cent  onze  pièces  en 
argent  et  une  en  or;  les  premières  à  l'eftigie  de  Henry  II, 
Henry  III,  Henry  IV  et  Charles  IX.  Celle  en  or  à  l'effigie 
de  Louis  XIII. 

A  Mosnay,  des  pièces  en  argent  à  l'effigie  de  Henry  II 
Charles  IX,  Henry  III  et  Henry  IV,  ont  été  également 
recueillies. 

Sur  l'emplacement  de  l'abbaye  de  Saint-Gildas,  dans  le 
faubourg  Saint-Christophe,  à  Chàteauroux,  a  été  trouvé 
un  denier,  frappé  à  Nantes,  de  Arthur  II.  duc  de  Bre- 
tagne, l.mV13l3. 

A  Villedieu,  on  a  découvert,  il  y  a  sept  ou  huit  ans,  un 
pot  contenant  plusieurs  kilogrammes  de  monnaies  d'ar- 
gent, à  l'effigie  de  Philippe  VI,  Jean  le  Bon,  et  de 
Louis  le  Masle;  nous  en  avons  quelques-unes. 

Au  Verger,  près  de  Déols,  plusieurs  pièces  de  Eudes  de 
Déols. 


556       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Dans  la  contrée,  sans  pouvoir  préciser  le  lieu,  on  a 
recueilli  beaucoup  de  monnaies  de  Macédoine,  de  Syra- 
cuse, d'Alhènes,  de  Lacédémone,  d'Ég^ypte,  de  Syrie,  etc. 

Enfin,  Messieurs,  j'ai  réservé  pour  la  fm  une  pièce  qui 
est  sinon  la  plus  rare,  du  moins  une  des  plus  belles  de 
notre  collection.  C'est  une  monnaie  d'or  de  Philippe  II  de 
Macédoine,  trouvée  sur  le  bord  d'un  fossé  par  un  labou- 
reur, à  la  Perrière,  commune  de  Buzancais;  elle  repré- 
sente à  l'avers  une  magnifique  tète  laurée  d'Apollon,  à 
droite  ;  au  revers,  la  Victoire 'conduisant  un  bige  au  galop, 
à  droite;  au-dessous  Philippou ;  dans  le  champ,  au-des- 
sous, à  droite,  un  trident. 

Comment  une  pièce  de  monnaie  de  Philippe  II  de 
Macédoine,  père  à'Alexandr.'  le  Grand,  se  trouve-t-elle 
dans  nos  contrées,  si  éloignées  de  son  point  d'origine? 

Pour  moi.  Messieurs,  il  est  évident  qu'elle  a  été 
apportée  par  des  étrangers,  probablement  par  des  Phéni- 
ciens, qui  faisaient  un  grand  commerce  avec  Nantes,  et 
qui  cerlainement  passaient  par  Gabalon,  qui  était  une 
ville  Irès-importante.  Si  j'émets  cette  opinion,  c'est  que 
MM.  Rollin  et  Fenaident,  de  Paris,  ont  prétendu  que  ces 
monnaies  étrangères,  et  surtout  celles  de  Philippe,  étaient 
frappées  par  les  Gaulois,  avec  des  coins  vendus  par  des 
marchands  venus  de  Grèce  et  de  Macédoine.  Je  ne  puis 
me  ranger  de  cet  avis,  quand  j'examine  cette  pièce 
frappée  éviilemment  avec  un  coin  neuf,  d'un  type  mer- 
veilleux; et  quand  je  considère  les  autres  pièces  étran- 
gères que  nous  possédons,  je  conclus  que  ces  dernières 
peuvent  sortir  de  coins  vendus  aux  Gaulois  dans  un  état 
de  détérioration  déjà  avancé,  mais  que  de  scmljlablcs 
coins  on  n'a  jamais  pu  tirer  d  aussi  belles  épreuves  que 
celle  que  vous  avez  sous  les  yeux. 

I)'autres  plus  compétents  pourront  juger  la  question 


XL*    SESSIOx\,    A    CIIATKAUROUX.  557 

gui,  du  reste,  ne  chimijera  rien  aux  couclusions  de  ce 
rapport  sommaire,  c'est  que  nous  habitons  un  pays  qui  a 
été  d'une  importance  très-grande,  et  dont  l'histoire  serait 
des  plus  intéressantes  si  elle  était  connue  avant  la  domi- 
nation romaine.  Les  faibles  documents  que  je  vous  ai 
apportés  sont  encore  bien  insulTi^ianls,  mais  peul-étre  un 
jour  trouvera-t-on,au  pied  de  ces  vieux  murs  de  Levroux, 
la  clef  qui  nous  ouvrira  la  porte  du  monde  nouveau  que 
nous  cherchons. 

Pour  arriver  à  ce  but,  il  serait  à  désirer  que  toutes  les 
découvertes  faites  vinssent  se  réunir  dans  un  centre  com- 
mun où  les  savants  pussent  les  venir  consulter  à  l'aise,  et 
que  les  inventeurs  de  curiosités,  au  lieu  de  les  laisser  dis- 
perser ou  détruire,  voulussent  bien  les  donner  ou  les 
vendre  aux  musées,  dont  le  but  est  de  conserver  tous  les 
objets  offrant  de  l'inléiêl  à  un  point  de  vue  quelconque. 

Ce  vœu.  Messieurs,  que  j'émets  devant  vous,  n'est  pas 
aussi  banal  qu'il  peut  vous  paraître.  Il  m'est  suscité  par 
une  petite  excursion  que  je  fis  dernièrement  à  Levroux, 
dans  une  vigne  distante  à  peu  prt^^s  de  deux  kilomètres  de 
la  ville.  Elle  appartient  à  un  vigneron  nommé  Ferré,  qui, 
chemin  faisant,  m'a  raconté,  d'une  manière  très-vague,  je 
dois  le  dire,  parce  que,  l'intérêt  à  ces  trouvailles  faisant 
défaut,  sa  mémoire  n'en  avait  conservé  qu'une  très-faible 
trace.  Ferré  m'a  raconté,  dis-je,  que  depuis  vingt-cinq 
ans  environ,  il  détruisait,  en  travaillant  sa  vigne,  un 
dallage  fait  avec  de  petites  pierres  blanches  et  noires  de 
forme  cubique,  et  qui  était  presqu'à  fleur  de  terre.  11  me 
dit  avoir  vu  des  dessins  très-jolis,  et  un  entre  autres, 
représentant  un  homme  à  cheval,  de  deux  à  trois  pieds 
de  hauteur,  qu'il  avait  brisé  après  l'avoir  montré  à  quel- 
ques personnes  de  sa  connaissance. 

Ce  récit  ayant  excité  ma  curiosité,  je  l'interrogeai  d'une 


558       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

t'açon  plus  pressant*^,  et  j'appris  qu'il  avait  découvert  des 
murs  se  croisant  en  tous  sens,  dont  il  avait  extrait  les 
pierres  pour  construire  sa  maison  de  ville  et  les  dépen- 
dances. Au  pied  de  l'un  de  ces  murs,  à  un  angle  extérieur, 
il  avait  trouvé,  me  dit-il,  à  quatre  ou  cinq  pieds  du  sol 
actuel,  quatre  décalitres  à  peu  près  d'écaillés  d'huîtres;  à 
quelques  mètres  de  là,  il  avait  rencontré  un  fourneau 
surmonté  d'une  cuvette,  dans  laquelle  se  trouvaient  des 
piles  de  pièces  de  monnaie  fondues  et  non  encore  séparées, 
ainsi  que  des  moules,  qu'il  appelait  des  moules  à  boutons. 
Il  est  probable  que  c'étaient  des  coins  pour  frapper  la 
monnaie. 

Tous  ces  détails,  racontés  avec  la  simplicité  d'un  bon 
vigneron  qui  n'attache  aucune  importance  à  ces  trou- 
vailles, puisqu'il  a  tout  donné  ou  tout  perdu,  nous  por- 
tent à  penser  que  sur  l'emplacement  de  cette  vigne  exis- 
tait une  maison  romaine  très-riche  et  très-importante, 
habitée  par  un  des  chefs  de  la  contrée.  Du  reste,  j'ai  pu 
m'assurer  par  moi-même  de  la  vérité  du  récit  de  Ferré; 
car,  à  notre  arrivée  sur  le  plateau  ,  il  a  découvert  deVaiit 
moi,  à  quatre  ou  cinq  pouces  du  sol,  im  reste  de  mo- 
saïque tellement  désagrégée,  qu'il  m'a  été  impossible  d'en 
recueillir  la  moindre  parcelle  intéressante.  Cette  mosaïque, 
dont  le  dessin  figurait  une  grecque,  devait  composer  l'en- 
cadrement d'une  salle. 

C'est  donc  du  fond  du  cœur.  Messieurs,  que  je  forme  le 
vœu  ((uej'ai  émis  plus  haut,  et  j'espère  qu'il  ne  sera  pas 
seulement  entendu  de  vous,  dont  la  sympathie  m'est 
acquise  d'avance,  mais  qu'il  parviendra  jusqu'aux  oreilles 
de  notre  Conseil  général,  qui  pourra  mettre  k  notre  dis- 
position les  fonds  nécessaires  pour  lui  donner  la  vie 
efteclive. 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  559 

M.  le  Directeur  de  la  Société  française  d'Archéologie 
entre  dans  ces  vues,  et  conseille  la  création  d'une  Société 
archéologique  à  Châteauroux. 

A  la  fin  de  la  séance,  M.  Lenail  présente  quelques 
observations,  exprimées  d'une  manière  remarquable,  dans 
le  but  de  conserver  les  pures  traditions  dans  le  langage  de 
l'archéologie  chrétienne.  11  démontre  comment  il  y  a  un 
abus  regrettable  à  substituer  le  mot  donateur  à  l'expres- 
sion donataire. 


Donataires. 


Vous  avez  plusieurs  lois,  Messieurs,  entendu  émettre 
cette  opinion  que  le  titre  de  donateur,  appliqué  à  ceux  qui, 
soit  par  legs,  soit  par  donation,  abandonnent  leurs  biens 
aux  églises  et  aux  monastères,  est  un  titre  qui  répugné  au 
sens  chrétien. 

L'homme  placé  dans  de  telles  conditions  ne  peut  être 
qu^in  donataire. 

M.  l'abbé  Chevalier,  président  de  la  Société  archéolo- 
gique de  Touraine,  s'est  élevé  au  congrès,  à  Angers, 
contre  cette  opinion.  Il  affirme  que  le  mot  donner  est  fré- 
quent dans  la  langue  des  cartulaires,  et  que  nous  disons 
très-bien  :  o  Je  donne,  Ego  do,  à  Dieu,  àlaB.  V.Marie,  à 

Monsieur  saint  Martin Celui    qui  donne  son  bien, 

ajoute-t-il,  est  véritablement  et  doit  ètreap'^elé  donateur.» 

Permettez-moi  de  vous  faire  observer,  Messieurs,  que 
l'honorable  docteur  Cattois,  en  soutenant  l'opinion  que  le 
donateur  n'est  que  le  donataire,  n'ignore  point  le  texte  des 
chartes. 


560       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

Cette  opinion  me  parait  juste  et  fondée,  et  c'est  en  lisant 
les  cartLilaires  que  j'en  ai  ac(juis  la  conviction. 

Quels  sont  les  motifs  les  plus  fréquents  des  donations 
faites  aux  églises  ou  aux  monastères  ? 

Le  désir  de  racheter  quelques  fautes  commises  contre 
Dieu  ou  contre  le  procliain,  la  faveur  d'une  sépulture 
honorable  dans  le  cimetière  des  moines  ou  dans  l'église,  le 
salut  de  l'àme. 

En  vérité,  quelle  fortune  sur  la  terre  peut  compenser  de 
tels  biens,  et  si,  par  la  bienveillance  ou  les  prières  des  ser- 
viteurs de  Dieu,  l'homme  peut  obtenir  ce  qu'il  demande, 
n'est-il  pas  vraiment  le  véritable  avantagé? 

Il  offre  d'abandonner  telle  part  de  ses  biens  de  la  terre, 
pour  obtenir  une  faveur  enviée  par-dessus  toute?,  des 
prières  qui  lui  vaudront  le  pardon  de  ses  fautes,  son  salut 
éternel. 

Il  est  véritablement  le  donataire. 

Ce  sont  donc  les  images  des  donataires  que  nou?  voyons 
au  ponaii  des  églises,  au  bas  des  verrières,  dans  nombre 
de  monuments  religieux. 

Ne  m'opposez  pas  les  chartes  dans  lesquelles  l'homme 
s'affirme  propriétaire  et  donateur  par  les  expressions  abso- 
lues, Ego  do... 

Ce  ne  sont  là  que  des  actes  civils. 

Si  le  signataire  de  ces  actes  n'eût  jamais  dû  avoir  affaire 
qu'aux  monastères  ou  aux  églises,  il  n'eût  pas  eu  besoin 
d'employer  ces  formules  de  propriété,  et  eût  abandonné 
son  bien,  en  suppliant  ceux  qui  recevaient  de  vouloir 
bien  considérer  cet  abandon  comme  une  faible  compensa- 
tion des  faveurs  qu'il  sollicitait. 

Mais  il  n'est  pas  seul.  Ses  héritiers  sont  là,  intéressés  à 
la  conservation  des  biens  qui  vont  sortir  de  leur  héritage, 
prêts  à  tout  faire  pour  les  ressaisir. 


XI."    SKSSION,    A    CIIATEAUllOUX.  56< 

A  cause  d'eux  v.l  pour  eux,  il  douue  :  Jifp  do...  Four 
lui  et  pour  ceux  qui  reçoivent,  il  abandonne  humblement 
pour  telle  ou  telle  cause,  dans  tel  ou  tel  but....  Il  se  sent 
véritablement  l'obligé,  alors  que  dans  ses  rapports  avec 
ceux  qui  l'entourent  il  doit  être  le  propriétaire  et  le  dona- 
teur. 

Vous  ne  vous  considérez  comme  mariés,  grâce  à  Dieu, 
qu'après  avoir  reçu  la  bénédiction  du  prêtre,  et  cependant 
vous  allez  dans  une  mairieremplir  des  formalités  d'actes  et 
d'application  de  signatures;  que  peuvent-elles  donc  faire  à 
votre  mariage,  sinon  lui  donner  une  force  obligatoire  dans 
vos  rapports  avec  une  société  plus  intéressée  à  vos  biens 
qu'à  votre  bien  ? 

Vous  avez  ici  deux  actes  ;  j'en  vois  deux  également  dans 
les  chartes,  et  dans  les  chartes  comme  dans  le  mariage 
aujourd'hui,  l'acte  civil  est  le  premier,  parce  qu'il  a  tou- 
jours fallu  mettre  sous  la  protection  des  hommes,  par  une 
aberration  inexplicable,  ce  qui  se  fait  pour  le  service  et  la 
gloire  de  Dieu. 

L'homme  écrit  dans  les  chartes  :  Fgo  do;  c'est  l'acte 
civil,  et  il  ajoute  :  Je  le  fais  pour  obtenir  le  pardon  de 
mes  fautes  et  le  salut  de  mon  âme  ;  c'est  l'acte  religieux. 

La  nécessité  des  actes  de  donation  au  moyen  âge  était 
absolue,  puisque,  malgré  les  formalités  les  mieux  rem- 
plies, nous  voyons  intervenir  après  de  longues  années,  à 
la  sollicitation  des  moines  eux-mêmes,  les  fils  et  les  petits- 
fils  pour  confirmer  cet  acte  d'abandon.  La  volonté  expres- 
sément écrite  du  maître  aurait  pu  ne  pas  suffire,  il  fallait 
qu'elle  fût  confirmée  par  les  héritiers. 

Vous  voyez   sans  peine  de   quelle   façon   eussent  été 

observées    les   intentions    d'un   homme   qui   se    fût  dit 

l'humble  obligé  de  ceux  qui  recevaient.  Aussi,  comme  le 

dit  fort  bien  M.  l'abbé  Chevalier,  dans  un  sens  tout  ditfé- 

XL"  SESSION.  3G 


6i\îî.  CONGRÈS   ARCHÉOLOfilQUE   DE   FRANCE. 

rent,  il  est  vrai  ;  l'Église  a  toujours  consacré  par  la 
bouche  des  évêques  et  des  abbés  l'expression  de  donation, 
en  permettant  de  dire  des  donateurs  :  JJedit  Deo  et  sanctœ 
Mariœ. 

Ils  savaient  trop  bien,  en  vérité,  de  quelles  nullités 
seraient  frappés  par  la  cupidité  humaine  des  actes  qui 
n'eussent  pas  exprimé  absolument  la  volonté  de  transférer 
la  propriété,  de  la  part  de  celui  qui,  véritable  donateur 
aux  yeux  des  héritiers,  n'est  et  ne  peut  jamais  être  que 
l'obligé,  le  donataire  vis-à-vis  de  Dieu  et  des  Saints. 

M.  Gattois  exprime  les  mêmes  pensées  avec  une  grande 
élévation,  et  le  Congrès  s'associe  entièrement  à  ses  vœux 
pour  la  conservation  de  la  pureté  du  langage  de  l'archéo- 
logie chrétienne. 

La  séance  est  close  à  cinq  heures  et  demie. 


1"    SÉANCE   DU    14   JUIN    1873. 

PRÉSIDENCE   DE   M.   DE   CESSAC. 

Siègent  au  bureau  :  MM.  Lataille,  Jautrou. 
M.  Barboux  remplit  les  fonctions  de  secrétaire. 
M.  de  Laurière  lit  le  procès-verbal  de  la  séance  du  13 
juin,  qui  est  adopté. 

M.  le  Président  déclare  à  l'assemblée  qu'il   vient  de 


XL'    SESSION,    A    CHATKAUROUX.  ,^)()3 

recevoir  plusieurs  ouvrages  sur  l'Iiisioire  primitive  et 
naturelle  de  riiouinic,  ol  dout  raulcur,  JNl.  Emile  Car- 
tailhac,  l'ait  homiuage  au  Coiiyrès, 

M.  (îuillard  demande  à  faire  quelques  communications 
relatives  à  l'art.  31  du  programme.  La  parole  lui  ayant 
été  accordée,  il  nous  fait  connaître  que,  sous  l'invocation 
de  saint  Biaise,  il  existait  à  Châteauroux  une  corporation 
de  drapiers  dans  la  rue  d'Indre.  11  entre  dans  des  détails 
fort  intéressants  sur  les  statuts  qui  la  gouvernaient,  sur- 
tout en  ce  qui  regarde  la  juridiction. 


Notes  sur  les  confréries  établies,  à  Châ- 
teauroux, sous  les  dénominations  de 
Saint-Biaise ,  de  Saint-Sébastien  et  du 
S  aint-  S  acr  ement. 


Pour  répondre  à  l'art.  3]  du  programme,  relatif  aux 
anciennes  corporations  professionnelles,  nous  nous 
sommes  livré  aux  plus  minutieuses  recherches  pour 
découvrir  quelques-uns  des  statuts  qui  peuvent  s'y  rap- 
porter. Si  nos  démarches  n'ont  pas  eu  directement  de 
succès,  nous  avons  obtenu  au  moins  des  renseignements 
qui  donnent,  à  un  certain  point  de  vue,  un  aperçu  de  ce 
qu'elles  étaient. 

A  Châteauroux,  il  existait,  avant  la  Révolution,  des 
confréries  organisées  de  diverses  natures.  Toutes  avaient 
des  bâtons,  soit  qu'elles  eussent  rapport  aux  métiers,  ou 
seulement  à  un  but  religieux.  Au  commencement  du 
règne  de  Louis-Philippe,  nous  avons  vu  encore,  aux  pro- 


5t)4       CONGhÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

cessions  de  la  Fête-Dieu,  les  bâtons  dos  boulangers,  des 
cordonniers,  des  vignerons  ou  jardiniers,  des  charpentiers, 
etc.  Ces  vieux  usages  ont  disparu,  au  moins  en  grande 
partie.  Le  corps  de  métier  le  plus  nombreux  était  celui 
des  «  tixiers  en  draps,  »  établi  sous  le  patronage  de 
saint  Biaise,  dont  la  fondation  remontait  au  29  mars  1-192. 
Il  comprenait  tous  les  ouvriers  en  laine,  drapiers, 
cardeurs,  fouleurs,  etc.  Le  travail  des  draps  était  alors 
l'industrie  la  plus  importante  de  la  ville. 

Une  chapelle,  dépendant  originairement  du  monastère 
de  Saint-Gildas  de  Chàteauroux,  était  érigée  à  saint 
Biaise,  dans  l'enceinte  même  du  Château-Raoul  ;  elle 
était  située  près  de  la  porte  qui  en  formait  autrefois  la 
seule  entrée  et  qui  existe  toujours.  Elle  fut  mise  en  inter- 
dit, le  8  mai  1749,  comme  tombant  en  ruine  et  manquant 
des  objets  indispensables  au  culte,  et  démolie  à  la  suite 
d'un  procès-verbal  dressé  le  29  novembre  1756.  Les 
matériaux  en  ont  été  employés,  en  partie,  à  l'érection 
d'une  autre  chapelle,  placée  sous  le  vocable  de  saint 
Pierre-ès-Liens  et  de  saint  Biaise,  qui  fut  élevée  près  des 
tours,  servant  de  prison,  de  la  porte  aux  Guindons, 
démolie  de  nos  jours. 

La  demeure  du  prieur,  maison  basse  et  en  mauvais 
état,  se  remarque  encore  à  l'angle  de  la  rue  de  la  Préfec- 
ture et  de  la  Vieille-Prison,  en  face  de  la  porte  de  l'an- 
cienne église  de  Saint-Martin. 

Cette  confrérie,  tombée  à  la  Révolution,  a  été  reconsti- 
tuée 1808,  et  de  nouveaux  règlements  furent  dressés 
vers  1815.  Depuis  l'introduction  des  mécaniques  à  Chà- 
teauroux, c'est-à-dire  des  métiers  à  carder  et  à  filer, 
l'institution  s'est  perdue  peu  à  peu,  et,  depuis  quarante 
ans,  il  n'en  est  plus  question. 

La  tradition  rapporte  que   les  procès    civils  entre  les 


XL'   SESSION,    A   CHaTEAUROUX.  o65 

confrères  y  étaient  jugés,  autrefois,  par  des  délégués  ou 
syndics.  Nous  n'avions  pas  d'autres  renseignements  sur 
cette  disposition  particulière;  mais  nous  avons  pu  prendre 
connaissance  dos  anciens  statuts  d'une  autre  Société,  de 
la  confrérie  religieuse  de  Saint-Séhastien,  dont  plusieurs 
articles  corroborent  le  témoignage  précédent. 

La  confrérie  de  Saint-Sébastien  a  été  instituée,  en  1642, 
dans  la  paroisse  de  Notre-Dame  et  Saint-Martin,  et 
confirmée  par  une  bulle  du  pape  Urbain  VIII,  en  date  du 
iO  septembre  de  la  même  année.  Elle  s'étendait  aux 
hommes  et  aux  femmes;  et,  par  suite,  des  procureurs  et 
des  procureuses  y  élaient  élus  annuellement. 

Le  cérémonial  des  enterrements,  qui  était  encore  usité 
à  Cliàteauroux  sous  la  Restauration  par  quelques  corpora- 
tions de  métiers,  y  est  indiqué  exactement.  Ces  institutions, 
quelles  qu'elles  fussent,  devaient,  en  effet,  avoir  des 
règles  communes  et  ne  différer  que  par  le  nom  :  les 
conditions  spéciales  à  chaque  profession,  dans  la  même 
localité,  en  étaient  certainement  les  seules  différences 
essentielles.  La  religion,  à  l'ombre  de  laquelle  elles  se 
formaient  et  se  développaient,  devait  inspirer  les  mêmes 
préceptes  pour  toutes. 

A  l'art.  15  de  la  confrérie  de  Saint-Sébastien,  il  est  dit: 
«  Si  quelque  frère  ou  sœur  a  quelque  différend  avec  quel- 
qu'autre  de  la  confrérie,  sera  accordé  le  dict  différend  la 
ueille  de  la  feste  de  monsieur  saint  Sébastien,  par  le 
curé  de  Saint-Martin  et  par  les  procureurs  de  la  confré- 
rie, et  celuy  ou  celle  qui  refusera  l'accord  sera  expulsé 
de  la  dicte  confrérie.  » 

Ce  passage  explique  ce  que  l'on  attribue  aux  statuts  de 
Saint-Biaise,  le  jugement  amiable  des  procès  par  les 
frères  élus,  présidés  ici  par  le  prêtre,  puisque  la  confrérie 
était  toute  religieuse.  Le  président   du   conseil,  pour   les 


566  CONGRÈS   AUCHÉOLOGIQUE   DE    FIUAGE. 

autres  corporations,  était  vraisemblablement  pris  parmi 
les  confrères  (1). 

Sans  doute  ces  jugements,  rendus  par  des  hommes 
souvent  peu  compétents  en  matière  judiciaire,  pouvaient 
quelquefois  n'être  pas  très-fondés  en  droit.  Mais  quand  on 
réfléchit  que  le  droit  de  chacun  n'était,  en  grande  partie 
réglé,  à  ces  époques,  que  par  des  coutumes  prêtant  elles- 
mêmes  beaucoup  à  l'interprétation  ;  que  les  formes  judi- 
ciaires étaient  très-complexes  ;  qu'un  procès  était  quel- 


(1)  L'obligation  qui  permettait  de  trancher  amiableineiit  les 
difficultés  surgissant  entre  les  sociétaires,  semble  également 
ressortir  des  règlements  d'associations  étrangères  à  la  ville 
de  Chàteauroux.  En  voici  un  exemple  : 

En  mail 486,  un  riche  marchand  de  Bourges,  Jean  de  Cuchar- 
mois,  institua  dans  la  ville  une  confrérie  sous  le  titre  de  C/ie- 
voHers  de  l'ordre  de  ^otre-Dome-de-la-Tahle-Ronde,  dont 
il  fut  le  chef,  le  président  ou  roy.  Cette  dénomination  était 
probablement  une  réminiscence  de  la  légende  du  fameux 
Arthur,  roi  des  premiers  Bretons.  Les  associés,  à  l'origine, 
étaient  au  nombre  de  quinze  seulement;  mais,  trois  ans  après, 
ils  furent  portés  à  vingt-quatre,  pour  atteindre  celui  des  com- 
pagnons d'Arthur,  de  ce  souverain  légendaire. 

Les  frères  devaient  s'entr'aider  et  se  secourir  mutuellement  : 
<c  Dès  que  les  chevaliers  avaient  connaissance  de  quelques 
différends  mus  entre  eux,  ils  devaient  s'emploijer  à  les 
apaiser  et  au  besoin  en  avertir  le  chef  et  les  autres  compa- 
gnons pour  que  ceux-ci  pussent  ij  mettre  ordre.  »  Celle 
appréciation,  bien  que  rapportée  d'après  la  tradition,  est  confir- 
mée par  la  formule  suivante  du  serment  que  les  chevaliers 
prêtaient  à  leur  réception,  telle  que  nous  l'a  conservée  un 
auteur  du  xvn"  siècle,  Chenu,  avocat  : 

€  Vous  jurer,  et  vouez  à  Dieu  et  à  Notre-Dame,  que  vous  gar- 
derez et    observerez    de  point  en   point   les  ordonnances   et 


XL"   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  ri()7 

qucfois  interminable  et  une  ruine  pour  les  familles,  on 
comprend  combien  de  services  rendaient  de  semblables 
conditions  imposées  aux  associés.  Il  est  inutile  de  le 
faire  ressortir  par  de  longs  développements. 

La  bonne  foi  résultant  de  sentiments  honnêtes,  de 
l'amour  du  bien,  était  le  mobile  qui  devait  inspirer  les 
décisions  plutôt  que  le  désir  d'une  application  rigoureuse 
de  ce  que  l'on  pouvait  appeler  alors  la  jurisprudence.  Les 
jugements  n'étaient  pas  obligatoires,  il  est  vrai  ;  les  par- 
ties avaient  la  faculté  de  ne  pas  les  accepter,  mais  les  dis- 
sidents étaient  exclus  de  la  société.  Des  motifs  très-graves 
devaient  uniquement  pousser  les  frères  et  les  sœurs  à 
une  pareille  extrémité.  11  est  même  plus  que  probable 
qu'en  ne  les  supposant  pas  rigoureusement  équitables,  ils 
n'étaient  pas  sans  appel  et  qu'ils  pouvaient  être  modifiés 

statuts  faits  et  qui  se  feront  au  temps  à  venir,  à  l'honneur  de 
Dieu,  (lu  Roi  notre  sire,  et  de  la  chose  puhiique  de  cette  ville 
de  Bourges,  et  à  l'utilité,  amour  et  union  des  frères  chevaliers 
de  la  Table,  et  fraternité  mise  sus  en  la  dite  ville  par  les  dits 
frères;   pourchasserez    te  bien   et  honnexir    d'eux  et   leur 
dommage  éviterez  à  votre  pouvoir  ;   porterez  honneur  et 
révérance  au  chef   de  la  dite  compagnie  en  ses  conseils   et 
convocations  ;   obéirez  à  ses  commandements  et  ordonnances 
qui  vous  seront  faits  pour  le  bien  de  la  dite  fraternité  et  com- 
pagnie; et,  en  signe  de  ce,  porterez  dorénavant  une  image  et 
enseigne    de   la  dite  glorieuse  Notre-Dame,  à  l'honneur    de 
Dieu  et  d'Elle;  et  aussi  vous  jurez  et  promettez  que    quand 
vous  serez  appelé,  selon  les  dites  ordonnances,  pour  assister  à 
la   messe  que  la  dite   compagnie  fait  dire  chaque  dimanche, 
vous  y  irez  et  direz  durant  icelle  le  chapelet  de  Notre-Dame, 
ou  donnerez  trois  deniers  pour    Dieu.  »  {Des   chevaliers  de 
l'ordre  de  Notre-Dame-de-la-Tabie-Ronde  de  Bourges,  par 
M.  G. -P.  Chevalier,  de  Saint-Amand.  Bourges,  1837.) 


o68       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

par  un  nouvel  examen  et,  par  conséquent,  par  une  autre 
transaction. 

Toute  personne  d'une  mauvaise  conduite  était  exclue 
de  la  société.  L'art.  16  en  est  ainsi  conçu  : 

«  Si  quelque  frère  ou  sœur  uient  à  estre  surpris  de 
iustice  en  sorte  qu'il  y  ait  sentence  d'infamie,  sera  mis 
hors  de  la  dicte  confrérie  et  son  nom  sera  rayé  du  livre 
de  la  dicte  confrérie.  » 

Les  mêmes  statuts  sont  terminés  par  une;  note  concer- 
nant la  première  nomination  des  procureurs  et  des  procu- 
reuses.  Une  partie  des  paragraphes  qui  y  ont  trait  nous 
paraît  intéressante  à  reproduire. 

«  Le  dixième  iour  deiuin,  mardy  de  la  Pentecoste,  l'an 

1642 ont  esté  nômé  procureurs  de  la  confrérie  lean 

le    maistre    et  Louys  Thony,    et    procureuse    Madelene 

Giraud Le  iour  de  saint  Sébastien,  l'an   1644,  on  a 

cômancé  à  porter  le  baslon  de  Saint-Sébastien  qu'on  a 
faict  apporter  de  Paris  où  il  a  esté  faict  aux  fraiz  de  la 
confrérie...  » 

Saint  Sébastien  ou  monsieur  saint  Sébastien,  comme 
il  est  communément  désigné,  avait  une  chnpelle  spéciale, 
tant  dans  l'église  de  Notre-Dame  et  Saint-Martin,  que 
dans  celle  de  Saint-André,  autre  église  démolie  à  la  Révo- 
lution. Le  curé  de  cette  dernière  paroisse  revendiqua  éner- 
giquement  ses  droits  sur  l'association.  Un  procès  s'en- 
suivit :  ses  prétentions  furent  lejetées  par  une  sentence 
de  Mgr  Pierre  d'Hardi uillier,  archevesque  de  Bourges,  en 
date  du  29  janvier  1644. 

Aucun  autre  fait  que  nous  sachions  digne  d'être  signalé, 
ne  nous  parait  devoir  être  rapporté  sur  ces  anciennes 
sociétés,  qui  ont  eu  l'influence  de  réunir,  pendant  si 
longtemps,  des  groupes  nombreux  d'habitants  d'une 
même  ville,  dans   un  but   commun,    manuel   ou    reli- 


XL*    SESSION,    A    CIIATEAUUOIIX.  t>û*^ 

gieux,  pour  s'entr'aider  par  le  travail   on  par  la  prif'rc. 

Cet  article  était  rédigé  quand  nous  eûmes  connaissance 
des  statuts  de  la  confrérie  du  Très-Saint-Sacrcinont,  fon- 
dée en  l'église  de  Saint-Martial  de  Chàteauroux,  par  Guy 
de  Chauvigny,  seigneur  de  la  ville  et  de  la  principauté 
du  Bas-Berry,  en  l'an  I3G''2  (1),  revus  et  corrigés,  en  l()99 
par  les  frères  Hell'ort  et  Mathieu  liauduit.  Ce  règleuxuit 
est  composé  de  vingt-cinq  articles  ;  les  prescriptions  reli- 
gieuses y  sont  nombreuses  et  austères  ;  nous  n'en  repro- 
duirons que  les  articles  qui  paraissent  avoir  réellement 
de  l'intérêt  au  point  de  vue  des  mœurs  et  des  pratiques  de 
l'époque. 

(1)  Cette  confrérie  a  été  établie  peu  de  temps  après  l'inslitutioii 
de  la  Fète-Dimi  et  de  la  procession  du  Saiiit-Sacrement,  qui  ne 
remontent  qu'aux  années  1311  et  1316.  Il  est  même  probable 
que,  dans  toutes  les  paroisses  de  la  France,  les  |jresLMiptions  du 
pape  Jean  XXII,  relatives  aux  prières  de  Voctare,  n'a\aieut 
pas  été  immédiateuienl  suivies  d'exéiuilion.  L'association,  à 
part  les  sentiments  religieux  tout  individueLs  ([ui  rins|)iraient, 
ne  peut  très-bien  avoir  été  oi'gani.^ée  parle  clergé  qu'au  nioment 
de  la  mise  en  pratique  des  bulles  des  Papes,  pour  inspirer  plus 
de  respect  aux  liabitanls  et  donner  plus  de  i>ompe  aux  cérémo- 
nies extérieures. 

Une  autre  circonstance  le  ferait  présumer.  On  lit  dans  La 
Thaumassiére,  Histoire  da  Berry,  que  le  Prince  fit  présent 
à  l'église  Saint-Marlial  d'un  vaisseau  d'argent  doré  pour  porter 
le  corps  de  Notre-Seigneur  à  la  fêle.  Les  ostensoirs  n'ont  été 
adoptés  que  dans  le  xvi«  siècle.  Entre  cette  époque  et  le  milieu 
du  xiv«  siècle  (1362;,  pendant  près  de  deux  cents  ans,  la  sainte 
hostie  devait  être  portée  aux  processions  dans  la  pijxide,  qui 
avait  habituellement  la  lorme  d'une  colombe.  Dans  l'église,  ce 
vase  était  suspendu  au-dessous  du  cihorium  ou,  après  la  suppres- 
sion de  cette  petite  coupole,  à  un  su[iport  recourbe  en  lorme  de 


570       CONGRÈS  ARCHKOI.OGIQUE  DE  FRANCE. 

L'art.  4*""  ne  concerne  que  le  costume  adopté  par  les 
frères  et  que  quelques  règles  générales  ; 

L'art.  3  mérite  de  fixer  tout  particulièrement  l'attention. 
On  voit  que  le  voile  ou  drap,  dont  l'usage  paraît  remonter 
à  la  fin  du  xiii"  ou  au  commencement  du  xiv"  siècle,  qui 
était  étendu  à  la  procession  du  Saint-Sacrement  au-dessus 
de  Notre-Seigneur  et  du  prêtre,  est  encore  porté  ici,  en 
1669  ou  aussi  exactement  en  1700,  par  quatre  frères.  Il 
est  généralement  admis  que,  vers  la  fin  du  xV  ou  le  com- 
mencement du  XYi^  siècle,  ces  poêles  ont  reçu  une  forme 
bombée,  de  manière  à  imiter  une  voûte  légère.  Ils  étaient 
recouverts  d'étoffes  précieuses,  richement  brodées.  Les 
instruments  de  la  Passion  s'y  remarquaient  souvent  en 
relief.  Si  ce  fait  est  exact  pour  Paris  et  quelques  grandes 
villes,  il  ne  saurait  l'être  pour  toute  la  province,  puisque, 
plus  d'un  siècle  après,  les  voiles  primitifs  existaient  à 
Châteauroux. 

Nous  ignorons  quand  les  dais  actuels,  dont  la  forme  a 
été  évidemment  empruntée  aux  baldaquins  des  lits,  ont 
été  substitués  à  ces  voiles.  Mais  l'époque,  dans  nos  con- 
trées, ne  saurait  être  antérieure  au  xviii''  siècle.  L'innova- 
tion n'a  pas  été  heureuse,  car  les  draperies  soutenues  par 


crosse,  richement  décoré,  placé  derrière  l'autel.  Le  présent  du 
seigneur  de  Châteauroux  ne  devait  pas  avoir  une  autre  destina- 
tion que  de  servir  aux  hosties  consacrées. 

Nous  ferons  remarquer  que  Guy  de  Chauvij^ny  n'avait  i|iie 
qninze  ans  en  1362,  que  vraisendilal)lement  rétahlissement  de 
la  confrérie  n'a  pu  être  due  à  son  initiative  el  qui!  n'a  pu  en 
accepter  (juc  \q  patronage.  Peut-être  même,  alors,  était-il 
on  Angleterre,  prisonnier  ou  otage  d'Edouard  III,  comme  le 
suppose,  dans  les  Eaquisses  hiograpliiques,  M.  Grillon-Des- 
chjpelles. 


XL'"    SKSSIOiN  ,    A    CIlATKAimuUX.  r)7  J 

des  lances  prêtaient  davantage  à  la  décoratidii,  et  t'iaiciil 
(l'un  cH'ct  plus  majestueux  ([ue  les  châssis  dont  un  l'ait 
usage  aujourd'hui. 

L'art.  19  a  trait  aux  contestations  qui  peuvent  surgir 
entre  les  l'rères.  On  remarquera  que  les  différends,  au  li(!u 
d'être  pris  dans  un  sens  absolu,  connue  dans  la  conlrérie 
de  Saint-Sébastien  etdans  celle  de  Notre-Dame-de-la-Table- 
Ronde,  sont  limités  aux  rancunes  et  injures.  Était-ce  le 
résultat  de  l'expérience  d'un  passé  qui  n'avait  pas  produit 
des  fruits  satisfaisants  ou  de  la  confiance  qu'inspirait  le 
prestige  dont  le  gouvernement  était  entouré?  Nous  ne 
saurions  le  dire. 

Ces  statuts  ont  été  révisés  en  1099.  Quand  les  ordon- 
nances de  Louis  XIV  avaient  apporté  de  grandes  modiii- 
cations  dans  la  procédure  en  général.  Golbert  avait  même 
cherché  à  la  rendre  uniforme  pour  toute  la  France.  La 
justice  devait  être,  en  conséquence,  plus  régulièrement 
rendue,  les  frais  d'instance  moins  onéreux,  les  règles 
protectrices  des  intérêts  de  chacun  mieux  observées , 
et,  par  conséquent,  les  obligations  imposées  aux  confrères 
de  se  soumettre  aux  jugements  d'arbitres  amiables,  bien 
moins  utiles. 

L'art.  20  montre  les  sentiments  d'humilité  dont  devaient 
être  animés  tous  les  associés. 

Le  pape  Innocent  X  a,  par  lettres  datées  du  3  mai  de 
l'an  de  l'Incarnation  1645,  accordé  à  tous  les  frères  qui 
«  satisferaient  aux  nouvelles  obligations  de  ladite  confré- 
rie, PARDON  et  INDULGENCES  de  première  rémission,  données 
et  octroyées  à  perpétuité.  » 

Voici  la  copie  des  articles  que  nous  avons  cités  : 

«  Art.  1".  —  Sont  tenus  lesdits  frères  de  ladite  Con- 
frérie, la  veille  de  la  Fête-Dieu,  d'aller  tous,  deux  à  deux, 
à  vcspres  audit  Saint-Martial,  vêtus  d'une  robe  blanche, 


.S7"2       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

longue  jusques  aux  pieds,  sans  fandures  ni  boutons,  et 
ayant  aussi  un  chaperon  à  l'ancienne  loy,  en  signe 
d'humilité;  et  le  lendemain,  jour  de  la  leste,  aller  à 
mâtine,  et  n'en  partiront  point  lesdits  frères,  que  la 
grande  messe  ne  soit  dite,  excepté  ceux  quiontexoine 
loyale  et  qui  prennent  congé  des  maîtres.  » 

«  On  a  depuis  ordonné  que  les  confrères  iront  dans 
l'ordre  susdit,  deux  à  deux,  le  cierge  allumé,  quérir  à 
Saint-Denis  (I)  le  saint  Sacrement  pour  être  porié  à  Saint- 
Martial,  à  huit  heures  du  matin. 

«  Art.  3.  —  Item.  Sont  tenus  lesdits  frères  de  se  con- 
fesser et  être  repentans  de  toutes  leurs  fautes  et  péchez,  et 
offrir,  le  jour  de  ladite  fête,  chacun  un  denier,  deux  à 
deux,  et  recevoir  Noire-Seigneur  à  ladite  messe,  deux  à 
deux,  et  en  iceluy  état  comme  dessus,  et  suivre  la  pro- 
cession niids  pieds,  s'il  n'y  a  exoine  loyale,  à  laquelle  pro- 
cession le  prêtre  qui  portera  Notre-Seigneur  doit  être 
accompagné  et  tenu  par  les  deux  cotez  de  deux  frères  de 
ladite  confiairie,  à  l'élection  des  maîtres  :  et  autre  quatre 

(1)  Saint-Denis  est  un  faubourg  complètement  détaché,  qui 
était  éloigné  de  1  kilomélre  des  [.lorles  de  la  ville.  L'église  qui 
remplaçait  une  antique  chapelle  érigée  avant  le  x"  siècle,  et 
par  conséquent  avant  la  consiruction  du  donjon  au  pied  duquel 
Chàteauroux  s'éleva  snccessivenient,  devint  la  premièie  égli.^^e 
paroissiale;  Sainl-lNlailial,  liàli  à  la  lin  du  xi«  siècle,  près  de 
l'ancienne  enceinte,  en  dépendait  La  première  fut  aliénée  à  la 
Révolution.  Sous  la  Restauraiion,  M.  Carre,  officier  supérieur  en 
retraite,  y  installa  des  machines  à  carder  la  laine  et  des  métiers 
à  fder;  vers  le  milieu  du  règne  de  Louis-Philippe  une  vinai- 
grerie  y  fut  établie;  enfin,  depuis  longtemps  déjà,  elle  sert  d'éta- 
blissement  principal  au  dépôt  de  mendiciié  départemental.  Les 
cuisines  de  la  maison  sont  établies  dans  la  chapelle  de  Sainte- 
Radegonde. 


XL*    SESSION,    A    GIIATKAUKOUX.  o73 

porteront  en  qnalni  bâtons^  le  drap  qui  serti  sur  Notre- 
Seigneur  et  sur  ledit  prêtre.  Et  sont  tenus  tous  lesdits 
frères,  comme  dessus,  de  venir  tous  ensemble  de  l'église 
susdite  Saint-Martial  et  aller  dîner  sans  eux  départir  ni 
devestir  leurs  robes  blanches,  jusques  au  soir,  (ju'ils  se 
voudront  coucher. 

«  Art.  19.  —  Item.  S'il  advenait  quelque  discord  entre 
aucuns  desiits  frères,  pour  rancunes  et  injia-es,  les  maîtres 
de  ladite  confrairie  seront  crus  et  pourront  ordonner 
dudit  discord  a  leur  volonté  :  et  celuy  ou  ceux  qui  contre- 
diront audit  appointement  et  ordonnance  desdits  maîtres, 
paieront  les  devoirs  de  ladite  confrairie  du  temps  qui  leur 
sera  passé ,  et  prendront  la  robe  et  cierge  de  ladite 
confrairie  et  ne  seront  plus  de  ladite  confrairie. 

«  Art.  20.  —  Item.  En  reconnaissance  et  considération 
du  haut  mystère  de  la  tr(S-noble  institution  du  précieux 
sacrement  du  corps  de  Jésus  Christ  pour  l'honneur,  re- 
merabrance  et  mémoire  duquel  a  été  ordonnée  cette  pré- 
sente confrairie;  les  frères  de  ladite  confrairie  ont  voulu  et 
veulent  que  dorénavant  au  diner  et  souper  que  feront  las- 
dits  frères,  chacun  an,  le  jour  de  ladite  Fête-Dieu,  treize 
pauvres  pour  l'honneur  de  Dieu  et  des  douze  apôtres,  qui 
furent  à  la  très-noble  fête  et  institution  de  susdite  du 
très-saint  et  précieux  sacrement;  lesquels  treize  pauvres 
sont  servis  à  diner  et  à  souper  avant  que  nul  desdils  frères, 
des  biens  que  Dieu  leur  a  donnez.  » 

L'ordonnance  suivante,  de  l(i23,  du  prince  de  Condé  (1), 
seigneur  de  Ghâteauroux,  règle  le  cérémonial  de  la  pro- 
cession du  commencement  de  Voctave. 

(1)  Le  prince  de  Coudé  avait  acheté,  en  <6I2,  des  héritiers 
du  dernier  des  Chauvigny,  la  terre  comprenant  l'ancienne  piiu- 
cipauté  déoloise. 


574  CONGRÈS   AUCIIEOLUGIOUE   DK   FRANCE. 

«  Le  jour  de  la  Fête-Dieu,  le  curé  de  Saint-Denis  ira 
quérir,  audit  Saint-Denis,  le  précieux  corps  de  Notre- 
Seigneur;  il  le  portera,  suivant  la  couiume,  en  l'église 
Saint-Martial,  auquel  lieu,  la  grande  messe  capitulaire 
dite  à  Saint-Martin  (1),  viendront  processionnellemeut  les 
chanoines  et  abbés  de  Chàteauroux,  et  l'abbé  ou  l'ancien 
chanoine,  l'un  absent,  portera  le  corps  de  Dieu  aux  lieux 
ordinaires  et  accoutumez,  et  après  la  prédication  rapporte- 
ront en  ladite  église  de  Saint-Martial  ledit  corps  de  Dieu, 
et  de  là  se  retireront  chez  eux  processionnelleraent.  Là 
assisteront  tous  les  autres  curés  de  la  ville,  avec  leurs 
prêtres,  croix,  bannières  et  chapes,  même  celuy  de  Saint- 
Christophe  (2),  auquel  nous  enjoignons  d'ainsi  le  faire,  et 
réserver  à  l'octave  la  procession  de  leur  confrairie  (3);  et 

(t)  L'église  de  Saint-Martin  était  dans  l'enceinte  même  du 
Cliàteaii-Raoul.  Elle  remplaçait  une  cliap  -Ile  qui  existait,  comme 
celle  de  Saint-Denis,  avant  la  construction  de  ce  château.  Vendue 
à  la  Révolution,  elle  resta  longtemps  une  propriété  particulière. 
Aujourd'hui  elle  est  habitée  par  les  sœurs  de  l'Espérance. 
L'ancien  chœur,  dont  nous  avons  vu  debout  les  voûtes  en  ogive, 
a  été  abattu  intérieurement ,  et  une  petite  chapelle  a  été  éri- 
gée à  la  place,  sans  en  avoir  moilifié  les  dimensions  extérieures. 

(2)  Faubourg  qui  est  séparé  de  la  ville  par  la  rivière  de 
l'Indre,  où  Ebbes  le  Noble,  seigneur  de  Déols,  a  fondé,  au 
commencement  du  x*  siècle,  l'abbaye  de  Saint-Gildàs. 

(.3)  A  Saint-Christophe,  il  existait  une  confrérie  du  Saint- 
Sacrement.  Il  est  probable  qu'il  devait  en  être  de  même  pour  les 
deux  autres  paroisses  de  Saint-André  et  de  Saint-Martin.  Les 
statuts  ne  paraissent  pas  avoir  olé  ideiiti(iueMient  scnd)lables 
pour  chacune  d'elles.  A  Saint-Martial  les  confrères  étaient 
obligés,  à  leur  décès,  de  donner  leurs  robes  à  un  pauvre, 
lequel  était  tenu  d'assister,  revêtu  de  cette  robe,  un  cierge  à  la 
niain,   au  service  et   à   Tenterrement   du    délunt.    A  Saint- 


XL''    SESSION,    A    llllATEAimolIX.  57o 

en  tout  1(!  reste  y  sera  procédé  suivauL  la  manière  aecoii- 
tnniéeet  statnls  (le  la  conCrairie.  La  [)rocL'ssion  roninicncera 
à  partir  de  Sainl-iMartial,  précisément  à  10  heures  du 
matin. 

«  Fait  ce  8  juillet,  l'an  lO'^.'J. 

«  Signé  :  Henry  de  Bourbon.  » 

Au-dessous  de  cette  ordonnance  est  consignée  la  mention 
suivante  : 

«  Ladite  ordonnance  de  Monseigneur  le  prince  de  Condé 
a  été  authorisée  par  l'eu  Monseigneur  l'archevêque  de 
Bourges,  Anne  de  Lévy,  le  18  juin  1038.  Les  parties 
intéressées  appelées,  comme  il  se  voit  par  les  règle- 
ments. » 

Nous  ajouterons  que  la  réunion  du  clergé  des  paroisses 
secondaires,  de  Notre-Dame  (autrefois  église  du  couvent 
des  capucins),  et  de  Saint-Christophe,  pour  assister  à  la 
possession  de  la  paroisse  principale  qui  est  Saint-André 

Christophe,  les  robes  étaient  vendues  au  profit  de  l'association, 
A  ces  époques,  l'on  plaidait,  comme  on  le  sait,  avec  acharne- 
ment pour  les  moindres  choses.  En  voici  un  exemple  qui  a  trait^- 
à  cette  association.  L'analyse  du  jugement  dont  il  est  (]uesti-dn 
est  extraite  de  l'inventaire  des  pièces  de  l'ancien  duché  de 
Chàteauroux  :  Par  sentence,  en  date  du  \%  juin  1559,  «  rendue 
à  Issoudun  contre  maître  Pierre  Veronneau,  naguère  vicaire  de 
la  cure  de  Saint-Christophe-lès-Cliàteauroux ,  demandeiu"  ; 
contre  Jean  Fredel ,  maître  d'une  confrairie  appelée  la  Conf'rai- 
rie  du  Corps-Dieu ,  fondée  en  la  paroisse  de  Saint-Christophe, 
défendeur,  pour  raison  de  6  1.  demandées  par  ledit  vicaire,  pour 
une  messe  qu'il  a  dite  en  ladite  paroisse  une  année  durant, 
laquelle  sentence  renvoie  les  parties  devant  le  bailly  de  Saint- 
Gildas.  »  Ainsi,  pour  six  livres,  on  va  plaider  de  Chàteauroux  à 
Issoudun,  et  d'Issoudun  on  revient  plaider  à  Chàteauroux  devant 
un  autre  baillv.  Les  commentaires  sont  inutiles. 


o76  COxN'GRÈS    ARCHÉOLOGIQUE    UE    FRANCE. 

(ancienne  église  du  Couvent  des  Cordeliers),  le  premier 
dimanche  qui  suit  l'ouverture  de  l'octave  de  la  Fête-Dieu, 
a  encore  lieu  aujourd'hui.  Saint-Martial  est  une  annexe 
de  Saint-André,  comme  autrefois  cette  église  l'était  de 
Saint-Uenis. 

La  parole  est  donnée  ensuite  à  M.  Daiguson,  pour  la 
lecture  d'un  mémoire  sur  l'article  38. 


Note  sur  le  cartulaire  de  l'abbaye  de 
Saint-Pierre  de  Vierzon. 


Au  nombre  des  rares  manuscrits  contenant  des  rensei- 
gnements du  plus  haut  intérêt  pour  l'histoire  locale  de 
notre  Berry,  se  trouve  sans  contredit  le  cartulaire  de  l'ab- 
baye de  Saint-Pierre  de  Yierzun,  qui,  malheureusement, 
ne  fait  pas  partie  de  nos  archives  départementales.  Ce 
précieux  cartulaire  {Cartularium  Virsionense)  appartient 
actuellement  à  la  Bibliothèque  Nationale,  ou  il  est  entré 
par  voie  d'achat,  en  1822,  et  il  y  est  classé  sous  le 
numéro  97  du  fonds  des  cartulaires.  Par  suite  d'un  sem- 
blable déplacement,  qui  a  mis,  de  longue  date  déjà,  ce 
remarquable  manuscrit  hors  de  la  portée  des  archéologues 
de  notre  province  pour  leurs  études  habituelles,  tout  porte 
à  supposer  que  cet  important  recueil  de  documents  n'est 
vraisemblablement,  pour  ce  motif  d'éloignement,  qu'assez 
peu  connu  dans  notre  région;  et  peut-être,  en  pareil  cas, 
une  courte  description  ne  paraitra-t-elle  pas  dépourvue 
de  tout  intérêt. 

L'abbaye  de  Saint-Pierre  de  Vierzon  [abbatia  sancti 
Pétri  Virsionensis  ;  monasterium  sancti  Pétri  Virsionensis 


XL*    SESSION,    A    CHATEA.UUOUX.  577 

Cenobii;  Cenobium  Virsionense;  Congregatio  suncti  Pétri 
Virsionensis  Cenobii)  fut  originairement  établie  en  un 
lieu  appelé  Dèvre  [vocabulo  Dovertim) ,  situé  non  loin  de 
Vierzon,  à  deux  lieues  environ  de  cette  ville,  et  entre 
Vierzon  et  Saint-Georges-sur-la-Prée,  sur  les  bords  de 
l'Yèvre,  et  dans  une  vallée  à  proximité  du  Cher.  De  là  lui 
vint  primitivement  le  nom  d'abbaye  de  Saiut-Pierre-de- 
Dèvro  [abbatia  Doverensis ;  monasterium  sancti  Pétri  Dove- 
rensis  Cenobii;  Monasterium  Doverense ;  Dovereme  Ceno- 
bium), qu'elle  porta  pendant  les  premiers  temps  de  son 
existence  et  durant  le  cours  d'un  siècle  environ.  Le  cartu- 
laire  de  l'abbaye  de  Vierzon  {Chartvlarium  Virsionense]^ 
renferme  les  actes  et  chartes  se  rapportant  à  ces  deux 
abbayes,  qui,  pour  ainsi  dire,  n'en  constituent  qu'une 
seule  et  unique,  puisque  l'abbaye  de  Vierzon  ne  fit  que 
remplacer  l'abbaye  de  Dèvre,  détruite  par  les  Normands,  et 
en  devenir  la  continuation  et  la  suite.  Il  contient  en  tout 
cent  dix-sept  actes  ou  chartes,  dont  seize  seulement  se 
rapportent  à  l'abbaye  de  Dèvre,  et  les  cent  un  autres  ont 
trait  à  l'abbaye  de  Vierzon. 

Suivant  toute  vraisemblance,  ce  fut  Raoul  de  Turenne, 
quarante-quatrième  archevêque  de  Bourges,  qui,  vers  l'an 
843,  fonda  l'abbaye  de  Dèvre,  dont  les  moines  devaient 
suivre  la  règle  de  Saint-Benoit,  et  en  fit  construire  le  mo- 
nastère, auquel  il  fit  donation  de  divers  biens  dépendant 
du  patrimoine  de  l'évèché.  Les  savants  auteurs  de  la 
Gallia  christiana,  toutefois,  ne  considèrent  pas  Raoul 
comme  le  fondateur  de  l'abbaye  de  Dèvre,  et,  d'après  eux, 
ce  prélat  aurait  seulement  agrandi  et  considérablement 
enrichi  par  sa  munificence  cette  abbaye  qui  existait  déjà 
auparavant.  D'après  la  Gallia  chiistiana,  l'abbaye  de 
Dèvre  aurait  été  fondée  par  Charlemagne,  alors  qu'il  pos- 
sédait seul  le  royaume  d'Aquitaine,  de  771  à  8J4,  ou  tout 
XL*  SESSION.  37 


578  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIUUE   DK    FRA.NT.E. 

au  moins  par  son  lils  Louis  le  Dcbdouaire,  qui  mourut  le 
20  juin  840;  tandis  que  dans  la  Chronique  de  Vierzon,di\\ 
contraire,  Labbe  fixe  à  l'année  843  l'époque  précise  de  la 
construction  par  Raoul  du  monastère  de  Dèvre.  Charles  le 
Chauve,  par  une  charte  de  843,  confirma  la  donation  de 
Raoul,  et  prit  sous  sa  protection  l'abbaye  de  Dèvre,  à 
laquelle  il  accorda  plusieurs  privilèges  et  immunités. 

Pa  rtrois  chartes  de  l'année  843,  Arabran  ,  seigneur  de 
Vierzon,  fit  des  donations  importantes  à  l'abbaye,  et  lui 
donna  entre  autres  biens  sa  chapelle,  dédiée  à  saint  Pierre, 
qui  était  située  sur  l'Yèvre,  non  loin  de  l'enceinte  de  la 
ville  de  Vierzon,  et  près  de  laquelle  le  monastère  fut 
construit. 

Un  des  bienfaiteurs  de  l'abbaye  fut  ensuite  Centulphe, 
seigneur  de  Vierzon,  qui,  en  852,  lui  fit  une  importante 
donation  qui  fut  approuvée  pi  r  Louis  II  le  Bègue,  qui  prit 
le  monastère  sous  sa  protection  et  lui  confirma  tous  les 
droits  et  privilèges  qui  lui  avaient  été  conférés  par  sou 
prédécesseur,  Charles  le  Chauve.  En  l'an  903,  l'abbaye  de 
Dèvre,  déj^  riche  et  puissante  et  alors  très-florissante,  fut 
presque  entièrement  ruinée  par  les  Normands,  qui  rava- 
gèrent à  cette  époque  le  Berry  et  la  Touraine.  L'abbé 
Raymond  et  les  moines  de  l'abbaye  de  Dèvre  furent  alors 
recueillis  par  l'archevêque  et  les  chanoines  de  Bourges,  qui 
les  installèrent  dans  le  château  de  Vierzon,  situé  au-des- 
sous de  l'enceinte  de  cette  ville,  et  où  Thibaud,  comte  de 
Chartres  et  seigneur  de  Vierzon,  les  autorisa,  par  une 
charte  du  jeudi  23  novembre  926,  à  établir  pour  toujours 
leur  monastère,  qu'il  mit  sous  la  protection  des  chanoines 
de  Saint-Étienne  de  Bourges.  Par  suite  de  cette  transla- 
tion dans  le  château  de  Vierzon ,  l'abbaye  de  Dèvre  prit 
alors  le  nom  d'abbaye  de  Saint-Pierre  de  Vierzon,  et 
recommença  sous  ce   nom   une  ère  de  prospérité  et  de 


XL'   SESSION,    A    CHATEAUHOUX.  579 

grandeur.  Quant  au  inonaslère  de  Uèvre,  bien  (ju'uyant 
6t6  presque  entièremeut  détruit,  il  ne  resta  pas  cependant 
toujours  abandonné,  et  il  l'ut  relevé  de  ses  ruines  et 
reconstruit,  en  1007,  par  Éverard,  seigneur  d'Issoudun,  de 
Vatan,  de  Koinorantin  et  de  Selles,  qui  y  établit  un 
prieuré  sous  la  dépendance  de  l'abbaye  de  Vierzon.  Éve- 
rard installa,  en  1025,  dans  ce  prieuré,  un  prieur  et  deux 
moines,  qui  furent  envoyés  de  l'abbaye  de  Vierzon  par 
Martin,  alors  abbé  de  ce  monastère,  et  auxquels  il  donna 
et  restitua  des  biens  considérables  et  notamment  tous  les 
droits  seigneuriaux  qui  avaient  précédemment  appartenu 
à  la  primitive  abbaye  de  Dèvre.  Le  prieuré  de  Dèvre  resta 
toujours  soumis  depuis  à  l'abbaye  de  Vierzon,  sans  pou- 
voir lutter  jamais  d'importance  avec  ce  puissant  monas- 
tère. Dans  l'église  de  l'abbaye  de  Dèvre  [Sancta  Dove- 
rensis  Basilica  que  est  constructa  in  honore  apostolorum 
Principis  Pétri  et  iniemerate  Virginis  Marie)  étaient 
inhumés  les  corps  du  saint  confesseur  Optât,  évèque 
d'Auxerre  vers  5'20  [confessor  Obtatus  scilicet  venerabiiis 
antissioderii  Pontifex),ei  des  saintes  martyres  Perpétue  et 
Félicité. 

Après  l'achèvement  de  la  construction  Je  l'église  du 
monastère  de  Saint-Pierre  de  Vierzon  [sacrosancta  Basilica 
Sancti  Pétri  Virsionensis  Monasterii  que  est  constructa  in 
honore  apostolorum  Principis  Pétri  et  intemerate  Virginis 
Marie),  dont  la  construction  fut  commencée,  d'après  Labbe, 
le  7  des  calendes  de  mai  de  l'année  1  li>3,  les  reliques  de  saint 
Optât  et  des  saintes  Perpétue  et  Félicité  furent  transpor- 
tées dans  cette  église,  dans  laquelle  fut,  en  outre,  inhumé 
le  corps  de  saint  Bcsaint,  ou  Besaut,  ou  Bisaut,  ou  Bezen- 
tion  {Beat us  Bisencius,  confessor  Cristi),  prêtre  et  solitaire 
en  Berry,  aux  environs  de  Vierzon,  qui  devait  vivre  au 
Yiii''  siècle  et  mourut  avant  le  ix*  siècle.  D'après  le  carlu- 


580       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIOUE  l'E  FRANCE. 

laire,  le  monastère  de  Saint-Pierre  de  Vierzon  Sancli 
Pétri  Virsiouensis .  Monosterium  quod  est  con&tnictum  in 
pQyo  bitur-ko  in  viearia  vestmnense  super  fluvium  Cans), 
quoique  situé  au-ilessous  même  de  l'enceinte  de  la  ville 
de  Vierzon.  était  bâti  sur  le  territoire  de  la  viguerie  de 
Vatan. 

L'abbaye  de  Vierzon,  prise  par  les  seigneurs  de  Vierzon 
sous  leur  protection  spéciale,  reçut  à  maintes  reprises  des 
divers  seigneurs  de  cette  maison  d'importantes  donations, 
qui  augmentèrent  considérablement  son  patrimoine  et  sa 
puissance.  Les  seigneurs  de  Mehun  et  de  Sully  se  font 
également  remarquer  par  leur  générosité  envers  le  monas- 
tère. Humbaud  H  le  Riche,  seigneur  de  Vierzon,  qui.  en 
10-25,  se  fil  moine  à  l'al-baye  de  Saint-Pierre  de  Vierzon, 
dont  il  devint  plus  tard  abbé,  fit  don  au  monastère,  en 
lOlS  et  on  10-25.  d'une  partie  de  ses  richesses.  Arnoul  1". 
Geofifroy  I",  Arnould  II  et  Hervé  I",  tous  seigneui-s  de  la 
maison  de  Vierzon,  lurent  aussi  les  bienfaiteurs  constants 
de  l'abbaye.  Le  mercredi  IV  des  calendes  de  mai  de  l'année 
109-2  4  mai  1092  .  Etienne,  vicomte  de  Bourges,  fit  dona- 
tion au  monastère  de  Vierzon.  par  une  charte  qui  fut  plus 
tard  confirmée  par  son  successeur  et  héritier.  Eudes  Arpin. 
dernier  vicomte  de  Bourges,  de  la  riche  abbaye  de  Saint- 
Gondou-sur-Loire  [abbatia  scilicet  Sancti  Gundulfi  super 
fluvium  Ligeris  in  episcopatu  bituricensi  sita  et  de  tous  les 
bieus  en  dépendant. 

Vers  la  fin  du  xi*  siècle,  les  moines  de  Vierzon  furent 
chassés  de  leur  abbaye  par  les  moines  de  l'abbaye  de  Déols 
ou  du  Bourg-Dieu,  avec  l'aide  de  l'archevêque  île  Bourges. 
Adelbert  (cinquanle-st-ptième  archevêque  de  Bourges), 
qui,  avant  d'être  promu  au  siège  archiépiscopal,  avait  été 
abbé  de  Déols;  mais  ils  ne  tardèrent  pas,  après 
la  mort,  toutefois,    de   l'archevêque  Adelbert  ^10971.  à 


XL*    SESSION  ,    A   CHATEAUROUX.  581 

être  réintégrés  dans  leur  monastère,  avec  l'abbé  Herbert, 
dont  le  nom  ligure  dans  des  chartes  des  années  1100  et 
1  l'ai .  Après  l'abbé  Pierre,  qui  est  le  dernier  abbé  cité  dans 
le  cartulaire,  vini^^t-ntMil' abbés,  d'après  la  Gallia  Chri$- 
tiana,  régirent  successivement  l'abbaye  de  Saint-Pierre  de 
Vierzon,  qui  continua  à  prospérer  sous  leur  administra- 
tion, jusqu'au  moment  où  le  quarante-septième  et  dernier 
abbé,  Ludovic  de  Plas,  qui  administra  l'abbaye  de  1637  à 
1675,  la  réunit  en  1665  ou  1671  à  la  congrégation  de 
Saint-Maur. 

Le  cartulaire  de  l'abbaye  de  Saint-Pierre  de  Vierzon  est 
un  volume  in-folio,  composé  de  xxix  folios  de  parchemin 
reliés  entre  eux,  et  n'offrant  jusqu'à  la  fin  aucune  lacune 
entre  les  différents  actes  qu'il  contient.  Le  manuscrit  n'a 
pas  été  terminé,  il  s'interrompt  brusquement  au  milieu 
de  la  première  colonne  du  verso  du  folio  xxix;  toutefois, 
il  ne  renferme  en  réalité  que  xxviii  folios,  quoique  la  pa- 
gination fasse  croire  à  l'existence  d'un  folio  en  plus.  Le 
scribe  a  commis  une  erreur  dans  la  pagination,  car,  con- 
trairement à  l'usage  de  ne  pas  placer  de  numéros  d'ordre 
sur  les  versos,  le  verso  du  folio  xxii  du  manuscrit  porte  le 
chiffre  xxiii,  et  le  folio  suivant,  qui  n'est  en  réalité  que  le 
folio  XXIII,  est  indiqué  par  erreur  comme  étant  le 
folio  XXIV.  Chaque  page  du  cartulaire  contient  deux  co- 
lonnes, renfermant  chacune  trente-cinq  lignes  d'écriture, 
dont  la  réglure  est  à  la  pointe  sèche.  Il  n'existe  dans  tout 
le  manuscrit  qu'une  seule  lettrine  ou  grande  lettre  ini- 
tiale, celle  placée  au  commencement  de  la  première  charte 
du  cartulaire,  c'est  la  lettre  C,  commençant  le  nom  du 
pape  Calixie  II,  qui  est  enluminée  avec  des  couleurs  rouge, 
bleue  et  veite.  Partout  ailleurs  les  lettrines,  qui  auraient 
dû  se  trouver  au  commeucement  de  chacun  des  différents 
actes,  manquent  dans  le  cartulaire,  et  l'espace  qui  a  été 


582  OO.NGRÈS    AUr,lIÉOI.<H;iuUK    1>E    FUA.NC.E. 

léservé  jtour  leur  conrcctidii   aux  ('nluluilnMll•^  est  resté 
vido. 

On  reiiiar((ii('  dans   k'  carliilaire  de;  Vicrzi'n  plusieurs 
dessins,  ce  qui  est  fort  rare  et  donne  un  grand  prix  à  ce 
manuscrit,  en  même  temps  que  c'est  là  une  marque  évi- 
dente d'une  haute  antiquité.  Ces  dessins  sont  au  nombre 
de  treize  :  six  d'entre  eux  représentent  des  abbés  du  mn- 
nastère,  tous  à  peu  près  dans  la  môme  posture,  se  tenant 
debout,  portant  la  crosse  dans  la  main  droite,  un  livre 
dans  la  main  gauche,  et  ayant  la  tète  découverte,  avec  la 
couronne  de  cheveux  monastique.  En  ouvrant  le  cartu- 
laire,  on  trouve,  au  premier  folio,  un  dessin  surmontant, 
dans  toute  la  largeur  de  la  page,  le  privilège  accordé  par  le 
pape  Calixte  II  à  l'abbaye,  en  l'année  H21;  ce  dessin 
représente,  au-dessus  de  la  première  colonne  d'écriture  de 
ce  folio,  assis  dans  une  chaire  et  portant  des  clefs  dans  la 
main  droite,  l'apôtre  saint  Pierre,  à  qui  Calixte  II,  assis  à 
sa  gauche,  offre  une  palme  de  la  main  gauche;  au-dessus 
de  la  deuxième  colonne  du  même  folio  (folio  i,  recto), 
saint  Paul,  également  assis  dans  une  chaire,  et  tenant  un 
livre   dans   la  main,    a    à   sa   gauche    le    même    pape 
Calixte  II,  qui  lui  offre  aussi  une  palme.  Les  vêtements 
dont  sont  revêtus  saint  Pierre  et  saint  Paul  sont  enlu- 
minés avec  des  couleurs  bleue  et  verte,   qui  paraissent 
avoir  été  ajoutées  après  coup,  et  vraisemblablement  à  une 
époque  postérieure   à   la   confection   du   cartulairc.    Au 
verso  du  folio  i,  un  dessin  représente  le  pape  Adrien  IV, 
revêtu  du  costume  pontifical,  et  portant  la  crosse  de  la 
main  droite;  au  verso  du  folio  ii est  représenté  Charles  II 
le  Chauve,  la  couronne  en   tête,  et  portant  de  la  main 
gauche  un  attribut  qui  se  rapproche  par  sa  forme  de  la 
main   de  justice;    le  roi   a  à  sa  droite  l'archevêque  de 
Bourges,  Raoul  de  Turenne,  revêtu  d'une  chasuble,  coiffé 


XI,'    SESSION,    A    (iHATEAUHOUX.  583 

d'une  mitre,  ol  louant  lu  crosse  do  la  main  droite.  Au 
verso  du  folio  m,  est  un  dessin  ropr(^scntaiit  le  roi 
Louis  II  lo  Hè^iio,  portant  dans  la  main  droilc  une  main 
de  justice,  la  couronne  sur  la  tète,  <!t  revêtu  du  manteau 
royal.  Au  verso  du  l'olio  v,  se  trouve  le  dessin  le  plus  con- 
sidérable de  tout  le  manuscrit:  c'est  un  [j;-roupe  représen- 
tant, à  genoux,  Arabran,  seigneur  de  Yierzon,  accompagné 
(le  son  épouse  et  d'un  de  ses  parents,  et  remettant  à  l'abbé 
Aimeric,  auprès  duquel  se  tiennent  deux  moines,  la 
charte  de  donation  écrite  au-dessous.  Au  l'olio  ix,  recto, 
est  représenté  l'archevêque  de  Bourges,  Aimon,  avec  la 
mitre  en  tète,  la  crosse  dans  la  main  droite  et  un  livre 
dans  la  main  gauche.  Le  dernier  dessin  que  l'on  rencon're 
dans  le  manuscrit  représente,  au  folio  xiv,  l'abbé 
Bèrenger,  dans  une  chaire,  avec  la  couronne  de  cheveux 
monastique,  portant  la  crosse  de  la  main  droite,  et  ayant 
la  main  gauche  appuyée  sur  un  livre  placé  lui-môme  sur 
le  rebord  de  la  chaire.  Il  a  été,  en  outre,  laissé  dans  le 
cartulaire,  aux  versos  des  folios  xvii  et  xxv,  deux  places 
vides  pour  des  dessins  qui  n'ont  pas  été  exécutés,  ce  qui 
prouve  jusqu'à  l'évidence,  indépendamment  même  de 
l'absence  des  lettrines  ou  grandes  lettres  et  de  la  brusque 
interruption  du  manuscrit,  que  le  cartulaire  n'a  pas  été 
terminé. 

L'écriture  du  manuscrit  est,  suivant  toute  apparence, 
de  la  seconde  moitié  du  xii*  siècle  ;  elle  est  uniforme  et 
paraît  être  de  la  même  main.  Cependant,  au  commence- 
ment de  la  deuxième  colonne  du  folio  xxix,  il  y  a  un 
brusque  changement,  et  les  deux  dernières  colonnes 
d'écriture  semblent  être  postérieures  aux  autres;  l'encre 
est  beaucoup  plus  noire,  et  les  caractères,  qui  sont  plus 
petits  et  paraissent  moins  anciens ,  pourraient  être 
rapportés   peut-être   au    commencement   du   xiii''  siècle 


584       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

OU  aux  dernières  années  du  xir.  Il  est  à  remar- 
quer, toutelbis,  (juc  l'écriture  change  d'une  manière 
bien  soudaine  et  de  telle  façon  que  les  deux  genres 
d'écriture  se  rencontrent  dans  le  corps  du  même  mot,  ce 
qui  tendrait  à  faire  croire  que  l'écriture  est  de  la  même 
époque  et  ne  diflère  que  par  la  main  du  scribe.  Ainsi,  le 
mot  commendare ,  qui  termine  la  première  colonne  du 
recto  du  folio  xxix  et  commence  la  deuxième  colonne  du 
même  folio,  est  formé  des  deux  écritures  :  corne  (pour 
commen)  est  de  l'écriture  ordinaire  du  manuscrit,  et  dare 
est  tracé  avec  les  caractères  employés  dans  les  deux  der- 
nières colonnes  seulement.  Il  est,  du  reste,  probable  que 
l'interruption  qui  a  été  mise  dans  la  transcription  des 
deux  parties  du  même  acte,  n'a  pas  dû  être  de  longue 
durée.  Dans  la  plus  grande  partie  du  contexte  du  cartu- 
laire,  les  pièces  sont  copiées  les  unes  à  la  suite  des  autres, 
sans  intervalles  entre  elles  et  dans  toute  leur  étendue  ; 
mais,  à  partir  du  folio  xxviii  recto,  dont  l'écriture  paraît 
être  de  l'époque  de  la  confection  du  cartulaire,  le  scribe 
ne  copie  plus  les  pièces  in  extenso,  et  il  se  borne  à  en 
donner  seulement  une  simple  analyse,  dans  la  forme  des 
pièces  appelées  notices  ou  chartes  notices.  D'après  les 
inductions  que  l'on  peut  tirer  de  l'écriture  et  des  dates 
que  renferment  certains  actes  qui  y  sont  contenus,  le  car- 
tulaire de  Vierzon  paraît  avoir  été  rédigé  dans  la  seconde 
moitié  du  xii''  siècle.  Il  doit,  suivant  toute  vraisemblance, 
et  à  notre  sens  du  moins,  avoir  été  entrepris  vers  H 50 envi- 
ron et  copié  pemlant  l'administration  de  l'abbé  Araudus,  et 
celle  de  l'abbé  Pierre,  qui,  d'après  les  auteurs  de  la  nouvelle 
Gallia  Christiana,  était  abbé  de  Vierzon  en  H57  et  en  H63. 
Nous  croyons  doue,  d'après  toutes  les  données  fournies  par 
le  manuscrit,  pouvoir  fixer  l'époque  de  la  rédaction  du 
cartulaire  de  Vierzon  entre  les  années  1150  et  Ii210. 


XL*    SESSION,    A    CIIATKAUHOIJX.  r»85 

(^ecarlulaire  compreiifl  on  hnil  117  actes  on  cliartcs,  i|ui 
peuvent  se  diviser  d'après  la  iioinonclatiiro  suivante  :  trois 
bullosou  privilèges  de  papes,  dtîux  (lii>lùnies  royaux,  deux 
chartes  de  l'ondation,  soixante-quinze  actes  de  donations  et 
fondations  pieuses,  dix-neut"  accords  et  transactions,  trois 
actes  d'échange,  deux  actes  d'affranchissement,  neuf  accu- 
sements,  une  charte  de  vente  et  un  acte  d'achat.  L'ordre 
entre  ces  divers  actes  contenus  dans  le  cartulaire  n'a 
rien  de  méthodique,  de  systémati(iu(;  ni  diî  chronohj- 
gique. 

L'acte  le  plus  ancien  que  l'on  trouve  dans  le  cartulaire 
est  la  charte  de  fondation  ou  tout  au  moins  d'agrandisse- 
ment considérable  de  l'abbaye.  C'est  un  diplôme  royal 
portant  le  monogramme  de  Charles  le  Chauve,  ne  conte- 
nant mention  d'aucune  date,  et  qui  est  attribué  par 
Mabillon  à  l'année  843.  La  charte  la  plus  ancienne  du 
cartulaire  qui  porte  une  date  certaine,  est  une  donation 
(folio  7  verso),  faite  par  Centulphe,  seigneur  de  Vierzon, 
à  la  basilique  du  monastère  de  Saini-Pierre  de  Dèvre,  de 
divers  biens  et  portant  la  date  du  mois  de  février  de 
la  treizième  année  du  règne  de  Charles  le  Chauve  (février 
852). 

L'acte  le  plus  récent  et  à  date  certaine  qui  figure  dans 
le  cartulaire  est  le  privilège  accordé  au  monastère  de 
Saint-Pierre  de  Vierzon  par  le  pape  Adrien  IV,  qui  est 
ainsi  daté  :  «  Donné  à  Rome,  à  Saint-Pierre,  le  9  des  ca- 
lendes de  février,  indiction  ïll,  l'an  de  l'Incarnation  1154, 
la  première  année  du  ponlilical  du  pape  Adrien  IV.  » 
Le  plus  récent  ensuite,  et  également  à  date  certaine, 
est  un  acte  de  donation  contenant  restitution  de  l'église 
de  Clémont  (arrondissement  de  Sanccrre,  dans  le  dépar- 
tement du  Cher)  à  l'abbaye  de  Vierzon,  et  portant  la 
date   de   l'année  de  l'Incarnation   1100   et  de  la  trente- 


586       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

sixième  ain)ée  du  W'gne  du  roi  Philippe  au  mois  de  mai. 
Cette  dernière  date  de  l'année  du  règne,  toutefois,  contient 
une  erreur.  Philippe  I"^  étant  monté  sur  le  trône  le  4  ou 
le  29  août  lOHO,  la  trente-si.xième  année  de  son  règne  ne 
pourrait  être  l'année  H 00,  mais  serait  l'année  1096.  De 
semblables  erreurs  dans  l'indication  de  l'année  du  règne, 
en  désaccord  avec  l'année  de  l'Incarnation,  ne  sont  pas 
rares  dans  les  chartes.  En  pareil  cas,  il  est  préférable  de 
s'en  rapporter  plutôt  à  l'année  de  l'Incarnation  qu'à  celle 
du  règne.  Plusieurs  autres  actes,  probablement  plus 
récents,  mais  qui  ne  sont  pas  datés,  semblent  se  rapporter 
à  l'administration  de  l'abbé  Araudus,  qui  ne  figure  pas 
sous  ce  nom  dans  la  Gallia  Christiana,  mais  qui  vraisem- 
blablement doit  être  le  même  que  l'abbé  Arnaudus, 
Artaudus  et  Arnulfus,  qui  se  trouve  le  seizième  dans  la 
liste  des  ahbés  du  monastère  à  partir  de  1137,  et  que  l'on 
voit  encore  en  M 42. 

Enfin,  un  autre  acte  qui  doit  être  encore  plus  récent  et 
qui  ne  porte  pas  de  date,  est  intervenu  du  temps  de  l'abbé 
Pierre,  que  la  Gallia  Christiana  signale  comme  dirigeant 
le  monastère  eu  1157  et  en  1 10,3. 

I.  Bulles  des  Papes.  —  Lecartulaire  contient  trois  bulles 
de  papes  :  la  première,  émanée  de  Calixte  II,  est  de 
l'année!  121,  et  les  deux  autres  d'Adrien  IV,  l'une  de 
l'année!  154,  et  l'autre  datée  seulement  du  4  des  calendes 
de  février,  sans  indication  de  l'année.  Les  bulles  de 
Calixte  II,  de  l'année  1121,  cl  d'Adrien  [V  du  mois  de 
février  1154.,  commencent  par  un  court  préambule;  puis 
vient  le  dispositif  dans  lequel  le  Pape  confirme  au 
monastère  la  possession  des  biens  qui  lui  ont  été  donnés, 
et  dont  l'énumération  est  contenui'  dans  l'acte,  et  elles  se 
terminent  par  l'excommunication  ou  la  [)rivatiun  des 
sacrements   portée  contre  ceux  ([ui,  en  connaissance  de 


XI/    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  ^^7 

cause,  cl  après  doux  ou  trois  avertisscmciils,  persisteraient 
à  no  |)as  respecter  les  privilèges  accordés  par  le  Saint- 
Père.  La  iMille  de  Calixte  II  n'est  suivie  que  de  la  signa- 
luro  du  Pape  et  ne  fait  connaître  en  plus  que  le  nom  du 
cardinal-diacre  qui  l'a  libellée.  Dans  la  bulle  d'Adrien  IV, 
la  souscriptidu  du  Pape,  est  suivie  de  celles  île  douze 
cardinaux,  l.a  date  de  ces  deux  bulles  exprime  l'année  de 
l'incarnation,  le  jour  d'après  la  méthode  romaine,  l'in- 
diction,  l'année  du  pontificat,  et  le  lieu  où  les  bulles  ont 
été  libellées. 

La  troisième  bulle,  émanée  du  pape  Adrien  IV,  contient 
une  sentence  cassant  l'élection  du  prieur  de  Saint-Maximin 
(prieuré  situé  non  loin  de  la  ville  d'Orléans,  en  un  lieu 
où  existe  actuellement  la  chapelle  Saint-Mesmin),  que  les 
moines  de  Vierzon  avaient  choisi  pour  leur  abbé),  par 
suite  de  l'opposition  laite  par  l'archevêque  de  Bourges  à 
son  élection,  comme  étant  contraire  aux  statuts,  et  ordon- 
nant aux  moines  de  choisir  un  abbé  dans  la  congrégation 
de  Cluny  ou  dans  un  monastère  plus  considérable  de  la 
règle  de  saint  Benoit,  sans  toutefois  préjudicier  pour 
l'avenir  à  leur  droit  d'élection  et  à  leur  choix  à  faire  dans 
leur  propre  monastère.  La  date  de  cette  bulle  n'indique 
que  le  lieu  où  elle  a  été  libellée,  et  elle  n'est  suivie 
d'aucune  signature  ou  souscription.  Dans  ces  trois  bulles, 
le  Pape  prend  son  titre  ordinaire  de  episcopus  servus 
servorum  Dei,  et  dans  la  signature  celui  de  episcopus 
catholice  ecclesie. 

H.  Diplômes  royaux.  —  Les  diplômes  royaux  sont  au 
nombre  de  deux  dans  ce  cartulairc.  Par  le  premier, 
émané  de  Charles  le  Chauve,  et  dans  lequel  la  date  n'est 
pas  exprimée,  mais  que  Mabillon  rapporte  à  l'année 
813,  cet  empereur  et  roi  confirme  au  monastère  de  Dèvre 
la  propriété  irrévocable  des  biens  ([ui  lui  ont  été  donnés 


!^88       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

par  l'archevêque  de  Bourges,  Raoul ,  lui  concède  la  per- 
mission d'en  acquérir  de  nouveaux,  lui  accorde  le  droit 
d'élire  ses  abbés,  preud  sous  sa  protection  l'abbaye,  et 
défend  aux  juges  d'entrer  sur  ses  terres  pour  l'accom- 
plissement de  leurs  fonctions.  Dans  ce  diplôme  le  roi 
prend  le  titre  de  Karolus  Dei  gratia  rex,  et  a  fait  sou- 
scrire son  monogramme  au  bas  de  l'acte.  C'est  le  premier 
acte  se  rapportant  à  l'abbaye  qui  est  signalé,  et  il  peut 
donc  en  être  considéré  comme  la  charte  de  fondation, 
puisque  cet  acte  constate  pour  la  première  fois  son  exis- 
tence légalement  et  officiellement.  Dans  le  second  diplôme, 
Louis  II,  le  Bègue,  accorde  à  l'église  de  l'abbaye  de  Dùvre, 
bâtie  par  l'archevêque  Raoul,  avec  l'autorisation  de 
Charles  le  Chauve,  soixante  sols  des  revenus  [lublics, 
payables  chaque  année  le  jour  de  Pâques,  contîrme  les 
donations  faites  à  l'abbaye  par  Raoul  et  par  Centulphe, 
seigneur  de  Vierzon,  ainsi  que  le  diplôme  de  Charles  le 
Chauve,  en  accordant  les  mêmes  droits  et  eu  faisant  les 
mêmes  défenses  que  son  royal  prédécesseur  ;  puis  il 
souscrit  avec  la  reine  Judith,  son  épouse.  La  date 
n'exprime  que  le  lieu  où  le  diplôme  a  été  accordé  et  le 
jour  de  l'année,  et  est  ainsi  conçue  ;  «  Donné  à  Aix,  au 
Grand-Palais,  le  jour  des  nones  de  mars.  »  Louis  11,  le 
Bègue,  n'ayant  régné  que  du  6  octobre  877  au  10  avril 
879.  c'est  donc  pendant  cette  période  de  temps  qu'il  faut 
placer  l'époque  de  la  rédaction  de  ce  diplôme.  Ces  deux 
diplômes  commencent  par  des  préambules  religieux,  puis 
vient  le  dispositif,  et  enfin  de  longues  clauses  renferment 
les  privilèges  accordés  par  le  roi  au  monastère. 

m.  fjonutkns  pieuses.  —  Les  donations  pieuses  sont  de 
beaucoup  les  actes  les  plus  uoiiilu'tnix  parmi  ceux  de 
diverses  sortes  que  contient  le  carlulaire;  elles  présentent 
en  général  d'assez  longs  développements  et  fournissent 


XL*    SESSION,    A    CHATEAUKOUX.  589 

sur  le  passé  les  plus  précieux  renseignemeiils.  Les  dona- 
tions rommcncent  ordinairement  par  des  préanihnles 
religieux  et  i)liilosui)lii(|n('s;  après  vient  le  (lis|)(jsitir,  dans 
lequel  les  biens  sont  en  général  donnés  à  perpétuité;  puis 
le  dispositif  est  suivi  de  clauses  pénales  par  lesquelles  les 
infracteurs  ou  opposants  sont  voués  à  la  vengeance 
céleste  et  à  l'enfer,  et  en  outre  sont  condamnés  à  une 
amende  qui  varie  entre  cinquante  et  cent  sols  d'or  et 
entre  dix  et  cent  livres  d'or.  Les  donations  sont  souscrites 
par  le  roi  lorsqu'elles  sont  faites  par  le  seigneur;  par  le 
seigneur  lorsqu'elles  émanent  des  vassaux;  par  les  arche- 
vêques de  Bourges,  les  donateurs,  leurs  enfants  et  parents; 
par  les  abbés,  les  moines  et  les  dignitaires  de  l'abbaye,  et 
enfin  par  les  intéressés  à  quelque  litre  que  ce  soit. 

La  formule  cum  stipulatione  subnixa,  qui  annonce 
tantôt  les  signatures,  tantôt  les  cérémonies  de  la  stipu- 
lation, qui  consistait,  comme  dans  le  droit  romain,  en 
formules  d'interrogations,  de  réponses  et  de  promesses 
solennelles,  tantôt  les  caractères  de  l'investiture,  s'accom- 
plissant  en  rompant  la  paille  et  en  l'altacbant  à  l'acte,  ou 
en  la  jetant  dans  le  sein  de  l'acquéreur  ou  du  donataire, 
est  assez  rarement  employée  dans  le  cartulaire  ;  cepen- 
dant quelques  actes  en  fournissent  des  exemples.  Les 
dates  sont  fort  diversement  exprimées  dans  les  actes  de 
donation  ;  elles  indiquent  ou  bien  le  lieu  oii  l'acte  a  été 
fait,  ou  l'année  de  l'Incarnation  et  l'année  du  règne, 
d'autres  fois  le  roi  régnant  seulement,  ou  bien  le  jour 
du  mois,  soit  encore  l'année  de  l'Incarnation  seule,  quel- 
quefois l'indiction,  très- rarement  l'épacte. 

Chacune  de  ces  donations  fait  connaître  le  but  que  s'est 
proposé  le  donateur  et  les  njolifs  qui  l'ont  fait  agir;  le 
plus  souvent  ce  sont  des  motifs  pieux  développés  dans  le 
préambule.  En  général,  les  donations  sont  faites  pour  le 


690       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

repos  des  ùines  du  donateur  et  de  ses  parents  les  plus 
proches,  épouse,  enfants,  père  et  mère,  frères  et  sœurs, 
et  pour  la  rémission  des  péchés,  ou  pour  obtenir  la 
sépulture,  soit  du  donateur,  soit  de  ses  parents,  dans 
l'intérieur  du  monastère  et  avec  les  cérémonies  dues  aux 
moines  défunts,  ou  bien  encore  pour  être  admis  dans  les 
associations  de  prières,  formées  entre  les  monastères  du 
même  ordre  ou  d'ordres  différents  pour  le  rachat  des  âmes 
des  défunts.  La  plupart  de  ces  donations  sont  laites  avec 
réserve  pour  le  donateur  ou  ses  parents  de  la  jouissance 
viagère  des  biens  et  objets  donnés.  Dans  un  certain 
nombre  des  donations  contenues  dans  le  cartulaire,  il  est 
à  remarquer  que  c'est  maxima  inflrmitate  positus  que  le 
donateur  fait  des  largesses  au  monastère.  Les  donations 
de  cette  espèce  ont  quelque  analogie  avec  celles  à  cause  de 
mort;  elles  sont  cependant  irrévocables  et  actuelles,  et  leur 
periectiou  ne  dépend  pas  de  la  mort  de  leur  auteur,  ce 
qui  constitue  entre  elles  et  les  donations  à  cause  de  mort 
une  différence  essentielle.  Mais  ce  qui  crée  entre  ces  deux 
sortes  de  donations  une  certaine  ressemblance,  c'est  que 
vraisemblablement  le  motif  qui  a  le  plus  puissamment 
déterminé  leurs  auteurs  à  agir  de  la  sorte,  consistait 
principalement  dans  la  crainte  de  la  mort,  et  qu'en 
bon  état  de  santé  ils  n'eussent  peut-être  jamais  songé  à 
faire  de  semblables  libéralités. 

Il  existe  dans  le  cartulaire,  en  assez  grand  nombre, 
des  donations  de  coUiberts,  d'hommes  soumis  à  la  com- 
mande de  seigneurs,  et  même  d'hommes  libres  qui  sont 
donnés  au  monastère  par  les  seigneurs  ou  les  parents 
dont  ils  dépendent  pour  entrer  dans  les  rangs  des  frères 
qui  desservent  l'abbaye.  Les  colliberts  étaient,  comme  on 
le  sait,  des  serfs  d'un  ordre  un  peu  relevé,  tenant  le 
milieu   entre    les  serfs  proprement  dits  et  les   hommes 


XI/'    SESSION,    A    CIIATEAUKOUX,  891 

lihnîs;  au  moyen  âge,  les  monuslères  et  les  églises  (ui 
possédaieiiL  un  grand  nombre  On  |)ourrait  croire  que  les 
serl's  d'église  étaient  exclusivement  des  coUiberts  ;  mais 
cette  opinion  serait  erronée,  puisqu'on  trouve  également 
des  coUiberts  appartenant  à  des  seigneurs.  Les  serfs 
d'église  ayant  toutefois  une  situation  relativement  bien 
préférable  à  celle  des  serfs  des  seigneurs,  il  n'y  a  donc 
rien  d'étonnant  à  ce  que  chaque  monastère  possédât  un 
nombre  considérable  de  coUiberts.  Les  donations,  soit  de 
coUiberts,  soit  de  services  dus  par  des  vassaux  ou  serfs, 
sont  accompagnées  d'actes  d'affranchissement  qui  déchar- 
gent en  entier  ces  coUiberts,  ces  serfs  ou  vassaux  de  toutes 
obligations  semblables  envers  leurs  anciens  maîtres. 

Les  nombreuses  donations  contenues  dans  le  cartulaire 
font  connaître  de  quelles  richesses  pouvait  déjà  disposer 
l'abbaye  de  Saint-Pierre  de  Vierzon,  deux  cent  cinquante 
ans  environ  après  sa  fondation,  ou  tout  au  moins  l'époque 
de  son  agrandissement.  Ladiversitéet  le  nombre  des  biens 
et  des  objets  donnés  montre  avec  quelle  générosité  et  quelle 
sollicitude  la  piété  des  fidèles  pourvoyait  alors  à  tous  les 
besoins  des  communautés  religieuses.  L'on  trouve,  en 
effet,  parmi  les  différents  biens  compris  dans  les  donations 
faites  au  monastère  de  Vierzon,  de  nombreuses  églises 
(dix-huit  églises  et  trois  chapelles),  une  abbaye  (l'abbaye 
de  Sainl-Gondon-sur-Loire),  des  ornements  d'église,  des 
alleux,  des  rnanses,  des  maisons,  des  forêts  et  des  bois, 
des  exploitations  rurales  avec  tout  leur  matériel  et  leurs 
colons,  des  prés,  des  vignes,  des  pâturages,  des  vergers, 
des  chezaux,  des  breuils,  des  terres  cultivées  et  incultes, 
un  fief  presbytéral,  une  maison  seigneuriale  avec  toutes 
ses  dépendances,  des  granges,  des  moulins,  des  écluses, 
des  cours  d'eau,  des  fours  à  chaux,  des  coUiberts,  des 
serfs  et  des  serves,  des  hommes  libres,  donnés  par  leurs 


592       CONGRÈS  AKCHÉOLOGIQL'E  DE  FRANCE. 

pères,  et  qui  se  faisaient  moines;  des  concessions  de  foires 
avec  la  perception  de  tous  les  droits  inhérents  (tonlieu, 
péage,  roulage),  des  droits  seigneuriaux  de  toutes  sortes, 
(droits  de  justice,  de  chasse,  de  pèche),  des  deniers  des 
revenus  publics,  le  droit  de  p.  rcevoir  les  amendes  dues 
dans  le  cas  de  combat  singulier,  des  cens,  des  rentes  et 
redevances,  des  services  dus  par  les  serfs  et  des  droits  de 
commande  et  de  protection.  Il  était  d'usage  de  déposer  les 
actes  de  donation  sur  l'autel,  et  plusieurs  des  actes  de 
cette  espèce,  contenus  dans  le  cartulaire,  font  mention 
de  cette  cérémonie.  Les  mesures  dont  le  cartulaire  con- 
tient l'indication  sont  :  en  fait  de  mesures  de  capiicité,  le 
muid  et  le  setier,  et,  pour  les  mesures  agraires,  l'arpent 
et  la  perche.  Quant  aux  monnaies,  nous  y  trouvons  cités 
les  sols,  les  livres  d'or  et  les  deniers. 

IV.  Fondations  pieuses.  —  Les  fondations  pieuses  ou 
fondations  d'anniversaires  ne  sont  autre  chose  que  des 
donations,  seulement  plus  déterminées  en  ce  sens  qu'elles 
mdiquent  plus  nettement  le  but  essentiel  que  s'est  pro- 
posé le  donateur,  et  qu'elles  stipulent  certains  bienfaits 
d'un  ordre  moral  et  spirituel  ;  elles  sont  en  même  temps 
des  donations  réciproques.  Les  messes  et  prières  désignées 
dans  les  actes  devaient  être  chantées  ou  récitées  les  jours 
anniversaires  de  la  mort  des  personnes  en  vue  desquelles 
la  donation  était  faite. 

V.  Accords  et  transactions.  —  Les  accords  et  transac- 
tions intervenus  entre  le  monastère  et  les  particuliers, 
ainsi  que  les  désistements  de  procès,  ne  sont  pour  ainsi 
dire  que  des  espèces  de  donations. 

Ces  actes  offrent  aussi  beaucoup  d'analogie  avec  les 
échanges  ;  car,  si  dans  ces  actes  les  intéressés  se  servent 
de  la  forme  de  la  donation  pour  faire  des  largesses  au 
couvent,  ce  dernier,  en  retour,  leur  accorde  des  terres,  des 


XI/'    SKSSION,    A    CIIATKALIIUIUX.  593 

inanses,  des  buis,  des  prés  ou  des  vignes,  ou  s'oblige  à 
payer  chaque  année  un  cens  lixé  dans  l'acte.  C'est  là  ce 
qui  fait  différer  les  accords  et  transactions  des  donations, 
dont  ils  affectent  la  forme,  en  ce  sens  que  les  donations 
ne  sont  faites  que  dans  un  intérêt  spirituel,  et  que  dans 
les  accords  et  transactions  et  les  désistements  l'intérêt 
matériel  parait  avoir  été  le  premier  consulté. 

VI.  Actes  d'échange.  —  Les  actes  d'échange  se  rappro- 
chent beaucoup,  par  la  forme  dans  laquelle  ils  sont  conçus, 
des  accords  et  transactions  et  des  désistements  de  procès  ; 
ils  sont,  en  général,  faits  au  nom  de  l'abbé  dirigeant 
alors  le  monastère  ;  on  y  énonce  les  deux  objets  échangés, 
en  commençant  par  celui  appartenant  au  couvent,  et  l'acte 
se  termine  par  les  signatures  des  témoins  intervenant  de 
chaque  côté  :  pour  le  monastère,  l'abbé  et  des  moines,  pour 
l'autre  partie,  le  contractant  et  ses  proches  ou  ses  amis. 
Puis  vient  la  date  exprimant  l'année  du  règne  seulement  ; 
d'autres  fois  les  échanges  commencent  par  l'indication  de 
l'année  de  l'Incarnation  du  Seigneur.  Dans  certains  de 
ces  actes,  l'objet  fourni  par  le  couvent  a  beaucoup  plus  de 
valeur  que  celui  contre  lequel  il  est  échangé  ;  mais  dans 
ce  cas  on  ajoute  une  clause  par  laquelle  la  possession  de 
l'objet  provenant  du  monastère  est  accordée  à  l'autre 
partie  contractante  pendant  sa  vie  seulement,  pour  revenir 
après  sa  mort  au  couvent,  avec  les  améliorations  et  les 
agrandissements  qu'il  aura  reçus  pendant  la  jouissance  du 
possesseur  viager.  Ce  n'est,  dans  ce  cas-là,  de  la  part  du 
monastère,  qu'une  constitution  d'usufruit  en  échange 
d'un  objet  à  lui  donné  en  toute  propriété  et  qui  fait 
désormais  partie  de  son  patrimoine. 

VU.  Actes  d'affranchissewent.  —  Le  cartulaire  ne  con- 
tient que  deux  actes  d'alTranchissenient  ;  mais,  en  outre, 
il  existe  parmi  les  donations  de  nombreux  actes,  par  les- 
XV  SESSION.  38 


594  CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE    DE   FRAN'CE, 

quels  on  accorde  au  monastère  soit  la  commande  sur  des 
serfs,  soit  le  service  que  doivent  des  colliberts  ou  des 
hommes  libres,  et  dont  les  donateurs  affranchissent  envers 
eux  les  obligés  et  en  font  don  à  l'abbaye,  envers  qui  ces 
derniers  se  trouvent  par  suite  dnns  la  même  situation  que 
vis-à-vis  des  donateurs  avant  leur  affranchissement.  La 
commande  était,  comme  on  le  sait,  la  protection  que  le 
seigneur  accordait  à  ses  vassaux  ou  aux  hommes  libres, 
petits  propriétaires  et  serfs,  qui  en  retour  étaient  obligés 
à  rendre  quelques  services  et  à  acquitter  certaines  rede- 
vances. L'on  trouve  aussi  parmi  les  donations  plusieurs 
actes  par  lesquels,  soit  des  pères,  soit  des  seigneurs,  don- 
nent à  Dieu  et  à  l'apôtre  saint  Pierre,  pour  les  servir 
selon  la  règle  de  saint  Benoit,  ou  leurs  enfants  ou  bien 
des  colliberts  et  des  serfs.  D'après  ces  actes,  au  moment 
de  la  donation,  la  personne  ainsi  consacrée  au  service 
divin  dans  le  monastère  avait  la  main  enveloppée  de  la 
tenture  de  l'autel,  et  le  donateur  faisait  en  même  temps 
don  à  l'abbaye  de  portions  de  terre  d'étendue  variable, 
suivant  ses  moyens. 

Vin.  Actes  d'acensement.  —  Les  acensements  sont  des 
actes  par  lesquels  le  seigneur  ou  le  tenancier  transporte  à 
une  tierce  personne  la  jouissance  et  le  droit  d'exploitation 
d'une  terre,  moyennant  une  certaine  somme  qu'on  appelle 
cens.  Le  cartulaire  contient  neuf  de  ces  actes,  qui  sont 
tous  rédigés  au  nom  de  l'abbé  et  de  la  congrégation  du 
monastère,  et  qui  accordent  à  cens  des  portions  de  terrain 
dont  l'acte  indique  la  quantité  et  la  situation  exacte  en 
même  temps  que  les  noms  du  pays,  de  la  viguerie  et  de 
la  terre  dont  elles  dépendent  et  la  délimitation  des  quatre 
côtés.  Ensuite  vient  la  mention  de  la  somme  à  payer 
comme  cens  et  du  jour  où  ce  paiement  doit  avoir  lieu. 
Lorsque  le  preneur  manquait  de  payer  le  cens  au  terme 


XL"    SKSSIO.X,    A    C.llATEAUl'.OUX.  595 

convenu,  le  contrat  éUil  lial)itu(!ll(!ni(!iil  n)ni|tu;  nmis,  il 
n'en  est  pas  ainsi  dans  les  actes  de  cette  espèce  insérés 
dans  le  cartulaire,  qui  contiennent  une  dérogation  à 
l'usage  ordinairement  suivi. 

Les  actes  d'acensement,  contenus  dans  le  cartulaire, 
renferment  tous  invariablement  une  formule  qui  stipule 
qu'en  cas  de  négligence  pour  le  paiement  du  cens  le 
contrat  ne  sera  pas  rompu,  mais  que  les  débiteurs  auront 
le  droit  de  payer  l'amende  légale  pour  retard  dans  l'exé- 
cution du  contrat.  Le  jour  fixé  pour  le  paiement  du  cens 
est  presque  invariablement  le  jour  de  la  messe  de  saint 
Pierre,  c'est-à-dire  de  la  fête  de  ce  saint,  qui  se  célèbre  le 
29  juin;  le  dernier  acte  d'acensement  seul  fixe  [le  jour  du 
paiement  du  cens  à  la  veille  de  Noël  ;  dans  un  acte  de 
vente,  au  contraire,  l'échéance  est  fixée  à  la  fête  de  saint 
Martin.  Sur  neuf  acensements,  contenus  dans  le  cartu- 
laire, sept  sont  datés  par  le  mois  et  l'année  du  règne  ;  la 
date,  généralement  partagée  en  deux,  indique  d'abord,  et 
à  la  suite  du  mot  actum,  le  lieu  où  l'acte  a  été  fait,  et 
ensuite,  après  les  signatures  et  à  la  suite  du  mot  datum, 
se  trouve  l'indication  du  mois  et  de  l'année  ;  la  signature 
de  l'abbé  est  toujours  la  première  au  bas  de  l'acte.  On  voit 
en  général,  par  la  formule  Actum  publiée  de  la  fin  de 
l'acte,  et  par  celle  du  commencement,  «  Et  cuncta  sancti 
Pétri  Doverensis,  cenobii  congregatio,  ou  bien  Et  omnis 
congregatio  Sancti  Pétri  Virsionensis  cenobii  »  que  les 
acensements  faits  avec  une  grande  solennité  étaient 
accordés  dans  les  réunions  générales  du  chapitre  et  eu 
présence  de  toute  la  communauté. 

IX.  Abbés  de  l'abbaye  de  Vierzon.  —  Les  abbés  du 
monastère  qui  sont  cités  dans  le  cartulaire  avec  les  divers 
titres  de  :  Donnus,  doninus  ou  dompnus  abbas  ecclesiœ 
nomine  Dovera;  abbas  Doverensis  cenobii;  abbas  ex  tnonas- 


596  CONGRÈS   ARCIIÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

terio  Sancti  Pétri  Doverensis  cenobii  ;  abbas  ex  monasterio 
Sancti  Pétri  Virsioncnsis  cenobii;  abbas  Virsionensis 
monasterii;  Sancti  Pétri  Vij'sionensis  cenobii  rector ,  sont 
au  nombre  de  seize,  et  ils  y  sont  mentionnés  dans  l'ordre 
chronologique  suivant  : 

I.  Aimericus,  Aimerio,  qui  figure  dans  le  diplôme  de 
Charles  II  le  Chauve,  de  843,  et  qui  doit  avoir  été  le 
premier  abbé  de  l'abbaye  de  Dèvre  ; 

II.  Asinarius,  cité  en  852  et  dans  le  diplôme  de  Louis  II 
le  Bègue,  dont  la  date  doit  être  fixée  entre  les  années  877 
et  879,  et  à  qui  Centulphe,  seigneur  de  Vierzon,  fiiit  une 
donation,  vers  853  ; 

III.  Raimundus,  Raymond,  alors  abbé  à  l'époque  de  la 
translation  de  l'abbaye  de  Dèvre,  en  926,  dans  le  château 
de  Vierzon  ; 

IV.  Odo,  Eudes,  cité  dans  un  acte  de  956  ; 

V.  Andréas,  André  1%  qui  est  mentionné  dans  des  actes 
de  964,  968  et  974,  sous  le  règne  de  Lothaire  ; 

VI.  Girbertus,  en  981  ; 

VII.  Syon  ou  Sion,  en  989,  991  et  993  ; 

VIII.  Andréas,  André  H,  en  994  ou  en  996,  sous  le  règne 
d'Hugues  Capet  ; 

IX.  Xrispianus,  Xristianus  ou  Cristianns,  Chrétien,  en 
1018  ; 

X.  Martinus,  abbas  et  corepiscopus,  Martin,  en  1025, 
1029  et  1031.  C'est  cet  abbé  qui,  après  que  le  monastère 
de  Dèvre  eut  été  rebâti  par  Everard  d'Issoudun,  pour  en 
faire  le  siège  d'un  prieuré,  y  envoya,  en  1025,  sur  la 
demande  de  ce  seigneur,  pour  le  desservir  sous  la  dépen- 
dance de  l'abbaye  de  Vierzon,  un  prieur  et  deux  moines, 
auxquels  Everard  fit  donation  de  biens  considérables  et 
accorda  tous  les  droits  et  privilèges  qui  jadis  avaient 
appartenu  à  l'ancien  monastère. 


XL'    SESSION,    A    CHATEAUROUX.  597 

XI.  Constabulm,  en  lOiO  ; 

XI.  Berengarins,  Béranger,  en  1052  et  1075  ; 

XIII.  Humbaldus,  UmhalJits,  Unbaldus,  Ilumbaud  II, 
le  Riche,  seigneur  de  Vierzon,  qui  se  fit  moine  et  entra 
dans  la  congrégation  de  Saint-Pierre  de  Vierzon,  dont  il 
devint  abbé,  en  1082  et  1095  ; 

XIV.  Herbertus  ou  Arbertus,  Herbert,  en  1100  et 
1121  ; 

XV.  Aravdus,  cité  dans  de  nombreux  actes  dont  aucun 
n'est  daté,  et  qui  n'est  pas  mentionné  dans  la  Gallia 
Cliristiana,  qui  signale,  sous  les  noms  de  Arnaudus, 
Artaudus  et  Arnelfus,  un  abbé  de  Vierzon  qui  dirigeait 
l'abbaye  en  1142  ; 

XVI.  Petrus,  Pierre  ;  mentionné  dans  une  charte  non 
datée,  et  le  dernier  cité  dans  le  cartulaire  ;  la  Gallia 
Christiana  signale  cet  abbé  en  1163  et  le  fait  vivre  en 
même  temps  que  l'archevêque  Pierre  de  la  Châtre, 
soixante-quatrième  archevêque  de  Bourges. 

D'après  les  bénédictins,  l'abbé  Sion  serait  le  hui- 
tième dans  l'ordre  de  succession  des  abbés  de  Vierzon 
et  aurait  succédé  à  l'abbé  André  II,  tandis  que,  d'après 
le  cartulaire,  l'ordre  inverse  semblerait  devoir  être 
adopté,  et  ce  serait,  au  contraire,  l'abbé  Sion  qui  aurait 
été  le  septième  abbé  du  monastère  et  aurait  eu  pour 
successeur  André  II.  Suivant  la  Gallia  Christiana , 
l'abbé  Pierre  serait  le  dix-huitième  abbé,  et  non  pas  le 
seizième,  ainsi  que  l'indiquerait  le  cartulaire.  En  outre, 
dans  la  liste  des  abbés  du  monastère  de  Vierzon,  les  béné- 
dictins en  font  figurer  deux  :  Etienne  I",  Stephmms, 
(quinzième  abbé  du  monastère)  de  1122  à  1137,  et  lui  1- 
con  (dix-septième  abbé,  qui  était  mort  avant  1157), 
dont  les  noms  ne  sont  pas  mentionnés  dans  le  cartu- 
laire. 


398  CONGRÈS   ARCIIÉOLOGKJUE    DE   FRANCE. 

X.  Archevêques  de  Bourges.  —  Les  archevêques  de 
Bourges  dont  il  est  fait  mention  dans  le  cartulaire  sont 
au  nombre  de  neuf.  Le  premier  est  Rodulfus  ou  Roldulfus, 
Bùuricensis  ecclesie  venerabilis  archiepiscopus;  Bituri- 
gensis  ecclesie  archipresul,  qui  monasterium  Doverense 
construxit;  Rodolphe,  RoduU"  ou  Raoul,  fils  de  Raoul, 
comte  de  Turenne  et  de  Gahors,  quarante-quatrième 
archevêque  de  Bourges,  et  connu  sous  le  nom  <le  Raoul 
de  Turenne,  qui  lit  construire  l'abbaye  de  Dèvre  et  lui  fit 
de  nombreuses  et  importantes  donations.  Raoul,  qui, 
d'après  la  Gallia  Christiana,  devint  archevêque  de  Bour- 
ges, en  84  i,  et  mourut  en  836,  est  cité  dans  le  diplôme 
de  Charles  le  Chauve  de  843,  et  sa  signature  figure  dans 
les  trois  chartes  d'Ambran,  seigneur  de  Vierzon,  qui  peu- 
vent être  à  peu  près  de  la  même  époque. 

Puis  vient  Geroncius,  donnus  Geroncius  Bituricensium 
archiepiscopus,  quarante-neuvième  archevêque  de  Bourges, 
issu  de  l'illustre  et  ancienne  maison  de  Déols.  L'arche- 
vêque Géronce  figure  dans  une  charte  datée  du  jeudi, 
jour  de  la  fête  de  saint  Clément,  au  mois  de  novembre,  la 
quatrième  année  du  roi  Raoul  (23  novembre  926),  par 
laquelle  Thibaut,  comte  de  Chartres,  de  Blois  et  de  Tours, 
seigneur  de  Vierzon  et  de  Montagu  eu  Laonnois,  accorde 
aux  abbés  et  aux  religieux  de  Dèvre  l'autorisation  de 
s'établir  pour  toujours  dans  son  château  de  Vierzon. 
Suivant  les  bénédictins,  Géronce.  aurait  été  promu  en  908 
ou  910  et  serait  mort  en  948. 

Le  troisième  archevêque,  cité  dans  le  cartulaire,  est 
Hugonus,  archiepiscopus  Biturigensis,  Hugues,  cinquante- 
deuxième  archevêque  de  Bourges,  mentionné  dans  une 
charte  datée  de  la  douzième  année  du  règne  de  Hugues 
Gapet,  qui  doit  être  rapportée  à  l'année  996  (ce  roi 
pouvant ,    d'après  les  bénédictins ,  être   considéré   à   la 


XL°    SESSION,    A    CHATEAUUOUX.  5i>9 

rigueur  comme  ayant  régné  douze  ans,  on  comptant  pour 
deux  années  entières  la  première  et  la  dernière  année  de 
son  règne,  qui  ne  furent  que  commencées  et  ne  durèrent 
l'une  et  l'autre  que  peu  de  mois).  D'après  le  carlulairc, 
l'administration  de  l'archevêque  Hugues  aurait  donc 
encore  duré  en  996,  tandis  que  les  bénédictins  font  mou- 
rir cet  archevêque  en  985  ou  en  987  et  commencer 
l'administration  de  son  successeur  immédiat,  Dagbert,  en 
987.  L'archevêque  Hugues  était  fils  de  Thibaut,  comte 
do  Chartres,  de  Blois  et  de  Tours,  et,  dès  l'année  956, 
il  fut  lo  coadjuteur  de  son  prédécesseur,  l'archevêque 
Richard,  son  oncle,  qui  était  fils  de  Kichard,  comte  de 
Troycs. 

Le  quatrième  archevêque  mentionné  dans  le  cartu- 
laire,  est  Dabertus,  pontifex  Biturigensis,  Dagbert,  cité 
dans  une  charte  du  temps  du  roi  Hugues,  qui,  tout  au 
moins,  devrait  se  rapporter  à  l'année  996  (Hugues  Gapet 
étant  mort  le  24  octobre  de  cette  année  là).  Cette  charte 
permet  ainsi  de  rectifier  une  erreur  commise  par  La  Thau- 
massière,  d'après  lequel  cet  archevêque  n'aurait  pris  le 
gouvernement  de  l'église  de  Bourges  qu'en  1005.  Ce 
serait  donc,  d'après  le  cartulaire,  et  contrairement  aux 
dates  données,  tant  par  la  Thaumassière  que  par  la  Gallia 
Christiana,  l'année  996  qui,  aurait  vu  finir  l'admi- 
nistration de  l'archevêque  Hugues  et  commencer  celle 
de  son  successeur,  l'archevêque    Dagbert. 

Le  cinquième  archevêque  cité  dans  le  cartulaire  est 
Goslenvs ,  Bituricensium  archiepiscopus ,  Gauslin  (cin- 
quante-quatrième archevêque  de  Bourges),  fils  naturel  de 
Hugues  Capet,  et  qui  auparavant  avait  été  ab])é  de  Flcury 
ou  Saint-Benoit-sur-Loire.  Il  est  mentionné  dans  une 
charte  de  l'an  de  l'Incarnation  1007,  sous  le  règne  du  roi 
Henri  ;  mais  cette  date  est   incontestablement  erronée. 


()00       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Henri  F""  n'étant  monté  sur  le  trône  que  le  50  juillet 
1031,  et  Gausliu  n'ayant  été  archevêque  qu'à  partir  de 
1013. 

Le  sixième  archevêque  est  Airnon  ou  Aymon,  episcoptis, 
Biturix  presul,  Ayuion  de  Bourbon  (cinquante-cinquième 
archevêque  de  Bourges),  qui  est  mentionné  dans  des 
chartes  datées  des  années  102a  (sous  le  règne  du  roi 
Robert)  et  1052;  ce  qui  permet  de  rectifier  l'erreur  com- 
mise par  les  auteurs  de  la  Gallia  Christiana,  qui  ne  consi- 
dèrent l'archevêque  Aymon  comme  n'ayant  occupé  le 
trône  archiépiscopal  qu'en  1031  seulement,  ainsi  que  celle 
de  La  Thaumassière,  suivant  lequel  ce  prélat  n'aurait  été 
élu  qu'en  1030. 

Le  septième  archevêque  est  Richardus,  dominus  Richar- 
dus  sancie  Biturice  sedis  archiepiscopus  ;  donnus  Richardus 
archiepiscopus ;  qvi  et  patriarchatuyn  Biturigensis  ecclesie 
administrabat  ;  béate  memorie  Richardus  archipresul. 
Richard,  deuxième  du  nom  (cinquante-sixième  arche- 
vêque de  Bourges)  ;  il  est  mentionné  Richardus  incom- 
purabilis  suis  temporibus  Bituricensis  archipresul  dans 
une  charte  de  l'année  1082,  contenant  donation  par 
Etienne,  vicomte  de  Bourges,  à  l'abbaye  de  Vierzon  de  la 
possession  perpétuelle  de  l'abbaye  de  Saint-Gondon-sur- 
'Loire  :  Abbatia  sancti  Gundulfi  super  fluvium  Ligeris  in 
episcopatu  Bituricensi  si  ta. 

Le  huitième  archevêque  est  Aldebertus  ou  Haldebertus 
Bituricensis  archiepiscopus  ;  Bituricum  dictus  archipresul; 
Aldebert  (cinquante-septième  archevêque  de  Bourges),  qui 
figure  dans  une  charte  de  l'année  1095.  Avant  d'être 
promu  au  siège  archiépiscopal  de  Bourges,  ce  prélat  avait 
été  abbé  de  Déols,  et,  d'après  la  Gallia  Christiana,  il 
mourut  en  1097. 

Enfin,  le  neuvième  et  dernier  archevêque  dont  il  est  fait 


XL»    SESSION,    A    CllATEAUllOIIX.  001 

mention  dans  le  cartulaire  est  Leodeyarius  episcopus  ; 
Domnus  Lcodegariiis  Biturir/e  urbk  religiosissimvs  Dei 
gratin  archiepiscopus  et  tocius  Aquitanie  primas  ;  lA^^av, 
cinquante-huitième  archevêque  de  Bourges,  quiestcilédans 
une  charte  datée  de  l'année  HOO,quiest  bien  sa  date  véri- 
table, quoiqu'elle  soit  datée  également,  mais  évidemment 
par  suite  d'une  erreur,  de  la  trente-sixième  année  du  règne 
du  roi  Philippe  I*""",  qui  devrait  se  rapporter  à  l'année  996. 
Suivant  les  auteurs  de  la  Gallia  Christiana,  cet  arche- 
vêque mourut  en  \  120. 

XI.  Seigneurs  de  Vierzon.  —  Parmi  les  seigneurs  de 
Vierzon  qui  ont  été  les  persévérants  bienfaiteurs  de 
l'abbaye,  le  cartulaire  en  cite  plusieurs,  dont  les  noms  se 
retrouvent  fréquemment  dans  les  divers  actes  qu'il  con- 
tient. C'est  d'abord  Ambrannus,  Arabrand,  qui  semble 
avoir  été,  pour  ainsi  dire,  par  ses  généreuses  et  impor- 
tantes donations,  le  véritable  fondateur  de  l'abbaye,  en 
même  temps  que  l'archevêque  Raoul  faisait  construire  à 
Dèvre  les  bâtiments  du  monastère  vers  84.3.  Par  trois 
chartes,  toutes  du  temps  de  Charles  le  Chauve,  Ambran 
fit  donation  de  biens  nombreux  et  importants  à  la  sainte 
basilique  du  monastère  de  Saint-Pierre  de  Dèvre,  et 
notamment  lui  fit  abandon  de  sa  chapelle,  construite  en 
l'honneur  de  l'apôtre  saint  Pierre  [cella  super  L'vure 
fluminis  sita  prope  cluvsura  virsionis  opidi),  près  de  laquelle 
les  moines  établirent  leur  monastère,  et  en  outre  de 
cinq  églises  et  de  deux  autres  chapelles. 

Le  second  seigneur  de  Vierzon  cité  dans  le  cartulaire 
est  Centulfus,  Centulphe,  qui  fit  au  mois  de  février  852, 
sous  le  règne  de  Charles  le  Chauve,  une  importante  dona- 
tion au  monastère.  Suivant  La  Thaumassière  [Histoire  du 
Berry,  livre  X,  chapitre  vu),  Centulphe  aurait  vécu  du 
temps  de  Charlemagne,  et  ce  serait  l'an  3  du  règne  de 


602        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

cet  empereur  que  ce  seigneur  de  Vierzon  aurait  accordé  à 
l'abbaye  de  Dèvre  la  charte  de  donation  contenue  dans  le 
cartulaire.  Cette  charte  démontre  elle-même  par  sa  date, 
qui  est  ainsi  conçue  :  Data  mense  febroario  régnante 
Karolo  rege  anno  tercio  decimo ,  l'erreur  manifeste 
commise  par  La  Thaumassière ,  puisqu'elle  doit  être 
rapportée  par  sa  date  au  mois  de  février  de  la  treizième 
année  du  règne  de  Charles  le  Chauve,  c'est-à-dire  de 
l'année  852  (Charles  II  le  Chauve  étant  monté  sur  le 
trône  le  20  juin  840),  et  est  ainsi  postérieure  de  quatre- 
vingt-un  ans  à  l'année  771,  à  laquelle  cet  historien 
l'attribue  à  tort.  Le  cartulaire  prouve  ainsi  de  plus  que 
Gentulphe  aurait  été  seigneur  de  Vierzon  postérieurement 
à  Ambran,  tandis  que  La  Thaumassière  le  fait  par  erreur 
vivre  longtemps  avant  ce  seigneur.  Cet  historien,  toute- 
fois, ne  fait  rien  savoir  sur  la  parenté  qui  a  pu  exister 
entre  Ambran  et  Centulphe,  non  plus  que  sur  la  généa- 
logie de  ces  deux  seigneurs  de  Vierzon  ou  leur  descen- 
dance et  postérité. 

Le  troisième  seigneur  de  Vierzon  dont  le  cartulaire  fait 
mention,  est  Teobaldus  ou  Teobaudus  cornes,  Thibaut  le 
Tricheur,  comte  de  Chartres,  de  Blois  et  de  Tours, 
seigneur  de  Saint-Aignan,  de  Selles,  de  Sancerre,  de 
Vierzon  et  de  Montagu  eu  Laonnois,  qui,  par  une  charte 
du  jeudi  23  novembre  926,  jour  de  la  fête  de  saint 
Clément,  autorise  l'abbé  Raymond  et  les  moines  de 
l'abbaye  de  Dèvre,  qui  avaient  dû  abandonner  leur 
monastère  presque  entièrement  détruit  en  903  par  les 
Normands,  à  s'établir  définitivement  et  pour  toujours 
sous  la  protection  des  chanoines  de  Saint- Etienne  de 
Bourges  {in  cellulam  castellnlo  virsionc  sitam),  dans  son 
château  de  Vierzon,  qui  devint  à  partir  de  cette  époque  le 
siège  de  l'abbaye  Saint-Pierre  de  Vierzon.  Rien   ne  fait 


XL*    SESSION,    A    OHATEAUUOUX.  603 

connaître  dans  le  cartulaire  quelles  ont  été,  entre  ces  trois 
seigneurs  deVierzon  les  relations  de  famille  et  de  parente, 
ni  comment  la  seigneurie  do  Vierzon  leur  est  advenue  ou 
a  cessé  de  leur  appartenir. 

Le  quatrième  seigneur  de  Vierzon  cité  dans  le  cartu- 
laire est  Hiimbaudus  vocahulo  tortus,  Humbaud  le  Tortu, 
qui  parait  avoir  été  la  souche  véritable  et  le  fondateur  de 
la  maison  de  Vierzon.  Par  une  charte,  qui  peut  être 
attribuée  à  l'année  996,  tout  en  n'étant  seulement  datée 
que  des  temps  du  roi  Hugues  et  de  l'archevêque  de 
Bourges  Dagbert,  un  chevalier  Humbaud,  surnommé  le 
Tortu,  venu  peu  auparavant  de  Bellème  dans  le  Perche, 
et  qui  exerçait  alors  l'autorité  dans  Vierzon  :  qui  domina- 
tum  exercere  videhatiir  in  Castro  Virsionensi,  obtint  de 
l'abbé  André,  en  récompense  de  ses  services,  et  après  avoir 
secouru  vaillamment  l'abbé  et  les  moines  dans  leurs 
dangers  et  les  avoir  délivrés  de  leurs  ennemis,  la  conces- 
sion de  terrains  pour  construire  une  maison  et  planter 
des  vignes,  ainsi  que  celle  des  deux  églises.  Avec  l'aide 
des  moines,  Humbaud  le  Tortu  parvint  ensuite  à  étendre 
son  pouvoir  sur  toute  la  seigneurie  de  Vierzon,  et, 
d'après  une  charte  d'Arnoul  II,  l'un  de  ses  descendants, 
il  est  qualifié  du  titre  de  seigneur  de  Vierzon.  Il  a  pu  se 
faire  que  la  seigneurie  de  Vierzon  ait  été  concédée  à  foi  et 
hommage  à  Humbaud  le  Tortu  par  Eudes  I",  comte  de 
Blois  et  de  Chartres,  dont  il  était  le  vassal,  et  qui  possé- 
dait le  château  de  Vierzon  du  chef  de  son  père,  Thibaud 
le  Tricheur,  comte  de  Blois  et  seigneur  de  Vierzon  de- 
puis 920. 

Après  Humbaud  le  Tortu,  les  seigneurs  de  Vierzon 
mentionnés  dans  le  cartulaire  sont  :  Hunbaldus  ou  Hun- 
baudus  connomine  dives,  Humbaud  II  le  Riche,  fils  d'Hum- 
baud  le  Tortu,  qui  fait  plusieurs  donations  à  l'abbaye 


604       CONGRÈS  ARGHÉOLOGIUUE  DE  FRANCE. 

par  des  chartes  de  1018,  1019  et  1025,  puis  se  fait  moine 
en  1025,  et  est  ensuite  élu  abbé  du  monastère  de  Vierzon, 
qu'il  dirigeait  encore  en  109o;  et  Arnulfus  senior  Virsio- 
nensis  castri,  Arnoul  P',  neveu  et  héritier  d'Humbaud  II 
le  Riche,  qui  figure  dans  des  chartes  de  1052  et  1082. 
A  Arnoul  I"  succéda  Gaufridus  ou  Goffredus  domnus 
Versioniensis,  Geoffroy  I*%  son  tîls,  cité  dans  une  charte  de 
l'année  1095,  Après  Geoffroy  P%  le  cartulaire  fait  mention 
de  Arnulfus,  Arnoul  II,  son  fils,  qui,  suivant  la  Chronique 
de  Vierzon,  mourut  en  1142.  Enfin  le  dernier  seigneur 
de  Vierzon,  dont  le  nom  figure  dans  le  cartulaire,  est 
Herveus  Virsionis  dominvs,  Hervé  P"",  qui  succéda  à 
Geoffroy  II,  son  père,  en  1144,  se  croisa  en  1163, 
fit  le  voyage  d'outre -mer  en  1164,  et  mourut  vers 
1184. 

XII.  Vicomtes  de  Bourges.  —  Le  cartulaire  de  Vierzon 
paraît  être  le  seul  manuscrit  qui  puisse  permettre  de 
tenter  de  reconstituer  la  généalogie  des  vicomtes  de 
Bourges,  et  c'est  l'unique  recueil  de  documents  qui  four- 
nisse des  renseignements  sur  les  deux  premiers  d'entre 
eux.  Une  charte,  datée  de  l'an  de  l'Incarnation  1092, 
indiction  XV,  épacte  IX,  4''  série  (le  mercredi  4  mai 
1092),  sous  le  pontificat  du  vénérable  pape  Urbain  II  et  le 
règne  du  roi  Philippe  F'',  fait  connaître  les  noms  de  cinq 
des  vicomtes  de  Bourges,  dont  sans  elle  deux  au  moins 
seraient  absolument  inconnus,  ainsi  que  leur  filiation 
et  l'ordre  dans  lequel  ils  se  sont  succédé  de  père  en 
fils. 

Les  vicomtes  de  Bourges  mentionnés  dans  cet  acte  du 
cartulaire  sont  dans  l'ordre  suivant  : 

I.  Gaufredus  cognomento  Papabos  ^  Geoffroy  I"»", 
surnommé  Papabos ,  qui  vivait  du  temps  du  roi 
Louis  IV  d'Outremer  (936-954),  qui  lui  donna  en  com- 


XL'    SESSION,    A    ClIATIOAUROUX.  (>05 

mande  perpétuelle  l'abbaye  de  Saiiit-dondon-sur-Loire  ; 

II.  Gauf/'C'dus  gui  Bosberaes  cof/no)innatus  est,  Geof- 
froy H,  surnommé  Bosberas,  fils  de  Geoffroy   Papabos  ; 

III.  Gaufredus  Nobilis  cognominatus,  Geoffroy  III,  sur- 
nommé le  Noble,  fils  de  Geoffroy  Hosberas; 

IV.  Gaufredus  gui  Meschins  prenominatiis  est,  Geof- 
froy IV,  surnommé  le  Meschins,  fils  de  Geoffroy  III  le 
Noble  ; 

Et  V.  Stephanus  vicecomes  Bitmicensis  urbis,  Etienne, 
vicomte  de  Bourges,  qui  mourut  sans  enfants  en  laissant 
pour  seule  et  unique  héritière  de  tous  ses  biens  sa  nièce 
Mahault  ou  Mathilde  de  Sully. 

Par  cette  charte  de  1092,  le  vicomte  Etienne  fait, 
d'accord  avec  sa  sœur  Ildeburge ,  cette  dernière  avec 
l'autorisation  de  son  mari  Gilon  de  Sully,  donation 
à  Tabbaye  de  Saint-Gondon-sur-Loire.  Cette  donation 
fut  ensuite  confirmée  par  Eudes  Arpin,  successeur  du 
vicomte  Etienne.  Le  cartulaire  mentionne  enfin,  après 
Etienne,  Odo  donnus  vicecomes  Bituricensis  cognomento 
Arpinus,  Eudes  Arpin,  fils  d'Humbaud,  seigneur  de  Dun, 
qui,  par  suite  de  son  mariage  avec  Mathilde  de  Sully, 
fille  d'Ildeburge,  sœur  du  vicomte  Etienne,  devint  l'héritier 
de  ce  vicomte  mort  sans  enfants,  et  fut  le  dernier  des 
vicomtes  de  Bourges.  Eudes  Arpin  vendit  pour  se  croiser, 
vers  HOO,  sa  vicomte  de  Bourges  au  roi  Philippe  I"; 
puis  au  retour  de  la  Croisade  il  se  fit  moine  en  l'abbaye 
de  Cluny,  où  il  se  trouvait  déjà  avant  1109,  et  où  il 
mourut. 

Tels  sont,  sans  entrer  dans  les  développements  plus 
circonstanciés  et  beaucoup  plus  complets  que  comporterait 
l'examen  de  ce  précieux  manuscrit,  quelques-uns  des  ren- 
seignements que  fournit  le  cartulaire  de  l'abbaye  de  Saint- 
Pierre  de  Vierzon,  et  qui  peut-être  ne  manqueront  pas  de 


606  CONGRÈS   ARGllEOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

tout  intérêt  pour  l'histoire  locale  de   notre  province  du 
Berry. 

Ce  travail,  très-apprécié,  reçoit  les  ielicitations  de 
l'assemblée. 

M.  le  Président,  passant  à  l'art.  34  du  programme, 
relatif  au  principe  d'unité  de  style  dans  les  édifices  reli- 
gieux, demande  si  quelque  personne  a  traité  la  ques- 
tion. 

M.  Lenail  donne  lecture  du  mémoire  suivant  : 


Mémoire  de  M.  Lenail. 


Placé  sur  la  terre  comme  en  un  lieu  de  passage, 
l'homme  est  essentiellement  changeant.  Son  esprit,  facile- 
ment impressionnable,  subit  des  influences  dont  il  ne  peut 
se  rendre  compte  dans  l'art  aussi  bien  qu'en  politique.  Gréé 
pour  le  bien,  mais  sans  cesse  entraîné  par  le  mal,  il  flotte 
indécis  entre  les  extrêmes  ;  il  avance  vers  ce  qui  l'éloi- 
gnait  tout  à  Theure,  repousse  aujourd'hui  ce  qui  lui 
plaisait  hier,  s'incline  devant  l'objet  de  son  mépris,  pour 
bientôt  fouler  aux  pieds  son  idole,  prêt  cependant  à 
détruire  toujours  et  partout  pour  avoir  l'occasion  sans 
cesse  renouvelée  de  pleurer  sur  les  ruines  qu'il  a  faites  et 
qu'il  est  impuissant  à  relever. 

Les  leçons  de  l'expérience  ne  lui  serviront  jamais.  Les 
grands  enseignements  de  l'histoire  ne  semblent  pas  écrits 
pour  lui.  Les  idées  de  progrès  (juo  l'on  prône  si  fort 
aujourd'hui  semblent  avoir  encore  obscurci  les  ténèbres 


XL"    SESSION,    A    CHATKAUnOUX.  607 

dont  il  est  entouré,  et  jeté  un  nouvel  aliment  à  la  folie 
furieuse  dont  il  est  dévoré. 

Demeurant  dans  le  domaine  des  arts,  que  de  réflexions 
n'avons-nous  pas  à  faire  sur  ces  successions,  ces  change- 
ments du  goût  public,  sur  ces  manies  déplorables  aux- 
quelles nous  devons  plus  de  ruines  que  n'en  ont  jamais 
entassé  les  passions  religieuses  et  politiques  ! 

Héritier  des  idées  du  xvi"  siècle,  le  xvii''  eut  un  culte 
pour  l'art  romain,  à  l'exclusion  de  tout  autre.  Au  xyiii", 
on  crut  au  seul  grec,  sans  s'apercevoir  que  ce  grec  tant 
admiré  n'était  qu'un  romain  bâtard. 

Le  mal  empira  jusqu'au  règne  du  roi  Louis-Philippe. 

De  cette  époque  date  le  soulèvement,  la  résurrection 
dite  romantiquie,  qui  n'est  en  réalité  qu'une  nouvelle 
chute.  Ce  mouvement  nous  lança  à  corps  perdu  dans 
l'admiration  irraisonnée  du  moyen  âge  et  de  la  renais- 
sance :  renaissance  de  contrebande,  iQoyen  âge  en  toques 
à  panaches  et  en  pourpoints  abricot. 

Cet  engouement,  dont  les  meilleurs  esprits  eurent  grand'- 
peine  à  se  défendre,  n'a  pas  été  moins  nuisible  dans  ses 
résultats  que  le  mépris  des  siècles  précédents  pour  ce  qui 
n'était  pas  grec  ou  romain. 

A  chacun  de  ces  moments,  tout  ce  qui  n'était  pas  l'art 
vénéré  du  jour  fut  impitoyablement  condamné,  et  s'il 
reste  quelque  trace  des  époques  proscrites,  c'est  que  le 
temps  à  fait  défaut  et  que  les  changements  de  l'esprit 
humain  furent  plus  rapides  que  la  main  des  exécuteurs. 

Faire  revivre  un  type  d'architecture  à  une  époque  autre 
que  celle  qui  l'a  enfanté  est  une  des  entreprises  les  plus 
folles  qui  se  puissent  concevoir. 

Comment  donc  empêcher  l'homme  de  laisser  manifes- 
tement lisible  dans  son  travail  l'influence  du  teujps  et  des 
milieux,  ce  je  ne  sais  quoi  qui  devient  la  signature  de  son 


608  CONGBÈS   ARCHÉOLOlilOUE   DE    FRANCE. 

siècle,  le  cachet  dont  il  est  impossible  de  nier  l'authenticité. 

Le  XVII"  siècle,  en  croyant  faire  du  romain,  a  fait  du 
Louis  XIII  et  du  Louis  XIV.  Le  grec  du  xviii*  ne  sera 
jamais  que  du  Louis  XVI.  Le  premier  empire  et  la  Res- 
tauration ont  eu  leur  manière  particulière  de  bâtir,  et  les 
prétentions  antiques  de  leurs  travaux  ne  tromperont 
jamais  personne. 

Depuis,  suivant  cette  manie  qui  paraît  être  une  loi 
contre  laquelle  il  est  inutile  de  se  révolter,  nous  avons 
continué  à  vouloir  copier.  Nous  avons  copié  toutes  les 
époques,  il  est  vrai,  si  bien  persuadés  nous  étions  qu'il 
nous  fallait  une  architecture  originale. 

Nous  vîmes  éclore  le  moyen  âge  Louis-Philippe,  la 
Renaissance  Louis-Philippe,  le  grec  Louis-Philippe  ! 

Notre  but  est  manqué,  et  nous  avons  fait  mieux  que 
nous  ne  croyons  faire  ! 

Il  existe  en  effet  de  tels  points  de  ressemblance  entre 
tous  ces  ouvrages,  que  la  postérité  n'y  sera  point  trompée. 
Reconnaissant  en  eux  un  même  sang  et  un  même  esprit, 
elle  les  confondra  sous  le  nom  d'époque  Louis-Philippe. 
Le  règne  de  Napoléon  III  marquera  de  même  son  passage. 
L'architecture  de  ces  vingt  années  existe,  quoi  qu'on  en 
dise.  Elle  est  caractérisée,  et,  malgré  les  efforts  incompré- 
hensibles de  leurs  auteurs,  tous  ces  travaux,  qui  nous 
semblent  d'agréables  postiches  des  âges  passés,  formeront 
un  seul  genre. 

L'église  Saint-Augustin  et  le  Palais  de  Justice,  la  Tri- 
nité et  l'Opéra,  l'église  de  Montrouge  et  le  nouveau 
Louvre,  aussi  bien  même  que  Sainte-Clotilde,  seront  du 
Napoléon  III,  rien  autre  chose,  et  nul  ne  s'avisera  de 
confondre  ces  monuments  avec  leurs  aînées  de  vingt  à 
de  trente  ans  à  peine. 

Nous   nous  trompons   donc  en    bâtissant;  nous  nous 


XI.''    SKSSIOX,    A    CIIATKAI'l'.dIJV.  (.()'.< 

trompons  Ibrt,  uussi  on  ré[);iraiit,  en  rcslaiiraiil,  (•(hhhk! 
nous  disons,  c'est-à-dire  en  laisanl  disparaître  les  travaux 
d'époques  que  nous  considérons  comme  ridicules,  pour 
leur  substituer  nos  propres  élucubrations,  qui  ne  sont 
la  plupart  du  temps  rien  moins  ([ue  déplorables. 

Vous  savez  bien,  Messieurs,  (jue  je  ne  suis  pas  trop 
sévère.  Presque  toutes  les  restaurations  que  nous  sommes 
appelés  à  constater  sont  mauvaises. 

Je  viens  de  vous  dire  que  l'architecte  d'aujourd'hui, 
croyant  faire  du  moyen  âge  ou  de  la  Renaissance,  fait 
du  moderne. 

Je  ne  blâme  point  ce  résultat  assurément. 

L'architecte  construit  un  bâtiment  selon  les  idées  et  les 
convenances  du  moment;  s'il  apporte  dans  ses  construc- 
tions de  la  logique  et  du  goût,  il  a  réussi. 

Il  faut  bien  autre  chose  pour  restaurer,  et  volontiers 
dirais-je,  arrière  ce  qu'on  appelle  vulgairement  du  goût. 
Il  faut  pour  restaurer  beaucoup  de  jugement,  de  bon 
sens  et  de  science. 

Je  touche  à  la  question  du  programme  ;  j'ai  peut-être 
mis  bien  longtemps  à  y  arriver,  mais  ceux  qui  démolis- 
sent vont  si  vite,  qu'en  les  blâmant  j'ai  la  permission,  je 
l'espère,  d'avancer  plus  lentement. 

L'histoire  est  véritablement  écrite  dans  nos  monuments 
religieux  et  civils  :  chaque  époque  y  a  apposé  son  cachet 
et  gravé  sa  signature. 

Devons-nous  faire  disparaître  ces  marques  de  la  succes- 
sion des  âges?  Ceux  qui  le  font  avec  précipitation  et  sans 
études  me  rappellent  les  alFolés  effaçant  naguère  les  aigles 
sculptés  sur  les  monuments  publics  pour  se  faire  croire 
que  l'empire  n'avait  jamais  existé. 

Nous  acceptons  les  constructions  successives ,  les 
adjonctions,  les  amplifications  des  différents  siècles  ju-qu'à 
XL*   SESSION.  39 


610  CONfiRÈS   AdCIlÉOLOGIQUE   DE    FP.AXCE. 

la  Renaissance  peut-être?  Pourquoi  donc  nous  arrêter  là? 
L'époque  de  Louis  XIV  n'a-t-elle  pas  produit  des  monu- 
ments d'une  réelle  grandeur  ?  N'a-t-on  pas  atteint  sous  le 
roi  Louis  XIV  un  type  du  pur  goût  français  en  croyant 
imiter  les  Grecs  ? 

Les  restaurations,  croyez-le,  ne  vaudront  la  plupart  du 
temps  pas  mieux  que  ce  que  vous  mettez  tant  de  zèle  à 
remplacer,  et  jamais  la  manie  des  restaurations  n'a  été  si 
formidable  qu'aujourd'hui. 

En  continuant,  en  vérité,  dans  la  voie  où  nous  sommes 
engagés,  il  ne  me  semble  pas  impossible  que  nous  efTa- 
cions,  pour  la  postérité,  des  pages  entières  de  l'histoire  des 
arts,  de  l'architecture  et  de  la  décoration. 

C'est  surtout  pour  les  églises  que  de  pareils  faits  sont  à 
craindre.  Or,  dans  les  églises,  les  restaurations  portent 
sur  le  monument  lui-même  ou  sur  son  ameublement. 

Dans  le  premier  cas,  le  plus  grave,  l'architecte  a  quel- 
quefois le  pouvoir  de  contrebalancer  les  opinions  renver- 
santes qui  lui  sont  soumises. 

Si  la  construction  attaquée  est  de  peu  d'importance  et 
véritablement  mauvaise,  remplacez-la  par  une  résurrec- 
tion de  ce  qu'elle  a  remplacé  elle-même,  ou,  plus  logi- 
quement, par  une  construction  qui  présente  franchement 
les  caractères  du  xix''  siècle. 

Si,  au  contraire,  la  construction  est  importante  par  son 
étendue  ou  sa  valeur  artistique,  je  le  dis  fermement,  vous 
n'avez  dans  aucun  cas  le  droit  d'y  toucher. 

On  a  bien  agi  autrement  ! 

Un  exemple.  Messieurs,  le  plus  frappant,  je  l'avoue, 
qu'il  m'ait  été  donné  de  voir. 

La  cathédrale  de  Moulins  est  trop  petite  pour  la  popu- 
lation de  la  ville,  elle  ne  consiste  qu'en  un  chœur  et  deux 
nefs  latérales.  Vous  pensez  que  l'on  va  compléter  l'église 


XI."    SESSION,    A    illl ATKAri'.OlIX.  611 

dans  le  stylo,  du  xv"  sirc.lc!  Co  n'osL  imiul  ('(da.  On  élèvo 
devant  ce  chœur,  dans  son  axe,  une  immense  construc- 
tion du  prf'dondu  xii"  siècle,  et  l'édifice  ancien,  dans 
lequel  il  existe  des  détails  charmants,  est  accablé  par  la 
nouvelle  bâtisse  et  ne  peut  tarder  à  disparaître. 

A  Gap,  où  l'on  a  peut-être  pour  excuse  le  manque  d'am- 
pleur de  la  ville,  la  cathédrale,  fort  ancienne,  a  été  rasée 
pour  faire  place  à  une  nouvelle,  et  j'ai  dû,  avec  un  de  mes 
amis  ici  présent,  aller  à  la  messe  dans  le  théâtre.  Il  n'y  a 
pas  d'autre  église, 

Gap  n'a  plus  de  monument  antérieur  au  xvii"  siècle, 
on  a  déchiré  les  pages  parlantes  de  son  histoire. 

Nous  qui  jugeons  de  pareils  faits,  soyons  réservés  et 
très-réservés  quand  il  s'agit  de  démolir  et  d'effacer  ce  qui 
nous  a  été  légué  par  les  âges  précédents. 

Il  nous  faut  travailler,  non-seulement  pour  nous,  mais 
encore  pour  l'avenir.  Ne  détruisons  donc  pas;  conservons 
et,  autant  que  possible,  dessinons  et  décrivons  tous  les 
monuments  que  nous  pouvons  voir.  Qui  peut  nous  assu- 
rer qu'ils  existeront  demain  ?  Les  intempéries  des  saisons, 
les  fureurs  populaires,  l'incendie,  les  décisions  du  Comité 
des  monuments  historiques  les  menacent  sans  cesse  ! 

Souvenons-nous  du  plaisir  et  de  l'intérêt  que  nous 
éprouvons  à  retrouver  dans  les  peintures  ou  les  sculptures 
des  représentations  de  tant  de  belles  choses  aujourd'hui 
disparues.  Quels  services  nous  ont  rendus  des  chercheurs 
comme  Montfaucon  ou  Michel  de  Gaignières  !  Faisons 
pour  l'avenir  ce  qu'ils  ont  fait  pour  nous  ;  faisons-le  avec 
d'autant  plus  de  zèle  que  nous  apprécions  davantage 
l'immense  utilité  de  leurs  travaux. 

Effaçons,  encore  une  fois,  le  moins  possible  dans  nus 
monuments  ;  que  la  main  qui  les  touchera  soit  discrète 
autant  qu'habile.  Il  y  a  tel  cas  dans   lequel   un  simple 


f>l2  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

ravalement,  un  enduit  appliqué  sans  discernement  peuvent 
défigurer  à  jamais  un  monument  du  plus  haut  intérêt. 

La  question  du  mobilier  et  de  l'ornementation  inté- 
rieure n'est  pas  moins  importante,  et  c'est  ici  surtout 
qu'il  faut  se  défier  du  beaucoup  de  (joût. 

Pensez-vous  que  les  autels  marbrés  et  dorés,  objets  du 
mépris  du  moment,  soient  plus  extraordinaires  que  les 
prétendus  ouvrages  gothiques  par  lesquels  on  les  rem- 
place aujourd'hui  ?  Chacun  y  veut  mettre  la  main,  et  le 
résultat  est  déplorable. 

Le  XVII*  et  le  xviii^  siècle  nous  ont  légué  nombre  de 
retables.  Presque  tous  ont  une  grande  tournure,  beaucoup 
sont  remarquables  par  la  forme  et  l'exécution. 

Ce  sont,  à  n'en  pas  douter,  les  monuments  de  la  ma- 
gnificence des  fidèles. 

Ces  ouvrages  ont  été  offerts  à  l'église,  et  je  ne  crois  pas 
qu'on  ait  le  droit  de  les  en  arracher.  Les  faire  disparaître 
ou  les  vendre  est  plus  qu'un  manque  de  tact,  c'est  un 
manque  de  goût.  Tel  de  ces  objets,  d'une  valeur  réelle,  sera 
remplacé  par  le  travail  d'un  amateur  imprudent  ou  par 
les  productions  sans  nom  d'une  de  ces  fabriques  d'objets 
d'art,  dont  quelques  départements  sont  particulièrement 
infestés. 

La  plus  lointaine  ressemblance  avec  les  époques  romane 
ou  ogivale  suffit  pour  faire  jeter  des  cris  d'admiration,  et 
l'on  se  pâme  devant  les  travestissements  de  ces  époques 
en  pierre,  en  bois,  en  cuivre  ! 

Ces  ouvrages  ont  le  principal  mérite  d'être  très-mal 
fabriqués,  et  sont  de  beaucoup  inférieurs  aux  œuvres 
décriées;  mais  le  marchand  a  déclaré  que  l'aulel  était 
genre  xii'^,  le  retable  genre  xiv'^  siècle,  et  ces  appellations 
font  fort  bien.  Chacun  conspire  en  ce  sens  et  l'cntraine- 
ment  est  général. 


XL*    SESSION,    A    CllATEAUUOUX.  «»13 

Il  laut  faire  comprendre  qu'un  bon  ouvrage  du 
xvir  siècle  est  fort  au-dessus  d'un  mauvais  travail  du 
xix°.  Je  dis  mieux,  en  thèse  générale,  qu'on  ne  sait  plus 
aujourd'hui  traiter  le  bois,  le  cuivre,  comme  on  le  savait 
faire  aux  époques  de  Louis  XIV,  Louis  XV  et  Louis  XVL 
Conservons  donc  nos  autels  et  nos  retables,  si  médio- 
cres qu'ils  puissent  être  ;  nous  risquons  trop  d'avoir 
pire. 

Il  est  difficile  d'arrêter  un  mouvement  comme  celui  que 
je  signale  ;  je  déclarerais  volontiers  l'entreprise  impos- 
sible. 

Faisons  donc  cependant  tous  nos  efforts  ;  jetons-nous  au 
devant  des  fuyards  :  c'est  notre  devoir.  Il  y  va  de  l'intérêt 
de  l'avenir,  comme  de  l'intérêt  et  de  la  dignité  du  pré- 
sent. 

Tous  les  membres  du  Congrès  s'unissent  pour  approu- 
ver ces  conclusions  et  faire  des  éloges  à  l'auteur. 

M.  Hubert  demande  au  Congres  d'émettre  le  vœu  que 
les  deux  églises  de  Chàteauroux,  Saint-André  et  Saint- 
Martial,  ne  soient  pas  détruites  ei  rasées,  comme  il  a 
entendu  dire  qu'on  en  avait  l'intention.  Tous  les  membres 
du  Congrès  protestent  avec  énergie  contre  cette  idée 
barbare,  surtout  en  ce  qui  concerne  l'église  Saint-Martial. 

M.  Rigollot  demande  s'il  n'y  aurait  pas  une  distinction 
à  faire  entre  le  clocher  et  le  corps  de  cette  église,  et  si 
l'inconvénient  serait  bien  grand  de  laisser  démolir  le 
le  corps  dans  le  cas  où  il  faudrait  faire  un  sacrilice  pour 
l'élargissement  des  voies  de  communication,  tout  en  con- 
servant le  clocher,  autour  duquel  on  pourrait  faire  un 
square  dans  le  genre  de  celui  qui  entoure  la  tour  Saint- 
Jacques-la-Boucherie,  à  Paris. 

M.  de  Cougny   n'est   pas  de   cet  avis  et  aliirme,   au 


014       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

contraire,  que  le  morceau  le  plus  intéressant  est  la  net'  de 
l'église,  qui  est  du  xii"  siècle,  tandis  que  le  clocher  ne 
date  que  delà  Renaissance.  L'assemblée  entière  s'associe  au 
vœu  émis  par  M.  Hubert  pour  la  conservation  complète. 

M.  le  Président  donne  lecture  de  l'art.  35.  Personne  m 
se  présente  pour  traiter  la  question.  Uu  reste,  chacun  fait 
observer  que  la  réponse  est  impliquée  dans  la  demande 
elle-même.  Il  est  évident  pour  tout  le  monde  qu'il  y  a 
une  très-grande  utilité  à  créer  des  musées  d'antiquités, 
d'abord  pour  la  conservation  des  objets  antiques  et  ensuite 
en  raison  des  avantages  qu'ils  peuvent  procurer,  pour 
l'étude  des  arts,  de  l'histoire,  de  la  topographie  et  des  usages 
de  la  région  dans  laquelle  ces  précieux  monuments  sont 
découverts.  M.  Hubert  dit,  à  ce  propos,  avoir  demandé  au 
conseil  général  que  le  vieux  Château-Raoul  lut  consacré 
exclusivement  aux  archives  départementales  et  au 
musée. 

Un  membre  Faisant  observer  que  beaucoup  d'objets  en 
pierre,  appartenant  au  musée,  sont  exposés  dans  les  cours 
aux  détériorations  du  public,  M.  le  conservateur  répond 
que  le  local  mis  à  sa  disposition  est  très-insuffisant  et  que 
souvent  il  a  mieux  aimé  laisser  sur  place  bien  des  monu- 
ments curieux  ou  des  fragments  qui  auraient  été  plus  expo- 
sés dans  les  cours  que  sur  les  lieux  qu'ils  occupent  actuel- 
lement. Quand  on  aura  donné  un  espace  plus  approprié 
aux  besoins,  les  visiteurs  seuls  pourront  approcher  de  ces 
objets,  qui  seront  de  cette  façon  à  l'abri  des  injures  des 
ignorants  ou  des  malveillants.  Le  classement  raisonné 
pourra  s'établir  aussi  d'une  manière  plus  facile. 

M.  de  Rouraejoux,  inspecteur  du  Lot,  a  adressé  le 
mémoire  suivant  à  M.  le  Directeur  depuis  la  clôture  du 
Concrrès. 


XL'   SESSION,    A   GHATEAUKOUX.  615 


Lettre  à  M.  de  Cougny,  sur  la  35"  question 
du  programme  du  Congrès  archéolo- 
gique de  Châteauroux. 

Celte  question,  vous  l'avez  dit  avec  raison,  Monsieur  le 
Directeur,  méritait  d'être  étudiée,  et  la  discussion  qui  s'est 
établie  au  Congrès  a  été  fort  intéressante;  tous  ont  été 
d'accord  sur  l'utilité  des  collections  publiques;  il  eût  été 
étrange  qu'il  en  lut  autrement  dans  le  lieu  où  la  question 
était  posée,  et  la  poser  c'était  la  résoudre.  Cependant,  j'ai 
quelquefois  entendu  dire,  et  je  pourrais  ajouter  que  j'ai 
lu,  que  les  musées  ne  servaient  qu'à  amollir  les  esprits  et 
retarder  leur  essor  vers  des  aspirations  ou  des  conceptions 
nouvelles  par  la  vue  de  tableaux  rappelant  d'antiques 
superstitions,  de  statues  aux    formes    trop    légèrement 
voilées  ou  de  sujets  grossièrement  travaillés,  sans  valeur 
artistique,  sans  expression,   gothiques  en   un   mot.    Ces 
réflexions  saugrenues  ne  méritent  pas  la  discussion  ;  les 
pauvres  diables  qui   les  émettent  ne  réfléchissent  pas, 
quelles  que  soient  leurs  prétentions,  que  nous  ne  saurions 
pas  ce  que  nous  savons  si  nos  pères  n'avaient  pas  travaillé, 
et  que  notre  science  est  faite  bien  plus  de  la  science  et  des 
découvertes  du  passé  que  de  ce  que  nous  avons  trouvé 
nous-mêmes.  On  dirait  vraiment  que  ce  sont  ces  idées 
fausses  et  cette  étroitesse  de  jugement  qui  dirigent  la  plu- 
part des  conseils  municipaux  des  villes,  car  il  en  est  bien 
peu  qui  fassent  des  sacritices  sérieux  pour  l'installation  de 
musées,  et  combien  ont  refusé  les  allocations  nécessaires 
à  cet  elfet  !  A  l'abri  de  combien  de  prétextes  se  rétranche 
l'ignorance  pour  prouver  que  les  dépenses  faites  pour  ces 


«il 6       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

établissements  sont  inutiles  et  n'ont  rien  de  pratique.  Ah  ! 
si  l'on  parle  d'élargir  une  rue,  de  démolir  tout  un  quar- 
tier, tous  approuveront,  si  la  rue  donne  plus  de  jour  à 
leurs  maisons  et  si  leurs  immeubles  voués  à  la  démolition 
sont  payés  très-cher.  Mais  un  abri  pour  de  vieilles  pierres, 
de  vieux  pots  presque  toujours  cassés,  d'antiques  ferrailles, 
à  quoi  bon?  de  quelle  utilité  cela  peut-il  être? 

Toutes  les  villes,  heureusement,  ne  jugent  pas  ainsi, 
car  il  n'est  pas  un  département  qui  ne  puisse  réunir  les 
éléments  d'une  collection  remarquable,  et,  vérité  digne  de 
M.  de  la  Palisse,  plus  les  musées  sont  riches,  plus  ils 
attirent  de  visiteurs,  et  plus  ils  sont  appelés  à  avoir  d'in- 
fluence sur  l'esprit;  on  y  apprend  à  comparer  les  objets, 
à  saisir  les  différences  entre  les  arts  aux  époques  succes- 
sives de  notre  histoire  ;  on  peut  y  étudier  l'architecture, 
la  sculpture,  l'orfèvrerie,  l'armurerie,  la  céramique,  et  se 
rendre  compte  des  progrès,  des  rallentissements,  des 
déviations  de  l'art;  l'archéologue  et  l'historien  y  trouvent 
des  documents  quelquefois  nouveaux,  inattendus,  qui 
éclairent  des  questions  obscures  ;  l'ouvrier,  l'artiste  peu- 
vent y  prendre  des  modèles  souvent,  des  leçons  toujours. 

A  Limoges,  on  l'a  bien  compris  ainsi  lorsque,  grâce  à 
l'initiative  de  M.  Dubouché,  le  musée  céramique  a  été 
fondé  ;  on  n'a  rien  négligé,  ni  local,  ni  vitrines,  ni  achats, 
pour  en  faire  un  tout  aussi  complet  que  possible  ;  on  y 
suit  l'art  de  la  terre  depuis  l'époque  la  plus  reculée 
jusqu'aux  temps  modernes,  en  passant  par  tous  les 
peuples.  Il  y  a  bien  quelques  vides  encore,  quelques 
lacunes  ;  mais,  grâce  à  M.  Dubouché  et  à  la  commission 
qui  le  seconde,  ces  lacunes  seront,  je  n'en  doute  pas, 
bientôt  comblées.  Une  école  de  dessin  et  une  école  de 
peinture  sont,  dans  l'établissement,  ouvertes  aux  jeunes 
gens  qui  veulent  se  perfectionner  ;  les  professeurs  et  les 


XL''    SESSION,    A    CllATEAUllol'X.  017 

modèles  ne  leur  font  pas  défaut.  Voilù  un  musée  large- 
ment conçu,  largement  établi,  et  qui  est  appelé  à  rendre 
de  vrais  services  à  l'art  et  à  l'industrie. 

Cette  collection,  dira-t-on,  comme  celle  de  Sèvres  ou 
des  Gobelins,  a  un  but  particulier,  et  on  comprend  son 
importance;  mais  dans  les  villes  qui  n'ont  pas  d'industrie, 
à  quoi  bon  tant  de  dépenses?  je  l'ai  déjà  dit  :  à  former,  à 
épurer  le  goût,  à  donner  des  idées,  à  apprendre  aux  igno- 
rants, à  aider  la  mémoire  de  ceux  qui  ont  oublié,  à 
occuper  sérieusement  les  instants  de  loisir.  On  peut  dire 
que  les  musées  sont  un  livre  ouvert  où  chacun  peut  lire  à 
la  page  qui  lui  convient.  Cherchons  donc  à  rendre  ce  livre 
complet,  et  nous  serons  siîrs  qu'il  sera  souvent  feuilleté. 
Parce  que  dans  certaines  villes  rien  ou  presque  rien  n'a 
été  fait,  ce  n'est  pas  une  excuse  pour  continuer  à  dormir 
dans  l'inaction  et  l'indifférence  ;  suivons  l'exemple  de  celles 
qui  s'éveillent.  On  a  des  bibliothèques  publiques,  pour 
moi  les  seules  sérieuses;  on  crée  des  bibliothèques  dites 
populaires,  où.  on  essaye  d'attirer  les  ouvriers  par  l'attrait 
des  lectures  morales,  je  n'en  doute  point,  ou  profession- 
nelles; croit-on  que  si  auprès  de  ces  établissements  on 
trouvait  une  collection  méthodique  de  tous  les  objets 
anciens  artistiques,  tels  que  dessins,  sculptures,  meubles, 
vases,  ces  lectures  ne  deviendraient  pas  plus  fructueuses 
par  l'application  pratique  qu'un  jour  ou  l'autre  on  pour- 
rait faire  des  principes  puisés  dans  les  livres?  Croit-on 
que  cette  comparaison  ne  serait  pas  une  bonne  critique  de 
ces  lectures  ?  Voilà  pourquoi,  n'en  déplaise  à  ceux  qui 
jugent  des  facultés  et  des  besoins  des  autres  d'après  leur 
insuffisance  ou  leur  manque  de  goût,  les  musées  sont 
utiles,  pratiques  et  intéressants. 

Je  demanderais,  si  j'avais  l'honneur  d'avoir  voix  au 
chapitre,  à  tous  les  conseils  munici[iaiix  des  chels-lieux  de 


618       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

départemenl,  à  tous  les  conseils  généraux,  de  larges  sub- 
ventions pour  créer  des  musées,  faire  des  achats  et  conser- 
ver bien  des  objets  qui,  transportés  au  loin,  perdent  de  leur 
intérêt.  Je  répéterai  ce  que  je  disais  en  1871,  dans  le 
Bulletin  monumental,  au  sujet  des  musées  de  Nîmes  et 
d'Arles  :  c'est  que  l'on  doit  conserver,  dans  le  pays  où  on 
les  a  trouvés,  les  restes  du  passé  ;  là  seulement  ils  ont 
leur  valeur  réelle,  entière,  auprès  des  monuments  dont 
ils  ont  fait  partie  et  qu'ils  ont  contribué  à  meubler  ou 
à  décorer. 

Je  crois ,  Monsieur  le  Directeur ,  que  s'appesantir 
davantage  est  inutile,  d'autant  mieux  que  je  n'ai  pas  la 
prétention  d'avoir  rien  dit  de  nouveau  ;  mais  il  est  des 
questions  qu'on  ne  saurait  soulever  trop  souvent. 

J'ai  traité  un  sujet  banal,  je  l'avoue  sans  honte  ;  je 
persisterai  avec  le  même  sentiment  tant  que  nous  n'aurons 
pas  satisfaction. 

Au  sujet  de  l'art.  36,  dont  M.  le  Président  fait  la 
lecture,  M.  de  Cessac  fait  part  de  la  manière  dont  il  vou- 
drait voir  composés  les  musées  d'antiquités.  On  ne 
devrait  pas,  dit-il,  mélanger  les  objets  tout  à  fait  dispa- 
rates entre  eux,  et  des  objets  du  département  avec  ceux 
qui  peuvent  venir  d'un  autre  département  ou  de  pays 
étrangers.  Comme  exemple  de  sa  manière  de  voir,  il  cite 
le  musée  de  la  ville  de  Namur,  où  la  classification  est 
faite,  non-seulement  par  objets  de  même  nature,  appar- 
tenant à  la  même  époque,  mais  même  par  trouvaille  et 
par  commune.  On  atteint  de  cette  façon  un  double  but  : 
faciliter  l'étude  et  exciter  le  zèle  des  habitants  de  chaque 
localité,  qui  mettront  leur  amour-propre  à  faire  connaître 
les  trésors  sortis  de  leur  pays. 

M.  le  Président  lit  l'art.  37.  Personne  ne  se  présente 


XL"    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  61  «J 

pour  traiter  la  question  ;  mais  plusieurs  niemlircs  loiit 
sur  ce  sujet  des  réflexions  qui  sont  pour  raffirniative. 
M.  de  Cougny  cite  à  ce  propos  un  fait  qui  soulève  une 
protestation  générale. 

En  1821,  le  conseil  municipal  d'Arles,  sur  la  demande 
du  comte  de  Forbin,  oflVit  au  roi  un  torse  en  marbre,  que 
l'on  croyait  alors  appartenir  à  une  statue  de  Jupiter  et  qui, 
depuis,  a  été  reconnu  comme  faisant  partie  d'une  statue 
d'Auguste.  La  tète  et  la  partie  inférieure  de  cette  statue 
ayant  été  découvertes  depuis  cette  époque,  la  ville  d'Arles 
réclama  au  musée  du  Louvre  la  restitution  du  torse  en 
question,  sans  qu'il  ait  été  jusqu'ici  fait  droit  à  sa  juste 
demande.  Il  résulte  de  là  ce  fait  inouï  d'une  statue  dont 
le  torse  est  à  Paris  et  la  tète  et  (es  jambes  h  Arles.  La 
réclamation  de  la  ville  d'Arles  est  motivée  par  l'équité  et 
par  l'intérêt  sagement  compris  de  l'art.  J'ai  promis,  ajoute 
M.  de  Cougny,  à  M.  le  conservateur  du  musée  d'Arles, 
que  je  protesterais  ici  en  son  nom  ;  je  m'acquitte  de  mon 
engagement  en  priant  le  Congrès  de  joindre  son  énergique 
protestation  à  la  mienne. 

M.  Cattois  cite  plusieurs  exemples  de  ce  genre  :  l'église 
de  Saint-Germain-des-Prés  a  refusé  de  rendre  une  statue 
appartenant  à  la  vieille  basilique  de  Saint-Denis.  L'église 
Saint-Roch  refuse  aussi  à  l'église  du  Val-de-Gràcc  une 
statue  qu'elle  s'est  appropriée.  M.  Hubert,  dans  un  autre 
ordre  d'idées,  nous  dit  que  Paris  a  gardé  un  volume  sur 
cinq  de  V Inventaire  des  archives  du  duché  de  Château- 
roux  et  VHistoire  entière  de  l'abbaye  de  FonKjontbaud^  qui 
avaient  été  demandés  en  communication.  Heureusement  le 
conseil  général  a  fait  refaire,  au  prix  de  800  fr.,  le  volume 
manquant,  et  les  moines  de  Fontgonibaudont  recopié  cux- 
mcmes  l'intéressante  histoire  de  leur  abbaye. 

La  conclusion  qu'on  tire  de  ces  dillérents  faits  est  qu'il 


(320       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

faut  réagir  contre  cette  absorption  de  la  part  de  la  capitale, 
et  qu'on  doit  laisser  sur  les  lieux,  quand  il  y  a  possibilité, 
les  objets  intéressants  qu'on  y  trouve. 
La  séance  est  levée  à  onze  heures  et  demie. 


SÉANCE  DE  CLOTURE  DU  SAMEDI  14  JUIN. 

PRÉSIDENCE   DE    M.    DE    COUGNY. 

Siègent  au  bureau  :  MM.  de  Verneuil,  capitaine  d'état- 
major,  aide-de-camp  du  général  Ferri-Pisani,  Desgouttes, 
deuxième  adjoint,  Daiguson,  secrétaire  général  du  Con- 
grès, l'abbé  Blanchet,  aumônier  du  lycée. 

La  séance  est  ouverte  à  deux  heures,  au  milieu  d'une 
nombreuse  assistance,  composée  de  membres  de  la  Société 
française  d'Archéologie  et  de  l'élite  intelligente  de  la  ville 
et  du  département.  On  remarque  dans  la  salle  un  grand 
nombre  de  dames. 

Le  procès-verbal  de  la  précédente  séance  est  lu  et 
adopté. 

Deux  questions,  dit  M.  le  Président,  avaient  été  réservées 
pour  cette  séance.  La  personne  qui  en  avait  demandé 
l'insertion  au  programme  ne  se  présentant  pas  pour  les 
traiter,  comme  nous  en  avions  l'espérance,  M.  l'abbé 
Damourette  a  bien  voulu,  sur  ma  demande,  se  charger 
d'y  répondre  avec  cette  obligeance  et  ce  dévouement  dont 
il  nous  a  donné  tant  de  preuves  durant  le  cours  de  cette 
session. 


XL"   SESSION,    A    C.IIATKAUllOUX.  0-21 

Origine  de  la  famille  d'Hervé  de  Buzan- 
çais,  trésorier  de  la  collégiale  de  Saint- 
Martin  de  Tours  et  constructeur  de  la 
magnifique  basilique,  dont  il  existe 
encore  deux  tours. 

En  994 ,  Foulques-Nerra  prenait  d'assaut  l'ancienne 
Martinopole,  nommée  Chàteauneuf  depuis  qu'elle  était 
délendue  par  une  enceinte  de  murailles  garnies  de  tours. 
Il  y  brûlait,  outre  la  basilique  de  Saint-Martin,  vingt- 
deux  autres  églises  ;  mais  l'église  de  Saint-Martin  allait 
sortir  de  ses  ruines,  plus  splendide  que  jamais. 

Parmi  les  membres  du  chapitre  de  Saint-Martin  figu- 
rait, en  ce  temps-là,  un  homme  d'une  naissance  illustre, 
distingué  par  une  grande  piété,  et  possesseur  d'une 
immense  fortune  ;  il  se  nommait  Hervé.  Hervé  résolut  de 
rebâtir  à  ses  frais  et  sur  de  nouveaux  fondements  la  basi- 
lique de  Saint-Martin, 

11  se  met  à  l'œuvre,  et,  vingt  ans  à  peine  après  l'acte 
sauvage  de  Foulques-Nerra,  c'est-à-dire  le  14  juillet 
101-4,  Hugues  ]"%  archevêque  de  Tours,  consacrait  solen- 
nellement le  monument  dû  à  la  munificence  d'Hervé. 

Cette  église  est  celle  qui  subsista  jusqu'en  1802,  et  dont 
il  reste  encore  deux  beaux  vestiges,  la  tour  Gharlemagne 
et  la  tour  de  l'Horloge. 

A  quelle  famille  appartenait  Hervé  ?  Tous  les  historiens 
s'accordent  à  le  nommer  Hervé  de  Buzançais  ;  son  grand- 
père  se  nommait  Aymon,  et  son  père  était  un  valeureux 
guerrier,  que  l'on  appelait  Sulpice-Mille-Boucliers. 

Hervé  avait  pour  frère  Archambaud,  seigneur  de  Buzan- 
çais, de  Ghàtillon-sur-IodreetdeVillantrois  ;  Archambaud 
était  aussi  un  des  trois  seigneurs  qui  se  partageaient  la 


irl'l  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE  LE   FRANCE. 

ville  d'Amboise  ;  mais  il  était  le  moins  puissant  des  trois, 
car,  dit  M.  l'abbé  Chevalier,  dans  ses  Promenades  en 
Touraine,  la  maison  de  Buzançais  ne  possédait  à  Amboise 
qu'un  territoire  très-exigu,  sur  la  rive  droite  de  l'Amase. 

Archambaud  laissa  trois  enfants  :  un  fils  nommé 
Robert,  et  deux  filles,  Hersende  et  Hermesende.  Ces  trois 
enfants  étaient  sous  la  tutelle  de  leur  oncle,  Hervé,  tréso- 
rier de  Saint-Martin  de  Tours. 

Robert,  seigneur  de  Buzançais,  de  Châtillon-sur-Indre 
et  de  Montrésor,  était  surnommé  le  Diable  (1). 

Foulques  lui  donna  la  garde  du  château  qu'il  fit  con- 
struire à  Montrésor. 

Voici  ce  que  j'ai  pu  découvrir  sur  l'origine  de  la 
famille  d'Hervé. 

M.  l'abbé  Damourette  donne  lecture  du  mémoire  sui- 
vant en  réponse  à  la  23*  question. 

Les  seigneurs  du  Berry,  le  vicomte  de 
Brosse,  Guinaume  de  Chauvigny,  le  sei- 
gneur de  Gluis,  Roger  de  Palluau,  Guy 
Senebaud  du  Bouchet,  Gaudin  de  Rome- 
fort ,  le  seigneur  de  Château -Meilland 
étaient  chevaliers  bannerets  de  Touraine  ; 
était-ce  en  raison  des  fiefs  que  ces  sei- 
gneurs possédaient  en  cette  province  ? 

La  prise  de  Loches  et  de  Chinon,  en  1205,  assura  la 
conquête  définitive  de  la  Touraine  et  la  réunion  de  cette 

(1)  Haiino  (loniinus  Buzenchaici  genuit  Sulpiciuiii  mille  cli- 
peonini.  Arclianibaiidus  genuit  Rolieiiiun.  Hersendim,  llornie- 
sendim,  etc.  Spicilege,  29G. 


XI.«   SESSION,    A   r.IlATKAUROUX.  (i^2:{ 

province  à  la  couronne  do  France.  Devenu  possesseui-  de 
ce  riche  pays,  et  voulant  s'en  attacher  de  plus  en  plus  la 
haute  noblesse,  Philippe-Auguste  nomma  cinquante- 
cinq  chevaliers  bannerets. 

Nous  apprenons  de  Laurière  [Glossaire  du  droit  fran- 
çais)^ que  le  banneret  devait  posséder  au  moins  quatre 
terres  à  bacelle  (I). 

La  marque  d'honneur  du  chevalier  banneret  était  une 
bannière  carrée,  que  ce  titre  lui  donnait  le  droit  de  porter 
au  haut  de  sa  lance  ;  le  cri  d'armes  ou  de  ralliement  était 
aussi  inhérent  à  la  possession  d'un  fief  à  bannière. 

Les  girouettes  du  manoir  dominant,  où  résidait  le  che- 
valier banneret,  peintes  aux  couleurs  de  son  blason, 
annonçaient  au  loin,  par  leur  forme  carrée,  la  dignité  du 
fief  et  du  seigneur.  En  échange  de  ces  honneurs  et  de  ces 
droits,  le  banneret  devait  conduire  à  l'appel  du  roi,  sui- 
vant Laurière  et  l'historien  Froissard,  cinquante  lances, 
sans  y  comprendre  les  archers  et  les  arbalétriers,  c'est-à- 
dire  cent  cinquante  chevaux  avec  leurs  cavaliers. 

Parmi  les  cinquante- cinq  bannerets  de  Touraine,  nous 
voyons  deux  Poitevins,  les  seigneurs  de  Chàtellerault  et 
de  Montmorillon,  et  sept  grands  seigneurs  du  Berry. 

Guillaume  de  Chauvigny.  fils  aîné  de  Denyse  de  Déols, 
était  trop  jeune  pour  aller  en  guerre,  lorsqu'il  devint 
possesseur  de  la  baronnie  de  Chàteauroux,  et  cependant 
il  est  inscrit  sur  la  liste  des  bannerets,  preuve  évidente 
que  cette  distinction  n'était  pas  toujours  la  récompense 
des  états  de  service.  Si  Guillaume  de  Chauvigny  fut 
compris  dans  la  promotion  des  bannerets  de  Touraine, 

(1)Une  terre  à  bacelle  devait  au  moins  comprendre  autant 
d'étendue  que  vingt  bœufs  pouvaient  en  labourer  en  un  jour. 
Glossaire  de  Roccjuefort  au  mol  hacele. 


624  CONGRÈS   ARC.HÉOLOr.IOUE   T>E   FRANCE. 

c'est  qu'il  possédait  en  cette  province  le  fief  de  Montrésor. 

Le  seigneur  de  Chàteau-Meliand  était,  comme  Kaoul 
de  Déols,  de  l'illustre  famille  des  princes  de  ce  nom. 
Il  était  classé  en  Berry  dans  la  catégorie  des  comtes 
ou  barons  qui  avaient  rang  et  préséance  sur  les  simples 
hannerets.  En  Tourainc,  son  fief  ne  lui  donnait  pas  une 
aussi  haute  position;  il  n'était  que  banneret. 

Les  liefs  de  Palluau  et  du  Bouchet-en-Brenne,  régis 
par  la  coutume  de  Touraiue,  appartenaient  simultané- 
ment au  Berry,  pour  le  spirituel  et  les  finances,  à  la 
Touraine,  quant  au  gouvernement  temporel  et  au  service 
militaire  ;  il  n'est  donc  pas  surprenant  que  les  possesseurs 
de  ces  fiefs  figurent  parmi  les  bannerets  de  Touraine. 

Si  le  vicomte  de  Brosse  était  banneret  du  Berry,  il  ne 
pouvait  l'être  qu'à  raison  de  son  fief  d'Argenton  :  son 
manoir  et  sa  terre  de  Brosse,  près  Saint-Benoit-du-Sault, 
étant  du  ressort  de  la  vicomte  de  Limoges,  il  était  certaine- 
ment porté  sur  les  cadres  des  bannerets  du  Limousin.  La 
Touraine  le  compte  au  nombre  de  ses  bannerets,  c'est  sans 
doute  parce  qu'il  possédait  dans  cette  province  des  terres  à 
bacelle  dont  nous  ne  connaissons  pas  le  nom. 

Il  y  a  dans  le  Ras-Berry  deux  fiefs  qui  portent  l'un  le 
nom  de  Cluis-Dessous,  et  l'autre  le  nom  de  Gluis-Dessus  ; 
ces  deux  fiefs  sont  à  peu  de  distance  l'un  de  l'autre.  La 
châtellenie  de  Cluis-Dessous,  qui  rendait  foi  et  hommage 
à  l'abbaye  de  Saint-Sulpice  de  Bourges,  appartint  aux 
Chauvigny,  de  la  branche  des  seigneurs  de  Ghàteauroux, 
jusqu'à  l'extinction  de  cette  maison,  en  1502. 

Gluis-Dessus  relevait  de  la  baronnie  de  Ghàteauroux, 
et  a  reçu  son  nom  de  la  configuration  du  terrain  et  des 
champs  clos  qui  existent  sur  les  versants  des  coteaux 
qui  dominent  la  Bouzanne. 

G'est  à  tort  que,   dans  le  catalogue  des  bannerets,  les 


XL*    SESSION,    A    C.IIATEAUllOUX.  025 

annalistes  do  'I'iuiimiik'  uni  iiis(  lil  ImkIcs  sons  le  titre  de 
dominus  Ciivx,  il  l'allail  écrire  ;  (lominns  de  closis  snperio- 
ribus. 

Cet  Eudes,  qui  possédait  un  (ief  en  Tourainc  et  ([ue 
nous  ne  connaissons  pas,  ne  l'ait  pas  partie  des  ban- 
nerets  du  Berry.  C'était  un  vassal  on  bas  clievalier  (jui 
s'engagea,  en  1248,  à  rendre  au  seigneur  deChàteauroux, 
Guillaume  H  de  Chauvigny,  le  bourg  de  Cluis-Dessus,  et 
sa  forteresse  du  Repaire,  soit  à  petite,  soit  à  grande  force, 
ad  parvam  vim,  vel  ad  maynam. 

Gandin  de  Romefortest  un  seigneur  du  Berry;  il  vivait 
sous  Philippe-Auguste;  nous  avons  de  lui  un  acte  de 
donation  aux  Fontévristes  de  Longcfond  de  tout  ce  qu'il 
possédait  depuis  Cors  jusqu'à  Margoux  ;  cet  acte  est  signé 
d'une  grosse  croix. 

Nous  sommes  heureux  d'apprendre  des  savants  auteurs 
de  la  Touraine  illustrée,  que  Gaudin  de  Romelbrt  possé- 
dait les  terres  fieffées  de  Marçay,  près  Richelieu,  de  Rome- 
fort,  dans  les  environs  de  Saumur,  et  qu'à  ce  titre  sans 
doute  il  fut  nommé  par  le  roi  banneret  de  Touraine. 
Était- il  banneret  en  Berry?  Nous  l'ignorons.  Ce  que 
nous  savons  c'est  que  son  fief  des  bords  de  la  Creuse 
devait  avoir  une  grande  importance,  puisque  le  donjon 
qui  subsiste  encore  est  un  colosse  qui  étonne  par  sa  masse 
imposante,  et  par  la  solidité  de  sa  construction. 

Un  de  ses  successeurs  presque  immédiats  put  accorder 
par  son  testament  l'affranchissement  à  cent  filles  de  sa 
terre  de  Romefort. 

Nous  concluons  en  disant  que  nos  sept  seigneurs  du 
Berry  furent  promus  par  Philippe-Auguste  au  grade  de 
banneret  de  Touraine,  à  raison  des  terres  qu'ils  possé- 
daient en  cette  province,  mais  sans  exclure,  si  ce  n'est 
pour  le  jeune  héritier  do  la  l)aronuio  do  Cbàteauroux,  les 

XL^  SESSION.  **^ 


():2()  CONGRÈS    AlU'.IiÉOLOGKjUE    1»K    KliANCE. 

services  militaires  rendus  au  roi.  Tout  porte  à  croire 
qu'il  leur  accorda  les  honneurs  et  les  droits  de  chevaliers 
bannerets,  parce  qu'ils  l'avaient  puissamment  aidé  à 
punir  Jean-sans-Terre  de  sa  félonie. 

M.  le  Président  remercie  M.  l'abbé  Damourette  de  sa 
communication,  qui  a  été,  comme  toujours,  accueillie  par 
l'assemblée  avec  le  plus  sympathique  intérêt,  et  donne 
ensuite  la  parole  à  M.  l'abbé  Voisin,  curé  de  Douadic, 
qui  lit  la  note  suivante,  relative  à  la  statuette  chinoise 
découverte  par  M.  Lenseigne  au  milieu  de  substructions 
gallo-romaines,  à  Argenton. 


Note  à  propos    de    la    statuette    chinoise 
trouvée    à   Argenton. 

Quelques  personnes  ont  trouvé  bizarre,  avec  raison,  la 
découverte  d'une  statuette  chinoise  dans  le  sol  gallo- 
romain  d'Argenton.  Sans  chercher  à  expliquer  ce  fait 
curieux,  ni  à  prendre  parti  pour  ou  contre,  j'ai  l'honneur 
de  soumettre  au  Congrès  quelques  notes  que  j'ai  recueil- 
lies, en  essayant  de  me  rendre  compte  à  moi-même  de  la 
présence  par  trop  insolite  de  ce  Boudha  sur  les  bords  de 
la  Creuse. 

Les  Romains  ont  connu  la  Chine  et  ont  eu  des  rapports 
avec  elle.  Une  ambassade  de  l'Inde,  conduite  par  le  philo- 
sophe babylonien  Bardesanne,  et  dans  laquelle  ligurait  le 
philosophe  indien  Dr.ndamis,  vint,  vers  l'an  160  après 
Jésus-Christ,  saluer  à  Rome  le  philosophe  Marc-Aurèle. 
Rome,  à  son  tour,  dès  ce  siècle,  envoyait  en  Chine  des 
marchands.    Les    annales    chinoises  constatent   ce  fait, 


XI."   SKSSION,    A    ClIATICAI'linn.V,  627 

iiép^lij^f''  par  les  liistorieiis  roinaiiis,  d'une  uinhassade,  ou 
soi-disant  toile,  du  roi  de  Ta-Tsiri  (Occidciut)  Aaii-Toun 
ou  Gan-Toun  (iMarc-Aurèlc-Aiiloiiiii),  ([ui  vint,  en  l'aninM! 
correspondant  à  l'an  KK»  de  n(iti'(î  ('l'c,  déposer  aux  pieds 
du  lils  du  Ciel  llan-llionon-Ti,  à  titre  de  tribut,  des 
cornes  de  rhinocéros,  des  deuls  d'éléphant,  des  écailles 
de  tortue. 

Les  savants  actuels  supposent  avec  assez  de  vraisem- 
blance que  Marc-Aurèle  n'eut  pas  connaissance  de  cetttî 
ambassade,  et  (jue  les  i)rélendus  envoyés  impériaux 
étaient  de  simples  commis  voyageurs  d'un  iVkcsius  Tita- 
iius,  qui  Taisait  avec  les  Sères  le  commerce  de  la  soie. 
(Voyez  le  F.  Ganbil,  Bist.  abrégée  de  l'astronomie  chi- 
noise, dans  les  observations  mathéoiatiques  du  P.  Souciet, 
t.  II,  p.  118.  —  Klaproth,  Tableau  historique  de  l'Asie.  — 
Mém.  de  l'Acad.  des  Inscriptions,  t.  XLVl,  p.  TioOet  seq., 
et  Nouv.  Série  rom.,  X,  p.  2'27,  7ném.  de  M.  Letronne.) 
—  (Sur  Titanus,  voyez  Ptolémée,  Géogr.  I,  11.) 

An-ïoun  ou  Gan-Touii  est  encore  aujourd'hui  la  l'orme 
([ue  les  chrétiens  chinois  donnent  au  nom  d'Antoine. 
[Annales  de  la  Propagation  de  la  foi,  pussitn.) 

Partis  au  temps  de  la  guerre  de  Rome  contre  les  Far- 
thes,  les  ambassadeurs  ou  marchands  ne  purent  arriver 
en  Chine,  comme  les  Annales  chinoises  le  remarquent, 
que  par  la  frontière  du  midi  et  non  par  celle  de  l'occident. 
C'est  par  laque  la  première  fois  Home  et  Féking,  ou,  pour 
mieux  dire,  Rome  et  Lo-Yand  se  connurent. 

Les  A-Si  (Parthes),  disent  les  Chinois,  voulant  que  le 
commerce  de  la  soie  se  fit  exclusivement  par  leurs  mains, 
cachaient  la  route  aux  habitants  du  Crand-Thsin  (empire 
romain)  et  empêchaient  les  communications  entre  les 
deux  peuples.  Ainsi  ce  l'ut  par  l'Inde  et  par  la  mer  que 
les  envoyés  romains  arrivèrent  eu  Chine. 


G-28  CO.NGRÈS    ARCHÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

iM.  Reinaud  [Relations  politiques  tt  commerciales  de 
Vemp.  rom.)  remarque  que  par  suite  de  ces  communica- 
tions, les  Romains,  au  temps  de  Marc-Aurèle,  ont  mieux 
connu  que  par  le  passé  la  nature  de  la  soie.  Pausanias 
(VII,  n°  3)  en  décrit  exactement  l'origine,  tandis  que 
Virgile  {Géorg.,  II,  v.  120)  et  Pline  {Bist.,  VI,  20)  parlent 
de  la  soie  comme  d'un  produit  végétal. 

D'après  un  autre  auteur,  les  transactions  entre  les 
Romains  et  les  Chinois  remonteraient  beaucoup  plus 
haut.  Selon  M.  Orsini,  ce  fut  sous  le  règne  d'Auguste  que 
le  peuple  romain  vit  la  première  ambassade  des  Sères, 
que  nous  appelons  aujourd'hui  les  Chinois.  Les  ambas- 
sadeurs prétendirent  qu'ils  avaient  mis  trois  ans  à  faire  le 
voyage.  (Orsini,  La  Vierge,  note  9^  p.  5-40.) 

Il  ne  manquait  paS;  parmi  les  Romains,  d'antiquaires, 
d'amateurs  de  raretés,  qui  collectionnaient,  tout  comme 
nous,  les  objets  curieux  des  pays  étrangers,  témoin 
Verres,  qui  s'annexait  si  gaillardement  les  chefs-d'œuvre 
artistiques  de  la  Sicile.  On  ne  devrait  donc  pas  trop 
s'étonner  qu'un  archéologue  du  temps  des  empereurs  ait 
transporté  de  son  musée  de  Rome  sur  les  bords  de  la 
Creuse  une  idole  enlevée  aux  rivages  du  fleuve  Jaune. 

Après  avoir  félicité  M.  l'abbé  Voisin  de  ses  savantes 
recherches  historiques,  M.  de  Cougny  engage  M.  Roubet, 
juge  de  paix  de  la  Guerche,  à  donner  lecture  de  son 
mémoire  intitulé  :  le  Vicus  Idallus. 


Un  mot  sur  Gergovia  Boïorum. 

LE   VICUS   IDALLVS. 

Les  difficiles  problèmes  qui  se  rattachent  à  la  période 


XL^    SESSION,    A    CIlATEAUIlOUX.  629 

gallo-romaine  auront  toujours  le  privilège  de  provoquer 
les  investigations  des  archéologues.  Nous  devons  donc 
naturellement  nous  intéresser  plus  volontiers  aux  ques- 
tions qui  concernent  nos  contrées  bituriges. 

Le  dernier  mot  n'a  pas  encore  été  dit  sur  le  fugitif 
oppidum  que  les  Commentaires  désignent  sous  le  nom 
de  Gergovia  ou  Gergobina  Boïorum. 

Rassurez-vous,  Messieurs,  je  n'ai  garde  d'oser  produire 
ici  une  quinzième  ou  seizième  opinion  sur  cette  énigme, 
véritable  pierre  philusophale  de  la  topographie  des 
Gaules. 

Je  me  propose  seulement  de  répondre  très-succincte- 
ment à  deux  questions  préliminaires  qui  m'avaient  été 
posées  autrefois  par  des  savants  sérieux  et  des  plus 
autorisés,  qui  cherchaient  l'emplacement  de  l'ancienne 
Gergovia  Boïorum. 

1"  question. 

Existe-t-il  dans  le  voisinage  de  la  Guerche  quelques 
localités  portant  le  nom  de  Bouy?  —  Connaît -on  le 
vocable  latin  de  Bouy? 

2^  question. 

La  Guerche  et  ses  environs  possèdent-ils  des  vestiges  de 
quelque  importance  attestant  l'occupation  romaine? 

Aujourd'hui  seulement  j'apporte  réponse  à  ces  ques- 
tions, auxquelles  j'avais  cru  devoir  me  dérober. 

Quelque  Iragiles  que  soient  les  déductions  que  l'on 
puisse  en  tirer,  je  suis  heureux  de  les  offrir  au  Congrès 
qui  nous  rassemble. 

Il  y  a  quinze  ans,  deux  généraux  badois,  iMiM.  Boëlhcr 


(i30  CONGRÈS   ARCUÉOLOGIQUE   DE   FRAN'CE. 

et  Heller,  dissertant  sur  les  opérations  stratég-iques  du 
vainqueur  des  Gaules,  n'hésitèrent  point  à  placer  à 
la  Guerche-sur-l'Aubois,  l'introuvable  Gergovia  Boïo- 
rum. 

Cette  opinion  mérita  une  sérieuse  créance,  et  peu  de 
temps  après  un  officier  d'état-major,  jeune  mais  déjà 
érudit,  fut  envoyé  en  mission  spéciale  pour  examiner  les 
bords  de  l'Aubois.  Il  était  chargé  de  recueillir  divers 
matériaux  archéologiques  nécessaires  à  la  publication  de  la 
Vie  de  César. 

Arrivé  à  la  Guerche,  il  s'adressa  au  maire  et  à  son 
adjoint,  et  s'enquit  auprès  d'eux  si  les  environs  ne 
recelaient  point  quelques  substructions  remontant  à 
l'époque  romaine. 

M.  le  maire  répondit  que  la  race  Durham  et  Charolaise 
remportaient  annuellement  des  palmes  au  concours  de 
Poissy;  que  le  sol  de  la  contrée  fournissait  d'excellents 
pâturages,  mais  pas  le  moindre  débris  romain. 

M.  l'adjoint  vint  à  son  tour,  et  affirma  mathémaiique- 
ment  qu'en  qualité  d'employé  des  ponts  et  chaussées,  il 
avait  pendant  de  longues  années  fait  procéder  à  l'enlève- 
ment et  au  remuement  de  bien  des  mètres  cubes  de  terre; 
mais  qu'il  n'avait  jamais  rencontré  aucun  vestige  de 
l'époque  gallo-romaine. 

Quelques  mois  après  son  passage,  le  hasard,  je  devrais 
dire  une  bonne  fortune,  me  fit  rencontrer  à  Moulins  le 
jeune  capitaine  archéologue,  et  toutes  les  heures  dont 
nous  pûmes  disposer  furent  consacrées  à  ces  causeries 
intimes  que  vous  connaissez,  Messieurs,  et  qui  font  la 
liesse  et  le  bonheur  des  antiquaires. 

J'appris  que  l'historien  de  la  Vie  de  César  et  ses  colla- 
borateurs étaient  d'avis  de  ne  point  rechercher  l'emplace- 
ment précis  de  cet  oppidum,  dont  le  siège  fut  abandonné 


XL"    SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  031 

par  Vercingétorix,  pour  aller,  minoribus  itineribus,  à  la 
rencontre  de  l'armée  romaine;  mais  qu'ils  se  contente- 
raient d'indiquer  l'arc  de  cercle  passant  in  finibm  Bitu- 
rigum,  non  loin  de  l'Allier  et  de  la  Loire,  laissant 
de  plus  osés  déterminer  sur  cet  arc  le  point  où  fui  jadis 
Ger(jovia. 

Le  rayon  de  l'arc  qui  avait  Novidunum  pour  point  cen- 
tral paraissait  alors  avoir  seul  une  réelle  importance  aux 
yeux  des  investigateurs. 

Cela  dit  sans  avoir  à  examiner  les  diverses  solutions 
proposées,  même  celle  qui  placerait  Gergovia  à  Sainte- 
Parise-le-Chàtel,  je  vais  répondre  aux  deux  (juestions 
plus  haut  énoncées. 

Près  de  la  duerche,  existait  l'ancienne  abbaye  de  Font- 
morigny,  qui  possédait  dans  ses  dépendances  territoriales 
deux  ténements  appelés,  l'un  le  Petit-Bouy,  et  l'autre  le 
Grand-Bouy. 

J'ai  donc  ouvert  le  Cartulaire  du  vieux  couvent,  et  dans 
une  charte  de  1160,  j'ai  rencontré  Nemus  de  Boa,  le  bois 
de  BouY. 

Dans  une  autre  charte  de  l'année  1192,  j'ai  lu  textuelle- 
ment ce  qui  suit  :  Juiius  d^:  Croseio  quittaverat  in  ele 
mosinam,  quidquid  liabcbat  in  magno  Boaio  in  memore,  le 
Grand  Bouy. 

Enfin  j'ai  trouvé  dans  le  même  cartulaire,  la  désigna- 
tion d'une  localité  située  près  du  Grand  et  du  Petit-Bon//, 
qui  se  dénommait  Sorgues  (Gorgue). 

Je  cite,  et  j'ai  prorais  de  ne  point  discuter.  Je  laisse 
donc  aux  éthymologistes  le  soin  de  Ibrmuler  tels  rappro- 
chements ou  déductions  qu'ils  trouveraient  favorables  au 
système  proposé  par  les  généraux  Boëlher  et  Heller. 


632       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

J'arrive  à  la  seconde  question. 

Les  vestiges  de  l'occupation  romaine  sont  si  nombreux 
dans  tous  les  environs  de  la  Guerclie,  qu'ils  peuvent  ré- 
pondre pour  moi  :  Saxa  loquntur. 

Je  n'ai  pas  à  énumérer  de  proche  en  proche  l'emplace- 
ment des  villas  qui  s'étendaient  sur  les  rives  de  l'Aubois; 
je  ne  peux  point  cataloguer  toutes  les  épaves,  toutes  les 
intéressantes  trouvailles,  nobilia  )itonvmenta,  qui  ont  été 
recueillies  depuis  quelques  années;  je  tiens  seulement  à 
donner  en  primeur  à  ce  Congrès  le  nom  d'un  vicus  com- 
plètement ignoré. 

Sur  les  limites  des  anciennes  justices  de  la  Guerche,  de 
la  Chapelle-Hugon  et  de  Germigny,  existe  encore  un  vieux 
manoir  féodal  :  il  se  nomme  Chezelle.  Si  le  blason  est  une 
langue  fidèle,  sa  construction  remonterait  à  l'année  1470, 
époque  à  laquelle  Haliz  deCharenton  aurait  apporté  ce  fief 
à  Pierre  Gueneau,  seigneur  de  la  Roche-Brun. 

Le  castel  est  construit  sur  des  substructions  romaines, 
et  le  sol  plantureux  des  terres  environnantes  cache,  sur 
une  grande  étendue,  bien  des  secrets  archéologiques;  il 
m'a  été  permis  d'y  retrouver  des  marbres,  des  frag- 
ments de  colonnes  et  de  statuettes ,  et  toujours  des 
médailles. 

J'avais  d'abord  pensé  que  sur  ce  territoire  florissait 
jadis  une  riche  villa  ;  mais  après  avoir  retrouvé,  comme 
sur  le  mont  Beuvray,  une  grande  quantité  de  fragments 
de  meules  à  bras,  qui  sont  demeurées  à  leur  place  pri- 
mitive, comme  pour  indiquer  que  là  était  le  locus  et  le 
focus  sacré;  j'en  suis  arrivé  à  conclure  que  Chezelle  nous 
cachait  l'emplacement  d'un  vicus. 
Quel  pouvait  être  son  nom? 

J'avais  déjà  rencontré  dans   de  vieux   parchemins  la 
mention  d'une  rue  ou  vieux  chemin  qui,  traversant  le  ter- 


XL'   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  633 

ritoirc  de  Chezellc ,  s'en  allait  rejoindre  Germigny , 
Boncenay  et  la  Chapelle- Uuyon,  en  passant  par  \iUe- 
doux. 

Cette  rue  se  dénommait  d'ancienneté  indifféremment  la 
Vie  dallé  ou  la  vie  d'Allier. 

Je  découvris  d'autres  titres  qui  donnaient  au  che- 
min le  nom  de  chemin  du  Vie  dallé  ou  Vie  d'Allier. 

Je  n'osais  hasarder  aucune  conjecture,  et  je  me  con- 
tentai d'inscrire  une  note  au  chapitre  des  profits  et  pet  tes 
de  l'histoire  locale. 

Il  est  toujours  réservé  aux  chercheurs  quelques-uns  de 
ces  petits  bonheurs  qui  les  récompensent  amplement  de 
leurs  arides  travaux. 

Il  y  a  trois  mois  à  peine,  au  milieu  de  multiples  et 
charmants  petits  débris  de  sculptures  d'ornementation, 
j'ai  fini  par  trouver  gravé  sur  une  pierre  un  nom  qui  me 
fit  tressaillir  : 

IDALLVS 

En  rapprochant  ce  nom  de  celui  qui  m'a  été  livré  par 
mes  vieux  parchemins,  ne  puis-je  point  en  conclure  qu'au 
temps  des  Autonins  le  vicus  qui  s'étendait  sur  le  terri- 
toire de  Chezelle  avait  pour  nom  IDALLVS,  lequel  vocable, 
pendant  bien  des  siècles,  se  serait  perpétué  dans  le  nom  du 
vieux  chemin,  dit  chemin  du  Vie  dallie? 

J'ajouterai  en  terminant  que  j'ai  relevé,  sur  l'emplace- 
ment d'une  habitation  de  ce  vicus,  un  fragment  de  pierre 
sur  lequel  sont  profondément  gral'fitées  deux  lettres  seu- 
lement : 

DR... 

Or,  si  Piimpci  nous  a  donné  la  maison  de  Tansa,  pour- 


634       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

quoi  le  vicus  Idallus  ne  nous  otrrirait-il  pas   la  maison 
d'un  DRmsws  quelconque  ? 

M.  le  président  remercie  M.  Roubet  de  son  intéressante 
communication,  et  l'engage  à  continuer  ses  recherches 
archéologiques,  dont  il  sait  interpréter  les  résultats  avec 
une  si  remarquable  sagacité  et  rendre  compte  d'une  façon 
si  spirituelle. 

M.  Guillard,  sur  l'invitation  de  M.  le  président,  donne 
lecture  d'un  travail  plein  d'érudition  et  de  judicieuse 
critique,  sur  l'ancienne  église  de  Chabris,  dont  certaines 
parties  lui  semblent  remonter  à  une  époque  antérieure  au 
x^  siècle.  Cette  localité  est  située  dans  la  vallée  du  Cher. 


Observations  sur  l'importance  archéolo- 
gique des  pierres  sculptées  qui  existent 
dans  les  murs  de  l'église  de  Chabris 
(Indre).  —  Ancienneté  de   cette  localité. 

Plusieurs  parties  de  l'église  de  Chabris  sont  très -an- 
ciennes et  incontestablement  antérieures  au  x"  siècle. 
L'église  avait,  à  l'origine,  la  forme  d'une  croix  latine;  elle 
est  orientée  de  l'est  à  l'ouest;  plus  tard,  une  chapelle 
ouvrant  dans  la  nef  fut  construite  au-dessous  des  transepts. 
La  base  de  l'abside  et  les  murs  latéraux  du  transept  nord 
portent  les  caractères  du  xr  siècle.  Vers  le  milieu  du  siècle 
suivant,  le  13  mars  1164,  Rabeau  de  Rabeau,  seigneur  de 
Villepaple,  de  Bouges  et  de  Sembleçay  [Semblancé]^ 
'onjoint  avec  Jeanne  de  Chabris,  fonda  «  en  l'église 
paroissiale  »  la  chapelle  Saint- Jean,  pour  leur  servir  de 


XL*   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  635 

sépulture.  Le  patronage  en  fut  concédé  aux  abbés  et  reli- 
gieux de  Massay. 

Le  porche  est  très-probablement  de  la  lin  du  xii"  siècle; 
il  était  fermé.  Quatre  belles  fenêtres,  superposées  deux  à 
deux,  dans  le  pignon,  l'éclairaifnt.  Il  comniuiii(iuait,  sur 
les  côtés,  par  des  arcades  ou  des  cloîtres,  avec  le  palais  des 
archevêques,  qui  y  était  contigu. 

La  nef  et  la  partie  supérieure  de  l'abside  paraissent 
avoir  été  presque  entièrement  reconstruites  au  xiii"  siècle. 
Deux  des  chapelles  et  le  chevet  de  celle  qui  est  au  nord 
ont  été  élevées  au  xv'';  enfin  la  porte  d'entrée  sous 
le  porche,  divisée  en  deux  baies  par  un  trumeau,  est 
du  xvi'.  Les  voûtes,  détruites  pendant  les  guerres  de 
religion,  furent  reconstruites  au  xvii^  siècle.  Celles  du 
porche  n'ont  pas  été  relevées,  et  les  murs  portent  encore 
la  trace  de  l'incendie  qui  les  embrasa.  Elles  étaient  dis- 
posées pour  former  un  étage.  Les  consoles  qui  sup- 
portent encore  les  nervures  sont  ornées  de  petites  sculp- 
tures figurant  des  personnages  religieux  et  des  animaux 
fantastiques.  On  raconte,  écrit  M.  Juste  Veillât,  dans  les 
Pieuses  Légendes  du  Berinj,  «  que  les  huguenots,  furieux 
de  la  résistance  des  fidèles  réfugiés  sur  la  tour  du  clocher, 
mirent  le  feu  aux  chapelles  de  Saint-Jean-Baptiste,  de 
Sainte-Madeleine,  et  que,  sans  l'assistance  de  Dieu  et  de 
saint  Phalier,  tout  eût  été  réduit  en  cendres  dans  l'église  et 
le  château  de  Bourges  (1).  » 

Une  crypte  ou  chapelle  souterraine  existe  sous  le  chœur  ; 
elle  est  basse,   voûtée   et   peu   éclairée.  Des   tuyaux   de 

(I)  Les  derniers  vestiges  de  ce  château,  où  résidaient  ies 
archevêques  (piand  ils  venaient  à  Chabris,  abandonnés  depuis  de 
longues  années,  (lis|ianireiit  vers  IS3;j,  d'ajtrés  l(!s  renseigne- 
ments que  nous  avons  recueillis  dans  la  commune. 


636       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

poterie,  ajustés  bout  à  bout,  communiquaient  (et  peut- 
être  en  trouverait-on  encore)  de  la  voûte  à  l'extérieur. 
Dans  plusieurs  nous  avons  trouvé  de  petits  morceaux  de 
charbon.  Cette  crypte  est  dédiée  à  saint  Phalier,  et  la 
messe  y  est  célébrée  le  jour  de  sa  fête.  Sa  statue  en 
bois,  grossièrement  sculptée,  est  placée  sur  l'autel. 
Derrière  est  un  tombeau,  que  l'on  suppose  être  celui 
de  ce  saint.  Ce  tombeau,  formé  d'une  seule  pierre 
évidée,  a  l'une  de  ses  extrémités  engagée  dans  le  mur  est 
de  la  chapelle,  et  l'autre  supportée  par  un  socle  dont  la 
face  supérieure  parait  avoir  été  creusée  circulairement. 

Les  parties  sur  lesquelles  nous  appelons  tout  particuliè- 
rement l'attention,  sont  les  murs  est  et  ouest  du  transept 
nord,  et  le  côté  nord  également  de  l'abside.  Ces  deux  murs 
(fig.  1  et  2)  ont  été  construits  bien  certainement  avec  des 
matériaux  provenant  d'un  monument  plus  ancien.  Les 
pierres,  de  petit,  de  moyen  et  de  grand  appareil  romain,  y 
sont  disposées  irrégulièrement  dans  toute  la  hauteur.  La 
base,  située  du  côté  de  l'est,  est  formée,  à  partir  du  sol, 
en  six  assises  régulières,  de  tronçons  de  colonnes  de  O^IO 
à  0°'1'2  de  diamètre,  dont  le  filet  qui  les  reliait  à  la 
muraille  ou  à  d'autres  colonnes  existe  encore.  Elles  sont 
noyées  dans  une  forte  épaisseur  de  mortier.  Vers  le  milieu 
de  la  hauteur  du  mur,  est  une  baie  simulée  de  1  mètre  de 
largeur  sur  l^'oO,  qui  est  fermée  par  une  tablette  où  sont 
tracés  des  losanges  réguliers,  imitant  l'appareil  réticulé. 
Deux  grandes  pierres  sculptées  de  0"38  d'épaisseur,  sont 
disposées  en  guise  d'appui  à  la  base  de  cette  fausse  baie 
(fig.  3  et  A).  Sur  l'une  on  remarque,  entre  deux  oliviers 
très-probablement,  symbole  de  paix,  deux  femmes  qui 
se  font  face  et  qui  se  donnent  la  main.  Leurs  voiles, 
rejelés  derrière  la  tète,  descendent  jusqu'à  la  ceinture. 
Sur  l'autre,  deux  anges  aux  ailes  déployées,  dont  la  tète 


XL'    SESSION-,    A    CIlATlCAUROUX.  637 

est  surmonléc  d'une  croix,  sont  pinces  de  cIkkiuc  cùlrd'uu 
saint  personnage  nimbé.  Ce  personnage  lève  les  mains 
vers  le  ciel  et  semble  être  en  extase.  Le  premier  bas-reliei 
ne  se  rapporterait- il  pas  à  la  visite  de  la  sainli;  Vierge  à 
sainte  Elisabeth,  et  le  second  à  un  épisf)de  de  la  vie 
contemplative  de  saint  Phalier  ou  à  son  ascension  au 
séjour  des  bienheureux? 

Le  mur  ouest  (fig.  2)  est  orné,  à  moitié  hauteur,  par 
deux  arcatures  bouchées  avec  des  matériaux  de  petit  et 
de  moyen  appareil.  Au  niveau  de  la  naissance  des  cintres, 
règne  un  cordon  cbanfreiné  qui  se  relève  au-dessus  des 
archivoltes  pour  les  encadrer.  C'est  entre  ces  baies,  à 
partir  de  la  naissance  des  pieds-droits,  qu'existent  trois 
rangs  superposés  de  bas-relieis,  qui  ont  été  jus(ju'à  ce  jour 
diversement  interprétés,  et  qui  nous  paraissent  d'un  haut 
intérêt  archéologique.  Des  antiquaires  ont  cru  y  distin- 
guer des  signes  du  zodiaque,  débris  d'un  monument  anté- 
rieur à  l'établissement  du  christianisme  dans  l'Aquitaine. 

Cette  opinion  était  le  résultat  d'une  inconcevable 
méprise,  ainsi  que  le  prouve  le  dessin  (fig.  Ti)  de  cette 
sculpture  relevé  avec  le  plus  gra  :d  soin.  Nous  l'avons, 
du  reste,  déjà  fait  remarquer  dans  la  petite  notice  ])ubliée 
en  1865,  et  par  nous  citée  dans  notre  mémoire  sur  les 
mardelles  (1). 

L'erreur  étant  évidente  sur  ce  point ,  ainsi  que  le 
montre  le  dessin,  une  étude  très -attentive  des  autres 
pierres  sculptées  nous  suggéra  une  interprétation  bien 
différente  de  celle  qui  paraît  généralement  admise.  Nous 

(1)  Il  faut  être  étranger  aux  notions  les  plus  élémentaires 
de  l'archéologie,  pour  attribuer  une  origine  gauloise  ou  gallo- 
romaine  à  une  figurine  dont  le  style  et  l'agencement  offrent 
tous  les  caractères  de  la  statuaire  du  xni*^  siècle.  Une  si  gros- 


638       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

donnons  cette  explication  avec  d'autant  plus  de  réserve, 
que  des  hommes  que  nous  estimons  au  plus  haut  point, 
en  contestent  Texactitude.  Nous  croyons  néanmoins  être 
dans  le  vrai.  Ces  pierres  seraient  les  restes  du  premier 
édifice  consacré  à  saint  Phalier. 

Celles  qui  sont  les  moins  frustes  (1),  dont  les  sujets 
sont  les  plus  apparents,  auraient  trait,  suivant  le  système 
que  nous  critiquons,  aux  constellations  du  Taureau 
(fig.  6),  du  Lion  (fig.  7),  du  Scorpion  (fig.  8),  du  Sagit- 
taire (fig.  9),  des  Poissons  (fig.  10),  d'Hercule  (fig.  11),  et 
du  Cygne  (fig.  12).  Pour  appuyer  notre  opinion,  il  nous 
semble  indispensable  de  décrire  la  représentation  figurée 
qui  en  a  été  adoptée  de  tout  temps.  Les  objets  qui  les  carac- 
térisent ont  dû  affecter  des  dispositions  à  peu  près  fixes, 
puisqu'ils  embrassent  une  zone  stellaire  limitée,  et  que 
certaines  étoiles  désignent  des  parties  distinctes  de  ces 
corps.  C'est  ainsi  que  nous  voyons  l'œil  du  Taureau,  le 
cœur  du  Lion,  la  bouche  du  Poisson,  le  cœur  du  Scorpion, 

sière  méprise  prouve  combien  est  utile  et  nécessaire  l'étude  de 
la  science  que  la  Société  française  d'Archéologie  lend  à  vulgari- 
ser par  ses  Congrès.  Le  prétendu  dieu  Phallus  de  Chahris.  n'est 
autre  chose  qu'une  de  ces  petites  cari;itides  que  l'on  rencontre 
à  la  retomi)ée  des  arcs  et  des  nervures  dans  la  plupart  des 
monuments  du  moyen  âge.  [Aofe  de  M.  de  Cnugnij.) 

(1)  Les  figures  n°^  3,  4,  6,  7,  8,  9,  10,  11,  12,  15  et  16  ont 
été  coulées  en  plâtre  sur  les  originaux  ;  elles  ont  été  dessinées 
ensuite  sur  le  relief  qui  en  est  résulté.  Les  dessins  des  figures 
nos  3,  4,  7,  8.  9,  10,  11,  \i  et  13  ont  été  faits,  à  la  prière  de 
M.  Fauconneau -Dufresnc,  inspecteur  des  monuments  histo- 
riques, par  M.  Jules  Chertier,  pour  accélérer  le  rendu  du  tra- 
vail. Tous  ont  été  extraits  des  cartons  de  M.  Regnault,  archi- 
tecte à  Paris,  lequel  a  été  chargé  par  M.  le  Muiistre  de  relever 
les  fresques  de  l'église  de  Nohant-Vicq  (Indre). 


XI.'"    SESSION,    A    CIIATKAIIHOUX.  6.'5*.) 

le   pied   d'Orion,   etc.,  détenniiiés  par  un  astre  spécial. 

Nous  ne  connaissons  aucun  dessin  de  ces  H|:ures  se 
rapportant  à  r(''pnque  romaine  ou  galhj-romaiiic;  imus 
n'en  avons  que  des  descriptions  très-vagues ,  ([iii  ne 
seraient  ici  d'aucune  utilité.  La  représentation  qui  en  est 
faite  sur  les  zodiaques  égyptiens  ne  peut  guère  être  invo- 
quée, l'origine  de  ces  monuments  étant  d'une  époque 
trop  incertaine.  En  l'absence  de  documents  précis,  les 
cartes  publiées  avec  tant  de  soin  dans  V Astronomie  de 
M.  François  Arago,  d'après  les  atlas  de  Bayer,  de  Bode  et 
de  Vaugondy,  nous  paraissent  les  seules  qui  permettent 
d'avoir  une  connaissance  suffisamment  exacte  de  la  forme 
des  astérismes  consacrée  par  l'usage. 

Sur  les  sphères  célestes,  le  Taureau  a  les  pieds  de 
devant  au  repos,  et  ceux  de  derrière  courbés  en  partie 
sous  le  corps;  la  tête  est  tournée  vers  le  haut  de  l'épaule 
gauche  et  renversée  de  façon  à  présenter  de  face  les  deux 
cornes,  et  par  conséquent  les  deux  oreilles.  Le  Lion  semble 
courir;  il  a  la  tête  très-accentuée,  et  la  crinière  descend 
jusqu'à  la  naissance  du  col;  la  queue,  recourbée  sur  elle- 
même  circulairement,  est  terminée  par  une  toulTe  de  poils. 

Le  Scorpion  diffère  de  la  forme  que  lui  donne  la  nature. 
L'on  sait  que  ce  petit  animal  est  un  arachnide,  qu'il  a,  par 
conséquent,  quatre  paires  de  pattes  et,  de  plus,  de  chaque 
côté  des  mandibules,  de  longs  palpes  terminés  par  des 
pinces  semblables  aux  pattes  d'écrevisses.  La  queue  est 
divisée  en  six  anneaux,  dont  le  dernier,  presque  sphérique, 
renferme  un  dard  venimeux.  Le  dessin  de  la  constellation 
ne  lui  donne  que  trois  paires  de  pattes  ordinaires  et  une 
quatrième  paire  armée  de  pinces  sans  palpes.  La  tête  est 
carrée  et  terminée  par  deux  petites  cornes  assez  ressem- 
blantes à  celles  de  la  femelle  du  lucane  (cerf-volant), 
appelée  èicAe,  et  la  queue  est  divisée  en  dix  anneaux.  Nous 


640  CONfiRÈ.>?    ARCHÉOLOGIQUE   DE    FRANCE. 

ferons  remarquer  que,  sur  le  zodiaque  de  Denderali,  les 
palpes  et  les  paUes  sont  bien  indiqués;  mais  le  corps  et  la 
queue  n'offrent  aucune  ressemblance  avec  ceux  de  l'insecte. 
Celte  transformation  des  palpes  en  pattes  est  expliquée. 
Le  champ  de  l'astérisme  avait,  à  l'origine,  une  grande 
étendue.  11  fut  restreint,  en  remplaçant  les  pinces,  sous 
Jules  César  ou  sous  Auguste,  lors  de  la  réforme  du  calen- 
drier, par  la  constellation  de  la  Balance,  qui  ne  figurait 
pas,  avant  cette  époque,  sur  les  sphères  grecques  et  les 
romaines.  Ainsi  le  dessin  du  Scorpion,  sa  représentation 
conventionnelle ,  est  bien  définie. 

Le  Sagittaire  est  un  cheval  dont  le  col  est  transformé 
en  buste  d'homme,  et  dont  les  bras  tendent  en  avant 
un  arc  armé  d'une  flèche.  Les  Poissons,  au  nombre 
de  deux,  sont  assez  éloignés  l'un  de  l'autre  et  placés 
suivant  deux  lignes  de  directions  réciproquement  per- 
pendiculaires. A  un  anneau  fixé  à  la  naissance  de  la 
queue  est  attachée  une  torsade,  enroulée  plusieurs  fois  sur 
elle-même  en  forme  de  nœud,  qui  les  relie  l'un  à  l'autre. 
Hercule  est  représenté  un  genou  à  terre;  l'autre  jambe  est 
courbée  comme  celle  d'une  personne  assise.  La  main 
gauche  étreint  Cerbère,  et  le  bras  droit,  armé  de  la  massue, 
est  levé  pour  l'écraser.  Il  est  couvert  de  la  peau  du  lion  de 
Némée.  Enfin  le  Cygne  est  représenté  les  pattes  repliées 
sous  le  corps,  les  ailes  ouvertes,  le  cou  ondulé  et  tendu 
devant  lui.  Il  semble  voler. 

Rien  de  semblable  n'est  reproduit  sur  les  murs  de 
l'église. 

Le  Taureau  a  la  tète  droite,  au  niveau  du  corps,  comme 
un  animal  au  repos.  Le  Lion  parait  dévorant,  sans  cri- 
nière bien  accentuée;  sa  queue  est  grosse  et  touffue  comme 
celle  d'un  renard. 

Le  Scorpion  i>'a  qu'une  paire  de  pattes;  elles  sont  ter- 


'  itl   C/'i  Giii/land  ToiU'J. 


Eglise   de     CHABRIS^    Transept 


oWr^:^ 


^^  "^  =^ 


b     In:; 


^^ 


V.-TÎ7^- 


^m^:^ 


):^'.  i'-.r.'is 


^"ïteiJ^ 


^jr 


W^3^SW^^î^ 


iîir^iaiME.'^ 


Vrilli 


i'iii 


'11'  'i^liil!,;;!:;  i'"ii'  '  M^''" 


/'l  -  'II;!  il,, 


d"      ">>ii 


w 


^       \\      \\V:'^pSti^ 


Eglise    de  CHABRIS 


XL»  SESSION,    A    CllATEAUllOUX.  641 

minées  par  de  véritables  grifl'cs  ressemblantes  à  celles  d'un 
chien  ou  d'un  chat.  L'extrémité  de  la  tète  est  prolongée  en 
trompe;  la  queue  est  retournée  sur  elle-même  comme 
celle  d'un  porc.  Il  ne  présente  aucun  rapport,  môme  très- 
éloigné,  avec  le  petit  animal  qui  porte  ce  nom  ni  avec  la 
figure  qui  le  caractérise. 

Le  Sagittaire  est  un  des  sujets  les  moins  bien  ressortis 
au  moulage,  et  par  conséquent  les  moins  bien  reproduits 
parle  dessin.  La  tète  n'a  nullement  la  lorme  de  celle 
d'un  homme.  Il  tendrait,  dans  cette  position,  son  arc  non 
en  lace,  mais  derrière  lui,  en  retournant  le  corps.  La 
tète  assez  grosse  de  l'animal  et  l'espèce  de  cercle  qui 
l'entoure  sembleraient  indiquer  un  mouton  nimbé. 

Les  Poissons  sont  disposés  l'un  au-dessus  de  l'antre,  en 
sens  inverse,  et  rattachés  ensemble  par  la  bouche,  au 
moyen  d'un  cordon  courbé  aux  deux  extrémités,  qui 
passe  au  milieu  de  l'espace  laissé  entre  leurs  corps. 

La  figure  attribuée  à  Hercule  représente  un  homme 
vêtu  d'une  robe,  le  corps  droit  et  la  main  gauche  appuyée 
sur  un  bâton,  dont  la  partie  supérieure  est  brisée. 

Le  Cygne  a  les  ailes  pliées  sur  le  corps  et  l'apparence  de 
marcher  la  tète  tournée  sur  le  côté.  Les  pattes  ne  parais- 
sent pas  palmées  ;  elles  semblent,  au  contraire,  être  des 
serres  ou  des  griffes.  Cet  oiseau  ne  serait-il  pas  plutôt  un 
paon  ou  un  phénix? 

D'autres  figures  de  quadrupèdes,  trop  frustes  pour  être 
appréciées  et  décrites  exactement,  complètent  ces  bas- 
reliefs.  Sur  le  côté  nord  de  l'abside,  au-dessus  de  l'une 
des  fenêtres  de  la  crypte,  est  sculpté  un  autre  animal  qui 
mord  sa  queue,  l'envie  peut-être. 

De  ce  rapprochement,  il  noua  parait  incontestable  que 
l'on  ne  saurait  assimiler  ces  sujets  aux  constellations, 
ni    les   attribuer  au    culte    du    paganisme.    11^;   doivent 

XL"   SESSION.  il 


642       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

avoir  trait,  au  contraire,  au  syrûbolisme  chrétien.  A 
partir  du  v^  siècle,  et  même  antérieurement,  le  Christ  et 
les  Apôtres  furent  représentés,  soit  sous  leurs  formes 
véritables,  soit  sous  celles  d'attributs  emblématiques. 
Alors,  dans  cet  ordre  d'idées,  le  Taureau,  le  Lion  ne  dési- 
gneraient-ils pas  les  évangélistes  saint  Luc  et  saint  Marc? 
Le  mouton  nimbé  ne  serait-il  pas  l'Agneau  pascal,  sym- 
bole de  Jésus-Christ?  V homme  qui  est  sur  la  même 
pierre  ne  pourrait-il  pas  être  le  bon  Pasteur,  appuyé  sur 
sa  houlette?  Les  poissons  n'ont-ils  pas  personoifié  Jésus- 
Christ  dès  le  II*  et  le  m*  siècle,  et,  par  extension,  la 
société  chrétienne;  n'étaient-ils  pas  le  signe  du  chrétien  ? 
Vers  le  milieu  du  iv*  siècle,  écrit  M.  Didron,  dans  son 
Iconographie  chrétienne,  Optatus,  évêque  de  Milésie,  en 
Afrique,  déclare  que  «  le  seul  nom  de  poisson,  suivant  la 
dénomination  grecque,  contient  une  foule  de  noms  sacrés 
dans  l'ensemble  des  lettres  qui  le  composent.  Ichthus, 
qui  signifie  poisson,  donne  en  latin,  en  prenant  chacune 
de  ses  lettres  pour  initiales  d'un  mot  grec  :  «  Jésus-Christ 
fils  du  Dieu  Sauveur.  »  Plus  tard  «  Jésus -Christ  fut 
assimilé,  non-seulement  au  poisson  qui  se  donne  à  man- 
ger, mais  encore  au  pêcheur  qui  prend  le  poisson,  comme 
le  Christ  a  pris  les  âmes  dans  le  filet  de  son  amour.  » 
L'analogie  n'est-elle  pas  évidente  ? 

Le  paon  ou  le  phénix  ne  serait-il  pas  encore  l'emblème 
de  l'immortalité  de  l'âme  et  de  la  félicité  éternelle  ? 

Dans  ces  hypothèses ,  les  bas-reliefs  ne  se  rapporte- 
raient au  plus  tôt  qu'à  la  fin  du  iv*  siècle  ;  mais  celui 
qui  a  trait  à  saint  Phalier  y  est  au  moins  postérieur 
de  deux  cents  ans,  les  nimbes  entourant  la  tète  de  Dieu 
et  des  saints  n'ayant  été  mis  en  usage  que  vers  le 
VI*  siècle.  Avant  cette  époque  (Didron,  p.  101),  le  nimbe 
chrétien  ne  se  voit  pas  sur  les  monuments  authentiques. 


XL"    SESSION,    A   CIIATEATJROUX.  64.'] 

Si  CCS  sujets  appartiennent  au  munie  édilice,  ils  ne  reniun- 
teraient  qu'au  milieu  de  l'ère  mérovingienne.  D'autres 
sculptures  qui  existent  à  l'église  et  que  l'on  peut  classer 
dans  la  même  période,  cunlirmeraient  cette  supposition. 
Sur  le  mur  nord  de  l'abside,  près  de  la  pierre  représen- 
tant l'envie  (?),  est'uii  autre  motif  (fig.  14),  dont  la  dispo- 
sition rappelle  ceux  de  l'église  de  Saint-Jean  de  Poitiers. 
Ce  tableau  a  VU)  d'élévation  et  0"'79  de  longueur  à  la 
base.  Il  est  rempli  à  l'intérieur  de  piHites  rosaces  conti- 
guës,  encadrées  dans  un  carré  de  i)'"\0  à  0"'l  1  de  côté.  Le 
dessin  en  est  simple  :  un  cercle  tracé  au  centre  avec 
quatre  rayons  allant  de  la  circonl'érence  aux  angles.  Un 
point  évidé  est  au  milieu.  Le  sommet,  disposé  en  forme 
de  fronton,  est  divisé  en  deux  bandes,  contenant  chacune 
trois  rangées  de  petites  moulures  prismatiques  ayant  la 
forme  de  gouttes,  et  disposées  en  échiquier.  L'encadre- 
ment du  bas  est  lisse. 

Sur  le  mur  ouest,  toujours  du  transept  nord,  sont 
encore  des  entrelacs  qui  ont  une  grande  analogie  avec  ceux 
des  mosaïques  provenant  de  Sainte-Marie-Transtevère, 
à  Rome,  de  Saint-Pierre  de  Vienne,  de  Saint-Jean,  et  avec 
les  ornements  exécutés  sur  divers  objets  d'art,  déposés 
dans  nos  musées,  dont  l'origine  est  antérieure  au 
viir  siècle. 

Nous  ne  croyons  donc  pas  nous  éloigner  de  la  vérité, 
en  concluant  que  toutes  ces  pierres  sont  les  restes  de 
l'ancienne  chapelle  mérovingienne,  élevée  sur  le  tombeau 
de  saint  Phalier.  En  effet,  il  résulte  de  la  lecture  de  sa 
vie  qu'un  édifice  lui  fut  consacré  dès  après  sa  mort,  et 
que  sa  «  sépulture  chrétienne,  féconde  en  miracles,  » 
attira  constamment  des  plus  lointaines  contrées  do  nom- 
breux fidèles. 

Si  la  date  de  la  naissance  ou  de  la  mort  de  i.c  saint 


G44       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

homme  était  connue,  elle  pourrait  jeter,  sans  aucun  doute, 
une  certaine  lumière  sur  la  question.  «L'auteur  de  la  Vie 
admirable  du  glorieux  saint  Phalier  a  ouï  dire  [Pieuses 
légendes  du  Berry,   p..  198)  que  celui-ci  vivait  comme 
saint  Eusice,  dans  la  première  moitié  du  vi^  siècle.  Il  cite 
une  tradition  d'après  laquelle  ces  deux  solitaires  construi- 
sent en  même   temps    leurs  chapelles,    l'un   à  Selles, 
l'autre  à  Chabris,  se  prêtaient  et  se  lançaient,  malgré  la 
distance,  leurs  outils  qui,  transportés  par  un  souftle  divin, 
arrivaient  à  destination.  Cependant  il  éprouve  quelques 
doutes  en  se  rappelant  que,  suivant  la  légende,  saint 
Phalier  avait  été  reçu  à  Rome  par  le  pape  Etienne.  Or, 
pour  trouver  un  pape  de  ce  nom,  il  faut  se  rapporter  en 
avant  ou  en  arrière,  Etienne  I"  ayant  occupé  le  siège 
pontifical  de  253  à  257,  et  Etienne  II  de  752  à  757.  » 
D'un  autre  côté,  les  hagiographes  le  mettent  en  rapport 
avec  les  pieux  Osius  et  Dionysius,  l'un  évêque  d'Agen  et 
l'autre  de  Clermont,   qui  très-probablement   n'ont   pas 
existé.  Au   milieu   de   renseignements  aussi  vagues,  on 
peut  apprécier  de  quelle  importance  serait  l'interprétation 
exacte  des  curieux  vestiges  que  le  temps  nous  a  conservés. 
Nous  voyons,  dans  sa  vie  écrite  par  le  P.  Labbe,  que 
saint  Phalier,  «  averti  par  une  voix  du  ciel,  se  rendit, 
conduit  par  un  ange,  à  Chabris,  lieu  désert  et  inculte,  sur 
les  confins  du  pays  des  Bituriges,  pour  y  attendre  son  der- 
nier jour  et  y  mourir.  »  Il  ne  faudrait  sans  doute  pas 
prendre  à  la  lettre  cette  expression  :  lieu  désert  et  inculte. 
Sous  les  Romains,  Chabris  devait  contenir  une  population 
assez  forte.  Le  coteau  qui  domine  le  gros  bourg  actuel  est 
couvert  de  substructions,  comme  nous  l'avons  fait  remar- 
quer dans  un  autre  mémoire.  La  voie  romaine  de  Bourges 
à  Tours  le  traverse,  et,  au-dessus  de  la  plate-forme  de  ce 
grand  chemin,  le  sol  est  rempli,  sur  0°'25  à  O^SO  d'épais- 


XL"    SESSION,    A   CIIATEAUROUX.  645 

seur,  de  débris  de  toute  espèce,  se  rapportant  à  cette 
époque  reculée.  La  voie  qui  se  dirige  vers  Poitiers  et  celle 
d'Argenton  s'y  réunissaient  également  avant  d'atteindre 
le  Cher.  Il  ne  nous  parait  pas  inutile  de  faire  remarquer 
que,  près  de  la  première,  à  deux  kilomètres  de  Ghabris, 
dans  les  terres  de  la  Rivière,  plusieurs  tombeaux  gallo- 
romains  ont  été  exhumés  il  y  a  une  dizaine  d'années,  et 
que  la  direction  prolongée  de  ces  trois  artères  passe  près 
de  l'église  actuelle. 

D'autres  preuves  semblent  devoir  ressortir  avec  évi- 
dence ,  pour  l'antiquité  de  Ghabris ,  des  documents 
écrits  indépendamment,  des  traces  matérielles  qui  existent 
encore  dans  le  sol  ;  preuves  qui  se  corroborent  les  unes 
les  autres  (1). 

Après  la  chute  de  l'empire  romain  dans  les  Gaules, 
Ghabris,  traversé  par  d'aussi  grandes  voies  de  communi- 
cation, qui  lui  attirèrent  vraisemblablement  bien  des 
désastres,  conserva  néanmoins  une  certaine  importance. 
Les  habitations  qui  couvraient  le  coteau  existaient-elles 
alors  ou  étaient-elles  détruites?  Gette  question  parait 
devoir  rester  sans  réponse.  Ge  que  nous  pouvons  consta- 
ter, c'est  que  saint  Austr-^gisile  y  possédait,  au  vi'=  siècle, 
une  villa  appelée  Stivalis. 

Saint  Austrégisile  est  né  à  Bourges,  en  551,  de  parents 
pauvres ,  quoique  très-recommandables  ;  il  a  été  élevé 
à  la  cour  du  roi  Gontran,  et,  malgré  les  conseils  qui  lui 
étaient  donnés,  il  embrassa  le  sacerdoce.  Il  était  abbé  du 
monastère  de  Saint-Nizier  quand,  à  la  fin  de  l'année  6H, 
il   fut  appelé   au    siège  archiépiscopal  de  Bourges.  Sa 

(1)  D'après  les  étyraologistes,  Ghabris  ou  Gabris  viendrait, 
par  contraction,  de  Caro-Brix  ou  de  Caro-Brica ,  mots  qui 
signilicnt  Ponts-sur-Cher. 


64.6       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANGE. 

villa  n'avait  pu  être  achetée  ui  construite  par  lui  ;  elle  lui 
venait  de  ses  prédécesseurs,  aux  mêmes  droits  qu'en 
jouirent  ses  successeurs,  comme  apanage  de  l'église.  Il  s'y 
produirait  journellement  d'éclatants  miracles.  Eu  731, 
plus  d'un  siècle  après  sa  mort,  lors  de  la  guerre  de 
Charles  Martel  avec  Eudes  d'Aquitaine,  les  soldats  l'enva- 
hirent, la  pillèrent  et  y  mirent  le  feu,  malgré  les  repré- 
sentations des  habitants.  Ils  en  furent  aussitôt  cruellement 
punis  et  atteints  d'atroces  souffrances.  Dès  que  la  nouvelle 
en  fut  parvenue  au  camp,  Charles  Martel  ordonna  qu'on 
respectât  à  l'avenir  toutes  les  choses  ayant  appartenu  à 
saint  Austrégisile. 

Les  archevêques  de  Bourges,  par  suite  de  l'attribution 
de  ce  domaine,  étaient  seigneurs  en  partie  de  Chabris. 
Les  Rabeau  que  l'on  voit,  dès  l'année  1040,  au  même 
titre,  en  partie  également,  prétendaient  être  en  possession 
de  leur  fief  depuis  le  règne  de  Charlemagne.  Cette  division 
seigneuriale  doit  avoir  subsisté  jusqu'au  xvii''  siècle. 
Au  X*  siècle,  en  990,  Chabris ,  qui  n'avait  pas  cessé 
d'exister,  au  moins  comme  bourg,  sinon  comme  ville, 
était  le  chef-lieu  d'une  vicairie  ou  viguerie,  sous  le  nom 
de  Vicaria  Carbriacensis.  La  population  devait  en  être 
encore  relativement  nombreuse.  Ainsi  ce  lieu,  du  vivant 
de  saint  Phalier,  soit  au  vi''  ou  au  vii'=  siècle,  ne 
pouvait  être  désert  dans  l'acception  que  l'on  donne  à  ce 
mot. 

M.  Ernest  Desjardins  admet  que  Chabris  est  d'origine 
gauloise.  Sur  la  carte  de  Peutinger,  la  voie  figurée  de 
Tassiaca  (Thésée)  à  Avaricum  (Bourges)  forme,  entre  ces 
deux  localités,  six  coudes  à  angles  droits.  Gabris  est 
inscrit  au  milieu,  à  xxiiii  lieues  gauloises  (53  k.  environ) 
de  chacune  de  ces  localités,  au  point  où  se  trouve  actuelle- 
ment  Chabris  et  où   plusieurs   géographes  l'ont  placé. 


XL"   SESSION,    X   OHATEAUROUX.  047 

Malgré  ces  tcmoignagos,  des  archéologues  pensent  que 
cette  antique  cité  était  exclusivement  sur  la  rive  droite  du 
Cher,  à  deux  kilomètres  et  demi  plus  au  nord,  sur 
rem])lacernent  de  Gièvres.  Des  cimetières  gallo-romains 
ont  été,  jusqu'à  ce  jour,  il  est  vrai,  trouvés  à  Gièvres;  le 
dernier  a  été  exploré,  en  1865,  par  M.  le  curé  de  la 
paroisse,  qui  y  a  recueilli  plusieurs  objets  antiques.  Cela 
ne  nous  parait  pas  cependant  une  preuve  irrécusable. 
L'opinion  émise  par  M.  de  la  Saussayc  {Antiquités  de 
In  Sologne  blésoise),  que  Gabris  était  situé,  à  cheval, 
sur  les  deux  rives  du  Cher  ou  aux  deux  extrémités 
d'une  suite  de  ponts,  nous  semble  seule  admissible. 
Sans  sortir  du  Berry,  Vierzon  et  Chàteauneuf,  traversés 
par  le  Cher,  nous  en  offrent  deux  exemples.  Et  si, 
ces  villes  venant  à  être  détruites  de  fond  en  comble,  l'on 
trouvait,  dans  seize  siècles  d'ici,  un  document  incon- 
testé, connne  la  carte  de  Peutinger,  qui  rattachât  leurs 
noms  à  un  lieu  donné,  irait-on  reporter  ces  noms  à 
un  autre  endroit,  à  celui  où  auraient  été  les  sépul- 
tures? De  tout  temps  Chabris  a  été  peuplé.  Au  sur- 
plus ,  il  est  peu  probable  que  le  territoire  où  se 
croisaient  trois  voies  aussi  importantes  que  celles  de 
Poitiers,  de  Limoges  et  de  Bourges,  près  d'une  rivière 
comme  le  Cher,  n'ait  pas  été  à  toutes  les  époques  couvert 
d'habitants. 

L'histoire  de  Chabris  serait  certainement  des  plus  inté- 
ressantes. Mais,  en  raison  des  vicissitudes  que  la  localité 
a  subies  et  des  grandes  circonscriptions  territoriales  dont 
elle  fit  successivement  partie,  elle  exigerait  de  longues  et 
laborieuses  recherches. 

Nous  venons,  à  la  suite  de  plusieurs  individualités 
bien  respectables,  appeler  de  nouveau  l'attention  sur 
cette  petite  ville  et    principalement  sur   son  église.  Si 


648       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

notre  exposé  pouvait  contribuer  à  conserver  et  à  pré- 
server de  restaurations  défectueuses,  ce  qui  y  reste  d'in- 
téressant pour  la  science,  notre  but  serait  complète- 
ment atteint. 

Le  mémoire  de  M.  Guillard  est  accompagné  d'excellents 
dessins  de  M.  Victor  Regnauld,  architecte  à  Paris.  M.  le 
président  charge  M.  Guillard  de  transmettre  ses  remer- 
ciements à  M.  Regnauld  et  de  le  féliciter  en  même  temps 
du  talent  avec  lequel  il  a  su  reproduire  les  bas-reliefs  et 
l'ornementation  si  curieuse  de  l'église  de  Chabris. 

M.  de  Cougny  se  plaît  à  constater  l'intérêt  soutenu  avec 
lequel  l'assemblée  a  écouté  la  lecture  du  mémoire  de 
M.  Guillard.  Il  aime  à  penser  que  les  espérances  de  l'au- 
teur ne  seront  point  déçues,  et  que  l'on  tiendra  à  honneur 
de  conserver  et  de  préserver  de  toute  restauration  malen- 
tendue un  monument  aussi  curieux  et  aussi  intéressant 
à  tous  égards  que  l'église  de  Chabris. 

M.  Martial  Boucheron  donne  lecture  d'une  note  fort 
spirituellement  écrite  au  sujet  de  la  croix  de  Sainte- 
Sévère,  en  faveur  de  laquelle  il  réclame  une  subvention 
de  la  Société  française  d'Archéologie. 


Note  sur  la  croix  de  Sainte- Sévère. 

Messieurs, 

M.  le  marquis  de  Villaines,  maire  de  Sainte-Sévère, 
serait  venu  lui-même  vous  faire  la  communication  qui 
m'amène  devant  vous,  si  une  affaire  imprévue  ne  l'eût 


XL'   SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  649 

appelé  à  Paris.  Il  m'a  donc  pri6  d'ôtrc  son    inlorprèle. 

La  ville  de  Sainte-Sévère  possède  sur  sa  place  du  iMar- 
ché  une  belle  croix  en  pierre,  monument  de  la  Renais- 
sance, d'une  grande  pureté  et  parfaitement  authentique, 
bien  qu'il  ait  eu  le  malheur  de  mettre,  à  ma  connaissance, 
deux  savants  dans  l'embarras  :  M.  de  la  Tremblais,  le 
premier,  qui  l'a  pris  pour  un  monument  du  xiii*  siècle  et 
a  propagé  l'erreur. 

Il  est  évident  qu'il  l'a  écrit  sur  les  on  dit,  et  le  second 
l'a  répété  de  confiance.  Tous  les  deux  ont  cru  sans  avoir 
vu,  selon  la  maxime  de  l'Évangile,  ce  qui  prouve  qu'en 
archéologie,  il  est  bon  aussi  d'être  un  peu  de  l'école  de 
saint  Thomas. 

Fvt  faicte  ceste  croix  en  septembre 
Claude  Pignot  Pierre  Piat.  1543. 

Voilà  le  texte  inscrit  en  style  lapidaire.  On  peut  d'ail- 
leurs le  vérifier  dans  le  volume  illustré  des  Etudes  pitto- 
resques, où  un  dessin  de  cette  croix  est  représenté,  à  con- 
dition de  lui  restituer  le  millésime  de  1543,  au  lieu  de 
celui  de  1243,  qu'a  cru  voir  le  reporter  de  M.  de  la 
Tremblais. 

J'ajoute,  en  passant,  que  Clavde  Pignot,  l'un  des 
fondateurs,  est  un  ancêtre  de  la  famille  Pignot,  dont  un 
membre  est  aujourd'hui  conseiller  général  de  ITndre, 
pour  le  canton  de  Sainte-Sévère. 

Maintenant,  j'arrive  à  l'objet  direct  de  ma  communi- 
cation. 

La  première  ibis.  Messieurs,  que  je  vis  la  croix  de 
Sainte-Sévère,  j'eus  le  cœur  navré.  Le  sommet,  à  demi 
détaché  de  la  base,  penchait  sur  un  des  bras  comme  la 
tète  du  Christ  expirant.  L'autre  bras  brisé  pendait  le  long 


650       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

du  montant,  où  il  ne  semblait  plus  tenir  que  par  habi- 
tude. Le  reste  à  l'avenant. 

C'était  l'abomination  de  la  désolation. 
Aussi,  un  jour  de  foire,  tout  s'en  alla,  heureusement 
sans  faire  de  mal  à  personne  :  c'est  toujours  la  miséri- 
corde de  la  croix. 

M.  le  maire  recueillit  religieusement  les  débris,  et  se 
mit  à  prêcher  la  croisade;  mais  la  foi  n'était  plus  là,  et, 
ennuyé  d'attendre  l'armée  des  croisés,  il  finit  par  où  il 
aurait  pu  commencer. 

L'occasion  d'ailleurs  était  favorable  ;  on  restaurait  dans 
le  pays  la  chapelle  d'un  couvent,  et  l'on  avait  sous  la 
main  des  ouvriers  spéciaux.  M.  de  Villaines  leur  confia 
les  précieux  vestiges,  et  le  monument  fut  rétabli  dans 
toute  son  intégrité. 

La  croix  de  Sainte-Sévère  est  donc  aujourd'hui  à  l'abri 
des  injures  du  temps  et  des  hommes,  au  moins  il  faut 
l'espérer,  mais  pas  de  celles  des  enfants,  ce  qui  etïraie 
presque  autant  son  honorable  restaurateur.  On  sait,  en 
effet,  qu'elle  est  sur  la  place  de  la  ville,  où  rien  ne  la 
protège  contre  les  jeux  plus  ou  moins  innocents  des  éco- 
liers. D'ailleurs,  le  voisinage  d'un  marché  a,  pour  un 
édifice  de  ce  genre,  des  dangers  permanents  que  tout  le 
monde  comprend. 

M.  le  marquis  de  Villaines  vient  donc  demander  au 
Congrès  archéologique  de  France  de  vouloir  bien  s'asso- 
cier à  son  œuvre,  eu  lui  procurant  les  ressources  néces- 
saires pour  la  construction  d'une  grille  qui  en  défendrait 
les  abords,  et,  de  cette  manière,  tout  se  trouverait  sauve- 
gardé. Ce  serait,  il  paraît,  une  dépense  de  deux  ou  trois 
cents  francs. 

Tel  est.  Messieurs,  le  simple  mandat  que  j'avais  à 
remplir  auprès  de  vous. 


XL*    SESSION,    A    CIIATEAUROUX.  651 

La  croix  de  Sainte-Sévère,  dit  M.  le  président,  ne  pou- 
vait avoir  un  meilleur  et  plus  8ympatlii([ue  avocat  que 
celui  qui  vient  de  plaider  sa  cause  devant  le  Congrès. 
Malheureusement,  il  ne  peut  être  fait  droit  à  sa  demande; 
l'œuvre  conservatrice,  en  vue  de  laquelle  l'allocation  est 
réclamée,  ne  rentrant  point  dans  la  catégorie  de  celles 
que  la  Société  est  dans  l'usage  de  subventionner. 

Toutes  les  questions  à  l'ordre  du  jour  étant  épuisées, 
M.  le  secrétaire  donne  lecture  de  la  liste  des  allocations 
votées  par  le  Conseil  administratif  pour  fouilles  archéolo- 
giques ou  pour  la  restauration  et  la  conservation  des 
monuments  historiques  en  France  et  en  Algérie. 


MM. 

Morel,  fouilles  au  camp  d'Attila.     .     .     .  iOO  fr. 

Allègre,  restauration  de  la  crypte  d'Uzès    .  200 
Hucher,  restauration  de  la  crypte  de  Sillé- 

le-Guillaume 100 

Vincent  Durand,  fouilles  à  Feurs.     ...  50 

Vallier,  fouilles  du  tumuhis  de  Paladru     .  60 

L'abbé  Cérès,  fouilles  dans  l'Aveyron     .     .  100 

Boyer,  fouilles  près  d'Hyères 100 

Palustre,  restauration  du  retable  de  Nouâtre.  100 

Calvet,  fouilles  à  la  villa  de  Bapteste.     .     .  300 

Fauconneau-Dufresne,  fouilles  à  Levroux  .  150 

Id.,  restauration  du  fanal  d'Estrées    ...  150 
Battandier,  fouilles  au  tombeau  des  rois  de 

Numidie  (Algérie) lOO 

L'abbé  Delapart,  consolidation  du  temple 

de  Minerve  (Algérie) "100 

L'abbé    Decorde,    restauration    de   l'église 

d'Aliermont 100 


G52       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Bruguier-Rouve,  conservation  de  peintures 

du  XY"  siècle  au  Pont-Saint-Esprit    .     .  50 
Liénard,  fouilles  dans  les  environs  de  Ver- 
dun               150 

L'abbé  Ghagnon,  restauration  du  chevet  de 

l'église  de  Déols 100 

Audiat,  fouilles  à  Saintes 100 

De  Cessac,  fouilles  dans  la  Creuse.     .     .     .  100 

Dauvergne,  restaurations  des  arbres  symbo- 
liques de  l'hôtel-Dieu  d'ïssoudun  .     .     .  100 

Cette  lecture  terminée,  M.  le  président  procède  à  la 
proclamation  des  médailles  décernées  par  la  Société  fran- 
çaise d'Archéologie,  en  signalant  les  titres  de  chacun  des 
lauréats  à  ces  distinctions  honorifiques. 

M.  Buhot  de  Kersers,  une  médaille  d'argent. 

Cette  médaille,  dit  M.  le  directeur,  est  décernée  à  M.  de 
Kersers  pour  le  recueil  épigraphique  des  inscriptions  de 
la  région  archéologique  à  laquelle  appartient  le  départe- 
ment de  l'Indre,  recueil  dont  il  a  été  donné  lecture  dans 
notre  première  séance. 

La  collection  de  l'épigraphie  gallo-romaine  est  un 
monument  que  la  Société  française  d'Archéologie  et  son 
directeur  actuel  ont  entrepris  d'élever  à  la  mémoire  de 
M.  de  Caumont,  à  qui  appartient  le  projet  originel  de 
cette  œuvre  importante.  Je  remercie  M.  de  Kersers,  dit 
M.  de  Couguy,  de  la  manière  habile  et  savante  avec 
laquelle  il  en  a  posé  les  premières  assises;  son  travail 
pourra  servir  de  modèle  et  d'encouragement  à  ceux  qui  le 
continueront  après  lui.! 

iM.  l'abbé  Chagnon ,  curé  de  Déols,  une  médaille 
d'argent. 

En  décernant  cette  médaille  au  vénérable  curé  de  Déols, 


XL''    SESSION,    A    CHATEAUUOUX.  Cri3 

dit  M.  de  Gougny,  nous  n'avons  point  eu  en  vue  les  sacri- 
fices considérables  qu'il  s'est  imposés  pour  la  restauration 
et  l'agrandissement  de  son  église  ;  prétendre  attribuer  un.- 
récompense  humaine  à  de  tels  actes,  ce  serait  les  mécon- 
naître et  les  amoindrir.  Ce  que  nous  avons  voulu  recon- 
naître par  cette  distinction  honorifique,  accordée  à 
M.  l'abbé  Chagnon,  c'est  le  judicieux  et  intelligent  emploi 
des  ressources  de  sa  généreuse  bienfaisance,  en  même 
temps  que  la  découverte  et  l'habile  restitution  du  tombeau 
de  saint  Léocade. 

M.  le  docteur  Elie  de  Beaufort,  une  médaille  d'ar- 
gent. 

Cette  médaille  est  la  faible  récompense  de  trente  années 
de  travaux  et  de  recherches  archéologiques.  Grâce  à  M.  de 
Beaufort,  tous  les  monuments  anciens,  historiques  et  pré- 
historiques du  pays  qu'il  habite  ont  été  explorés  et  décrits 
avec  soin.  La  médaille  que  nous  décernons  à  ce  vétéran 
de  la  science  pourrait  à  bon  droit  porter  cette  inscription  : 
A  M.  de  Beaufort,  l'Archéologie  reconnaissante.  M.  de 
Beaufort  fils  voudra  bien  transmettre  à  son  vénérable 
père  les  félicitations  du  Congrès  et  de  celui  qui  a  l'hon- 
neur de  le  présider. 

M.  Joseph  de  Baye,  une  médaille  de  bronze. 
La  Société  française  d'archéologie,  dit  M.  de  Cougny, 
restreint  d'ordinaire  la  distribution  de  ses  médailles  à  la 
région  dans  laquelle  se  tiennent  ses  Congrès.  Nous  avons 
pensé  devoir,  par  une  flatteuse  exception,  récompenser  et 
encourager  des  travaux  exceptionnels,  on  peut  le  dire,  à 
l'âge  de  notre  jeune  et  intelligent  collègue.  Grâce  à  ses 
recherches,  la  science  préhistorique  s'est  enrichie  de  pré- 
cieuses et  importantes  découvertes  que  nous  serons  heu- 
reux de  constater  de  nos  propres  yeux,  h-rs  du  prochain 
Congrès  de  Chàlons,  en  1875. 


654       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

M.  Verdot,  une  médaille  de  bronze. 

Tous  les  membres  du  Congrès  ont  admiré  les  belles 
photographies  exposées  par  M.  Verdot  dans  la  salle  de 
nos  séances.  Sans  sortir  de  cette  salle,  nous  avons  pu 
passer  en  revue  les  principaux  monuments  du  lias- 
Berry,  reproduits  avec  cette  fidélité  à  laquelle  seule  peut 
atteindre  la  photographie  exécutée  par  une  main  habile. 
C'est  cette  habileté  que  nous  avons  voulu  récompenser 
chez  M.  Verdot,  en  considération  des  services  que  cet 
intelligent  photographe  a  rendus  et  peut  rendre  encore  à 
l'archéologie.  Je  signalerai  tout  particulièrement  la 
reproduction  des  belles  peintures  murales  de  Nohant- 
Vicq,  dont  malheureusement  nous  ne  pourrons  faire 
figurer  une  copie  dans  le  compte  rendu  de  ce  Congrès. 

M.  Lenseigne,  une  médaille  de  bronze. 

M.  Guillard,  une  médaille  de  bronze. 

Les  applaudissements  avec  lesquels  le  Congrès  a 
accueilli  les  si  remarquables  communications  de  ces  deux 
zélés  et  consciencieux  explorateurs  du  Bas-Berry  gallo- 
romain,  nous  les  ont  tout  naturellement  désignés  pour  la 
récompense  que  nous  leur  décernons  aujourd'hui.  Je  ne 
.  saurais  trop  féliciter  MM.  Guillard  et  Lenseigne  de  la 
patiente  persévérance  avec  laquelle  ils  ont  poursuivi  leurs 
explorations  et  de  la  sagacité  avec  laquelle  ils  ont  mis  à 
profit  les  résultats  de  leurs  recherches.  Si  je  ne  craignais 
de  blesser  leur  modestie,  je  les  signalerais  comme  modèles 
à  ceux  qui  veulent  étudier  l'archéologie  d'une  manière 
utile  et  pratique. 

Les  applaudissements  de  l'assemblée  prouvent  que 
M.  le  président  a  été  le  fidèle  interprète  de  ses  sentiments. 

En  terminant,  M.  de  Cougny  remercie  les  membres  du 
Congrès  de  l'assiduité  avec  laquelle  ils  ont  suivi  les 
séances,  et  en  particulier  ceux  d'entre  eux  qui,  en  traitant 


XL'   SESSION,    A    CHATEAUROU.V.  C55 

les  questions  du  programme,  ont  pris  une  part  plus 
active  aux  travaux  de  la  session.  Si,  ajoute-t-il,  le  zèle  et 
le  dévouement  de  nos  deux  dignes  secrétaires  généraux  ; 
si  les  démarches  personnelles  du  directeur  de  la  Société 
.  française  d'Archéologie  n'ont  point  obtenu  tout  le  résultat 
que  l'on  pouvait  espérer  ;  si  nous  n'avons  pas  trouvé  par- 
tout, je  le  dis  à  regret,  la  coopération  sur  laquelle  nous 
eussions  été,  ce  semble,  en  droit  de  compter,  vous  nous 
en  avez,  Mesdames  et  Messieurs,  dédommagé  autant  qu'il 
était  en  votre  pouvoir  par  votre  accueil  sympathique  et  par 
le  concours  soutenu  que  vous  nous  avez  prêté.  Vous  avez 
su  comprendre  l'honneur  que  la  Société  française  d'Archéo- 
logie avait  fait  au  chef-lieu  de  ce  département  en  le  choi- 
sissant pour  siège  de  l'une  de  ses  sessions  annuelles.  Vous 
avez  su  apprécier  les  avantages  qui  pouvaient  résulter 
pour  cette  antique  province  de  l'étude  attentive  de  ses 
monuments  et  de  la  discussion  des  questions  relatives  à 
son  histoire  locale.  Je  vous  en  félicite,  Mesdames  et  Mes- 
sieurs, et  je  vous  en  remercie  au  nom  de  la  Société  que 
j'ai  l'honneur  de  diriger. 

L'an  prochain,  nous  tiendrons  à  Toulouse  notre  xli"^ 
session.  Ceux  d'entre  vous  qui  pourront  y  assister  nous 
trouveront  heureux  de  les  rencontrer  et  de  leur  montrer 
ce  qu'est  d'ordinaire  et  dans  ses  conditions  habituelles  un 
Congrès  archéologique  de  France. 

Nous  aimons  à  penser  que  celui  dont  nous  allons  pro- 
noncer la  clôture  produira  les  résultats  que  nous  sommes 
en  droit  d'en  attendre,  et  qu'une  société  archéologique  ne 
tardera  pas  à  se  fonder  à  Chàteauroux.  Le  département  de 
l'Indre  tiendra  à  honneur  de  n'être  point  le  seul  peut-être 
en  France  où  n'existe  pas  une  société  vouée  à  l'étude  des 
monuments  de  l'antiquité.  Nous  emportons  à  cet  égard 
plus  qu'une  espérance,  vous  nous  avez  donné  votre  pro- 


656       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

messe,   Messieurs,   et  vous    ne  voudrez   pas  la    laisser 
protester. 

M.  le  président  prononce  en  terminant  la  clôture  de  la 
XL*  session  du  Congrès  archéologique  de  France. 

La  séance  est  levée  à  cinq  heures. 


XL^    SESSION,    A    CIIATEAUIIOUX.  657 

Hôtel-Dieu  d'Issoudun, 

PAU   M.    BOUET,    INSPECTEUR   DU    CALVADOS. 

Les  portions  les  plus  anciennes  de  cet  hôpital  sont  les 
deux  portes  bouchées  que  l'on  voit  auprès  du  pont;  elles 
peuvent  remonter  à  l'époque  de  la  première  fondation. 

Vient  ensuite  la  chapelle.  La  date  de  1502,  que  l'on 
trouve  dans  une  pièce  conservée  dans  les  bureaux  de  la 
maison,  s'accorde  assez  bien  avec  son  style,  qui  est  le 
gothique  des  derniers  temps;  la  Renaissance  n'y  parait 
pas  encore. 

Les  autres  bâtiments  m'ont  paru  appartenir  en  grande 
partie  au  xvii'^  siècle.  Une  salle  des  bureaux  est  entière- 
ment tendue  de  tapisseries,  contre  et  à  travers  lesquelles 
on  a  maladroitement  établi  des  étagères  pour  porter  les 
cartons  et  les  registres.  Sur  la  cheminée  sont  deux  tableaux 
à  cadres  plats,  noirs,  ornés  de  rinceaux  dorés,  qui  repré- 
sentent en  pied  et  de  grandeur  naturelle,  deux  pauvres, 
un  vieux  et  un  jeune,  tous  deux  en  guenilles  et  tendant 
la  main.  Ces  tableaux,  qui  n'étaient  pas  sans  mérite,  ont 
été  malheureusement  retouchés  ;  ils  passent  pour  les  por- 
traits des  deux  premiers  pauvres  admis  dans  l'hospice,  ce 
qui  ne  peut  se  rapporter  à  l'époque  de  la  fondation,  mais 
s'accorde  assez  bien  avec  l'époque  de  la  reconstruction 
presque  complète  de  la  maison,  au  xvii^  siècle.  On 
conserve  encore  dans  ces  bureaux  quelques  émaux,  des 
chartes  et  des  bulles. 

Dans  la  pharmacie  tous  les  vases  sont  en  faïence  décorée 
portant  en  latin  le  nom  des  drogues  qu'ils  contiennent  ; 
quelques-uus  sont  armoriés.    Les   fioles   sont  on  verre, 
XL^  SESSION.  42 


6S8       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ornées  de  nébules  (?),  en  verre  blanc  opaque.  Les  boîtes 
sont  décorées  de  peintures  présentant  souvent  quelque 
rapport  avec  leur  contenu  :  fleurs,  animaux,  etc.  ;  ainsi 
des  poissons  d'un  aspect  très-fantastique  sont  peints  sur  la 
boite  qui  doit  contenir  Victyocole  (I). 

La  pharmacie  contient  encore  une  belle  série  de  mor- 
tiers en  bronze  de  diverses  dimensions.  Sur  le  plus  grand 
est  cette  inscription  : 

L'an  :  mil:  IIII  î:  GCCG  :  Ilipx  :  dix  :  sept  :  Pasquier  : 
Thibault  :  [me  :  fit  :  faire  :  pour  ;  le  :  servir  :  a  :  son  : 

AFAIRE  'ï*(2). 

A  l'extrémité  de  la  cour,  du  côté  de  la  ville,  est  une 
construction  qui  m'a  paru  être  une  grange  du  xvii'  siècle, 
et  en  face  de  l'entrée  actuelle  au   milieu  du  bâtiment  de 

(1)  Silènes  estoyent  Jadis  petites  boytes,  telles  que  voyons  de 
présent  es  boutiques  des  apothecaires,  painctes  au-dessus  de 
figures  ioyeuses  et  frluoles,  comme  harpyes,  satyres,  oisons 
bridés,  lièvres  cornus,  canes  bastées,  boucqs  volans,  cerfs  lymo- 
niers  et  autres  belles  painctures  contrefaictes  à  plaisir  pour 
exciter  le  monde  à  rire  ;  quel  feust  Silènes,  maistre  du  bon 
Baccluis;  mais  en  dedans,  Ion  reservoit  fines  drogues,  comme 
baulme,  ambre  gris,  amomon,  musq,  zinette,  pierreries  et 
autres  choses  précieuses.  »  (Rabelais,  la  Vie  de  Gargantua  et 
de  Pantagruel ,  livre  I,  prologue.) 

(2)  Ce  Pasquier  Thibault  ne  ligure  point  dans  ce  qui  nous 
reste  de  paperasses  de  1497,  ce  qui  est  peu  de  chose  il  est  vrai. 
Il  est  bien  probable  que  ce  mortier  aura  été  acheté,  pour  le 
service  de  l'hôtel-Dieu,  à  la  vente  de  quelque  ancien  apothi- 
caire ou  espicier  droguiste.  S'il  avait  été  fondu  pour  la  maison- 
Dieu  elle-même,  il  en  porterait  certainement  les  traces. 

[Note  de  M.  le  docteur  Cachet.) 


XL»   SESSION,    A   CHATEAUHOUX.  659 

l'ouest,  quelques  arches  en  pierre  sont  surmontées  d'une 
galerie  de  bois  ù  baluslres  de  la  même  époque. 

La  chapelle  de  l'hôtel-Dieu,  qui  probablementétaildans 
l'origine  en  même  temps  une  salle  des  malades,  est  la 
partie  la  plus  intéressante.  Elle  est  bâtie,  ainsi  que  la  salle 


des  malades  actuelle,  sur  un  canal  qui  permettait  de  se 
débarrasser  facilement  des  eaux  et  des  imaiondices. 

La  porte  par  laquelle  on  entre  aujourd'hui  dans  la  cha- 
pelle est  moderne.  Cette  chapelle  est  un  peu  plus  large 


660 


CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 


XL"   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  66i 

que  longue  ;  au  fond,  porté  sur  un  petit  massif  triangu- 
laire, est  le  sanctuaire,  formant  un  (iemi-hexagonc,  percé 
(le  trois  fenêtres  très-élancées  à  meneaux  flamboyants.  Ce 
sanctuaire  présente  une  disposition  fort  curieuse.  La 
déviation  du  chevet,  qui  a  déjà  donné  lieu  à  tant  de  dis- 
cussions y  existe,  et  dans  des  conditions  telles  que  les 
personnes  même  les  plus  prévenues  ne  pourront  pas, 
croyons-nous,  y  voir  une  maladresse;  cela  est  fait  évidem- 
ment avec  intention,  puisqu'en  élevant  ce  petit  édifice  sur 
un  plan  si  irrégulier  le  constructeur  se  créait  de  grandes 
difficultés  de  coupes  de  pierre.  Si  encore  la  déviation  était 
en  sens  contraire,  on  eût  dit  sans  doute  que  l'on  avait 
voulu  éviter  la  rivière  ;  mais  ici  on  se  jette  avec  plaisir  de 
son  côté. 

Du  côté  de  l'épître,  au-dessus  d'une  petite  crédence  sans 
cuvette,  richement  sculptée,  est  une  statue  de  saint  Roch  ; 
il  est  représenté  le  bourdon  à  la  main,  ayant  une  panne- 
lière  en  bandoulière  à  droite,  à  gauche  un  couteau  à  la 
ceinture  ;  la  bordure  de  son  manteau  est  ornée  de  lettres, 
et  à  son  chapeau  est  une  enseigne  de  la  sainte  Face.  Il 
montre  la  pustule  de  sa  cuisse.  Un  petit  ange  sort  de  la 
muraille  auprès  de  sa  tête.  Le  saint  a  pour  support  un 
monstre,  dont  un  oiseau  becqueté  l'oreille.  De  l'autre  côté 
de  l'autel,  et  faisant  face  à  saint  Roch,  est  saint  Sébastien, 
qui  est  invoqué  lui  aussi  contre  la  peste.  Il  est  attaché  à 
une  colonne  et  percé  de  flèches. 

Les  consoles  qui  reçoivent  les  nervures  de  la  voûte  sont 
ornées  d'animaux,  excepté  celle  d'auprès  de  saint  Sébas- 
tien qui  n'est  pas  sculptée,  et  les  deux  du  côté  de  saint 
Roch,  dont  une  est  un  personnage  accroupi  s'ouvrant  la 
bouche  avec  ses  doigts;  l'autre  représente  un  fou. 

Le  montant  de  fenêtre  voisin  de  la  statue  de  saint 
Roch  est  construit  en  pierres  numérotées.  Le  n"  6  ayant 


662       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

été  oublié,  on  a  réparé  l'erreur  en  employant  un  autre 
système  de  chiiïres.  Celle  série  de  chiffres  indique  évi- 
demment le  rang  que  doit   occuper  chaque   assise  (1). 


\\\< 

\\< 

ll< 

^ 

XI 

III 

(1 

1 

<- 

mil 

llll 

(I)  Nous  pensons  qu'il  ne  faut  pas  confondre  ces  chiffres  avec 
les  lettres  ou  signes  que  portent  dans  quelques  contrées  les 
pierres  formant  le  parement  des  édifices.  Ces  signes  placés  ordi- 
nairement sans  ordre  ne  peuvent,  comme  on  l'a  dit  quelquefois, 
indiquer  leur  place  ;  ils  nous  semblent  être  la  marque  du  tâche- 
ron qui  a  taillé  chaque  pierre. 

Les  chiffres  que  nous  donnons  ici  ressemblent  à  ceux  que  les 
charpentiers  employent  encore  aujourd  hui  pour  indiquer  le 
rang  que  doit  occuper  chaque  pièce  de  bois,  et  que  nous  avons 
rencontrés  quelquefois  entaillés  dans  les  pièces  de  bois  de  cer- 
taines maisons  du  moyen  âge,  entre  autres  à  Falaise,  sur  une 
maison  voisine  de  la  porte  Ogive. 

Outre  la  pierre  et  le  bois,  le  verre  a  reçu  quelquefois  des 
marques  analogues.  Nous  donnons  ici,  de  grandeur  naturelle, 


A  AAA 


celles  qui  occupent  l'angle  inférieur  des  losanges  de  verre  de 
l'église  du  Mesnil-Mauger  (diocèse  de  Lisieux). 


XL"   SESSION,    A    CHATKAUROUX. 


663 


664        CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Sur  l'écusson  de  laprincipaleclef  de  voûte  sont  sculptés 
les  instruments  de  la  Passion.  Les  six  autres  écussons 
sont  aux  armes  du  fondateur  :  d'azur  à  la  rose  d'or,  au 
chef  cousu  de  gueules  chargé  d'un  lion  passant  d'or. 

De  chaque  côté  de  l'entrée  du  sanctuaire  sont  placées  : 
du  côté  de  l'épître,  une  statue  de  la  sainte  Vierge,  un 
sceptre  brisé  à  la  main.  Jésus  enfant  est  sur  son  bras, 
il  tient  une  colombe  d'une  façon  assez  brutale.  J'ai  déjà 
rencontré  plusieurs  fois  ce  fait,  que  je  ne  sais  comment 
expliquer  ;  quelquefois  il  semble  vouloir  la  déchirer. 

Du  côté  de  l'évangile,  la  statue  de  sainte  Catherine 
d'Alexandrie,  une  palme  à  la  main,  foulant  aux  pieds 
Porphyre  ou  Maximin.  Sa  couronne  est  formée  de  roues, 
instrument  de  son  martyre.  Sur  la  banderole  qu'elle 
tient  à  la  main  est  écrit  :  sancta  catharina,   ora   pro 

NOBIS. 

A  côté  de  cette  statue  ouvre  une  fenêtre  à  double  croi- 
sillon de  pierre,  ayant  de  chaque  côté  un  siège  d'où  les 
malades  avaient  vue  sur  la  campagne,  la  rivière  et  le  pont 
qui  donnait  entrée  à  la  ville  de  ce  côté.  Entre  cette  fenêtre 
et  une  semblable  aujourd'hui  bouchée  est  une  autre  statue 
représentant  un  saint  de  l'ordre  de  saint  Dominique, 
tenant  de  la  main  droite  une  palme,  de  la  main  gauche 
un  livre  ouvert;  sur  sa  tète  est  un  instrument  de  mort, 
un  couperet,  je  crois,  resté  dans  la  fracture  de  son  crâne  : 
c'est  probablement  saint  Pierre  de  Vérone. 

Au-dessous  de  cette  statue  est  une  jolie  niche  gothique  ; 
la  statue  n'existe  pas,  mais  à  sa  place  est  cette  inscrip- 
tion : 

A  La  Gloire  de  Dieu. 
Jacques  Bernard  sieur  de  saint 


XL°   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  66.S 

IgNY  a   KONDK    en   CliT    HOTEI-IHEU 
•    VNE  MESSE  RASSË.  (JUI  SK  DIRA  TOUS 
LES  JOURS  A  PERPETUITE  ENTRE  VIII 
ET  IX  HEURES  AU  GRAND  AUTEL  UN  DE 
PnoFUNDis  A  LA  FIN.  POUR  QUOY   IL  A  DON 
NÉ  SA  TERRE  DE  S».  IgNY  ET  SES  DEPEN 
DANCES,  SUIVANT  DONATION  PASSÉE 
PAR  LOUIS  GOUTIN  NOTAIRE  ROYAL 
A  BOURGES  LE  vin  janvier  m   uccx. 

Cette  inscription  a  este  posée  par  les 
soins  de  m.  jean  bapt.  renavldom  con^" 

DU  ROY  CÔTROLLEUR  AV  GRENIER  A  SEL  DE 
CETTE  VILLE  EXECUTEUR  TESTAMEN 
TAIRE. 
REQUIESCAT  IN  PAGE 

17  rs 

La  seconde  est  placée  contre  la  muraille  du  nord. 

A  LA 

GLOIRE  DE  DIEV 

Dame,  ANNE,  Thierry 
Uevve,  de  noble,  pierre,  hurtavlm, 

S',  DE,  LVD,  A,  FONDE,  EN,  CETTE,  HOTEL, 
DIEV,  UNE,  MESSE,  DE,  REQUIEM,  TOUS 


666  CONGRÈS   ARCHÉOLOGIQUE   DE   FRANCE. 

LES,  LVNDIS,  A,  PERPETVEL,  ET  UN  libéra 

A,  LA,  FIN,  DE,  LA,  MESSE,  POUR  QUOY, 

ELLE,  A,  DONNÉE,  AVDIT,  HOTEL-DIEV 

LA,  SOMME,  DE,  TROIS,  MIL,  LIVRES, 

POVR,  LE,  SALUT,  DE,  SON,  AME,  ET, 

POVR,  FAIRE,  SUBSISTER,  LES,  PAV- 

URES,  COMME,  IL,  EST,  PORTÉ,  PAR, 

LE,  CONTRAT,  PASSÉ,  PAR,  GERVAISE, 

NOTAIRE,  ROYAL,  LE,  QUATORZE, 

MAY.  M.  D.  C.  LXXVI  REQVIESCAT 

IN  PACE. 

cette,  inscription,  a,  ete  posée, 

par,  lel,  soins,  de,  noble,  philippe, 

clavde,  baraton,  s^»"",  de,  lvc, 

son,  petit  fils,  admlnistratevr, 

dvdit,  hotel-dieu,  lan,  1746. 

Pierre,  MAYET,  fecit. 

Au  milieu  de  cette  muraille  du  nord  est  une  fenêtre 
flamboyante  à  trois  meneaux,  et  à  chaque  extrémité,  dans 
les  angles  qui  réunissent  cette  muraille  à  celle  de  l'est  et 
à  celle  de  l'ouest,  sont  sculptés,  s'étendant  dans  toute  la 
hauteur  de  la  chapelle,  les  arbres,  que  comme  plusieurs 
autres  parties  de  la  chapelle  je  regrette  de  n'avoir  pas  eu 
le  temps  d'étudier  plus  à  loisir.  Celui  du  nord-est  est  bien 
évidemment  l'arbre  de  Jessé.  Ce  nom  est  d'ailleurs  écrit 
sur  la  banderole  que  tient  le  patriarche  endormi.  Quant 
à  l'autre,  ce  n'est  pas  la  première  fois  que  je  rencontre  des 


XL"    SESSION,    A    CHATEADROUX.  667 

arbres  avec  les  prophètes,  (|UL'lquefois  aussi,  je  crois,  avec  les 
apôtres.  Tandis  que  dans  l'arbro  de  Jessé  chaque  ancêtre 
de  Notre-Seigneur  sort  d'une  des  Heurs,  dans  celui-ci  les 
personnages  sont  assis  sur  les  brandies  d'un  chêne,  bien 
reconnaissable  à  son  feuillage  et  surtout  à  des  glands 
gigantesques.  Moïse  tenant  les  tables  de  la  loi  est  facile  à 
reconnaître,  et  son  nom  assez  facile  à  lire  sur  le  galon  de 
son  vêtement.  Cela  n'a  pas  empêché  quelques  personnes 
d'y  voir  la  généalogie  du  fondateur,  le  chevalier  Le  Lion 
la  Rose,  comme  on  l'appelle,  qui  aurait,  dit-on,  fait  bâtir 
cet  hospice  en  expiation  du  meurtre  de  sa  femme  et  de 
grands  ravages  et  brûlements,  qu'il  aurait  faits  sur  un 
faux  rapport;  on  rattache  à  cela,  je  ne  sais  trop  comment, 
le  curieux  petit  paysage  qui  anime  le  rocher  sur  lequel  le 
personnage  principal  est  étendu. 

Sous  une  projection  de  ce  rocher  est  sculpté  avec  soin 
un  moulin  à  eau,  construit  en  bois  et  couvert  de  grandes 


tuiles;  deux  pièces  de  bois  servent  de  pont  pour  passer  de 
l'autre  côté  de  l'eau.  A  quelque  distance,  ini  toit  à  porcs, 
couvert  en  chaume,  s'appuie  contre  le  loclier  ;  des  ouver- 


668 


CONGRES  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 


lures  permettent  à  ces  animaux  de  manger  dans  les  auges 
placées  à  l'extérieur.  A  quelque  distance,  une  grosse  truie, 
d'une  taille  hors  de  proportion  avec  le  reste,  est  étendue  à 
terre  les  mamelles  gonflées.  De  l'autre  côté  du  moulin,  et 
un  peu  plus  haut  que  lui,  est  un  colombier  circulaire, 
auprès  duquel  on  voit  le  meunier  sur  son  mulet  chargé 
de  sacs.  Le  sommet  du  rocher  est  couronné  par  un  châ- 
teau-fort, donjon  carré  à  quatre  tours  cylindriques,  recou- 


vert d'une  toiture  pyramidale  et  entouré  d'une  muraille 
circulaire  crénelée.  On  arrive  à  la  porte  par  un  escalier 
taillé  dans  le  roc,  et  on  y  entre  par  un  pont  de  bois  cou- 
vert, jeté  sur  les  fossés  pleins  d'eau.  De  l'autre  côté  du 
personnage  couché,  un  berger  joue  de  la  lourreen  gardant 
ses  moutons;  il  est  assis  à  l'ombre  d'un  arbre  planté 
sur  un  terrain  entouré  de  palis. 

Au-dessous  des  terrasses  qui  portent  les  patriarches, 
sont  représentés,  comme  aplatis  sous  leur  poids,  de  grands 
animaux,  espèces  de  sauriens  fantastiques. 

Sous  l'arbre  de  Jessé,  les  animaux  ne  sont  que  deux  ; 


XL"   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  069 

le  paysage  est  moins  intéressant;  on  n'y  voit  qu'une 
petite  maison,  sorte  de  chapelle  avec  abside,  mais  sans 
clocher.  Dans  ces  bâtiments,  les  portes  et  les  fenêtres  sont 
toutes  carrées. 

Le  mur  qui  lait  lace  au  sanctuaire  est  percé  d'une 
porte  moderne  qui  donne  accès  du  dehors,  d*un(!  autre 
porte  plus  petite  de  l'autre  côté  et  d'une  grande  fenêtre  à 
volets  placéeen  face  del'autel.  Cesdeux  dernières  ouvertures 
font  communiquer  la  chapelle  avec  la  salle  des  malades, 
et  pourraient  bien  ne  pas  dater  de  la  construction  primi- 
tive. Toute  cette  muraille,  sauf  le  bas  qui  était  probable- 
ment revêtu    d'un   lambris,   était    autrefois   richement 


/"■^'A 


décoré  d'un  semé  de  France,  les  fleurs  de  lis,  d'un  pied 


670       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

(le  haut,  étaient  sculptées  chacune  dans  un  losange  de 
pierre,  accompagné  d'autres  pierres  formant  réseau. 

Cette  riche  décoration,  où  i)rilliut  sans  doute  l'or  et 
l'azur,  a  été  martelée  sans  pitié. 

Le  côté  du  midi  semble  avoir  été  reconstruit  au  moins 
en  grande  partie  ;  il  est  percé  d'une  fenêtre  de  forme 
ogivale,  mais  ne  répondant  au  reste  de  l'édifice  ni  par  sa 
grandeur  ni  par  sa  richesse.  Une  magnifique  corniche, 
composée  de  deux  étages  de  feuillages  largement  sculptés, 
qui  règne  autour  du  reste  de  la  salle,  manque  en  grande 
partie  de  ce  côté.  Deux  belles  consoles  de  cha([ue  côté  de 
la  chapelle  portent  les  grandes  poutres  de  la  charpente  ; 
deux  autres  sont  placées  auprès  du  mur  méridional  ;  sur 
chacune  de  ces  six  consoles  sont  sculptés  deux  apôtres 
portant  leurs  attributs  et  tenant  à  la  main  deux  bande- 
roles sur  lesquelles  sont  écrits  leurs  noms.  La  charpente 
que  portent  ces  consoles  est  moderne.  Sur  une  des  grandes 
poutres  on  lit  : 

M.    DUBOIS 
F.  BISSEREAV.  F.  ARNAVLT.   1708.  G.  GODEFROY. 

Au-dessus  du  plafond,  la  charpente  forme  une  assez 
belle  salle. 

Le  petit  clocher  placé  sur  le  gable  du  midi,  et  qui 
comme  lui  est  probablement  plus  moderne  que  la  chapelle, 
contient  deux  cloches  neuves  et  un  timbre  sans  inscrip- 
tion. 

Deux  statues  peintes,  représentant  saint  Gosme  et  saint 
Damien,  sont  conservées  dans  la  chapelle;  elles  sont  du 
même  faire  que  les  arbres  dont  nous  avons  parlé.  Comme 
sur  les  statues   de  ces  arbres  et  sur  le  saint  Roch,  les 


XL'   SESSION,    A    ClIATEAUROUX.  671 

galons  des  vêtements  portent  des  inscriptions  ou  des 
imitations  d'inscriptions.  Un  des  saints,  en  costume  de 
docteur,  tient  à  la  main  un  objet  brisé,  dans  lequel  on  a 
cru  reconnaître,  mais  peut-être  à  tort,  la  fiole  aux  urines 
que  l'on  voit  ordinairement  dans  leur  main  ;  l'autre  lait 
une  opération  à  la  joue  d'un  patient;  il  tient  de  la  iiiaiii 
gauche  une  petite  boite  ronde,  dont  le  dessus  semble 
fermé  par  un  grillage. 

Il  est  à  regretter  que  ces  statues  reposent  à  terre  et 
soient  ainsi  exposées  aux  dégradations.  Elles  pourraient 
bien  avoir  occupé  les  angles  maintenant  vides  de  la 
chapelle.  La  richesse  des  deux  autres  angles  ferait  croire, 
en  effet,  que  ceux-ci  devaient  autrefois  être  décorés 
de  quelques  sculptures.  On  voit  encore,  au  haut  de  celui 
qui  est  le  plus  voisin  du  sanctuaire,  une  petite  sculpture 
dans  laquelle  quelques-uns  de  nos  confrères  ont  cru 
reconnaître  un  pressoir. 


Vitraux. 

La  fenêtre  du  côté  méridional,  que  nous  ne  croyons 
pas  appartenir  à.  la  construction  primitive,  est  vitrée  en 
verres  blancs. 

Il  en  est  de  même  de  la  grande  fenêtre  à  croisillons. 

Les  vitres  de  la  fenêtre  du  nord  existent  encore,  mais 
en  grande  partie  cachées  derrière  le  retable  d'un  autel  ; 
aussi  je  n'ai  pu  les  étudier  comme  je  l'aurais  désiré.  Elles 
représentent  Jésus-Christ  en  croix,  entre  la  sainte  Vierge 
et  saint  Jean  et  un  troisième  personnage  ;  au  haut  sont 
les  instruments  de  la  Passion,  au  bas  quatre  écussons 
armoriés. 

Le  sanctuaire  a  perdu  les  vitres  de  ses  fenêtres  latérales. 


672       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

La  fenêtre  du  milieu,  à  deux  baies,  est  décorée  de  vitres 
représentant  :  d'un  côté  Charlemagne  couvert  de  son 
armure,  sur  laquelle  il  porte  un  vêtement  mi-parti 
d'empire  et  de  France;  il  lieut  le  globe  d'une  main,  l'épée 
de  l'autre;  sa  couronne  paraît  doublée  de  fourrures,  selon 
l'usage  allemand  ;  de  l'autre  côté,  saint  Louis  en  armure 
et  manteau  fleurdelisé.  Sur  le  fourreau  de  son  épée  on 
lit  :  JESUS  maria;  de  la  maiu  gauche  il  tient  le  sceptre,  de 
la  droite  un  bâton,  dont  le  haut  manque  et  dont  le  bas  se 
termine  en  pointe. 

Les  armoiries  qui  existent  encore  au  bas  de  la  vitre 


XI.''    Sr..«S10i\,    A    CIIATKAIIIIOUX.  ()7.'{ 

coiitralo  ont  (le  très-curieux  supports.  Deux  personiiaf;os 
nus,  (\\i\  ont  un  peu  l'air  de  gambader,  tiennent  c.li.-ieun, 
an  nioven  de  leur  baudrier,  un  t'-cusson  de  ^ue-ules  à  Intis 


pelotons  (?)  d'or.  Une  croix  en  pal  est  placée  derrière  l'écu. 
Les  personnages  servant  de  supports  sont  coiffés,  l'un 
d'un  paon,  dont  la  queue  et  les  ailes  lui  forment  une  sorte 
de  manteau;  l'autre  a  aussi  la  tète  recouverte  d'un  oiseau, 
mais  disposé  d'une  manière  différente,  et  dont  le  dessin 
peut  seul  donner  une  idée.  Il  y  a  probabl(>ment  là  une 
porte  de  rébus,  que  l'on  décliiOrerait  facilement  si  on 
connaissait  le  nom  du  dignitaire  ecclésiastiiiue  au(|iiel  on 
doit  ces  riches  verrières. 

XL''  SESSION.  4.3 


674       CONGRÈS  AUCHÉOLOGIQUK  DE  FRANCE. 

Dans  les  traceries  qui  décorent  le  sommet  des  trois 
fenêtres  de  ce  sanctuaire  ast  représentée  l'Annonciation. 
L'auge  d'un  côté,  la  sainte  Vierge  de  l'autre,  au  centre  le 
Père,  couronne  fermée  en  tête,  sceptre  à  la  main,  un 
rayon  sort  de  sa  bouche  vers  le  Saint-Esprit,  qui  est 
entouré  d'une  brillante  auréole. 


Peintures. 

Cette  salle  semble  avoir  autrefois  été  entièrement  peinte 
et  dorée,  les  peintures  de  la  corniche  appartiennent  à  cette 
décoration  primitive,  les  doubles  feuilles,  entablées  de 
grande  dimension,  sont  alternativement  peintes  en  vert  et 
dorées,  sur  un  fond  de  vermillon  ;  au-dessous  court  un 
rinceau  peint  en  vert.  La  statuaire  est  encore  entièrement 
peinte,  sauf  les  arbres  symboliques  qui  ne  conservent 
aucune  trace  de  couleur  sous  le  badigeon,  et  qui  semblent 
avoir  été  lavés  anciennement.  Quant  au  semé  de  fleurs  de 
lis,  il  est  tellement  martelé,  plâtré  et  badigeonné,  qu'il  est 
à  peine  visible  maintenant.  Le  sanctuaire  et  les  portions  de 
la  salle  qui  l'avoisinent  ont  été  repeints  plus  tard  vers  la 
lin  du  xvii'=  siècle,  à  en  juger  par  le  style  des  doubles 
chiffres  que  l'on  y  rencontre.  Un  écusson,  qui  existe  dans  le 
sanctuaire,  au-dessus  de  saint  Roch,  et  qui  est  probable- 
ment celui  du  bienfaiteur  qui  a  fait  faire  ces  peintures, 
en  donnerait  la  date  d'une  façon  plus  certaine.  C'est, 
autant  que  l'on  peut  en  juger  maintenant,  un  écusson 
d'azur  au  chevron  d'or,  accompagné  de  trois  étoiles 
d'argent.  Une  crosse  est  placée  en  pal  derrière  l'écu  (I), 

(1)  La  famille  Tuilier,  de  Bourges,  à  latjiielle  apparlieiment 
ces  armes,  a  fourni  de  nombreux  dignitaires  à  l'Eglise. 


XI/    SESSION,    A    r.HATKAUROUX.  67o 

Un  autre  écusson,  aussi  avec  crosse,  est  placé  en  face  au- 
dessus  du  saint  Sébastien  ;  il  contient  un  chitlre.  Les 
voûtes  du  sanctuaire  sont  peintes  d'azur  semé  d'étoiles 
d'or. 

Nous  nous  sonmics  étendus  longuement  sur  la  descrip- 
tion de  ce  petit  édifice  ;  mais  son  existence  est  sérieusement 
menacée,  ses  biens  étant  maintenant  absorbés  par  l'érec- 
tion d'un  hôpital  administratif,  s'élevant  à  grand  frais 
dans  cette  ville.  Espérons  que  l'on  trouvera  au  moins 
moyen  d'utiliser  l'ancien  hôtel-Dieu  pour  quelque  œuvre 
charitable  ;  mais  si  nous  ne  pouvons  empêcher  la  destruc- 
lion  d'un  (les  rares  hôtels-Dieu  qui  existent  encore,  nous 
aurons  au  moins  essayé  de  conserver  le  souvenir  de  ces 
œuvres  de  la  foi  et  de  la  charité  de  nos  pères. 


Notes  et  croquis. 

PAR   M.    BOUET,    INSPECTEUR   DU   CALVADOS. 

M.  Bouet  qui,  à  la  suite  du  Congrès  de  Châteauroux, 
s'était  rendu  à  Issoudun  avec  les  membres  du  Conseil 
administratif  de  la  Société  française  d'Archéologie, 
demeura  quelques  jours  dans  cette  ville  et  y  recueillit  des 
notes  et  des  croquis  pleins  d'intérêt,  comme  tout  ce  que 
produit  la  plume  ou  le  crayon  de  cet  habile  et  judicieux 
observateur. 

La  remarquable  étude  sur  l'hôtel-Dieu  d'Issoudun  peut 
donner  une  idée  de  ce  qu'eût  été  le  travail  de  M.  Bouet  si 
le  temps  ne  lui  eût  manqué  pour  rédiger   un   rapport 


07G       CONGRÈS  ARCnÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

complet  sur  les  monuments  d'Issoudun,  Les  notes  et  cro- 
quis, dans  leur  cadre  plus  restreint,  suppléeront  à  ce 
travail,  en  ce  qui  concerne  les  monuments  anciens,  autres 
que  l'hôtel-Dieu. 

Eglise  de  Saint-Cyr. 
La  partie  centrale  du  transept  de  cette  église  appartient 


Détails  près  la  porte  du  clocher. 


XL*   SESSION,    A    GIIATKAUROUX. 


G77 


078       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

au  xir  siècle;  les  deux  portes  occidentales  sont  un  peu 
moins  anciennes.  Quant  au  chœur,  il  est  tout  entier  du 
XV*  siècle. 

La  chapelle  du  Rosaire  contient  un  assez  beau  retable 
en  pierre,  à  colonnes  de  marbre  du  xvii°  siècle.  La  statue 
de  la  sainte  Vierge,  assise,  tenant  l'enfant  Jésus  sur  ses 
genoux,  quoique  un  peu  mondaine,  est  une  œuvre  fort 
remarquable.  Au  bas  se  trouve  cette  inscription,  en  partie 
effiicée  :  ^g.  catesnavlt  fecit.  160.  cat.  Sur  la  base,  à 
droite  de  la  statue,  on  lit  ces  mots  :  lan  1691,  pierre 

BRVNET.    ECRIVAIN.  A.  DONNÉ.   CETTE    IMAGE  ;  a  gauchc    CSt 

est  un  écussou  effacé  accompagné  de  palmes. 

J'ai  cherché  le  nom  de  Catesnault  sur  la  liste  des  sciilp- 
t' urs  du  xvir  siècle  et  je  ne  l'y  ai  point  rencontré. 

La  chaire  est  remarquable  ;  je  regrette  de  n'avoir  pas 
en  le  temps  d'en  prendre  les  détails.  La  date  de  1618  est 
au-dessous  de  la  tête  du  personnage  qui  la  supporte.  On 
r<!trouve  rette  date  à  l'intérieur^  ainsi  que  le  nom  du 
sculpteur. 

FAY.  PAR.  lEAN  DE  LA  FOND  1618. 

Cette  chaire  est  en  buis. 

Sur  le  dossier  d'un  grand  banc  placé  dans  le  bas-côté 
de  la  nef  est  gravée  cette  inscription  : 

BANC-APERTENANT-A-LA-COMMUNEAUTÉ-DES-MAISTRES- 
ROULANGEHS.   1738. 

Le  buffet  d'orgue  est  moderne;  mais  lu  tribune  dans 
laquelle  il  est  placé  doit  être  à  peu  près  du  mèms  temps 
({ue  la  chaire. 


XL"    SliSSION',    A    GllATlCAUUOUX.  07î> 


Tableaux  anciens. 

Dans  la  nef,  Notre-Seigneiir  lavant  les  pif^ds  de.  saint 
Pierre  ;  tableau  manquant  de  style,  mais  paraissant  un 
original. 

Copie  de  la  Vierge  au  llaisin,  de  iMignard. 

Copie  de  la  Flagellation,  du  Titien. 

Dansle  bas-<;{)té  de  la  net,  luipie  agrandie  df,  la  Femme 
Adultère,  du  Foussin. 

Au-dessus  de  l'autel  de  la  paroisse,  dont  le  retable  est 
en  partie  du  xvi"  siècle,  copie  de  la  Mise  au  Tombeau,  du 
Titien  ;  et,  à  droite  et  à  gauche  de  l'autel,  saint  Cyr  et 
sainte  Julitte,  d'un  côté  et  de  l'autre  un  évè<|ue. 

A  propos  de  saint  Cyr,  M.  Dard  eau,  greffier  du  tribu- 
nal d'Issoudun,  m'a  montré  un  sceau  et  un  jeton  oi^i  saint 
Cyr  est  représenté  tenant  un  porc  par  les  oreilles.  J'ai 
retrouvé  ce  dernier  gravé  dans  le  P.  Cahier;  mais  je  ne 
vois  pas  comment  concilier  cet  attribut  avec  le  martyre  de 
saint  Cyr  et  de  sainte  Julitte.  A  moins  qu'il  n'y  ait  deux 
saints  du  même  nom,  patrons  tims  les  deux  de  l'au- 
cienne  collégiale  d'Issoudun. 

Consulté  sur  le  plan  de  restauration  de  l'église  de  Saiiit- 
Cyr  par  M.  le  directeur  de  Société  française  d'Archéo- 
logie, M.  Bouet  émet  l'avis  suivant  ; 

La  portion  centrale  de  l'église  de  Saint-Cyr  et  la  cha- 
l>elle  du  Rosaire  sont  les  parties  les  plus  intéressantes  et 
qu'il  faudrait  lâcher  de  conserver,  ainsi  que  1(,'S  deux 
portes  de  façade  ;  mais  je  crois  que  si  l'on  a  des  funds,  il 
sera  bien  difficile  de  résister  à  la  perspective  de  deux 
flèches  de  façade,  imitées  de  celles  de  Saintc-Ch, tilde. 
Laissant  de  côté  l'idée  de  ct)nservation,  et  ne  jugeant  le 


680       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIOUL;  de  FRANCE. 

projet  que  comme  œuvre  d'art,  ce  projet  m'a  paru  assez 
médiocre. 


Tour  Blanche. 

Les  inscriptions  hébraïques  reproduites  par  M.  Pérémé, 
dans  son  histoire  d'Issoudun,  sauf,  je  crois,  une  seule  qui 
se  trouve  dans  la  salle  haute,  sont  dans  la  principale  salle 
de  la  tour,  salle  qui  évidenimeul  n'était  pas  destinée  à 
servir  de  prison  ;  mais  qui  a  pu  être  atfectée  accidentelle- 
ment à  cet  usage;  ce  que  semble  indiquer  le  mot  sorti, 
inscrit  à  la  suite  d'un  nom.  Cette  inscription,  comme  la 
plupart  des  autres,  est  en  caractères  assez  modernes. 
M.  Jules  Dardeau,  les  a  copiées  pour  la  plupart  ainsi 
qu'un  grand  nombre  de  figures.  Sur  l'une  il  a  reconnu 
la  colombe  buvant  dans  un  calice. 

La  voûte  de  la  grande  salle  est  portée  sur  des  colon- 
nettes  dont  les  chapiteaux  n'ont  jamais  été  sculptés.  Ceux 
qui,  à  gauche  et  à  droite,  accompagnent  la  cheminée 
offrent  des  crossettes,  dont  l'extrémité  est  déjà  indiquée. 
Les  chapiteaux  supérieurs  sont  circulaires  comme  dans 
les  constructions  anglaises.  Le  manteau  de  la  cheminée 
est  supporté  par  une  charpente  en  bois. 

11  résulte  des  comptes  du  domaine  royal  que  la  char- 
pente (le  la  Tour  blanche  ne  fut  terminée  qu'en  1202. 
Elle  était  recouverte  d'une  toiture  en  plomb. 

Parmi  les  objets  conservés  dans  la  tour,  j'ai  remarqué 
et  dessiné  une  tablette  de  pierre,  olfrant  des  entrelacs 
analogues  à  ceux  qui  sont  figurés  à  la  page  25  de  Y  Abé- 
cédaire de  M.  de  Caumont. 

Cette  pierre  a  été  trouvée  dans  un  des  petits  réduits  de 
l'oratoire,  dont  on  voit  les  restes  près  de  la  Tour  Blanche, 


XL"    SESSION,    A   CIIATEAUROUX. 


(IHl 


OU 


clic  avait  été  employée  comme  table  d'autel.  On  l'avait, 


à  cet  effet,  retournée  sens  dessus  dessous,  et  sur  la  surface 
plane  on  avait  creusé  un  encastrement  destiné  à  recevoir 
Id  pierre  sacrée. 


Abbaye  Notre-Dame. 
La  plupart  des  débris  antiques  conservés  dans  la  tour 


68-2 


CONGRÈS    ARCHÉOLOGIOUE   DE    KRAN'CR. 


XL''    SESSION,    A    (.HATKAIMUtnX. 


683 


()84  CO-NGIVÈS    ARCIIÉOLOGKJUE   DE   FRANCE. 

proviennent  de  l'abbaye  de  Notre-Dame,  à  laquelle 
M.  Eugène  Royet,  médecin  à  Saint-Benoît-du-Sault,  a 
consacré  une  petite  notice,  publiée  dans  les  travaux  de  la 
Société  du  Berry.  La  pierre  tombale  de  l'abbé,  dont  je 
donne  ci-dessus  le  dessin,  s'appliquait  sur  le  cercueil 
d'une  façon  assez  curieuse.  Je  reproduis,  comme  point  de 
comparaison,  un  sarcophage  provenant  de  la  même 
abbaye  et  conservé  dans  le  jardin  du  palais  de  justice, 
qui  présente  également  une  disposition  particulière  pour 
la  i'uçon  dont  le  couvercle  s'adaptait  sur  l'auge  sépul- 
crale. 


Comme  on  le  voit  par  le  dessin,  l'abbé  est  couché 
dans  son  cercueil  les  yeux  fermés.  Ses  mains,  la  gauche 
surtout,  je  ne  sais  si  l'imagier  l'a  représenté  ainsi  avec 
intention,  sont  très-décharnées,  bien  que  la  ligure  soit 
pleine. 

J'ai  fait  un  dessin  à  part  de  la  crosse  sculptée  sur  la 
tombe,  qui,  contrairement  à  ce  que  je  pensais  et  au  dessin 
de  M.  Uoyct,  diffère  beaucoup  de  la  crosse  émaillée  trou- 
vée dans  le  cercueil. 


XL^   SESSION,    A    CHaTEAUROUX. 


685 


Les  deux  bandes  de  l'étole  diffèrent  complètement 
entre  elles,  ainsi  que  l'on  peut  en  juger  par  les  deux 
croquis  ci-dessus. 

Le  cercueil  de  l'abbé  a  une  forme  analogue  à  ceux  qui 
ont  été  dessinés  à  Saint-Ouen  de  Rouen  par  M.  l'abbé 
Cochet,  et  que  ce  savant  antiquaire  atlribue  <à  la  période 
capétienne  (1050  à  1250).  {Mémoires  de  la  Soc.  des  Ant. 
de  Normandie.) 

Deux  fragments,  trouvés  dans  la  crypte,  offrent  une 
décoration  qui  se  retrouve  sur  les  colonnes  qui  accom- 
pagnent le  portail  méridional  de  la  cathédrale  du 
Mans. 


(iSO 


CONGRES   ARCliEÛLOGIOUE    DE    FRANCE. 


Je  n'ai  rien  rencontré  dans  les  restes  (3e  l'abbaye,  qui 
remonte  aux  époques  anciennes  de  l'abbaye,  si  ce  n'est 
une  petite  arche  dont  on  a  vu  le  dessin  dans  le  mémoire 
de  M.  l'abbé  Daraourette  sur  l'abbaye  de  Notre-Dame. 

Cette  abbaye,  qui,  dit  M.  Royet,  présentait  une  masse 
considérable  de  constructions  et  a  traversé  ainsi  tant  de 
siècles,  «  n'était  en  apparence  soutenue  par  aucune  fon- 
dation. Une  sorte  de  plancher,  grossièrement  maçonné, 
sans  profondeur,  mais  d'une  grande  résistance,  reposant 
sur  un  sol  complètement  mouvant,  en  tenait  lieu. 

((  Le   terrain    était   en    effet  si   peu   consistant  en  cet 


XL**    SESSION,    A    CllATKAlUliil  \.  ()S7 

endroit,  qu'il  a  l'allii  creuser  de  sept,  iieul'ct  onze  mètres 
pour  asseoir  le  nouvel  (klilke.  » 

Le  chapiteau    ci-joint,  déposé  dans  la    tour,  pruvicnt 
également  de  l'abbaye  de  Notre-Dame. 


Musée. 

Le  musée  contient  des  objets  de  diverses  natures  ;  la 
plupart  n'offrent  qu'un  intérêt  purement  local.  J'y  ai 
remarqué,  entre  autres,  un  petit  édicule  antique  d'un 
pied  de  haut,  que  je  regrette  de  n'avoir  pas  dessiné;  mais 
j'ignorais  alors  qu'il  eût  été  trouvé  à  Issoudun,  auprès  du 
château,  en  même  temps  que  quelques  autres  fragments 
romains.  Le  grand  torse  anti([uc,  qui  est  dans  le  donjon, 
suppose  des  constructions  romaines  importantes. 

Les  canons  sont  au  nombre  de  trois,  portant  la  date  de 
1568. 


^ 


688 


CONGRES   ARCHEOLOGIQUE   DE   FRANCE, 


XI.'    SESSION,    A    (illATKAUUOUX.  ft89 

Le  l)liis  remarquable  des   liois  porte  <',elte  iuscriplioii  : 

A.  YSSOUDUN  :  lE  FV  l'ETTE  :  l'OUIl  TENIR  :  AVX  ENNEMIS: 
TESTE  :  DE  RAK 

Le  reste  manque,  cette  pièce  ayant  été  raccourcie. 

On  y  voit  Técu  de  France  avec  le  collier  de  Saint- 
Michel  ;  un  second  écusson,  entouré  d'une  couronne  de 
laurier,  à  trois  tètes  de  léopard  2  et  1  ;  puis  les  armes  de 
la  ville,  d'azur  au  pairie  d'or.  Sur  une  banderole,  autour 
de  ce  dernier  écusson,  sont  les  noms  des  quatre  golteh- 
NEux  avec  la  date  de  1568. 

Sur  la  culasse  se  lit  cette  inscription  : 

ANDRE    BRASSEUX   P0TTIER   DETEN 
A   FETTE    cette   PIESSE   SY 
SIMON   DVFOVR   SOLLICITEVR. 

Une  buire,  figurée  au  milieu  de  cette  inscription,  est 
probablement  la  marque  du  potier  d'étain. 

Plusieurs  autres  inscriptions  ont  été  successivement 
gravées  à  la  suite  de  celle-ci  ;  une  d'elles  indique  le  nom 
de  celui  qui  l'a  désenclouée. 

J'ai  remarqué,  en  outre,  un  petit  pistolet-poignard, 
d'un  travail  très-soigné,  et  une  bague  en  argent  trouvée 
dans  le  cimetière  de  Massay.  Cette  bague  porte  l'inscrip- 
tion grecque  :  Agios,  ô  Theos,  Athanatos. 

J'ai  encore  trouvé  dans  ce  musée  un  petit  dessin  qui 
intéresse  tout  spécialement  la  ville  de  Caen;  c'est  un  por- 
trait du  graveur  caennais,  M.  Lasne,  dessiné  avec  grand 
soin  sur  vélin. 

La  maison,  dont  je  donne  ci-dessus  le  dessin,  porte  la 
date  de  1601. 

XV   SESSION.  44 


690       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Argenton,    Saint-Marcel, 

PAR  MM.  DE  LaURIÈRE  ET  LeNAIL. 

Pour  l'archéologue,  la  ville  actuelle  d'Argenton,  l'aii- 
cien  Argentomagus,  est  d'un  intérêt  aussi  médiocre,  pour 
ne  pas  dire  aussi  nul,  que  son  aspect,  sa  position  sur  les 
deux  rives  de  la  Creuse,  ses  coteaux  verdoyants,  reflétés 
dans  les  eaux  de  la  rivière,  sont  séduisants  pour  un 
peintre  et  capables  de  le  retenir  de  longs  jours  au  milieu 
de  leurs  sites  pittoresques  et  gracieux.  Cette  petite  ville 
n'en  serait  pas  moins  un  centre  admirablement  choisi 
pour  une  sorte  de  Congrès  archéologique  rayonnant,  qui, 
après  avoir  examiné  tout  près  de  là  l'église  du  bourg  de 
Saint-Marcel ,  se  transporterait  à  Neuvy-Saint- Sépulcre, 
où  se  trouve  l'église  la  plus  intéressante  du  département 
de  l'Indre,  puis  à  Gargilesse,  Crozant,  Châteaubrun  et 
autres  localités  bien  connues  des  touristes. 

Nous  ne  pouvions  songer  en  ce  moment  à  entreprendre 
toutes  ces  courses,  et  notre  ambition  devait  se  borner  à 
prendre  gîte  à  Argenton,  pour  aller  de  là  visiter  l'église 
de  Saint-Marcel,  dont  le  clocher  apparaît  au  nord  comme 
un  point  de  mire  et  d'attraction. 

Cependant,  à  défaut  de  monument  digne  d'un  grand 
intérêt,  on  ne  peut  s'empêcher  d'évoquer,  à  Argenton,  le 
souvenir  de  l'ancien  château.  Il  n'en  reste  plus  aujour- 
d'hui que  des  débris  insignifiants,  épars  sur  le  sommet 
du  coteau  qui  domine  le  quartier  de  la  ville  situé  sur  la 
rive  gauche  de  la  Creuse,  débris  bien  impuissants  à  don- 
ner une  idée  de  cette  ancienne  forteresse,  l'une  des  plus 
considérables  du  Berry  pendant  le  moyen  âge. 

Ce    château ,    d'après    les    plus    anciens    historiens , 


XT.e   SRSSrON,    A    r.IlATEAUROUX.  091 

rfmonlfirait  ù  IV'poijun  roinaiiio.  Sa  tour  ]»iincipale  s'ap- 
pelait Tour  d'Héraclée,  nom  ([ue  la  tradition  rattaclie  à 
celui  d'Héraclius,  lieutenant  de  l'empereur  Valérien  et 
préteur  de  la  province.  Détruit  une  première  lois  par 
Waiffre,  duc  d'Aquitaine,  le  château  d'Argenton  aurait 
été  rebâti  par  Pépin.  Ce  prince  y  mit  une  forte  garnison 
en  vue  de  défendre  ce  passage,  le  plus  important  entre  le 
Berry  et  l'Aquitaine. 

Pendant  le  cours  du  moyen  âge,  cette  forteresse,  prise 
et  reprise  plusieurs  fois  par  différents  partis,  nolanimenl 
par  Philippe-Auguste,  qui  l'enleva  en  H88  aux  Anglais, 
subit  de  violentes  vicissitudes.  Elle  fut  en  grande  partie 
ruinée  ;  mais  ses  tours,  au  milieu  de  ces  dévastations, 
semblent  avoir  été  plus  épargnées  et  continuèrent  à  former 
une  enceinte  des  plus  formidables,  si  bien  que  Henri  IV, 
après  s'en  être  emparé,  en  1589,  manifeste,  dans  une  de 
ses  lettres,  toute  sa  joie  d'avoir  pu  prendre  miraculeuse- 
ment une  place  aussi  forte  (I). 

Voici  en  quels  termes  l'historien  Jean  Ghaumeau 
décrivait,  vers  1566,  l'état  de  cette  forteresse  : 

«  Au  fais  et  sommets  de  laquelle  (colline)  est  construit 
et  édifié  un  fort  et  ancien  château,  cloz  et  environné 
d'hautes  murailles  hors  d'échelles  ;  sept  grosses  tours  et 
troys  petites,  l'une  desquelles,  qui  est  la  plus  grosse  de 
toutes,  est  appelée  la  tour  d'Éracle,  ayant  son  regard  sur 
le  pais  de  Berry,  en  laquelle  est  figurée  et  enlevée  la 
statue  et  effigie  d'un  toreau  fort  antique,  à  l'entour 
duquel  est  escript  :  Veni,  vici  ;  l'autre  est  près  et  joignant 
celle  en  laquelle  y  a  un  puits  profond  à  merveille,  appelé 
le  puits  du  Donion.  Au  milieu  de  la  profondeur  de  ce 

(1)  De  la  Tremblais,  Esquisses  pittoresques  du  départe- 
ment de  l'Indre. 


692       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

puits  y  a  un  roc,  sus  lequel  on  peut  marcher  cinq  ou  six 
pas  :  au  bout  desquelz  y  a  une  porte  taillée,  fermée  d'un 
grand  quartier  de  taille,  par  laquelle  on  va  assez  loing 
desdiles  deux  tours,  la  tierce  est  plus  haute  que  les  autres; 
et  l'appelle-t-on  la  tour  des  prisons.  Elle  est  faite  à  vif 
arreste  et  couverte.  Du  costé  regardant  le  pays  de 
Guyenne  y  a  trois  autres  grosses  tours  :  dont  l'une  est 
assise  sur  le  fetz  du  roc,  appelé  la  tour  du  guet  :  les 
autres  deux  sont  plus  basses,  construites  d'une  même 
hauteur  et  grosseur  que  les  autres  :  esquelles  y  a  cisternes 
bien  cymentées  et  de  forte  composition,  où  l'on  fait 
reserve  d'eau.  Entre  l'une  desdites  tours  et  celle  où  est  le 
puits  Doniou,  il  y  a  une  autre  belle  tour  couverte  et  bien 
percée,  faicte  de  carthellages,  ayant  son  regard  vers 
l'occident.  Les  autres  trop  petites  ne  sont  de  telle  impor- 
tance qu'elles  méritent  être  descriptes.  »  [Histoire  du 
Berry,  par  Jean  Chauraeau,  seigneur  de  Lassay,  p.  262.) 

Tous  ces  détails  n'indiquent  point  l'origine  de  ces  con- 
structions remaniées,  agrandies  sans  doute  aux  xii^  et  xiii'' 
siècles;  et  s'il  est  vrai  qu'au  temps  de  Chaumeau  la  tour 
d'Éracle  portait  encore  la  devise  de  César,  raccourcie 
d'un  mot  ;  Veyii,  vici,  avec  d'autres  vestiges  romains,  nous 
devons  croire  que  les  constructeurs  du  moyen  âge,  animés 
d'un  louable  esprit  de  conservation  qui  ne  trouve  pas  tou- 
jours à  notre  époque  d'aussi  sages  imitateurs,  avaient  fait 
entrer  dans  leur  œuvre  les  restes  du  premier  castellum 
bâti  par  le  duc  d'Aquitaine. 

Les  ruines  que  nous  voyons  aujourd'hui,  et  dont  un 
débris  porte  encore  le  nom  de  tour  d'Héraclée,  proviennent 
de  la  démolition  du  château,  ordonnée  par  le  cardinal 
de  Richelieu  en  1632,  et  définitivement  accomplie  sous 
Louis  XIV. 

La  ville  actuelle  d'Argenton  ne  correspond  pas  précisé- 


XL*   SESSION,    A   CHATEAUROUX.  693 

ment  à  l'emplacement  de  l'ancien  Argentomagus,  ipii 
s'étendait  plus  particulièrement  sur  les  territoires  occupés 
aujourd'hui  par  le  faubourg  Saint-Étienne  et  le  bourg  de 
Saint-Marcel. 

Jusqu'à  la  fin  du  xiV  siècle,  le  centre  de  l'ancienne 
ville  se  trouvait  au  quartier  Saint-Étienne.  Vers  cette 
époque,  les  habitants,  ne  se  sentant  pas  assez  en  sûreté 
dans  celte  position  découverte,  vinrent  se  fixer  au  pied 
du  château  ;  puis,  bientôt  trop  resserrés  entre  le  château 
et  la  rivière,  ils  bâtirent  sur  l'autre  rive  un  faubourg  qui 
devint  plus  considérable  que  la  ville  elle-même,  et  dans 
lequel  les  seigneurs  de  Ghauvigny  fondèrent,  en  ur)."},  un 
couvent  de  cordeliers.  L'église  de  ce  monastère,  caracté- 
risée par  le  style  dégénéré  de  cette  époque,  est  devenue 
l'une  des  églises  paroissiales  d'Argenton.  Sa  façade  est 
surmontée  d'une  maigre  flèche  moderne,  disgracieuse- 
ment  ajustée  sur  un  porche  en  saillie.  L'édifice  entier  ne 
présente  aucun  intérêt. 

Dans  la  ville  basse,  à  l'angle  de  deux  rues,  près  du 
vieux  pont,  il  faut  signaler  une  assez  jolie  statuette  de 
vierge,  abritée  sous  un  dais  gothique  dans  le  goût  du 
xy"  siècle,  et  qui  fait  l'ornement  d'une  vieille  maison.  On 
remarque  encore  dans  la  ville  haute  la  porte  de  l'ancienne 
église  Saint-Benoit,  encadrée  par  une  arcature  aiguë  et 
fleuronnée,  accostée  de  deux  pinacles.  Cette  porte  ainsi 
que  la  vierge  ont  été  reproduits  dans  le  u"  2  (1873j  du 
Bulletin  monumental,  d'après  les  dessins  de  l'album  de 
M.  Bouet. 

L'église  Saint-Benoit  est  actuellement  transformée  en 
halle  au  blé.  On  voit  encore  à  la  voûte,  dit  M.  de  la 
Tremblais,  les  armes  de  Louis  de  Bourbon,  prince  de  la 
Roche-sur- Yon  et  comte  de  Vendôme,  qui  avait  épijusé  la 
veuve  d'André  de  Ghauvigny. 


694       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Aujourd'hui,  l'aucien  quartier  Saint-Étienne  est  un 
faubourg  situé  au  nord  de  la  ville.  Il  n'a  conservé,  comme 
témoignage  de  son  ancienne  importance,  qu'un  débris  de 
son  église  paroissiale,  église  romane,  composée  d'une  nef 
avec  transepts  et  absides.  Il  n'existe  plus  maintenant  que 
la  nef,  dont  le  pignon  a  été  surélevé  vers  le  xvi*^  siècle. 
Cette  nef  est  actuellement  convertie  en  magasin. 

A  peu  de  distance  de  ce  faubourg  se  trouve  le  village 
de  Saint-Marcel,  sur  l'un  des  coteaux  qui  s'élèvent  au 
nord  d'Argenton,  au-dessus  de  la  vallée  de  la  Creuse.  Au 
dire  des  historiens  du  Berry,  le  sol  de  ces  coteaux,  encore 
couvert,  comme  de  leur  temps,  de  vignes  fertiles,  renfer- 
mait de  nombreux  vestiges  d'antiquités;  «en  labourant 
lesquelles  vignes,  nommées  le  Pallais,  Virou,  Saint-Anas- 
taire,  à  la  dénomination  du  lieu  desdits  martyrs,  les 
Marssaincts,  se  sont  trouvées  plusieurs  caves,  cisternes 
cimantées,  fontaines  artificielles  garnies  de  marbre  et 
albâtre,  merveilleusement  bien  composées  et  taiotes;  s'y 
sont  trouvées  plusieurs  pièces  d'or  et  d'argent  esquelles 
sont  escripts  les  dicts  des  empereurs  de  Rome.  »  C'est 
ainsi  qu'on  décrit,  en  loTl,  dans  le  terrier  d'Argenton, 
les  grandes  et  louables  somptuosités  qu'on  y  remarquait 
encore  (l). 

Si  encore  de  nos  jours,  avant  d'arriver  à  Saint-Marcel, 
de  suite  après  avoir  traversé  le  chemin  de  fer,  on  explore 
les  coteaux  qui  s'élèvent  à  gauche  de  la  route,  on  trouve 
les  restes  de  ces  gî'andes  et  louables  somptuosités.  Ce  sont 
les  vestiges  du  théâtre  romain  de  Virou,  nom  qui  lui  a 
toujours  été  conservé  dans  le  pays. 

Ces  ruines  ne  consistent  plus  qu'en  une  portion   de 

(1)  Archives  de  l'Indre,  citation  de  Haynal.  Histnirr  du 
Berrij,  I,  p.  107. 


XL°    SESSION,    A   CHATEAUROUX.  695 

muraille  circulaire,  en  petit  appareil  régulier,  dégagée 
d'un  côté  sur  une  élévation  de  un  mètre,  et  enterrée  de 
de  l'autre  comme  un  mur  de  soutènement.  Ce  théâtre, 
ainsi  que  la  plupart  des  théâtres  romains,  était  étahli  sur 
le  versant  concave  du  coteau,  dont  les  pentes  naturelles 
portaient  les  gradins  et  les  précinctions  de  la  cavea. 
Son  ouverture,  sur  un  axe  se  dirigeant  du  nord  au  sud, 
en  face  d'un  horizon  qui  semhlait  fait  pour  charmer  la 
vue  des  spectateurs,  regardait  la  vallée  de  la  Creuse.  Le 
fragment  de  mur  circulaire,  que  nous  avons  examiné  sur 
une  longueur  d'environ  30  mètres,  situé  au  sommet 
du  coteau,  devait  probablement  dépendre  de  l'enceinte 
extérieure  du  théâtre.  Tout  remplacement  de  la  cavea  et 
du  proscenium  est  maintenant  recouvert  de  vignes,  et  il 
est  difficile  de  reconnaître,  dans  cet  état  de  choses,  les 
limites  extrêmes  du  monument.  M.  de  la  Tremblais, 
dans  ses  Esquisses  pittoresques  de  l'Indre,  donne,  pour 
les  dimensions  de  ce  théâtre,  78  mètres  en  largeur  et 
94  mètres  en  longueur  perpendiculaire  à  l'axe  de  la 
corde. 

Sur  un  autre  point  du  territoire  de  la  commune  de 
Saint-Marcel,  et  nommé  le  Pallais,  la  tradition  a  con- 
servé aussi  le  souvenir  d'un  autre  théâtre  d'Argento- 
magus,  et  dont  l'ancienne  existence  n'est  plus  constatée 
que  par  la  forme  du  terrain. 

L'église  de  Saint-Marcel,  consacrée  aux  saints  Marcel  et 
Anastase,  martyrisés  sur  Tun  des  emplacements  que  nous 
venons  d'indiquer,  est  un  monument  plus  digne  d'attirer 
notre  attention.  Les  Chroniques  du  Berry  ne  fournissent 
aucun  document  sur  l'origine  de  sa  construction  ;  une 
tradition  chrétienne,  au  fond  de  laquelle  on  ne  peut 
s'empêcher  de  trouver  un  certain  caractère  histori(iue, 
recueillie  par  Ph.  Labbe,  rapportée  par  les  Bollandistes, 


606       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

dans  les  Acta  Sanctorum,  et  traduite  en  partie  par 
Raynal  (i),  attribue  les  martyres  de  ces  deux  saints  au 
règne  de  Valérien,  vers  258. 

D'après  cette  tradition,  dont  nous  n'avons  pas  à  repro- 
duire ici  tous  les  longs  et  dramatiques  détails,  le  jeune 
Marcel,  après  avoir  assisté  à  Rome  au  supplice  du  pape 
Sixte  II,  en  258,  vint  en  Gaule,  sur  le  conseil  de  l'archi- 
diacre saint  Laurent,  pour  rejoindre  sa  mère  Marcellina, 
Saturnin,  son  frère  (9),  et  Denis  qui  avaient  fait  partie  de 
la  mission  envoyée  dans  les  Gaules  par  le  pape  Fabien 
(235-251).  Marcel  avait  pour  compagnon  de  voyage  un 
jeune  chrétien  du  nom  d'Anastase.  Ils  vinrent  d'abord  à 
Lyon,  puis,  se  rendant  à  Toulouse  pour  y  retrouver 
l'évèque  Saturnin,  ils  s'arrêtèrent  à  Argentomagus,  où 
résidait  ce  préteur  Héraclius,  dont  une  tour  du  château 
porte  encore  le  nom. 

Là,  Marcel  opéra  des  miracles  qui  suscitèrent  le  cour- 
roux du  préteur;  celui-ci,  pour  contraindre  Marcel  à 
sacrifier  aux  faux  dieux,  lui  fit  infliger  les  plus  durs 
supplices;  mais  le  jeune  chrétien,  confessant  la  foi  du 
Christ  avec  une  inébranlable  fermeté,  sortit  victorieux  de 
toutes  ces  épreuves  et  fut  enfin  décapité  sur  l'ordre  d'Héra- 
clius  ;  son  compagnon  Anastase,  demandant  à  ne  pas 
survivre  à  son  frère  en  Jésus-Christ,  périt  par  le  supplice 
du  chevalet. 

Ce  que  l'histoire  nous  apprend  de  plus  positif  sur  l'ori- 
gine de    l'église  de  Saint-Marcel,  que    Chaumeau    se 

(1)  Histoire  du  Berry,  \. 

(2)  Si  SS.  Saturninus  et  Dyonisius,  hic  Pariensis,  ille  Tolo- 
saniis  priiiiiis  antistes,  inlelliginitur  ;  fictitia  est  hujusnicdi 
fraternitas  alicis  vero  nullos  Toiosani  noveiunl.  {Aoie  des  Bol- 
landistes.) 


XL»   SESSION,    A   OHATEAUROUX.  697 

contente  de  qualifier  de  très-belle  (1),  c'est  que  cette  église, 
au  rapport  de  La  Thaumassière,  était  celle  d'un  prieuré, 
fondé  au  xii"  siècle  par  les  seigneurs  de  Chauvigny,  et 
dépendant  des  abbés  et  religieux  de  Saint-Gildas  de 
Chàteauroux. 

L'église  de  Saint-Marcel  est  assurément  l'un  des  édifices 
do  la  région  les  plus  inexplicables.  Tous  les  siècles,  depuis 
le  xi°  jusqu'au  xvi%  y  ont  apporté  leur  travail,  et  il  est 
fort  difficile  d'assigner  à  chaque  partie  une  date  exacte, 
tant  les  reprises  sont  enchevêtrées. 

Un  membre  de  la  Société  française  d'Archéologie  a 
construit  sur  ce  monument  une  théorie  facile,  dit-il  : 
«  L'église  est  pleine  d'intérêt  pour  l'étude  de  la  tecnie, 
mais  surtout  pour  l'estétique.  Posée  sur  un  sol  accidenté, 
au  milieu  d'une  région  mouvementée,  son  architecture 
est  mouvementée,  mais  son  style  a  de  l'unité,  abstraction 
faite  des  modifications  du  xV  siècle.  Ce  n'est  plus  le  style 
roman,  ce  n'est  pas  encore  le  style  ogival  ;  c'est  l'ère  ogi- 
vale sans  mélange  confus,  très-raisonnée,  harmonisant 
habilement  le  plein  cintre  et  l'ogive,  le  cylindrique  et  le 
polygonal,  avec  l'unité  dans  la  similitude,  mais  jamais 
dans  la  parité;  c'est  la  nature,  la  vie,  avec  ampleur.  » 

Pour  nous,  qui  demandons  à  voir  plus  clairement 
qu'au  travers  du  prisme  de  la  fantaisie,  nous  demeurons 
anxieux,  et  c'est  avec  de  grandes  précautions  que  nous 
entrons  dans  la  description  d'un  semblable  monument. 

L'église  de  Saint-Marcel  se  compose  aujourd'hui  d'une 
seule  nef,  d'un  double  transept  et  de  trois  absides,  orien- 

(1)  €  En  une  partie  du  circuit,  ioignant  la  dite  rivière  de 
Creuse,  est  construite  et  bastie  la  ville  de  Sainl-Marcol,  petite 
ville  en  laqueUe  y  a  une  fort  belle  église.  (Jean  Cluiimoau, 
Histoire  du  Berry,  p.  263.) 


698       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

tées,  d'inégales  dimensions.  Un  clocher  est  élevé  sur  le 
premier  croisillon  septentrional,  et  une  crypte  s'ouvre 
sous  l'absidiole  méridionale. 

Le  plan  primitif,  que  nous  pouvons  faire  remonter  aux 
dernières  années  du  xi"  siècle,  nous  donne  une  nef,  une 
abside  principale  et  un  transept,  sur  lequel  s'ouvrent 
deux  absidioles.  C'est  le  plan-type  des  églises  de  cette 
époque.  Ainsi  disposée,  l'église  de  Saint-Marcel  n'était 
vraisemblablement  pas  voûtée. 


Le  monument  ne  fut  achevé  (ju'au  xii*  siècle.  Le  xiii' 
refit  le  chœur  et  l'un  des  transepts  que  nous  voyons 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  009 

aujourd'hui.  Le  xiv*  éleva  le  clocher,  ajouta  un  second 
transept  et  construisit  une  partie  des  voûtes  auxquelles  le 
xv"  mit  aussi  la  main,  en  môme  temps  qu'il  ouvrait  des 
chapelles  dans  les  murs  do  la  nef.  Le  xvi"  siècle  s'est 
chargé  de  l'ameublement. 

Le  pignon  occidental  de  l'église  est  renforcé  par  (|uatre 
contre-forts,  dont  les  fonctions  ne  sont  nullement  indi- 
quées par  le  plan.  Les  deux  plus  épais,  placés  de  cha(iue 
côté  de  la  porte,  ont  été  ajoutés  au  xiv*  ou  xv*  siècle  : 
leurs  assises  ne  sont  point  d'accord  avec  celles  du  mur  de 
façade. 

La  porte  percée  dans  ce  pignon  nous  a  paru  digne 
d'une  attention  spéciale  ;  nous  en  donnons  le  tracé.  Deux 
archivoltes  reposent,  la  première  sur  des  pieds-droits,  la 
seconde  sur  des  colonncttes  qui  remplissent  l'ôbrasement. 
Ces  colonnettes,  longues  et  menues,  ont  une  base  anne- 
lée  et  des  chapiteaux  formés  de  grotesques  accroupis, 
levant  les  bras  pour  supporter  le  tailloir.  Ces  bases  et  ces 
chapiteaux  n'ont  qu'une  saillie  inappréciable  sur  le  fût. 
Une  moulure  en  biseau,  décorée  d'étoiles  à  quatre  pointes 
taillées  dans  l'épannelage  rectangulaire  (l),  et  surmontée 
d'un  triple  filet  extradosse  Tarchivolte  extérieure. 

Cette  archivolte  est  ornée  à  son  l'intrados  d'une  mou- 
lure torique,  très-déliée,  prise  dans  l'épannelage  des 
claveaux.  Ceux-ci,  séparés  par  des  joints  plats,  très-épais, 
sont  tous,  fors  la  clef  de  l'archivolte  extérieure,  décorés 
d'entrelacs,  de  rosaces,  de  cercles  concentriques  étoiles, 
d'animaux  fantastiques,  isolés,  affrontés,  opposés. 

Nous  donnons  quatre  exemples  de  ces  claveaux  au 
dixième  de  l'exécution  ;  deux  proviennent  de  l'archivolte 

(1)Ces  étoiles  coniques  se  retrouvent  à  Fontgombaud  et  à 
Preuilly. 


700       CONGRÈS  ARCHEOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

supérieure,  leur  extrados  est  courbe,  et  deux  autres  de 
l'archivolte  inférieure. 


Ces  claveaux  nous  ont  rappelé  les  pierres  sculptées  que 
l'on  trouve  noyées  dans  des  constructions  plus  modernes, 
pierres  que  l'on  dit  volontiers  antérieures  à  l'an  mil, 
sinon  mérovingiennes. 

Le  travail  n'est  point,  à  proprement  parler,  de  la  sculp- 
ture. Aprf-s  avoir  tracé  un  trait  de  la  bordure  du  claveau, 
et  du  sujet  qu'elle  devait  inscrire,  l'ouvrier  a  creusé  la 
(tierre  de  façon  à  donner  aux  formes  un  relief  de  trois  à 


XL'    SESSION,    A    ('.HATKAIJROU.V.  70i 

cinq  millimètres.  Un  simple  tniil  gravé  lient  lieu  de 
modelé. 

Quelques  pierres,  travaillées  de  la  même  manière,  mais 
plus  grandes  que  les  claveaux  et  à  surface  rectangulaire,  se 
trouvent  mêlées  à  l'appareil  du  pignon.  Sont-ce  de  sim- 
ples fantaisies  d'ouvrier  ou  les  restes  d'une  construction 
précédente  qui  aurait  servi  de  modèle?  Nous  penchons 
pour  ce  dernier  avis  (i). 

Il  existe  les  plus  grands  rapports  entre  ces  figures  et 
celles  que  M.  de  Caumont  appelle  cloisonnées  (il  faudrait 
dire  ici  champlevées).  Les  ornements,  cercles  concen- 
triques dentelés,  sont  ceux-là  mêmes  qui  se  trouvent  sur 
le  tombeau  de  Boëtius,  évêque  de  Carpentras,  en  604.  (2). 
Les  points  semés  dans  les  vides,  le  long  de  la  bordure,  se 
retrouvent  à  chaque  instant  dans  les  décorations  mérovin- 
giennes. Doit-on  conclure  de  ces  ressemblances  que  les 
archivoltes  de  Saint-Marcel  remontent  à  une  époque  aussi 
ancienne?  Cela  est  impossible.  Qui  donc  aurait  détaché 
ce  boudin  si  délié  à  l'intrados  des  claveaux  supérieurs  ? 
Malgré  la  singularité  de  la  décoration,  la  porte  ne  nous 
parait  point  remonter  plus  haut  que  le  xii"  siècle.  Nous 
énonçâmes  cette  opinion  devant  le  docteur  Cattois,  qui  la 
partagea. 

Plusieurs  claveaux  présentent,  du  reste,  des  ornements 
fleuronnés,  comme  celui  que  nous  donnons,  ornements 
qui  rentrent  bien  dans  les  tracés  du  xii*^  siècle. 

Nous  sommes   donc  ici   devant  le  travail  d'ouvriers 

(-1)  Il  est  certain  que  d'anciennes  construclions  ont  été  utili- 
lisées  au  xn*  siècle.  Nous  avons  trouvé  dans  le  pignon  des 
fragments  d'inscriptions  romaines. 

(2)  Ce  tombeau  a  été  publié  par  M.  Revoii,  et  reproduit  par 
M.  de  Caumont  dans  son  Abécédaire. 


702       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

ignorants,  assez  pauvres  d'imagination  pour  être  réduits 
à  répéter  sur  plus  de  dix  claveaux  ce  poncif  des  cercles 
concentriques,  l'ornement  le  plus  ancien  qui  soit  connu, 
sans  trouver  d'autres  ressources  qu'une  dentelure  pour 
décorer  le  cercle  intermédiaire.  Malgré  la  pauvreté  de 
l'invention  et  la  sécheresse  de  l'aspect,  la  porte  de  Saint- 
Marcel  est  un  type  curieux  à  observer  et  à  faire  con- 
naître. 

Au-dessus  de  la  porte,  une  fenêtre  a  été  ouverte  au 
xv""  siècle,  remplaçant  une  baie  primitive.  Plus  haut  règne 
une  petite  corniche,  formée  de  deux  rangs  de  denticules. 
Le  pignon  et  les  murs  goutterots  de  la  nef  ont  été  suré- 
levés au  moment  de  la  construction  des  voûtes  ;  c'est  alors 
qu'on  a  dû  appliquer  les  deux  contre-forts  qui  accompa- 
gnent la  porte. 

La  nef,  autrefois  éclairée  par  de  petites  fenêtres  en  plein 
cintre,  aujourd'hui  bouchées,  est  divisée  en  trois  travées, 
séparées  par  des  piles  engagées,  cantonnées  de  colonnes. 

Les  bases  du  premier  faisceau  sont  composées  de  deux 
tores  très-aplatis,  séparés  par  une  étroite  gorge.  Le  fore 
inférieur  est  muni  de  griffes.  Les  chapiteaux  sont  garnis 
de  crochets  qui  ne  débordent  point  un  tailloir,  très-épais 
et  très-saillant  à  sa  partie  supérieure.  Au  deuxième  fais- 
ceau tout  est  changé.  Nous  touchions  au  xiii*  siècle,  nous 
voici  au  début  du  xii«.  Les  tores  des  bases  sont  très-déve- 
loppés,  et  la  scotie  a  pris  une  importance  exagérée. 

Les  chapiteaux  des  colonnes  portant  le  doubleau  sont 
ornés  bien  différemment.  Au  nord  nous  voyons  deux 
tètes  sur  les  angles  ;  chaque  tête  est  accompagnée  de  deux 
mains  coupées  qui  semblent  retomber  de  la  corbeille.  Au 
midi,  deux  gros  animaux  affrontés,  et  au-dessous  d'eux, 
près  de  la  base,  sur  le  slylobate  à  trois  pans,  git  mourant 
un  troisième  animal,  qui  fut,  suivant  certaines  théories 


XL*    SESSION,    A   CTIATEAUROUX.  703 

de  symbolisme,  eu  rapport  direct  avec  les  hôtes  du  chapi- 
teau. Les  tailloirs,  couverts  de  moulures  multipliées  sout 
plus  hauts,  mais  moins  saillants.  Les  piles  qui  devaient 
renforcer  l'angle  saillant  entre  la  nef  et  le  transept  ont 
disparu. 

Pour  soutenir  le  clocher,  élevé  au  xiv*  siècle  sur  une 
faible  (;onstruction,  on  dut  projeter  un  contre-fort  dans 
l'intérieur  de  l'église  jusqu'à  une  profondeur  de  plus  de 
trois  mètres. 

L'amour  de  la  symétrie,  ou  plus  probablement  le  besoin 
de  soutenir  les  voûtes  du  transept  qu'on  élevait  alors, 
engagea  les  constructeurs  à  bâtir  au  midi  un  pan  de  mur 
qui  n'est  que  la  pénétration  du  mur  de  ce  transept  dans 
la  nef.  Celle-ci  se  trouve  ainsi  presque  fermée  par  ces 
deux  adjonctions. 

Le  contre-fort  du  clocher  entre  de  biais  dans  l'église,  de 
sorte  que  pour  bander  l'arc-doubleau  en  tiers-point  qui 
ferme  la  nef,  il  a  fallu  faire  pénétrer  le  sommier  et  les 
premiers  claveaux  de  l'arc  par  un  des  angles  saillants  de 
ce  contre-fort. 

Le  chœur  est  du  xiii"  siècle.  Les  transepts  présentent 
les  caractères  du  xiii"  et  du  xiv'  siècle;  mais  les  voûtes 
ont  été  refaites  au  xv^  Nous  ne  parlons  point  de  la  partie 
méridionale,  qui  est  entièrement  moderne. 

Une  chapelle  rectangulaire  a  été  ouverte  au  xV  siècle 
dans  le  pignon  du  deuxième  croisillon  septentrional.  Elle 
est  éclairée  par  une  grande  fenêtre  à  meneaux,  sa  voûte 
est  portée  par  des  arcs  saillants  au  point  d'intersection 
desquels  se  trouve  une  clef  pendante  présentant  un  écus- 
son  soutenu  par  des  anges. 

Les  trois  absides  sont  voûtées  en  cul-de-four.  Dans 
l'abside  centrale,  un  soubassement  de  deux  mètres  envi- 
ron porte  une  arcature  composée  de  sept  doubles  archi- 


704       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

vol  tes  retombant  sur  des  colonnes  à  chapiteaux  décorés  de 
palmettes  et  de  volutes  perlées.  Les  archivoltes  centrales 
enveloppent  trois  des  fenêtre?  qui  éclairent  cette  abside. 
Nous  remarquerons  que  ces  archivoltes  augmentent  d'élé- 
vation et  de  largeur  en  se  rapprochant  du  chœur. 

Les  deux  absidioles,  élevées  sur  plan  intérieur  circu- 
laire, ne  présentent  aucune  décoration.  Celle  du  midi  a 
un  caractère  plus  archaïque.  Il  semble  que  la  construction 
de  l'église  ait  été  commencée  par  là.  La  situation  de  cette 
absidiole,  au-dessus  de  la  crypte,  est  un  motif  suffisant 
pour  appuyer  notre  opinion. 

Dans  le  deuxième  croisillon  méridional,  nous  arrivons 
à  l'entrée  de  la  crypte.  Il  est  difficile  de  dire  si  elle  a 
formé  une  pj-emière  église  isolée,  ou  si  elle  était  com- 
prise dans  un  autre  édifice.  Elle  s'étend  sous  l'absidiole 
méridionale  et  sous  ce  deuxième  croisillon  dont  le  sol  est 
surélevé  d'un  mètre  environ. 

Cette  crypte  a  été  rendue  à  l'église  depuis  quelques 
années  seulement,  après  avoir  longtemps  servi  de  cave  à 
des  maisons  particulières. 

Elle  présente  le  type  parfait  de  l'église  primitive,  une 
nef  au  fond  de  laquelle  s'ouvre  une  abside  demi-circulaire. 
La  nef  est  composée  de  deux  travées  d'inégale  grandeur 
séparées  par  deux  piles  carrées,  portant  l'arc-doubleau  de 
la  voûte.  L'abside  est  éclairée  par  deux  petites  fenêtres  cin- 
trées que  nous  retrouverons  à  l'extérieur,  l'une  au  centre, 
l'autre  au  sud.  Dans  le  mur  méridional  de  la  première 
travée  sont  aussi  pratiquées  deux  petites  fenêtres  étroites, 
obstruées  par  l'exhaussement  des  terrains.  Au  long  du 
mur,  entre  les  piles  et  l'abside,  s'étend  un  banc  de 
pierres. 

La  première  travée  est  voûtée  en  berceau  et  a  gardé  son 
caractère  primitif  ;  il  n'en  est  pas  de  même  de  la  seconde, 


XL"    SESSION,    A    CUATEAUROUX.  705 

dont  la  voùtc  d'arêtes  surbaissée  est  une  œuvre  uioderiie. 

On  conserve  encore  dans  le  pays  le  souvenir  de  l'an- 
cienne disposition  du  mur  qui  terminait  cette  travée  à 
l'opposé  do  l'abside.  Là  débouchait  l'escalier,  et  dans  la 
partie  supérieure  du  mur,  élevée  au-dessus  du  sol  du 
transept,  étaient  ménagées  des  ouvertures  transversales 
appelées  jugula,  qui  permettaient  aux  lidèles  de  plonger 
leurs  regards  dans  l'intérieur  de  la  crypte,  où  se  trouvaient 
déposées  les  reliques  des  saints  martyrs. 

C'était  la  disposition  consacrée  puur  les  cryptes  les  plus 
vénérées,  installées  en  confession  ou  en  martyriurn. 

La  possession  de  cet  insigne  monument  était  pour 
l'église  Saint-Marcel  un  glorieux  souvenir  que  l'on  ne 
saurait  trop  regretter  de  ne  pas  voir  rappelé  dans  des  tra- 
vaux de  restauration,  dirigés  par  ce  qui  s'appelle  le 
Comité  des  monuments  historiques. 

Trois  autres  chapelles  ont  été  établies  à  la  môme 
époque  et  sur  le  même  plan  le  long  des  murs  de  la  nef. 
Des  pierres  scellées  portent  le  nom  des  fondateurs,  les 
dates  et  conditions  de  la  construction  ;  l'une  de  ces  cha- 
pelles est  entourée  d'une  litre  et  de  peintures  dans 
lesquelles  se  trouve  une  ligure  de  Sainte  Femme  d'un 
très-joli  caractère. 

Il  semble  que  ces  chapelles  soient  intéressantes  à  con- 
server; les  constructions  successives,  de  si  mince  impor- 
tance qu'elles  puissent  êlre,  sont  l'histoire  écrite  sur  les 
pierres.  La  commission  des  monuments  historiques  a  bien 
d'autres  idées;  l'une  de  ces  chapelles  a  déjà  disparu  et  les 
autres  ne  vont  pas  larder  à  être  suppriujécs,  parce  que, 
dit-on,  elles  n'entrent  pas  dans  le  plan  primitif!  Pauvre 
église  !  Si  la  logique  préside  aux  opérations  des  archi- 
tectes, nous  sommes  curieux  de  savoir  ce  qui  restera  du 
monument  que  nous  voyons  aujourd'hui,  quand  on  aura 
XL^  SESSION.  45 


TOfi  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE    DE   FRANCE. 

détruit  tout  ce  qui  n'entre  pas  dans  le  plan    primitif. 

Avant  de  sortir  de  l'église,  nous  devons  faire  remar- 
quer que  dans  le  mur  septentrional  de  la  première  travée 
de  la  nef,  on  voit  les  restes  d'une  très-ancienne  muraille, 
sur  laquelle  la  construction  du  .xii*"  siècle  a  été  appliquée. 

Nous  avons  décrit  le  pignon  de  l'église  ;  voyons  main- 
tenant les  côtés  et  l'abside. 

Les  contre-forts  plats  du  xii"  siècle  sont  encore  appa- 
rents, écrasés  par  les  masses  qui  les  ont  renforcés  au 
xv^  siècle. 

Le  clocher,  construit  au  xiv*"  siècle,  fortement  épaulé 
par  des  contre-forts  à  ressauts,  est  percé  de  fenêtres  et 
d'une  petite  rose.  Il  ne  serait  point  digne  de  remarque 
sans  les  hourds  qui  le  couronnent.  Nous  ne  pouvons 
mieux  faire  que  de  renvoyer  nos  lecteurs  au  Dictionnaire 
d'architecture  de  M.  Viollet-le-Duc  (1).  Le  clocher  de 
Dugny,  dont  l'auteur  présente  un  tracé,  donne  une  juste 
idée  du  clocher  de  Saint-Marcel.  Mêmes  dispositions  du 
pan  de  bois  posé  en  encorbellement  sur  des  solives,  et 
revêtu,  à  Saint-Marcel,  d'un  lattis  sur  lequel  sont  cloués 
des  bardeaux.  Le  toit,  également  couvert  de  bardeaux, 
est  plus  élevé  que  celui  de  Dugny. 

'Ce  mode  de  couronnement  de  tours  d'églises  n'est  pas 
très-commun.  Il  en  existe  plusieurs  exemples  aux  envi- 
rons de  Verdun;  nous  en  avons  trouvé  un  tout  semblable 
à  Saint-Bertrand  de  Comminges. 

A  l'intérieur,  le  clocher  de  Saint-Marcel  est  divisé  en 
deux  étages  au-dessus  des  voûtes  du  transept.  On  arrive 
à  ces  étages  par  un  escalier  situé  dans  une  tourelle  en 
encorbellement,  appliquée  dans  Tangle  rentrant  de  l'un 
des  contre-forts. 

(1)  Vol.  VI,  p.   139. 


XL*  SKSSION,    A   CHATEAUROUX.  707 

Au  premier  étage  est  une  salle  carrée  voûtée  sur 
nervures  ;  au  deuxième,  la  partie  supérieure  de  la  salle 
passe  du  carré  à  l'octogone  au  moyen  d'arcs  bandés  dans 
les  angles  et  pénétrant  les  côtés  du  carré.  Les  murs  de 
cet  étage  portent  la  charpente. 

L'abside  méridionale  est  circulaire  dans  toute  sa  hau- 
teur. Deux  colonnes  engagées,  qui  partent  de  fond  et 
s'élèvent  jusqu'à  la  corniche,  lui  servent  de  contre-lbrts. 
Les  bases  de  ces  colonnes  reposent  sur  un  socle  carré  très- 
saillant.  La  partie  inférieure  des  murs,  à  l'est  et  au  sud, 
est  décorée  d'une  arcade  aveugle,  dans  laquelle  s'ouvre 
une  très-petite  fenêtre  qui  donne  du  jour  à  la  crypte. 
L'archivolte  de  cette  arcade  retombe  sur  des  colonnettes 
trapues  dont  la  base  repose  sur  le  même  socle  que  les 
contre-forts.  Les  chapiteaux  de  deux  de  ces  colonnettes 
ont  conservé  des  traces  de  sculptures,  dont  les  sujets 
devaient  avoir,  près  du  sanctuaire  où  reposaient  les  reli- 
ques des  martyrs,  un  sens  tout  particulièrement  signifi- 
catif. Sur  l'un,  deux  petits  personnages  tiguraient  saint 
Marcel  et  saint  Anastase,  chassant,  comme  le  rapporte  la 
légende,  le  démon  de  l'idolâtrie,  tiguré  par  un  animal 
informe  qui  fuit  devant  eux  :  des  épis  de  blés,  symbole  de 
l'eucharistie,  sculptés  sur  l'autre  semblaient  convier  les 
fidèles  à  la  participation  au  divin  banquet.  Une  seule 
fenêtre  cintrée,  dont  l'ébrasement  profond  est  ocrupo  par 
des  colonnettes  portant  une  archivolte  décorée  d'un  bou- 
din, laisse  pénétrer  le  jour  dans  l'intérieur  de  l'abside. 
Les  pieds-droits  de  la  fenêtre  reposent  sur  un  bandeau 
qui,  s'interrompant  au  droit  des  colonnes  contre-forts, 
pourtourne  les  trois  absides. 

Des  traces  très-évidentes  de  reprise  sont  visibles  entre 
cette  absidiole  et  l'abside  principale,  sans  qu'il  soit  bien 
possible  de  dire  qu'elle  était  la  fonction   d'une  colonne 


708       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

dont  il  ne  reste  plus  que  quelques  assises,  et  d'un  bandeau 
placé  quelque  peu  au-dessous  de  celui  sur  lequel  reposent 
les  pieds-droits  des  fenêtres. 

L'abside  principale,  de  forme  également  demi-cylin- 
drique, est  assise  sur  un  soubassement  pentagonal,  décoré 
à  sa  partie  supérieure  d'une  grosse  moulure  en  torsade. 
Des  colonnes  légères  reposent  sur  le  soubassement  et 
portent  de  véritables  arcs  de  décharge  au-dessus  desquels 
règne  la  corniche  soutenue  par  des  corbeaux.  L'arc  central 
est  plus  large  et  plus  élevé  que  les  autres.  Trois  fenêtres 
s'ouvrent  dans  ces  arcs. 

L'ébrasement  de  ces  fenêtres  est  occupé  par  des  colon- 
nettes  dont  les  chapiteaux  sont  formés  par  une  tête 
humaine  monstrueuse,  dans  la  bouche  énorme  de  laquelle 
disparait  le  sommet  des  colonnettes. 

L'abside  septentrionale  présente  des  dispositions 
curieuses,  conséquences  des  nombreux  remaniements  qui 
y  ont  été  faits.  Elle  est  semi-circulaire  et  repose  sur  un 
soubassement  curviligne  dans  une  partie,  et  droit  dans 
l'autre. 

Comme  dans  l'abside  principale  la  partie  supérieure  du 
mur  et  la  corniche  sont  portées  par  des  arcs  de  décharge 
d'inégales  dimensions;  mais  ici  ces  arcs  sont  tracés  en 
tiers-point,  décorés  de  moulures  très-maigres;  ils  sont 
portés  par  des  pilastres  à  trois  pans,  surmontés  de  chapi- 
teaux bas  sans  sculptures  ;  chapiteaux  dans  lesquels  ne  se 
retrouvent  plus  les  parties  essentielles  du  chapiteau,  tel 
qu'on  le  comprit  jusqu'à  la  fin  du  xiv"  siècle. 

Sous  le  plus  grand  arc  est  ouverte  une  fenêtre  assuré- 
ment contemporaine  des  deux  autres  absides.  Or  l'appa- 
reil, la  forme  des  joints  saillants  et  arrondis  exactement 
reproduite  sur  les  pilastres  et  les  arcs  déroutent  à  pre- 
mière vue.  Pour  nous,  sans  autre  hésitation,  nous  décla- 


XI."    SESSION,     A     r.IlATËAUROUX.  709 

rons'du  xV  siècle  cette  liabile  reprise.  Les  constructeurs 
de  cette  é.po([ue  ont  maintes  Ibis  reproduit  des  (l'uvres 
antérieures,  nous  eu  avons  vu  la  preuve  à  C-liàteaumux, 
au  Blanc;  nous  voyons  à  Saint-Marcel  (|u'ils  ont  pu  aller 
jusqu'à  imiter  la  manière  de  maçonner  les  constructions. 

Ces  trois  absides  viennent  d'être  agréablement  remises 
à  neuf;  la  partie  supérieure  a  clé  surtout  arrangée.  Nous 
n'avons  donc  point  à  en  parler.  Il  nous  faut  toutefois  l'aire 
une  remarque. 

Les  corbeaux,  dont  il  ne  reste  que  quatre  ou  cinq 
anciens,  portent  la  tablette  d'une  corniche  fort  simple, 
aujourd'hui  surmontée  d'un  chéneau  qui  reçoit  les  eaux 
d'un  comble  dallé,  très-plat,  et  les  rejette  par  des  gar- 
gouilles. Si  le  chéneau  n'a  été  que  restauré,  c'est  assuré- 
ment le  plus  ancien  modèle  de  chéneau  du  moyen  âge 
connu.  Nous  le  recommandons  comme  tel  avec  toutes  les 
précautions  auxquelles  obligent  ce  qu'on  appelle  avec  tant 
d'indulgence  des  restaurations.  Nous  sommes,  du  reste, 
persuadés  que  toute  cette  partie  supérieure  est  une  inno- 
vation. La  couverture  des  absides  est  donc  un  problème 
que  l'auteur  des  Esquisses  pittoresques  du  département  de 
l'Indre  ne  rend  pas  très-facile  à  résoudre. 

Nous  lisons  dans  sou  livre,  qui  ne  contient  aucune 
description  de  cette  église  que  les  absides  étaient  sur- 
montées de  clochers  1  «  Il  est  regrettable,  dit  M.  de 
Laurière,  de  ne  pas  avoir  des  renseignements  plus  précis 
sur  une  disposition  aussi  exceptionnelle.  Ne  pouvons- 
nous  pas  avancer  que  ces  absides  portaient  des  ouvrages 
de  fortifications  comme  ceux  que  nous  voyons  dans 
une  région  voisine,  sur  l'abside  de  la  belle  église 
du  Dorât  (1).  » 

(1)  L'église  de  Chandieu  (Loire)  montre  eucore  aujourd'hui 


liO  CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

Assurément,  Saint-Marcel,  dont  le  clocher  encore  exis- 
tant prouve  la  destination  belliqueuse,  pouvait  avoir  son 
abside  fortifiée;  rien  de  plus  naturel.  Trouver  trois 
absides  surmontées  de  clochers  serait  plus  extraordinaire  ; 
et  vraiment,  quand  on  se  fait  imprimer  avec  tant  de  luxe, 
on  devrait  bien  ne  pas  écrire  clochers  quand  il  faut  lire 
tours,  et  surtout  citer  ses  sources  et  origines.  Cette  précau- 
tion est  indispensable  dans  un  livre  qui  a  la  prétention 
d'être  sérieux. 

Nous  en  voyons  bien  d'autres  dans  ces  Esquisses  pitto- 
resques, trop  pittoresques  vraiment.  La  description  de 
l'église  de  Saint-Marcel  est  bien  courte  ;  nous  y  trouvons 
par  bonheur  ce  passage  charmant  d'exactitude  :  «  Le 
clocher  qui  s'élève  au-dessus  de  la  coupole  a  perdu  toute 
sa  physionomie  depuis  que  l'on  a  réduit  de  moitié  la 
hauteur  de  sa  charpente.  »  Le  clocher  élevé  sur  la  coupole 
a  disparu  depuis  le  xiii^  siècle,  selon  toute  vraisemblance, 
avec  la  primitive  coupole,  et  le  vrai  clocher  est  depuis  si 
longtemps  à  la  place  où  nous  le  voyons  aujourd'hui,  qu'il 
nous  parait  impossible  que  l'auteur  cité  ait  pu  le  voir 
ailleurs. 

Si  le  gros  œuvre  de  l'église  de  Saint-Marcel  est  digne 
de  fixer  l'attention,  son  mobilier  n'est  pas  moins  capable 
d'attirer  les  archéologues. 

Derrière  le  parement  de  l'autel  majeur  se  trouvent  des 
fragments  de  sculptures,  dont  nous  donnons  le  dessin,  et 
qui  portent  le  nom  de  tombeau  de  saint  Marcel.  Ce  sont 
deux  grands  morceaux  de  pierre,  rapprochés,  comme  le 
montre  le  tracé.  Ces  débris,  dont  il  est  difficile  d'indiquer 

ses  trois  absides  transformées  en  véritables  tours,  qui  furent 
élevées,  avec  tout  un  sysième  de  défense,  au  \i\*  siècle  contre 
les  incursions  des  Anglais. 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX. 


711 


712       CONGRÈS  ARCHEOI.OGIQUE  DE  FRANCE. 

la  provenance,  n'ont  probablement  jamais  fait  partie 
de  la  décoration  d'un  tombeau  ;  nous  les  attribuons  à 
l'époque  cariovingienne  (1). 

Dans  l'une  des  grandes  pierres  est  percée  une  petite 
ouverture,  fermée  d'une  porte,  et  c'est  derrière  cette  porte 
que  se  trouve  le  trésor  de  Saint-Marcel,  trésor  que  nous 
n'avons  pu  voir. 

Ce  trésor  comprend  deux  châsses  :  l'une  en  bois  sculpté, 
l'autre  émaillée  et  niellée,  du  xii''  et  du  xiii''  siècle  (2j. 

Un  chef  d'argent  doré  ; 

Un  bras  du  même  métal  avec  bracelet  émaillé  ; 

Une  croix  dorée  à  double  croisillon,  du  xiii'=  siècle. 

Cette  croix  renferme  dans  une  rosace  un  vélin  sur 
lequel  on  lit,  en  caractères  de  l'époque  :  «  De  la  vraie 
croix,  de  Saint-Sepulclire,  de  saint  Pierre,  de  saint 
Etienne,  et  de  plusieurs  autres  saints.  » 

(1)  C'est  l'avis  des  personnes  qui  m'accompagnaient;  pour 
moi,  malgré  la  ressemblance  qui  existe  entre  certains  orne- 
ments de  la  partie  gauche  et  les  sculptures  du  tombeau  méro- 
vingien de  Tabanac,  dé[)0sé  au  musée  de  Bordeaux,  je  ne  puis 
assigner  à  ces  sculptures  une  origine  aussi  reculée,  et  j'altrihue 
la  partie  droite  au  xi«  siècle. 

(2)  Cette  châsse  a  été  envoyée  à  l'exposition  universelle  de 
1867.  Voici  comment  elle  est  décrite  au  catalogue  :  «  N"  2064. 
Chasse  de  Saint-Marcel.  Châsse  en  forme  de  maison  avec 
crête  à  jour,  ornée  de  cristaux  de  roche  et  de  pinacles  émaillés, 
formée  de  plaques  en  cuivre  doré  assujetties  par  des  bandes 
émalllées  de  rosettes  :  sur  chaque  compartiment  est  rapportée 
une  plaque  à  quatre  lobes  aigus,  portant  les  figures  du  Christ, 
de  la  Vierge,  des  Anges  et  des  A[>ôtres,  en  relief  ou  en  réserve 
sur  fond  bleu  décoré  de  rinceaux;  des  pierres  cabochons  dans 
de  larges  sertissures  accompagnent  les  plaques.  Limoges,  com- 
mencement du  xm«  siècle.  » 


XL*   SESSION,    A    CHATEAUROUX.  713 

Le  trésor  renferme  encore  une  autre  rrnix  du  xii''  «ir-cle 
à  double  croisillon. 

Nous  avons  vivement  regretté  de  ne  pouvoir  admirer 
ces  curieuses  pièces  d'orfèvrerie  pour  en  l'aire  une  descrip- 
tion complète  ;  nous  espérons  que  quelques-uns  des 
membres  de  la  Société  seront  plus  favorisés  que  nous  et 
qu'il  nous  sera  donné  quelque  jour  de  lire,  dans  le  Bulle- 
tin monumental,  un  intéressant  article  sur  les  reliquaires 
de  Saint-Marcel. 

Le  chœur  est  entouré  de  stalles  du  xvi"  siècle,  d'une 
remarquable  exécution,  et  bien  complètes.  Les  places  des 
dignitaires  sont  faciles  à  distinguer  :  stalles  de  l'abbé,  du 
prieur  et  de  l'intendant  militaire.  Les  dossiers  et  les  misé- 
ricordes sont  décorés  de  sculptures  dans  lesquelles  le 
symbolisme  le  plus  échevelé  peut  trouver  une  ample 
pâture. 

La  fantaisie  la  plus  dévergondée  a  couvert  le  bois  de 
sujets  souvent  reproduits  bien  qu'invraisemblables  en 
pareil  lieu.  Une  haute  balustrade  de  bois,  appuyée  sur 
des  dossiers,  ferme  le  chœur  ;  elle  porte  le  dais  qui  recouvre 
les  stalles  :  tous  les  baluslres  sont  décorés  avec  une  variété 
infinie.  Une  pente,  délicatement  brodée,  borde  le  dais. 
Du  côté  de  la  nef,  la  balustrade  porte  un  dais  et  une 
pente  semblables  à  ceux  de  l'intérieur. 

Cet  ensemble  de  sculptures,  remarquablement  conser- 
vées, offre  le  plus  sérieux  intérêt. 

Deux  petits  autels  orientés  sont  appliqués  aux  parties 
de  murs  que  nous  avons  montrées  fermant  pour  ainsi  dire 
la  nef.  Ces  autels  sont  surmontés  de  dais  et  de  pentes  en 
bois  sculpté  également,  au  xvi-^  siècle,  souvenirs  du  cibo- 
rium  que  l'on  élevait  sur  les  autels  comme  l'expression 
matérielle  du  respect  dû  aux  objets  sacrés. 

Dans  la  première  travée  de  la  nef,  sur  le  mur  sopten- 


714       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

trional,  nous  avons  vu  une  peinture  curieuse.  En  voici 
la  description,  que  M.  le  curé  de  Saint-Marcel  a  bien 
voulu  nous  envoyer  avec  l'inscription  qui  l'accom- 
pagne. 

«  Cette  peinture  est  une  allégorie.  Un  prieur  de  Saint- 
Marcel  prie  pour  la  paroisse,  accompagné  de  son  patron 
saint  Louis;  il  est  agenouillé  aux  pieds  de  l'enfant  Jésus, 
porté  par  la  sainte  Vierge.  Le  prieur  est  en  costume  de 
moine  et  de  chanoine;  saint  Louis,  en  tunique  et  dalraa- 
tique  avec  le  sceptre  en  main,  porte  une  pèlerine  d'her- 
mine. La  sainte  Vierge,  en  grand  manteau,  est  assise  sur 
un  bahut  du  xvi^  siècle  ;  tandis  que  le  divin  Enfant  tient 
et  montre  au  prieur  un  crucifix  soutenu  dans  le  haut  par 
un  ange  ;  sa  sainte  Mère  adresse  des  reproches  aux  habi- 
tants de  la  paroisse.  Ces  reproches  se  lisent  dans  une 
inscription  gothique  au-dessous  du  tableau.  Après  l'in- 
scription est  une  dédicace  en  grandes  lettres  fleuries  de 
l'époque.  Dans  le  haut  de  la  peinture,  à  droite  et  à 
gauche,  sont  des  écussons,  portant  un  même  chiffre, 
formé  parles  grandes  lettres  L.  M.  entrelacées  et  liées  par 
des  cordelières  avec  cette  exergue  :  Mater  Dei,  mémento 
met  l 

Inscription  : 

ENTRE  :  VOUS  I  FELONS  :  DESPITEUX 

JUREURS  :  MAUGRYEURS  :  REGNYEURS  : 

GENS  :  INFAMES  :  ET  :  DETESTABLES  : 

REGARDEZ  :  CY  :  COMMENT  :  VOS  :  JEUX  : 

DÉPANCES  :  DE  :  DES  :  ET  :  DE  :  TABLES 

VOS  :  MECHANTES  :  LANGUES  :  CAPABLES 

ONT  :  PAR  :  VENTRE  :  PAR  :  CORPS  :  ET  :   PAR  :  CHEF  : 

PLAYÉ  :  DE  :  PAROLES  :  DAMNABLES  : 


XL*    SESSION,   A   CHATEAUROUX.  715 

ris  :  QUE  :  fauls  :  juifs  :  derechef  : 

MON  :  CHER  :  ENFANT  :  DUQUEL  :  MESCHEF  : 

A  :  MOY  :  SE  :  plaint  :  piteusement  : 

DISANT  :  DU  :  cas  :  qui  :  est  :  tant  :  grief  : 

vous  :  PUGNiUA  :  villainement  ; 

au  :  JOUR  ;  de  :  son  :  grant  :  jugement. 

Dédicace  : 


MESSTRE  :    Loys  :  ...  P^bk. 
A  :  LovNEUR  :  de  :  Di.... 


Eglise   Saint- Géniteur,   au  Blanc. 

Par  M.  Lenail. 


Il  a  été  plusieurs  fois  parlé  de  l'église  Saint-Genitour  : 
sans  donc  entrer  ici  dans  une  description  complète,  nous 
allons  signaler  ce  qui  nous  a  le  plus  frappé  dans  ce 
monument,  dont  le  plan  primitif  a  été  complètement 
défiguré. 

La  porte  principale  est  parfaitement  indiquée  par 
M.  Viollet-le-Duc,  dans  son  Dictionnaire,  comme  un  type 
spécial  au  pays.  Cette  porte,  de  dimensions  ordinaires, 
est  surmontée  d'un  gable,  composé  de  dalles  incrustées 


716       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE, 

dans  le  parement  du  mur  et  formant  ahri.  Le  gable 
repose  sur  des  pieds-droits,  saillants  comme  des  jouées  et 
décorés  de  colonnettes. 

Ce  motif  d'architecture  est  du  plus  heureux  etfet  (1). 

La  nef  médiane  est  une  construction  du  xiii"  siècle. 
Les  voûtes  sont  portées  par  des  arcs  croisés.  Les  formerets 
sont  simplement  indiqués  par  la  saillie  des  claveaux  épan- 
nelés  sur  l'un  des  murs.  Les  deux  nefs  latérales  sont  du 
xV'  siècle,  à  part  les  travées  qui  s'ouvrent  sur  le  tran- 
sept. 

Ce  transept,  contemporain  de  la  nef,  et  beaucoup 
plus  étroit,  n'est  indiqué  que  par  le  retour  des  voûtes. 
Sur  le  croisillon  méridional  s'élève  le  clocher  ,  dont 
la  partie  supérieure,  copie  du  xii"  siècle,  appartient 
au  xv". 

Après  le  transept,  l'église  se  trouve  tout  à  coup  rétrécie. 
Au  nord,  le  mur  du  chœur  vient  joindre  la  pile  septen- 
trionale de  la  croisée,  tandis  qu'au  midi  le  mur  tombe  au 
quart  environ  d'un  côté  du  quadrilatère  formé  par  les 
piles  de  cette  croisée.  Ces  murs  font  avec  l'axe  de  la  nef 
un  angle  très-prononcé.  On  a  voulu  voir  là  une  déviation 
symbolique.  Il  me  semble  que  si  jamais  construction  n'a 
pu  être  invoquée  en  faveur  de  celte  opinion,  c'est  bien 
celle  qui  nous  occupe.  Après  une  nef  du  xiii''  siècle  nous 
trouvons  un  chœur  du  xii%  et,  certes,  cent  années  au 
moins  se  sont  écoulées  entre  les  deux  constructions  ;  de 
plus  il  n'y  a  pas  déviation  d'axe,  comme  on  est  convenu 
de  dire,  il  y  a  deux  axes  très-différents.  Deux  construc- 

(1)  Nous  croyons  devoir  attirer  ratlenlion  sur  la  curieuse 
inscription  moderne  gravée  sur  cette  porte  :  Snli  Deo.  Que  des 
archéologues  trop  enthousiastes  n'y  voient  point  la  preuve  que 
réglise  de  Saint-Genitour  a  remplacé  un  temple  d'Apollon. 


XL*    SESSION,    A    CllATEAUROUX.  717 

lions,  en  tout  dissemblables,  vcuaul  lMit.;r  à  taux  l'iiue 
contre  l'autre,  ne  sont  point  de  celles  que  l'on  doit  mettre 
en  avant  comme  manifestation  d'un  parti  pris. 

Le  chœur  de.  Saint-denitour  est  tout  cntifr  une  (excep- 
tion. Le  mur  qui  termine  son  chevet  droit  n'est  point 
perpendiculaire  aux  murs  latéraux.  Les  deux  arcs-dou- 
bleaux  qui  portent  les  voûtes  sont  parallèles  entre  eux, 
parallèles  au  mur  du  chevet  et  aux  doubleaux  de  la  nef, 
ils  sont  donc  bandés  en  biais. 

Disposition  plus  que  singulière. 

La  voûte  de  ce  choeur  est  un  berceau  brisé,  et  cependant 
ce  berceau  est  porté  en  plus  des  deux  doubleaux  par  des 
arcs  ogives. 

Les  doubleaux,  formés  d'un  seul  rang  de  claveaux  sans 
moulures  ni  ornements,  sont  très-larges  et  très-épais. 
Les  arcs  ogives,  non  moins  larges  et  épais,  sont  ornés 
d'un  boudin  refouillé  aux  arêtes  dans  l'épannelage  carré 
des  claveaux.  Par  une  conséquence  naturelle  de  l'emploi 
d'arcs  diagonaux,  non  appareillés  biaisement,  sous  un 
berceau,  ces  arcs  semblent  et  doivent  pénétrer  la  voûte  et 
non  l&  porter.  Leurs  claveaux  ont  près  des  sommiers  une 
très-forte  saillie  sur  Tune  de  leurs  faces,  tandis  que 
l'autre  face  disparait  presque  complètement. 

Deux  de  ces  arcs  ont  leurs  sonnniers  à  deux  [)ieds 
environ  de  ceux  des  doubleaux,  ce  qui  prouve  de  quelle 
utilité  ils  peuvent  être  et  quelle  était  la  sagesse  de  ceux 
qui  les  ont  placés  là. 

Pour  ne  point  rester  en  arrière  de  leurs  prédécesseurs, 
les  ouvriers  du  xv*^  siècle  ont  ouvert  les  murs  de  ce 
chœur,  coupant  les  colonnes  sans  plus  de  souci  de  la 
raison  et  du  bon  sens  que  s'ils  n'avaient  jamais  existé. 
Aujourd'hui  nous  voyons  tous  les  arcs  lourds  et  massifs, 
suspendus  en  l'air  sur  des  chapiteaux  sans  supports.  Les 


718       CONGRÈS  ARCHÉOLOGIQUE  DE  FRANCE. 

figures  grimaçantes  qui  décorent  ces  chapiteaux  parais- 
sent désolées  ou  furieuses  de  l'insanité  d'esprit  de  ceux 
qui  les  ont  ainsi  suspendues  dans  une  position  si  dan- 
gereuse. 

L'église  du  Blanc  renferme  un  curieux  porte-cierges  du 
xiv*  siècle,  assez  bien  conservé. 


TABLE   DES    MATIÈRES 


Liste  des  membres  de  la  Société  française  d'Archéologie.  i 

Statuts  de  la  Société xlix 

Comptes  de  M.  le  Trésorier lu 


Séance  d'ouverture  du  loy^m,  présidence  de  M.  de 
Cougny 1 

Discours  de  M.  de  Cougny 2 

Aperçu  de  l'histoire  de  Chàteauroux  et  sur  les  lieux 
que  devra  visiter   le  Congrès,  par  M.  Faucouneau- 

Dufresne 7 

Mémoire  de  M.  de  Beaufort 14 

Monuments  celtiques  de  l'arrondissement  du  Blanc,  par 

M.  l'abbé  Voisin 34 

L'Antiquaire  hagiologue,  par  M.  Roubet 73 


\"  Séance  du  41  juin,  présidence  de  M.  de  Cessac.   .  79 

Mémoire  de  M.  l'abbé  Voisin Id. 

Existe-t-il  des   cavernes   à    ossesnents?  Ont-elles  été 

exfilorées?  par  M.  l'abbé  Damourette 83 

Pourrait-on,  d'après  l'étyraologie  des  noms  des  diverses 


"/•SO  TABLE   DES   MATIÈRES. 

localités,  indiquer  celles  dont  l'origine  remonte  aux 
époques   celtique,    ^allo-roinaine    ou    Iranke,    par 

M.    l'abbé   Damouretle 84 

Topographie  et  monuments   gallo-romains  de  larron- 

dissement  du  Blanc,  par  M.   l'abbé  Voisin 87 

2*  Séance  du   M  juin,  présidence  de  M.  Lodain.    .    .         124 

Grottes  de  la  Marne,  par  M.  Joseph  de  Baye Id. 

Le  Bronze  dans  l'ouest  de  l'Europe  aux  temps  préhisto- 
riques, par  M.  de  Cessac 129 

Des  Mar-es,  Mardelles  ou  Margelles,  par  M.  Guillarù.   .         144 

Recueil  des  inscriptions  gallo-romaines  de  la  7"  divi- 
sion archéologique  ;  Cher,  Indre,  Indre-et-Loire, 
Loir-et-Cher,  Nièvre,  par  M.  Buhot  de  Kersers.   .    .         183 

l""*"  Séance  du  M  juin,  présidence  de  M,  Roumejoux,        264 

Rapport  sur  les  voies  romaines  dans  les  environs  d"Ar- 
genton,  par  M.  Lenseigne 267 

2'' .Çm«ferf«  12. /■»/«,  présidence  de  M,  Cattois.  ,   .    .         292 

De  l'invasion  ruiiiaine  el  de  l'établissement  du  camp  de 
Vercingélorix  dans  le  Herry,  sur  la  colline  où  se 
trouve  placée  la  ville  de  la  Châtre,  par  M.  Mauduit.        294 

Des    voies    romaines    situées    dans    l'arnindissemeni 

d'issouduii   (Indre),  par  M.  Giiillard 3u4 

Notice  sur  la  basilique  de  Tébessa  (Algérie),  par  M.  de 

Lauriére .344 

Monnaies  du   moyen  ;ige  et  de  l'ère  moderne,  trouvées 

dans  l'arrondissement  du  Blanc,  par  M.  l'obbé  Voisin.         .'{56 

■\''^  Séance  du  \^juin,  présidence  de  M.  Léon  l'aliistre.         .369 

Rapport  sur  l'excursion  fiiite  à  Déols  par  le  Congrès 
archéologique,  le  1  !  juin  1873,  par  M.  de  Salies.  .    .         370 


TAlil.K    HKS    MATIKIli:S.  T^l 

Note  (le  M.  lloiiodc  sur  les  (Icriiicros  dccoiivoites  iniiiiis- 

mati(iues  i'aites  dans  le  départcmc.iil  d»;  l'Iiidre.    .    .         405 

Excursions  de  saint  Martin,  évcHiiic  de  Tours  en  Herry. 
—  Localités  où  son  corps  a  repose  lors  dt;  sa  transla- 
tion de  Tonrs  à  Aiixcrre.  —  ('"^^lises  du  Herry  consa- 
crées à  ce  saint  en  niénioir(î  de  ses  excursions  ou  de 
la  translation  de  son  corps,  par  M.  l'ablié  Daiuou- 
rette 407 

Du  symbolisme  dans  les  nionuinents  religieux  du 
Berry;  quels  sujets  y  trouve-t-(H)  le  plus  souv(Mit 
figurés'/  par  M.  l'abbé  Daniouretie iSo 

2«  séance  du  13  Jtdn,  présidence  de  M.  de   Laurière.         494 

Note  sur  la  signilication  synilioliipie  des  sujets  de 
chasse  représentés  sur  le  tombeau  de  saint  Ludre, 
dans  la  crypte  de  Déols,  et  sur  le  tombeau  de  .lavar- 
zay,  par  M.  Lenail 496 

Quelle  est  la  signification  des  emblèmes  du  soleil  et  de 
la  lune,  figurés  de  chaque  côté  de  la  tète  du  défunt, 
sur  une  dalle  tuniulaire  du  musée  de  Chàteauroux? 
par  M.  l'abbé  Damourette 500 

Note  sur  un  ancien  camp  situé  en  la  commune  de  Sas- 

sierges,  au  lieu  dit  Blard,  par  M.  Guillard.    .    .    .        504 

Les  arbres  généalogiques  de  l'Hôtel-Dieu  d'Issoudun, 

par  M.  Damourette 507 

A  quelle  époque  remontent  les  archives  municipales 
des  principales  villes  de  la  région?  En  signaler  les 
documents  historiques  les  plus  importants ,  par 
M.  Fauconneau -Dufresne 509 

Note  de  M.  Hubert 513 

Hôtels-Dieu,  Charités,  Léproseries,  |iar  M.  l'abbé  Da- 
mourette         ^36 

Chapelle  de  Saint-Marc,  par  M.  l'abbé  Damourette..    .        545 

Mémoire  de  M.  Barboux 550 

Note  sur  le  mot  Donataire,  par  M.  Lenail t)59 

XL"   SESSION.  4.6 


722  TABLE   DES   MATIÈRES. 


<"  séance  du  M  Juin,  présidence  de  M.  de  Cessac.    .        562 

Note  sur  les  confréries  établies  à  Châteauroux  sous  les 
dénominations  de  Saint-Biaise,  de  Saint-Sébastien  et 
du  Saint-Sacrement,  par  M.  Gaillard 563 

Note  sur  le  cartulaire  de  l'abbaye  de  Saint-Pierre  de 

Vierzon,  par  M.  Daiguson 576 

Mémoire  sur  l'unité  de  style  dans  les  édifices  religieux, 

par  M.  Lenail 606 

Lettre  à  M.  de  Cougny  sur  la  35«  question  du  pro- 
gramme, par  M.  de  Roumejoux 618 

Séance  de  clôture  du  samedi  \  4  Juin,  présidence  de 
M.  de  Cougny 620 

Origine  de  la  famille  d'Hervé  de  Buzançais,  trésorier  de 
la  collégiale  de  Saint-Martin  de  Tours  et  constructeur 
de  la  magnifique  basilique,  dont  il  existe  encore  deux 
tours,  par  M.  l'abbé  Damourelte 621 

Les  seigneurs  du  Berry,  le  vicomte  de  Brosse,  Guil- 
laume de  Cliauvigny,  le  seigneur  de  Cluis,  Roger  de 
Palluau,  Guy  Senebaud  du  Bouchet,  Gandin  de 
Romeforl,  le  chevalier  de  Chàieau-Meiiland  étaient 
chevaliers  bannerets  de  Touraine;  était-ce  en  raison 
des  fiefs  que  ces  seigneurs  possédaient  en  cette  pro- 
vince? par  M.  l'abbé  Damourette 622 

Note  à  propos  de  la  statuette  chinoise  trouvée  à  Argen- 

ton,  par  M.  l'abbé  Voisin 626 

Un  mot  sur  Gergovia  Boïorum,  par  M.  Roubet.    .    .    .         628 

Observation  sur  l'importance  archéologique  des  pierres 
sculptées  qui  existent  dans  les  murs  de  l'église  de 
Chabris  (Indre);  ancienneté  de  cette  localité,  par 
M.  Guillard 634 


TABLE    DES    MATIÈRES,  723 

Note  sur  la  croix    de  Sainte-Sévère,  par  M.  Martial 

Boucheron fi48 

Allocations  volées  par  le  conseil  administratif 651 

Proclamation   des  médailles  décernées  par  la   Société 

française  d'Archéologie 652 

Discours  de  clôture  de  M.  de  Cougny 654 

Clôture  de  la  40"  session  du  Congres  archéologique  de 

France 656 


Hôtel-Dieu  d'Issoudnn,  ]»ar  M.  Bouet 657 

Notes  et  croquis,  par  M.  Bouet 675 

Argenton,  Saint-Marcel,  par  MM.  de  Lauriore  et  Lenail.  6'J() 

Église  de  Saint-Génitoux,  au  Blanc,  |)ar  M.  Leiiail.   .   .  700 


TABLE 


DES 


PLANCHES    ET    GRAVURES 


Souterrain  du  pays  des  Meurtres 18 

Carte  des  voies  romaines  aboutissant  à  Proetorium.    .    .  30 

Carte  des  voies  romaines  des  environs  de  Saint-Marcel.  90 

Villa  romaine  (lu  Blanc 112 

Villa  romaine  des  environs  de  Douadic Id. 

Colonne  et  chapiteau  gallo-romains  du  Blanc 114 

Cep  d'esclave 117 

Mardelles 146 

Carte  des  voies  romaines  des  environs  d'Argenton.    .    .  268 

Cartes  des  voies  romaines  des  environs  dIssouJun.    .    .  304 

Clocher  de  Béols 374 

Chapiteau  du  clocher  de  Déols Id. 

Pyramide  de  Beaulieu 380 

Plan  de  l'église  de  Déols 387 

Détails  extérieurs  de  l'église  de  Déols 389 

Contre-fort  de  l'église  de  Déols 391 

Chapiteaux  de  l'église  de  Déols 393 

Porte  du  cloître  de  l'abbaye  de  Déols 397 

Bas-relief  de  l'église  de  Déols 434 

Arche  de  l'abbaye  de  Notre-Dame  d'issoudun 443 

Plan  du  camp  de  Blard o06 

Hospice  Saint-Jacques  à  Chàteauroux 543 


TABLE   DES    PLANCHES    ET    GRAVURES.  725 

Cliap»!lle  Saint-Marc  à  Chàfeauroux 547 

Appareils  et  détails  extérieurs  de  l'église  de  Cliabris 

(deux  planches) fi.jG 

Détails  extérieurs  de  l'église  de  Cliabris,  et  cariatide  du 

porche fiio 

Plan  de  la  chai)ollc  de  l'Uôtcl-Dicu  d'Issondun.    .    .    .  (i.'jO 

Abside  de  cette  chapelle (iOO 

Marques  de  tacherons (i62 

Vue  intérieure  du  côté  est  de  la  chapelle (i(i.H 

Détail  des  arbres  symboliques  de  la  chapelle.        .         667-(i6H 

Décoration  murale  de  la  chapelle 069 

Armoiries  des  vitraux (i72-67.i 

Détail  de  l'intérieur  de  l'église  de  Saint-Cyr  d'Issoudun.  67() 

Chaire  de  l'église  de  Saint-Cyr  d'Iî-soudun (177 

Entrelacs  découverts  dans  la  tour  Blanche  d'Issoudun.  .  (iSl 
Tombe  d'un  abbé  de  Notre-D.ime  et  détails.  .    .    .         ()82-68:5 

Sarcophage  antique ,    .  684 

Crosse  de  l'abbé 685 

Pierre  sculptée  provenant  de  l'abbaye  Notre-Dame.    .    .  686 

Chapiteau  cubique  de  l'abbaye  Notre-Dame 6s7 

M'iison  portant  la  date  de  1601 688 

Porte  de  l'église  de  Saint-Marcel 698 

Claveaux  de  l'église  de  Saint-Marcel 700 

Dalle  sculptée,  dite /o?rt6ea((  rfe  .v«zn/  Marcel.   .    .   .  711 


ERRATA  PRINCIPAUX,  NOTES  OU  ADDITIONS 


AUX   MEMOIRES  DE   M.    GUILLAKD. 


Page  145,  ligne  13,  au  lieu  de:  celte  citation  est  erronée, 
lisez-  :  ce  dernier  paragraphe  est  erroné. 

Page  151,  ligne  9,  au  lieu  de:  deux  autres  d'issoudun, 
lisez,  :  deux  comuiunes. 

Page  155.  lignes  15  et  17.  au  lieu  de  :  à  quatre  autres, 
lisez  :  à  l'intérieur  de  quatre  autres. 

Page  155,  ligne  20,  au  lieu  de  :  sur  deux  d'entre  ceux, 
lisez-  :  deux  des  foyers. 

Page  159,  ligne  22,  au  lieu  de  :  quoique  puliliéesbien  anté- 
rieurement, comme  le  résumé,  etc.,  lisez  :  (juoique  publiées 
antérieurement  au  livre  de  INI.  de  Bellognet,  comme  le  résumé 
de  la  pariie  de  ce  savant  ouvrage  consacrée,  etc. 

Pages  175,  ligues  16  et  20,  au  lieu  de  :  les  Hères,  lisez  :  les 
Ibères. 

Page  319,  ligne  21,  au  lieu  de:  de  100"',  lisez  :  de  1000"'. 

Page  327,  ligne  10,  après  :  distance  réelle,  ajoutez:  et 
l'itinéraire  d'Antonin. 

Page  500,  ligne  10,  an  lien  de:  l'obligation,  lisez  :  la  condi- 
tion. 

Page  637,  ligne  19,  au  lieu  de  :  Cette  opinion  était  le  résul- 
tat, etc.,  lisez  :  Cette  oi)inion  est  le  résultat  d'une  inconcevable 
méprise;  elle  semble  avoir  eu  pour  origine  l'observation,  faite 
l)lus  (jue  légèrement,  d'une  staluelle  placée  sous  une  console 
supportant  la  naissance  de  l'une  des  voûtes  d'arcte  du  porche. 


i; Il  HATA.  7 "27 

Le  dessin  ((i^^.  îi)  do  collf  sciil|itiiri',  iclovô,  avec,  le.  plus  ^raiid 
soin,  en  nionlro  l'origine.  Nons  l'avons,  an  snrpliis,  déjà  l'aii 
remaïqner  dans  la  pelile  notice  pultlitM;  en  1H(1."),  (pie  nons 
avons  citée  dans  noire  inénioin;  snr  les  mardelks.  L'erreur 
étant  évidente  snr  ce  iioint,  une  étmh;  très-attentive  des  antres 
pierres  scnlptées,  etc. 

Page  642,  ligne  i.i),  aprî's:  éternelle,  a.yo«/fis en  alinéa  :  Les 
autres  figures  ont,  sans  aucun  doute  aussi,  leur  signilicalion 
particulière.  Des  personnes  plus  versées  que  nous  ne  le  sommes 
dans  la  science  archéologique,  en  découvriront  bien  certaine- 
ment le  symbolisme. 

Page  (>4(),  ligne  :i,  après  :  de  l'église,  ajoutez-  :  Pour  en 
fixer  l'origine,  nous  sommes  obligé  ainsi  de  remonter  presque 
à  l'époque  romaine  ;  car  on  n'élevait  guère  des  constructions  d(î 
cette  nature  au  v  ni  au  vi"  siècle,  au  milieu  des  ruines  accu- 
mulées par  les  invasions  des  Barbares. 


Page  ;^«)9,  au  lieu  de  :  2"  séance  du  1^2  juin,  lisez  :  l'"  séance 
du  13  juin. 


TOURS,  IMP.  DE  J.    DOUSEREZ. 


SI,T,.P'^"'"ER  LINRARY 


3  3125  00671  ^hoa